UNIVERSITE DES SCIENCES SOCIALES DE
TOULOUSE 1
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pour l'obtention du grade de
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Doct:r~UR ès SCIENCES ECONOMIQlJES
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Titre .:-
LA FAISABIlITE DtU'NE INTEGRATION ECONOMIQlJE
EN AFRIQUE CENTRALE:
UN ESSAI DE ltÉDEFIJ.VITION DES C01VDITI01VS D'OPTIMALITE
présentée et soutenue publiquement le 08/10/1999 par
Jeail-:-Sylvain NDO NDONG
-
.
Sous la direction des Professeurs: Georges MOLl1VS-YSAL
et
Albert ONDO OSSA
yemkes du JURY:
Les Professeurs :
- Jean-Paul AZAM
Université de Toulouse l,Membre du Co!lëge de France;
- Henri-François IIB".tVNER
Université d'Auvergne;
__.Philippe HlJGOIY. .. "."
Université de Paris X Nanterre;
':Gèorges MOLINS-rSAL
Université de Toulouse 1 ;
- Albert ONDO' QSSA
Université de Libreville.
"."
Cene th~se a été réalisée avec le soutien financier du
Programme de Troisième Cycle Interoniversitaire

,
,
a mon epouse,
à 1vlimetè,

à Çaë{{e et à Çeorgina-C{aude
,....
hi

Remerciements:
Je tiens à remercier particulièrement le Professeur Albert ONDO OSSA, qui m'a
toujours soutenu dans les moments les plus difficiles de cette entreprise et dont les critiques et
commentaires m'ont permis de m'écarter des sentiers battus.
Je remercie également le Professeur Georges MOLlNS-YSAL qui a accepté malgré
toutes ses occupations de diriger cette thèse.
Enfin, ma gratitude va au Professeur J.P. AZAM, Directeur du Centre de Recherche, et
toute l'équipe d'ARQADE (UTl).
Comment ne pas aVOIr une pensée pour Jean-Jacques EKOMIE, Serge Maurice
PAMBOU. Que toute l'équipe du Laboratoire d'Economie Appliquée (LEA) à libreville,
......
trouve ici toute la ferveur qu'elle mérite.
iv

1--- -~-
TABLE DES MATIERES
Résumé....
..
...
..
.page ii
Dédicaces
ili
Remerciements
.iv
Table des matières
v
mTRODUCTION GENERALE
09
PREMIERE PARTIE: LES FONDEMENTS DE LA REDEFINITION .....23
CHAPITRE 1 : Les théories de l'Intégration sont séduisantes
25
SECTION 1 : La théorie traditionnelle de l'intégration régionale
27
A - Les effets de création et de détournement des échanges
27
A1- L'approche de VINER
27
Al.l- Les effets de production
28
Al.2- Les effets de consommation
30
Al. 3- La combinaison des effets de consommation et de production
31
A2- Présentation de l'analyse de KEMP et WAN
34
B - La prise en compte d'autres effets dans l'analyse du bien-être
36
B 1- L'analyse de COOPER et MASSELL.
36
Bl.l- La préférence pour l'industrie
37
B2.l- Le problème de la spécialisation
AO
B2- L'approche duale de BALDWIN et VENABLES
A3
B2.l- Concurrence parfaite
46
B2.2- Concurrence imparfaite
A 7
C - L'investissement dans l'analyse du bien-être
49
C1- Le modèle de HAMADA
50
C2- Le modèle alternatif
52
C3- Le cas d'une nouvelle industrie
54
C4- Croissance, investissement étranger
56
v

SECTION fi : Le nouveau régionalisme: la dimension institutionnelle
59
A - Présentation du modèle de de MELO, PANAGARIYA et RODRIK
60
B - La dimension institutionnelle de l'I.R. et ses implications
65
B 1- Les effets économiques
65
B2- Les conséquences politiques de l'I.R
67
B3- Les objectifs de croissance
68
C - Les avantages potentiels de l' intégration Nord-Sud
71
=C..;;.;HAP:=;;.=;..;:I~T.;;.;RE=-=I::o:.I : ••• Mais leur application est difficile
74
SECTION 1 : Les difficultés de mise en œuvre des théories de l'I.R.
75
A - Les regroupements impliquant au moins un pays industrialisé
76
A1- La Communauté européenne
77
A2- L'ALENA et le Mexique
79
A3- La Communauté de Développement Sud Africain.(SADC)
82
A3.1- Les objectifs de la SADe
83
A3.2- Le problème du partage des gains commerciaux
86
A4- La coopération institutionnelle entre pays de la zone franc
90
B - L'intégration commerciale en Afrique Centrale (modèle de gravité)
93
Bl- Les techniques d'analyse
93
Bl.l- La mesure de la similarité de /'import-export
93
Bl.2- Le modèle de gravité
95
B2- Les résultats et commentaires
97
SECTION fi : Les causes des difficultés de l'intégration en Afrique Centrale
107
A - L'inadaptation du cadre analytique
108
A1- La non optimalité de l'intégration par les marchés
109
A2- La contrainte de pouvoir d'achat
117
B - La difficulté de la libéralisation des échanges intra-régionaux
121
B 1- Les politiques de substitution aux importations
.121
B2- Les contradictions nées de la dévaluation du franc CFA.
124
C - Le manque de coordination des politiques commerciales
127
C 1- La répartition inégale des coûts et avantages de l'intégration
127
C2- La non prise en compte des effets dynamiques
130
C3- Une certaine incapacité à réguler l'offre
132
Conclusion de la première partie
·.133
vi

DEUXIEME PARTIE: LA FINALITE DE LA REDEFINITION DES
CONDITIONS D'OPTIMALlTE : La nouvelle stratégie
135
CHAPITRE III : La définition de la nouvelle stratégie
138
SECTION 1 : La création d'une véritable union douanière en Afrique centrale
139
A - Les raisons de la création d'une U.D. plutôt qu'une ZLE
140
A1- Accès au marché et pouvoir de négociation
142
A2- La contrainte des règles d'origine
143
A2.l- Principe des règles d'origine
143
A2.1-1 - Le principe
144
A2.1-2 - Les règles de cumul
145
A2.2- Le handicap
146
B - La construction de l'U.D. sur la base de l'union monétaire
150
B 1- Les nouvelles perspectives
151
B2- Le nouveau marché
154
C - La définition du niveau optimal d'intégration
154
C1- Le degré optimal d'intégration
155
C2- Représentation graphique
158
SECTION fi: La création d'une ZLE entre la CEMAC et l'union européenne
163
A - Libéralisation commerciale
164
Al - Réduire les entraves aux importations
164
Al.l- Diminuer les taxes sur les biens intermédiaires importés
165
Al.2- Réduire les obstacles non tarifaires
170
Al. 3- Remplacer les restrictions quantitatives par les tarifs
173
Al.4- Réduire les barrières tarifaires
175
A2 - Encourager les exportations
177
A2.l- Agir sur les coûts de transport
179
A2. 2- Promouvoir les exportations
179
B - Les effets attendus de la ZLE entre la CEMAC et l'U.E...........•.................... 186
B 1- Evaluation des échanges bilatéraux
187
Bl.l- Intensité des échanges
187
Bl.2- Estimation de la sensibilité des échanges aux prix et revenus
189
Bl.2-1 - Rôle des prix des inputs importés
190
Bl.2-2 - L'effet induit sur les exportations
192
B2 - Transfert de technologie et innovation
194
B2.1- Cas de délocalisation
195
B2.2- L'innovation et le transfert de technologie
198
vii

CHAPITRE IV : Les conditions de succès de la nouvelle stratégie
204
SECTION 1 :Généraliser la libéralisation.•••~•••......•......•.••................................... 206
A - Etendre la libéralisation géographiquement
207
Al - Observer les règles du GATT/OMC
207
Al.l- Elles organisent l'échange mondial
207
Al.2- Elles constituent un code de conduite
209
Al.2-1- Le principe de non discrimination
210
Al.2-2 - Le principe de réciprocité
212
Al.2-3 - L'accès au marché
2l3
Al.2-4 - Une saine compétitivité
214
A2 - Pour favoriser l'efficience des économies de la CEMAC
214
A2.1- Avantage comparatif
215
A2.2- Une ouverture plus large des marchés
216
B - Les domaines à libéraliser
218
BI - Libéralisation dans les services
219
B2 - Domaines institutionnels
220
B2.1- Protection des droits de propriété intellectuelle
220
B2.2- Procédures de règlement des différends
222
B3 - Domaine politique
224
SECTION fi : Créer et développer les mécanismes incitatifs à l'industrialisation
226
A - Au niveau national.
:
226
Al-Les facteurs de production
226
Al.l- Formation du capital humain
228
Al.2- Complémentarité entre capital national et capital étranger
229
A2- Les entrepreneurs
230
A2.1- Améliorer les conditions de la concurrence
231
A2.2- Dynamiser le secteur informel
233
B - Au niveau régional
236
B 1- Au sein de la CEMAC
236
B2- Au niveau de la ZLE
238
B2.1- Coopération institutionnelle
.23 8
B2.1-1 - Sur le plan monétaire
238
B2.1-2 - Sur le plan juridique
239
B2.2 - La coopération industrielle
.240
C - Garantir le financement de l'industrialisation
243
C1- Favoriser la compétitivité sur le plan international
243
C2- Recourir aux investissements directs étrangers
,
245
Conclusion de la deuxième partie
249
CONCLUSION GENERALE
250
BffiLIOGRAPHIE
254
viti

LA FAISABILITE D'UNE INTEGRATION REGIONALE
EN AFRIQUE CENTRALE:
UN ESSAI DE REDEFINITION DES CONDITIONS D'OPTIMALITE
li est de plus en plus reconnu aujourd'hui que les économies ouvertes connaissent une
croissance plus rapide que les économies fermées. Au moment où les opinions divergent sur la
meilleure façon de s'ouvrir et de s'intégrer à l'économie mondiale, il semble que tout le monde
s'accorde sur le fait que les économies africaines doivent libéraliser significativement leur
commerce dans la première décennie du 21 ème siècle.
En effet, la promotion du commerce régional a été l'un des objectifs les plus importants
des
tentatives
d'intégration
régionale
en
Afrique
subsaharienne.
En
particulier,
le
développement accéléré à travers un commerce régional accru a été le point central des
objectifs de ces tentatives d'intégration régionale. Plusieurs théoriciens (De MELO,
MONTENEGRO et PANAGARIA, 1993; P. et S. GUILLAUMONT, 1993; OYEJIPE,
1998 ;...) ont, à cet égard, considéré la nécessité d'explorer les mécanismes par lesquels
l'intégration régionale était supposée apporter à la fois une expansion du commerce régional et
9

un développement accéléré de la zone intégrée essentiellement par la libéralisation commerciale
de la région.
La théorie du commerce international de base offre une explication des effets induits de
croissance émanant des gains statiques et dynamiques dus à l'expansion commerciale. Dans ce
contexte, le commerce est un important moyen d'élargissement des marchés, d'accroître la
division du travail, d'améliorer l'efficacité d'allocation des ressources et d'encourager la
concurrence et la spécialisation des produits.
A cet effet, RICARDO (1817) d'une part, HECKSCHER et OHLIN (1956) d'autre
part, ont proposé une explication des conditions de l'échange international, et par voie de
conséquence, une voie possible pour le développement. Le commerce international, leur
apparaît, avec quelques variantes dans les procédés, comme le chemin le mieux à même de
permettre la croissance économique et par la suite, le développement.
Alors que RICARDO centre son analyse sur la technologie (productivité du travail) et
les avantages comparatifs dus à la différence dans les prix relatifs des produits, HECKSCHER
et OHLIN fondent leur explication sur les ressources (les dotations factorielles) dans la
détermination de l'avantage comparatif.
Les pays s'engagent donc dans le commerce international parce qu'ils ont des
technologies différentes les uns des autres. Ce qui leur permet, à l'image des individus, de
bénéficier au mieux de leurs différences, mais à condition que chacun d'eux se consacre à ce
qu'il fait relativement le mieux.
Dans le modèle simple de RICARDO, le travail est le seul facteur de production et les
seules différences entre les pays résident dans la productivité du travail des différentes
industries. En somme, la structure de production d'un pays est déterminée en économie ouverte
par les avantages comparatifs. RICARDO essaie de montrer dans son modèle qu'un pays peut
profiter de l'échange de deux manières:
1°) la méthode de production indirecte selon laquelle, plutôt que de produire un bien
par lui-même, il produira un autre bien qu'il échangera contre le premier. Comprenons ici que
10

chaque fois qu'un bien est importé, sa "production indirecte" (c'est-à-dire son importation) doit
exiger moins de travail national que la production directe;
2°) la distribution des gains à \\' échange qui dépendent du prix relatif des biens que
produisent les pays. Ces prix relatifs sont déterminés eux-mêmes par les offres et les demandes
internationales de ces biens.
Si le travail est le seul facteur de production, ainsi que le conçoit RICARDO, l'avantage
comparatif ne provient que des différences internationales dans la productivité du travail. Or
dans le monde réel, des différences dans les ressources des pays expliquent aussi les échanges.
Selon la théorie de HECKSHER-OHLIN, le commerce international reçoit son
impulsion des différences de ressources entre pays. En ce sens que les pays fabriquent, de
manière relativement efficace, les biens dont la production est relativement intensive dans les
ressources qui y sont disponibles avec une abondance relative. Les changements dans les prix
relatifs des biens ont des effets très puissants sur les revenus obtenus par les différentes
ressources productives. La base de cette théorie est que les pays tendent à exporter les biens
intensifs dans le facteur dont ils ont une dotation relativement abondante et importent les biens
intensifs dans le facteur dont ils ont une dotation relativement rare.
Les marchés plus larges présentent l'intérêt d'offrir une base adéquate d'exploitation
des économies d'échelle comparativement aux marchés domestiques isolés; ils permettent
aussi un accès accru à la technologie. Ces effets, pris ensemble résultent d'un accroissement du
niveau de la productivité des facteurs et donc d'une augmentation de la croissance globale de
l'économie.
Aussi pour assurer cette croissance globale de leurs économies, la plupart des pays se
sont alors engagés dans des processus d'intégration régionale ces dernières années. Le
régionalisme connaît ainsi un net renforcement en Europe avec notamment la mise en oeuvre
du marché intérieur et la formation de l'Union Européenne. Dans le continent américain, il s'est
traduit par la création de l'ALENA, (Accord de Libre Echange Nord Américain) qui implique
des pays industrialisés à économie de marché (Etats-Unis et Canada) et un pays en
11

développement (Le Mexique). En Afrique, en Asie et en Amérique Latine, on enregistre dans
le même temps plusieurs tentatives de regroupement Sud-Sud.
L'intérêt porté à l'intégration internationale n'est pas tout à fait nouveau. Déjà, dans la
deuxième moitié du XIXè siècle, fut signé l'accord franco-anglais dont l'élément essentiel était
l'inclusion d'une clause inconditionnelle de la nation la plus favorisée (NPF). Cette clause
prévoyait l'accès égal au marché de l'autre pour chaque partenaire et limitait la possibilité de
renégociation en cas d'abaissement des droits avec les pays tiers.
Ce traité a permis à la Grande-Bretagne d'étendre ses propres réductions de droits à
d'autres pays, tandis que la France a abaissé ses tarifs exclusivement sur les produits
britanniques adoptant ainsi une structure de droits à deux niveaux. D'autres pays ont recherché
des accords avec la France pour garantir l'accès de leurs produits au marché français. On
mesure ainsi, dès l'instant, la nécessité de la formation des Unions Douanières.
L'histoire récente a connu elle aussi des mouvements vers le régionalisme. Dans la
période qui a suivi la seconde guerre mondiale, au cours des années 50, alors que la
libéralisation du commerce se négociait à un niveau multilatéral, le régionalisme illustré par les
arrangements européens s'est répandu en Amérique Latine, en Afrique et au Moyen-Orient.
Après une certaine torpeur dans les années 70, il fit un retour marqué dans les années 80. Le
processus s'est accéléré au début des années 90 avec de nouvelles initiatives presque chaque
mOlS.
Ces récentes initiatives d'intégration régionale, comme le disent 1. DE MELO et alii,
laissent penser que le système commercial mondial pourrait se trouver divisé en trois blocs
commerciaux tournant autour de l'U.E., des Etats-Unis et du Japon. Pour certains, cette
évolution constitue un mouvement dans le sens d'une unification du système commercial
mondial, tandis que pour d'autres, elle met le multilatéralisme en danger. Pour ces derniers, le
régionalisme dispense les négociateurs et les politiciens de la difficile tâche de conclure des
accords dans le cadre des négociations du GATT, et représente un substitut plus qu'un
complément au multilatéralisme.
12

Mais, il faut dire que la véritable discussion des problèmes théoriques relatifs à la
formatiQn des Unions Douanières, à proprement parler, est d'origine relativement récente.
Augustin COURNOT (1927), par exemple, distingue les effets d'une suppression de barrières
commerciales tarifaires et non tarifaires, d'une part, et l'équité, d'autre part. Une considération
beaucoup plus explicite est accordée pour la première fois aux Unions Douanières par
WICKSELL (1934), BEERS (1941), WESTRATE (1948) et COURTlN (1948). Mais il faut
attendre les années 1950 pour voir émerger de véritables analyses théoriques avec Maurice
BYE (1950), Herbert GIERSCH (1949-50) et Jacob VINER (1950).
Dans leurs analyses respectives, VINER et BYE étudient l'impact de l'union douanière
sur les flux commerciaux à partir des effets de création et de détournement de l'échange. De
ces deux effets, c'est la mesure de l'effet de détournement qui a le plus focalisé l'attention des
chercheurs. En effet, il y a eu deux approches différentes pour calculer l'effet de détournement.
La
première
analyse
microéconomique
(GONDWE
et
GRIFFITH,
1989 ~
KAREMERA et KOO, 1994) a considéré l'effet de l'intégration sur les industries spécifiques.
Elle a particulièrement été utilisée pour déterminer l'impact potentiel de l'intégration sur la
structure industrielle des pays participants.
La deuxième approche macroéconomique de l'effet de détournement, se consacre à
l'influence de l'intégration sur les flux commerciaux internationaux, et particulièrement sur les
nuances qui existeraient entre le commerce intra-régional et le commerce global.
C'est cette deuxième analyse qui s'appuie sur les travaux de BALASSA (1975), qui
stipule que la création et le détournement de trafic peuvent être déterminés en mesurant les
élasticités-revenu avant et après l'intégration tant du commerce intra-régional que du
commerce extra régional. De ce point de vue, une diminution de l'élasticité-revenu après la
formation de l'union douanière indiquerait un détournement des échanges alors que son
augmentation signifierait une création de trafic.
Les aspects de la localisation de l'union sont abordés par GIERSCH qui applique la
théorie de la localisation de WEBER et LGSCH'S à l'intégration économique.
13

En plus des effets de création et de détournement de trafic, la formation des unions
douanières peut conduire aussi à l'accroissement de l'efficience industrielle à travers les
économies d'échelle. En effet, du point de vue de la compétitivité internationale, il peut y avoir
des gains substantiels à travers la concentration intra-régionale des industries, ce qui permet de
réduire le coût de production, faisant en sorte que les entreprises régionales deviennent ou
demeurent globalement compétitives. Cette réduction des coûts est le résultat d'une
amélioration de l'infrastructure de production et de la poursuite de la spécialisation
ind ustrielle·.
Par ailleurs, les plus grandes entreprises sont capables de s'assurer les économies
d'échelle additionnelles en s'approvisionnant en matières premières, mais cet accroissement des
: économies d'échelle n'est possible que si le marché potentiel est assez grand pour absorber
l'accroissement de la production. L'intégration régionale est donc un moyen d'accroître l'accès
au marché, qui conduit à un accroissement de l'échelle de production.
La réduction des coûts unitaires au travers d'un accroissement de la taille des
infrastructures peut être illustrée par la figure l-A. En effet, on peut considérer que l'entreprise
fait face à des courbes de coût marginal, Cml et de coût moyen, CMI Ses courbes de demande
et de recette marginale sont représentées respectivement par Dl et Rml. La production qui
maximise son profit est au niveau QI, avec le prix correspondant Pl. Comme résultat,
l'entreprise fait des profits représentés par l'aire abcd. Cependant, elle peut réaliser des coûts
moyens plus faibles en augmentant la taille de ses infrastructures, comme indiqué par les
courbes Cm2 et CM2, or, le niveau courant de demande ne garantit pas ce niveau de
production.
\\
Dans la figure I-B la courbe de demande de l'entreprise, D2 a augmenté suite à l'accès
!aux nouveaux marchés. La nouvelle courbe de recettes marginales, Rm2 s'est aussi déplacée
vers la droite. C'est-à-dire que l'entreprise peut continuer à opérer, sans pertes avec ses
anciennes installations, produisant au niveau Q'I. Ses profits seraient représentés par l'aire efgh
\\ qui excède les profits de l'entreprise avant l'accroissement de la taille du marché.
! - - - - - - - - - - - -
• Pour les économies d'échelle, voir SCITOVSKY, J956: pour l'évidence empirique de la concentration industrielle, voir
SLEUWAEGEN et YAJvfA WAKI, J988: et pour le détournement et création de trafic en présence des économies d'échelle,
voir CORDEN, 1972.
14

p.
A
Q
p
B
" " - - - - - - - - - - - - - - - - - , Q
Q~
~
Figure 1: Economies d'échelle et hausse de la demande
Si l'entreprise augmente ses capacités de production, alors ses coûts marginal et
moyen, Cm2 et CM], vont diminuer. Elle maximise son profit au niveau de production Q2 avec
le niveau de prix P2. Les profits de l'entreprise sont maintenant représentés par l'aire jklm. Ils
sont supérieurs à ceux obtenus au niveau de production Q'}. La réalisation de ces économies
d'échelle est le résultat normale de l'expansion de la taille du marché à travers l'intégration
régionale.
Tous ces effets ont fait que depuis une trentaine d'années, la littérature sur l'intégration
économique connaisse un essor considérable. Renforcé par le succès de l'Union Européenne
eUE), par le résultat décevant de l'Uruguay Round sous l'égide du GATT, et par
l'enthousiasme des Etats-Unis pour les zones de libre-échange (ZLE), le régionalisme a le vent
en poupe dans le monde entier.
15

L'Afrique au Sud du Sahara n'a pas échappé à ce grand mouvement car beaucoup
d'institutions visant à promouvoir l'intégration et la coopération régionales sont créées peu
après les indépendances, malheureusement sans avoir été véritablement planifiées. La petite
taille et la pauvreté de nouveaux Etats indépendants constituent une entrave à leur
développement. En particulier, une faible population combinée avec de faibles revenus per
capita constituent des limites importantes sur les perspectives de développement et de
, croissance à l'intérieur du marché limité de chaque pays en restreignant sa capacité à bénéficier
de la diminution des coûts unitaires provenant de l'exploitation des économies d'échelle et en
réduisant les gains d'efficacité générés par la concurrence accrue, d'où l'engouement pour la
constitution d'entités plus importantes.
Le plan d'action de Lagos, qui fournit un cadre conceptuel et programmatique, divise
J'Afrique Subsaharienne en trois sous-régions: l'Afrique de l'Ouest, l'Afrique Centrale et
l'Afrique de l'Est et Australe. Le plan d'action de Lagos prévoit que chaque sous-région doit
passer par trois étapes : le libre-échange (LE), l'Union Douanière (Lill) et la Communauté
Economique (CE). Ainsi, dès 1982, il existait déjà sept accords commerciaux au moins en
Afrique au Sud du Sahara dont trois en Afrique de l'ouest (CEAO, CEDEAO, UFM), deux en
Afrique Centrale (UDEAC, CEPGL) et deux en Afrique de J'Est et Australe (ZEP, SACU).
Les expériences d'entreprises régionales intégrées ont donc été nombreuses comme le suggérait
la Commission Economique pour l'Afrique (CEA), qui en faisait une étape cruciale vers la voie
de l'intégration totale.
Il faut bien reconnaître aujourd 'hui que l'évolution de la plupart de ces tentatives
d'intégration régionale africaine pousse à dire qu'elles n'ont pas connu un grand succès
L'expansion commerciale a été lente et les échanges intra-groupes sont restés modestes tant en
Afrique de l'Ouest, en Afrique Australe qu'en Afrique centrale. On note pour la Communauté
Economique et Monétaire pour l'Afrique Centrale (CEMAC, ancienne UDEAC) que les
exportations à l'intérieur de la zone représentent à peine 4 % du commerce extérieur de tous
les Etats membres en 1999.
Le très faible niveau des échanges intra-zones conduit à douter de l'opportunité de la
stratégie de l'intégration. Il est vrai que les diffIcultés que rencontrent les pays en
16

développement sont bien connues. Les effets à court terme de l'intégration ne sont pas
plausibles à cause notamment:
- des coûts administratifs initiaux élevés car les bénéfices qui découlent d'une extension
des investissements et des économies d'échelle peuvent ne pas apparaître avant un délai assez
long et ces bénéfices sont incertains, difficiles à quantifier et parfois intangibles;
- des difficiles problèmes de répartition des coûts et des avantages entre les pays
partenaires ainsi que la non certitude et l' inévidence des gains potentiels.
Autant de raIsons qui conduisent P. ROB SON (1983) à dire que "bien que
l'intégration régionale soit certainement importante comme moyen de desserrer les
contraintes de développement auxquelles sont confrontés les Etats africains, il est peu
probable que ce soit un processusjacile".
Cependant, l'expérience récente des tentatives d'intégration suscite quelques espoirs
car les trente dernières années ont permis de bien situer les limites des Unions douanières dans
les pays en développement. Il faut reconnaître que les conditions sont différentes aujourd'hui
de celles du régionalisme des années 60. Non seulement le commerce mondial est plus ouvert,
mais aussi les conceptions sont très différentes, tout au moins parmi les pays en développement
qui s'engagent dans un processus d'intégration régionale.
On a enregistré amsl trois phases dans les processus d'intégration des pays en
développement:
1°) l'objectif des pays en développement était d'abord d'accomplir une industrialisation
par substitution aux importations en fermant leurs marchés aux exportations des pays
développés;
2°) ensuite, la plupart des pays en développement se sont engagés de manière
indépendante dans un vaste processus de libéralisation commerciale unilatérale (LCU), tout en
étant candidat au GATT;
17

3°) actuellement, ces pays semblent chercher à s'associer avec de grands pays
développés pour s'assurer un accès à leurs marchés. De ce point de vue, l'intégration régionale
présente des caractéristiques différentes. Dans certains cas, elle est plus du type Nord-Sud que
Sud-Sud ou Nord-Nord qui caractérisait généralement les objectifs d'IR de la première vague.
En fait, on reconnaît aujourd'hui les limites des Unions Douanières. On sait notamment
que les travaux pionniers de VINER et de i\\1EADE se sont préoccupés surtout des effets
statiques des modifications tarifaires. En effet, si les gains dus à l'intensification des échanges,
tels que le présente la théorie du commerce international constituent l'un des avantages à en
attendre, les gains dynamiques dont le principal est de surmonter l'étroitesse des marchés et de
favoriser l'industrialisation des pays ainsi regroupés en sont les plus importants.
La réalité est qu'il semble, en effet, que la structure des économies en voie de
développement n'est pas compatible avec les conditions arrêtées par la théorie des unions
douanières et notamment l'existence d'un marché véritable. En effet, selon la théorie
traditionnelle du commerce international, les échanges commerciaux ont lieu entre les
économies à structures complémentaires. Ce qui signifie que les pays doivent avoir des
dotations factorielles différentes. Autrement dit, les pays d'Afrique centrale n'ont, de ce point
de vue, aucune chance de réussir une intégration par les marchés.
Par ailleurs, la théorie moderne admet que deux économies semblables peuvent très
bien commercer entre elles. A cet effet, KRUGMAN (1980), fait observer que les 2/3 du
commerce mondial se déroulent entre des pays à dotations factorielles identiques. De son point
de vue, les pays en développement sont en mesure de commercer entre eux.
Mais cette théorie n'est complète que si on précise que ces échanges commerciaux sont
II davantage intra-industriels plutôt qu'inter-industriels. Ce qui s'accompagne bien entendu des
économies d'échelle. En d'autres termes, les produits échangés lors d'un tel commerce sont
surtout des biens différenciés. Ce qui requiert un niveau élevé de revenu per capita. Or, la
différenciation des biens implique une spécialisation dans la production et, par conséquent, des
\\
il infrastructures industrielles développées. Ce qui n'est réalisable que lorsque les moyens pour
l'innovation technologique sont réunis.
18

Le problème est donc que ces pays ne possèdent pas de marché intérieur, car le revenu
par tête y est très limité. L'exemple du Nigeria ou de l'Inde, des pays qui ont des populations
atteignant ou dépassant une centaine de millions d'habitants, mais qui ne disposent pas de
pouvoir d'achat réel pour consommer la production du pays, nous éclaire sur l'une des raisons
pour lesquelles les différentes tentatives d'intégration en Afrique n'ont pas été couronnées de
succès.
En effet, comme le précise BOURGUINAT (1993), additionner ne signifie pas
intégrer. Ce n'est pas simplement en formant une Union douanière que le commerce entre les
pays membres sera promu. Les Etats étant eux-mêmes au bord de la cessation de paiements, ce
n'est pas sur les populations à faible pouvoir d'achat qu'il faut compter pour absorber la
production nationale ou celle de l'union. Ainsi se trouve posé le problème de l'opportunité de
l'intégration régionale dans les pays africains et particulièrement ceux d'Afrique centrale. Mais
faut-il pour autant abandonner cette perspective?
Il est utile de considérer un certain nombre de critères pour répondre à cette
interrogation. De nombreuses possibilités de sortir du marasme économique ne s'offrent pas
aux pays d'Afrique centrale. On a cru que la dévaluation du franc CFA, le 12 janvier 1994,
pouvait les aider à résoudre leur sempiternel problème de relative faiblesse des exportations et
de niveau élevé des importations.
Malheureusement, la Banque des Etats d'Afrique Centrale (REAC) n'a pas vraiment
joué le rôle fédérateur qu'on aurait pu attendre d'elle. Elle a eu des mandats flous par rapport à
la BCEAO. L'environnement international pétrolier est instable. La coopération par des
institutions monétaires est moins forte... La dévaluation a plutôt accentué les risques
d'explosion de la zone BEAC. Elle a révélé notamment les antagonismes d'intérêt à propos de
la dévaluation car certains pays membres comme le Gabon n'y étaient pas favorables alors que
d'autres comme le Cameroun hésitaient par rapport à la position à adopter.
Il est donc clair que ne disposant pas de marché intérieur suffisamment dynamique, les
pays d'Afrique centrale doivent rechercher des débouchés à l'extérieur de leur cadre
d'intégration. Toute la stratégie doit s'attacher à proposer que ces pays s'unissent pour
produire ensemble, afm de proposer des biens compétitifs, facilement commercialisables sur les
19

marchés extérieurs. En fait, nous pensons que les pays d'Afrique centrale, en mettant l'accent
sur l'industrialisation de leurs économies, pourraient favoriser leur intégration par l'offre.
Cette stratégie est d'autant plus réalisable qu'il existe des accords commerciaux
préférentiels qui favorisent l'entrée des produits venant des pays d'Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique (A.C.P.). Les pays d'Afrique Centrale peuvent bénéficier, au nom de leur statut
d'économies en développement de deux types de préférences générales: la Convention de
Lomé en prévoit un pour l'Union Européenne et les autres pays de l'OCDE en prévoient
1
également un dans le cadre du système généralisé de préférences (SGP).
Il existe en effet, un aspect important, tant des développements récents que des
analyses académiques, concernant les considérations sur l'intégration Nord-Sud. De nombreux
1
avantages peuvent être mis en exergue pour justifier ce type d'accord entre les pays en
développement comme ceux d'Afrique centrale et l'Union Européenne.
L'intégration doit effectivement permettre de rendre plus rationnelle l'implantation des
industries en évitant les investissements parallèles et surdimensionnés, en faisant jouer la
. complémentarité des économies et en regroupant des ressources rares (capitaux et techniciens)
pour mener à bien des projets industriels communs.
Mais il est clair que cet objectif ne peut être atteint que si certaines conditions le
permettent. Car si l'Afrique Centrale n'y prend garde, si elle n'y répond pas par des politiques
économiques de la « diminution des coûts de la non intégration », elle sera relativement moins
bien placée dans l'avenir pour attirer les investissements étrangers et la technologie dont elle
• continuera à dépendre fortement pour son développement.
Par ailleurs, puisque les pays d'Afrique Centrale ont besoin de préparer le terrain pour
être en mesure de profiter des opportunités de développement à long terme qui se
présenteraient si la vague de convergence en Europe entraîne encore une délocalisation de la
\\ production à haute intensité de travail de la périphérie de l'Union Européenne vers les pays en
!développement, alors l'intégration économique Nord-Sud serait la voie la plus indiquée pour
1
minimiser les coûts de la fragmentation de leurs marchés.
20

Ainsi, sur la base des dispositions de politique commerciale des accords de Lomé,
l'accès amélioré aux marchés européens par les pays de l'ACP pourrait s'avérer très bénéfique .
et apporter à l'Afrique Centrale, les bases d'une plus grande crédibilité de la politique de
réforme.
Les arguments en faveur de ce type d'intégration régionale sont basés sur le fait qu'elle
est plus avantageuse sous forme d'Union Douanière liée au marché européen plutôt qu'à
travers la libéralisation commerciale unilatérale. Toute la problématique est de trouver
comment intégrer l'Afrique Centrale (arrangement régional Sud-Sud) dans le moule des
accords Nord-Sud.
Nous développerons cette analyse en quatre chapitres regroupés en deux grandes
parties.
La première partie nous rappellera que les théories qui évoquent le problème des
intégrations économiques sont si séduisantes que la plupart des dirigeants africains se sont
laissés tenter par la construction des Unions Douanières ou des Zon,es de Libre-échange de
type Sud-Sud (Chapitre 1).
Le problème est que la mise en œuvre de celles-ci n'a pas toujours été facile. En effet,
nous construisons un petit modèle de gravité ainsi 'lu 'un modèle théorique qui indiquent
comment et pourquoi les résultats des regroupements Sud-Sud sont mitigés (Chapitre 2).
Nous y indiquons clairement qu'en Europe, l'U.E. a enregistré des gains importants ainsi que
l'ALENA en Amérique, tandis qu'en Afrique, les intégrations n'arrivent pas à s'engager
véritablement sur la voie du succès malgré l'existence des pays comme la République Sud
Africaine (RSA) dont l'industrialisation est bien amorcée.
La deuxième partie nous permettra de proposer une définition de la nouvelle stratégie
(Chapitre 3) que doit adopter les pays d'Afrique Centrale afin qu'ils trouvent le moyen de
sortir de leur marasme économique. Nous proposons notamment que ces pays d'Afrique
Centrale s'unissent d'abord sérieusement au sein d'une Union Douanière véritable (UDEAC
ou CEMAC, peu importe le nom qu'ils donneront à cette entité). Mais nous indiquons que
21

cette Union Douanière, pour garantir son efficacité et sa crédibilité, doit se lier à l'UE. a
travers le libre-échange.
Mais il est clair que pour que cette intégration Nord-Sud soit viable, un effort doit être
produit par les pays d'Afrique Centrale. C'est pour cela que nous définissons les conditions de
réussite de cette stratégie d'intégration régionale (Chapitre 4). Nous en détenninons deux
types: une libéralisation plus généralisée des échanges non seulement pour observer les règles
du GATT/OMC mais aussi pour accroître l'efficience des économies concernées; le deuxième
type de conditions est de favoriser les mécanismes d'incitation à l'industrialisation.
22

LES FONDEMENTS DE LA REDEFINITION DES
CONDITIONS D'OPTIMALITE
Depuis le début des années 60, de nombreux accords d'intégration économique
régionale entre pays en développement ont été conclus en Afrique et en Amérique Latine. Le
contexte dans lequel ils sont intervenus est très différent de celui dans lequel la Communauté
européenne a été élaborée. En Afrique, l'intensité du commerce intra régional est relativement
faible et la dépendance vis-à-vis du commerce extra régional est très élevée. On relève
également que:
- les exportations sont constituées surtout de produits minéraux et agricoles;
- les coûts de transaction sont relativement forts, ce qUI entraîne des distorsions
majeures qui empêchent les mécanismes de marché de fonctionner;
- la dimension du marché est petite par rapport à la taille économique minimale pour
plusieurs productions industrielles;
- il existe de grandes disparités entre les niveaux de revenu, qui sont extrêmement
faibles, et de développement des pays dans les régions de référence;
23

- le commerce informel est très important.
Si l'on se réfère à la théorie orthodoxe, les pays ayant de telles caractéristiques ne
peuvent former ni des espaces commerciaux optimaux, ni des zones monétaires optimales. En
effet, si les économies n'ont pas de structures complémentaires, c'est-à-dire des dotations
factorielles différentes, elles auront du mal à commercer entre elles. De même, la faiblesse des
revenus per capita ne peut pas soutenir la spécialisation de ces économies.
TI apparaît aujourd'hui que l'intégration économique régionale en Afrique centrale n'a
pas été capable de générer des bénéfices immédiats, importants et tangibles en termes
d'expansion du commerce ou d'une croissance plus forte. Ce qui s'explique en partie par le
protectionnisme vis-à-vis des importations et par conséquent, le biais anti-exportation de ces
accords.
Par ailleurs, L'inefficacité de ces accords s'explique par l'inadéquation des instruments
et des structures. On ne doit donc pas s'étonner que cet échec ait érodé tout véritable soutien
politique au cours des dernières années.
La réalité de l'échec de la première vague d'intégration dans les années 60 et 70 permet
de s'interroger sur la pertinence des outils employés pour façonner les différentes unions
douanières et économiques qui existent en Afrique et dans le monde en développement en
général. Les deux premiers chapitres devraient nous permettre d'apprécier non seulement les
différentes théories des unions douanières, mais aussi de nous rendre compte que ces théories,
bien que séduisantes (chapitre 1), ne sont pas aisées à mettre en pratique surtout dans les pays
en développement où les tentatives d'intégration économique et de coopération régionale ont
connu des fortunes diverses (chapitre 2).
24

CJ{jlPlcrcg~ l
Les théories de l'intégration sont séduisantes ...
Ainsi que nous l'avons dit plus haut, la théorie économique a sensiblement évolué
depuis les travaux précurseurs de BYE(1950) et de VINER(1950) vers la prise en compte de
nouveaux effets qui sont venus rectifier une image au départ trop ambiguë des accords
régionaux. De fait on s'est toujours interrogé sur les avantages auxquels les pays en
développement peuvent s'attendre en participant à des regroupements régionaux.
L'analyse de statique comparative classique basée sur la théorie des unions douanières
attribue ces avantages à une production accrue provenant de la spécialisation selon les
principes de l'avantage comparatif, autrement dit, les gains statiques d'allocation des
ressources.
L'Union douanière est une des formes de l'intégration économique régionale. En effet,
les accords qui ont pour objectif l'intégration des marchés sont au premier chef les accords de
nature commerciale. On peut construire une échelle d'intégration régionale, comprenant
successivement les zones de libre-échange, les unions douanières, le marché commun et le
marché unique puis l'union économique et monétaire.
Les zones de libre-échange (ZLE) sont des zones où les pays membres décident de la
suppression des barrières tarifaires et non tarifaires pour ce qui concerne les échanges de leurs
25

produits originaires mais où chaque partenaire garde une politique commerciale indépendante
face aux pays non partenaires.
Comme les ZLE, les Unions Douanières (UD) éliminent les barrières commerciales
entre partenaires. Mais en plus, les partenaires adoptent un tarif extérieur commun (tee). Ici,
les législations douanières sont harmonisées par les partenaires.
L'intégration est encore plus poussée avec le marché commun qui est une UD
prévaut la mobilité des facteurs. Cette étape est caractérisée par la liberté de mouvement des
biens, des personnes, des capitaux et des services des pays partenaires. Le marché unique
inclut l'harmonisation des normes et des réglementations.
Enfin, au sommet de la hiérarchie de l'intégration, il y a l'union économique et
monétaire, qui sous entend une politique monétaire commune et un niveau de coordination
très poussé des politiques économiques.
La théorie classique analyse surtout les effets de l'intégration en termes de création et
de détournement des courants d'échanges qui en résultent. La mesure statique de ces effets
conduit le plus souvent à un bilan ambigu, en terme d'efficacité globale et surtout de bien-être
des pays tiers. Nous rappellerons cette analyse dans la première section du présent chapitre à
travers un aperçu de la théorie traditionnelle de l'intégration. La deuxième section sera
consacrée à la nouvelle approche du régionalisme qui privilégie le caractère institutionnel de
l'intégration régionale.
26

S~CrrIO:Nl
La théorie traditionnelle de l'intégration régionale.
La théorie traditionnelle tente d'apprécier l'impact d'une unIOn douanière sur
l'allocation des ressources dans les pays participants. C'est une analyse en tenne de bien-être.
Nous rappelons successivement les approches de VINER (1950), de KEMP et WAN (1976),
la contribution de COOPER et MASSELL (1965b) sur les pays en voie développement, celle
de BALDWIN et VENABLES (1995) ainsi que quelques extensions.
A - Les effets de création et de détournement des échanges.
Plusieurs auteurs se sont intéressés à la théorie de l'Union Douanière. En effet, depuis
VINER (1950), d'autres auteurs comme MEADE (1953), JOHNSON (1962) et LIPSEY
(1970) sont venus compléter l'analyse. Nous nous limiterons ici, au rappel des approches de
VINER et de KEMP et WAN (1976).
Al- L'approche de VINER.
Il est difficile de traiter des effets de l'intégration régionale sans se référer aux travaux
précurseurs de J. VINER. Le principal apport de VINER repose sur la distinction des effets de
création et de détournement d'échanges. Son raisonnement repose essentiellement sur une
approche statique qui ne prend pas en compte les ajustements de l'offre et de la demande et
qui ne considère qu'un seul produit. C'est donc une analyse d'équilibre partiel. La
compréhension de ces effets est mieux assimilée lorsqu'on distingue les effets de production
des effets de consommation.
27

Al.l- Les effets de production
En examinant les effets de l'intégration sur la production, VINER a introduit une
distinction entre la création d'échanges, qui représente une amélioration de l'allocation des
ressources et le détournement d'échanges, qui au contraire représente une détérioration de
cette allocation.
Les effets favorables de création de commerce ont lieu lorsque la production nationale
est remplacée par les importations d'un pays partenaire dans l'union douanière qui produit
moins cher. En effet, la création d'échanges se réfère au fait que, comme conséquence à
l'élimination des droits de douane à l'intérieur de l'union, un bien qui avant la formation de
l'union était produit sur le plan national par chaque pays partenaire sans pouvoir être exporté
vers les pays voisins à cause des tarifs douaniers et des barrières non tarifaires est maintenant
produit et commercialisé par celui des partenaires qui est le plus efficace dans sa production.
C'est ce qui amène l'amélioration de l'allocation des ressources.
Les
effets défavorables
de détournement
de commerce surviennent quand les
importations en provenance d'un producteur extérieur à l'union sont remplacées par celles d'un
producteur intérieur dont les coûts sont plus élevés. En fait le détournement des échanges se
produit lorsque l'élimination des tarifs douaniers et d'autres barrières non tarifaires au sein de
l'union amène un pays partenaire à importer un bien d'un autre pays partenaire à coûts plus
élevés que celui d'un pays tiers. En réalité, ce pays tiers, bien que plus efficace, n'est plus
compétitif compte tenu du droit de douane qui est appliqué à son produit. C'est ce qui
détériore l'allocation des ressources.
Prenons l'exemple de deux pays 1 et 2, qui décident de former une union douanière à
partir d'une politique commerciale non discriminatoire. Les deux pays éliminent toute barrière
au commerce entre eux et maintiennent des barrières tarifaires identiques vis-à-vis du reste du
monde, représenté par le pays 3. Supposons qu'il existe trois biens A (les chaussures), B (les
textiles) et C (les pneus). Les flèches dans le tableau (1.1-1) représentent la direction des flux
d'échanges. L'absence de flèche signifie qu'il n'y a pas d'échanges. L'efficacité productive est
28

mesurée en terme de coût unitaire de production en l'absence des droits de douane et la
simplification nous amène à supposer des coûts constants.
Avant la formation de l'union, le pays 1 applique un tarif douanier de 20 % sur toutes
les importations. Après la formation de l'union, il n'applique des tarifs douaniers qu'à l'encontre
des biens en provenance du pays 3.
Tableau 1.1-1 : Les effets de l'union douanière
pays 2
pays 1
pays 3
Effets
Biens
Coûts
(exp. vers 1)
(exp. vers 1)
c
11
13
10
Chaussures(A)
cCl + ta)
13.2
13
<····12
Détournement
cCl + tl)
11 .... >
13
12
d'échanges
c
18
15
20
Ni création
Textiles(B)
cCl + ta)
21.6
15
24
ni
cCl + tl)
18
15
24
détournement
c
15
17
16
Pneus(C)
cCl + ta)
18
17
19.2
Création de
cCl + tl)
15 .... >
17
19.2
commerce
c = Coût unitaire de production (supposé constant)
to = Tarif avant formation de ZLE entre le pays 1 et le pays 2 (1: = t: = 20%)
3
li = tarifaprès formation de ZLE (t ~ = 0; t1 = to).
Par rapport au bien A, le pays le plus efficace est le pays 3 dont le coût unitaire est plus
faible (10).
Avant la formation de l'union, le pays 1 importe le bien A du pays 3, dont le prix (droit
de douane compris) est plus faible que le coût intérieur de production (12 plutôt que 13).
Après la formation de l'union, le pays 1 importe le même bien du pays 2, parce que son
coût est Il, plus faible que 12. L'efficacité du pays 2 par rapport au pays 3 est compensée par
le droit de douane dans la production du bien A. L'union donne lieu à une allocation moins
efficace de ressources (détournement d'échanges).
Par rapport au bien B, le pays le plus efficace est le pays 1. La formation de l'union ne
change pas le fait que, pour ce pays, il est préférable de produire localement le bien B plutôt
29

que de l'importer. La situation pour le pays 1 est la même avant comme après la formation de
l'union. L'union n'a donc pas d'effet sur son commerce.
Enfin, la présence des tarifs prorubitifs empêchent le pays 1 d'importer le bien C. En
effet, la formation de l'union avec le pays 2, (producteur le plus efficace du bien C), entraîne
une meilleure allocation de ressources, car le pays 1 peut à présent importer ce bien du pays 2
(création d'échanges).
Cette analyse prend uniquement en compte les effets de production de l'union
douanière. Cependant, JOHNSON (1960) et d'autres auteurs ont observé que pour évaluer les
conséquences de la formation de l'union douanière, il convient d'intégrer les effets de
consommation et, plus précisément, les effets sur le surplus du consommateur.
A1.2- Les effets de consommation.
L'effet de création tient au fait que les consommateurs substituent, aux biens
domestiques plus coûteux, les biens étrangers moins chers (importés d'un pays membre). Ils
bénéficient donc d'un accroissement du surplus des consommateurs. En effet, la création
d'échanges se rattache à une modification de la consommation des produits nationaux à coûts
plus élevés en faveur des produits à coûts plus faibles provenant des autres Etats membres. Ce
qui réduit le coût d'acquisition par les consommateurs des biens qui étaient auparavant
produits à l'intérieur du pays.
L'effet de détournement, quant à lui, tient au fait que le surplus des consommateurs
procède d'une substitution par les consommateurs des biens moins coûteux (importés
auparavant d'un pays non partenaire) par les biens plus coûteux étrangers (importés d'un pays
partenaire). Les biens moins coûteux deviennent non compétitifs parce que l'union a décidé
d'augmenter les taux douaniers vis-à-vis des pays tiers.
La prise en compte simultanée des effets de production et de consommation, nous
amène à analyser les effets de création et de détournement de trafics au sens large.
A1.3- La combinaison des effets de consommation et de production
30

VINER a présenté dans un diagramme les concepts les plus larges de la création et du
détournement de commerce à partir d'un cas d'équilibre partiel. Rapportons-nous à cet effet à
la figure (1. 1-1), avec (1.1-1 )a, les courbes d'offre et de demande intérieures du pays 2 pour
un certain produit et (1.1-2)b, les courbes d'offre et de demande intérieures du pays 1 pour le
même produit. Calculons ensuite, pour un prix donné, l'excès d'offre O - D
2
2 ,
c'est-à-dire,
l'offre d'exportations du pays 2 qui, dans le cas de la formation de l'union entre le pays 1 et le
pays 2, doit s'ajouter à l'offre domestique du pays 1, provoquant un déplacement de la courbe
O} en q + MI 2 dans la figure (1.1-l)b. Cette nouvel1e courbe a son origine au point 0 1
correspondant au prix d'équilibre intérieur du pays 2, OL2 .
p
p
W
°2
L1
T
T
T'
L
L
2
2
W
: A: , B',
1
,
,
1
1
1
1
,
,
,
,
,
,
o
q
0
qu qh
qe
q
a
b
Fig. 1.1-1: les effets d'une union douanière
L'analyse de VINER est d'autant plus simple qu'il suppose que le prix de l'offre de bien
par le reste du monde est constant et est, en l'absence des droits de douane, égal à Ow.
Plusieurs cas sont alors envisageables (ROBSON, 1984) :
1) On peut penser qu'avant l'union, les deux pays 1 et 2 lèvent des droits de douane
prohibitifs (droit prohibitif à l'exportation pour le pays 1 et droit prohibitif à l'importation pour
le pays 2). Les prix intérieurs seront respectivement O~ et OL2 · Après la formation de l'union,
ces pays lèvent un tarif au même taux (par exemple une moyenne des taux avant l'union) vis-à-
vis du reste du monde, tel que le prix intérieur dans les deux pays est établi à un niveau
31

commun, intermédiaire entre O~ et OLz, soit DT. DT n'est cependant pas un prix d'équilibre,
puisque l'excès d'offre du pays 2 est plus grand que l'excès de demande du pays 1. Le prix
décroît par conséquent au niveau DT', X'z X" = FH, c'est-à-dire que l'offre combinée
Z
q + M1,2 est égale à la demande DI .
L'examen des effets de l'union douanière amène à utiliser les concepts de surplus du
consommateur et du producteur. Dans le pays l, comme conséquence de la baisse du prix
intérieur de OL à DT', le surplus du consommateur augmente de la surface T' LjE1H alors que
I
le surplus du producteur diminue de la surface T L,EjF (les producteurs nationaux ont dû
réduire la production de Oqe à Oqu comme conséquence de la baisse du prix intérieur). Le
gain net est donné par la surface FEjH qui peut être divisée en deux parts:
1
- l'aire FEjF' représente l'effet de production, autrement dit la baisse des coûts due au
fait que la quantité quqe est importée à un coût plus faible que celui de la production
intérieure: c'est la part de production de l'effet de création d'échanges;
- l'aire F' E]H représente l'effet sur la consommation.
La somme des deux constitue l'effet en bien-être de la création de commerce de l'union
douanière.
Le prix intérieur du pays 2 augmente 2 de DL;, à DT', tel qu'il y a une diminution du
surplus du consommateur égale à l'aire LzT X'z Ez. Mais la hausse du surplus du producteur
(aire LzT' X" E
Z
z) est plus grande, de sorte que l'effet net de l'union est favorable au pays 2.
En considérant le reste du monde, la situation n'est pas altérée, puisque son commerce
avec les pays 1 et 2 est nul avant comme après l'union. De ce point de vue, il est aisé de
conclure que dans le cas examiné, la formation de l'union est de façon non équivoque
bénéfique.
2) Dans le second cas, seul le pays 2 lève un tarif prohibitif à l'exportation avant la
formation de l'union. Supposons alors que dans le pays l, le tarif avant l'union est égal à WT,
32

de sorte que la production intérieure est Oqh et les importations (venant du reste du monde)
W'W". La rente tarifaire, W'T est multiplié par W'W", soit l'aire W'ABW".
Supposons qu'une union douanière est maintenant formée entn:: les pays 1 et 2, et que
le taux de tarif commun vis-à-vis du reste du monde se situe entre les taux des deux pays avant
l'union. Le pays 1 importe maintenant FH de bien du pays 2 et produit Oqu de ce bien. Le
surplus du consommateur augmente de l'aire T'TW"H, le surplus du producteur diminue de
l'aire T'TW'F, les recettes publiques douanières disparaissent, c'est-à-dire diminuent de l'aire
globale W'ABW". Cette dernière aire peut être divisée en deux parties, puisque W'ABW" =
W'NSW" + NABS.
La balance entre les gains et les pertes est donc réduite graphiquement à la comparaison
entre les aires FW'N et SW"H d'un côté, l'aire NABS, de l'autre.
L'aire FW'N représente l'effet de production de la création de commerce, due au fait
que la quantité quqh = FN, au lieu d'être produite à l'intérieur du pays, est importée à coût plus
faible (celui du pays 2). L'aire SW"H représente l'effet de consommation de la création de
commerce. L'aire NABS, au contraire représente l'effet de détournement de commerce du côté
de la production, dû au fait que la quantité des importations (W'W" = AB,) qui avant l'union
venaient du reste du monde, proviennent à présent du pays 2, avec un coût additionnel égal à la
différence entre OT' (le prix d'offre, c'est-à-dire le coût marginal, du bien dans le pays 2) et OW
( le prix d'offre du reste du monde). Cette différence est T'W = NA. Le diagramme montre que
dans le cas que nous avons examiné, la balance entre les gains et les pertes du pays 1 est
défavorable. Mais le contraire est tout à fait possible dans le cas où l'effet de création de
commerce est plus fort.
En considérant le pays 2, les effets sont les mêmes que dans le cas (a), de sorte que ce
pays gagne à s'intégrer. Et la somme algébrique FW'N + SW"H - NABS + X'2 X"2 E 2, nous
amène à constater que l'union est en général, soit bénéfique, soit préjudiciable. Il convient de
signaler que nous n'avons pas inclus, dans ces calculs, les effets sur le reste du monde (Viner
ayant supposé que la courbe d'offre du reste du monde est parfaitement élastique).
33

En réalité, les mérites de l'intégration sont évalués par rapport à la création et au
détournement de commerce. Ainsi, une union douanière créatrice nette de commerce est
considérée comme bénéfique. Elle est préjudiciable aux partenaires dans le cas contraire.
L'analyse de VINER révèle bien qu'une Union Douanière peut améliorer le bien-être
des populations. Cette approche est complétée par KEMP et WAN (1976) qui démontrent
que, sous certaines conditions, une Union Douanière peut toujours être bénéfique.
A2 - Présentation de l'analyse de KEMP et WAN.
Pour prouver que l'Union Douanière améliore le bien-être, KEMP et WAN (1976) se
, réfèrent à deux pays qui, sous certaines conditions, peuvent adopter un tarif extérieur commun
qui améliore leur bien-être sans pour autant entraver celui du reste du monde. L'idée principale
repose sur le fait que ces pays peuvent choisir des tarifs communs de manière telle que les
termes de l'échange extérieur, c'est-à-dire que les quantités échangées avec le reste du monde,
restent inchangées alors que l'échange intérieur dans la zone est réaménagé afin de maximiser
les gains de l'union.
Les conclusions de ces deux auteurs ont eu des conséquences importantes sur l'analyse
: des Unions Douanières (UD) en présence des restrictions quantitatives (application des
quotas), même si ces implications n'ont pas été suffisamment exploitées dans la littérature.
Nous en ferons ici une présentation assez brève.
Dans la figure (1.1-2), nous prenons un modèle à 2 biens. KEMP et WAN supposent
i alors que le pays 1 restreint ses importations totales au niveau GH en adoptant une politique de
quota global. En supposant que ces quotas de licence sont vendus de manière concurrentielle
aux résidents nationaux, la quantité GL est importée du pays 2 et LH du pays 3 (reste du
monde).
En Union Douanière, le pays 3 est sujet aux quotas à son niveau initial d'importations
(LH) tandis que les importations en provenance du pays 2 sont exemptées de toutes
restrictions. Les importations totales peuvent augmenter. En soustrayant la quantité LH
34

horizontalement le long de la courbe M~, KEMP et WAN obtiennent la courbe M~' (courbe
de demande résiduelle du pays 2). La quantité SF des importations du pays 1 provient donc du
pays 2 et la quantité FN (== LH), du pays 3.
Prix relatif
\\
\\
\\
\\
\\
\\
\\
~-""""T-:--=-'-===:'-_- 1
\\
M
~--
A
1
- - - - - - -

1
M
1
A
1
\\
'------......r....-----------7
Q\\é importée
Fig. (1.1-2): Une UD avec quotas
- Gain du pays 1 : aire HUN-STRP
- Gain du pays 2 : aire SFRP
En fait, les auteurs ont constaté un effet positif (BUN) sur le pays 1 dû à la réduction
du gap entre les prix intérieurs et les prix à la frontière et un effet négatif (STRP 3 ) dû à la
détérioration des termes de l'échange avec le pays 2. L'effet net sur le pays 1 est en principe
ambigu et le pays 2 gagne nécessairement dans ce cas. Ce gain, représenté par la surface
SFRP 3 , est plus important que la perte du pays 1. A cet égard, le pays 2 peut compenser les
pertes du pays 1 dans 1'00. Dans l'esprit de KEMP et WAN, 1'00 permet d'encourager les
échanges entre les partenaires sans réduire les échanges avec le reste du monde. L'OO
améliore donc tout aussi bien le bien-être mondial.
Cette conclusion repose sur le fait que le pays 2 doit compenser la perte enregistrée par
le pays 1. Nous verrons par la suite que cette condition n'est pas toujours remplie dans les pays
en développement. Mais auparavant, revenons sur la contribution de COOPER et MASSEL
(1965a, 1965b) et de BALDWIN et VENABLES (1995).
35

B - La prise en compte d'autres effets dans l'analyse du bien-être.
La théorie classique des uruons douanières a été critiquée par des auteurs comme
COOPER et MASSELL (l965a) qui considèrent que l'effet de bien-être engendré par l'union
douanière est décomposé en deux aspects. En effet, pour eux, les aspects traditionnels qui sont
les effets de création et de détournement correspondent en fait à l'aspect réduction des droits
de douane d'une part et le détournement à proprement dit des échanges.
En réalité, dans l'analyse traditionnelle des unions douanières, l'aspect « réduction des
tarifs» est la seule source de gains pour les consommateurs. Cet aspect prend en compte à la
fois la création d'échange et l'effet de consommation. Mais l'interrogation de COOPER et
MASSELL repose sur l'utilisation d'une politique appropriée de protection non préférentielle
au sein de l'union douanière. En effet, pour eux, une telle politique conduit nécessairement à
un détournement de commerce et elle est, par conséquent, mauvaise.
Du point de vue du libre-échange, l'analyse de VINER, selon COOPER et MASSELL,
n'explique pas pourquoi une union douanière est préférée à une politique tarifaire non
préférentielle. Pour ces auteurs, la littérature économique n'insiste pas beaucoup sur le moyen
le plus efficace de protection. Est-ce le système tarifaire préférentiel ou non préférentiel? Pour
1 eux, les membres d'une union douanière doivent pouvoir intervenir sur le marché du partenaire
en se donnant les moyens de protéger leur marché national sans faire plus de sacrifices que par
la protection non préférentielle. C'est en tentant d'approfondir cette analyse qu'ils conçoivent
une théorie différente des unions douanières. Nous reprenons leur raisonnement dans le
!
! développement qui suit
1
Bl- L'analyse de COOPER et MASSELL.
COOPER et MASSELL (l965b) estiment en effet que les pays non industrialisés
. peuvent trouver dans le regroupement économique un moyen efficace de produire des biens
industriels. Si l'industrialisation est un objectif recherché de politique de développement, son
coût dans les pays en développement, dont les marchés sont très étroits, peut être réduit par la
36

constitution des unions douanières qui favorisent les échanges et les écononùes d'échelle à
l'intérieur de l'union tout en protégeant les nouvelles industries contre les importations des
biens manufacturés en provenance des pays développés.
Bl.l - La préférence pour l'industrie.
L'analyse de COOPER et MASSELL est basée sur l'hypothèse qu'il y a une préférence
sociale pour un type d'activité écononùque «l'industrie ». Cette théorie qui s'appuie sur
l'expérience des pays en développement suppose que les décideurs dans ces pays acceptent de
réduire leur revenu national pour avoir une production industrielle accrue l . De ce point de vue,
ils considèrent que la production industrielle doit être introduite comme une nouvelle
dimension dans la théorie des unions douanières. Aussi pour comparer les possibilités
alternatives de production, il faut prendre en compte non seulement le revenu national mais
encore le niveau de la production industrielle associée à chaque possibilité.
Fig. (1.1-3) - Demande pour l'industri
Cmi
D
0'
D'
o
Prad. ind.
Ceci est caractérisé, dans le graphique de la figure (1.1-3) par la courbe de demande
des décideurs économiques, DD
qui exprime le prix que les décideurs sont prêts à payer pour
JJ
toute augmentation de la production industrielle. COOPER et MAS SELL supposent que
lorsque ce prix est plus élevé, les décideurs choisissent moins de protection pour leurs
industries. Cela signifie qu'ils sont indifférents au choix entre deux industries dissemblables
37

Autrement dit, ils satisfont leur demande de production industrielle en sélectionnant les
, industries moins coûteuses.
L'offre est représentée sur la figure (1.1-3) par la courbe en escalier 00 '. COOPER et
MASSELL supposent une situation de
plein emploi,
des coûts constants,
des prix
concurrentiels et des termes de l'échange constants l . En considérant au départ que seul le bien
agricole exporté (exemple le cacao) est produit et que la production du cacao est plus
profitable dans le pays considéré que toute autre activité économique.
Il est moins cher d'importer tous les autres biens en échange des exportations du cacao
que de les produire sur place. Le coût moyen de l'industrie locale, selon eux, est ainsi défini
comme la différence entre le coût moyen de production d'un bien industriel et le prix d'un bien
semblable importé. Ce coût mesure la perte du revenu national à la place de la production de
chaque unité du bien industriel.
L'obtention de la courbe d'offre se fait par le classement des industries par ordre
croissant selon leurs coûts. Puisque toute industrie est par hypothèse non avantageuse et que
seul le cacao est exporté, la demande nationale place la contrainte au niveau de production de
chaque industrie. Comme résultat de ceci, une expansion de la production industrielle conduit à
un niveau supérieur sur la courbe, chaque niveau correspondant à une industrie à coût plus
; élevé.
Le niveau optimal de la production industrielle, comme l'indique l'intersection des deux
courbes de demande et d'offre, est av sur la figure (1.1-3). Le droit de douane correspondant
à ce niveau de production industrielle est efficace, c'est-à-dire un ensemble de taux tarifaires
qui protègent chaque industrie à gauche du point V pour permettre la production locale dans
cette industrie et des taux non protecteurs à droite du point V.
Avec des coûts constants, il n'y a qu'une alternative, soit les industries ont l'exclusivité
1
de la production des biens qu'elles offrent dans tout le marché domestique soit elles ne
l A travers cette analyse. on distingue le choix social du choix des décideurs économiques. En fait. il faut noter que la
différence se situe entre le choix de l'industrialisation et toute autre activité économique.
1 Ces hypothèses sont présentes dans l 'espl1't de la théorie des unions douanières existant
38

produisent pas du tout. Ainsi, une industrie ne peut produire que si (et seulement si) le coût de
l'industrie est plus faible que le taux protecteur. VP représente donc le coût marginal de
protection de l'économie, autrement dit, le coût de protection de l'industrie marginale. Le coût
total de protection est représenté par l'aire OOpv.
Les effets sur le bien-être de cette analyse apparaissent sur la figure (1.1-4). L'arbitrage
entre le revenu national et la production industrielle est décrit par la courbe MN. Elle indique le
montant du revenu national auquel il faut renoncer pour atteindre un niveau spécifique de
production industrielle compte tenu de la contrainte que toute la production industrielle doit
être absorbée par la population nationale. COOPER et MASSELL appellent cette courbe,
« lieu de rencontre» entre la production et la consommation.
Fig. (1.1-4): Préférence pour l'industrie
Rev. nat.
l'
o
v
Prod. indust.
Déplacer la courbe MN vers le bas correspond à élever la hiérarchie des industries et
accroître le coût marginal de protection. Au point N, l'économie ne peut produire que des
biens industriels, destinés à être consommés sur place. Le revenu national est alors égal à la
production industrielle.
La courbe d'indifférence 11' dans la figure (1.1-4) exprime les préférences des
gouvernements nationaux pour la production industrielle.
Si les gouvernements sont
indifférents entre produire du cacao et les biens industriels, la courbe d'indifférence serait
horizontale, avec un niveau optimal au point M. Avec une pente négative comme dans la figure
39

(1.1-4) le niveau optimal est situé au point P et inclut un mélange de production de biens
industriels et de cacao (OE - OV).
En réalité, le vrai problème se situe au niveau de la prise en compte des désirs des pays
partenaires. C'est-à-dire lorsqu'il faut partager les gains de l'union douanière. Ce qui revient
au problème de la spécialisation ou de la localisation des industries de l'union.
Bl-2 - Le problème de la spécialisation.
COOPER et MASSELL considèrent l'existence de deux pays, le Nord et le Sud,
chacun ayant un plan de développement qui consiste à lister les industries qui doivent être
développées pendant la durée du plan. Ils supposent que la demande nationale est la même
pour chaque bien industriel et égale dans chaque pays.
Si les deux pays doivent créer une union douanière, cette union ne permet pas une libre
circulation des ressources entre les membres contrairement au marché commun. Les deux pays
ont des structures économiques similaires, ils doivent être capables de produire un niveau
donné de biens industriels à des coûts inférieurs en terme de perte de revenu.
Le nIveau de production industrielle est fortement déterminé par le tarif extérieur
commun qui existe dans l'union douanière. La question centrale formulée par COOPER et
MASSELL est la suivante: existe-t-il un droit de douane tel que les deux pays soient mieux
situés par rapport aux politiques optimales individuelles de protection non préférentielle?
Les gams dus à la spécialisation en supposant l'existence d'un tarif efficace, sont
visibles dans la figure (LI-Sa). Les courbes On et Os représentent respectivement les courbes
d'offre pour le Nord et le Sud avant la formation de l'union. Avec l'union, une nouvelle
. hiérarchie est instituée pour les industries; et la courbe correspondante à cette hiérarchie est la
courbe Ou. Cette nouvelle courbe d'offre est assez importante car à chacun de ses points
1
correspond un tarif efficace. En effet, chaque bien est produit, au sein de l'union, dans le pays
dont les coûts de production sont les plus faibles. Autrement dit, à gauche de chaque point de
: la courbe combinée se trouvent les industries protégées, et à droite celles qui ne le sont pas.
40

fig. (1.1-5): les effets de spécialisaüon
Cmi
N~,,~I0~
Os
""I"IIP'
_
-polos _
On
1-
lObes.. -
(a)
_chapeaux _
"p.lp.
_ .\\lestes... _
_ _>œs.tes ___
Ou
lcbaussuœs_ _cbaussures _
o
L
M
N
p
Production industrielle
Cmi
N~,,~lo~
Os
r"I"lIo~
-polos _
-
On
(b)
"ooto~
i-Jobes _
-
I-chapeaux _
chapeaux. _
_cbapeaux___
Ou
-ehauss.ur.eL _cbaussures _
o
L
M
N
p
Production industrielle
Cmi
rr"""to~
Os
",ko~
-
-polos _
rh~M~"V
On
(C)
1- lObes- -
_chapeaux _
,-chaussures-
o
L
M
N
p
Production industrielle
Mais, selon COOPER et MASSELL, le tarif commun dépend des préférences des
décideurs dans tous les pays membres. S'ils sont indifférents à la manière dont les industries
sont implantées dans les pays, ils choisissent un tarif efficace. Ainsi, dans l'union, les décideurs
obtiendront satisfaction en regroupant les marchés. Il y aura donc un effet de revenu; les pays
produiront ensemble le même bien industriel,. ils se partageront ainsi les coûts. Cet effet de
revenu conduira à un accroissement tant du revenu national que de la production industrielle.
Il y aura aussi un effet de substitution du à la diminution du coût marginal de
protection. Ceci entraîne un accroissement de la production industrielle. La combinaison de ces
41

deux effets entraîne donc un accroissement de la production industrielle; et le revenu national
peut augmenter si l'effet de revenu est plus fort que l'effet de substitution.
Prenons un exemple pour mieux suivre le raisonnement de COOPER et MASSELL. En
effet, dans la figure (l.l-Sa), chaque pays planifie initialement une production industrielle égale
à OM, de sorte que la production industrielle planifiée des deux pays combinés est égale à OP.
Le Nord planifie de produire les chaussures et les chapeaux, tandis que le Sud se propose de
produire les vestes et les culottes. Avec l'union douanière, la même production industrielle
combinée OP est obtenue à un coût plus faible en produisant deux fois plus de chaussures et de
vestes et en abandonnant la production plus chère de chapeaux et de culottes.
li est en fait plus réaliste d'abandonner l' hypothèse selon laquelle les décideurs sont
indifférents au partage des gains entre les pays et supposer plutôt que les décideurs dans
chaque pays sont d'abord intéressés par les gains de chaque pays. Le niveau de bien-être social
de chaque pays est en effet déterminé par le niveau de la production industriel1e et du revenu
de ce pays, ce qui est totalement spécifié par un tarif extérieur commun, avec des règles de
1
partage des gains entre les pays.
Si le tarif et les règles de partage des gains sont choisis d'un commun accord et en
collaboration par les décideurs des deux pays, et s'ils agissent rationnellement, ils pourront
choisir un tarif et des règles qui conduisent à une situation de Paréto optimale. C'est-à-dire à
des niveaux de production industrielle et de revenu national tels qu'aucun bien-être social d'un
pays ne peut augmenter sans diminuer le bien-être social du pays partenaire.
Mais la réalisation de cette situation idéale ne reste-t-elle pas une vue de l'esprit,
d'autant plus que COOPER et MASSELL eux-mêmes, avaient déjà indiqué que l'existence
d'un tarif efficace est déjà non Pareto optimal?
Nous pouvons voir cela dans la figure (l.l-Sb) qui est semblable à la figure (l.l-Sa)
sauf que l'industrie de chapeaux du Nord est maintenant moins chère que l'industrie de vestes
du Sud. Aussi, si la production industrielle combinée doit être égale à OP, un tarif efficace
: protégera les industries de chaussures et de chapeaux, toutes deux installées au Nord. Le Nord
42

aura dans ces conditions, deux fois plus d'industries avec l'union que sans l'union mais le Sud
n'en aura point.
En fait le problème, disent COOPER et MASSELL (1965b), doit pouvoir trouver sa
solution si les membres coopèrent véritablement. Si chacun intègre dans sa politique
économique les préférences légitimes de son partenaire. C'est-à-dire qu'on doit pouvoir
trouver des combinaisons de politiques comparables qui garantissent un gain potentiel à tous
les membres. Passons maintenant à l'analyse de BALDWIN et VENABLES (1995).
B2- L'approche duale de BALD WIN et VENABLES
L'approche duale de BALDWIN et VENABLES a le mérite de décomposer, de façon
élégante, les effets de la libéralisation commerciale sur le bien-être. Elle offre ainsi une
alternative à la notion de création et de détournement de commerce présentée précédemment
et incorpore les effets de bien-être à la fois dans des situations de concurrence parfaite et
imparfaite. Cette approche se présente sous la forme suivante.
Soit une économie à n biens (n 2 2) et deux facteurs de production,
le capital, K et le travail, L.
Le vecteur des productions est noté X = (XI>"" X n ), le vecteur des quantités
consommées C = (CI"'" Cn) et le vecteur des importations nettes M =(Ml"'" Mn)' avec
Mi =Ci - X/(i = I, ... ,n)
Le prix national du bien i est noté pi, Pi = pt + li li représente les taxes liées au
commerce du bien i.
Selon le type de barrière au commerce, seule une fraction ai de li (0 ~ ai ~ 1) échoit
aux agents nationaux sous forme de rente, d'autant que les accords régionaux se traduisent
souvent par une élimination des tarifs entre les pays partenaires, dans ce cas, a = 0,.
43

P
1
.
...c: •
CM
Ci (w, X)
our es secteurs en concurrence lmpallalte, on notera
. ==
..
1
le coût moyen
X . '
.
1
1
de production du bien i, et Tt =(Pi - CM; )Xi, les profits. On se limitera au cas symétrique où
les secteurs
sont composés de firmes
identiques.
La fonction
d'utilité indirecte du
consommateur représentatif est alors:
U(pw + l, n, D)
(1.1-1)
n est le vecteur du nombre de variétés de produits disponibles dans chaque industrie et D,
un scalaire représentant la dépense totale et égal au revenu national.
Si le revenu total des facteurs s'écrit:
wL -\\- rK,
avec L,l'offre de travail, et K, l'offre de capital, et leur prix respectif, w et r, on peut
mettre sous forme vectorielle l'égalité entre dépense totale et revenu national:
D = wL + rK + X[(pw + 1) - CM] + alM
(1.1-2)
L'avant-dernier terme de cette équation représente la somme des profits dans
l'économie, et le dernier, la redistribution des revenus.
1
L'analyse en terme de bien-être se fait au moyen de la différenciation totale des
1
équations (1.1-1) et (1.1-2). L'expression finale est simplifiée par certaines propriétés:
1°) l'identité de Roy qui conduit à poser:
oU / éPi = -c = - X - M .
ôU/ôD
1
1
l '
2°) le Lemme de SHEPHARD qui permet, à partir du coût total de production du bien i
1 XiCM"
d'écrire:
1
1
44

et
6(Xi CMi ) =K
or
"
La prise en compte de ces relations permet d'apprécier la variation de bien-être :
dU
=
aU/aD
L)a,tid\\1 i -Midpiw -Mid(ti -aJ;)+(PiW +t -CM;)dJ( -Xi ac;:'i dXJ
j
,
aU/m
+
dn
(1.1-3)
au/aD
Les trois premiers termes de cette expression représentent les différents effets de bien-
être qui apparaissent dans les modèles de concurrence parfaite:
- a;f;elMi est l'effet volume de commerce. C'est le produit entre les variations du
volume d'échanges, dMi , et l'importance des barrières commerciales aJi ;
- - Midpiw , représente l'effet" termes de l'échange".
- - Mid(ti - a;fi)' représente l'effet" coût commercial" qui mesure la variation des
coûts générée par les modifications de certains éléments des barrières commerciales non
rentables aux agents nationaux
Les trois derniers effets de l'expression (1. 1-3) représentent les effets de bien-être en
situation de concurrence imparfaite.
Ainsi:
45

- (p,W + l; - CM)d.X est l'effet de production qui augmente lorsqu'il y a variation de la
j
production dans les industries où le prix diffère du coût moyen;
1
- - X, (éCM /oX )d.X,
représente l'effet "d'échelle", qui mesure la valeur de la
j
j
variation des coûts moyens induite par les variations de l'échelle de l'entreprise;
- enfin le dernier terme mesure les effets de variété qui s'accroissent quand le nombre
des variétés de biens des consommateurs change.
L'équation (1.1-3) permet donc d'analyser la variation du bien-être aussi bien en
situation de concurrence parfaite qu'en situation de concurrence imparfaite.
B2.1 - Concurrence parfaite
Viner a montré que l'impact de la formation des Unions douanières sur le bien-être est
ambigu. Plusieurs études ultérieures ont développé cette théorie. (LIPSEY, 1960, KRAUSS,
1972, POrviFRET, 1986 et KOWALCZYK, 1992). Nous nous limiterons à rappeler les
différents effets de l'intégration sur le bien-être des' populations en situation de concurrence
parfaite.
1
1
En concurrence parfaite, les trois derniers termes de l'équation (1.1-3) sont nuls. Ce qui
. permet de retrouver l'expression traditionnelle des effets de bien-être d'une libéralisation
commerciale en tenant compte de la distinction entre barrières au commerce qui créent des
rentes (ex. = 1) et celles qui créent des coûts (ex. = 0).
1
Dans le premier cas (ex. = 1), on réalise que les importations augmentent lorsque le prix
1
national excède le prix mondial (pj - pjW)dlv1, = l,dlv1i • La condition suffisante pour un gain en
bien-être est que le tarif moyen varie dans le pays dont le volume d'échange s'accroît.
Dans le second cas (ex. = 0), la libéralisation commerciale crée des gains dans la mesure
!où elle réduit les coûts du commerce. Ce résultat peut être associé à des étapes d'intégration
;régionale plus poussée comme le Marché unique.
46

Ce résultat reste cependant ambigu car, même si tous les éléments de t sont positifs,
certains éléments de dM seront négatifs. Et dans le cas où t =t . > 0 Vi J.
une Union
1
]
'
"
douanière n'augmentera le bien-être que si le volume agrégé des imp011ations augmente. Pour
un petit pays, l'union est optimale si t = o. Dans ce cas, il n'y a aucun effet d'amélioration des
termes de l'échange provenant de la réduction tarifaire des partenaires de l'accord régional.
Pour lever cette ambiguïté il suffit d'identifier les conditions suffisantes de réalisation
des gains. Il suffit donc simplement de supposer une absence de barrières à l'exportation et une
égalité de tous les éléments de t. Dans ce cas, un Etat gagnera à s'intégrer si et seulement si
cette intégration augmente son volume d'importations.
On peut également supposer que, lorsque le niveau initial des tarifs sur le commerce
intra-zone est proche de zéro, un accroissement des rentes tarifaires sur le commerce extérieur
est une condition suffisante de bien-être.
,
Relevons enfin qu'un petit pays peut tout à fait préférer une libéralisation unilatérale
des échanges à l'appartenance à une union douanière. En effet, puisqu'avec des prix constants
à la frontière, la variation de bien-être se réduit à tdM;, les barrières commerciales n'ont donc
aucun effet sur le bien-être national, et aucun avantage ne peut provenir des restrictions
tarifaires des pays partenaires.
Cependant, ces résultats ne sont valables que pour un petit pays. Plus généralement, la
possibilité de modification des prix aux frontières signifie que la libéralisation commerciale
unilatérale et/ou le fait d'être membre d'une zone intégrée n'est pas forcément liée aux
conséquences qui en découlent sur le bien-être agrégé. Pour les grands pays, les variations de
volume commercial entraînent des variations de prix mondiaux qui jouent sur le bien-être.
B2.2 - Concurrence imparfaite
La littérature a été très riche ces dernières années sur les unions douanières dans un
environnement de concurrence imparfaite. Deux raisons expliquent cet état de fait. La première
47

est que l'intégration a eu lieu en Europe avec des pays dont les structures économiques sont
voisines et dont le volume de commerce intra-industriel est important. La seconde raison est
que la structure du marché influence certainement les gains de l'intégration.
Envisageons la manière dont la formation d'une union douanière affecte une industrie
imparfaitement concurrentielle avec des entreprises localisées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur
de l'Union. Il semble que les effets de bien-être des Unions douanières s'accroissent
sensiblement
lorsque
les
industries
sont
imparfaitement
plutôt
que
parfaitement
concurrentielles. Ces effets sont représentés par les trois derniers termes de l'équation (1.1-3).
En effet, le terme (pjW + f j - CMj)(1)( représente l'effet pro-compétitif du commerce en
situation de pouvoir de monopole;
le terme, - Xi éCM; (1)( montre que l'output devrait être augmenté (pour un nombre de
ôXj
firmes constant) tant qu'il y a des rendements d'échelle non réalisés (CMi > Cmi).
Cet effet plaide souvent en faveur de la protection; enfin le dernier terme, 8U / in dn,
ÔU/ÔJ)
donne les effets d'une augmentation de bien-être provenant d'une augmentation de la variété
des produits à la suite d'une libéralisation commerciale.
Le mécanisme par lequel l'intégration régionale agit sur les prix et les coûts est mieux
expliqué par l'effet pro-compétitif. En effet, l'intégration régionale conduit, de façon
informelle, à une érosion des positions dominantes des entreprises dans leurs marchés
1 nationaux.
Les pertes de profit qui découlent des baisses des ventes sur le plan national se
. comparent aux profits issus des hausses des ventes à l'exportation. En général, l'effet net est
1 ambigu par rapport à la taille de l'entreprise.
En fait, lors de l'intégration régionale, des économies semblables tendent à libéraliser
! leur commerce. Ceci réduit substantiellement la dispersion des parts de marché puisque les
entreprises gagnent par l'exportation et perdent par la baisse des ventes sur les marchés
nationaux. La libéralisation réduit donc les ventes sur le marché national et accroît les ventes
48

sur le marché d'exportations. Ce qui signifie, qu'à l'équilibre, la taille de l'entreprise doit
augmenter.
En réalité, les effets exacts de la libéralisation sont difficiles à évaluer. BALDWIN et
VENABLES (1995), ont montré que les effets pro compétitifs sont substantiels, en
l'occurrence l'accroissement significatif de l' éèhelle des entreprises.
L'existence des effets pro compétitifs suppose deux effets additionnels sur le bien-être:
les effets volume et les effets coût, autrement dit les effets des termes de l'échange. Si les coûts
marginaux sont constants, modifier les parts de marché contribuera à augmenter les prix des
producteurs agissant sur les importations intra-zones. De même, ils diminueront les prix des
importations en provenance du reste du monde. Ainsi, si les coûts marginaux dépendent de la
taille de l'entreprise, ces effets seront facilement absorbés par les coûts induits et la variation
des prix.
Les effets pro compétitifs mettent donc en lumière l'expansion des entreprises dans les
pays de l'union et par conséquent réduisent les coûts moyens de production. Il est possible de
spécifier les jeux d'oligopole qui saisissent plus ou moins les effets de l'intégration. Il reste que
la préoccupation est le choix d'une politique susceptible de conduire à équilibre plus intégré.
Pour répondre à cette préoccupation, il faut recourir à d'autres concepts, dans une optique
beaucoup plus large afin de prendre en compte le phénomène des investissements privés. Ces
investissements privés sont très sensibles aux politiques des gouvernements impliqués dans le
processus d'intégration.
C - L'investissement dans l'analyse du bien-être.
Bien souvent, les Unions Douanières sont le fait des pays qui subventionnent plutôt les
exportations des biens manufacturiers que celles plus traditionnelles de matières premières. En
réalité, la réalisation des un fait partie d'une stratégie de développement orienté vers les
exportations. La tendance actuelle est de tirer parti de l'exemple des pays qui ont industrialisé,
avec succès, leurs économies grâce à la promotion de ce type d'exportations. Il s'agit
49

notamment de Taiwan, de La Corée du Sud, de Singapour et de Hong Kong. A cet effet, nous
présentons quelques modèles.
Cl - Le modèle de HAMADA.
HAMADA (1974) considère un petit pays avec deux biens. Le bien 1 est un bien
exportable avec un prix normalisé à l'unité. Le bien 2 est importable avec un prix mondial p;
et un prix intérieur P2 (augmenté par rapport à p; d'un tarif ad valorem t).
"
Si w et r sont des rendements respectifs du travail et du capital et si c;(w, r) est la
fonction de coût unitaire de l'industrie i, les conditions de profit nul pour l'équilibre de
l'industrie s'écrivent de la façon suivante:
c/(w, r) = 1
(1.1-4)
et
c (w,r) = p; (1 + t)
(1.1-5)
2
Hamada suppose que lorsqu'une Union Douanière est établie, la protection du bien 2
est appliquée au sein de l'Union tel que le prix du bien 2 dans l'union est égal au prix mondial
p~ . Si le bien 2 est produit au sein de l'union avec les mêmes technologies et le même salaire w
que le reste du monde, la condition d'équilibre de l'industrie dans l'union est
(1.1-6)
r est le rendement du capital au sein de l'union.
k
Selon HAMADA, l'industrie nationale peut ne pas être installée au sein de l'union de
sorte que l'investissement étranger soit indispensable au succès de l'union. Car les relations
(1.1-5) et I( 1.1-6) impliquent que r < r autrement dit, une entreprise installée dans l'union doit
k
accepter un rendement plus faible que celui de l'industrie nationale isolée.
50

La deuxième proposition de HAMADA est qu'un accroissement exogène 'de
l'investissement étranger au sein de l'union peut diminuer le bien-être national si le secteur du
bien importable est relativement intensif en capital. Ce qui signifie qu'un accroissement du
capital étranger dans 1'00 attire du travail. Autrement dit, si les biens importables sont
relativement intensifs en capital, leur production augmentera, aggravant ainsi la distorsion due
au tarif et diminuant le bien-être national.
Cette présentation a été sévèrement critiquée par HAMILTON et SVENSON (1982).
Ils ont estimé que les deux propositions sur lesquelles se basaient les résultats de HAMADA
dépendaient étroitement de l' hypothèse implicite que le bien 1 n'est pas produit au sein de
l'Union Douanière. Or a priori, il n'y a rien dans les propos de HAMADA qui exclut la
production du bien 1 dans 1'00 puisque les entreprises dans l'industrie 1 sont indifférentes
entre produire dans l'union et produire sur le plan national. Si le bien 1 est produit dans l'lID,
les propositions de HAMADA risquent de ne pas tenir.
La critique faite à la contribution de HAMADA par MIYAGIWA (1986) est d'une
autre nature. En effet, selon MIYAGIWA, certains éléments sont omis dans la présentation de
l'union douanière par HAMADA. Il semble en effet que l'établissement d'une 00 y diminue le
rendement du capital. La raison pour laquelle le pays qui veut attirer l'investissement étranger
adopte des politiques qui donnent cet effet n'est pas clairement établie. De plus, dans ce cas,
l'investissement étranger sur le plan national (où le rendement du capital est plus fort) semble
indésirable, alors que l'on sait que dans une union douanière, il existe plusieurs facteurs qui la
rendent plus attractive pour les investisseurs étrangers que sur le plan national.
Etant donné que la structure globale du modèle de HAMADA repose sur le modèle à
deux biens et deux pays de HECKSHER-OHLIN, ces résultats ne sont donc pas surprenants.
Avec un seul prix relatif du bien, on peut très bien comprendre qu'une union douanière
favorise plutôt une élimination de la protection tarifaire sur les biens importables. De ce point
de vue, le modèle de HAMADA est plus applicable aux zones hors taxes des aéroports qu'à
une véritable union douanière.
Comme nous pouvons le comprendre, une véritable union douanière nécessaire dans les
pays en développement fournit
une grande variété d'incitations pour encourager les
51

producteurs à investir dans des industries orientées vers des exportations. En fait, une union
douanière doit être introduite comme un secteur additionnel. C'est cette présentation
alternative que nous propose MIYAGIWA.
C2 - Le modèle alternatif
Le modèle présenté ci-dessous est en fait un modèle hybride entre la présentation de
RICARDO-VINER et celle de HECKSHER-OHLIN. Une telle structure a été d'abord
employée par KRUEGER (1977) et a été très utile pour l'examen des moyens commerciaux
des pays en développement. Selon KRUEGER, en effet, il existe deux secteurs dans un petit
pays : le secteur agricole et le secteur manufacturier. L'agriculture représente le secteur 1. Il
produit le bien primaire (nourriture en l' occurrence) avec du travail et de la terre. Le travail est
mobile entre les secteurs mais la terre est spécifique à l'agriculture. La nourriture est exportée
au prix international normalisé à l'unité.
Quant au secteur manufacturier, il produit des biens avec du travail et du capital où le
dernier facteur est spécifique. Ces deux secteurs constituent le modèle standard de RICARDO-
VINER. La nouvelle structure est que, à l'intérieur du secteur 2, une variété de biens peut être
produite en utilisant différentes proportions des facteurs. On a deux sous-secteurs appelés
industries dans le secteur 2. Chaque industrie emploie du travail et du capital homogènes. De
ce point de vue, le secteur manufacturier constitue le monde en miniature de HECKSHER-
OHLIN.
MIYAGIWA se sert de cette présentation et pose que le prix mondial du bien i est Pi>.
Il suppose aussi que le secteur 2 n'est constitué que d'une industrie, l'industrie 2, qui produit
1
1 un bien concurrencé par les importations, le bien 2, sous une protection tarifaire. Le salaire WO
et les rendements r~ et r~ respectifs de la terre et du capital sont déterminés de la manière
dont l'avaient fait RICARDO et VINER. MIYAGIWA suppose donc qu'à ces prix de facteurs,
aucune autre industrie ne peut s'installer même avec des aides publiques, c'est-à-dire que pour
toute autre industrie i (;r 1, 2) confrontée au prix mondial pj> l'inégalité suivante tient:
1
>
0
0)
Pi <Cj(W ,r
(1.1-7)
K
.
52

MIYAGIWA suppose également qu'un Etat désireux de diversifier son secteur
manufacturier peut
utiliser l'union douanière.
C'est notamment le cas des pays en
développement. Ainsi, en supposant que la nouvelle industrie sélectionnée pour l'union
douanière est l'industrie 3, (une industrie orientée vers l'exportation et soutenue par l'Etat),
l'industrie 3 s'installe au taux de subvention s', avec :
(1.1-8)
Tout taux de subvention s supérieur à s' conduit à la diversification du secteur 2, c'est-
à-dire pour s > s', 1'00 est établie. s est donc le taux effectif de subvention.
Dans ce modèle formel du pays avec une union douanière, les équations suivantes
tiennent compte des prix des facteurs et des prix des biens ainsi que des taux tarifaires et de
subvention:
(1.1-9)
(1.1-10)
(1.1-11)
Etant donné ces prix de facteurs, les inputs unitaires nécessaires à chaque industrie i
sont donnés par les relations de SHEPHARD-SAMUELSON. Ainsi dans l'industrie i(= 1, 2,
3), le travail requis est Ci'" = êt)i3w, le capital requis dans l'industrie i( = 2, 3) est
c
=êt)â et la terre nécessaire pour l'industrie 1 est c =êtj)à
ir
K
1r
r .
Si n est la dotation en travail du pays et dT et dK , respectivement des dotations en terre
et en capital, alors les productions x, des trois industries (i = l, 2, 3) sont déterminées
récursivement par les conditions d'équilibre du marché des facteurs :
(1.1-12)
53

(1.1-13)
(1.1-14)
En absence d'union, le modèle est réduit au cas standard de RICARDO-VINER qui se
limite aux relations (1.1-10), (1.1-11), (1.1-12), (1. 1-13) et (1.1-14) sans les termes contenant
X3 dans les deux dernières équations.
C3- Le cas d'une nouvelle industrie
Nous examinons maintenant l'effet d'une intégration régionale sur la distribution des
revenus et le bien-être national. L'effet de distribution de revenu est assez facile à établir, selon
MIYAGIWA, en supposant que l'Etat applique un taux effectif de subvention et établit une
union douanière. Dans un premier temps, il considère qu'il n'y a pas d'attrait d'investissement
étranger par l'union. L'union douanière doit donc compter avec les industries existantes (leur
travail et leur capital).
En fait, si l'industrie 3 est relativement capital intensif par rapport à l'industrie 2,
l'institution de l'union douanière requiert relativement plus de capital que de travail, alors que
l'industrie 2 a plus besoin de travail que de capital. Afin de restaurer l'équilibre du marché des
facteurs, le rendement du capital doit accroître et le salaire doit diminuer.
Cette proposition est assez surprenante mais a une implication importante. En effet, elle
montre que si l'attrait des capitaux étrangers par l'augmentation des rendements domestiques
du capital est le premier objectif de l'union douanière, alors l'Etat devrait choisir des industries
relativement intensives en capital pour la zone. Dans les faits c'est le contraire qui se produit
dans les pays en développement. Voyons à présent ce qu'il en est pour l'effet de production.
MlYAGIWA énonce une autre proposition selon laquelle, sans se préoccuper du
facteur relativement intensif dans l'industrie 3, un accroissement du taux s supérieur à s' défini
par la relation (1.1-8) augmente la production de J'industrie 3 et diminue celle de l'industrie 2.
54

De même, si l'industrie 3 est relativement capital intensif, alors un accroissement de s supérieur
à s'accroît la production de l'industrie 1 ou au contraire si l'industrie 3 est relativement travail
intensif, un accroissement de s plus que s' diminue la production de l'industrie 1.
De façon intuitive, la diminution de la production de l'industrie 2 se produit parce que
le capital doit se déplacer de l'industrie 2 à l'industrie 3 afin de produire le bien 3. La variation
de la production du bien 1 dépend de l'impact qu'a la création de l'union douanière sur le taux
de salaire.
Pour déterminer l'impact de l'établissement d'une intégration régionale, MIYAGIWA a
exprimé l'identité revenu-dépense en termes de fonctions duales. Il pose:
e(1,p2. li), la dépense minimum nécessaire à un pays pour atteindre un niveau de bien-
être li aux prix (1,p2) et la fonction de revenu maximum est g(l'P2,p:(l+s),n,dr ,dK ) pour
un vecteur de prix donnés et des dotations de facteurs. A ce niveau il Hmt noter que, puisque le
bien 3 est entièrement exporté par l'union sans consommation domestique, P; (1 + s) ne peut
apparaître comme argument dans la fonction de dépense (coût).
En posant e2 = ée/c5p2 , la différenciation partielle de la fonction par rapport au prix du
bien 2, les arguments habituels de dualité impliquent que e2 est égal à la demande Hicksienne
du bien 2, et g, est égale à la production nationale du bien i(=2, 3). Puisque l'importation du
bien 2 est el = gl, le bien-être du pays hôte est déterminé par l'identité revenu-dépense
suivante:
(1.1-15)
Dans la relation (1.1-15), le deuxième et le troisième tenues à droite représentent
respectivement le revenu tarifaire et la subvention à l'exportation. Cette relation signifie
simplement que le revenu généré par la production et les ressources tarifaires est partagé entre
la consommation et la subvention à l'exportation de l'union douanière. En utilisant l'équation
(1. 1-15), MIY AGIW A obtient la proposition suivante :
55

Avec un taux de subvention supérieur à s' défini par la relation (1. 1-8), si le bien 1 et le
1
bien 2 ne sont pas des biens inférieurs, alors,
1
.
SP3 <
&2 / a
-
P:
(1.1-16)
>
&3/ÔS
<
implique du/ds = 0 .
>
L'établissement d'une union douanière est donc mieux à même d'accroître le bien-être
national si la subvention à l'exportation sp; est plus faible que le tarif tp; . La hausse du taux
de subvention entraîne non seulement une forte réduction de la production du bien 2 mais
également une faible augmentation de la production du bien 3.
La possibilité d'accroissement du bien-être peut être expliquée par la théorie de second
rang qui, dans ce contexte, fait valoir que si une distorsion tarifaire ne peut être supprimée
i dans une économie, l'imposition d'une autre distorsion peut augmenter le bien-être national.
1
. Une union douanière soutenue par une subvention à l'exportation joue donc ce rôle grâce à un
déplacement des facteurs hors de l'industrie excessivement protégée.
!
On peut noter que le bien-être ne dépend pas du facteur relativement intensif dans
i
l'industrie 3. En revanche, l'intensité du facteur l'effet de la croissance économique.
C4 - Croissance, Investissement étranger
Puisque le revenu national est égal à la valeur de toutes les productions en termes de
i prix internationaux, l'équation (1.1-15) peut être réécritede la manière suivante:
(1.1-17)
En la différenciant par rapport au facteur j(= n, dT, dK), on aura:
(1.1-18)
56

On peut utiliser la relation (1.1-18) pour évaluer l'impact de la. croissance sur le bien-
être national. De ce point de vue, MlYAGIWA suppose que la force de travail totale
augmente. Son effet sur le bien-être est donné par la proposition suivante:
Soit ai. la part de revenu du
capital dans l'industrie i(= 2, 3). Si l'industrie 3 est
intensive en capital par rapport à l'industrie 2, et (1 + s)/(1 + t) < a z / a
ou bien si l'industrie
3
3 est intensive en travail par rapport à l'industrie 2 et (1 + s)/(1 + t) > a z / a 3 , alors un
accroissement exogène du travail diminue le bien-être national. Si (1 + s)/(1 + t) =a z / a , le
3
bien-être ne sera pas affecté. Dans tous les autres cas, une expansion de la force de travail
accroît le bien-être national.
Le cas d'une augmentation des terres (dT) ne conduit pas à une interprétation précise,
mais pour une expansion du capital (dK) on aura des propositions suivantes:
Soit fJ" la part de revenu du travail dans l'industrie i(= 2,3). Si l'industrie 3 est capital
intensif par rapport à l'industrie 2 et (l+s)/(1+t»fJz / fJ3 ou bien si l'industrie 3 est travail
intensif par rapport à l'industrie 2 et (1 + s)/(1 + t) < fJz / fJ3, alors un accroissement exogène
du capital diminue le bien-être national. Si (1 + s)/(1 + t) = fJz / fJ3 ' alors le bien-être reste
inchangé. Dans tous les autres cas, un accroissement du capital augmente le bien-être national.
Puisque les unions douanières visent entre autres, à attirer le capital étranger, il est
intéressant d'examiner l'impact de l'investissement sur le bien-être.
A ce niveau, MIYAGIWA suppose que le capital étranger reçoit un rendement égal au
revenu marginal national du produit du capital. Sous la protection tarifaire pour l'industrie 2, si
l'industrie 3 est capital intensif par rapport à l'industrie 2 et fJ3(1 + s)/ S < fJz (1 + t)/ t , ou si
l'industrie 3 est travail intensif par rapport à l'industrie 2 et fJ3(1 + s)/S > fJz(1 + t)/t , alors un
accroissement
de
l'investissement
étranger
diminue
le
bien-être
national.
Si
fJ3(I+s)/s=fJz(1+t)/t, un accroissement de l'investissement étranger laisse le bien-être
inchangé. Dans tous les autres cas, le bien-être augmente en réponse à l'accroissement du
capital étranger.
57

Dans cette analyse, MIYAGIWA a considéré l'impact d'un établissement d'une ZLE à
travers une aide publique pour promouvoir l'exportation et la diversification industrielle. Il
énonce qu'en établissant une union douanière, un pays aide les industries qui se situent à
J'intérieur de l'union. De telles industries sélectionnées par l'Etat sont basées sur l'intensité
relative du facteur et sur les exportations.
L'établissement des unions douanières peut se faire au moyen des aides directes aux
exportations. On peut également recourir à des aides indirectes telle que la baisse des taxes sur
l'importation des biens intermédiaires. De même, on peut procéder à un transfert de
technologie. En effet, puisque l'introduction des technologies avancées est un des objectifs des
1
UD en pays sous développés, nous aurions pu explorer ici les effets de bien-être d'un transfert
de technologie par les unions douanières.
Par ailleurs, tous les arguments utilisés ici reposent sur une analyse statique avec une
'technologie donnée. Comme l'avait fait GRUBEL (1982), on aurait eu certainement de
résultats améliorés en utilisant un contexte plus dynamique sous forme d'innovations plus
rapides et fréquentes.
58

SCEC'I'ION II
Le nouveau régionalisme :
la dimension institutionnelle.
Les effets de l'intégration régionale vont au-delà des échanges des biens, des services
et des facteurs. En effet, par définition, tout regroupement régional suppose des règles de
1
conduite communes aux pays concernés et des ententes réciproques et obligations.
L'intégration régionale implique un certain degré d'arbitrage entre les préférences
nationales respectives. L'importance de cette dimension politique de l'intégration régionale
dépasse le cadre des effets habituellement comptabilisés à partir des seuls flux commerciaux.
Jaime de MELO, Arvind PANAGARIYA et Dani RODRIK (1992) postulent que la liberté
d'action des Etats dans leur choix de politique économique est contrainte par la présence des
lobbies dont les buts diffèrent de ceux des gouvernements. Ils agissent donc en prenant en
compte les préférences des lobbies et ne peuvent adopter la politique optimale d'un point de
vue économique. Selon leur modèle, les effets positifs de la coopération régionale passent par
deux canaux principaux.
D'abord, elle réduit le poids des groupes politiquement importants dans chaque
économie et permet de libérer les décisions de politique économique de la pression des
intérêts particuliers: c'est ce qu'ils ont appelé" l'effet de dilution des préférences".
59

Ensuite, cette coopération donne aux Etats une plus grande liberté dans le choix des
institutions. Ce choix qui se trouve libéré des contraintes historiques propres à chaque Etat :
c'est" l'effet de création institutionnelle".
Mais d'un autre côté et de façon simultanée, la coopération· institutionnelle entraîne une
réduction de l'autonomie politique de chaque Etat, autrement dit une subordination aux
préférences des autres Etats. Même si cette subordination n'est que partielle parce que chaque
Etat participe aux institutions communes, elle implique un arbitrage entre les préférences des
différents pays. Le problème est que ce compromis peut être favorable à certains Etats et
défavorable à d'autres. Ce troisième effet s'appelle" l'effet d'asymétrie des préférences" et
1
son impact est souvent ambigu. Pour comprendre les fondements de cette théorie, nous allons
revenir sur le modèle que de MELO et AL (1992) ont construit et qui intègre la dimension
institutionnelle de l'intégration régionale.
A - Présentation du modèle de DE MELO, PANAGARlYA et RODRlK.
De MELO et al se sont intéressés à l'interaction entre les Etats et leurs secteurs privés,
et les variations de cette interaction issues de l'intégration. ils ont tout d'abord développé le
cas d'un seul pays, ensuite celui de deux pays intégrés.
Ces auteurs pensent que le comportement d'un gouvernement peut être traduit par une
fonction objectif de perte quadratique qui tient compte à la fois des motifs économiques et des
objectifs politiques:
(1.2-1)
g représente la variable de choix du gouvernement. C'est l'intervention publique qui revêt une
dimension politique. Elle peut prendre la forme d'une protection commerciale ou de
subventions industrielles, g représente le niveau optimal de g dans un sens strictement
économique. Autrement dit, le premier terme dans la relation (1.2-1) saisit la motivation
purement économique de la décision gouvernementale.
60

De plus, les auteurs pensent que le gouvernement subit aussi des pressions pour
intervenir au compte des intérêts politiques représentés ici par le second tenne dans (1.2-1).
Politiquement, les groupes de pression dans le secteur privé préfèrent un niveau d'intervention
donné par e.
Dans le second tenne, on retrouve l'idée que le gouvernem(;mt subit une pénalité
chaque fois que son choix g est différent de celui des groupes de pressions, e. Â représente le
poids relatif de la volonté politique du gouvernement. De MELO et al n'ont pas donné une
importance nonnative à cette fonction objectif. TIs ont voulu simplement caractériser le
comportement de l'Etat.
Le niveau de e est endogène et est choisi par un lobby représentant des groupes
politiquement actifs dans la société. Ces groupes de pression tentent de marchander avec le
gouvernement chaque fois que celui-ci veut prendre une décision importante. Ce marchandage
est représenté par une fonction d'utilité:
(1.2-2)
ag représente les intérêts privés de l'intervention publique, tandis que le second tenne
représente les coûts économiques. Ces coûts sont positifs chaque fois que le groupe de
pression privé exprime une préférence pour g différente de g, et ils sont supposés être
partiellement internalisés par le lobby.
En fait, le jeu se déroule comme suit: dans un premier temps, le groupe de pression
annonce son niveau préféré d'intervention de l'Etat, e, en tenant compte de la réaction du
gouvernement à leur annonce. Dans un deuxième temps, le gouvernement détermine son
niveau optimal de g compte tenu de e. TI est clair qu'ici, le gouvernement subit une perte de
bien-être du fait de son incapacité à préconiser un niveau g librement.
La résolution de cette séquence du jeu se déroule de la façon suivante. En maximisant
la relation (1.2-1) par rapport àg, il vient:
61

1
g(1 + Àt (g + ÀO) == g(O).
(1.2-3)
Ceci représente la meilleure réponse du gouvernement par rapport à O. D'un autre côté,
dans le premier niveau du jeu, le lobby maximise la relation (1.2-2) par rapport à (1.2-3). La
solution est:
e=g +/ 2(1 + À).
(1.2-4)
eest plus grand que g aussi longtemps que a > e. En substituant cette équation dans la
relation (1.2-3), de MELO et al ont obtenu le niveau d'équilibre de l'intervention du
gouvernement :
g =g + (a / 2)[À / (1 + À)2]
(1.2-5)
Donc g supérieur à g tant que a et À sont tous les deux positifs.
Les deux auteurs démontrent également que:
(0 - g) =(a / 2)[À / (1 + À)2] > O.
(1.2-6)
Ce qui implique que le gouvernement choisit de modérer la demande des lobbies. Par la
suite, DE MELO et al ont substitué (1.2-5) (1.2-6) à (1.2-1) pour exprimer la valeur prise par
lIa fonction objectif du gouvernement dans l'équilibre non intégré soit:
1
(1.2-7)
On se rend compte que pour aVOlf du répondant à la pressiOn politique, le
1
gouvernement subit un coût.
62

DE MELO et ses associés ont aussi étudié le cas où deux pays décident de s'intégrer.
Dans ce cas, le niveau d'intervention est supposé être le même pour les deux économies. C'est-
à-dire que les deux pays diffèrent seulement par rapport au niveau d'intervention
économiquement désirable. C'est-à-dire que, si la fonction objectif du gouvernement étranger
est donné par la relation, :
(1.2-8)
le lobby privé dans ce pays devrait maximiser la fonction:
U • =ag• - (B·
-.)2
-g
.
(1.2-9)
On peut constater que ces auteurs estiment que a et  sont communs aux deux pays. fi
reste à savoir comment la décision est prise au niveau régional? DE :MELO et AL pensent que
l'institution régionale maximisera une fonction objectif qui a la même structure que celles des
deux pays:
(1.2-10)
L'indice r se réfère à l'institution régionale.
Dans cette expression on peut déceler deux possibilités :
1°) g -:t g. ;
2°) B-:t B·.
DE MELO, P ANAGARIYA et RODRlK posent une hypothèse neutre en égalisant gr
et Br aux préférences moyennes des deux économies. C'est-à-dire en posant:
gr =+(g + g.) ;
(1.2-11)
Br =t(B+B·).
(1.2-12)
63

La fonction indiquant la meilleure réponse de l'institution régionale est:
g = (1 + Â) -1 (g,. + ÂOr) == g(Or) .
(1.2-13)
Les groupes de pression nationaux maxirrùsent leurs fonctions objectif, en internalisant
cette fonction de la meilleure réponse possible, mais en tenant compte des actions des autres
groupes de pression. En utilisant la relation (1.2-12), il vient:
o= g + / 4(1 + Â); O· = g. +/ 4(1 + Â) .
(1.2-14)
En comparant (1.2-14) et (1.2-4), on peut remarquer que l'intégration régionale
modère les demandes des lobbies nationaux pour l'intervention. En fait, la raison est simple.
Chaque groupe de pression a un faible impact sur la prise de décision puisque l'institution
régionale tient compte de deux parties. Puisque les intérêts marginaux des lobbies ont diminué,
1
les groupes choisissent rationnellement d'en faire moins. C'est ce qui explique l'effet de
dilution des préférences mentionné plus haut.
Cependant, on note que 0 et dépendent respectivement de g et g" de sorte que la
Ipressionglobale pour l'intervention ne se réduira pas simultanément pour les deux pays. En
combinant (1.2-12) et (1.2-14), il vient:
Or =gr + / 4(1 + Â) =t (g + g.) + /4(1 + Â) .
(1.2-15)
En tenant compte du second terme, chacun des deux pays expérimente une réduction
de l'influence du groupe de pression. Mais l'effet du premier terme agit différemment pour les
deux économies. C'est l'effet d'asymétrie des préférences.
Si g > -g., le pays hôte obtient une diminution additionnelle de lobbies grâce à
1
l'intégration régionale, alors que le pays étranger obtient un accroissement compensatoire. En
utilisant la relation (1.2-14), les trois auteurs ont estimé le niveau d'équilibre de l'intervention
dans l'union:
64

utilisant la relation (1.2-14), les trois auteurs ont estimé le niveau d'équilibre de l'intervention
dans l'union:
g = +Cg + gO) + (a /4)[,,1, / (1 + ,,1,)]2.
(1.2-16)
La comparaison de cette relation avec (1.2-5) indique que le sens des variations de g
après l'intégration dépend de l'ampleur relative des effets de dilution et d'asymétrie des
préférences. Le premier effet tire g vers le bas dans les deux pays, alors que le second effet
réduit g dans un pays l'augmente dans l'autre.
Cette modélisation a permIS à DE MELO et ses associés (1992) d'évaluer les
conséquences de l'intégration pour chacun des deux pays. Ils ont pu le faire sur le plan
économique et sur le plan politique.
B - La dimension institutionnelle de l'LR. et ses implications.
On peut constater que DE MELO et alia ne se sont pas contentés d'élaborer une
nouvelle présentation de l'intégration régionale. Ils essaient surtout d'en analyser les
différentes implications en prenant appui sur la dimension instituti01lilelle des regroupements
régionaux. Au nombre de ces implications, il y a non seulement les aspects économiques et
les aspects politiques mais également les objectifs de croissance.
Bi Les effets économiques.
L'évaluation des conséquences économiques de l'intégration conduit à s'interroger sur
la capacité
de
l'intégration
à réduire
la différence
entre
le
niveau
d'intervention
économiquement désirable du gouvernement et le niveau choisi d'équilibre. DE MELO,
PANAGARIYA et RODRlK (1998) ont besoin de savoir si cg - g) 2 et (g. - g.) 2 sont plus
faibles sous l'intégration. Si G est la composante économique de la fonction objectif du
gouvernement et en utilisant Net J comme indices, ils posent:
65

G
=G; =
N
-(g - g)2 =_(a2 / 4)[Â/(l + Â)t ;
GJ =_(g_g)2 =-~(g-gO)-(a/4)[Â/(1+Â)]2Y;
(1.2-17)*
G; =_(gO _g)2 =-~Cf -g)-(a/4)[Â/(1+Â)]2Y.
En considérant d'abord le cas où les deux économies sont identiques, c'est-à-dire:
(g - gO)2 =0, les auteurs constatent que G =G; < G =G; . Ce résultat traduit l'effet de
N
J
dilution des préférences et montre l'impact favorable d'une union politique plus grande. Cet
effet joue en fait pour les deux économies.
En revanche, les deux pays sont différents, (g - gO)2 * 0, c'est l'effet d'asymétrie des
préférences qui intervient. Pour de faibles différences, cet effet bénéficie au pays dont le niveau
d'intervention est plus élevé. En l'absence d'intégration, l'intervention publique est surévalué
dans les deux pays. Lorsqu'il y a intégration, les effets d'asymétrie des préférences réduisent g
dans le pays dont le niveau d'intervention est plus élevé et accroît g dans l'autre pays.
Autrement dit, compte tenu de la distorsion initiale, l'intégration bénéficie au premier pays et
dessert l'autre. Mais pour une divergence importante entre les deux économies, les deux pays
sont desservis par l'intégration.
En fin de compte, les auteurs ont dégagé une implication importante. Lorsque le
nombre de pays membre de l'intégration augmente, les avantages que chacun en tire restent
faibles, aussi longtemps que ces pays ne sont pas identiques. Un nombre relativement petit de
participants à l'intégration peut constituer un avantage significatif du régionalisme sur le
multilatéralisme.
En supposant que l'intégration régionale peut être réalisée de manière telle qu'elle
maximise les avantages économiques des pays, il est nécessaire d'évaluer les conséquences
économiques des politiques de ces pays de manière optimale. La fonction objectif de
l'institution régionale pourrait être altérée au bénéfice de ces économies. En somme, la
question institutionnelle résultera d'une considération plus grande des préférences du pays à
faible intervention.
Les astérix indiquent le pays étranger.
66

B2- Les conséquences politiques de l'I.R.
De MELO et alii suggèrent maintenant de prendre en compte les considérations
politiques et les contraintes des activités des lobbies privés dans l'évaluation des effets
bénéfiques de l'intégration. Les considérations politiques ont une influence importante sur la
décision d'un pays à s'intégrer ou pas.
Les valeurs maximisées de G et de G* en l'absence d'intégration sont:
(1.2-18)
En uti lisant (1.2-14) et (1.2-16), ils obtiennent une expressIOn semblable sous
intégration:
(1.2-19)
Lorsque les deux pays sont identiques, g =g., l'intégration est sans ambiguïté
avantageuse à l'un et à l'autre (effet de dilution des préférences discuté plus haut).
L'intégration réduit alors l'influence du lobby national et permet ainsi au gouvernement de
poursuivre sérieusement ses objectifs.
En revanche, lorsque les deux pays sont différents (g' ~ g.), les avantages de
l'intégration sont limités pour les deux partenaires, car tous les avantages économiques
d'asymétrie des préférences sont absorbés par des pertes politiques dues à la divergence de
vue entre les préférences des lobbies nationaux et le niveau commun d'intervention.
Une comparaison entre les équations (1.2-18) et (1.2-19) indique clairement que
l'intégration n'est pas bénéfique lorsque g ~ g•.
Ce qu'il faut retenir, c'est que l'intégration implique parfois la renonciation des
partenaires aux intérêts particuliers et l'adoption de règles supranationales. Dans certaines
67

1
! conditions, l'arbitrage des institutions au-delà des frontières nationales peut être mutuellement
1
bénéfique. Cependant, les partenaires régionaux doivent atteindre un certain seuil de similarité
pour que l'intégration soit bénéfique dans un sens institutionnel. L'adoption des politiques et
des règles communes devient alors un objectif supplémentaire de leur propre droit.
B3- Les objectifs de croissance.
Selon DE MELO, PANAGARIYA et RODRIK (1992), le succès d'un processus
d'intégration procède de la convergence des objectifs, du nombre relativement faible des
partenaires et de la volonté de chacun d'eux d'abandonner une partie de son autonomie
nationale au profit de la réglementation supranationale. Si ces considérations institutionnelles
sont acceptées, il est possible que les gains dynamiques, concrétisés par une forte croissance,
soient engrangés.
Le fait que les effets dynamiques n'ont pas été vraiment pris en compte jusqu'ici vient
! non seulement de la difficulté de les caractériser sur le plan empirique, mais aussi parce que,
comme les effets d'échelle, ils ne sont pas particuliers aux accords d'intégration régionale.
Cependant, ces effets sont plus importants que les effets statiques étudiés jusqu'ici. Sur le plan
, macro économique, une coordination politique stable est source de croissance1.
1
1
Les effets dynamiques les plus palpables de l'intégration sont liés à la diffusion rapide
de la technologique. Elle se traduit par un relèvement de la compétitivité des finnes nationales.
Un marché élargi stimule également l'investissement, du fait que les entreprises veulent profiter
de l'élargissement du marché et produire davantage et mieux.
La réduction des barrières commerciales est dans ce sens un moyen renforçant les
prédictions néoc1assiques de la théorie de la croissance basée sur les rendements décroissants.
Puisque de telles barrières sont érigées plutôt qu'abaissées dans les pays en développement, ces
effets dynamiques ne sont pas pleinement exploités par leurs zones d'intégration.
1 Dans les anciens instruments de l'intégration régionale, l'avantage de la coordination à travers une délégation d 'une
partie de pouvoir aux organismes supranationaux était largement absent des accords entre les pays en développement à
cause de la combinaison des objectifs divergents et de la faiblesse des institutions centrales. Cela a été le cas
particulièrement en Afrique au Sud du Sahara. Mais ces avantages étaient bien visibles dans la Communauté eur9péenne.
68

Peut-être que l'effet le plus potentiellement dynamique qui bénéficie aux pays en
développement provient-il de la coopération économique où les extemalités significatives et les
biens publics existent (par exemple la recherche et le développement, l'éducation,
l'environnement et l'infrastructure).
Bien entendu, la coopération peut prendre plusieurs formes allant de simples échanges
d'information, à la coordination des politiques et à l'établissement des institutions communes
ayant des pouvoirs quasi législatifs en passant par la reconnaissance mutuelle et par l'adoption
des règles communes. Etant donné le retard de l'Afrique centrale, il apparaissait pour De
MELO et AL que les gains potentiels même d'une coopération institutionnelle limitée sont
importants.
Tout compte fait, l'idée centrale est que les effets positifs de la coopération
institutioIUlelle ont d'autant plus de chance de se réaliser dans les pays en développement que
ces pays restent liés aux pays industrialisés. De ce point de vue, BALDWIN et SEGHEZZA
(1998) ont étudié les effets théoriques potentiels de. l'intégration Nord-Sud sur les pays en
développement. Ce qu'ont fait avant eux, P. et S. GUllLAUMONT (1993), en analysant la
coopération monétaire dans la zone franc.
Mais au delà même de l'aspect purement intégrationniste, l'instabilité politique notoire
qu'on enregistre dans la plupart des pays afiicains peut être aussi une cause du non
développement économique de ces pays.
En effet, depuis leurs indépendances, plusieurs pays de l'Afrique au Sud du Sahara
connaissent de faibles performances sur le plan économique. Or, c.es contre performances
s'accompagnent presque toujours d'un fort degré d'instabilité politique (Banque Mondiale,
1984). La faiblesse des institutions peut donc être à l'origine du faible développement des pays
en développement comme le pense NORTH (1990).
Des études empiriques ont souvent négligé les facteurs institutionnels telle que la
stabilité politique et se sont focalisées sur des quantités et la qualité des inputs dans la
détermination de la croissance économique. Cette négligence a conduit, au fait que la
69

,
i
1
!fonnulation et l'évaluation de la politique économique constituent un détenninant important de
la croissance économique durable. Si l'environnement institutionnel est important dans la
détermination de la croissance économique, un environnement politique instable empêche les
pays en développement d'avoir une croissance économique durable (WELLS, 1992).
Une étude menée par GYIMAH-BREMPONG et TRAYNOR (1999) confirme
l'importance de l'instabilité politique dans la croissance économique. L'instabilité politique
affecte la croissance économique tant directement qu'indirectement à travers une réduction
de la formation du capital. En fait, ces auteurs concluent à un cercle vicieux du processus de
:non croissance économique: une faible croissance économique entraîne une instabilité
:politique qui en retour conduit à une plus grande stagnation économique.
Selon P. et S. GUILLAUMONT et lF. BRUN (1999), l'Afrique subsaharienne connalt
beaucoup d'instabilités primaires (instabilité climatique, instabilité des termes de l'échange et
instabilité politique) c'est-à-dire des instabilités qui sont structurelles plutôt que le résultat des
1
politiques économiques. Ces instabilités primaires influencent la croissance africaine plus par
une faible croissance résiduelle qu'à travers un faible taux moyen d'investissement. Ces
instabilités agissent, selon eux" par leur impact sur la politique économique, qui à l'évidence
est influencée par deux instabilités intermédiaires: les instabilités de taux d'investissement et de
taux de change réel.
P. et S. GUILLAUMONT et BRUN ont montré que les conditions climatiques, les
troubles politiques et les instabilités sur les marchés mondiaux sont plus forts dans les pays
! africains
que dans d'autres régions du monde. Ils estiment que l'instabilité des termes de
1 l'échange et l'instabilité politique expliquent en grande partie la faiblesse du taux de croissance
en Afrique. Ces instabilités induisent une mauvaise politique qui entraîne une instabilité plus
forte du taux d'investissement et du taux de change réel.
C'est pour toutes ces raisons que la dimension institutionnelle est si importante dans le
1 processus d'intégration économique régionale en Afrique centrale. TI est clair que une bonne
intégration régionale ne peut pas se construire dans l'instabilité politique des membres
éventuels. Nous pouvons maintenant présenter les avantages que l'on peut attendre d'une
intégration Nord-Sud.
70

C - Les avantages potentiels de l'intégration Nord-Sud.
Selon BALDWIN et SEGHEZZA (1998), la fonnation d'une zone de libre-échange
entre pays en développement (pays du sud) et pays industrialisés (pays du nord) pennet de
libéraliser les échanges entre les grands pays (comme l'Europe ou les Etats-Unis) et les petits
pays (comme ceux d'Afrique). Ces auteurs ont comptabilisé trois effets directs qui peuvent agir
sur la hausse du taux de rendement du capital dans les deux types de pays :
- un effet direct d'accès au marché: les deux types de pays exportent davantage, il
s'ensuit une augmentation de leurs recettes commerciales ~
- deux effets de concurrence: au fur et à mesure que les barrières commerciales
s'abaissent, les entreprises font face à plus de concurrence sur leur propre marché de la part
des autres entreprises des pays partenaires (pays du Sud) et sur le marché extérieur de la part
de toutes les autres entreprises.
En excluant le phénomène de la taille, les effets directs sont constants parce que le
grand marché du pays industrialisé devient de plus en plus grand mais avec de plus en plus
d'entreprises concurrentes. Puisqu'il y a plus d'entreprises basées dans le grand marché, celles
qui sont localisées dans le petit pays font face à une concurrence plus forte dans leur marché
local et à un plus petit accroissement de la concurrence dans le marché d'exportation du fait
des fusions possibles et des disparitions des entreprises moins perfonnantes.
Compte tenu des barrières commerciales, le marché local est plus bénéfique que le
marché d'exportation. Ce qui fait dire que la libéralisation réciproqw~ conduit toujours à un
accroissement des profits des entreprises des pays industrialisés plus qu'elle ne le fait aux
entreprises des petits pays. Autrement dit, la libéralisation réciproque diminue le taux de
rendement du capital dans le petit pays et l'augmente dans le grand pays.
71

1
i
TI faut reconnaître que ce cas de figure se présente lorsque la libéralisation des échanges
est la même pour tous les pays. En fait, cela ne se passe pas ainsi dans la réalité, car le respect
des règles du GATT autorise une certaine discrinùnation dans la libéralisation entre le Nord et
le Sud. TI en est ainsi dans l'accord de libre-échange entre le Mexique et les Etats-Unis
d'Amérique où le taux tarifaire sur les importations mexicaines en provenance des Etats-Unis
était de 25%, alors que celui des Etats-Unis vis-à-vis du Mexique était de 4%.
Cette asymétrie du niveau de protection initial permet d'apprécier l'impact de la
libéralisation réciproque. TI va sans dire que les résultats discutés jusqu'ici sont surtout affectés
par la taille des pays concernés. Mais le lien entre la croissance et les échanges se mesure plus
par le coût des biens intermédiaires dans le secteur des investissements.
En effet, selon BALDWIN et SEGHEZZA (1998), le niveau de l'effet de croissance
d'une libéralisation avec un partenaire donné dépend seulement de l'importance des
1 exportations
du partenaire dans la fonction de coût de l'investissement. Ainsi, l'effet de
croissance sera d'autant plus grand que le partenaire offre une part importante de biens
intermédiaires. Cela fait admettre que les accords de libre-échange Nord-Sud sont pourvoyeurs
de croissance tant que c'est le partenaire du Nord qui demeure le principal fournisseur de biens
intermédiaires.
Cependant, l'effet de la libéralisation réciproque dépend également des importations
libéralisées. En fait, si les accords de libre-échange Nord-Sud libéralisent une grande part des
importations des pays du Sud, BALDWIN et SEGHEZZA pensent que ces accords sont
, susceptibles de promouvoir la croissance.
1
1
TI reste un élément important des accords de libre-échange entre pays industrialisés et
pays non industrialisés, c'est la certitude que peuvent avoir les investisseurs de s'impliquer
dans une entreprise sans risque dans les pays en développement.
Sur le plan micro économique, les partenaires d'une zone de libre-échange peuvent agir
sur les variations des échanges, l'investissement et les politiques de taxes indirectes.
L'argumentation de BALDWIN et SEGHEZZA repose sur le principe que l'établissement de
72

ce type d'accord nécessite, plus que la clause de la nation la plus favorisée, un engagement
important de la part des pays intéressés.
A cet égard, des changements brusques dans la politique commerciale peuvent donner
lieu à des représailles. De ce point de vue, les politiciens dans les pays du Sud ont intérêt à
stabiliser leur comportement.
En fait, la règle d'or pour attirer les investisseurs est de développer, un cadre politique
stable et si possible du côté de l'offre, d'importants investissements publics dans les
infrastructures et la fonnation professionnelle. Ce qui peut contribuer à réduire les coûts de
production.
En fait, une véritable libéralisation en faveur du développement suppose la transparence
dans les négociations. Les intérêts des pays doivent donc être clairement spécifiés tandis que la
taille du marché intérieur et la force industrielle nationale doivent ëtre, pour les pays en
développement, consolidées par un programme actif incluant une relative protection
commerciale et des dépense publiques.
Ce dernier point nous amène à s'interroger sur le niveau de libéralisation commerciale
nécessaire pour des pays en développement dont les structures de production sont au stade
embryonnaires. Mais cette question sera traitée dans la deuxième partie de cette étude. En
attendant, nous allons nous intéresser, dans le chapitre qui va suivre, aux résultats des accords
d'intégration qui existent compte tenu des différentes théories que nous avons énoncées.
73

... Mais leur app lication est diffici le
Si la théorie de l'intégration est intéressante, sa mise en œuvre paraît difficile. En effet,
autant il est vrai que dans les dispositifs d'intégration où interviennent les pays développés,
les succès sont à la mesure des espérances, autant dans les regroupements régionaux qui
concernent les pays en développement, les résultats sont décevants. Pourquoi donc les pays du
Nord réussissent-ils relativement mieux là où ceux du Sud éprouvent d'énormes difficultés?
Le présent chapitre tente de rappeler succinctement les résultats obtenus par les
principaux types de regroupement économique. La première section sera donc consacrée aux
difficultés de mise en œuvre des théories de l'intégration régionale. Nous y verrons
successivement la Communauté européenne, l'ALENA et le Mexique, la Communauté de
Développement Sud Africain (SADC) et la coopération institutionnelle entre pays de la zone
franc.
La deuxième section s'intéressera aux raisons qui font que les tentatives d'intégration
économique dans les pays en développement ne soient pas couronnées de succès. Notre
analyse s'appuiera tant sur l'inadaptation du cadre analytique que sur le manque de
coordination des politiques commerciales.
74

SŒC'TIONI
Les difficultés de mise en œuvre des théories de l'LR.
Les effets économiques des accords d'intégration régionale font l'objet d'études de plus
en plus nombreuses, tant sur le plan théorique que sur le plan empirique (BALDWIN ET
VENABLES 1995). Malheureusement, l'analyse est complexe. A ce jour, on dénombre deux
types de regroupements régionaux.
D'abord, les regroupements dont les visées intégrationnistes sont modestes. Les Etats
membres se contentent d'un accord de tarifs préférentiels, préconisant des tarifs plus faibles
sur les importations de certains produits originaires des pays partenaires ou alors d'une zone
de libre-échange qui préconise la disparition progressive des tarifs et autres restrictions
commerciales pour les échanges des produits originaires des pays partenaires.
La seconde catégorie de regroupements, plus ambitieuse, préconise une intégration
plus profonde avec la mise en oeuvre d'une union douanière (on impose ici un tarif extérieur
commun aux pays partenaires), puis d'un marché commun.
Le but visé par ces accords est d'encourager les échanges intra-régionaux. Et c'est pour
cette raison que l'intégration régionale est évaluée à partir de l'intensité des relations
commerciales entre les pays partenaires. Aussi, plusieurs recherches ont-elles testé l'impact
des processus d'intégration sur des variables telles que la taille des entreprises et les marges
coût-prix. (SLEUWAEGEN ET y AMAWAKl, 1989, MLTLLER et OWEN, 1985 et le
commerce intra-régional, JACQUEMIN et SAPIR, 1988, THOMPSON, 1994).
Il semble que, théoriquement, la libéralisation du commerce régional, même si elle est
accompagnée d'un détournement des échanges, peut profiter au pays importateur. Par exemple
75

dans les pays membres d'une union douanière, les gains que les consommateurs tirent de la
baisse des prix peuvent compenser les pertes découlant du détournement d'échanges.
Un élément important est que s'il y a des économies d'échelle inexploitées dans
certaines branches de production, la libéralisation du commerce régional peut entraîner des
gains importants du fait des réductions des coûts moyens de production et de l'offre d'une plus
grande variété de marchandises pour les consommateurs. L'abaissement des obstacles au
commerce peut aussi accroître la concurrence dans la zone et entraîner une réduction globale
des coûts de production. La conclusion d'un accord d'intégration régionale peut alors mettre
les pays membres sur le sentier d'une plus forte croissance économique.
Plusieurs indicateurs permettent de rendre compte du succès d'un processus
d'intégration: les indicateurs de nature économique (la part du commerce dans le PIB) et les
indicateurs qui obéissent à une logique plus politique, (la limitation du pouvoir économique
des gouvernements nationaux).
L'intégration économique n'étant pas un objectif en soi, elle doit être perçue comme un
moyen de réaliser la croissance et d'accroître le bien-être des populations. Dans cet esprit,
WAELBRÜECK (1976) a considéré le commerce et les mouvements de facteurs comme des
variables significatives dans l'évaluation de l'intégration économique et a proposé de
concentrer l'analyse sur le bien-être. Nous allons nous servir de ces variables pour rendre
compte des difficultés de mise en œuvre de l'intégration régionale tout d'abord dans les
regroupements impliquant au moins un pays industrialisé (section 1), ensuite dans les
regroupements Sud-Sud (section 2).
A - Les regroupements impliquant au moins un pays industrialisé.
Depuis une trentaine d'années, on enregistre un engouement des pays à s'intégrer,
qu'ils soient industrialisés ou non. Même les Etats-Unis, qui avaient une position très critique
vis-à-vis de l'intégration économique, ont cédé à la tentation de sceller des accords régionaux
avec le Canada et le Mexique.
76

Nous présentons tout d'abord les résultats de la Communauté économique, ensuite
nous évaluons le chemin parcouru par l'ALENA et le Mexique. Enfin, nous analysons
l'intégration monétaire des pays de la zone franc.
Al - La Communauté européenne.
Les modèles d'équilibre général calculable et leurs résultats varient selon les contextes
dans lesquels ils sont montés. On peut considérer trois générations de ces modèles selon les
effets sur le bien-être qu'ils permettent d'étudier. En effet, la première génération suppose
l'existence d'une concurrence parfaite et néglige les effets dynamiques: chaque industrie
produit un bien homogène dans un cadre de concurrence parfaite et de rendements d'échelle
constants.
Dans ces conditions, le commerce intra-industriel est difficile à expliquer, alors qu'il
est apparent au niveau des données statistiques. Une hypothèse a dû être faite pour contourner
ce problème; c'est que les biens dans chaque secteur sont parfaitement substituables s'ils sont
produits dans des pays identiques, mais ne le sont pas s'ils proviennent de pays non
identiques. L'offre des facteurs est supposée fixe.
La seconde génération de modèles postule des rendements d'échelle croissants dans un
cadre de concurrence imparfaite. Ces modèles donnent une estimation de la production, des
effets d'échelle et de variété, mais leurs résultats sont liés à la forme de la concurrence entre
les entreprises et à la politique des prix qui en découle.
La dernière génération (troisième) des modèles incorpore les effets d'accumulation tout
en prenant en compte la variation des stocks de capital. Ce type de modèles étudie les effets
de création et de détournement des investissements.
La réalisation du marché intérieur européen en 1992 impliquait un ensemble de
mesures politiques complexes pour supprimer les barrières non tarifaires qui entravaient le
commerce au sein de la Communauté économique.
77

Les premières études sur cette programmation ont été sectorielles, et ont exploré les
effets de la politique sur des industries en utilisant des approches de la deuxième génération
de modèles. En recherchant les effets pro concurrentiels possibles du programme de 1992,
SMITH et VENABLES (1988) en ont retenu essentiellement deux.
La
première
conséquence
est
une
réduction
des
coüts
du
commerce
intra
communautaire de 2.5 % de la valeur du commerce global de la communauté. Ce qui a
entraîné un accroissement substantiel du volume de commerce.
La deuxième conséquence vise l'élimination de la segmentation du marché européen.
Les résultats sont très variables d'une industrie à l'autre, mais le modèle a prévu des réductions
de coûts moyens plus importantes que dans la première expérience. Aussi, pour les industries
qui ont connu une faible concentration, leurs gains en bien-être sont restés inférieurs à 1 % de
la production alors que pour celles qui ont eu une forte concentration, les gains en bien-être
sont environ de 5 % de la production. Quand on décompose ces gains en différents éléments,
leur source principale s'avère être la réduction des coûts moyens.
Des évaluations agrégées du programme élaboré pour l'Europe en 1992 ont été faites
par FLAM (1992) et BALDWIN et VENABLES (1994). Ces résultats sont résumés dans le
tableau (2.1-1) qui récapitule et compare plusieurs simulations faites par ces différents
auteurs. Ainsi, la Communauté Economique Européenne s'attendait à des perspectives de
gains plutôt modestes:
1°) les estimations faites ont révélé que les gains les plus importants sont réalisés par
les petits pays qui ont une plus grande ouverture au commerce intra-communautaire.
2°) les estimations des effets de bien-être des dispositions de 1992 ont révélé que les
secteurs affectés ont connu une augmentation de la production globale à l'intérieur de la
communauté et une diminution de celle-ci pour les pays dont les ventes intra-communautaires
sont importantes.
78

30) La différence entre HN-a et HN-b est liée à la nature de l'expérience. En effet, HN-
a ne tient pas compte d'un mouvement vers l'intégration des marchés. Ce qui n'est pas le cas
de HN-b en raison du gain supplémentaire en bien-être.
Tableau 2.1-1 : Impact de l'Europe de 1992 en pourcentage du PIE
II
II
III
1
II
III
Moyenne
HN-a
HN-b
BFH
HRT-I
HRT-II
HRT-III
C.E.
0.52
0.40
0.64
0.80
0.50
1.18
2.60
ZLE
n.a
-0.15
-0.22
-0.24
n.a
n.a
n.a
Explications: La prelllière colonne est la moyenne estimée de cinq études faites par Baldwin et Venables (1994). dans la
deuxième colonne, HN indique Haaland et Norman
(/992). Le Scénario
"a" est une réduction de 2.5 % des coûts du
comlllerce intra-communautaire s'il y a segmentation des marchés, le scénario "b" est une réduction des coûts commerciaux
avec les marchés intégrés. Dans la troisième colonne, BFH signifie Baldwin, Forslid et Haaland
(/994), elle est identique à
HN-b sauf que les stock de capital sont endogènes. Dans la quatrième colonne, HRT signifie Harrison, Rutheford et Tarr
(/994). Les scénarios 1. fi et fil constituent les premier, second et troisième versions de leur modèle. Tout indique des coûts
commerciaux plus faibles avec des marchés intégrés.

La troisième génération de modèles, (BALDWIN, FORSLID et HAALAND, 1994),
augmente l'effet attendu de revenu additionnel, à travers un multiplicateur de production. Les
expériences faites par HARRISON, RUTHEFORD et TARR (1994), utilisent les trois
générations de modèles, et confirment le point de vue selon lequel, en tenant compte des effets
supplémentaires, on augmente en réalité l'effet net estimé de la politique.
Ainsi, il peut arnver que le multiplicateur associé aux effets d'accumulation soit
inférieur à l'unité, mais ces estimations sont de 1.2 % ou 2.2 %, reflétant le fait que les biens
échangés tendent à être à forte densité capitalistique. L'intégration régionale stimule la
production de ces biens et augmente la demande du capital.
L'intégration européenne est donc globalement satisfaisante. Ce qui justifie la volonté
des pays partenaires à aller plus loin dans l'harmonisation des politiques économiques et
monétaires.
A2 - L'ALENA et le Mexique
De bons résumés des évaluations des résultats de l'ALENA ont été faits par
FRANÇOIS (1993) et FRANÇOIS et SHIELS (1994). Ces auteurs sont parvenus à des
79

résultats qui tiennent compte de l'emploi, des salaires, de la migration et des effets d'échange.
Le tableau (2.1-2) présente les variations de salaires réels prévues à partir de la moyenne
estimée de toutes les études faites par l'U.S. International Trade Commission (1992) et à partir
de quelques scénarios présentés dans des études individuelles (Cf. tableau 2.1-2). Les chiffres
romains sur des colonnes représentent la classification des modèles par génération.
Tableau 2.1-2: Impact agrégé de l'ALENA en pourcentage du PIE
1
II
II
III
III
Moyenne
BM-I
BDS-II
RRS
BM-III
BDS-III
Mexique
2.59
0.32
1.60
3.40
4.60
5.00
Canada
3.26
n.a
0.71
10.60
n.a
0.70
USA
0.16
0.02
0.01
2.l0
0.40
0.30
ExplIcatIOns: La premIère colonne represente la moyenne de tous les résultats trouvés par Jre (/992). BM signifie
Bachrach et Mizrahi (1992). Le scénario
"/" indique la première génération de modèles qui concerne la zone de libre
échange entre le Mexique et les Etats-Unis d'Amérique. Le scénario "JI/" améliore celle expérience avec des stocks de
capital endogènes. BDS signifie Browll, DeardojJ et Stern (/992). Le scénario "JI" représente la deuxième génération des
modèles et considère les barrières tarifaires et Izon tarifaires supprimées entre les pays membres de l'ALENA. Le scénario

"JJI" est le même que le scénario "J/" plus un flux de capital exogène au Mexique. RRS signifie Roland-Horst, Reinert et
Shie//s (1992), il concerne les ejJets de la suppression des barrières tarifaires et non tarifaires dans la troisième génération
de modèles.
Il ressort de ce tableau que tous les pays membres de l' ALENA s'attendent à un gain
substantiel. La moyenne des gains prévus pour le Mexique et le Canada, soit 2.5 % et 3.3 %
du PIE est simplement importante. ROLAND-HORST, REINERT et SHIELS (1992) et
HINJOSA et ROBINSON (1991) attribuent la plupart des gains mexicains et canadiens à la
suppression des barrières non tarifaires. Des gains escomptés pour les Etats-Unis d'Amérique
sont estimés plus faibles, reflétant à la fois la faible proportion du PIS des USA directement
affectée par des mesures de politique commerciale et le faible niveau initial des barrières
commerciales.
Le second point à retenir est l'ampleur de la différence entre les estimations faites par
les diverses études. En comparant les modèles de la première et de la deuxième génération,
nous voyons que les gains estimés sont cinq fois plus importants pour le Mexique, car on
passe de 0,32 à 1,60. La raison en est que, la présence d'économies d'échelle crée des
mécanismes supplémentaires par lesquels une intégration régionale affecte le bien-être. La
théorie ne dit pas que les gains agrégés sont nécessairement plus grands dans un cadre de
concurrence imparfaite, mais les simulations faites sur la Communauté européenne donnent ce
résultat.
80

En réalité, la différence entre ces générations de modèles est attribuée aux différentes
approches élaborées par des chercheurs pour construire les modèles de concurrence
imparfaite.
BROWN,
DEARDOFF
et
STERN
(1992)
ont
supposé
une
concurrence
monopolistique et les entreprises sont concurrentes à la Bertrand. C'est-à-dire que ces
entreprises ont la possibilité de fixer leurs prix de vente mais elles doivent laisser le marché
déterminer les quantités vendues. De ce point de vue, cela génère de petites variations et des
effets d'échelle très modestes de l'ordre de moins de 1 %, au niveau des entreprises, dans leurs
secteurs en concurrence imparfaite.
La version de ROLAND-HORST, REINERT et SHIELS (1992) que l'on retrouve dans
le tableau (2.1-2) utilise une politique de prix différente qui suppose que les entreprises
égalisent les prix aux coûts moyens et que le nombre d'entreprises dans l'industrie reste fixe.
La justification théorique d'une telle hypothèse n'est pas très claire, mais ses implications sont
immédiates. Toute expansion de la production dans l'industrie est transmise automatiquement
par l'effet d'échelle. Elle génère donc des réductions plus grandes de coûts moyens et de gains
en bien-être.
La plupart des études supervisées par l'U.S. International Trade Commission (1992)
trouvent que l'ALENA augmente le rendement ducapital dans les trois pays membres lorsque
les stocks de capital sont constants. L'ALENA génère donc une création des investissements.
La comparaison avec la troisième génération indique une crOIssance possible du
revenu associée à un stock de capital accru. Par exemple, en endogénéisant le stock de capital
dans le modèle BM, cela accroît la variation prévue des facteurs de 20 % et de 15 % aux USA
et au Mexique respectivement. Ils stimulent l'impact d'une hausse exogène du stock de capital
au Mexique de 10 %. Ce qui accroît l'impact de l'ALENA sur la production du Mexique,
comparé au cas où le stock du capital est maintenu constant.
81

., .' Toutefois, cette expérience soulève plus de questions qu'elle ne donne de réponses.
BDS ont trouvé que l'accroissement du stock de capital conduit à un taux de rendement plus
fort, un effet qu'ils attribuent à l'accroissement des rendements d'échelle.
En tout cas, la diversité des résultats tient aux structures des modèles utilisés. C'est
ainsi que dans la seconde génération de modèles, l'ampleur des effets dépend en grande partie
du caractère imparfait de la concurrence. Et les conclusions tirées dépendent elles
essentiellement de la forme de la concurrence, de la différenciation des produits, du degré de
concentration dans l'industrie et du degré des économies d'échelle inexploitées. Des données
statistiques sur ces différentes variables ne sont pas toujours disponibles. Aussi les inputs et la
procédure de construction de modèles doivent-ils être choisis avec précaution et rigueur.
De nombreuses évaluations des regroupements existant en Afrique au Sud du Sahara
ont été faites. NGILA MWASE (1998) a tenté de déterminer l'apport de l'Afrique du Sud
dans le processus d'intégration économique de l'Afrique de l'Est et Australe.
Plusieurs autres études ont été réalisées sur l'Afrique de l'Ouest, LAPORTE (1996) et
plus généralement en Afrique subsaharienne, notamment celle de ORAMAH et ABOU-
LEHAF (1998). Nous allons nous intéresser à l'analyse faite par Harald V. PROFF (1998) sur
les risques d'effets de polarisation de l'intégration régionale dans la Communauté de
Développement Sud Africain.
A3 - La Communauté de Développement Sud Africain (CDSA ou SADC).
On peut dire que malgré les expériences négatives de l'intégration régionale en
Afrique subsahararienne, les membres de la Communauté de Développement Sud Africain ont
annoncé en août 1996 de faire de la région toute entière une zone de libre-échange. PROFF
(1998) a tenté d' évaluer l'opportunité de cette Communauté ou plus spécifiquement les
chances d'un développement concerté dans cette zone.
Il faut reconnaître que depuis la mise sur pied en 1992 du programme définissant les
nouvelles orientations de la Communauté européenne, une nouvelle tentative d'intégration
82

régionale en Afrique de l'Est et Australe a posé les bases de la SADC qui regroupe dix pays
(Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Namibie, Swaziland, Tanzanie, Zambie
et Zimbabwe). Ces Etats composaient déjà l'ancienne Conférence de Coordination de
Développement de l'Afrique du Sud (CCDAS ou SADCC). Ce n'est que plus tard que la
République Sud Africaine (RSA) et l'Ile Maurice les rejoignent formant un groupe de douze
pays.
A3.1 - Les objectifs de la SADe.
Les principaux objectifs de la Communauté sont d'atteindre le développement et la
croissance économique en combattant la pauvreté, et en contribuant à l'élévation du niveau de
vie des peuples sud africains. A cet égard, il est nécessaire d'avoir des politiques communes;
des institutions fortes et d'atteindre une certaine complémentarité entre les stratégies
nationales et régionales de développement. Ce qui est affirmé en 1996 est de faire en sorte que
la région toute entière devienne une zone de libre-échange au terme de huit ans.
Comme l'indique LEISTNER (1995), on attend de l'intégration régionale qu'elle
améliore le bien-être économique grâce aux gains commerciaux. Mais la question que pose
PROFF (1998) est de savoir si la SADC va conduire aux effets de polarisation ou bien
constitue-t-elle une opportunité de développement concerté.
Le problème est que les objectifs d'amélioration de bien-être par un accroissement des
recettes commerciales sont difficiles à atteindre. En effet, les effets bénéfiques de l'intégration
régionale en Afrique de l'Est et Australe se heurtent à quatre obstacles principaux:
(1) un système d'échange entre les pays membres défavorable car basé principalement
sur des exportations de matières premières, ce qui limite les gains de l'intégration régionale;
(2) un fort pourcentage de recettes publiques lié aux droits de douane dans les pays
membres rend difficile la réduction des tarifs;
(3) pas de volonté politique de sacrifier sa souveraineté, condition préalable à tout
accord multilatéral, ajouté à un grand désaccord idéologique sur la politique économique;
(4) de fortes inégalités de niveau de développement dans la région, ce qui tend à
biaiser le partage des gains de l'intégration.
83

Que peuvent signifier ces obstacles pour la Communauté de Développement Sud
Africain?
Selon PROFF, tous les pays membres de la SADC produisent et exportent des
matières premières qui ne sont pas commercialisées à l'intérieur de la zone mais sont
exportées dans des économies plus développées, où elles font face à des droits de douane.
Environ 80% du commerce intra-régional est libre mais les 20% restants concernent
les produits « sensibles» qui ont un intérêt majeur pour les pays, à l'instar du textile, du sucre
ou des automobiles. Dans ces conditions, apparemment, il reste un grand potentiel de création
d'échange par la réduction des tarifs.
Mais le problème crucial des intégrations régionales dans les pays en développement
est la perte des recettes publiques issues des droits de douane sur les importations. En effet,
les droits de douane constituent généralement une part importante (20 ou 30%) de recettes
publiques dans les pays de la SADe. Cela a été spécialement important pour la SACU
(l'Union Douanière pour l'Afrique de l'Est et Australe) créée par la RS.A, le Lesotho, le
Swaziland, le Botswana et la Namibie en 1969.
Les biens circulaient librement entre les membres avec un tarif extérieur commun sur
les biens importés des pays tiers. Les droits de douane étaient appliqués en un taux commun
administré par la Banque de réserve de la R.S.A. Les recettes étaient partagées annuellement
entre les Etats membres en proportion de la valeur de leurs importations, leurs productions et
de la consommation des biens taxables. Comme les budgets de plusieurs pays membres
dépendaient lourdement de leur part de recettes douanières, il fut très difficile d'appliquer
véritablement les accords.
Même s'il y avait un faible niveau de commerce intra-régional dans la SADC (5% du
commerce global selon LEISTNER), une part trop forte de recettes douanières dans les
recettes publiques rend les pays membres individuellement inflexibles dans les négociations
commerciales. Il yale risque d'avoir ainsi une intégration régionale trop fermée avec des
84

droits de douane trop élevés vis-à-vis des pays tiers. Ce qui est souvent la raison essentielle
d'échec des accords régionaux en Afrique ou en Amérique Latine.
Mais si la régionalisation conduit vers une ouverture sur les marchés mondiaux, les
accords d'intégration régionale conduiront sans doute à une expansion de la production
industrielle et des exportations industrielles dans les pays concernés. C'est pour cette raison,
pense PROFF (1998), qu'une réforme du système de taxation pour générer des recettes est une
question importante pour l'intégration régionale en Afrique de l'Est et Australe. A cet égard,
réformer les structures et les institutions dans chaque pays membre de la SADC est une étape
aussi nécessaire que réaliste pour encourager les gouvernements à modifier graduellement leur
système de finances publiques.
Il faut dire que cette exigence n'est pas propre à la SADC puisqu'elle est aussi un
objectif visé par les programmes d'ajustement structurels du FMI et de la Banque Mondiale
en Afrique au Sud du Sahara (World Bank, 1994).
En effet, s'agissant de la SADC, la République Sud Africaine (RSA) est l'économie
dominante de cette entité. Le fait est que la RSA accepte de réduire sa souveraineté en
échange du progrès économique, c'est-à-dire pour plus d'exportations dans les industries ou
pour une réduction des migrations illégales. Pour les autres pays membres de la SADC, avec
l'intégration régionale, le degré de responsabilité de leurs états respectifs sera plus grand, ce
qui est aussi un avantage car ils ont plus d'importance aux yeux des organisations
internationales comme le FMI, la Banque Mondiale ou tout autre donateur.
Habituellement, l'intégration régionale se focalise sur la création de commerce. A cet
égard, l'effet de création d'échange est l'un des effets non monétaires qui conduit à plus de
commerce entre les pays membres, compte tenu de la réduction des droits de douane. Ce qui
amène les économies de ces pays à être stimulées et à cOImaître une croissance économique
durable. Cet effet positif de l'intégration régionale, qui est basé sur l'utilisation efficace des
ressources disponibles dans les pays participants, s'oppose cependant à un effet négatif, l'effet
de détournement des échanges· .
• NOLIS avons défini 10lls ces effets dans le chapitre premier de cette thèse.
85

L'argumentation traditionnelle indique que la libéralisation commerciale tend à
polariser le développement régional autour des pays partenaires les plus avancés, LEISTNER
(1995). Les disparités initiales sont donc perpétuées par un processus cumulatif et la
croissance économique devient l'apanage des pays économiquement plus avancés.
A3.2 - Le problème du partage des gains commerciaux.
Comme l'indique KRUGMAN (1991), une analyse complète des coûts et bénéfices de
l'intégration régionale nécessite non seulement une base théorique forte mais aussi une
analyse assez poussée du processus de négociations commerciales. En effet, lors de ce
processus de négociation, la question du partage des gains entre les partenaires est un point
focal.
Aussi, dans la SADC, le partage des gains commerciaux est au centre des discussions.
Pour comprendre ce concept, nous allons l'illustrer par un graphique (figure 2.1-1) emprunté à
SALVATORE (1995).
Le point de départ est la situation d'équilibre E en autarcie. Comme le pays 1 se
spécialise dans la production du bien A et baisse sa frontière de production, il a un
accroissement des coûts d'opportunité dans la production de ce bien. Pour le pays 2, le même
effet se produit avec le bien B. Le processus de spécialisation se poursuit jusqu'à ce que les
prix relatifs PA et PB deviennent égaux dans les deux pays. Les gains commerciaux peuvent
être divisés en deux composantes: les gains issus de l'échange et les gains qui proviennent de
la spécialisation, comme on peut le voir pour la pays 1 dans la figure 2.1-1.
Sous 1'hypothèse que le pays 1 se spécialise dans la production du bien A avec une
ouverture commerciale mais continue de produire au niveau d'équilibre E, le pays 1 pourrait
exporter le bien A et importer le bien B au prix relatif qui prévaut sur le marché mondial Pw,
qui conduit au niveau de consommation S sur la courbe d'indifférence 1. Le passage du point
d'équilibre E au niveau de consommation S mesure les gains à l'échange. Si le pays 1 se
spécialise concomitamment dans la production du bien A et produit au niveau F, il peut alors
86

commercer et consommer au point G sur la courbe d'indifférence 2. Le passage de S à G
mesure les gains issus de la spécialisation.
Le prix mondial Pw définit les termes de l'échange entre les deux économies. Ces
termes de l'échange indiquent la valeur avec laquelle chaque économie peut obtenir les
importations de l'autre. Dans la figure (2.1-1), un accroissement du prix relatif du bien A,
rendant la pente GF plus abrupte, améliore les termes de l'échange du pays 1 et détériore ceux
du pays 2.
Figure 2. 1-1: les gains commerciaux
(termes de l'échange)
Pw
'-------....,...-----------'--~
A
o
Comme les tennes de l'échange déterminent la distribution des gains commerciaux, le
consommateur dans chaque pays gagne à l'échange, mais le consommateur du pays 1 gagne
plus que celui du pays 2. Ce qui conduit à dire que les gains commerciaux sont partagés par
rapport aux termes de l'échange.
De ce point de vue, si les termes de l'échange connaissent une évolution négative dans
les pays en développement, il peut y avoir un biais dans le partage de ces gains commerciaux
dans les pays les plus développés.
87

: Pour évaluer la distribution des tennes de l'échange à l'intérieur de la SADe, en
utilisant ce modèle statique, il apparaît que seul le commerce intra-régional pennet de le faire.
Mais ce commerce est tellement faible, de l'ordre de 5% du commerce mondial.
PROFF (1998) a montré le développement des tennes de l'échange des plus petits
pay~ membres de la SADe en comparaison avec les tennes de l'échange de la République
Sud Africaine et du Royaume Uni comme groupe de référence.
Il apparaît qu'il n'y a pas de véritable trend du développement des tennes de
l'échange. En effet, alors que les petits pays de la SADe sont sujets à une évolution erratique
de leurs tennes de l'échange, ceux du Royaume Uni semblent plutôt stagnants et ceux de la
RSA se détériorent lentement.
Tandis que la structure commerciale des petits pays de la SADe est plus ou moins
semblable par rapport à leur commerce total et intra-régional, la RSA présente une structure
ambivalente: elle a une structure traditionnelle proche des pays en développement dans son
commerce total mais elle a une structure similaire à celle des pays développés dans son
commerce intra-régional. Il y aurait donc des différences à l'intérieur de la SADe. La
République Sud Africaine réalise un fort excédent commercial qui est basé sur les
exportations des biens industriels. Les petits pays sont plutôt déficitaires par rapport à leur
commerce intra-régional.
Mais globalement, il n'y a pas d'indications claires quant à l'argumentation d'un biais
dans la distribution des gains commerciaux consécutifs aux effets négatifs de ses tennes de
l'échange.
En particulier, avec une détérioration du Rand sud africain, qui
affecte
négativement la qualité des indicateurs des tennes de l'échange.
De plus, un indicateur statistique, seul approprié à caractériser des situations
statistiques comparables ne semble pas être méthodologiquement adéquat à détenniner un
processus dynamique de développement. Une autre posibilité est d'analyser la distribution des
gains commerciaux à travers un modèle dynamique qui prenne en compte les transactions
économiques entre les pays industrialisés et les pays non industrialisés.
88

Les modèles indiquent plutôt qu'en général, les pays économiquement forts attirent
plus d'industries à cause des rendements croissants d'échelle, la meilleure disponibilité de la
main d'œuvre et de l'existence des services nécessaires à l'industrialisation comme le
transport, les finances et la réglementation du droit. En conséquence, des industries intensives
en main d'œuvre dans les pays les moins développés connaissent des problèmes dus à
l'incapacité à faire face aux importations des biens moins chers provenant des pays
économiquement plus développés de la région (c'est-à-dire la SADC).
En fait, ni le modèle statique traditionnel expliquant la distribution des gains compte
tenu des termes de l'échange ni le modèle plus dynamique de MYRDAL et KALDOR
n'explique le biais dans la distribution des gains au sein de la SADe.
Les résultats de la SADC contrastent d'abord avec les conclusions de KRUGMAN et
VENABLES (1995) qui annoncent un premier stade d'augmentation des inégalités des
salaires réels puis une réduction de ces inégalités. Les coûts de transport dans la SADC sans la
RSA sont très élevés à cause de la pauvreté des infrastructures. Ce qui laisse supposer une
distribution des gains commerciaux inégale. Mais l'impact de l'intégration régionale sur cette
infrastructure semble positive.
La République Sud Africaine domine la SADC économiquement puisque son PNB de
125,2 milliards de dollars US (1994) est presque quatre fois celui additionné de ses onze
partenaires 33,1 milliards de dollars US, LEISNER (1995). Mais la majorité de la population
de la RSA souffre des problèmes de développement énormes. Ainsi, l'inégalité entre les
différents pays membres de la SADC doit être toujours comparée aux inégalités à l'intérieur
de chaque pays particulier de la région.
Ce qu'il faut retenir ici est que compte tenu de tous les arguments avancés jusqu'ici, il
est clair que ni la généralisation des gains de bien-être de l'intégration régionale ni la
généralisation de la distribution des gains commerciaux n'est possible. En réalité, les
négociations pour un regroupement au sein de la SADC sont possibles parce que sans gains
mutuels, il n'y a pas de raison de débuter des négociations substantielles. Ces négociations
89

détenninent finalement le partage des gams dans la Communauté de Développement de
l'Afrique du Sud et mieux chaque Etat membre définit ses objectifs, mieux sera le résultat de
la négociation.
Nous pouvons nous intéresser maintenant à la coopération institutionnelle entre les
pays de la zone franc.
A4 -La coopération institutionnelle entre pays de la zone franc.
Depuis plus de trente ans, des expériences d'intégration économique régionale se sont
multipliées dans le monde. Et nombreuses d'entre elles se sont inspirées de l'expérience
européenne. C'est ainsi que la libéralisation commerciale a presque toujours précédé la
coopération monétaire. Or, l'expérience des pays africains de la zone franc est différente.
Ces pays ont choisi la séquence "coopération monétaire d'abord, coopération
commerciale ensuite ". Et s'il est un domaine où les pays d'Afrique subsaharienne semblent
avoir des résultats relativement bons, c'est celui de la coopération institutionnelle comme le
notent P et S GUILLAUMONT (1993).
Cette coopération semble couvrir beaucoup de domaines: la recherche, la fonnation et
l'éducation, la lutte contre la sécheresse ou les grandes endémies, la promotion de produits
agricoles ou la mise en valeur de bassins fluviaux, etc. En fait l'efficacité de ces institutions
est assez inégale. Mais c'est essentiellement sur le domaine de la coopération monétaire que
cette coopération institutionnelle est remarquable.
Les deux unions monétaires constituées dans le cadre de la zone franc représentent en
leur genre une expérience unique dans le monde aussi bien par le nombre des Etats qui y
adhèrent que par la durabilité de celles-ci. D'un côté il y a eu l'Union Monétaire Ouest-
Africaine (UMOA), créée en 1962. Elle était fonnée de sept pays. Cet accord a pris fin en
janvier 1994 avec la création de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine 1 , après la
1 Voir, pour plus de précisions. B. LAPORTE (1996).
90

dévaluation du franc CFA. De l'autre côté, l'Union des Etats membres de la Banque des Etats
d'Afrique Centrale (BEAC).
Cette coopération a connu, au cours des dernières années, des développements
importants notamment en avril 1991, à la réunion des Ministres des Finances à Ouagadougou,
où a été affirmée la volonté des Etats d'utiliser la base que constituent les Unions monétaires
et la zQne franc PQur aller de l'avant dans le domaine de l'intégration économique, (P et S
GUILLAUMONT, 1993). De même, en janvier 1994, est intervenu le changement de parité
entre les francs CFA et le franc français.
On sait que les grandes lignes d'une coopération institutionnelle devant conduire'à
l'Union économique ont été dessinées. Quatre grands domaines de coopération entre pays de
la zone franc sont ainsi définis, dont certains ont déjà fait l'objet de décisions: la surveillance
multilatérale des politiques budgétaires, les institutions financières (banques, assurances,
bourse des valeurs, ... ), le droit des affaires, la, formation d~s cadres de l'administration
économique et financière, l'élaboration de statistiques et d'études économiques, etc.
Cette coopération s'opère soit dans l'ensemble des pays africains de la zone, soit dans
le cadre de chaque union monétaire. En réalité, ce qui fait l'originalité de cette démarche
d'intégration en zone franc, c'est que la coopération institutionnelle est l~ première étape du
processus. La réalisation du marché commun dans le cadre de chaque union, par la
suppression des tarifs douaniers internes et la mise en place d'un tarif extérieur commun, ne
constitue que la deuxième phase du processus.
Dans le premier chapitre (cf section II, A.), nous avons montré, en nous inspirant des
travaux de DE MELO et alii (1992), comment cette coopération institutionnelle pouvait
constituer pour les Etats un atout essentiel en vue de la mise en œuvre de bonnes politiques.
En réalité, les quatorze Etats africains de la zone franc, réunis en deux unions
monétaires, ont décidé d'avoir une monnaie unique dans chaque union, émise par une Banque
centrale, la BCEAO pour l'Afrique de l'Ouest et la BEAC pour l'Afrique Centrale. Ce sont
des établissements multinationaux.
91

Ces Banques centrales sont gérées de manière consensuelle par l'ensemble des
représentants des Etats ainsi que par les représentants de la France qui siègent au Conseil
d'Administration des deux Banques centrales. Cette présence des représentants français aux
Conseils d'Administration se justifie par le fait que la France garantit la convertibilité en
francs français des francs CFA, grâce aux comptes d'opérations ouverts auprès du Trésor
français par les Banques Centrales de la zone franc. Ces comptes peuvent devenir débiteurs
sans limite fixée a priori. Il est bien reconnu qu'il appartient à la politique monétaire d'assurer
l'équilibre à moyen terme des balances de paiements par un contrôle de la création monétaire,
la garantie française devant permettre de faire face à des déséquilibres transitoires dus aux
chocs extérieurs.
Les statuts des Banques centrales précisent les instruments de la politique monétaire et
les règles de base de leur application. C'est ainsi que les avances des Banques centrales aux
Trésors publics sont limités à 20 % des recettes budgétaires de chaque Etat. Le refinancement
des crédits à l'économie par les Banques centrales dans chaque Etat est quantitativement
limité et s'opère à des taux identiques dans tous les Etats de la zone.
Il existe toutefois une certaine décentralisation des décisions au niveau des comités
d'Etat qui permet une flexibilité dans l'application de la politique monétaire en fonction de la
situation économique propre à chaque pays.
Pendant plus de trois décennies, l'inflation a été mIeux maîtrisée dans les pays
africains de la zone franc que dans les autres pays en développement tant africains que non
africains (voir PLANE, 1988 et DEVARAJAN, DE MELO, 1991). Même si la garantie de
convertibilité des francs CFA par la France a joué à un moment donné, les débits des comptes
d'opérations ont été temporaires et d'ampleur très limitée.
Si la coopération monétaire a donc rempli sa mission, on ne peut nier que les pays de
la zone aient connu dans les années 1970 une croissance excessive de leur masse monétaire
qui s'est poursuivie pour certains pays de la BEAC jusqu'au milieu des années 1980.
92

Cette expansion monétaire est imputable à la hausse du prix des principaux produits
exportés par les pays de la zone franc (café, cacao, pétrole, coton, palmier à huile, etc.).
Le boum des produits pnmalres, qui s'est accompagné d'un accès facile aux
financements internationaux, a conduit ces pays à accroître massivement leurs dépenses
budgétaires, avec une augmentation des effectifs de la fonction publique, la mise en œuvre
d'importants programmes d'investissements publics, la multiplication des établissements
publics et parfois la nationalisation de nombreuses industries ...
Dans la plupart des pays, l'inflation a été plus rapide que l'inflation française et,
compte tenu du rattachement des francs CFA au franc français, les taux de change réels se
sont appréciés et les balances des paiements courants fortement déséquilibrés. Les Etats ont
été contraints par la suite à mettre en œuvre des programmes d'ajustement de leurs économies
et plus tard à un changement de parité de leur monnaie.
Mais on peut dire que, sur le plan monétaire, les pays de la zone franc connaissent de
meilleurs résultats que les autres pays en développement. Mais sur le plan de la coopération
commerciale, les résultats ne semblent pas aussi bons.
B - L'intégration commerciale en Afrique Centrale
(le modèle de gravité).
Pour analyser les effets réels et potentiels de la coopération économique sur les
échanges, il est nécessaire de mesurer le degré de correspondance entre les exportations d'un
pays et les importations d'un autre pays comme l'avaient fait BEERS et LINNEMAN (1991).
Nous allons donc préciser les techniques d'analyse qui permettent d'étudier les
similarités entre les importations et les exportations des pays, nous verrons ensuite quels ont
été les résultats de la coopération commerciale en Afrique centrale pour l'année 1996.
93

BI - Les techniques d'analyse
Parmi les techniques d'analyse des échanges commerciaux bilatéraux entre les pays, il
y a la mesure de la similarité de l'import-export et le comportement de certaines variables
structurelles et socioculturelles vis-à-vis de flux bilatéraux de commerce.
BI.I- La mesure de la similarité de l'import-export.
Il existe deux mesures alternatives du degré de correspondance des biens entre les
exportations et les importations des pays partenaires.
La première appelée Similarité des Biens à Echanger (SBE), a été employée pour la
première fois par LINNEMAJ~ (1966) et reprise par ORAMAH et ABOU-LEHAF (1998). La
seconde appelée Indice de Similarité des Exportations (ISE), est de FINGER-KREININ
(1979).
Si les indices i, J, et k correspondent respectivement au pays exportateur, au pays
importateur et au type de bien, les deux mesures sont définies par les équations suivantes:
n
n
n
SBEij = l (Xik M jk ) / (I Xi~ )(I MJk)
(2.1-1)
k
k
k
Il
n
n
ISEij = l [min(Xik l X ik ,Mjk ) / l M jk ]
(2.1-2)
k
k
k
Xik représente les exportations par le pays i du bien k, Mjk représente les importations du
bien k par le pays}. Les deux mesures se situent dans l'intervalle zéro (pas de similarité ou de
correspondance) et une (parfaite correspondance des biens).
En fait la SBE mesure le cosinus de l'angle entre le vecteur des exportations du pays i
et le vecteur des importations du pays J dans l'espace de n biens. L'ISE s'obtient, par contre,
en sommant le minimum du produit entre les exportations et la somme des exportations ou les
importations de biens de type k dans le pays i exportateur ou le pays J importateur. Les deux
94

. . . . . . .
. '
'1';
.' J ...~. ,
. ; ~ "

mesures sont sensibles au nIveau de l'agrégation. Accroître le nombre de biens tend à
diminuer leurs valeurs numériques.
Nous avons besoin, pour ces mesures, de connaître bien entendu le total des
exportations du pays i et le total des importations du pays}. BEERS et LINNEMAN (1991)
ont indiqué que ces mesures indiquent un commerce potentiel ou l'intensité attendue des
échanges bilatéraux entre les pays. Ainsi une valeur non nulle de la SBE ou de l'ISE ne
signifie pas nécessairement que le pays i exporte vers le pays} en réalité.
De plus, la mesure de la similarité des exportations et des importations estimées peut
être interprétée comme reflétant l'intensité espérée du flux de commerce bilatéral du pays
exportateur au pays importateur.
Les équations (2.1-1) et (2.1-2) donnent les mesures qui sont interprétées comme des
variables qui reflétant l'intensité attendue du flux de commerce bilatéral entre un pays i
exportateur et un paY$} importateur.
Il est donc clair que l'intensité des échanges ainsi définie transcende la similarité de
l'import-export et inclut la distance géographique entre les partenaires commerciaux, les tarifs
à l'importation et les autres barrières commerciales non tarifaires.
Bl.2- Le modèle de gravité
Pour expliquer le niveau des flux commerciaux réels entre deux pays, on se sert de la
régression par les moindres carrés ordinaires, surtout pour démontrer empiriquement
l'importance du degré de similarité des exportations et des importations. C'est souvent le
modèle de gravité qui est utilisé à cet effet.
La forme de ce modèle est la suivante:
(2.1-3)
95

avec Ci}' le flux total du commerce d'un pays i de la CEMAC à un autre pays j'de la
CEMAC;
y, le Produit Intérieur Brut (PIE) à prix courant;
x ij' les exportations du pays i vers le pays} ;
(DPNB)I) la différence des PNB entre les deux pays en valeur absolue;
(DTS)i), la différence des taux de scolarisation entre le pays i et le pays} ;
(DUT)i), est la différence d'utilisation des terres entre les deux pays i et} ;
(FRONT)i), est une variable muette qui prend la valeur 1 si les deux pays sont
frontaliers (ou zéro autrement)l.
Toutes les variables sont en logarithmes népériens. Ce qUI nous permet d'avoir
directement des élasticités entre la variable endogène et les variables exogènes.
Traditionnellement, les facteurs structurels sont ceux qUI sont développés dans les
théories du commerce international. Ils sont liés à la dimension économique et aux
caractéristiques géographiques et socioculturelles des pays. Le PIB et le PNB par tête sont
introduits comme facteurs de dimension. Ils représentent respectivement le niveau d'activité
et le niveau de développement des pays. Les relations attendues avec les échanges sont
normalement positives.
La théorie traditionnelle du commerce international explique l'échange par la
différence entre les nations. Les différences dans les dotations factorielles, dotations en
capital, en travail, en capital humain, ... , sont difficiles à évaluer dans les pays en
développement, c'est pour cela que nous utilisons des proxy-variables.
Pour les dotations factorielles classiques, le premIer rapport "terre arable sur
population" prend en compte deux des principaux facteurs de production de la région, la terre
et le travail.
1 JI peut être remarquer qlle nOlis n'avons reteml comme mesure de la similarité, la variable, ESB, qui est plus
signiflcativeque ISE
96

Pour les dotations en facteurs spécifiques, le taux de sCÇ}larisation dans le secondaire
est choisi comme proxy-variable de l'accumulation du capital humain. C'est parce que la
population a un niveau d'éducation suffisant qu'elle peut acquérir une qualification
professionnelle satisfaisante par le travail et utiliser des techniques de production moderne. La
différence en valeur absolue entre deux pays est introduite pour chacun de ces indicateurs. Les
relations attendues sont positives. Plus les écarts sont grands, plus les échanges sont
importants.
On prend également en compte un facteur de proximité géographique et ethnique,
l'existence d'une frontière commune. Ainsi, non seulement la distance qui sépare des centres
économiques de part et d'autre de la frontière est souvent faible, mais en plus, le tracé des
frontières en Afrique centrale est tel que les populations qui vivent de chaque côté de celles-ci
appartiennent le plus souvent à la même ethnie. La relation attendue est de ce fait positive.
Les nouvelles théories du commerce international*, conçues dans un cadre de
concurrence imparfaite, expliquent l'échange par la combinaison des économies d'échelle, de
la stratégie des finnes et du goût des consommateurs pour les produits différenciés. La
similitude économique des pays devient ainsi un facteur d'échanges. Cependant, il apparaît
que ce cadre d'analyse s'adapte mal à la situation des pays d'Afrique centrale.
En effet, si la structure des marchés est souvent une structure de concurrence
imparfaite, la différenciation des produits reste faible du fait d'une demande standardisée
(produits de premières nécessités notamment). De plus, les économies d'échelle attendues
sont faibles à cause de la taille relativement petite des pays de la région.
H2 - Les résultats et commentaires
Nous avons utilisé les deux mesures de la similarité des exportations et des
importations de la zone pour apprécier l'intensité espérée du flux de commerce bilatéral entre
• Bernhofen D.M., (1999), il Intra-Industry Trade and Strategic Interaction: Tlzeory and Evidence ii, Journal of
International Economies, 47, pp. 225-244. Krugman P.R. and Venables A.J. (1995), il Globalisation and the Inequalities
of Nations ii. Quaterly Journal of Economies, 60(4), pp. 857-880. Hummels D. et Levinsohn J., (1995), il Monopolislic
Competition and International Trade . Reconsidering tlze Evidence. Quaterly Journal of Economies, 110, pp. 799-836.
97

un 'pays exportateur i et un pays importateur j à partir des données de l'année 1996 1• Une seule
a été retenue.
Dans le tableau (2.1-1), nous avons tenté de saisir, par paire de pays, les plus fortes et
les plus faibles potentialités commerciales comme mesure dans un sens absolu. Les résultats
du tableau (2.1-1) montrent qu'il y a beaucoup plus de paires de pays ayant les plus faibles
potentialités (en fait zéro) de commerce bilatéral que ceux qui ont de fortes potentialités.
En d'autres termes, pour les six pays de la zone, il y a une plus grande potentialité de
mauvais partenaires commerciaux qu'il y en a de bons. Le tableau (2.1-1) montre que sur les
six pays de la CEMAC, il n'y a que le Gabon et la Guinée équatoriale qui peuvent avoir de
fortes potentialités commerciales avec le Cameroun car leur indice en tant que exportateur
vers ce pays est de 1 alors que le Cameroun exporte vers tous les pays de la zone.
Tableau (2.1-1) : Les valeurs plus élevées et plus basses de la mesure de la similarité de l 'import/export par
pays exportateur (1996)
,
'"
,
..
SBEï
Pays exportateur
Le plus élevé
Le plus bas
Cameroun
0.84
Guinée- Equat.
0.000
R.CA., Tchad
Congo
0.709
R.CA.
0.000
Cameroun, Gabon,Tchad,
Guinée Equatoriale
Gabon
1.000
Cameroun
0.000
R.CA
Guinée- Equatoriale
1.000
Cameroun
0.000
Gabon, R.CA.
R.CA.
0.452
Guinée-Equat.
0.000
Cameroun, Gabon, Congo
Tchad
0.662
R.CA.
0.000
Cameroun, Gabon, Congo
Les résultats récapitulés dans le tableau (2.1-2) indiquent que la plupart des variables
structurelles apparaissent avec le signe attendu pour l'année 1996. Le signe négatif du PIB du
pays j importateur signifie que la faiblesse de celui -ci n'est pas favorable aux échanges intra-
zones. La différence des PNB par tête apparaît avec un signe positif; ce qui montre que c'est
plus la différence que la similitude qui explique l'échange en Afrique centrale. C'est
certainement pour cette raison que le Gabon, dont le PNB par tête est très différent de celui
des autres pays de la zone, a une mesure plus forte de la similarité des biens.
1 Les résultats détaillés Ollt été obtellus à partir de l'examen des 6 pays d'Afrique centrale couverts par l'étude.
98

Tableau (2.1-2) : Les résultats de l'estimation du modèle de gravité,
analyse des flux de commerce bilatéral intra-CEMAC (1996)
Variables
Coefficients. (Ecart-type)
t-student
t-prob.
Constante
-1,975800
(1,901200)
-1,039
0,3105
Yi
0,248180
(0,218350)
1,137
0,2685
Yj
-0,036160
(0,226300)
-0,160
0,8746
Xij
0,068056
(0,074085)
0,919
0,3687
DPNBij
0,169300
(0,246070)
0,688
0,4990
DTSij
-0,317020
(0,500780)
-0,633
0,5335
DTPij
0,411900
(0,185860)
2,216
0,0373*
FRONTij
0,017410
(0,179810)
0,097
0,9238
ESBij
0,158870
(0,146470)
1,085
0,2904
RZ - 0,52386
F(8, 21) = 2,8881 [0,0245]
DW= 2,73
La différence des taux de scolarisation n'est pas favorable aux échanges intra-CEMAC
en 1996. Ce qui conforte 1'hypothèse de départ. Plus les pays d'Afrique centrale ont des taux
de scolarisation différents, moins ils échangent entre eux. Ces pays ont donc intérêt à coopérer
davantage en matière de formation de leurs cadres s'ils veulent améliorer leurs échanges
bilatéraux. Les hypothèses de constance des coefficients ne sont pas rejetées au seuil de 10 %.
Un certain nombre de variables muettes n'ont pas été retenues. C'est notamment le cas
des variables socioculturelles LANGij et CEMACij, parce que tous les pays de la zone ont le
français comme langue d'échange] et appartiennent tous à la CEMAC.
Les résultats montrent également que la mesure de la similarité de l'import-export
contribue à l'explication du niveau des flux d'échange bilatéraux intra-CEMAC. Même si
cette explication n'est pas substantielle, son paramètre est significativement différent de zéro.
Ce qui montre que cette variable a une influence certaine sur le flux de commerce intra-zone.
Il apparaît clairement que l'établissement d'un véritable ensemble de libre-échange
entre les pays d' Afriq ue centrale pourrait être bénéfique au commerce intra-zone, eu égard au
fait que le degré de similarité d'import-export est favorable aux échanges bilatéraux et que les
pays de l'Afrique centrale ont tendance à avoir une meilleure correspondance de leurs
exportations avec les importations des pays hors zones2.
1 Même la Guinée-Equatoriale, ancienne colonie espagnole utilise la langue française dans ses rapports avec les autres
pays partenaires de la CEMAC
2 Une autre étude englobant les autres pays hors zones pourra être menée à cet effet.
99

Mais on voit tout de même que les échanges bilatéraux officiels intra-CEMAC ne sont
pas tout à fait libéralisés. Le F-statistique n'est pas suffisamment élevé pour conclure au rejet
de la nullité de 1'hypothèse.
De plus, il est possible qu'en intégrant les échanges non officiels dans cette analyse,
nous ayons des conclusions différentes, eu égard au fait que les échanges de part et d'autre
d'une frontière sont certainement plus importants que ceux qui sont officiellement enregistrés.
Par ailleurs, il faut bien reconnaître que plus de trente ans après sa création, l'UDEAC
reste un échec que révèle entre autres, la faiblesse de ses échanges internes.
Tableau (2.1-3) : Commerce des marchandises des pays de la CEMAC en millions
de dollars U.S. et en pourcentage
Le Degré d'ouverture des Etats de la Ç.E.M.A.C.
Exp. Totales Imp. totale Total des
P.I.B.
Degré
é changes
d'ouverture
Moyenne triennale pour 91-92-93
Cameroun
1852
1141
2993
11572
25,86
Congo
1093
527
1620
2780
58,27
Gabon
2207
793
3000
5467
54,87
Guiné e-Equa
48
61
109
169
64,50
R.CA
88
121
209
1317
15,87
Tchad
234
231
465
1226
37,93
Moyenne triennale pour 94-95-96
Cameroun
2222
1207
3429
9086,2
37,74
Congo
1661
1536
3197
2469,4
129,46
Gabon
2850
978
3828
5794
66,07
Guiné e-Equa
141
152
293
280,2
104,57
R.C.A.
244
174
418
1090
38,35
Tchad
124
216
340
1136,8
29,91
Sources: - Banque des Etats d'Afnque Centrale, Etudes et Statistiques. Janvier 1997.
En effet, le commerce extérieur à l'union est dominant pour tous les Etats membres de
l'UDEAC. La plupart d'entre eux dépendent largement du monde extérieur à l'union et
l'importance de cette dépendance est mesurée par leur degré d'ouverture. Plus la valeur de cet
indicateur est forte, plus le degré de la dépendance est fort.
Le tableau (2.1-3) permet d'expliquer que certains Etats comme le Congo, le Gabon et
la Guinée-Equatoriale sont relativement plus dépendants vis-à-vis du commerce extra-Union
100

pUIsque
leur
degré
d'ouverture
en
prenant
la
moyenne
triennale
(1991-1993)
est
respectivement de 58,27 %, 54,87 % et 64,50 % de leur produit intérieur brut.
Ces chiffres restent élevés pour ces trois pays en moyenne des trois années qui ont
SUI VI la dévaluation du franc CFA. (1994-1995-1996) surtout pour le Congo et la Guinée-
Equatoriale.
On remarquera que, entre les deux périodes, les exportations en dollars U.S. restent
relativement stables ainsi que les importations, excepté pour le Congo dont les importations
connaissent un triplement de leur valeur malgré la dévaluation du franc CFA.
Les chiffres révèlent que le Congo, le Gabon et la Guinée-Equatoriale sont beaucoup
plus dépendants du reste du monde sur le plan commercial. Mais la Quinée-Equatoriale et le
Tchad ont une balance commerciale déficitaire.
Ces chiffres suggèrent que les perfonnances économiques de ces pays sont largement
détenninées par leur secteur extérieur. Elles sont fortement tributaires de la conjoncture
internationale.
On peut donc affinner que très peu de progrès ont été réalisés au nIveau de
l'intégration véritable des pays membres. Aucun calendrier n'a été adopté pour la mise en
place d'un tarif douanier extérieur commun; l'idée du système de compensation a été
abandonnée; la liberté de circulation de la main-d'oeuvre n'a jamais été instaurée; les projets
communs comme la raffinerie de pétrole (SOGARA) ont été abandonnés et la taxe unique est
devenue un instrument de protection et non d'intégration.
Tableau (2.1-4): Commerce total des P.A.C. et intra-CEMAC (en millions de $ U.S.)
Export.
Import.
Total
Exp.
Imp.
Comm. Part XO Part MO
%C.
totales
totales
comm.
int-z
int-z
intra-z.
intra-z
intra-z.
int-z
191-92-93
4442
2874
7316
21,B
28
49,6
0,49
0,97
0,68
194-95-96
6412
3505
9917
139
152
291
2,17
4,34
2,93
..
Sources
- Les calculs on/ ete la Ils a par/Ir des donnees du F.M.I. (Depar/ment 01 Trade and Statlsttcs)
101

Les échanges générés par l'instauration de l'UDEAC n'ont pas permis d'engranger des
gains d'efficacité qu'on pouvait attendre de l'intégration, grâce noltamment à une plus grande
spécialisation et à l'exploitation des économies d'échelle.
Les données du Tableau (2.1-4) indiquent le commerce moyen de la région trois ans
avant et après la dévaluation des francs CFA. On constate en général une augmentation de
celui-ci au niveau de la zone même si les chiffres restent encore très modestes. Mais comme
on pouvait s'y attendre, les importations intra-zones augmentent plus vite que les
exportations. Ce qui peut vouloir dire que la dévaluation a légèrement poussé les pays de la
zone à acheter dans la zone.
Par le diagramme 1, on observe que si le commerce global intra-CEMAC est
relativement élevé après la dévaluation, il reste assez modeste en pourcentage du commerce
total des pays de la zone.
Histogramme 1 : Les échanges intra-zones des pays membres de l'UDEAC.
! iii c. 1 . Germc 1.1 % XO . 1 . C.
0 % M' . 1. C. lEI % E. 1. C. 1
_ _ _ _ _ _ .1
l
/11!
i
/
300/
~::IiO·'
91-92-93
94-95-96
C 1. Cellzac ' Le commerce intra-CEMAC;
% XO 1.
C. . La part des exportations intra-CEMAC dans les exportations totales;
% MO, l
C. .' La part des importations intra-CEMAC dans les importations totales;
% E le.' La part des échanges intra-CEMA
C dans les échanges totaux.
Comme nous l'avons dit plus haut, on apprécie les effets de bien-être des arrangements
commerciaux régionaux par la quantification des avantages statiques découlant des échanges,
en termes de création ou de détournement net de commerce, et des avantages dynamiques, en
termes d'amélioration à plus long terme de la croissance et de l'efficience économique.
102

On peut noter des variations considérables en valeur et en pourcentage du commerce
intra-CEMAC par rapport au commerce global des pays membres comme l'indique le tableau
(2.1-5) en moyenne triennale (91-93) et (94-96).
En effet, il ressort de ce tableau que le plus gros exportateur de la région en valeur
absolue est le Gabon avant la dévaluation et il est suivi par le Tchad, puis par la Guinée-
Equatoriale. Le Cameroun a la particularité d'être le seul Etat de la zone à avoir une frontière
commune avec tous les autres Etats de la CEMAC. Cette position favorise certainement son
commerce intra-zone surtout au niveau des exportations.
Les chiffres les plus significatifs sont ceux décrits par les histogrammes 2 et 3. Ils
représentent la part du commerce intra-zone dans le commerce extérieur total des pays de la
CEMAC. On voit que trois années avant la dévaluation, la Guinée-Equatoriale était le seul
Etat de l'UDEAC qui consacrait près de la moitié de ses importations totales aux importations
jntra-zones.
Tableau (2.1-5) : Le Commerce exté rieur des pays membres de la CEMAC
Exp. tot.
Imp. tot.
XO int. zone
MO int. zone
% XO int-z
% MO int-z.
Valeurs en millions de $ U.S. .
En pou'rcentage
Moyenne triennale 91-92-93
Cameroun
1 852,00
1 141,00
20,50
0,64
1,11
0,06
Congo
1093,00
527,00
0,06
4,06 '
0,01
0,77
Gabon
2207,00
793,00
0,75
10,70
0,03
1,35
Guiné e-Equa
48,00
61,00
0,00
10,30
0,00
16,8!;l
R.CA
88,00
121,00
0,18
6,87
0,20
5,68
Tchad
234,00
231,00
0,11
7,45
0,05
3,23
Moyenne tnennale 94-95-96
Cameroun
2062,00
1 081,00
133,00
1,30
6,40
0,12
Congo
1 438,00
986,00
1,30
10,70
0,10
'1,09
Gabon
2512,00
964,00
1,00
42,00
0,04
4,36
Guiné e-Equa .
93,00
127,00
0,00
31,00
0,00
24,41
R.CA
191,00
165,00
3,00
15,70
1,57
9,52
Tchad
116,00
182,00
1,00
45,00
0,90
24,7'3
..
,
Sources: . Les calculs Ollt ete fa Ils a partir des dOllllees du F.M.I. (Departlllellt ofTrade alld Statlsucs)
Il faut reconnaître que c'est le plus petit pays de la zone sur le plan économique ainsi
que sur celui de la superficie. Ce qui laisse penser que ce pourcentage n'a malheureusement
pas beaucoup d'influence sur l'évolution des échanges intra-zones.
103

Mais, ces chiffres connaissent une légère hausse trois ans après la dévaluation car cet
Etat est rejoint par le Tchad. Ce qui est tout à fait notable, c'est qu'aucun de ces pays ne peut
compter .sur ses' partenaires pour écouler ses produits, les exportations intra-CEMAC
demeurent très limitées avant comme après la dévaluation du franc CFA.
On a pu penser que le secteur de l'agriculture, pour lequel d'importants échanges
auraient pu être canalisés vers les pays voisins au détriment des pays extérieurs à la zone, n'a
pas reçu l'attention qu'il méritait. Loin s'en faut. L'UDEAC, et c'est semble-t-ill'objectif de la
Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC), a de manière
officielle instauré le libre-échange pour les produits agricoles.
Histogramme 2 : La part du commerce intra-zone dans les échanges extérieurs des pays de
l'UDEAC (moyenne des trois années 91-92-93).
~~--
/
,
18/
16
m%xO:J:c:-',
11% MO.I.e
_ _ _ ••
i
14
1
12 '
10
8
6
4
2
0'
Cameroun
Congo
Gabon
Guiné e-Equ.
R.CA
Tchad
% XO. I. C .' La part des exportations intra-CEMAC dans les exportations totales;
% MO. I.
C : La part des importations intra-CEMA C dans les importations totales
Mais la réalité est que les barrières tarifaires et non tarifaires sont restées importantes.
En outre, des circuits d'échanges parallèles (informels) existaient déjà pour ces produits (Il
existe par exemple un marché informel entre le Gabon et le Cameroun où se rencontrent les
offreurs camerounais et les demandeurs gabonais)".
Dans le secteur industriel, on pense que pour appliquer la politique de substitution des
importations, il fallait susciter les échanges grâce à la suppression des barrières et à
l'instauration de la concurrence régionale. On remplacerait ainsi les productions locales
• Le lieu dénommé « Marché Mondial» se situe sur la frontière camerouno-gabonaise. Toutes les fins de semaine, les
vendeurs de légumes et autres produits agricoles camerounais viennent échanger librement avec les acheteurs gabonais.
104

inefficaces par des importations moins chères en provenance d'autres pays partenaires comme
le prévoit la théorie orthodoxe. Malheureusement, les pays d'Afrique centrale ne sont pas
manifestement prêts à sacrifier leur industrie locale au nom de la coopération régionale.
Par rapport aux exportations, la position du Cameroun se comprend aisément, car ce
pays est économiquement le plus fort. Il fournit à tous les pays de la zone des produits
agricoles. C'est en réalité le seul Etat qui a su conserver un niveau de production agricole
élevé. Malheureusement, la performance économique de ce pays n'est pas très bonne dès lors
qu'on considère la proportion de son commerce dans la zone par rapport à son commerce
extérieur global.
Histogramme 3 : La part du commerce intra-zone dans les échanges extérieurs des pays de
l'UDEAC (moyenne triennale 94-95-96).
/1----- ------- .....__._. -.-----.
l '
/ .
25 / ;
20
15!
!
10:
5
O,
Cameroun
Congo
Gabon
Guiné e-Equ.
R.C.A.
Tchad
% X O, I. C. : La part des exportations intra-CEMA C dans les exportations totales;
% MO, I.
C. : La part des importations intra-CEMAC dans les importations totales
En termes relatifs, les pays enclavés comme le Tchad et la République Centrafricaine
ou la Guinée-Equatoriale (le plus petit pays) consacrent une proportion relativement moins
faible de leur commerce extérieur dans les échanges avec les autres Etats membres de la sous-
région. Même si cette proportion reste relativement faible par rapport au commerce global de
ces Etats, tout laisse penser que ceux-ci dépendent assez fortement du commerce avec leurs
partenaires de la CEMAC et de ce point de vue, ils peuvent avoir intérêt, plus que les autres, à
l'affermissement de l'intégration régionale en Afrique centrale.
105

". ~.-
Tableau (2.1-6) : Matrice des flux commerciaux intra-CEMAC (en millions de $ U.S.)
Moyenne triennale pour 94-95-96
Cameroun
Congo
Gabon
Guiné e-Equat.
R.CA
Tchad
Total
Cameroun
10,70
48,30
31,00
1'1,70
41,70
143,40
Congo
3,00
3,00
Gabon
1,00
1,00
Guiné e-Equat.
0,00
R.CA
0,30
2,30
0,70
3,30
Tchad
1,00
1,00
Total
1,30
13.00
48,30
31,00
1S,70
42,40
151,70
..
. .
Sources. - Les calculs ont ete faits a partir des donnees du F.M.!. (Department of Trade and Statlstlcs)
Le tableau (2.1-6) présente le flux des exportations et des importations de chaque pays
vers et en provenance des autres pays membres de la CEMAC. Le Cameroun exporte vers
tous les autres pays alors que la ligne de la Guinée-Equatoriale est quasi vide, il est difficile de
savoir si c'est par manque de statistiques ou parce que ce pays n'exporte pas vers ses
partenaires.
En
revanche,
ce
pays
importe exclusivement du
Cameroun. La République
Centrafricaine commerce relativement bien avec le Cameroun, le Congo et le Tchad même si
les proportions restent très faibles. Certains pays comme le Gabon et La Guinée-Equatoriale
sont moins diversifiés puisqu'ils n'ont pour seul partenaire que le Cameroun dans leurs
échanges intra-CEMAC.
On peut donc affirmer que les formations de l'UDEAC et récemment celle de la
CEMAC n'ont eu que peu d'effet sur les relations commerciah~s entre pays membres. De
même qu'il est fort probable que les mécanismes de compensation prévus lors de la formation
de ces accords n'aient pas correctement fonctionné. Cependant, les difficultés de mise en place
des mécanismes de compensation n'expliquent pas seules la faible application des
dispositions prévues dans les traités en Afrique Centrale. L'un des objectifs de l'intégration
régionale était de favoriser l'industrialisation. Cet objectif ne semble pas avoir été atteint.
106

StECifIŒ!VII
Les causes des difficultés de l'intégration
en Afrique Centrale
Nous venons de voir, dans la section précédente, que la plupart des tentatives
d' intégration régionale n'ont pas atteint les résultats attendus. Elles connaissent aujourd'hui
d'énormes difficultés. Et comme le note E. BERG (1993), les Etats membres de ces
I
institutions n'ont apporté qu'un soutien financier partiel et irrégulier, à cause notamment des
restrictions budgétaires imposées par les programmes de stabilisation..
Aussi les aniérés de cotisation .sont-ils la règle pour ces organisations régionales. Et ce
'1
, problème n'a cessé de s'aggraver et de s'étendre au cours des années 1980. Rien d'étonnant
donc à ce que la plupart des organismes régionaux soient sévèrement handicapés par des
budgets incertains et insuffisants. Leurs responsables s'épuisent dans le rappel de fonds à peine
suffisants pour payer les frais de fonctionnement, les programmes étant réduits à la portion
congrue.
Par ailleurs, la libéralisation du commerce entre pays en développement ne stimule pas
vraiment les échanges car ces pays importent les mêmes biens du reste du monde et produisent
très peu de biens susceptibles de satisfaire la demande d'importations de leurs partenaires.
Autrement dit, le développement potentiel du commerce intra-zone qui pourrait résulter
d'une baisse réciproque des droits de douane ou d'un allégement des restrictions quantitatives
serait faible.
107

Parmi les causes des difficultés rencontrées, nous retenons principalement trois qui
nous paraissent plus importantes:
l'inadaptation du cadre analytique;
la libéralisation difficile des économies et
la répartition inégale des coûts et avantages de l'intégration.
A - L'inadaptation du cadre analytique
Les multiples tentatives des pays en développement posent un délicat problème
d'opportunité comme le souligne BOURGUINAT (1966). Dans la mesure où les différentes
expériences semblent devoir toutes emprunter la voie de l'Union Douanière (U.D.), elles
dépendent donc d'un ensemble de conditions qui peuvent être résumées en trois propositions
suggérées par MEADE (1955) et LIPSEY (1960) :
Une UD est d'autant plus susceptible d'améliorer le bien-être:
- que les économies des pays partenaires sont très concurrentes ou similaires, et
potentiellement très complémentaires ou dissimilaires ;
- que se trouve élevée la proportion du commerce entre pays partenaires par rapport au
commerce total ;
- que se trouve plus faible la proportion du commerce extérieur de chaque pays membre
par rapport à sa production domestique.
Dans la section précédente, nous avons vu que les conditions 2 et 3 ne sont pas
remplies du fait de la faiblesse du commerce intra-régional par rapport au commerce total.
108

Ce qui rend inadapté le cadre analytique relève d'abord de la non optimalité de
l'intégration régionale dans nos pays, surtout que les recettes fiscales ol:;cupent, dans ces pays,
une part très importante de leur PIB.
Al - La non optimalité de l'intégration par les marchés.
La fonnulation d'une fonction d'intégration nécessite d'exprimer avant toute chose une
fonction d'utilité pour les agents économiques. En effet pour mesurer les effets économiques de
l'intégration, on a vu que BALDWIN et VENABLES (1994) ont utilisé une fonction d'utilité
indirecte où l'offre de travail était considérée comme une constante. Mais si on fait l'hypthèse
que cette offre n'est pas constante dans les pays en développement, les résultats de leur analyse
deviennent différents.
Certaines particularités des pays de l'Afrique centrale paraissent être en mesure
d'influencer le comportement des agents. En effet, la " solidarité africaine" étant très poussée,
on peut penser que ce phénomène, en même temps qu'il nuit à la constitution de l'épargne
privée en Afrique au sud du Sahara, pennet d'éviter que les personnes démunies ne passent au-
dessous du seuil de survivance. Nous prendrons en compte ce phénomène pour expliquer
l'existence de deux catégories de consommateurs.
Nous savons qu'il existe, en Afrique centrale, deux catégories de consommateurs. La
première catégorie (souvent évaluée à moins de 15 % de la population active) est réellement en
mesure de consommer. C'est la catégorie qui détient un réel pouvoir d'achat. Mais il y a aussi
une catégorie qui comprend la frange la plus importante de la population ( plus de 85 % de la
population active) qui n'a pas de réel pouvoir d'achat.
Cette deuxième catégorie de consommateurs est si démuni,~ qu'on en arrive à se
demander comment elle réussit à survivre. L'altruisme, ou plus e:xactement la solidarité
africaine, fait que le niveau minimum d'utilité requis de cette catégorie 2 des consommateurs
est atteint grâce à la première catégorie. Or, on ne peut aider que si on a soi-même un niveau
109

de satisfaction élevé. Ce qui nous amène à dire qu'il y a une sorte d'utilité interdépendantel
chez les consommateurs africains.
On peut dire que les populations villageoises, les chômeurs dans les villes, les
travailleurs dans des emplois précaires à faible rémunération, et autres constituent la catégorie
2 des consommateurs. Ceux-ci sont satisfaits lorsqu'un parent proche ou parfois éloigné,
occupe un poste important dans l'administration publique ou dans le secteur privé.
De ce fait, le niveau de satisfaction de ces consommateurs dépend de la consommation
du parent dont le revenu est élevé. Ainsi, la satisfaction du sujet 2 s'accroît lorsque le niveau de
consommation du sujet 1 augmente.
Dans ces conditions, peut-on atteindre l'optimalité au sens de Pareto ? Pour plusieurs
raisons, le taux de substitution des biens des consommateurs de la catégorie 1 ne peut pas être
égal au taux de substitution des biens des consommateurs de la catégorie 2.
La raison principale tient à la différence dans les niveaux de consommation car, si les
uns sont en mesure de consommer tout ce qu'ils désirent, les autres, en revanche, ne vivent que
d'expédients. Ds sont obligés d'attendre que d'autres veuillent bien leur permettre de satisfaire
leurs besoins.
Forts de cela, des auteurs comme MURPHY, SHLEIFER et VISHNY (1989) ont
montré que tous les consommateurs pouvaient avoir les mêmes préférences. Mais seuls
certains d'entre eux étaient en mesure de consommer les biens manufacturés, les autres limitant
leur consommation aux biens de première nécessité.
Ainsi, la propension à consommer la nourriture, qui en général est considérée comme
un bien de première nécessité, est égale à l'unité lorsque les revenus sont faibles. Elle devient
nulle lorsque les revenus sont élevés.
1 Selon Joseph Thiam, (1956), le sens familial du Noir entretient paifoÎ$ de vrais pensionnats de chômeurs qui sucent le
parent venu travailler en ville extrait de " Des Prêtres noirs s'interrogent" aux éditions Seuil, et Pierre Merlin, (1996)
d'ajouter que l'hospitalité familiale n'est plus seulement une vertu mais une véritable contrainte sociale, et elle s'étend aux
parents éloignés extrait de " Espoir pour l'Afrique Noir" aux éditions Présence Africaine.
• Murphy KM, Shleifer A. et Vishny R, (1989), "Income Distribution, Market Size and Industrialization", Quarterly
Journal of Economies, Vol. 104, pp. 537-64.
110

Les consommateurs à revenus élevés, c'est-à-dire ceux de la première catégorie,
consomment non seulement les mêmes biens que ceux de la deuxième catégorie mais encore
sont en mesure d'en consommer d'autres (les biens de luxe). En réalité, une augmentation de la
consommation prend la fonne d'une augmentation de la diversité et non une augmentation de là
consommation des mêmes biens.
Tout ce qui précède nous conduit à considérer que le niveau d'utilité du consommateur
de la catégorie 1 est supérieure au niveau d'utilité du consommateur d(~ la catégorie 2.
Considérons que chaque Etat de la Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale (CEMAC) a une économie à trois secteurs. Chaque secteur est producteur
d'un bien spécifique:
- un bien exportable (X) ;
- un bien importable (M) et
- un bien non commercialisable (N).
Pour produire les biens échangeables, on a besoin d'utiliser du matériel importé (l) (non
produit localement). Autrement dit, chaque unité de bien (M) et de bien (X) nécessite z unités
de bien (l), soit:
(2.2-1)
QM et Qx étant respectivement les quantités de biens à importer et à exporter.
Etant donné que l'optimum collectif est souvent indétenninée quand on se limite au
seul critère de Pareto, nous allons initier une fonction d'utilité coll{~ctive susceptible de lever
cette indétermination. Cette fonction sera à la fois un indicateur ordinal des préférences de la
société et une fonction des niveaux d'utilité de tous les individus.
Pour caractériser les niveaux d'utilité des individus, nous nous limiterons à la
description du comportement des individus représentatifs. TI est clair que cette fonction n'est
111

pas unique et sa forme dépend essentiellement de notre perception du comportement dans les
Pays d'Afrique Centrale cPAC). C'est donc une fonction subjective.
Nous retenons que chaque pays de l'Afrique Centrale comprend deux types de
consommateurs indicés par 1 et 2. En reprenant l'hypothèse de trois secteurs d'activité
produisant trois biens, chaque bien est consommé par chacun des deux consommateurs
représentatifs, soit :
Le niveau de consommation totale du bien X, exportable par exemple, Cx' est la
somme de la consommation de ce bien par les consommateurs des deux catégories. ciX ' CiM et
,
c
représentent respectivement les quantités consommées des biens X, M et N par le
iN
consommateur de la catégorie i.
Le niveau de consommation du consommateur 2 dépend du niveau de consommation
du consommateur 1, soit:
C
=
-c
2X
C x
1X
C
=
2M
CM-C1M
C
=
2N
C N -C1N
On peut supposer que le bien-être d'un individu est fonction de la quantité de biens
qu'il consomme et qu'il produit. Nous aurons alors une fonction d'utilité collective du type :
(2.2-2)
CX' CM' CN' QM' Qx et QN représentent respectivement les quantités des biens exportables
X, importables M et non commercialisables N, consommées et produites dans chaque pays. Les
prix des biens X, M, et l sont fixés sur le marché mondial, soit Px, PM et ~.
112

· Nous devons maintenant préciser les termes avant d'envisager l'optimisation de la
fonction d'utilité ci-dessus. Nous rappelons que la concurrence imparfaite et l'inexploitation
des économies d'échelle sont les traits caractéristiques des PAC.
Plusieurs autres différences structurelles les éloignent des pays développés, c'est le cas
notamment d'une plus grande part des biens intermédiaires dans les importations, un degré
important de rigidité structurelle qui limite la fluidité des entreprises, un excès de profit et une
prédominance de l'inter industrie au détriment de l'intra-industrie dans l'échange. Tous ces
éléments seront pris en compte dans les analyses qui vont suivre, notamment dans la recherche
de l'équilibre optimal.
La détermination d'un optimum nécessite que soient connues les contraintes et les
conditions du programme d'optimisation. En effet, pour que la solution du programme soit un
maximum global, il faut que les conditions de second ordre soient strictement négatives.
L'Intégration économique par l'industrialisation, conçue à la fois comme une
multiplication des activités et comme une transformation des processus de· production par
utilisation des machines, est au coeur de tous les développements. L'Afiique centrale doit donc
y recourir pour se développer.
Les premières tentatives d'Intégration économique, nous l'avons vu, n'ont pas été
couronnées de succès. Au contraire, elles ont souffert de graves erreurs et ont entraîné
d'importants gaspillages. A cet égard, les nouveaux investissements industriels doivent
rapidement dégager une rentabilité suffisante. Et pour ce faire, ils doivent nécessairement
prendre en compte les contraintes de l'environnement économique des pays concernés et
répondre à une demande réelle.
Lorsque les pays veulent former une union douanière ou une Intégration économique,
ils sont surtout motivés par les objectifs commerciaux. En réalisant que les marchés nationaux
sont petits, ils espèrent trouver dans l'union, un marché plus grand où ils peuvent écouler
facilement leur production. L'équilibre de la balance commerciale constitue pour ces pays une
contrainte supplémentaire qui s'exprime formellement de la façon suivante:
113

(2.2-3)
Ce qui signifie que tout ce qui est produit est consonuné ou encore que les exportations
sont égales aux importations. Q représente la production du bien i, et Ci est la consonunation
1 du bien i à l'intérieur de l'union
....
L'équation (2.2-3) peut se réécrire comme suit:
(2.2-4)
avec
Pf.t =PM - z~ ;
(2.2-S)a
(2.2-S)b
1
4
Les équations (2.2-S)a et (2.2-S)b définissent donc les pnx nets des deux biens
échangeables.
S'il est vrai que l'Intégration recherchée par les pays en développement doit servrr
essentiellement à promouvoir la croissance des activités à travers l'accroissement du goût
d'entreprendre, le changement de mentalités pour plus d'effort, etc., elle doit aussi favoriser
l'implantation d'un large éventail d'industries. TI convient bien entendu de préciser par quelle
voie cette Intégration va se réaliser.
En effet, après avoir déterminé la fonction d'utilité collective ainsi que ses
contraintes, nous devons maintenant rechercher les conditions d'optimalité d'un regroupement.
L'existence d'une situation d'équilibre au programme d'optinùsation suppose la continuité et la
quasi concavité de la fonction d'utilité U en C et en Q.
114

Compte tenu de la fonction d'utilité collective (équation 2.2-2) et des contraintes
exprimées, nous pouvons poser le Lagrangien suivant :
L == U(CM,Cx' CN,QM,QX,QN)
+ a(P~QM +P;Qx +PNQN - PMCM - PxCX - PNCN)
La situation d'équilibre optimal exige que la consommation et la production soient
efficaces. Aussi la maximisation de l'équilibre du consommateur représentatif requiert que le
taux marginal de substitution des biens soit égal au rapport des prix bruts; tandis que
l'efficacité de la production exige que le taux marginal de transfonnation des biens soit égal au
rapport des prix nets. C'est ce qu'expriment les équations suivantes obtenues grâce à la
résolution du programme d'optimisation de l'individu représentatif:
UCM _PM
- - - - = -
(2.2-6)
UCx
Px
UC
PM
M
- - = -
(2.2-7)
UC
P
N
N
UQM ==P~
(2.2-8)
UQx
P;
UQM == PiJ
(2.2-9)
UQN
PN
UC
indique la dérivée partielle de la fonction d'utilité collective par rapport à la
j
consommation du bien i, et UQj est la dérivée partielle de la fonction d'utilité par rapport à la
production du bien i.
Nous considérons que les prix nets et les prix bruts des biens non commercialisables
sont identiques, puisque par hypothèse, leur production ne nécessite. pas de biens
intennédiaires.
115

Une curiosité retient notre attention dans ce que nous venons de relever. Pour qu'il y
ait équilibre parétien dans la résolution d'un programme sous contraintes, nous devions avoir
égalité entre les taux marginaux de substitution et les taux marginaux de transformation. Nous
devrions avoir effectivement au moins (UCMJUCx) = (UQM jUQx ) .
Mais il se trouve que cela n'est pas possible car, pour les biens commercialisables X et
M, les prix effectifs (nets) sont différents des prix bruts, PfJ "* PM et P; "* Px.
Cela nous amène à considérer que toutes les conditions nécessaires ne sont pas réunies
pour une Intégration classique des pays d'Afrique centrale. L'optimum de premier rang n'est
donc pas réalisé ici.
li existe des contraintes supplémentaires qui, théoriquement, conditionnent le passage à
l'optimum de second rang.
Si des barrières sous forme de mesures tarifaires et non tarifaires sont équivalentes à un
taux douanier combiné de ti sur les biens importés, nous pourrions identifier deux formes de
biais anti exportation. En définissant Qi et Ci respectivement comme des niveaux optimaux de
production et de consommation pour le bien i sous des conditions de premier ordre, alors les
effets de restriction des importations sur Q et Ci dépendront de l'importance de la taille de fi'
de la structure de protection (soit fM < ou > fI) et de la nature des relations de substitution
entre chaque secteur.
On peut considérer l'impact d'une structure tarifaire non uniforme particulière avec des
distorsions de la production et de la consommation induites. La hausse du prix brut intérieur de
M par rapport aux prix deX et N entraîne CM < CM,C > C
> C
X
x et CN
N •
Le prix net des biens importables (PfJ) produit sur place pourrait être inaltéré par cette
structure particulière non uniforme des droits de douane sur les outputs et les inputs.
116

Le prix net des biens exportables (P;) doit diminuer par rappolrt aux prix nets des biens
importables
et
des
biens
non
échangeables;
ce
qui
provoquerait
par
conséquent
QM > QM,QX <Qx et QN > QN'
Ainsi le biais anti exportations ou l'effet qui en résulte du fait que Qx < Qx et ex> ex
(où les exportations sont égales à Qx - ex) peut être décomposé en un effet "taxe sur
l'input" et en un effet" prix relatif". TI existe donc d'autres contraintes liées à la principale
source de revenus de nos pays.
A2 - La contrainte de pouvoir d'achat
Nous allons poser la forme fonctionnelle de la contrainte dt:~ pouvoir d'achat comme
suit en remplaçant c
et
par leur valeur:
2X ' C2M
C2N
(2.2-10)
La fonction d'utilité collective dépend en définitive du nivt::au de consommation des
individus de la catégorie 1. A cet égard, l'équation (2.2-2) devient:
(2.2-2)'
Deux raisons nous amènent à privilégier les consommations des individus de la
catégorie 1.
La première est que c'est la seule catégorie des agents capables d'acheter des biens
manufacturés produits dans le pays ou importés.
La deuxième est qu'en utilisant les niveaux de consommation de la catégorie l, on tient
compte indirectement de la consommation de la catégorie 2, négligeable et dépendante du
niveau de consommation de la catégorie 1.
117

En réalité, nous avons le choix entre utiliser la prerrûère fOIme de la fonction d'utilité
collective (équation 2.2-2) et utiliser la nouvelle fOIme ci-dessus (équation 2.2-2)' car en fait,
la consommation de la catégorie 2 est négligeable. L'utilisation de l'une ou l'autre fonne est
indifférente et nos résultats n'en seront pas fondamentalement modifiés.
En tout état de cause, la prise en compte de la contrainte (2.2-10) et le fait que la
production de chaque bien nécessite la combinaison des facteurs travail, L et capital, K, nous
conduit à avoir pour chaque bien i :
QM =QM(LM,KM)
Qx
= Qx(Lx,Kx )
QN =QN(LN,KN)
Lx,LM,LN,Kx,KM et K N sont respectivement des facteurs travail et capital nécessaires à la
production des biens échangeables X et M et du bien non échangeable N. Si L et K
représentent les quantités totales disponibles des facteurs L et K dans les éconorrûes qui nous
intéressent, on aura à considérer les inégalités suivantes :
LM+Lx+LN ~I
(2.2-11)
KM+Kx+KN ~K
avec L et K non négatifs ainsi que les quantités des biens.
Une autre contrainte existe dans les pays en développement et particulièrement
en Afrique centrale, c'est la faiblesse du pouvoir d'achat qui peut lirrûter les effets d'une
intégration. C'est ce qui nous conduit à analyser l'inefficacité de la consommation comme une
contrainte supplémentaire dont il faut bien tenir compte dans le programme d'optimisation.
La pnse en compte de toutes ses contraintes nous amène au programme P
d'optimisation suivant:
Maximiser U sous contraintes, (2.2-10) ; (2.2-11) ; (2.2-4).
118

Ce qui donne formellement :
U(ClM ,CIX,CIN ,QM,QX ,QN) +
a{HI(ClM,CIX,CIN)-[H2(CM -ClM),(CX -CIX),(CN -cIN)]+H;}
+ P(P'M QM +pI X Qx +PNQN -PMClM -PXCIX -PNCIN )

+w(LM +Lx +LN -L)+r(KM +Kx +KN -K)
Les termes a, {J, w et r sont des multiplicateurs de Lagrange associés aux contraintes
définies ci-dessus. L'annulation des dérivées partielles premières, la résolution du système
d'équations qui en découle et la prise en compte des équations comptables:
C2X =Cx - CIX
C2M = CM - CIM
C2N = CN - CIN
nous permettent de poser pour l'individu représentatif:
(2.2-12)
(2.2-13)
HlM
H 2M
HlM
H 2M )
avec ( - - - - - » 0 et ( - - - - - >0
H lx
H 2X
H IN
H 2N
(2.2-14)
UQM
P/..t
- - = -
(2.2-15)
UQN
PN
119

(2.2-16)
Nous remarquons que l'équation (2.2-16) fait valoir que les taux de substitution
technique des facteurs sont parfaitement égaux.
Par ailleurs, avec la différence des niveaux d'utilité des consommateurs, il est confirmé
qu'il n'y a pas d'optimum. Les équations (2.2-12) et (2.2-13) suggèrent que d'un côté, la
somme entre le taux de substitution collectif des biens échangeables, d'une part, les biens
importables M et non échangeables N, d'autre part (s'agissant du consommateur de la
catégorie 1), de l'autre, la différence des taux de substitution individuels des biens des
consommateurs est égale au rapport des prix nets.
Les individus de la catégorie 1 étant les seuls en mesure de consommer ce qu'ils
désirent vraiment et donc les seuls capables de substituer les biens qu'ils consomment, l'égalité
entre les taux de substitution collectifs des biens
et le taux de transfonnation des biens,
équations (2.2-14) et (2.2-15), auraient pu pennettre de détenniner l'optimum si on avait eu
simplement:
(2.2-17)
Mais il se trouve que pour que l'équation (2.2-17) soit vraie, il faut que les tennes entre
parenthèses des équations (2.2-12) et (2.2-13) soient nuls; autrement dit, qu'il y ait égalité des
taux de substitution des biens. Cette condition n'est réalisable que si l'allocation initiale des
ressources est modifiée.
Or, une réallocation des ressources entre les agents en vue d'égaliser les taux de
substitution des biens n'est réalisable que s'il est possible d'augmenter le niveau d'utilité des
consommateurs de la catégorie 2 sans provoquer une diminution du niveau d'utilité des
consommateurs de la catégorie 1. Dès lors, l'optimum recherché n'est pas atteint.
120

De toute manière, l'allocation actuelle des ressources dans les pays d' Afiique centrale
ne permet pas de dire que les niveaux d'utilité des consommateurs pc~uvent s'équilibrer. Une
réallocation des ressources de façon à rendre moins dépendante la satisfaction des besoins des
consommateurs de la catégorie 2 peut éventuellement rendre égaux les taux de substitution des
biens pour les deux catégories de consommateurs.
Ainsi, le problème fondamental est celui du pouvoir d'achat des individus et donc de la
distribution des revenus. La demande ne peut donc pas soutenir la production en Afiique
centrale.
Aussi, l'intégration régionale dans cette sous région est-elle diflicile à réaliser tant qu'il
existera, d'un côté, une différence de niveau d'utilité entre les consommateurs et, de l'autre
côté, une différence appréciable entre les prix à la frontière (nets) et les prix intérieurs (bruts).
B - La difficulté de la libéralisation des échanges inf1'a-régionaux
Deux raisons expliquent la difliculté des pays de l'Afiique subsaharienne à lever les
barrières commerciales:
- les politiques de substitution aux importations menées uniIaténùement par les Etats ;
- la mauvaise répartition des coûts et avantages de l'intégration liés aux différences
constatées dans les niveaux de développement économique des partenaires.
Bl - Les politiques de substitution aux importations.
La plupart des politiques de substitution aux importations mises en œuvre dans la
majorité des pays d'Afiique au Sud du Sahara ont constitué un obstacle majeur, à la
libéralisation des échanges commerciaux et aux échanges intra régionaux. C'est ainsi qu'on a
relevé d'importantes distorsions des marchés créées par des politiques gouvernementales
(intervention excessive) qui ont fortement gêné les flux. commerciaux.
121

La
levée
de
ces
obstacles
laissait
entrevoir
une
expansion
des
échanges.
Malheureusement, elle a donné lieu à la création d'industries inefficaces assorties de barrières
protectionnistes ainsi qu'à une surévaluation des taux de change qui a contribué à maintenir
artificiellement à un niveau élevé le coût des capitaux et des biens intennédiaires.
L'un des arguments avancés dans le chapitre 1 en faveur de l'intégration régionale est la
réduction du coût des politiques de substitution aux importations.
Dans un cadre régional, chaque pays peut se spécialiser dans les productions pour
lesquelles il a un avantage comparatif, tout en continuant à bénéficier d'une protection vis-à-vis
du reste du monde. Dans ce contexte, l'existence des éconoITÙes d'échelle est un argument
\\
important en faveur de l'intégration, en raison des gains potentiels et de la réduction des coûts
1
de production. Cependant, la petite taille des éconoITÙes africaines linùte l'effet favorable de
l'élargissement des marchés à la dimension de la région.
TI existe une manière classique d'atténuer les effets défavorables de l'union douanière
sur les pays importateurs, c'est de réaliser simultanément une baisse unilatérale des droits de
douane qui s'appliquent aux importations en provenance du reste du monde. Cette baisse
garantit au pays importateur une dinùnution du prix d'importation.
Or, dans la plupart sinon tous les pays africains, les recettes douanières constituent une
part très importante de leurs recettes fiscales.
Des auteurs comme VINER (1950), ont montré que quels que soient les avantages que
l'intégration apporte individuellement aux partenaires d'une Union Douanière compte tenu de
leurs taxes initiales, la libéralisation commerciale est une option qui intéresse le plus les
partenaires dans un regroupement. Cela suppose en réalité que les recettes douanières
n'existent pas. Or on vient de dire que ces ressources sont si importantes dans le budget public
des pays en voie de développement qu'il leur est difficile de les supprimer.
Si tous les pays ne peuvent pas recourir au libre-échange, ils peuvent tout au moins
opter soit pour une structure de droits discriminatoires, soit pour une structure de droits non
122

discriminatoires. La prerrùère structure accorde des réductions ou des exemptions de droits à
certains partenaires alors que la seconde ne le fait pas.
Selon la théorie traditionnelle de l'intégration, il est connu que les gains statiques de
bien-être sont maximisés lorsque la création l'emporte sur le détourn~:ment de commerce. La
contrainte de recettes douanières ne modifie en rien cette donnée puisque le détournement de
commerce aggrave les pertes des recettes. TI y a deux raisons essentielles à cela.
Premièrement, les partenaires commercent plus entre eux, la proportion de recettes
issues de ces échanges est plus forte mais plus difficile à accroître.
Deuxièmement, aucune préférence induite de la perte de recettes douanières ne
nécessite un accroissement supplémentaire des droits à l'égard du reste du monde pour
augmenter le montant fixe des recettes et de ce fait aggraver l'effi~t de détournement de
l'intégration.
En plus, du fait même de son existence, la contrainte de recettes rend plus difficile la
mise en place des mécanismes de compensation. Ce qui complique davantage l'avènement
d'une intégration viable.
Par ailleurs, peu de pays africains sont capables de faire face à la pénurie de recettes
que générerait la perte de droits de douane.
Enfin certains membres n'ont pas grand-chose à échanger ou simplement leurs intérêts
commerciaux se trouvent surtout à l'extérieur de la région. La réduetion des obstacles aux
échanges intra-régionaux ne les incite pas à modifier la structure de leurs échanges. Dans
beaucoup de cas, la similarité des structures de production ne favorise pas les échanges intra-
régionaux même lorsque des mesures de libéralisation sont prises.
En définitive, alors que les pays d'Afrique sub-saharienne sont considérés comme des
partenaires commerciaux non naturels et donc ne peuvent remplir les conditions d'une création
d'échange, l'existence d'une contrainte de recettes rend encore plus difficile la réalisation de
l'intégration et entraîne un détournement de commerce.
123

:1'
B2 - Les contradictions nées de la dévaluation du franc CFA.
A la suite du renouveau des initiatives d'intégration régionale en Afrique centrale, un
certain nombre d'études ont souligné l'échec des projets antérieurs et montré le caractère
incertain des projets de préparation de la réforme fiscalo-douanière de l'UDEAC et de la mise
en place de la CEMAC. La dévaluation du F CFA et ses conséquences modifient la
signification de ces nouveaux projets d'intégration régionale en Afrique centrale tout en leur
conférant une portée différente.
Comme principale politique d'accompagnement de la dévaluation, l'intégration
régionale en Afrique centrale est dotée d'un nombre plus important de fonctions: fonction de
contrôle de la maîtrise de l'inflation et des salaires et plus généralement de contrôle des
politiques économiques; fonction d'assainissement des finances publiques; fonction de
convergence des politiques budgétaires; fonction d'harmonisation du droit et des règles;
fonction implicite de reconstruction des Etats ou du moins des administrations et de lutte
contre la fraude et les détournements, etc.
L'Afrique centrale n'a jamais été intégrée. L'histoire de l'UDEAC est celle de plus de
30 années d'échecs. Et les flux d'échanges informels lient principalement les pays de l'UDEAC
à des pays n'appartenant pas à cette union (Nigeria principalement mais aussi Afrique du Sud).
Ce défaut d'intégration régionale n'a jamais remis en cause le fonctionnement de la
zone franc et plus particulièrement de la BEAC : même si on présente la zone franc comme
l'exemple d'intégration monétaire réussie en Afrique, il faut reconnaître que ce système de
coopération monétaire est un dispositif où priment les relations bilatérales entre le pays-leader
et chacun des autres pays.
Paradoxalement, la dévaluation peut s'interpréter comme la première atteinte au
protectionnisme spécifique que constituait la pratique globale de la zone franc. Elle a eu lieu
dans un contexte de lutte contre la spécificité de la protection en zone franc et notamment en
zone BEAC. La réforme fiscalo-douanière (RFD) adoptée en juin 1993, promue par la Banque
mondiale et soutenue par la Coopération française, a permis de libéraliser le commerce
124

extérieur des pays de l'UDEAC et de rendre le système de protection beaucoup plus
transparent et confonne à la doctrine libérale. Si dans le système antérieur, on a pu douter de
l'efficacité d'une telle réfonne, aujourd'hui les conséquences de cet essai de libéralisation sont
illustrées de façon particulière dans un pays comme le Gabon.
A la suite de la dévaluation et d'une mauvaise application de la réfonne fiscalo-
douanière, les entreprises locales, toutes fortement protégées et non compétitives, y compris au
niveau régional, souffrent d'une très forte concurrence des importations, frauduleuses pour la
plupart. Le fait même qu'il y a des importations frauduleuses indique que la libéralisation
commerciale n'est pas effective en Afrique Centrale.
Le volet commercial et douanier de la réfonne a été revu à la baisse et a été
immédiatement appliqué tandis que le volet fiscal se met en place péniblement. Ce qui
défavorise les producteurs locaux des biens de substitution aux importations.
De plus, la concurrence camerounaise, plus compétitive et plus diversifiée, profite plus
rapidement de la dévaluation. Enfin, la contrebande des biens en provenance d'Afrique de
l'Ouest s'est beaucoup développée à cause notamment de la crise qui sévit dans toute la
région, du niveau de vie plus élevé des populations et de la très forte protection des marchés
de la sous-région.
Or, cette intégration informelle entre en totale contradiction avec l'intégration régionale
promue par la France. Elle a toutes les chances de provoquer des réactions de rejet et de repli
de la part du Gabon (par exemple), deuxième pays de la région par son poids économique. Et
ceci d'autant que le Gabon avait fini par signer une réforme qu'il n'avait sans cesse combattu,
dans l'espoir d'éviter la dévaluation du franc CFA. Quel intérêt le Gabon a-t-il désormais à
poursuivre une politique qui, assurément, condamne son industrie alors que sa rente pétrolière
lui permet de subventionner des activités non compétitives?
Il est clair que la décision de dévaluer répondait principalement aux eXIgences
économiques et financières de deux pays: le Cameroun et la Côte-d'Ivoire. Ces deux pays
coûtaient particulièrement cher en aide budgétaire à la France. En raison de leur structure
125

, économique et de leur niveau de développement, ils sont les seuls à tirer réellement profit de
cette mesure.
Cependant, la politique d'intégration sous régionale, la mesure d'accompagnement
indispensable à la dévaluation, pose problème en Afrique centrale. En effet, comment envisager
1 sérieusement l'adoption de conseils de convergence ou de surveillance au niveau régional,
l'harmonisation des règles, des législations et des politiques économiques lorsque les appareils
étatiques n'existent plus ou presque? Comment centrer son action sur les règles lorsqu'en
matière économique, toutes les mesures effectives ne sont que des dérogations à un droit
commun inappliqué?
L'adoption et l'adaptation de la réforme fiscalo-douanière illustrent d'ailleurs, à petite
échelle, les difficultés d'une telle politique. En effet, certains pays ont continué à taxer les
importations au taux de change antérieur à la dévaluation (RCA et Tchad). C'est-à-dire que les
importations en provenance de France, par exemple, sont taxées sur la base de 1 franc CFA =
0,02 franc français au lieu de IFCFA = O,OlFF; d'autres ont modifié les taux du tarif extérieur
commun pour tenir compte de l'effet protecteur de la dévaluation (Gabon et Cameroun) ;
d'autres encore sont passés directement à la dernière phase de la réforme (Cameroun);
d'autres ne mettent pas en place la nouvelle fiscalité intérieure (Gabon, Congo, Tchad) etc.
Il est difficile d'imaginer dans ces conditions comment la transformation de la BEAC
(coopération monétaire) en UMAC (véritable union monétaire) aux compétences élargies
pourra être approuvée unanimement. Le refus du Cameroun de signer le traité donnant
naissance à la CEMAC (composée de l'UMAC et de l'UDEAC) ne se comprend pas
autrement.
Par ailleurs, il est assez difficile d'étendre les fonctions économiques d'une BEAC
composée d'Etats en mal de légitimité politique. Dans les situations actuelles, si les problèmes
inter-étatiques pouvaient être résolus, comment envisager le respect de mesures ou de
1 décisions prises par une entité régionale alors même que les décisions internes ne peuvent être
respectées ?
126

C -Le manque de coordination des politiques commerciales.
Le manque de coopération au niveau de la coordination des politiques nationales tient
essentiellement à la répartition inégale des coûts et avantages de l'intégration, à la non prise en
compte des effets dynamiques et à une certaine incapacité à réguler l'offre. Nous pensons que
sans cette coordination, il est difficile pour les pays d'Afrique subsaharienne de réaliser de
véritables intégrations régionales.
Cl - La répartition inégale des coûts et avantages de l'intégration
L'une des conditions fondamentales de réussite de l'intégration selon la théorie des
Unions douanières est que les gains et les pertes soient distribués entre les pays partenaires ~u
qu'un mécanisme de transferts soit institué tel que les gains des uns compensent les pertes des
autres au sein de la zone. ~utrement dit, la répartition doit se faire en faveur des pay?)
exportateurs nets à l'intérieur de la zone et au détriment des pays importateurs nets.
~
Ainsi, la répartition des gains et coûts est d'autant plus inégalitaire que les partenaires
ont, en raison de niveaux de développement et d'industrialisation düférents, des soldes de
balance commerciale intra-zone inégaux. Telle est en réalité la situation qui prévaut dans les
Unions douanières ou zones de libre-échange en Afrique sub-saharienne.
La CEAO est dominée par la Côte-d'Ivoire et le Sénégal, la CEPGL par le Zaïre, la
CEDEAO par le Nigeria et la Côte-d'Ivoire, IUDEAC par le Cameroun, la ZEP par le Kenya
et le Zimbabwe et la SACU par l'Afrique du Sud. Dans ces conditions, la réalisation des zones
de libre-échange en Afrique implique la mise en place de mécanismes de compensation entre
les gagnants et les perdants.
En accord avec la théorie de l'intégration appliquée aux pays à faible revenu per capita,
une condition essentielle pour que réussisse l'intégration commerciale es1t qu'il y ait une certaine
différence soit des technologies (selon RICARDO) soit des dotations factorielles (selon
H.O.S.) entre les partenaires potentiels. Ceci permet de maximiser la probabilité que tous les
127

partenaires développent au moins les activités industrielles pour lesquelles ils ont des avantages
comparatifs sur le reste du groupe.
Si cette condition n'est pas remplie et si la préférence pour l'industrie est suffisanunent
forte dans tous les pays partenaires, il ne sera pas possible de mettre sur pied un mécanisme de
compensation efficace. Et la poursuite de l'intégration devient dans ce cas impossible.
Dans une optique libérale, MEADE précisait que les productions des partenaires
devaient être proches, il s'agissait pour lui de productions semblables mais aussi diversifiées.
Mais les spécialisations primaires parallèles des pays d'Afrique sont peu propices à la création
de courants d'échanges.
Un autre argument est basé sur la reconnaissance des économies d'échelle avec des
circonstances qui expliquent pourquoi elles ne peuvent pas être exploitées par une simple
expansion des exportations comme l'ont souligné CORDEN (1972) et PEARSON et INGRAM
(1980).
Bien que la petite taille économique des pays d'Afrique ne leur permette pas
d'engranger des économies d'échelle, celles-ci peuvent toutefois s'exprimer de manière
significative dans des industries. En analysant les résultats d'une hypothétique Union douanière
entre la Côte-d'Ivoire et le Ghana, PEARSON et INGRAM ont montré que les gains
substantiels de ces deux pays peuvent augmenter puisque l'Union pourrait rendre rationnelle
leur production industrielle commune en diminuant l'inefficacité et en augmentant le nombre
d'usines tout en accroissant la production des entreprises déjà existantes.
Cependant, ils ont bien démontré que la probabilité de former une Union mutuellement
avantageuse augmente avec la possibilité que les partenaires potentiels soient similaires en
terme de coût de production de telle sorte que tous les partenaires pourront soutenir et étendre
certaines activités industrielles. TI est vrai que comme l'a montré LlPSEY (1971) avec plus de
deux biens, la probabilité d'une plus grande distribution des gains s'accroît quand les
partenaires ont chacun la possibilité d'agrandir leurs activités industrielles et d'exporter sur le
marché des autres. Ce qui suppose une plus grande diversification de leur part.
128

Certaines études, (FOROUTAN, 1992), montrent que les pays d'Afrique ont un fort
degré de divergence. Ds présentent notamment des différences de revenus par tête importantes.
La différence est encore plus marquée dans le degré d'industrialisation des pays
partenaires et leur participation dans le commerce intra-groupe, étant donné que les coûts et
avantages immédiats de l'intégration pour un. pays sont proportionnels à sa part dans les
importations et les exportations totales en provenance et vers le reste du monde. On peut voir
que les pays africains ont réellement des divergences au niveau de l'industrialisation en
considérant le modèle de gravité de FOROUTAN et PRITCHETT (1993).
Ce que nous pouvons retenir déjà est que le déséquilibre de la balance commerciale et
du degré d'industrialisation a une double implication sur l'intégration commerciale, car d'un
côté, il avantage disproportionnellement les pays qui ont la plus grande part de production
industrielle et de commerce intra-zone, et de l'autre côté, il justifie les mouvements· migratoires
observés vers les pays relativement plus industrialisés, vidant ainsi les industries des Etats les
plus pauvres.
En fin de compte, les politiques de substitution aux importations des pays africains, la
contrainte de recettes douanières et la distribution inégale des coûts et avantages de
l'intégration sont les principales raisons qui limitent la libéralisation du commerce intra-régional
des produits industriels.
En effet, en plus des obstacles non tarifaires et d'autres distorsions du marché
maintenues en place sous l'effet de l'incapacité de nombreux pays à mettre en oeuvre les
accords, il existe d'autres obstacles intra-régionaux à la libre circulation
des facteurs de
production telles que les voies de communication.
Les déséquilibres macro-économiques ont accru les ajustements intérieurs et mutuels
rendus nécessaires après l'intégration et en ont souvent augmenté le prix. Des facteurs
extérieurs tels que les chocs pétroliers, la baisse des prix des produits de base qui a suivi et la
hausse mondiale des taux d'intérêt, ont également joué un rôle dans l'échec des tentatives
d'intégration en Afrique.
129

C2 - La non prise en compte des effets dynamiques
En se référant aux travaux de VINER, MEADE et LIPSEY, les résultats de la théorie
des unions douanières présentent quelque intérêt pour la constitution d'un groupement régional
len Afrique Centrale. On apprend que l'union douanière serait efficace si le nombre de pays
concernés est important, si les tarifs douaniers initiaux sont élevés et si pour des tarifs peu
prohibitifs, les économies intégrées sont semblables.
Le problème est que cette analyse s'appuie sur des hypothèses néoclassiques qui la
rendent trop normative et donc peu opérationnelle. Par ailleurs, ces hypothèses nous paraissent
trop simplificatrices pour saisir une réalité qui ne se limite pas à l'échange d'un seul ou de
plusieurs biens, même produits à rendements constants, dans un environnement qui ignore
l'étude de la demande, la mobilité des capitaux, etc.
En effet, selon VINER, l'union douanière est "bonne" ou "mauvaise" du point de vue
du bien-être, suivant que l'effet de création l'emporte ou non sur l'effet de détournement. Mais
la référence est plus ou moins explicite à l'apport de RICARDO quant aux vertus du libre-
échange du point de vue de l'allocation des ressources et de la spécialisation. Comme celle du
llibre-échange, la théorie des unions douanières n'intègre aucune autre forme de régulation que
celle par le marché. Or, une intégration exclusivement réalisée par le marché engendre des
coûts d'adaptation et des risques trop importants pour l'Afrique Centrale.
En effet, les pays de la Zone BEAC ne sont concurrents en réalité que sur les marchés
extérieurs où ils vendent souvent les mêmes biens primaires. A l'intérieur, ils ne peuvent l'être
vraiment, puisqu'il leur manque le plus souvent ces cellules fondamentales à toute compétition
que sont des entreprises industrielles nombreuses et à même de se disputer le marché élargi. Ne
faut-il pas, même si la complémentarité n'est que potentielle, que ces pays choisissent comme
partenaires dans un premier temps ceux des pays dont les facteurs pourront compléter ceux des
1
.autres afin de mieux tirer profit des programmes d'investissement communs et donc de la
production industrielle?
130

· On peut voir par exemple que si le Gabon et son voisin le Cameroun produisent à des
niveaux de coûts voisins, la suppression des tarifs entraînera pour l'un des deux pays (le Gabon
en l'occurrence), une compétition accrue et alors toutes les adaptations seront bénéfiques :
compression des coûts, rationalisation des productions, reconsidération des localisations et
accords de spécialisation. Mais si l'écart entre les coûts est fort, comme c'est le cas entre ces
deux pays d'Afrique Centrale, la suppression des barrières douanières procurera des effets de
consommation et de production intenses puisque le producteur du Cameroun sera le plus
efficace.
Mais on peut douter qu'il y aura la même compétition et les mêmes progrès car les
facteurs libérés par la production chère du Gabon s'orienteront vers des activités correspondant
mieux aux dotations en facteurs; et au Cameroun, le producteur efficace, s'il est protégé par le
TEC ne sera plus stimulé par l'aiguillon de la concurrence. Selon la théorie des avantages
comparatifs, le Gabon a intérêt à se spécialiser comme le fait le Cameroun. On voit ici que s'il y
a intérêt à unir les rivaux, c'est parce que l'on compte sur la dynamique de la concurrence.
TI existe aujourd'hui une grande contradiction entre la nécessité pour les pays du Sud
d'appartenir à l'une des grandes zones commerciales, d'une part, la difficulté concrète qu'ils
éprouvent à s'entendre au sein d'accords soit régionaux ou de producteurs, indispensables à
l'élargissement de leur marché intérieur et à la garantie de recettes stabltls, d'autre part.
Cependant, la volonté des pays en développement à constituer des zones de libre-
échange ou des unions douanières en vue de dynamiser leurs économies, obéit aux mêmes
objectifs:
- remédier à l'étroitesse des marchés intérieurs, particulièrement gênante quand la
population totale d'un pays est faible et son pouvoir d'achat limité. La CEMAC est constituée
de six Etats dont la majorité comptent moins de trois millions d'habitants;
- permettre une industrialisation à l'échelle régionale par la construction d'unités
industrielles communes à plusieurs pays, afin de partager les coûts:, faire tourner à pleine
capacité des unités de production de grande dimension et miser sur la complémentarité au sein
de programmes intégrés;
131

- pennettre des spécialisations à l'échelle régionale, facteur de dynamisme des échanges,
et cela en fonction des avantages comparatifs;
- offrir des débouchés régionaux qui pennettent de contrecarrer la montée éventuelle
des protectionnismes à l'encontre de la zone.
C3 - Une certaine incapacité à réguler l'offre.
Depuis plus d'une trentaine d'années, les pays du Sud sont exportateurs de produits
primaires. Ce qui limite leurs marges de manoeuvre aussi bien pour réduire les fluctuations des
prix que pour freiner la tendance à la baisse des cours des matières premières, dont la vente
représente une part importante de leurs recettes d'exportation. La seule tentative couronnée de
succès fut l'OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) avec le pétrole en 1973,
mais ce succès a été de courte durée.
Les principaux accords concernant les produits comme le cacao et le sucre (1961), le
caoutchouc (1982), le bois tropical (1984), le café (1961 et 1993) répondaient au souci de
limiter l'offre sur le marché mondial grâce à des stocks régulateurs à la définition de quotas de
production par pays de façon à adapter les quantités mises sur le marché à un niveau
susceptible de garantir le maintien d'un prix plancher. Ces accords ont en général échoué faute
de discipline suffisante de la part des pays producteurs.
De plus, la surproduction mondiale de la plupart des matières premières a entraîné la
baisse des cours. En fait, la condition essentielle pour qu'un accord de produits fonctionne est
que les pays qui l'ont signé puissent contrôler durablement une part suffisante de la production,
afin d'être en mesure de maintenir l'offre à un niveau tel que le prix du produit reste élevé. C'est
ce qui a expliqué la réussite de l'OPEP au milieu des années 1970, mais aussi son échec dix ans
plus tard.
Les pays d'Afrique centrale, dont les structures de production sont quasiment les
mêmes, disposent des mêmes matières premières. Il est surprenant de voir que ces pays se font
132

une concurrence acharnée sur les marchés extérieurs. Le Gabon, ]le Congo, le Cameroun et
récemment, la Guinée-Equatoriale sont des pays qui produisent du pétrole. C'est à qui placera,
le premier, le fruit de son extraction.
Conclusion de la première partie:
La théorie des Unions douanières est, de par la rigueur d,e ses démonstrations, très
intéressante. Mais l'application de celle-ci pose beaucoup de problèmes. TI faut comprendre
qu'une théorie est toujours dépendante de la nature des hypothèses qui l'inspirent. Or celles-ci
sont parfois simplifiées pour rendre compte de l'état réel de la nature.
A cet égard, les théories des Unions Douanières pêchent ce:rtainement du fait qu'elles
reposent toutes sur un monde à deux biens et deux pays. Cette réduction de l'état de la nature
conduit à des conclusions parfois trop optimistes, toujours en décalage avec la réalité. Cela
peut expliquer pourquoi les pays éprouvent autant de difficultés à s'intégrer. Dès lors,
pourquoi les pays développés réussissent-ils, si l'on se réfère aux résultat d'étape de l'Union
Européenne et à ceux de l'ALENA ?
Si l'échec des tentatives d'intégration régionale en Afriqm~ centrale tient en partie à
l'incapacité des Etats de respecter et de faire respecter les règles établies, le commerce
clandestin, le détournement des mécanismes de compensation, des coûts de transaction élevés
du fait du nombre des intermédiaires sont autant de facteurs qui pénalisent le processus
d'intégration.
Dès lors que cette intégration n'est pas un jeu à somme nune, il est nécessaire que les
inégalités engendrées soient minimales et il faut éviter les attitudes de "passager clandestin". Ce
qui exige des institutions supranationales viables. Par ailleurs, l.es structures sociales, les
133

réseaux et
les
solidarités
ethniques
peuvent
renforcer l'efficacité
des
organisations
économiques.
Mais il semble que malgré les expériences négatives d'intégration régionale enregistrées
en Afrique au Sud du Sahara, l'Afrique du Sud et ses partenaires connaissent des résultats
relativement meilleurs. En effet, les membres de la Communauté de Développement Sud
Afiicaine (SADC en Anglais) semblent ne pas se heurter aux difficultés des autres Etats. TI y a
lieu de croire que l'érection en Zone de Libre Echange de leur Communauté est une bonne
opportunité comme le souligne Harald V. PROFF (1998). Peut-être que cette initiative doit
servir d'exemple au reste des sous-régions en Afrique au Sud du Sahara. Gageons qu'elle
constitue une opportunité pour le développement joint de toute la région.
134

LA FINALITE DE LA REDEFINITION DES (-:OND1TIONS
D'OPTIlVIALITE : La nouvelle stratégie
Plusieurs accords régionaux ont été signés depuis la fin des années quatre vingt. Il s'agit
en fait d'une deuxième vague de régionalisme après celle des années soixante. La première
avait connu un seul résultat tangible, la fonnation de la Communauté Economique
Européenne. La seconde peut susciter plus d'espoir.
De son côte, la théorie économique a sensiblement évolué depuis les travaux de VINER,
car de nouveaux effets sont venus rectifier une image au départ trop négative des accords
régionaux. En particulier pour les pays en développement.
En effet, les théories traditionnelles élaborées respectivement par VINER (1950),
MEADE (1955), LIPSEY (1957 et 1960) et BALASSA (1961) ne pennettaient pas de
conclure à la plausibilité de l'intégration pour les pays en voie de développement. Leurs
analyses menaient à la conclusion que la fonnation des Unions douanières ne peut être
bénéfique que si la création de l'échange l'emporte sur le détournement de l'échange. Ce qui
135

n'est possible que lorsque les économies partenaires sont avant la fonnation de l'umon plus
.concurrentes que complémentaires.
C'est-à-dire que pour les pays à faible mveau de revenu: la complémentarité (sur la base
de la théorie traditiormelle de la spécialisation) est une condition de succès car la création
Id' échange est supérieure au détournement de trafic.
1
Mais pour les pays à niveau élevé de revenu per capita : outre la complémentarité, une
reuxième condition pennet le succès de l'intégration, c'est la similitude (sur la base du
fommerce intra-branche).
Aussi, les travaux de :MEIER (1960), ALLEN (1961) et MICKSELL (1961) ont-ils
considéré que la théorie des Umons douanières ne convenait pas aux pays en développement.
Ce que nous avons effectivement vérifié dans la deuxième section du dernier chapitre avec
1
l'exemple de l'UDEAC.
1
Mais d'autres courants de pensée, BHAMBRI (1962), URQUIDI (1962), MICKSELL
(1963) dans un second ouvrage, COOPER et MASSELL (1965), KlTAMURA (1966) et
LINDER (1967), ont estimé que les Umons douanières peuvent être analysées non pas
1.
~
.
l
'h
.
'al
'
uruquement par rapport aux euets statIques sur es ec anges maIs eg ement par rapport a
1
Vindustrialisation et éventuellement la substitution aux importations. Ce qui leur dorme une
dimension différente, plus proche de la théorie du développement.
Les travaux plus récents de BALDWIN et VENABLES (1995) ont pennis d'avoir une
àpproche synthétique en termes d'analyse du bien-être. Les effets de l'intégration éconollÙque y
bnt été analysés. Mais ces effets sont difficilement observables dans les pays en développement.
\\
En effet, ces pays présentent des structures différentes de celles décrites par les théories des
Unions douanières en ce sens que les conditions de réussite (revenu par tête élevé, notarrunent)
de l'intégration ne sont pas réunies. C'est pourquoi il est d'abord nécessaire de défimr ces
donditions économiques et politiques plus compatibles avec les structures des pays d'Afrique
1
<l:entrale.
1
136

A cet égard, la formation d'une véritable union douanière entre les pays d'Afrique
centrale et la création d'une zone de libre échange entre l'Afii.que centrale et l'Union
Européenne apparaît une des stratégies possibles.
Mais quelle que soit la stratégie adoptée, l'objectif demeure le développement des
économies des pays d'Afrique centrale au moyen de l'industrialisation de ces pays.
A cet effet, nous allons, dans cette partie, traiter de la faisabilité de la nouvelle stratégie
III
proposée (chapitre 3). TI s'agit de définir les aspects interne et externe de l'intégration des pays
d'Afrique Centrale.
Nous définirons ensuite les conditions que ces pays doivent remplir pour que réussisse
cette stratégie (chapitre 4). Ce chapitre consistera essentiellement à démontrer que sans un
certain nombre de conditions nécessaires, la nouvelle stratégie risque de connaître le même sort
que les premières vagues d'intégration régionale.
137

C!J-{iAPlrf9.ΠIII
La définition de la nouvelle stratégie.
Depuis le début des années 80, une grande attention a été portée au rôle de la politique
commerciale dans la performance des économies des pays en développement. Cette attention
reflète le fait que le développement des marchés mondiaux influence fortement ces économies
et qu'entre les années 60 et 70, la politique commerciale menée dans les pays en
développement n'a pas été particulièrement en mesure de permettre la croissance éconollÙque
rapide et durable.
L'élaboration d'une nouvelle stratégie doit tenir compte non seulement du cadre
institutionnel mais aussi des capacités économiques des pays d'Afrique centrale et la possibilité
pour ces pays de s'industrialiser.
Compte tenu de l'échec des différentes tentatives d'intégration régionale en Afrique
centrale, une nouvelle stratégie d'intégration s'impose. Elle consiste à mettre en œuvre une
véritable union douanière (Section l) et à lier cette union douanière à l'Union Européenne par
le canal d'une zone de libre échange. Cette ZLE pourra être instaurée sur le socle de l'union
monétaire actuelle des pays d'Afrique centrale (Section fl).
138

SiECfJ'IOJ{I:
La création d'une véritable Union Douanière en
Afrique centrale
Différentes formes d'intégration correspondent à un degré particulier d'intégration
économique (Bela BALASSA). Panni ces formes, il y a la Zone de Libre-Échange (ZLE) et
l'Union Douanière que les analystes de la théorie du commerce international ont distinguées
(KRUEGER, 1997).
Lorsqu'un pays cherche à diminuer la protection de son économie, plusieurs choix
s'offrent à lui:
(1) réduire sa protection unilatéralement (libéralisation commerciale unilatérale, LCU) ;
(2) réduire sa protection dans le contexte multilatéral de l'üMC (libéralisation
commerciale multilatérale, LCM) ;
(3) réduire sa protection en participant à un ou plusieurs accords régionaux
(libéralisation commerciale régionale, LCR).
Dans le cas d'une LCM, le pays applique la clause de la nation la plus favorisée à tous
les partenaires. Mais dans le cas d'un accord régional, seuls les partenaires de l'accord
bénéficient de la réduction de la protection. De ce point de vue, on peut dire que les accords
régionaux sont en contradiction avec le principe fondateur de non discrimination du GATT :
l'article XXIV précise les conditions à remplir c'est-à-dire essentiellement, effectuer une
libéralisation substantielle et ne pas augmenter la protection à l'égard des pays tiers.
139

Les pays d' Afiique centrale étant économiquement faibles,
une libéralisation
commerciale unilatérale de leurs économies engendrera plus de problèmes qu'une libéralisation
commerciale régionale ou multilatérale. En effet, une libéralisation unilatérale risque de les
priver d'un élément particulièrement important: « l'accès au marché ». De plus, une
libéralisation unilatérale risque de ne pas leur conférer le pouvoir de négociation dont ils ont
besoin.
Nous allons donc tout d'abord préciser les raisons de la supériorité d'une umon'"
douanière en Afrique centrale. Ensuite, nous montrerons la façon dont doit être construite
cette union avant de définir son cadre géographique.
A - Les raisons de la création d'une U.D. plutôt qu'une ZLE.
Plusieurs analyses ont été faites concernant les effets des unions douanières sur les pays ~
membres et sur le reste du monde. Toutes ces analyses, ont reconnu que la formation d'une
union douanière était une solution de second rang, parce que le bien-être économique pouvait
être amélioré autrement par la suppression des protections tarifaires et l'instauration du libre
échange.
L'effet de bien-être d'une UD. dépend en grande partie de la façon dont sa formation
affecte les barrières commerciales vis-à-vis du reste du monde puisqUl~ la formation d'une
union douanière s'accompagne de la création d'un tarif extérieur commun (tec) par rapport au
reste du monde. Tout le problème est de savoir si la création de commerce entre les pays
membres de l'union excède le détournement de commerce et si les gains des consommateurs
(dus à la baisse des prix) compensent les pertes des producteurs.
Il arrive qu'on s'intéresse aussi à l'impact de l'union douanière sur chaque pays membre
et sur le reste du monde. Et dans ces cas, on relève que l'UD. est supérieure à la zone de libre-
échange. En fait, la supériorité des unions douanières en termes d'effets dynamiques repose sur
les idées suivantes.
140

Les zones de libre-échange doivent suivre à la trace les biens qui circulent en leur sein
pour éviter que des biens soient importés de pays tiers via celui où le tarif extérieur est le
moins élevé. Cela suppose l'instauration de règles d'origines complexes, reposant le plus
souvent sur la valeur ajoutée, mais qui n'apportent pas de solution complètement satisfaisante
à l'élimination de cette forme de contrebande (HUFBAUER et SCHOTT, 1992).
On ne saurait s'en tenir aux seuls mouvements de biens pour évaluer les bienfaits d'un
groupement régional. li faut également examiner les services, ou encore les coûts de
transactions. Les unions douanières semblent plus à même d'approfondir leur intégration dans
ces domaines, d'où de nouveaux effets positifs. Par exemple, le libre établissement des banques
de pays tiers déjà installées dans un autre pays de l'union européenne, incite à la concurrence et
contribue à l'optimalité du bloc régional.
Enfin et dans le même esprit, les unions douanières s'accompagnent souvent d'une plus
grande liberté de circulation des facteurs capital et travail. Un théorème classique montre que
le mouvement des facteurs peut se substituer à celui des biens pour atteindre l'optimum général
(MUNDELL, 1957). Une meilleure circulation des facteurs implique par conséquent une
convergence plus rapide vers cet optimum. Les retenues opérées sur le rapatriement des
dividendes et profits sont d'ailleurs, dans cette optique duale, l'équivalent des tarifs douaniers.
li est difficile de faire des généralisations théoriques sur la capacité de l'union douanière
à permettre des effets positifs importants. Mais il a toujours été admis que plus la part de
commerce est grande entre les partenaires de l'union avant la formation de celle-ci, plus elle est
en mesure d'avoir un effet net de création d'échanges et moins il y a de détournement de trafic.
Autrement dit, lorsque les tarifs préexistants sont très élevés (tels qu'il y a moins de commerce
à détourner) ou très faibles (tels que les coûts de détournement sont bas), le bien-être
augmente avec la formation de l'union.
En réalité, on peut enregistrer les effets de l'union douanière dans plusieurs domaines
économiques.
Si les économies d'échelle sont possibles, un grand marché favorise forcément la baisse
des coûts de production. D'un autre côté, une concurrence accrue stimule la recherche de
141

.';
gains de productivité statiques ou dynanùques. Par ailleurs, si l'union douanière est fonnée de
pays qui produisent collectivement des biens et des services aux mêmes prix de facteurs, les
effets de bien-être seront plus importants.
Il faut ajouter que l'U.D. attire nécessairement l'investissement étranger. L'analyse des
effets de bien-être de ces investissements est semblable à celle des variations des flux
commerciaux. A cet égard, si l'investissement est attiré par la hausse de taux de rendement réel
(en dehors de la création de trafic), cela se traduit par une amélioration du bien-être mondial.
Mais si l'investissement est détourné, alors le bien-être mondial diminue.
Deux phénomènes militent en faveur de la création d'une union douanière en Afiique
centrale, plutôt qu'une zone de libre-échange. Il s'agit d'abord de la nécessité d'accès au marché
et le pouvoir de négociation que confère une union douanière à ces membres puis il y a la
contrainte des règles d'origine. A ce sujet, nous retiendrons le constat de YRUEGER (1997), à
savoir qu'une zone de libre-échange n'est pas nécessairement Pareto supérieure à une union
douanière.
Al- Accès au marché etpouvoir de négociatîo!I
Le premier élément qui milite en faveur de la création d'une UD. en Afrique Centrale
est l'accès au marché et le pouvoir de négociation.
En effet, les pays d'Afrique centrale ont
besoin, pour accéder au marché européen, de se constituer préalablement en une union
douanière ayant un pouvoir de négociation non négligeable.
Les termes de l'échange des membres d'une telle union douanière dépendent des prix
internationaux et droits qu'ils ne maîrisent guère. Dans la mesure où le niveau de ces droits
peut être influencé par la négociation, une union douanière qui augmente le pouvoir de
négociation de ses membres est nécessairement bénéfique.
L'existence de la CEE a mis les pays d'Europe occidentale dans une meilleure position
de négociation vis-à-vis des Etats-Unis d'Amérique en ce qui concerne les réductions tarifaires
que s'ils avaient dû agir individuellement. En comparaison, les unions économiques fonnées en
142

Afrique et en Amérique Latine paraissent certes trop faibles pour augmenter leur pouvoir de
négociation dans les mêmes conditions, mais des gains sont possibles.
Nous pouvons donc considérer de ce point de vue que l'argument en faveur de la
libéralisation commerciale multilatérale est sans doute puissant, mais supposons que les pays
développés et nouvellement industrialisés se divisent en trois blocs régionaux comme le note
De MELO (1995) : l'Amérique du Nord, l'Europe Occidentale et l'Asie Orientale. Supposons
aussi que chacun de ces blocs libéralise ses échanges internes mais impose aux importations
venant de l'extérieur des barrières tarifaires ou non tarifaires sigrûficatives. Dans ces
conditions, est-ce qu'un petit pays (par exemple les pays d'Afrique centrale) bénéficiera plus
de la libéralisation commerciale multilatérale ou de l'adhésion à l'un de ces blocs?
Le sens commun indique que cette dernière option devrait être plus génératrice de bien-
être puisqu'elle garantit l'accès au marché de l'un des blocs, bien qu'elle comporte l'adoption
et le maintien de barrières commerciales aux échanges avec les pays tiers (dispositions anti
GATT).
TI existe un autre argument qui permet de penser que l'union douanière est supérieure
au libre échange. C'est qu'elle évite aux pays membres de l'union de se soumettre aux
contraintes des règles d'origine.
A2 - La contrainte des règles d'origine
Il est de plus en plus démontré aujourd'hui que les règles d'origine constituent
davantage une contrainte qui pèse sur les partenaires dans une zone de libre échange qu'un
atout. Nous allons d'abord rappeler ici les principes de fonctionnement de ces règles d'origine
avant de comprendre en quoi c'est un handicap.
A2.} - Le principe des règles d'origine
Dans une zone de libre échange, comme les taux de droits diffèrent généralement d'un
membre à l'autre, les exportateurs situés dans les pays tiers ont intérêt à accéder au marché des
membres dont les droits sont élevés en passant par le marché du membre dont les droits sont
143

les plus faibles. Pour éviter une telle « déviation de commerce », les membres d'une zone de
libre échange adoptent des réglementations destinées à détenniner s:i une marchandise qui
entre dans un pays partenaire est originaire de la zone et est donc adnùse à bénéficier de la
franchise de droits.
A2. 1-1 - Le principe
Si la totalité des intrants et de la valeur ajoutée vient d'un seul pays, il est facile de
détenniner l'origine du produit. Lorsqu'un produit contient des intrants importés d'autres pays,
ou subit une transfonnation dans au moins un pays de la zone et au moins un pays en dehors
de la zone, on peut utiliser certains critères pour détenniner sa « nationalité économique »:
1)- s'il y a eu un changement de position tarifaire entre des stades de la production (par
exemple, de l'acier aux bicyclettes) ;
2)- si la valeur des matériaux utilisés pour transfonner le produit dépasse un certain
pourcentage de la valeur du produit transfonné, ou si la valeur ajoutée dans le pays de
transfonnation atteint un certain niveau,
3)-s'il a été procédé à une série d'opérations spécifiques de transfonnation qUI
confèrent aux produits concernés l'origine du pays dans lequel les opérations ont été
effectuées.
A titre d'illustration, on peut voir qu'en vertu des règles d'OIigine de l'ALENA, les
vêtements produits au Mexique accèdent au marché des Etats-Unis en franchise de droits, à
condition qu'ils soient conformes à la règles du " yarn forward " qui, pour de nombreux
produits, exige que la quasi-totalité des intrants proviennent de l'Amérique du Nord.
Les fabricants mexicains de vêtements doivent choisir entre se procurer tous les intrants
au-delà du stade de la fibre en Amérique du Nord et obtenir ainsi le régime préférentiel de
l'accord de libre-échange et se procurer les intrants en dehors de la zone à un coût
éventuellement plus bas, mais à condition de renoncer à l'admission en franchise de droits aux
144

Etats-Unis et au Canada. Si les bénéfices sont plus élevés dans le premier cas, les fabricants de
vêtements
mexicains
opteront
pour
le
statut
"nord-américain"
et
cesseront
de
s'approvisionner auprès de fournisseurs moins chers dans les pays tiers.
Les effets qui rendent les règles d'origine potentiellement restrictives ont été examinés
pour la première fois au GATT lors des travaux du groupe de travail chargé d'examiner
l'AELE de 1960. Les pays tiers ont fait observer que les critères de l'ouvraison extrêmement
teclmiques et les impératifs des règles d'origine pouvaient donner lieu à des difficultés d'ordre
pratique qui risquaient d'avoir une incidence négative sur le commerce des pays tiers.
A2.1-2 - Les règles de cumuL
Dans les échanges entre deux pays appartenant à une zone régie par la Convention de
Lomé (ACP-UE), tous les éléments fournis par les pays partenaires aussi bien les produits qui
en sont originaires que les ouvraisons qui sont effectuées, sont pris en compte pour
l'attribution de caractère" originaire" aux produits obtenus.
li en est ainsi d'un chef d'entreprise du Tchad qui souhaite exporter vers l'union
européenne, un produit, qu'il croit pouvoir fabriquer à moindre coût que son homologue
européen, essentiellement parce qu'il dispose d'un accès plus facile aux matières premières
dont il a besoin et que ses charges salariales sont relativement plus faibles.
Il peut se trouver que ce chef d'entreprise n'ait pas le savoir-faire nécessaire pour
concurrencer valablement les producteurs européens et son avantage en terme de prix peut
parfois être annihilé par les droits à l'importation perçus par l'union européenne.
En vertu du cumul multilatéral total, la condition de fabrication à partir de fil, requise
par exemple, parles règles d'origine préférentielle pour l'attribution du caractère" originaire"
aux vêtements obtenus, peut en effet être réalisée globalement dans plusieurs pays de la zone
UE-ACP, au lieu d'être impérativement réalisée dans un seul d'entre eux pour être considérée
comme satisfaite.
145

Ce dispositif permet donc à un produit d'origine tierce subissant des ouvraisons
successives dans deux ou plusieurs pays de la même zone préférentielle d'acquérir le caractère
de "produit originaire" dès lors que l'ensemble de ces ouvraisons
constitue une
transformation suffisante. Plus précisément, des vêtements confectionnés au Cameroun à l'aide
de tissus faits dans l'union européenne à partir du fil venant de pays tiers (pakistan par
exemple) peuvent être réexportés vers l'union européenne au bénéfice de l'origine
préférentielle camerounaise.
Prenons un autre exemple, des mouvements de montres montés en France à partir de
composants importés de Taiwan: unité d'affichage en cristal, plaque métallique contenant un
llÙcrocircuit, pile. La valeur de ces composants tiers dépassant 40 % du prix départ des
mouvements obtenus, ces denùers ne satisfont pas aux conditions requises par la liste des
exceptions à la règle du changement de position tarifaire pour être considérés comme
originaire de l'union, lorsqu'ils sont exportés vers le Gabon. Dans cet état ACP, ces
mouvements sont utilisés pour la fabrication de montres numériques avec des boîtiers et des
bracelets originaires du Congo, autre pays ACP.
Dès lors que la valeur des composants taiwanais initialement mis en œuvre en France ne
dépasse pas 40 % du prix départ usine des montres finalement obtenues, conformément aux
conditions requises par la liste des exceptions à la règle du changement de position tarifaire,
ces montres pourront être réexportées vers l'Union européenne au bénéfice de l'origine
préférentielle ACP. En vertu du cumul multilatéral total applicable à l'intérieur de la zone
ACP-UE, l'ouvraison réalisée en France est en effet prise en compte comme si elle avait été
effectuée au Gabon.
Mais si ce principe paraît tout à fait utile pour éviter certains dérapages, il peut se
transformer rapidement en handicap pour les partenaires d'une ZLE.
A2.2 - Le handicap des règles d'origine
En partant de l'observation que les unions douanières s'accompagnent de la formation
d'un tarif extérieur commun (qui peut être la moyenne des niveaux de tarifs existants avant la
formation de l'union), KRUEGER analyse les effets de la libéralisatilon ou de la restriction
146

fonnation de l'union), KRUEGER analyse les effets de la libéralisation ou de la restriction
commerciale en isolant les aspects essentiels. Concernant les ZLE, puisque chaque pays
conserve sa structure de tarifs extérieurs, l'hypothèse que la moyenne des niveaux de tarifs
extérieurs reste inchangée est trivialement satisfaite.
Cette hypothèse est en réalité incorrecte selon KRUEGER, puisque les règles d'origine
ont le même effet que les barrières commerciales additionnelles en zone de libre échange.
Le fait que la zone de libre échange maintienne les barrières commerciales externes de
chaque pays tout en supprimant celles qui existent entre les pays partenaires, entraîne trois
types de conséquences :
Premièrement, l'existence de taux de tarifs différents des pays partenaires par rapport
aux pays tiers, nécessite des règles d'origine: les biens qui circulent entre pays de la zone
doivent avoir pour origine l'un des pays partenaires afin d'éviter" déviations de commerce ".
Deuxièmement, on peut décider que la règle d'origine préserve naturellement le niveau
de tarifs pré-exitants avant la fonnation de la zone de libre échange à moins qu'il y ait
délibérément des modifications de tarifs ou de toute autre barrière commerciale, la règle
d'origine peut en effet « exporter la protection» (voir infra, exemple, HERiN. début de la page 149).
Quoiqu'il en soit, en tennes d'incitations aux producteurs, une ZLE « exporte» la protection
d'un pays à l'autre à travers les stimulants créés par ces règles d'origine.
Le troisième type de conséquences tient à la différence des taux de protection dans les
pays partenaires. Cette différence de niveau de taux de protection implique que les producteurs
dans les pays partenaires ne peuvent pas faire face aux mêmes prix de biens échangeables et
non échangeables dont la fabrication
nécessite des quantités importantes
de biens
intennédiaires. Ceci est vrai dans la mesure où les coûts de transport conduisent inévitablement
à des prix différents dans les pays partenaires.
Selon l'importance de chacune de ces conséquences, on enregistre naturellement des
implications sur la structure de protection existant dans les pays membres de la ZLE et sur le
comportement économique.
147

Le fait de vouloir éviter la déviation de commerce est, selon KRUEGER, lourd de
conséquences. En effet, on est obligé de prendre certaines mesures à la frontière. Et il est de ce
fait difficile qu'une ZLE évolue vers un marché unique du moins tant qu'il n'y a pas
d'unification des taux tarifaires.
En revanche, on peut très bien imaginer un groupe contigu d~: pays formant une union
douanière et supprimant les procédures frontalières entre eux. Mais il est impossible que cela
soit possible dans une ZLE, en raison de la nécessaire production d'une preuve de l'origine des
produits qui circulent à l'intérieur de la zone de libre échange.
De ce point de vue, la zone de libre échange est plus lourde à manipuler que l'union
douanière. Et quels que soient les coûts des produits, la fourniture de la documentation
prouvant l'origine de ces produits est une tâche qui ajoute à la difficulté.
Par ailleurs, les règles d'origine adoptées pour éviter des déviations de commerce
peuvent constituer des incitations aux producteurs d'un pays partenaire, pour qu'ils achètent à
des coûts très élevés les biens intermédiaires d'un autre pays de la zone; ce qui permet
d'exporter le produit final vers le pays partenaire sans taxe (malgré l'existence des inputs
alternatifs à bas prix dans le reste du monde).
Ainsi, les producteurs du Mexique ont jugé profitable d'importer une part de leur biens
intermédiaires d'une source à coûts plus élevés (les Etats-Unis) plutôt que leur source
habituelle (le Japon), au coût moins élevé, dans le seul but de pouvoir exporter librement aux
Etats-Unis. Mais il peut arriver qu'un producteur extérieur trouve profitable d'investir au
Mexique afin de satisfaire les règles d'origine, même si la production mexicaine est à coûts plus
élevés que les coûts du marché d'un pays tiers. C'est dans ce sens que la protection extérieure
devient plus forte consécutivement à un accord de libre-échange.
Enfin, le fait que les règles d'origine sont nécessaires en ZLE donne aux producteurs
nationaux l'opportunité de se constituer en lobby de protection. Autrement dit, les
négociations pour une union douanière doivent réconcilier les divergences d'intérêt des
producteurs dans les pays à faibles et à forts taux tarifaires. Ce qui n'est pas possible dans une
148

ZLE. Ainsi, les producteurs des Etats-Unis ont insisté sur les règles d'origine suffisamment
élevées pour s'assurer qu'ils n'auront pas trop de concurrents (eu égard à leur connaissance
des coûts mexicains) alors que les producteurs mexicains sont dédommagés pour avoir accepté
de recevoir du marché US. de biens intermédiaires à forts coûts (tarif non compris).
Le coût engendré par l'obtention des documents nécessaires prouvant l'origine d'un
produit a été estimé par HERIN (1986), dans un contexte de zone européenne de libre-
échange, entre 3 et 5 % du prix hors taxe. A cette occasion, il est reporté que les producteurs
canadiens avaient préféré supporter les barrières tarifaires plutôt que les coûts que nécessitaient
les preuves de l'origine. Plus le tarif nominal de protection des importations est élevé dans un
pays importateur, plus grande est la volonté des producteurs de fournir de la documentation
nécessaire à la preuve de l'origine du bien.
En raison de tout ce qui précède, KRUEGER estime que du point de vue du bien-être
économique la comparaison entre la ZLE et l'UD. permet de montrer qu'une ZLE ne peut
conduire à plus de création de trafic que l'union douanière et, quand les règles d'origine
exportent de la protection, une zone de libre échange conduit à plus de détournement de
commerce que l'union douanière. TI reste à démontrer que, par rapport au bien-être qu'elle
apporte, la ZLE n'est pas nécessairement supérieure à l'union douanière.
A cet égard, KRVEGER signale que les tarifs entre les pays partenaires sont dans tous
les cas nuls et que si la production a lieu au sein d'une ZLE ou une UD., elle doit se faire dans
le pays où les coûts sont plus faibles. Chaque fois qu'il y a création d'échange dans une union
douanière, cette création a nécessairement lieu en ZLE, et il n'existe aucun mécanisme par
lequel elle serait plus forte en ZLE. La question est alors de savoir si une UD. conduit
toujours à un détournement de trafic à travers un réalignement des tarifs.
De prime abord, cela arrive dans le cas où le pays à tarifs plus élevés est déjà producteur
avant la création de l'union. Quoi qu'il en soit, si le tec est inférieur au niveau de tarifs en
vigueur dans le pays à coûts maximums, son niveau de production doit être réduit en UD. Ce
qui favorise le création d'échanges étant donné que si cette production est soutenue en zone de
libre échange, il y aurait moins de création de commerce.
149

En d'autres termes, une uIÙon douarùère ne peut générer plus de détournements de trafic
que la zone de libre échange. En combinant la proposition selon laqueUe les règles d'origine
conduisent au détournement de trafic en ZLEalors que cela n'arrive pas en uIÙon douaruère, et
qu'une uIÙon douarùère ne conduit jamais à plus de détournement qu'une ZLE à cause de la
variation des taux de tarifs, on arrive à la conclusion qu'il y a plus de détournement en ZLE
qu'il y en a dans une uIÙon douarùère. Et, puisqu'il n'y a pas plus de création de commerce et
qu'il y a plus de détournement d'échanges en ZLE qu'en U.D., les effets de bien-être potentiels
d'une ZLE sont inférieurs à ceux de la création d'échanges dans une uIÙon douanière.
Pour toutes ces raisons, il est préférable pour les pays d'Afrique centrale de former une
uIÙon douarùère plutôt qu'une zone de libre échange. Mais cette union douarùère ou
communauté économique pour l'Afrique centrale devra se faire sur la base de l'union
monétaire actuelle au sein de la BEAC.
B - La construction de l'union douanière sur la base de l'union monétaire
L'Afrique centrale a connu une union douanière: l'UDEAC. ]] y a donc lieu de se
demander pourquoi cette première union n'a pas donné des résultats satisfaisants et a du être
abandonnée au profit de la Communauté Economique de l' Afrique Ct~ntrale (CEMAC) 1- En
somme, de quels atouts dispose la CEMAC pour réussir là où l'UDEAC a échoué?
Le problème de l'UDEAC a été principalement, comme pour la plupart des entreprises
d'intégration dans les pays en développement, celui de la mauvaise répartition des coûts et
avantages de l'intégration (Cf chapitre II). Mais au-delà des obstacles politiques et
économiques de l'UDEAC, la détermination des dirigeants de l'Afrique centrale à surmonter
les obstacles ne tient-elle pas aux multiples avantages de l'union douarùère en terme de
croissance et de développement des pays membres?
li est bien connu que les échanges commerciaux et l'industrialisation sont des facteurs
déterminants de la croissance et du développement. Toute politique qui les favorise crée
nécessairement les conditions de croissance durable. Nous examinons donc successivement les
150

nouvelles perspectives de l'Union douanière et les effets du nouveau marché que doit créer
cette entité régionale.
BI - Les nouvelles perspectives
L'expérience de la coopération régionale entre les pays d'Afrique centrale de la zone
franc fait apparaître les enjeux de la coopération institutionnelle. Dans les deux domaines où la
coopération régionale se développe entre ces pays, notamment la monnaie et le droit, il existe
un problème d'autonomie de l'action publique à deux niveaux pour un pays donné:
(1) la séparation des pouvoirs au sein d'un même Etat, c'est-à-dire les pouvoirs législatif,
exécutif et judiciaire (depuis MONTESQUIEU) ;
(2) l'abandon de souveraineté d'un pays en raison de l'intégration au sein d'un ensemble
régional, qu'il s'agisse d'une union monétaire ou d'une union douanière.
Or la garantie de ces deux types d'autonomie est particulièrement difficile dans des Etats
jeunes, fragiles, soumis à de fortes tensions internes comme le sont les pays d'Afiique centrale.
La délégation volontaire de souveraineté à une institution plurinationale peut alors être le
moyen d'affermir cette autonomie en mettant partiellement le pouvoir judiciaire et monétaire à
l'abri des pressions gouvernementales ou sociales nationales. En somme, l'objectif est de
déléguer une partie des pouvoirs de l'Etat afin de garantir une monnaie stable et un Etat de
droit.
La coopération institutionnelle devient aussi un instrument favorisant la séparation des
pouvoirs. En effet, elle signifie que les Etats établissent une réglementation commune ou
délèguent leurs pouvoirs à des instances communes de décision. La coopération institutionnelle
est ainsi par nature multiforme. Elle consiste dans la mise en place de services techniques
communs, tels que l'éducation, la formation, la recherche ou la création d'institutions
régionales responsables de certains domaines de la politique économique, eux-mêmes aussi
variés que le change, la monnaie, la politique industrielle ou agricole, la politique de
l'environnement ou la définition de nonnes et de réglementations identiques conjuguée avec
l'institution de commissions de surveillance ou de juridictions communes.
151

Si les nouvelles formes de la coopération institutionnelle en zone franc visent à améliorer
le fonctionnement des institutions, leur intérêt est aussi de contribuer à lever les obstacles à
l'intégration commerciale des pays d'Afrique centrale.
Nous avons observé le peu d'efficacité de l'uruon douatùère en Afrique centrale surtout
par rapport au commerce intra-zone. En effet, ce commerce, en proportion du commerce total,
a eu tendance à diminuer en Afrique centrale au cours des dernières décennies. Toutefois, en
raison de la convertibilité du franc CFA, ce commerce est plus important en proportion du PIB
que dans des zones comparables hors zone franc. TI va de soi qu'il ne s'agit que du commerce
officiel, car le commerce non officiel s'est probablement développé plus rapidement du fait
qu'il échappe totalement aux restrictions commerciales imposées par les différents droits de
douanes et autres taxes, en particulier entre les pays de la zone et les pays frontaliers voisins à
monnaie non convertible.
La raison de cet état de choses peut se situer à deux ruveaux :
- d'un côté, la politique d'intégration est caractérisée par des accords entre Etats, sans
véritable intégration des marchés, c'est-à-dire sans unification des prix~ ru intensification des
échanges;
- d'un autre côté, il peut y avoir intégration des marchés sans accords de coopération à
portée économique, voire malgré le maintien d'obstacles officiels à l'échange, parce que ceux-
ci sont contournés, notamment par la fraude et la contrebande.
Les nouvelles formes de la coopération en Afrique centrale devraient donc exercer un
effet positif sur le commerce intra-zone, voire de matùère plus générale, sur le commerce inter-
africain, (p. et S. GUlLLAUMONT, (1993).
La productivité des économies de la zone est limitée par deux facteurs principaux: d'une
part, les contraintes administratives et l'incertitude sur l'application des règles juridiques,
d'autre part, la faiblesse des taux d'investissement.
152

En effet, les progrès de la productivité ne pourront se réaliser sans une reprise de
l'investissement. Et la croissance de l'investissement dépend de la mobilisation de l'épargne
(nationale et étrangère), stimulée par l'intégration sous régionale.
Un des principes fondamentaux de la zone franc est celui de la libre circulation des
capitaux à l'intérieur de la zone. Ce principe ne suffit pas à lui seul à assurer l'intégration
financière des pays d'Afiique centrale. li faut en plus que les placements d'épargne soient
suffisamment sûrs et substituables et que les intermédiaires financiers aient le droit et la
possibilité de développer leurs activités dans l'ensemble de l' Afiique centrale. C'est bien
pourquoi l'établissement des règles communes en matière de placement et de fonctionnement
des institutions financières doit donner à l'Union douanière toute sa portée.
Un corollaire de la liberté des changes à l'intérieur de la zone monétaire de la Banque des
Etats d'Afiique Centrale (BEAC) est la réglementation commune ou harmonisée vis-à-vis de
l'extérieur qui signifie la convertibilité totale du franc CFA vis-à-vis de toutes les grandes
monnaies du monde. Un effet attendu de cette convertibilité est la confiance des investisseurs
étrangers, assurés de pouvoir rapatrier leurs avoirs. Mais cette convertibilité ne doit pas être
entravée par divers obstacles aux mouvements de fonds, dues à l'illiquidité et à la mauvaise
gestion des systèmes financiers. C'est l'intérêt du transfert à l'échelon régional de la
surveillance des intermédiaires financiers.
Un tel transfert, s'il accroît l'efficacité du contrôle, est susceptible de renforcer la
confiance des acteurs économiques. C'est la condition essentielle pour créer un climat propice
aux investissements directs étrangers. D'une façon plus générale, dans des économies dont le
fonctionnement repose sur le marché et implique le respect des contrats, l'établissement d'un
Etat de droit, particulièrement en matière économique et financière, est aussi important que la
convertibilité de la monnaie pour attirer et retenir les capitaux étrangers.
Le nouveau marché qui doit être créé aura certainement des conséquences sur les
différents acteurs économiques.
153

B2 - Le nouveau marché.
La dimension d'un marché est déterminée par des variables telles que la population, le
niveau de vie des habitants, la standardisation, la demande, les goûts, les moyens de
communications, les barrières douanières. Que deviennent ces variables avec la construction de
la CEMAC ou de l'union douanière (nouvelle forme) de l'Afrique centrale et quelle
perspective d'industrialisation suppose cette union?
Avec environ trente millions d'habitants, la CEMAC apparaJ.1: comme « une grande
nation », si on se réfère à la définition de KUZNETS pour qui, « une petite nation est celle qui
a une population inférieure à 10 millions d'habitants ».
Le produit intérieur brut (PIB) au prix du marché de cette zone s'élève à environ à
20.000 millions de dollars U.S. en 1997, avec 9.086,2 millions de dollars au Cameroun, 5.794
millions de dollars au Gabon, 2.469,4 millions de dollars au Congo, etc. Le pouvoir d'achat en
moyenne est de 725 dollars par habitant environ.
Cet élargissement des aires de marché des entreprises doit permettre la rentabilité de
plusieurs projets industriels qui ne l'étaient pas dans le cadre national.
Si on produit sur place certains biens que l'on importait jusqu'à présent, on épargne des
devises étrangères rares qui devraient améliorer, le solde des transactions commerciales et
accroître la capacité de l'investissement de l'économie. Par ailleurs, ces investissements
préparent le terrain à d'autres productions locales. En amont comme en aval, il se crée de
multiples occasions d'investissement qui, peu à peu, génèrent une croissance durable.
L'argument selon lequel une communauté économique entre pays en développement
fondée sur l'import-substitution diminue les importations en provenance des pays industrialisés
n'est pas particulièrement exacte. Pendant la phase de construction des industries, les
importations en équipements industriels augmentent ce qui contribue à maintenir de forts
courants d'importations en provenance des pays industrialisés.
154

C - La définiiïon du cadre géographique oplîmal
Il existe un degré d'intégration qui est associé, d'une part, à la taille de la zone que l'on
doit intégrer et, d'autre part, au niveau et à l'homogénéité du développement industriel des
pays partenaires. En Afrique centrale, une association de ces trois éléments est absolument
indispensable pour la réussite d'un regroupement économique. On devrait montrer qu'en fait,
pris de manière isolée, ni le niveau, ni l'homogénéité de développement industriel et encore
moins la taille de la zone intégrée ne garantissent un degré optimal d'intégration économique.
Tant que les pays en développement seront principalement des producteurs de biens
agricoles et que leur production industrielle sera essentiellement fondée sur les biens
primaires, il y aura très peu de possibilités de diminution des coûts dans les secteurs
industriels et il n'y aura aucune chance qu'il y ait des économies d'échelle potentielles.
Pour engranger des effets dynanùques de long terme d'un élargissement du marché
intérieur, un degré minimal d'industrialisation est nécessaire ainsi qu'une taille minimale de la
zone d'intégration. Nous explicitons ces points ici en définissant d'abord un degré optimal
d'intégration puis en faisant une représentation graphique de l'intégration optimale.
CI - Le degré optimal d'intégralîon
C'est d'abord BALASSA (1975) qui a soulevé le problème des avantages que l'on peut
tirer du respect des différentes étapes d'une intégration économique, puis COOPER (1976)
s'est intéressé aux problèmes concernant la taille optimale d'une zone d'intégration.
PEGNAHERRERA (1980) s'est interrogé, quant à lui, sur les circonstances favorables à
l'élaboration d'une intégration économique.
En Afrique centrale, le passage du degré d'intégration actuel (1) (sous-optitnal) à un
degré optimal (JO) peut s'opérer grâce à trois possibilités:
155

a) élargir la taille de l'Afrique centrale en ne se limitant plus uniquement aux pays qui
forment actuellement la CEMAC. Une réflexion peut être engagée pour savoir quels autres
pays peuvent être associés à cette grande aventure;
b) accroître le niveau de développement industriel en aplanissant les différences entre les
niveaux nationaux d'industrialisation;
c) rendre homogènes les degrés de développement industriel.
Soit la fonction d'intégration suivante:
1 = f(Tac,Hdi,Di),
+0-
+0
+
1 représente le degré d'intégration, Tac représente la taille de l'Afrique centrale, Hdi est le
degré d'homogénéité du développement industriel, et Di est le niveau de développement
industriel. Le signe est celui de la dérivée partielle de la fonction d'intégration dont le calcul
nous permet d'écrire:
I T = ~ > 0, et IT < ITo , si Tac < TacO
àTac
I T = ~ =0 et IT =ITo si Tac = Tac o
àTac'
,
I T = ~ < 0, et IT < ITo , si Tac> Tac o
àTac
éJI
<0
ôl'ac02
li semblerait qu'il y ait une certaine ambiguïté au niveau du signe de la dérivée par
rapport à la taille de l'intégration économique en Afrique centrale. En réalité, il y a une certaine
concavité de la fonction que nous expliquons ci-dessous compte tenu des éléments de la
formulation mathématique ci-dessus.
1H la dérivée partielle par rapport au degré d'homogénéité.
I H= ~ > 0 et I H< IHo, si 0 (= hétérogénéité) < H < 1 (= Homogénéité)
ôHdi
'
]H =~=o, et]H =]HO si Hdi = Hdr =1,
éJI 2 <0
ôHdi
ôHdio
156

ID; la dérivée partielle par rapport au niveau de géveloppement industriel,
Di
01
dl
1
=- - > 0) et --2 < 0 pour tout Di
8Di
8Dio
On doit pouvoir définir une taille optimale) Taco ) pour l'intégration en Afrique Centrale.
En effet, l'élargissement de l'Afrique centrale aux pays comme l'Angola, La République
Démocratique du Congo (Ex Zaïre), le Rwanda, le Burundi et Sao Tomé et Principe, peut
permettre d'atteindre cette taille optimale.
L'Afrique centrale dans ses limites géographiques actuelles ne constitue, comme on le
sait, qu'un marché d'environ trente millions d'habitants. Ce qui est insuffisant pour la
constitution d'un espace économique dynamique, le pouvoir d'achat étant trop faible dans ces
pays. Avec l'extension de l'espace économique de l'Afrique centrale, on pourrait sûrement saisir
des avantages procurés par des économies d'échelle et avoir des possibilités de mininùsation
des coûts liés à l'organisation même de ce genre de regroupement.
En somme, le signe positif sous la variable nous indique que I T varie dans le même sens
que l'élargissement de la zone tant que la taille (Tac) reste inférieure à un certain niveau·
(optimal), Taco . Car, à partir du moment où la taille est supérieure à la taille optimale, on
risque d'enregistrer un rendement marginal négatif, ce qui justifie que I T peut devenir négatif.
De plus, il est possible que la mobilité des facteurs devienne limitée par des
considérations d'ordre économique, historique, de langage et géographique. N'oublions pas que
l'Afiique centrale actuelle repose sur des considérations liées plutôt au passé colonial commun
des Etats membres et surtout à l'utilisation d'une monnaie commune, le CFA.
Un autre facteur qui pourrait limiter la taille optimale de l'intégration en Afrique centrale
est la diversité des préférences de biens collectifs. En effet, conditionnés par les différences
• La mesure de la taille optimale de l'intégration régionale en Afrique centrale peut dépendre de plusieurs cn't~res qui
dépassent le cadre de notre étude. Nous pO/lVons simplement considérer qu'avec une population de près de 100 millions
d'habitants. la grande Afrique centrale aura une taille acceptable si le pouvoir d'achat des habitants leur pennet d'avoir

un niveau de vie relativement élevé.
157

culturelles, socio-économiques, politiques et de revenus, les individu8 en Afrique centrale
diffèrent largement par rapport aux préférences de biens sociaux.
A cet égard, si la taille de l'Afrique centrale dépasse sa taille optimale, il y aura plus de
difficultés à satisfaire toutes les préférences individuelles de biens publics. Ceci permet de dire
que pendant que les avantages technologiques militent pour un accroissement de la taille de
l'Afrique centrale en tant que zone intégrée, plusieurs autres facteurs peuvent jouer dans le sens
contraire, c'est-à-dire en faveur d'une zone intégrée d'échelle plus modeste. Ces facteurs sont
notamment l'accroissement des coûts liés à l'organisation structurelle, à l'accroissement des
diversités de préférences individuelles et de liberté de choix, aux raisons de prestige national et
de souveraineté ainsi qu'au sens de l'identité culturelle.
Ainsi, le degré optimal d'intégration nous semble surtout lié à l'homogénéité plus forte du
développement industriel des pays membres de l'Afrique centrale. Les avantages de
l'intégration tels que la création d'échanges, les économies d'échelle internes (par la
spécialisation) et externes (par une propagation intra-industrielle de la technologie et de la
main-d' œuvre qualifiée), la hausse du niveau de productivité et un environnement économique
plus compétitif (attirant des capitaux extérieurs et des connaissances plus grandes dans des
domaines portés vers des technologies de pointe) sont mieux à mc~me d'amener l'Afrique
Centrale vers un niveau d'industrialisation plus élevé.
Mais pour mieux fixer les idées sur le degré d'intégration optimal, nous allons faire une
illustration graphique générale.
C2 - Représentation graphique.
Il s'agit ici de déterminer quelle est l'interaction entre la taille de la zone d'intégration,
le niveau et l'homogénéité du développement industriel. En fait, il est plus facile de démontrer
que ni « l'homogénéité », ni la « taille optimale» encore moins un « niveau de développement
économique» spécifique ne garantit de façon ,isolée un degré optimal d'intégration
économique. Seule la prise en considération simultanée de ces trois facteurs indique le degré
optimal d'intégration pour une zone.
158

Figure (3.1-1): Degré optimal d'intégration.
~
,
1
-l'
j)edl'e j,'n es,.,t. fI)
:I .... G;<
(H])~ = ?]»)
"
~
':\\
1
I , L I
1
:t
Y ....rl'e .J '''''c.r~l''. (1)
P
:lfl
(HJ~ = PV.b)
",
f:
,
F······
-;~-~..; ·~:-;:;ï~· 0i f,;., .Je
Si nous choisissons l'axe des X pour représenter la taille de la zone d'intégration (1) ;
l'axe des Y pour le degré d'homogénéité dans le développement industriel (Hdi) et l'axe des Z
pour représenter le niveau de développement industriel (Di) d'une part et le degré d'intégration
(I) d'autre part, nous aurons une surface qui pourrait représenter le degré d'intégration optimal
(1°) pour toute combinaison des trois variables indépendantes. Suivant les fonnulations
algébriques ci-dessus (Cf. supra p. 156 et suivantes), nous supposions que le taux marginal du
degré d'intégration est décroissant si l'homogénéité est plus forte entre les pays membres de la
zone ou si le niveau de développement industriel est plus élevé.
159

Compte tenu des trois déterminants que sont la taille de la zone d'intégration, le niveau
de développement industriel et l'homogénéité du développement industriel, et avec les
différences entre « petite, optimale et grande », «faiblement développé et fortement
développé », « hétérogénéité et identité », respectivement, chaque zone d'intégration peut être
classée à l'intérieur des douze groupes suivant ses spécificités:
Groupe
Développement industriel
Taille
Niveau
Homogénéité
-----------------------------------------------------------------------------------------------
A
Faible
Hétérogénéité
Petite
B
Faible
Hétérogénéité
Optimale
C
Faible
Hétérogénéité
Grande
D
Faible
Identité
Petite
E
Faible
Identité
Optimale
F
Faible
Identité
Grande
G
Elevé
Hétérogénéité
Petite
H
Elevé
Hétérogénéité
Optimale
I
Elevé
Hétérogénéité
Grande
K
Elevé
Identité
Petite
L
Elevé
Identité
Optimale
M
Elevé
Identité
Grande
Pour accroître le degré d'intégration, toutes choses égales par ailleurs, une zone
d'intégration pourra se déplacer le long de l'isoquante parallèlement à :
a)
l'axe des X, c'est-à-dire qu'il y a élargissement de la taille de l'intégration par
l'association d'autres membres. Ceci correspond au déplacement du point A au
point B au point C ou de D à E à F ou de G à H à I ou de K à L à M dans la figure
(3.1-1) ;
b) l'axe des Y, dans ce cas il y a égalisation du degré d'industrialisation au sein de la
zone d'intégration. Cela correspond au déplacement du point A au point D ou du
point B au point E ou du point C au point F ou du point G au point K ou de H à L
ou de I à M sur la figure (3.1-1) ;
c) l'axe des Z, il y a alors accroissement du niveau de développement industriel. Ici
cela correspond à une élévation de niveau, en partant du niveau correspondant au
160

pays en développement (HDi=PVD) vers le niveau des pays développés (HDi=PD)
sur la figure (3.1-1).
Pour la zone intégrée A par exemple, cette procédure d'ajustement signifie que le
groupe A est supposé être typique pour beaucoup de zones d'intégration dans les pays en
développement. Ce groupe est caractérisé par un niveau relativement faible d'industrialisation,
une hétérogénéité relativement forte entre ses membres et une petite taille de la zone
d'intégration (ceci correspond tout à fait à l'UDEAC ou à la CEMAC, excepté pour
l'hétérogénéité). On peut dire que cette zone d'intégration a des alternatives entre:
1) Se mouvoir vers fJ en favorisant l'égalisation des degrés d'industrialisation à
l'intérieur de la zone d'intégration au point D.·
2) aller vers j3 en acceptant de nouveaux membres et donc un élargissement de la
taillel ;
3) accroître le niveau de développement industriel vers le point G (et se déplacer du
niveau le plus bas du plan PVD vers le niveau le plus élevé du plan PD) en agissant sur les
différences entre les niveaux nationaux d'industrialisation.
Il faut rappeler que, quand bien même ces alternatives peuvent accroître isolément le
degré d'intégration, seule leur combinaison conduit à un degré optimal d'intégration I;VD et
I;D respectivement.
Si notre zone A (exemple l'Afrique Centrale) essaie de sortir du niveau r pour un
degré plus élevé j3 en choisissant l'alternative 2), l'hétérogénéité de ses membres deviendra le
facteur limite. Il n'y aura pas d'autres possibilités d'aller vers I;VD qu'en prenant des mesures
permettant d'égaliser les niveaux nationaux d'industrialisation.
Robson (1984, pp. 157-164) a examiné des politiques correctives possibles pour promouvoir le développement équilibré
·
au sein de la zone d'intégration et des instroments appropriés pour leur application.
1
1 L'illustration de ce point peut se faire en prenant l'exemple de l'élargissement de la Communauté Européenne aux pays
du Sud (Espagne, Portugal ou Grèce). On peut supposer qu'avant cet élargissement, la CE était caractén'sée par le point
G (ou K) sur lafigure (3.1-1), l'élargissement l'a amené vers la taille optimale H (ou L). Mais si nous supposons que la
CE était caractérisée par H (ou L) avant l'élargissement, alors l'élargissement l'aurait éloigné de sa taille optimale vers J
(ouM).
161

D'un autre côté, si on choisit l'alternative 1), on aura comme processus d'ajustement
qui passe d'abord par la taille - isoquante à partir de A - puis atteidre ensuite D (et donc le
degré d'intégration fJ), alors la taille sous-optimale de la zone d'intégration deviendra le
facteur limite.
Pour ce second cas où la taille sous-optimale de la zone d'intégration est à l'origine du
degré sous-optimal de l'intégration, et où le processus d'ajustement suit l'homogénéité _
isoquante (ligne ABC ou DEF) - allers vers un degré d'intégration plus élevé est indépendant
du degré d'homogénéité. Dans ce cas précis, l'hétérogénéité entre les membres ne saurait
expliquer le mauvais fonctionnement des accords d'intégration. En d'autres termes, si la taille
plutôt que l'hétérogénéité de ses membres est à l'origine du degré sous optimal de
l'intégration, cela ne peut pas signifier que l'hétérogénéité n'influence pas le fonctionnement de
la zone d'intégration.
La raison pour laquelle les tentatives actuelles d'accords d'intégration dans les pays en
développement en général et en Afrique au Sud du Sahara ont été plutôt source de
mésententes que couronnées de succès peut se trouver dans la représ~mtation graphique que
nous venons de faire. En effet, il existe une taille optimale d'intégration. Par conséquent, la
taille de la zone intégrée devient un facteur explicatif additionnel à l'intérieur d'une
combinaison de niveau et d'homogénéité de développement industriel 'qui détennine le degré
optimal de l'intégration économique.
Notre figure (3.1-1) suggère que sous des pré-conditions spécifiques, des activités
rationnellement coordonnées sur une base régionale peuvent être plus efficientes qu'une
tentative plus large sur une base mondiale. On voit par ce graphique qu'il est possible pour des
zones qui sont industriellement homogènes d'avoir des difficultés à s'intégrer si elles n'ont pas
de taille optimale.
162

S~Ciflœvll
Création d'une ZLE
entre la CEMAC et L'Union Européenne
La plupart des pays en développement bénéficient actuellement, pour leurs produits,
d'un accès préférentiel au marché européen. Pour certains d'entre eux, cet accès est meilleur
que pour d'autres en raison de l'existence de la pyramide des préférences commerciales. Il se
trouve que justement, au sommet de cette pyramide, il y a les 70 Etats d'Afrique, des Caraïbes
et du Pacifique (ACP) liés à rUE. par la convention de Lomé.
Cet accès préférentiel des produits venant des pays ACP au marché de l'union
européenne a été amélioré puisque simultanément une priorité a été accordée à la
transformation sur place des matières premières des pays ACP. Le mécanisme de stabilisation
des recettes d'exportation, le STABEX, a été amélioré, de même que le mécanisme de
promotion de l'industrie minière dans ces pays, le SYSMIN.
Parmi les principales caractéristiques des préférences commerciales que l'Union
européenne accorde aux pays ACP, il y en a qui sont destinées à encourager ces Etats à s'unir
dans une production industrielle plus efficace. C'est le principe des règles de cumul d'origine
qui peuvent entraîner un cumul total (voir supra Section J, A2.1-2, page 145).
Les pays d' Afiique centrale ont alors intérêt, eu égard à l'exiguïté de leurs marchés
respectifs, à renforcer leur coopération avec l'Union européenne devenue le plus grand marché
163

mondial. Cette coopération peut se faire par le biais d'une zone de libre-échange. En effet,
dans ce type de relation Nord-Sud, une zone de libre-échange présente beaucoup plus
d'avantages. Dans la mesure où le principe de réciprocité qui caractérise ce type d'accord est
réellement appliqué.
A cet égard, les pays d'Afrique centrale doivent libéraliser davantage leur commerce.
Nous analysons deux points importants dans cette section: la libéralisation commerciale en
tant que mesure de politique nécessaire; les effets attendus de la ZLE entre la CEMAC et
l'UE.
A - Libéralisation commerciale.
Tous les pays de l'Afrique centrale poursuivent des politique8 de protection de leur
production nationale par des tarifs douaniers élevés et par des restrictions quantitatives.
Ainsi protégées, les entreprises industrielles ne se voient pas obligées de faire de grands
efforts de réduction des coûts de production et de modernisation. La victime de ce
protectionnisme étant surtout le consommateur de l'Afrique centrale, qui a un choix limité et
doit souvent payer des prix élevés pour des produits de qualité parfois médiocre. Une politique
commerciale plus libérale suppose qu'un accent particulier soit mis sur la réduction des
entraves aux importations et sur la promotion des exportations.
Al - Réduire les entraves aux importations
Il est aujourd'hui prouvé que les restrictions des importations constituent un obstacle
aux exportations et empêchent les entreprises locales de tirer parti des possibilités offertes dans
ce domaine. L'imposition des droits de douane et d'obstacles non tarifaires élevés peut
renchérir sensiblement les intrants et par le fait même, hypothéquer la compétitivité des
exportateurs. Aussi, convient-il de réduire ou de lever les barrières tarifaires et les restrictions
quantitatives aux importations. Ce qui passe par la réduction ou la suppression des obstacles
164

non tarifaires et de la taxe sur les biens intermédiaires importés nécessaires à la production
1
°
1 d
°
bO
fuù
rltona e e certams lens
s.
ème
ème
1
Dans la 2
section du 2
chapitre (page 116), on a vu que l'une des conditions de
r1éalisation de l'optimum de premier rang était liée précisément à la taxe sur les intrants. En
effet, nous avons vu qu'avec cette taxe, il y avait une différence de prix, c'est-à-dire entre les
JriX à la frontière P et les prix intérieurs P' des produits échangeables. Ce qui est la cause
JrinCipale de la non égalité entre les taux de substitution collectifs des biens et les taux de
t~ansformationde ceux-ci, condition nécessaire à l'optimum. Or, si on arrive à supprimer cette
tle sur les intrants, il y aura égalité entre les prix intérieurs et les prix à la frontière. La
Juppression de cette taxe serait donc une condition suffisante pour qu'on ait l'égalité:
A cet égard, si la contrainte fiscale qui conduit à la différence des prix est levée, la
Gondition nécessaire et suffisante pour que l'équilibre parétien reste valable dans le cadre de
'l'OPtimum de second rang sera satisfaite. li est donc important d'égaliser les différents prix en
liéduisant les taxes sur les intrants importés.
AI.I - Diminuer les taxes sur les biens intermédiaires importés.
Les effets de production des restrictions des importations sont dépendants de la
manière dont l'input nominal (t ) et les droits sur les outputs (t M) influencent le prix net de
J
JhaqUe type de bien. Le taux effectif de protection (e) pour le processus de production du bien
1
M est défini par :
p,l_p'
e
= M
M
(3.2-1)
M
P'M
P;) est le prix net (valeur ajoutée) du bien M incluant le droit de douane et PfJ, le prix net
1
du même bien M en situation de libre-échange.
165

Nous allons introduire dans l'équation (3.2-1) l'expression de Pf.t dans la relation (2.2-
5)a : P/vt =PM - z~ (Al dans la 2ème section du 2ème chapitre, page 110) et prenons en compte
le droit de douane comme suit :
(3.2-2)
Puisque l'expression zP peut se réécrire comme suit :
J
l'expression du taux effectif de protection devient:
(3.2-3)
0:$ a
< 1 (a
est le coefficient technologique fixe sous les conditions de libre-échange).
lM
lM
Dans le cas de bien exportable X, la définition de l'équation(3.2-1) s'applique, mais le
prix brut de l'exportable ne peut augmenter suivant l'imposition de la taxe douanière, c'est-à-
dire:
.........(3.2-4)
Si nous substituons les équations (3.2-4) et (2.2-5)b: P; =F~ - z~ dans l'équation
(3.2-1), alors le taux effectif de protection de bien exportable (ex) est:
(3.2-5)a
a
=a avec la subvention des exportations:
lM
IX
166

(3.2-5)b
Dans le cas des biens importables, on a eM ~'M ~ '] et eM > 0 si 'M > alM']. Quoique le
taux de douane effectif soit maximisé pour un taux donné sur l'output nominal quand '] = 0, la
probabilité que la structure de protection produise une protection effective positive est forte.
Pour une structure tarifaire en cascade, on a eM > 'M > ']' alors que pour une structure de
droits unifonnes, e
=
M
'M quand 'M =Il. Même pour une structure de droits non unifonnes, la
protection effective peut être positive si la condition'M > alM'] est satisfaite.
En "absence de subventions des exJ10rtations, le taux négatif ex ne peut être atteint
qu'en ramenant '] au niveau zéro. Mais malgré le fait que ex = 0, il Y aura encore une forte
probabilité que eM > ex, si '] =0 autant pour les exportations que pour les importations, ex =
o mais e >
M
'M. Si '] = 0, pour les importations alors que les exportations sont exemptes de
droits sur les biens intennédiaires, alors ex = 0 mais e
> 0 si
M
'M > alM']. Ainsi exempter les
exportations des droits sur les biens intennédiaires revient à modifier le biais anti-exportables
par rapport aux non exportables mais cette mesure n'est pas capable d'éliminer le biais par
rapport aux biens importables.
L'élimination du reste de biais anti exportable où ex = 0 mais e
> 0 (si
M
'M > alM ,])
requiert un certain degré de subvention des exportations. Si 'J sur les exportables est
1
effectivement nul, alors ex = sx / (1- alX)· Ainsi sx doit être égal à eM(1- aIX) afin d'égaliser
le taux de protection effectif entre les exportables et les importables. Si la part des
intennédiaires dans les exportables est plus faible que dans les importables (alX < alM) alors
ex =eM pour un '] commun si sx < 'Mj' la différence précise entre sx et 'M dépend de
l'ampleur de alM - alX.
Sous les conditions d'équilibre de la balance commerciale (avec X = M), l'objectif fiscal
de taxation commerciale est éliminé, en cas de structure interventionniste unifonne. Dans tous
les cas, lorsque e
= ex, l'intervention servira (au mieux) à promouvoir les biens échangeables
M
par rapport aux biens non échangeables.
167

S'il peut arriver que la taxe sur les biens intermédiaires soit nuUe uniquement pour les
exportables, 1J = 0, la subvention effective des exportations peut être nulle, ex = 0 (si
sx =0) et le différentiel (eM - ex) sera réduit. Mais il y a des inconvénients à cette solution
car elle agit directement et indirectement de façon négative sur les revenus: directement, parce
que toute diminution de la taxe est un manque à gagner et indirectement dans le sens où il y
aurait des coûts associés aux arrangements administratifs...
On peut également avoir le cas où les tarifs nuls sur les inputs importés sont en conflit
avec d'autres objectifs. En effet, la diminution, notamment, de la protection des intermédiaires
par rapport aux importables finaux pourrait diminuer l'incitation à produire localement des
biens intermédiaires.
Etant donné que les pays en développement ne peuvent pas agir sur des prix mondiaux,
et que les multinationales peuvent agir de façon significative sur les prix dans leurs secteurs
d'exportation, la pression pour éliminer la réduction du prix net absolu due aux taxes sur les
intermédiaires est susceptible d'être forte. Cette option est considérée comme tout au plus une
mesure complémentaire. Si aJX et la taxe l
sont relativement faibles, alors la non protection
J
absolue des exportables sera faible. Sans subvention des exportations, la limite supérieure de
ex est zéro, auquel cas il y a une grande capacité à réduire le differentiel (eM - ex) par la
réduction de eM .
Dans la plupart des pays en développement, la protection effective (moyenne) des
industries nationales vis-à-vis des importations est relativement fOlie, à cause de l'escalade
tarifaire (lM> l ). Diminuer cette protection effective dans le but de réduire le biais anti
J
exportation requiert, soit de diminuer lM' soit d'augmenter 1J'ou les deux à la fois. La hausse
de l
provoque en fait un accroissement des revenus si les exemptions tarifaires appliquées à
J
une proportion significative des inputs ou si la taxe est inférieure à son niveau de maximisation
de revenu. Cela tend également à limiter la réticence à produire localement des biens
intermédiaires.
168

Si les exportations ne peuvent pas être dissociées d'un accroissement de f], alors il
serait plus approprié de diminuer eM par la diminution de fM' c'est-à-dire par la réduction des
tarifs nominaux sur les importations. De même, cet ajustement des tarifs nominaux serait
bénéfique à l'augmentation des revenus si les droits sur la production sont au-dessus du niveau
du revenu maximum. Même si la baisse de f
décourage l'augmentation du revenu, les taxes
M
totales sur les importations pourraient augmenter si la hausse de f] est suffisamment forte pour
augmenter le revenu. En réalité, compte tenu de la part significative des biens intennédiaires
dans les importations des pays en développement, la diminution des taux moyens de la
protection des produits nationaux vis-à-vis des biens importés est possible contre la hausse du
taux moyen des droits sur les importations.
Venons en à l'exemple de MILNER (1993). Si avant la libéralisation, les taux tarifaires
étaient de f
= 0,35 et f] = 0,1, on aurait e
> 0,35 (si Gif = 0,4 alors e
serait environ de
M
M
M
0,517) et avec des parts égales dans les importations totales, le taux moyen collectif sur les
intrants et les biens finis serait de 0,225. Maintenant avec la réforme du système tarifaire telle
que l'on ait f M = f] = 0,25, eM baissera de 0,25 mais le taux moyen des droits de douane sera
aussi de 0,25. La diminution de la protection de la production nationale peut se faire aussi par
la diminution des restrictions non tarifaires.
En fait, dans le court tenne, le remplacement des restrictions quantitatives par des taux
tarifaires équivalents conduit simplement à libéraliser les importations mais à alourdir la
fIscalité. Dans le long terme par contre, une réduction supplémentaire du biais anti exportation
conduit à la diminution du niveau moyen des tarifs sur les importations; à des niveaux
inférieurs au taux maximum de recettes, cela a un effet de revenu restrictif, du moins en terme
de rapport taxes sur les importations/revenu national.
La réduction de la dépendance vis-à-vis des taxes commerciales est souhaitable en
raison de son efficacité. Ce qui nécessite d'autres réformes fiscales pour maintenir le ratio
taxe/revenu national.
A cet égard, les pays d'Afiique centrale ont entrepris depuis 1993 par l'Union
Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC), une réforme fiscalo-douanière
169

dont les dispositions pratiques sont encore soumises à la procédure de ratification au sein des
Etats membres. Mais depuis 1994, l'UDEAC est en train de se muer en Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique centrale (CEMACt.
En attendant, certains Etats à l'instar du Gabon et du Cameroun ont amorcé
l'introduction d'une taxe sur le chiffre d'affaires comportant le princip(~ des déductions qui est
un des mécanismes essentiels de la TVA. Toute la question est de savoir quelles vont être les
incidences de l'introduction de la TVA sur les populations de ces Etats, nous y reviendrons.
A1.2 - Réduire les obstacles non tarifaires.
La principale raison qui pousse un Etat à intervenir au plan commercial est le souci de
protection. Il s'agit d'augmenter le prix net du bien ou secteur protégé par rapport aux prix des
autres biens ou secteurs. Si pour des besoins de simplification, on considère que les biens
échangeables ne nécessitent pas de b\\ens intermédiaires dans leur processus de production
(c'est-à-dire que aIM = alX = 0), les prix nets et bruts sont identiques pour tous les biens.
Les propriétés d'équilibre du modèle que nous avons vu (cf Al, 2ème section, 2ème
chapitre) peuvent être examinées en termes d'équilibre sur le marché des biens non
échangeables, puisque l'équilibre sur ce marché implique aussi qu'il y ait équilibre de la balance
commerciale. Nous pouvons l'illustrer par la figure (3.2-1), empnmtée à Chris MILNER
(1993) où la substituabilité des biens directement échangeables n'est pas possible, mais où les
biens échangeables peuvent être substitués par des biens impOItables et lou des biens
exportables.
Le prix des biens importables en situation de libre-échange par rapport aux biens
exportables est dOIU1é par les termes de l'échange mondiaux (rayon 01). La droite HH
représente les combinaisons alternatives du prix des biens importables ( PM) et des biens
exportables (Px) qui s'établissent sur le marché des biens non échangeables. L'équilibre de
* Pour plus de détails à ce sujet, /ire Fidèle MENGllE ME ENGOUANG, (1999), Le Gabon au Rendez-Vous de la taxe sur
la valeur Ajoutée in Economie et Gestion, la Revue du LEA, pp.91-112.
170

libre-échange se situe au point A où or coupe HH; ceci correspond à l'équilibre commercial
(Xo = Mo), les exportations sont égales aux importations.
L'utilisation de ce cadre nous conduit à examiner en termes généraux, les effets sur les
prix relatifs des politiques commerciales d'intervention. Un taux uniforme (t
)
appliqué sur
M
Itous les biens importables conduit initialement à un écart entre le prix des importables et des
\\exportables ( PM / Px) (constants pour un petit pays) et entre le prix des importables et des
biens non échangeables (PM / PN ) (de l'unité à 1+t).
Fig. (3.2-1): Un modèle de protection
1+t
(1+t)/(1+
1
o
1/(1+d)
1
1+t
En d'autres termes, l'économie passe de la situation A, à la situation B. Les forces du
marché éloigneront l'économie du point B : l'excès de demande des biens non échangeables
bntraîne des ajustements supplémentaires des prix relatifs. Ici, l'équilibre est restauré au point
b, le prix des biens non échangeables augmentant pour supprimer l'excès de demande. Le
1
~ésultat de la hausse proportionnelle du prix des biens non échangeables (d) est que le prix
~elatif des biens importables (PM /PN ) diminue au niveau (1 +tMIl +d) et celui des biens
Lportables (Px / P ) au niveau (J/(J+d). li est clair que l'ampleur de ces ajustements induits
N
1es prix relatifs dépend de la nature des relations de substitution entre M et N, d'une part, entre
1
\\
X et N, d'autre part.
171

En effet, si X et N ne sont pas de bons substituts en consommation et en production,
alors la courbe HH aura une pente forte et le point d'équilibre tendra vers B. Si Met N sont de
parfaits substituts, la ligne HH aura une pente légère et l'équilibre fimù tendra vers le point D
sur la figure (3.2-1).
Dans un cadre d'équilibre général, les effets d'un tarif douanier (t~) ou d'une
subvention ( s~) doivent être mesurés selon leur impact sur le prix relatif des biens
conunercialisables. Ainsi:
(3.2-6)
(3.2-7)
Sauflorsque les biens X et N sont parfaitement substituables, le droit de douane réel est
inférieur au taux de douane nominal. En réalité, la différence entre ces deux taux dépend de
l'importance de la hausse de prix induite des biens non échangeables (d). Compte tenu de la
substituabilité entre M et N, d tend vers t et t~ vers zéro. Si X et N sont de mauvais substituts,
leurs prix relatifs ne sont pas altérés, c'est-à-dire d = Sx; à partir des équations (3.2-6) et (3.2-
7), on peut voir que les subventions réelles n'ont pas d'effet. Et même si le tarif réel douanier
est positif, il reste inférieur au taux nominal.
Au contraire, si M et N sont de parfaits substituts, alors d = tM- Dans ce cas, le taux réel
est nul et la subvention réelle est négative. De ce point de vue, on voit que la protection des
activités concurrentes des importations en économie fermée tend à exposer les secteurs
,
d'exportation et la subvention des biens exportables a tendance à exposer les activités
concurrentes des importations. Si la protection des exportations et des importations est
simultanément appliquée, les effets dans une telle économie tendent à être compensés
mutuellement. Les effets nets de la politique conunerciale sur les prix relatifs peuvent en fait
être très différents de ceux attendus.
172

Très souvent, dans les pays en voie de développement, le taux de douane appliqué sur
les importations lM est supérieur à la subvention des exportations Sx, (lM> sx). Cela montre les
problèmes qui se posent dans la mise en œuvre des stratégies de politique commerciale mixte.
En particulier les coûts, c'est-à-dire le biais anti exportation que la protection contre les
importations impose au secteur des exportations apparaissent en l'absence de subventions, qui
ne font que compenser.
" ..
La subvention des exportations joue en fait un rôle protecteur des industries naissantes
qUi n'ont pas pour vocation première de servir le marché local . Elle ne peut donc pas
transférer les ressources du secteur des biens non échangeables vers celui de la production des
biens exportables.
Si lM = Sx et si des mesures de promotion des exportations sont plus fortes que la
protection contre les importations, alors le prix des biens non échangeables augmentera à
l'équilibre de long terme, du montant de lM (sx) qui résulte d'une protection réelle nulle des
biens échangeables. Les prix relatifs retourneront à la position de libre-échange avec une
protection contre l'importation et une promotion des exportations uniformes.
Si la réforme de la politique commerciale est nécessaire par les pays d'Afrique centrale,
le problème est de savoir comment réduire les barrières tarifaires et non tarifaires afin de
réaliser en douceur le processus de libéralisation. Il est vital de remplacer les restrictions
commerciales existant par des politiques industrielles et commerciales appropriées comme le
suggèrent LALL et WANGWE (1998)*.
Al.3 - Remplacer les restrictions quantitatives par des tarifs.
En général, toute réforme commerciale qui n'est pas accompagnée d'une réforme des
distorsions internes sera inefficiente. Il faut donc trouver l'approche optimale de la
• La Conférence sur la Recherche Economique en Afrique qui s'est tenue en mai 1997 a concentré ses travaux sur les
différentes politiques industrielles et commerciales susceptibles d'être mises en œuvre pour accélérer la croissance
économique des pays africains au sud du Sahara, ainsi que les modalités d'application de ces politiques. I.ALL et

WANGWE,
entre autres intervenants, ont centré leur intervention notamment sur la politique industn'elle et
l'industrialisation en Afrique Sub-Saharienne.
173

libéralisation commerciale. MICHAELY, PAPAGEORGIOU et CHOKSI (1991), d'une part,
THOMAS et NASH (1991), d'autre part, ont justement montré que les pays qui ont eu le plus
de succès en engageant des réformes ont été ceux qui ont remplacé les restrictions
quantitatives par des tarifs puis graduellement, ont diminué ces ta.rifs et les ont rendus
uniformes.
Plusieurs théoriciens comme MICHAELY (1986), KRUEGER (1986), KIM et al
(1992) ont estimé qu'un emplacement des restrictions quantitatives par des droits équivalents
est une libéralisation en soi. D'abord, une telle transformation rend le système plus
transparent; ensuite l'incertitude par rapport à l'accès des biens importés est réduite; et enfin
le pouvoir de monopole éventuel est réduit. En effet, ces conséquences en entraînent d'autres
notamment l'augmentation des recettes publiques laquelle contribue au soutien financier du
programme de réforme.
En fait, l'alternative la plus fréquente est d'éliminer les restrictions quantitatives (RQ)
produit par produit. Ceci est souvent opéré en passant d'un système de liste positive (c'est-à-
dire un système comprenant tous les biens pouvant être importés librement) à un système de
liste négative ou restreinte (c'est-à-dire les biens contrôlés).
Le problème avec cette méthode est que les taux effectifs de protection des biens finals
peuvent s'accroître si les premiers biens à libéraliser sont des biens intermédiaires ou des biens
de capital. De ce point de vue, il est apparu dans l'étude de MICHAELY, PAPAGEORGIOU
et CHOKSI que les gains les plus importants sont atteints en éliminant les RQ dans les
industries avec pouvoir de monopole d'abord, parce que l'accroissement des prix causé par des
quotas à l'importation équivalents à des droits en monopole est plus fort qu'en concurrence
parfaite.
Mais l'une des implications de la transformation des RQ en tarifs est la difficulté de
détenniner les tarifs équivalents. Mettre les licences aux enchères pour les quotas permet de
résoudre ce problème. En Afrique centrale, on peut effectivement utiliser les enchères comme
mécanisme d'élimination graduelle directe des quotas en accroissant le volume des licences et
en simplifiant l'élimination des restrictions quantitatives.
174

Al.4 - Réduire les barrières tarifaires
Les études menées par MICHAELY, P APAGEORGIOU et CHOKSI puis THOMAS
et NASH (1991) nous permettent d'introduire non seulement la neutralité mais aussi
l'optimalité dans la définition de la libéralisation commerciale. En effet, libéraliser ne signifie
pas seulement une réduction des biais anti-exportation du régime commercial, et un
accroissement de l'influence des mécanismes de prix, il signifie aussi une réduction du niveau
de l'intervention des pouvoirs publics.
L'inclusion de ces concepts dans la définition de la libéralisation commerciale signifie
qu'il faut tenir compte de plusieurs options avant toute prise de décision politique. Par
exemple:
• la diminution des tarifs nominaux;
• le rétrécissement de l'écart entre les tarifs nominaux et effectifs;
• le remplacement des restrictions quantitatives par les tarifs;
• une dévaluation réelle, une unification des taux de change multiple;
• une diminution ou suppression des taxes à l'exportation et des restrictions
quantitatives sur les exportations, etc.
Des discussions ont été menées au sujet des méthodes à travers lesquelles un pays doit
réduire ses tarifs en vue de rendre efficace une libéralisation commerciale. On peut en retenir
globalement quatre:
- réductions absolues du niveau des tarifs;
- réductions proportionnelles des tarifs;
- réductions en chaîne et
- réductions étendues.
Selon P AP AGEORGIOU et al (1991), des réductions en chaîne sont susceptibles de
générer des gains en bien-être importants. Cette méthode implique de réduire les taux tarifaires
les plus élevés jusqu'à un niveau spécifié, tandis que les taux les plus faibles restent inchangés.
175

Cela peut être répété jusqu'à ce que les tarifs atteignent le ruveau minimum possible et
deviennent unifonnes.
Cette méthode pennet de réduire les dispersions à chaque stade et de concentrer les
réductions uniquement sur les tarifs les plus élevés. Selon ce raisonnement, c'est la méthode de
réduction étendue conduisant les tarifs les plus bas vers le niveau minimum qui paraît meilleure
tant que les tarifs moyens baissent au même taux. Les pays d'Afiique centrale peuvent s'en
inspirer pour ajuster leurs tarifs vis-à-vis des pays tiers.
Cependant, quelques réserves peuvent être exprimées. Premièrement, les tarifs les plus
élevés peuvent être appliqués à très peu de produits. Parmi ces tarifs, des baisses importantes
seraient nécessaires avant de relâcher les contraintes sur les importations. C'est pour cela que
THOMAS et NASH (1991) ont opté pour des réductions proportionnelles ou une combinaison
de celles-ci avec des réductions en chaîne.
Deuxièmement, appliquer des tarifs positifs sur les biens non taxés conduit à
l'accroissement des biais anti-exportation. Souvent, pour les pays en développement, les biens
intennédiaires et les biens de capital sont exemptés de tarifs.
En effet, si le minimum prédéterminé est supérieur à zéro, une approche de réduction
des tarifs en chaîne pourrait aggraver les effets négatifs des taux effectifs de protection
appliqués aux exportations. Même si ces exportations sont largement exemptées de tels droits,
l'imposition des tarifs sur les importations des biens intermédiaires créera une distorsion sur les
incitations relatives à la production des inputs jusque-là importés.
Troisièmement, toutes les méthodes ci-dessus nécessitent des réductions graduelles ou
partielles de barrières, en fait, des réformes spécifiques. Comment cela peut-il prendre corps?
Pour illustrer ce problème, nous supposons qu'il y ait deux biens, i et), substituables
avec un droit sur le bien i supérieur au droit sur le bien), li> If. Diminuer le droit sur le bien)
seul n'entraîne pas nécessairement une hausse du bien-être. Ceci parœ que le niveau initial des
tarifs pénalise la consommation relative du bien i. Abaisser ff seul réduira davantage la
176

consommation relative du bien i, générant une distorsion sur ce marché. Ainsi, supprimer une
seule et non pas toutes les distorsions tarifaires peut conduire à réduire le bien-être.
Une diminution proportionnelle de tous les tarifs augmenterait à coup sûr le bien-être. La
méthode concertée aussi augmente le bien-être si, à chaque niveau, les biens sujets aux plus
forts tarifs sont des substituts nets de tous les autres biens. De même, un accroissement du tarif
le plus faible pourrait également améliorer le bien-être si les biens auxquels il s'applique sont
des substituts nets de tous les autres biens.
Mais la solution préférable serait de supprimer totalement des tarifs dans des industries à
pouvoir de monopole. Cependant, des réductions graduelles généreront des distorsions dans
d'autres marchés rendant le gain en bien-être incertain à chaque niveau. Dans ces conditions,
comment démanteler les restrictions quantitatives et les remplacer par des tarifs?
A2 - Encourager les exportations
La diversification des exportations des biens autres que les produits primaires est source
de multiples avantages économiques si elle s'opère en direction des créneaux porteurs.
L'Afrique subasharienne continue d'exercer une protection très forte de quelques usines
locales vis-à-vis des importations. Or, cette protection génère inévitablement un biais contre
l'exportation de ses propres produits au lieu d'en promouvoir. La part de l'Afrique
subsaharienne dans le commerce mondial a diminué au cours des quarante dernières années.
Ses exportations, qui constituaient 3,1 % du total mondial en 1955, n'en représentaient plus que
1,2 % en 1990, soit une perte annuelle de 65 milliards de dollars courants depuis les
indépendances jusqu'en 1990.
Nous avons vu que la médiocrité des résultats à l'exportation de cette région est surtout
imputable aux politiques menées par les pays d'Afrique subsaharienne eux-mêmes en matière
de commerce et de transport. Les types de correction qu'on peut opérer incluent des actions sur
les coûts de transport et des stratégies visant à réhabiliter les exportations, compte tenu des
contraintes budgétaires importantes de ces pays.
177

A2.I - Agir sur les coûts de transport.
Certaines analyses des problèmes commerciaux des pays en développement ne prêtent
pas assez d'attention aux coûts de transport. Pourtant, une variation même nùnime de ceux-ci
sur le plan international peut influer fortement sur la localisation des industries d'exportation.
La moitié des pays d'Afrique subsaharienne ont opté pour des politiques anti
concurrentielles, en réservant par exemple une certaine proportion du. commerce (système de
part de cargaison réservée) aux sociétés nationales de transport maritime pour favoriser le
développement des flottes nationales et économiser des devises. Le:s immatriculations sous
pavillon national et les balances des paiements montrent qu'aucun des objectifs n'a été atteint.
Par exemple, en 1990-91, les paiements nets de l'Afrique subsaharienne au titre du fret et des
assurances étaient d'environ 3,9 milliards de dollars, soit 15 % de la Vlùeur des exportations de
la région, contre 11 % en 1970.
Une large part des recettes en devises de l'Afrique subsaharienne, qui pourrait être
consacrée à l'investissement productif, sert à payer les services de transport international. En
fait, les coûts de transport pénalisent lourdement l'Afrique subsaharienne par rapport à ses
concurrents. Plus de la moitié des tarifs nominaux de fret maritime dépassent de plus de 2
points ceux que paient les autres exportateurs de produits identiques, et la marge est encore
plus défavorable pour le fret aérien.
TI apparaît en somme que, en sus des tarifs douaniers et des obstacles non tarifaires des
pays de l'OCDE, le coût des transports internationaux pèse de fa90n très négative sur les
exportations de l'Afrique au sud du Sahara.
Non seulement les coûts de transport de l'Afrique subsaharienne sont en général plus
élevés que ceux des concurrents, mais en plus, leur structure même semble avoir un impact
négatif sur les types de biens exportés par la région.
En particulier, les coûts de fret nominaux de nombreux produits transformés (poudre et
beurre de cacao) sont supérieurs à ceux du produit brut (fèves de cacao). TI en va de même
178

."(.
..
"
,'.
~
potiides produits transfonnés comme le contre plaqué et les placages, par rapport aux grumes
non équarries ou sciées.
Les pays de l'Afrique subsaharienne ont sans doute de multiples raisons de vouloir
s'orienter vers les exportations de produits ouvrés (plus grande stabilité des prix, création
d'emplois, recettes d'exportation accrues, etc.). Cependant, la structure des coûts de transport
tend à pénaliser la transfonnation locale de biens produits dans le pays.
Comment expliquer ces coûts de transport défavorables et surtout comment y
remédier? TI semble que les pratiques anticoncurrentielles consistant à réserver des parts de
cargaison pèsent lourdement sur les coûts de transport. Ce constat conduit à préconiser la
déréglementation. Les études que la Banque'mondiale (a consacrées aux autres régions telles
que l'Amérique Latine et l'Asie montrent qu'une telle mesure, conjuguée à l'ouverture du
transport maritime à la concurrence, peut réduire de 50 % les tarifs de fret. De multiples
enquêtes, dans les pays d'Afrique de l'Ouest, montrent par ailleurs que les possibilités
d'abaisser les coûts de transport sont bien plus nombreuses qu'on ne le pense souvent.
On peut ainsi recourir aux cargaisons en vrac pour réaliser des économies d'échelle,
rationaliser les services de transport maritime et le fonctionnement des lignes régulières,
accélérer la rotation des navires, utiliser dans la mesure du possible le transport à la demande,
améliorer les services de collecte en zone côtière, adopter de nouvelles techniques de transport,
promouvoir les associations de transporteurs ou moderniser les installations portuaires et
d'entreposage. Des études coûts/avantages des systèmes de transport au niveau national ou
régional peuvent aider à choisir les meilleures mesures.
A2.2 - Promouvoir les exportations.
Dans la littérature sur la politique commerciale, la stratégie de subvention aux
exportations a reçu une attention particulièrel . Cette attention résulte des difficultés à
rationaliser ce genre de politique dans un cadre néoclassique. Hong HWANG, Kaz
MIZAGIWA et Kar-yiu WONG (1997) se sont inspirés des travaux de BRANDER et
1 Nonnalement. le GA1T interdit des subventions aux exportations. Mais les pays en développement ont une dérogation.
179

SPENCER (1985) pour démontrer que lorsqu'on accroît les subventions aux exportations, cela
peut pennettre d'augmenter la production nationale et le bien-être global. Les pays d'Afiique
centrale doivent pennettre à leurs économies d'exporter sur le marc:hé de la Communauté
européenne en mettant à profit les dispositions de la Convention de Lomé.
Nous avons pu identifier deux sources potentielles de biais anti lexportation induites par
des politiques commerciales d'intervention. Nous avons établi que dans un contexte
-
+
+
d'incitation relative, le biais anti exportation était une fonctionf= f(sx, t] ,eM). Ce qui nous
fournit un cadre d'analyse des options politiques de réduction de tous les biais constatés.
En tennes absolus, on peut éliminer la source de biais anti expOJ1ation qu'est la taxe sur
les inputs en posant que la subvention nominale des exportations, sx est égale au produit entre
le coefficient technique, aIX et la taxe sur les inputs, t], tel que la subvention effective pour la
production des biens exportables soit nulle, ex =o.
Cela pennet de réduire les coûts sans éliminer la non incitation relative à réduire les
exportations, puisque avec ex = 0 et eM > 0 (si tM > t]), il y aura subvention effective pour
la production des importables uniquement. Comme nous l'avons souligné plus tôt, dans le cas
extrême où le différentiel de la subvention effective, eM - ex, devenait plus petit, la protection
réelle et le rendement fiscal diminuent. Les coûts administratifs et politiques du système
d'intervention et les barrières politiques augmentent.
Nous prenons l'exemple de deux pays dont l'un est le pays hôte et l'autre, un pays
étranger. Chacun de ces pays a une entreprise qui produit un bien identique et l'exporte. Le
produit X est fabriqué par l'entreprise nationale et le produit Y est fabriqué par l'entreprise
installée dans un des pays partenaires. Pour faciliter la compréhension, nous parlerons
d'entreprise nationale et d'entreprise étrangère. En considérant que la firme nationale maximise
son profit 7t, nous pouvons poser:
7l"(X,Y,s) =Xp(X + Y) - C(X) + sX
(3.2-8)
180

où C représente la variable de coût, s, une subvention unitaire et p(X + }j la demande
mondiale du bien.
La condition de premier ordre de maximisation de ce profit est:
1C = "'P'+p - C + s= 0
x
x
(3.2-9)
et la condition de second ordre est:
7r
= 2p '+Xp"-C < 0
xx
xx
(3.2-10)
où les dérivées partielles sont notées par les indices, sauf p qui est la dérivée partielle de la
J
fonction de demande.
De même, pour l'entreprise étrangère, le profit 7r* est donné par l'équation suivante:
7r* = Yp(X + }j - C*m
(3.2-8)*
avec les conditions de premier et de second ordre suivantes :
7r. =Y:pl+p - C· =0 .
(3.2-9)*
y
Y '
7r • =2p'+Yp"-
(3.2-10)*
yy
yy < o.
Les autres conditions sont :
7rxy == p'+Xp" < 0;
7r: == p'+Yp" < 0;
(3.2-11)
(3.2-12)
181

La condition (3.2-11) signifie que la recette marginale propre diminue lorsque la
production de l'autre entreprise augmente. A partir des conditions (3.2-10), (3.2-10)* et (3.2-
Il), la condition (3.2-12) est vraie si le coût marginal est non décroissant. Les conditions (3.2-
11) et (3.2-12) impliquent que:
(3.2-13)
Si les conditions (3.2-10), (3.2-10)* et (3.2-13) sont globalement vraIes, elles
impliquent l'unicité globale de l'équilibre. L'équation (3.2-13) se rapproche de la condition de
stabilité de RüUTH-HURWITZ. Les propriétés de statique comparative de ce modèle
dépendent de ces conditions. Les conditions de premier ordre (3.2-9) et (3.2-9)* sont des
fonctions implicites de réaction des deux entreprises. Chacune d'dIes montre la meilleure
réponse de l'entreprise à la production choisie par sa rivale.
Pour mettre en évidence l'effet de la subvention, on différencie totalement les équations
(3.2-9) et (3.2-9)*, ce qui donne:
(3.2-14)
(3.2-14)*
Puisque 1r;o; =1 et 1r;s =0, ces équations peuvent être mises sous forme matricielle et
résolues en utilisant la règle de Cramer, soit:

dX
1ryy
X :=-=-->0'
(3.2-15)
S
ds
D
'

dY
1ryx
Y:=-=-<O
(3.2-15)*
S
ds
D
'
D est défini dans l'équation (3.2-13).
182

Tout naturellement, un accroissement de la subvention à l'exportation, s, accroît les
exportations nationales comme l'exprime l'équation (3.2-15). De même, cette subvention
réduit la production de la finne étrangère comme dans l'équation (3.2-15)*.
Ce qu'il faut surtout retenir, c'est que la subvention aux exportations pousse les
entreprises de l'union à accroître leur part du marché international. Elle apparaît de ce point de
vue comme une bonne stratégie même si le problème de financement de cette subvention peut
se poser. Mais on peut très bien imaginer que si seules les entreprises rentables sont retenues
dans le cadre de l'union, un mécanisme de soutien financier à celles-ci, le cas échéant, peut être
facilement accepté par les Etats.
Soit alors une fonction d'utilité u(z, m), où Z est la consommation nationale du bien
imparfaitement concurrentiel et m est la consommation du bien numéraire. La variation de
l'utilité associée à la variation marginale des niveaux de consommation est donnée par
l'équation suivante:
(3.2-16)
En divisant cette équation par um' on a:
(3.2-17)
p = uz / Um est le prix relatif du bien exporté en situation de concurrence imparfaite. Le
tenne dl est la variation du revenu réel et a le même signe que la variation de l'utilité.
Les niveaux de production nationale sont X et mP • En supposant que tous les profits
des ventes du bien X s'accroissent pour les résidents, l'équilibre de la balance commerciale
requiert que la valeur de la production soit égale à la valeur de la consommation.
pX+mP =pz+m
(3.2-18)
183

la différenciation totale de (3.2-18) et la substitution dans l'équation (3.2-17) donne:
dI=(X -z)dp+ pdX +dm P •
(3.2-19)
Cette expression est composée de l'effet des tennes de l'échange, (X - z)dp, et de l'effet
de la valeur de la production, pdX + dm P • Le taux marginal de transfonnation est donné par
l'expression - dm P / dX =C
est mesuré en unités de bien m. Par
x , où le coût marginal
Cx
conséquent, l'équation (3.2-19) devient:
di =(X - z)dp+ (p- Cx)dX.
(3.2-20)
En substituant (p - Cx) = -Xp' - s dans l'équation (3.2-20), nous obtenons:
di = (X - z)dp - (Xp' + s)dX.
(3.2-21)
En général, une variation de la subvention affecte les profits et l(~s revenus dans les pays
producteurs et par conséquent y affecte la demande. Mais quel que soit le taux, on peut mieux
saisir les effets de la subvention en utilisant la fonction d'utilité u(z, m) = U(z) + m, puisque
dans ce cas, tous les effets de revenu sont absorbés par le bien numéraire parfaitement
compétitif. Avec cette fonction d'utilité et en utilisant Ps = p' (X + YJ il vient:
s
(X - z)Ps - (Xp'+s)Xs
dI/ds= {
(3.2-22)
- ZPs + ÀfJI J: - sXs
TI est donc clair que dI/ds est positif pour s = 0 puisque Ps et J: sont négatifs. Ce qui
indique qu'on peut être incité à rendre la subvention effective. La subvention optimale est
obtenue en posant dI/ds = 0 :
(3.2-23)
184

L'effet d'équilibre général de la subvention est illustré dans la figure (3.2-2). Le point P
représente le point de production concurrentielle avec la consommation associée à QC et le
IÙveau d'utilité U C • A cet égard, une subvention appliquée à partir de ce point doit diminuer le
bien-être puisque la production se situe en deçà de la frontière des possibilités de production
(PPP) et les termes de l'échange se détériorent.
La quantité de bien X produite par l'entreprise nationale à l'équilibre non coopératif de
Cournot est indiquée par le point N. La consommation se situe à Qn indiquant que la quantité
1 NA de bien X est échangée contre
Qn A de bien m. La valeur absolue de la pente Qn N, qui
1
représente les termes de l'échange excède la valeur absolue de la pente de la tangente en N à la
courbe FPP, qui représente le taux marginal de transformation.
La subvention amène donc la production au point S, accroissant la production du bien
X mais détériorant les termes de l'échange comme le montre la valeur absolue de la pente
Q'S . Malgré tout, une petite subvention à partir d'un équilibre non coopératif accroît le bien-
être national grâce à une expansion profitable des exportations. La consommation nationale
: passe au IÙveau Q' et les consommateurs se situent sur la courbe d'utilité la plus élevée U'
plutôt que sur celle de l'équilibre non coopératif un .
Fig. (3.2-2): l'effet de l'équilibre général
~---Lf
A
a
185

Incontestablement, le bien-être des consommateurs est amélioré. TI va sans dire que ces
politiques d'encouragement des exportations sont coûteuses. Mais ces coûts peuvent être
largement compensés par les recettes d'exportation. A ce niveau d'ailleurs, les gouvernements
des pays d'Afrique centrale peuvent s'inspirer des travaux de Hong HWANG, Kaz
MNAGIWA et Kar-yiu WONG (1997). Leurs résultats permettent de choisir la meilleure
politique à mener (entre une subvention spécifique et une subvention ad valorem).
Le développement des exportations qui est une composante d(~ la nouvelle stratégie est
une reconnaissance de fait que les pays d'Afrique Centrale souffrent dl~ deux handicaps:
1°) la structure de leurs économies demeure peu diversifiée depuis les trois dernières
décennies;
2°) les exportations de l'Afrique Centrale sont restées très faibles en pourcentage du
commerce mondial.
Il nous reste donc à quantifier et analyser les effets que pourra avoir la création de la
ZLE entre la CEMAC et l'Union Européenne.
B - Les Effets attendus de la ZLE entre la CEMAC et l'U.E.
L'impact de l'instauration d'une zone de libre-échange est habituellement mesuré par
des modèles d'équilibre général calculable (ROBINSON, 1990 dans le cas du Maroc puis
COGNEAU et TAPINOS, 1995). Mais de tels modèles nécessit(~nt la construction d'une
matrice des comptes sociaux. Pour les pays d'Afrique centrale, il est difficile de construire une
telle matrice dans le cadre de la CEMAC, faute de statistiques suffisantes et significatives sur
les régimes fiscaux et sur les coefficients techniques des structures éc:onomiques.
La démarche que nous avons retenue ici est fondée sur deux types d'analyse :
186

- le premier utilise des séries chronologiques (données trimestrielles de 1990 à 1997,
soit 32 observations) pour étudier la sensibilité des prix et des volumes d'échanges extérieurs
des pays de la CEMAC avec l'Union européenne. Les scénarios proposés utilisent les
coefficients d'élasticité obtenus pour évaluer l'impact des modifications des droits de douane
sur les prix et sur le volume des exportations;
1
- le second vise à expliquer comment les pays de la CEMAC peuvent bénéficier du
transfert de technologie dans leur conunerce avec l'U.E.
Bl - Evaluation des échanges bilatéraux entre la CEMAC et l'UE.
Le cadre dans lequel doit s'instaurer le libre échange entre la CEMAC et l'U.E. est
marqué par une intensité des échanges des pays d'Afrique centrale avec certains pays de
l'Union européenne. Par ailleurs, ces pays connaissent une période d'ajustement structurel. Ces
pays affichent une forte volonté de poursuivre la libéralisation de leurs économies.
Pour évaluer les échanges bilatéraux avec l'U.E., nous utilisons les données fournies
par les publications de la Banque mondiale (African Deve/opment Indicators, 1998/99), du
i
iFMI (Direction of Trade Statistics). Toutes les variables sont exprimées en logarithme
Inépérien afin d'avoir directement les élasticités.
Les indices de prix à l'importation et à l'exportation sont directement fournis par les
publications de la Banque mondiale. Mais l'indice de prix à la production, non fourni, a été
'obtenu en pondérant les indices de prix à la production des biens alimentaires et non
alimentaires. De même, nous utilisons pour les inputs, l'indice de prix de biens intermédiaires
primaires et l'indice de prix des engrais importés.
Bl.l - L'intensité des échanges.
Pour des raisons historiques (rapports avec la France, l'Allemagne et la Belgique), le
commerce des pays d'Afrique centrale est fortement concentré sur l'U.E.
187

Globalement, les pays de l'Union européenne ont absorbé, au quatrième trimestre 1995
40,12 % des exportations totales des pays de la CEMAC et leur fournissent 62,21 % de leurs
importations totales. En 1997 ces chiffres sont en moyenne, respectivement de 35,65 % et
60,87 % (Source: FMI, Direction ofTrade Statistics, juin 1998). On peut ainsi remarquer que si les
exportations des principaux pays de la CEMAC vers l'U.E ont connu un léger fléchissement,
leurs importations en provenance de l'U.E. restent pratiquement stablc;:s. Ce qui peut indiquer
une certaine rigidité de ces importations.
Xi
1Xi
Nous avons utilisé le ratio:
X CE-UE 1 X CE-MO *100 pour avoir les indicateurs de la
CE-UE
CE-MO
concentration des échanges entre la CEMAC et l'Union européenne.
XicE-uE représente les exportations du pays i de la CEMAC vers l'U.B.,
XiCE-MO représente les exportations du pays i de la CEMAC vers le monde,
XCE-UE, les exportations totales de la CEMAC vers l'U.E.,
XCE-MO les exportations totales de la CEMAC vers le monde
En remplaçant X; les exportations par M, les importations, on peut obtenir le même
ratio pour les importations. Quand le ratio est supérieur à 100, cela signifie que les
exportations de la CEMAC (respectivement les importations) sont plus concentrées vers
(respectivement en provenance de) l'U.B. que le reste du monde.
Le tableau (3.2-1) présente, pour la période 1990/97* , les indicateurs de la
concentration relative des exportations et des importations pour les principaux pays de la
CEMAC (le Cameroun, le Congo et le Gabon) .
Pour la période sous étude, les exportations du Cameroun vers l'U.E. sont fortement
concentrées alors que ses importations en provenance de l'U.E. le sont moins. Pour le Congo
et le Gabon, on constate beaucoup moins de concentration des expoItations vers l'U.E., avec
une diversification plus poussée pour le Gabon car ce pays ne consacre que 35,17 % de ses
exportations totales vers l'u.E. Cela peut se comprendre par le fait que, depuis la fin des
188

années 1980, ce pays a décidé de diversifier ses exportations de matières premières
(notamment le bois et le pétrole brut). Mais on constate que les importations du Congo et du
Gabon en provenance de l'D.E. sont très concentrées.
Tableau 3.2-1 : Intensité des échanges des pays de la CEMAC avec ['U,E. (en millions de dollars
V.S. courants pour les X et 11) movenne our 1990/97
Xce-ue
Xce-mo
Mce-ue
Mce-mo Ratio X RatloM
Cameroun
1780
2440
820
1430
204.65
94.21
Congo
760
2410
470
750
88.47
102.95
Gabon
440
3510
670
1040
35.17
105.84
Total
2980
8360
1960
3220
Ce que l'on peut dire, c'est que l'importance de l'U.E. dans les échanges extérieurs de
la CEMAC justifie à la fois l'opportunité d'un accord de libre-échange avec cette Union et
aussi l'intérêt d'en évaluer les effets.
BI. 2 - Estimation de la sensibilité du commerce aux prix et aux revenus.
Pour les exportations des pays de la CEMAC, l'instauration d'une zone de libre-
échange avec l'D.E. n'apportera que peu de modification par rapport à la situation actuelle. En
effet, les produits venant des pays de la CEMAC bénéficient déjà d'une liberté d'accès au
marché européen. Mais pour les importations de ces pays, la zone de libre échange devra
favoriser l'application du principe de réciprocité. Les biens en provenance de l'union
européenne devront bénéficier également d'un libre accès à la CEMAC. Tout dépendra en fait
de la suite des négociations en cours.
Nous avons vu, en analysant les pourcentages du tableau (3.2-1) que les importations
de la CEMAC avaient une certaine stabilité. Cela peut en effet, vouloir signifier que l'effet de
« substitution» est plus fort que l'effet de « complémentarité », car ces importations semblent
insensibles aux variations de la demande intérieure et/ou du PIB,
Faute de statistiques. nous n'avons pas pu faire une étude secton'elle pour déceler avec certitude les branches pour
lesquelles l'U.E. constitue le principal débouché.

189

Pour en être certains, nous avons voulu analyser l'impact que pourra aVOlf
l'instauration d'une zone de libre-échange entre la CEMAC et l'U.E. Dans une première étape,
nous allons évaluer l'effet du désannement douanier sur les prix des biens importés et au-delà,
sur les prix à la production intérieure et à l'exportation des principaux pays de la CEMAC.
Dans une deuxième étape, il va nous être possible d'en estimer l'impact sur le volume des
exportations
Bl.2-1 - Rôle des prix des inputs importés.
RUTHERFORD et alü (1994) puis MOURJI F. (1995) ont effectué des simulations
pour mesurer l'impact d'un accord d'association entre le Maroc et l'U.E. Nous nous servons
de leur modèle pour analyser le rôle des prix des biens intermédiaires importés par les pays de
la CEMAC. Nous avons posé deux types d'équations de type Cobb-Douglas. La première
(3.2-24) mesure le rôle des prix des inputs sur la production et la deuxième équation (3.2-25)
sur les exportations vers l'U.E.
IPP =ATaIPMb
........(3.2-24)
IPX = ArcIPMd
........(3.2-25)
IPP représente l'indice des prix à la production; IPM, l'indice des prix à l'importation des
inputs; IPX, l'indice des prix à l'exportation; r, le trend (non sigrùficatit) ; a, b, c, d, sont des
élasticités-prix. Nous avons fait une régression de toutes ces équations par la méthode des
moindres carrés ordinaires en appliquant le logarithme népérien à toutes les variables. Sur 32
observations, les résultats ont été répertoriés dans les tableaux (3.2-2) et (3.2-3) pour les trois
pays de la CEMAC concernés.
Les valeurs entre parenthèses représentent les écart-types. On peut dire que les résultats
sont globalement acceptables grâce notamment aux bons niveaux des tests de Fischer même si
on peut regretter la faiblesse des Durbin-Watson. Les signes sont conformes aux intuitions
théoriques. La sensibilité des exportations est plus significative que celle de la production.
190

Les tableaux (3.2-2) et (3.2-3) montrent une certaine sensibilité de la production
. intérieure et des exportations aux variations des prix des biens intermédiaires importés. Cette
sensibilité est très faible pour le Cameroun en ce qui concerne la production intérieure et très
forte en ce qui concerne les exportations.
Tableau (3.2-2) :Effets des IPM sur l'IPP
Tableau (3 2-3) 'Effets des IPM sur l'IPX
CAM
CON
GAB
CAM
CON
GAB
Constante
3.475
.917
1.625
Constante
-2.028
.857
.599
(.35)
(.255)
(0.762)
(.58)
(.742)
(.675)
Trend
.013
.0205
.012
Trend
.003
-0.0096 -0.0043
(.0011)
(.001)
(.002)
(.002)
(.003)
(.0017)
IPM
.198
.719
.617
IPM
1.532
.798
.883
(.0817)
(.053)
(.164)
(.135)
(.155)
(.146)
R2
.83
.97
.69
R2
.83
.52
.57
F(v1,v2)
73.49
455.82
33.68
F(v1,v2)
72.66
16.003
19.15
DW
.39
.91
.41
DW
.59
.37
.19
En effet, si une diminution des taxes douanières provoque une baisse des prix des
inputs importés de 10 %, toute chose restant égale par ailleurs, cela n'aura aucun effet sur les
prix à la production intérieure du Cameroun mais aura un effet plus que proportionnel sur les
prix à l'exportation de ce pays puisque ces prix connaîtront une diminution de 15,5 %. Pour le
Congo, on enregistre des baisses de 6,9 % pour les prix à la production et de Il % pour les
prix à l'exportation. Quant au Gabon ces diminutions seront respectivement de 5.8 % et de
9.03 %. On voit bien que les prix à l'exportation sont plus sensibles aux variations des prix des
biens intermédiaires importés. Ceci est en conformité avec notre raisonnement de la section
1
précédente.
En fait, on peut dire, selon les résultats ci-dessus que si la compétitivité des pays de la
CEMAC peut s'améliorer sur les marchés intérieurs, elle le sera encore davantage sur les
1 marchés extérieurs avec la possibilité, dans ce dernier cas, d'accroître les marges bénéficiaires
. et d'inciter à une réorientation de l'effort d'investissement vers ces marchés. Par ailleurs, cette
sensibilité de la production et des exportations des pays de la CEMAC (sauf la production
1
191

,,
"';;
intérieure du Cameroun) atteste que la production industrielle, le cas échéant, de ces pays a un
fort contenu en importations.
B1.2-2 - L'effet induit sur les exportations
Nous avons, pour connaître l~effet sur le volume des exportations des pays de la
CEMAC vers l'U.E., poser deux types de spécifications qui intègrent les variables retenues
usuellement, c'est-à-dire celles qui constituent un indicateur de compétitivité (effet prix) : les
prix à l'exportation, les prix à la production et les prix à l'importation et celles qui constituent
un indicateur de demande c'est-à-dire le PIB de l'UE.
Nous avons tester successivement les équations suivantes:
ao + a/PX + a PIBue + Il
2
X = bo + b/PP + b PIBue +
2
8
Co + c/PM + c PIBue + r
2
X: Exportations en volume
PIBue : PIB de l'UnionEuropéenne (en fait moyenne pondérée par les parts respectives
des cinq premiers partenaires des pays de la CEMAC : France, Allemagne, Belgique, Espagne
et Italie).
Les résultats des régressions n'ont pas été probants. Nous avons donc rejeté ces
spécifications. Nous avons tenté de regrouper toutes les exogènes pour expliquer le volume
des exportations des pays de la CEMAC :
La régression de cette relation donne pour les trois pays de la CEMAC retenus, les
spécifications suivantes :
192

,',:
Xca = 4.67 - 0.762IPMca + 0.457IPPca + 0.598IPXca + 0.0097PIB
(3.2-26)
(3.66) (-2.09)
(1.31)
(2.69)
(0.058)
If = 0.56,. F(4,27) = 8.898,. D-W = 1.76.
Xco = 3.767 -1.617IPMco + 1.389IPP + 0.9611PX - 0.1558PIB
(3.2-27)
(2.047) (-1.82)
(1.88)
(1.86)
(-0.33)
If = 0.52,. F(4,27) = 7.44 .. D-W.= 1.28.
Xga = 3.424 - O. 743IPM + 0.366IPP + 0.583IPX + 0.323PIB
(3.2-28)
(2.956) (-2.164)
(1.433)
(2.235)
(2.09)
If = 0.53 .. F(4,27) = 7.75,. D-W. = 1.54.
Les indices ca, co et ga désignent respectivement le Cameroun, le Congo et le Gabon.
Les valeurs entre parenthèses représentent les statistiques de Student. Selon ces statistiques,
les paramètres sont significativement non nuls. La régression est globalement bonne avec les
coefficients significativement acceptables. Les signes de la variable indice de prix à
l'importation sont conforme aux intuitions théoriques. Les tests de Durbin-Watson ne
permettent pas cependant de rejeter l'hypothèse d'auto-corrélation des résidus.
Les élasticités des volumes exportés aux variations du PIB européen est très faible
(négatif pour le Congo), ce qui atteste que l'intensité des exportations des pays de la CEMAC
vers l'u.E. n'est pas dépendante de la conjoncture en Europe. Elle obéit plutôt à d'autres
critères (politiques et historiques notamment).
Dans la CEMAC, les biens importés sont soumis à un taux de douane moyen de 17.3 %
au Cameroun, 16.6 % au Congo et 19.1 % au Gabon (moyenne de la période 1990/97). Une
réduction linéaire et graduelle de 10 % de ce taux, dans la perspective de la ZLE avec l'U.E. se
traduira par une baisse de 1,73 points (Cameroun); 1,66 points (Congo) et 1.91 points
(Gabon) chaque année pour atteindre zéro la dixième année.
Selon le schéma imaginé de démantèlement tarifaire sur dix ans, le tableau (3.2-4)
donne, compte tenu des estimations, les effets au cours de la première année, toutes choses
égales par ailleurs, sur les exportations en volume et sur les prix.
193

Le signe ncgariflnd lque qu 'i 1Y a d.iminution et plus signifie augmentation I\\insi, nous
crucgistrons t.oujCîl1r~ pour le Cameroun., cet effd perver:; d'une diminution des droits de
douane sur les prix à la production intérieure. Cela peut ëtîC intcrprél~~ var le fllit que la
pI'Oduction intérieme au Cameroun n'a p~~ Ull fort contenu cn importations. Une <1Ïrninuliun dt:
10 % des droits de douCl.n~ provoque en r':alité une augmenLaLluu ÙU .....o'ume de~ exportations
de 8 % pour le Camcroun, 20 % pour le Congo et plus ùe 9 % PULlI le Gab~)U,
Tab/l!Gu (J.2 ..4) : tYJét.ç dl'. bQi..~"1! de druiJ. d~ dlmum:
..
Cameroun
Congo
Gahon
..
[
UlM
.1 S.6
~15
-17
- - ..
TPP
+1.7
-4
-7
...
IPX
-21.6
-1(;
-16.6
'-
_...
b:\\portatiollS
+8
120
+9.13
-.
Ces rcsuhals n'tllCOrporent. rn.~ d'hypotheses ~ur I~ d6loumemt'ul Ut;; tlaiiç ~LJi pOtinait
Jesuller des accords s[mjbüre~ de l' U.TI. '-iV~\\': 11~~ pays tiers, notamment ceux d" Afrique cie
l'ouest. 11 n'est pas non pILl.~ ~uppo5é qu'il y ait creation de commerce au profit rie la C.EMAC.
On consldère que ks fIle~~LfCg d' IIccompagnement que nous envisageon~ ù~us I~
l"Juatrième chapitre nOl~JIlm~nl, pcrmettront fi. la C:EMAC; au moins de conserver sa part au
:,en:; large, dans les èt:haflgl;s de l' lU'i.. En d'autres termes, les gains de comp~thiv;t~ pnx.
qu'elle peut réalis~r doivenL ~c traduire par un .nccro{'1.~ement des exportations.
82 - Tran.'ifert de technologie e{ innova.tion
Le rrllllsfcrt cie technologie et riIlm..w~Ü()n peuvent jouer un rôle important dans les
rdations cmnmerciales entre la CEMAL ct l'union européenne. En effet, l'analyse de:s dle\\s
c.ommerciaux entre ui\\ ~ays ct} dévcl()ppement et un pays industrialise perf(l('.\\' de peOlOer que
ces rdati0n~ ~l)[ll profitables tnnt pour le~ paYi:> iJévdoppé:s s)il~ innovent continuellement dans
les nou Vl;aUx, produits, 'llie pour les pay~ cn développement car ils peuvent bénéfki~r du
tra.lls1cf\\ de tcchnologie. Dans la p~I spccti 'v'C d'une créadon de la zone de libre échange. (~lllrC
ks pay~ J' Ali'iqlJC centrîlle et l'urnml eLln)p~c:n.ne, ces rlellx gronre,q de lraYf> peuvent ~. attendre
à ùes a\\l~utagc~, même. ~i ceux-ci peuvent pal"<ùtre inégnllx
19-t.
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:~.~ . .'
B2.1 - Cas de délocalisation
Si nous partons de l'hypothèse que grâce à la ZLE entre la CEMAC et l'U.E., certaines
entreprises des pays européens peuvent délocaliser leurs structures de production dans certains
pays d'Afrique centrale, elles auront deux types de biens à produire: des anciens biens et des
. biens nouveaux!. Nous retenons l'hypothèse d'un seul facteur de production, le travail, dont
les dotations peuvent être différentes dans chaque type de pays. En effet, les travailleurs dans
les pays de la CEMAC sont beaucoup moins qualifiés que ceux de l'union européenne.
Par ailleurs, nous considérons que tous les biens sont supposés produits avec la même
fonction de coût. Cette dernière hypothèse nous permet de considérer qu'il s'agit en réalité
d'une même entreprise qui délocalise simplement certaines unités de production. Nous pensons
donc que la productivité du travail est la même pour la production des deux types de biens. Ce
qui explique que la capacité de l'entreprise à produire certains biens dans le pays d'origine
(pays européen) est la seule source d'inégalité de salaires entre la CEMAC et l'U.E.
Ainsi, les anciens biens sont des biens qui ont été développés depuis un certain temps.
1 Leur technologie est devenue propriété commune et ils peuvent être produits soit dans un pays
européen soit dans un pays de la CEMAC. Les nouveaux biens sont, quant à eux récemment
développés. Ils ne peuvent être produits que dans un pays européen compte tenu de la
technologie nécessaire à leur fabrication et de l'exigence de qualification de la main-d'oeuvre.
Nous considérons que la fonction d'utilité de tous les individus est de la forme:
n
U =(2:: c(i)o ]110 0 < e< 1.
(3.2-29)
i=1
cri) est la consommation du bien i, et n est le nombre total de biens produits
disponible. Le nombre de produits est le même que le nombre de vieux et nouveaux biens.
l Il faut préciser que tous ces biens sont destinés au marché européen, le marché de la CEMAC n'étant pas tout à fait
dynamique.
195

En développant son modèle, KRUGMAN (1979) avait supposé l'existence d'une
demande latente pour des biens non encore produits mais qui entrent dans la fonction d'utilité
en tant que biens additionnels. C'est-à-dire que si les biens additionnels sont disponibles pour
n+An
les consommateurs, ils auront à maximiser leur fonction d'utilité: U=[Lc(i)8]118 compte
;=1
tenu de leurs contraintes de budget. TI faut dire que la fonction d'utilité est une fonction
positive de la variété de biens disponibles. Ce qui signifie qu'un individu est satisfait si on lui
offre un grand choix de biens.
Du côté de l'offre, nous considérons, comme KRUGMAN, qu'il faut une unité de
travail pour produire une unité de bien. A cet effet, tous les biens sont produits sous des
conditions de concurrence parfaite c'est-à-dire que les profits tendront vers zéro au fur et à
mesure qu'entrerons les entreprises. Nous aurons donc:
PUE =SUE
(3.2-30)
PCE =SCE
SUE, SCE
sont des taux de salaires et PUE , PCE des pnx des biens produits
respectivement dans l'union européenne et la CEMAC.
Si nous considérons que les nouveaux biens sont exclusivement produits dans l'union
européenne, on peut se demander si certains anciens biens peuvent ëtre produits aussi dans
l'U.E. En fait, cela va dépendre des salaires relatifs. En effet, si SUE/SCE> 1, il vaudra mieux
pour l'UE, qu'elle se spécialise dans la production des nouveaux biens. Mais si SUE/SCE = 1,
l'UE sera compétitive dans la production de l'ancien bien.
Le salaire relatif est déterminé par la demande de travail dans les pays de l'U.E. Nous le
voyons dans le graphique (3.2-1). En effet, nous supposons qu'initialement, le salaire relatif est
supérieur à l'unité, SUE/SCE> 1, tel que les pays de l'U.E. se spécialisent dans la production du
nouveau bien. Si nous diminuons le salaire relatif, la demande des nouveaux biens va
augmenter et avec cela, la demande du travail comme on le voit par le segment DE. Si SuJJSœ
= 1, la courbe de demande de travail dans les pays de l'UE devient infiniment élastique, parce
196

que le travail dans l'U.E. et dans la CEMAC est parfaitement substituable dans la production
des vieux biens. La force de travail de l'UE est représentée par GA (graphique 3.2-1) de façon
qu'à l'équilibre le salaire relatif soit supérieur à un et que l'U.E. produise seulement des
nouveaux biens.
Maintenant, nous pouvons dire ce qui se passe lorsqu'il y a transfert de technologie. En
effet, au fil du temps, certains nouveaux biens devierment anciens, c'est-à-dire que la
technologie pour produire des nouveaux biens devient accessible pour les pays de la CEMAC.
L'effet de cette possibilité est traduite par un déplacement du segment DE à D 'E 'F. Ce qui
rétrécit le différentiel des salaires.
Graphique 3.2-1: Modèle de transfert de technologie
F
E'
E
o
A
Ces résultats peuvent être expliqués algébriquement. En effet, considérons les
demandes relatives d'un bien produit dans un pays de l'D.E. et un bien produit dans un pays de
la CEMAC. La fonction d'utilité (3.2-30) implique que la demande relative dépende seulement
des prix :
1
(P.
1P ) -CI/1-6)
C UE
CCE =
UE
CE
= (S
1S
)-CI/I-6)
(3.2-31)
UE
CE
Avec CUE la consommation du bien produit dans l'UE. et CeE, la consommation du bien
produit dans la CEMAC. La demande de travail dans chaque région (chaque pays de la région)
197

est égale à la demande de chaque bien multipliée par le nombre de biens, telle que la demande
relative de travail s'écrit :
- (
/
)S
/ S
)-(111-8)
-
nUE
nUE
UE
CE
(3.2-32)
Cette relation peut dOIUler l'expression des salaires relatifs en fonction du travail relatif
et du rapport nouveau bien, ancien bien:
(3.2-33)
En fait, le point le plus important à noter ici est que le taux de salaire relatif dans les
pays de l'D.E. dépend de l'importance du nouveau bien développé qu'ils peuvent produire
mais que les pays de la CEMAC ne peuvent pas produire. L'importance de l'iIUlovation qui
accroît le volume des biens produits dans l'D.E. augmentera le salaire relatif dans ces pays.
Ceci contraste avec le résultat des modèles conventioIUlels dans lesquels le progrès
technologique dans le secteur d'exportation détériore les tennes de l'échange.
Notre raisoIUlement, montre comment il se produit un équilibre momentané dans le
monde économique entre les exportations des nouveaux biens par les pays du Nord et les
exportations des anciens biens par les pays du Sud avec des salaires relatifs qui dépendent de la
quantité des anciens et des nouveaux biens existants. Mais les facteurs qui détenninent cette
quantité des anciens et nouveaux biens sont notamment l'iIUlovation et le transfert de
technologie.
B2.2 - L'innovation et le transfert de technologie.
Si nous considérons que toute variation technologiquel prend la fonne d'un ajout de
nouveaux produits, cela signifie la possibilité, pour les travailleurs dans les pays de la CEMAC
1 Il Y a en/ait deux progrès: un nouveau processus pour un même bien et un nouveau bien.
198

de produire plus de biens. Ce qUI suppose un accroissement de la productivité dans la
production des anciens biens.
Le processus d'innovation signifie un accroissement du nombre de biens produits n.
Comme nous ne sommes pas bien infonnés sur les facteurs qui affectent le taux d'innovation i,
notre propos se limite à considérer que le nombre de nouveaux biens inventés varie
[positivement avec le nombre de biens développés.
C'est-à-dire que l'innovation est
proportionnelle au volume de produits qui existent· :
il =in
(3.2-34)
avec i, le taux de l'innovation.
Dans le processus de transfert de technologie on suppose que les produits qui sont
nouveaux le restent pendant une période; comme s'ils étaient protégés par une licence. On sait
qu'au bout de cette période, le produit tombe dans le domaine public. Or le temps pour les
pays en développement comme ceux de la CEMAC, d'adopter un nouveau produit varie
considérablement d'un bien à un autre. li est donc réaliste de représenter le processus par
lequel les nouveaux produits deviennent vieux:
(3.2-35)
avec t le taux de transfert de technologie.
Cela implique que le temps moyen que prend les pays de la CEMAC pour apprendre à
fabriquer un nouveau produit est l/t. Le taux de variation du nombre de nouveaux produits
sera la différence entre le taux d'innovation et le taux de transfert technologique:
(3.2-36)
• Les raisons qui nous poussent à faire cette hypothèse sont les mêmes que celles qui pennettent, dans les modèles
conventionnels de supposer que la variation technologique est exponentielle: c'est-à-dire que cela pennet au modèle
d'avoir un sentier de croissance à long ternie.
199

-.,;..:"
Le système d'équations (3.2-34) - (3.2-36) n'est pas stable; il explose vers le haut
selon l'évolution du progrès technique. La composition du stock des produits tend, de quelque
manière que se soit, vers quelque chose de stable. Posons a = nUl/n, la part de nouveaux
produits. Nous avons donc
u= nUE / n - an / n = i - (i + t)a
(3.2-37)
Ainsi, le système tend vers un équilibre lorsque a = i/(i+ t).
Finalement, on peut noter que le rapport entre les nouveaux: et anciens produits qui
déterminait les salaires relatifs est
a
i
nUE / n
=- - =- en équilibre.
CE
(3.2-38)
l - a
t
La situation économique de la zone de libre échange tend donc; vers un équilibre stable.
A quoi ressemble cet équilibre en fait? Les salaires relatifs sont supposés constants, avec un
différentiel fixe en faveur des pays développés de l'U.E. qui ont une fonction croissante du
taux de l'innovation i et une fonction décroissante du taux de transfert de technologie t. La
structure de l'échange reste inchangée dans le sens où les pays de l'U.E. exportent toujours de
nouveaux produits et importent des anciens produits. Mais les produits actuels sont en
perpétuel changement. Chaque produit est d'abord fabriqué et exporté par les pays de la
CEMAC; alors quand sa technologie devient accessible pour les pays de la CEMAC,
l'industrie se délocalise vers ces pays à faibles salaires.
Examinons maintenant les effets de variation des taux d'innovation et de transfert
technologique. De telles variations, en modifiant le nombre de biens produits et la localisation
de la production, ont un effet d'efficience qui change la productivité de la zone de libre
échange. Elles ont aussi, ce qui s'avère intéressant, des effets sur la distribution des revenus
dans la zone entre les pays de la CEMAC et ceux de l'U.E.
200

En s'intéressant à ces effets d'efficience, il apparaît que l'innovation, en accroissant le
volume de produits, représente un accroissement de la productivité réelle de la zone. Même si
cela est moins clair, il ne demeure pas moins vrai que le transfert de technologie, en favorisant
la production d'un grand éventail de biens dans les pays de la CEMAC, représente également
un gain globalement.
(
Pour le voir, nous allons considérer le problème dual de la production, le problème de
produire des biens au coût minimum. Cet aspect de la question est illustré dans le graphique
(3.2-2), qui compare les différentes combinaisons de travail de l'U.E. et de la CEMAC qui
, peuvent être employées pour produire un panier donné de biens. Aussi longtemps que l'UE. et
la CEMAC produisent ensemble des anciens biens, le travail dans la CEMAC et dans l'UE.
peut être librement substitué d'un groupe de pays à un autre comme indiqué par le segment
AB.
Graphique (3.2-2): Combinaisons de Ira vai/
o
Mais nous avons supposé que dans la zone de libre échange entre la CEMAC et l'UE.,
les salaires relatifs, comme l'indique la pente SS, sont tels que l'UE. et la CEMAC se
spécialisent respectivement dans les nouveaux et anciens biens comme au point B. Un transfert
de technologie, transformant certains nouveaux biens en anciens produits peut rendre possible
de substituer le travail de la CEMAC par celui de l'U.E. dans la production d'un panier donné
de biens comme le montre l'extension de AB à C (graphique 3.2-2). Aux prix initiaux, cela
réduirait le coût de production, qui indique que les possibilités de production ont été étendues.
201

De ce point de vue, l'innovation et le transfert technologique accroissent la production
de la zone. Mais ces éléments peuvent aussi modifier la distribution de revenus en ce sens que
les revenus peI' capita dans les pays de la CEMAC peuvent évoluer favorablement. Ce qui est
un atout formidable pour ces pays dont les revenus par tête sont très faibles. En effet, une
intégration de type Nord-Sud peut être bénéfique pour les deux partie:s, mais surtout pour les
pays du Sud.
En réalité, l'importation des anciens biens par les pays du Nord peut être à l'origine
d'un accroissement de bien-être dans les pays du Sud. Le fait que les pays du Nord importent
les anciens biens en provenance des pays du Sud constitue pour ces derniers une source de
recettes commerciales importantes. Si les salaires augmentent dans~es pays du Nord, du fait de
l'innovation technologique, ils connaissent aussi un accroissement dans les pays du Sud du fait
du transfert de technologie. Cette situation devrait contribuer ainsi à éliminer progressivement
la contrainte de pouvoir que nous avons relevée dans le deuxième chapitre et qui posait
particulièrement problème au niveau de l'intégration par les marchés.
Deux types d'effets sont donc enregistrés par les pays de la CEMAC en adhérant à une
zone de libre échange avec l'Union Européenne. Le premier effet est que cela peut favoriser le
transfert de technologie de l'U.E. vers la CEMAC. Et lorsqu'il y a transfert de technologie, en
plus des avantages directs, il peut y avoir des effets positifs indirects comme l'amélioration des
termes de l'échange.
Le deuxième type d'effet, moins encourageant est que les pays en développement de la
CEMAC, en accélérant leur adoption de nouvelles techniques peuvent provoquer une
diminution du niveau de vie chez les travailleurs les moins qualifiés des pays développés de
l'U.E. et il est facile d'imaginer que cela peut encourager des mesures protectionnistes de la
pan de l'U.E. Ce risque doit interpeller les négociateurs des deux parties afin qu'ils insistent
sur le principe de réciprocité.
Mais il est clair que toutes ces implications potentielles ne peuvent être effectives que
s'il y a une réelle volonté, surtout de la part des dirigeants des pays de la CEMAC, de modifier
202

structurellement leurs économies. Cela passe par la généralisation de la libéralisation ainsi que
par la création et le maintien des mécanismes incitatifs à l'industrialisation.
Si la libéralisation généralisée de l'économie peut engendrer quelques déséquilibres au
niveau des recettes publiques des pays comme ceux d'Afrique centrale dont les recettes
'douanières occupent une part importante dans le budget des Etats, nous pensons que
ll'instauration de la TVA devrait accroître celles-ci même s'il existe quelques risques de
1
~déperdition comme le note F. MENGUE ME ENGOUANG (1999). Mais il est clair que pour
les Etats de l'Afiique centrale, la TVA pourrait être un impôt intéressant, en raison de sa très
grande productivité et de sa souplesse.
En effet, perçue à tous les stades du processus ~e production et de distribution, la TVA
aura au moins les mêmes avantages que deux des différentes taxes à cascades qu'elle va
iremplacer (impôt sur le chiffre d'affaires intérieur et taxe sur les transactions commerciales).
IL' instauration de la TVA pourrait donc constituer un facteur d'assainissement des conditions
Ide la concurrence car elle exercera une influence utile sur les prix, le commerce extérieur et les
investissements. L'instauration de la TVA peut donc constituer un début de la prise de
,conscience qu'il faut créer les conditions d'amélioration des capacités industrielles des pays
concernés.
203

Les conditions de succès de la nouvelle stratégie.
La CEMAC doit être fondée sur une union douanière qui s'étend à l'ensemble des
échanges de marchandises et qui comporte l'interdiction, entre les Etats membres, des droits de
douane à l'importation et à l'exportation et de toutes taxes d'effet équivalent, ainsi que
l'adoption d'un tarif douanier commun dans leurs relations avec les pays tiers. Cela signifie que
toutes les marchandises, même celles qui proviennent des pays tiers, doivent bénéficier de la
libre circulation à l'intérieur de la CEMAC, pour autant qu'elles soient mises en libre pratique,
. c'est-à-dire que les fonnalités douanières aient été accomplies et les droits de douane et taxes
d'effet équivalent perçus dans l'Etat membre d'importation.
Mais la mise en place d'une véritable union douanière et sa liaison avec l'Union
. Européenne au moyen d'une zone de libre échange n'aura d'effets sur les pays concernés que
sous certaines conditions. En effet, l'intégration régionale des pays d'Afrique centrale devant
favoriser le développement économique de ces pays à travers l'industrialisation; ces pays
doivent restructurer profondément leur appareil productif.
Dans ce chapitre, nous analysons les conditions nécessaires de succès de la stratégie
définie dans le chapitre précédent. En réalité, il s'agit de créer les conditions pennettant
d'améliorer les capacités industrielles des pays d'Afrique centrale. Cette analyse s'appuiera sur
deux sections.
204

En effet, pour améliorer les capacités industrielles des pays de la CEMAC, il est
nécessaire de généraliser la libéralisation d'abord géographiquement, afin de respecter les
règles de l'Organisation Mondiale du Commerce et de limiter les risques d'un régionalisme
« fermé }}. L'association avec l'union européenne au moyen d'une ZLE, on l'a vu, contraint les
ipays d'Afrique centrale à ouvrir progressivement leurs économies aux importations en
provenance des pays de l'Union Européenne. Mais cette libéralisation se fait dans un cadre
préférentiel qui, si on n'y prend garde, peut être non conforme aux exigences de l'OMC.
Par ailleurs, la libéralisation doit s'étendre à des domaines où la seule libéralisation du
Icommerce des marchandises n'a pas nécessairement d'effets. La première section aura donc à
se préoccuper de savoir comment compléter la libéralisation commerciale préférentielle.
Pour créer et développer un véritable tissu industriel au sein des économies de l'Afrique
centrale, ces pays doivent obéir en second lieu à un autre type de conditions permissives d'une
véritable industrialisation. C'est-à-dire qu'il faut créer des incitations nécessaires au
développement industriel de ces pays tant au niveau national qu'au niveau régional. La
deuxième section sera consacrée à cette analyse.
205

SŒ:CiflaJ{1
Généraliser la libéralisa.tion.
Une ouverture plus large suppose des niveaux de protection relativement faibles vis-à-
vis des pays tiers et des régimes d'investissement transparents et ouvt::rts. Ces conditions sont
cruciales non seulement pour la minimisation des effets de détournement de trafic inhérents aux
accords commerciaux régionaux, mais aussi pour assurer la place des pays de la CEMAC dans
le processus de globalisation de l'investissement et de la production, chaîne principale d'accès
au transfert de technologies.
La libéralisation généralisée des échanges passe donc nécessailrement par la réduction
ou la suppression des droits de douane ou autres barrières commerciales. Elle encourage
notamment la spécialisation de la production eu égard à l'avantage comparatif, et elle accroît la
disponibilité des biens de consommation. La possibilité d'exploiter de façon dynamique les
avantages comparatifs dans un contexte multilatéral permettrait aux pays de l'Afrique centrale
d'atteindre une croissance plus forte et durable tout en diversifiant leur structure de
production. En effet, lorsque la libéralisation commerciale est régionale, elle est souvent
accompagnée de mesures discriminatoires qui défavorisent les pays tiers.
Le principe de non discrimination est la pierre angulaire des dispositions du GATT. Il
est bien inscrit dans l'article 1 qui oblige les parties contractantes à accorder la clause de la
Nation la plus favorisée aux pays membres de l'OMC. La ZLE entre la CEMAC et l'Union
Européenne risque d'être discriminatoire si l'accès aux marchés de (;ette zone s'accompagne
d'un détournement des exportations des pays tiers vers cette même zone.
206

- :?'"
Pour l'éviter, les pays de la CEMAC doivent non seulement étendre leur libéralisation
géographiquement, au-delà de la zone de libre échange avec l'V.E. mais aussi dépasser le cadre
du seul commerce des marchandises.
A - Etendre la libéralisation géographiquement
On peut distinguer principalement deux raisons en faveur de l'extension géographique
de la libéralisation engagée au niveau de la ZLE entre les pays d'Afrique centrale et l'U.E., il
s'agit de :
1)- observer les règles du GATT/OMC ;
2)- favoriser l'efficience au sein des économies d'Afrique centrale.
Al - Observer les règles du GATTIOMC
.1
Deux aspects aident principalement à comprendre le rôle de l'Organisation Mondiale du
fommerce (OMC) ou l'Accord Général sur les Tarifs et le Commerce. Le premier pennet de
considérer ces institutions comme organisatrices du marché mondial; et le second aspect
pousse à voir dans les règles de ces institutions, un code de conduite pour les membres.
1
Al.I - Elles organisent le marché mondial
1
Les négociations commerciales sont habituellement conduites pour réduire les barrières
aux échanges, accepter des règles de comportement et résoudre les différends. Elles peuvent
être vues comme un marché à travers lequel les nations tentent de créer et améliorer les règles
Aui régissent les politiques commerciales des membres (code de conduite), et s'engager dans
ln échange réciproque de libéralisations. On peut facilement identifier deux éléments
Ifondamentaux dans ce contexte: arriver à un accord et le renforcer.
207

La théorie du commerce international de base suggère qu'on évoque souvent une
raison économique, du point de vue du bien-être national, pour appliquer des restrictions
commerciales, lorsque le pays concerné dispose d'un certain pouvoir dans le marché. Par
contre, un petit pays qui ne peut influencer les prix sur les marchés mondiaux est généralement
perdant en imposant des barrières commerciales, et par conséquent, il a peu à perdre et
beaucoup à gagner d'un accord multilatéral qui favorise une dinÙllution des barrières
commerciales.
En réalité, les grands pays peuvent être capables de modifier les termes de l'échange en
leur faveur en restreignant le commerce. Cependant, globalement, l'imposition des restrictions
commerciales par un ou un groupe de pays peut réduire le bien-être.
En effet, les grands pays se retrouvent souvent dans une situation de «dilemme du
prisonnier» selon laquelle chaque pays trouve un intérêt à imposer des restrictions
commerciales, mais le résultat d'un tel comportement individuel est que tous les pays seront
dans une situation où leur bien-être sera plus faible que s'ils avaient tous suivi des politiques de
libre-échange. En fin de compte, les petits et grands pays doivent donc coopérer et se mettre
d'accord pour ne pas imposer des barrières commerciales aux importations. Le commerce libre
est un jeu à somme positive comme le disent si bien HüEKMAN et KOSTECKI (1995).
Dans plusieurs pays, se heurtent habituellement des intérêts divergents par rapport aux
mesures commerciales à adopter. La structure de protection est le résultat de l'interaction entre
les demandes exprimées par plusieurs groupes d'intérêt et les offres des gouvernements. Les
tentatives d'accroître le bien-être en réduisant la protection résultent souvent de la position des
groupes qui s'attendent à une perte s'il y a libéralisation. En fait, les pertes associées à la
libéralisation sont centrées sur les industries qui se heurtent à la concurrence des importations,
alors,
dans
ce jeu,
les gagnants paraissent
beaucoup
plus
diffus,
c'est-à-dire
les
consommateurs.
Ainsi ceux qui font plus de pertes sont ceux qui organisent et investissent des lobbies
contre la libéralisation. Les négociations commerciales multilatérales peuvent résoudre ce
problème en confrontant les perdants avec un autre lobby, tout aussi puissant: l'ensemble des
entreprises qui sont avantagées par l'accès aux marchés étrangers.
208

Par ailleurs, la volonté de réduire réciproquement les barrières commerciales, peut aussi
être à l'origine de l'apparition du « dilemme du prisonnier» qui normalement oppose les
grands pays mais favorise l'amélioration du bien-être mondial. En fait, en incluant beaucoup de
produits dans
la
négociation,
les perdants peuvent
obtenir quelques
compensations
~utomatiques au moyen de l'accès aux importations moins coûteuses.
Une négociation commerciale multilatérale est organisatrice de l'échange mondial dans
ce sens que les pays peuvent se mettre ensemble pour discuter des principes d'accès au marché
sur une base réciproque. C'est en fait un lieu d'échange.
A1.2 - Elles constituent un code de conduite.
L' OMC contient un ensemble d'obligations spécifiques légales qui régulent les
politiques commerciales des Etats membres. Elles sont incorporées dans les dispositions du
bATT et de l'Accord Général sur le Commerce et les Services (GATS) et servent à atteindre
les objectifs des fondateurs du GATT en 1947 : l'accélération de la croissance écononùque au
travers de la non discrimination et de la libéralisation commerciale progressive.
Les règles et principes de l'OMC contraignent la liberté des gouvernements à utiliser
les instruments de politique commerciale spécifiques. Ils agissent sur les rapports entre
différents groupes d'intérêt, ceux qui nùlitent pour la protection et ceux qui sont favorables à
l'ouverture des marchés des pays membres. C'est à travers les mécanismes du GATT/OMC
que les faiblesses des marchés qui sont inhérentes dans toutes les sociétés (pays industrialisés
comme pays en développement) peuvent être corrigées, au moins en partie car une entorse aux
principes de libéralisation requiert la compensation des partenaires commerciaux affectés.
Quatre principes de base particulièrement importants dans la compréhension de l'OMC
'peuvent être identifiés:
1) la non discrimination;
2) la réciprocité;
209

3) l'accès au marché ;
4) et la saine compétitivité.
Ces principes ne sont pas nécessairement complémentaires. Il peut y avoir des
contradictions d'une part entre le principe de non discrimination et celui de l'accès au marché
et d'autre part entre l'accès au marché et la notion de saine compétitivité.
La réciprocité au contraire, est un mécanisme qui est utilisé dans les négociations
multilatérales pour atteindre la libéralisation et être d'accord avec d'autres principes du code
de conduite multilatéral. L'accès au marché et la saine compétitivité sont surtout vus conune
des objectifs qui sont poursuivis à travers le renforcement et l'organisation du principe de la
non discrimination et autres règles de comportement réciproquement négociées.
La
transparence et la notification de ces dispositions jouent un rôle important dans cette
connexion.
A1.2-1 - Le principe de non discrimination.
La non discrimination est un principe à deux dimensions. La clause de la nation la plus
favorisée (NPF) requiert qu'à la frontière, les produits fabriqués dans les pays membres soient
traités sur un même pied d'égalité que les biens originaires d'autres pays. Ainsi, si un meilleur
traitement est réservé à un partenaire conunercial offiant un produit spécifique, par exemple, si
ce produit est soumis à un tarif de 5 %, alors le même taux doit être appliqué immédiatement
et sans condition aux importations des biens dont l'origine est d'un tout autre pays membre de
l'OMC.
La clause de la NPF est complétée par la règle du traitement national. Celle-ci requiert
que les biens étrangers, une fois que toutes les obligations sont remplies (mesures spécifiques
aux frontières, droits de douane, etc.) soient traités équitablement notanunent en termes de
taxes et autres mesures avec effet équivalent que les biens domestiques. C'est-à-dire que les
biens d'origine étrangère circulant à l'intérieur d'un pays doivent être sujets aux mêmes taxes,
charges et régulations que celles qui sont appliquées aux biens identiques d'origine nationale.
Cette obligation empêche un traitement « moins favorable» des biens étrangers.
210

En réalité, le pays est libre de faire une discrimination en faveur des produits étrangers
(contre les produits nationaux) s'il le désire, mais tous les produits étrangers doivent avoir le
même traitement.
.
La clause de la NPF s'applique sans conditionnalité. La seule exception importante se
'/présente dans le cas d'un groupe de membres qui forment une zone de libre-échange ou une
,
union douanière ou encore tout autre accord préférentiel qui accorde l'accès aux pays en
développement.
La non discrimination est importante pour plusieurs raisons. La première est l'efficience
économique. En effet, les barrières commerciales sont des instruments non efficients. Si la
politique n'est
pas discriminatoire entre offreurs étrangers,
les importateurs et
les
consommateurs vont continuer de s'approvisionner auprès des offreurs étrangers les moins
1 coûteux.
La deuxième raison est de donner la garantie aux petits pays que les grands pays ne
vont pas exploiter leur pouvoir pour augmenter les tarifs à leur encontre lorsque la situation est
mauvaIse.
De même, les industries nationales ne pourront pas réclamer des mesures protectrices.
Ou encore, pour des raisons spécifiques de politique étrangère, les nations ne pourront pas
accorder un traitement préférentiel à certains autres pays. Si une nation veut augmenter les
barrières commerciales, elle doit appliquer cette modification de régime à tous les pays
membres de l'OMC, qui peuvent, le cas échéant être capables d'exiger des compensations.
Le traitement national s'applique aussi sans conditionnalité au sein du GATT. Son rôle
est d'assurer que le principe d'accès au marché (libéralisation commerciale) ne soit pas
contourné par les pays à travers l'imposition des taxes nationales et mesures similaires.
En requérant que les biens étrangers soient traités non moins favorablement que les
produits domestiques identiques, il devient beaucoup plus difficile pour une partie contractante
d'empêcher les produits étrangers de concurrencer les produits domestiques. L'effet est de
211

donner aux offreurs étrangers et aux acheteurs domestiques une plus grande certitude au
regard de l'environnement régulateur dans lequel ils peuvent opérer.
A1.2-2 - Le principe de réciprocité.
Les accords administrés par l'üMC sont basés sur un équilibre des droits et obligations,
définis à travers des engagements réciproquement pris pour favoriser l'accès au marché. Le
principe de réciprocité est
un
élément
fondamental
des
négociations
commerciales
multilatérales, c'est-à-dire du processus d'établissement du code de conduite. li est gouverné
par le désire de limiter l'utilisation de la clause de la nation la plus favorisée.
La réciprocité s'applique aussi quand les pays accèdent à un club. Comme les nouveaux
membres obtiennent tous les avantages en termes d'accès au marché qui auraient résulté des
négociations antérieures, les anciens membres demandent invariablement que les nouveaux
venus éventuels paient leurs droits d'admission. En pratique, cela implique non seulement que
les pays qui rejoignent le groupe des membres de l'üMC doivent se: conformer autant que
possible aux règles du commerce de biens et services ainsi qu'au respect des droits de
propriété intellectuelle, mais aussi qu'ils doivent répondre du libre accès à ces marchés. Ils
doivent entreprendre également d'abolir les licences aux importations et autres restrictions
quantitatives sur un large éventail de produits.
Le problème le plus important qu'on associe à la réciprocité dans un processus de
négociation est que l'asymétrie dans la taille des pays peut être à l'origine des réticences. En
effet, les petites nations ont peu à offrir aux plus grandes nations en termes de potentiel
d'exportations.
Fondamentalement, les petites économies (comme les pays en développement de
l'Afrique centrale) ont peu à apporter sur la table de négociations. Cela ne signifie pas pour
autant que leur participation dans des négociations réciproques est non significative, puisque
être signataires des accords du GATT aide à s'engager dans la libéralisation. Cela ne signifie
pas non plus que la valeur du commerce libéralisé est significativement réduite pour ces pays.
Simplement le potentiel politique des avantages des négociations réciproques est moindre et
212

ces pays peuvent très bien se sentir mieux s'ils faisaient des efforts unilatéraux dans le sens
1
: d'ouvrir leurs marchés domestiques à la concurrence étrangère.
A1.2-3 - L'accès au marché.
L'objectif le plus important des fondateurs du GATT était la promotion d'un système
d'échange ouvert, basé sur des règles qui renforcent la compétitivité entre les offreurs localisés
dans différents pays plutôt que sur des tentatives d'organiser des flux commerciaux et de
déterminer les résultats. Les négociations commerciales multilatérales réciproques étaient vues
comme des instruments pour améliorer l'accès au marché, alors que le principe de non
discrimination, comme stipulé dans les articles l (NPF) et ID (traitement national) du GATT,
tentait d'aider à assurer que les engagements d'accès au marché soient organisés et maintenus.
En fait, les pays concernés ne peuvent pas augmenter les tarifs au-delà des limites
prédéterminées sans négocier des compensations avec les pays affectés. La clause de la nation
: la plus favorisée assure donc que cette compensation (réductions des autres tarifs, notamment)
bénéficie potentiellement à tous les pays membres de l'OMC.
Si un pays s'aperçoit que des actions dans lesquelles s'engage un autre pays ont un
effet d'annihilation d'une concession, il peut attirer l'attention de cet Etat concerné et
demander que l'action soit arrêtée. S'il n'obtient pas satisfaction, il pourrait invoquer la
procédure de règlement de différends de l'OMC (voir infra, B2.2). Cette procédure de
règlement des différends permet aux pays membres de régler les problèmes au niveau de
l'OMe. Pour les petits pays d'Afrique centrale en particulier, le recours à l'organisme
multilatéral est en réalité leur seule option, puisque les actions unilatérales ne sont pas souvent
effectives et par conséquent crédibles.
L'accès au marché est aussi facilité par les règles qui accroissent la transparence des
régimes commerciaux maintenus par les membres. Plusieurs mécanismes de transparence sont
incorporés dans les accords adllÙnistrés par l'organisation mondiale du commerce. Les
membres doivent :
213

'publier leurs régulations commerciales;
établir et maintenir les institutions nécessaires à la révision des décisions administratives
affectant le commerce;
répondre aux demandes d'information des autres membres',
et notifier les pratiques subsidiaires à l'OMC.
La surveillance des politiques commerciales par les membres de l'OMC et du
secrétariat renforce aussi la transparence et réduit la capacité des pays à transgresser leurs
obligations.
A1.2-4 - Une saine compétitivité.
Une compétitivité same dans le contexte du GATT se reflète dans nombre de
dispositions de cette institution. La subvention aux exportations par les Etats est interdite et/ou
neutralisée par les pays importateurs. Certains comportements poursuivis par les entreprises
exportatrices sont aussi proscrits. Ainsi, le dumping par les exportateurs peut être neutralisé
par les gouvernements des pays importateurs à travers l'imposition des mesures antidumping si
le dumping nuit aux concurrents domestiques.
Les pays ont aussi le droit d'intervenir quand la concurrence des importations devient
exagérément nuisible aux industries nationales. Cela peut se faire aussi pour sauvegarder
l'équilibre de la balance des paiements ou pour préserver la santé publique ou la sécurité
nationale.
La deuxième raison pour laquelle il est utile de généraliser la libéralisation est de
favoriser l'efficience économique des pays de l'Afrique centrale.
A2 - Favoriser l'efficience des économies de la CEMAC
L'exploitation des économies d'échelle (c'est-à-dire la réduction des coûts de
production due à l'accroissement de la taille de l'entreprise) et le ül.Ït de rendre rationnelle
l'utilisation des ressources du marché sont des avantages naturels du régionalisme et du
multilatéralisme. Mais les avantages de cette réduction des coûts sont plus évidents dans le
214

dernier cas. En effet, dans un système multilatéral de libéralisation des échanges où sont inclus
les pays en développement avec une capacité industrielle diversifiée, la dirrùnution consécutive
des coûts est particulièrement importante.
Une ouverture plus large des marchés conduit les entreprises à exploiter les économies
d'échelle à un degré difficile à atteindre au sein des marchés régionaux. En effet, de nombreux
accords conunerciaux préférentiels conduisent à des fiictions importantes, à des pressions
politiques et soulèvent de nombreux problèmes d'ordre pratique. Les effets de détournement
de trafic des accords régionaux conduisent souvent les pays tiers à user de représailles,
pouvant ainsi provoquer une chaîne de réactions dommageables.
Si les pays de la CEMAC pratiquent une politique commerciale trop discriminatoire, ils
peuvent se heurter en conséquence aux pratiques protectionnistes de la part des pays
industrialisés tiers chez qui ils auraient pu, peut-être s'approvisionner au moindre coût.
Les risques inhérents au régionalisme incluent la possibilité de ne pas tenir compte des
avantages du multilatéralisme lors des négociations régionales, l'accroissement potentiel des
fiictions au sein du groupe régional et de possibles effets pervers sur les pays exclus de tels
accords.
Pour comprendre comment favoriser l'efficience des économies des pays de la
CEMAC, nous nous appuierons essentiellement sur deux phénomènes que nous avons déjà
soulignés sans les avoir approfondis: l'avantage comparatif et l'accès plus large au marché.
A2.1- L'avantage comparatif
Le concept central qui sous tend le commerce est le coût d'opportunité c'est-à-dire les
gains au commerce qui sont associés à la spécialisation.
La production et la consommation agrégées d'un groupe de personnes, ou un groupe
de pays dans le monde, peuvent être augmentées si les peuples ou les pays concernés se
spécialisent dans la production de biens et services dans lesquels ils ont un avantage comparatif
215

et sont autorisés à échanger librement leurs produits contre ceux des autres peuples ou pays
(Voir CAVES et JONES, 1985).
Le commerce international foumt aux nations une bonne opportunité de se spécialiser
dans la production eu égard à leur avantage comparatif La libéralisation commerciale, qui est
un objectif important du GATT, les aide à réaliser une meilleure utilisation de leurs ressources
(capacités de production).
La généralisation de la libéralisation a donc deux effets essentiels. Premièrement, elle
permet une réallocation des ressources vers les activités dans lesquelles le pays a un avantage
comparatif
Deuxièmement, elle augmente les opportunités de consommation des pays, puisqu'une
production plus efficiente génère des revenus plus grands et donc des opportunités d'accroître
l'achat des biens et services en provenance des autres pays.
Cela suggère que les pays qui sont intéressés par la maximisation de leur bien-être ne
devraient pas lever des barrières commerciales. C'est le cas des pays d'Afrique centrale qui
n'influencent pas les prix des marchés mondiaux.
Toutefois, il y a des difficultés liées au fait que même si un pays peut être apparemment
toujours bénéficiaire de la libéralisation de ses échanges, il est toujours préférable que ses
partenaires commerciaux en libéralisent aussi. C'est là une des raisons pour lesquelles il faut
s'engager dans la libéralisation généralisée des échanges.
A2.2- Une ouverture plus large des marchés.
Il est reconnu que l'amélioration de l'accès aux marchés mondiaux peut contribuer
significativement à l'objectif de croissance.
WANG et WINTERS (1998) ont observé dans leur étude que les accords commerciaux
préférentiels existants actuellement en Afrique au Sud du Sahara ont failli, parce que les gains
216

enregistrés ont été très faibles. Mais ils peuvent être améliorés avec une libéralisation
généralisée des échanges.
Les préférences commerciales accordées au sem des regroupements régionaux,
lorsqu'elles sont sujettes aux limites quantitatives, exclusions et règles d'origines étroites, ne
sont pas une réelle base de sécurité pour un accès facile au marché et peuvent donc ne pas
constituer, à long tenne une base d'investissement pour les pays d'Afrique centrale.
üYEJIDE (1998) identifie plusieurs limites aux accords préférentiels régionaux et note
que ceux-ci n'ont pas été particulièrement bénéfiques pour les pays africains. En effet, il
démontre que les opportunités spéciales d'accès au marché offertes par les regroupements
régionaux préférentiels en Afrique au Sud du Sahara ont eu plutôt un impact négatif sur ces
pays.
En l'occurrence, elles n'ont pas permis l'expansion en Afrique et la diversification des
exportations; elles ont été en plus insuffisantes pour pennettre à la région de maintenir sa part
du marché mondial et de l'u.E.
Si les pays d'Afrique centrale libéralisent davantage leur commerce au niveau désiré par
l'üMC, ils peuvent avoir des gains significatifs en participant davantage aux négociations,
malgré la petite taille de leurs économies. L'analyse de WANG et WINTERS a démontré ce
point de vue en deux aspects :
- premièrement, ils ont confinné que les pays d'Afrique au Sud du Sahara ont obtenu
moms des négociations commerciales multilatérales du GATT que les autres pays en
développement. En effet, les exportations principales de la région ont eu moins d'exemptions
que celles des autres produits;
- deuxièmement, les pays d'Afrique ont obtenu moins parce qu'ils ont donné peu en
termes de concessions.
217

On peut dire que le retard des pays d'Afrique dans leur participation à des négociations
du GATT/OMC peut être attribué à leur inaptitude à articuler et à défendre leurs intérêts
commerciaux ou de saisir l'avantage des droits que procure le système de l'OMC.
En fait, la formation de la ZLE, comme nous l'avons préconisé, doit être une étape vers
la réalisation du libre-échange mondial"; les tarifs vis-à-vis de l'extérieur ne doivent pas être
globalement plus restrictifs et la période de transition doit avoir une durée raisonnable.
Mais l'intérêt d'une ouverture plus large des marchés est en fait triple:
- premièrement, la création de la ZLE avec l'U.E. est importante pour la coopération
économique et politique et doit s'étendre à d'autres domaines;
- deuxièmement, pour les pays de la CEMAC, cet accord leur permet de s'ancrer
réellement dans la libéralisation et les protège des pressions protectionnistes nationales;
- troisièmement, ces pays auront la possibilité de se protéger du risque (moins évident
mais latent) d'une résurgence du protectionnisme dans certains pays industrialisés.
La généralisation de la libéralisation doit aussi pousser ces pays à identifier clairement
les domaines dans lesquels ils peuvent devenir compétitifs afin d'y concentrer leurs ressources;
de faire beaucoup d'efforts pour encourager les petites et moyennes entreprises à se multiplier
et à se diversifier afin de s'en servir comme moyens d'accroître les exportations non
traditionnelles.
B - Les autres domaines à libéraliser.
La libéralisation commerciale.,dans le cadFe d'une union douanière ou une zone de libre
échange ne s'intéressait pas habituellement aux secteurs des services et des institutions.

En effet, les services constituent un domaine auquel il faut s'intéresser dès que le
commerce des marchandises est libéré. De plus en plus, le commerce de services occupe une
place de premier plan dans des accords régionaux comme l'Accord de libre-échange entre le
Canada et les Etats-Unis, l'ALENA, ainsi que dans le programme de marché unique de la
Communauté européenne. Le cycle de l'Uruguay a également été marqué par les efforts
déployés pour libéraliser les services, effort qui s'est poursuivi dans le cadre de l'OMC.
BI - Libéralisation du commerce dans les services.
Les résultats obtenus dans la libéralisation des services ont été énoncés dans l'Accord
Général sur le Commerce des Services (AGCS). Il est difficile de comparer la libéralisation
concrète et effective des services aux niveaux régional et multilatéral, car l'approche adoptée
dans les accords d'intégration régionale est très différente de celle adoptée dans l'AGCS.
Pour ne donner qu'un seul exemple de cette approche, on peut dire que l'ALENA qui
intègre la libéralisation des services dans le contexte plus vaste des dispositions du Traité en
matière d'investissement, de concurrence et d'entrée temporaire des personnes physiques,
prévoit effectivement, la libre entrée et le traitement national pour les entreprises et leur
personnel d'encadrement, ainsi que des négociations sur des exclusions sectorielles.
Par contre, les engagements en matière de libéralisation pris dans le cadre de l'AGCS
relèvent d'une approche fondée sur une liste positive, chacun des participants ayant indiqué
dans sa liste d'engagements les activités auxquelles il entend que soient appliquées les
obligations relatives à l'accès aux marchés et au traitement national en ce qui concerne les
fournisseurs étrangers de services.
En outre, l'application des clauses concernant l'accès aux marchés et le traitement
national n'est pas automatique, puisque les membres de l'üMC peuvent indiquer dans quelles
conditions ils appliquent ces principes. Cette approche, rendue nécessaire par les grandes
différences dans le degré d'acceptation par les 125 participants aux négociations du Cycle
d'Uruguay de la libéralisation des services, limite la portée de la libéralisation réalisée à ce jour
dans le cadres de l'AGCS.
219

Un élément clé de la libéralisation des services est la libéralisation de la réglementation
intérieure puisque l'accès des fournisseurs étrangers de services dépend généralement du
régime de licences (par exemple les banques) et des normes nationales en matière de
qualifications (pour les médecins, juristes, ingénieurs, .. .).
L'AGeS prévoit un programme de travail visant à l'élaboration de disciplines
concernant les réglementations intérieures, qui devraient être fondées sur des critères objectifs
et transparents, mais ne devraient pas être plus rigoureuses qu'il n'est nécessaire pour assurer
la qualité du service et, dans le cas des procédures de licences, ne devraient pas constituer en
soi une restriction à la fourniture du service.
L'AGeS prévoit aussi la reconnaissance des fournisseurs étrangers de services, soit de
manière autonome, soit sur la base d'accords. On sait que la question de la réglementation
intérieure a été partiellement résolue dans le programme du Marché unique de la Communauté
européenne, mais les questions relatives aux qualifications des personnes physiques restent
inscrites à l'ordre du jour de l'Union.
B2 - Domaines institutionnels.
La généralisation de la libéralisation dans les domaines institutionnels vise la protection
de la propriété intellectuelle et les procédures de règlement des différends.
B2.1- La protection de la propriété intellectuelle.
L'accord sur les Aspects des Droits de Propriété intellectuelle qui touchent au
Commerce (ADPIC) a été motivé par le désir d'améliorer une situation caractérisée par la
grande diversité des normes destinées à protéger et à faire respecter les droits de propriété
intellectuelle, ainsi que par l'absence d'un cadre multilatéral de principes, règles et disciplines
concernant le commerce international des marchandises de contrefaçon.
220

L'accord sur les ADPIC fait obligation aux membres de l'OMC de traiter les
ressortissants de leurs partenaires commerciaux sur la même base (NPF) et d'accorder le
traitement national en ce qui concerne la protection de la propriété intellectuelle.
Cet accord sur les ADPIC porte sur le droit d'auteur et droits connexes, les marques de
fabrique ou de commerce, les indications géographiques, les brevets, les dessins et modèles
industriels ainsi que les schémas de configuration (topographies) de circuits intégrés. TI stipule
l'obligation générale de se conformer aux dispositions de fond de la Convention de Paris
(1967) et prescrit en outre une durée de protection des brevets de 20 ans pour toutes les
inventions, dans presque tous les domaines de la technologie. li fait obligation aux parties
d'accorder une protection sur la base du Traité de Washington sur la propriété intellectuelle en
matière de circuits intégrés, qui a été ouvert à la signature en mai 1989, mais en y ajoutant un
certain nombre de clauses.
Les membres de l'OMC doivent donc faire en sorte que leur législation nationale
prévoie des procédures et des mesures correctives destinées à permettre aux détenteurs de
droits étrangers de faire respecter effectivement leurs droits de propriété intellectuelle.
Les prescriptions de l'accord comprennent des clauses relatives aux éléments de
preuves, injonctions, dommages-intérêts et autres mesures correctives civiles y compris le droit
des autorités judiciaires d'ordonner une action provisoire d'urgence afin que des mesures
spéciales à la frontière soient prises contre les importations de marchandises de marques
contrefaites ou de marchandises pirates portant atteinte au droit d'auteur et d'infliger des
peines d'emprisonnement et des amendes suffisantes pour être dissuasives en cas d'actes
délibérés de contrefaçon de marques de fabrique ou de commerce, ou de piratage portant
atteinte au droit d'auteur, commis à une échelle commerciale.
En fait, les questions que pose la protection de la propriété intellectuelle sont analogues
à celles soulevées au sujet des mesures non tarifaires. Souvent les pays adnùnistrent un régime
unique s'appliquant aussi bien à leurs partenaires commerciaux régionaux qu'aux pays tiers.
D'où l'intérêt particulier porté à l'élaboration, dans le cadre du Cycle de l'Uruguay, de règles
multilatérales dans le domaine de la propriété intellectuelle, puisque l'objectif premier de ceux
221

qui cherchent à établir de telles règles est de leur assurer un champ d'application mondial et
d'ancrer les engagements dans un système de règlement des différends qui soit solide.
De par sa nature, un accord universel offre aux détenteurs de droits de propriété
intellectuelle des avantages commerciaux supérieurs à ceux d'un accord passé avec un groupe
limité de pays, même si les accords régionaux sont susceptibles d'harmoniser les régimes
nationaux à des niveaux qui offrent une protection plus complète des droits.
Contrairement aux accords de l'OMC sur les marchandises et les services, les
négociateurs de l'accord sur les ADPIC n'ont pas prévu de disposition concernant
« l'intégration économique ».
Cet accord fait uniquement référence aux UIuons douanières, ce qui permet à un
membre de l'üMC qui aura démantelé toutes ses mesures de contrôle touchant le mouvement
de marchandises par-delà sa frontière dans le cadre d'une union douanière de ne pas être tenu
d'appliquer à cette frontière les règles spéciales relatives aux mesures d'exécution à la frontière
de l'accord sur les ADPIC.
La raison de cette position en est que l'accord sur les ADPIC, tout comme les
Conventions de Berne et de Paris de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle
(OMPI), comporte des obligations très étendues en matière de traitement national, ce qui laisse
aux unions douanières et aux zones de libre-échange peu de latitude pour accorder un
traitement préférentiel aux partenaires commerciaux régionaux.
B2.2- Procédures de règlement des dffférends.
Généralement, les accords, qu'ils soient régionaux ou multilatéraux, constituent pour
les pays qui y adhèrent des systèmes juridiques de droits et d'obligations:
III de droits, parce qu'un pays peut espérer que les politiques de ses partenaires
commerciaux seront conformes aux dispositions des traités;
222

• d'obligations, parce que la contrepartie est la volonté du pays lui-même de respecter
le traité.
Le système de l'OMC, comporte des obligations concernant un large éventail de
moyens d'action affectant le conunerce des marchandises et des services et la protection des
,droits de propriété intellectuelle. Tous les membres de l'OMC doivent faire en sorte que leurs
1
,lois, réglementations et procédures administratives soient conformes à l'accord, ce qui crée
entre eux un équilibre de droits et d'obligations.
Mais on sait toutefois que les gouvernements sont inévitablement confrontés à des
pressions protectionnistes au plan intérieur. L'une des caractéristiques essentielles des accords
d'intégration régionale, tout conune du système conunercial mondial, est qu'ils fournissent aux
gouvernements des mécanismes institutionnels pour les aider à contenir ces pressions.
Au sein de l'OMC, les partenaires conunerciaux exercent une pression les uns sur les
autres par le biais du mécanisme d'examen des politiques conunerciales, qui prévoit la
surveillance périodique des faits et éléments nouveaux des politiques conunerciales nationales.
En dernier recours, les partenaires conunerciaux peuvent faire respecter les engagements en
recourant à la procédure de règlement des différends.
Cette procédure de règlement des différends permet aux pays d'obtenir des décisions
juridiques faisant autorité en réaction aux mesures prises par leurs partenaires conunerciaux.
Après adoption de la décision, le membre défendeur doit notifier ses intentions au sujet de la
;mise en œuvre des reconunandations adoptées. Si ces reconunandations ne sont pas mises en
1
œuvre dans un délai raisonnable, le requérant peut demander l'autorisation de prendre des
mesures de rétorsion.
Les procédures de l'OMC fournissent donc aux membres de l'organisation un solide
mécanisme leur permettant d'obtenir le retrait d'une mesure illicite, ce qui, en contrepartie,
limite le risque de manquements délibérés aux obligations découlant des accords de l'OMC.
Les membres de l'Organisation conservent toutefois leur pleine souveraineté pendant la phase
de mise en œuvre et ne peuvent pas être contraints de retirer une mesure. On peut noter ici que
223

le système commercial mondial offre les avantages d'impartialité des décisions et de pression
mutuelle exercée par les membres de l'ensemble de la communauté des nations commerçantes.
En fait, les initiatives régionales et multilatérales d'intégration se complètent plutôt
qu'elles ne s'opposent dans la recherche d'une plus grande ouverture commerciale. En
acceptant en effet, dans certains domaines des niveaux d'obligation plus élevés (que dans les
accords multilatéraux), les membres d'accords régionaux sont allés plus loin dans un cadre
plurilatéral qu'il n'était possible de le faire au plan multilatéral. En outre, les dispositions prises
auparavant dans le cadre de certains accords d'intégration régionale pour élaborer des
dispositions relatives aux services et à la protection de la propriété intellectuelle ont aidé à jeter
les bases qui ont permis de faire progresser le Cycle de l'Uruguay.
A l'inverse, les accords de l'üMC vont plus loin que la plupart des accords
d'intégration régionale dans un certain nombre de domaines, en complétant le processus de
libéralisation régionale et en étendant l'application de ces disciplines à tous les partenaires
commerciaux actuels et futurs sur une échelle mondiale. L'accord sur les ADPIC, par exemple,
complète les dispositions pertinentes des accords régionaux qui, par définition, ne lient qu'un
nombre limité de partenaires commerciaux.
B3 - Une plus grande libéralisation dans le domaine politique.
Les changements politiques ont émergé depuis le début des années 1990 un peu partout
dans le monde et en particulier en Afrique centrale sous forme de démocratisation et de
libéralisation politique. Divers groupes dans la société ont acquis une plus grande autonomie
pour articuler leur position et avoir une influence sur l'analyse et le processus de changement
politique.
Avec le pluralisme politique, on note une plus grande liberté de prendre position; des
groupes sociaux, comme le secteur privé, la société civile, les jeunes et les femmes sont plus à
même de défendre leurs intérêts.
224

- ~;;
Ceci est accentué par l'accroissement significatif de la liberté de la presse. Cette
nouvelle situation politique a au moins deux implications sur la capacité à instaurer une
politique industrielle :
- la première conséquence est que la capacité de construire la politique industrielle doit
s'intéresser à l'amélioration de la capacité de l'Etat à gérer les intérêts contradictoires de ces
différents groupes;
- la deuxième implication est qu'il y a un grand besoin d'accroître les capacités de
divers groupes sociaux à être en mesure de situer leurs intérêts propres dans le contexte plus
large de la société toute entière.
L'une de ces implications est que les mécanismes d'incorporation des objectifs des
entrepreneurs dans le développement industriel auront besoin d'être mis en place.
225

S~Cq'IaJ{II
Créer et développer
les mécanismes incitatifs à l'industrialisation.
La perfonnance industrielle en Afrique est très limitée. La croissance de la valeur
ajoutée dans le secteur manufacturier a été très faible entre 1980 et 1993 : 3 % en moyenne sur
toute la période (World Bank, 1997). La part de l'Afrique subsaharienne dans la valeur ajoutée
mondiale du secteur manufacturier qui était de 1,5 % en 1980 est passée à 0,8 % en 1994,
toujours selon la Banque Mondiale (1997). li est donc prioritaire que les pays d'Afrique
centrale s'intéressent à l'industrialisation de leurs économies afin de transfonner leurs
économies à faible productivité et à faible croissance, en économies modernes et dynamiques.
Pour ce faire, les préoccupations des pays d'Afrique centrale doivent se situer
principalement à deux niveaux : ils doivent favoriser leurs capacités industrielles au niveau
(national) de chaque Etat membre (A) et au niveau régional (E).
A - Au niveau national
La volonté d'inciter les entrepreneurs à s'investir dans la production industrielle doit
prendre en compte l'émergence de tout un ensemble de technologies apportées par la
globalisation et le progrès technique.
226

Mais l'avance technologique caractérisée par l'émergence des nouvelles technologies
telles que la micro-électronique, l'informatique, la biotechnologie, etc. modifie la nature et les
formes de la compétitivité industrielle et des structures organisationnelles au niveau des
entreprises.
Le développement industriel est influencé par l'organisation macroéconomique en
général et par des incitations spécifiques au progrès technologique et industriel.
La création des incitations à l'industrialisation peut être identifiée par quatre
composantes: le transfert de technologie; l'amélioration des capacités des petites et moyennes
entreprises (pNIE) ; le perfectionnement de l'infrastructure technologique et l'augmentation du
niveau d'effort technologique des entreprises.
Si dans le chapitre précédent (section 2) nous avons vu comment, par une politique
commerciale bien adaptée, le transfert et l'innovation technologique pouvaient s'opérer, il faut
maintenant
prendre
en
compte
que l l'amélioration
des
capacités
des
PME
et
le
perfectionnement des structures technologiques restent des priorités pour les pays d'Afrique
centrale.
La nécessité de favoriser les capacités incitatives à l'industrialisation, lorsqu'elle est
exprimée sur le plan national, doit être orientée non seulement vers les facteurs de production
mais aussi vers les entrepreneurs. En effet, les facteurs de production (le capital humain comme
le capital physique) et les entrepreneurs (essentiellement les entreprises productrices) sont les
acteurs économiques pris en compte en priorité.
Al - Les facteurs de production
En Afrique centrale, les facteurs de production sont essentiellement composés des
travailleurs et subsidiairement de capital. TI s'agit en fait de s'intéresser à la formation du
capital humain et aux conditions qui rendent complémentaires les investissements domestiques
et les investissements étrangers.
227

AloI - La formation du capital humain.
Les pays d'Afrique au Sud du Sahara sont caractérisés par la faiblesse du taux de
scolarisation des jeunes et de la formation des travailleurs. Or, l'industrialisation est avant tout
soutenue par la qualité des facteurs de production et l'amélioration continuelle des
compétences requises pour atteindre la compétitivité internationale.
L'éducation formelle est la meilleure voie susceptible de créer des ressources humaines'
nécessaires à l'industrialisation efficiente. La formation par les stages au sein des entreprises·
industrielles est également importante.
Malheureusement, dans les pays d'Afrique centrale, les rares entreprises industrielles
consacrent de faibles ressources à la formation des travailleurs. La nature et l'importance des
demandes de main d'œuvre industrielle qualifiée s'accroissent pourtant rapidement avec de
nouvelles teclmologies et de nouvelles formes d'organisation.
WANGWE et LALL (1998) ont montré que les entreprises qUi maintiennent ou
améliorent leur position sur les marchés d'exportation sont celles qui investissent dans la
formation de leurs travailleurs et encoura.gent l'amélioration des qualifications des cadres
supérieurs.
L'évaluation de ces entreprises indique que la flexibilité de la main d'œuvre qualifiée est
fondamentale car elle permet une adaptation rapide à de nouvelles machines et à des
teclmologies plus sophistiquées. La qualité et l'importance des services d'infrastructure
teclmologique peuvent être déterminantes dans l'amélioration des connaissances, garantissant
le succès de l'innovation et ouvrant de nouveaux marchés d'exportation.
Mais dans les pays d'Afrique centrale, il y a souvent très peu d'interaction à l'intérieur
même du secteur industriel. Les instituts de recherche sont cruellement pauvres en équipements
adéquats, ce qui démotive les effectifs de chercheurs. Il n'y a donc pas de recherche agressive
pour offrir des solutions aux problèmes techniques de l'industrie. Alors que les nécessités
industrielles impliquent sans cesse un niveau supérieur de formation donc des investissements
supplémentaires dans la formation et l'éducation.
228

Pour les entreprises indust~lles installées dans les pays d' Afiique centrale, l'envoi en
stage de leurs personnels dans des écoles de formation de par le monde est onéreux. Elles
limitent donc les stages de formation de leurs employés dans des institutions locales. Or ces
centres de formation nationaux sont souvent dépourvus de spécialistes même dans des
domaines relativement simples corrune la technologie des textiles ou la fabrication de
chaussures.
Les stages en entreprises sur le plan local en Afiique centrale ne peuvent se substituer à
un véritable investissement dans la formation de haut niveau pour des technologies de pointe.
A des niveaux élevés d'industrialisation, les demandes d'intervention publique dans le domaine
éducationnel, spécialement dans des technologies avancées sont de plus en plus fortes. La
grande majorité des entreprises industrielles investissent très peu dans le capital humain de
base. De ce fait, elles souffrent d'un retard chronique sur les autres entreprises concurrentes en
termes d'efficacité et de compétitivité. La plupart du temps, elles ne peuvent financer de tels
investissements, et les institutions qui peuvent les aider sont inefficaces et parfois inexistantes.
La faiblesse du taux de scolarisation des jeunes et l'incapacité à former les ouvriers
dans des entreprises font que la main d'œuvre demeure moins qualifiée et incapable de se
reconvertir pour un autre emploi dès que les problèmes surgissent dans la branche de leur
spécialité. Cette incapacité est, entre autres facteurs, à l'origine de la prolifération des
candidats au secteur informel. Mais celui-ci peut être utilisé justement par les pouvoirs publics
corrune moyen résiduel pour une industrialisation plus dynamique (voir infra, A2).
A1.2 - Favoriser la complémentarité entre capital national et étranger.
La politique d'investissement dans les pays d'Afiique centrale est basée sur le fait que
les investissements domestiques étrangers (IDE) concurrencent les investissements locaux
lesquels sont étroitement contrôlés par les pouvoirs publics. Pourtant, l'expérience des pays
d'Asie du Sud-Est et de quelques pays africains (ne Maurice par exemple) a démontré que les
investissements domestiques et étrangers peuvent être complémentaires.
229

Cette complémentarité peut s'exercer principalement au IUveau des entreprises
faiblement industrialisées des pays d'Afrique centrale. On sait qu'à l'ne Maurice, par exemple,
,
le financement des certaines activités productives locales est devenu progressivement
indépendant du capital étranger. Mais cela n'a pas empêché ce capit~ù étranger de continuer à··
être investi même si avec l'accroissement de la compétitivité et la hausse des salaires, certaines
usines de fabrique de vêtements ont commencé à se poser la question de l'opportunité de leur
localisation (LAMOSSE, 1995).
Mais il faut dire que l'indépendance vis-à-vis des firmes étrangères a été facilitée par
l'existence d'une classe d'entrepreneurs qui s'est développée durant les années de production
de sucre. Le surplus accumulé à cette époque était investi dans l'industrie. L'existence d'un
marché de capital et d'un groupe d'institutions et d'individus ayant la volonté d'investir semble
avoir favorisé le processus d'industrialisation à l'ne Maurice.
On sait que le transfert de technologie vers les pays d'Afrique centrale s'effectue à
travers les importations des biens de capital. L'octroi de brevets et licences technologiques et
l'investissement direct étranger ont été particulièrement limités, contraignant ainsi la
diversification. Il est essentiel d'encourager le transfert de technologie, spécialement par les
IDE, pour améliorer et approfondir la structure industrielle et pour pousser les entreprises
nationales à perfectionner la qualité de leurs travailleurs et leurs capacités à engranger les effets
bénéfiques apportés par les entreprises étrangères.
Etant donné la marginalisation croissante des pays d'Afrique centrale du processus
naissant de globalisation du système de production et tout ce que cela entraîne en termes de
croissance future et de compétitivité, il devient vital de réorienter les politiques vers les
investissements directs étrangers et créer un environnement propice qui attirerait les entreprises
multinationales. Mais avant de développer ce point, intéressons-nous aux acteurs économiques.
A2 - Les entrepreneurs.
Les acteurs de la VIe économique dans les pays de la CEMAC sont surtout les
entreprises para étatiques. Mais dans la perspective de l'instauration d'une ZLE avec l'U.E. et
en accord avec les exigences des créanciers internationaux (Banque mondiale et FMI), la
230

"
'.,'\\
tendance générale est à la privatisation et au désengagement de l'Etat. Dans ces conditions, un
accent particulier doit être mis sur les capacités des petites et moyennes entreprises à
dynamiser l'industrie dans ces pays. Cette dynamisation passe par la création et l'amélioration
des conditions de la concurrence dans les pays de la CEMAC. TI est aussi nécessaire de
dynamiser le secteur informel, vu son importance dans ces pays.
A2.i - Améliorer les conditions de la concu"ence.
La nouvelle conception de la production nécessite non seulement de nouvelles
technologies (au sens traditionnel du terme), mais de nouveaux modes et techniques
d'organisation, de nouveaux rapports au sein des entreprises et des relations plus étroites entre
les industries pour favoriser des flux directs d'information entre les agents économiques.
En fait, l'une des plus importantes considérations qui influencent la manière dont le
problème de l'industrialisation est conceptualisé est liée au caractère changeant de l'innovation
et du progrès technologique et leur rôle dans le commerce international et la compétitivité.
Les pays africains au Sud du Sahara sont caractérisés par la faiblesse de la croissance de
l'industrie. Les causes de cette carence peuvent être regroupées en deux volets:
• le premier concerne les facteurs externes tels que la sécheresse, la détérioration des
termes de l'échange, les fluctuations des taux d'intérêt internationaux et la réduction
des flux d'aide internationale;
• le second volet s'applique aux facteurs internes comme les politiques nationales et
les structures d'incitation inappropriées ainsi que la mauvaise gestion des ressources
publiques.
Pour que les conditions de la concurrence soient favorables à la croissance durable et au
développement industriel, il est nécessaire que sur le plan intérieur de chaque pays, un
minimum d'assainissement macroéconomique s'opère. Cela permettra un rétablissement des
grands équilibres. Mais l'assainissement économique suppose que soient créées les incitations
231

nécessaires à la création et au maintien d'un appareil productif capable de préparer les
économies des pays d'Afrique centrale à la compétitivité internationale.
La conception théorique qu'onpeut avoir au sujet des capacités d'un pays à développer
ses possibilités technologiques indique clairement les avantages considérables que l'Afrique
centrale peut tirer du développement de son industrie, surtout dans les pays où les conditions
d'accélération du progrès technique et d'application de nouvelles technologies sont favorables.
En effet, selon cette approche, les différences internationales de niveaux technologiques
et les possibilités de l'innovation sont primordiales dans l'explication des flux commerciaux et
de capitaux des pays.
Les réformes de politique économique adoptées dans les pays d'Afrique centrale ont
souvent été tantôt suggérées, parfois influencées par les organismes internationaux (Fonds
Monétaire International et Banque Mondiale) c'est-à-dire les programmes de stabilisation et
d'ajustement structurel.
La restructuration industrielle doit être une composante de ces réformes. Une des
constatations, lors de la mise sur pied des politiques d'ajustement, était que l'inefficacité des
entreprises nationales reflète, en premier lieu, les politiques macroéconomiques inadéquates et
les distorsions dans l'allocation des ressources introduites par des politiques industrielles
sélectives1.
Ces réformes sont par conséquent des préalables aux ajustements appropriés au niveau
macro économique. La liberté des forces du marché, la libéralisation commerciale et la
privatisation des entreprises para étatiques constituent des conditions nécessaires pour une
croissance durable et un développement industriel adéquat.
Dans cette perspective, les activités inefficientes, qui n'existent que parce que l'Etat
induit des distorsions, ont tendance à disparaître; des ressources pourront être ainsi orientées
1 La politique sélective est celle qui consiste à promouvoir des industries spécifiques ou certains agents économiques,
contrairement à la politique fonctionnelle qui encourage l'amélioration des marchés globalement, c'est-à-direfavoriser
l'éducation et l'infrastnlcture notamment (l.ALL et WANGWE, 1998).

232

vers des activités plus efficaces qui émergent en réponse aux incitations du marché. Par
conséquent, si cela est effectif en Afrique centrale, l'industrie de cette sous région connaîtra un
dynamisme et une compétitivité comparables à celle des économies de l'Asie du Sud-Est avant
la crise financière de 1997/98.
A2.2 - Dynamiser le secteur informel.
Les activités informelles sont définies comme des activités productives non enregistrées
par le système statistique national (l-C. VEREZ 1998). Les activités non enregistrées par la
statistique se révèlent être également non enregistrées par la plupart des registres
administratifs, y compris les registres fiscaux. Par ailleurs, cette définition du secteur informel
recoupe très largement un second critère souvent utilisé qui est la taille des établissements: (la
plupart des établissements de moins de cinq personnes ne sont pas enregistrés).
Par ailleurs, le secteur informel est décrit comme l'ensemble de toutes les micro-
entreprises: artisanat, petit commerce, services divers (M. P. van DIJK, 1995). TI s'agit
souvent d'entités sans forme juridique pour l'exercice de leurs activités, ce qui implique que le
chef d'entreprise paie des salaires inférieurs au minimum légal et que son personnel ne bénéficie
généralement pas de la sécurité sociale.
Les premiers signes d'une volonté de soutenir le développement du secteur informel
apparaissent au cours des années 1970~ La Banque mondiale a mis en place une série de projets
liés au crédit tandis que d'autres donateurs axaient leur action sur l'éducation et la formation.
L'idée sous-jacente restait néanmoins que l'importance du secteur informel urbain était appelée
à diminuer au fil du temps.
Force est de constater plus d'une vingtaine d'années plus tard, que le nombre de
personnes travaillant dans ce secteur, dans le tiers monde, a non seulement augmenté en termes
absolus mais également en pourcentage du total de la main d'œuvre. En effet, ce secteur
emploie plus d'un quart de la main d'œuvre et s'accroît de plus de 15 % de toutes les activités
économiques chaque année. Cette progression s'explique par la diminution de l'emploi dans le
secteur public, d'une part, et l'absence de croissance de l'emploi dans le secteur industriel et
les services, d'autre part.
233

L'importance du secteur infonnel s'est souvent accrue du fait qu'en période
d'ajustement structurel, les travailleurs doivent souvent entreprendre des activités éconollÙques
supplémentaires pour survivre. Tel a manifestement été le cas au Cameroun, où les Banùlékés
ont crée leurs petites entreprises et, dans une moindre mesure au Gabon, où beaucoup de ceux
qui ont perdu leur emploi dans le secteur fonnel se sont installés à leur propre compte dans le
secteur infonnel.
Plusieurs travaux montrent que les activités infonnelles ne sont pas incompatibles avec
les mécanismes de l'éconollÙe de marché. En l'occurrence, lorsqu'une activité prospère, on
enregistre l'entrée dans ce secteur de plusieurs petites unités concurrentes. De plus, les
échanges infonnels trouvent leur source dans les disparités des politiques éconollÙques,
financières, monétaires, commerciales distinctes selon les pays.
Les activités infonnelles se déploient sur des espaces frontaliers, à partir de réseaux
marchands différenciés par ethnies et structurés depuis longtemps. Sur la base de solidarités
ethniques et d'échanges régionaux, le comportement des acteurs n'est pas irrationnel mais
s'insère dans un cadre communautaire de référence.
La croissance éconollÙque est un facteur majeur d'allégement de la llÙsère dans les pays
en développement, et le secteur infonnel urbain est l'un des moyens qui pennet à cette
croissance économique de toucher les catégories les moins favorisées de la population.
L'urbanisation a créé de nouvelles opportunités et le développement du secteur infonnel dans
les villes peut renforcer la croissance éconollÙque à condition d'être soutenu par des actions,
des projets et une aide dans ce sens.
Les actions en matière de la technologie pourraient être orientées vers la llÙse au point
des produits et le perfectionnement des techniques de production à l'intention plus spécifique
des llÙCro et petits entrepreneurs. En effet, la multitude des règles et règlements rend
aujourd'hui difficile l'exploitation des activités de petits entrepreneurs, et une déréglementation
sélective pourrait favoriser le développement de leur secteur.
234

De même, de nombreuses taxes sont prélevées et les entrepreneurs ne savent pas.
toujours quelles sont celles qui les concernent, quel est leur montant, ni quelle est leur
destination. Les gouvernements d'Afrique centrale devraient veiller à rendre le système plus
transparent et le réfonner de manière à ne plus inciter les petites entreprises à l'illégalité.
L'éducation et la fonnation, conune nous l'avons déjà signaler plus haut, doivent être
davantage orientées vers le marché, à savoir, en l'occurrence vers les besoins des petits:
entrepreneurs
Un progranune complet de projets et d'actions peut orienter les activités du secteur
infonnel vers un développement à forte densité de main-d'œuvre. Il conviendra, dans de
nombreux cas, de stimuler le secteur privé pour faire démarrer ces activités, pour faciliter
l'accès du secteur aux petits entrepreneurs qui les exercent déjà et pour fournir de la sous-
traitance au secteur infonnel. Les priorités à cet égard seront les suivantes :
- la création d'associations de petits entrepreneurs. Ces associations existent déjà dans
plusieurs branches (conune au Cameroun) et remplissent parfaitement leur rôle de forum de
discussion et d'échange de nouvelles idées et expériences. Cette possibilité de communication
entre petits entrepreneurs peut constituer la base des réseaux dont ils ont besoin pour
i
développer leurs activités;
- la fourniture par les pouvoirs locaux et municipaux d'espaces et d'infrastructures à
l'intention des micro et petites entreprises;
-la transparence du système fiscal et l'explication par les pouvoirs publics de la manière
dont les petits entrepreneurs peuvent bénéficier de ses recettes ;
- la promotion de la sous-traitance et d'autres fonnes de relations entre les micro,
petites, moyennes et grandes entreprises;
- un appui aux petits entrepreneurs pour qu'ils puissent accéder aux structures actuelles
de crédit, de fonnation et de marketing. TI convient de convaincre les banques privées et les
établissements de fonnation de l'importance de ce marché;
235

- la levée des barrières qui entravent l'accès au secteur par une déréglementation et une
simplification des procédures administratives. Une information et une aide devraient être
prévues à l'intention des petits entrepreneurs dans le cadre des exigences formelles existantes.
Les différentes taxes et l'utilisation qu'on en fait devaient être mieux expliquées;
- le renforcement de la spécialisation en apprenant aux entrepreneurs à adapter leurs .•.
conceptions, leurs produits, leur technique de fabrication et leurs canaux de distribution et le
renforcement de la flexibilité des petits entrepreneurs, qui est l'un de leurs principaux atouts.
Les entrepreneurs donnent toute leur mesure lorsqu'ils peuvent évoluer librement de certains
créneaux vers des marchés plus larges.
li convient d'améliorer l'efficacité et la performance des micro-entreprises qm
participent de l'activité industrielle et des fournisseurs de services qui leur sont liés. Créer les
conditions propices à l'exploitation de ce potentiel immense que constitue le dynamisme du
secteur informel dans les villes en Afrique centrale est un réel défi pour l'avenir.
B - Au niveau régional
La volonté de créer les conditions d'une industrialisation véritablement offensive et
efficace suggère pour les pays en développement comme ceux d'Afrique centrale, l'instauration
de la coopération tant au sein de la CEMAC qu'au niveau de la zone de libre-échange avec
l'Union Européenne.
Bi - Au sein de la CEMAC
La coopération régionale au ruveau de l'industrie est particulièrement intéressante
quand les conditions locales de détermination de la technologie la plus appropriée sont réunies.
Les opportunités des marchés régionaux sont définies par les entreprises sur la base de la
qualité des produits et de la particularité des conditions locales spécifiques. La coopération
régionale doit servir à diminuer les disparités qui existent entre les pays de l'union et créer une
réelle coopération industrielle.
236

La disparité qui a toujours existé d'un pays à l'autre au sein de l'Afrique centrale par
exemple, au niveau des prescriptions techniques s'expliquent par des raisons de caractère
historique et économique. Un pays où un produit était plutôt importé que fabriqué avait
tendance à lui imposer des prescriptions sévères et des contrôles à sa mise sur le marché sans
trop se préoccuper du coût économique que cela représentait.
Or, cela rend la production à l'échelle de la C:ËMAC plus coûteuse qu'elle ne devrait
l'être et favorise les grandes entreprises par rapport aux petites et moyennes unités. En effet,
les grandes entreprises et notanunent les multinationales ont la structure, l'expérience et le
personnel nécessaires pour répondre aux particularités des marchés de plusieurs pays et
peuvent ventiler les coûts supplémentaires sur de longues périodes de manière à ce qu'ils ne
représentent qu'une fraction négligeable du coût unitaire du produit.
Pour les petites et les moyennes unités, par contre, les coûts supplémentaires
représentent une fraction importante du coût unitaire de production et peuvent être prohibitifs
pour toute exportation. C'est pour cette raison que l'une des conditions de réussite de la
nouvelle stratégie est le rapprochement des dispositions réglementaires dans l'industrie.
Le fait de vouloir éliminer les entraves techniques aux échanges de produits industriels
se base traditionnellement sur la volonté de rapprocher les dispositions législatives,
réglementaires et administratives qui peuvent avoir une incidence sur le fonctionnement du
marché de la CEMAC. Longtemps, l'UDEAC a tenté d'aligner les réglementations nationales
sur une norme communautaire, sans beaucoup de succès.
Comme les réglementations techniques concernent les systèmes de production et, par
conséquent, les investissements déjà effectués; et que leur rapprochement implique parfois la
nécessité pour les industriels de certains Etats membres de changer leurs systèmes de
production en faisant de nouvelles dépenses d'investissements, on comprend pourquoi
l'élimination des entraves techniques aux échanges passe par d'interminables discussions.
Chaque pays membre essaie de convaincre ses partenaires que ses propres réglementations
techniques sont les meilleures et doivent être adoptées par l'union.
237

A cet effet, pour minimiser toutes ces divergences, il est souhaitable d'oeuvrer pour une
coopération plus étroite sur le plan industriel, ce qui peut être facilité par l'existence d'une
coopération si utile à un niveau plus global de la ZLE entre la CEMAC et l'U.E.
B2 - Au niveau de la ZLE.
Un domaine important où l'Union Européenne a un avantage comparatif par rapport ..:
aux donateurs nationaux et aux organisations intennédiaires est celui des institutions
supranationales.
B2.1 - La coopération institutionnelle
Le principe d'institutions auxquelles les pays de la CEMAC pourraient choisir d'être
associés est d'une portée beaucoup plus générale car il s'agit de la monnaie et de
l'environnement juridique.
B2.1-1 - Sur le plan monétaire.
L'intégration économique africaine nécessite une convertibilité des monnaies nationales
et des taux de change stables. Or, l'unification monétaire européenne transfonne la
signification de la zone franc eu égard au fait que les francs CFA se trouvent définis depuis
janvier 1999 par rapport à la nouvelle monnaie européenne, même si la garantie de
convertibilité demeure assurée par le seul Trésor français.
Mais, comme le disent P. et S. GUlLLAUMONT (1993), cette garantie française ne
paraît pouvoir s'étendre qu'à quelques pays de petite et moyenne dimension, comme ceux pour
lesquels est périodiquement évoqué un projet d'adhésion aux unions monétaires existantes: par
exemple Sierra Leone, Guinée, Gambie, Guinée-Bissau, Sao-Tomé et Principe, etc.
Au demeurant, il est concevable que l'Union européenne: apporte son appui à la
convertibilité des autres monnaies africaines. L'U.E. pourrait mettre en place, à la demande de
238

la CEMAC, des mécanismes de garantie en échange de l'acceptation des règles de gestion
monétaire et budgétaire.
Elle pourrait ainsi offiir aux pays de la CEMAC d'être associés aux nouvelles
dispositions de l'Union monétaire européenne. En effet, depuis de nombreuses années déjà, la
zone franc offre aux pays d'Afrique centrale un mécanisme qui leur permet de réaliser une
certaine stabilité monétaire, à travers une coopération avec la France. L'Union monétaire
européenne fournit une occasion de tirer parti de cette expérience et de mettre en place des
dispositions du même ordre, l'Europe jouant un rôle similaire à celui de la France (voir P. et S.
GUILLAUMONT, 1989).
Il est clair que la pleine association monétaire impliquerait notamment le respect de
règles budgétaires très strictes. Les pays de la CEMAC auraient à arbitrer entre l'autonomie
qu'ils veulent conserver dans leur politique macroéconomique et le degré de garantie qu'ils
souhaitent pour leur monnaie. Une fois les monnaies rendues plus convertibles et stabilisées par
rapport à une même référence, en l'occurrence la monnaie européenne (Euro), un des
principaux obstacles serait levé pour une intégration monétaire et économique élargie.
B2.1-2 - Sur le plan juridique.
L'environnement des acteurs de la vie économique est certes instable parce que les
politiques macroéconomiques sont changeantes et imprévisibles, mais aussi en raison de
l'instabilité des règles juridiques et des conditions dans lesquelles elles sont appliquées.
L'adoption d'un nouveau droit commercial ou de nouvelles dispositions judiciaires peut n'avoir
que peu d'effet sur le comportement des investisseurs si ceux-ci ne les considèrent pas comme
stables. La communauté internationale doit donc chercher à renforcer les facteurs de stabilité
des règles.
Dans cette perspective, le soutien international à une coopération institutionnelle entre
Etats d'une même région a un rôle essentiel à jouer. L'adoption simultanée de règles par
plusieurs Etats, soutenue par un financement extérieur (ou une aide technique) a plus de chance
d'être stable que si elle intervient à l'échelon national. Placer les règles à un niveau
international les met à l'abri des troubles sociaux et des pressions propres à chaque pays,
239
'

d'autant IIÙeux que le fonctionnement des institutions régionales est soutenu par un concours
extérieur.
C'est bien dans ce sens que la France a soutenu l'effort des pays de la zone franc pour
moderniser et harmoniser le droit des affaires et la pratique des assurances à l'échelon des pays
francophones d'Afrique. Dans les pays d'Afrique centrale, le droit des affaires n'a pas intégré
une grande part des développements modernes de ce droit.
L'Europe elle-même est entrée dans un processus d'harmonisation du droit commercial
européen et des normes pour nombre de professions. Elle pourrait faire bénéficier les pays de la
CEMAC de l'expérience acquise pour harmoniser et rendre compatibles des systèmes
juridiques dont les racines historiques sont différentes.
Rapprocher les droits des affaires africain et européen pourrait réduire les coûts
d'entrée des nouveaux investisseurs en Afrique centrale. En même temps cela réduirait, pour
les finances publiques des pays d'Afrique centrale, le coût de l'adaptation de ce droit aux
conditions modernes. Le rôle de l'U.E. pourrait être d'une part de financer la formation et
l'assistance technique en ce domaine; d'autre part, de coordonner des réformes du système
judiciaire.
Dans de nombreuses professions importantes, comme l'expertise comptable, les pays
d'Afrique centrale n'ont pas réussi à reproduire l'autorégulation qui, dans l'Union européenne,
s'est imposée aux pratiques professionnelles. En raison d'un affaiblissement progressif de cette
autorégulation, les normes de conduites se sont érodées. Comme l'a montré 1. TIRüLE
(1992), la possession d'une « bonne» réputation que l'on a avantage à conserver incite à éviter
d'avoir
un
comportement
opportuniste.
L'instauration
des
procédures
européennes
d'habilitation des groupes professionnels peut être un moyen de résoudre ce problème.
Bi. 2 - La coopération industrielle.
La coopération a une dimension industrielle lorsque le but visé conjointement par les
partenaires est d'essence industrielle ou technologique. C'est le cas de l'amélioration d'une
technologie de produit, ou de procédé lorsque les ressources IIÙses en commun ou échangées
240

sont de nature industrielle ou technologique comme les connaissances codifiées, les ingénieurs,
1
les laboratoires, les équipements, ...
La coopération industrielle peut s'établir entre les entreprises installées en Afrique
centrale et celles qui opèrent au sein de l'Union européenne. Les alliances entre firmes
concurrentes (ou potentiellement concurrentes) s'apparentent souvent à des alliances d'échelle,
qui visent la rentabilité des capacités de production. Alors que les alliances entre firmes
n'appartenant pas au même secteur sont souvent de nature complémentaire, c'est-à-dire
qu'elles s'entendent pour minimiser leur coût de production au niveau de l'approvisionnement
en biens intermédiaires notamment.
Les alliances verticales, sont une forme d'organisation des échanges entre clients et
fournisseurs qui suppose un objectif collectif, une intégration des décisions et une
communication élargie en vue d'une performance globale. Un industriel européen et son client
d'Afrique centrale peuvent tirer tous les deux profit à travailler ensemble sur une innovation
technologique appelée à être incorporée dans l'offre du client (à l'instar, par exemple, du
microbille d'un stylo développé conjointement par la firme BIC et un client en Afrique
centrale).
L'échange entre alliés de connaissances technologiques entre le plus souvent dans la
catégorie des coopérations sans structure. Il peut s'agir d'un échange de résultats ou d'un
octroi de licences (qui pourra s'accompagner d'un échange de personnel). De tels accords sont
souvent présents dans l'industrie pharmaceutique ou dans la micro-électronique avec les
accords d'approvisionnement secondaire (ou accords de double source). Ce genre d'accords
pourraient se réaliser facilement entre l'Union Européenne et les pays d'Afrique centrale car ils
sont aisés à mettre en œuvre. Ils sont donc flexibles et facilement résiliables.
Si l'innovation est difficile à protéger ou pose un problème commun à plusieurs firmes
et que ce problème ne peut que difficilement être résolu par une seule d'entre elles (exemple,
fixation d'un standard ou réponse à un renforcement de la législation anti pollution), la formule
du consortium peut être plus adaptée. Les consortiums jouant ici le rôle d'entité coordinatrice
des recherches conduites par les membres.
241

Plus proches du modèle des consortiums, les centres de recherche appliquée des
fédérations sectorielles,
habituellement localisés dans
des
universités,
permettent des
recherches technologiques de qualité.
L'achèvement du marché de la CEMAC doit correspondre à l'adoption de toute une
série de directives communes, d'arrangements fiscaux et de mesures administratives, qui
facilitent le travail des entreprises industrielles. Pour les entreprises exportatrices et
importatrices, l'absence de contrôle aux frontières internes de l'union douanière de l'Afrique
centrale signifie l'élimination d'une série de coûts importants: coûts administratifs internes, tels
que les frais généraux, de personnel et d'informatique nécessaires pour remplir les formulaires
de passage en douane; les coûts externes directement liés au passage en douane et autres
services conseils et les coûts résultant des retards de procédures douanières, tels que les frais
de stockage et de transfert pour les produits immobilisés aux postes de douane.
A l'élimination de ces coûts directs des formalités aux frontières et des coûts
administratifs connexes, s'ajoute l'élimination d'autres coûts importants pour les industriels de
l' Mrique centrale résultant de la nécessité de conformité de leurs produits à des
réglementations techniques et administratives différentes.
Cette réalisation, à terme, du marché intérieur de la CEMAC doit donner un coup de
fouet à la restructuration de l'industrie en Afrique centrale. La levée des barrières physiques,
techniques et fiscales aux échanges intra-CEMAC suscite un renforcement des échanges
commerciaux et donc de la concurrence au sein de l'Afrique centrale. Un même produit peut
désormais être livré sur tout le marché de l'Afrique centrale, grâce à la suppression des
contrôles aux frontières et des entraves techniques aux échanges.
L'élimination des producteurs les moms compétitifs permettra, cependant, une
expansion des firmes subsistant sur le marché. Celles-ci pourront dès lors: mieux exploiter et
rentabiliser leurs capacités de production, voire les augmenter (en réalisant " des économies
d'échelle ") ; renforcer leur efficacité interne en restructurant et en concentrant leurs activités
et en procédant à une meilleure allocation des ressources humaines, techniques et financières;
242

,
..,
être incitées à améliorer leur organisation, la qualité et la variété de leurs produits et en
particulier à innover tant dans le processus de production que dans les produits offerts.
Un Comité de coopération industrielle a été créé au sein de l'UE en vue de faire le point
des progrès réalisés dans la mise en œuvre de la politique de coopération industrielle.
L'Afrique centrale devrait se doter d'un tel instrument.
En réalité, les limites de la taille du marché posent un sérieux problème car elles sont
liées au niveau de l'épargne domestique, laquelle dépend à terme de la croissance économique
ou, plus globalement, des performances économiques nationales. Mais la faiblesse de l'épargne
est si forte dans les pays d'Afrique centrale qu'il est difficile de ne pas soulever le problème du
financement de l'industrialisation.
C - Garantir lefinancement de l'industrialisation.
La garantie d'une libre circulation des capitaux au sein de la CEMAÇ d'une part et
entre la CEMAC et l'Union Européenne d'autre part est un gage que l'industrialisation
pourrait être financée sans difficultés majeures. Cette garantie pourra s'exprimer à deux'
niveaux principalement: d'abord elle favorisera une compétitivité saine entre les investisseurs,
ensuite elle permettra d'attirer et de fixer les investissements dans les pays de la CEMAC.
Cl - Favoriser la compétitivité sur le plan international
La finalité du grand marché de l'Union européenne est l'animation de la concurrence.
Le grand marché permet en effet aux entreprises de produire à grande échelle, de mettre en
œuvre des moyens modernes de production et de réduire leurs coûts. Les pays d'Afrique
centrale pourraient s'inspirer du fonctionnement de l'Union Européenne pour améliorer la
politique de concurrence dans la CEMAC.
Cette politique doit garantir l'unité du marché commun en empêchant les ententes
restrictives de concurrence entre entrepreneurs. Elle doit éviter la monopolisation de certains
243

marchés en interdisant aux grandes entreprises d'abuser de leur position dominante. Elle 'doit
empêcher également aux gouvernements de fausser les règles du jeu au moyen d'aides aux
entreprises du secteur privé ou de discriminations en faveur d'entreprises publiques.
On sait que la politique de concurrence favorise l'efficacité économique, grâce à la
création d'un climat propice à l'innovation et au progrès teclmique. Ce qui revient à éviter le
cloisonnement des marchés, la formation des rentes de situation en faveur des entreprises
dominantes.
Il s'agit par ailleurs d'amener les petites et moyennes entrepris(~s à coopérer entre elles
et à se concentrer, sans nuire aux intérêts des consommateurs ou aux échanges entre les Etats
membres,
En matière d'aides d'Etat, le rôle de la politique de concurrence est d'empêcher les
initiatives nationales nuisibles aux échanges intra-CEMAC et à l'activité économique des autres
Etats membres.
Etant donné que les aides sectorielles et leurs conditions d'octroi diffèrent d'un Etat à
l'autre en Afrique centrale, elles peuvent affecter les échanges entre les Etats membres et
fausser la concurrence. La politique sectorielle de l'Afrique centrale doit donc mettre un frein
au protectionnisme national.
Ainsi, la politique de concurrence est non seulement un instrument nécessaire de la
cohésion économique et sociale, dont dépend le succès de la nouvelle stratégie mais aussi un
complément des politiques sectorielles communes qui visent l'assainissement des structures de
production. Il n'est pas exagéré de dire que la politique de concurrence doit favoriser la
"moralité industrielle" en Afrique centrale. Les entreprises qui visent une coopération
horizontale ou verticale doivent travailler en étroite collaboration avec l'autorité chargée du
contrôle de cette politique et, le cas échéant, rectifier leurs accords ou leurs pratiques
concurrentielles.
La mise en place par les pays d'Afrique centrale de la nouvelle stratégie de coopération
commerciale doit être l'aboutissement d'un processus logique qui s'inscrit dans une perspective
244

spécifique, celle d'une stratégie d'industrialisation rapide. La stratégie d'industrialisation par la
; substitution aux importations ayant montré ses limites, les pays d'Afrique centrale doivent
maintenant s'orienter vers une stratégie d'industrialisation tirée par les exportations.
C'est pour cela qu'il est nécessaire que la construction des avantages compétitifs se
'fasse dans un contexte de libre-échange. Et les pays d'Afrique centrale doivent militer en
faveur
d'un
démantèlement
des
protections.
Les
politiques
commerciales
doivent
,éventuellement protéger les industries naissantes et stratégiques mais surtout soutenir les
exportations.
En effet, comment devenir un opérateur économique dynamique et tenter sa chance sur
des marchés nouveaux quand, comme au Cameroun, il faut accomplir une trentaine de
démarches différentes pour obtenir un visa de sortie? D'autres exemples cités par la Banque
Mondiale soulignent que le commerce intra-africain officiel exige au minimum 70 formalités
administratives.
Il est amplement prouvé qu'en réformant leur politique commerciale, les pays d'Afrique
,centrale peuvent donner un coup de fouet à l'industrialisation et à la croissance. Ces pays
doivent donc adopter au plus tôt des politiques commerciales et structurelles de nature à
améliorer leur compétitivité et à permettre à leurs exportations de bénéficier des débouchés
.offerts par les marchés extérieurs notamment celui de l'Union européenne.
C2 - Nécessité de recourir aux investissements directs étrangers
L'industrialisation des pays d'Afrique centrale ne peut se faire sans apport extérieur
c'est-à-dire sans faire appel aux investissements étrangers. Or, l'un des effets les plus attendus
de la coopération Nord-Sud préconisée sera l'attraction des capitaux au sein du regroupement
régional ainsi constitué grâce à l'investissement direct étranger dont les effets directs et
indirects attendus seront nécessairement bénéfiques.
Traditionnellement, on reconnaît aux investissements directs étrangers (IDE) des effets
positifs, comme l'augmentation de l'emploi, l'amélioration du taux de croissance, le transfert
de technologie. En fait, les investissements étrangers constituent une source de capitaux
245

(aspect essentiel pour les économies d'Afrique centrale), une VOle d'accès aux nouvelles
technologies, une source de transmission de savoir-faire technique et managérial, un moyen de
connaissance des marchés internationaux et des différents réseaux de commercialisation
(CHEN, 1993).
En réalité, les effets bénéfiques de l'investissement direct étranger sur l'économie du
pays d'accueil dépendent de la stratégie de développement, selon qu'elle est orientée vers
l'import-substitution ou vers la promotion des exportations. Us dépendent par ailleurs des
moyens que mettent en œuvre les pays d'accueil pour favoriser une intégration du secteur
étranger et local et éviter ainsi la formation d'enclaves étrangères sans lien avec les producteurs
locaux.
Cependant, ce sont les pays qui assurent un investissement en capital humain important
qui sont souvent les mieux à même de saisir le maximum de bénéfices de l'investissement direct
étranger, notamment parce qu'ils pourront plus facilement assimiler l'apport de technologie et
de savoir managérial et organisationnel.
Un autre type d'effet indirect peut résulter de l'investissement en capital humain non
spécifique fait par des étrangers et bénéfique aux entreprises sous contrôle local. On peut aussi
citer un avantage indirect considérable dans la possibilité qu'ont les firmes locales d'assimiler
plus rapidement une nouvelle technologie et des techniques de gestion et d'organisation plus
performantes.
Ce dernier effet est très important car l'investissement direct étranger peut être
préférable à l'achat de licence, d'une part parce que les technologies qu'on peut acquérir par
licence sont moins innovatrices que celles utilisées par les firmes étrangères, et d'autre part,
parce que l'acquisition d'une nouvelle technologie par effet de proximité avec une firme
étrangère est sans coût direct et permet un transfert de technologie plus rapide.
La plupart des études sur les effets de l'investissement direct étranger dans les pays en
développement ont eu pour cadre le Mexique, pays qui dispose de statistiques industrielles
sectorielles des entreprises. Une étude de GLOBERMAN (1979) conclut que la productivité
du travail est plus forte dans les secteurs où les firmes étrangères emploient une plus grande
246

part de la main-d' œuvre nationale. Cependant, il reconnaît les limites de ce type d'analyse en ce
sens que les bénéfices indirects qui apparaissent par rapport à la qualité du produit ou des
salaires ne sont pas pris en compte au niveau de la productivité.
Or, l'investissement direct étranger favorise la productivité de trois façons:
1°) par une augmentation plus rapide de la production par rapport à l'accroissement de
la part des biens intermédiaires dans cette production;
2°) par l'innovation institutionnelle: le produit s'accroît, à quantité de facteurs égale,
lorsque certaines contraintes institutionnelles existant dans l'allocation des ressources sont
levées;
3°) par le progrès technologique qui déplace la fonction de production vers le haut. Le
progrès technique est souvent contenu dans une qualité de capital humain et physique
améliorée.
Lorsque les biens intermédiaires nécessaires à la production sont fabriqués localement,
l'investissement direct étranger agit directement sur ces trois sources. C'est en fait un moyen
de stimuler la production des biens intermédiaires.
Ainsi, les investissements locaux et étrangers sont fortement complémentaires surtout
dans les pays d'Afrique centrale à faibles niveaux d'industrialisation.
Par ailleurs, dans le cadre de l'innovation institutionnelle, un pays peut décider, pour
attirer et conserver des capitaux étrangers, d'alléger les formalités administratives qui
s'imposent aux investisseurs.
Ainsi au Gabon, l'innovation la plus importante au cours des dernières années est la
politique de privatisation mise en œuvre dans le cadre de la libéralisation. Ces mesures doivent
faciliter les conditions d'acquisition et d'utilisation des biens d'équipement et peuvent
permettre aux entreprises locales d'envisager de nouveaux modes de gestion.
247

L'intégration verticale Nord-Sud offre de fait l'occasion d'investir dans les pays
d'Afrique centrale alors que le cadre formel de la nouvelle stratégie donne aux investisseurs
une garantie de stabilité nécessaire aux investissements productifs à long terme. Toutefois, ces
mesures entraînent des coûts pour les pays d'Afrique centrale, du fait de " l'effet moyeu et de
rayons" qu'entraîne la conclusion d'un accord de libre-échange avec l'Union si chaque pays
maintient à un niveau élevé ses entraves au commerce intra régional.
Plusieurs regroupements régionaux ont été observés en Afrique au Sud du Sahara. Mais
ils diffèrent, les uns les autres, selon leur degré d'intégration économique. Certains, tels que la
Conférence pour la Coordination du Développement de l'Afrique du Sud, sont constitués pour
la réalisation de certains projets spécifiques dans des secteurs particuliers; d'autres, comme la
Communauté de l'Afrique de l'Est et l'Union Equatoriale sont plus ambitieux et visent la
création d'un marché commun avec une libre circulation des biens et services et des facteurs de
production.
Comme plusieurs pays africains sont au stade embryonnaire de leur développement,
avec une infrastructure inadéquate et une production industrielle inexistante, se concentrer sur
l'intégration des secteurs productifs semble approprié. La libéralisation commerciale, seule,
n'est pas suffisante pour offrir aux membres d'un bloc régional des avantages auxquels ils
peuvent attendre d'une intégration économique.
248

On peut noter que la petite taille des marchés nationaux est un des arguments qui
militent en faveur de l'intégration régionale. En effet, pour bénéficier des économies d'échelle
nécessaires à l'industrialisation, l'élargissement des marchés nationaux doit se faire par un
regroupement économique.
Mais dans le cas des pays d'Afrique Centrale, même la combinaison des marchés de la
sous-région reste insuffisante, eu égard à la faiblesse des revenus par tête des pays concernés.
Ce qui constitue le facteur le plus important expliquant les échecs du développement industriel,
à côté de la faiblesse de la qualification de la main d'œuvre et de l'infrastructure.
Il reste donc une voie alternative, les pays d'Afrique centrale doivent s'unir pour créer
une zone de libre échange avec l'union européenne. Mais la réalisation de cette stratégie,
nécessite que soient remplies certaines conditions.
La première d'entre elles est que les pays d'Afrique Centrale généralisent la
libéralisation de leurs économies. C'est-à-dire qu'ils doivent étendre cette libéralisation
géographiquement au-delà de la ZLE d'une part pour observer les règles du GATT/OMC et
d'autre part pour favoriser l'efficience des économies. Cette libéralisation doit s'effectuer aussi
dans les services et les domaines institutionnels et politiques.
La deuxième condition est de favoriser des incitations en faveur d'une industrialisation
adéquate. En effet, les mesures incitatives favorables au développement de l'infrastructure
industrielle doivent être prises tant au niveau national que régional. Les pays d'Afrique centrale
doivent enfin garantir le financement de leur industrialisation en favorisant la compétitivité
international de leurs entreprises et le recours aux investissements directs étrangers.
249

L'examen des différentes théories de l'union douanière nous a permis de réaliser que
lorsqu'une union douanière favorise plus de création d'échanges que de détournement de
trafic, elle est bénéfique. Nous avons utilisé principalement les travaux de VINER, puis les
analyses de KEMP et WAN ainsi que celles de COOPER et MASSELL pour le montrer. Les
travaux de DE MELO ont montré que la dimension institutionnelle des accords régionaux
d'intégration était tout aussi importante, surtout pour les pays en développement, dans la
volonté de construire les unions douanières.
Mais toutes ces théories, mises à l'épreuve des faits, se sont avérées problématiques.
Elles exigeaient une série de conditions pour leur mise en pratique: les pays non industrialisés
se heurtent à des problèmes eu égard à leur spécificité au regard des hypothèses du cadre
analytique retenu.
En effet, ils ne remplissent pas les conditions nécessaires à la réussite de l'intégration
économique régionale de type classique. Nous avons vu qu'en Afrique centrale, les contraintes
étaient trop fortes, (de faibles revenus et une trop grande dépendance vis-à-vis des recettes
fiscales liées aux taxes commerciales, notamment). Ces contraintes empêchent la réalisation de
l'égalité des rapports des utilités marginales des agents économiques. De même, les taux
marginaux de substitution et de transformation ne s'équilibrent pas, les conditions d'optimalité
de l'intégration économique ne sont donc pas réunies dans ces pays.
Par ailleurs, l'analyse économétrique confirme les hypothèses de similarité des
économies concernées. La mesure du degré de correspondance des biens entre les exportations
et les importations des pays d'Afrique centrale explique la faiblesse relative des flux de
250

commerce entre ces pays, mais révèle cependant que le potentiel d'expansion des échanges
intrarégionaux peut être mieux exploité qu'il ne l'est actuellement.
D'un autre côté, il existe paradoxalement des barrières commerciales qui freinent les
échanges au sein de la CEMAC. Celles-ci doivent donc être plus vigoureusement combattues:
procédures douarùères fastidieuses et règlements disparates, procédures de transit trop longues
et compliquées, absence de nonnes unifonnes pour les produits, absence de nonnes de
transport; coûts parallèles particulièrement élevés aux frontières; absence d'infonnation sur
les échanges et parfois moyens de financement inadéquats.
A travers le modèle de gravité, les facteurs structurels de l'échange et les facteurs de
politique économique ont été utilisés pour expliquer le niveau des échanges entre les pays
d'Afrique centrale. La plupart des variables ont des signes attendus excepté le PIE des pays
importateurs qui a un signe négatif Cela semble signifier en fait que lorsque le PIE augmente
dans les pays d'Afrique centrale les échanges intra-zones ont tendance à diminuer. Les
échanges au sein de la CEMAC paraissent obéir à d'autres critères. De même, la différence des
PNB par tête apparaît avec un signe positif, cela laisse penser que c'est la différence plutôt que
la similitude des PNB par tête qui explique l'échange en Afrique centrale.
La différence des taux de scolarisation ne paraît pas favorable aux échanges intra-
CEMAC en 1996. En effet, on se rend compte que plus les pays d'Afrique centrale ont des
taux de scolarisation différents, moins ils échangent des biens et services entre eux. A ce
niveau, nous avons estimé que ces pays avaient intérêt à coopérer davantage, du point de vue
de la fonnation de leurs cadres, s'ils veulent améliorer leurs échanges bilatéraux et
multilatéraux.
Il convient de mettre davantage l'accent sur la mobilité des facteurs, notamment sur les
mouvements de capitaux. Tous les pays de la CEMAC restreignent ces mouvements, étouffant
les possibilités d'intégration au moyen d'investissements transfrontières.
Le problème de la compensation qui a empoisonné tous les projets d'échanges
préférentiels et particulièrement l'UDEAC doit être traité plus efficacement. Il est évident que
251

l'expansion des échanges par la libéralisation interne et un tarif extérieur commun de prote~tion
se traduit par des gagnants et des perdants.
Cependant, on peut atténuer le problème en réduisant les pertes grâce à des tarifs
externes communs bas. Les accords actuels, aux termes desquels ce sont souvent les
« gagnants» qui financent des investissements répartis de telle sorte qu'ils favorisent les pays
pauvres, mènent à une utilisation peu rationnelle des ressources.
On a trop souvent négligé la fermeture d'usines peu rentables en Afrique centrale afin
de réaliser des plus grandes économies d'échelle lorsque cela est possible. Les gouvernants et
donateurs de la sous-région devraient systématiquement étudier la possibilité de développer les
approches régionales en matière de fourniture de services techniques. Cela n'implique pas
forcément des organismes régionaux, mais le recours, à l'échelle de la région, à des centres
d'excellence nationaux souvent préférables. Lorsque les spécialisations sont possibles ou bien
quand les économies d'échelle n'ont pas encore été exploitées, il faut étudier des approches
régionales.
A cet égard, nous avons envisagé une stratégie qui consistl~rait à créer d'abord une
véritable union douanière entre les pays d'Afrique centrale, puis de lier cette union douanière à
l'union européenne par le libre échange.
A travers une évaluation quantitative, nous avons mesuré les effets potentiels de cette
ZLE entre la CEMAC et l'Union Européenne. Les spécifications économétriques ont pefIIÙs de
conclure à une certaine sensibilité du volume des exportations des principaux pays de la
CEMAC aux variations des droits de douane. Ces résultats augurent d'un effet globalement
bénéfique de la stratégie envisagée pour les pays d' ~que centrale.
Mais cette stratégie ne sera efficace que SI elle est soutenue par deux conditions
importantes :
_ la généralisation de la libéralisation des économies en (~st la première car il est
nécessaire de libéraliser d'abord géographiquement puis dans des domaines autres que celui des
marchandises. En effet, en généralisant la libéralisation de leurs économies, les pays de la
252

CEMAC se conforment aux règles de l'üMC et évitent ainsi de céder à la tentation d'adopter
des comportements discriminatoires inhérents aux accords préférentiels régionaux. En réalité,
cette condition essaie de limiter les effets de détournement des échanges habituellement
enregistrés après la formation des unions douanières ou des zones de libre échange;
- la deuxième condition concerne la création, aux niveaux national et régional, des
incitations favorables au développement industriel. Cette condition doit permettre la création,
le développement et la garantie de financement des industries susceptibles de bénéficier de la
stratégie d'intégration économique préconisée.
A cet égard, nous avons particulièrement mis l'accent sur la dynamisation du secteur
informel urbain. En effet, en dépit des efforts considérables à des fins d'ajustement dans la
plupart des pays de la CEMAC, le développement du secteur moderne reste globalement lent.
Aussi, le secteur informel peut jouer un rôle positif en fournissant à la population des villes des
biens et des services peu coûteux, et en offrant de très nombreuses possibilités d'emploi. Créer
les conditions propices à l'exploitation de ce potentiel que constitue le dynamisme du secteur
informel est un réel défi pour la prochaine décennie en Afrique centrale.
253

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RESUME :
La ptupart des tentatives d'intégration écononùque dans les pays en développement ont
connu des résultats mitigés. Les accords de type Nord-Nord ou Nord-Sud semblent pourtant
avoir de bons résultats. La théorie traditionnelle du commerce international basée..sur la
différence des technologies, et la théorie moderne menée par HECKSHER-OHLIN, axée. sur
les dotations factorielles ne· s'avèrent pas favorables à la réalisation de l'intégration régiortaIe
en Afrique centrale. D'une. pait, ces. économies ne sont pas complémentaires au point de
bénéficier des avantages companitifs dus à la différence technologique, d'autre part, elles n'ont
pas les moyens de se spécialiser pour bénéficier des avantages liés. à la différence des dotations
factorielles. Vraisemblablement, il reste une solution: rechercher des accords de type Nord-
Sud. En effet, plusieurs avantages justifient l'intégration Nord-Sud: une plus grande
crédibilité; une implantation rationnelle des industries, etc. Toute la question est de savoir
comment intégrer les regroupements Sud-Sud dans les accords de type Nord-Sud? C'est à
cette question que nous tentons de répondre dans cette thèse.
TIlLE:
THE FEASABILITY OF ECONOMIe INTEGRATION
lN CENTRAL AFRICA :
AN ATTEMPT TO DEFlNE 01HER OPTIMALITY'S CONDITIONS
ABSTRACT:
In Subsaharan Africa, aU the attempts of South-South regional economic integration
failed. The North-North or North-South agreements soom to have better results. The
traditional theory of international trade based on the technological differencies and the modem
one centred on tàctorial dotations are not very tàvorable to régional economic integration in
central Afiica. Indeed, on' one hand, economies in these countries are not complementary
enough to benefice of comparative advantageous due to the difference of technologies, and on
the other hand, these are not able to specialize in order to profit of advantageous due to the
differences of factorial dotations. Probably one solution is to research North-South type of
agreement. In fact, many advantageous can justify the Norh-South integration: greater
credibility ; rational implantation of industries, etc. But the question is to know how South-
South agreements will work out into North-South integrations? This is what we try to explain
in this thesis.
DISCIPLINE: Sciences Economiques
...
MOTS-CLES: Intégration économique, Zone de libre échange, Union douanière, Afrique
centrale, UDEAC, Intégration Nord-Sud, Libéralisation des échanges.
CENTRE DE RECHERCHE :
Atelier 'de Recherche Quantitative Appliquée au Développement Economique (ARQADE)
Université des Sciences Sociales de Toulouse 1 - MallUfacture des Tabacs
.
21, ~ée de Brienne - 31000 Toulouse