Université de Yaoundé II
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Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion
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de l"entreprise
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THESE
Pour le Doctorat Troisièlne Cycle es Sciences Economiques
Option: Economie de l'Entreprise
Présentée et soutenue publiquement
Par
Tsafack-Nanfosso Roger A.P.
D,E,A, en Sciences Economiques
Chargé des Travaux Dirigés - Université de Yaoundé II
Lauréat du CODESRIA
JURY
PRESIDENT:
Monsieur Henri-François HENNER
Profcsscur il l'Uninrsilé d':\\unrgllc (Clrrrnolll-Fcrrand)
i\\IDIBRES:
\\Ionsieur Jean-i\\larie GANh:üü
Profcsscur li l'Université dl' Yaoundé Il
Din'Clcur ÙC Rl'chcrciH'
;\\'Ilsicur Germain ;\\DJ li ,iNDE
Pn;iCSWllr il l'Uninrsité ùc Y""III](ié Il
i\\ 1onsieur TOU:":\\. .\\ 1.-\\ \\1.-\\
l'rofcsscur ill'Uni\\crSI'1 dt: yaUUlldt:/,/U
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i CONSeIL AFRICAIN ET MALGAë-;~1
"uin 1992
, POUR l'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR '1
l'
C. ~',M. E. S. -
OUAGADOUGOU,
i
Arrivee
.
i}n'eg;st~~~~;:;.~~O::fË·2:L il

2
A mon épouse,
A mes enfants,
Au nom de tous les miens ...

Cette recherche a été menée avec le concours acti f du
Conseil pour le Développement de la Recherche Economique et Sociale en Afrique
(CODESRIA)
basé à Dakar - SENEGAL.

4
Que tous ceux qui nous ont assisté, de près, de loin, et de quelquc manière que ce soit;
trouvent ici l'expression de notre reconnaissance.
Nous voulons toutefois rendre particulièrement hommage:
Au Pr. Jean-Marie GANKOU dont les lumières n'ont cessé d'éclairer notre chemin dès
l'instant où il a accepté de diriger notre travail,
Au PI'. E. TüUNA MAMA dont l'exemple nous servira toujours de modèle,
Au PI'. Gennain NDJIEUNDE dont les conseils nous serviront encore longtemps,
Au Docteur Jean-Claude AYEM à qui la réalisation et l'aboutissement de ce travail
doivent beaucoup.
A tous: merci ...

5
«Nous renonçons aux commodités d'une présentation purement formelle; il nous
semble que ce n'est pas aller contre les exigences de la rigueur; nous pensons que l'amour du
rationnel ne se réduit pas au goüt pour le fonnalisme ; qui n'est au fond qu'une caricature de
l'esprit de rigueur ».
Michel VOLLE, Analyse des données,
ème
2
édition, Economica, Paris, 1980, Page 7.

7
/
Face au défi
du développement
Jusque là
(Brésil - Corée)
ADAPTATIVE
1
1
ct étudiée par la théorie
La flexibilité
de l'entreprise
Mais elle peut aussi être
OFFENSIVE
1
1
DEFINITION
1
1
MOYENS
r
1
/
Pour faire face à la crise,
à la concurrence monopolistique,
et désomlais au défi du développement.
Sch~ma 0 : Illustration générale du sujet.
Source: ElaburallL;.' Dcrsonnelle.

8
RESUME
La cnse économique qui perdure appelle, devant les échecs des thérapeutiques
adoptées ici et là, lin investissement en profondeur sur des axes de réflexion et d'action
pouvant conduire à sa finitude.
Si pour renouer avec la croissance, des pays comme le Brésil ou la Corée du Sud se
sont appuyés sur la grande flexibilité de leurs outils de production, il n'est plus aujourd'hui
évident que cette politique soit la meilleure pour au moins deux raisons: d'abord c'est une
politique d'adaptation et 1 ou de défensive; ensuite, les marchés, de plus en plus mondialisés,
se caractérisent désonnais par la concurrence monopolistique.
En conciliant l'anticipation, la réaction, l'action, la création et la citoyenneté, la
politique de flexibilité offensive, à rechercher dans l'entreprise, apparaît comme une des voies
de salut possibles pour le pays à condition que le cadre institutionnel réglementant la vie
entrepreneuriale le pem1ette.

10
Corée du Sud et Singapour en Asie du Sud-Est; Brésil, lv1cxique et Venezuela en Amérique
Latine.
Parce qu'ils possèdent un marché intér;cur relativement étroit, parce qu'ils ne
dépendent pas d'une ressource clé comme le pétrole, et parce qu'ils sont qua! ifiés de
« surdoués du développement »1 ; le Brésil ct la Coréc doivcnt retenir l'attention.
1.1 -Le modèle brésilien.
Tantôt qualifié d' « autoritaire et bureaucratique », tantal d' « c\\trayerti et orienté
principalement
vers
l'exportation »,
lc
l110clèlè
brésilicn
de
dévcloppement
est
fait
d'ajustements, de crises et de rebondissemcnts ; et est avant tout orienté vers l'accroissement
de la puissance du pays2,
De l'industrialisation par substitution aux importations, le
pays est passé au
développement d'une industrie de biens de consommation et SUIiout de biens d'équipement,
tournée vers l'exportation plus que vers le marché intérieur étroit: d'une part, le pétrole prend
la première place panni les importations, bien avant les machines et les produits chimiques en
1975 ; d'autre part, les biens d'équipement viennent au premier rang des exportations, bien
avant le café ou le soja dans les années 80.
Précisément, le décollage de l'économie industrielle et agricole repose sur la triple
alliance du capital de l'Etat, du capital transnational, et du capital national. Cela se traduit par
l'ouverture aux capitaux étrangers, l'interventionnisme de l'Etat et un protectionnisme accru
pour les biens de consommation. Le résultat est une industrialisation accélérée et réussie qui a
atteint le taux de Il,7 % par an entre 1967 et 1978.
Cette crOIssance est cependant interrompue par le « choc pétrolier» de 1979 qUI
marque le début d'une profonde récession qui va durer quatre ans et atteindre de plein fOllet
les indus\\;'ies manufacturières' 1'vlalgré un processL" cie libéralisation in;'ié en 1979, le pays
est contraint de mettre en place, en 1983, un plan de stabilisation sous la houlette du Fond
1 Bem.nd KAPP. Françoise i\\'!OIUN et Eric \\V:\\ n'EL
'f3résil-Corëc : Lt's sur,'nuës du dé\\'(:!oppCIllCIll ,.'.
Science el l'il! économie, Dossier ne n. 1':0\\' .. 1986, pJges 53-(.:1.
2 Voir Victor PREVOT. « Le Brésil. l" croiSS:lIlCt' a\\'Jllt tout ,:: Exi.l'Ie-l-i/ des 1II0de',/,
i". dlh'c!oppemf'1II '.
DocumentduCi::l'II, 1987, pages211-11'J.
) La fondation GETULlO VARGAS, équi\\'ak,':! de l'INSEE FrançJis, t'stime que durallt ct'ttc période, les
revenus par habitant ont baissé de 12,1 % par an, Voir B K-,-\\PP, F. 1vlOR1N et E. \\VATTEZ op, cil., page 57.

11
Monétaire Intemational : réduction du déficit de la balance des paiements, dévaluation de la
monnaie, réduction du déficit du secteur public, diminution de l'innalion. En contrepartie, le
pays obtient de nouveaux prêts, un rééchelonnement de ses dettes à moyen ct long ten11eS, et
une « côte d'estimation» de plus en plus grande due ~l la mise en œuvre du processus de
démocratisation.
Le pays est aujourd'hui « le Brésil des superlatifs» : dixièmc puissance économique
mondiale et premier fournisseur des échànges Sud-Sud, le Brésil est le dixième producteur
mondial d'automobile, d'énergie électrique et de ciment; septième producteur mondial d'acier
(devant la France) ; cinquième producteur mondial d'armements ct de constructions navales;
quatrième producteur mondial d'émissions télévisées ; troisième producteur mondial de
minerai de fer et second producteur de soj a. Sans parkr des performances agrico les avec le
café, les oranges, le sucre brut, le cacao, le maïs ... le palmarès n'en finit pas.
Deux éléments fondamentaux sont à la base de ces succès économiques:
o
Une industrie puissante, dynamique maIs surtout extrêmement diversifiée, et dont les
dimensions sont pour le moins colossales: en effet « pour avoir une idée de la production
brésilienne, il faut additionner le poids de l'Inde à ceux de Taïwan, de Singapour, de
Hong-Kong et de la Corée du Sud» 1. La souplesse de l'outil industriel pennet au Brésil
d'être présent dans tous les secteurs : des chantiers navals aux machines-outils, des
automobiles au machinisme agricole, de la biologie aux télécommunications, de la
construction à l'aéronautique ...
e
Un Etat (par delà les idéologies politiques) protecteur et pragmatique: protecteur d'abord
au double plan du « protectionnisme» et de la distribution des subventions: la plupart des
industries nationales telles que l'automobile, les machines-outils et les ordinateurs est née
à l'abri des protections et a été constamment nourrie de subventions. Pragmatique ensuite
parce que les grands problèmcs économiques nationaux sont vigoureusement étudiés puis
résolus avec opiniâtreté et vivacité: le plan « alcool »2 ainsi que le plan « tropical »3 en
sont les illustrations.
1 B. KAPP, F. 1\\\\ORlN. E. \\VA rrEZ. op. cil.
2 Le « pbll alcool» : lancé en I(n~. il "ise il limiter ks cf!,":' cl<: la crise p~trolière e: n'mc la dépendance du P'~:-'
vis-à-Vh -ie cette ressource (le BI ,;:1 importe 80 % de SOI1 [)";role) : en fournissant li;. ,ubstitut au carburant cie"
automobiles Résultat: en 1986.86 ';'" des voitures fabriqu~es a~1 Brésil circukllt à l' « alcool ».
) Le « plan truj"cal » ou « plan cruzaclu
Iallc'~ Cil 1986. il "ise d jugukr l'inflation qui én1Îll<: ;lU taux de 235 %
par an. Le plan comprend le blocage uniforlllè des prix des biens el sèl\\'ices. l'augmentation g':l1':r:,1I<: des salaires
et la création d'une nouvelle monnaie (1 cI11z:ld,) ,'aut 1000 cruzeiros). iZ~su\\tat : 6 mois plus l~lrd le taux
d'intlation est ramené à 10 % par an.

12
A cet égard et de maintes manières, le Brésil présente des similitudes avec la Corée du
Sud.
1.2 - Le modèle coréen.
Tantôt qualifié d' «industrialisation sans développemcnt )l, tantât dc «fordisme
périphérique», le modèle de la Corée du Sud illustre bien la situation des « pays ateliers» à
travers son processus de diversification des productions l . Après la réduction de ['aide
financière américaine (qui jusque là soutenait littéralement j'économie) en 1957, la Corée est
soumise ù son premier plan de stabilisation et passe alors à l'industrialisation (de petites unités
dynamiques) par substitution aux importations au développement d'ulle véritable industrie de
biens d'équipement grand public essenticllcment tourJlée vers J'extérieur.
Le pays devient ainsi l'un des premlcrs laboratoires de «J'industrialisation par
l'exportation ». C'est une nouveauté à deux titres au moins:
G
d'abord, les pays en développement sont en général des exportateurs de produits primaires
et beaucoup moins de produits manufacturés;
o
ensuite, l'industrial isation dans ces pays se construit en général « contre» le secteur
primaire et contre les politiques libérales (puisque les Îndustlies de substitution sont à
l'abri des protections douanières efficaces) ; en même temps que la production est destinée
au marché intérieur principalement.
Il faut parallèlement mentionner trois traits spécifiques à l'expérience coréenne: en
premier lieu, les secteurs prioritaires pour le développement industriel sont définis dans le
cadre du Plan; en second lieu, le système bancaire qui alloue les crédits est entièrement
contrôlé par l'Etat; enfin la politique d'impol1ation est définie par l' « import-export link»
c'est-à-dire que seules les importations foumies aux secteurs expol1ateurs sont libres.
Tous ces éléments pemlettent à la Corée du sud de réaliser une industrialisation
accélérée et réus:<ie qui atteint le taux .k' 25 % par an entre: 967 et J978.
1 Voir
J\\'lichel FOU(!LJI~. «Corée du sud
i ;:1dustrialisation
planll'l"_ ". 111 E.ü.I'1,'-t-il des Iliod..\\lcs dl:'
développement, Document du CEP II, pages 219-22-1.

13
Mais comme dans le cas du Brésil, cette crOIssance est interrompue par le second
« choc pétrolier» de 1979 qui marque le début d'une crise qui durera quatre ans'. Comme le
Brésil, le pays doit mettre en place en 1983 un plan d'ajustement pour rééquilibrer les
structures de l'économie nationale, en même temps qu'il est confronté au défi de la
démocratisation de la vic nationale.
Aujourd'hui le tableau d'honneur cie la Corée clu Sud est particulièrement bien fourni:
numéro deux mondial de la construction navale, les produits manufacturés, (de l'électronique
grand public aux automobiles et aux supertankers) comptent actuellement pour 91,5 % de ses
exportations. De j'automobile à la construction, des centrales nucléaires ù l'exportation de
savoir-faire, cles chaussures au textile, de l'informatique ù la sidérurgie ; la Corée est
aujourd'hui l'un des producteurs mondiaux les plus appréciés.
L'élément fondamental qui est à la base cie ces succès économiques est une stratégie
complexe qui s'organise autour d'une idée centrale appelée la « remontée de filière» : il s'agit
pour chaque domaine d'activité précis, d'une planification de la spécialisation coréenne
d'abord dans l'industrie lourde pour endiguer la pénétration du marché intérieur, ensuite pour
l'industrie légère qui travaille principalement pour le marché mondial. Cette « remontée de
filière» a pu être réalisée grâce à trois apports fondamentaux:

« un interventionnisme ultra-autoritaire» de l'Etat qui contrôle la politique monétaire,
alloue des crédits aux secteurs industriels prioritaires et aux sociétés qui réussissent sur le
marché extérieur, et agit comme une entreprise pour certains grands investissements
nécessaire à l'activité économique dans son ensemble;

les « chabols» (conglomérats industriels équivalents des « zaïbatsl/s» japonais) qUi
englobent des secteurs d'activité très diversifiés et font preuve d'une grande aptitude à
saisir toutes les opportunités qui se présentent;

les industries légères, détentrices d'un h~lltt niveau technologique par l'acquisition d'un
véritable savoir-faire en électronique, souples, dynamiques, presque totalement tournées
vers l'exportation et qui possèdent par conséquent une compréhension rapide des
chang':l11eIlb des conditions iIltem;~tioIlales de la croiss~l!1ce.
1 La balance commc,·iJ!e est d~ricitaire dt' i - 111111iards de dolbrs. L
pm baisse dl' 3..5 %. L:i monnaie (le
Won) est Myaluée de 2, ., Les récoltes som caLl,,:ophlqut's ... Voir B. K.., l'P. F. ;\\'IORIN, et E. WAi-rEZ. « Le
mirack coréen est-il un mythe ·1 .'. in Dossier: Br,;.liI-Con·',.·· . Les surdoués du tlého!0fJ/NlIlenr, op. cil. page tJ:.

17
System» aux Etats Unis, la théorie quant à elle, en faisant un usage fréquent du terme,
débouche sur un éclatement de la définition précédente en cinq autres, moins générales et se
référant à des objectifs plus précis comme en témoigne le tableau 1. La lecture de ce tableau
montre que le mot« flexibilité» est une notion assez diffuse car protéiforme'.
- Forme 1 : La flexibilité désigne la plus ou mOins grande adaptabilité de
l'organisation productive qui. elle, dépend dans une large mesure des choix technologiques et
organisationnels effectués. Simultanément apparaissent de nouveaux équipements flexibles
dont la finalité est de répondre à une demande incertaine et fluctuante, en volume et/ou en
composition. C'est le schéma de l'usine flexib1e 2
- Forme 2 : La deuxième forme concerne l'aptitude des travai lieurs à changer de poste
de travail, au sein d'une organisation donnée ou éventuellement en transformation rapide (lien
avec la première définition). On fait appel ici au savoir-faire et à la compétence de la main-
d'œuvre, et surtout à son aptitude à maîtriser divers segments d'un même processus productif.
Le maître mot est alors celui de la polyvalence de la main-d'œuvre qui s'accorde à une version
moderne de l'ouvrier proudhonien3,
- Forme 3 : La flexibilité se mesure à la faiblesse des contraintes juridiques régissant
le contrat de travail et en particulier les décisions de licenciement. Vont dans le sens de cette
flexibilité toutes les mesures qui réduisent les attaches d'un travailleur vis-à-vis d'une firn1e
particulière. Pour le salarié d'une grande entreprise, cette souplesse peut être assurée de façon
interne par déplacement d'une ligne de production à une autre; ou de façon externe par un
contrat de travail dont les conditions sont révisables au jour le jour. Il s'agit là d'un salariat
intérimaire.
- Forme 4 : La flexibilité désigne la sensibilité des salaires (nominaux et/ou réels) à la
situation économique propre à chaque firn1e ou générale concernant le marché du travail. Il
s'agit donc de recommander plus de concurrence sur le marché du travail, une différenciation
des salaires selon la situation financière des firme,; et de la producti\\ i,é industrielle; ou
1 L'on se réfère ici il Robert BO'rTR (sous la direction de), La flexibililé du Iral'lUf en Europe, La Décou\\'<:ilc.
~aris, 19:'(). \\'oir principalement r.,,;icle la, pages 235 el S5
• Pour une lJrésentation plus détaillée. l'air Ramchandran JAIK:' ii\\'IAR. « Les ateliers tlc:-;:hlcs : une comparaison
Japon-USA ", ! (',1' Cahiers Français. n ~.'-!. Janv-Fén. 1988. pJ~:': 66.
J De PROUDHu'< (1809-1865), philosol
. ,,'1 théoricien socialisll. nuis d'lin socialisme IlbcrI;\\II'è, opposé il la
fois au capitalisme èl au i11Clrxisme. Voir L' Pl'Iil J.;'J/Jerl, Edition 1990, page 1556.

18
encore une suppression ou une atténuation de la législation sur le salaire minimum
bref, il
s'agit de l'adoption d'une fomle de salaire au rendemcnt.
Organisation de
Hiérarchie des
~Iobililé des
FormaliollS des
Couverture
la production
qualifications
tra vaille urs
salaires
soci ale
Définitions
Aptitude à
Adaptabilité des
Possibilité de
Sensibilité des
Elimination des
ajuster les
tra\\'ailleurs à des
varier ['emploi ct salaires à la
dispositions
équipements à
tâches variées
la durée du
situa tion des
défavorables à
une demande
complexes ou
tra\\'Jil en
fi rmes et du
l'emploi en
\\'ariable en
non
fonction cIL: la
marché du
matière de
volume et
conjoncture
trJ vail
fiscalité en
composition
locak ou g\\obalè
transferts
sociaux
Composantes
-Equipements à
-Ampleur de 1J
-,\\bsence de
*Ni\\'eau macro
-Absence de
usages multiples
fomlation
contrainte
-SalJire moyen
pré 1è\\'C men ts
-Asse rv isseme nt
technique
majeure tenant
fonction du
renchérissant le
de la chaîne de
-Rotation des
au droit du
chômage, de la
travail au profil
production et
postes au sein
travJil
productivité et
du capital
gestion optimale
d'un collectif de
-fluidité des
des termes de
-Suppression des
des flux
travail
migrations
l'échange
seuils sociaux ct
-Relative
interrégiona les
-Absence du
fiscaux
proximité des
(problèmes de
salaire minimum
-A llèg,ements des
tâches de
logement)
contraignant
charges payées
production et
-Inexistence des
*Niveaumicro
par les
contrôle
droits
-Révision
entreprises
spécifiques à une
permanente
-Ouverture du
entreprise
fonction de la
choix entre
(avantages
conjoncture
assurance privée
sociaux, ou
locale
et couverture
retraites)
-Atténuation de
collective
-Réponses de
l'argument de
l'emploi aux
parité
différentiels de
salaires
Figure
L'usine flexible
L'ouvrier
Le salariat
Le salariat au
Le salariat à
emblématique
Proudhonien
intérimaire
rendement
deux vitesses
Références
B, KUNDIG, P.
G, ARCHIER,
y. GATIAZ, G
M,
R, HARRlS, A.
BESSON, B,
H, SERlEYX,
GILDER
WEITZMAN,
SELDON
CORlAT
M. PlORE, CH,
General Motors
SABEL
1985
Tableau l : Les flexibilités: cinq principes de base,
Source: Robert BOYER, Laflexibilité du travail en Europe, op, ciL, page 236
- Forme 5 : La flexibilité est entendue COIllme la possibilité pour les entreprises de se
soustraire à une partie des prélèvements sociaux et fiscaux et plus généralement, de
s'affranchir des réglementations publiques qui limitent leur liberté de gestion, La flcxibilité est
alors synonyme d( :::follte de la ration,!:;s~l1ion des intervecions de l'Etat pouv~:': conduire
soit à l'économie souterraine, soit à un « Etat minimal », ou alors à un salariat à deux vitesses
par référence ~:ux modalités d'accès ,1 la couverturc soci~,j..: et au respect du dt,,·;! de travail.

13
Mais comme dans le cas du Brésil, cette croissancc est interrompue par le second
l
« choc pétrolier» de 1979 qui marque le début d'une crisc qui durera quatre ans . Comme le
Brésil, le pays doit mettre en place en 1983 un plan d'ajustcmcnt pour rééquilibrer les
structures dc l'économie nationale, en même temps qu'il est confronté au défi de la
démocratisation de la vic nationale.
Aujourd'hui le tableau d'honneur de la Corée du Sud est particulièrement bien fourni:
numéro deux mondial de la construction navale, les produils manufacturés, (de l'ékctronique
grand publie aux automobiles et aux supertankers) comptent actuellemcnt pour 91,5 % de ses
exportations. De l'automobile à la construclion, des centrales nucléair'cs ù l'exportation de
savoir-faire, des chaussures au tcxtile, de l'informatiquc ù la sidérurgie ; la Coréc est
aujourd'hui l'un des producteurs mondiaux les plus appréciés.
L'élément fondamental qui est à la base dc ces succès économiques est une stratégie
complexe qui s'organise autour d'une idée centrale appelée la « remontée de filière » : il s'agit
pour chaque domaine d'activité précis, d'une planification de la spécialisation coréenne
d'abord dans l'industrie lourde pour endiguer la pénétration du marché intérieur, ensuite pour
l'industrie légère qui travaille principalement pour le marché mondial. Cette « remontée de
filière» a pu ètre réalisée grâce à trois apports fondamentaux:

« un interventionnisme ultra-autoritaire» de l'Etat qui contrôle la politique monétaire,
alloue des crédits aux secteurs industriels prioritaires et aux sociétés qui réussissent sur le
marché extérieur, et agit comme une entreprise pour certains grands investissements
nécessaire à l'activité économique dans son ensemble;

les « chabols»
(conglomérats industriels équivalents des « zaïbatslIs» japonais) qUI
englobent des secteurs d'activité très diversifiés et font preuve d'une grande aptitude à
saisir toutes les opportunités qui se présentent;

les industries légères, détentrices d'un haut niveau technologique par l'acquisition d'un
véritable savoir-faire en électronique, souples, dynamiques, presque totalement tournées
vers l'exportation et qui possèdent par conséquent une compréhension rapide des
changemcnb des conditions intcnutiona1es de la croissance.
1 La balance conml(';('i~lle est ddïcitaire dl' i - Illilli:mls (il' dollJrs. L
1'111 bJissl' dl' 3.5 %. Li monnaie (le
Won) est dé\\"3luée de 2,>" Les récoltes sont caLLii~'c)phiques ... Voir 8. K.·,"P. F. !','IOR1\\', et E. W,,\\ ;TF7... « Le
miracle coréen est-il un mythe '! '.". in Dossil'r: Brc:.\\ïl-Con:'·' : Les surdoués du d';\\"'!flj)[JL'IIlL'llr, op. cil. p3gC CJ,

14
Enfin de compte, la grande leçon qui paraît devoir être tirée de ces exemples de
réussites économiques est la suivante: au-delà des spécifications des cadres institutionnels,
au-delà des niveaux d'endettement élevés l, et au-delà des structures ct régimes politiques
(comparativement au Cameroun par exemple - schéma 1) ; l'évolution du Brésil ct de la Corée
a été marquée par:
[
BRESIL - COREE ~
CAMEROUN
1967 - 1978
1960-1984
Croissance ra )ide
Croissance
1986
'--_--=----=--.::_"-_1_9_79
--'
Crise
1..
Chocs pétroliers: crise
« officielle»
1
1983
1989
Programme d' aj ustement
Progral11l11e cl' ajustement
structurel
structurel
1985 - 1986
Redécollage par:
développement par
l'exportation
diversification
« surveillance» de
l'envi ronnement
souplesse et flexibilité
des entre rises
Schéma 1 : Essai de comparaison des évolutions du Brésil et de la Corée, puis du Cameroun.
Source: Elaboration personnelle.
- Une croissance rapide entre 1967 et 1978,
- Une récession consécutive aux chocs pétroliers,
- Un programme d'austérité, et surtout
- Un redécollage principalement organisé autour du développement par l'exportation, de la
diversification des industries, de « la surveillance»
des environnements intemationaux
(surtout la Corée), cie la souplesse et de la ncxibilité des entrepri<;cs nationales.
Car dans une période de croissance géneralisée, l'anticipation est facile ct l'adaptation
'~e réalise par des :::Llstements margina:-: destinés à C0l11pC1Ser des erreurs 10,,:1es. Au
contraire, en période de difficultés économiques, L1ne entreprise peut de\\'oir faire face ~1 des
1 Plus de 150 milliards de dette pour le 13rcsil el plus de 50 milliards pour la Cor':e.

15
discontinuités brutales et donc modifier profondément son compol1ement pour s'adapter à un
nouvel environnement. Cette capacité, manifestement bien intégrée par les outils industriels
brésiliens ct coréens, soulève cependant des questionnements si l'on s'y attarde quelque peu.
2 - LA FLEXIBILITE DE L'ENTREPRISE.
S'il est possible de prévoir certaines catastrophes, il serait vain de chercher à prévoir
des révolutions ou des inventions. Ce que peut faire l'entreprise consiste à contracter des
assurances ou à se mettre « dans la course» d'éventuelles inventions en ajoutant à sa liste
d'objectifs, un objectif de nexibilité qui ne peut mieux sc résumer que par l'adage qui
conseille de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier.
Après un bref aperçu historique, ['on tentera de définir (et de relever les limites de) la
notion de flexibilité.
2.1 - Historique de la notion de flexibilité.
La flexibilité est une notion relativement ancienne. On la retrouve quelque peu dans la
théorie néoclassique\\ et dans quelques autres travaux 2, mais l'on peut dire qu'elle naît
véritablement autour des années 70. Dès la deuxième moitié des années 60 en effet, la
demande qui avait longtemps tiré la croissance observée les trente années précédentes s'est
effondrée suite aux changements survenus dans la dynamique du marché: les consommateurs
devenaient exigeants et réclamaient de plus en plus des biens personnalisés.
Dès lors, les grands unités de production, filles du « fordisme »3, engendrées pour
assurer la production en série du même bien pour la même demande, durent fem1er leur
portes; l'immensité de leur structure ne leur pen11ettant pas de s'adapter aux changements.
Ainsi naquirent des entreprises moins massives et plus souples, faciles à gérer dans un
environnement de turbulences parce que se prêtant plus aisément à des processus adaptatifs.
, [;,eprise par Jacqu~s LEl' \\ILLON, .-tl1al,ne /11(/CI "onolllique. Cujas, Pari". : 969, pages 198-200.
2 Notanm1cnt : G. STIGLEi<. « Production and dislIlhlltion in the short n.1l1 )1. Journal 0/ Polilical f:.'cé'!/Olll)'.
XL V;; Juin, 1939, pp. 30S-~.' (' ,:t T. ,,1.-\\ RCHAK el R. NELSON « flex ibili',', lIncerl3inty. and eC01\\· ",lie
theory ),' . .\\fcr"oL'col/olllico, vol. .\\j\\/. n~ l-III. 1962. pp. 42-.5S
) Notion introduite par GRAivfSCl ct sys[~'illatist'e par PALLOIX Cl CORIAT. Note de Alaill UPIETZ, Crise CI
inflalion. pOl/l'quoi
:), i\\bspero, Paris, 1979,' pa5e 227.

17
System» aux Etats Unis, la théorie quant à elle, en faisant un usage fréquent du tern1e,
débouche sur un éclatement de la définition précédente en cinq autres, moins générales et se
référant à des objectifs plus précis comme en témoigne le tableau l, La lecture de ce tableau
montre que le mot « Oexibilité » est une notion assez diffuse car protéi formel,
- Forme
1 : La Oexibilité désigne la plus ou moins grande adaptabilité de
l'organisation productive qui, elle, dépend dans une large mesure des choix technologiques et
organisationnels effectués, Simultanément apparaissent de nouveaux équipements Jlexiblcs
dont la finalité est de répondre à une demande incertaine ct Ouctuante, en volume ct/ou en
composition, C'est le schéma de l'usine Jlexible",
- Forme 2 : La deuxième forme concerne l'aptitude des travailleurs à changer de poste
de travail, au sein d'une organisation donnée ou éventuellement en transformation rapide (lien
avec la première définition). On fait appel ici au savoir-faire et à la compétence de la main-
d'œuvre, et surtout à son aptitude à maîtriser divers segments d'un même processus productif.
Le maître mot est alors celui de la polyvalence de la main-d'œuvre qui s'accorde à une version
moderne de l'ouvrier proudhonien}.
- Forme 3 : La flexibilité se mesure à la faiblesse des contraintes juridiques régissant
le contrat de travail et en particulier les décisions de licenciement. Vont dans le sens de cette
flexibilité toutes les mesures qui réduisent les attaches d'un travailleur vis-à-vis d'une firn1e
particulière. Pour le salarié d'une grande entreprise, cette souplesse peut être assurée de façon
interne par déplacement d'une ligne de production à une autre; ou de façon externe par un
contrat de travail dont les conditions sont révisables au jour le jour. Il s'agit là d'un salariat
intérimaire.
- Forme 4 : La flexibilité désigne la sensibilité des salaires (nominaux et/ou réels) à la
situation économique propre à chaque firme ou générale concernant le marché du travail. 11
s'agit donc de recommander plus de concurrence sur le marché du travail, une di fférenciation
des salaires selon la situation financière des (inne,; et de la producti\\ ité industrielle; ou
1 L'on se réfère ici à Robert BOYFR (sous la direction de). La.f1exibi/ité du tmmii Cil Europe, La Décou\\'crlC.
paris, lt;:-:(), \\'oir principalement l'..,;icic 10, pages 235 et ss
- Pour une présentation plus délailiCL', "air Ramchandran J.-\\IKl !l'v1.-\\R, « Les ateliers tle\\ibles : une comparaison
Japon-USA}),! ('.1' Cahiers Flïll1çais, n ~~-1. Janv-Fén. 1988. pJ::.'C 66.
J De PROUDI-Ic.",; (1809-1865), philosOi' c'[ théoricien sociaiislc ,m:lis ct'un socialisme libertaire. opposé il la
fois au capitalisme et au marxisme, Voir Lt' Pt'l1! ;'.'"hert, Edition 1990, pagé' 1556,

18
encore une suppression ou une atténuation de la législation sur le salaire I11mtn1U111
bref, il
s'agit de l'adoption d'une fonne de salaire au rendement.
Organisation de
Hiérarchie des
l\\lobililé des
Formations des
Cou\\crturc
la production
qualifications
travailleurs
salaires
socialc
Définitions
Aptitudc à
Adaptabilité des
Possibilité de
Scnsibilité des
Elimination des
ajuster les
tra\\·ailleurs à des
varier l'emploi Cl salaires à la
dispositions
équipcments à
tâches variées
la duréc du
situation des
défavorables à
une dcmande
complexes ou
tra\\·ail cn
firmcs ct du
remploi en
\\·ariable en
non
fonction de la
marché du
matière de
\\·olume et
conjoncture
travail
fiscalité en
compos itio n
local<: ou globalt:
transferts
sociaux
Composantcs
-Equipcments à
-Ampleur de la
-,\\ bsence de
+Ni\\·eau macro
-Abscncc de
usagcs multiples
fOnl1ation
contrainte
-Salaire moyen
prélè\\Tl11enlS
-Asserv isscmcnt
technique
majeure tL~nanl
fonction du
renchérissant le
de la cha îne de
-Rotation dcs
au droit clu
chômagc, de la
travail au profit
production et
postes au se\\ll
travail
productivité' et
du capita 1
gestion optimale
d'un collectif de
-rIuiclité des
des termes clc
-Suppression des
des flux
travail
migrations
l'échange
seuils sociaux ct
-Relative
interrég iona ks
-A bsencc du
fiscaux
proximité des
(problèmes de
salaire minimum
-Allègements des
tâches de
logement)
contraignant
charges payées
production et
-Inexistence des
*Niveau micro
par les
contrôle
droits
-Révision
entreprises
spécifiques à une
permanente
-Ouverture du
entreprise
fonction de la
choix entre
(avantages
conjoncture
assurance pnvée
SOCIaux, ou
locale
et couverture
retraites)
-Atténuation de
collective
-Réponses de
l'argument de
l'emploi aux
parité
différentiels de
salaires
Figure
L'usine flexible
L'ouvrier
Le salariat
Le salariat au
Le salariat à
emblématiQue
Proudhonien
intérimaire
rendement
deux vitesses
Références
B. KUNDIG, P.
G. ARCHIER,
Y. GATIAZ, G.
M.
R. HARRIS, A.
BESSON, B.
H. SERlEYX,
GILDER
WEITZMAN,
SELDON
CORIAT
M. PIORE, CH.
General Motors
SABEL
1985
Tableau 1 : Les flexibilités: cinq principes de base.
Source: Robert BOYER, Laflexibilité du travail el! Europe, op. cil., page 236
- Forme 5 : La flexibilité est entendue cornIlle la possibilité pour les entreprises cie se
soustraire à une partie des prélèvements sociaux et fiscaux et plus généralement, de
s'affranchir des réglementations publiques qui limitent leur liberté de gestion. La ncxibi\\ité est
alors synonyme dl ,·('fonte de la ration"~;~';l\\ion des interver.ioi1s cie l'Etat pouv;:.·; conduire
soit à l'économie souten"aine, soit à un « Etat minimal », ou alors à un salariat à deux vitesses
par référence :,lJX modalités d'accès ,\\ la couvel1ure soci,!!~ et au respect du dl<"il de travail.

19
Cependant, toutes ces différentes fom1es de Ocxibilité, ajoutées à d'autres analyses
théoriques de la notion donnent un enseignement précis : qu'elle soit concurrentielle,
2
opérationnelle ou stratégique l ; qu'elle soit potentiel1c ou effective ; qu'elle soit inteme ou
exteme3 ; la flexibilité traduit une aptitude à l'adaptation. Ceci signifie que l'environnement sc
modifie d'abord, et ce n'est qu'ensuite que l'on actionne les leviers qui commandent la
flexibilité. Cette flexibilité, .. adaptati\\'e qui attend des signaux d'oppol1unités ou de menaces
de son environnement pour se mettre en action « pourrait être, comme le note Robert
BOYER, une réaction défensive en vue de gérer j'imprévisibilité associée à la Cflse, pas
nécessairement un moyen de la surmonter »".
En ce sens, la Oexibilité adaptative rejoint la « soup\\csse défensive »5, mesurable au
nombre de clients indépendants (c'est-à-dire ceux dont les intentions d'achat obéissent à des
tendances qui évoluent de manière distincte) qui absorbent une part importante du volume des
ventes; au nombre de segments de marché sur lesquels l'entreprise intervient et au nombre de
technologies indépendantes dont relèvent ses activités.
La flexibilité est donc avant tout une flexibilité adaptative eUou défensive. D'une façon
générale pourtant, les principes propres à assurer le succès de l'entreprise sont de trois ordres:
.,
La rigueur et la persévérance d'abord: pour réussir, il faut prévoir, anticiper le futur avec
le meilleur modèle possible, choisir une ligne de conduite puis la respecter même si le
succès n'est pas immédiat.
o
L'opportunisme et l'intuition ensuite: par paresse ou incrédulité, ou renonce à la prévision
et l'on tente, à chaque instant, d'exploiter au mieux les circonstances.
CI
La citoyenneté et la création enfin: par option, on accorde beaucoup d'importance au
mieux-être social, à l'épanouissement du personnel et à une innovation en continu.
Etant donné que l'infom1ation n'est jamais parfaite, l'on peut considérer que la gestion
est faite à la fois d'anticipation et de réaction et s'en tenir par conséquent aux éléments de
gestion donnés par la flexibilité adaptative eUou défensive. f\\'lais si l'on considère que la
gestion est faite à la fois d'anticipalion, de réaction et aussi de création, il nous fJ.~:t rechercher
1 Voir D.1.
EI'PINK, « fkxibililY : a :ll'Cl'SSary compl<?me111 10 rbnning n, Rapport Institut Européell de
recherches et d'F::,:les Supérieures ell Mu" ;gelllt!llt, \\V,P. 1975-24 !··T-.:elles, Juin 1975.
2 Voir R. REL\\, op. cil.
3 Voir 1. ANSOFf, « Gérer la surprise el la dis,"'lllinllilé : réaclion Slrall'S:qlle aux signaux faibles·>. op. CiL: l.
.'\\NSOfF, Stratégie du (;,;C/OpPCIIlt!llt dl! /'t'Iltrq'; ..',:', op, cil.. 1989, pages Î I-T}',
4 R. 130YER (sous la direction de). op. ciL. pag.: 243
51. ANSOfF, op. cit, page 72.

20
comment peuvent sc concilier rigueur, opportunisme, innovation et enthousiasme et donc,
explorer la notion
sous-jacente de « nexibilité offensive »,
rarement
évoquée ct en
conséquence rarement définie. C'est à cette exploration qu'est consacrée l'étude qui suit.
3 - LA FLEXIBILITE OFFENSIVE DE L'ENTREPRISE.
La recherche sur la « nexibilité offensive» nous a, en effet, paru actuellement justifiée
à la fois par des raisons particulières de commodité d'observation ct par des raisons générales
liées au développement des sciences de gestion:
o
Commodité d'observation d'abord: en période de difficultés économiques, pour faire
face à l'imprévu, l'entreprise peut utiliser, sans succès, son aptitude à répondre aux
l
modifications de l'environnement . A fortiori,
lorsque ces difficultés économiques
perdurent (et la mouvance actuelle de l'environnement caractérise la pemlanence de ces
difficultés), il s'agit moins pour l'entreprise de s'adapter que de meltre en œuvre des
modèles viables qui fomlalisent son comportement de réaction, d'action et de création.
o
Raisons permanentes surtout: si l'on s'intéresse à la « flexibilité offensive », c'est parce
que l'on pense que son étude peut être une contribution positive au développement des
sciences de gestion. Si l'on admet avec des nuances diverses, que l'entreprise poursuit des
objectifs d'efficacité et de sécurité; l'on reconnaît aussi qu'elle cherche à maintenir un
équilibre viable et équitable entre les droits des divers groupes d'intérêts: les actionnaires,
le personnel, la clientèle et l'ensemble du public.
Il Y a un intérêt évident, tant au plan nomlatif qu'au plan descriptif, à rechercher dans
quelle mesure la «flexibilité offensive» contribue à l'amélioration de la sécurité de
l'entreprise (la meilleure défense n'est-elle pas l'attaque ?), et reste compatible avec les
objectifs d'efficacité et de maintien d'un équilibre viable entre les actionnaires, le personnel et
la clientèle. Cet intérêt paraît d'autant plus justifié que contrairement à d'autres aspects de la
conduite et de la fimlc (concentration, diversification, intégration, nexibilité adaptative ... ), la
« l1cxibilité offensive » J~;té fort peu étudiée.
1 En 1S)S5.
le sixième grand giOlipC coréen KUKJE, I"q1lllè COI11Ille les autres c'Iill"':priscs du pays pour S3
: flexibilité a pOllriallt fait faillite. Voir 13. K:\\PP. F. MORIN et E. W:\\TTEZ. op. cit:. page 64

21
Certes l'expression n'est pas totalement absente de la littérature économique, bien
qu'on ne trouve à notre connaissance aucune étude spécifique à L1 \\\\ flexibilité offensive ».
Des contributions sur la tlexibilitê du travail en Europe (au plan macroéconomique)! et sur la
stratégie d'entreprise (au plan microéconomique/ font allusion ù la i( flexibilité offensive»
pour, dans le premier cas, stigmatiser les cadres institutionnels de la réglementation du travail;
et dans le second cas, étudier en profondeur ]'objecti f flexibilité de l'entreprise.
On se trouve donc devant un sujet relativement neuf n'ayant pas, à notre connaissance,
fait j'objet d'études spécifiques autres qu'évocatrices. Cet état de fait explique et nos objectifs
et notre méthode de recherche
4 - OBJECTIFS ET [VIETHODE DE RECHERCHE.
Notre objectif essentiel est de contribuer à l'émergence du concept de « flexibilité
offensive» de j'entreprise. Notre recherche, de dimension limitée, ne saurait prétendre épuiser
le sujet; elle conserve avant tout un caractère exploratoire. Elle a pour but de foumir un cadre
à la mise en ordre du réel, en apportant un langage adapté au sujet, puis de recenser les
problèmes que pose la recherche de la « flexibilité offensive» dans l'entreprise, sans
prétendre constmire une théorie prescriptive. Toutefois, l'on ne perdra pas de vue cet objectif
normatif et l'on s'attachera à l'étude des questions concrètes soulevées par l'application d'une
politique de « flexibilité offensive ».
En conséquence, malgré le sous-développement du sujet, l'on ne pouvait utiliser une
démarche purement axiomatique. De même, une étude empirico-déductive apparaissait
prématurée. Il nous a semblé présomptueux d'entreprendre des tests d'hypothèses dans un
domaine aussi peu exploré et le risque était grand de trop restreindre le champ d'investigation.
Parce que la question fondamentale était de relever des axes de réOexion et de
répertorier les problèmes plus que de les résoudre, il nous est appam pertinent d'utiliser une
appr.xhe qualitative fon,lé'C sur des études \\."llpiriqucs. Les informations recueillies pmI'
vingt-ncuC entreprises sont une base utile à l'inciuction et pemlettront de mettre en relief
certaines variables ju~ées compatibles avec Llne politique de « flexibilité offensive ».
1 RobenJ)YER (sous la directioi' ck). Ll/lll'xihl1i{(; du {/'(il:."-! ('11 Et,ropl', op. cil.
2 Igor H. f\\NSOFF. S{/'{/{égie de dlhe1oppc','IlCIIf de l'l'/l{reprisl', op. (il

23
PREMIERE PARTIE
LE CONCEPT DE FLEXIBILITE
OFFENSIVE

24
De façon générale, la n1lSe en place d'une définition peut se faire d'au moins deux
façons: formuler directcmcnt celie-ci avant de la rendre pertincntc par des explications
adéquates, ou alors déblayer d'abord le terrain, fixer le cadre théorique dans lequel on entend
se situer, relever l'importance de la notion avant de procèdel' à l'élaboration des tem1es de la
définition.
Cette demière manière a semblé convenlr à la démarche bipal1ite ici adoptée pour
appréhender le concept de « flexibilité offensive ». C'est donc pour éviter le piège d'une
définition abstraite, nonnative voire dogmatique de cette notion que l'on a procédé:
o
à une étude de la nécessité de la « flexibilité offensive» (chapitre 1). En répondant à un
souci de dépoussiérage théorique, ce travail vise en quelque sorte à évaluer J'efficacité des
modèles de gestion actuels dans la Jutte de l'entreprise contre la crise économique;

à la mise au point de fom1ulations de ce sujet ]a « flexibilité offensive» (chapitre 2) ;
notion qui se situe, on le verra, au point de convergence d'un fanatisme pour J'innovation
et d'un état d'esprit dominé par un leadership emprunt de rigueur et d'enthousiasme.

25
CHAPITRE 1
LA NECESSITE DE LA
FLEXIBILITE OFFENSIVE
Dès l'instant où l'on admet que la conduite des entreprises s'appuic simultanément sur
la rigueur et la persévérance d'une part, sur l'opportunisme et l'intuition d'autre part (dosées
sans doute à des degrés fort divers selon les individus et les firmes); l'on est conduit ù
reconnaître qu'on peut modifier les objectifs, 1cs plans, ct les comportemcnts pour non
seulement faire face à l'imprévu (souplesse), mais aussi ct surtout pour être le vecteur
enthousiaste et prolifique de cet imprévu (agressivité).
Mais dans quelle mesure une telle attitude importe-t-elle à l'entreprise?
Le problème de la nécessité d'une « flexibilité offensive» par rapport à une
« flexibilité défensive », suggère alors des investigations au triple plan:

de l'existant en matière de gestion d'entreprise (section 1) pour apprécier, en tem1es de
connaissances théoriques, les modèles généraux de fonctionnement actuel des unités de
production;

des conséquences de l'application de ces modèles sur les performances globales de
l'entreprise (section 2), pour en évaluer empiriquement la validité et l'efficacité;

de l'étude d'un cas de sortie de crise exemplaire (section 3), menée par une entreprise
grâce à un type de gestion riche d'enseignements pour toutes les entreprises en difficultés,
et singulièrement différent des modèles jusque là utilisés.
SECTION
1 : L'EXISTANT EN MATIERE DE
GESTION D'ENTREPRISE.
A parti,· de l'évolution des ;héorics en orgalllsa:lon, on peut faire :';'paraitre deux
grandes tendances qui marquent l'existant en matière de gesllc'!l d'entreprise:

26
Il
d'une part et avant les années 70, une gestion traditionnelle impulsée par le « taylorisme»
avec une très forte rentabilité (référence faite à cc qu'on a appelé les « trente glorieuses »);

d'autre part, après les années 70, une gestion en quête de modernité pour pennettre à
l'entreprise de survivre ct d'être profitable dans un environnement perpétuellement trouble.
1- LA GESTION TRADITIONNELLE DE L'ENTREPRISE.
La gestion traditionnelle de l'entreprise, c'est d'abord l'organisation scienti flque ùu
travail; c'est ensuite la prise en compte progressive du management; c'est enfll1 le triomphe
de l'approche rationnelle dans la conduite de la firme.
1 - L'ORGANISATION SCIENTIFIQUE DU TRAVAIL.
En inventant l' « organisation scientifique du travail », Frederick W. TAYLOR fut
certainement le premier auteur à f01l11aliser la science de l'organisation. L'on étudiera
brièvement son œuvre avant d'analyser le prolongement qu'en a fait Henry FORD.
1.1 - Frederick \\V. TAYLOR (1856-1915r
Frederick W. TAYLOR a si fortement influencé son époque que son nom a servi à
qualifier ce nouveau courant, le « taylorisme ». Aussi bien à l'aciérie Midvale (1870), à la
Compagnie Simonds Rolling Machine (1893) qu'à l'aciérie de Bethlehem (1898), travaillant
dans l'une et étant consultant dans les autres, il développe le système des salaires aux pièces et
étudie, pour les expérimenter, les éléments du travail ayant trait à la productivité, à la qualité
du travail, au moral des travailleurs et à la façon de les rémunérer. Il publie deux ouvragesl
qui guident la rédaction du recueil de ses textes1 d'où l'on extrait ses cinq principes sur
l'organisation du travail:

les tâches doivent être décomposées en éléments constituti fs ;
o
chaque élément doit être analysé afin de rI:;, !lcrcher la meilleure :l1éthode d'exploitation:
e
les éléments de chaque L1chc doivent être inlC'grés, et il est nécessaire d'établir des nomlCS
de rendement;
1 Freànick W, TAYLOR, ShofJ :"0 IlIIg ('/II ('II 1. 1906 et n,
"/'iIlCl{)/cs orseiclllifre /",/l/ogC/l/C/lI, 1911. extrai: .,ie
P.G. BEF.GERON, op. ci!.
2 - Frederick \\V.TA '{LOR, La Dircelioll .'iCic•lI lifiq!IC des clllre/Jlïscs. UlIllOd, Paris, 1971.

'':
',-.
27
o
les employés doivent être sélectionnés et entraînés d'une façon scientifique; et
o
les travailleurs doivent être rémunérés en fonction du rendement.
La décomposition des tâches en gestes élémentaires à durée imposée pennet ainsi de
parcelliser et d'individualiser les opérations humaines (qui apparaissent alors en « miettes»1
selon l'expression de George FR1ED\\1ANN). II devient clonc possible de calculer les salaires
en fonction du rendement et d'inciter les ouvriers il accroître leur productivité individuelle.
Cette « organisation scientifique du travail» s'accompagne d'une séparation de plus
en plus nette entre la conception (domaine de l'ingénieur) ct j'exécution (qui est vidée de toute
part d'initiative). Ce processus de « déqualification du travailleur est sans cesse repoussé vers
de nouvelles limites (tandis qu') à l'autre pôle, les puissances intellectuelles se trouvent
accaparées par une fraction particulière du salariat, les ingénieurs, les techniciens et cadres
(... ), et matérialisées dans les moyens de production eux-mêmes »2.
1.2 - Le fordisme.
Car TAYLOR ne met en place que la première étape du taylorisme, celui-ci devant
encore se matérialiser dans les moyens cie production. Henry FORD se charge alors de
systématiser cette méthode organisationnelle en aménagement les postes de travail le long
3
d'une chaîne en continu , La simplicité des gestes à accomplir assure une rapidité, source de
productivité, mais elle a pour corollaire la répétitivité et la monotonie qui peuvent heurter le
besoin de diversification de l'homme.
De plus, comme le montre FREYSSENET, « le mode capitaliste de mise en œuvre
du principe mécanique matérialise, dans les machines elles-mêmes, la séparation de la partie
intellectuelle et de la partie manuelle du travail. La mise en œuvre capitaliste du principe
automatique va enlever au travailleur la petite parcelle d'activité intellectuelle qui lui restait, et
réduire son travail à une tâche de surveillance purement réflexe »4 car le principe mécanique,
en donnant à la machine l' « art» de façonner l'objet, met presque l'ouvrier à l'écart: ce sont
1 Georges FRlEDMA0:!'i. I.e 1Iï1l'(li! Cil miel/CS, Ga] 1i 111 a rd, Paris. 1956.
2 Alain LPIETZ, op. cil., P:';l~ 224
J Voir Gilles MAROUSEAU, « L'évolution des theOlîe.; en organisation ». Le.\\' Cahiers Français, n° 233. Ocr.
Dec. 1937. page 26.
4 M. FRt':'SSENET, cité par A. Li 1'; [TZ. op. cil. page 226
1
1-

28
désonnais les machines qui se servent les unes des autres, la tâche du travailleur se réduisant à
surveiller ou à suppléer j'appareil de production.
Ainsi se met en place le fordisme, qui complète le taylorisme par unc incorporation
au système des machines des règles de l'organisation taylorienne du travail. Il se caractérise
par un « rapport de production », un « rapport salarial» et un type de « configuration de la
division sociale du travail » particulier! :
o
Le rapport de production fordien 2 se caractérise par le fait qu'il permet d'asseoir sur unc
base stable et dans une large mesure généralisable, la production en grandc série dc
marchandises dont la valeur unitaire en termes de temps de travail nécessaire est abaissée.
o
Le rapport salarial fordien 3 se caractérise par le lien qui a été progressivcment établi
entre productivité et salaire. Cette substitution du salaire au temps au salaire à la pièce a
une double dimension : le salaire direct, progressivement garanti par des formules
d'indexation des salaires sur les prix des biens de consommation; et le salaire indirect
(chômage, santé, vieillesse) apportant quelques garanties concernant la reconstitution de la
force de travail.
o
La configuration fordienne de la division sociale du travail4 se caractérise par une
liaison établie entre nonne de production et nonne de consommation, et qui a pernlis le
développement de la production (production de masse), amenant par là un développement
considérable de certains secteurs qui vont jouer un rôle moteur dans l'économie :
l'automobile, le logement, et plus généralement les biens d'équipement des ménages qui
assurent le maintien d'une demande haute favorisant le développement des secteurs
concernés.
Il faut dire cependant qu'en reposant sur une « stricte hiérarchie fondée sur le savoir
théorique »5, et en étant « une fomle historique d'organisation du travail en fonction de
l'économie du temps »6, le taylorismc de FORD sinon celui de TA l'LOR a vite connu des
1 Voir Benj:lmin CORIAT, « Crise Cc élèctronisalioll de la pro,: 'clion : robotisation d'ac"lia ct modèle fordien
d'accumulatio:' ,in capital », Critiques dl l'Feol/omie Pulitique. ai
·:t. pages 71-91.
1 Le « rapport Gê production fordien » d0signè \\es conditions partlul\\1ères de production des biens suscitées par
la rationalisation taylorienne et fordienne du travail et de la production.
) Le « rJpport salarial fordien» désigne ce qui a trait J!!, modalités institutiol1l1t?llcs et concurrentielles ,,.
fixation de" salaires et des revenus ,,'condaires.
4 La « confl!:"uration fordienne de la division sociale du tra\\ail, désigne les contours du ,( fractionnement et du
sectionnemel1l de l'appareil productif ». '''''Ir 8. Coria!. op. cil.. pJ:,:,: Sel.
S Voir G. I\\'IAROUSL\\U, op. ci!., page 2b.
/- Voir B. KUNDIG, op. ,'il. page 57

29
obstacles principalement dus à la rigidité du système'. C'est pour combattre celle-ci que petit
à petit ont été pris en compte les principes du management.
2 - LA PRISE EN CO~'IPTE DU ~'1ANAGE1\\1ENT.
Entendue comme étant « le processus d'accomplissement des objectifs de l'entreprise
par le personnel »2, le management traite des moyens à mettre en Œuvre pour déternliner
l'orientation d'une firme et la guider vers des obj~ctifs. C'est donc « un vaste complexe
d'activités comportant études, décisions, communications, direction, motivations, mesures et
contrôles »3 qui est né et s'est développé comme un art.
Des analyses de plusieurs théoriciens (entre autres Henri FAYOl (1841-1925) et
Elton MAYO (1880-1949)), il ressort d'une part, que le management est un processus
opérationnel qui se prête mieux à la compréhension à travers une étude globale de ses
fonctions; et d'autre part, que l'étude du management devrait conduire au développement de
certains principes, mis en valeur lorsque mis en pratique.
On doit à H. FAYOL les premières fonctions du management: planifier, orgal1lser,
commander, coordonner et contrôler ;et à P. DRUCKER le premier regroupement de celle-ci
en cinq catégories : la fixation des objectifs, l'organisation du travail, la motivation,
l'évolution de la firme et le développement du personnel. DRUCKER relève aussi
l'importance incontournable de la perfonnance économique car l'existence et l'autorité du
manager peuvent être simplement justifiées par les résultats économiques provenant de son
action4•
1 De fait, le schéma classique taylorien propose à la fois:
un moyen d'intégralion au travail induslTiel des salaril~s déqualifiés;
un mode \\!',)rganisation du tra\\'ail Ic:'OSJnt des hiérarchies ct cc's répartitions strictes de" compétences;
un système l\\~ rémunération basé sur 1::::: logique simple: la qu. ,'iié produite fonde le nl"::au du sJlaire ; et
un système de motivation établi sur Ullé vision pessimiste de l'homllle au tra\\'ai] : la moti\\'ation repose sur
une incitation financière directe fondée sur le couplage ou salaire el du rendemenl direct.
Voir à ce sujet Bernard MARTOR'r', i{ La geslion des ressou:'Ces humaines en période' de crise ». Les Cahier.\\
Français, J,'" 234, Janv-Fév. 1988, pa~.i' 52,
2 Moses BESSONG, Co/poratc t!Icor)'. !'olycopié, Yaoundé, 1985, page 5.
3 Igor H. ANGOr'~, oréface de l'édition de i '165 de Stratégie dl/ del'c·jo/'!}l'Ille//t dl' l'entrepris ..."
4 Peter DRUCKER, '[lie !'rf/ctiee o/lIIl1nagl'iJil:lii. PJI1 Books. 1968, Traduction personnelle.

30
Parce que « lc produit final du managemcnt est constitué par les décisions et les
actes »', on peut, en limitant à quatre points (l'avcnir, les clients, l'environnement et
l'organisation interne) recenser les techniques miscs au point par les décideurs de l'époque
(tableau 2). Ainsi:
iFace à l'avenir
Face aux clients
Face à
1 :ace à J'organisation
l'en vi ronnemen t
Interne
1 Techniques
1- planification
- marketing
-marketing
J-contrôle
-mutisme
-paternalisme
Tableau 2 : Quelques techniques du management traditionnel
Source: Elaboration personnelle, ù partir de Hcn'é SERIEYX, op. CiL, pages 65-68.
- Face à l'avenir, il faut procéder à la planification, sorte de catalogue des actions à
entreprendre dans tous les domaines de la vie de l'entreprise, et à respecter à tout prix. La
planification consacre le règne d'une prévision plus ou moins exacte, dictée par la quasi-
stabilité de l'environnement.
- Face aux clients, il faut faire du « marketing» pour avoir une bonne perception des
attentes de la clientèle.
- Face à l'environnement, et parce que celui-ci est pratiquement stable, la fonction
marketing conserve sa mission d'exploitation pern1anente du marché. Mais au nom du
principe « pour vivre heureux, vivons cachés », l'entreprise ne s'occupe pas de communication
et fonctionne en quelque sorte en vase clos.
Face
à
l'organisation
interne,
on
combine
les
techniques
de
contrôle
(questionnaires rigoureux sur l'évaluation du personnel) et les comportements pécuniairement
paternalistes du genre « il faut être gentil avec le salarié ».
Parallèlement à ce mouvement d'intégration du management pour une meilleure
gestion de l'entreprise, l'on note l'importance de plus en plus croissante de l'approche
rationnelle dans la maîtrise de la conduite des organisations.
i l'der DRUCKER, cité par [gCl;" I-!
ANGorr. S/r'l/l:gic du dJ\\ï!/OpPCIIICIl/ de l'eli/reprise, l'ouveau:\\ HOrlzons.
Paris, IY89,page 13.

31
3 - LE TRIOMPHE DE LA GESTION RATIONNELLE.
Diversement étudiée par une littérature plus ou moins spécialisée!, la gestion
rationnelle de l'entreprise s'appréhende sUl10ut à travers les modèles que l'on peut définir
comme étant, « de façon générale (... ), une présentation simplifiée d'un système, qui en décrit
les aspects les plus essentiels pour son analyse et la résolution des problèmes qu'il pose >,2.
Ces modèles qui exposent généralement des solutions aux problèmes de décision par
des techniques quantitatives de gestion, peuvent être regroupés en deux catégories qui feront
l'objet de développement: les modèles de gestion en environnement certain, et les modèles de
gestion en environnement incertain.
3.1 - La prévision et la programmation.
Entre autres problèmes de files d'attente, de stocks, de flots et d'ordonnancement, de
transport ou de gestion des systèmes dynamiques, les problèmes de prévision et de
programmation semblent être le socle sur lequel reposent les techniques quantitatives de
gestion en environnement certain, c'est-à-dire justement, en environnement prévisible.
- La prévision semble être un des éléments clés de tout processus de gestion. Il est en
effet important de prévoir l'évolution de l'environnement de l'entreprise à travers tous les
facteurs pouvant exercer une influence sur ses résultats. L'on dispose à cet effet de techniques
quantitatives et qualitatives et/ou endogènes et exogènes.
Les techniques quantitatives sont basées sur l'idée selon laquelle l'étude de données
chiffrées caractérisant une variable économique pemlet de mette en évidence des régularités
susceptibles de se reproduire et à partir desquelles il est concevable de faire des prévisions sur
l'état futur de cette variable. A partir de la fomlalisation et du traitement des séries
chronologiques, ces techniques peuvent être des modèles de prévision à court temle (prévision
par les moyennes mobiles, par le lissage ,\\ponentiel ou par la méthode de BOX et J D'-!KfNS)
1 Pour ne citer qUé quc'Iques exemples:
Dans la finance
Ph. MAILLET, La déc; ...',1/1 il IOllg lerllle dalls l'i!//(!''.'prise, Cujas, Paris, 10 Î 3.
Dans [a politique gl'nérale : J. LESOURNE, I.es 1I/0di'li!s de croissollL" ries elllreprisl's, Dunod, Paris, 1973.
Dans le marketing: Ph KOTLER. Le lIIark,·'
. les 10ll<lcII/I'II1S de i, ,Iécis/oll, Editions d'Orh.,,\\isarion,
Paris, 1974.
Dans la production: V. GIARD, Gcslioll de ln produclioll, Economica, Paris. 1981.
2 Jean-Pierre VEDRINE, TQ.G., Vuibert, Gestion, Paris, 1985, page 3.

32
ou des modèles de prévision à long temle (régrcssions linéaires simples, modèles endogènes
ou exogènes).
Les méthodes qualitatives recourent partiellemcnt à des donnécs chiffrécs, mais ellcs
procèdent beaucoup plus par intuition, par imagination, par la créativité ct la compétence dans
des domaines aussi divers que la sociologie, la politique, la technologie, Dès que l'on s'écarte
des problèmes de gestion courante de l'cntreprisc, les tcchniqucs quantitatives nc pcuvent
fournir que des indications, des repères qu'il con\\'ient d'enrichir par des analyses plus
qualitatives des situations évoquées l .
Les techniques endogènes de prévision ne retiennent que le temps comme variable
explicative de l'évolution des phénomènes : chaque phénomène économique contient une
certaine force d'inertie qui l'amène à poursuivre son trajet sur sa lancée quel que soit le
comportement des autres variables économiques. En ce sens, Jes valeurs futures qu'il est
susceptible de prendre sont déduites des valeurs enregistrées par le passé. On retrouve
généralement les techniques endogènes dans les méthodes de cycle de vie du produit où la
formulation de J'ensemble du cycle est faite soit par le schéma linéaire, soit par le schéma
logistique, soit par le schéma de GOMPERTZ ; et où une autre formulation peut intégrer deux
phases successives du cycle à savoir les phases de lancement et de croissance du produit
(schéma parabolique) et les phases de croissance et de maturité (schéma exponentiel modifié).
Les méthodes exogènes, en retenant aussi Je temps, intègrent cependant d'autres
variables : l'évolution d'un phénomène donné est alors déduite de l'évolution d'autres
phénomènes. Selon le cas, on aura ici recours à des variables explicatives de types
microéconomique (prix, attributs du produit, publicité) ou de type macroéconomique (revenu
des ménages, consommation nationale). Les modèles exogènes recourent généralement à des
techniques de régression multiple.
- La programmation des activités de
l'entreprise s'étend
sur un domaine
d'application très divcrsifi'2 Elle peut être l11a1.l~élllatique ou dynan1iljJc,
1 Sur les techniques de pré\\'isiull qualitatiH. \\'oir :
« ~<··~tégies d'entreprises el l'Induits nou\\'caux ", Oùs,;;n f~('\\'Il(' Française de GL··rioll, 1980,
R. S/\\INT-PAUL el P.F. '1 H-iIERE-I3UCf-lOT. !1I11'};(lIioll cr émlua/ioll rechllologiques, Entrepris\\:
Moderne d'Edition, Paris, 1974.

33
La programmation mathématique recouvre un ensemble de techniques d'optimisation
sous contraintes qui penllettent de déterminer dans quelles conditions on peut rendre
maximum ou minimum une fonction objectif d'un certain nombre de variables liées par un
certain nombre de relations ou contraintes. Après une forI1lulation mathématique, on résout le
programme soit graphiquement, soit par l'algorithme du simplexe pour procéder à la décision.
Mais lorsque j'environnement de la décision change de période en période, il devient
plus indiqué d'utiliser la programmation dynamique pour résoudre les problèmes parce que les
décisions d'une période dépendent entre autres des décisions des autres périodes. Cette
programmation, particulièrement adaptée pour les systèmes dynamiques (comme la gestion
des stocks) se fonde sur le « principe d'optimalité»1 et trouve les applications dans plusieurs
domaines (gestion des stocks pour une firme de transfollllation, déterminJtion du trJjet
optimal pour une compagnie de transport).
Voilà pour ce qui est de la gestion en environnement « certain ». Cette gestion est
assez différente de celle que l'on applique en cas d'imprévisibilité de l'environnement.
3.2 - L'introduction de l'incertitude.
L'incertitude en effet, est une des caractéristiques permanentes de la gestion des
entreprises et de façon plus générale de toute décision économique : lancer un nouveau
produit ou modifier un prix de vente pour une entreprise; acheter un réfrigérateur ou une
nouvelle marque de savon pour un ménage; implique toujours un certain risque, un pari sur
les résultats futurs que l'on ne peut complètement maîtriser. La gestion en environnement
incertain interpelle l'attitude de l'agent économique vis-à-vis du risque en général, et vis-à-vis
du choix des investissements en particulier, après une f0n11alisation des problèmes de choix
imprévisibles.
- Les problèmes de choix incertains, une fois fOnllalisés peuvent être résolus de
diffàcntes manières sc 101] qu'il est possible ou non de probabiliser :"~nvironnement. Lors(!uc
l'entrepriSe a à sa dispositiol, des probabilités COi:ccrnant les environnements éventuels, e\\k
peut appliquer certains critères de décision développés dans l'analyse de BA'{ES eUou
1 « Principe d'optimalité)) de R. UELLM:\\N : une décision ",HinDie est lelle que, qUël~; que soient l'état initiai;
la décision iilltiale, les décisions SUI':an!èS doi\\'Cnt constituel Li;le politique optimale par rappon à l'état résultal\\l
de la première décision R.E. BELLMAN.:t S.E. DREYFLS, LI/ progml/1l/1afioll d.l'namique el se.'i applications,
Dunod, Paris, 1965, cité par J.P. VEDRINE, op. cil. page 151.

34
considérer le risque encouru comme un critère de choix important r our certallles décisions.
Dans ce cas, elle doit faire face à un arbitrage entre rentabilité ct sécurité qui peut trouver
solution par le recours aux fonctions d'utilité ou par J'introduction d'indicateurs explicites du
rIsque.
En situation non probabilisée, l'agent économiquc est capable d'énumérer les états
éventuels de la nature sans pouvoir leur attribuer unc probabi lité d'apparition. C'est la
caractéristique des situations de concurrence et· dcs situations indéterminées. Dans une
situation de concurrence, J'environnement de l'entreprise est constitué par les décisions
d'autres agents économiques dont les intérêts sont soit totaiemelll, soil partiellement
antagoniques avec les siens. Il s'agit donc d'une diversité de cas susceptibles de méthodes
d'analyse et de décisions différentes qui font l'objet de la théorie des jeux.
En situation indétemlinée, le décideur ne peut affecter aucune probabilité aux
différents états de la nature, et il n'a même pas la possibilité d'émettre des hypothèses sur le
comportement de son environnement puisque celui-ci est neutre. Pour traiter ce type de
problèmes, l'on dispose des critères de LAPLACE, WALD, HURWICZ, et SAVAGE 1•
- Les techniques de choix des investissements intègrent aussi l'incertitude puisque
les résultats de ceux-ci ne sont jamais certains. Ce qui définit l'investissement, c'est moins son
domaine d'application que sa nature fondamentale de sacrifice d'avantage immédiate en vue
d'obtenir des avantages ultérieurs plus importants. Le problème pour le décideur consiste à
déterminer si l'importance de la mise de fonds initiale est justifiée compte tenu des revenus ou
des économies attendus. C'est le rôle des critères de choix des investissements de le vérifier,
soit par l'actualisation, par la valeur actuelle nette ou par le taux de rentabilité inteme2.
1 _ Le critère de LAPLACE repose sur le principe de la raison su f!ïsante : s'il n 'y a aucune raison de croire que
('environnement Ej soit plus probable que l'environnement Ej , alors ces évènements sont considérés comme
équiprobables. L'application du critère de LAPLACE re\\·icnt il ,,;lectionner la décision présentant la meilleure
moyenne de rés::\\c:tls.
- Le critère de WALD consiste à choisir L, décision pour laquelle S,)11 gain le plus petit est maximal (maximin)
ou, à ('inverse, celle pour laquelle sa plus grande perte est minimale (minimax).
- Le critère de HURW\\CZ repose sur l'utilisation d'un indice' d'optimisme (a). Chaq·!c' décision est repérée p;j"
son meilln, J'ésultat Ri et par son i :us mauvais ri. La finllL' c !loisit la décision qui .IUI;I la meilleure moyenne
Hj=aR j+( 1-a)l,
- Le critère de S:\\VAGE fait appel à la .. ;)!ion de regrel. c·est-i .. ,·"
au coùt d'opportunité possible associé il
chaque décision. Ji c'onsiste J choisir la décl~iol1 pour laquelle le plus o!L;nd regret est minimal (nllnirnax regret).
'Voir entre autres: J.P. VLDRrNE, op. cil.. pages 332-354; Walder l\\lASIE1\\.l, op. cil. ; Pierre CONSO, op. cil.

35
En somme, les modèles de gestion rationnelle couvrent, entre autres domaines, ceux
de la prévision, de la programmation et de l'incertitude. Il faut dire cependant que
l'introduction de l'incertitude dans ces modèles est duc à l'exigence de souplesse dictée par un
environnement de moins en moins stable. Parce qu'elles sont au centre des méthodes de
prévision, ces techniques permettent d'anticiper sur des évènements futurs et introduisent ainsi
la modemité dans la gestion de l'entreprise
II - LA GESTION I\\1üDERNISEE DE L'ENTREPRISE.
Après les années 70, l'instabilité soutenue de j'environnement fait apparaître une
nouvelle nature de menaces qu'il faut apprendre cl dompter. Les sciences de gestion, appelées
à la rescousse, mettent à la disposition des entreprises des éléments ayant tout à fois à la
stratégie, à un nouveau management et à l'offènsive.
1 - LA STRATEGIE.
Alors que ce n'est qu'en 1965 qu'est publié l'ouvrage pionnier de la stratégie
d'entreprise!, l'on assiste aujourd'hui à un foisonnement de discours et le vocable est utilisé sur
des plans très différents. D'où l'intérêt d'une définition, d'une évaluation de la pensée
stratégique et d'une insistance particulière parce qu'actuellement mis en relief, sur le
management stratégique.
1.1 - La définition.
Installé au cœur de l'organisation, Je stratège manipule quatre grandes masses:

Le projet du groupe dirigeant, c'est-à-dire son système de valeurs, de buts et d'objectifs;

L'environnement économique, c'est-à-dire à la fois les conditions générales (croissance,
inflation ... ) qui influencent la demande, les compo11ements des consommateurs, les
foumisseurs, des banquiers ... ; et la structure et la dynamiquè de la concurrence qUI
rendent pL!s ou moins tenable U,lC position compétitIf: :

Les compétences et ressources de l'entreprise, c'est-à-dire ses capacités financières,
technc logiques et humaine' :
1 Igor
H. ANSOFF, Corpor(Jte St/ïltegy. \\!cGraw-Hill. 1965, tral~uit par Sr/ïltégie d/l th:\\c'!0ppl'1IIelll de
l'entreprise, Editions Hommes et Techniques. Paris. ]1)68.

36
o
Les obligations et pressions sociales externes et internes qui entourent ou favorisent tel ou
tel changement majeur.
Le schéma suivant donne un aperçu de ces masses:
le,qLIel'entrq~lScveLltraile
icctif dcs diriucants
, outs et handicaos
1 cl1\\'ironncll1cnt
é 'onomiquc ct industriel
Ce que l'entreprise a la capact)'ih:l1#:iilil~~~;;:;i.ç~-.>.ol;.i<lJh::ilil~le~· ~l'entreprisc devrait faire
olitiaucs interne et externe
Ce que l'entreprise est autorisée à faire
Schéma 2 : Les grandes masses de la stratégie.
Source: Alain Charles MARTINET, « La démarche Stratégique »,
Les Cahiers Français, nO 233, Oct.-Déc, 1987, page 6.
Ces grandes catégories détem1inent pour l'essentiel la stratégie et les décisions
d'envergure que l'entreprise est amenée à prendre pour, selon les cas, préserver sa survie, se
redresser ou poursuivre son développement.
Ainsi « faire de la stratégie» consiste donc, essentiellement à placer l'entreprise dans
une position - notamment à l'égard des forces concurrentielles - telle qu'elle puisse dégager
l durablement une perfonnance jugée suffisante par les dirigeants et autres parties prenantes
(actionnaires, personnel, banques ... ) »1. Comme dans la guerre, c'est dans la plupart des cas
celui qui s'est placé dans la meilleure position de départ qui gagne la bataille, dans la mesure
bien sCIr où règne dans ~t's troupes un minil::"m d'organisation. D:ms cet esprit, « tout j'intérêt
de la réflexion stratégique sera donc de permettre aux responsables de trouver le moyen de
placer leur entreV!se dans une positic:, telle que par rappu'-( à ses concurrents, ~:t de façon
1 _ Alain Charles MARTINET, op. ciL

37
systématique parce que structurelle, elle rende plus cher ses produits, elle achète meilleur
marché ses fournitures ou elle fasse mieux fonctionner ses ateliers afin que ses privilèges ne


1
sOIent pas partages» .
Cette rél1exion qui, au fur et à mesure du temps, a donné naissance à plusieurs types
de stratégies (stratégie commerciale, administrative, technologique ... ) aura connu, face à la
diversité des problèmes des entreprises et à la multiplicité des perceptions qu'en ont les
stratégies, des types de démarches ou de modèles très différents.
1.2 - La pensée stratégique.
Malgré sa relative jeunesse, la pensée stratégique d'entreprise est déjà très disparate 2.
Deux aspects le montrent:
Premier aspect : Au-delà d'une certaine taille et/ou complexité les entreprises
désireuses de formaliser leur démarche stratégique ont dû mettre en place quelques
procédures, reprises par des méthodes proposées par des un iversi taires ou des cabinets
spécialisés. Ainsi s'est constitué un ensemble d'outils dont le contenu a évolué en fonction des
problèmes rencontrés.
En mettant en lumière les traits forts des changements accomplis face aux défis
nouveaux posés aux entreprises, le tableau 3 suivant relève le passage d'une planification à
long tenne (1965-1975) au management stratégiq ue (depuis 1980) en passant par la
planification stratégique (1975-1980). 11 montre le passage d'une vision très économique et
prévisible à une volonté de piloter les changements économiques, sociaux et politiques; du
plan à l'action stratégique; de la domination des chiffres à la large technologique à la
diffusion de la stratégie; de la centralisation à la diffusion des tâches, des pouvoirs et des
décisions.
Deuxième aspect: La disparité de la pensée stratégique vient aussi de l'éparpillement
ùcs plans où se situelli L~·S auteurs des dive!:',; contributions théo;'iques et pratiques:

Sur le plan des propositions nOnllatives, l'on aboutit à des préceptes dont les plus connus
sont les lois du P.I.M.S. (Profit flllj-':!ct a/Marketing Stl",:,egy) pour lesquels n','ufs facteurs
1 François QUARRE, « A quoi sert la stratégie'? n. Les Cahiers Français. op. CiL. p:Jgt: 7
l L'on s'inspire ici de Alain Charles MARTINET. op, CiL

38
expliquent 80 % des succès ou des échecs dans un domaine d'activité stratégique :
l'intensité capitalistique, la productivité, la croissance du marché, la position sur le
marché, la qualité des produits, l'innovation, l'intégration verticale, la pression sur les
coûts et la phase construction d'une position ou récolte des bénéfices!.
1965-1975
1975-1980
1980
~
Planification à long tenlle
Planification stratégique
!v!anagement stratégiquc
Elérncnts
-Prévisions à long tenlle
-Stratégie glob:Jle
-Vision stratégique et
-Plans opérationnels
-Segmentation en DAS*
projet
-Budgets pluriannuels
-Prévision et prospective
-Leadersh ip
-Stratégie de croissance et
-Simulation
-Formulation et mise en
di vers ification
-Planification sociale
œuvre stratégique
-Diffusion de la stratégie
dans l'organisation
-Management du
changement
Teehniq ues
-Prévision économétrique
-Scénarios
-Analyse de compétitivité
-Techniques budgéta ires
-Matrice de portefeuille
-Explication clu projet
-Analyse d'écarts
-Courbe d 'expérience
-Portefeuille de
-Matrices
-Analyse de risque et cie
technologies
produi tsxmarchés
sensibilité
-Qualité totale
-Budget base zéro
-Marketing interne
-Systèmes d' infonllations
stratégiques
Problèmes
-Rigidité, détemlinisme
-Centralisation
-Exigence vis-à-vis des
-Optimisme prévisionne 1
-Aspects analytiques
états majors
-Risques minorés
majorés
-Approche ambitieuse
-Facteurs soc iopolitiques
-Mise en œuvre négligée
-Coût en temps
occultés
-Sons-estimation des
-Coûts en investissement
-Peu de discussions des
liaisons entre DAS
de changement
alterna ti ves
-Difficultés à traiter les
changements rapides et
les crises
Tableau 3 : L'évolution de la pensée stratégique.
*DAS = Domaine d'activité stratégique
Source: Alain Charles MARTfNET, op. cit., page Il.

Sur le plan des propositions de méthodes de gestion devant pennettre aux chefs
d'entreprises d'identifier et de résoudre eux-mêmes leurs problèmes, l'on aboutit à
l'analyse
compétitive de
Michael
E.
PORTER
qui
met
en
relief cinq
forces
concurrentielles (l'intensité de la lutte inteme, le pouvoir de négociation des foumisseurs,
le pouvoir de négociation des clients, la menace de concurrents potentiels et la mesure des
pr"r1uits de substitutioli), et trois stratégies g"'!1ériques (la dominal:'!1 globale de l'indus;rie
par les coûts et les prix de vente, la différencialion et la focalisation sur niche)2.
- - - - - - - - - - - - - -
1 Voir Alain Charles i\\l\\RTl1\\"ET. op, cil. ; R.A. THIL l'ART. La srrardgic d'enrl"/lrise. Mc Graw-Hill. 19S 1.
2 _ Voir: Michel E. PORTER. Ciwir 5rra r,;giq I/es cr COIIClI!h'I/Ce. Economica, Paris
1982
- Michael E. PORTER, L 'a\\'(ll/rag" cOIICl/rrellrie!. Inter EdillUl'. PJris, 1986.
- STATEGOR, Srrarégie. srrl/cr/lre, décisioll. ide/lfiré. po/iriql/e gtllliira/e d'enrreprise. [nlèr Edition, Paris, 1988.

39
Ces approches penl1ettent d'élaborer un diagnostic qui débouche sur un ensemble de
décisions stratégiques. L'étape suivante réside dans la mise en œuvre de celies-ci, au travers
de procédures d'application.
1.3- Le management stratégique.
1
Selon Arthur SHARPLlN , «le management stratégique sera défini comme la
fomlUlation et l'exécution de plans metlant en relief les activités touchant à ce qui est vital,
répandu
et
d'une
importance
permanente
pour
l'organisation ».
La
notion
consiste
2
principalement en deux phases
(formulation ou planification stratégiques et exécution
stratégique) auxquelles J'on a récemmcnt J ajouté la planification des compétences et un
système de gestion des changements discontinus (schéma 3).
Planification stratégique
Exécution stratégique
Planification des compétences
Gestion de l'évolution discontinue
Schéma 3 : Le processus du management stratégique.
Source: Elaboration personnelle à partir de A. SHARPLlN, op. cil. et 1. ANSOFF op. cit.
L'organisation doit donc élaborer ses objectifs dans le cadre d'une planification
stratégique. Elle doit étudier ses compétences managériales et ses aptitudes dans le domaine
de la gestion des turbulences qui sont « par définition irrégulières, sinueuses et convulsives »4,
afin de parfaire la mise en œuvre de l'exécution stratégique, c'est-à-dire d'engager vis-à-vis de
l'environnement des «manœuvres stratégiques »5 découlant des orientations choisies et
adoptées.
1 Arthur SH.\\ RPUN. Strategie /Iii: ·;,;gell/el/t. i'\\'IcGraw-H ili
:lies in l\\hnagement, ;, nv 'l'ork, 1985. page G
Traduction personnelle.
2 Voir A. SHARPUN, op. cil. pages 10-11.
- t'vl :cheI MARCHESNA Y, " 1 :t pratique stratégique ). !-L'S Cahiers Français, OF cil., page 18
J Igor ANSOFF, Stratégie du a',;"efoppell/el/t de l'el/tr('/I/;:.<:, 0<OUVeaux Horizons, Paris. 1989.
4 Voir Peter DRUCKER, L 'elllrefJrise face cl /a crise lI/ul/d.. .'!('. Inter Editions. Tendal'ces Actuelles, Paris, 195'.
page 4.
_ l '
.
M. rvtARCHESNA'l , op. Cil., page 18.

40
Ces orientations incluses dans la pIani fication stratégique sc traduisent généralement
par des objectifs POurSUIVIS par l'entreprise. Pour unc meilleure réalisation de ceUX-CI,
l'entreprise doit avoir recours à un nouveau management.
2 - UN NOUVEAU MANAGEJVIENT.
En effet, la concurrence se mondialise, de nOU\\'C~IUX pays industrialisés entrent cn
scène, l'évolution technologiques s'Jccélère ù un rvthme \\erllgllleux, les eXigences des
consommateurs s'accroissent de plus en plus, des idées porteuses d'espoir jaillissent ici ct là ...
Parce que les turbulenccs de l'environnement s'éternisent, l'entreprise doit adopter un
management plus à même de lui vcnir cn aide.
En se limitant aux quatre points évoqués précédemment 101's de l'étude du management
traditionnel, le tableau 4 suivant montre les nouvelles méthodes adoptées par l'entreprise.
Ainsi:
Face à l'aycnir
Facc aux clicnts
Facc à
Facc à
l'cnvironncmcn t
l'or~anisation
1 Techniques
Projet d'entreprise
«Vente»
-Marketing
-Motivation aClive
mobilisateur
-Communication
-Action à tout prix
Tableau 4 : Quelques techniques du management moderne.
Source: Elaboration personnelle à partir de H. SERIEYX, op. cil.
- Face à l'avenir, la planification sera de moins en moins utilisée. Lui sera substitué le projet
d'entreprise mobilisateur pour baliser les voies du futur.
- Face aux clients, le marketing perd de plus en plus son prestige. On lui préfère déson11ais la
« vente» au sens de BLOCH, HABABOU et XARDEL : « Vendre, c'est se taire »\\. Il ne
s'agit plus de faire du baratin aux clients
le nouveau vendeur doit saISIr, au travers
d'attitudes, de critiques, de sIgnes plus ou mOIllS perccptibles, les véritables attentes du
marché, et transmettre ces signaux a l'entreprise, il doit accompagner le produit jusqu'au
client et « faire preuve de cetle sorte c1'humilité active face au client ct face au produit »2 qui
favorise la cro:~sancc des parts de Jj:::rché.
- Face à l'environnement, la fonction marketing conserve sa miSSIon d'exploration du
marché. ;-" ais li la f0n11ule « j>;lIr Vi\\TC heureux, v:. :Jns cachés », on plI.- ~!:re de plus en plus
1 Philippe BLOCH, :~.:Jlph 1-I.-\\B.-\\130L' ct ill'illilliqllè XARDEL, S,Il';",: «(III1/)ris, Edition Ji.... L:1tlès, ParIS.
1986, page 33.
2 H. SERlEY\\:, op. cil. page 66

41
J'érection de la communication en une direction - carrefour au sein des organigrammes des
firmes, l'objecti f étant en quelque sorte de dialoguer avec l'environnement pour percevoir ses
dési rs.
- Face à l'organisation interne, les slogans en vigueur sont du type: « C'est avec les salariés
qu'on mène la guerre: mettons-\\cs en position de la gagner Il, Et donc, au lieu d'améliorer les
conditions de travail au sens strict, on pense plutôt il motiver cie façon active les acteurs de
l'entreprise, De même, au lieu d'un contrôle qui stérilise la créati\\'ité, on fait la part belle il
l'initiative: mieux vaut une vie effervescente qu'une mort en bon ordre,
Toutes ces attitudes permettent ainsi il l'entreprise cie sc mouvoir tant bien que mal
dans un environnement turbulent. l'vlais il ne sUlfit pas de sc mouvoir, car j'entreprise doit
faire face à l'exigence de rentabilité et de profitabilité, Le moyen le plus indiqué semble être
l'agressivité.
3 - L'OFFENSIVE.
Dans son modèle globaJ de la fimle, la théorie behaviouriste l considère l'entreprise
comme un système dont l'équilibre est sans cesse remis en question du fait des variations que
subit son environnement (conjoncture, concurrence, contraintes réglementaires ... ). Ce
système évolue selon des processus adaptatifs.
Or, lorsqu'en 1968, Pierre TABATONI soumet ce modèle aux dirigeants de grandes
fimles françaises, certains d'entre eux estiment que si les processus adaptati fs caractérisent
certaines entreprises, ils ne caractérisent pas l'ensemble de celles-ci : « il y a aussi des
entreprises qui attaquent, qui créent l'événement au lieu d'avoir à s'y adapter )/2.
L'on situera la place de l'innovation au sem de l'offensive, avant de lui donner une
définition.
1 Extension dl's l!l\\'illlX de Rr.l ('Y"ERT c"
.I.G \\I.·\\RCI-l. A be/w';(.'!l\\ïd l!ll'OIT (~r Ilze/inli, 1963 ; traduit par
Processus de dJcis;,)!! duns /'elllreprisi!. Dunl',:. Paris, 19ïO.
2 Voir P. TABATüNI et collaborateurs. ( k prOCCS:'llS de déciSion dJllS i'c:lIl;'_'prisc : la thèse de C\\TRT Cl
MARCH et les réJctions dcs dirigcJllts frJllÇJis ". EI/C\\'c/opédii! dll I//{{I/([gelllL'l1I, Celltre d'Enseignement
Supérieur des Affaires, FrJnce expansion. KIU\\wr. Paris, 197-1, page 2.33-13.

42
3.1 - L'innovation au cœur de l'offensive,
Perçue comme étant « la mise en appl ication originale ct porteuse de progrès d'une
découverte, d'une invention ou simp\\cment d'un concept »1, J'innovation est un processus dont
J'aboutissemcnt est une réalisation originale qui comporte des attributs de valeur. Réduit à sa
plus simple expression, ce processus consiste à trouver une combinaison originale entre trois
composantes: un besoin à satisraire, autrement dit une ronction ou un ensemble ck fonctions
à remplir; Je concept de l'objet propre à satisfaire le besoin c'est-à-dire l'idée nouvelle; et des
ingrédients comprenant une somme de matériaux et/ou une technologie disponible permettant
de rendre ce concept opérationnel ou simplement d'amé1iorer tel ou tel attribut de l'objet. Cela
donne la représentation suivante:
Le besoin
l,
(fonctions à rellloi il')
Le concept
...1 Elaboration de
...
Déve loppemenl
1
.. 1
Diffusion
...
1
(idée nou ve lie)
'1 l'innovation
et introduction
"'1
1
,,"'-
Les ingrédients
(technoloeie et matière)
Schéma 4 : Le processus d'innovation.
Source: P.-Y. BARREYRE, op. cit., page 11.
Les objectifs assignés à l'innovation 2 sont clairs : il faut innover pour s'adapter à
l'évolution des techniques, innover pour suivre le goût du marché, innovcr pour réagir face à
la concurrence. L'entreprise a ainsi le choix entre des innovations à caractère imitatif pour
renforcer sa capacité d'adaptation (sa Oexibilité) ; ct des innovations absolues 3 qui insufflent
son « aptitude à devancer les évolutions de l'environnement»~ (son « offensivité »\\ Le
schéma suivant illustre cette réalité:
1 Pierre-Yves S..... RREYE.
« Typologie des inno\\'ations », Dossin RC\\'lle Françl1ise cie Ccslioll, Stratégies
d'entreprises et produits nouveaux, page 9.
2 Pour les objectifs. ',air Thierry GRILLET " Daniel LE CO~TE OF; FLORIS (sous la direc;;\\)n de), France
High Tech,
Editions t\\utrement, Paris. 19S~.
3 On dit aussi « inno\\'3lions de ruplure )l. voir l' \\1. 13ARRE)'RE. op. CI~
page 13. Ce sont des >1l1o\\'3tions
luulell1ent risquces mais qui L'C'nfCrent au createur Ulle' :1 lance quasi certaine sur ks concurrenlS,
4 Philippe TEt\\lPLE. « Le processus d'innÙ\\'3lion dans les entreprises n, Probl.!/Ill'S L'co/lo/lliqllC's, nO 2 029, 17
Juin 1987, page 16
5 « Offensivité » = caractère de ce qui est ol'knsif.

43
Flexibilité
Adapta 1ion
<1r-------
_
Caractèrt: imitaI if
Inno\\'atioll
- - - - - - - - - - - - . B > Pro-action
«Ofrensivité»
Schéma:) : Les deux aspects principaux de j'innovation
Source: Elaboration personnelle.
Accompagné
d'un
«comportement
offensif»l
propIce
pour
son
éclosion,
la
dynamique
offensive
est
mue
par
la
dynamique
innovatrice
qui
matérialise
dans
l'environnement la créativité de l'entreprise. Etre offensif, c'est d'abord être innovateur. On
touche là à la définition.
3.2 - Définition, enjeux ct exigences.
L'offensive peut avoir pour synonyme l'agressivité, le culot, l'outrance 2, ['action à tout
3
prix ; la créativité par l'innovation" ; l'attaque et l'initiative de l'événements. L'offensive peut
s'apparenter au processus de recherche des domaines technologiques en gestation pour les
développer par l'innovation afin de participer à des percées6. Cela signifie qu'aux entreprises,
il faut « face à la complexité recréer du sens, face aux turbulences des zones de stabilité, face
aux inerties des dynamismes» 7.
En ce sens, ['offensive traduit l'aptitude de l'entreprise à modifier l'environnement par
la production et la distribution de nouveautés viables sur le plan commercial, afin de dégager
1 L.\\pression empruntée à l. .\\0iSOFF. op. cit., page! i 7
2 Bernard TAPI E, Cagller. [cl ilions Larront. Paris, 1%6.
3 Thomas PETERS cl Robert WATER\\I.\\?\\'. Li: IJrÙ de l'excellellce . L,s seCTe/s dt'.\\" lII(;'ill('/lr('s ell/reprises,
Inter Editions. Paris. : <)86.
4 Peter DRUCKER, L't'Il/reprise(oCt' il la crise /I!ollr!ialt'. op. cit.
5 P. TABA TONI et Collaborateurs. op. CiL
" l. .\\NSOFF, SII'II!égit' d/l ,i':\\·c/()PPCllli..'1I! d,'I'ellll"I'!'i.·;e. op. cit.
7 Laurent CRETON, « Les slratégit:s d'iI1l\\O\\'3tions progressi\\'es », Rel'lle Françaist' de Ct'S/iOIl, n° 46, Juin-
Juillet-Août 1984, page 6.

44
un avantage comparatif par rapport à la concurrence. lmpulsée par le système de la
dynamique innovatrice, cette aptitude doit d'une part, être continue ct soutenue; et d'autre
part, utiliser vériti1blemcnt l'innovation comme un processus de « destruction créatrice» 1 car
en fin de compte, il s'agit sinon de sacrifier sa propre survie, du moins de saborder sa place de
leader dans un secteur donné.
L'entreprise doit alors:
o
Mettre au point et suivre un « plan de développement des compétcnces » permettant de
privilégier des compétences entreprenemiales et fonctionnelles aux compétences de type
concurrentiel 2 ;
e
Etre résolument à l'écoule du client, dépositaire cie l'cxpression d'un besoin que l'entreprise
cherche à satisfaire;
o
s'enquérir de sa santé financière, cie sa solvabilité, de sa liquidité; gage d'une
renouvelable capacité d 'innover3 ;
o
avoir une gestion du risque compatible avec l'esprit offensi f: «le risque fait partie de
l'innovation, mais il constitue une menace beaucoup moins forte que le refus de celle-
.
4
Cl » .
Rappelons pour tenniner, que l'objectif poursuivi par cette partie était de « faire l'état
des lieux» de la gestion d'entreprise. 11 ressort qu'en la matière, l'existant peut-être ramené à
deux réalités non exclusives: une gestion traditionnelle et une gestion modemisée.
Si les préceptes issus du taylorisme (de TAYLOR ou de FORD) sont de mOinS en
m01l1s usités, et la planification de plus en plus rejetée; l'entreprise fait bon usage des
modèles de gestion rationnelle pour optimiser son fonctionnement et maîtriser ses variables
1 « Destruction créJtrice» : il s'Jgit d'utiliser l'innontion comme une Jrme MlèmlinJI1t un concurrent \\( qui
s'Jppuie et qui S'J[{Jque non pJS seulement JUX mJrgcs b0ndïciJires ct JUX productions m:lfginJlès des firmes
existJntes, mais bien il leur fondement et il leur existence mème. L'Jction de cette concun'ence d0passe celle de la
concurrence par les prix tout JutJnt que les effets d'un bombJrdel1lent d0pJssent ceux d'une pese~ sur une
porte Il Joseph SCHU\\IPETER. CapitalislI1e. sociu/isl/li' el DtÎlIIoc/"{/lie, [l'Jd. Françoise, PJyot, PMis, l()S~.
~Jge 10(,
- Voir I. l .. >::';OfF. op. cit.. chapitre'., U et 14.
3 Les inno"Jtions absolues qui sont au centre de l'offensi\\'e eXigent des moyens finJilCiers que peu d'entreprises
possèdent. C'est pour ceb que l'on s'Jccorde généLllcmellt pour dire qu'elks sont le fait surtout des grandes
enlrqJrises, mème si elles 50, . r~Jlisées pJr de petites '1ités décentrJlisées.
4 VOIr entre Jutres :
JeJn-\\'1Jrie DOUBLET, «En toi1e de fond ». Dossiu /',,\\'[/(' Française de Cesll"li : StrJtégics d'entrepris,;
et produits nOLl\\'eJUX, Op.CiL pJ,c:,' 7
Peter DRUCK ER, op.cit. pJges 62-65
Th. PETER ct K. \\VA TER\\!AN, Op.CiL

45
d'anticipation. Car, confrontée à un environnement qui se rnodi rie sans cesse, la firme doit,
pour assurer sa survie et maintenir (ou augmenter) ses gains, utiliser tous les éléments qui lui
sont offerts par la stratégie, le management et les techniques d'agression du marché.
Mais l'objectifde poursuite du gain est-il toujours atteint ') Autrement dit, quelles sont
les conséquences de ces méthodes de gestion sur les performances de l' entrepcise ?
SECTION 2: LES CONSEQUENCES
SUR LES
PERFORMANCES
Pour réaliser leurs objectifs et dégager le maximum de profit possible, les entreprises
utilisent soit une gestion traditionnelle, soit une gestion modemisée, soit (bien souvent) les
deux à la fois. II est cependant pemlis de douter cie la qualité presque universellement acquise
de ces méthodes.
Que ce soit en effet au plan de l'organisation, au plan de l'agressivité, comme au plan
des résultats proprement dits, les diverses performances réalisées par l'entreprise permettent
d'émettre des réserves non pas sur la validité de ces types de gestion, mais davantage sur le
principe de leur efficacité.
1- UNE ORGANISATION SCLEROSANTE.
La sclérose, maladie de l'apathie, du manque d'initiative et d'absence de créativité,
semble être la caractéristique dominante de l'organisation issue des types de gestion
précédemment étudiés. On peut illustrer cela en évoquant les problèmes de motivation du
personnel et les problèmes de conduite de la finne.
1 - LES PROBLEiVIES DE i\\IOTIVATION DU PERSONNEL.
Créer une dyn~lmique d'affaires et convenrr d'objectiCs de valeur ajoutée sont
indl:i'cnsabies à la réus .. '1e économique de i entreprise. ~vlais CCi.i ne fonctionne pas ::1 le
manager ne sait pas en mênll temps susciter L1 mc;rivation des hommc~ En étant au cœur cie
l'interaction fondamentale entre dimension économique et dimension humaine Ùe l'entreprise,

46
la motivation apparaît comme la résultante de la qualité de J'animation, cie la communication,
de la fonnation, du style de relation et de la confiance.
Pour tenter de traduire ces différentes données, l'on a mis en relief quatre variables
ayant successivement trait:
o
à la fragmentation du capital,
(1
à des politiques de contacts intra-personnel,
(1
à J'attitude vis-à-vis du travail fourni, et
e
au dialogue entre la direction et le personnel.
La fragmentation du capital traduit généralement l'option cie la société pour une
[Orllle juridique particulière. Dans le cadre de notre travail toutefois, l'on s'est intéressé à la
détention de titres de propriété par le personnel, autrement dit à la propol1ion d'actionnaires
qui sont en même temps des membres du personnel. Il est en effet permis de penser qu'un
employé sera d'autant plus dévoué et d'autant mieux travailleur s'il est non pas seulement un
salarié, mais surtout un propriétaire de l'entreprise.
Sur cette base, on a relevé que 80% des entreprises de notre échantillon n'ont pas
d'employés-actionnaires d'une part; et d'autre part, que sur les 20% qui en ont, la proportion
moyenne se situe à 3,3% du total des hommes qui constituent le personnel de ['entreprise. En
conséquence, en supposant admissible 1'hypothèse précédente, on peut dire qu'il n'y a qu'en
moyenne 3,3% du personnel de 20% d'entreprises qui sont d'autant plus motivés qu'ils
travaillent moins pour des tiers que pour eux-mêmes.
C'est là une faible proportion, comparativement à certaines entreprises d'autres pays.
C'est le cas des fimles américaines PUBLlX SUPER MARKET (Commerce de détail) et
HER1v1AN MILLER INC. (mobilier de luxe ct dérivés). Le président de la première estime
que tout le monde doit posséder des actions de l'entreprise. Il en est tellement convaincu qu'il
accorde, dans ce but, une augmentation de salaire à ceux qui n'ont pas de quoi les acheter'. Le
président de L:~'::conde est sans éqLl;\\'oque: ( HERi\\'lAl\\ \\'11LLER est ['une deS rares sociétés
américaines côtés en bourse, où 100';0 des employés réguliers à plein temps, travaillant pour
la société ;lUX Etats-Unis depuis au moins un an, so:'! cies actionnaires »è Fn agissant parfois
1 Voir à ce sujet ThOIl1:JS PETERS etl'\\3!ll:
\\\\;ST[:\\. La passion ri.
"<'XCC//Cllce, Inter Edil:.':JS. P:Jris, 1985,
p:Jge 252.
1
Max DE PREE. Diriger es!
C
IlIl (Ir!. Editions Ri\\·agl's. i':Jris. 1990. page Ill. [\\ote : L 'auteur est k président de
.
la finne HER~t-\\N MILLER [Ne.

47
comme des employés, parfois comme des propriétaires, ct parfois commc un pcu des deux, les
employés actionnaires accomplissent avcc efficacité le processus de gestion-participation
important dans la vie de l'organisation.
Les politiques de contacts intra-person ne! sont importantes pour pem1ettre aux
individus de communiquer entre eux, d'émettre des idées puis de discuter. Dans le cadre de
notre travail, l'on s'est attaché à mettre en relief des préférences entre des escaliers ou des
ascenseurs d'abord, entre des bureaux ouverts ou des bureaux fermés ensuite, ct entre des
banquettes ou des chaises dans les reslaurants de la fim1e enfin. L'hypothèse ici est que des
escaliers, des bureaux oLLvel1S ct des banquettes sont plus des vecteurs de contacts et donc de
communications, que des ascenseurs, des bureaux fermés ou des chaises individuelles. Bien
que probantes (94% de répondants préfèrent les escaliers, 100% les bureaux ouverts et 87%
les banquettes), les préférences obtenues ne donnent pas entière satisfaction, parce qu'elles
n'ont pas fait l'objet d'un calcul à priori. Et s'il y a eu un calcul à priori, c'était plus pour des
raisons de commodités financières liées à l'investissement que pour la volonté d'une mise en
œuvre de politique de contacts intra-personnel l .
L'attitude vis-à-vis du travail fourni par le personnel est aussi déterminante pour
l'instauration d'une ambiance propice à la motivation. C'est pour cela que l'on a voulu
connaître la politique privilégiée entre les sanctions, les félicitations et les récompenses. Le
résultat de cette quête montre que 94% des entreprises interrogées privilégient les
récompenses face aux résultats fournis par le personnel. Cette attitude est louable, mais elle le
serait encore plus si elle s'accompagnait des félicitations. Car, les récompenses sont issues
d'une source tarissable tandis que les félicitations sont le fait d'énergie renouvelable.
Autrement dit, on peut manquer d'argent pour récompenser un travail bien fait, mais on
trouvera toujours le moyen de faire rédiger une lettre de félicitations pour encourager
l'excellence.
Ainsi, à la Compagnie Nationale d'Assurance (CNA), une fois par mois, le Directeur
Général s'adrc'sse à chacun des n:'mbres du personne: :1 tra\\'ers une lettrc' nominative ct
personnifiée qui i~'licite ce qui a été l'aH, rappelle cc qui resec.: ~\\ faire et, le cas éch('anL, montre
les mesures correctives à suivre pOLIr la réalisation de ses objeclifs~. Cettc' I( Lettre du D.G. »
1 Cette aflïm1arion,':'couie d~ nos entrepris,
,l'il:> ks enrreprises. du . "';r~s pour celles ou l'or: . !'!"occLié il des
en quêtes- inter\\'i~\\\\"s.
! Voir CNA-Nell's, Publicatiun tril11estridle de la Compagnie Nationale d'Assurance, Hors série n"OOl, ~-lars
1992, page 3.

48
n'exclut pas la distribution de récompenses de toutes sortes; elle s'y ajoute pour montrer le
vif intérêt que l'encadrement accorde au travail de tous et de chacun, et pour renforcer
J'ambiance de motivation qui règne dans l'entreprise.
Le dialogue entre la direction ct le personnel s'en trouve raffermi. Il est important
que le personnel ne se sente pas réduit à l'exécution car, comme l'affirme ['\\'1. DE PREE, « ce
dont les gens ont besoin, c'est d'être libérés, de se sentir impliqués, d'être responsables et de
réaliser leur potentiel »1. L'un des moyens pour y parwnir est d'instituer le dialogue
pemlanent dans l'entreprise.
A cet égard, on a cherché la fréquence des rencontres entre la direction ct le personnel.
Et l'on a pu relever que dans 94% de firmes, la direction rencontre le personnel lIne fois par
mois et dans 6% seulement, une fois par semaine. Ceci est négligeable et ne peut être qualifié
de pernlanent2. La permanence implique un dialogue à la fois fornlel (réunions de travail,
réunions-bilan, ... ) et informel (discussions face à face). A cet égard, la politique des « portes
ouvelies» au sein de l'entreprise signifie premièrement, que l'on est prêt à recevoir tout le
monde et à tout moment; et deuxièmement, que l'on est absent de son bureau pour cause
d'échanges constructifs avec des collègues.
Les problèmes de motivation du personnel, bien qu'ils soient au centre de la
problématique de l'implication des hommes au travail, demandent encore à être repensés pour
une meilleure stimulation. Il n'y a en effet, dans l'échantillon ici concerné, que 6%
d'entreprises (a) qui accordent des parts de leur capital au personnel; (b) qui préfèrent les
escaliers aux ascenseurs, les bureaux ouverts aux bureaux fermés, les banquettes aux chaises,
pour favoriser les contacts entre le personnel; (c) qui récompensent le travail bien fait; (d) et
où la direction et le personnel se rencontrent toutes les semaines. Si l'on considère que mises
ensemble, ces différentes variables expliment quelque peu la motivation, alors on peut dire
que 5% seulement d'entreprises possèdent une organisation motivante. 11 s'agit là de 1:1
prédominance d'un manque d'initiatives qui se traduit également dans la conduite de la fimlc.
, '''!JX DE PREE. op. cil.. ,:<g.: Ils
2 L'on l'st ici surpris que dans l)·l"·<. d'.:l1tr.:pris.:s. on pré!'t:re des escali.:rs et des burc'Jux oU\\'erts ; et pourtJI1t ,):,
n'y rencontre que mensuellemenl le personnel. Ce type d'ambiguÏté a ~[é plusieurs fois rele\\'~ au cours d.:
l'enquête et donne à réfkchir sur la cohérence et la sincérité des répondants.

49
2 - LES PROBLEl\\1ES DE CONDUITE DE LA FIRl\\1E.
La conduite de la fimle englobe toutes les actions d'animation et d'impulsion de la
dynamique de l'entreprise. Parce que « les hommes ct les femmes clans les entreprises
attendent de leur manager qu'il voit loin, sache saISir les bonnes occasions et susciter
l'innovation clans la pensée et dans les actes ii l, l'animation doit aujourd 'hui ajouter au
progrès technologique nécessaire des spécialités nouvelles. Elle cloit mieux communiquer,
gérer des relations avec des groupes, ètre à l'écoute de l'environnement et manifester une
présence physique pour réaliser un management davantage participatif.
Pour tenter de cerner toutes ces variables, l'on s'est intéressé à clllq éléments ayant
trai t :
o
aux rencontres avec la clientèle,
G
à la structure de l'entreprise,
o
au nombre des objectifs,
o
au comportement en envirolmement supposé stable, et
o
à l'opportunité d'une modification de l'environnement.
Les rencontres avec la clientèle sont détemlinantes dans l'appréciation de l'écoute de
l'environnement et de la gestion des relations avec les groupes. Elles consacrent la conscience
aiguë de l'entreprise pour le dépositaire du besoin à satisfaire (donc du bien à créer) qu'est le
client; et penneHent de ce fait la saisie à la source d'une évolution ou d'une modification
prochaine ou imminente des goûts du consommateur. L'on est donc surpris de relever que 20
% des entreprises interrogées ne rencontrent que moins de quatre fois par an leurs clients: et
qu'au sein de cette proportion, il y a 6% qui n'ont aucun contact avec leurs acheteurs.
2
Ailleurs pourtant , les entrepr1ses n'organisent pas de rencontres aVec leurs clients
pour la simple raison qu'elles vivent avec eux. Les clients ont accès à tous les systèmes de la
fimle et sont associés au processus de production dès l'<lpparition d'une idée de produit
IlClllveau (quand cette idée ne provient pa, d'eux). Les client~ ':articipent, de l'ide: à la
1 Charles RILE'r', « 1 e I11Jnagemenl ou la gestinn ',) un point de \\'uc », :' ,'co Ca/l1<!/'S Frallçail, ne -:'''3, OeL-Déc.
1987, page 14.
2 Le contact pem1anclH a\\'~c la clientèle est abordé ,1,,' fa~'on l11ultifonnc. VOII ,'nlre autres:
Th. PETERS et N, AU~T!,\\I. La passIOn de' /·ercc'l'!lCc. op, cil.
Theoclore LEVITT, L 'illlilgindiioli (/II .l'L'l'n'cc du Iliill'kt'lillg. Economiea. Pans, 1().'\\:' ,
David OGIL VY, La pllb/icit.! sc/on Ogill:", Dunod, Paris. 198-l

50
réalisation, à la mIse au point des nouveaux produits. Ils sont invités à intervenir et à les
modifier autant que possible pour que le produit final mis sur le marché réponde à des besoins
actuels et réalise c1es marges bénéficiaires importantes. 80'% des entreprises de notre
échantillon rencontrent plus de quatre fois par an les clients pour discuter des comlllandes et
non des suggestions. Cela est dü, pour une part, à leur structure organisationnelle.
La structure de l'entreprise, en dTet, formalise la hiérarchie, le pouvoir décisionnel
et les systèmes de comlllunication et d'information existants au sein de la firme. Elle
détemline les compor1ements et fixe quelque sone le degré de liberté accordée à tous et à
chacun,
Elle
finalise
le mode d'animation
qu'ambitionne la structure dirigeante de
l'entreprise.
Dans la recherche ici menée, l'on peut noter que 94% d'entreprises possèdent une
structure centralisée, contre 6% seulement ayant opté pour la décentralisation, En consacrant
le pouvoir mythique du chef sur la communauté, ces proportions signi fient l'absence de
liberté, le manque d'esprit d'initiative et l'atrophie de la créativité, Elles éclairent sur
l'involution du management pratiqué ici, au moment où ailleurs, il est question de structure
divisionnalisée, de management des ressources techniques (MRT), c1'« adhocratie », de
management total du temps (MTT) ou de direction par objectifs (DPO)',
A cet égard, le nombre d'objectifs est important pour apprécier le réalisme et la
ténacité de l'entreprise, Certes, comme l'écrit ANSOFF, « l'objectif économique primordial
est d'obtenir le meilleur rendement à long temle des fonds placés dans l'entreprise, Dans cette
perspective, l'attribut ou critère n'est plus le profit (c'est-à-dire le surplus de recettes sur les
coûts), mais la rentabilité (mesure du rendement des ressources) »2, Mais la conduite de la
firme est rythmée par des objectifs autour desquels s'inscrivent des buts dont ils sont la
résultante.
En accord avec le mot d'ordre de la finlle américaine de haute technologie TEXAS
INSTRUMENTS «< plus de deux objectifs est svnonyme de pas d'ohjectif du tout »3); J',')!)
1 Voir à cet effet:
- Hl':'vé SERIEVX, « L'évoiL:::on des techniques de In.:. Igement », Lcs Cl/hier,\\ ,'ullu;ais, n" 223, op. Cil .. pJge
65-68
- Gilles 1\\1\\ ROUSEAU. « L'évoluli')n des thL;oriL', cn orgJlli<'lion ). Les Cl/hil'rs Fr,,;, ·(/is. op. cit. pJge 26-29
21. ANSOI:r:, Srl'llli!gie tlu dàcloppelli"Ii: d,' /"'I/Ii'c'prise. op. Cil. p~gL' 60.
3 Voir Thomas PETERS et Robert \\V:\\ TElZ\\, 1.\\ N. Le pri.r dl' / 'e.red/cl/cC'· /t' S,'C/Tt tll':; lIIL'i//L'lil'i!:; entreprises,
Inter Editions, Paris. 1983, page 166.

51
s'est aperçu que 20% des entreprises de l'échantillon ont plus de deux objectifs par an. Il
s'agit là d'une recherche simultanée de plusieurs résultats dont la réalisation s'en trouve
limitée. Cette recherche multidirectionnelle innuencc par ailleurs l'attitude de l'organisation
vis-à-vis de l'environnement.
En effet, le comportement de l'entreprise en environnement supposé stable met en
relief l'option de l'encadrement pour une organisation passive ou au contraire offensive. Si
]'on,peut relever qu'aucune des entreprises interrogées n'a un comportement défensif ici, il
est permis de déplorer le fait qu'il y ail plus de 40(1 des répondants qui adoptent un
0
comportement « normal» 1orsq u' i1 n' obser-ven t pas de n:;mous dans kur envi ronnement. En
poursuivant la recherche, pour ce qui est de l'opportunité d'une modilïcation de cet
environnement, on constate qu'à l'intérieur de cette proportion, il y a 14% de répondants
pour lesquels aucune modi tïcation n'est souhaitable tandis que 26% estiment, tout en ayant
opté pour un comportement « nonnal », qu'il faut modifier l'environnement!,
L'hypothèse de base est ici que le comportement de l'entreprise en enviroIlnement
supposé stable éclaire sur son point de vue en matière de modification de cet environnement.
Ainsi, une entreprise comme la Société des produits insecticides au Cameroun SOPICAM
adepte d'un comportement « nonnal », estime qu'une modification de l'environnement, n'est
opportune que pour s'adapter aux conditions du marché. Il ne s'agit donc pas d'une
modification au sens strict de l'environnement, mais plutôt d'un réaménagement du système
productif dans le but de soutenir la concurrence, et non pas pour exercer la créativité, que la
SOPICAM a élargi sa gamme de produits de façon à investir aussi les niches envahies par les
autres producteurs: elle produisait déjà des insecticides en spirales (consommation en fumée),
elle les compléta par la fabrication des insecticides conditionnés en bombes aérosols
(consommation directe), et en pastilles à chauffer, munies d'un réchaud à cet effet
(consommation par évaporation).
Tout comme ceux de motivation du personnel, les problèmes de conduite de la tïmle
doivent susciter de nouveaux questionnements PO''f consolider leur aptifude à assurer l'aveni,
de l'orgailisation. En effet, J
est révélateur qU\\'l fin de compte, 1::)11 n'ait que 6 %
d'entreprises interrogées qui rencontrent leurs distributeurs et clients plus de quatre fois par
1 C'est une' Jutre ambiguïté de 1'<.'lh;I!01l': COl11nll'nt modifici "environnement en étJI!.
'bptJlif') Le carJctèn::
exclusif de l'CS deux aspects est au CC:I;:': 'ok l'eXistence d'une ;k':ibiliré offcnsi\\-c par 1:\\PP'Jr\\ à une flèxibililé
adaptative.

52
an, qui ont une structure décentralisée, qUI estiment qu'il est souhaitable de modifier
l'environnement ct qui ont un comportement offensi f lorsque cc dernier est stable.
Au total, on peut admettre que G%J des entreprises interrogées ont à la fois une
organisation motivante ct une animation proacti\\"C. Cette animation doit prendre sa source
dans des qualités offensives correctement ballsées pour ne pas donner naissance à une
agressivité incontrôlée.
II - UNE AGRESSIVITE INCONTROLEE.
Car l'organisation doit cultiver une certaine agressivité pour réagir, agir, antiCiper ou
créer l'événement dans son environnement. Elle doit puiser son éllcrgie offensive dans
l'innovation d'une pali, et dans la qualité ct la rlabilité de ses produits, c1'autre part.
1 - L'INNOVATION.
De plus en plus, la concurrence se porte sur le terrain de la créativité technologique et
organisationnelle: il ne suffit plus d'être apte à combiner des facteurs donnés pour obtenir
plus de surplus, il faut de la créativité à toutes les étapes de la valorisation pour générer des
produits à grande valeur ajoutée. C'est un processus que l'on peut apprécier à travers:

le budget affecté à la recherche,

les licences d'exploitation et/ou produits nouveaux qui matérialisent l'innovation,

les attributs de souplesse de ceux-ci, et

leur importance dans le chiffre d'affaires.
La part du budget affecté à la recherche peut, toutes choses restant égales par
ailleurs, être révélatrice de l'importance de l'innovation dans la stratégie de 1'entreprise. De
façon primaire en efret, l'on peut admettre qu'une entreprise qui consacre 20% de son budget
à la recherche est quatre fois plus intéressée par l'innovation qu'une autre qui ne lui consacre
que 5% du sien. Ull tel raisonnemenl plausible dans une ~;~:nroche théorique, deit être nuancé
dans la pratique.
En efre! l'enquête a pemlÏs de noter que 27% d\\'ltreprises ont un bud~'et Ret D nul
(entreprises de montage ou d'assembiag(', entreprises de production sous-licence, ctc ... );

53
tandis que 60% d'entre elles consacrent en moyenne 3 % cIe Jeur budget à la recherche; ct que
13% ne peuvent « répondre sans explications »1. Car l'imprécision (ou j'inexistence) de la
proportion du budget affectée à la recherche ne doit pas minorer ou occulter l'importance de
l'innovation pour l'entreprise considérée. 11 y a des Jinnes qui n'ont pas de budget pour la
recherche, mais qui soutiennent et financent tout ce qui peut avoir trait, de près ou de loin, à
l'innovation. Elles encouragent le « gaspillage », la (i perruque », l'expérimentation constante,
le « faire-aménager-tester », ... qui sont autant de méthodes novatrices imprévisibles ct donc
difficiles à prendre en compte dans J'élaboration d'un budget, mais qui donnent de bons
résultats.
Le nombre moyen annuel de licences d'exploitation ct/ou dc produits nouveaux
montre en effet, premièrement, que la moitié cIes entreprises les plus innovatrices (plus de
cinq produits nouveaux par an) est constituée des firmes n'ayant pas un budget consacré à la
recherche. On note ainsi que 80% des répondants créent moins de deux produits nouveaux par
an, 7% entre deux et cinq, et 13% plus de cinq. Sans être négligeable, cette proportion de 13%
d'entreprises qui créent plus de cinq produits nouveaux par an, doit être améliorée aussi bien
pour le nombre d'entreprises que pour le nombre de produits: la firme américaine
HEWLETT-PACKARD introduit des produits nouveaux au rythme de huit par semaine,
tandis que 3M qui possède plus de cinquante mille produits au total, met sur le marché plus de
cent nouveaux produits importants par an 2•
Deuxièmement, on constate que toutes les entreprises interrogées achètent moins de
deux licences d'exploitation par année. Il s'agit là pourtant d'une technique d'innovation qui
permet la réalisation d'importantes économies sur la mise au point du nouveau produit. C'est
une technique utilisée par plusieurs grandes fim1es à l'instar du groupe PHILIPS3 . Pour
développer ses activités à travers l'utilisation d'un savoir-faire technique, commercial et
administratif, cette fim1e avait poursuivi une ambitieuse stratégie commerciale: fabriquer tout
ce que vend un commerçant grand public de produits électriques: lampes, radios, disques,
réfrigérateurs, cuisinières, ... Et comme le groupe ne fabriquait pas plusieurs de ces biens, il
racheta un certain nombre de marques, assurant ainsi la poursuite de la diversification de ses
\\
1 Il s'agissail cl'une question fermée ':'Int b réponse consista;', en l'inscription du clll: :re correspondant au
1
~ourcentage du budget affecté à la rechercile-dé\\·e\\oppement.
- Th. PETERS et )\\\\USTIN, op. Cil, page :.::~ : TIl. PETER et N. \\\\ \\TER\\IAN Op. cil pagl 2,1. Note: 3M
= i\\·linnesota l\\"linint: :ll1cl l\\'lallufaclurint:.
J Voir Jean BRUN -et ;\\Iarcd CAPET.-« Histoire du groupe PHILIPS », Les Cailiers Français, n'" 233, op. Cil
pages 8-9.

54
produits et de ses clientèles, par la distribution d'objets aux attributs de qualité et de
souplesse.
La plus ou moins grande flexibilité ùes produits est en effet détell11inante dans la
recherche de marges bénéficiaires importantes il travers l'innovation. Il s'agit de mettre il la
disposition des consommateurs des produits il usages multiples cUou pouvant satisfaire
plusieurs besoins. Il peut s'agir de produits dérivés de la robotique ou de la « mécatronique ni
tout comme il peut s'agir de «procluits conditionnels »2 ou de produits modulaires »3 3JlYo
des entreprises interrogées fabriqucnt des produits flexibles, contre 67% pour des produits
rigides.
La recherche de la souplesse des innovatiolls apparaît alnSl comme un attrait
complémentaire en faveur du produit, et bon comme une fin ell soi. Pourtant, la stratégie
offensive du YAOUNDE HILTON HOTEL repose sur la notion de flexibilité maximale~.
Dans cet hôtel de luxe en effet, seuls le bâtiment central ct ses artères sont inamovibles. Tout
le reste (les chambres, les salons, les salles, les halls ... ) peut être modifié selon les goüts du
client et les circonstances qui justifient son utilisation. Les tables, les ch(lises, les podiums, les
estrades, les planchers, et même certains (faux) murs sont démontables et se prêtent ainsi à
une utilisation protéiforme. II n'est pas surprenant que 15% du chiffre d'affaires de cette
entreprise provienne des produits nouveaux.
L'importance des produits nouveaux dans le chiffre d'affaires peut, ou non, être
influencée par l'intérêt qu'accorde l'entreprise à l'innovation flexible. Ainsi, alors que 33%
de répondants fabriquent des produits flexibles, 60% tirent en moyenne 15% de leur chiffre
d'affaires des ventes de produits nouveaux. Dans le contexte local par conséquent, l'on peut
préférer la production rigide à la production flexible; et en tirer profit comme l'Union
Camerounaise des Brasseries UCB. En effet, la production de cette entreprise générait des
revenus lui pennettant d'assurer sa survie, jusqu'à il y a à peu près quatre ans, quand elle
décida du lancement sur le marché de la boisson gazeuse « Spécial Pamplemousse ». Jusque-
là, sa production ainsi que celle cie SOI1 principal cOllcurrcn: - la Société AnOIr.'me des
1
Mécatronique = combinaison organique de la mécanique et <iL'
l'électronique,
Voir l\\'linuro
lTO,
« Développement de ::, micro-électronique ethangements de l'organ: .Ilion du tra\\'ail dans k, entreprises
Japonaises», Sociologie du rramil. nO 4-84. pages 4.57-467.
~ Voir à cet efret Bernard D·' UDE, « Décision et inl1o\\':llion ». Rc\\'IIc Frollçai.,:· dc Cesrioll, n° 46, page.' ~
) VOir 1:'1 cet l'l'l'et Patrick BL<~ON. L 'arcli!!!' de del/wiI! l't'I'spceri,'!!s dl! l'uuru:::{uisilflo/l flexible. PUL, l_ Yon,
1983, page 26
4 L'exposé qui suit découle de nos visites répétées au YAOUNDE HILTON,

55
Brasseries du Cameroun SABC - couvrait des boissons à base d'oranges, de citrons ... , mais
pas de pamplemousse. Cette offensive permit à UCB de se positionner comme monopoleur et
d'en tirer de fabuleux bénéfices I
Mais, l'agressivité de l'entreprise qUI s'appuie sur l'innovation doit être contrôlée
efficacement pour se traduire par d'heureux résultats, L'histoire du groupe PHILIPS montre
ainsi 2 que l'ambitieuse stratégie commerciale qui conduisait sa puissance a aussi été à la base
de ses problèmes car, face à la concurrence mondiale et principalement de l'Asie du Sud-Est,
celle-ci était inadaptée pour faire front à des discontinuités dans l'environnement. De même
après avoir fait preuve d'adaptation en créant « top pamplemousse» face au « Spécial coca
familial », « Fanta familial )1 et « Sirop familial », ce dernier produit ayant plusieurs variantes
selon les goùts - grenadine, orange, citron, menthe -). L'UCB, qui avait pourtant initié
l'offensive, se trouve quasiment inapte à suivre les évolutions du marché. L'agressivité doit
être contrôlée; et ce contrôle commence par la qualité el la fiabilité des produits destinés aux
consommateurs.
2. - LA QUALITE ET LA FIABILITE DES PRODUITS.
Il existe en fait deux traditions en matière de qualité 3 : la première, d'origine
occidentale et que l'on pourrait qualifier de « qualité qualiticienne», s'intéresse surtout aux
produits et aux procédures; alors que la seconde, essentiellement japonaise, considère depuis
longtemps (les années 50) la qualité comme un 1'« outil de management» indissociable de la
fiabilité. Pour mettre en relief l'importance de ces éléments dans la stratégie de l'entreprise,
l'on s'est intéressé:

au mode d'intervention des produits sur le marché,

à l'existence d'une pré-enquête accompagnant les idées nouvelles,

à l'activité du service après-vente, et

à la durée de vie des produits.
Le mode d'illlcrYelltion des produits slir le marché d(;,Tmine la valeur impnrtante
pour l'entreprise: le prix, la qualité, ou les deux à la fois, Chaque entreprise, à quelque
1 Un entretien a\\'(:c un r~sponsable de UCB est éloquent à ce sujet: « A un nl'.Jl11ent donnl;, "Union ne \\'i\\'ait que
~ar les pamplemousses, .. »
- Voir J. BRUN et ~1. CARD. D,' cil.
J Voir 1\\'1. PERIGORD, « Réussir 13 Cju:1!l1é totale », ;\\{lIllag,L'IIlL'1l1 ]000, Edition d'Organl~::lion, Paris 1987

56
secteur qu'elle appartienne, cherche à produire des biens de qualité au coùt le moindre pour
que les prix soient les plus faib1cs, Mais à la pratique, on relève que l'option qualité n'est pas
la plus répandue. En effet, seules 20% des entreprises interrogées possèdent des produits
qualitativement supérieurs dont le monde d'intervention sur le marché est la concurrence non-
priX.
Depuis les années 60 pourtant, sous l' impulsion de K, \\S H1K.A \\V Ad' une part J et de T.
OHNO d'autre part", se développe clans les flmles nipponnes, le« CWQC» (CollljJagny Wide
QI/ality Control): la qualité n'englobe plus uniquement l'ensemble de J'activité proprement
dite de la fimle mais aussi tous ses réseaux de fournisseurs, clients, sous-traitants, filiales,
distributeurs, etc." L'objectifdu « CWQC» est cie « vendre» la qualité ct non pas Je prix clu
produit auprès du consommateur. La prolifération cles « cercles cie qualité »3 ct l'obsession
des «cinq zéros »4 sont ainsi des éléments qui contribuent à la réalisation de la «qualité
totale »5 dans l'entreprise,
De même, l'élaboration d'une pré-enquête pour accompagner les idées nouvelles de
produits témoigne, par l'intégration à la base de diverses suggestions et/ou rectifications, de la
volonté établie de l'entreprise d'asseoir sa stratégie commerciale et offensive sur la qualité
des biens produits. Si l'on peut, à cet égard, se réjouir du fait que 74% d'entreprises élaborent
des pré-enquêtes; on peut déplorer la faible proportion (6%) de celles qui, à la fois, possèdent
des produits dont le mode d'intervention sur le marché est la concurrence non-prix et ne font
que « quelques fois» des pré-enquêtes. De telles entreprises présentent un double intérêt au
moins: d'abord elles enseignent l'intégration de la critique très tôt et de manière totale dans le
processus de réalisation du produit, et ensuite elles militent en faveur de l'expérimentation
constante et de l'approche du « faire, aménager, tester» ci-dessus évoquées.
\\ Voir Jacques PIERRE, « La gestion de IJ qualité: théories et réalités », Les Cahiers Français, nO 234, Janv,-
Fey. 1988, page 69
2 Voir Taiichi OHNO, L 'espril TOY0la, ~1asson, Paris, 1989
J Un « cercle de qualité)) est un petit groupe d'employés ou d'ouvriers (5 à 10) du même bureau ou du même
atelier, \\'n!ontaires, qui se réul1lss,';ll p(-riodiquement (une O'! deux heures par semaine ou tous les 15 jours) SOl~S
la direction de leur responsable hiè!,]!"chique, pour examiner . ",lHnenl faire progresséi C'.~ qu'ils font, la qualité
de leur proàuclion, de leurs outils, de ::ms procédures, de leur ,:n\\'ironnemenl de tra\\'ail, puur proposer des \\'oit:s
d'amélioratioll, mettre en œune les solutions et en contrôler les r(-sultats. Voir il ce sujet (1) Hervé SERIEYX,
Aofobiliserl 'jl1/elligel/ce de l'cl/!reprise: cercles de quolilé el cercles di? pilolOgc, EnlrL'prise Moderne d'Edition.
Paris, ;'ages 60-6 ; et (2) Fran',cise CHEVALIER et Ge(;rges TREPO, « Les cercks de qualité: d<"veloppei!lent
rapide CI problèmes d'intégration clans la gestion d'entreprise ), ProblJIIIl's ECOIlOlllitjllt!S, nO 2016, page 6.
4 « Cinq D'TOS»): zéro panne -
Zl"") dc'-Iai -
zéro d<"faut -_. ûro stock - zéro papi,"
Voir H, SERIEYX,
« L'évolution lks techniques de manage'li\\t'Ilt n. op, ci!., page 6~,
5 Expression empmntée à G, STORA el J, MO;'\\JTAIG:-JE, « La qualité totale dans l'entreprise ", MnllagelllL'lll
2000, 1986.


57
Ces deux idées en effet, maintes fois défendues par les théoriciens du management l,
peuvent donner à l'entreprise une quasi-assurance de lancement réussi d'un produit sans
grand apport d'enquête. Le traitement collcctifdu produit, l'association de toutes les fonctions
ou divisions ct l'intégration du monde extérieur (clients, fournisseurs, sous-traitants ct
consommateurs « neutres ») à sa mise au point (cie j'idée à la réalisation) pemlettent en effet
d'obtenir en fin de compte un produit
fiable sur les plans commercial ct souvent
technologique.
L'activité du service après vente peut alors attester de cette fiabilité, de même que la
durée de vie du produit. Ces deux variables doivent toutefois être explicitées.
Le service après-vente recou vre deux aspects au mOll1s: d'une part, il peut s'agi r
d'assurer à la fois la réparation des matériels fabriqués et/ou vendus, ct la disponibilité des
pièces détachées ct accessoires à cet effet; et d'autre part, il peut s'agir plus globalement cie
1'« orientation service» c'est-à-dire la mise en pratique d'une inébranlable volonté d'écouter
le client pour le servir afin de satisfaire la moindre de ses exigences et, si possible, devancer
ses désirs, Ainsi comprise, J'activité de ce service présente, à tous égards, un aspect dual:
faible, elle peut traduire soit une grande fiabilité des produits, soit une faiblesse de
1'« orientation service» ; et forte, elle peut signifier soit une non-fiabilité des produits, soit
une vigoureuse « orientation service», C'est donc une variable qui doit être analysée pour
chaque entreprise ou pour chaque branche d'activité. Ainsi, lorsque l'on observe que l'activité
du service après-vente de la SABC (brasserie) est forte, cela traduit moins la fiabilité ou la
robustesse de leurs boissons que le suivi pemlanent de leurs clients et de leurs produits. Au
contraire, la faiblesse de ce service constatée à la Société du Haut-Ogoué (SHO - Département
Tractafric -) est due à la fiabilité de la principale marque ici commercialisée: la « Mercedes».
De la même manière, la durée de vie du produit, qui influence par ailleurs l'activité du
service après-vente (non compris au sens de l' « orientation service)}), dépend de la branche
d'activité2 : le sel (industrie extractive) n'est ni de l'huile végétale (transformation de produit
d'origine agricole), ni du paiJ~ (houlangerie et pâtl~erie), ni de l'engraIS (industrie chimique),
ni de l'acier (métallurgie de base). A l'intérieur mêLic d'une branche d'activité, les produits
n'ont pas toujours une dmée de vie comparable. Au sein de la branche « industrie extractive»
1 Par exemple' Tom PETERS, Le ci:::,)s !IIi/l/lIgt:III<!IlI: 111(11111(-/ {JOllr III/l' lIol/l'dle pro"/',;rirc: de /'eIlTl'eprise,
Inter-Edition, Paris, 1988.
2 Il Y a vingl-tTois (23) branches d"acti\\"ités ~ll Cameroun. Voir , ~vIINPAT-0.IINEDUC-ONUDI, Le plull
direcrellr d 'inrillsrrialisarioll,
Sept. 1989.

58
par exemple, la durée de vie n'est pas la mêmc cntrc la bauxite, le fer, la soude naturelle, le
sel ou le gaz naturel.
En conséquence, l'entrcprise cloit principalemcnt produire dcs biens qui fonctionnent
sans incidents pendant le maximum de temps possible. Mais en même temps, quelle que soit
la branche d'activité, elle doit renforcer de façon permanente j'option « orientation service»
de son organisation. Si l'on s'cn ticnt ccpcndant aux résultats proprement dits, cela semble
être plus l'exception que la règle.
HI- DES RESULTATS lViITIGES.
L'analyse des buts de l'entreprise peut être globalement menée ù deux ll\\veaux : au
niveau social d'abord, l'entreprise cherche à foul11ir des biens et dcs satisfactions au public ct
à créer des richesses et des emplois; au niveau économique ensuite, l'entreprise cherche à
créer de la valeur ajoutée et à être compétitive en dégageant clu profit.
A ces deux niveaux peut alors se mesurer la performance de l'entreprise, c'est-à-dire
sa plus ou moins grande capacité à créer et à distribuer des richesses; sa plus ou moins grande
capacité à réaliser qualitativement ou quantitativement de bons résultats.
1- LES RESULTATS QUALITATIFS.
Issus des variables « qualitatives» ici étudiées, ces résultats cherchent à apprécier
brièvement l'apport social de l'entreprise vis-à-vis de l'environnement aussi bien interne
qu'externe. C'est ainsi que l'on s'est intéressé:
o
à la politique contractuelle, et

aux activités infornlelles.
La politique contractuelle est de plus en plus initiée et pratiquée dans les
entreprises qUi connaissent des ,: :'~icllltés de tous ,:!"drcs dues à de~c problèmes
financiers. En général, elle consiste à renégocier en quelque sorte le contrat qui lie le
travailleur ~1 son employeur, d~_' façon à modifier (il la baisse et pOLir une période
déterminée d'accord parties) les tCI, ':5 de la rémunéra[:'JIl de l'employé. L'objectif de
cette politique est d'éviter que \\cs difficultés de l'entreprise ne se traduisent par un

59
accroissement du chômage: le maintien des effectifs se trouve au mieux compensé, au
pire conditionné par dcs baisses de salaircs. On note alors que J'ensemble (100%) des
entreprises inten'ogées a élaboré unc politiquc contractuelle pour sauvegarder l'emploi.
C'est l'aveu d'unc situation de cri sc plus généralc quc nc la laisse penser l'analyse des
activités infomlelles qui graviteraicnt autour dc la firmc.
Composantes principales de ce que Marc PENOUIL appelle « le développement
spontané >), les activités informelles sont des « activités non capitalistiques, toujours tOllmées
vers le marché et qui témoignent sOllvent d'un sens certain de \\a création et de l'adaptation,
sinon de l'innovation» '. TOlites choses étant égales par ai lleurs, l'on constate d'une manière
générale que les entreprises qui paraissent norissantes génèrent d'une manière ou d'une autre
des activités infon11elles liées à leur production dominante et/ou à leur existence même. Les
exemples sont ici légion: aux abords de certains hôpitaux, on rencontre des vendeurs de
thennomètres et de carnets de santé; la chaîne de distribution de certains produits comme la
cigarette fait apparaître une répartition fonctionnelle révélatrice entre le distributeur (achat par
tonnes), le grossiste (achat par cartons), le semi-détaillant (achat par cartouches) et le
détaillant (achat par paquets). De plus, les villes de MBANDJOCK, de NKOTENG et de
NYE'ETE doivent leur existence et leur développement, respectivement à la Société sucrière
du Cameroun SOSUCAM, à la Cameron Sugar Compagny CAMSUCO et à la Société de
développement de l'hévéa au Cameroun HEVECAM.
L'hypothèse de base est ici l'établissement d'une corrélation positive entre la santé
économique de l'entreprise et les activités infonnelles qu'elles génèrent. Sur cette base, on
relève que ces activités ne se sont développées qu'autour de 40% des entreprises interrogées.
Mais la situation de cflse qu'illustre la pratique généralisée de la politique
contractuelle pour sauvegarder les emplois n'a pas épargné ces entreprises dont l'activité était
généreuse pour une frange de la population. Elles sont toutes obligées de prélever sur la masse
salariale pour assurer leur finalité principale qu'est la survie, d'autant plus que les tendances
observées sur les "niables quantitatiVL : Ile sont pas encour<;'~>antes.
1 l\\-larc PENOUIL, Le clél'(:ioppelllel1r sponranL; . Il;ji,'.,iol/s surie processus lie iml/sir/on, Centre d'Economie du
Déveioppement de l'Université de BordeJllX 1. FrJnce.

60
2- LES RESULTATS QUANTITATIFS.
Pour mettre en rel il' f ces résultats, l'on s'est intéressé:
o
à trois variables distinctes: le résultat net, c'est-à-dire le profit dégagé; le nombre
d'employés et la part de marché, entendu comme le volume du chiffre d'affaires par
rapport aux ventes totales du secteur d'activité concerné;
o
à l'évolution de ces variables depuis quatre ans, d'une part parce que l'observation des
faits sur une longue période est plus significative, en termes d'interprétation et de fiabilité,
qu'un prélèvement statique des données; et d'autre part parce que c'est au crépuscule de
l'année 1986 que le Cameroun était officiellement infornlé de la ré31ité de la crise
économique l . Il a par conséquent semblé opportun de mesurer, 8U travers de ces variables,
le chemin parcouru par les entreprises face à une contraction globale de la c\\eI118nde.
Variables
Hausse
Stable
Baisse
Total
- Résultat net
40
26
34
100
- Nombres d'emplovés
26
46
28
100
- Part de marché
53
33
14
100
Tableau 5 : Résultats quantitatifs.
Source: Elaboration personnelle.
L'observation de ces tendances pernlet de noter que (tableau 5) :

la tendance du profit de 40% d'entreprises est à la hausse,
o
46% de finnes ont eu un personnel stabilisé (pas de recrutement, pas de licenciement)
pour cause d'application de la politique contractuelle,

53% ont vu leur part de marché en augmentation ces quatre dernières années. Cette
augmentation peut cependant s'expliquer soit par le retrait de certains concurrents du
secteur (fenneture de SILAC profitable à CAM LAIT, fenneture de NOBRA profitable à
la SABC) : soit par une situation de quasi monopole (UNALOR et ses allumettes, SECCA
avec la distribution de films pour grands écrans) : soit p3r une situation de quasi duopole
(HILTON et SOFITEL à Yaoundé pour les hôtels de grand standing, CCC et la
SODECOTON pour les huiles de table). En soi, l'augmentation de la p:1rt de march& n'est
qu'un motif de satisLliioll pour l'entreprh'. si clic ne s'accon:pagne pas de bénéliLcs
réels que l'on peut en tirer.
1 Discours du Président de la Républiquè j la ":Ilion le 31 décèmbre 1986.

61
A cet égard, on remarque alors que sur l'ensemble des entreprises interrogées:
Il
Bien que 53% aient connues une augmentation de \\cur part de marché, il n'yen a que 40%
à avoir matérialisé cette hausse d'une augmentation de \\curs bénéfices; les 13% restant
ayant eu des perforntances de moindre importance,
o
Seules 26% d'entreprises ont apporté leur contribution à la lutte contre le chômage,
puisqu'ayant un nombre d'employés en augmentation,
o
Par ailleurs, seules les 26% ci-dessus évoquées ont réalisé des performances appréciables
aussi bien sur le résultat net, le nombre d'employés que sur la part de marché.
En se limitant donc aux variables qualitatives ct quantitatives ici retenues, on aboutit à
la conclusion que les entreprises, tout au moins celles cie notre échantillon, sont frappées par
Ulle crise qui ne leur donne la possibilité de réaliser que des performances clont la médiocrité
n'a d'égale que les menaces qu'elle fait peser sur leurs finalités principales: exister, croire,
rémunérer le capital, être indépendante et assumer sa responsabilité socialel.
Quelles sont, en définitive, les effets de l'existant en matière de gestion d'entreprise
sur les perfom13nces de celle-ci?
D'abord, la gestion telle qu'actuellement menée donne naissance à une organisation
sclérosante qui affecte à la fois le personnel (manque total de motivation) et la structure
directoriale (conduite rigide des affaires).
'\\
Ensuite, elle génère llne agressivité incontrôlée parce que d'une part, l'offensive
impulsée par l'innovation n'est pas flexible, et d'autre part la qualité et la fiabilité des
produits sont moins recherchées pour elles-mêmes que pour des motifs publicitaires.
Enfin, elle aboutit à des résultats mitigés tant sur les plans qualitatif et quantitatif que
sur les plans social et économique.
11 s,,,ll1ble bien pourtant q!l'une autre apPI"OChL' nuisse donner ù l'entreprise la capacité
de conserver ses performances (lU bien de sortir d 'Ln l,: crise dans laquelic elle se trouve
plongée (et c'est le cas de bien des entreprises nationales). L ',1Il:l1yse d'un cas cie
redressement d'une entreprise occidentale est alors o!)portllne pour il!llsll-t.'r notre propos.
1 Pour des det~ils sur les tïn~lites dc l"clllrcprisc. \\'olr D. L-\\RUE, Ecol/omie d·el/lI·l'Prise. Hachettc-Techlliquc,
Paris, 19S3, p3ges 40 el ss.

62
SECTION 3 : ETUDE D'UN REDRESSEMENT' LE
GROUPE CARL'\\TAUD.
Le groupe CARNAUD n'est qu'un exemple de redressement entre autres, parmI de
célèbres fimles européennes.
En 1980, ]a firme britannique de construction automobile JAGUAR 1 était quasiment
au bord de la faillite. En 1985, elle totalisait cent vingt-sept millions de Livres Sterling cie
profit et était classée cinquante-deuxième entreprise anglaise. Le produit était pourtant le
même et la technique n'avait pas changé. Seuls les hommes avaient porté la qualité ù la
hauteur d'une image tradi tionnelle pres tigi cuse grâce à un managemen t cla van tage partici pat i r.
A partir de 1974, suite d'une part à de graves difficultés économiques caractérisées par
une forte surcapacité de production - la demande mondiale ayant été sérieusement déprimée
par le choc pétrolier -, et d'autre part à une productivité très inférieure à celle de ses
principaux concurrents; la survie même de FIAT-AUTüMüBILES 2 se trouve sérieusement
menacée. Les mesures draconiennes initiées dès 1979 (réduction massive d' effecti fs touchant
vingt-trois mille personnes, compression des coûts et des prix, effort intense d'innovation sur
les produits, amélioration de la qualité et de la fiabilité par une restructuration systématique
des processus de fabrication, accroissement de la souplesse de l'outil, transfomlation de
certaines
concessIOns
en
entreprises
indépendantes,
décentralisation
et
recentrage
géographique sur l'Italie et l'Europe par retrait des Etats-Unis et de l'Amérique Latine)
donnent lieu à des résultats spectaculaires: les effecti fs passent de 135.200 à 81.400
personnes entre 1979 et 1984, le nombre de robots de 200 à 900 et la productivité de 8,8 à
13,4 voitures par an et par tête. Le ratio d'endettement par rapport aux capitaux propres passe
de 2,30 à 0,27 alors que le déficit \\let de 3,4% du chiffre d'affaires se transfomle en bénéfice
de 2,2% ; faisant de FIAT le groupc automobile le plus rentable d'Europe en 1984.
Pour être précis sur la manière par laquelle peut s'opérer une sortie de Crise, l'on
étudiera en détail le cas du grotq)c CARNAUD.1. Peill!' cela, on présenkr:\\ le groupe, on
1 POUT l "cmple de JAGUAR, \\'O!' ChJrh:s RILEY, op. cil. ;'Jge t-t
2 POUT l'exl'rnpk de FIAT. voir AIJill C\\1Jrks \\1.-\\RT1\\;ET, <, t.J déllurche SlrJlégiqul""
Les Cohias FrcIlIÇO[~\\'.
nO 233, Op.Cil .. pJges 5-6
J
Toute celle pJnic cst inspirée de Jl':lil-\\brie DESCARPE?< i RIES, « Les obsl'ssi')l1s d'une' entreprise
perfom1anle: le groupe (ARNAUD n. Les Cahiers François. nO 23-t. op. cil., pJges 2 j -t. ,,"'ole : L'Jlllèllr est le
PDG du groupe en question.

63
analysera le processus d'action du redressement mis en ccune, avant d'étudier son passage du
redressement à l'excellence.
1- PRESENTATION DU GROUPE CARNAUD.
Le groupe CARNAUD est un industriel de l'emballage; emballage fer blanc et
cmballage plastique. Il existe depuis 120 ans ct reste orienté sur le seul métier de l'emballage.
Son chiffre d'affaires était de 6,9 milliards de francs français en 1984. Le groupe est implanté
industriellement dans 7 pays avec 48 usines. Il faut ajouter ,1 cela une alliance avec le groupe
américain METAL BOX pour son activilé économique (Ct\\RNAUD EMBALLAGE détient
40% de METAL EUROPE BV aux Pays-Bas, laquelle est elle-m!2me majoritaire chez
METAL BOX Italie et HELLAS CAN en Grèce).
CARNAUD est leader en France pour les emballages métallique (70%). Il en est de
même pour sa position en Espagne. Les emballages plastiques représentent d'autre part 30%
de la production française. Au plan des effectifs, le groupe comprend 10.300 personnes
(15.000 si l'on tient compte des participations).
C'est donc une frm1e au sein de laquelle peuvent être relevés des atouts et surtout des
handicaps qui ont mis à nu la nécessité du redressement.
1- LES ATOUTS DU GROUPE.
Avant le processus de changement, les atouts de CARNAUD étaient:
G
un métier: l'emballage,
G
des hommes jugés solides,

un début de dimension internationale,

des investissements très pertinents mais lourds,

un actionnaire « industriel» principal détenant près cle 43% du capital, et
o
pas de COnClllTC;1[ 11londi<11 à positioi; dominante comme iiJi'vl peut 1'0tre dans !l:' domaine
de l'informatique.
Ces atouts baient pOl1eurs d'espoir pour la prospérité de la firme, n'l'CIt été les
aspects négatifs plus ou moins dissimulés.

G4
2- LES HANDICAPS DU GROUPE.
En effet, on constatait toutefois certaines faiblesses au nombre desquelles figuraient:
G
une productivité très insuffisante,
o
un niveau d'endettement qui s'était « emballé» jusqu'à progresser de 19% par an, et qui
représentait des frais financiers cie 7,3 % du chiffre cI'affaires.
o
Une insuffisance de la gestion (inexistence du contrôle de gestion) ct cie l'organisation
(contrôie cles filiales), ct
o
par conséquent, des résultats net annuels qui plafonnaient en francs courants.
Exécuté il la demande du président de la firme, le diagnostic des atouts ct des
handicaps a été présenté en 1982 : il devenait alors impérieux d'engager un vigoureux
processus de changement dans le groupe.
1
3- LA NECESSITE DU REDRESSEIVIENT.
1!
Car, 1982 faisait suite à un exercice 1981 très déficitaire, avec un résultat net négati l'
de 63 millions de francs français. Ce résultat traduisait une perte brutale après plusieurs
années d'un profit approximativement évalué entre 60 et 70 millions de francs. La non-
distribution de dividendes provoqua la chute de la moitié du cours de l'action: variant entre
80 et 100 francs jusqu'à mi-1981, il ne valait plus que 40 francs français en juillet 1982; avec
de néfastes répercussions sur l'avenir du groupe.
D'où l'initiation d'un processus d'action de redressement obligatoirement rapide en
optant pour la mise à l'écart de toute décision dite « stratégique» pençant deux années. Ce
processus, qui a été déclenché à partir des éléments donnés par le diagnostic, doit maintenant
être profondément explicité.
1(- LE PROCESSUS D'ACTION DU REDRESSEl\\1ENT.
Renouer avec la performance exigeait courage el dynamique de la part cie la structure
directoriale du groupe CARi\\lAUD. De fait, et cela parait naturel, cc processus a été amorcé
i'nr le P.D.G. L'Orli..::lation donnée dut cil' choisir trois thèlll('S cie réOexion qUI devaient

65
devenir des thèmes-réflexes et donc de contre-attaque. Ces trois thèmes de réflexion ont
abouti à trois exigences qui devaient permettre le redressement de la fimle :
o
une organisation motivante,
o
des leaders passionnés, et
e
quelques objectifs ambitieux.
1- UNE ORGANISATION MOTIVANTE.
La démarche cie réorganisation est identique ù cellc préconisée par Th. PETERS et R.
WATERMAN, à savoir le « KISS» (Kecfl Jr Sil/lple olld SI/udl) \\. CARNAUD a ainsi
recherché la simplicité et voulu combattre la taille, arguant que les leaders des meilleures
entreprises sont un peu « simplistes », et que celles-ci sont découpées en petites unités dites
« suboptimales ». L'autonomie des centres de décision a alors précédé la refonte cie
l'organisation proprement dite.
1.1- Décentralisation et autonomie.
Le principe d'action a conduit une organisation largement décentralisée en plusieurs
entreprises de taille «humaine» dans le but de créer ceux que ANSOFF appelle des
« entrepreneurs >/ Menée rapidement (réalisation en
1983) mais
progressivement,
la
décentralisation a pemlis la création de 30 entreprises qui se croisent entre elles selon
l'organisation suivante: 9 entités opérationnelles, elles-mêmes réparties en 18 divisions et 3
départements. Cette organisation respecte les trois principes suivants:

Le principe d'équilibre. Ce principe stipule que les entités sont égales entre elles;
chacune devant représenter environ un milliard de chiffre d'affaires et un effectif de
800/1200 personnes; alors que le chiffre d'amlircs des divisions est de 100/300 millions et
celui des départements de 30/S0 millions.

Le principe de décentralisation. Ce chapitre stipule une décentralisation économique
mais aussi sociale. ("est ainsi que 45 ,:i,ecteurs d'unités, nl'tl préparés, ont ell 'Ine
délégation sociale.
1 Th. PETERS et R. \\VA TE F.. \\1:-\\:-..', op. cit.
2
:\\NSOFl~.
POUi
il faut disting.:,_·r lès « entreprClll'urs >, ,: " " gestionnaires» ou ,. ':Oll1I1lCS d'atl'aires » : ccu,,-ci
ont un cc;;nportement concurrentie! ;,plc' à dlrig<:r des nlOU\\<:il1c'nls opérationnels-é\\'ulllllr, dc l'entreprise: tandis
que ceux-là ont un cOl11portcrne?nt el1lreprèllcurial apte à conduire? dcs mou \\'èl11e?n ts Slra\\cg iqlles-discontilllls. Voir
1. ANSOFF, op. cit. pages 207-2t5.

66
o
Le principe hiérarchique. Ce principe stipule de ne pas dépasser 6 échelons
l
hiérarchiques grâce à la fois à un fOr! clé\\'e]oppcmcnt du travail en équipe, à l'élévation du
niveau de la base et à la volonté établie d'amener le caclre à être un éducateur qui les forme
en permanence. La di fficulté a ici été cie passer de 12 échelons Ù 6 entre le président et
l'ouvrier. C'est pourquoi clans le caclre cc principe, trois types de mesures et actions ont élé
développées pour un mieux-être professionncl : les GEISER d'abord, qui sont les Groupes
d'Expression et d'Innovation Socio-Economiquc et cie Responsabilisation (267 geiscr cn
] 983 - 418 idées traitées dans 18 établissements) ; la rorll1ation ensuite, en particulier celle
, 1
à la gestion de l'entreprise pour 100 cadres du comité opérationnel; le dialogue social
1
1:
décentralisé enfin (34 accords en 1(83).
Chez
CARNAUD,
la décentralisation
est
indissociable
de
l'autonomie.
Par
conséquent, l'on s'interdit cie favoriser une autonomie par rapport à une autre. Si un patron
d'entité doit créer en X années une autre entité, son programme ne sera pas privilégié à priori
Il
par rappol1 à eeux des autres. Cette large part laissée aux opportunités caractérise
il:,
l'organisation proprement dite du groupe.
1.2- L'organisation du groupe.
L'organisation a aussi été conçue pour être communicante: en plus des GEISER et
du travail en équipe systématique, les échanges entre de multiples réseaux ont été formalisés
par l'instauration d'instances cohérentes: d'une part, un comité exécutif comprenant le PDG,
le staffet les dirigeants des 9 entités; et d'autre part, Ull comité opérationnel de 103 membres,
qui se réunit un jour et demi, deux fois par an, pour un transfert vertical et horizontal de savoir
et d'expérience, sous fom1e de communication des résultats par rapport aux objectifs. Chaque
direction présente alors ce dont elle est le plus fière, et fait aussi part de ses erreurs (il s'agit là
d'un pari sur la confiance des hommes).
Au plan de l'organisation en somme, le groupe CARNAUD a conduit un processus
ayant pour résultat la création d'une féclératio'l d'entreprises, alliall! la souplesse des « poids
légers 1,' :\\ la puissance de,:; ., poids lourds », a\\ ,~c ulle multitude de: centres de motivation
1 La firme japonaise TO'{OT:-\\. cOl11me l'Eglise Calhollq.!L' Ro llJJ 111 L', ne COllJple ql!<: 5 l~lhclons hiérarchiql;','::
Voir Tail.:hi OHNO, L'Esprit Ta.wIII. of'. cil.

67
communiquants et cohérents. Pour tenir et maintenir le gouvell1ail de cette organisation, il
fallait moins des chefs d'entreprises que des leaders passionnés.
2- DES LEADERS PASSIONNES.
Le groupe CARNAUD a aboli l'organisation pyramidale et donc « écrasante )i. II
considère que le leader doit être l'animateur d'un groupc d'animateurs. C'est pour cela qu'a été
donnée une priorité quantitative ct qualitati\\'e aux opérationnels (personnel de terrain) sur les
fonctionnels (personnel de bureau).
CARNAUD considère que pOlir que sa motivation soit augmentée, un leader a besoin
d'une organisation décentralisée mettant en relief sa ['esponsabilité (étudiée ci-dessus), de
quelques objectifs ambitieux représentant des défis pour stimuler son sens de la victoire
(étudiée ci-dessous), et d'un système de sanctions / récompenses qui peut à la fois être un
intéressement ou des signes de reconnaissance. II est à cet égard prévu que l'intéressement
puisse aller jusqu'à 30 % de la rémunération annuelle.
Une autre motivation consiste à participer au comité opérationnel, lequel a lui-même
des objectifs en tenlles de typologies de ceux qui y siègent; et sa composition est suivie
publiquement. Enfin, il faut au leader un suivi de gestion simple, rapide et stimulant, et se
rapprochant à des objectifs.
3- QUELQUES OBJECTIFS AlVIBITIEUX.
CAR..t"lAUD s'est donné pour principe de se fixer, chaque année, quelques objectifs
clairs: 3 objecti fs économiques et 3 objecti fs sociaux. Par exemple, les objectifs économiques
de 198311984 étaient les suivants: accroître la productivité, diminuer les frais financiers,
augmenter les résultats.
Il C:ut que ces objectifs soient partagés par le plus grand nombre, l: qu'ils soient par
conséquent accompagnés de critères de sui\\'i simples. Par exemple, le suivi de la productivité
est le chiffre d'affaires par pe'·sonne; le suivi de l'c:\\olution des frais fïl1l,lciers est la variatio"
de l'endellel11ent global finanCier, donc le besoin en fonds cie roulement cI'e.\\ploitation ; le
critère des résultats est la marge brute d'autofinancement .il'111t impol.
;
, ,
l ,

68
11 faut par ailleurs que ces objectifs soient exigeants et qu'ils se réfèrent aux
« meilleurs» de la profession eUou des métiers ; ccci pour approcher la performance
(croissance, rentabilité, innovation). De plus, en terme de suivi, il faut souligner l'exigence
d'une diffusion rapide et mensuelle des résultats comparativement aux objectifs.
Il est prouvé que celte façon de procéder par concentration des efforts produit des
perfomlances significatives. Ainsi, la publication des résultats des efforts en matière de
diminution des besoins de fonds de roulement d'exp1oitation(en nombre de jours de chiffre
d'affaires) a eu un effet d'entraînement et de consolidation d'acquis essentiels (gains de 46
jours, soit gains de fInancement de 800 millions de fi'ancs français) et a créé une dynamique
qui se perpétue.
Au total, le processus d'action de redressement du groupe CARNAUD s'est articulé
autour des trois axes princip::lU.\\ : LIne organisation motivante pour libérer la créativité, des
leaders passionnés pour insuffler la dynamique et quelques objectifs ambitieux synonymes de
défis à relever. Ce processus a pemlis le passage du redressement à l'excellence.
111- DU REDRESSEMENT A L'EXCELLENCE.
Ce passage du redressement à l'excellence peut être étudié en deux temps: l'analyse
des résultats issus du processus d'action ci-dessus explicité, et la mise en relief de quelques
conclusions à pérenniser pour le groupe CARNAUD.
1- LES RESULTATS OBTENUS.
En résumé de la triple eXIgence précédemment étudiée, un redressement s'est
accompli, en deux ans, par :

une organisation motivante parce que décentr::disée légère et cOl11l11unicante,

des leaders passionnés (entrepreneurs et spéc ial istes) parce q LI' an imateurs, « servan ts » et
i nnovatcu l's.

quelques objectils ambitieux parce que partagés, stimulants et comparatifs.
En ICn11eS de résultats qU:lntitati Is :

69

le redressement a été rapide puisqu'en 1982, le groupe a retrouvé du profit (p1us 47
millions de francs) et que le résultat atteint en 1984 était de 140 millions, chiffre jamais
atteint par la fimle ;
o
le cours de l'action en bourse a été dans le même temps multiplié par 18,5.
Au-delà de ces résultats. l'entreprisc
réfléchit aux conséquences et tire des
conclusions de son processus cl'action en termc cl'efret sur sa perf0Jl11ance.
2- LES CONCLUSIONS OU GROUPE CARNAUD.
De la triple eXigence qu'elle s'était donnée, l'entreprise réfléchit aujourd'hui aux
obsessions qu'elle cloit entretenir et qui sont en quclque sorte sa charte ou son projet.
CARNAUD
a examiné
les
huit
«pnnclpes
d'excellence»
de
PETERS
ct
1
WATERNIAN et a décidé que les trois obsessions de l'entreprise « excellente» devraient étrc
les clients d'abord (étre les résolveurs de leurs problèmes), le personnel ensuite (1'expen est
celui qui accomplit la tâche), un foisonnement d'actions enfin (les actions anarchiques sont
préférables à une inaction ordonnée).
CARNAUD affirme par conséquent:

qu'une organisation décentralisée est plus proche de son personnel, est mieux à l'écoule
des clients et fait foisonner des actions;
o
que les leaders passionnés sont les entraîneurs de leur personnel, sont des novateurs pour
les clients et provoquent un bouillonnement d'actions dans le quotidien;
o
que quelques objectifs exigeants sont des outils de communication avec le personnel,
qu'ils garantissent un niveau de qualité aux clients et font converger les actions; et

qu'en fin de compte, ce sont les hommes qui font la différence,
1 Voir entre autres Th
PETERS el R. W.\\TER!\\·IAN, op. cil. : R..-\\. HllFTART, La STI"l7Té:gie d'elli!'cprise. !'\\Jc
Graw-Hill, 1984 ct AIJi' Charles MARTINET, 01' cil.
\\lote: Les huit « principc, d'excellence}) SOnt :
1 Agir
2 A l'écoule du client
3 Autonomie c:, esprit d'entreprise
4 Producti\\'ih:' par la motivation du personnel
5 Quelques valeurs ('ommunes
6 Un métier principal
7 Structure simple et kgère
8 Souplesse dans la rigueur

70
Pour le groupe CARNAUD en somme, la perf0ll11anCe s'obtient par la confiance aux
hommes et aux organisations qu'ils créent. L'excellence ne proviendrait ni de stratégies super-
analysées, ni de structures super-sophistiquées, ni cie plans pluriannuels détaillés, ni d'une
armée de diplômés; mais bien plus d'une volonté appuyée sur une compétence des hommes
qui sont donc à professionnaliser. Cela demande la conciliation cie l'esprit (autonomie et
moti vat ion) et de l'espri t de l'en trepri se (apparten ance).
Comment mieux illustrer la notion de performance qu'en retraçant l'histoire d'un
redressement exemplaire? En quelques années, le groupe CARNAUD a non seulement
renoué avec les béné fices, mais il il aussi instauré une réorgan isation pro foncle de l'entreprise.
La méthode utilisée a été la suivante:
1ère étape: un diagnostic sévère des atouts et des handicaps pour clarifier la nécessité
du changement.
i,mr
étape : une stratégie de contre-attaque basée sur la trilogie suivante: une
organisation motivante (décentralisation, autonomie et communications dans tous les sens),
des leaders passionnés (entraîneurs, innovateurs et dynamique), quelques objectifs ambitieux
(clairs, précis et avec une méthode simple et suivie).
3èmr étape: des résultats riches d'enseignements sur l'importance primordiale des
hommes qui composent et animent l'organisation.
CONCLUSION DU CHAPITRE 1.
Au terme des analyses effectuées dans ce premier chapitre, on peut désomlais
affirmer la nécessité d'un autre style de gestion (provisoirement appelé « flexibilité
offensive »).
Trois étapes ont pemlis d'aboutir à cette conclusion:
- d'abord, \\L", modèles de condulL' d'entreprise en vigueur actuellement, en 'è!ltant de
(re)créer une hamlonie entre gestion traditionnelle et gestion 1l10deme, utilisant sans grand
discemement les notions de « taylorisme », de rationali~t~, de management, je stratégie ou
d'offensive.

72
CHAPITRE 2
VERS UNE FORIVIULATION DU CONCEPT
DE FLEXIBILITE OFFENSIVE
Qu'est-ce que la « flexibilité offensive » '7 Si le mot flexibilité est fréquemment utilisé
dans la littérature consacrée à l'entreprise, l'expression «( flexibilité offensive » y est rarement
évoquée et à fortiori définie. C'est donc à un problème de clari fication qu'est consacré le
présent chapitre.
Pour le résoudre, l'on disposait au départ de deux voies distinctes:
o
une démarche axiomatique consistant à partir de quelques hypothèses initiales, à
développer, de manière abstraite, une formulation personnelle de la notion de « flexibilité
offensive» ;
"
une démarche inductive consistant à analyser les perceptions de la « flexibilité offensive»
chez les responsables d'entreprise pour élaborer une fonmtlation synthétique susceptible
de satisfaire le plus grand nombre.
L'on a, au nsque d'en cumuler les inconvénients, tenter de combiner les deux
démarches.
En effet, il existe déjà des définitions de la « flexibilité offensive» : R. BOYER 1 d'une
2
part et I. ANSOFF
d'autre part ont proposé une réponse à la question dans des cadres
différents. Compte tenu de nos préoccupations, avant d'adopter l'une ou l'autre de ces
propositions, l'on a jugé préférable de procéder à une étude empirique auprès d'une quinzaine
de dirigeants d'entreprise. cette exploration du concept (section 1) a montré au moins cieux
choses:
o
Une relative insuffisante des fonmtlations the ;'iques existantes P0l!\\,!!ll justifier un tr;1\\:'!
complémentaire cie définition; ct
1 Robert BOYER (saLIs 13 directIOn cie). op. cil.
l Igor ANSOFF, op. cil.

73
e
Une relative homogénéité des perceptions obtenues au travers de la notion d'« offensive »,
mais insuffisante par rapport à ces formulations.
Par conséquent il a paru souhaitable cie prolonger cette exploration par des
propositions de définition (section 2) cn essJyant de concilier exigence de rigueur ct cJractère
concret des résultats. C'est ainsi qu'après avoir préalablement précisé le domaine d'application
de la « flexibilité offensive», on proposera trois définitions du concept. Et si ces formulations
générales, plus précises que celles ci-dessus citées ne répondent pas directement aux
eXigences
des
firmes
interrogées,
on
peUL
cependant
les
rclicr
directement
ù des
préoccupations concrètes des entreprises.
SECTION 1 - EXPLORATION DU CONCEPT.
Afin de conduire cette exploration, l'on procédera d'une part à l'étude des allusions et
définitions existantes par un rapide parcours de la littérature, et d'autre part à la
compréhension analytique des perceptions de la notion chez des responsables d'entreprises. Il
sera alors possible d'évaluer dans quel1e direction les travaux existants doivent être
développés pour répondre aux préoccupations annoncées.
1- LE PARCOURS DE LA LITTERATURE.
L'expression « flexibilité offensive» a déjà été utilisée par au moins deux auteurs:
Robert
BOYER, théoricien de
la
régulation
économique,
et
Igor ANSOFF,
grand
vulgarisateur de la pensée managériale à travers le monde. L'on évoquera chronologiquement
leurs apports avant de relever la contribution de Thomas PET ERS et Robert WATERMAN
qui se rapporte plus à j'esprit du concept.
1- LA« FLEXIBILITE OFFENSIVE)) CHEZ Robert BOYER.
Il fal:: rappeler que pour BO'{ER, a flexibilité peut à la fois désigller la plus ou
moins grande adaptabilité de l'organis~1tion productive, l'aptitude des tr:lvailleurs à changer de
poste de [ravail au sein d'une entreprise. la faibles:;.' des contraintes juridiques régissant le
contrat du tr~i·:lil. la sensibilité de> salaires à la situatl~1I1 économique propiC ;\\ la firme ou

74
générale concernant le marché du travai l, et la possibilité pour les entreprises de s'affranchir
des réglementations publiques qui limitent leur liberté cie gestion.
Ainsi « la nexibilité sc définit très généralement comme l'aptitude d'un système ou
d'un sous-système à réagir à diverses perturb,llions Il \\. Et pour 13 mesurer, on peut mettre en
place autant d'indicateurs que de variables ct de chocs exogènes. A ce jeu, l'auteur en vient à
s'interroger sur « des nexibiJités offensives ... ou défensives >/. Car en définitive, la nexibilité
est surtout une réaction défensive en vue de gérer l'impl'évu, une politique du « dos rond» qui
permet à l'organisation de vivre clans un environnement de crise. En reportant sa rénexion
dans un cadre macro-économique, BOY ER Illontre que la sortie cie crise ne s'opère pas par la
flexibilité défensive.
C'est là qu'intervient la nexibilité offensive qUI revêt deux significations selon la
nature de la crise:
o
Si la crise est un phénomène transitoire, la flexibilité offensive « est une stratégie qui
privilégie la modernisation des systèmes productifs, la formation ... comme autant de
moyens pour améliorer la place du pays considéré dans la hiérarchie des nations, Elle
s'oppose à la [flexibilité défensive] en ce sens qu'elle n'a pas nécessairement recours à des
réductions de salaires, à des restrictions du droit du travail, mais à une mobilisation
offensive]
des possibilités qu'offrent
de nouvelles méthodes d'organisation et de
production» 4.
o
Si la crise est plutôt considérée comme un phénomène structurel, la flexibilité offensive
représente « une mutation d'ensemble des [onnes d'organisation ( ... ) susceptible de
promouvoir un retour à la croissance (.,.). [Elle] s'oppose à la [flexibilité défensive] en ce
sens qu'elle suppose une large irréversibilité5 des structures économiques et sociales »6.
Ainsi, la flexibilité offensive est une stratégie qui a recours à la mobilisation.,.
offensive des possibilités qu'ouvrent de nouvelles méthodes d'organisation et de production;
stratégie qui s'appuie sur une mutation d'ensemble de ces forn1es d'organisation et qui suppose
une large ilTéversibilité des strucê'!res économiques ct sociales ainsi rcvitallsb~s.
1 R. I30YER (sous la direction de). op cil.. page 2,W.
2 Intitulé cit: dixième article de la plli'!ication sus-citée. PagL's ,2:5-281.
J Souligné dans le texte par l'auteur.
~ R. BO'y'ER, op cil., page li8
5 Souligné dans 11: lL'xte par l'auteur.
6 R. BOYER, op. cil., page 278

7S
Cette fomlule raccourcie, en s'appliquant il une dimension macro-économique, peut
ainSI faire référence à l'analyse Illicroéconomiquc telic qu'elle apparaît clans les écrits de
ANSOFF.
2- LA« FLEXIBILITE OFFENSIVE» CHEZ Igor ANSOFF.
Dans la récente édition de l'ouvrage principal qu'il publie en 1965\\, ANS OFF affirme
d'abord que la nexibilité est un objectif important pour l'entreprise. Il précise ensuite que la
nexibilité est soit externe par la diversification de ses produits et cie ses marchés, soit interne
par la fluidité de ses ressources
C'est à l'intérieur de la politique de souplesse externe qu'il distingue la flexibilité
défensive de la nexibilité offensive: la défensive se ramène à «limiter les effets d'une
catastrophe », l'offensive vise « à placer l'entreprise dans des zones où clIc aura la chance de
rencontrer des occasions de percer >/ L'entreprise peut adopter l'une ou l'autre de ces
politiques, ou les deux à la fois.
De ces deux politiques cependant, « la plus subtile et difficile à apprécier est la
souplesse offensive qui, au lieu de réduire la poriée d'une catastrophe, augmente les chances
de participer à des percées. Elle peut toutefois se mesurer: 1- aux anticipations en gestation,
qui sont, sinon mesurables, du moins récupérables pour des dirigeants ayant au flair et de
bons conseillers techniques ( ... ),2- à la vigueur de l'effort de recherche et de développement
de l'entreprise dans ces domaines : une entreprise solidement équipée en recherche et
développement saura toujours exploiter rapidement et intelligemment une découverte, fût-elle
faite par d'autres ».
L'auteur ajoute par ailleurs que la flexibilité offensive est celle qui « a la chance
d'être vraiment payante, mais elle nécessite un type de dirigeants et de compétences ainsi que
des moyens financiers que peu d'entreprises possèdent ».
Le schéma 6 suivant tente de struclllrer la notion telle que développée par A>!SOFF :
la flexibilité offensive est une politique qui vise à augmeillel' les chances de participation à des
percées pour l'entreprise. Par la recherche et le développc!llcnt des technologies riches de
1 Igor ANSOFF. Srmrégie de dél'e10P/N/JIl'1I1 dt: / 'ellfrl'prise. NOU\\'e311x Horizons. P3ris. 1989.
21. ANSOFF, op. cil.. p3ge 7t et page 72.

76
possibilités qu'elle suppose, cette politique pennet aussi de créer des novations ou d'exploiter
rapidement celles qui sont le fait des concurrents. La nexibilité offensive utilise comme
moyen de charisme des dirigeants, les compétences entrepreneuriales du personnel ct des
moyens financiers importants, et peut S'apprécier ~I travc:rs la vigueur de l'effort de recherche
développement et le nombre des domaines technologiques en gestation.
- Dirigeants charismatiques
i\\loyens
.....
- Compétences
1
1
en trepreneuria les

- ~vloyens fInanciers
Flexibilité Ollensi\\'e :
Politique de participation J
dcs percées; eVou ck création
de percées
~
- Domaines technologiques en
Mesures
.... gestation
1
1
- Dynamisme de la fonction
Recherche et
J
Développement
Schéma 6 : La notion de flexibilité offènsive chez ANSOFF.
Source: Elaboration personnelle à partir de 1. ANSOFF, op. cit.
La flexibilité offensive doit s'accompagner d'un esprit qui n'est pas (ou plus)
seulement le « comportement offensif» de ANSOFF, mais une manière de vivre et de faire
que l'on retrouve chez Thomas PETERS.
3- LA CONTRIBUTION DE Thomas PETERS.
Thomas PETERS, expert consultant intel11ational, expérimenté par de solides audits
d'entreprises en difficulté dans le monde cntier, a introduit dans le management cc que G.Y.
KERVERN appelle « l'évangile selon Saint r..'lac »1, et qui se traduit par « 806 p:.J.ges
d'évangile: 360 pour l'ancien testament~, 446 pour le nouveau) demier-né de T0111 PETERS H.
1 De Î\\'!ac KINSEY \\-=O~SULTA~TS, le céi~')re cabinet d'audit. empL '·<.?ur de l'auteur. Extrait ,;c Georges \\'ves
KERVERN. « L'évangile scion Saint Mac ". Càt'r t'f Comprt'ndr,'.
j\\'!ai
1986. repris par Problèmt's
Economiques. n° 2029. ,7 Juin 1987, page 2
- Thomas PETERS et Robt'fÏ WATERM.-\\N, Lt' prix d,' /','xeel/t'lIce, Inter Edilions. Paris, 1983.
3 Thomas PETERS et Nancy l\\ USTIN, Li! pussion dt' /'t'.\\'CC'IIt'lIce. Inter Editions. Paris, 1985.

77
Sans évoquer le concept ici concerné, Th. PETERS disserte d'un style de gestion qui
semble bien rimer avec la « nexibilité offènsive». Sur la base de son expérience, il prend le
l
contre pied des analyses très rationnelles
ct évoque SOllS le vocable de « principes de 1
l'excellence »2 les huit caractéristiques des meilleures entreprises. Autrement dit, il faut à la
fabrication des principes simples « que tout chef d'entreprise devrait savoir »3 : il faut un bon
patron; il faut s'occuper des clients; il faut s'occuper du personnel; il faut veiller à la qualité;
il faut simplifier au maximum; il faut faire ce qu'on sait Elire; il faut décentraliser, et il faut
des petits groupes motivés pour innover.
On peut de la sorte mettre en relief quelques thèmes forts de la pensée de PETERS :
(t
JI faut agir c1'abord quitte à rénéchir ensuile : « Dans nos entreprises exemplaires, il
semble que J'action précède la stratégie, et non l'inverse ».
o
On peut « tricher» si c'est le moyen efficace, c'est-à-dire « court-circuiter la voie
bureaucratique pour rassembler plus rapidement cles ressources humaines et financières»
pour arriver à un succès.
o
A l'opposé du management scientifique, il faut célébrer le « K!SS
Keep It Simple,
Stupid» pour alléger Ja gestion de l'organisation.
o
Il faut développer la « culture» (shared vallies) de l'entreprise; c'est-à-dire cet ensemble
d'histoires, d'anecdotes, de connaissances, d'habitudes et de rites qui caractérise la manière
d'être, de vivre, et de construire en commun des idéaux qui différencient profondément
une entreprise d'une autre.
o
Tl
faut
développer
l'innovation
par
la
recherche-développement
malS
aussI
par
l'encouragement de l'éclosion d'une caste de « champions du produit» qui sont « des
individus qui poursuivent une activité hautement créative en marge des systèmes fomlels
de l'entreprise ».
Si l'on s'en tient là, on note la simplicité de l'exposé de PETERS ; la clarté du « ce que
tout chef d'entreprise devrait savoir ». Mais il ne suffit pas seulemcnt de le savoir car. ainsi
que l'observe lin chef d'entreprise, « soyons francs: nous autres, resronsablcs d'entreprisc, les
pratiquons-nous effeetive:1lem, ces principes; même quand nOlis en avons reconnu b
nécessité ? Ri tOllme Iles usées, viei Iles lunes, peu [-être, mais tous les Sli bter fuges son t bons
pour nous les rappeler »~.
1 Analy:,cs é\\'oquées au chapitre i.1I"tcédenr.
2 Les huit principes ont été déjà cite's.
3 G. Y. KERVERN, op. cit. page 2.
4 H. SERlEYX, op. cit., page 68.

78
On a ainsi passé en revue la « flexibilité offensive» telle qu'elle est analysée par R.
BOYER ct 1. ANSOFF. On a complété l'exposé avec l'esprit sur lequel pOLmait s'appuyer la
notion tel qu'il est abordé par PETERS. Reste cl éprouver la comptabilité de tout ccci avec les
pratiques des responsables de la gestion d'entreprise.
11-
LES
PERCEPTIONS
DES
DIRIGEANTS
D'ENTREPRISE.
On présentera la méthode utilisée ~lVant d'exposer' les opinions recueillies. On mettra
ensuite en évidence les points commuils ct les divergences observées avant d'en dégager la
quintessence.
1- LA lVIETHODE.
L'objectif essentiel était ici d'avoir des indications sur la façon dont était perçue la
« flexibilité offensive» par ceux investis du pouvoir de décision et, si possible, des éléments
de jugement sur les politiques pratiquées en vue d'améliorer la « flexibilité offensive » de
l'entreprise. Mais cela n'a pas été aussi simple.
Nous avons fait précéder l'étude empirique d'une pré-enquête où les questions posées
étaient les suivantes:
Qualld dit-oll d'une entreprise qu'elle est flexible?
Quand dit-on d'une entreprise quelle est offensive?
Qu'évoque pour vous la flexibilité offensive d'li/le entreprise?
Ces trois questions étaient dictées par l'intuition que nous aVIOns au sujet du flou
contenu dans l'expression « flexibilité offensive », et par la prémonition que les répondants
auraient tendance à séparer les deux mots, Les vingt deux (22) interrogés à cette pé-enquête
ont soigneusement évité les première et troisi'~ll1e questions pour s'exprimer exclusivement
sur la deuxième, quand ils ne rerusaient p3S carrén, :1][ de répondre.
Explication: Les deux autres questl011s étaient, pour reprendre les tennes de sept
d'entre eux, « trop compliquées »1, autrement dit ils ne cOl11prCn~i,l'!lt le sens ni de :::
1 Un répondant nOlis a dit qll~ 1':5 qll~stions « trop lIl1i\\'.:rsilair~s » !

79
flexibilité,
nI
de
la
« flexibilité
offensive ».
Cependant
les
réponses
données
pour
1'« offensive» constituaient un amalgame plus ou moins exploitable pour la « flexibilité
offensive ». C'est pour cette raison que plus tard, lorsque l'on a véritablement élaboré les
temles de notre étude empirique, pour être en ph~lse avec l'environnement local et accessible à
ceux des décideurs qui avaient la volonté de nous répondre, nous avons adopté le libellé de
notre précédente question ouverte: (( li \\"O{re (/\\·is. qI/und di{-oll d'I/Ile entreprise ql/'elle est
offensive? »1.
Que l'on se fasse bien comprendre:
8
Nous voulons avoir les perceptions des dirigeants sur la notion de « l1exibilité offensive »;
o
Nous sommes obligés, pour être compris de nos répondants, de chercher les perceptions
des dirigeants sur la notion d'« offensive» ;
o
Nous sommes amenés à prélever, à l'intérieur des perceptions de la notion d'« offensive »,
celles qui peuvent être du domaine de la « flexibilité offensive ». Travail ingrat qui, hélas,
renverse notre démarche: au lieu de partir des perceptions pour élaborer une définition, on
est obligé de retenir les définitions de R. BOYER et de I. ANSOFF (à titre provisoire) que
nous avons et de les confronter aux discours des dirigeants qui se sont prêtés à notre
interrogatoi re.
2- LES OPINIONS DES RESPONSABLES D'ENTREPRISE.
La question ouverte apparaissait donc dans le questionnaire en ces termes: « A votre
Ql..'is, quand dit-ail d'une entreprise qu'elle est offensive? ». Nous citons ici intégralement les
réponses recueillies:
01- Lorsqu'elle est agressive.
02- Lorsqu'elle se bat pour conquérir de nouvelles parts de marché quand elle ne
contrôle pas son marché local.
03- Lorsqu'elle attaque son marché; lorsqu'elle est agressive.
04- Lorsqu'elle provoqUl' ses concurrents.
05- LOïsqu'elle innove.
00- Si elle attaque ses adversaires.
1 Nous avions le choix entre deux points . s,)it cOntollmc:r lJ di/lieu),':' dl' celle Illani':re : SOil annlllt:r cette
enquête. Nous avons choisi de Contourner la di rflc li lié.

80
07- Quancl elle crée souvent cie nouveaux produits sur le marché.
08- C'est un problème d'agressivité.
09- Lorsqu'elle ne se contente pas des parts de marché qu'clic détient, et recherche
non seulement à consolider ses positions, mais à grignoter sur les concurrents.
10- Si elle innove très souvent.
11- Quand elle essaie toujours de changer les habitudes des consommateurs par
l'introduction sur le marché des produits jusque-là inconnus du public ..
12- Il faut pour cela qu'elle attaque le marché ct \\cs concurrents.
13- C'est la recherche du numéro 1 dans le secteur d'activité.
] 4- Quand elle anticipe sur le marché en offrant de nouveaux produits ou ses
produits habituels sous d'autres fomles ; lorsque l'entreprise favorise ù chaque étape de son
existence l'adhésion du consommateur à ses produits.
] 5- Quand elle travaille par un développement régulier et logique cie son marché en
utilisant cles leviers tels que l'amélioration de la qualité cles produits et du service, le
développement pennanent de sa notoriété et de son image.
A partir de ces opinions et par rapport à la « flexibilité offensive)f telle que dé fin je par
R. BOYER et 1. ANSOFF, on peut distinguer ce qui unit les entreprises cie ce qui les sépare.
3- POINTS DE CONVERGENCE ET DE DIVERGENCE.
Il convient d'analyser successivement ces deux points en considérant l'ensemble des
quinze (15) réponses obtenues.
3.1- Les points communs.
- 1cr point: La « flexibilité offensive» suppose un marché concurrentiel. Les réponses
02, 04, 06, 09, ] 2 évoquent explicitement l'existence d'un tel marché tandis que les autres
réponses le supposent. Cette idée est évidente chez BOYER comme chez ANSOfF.
- Zèl11l' point: (corollaire clu premier). La « flexibilité offensive» Sl' conçoit dans un
environnement en lllutation, évolutif ct incertain parce que concurrentiel. Ceu,,· idée est sous-
jacente clans toutes les réponses comme elle l'est allssi chez BOYER et ANSOFF. Il y a donc
pas de place pour la « flexibilitc offensive » dans un système stationnaire.
ènll
- 3
' point: La « flexibilité offensive» s'accolllillode bien de la JlcXlt)i!ité défensive.
Cette idée que l'on retrouve chez ANSOFF, apparaît également dans les réponses 02 ct 09. Il

81
est ainsi important pour J'entreprise de pouvoir s'adaptcr au mIeux a un changement
quelconque, ct de pouvoir dans le même temps utiliser sa « nexibilité offensive».
èl11e
- 4
point: La « flexibilité offensive» utilise comme moyen de la mobilisation
offensive des potentialités dont fait état BOYER, et qui est implicite dans les réponses Il, 14
et 15; elle utilise aussi l'innovation (05,07,10, Il, 14) ct les compétences du personnel (15)
dont parle ANSOFF.
-
Sèl11e
point : L'idée d'une « flexibilité offensive» pell11anente est évoquée par
BOYER et ANSOFF et confirmée plus ou moins explicitclllcnt par les réponses 0 l, 03, 06,
07, 09, 10, Il, 13, 14 et 15. L'entreprise doit clonc cultiver au jour le jour cette vertu
importante pour sa performance.
Il faudra par conséquent développer une notion de « Ilexibilité offensive» qui respecte
au mieux ces points de convergence, mais en même tcmps une notion qui intègre tes points de
divergence rappelés ci-après:
3.2- Les points de divergence.
Ces points peuvent s'exprimer sous forme de questions auxquelles il faudra trouver
réponse en temps opportun:
- 1ère question: La « flexibilité offensive» s'aceompagne-t-elle du développement de
la « griffe» de l'entreprise ? La réponse 15 en effet fai t allusion au développement de la
notoriété et de l'image de l'entreprise.
éme
- 2
question
: La « flexibilité offensi ve» exprime-t-e \\le un combat contre
l'environnement? Faut-il en effet être agressif(OI, 03, 08), se battre (02), attaquer (03,06,12)
ou provoquer (04) ses concurrents?
éme
- 3
question
La « flexibilité offensive» suppose-t-elle des moyens financiers
importants (ANSOFF)
une large irréversibilité dcs structures économiques et sociales
(BOYER) ; et une mutation profonde de l'organisation (BOYER) '? Ces trois points
n'apparaissent nulle part si l'on parcourt les réponses obtenues.
C'est pour cela qu'il faut tenter de faire une synthèse à partir des définitions proposées
par BOYER et ANSOFF et à partir des perceptions qu'en onl les responsables d'cntreprise.

82
Au total, l'étude exploratoire cie la « flexibilité offensive» conduit à fomluler cinq (5)
remarques:
o
Les opinions recueillies ne contredisent pas les formulations existantes. On notera
toutefois que la conception cie BO'{ER, surtout macroéconomique, n'est jamais évoquée
(ct c'est nomlal !) alors que plusieurs réponses se rattachent assez clairement à la
f0n11ulation de ANSOFF.
fil
La politique de « flexibilité offensive» est compatible avec celle cie flexibilité défensive
ou adaptative.
fil
La « flexibilité offensive» s'appuie fOl1cmcnt sur l'innovation et clone sur la vigueur du
département Recherche et Développement. Parce qu'elle sollicite les compétences cie tous,
elle cherche la mobilisation de la rïrme pour atteindre une performance toujours
renouvelée.
o
La « flexibilité offensive» est une recherche permanente qui cloit s'inscrire clans les
préoccupations quotidiennes de l'entreprise. En se basant sur des moyens financiers
importants, elle doit concluire à une mutation profonde des structures de l'entreprise et
devenir si possible, irréversible.
fil
La « flexibilité offensive» exprime un combat contre les concurrents, une pen11aneme
volonté de dominer les règles du jeu et de modifier son envirormement.
La synthèse ainsi faite est un travail primaire et justifie la nécessité d'entreprendre un
travail complémentaire de définition en cherchant d'une part, à résoudre les questions
évoquées pendant l'étude exploratoire ci-clessus ; et d'autre part, à prolonger le travail de 1.
ANSOFF pour aboutir à une f0n11ulation aussi précise que possible de la « flexibilité
offensive ».
C'est à ce travail cie définition qu'est consacrée la deuxième section de ce chapitre.
SECTION 2
LA DEFINITION DU CONCEPT.
Pour tenter de :\\~pondre aux interro:::,,:ltions soulevées à l'ISsue cie la phase expk'-atoire,
on adoptera la démarche suivante:

Dans une éupe préliminaire, on limitera le clomaine cI'application de la « flexibilité
offensive» en précisant le cadre cie sa définition;

83
o
Dans une première étape dictée par l'importance capitale de la technologie, on étudiera la
dynamique innovatrice qui est au cœur du concept;
o
Dans une seconde étape de définition proprement dite, pour tenter de satisfaire le besoin
d'une « pensée qualitative rigoureuse »', on proposera, Ù par1ir de la flexibilité défensive,
de l'innovation, et de l'esprit qui les soutend, trois fonmtlations aussi précises que
possible de la « flexibilité offensive ».
1- LE DülVIAINE D'APPLICATION.
Une définition rigoureuse ct opérationnelle de la « flexibilité offensive» eXige une
limitation du champ d'application de la notion. Le cadre nécessaire sera obtenu par le recours
à trois hypothèses: la première relative à la volonté de changement de l'entreprise; la
seconde relative au modèle de fonctionnement de l'entreprise; et la troisième relative à la
nature des objectifs de l'entreprise.
1- LA VOLONTE DE CHANGEMENT: LUTTER CONTRE LA
RESISTANCE DANS L'ENTREPRISE.
L'une des difficultés majeures de la conduite d'une organisation est de vamere la
résistance à tout processus de changement dans l'entreprise. La résistance est un phénomène
complexe qui provoque des retards et des coûts imprévus et qui, très souvent déstabilise le
processus de changement. Elle se manifeste sous des fom1es différentes: temporisation et
retards dans le déclenchement, insuffisances et délais inattendus dans la mise en œuvre qui
ralentissent le changement et le rendent plus onéreux que prévu, tentatives pour diluer le
changement dans un tourbillon d'autres priorités. Et une fois le changement mis en place, il y
a parfois un décalage entre l'initiation du changement ct les résultats cscomptés et le
problème du retour à la situation antérieure favorisé par certains membrcs de l'organisation.
Comme l'écrit MACHIAVEL, «il n'est rien de plus difficile à prendre en main, de
plus pé~i\\\\eux à diriger, ou (k~ plus aléatoire, que: de s'engager dans ::' mise en place d'v'
nouvel ordre des choses, car l'innovation a pour ennemis tous ceux qui ont prospéré dans les
conditions passées et a pour tièdes défenseurs tous ceux qui pellvcl:t prospérer dans le n'1uvel
1 Expression èmpruntée à R. Tl·IO~·i. SwhililJ sll"llcluref/e el II!luphogt:nèse, 1972, reprbè par R. REIX. op. cil..
page 24.

84
ordre »1. La volonté de changement implique alors la maîtrise de celui-ci dans le contexte de
l'entreprise.
Mais comment maîtriser le changement? Plusieurs méthodes, selon des auteurs
di fférents, peuvent être proposées à cel efret. Nous n'en listerons que deux.
Méthode J. Igor ANSOn:' propose quatre méthodes pour maîtriser le changement
dans l'entreprise2 : la maîtrise par la contrainte qui est un processus de changement coercitif
utilisant le pouvoir pour venir à bout de 18 résist8nce; l'adaptation organique qui est un
processus de changement progressif utilisant parfois le pouvoir pour son impulsion mais
s'opérant surtout à travers une accumulation graduelle d'évolutions progressives: la gestion
par la crise qui est un processus de mobilisation générale pour préserver l'entreprise en temps
de turbulences de l'environnement; ct la méthode de résistance contrôlée ou méthode
« accordéon» qui se situe à mi-chemin entre la méthode coercitive et la méthode progressive.
Le tableau 6 suivant compare les avantages et les inconvénients des quatre options:
Méthodes
Conditions d'utilisation
Avantages
Inconvénients
Coercitive
Extrême urgence
Rapidité
Extrême résistance
Progressive
Urgence limitée
Faible résistance
Lenteur
Crise
Survie menacée
Faible résistance
Impératif
de
temps.
Risque d'échec
« Accordéon»
Urgence moyenne rupture Faibles
résistance complexité
reccurentes
adaptée au temps
changement global
de compétence
Tableau 6 : Quatre méthodes pour maîtriser le changement.
Source: 1. ANSOFF, op. cit., page 264.
Le tableau montre que les risques encourus rendent peu souhaitable de substituer la
gestion de crise à la méthode coercitive. La méthode progressive est la plus lente; mais c'est
elle qui rencontre la plus faible résistance et demande le moins de vigilance et de ressources.
La méthode « accordéon » est préférable quand la situation n'exige pas l'intervention par la
contrainte. Son plus grand avantage est de représenter un excellent compromis entre limiter la
résista~'ce et employer la force, tout en ne dépassant pas le temps di.~,}onible. A ces quat:-c
méthodes, l'on peut opposer deux autres làçons de mener le changement.
1 MACHIAVEL, LI! prince. cité par I. A~SOFF, op. cil.. pJgc 249.
2 Voir 1. ANSOFF, op. cil. chJpitre 17.
1-

85
Méthode 2. Thomas PETERS ct Nancy AUSTIN proposent en effet deux méthodes
principales: l'approche du changcmcIll forcé ct le processus de di ffusion naturelle. Le
challgement forcé consiste à réaliser un programme puis de rédiger un manuel que le
personnel est chargé dc fai re app] iquer. S'i 1 pcut pCnllcttre d' cnrcgistrer au début quelques
succès, ce modèle cst ccpcndant vitc freiné par l'absence d'un réel cngagement de ceux qui
doivent subir le changement parce qu'ils n'ont ni créé ni adopté de plein gré le programmc et
ne se sentent donc pas propriétaires d'unc part, ct d'autrc part par l'émcrgence à la suite dcs
premières difficultés d'individus qui prcndront plaisir à souligncr la nullité du programmc ct
le caractère accidcntel dcs succès initiaux. Lcm nombre de plus cn plus croissant pCITnet Icur
triomphc et l'effondrcmcnt du programme. La diffusion Ilatllrelle cn revanchc démarre
difficilemcnt et péniblemcnt. Ellc s'appuic sur des hommes sOliis des rangs du personnel et
dotés de l'esprit d'équipe, du courage et de la persévérance nécessaire pour prendrc en charge
les éléments du changement et le conduire d'une part, et d'autre part sur la « technologie de la
diffusion» qui désignc la somme des initiatives prises dans le but d'augmenter l'écho dcs
succès du programme. Cette technologie de la diffusion s'appuie fOliemcnt sur les pctites
victoires remportées par les équipes qui mènent le changement.
Changcmcnt « forcé"
Diffusion naturellc
Début de réai isation sous
Standardisation
l'eITct de la pression
JI" prématurée
~n 'ch",","",;d""
Résidus
V
F==::::::!
o
1
rcmps --i>
Schéma 7 : Changement forcé et diffusion naturelle,
Source: Th. PETERS et N. AUSTIN, op. CiL, page 322.
Le schéma 7 ci-dessus compare le processus de diffusion naturelle à l'approche du
changement forcé. Le changement forcé est imposé et plafonne rapidement tandis que la
diffusion naturelle est plus lente au départ mais, sui\\'ant la fOnlle d'une courbe exponentielle,
elJe devient par la suite efficiente et plus rapide.

86
La diffusion naturelle a pour base « l'autonomie guidée», le sentiment de propriété,
les petites victoires et le principe de la participation volontaire qui permet au processus du
changement de trouver son régime de croisière par lui-même. C'est un processus long, qui
demande beaucoup de patience mais paye et peut déboucher sur une heureuse irréversibilité
du modèle. Encore faut-il que la conduite globale de l'entreprise le permette car les thèmes
que soulève le processus de diffusion naturelle (personnel, esprit d'équipe, initiatives,
autonomie guidée, sentiment de propriété, participation volontaire ... ) présagent d'un modèle
particulier de fonctionnement de l'entreprise.
2- LE lVIODELE DE FONCTIONNEMENT DE L'ENTREPRISE.
Il faut en effet que l'entreprise soit un système dont le fonctionnement est basé, pour
reprendre le mot de Th. PETERS et R. WATERMAN, sur « des valeurs compulsives, simples
et belles» qui prennent en compte la rationalité de la gestion d'entreprise mais qui font la part
belle à plus d'ingéniosité, plus de rapidité dans l'action, plus de créativité. C'est un modèle de
fonctioill1ement simple, souple, attentif à tout signal révélateur et obstiné.
Après la seconde guerre mondiale, il était très difficile aux grandes entreprises, en
majorité américaines d'échouer. Comme l'explique W. MORRIS, «seul un management
d'une totale incompétence aurait pu empêcher l'Amérique de profiter du boom »1. Il suffisait
aux entreprises d'ouvrir les vannes à fond pour réussir, tant la demande intérieure et les
marchés européens ne demandaient qu'à consommer. Au début des années 70, une nouvelle
réalité s'imposa: l'OPEP, le défi japonais, l'agitation sociale et politique et l'émergence
d'une nouvelle force de travail (Asie du Sud-Est) suivie par l'expression des besoins très
différents de ceux du passé. Les erreurs de gestion amorcèrent une remise en cause profonde
des pratiques en cours relevée par R. HAYES et B. ABERNATHY dans un article qui
dénonçait la mentalité des entrepreneurs intéressés par des chiffres au détriment des fonctions
aussi essentiellement que la fabricatiOl/. On sonnait ainsi le glas des systèmes d'analyse sans
âme et l'on soulignait les dégâts causés par l'intérêt porté aux dossiers au détriment des
indi vidus 3.
1 William !\\'IORRlS, A l'''I/l! ofpassion, cité par Th. PETERS Cl~' ..... USTIN, op. ci!.. page 15.
2 Robert HA 'l'ES et Bill ABERNATHY. « Nous allons tout droit au déclin économique -'. f!mTard Business
Reviell',
cité par Th. PETERS et N. AUST''-J. op. cil., page 16.
J D'autres livres OiH tr:lÎté du même sujet. \\\\'illian1 OUCHL Théorie' (aire face aIl ihj; F,'/.'(I/1((is. Inter
Éditions, Paris 1982 ; et Richard PASCALE et Anthony ATl-lOS. Le /I1allag~lIIcl/I esl-if 1111 an JI/pOilais ?, Les
Editions d 'Organisation, Paris. 1984,

87
L'approche numérative et rationaliste dans le domaine du management domine dans
les Universités et Ecoles de gestion. Elle cnseigne que des professionnels du management
bien formés sont capables de gérer n'importe quoi. Elle justifie (ou cherche à le faire) toutes
les décisions par des analyses objectives. Mais, comme l'affimle Th. PETERS ct R.
WATERMAN, elle n'explique pas cc que les meilleures entreprises ont apparemment
compris: .elle n'apprend pas à aimer le client; elle n'enscigne pas aux entrepreneurs qu'il est
primordial de traiter les employés en gagnants; elle ne montre pas à quel point ceux-ci
s'identifient à leur tâche lorsqu'on leur pel'met de s'exprimer librement; elle n'explique pas
pourquoi un contrôle de qualité spontané est plus efficace qu'un contrôle imposé; elle ne dit
pas de choyer les membres les plus innovatcurs du personnel; c1le n'ordonne pas de déployer
toute l'énergie nécessaire pour défendre la qualité et le service à la clientèle, ni de fabriquer
des produits qui durent et qui marchent; clle ne démontre pas que le rôle principal du
manager est de façonner des valeurs pour l'entreprise; elle ne suggère pas que la productivité
puisse reposer sur la fierté de faire partie de l'entreprise et sur l'enthousiasme dans le travail;
elle ne parle pas du leadership 1.
Pourtant, « ce dernier concept est cnlcial (... ) au point que les mots « manager» et
« management» devraient être bannis à son profit. Le temle « management» est trop souvent
associé à des images négatives (celle du policier, du juge, de l'analyste froid et calculateur),
alors que le mot« leadership» évoque énergie, esprit d'entreprise, libération et croissance »2.
Comme le dit W. BENNIS en fin de compte, «trop d'entreprises souffrent d'un excès de
management et d'une carence de leadership »3.
Le modèle de fonctionnement de l'entreprise est donc celui qui apparaît sur le schéma
8 ci-après. Il s'agit de :

Accorder un soin exceptionnel aux clients grâce à une qualité et un service exceptionnels;

Innover constamment, partout et en tout 1ieu dans l'entreprise;

Motiver le personnel par la confiance et le respect de la dignité et du potentiel créatif de
chacun dans l'organisation; et
1 Th. PETERS el R. WATERMAN, op. cit. pages Jq-so.
2 Th. PETERS et N. A USTI N op. cit, pages t 7-\\ S
J Warren BEi\\!NIS et Burt NANUS, Dil'igt.'r: les secrC'lS dt.'s 1IlC'i/lc/ll'es el/lreprisf?S, Inter-Editions. Paris, 1985,
page 17.

88
CHERIR
INNOVER
LE
SANS
CLIENT
CESSE
rvIOBILlSER
LES
HOMMES
Schéma 8 : Le modèle de fonctionnement de l'entreprise.
Source: Th. PETERS et N. AUSTIN, op. cil. page 32.
o
Pratiquer le leadership qui rclie lcs autres élémcnts cntre cux et illumine l'organisation
car, leadership signifie vision d'avenir, l'optimismc et dynamisme, enthousiasmc,amour,
confiance, fougue, passion, obsession, cohércnce, utilisation de symboles, attention pOttée
aux autres, mise en scène théâtrale (et son organisation), créations d'innovateurs à tous les
niveaux, et bien d'autres choses encore. Et c'est de ce modèle de fonctionnement que
découlent, presque évidemment, les objectifs de l'entreprise.
3- LA NATURE DES OBJECTIFS DE L'ENTREPRISE.
Grosso modo, l'entreplise poursuit des objectifs généraux d'efficacité économique ct
de sécurité qui se matérialisent par l'ambition de réaliser le plus grand profit possible et par
une attitude spécifique à l'égard du risque. Il s'agit pour l'entreprise de tirer le meilleur profit
possible des ressources dont elle dispose.
Il faut relcver ccpendant, avec CYERT et MARCH 1 que seuls lcs hommes peuvent
avoir des objectifs. et qu'une entreprise ne saurait Cil avoir d'autres que ceux que scs
par·tïcipants inf1uents ,:dcrminent d'un COILi1lUIl accord. Les Ot)jcctifs de l'cntreprise sont
donc avant tout les objcctifs des hommes qui fOnllent
l'organisation: devenir plus
innovateurs, être cie meilleurs vendeurs, améliorer constammcnt les relations sociales ou
1 R.M. CYERT et J.G. MARD-!, A beh(/\\'io/lm!lheory o/Iile finI!. op. CiL, ChJpitre 3.

89
acquérir une compétence que J'on n'avait pas jusque-là. Et c'est j'ensemble de ces buts qui
constitue l'objectif suprême de l'entrcprisc: êtrc le numéro 1 dans son secteur d'activité. Si
des entreprises luttent pour offrir le mcilleur produit a leurs clients, pour innover
constamment ou pour respecter leurs membres, c'est dans un seul et unique but: améliorer
leur perfomlance et devenir les meilleurs'
« Devenir Ics meilleurs» est une quête pe1l11ancnte et quotidienne. 1] ne s'agit plus
seulement d'apprécier la réalisation de ses objectifs sur des livres comptables en fin
d'exercice, mais cie relever chaque mois, chaque semaine, chaque jour, les points sur lesquels
l'entreprise a avancé par rapport au niveau qu'elle avait hier.
« Devenir les meilleurs» est à l'image du modèle de fonctionnement cie l'entreprise:
le leadership, la motivation, l'innovation et les clients. Cela suppose (et répond à l'une des
questions soulevées lors de l'étude exploratoire) une mutation profonde de l'organisation mise
1
en relief par BOYER et visant à pousser la fi1l11e à être toujours toumée vers l'extérieur, à
« sentir» les changements alors qu'ils sont à peine perceptibles et à «s'adapter sinon
devancer les évolutions de l'environnement »2. En effet, si la clientèle et l'innovation sont des
variables toumées vers l'extérieur (pour 1'entreprise), le personnel et le leadership, bien
qu'intemes, peuvent aussi le devenir: si l'on exige de chacun des membres du personnel,
depuis la réceptionniste jusqu'à l'ingénieur, des innovations pratiques, on transforme chaque
employé en une sorte de radar toumé vers l'environnement et donc capable d'adaptation et de
création. De même, le leadership tel que défini ci-dessus suppose d'abord le « management
baladeur»3 ; c'est-à-dire se balader effectivement avec des clients, les vendeurs et le
personnel. C'est une pratique qui signifie recevoir les premières vibrations de la nouveauté et
permet donc de rectifier le tir et/ou d'attaquer.
« Devenir les meilleurs» suppose souplesse et rapidité, alacrité et multiplicité, rigueur
et femleté :

Souplesse par l'autonomie, la liberté et le contact avec les gens; rapidité dans l'action et
principalement dans l'innovation où il faut à tout prix faire, aménager, tester et
expér::"enter toutes les id~es innovatrices pOl:: les lancer le plus vite possible sur le
marché.
1 Voir la 'l'clion 1 du présent chapl:;·e.
2 Philippe TE:-vIPLE, « Le processus (l'in:lOvation dans les entrcpri,cs 1) op. cil., page 16
3 Nous reviendrons sur ce concept plus loin

90
o
Alacrité par l'attention, la confiance, le sentiment de propriété patiemment inculqué aux
membres du personnel, l'enthousiasmc et les célébrations de ceux-ci car, il faut le dire, ce
ne sont pas les techniques qui fabriqucnt les produits de qualité, éduquent les enfants ou
ramassent les ordures à tcmps; cc sont des hommes traités en adultes responsables à
créatifs. Par conséquent, le managcmcnt, c'est d'abord prendre soin et s'intéresser, en
particulier en célébrant chaquc individu tous les jours de mille manières différentes. Les
célébrations ne sont pas un point de détail en management, mais manifestement une clé du
succès.
o
Multiplicité par j'émiettement de l'objectif suprême en microbuts assignés à chaque
individu et parfaitement réalisables dans un laps de temps fixé d'avance; multiplicité par
l'apprentissage sous forme d'expérimentation en continu; et multiplicité par la mise en
place de plusieurs petites équipes de travail orientées vers un objectif précis.
o
Rigueur et fenneté par le respect des délais et un attachement farouche aux valeurs
partagées de l'entreprise, à la culture cie l'organisation.
« Devenir les meilleurs» signifie porter une attention constante à l'amélioration de la
perfonnance de la finne dans tous les domaines concemant sa gestion. Mais cela signifie aussi
d'avoir un créneau bien précis car l'on ne peut être le meilleur en toutes choses: en matière
d'excellence, il faut choisir son cheval de bataille. Cela peut être « le client d'abord»,
« l'innovation d'abord », ou encore « le service avant tout» ; il faut que ce soit une recherche
pennanente autour de laquelle s'articule la culture de l'entreprise.
Ainsi donc, la « flexibilité offensive» s'inscrit :
o
Dans un système où la volonté de changement est clairement établie et s'irradie par un
processus de diffusion naturelle;

Dans un système au modèle de fonctionnement basé sur des « valeurs compulsives,
simples, et belles» qui s'articulent autour de quatre mots: leadership, clients, innovation
et motivation;

Dans un système poursuivant l'objectif suprême d'« être le meilleur» dans un domaine
précis par rapport à la c-.)ncurrence.
Il faut cepend:lllt mettre sur pied Ic~; conditions favorables à la diffusion naturelle du
changement; il faut inventer des « valeurs cOIl'pulsives » et en faire le moule sur lequel doit
s'ériger j'entreprise; il faut produire en quantité mais surtout en quaiité, dans le domaine

90
Cl
Alacrité par l'attention, la confiance. le sentiment cie propriété patiemment inculqué aux
membres du personnel, l'enthousiasme ct les célébrations de ceux-ci car, il faut le dire, ce
ne sont pas les techniques qui fabriquent les produits de qualité, éduquent les enfants ou
ramassent les ordures à temps; cc sont des hommes traités en adultes responsables à
créatifs. Par conséquent, le management, c'est d'abord prendre soin et s'intéresser, en
particulier en célébrant chaque individu tous les jours de mille manières différentes. Les
célébrations ne sont pas un point de détail en management, mais manifestement une clé du
succès.
Cl
Multiplicité par l'émiettement de l'objecti f suprême en microbuts assignés à chaque
individu et parfaitement réalisables clans un laps de temps fixé d'avance; multiplicité par
l'apprentissage sous forme d'expérimentation en continu; et multiplicité par la mise en
place de plusieurs petites équipes de travail orientées vers un objectifprécis.

Rigueur et fernleté par le respect des délais et un attachement farouche aux valeurs
partagées de l'entreprise, à la culture de l'organisation.
« Devenir les meilleurs» signifie porter une attention constante à l'amélioration de la
perfomlance de la firme dans tous les domaines concernant sa gestion. Mais cela signifie aussi
d'avoir un créneau bien précis car l'on ne peut être le meilleur en toutes choses: en matière
d'excellence, il faut choisir son cheval de bataille. Cela peut être « le client d'abord»,
« l'innovation d'abord», ou encore « le service avant tout» ; il faut que ce soit une recherche
pemlanente autour de laquelle s'articule la culture de l'entreprise.
Ainsi donc, la « flexibilité offensive» s'inscrit:
o
Dans un système où la volonté de changement est clairement établie et s'irradie par un
processus de diffusion naturelle;

Dans un système au modèle de fonctionnement basé sur des « valeurs compulsives,
simples, et belles» qui s'articulent autour de quatre mots: leadership, clients, innovation
et motivation;

Dans un système poursuivant l'objectif suprême d'« être le meilleur» dans un domaine
précis par rapport à la concurrence.
Il faut cependant mettre sur pied les conditions favorables à la diffusion naturelle du
changement; il faut inventer des « valeurs compulsives» et en faire le moule sur lequel doit
s'érigel' \\'entreprise; il faut rroduire en quantité mais surtout en qldité, dans le domaiœ

91
choisi pour exceller ... Il faut, à chaque fois, innover. L'Innovation a une importance pour la
« nexibilité offensive» telle qu'elle justifie que lui soit consacré le paragraphe suivant.
H- LA DYNAMIQUE INNOVATRICE.
L'innovation, c'est la VIC; là où elle finit la mort surgit. C'est ce caractère vital de
l'innovation qui lit dire à André GIRAUD, alors ministre français de j'industrie: «je suis prêt
à signer, quitte à laisser en blanc la date précise, l'acte de décès que l'entreprise qui ne
renouvellerait pas des procédés et ses produits)/ Rien ne résiste ù l'innovation: ellc rend
obsolètes les machines et les produits jugés \\cs plus durables; el1c change les modes; elle
détraque les h~lbitudes acquises. On la retrouve à tous les niveaux cie l'organisation; entre
autres, au niveau de l'atelier, au niveau du produit, au niveau de l'organisation. L'innovation
peut par ailleurs être au cœur d'une des principales tactiques de la « Ilexibilité offensive».
]- L'INNOVATION A L'ATELIER.
L'atelier est un des lieux privilégiés de la coordination et cie l'expérimentation des
nouvelles techniques car en son sein elles sont confrontées d'une part, aux conditions
générales de rentabilité du capital, d'autre part à ceux qui les mettent en œuvre à des lins
productives, les travailleurs. Ceci est important pour comprendre la mutation qui s'opère de
plus en plus dans l'atelier.
En 1972, une enquête réalisée par CARTER2 révélait premièrement, que 5%
seulement du temps de cycle moyen d'une pièce dans un atelier d'usinage était effectivement
passé sur des machines-outils et le reste, c'est-à-dire les 95% restant, était du temps de
stockage et de transfert; deuxièmement, que sur les 5% du temps que la pièce passait sur la
machine, il n'y avait que 30% cle temps producti L soit 1,5% du temps de cycle en usinage
effectif; et troisièmcmcnt. qu'ulle machine attcndait les pièccs 55% du temps ouvrablc, ct sm
les 45% du temps pendant lesquels une pièce se trom'ait sur la machine, 1/3 étaient dépensés
en réglage, positi()nnement et seulement 113 cn usinage. l es di tllcultés rCI1Col1trées dans
l'organisatiol1 d'un Ilux de production continue à cause de la sous-utilisatiol1 des machil1es-
1 André GIRALD. cit~ pJr Je;:l1l-\\'brie DOC;13LET. '( [Il loik de t'ond 1). Srl'lll':J;i,'s cl ','11 1!"'11li.l' cs Cl !JloduilS
lIoun'aux. op. ci!., P~~l' 6
, CARTER. Cill; par C,:.i\\
DOLJ\\IEI:\\GTS. "1..:' C'OIlC'l'pl, de tlo:ibIillé). Ral)I)()1'! cI,'s 3,;/11('.\\ jOlll'lules
sciellli{iquL'S el ll'l'lill/IIIIC.\\ de la pmi/llelioll aU/(}lIl.'1fi.I';,·. 3-~-.:' Juin 1981. ADEP,-\\. Touioll'c'.

92
outils et de la non-fiabilité du capital humain (ouvriers) rendaient très faible le taux de
productivité de l'atelier traditionnel.
D'un autre càté, la production fonement automatisée illustrée par la chaîne de
montage et/ou la ligne tr<1I1sfert battait de l'aile il cause de son inad,lptation ,lU contexte
nouveau d'un marché en modification continue. Il fallait changer celui-Iù et repenser celui-ci:
les Systèmes cie Production Automatiques Flexib1cs (Sr ;\\F) firent ainsi leur apparition. Plus
connus sous le nom c1'A.. teliers Flexibles, « les SPAF marquent l'avènement d'une VOle
médiane de développement des micro-systèmes producti l's, entre la spécialisation ct la
polyvalence »1.
On peut noter, avec Ramchandran JAIKUi'v1AR, qu'« un système de fabrication
flexible est un groupe contrôlé par ordinateur cle postes de travail reliés par des systèmes
automatisés de manipulation de matériel ( ... ). Toutes les {lctivités dans le système - la coupe
du métal, le monitoring d'un équipement en bon état, le passage des pièces cl 'une machine à
l'autre, la mise en place, l'inspection, l'ajustement de i'équipement, le maniement du
matériel, la programmation et la répartition - sont sous contrôle précis informatique. Quand il
fonctionne, le système est une usine miniature automatisée »2. Aux Etats-Unis, on résume
laconiquement cette définition comme ceci: « saisir la pièce et ne plus la reposer jusqu'à ce
qu'elle soit travaillée ».
Consécuti fs au développement des automatismes programmables, les SPAF sont des
moyens de production automatisés en ce sens qu'ils sont pilotés par des programmes
préétablis avec un minimum d'intervention humaine en cours d'opération. Ce sont des
moyens de production flexibles car ils peuvent être pilotés par des multiples programmes et
peuvent donc réaliser de multiples opérations ou produits. Ce sont des moyens de production
qui constituent l'innovation majeure dans l'atelier moderne.
Cette inno\\'ation marque un changement important, « Juge inéluctable »3 et dont le
succès résulte d'une ~lm~lioration continue des méthodes par l'apprentissage de l'organisation
et par 1'expérimenti1tiOII Les SPAF préscntellL des a\\antages mu!ti ;url11cs~ :
1 P. BESSON, op. cil.. ;_)3g~ 121
,
] .
. R. JAIKU1\\·I.·\\R. " L~s :llè lèrs tlè:\\iblès : un(' comparaison J:lpon-LS.-\\ ". les CIl!z{,"I'.1 Fraliç'(!{s. op cil.. pJge
66
j
D. GER\\VI~ é{ le T.·\\l~O"'D[:::\\L:. "LJ tll'.\\ihllilc· d:lns lès processus de prl)dUClioll: lé CJS d~
l"automobik». R!:"l'IIe rl'UIIÇll{S<' de Gnlion. n° -+6. op. ciL. pagé '!-ï.
4 Synthèse [Jite J pJrtir de P
I3ESSO'-.'. op. cil.. pJgèS SI et SUi\\Jllles.

93

Ils pemlettent une flexibilité des productifs ct de fonctionnement. Les qualités propres aux
automatismes programmables autorisent en cfCct la fabrication de produits diffërents sur
les
mêmes
moyens
de
production,
de
même
que
l'évolution
du
produit
sans
transformation coùteuse de ces moyens. Ils permettent aussi une reconfiguration rapide cie
la fabrication en cas de fluctuations de 1a demande ou d'aléas de fabrication.
o
Ils permettent une amélioration cie la qualité et des délais de fabrication. Ils assurent un
niveau constant de qualité en éliminant les erreurs humaines gràce aux contrôles
systématiques en cours de fabrication L·t de. minimiser les stocks cl'encours ct de produits
finis.
o
Ils permettent une réduction des stocks ct une économie cie capital fixe. Ils clonnent la
possibilité, par des délais de production compressés, d'approcher l'idéal en matière de
gestion de la production: lancer un lot le plus tarcl possible ct le fabriquer le plus vite
possible. En conservant les programmes-pièces, ils permettent de faire face aux nécessités
de l'après-vente et rendent possibles l'utilisation de l'appareil de production 24 heures sur
24 et l'adéquation entre le cycle de vie d'une classe de produits et le cycle de vie d'~ln
processus de production.
Les « technologies flexibles» 1 n'ont pas seulement pemlis de révolutionner l'atelier.
Elles ont poussé leurs tentacules jusqu'au produit fabriqué,
2- L'INNOVATION SUR LE PRODUIT.
La grande innovation introduite sur le produit par les « technologies flexibles»
s'articule autour des notions de « produit nexible », de « produit modulaire» ou de « produit
conditionnel ».
Le produit flexible est celui qui pennet de satisfaire plusieurs besoins~ à la fois;
plusieurs désirs différents. Un exempk remarquable de « produit flexible}) est celui des
moulins ou moulinettes qLle l'on retrou\\e de plus en plus dans la cuisine des ménagères
1110tkrnes, Ces petites m~h'hines pennettent en L'fCct de satisfaire pratiquement tous les be:,,)ins
de celle qui \\'Cut faire 1a cuisine: écraser des tomates, r<Îper des Ctlrottcs ou des choux, battre
1 R. .IAIKU\\L\\R. « L<:s Jtl'Iic'rs tk\\ibks : un<: cOl11p~lI:lison JJpon-US:\\ », L's Cuh/as FIUl/ïU1s , op. Cil .. pag<:
66.
il
2 Pelit Rob<:rl 1990: [3<:'soin = Exig<:l\\ce nl;e lié' b I\\Jlure ou de 1:1 \\'ie soci:Jk
Celle dét-lnlllOI\\ [Jrg<: :1uloris<: dl'
; :
penser que b boisson ,( COCJ cob ». pJrce qu'dlc p<:rl11ct d'':t:Jncher SJ soif ou d<: dégust<:r du whisky, est un
. ,
produit nexibk puisqu'elle SJlisfJit Jinsi deux désirs.
'
1-

1
94
des œufs, fabriquer de la mayonnaIse, hacher de ]a viande, préparer une pâte à gâteaux,
moudre du café, couper cles œufs ou des tomates ou ùes carottes en fines rondelles, extraire du
jus d'un fruit. .. Tout ceci sur la même machine, all mème si besoin est, en utilisant
simplement quelques pièces cie finition interchangeables.
Le produit modulaire est issu de la mise au pOint des automates programmables.
Comme l'écrit BESSON, « le modu\\c est un produit interchangeable destiné à ùe multiples
emplois. La multiplicité cie ces emplois permet de simplificr le système de production tout en
assurant la diversiClcation nécessaire des produits. Par cxcmple, une gamme de produits très
large peut n'être constituée que d'un nombre réduit de moc!ules agencés différemll1ent suivant
\\cs besoins à satisfaire» 1. Le « produit modulaire» constitue le CŒur du robot et de ]a
machine outil à commande numérique (iv1.0.eN.) dont la llexibi lité repose justemcnt sur le
caractère (re) programmable du module.
Le produit conditionnel provient de la poursuite de l'objectif de souplesse, élément
fondamental de l'analyse du risque de l'entreprise. Etant donné la faible fiabilité de la
prévision, la fimle doit choisir sa politique générale et ses investissements de façon telle
qu'elle puisse faire face au maximum de situations possibles. Il faut alors, comme le note B.
DAUDE, que « chaque produit - sous réserve de la satisfaction de certaines contraintes
financières - répondre au plus grand nombre d'états économiques; c'est-à-dire que, si à
chaque état on associe un type de demande et un type de marché, le produit devra permettre
de couvrir le plus grand nombre de demandes hétérogènes et de marchés différents »2. Cette
définition du « produit conditionnel» pell11et de penser que non seulement l'entreprise doit
sélectionner le produit qui lui pennet de faire face au maximum de situations du ou des
marchés (s) qui lui pell11et de fabriquer le maximum de « produits conditionnels». L'un de
ces produits est par exemple le laser qui pemlet la mise au point d'un grand nombre de biens
destinés à des marchés tr~s di fférenrs.
Le rythme des innovations sur le produit a généré des études sur le degré de nouveauté
des produits nouveaux. Ainsi d'après une c1<lssi!ication pr~sentée en 1957 par JOHNS00: L:t
J
JONEs
cl
développée par DAUDE-1, le degré cl'innovation cl'un produit résulte cl'une
1 P. BESSON. op. cil. Page 16.
2 Bernard D:\\UDE. « Décision Cl inno\\"ation n. Re'llIe FI'lIlI\\'uisc tic' Ccslioll, nO ~6. jtlin.-jllillet-JoLÏt 19S~. page
23.
3 S.c. JOHl\\'SO?', Cl C. JO:'\\ES, ,( Ho\\\\' 10 organiSé loI' ne\\\\' producis », 1-1111'\\(//</ BIiSilli!sS Rc\\'ll:'\\\\', "-!Ji 1957.
• B. D:\\UDE. « Qu'est-cc-qu'lln produit nOU\\CJU ') Scs cJrJclàistiques n, Blll/elill dt' /a Caisse N(lfiOlla/e clt!s
Marchés dt!
/ 'EIIII CN:\\IE. ne ::, 7, 4"Ille trimcstre 1972, Il [31.
1-

, ,
95
combinaison de nouveautés regroupées clans le tableau 7 suivant celles qui ont trait au concept
(dont il est la matérialisation), d'une part, et celles qui s',lttachellt il la technologie sur laquelle
repose sa réalisation, d'autre part. Le concept, comme la technologie, peut être traditionnel
(T), simplement (lmélioré (A), perfectionné (P), ou alors franchement nouveau (N). Dès lors,
seize cas de figure sont envisagés en théorie:
,I~CI
..
I_T-----+-_A_I, ~p_L N-l
=co:..:.=nc.l,_'+
lGchn()I(l~IC
.------J
1
N' 1
-----------fI
1
1
1 p
_.~_I
l e - - - - - '
1
1
A
1
1
T
[--------1.__
1
1
Tableau 7 : Degré de nouveauté des produits nouveaux.
Source: P.Y. BARREYRE, « Typologie des innovations», op. cit., page 13.
On constate, à partir du tableau, que plus on se déplace vers le nord-est et plus le degré
d'innovation est élevé. A contrario, le cas où le concept et la technologie sont traditionnels ne
peut guère corresponclre cl une innovation que dans l'hypothèse où il y a application à un
marché nouveau. Quel que soit le degré d'innovation, il vaut mieux en produire autant que
possible parce que, entre autres motifs, «diverses investigations ont montré que les
entreprises qui réalisent les innovations techniques présentent, fréquemment, l1l1 caractère
relativement innovatif sur divers plans: méthodes d'organisation, style de gestion, etc »1.
Ceci amène à s'interroger sur la source de l'innovation dans la firnle.
3- QUI DOIT INNOVER DANS L'ENTREPRISE.
A la différence des technologies traditionnellcs~, saufpeut-ètre la machine à vapeur et
l'électricité, les technologies nouvelles sont:
o
transversales
car
elles pell\\'Cnt
concerner n'importe quel
domaine de
l'aCli\\'ilé
économiCjLle et n'imporle que' marché;

combinatoires car chaque technique ne peut progresser qu'en faisant appel a d'autres
teclmiqlles auxquelles cl::,' sc combine en assipli1ant leurs derniers il"quis ; et
1 P. Y. BARRE'{RE. op. CiL. PJgl' \\ 5
'Voir Jacquès [v[ORI~, « L'innovation. lIne allJire dè gestion ». Les Lahit'I'.\\' FI'iII/ç'ais. na 23~. op. cil., page 7~.

96
Cl
contagieuses car clics sc diffusent, irriguent les techniques ct technologies VOISines
qu'clics impulsent en provoquant un effet d'entraînement ct un effet multiplicateur de
leurs performances.
Parce que la technologie est <)ujourd 'hui le princip,ll ct parfois même le seul facteur
susceptible d'améliorer de façon décisive la compétitivité de l'entreprise par ses effets sur le
cout, les performances ou la qualité, ou cie lui fournir !cs tickets cl 'entrée dans \\cs nouveaux
marchés qui assureront sa pérennité; il est primordial que la mobilisation cles ressources cie la
firme, sous toutes leurs formes, s'exerce prioritairement dans des domaines qui stimulent
l'innovation grùce ù laquelle l'entreprise pourra « faire la di fférencc» vis-à-vis cie ses
concurrents.
Entreprises de III oin-~
Entreprises de 100 il
llreprises de p~
de 100 personn es J
499 persoJlnes
e 500 personnes
1
fi,,~tiOO-
Direction
- -
Direction
Services
Services
d'études
d'études
Services
d'élUdes
Encadrement
Personnel
Encadrement
Personnel
Clients
Personnel
Clients
Clients
Follmisseur
FOl''-'';''f'lIr
F()II rn j, ,1"11 r
Orga. Ext.
Orga. Ext.
Orga. Ext
Autres
Autres
Autres
Orga. L\\t = Organisme Extérieurs: Organismes de financemellt, bureaux conseils.
Tableau 8 : Les sources dïnnovation dans l'entreprise
Source: CPE, tir~ de T. GRILLET de D. LE CONTE DES FLORIS, France High Tech, Autrement,
P~ii:;. 1985, pages 192-1 C)_~
La recherche d'une évaluation cie cette mobilisation cles ressourcc's tournées \\"Crs la
création a conduit, il ya qUç!ques annéçs. ]çs étllciçs du Centre de Prospective ct d'Evaluation
(CPE) français \\1:)~l1lt Ù répondre il la LjL·.'stion «qui illllOl'e dUl/s ! 'elllreprise ? ». L'.::'S résultats

97
de ces études, consIgnés dans le tableau 8 ci-dessus, diffèrent selon qu'il s'agit d'une
entreprise petite, moyenne ou grande par rapport au nombre des employés.
En retenant, par ordre d'importance, les tr01s principales sources d'innovation pour
chaque type cl 'entrcpr"isc, on obtielllia classi Clcation du tableau 9 suivant:
SOURCES D'INNOVATION
Entreprises de Illoins de
1. Direction
2 SeJ\\îce d"élude
3. ClIents
Il
100 personnes
Entreprises de 100 à 499
1 Services cl 'étudc" , 2. Direction
3.
1
Clie~
personnes
Entreprises de plus de 500
1. Senices cl 'élude
2. Personnel
3. [nC~clrClllcnt 1
personnes
Tableau 9: Classiflcalion des troIS princIpales sources clinno\\'alion par types d·entreprises.
Source: Eluboration personnelle.
On note ainsi que la direction, le service d'étude et les clients jouent un rôle de
premier plan dans la capacité innovatrice de l'entreprise. A ceux-là s'ajoutent dans les
grandes entreprises, le personnel et les cadres. De ces cinq sources d'innovation apparaissent
deux tendances lourdes:
- Les clients. Ce sont les uniques destinataires du produit de l'innovation. Il faut donc
les écouter, recueillir leurs avis, tester le plus tôt possible le prototype du futur produit auprès
d'eux et même les intégrer simplement dans le processus d'innovation. Comme l'affimlent
PETERS et AUSTIN, « ce n'est qu'en chimie industrielle que le département de Recherche et
Développement semble être à l'origine de la plus grosse part des idées. En fait, toutes les
analyses montrent qu'une large majorité des idées de nouveaux produits proviennent des
utilisateurs »1. Les services d'études sont importants pour l'innovation, mais ils « raisonnent»
souvent en temles de marché, de positionnement stratégique, de marketing ... pourtant, on n'a
jamais vu « un marché» payer une facture. Cc sont les clients qui le font.
- Le personnel. C'est lui qui trans!onne en produits finis les idées glanées çù ct li. Il
faut donc le 1110ti\\er entre autre, P::lI' une culture d'entreprise qui le célèbre; une culture qui
récompense ceux qui gélgnent, soutient l':c!:\\ qui perdent ct qr:! permet au.\\ idées ci 'éIVélncer.
Pour les entreprises réellement innovatrices, la question clé est de transformer 1o~/o, \\'oirc
30% du personnel en champion, de sortir sans 311'(', des nouveautés. d'apporter des
améliorations pratiques. petites ct grandes, au:\\ produits com111e au !onctionnement inlell1e, 1\\
1 Th. PETERS et 0:. :\\USTIN. op. CIl. PJ:;e 199.
1
1
-

98
faut donc transfom1er des gens simples en expérimentateurs vigoureux ct enthousiastes; ct
réaliser des résultats extraordinaires avec des personnes ordinaires Ceci sc fait dans un
contexte pal1icu]ier d'innovation' et génère J'une des tactiques favorites de la «flexibilité
offensive» à savoir, l'offensive flexible.
4- L'OFFENSIVE FLEXIBLE.
La « flexibilité oITensive» n'est pas seulement l'offensive flexible. Celle-ci constitue
l'un des principales tactiques de celle-là en ce sens que l'entreprise en quête de « flexibilité
offensive» utilise souvent sa capacité offensivement flexible pour atteindre son objectif
L'offensive tlexible sc caractérise par la ïapidité dans la production ct la distribution
de « produits flexibles» ct/ou dans ]a diversi flcation de ses activités:
- La rapidité dans la production et la distribution de « produits flexibles» permet à
l'entreprise soit de rattraper en le corrigeant si possible un retard dù à une échappée de la
concurrence; soit de modifier l'environnement par un produit aux attributs suffisamment
multiples ct complexes qui en compliquent l'imitation ct lui donne un temps de répit (et de
gains financiers). L'offensive flexible caractérise l'entreprise innovatrice qui met sur le
marché des produits «flexibles» à un rythme suffisamment élevé 2 pour faire face à la
concurrence. Ainsi, lorsque l'entreprise MOULINEX lance le produit « Masterchef 30 » qui
est la moulinette dont on a évoqué les caractéristiques antérieurement, elle fait preuve
d'innovation (offensive) par un produit dont la flexibilité n'a d'égale.que le nombre de
services qu'il rend à la ménagère modeme.
- La rapidité dans la diversification de ses activités pem1et à l'entreprise d'être au
bon endroit au bon moment, ou bien d'être le précurseur à un enclroit précis et à un moment
donné. Ainsi peut-elle attaquer sur plusieurs fronts, simultanément ou successivcl11t'nt scion
ses capacités technologiques, en prenant garde, au risque de se disperser, de rester
1 Nous re\\'ièndrons sur k COn[CXlc' de !lnnO\\'31ion 3U plus loin.
, La question du rythme de Ilnno\\3tion l'sr assez contro\\crs~e. L:nè éludè ré:Jlisée par la société l':IELSEN
montre qu'cn une
;:<1née aux
m3ximuIl1.
k
sort d'un
nou\\cau p:oduit est
réglé.
Voir Jean-Philippc'
RENSONNET, « Le contrôle dl' lancement 'J. S!/(lfl;gil'S il 't!//Ireprisc ef /lrodlllrS nOll\\'l'!/IIX. op. cil., page 95.
D'autrès pJrl. l'wITepnsc JI11àic3ine HE\\\\'LETT 1':\\CK:\\RD inlroduJ{ dcs produits nOU\\·C3UX., semble-t-iL 3U
nOl11h!c de hUll p3r se1l13ine :' VOIr Th, PETERS c't N..\\l :STIN, op. cil., p3ge IS:S D·Jutres. cit~s p3r les :IIC'I11CS
f3briquen[ unnOU\\'e3U produit en 2...1, ou S Sl'11131Ilc'S. L CRETON op. cit proposc un prodUIt tous les trois mois.
lnnm'cr ch3que fois qu'on lc peut sel11bll' élrè la ùllc' I11c;dIJnc.

99
principalement dans son domaine de prédilection. Lorsque l'on met sur le marché du
« Maliini Blanc », clu « iv1anini Rouge» et du « i\\'lanini Rosé », on fait preuve d'innovation
(offensive), on fait preuve de diversification (souplesse), mais on reste dans son domaine
d'activité (les apéritifs légers).
Ainsi clonc, 1<1 dynamique innovatrice ,) permis:
o
La modemisalion de l'atelier par la réalisation des systèmes de production autom'ltlques
flexibles;
e
La fabrication,
grâce
a des technologies
appropnees,
des
produits
(, flexibles »,
« modulaires» ou « conditionnels» qui donnent lieu il 1J s8tisfaction de plusieurs besoins
exprimés par l'homme ou pé)r la machine dans la production d'autres biens;
"
Le remodelage du paY'sage innovateur cie l'entreprise qui n'cst plus seulement du ressort
du département R et D, mais qui prend de p1us en p1us sa source dans le personnel motivé
et dans le client écouté;
e
La clarification de l'offensive flexible par rapport à la « flexibilité offensive », notion
qu'il convient maintenant de définir.
III- FORMULATIüNS THEORIQUES.
Les perceptions précédentes de la notion et la dynamique innovatrice qui l'insuffle
conduisent à trois définitions complémentaires de la « flexibilité offensive» : la première par
rapport à la flexibilité défensive, la deuxième par rappoli à l'aptitude à innover, et la troisième
par rapport à l'adoption d'un compOliement nouveau dans l'organisation. C'est ce que l'on
rappellera l'esprit « flex-offensif ».
1-
FLEXIBILITE
OFFENSIVE
VERSUS
FLEXIBILITE
DEFENSIVE: PREi\\'llERE DEFINITION.
Au chapitre précédent, on a \\'U que la notion protéi Îormc de tlexibilité défensivc
traduisclit unc aptitude de l',-ï1treprise il répondre ,11lX modifications cie: l'cnvironnement pour
~)ssurer le maintienl de scs objcctifs fondamentaux. Parce que C('S modifications. continues 0\\1
1 On peut penscr que b
flcxibilité nc puisse sc comprcndrc que si \\'on assurc le maintien de Ses objectifs
fondarnentJux. (eb nc nous scmble pJS c"aet . une cl11reprise de fJbrication dc meublcs en cuir qui, pJrce que la
branchl' n'l'51 pJS portCUSl'. se rl'cycle d:lI1s b produl'llOn des chaussures en cuir nous pJrJit faire preuve dl'

100
brutales, pouvaient être dangereuses ou favorables, l'entreprise dotée de flexibilité défensive
devait être à même d'éviter la catastrophe ct/ou de saisir une opportunité quelconque.
Il s'agit donc pour la flexibilité défensive:
"
de répondre aux modifications de l'environnement;
o
d'assurer le maintien de ses objectifs,
o
d'éviter la catastrophe;

de saisir une 0pp0r1unité pour, justement, é\\ltcr la catastrophe et préserver sa survie.
Anal ysons ces di fréren ts poi nts pour en ressort ir les insu ffisances :
o
Répondre aux modifications de l'environnement, comme on l'a cléjà fait remarquer, c'est
faire preuve d'attentisme parce que cela implique Llne réaction ex-post cie l'entreprise face
à la perturbation.
o
Assurer le maintien de ses objectifs ne semble pas toujours réaliste parce que cela élimine
l'entreprise qui, pour justement répondre aux modifications de l'environnement, change
de branche d'activité en cours d'exercice et qui peut donc difficilement maintenir ses
objectifs.
CI
Eviter la catastrophe comporte, entre autres éventualités, la possibilité de quitter un
secteur d'activité « sinistré» ; et
o
Saisir une opportunité pour éviter le naufrage et préserver sa survie pose le problème de
vitesse de réaction de l'entreprise face à l'occasion qui se présente à elle d'une part; et
d'autre part, cela peut rendre irréalisable le maintien d'objectif préalablement établis,
Au contraire de cette souplesse, la flexibilité offensive se propose de permettre à
l'entreprise :
e
De modifier l'environnement afin qu'il revienne aux concurrents, comme précédemment,
le soin de répondre à la modification ainsi initiée,

D'assurer non pas le maintien, mais la réalisation; non pas de ses objectifs, mais de son
objectifprincipaJ : être le meilleur;

De s":ngager très rapidel,"c'Jlt dans les plus !):,lites opportunités ,:èli sont le fait des
concurrcnts. Cela suppose une forte vitesse d'antIcipation, de réaction et de création; et
une aptitude à créer l'opportunite;
flexibilité. Ulle {elie entreprise P('UI difiïctlc'l1lcl]{ 3ssurer le I1lJinti(,1l dcs obJectiCs qu'elle s'ét3il aUp,HJ\\'ant
fixés! '

101
o
D'avoir une flexibilité que l'on peut qualifier cie totale parce que compatible avec un
éventuel désengagement de la firme cI'une branche cJ'aclivité;
e
De possécler llne capacité aiguë d'aclaptation ct/ou d'intégration cles innovations provenant
cie l'environnement technologique général.
Le tableau lOci-dessus reprend en substance la répartition alnSl faite entre ces deux
formes de flexibilité.
La flex ib i] ité 0 ffensi ve apparaît clonc comme étzl11 t l' apt i tucle cie l'entreprise à mod dl cr
l'environnement et à créer des opportunités par' la production de nouveautés viables sur le
plan commercial, dans Je but de réaliser son objectifprincipal : être le meilleur.
FLEXIBILITE DEFENSIVE
[FLEXIBILITE ~ ~
l-Répond aux modifications de
!J=1nitie les mod ifi Cl tions de
l'environnement
I.l'environnement
2-Assure le maintien des
2-Assure la réalisation de
objectifs
l'objectif
3-Saisie une opportunité
3-Crée des opportunités
4-Faiblc vitesse de réaction
4· Forte vitesse d'anticipation,
de réaction et de création
S-Cherche à éviter la
S-Pratique une politique de
catastrophe
flexibilité totale et exploite
l'environnement technologique
général
Tableau 10 : Flexibilité défensive versus llexibilité offensive,
Source: Elaboration personnelle.
Etre doté de flexibilité offensive, c'est pouvoIr faire preuve de souplesse totale et
pouvoir anticiper, réagir et créer rapidement et à un rythme soutenu, D'où la nécessité
d'affiner cette définition clu point de vue de la créativité.
2- FLEXIBILITE OFFENSIVE ET INNOVATION
DEUXIEME
DEFI~ITION.
Cumme récrit Yvon
I
PESQUEUX , Jcs orientations de l'activité inventive dans
l'entreprise SC)llt classiquement all\\ nombre de trois:
1 Yvon PESQUEUX, L 'el/{I'epnse III/se (11111, honomica, Paris. 1987. page -13.

102
o
Améliorer les conditions de production en inventant un nouveau mode de fabrication ou
en perfectionnant les machines existantes;
o
Améliorer le produit au point de le reconditionncr totalement. Par exemple, l'entreprise
SIEMENS a repris le scanner mis au point par la firme anglaise THOtvl, malS en le
revoyant d'une manière telle qu'aujourd'hui, la firme allemande est présente de façon
notoire sur le marché européen l .
G
Définir les nouveaux procluits. C'est l'exercice le plus dirtlcile car il implique à la fois
création au sens technique du terme mais aussi au sens commercial puisqu'il s'agit de
répondre de manière inédite à un besoin existant ou de faire évoluer cc besoin.
On peut faire correspondre à chacune de ces orientations, une formulation appropriée
de la flexibilité offensive:
- Au niveau du processus de production, la flexibilité offensive caractérise un
processus de production souple, capable d'utiliser successivement ou simultanément plusieurs
produits modulaires, capable cle rentabilité avec une production en série ou limitée, et
complètement intégré à la culture de l'entreprise.
- Au niveau de l'amélioration du produit, la flexibilité offensive se caractérise par la
recherche de constants rajouts (précédés de tests) sur la fabrication, le conditionnement, la
présentation et l'image du produit mis sur le marché.
- Au niveau de la définition du produit nouveau, la flexibilité offensive est la
capacité à fabriquer des produits flexibles ou conditionnels, à produire la nouveauté à un
rythme soutenu. En fait la flexibilité offensive se caractérise d'abord et surtout par
l'innovation comprise au sens de CRETON comme « un processus évolutionnaire» qUI
s'inscrit dans la logique de « la fimle qui régulièrement sort un produit nouveau tous les trois
mois »2. Cette innovation doit être rapide (par l'expérimentation par étape), constante (par la
mobilisation de toutes les énergies de la finne), ciblée (par un lancement adéquat sur le
marché), et peut être illustrée, comme sur le schéma ci-dessous, par des successions (par
grappes ou non) de nouveaux produits:
1 Exemple ci{~ par \\'\\'on PESQUEU\\:. op, cil.
! Laurent CRETON op, cil.. page 9.

103
Progr~s technique
Courbe Cf1\\'C loppc dt~
J'évolution
Succcssion cie \\agucs de produits
(ou grJppl'S cie produits) nouveaux
Schéma 9: Aspect de J'mnovation dans la llcxibilité offensive.
Source: Elaboration personnelle, avec un emprunt chez L. CRETON, op. ciL, page 9.
Ce schéma 9 met en lumière un fait important qui caractérise l'innovation dans la
flexibilité offensive: on n'attend pas que le(s) produites) nouvellement lancé(s) plafonne(nt)
et commence(nt) à décroître pour mettre sur le marché d'autres nouveaux produits.
Flexibilité Offensive 1
1
~
,,,
~
Processus de production
Amélioration du produit
Définition du produit
-souplesse
Rajouts constants sur
création et diffusion
-utilisation de produits
-la fabrication
-rapides
modulaires
-le conditionnement
-constantes
-intégré à la culture
-l'image
-ciblées
-conditionnelles
Schéma 10: La tlexibilité offensive par rapport à l'innovation.
Source: Elaboration personnelle.
Les innovations naissent et « étouffent » le marché quantitativement et qualitativement
au pOlnt où, si celle logique est bien entretenue, on voit mal comment une tellc firme pourrait
n'être pas perfOnllal1lc. Le schéma 10 rcsume la flexibilité offensive par rapport a
j'innovation. L'jn!1o\\'ation est ainsi le conducteur principal cie la flexibilité offensive.
Mais la diftërcilce entre une firme fortement innovatlï(t"
simplement, et UI
firme
dotée de flexibilité offensive réside dans l'esprit qui gouveme ce concept.

104
3- L'ESPRIT« FLEX-OFFENSIF»
TROISIEiVIE DEFINITION.
ANSOFF écrivait déjà 1 que la souplesse oCfensive demandait un certain type de
dirigeants, dotés non plus seulement de compétences managériales ; mais aussi et surtout de
compétences entrepreneuri ales ; ct un certa iil type cl' ell t rep ri ses, mues non plus se u1cment pa l'
un comportement concurrentiel, mais aussi ct surtout par un comportement entrepreneurial.
A partir de quelques éléments, on peut Caire appar'aître sur un tableau, un ~lpcrçu
général du comportement ct cles compétences entrepreneul'i3!cS
Eléments
Com portcmcn t
Elémcnts
Compétcnces
entrcprcncurial
cn trcp rencu rialcs
- -
Orientation
Optimiser la rentabilité
Vision du monde
-Sensible il l'extérieur
potentielle
-Tournée vers cl 'autres
secteurs
-0.'!ul t ina tiona le
-Favorable aux
croisements culturels
QQiectifs
Déterminés il partir de
Valeurs
-Récompenses
l'interaction
personnelles
économIques
compétences/opportunités
-Changements
-Non-confonnisme
Système
-Récompense créativité et
Compétences
-Acquises au cours de la
récompense-
initiative
carrière
pénalisation
-Pénalise le manque
-Dirigeant politique ct
d'initiative
charismatique
-Visionnaire
Struchlre de
-Fluide, sujelle à des
-Capacité il résoudre les
l'organisation
ménagements
nouveaux problèmes
-Activités par problèmes
-Prend de nouveaux
risques
-Insuffle la créativité
Problèmes
Non récurrents, inédits
-Prise de position
novatrice
-Planifie avec
dvnamisme
Tableau \\ 1 : Compor1ement ct compétences entreprcneurialcs.
Source: Elabor::ltion personnelle :i partir de 1. ANSOFl~ op. cit.
Les points rec:.:nsés clans le tabk3U \\ 1 Corment la b3se de ia mentalité qui caraclerise la
flexibilité oflènsi\\·e.
JI s'agit d'ulle organisation conduite par le leadership (tel que
précédemment ciéfini), où la hiérarchie est diluée d3ns la mobilisation de lOUS pour !J
1 1. ANSOFF, op. cil., chapitres 12- 13 plusicurs l'ois cit~s.

105
réalisation de l'objectif fixé (cet objectif étant non pas celui de l'entreprise, mais celui de tout
le monde dans l'organisation).
La mentalité qUI caractérise la flexibilité offensive, c'est le refus du protocole, la
présence quasi physique de l'innovation, l'intervention de tout le personnel dans le
développcment ct le lanccment des nouveaux produits, l'importance accordée à j'amusement
et aux célébrations, la banalisation du travail cie créalion, le suivi et l'écoute ciu client, les
histoires qui se colportent et qui ont un lien avec les valeurs défendues par l'entreprise, une
sorte d'irrévérence vis-à-vis de la hiérarchie.
La
mentalité
qui
caractérise
la
flexibilité
offensive,
c'est
l'apologie
des
comportements non-conformistes porteurs de bons résultats, la politique des portes ouvertes'
et l'encouragement des contacts intra-entreprise, la clébureaucratisation, J'utilisation formelle
des prénoms, l'admission du droit à l'échec et aux erreurs et un mépris pour l'inaction, le rejet
des bureaux individualisés pour la préférence de vastes locaux où 1'011 peut réaliser un produit
de sa conception à sa finalisation.
La mentalité qui caractérise la flexibilité offensive, c'est un type nouveau de risque,
qui dépasse le risque lié à la simple incertitude pour être un saut dans un trou complètement
nOIr.
La mentalité qui caractérise la flexibilité offensive, c'est en définitive l'esprit « flex-
offensif» que l'on peut définir comme étant un mode de vie « brouillon mais de bonne
qualité» qui, sous une apparence humaine, bonhomme et enthousiaste, exige des résultats
pratiques et concrets en tem1e de perfom1ance. En s'adressant aux leaders d'entreprises,
David DGILVY a cette phrase que l'on rattache expressément ici à l'esprit<< flex-offensif»:
« Nommez un vice-président responsable de la Révolution, pour qu'il sème son fC1l11ent parmi
vos collègues les plus conventionnels »~.
Ainsi, l'élaboration de formulation::- rhéoriques du conc~':~t ICI étudié a pcn:lis de
mellre en évidence le fait que:
1 Alors que jusq\\\\c-b la p\\UpiH\\ des entrcpriSl's au CJl1leroun org:lI1isai"111 0pisodiqucmcl1I des « jOUrIll;CS portéS
OU\\\\:rtcS». 13 l3angue !\\kridil'n Call1eroun :J. en d0c,·mbr,' 1991. Crapp0. COf1]me: on dit 1;)-bJs. un granci coup:
désormJis, les portes y seront lIU\\·eIlCS de hçon pernul1C:llte Toute b politique 111:J!-f:cting est depuis J\\e,' sur
l'explication de cette « inno\\'Jtion \\"
2 David OGIL VY. La {JlIblicilL i sl'Ion Ogi/n. DUl1od. P:uis, 19S.J. page 51,

106
o
Que la flexibilité offensive n'est pas la flexibilité défensive. En fait, celle-ci fait pression
sur celle-là et l'oblige ainsi à ses déployer;
o
Que la flexibilité offensive s'apparente d'abord à du fanatisme pour l'innovation; et
o
Que la flexibilité offensive s'accompagne ensuite de l'adoption d'un comportement
nouveau baptisé l'esprit « [lex-offensif» que tel1le de récapituler le schéma 11 ci-dessous.
Flexibilité
Offensive
Il
8
Esprit « fln-offensif»
1
1
,
'l
-Leadership
-Refus du protocole
-Présence de
-Sentiment
-N on-confonnisme
l'innovation
d'appartenance et
-Mythologie
-Intervention de tous
de propriété
-Débureaucratisation
-Droit à "échec
-Hiérarchie diluée
-Enthousiasme
-Mépris pour' 'inaction
-Irrévérence
1
Schéma 11: La flexibilité offensive par rapport à l'esprit « flex-offensif».
Source: Elaboration personnelle.
Il faut cependant souligner qu'au Cameroun, le comportement du consommateur
permet surtout une « flexibilité d'imitation» et non pas une flexibilité créatrice de nouveaux
biens et besoins car, l'environnement national est plus disposé au mimétisme de l'Occident.
Pour cette raison principale et dans le cadre de l'étude empirique réalisée dans ce travail, on
limitera la définition du concept à la fonmtlation suivante: pour l'entreprise camerounaise, la
flexibilité offensive traduit l'aptitude à modifier l'environnement par la production de biens
flexibles 1.
;.cs analyses qui prél"L1c11t ont donc pem1;'; :
o
De limiter le ch3mp d'application de la flexibilité offensive: un système qui combat ks
inerties, fonctionne sur des valeurs compulsives et poursuit l'objectif suprême d'une
performance inégalée:
1 Un bien fle:\\iblc est considéré. pour l'entreprISe CamCl"Olllnise. au moins comme un bien pOl1V3nt sJtisfJ.ire
plusieurs besoins ou plusieurs désirs.

107
o
De montrer, parce que l'innovation est au centre cie la flexibilité 0 ffensive, l'importance et
la diffusion de la dynamique créatrice dans l'atelier par les SPAF, dans la distribution par
la parution cie produits flexibles ou modulaires ou conditionnels, dans le paysage
innovateur de plus en plus dominé par le personnel et les clients, ct dans \\a compréhension
de la notion d'ofrcnsive flexible;
o
De formuler trois définitions de la flexibilité oflensive; j'une par 0pJ1osition ct par
prolongement de la flexibilité défensive; la deuxième par rapport à l'innovation, ct la
troisième par rapport é11'esprit « flex-offensif». Ces formulations ont enfin conduit à une
limitation du concept de flexibilité offensive pour l'entreprise camerounaise.
CONCLUSION DU CHAPITH.E 2.
L'objectif de ce chapitre était de définir, par le biais d'une étude conceptuelle, ia
flexibilité offensive dans l'entreprise. Les résultats sont les suivants:
o
Deux
auteurs,
principalement,
ont
abordé
la
notion:
R.
BOYER
sur
le
plan
macroéconomique et 1. ANSOFF dans une évocation microéconomique.
o
La flexibilité offensive s'entene! à l'intérieur d'un modèle mû par une tenace volonté de
changement: basé sur des valeurs compulsives; évoluant en situation d'incertitude
permanente; et utilisé par une firme qui poursuit l'objecti f d'une performance inégalée
dans son secteur d'activité;

La flexibilité offensive, c'est la capacité à répondre promptement aux perturbations, à
modifier l'environnement, à créer des opportunités grâce à une innovation souple, rapide,
constante; et à une mentalité de laissez faire de l'esprit d'initiative dans le but de réaliser
la perfonnance suprême. Etre doté de flexibilité offensive, c'est pouvoir faire preuve de
souplesse totale et pouvoir anticiper, réagir et créer rapidement et à un rythme soutenu
dans un état d'esprit enthousiaste conduit par un leadership exigeant sur les résultats;

Dans le cadre des entreprises camerounaises que l'on a étudié, on considàera la flexibilité
offensive coml11e étant l'aptitude de la firme 3. modifier l'en\\'ironnelilcnt par la production
et la distribution (le produits ik\\ib\\es ;

La flexibilité défcnsivc fait pression sLlr la Ilcxibilité ollensive ct l'oblige à se déployci

108
CONCLUSIONDJE LA PREMIERE PARTIEo
L'objectif de cette première partie était cie mettre en lumière l'importance de la
définition du concept de flexibilité offensive. Les analyses ici menées penllettent cie libeller
cinq propositions:
Proposition 1. La nexibilité offensive se Sllue bien au-cle1<\\ du taylorisme ou du
fordisme qui sont des formules dépassées pour cause de rigidité. Elle émet la nécessité d'un
tri clans la pensee managériale et suggère un bon usage des modèles de gestion purement
rationnelle parce que ceux-ci possèclent des caractéristiques défensives.
Proposition 2. La flexibilité offensive pourrait pC1l11ettre une sortie de crise pour la
fimle, difficilement réalisable à l'aide des modèles de conduite des affaires actuellement en
vigueur. Le redressement du groupe CARNAUD à la suite de graves difficultés et grâce aux
éléments de ce concept est un exemple à suivre pour les autres entreprises.
Proposition 3. La flexibllité offensive s'entend à l'intérieur d'un modèle mû par une
tenace volonté de changement, basé sur des valeurs compulsives, et utilisé par une entreprise
qui poursuit l'objectif suprême; être le meilleur dans son secteur.
Proposition 4. La flexibilité offensive traduit la capacité à répondre promptement aux
perturbations, à modifier l'environnement, à créer des opportunités grâce à une innovation
souple, rapide, constante, et à une mentalité de laissez faire et de libre initiative dans le but de
réaliser une perfonnance supérieure. Etre doté de flexibilité offensive, c'est pouvoir faire
preuve de souplesse totale et pouvoir anticiper, réagir, et créer rapidement et à un rythme
soutenu, dans un état d'esprit enthousiaste conduit par un leadership exigeant sur les résultats.
Proposition 5. La flexibilité offensive pour ce qui est des entreprises camerounaises
évoquées dans notre étude empirique, sera prise comme étant l'aptitude de la fimle à modifier
l'environnement par la production et la distribution de biens tlexibles.
Cependant, si toutes ces précisions donnent lln~ meilleure compréhension du concept
de flexibilité ollensive, elles ne prop\\lscnt pas de recettes pour y parvenir. Il importe alors de
définir \\cs axes essentiels de:; politiques qui conduisent à 13 réalisation de cette notion. C'est
l'objet de ia partie suivante de cc tra\\ai l.

109
DEUXIEME PARTIE
LA RECHERCHE DE LA
FLEXIBILITE OFFENSIVE

110
/
La flexibilit-i: offensive a pour supports t'innovation et un état d'esprit approprié. Il ne
semble par conséquent pas possible d'exprimer totalement une telle flexibilité en se référant
uniquement il un modèle calculable de gestion des ressources; la flexibilité offensive dépend
également de caractéristiques organisationnel1cs : structure, pouvoir, information, motivation,
etc ... qui s'apprécient en termes de comportement.
Puisque l'on admet, à des degrés variables, l'importance de la flexibilité offensive, il
est nécessaire de définir les axes essentiels des politiques qui y conduisent. On peut, à cet
égard, distinguer:
- d'une part, des politiques de gestion des ressources qui, à partir des potentiels
fondamentaux de l'entreprise, et par les stratégies financières et technologiques aussi bien que
par la gestion des ressources humaines, développent la flexibilité offensive;
- d'autre part, des politiques d'animation et de conduite de l'organisation qUI, en
développant les motivations au changement, en améliorant les conditions d'information, en
promouvant la souplesse de la structure et des procédures; proposent l'érection d'une
organisation motivante et d'une gestion « artistique» pour améliorer la flexibilité offensive.
Ces composantes d'une politique générale de flexibilité offensive dans l'entreprise
sont résumées par le schéma suivant:

111
Face à j'incertitude,
- Stratégies financières
face aux exigences
l'al' la gestioll
....
- Stratégie technologique
de pl' r/ormance,
ues ressources
- Gestion des ressources
face a la flexibilité
.4
humaines
défen sive, l'entreprise
cherc he à améliorer sa
Flexibilité
OffcnsÎye
Aptitude à initier
des modifications de
l'environnemellt dans
un état d'esprit
l
Par l'action
- Organisation motivante
li nex-offensi f»
f
sur
I - -_ _~~
- Gestion 'i artistique }> et
l'organisation
Lrnalion dynamique
Schéma 12: Composantes générales d'ulle politique de nexibi!ité olTensive,
Source: Elaboration personnelle.
Malgré le caractère relativement arti ficiel de !a distinction opérée, l'on se référera à ce
cadre général en étudiant successivement, par rapport à l'objectifde flexibilité offensive:
La gestion des ressources de l'entreprise (chapitre 3)
L'animation-organisation de l'entreprise (chapitre 4)

112
CHAPITRE 3
FLEXIBILITE OFFENSIVE ET GESTION
DES RESSOURCES DE L'ENTREPRISEo
On peut considérer, avec PENROSE, que l'entreprise est une «collection de
ressources productives» J. Une ressource est un intrant qui, en fournissant un servIce
dételllliné, permet ~\\ l'entreprise d'effectuer une tflche particulière. Autrement dil, la
disposition d'un ensemble donné de ressources ouvre l'accès il un ensemble d'activités.
La nature et le vo 1ume des ressources détenues par l' entrepri se défi nissent en
quelque sorte les «conditions pellllissives» de l'évolution future des activités de l'entreprise.
Les politiques de gestion de ressources constituent alors un élément majeur des pratiques de
flexibilité offensive. Ces pratiques constituent en fait un ensemble d'actions sur «les
potentiels fondamentaux» de l'entreprise, ce terme désignant les ressources de base
susceptibles de foumir une gamme de service étendue selon l'affectation qu'on leur donne.
Parce qu' e1les nous paraissent constituer la base de départ de toutes les actions
générales de flexibilité offensive, l'on retiendra pour cette étude, trois catégories de
ressources complémentaires: financières, technol;ogiques et humaines:
- La stratégie financière (section 1), puisque l'argent est le nerf de la guerre, est la
première de ces politiques de gestion des ressources. Elle consiste en un aménagement des
structures des actifs et de financement, et en un ciblage particulier de la politique des
investissements dans l'entreprise;
- La
stratégie
technologique
(section
2)
conceme
l'ensemble
des
moyens
«techniques» il mettre en œuvre dans 1:1 recherche de la flexibilité offensive. Il s'agit de
change! les orientations de ]a fonction Recherl~hc ct Déve\\oppemel\\i. de faire éclater 1"
décision d'innover pour devenir en somme, une entreprise fanatique d'innovation;
1 E.T. PENRQSE. Theory of Ihe growlh o(lht'jiml. repris pJr R. REI:\\. op. cit., page 59.

113
- La gestion des ressources humaines (section 3), troisième voie à suivre, conceme
principalement la constitution d'un potentiel humain ct la prise de conscience aiguë de la
valeur intrinsèque des individus p3r un travail permanent sur le personnel de ]a finne.
SECTION 1 . LA STRATEGIE FINANCIERE.
« La situation financière du groupe est clonc solide, ce qui pen11ettra de saisir les
meilleures opportunités qui se présentent toujours en cas de crise. L'argent est le nerf de la
guen'e: nous l'avons ... »1. Cette phrase d'un Président Directeur Général situe l'essentiel clu
problème: la politique de « liquidité financière» est un élément clétellllÎnant pour l'entreprise
en quête de nexibilité offensive. Parce que cette politique résulte il la fois cie sa structure
d' acti f et cie sa structure de fi nancemen t, on les étud iera successi vement avan t d' insister sur
les problèmes relatifs aux investissements et aux nouveaux instrllments financiers dans Je
cadre de la nexibilité offensive.
1- LA STRUCTURE DES ACTIFS.
L'analyse du «degré de liquidité de l'actif»2 passe par l'évocation de certains
principes de base auxquels on peut se référer sous le double plan statique et dynamique, et par
l'étude de composantes propres à accroître la flexibilité offensive.
1- LES ASPECTS STATIQUES.
On peut distinguer, comme le suggère COTT A3 dans l'ensemble du capital détenu
par l'entreprise, trois catégories d 'acti fs :

des actifs de «transaction» (KA) correspondant à tous les biens détenus dans un but
d'utilisation immédiate;
ct
des actifs de « précaution» (KB) détenus en raison de l'incertitude sur le futur; on y
trouve des actifs de toute nature (biens de production volontairement inutilisés, encaisses
de précaution ... ) ;
1 Allocation de Jacques BOREL aux actionnaires clu groupe. Rapport 1973, page IS. cité par R. REL\\:. op. cit.,
~age 83.
- Pierre CONSO. LII gcsliollj/I1<1l1ciàe de! 'clltrepris/!. Tome l. ïè édition, Paris. Dunod. 1988, pagè 263.
3 Alain COLL\\, 71l1!orie géllérale .Ill copitll/. .Il' III croissallce cl des(llicililliiolls, Dunod. Paris. 1967, page 8.

114
Il
des actifs de « spéculations» (KC) détenus en raison de Icur appréciation anticipée, à
cOUli tenne comme à long temle (i 15 représentent des prévi sions opt i 111 istes).
De façon figée, le comportement patrimonial de l'entreprise peut être apprécié en
fonction des coefficients de ces trois catégories. Si l'on ~dlllet que les actifs de transaction
sont détenus en raison de leur rentabilité, on peut considérer que l'objectif de flexibilité
offensive se révèle par la valeur du coefficient Z, qui s'écrit:
Z=KB+KC
avec
K= KA + KB + KC
K
puisque ce coefficient cxpnme la pali faite à l'incertitude et ~ l'audace, à l'inconnu et au
cu lot.
Cependant, l'on n'a par ce biais qu'une vue statique du phénomène qui ne pemlet pas
une analyse précise du comportement de recherche de la flexibilité offensive. C'est pourquoi
il paraît intéressant de pousser plus loin l'étude en faisant appel à LIn modèle plus dynamique.
2- LES ASPECTS DYNAMIQUES.
Le problème de la liquidité peut être analysé en trois points 1 :
Point 1. Pour assurer ses besoins courants de transaction, la fimle conserve une
encaisse; l'objectif assigné au contrôle de cette encaisse est la minimisation des coûts sur une
période détenninée face à des entrées et des sorties de fonds de nature aléatoire. La détention
d'une encaisse positive entraîne des « coûts de pénalisation ». La fimle peut accroître son
encaisse soit par appel à des capitaux nouveaux, soit par la vente d'actifs; elle la réduit par le
paiement des dividendes ou par l'investissement; ces ajustements de niveau impliquent des
« coûts de transfert ».
Point? On admet qu'il c:'iste deux catégories (j'actifs: des « bons' (<< bonds ») et
des « actions» \\" srocks »); ces dernIers sont les actifs essentiels de l'entreprise: ils ont un
1 Cette présentali"'l. empnll1lée à R. REI.\\. op. Clr.. pages 85-86. (',' inspirée de G.D. EPPL\\' Cl E.F. FAMA,
1( Three assel cash
ba lance and dynamic pOli fo 1io probkms ». Mallllgt'II!CIII Sciel/Ci'. Vol. 17. nO 15, Janvier
1971, pp. 331-3t9: et « Cash balance and simple dynamic poI1folio problcms \\Vith proportiona! COSIS",
[II/emariol/ol Ecol/vlIl/C Rel'II!\\\\'. Vol. 10. Juin 1969. pp. 119-1]3.

115
revenu espéré supérieur à celui des « bons» sur la période considérée mais entraînent des
coûts de transfert plus élevés.
Point 3. Les différences entre les revenus d'une part, les cOllts de transfert d'autre
part, entre « bons» et « actions» sont telles qu'il peut étre intéressant pour la firme de détenir
des « bons» comme « tampon» pour faire face aux fluctuations. Cette fonction de tampon est
la seule raison de détention des « bons ».
L'intérêt principal de ce modèle est qu'il montre que la recherche d'une flexibilité
offensive par l'aménagement de la structure des actifs passe d'une part, par la classification
des actifs selon leur liquidité (c'est-à-dire leur proximité monétaire), leur espérance et leur
certitude de revenu; et d'autre part, par la connaissance cles coûts de pénalisation dus à
l'absence de liquidité; ces coûts de pénalisation pouvant être des coûts d'opportunité.
La flexibilité offensive de l'entreprise sera donc d'autant plus forte que la paIt des
actifs liquides sera élevée et que les coûts de ti'ansfert des actifs tampons seront plus faibles.
Reste maintenant à examiner les caractéristiques propres à chaque élément de l'actif.
3 - A LA RECHERCHE DE LA DIVISIBILITE, DE LA MOBILITE
ET DE LA DISPONIBILITE.
Une recherche pemlanente des caractéristiques de mobilité, divisibilité et disponibilité
peut concourir à une meilleure expression de la flexibilité offensive de l'entreprise:
- La divisibilité mesure l'aptitude d'un actif à être divisé en plusieurs fractions
indépendantes; et un actif est d'autant plus facilement transfomlable qu'il est constitué
d'éléments divisibles et séparables. Parce que le risque pour l'entreprise s'accroît avec la
diminution de la divisibilité, seront préférés dans l'entreprise en quête de flexibilité offensive,
les biens financiers divisibles (capital libellé sous forme d'actions) ou un actif industriel
réparti sur plusieurs filiales.
- La mobilité est un caractère technique qui mesure l'aptitude d'un bien à passer d'un
emploi à l'autre. A la mobilité « intclï1c» qui caractérise tout bien que l'on peut utiliser dans
l'entreprise à des usages différents et à des prCéCSSus de production différents, on peu'
opposer la mobilité « exteme » qui caractérise tout bien qui peut être cédé- ù un tiers pour un
même usage ou à d'autres fins. La mobilité illlerne est Ull facteur important d'adaptation,
d'anticipation et de réaction de la fonction de production qui « accroît J'efficacité industrielle

116
d'une structure d'actif et diminuc le rIsque ». financièrement, cette caractéristique est
détcrminante car, «seule la mobi lité du capital permet à une entreprise de s'adapter
rapidement, de Cl'éer race à l'évolution clu m::lfché ct de la conjoncture, de réviser son plan en
lllodifiant1a combinaison des t~lcteurs qu'c1le détient »1.
- La disponihilité est l'aptitude d'un hien à pouvoir être rapidement et sans
illcollvélliellt rendu liquide. La transformation d'un bien en monnaie ne doit pas cOlllpromellre
souvent l'encaisse par le mot « disponibilité 'J. Dans l'acquisition cie ses biens, l'entreprise
doit tenir compte dc cette caractéristiquc car, la disponibilité est un puissant facteur de
soup!csse lotale p,lrcc que c'est elle qui favorise le passage complet (une des potentialités de
la ilc.\\ihililé ofrcl1siv\\..~) d'unc activité économique à une autre totalement dirtërentc de la
première.
Mais il faut reconnnÎtre qu'il n'est pas possible de juger des possibilités de l'entreprise
par le seul e"amell cie la structure de ses actifs. L'interdépendance des structures actif-passif
conduit ;'1 étendre la recherche à la structure cie financement.
H - LA STRUCTURE DE FINANCEMENT.
2
Pour Ull degré de liquidité donné de l'actif, la nexibilité offensive repose sur son
aptitude ù mobiliser des ressources au moment où elles sont nécessaires. Les facultés
cl 'adaptation ct cie création continue se trouvent donc liées à la capacité de la firme à se
procurer des ressources, soit par le financement inteme, soit par l'appel au capital et aux
emprunts qui constituent le financement exteme.
1 - LE FINANCEMENT INTERNE.
Le
financement
inteme
dépend
principalement
de
deux
facteurs J :
l'annuité
d'amortissement ct la mise en réserve des bénéfices.
1 P. CONSO, op. cil., page 262.
: R. REIX, op. cil., page <) 1, eSlime qu'en donnant au temlC liquidilé son acceptation la plus générale, on peut
dire que la poursuile d'un objectif de flexibilité (offensive) doit se traduire, toutes choses égales par ailleurs, par
un « état de sur-liquidité» (défini par rapport à un état de liquidité minimum calculé dans le certain). En fait, si
l'on interroge les praticiens (... ) la notion de liquidité sembie plus liée à la notion de « mobilisable» ou de
« réalisable» qu'à la notion cie « disponible » .
.1 r CONSO, op. cil.. page 264.

117
- L'annuité d'amortissement.
Selcn
la
1~1ture de son activité et le degré
d' :lmort issem en t de ses imJllobi 1isatiolls, « 11 nc;; entreprise est plus ou moi ns apte à dégager
rapidcment des liquidités, ù condition bien sOr de pouvoir dégager un résultat d'exploitation
suffisant pour couvrir les amortissements )1, parce que « les actifs amortissables deviennent
progressivement liquides ».
- La mise en réserve de bénéfices. Elle n'a qu'un aspect souvcnt accessolrc par
rapport au:\\ amortisscmcnts] car, le financement interne pas bénéfices non distribués est réduit
par l'impôt sur les sociétés et par, justement, la distribution des bénéfices. Ce financement est
plus vulnérable :\\ dcs variations accidentelles du résultat et à la fois soumÎs ù la contraintc
importantc que constitue la p311 prise par les associés. De ce point de vue, la recherche de la
flc:\\ibililC ofTensive p,n le financement inteme va dépendre de la capacité de l'entreprise à
conserver des liquidités par la réduction ou, si possible, la suppression de la distribution des
bénéllccs-'.
Face ù ces diverses difficultés et contraintes, l'entreprise a souvent recours au
Iln:lnccment c:\\tcllle qUI dépend non seulement cie la capacité d'agir, mais également de la
volonté des dirigeants.
2 - LE FINANCEIVIENT EXTERNE.
Peu d'entreprises fonctionnent avec leurs seuls capitaux propres; le recours aux fonds
empruntés est quasiment la règle habituelle. Ce type de financement peut prendre trois fomles
principales: le capital, les emprunts et crédit, et le crédit bail.
- Le capital est un moyen de financement dont l'emploi dépend d'une part, de sa
répartition entre les associés qui se partagent le pouvoir de l'entreprise et d'autre part, de leur
capacité de « suivre» une augmentation de capital c'est-à-dire de faire de nouveaux apports
en espèces.
- Les emprunts et crédits constituent le moyen le plus commode pour l'entreprise dl'
se procurer des liquidités. Or, à tout endettement peuvent spécifiquement être rattachés deux
1 P. CONSO, op. ciL, page 264.
~ Sauf peUl-être pour les entreprises de service qui ne mettent pas en œuvre un capital de production important.
.' L'hYPolhèse de la suppression cie la distribution des bénéfices est évoquée par P. CONSO, op. cil., page 265.

118
risques distincts 1 : celui qu'il fait peser slIr la disponibilité des ressources et celui qu'il fait
peser sur la rentabilité des ressources des fonds propres. C'est au premier risque que l'on peut
rattacher la notion de flexibilité offensive par l'intcllllédiaire du concept de « capacité
d' enel ett cm en t ».
Celte capacité d'endettement, qui « dépend (... ) de manière objective de (la) capacité
de couvrir les charges fïnancières, de rembourser le principal des emprunts ( ... ) ct cie la
ch~lrge financière que supporte déjà l'entreprise»2; pellllct l'appréciation cie la marge de
manŒuvre ct de la flexibilité offensive de fïnancement de l'entreprise. Comme le note REIX,
« cctk flexihilité est directement déterminée par la différence entre la capacité d'endettement
maxilll:t1e ct le niveau d'endettement actuel cie l'entreprise »3. La flexibilité oflènsive de
l'entreprise peut alor·s être développée par la politique qui consiste à ne pas mobiliser
totalement les possibilités d'endettement qu'autorisent son revenu ct sa richesse car, il est
évident que moins une entreprise est endettée, plus son degré de flexibilité financière est
élevé, car elle a le pouvoir de négocier rapidement de nouveaux emprunts.
- Le crédit-bail est un moyen d'éviter l'obstacle de l'augmentation de capital ct de
cautionner celui d'une capacité d'endettement insuffisante. Cc crédit est un instrument de la
flexibilité ù la condition que l'entreprise n'ait pas encore largement fait appel à cette méthode
de fin:1ncement ct que la nature de ses besoins lui pennette de faire appel à des procédures
« banalisées ».
Les pnnclpes d'une politique financière de la flexibilité offensive ayant ainsi été
classi fïés, il nous reste à examiner les di fférentes orientations aptes à répondre au problème
précis de l'investissement pour la réalisation de cet objectif.
111- LE PROBLEME DE L'INVESTISSEMENT.
« D'uil point de VLle financier, COlllllle le note CONSO, J'investissement s'analyse
comme l':lfTcctation de monnaie à J'acquisition d'actifs industriels ou financiers. C'est une
décision d'imlllobiliser des capitaux, c'est-à-dire d'engager ulle dépense immédiate dans le
1 Voir R. PEREZ, « Une étude théorique de l'endettement dans le calcul économique de l'entreprise », Ecollomie
el Sociélés, Vol VIII, n04 Avril 1973, paee 612.
~ P. CONSO, op. cil., page 265.
-
J R. RElX, op. cil.. page SS.

119
but d'en retirer un galll sur plusieurs périodes successives »1. Prise telle qu'elle, cette
conception élargit la notion d'investissement qui ne concerne plus seulement les dépenses de
création des actifs financiers et physiques, mais également toutes les dépenses qui ne
contribuent pas directement ct immédiatement au fonctionnement de l'entreprise: formation
du personnel. autres constructions, recherche et développement, écoute de l'environnement. ...
La décision d'investissement est une décision financière dans la mesure où la
réalisation
d'un
investissement
implique
son
financement
ct
par
conséquent
une
immobilisation cie fonds. Une entreprise visant la flexibilité offensive va chercher à privilégier
les emplois liquides, ù améliorer ses conditions de désengagement ct à investir principalement
dans le domaine qu'clic connaît le mieux.
1 - LA RECHERCHE DES EMPLOIS LIQUIDES.
L'cntreprise qui veut privilégier les emplois liquides peut être amenée à éviter ou ù
différer l'investissement". D'un point de vue financier, la flexibilité offensive, temps de
réponse le plus court, coùt de transfollllation le plus faible, possibilité de création maximum,
peut êtrc obtenue par des emplois en trésorerie. Si cette solution n'est pas retenLIc, comme
l'écrit RE1X, (1 c'est qu'elle heurte directement l'objectif de rentabilité: il est effectivement
dil1icik cie (rouver des emplois à la fois liquides ct rentables »3. Aussi, pour tenter de résoudre
le problème, les firmes cherchent-clics des emplois rentables et mobilisables sous des
contraintes limitées de coùt et de temps.
Deux techniques ont alors les faveurs des gestionnaires4 :
- Le placement spéculatif à court terme en actifs réels (matières premières) ou
financiers (titres, devises ... ). Par ce moyen, l'entreprise réduit sa durée d'engagement mais,
parce qu'clic n'élimine pas le risque lié à l'investissement, la fomlUle est rarement utilisée « à
l'état pur» ct l'interfère souvent avec les opérations d'exploitation (gonflement volontaire
des stocks par exemple).
: P. CONSO, La ge.\\"llolI fill alicière de l'clltreprlse, Tome 2, Dunod, Paris, 1988, page 416.
- Les aspects « industriels» de cette question concernent en général les politiques de « capacité excédentaire» et
d'évitement cie capacité». Voir à ce sujet R. REIX, op. cit., pages 60-82; voir aussi Yves SCHWARTZ et
Daniel FA ITA, L '!lOlIlllle prodliClelir alllOlir des /IIutatlons du traval! et des savoirs, Messidor/Editions Sociales,
Paris. 1985, pages 92-93.
J R. REL\\:, op. cil.. page 93.
4 Voir il ce sujet R. PEREZ op. cil.

120
- Le placement a long terme, en actifs non productifs. Ces opérations, qUI ne
correspondent pas ù la vocation de l'entreprise, sont généralement limitées à la constitution de
réserves foncières ou ;} l'acquisition de titres de placement. L'entreprise en attend une
négociabilité plus facile ct une rentabi[i~é satisfaisante.
La recherche de la Oexibilité offensive peut aussi conduire l'entreprise à récupérer des
ressources financières attachées ù des biens devenus improductifs.
2-
L'AMELIORATION
DES
CONDITIONS
DE
DESENGAGEMENT.
Une entreprise qui a engagé des ressources clans la réalisation d'un programme
d'investissement peut vouloir en récupérer tout ou partie, si une nouvelle opportunité s'offre à
elle ou si elle veut quitter un secteur donné d'activité. li ya lieu de distinguer deux cas:
rr
l
cas: L'entreprise souhaite conserver l'usage des biens. Elle dispose alors d'une
fOnllllle financière, la cession-bail (ou lease-back) qui est l'opération par laquelle une
entreprise qui dispose déjà de biens immobiliers ou de biens d'équipernent \\cs cède à une
société de leasing en VLIe d'obtenir de cette demière, un contrat de leasing lui pennettant de
garder l'usage des biens.
Comme le note CONSO, «cette procédure (... ) offre beaucoup de souplesse. Elle
permet en effet à une entreprise qui a engagé toutes ses ressources dans la réalisation d'un
programme d'investissement d'en
récupérer une partie, si
une
nouvelle opportunité
d'investissement s'offre à elle »1. Les possibilités de rachat progressif pennettent à la fimle
d'acquérir la propriété des biens créés et ramènent donc tout à la situation initiale. Il faut
toutefois noter que la formule n'est possible que si le bien cédé n'était pas déjà utilisé pour
garantir Ull tïnancement quelconque.
- 2""'" cas: L'entreprise ne souhaite pas conserver l'usage des biens. Elle doit alors
désinvestir. Les conditions du désinvestissement sont extrêmement variables. Elles dépendent
des secteurs d'activité, de la nature des biens cédés et en particulier de leur souplesse, du
1 P. CONSO op. cil.. Tome 2, pages 405-406.

121
nombre des acheteurs potentiels qui augmente ou diminue le montant à récupérer selon qu'il y
a ou non conculTence entre les acheteurs.
Les conditions du désinvestissement sdnt aussi fonction de la fonne juridique de
J'investissement. Par exemple, les créations de nliales constituent une manière de croître plus
flexible que l'investissement direct car il semble plus simple, en principe, de céder tout au
partie des droits cie contrôle sur une entreprise que de céder des immobilisations cx(raites de
leur contexte organisationnel. M,lis il faut dire que « cettc diversité ne doit pas masquer L1ne
proCondc unité de principes: le désinvestissement cloit être traité de manière systématique et
constituer une variable stratégique permanente (... ). Le désengagement doit perdre son
caractère émotionnel; il n'est pas obligatoirement la sanction d'une erreur mais au contraire
l'indicc que l'entreprise peut faire preuve de Oexibilité stratégique et préserver ainsi sa
sécurité ct son crficacité »1.
S'il Caut cependant investir, autant le faire dans le domaine que l'on connaît le micux.
3 -« S'EN TENIR A CE QUE L'ON SAIT FAIRE».
En cffet, la principale conclusion de PETERS et WATERMAN est sans équivoque:
« les entreprises qui se clivcrsijient (soit par le biais d'acquisitions, soit cie manière intcllle),
mais s'en tiennent <1 ce qu'elles savent faire, réussissent mieux que les autres. Les plus
prospères sont celles qui diversifient autour d'une compétence unique (... ). Le second groupe,
en ordre de prospérité décroissant, comprend ces entreprises qui se diversifient dans des
domaines connexes ( ... ). Celles qui réussissent moins sont, en général, les entreprises qui sc
diversifient dans des domaines variés >/.
On peut citer plusieurs travaux universitaires qui corroborent cette affimlation. L'une
des études les plus complètes sur les entreprises diversifiées a été menée par Richard
RUMEL T" qui, cn s'appuyant sur un échantillon de 500 entreprises diversifiées sur une
période cie 20 ans parvint à la conclusion suivante: les entreprises aux stratégies cie
diversification « limitées à l'activité dominante» et « limitées aux activités connexes» sont
1 R. REIX, op. ci!., pages 95-96.
~ Th. PETERS ct R. WATEIU."lAN, op. ci!., page 291.
J Extrait cie R. RUMEL T, Slrall'gy, sll1lcllIre alld l'cof/omie pe/formal/ce, TI1èse de Doctorat, Harvard Business
S(hool 1974.

122
« incontestablement les plus perfonnzlI1tes >J. li s'agit là des entreprises qui étendent quelque
peu leurs activités tout en restant très proche de leur compétence centrale, et non des
entrcpri ses qui ne dépendent que d'une acti vi té un iq ue verticalement intégrée.
La recherche de la nexibilité offensive, limitée à J'activité dominante ou aux activités
connexes, pose le problème du « ('<lire ou élcheter », « acquisition ou expansion interne ».
Comme
le
note
ANSOFF,
« ces
deux
stratégies
peuvent
revêtir
plusieurs
formes.
l~'acquisilioI1 peut être celle d'ulle licence ou de produits développés, ou sc faire par fusion
avec une autre entreprise. L'expansion interne peut aller de l'addition de nouveaux rroduits il
cie prolonds changements de structure
faisant place à de nouvelles compétences» 1.
S';ldjoiI1l1IT un produit plutôt qu'une entreprise demandera plus ou moins cie temps selon le
degré de synergie: juste le temps cie s'outiller cl de commercialiser le produit ou au contraire,
plusieurs années pour mettre en place tout l'appareil voulu.
Le tableau 12 Cl-apres indique la façon de peser le pour ou le contre des deux VOles
stratégiques en rapport avec les composants synergiques. La deuxième colonne du tableau
montre que le développement est préférable quand la synergie opérationnelle est faible.
Degré de synergie
Stratégie à
Vecteurs de croissance d'une
Dérnarraee
Exploitation
préférer
divcrsilïca tiOIl
Unc
Elcvc
Expansion internc
Elargissement du marché,
développemcnt de produits,
diversification horizontale ct verticale
dans des domaines technologiqucs
apparentés
Elevé f:lIble
Faible élevé
Expansion
Diversification horizontale ct
interne,
verticale dans des domaincs
combinaison
technologiques non apparentés
d'acquisition ct
d'expansion
interne
Faible
Faible
Acquisition
Diversification concentrique
Nul
Nul
Acquisition
Diversification hétérogène
(conglomérat)
Tableau 12 : Expansion interne ou acquisition.
Source: Extrait de 1. ANSOFF, tableau 10-3, page 174.
Il reste cependant, COlllme le précise ANSOFF2, qu'avec une synergie de démarrage
forte, 011 préférera l'acquisition dans cinq cas:
1 1. ANSOFF, op. cil.. page 172.
21. ANSOFF, op. ciL page 179.

123
1)
quand les besoins cie l'entreprise ou l'illstabilM du marché exigent une entrée rapide;
o
quand l'entreprise a besoin, ou trouve! 'occasion cie s'attacher une direction compétente;
1;1
s'il lui faut absolument élargir ses capacités;
o
si acquérir un produit déjà développé lui coùte moins cher que de le fabriquer elle-même;
1;1
dans le cas où la stabilisation des parts de marché d'un secteur privé arrivé ù maturité
renclrait très clitlici!e pour un nouveau venu de soustraire des affaires aux concurrents en
pLIee.
Il Llll! que la croissance de l'entreprise, dans tous les cas, soit issue de l'intérieur pour
que n'écl:lle pas « la difficulté d'absorber l'inhabituel». Ainsi, dans le cadre de la nexibilité
olicllSivc, le problème de l'investissement sera résolu en privilégiant son domaine principal
d'activité, mais ;lllssi en recherchant des emplois liquides et en améliorant les conditions de
récupération de roncls devenus improductifs. Mais la complexité de l'environnement financier
cl des techniques ~l utiliser complique la résolution de ces préoccupations. L'entreprise doit
alor? maîtriser l'utilisation des nouveau'; instruments financiers.
IV-
L'USAGE
DES
NOUVEAUX
INSTRUMENTS
FINANCIERS.
La filllle en quêk de flexibilité offensive ne limite pas ses activités il un pays donné.
Parce qu'elle a des ambitions transnationales, elle se heurte à Ull environnement financier de
plus cn plus complexe. D'une part, cet environnement génère une innovation et des risques
dont la gcstion est impérative sous peine de mort; et d'autre part, cet environnement pose des
problèmes concrets auxquels il faut apporter des solutions aussi précises que possibles.
1 - LA CO]\\,IPLEXITE DE L'ENVIRONNEMENT FINANCIER.
Commencée sur les bourses des valeurs et étendue sur les marchés des changes, la
cnse d'octobre 1987 a mis ell relief le désordre monétaire qui caractérise J'actualité
économique et financière de ces dernières années l . L'évolution aléatoire des prix des
monnaies influence lourdement l'activité de l'entreprise puisqu'elle modifie la configuration
des mDrchés et donne naissance à de nouveaux risques à contourner.
1 Voir Roger TSAFACK NANFOSSO,
Les I{Nt de change /lOf/aniS ct les pays solls-développés, Mémoire,
Université de Y:lO\\lndé. Septembre 1988.

124
1.1 - La globalisation des marchés.
La généralisation du flottement des taux de change a provoqué, avec les rapides
changements technologiques obser.'é;s dans ks domutnes de la communication et du transfert
cles fonds', une métamorphose de l'environnement de l'entreprise.
Les tau'\\ de change (les prix extérieurs d'une monnaie) et les taux d'intérêt (ses prix
illlérieurs) étant liés cians une économie ouverte, lu généralisation des premiers a provoqué
L1ne plus gr"ande variabilité des seconds. Les mouvements des taux d'intérêt ont accentué la
volali lité de tous les marchés financiers en raison clu lien entre ces taux et les prix des
instrumcnts négociés sur ces marchés. Alors le marché monétaire à court terme s'est animé,
engendrant une plus gl"Llllde agitation du marché des valeurs obligatoires. Or cc marché est lié
au marché des valeurs mobilières (les actions), qui est lui aussi devenu plus volatile ... Et de
proche en proche, tous les repères, tous les circuits et tous les marchés financiers sont touchés
par cctte volai ililé.
Ce vaste mouvement de déréglementation à J'échelle mondiale, en favorisant le
décloisonncment des marchés domestiques ct une plus grande intégration économique
intemationale (la globalisation des marchés), a aussi porté au premier plan des risques jusque-
lù secondaires pour l'entreprise.
1.2 - Les risques encourus par l'entreprise.
L'on peut distinguer quatre catégories de risqucs 2 issues de la globalisation des
marchés et concemant des domaines précis dans l'activité de l'entreprise: la conversion, la
traduction, la désindustrialisation et l'économie (ou commercial) :
- Le risque de conversion procède de J'incertitude sur la valeur future des cours. Il a
pour support les opérations commerciales et financières internationales, ct par conséquent, il
est encouru par l'opérateur économique dès lors que la monnaie dans laquelle s'effectuent les
transactions (devise ou monnaie de facturation) n'est pas sa propre monnaie. Le risque est
1 Voir Charles GOLDFINGER, La g(;ojinance' pour comprendre la mutation jinancière, Seuil, Paris, 1986.
Voir ég;llcl11enl l'artlck « L'inlcrnalionalisJtion dcs activités financières», Problèmes Economiqucs, nO 1999, 19
novembrc 1986,
2 Voir DJniel YOUKNA KAi'vIYAP, L'elllreprise ct la volatilité des faux de change, Mémoire, Université de
YJoundé, Septembre 1988.

125
ainsi apprécié au moment de la transformation (cOIl'/c;'sion) de la devise en monnaie nationale
ou de la monnaie nationale en devise 1•
- Le risque de désindustrialisation provient de l'appréhension d'une logique de long
terme, caractéristique de J'activité inciustrielle; et d'une logique opposée de court terme
inhérentc aux activités financières. Le risque dc désindustrialisation traduit la tentation pour
les entrepriscs de préférer un placement financier à un investisscment industriel, ct donc dc
quitter leur métier traditionnel pour se consacrer à la financc. La préférence pousséc accordée
aux placcmcnts flnancicrs au détriment de l'industrie (<< cancérisation financièrc ») cst alors
l'expression de \\<1 désindustrialisation croissante de la finm:.
- Le risque de traduction ou risque sur les éléments du bilan est spécifique aux
multinationa1cs ct a pour support les opérations de consolidation des comptes du groupc. La
comparaison des résultats de deux filiales situées dans des pays différcnts posc dcs
problèmes; ct malgré les méthodes mises au point2, des erreurs subsistent. C'cst l'existencc
cie ccs crreurs qui tr<lc1uil le risque de traduction.
L'entreprise en quête de Ocxibilité offensive doit être attentive à ccs risques ct utiliscr,
pour les eombattrc, 1cs instruments mis ù sa disposition par l'innovation financière de ccs
dernièrcs années 3.
2 -INNOVATION FINANCrERE ET GESTION DES RISQUES.
4
Aux nsqucs ci-dessus énumérés
peuvent correspondre diverses techniques de
protection) que devra utiliser l'entreprise.
1 Le risque de conversion est souvent assimilé au « risque de change» c'est-à-dire celui supporté par un agent
économique « dès lors quc son patrimoine comporte un actif ou une dette en monnaie étrangère ». Voir
RJ)imond ROBERT et Alain CHA USSARD, Les relalions écollomiques el II/ollélaires illlernaliollales, Revue
B:lI1quc Editcur, Paris, pagc 143.
2 Notammcnt la méthodc « financière» et la méthode « circulant-nan-circulant ».
.1 Voir à ce sUJct :
D. YOUKNA KAi'vIYAP, op. cil.
H. DE BODINAT, J. KLEIN ET B. MAROIS, op. cil.
R. RAYMOND et A. CHAUSSARD, op. cil.
D. DEAUFILS, G. l'Y, 13. R1CHARD, B. THJR'{ et J.-P. GUIM13ERT, La ballque el les nOl/veaux
ill.\\·tr1l1l1ellls/illal/ciers : la proliqlle des marchés, Paris, Revue 13anque Editeur, 1986.
E. MANCl-fON, Allalyse bllllcaire de l'clllreprise: méthodologie, 3è édition, Paris, Economica. 1990.
A. CHOINEL et G. ROYER, Le 1I/{1I"(.:hi fillallcier : slmclures el acleurs, Paris, Revue 13anque Editeur,
1990.
., Sauf le risquc commercial dont la prctection n'est priS vl~rjtablc!l1ent liée il la fir.ance .
.' Gilles NANCY, Ces/ioll du risqlle dl! chunge et II/uuvements de capi/ol/x, Economica, Paris, 1977, page 19.

126
2.1 - La gestion du risque de conversion.
D'une façon générale, le moyen pri,.rilégié pour se prémunir du risque de conversion
sera la facturation en monnaie nationale qui permet une détermination à priori des prix de
revient pour un importateur et de la recette nette pour un exportateur. Le principe du choix de
la monnaie cie 1~lcturation, en effet est «( qu'un exportateur doit s'efforcer de libeller ses
crbnces clans une ou plusieurs monnaies fOlies pour diminuer 1cs risques cie dérréciation de
ses :lctiCs, alors qu'un importateur chercllera de façon systématique ù obtenir cie son
roulïlisseur Ull règlement dans j'une des monnaies faibles clu moment» 1.
D'une façon spécifique cependant, l'entreprise en quête de nexibilité offensive
adoptera des techniques différenciées pour protéger ses transactions cOlllmercia1cs ct
lin:lI1cières ou pour protéger ses aeti fs à l'étranger:
- Pour les transactions commerciales et financières, elle a le choix entre la
COl/l'crlllre de c!longe ail cOlI/plonl (qui consiste pour un débiteur, à acheter immédiatement ct
Ù laisser en clépôt bancaire la quantité cie Illonnaie étrangère qui devra être remise en paiement
ù une clate ultérieure; et pour un créancier, à emprunter l'équivalent de la recette attenclue en
devises cl ù vendre ces devises pour obtenir aussitôt de la monnaie) : la COl/vertllre cl terme
(qui consiste ù fixer, dès la conclusion du contrat, le prix auquel l'opération sera exécutée ù
l'échéance convenue); les «s\\Vops» (technique de crédits croisés qui consiste, pour un
export:lteur, ù créer simultanément une créance sur une monnaie ct une dette dans une autre
monnaie, pour éviter d'être trop exposé au cours de l'opération de vente); l'indexation
II/onétaire (qui consiste à libeller un prêt, un dépôt ou toute autre opération financière à l'aide
d'lIne unité de compte plus stable, à l'instar du Droit de Tirage Spécial ou de j'Unité de
Compte Européenne) et le lernleillage (qui est lin jeu des tennes de paiement qui consiste à
modifier le calendrier de ses achats ou de ses ventes en fonction de la situation du marché des
changes).
- Pou,- les actifs de la firme à l'étranger, celle-ci a le choix entre le « hedging» ou
« c/II!igl/clI/cIII» (qui consiste à transférer les postes des bilans des filiales exprimés en
monnaie étrangère. C'est par exemple la réduction des actifs exposés comme les stocks ou les
effets
a
receVOir,
pour
les
transfonner
en
des
actifs
plus
protégés
comme
les
iml1lobilisations); et la cOlI/pensalion (qui est bilatérale quand clic consiste en j'institution
1 H. Dc 130DINAT, J. KLEIN el 13. J'dAROIS, op. cil. ; Jean-Claude CHRETIEN, (( Les options: l'atout maître
de la spéculation». Science Cf Vic Econolllie, n022, nov. 1986, pages 38-43

127
des paiements réciproques entre fiiiales, ct centralisée au sein d'une filiale de refacturation en
une monnaie unique, ou directement avec la société mè;-e).
D'autres méthodes seront utilisées pour faire face aux rIsques de traduction ct de
dés ind ustri a1isat i011.
2.2- La gestion des risques de traduction et de désindustrialisation.
A chaque risque peut correspondre une méthode de protection. Ainsi:
- pour le risque de traduction, l'entreprise ajustera dans un premIer temps les
comptes des lIliales pour les exprimer dans un numéraire unique, puis elle traduira tous ces
comptes aux taux de change en vigueur lors de l'établissement de ceux-ci. Le groupe
PH J UPS utilise avec succès cette méthode.
- Pour le risque de désindustrialisation, !J protection adéquate est le maintien de
l'entreprise dans son métier traditionnel; maintien qui est par ailleurs l'une des attitudes de
base liées ù la flexibilité offensive.
Il faut dire cependant que les techniques financières ci-dessus évoquées offrent
d'autres possibilités ù j'entreprise poursuivant l'objectif de flexibilité offensive: clics ne lui
permettent pas seulement de se protéger contre les risques, mais aussi de peaufiner sa gestion
pour faire face à des problèmes de nature différente.
3 - PROBLEMES CONCRETS ET AXES DE RESOLUTION.
En effet, les nouveaux instruments financiers pennettent à l'entreprise de mieux gérer
ses excédents de trésorerie, de mieux gérer sa dette mais aussi de se protéger des risques
provenant des fluctuations des taux des différents marchés 1.
1
Pour ces analyses, voir Micllel ROLAND, ( La trésorerie des entreprises et les nouveaux instruments
financiers », Pl'Ohli;mc.\\· Ecollomiques, nO 2029, 17 Juin 1987, pages 27-28.

128
3.1 - La gestion des excédents de trésorerie.
L'entreprise de plus en plus amenée ù préférer la finanee à l'industrialisation devra,
lorsque apparaissent des excédents de trésorerie dans sa comptabilité, opérer un choix optimal
entre les placements classiques et les placements sur le marché monétaire:
- Les placements classiques sont les dépôts à terme sur le compte bancaire ct les
sicav. l,cs d(:/Jôrs (1 renlle SlIr comple ballcaire sont des placements sans risque, mais pas très
souples. Les taux sont libres au-delà de trois mois mais le rendement est légèrement infëricur
au taux du marché monétaire. La rigidité de ces placements milite en faveur de leur rejet par
l'entreprise en quète de flexibilité offensive. Leur seront préférées les sicav (3 réméré ou de
[résorcri C 11l0néta ire) dont les taux dégagés sont aussi in féri cu rs à ceux du marché, mJ.i s qLI i
ont rav~\\l1tase d'être très soup1cs : elles sont en effet accessibles pour quelques jours ct avec
peu de l1loyens lïnanciers.
- Les placements sur Je marché monétaire dont Je montant miniIllul1l est <.le cinq
lllilliollS de Crancs Français el les échéances de dix jours à sept ans l oscillent entre les billets de
trésorerie, les ccrti tÎcats de dépôt et les bons du Trésor. Souscrire aux billels de Irésorerie
revient ù prèter directement de l'argent à une autre entreprise malgré l'intemlédiation dcs
b:lI1ques. L'avantage, surtout si l'on choisit un empnllltcLlr de taille moyenne, est une
rémunération supérieure au t<lUX du marehé monétaire cumulée à une échéance générale de
trois semaines à un mois. Les cerl({tcats de dép 01 sont des équivalents aux billets dc
trésorerie, mais ici, l'émctteur est une banque. Mais comme cette signature comporte moins
de risques, on n'y trouvera pas de rémunération supérieure au marché monétai re. Enfin, pour
les hOlls du Trésor, l'emprunteur est l'Etat et donc le rendement est de plus en plus faible,
largement au-dessous du marché monétaire. Dans le cadre de la flexibilité offensive, on
préférera principalement les billets de trésorerie, en ayant tout de même à l'esprit que dans
certaines circonstances économiques et politiques, il peut être intéressant d'avoir les créances
vis-à-vis dc l'Etat (et donc des bons du Trésor).
L'entreprise peut également améliorer la gestion de sa dette grâce aux instruments
fInanciers.
1 _ Chiffres donnés par Î\\1. ROLAND, op. ciL, page 28

129
3.2 - La gestion de la dette.
Pour améliorer la gestion de sa dette, l'entreprise a le choix entre les billets de
trésorerie évoqués ci-dessus ct les créclits « spot ». L'entreprise émet le billet de trésorerie
clans l'espoir cie trouver cles prêteurs. Elle signe également l'équivalent d'une reconnaissance
cie detle et une convention avec la banque intermécliaire. Tout l'art consiste ici à trouver soi-
même les souscripteurs afin cie négocier la plus juste rémunération. L'émission clu billet de
trésorerie est soumise cependant à cieux contraintes: publier une situation cie trésorerie
semestrielle ct des comptes consolidés, puis émettre pour un montant minimal cie cinq
millions de francs français. Par contre, les crédits (( spot)) sont sans contraintes. Ce sont des
prêts h;!llcaircs à très court terme, où l'emprunteur paie le taux clu marché monétaire plus une
marge qui dépend de la valeur de sa signature. Ces crédits permettent d'éviter, au mOins en
partie. le décoll\\ut ct l'escompte, toujours facturé au taux de base bancaire.
Mais LI profusion cie taux qui entoure l'espace d'intervention de l'entreprise (taux cie
base bancaire. taux d'intérêt, taux clu marché monétaire ou taux de change) n'est pas sans
danger puisque ceux-ci fluctuent. li est donc important pour l'agent économique de sc
prémunir contre le risque attaché aux fluctuations cles taux.
3.3- La gestion du risque de taux.
D'une
façon
générale,
l'entreprise dispose du « matif» (marché à tenne des
instruments financiers) pour sc protéger. En effet, celui-ci permet de se couvrir du risque de
taux sur un emprunt ou un prêt en se plaçant en sens inverse sur des contrats fictifs. De
manière plus spéci fique, l'entreprise devra rechercher soit une protection de long terme, soit
une protection de court telllle :
- pour la protection de long terme, elle utilisera un contrat fondé sur une émission
obligatoire de dix ans, au taux de 10%, d'un montant unitaire de cinq cent mille francs
français avec un dépôt de garantie de 4% du montant unitaire'.
- pour la protection de court terme, elle utilisera un deuxième type de contrat,
représentatif d'une échéance de trois mois ct fondé sur les bons du Trésor. L'entreprise peut
avoir recours aux «( swaps )) de taux (qui consistent à remplacer un créclit à taux variable par
1 _
Chiffres donnés par M. ROLAND, op. cil.. page 28.

130
un crédit ù taux fixe si on craint une hallsse des taux, ct/ou à remplacer un crédit à taux fixc
par un crédit à taux variable pour profiter d'une baisse) ; aux «caps» (lorsque, emprunteuse,
elle veut s'assurer contre une hausse de taux) ; ou aux «jloors » (lorsque, prêteuse, clic veut
s'assurer contre la baisse des taux). Pour ces deux derniers instruments, l'entreprise choisit
elle-même son plafond (en cas de caps) ou son plancher (en cas de floors) ; cc qui lcur confèrc
la souplesse qui caractérise aussi le matif: tous trois sont des instruments dont l'US~lgC scra
préféré dans le cadre de la tlexibllité offensive.
En définitive, le premier moyen à mettre en œuvre pour une entreprise poursuivant
j'objectif de Ilcxibilité offensive concerne la finance: quelle stratégie financière adopter? La
recherche de la Ilexibi lité offensive par la stratégie financière s'appuie sur :
o
l'amélioration de
la
liquidité des actifs et
une recherche
pel111anente dc
Icurs
caractlTistiqLles de mobilité, de disponibilité et de divisibilité;
o
j'amélioration de « degré de liquidité potentielle» par une attention soutenue a la capacité
de lïnancemenl illlelllc et L1ne utilisation !imitée dc sa capacité d'endettement;
o
LIlle oriellt~\\tioll de l'investisscment vers dcs emplois liquides concemant avant tout son
activité dominante; et
III
une j ud ici euse ut i1isation des nouveaux instruments fi nanciers dont les possibi 1ités
permettent à la fois l'amélioration de la liquidité des acti fs, la gestion de la capacité de
finélnccmcnt intel'ne ct dc la capacité d'cndettement, et l'orientation de l'invcstissement
non seulement vers les cmplois liquides, mais directement vers des placements financicrs
plus rent~lb les et plus rapidement rémunérés.
La rechcrche de la flexibilité offensive et le maintien de l'indépendance financière
sont dCllX éléments qui vont de paire: J'entreprise doit éviter de se trouver en situation de
vulnérabilité. Cela signifie une répartition homogène de son patrimoine financier entre ses
di verses encaisses dc précaution, transaction et spéculations. Mais cela peut aussi signi fier,
dans un environnement dépourvu de marché financier comme au Cameroun, une plus grande
importance accordéc aux encaisscs dc précaution ct de transition.
Cependant, le maintien de l'indépendance financière ne doit pas faire ombrage à la
recherchc de la tlexibilité offensive et provoquer un comportement tatillon dicté par la peur
clu risque. Notre enquêtc a ainsi montré que les entreprises ayant une présomption de
nexibilitê offcnsive font ]a part belle non pas aux encaisses de précaution (symbolisant une
attitude d'aversion pOl\\[ le risque), mais aux encaisses de transaction qui pennettent, dans le
.1

131
contextc local, de fïnancer ù la fois l'innovation flexible, le rythme de cette innovation et le
lancement plus ou moins régulier de nouveaux produits sur le marché.
L'innovation est en effet un moyen très important de recherche de la flexibilité
offensive. C'est pourquoi il convient, dans une deuxième section, d'étudier la stratégie
globale dont elle cst le résultat.
SECTION II: LA STRATEGIE TECHNOLOGIQUE.
Autrement appelée « stratégic de R et D », la stratégie technologique est le deuxième
ensemble de moyens que doit mettre en Œuvre une entreprise dans la recherche de la
nexibilité offensive. Il s'agit de l'ensemble des moyens eoncemant la rcchcrche, le
dévcioppel1lCill ct la fabrication des nouveautés viables sur le plan commercial; ensemble que
l'on retrouve 11~lturellcment dans la fonction recherche ct développement ct dans le processus
de décision sans 1cquel ]'innovJtion n'est ricn. L'importance de la stratégie tcchnologiquc
pour la ncxibilité olTensive esttelle que la firme doit devenir fanatique d'innovation.
1 - LA FONCTION RECHERCHE / DEVELOPPEMENT.
La fonction RJD a pour rôle, comme le note LARUE, « de rechercher de nouveaux
produits (ou services), d'3méliorer les produits actuels tant du point de vue de leur élaboration
(procédés et processus de fabrication) que de celui de leur utilisation» 1. Pour ce faire, il faut
unc « rencontre technologie-marketing »2 d'abord, un processus d'innovation particulier
cnsu îte. et un contexte d'innovation devant favoriser ce processus, enfin.
1 - LA RELATION RECHERCHE-MARKETING.
La nature de j'innovation réussie, c'est-à-dire l'adéquation d'une opportunité ou d'une
création tcchniquc <\\ une opportunité du marché (et vice versa) penn et de souligner le rôle
cssenticl des fonctions R et D d'une part, et marketing de l'autre, dans le processus
innovateur. La coordination des efforts de ces deux fonctions a mis en rcliefl'existencc d'une
1 D. LARUE, Ecol/olllie ri '('n(reprise, Hachette-Technique, Paris, 1983, page 18.
~ 1. MORIN, « L'inIlovation. L1ne affaire de gestion Il, op. cil.. page 74.

132
« Interface
îvLIrketing-Recherche
I.M.R »1
opérationnelle.
L'I.M.R.
est
une
structure
org~lIlisationnel!e tendant il l'harmonisation cles <lcttons prévisionnelles et opérationnelles des
fonctions marketing et recherche, dans le cadre des objectifs de l'entreprise ct sous les
contraintes de son environnement.
JI
s'agit
donc
d'une
intégration
aussi
étroite
que
possible
entre
« fonction
technologique» normalement aux aguets des menaces et opportunités, mais aussi des
possibilités de créativité clu système technique ct du système de l'entreprise; et « fonction
marketing». plus particulièrement sensible, en principe, aux attentes cles systèmes socio-
économiques et socioculturels. « N'est-cc pas en effet, s'interroge MORIN, ù l'interface cie
ces deux champs de la technologie et du marketing que se situe la principale zone
d'émergence des innovations, clés de la compétitivité ou de l'entrée sur cie nouveaux
marchés'? >/
S~lns répondre ù celte question en forme d'interrogation affirmative, il apparaît que3 :
"
Les entreprises pel"!'ormantes sont celles qui mettent en place des cellules de marketing
élroitement liées (proximité géographique, travail en équipe, rencontres fréquentes ... )
avec les équipes de recherche ct développement;
Cl
Puis l'innovation est perçue comme stratégique, dans la politique de l'entreprise ct plus
LlCilcmcnt sc développent des structures f0n11elles d'I.M.R. ;
"
Plus le marché est résistant aux innovations, plus la fonction RlD est impliquée dans le
processus de lancement de nouveaux produits;

Plus le comportement de la firme est offensif sur le plan technique, (politiques
d'innovations révolutionnaires ou d'innovations de rupture), plus Je succès de sa politique
repose sur une intégration précoce du marketing à la recherche dans le processus.
Pour la recherche de la flexibilité offensive, deux types d'organisation peuvent être en
somme relevés:
o
une intégration du marketing ct de la recherche avec association de la production pour les
produits nouveaux de l'entreprise; et
1 Voir AI3in CADIX. « Le face-à-face recherche-marketing », Stratégies d'cntrcprises et produits nOl/veaI/X,
op.cir., page 16.
2 J. MORIN op. cir., page 74.
3 1. MORIN op. cil., page 74.

133
fi)
une intégration du marketing el de la production avec assistance dans la recherche pour les
produits existants clans l'entreprise.
Et si le système d'organisation qui prévaut dans la finne le pennet, peut-être faut-il,
cOl11me le proposent GERBELOT et MAIRE, une Direction de la Recherche et une Direction
du Développement car, arfi1l11Cllt-ils, « cette fameuse I.M.R se trouve naturellement réalisée
au sein de
la direction développement» i.
Face à un environnement
instable donc.
caractéristique du présent]' I. M. R. doit être une organisation pemlanente, souple ct tenace où
s'insclït un processus d'innovation résolument tourné vers j'avenir.
2 - LE PROCESSUS D'INNOVATION.
Soulignons, à titre de rappel, ee qui a été dit à la deuxième section du chapitre premier
de cc travail et que l'on empruntait à P.-Y. BARREYRE :
"
Réduit il sa pius simple expression, un problème d'innovation consiste a trouver LIlle
combinaison originale pemlettant une adéquation entre trois composantes: Ull besoin à
satisLlire. le concept d'Ull objet et des ingrédients permettant de rendre cc concept
opérationnel.

Présenté de manière simplifiée, le processus d'innovation comporte trois phases:
élaboration de ]'innovation, développement et introduction, et diffusion de l'innovation.
liI
Présenté de façon schématique, on obtient la représentation suivante:
Le besoin
(fonctions à remolir)
1
~
Le concept
~
Elaboration de
.. Développement
1 Diffusion
..
...
(idée nouvelle)
['innovation
et introduction

l
..
Les ingrédients
1 (technolol!ie et matière) 1
Schéma 13 : Le processus d'innovation « rationne] ».
Source: P.-Y. BAr'lliEYRE, op. cit., page Il.
1 Claude GER13ELOT et Georges f\\,IIAfRE, « De l'idée de la réalisation », Stratégie,\\' d'entreprise et produits
IIOl/veaux. op. Cii., page 31.

134
Mais les histoires d'innovations réussies, comme celles des «papillons jaunes»
(encore appelés «post-il») qui ont envahi les bureaux du monde entier, sont là pour nous
rappeler que « la route empruntée par les innovatior:s -- naissance de l'idée, développement du
prototype, expérimentation avec les clicnts pilotes, percée et conquête du marché - est
aléatoire, tortueuse, parcourue d'embüches et son tracé dépend considérablement de
l'entêtement (cléraisonnuble ?) du champion» 1.
Ce demier POillt est capital parce qu'en effet, il faut désonllais apprendre à concevoir
des organis~llions qui prennent explicitement en compte le caractère «brouillon» du
processus d'innovation, c'est-à-dire précisément son caractère «irrationnel», plutôt que
chercher par des systèmes et des plans, à le combattre. Le modèle devient donc celui qui
apparaît sur le schéma 14. L'explication est simple: le monde est complexe, désordonné, ct
chaotique.
Dès lors,
le seul moyen d'innover est J'expérimentation constantc.
Et si
l'expérimentation constante est Je seul antidote du chaos, il faut des expérimcntatcurs, dcs
champions et des petites équipes décentralisées. Et pour cela, il faut leur offrir un
ellvironllement où ils puissent s'épanouir et se multiplier.
Données de base
III
1 Monde complexe
1
Expérimentations et essais
Solution nécessaire
Innovateurs
Petites équipes
décentralisées
Créer un climat qui favorise
Rôle d Il dirige'lllt
expérimentations ct
innova te urs
Schéma 14 : Le processus d'innovation « brouillon ».
Source: Elaboration personnelle à partir de PETERS et AUSTfN, op. cit., page 141.
1 Th. PETERS cl N. AUSTfN, op. cil.. pages 139-140. Lc « champion» est un forcené de l'innovation.

135
L'innovation, appréhcnd(c ici comme un processus brouillon en dépit de l'attrait
ilTésistible d'une piani fication rJtionn~I!c, pcmlet de relever quelques remarques:
o
On peut penser que ia pIani fïcation stratégique ct technologique réduit considérablement
les risques cl'imprévus. En réalité, bien qu'il fail1e réfléchir pour localiser son champ de
recherche, J'innovation dans Jes affaircs est hautement imprévisible. Le contexte ct la
cOllliguratioll de la I"ccherche impliquent incertitude et ambiguïté.
o
On
peut
penser
que
des
spécifications
techniques
complétées
ct
un
marché
minutieusement étudié sont des bases indispensables à la réussite. En réalité, il faut
procéder à des tests aussitôt que possible, même quand la conception est encore
incomplète. ct cc, sur des sites clients. Il faut expérimenter et trouver son chemin à
lïnh:'rieur d'une interface marketing-recherche bien organisée et tenace.
o
On peut penscr qu'il l'ai Ile aménager des temps de réflexion dans le processus de
développement pour obtenir des résultats créatifs. En réalité, les véritables champions sont
surlout des pragmatiques qui gagnent non pas en rêvant, mais parce que leur règle d'or esl
,( Ess~ryons tout cie suite! ».
o
On peut penser que d'importantes équipes sont nécessaires pour faire aboutir rapidement
un projet complexe. En réalité, de petites équipes (des groupes de champions provenant uc
cliverses fonctions) peuvent être beaucoup plus efficaces et accomplir l'cssentiel des
tàchcs, même complexes, en un temps très coul1.
e
On peut penser que des fonctions centralisées (en conséquence des organisations
fonctionnelles) sont indispensables si l'on veut que l'innovateur en puissance puisse sc
faire entendre. En réalité, une innovation viable sur le plan commercial a plus de chances
de
voir
le jour dans
des
organisations
nettement
décentralisées,
même
si
son
développement y est moins ordonné. On innove et on évite les principales sources de
retard en confiant les fonctions de conception, de fabrication et de marketing (la fameuse
I.M.R.) cl des petits groupes pugnaces.
la
On peut penser qu'il n'y a rien de commun entre les grands projets et les petits (un avion
n'est pas une calculette). Pourtant la gestion de gros projets qui semble la plus efficace est
celle qui adopte un état d'esprit de « petit dans le grand ».
o
On peut penser que les clients ne parlent que de besoins passés. En fait les utilisateurs de
pointe qui sont les clients tOllmés vers l'avenir, ont généralement des années d'avance sur
les autres ct constituent la meilleure source d'innovation. C'est pour cela qu'« une
entreprise il l'écoute de son marché devra être attentive aux réactions ou aux modifications

136
de comportement des entreprises aval [car] cn général, un produit nouveau sc crée dans les
structulTS « Recherche cl Développement» des sociétés clientes» 1.
Innover régulièrement, à tous les niveaux et à toutes les fonctions, constitue la seconde
clé d'un avantage stratégique durahle au sein de la flexibilité offensive. Une telle innovation
ne s'exprime valablemcnt que dans un contexte particulier; à l'intérieur d'un environnement
qui transfolllle des gens ordinaires en expérimentateurs rigoureux et enthousiastes.
3 - LE CONTEXTE DE L'INNOVATION.
Invité :\\ une grande réunion du personnel de l'entreprise américaine 3M, Th. PETERS
commença son discours par cette remarque: «C'est toujours un plaisir de venir chez vous. Il
y règne un tel désordre! 3M est la société la plus tordue des Etats-Unis. Et je trouve cela
formidable 1 »2. Au lieu d'un silence glacé, le personnel sc leva pour applaudir: les gens de
3M élaienl fiers d'ètrc des mcrveilleux tordus !!! De mème l'ordre du jour présentait la liste
des intervenants par leur prénom. Ainsi la présentation de Lew LEHR, président de 3M était
annoncée comme ccci: « discours de Lew » !
L.es vari3bles importantes, entre autres, dans la gestion du contexte de l'innov3tion
sont, on 1'a déjà souligné, le refus de protocole, la présence quasi physique de l'innovation,
l'intervention de tout le personnel dans le développement et le lancement de nouveaux
produits, (tout le monde est concerné), l'importance accordée à l'amusement, la banalisation
du transrert des produits d'un service (division) à l'autre, le langage employé (<< merveilleux
tordus »). J1 convient de s'attarder sur quelques unes de ces variables:
- Le langage et les fables. Parce que le processus d'innovation brouillon et semi-licite
est une n0ll11e célébrée dans les entreprises novatrices, le langage souvent utilisé dans la fimle
toul11e au manque de respect et l'irrévérence vis-à-vis de la hiérarchie: « si J'on devait
attendre la permission de ces vieilles barbes pour lancer le produit. .. » disent en plaisantant
les cadres de HE\\VLETT-PACKARD (HP). De même le caractère sel11i-licite de l'innovation
évoque L1ne rOlllle de « tricherie»
c'est-à-dire une manière de court-circuiter la voie
bureautique pour rassembler plus rapidement les ressources financières et humaines. Il ne faut
1 C. GERBELOT et G. MAIRE, op. cit., page 30.
2 Th. PETERS ct N. AUSTIN, op. cit., page 205.

137
pas cacher ni sanctionner ~~es I( tricheries»; il faut au contraire en faire des fables, des
histoires que l'on r:lcontt.: ct qui poussent en avant et donnent aux autres l'audace d'essayer.
- La qualité dans le désordre. Dire par exemple que 3M honore les processus
brouillons, c'est dire qu'on y respecte l'inéductible nécessité d'expérimenter, de tester pour
se retrouver confronté, aussi rapidement que possible; aux nombreux rochers qui obstruent la
route d'un produit commercial réussi. Cela ne veut pas dire que la pensée ct l'action doivent
être brouillonnes ct de mauvaise qualité: plus on honore le chaos du monde naturel, plus la
discipline est nécessaire pour y faire j~lCC ct avancer avec promptitude. Plus l'entreprise est
novatrice, plus le management doit être rigoureux.
- Le droit à l'échec. II faut professer le droit à l'échec en parl8nt ouvertement des
faux pas obset'vés ici ct là. Le message ainsi communiqué est clair: rencontrer des erreurs
n'est pas une tare; au contraire, c'est le seul moyen d'apprendre; l'erreur étant ici considérée
comme un essai bien pensé qui n'aboutit pas ct dont on apprend quelque chose de précis. Le
corollaire dc l'admission de l'échec ct un profond mépris pour l'inaction.
- L'esprit d'innovation. Il embrasse tout cc qui précède et s'identi fie ~l l'esprit
c1'illitiativc: « Cet esprit d'initiative doit être cultivé dans toute entreprise dynamique. Les
idées nouvelles, d'où qu'elles viennent - de la recherche, du développement, de la fabrication,
des services commerciaux aussi bien que des cadres, des agents de maîtrise ct des ouvriers, -
doivent être vérifiées cl, si elles présentent un intérêt, récompensées »1. L'esprit d'innovation
s'accompagne d'un esprit d'équipe ct d'une politique expresse de rencontres inter-personllels
d8ns la firme. Cela peut être « les bistrots du coin» où les gens peuvent se rencontrer comme
à la Silicon valley des Etats-Unis; ou encore la préfërence des escaliers ou ascenseurs, des
bureaux ouverts aux bureaux fennés, des banquettes aux chaises dans les restaurants de
l'entreprise, tel qu'on le constate pour les entreprises de notre enquête et qui favorise les
contacts entre les membres de la fimle.
Ainsi, la firme poursuivant l'objectif de flexibilité offensive s'efforcera de mettre en
place une fonction R ct D ou le face-à-face recherche-marketing est bien intégré, où le
processus d' innovat ion s' illustre par son caractère broui lion, et où le contexte de cette
innovation « colle» à cette f0ll11Ule de Ken SCHOEN: « Il faut partir d'un pnnclpe
irréfutable: l'innovation est, par nature, un processus désordonné. Il est essentiel de sentir
dans ses tripes les produits. C'est plus important qu'une tonne d'études de marché »2. Reste
1 C G[RI3ELOT ct Ci. MAIRE, op. cil., pages 33-34.
'Cité par Th. PETERS ct N. AUSTIN, op. cil., page 203.

138
qu'une fois l'innov3tion n~ise au point, il est difficile Je la dissocier de la décision qui précède
par exemple son lancement sur le marché.
II - INNOVATION ET DECISION.
En effet, parmi les questions que soulève ]a tentative de conquête ct d'utilisation de la
technologie, il en est une qui, «de par sa dimension engage tout l'avenir ct le devenir de la
fïJllle, c'est celle de la décision »1. Décider du lancement d'un produit nouveau (au sens largc)
consiste ;', appréhender les risques dans une situation d'incertitude. La maîtrise de ces risques
peut passer par une innov;1tion ciblée et une promotion de la circulation de l'information dans
l'entreprise.
1 - LE RISQUE D'INNÜVATlON.
Le risquc d'innovation recouvre en réalité quatre risques distincts 2 :
- Le risque de nouveauté du produit. Ce risque résulte de la combinaison du risque
de nouveauté proprement dit et de la balance des avantages et inconvénients des nouveaux
produits par rapport ù ceux existants et à ceux qui sont technologiquement les plus en points,
de r~lçon ~I tenir compte tout à la fois de la concurrence immédiate et de la concurrcncc
potentielle à venir. Deux facteurs atténuent ce risque: la mode qui substitue l'irrationnel au
logiquc, ct le degré de souplesse de l'innovation (produits tlexibles ou conditionnels).
- Le risque de nouveauté de la technique. Ce risque de nouveauté découle aussi le
degré de nouveauté de la technique utilisée pour produire le nouvel objet. A cet égard, il
semble « évident et certain (... ) qu'un produit nouveau fabriqué à partir d'une technique
nouvelle est plus risqué que si ce même produit avait été obtenu à partir des techniques
maîtrisées et rodées »3.
- Le risque du marché. L'importance de ce risque n'a d'égale que la possibilité ou
non pour le marché d'élaborer ou de rejeter la nouveauté. Dans une optique de sécurité, la
viabilité de l'innovation est considérée eomme étant d'autant mieux assurée que cc1le-ci
permettra cie I~lire face au plus grand nombre de « situations de marehé» pouvant se présenter
cl l'avenir.
1 13. DAUDE, « Décision et innovation », op. cil., page 77
~ Ces risques sont recensés par 13. DA UDE. Op. ciL, pages 20-36
.1 13. DAUDE, « Décision ct inno\\'ation », op. cil., page 24.

140
i ZONE]
ZONE2
ZONE3
!
ZONE A
RI
ZONE fi
ZONEC
R3
RI = risque élevé; R2 = risque moyen; R3 = risque faible
Tableau 15 : La classification du risque d'innovation.
Source: B. DAUDE, op. cit., page 43.
Les zones de risque élevé sont soit inaccessibles aux entreprises sauf à être
entièrement déchargées de leur risque par les pouvoirs publics, soit accessibles à la condition
de posséder des moyens financiers lourds 1. La zone de risque moyen est celle que l'on peut
tentCl'; et celle cie risque faible est eelle que doivent préférenliellement jouer les fimles parcc
qu'clle présellte les avantages d'une mise limitée, d'un risque circollscrit, d'unc réponse
r'lpicle clu marché.
Il ne f.lut cependant pas oublier que le «risque fait partie de l'innovation, mais il
constitue une menace beaucoup moins forte que le refus de celle-ci >/. C'est pour cela que
l'entreprise en quête cie nexibilité offensive, tout en reconnaissant l'importance cie la maîtrise
des risques, ne cessera pas d'expérimenter pour, au moins, innover dans le domaine qu'elle
connaît le mieux.
2 - INNOVER DANS SON DOMAINE PRINCIPAL.
Car, avant toutes choses, il vaut mIeux qu'une société utilise sa technique et ses
compélences qu'elle connaît parfaitement. Parce qu'à l'intérieur d'une même technologie, les
axes de développement sont souvent fort nombreux, les critères de choix de ces axes
dépendront des facteurs tels que l'évolution du marché, le repérage des points forts de la
firme, (équipes de recherche, disponibilités en matières premières ... ) et les points faibles
(réseau commercial par exemple). En effet, comme le note GERBELOT, « la première tâche
de toute entreprise qui veut se développer consiste à définir ses axes de développement ct à s'y
tenir. Dans ce domaine, la dispersion est une tentation suicidaire }}3. On remarquera à ce
propos que les entreprises de notre échantillon innovent avec des produits rentrant dans leurs
compétences principales (SAFCA avec ses cahiers, FERMENCAM avec son whisky,
FABASEM avec ses étiquettes imprimées).
1 Le ticket d'entrée dans cette zone est de l'ordre du demi-billion de dollars, selon Je Pr CAREY, cité par B.
DAUDE. op. cil., page 43
~ HA DOUBLET. op. ci!.. page 7.
J C. GERBELOT ct G. MAIRE, op. ci!.. page 31.

141
Le lancement d'un produit nouveau est une chose suffisamment hasardeuse et risquée
en soi pour qu'il soit plus di fliciJc encore de Je réussir dès que l'on s'attaque à un marché ou
une technique que l'on ne maîtrise pas parfaitement. C'est pourquoi, « la meilleure façon de
réussir en innovant, c'cst innover dans k domaine où l'on est déjà» 1. Il apparaît à cet égard
que la quasi-total ité des nouveaux produits qui réussissent sont lancés par des firnles qui
travaillaient déjù sur ce marché ou avaient des compétences liées à ce marché.
Domaine de compétence actucl dc l'cntrcprisc
87°/.,
Diversitïca t ion
10%
Acquisitioll
03'10
Total dc lIouvcaux produits lancés avcc succès
100%
T~lbleau 16: Origine des nouveaux produits lancés avcc succès.
Source: B.M. POLLIT, cité par l-P. RENSONNET op. cil., page 88.
L'enquête de B.M. POLLIT de laquelle provient le tableau 16 vient rappeler les
principes de DRUCKER: « les entreprises les plus florissantes sur une longue période sont
les entreprises spécialisées dans un seul produit, à condition que ce produit soit le bon (IBM
ou General îV1otors). Les entreprises les moins florissantes à long temle sont les entreprises
spécialisées clans un seul produit ... qui n'est pas le bon (... ). Aussi profitables et florissantes
que les entreprises ccntrées sur un seul bon produit: les entreprises diversifiées autollr d'un
noyau qui fait leur unité - en entreprise qui fabrique du coton hydrophile, produit de
contraception, ... tous des produits liés à la santé et distribués sur les mêmes marchés et par
les mêmes canaux: la pharnlacie). Aussi peu rentable que l'entreprise centrée sur un seul
mauvais produit: le conglomérat, c'est-à-dire l'entreprise diversifiée sans noyau commun à
ces produits - que de noyau concerne le marché ou la technologie »2.
Pour que tout le monde dans la finne soit impliqué et concemé par ce désir d'innover,
ill~ltIt décentraliser la décision d'innovation par la circulation de l'infonllation.
1 1.P. RENSONNET, « Le contrôle du lancement », op. CiL, page ]8
~ P. DRUCK ER, L'cn'rcprise{acc cl fa crise /IIondia/e, op. ciL, pages 70-71.

142
3- LA CIRCULATION DE L'iNFORMATION: DECENTRALISER
LA DECISION D'INNOVER.
Il faut en erfet que des flux d'infonnations irriguent toutes les forces de l'entreprise,
alors considérées comme créatrices à des degrés divers. Il s'agit non seulement des flux
d'informations issus de l'environnement ct notamment du système technique général, mais
aussi des flux d'échanges f0l111els ou infon11els au sein de l'entreprise; notamment d'une part
entre ceux qui savent le mieux apprécier ses possibilités spécifiques ct ceux qui sont les mieux
avertis des possibilités externes de les exploiter; ct d'autre part entre ccux qui savent détecter
les menaces et opportunités du marché ct du jeu concurrentiel et ecux qui peuvent évaluer les
réponses technologiqucs possibles de l'entreprise.
L'org~1I1isation et la gestion de ces /lux d'infomlation ne peuvent être laissées au
has~lrd. Elles doivcnt, on l'a dit, faire l'objet d'une attention soutenue de la part du
management tant en cc qui conccme la mise en œuvre de leur traitcment que les problèmes
de culture collective et de comportements individuels.
Quant aux forccs créatrices, il faut, tout en encourageant l'esprit d'innovation, porter
une attention aux individus porteurs du «facteur l »\\, c'cst-à-dire 1 comme Intelligence des
situations nouvelles, 1 comme Interpellation, Induction, Interconnexion, bref 1 comme
Innovation. Et il est donc important de les identifier, de les « utiliser» ct, à travers eux, dc
gércr le « facteur 1» de toute l'entreprise. Quand tout le monde sera possesseur de
J'information
extellle
comme
des
savoirs
de
l'entreprise,
seront
alors
favorisés
le
développement et la participation mobilisatrice des intelligences individuelles; sera alors
accrue la possibilité de décider de l'opportunité d'une innovation ; sera alors acceptée
J'invitation faite il chaque possesseur d'ull talent de participer au progrès technique.
Innover implique donc une décision qui:
o
passe par la maîtrise des risques sans en faire un obstacle à la créativité;

est atténuée pJr le ciblage de l'innovation à son domaine principal ou (connexe) d'activité;
o
peut être heureusement décentralisée par le développement de la circulation de
l'infollllation au sein de l'entreprise.
1 E.
LEGOUVELLO ct J. RA l'ER, « De l'homme iconoclaste à l'homme innovateur », Direction et gestion,
Mars-/\\vriI1985.

143
L'entreprise qui poursuit l'objectif de flexibilité offensive doit banaliser la décision
d'innover pour qu'elle sc dilue dans l'entreprise et la rende fanatique d'innovation.
III - LE« FANATISlVIE» POUR L'INNOVATION.
Etre « fanatique )} d'innovation, c'est avoir « une passion, une admiration excessive»
pour elle; c'est être « enthousiaste, fervent, passionné, partisan, amoureux, enragé ct fou »'
2
d'innovation. Comment être ou devenir fanatique d'innovation? Voici quelques moyens :
G
Ne jamais tolérer J'inaction.
o
;\\
entendre dans l'entreprise : « Essayons », « testons» ou «bricolons ». A ne pas
entendre: « Réunissons-nous pour étudier la question », « Ne brusquons pas les choses ».
o
A dire souvent dans l'entreprise: « Pourquoi ne pas se réunir cet après-midi avec X (du
marketing), Y (de la production), Z (des ventes) pour trouver une solution? Appelle
l'vtonsieur /\\ (un bon client) iJ aura peut-étlT une idée. Vient me dire cc qui en est sorti ».
A ne pas dire: « Réunis une commission ct demande à X, Y et Z de participer. E cn sera
le président, comme cela son patron sera content. Et prévois un état des lieux dans environ
huit semaines ».
o
L'échec doit étre non seulement toléré, admis, mais même célébré. A entendre souvent
clans l'entreprise: « Quelle gamelle on Cl ramassé avec ce projet! Mais, on a appris A, B,
et C. Demain on réessaye avec les corrections ». A ne pas entendre: « C'est la faute de la
làbrication. Ils n'ont rien compris. Allons voir le patron ».
o
Les personnes les plus célèbres dans l'entreprise doivent être les individus porteurs de
« facteur 1 » (les champions) qui se sont battus comme des lions pour amener l'idée d'un
produit sur le marché.
Il
Malgré une tolérance ouverte pour un brin d'excentIicité, on relève surtout la performance
pratique.
o
La collaboration des clients, même de la part du personnel ne faisant partie ni de la vente
ni du marketing, doit être la nomle.
o
L'innovation pour le plaisir d'innover doit être récompensée à tous les niveaux et dans
toutes les fonctions.
1 Extrait du Pelir Roberr, 1990, page 757.
2 Moyens inspirés de n. PETERS et N. AUSTIN, op. cir., pages 227-231.

144
o
La disposition des lieux (bureaux ouverls ou cloisons vitrées entre les bureaux) doit être la
nonne pour favoriser la communication inforn1elle, surtout entre différentes fonctions.
o
On doit considérer qu'il est nornlal que tout personnel consacre 10 à 20 % de son temps à
des projets (dont les résultats sont récompensés).
fi
La plupart des histoires racontées aux nouveaux venus doivent mettre en évidence
l'innovation, de travaux clandestins, des actions anti-bureautiques, d'aide semi-illicite
oblenue des aulres fonctions.
\\\\)
Oc petites équipes constituées rapidement sur une idée devront être considérées comme
llnc norme pOlir résoudre les problèmes.
o
Lcs mJI1Jgers doivcnt afficher lin irrespect constant de leurs propres procédures et
structures, ct encourager régulièrement les autres à détourner les règlements.
o
JI
doit
être
normal
pour
ceux
qui
développent
les
produits,
d'intcrrompre
Je
fonctionnement d'une chaîne de production pour tester un prototype.
La nexibilité offcnsive s'accomplit dans un fanatisme pour l'innovation car, comllle le
note MORIN, « le véritable défi de l'innovation technologique est probablement moins dans la
capacité de l'entreprise à "inventer" et à mener à bonne fin économique les innovations, que
dans celle de son management à véritablement intégrer la dimension technologique dans ses
préoccupations ( ... ) pour être en mesure d'adapter les comportements de chacun à la variété
de changement qui leur est inévitablement imposés »1.
L.1 stratégie technologique constitue donc le deuxième axe de politiques à mettre en
Œuvre pour ['entreprise en quête de flexibilité offensive. Elle suppose:
"
Une fonction R et D qui s'articule autour d'une interface marketing-recherche bien
intégrée,
un processus d'innovation quelque peu brouillon qui
s'inscrit dans un
extraordinaire contexte de Jaisser-faire ;
o
Une connaissance des risques qui n'annihile point la volonté de créer mais qui autorise un
éparpillement de la décision d'innover par une circulation accrue de J'information; et un
ciblage de l'innovation dans son domaine principal; et
Il)
Unc option femlc pour l'innovation qui transfornle l'entreprise en fanatique. Mais
comment être tànatique d'innovation sans opter pour une certaine gestion des ressources
humaines de la firme?
1 1. MORIN. op. cil., page 74.

J45
SECTION 3
LA. G·ESTION DES RESSOURCES
HUMAINES.
A la qucstion : « quclles sont les questions, les problèmes et les préoccupations qui
vont vraisemblablemcnt se poser à vous ct à votre entreprise dans les cinq prochaines années
')
1

vingt-cinq
responsables sociaux
répondirent en
dégageant
les quatre
types de
préoccupation sui vants :
o
Les problèmes d'identification ct de développemcnt du potenticl de managcmcnt,
o
Les prohlèmes cie motivation clu personnel,
o
Comment
,lccorder
les
besoins
contradictoires
de
J'organisation
(ccntralisation-
décent ra 1isa[ ion),
o
Les problèmes liés à la mobilité du personnel.
Le potentiel, la motivation, la centralisation-décentralisation et la mobilité nc
représentaient pas moins de 91°;;) des préoccupations prioritaires. Il faut, pour répondre ù ces
préoccupations. procéder il la constitution d'un potentiel humain, et à un travail permanent sur
le personnel.
1 - LA CONSTITUTION D'UN POTENTIEL HUMAIN.
Comme l'affimle MARTORY, « le raccourcissement de la durée de vie des métiers -
c'est-à-dire des compétences opérationnelles des individus - est un fait constaté »2. Autrement
dit, les compétences deviennent obsolètes plusieurs fois au cours de la vie active d'un
individu. Ce phénomène fait réfléchir ; puisqu'il devient aussi important d'apprcndrc à
apprendre que de transmettre des connaissances figées, nécessairement appelées à se démoder
plus ou moins rapidement. Ce phénomène a, du point de vue de la gestion des hommes, dcs
conséquences fondamentales pour j'embauche, la fomlation et la gestion des effectifs et des
carrières.
1 Extraits de
Paul EV ANS, « Gestion des ressources humaines ; évolution et tendances internationales H,
Ellseigllelllell/ el Ges/ion. nO 27, FNEGE. Automne 1983.
" l3ernard MARTORY, « La gestion des ressources humaines en période de crise H, Les Cahiers Français,
234. Janv-Fl;v 1088, page 55.

146
1 - EiVIBAUCHER DES P(YTENTIELS.
11
s'agit
d'embaucher
beaucoup
plus
des
« potentiels
d'évolution»
que
des
« compétences dans l'instant». Cala signifie en d'autres temles, que les entreprises recrutent
aujourd'hui des saL1riés sans connaître cxactement cc que seront les tâches qui leur seront
confiées dans dix ou quinze ans. C'est dire que les techniques de recrutement visent plus ù
mettre en lumière les capacités d'évolution, de créativité, les potentiels d'adaptation des
postulants que leurs strictes connaissances le jour de leur entrée dans la firme.
Il devient donc important de socialiser les nouveaux venus en les plaçant d'abord dans
des postes où ils doivent retrousser les manches (chaîne de production, vente, distribution,
marketing ... ) ; en les initiant ensuite à la compréhension des héros, des mythes ct des
symboles de la firme afin d'obtenir leur adhésion sans réserve aux valeurs partagées dans
l'entreprise.
L'embauche devient donc un pari sur l'avenir qui est alors de plus en plus lointain.
C'est ~\\ la fOlS une grelTe d'organe qui peut prendre ou ne pas prendre (et dont on va cn tous
cas limiter les risques de rejet), et un investissement que l'on rentabilisera à long terme.
L'embauche est clonc L1ne opération qui a, dans le cadre de la flexibilité offensive, de
profondes implications stratégiques et financières. C'est l'une des raisons pour lesquelles il
faut investir dans la formation.
2 - INVESTIR DANS LA FORMATION.
La nécessité d'une évolution au cours de la vie professionnelle souligne l'importancc
des actions cie formation comme moyen d'adapter et d'accroître les potentiels à la disposition
de l'entreprisc. A cet égard, la formation est conçue, gérée et appréciée eommc un
investissement dans les hommes : l'entreprise consent actuellement une dépense dont elle
espère tirer des fruits dans l'avenir.
« Former aujourd'hui ne se limite pas à apporter un savoir-faire. C'est pouvoIr se
donner les moyens d'agir sur le savoir-être. Cet investissement dans la fOnl1ation dcs
mentalités est pour l'entreprise aussi essentiel - sinon plus - que J'innovation technologique» \\.
1 O. OLLIVIER. « La plus-value de J'encadrement dans k contexte actuel )i, Personnel nO 308, Octobre 1989,
page 26.

147
On comprend dès lors pourquoi les entreprises Américaines comme DANA, Mc DONAL D'S,
DISNEY créent des uni\\'crsités qui panent .leurs noms, et qui dispensent prioritairement des
cours pratiques et insistent sur la culture attachée à ees différentes fimles. Et on espère au
Cameroun, que la création récente par le groupe fOTSO d'un Institut Polyvalent V. FOTSO,
qui est unc université qui ne dit pas son nom, va dans Je même sens puisque les cours
techniques ct rraliqucs :;ont suivis de stages dans les entreprises du groupe. Parce qu'on dit là-
bas que c'est la pépinière des futurs employés, il faudra, à cette finne comme à d'autres. gérer
les ciTecti 15 ct les carrières des membres du personnel.
3 - GERER LES EFFECTIFS ET LES CARllIERES.
En
elTet,
la
politique
de
recrutement
est
déterminée
par
deux
démarches
interdépendantes ; «une démarche quantitative, la gestion des effeeti fs ; une démarche
qualitative. la gestion des carrières »1.
- La gestion des effectifs. Compte tenu des contraintes qui pèsent SLIr J'entreprise. le
problème de la Ilexibilité offensive s'assimile essentiellement à l'antieipation correcte de
l'évolution de la firme. Comme le remarque DUrUY, «une partie du personnel est
embauchée par la production courante, j'autre pour assurer des tâches de préparation à la
croissance »~. Dans cette optique, la flexibilité offensive est assurée par J'existence d'ulle
réserve de personnel, à priori apte à accomplir un large éventail de tâches (les potentiels dont
on a précédemment parlé).
- La gestion des carrières. Si )'on admet que l'ensemble des compétences requIses
n'est jamais définitivement fixé, alors que les effectifs sont stabilisés, on doit considérer que le
personnel recruté aura à changer d'emploi en eours de carrière et que par conséquent, les
critères de recrutement ne sauraient être exclusivement ceux de J'affectation immédiate.
3
Or, il semble reconnu que j'aptitude au changement d'activité est directement liée au
niveau de formation générale des personnes recrutées. La flexibilité offensive implique donc
certes. ulle élévation des niveaux de reerutement, mais aussi un investissement important dans
1 D.
VERI3[S1', « La geslion prévisionnelle des ressources humaines », Anna/es des Sciences Econo/lliql/es
AIJfJ/iql/(;<:s, Louvain, nO J, 1974, page 85.
~ )". DUrUY, cilé par R RE[X, op. cil., page J02.
, Voir R. REIX.op. cil. page 103, qui s'appuie sur les travaux de H. E. BURACK et P. F. SORENSEN,
« Manpowcr dé\\'cl0PPcIl1Cnl and technosocial change », ./01/1'11111 of Mallagemellt Stl/dies, 3, Oct. 1971 ; ct r.
TA nl\\ TONI Cl P. lA RN JOU. Les .l'\\'s!(:lIIes de ge....!ion. [Joiitiqw!.\\: i'I Slrl/L'fUres, PUF, Puris, 1975, page 157.

148
la formation all sem de l'entreprise, cl Linc bonne utilisation du phénomène d'apprentissage
soit de f~lçon spécifIque (non transCérable mais propice à une hausse de l'erticacité), soit
surtout de façon générale (élargissant la gamme des emplois accessibles à l'individu).
En soml11e, la poursuite de la nexibilité offensive passe par la constitution d'un
potentiel humain qui cO!lsiste princip~llelllenl cn :
fi
L'embauehc des « potentiels d'évolution » CJui sont prioritaires à côté des « compétences
dans j'instant »,
o
L'investissemcnt dans la fOl1l1ation, ct
o
Une gestiol1 des cfTecti fs ct des can"ièrcs résolument tournée vers l'avenir.
Les conséquences qui en découlent sont multiples.
Il - LES CONSEQUENCES PRATIQUES.
Au plan de la gestion proprement dire des ressources humaines, deux conséquences
majcures doivcnt être relevées par rapport:
o
Au marché interne du travail
o
;\\ J'organisation du travail dans l'entreprise.
1 - LE MARCHE INTERNE DU TRAVAIL.
Le concept du « marché inteme » a d'abord été introduit par DUNLOP, mais cc sont
J
DOERfNGER ct PIORE
qui ont surtout développé cet outil d'analyse. Ainsi, un marché
inteme clu travail peut être défini comme « une unité administrative à J'intérieur de laquelle la
rémunération ct l'affectation du travail sont détem1inées par un ensemble de règles et de
procédures administratives >/. Les règles, implicites ou explicites, sont souvent liées à la
négociation collective, mais aussi (et de plus en plus) souvent liées à des habitudes, des
coutumes ou des pratiques propres à un milieu de travail ou à une entreprise donnée J.
1 P. DOERINGER cl M. PlO RE,
Internai labonr market and nwnpolVer analysis, Lexington, Massachllsclls,
Heath and co., 1971
2 D. GAMBIER ct Iv!. YERNIERES, Le marché d1l travai!, Economica, Paris, 1982, page 92 .
., Voir Diane Gabrielle TREMBLA Y, « Innovation technologique et différenciation des fom1Cs d'emploi », in
Y
Gerr
clt Janine RODG ERS]d\\r:soudS JaSdirccl[iOnO(Jl.eI),(~es. eIl1Pl/909i~o' précair:'3s7d2sflsS la régulation du marché du
1.
I
I
travllI. I\\Slltllt ntel11atlCna
.~1LI cs Dela cs,
,.Jcnevc,.
, pages L. . -L.

i

149
Le marché interne de travail compatible avec la nexibilité offensive possède une
structure dualiste sc décomposant entre un \\( centre» et une« périphérie »1.
1.1- Le marché primaire: le centre.
Le premier élément de la stratégie de l'entreprise consiste à avoir un « noyau central»
Întell1e cie travaillc:urs stables ct qualifiés, qui ont accès au marché de travail primaire, la base
économique ct sociale de cc secteur est son importance pour les activités clés, spéci fiques ù
l'cntreprise~. II y a donc une relation directe entre les conditions de l'emploi sur le marché
primaire ct le coneept entreprencuria\\ du choix stratégique de l'activité centrale Je
l'organisalion : le trait d'union étant ici formé par le caractère stable de l'emploi.
Dans le cadre de nexibilité offensive cependant, peuvent être distinguées deux (0n11eS
d'organisation qUI, au sein de l'entreprise, s'apparentent, pour reprendre l'expression de
OSTER!VIAN, aux «sous-systèmes de relations industrielles»-' du «centre» : le sous-
système« industriel» ct le sous-système« de métier »4.
- Dans le sous système «industriel» du marché pnmalre, il existe peu de portes
d'entrée ct les filières de promotion, peu nombreuses, suivent un tracé délimité et plus souvent
horizontal. Les règles en matière de sécurité d'emploi sont définies par des procédures et des
normes d'entreprise clairement définies. La fonnation est assurée par l'entreprise, soit il
j'intérieur même de la filme, soit par des courtes séances de fonnation à l'extérieur. La
mobilité inter-entreprise est réduite.
- Le sous système de « métier» connaît une plus grande mobilité ct on y trouve un
plus gr'and scntiment d'allégeance à l'égard de la profession ou du domaine de compétence
qu'à l'égard de j'entreprise. Les compétences ne sont pas très spécifiques à l'entreprise, ct la
mobilité est ici encouragée et même valorisée. Les caractéristiques dominantes de ce sous-
systèmc son t sUl101l t 1a transférabi 1ité des compétences ct la t1exibi li té des postes d'en trée.
1 Ces
expressions sont empruntées à Anna POLLERT, « L'entreprise f1exible : réalité ou obsession ?»,
Sociologie d/l rra mil, nO 1-89, page 77.
~ Voir J. ATKINSON, « !vlanpower strategies for flexible organisation 1), Août 1984.
J P. OSTERMAN, « Introduction: TIle nature and importance of internallabollr markets », dans P. OSTERMAN
(sous la direclion de), IlIrelïloriollal labour I/Iarkcrs, Cambridge, MIT press, t984, page o.
• Distinction opérée par P. OSTERMAN, « White eolor international labor markets », dans P. OSTERMAN
(sous la direction de), op. cil. L'on exploite uniquement ici les deux premiers volels de sa distinction.

150
A j'intérieur du marché primaire du traval! donc, j'entrepreneur utilise alternativement
les travailleurs soumis J ces deux régimes: d'une part et parce que des qualifications non
transférables constituent un puissant support de la flexibilité offensive, les travailleurs du
sous-système « de métiers », dont les compétences ne sont pas très spécifiques à l'entreprise,
pour assurer des tàches d'assistance ct de complément aux travailleurs du premier sous-
système. Âutrement dit dans le cadre de la flexibilité offensive, le cercle restreint qui forme le
véritable noyau stable est constitué par les travaiJ1eurs du sous-système « industriel ». Les
autres sont plus ou moins interchangeable, à l'instar des travailleurs du marché secondaire.
1.2 Le marché secondaire: la périphérie.
Le deuxième élément de la stratégie de l'entreprise consiste à avoir des travailleurs
« périphériques» qui ne font pas partie du noyau central de la firme, ce qui les rend plus
f:lcilcs ù recruter directement à partir du marché général de travail, et donc moins protégés par
la concurrence.
Les travailleurs précaires constituent alors une réserve de main-d'œuvre, permettent à
l'entreprise d'adapter rapidement son utilisation des ressources humaines au besoin de sa
production, sans avoir ù supporter les coûts d'une force de travail pcmlanente et assez large
pour répondre aux pointes de production. Il y a là recherche d'une « nexibilité numérique (... )
afin qu'il soit facile et rapide d'accroître ou de diminuer le nombre de travaillcurs en fonction
de l'évolution même à COlll1 terme, de la demande de l'emploi» 1.
Les emplois précaires, cadre de référence pourvoyeur du marché secondaire du travail,
sont multi formes pour répondre aux besoins de l'entreprise2 :
- Le travait temporaire, c'est-à-dire limité dans le temps est illustré par des contrats
formels d'apprentissage, des contrats à durée détemlinée et des contrats d'intérim.
- Le travail à temps partiel, exprime une concentration du nombre d'heures
travaillées qui a tendance il se situer autour de vingt heures par semaine. « Temps partiel»
signifie donc principalement « mi-temps ».
Le travail indépendant, à son compte, à forfait ct à domicile font partie du
« travail extériorisé » ou du «dernier cercle de la périphérie »3. fi s'agit d'une catégorie de
1 1. ATKINSON cité par A. POLLERT, op. cil. page 78
" - Gcrry RODGERS, « Le débat sur Je travail précaire en Europe de l'Ouest », dans G. et J. RODGERS (sous la
d irection de), op. ciL, pages 7-10. Voir également A. POLLERT, op. cil.
.
.1 Expressions empnllltées à A POLLERT, op. cil. page 84.

151
personnes travaillant ~l uomiciie 0\\1 ~ partir de leur domicile à leur compte ct sans employés;
soit pour plusieurs employeurs, soit pour un employeur unique.
- Le travail en SOlis-traitallcc sc rapporte directement à la « japonisation » e'est-à-
dire cl la fragmentatioll la production Cl il la croissance de la très petite entreprise.
L'entrepreneur devra consic!érer les travailleurs du sous-système « de métier» comme
étant des tr:lVailleurs périphériques. A cc titre, le recours au marché secondaire ne s'explique
plus seulement par la recherche d'une souplesse «numérique >1, mais également par un besoin
de
flc.\\ibilité
«tol1ctionnel\\e» pour abolir les
frontières
entre métier, encourager la
pluril'onctionnalité cl la déréglementation du temps de travail. C'est ainsi qu'une grande
rourchetle cie travailleurs peut être issue du marché secondaire du travail: le personnel de
bureau. les ouvriers, aussi bien que les collaborateurs de l'entrepreneur.
[
4
_
1
_
1_3
5
_
7
[ _ 2 _
6
Schéma 15 : Le marché inteme du travail pour la flexibilité offensive.
Légende: 1 - Noyau central: 2 - Noyau centra! stable: sous-système « industriel» ; 3 - Noyau central
instable : sous-système \\( de métier» ; 4 - Groupe périphérique 1 : travail temporaire; 5 - Groupe
périphérique 2 : travail à temps partiel; 6 - Groupe périphérique 3 : sous-traitance; 7 - Groupe
périphérique 4 : travail « extériorisé ».
Source: Elaboration personnelle.
Pour faire face aux coûts de productivité (encadrement, fonnation ... ) liés aux
fréquents recours au marché secondaire du travail, il faudra:
e
recruter, exclusivement pour des compétences bien définies et « sur le moment », le
personnel de h8ut niveau (ses collaborateurs) ; et
GI
préférer \\cs f0l111eS « extériorisées» du travail périphérique (indépendant, à son compte, à
forfait, ù domicile). En somme, le marché interne du travail compatible avec la flexibilité
offensive (schéma 15) est la somme de deux composantes principales: un moyen central

152
bidimensionnel (stable Cl instable) ct une périphérie multiforme (travail temporaire, à
temps partiel, « extériorisé», ct sous-traitance).
L'entrepreneur module au gr8 des besoins de l'entreplise, les possibilités qu'offre un tel
marché. Cette capacité à l110duicr J'offre de main-d'œuvre a des conséquences sur le plan de
l'ol'g,lIlisation du travail.
2 - L'ORGANISATION DU TRAVAIL.
La structure dualiste du m<lïché du travail a en effet des conséquences sllr
l'aménagement du temps du travail ct sur la structure des emplois. Elle donne aussI
l'opportunité ù l'entrepreneur de niveler la hiérarchie et d'adopter un
nouveau type
cl 'éva luat ion/cont l'Ô 1e.
2.1- Le temps de travail.
L'aménagement du temps de travail, qui découle de la dualité du marché, concerne
cepCnd,]llt tout le pcrsonnel, quelque soit la durée du contrat qui le lie à l'entreprise.
Le tableau 17 suiv3nt montre que cet aménagement peut être mené par accord
individuel ou par négociation collective, la décision générale pouvant être prise au niveau de
l'équipe, du groupe, du service O~I de la division. L'aménagement du temps de travail peut être
saIlS conséquence sur la durée de travail ou avec réduction de cette durée; et elle peut
concerner ID journée, la semaine, j'année et même la vie active du travailleur épanouit au sein
de 13 Oexibilité offensive.
La Oexibilisation du temps de travail concerne des modalités assez diverses englobant
à la fois les horaires, les congés, la retraite, les plans d'épargne-congé et la formation. Toutes
ces modifications et celles qu'on observe dans la structure des emplois, visent à motiver
davantage les hommes cn leur permettant de travailler comme ils le veulent et là où ils le
désirent.

153
1
Ai\\lE:'iAGEMEN-f'PAR
-1'
AMENAGEIVlENT PAR
1.
ACCORD INDIV.!.!2.UEL.
.
l"
l\\'EG~CIATIONCOLLECTIVE
1 Salls c(Jlls.equenc~ vec :CC!UClIOn de
,)ans cOlls:-qucncc
Avec réduction de
sur la duree du
.
lia dmec du travo.Il
. sur la duree du
la durée du travail
+.-:.
.__
travail
pra\\~~.-,-I
--I-
--t
Journéc
-HoraIres souples,
··r l'mps partle\\
1 ;Horalfes :ou~les et
-Journées
variables o~, à IJ
1
110ralres decalcs
continues (temps
carte
1
! (sclo[; services ou en
de repas inclus
fonction de choix
dans le temps de
1--
--1-
-+-
personnels)
travail)
Semaine
-Horaires souple;
-Temps partiel
,Semaine
-Repos
-.'\\ Iternallce une
-« Twinn ing »
comprimée (40
compensa teur
semaine courte/une
(méthode
heures sur 4 ou 4,5
-Réduction des
semaine longue)
britannique de
jours)
« équivalences Il
jumelage de deux
-« Postage /
-Réduct ion dl' la
personnes
dépostage » (passage durée
volontaires pour un d'emplois d'équipes
hebdomadaire au-
seul poste
successives en poste
dessous de 40h
de jour ou le
-Diminution du
contraire)
travail de nuit
Année
-f:talement des
-Temps partiel-
-Etalement des
-Chômage
congés
Travail temporaire
congés
technique
-Travail à domicile
-Travail saisonnier
-Capitalisation
-PIEC (plan
-TravaIl à domicile
annuelle
individuel
d'épargne congé)
-A 1I0ngement des
congés
Vic Active
-Travail.( domicile
-Congés sans solde
-Réduction du
-PIEC-retraite
-Travail temporaire « temps contraint»
(cumul des points
Retraite
(réduction du temps
individuels en lin
progressIve
de trajet,
de vic active)
Formation longue
amélioration des
durée et rorlllation
ramassages
altemée
Tahleau 17 : Les aménagements du temps de travail.
Source: La durée du travail dans l'entreprise, FNEGE, extrait de B. MARTORY, op. ciL, page 53.
2.2- La structure des emplois.
C'est principalement au sein du système productif de l'entreprise en quête dc flexibilité
offensive que s'observera une mutation globale des modes du travail et du contenu des tâches,
En effet, au fur ct à mesure de la maturation technique des systèmes de production
automatisés dont est dotée l'entreprise, les tâches sont progressivement émiettées, passant de
la conception (ingénieurs) à l'usinage (ouvricrs)I, Cet élargissement des tâches, dû notamment
à la délégation « vers le bas» conduit alors à une polyvalente professionnelle ayant dcux
aspects:
1
Pour les détails cie cet émiettement, voir Minuro no, « Développement de la micro-électronique ct
changements de l'org:lJ1is;Jtion du travail dans les c;]treprises Japonaise~ )... Sociologie du Travail, n° 4-84, pages
457-467.

154
o
Une polyvalence « verticale II qui conespond ù J'extension des tâches des opérateurs
(ouvriers) vcrs J'entretien ou la modification des programmes (ouvriers spécialisés, agents
de maîtrise ou cadres),
o
Une polyvalence « horizontale» qui corféspond à la maîtrise, par l'ouvrier par exemple,
clu fonctionnement de plusieurs machines de type différent.
L'entreprise devra développer cc type de « polyvalenciation » 1 pour deux raisons au
moins: prel11lèrement, elle contrecarre la tendance à la déqualification des ouvriers (le rôle de
« pousse bouton» étant incompatible avec le type d'organisation qu'il cherche à promouvoir)
ct
atténue
aInSI
la
monotonie
du
travail
automatisé
ct
deuxièmement,
cette
« polyvalenciation » facilite une merveilleuse utilisation des outils de production automatisés
ct un mcilleur contrôle sur la qualité du produit, puisqu'elle permet l'implication de tous dans
le processus de développement amélioration du procédé.
Cette structure des emplois dominée pm un perpétuel élargissement des tâches,
concourt il la non-spécialisation, à la mobilité et au partage de quali fications transférables au
sein cIe l'entreprise". Une telle structure inOue directement. sur la configuration hiérarchique de
1a fïlllle.
2.3- La configuration hiérarchique.
En effet l'option pour la «polyvalenciation» est une option déclarée pour la
transformation de j'information en matière première stratégique. Liée à l'automatisation (grâce
notamment au développement de l'infoIl11atique) mais ne s'y réduisant pas (c'est, on le verra
une valeur cardinale de l'esprit «flex-offensif»)), la disponibilité du flux d'infonnations
touche toute l'organisation par des canaux à la fois formels et infonnels.
Cette disponibilité de j'infoll11ation rend alors caduque la vieille identification entre
travail productif et travail d'exécution directe; le centre de gravité des tâches dans la fimle se
déplaçant rapidement vers les tâches de conception des produits et d'organisation-gestion de la
production.
1 Terme empnmté à ~\\'1. rra, op. ciL, page 463.
è
La nexibilité offensive permet des qunlifïcations transférables Întra-entreprise beaucoup plus que des
quai i1ications transférah ks inter-entreprises qu i n'assurent pas la protection de l'esprit « ncx-offensif lI.

155
Le résultat est Ulle «( intellectualisation clé la production »1 qUI, en partageant
info1l11:Jtion, responsabilité ct décisloll, nivelle la hiérarchie quand clle ne la rend pas
complètement inutile. En erfet «pour qu'une équipe gagne, il faut que les tendances
centrifuges [tel que le désir d'occuper des postes de responsabilités], manifestations des
intérèts égo(stcs cles incliviclus qui la composent, cèdent le pas devant le désir ct la volonté
d'adhésion ~lctive :l une communautl~ »2. L1 préférence cie J'entreprise sera accordée ~\\ la
hiél'~lI'chlc plate comme le fait B. TAPtE qui, au lieu de multiplier les échelons clans la
hiérarchie, multiplic plutôt les sociétés dont il confie la direction à ces collaborateurs J . Ainsi,
l'insertion d'un travailleur au sein de J'entreprise, quel que soit le marché duquel il est issu, sc
I~lit sur la base des compétences ct non plus de tàehes spéeifiques4.
Cette hiérarc hie plate est incompati ble avec un système salari al rigide. Celu i-ci cloi t
être repensé pOLir s'inscrire clans la logique de la Dexibilité offensive.
2.4- La rémunération.
En mJtière cie rémunération, les dirigeants se trouvent confrontés à un problème
complexe: il faut mettre en place des solutions suffisamment générales pour traiter un grand
nombre de siluations, mais suffisamment personnaliser pour que chacun se sente concerner
par le système cie motivation. Il leur faut en même temps proposer des mocles cie
détermination des avantages assez simples pour être compris de tous, mais susceptibles de
s'aclapter ct de valoriser des comportements relativement complexes. Il faut enfin que la masse
salariale s'ajuste ,1 l'évolution des ressources financières de l'entreprise.
Ces eXIgences cie souplesse se traduisent par la mIse en œuvre de systèmes de
rémunération clont l'équation fondamentale peut être posée de la façon suivante:
1 Voir Picrre VELTZ, « Infonl13tioll dcs industrics manufacturières et intellectualisation de
la production »,
Sociologie du humil, nO 1-86, pages 5-22.
2 G. DE COUU'{SS\\', « Pour unc collaboration plus active du personnel de l'entreprise », Personne!. Mars 1986,
~agé 17. _
~
.
_
- VOir 13_ l;\\P\\E, op. CIL. pagé l)j
4 Lc rccrutemcnt sans conU-ar d'un dcs collaborateurs de TAPIE est à cet égard éloquent. L'entrepreneur envoie la
nouvelle recrue \\'isitcr les cinq divisions du groupe TAPIE ct discuter avec leurs patrons: « Vous allez vous
apercevoir de cc qUl~ vous pouvez faire dans le groupe. Ali bout de huit jours, vous en lirerez vous-même les
conclusions '. si vous n'avez rien il dire aux patrons des divisions, c'est qu'il n'y a pas de place pour vous. Si au
contrairé vou'; avez des propositions à leur !'<lirc, ou si eux en onl qui vous conviennent, vous ferez une grande
carrière d~lns le groupe 1) Voir 13_ TAPI E, op_ ci t. pag.es 140- j 4 1.

156
Rémunération d'url postc
+ Rémlluér3tion de la façon d'occuper le post
+ Primes
+ Avantages divers
+ Prise cn compte de l'ancienneté
= Salaire (exprimé par an).
Tableau 18 : Rémunération tlexible.
Source: Elaboration personnelle à partir de B. MARTONY op. cit., page 54 ; ct
Alain-Mane CARRON, « Rémunération des cadres: L'évolution aux Etats-Unis », Prohlèmes
Economiqlles, n02029, pages 28-32.
Cette équation paraît traditionnelle ; ce qui l'est moms c'est équilibre entre ses
différentes composantes. Globalement, on peut dire que la recherche de la nexibilité offcnsive
se traduit par « une prise en compte de plus en plus importante de la façon d'occuper le poste
1
(jusqu'à constituer plus de 50 % de la rémunération dans certains cas» . L'exemple de la
firme Française TELEMACANIQUE est à cet égard édi fiant 2 :
Cl
La rémunératioll s'appuie sur un procédé de cotation anal}1ique des postes (et non des
personnes) ; ]a grille de cotation est unique permettant de coter n'importe quel poste, de
l'ouvrier aux
directeurs.
La cotation du
poste déternlÎne
un
nombre de points
« qua] itieat ion».
fil
A chaque nombre de points qualification correspondent d'une part un nombre de points
rémunération (partie fixe du salaire) et un nombre de parts du résultat (partie variable du
salaire). Ainsi, deux personnes occupant des postes différents (ouvrier professionnel et
secrétaire par exemple), mais ayant la même cotation et la même ancienneté, auront
exactement le même salaire.
D'une façon générale, l'entreprise devra désormais créer un lien entre sa stratégie
globale ct les rémunérations qu'eUe pratique. L'idée poun-ait être la suivante: pour faire face
avec succès il un 1110ment de conjoncture difficile, il faut que le personnel ait intérêt à
défendre l'entreprise ; pour réussir une réorientation, il faut non seulement prévoir une
panoplie de rémunérations adaptées aux cadres concernés (primes, bonus ... ), mais aussI
réviser le système de rémunération pour le rendre de plus en plus souple ct stimulateur.
18. ivlARTORY op. CiL, page 54.
2 Pierre SAUTHIER, « La réIllllnéïation à Télémécanique », Les Cahiers Français, nO 234, op. cit., page 58.
NOle: L'auteur est le directeur-adjoint du personnel de la fïmle.

157
Un tel mlx rémunération/stratégie relève nécessairement du «sur mesure» ; il
redéfinira
les di fférents
atouts du
salaire sans
égard
excessi f pour
J'hamlOnie des
rémunérations dans l'entreprise dont il faut prioritairement garantir le succès. C'est pour cela
qu'en plus des salaires flexibles, il faudra s'occuper du personnel par un travail de tout
instan ts.
HI - UN TRAVAIL PERMANENT SUR LE PERSONNEL.
Pour ce faire, il faut gérer la démotivation dans l'entreprise, inculper un sentiment de
propriété au personnel, mettre en place des rémunérations flexibles, favoriser Je travail en
groupe. ct ne pas confondre tout ccci avec du patcl1l{llisme.
J - GERER LA MOTIVATION ..
La présent{ltion des différents niveaux de motivation vécue dans une organisation peut
être opérée à partir de la parabole bien connue des bâtisseurs de cathédrales l .
Au moyen fige, sur un chantier de bâtisseurs de cathédrales, trois hommes transportent
une lourde piene. La même question leur est posée : « Qu'êtes-vous en train de faire
actuellement? ». Cette question soulève trois types de réponses tout à fait significatives de
niveaux de motivation très différents:
- « Je traw;porte une lourde pierre », répond le premier; on est là au degré zéro de la
participation, simple renouvellement d'une conception ancienne: l'homme condamné à porter
le fardeau éternel du travail;
- « Je gaglle mOIl pain avec mon travail », affirme le seeond se situant à un niveau de
motivation inlèrmédiaire qu'on pourrait en quelque sorte qualifier de « taylorien » : le niveau
de participation à une tàche est directement lié à l'intérêt pécuniaire qui en est tiré;
- « Je bâtis une cathédrale! », s'exclame le troisième, indiquant par sa réponse un
niveau absolu d'implication dans la iâche accomplie, une participation totale aux objectifs de
l'organisation.
La flexibilité offensive s'accompagne d'un développement du système de motivation
du troisième type, cc!ui des bâtisseurs d::: cathédrales. Cette volonté passe par une remise en
1 Extrait de MARTORY. op. ci!. page 54.

158
cause des formes trad i tion nt~llc:) cl'c~: cre icc du POUVl); r, le développement des modal ités de
participation très diverses au pouve,ir et/ou à la pCrLl1111ance. Au quotidien, cette volonté se
traduit par cieux aspects' : il s'agit cJ'une part, du d~ve!oppement des modalités de la
participation il la performance sous forme àe partage des résultats, d'association des équipes à
leur résultat de formules de participation au capital; et d'autre part de la mise en place dc
structure d'implication dans la décision: développement de la gestion participative, attribution
cie pouvoir de contrôle aux échelons subalternes, mise en place de« cercles de qualité »2 ...
2 - LE SENTIMENT DE PROPRIETE.
Comme j'affirment PETERS et AUSTIN, «tous les hommes sont des hommes
d'affaires' Il suffit pour cela qu'ils fassent partie intégrale du courant d'infomlation stratégique
de l'entreprise. II suffit de traiter les employés en propriétaires. Les hommes qui "possèdent"
j'entreprise ct qui "possèdent" leur travail Ol~t régulièrement des perfomlances mi Ile fois
supérieure aux autres. Considérez tous vos effectifs comme des hommes d'affaires et ils
deviendront des hommes d'affaires totalcment impliqués dans j'avenir de l'cntrcprise )}3.
L'un des moyens (sensibilisation le plus immédiat) est d'offrir aux employés la
possibilité de devenir des associés en 2.equérant des parts dans le capital de l'cntreprise, il
l'instar de PlLCAM (2(/;) des employés sont des associés), UNALOR (3%), et SABC (5%).
D'autrcs moyens peuvent également être envisagés:
e
Le partage de la responsabilité qui doit être assurée par tous. Rien ne doit relever de la
responsabilité de quelqu'un d'autre. quiconque constate que quelque chose doit être fait
devrait le faire.
fi)
La préférence pour une structure à petite échelle; une organisation par équipes ct unités
décentralisées ou sentiment de propriété se dissout péniblement.
o
La limitation. au maximum, des règles et des procédures d'ordre administratif qui enfemw
le personnel dans une sorte de camisole.
Ct
L'impol1ance de l'amusement, du plaisir et de l'enthousiasme dans le travail qu'il faut
reconnaître, admettre et organiser avec soin.
1 On reviendra I:'J dessus au chapitre suivant.
2 Voir Françoise CHEV AUER et Gearge.s TREPO, li Les cercles de qU<1Iilé : dé'leloppement rapide et problèmes
~'intégration dans la gestion de l'entTeprise », Proo/èmes Ecol/omiq/les, nO 20] 6,; 18 Mars J987, pages 6-13.
, Th. PETERS ct N. AUSTfN. op. eit.. page 250.

159
Il cxistc ég;:l1emcnl des moyen:, jÙ:s simples, plus directs et plus faciles à mcttre cn
pratiquc ; commc par cxcmple, fournir ù tous les membres du personnel des cartes de visite ct
des blocs-notes personnalisés, faire Llhriquer le calendrier de l'entreprise illustré par des
citations des employés, ou demander la solution d'un problème qui sc pose à l'employé le plus
concerné. Il faut traiter chaque individu en partenaire impliqué dans l'avenir de la firme. Il
raut le rendrc fier ct enthousiaste. TI raut transformer les tâches subaltemes en exploits. Il faut
respecter le personnel ; lui permettre d'être membre d'un groupe ct de partager la
responsabi lité d'une mission dont Je but est concret, les moyens suffisants, les échéances
raisonnables ct une totale latitude dans l'action. 11 faut donner à chaque employé l'occasion de
dcvenir un gagnant! Le travail en groupe est très stimulant à cet effet.
3 - FAVORISER LE l'RA VAIL EN EQUIPE.
L'harmonie collective est un équilibrè fragile. Il résulte d'une volonté consciente cie
l'encadrement d'agir pour réduire les antagonismes et créer des situations d'implications
collectives. Le degré de cette implication, pour cc qui est des salariés, dépend de plusieurs
facteurs parmi lesquels l :
o
L'absence d'un projet personnel
: comportements apathiques ct contraints liés a
l'obligation d'agir (dans Je genre de travail = gagne pain) ;
o
L'existence d'un projet personnel: comportements coopératifs motivés par le désir de
prouver (ou de se prouver) quelque chose;
fl
L'existence d'un projet collectif: comportements solidaires des membres de l'équipe entre
eux, sans que cela soit nécessairement au profit de l'organisation;
o
L'existence d'un projet organisationnel
: comportements synergiques vis-à-vis de
l'organisation ct de l'équipe, se traduisant par une volonté pem1anente d'améliorer Ic
lü IlC tionn em en t.
Ces facteurs donnent la représentation suivante:
i
il
!I
1 D. OLLIVIER, op. CiL, pJgc 28.

160
OrganisJtion
Existence d'un
projet personne 1
Existence d'un
projet collectif
Equipe
Schéma 1G : Implication équipe-organisation dans le travail cn groupe.
Source: D. OLLIViER, op. cit., page 29.
L'existence d'un projet collectif « démontre le besoin des individus d'appartenir à un
groupe dans lequel ils puissent se reconnaître» 1, tandis que l'existence d'un projet
organisationnel « démontre la capacité du responsable à satisfaire cette attente pour la
fëdération des valeurs et aspirations divergentes et convergentes »2.
Un tel projet organisationnel met l'accent sur la confiance, "ouverture vers les autres,
malS aussi la cohérence dans la méthode, l'intégrité et le courage dans l'action. Il exige la
pratique d'un management « baladeur »3. Chaque membre de l'encadrement doit devenir un
promoteur de matière grise; il doit élever le niveau d'analyse et cultiver (en les exploitant) les
ressources en créativité parce qu'il semble bien que Je potentiel d'un groupe puisse aller loin
<lu-delù de la somme des capacités individuelles.
Favoriser le travail en groupe, c'est vouloir éduquer un collectif dans l'optique d'une
réelle responsabilisation et non pas dans un esprit paternaliste.
1
,
'1
1 D. OLLlVIER. op. ciL, page 29.
il
2 On reviendra longuement sur le « management baladeur », au chapitre suivant.
J !J. MONTELL. P. RYON et G. ALEXANDRE. Cercles de qualilé el de progrès, cités par D. OLLIVIER, op.
Il
cit .. page 29.
Il'i

161
5- IL NE S'AGIT PAS DE PATERNALISME.
Issuc clu taylorisme, celte manière de traiter le personnel ne doit plus avoir cours: « cc
qui appar<lît clc plus en plus "out" cc sont les comportements paternalistes du type: "il faut
être gentil avcc le salarié". S'y substituc un:.: autre habitude: "c'est avec les salariés qu'on
mène la guerre: mettons les en position de la gagner" »] (4).
Il r~lut en conséquence traiter les gens en adultes, il faut les traiter en associés, il faut
les traiter avec clignité, il faut les traiter avec respect. Comme l'affirnle PETERS, « il faut
considérer les gens- eux, et pas les investissements et la mécanisation - comme ta source
primordia1c de gain de productivité >/.
Il est utile ù cet égard d'ériger l'entreprise en une sortie de cercle de famille où le
rcspect de j'individu est un thème dominant et, en conséquence, où l'on n'a pas besoin
d'horloge pointeuses, où l'on peut rentrer chez soi avec ce qui est inutilement et abusivement
considéré comme des « secrets d'entreprise », où l'on peut aménager des horaires souples ct
individualisés, où ]a communication peut se faire face-à-face ct non pas au travers
d'i nterm inab les règlemcn ts.
En somme, le travail pennanent que l'on doit effectuer consiste en la gestion de la
démotivation par la culture du sentiment de propriété et l'encouragement du travail en équipe;
tout ceci dans le respect de l'individu dénué de tout paternalisme.
Au tota!, la gestion des ressources humaines apparaît comme un autre moyen à utiliser
dans la poursuite de ]a tlexibilité offensive. El1e concerne essentiellement trois aspects:
o
D'abord, il faut constituer un potentiel humain par une politique d'embauche des potentiels
aptes à conduire ct à se conduire dans les évolutions; par une politique d'investissement
dans ]a fonnation qui pernlet d'entretenir ces potentiels et de les conserver « up 10 date» ;
ct une politique de gestion des effectifs et des carrières hannonieusement liée au système
de recrutement.
e
En conséquence, l'entreprise devra mettre en œuvre un marché interne du travail dual pour
modeler ses besoins quantitatifs ct qualitatifs en personnel d'une part, et d'autre part clic
devra assouplir l'organisation du travail en aménageant la durée de celui-ci et la structure
t ]-1. SER1EYX. « L'évolution des techniques cie management », op. cil. page 67.
2 Th. l'ETERS cl R. WATERMAN op. ciL page 242.

162
il
des emplois. La configuration hi(~rarchique sera plus horizontale que verticale, ct les
)1
1
rémunérations toujours plus souples.
c
Enfin, il faudra veiller de façon permanente sur Je personnel, le respecter, lui donner la
possibilité de devenir « bâtisseur de cathédrales» et lui inculquer le sentiment de propriété
pour qu'il sc sente « chez lui» dans l'entreprise.
CONCLUSION DU CHAPITRE 3.
L'objectif de ce chapitre était de mettre en lumière les axes des politiques de gestion
des ressources que doit développer l'entreprise qui poursuit l'objectif de flexibilité offensive.
11 ressort de cette analyse trois politiques principales ct complémentaires:
- La stratégie financière: La recherche de la flexibilité offensive par la finance
s'appuie sur l'amélioration de la liquidité des actifs et une recherche pemlancnte de leurs
caractères mobile, disponible et divisible; l'aillélioration du « degré de liquidité potenticl »
par unc attention soutenue à la capacité de financement interne et une utilisation limitéc dc sa
cap:1cité d'endettement ; une orientation de j'investissement vers des emplois liquides
concernant principalement J'activité dominante de l'entreprise; et un emploi judicieux des
nouveaux instruments financiers.
- La stratégie technologique: La recherche de la flexibilité offensive par les moyens
technologiques suppose une fonction R et D s'articulant autour d'une interface marketing
recherche bien intégrée, un processus d'innovation quelque peu brouillon s'inscrivant dans un
extraordinaire contexte de laissez faire; une connaissance des risques qui n'étouffe pas la
volonté de crécr mais qui autorise plutôt un éparpillement de la décision d'innover par une
circulation accrue de j'infomlation, un ciblage de l'innovation prioritairement dans le domaine
que l'on maîtrise mieux; et une option fermement déclarée et établie pour du fanatisme à
l'égard de J'innovation.
- La gestion des ressources humaines: La recherche de la flexibilité offensive par la
gestion des ressources humaines s'appuie d'une part, sur la constitution d'un potentiel humain,
par une politique d'embauche des potentiels aptes à conduire (et à se conduire dans) \\cs
évolutions, sur une politique d'investissement dans la fonnation pour conserver ces potentiels
« IIp 10 dale », et sur une politique de gestion des effectifs et des carrières hamlonieusement

lG3
liée au système de recrutement; d'autre pan sur un intérêt permanent pour le personnel qu'il
faut motiver, lui donner des rémunérations correctes mais surtout lui inculquer le sentiment
d'être propriétaire de l'entreprise; ct enfin sur l'élaboration d'une structure dualiste du marché
interne du travail et de la structure des emplois qui viennent compléter des salaires « sur
mesure» ct une hiérarchie de plus en plus plate.
Tous ces développements sur la stratégie financière, la stratégie technologique et la
gestion des ressources humaines ne pourront donner la pleine mesure de leur puissance, que si
leur application est cumulée à une animation/organisation particulière que tente d'étudier le
chapilrc suivant.

164
CHAPITRE 4
FLEXIBILITE OFFENSIVE ET
ANIMATION-ORGANISATION DE
L'ENTREPRISE.
Un « système de gestion» pellt ètre considéré comme lin ensemble de processus de
décisions qui « finalisent », « organisent », ct « animent» les actions collectives de personnes
ou de groupes au sein d'une entreprise l . Une telle définition met bien en évidence, au plan
conceptuel, les trois composantes majeures de J'activité de gestion. On peut dire qu'au plan
pratique, la distinction est moins nette car les politiques effectives mélangent en général les
trois composantes. Aussi nOLIs a-t-il paru plus réaliste, pour une étude à dominante concrète,
de distinguer dans la recherche de la f1exibi1ité offensive, d'une part, les aspects liés à
l'organisation, et d'autre part les aspects liés à l'animation.
Dans la majorité des cas, l'entreprise adopte une forme d'organisation c'est-à-dire
institutionnalise un partage des pouvoirs. Par rapport à ce cadre, volontairement stabilisé, elle
définit ensuite des processus de conduite pour finaliser sa gestion. La poursuite de la
flexibilité offensive commande, dans ce cadre, l'aménagement d'une organisation motivante
(section 1) dont le ciment est l'esprit « f1ex-offensif».
Pour donner vie à une telle organisation et en tenir le gouvernail, il faut une gestion
« artistique» alliant souplesse et rigueur dans l'animation (section 2) ; incarnée par un
entrepreneur au modèle de fonctionnement particulier et apte à conduire de nouvelles formes
du rapport social au sein de l'entreprise.
1 Cette définition est proposée par P. TABATONI et P. JARNlüU, Les S\\"srèllll!s dl! gl!srioll. poliriql/es er
struclllres, PUF. Paris. 1975. page 3.

165
SECTION 1
UNE ORGANISATION MOTIVANTE.
Lorsqu'il intervient dans une institution, le consultant en entreprise est souvent
infonné, tôt ou tard, des limites de son savoir par ses interlocuteurs qui lui énoncent la
première contrainte du travail à respecter: « Mellez-vous bien dans la tête que chez nous c'est
particulier ». Celte mise en garde est l'évocation d'une identité construite à travers une
évolution à durée variable.
La
recherche
de
la
flexibilité
offensive
place
celle
identité
au
centre
des
préoccupations de la firme. Ici en effet, l'organisation motivante trouve son fondement dans
l'esprit «flcx-offcnsif» qui se veut énergie renouvelable ; qui doit être le ciment
psychologique de l'entreprise; mais aussi le puissant limon d'où viennent prendre racines les
diverses fonnes organisationnelles compatibles avec sa dynamique.
Dans le cadre de la flexibilité offensive, l'organisation motivante est avant tout un
problème mental (qu'on analysera d'abord) qui,
une
fois opérationnel, autorise des
aménagements allant de l'éclatement de l'entreprise à une nouvelle configuration du pouvoir
décisionnel (qu'on étudiera ensuite).
1 - L'ESPRIT« FLEX-OFFENSIF ».
TANDEM COMPUTER est fim1e américaine qui fait concurrence (et ce n'est pas peu
1
dire) à IBM en offrant aux institutions bancaires des systèmes « non-stop}) qui garantissent
la continuité de fonctionnement des installations informatiques2. Son fondateur lie le succès
de l'entreprise à la philosophie de cinq points qui l'anime3.
Cet exemple montre l'importance de la philosophie et pem1et de préciser, afin que
soient pris en compte les vecteurs de flexibilité offensive, qu'il est impératif de bien la définir,
et de connaître les objectifs à elle assignés pour mieux les rechercher.
1 IBM = International Business i\\lachine.
2 Voir Charles GOLDFfNGER. La géoflnanc<!. St:uil. Paris, 1986. page 28-l.
3 (a)- Tous les gens sonl bons. (b)- Employés. ouvriers. cadres et membres de la direction ne font qu'un. (c)-
Chaque personne de l't'ntreprise doit comprt'ndre l'essence de notre métier. (d)- Chaque employé doit tirer un
profit du succès de l'entreprise. (e)- Le ràle du dirigeant est de créer un environnement favorable aux quatre
premiers points. Voir Th. PETERS et N. AUSTIN, op. Cil, page 240.

166
1 - LA DEFINITION.
L'esprit « flex-offensif» désigne la philosophie qUI doit être à la base de toute
politique ou action de J'entreprise. Il s'exprime au travers d'un système de valeurs qui,
progressivement, devient système de croyances.
1.1 - Un système de valeurs.
On peut définir l'esprit « flex-offensif» comme étant le ciment psychologique qUI
découle de l'intégration d'un ensemble de valeurs fondamentales fonnées parce que défend
l'entreprise en tous lieux et en tous temps, ct qui donne le plus de fierté à chacun dans
l'organisation. L'on peut dégager quelques caractéristiques fondamentales à cet ensemble de
valeurs:

D'abord, ces valeurs sont énoncées en termes qualitatifs plutôt que quantitatifs. Lorsque
des objectifs financiers sont mentionnés, ils sont ambitieux sans être précis. L'idée que le
profit est un dérivé quasi naturel d'une chose bien faite, et non une fin en soi, est
clairement établie.
o
Ensuite, le système des valeurs s'appuie sur la volonté d'inspirer tout le personnel même
celui se trouvant au bas de l'échelle hiérarchique, afin qu'il s'implique totalement et donne
le meilleur de lui-même dans l'accomplissement de sa tâche.
&
De plus, ces valeurs mettent en évidence l'importance du service à la clientèle et doivent
transformer l'entreprise, quel que soit son secteur d'activité, en une entreprise de service
résolument à l'écoute du client
o
De même, le système des valeurs reconnaît explicitement l'existence des innovateurs à
tous les niveaux de l'entreprise. Parce que l'innovation est fondamentale pour la flexibilité
offensive, l'entreprise doit intégrer le fait que la mise en évidence d'une opportunité est un
processus imprévisible qui doit plus au hasard qu'à la précision de la planification. La
croissance par le biais de l'innovation dépend donc de tout le personnel, et non pas des
quelques éléments du département R et D.

Enfin, ces valeurs exaltent l'absence de fOn1lalisme comme source d'infon11ation,
admettent les comportements à la marge de la hiérarchie pour encourager une fluidité
aussi maximale que possible dans la coml11unication.

167
La Oexibilité offcnsive commande à la firme de définir son propre système des
valeurs. Celles-ci doivent être bien articulées ct cohérentes; elles doivent faire corps avec les
principales préoccupations de l'entreprise; clics doivent être durables et apporter une réponse
à la question suivante: « Dans dix ou vingt ans, quel sera rétrospectivement l'objet de la plus
grande satisfaction pour l'entreprise'? ».
Le système des valeurs doit être un ensemble de thèmes mobilisateurs qUI
galvanisent le personnel et qui sont capables de générer des sentiments proches de la passion.
C'est en cela que l'esprit « flex-offensi f» s'assimile à un système de croyances.
1.2- Un système de croyances.
Thomas WATSON Fils, héritier du nOI11 du prestigieux fondateur que IBM, a écrit un
livre entièrement consacré aux valeurs, et à l'intérieur duquel il est sans équivoque: «Voici
ma profonde conviction: afin de réussir et de survivre, une entreprise, quelle qu'elle soit, doit
d'abord posséder un ensemble de valeurs saines sur lequel elle doit veiller au respect fidèle de
ces croyances. Et enfin, je crois que si une entreprise veut faire face au défi quc représente la
constante évolution du monde, elle doit être préparée à tout modifier en elle, tout sauf ses
croyances» 1•
Le subtil glissement qui rend opératoire le passage des valeurs aux croyances
modifie d'autant la nature de l'esprit « flex-offcnsif» : ce dernier doit s'appuyer sur le ciment
psychologique que formalisent les valeurs, pour devenir un élément organique de toute
l'organisation, qui vit avec son existence et meurt avec sa disparition. Il est à cet égard édifiant
de noter qu'en plus d'un siècle, la croyance à la base de la philosophie de IBM n'a pas changé:
le respect de l'individu2.
Dcux traits fondamentaux caractérisent le système des croyances:
- En premier lieu, ce système est initié et inculqué à force de persévérance par un
individu ou un groupe d'individus qui sont, en général, les fondateurs de l'entreprise. C'est le
cas de James TREYBIG pour TANDEM COi'vlPUTER que l'on a précédemment évoqué;
mais c'est aussi le cas de Thomas WATSON Père pour IBM ; de Ray K.ROC pour Mc
: Thomas \\V ATSO~ Jr, A bllslness and ils beliej~·. cité par 'l'II. PETERS et R. \\VATERMAN, op. Cl\\., page 279.
- Idem.

171
- Les histoires. Ce sont des récits divers, riches d'enseignements, qUI rythment et
nourrissent le ciment psychologique de j'entreprise; ct principalement la valeur fondamentale
qu'il exalte. Deux exemples paraissent devoir étayer cc propos:
Exemple 1. Le système des valeurs de la fil111e de produits industriels 3M J s'articule
autour de son « onzième commandement <~: «Tu ne tueras point une idée de nouveau
produit ». Toutes les histoires convergent vers ce commandement, ù l'instar cie celle qu'aime à
raconter aux jeunes le président de la firme: « les vendeurs qui se rendent dans les usines de
construction automobile remarquèrent que les ouvriers qui peignaient les nouvelles voitures
bicolores avaient du mal à empêcher les deux couleurs de se mélanger. Richard DREW,jeune
technicien chercheur, trouva la réponse : J'aclhési r protecteur, le premier adhési f de
l'entreprise. En 1930, six ans après le lancement de la cellophane par DU PONT, DREW
trouva un procédé pour la rendre adhésive, et ce fut la naissance du Scotch (... ). Ce produit
n'a vraiment commencé à marcher que lorsqu'un autre héros imaginatif de 3M, John
BORDEN, directeur des ventes, créa un distributeur avec lame incorporée »2.
Trois raisons au moins donnent de l'importance à cette anecdote:
G
elle souligne l'étroite interrelation qui existe (et doit exister) entre J'entreprise et le client;
G
elle montre que le technicien n'est pas nécessairement l'inventeur, et donc que tout le
monde est concerné par l'innovation;
o
elle montre que l'entreprise n'impose pas de limites aux projets en fonction de la taille
potentielle du marché, parce que la première utilisation n'a souvent aucun rapport avec le
potentiel réel du produit.
Exemple 2 : La philosophie de PROCTER and GAMBLE, entreprise de produits de
grande consommation, insiste sur l'importance de la qualité. Toutes les histoires y ont trait,
comme la suivante: Il y a quelques années, un ouvrier travaillant dans une fabrique de beurre
de cacahuètes de PROTER and GAMBLE arriva au travail avec un sac plein de pots: il avait
remarqué que les étiquettes étaient collées de travers sur ces pots et, ne supportant pas l'idée
de les laisser ainsi exposés, il les avait tous achetés. L'entreprise les lui remboursa 3.
Il ressort de cette histoire que:
1 3M = j\\'linnesota Mining and Manufacturing.
2 Emprunlée à Th. PETERS et R. \\V ATER.\\I.-\\\\.'. op. cil.. pages 234-235.
3 Idem, pages 30\\-302.

172
o
l'attention portée aux détails est importante et doit être le fait de tout le monde dans
l'organisation;
o
seul le développement de l'esprit d'appartenance peut générer des sentiments de propriété
vis-à-vis du produit ct de l'image du groupe: c'est un élan de protection qui découle de la
fierté d'être un membre de l'organisation;
o
le sentiment de propriété est invariant dans le temps et dans l'espace.
On peut maintenant évoquer l'autre support informel de diffusion que constitue le
langage.
- Le langage. Le langage utilisé dans une entreprise peut être un vecteur de
transmission de l'esprit qui y règne. Ainsi chez 3M, on est heureux d'être de « merveilleux
tordus de l'innovation », et les innovateurs principaux sont des « enquiquineurs ». Chez
HEWLETT-PACKARD, entreprise de haute technologie, on se vante d'avoir lancé un produit
avant d'avoir reçu le feu vert de la direction. De même, alors que dans une entreprise nonnale
un marché-test négatif est tenu secret, chez PEPSICO, on dit: « Et alors? Qu'est-ce que vous
allez faire pour rattraper çà ? ».
Ce langage de vérité, qui frise l'irrévérence et est dépouillé de finesse, traduit
simplement la confiance du personnel et est toléré gràce à la reconnaissance en ses mérites.
Au contraire de ce langage propre au vocabulaire de l'innovation, les mots qui traduisent le
respect de l'individu sont plus « bourgeois» : chez DELTA AIRLlNES, on parle du « cercle
de familles» ; chez Mc DONALD'S, les employés sont des « membres de l'équipage» ; chez
le. PENNEY, ce sont des « associés» ; et chez DISNEY PRODUCTION, les membres du
personnel sont des « hôtes» et les clients, des « Invités ». De même que le langage affirme le
caractère quelque peu brouillon de l'innovation, il marque aussi clairement l'orientation de la
firme pour le respect des hommes, que ceux-ci soient des employés on des clients.
Dans le processus de diffusion de l'esprit « flex-offensif», les supports fOnllels et
infonnels peuvent être complétés par la « technologie de J'enthousiasme» véhiculée par les
stimulants non financiers.

173
2.3- Les stimulants non financiers.
Deux éléments peuvent ICI être
relevés
les célébrations, et les sIgnes de
reconnaissance.
- Les célébrations. Pour Noël 1982, les seize mille employés de la SCANDINAVIAN
AIR SYSTEME (SAS) reçurent du président de la société une montre en or. Dans les trois
pays propriétaires de SAS (la Suède, la Norvège ct Je Danemark), plusieurs milliers de
personnes furent conviées à de grands banquets. La soirée terminée, chacun fut reconduit chez
lui dans une limousine avec chauffeur!1 Voilà un exemple de célébration où les organisateurs
ont consacré beaucoup de temps et d'argent pour sa réalisation.
Il ne faut cependant pas se limiter au faste: chaque entreprise devrait pouvoir célébrer
son personnel selon ses moyens et ses capacités. L'on peut toutefois lui suggérer la tenue d'un
congrès, d'un forum ou d'une session de rencontres et d'échanges dont le cadre serait bien
défini à l'avance, avec pour objectif avoué de « faire la fête» au personnel. Il faut alors se
rappeler:
o
qu'un seul prix est de trop s'il n'est pas décerné avec conviction et si chacun ne voit pas
qu'il est mérité;
o
qu'il vaut mieux parfois demander au personnel d'une division ou d'un département, de
définir lui-même ses nonnes de récompenses; parce qu'il connaît mieux que quiconque la
nature de son travail;
o
que l'unique menace de punition pour une performance médiocre répétée doit résider dans
le fait de ne pas être récompensé, quand les autres le sont; et
o
que le recours à l'argent est inutile; les prix, même modestes, gagnent en efficacité s'ils
sont fréquents et égaux pour tout le monde.
(Re) Donner confiance au personnel, leur accorder de J'importance et le manifester
dans la joie; tels sont les thèmes forts des célébrations que l'on retrouve aussi dans les signes
de reconnaissance.
- Les signes de reconnaissance. Ce sont des initiatives visant à signifier la fierté de
l'entreprise el à récompenser le travail bien fait d'un membre du personnel. Les signes de
1 Th. PETERS et N. AUSTIN, op. cit., pJge 276. Au sUjet des célébrations, voir aussi Robert TOWNSEND,
Faites décoller l'OS hOlllmes et votre entreprise. Seuil. Paris, 1985.

174
reconnaissance peuvent être négati fs ou posi ti fs. L'effet est un changement de comportement;
étrange, imprévisible et indésirable dans le premier cas; dans le sens souhaité dans le second 1.
L'entreprise doit cultiver des signes positifs car ils renfenllent des enseignements, mettent en
valeur son image et peuvent modeler le comportement du personnel. La manière dont on se
sert cependant de ces signes importe plus que leur nombre:
o
ils doivent être spécifiques et contenir le maximum d'informations possible. Par exemple,
un
système
de
direction
par
objectif centré
sur
des
problèmes
d'exploitation
(opérationnalité d'une usine, augmentation de la qualité) est plus riche et plus significatif
qu'un système qui opte pour des questions d'ordre financier;
o
ils doivent être immédiats, à ]'exemple de la spontanéité qui est à l'origine de la « banane
d'or» dont on a parlé plus haut;
o
ils doivent être accompagnés d'un système de feed-back qui tienne compte des facultés de
réaliser (et récompense donc les petites découvertes), et qui prend la forme d'un intérêt
réel de la part de la direction de l'entreprise;
o
ils fonctionnent mieux en étant imprévisibles et inteI111ittents, et en prenant la f0I111e de
petites récompenses plutôt que des grandes.
Le point cardinal de l'esprit «flex-offensif» que véhiculent les stimulants non
financiers (célébrations et signes de reconnaissance) est de porter au pinacle les hommes qui
fondent une entreprise, qui la font croître, qui lui font gagner les divers défis qui font entrave
à son évolution. On entrevoit dès lors les objectifs assignés à ce ciment psychologique.
3 - LES OBJECTIFS.
L'objectif majeur que recherche l'esprit «flex-offensif» est l'établissement d'une
culture, c'est-à-dire d'un «ensemble des
f0I111eS
acquises
de comportement »2 dans
l'entreprise. La réalisation de cet objectif obéit cependant à une démarche séquentielle dans le
temps: il y a ainsi des buts immédiats (à court temle) et des buts médiats (à moyen ou long
tem1e).
1 On reprend là les conclusions de B.F SKrN'"NER. Par-de/li /a IibC:l'Il; c/ /a diglli/é. repris par Th. PETERS et R.
WATERt'vlAN, op. ciL. pages SG-SS.
2 Dictionnaire Le Petit Robert, Edition 1990, page 437.

175
3.1- A court terme.
Le premier objectiC que poursuit l'esprit « flex-offensi est l'adhésion de tout le
personnel aux croyances fondamentales de l'organisation. Cette acceptation volontaire est
nécessaire, voire impérieuse pour que le « style» de J'entreprise prenne possession de tous
ceux qui la composent.
Le processus de cette adhésion doit être déclenché dès le recrutement. Ainsi chez
HEWLETT-PACKARD, entreprise de haute technologie américaine, le critère de choix des
nouveaux cadres de la direction est leur aptitude à engendrer J'enthousiasme.
Plus
généralement, il Caudrait en quelque sorte socialiser les nouvelles recrues afin que celles-ci
apprennent à connaître l'entreprise et décident elles-mêmes si elles adhèrent aux valeurs ici
partagées. Deux étapes doi vent à cet égard être respectées:
«1
Placer les aspirants cadres à des postes où ils doivent retrousser leurs manches: au bas de
l'échelle en l'occurrence à la chaîne de production. Cette initiation marque leur véritable
entrée dans le monde de la fim1e et, au fur et à mesure que leur véritable avancement, ils
apprennent à gérer par la « fibre» de l'entreprise.
o
Pratiquer simultanément un apprentissage par le biais des symboles, des héros et des
mythes de l'entreprise. la nouvelle recrue apprend ainsi la manière de faire le travail à
l'aide d'anecdotes. Chez IBM, celles-ci toument autour du service à la clientèle. Chez 3M,
elles parlent quelquefois des échecs, mais surtout de persévérance dans la volonté
d'innover. Chez PROCTER et GAMBLE, elles parlent de qualité. Chez HEWLETT-
PACKARD, on emplit soigneusement « le style HP» (sorte de manuel de la fim1e)
d'histoires à propos de ceux qui ont commencé au bas de l'échelle et qui font leur chemin
vers le sommet.
L'adhésion du personnel à l'esprit « flex-offensif» doit être volontaire et entourée de
sincérité. De même qu'on entre dans L1ne religion en accordant foi aux dogmes qu'elle
véhicule, de même l'on doit pratiquer avec passion les valeurs partagées dans j'entreprise afin
que leurs objectifs médiats soient atteints.

177
Système de valeurs ou de croyances en définitive, l'esprit « flex-offensif» est la
philosophie fondamentale de l'entreprise, Je noyau dur aUlOur duquel gravitent toutes les
actions concourant à sa croissance et son efficacité. JI utilise divers supports pour être diffusé
dans l'entreprise et vise à relever des fonnes précises de comportements dans l'organisation.
Il Y a plus de trente ans, Ph. SELZNICK notait que «l'élaboration du dessein de
l'entreprise représente un défi à la créativité dans la mesure où elle implique la transformation
d'hommes et de groupes, unités techniques 'neutres, en êtres pal1icipatifs, qui ont une
personnalité propre, une sensibilité et une volonté ue s'engager. C'est, en définitive, un
processus éducatif»'. L'entreprise en quête de flexibilité offensive doit écourter autant que
possible la durée de mise en œuvre de son système de croyances, tout en considérant, comme
SELZNICK, que c'est un processus éducatif. Elle doit s'appuyer, pour ee faire:
o
sur le fait qu'il n'y a que le premier pas qui compte car, créer une nouvelle culture durable
peut prendre des décennies, mais faire le premier pas peut donner des résultats concrets
quelques mois après;
o
sur la kyrielle de supports de diffusion qu'elle aura mis en place au fUr et à mesure des
contlibutions du personnel, et dont l'impact sur l'entreprise n'a d'égale que son
omniprésence.
L'esprit « flex-offensif» est au départ de toutes les formes d'organisation que peut
adopter l'entreprise pour son fonctionnement; c'est lui qui fonde le caractère motivant de
l'organisation; c'est lui qui autorise un certain nombre de modifications qui ne sont, en fait,
que des conséquences de l'adhésion de tous à ses principes directeurs.
II
LES
CONSEQUENCES
DE
L'ESPRIT
« FLEX-
OFFENSIF ».
La première tâche de l'organe directeur de l'entreprise est d'élaborer et d'initier un
esprit « flex-offensif». C'est le noyau dur autour duquel gravitent (à l'instar des élections
autour du noyau de l'atome) des degrés de liberté finalisés par trois conséquences majeures:

des centres de décision autonomes qui sacralisent la dilution de l'initiative,

un développement de la transparence qui rend caduque la rétention de l'infoll1l3tion,
1 Philip SELZNICK, Leaders/llp a/ld adJl1!lIisrrario/l. 1957. repris par TIl. PETERS et R, WATER.\\IAN, op, ciL,
page 10

178
o
de l'imagination au service de la structure pour briser le principe taylorien de la hiérarchie.
1 - DES CENTRES DE DECISION AUTüN01\\1ES.
Comme l'écrit PETERS, « le plus sC1r moyen d'aller au désastre est de créer des
équipes autonomes sans valeurs partagées. Il faut respecter un certain ordre: valeurs d'abord,
autonomie ensuite »1. Première conséquence cie l'esprit «flex-offensif», l'autonomie des
centres de décision s'articule autour de deux axes principaux : la décentralisation et le
morcellement.
1.1- La décentralisation.
Parce qu'il semble bien qu'au-delà d'une certaine taille, étonnamment petite, les
déséconomies d'échelles semble surgir avec un malin plaisir, la décentralisation s'avère être
une impérieuse nécessité. Trois méthodes complémentaires s'offrent alors à l'entreprise:
- « Eclater» la firme. Cet éclatement exprime en quelque sorte la parcellisation de
l'entreprise centrée sur un élément choisi d'avance; que ce soit le produit, la géographie ou la
fonction. De façon générale cependant, la préférence de la flexibilité offensive va à la division
par produit parce que la production est la préoccupation première de l'entreprise. Dans une
entreprise comme le COMPLEXE CHIMIQUE CAMEROUNAIS (CCC), on aurait une
Division «Pirogue », une Division «Palm'or », une Division «Finoline », etc ... Aux
BRASSERIES DU CAMEROUN, il n'y a pas un tel cloisonnement mais on y retrouve des
« Chefs de produit» qui, avec leurs petites équipes, sont chargés du suivi du produit et surtout
des actions marketing le concernant.
Pour un meilleur fonctionnement des structures articulées autour des produits, il faut:
(a)- une grande intégrité de la division qui possède alors les fonctions principales (Recherche,
Finance, Personnel. .. ) ; (b)- une décentralisation constante en nouvelles divisions (la fil1lle
peut fixer un niveau de chiffre d'affaires qui, s'il est atteint, donne lieu à la création d'une
nouvelle division) ; (c)- des mouvements de personnel et même des produits entre les
divisions; et (d)- un réel déplacement du pouvoir du centre vers la division.
1 Th. PETERS et N. AUSTIN, op. cil. page 331.

179
- Faire exister des structures temporaires, avantageuses en cc qu'elles promeuvent
l'efficacité de petites équipes mobiles, aptes à résoudre un problème ponctuel, aptes à perdurer
mais aussi et surtout aptes à disparaitre. C'est ici que l' « adhocratie » prend tout son sens.
1
W. BENNIS et A. TOFFLER ]a définissent tous deux comme un mode de vie de
l'entreprise. Face à la bureaucratie, c'est-à-dire la structure formelle établie pour faire face à
des éléments quotidiens et routiers ; ils opposent l'adhocratie c'est-à-dire l'ensemble des
mécanismes de l'organisation qui traite de toutes les nouvelles questions qui ne relèvent pas
de la bureaucratie ou qui recouvrent des domaines extrèmement divers. En fin de compte,
selon MINTZBERG, « l'adhoeratie se présente comme une structure nexible, très organique
avec peu de
fomlalisation des comportements, particulièrement adaptée aux
fi 1111 es
2
innovatrices travaillant par projets
Il s'agit donc d'un type d'organisation qui se renouvelle de
lui-même, la coordination n'étant plus planifiée mais provenant des interactions entre acteurs
(ajustements mutuels) »3.
L'adhocratie s'articule autour de groupes d'intervention « ad hoc» dont l'élaboration
et le fonctionnement sont optimisés s'ils englobent certaines caractéristiques:
o
Les groupes d'intervention sont composés de peu de membres; dix ou moins de dix.
\\II
Le niveau hiérarchique devant le lequel le groupe est responsable et l'expérience de ses
membres sont proportionnels à l'importance du problème qu'il faut résoudre. Il est alors
important que les participants allant toute liberté de faire appliquer toutes leurs
recommandations.
o
La durée du groupe d'intervention type est limitée: six mois au maximum.

La participation doit être volontaire.

Le groupe est rapidement constitué et n'a pas de statut particulier; le suivi est par contre
rapidement assuré.
e
La documentation est aussi infomlelle et peu abondante que possible; l'objectif du groupe
étant de fabriquer des solutions ct non du papier.
- La troisième méthode est le développement de petites unités décentralisées car,
le sentiment de
propriété,
la
fierté,
l'engagement personnel
et
l'enthousiasme sont
1 Warren BENNIS, The telllpomry society: et Ah'in TOFFLER. Le choc tllI/lIlllr : cités par TIl. PETERS et R.
WATERJ\\1AN, op. cit., page 136.
2 - C'est l'exemple de lJ NASA qui lr3\\'3ill~ exclusivement p3r projets. li y a ainsi eu le projet « challJnger n, le
projet « Discovery » etc ...
Henry MINTZBERG, cité par Gilles \\I.·\\ROUSEAU, op. Cil, p3g<-' 29.

1 :
180
difficilement compatibles avec des méga-organisatiolls. L'esprit même de ces notions renvoie
à la possibilité d'avoir un espace bien à soi, ct cet espace, seule la petite unité peut l'offrir.
L'éclatement de la firme en divisions par produits; la mise en œuvre de structures
adhocratiques et le développement de petites unités décentralisées peuvent prêter le nanc, à
tern1e, à l'avènement d'une lourdeur qui rappellerait la f01111e initiale de l'entreprise. Ces trois
méthodes seraient alors incomplètes si l'on n'y opérait pas le découpage davantage plus fin
que constitue le morcellement.
1.2 - Le morcellement.
Le morcellement est un principe sous-jacent, une caractéristique importante du parti pris
de l'action. Cela signifie simplement fractionner les choses pour faciliter la nuidité de
l'organisation, et encourager l'action. Il faut alors morceler autant d'éléments que possible
dans l'organisation; que ce soit j'entreprise elle-même, les objectifs ou les tâches.
- Morceler l'entreprise. C'est le découpage de l'entreprise en divisions autonomes, en
équipes libres ou en petites unités décentralisées. Ces « morceaux» dont l'orientation
première est l'action, ont différentes dénominations - équipes, groupes d'intervention, cercles
de qualité ... - et sont la partie la plus visible de l'adhocratie.
Le petit groupe est le principal dispositif du morcellement au sein de toute structure. Il
joue un rôle important du fait de la souplesse qui le caractérise et de la rapidité d'action et de
mouvement qui fait sa force. Doté d'autonomie, le petit groupe prend des initiatives
récompensées en cas de réussite, et tolérées en cas d'échec.
Morceler les objectifs. Comme l'affirn1e A. W. GIER « l'objectif est général, les
buts sont les moyens d'attendre cet objectif»'. Il s'agit en fait de ramener les objectifs de
l'entreprise à une taille humaine en les transfonnant en micro-buts réalisables et confiés aux
différentes équipes concernées. Dans son propos, GRIER postule que l'objecti f d'une
entreprise peut être morceler ainsi:
Objectif: gagner le maximum en perdant le minimum de clientèle.
1 Anthony \\\\'. GRIER, « Le développement de b petire enrreprise n, Conférence organisée le 12 mars au Centre
Culturel Américain de Yaoundé.
-

181
But n° 1 : Satisfaire le client à 90 %.
But n02 : Associer le client à la conception réalisation du produit.
But n03 : Augmenter le chiffre d'affaire de 10 % par trimestre.
Les buts sont plus réalisables et plus concrets que l'objectif; il faut que les équipes
chargées de leur réalisation soient libres et utilisent souverainement toutes les données dont
elles disposent.
- Morceler les tâches. Morceler les tâches, c'est faire fi des structurations évidentes
et d'échelons hiérarchiques. Comme le remarquait R. Mac PHERSON : « Combien d'échelons
hiérarchiques sont nécessaires pour faire marcher l'Eglise catholique? (... ). Au maximum
cinq - les laïques, le prêtre, l'évêque, le cardinal et le pape. Dans une énorme organisation
comme l'Egl ise, peu d'échelons sont nécessaires pour qu'elle fonctionne» 1. Le problème
fondamental des bureaucraties lentes et rigi des tient peut-être au nombre exagéré des ni veaux
hiérarchiques qui, en quelque sorte, confisquent l'action. La f1exibilité offensive commande
une dilution des tâches dans l'organisation à travers le triptyque responsabilité, prise
d'initiative et audace.
La première conséquence du ciment mobilisateur que constitue l'esprit « f1ex-
offensif» est l'autonomie des centres de décision. Cette autonomie se fonde elle-même d'une
part, sur la décentralisation dont J'objectif avoué est le total transfert du pouvoir du centre vers
les unités libres (divisions, équipes, groupes d'intervention ... ), et d'autre part sur le
morcellement, moteur du parti pris pour J'action dont le but est d'accélérer la fluidité de
l'organisation.
2 - UN DEVELOPPE~lENT DE LA TRANSPARENCE.
L'accélération de la f1uidité de l'organisation qui s'appuie sur le morcellement, vise
prioritairement la transparence de celle-ci, c'est-à-dire se « limpidité ». Il est alors nécessaire
pour l'entreprise d'innover dans la communication mais d'abord, de débureaucratiser et
d'infom1atiser.
J René Mac PHERSON. alors président de la tÏmle DAN:\\ CORPORATION aux USA; cité par Th. PETERS et
R. \\VA TEIU.,[AN. op. cit. page 270

182
2.1- Débureaucratisation et informatisation.
En effet, les deux piliers de l'avantage concurrentiel durable semblent être
l'innovation constante et un service supérieur à la clientèle. Ces deux piliers n'exigent pas une
technique mystérieuse, mais uniquement un sentiment de propriété qui pemlette une
contribution créatrice de tous les membres du personnel. Qu'est-ce qui semble contrarier le
plus ce sentiment de propriété? La paperasserie.
La paperasse en rajoute à la complexité de l'organisation. Or comme l'indique le prix
Nobel d'Economie Herbert SIMON, les êtres humains ne sont pas doués pour traiter un grand
nombre de données et d'informations nouvelles ; jls peuvent en retenir au mieux six ou sept
sur un temps très court l . La firme en quête de tlexibilité offensive doit en tenir compte pour
éviter la tentation de croire que des besoins de communication complexes nécessitent
forcément des systèmes de résolution complexes. C'est alors que la débureaucratisation eUpar
l'informatisation prennent toute leur importance. Chaque entreprise peut produire ces
éléments dans son organisation par des procédés propres. L'on peut cependant relever
quelques moyens:
- Limiter au strict minimum la structure directoriale. Une prolifération de directeurs
engendre d'habitude une prolifération de rapports à eux adressés pour qu'ils « se tiennent au
courant» de ce qui se passe. A moins, bien sûr, d'instaurer le « management promeneur ». Il
est à cet égard intéressant de noter que le puissant groupe Bernard TAPIE2 fonctionne avec
onze personnes au siège central : le président TAPIE et dix collaborateurs qui ne sont
d'ailleurs presque jamais présents parce qu'il « nomadisent joyeusement» entre les entreprises
du groupe.
- Institutionnaliser une limite dans les rapports et autres notes de service. On peut à
cet égard envisager, comme l'entreprise de distribution anglaise MARKS and SPENCER, de
limiter les rapports aux cas exceptionnels, quand cela s'avère absolument nécessaire ou alors
comme la firme américaine PROCTER and GAMBLE, d'insister, sous peine de rejet, sur des
notes d'une page comme unique moyen de communication écrite. Cette recommandation vaut
surtout pour les entreprises non équipées de système infon11atique. En effet, parce qu'elle est
1 Pour donner un ordre d'idée de la complexité ici décriée, le nombre d'employés d'une firme évolue selon une
progression arithmétique, alors que le nombre d'interactions possible progresse de façon géométrique. Ainsi,
pour 10 employés, le nombre d'interactions possible entre deux personnes est de 45 ; pour 1000 employés. ce
nombre est de 500.000 ! Il
2 « Un homme qui a commencé il reprendre des entreprises en octobre 1977 et qui, fin 1985, faisait 10 milliards
de chiffre d'affaires », Bernard TAPIE, op. cit., page 219.

183
principalement un instrument de communication, l'informatique « assure la coordination entre
les différents membres de l'organisation par les échanges d'infomlation »\\ qui limite de fait, la
communication écrite.
- Limiter au maximum la hiérarchie. L'on a déjà évoqué le fait qu'il n'y a que cinq
échelons hiérarchiques pour faire fonctionner l'Eglise catholique. En effet, trop d'entreprises
souffrent d'un nombre excessif de niveaux intermédiaires entre la base et le sommet et la
pyramide. Il est indispensable que ce nombre soit réduit. Ici aussi, ]'infomlatique joue un rôle
important: d'une part comme instrument de support et de coordination des processus de
gestion à la portée de tous, l'informatique banalise les fonctions et les responsabilités
attachées aux divers échelons hiérarchiques, et d'autre part comme vecteur d'effets « sensibles
(... ) »2, l'ordinateur entraîne d'importantes modifications dans la structure des emplois et le
déplacement effectifdes pouvoirs qui rendent inutiles de nombreux échelons hiérarchiques.
- Limiter les services centraux dans les entreprises décentralisées car, ces
services ont tendance à produire du papier dont le but est plus de légitimer leur raison d'être
que de mieux gérer l'entreprise. Mais pour la firme dotée, comme le commande la flexibilité
offensive, d'un système infomlatique ; le problème de la limitation des services centraux se
transforme en questionnement sur le choix des mécanismes de liaison au sein de l'entreprise.
un « mix » des solutions proposées par REIX semble alors adéquat 3, à savoir des logiciels
adaptés aux besoins en
informations des unités autonomes, mais en même temps
suffisamment ouverts aux autres divisions pour que la fonction de communication COuvre
l'entreprise dans sa totalité.
- Eviter l'embourgeoisement, en luttant contre l'embonpoint, les routines, les
habitudes, l'ennui et la résignation. Comme l'écrit TAPIE, «Avenue de Freidland, au siège
central du groupe Bemard TAPIE, nous disposons en tout et pour tout de cinq pièces qui sont
communes à tous les collaborateurs - qui ne font qu'y passer - et de quatre secrétaires. S'ils s'y
installaient tous, il m'aurait fallu dix-huit bureaux et une secrétaire à chacun, cela ferait trente-
six pièces, avec quatre standardistes en plus; on se retrouvait avec un holding; on y prend ses
aises, on pose sur son bureau la photo de sa fiancée ou de sa jeune femme, le petit cadeau
fétiche de sa maman, son agenda, son dossier, ses téléphones ... Il ne faut jamais oublier
comment s'i nstalle la bureaucratie, ce fomlidable sida des entreprises»4 . C'est dans le même
esprit qu'il faut appréhender le « chaos management» dont parle PETERS et qui n'est, en fait,
\\ Michel CHOKRON et Robert REIX, « L'infonnation et l'entreprise », Les Cahiers Français, n0233, op. cit.,
rage 30.
.
' "
' .
- Robert REIX, « L'ordmateur et 1organisation », Les Callias FrançaIS, n° 233, op. Cil., page 30.
)
~
Idem, page 31.
4 B. TAPIE, op. cit., page 142.

184
qu'un hymne à une inébranlable volonté de changement dans J'organisation, seule garante d'un
décollage toujours renouvelé de l'entreprise l .
Cette volonté de changement que cultive j'esprit « llex-offensif» ct pOur laquelle la
débureaucratisation ct l'infol11latisation doivent être initiées et développées, ne s'affemlirait
pleinement que si l'on complète ces deux moyens par de nouvelles fomles dans la
communication proprement dite.
2.2 - Innover dans la communication.
La procédure de recherche et de ventilation des in[om1ations a pour objectif de
combler le fossé qui existe entre )'infol111ation disponible dans l'environnement et celle dont
on dispose à l'intérieur de l'organisation. En général, cette recherche est déclenchée à partir de
l'apparition de symptômes précurseurs, pour confimler ou infirmer un diagnostic. Afin de
réduire les délais de réaction et d'éviter certains biais dans la recherche, il est préférable que
l'entreprise en quête de flexibilité offensive « ouvre» davantage son système d'informations et
mémorise, de manière continue, le maximum de données sur son environnement. Cet objectif
peut toutefois se heurter à deux séries d'obstacles:

d'ordre quantitatif d'abord: pour que le procédé soit efficace, il est nécessaire d'élargir
considérablement le champ de la collecte ; ce qui a pour conséquence une hausse
considérable du volume des données mémorisées. L'informatisation offre la solution
puisqu'elle permet aujourd'hui en stock un très grand volume de données mémorisées.

d'ordre qualitatif ensuite: on peut admettre qu'en raison de leur activité habituelle, les
personnes chargées de la collecte et de la saisie des infonnations, ont tendance à
privilégier certains aspects (plus que d'autres) des événements observés. Ce faisant, ils
limitent les possibilités futures d'exploitation des données recueillies. La nature formelle,
mais davantage informelle du réseau de communication à mettre en place dans le cadre de
l'esprit « flex-offensif» doit pennettre, par l'entreprise de contacts opportuns entre les
individus et par le développement de la « fibre» de ['entreprise, la détection de ce qui est
important et de ce qui l'est moins.
1 Tom PETERS, Thril'ing ou chaos: handbook for a management rel'o/utioll, Alfred A. KNOPF Inc, 1987 ;
traduit par Le chaos managemellt : II/a/llll!! pOl/r I/Ile /loI/velle propriété de /'elltreprise, Inter Editions, Paris,
1988.

185
L'intensité cie ce réseau ct la configuration des COlllmUllications doivent accroître le
potentiel de fluidité de l'organisation. Les exemples et illustrations de celle configuration sont
multiples:
- L'absence de formalisme, qui peut aller Je J'instauration du port d'ull badge
affichant uniquement le prénom pour tout le personllel (de l'ouvrier <lLl directeur), à la pratique
de la politique de la porte ouverte pour tous les bure<lu\\: de l'entreprise (même, et surtout celui
du dirigeant pour lui permettre de toujours répondre directement aux réclamations du
personnel) ; en pass<lllt par J'installation de l'ensemble des employés d'une direction ou d'un
service au même niveau (étage), sans cloisons elltre les bureaux 1.
- La présence physique des dirigeants qui sortent de leurs bureaux contribue aussi
aux échanges informels. 11 faut en effet en finir avec le dirigeant « invisible» qui dispose d'un
ascenseur (ou escalier) particulier, qui infonlle l'entreprise de sa présence en commandant par
interphone un café à la secrétaire, qui ne rencontre le personnel qu'après réception d'une
demande d'audience ... Il faut lui substituer un dirigeant adepte du management « visible» ou
« promeneur» qui est presque toujours hors de son bureau, à la rencontre du personnel, au
contact des idées, au founllillement de la recherche.
- L'installation d'éléments physiques aptes à engendrer ou à favoriser les contacts. Il
peut s'agir (a)- de la préférence des escaliers aux ascenseurs pour augmenter les contacts face
à face; (b)- de la création de « clubs» et autres groupes infonllels qui favorisent (c'est le cas
des cercles de qualité) des réunions d'où peut jaillir l'idée nécessaire à la résolution d'un
problème particulier; ou (c)- de l'installation de tableaux à certains endroits de la tinne pour
penllettre à celui qui essaie de se faire comprendre de matérialiser son idée par écrit sur un
support qu'il trouve sur la main.
Issu de l'esprit « flex-offensif», le développement de la transparence de l'organisation
est la seconde exigence de la flexibilité offensive. Il se traduit d'une part par la nécessité de
débureaucratiser (pas de structures scléros<lntes, beaucoup plus d'adhocratie) et d'informatiser
(adoption d'un logiciel, fomlation continue), et d'autre part par l'obligation de repenser le
réseau et la configuration du système de communication pour leur donner un caractère
davantage infollllel parce que vecteur d'une accélération cles échanges. Ces exigences donnelll
à réfléchir, en ce qui concenle k choix cie la « meilleure » structure pour l'entreprise.
1 C'est une pratique (ins!albtion du pcrsonnd sur le même pallicr) quc l'on obserye de plus en plus dans les
entreprises camerounaises. prilKipalem~nrles banquès.

186
3 - L'IwIAGINATIüN AU SERVICE DE LA STRUCTURE.
« Nous pou\\'ons prédire la fin de la suprémJtie cie la structur'e comme premier critère
pour définir l'aptitude d'une organisation, La structure va devenir un moyen dynamique de
changement ct d'immobilisme, l'ultime modèle clu "chaos organisé"» \\, écrivait il y a
longtemps 1. ANSOFF ; posant ainsi le problème de la mise en Œuvre d'une structure adéquate
pour certains types d'entreprises, A cet égard ct en adoptant, avec REl X", l'ambiguïté liée au
temle « structure », cleux démarches peuvent être retenues:
o
Si l'on considère que la structure n'est que la lorme d'organisation traduisant L1ne certaine
réparti lion des l'ales, la flexibilité orrensive recolllmande un « organigramme à l'envers » ;
o
Si l'on admet par contre que le temle a un contenu heaucoup plus riche couvrant divers
domaines de l'entreprise, alors l'esprit « Ilex-otTensi r» peut induire une conception
tridimensionnelle de la structure,
3.1 - L'organigramme à l'envers.
On a déjà montré que le modèle de fonctionnement qui guide la flexibilité offensive
est assis sur un trépied qu'impulse de façon pemlanente le leadership: chérir le client, innover
sans cesse, mobiliser les hommes, Il faut dire que J'innovation quotidienne et Ja motivation (au
propre comme au sens de l'esprit « flex-offensif») sans relâche des hommes sont des
principes qui ne visent qu'un objectif unique : satisfaire le client.
Cette préoccupation doit devenir une obsession dont la puissance n'a d'égale que la
transfiguration qu'elle fait subir à l'organigramme de l'entreprise, illustré dans le schéma 17,
Ainsi, l'organigramme adapté à la flexibilité offensive, abondamment utilisé par Jean
CARLON, le président de la société SCANDINAVIAN AIR SYSTEM], doit simplement
traduire la quadruple réalité de l'entreprise:

« le client est roi » ; il est au sommet de la pyramide parce qu'on a la conscience aiguë que
toute entreprise est d'abord L1ne entreprise de service qui cherche ,\\ vendre un produit au
consommateur qui est le seul à pou\\'oir l'acheter.

Les hommes les plus importants de l'entreprise sont constitués par le personnel
d'encadrement. Au contact de la clientèle, ces hommes sont chargés de la conception et de
1 Igor ANSOFf, cil0 p3r Th, PETERS cr R, W:\\TER\\!:\\:", op. cil., r3~C 126,
~ R, REIX, La.f7e.\\ibilirt! dt' l'el/rrcprist', op, cil.. p3ges l.\\7-1~S,
-
3 J, CARLZOl'. ReI/H'I'se:: la pyralllide ,', Inter Editions, P3ris, 1986,

187
la fabrication des produits, ainsi que de la vente cle ceux-ci en aSSU['ant le service après-
vente auprès des cli ents. Le personne l, dont 1a cl ynalll ique est di rectelllent 1iée à
l'évolution du chiffre d'aff:1Îres.
o
Parce que le personnel d'encadrement a besoin d'aide, le I1lveau hiérarchique inférieur
comporte le personnel qui j'assiste dans sa tâche. 1] peut s'agir des services infonllatique,
comptable, ou du personnel.
G
Ce n'est qu'ensuite qu'apparaît la directioll «< autres Il), dernier niveau hiérarchique dont le
travail principal consiste à mettre en place, autant de fois que possible, de meilleures
conditions de vie dans l'entreprise.
LES CLIENTS
PERSO:\\'NEL D'ENCADREi\\IENT
(conception, fabrication, vente, service
après-vente)
ASSISTANCE
(Autres services fonctionnels)
AUTRES
(direction)
Schéma 17 : L'organif,'Tamme à l'envers.
Source: Elaboration personnelle, à partir de: Th. PETERS et N. AUSTIN, La passion de l'excellence,
op. cil. ; Tom PETERS, Le chaos management, op. cil. ; Jan CARLZON, Rel1l'ersez la pyramide! op.
cil. ; Taiichi OHNO, L'esprit Toyota, op. cil.
L'essentiel n'est cependant pas d'afficher simplement cet organigramme dans tous les
coms de l'entreprise. Il faut au contraire, au travers de l'esprit «flex-offensif», vivre
réellement pour les clients avec l'aide d'un personnel en contact pemlanent avec eux; de sorte
qu'un tel schéma confimle juste un état de fait dans la firme.
Au-delà d'une telle représentation peuvent toutefois être suggérées des propositions
d'ensemble pour l'élaboration d'une structure type pouvant servir les intérêts de la fillne
poursuivant l'objectif de flexibilité offensive.

188
3.2 - Une conception tridimensionnelle de la str·ucture.
Plusieurs formes d'organisation! peuvent être adoptées par les entreprises selon Icur
entités propres. ivlais parce qu'en général, ces formes d'organisation ont dcs inconvénients
importants, il paraît oppor1un de recenser des propriétés souhaitables d'une « structure
potentielle de la nexibilité offensive» qui devra répondre aux trois besoins suivants:
o
un besoin d'efficacité en ce qui concerne les principes de base;
o
un besoin d'innO\\ation régulièr'c ; et
o
un besoin d'éviter la sclérose en garantissant d'abord un minimum de capacité de réaction
aux menaces extérieures majeures, ensuite un minimum de capacité d'anticipation aux
besoins à venir, et enfin un minimum de capacité cie création dc futurs besoins et marchés.
On pense alors à une forme structurelle fondée sur trois « piliers », chacun répondant à
l'un et de ces trois besoins fondamentaux: le pilier de la stabilité pour le premier, le pilier de
l'esprit d'entreprise pour le second, et le pilier « briseur d'habitudes» pour le dernier.
- Le pilier de la stabilité se fonde sur le maintien d'une fornle structurelle sous-
jacente, simple et constante d'une part, et d'autre part sur le développement et le respect de
l'esprit « flex-offensif» que traduisent les valeurs solides mais souples. La fornle sous-jacente
simple doit être la structure par division axée sur un produit. En effet, l'esprit d'entreprise vis-
à-vis du produit et du service, l'obsession du produit et de sa qualité, la concentration sur
l'action et la productivité par la motivation d'un personnel au contact des clients mènent à une
orientation vers le couple produit-marché. Le système des valeurs, seconde caractéristique du
pilier de la stabilité, s'inscrit dans la même logique car, il faut se souvenir qu'au sens large, la
structure représente la fonnalisation du réseau de communication de l'entreprise. C'est dans ce
sens qu'il est important que l'esprit « f1ex-offensif» possède quelques principes dominants qui
fondent sa stabilité.
- Le pilier de l'esprit d'entreprise a pour fondement «plus on est petit, mieux on sc
porte ». La principale manière de rester petit est de créer toujours plus de divisions pour
accueillir des acti"ités nouvelles ou en développement. De ce point de \\'lIe, la petite
dimension est une condition sille qua 11011 d'ulle faculté d'adaptation et d'innovation
1 Elles ont le choix entre: lJ stll.lcture p:u fOllctlùllS.
b struclure p:u divisions. lJ structure 1113tricielle. la
structure 3dhocr3tique. etc ... Voir Benl3rd CLAUZEL .. ( Les structures de l'enrreprise », Les Cahiers Français
n0233, op. cil.. p3ges 19·2.5.

189
constante 1. La seconde caractéristique du pilier de l'esprit d'entreprise, issue de la première,
est une nouvelle conception des systèmes d'évaluation du personnel. Ceux-ci doivent (a)- être
plus simples, (b)- être plus portés sur les remarques ct les félicitations que sur les sanctions, et
(e)- nécessiter des états-majors beaucoup plus restreints pour leur exécution.
- Le pilier « briseur d'habitudes » englobe en particulier la volonté de procéder à des
réorganisations régulières ct parfois temporaires (quand il faut s'attaquer à des tâches
spécifiques). Par réorganisation régulière, il faut entendre (a)- une volonté cie créer de
nouvelles divisions lorsque les anciennes devienncnt trop grandes et menacent de se
bureaucratiser; (b)- une volonté d'assurer la transmission cles produits entre les divisions afin
de tirer parti de compétences spécillques cie gestion, ou de répondre à des évolutions de
marché; (c)- une volonté de réunir les meilleurs cadres opérationnels dans des équipes de
projet dont l'objectif, limité dans le temps, est de résoudre des problèmes spécifiques ou
d'accomplir une mission importante; et (d)- une volonté cie redistribuer J'organigramme (tout
en maintenant l'intégrité de la fom1e centrale de base) dès que le besoin s'en fait sentir.
En somme, l'enracinement de l'esprit « flex-offensif» donne lieu à un éparpillement
multiforme de l'entreprise qui prend fortement appui sur les valeurs de bases qui l'animent.
Trois manifestations de cet éparpillement ont ici été retenLles : premièrement, l'esprit « tlex-
offensif» autorise des centres de décision autonomes ; deuxièmement, il pemlet de
développer la transparence et la fluidité de l'organisation; et troisièmement, il donne la
possibilité de repenser la structure quand il ne s'agit pas simplement de la bannir de
l'entreprise.
Ainsi, l'organisation motivante compatible avec la flexibilité offensive, c'est d'abord
l'esprit « tlex-offensif», support psychologique du concept, et ensuite (mais seulement
ensuite) des modifications dans la physionomie organisationnelle de la fim1e, supports
techniques de la notion. Une telle conception de l'org~misation motivante nécessite, nOLIs
semble-t-il, un « art » dans la gestion de l'entreprise, capable de conduire la nou\\clle donne de
l'animation de la finne.
1 A cet égard, Amhony W. GR1ER. lors de sa conference du 12 mars 1992. relève:
qu'aux US:\\. d'après le « Small Business Administration n. plus de 90 % de tïnnes peuvcnt èrre considérées
comme des P\\I E ou des P\\t\\ :
qu'en FrJnce. en dehors des P1\\IE non agncolcs. plus de 90 (;<) d'entreprises sont à considérer comme dèS
PME-P1\\II.

190
SECTION II . UNE ANIMATION DYNA.MIQUE.
l
Joseph A. SCHUMPETER estimait que l'entrepreneur agit pour fonder un royaume
privé; qu'il a éga\\cment la volonté de conquérir, le désir de se battre, de se montrer supérieur
1
aux autres, de réussir, non pas pour les fruits du succès, mais pour le succès lui-même; qu'il a
il
enfin la joie de créer, de mener quelque chose à bien, ou simplement d'exercer son énergie ct
son ingéniosité.
Plus tard, à partir d'une étude d'hommes d'affaires ayant montré des capacités
d'innovation d'une part, ct d'autre part de la théorie de ]a personnalité, on a reeensé les qualités
1
combinées de cel entrepreneur- :
o
sa satisfaction principale consiste ù résoudre des problèmes;
o
il a surtout confiance en lui-même;
o
son efficacité s'exprime dans J'innovation;
o
il est souple et pragmatique.
Tout en faisant bon usage de ces qualités, l'entrepreneur de type « flex-offensif» est
interpellé par des enjeux d'une autre nature-' : communiquer, gérer des relations avec des
groupes, être à J'écoute de l'environnement, et manifester sa présence personnelle, Il doit aussi
choisir une stratégie, l'incarner, gérer sa mise en œuvre et prendre des risques, Cela exigera de
lui un comportement que J'on tentera d'abord de modéliser, et donc on analysera ensuite les
conséquences sur le pJan de J'animation de l'organisation,
1
LE
lVIODELE
DE
FONCTIONNEMENT
DE
L'ENTREPRENEUR DE TYPE « FLEX-OFFENSIF».
L'animation de la flexibilité oflènsin commande à l'entrepreneur un comportement
illustré par cinq traits principaux:

un choix« émotif» des collaborateurs.
1 Joseph SCHU,\\,\\PETER. Cilé par b'~rert E. HAGE?\\'. Econolllii! du dC\\·t:/O{JfJt'IIlCIlI. Tendances Actuelles. Paris.
1980, pages 26·t
2 Extrail de EE. HAGEN.op. cil., pages 265-266.
J Pour une analyse de ces enjeux, voir:
- Charles R1LEY. (( L~ ll1anag~ll1<:nt ou la g<:slion ,) lin pOlnl de \\"(1<: n. Les Cahit'I's Français. n0233, op. Cil, pag~
14
- Daniel OLLIVIER. (( La plus \\'alue de !'encadrell1<:111 dan~ k- COT1t<:xte actuel ». Plll'sonnll/, n0308. pages 25-31.

191
ft
un grand engouement pour le risque,
o
un art dans l' « entraînement» des hommes,
o
un souci constant pour la prédominance de l'esprit « nex-ofrensif», et
o
une lucidité dans la poursuite du gain.
1 - LE CHOIX DES COLLABORATEURS.
Au sein de la nexibilité offensive en réalité, tout le personnel collabore à la réalisation
des objectifs fixés. ivIais le terme « collaborateurs» ici désigne principalement les individus
qui entourent directement j'entrepreneur, et qui sont la plupart clu temps au cœur de la
structure directoriale. Le choix cie ces individus est déterminé par trois éléments majeurs: la
compétence, la confiance et Lille sorte de sentimentalisme.
- La compétence. Chaque membre de l'équipe dirigeante doit être extrêmement
compétent dans un domaine bien précis et bien cerné par l'entrepreneur. Au-delà d'une
reconnaissance universitaire sanctionnée par des diplômes, la compétence doit davalllage être
le résultat heureux de l'exercice de la profession, et le couronnement cie multiples faits et actes
menés avec succès au fur et à mesure du temps. La compétence est donc liée à l'expérience;
ce qui donne aux collaborateurs d'être des personnes rompues à la tâche et possédant un
diagnostic fiable des problèmes pouvant se poser dans leur domaine d'activité.
L'entrepreneur de type « f1ex-offensif» peut comme B. TAPIE!, sélectionner ces
collaborateurs parce qu'il les a vu faire, qu'il les a suivi ou qu'on lui en a parlé. Mais il peut
aussi consulter des agences spécialisés, en l'occurrence les « chasseurs de tètes»2 qui
prolifèrent de plus en plus et dont le rôle est justement de trouver des personnes dotées de
compétences recherchées.
- La confiance. Deuxième élément détenninant, la confiance est au début et à la fin
des rapports qui existent entre l'entrepreneur ct ses collaborateurs. Elle suppose une quasi-
inexistence de l'autorité et une dilution de 13 responsabilité d'une part, et d'autre part une
1 Voir B. TAPIE. op. ciL, page 139.
2 Les « chasseurs de tètes n formcnt une profession rc!ati\\'cl11l'nt rèccnt·e. Ce sont des entreprises ou des hommes
dont le rôle est la \\( dètcction», l' « ach:ll» et la \\( \\'cnte » des personnes très hautcment qualitiées ct de
réputation souvent multinationale. VOir Antoine RE\\'ERCHO'\\. « Recruter au meilleur coût n. Scicllce el Vie
EcoNomiquc'
na 35. jal1\\'icr 1988, pages 62-67.

192
grande capacité d'adaptation de l'entrepreneur appelé à sélectionner ses collaborateurs mais
aussi à se détacher d'eux sans états d'âme.
La confiance doit être réciproque ct s'établir sur des bases saines. Elle donne alors lieu
I
comme dans le groupe TAPIE ou chez HERMAN MILLER INC:?, à une inexistence de
contrat de travail entre l'entrepreneur ct ses coJlaborateurs, de même qu'à un recrutement basé
sur un engagement verbal.
- Le sentimentalisme. L'entrepreneur de type « flcx-offensi r» doit avoir de l'intuition
c'est-à-dire une forme de connaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement, une
sorte de « sympathie» vis-à-vis de l'objet de connaissance. L'entrepreneur doit avoir
confiance en lui-même pour dompter ct utiliser à j'occasion son potentiel de sensibilité. O.
TAPIE résume bien des pratiques observées aussi chez 1. CARLZON J : « Tout est de l'ordre
de la sensation. Je fonctionne véritablement aux vibrations. Une personne pleine de vic, de
potentialité, dégage des ondes, nous envoie des vibrations fom1idables. Moi, je fonds; je
patauge avec délices dans le désordre amoureux, pour reprendre le titre d'un bon livre. Je me
laisse aller. Il faut pour que j'agisse, que quelqu'un m'attire. Je marche à l'amour, à
l'enthousiasme et à l'intuition >/
Tout ceci demande aux collaborateurs des qualités à la fois flexibles ct offensives pour
pouvoir s'adapter facilement, créer des événements et faire face aux divers risques qui attirent
l'entrepreneur.
2 - L'ATTITUDE VIS-A-VIS DU RISQUE.
La théorie admet également deux indicateurs explicites du risque dans l'analyse de la
décision en avenir incertains: Les paramètres de dispersion ct la probabilité de mine:
o
Les paramètres de dispersion. Les plus utilisées sont l'étendue et l'écart-type de la
distribution des résultats probables des dilTérentcs décisions engagées. Si l'écart-type
(pour se limiter à ce paramètre) est élevé, cela signifie qu'en moyenne les résultats sont
très dispersés autour cie l'espérance mathématique. et donc que le risque est fort.
1 Voir 13. TAPIE. op. cit.. page \\-10.
2 Voir Max DE PREE. op. cil.
3 Voir kan CARLZO:-;. op. cil.
4 B. TAPIE. op. cil. pJgC' 1-11.
5 Voir JCJn-Pierre VERDRINE. rQ.G, Vuibert. PJris. 1985. pages 316-318.

193
L'entrepreneur de type « flex-offensif» aura tendance il. préférer les projets à fort écart-
type pour satisfaire sa boulimie cie créativité mais aussi parce que ce sont souvent les
projets à forte espérance de gains, abandonnés par les concurrents pour cause de risque
élevé.
e
La probabilité de ruine désigne la probabilité que la décision envisagée entraîne des
résultats inférieurs à un seuil fixé à priori par l'entreprise. Dans les problèmes habituels de
gestion, l'entreprise cherche à maximiser \\a rentabil ité avee une contrainte sur la
probabilité de ruine. Mais darls le cadre de la flexibilité offensive, l'entrepreneur cherche
davantage à maximiser la probabilité cie ruine avec une contrainte sur la rentabilité.
L'on peut avoir recoms aux fonctions d'utilité pour schématiser le système cles
préférences des décidems, de mème que leur attitude vis-à-vis du risque. La représentation qui
suit s'appuie sur la théorie axiomatique des choix rationnels en avenir aléatoire développée
vers 1945 par VON NEUMAN et MORGENSTERN 1. Le schéma montre les comportements
divers des décideurs face au risque. Supposons des probabilités de 0,5 et 0,8 et des gains de
50.000 F et 100.000 F :
t
Utilité
.,...--.
/
"
.,.,.
/ '
/
/
/
/
/
/
/
a
Gain
Schéma 1S : Attitudes vis-:1-vis du risque;
Légende:
-
-
-
-
« risk adwrse »
« risk neutra\\ »
-
•• -
•• -
« risk taker »
« nom1a\\ persan»
Source: Elaboration personnelle:1 partir de: J.P. VEDRINE op. ci!., pages 311-316 et Georges
BORDES, Microéconolllie approfondie. Cours de DEA. Yaoundé, 1989.
1 J. VON NEUi'-L\\.\\i ct O. MORGENSTER:--J. Tht'oll' o/games al/d ecol/omie bt'llI/1·iolir. Princeton Uni\\'ersitv
Press, 1944.
-

194
- Premier cas. Le décideur peut considérer comme équivalents les choix suivants:
avoir avec une certitude 50.000 F, ou jouer à une loterie qui lui donne 50 % des chances de
gagner 50.000 F. On dit qu'il est (\\ risk neli!ra/» c'est-à-dire neutre vis-à-vis du risque. Cc
comportement est montré par la droite diagonale du schéma.
- Deuxième cas. Le décideur peut aussi considérer comme cqui\\'alcntes les possibilités
suivantes: avoir avec certitude 50.000 F, ou jouer cl L1ne loterie qui lui donne 80 %) des
chances de gagner 100.000 F on dit qu'il est « risk aâverse)} c'est-à-dire qu'il n'aime pas les
risques. Ce comportement est montré par la courbe convexe en ligne interrompue du schéma.
- Troisième cas. Le décideur peut aussi considérer comme équivalents les choix
suivants: avoir avec certitude 50.000 F et jouer à une pmbabilité qui lui donne moins de 50 %
des chances de gagner 100.000 F. On dit qu'il est « risk !akcr» c'est-à-dire qu'il préfère
prendre des risques. Ce comportement est illustré par la courbe concave en petits traits du
schéma.
- Dernier cas. Le décideur peut enfl11 être « preneur de risque» jusqu'à une certaine
espérance de gain, puis avoir une aversion pour le risque à partir d'une certaine somme. On dit
qu'il est « normal persan» c'est-à-dire que son comportement s'apparente à celui du commun
des agents économiques. La représentation est celle de la courbe en pointillés qui fomle un
« s» sur le schéma.
L'entrepreneur de type « flex-offensif» est prioritairement « risk Laker ». Il préfère un
Jeu doté d'une probabilité faible mais avec une espérance de gain élevée. A la limite de
l'irrationnel, le comportement de l'entrepreneur fait ici la part belle, encore une fois, à une
forte dose d'intuition pour pouvoir, comme chez BECHTEL l, « sentir ce qui est faisable ».
Mais dans le même temps, l'entrepreneur doit être un maître dans l'art d'entraîner les hommes.
3 - L'ART D'ENTRAINER LES HOl\\'IlVIES.
L'entrepreneur de type « flex-oflènsif ». à l'image de j'entraîneur sportif, est celui qui
trouve des champions et les nourrit; celui qui théàtralise le but à atteindre, dé\\'eloppe les
talents et irradie un enthousiasme ilTésistible. C'est un entraîneur, un conteur, un baladeur qui
encourage, incite, enseigne, écoute ct facilite k travail des uns et des autres.
1 BECHTEL èst unè firl11e d'ingénierie 3111CricJinè qUI construit des villes de 5 milli3rds de dolbrs d3ns le désert
d'Arabie ct c10nt on cik' ici la devise.

195
L'art d'entraîner est ]'art d'une leadership de contact qui rassemble les hommes
d'horizons et de formation les plus divers, et les amène à rechercher responsabilité et
perf0ll11ance. C'est un leadership qui traite les individus en collaborateurs associés à part
entière.
Entraîner recouvre un ensemble le rôle d'éducation, de parrainage, de guide, de conseil
et d'aide. chacun de ces rôles est assumé avec intensité ct vise toujours le même but: Celui de
facilité l'apprentissage et d'orienter toutes les contributions créatl'ices vers le destin souhaité
de l'entreprise:
40)
L'entrepreneur éduque quand les buts, les rôles ou les conditions de travail changent ou
pour orienter un nouveau venu. 11 le fait de façon positive, encourageante, en insistant sur
j'apprentissage et l'application des nouvelles connaissances particulières. Le résultat est
l'acquisition de nouvelles compétences;
le renforcement de
la confiance en soi,
l'élargissement de la façon de voir et de comprendre l'entreprise.
ct
L'entrepreneur parraine quand un individu peut apporter une contribution spéciale, ou
pour pemlettre à un talent de s'exercer. Il le fait de façon enthousiaste, en insistant sur le
long terme et sur la contribution apportée à l'entreprise. Le résultat est une vitrine pour
une compétence et/ou une expérience accrue.
e
L'entrepreneur guide pour apporter des corrections simples et brèves ou pour apporter des
encouragements spéciaux (avant ou après une première visite à un client par exemple), Le
résultat est une plus grande confiance en soi, et une compétence accrue.
ct
L'entrepreneur conseille quand les problèmes entravent la perfomlance, pour répondre à
des reculs et déceptions, ou pour accélérer le redressement. Il le fait en insistant sur la
résolution des problèmes ; de façon positive en encourageant, de façon structurée en
dialoguant. Le résultat est un sentiment de propriété accru, un engagement personnel
renouvelé, et un plus grand sentiment de responsabilité.
ct
L'entrepreneur, enfin, alerte quand les problèmes de perfomlanees persistent, quand un
individu semble incapable de remplir son rôle en dépit de l'éducation et des conseils. Il le
fait de façon positive, pour soutenir, mais d'un ton fenlle. Le résultat peut être une
redéfinition de la mission, une chance de réussir dans une autre position ou la démission.
Mais il faut avertir la personne de façon directe. et être capable de discuter des problèmes
délicats sans en faire des psychodrames.

196
C'est avec cohérence et intégrité que J'entrepreneur de type « flex-offcnsi f» doit user
de son art dans j'entraînement des hommes, car ces cleux qualités sont déterminantes dans la
perpétuation de l'esprit de l'organisation.
4 - LE DEVELOPPEMENT DE L'ESPRIT« FLEX-OFFENSIF ».
L'entrepreneur doit avant tout être celui qui incarne la philosophie cie l'entreprise. qui
la communique aux autres, ct qui les aide il comprendre la régulation des valeurs, pratiquer
l'autocratique, faire l'apologie d'une propriété par1agée et colporter \\cs histoires qui retracent
la vie de l'organisation.
Pour donner vie aux valeurs, l'entrepreneur de type « flex-offensi f» doit multiplier les
supports de l'esprit qui anime l'organisation; il doit incarner cet esprit et agir en tout temps
selon ses prescriptions. L'importance de la notion d'intimité entre les valeurs apparaît alors:
« les croyances, écrit M. DE PREE, sont liées à l'intimité. Les croyances, passent devant les
politiques, les norn1es ou les pratiques. La pratique est sans espoir si elle n'est pas assortie de
croyance. Les dirigeants dépourvus de croyances, qui ne comprennent que la méthodologie et
la quantification, sont les eunuques des temps modernes» 1. DE PREE estime par ai lieurs que
pour donner vie aux valeurs et entretenir cette intimité, la meilleure manière est de poser des
questions et de chercher des réponses: comment l'entreprise assure-t-elle son histoire? De
quel genre d'affaires s'occupe-t-elle ? Qui y travaille et quelle sorte de relations les individus
ont-ils entre eux? Comment la société fait-elle face aux changements et aux conflits? Quelle
est la vision d'avenir du personnel? ..
L'entrepreneur doit pratiquer l'autocritique pour éviter le risque de mettre ses actes en
contradiction avec les valeurs qu'il prône. Le seul moyen est de prendre l'habitude de « se
regarder dans un miroir ». C'est que l'art d'entrainer les autres est avant tout une question
d'action et non de paroles. Le comportement du leader se reflète d'une manière ou d'une autre
dans celui des collaborateurs qui perçoivent avec acuité ce qui est important pour lui.
L'entrepreneur, par conséquent. ne doit jamais hésiter à traquer la moindre de ses
incohérences pour être en accord avec lui-même ct consacrer l'intimité qui l'unit à l'esprit
« flex-offensif ».
1 M. DE PREE. op. cil., pages 69 et ss.

197
De plus il doit être j'apologie d'une propriété partagée car, « c'est le sentiment
d'appartenir à une équipe fOlie qui fonde la culture dc l'entrcprise. Si on ne développe pas ce
sentiment de fierté on ne parviendra pas à faire naître une motivation suffisante» 1. Les actes
posés par l'entreprcneur doivent al1er dans le sens du dé\\'clopperllcnt de cc sentiment de fierté
et de propriété: encouragement de l'initiativc individuclle ct de 13 prise dc participation dans
le capital dc l'entreprise, célébrations, récompenses, etc ...
Enfin, l'entrepreneur doit, avec ferveur, colporter les histoires qui retracent la vie de
l'organisation. En effet, rien n'est plus révélateur des réelles préoccupations d'une entreprise
que ses histoires, ses légendes, ses mythes et son folklore. Les histoires donnent des réponses
et montrent comment il faut faire, clics sont le levain qui alimente la mémoire collective ct
donc la tradition et la continuité de l'entreprise. L'entrepreneur de type« nex-offensif» est un
entraîneur-conteur qui dorme et informe, motive ct enthousiasme au moyen d'histoires de
réussites mais aussi d'échecs. Car les histoires d'échecs enrichissent la tradition des erreurs fi
ne plus commettre dans la poursuite de j'objectif final: réaliser Je maximum de gain possible.
5 - LA POURSUITE DU GAIN.
L'entrepreneur de type «tlex-offensif» est extrêmement lucide dans l'exigence de
réalisation de son objectif suprême : être le meilleur dans le créneau qu'il a choisi. La
poursuite du gain apparaît ainsi comme élément unificateur des quatre précédents thèmes de
son modèle de fonctionnement à savoir le choix des collaborateurs, l'attitude vis-à-vis du
risque, le développement de l'esprit «flex-offensif» et l'art d'entraîner les hommes. Le
schéma suivant traduit notre propos.
COLLABORATEURS
RJSQUE
Sélection au « coup de
« risk taler» quasiment
1
cœur»
1
irra tionne 1
POURSUITE
DU GAII"
EI"TRAINBŒNT
\\'ALEURS PARTAGEES
Education, parrainage.
Support humain de la
guide. conseil. akrte
tlexibilité offensive
Schéma 19: Le modl?k de fonctionnement de l'entrepreneur de type « tlex-offenslf».
Source: Elaboration personnelk,
1 B. TAPIE. op. ciL. page 155,

198
La poursuite du gain est le thème qUI pemlet la liaison entre tous les éléments du
modèle, de façon à ce qu'il f01111e un tout.
JI ne faut en effet pas croIre en l'illusion transmise par l'apparence bonhomme du
leader qui prône la liberté de ses collaborateurs, s'occupe des détails de la vie courante,
théâtralise la vision de l'entreprise, raconte des histoires et organise des sessions de rigolade
pour célébrer le personnel. En réalité, l'entrepreneur de tY'Pe « /lex-offensif» ne perd pas cle
vue, cl aucun moment, que sa principale tâche est de maximiser le profit et de rémunérer le
l
capital
pour « maintenir lin équilibre viable et équitable entre les droits des divers groupes
d'intérêts: les actionnaires, le personnel, la clientèle et l'ensemble clu public »2
Le modèle cie fonctionnement cie l'entrepreneur qui présicle aux destins de la nexibilité
offensive:
o
S'articule autour d'un choix « émotif» des collaborateurs sur la base de leur compétence,
d'une attirance quasI ilTationnelle pour le risque, d'un art dans l' « entraînement» du
capital humain de la fimle, et d'une constante obsession de la perpétuation de l'esprit
« flex-offensif» qui f01111alise le ciment psychologique de l'entreprise;
o
Est impulsé par l'omniprésence de l'exigence des résultats, ici représentée par la poursuite
achamée du gain.
L'entrepreneur qui fonctionne selon le modèle ci-dessus décrit influence l'entreprise
sur le principal plan de son animation. Les conséquences qui en découlent sont multiples.
II
LES CONSEQUENCES SUR L'ANIMATION DE
L'ENTREPRISE.
Au plan de l'animation de l'entreprise, trois conséquences majeures Issues du
comportement de l'entrepreneur peuvent être relevées, Elles ont trait :

Au système d'évaluation / contrôle;
1 Bien que la nla.,imisalion du profit soit prise pour ,( une notion erronée qu'il s'agisse des profits à court ou à
long ternIe» [Peter DRUCKER, « Business obJecti\\'cs and suni\\'al nccds : noie on a discipline of business
enterprise», ThL' Jal/mal of Business. Vol, 31, n02, pages S \\-90. :\\\\Til 1958]. l'entrepreneur de type « flex-
offensif» estime, a\\'ec KHROUCHTCHEV. que « pour une entreprise pri\\'ée, la question du profit a une grande
importance comme indicateur économique de son ertïcJcité » lSikita KROUCHTCHEY, Cilé par 1. ANSOFF.
op, Cil, page 53 J,
2 Frank ABRA;-"\\S. « \\\\anJgemmt responsabilities in a cOl11pkx \\\\orld », dans TH, CARROLL. Business for
compelence (lnd l'L'.lpolI.wIJiIIlY, Ulliversily ofNonh Caro\\ina, ChapcJ }-Jill. N.C, 1954,

199
c
Au nouveau marketing; et
11
A la pratique du changement.
1 - L'EVALUA TIüN 1CONTROLE.
On assIgne traditionnellement au système de contrôle de l'entreprise au mOll1s trois
objectifs:
o
Mesurer les déviJtions par rapport à une trajectoire anticipée ct fournir ainsi les données
nécessaires à une décision correctrice,
o
Favoriser le développement de l'apprentissage chez le personnel de tout niveau,
1)
Motiver les participants en supportant le système cie sanctions-récompenses.
Tous ces objectifs paraissent devoir être maintenus dans le cadre de la flexibilité
offensive, seule la pratique de ceux-ci doit être modifiée. Le système d'évaluation 1 contrôle,
parce qu'il met en évidence les succès et les échecs, contribue de manière sensible à la
définition de l'esprit « flex-offensif» par le biais des valeurs de la firme, « c'est-à-dire des
conceptions explicites ou implicites de ce que l'organisation considère comme souhaitable ou
acceptable» 1.
Ainsi se trouve profondément simplifiée la définition du contrôle pour l'entrepreneur
de type « flex-offensif» : le contrôle, c'est savoir que celui qui s'intéresse à ce que l'on fait et
est le plus concerné, y prête une attention minutieuse et quasiment maniaque. Il découle de
cette définition que le contrôle n'est pas une question de fom1e d'une part, et d'autre part qu'il
doit désonnais s'apparenter au « management baladeur» que résume bien OGILVY : « Ne
convoquez pas les gens dans votre bureau - cela les effraie. Au lieu de cela, allez les voir dans
leur bureau. Ainsi, vous êtes présent dans toute l'agence »2.
Conséquence
parn1i
d'autres
du
modèle
de
fonctionnement
ql1l
le
regt,
le
« management baladeur» avec le personnel transfotlne l'entrepreneur en un personnage
sympathique, \\'oire paternaliste. Ouvert à toutes fonnes de suggestions et critiques. il se
balade d'un bureau à l'autre, développe des échanges Înfonnels a\\ec le personnel à qui il tellte
d'éviter d'inutiles fmstrations (comme des places de parking réservées). De même, iltoJère ses
1
D.J. EPPINK. « The tkxibility : a nt'ct'ss:ny campkrnt'nt ta planning l), W.P.-75.24. Rapport IER5M,
Bruxelles, Juin t975. page 7.
2 David OGILV\\', La pl/bIiClI'! 5':/01/ Ogi/n', Dunad. Paris, 1984, pJge 35.

200
échecs, célèbre ses réussites (en mêmc temps, parfois que ses échccs) et lui témoigne
beaucoup de respect.
Mais il ne faut pas se leurrer: (( le management balaJeur» avec le personnel poursuit
un seul et uniquc but: contrôler au ( couJe <1 coudc » tout cc qui se dit, mais surtout tout cc
qui se fait et comment on le fait Jans l'organisation. La confection et l'utilisation dcs tableaux
de bord synthétisant les résultats des actions passées, sont alors rernplacés par j'élaboration
des ( livres d'histoires», beau\\ volumes dans lesquclles sont identifIés et racontés les
meilleurs moyens de faire quelque chose clans quelque domaine Je responsabilité que ce soit,
de la secrétaire à j'ingénieur!. Dans le même temps, j'évaluation cesse d'être d'intel1l1Ïnables
questionnaires à partir desquels on attribue des notes au personnel.
Le système d'évaluation cie l'entrepreneur de type « oex-offensif» est clésormais
profondément simplifié, à J'instar de celui qui existe clans le magasin cie détail américain
STEW LEONARD'S2. Le système de cette entreprise de produits laitiers se résume en une
question : « Qu'avez-vous fait pour S.T.E.\\V. ?» S pour satisfaction du client, T pour
transmission des savoirs, E pour excellence, et \\V pour Waoh!
; ce dernier traduit
('enthousiasme et la motivation dans le travail.
Au total, la quête de la oexibitité offensive commande un mode d'organisation du
travail articulé autour :
Cf
d'un aménagement des temps de travail tenant compte des « flexibilités sociales »3 issues
des dés irs di fférenci és,
o
d'une structure des emplois dominés par un élargissement des tâches conduisant à une
« polyvalenciation » du personnel,

d'une
configuration
hiérarchique
aplatie
pour
cause
d'« intellectualisation
de
la
production »,

et d'un système d'évaluation / contrôle à la fois simplifIé et dominé par le « management
baladeur» avec le personnel. Appliquée à toute la population se rapportant de près ou cie
loin la firnle (personnel, client, fournisseurs), cette technique de management se trouve
être au centre d'un type nouveau cie marketing;) mettre en place pour l'entrepreneur.
1 Chez HEWLETr-p.-\\CKARD. ce son! « les l11eillèures
pratiques» ; chez JOHNSON and JOHSON, c'est
( notre credo ». chez DAN.-\\ CORP .. ce sonl lès ,( qUJrJnte pensées». Voir Th. PETERS et N. AUSTIN op. cil..
'3- '-1 '6)
fages.J ):.J) . .J _.
.
_
- RappoI1e par Th. PETERS, LI! chaos 1lIiIIIllgl!lI1l'/ll. op. CIL. page )82.
J B. MARTORY. op. cil., page 52.

201
2 - LE NOUVEAU MARKETING.
Avec D. LINDON, rappelons que le marketing, « si l'on fait abstraction de son objet
habituel qui est d'aider les entreprises à mieux vendre leurs produits, peut sc ramener à deux
idées essentielles: d'une part, c'est cette attitude mentale caractérisée par le souci constant de
connaître, de comprendre et de prévoir les besoins du marché; d'autre part, c'est la mise en
œuvre systématique de divers
moyens destinés à intluencer le comportement des agents
,
.
1
economlques» .
Si le deuxième aspect, de loin le plus connu (emploi massif de la publicité) est
important dans le cadre de la flexibilité ofTensive, c'est le premier qui interpelle véritablement
l'entrepreneur pour sa redynamisation au triple plan cie :

la détection des marchés et produits;

la création des marchés et produits; et
Il
la théorie du « personnel radar ».
2.1- La détection des marchés et produits.
Pour la détection des nouveaux marchés et produits, l'entrepreneur du type « f1ex-
offensif» devra faire un usage massif de deux méthodes : le « target marketing» et le
« management baladeur» avec les clients et les foumisseurs.
- Le « target marketing »2, que l'on peut généralement traduire par « marketing
différencié », doit son apparition à la fragmentation de plus en plus constatée des marchés. Le
« target marketing» consiste premièrement, à segmenter le marché en groupes distincts
d'acheteurs de produits distincts; deuxièmement, à évaluer ces segments pour détenniner leur
potentiels de gains; et troisièmement à sélectionner pour une pénétration le (s) segment (s)
qui répond (ent) le mieux aux ambitions de l'entreprise.
L'usage du « target marketing» donne à l'entrepreneur un appréciable gain de temps
pour le déploiement de sa fim1e. Des études ont en effet montré d'une part, que l'idcnti fication
des segments de marché dans une zone géographique est généralisable à d'autres localités d'un
1 Dénis LINDON, MarkClillg po/iliql/I! I!I social, Edition DJlloz, PJris. 1976. page 2.
2 Voir Robin T. PETERSON. « SmJlI business lisage of targel mJrketing Il. JOl/ma/ al' BliSilll!ss Afa Il llgl!lIl I!II l,
1991, OCI., pages 79-S5.

202
même pays! ; et d'autre part, que des segments possédant des habitudes cie consommation
similaires peuvent exister au travers des frontières internationales"' Ainsi, un marketing-mix
mis au point pour la pénétration d'ull segment de marché spécilïque ne sera pas modifié pour
le déploiement de l'entreprise dans Je pays et même hors des frontières nationales.
- Le ({ management baladeur» avec les clients et les fournisseurs se résume en un
mot: écouter. L'entreprise en quête de nexibilité offensive, quel que soit son domaine
d'activité, est d'abord une entreprise de service. En conséquence, J'obsession du client est un
avantage stratégique durable. Jl s'agit cles clients et non de marché ou de positionnement
stratégique: on n'ajamais vu Ull « marché» payer une facture; ce sont les clients qui le lont.
QU'EST-CE QU'UN CLIENT '?
Le client est le roi: cela signifie que nous devons le servir avec
empressemenL et courtoisie.
Le client est la personne pour laquelle nOlis devons travailler ici car
c'est lui qui nous procure des recettes.
Le client n'est pas un gêneur; il n'interrompt pas notre travail car il en
est le but. Nous travaillons pour son entière satisfaction.
Le client ne quémande pas nos services et ce n'est pas une faveur que
nous lui faisons en le servant. Nous sommes là pour le servir car c'est
notre travail et même notre obligation.
Le client nous apporte ses problèmes et c'est notre devoir de les
résoudre grâce aux moyens mis à notre disposition.
Le client n'est pas une personne qu'il faut vaincre ou combattre. La
SNEC a été créée pour l'aider à résoudre ses problèmes d'cau. Il faudra
plutôt le convaincre ct l' infom1er.
Voilà ce qu'est le client à la SNEC car c'est notre raison de vivre.
C. OBOUH FEGUE
Directeur général de la SNEC
Tableau 19: Le client.
Source: Aftiche nie partout dans les locaux de la SNEc, Î\\'fars 1992.
1 Réalisée aux USA, l'étude a pennis de généraliser des seQments de marché d3ns douze états. Voir Jack A.
LESSER et ~larie Adt'Ie HUGHES. « The gener3biliry of psychogr3phic market segment 'lecross geographic
location H. Jouma! o.(:Ifarketillg. n050, 1990. J311u3ry. p3ges 18-27.
2 Cas des
US.-\\. des Pays-Bas. de IJ Fr3nce ct de 13 ~orv~ge. Voir Verhage 1. BRONISLA W. Lee D.
DAHRINGER et Edward W. CUNDIFF. « Will 3 glob31 11l3rkctinQ Str3tegy \\v~rk .) An enerQV conservation
perspectives ». Jouma! ofthe '-/car!c'IIIY a/Markcting Scicnce. Spring.~129-13~6.
-'

203
La technique consiste d'abord en une redéfinition du client comme à ]a société
nationale des eaux du Cameroun SNEC (voir tableau 18). Ensuite elle consiste en Ulle écoute
« naïve » du client, c'est-ù-c1ire en accordant plus d'importance à son opinion qu'à toutes les
connaissances techniqucs clu service ou du produit que l'on (croit) maîtrise (r)l. De plus la
technique consiste Cil ulle option déclarée pour la courtoisie, l'affabilité, la civilité et la
politesse raffinée qui doivent entourer tous les rapports avec tous les clients.
En effet « les économistes ne considèrent peut-être pas la simple courtoisie comme un
avantage concurrentiel durable, ni comme une réelle barrière à l'entrée d'un secteur, mais c'est
certainement l'avis des entreprises les plus performantes, même aussi di ffërentes que IBivl et
Mc DONALD'S »2, ou HERMAN MILLER3 ct MORGAN GUARANT'{ BANK". Enfin, la
technique consiste en une minutieuse gestion de la qualitéS par le biais de l'intégration des
clients dans les phrases de conception-développement des produits. Si on l'écoute, c'est pour
tenir compte de ce qu'il désire et comment il le désire. II faut davantage mettre ù sa disposition
un produit meilleur qu'un produit meilleur marché.
Par ai lleurs, l'entrepreneur de type « flex-offensi f» devra considérer les fournisseurs
comme étant des clients, et leur appliquer en conséquence la même technique. Parce que la
compétitivité de l'entreprise s'appuie en grande partie sur des produits et des services il elle
offert par les fournisseurs et autres sous-traitants, il faudra chercher à améliorer la qualité et à
favoriser l'innovation en mettant plus d'emphase sur les relations avec ceux-ci. Comme
l'indique R.M. KANTER en évoquant le cas de la
firn1e DIGITAL EQUIPMENT
CORPORATION, « les fournisseurs-clés sont intégrés dans les équipes de planification de
produit avec le personnel spécialisé dans l'ingénierie, la production et les achats. DIGITAL
utilise le personnel de son département des ressources humaines pour forn1er et diagnostiquer
la perforn1ance de
ses
fournisseurs,
exactement
comme s'ils
faisaient
partie de
la
compagnie »6. C'est une attitude à encourager dans le cadre de la flexibilité offensive pour que
la détection de nouveaux marchés et produits soit accélérée, de même que leur création.
1 A cet égard. il est intéressant de noter que lorsque les entreprISes Llltières camerounaises SILAC (a\\'ant dépôl
de bilan) et C:\\\\lLAIT se ['aisaient concurrence sur leurs produits «yaourt ", les consommateurs disaient
«naïvement" : « CA\\ILAIT est bon mais aVec cette eau qui surnage dans la boite ... " : il n'a pas fallu
tongtemps à la société concernée pour rectifïer le tir. ..
! Th. PETERS et l\\i. AUSTIN, La passion de /'excellence. op. cil.. pages 7t-72.
J Max DE PREE. Diriger est /111 ar{, op. cil.. pages 120 et ss.
• Charles GOLDF!~GER. La géo.finance. op. cil.. pages t59-160.
5 Voir Jacques PIERRE. « La gestion de la qualité: théories ct réalités ". Les Cahias Français. n0234, op. cil..
pages 69-73.
6 Rosabeth lvloss KAi\\TER, citée par Elisabeth LEFEBVRE,
Louis-A. LEFEBVRE, et Robert POUPART.
« Innovation et P\\t E : les enjeux stratégiques ". Gestion. mai 1991. page 35.

204
2.2 - La création des marchés et produits.
Le nouveau marketing ne se limite pas à la détection. L'entreprencur de type « nex-
offensif» c10it aussi, de façon concomitante ou non, créer de nouveaux marchés ct produits. Il
dispose
pour cela
d'au
mOins
deux
techniques
:
l'expérimentation
constante
et
le
développement de la « perruque ».
-
l'expérimentation
constante,
déjù
évoquée
clans
le
cadre
de
la
stratégie
technologique, consiste ù mettre ù l'épreuve les idées innovatrices dès leur naissance: une
idée, quelque bonne qu'elle soit, ne vaut rien tant qu'el1e n'est pas matérialiséc ; c'est-à-dire
tant que le produit supposé en découler n'est pas fabriqué.
L'expérimentation constante, c'est aussi J'obsession du « faire-aménager-tester» qUI
guide le comportement de l'entrepreneur vis-à-vis des individus, que ceux-ci soicnt ou non
chargés de la conception des produits. Elle suppose d'une part, que le personnel mobilisé soit
conscient des valeurs de l'entreprise qui font l'éloge de la créativité, et ait l'essentiel des
moyens nécessaires pour travailler, et d'autre part, que les clients et foumisseurs soient
rapidement intégrés dans le processus de cette expérimentation.
L'expérimentation constante rentre dans la logique de l'action qui prévaut dans la
flexibilité offensive. Elle consiste, concrètement, à fabriquer en trois mois un prototype
approximatif et pas forcément coüteux, à évaluer ce prototype en trois mois en le plaçant chez
un utilisateur pour essai (pendant qu'une équipe travaille à son perfectionnement), à produire
ensuite, en trois autres mois, un second prototype plus élaboré qu'on replacera chez un
utilisateur, etc ... jusqu'à l'obtention d'un produit de bonne qualité préalablement testé et
accepté par les clients.
- Le développement de la « perruque», c'est l'utilisation encouragée d'un espace
particulier d'innovation dans l'entreprise. Faire de la « perruque », c'est travailler pour son
propre compte en utilisant les équipements, matériels et/ou matières de j'entreprise où on est
l
employé . Et comme l'explique DRUCKER, « à chaque fois que quelque chose se fait, sa
réalisation, je j'ai appris, est toujours duc à un monomaniaque investit d'une mission »2.
1 Dictionnaire Larousse. cité par Georges 1\\1:\\IRE. \\( Eloge ck la "pemlque" : l'utilisation d'un espace particulier
d'innovation dans l'entreprise », Prob/èlll1!5 EconomiqllL's, n02029. 17 juin 1987, page 18
! - Peter DRUCKER, .-itfll:'llfllrI!5 a/a Byslililder . cite par Th. PETERS et N. AUSTIN, page 162.

205
L'entrepreneur de type « flex-offensif» doit encourager les projets parallèles et
célébrer les vertus de ces monomaniaques et le grappill:.lge dcs idées. Il doit être complice des
projets de rccherche développés dans la clandestinité, ct protégcr les champions marginaux,
cette variété rare d'individus innovateurs qui induiscnt clans le sysLème institutionnel un
mélange de perplexité, d'cxaspération mais surtout J'admiration.
L'utilisation concomitante dc la « petTuque » et de l'expérimentation constante permet
à l'entrepreneur de créer, de manière quasimcnt continue, cie nouveaux marchés et produits
préalablement testés pour maintenir intact son avantage concurrentiel. La mobilisation
générale que requièrent ces techniques élppelle une transfotlnation toute élLlssi générale du
personnel.
2.3- La théorie du « personnel radar ».
Avec l'obsession du client et de l'innovation, avec le souci du personnel et du
« management baladeur », j'entrepreneur de type « flex-offensif» vise, entre autres buts, celui
de pousser l'organisation à être toujours toumée vers l'extérieur, à sentir les changements alors
qu'ils sont encore à peine perceptibles, et davantage à provoquer de tels changements. En
exigeant de chacun (de la réceptionniste au collaborateur) des innovations pratiques,
l'entrepreneur veut transfom1er chaque employé en un « capteur de vibrations» tourné vers
l'extérieur.
La théorie du « personnel radar », émanation du B.LS. (Business Intelligence System),
se veut transfom1atrice des individus en autant de vigiles en alerte, à l'affût des signaux de
l'environnement, à J'inventaire constant des possibilités de l'entreprise, aux aguets du monde
extérieur et à la recherche pemlanente des idées novatrices.
La théorie du « personnel radar» vient en renfort de cc que SERIEYX nomme « \\'1
fonction de renseignement de l'entreprise» 1. Il s'agit pour tout le personnel d'être des agents
de renseignements c'est-à-dire des espions à la solde de l'entreprise, chargés non seulement de
surveiller
l'en\\'Îronncment
mais
aussI
de
créer
des
« armes»
pour
combattre
cct
environnement et pour devancer les entreprises concurrentes.
1 Heryé SERlEY\\:. « L'é\\'oiulion des techniqut?s de lllJI13gCIllL'1l1 .1,. L<'5 Cahiers Français, n0 233, op. CiL, page
67.

206
Au total, 1e nouveau marketi ng tradui t un nouveau st y le dans l'agression de
l'environnement. Il s'exprime à travers le « management baladeur» avec les clients et les
fournisseurs et le « target marketing» ; cl travers l'expérimentation constante ct « fonction de
renseignement» de la filllle. La recherche de la flexibilité offensive implique la recherche de
la maîtrise de cette « fonction de renseignement», c'est elle qui guide la pratique du
changement dans l'entreprise.
3 - LA PRATIQUE DU CHANGE1VIENT.
Gràce à la fonction de renseignement en effet (( management baladeur», « pct"sonnel
radar ») et dans un souci d'efficacité par anticipation, réaction ou création dictée par
j'environnement, l'entreprise devra être toujours prête à opérer soit des changements partiels,
soit des changements d'ensemble.
3.1 - Les changements partiels.
Les changements partiels traduisent les ajustement opérés au sein de l'entreprise pour
répondre à des modifications de l'environnement. Car même en l'absence des chocs
économiques importants, les marchés manifestent des phénomènes itératifs d'expansion et de
récession, de même que des évolutions dans les goûts des consommateurs aussi bien que des
opportunités à saisir.
Eu égard à ses éventualités, la pratique de la flexibilité offensive devra conduire
l'entreprise:
o
A réagir correctement car il est de la plus grande importance qu'elle plllsse aisément
s'adapter aux changements en volume de [a production;
o
A anticiper sur les évolutions des gOlHs des individus pour les « sentir» et les prévenir
afin de mieux répondre aux modifications concelllant la nature de la demande.

A créer constamment pour qu'avec ses facultés d'anticipation, elle pUisse toujours
entrevoir à temps et saisir toutes les opportunités qui s'offrent à elle; et

A agir en pellllanence pour créer les opportunités au lieu d'avoir à les anticiper, il s'y
adapter ou à les saisir.
Réaction, anticipation, création et action constituent la trame des changements partiels.
Issus de verbes de mouvement, ces mots véhiculent fidèlement le message de l'entrepreneur

207
de type « Oex-offensif» : l'entreprise doit être un lieu de changements constants, de
perpétuels recommencements et de penllanentc remise en cause, touchant ù la fois les
hommes qui la composent, qui y vivent et qui y tra\\'aillent, et l'organisation dans tout son
ensemble.
3.2 - Les changements d'ensemble.
En effet, l'idée qui sous-tene! les changements partiels est que l'entreprise doit répondre
aux modi fications de l'environnement. Or tout au long de son parcours, aussi bien pour des
raisons stratégiques que pour des raisons de survie, aussi bien pour des raisons de gains élevés
que pour des raisons cie gains élevés que pour des raisons de politique institutionnelle
touchant aux décisions gouvernementales du pays hôte, aussi bien pour des motifs
d'anticipation que pour des calculs de créativité; l'entreprise peut être amené à faire face non
plus à des modifications de l'environnement, mais il une dislocation ou à une saturation de
celui-ci.
Les changements d'ensemble traduisent alors les opérations menées par l'entreprise
pour répondre à une modification d'environnement. C'est le vaste mouvement qui pemlet à
l'entreprise:
o
soit de quitter son métier traditionnel pour se consacrer à un métier connexe (par exemple,
CAMLAIT quitterait la production du yaourt et du lait pour se consacrer exclusivement à
celle du beurre; ou bien BATA passerait des chaussures en cuir aux fauteuils en cuir). Le
passage du métier traditionnel à un métier connexe peut traduire simplement un
changement de segment dans l'environnement (premier exemple), ou eXIger une
importante transfomlation due à la dissemblance des environnements (second exemple).
Ce passage est plus ou moins facilité par le rapprochement des technologies ou des
processus de production nécessaires à la fabrication des biens connexes considérés.
o
soit de changer totalement son objet social, à savoir son métier traditionnel. Ainsi. on
oublie trop souvent que la finlle japonaise TOYOTA était il j'origine de TO'{OTA
TEXTILES COlvlPANY, une entreprise de production des métiers tisser. Ce n'est que vers
1935, et précisément en 1942 (avec la dissolution de TOYOTA TEXTILES) que
TOYOTA
MOTOR COlvlPAN'{ prend
réellement son envol dans
la production
l
automobile . Dans le cadre de la flexibilité offensive et selon les circonstances, l'entreprise
1 Voir à ce sujet T:liichi OH'\\'O. L'e~priI Toyo!{J, Edition \\!Jsson. P;)fis. 1989.

208
doit pouvoIr changer totalement
cie cap en passant d'une
activité a une autre
fondamentalement diflërente de la première.
En défll1itive deux traits principaux marquent la nouvelle donne de la conduite de
l'entreprise:
G
d'une part, le cœur de J'animation est l'entrepreneur de type « flex-offensi r» qUi
fonctionnent selon un modèle ou la raison et j'émotion se complètent;
o
ensuite c'est de ce modèle de fonctionnement que découle la dynamique qui impulse au
quotidien, la vie de l'organisation dans sa globalité.
CONCLUSION DU CHAPITRE 4.
Le chapitre qui s'achève a étudié un second ensemble de moyens devant être mis en
œuvre par l'entreprise désireuse de développer sa flexibilité offensive. Cet ensemble est une
paire de deux éléments: l'organisation et l'animation.
Le premier élément concerne la mIse en place d'une organisation motivante
principalement assise sur l'esprit « fJex-offensi f» qui doit régir la mentalité de l'entreprise.
système cohérent de valeurs appelé à se muer en système de croyances, l'esprit « flex-
offensif» doit être un élément organique célébrant le culte de la souplesse et de la créativité,
de la vitesse de réaction et de l'alacrité, de l'action et de j'excellence. L'adhésion encouragée
de tous à ce ciment psychologique autorise alors des fonnes d'organisation plus légère et plus
libres de leurs mouvements telles que la décentralisation par divisions, le morcellement des
tàches,
la
débureaucratisation
et
le
développement
de
communications
infonnelles,
l'organigramme à l'envers, etc ...
Le second élément concerne l'impulsion d'une animation plus dynamique par un
entrepreneur de types « flex-offensif» fonctionnant selon un modèle où l'affectif se dispute le
rationnel, et où les rôles de leader et de support humain de la flexibilité offensive n'occultent
pas la lucidité dans la poursuite du gain. Les conséquences de la dynamique insufflée par cc
modèle se traduisent directement sur l/animation par un système de contrôle au « coude à
coude» du personnel, un marketing dominé par le « management baladeur» et le « personnel
radar» ; et une aptitude aussi bien aux changements partiels qu'aux changements d'ensemble.

209
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
L'objectif de cette partie qui s'achève était cie réponclre à la question: «comlllent
arriver à la nexibilité offensive? ». Il s'agissait d'élaborer cles axes principaux de politiques à
mettre en œuvre par l'entreprise pour développer ct améliorer sa nexibilité offensive.
Ce travail a permis de re1e\\'er cieux axes:
] - Des politiques de gestions cie ressources, qui distinguent les moyens à utiliser clans
les domaines financier, technologique et humain.
- Financièrement, il
s'agit d'améliorer la liquidité des acti fs,
de préférer le
financement interne en utilisant limitativement sa capacité d'endettement, d'investir dans des
emplois liquides se rappol1ant prioritairement à l'activité dominante de l'entreprise, et
d'utiliser les nouveaux instmments financiers pour mieux gérer non seulement les risques
issus des désordres monétaires, mais aussi ses excédents de trésorerie et sa dette.
- Technologiquement, il s'agit d'articuler la fonction recherche/développement autour
d'une interface marketing-recherche bien intégré, d'admettre et de tolérer le caractère quelque
peu brouillon de l'innovation, et d'éparpiller la décision d'innover pour que se développe un
fanatisme pour l'innovation.
- « Humainement », il s'agit de constituer un potentiel d'hommes aptes à conduire (et à se
conduire dans) les évaluations; et donc de mettre en œuvre un marché interne dual du travail
se partageant entre un «centre» et une «périphérie », d'aménager les temps de travail,
d'élargir les tàches par la «polyva1enciation» du travail, d'aplatir la hiérarchie gr;}ce à
l'intellectualisation de la production ; enfin, il s'agit de porter un intérêt pemlanenl au
personnel en créant des conditions de motivation qui débouchent sur le sentiment de propriété
qu'il faut constamment développer au sein de J'entreprise.
2 - Des politiques d'organisation ct d'animation qui distinguent les moyens à utiliser
dans la struClure (au sens large) de la firme. et dans la conduite de J'organisation.

210
- Il faut une organisation motivante dont le socle est l'esprit ii flex-offensif» qui
gouveme la fimle. Au-delà des valeurs fondamentales ct donc de la phi losophic qu'il véhicule,
l'esprit « !lex-offensif », ciment psychologique, est l'élément organique qui unit l'organisation
et les hommes qui la composent autour des croyances qui fondent son identité et sa
particularité. C'est l'adhésion quasi obligatoire cie tout le monde à cet esprit qui autorise des
aménagements tels que la décentralisation et le morcellement pour accorder la liberté et
l'infomlatisation
et la promotion cie communications informelles pour développer la
transparence et fluidité; l'organigramme à j'envers ou une forme d'organisation tenant compte
à la fois de la stabilité, de l'esprit d'entreprise et des réorganisations régulières afin de mieux
formuler la stratégie de l'entreprise par une forme structurelle adéquate.
- Il faut alors une animation plus dynamique pour conduire cette organisation.
Menée par un entrepreneur de type «flex-offcnsif» fonctionnent selon un modèle où se
mélangent l'affectif et le rationnel, cette animation est influencée à trois niveaux :
premièrement, au niveau du système d'évaluation/contrôle, les questionnaires notés par la
hiérarchie cèdent la place au il management baladeur» avec le personnel, véritable contrôle
au il coude à coude» des hommes. Deuxièmement, au niveau du marketing, des pratiques
comme le il target marketing », le il management baladeur» avec les clients et les fournisseurs
et la « penllque » deviennent les nouveaux modes de détection et de création des marchés et
des produits,
tout comme
le développement
de
la théorie du
« personnel
radar ».
Troisièmement enfin, au niveau de la pratique du changement, l'entreprise peut, selon les
circonstances, procéder à des modifications partielles à des fins d'ajustements par anticipation,
action, réaction ou création; tout comme elle peut désormais changer totalement son métier
traditionnel et passer ainsi d'Une activité à une autre complètement différente de la première.

21 ]
CONCLUSION GENERALE
]ntuitivemcnt, l'expression « flcxibilité offensive» exprime une aptitude de l'entreprise
à faire cohabiter dans son modèle de fonctionnement, à la fois l'anticipation, la réaction,
l'action et la création. Après analyse:
1)
des difficultés qu'éprouvent les formes actuelles cie conduite cie la firme dans sa lutte
contre la crise économique,
o
des insuffisances de la Oexibilité jusque là analysée sous son aspect adaptatif et / ou
défensif,
lJ
de l'importance du système de la dynamique innovatrice, désormais condition de survie de
J'entreprise dans son ensemble,
o
de la montée des revendications exigeant plus de participation, d'implication et donc de
citoyenneté de la part des forces vives de la fim1e ;
l'on a pu fonnuler trois définitions précises de la flexibilité offensive, en accord avec cette
acceptation intuitive:
1) - La première par opposition a la flexibilité adaptative et / ou défensive: la
flexibilité offensive traduit l'aptitude de l'entreprise à modifier l'environnement et à créer des
opportunités par la production des nouveautés viables sur le plan commercial, dans le but de
réaliser l'objectif suprême: être le meilleur. Elle traduit aussi l'aptitude à pouvoir faire preuve
de « souplesse totale» par le retrait rapide d'un secteur d'activité donné.
2) - La seconde relative à la capacité créatrice: la Oexibilité offensive se caractérise
d'abord par un processus de production souple, capable d'utiliser successivement ou
simultanément plusieurs produits modulaires, et capable de rentabilité avec une production en
série ou limitée; ensuite par une amélioration du produit pem1anente par la recherche de
constants rajouts sur la fabrication. le conditionnement, la présentation et l'image du produit;
enfin par une capacité à fabriquer des produits Oexibles et/ou conditionnels et à produire la
nouveauté à un rythme soutenu.
3) - La troisième relative à un esprit « flex-offensif» : la flexibilité offensive se
caractérise par une mentalité que ['on peut définir comme étant un mode de vie « brouillon

212
mais de bonne qualité », un style de gestion « merveilleusement désordonné» qui, sous une
apparence humaine, bonhomme, enthousiaste, ct même folklorique, eXige des résultats
pratiq ues et concrets en terme de pcrfomlance.
Plus concrètement, pour ses l,lisons de commodité et de clarté, l'on a été amené a
distinguer deux étapes dans toute politique de nexibilité offensive:
1)- Le développement d'un potcnticl de flexibilité offensive par llne gestion
adéquate des ressources financières: emploi judicieux des nouveaux instruments financiers,
amélioration de la liquidité des acti fs et recherche permanente de leurs caractères mobile,
disponible et divisible; pour les ressources technologiques: bonne intégration de l'interface
marketing-recherche, ciblage de la crézJlion dans le domaine le mieux maîtrisé et fanatisme
pour l'innovation ; pour les ressources humaines : constitution d'un potentiel humain,
fomlation continue et élaboration d'une structure dualiste du marché interne du travail de
l'entreprise.
2) - L'utilisation effective de ce potentiel de flexibilité offensive par une action sur
le comportement de la firme: d'abord une organisation motivante qui, parce qu'elle se fonde
sur un esprit « flex-offensif» partagé par tous, autorise entre autres la décentralisation, le
morcellement, la débureaucratisation, les communications informelles, l'organigramme à
l'envers ... Ensuite, une animation plus dynamique insufflée par un entrepreneur de type
« flex-offensif» fonctionnant selon un modèle où l'affectif se dispute le rationnel, et dont les
conséquences se traduisent entre autres par les concepts de « management baladeur» ou de
« personnel radar ».
La flexibilité offensive apparaît donc comme le moyen d'assurer la sécurité et
l'efficacité dans un contexte de créativité et de participation de tous à la vie de l'entreprise.
Parce que la concurrence se mondialise et que les nations sont de plus en plus intégrées, voire
englouties dans le « vil1age planétaire ll, les théories de la « concurrence parfaite» ct du
« monopole » sont de moins en moins mises en relief comme caractéristiques des mod~les
pour les entreprises et 1cs marchés.
A leur place,
la théorie de la « concurrence

li
213
1
monopolistique» de E. CHAMBERLIN décrit de mieux en mIeux j'une des réalités de la
théorie microéconomique 2.
La « concun-ence monopolistique» se fonde sur une donnée cmplllque solide: il
existe très peu de biens pour lesquels il n'y a pas de substituts étroits (donc très peu de
monopoleurs), de même que très peu de biens sont totalement homogènes d'un producteur à
l'autre (la concurrence parfaite n'est donc pas réal iste). Par contre on est en présence d'une
large gamme de biens, dont certains ont relativement peu de bons substituts et dont certains
ont de nombreux substituts qui sont bons, sans être parfaits. C'est donc une fomle générale de
marché caractérisée par la différenciation du produit qui, il son tour, cdfactérise ]a plupart des
marchés aujourd'hui.
En efret, il n'existe pas un modèle unique d'automobiles ni de qualité ulllque de
savons, de costumes, de téléviseurs ou de magazines. Chaque producteur essaie de
différencier son produit pour le rendre unique; pourtant, pour être sur le marché, les produits
particuliers doivent être très proches du produit général considéré.
En appelant à la différenciation du produit, la « concurrence monopolistique» soulève:
o
d'une part l'inefficacité de la concurrence par les prix : parce que chaque entreprise
cherchera à produire au niveau pour lequel sa recette marginale égale son coût marginal,
les prix ne peuvent être infllliment baissés pour attirer la clientèle:
o
d'autre part l'importance de la valeur ajoutée issue d'attributs qualitatifs: la concurrence a
désormais trait à la qualité des produits mis sur le marché.
Parce qu'elle se veut célébration de la qualité, la Dexibilité offensive apparaît comme
la voie à suivre pour l'entreprise condamnée à compétir (sous peine de disparition) dans un
environnement caractérisé par cette qualité des biens produits. Mais cet apparent optimisme
(qui demande à être conforté par des études ultérieures) ne doit cependant pas occulter une
réalité: l'entreprise ne maîtrise pas totalement son environnement.
L'environnernent institutionnel est en effet d'une importance primordiale pour que vive
l'entreprise et pour que se déploie la flexibilité offensive. Les exemples du Brésil ct de la
1 Edward H. CH.-\\\\1I3ERUN. Thc illcon' o{ /l/oliopolisll·C COIII/h'lilion, 8' Edition. Cambridge. 1\\lassachuselts.
Harvard University Press, 1962
-
2 1.P. GOULD et E. FERGüSON, Theorie lIlicro,;conollllquL'. Tendances Actuelles, Paris. 1982.

Il
214
Corée qui introduisent ce travail, et dont la flexibi\\iié caractérise les entreprises, montre qu'il
est fondamental qu'il existe un cadre institutionnel ackquat pour favoriser le développement et
la compétitivité des rirmes.
Dans ce contexte, le problème de la flexibilité ofrensive n'est plus seulement celui de
l'entreprise, il concerne alors l'ensemble de la Société.

215
ANNEXE
EXEMPLES D'ACTlO:'.'S CONCRETES VISANT A DEVELOPPER LA
FLEXIBILITE OFFENSIVE DE L'ENTREPRISE
On trouvera dans le tableau ci-après la description succincte de décisions \\'isant à
améliorer la flexibilité offensi\\'e de J'entreprise. Ces décisions, regroupées par grandes
fonctions, constituent des applications des principes étudiés principalement dans les chapitres
3 et 4. La liste des actions présentées ne prétend pas être exhaustives; son objet est avant tout
d'illustrer par des exemples les différents concepts attachés il la politique de flexibilité
offensive.
DOMAINE
DESCRIPTION SUCCINTE
PRINCIPES EVOQUES
D'APPLICATION
DE L'ACTION
- CONCEPTION DU PRODUIT
Processus « brouillon» de
par l'expérimentation constante, le
l'innovation, adaptabilité
« grappillage» ou la « perruque »,
des actifs.
concevoir des produits flexibles,
Intégration des tiers au
modulaires ou conditionnels, facilement
processus.
modifiables et pouvant évoluer par
recomposition de produits anciens.
Association des tiers.
- OFFENSIVE SUR LE MARCHE
Création et diffusion pemlanente,
Occupation constante du
rapides et bien ciblées.
marché innO\\'ation
fONCTION
in interrompue.
RECHERCHE
- A1\\IELiORATION DU PRODUIT
DEVELOPP:-.IENT
Recherche constante des rajouts sur b
L1brication. le conditionnemènt. lJ
fanatisme pour
présel1tation et l'image du produit.
l'innO\\'ation
1
création du changement.
- L1ELi DE CONCEPTION: partout
Fanatismè pour
- PERSONl'JEL CONCERNE: tout le
l'innovation; « personne 1
monde
radar ».

216
DOi\\L-\\I~E
DESCRI l'TION SUCCINTE
PRI~CIPES EVOQUES
D'AI'PLlCATlO;\\
DE L'ACTION
- DISTRII3UTION
Vente par « humilité ».
Utilisation d'un réseau de magasins
Association ct « écoute )}
franchisés. Recours à des représentants
du clienl.
multicartes. Recherche, utilisation ct
entretien dc « \\'endeurs » qui savent
« chérir)} le client
« sc taire ». Abandon du produit
fvlanagement baladeur
proposé au clients pour essai, pour une
avec le cl ienl.
période donnée, Possibilité de paiement
éta lé dans le temps
- PRO~vIOT[O:\\
Pratique d'une publicité axée plus Sur
La \\'ente ne commence
l'entreprise que sur le produil.
qu'après la vente.
Visites régulières aux clients.
FONCTI00i
Organisations périodiques de rencontre
« Ecoute » du client
COMivlERCIALE
de communication entre l'cntreprise ct
les acheteurs,
Anticipation du
Information continue sur les produits
changement. Création de
nouveaux par courrier ou téléphone.
l'opportunité.
Association des clients aux différents
étapes de production de la nouveauté
- RECHERCHE
prospection systématique de nouveaux
Implication de tous.
marchés. Création de nouveaux
marchés existantes ou à détecter.
Transfonnation de tout le personnel en
prospecteurs éveillés.
- INVESTISSEMENT MATERIEL
Adaptabilité des actifs.
lvlachines et outils à vocation élargie.
Préparation à la
Ateliers flexibles MO.eN. et S,P.A.F.
« souplesse totale»
légers et démontables donnant lieu à
une très large utilisation grâce au
Lutte contre le gaspillage
produits modulaires. Machine « auto-
activée ».
- METHODES DE PRODUCTION
Découpage de la fabrication en unités
Décentralisation Rejet du
indépendantes avec constitution de très
gaspillage; option qualité.
légers stocks tampons, Méthodes
Fomlation au changement.
japonaises du « juste à temps », Chasse
à « l'usine fantàme ». Regroupement au
même endroit de machines à \\'ocations
différentes
FONCTION DE
PRODUCTI00i
-ORGANISA TION DE LA M.-\\IN-
D'ŒUVRE
« Poly\\'alenciation »du
Peu d'ouniers spécialisés. Constitution
personnel.
d'équipes de réserns polyvalentes.
Fornution continue du personnel.
Exploration du marché dual du tra\\'ail
Dualité du marché interne
utilisation de la main-d'œune
du tra\\·ail.
temporaire ou saisonnière; recours au
heures supplémentaires, ou à la sous-
traitancc ou au tra\\'ail à domicile.
- RECHERCHE
Recherche systématique pour tout le
Responsabilisation et
personnel. de nouveaux procédés de
implication de tous
fabrication plus performants.

217
DOi\\IAll\\'E
1
DESCRIPTION SUCCIi\\TE
1 {'JŒ\\ClPES EVOQUES
D'APPLICA'['IO'i
DE L'ACTIO:\\'
- POLITIQUE A L'EGARD DES
FOURNISSEURS
Priorité aux fournisseurs gar<Jntissanl
R':duclion du lemps de
les dél<Jis les plus faibles.
changcment.
Constitution d'un noyau de fournisseurs
liés au métier traditionnel: les <Julres
\\-1 anagemcnt ba ladeur
intervenants pour des besoins ponctuels.
a\\'Cc les fournisseurs
Visitcs réguliéres aux fournisseurs.
fONCTION
Organisalion des rencontres de
APPROVISIONNE-
communic<Jtion sur des besoins cn cours
MENT
ou fUlurs. Con!Jct permanent par
courrier ou par téléphone.
- TECf-INIQUI:S D'ACf-IA T
Polilique du « juste à temps» chez le
Associalion du fournisseur
fournisseur. recours ci des conlrats
Ilexibilité
« ouvertes li, à quantité modifiables.
« conlractue Ile »
- RECHERCHE
Prospection systématique des produits
Option qualité
de subslitution. Recherche syslématique 1 anticipation du
de fournisseurs potentiels plus
changement.
compétents.
- RECRUTEMENT
Embauche pOlentiels humains.
Recrulement diversifié selon l'àge et la
Adaptabililé des actifs.
formation: pondération forte du niveau
de fonnation génér<J\\e. Exploitation du
Recherche du facteur « 1 »
marché dual du travail, « primaire» et
chez les individus.
« secondaire ». Embauche des
compétences proches de la direction:
Caractère « affectif» ) de
par conviction ou par l'entremise des
l'entrepreneur.
« chasseurs de tête », sans contrats
formels de travail.
- GESTION DES EFFECTIFS
formation continue. Rotation des
employés à divers postes de travail, de
Entretien des
façon systématiques. Succès célébrés,
« potentiels»
échecs tolérés. Encouragement de la
Management baladeur
« perruque» el du grappillage. Salaires
avec le personne 1.
indépendants du diplôme. Suivi
Innovation à tous les
permanent du travailleur, parfois même
Illveaux.
FONCTION
dans sa vie privée. Recueil systématique ivlanagement baladeur
PERSOl\\,TNEL
de suggestions par contacts, boites aux
avec le personne 1
idées .... Visites régulières dans les
Cimenl de l'espril « flex-
bureaux. les atel iers, les usines
offensif ».
- GESTIO!\\i DES CARRlERES
FonnJtion axée sur les connaissances
générales absolument liées à la culture, ivlotivation
au
chan-
de l'entreprise. Promotion fondée sur gement.
Fanatisme
pour
des critères d'adaptabilité, d'initiative,
l'inno\\·ation.
de
créati\\·ité.
et
même
sur
les !vlanagement baladeur
inno\\'ations réussies ou initiées.
a\\'ec le personnel.
- RECHERCHE
Recherche sysll;nutique des indi\\'idus
Fan3tisme pour
porteur du « fJcteur 1 ». Organisation de
l'i nnov3tion. Personne 1
càémonies de cekbrJlion. Recherche la « radar»
« sUf\\'Cil1ance ») de l'el1\\'ironneme111----L.-..--
----l

218
DO\\IAI:"Œ
DESCRJPTIO;\\, SüCCINTE
PRINCIPES EVOQUES
D'APPLICA TlON
DE L'ACTION
- 1NVESTlSSClvlENT
r----
Intégration des critères de liquidit0s ct
cI'adaptabilité dans le processus du
Liquidités des actifs
choix des investissements.
1 nvestissemen l priori la iremcn t dans le
métier principal Recherche cie prises de
Emploi de nouveaux
contrôle plutôt qu'il1\\"eSlissement
instruments financiers.
inteme. Investir dans des actifs
fïnanciers.
- FINANCEMENT
Renforcement de J'autonomie fïnancière
Sous-endettement
FONCTION
par accroissement des fonds propres.
FlNANCIERE
- GESTION DE TRESOERIE
Ivlaintien cles liquidités. Gestion avec
Divisibilité, mobilité,
l'aide cles nouveaux instruments
disponibilité, liquidité.
lïnanciers.
- RECHERCHE
Option établie pour la maîtrise de la
Préparation à la
gestion des nom'eaux instruments
« souplesse totale ».
financiers
-STRUCTURE
Changement fréquents dans la
Réorganisations
répartition des pouvoirs. Limitation
pem1anentes. Hiérarchie
stricte du nombre de niveaux
plats.
hiérarchiques. Lutte contre la structure
pyramidale; pratique du changement
Organigranune à l'envers.
dans l'exercice des fonctions.
- SYSTEME D'INFORMATION
Tableau de bord ouvert sur les relations
entreprises-environnement. Conception
modulaire des procédures
Préparation au chan-
infom1atiques. Solutions informatiques
gement. Communications
fONCTION
pas forcément liées au matériel utilisé.
infom1elles.
ADMINISTRA-
Existence des supports physiques pour
TIVE
des échanges (tableaux noirs ... ).
Utilisation des prénoms, dialogue face à
face; langage franc à la limite de
l'irrespect; cercles de qualité; des
journées d'échanges intra-personnel
- ORGANISATION
AmvlINISTRATIVE
Procédures écrites inexistantes
Accélération des
(communication par ordinateur, par
communications.
téléphone ou en contact direct) ou
strictement limitées à une page par
Ivloti\\'ation au
exemple Inexistence (ou presque) de
l'hangemenl.
titres ou bien tout le monde à un titre.
IvlorcellemenL
[ncour3gel11ent de la « ba \\ade » des
!vlanagement baladeur.
différents responsables. Politique des
Débureaucra tisa tion.
« poncs om'enes ». Encouragement de
la « tricherie» par rapport au respect
des procédures ct instructions.
Fom1ation des el11p layés axée sur
l'initial!\\'e et IJ crL;ati\\·ité.

219
- RECHERCHE
Prospection systématique du
1
renforcement des trois piliers de la
structure: stabilité-esprit d'elllreprise-
i
Création du changement
briseur d'habitudes.
- LEADERSHIP
Définition ct proclamation de la finalité
de la flexibilité offensive: l'esprit
« flex-offensif» devient \\a norme.
iVlotivation au
DIRECTiON
Aménagement du système
changement. Incarnation
GENER.A.LE
d'information, du contrôle de gestion,
de l'esprit « flex-
du système de sanctions-récompenses.
offensif ». Mobilisation
en fonction de cette nOl111e.
des hommès.
« Entraînement }i développement de la
j}articipation, cu Ite de l'entrL'prise.

220
LES TABLEAUX DU TEXTE
INTRODUCTION GENERALE
Tableau 1 : Les Oexibilités : cinq principes de base
18
PREMfERE PARTIE: LE CONCEPT DE fLEXfBILlTE OFFENSIVE
Tableau 2 : Quelques techniques de mnnagemenl traditionnel
30
Tableau 3 : L'évolution de la pensée stratégique
38
Tableau 4 : Quelques techniques de management modellle
40
Tableau 5 : Résultats quantitati fs
60
Tableau 6 : Quatre méthodes pour maîtriser le changement
84
Tableau 7 : Degré de nouveauté des produits nouveaux
95
Tableau 8 : Les sources d'innovation dans l'entreprise
96
Tableau 9 : Classification des trois principales sources d'innovation par types
d'entreprises
97
Tableau 10 : Flexibilité défensive versus flexibilité offensive
101
Tableau II : Comportement et compétences entrepreneuriales
104
DEUXIEME PARTIE: LA RECHERCHE DE LA FLEXIBILITE OFFENSIVE
Tableau 12 : Expansion interne ou acquisition
122
Tableau 13 : Classi fIcation de la nouveauté
139
Tableau 14 : Classi fIcation de la nouveauté zones du risque économique
139
Tableau 15 : La classi fIcation du risque d'innovation
140
Tableau 16 : Origines des nouveaux produits lancés avec succès
141
Tableau 17 : Les aménagements du temps de travail
153
Tableau 18 : Rémunération flexible
156
Tableau 19: Le client
202
Il,I!

221
LES SCHEMAS DU TEXTE
Schéma 0 : Illustration générale du sujct
7
INTRODUCTION GENERALE
Schéma 1 : Essai de comparaison des évolutions du Brésil et dc la Corée, puis du
Cameroun
14
PREMIERE PARTIE: LE CONCEPT DE FLEXIBILITE OFFENSIVE
Schéma 2 : Les grandes masses de la stratégic
36
Schéma 3 : Le processus du management stratégique
39
Schéma 4 : Le processus d'innovation
42
Schéma 5 : Les deux aspects principaux de l'innovation
43
Schéma 6 : La notion de flexibilité offensive chez ANSOFF.
76
Schéma 7 : Changement forcé et diffusion naturelle
85
Schéma 8 : Le modèle de fonctionnement de l'entreprise
88
Schéma 9 : Aspect de l'innovation dans la flexibilité offensive
103
Schéma 10: La flexibilité offensive par rapport à l'innovation
103
Schéma Il: La flexibilité offensive par rapport à l'esprit « flex-offensif»
106
DEUXIEME PARTIE: LA RECHERCHE DE LA FLEXIBILlTE OFFENSIVE
Schéma 12 : Composantes générales d'une politique de flexibilité offensive
111
Schéma 13 : Le processus d'innovation « rationnel»
133
Schéma 14 : Le processus d'innovation « brouillon »
134
Schéma 15 : Le marché interne du travail pour la flexibilité offensive
151
Schéma 16 : Implication équipe-organisation dans le travail en groupe
160
Schéma 17 : L'organigramme à l'envers
187
Schéma 18 : Attitudes vis-à-vis du risque
193
Schéma 19 : Le modèle de fonctionnement de l'entrepreneur de type « flex-
offensif»
197

222
BIBLIOGRAPHIE
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225
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65 - Les cahiers français nO 233, Oct-Déc. 1987.
66 - Les cahiers français, n° 234, Jan-Fev. 1988.
67 - Critiques de l'économie politique, nO 26-77, Jan-Juin 1984.
68 -Sociologie du travai 1n° 4-84.
69 - Sociologie du travail n° 1-88
70 - Sociologie du travail n° 1-89.
71 - Science et vie économie, n° 22, Jan 1986
72 - Science et vie économie, n° 35 Nov. 1988
73 - Journal ofPolitical Ecollomy, XLVll, Juin 1939
74 - Metroeconomica, vol. XIV, nO I-III, 1962
75 - Management 2000, 1986.
76 - Management 2000, 1987.
77 - Problèmes économiques, n° 2016
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85 - Bulletin de la caisse nationale des marchés de l'Etat, CNME, n° 57, 4e trim., 1972, II B 1.
86 - Economie et sociétés, vol. VIII, n04 Avril 1973.
87 - Dossier Revue Française de Gestion: stratégie d'entreprise et produits nouveaux.
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Il;1,

226
\\1
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93 - PRESIDENCE ET MfNISTERES DU CAMEROUN
- Déclaration cie stratégie de relance économique, Mai 1989.
- Projet dimension sociale de j'ajustement, Février 1990.
- Plan directeur d'industrialisation, Sept. 1989.
94 - fNSTlTUT EUROPEEN DE RECHERCHE ET D'ETUDES SUPERIEURES EN
MANAGEMENT (IERSM)
- Rapport W.P. 1975-21
- Rapport W.P. 1975-24.
95 - CENTRE D'ETUDES ET DE PROSPECTIVE INDUSTRfELLE INTERNATIONALE
(CEPI!) :
- Existe-t-il des modèles de développement ?, 1987.
96 - BANQUE MONDIALE
- L'Afrique subsaharienne : de la crise à une croissance durable, 1989.
- Rapport sur le développement dans le monde: Systèmes financiers et développement, 1989.
- Actualités Afrique, 1989.
97 - COMMISSION DES NATIONS-UNIES POUR L'AFRIQUE:
- Programme prioritaire de redressement économique de l'Afrique (PPREA), 1985.
- Programme
d'action
des
nations-unies
pour
le
redressement
économique
et
le
développement de l'Afrique, (PANUEREDA) 1985.
- Cadre africain de référence pour les programmes d'ajustement structurel en vue du
redressement et de la transfom1ation socio-économique (CARPAS), 1989.
98 - CENTRE D'ECONOMIE DU DEVELOPPEMENT
- Marc PENOUIL, Le développement spontané: réflexions sur le processus de transition,
université de Bordeaux 1.
99
-
JOURNEES
SCIENTIFIQUES
ET
TECHNIQUES
DE
LA
PRODUCTION
AUTOMATfSEE
- Rapport des 3èmes journées, 3-4-5 Juin 1981 ; Guy DOUMEINGTS, « Les concepts de
flexibilité ».
il
Il

227
IV - LES PUBLICATIONS A CARACTERE DIDACTIQUE.
100 - TSAF ACK NANFOSSO (R.), Les taux de change Oottants et les P3YS sous-développés,
mémoire Université de Yaoundé, Sept. 1988.
101 - YOUKNA KAMYAP (O.), l'entreprise et la volatilité des taux de change, mémoire,
Université de Yaoundé, Sept. 1988.
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104 - BESONG (M.), Corporate theOl'y, polycopié, Université de Yaoundé, 1988.
105 - BORDES (G.), Microéconomie approfondie, cours dc DEA, Université de Yaoundé,
1989.
106 - GRIER (A.), Conférence sur lc dévcloppcment dc la petite entreprisc, CCA-Yaoundé,
Mars 1992.

228
TABLE DES MATIERES
Dédicace
2
Remerciements
4
Sommaire
6
Illustration générale du sujet
7
Résumé
8
INTRODUCTION GENERALE
9
1 - Des cas de réussites exemplaires
9
1.1 - Le modèle brésilien
10
1.2 - Le modèle coréen
12
2 - La flexibilité de l'entreprise
15
2.1 - Historique de la notion de flexibilité
15
2.2 - La flexibilité adaptative ou défensive
16
3 - La flexibilité offensive de l'entreprise
20
4 - Objectifs ct méthode de recherche
21
PREMIERE PARTIE: LE CONCEPT DE FLEXIBILITE OFFENSIVE
23
Introduction
24
CHAPITRE 1 : LA NECESSITE DE LA FLEXIBILITE OFFENSIVE
25
SECTION 1 : L'EXISTANT EN MATIERE DE GESTION D'ENTREPRISE
25
1 - La gestion traditionnelle de l'entreprise
26
1 - L'organisation scienti fique du travail
26
1.1 - Frédérick W. TAYLOR (1856-1915)
26
1.2 - Le fordisme
27
2 - La prise en compte du management
29
3 - Le triomphe de la gestion rationnelle
31
3.1 - La prévision et la programmation
31
3.2 - L'introduction de l'incertitude
33
Il - La gestion modemisée de l'entreprise
35
1 - La stratégie
35

229
1.1 - La délïnition
35
1.2 - La pensée stratégique
37
1.3 - Le management stratégique
39
2 - Un nouveau management
40
3 - L'offensive
41
3.1- L'innovation au cœur de l'offensive
42
3.2 - Délïnition, enjeux et exigences
43
SECTION 2 : LES CONSEQUENCES SUR LES PERFORMANCES
45
1 - Une organisation sclérosante
45
1 - Les problèmes cie motivation clu personnel
45
2 - Les problèmes cie concluite cie la lïrme
49
ll- Une agressivité incontrôlée
52
1 - L'innovation
52
2 - La qualité et la fiabilité
55
III - Des résultats mitigés
58
1 - Les résultats qualitatifs
58
2 - Les résultats quantitatifs
60
SECTION 3 : ETUDE D'UN REDRESSEMENT: LE GROUPE CARNAUD
62
1 - Présentation du groupe CARNAUD
63
1 - Les atouts du groupe
63
2 - Les handicaps du groupe
64
3 - La nécessité du redressement
64
II - Le processus d'action du redressement
64
1 - Une organisation motivante
65
1.1 - Décentralisation et autonomie
65
1.2 - Organisation du groupe
66
2 - Des leaders passionnés
67
3 - Quelques objectifs ambitieux
67
III - Du redressement à l'excellence
68
1 - Les résultats obtenus
68
2 - Les conclusions du groupe CARNAUD
69
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
70
1
~

230
CHAPITRE 2 : VERS UNE FORMULATION DU CONCEPT DE FLEXIBILITE
OFFENSIVE
72
SECTION 1 : EXPLORATION DU CONCEPT
73
1 - Le parcours de la littérature
73
1 - La « flexibilité offensive» chez Robert BOYER
73
2 - La « flexibilité offensive» chez Igor ANSOFF
75
3 - La contribution de Thomas PETERS
76
Il - Les perceptions des dirigeants d'entreprise
78
1 - La méthode
78
2 - Les opinions des dirigeants d'entreprise
79
3 - Points de convergence et de divergence
80
3.1 - Les points communs
80
3.2 - Les points de divergence
81
SECTION 2 : LA DEFINITION DU CONCEPT
82
1 - Le domaine d'application
83
1 - La volonté de changement: lutter contre la résistance dans l'entreprise
83
2 - Le modèle de fonctionnement de l'entreprise
86
3 - La nature des objectifs de l'entreprise
88
II - La dynamiq ue innovatrice
91
1 - L'innovation à l'atelier
91
2 - L'innovation sur le produit
93
3 - Qui doit innover dans l'entreprise?
95
4 - L'innovation flexible
98
III - Fonnulations théoriques
99
1 - Flexibilité offensive versus flexibilité défensive: première définition
99
2 - Flexibi lité offensive et innovation: deuxième définition
101
3 - L'espri t « flex -0 ffensi f» : troi sième défi ni tion
104
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
107
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
108
DEUXlEME PARTIE: LA RECHERCHE DE LA FLEXIBILITE OFFENSIVE
109
Introduction
110

231
CHAPITRE 3 : FLEXIBILITE OFFENSIVE ET GESTION DES RESSOURCES
DE L'ENTREPRISE
112
SECTION 1 : LA STRATEGlE FINANClERE
113
l - La structure des acti fs
113
1 - Les aspects statiques
113
2 - Les aspects dynamiques
114
3 - A la recherche de la divisibilité de la mobilité et dc disponibilité
115
Il - La structure de financement
116
1 - Le financement interne
116
2 - Le financement ex terne
1] 7
III - Le problème de l'investissement
118
1 - La recherche des emplois liquides
119
2 - L'amélioration des conditions de désengagement
120
3 - « S'en tenir à ce que l'on sait faire»
121
IV - L'usage des nouveaux instrument financiers
1?'"I
- j
1 - La complexité de l'environnement financier
123
1.1 - La globalisation des marchés
124
1.2 - Les risques encourus par l'entreprise
124
2 - Innovation financière et gestion des risques
125
2.1 - La gestion du risque de conversion
126
2.2 - La gestion des risques de traduction et désindustrialisation
127
3 - Problèmes concrets et axes de résolution
127
3.1 - La gestion des excédents de trésorerie
128
3.2 - La gestion de la dette
129
3.3 - La gestion du risque de taux
129
SECTION 2 : LA STRATEGIE TECHNOLOGIQUE
131
1 - La fonction recherche/développement
131
1 - La relation marketing-recherche
131
2 - Le processus d'innovation
133
3 - Le contexte de l'innovation
136
II - Innovation et décision
138
1 - Le risque d'innovation
138
2 - Innover dans son domaine principal
140
3 - La circulation de l'infonnation : décentraliser la décision d'innover
142
III - Le fanatisme pour l'innovation
]43

232
SECTION 3 : LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
145
l - La constitution d'un potentiel humain
145
1 - Embaucher des potentiels
146
2 - Investir dans la fomlation
146
3 - Gérer les effectifs et les calTières
147
II - Les conséquences pratiques
148
1 - Le marché interne du travail
148
1.1 - Le marche primaire: le centre
149
1.2 - Le marché secondaire: la périphérie
150
2 - L'organisation du travail
152
2.1 - Le temps de travail
152
2.2 - La structure des emplois
153
2.3 - La configuration hiérarchique
154
2.4 - La rémunération
155
III - Un travail pemlanent sur le personnel
157
1 - Gérer la démotivation
157
2 - Le sentiment de propriété
158
3 - Favoriser le travail en équipe
159
4 - Il ne s'agit pas de paternalisme
161
CONCLUSION DU CHAPITRE 3
162
CHAPITRE 4 : FLEXIBILITE OFFENSIVE ET ANIMATION-ORGANISATION
DE L'ENTREPRISE
164
SECTION 1 : UNE ORGANISATION MOTIVANTE
165
l - L'esprit « flex-offensif»
165
1 - Définition
166
1.1 - Un système de valeurs
166
1.2 - Un système de croyances
167
2 - La di ffusion
168
2.1 - Les supports fonnels
168
2.2 - Les supports infornlels
170
2.3 - Les stimulants non financiers
173
3 - Les objecti fs
174
3.1 - A court ternle
175

233
3.2 - A moyen et long terme
176
II - Les conséq uences de l'espri t « flex -0 ffensi f»
177
1 - Des centres de décision autonomes
178
1.1 - La décentralisation
178
1.2 - Le morcellement
180
2 - Un développement de la transparence
181
2.1 - Débureaucratisation et infomlatisation
182
2.2 -Innover dans la communication
184
3 - L'imagination au service de la structure
186
3.1 - L'organigramme à l'envers
186
3.2 - Une conception tridi mensionnell e cie 1a structu re
188
SECTION 2 : UNE ANIMATION D'{NAMIQUE
190
1- Le modèle de fonctionnement de l'entrepreneur de type « flex-offensif»
191
1 - Le choix des collaborateurs
191
2 - L'attitude vis-à-vis du risque
192
3 - L'art d'entraîner les hommes
194
4 - Le développement de l'esprit « flex-offensif»
196
5 - La poursuite du gain
197
Il - Les conséq uences sur l'animation de l'entreprise
198
1 - L'évaluation / contrôle
199
2 - Le nouveau marketing
201
2.1 - La détection des marchés et produits
201
2.2 - La création des marchés et produits
204
2.3 - La théorie du « personnel radar»
205
3 - La pratique du changement
206
3.1 - Les changements partiels
206
3.2 - Les changements d'ensemble
207
CONCLUSiON DU CHAPITRE 4
208
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
209
CONCLUSION GENERALE
211
ANNEXE
215

234
LES TABLEAUX DU TEXTE
220
LES SCHEMAS DU TEXTE
221
BIBLIOGRAPHIE
222
TABLE DES MATIERES
228
l,