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UNIVERSITE D'AUVERGNE - CLERMONT-FERRAND 1
,
FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE
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BUTION A LA PROTECTION JÛRIDIQUE
.
CONSOMMATËUR DANS LES~ÀX~!;,:}i:
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.. ,,,.
ENVOIE DE DEVELOPPEMENt.»
(EXEMPLE PARTICULIERD12SPAYSD'AFRIQYl!l>«>'
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THE5E DE DOCTORAT - NOUVEAU REGIME
1
Présentée et soutenue publiquement devant la Faculté de Droit de Clermont 1
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pour l'obtention du Grade de Docteur e
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CONSEil AFRICAIN ET MALGACHE 'f
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POUR L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR;
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le 29 mai 1996
C. A. M. E. S. -
OUAGADOUGOU
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1 Arrivé.e .: ..... :0'# '0'-: 'ù' U'9' '\\'
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Par Shamsidine Akrawati AJJ~T.~g,str~_sou~",n,,':' 3~.
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Sous la direction de Monsieur le Professeur Jean-Pierre MARGUÉNAUD
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j
Membres du Jury:
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1
Monsieur Jacques PRÉVAULT
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~
1
Professeur Emérite à l'Université d'Auvergne.
j
!
Monsieur Jean MOULy
!
Professeur à l'Université de Limoges.
j
Monsieur Jean-Pierre MARGUÉNAUD
Professeur à l'Université de Limoges.
Madame Muriel FABRE-MAGNAN
Professeur à la Faculté de Droit de Nantes.
,
Madame Anne-Marie LAVILLAINE
Maître de Conférence à la Faculté de Droit de Clermont 1
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A ma Famille.
1
A nlon cher Pays.
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A tous les pays d'Atl'iquc.
1
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A tous les pays du Tiers-fvlonde.
A tous ceux qui luttent pOllf la protection des droits des plus faibles.
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1

I~ I(!\\I EIH'II(1\\1 ENTS.
Nous teuous frès Sillli~'clllelli
,1 lelllcrClcr IIplle Direclelll de reliterc!le, Monsicnr le
Professeur lerlll-Pierre 1\\1/\\IU~lll';N;\\IIf\\ dOllt les précicllses ct pCI1incntes (lbservatious nous lllll
pennis de meller nbiell cc tnlv<lil. TrPllvc/ dmls ces Illl'ts IIPlre prl 1h11Hle reconn<lissancc et grntilnde.
Nous nous illSpireltllls dl' "pl le lïllC<:.<:f' d;lIls l';IlI<llyse cl de vplrc sells dll travail bien [njt prmr IIPS
recherches fut lires.
Nous telltlllS ,11!Psi il Jï'IIIL'ICicI I\\I,lllSiclJl' PmJl-r;r;ranl Pr)[I(;r){JK PlofCsseur Agrégé de.<::
Facultés de Droit. I)(lyen IIPll\\lr,Jire. de 1'1I1liycrsilé de Y,)(llllldé (CameroulI). Fil nOlis env,1yall! la
législation cClJIlerollllai"e relative <'1 la proteclion du COIISOIIIIIWlclJl'. V(1I1S 1l(lllS etvez pennis de
combler un déficit éllorme Cil d,lClllllellts. l'r,lllvez dans ccs illoIs nptre profonde recouJlmssClJlce.
Nous relllcrcil1fls c7-alelllent 1\\1(111siellr Bellld ::>TA[)J)ER, J'wfesseur H ICI FClculté de Droit de
l'Université de Uenéve (Snisse l. P(llJl' ['<lide qnll n(lIlS CI ,IJlp(ll1ée dans la doculllelltation.
Nous relllcrciolls 1\\1,lllsiem l'hicrry STNVJiWSK 1. Assistallt <1 la FClL'lllté de Droit et de
Science Politiqlle de Clertll,llll-{o'ernllld r \\'<llre Clide IIPIlS a été tlès précieuse dans le dOlllaule
infollTmtiql1e. Twu\\'ez dalls ccs mots IHlfre prnfPIHJe gratitllde.
Nos rel1lercicf1Ieut~ \\".lul pp.alcflIclit :1 l\\[plIsicm l\\uI<ldn1l Cheikh KANOUTÈ, Directeur dll
Programme OIC'-ENDA /l,lUI" l'i\\/iiqlle dc j'( )lIesl el dll Celllre. V<llre Clide I)(lUS a été très précieuse
dans la documcntatioll relative ail dévehlppeulcllt dll IIWllvelllClI1 cOllsommateur en Afrique. Nllus
vous exprimolls ;1 Ilavers l'CS ligncs 'lllllC plOftlllde gralilllde
NOliS tel1l111S ,mssi ;'1 rcnlClcier le nmeCIII EJJropécll des Unions des ConSOtnllwtellrs
(B.E.U.C.) dont \\'njc1e cn d\\lcnlllellls HUIIS fi été c;lpitale dalls le dOIlUlitre relntif au COlTllllerCC
inLenlCltional Nord-Slld.
Nous remcrcions la I)irectinll de la (\\11IC11ITellce. de la COJlSt"'"l1atioll ct dc la Répressipll des
Fraudes de Clermont-Ferrand IhllllllllllS a\\qir (1UVe111CJ porte de set biblioUlèque.
Nolis terWlIs CIII.ssi i\\,cIIIClciel Il,llrc CIIlfi Patrick IIFLSTRUFFER. Ton concours tout al1101l!?-
de cc tretvaiJ Ile Illlns aim1lais Elit dél"llll. T,nnve dalls ccs Illpts l'expression de notre trèfl grande
reCOIUlillssaflCc.
La lisle de lnlls lins anlis qlli Il,lllS (llIt llPlh111é lem aidc est lt'llglle. Nous ne sClllriolls lcs cHcr
tous ici. Salis '/(11I'e aide. 1I(lllS <lIlIÙlnS ell bC,lIlCOIlP de llIal dans la frappe de cc travetil. Nolis tcnnlls
très sincèrement nVPlIS exprimer nol re Ilr,lri lude l'ecnllllaissallcc.
Nolis l'CllIerl'1\\llls clllïll lolls ccliX qlli de 11Iè~ Lill de !tlin Illlll~ (111( ll\\l\\lllrté leur souticn ct lem
aide tout ail JOllg dc 1101' rCc!l('rc!les.

La Faculté n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions
émises dans cette thèse. Celles-ci doivent être considérées comme propres à
leur auteur.
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SOl\\ll\\lAIRE

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LI\\fIRODUCIlON GENERALE
1
1
PREMIERE PARTIE:
LA FACE CACHEE DU COI\\1.l\\1ERCE
..
1
1
1
INTERNATIONAL DES 1\\1ARClIANDISES
49
1
CHAPITREI:
1
L'EXPORTATION DES PRoDurrs DANGEREUX
"
1
A DESTINATION DES PAyS
55
1
EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (P.V.D)
55
SectionJ:
1
Qualité et circulation des produiLr et services dam le monrfe
59
1
Sous-section 1 : Notion de produit et de sen~ce
59
Sous·Section TI : Esquisse d'IUle théorie de la qualité des
68
produits et services
68
Section JJ:
Les agissements contraires au bien-être du COJlsommate"r dans le commerce international: le déversement
des produits dangereux dans les pays du Tiers-il!onde
83
Sous·Section 1 : Le commerce intemational des produits
..
de consommation cOUlante
84
Sous-Section TI : Le commerce international des produits
.
de consommation indirecte
121
CHAPITRETI:
LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR CONIRE
..
LES DANGERS DU COMMERCE INTERNATIONAL
143
SectionJ:
la préservation de Ja santé et de la sécurité du comommateur
J 47
Sous-section 1 : les mesures sécuritaires de protection du consommateur
148
Sous·section TI : L'exigence sociale et la non-qualité
159
Section JJ:
La garantie de la sallté et de la sécurité du comomma1mr
J69
Sous-Section 1 : La garantie de la santé et de la sécwilé au plan national
169
Sous·Section II : La garantie de la sanlé cl de la séclUité
.
au plan international
182
- CONCLUSION DE LA PREMlERE P ARm :
21 5
DEUXIEME PARTIE:
LA PROMOTION DES DROrrS DU
.
CONSOMMATEUR EN AFRIQlJE
219
.::...

CHAPITRE 1 :
LA RECONNAISSANCE DU Dlwrr DU
.
CONSOMMATEUR A LA PRnn~('11nN.
................................................................................................... 225
Section 1 :
Laprise en compte dcs problè1lll'S (ks COII.WlIIfl/otCIll:5 en ,1/i-iQllc 011 Jo nécrssité d'adapter le mmché mL\\;
exigences 011 a'ipiratio/!'i socioles
230
Sous-Seçtion 1 : L'action cn amont de~ pouvoirs publics ou
.
l'açtion sur l'offre de~ produils el ~C1vices
231
Sous·Seçlion II: L'action CIl aval des pouvoirs puhlics oul'aclion
.
sur la demande des produits cl s(·rvic(·s
257
SectiolllI :
L'assainissement dll circllit COlllfl/elôaJ 01/ la nécessité d 'adoptcr Je manhé mL\\; e.tigencesjllridiques et
écçmomiques
274
Sous·Seçlion 1: La prohibition des pratiques cOIlIInClcia1rs reshictives
274
Sous-Seçlion II: La prohibition des pratiques çornlllClcia1rs délo)'ales
284
CHAPITREll:
LE RETABLISSEMENT DE L'El.,IlHUBRE DU
.
CONIRAT DANS LES RAPPORTS.......................
.
..
PROFESSIONNELS - CONSIIl\\lr-.fAIFURS............
..
302
Section 1:
La lutle cOlttre Ja déloyoJl1t; dOJL'i le.5 J'opport.5 prq/es.5iOllllc/s - rO/!'iOmmo1c'w:'i
308
Sous-seçlioll 1: L'obligation de loymllé du professionllel
..
dans la vente sou la prestalion de sClvÏt:e
]09
Sous-Seçlion II: Le problème relatif à la garantie du professionnel dans la vCllte
351
Section II:
La lutte contre les clausc.5 a!JlLlù'I'S dan5 les conlroL5 COnChL'i cnlre professiollnels et consomma/l'urs
388
Sous·Section 1 : Le problème relatif aux clanses abusives en Afnque
389
Sous-Section il : La protection dll consolmnalenr contre les
..
clauses abusives en Afli(jue
.426
CONCLUSION DE LA DEl TXJEME PARTIE :
458
TROISIEME PARTIE:
L'ADAPTATION DU SYSTEl\\Jf: .JUJUDJQI.JE
.
AUX EXIGENCES DE LA PRC)'I'EC'I'JON
..
DU CONSOMMATEUR AFJUCAIN
460
Cl-W'rIRE 1:
L'INSTAURATION D'UN DROIT PRnTECll~UR
..
INSPIRE DES REALITES AFRICAINES
468

Section 1.'
Droil de la consommation et réalités qthcaines
</72
Sous-Section 1 : Le particularisme des réalités commerciales
.
et sociales africaines
.472
Sous-Section il : Les exigences consmnétistes face aux réalités africaines
.488
Section Il:
Le phénomène consumériste en .1/i'ique .' la nécessité d'une réglementation adaptée aux réalités locales
500
Sous-Section 1: La prise en compte. à l'échelle nationale,
.
des réalilés IQcales dans la mise en place des législations
.
protectrices des consommateurs
,
.500
Sous-Section il : La prise en compte à l'échelle nalionale régionale,
..
sous-régionale ou continentale, des réalités africaines dans la mise
..
en place des législations protectrices des consommateurs
.5:32
CHAPITRE II
LE MOUVEMENT CONSOr-.1MATEUR ET LA PROr-.tOTION DU DROIT PROTECTEUR EN
AFRIQUE : BILAN ET PERSPECTIVES
543
Section 1.'
La consécration du mouvement consommateur
550
Sous-Section 1 : La reconnaissance du droit du consommateur
.
à la représentation
551
Section Il:
LafinaliJé de la consécration du mouvement consommateur
576
Sous-Section 1 : La défense de la callse consumrnste par les
..
associations de consommateurs
577
Sous-Section il : La protection du consommateur par les
.
groupements parallèles intéressés par la cause consumrnste
6:35
CONCLUSION DE LA TROISIEJ-"Œ PARm
646
CONCLUSION GENERALE
.'
;
649
ll'JDEX
686
!!
TABLE DES MATIERES
693
1
1
.~

Abréviatiolls :
A.BU.C.O. : Association Burundaise des Consommateurs.
,4.. C.D.I. : Agence Canadienne pour le Développement International.
A. C.LLY!. : Association des Consommateurs de l'Ile Maurice.
A.C.P.lC.E.E. (Afrique-Caraibes-Pacifique / Communauté Economique Européenne) devenue
Union Européenne depuis Novembre 1993.
rLC.R.I.D.I. : Actions Communautaires pour le Développement Rural Intégré.
A.D.E.C. : Association pour la Défense de l'Environnement et des Consommateurs.
A.D.E.E. Tél.! Sénégal: Association pour la Défense des Abonnés à l'Eau, à l'Electricité et au
Téléphone.
A.F. NOR. : Association Française de Normalisation.
A.L.D. : Actualité Législative Dalloz.
,:l. : Alinéa
A.M.C. : Association Marocaine de Consommateurs.
A.P.C.E.B. : Association pour la Protection du consommateur et de son Environnement
Bénin.
APEX: Projet pour l'Amélioration de la Productivité Animale et de l'Exploitation.
Art. : Article.
A... S.B.L. : AssoCÎ2.tions Sans But Lucratif.
AS.CO.AfA. : Association des Consommateurs du Mali.
AS. CO. SEN. : Association des Consommateurs du Sénégal.
Ass. : Assemblée.

II
.4...S.D.E.C : A~sJCiation Sénégalaise pour la Défense de l'Environnement et du Consommateur.
;1
B.A.D. : Banque Africaine de Développement.
B.E.N. : Bureau Exécutif National.
B.E. V.C. : Bmeau Européen des Unions des Consommateurs.
B.I.D. : Bulleti!; d'Infirmation et de Documentation (Direction Générale de la Concurrence et de
la Répression des Fraudes).
3.l.R.D. : Banque Internationale pour la Reconstruction et le Dévdoppement.
Bull. Civ. : Bulletin Civil.
Bull. Info : Bullctiu d'Information.
Bull. d'Illfo. Trim : Bulletin d'Information Trimestriel.
CA. : Consommateurs-Actualité.
CA : Cour d'Appel.
CA.A.P. : Cünfér;:nce Annuelle de l'Administration Publique.
C.A.G. : Consumers Association of Ghana.
Casso : Cassation.
C.C.B. : Consumer Council of BOPHUTHATSWANA.
CC.Z. : Conseil des Consommateurs du Zimbabwe.
C.D. : Compact Dise.
C. C.E. : Commission des Communautés Européennes.
C.E.E. : Communauté Economique Européenne.
C.E.E. T. : Compagnie Energétique et Electrique du Togo.

III
C.E.D.E.A.C: Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.
C.E.D.E.A..O : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest.
C.E.P.C.O.N. : Consumer Education and Protection Council of Nigeria.
Cf : Confert.
C.IN.E.R.G.I.E. : Cellule Informelle d'Etudes et de Recherche pour la Gestion de l'Information
sur les Echanges.
Civ. : Civil.
C.Civ : Code Civil.
Chroll. : Chronique.
c.I. : Consumers International.
C.N.V.C.E.D. : Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement.
C.N.T.T. : Confédération Nationale des Travailleurs du Togo.
Coll. : Collection.
Corn. : Commercial.
COOP.SYN.TO. : Coopérative Syndicale de Consommation du Togo
Corr. : Correctionnel.
Crim. : Criminelle.
C. T.A : Consumer Times Association.
D. : Dalloz.
D.E.A : Diplôme d'Etudes Approfondies.
D.R : Dalloz Hebdomadaire ou Recueil Hebdomadaire.

IV
D.L.D. : Démocratie Liberté Développement.
Doc. : Documentation.
D.P. : Dalloz Périodique ou Recueil Périodique.
D.S. : Dalloz-Sirey.
E.C.G. : Electricity company of Ghana.
Ed. : Editions.
E.E.B. : European Environmental Bureau (Bureau Européen de l'Environnement).
E.N.D.A. Tiers-Monde : Organisation Internationale pour l'Environnement et le Développement
du Tiers-Monde.
E.P.A.
: Environmental Protection
Agency
(Agence
fédérale
pour
la
protection
de
l'Environnement).
F.A.F.S. : Fédération des Associations Féminines du Sénégal.
F.A.O : Food and Agriculture Organization (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation
et l'agriculture).
F. C.F.A. : Franc de la Communauté Financière Africaine.
P.M.I : Fonds Monétaire International.
F.N.C.C. : Fédération Nationale des Coopératives de Consommation.
G.A.T.T. : General Agreement on Tariffs and Trade (Accords Généraux sur le Commerce et les
Tarifs douaniers).
Gaz. Pal. (G.P.) : Gazette du Palais.
G. WSE : Ghana Sewerage Corporation.
H.A./. : Health Action International.
HI-FI: High Fidelity.

v
I.B.F.A.N. : International Baby Food Action Network.
I.C.A.I.T.I. : Instituto Centroarnricano de Investigacion y technologia Industrial (Institut de
Recherches et de Technologie Industrielle).
~.C.D.A. : International Coalition for Development Action.
I.D.A : Institut de Droit des Affaires (Aix-en-Provence).
IF.P.M.A
: Fédération
Internationale
des
Associations
des
Fabricants
de
Produits
Pharmaceutiques.
I.N.C: Institut National de la Consommation.
I.N.C HEBDO : Hebdomadaire de l'Institut National de la Consommation.
.O. C. U.
: International Organisation of Consumers Union
(Union Internationale des
Organisations des Consommateurs).
I.R. : Information Rapide.
."f.S.O. : International Standing Organisation.
J. : Jurisprudence.
J.C.P.(G) : Juris-Classeur Périodique ou Semaine Juridique (édition Générale).
J.CP. (Cl.) : Juris-Classeur Périodique ou Semaine Juridique (édition Commerce et Industrie).
J.c.P. (E.) : Juris-Classeur Périodique ou Semaine Juridique (édition Entreprise).
J.O. : Journal Officiel.
J.O.C.E. : Journal Officiel des Communautés Européennes.
K.C.O. : Kenyan Consumer Organization.
K.P.T.C : Kenyan Post and Telecommunications Council.
L.A.D.fl.P. : Ligue Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.
L.c.E. : Ligue des Consommateurs du Burkina-Faso.

VI
L.G.D.]. : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence.
L.N.D.D.H. : Ligue Nigérienne de Défense des Droits de l'Homme.
N.C.L. : Narnibian Consumer Lobby.
Obs. : Observation,
O.C.D.E: Organisation de Coopération et de Développement Economiques.
OF.NA.CER : Office National des Céréales.
0./. C. : Organisation Internationale des Consommateurs.
O.M.C. : Organisation Mondiale du Commerce.
r
C'.lV1.S : Organisation Mondiale de la Santé.
O.N.EA : Oifiœ Nationale des Eaux.
O.N.G : Organisation Non Gouvernementale.
D.N.V: Organisation des Nations Unies.
OR. CO. NI : Organisation des Consommateurs du Niger.
O.S.H.A. : Occupation Safety an Health Administration (Office Américain pour la Sécurité de
l'Hygiène du Travail).
D.T.D.C. : Organisation Tunisienne Pour la Défense du Consommateur.
O. V.A. : Organisation de l'Unité Africaine.
P.A ; Petites Affiches.
P.A.H.O. : Pan American Health Organization (Organisation Panaméricaine de la Santé).
P.A.N. : Pesticide Action Network.
P.D.G. : Président Directeur Général.

VII
F.D.P.C. : Principes Directeurs pour la Protection du Consommateur.
P.I.J1.E. : Pour une Information Médicale Ethique.
P.M.A : Association Américaine des producteurs de médicaments.
P.N. V.D. : Programme des Nations Unies pour le Développement.
l
P.N.U.E: ProgramJ.'lle des Nations Unies pour l'Environnement.
1
P. U.F. : Presses Universitaires de France.
P. V.D. : Pays en Voie de Développement.
P. V.l. : Progra:'"lmes de Vérification des Importations.
P. V.O. : Private Voluntary Organisation.
.T.D. Com. : Revue Trimestrielle de Droit Commercial.
R. T.D. Civ. : Revue Trimestrielle de Droit Civil.
S.A..c.c. : South Africa Consumer Council.
Sem. : Semestre.
SENELEC: Société Nationale d'Elcctricité.
Somm. : Sorr..maire.
.J.NA.TEL. : Société Nationale de Télécommunications.
SO.N.E.E.S. : Société Nationale d'Exploitation des Eaux du Sénégal.
T.C.G. : Telephone Company of Ghana.
Trib. : Tribu:-:al.
T.G.!. : Tribunal de Grande Instance.
T.N.C: Transnational Corporations (Sociétés Transnationales).
j
jrj
i1
i

VIII
T. V.A : Taxe sur la Valeur Ajoutée.
V.F.C. : UnicE Fédérale des Consommateurs.
V.M.A : Union èu Maghreb Arabe.
V.N.E.P: United Nations Environnement Program.
U.N.I.C.EF. : U:1ited Nations International Childrcn's Emergency Fund (Fonds des Nations
Unies pour l'Enfance).
~':V.I.CO. : Union Ivoirienne des Consommateurs.
U.R.S.S. : Ul~ion des Républiques Socia1J~les Soviétiques.
U.S. : United States.
V.S.A : Unitèd States of America.
oJ'.S.-A.I.D : Ul'.llcd States Agency for International Developmenl (Agence Américaine pour le
DéveloppcmcLt International).
V. : Voir.
Vol. : Volume.
V. T. T. : Vélos Tout Terrain.
W.H.O. : \\Vorld Health Organization.

INTRODUCTION GENERAL&
!
J~

2
La défense du consommateurl est aujourd'hui à l'ordre du jour dans tous les pays du
monde entier, dans les instances internationales et dans toutes les organisations nationales et
internationales; qu'elles aient une coloration politique ou non. La Charte Mondiale des Droits des
Consommateurs adoptée à l'unanimité des membres de l'Assemblée Générale des Nations Unies
le 9 avril198~2 à l'attention des Etats membres de l'Organisation en est une illustration.
A l'intérieur de la Charte sont catalogués des principes généraux destinés à orienter les
pays membres, en particulier les pays en voie de développement (P.V.D.) , sur la voie de la
protection du consommateur. A l'origine de ce vote historique on retrouve les organisations
nationales des consommateurs avec à leur tête l'Lü.C.U. (International ürganization of
Counsumers Unions ou Union Internationale des Organisations des Consommateurs) aujourd'hui
i
.~
rebaptisée O.I.c. (Organisation Internationale des Consommateurs) pour les francophones c.I.
1
(Counsumers International) pour les anglophones3. Ainsi, longtemps négligé, quant à ses droits,
1j
et sacrifié sur l'autel des producteurs, le consommateur refait surface pour demander protection.
1
t
C'est l'essence du Droit de la Consommation.
ii!
Discipline juridique naissante, pragmatique, empruntant à toutes les autres branches du
droit, le Droit de la consommation est un droit de la production dont les grandes orientations
visent l'amélioration des conditions de vie des consommateurs4• Mais dans la pratique, peu de
pays s'occupent réellement du sort du consommateur dans les rapports d'inégalité qui l'opposent
quotidiennement aux producteurs et distributeurs dans ses différentes activités de consommation.
Exception faite des pays développés où le consommateur bénéficie d'une confortable
1
protection dans sa fonction de consommation, la plupart des pays membres des Nations Unies, en
1
j
\\
particulier les P.V.D, se soucient peu de ses problèmes au quotidien.
1
1 G. CAS: La défense du consommateur, Que sais-je? P.U.F. 1ère édition 1975.
2 Résolution N° 391248 de l'Assemblée Générale des Nations Unies adoptant la Charte Mondiale des Droits des
consommateurs ou les Principes Directeurs pour la Protection du Consommateur, ST/ESN17Ü, Nations Unies,
New York 1986; cf également « Consommateurs-Actualité» N°47ü du 21 juin 1985, P. 5 et suiv.
3
Voir «Consommation-Développement» N°I3, Bulletin Trimestriel d'Information O.I.C.-E.N.D.A, Dakar
(Sénégal), P. 1.
4 FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN : Principes et Pratiques du Droit de la Consommation, voir la page
relative à« l'avertissement », éd. Delmas, 1983.

On cnregisl rc dOlic 1111(' 1If({iorit(~ si/ellcÎcll.\\'(' qlli resle illd~lférellte aux déboire.\\' dl' lem
populat ion prise d;1I1S sa fOllclioll d'agent éCOJlIlllliqllc achl'leur dl' biens ct scrviccs nécessaire ail
développcmcnt de l'activilé éCOllollliqlle n;llionalc.
Lc COllt inent
afric, in.
d:1I1S cet te configurai ion géopolit iquc, dans cette
majorité
silcncieuse, cnre!!istre, pour cc qui concerne la mise en pl:tcc dcs législations relativcs il la
protection des consonllnatems, ,< /a pa/ml! d'or » des ahonnés absents il l'appel lancé par les
Nations Unies depuis Je vole de la Cilil/[e le <) avril 1<)X~), Pourlanl elle renlCrme en son sein un
grand nombre de COnSOllllllall'llrS dont I:t prot ccl ion s'avère nécessaire. Il s'agit ent re aut l'cs des
consommatcurs
ilnalp";lbètes
<Ill
illeltrl~s
ct
des
consommateurs
des
zones
rurales
particulièrcmenl
dél;lvmisés
p;Ir
leurs <Hi!!iIlCS socio-économiques ct culturelles ct
dcs
consommateurs au pouvoir d'achat très limité, encore ;lppclés consolT1maleurs il faible reVCllUS, cl
qui peuplent les quartiers pallvres des miliellx 11Ih;lins,
Somme tOlite, les P;IYS dll Ticrs··Mollde Ollt dcs conSOllll11ateurs dont l'urgellce de I:t
protection rend Ill:ccssairc la misc cn place des Iégislat ions consuméristes. Mais les besoins dl'
protection juridique des consommalcurs SOllt loin des préoccupatioll... premières de Icurs
pouvoirs publics il la grande surprise des ills1:lnccs des Nations Unics ct au grand désarroi des
organisations locales, Pourquoi une tellc insouciance, Ilne telle indiffërence des pouvoirs publics
locaux quant il la mise en place des législal ions protectrices de leur population ? La question
mérite réponse ; mais avant d'en arriver là, il convient de préciser les sources juridiques sur
lesquelles nous nOlis appUYCHlns pour batir notre analyse nécessaire pour la mise en place d'un
droit protecteur du COnSOll1l11:1tcur d.ms les pays en voie de développement, plus particulièrement
dans les pays d'Afrique.
1· Ll'S SOIUTCS juridi(Jucs d'inspiratiou.
Deux principales sources juridiqucs nOlis scrviront de point de repère tout ail long de cc
travail: le droit rriln\\'ais et le droit communautaire.
A - I,e amit {imlfai.\\·.
Le recours all droit rr:l,,~·:tis coJllllle source d'inspiréltion pour l'institution d'un droit de ln
consommation l'Il Afrique n' l'sI P:1S neut rc. Il sc jusl ilïc par les liens historiques qui lienl r Etal
français à ses anciennes colonies d'Al rique.

1
!1~
4
j
Cela est aussi valahle pour les autres Etats européens ayant cu des colonies sur le
continent africain. C'est notalllment le cas de l'Angleterre, de la Belgique, de l'Espagne cl du
Portugal.
En effd. pendant longlenlps ct cc. jusqu'à leur indépendance, les anciennes colonies
1"
françaises d' Afrique ét~lient régies par le droit français d~lIls tous les domaines. L'accession de l'CS
jeunes Etats à l'indépendancc politique Il'a rien c1wngé sur le plan juridique. Si la décolonisation
a permis à ces pays de devenir des Elats souverains sur la scène internationale, l'inl1uencc du
droit de l'ancienne puissancc occupante est restée déterminante. Et ceci n'est pas sans
conséquencc dans les rapports enlre les systèmes juridiques des Etats africains ct ceux de leurs
anciens colon isateurs.
Prenons l'exemple du Togo pour justifier notre artirmation. Dans ce pays l'influence du
droit français est très remarquée. 1/ reste la référencc dès lors qu'il s'agit de voter un texte
quelconque à l'Assemhlée Nat ionalc. On sc réfère constamment aux textes français relatifs aux
domaines concernés pOlir s'en inspirer. Cela est non seulement vrai pour la Loi fondamentale.
c'est-à-dire la Constitution, mais aussi pour la majorité des textes votés par le législateur.
Le droit français est enseigné à la Faculté de Droit de l'Université du Bénin (Lomé), cc
qui témoigne de l'usage des codes y afférent, notamment le code civil, le code pénal, le code
administratif, le code de procédure civile, le code de procédure pénale, etc., mais aussi de la
jurisprudence qui en résulte.
Le" tribunaux aussi s'inspirent régulièrement des décisions
jurisprudentielles françaises pour rendre la justice aussi bien dans le domaine civil, commercial
que pénal.
A titre d·exemple. dans cc pays. le seul texte législatif protégeant, en théorie. le
consommateur dans ses activités consuméristes de tous les jours reste J'Ordonnance Nn 67117 du
22 avril 1967 portant réglementation des prix ct des circuits de distribution5• Ce texte n'est pas
tout sorti armé du cerveau du législateur togolais. Il est inspiré par l'article 37-I-a) de
l'Ordonnance française du JO juin 19456 .
----------~--------
S Ordonnance N° 17 du 22 avril 1967 portant réglemenlalion des prix et des circuits de distrihution au Togo, J.O.
j
du 5 mai 1967, N° spécial.
6 Ordonnance française du 311 juill 1945 relative au cOlllrl,le el à la réglementation des prix, J.O. du R juillet J9,15,
.~
p. 4150. rectificatif la. du 21 juillet 194.'i. p. 4'; 16.

L'exemple logo/;\\is n'esl pas isok. " est rcprl;sl'ntafif du caractère des législations
africaines. Cest 1l01;Inll1lent le CIS au (',lIllcrollll <lvec la loi Nf' ()O/OJ 1 du JO août 1990 régissant
l'activité cOl11merCi;llcl .
On rdrouve dans cclle loi les traces dc plusieurs lextcs français, Ilotamment la loi du 22
décembre 1972 rel;llive il fa ploteet iOIl des consonlllwlcurs l'II matière de démarchage ct de vente
x
à dornicile , la loi dll 10 janvier Ilnl) sur la prolection cl l'informalion des consom11lateurs'),
l'Ordonllancc dll 1'-' décclllhrc 1()X() relat ive ;1 la liherlé el dl' la cOllcurrcncc lO. Dans certaills
pays, les lois adoptées pendant la période coloniale reslelll encore Cil vigueur salls modific,lt ion
aucune. C'est le cas du /,;l1re 011 le 1)l~cn'I du 21 Mars Il)J 1 n;gissant le contrôle des prix reste le
seul texte d,IIIS le dOlllainc Il.
Tous ces C.\\CIII[l!cS ci dcssus cités nc sonl P;IS sculcmenl valahles pOlir les colonies
françaises, mais ;H1Ssi j111111 tow; les pays d'I\\friquc qllelle que soit la puissance colon;;II('
concernée. Ils tl;llloi!'.llcnl aussi du IIl's rort lien .Îlllidiql1l' qui cxiste entre les Etats africains isslIs
de la décolollisatioll ct leur ancienne puissance O(Cllp'lnte. Cc qui du coup légitime notrc
démarche b;lS(~C s,''' l'illspir<llion du droif français p(llfr la mise cn place du droit de la
consommatiollcn ;\\friqlll'.
Il - 1.(' droit C01l111111110I1ta;/'e,
-_._-----
Tout eolllllW le droit frilllçaÎs, le recours all droil COmnlllll,lut,ùre n'est pas lion pill';
innocent. Il se just ilie Tlilr les rapports c0111ll1erciaux historiques qui lient depuis longtemps les
Etats de la COllllllllllauté écollolllique curopéennc (c. E. E.) aujou rd' hu i connue sous le n0111 de
l'Union européenne ct l'l'US de l'Afrique, des ('ara',hes ct du Pacifiquc (A.C.P.).
Si le groupe 1\\.( '.1'. lui-mêlllc n'a été erl~é ljU',lVCC la première Convention de Lomé, cn
1975, la coopérat ion enl re b ('0 Il1I1IlIIIail 1é elfropée Ilne (devellue l' lJ nion européenne) ct les pays
7 Loi N° l)O/o11 dll If) a(lÎll "II)(l r0giss:ml "aclivil(; cOlllmcrciale au Cameroun, Juridis Inro. N° 5 J[lnvier-Fêvrier-
Mars 199/, Lé/!islalioll. p. 5 el slliv.
R Loi du 22 décelllhre IIn2 Ichrive ;', la profeclioll dcs cOllsonlllwleurs Cil malière de démarchage ct Lie venle à
domicile, J.O. dll li (h'Clllhfl' 11177.
9 Loi N° 7X/21 du 10 j:mvicr 1l)7X sur 1<1 prolCl'lion cl l'inrllnllalion des consollllllateurs, .1.0, du Il janvier ,Q7X.
10 Ordonnance du icI' d0celllhre I<JX6 re!:tlive ~,Ia lihcrlé ct de 1[1 concurrence, J.O. du 9 décemhre 19H6.
JI Voir en ce sells F. K
1'\\11 'SII( mE : TIll' Slall' or COllsllmer Proleclion Lcgisialioll ln "frÎCa. « Tow[lnls 1\\
Strong "nd Elfccli\\'c CIJIlSlIIIllT 1\\11J\\TlllL'nf III I\\frÎca ", Illternational Or!!:lllizalÎon or Consumers Unions. "frica
Tr,lnsitioll Progr:ulll11e. The 11a~'lIl'. 'l'hL' Nl'L'flll'llallds. khruary 1<)1)4. p..n.

avec lesquels clic entrclielll ries rclaliolls particulières l'Il !\\Iriqllc subsaharienne, dans les Car:ùhes
et dans le Paci liquc, rClIlollt c pOlir sa pmt h 1957, dat e de la signat ure du Traité de ROllle sur la
Communauté écollomique emopéellnc (C.~.E.).12 Il est allssi motivé par le contenu des texte.s
issus des diverses COllventions signées par les parlies contractantes.
Tout d'abord. lbns fa
j1rell1i(~re p:lrlic de fa Convention de Lomé IV illti'I"(~('
« Dispositions Gélll~raics de la ('oopér:ll ion !\\CP-CE ", 1':11'1 ielc 1Cl alinéa 1 du c1wpilre 1 rcl:,! il
aux objectif.s ct principes dispose: " La Conllllllll:luté ct ses Etats mel1lbres, d'une part, cl le';
Etats A.C. P., d' aut re P;lIl. ci-après déllollllllés " Parl ies eont rael ant cs )), concluent la présclll c
Convention de coopération Cil vue de promouvoir ct d'accélérer le développement éconol1lique.
culturel ct social des Elals !\\CP cl d'approfondir el de diversifier leurs relations dans un espril dl'
1
~
1
-t
solidarité cl d'illtérêl mutuel. ,,1
J
,
Ensuile l'art kil' 2 l)Jù.. ise : « La coop(:r:ll ion !\\CPCE, rOJ1(lé sur 1111 régime de droit cl
1
l'existencc d ';1I.',(;(U(;Ol1S C(}l~;O;l1(('S, s' exeree sur la hase des princi pes fondamentaux su ivants :
1
-l'égalité des partenaires. le respect de leur souveraineté, J'illtérêt mutuel ct l'interdépendance,
1
1
-le droit de chaque Etat ;1 déterminer ses choix politiques, sociaux, culturels et économiques,
1
1
1
-la sécurité de leur relation fondée sur l'acquis de leur système de coopération, )}14
1
Enfin on relrouve le hien fondé de J'inspiration plus en détail dans les dispositions des
1
articles 4 et 5 de la Con\\'l'ntion.
1
j
L'article 4 alinéa 1 dispose :'t cet effet: « La coopération ACP-CE appuie les efforts des
Etats ACP en vue d'un déveloPIlC1llcnl ,glob:ll autonollle ct auto-entretenu fondé sur leurs valeurs
J
sociales ct culturelles, lems c:lpacit':s hUll1aines, leurs ressources naturelles, leurs potentialilés
1
1
i11
1
12 Ogustin (TYOWE:
"1.:1 Cl'n\\l'nli'"l ;\\( '1'/( 'E : \\In ill';trumcn! de parlenariat jaln:lis égalé", in l ,e Courrier
1
ACP/CE N° 1:'i4, J;lIlvin-Févrin··M:lrs P)l)(), p 2. L'évolution de l'l'Ile relation se résume comme suil :
-1957 : Tr<lilé de ROllle instituant la Comlllunauté Economique Européenne (CEE). Les arlicles III il 13(, du
Traité prévoienl l'associai ion de pays el de lerriloires Iwn-l'uropéens <Ivee lesquels les Elals memhres de la CFE
enlretiennent des rclal iOlls p:1I1 icul il'res.
-1963: Convenlion cil' Yaoudé , F.I\\.MI\\. (Fl:lls africains ellllaigache associés) - C.E.E.
-1969 : Con vent ion cie Yal'lIc1é Il FM'" 1\\ -CFE.
-1975: Convenlion de Lonl(: , I\\.CI'. (Afliqlle Cal:ùlwsT'acifiqlle) - C.EE.
-19HO: Convention de l.olll(-11 M'l' CIJ~.
-19H5: Convenlion <11' I.OIlJ« III I\\CI' cr:r:.
1990: Convention de \\'Olll[- lV 1\\('1' CEE.
1995: Révision i't mil'arcouls de 1.(11,,[- IV. si.l'lIalllle <111 IntI' r[-\\·is(-;l r"'alllice.
IJ Voir L;] ConH'nlÎnn de IlHl\\(( tV ll'lk que rl:visée par l'accord signé. l'vlalllice la 4 novemhre Il)1)5. in t .('
Courrier I\\CP-CE N~ 15·l rll:cill:. l'. 11.

7
économiques a/in de prolllouvoir le progrès social, culturel ct économiquc dcs Etats ACP ct le
bien-être de Ic"rs pol''' fatio ilS , par fa sati.~ractioll
de fe",.... beso;"s fondamclltaux,
hl
reconnaissancc du rôle de la femme ct de l'épanouissemcnt des capacités humaincs dans 1('
respect dc /cm dig!lill~. "l'
L'article :; l'st cncore plus clair dans ses dispositions. L'alinéa
1 dispose : « La
coopération vise IlIl dhcl0I'I'I'11II'1l1 (,(,lIlré sur l'IIOII1I11C, son aclellr cl bénéficiaire principal, ef
qui postule c10nc le respect ct la 1'1'0111olioll dl' /'l'IlSc111h1e dl~S droils de cclui··ci. Les aclions de la
coopération s'inscrivcnt dans cctle l'f'rsp('clit'l' posilil'l', 011 Il' respcct des droits de J'holllme l',t
reconnu cOlllmc 1111 factem (olldamclllal d'lin véritahle dévcloppement ct où la coopération clk-
même csl conçlle l'qnlllle une contribution :1 la promotion de ces droits. }) L'alinéa 2 précisc :
« Dans une telle pcrspccli\\'c, la polilique dc déH'loppcment ct la coopéralion sonl étroitement
liées au rcspl'CI ct illajOll;SSf11Il'C des dmils ct libalé.\\'.f01ulfllllelltale... de l'1101I1111e, ainsi qU':'1 1:1
reconnaissance ct l'applicatio!l dcs principes délllOcraliqlles, ;'t ln consolidaI ion de l'Elal dl' dr(lil
et à la bonne gestion des ;i1f:li,es puhliques ... ,,1('
Tous ces lextes ont, cntes, une portée plus économique qlle .Îmidiqlle. Mais le SOIt du
consommateur n·est··il P:IS lié ;'1 la sitU:ltioll éCOnOll1ique d'un Et"t ? ),'''lIlélioration des condition';
de vie du COnSOnll1J:lteur est fonction de l'état des n'glcs juridiques qui encadrent les aclellls (1('
l'économie d'un P:1YS ou d'Ilne région. C'est (1;lns ce bul que les direct ives ct rég\\clllcnts <;(ll1t
régulièrement adoptés :1 l'échelle cmopécnne. Ces actes du Conseil el de la Commission visent ~
encadrer l'activité économique d:lIls la logique de la protection du consommateur. Le droit de la
consommation n'étant appmu que pour limiter les excès de l'économie de marché, il est logique
que Jes pays liés pm des :lccords eOllllllereiaux llIatl~rialisés par des échanges réciproques des
biens et des services protègent leurs !1(lpltlaliolls t!:IIlS Ics mêllles proportions juridiques.
Si le conSOllllnatCIIJ de la ('ollllllunauté curopéenne jouit d'une protection efficace grâce
aux efforts légis/;ltits de la COl1lmission de Bruxelles, ccci n'est pas le cas chez son homologue
des Aer., cn l'oCl'IIrrencc d'Afriquc. Les P:IYS d'Afrique ignorent le droit de la consommation ct
l'absence quasi-générale dcs politiques ct législations ~lppropriécs en matière de protection du
14lhid.
15 Voir La Convcntion de L\\llll{.: IV tcllc que révisée par raccord signé Maurice la 4 novel11hre
(eN5, in Le
Courrier ACfl-CE N" 15·1. précilé. p. Il.
16 Ibid.

8
consommateur
continue
de
favoriser
de
douteuses
pratiques
commerciales
ql1l
ont
irrémédiablement transformé le continent en dépotoir des produits de mauvaise qualité ou
présentant des risques réels ct sérieux pour !'environnement ct/ou la santé de la populal ion. Or,
cette situation n'est pas compat ihle avec les disposit ions de l'art icle 4 alinéa 2 de la Convention
qui préconise Ull développement basé « sm un équilihre durahle entre ses objectifs économiques,
la gestion rationnelle de
l'env irollnement ct
la
va lorisat ion des
ressources
naturelles ct
humai nes »17.
L'homme étant au rentre des préoccupations de la coopération qui lie les ACP aux Etats
de l'Union européenne, s'inspirer des règles protectrices du consommateur de cette Union pour
asseoir une
législation protectrice du consommateur Il' est rien d'autre qu'une
f:lçon de
rééquilibrer les rapports cn faisant bénélicicr au COnSOnll11nteur du Sud ln superprotect ion de son
homologue du Nord. Et relie i nspi rat ion nous semble légiti Ille.
Si la protection du eonsonllllatCl!r est au centre de nos préoccupations, il n'est cepell<f;lIIt
pas un terme familier d,ms le langage juridique des pays a fi-icnins, ct ce, malgré le vote des
Principes Directeurs des Nations Unies invitant les Etats memhres à assurer pleinement ct
efficacement
sa
défense.
Une
exigence
s'impose
découvrir
ct
connaître
[';,ulil'it!"
C01lS0mmateur dans toutes ses composantes.
17 Voir La Convenl ion de LOI11l: IV !elle que révist:e par l'accorù signé Maurice la 4 novernhre 1995, in Le
Courrier ACP-CE W 154. précité. p. Il.

JI - Nn1iull d(' CUlIsummat(,lII',
La conll;lissance de la notioll exige une étude SOIIS dellx angles: une analyse de la notion
(A) ct une présenlation de sa dNinilion en droit posilif lB).
il - ,tllall'se de la 1I0lioll,
Que désigne-l-on par le vocable « comwlI1l11alellr » ?
«Le (:ollSOll1l11at(!lIr, ("'e,1;1 1'110111IIW » diront cert;lÎlls, car «1'/tolllme est ail centre de
toutes les aclÏl'ités juridiques cf écol1oll1iqlWS qui Il '(~xis((~l1t que par lui ct pOlir lui» 1R.
Sommes-nous donc lous des conSOllll11alcurs ? Si l'on prend à la lettre cette analyse, on aboutit il
la conclusion quc nous sOll1ll1es 1<1\\IS, par définitioll. des COIlSOl11lllateurs l '!.
Mais cefle \\'isioll de 1:1 1101 jOli UOIlS condllirait il une d(~dlletjon simpliste ct trop racile, car
il n'y aurait plus de raison dl' [1rolL~gn un Ici contre les :lhus d'lin tcl, puisque nOlis SOll1111CS tOIl.'.;
les mêmes dans le eOlnparl illlcnl de 1;1 consollllllation. Qui donc peut êt re qualifi<.~ de
consommateur (\\;tns l'analyse qu i nous concerne '! La réponse à ccl te quest ion suppose unc
finesse dans la conccpt lIalis;11 jOli du mot «con,'.;01l11l1ateur» ct dans la déterminat ion des
personnes à protéger dans les lransactions cOlllmCJ'ciales.
En effet, la caraclérisat ion du consomnl;lteur à protéger ne va pas de soi. La not ion de
consommateur implique la cOllnaissance des éléments servant à son identilïcation.
Tout d'abclnl. le L'OnSOlllll1:1leur csl Ull IIlilisateur des biens ct des services mis sur le
marché20• Aussi, Il' premier critère d ïdenl ifical ion du consommateur n' cst-il ricn d'autre que la
règle émise par 1';111 ick ()32 du code de COll1l11CrCe qui dissocie rachat pOlir revendre en l'état ou
après transrormal ion cmackrisanl r acl ivilé profcssiOllllclle de distrihut ion ou de production. Il
s'opposerait donc all prokssiollnel qui exerce UIlC activité il litre habituel.
IR cf « Le eonsol11l11aleur ". tOllle J. HI èllle Congrès des Notaires de France. r_yon, 12-15 mai 1985. P. 1J.
19 KENNEDY's special Illcss;tge 10 the congress on Prnleeting the Consumer Tnleresl, Mareh 15, 1962. Puhlic
papers of Presidents P. 235. L'expression « les consol1ll11aleurs, nous tous par délinition » lui fut reprochée par
certains au leurs dont Luc BIllI.: '< Consommateur, défends-to; ! ", éd. Dénoël Paris 1976, P. 26 ct suiv.
20 Jean-Pierre prZZIO : Droit dr la Consollll11ation, Fn('yclopédie Dalloz. Droit Commercial 1987. P. 4fi.

la
Si l'on s'en tient à ce critère, le consommateur serait non seulement le consommateur
final, simple partieulier agissant pour la satisfaction de ses hesoins personnels ou familiaux, mais
aussi le consommateur illtermédiaire qui est le professionnel agissant pour le compte de son
.';10",
21
exploitation .
Une telle approche, qui permet de cerner la fonction de consommation sans tenir comple
de l'affectation privée ou professionnelle du hien utilisé, n'est pas totalement ahsente du droit
positif. Il s'agit là aussi d'une conception large dc la notion retenue par la réglementaI ion
économique relative à la police de la consommation et au droit de la concurrence 22.
Toutefois, cette conception extensive du consommateur ne l'a pas emporté dans la paf lie
du droit positif plus tourné vers la protection des intérêts privés dcs particuliers dans kllls
relations avec les professionnels. Lcs lois assurant la protection du consommateur pris en C]ualil(:
de contractant le perçoivent, en effe!. comme J'utilisateur final des biens ou des serviccs11 •
La référence à la qualité de contractant faite par ces textes a conduit une part il' de 1:1
doctrine à mettre en avant cette qualité pour idcntifier le consommateur. Ce dernicr est d01illi
'1
comme la personne qui acquiert des hiens ou services pour son usage personnel' . 1,,'
consommateur est ainsi systématiquement assimi lé il un contractant.
Il s'agit là d'une délinition trop réductrice de la notion de consommateur <[ui, salls 011('
acquéreur du bien, donc contractant direct, peut néanmoins J'utiliser. Et ce «consomllwtcur
matériel» qu'on oppose au contractant «collsommateur juridique» selon l'expression d'un
éminent auteur,25 mérite d'être protégé contre les risques d'utilisation du produit acquis, car il est
également sujet du droit de la consommatior?'. C'est d'ailleurs dans ce sens que s'est prononcée
la commission de refonte du droit de la consommation, lorsqu'elle définit les consommateurs
21
A notcr cependnnt que, pour les économistes, les hiens d' équipcmcnt se di rrérencicnt des hiens de
consommation en raison justemenl de Irur pnrlicipatioll nu processus de production, H. KRIER ct J. Le BOURV A
: Economie politiquc. 1. l ,coll. U: Armnnd Colin P 14 il 16.
22 J-P PIZZIO : op. Cil. P. 46
23 ibid n° 135 ct suivnnt: n° 420
24 En particulicr : G. CORNU : La protection du consommateur dans
l'cxécution du contrnl, Travnux de
l'Association HENRI CAPITANT, 19n. T. XXIII. p.n5 sur la liste des auteurs proposant cette délinition, V J.c.
FOURGOUX, 1. MIHAÏLOV et M-JEANNIN : Principes ct Pratiqucs du droit de la consommation, 2r éd. Il)~.l
Coll. Cc qu'il faut snvoir, Dclrnas. P. Cl cl C4
25 J. CALAIS-AULOY: Droit de la consommation. 1CIe éd. 1980. Précis Dalloz n° 2 et 15, 2e éd. 1986, n" 1 et 1fi.
3eéd.1993nos4,6etsuiv.
26 J.C FOURGOUX, 1. MIHI\\lLOV ct M.-V. JEANNIN: op. cit p.C'

1 1
comme des personnes qui sc procurellt ou qui utilisent des hiens ou des services, pour un usage
. r . '
/)7
11011 prOJeSSlOlllle ..
Mais le simple fait d'être 1'ulilis:lteur des hiens ou des services acquis n'est pas un indice
suffisant permettant
de
bélléficier d'ulle prolect iOIl :llIlolllatiquc.
En plus de sa qualitl;
d'utilisateur des biens ou des services, Je consonllllateur doit être dépourvu de compétellce
professiollilelle. Sa protectioll s'explique en raison de sa propre faiblesse, de sa prop"('
illexpériellce.
2R
CeUe présomption anime toute ulle partie du droit de la eonsommation.
Les personnes présumées inexpérimentées sont assurément les personnes physiques qui
agissent en dehors de toute profession pour la satisf;lct ion de leurs besoins personnels ou
29
familiaux. Ils sont des ncheteurs profanes ct non avertis • Quant à l'appréciation du niveau de
compétence, il faut souli~ller que celui-ci peut présenter des dcgrés vnriables en fOllction des
consommateurs que l'on a Cil face de S(li. ln
Il - IJé/Ïllitioll du COllsommatellr ell droit positif.
Malgré son élévat ion :lU r:lIl~ de COIICl'pt juridique. il f~ltIt affirmer que le mot
« consommateur»
n'a
P:1S
f:lit
l'objet
d'une
recherche
suffisamment
réfléchie
sur
sa
11
signification . Aussi, mélllque-t -il de définition précise en droit posit if où la tendance s' est f:litc
pour }' assimiler au nOIl profession 11el.
Le consommateur se définit donc par rapport au professiollllel, Est COIlSOlllmateur cclui
qui n'est pas professiollllei. Il est donc un non-professionnel.
Cette définition du conSOlllln:lteur par opposition au professionnel a été avancée par b loi
française N° 78/23 du
10 janvier
1978 rcbtivc il l'information ct il la proteclion (le';
27 1. CALAIS- AULOY : Rappnrl tinal, en propositions pour un nouveau droit de la consommation 1985, la
documentation française. P 1R.
28 PIZZIO : op.cil. p.74. n° 422
29 Ibid.
30 Ibid.
31 PIZZIO : op.cit, p. 48, N° ..no.: Ch,iqian ATlAS : Epitéllloingie Juridique. 1985, coll. droit fondarnentnl.
P.U.F. N° 51 ; R. MARTIN: « Le conSOTnlllateur ahusif», O. 1987, chronique, P. 150; Charles GIAUME : « Le
non professionnel est-il un consommateur ') l'eliles AlTiches 1985 N° 88, P. 25 ct suiv.

12
consommateurs, laquelle ajoute dans son chapitre 4 portant sur les clauses abusives le terme de
« non-professionllel » à celui de « cOllsommateur »~2.
Déjà, bien avant le vote de cette lof, les textes consuméristes existants consacrés à la
vente par démarchage à domicile'.l et aux opérations de crédit34 excluaient de leur champ
d'application les personnes qui traitent pour les besoins d'une exploitation agricole, industrielle
ou d'une activité professionnelle en général. C'est dire que l'assimilation du consommateur au
non-professionnel était déjà consacrée même si le terme n'a pas fait l'objet d'une citation
explicite.
Ces textes confèrent à la notion un statut particulier et présentent le consommateur
conune celui qui agit, en dehors de toute profession, pour la satisfaction de ses besoins
personnels ou farniliaux.~5 Cette définition a été reprise par l'ensemble de la doctrine..l6 Elle est
aussi conforme à celle qui a été retenue à l'échelle européenne. Une directive du 20 décemhre
1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors
des établissements commerciaux, a consacré expressément cette définition.
Elle entend par consommateur « tOlite persOlllle physique qui agit pour Utl ll.'laJ.:C
pouvant être cOllsidéré comme étrallger à SOIl activité professionnelle »37.
L'article 9-b de la directive du 25 juillet sur la responsabilité du fait des produits
défectueux a aussi adopté cette conception stricte du consommateur à propos de la réparation
,
des dommages matériels.lR•
l
1
1
1
,1!1
J
1
,1,
32 Loi ND 78/23 du 10 janvier 197R, J.O Iljnnvier 197R.
{
33 Loi ND 72/1137 du 22 décembre 1972 relntive à la protection du consommateur en matière de démarchage et de
vente à domicile.
34 Loi ND 78/22 du 10 janvier 1978 rc!<llive à l'information et à la protection des consommateurs dans les
opérations de crédit, J.O l1janvier 1978.
1
35 PIZZIO, Op. cit, P. 48, N° 437.
36 En particulier, CALAJS-AULOY : op. cil., W 1. ; P. GODE: Consommalion , Dictionnaire Juridique Dalloz,
1
voir Consommateur. Sur l'ensemble des définitions doctrinnles, voir J. LAMBERTERIE et C. WALLAERT : « Le
1
contrôle des clauses abusives dnns l'inlérêt du consommnteur dans les pays de la C.E.E »., Revue. Internationale
j
de Droit Comparé 1982, ND 3, P. 671. nOs 28 et 16(i.
j
t
37 Directive du 20 décembre 1985. article 2, J.O.C.E. Ne L 'J72/31, JI décembre.
r,
~
1

n
F
13
La même conception du consommateur a été retenue par la Convention de Bruxelles du
17 septembre ] 978 concernant la compétence jud iciaire ct l' exécut ion des décisions en mat ièrc
civile et commerciale. Le consommateur y est défini comme la personne qui conclut un contrat
pour un usage pOllvallt être comiidéré comme étrallge,. à SOli activité pro!essiollllelle~9.
Enfin, si l'on remonte de quelques années dans le temps, on constate que l'administration
française avail déjà, dans une circulaire du 14 janvier 1972 relative à l'application des dispositions
concernant le marquage ct l'étiquetage des prix, interprété de façon similaire la notion de
eonsommateur40.
On peut donc, à juste titrc, conclure que l'unanimité s'est faitc autour de la définition du
consommateur lequel s'identifie à travcrs deux critères essentiels: d'une part, le critère de la
finalité de l'acte passé ou de la destination du bien, ct d'autre part, le critère de la 11011-
compétence pro!essiOllllelle de r autcur de l'acte en cause.
Mais le consommateur est unc notion tout autant juridique qu'économique. Si sa
définition est nécessaire pour préciscr le domaine d'application des lois qui le protègent, le juriste
ne saurait, pour cette raison, faire l'économie d'en préciser tous les contours. Aussi, est-il
nécessaire d'aller voir du côté de ceux qui sont censés appliquer les lois votées en sa faveur pour
en apprécier la position. Quelle est la définition jurisprudentielle du consommateur?
Même si des tâtonnemcnts ne sont pas à exclure, l'apport de la jurisprudence dans la
délimitation de la notion de consommateur est essentiel. Et en dernière analyse, c'est aux arrêts
de la Cour de cassation qu'il faudra se référer tant ses décisions sont autant d'orientations
décisives dans la compréhcnsion du concept consommateur.
38
Directive (CEE) N~ R5n74 du Conseil du 25 juillet 19R5 relative au rapprochement des dispositions
réglementaires ct administratives dcs Etats memhres en matière de responsahilité du fait des produits défectueux,
J.O 7 aoOt 1985, N° L 210, r. 2Q. Sur son commentaire, v. 1 GHESTIN : «La directive communautaire du 25
juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits délCctueux », D. 19R6, ehron., r.135 ; H. C. TASCHNER:
«La future responsahilité du fait des produits défectucux dans la communauté européenne», Rev. Mardll~
Commun, 1986, W 297, r. 257 cl suiv. : Ch. TOREM ct L. FOCSANEANU : « La directive du Conseil drs
Communautés européennes du 25 juillet 19R5 relative lt la responsabilité du fait des produits défectueux ct le droit
français des produits applicable Cilla matière », 1er. 19H7, 1, 3269.
39 Sur la convention, v. Ch. LARROUMET : «Réllexions sur la convention européenne ct la propositioll de
directive de Bruxelles concernant la responsahilité du l'ail des proùuits », D. 197R, chron., P. 219.
40 Circulaire du 14 janvier 1972. n. 1972. P. R9. cOllcernant l'application de l'arrêté W 25-921 du 16 septemhre
1971 sur la publicité des prix, BOSP t7 septemhre 1971.

\\ '~~-
14
41
Dans cette oeuvre prétorienne, l'arrêt de la première chambre civile du 25 mai 1992
est
d'une importance capitale. Comme souvent dans les litiges de la consommation, les faits de
l'espèce sont nécessaires pour comprendre le bien fondé de la décision jurisprudentielle.
lll:' ~.
Quelques jours après le cambriolage de son magasin, un petit commerçant avait reçu la
visite d'un démarcheur lui proposant
l'installation d'un système d'alarme.
L'affaire fut
immédiatement conclue et un acompte versé. Puis vint le temps de la réflexion: réalisant que le
coOt de l'opération, crédit inclus, allait s'élever à quelque 45.000 F et que cette dépense était au-
dessus de ses moyens eu égard à sa situation financière, le commerçant décida de renoncer à sa
commande et, dans la semaine, avisa la société installatrice de son intention. Mais cette société ne
l'entendit pas ainsi: elle soutint que le commerçant avait contracté à titre professionnel et de ce
fait, il ne pouvait se prévaloir du droit de rétractation de l'article 3 de la loi du 22 décembre 1972
relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile. De
l'issu de ce litige dépendait aussi le sort du contrat conclu pour le financement de l'acquisition.
La Cour de cassation donna raison au petit commerçant. Cassant l'arrêt d'appel, elle
retient que «le contrat principal litigieux concernait l'installation d'un système d'alarme
échappant à la compétence professionnelle de "l'intéressé" qui se trouvait dans le même état
d'ignorance que n'importe quel autre consommateur ». La Cour de cassation venait ainsi de
reconnaJ"tre la qualité de consommateur à llll professionnel en raison de son incompétence dans
la branche d'activité de son cocontractant, en l'occurrence l'installateur du système d'alarme.
La Cour de cassation a fondé sa décision sur l'article 8-I-e de la loi du 22 décembre 1972
et l'article 3 de la loi n° 78122 du 10 janvier 197842 relative à la protection du consommateur-
1
j
emprunteur. Mais cette décision qui va dans le sens d'une définition unitaire du consommateur
n'est pas un cas isolé. Son orientation est d'autant plus marquée que la formule retenue évoque
1
aussi la jurisprudence4J rendue sur l'autre loi n° 78123 du 10 janvier 197844 sur les clauses
j
l,
abusives.
j
~
j
1
l
1
41 Casso Civ. 1ère 25 mai 1992, J.c.P. éd. G., IV, 2142.
42 Loi nO 78122 du 10 janvier 1978 relative à l'in ronnalioll ct à ln protection des consommateurs dans Je domaine
de certaines opérations de crédit, J.O. du II janvier 1978.
1
43 Casso Civ 1ère 28 avril 1987, Bull. Civ. l, n° 134; D. 1987, somm. 455, oos. Aubert; D. 1988, note Dclebecque ;
j
J.C.P. 1987, éd. G., II, 20893, note Paisant ; RTD civ. 1987, p. 537, obs. Mestre.
f
44 Loi nO 78/23 du JO Janvier 1978 sur la protection ct l'information des consommateurs des produits ct services,
1
J.O. du Il janvier 1978.
.~
lj
t
!
1

15
De façon générale, les décisions jurisprudentielles sont convergeantes sur un point: elles
reposent sur l'idée que des professionnels pourront prétendre à la qualité de consommateurs.
Tout d'abord, peuvent hénéficier de la protection de la loi, d'après la jurisprudence, tous
ceux qui, profalles, agisse11f il des .fills l101l-professi01l1lelles. Cette définition se réfère à des
personnes qui, d'une part, sont dépourvues de compétence particulière au regard du produit
qu'eUes utilisent ou du contrat qu'elles concluent et qui, d'autre part, recherchent la satisfaction
d'un besoin d'ordre personnel, familial ou domestique. 4)
L'arrêt de la Cour de Nîmes va dans la logique de cette définition. Sollicitée sur le
fondement de l'article 35 de la loi du janvier 1978 sur les clauses abusives, soit l'article L. 132-1
du Code de la consommation, cette Cour a, dans un arrêt du 8 mars 199046, jugé que cc texte
entendait protéger les personnes «utilisatrices d'ull produit pour des besoins salls relatioll
directe avec leur professio1l..., c'est-à-dire ulle catégorie réputée Ilaïve et vulnérable [Jarce
que peu compétente de la population ».
11 en ainsi du photographe amateur qui confie ses souvenirs de vacances aux soins d'un
professionnel47, de celui qui emprunte pour acheter le véhicule qui lui permettra de pourvoir :1 ses
déplacements privés, ou encore de la ménagère démarchée à domicile pour l'acquisition d'lin
aspirateur...48 Parce qu'ils sont des «collsommateurs privés finaux »"1), l'accès au bénéfice des
différentes lois de protection, donc du Code de la consommation, leur est largement ouvcrt~o.
45 G. PAJSANT: Essai sur ln notion de consommatcur l'Il droit positif (Réllexions sur un arrêt du 25 mai 1992 dl'
la première chamhre civile de la Cour de cassation), 1.C.p. 1993, éd. n, Doctrine, 3655, p. 100.
46 Nîmes 8 mars 1990, lCP 1990, éd. G., Il, 21573, 1hCespèce, note Paisant.
47 Casso Civ 1ère, 25 janvier 19H9. Bull. Civ. I. N° 43, ; D. 1989,253, note Malauric; lCP 1989, éd. G., 21357,
note Paisant ; Casso Civ 6 juin 1990, Bull. Civ. J, n° 145 ; JCP 1991, éd. G., Il, 21594 2è espèce, note Hassler; -
14 mai 1991, Bull. civ. J, n° '5~; D. 1991, 44C), note Gheslin; JCP 1991, éd. G., II, 21763, notc Paisant; Rcvuc
Contrats-Coneurrence-Consommat;oJT juillet 1991, n° 1bO, note Levencur.
48 G. PAISANT : Essai sur la notion de consommateur en droit positi r (Rénexions sur un arrêt du 25 mai 1992 de
la première chambre civile de ln Cour de cassnlion), J.C.P. 1993, éd. G., Doctrine, 3655. p. 100.
49 L'expression est tirée de la loi luxemhourgcoise du 25 aoGt 1983 sur la protection juridique du consommatcur.
article 1er, cité par G. PAISANT : Essai sur la notion de consommateur en droit positif (Rénexions sur un arrêt du
25 mai 1992 de la première eharnhre civile de la Cour de cassation), J.c.P. 1993. éd. G., Doctrine, 3655, p. 100.
50 Ibid.

16
Cette conception du consommateurS 1 échappe au contentieux parce qu'elle représente le
plus petit dénominateur de la notion. C'est la définition a minima. 52 Mais la difficulté à cerner les
contours du consommateur réapparaît dès lors que l'on cherche à admettre que le consommateur
doit être plus largement compris. Et c'est dans cette recherche que l'arrêt du 25 mai 1992 de la
première chambre civile de la Cour de cassation montre tout son intérêt. II nous montre
clairement qu'aujourd'hui Ull proJessiollllel peut être le COllsommateur que la loi protège.
Les exemples sont nombreux. Ceux-ci montrent que, dans une relation contractuelle
d'ordre professionnel, l'une des parties pourra malgré son statut de commerçant prétendre à la
qualité de consommateur. C'est cc qu'ont décidé les juges de cassation dans l'arrêt du 25 mai
1992, comme ils ont déjà cu à le faire pour l'application de la loi sur les clauses ahusives :111
bénéfice d'un agent immobilier acheteur d'un système d'alarme à installer dans ses locaux.
professionnels. 5) Cette même loi a aussi été appliquée à un joaillier54 ct à des horticulteurs""
contractant en qualité de professionnels, tandis que la loi du 22 décembre 1972 avait déjà pu
f· ,
.
1
~(j
pro Iter a un agncu teur' .
Somme toute, la tendance est aflïrmée. Et comme le montrent les différents arrêts cités,
eUe n'est pas spécifique à une législation déterminée: la qualité de professionnel n'est pas
exclusive de celle de COllsommatell,.. Alors que la loi na 78/23 du 10 janvier 1978 fait état du
J
non professionnel ou consommateur, la jurisprudence a révélé la notion de professionnel-
1
consommateur. Et comme l'a dit un auteur, «incontestablement ce nouveau binôme fait
t
florès ».57
l]
ii
J
51 Dès t 939, sans utiliser le même terme consommateur, RI PERT écrivait qu'il ne serait pas « juste de traiter de
r
façon égale le professionnel qui, cn contractant fait un acte rentre dans l'exercice de sa profession, dont il cannait
le sens et doit comprendre la portée, et la ['ersonne qui s'adresse à lui pour en toute confiance » ... et qui « souvent
n'a aucune compétence pour discuter 1cs conditions de son contrat» : Ebauche d'un droit civil professionnel, in
Etudes de droit civil à la mémoire de Hcnri CAPITANT, Dalloz 1939, p. 6R4.
52 PAISANT : article précité, p. 100.
1
,
53 Casso Civ. the 2R avril 19R7 précité.
54 Paris 22 mars 1990, D. 1990, inf. rar. p. 98.
55 Angers 6 décembre 1987, D. 19RR, chrono 260 ; Cah. lm. Electr.-gaz 1988, 17R, note Sablière.
f
56 Casso Civ. I~re, 15 avril 19R2, Bull. Civ. J. n° Ln; D. 19R4, p. 439, note Pizzio.
57 PAISANT : article précité, p. 100.
1
tfl

17
Toute la difficulté consiste à faire la distinction entre les professionnels pouvant bénéficier
de la protection de la loi en tant que consommateurs et ceux qui n'en auront pas le droit. Et c'est
là qu'interviendra le pouvoir d'appréciation souveraine des juges du rond.
Mais cela ne saurait. scmhle+iJ. suffir pour apprécier efficacement la notion dans S;I
globalité; car la Cour de Cassation ~ travers sa premièrc chambre civile a encore opéré un
« revirement» en affirmant dans un arrêt du 24 novembre 1993 que le caractère abusif d'unc
clause limitative de garantie «ne pouvait être invoquée à propos d'un contrat conclu entre
professionnels »~R. Par cet arrêt, la Cour suprême rompait ainsi avec sa jurisprudence antérieure
laquelle intégrait dans le champ d'application de la loi protectrice du consommateur certains
professionnels reconnus COlllllle incompétents dans le domaine où ils contractent.
Cette nouvelle approche de la notion de consommateur va dans le sens souhaité par \\;\\
directive européenne na 93-13 du 5 avril 1993~9 relative aux clauses abusives qui précise en son
article 1er § 1 qu'elle concerne les clauses abusives figurant «dans les contrats conclus entre un
professionnel et un consommateur ». Celle directive qui retient la conception étroite de la notion
définit dans son art icle 2 le consommateur COlllllle «toute personne physique qui, dans les
contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son
activité professionnelle ».
La Cour de cassation a peut-être voulu, semb1e-t-il, appliquer à l'avance la directive
européenne avant son intégration dans le droit français des clauses abusives, Quelques semaines
seulement après l'adoption de cette directive, la première Chambre civile, dans un arrêt du 26 mai
199360, faisait les premiers pas dans ce sens, Après avoir observé que «le prêt litigieux était
destiné à financer l'acquisition d'un immeuble à usage de bureaux », la Haute juridiction en a
déduit «que ni la loi na 79-596 du 13 juillet 1979, ni la loi na 78-23 du 10 janvier 1978 n'étaient
applicables en la cause, la SCI ne pouvant être tenu pour un consommateur au sens de ces
textes », La Chambre commerciale de la Cour de cassation a aussi jugé dans un arrêt du 10 mai
sa Casso Civ Jhe 24 nov. 1993, lc.r. 1994, éd. E., Tl, 593, note L. LEVENEUR ; Contrats, conc., consom., J994,
chrono 3, obs. LEVENEUR ; n. 1994, sornin., p. 236, ohs. PAISANT.
59 Directive C.E.E du Conseil na 93-/3 du 5 avril 1993 relative aux clauses abusives, J.O.C,E. L. 95, 2J avril
1993, p. 29.
60 SCI de l'avenir cl Banque Louis Dreyfus, pourvoi n° 91-15.876 : Lexilascr n° 832, cité par .1. GHESTIN ct J.
MARCHESSAUX-VAN MELLE in « L'application en f'rancc de la directive visant à éliminer les clauses
abusives après J'adoption de la loi na 95-96 du 1cr février 1995 », J,c.P. éd. G. J995, r, doctrine. 3854.

t
1
18
1
199461 , à l'encontre d'un commerçant et au profit d'une banque, à propos d'un contrat relatif à
~!
l'encaissement des sommes payées à l'aide de certaines cartes de crédit, que les juges du fond
n'avaient pas à se prononcer sur le caractère abusif de la clause litigieuse au regard de l'article 35
;",i
de la loi du 10 janvier 1978 « la convention ayant été conclue entre deux professionnels ».
Par ces deux arrêts, la première Chambre civile rejoint enfin les avis de la Commission des
clauses abusives qui place hors du champ d'application de la loi consumériste les contrats passés
« entre en vue de répondre à des besoins professionnels»62. Ils expriment aussi une «rupture»
par rapport à la jurisprudence observée par la mfme Cour depuis le 28 avril 198763 puisqu'alors,
elle avait reconnu la qualité de « non-professionnel ou consommateur» à un professionnel ayant
conclu un contrat « échappant à sa compétence professionnelle» et qui, relativement au contenu
du contrat litigieux, se trouvait «dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre
1
consommateur ». Le revirement de jurisprudence serait bel et bien consommé.
Î
1
Mais comme J'ont souligné certains auteurs, « il est toutefois singulier qu'aucun de ces
1
1
arrêts n'ait été publié au Bulletin o flic ici des arrêts civils, ce qui, selon les principes rappelés
j
officiellement par le Conseiller Doycn HATOUX(i.1, signifie qu'ils ne peuvent avoir la portée d'un
revirement de jurisprudence ».65 Comme J'a souligné un auteur, il est prématuré de dire qu'il
1
« semble désormais certains que les derniers espoirs des professionnels d'être protégés contre les
'1
1
clauses abusives, lorsqu'ils contractent pour leurs besoins professionnels anéantis »66.
1
1
J
1
,1
i
l1
61 Casso Com. 10 mni
1994, D 1995, p. 89 el suiv. : Défrellois 1995, art. 36024, p. 347, obs. critiques D.
1
MAZEAUD; Conlrals, COIlC. ('OIlS<lII1. 1994, Il n 155, ohs npprohalives L. LEVENEUR.
1
62 Commission des clauses ahusives, avis, 14 seplemhre 1993, Conlrals Cone. Consom. 1994, comm. 92, noie
~
LEVENEUR; Defrénois 1994, nrt. 35891, Il n 122, ohs crilique D. MAZEAUD; - 28 avr. et 20 mai 1994, BOCC
30 mai 1995, p. 181.
63 Bull. Civ. J 1987, n° 134: D. 1987, SOlllln. 455, ohs AUBERT: D. 1988, p. 1 Nole DELEBECQUE ; lCP 1987,
1
éd. G., II,20893, noie PAISANT; R.T.D.civ. 1987, p. 537, obs MESTRE.
64 Rapport officiellemenl présenlé le 15 décembre 1993 pnr M. B. HATüUX, Doyen Hononaire de la Cour de
cassation, devant les Présidents de cours d'nppel, sur « Ln porlée des arrêls non publiés de la Cour de cassation en
1
matière civile ». Cité par GHESTIN el MARCHESSAUX-VAN MELLE in « L'application en France de la
l
directive visant à éliminer les clauses ahusives après l'adoption de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 », lC.P. éd.
1
1
G. J995, l, doctrine, 3854.
1
6S GHESTIN et MARCHESSAUX- VAN MELLE: « L'applicnlion en France dc la directive visant à éliminer les
1
clauses abusives après l'adoption de ln loi n° 95-96 du 1er février 1995 », J.c.P. éd. G. 1995, J, doctrine, 3854.
1
66 D, MAZEAUD: observalions criliques sous Casso Con:. JO mai 1994 prée.
~
ti
1
1

19
Unc tcndance existe, certes, en ce sens et il est possible qu'eHe se traduise un jour par
l'affIrmation publique d'un revirement de jurisprudence. Mais celui-ci reste pour l'instant
67
inavoué, donc inccrtain.
L'hésitation est donc permise en ce qui concerne la confirmation du revirement de
jurisprudence opéré par les arrêts cités. Elle est d'autant plus permise que « la Chancellerie ne
paraît pas avoir communiqué au Gouvernemcnt ct au Parlement, lors des travaux parlementaires
préalables au vote de la loi du ln fcvrier 1995(,8, que la scull' référence à l'arrêt «officiel» du 28
avril 1987 »69. C'est en visant expressément cette seule solution, tenue pour constante, que les
rédacteurs de la loi du 1cr Icvrier 1995 ont maintenu, malgré la directive, la référence aux
«contrats conclus entre professionnels ct non-professionnels ou consommateurs »70, dont ils
rappellent qu'elle visait à « prendre en compte la situation d'un professionnel concluant pour ses
besoins personnels al! dans Je cadre de son activité professionnelle mais hors de sa spécialité )/1.
Les travaux parlementaires semblent ainsi montrer que la volonté du législateur a été de
protéger tant les professionnels dans le cadre de leurs activités mais hors des compétences
n
générales nécessaires à la conduite de leur commetTe , que les personnes morales.
Cette solution, qui paraît traduire une orientation plus favorable li une réforme plus large
du droit du contrat de préférence à l'instauration d'un droit spécial de protection des
consommateurs, repose, semble-t-il, sur cette observation qu'au-delà des catégories juridiques -
consonunateur ou « non-professionnel », personnes physiques ou morales - « "appréciation est. ..
fonction de la technicité propre <lu professionnel ».n
67 GHESTIN et MARCHESSAUX-VAN MELLE: artide précité.
68 Loi n° 95-96 du 1er février 1995 concernant les clauses abusives ct la présentation des contrats ct régissant
diverses activités d'ordre économique et commcrcial, J.O. du 2 février 1995.
69 Ibid.
70 L. Art. l or : C. Consol1l., art. L. 1:12- J, al. 1cr
71 M. CHARIE, dans son Rapport devant l'Assemhlée nationale (Doc. AN. 1994-1995, n° t 775, p. 12) rappelle
cette interprétation qu'il tient pour acquise. Rapproché de la volonté affirmée des rédacteurs de la loi de ne pas
réduire la protection donnée par le droit français antérieur, ce rappel semhle hien exprimer la volonté du
législateur de ne pas revenir sur cette solulion tcnue par lui pour acquise (il est vrai à partir d'informations
incomplètes quant au vérilahlc état dc la jurisprudencc de la Cour de cassation). Cité par GHESTIN et
MARCHESSAUX-VAN MELLE. art. préc .. note n° 17.
72 Rapport CHARIE prée.. ibid.
73 Ibid.

20
La confirmation (à quelqucs nuances près) de la rcfontc dc la notion de consommateur cst
venue de deux arrêts récents rendus par la première Chambre civile de la Cour de cassation le 24
janvier 199574 ct le 21 février 19957~ relatifs elauses abusives dans Ics contrats conclus entre des
professionnels de spécialités dirtcrenles. Le I~'visa" de l'arrêt du 24 janvier 1995, destiné à la
publication au Bulletin ol1ïcic\\. csl ainsi rédigé: «les aispositiollsae l'article 35 de la loi un 78-
23 du 10 jauvier 1978, ael'em' h's articles L 132-1 et L 133-1 au Code de la cOll.'wlt111latim,
et dei'article 2 dll décret du 24 mars 1978 ne s 'appliquellt pas aux contrats de fournitllres ae
biens ou de services qui Ollt IIll rapport direct al'CC l'activité professionnelle exercée par le
contractant ». Comme )'ont souligné certains auteurs76, il s'agit d'une substitution de motifs
pour justifier le rejet d'un moyen gui soutenait « qu'est consommateur celui qui contracte hors
de sa sphère habituelle d'activité» ct reprochait aux juges d'appel d'avoir écarté J'application
de ces textes « en estimallt que la société Héliogravure Jean Didier, entreprise d'imprimerif',
était utilisateur professiollnel de l'énergie électrique ». Les mêmes motifs ont été avancés par
la même Chambre dans l'arrêt du 21 février 1995 pour rejeter le pourvoi d'un commerçant qui
,
avait reconnu dans ses conclusions d'appel avoir loué le véhicule de la société contractante pour
i'~
i
les besoins de son entreprise.
1
!
Contrairement aux arrêts précédents, non publiés au Bulletin officiel, deux remarques sc
1
,
dégagent du «visa}} de l'arrêt du 24 janvier 1995 : tout d'abord, le simple fait d'agir dans le
1
j
cadre d'une activité professionnelle ne sunït pas pour écarter l'application des textes visés ;
j
ensuite, la première Chambre civile préfère aujourd'hui distinguer selon que Je contrat litigieux a
1
un «rapport direct
avec
l'activité
professionnelle»
plutôt que de parler «d'utilisateur
J
professionnel}} du produit ou du service ou de se référer à sa «sphère d'activité}} et «sa
J
f
spécialité }}. Il faudra donc attendre un peu avant de voir se préciser la portée de ce changement
l
de formule au regard de la loi du 1er février 1995.77
La prudence est donc permise, car la notion de consommateur est une notion difficilement
définissable. Aussi, pourrait-elle connaître d'autres interprétations jurisprudentieJles en fonction
ii
1
1
ère
14 Casso Civ 1
24 janvicr 1995, (Héliogravurc .Ierlll Didier cl Elcctricilé de France, sur pourvoi na 92-18.227), n.
1995, Somm. Commcntés, 22Q ; Bull. Civ I~"', (995 n° 54; J.c.r. 1995, éd. G. IV, 745.
75 Casso Civ. 1ère 2 J févricr 1995, lC.P. éd. E 1995, n, 72R
76 GHESTIN el MARCHESSAUX-VAN MELLE: art. prée.
77 GHESTIN el MARCHESSAUX- VAN MELLE. art. prée.

21
des affaires en cause. Les arrêts rapportés ne seraient donc qu'un point de départ pour afliner la
définition du consommateur juridiquement protégé.
C'est peut-être la rnison pour laquelle le récent Code de la consommation est resté muet
sur la définition du terme « consommateur ». Que le Code n'ait pas défini le consommaleur ne
signifie pas que l'on ait entendu nier la notion 7R • Bien au contraire, son silence la confirme.
L'absence de définition s'explique aussi par le fait que, d'une part, la définition est toujours un
art difficile et il l'est encore dès lors qu'il s'agit d'enfermer une notion aussi diverse dans ulle
défmition légale unitaire ; d'autre part, le législateur voulant une codification « à droit
constant »79, une définition singulière se heurterait à celle philosophie. Ro
Si le professiollllel-collsommateur est considéré par la jurisprudence comme un
consommateur ordinaire, c'est en raison de son attitude profane. Et le professionnel-profalle
n'est consommateur que dans la me,mre où l'opération qll 'il cOllclut n'a pas de rapport direct
avec ['exercice de sa professioll.
Selon l'expression consacrée du doyen AUBERT, le professionnel-consommateur est
celui qui n'accomplit pas « 1111 acte de la profession »RI. Même s'il contracte à l'occasion de
l'exercice de son activité professionnelle, il n'agit pas pour les besoins ùe cette dernière à des fins
lucratives.82
Certes, le Code de la consommation a résolu un problème: celui du regroupement des
textes disparates ou épars Cil un texte unique. Une constatation s'impose cependant : le
consommateur, en droit positif français, est toujours à la recherche de sa définition. El
l'assimilation par la jurisprudence dc la notion au professionnel-profane n'est pas de nature ;1
faciliter cette recherche.
Une chose reste certaine aujourd'hui : la notion de consommateur est une notion à
géométrie variable laissée à l'appréciation souveraine des juges du fond. Elle recèle en elle-même
78 J,-c. MA YAU : La notion de consommateur, Thèse Montpellier, 1993, p. 9 ct suiv.
79 L'expression est de Hervé CAUSSE : « De la notion de consommateur», in «. Apr~s le Oxle de la
consommation, les grands pronlèmcs choisis ». Actes du colloque du 24 levrier 1994 de l'Université de Reims.
Direction de 1. CALAIS-AULOY ct Hervé CAUSSE. Litec 1995, p. 26.
80 Ibid.
81 Observations SOliS Cnss. Civ. 'ère. J lIlai '988. somm. 407,
82 PAISANT: article précité. p, 101.

22
deux éléments essentiels: le caractère profane et la non-compétence initiale de l'individu qui
invoque la protection de la loi.
C'est, en effet, parce qu'il agit en tant que simple particulier profane, sans compétence
initiale, que le consommateur est assimilé à un non-professionnel ou à un professionnel-
Hl
consommateur susceptible d'être protégé.
Ce hesoin de protection n'est pas nouveau, il
remonte dans l'histoire. Ainsi, le consommateur a-t-il son histoire.
III - Histoire de la défense du consommateur.
Le consommateur n'est pas né d'hier. La consommation a toujours été au centre des
préoccupations de l'homme et le consommateur existe depuis des millénaires, depuis que
l'homme est apparu sur la terre. Et si l'on en croit la genèse, Adam et Eve furent expulsés du
R4
jardin d'Eden à cause d'une histoire de consommation de pomme .
Notre démarche ne consiste pas à remonter aussi loin dans le temps - ce serait raconter
toute l'histoire de l'humanité - mai.. de rester dans les contours légaux de la définition du
consommateur. Ce qui nous éviterait de retomher dans la notion très générale et large de
consommateur avancée par le Président Kennedy en 1962 : « les consommateurs, nous tous par
définition »85.
1
!1
L'histoire du consommateur n'est pas celle de l'humanité, mais plutôt celle de deux
i
classes sociales s'affrontant sur un même terrain pour la sauvegarde de leurs intérêts respectifs.
j
C'est l'histoire des consommateurs anonymes affrontant les fabricants et les commerçants
R6
visibles et dont le théâtre d'opération reste le marché des biens et des services .
1
Jj
En effet, les abus dans le C0111merce ne datent pas d'aujourd'hui et le consommateur a toujours
j
eu besoin d'en être protégé. "Ses problèmes se perdent dans la nuit des temps"R7, selon
!
i
1
t
1
lJ
j
83 PIZZIO: op. ciL, P. 48, na 440. ; Ch. ŒAUME : article précité, P. 25 ct suiv.
i
84 Voir en ce sens, Luc DlHL : Consommatellr défends-toi !, éd. Dénoël, Paris 1976, P. 10.
1
,
8~ Message du Président Kennedy précité.
86 Luc WLLETIE : Une histoire du mouvement consommateur: Mille ans de luttes, éd. Aubier Montaigne, Paris
1984, P. 10.
1
87 Ibid. P. 8.
i
f
1
i.~

23
l'expression consacrée d'un auleur, ct les luttes pour l'amélioraI ion de sa condit ion datent de
l'apparition du eommerceRR •
La nécessité de protéger le consommateur est apparue le jour Otl, les hommes cessant de
vivre en situation d'autarcie économique. les trois fonctions de produclion, de distrihution el de
consommation se sont dissociC:c~r.
Face à cette nouvclle donne et conscientes de la velléité des hommes dans la course au
gain facile, les doctrines religieuses prenaient déjà la défense du plus faible, c'est-à-dire Je
consommateur.
Ainsi, à plusieurs reprises, la Bihle dénonce l'usage des poids et mesures trafiqués: « V01H
Ile commettrez pas d'il~iustice dalls les mesures. VOliS aurez des balances justes, des poids
justes, Ull setier juste »90 af/ïrmc le Levitiquc. Le Deuteronome renchérit: « Tu auras un poid,\\'
illtact et exact ct tu auras uue mesure illtacte et exacte. Car Yahvé a en abomillatioll
quiconque pratique la jimule »91.
L'Ecclésiaste va plus loin et annoncc une condamnation de principe que le Moyen Age
français reprendra : « VII marc/ralld résiste difficilement à la telltation, et le trafiquant Ile
saurait être sans péché »9~. Ailleurs, c'était une condamnation presque absolue : « Il est
difficile, voire impossible au marchand de plaire à Dieu» affirme la glose du décret du
Gratien93 • Le décrétale du Pape Saint-Léon le Grand est encore plus tranché: « Il est difficile de
ne pas pécher quand 011 fait profession d'acheter et de vendre »94. Et Saint Thomas d'Aquin de
renchérir: « Le commerce considéré en lui-même a Ull certain caractère honteux »9.~.
De toute évidencc, la posit ion de l'Eglise face au commerce se reconnaît dans la synthèse
du théologien J. GERSON: « Vendre une chose plus cher qu'on ne l'a achetée, si le ~aill cu
soi est Ilaturel, compte (('1111 d(' (OU((',\\" ft'!i dUficuftés. des dal1~e,...., ou tles amélioratio1l'" dout
88 WLLETI'E : Une histoire du mouvemcnl consommatcur, op. cil. p. 8
89 Voir J.-M. MOUSSERON ct autres: Droit de la distrihution, Litee, 1975, N° 4.
90 La Sainte Bible: le Levitique 19 : 36, nouvelle édition d'après la traduction de Louis SEGOND, Trinitarian
Bible Society, London. p. 91 .
91 La Sainte Bible, le Deuteronome 25 : 15-16. nouvelle édition d'après la traduction de Louis SEGOND,
Trinitarian Bible Society, London, p. 155.
92 Ibid.
93 Cité par WILLETfE, op. cil. P. J6.
.
94 Ibid.P. 23 .
-,.....~~ ...-"~"

1
24
j
on doit être dédommagé, doit être cOllsidéré comme IIlle fallte grave si, ce faisant, 011 profite
des besoills de SOll prochaill »96.
{
Outre cette prise de position. l'Eglise va poser deux règles essentielles qui domineront,
plus ou moins inconsciemment, l'histoire des rapports consommateurs-conunerçants. Tout
d'abord, elle condamne sans ambages le prêt il intérêts: c'est la lutte cOlltre l'usure.
L'Evangile selon Saint Luc affirme : « l'rêtez salis riell espérer en retour, et .'ot1'l~
récompellse sera grallde »'17. Appliquant à la lettre le texte de l'Evangile, l'Eglise médiévale
déclare: « le prêt à intérêts est IIll pécllé et même, pour certains, llll péché plus grave qlle
l'homicide »98.
Mais de tous les efforts fournis en faveur du consommateur, la théorie du juste prix reste
une donnée
fondamentale
qui
marquera des siècles
durant
l'inconscient collectif des
consommateurs. Cette théorie invitait le marchand à vendre au juste prix, c'est-à-dire à son prix
de revient augmenté de ses peines et de son salaire normal. Tout gain ajouté devient injuste et
donc condamnable et le consommateur ne doit payer que ce juste prix.
Partant de ces données, M. IMBERT encadre le juste prix dans une formule bien concise:
«Il ne devrait varier ni avec l'offre et la demande momentanées, Ili avec le caprice
individuel, Ili avec l'habileté du marchandage. Le devoir moral de l'acheteur et du vendeur
est de chercher à atteilldre ce juste plix d'aussi près que possible. »99 Et Saint Thomas d'Aquin
d'ajouter:
« User de fraude pour vendre une chose au-dessus de SOIl juste prix est certainement
un péché, car l'on trompe son prochain à SOli détriment ».
f
1
t
95 Cité par Luc WILLETIE, op. cil. P. n
1
96 Cité par WILLETIE : op. cil. P. 2"..
1
97 La Sainte Bible précitée, Luc fi : 35. p. 7Xet.
98 WILLETfE : Une histoirc du lIlouwlllenl l'Ollsoll1Jlwleur. op. cil. P. 25.
1
,
99 WLLETfE : Une histoire du lllouvcmcllt consommateur, op. cil., p. 25.
îf
1

25
« Vendre une marchandise pllls cher 011 racheter moins chère qu'elle ne vaut est l'n
soi injuste et illicite »100.
Le Coran 101 dans ce domaine n'est pas lIIoins riche que la Bihlc. Reconnaissant la licéitf
du commerce lO2 , il condamne sans réserve les marchands malhonnêtes avides de gains faciles,
les fraudeurs et la pratillue de l'usure I01 .
Outre quelques versets épars dans le Saint Livre, on recense une sourate tout entière
consacrée exclusivement à la fraude dans le commerce.
Tout comme la Bible, le Coran dénonce l'usage des poids et des mesures trafiqués J04 • Les
tout premiers versets de cette sourate sont ainsi libellés : «Malheur aux fraudeurs qlli
lorsqu'ils font mesurer la marchandise pOlir lellr propre compte, exigent la pleille mesure et
qui, lorsqu'eux-mêmes 11lCSlIre1lt et opèrellt pOlir les alltres, lellr causellt préjudice et perte.
eeux-l 'a Ile pellSellt pas qu "11.'1 serOllt
't'
f(Jç
reSSIiSCl es»
" 0 cs versets
b
scm. aI b
es l '
cXlstent pour 1es
..
d l'
lOf>
pratICIens e
usure
.
C'est aussi pour protéger le consommateur que le Coran interdit aux musulmans la
consommation de la viande du porc, cct animal étant considéré comme malsain lO7, car renfermant
dans sa chair,donc dans son organisme un grand nombre de parasites dangereux pour la santé de
1os
l'homme
,
100 WLLE1TE : op. cil. P. 25, Le nîle dl' l'Eglise n'a pas sculemcnt été doctrinal. Sur Ic plan pratique, elle a joué
le rôle qu'assurenl aujollfd'hui les émissions télévisées de l'Institut National de la Consommation (l.N.C.). Au
moyen Age, il n'y avait pas de télévision, mais toute la population assistait il la messe de dimanche. Ainsi, du haut
de la chaire, le pretre dénonçait les ahus tic tcllc catégorie de commerçants, ou même de tcl marchand particulier,
vilipendait telle pratique commerciale, mcllait le consommateur en garde contre les fraudes les plus courantes.
C'est en assistant à la messe dominicale que Ics consommateurs apprenaient que « les bouchers appellent mouton
de la chèvre, que Ics fourreurs vendent la rouine pour de la 7:ihéline, que les laitiers trempent le fromage dans dll
bouillon gras pour lui donner un aspect onclUeux », cr en cc sens, OURUAC, Le passé tlu consumérisme, cité par
Luc WILLEITE, op. cil. P. 27.
101 Livre Saint des musulmans.
102 Cf le Sainl Coran, Sourates (chapitres) : Il, versets 1RR cl 275 ; IV, versel 29 ; LXII, versets 9 à Il ; LXXXIII,
versets 1 à 3. Traduction ct notes du Dr Salah Ed-Edine KECHRID, Sème éd. 1990; voir également la traduclinn
et le commentaire du Pr MUHAMMAD IIAMIDULLAH avec la collaboration de M. LETURMY, éd. 1989.
103 Ibid, Sourates: Il, vcrsets 175 à 27R ; III, verset 1:10 ; IV, verset 161 ; XXX, verset 39.
104 Ibid. Sou raIe LXXXIII (8J), versets 1 à 6.
10~ ibid,
106 Le Saint Coran, sourates: Il verscl 179 ; III, verset 131 ; IV, versel 161.
107 Les analyses scientifiques confirment aujourd'hui celle vérité coranique. Les médecins interdisent souvent aux
diabétiques la consommation de la viande du porc pour éviler l'aggravation de la maladie.
108 Le Coran précité, sourate V, verset l,

26
Et rentrent dans la composition de la chair de porc, la graisse, l'os, la moelle et tout ce
qui est susceptible d'être consommé dans cet animal. Il cn va de même de l'alcool dont la
consommation est intcrdite aux fidèles.lOc)
Toutes ces doctrines religicuses sont guidées par un hut précis : moraliser la J'ie
économique. En agissant sur les conscicnces des individus, on vise la manifestation dc la
loyauté dans leurs rapports comlllerciaux, la justice socialc, et par-dessus tout le règlle d(~
l'équité dans les transactiolls commerciales. L'ohjectif poursuivi reste la protection du plus
faible économiquement, donc le consommateur, contre le plus fort, c'est-à-dire le commerçant.
Ce qui en soi était déjà une avancée considérahle dans la gestion des problèmes consuméristes.
Parallèlement à ces doctrines moralisatrices, il faut souligner que le consommateur a pu
aussi bénéficier de certaines mesures de protection priscs en haut de l'échelle sociale, c'est-à-dirc
la classe dirigeante d'antan.
Dans ce domaine, c'est illcolltestablemellt Ic dl'oit dc la vente qui est le plus riche cn
enseignement pour ce qui conccrne l'histoire dc la défense du consommateur. Par exemple, la
î
théorie des vices cachés rcmontc au droit romain ct la lutte contre les fraudes a été organisée en
1
France dès le Moyen Age par Ics commerçants eux-mêmes regroupés en corporations 110.
1
Le droit romain connaissait une protection très élaborée des consommateurs dans certains
1
domaines spécifiques. Dès le début de la République, la loi des XII Tables reconnaissait aux
consommateurs le droit d'exiger du vendeur une déclaration solennelle précisant les qualités
t
l
substantielles de la marchandise. Cette déclaration engageait le vendeur et lui interdisait d'une
manière ou d'une autre toute puhlicité mensongère"
1
1.
1
1
1
Au II ème siècle avant J-C, les édiles curules imposaient aux marchands d'esclaves de faire
1
connaître certains vices déterminés à l'achctcur. Si le vendeur ne respectait pas cette ohligation,
l'acheteur était en droit de résilicl' le contrat de vente. C'était la garantie des vices cachés. Celle-
t
'!
l
109 Le Saint Coran: Sourales II, versel 119, el V, versel 90 el 91.
\\
110 PIZZIO : op. cit. P. 8, BIBL: COllsommaleur, défends-loi !, op. cit. P. 10, WILLETIE : op. cil. P. 16 ; 29 el
suiv.
j
,
III BIHL: Consommateur, défends-toi !, op. cil. P. JO el J J ; WILLETIE: op. cit. P. J6.
1
1 •
1

27
ci, très proche de la garantie des vices c;lchés dl' nos jours, a été, à la fin de la Réf'uhliqllC,
,
d
1'"
1'1
1 l'
. ,
1
1
112
eten ue aux ventes l anImaux, pll1S au ( e lut (e
empire, a tous cs contrats l e vente
,
Du côté des corporat ions, certaines mesures internes à la profession contribuaient
indirectement à Ja protection des consommateurs. Les statuts des métiers imposaient une
véritable morale commerciale dont l'd'ICt indirect bénéficiait aux consommateurs, Un ensemhle
de mesures appropriées permettait d',lssurer le contrôle de la qualité des produits et de la loyauté
des méthodes de vente. Le non respect des obligat ions statutaires était sanctionné par des reines
allant de la simple confiscation ou destruction des marchandises à J'exclusion temporaire ou
défmitive de la profession. La réparation du préjudice subi par l'acheteur était même parfois
.
,
, . 1
1 l'
1 III
envlsagee, specla ement en cas (e rau( c '.
Comme partout ailleurs, en France, plus que l'autodiscipline des professionnels, c'est
l'action législative qu i a const it lie: la principale forme de protect ion des consommateurs, Dans cc
domaine, le pouvoir royal ,l, à parI ir du X 1V""''· siècle, réglementé l' aet ivité professionnelle avec
pour seul souci la protection des achetems contre les pratiques abusives des marchands.
Les textes de l'époque prévoyaient le contrôle de la détermination des prix, celui des
poids et des mesures ct, d'ulle façon plus générale, le contrôle de la fabrication des produits ct de
la loyauté des transactions commerciales "4 . On peut citer, à titre d'exemple, l'Edit de 1481 de
Louis XI qui renforça la lutte contre les fraudes dans le domaine des produits alimentaires 115.
Mais la libération du commerce qui a suivi la révolution de 1789 allait mettre un frein à
tout cela. Les corporations furent supprimées ct avec elles toutes les réglementations protectrices
qu'elIes avaient élahorées depuis le moyen âge. C'est le règne des grands principes de liherté ct
d'égalité. C'est aussi le (kbut de la liberté du cOlllmerce ct de l'industrie. 116 Abstraite ct totale,
elle permettait à tout producleur d'enlreprendre cl de rénliser toul ce qu'il désirnit salls
112 BlHL: Consommaleur, défends-loi !, op. cit. P. 10 el JI; WILLETI-E: op. cil. P. 16.
113 PIZZIO: op. cil. P. 9.
114 Ibid.
115 Ibid.
116 Guy LESOURD : Liberté du COIl1l1\\erce el délcnse des consommateurs, G.r. du 24 juin 1975, (1 er semestre), p.
380 et suiv.

1
l
28
J
restriction aucune l17 • L'homme individu était au centre de tout. Tous les hommes étaient par
1
,,
définition égaux. Ils possédaient donc une volonté et une force égales.
~j
Partant de ce constat, il serait illogique de protéger l'un contre l'autre. Ce serait briser
1
1
J
cette égalité. TURGOT, f~lisant l'éloge de GOUR NA Y, affirmait avec force ce principe: « Que
J
l'acheteur se défellde lui-même et Il 'aille pas à tout propos attendre l'intervention du
1
gouvernement et compter ,mr elle» Il R.
il,
En tout cas, toute réglementation relative à la protection des consommateurs était
devenue antinomique avec l'instauration d'une économie de marché fondée sur la liberté du
1
commerce et de l'industrie et son corollaire, la libre concurrence. Celle-ci allait connaître la
1
consécration en 1804 avec la rédaction du Code Civil basé sur la liberté contractuelle et le
J
principe du consensualisme. L'autonomie de la volonté, postulat de base du système juridique,
prône une fois pour toutes l'égalité entre contractants, professionnels et consommateurs.
Le libéralisme économique venait de jeter les consommateurs dans les mains des
producteurs avec pour conséquence la situation juridico-économique et sociale que connaît
aujourd'hui le consommateur dans l'environnement commercial que l'on appelle communément
la société de consommation.
IV - La société de consommation.
J,
Au cours des siècles, le commerce a toujours existé et l'homme consommé. Tout ce que
!
!
l'on découvre aujourd'hui existait déjà: le principe du renouvellement rapide des stocks, celui de
1
l'îlot de pertes dans un océan de profit, le bruit, l'environnement, le spectacle permanent, les
1
!
ventes promotionnelles, publicitaires, rabais, à crédit, à perte, les soldes après liquidations, les
primes gratuites, le gâchage des prix, les offres exceptionnelles, l'utilisation de l'enfant'19, tout
1
!
ceci existait depuis plus d'un sièclc'~o. Par conséquent, l'on a rien inventé depuis belle lurette
i!
dans le domaine de la vente.
f
Î
1
117 PIZZIO : op. cil. P. 9 ; BIHL : op. cil. P. 12.
118 Cité par BIHL, op. cil. P. 13; ct par WILLElTE, op. cit. P.88.
1
119 CALAIS-AULOY : « Les vcntcs agrcssivcs ", chronique, 1970, P. 37.
120 BIHL : op. cit. P. 16.
~
,
~
1

29
Si l'on n'a guère inventé de nouveau dans la vente, il y a eu tout de même évolution dans
le domaine. Le point dc changement le plus remarquable est celui de la distribution. En effet,
durant des siècles, le commerce était plus tourné vers la satisfaction des besoins de la clielltèle.
Mais, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale aux Etats- Unis, les années 1960 dans les pays
de l'Europe occidentale cl depuis ulle dizaine d'années dans les pays du Tiers-Monde, cette
vision du commerce a été complètement transfrll'mée. COlllme par le passé, l'on continue de
produire avec pour finalité la vente. La différence se situe cependant au niveau du but assigné ;1
cette production.
Dans le passé, la production se faisait en fOllctioll des besoills des clients. Aujourd'hui,
elle les suscite, les crée en agissant, parfois par des procédés peu indiqués, sur J'étal
psychologique des acheteurs potentiels. La satisfaction d'un besoin réel n'est plus nécessaire '21 .
Dans le cycle production-distribution-consommation, la production n'est plus subordonnée ü la
consommation. Le consommateur est appelé à acheter et doit le faire pour l'atteindre, tout 1111
artifice de moyens est mis en oeuvre par les producteurs pour assurer l'écoulement des produits,
la création des besoins, le pouvoir du producteur ct du distributeur sur le consommateur: c'cst
ce qu'on appelle aujourd'hui dans les termes génériques de société de COIIS0l1ll1~atiollm.
L'existence de la société de consommation n'est pas contestée et tous les économistes
s'accordent sur l'avènement de cette phase nouvelle de l'économie de marché. Un auteur l'a très
bien souligné dans un ouvrage fort remarquable :
« Le but, l'objectif, la légitimation officielle de cette société est la satisfaction. Nos
besoins connus, stimulés sont ou serollt satisfaits. En quoi consiste la satisfaction ? En une
saturation aussi prompte qlle possible. Le besoin se compare à un vide, mais bien défilli, à lin
creux bien délimité. 011 (la consommatioll) comble ce vide, remplit ce creux. C'est la
saturation. Pour qlle le besoi/1 dCJ,iell1le relltable, on le stimule à nouveau. Les besoi/1s
oscillent entre la sati.~ractio/1 et 1';/1.mti.~ractio/1 proJ'oquées par les mêmes manipulations »12.1,
Pour bien comprendre cette affirmation, un petit pas en arrière, du côté des économistes,
s'avère nécessaire. Déjü cn 1776, l'écossais Adam SMITH écrivait: «La consommation doit
121 Ibid., George KATONA: La soçj(~té de consommation dc masse, éd. Hommes et Techniques 1966, Paris, P. 49
et suiv. ; Sylvain WICKMAN : Vers une société des consommateurs, P.U.F. 1976, P. Il et suiv.
122 Ibid.

"'~
1
1
30
être la seule fill, l'ullique but de toute productioll »124. Dans la première moitié du XXèmc siècle,
le britannique John KEYNES, mort en 1946, lui emboîtait le pas et affirmait sans ambiguïté
«La consommation est la seule fin et l'objet de toute activité écollomique » 125.
Toutes ces théories sont aujourd'hui désuètes.
Tout comme Henri
LEFEBVRE,
l'américain John K. GALBRAITH a, dans une analyse rigoureuse, sonné le glas de toutes ces
belles affIrmations. Inversant les rôles. il démontre que ce n'est plus la demande qui guide la
production, mais la production qui oriente la demande. Dans une formule succincte, il dit :
«Il n'est plus à démontr,er que le conditiollllemellt du consommateur par le
producteur est total, en ce sem; que ce demier parvient à conformer la conduite du
consommateur à ses propres besoins et intention,,,. Ce/a est confirmé tous les jours par ft!,,,
pratiques du marketing et par ce qu'affirmellt les IlOmmes du marketing eux-mêmes » 120.
Pour les auteurs d'inspiration socialistc, loin de la satisfaction des besoins des individus, le
profit est le seul et l'unique objet de la production en économie libérale 127 .
L'existence de la société de consommation ne fait plus aucun doute. Celle-ci repose sur
trois grandes règles: une production de masse. une distribution à grande échelle, la règle d'or du
profit, expression chère aux marxistes (socialistes).
La production de masse n'est pas chose nouvelle. Elle existait déjà, depuis que le
machinisme a fait son apparition. La manière a cependant évolué. Le moteur n'a pas cessé de
s'emballer depuis plus d'un demi-siècle. Produire est la consigne de base. Il faut produire,
toujours produire, produire le plus possible pour retirer le maximum de profit. Pour assurer ce
profit, tout ce qui cst produit doit êlre vcndu. Et tout se vend aujourd'hui : les produits
nécessaires au logement, à l'hahillcmCl1t, à l'alimentation, à la culture, aux loisirs, à la santé, à la
beauté, etc. Même les produits les moins nécessaires se vendent l2ll• L'homme ne mange plus pour
123 Henri LEFEBVRE: La vie quotidienne dans le monde moderne, éd. Gallimard 1968, Paris.
124 Cité par G. CAS: La défense du consommateur: que sais-je, P.U.F., P. Il.
125 Ibid.
126 John K. GALBRAITH: « Le consommateur détnîné », l'Expansion, septembre 1970. Par BIBL, op. cit. P. 17.
127 G. CAS: La défense du consommateur. op. cit. P. Il.
,
128 BIHL : op. cil. P. 18.
~
f
J

31
vivre, nt ne vit plus pour manger, mais vit pour acheter à manger et ensuite se procurer dcs
produits inutiles tels que les produits amineissants 129 .
Même les biens les plus élémentaires, ccux qui appartenaient à tout le monde il y a encore
quelques années, ceux auxquels les plus miséreux pouvaient prétendre bénéficier,
sont
aujourd'hui confisqués par les producteurs et vendus aux consommateurs. C'est le cas
notamment de l'enu et l'airl~o. Même cc qui paraît être le plus en dehors du commerce se vend
aussi: la beauté n'est plus une chance, ni l'intelligence un don. Pour ccux ou celles qui veulent
être plus beaux ou plus belles, les fabricants de cosmétiques sont là pour leur proposer la beauté
en boîte, confectionnée en poudre, en crèmes ou en nérosols. Pour ceux qui veulent accroître
leurs capacités intellectuelles, il y a /cs cours par correspondance, mais aussi les produits vendus
h
.
l '
111
en p armaele pour a cIrconstance· .
On trouve donc tout dans le commerce d'aujourd'hui
à cause de la distribution de
masse, fait nouveau de la société de consommation ; des produits utiles aux produits
complètement inutiles l.l2.
Dans cette course effrénée au gam, le consommateur n'est pas, n'est plus le «roi»
d'antan, et par rapport à qui s'orientait la production, mais plutôt une simple victime qui a perdu
m
son libre arbitre et qu'on manipule au moyen des techniques très sophistiquées du marketing
.
Les fabricants des lessives sont passés maÎtres dans ce domaine, dans l'art de promouvoir
leurs produits. Depuis celles qui «lavent plus blanc que le blanc »134 jusqu'à celles qui «lm'ellt
sans frotter »135, on a fait des «pas de géant» dans l'art de promouvoir les produits et dc
susciter les besoins. On découvre là une véritable ant hologie de la publicité sous la grande
fascination des consommateurs.
129 BIHL : op. cit. P. 18.
130 L'eau sans laquelle on ne peut vivre, se vend rar millions de bouteilles dans Je monde. Elle devient même
signe de luxe. Quant à l'air, il faut reconnaître qu'il se vend lui aussi. La pollution de l'air est le plus souvent duc
au gaz carbonique que rejettent les usines. Mais les patrons de ces usines, à travers leurs filiales d'agence de
voyages vous vanteront l'air pur de telle station de sports d'hiver ou balnéaire. Ils vendent J'air dont ils vous ont
privé par le fait de leurs usines fumanles, voir en ee sens, BIHL, op. cit. P. 19 ; Josée DOYERE : Le combat des
consommateurs, éd. CERF 1975. Paris, P. 35 (pour l'cau uniquement).
131 BIHL: op. cit. P. 19.
132 Ibid. P. 18 ct suiv. ; KATONA: op. cil. P. 49 ct suiv.
133 BIHL op. cit. P. 18 ct suiv. ; KATONA: op. cil. P. 49 ct suiv.
134 BIHL : op. cit. P. 20.

32
Que deviennent ccs consommateurs dans une tclle cntreprise commerciale ? Rois sans
couronnes ou victimes sans défense d'un monde économique sans pitié, sans scrupulcs ? La
seconde hypothèse nous paraît la plus vraisemblable.
v -Le consommateur, victime de la société économi(Jul'.
Le libéralisme économique fonctionne sur un symhole clé : « le cOlltrat )). Le Code Civil
de 1804 qui repose tout entier sur cc mot Cil a d'ailleurs fait un mythe, ct on parle volontiers du
-« mythe du contrat »1J6. Selon les philosophes de l'époquc du Code Civil, « Qui dit cOll/mc/"d,
dit juste )). Cette affirmation se vérifie-t-elle encore aujourd'hui?
Le contrat suppose raccord de deux volontés: par exemple, l'achcteur ct lc vendem.
l'employeur et le salarié, le bailleur ct le locataire. Toules ces personnes étant par délinili(J1l
«libres)) et «égales)) entre elles, chacune devrait pouvoir, en principe, à sa guise, ct dès
l'instant où elle le désire, achetcr ou vendre, ne pas acheter ou ne pas vendre un produit ct, si clic
l'achète ou le vend, débattre au mieux de ses intérêts, avec J'autre partie, les conditions du
contrat 137• Cela refléterait le meilleur équilibre possible entre les contractants.
Cette possibilité s'offre-t-elle aujourd'hui au consommateur? La liberté d'acheter ou dc
ne pas acheter existe-t-elle encore de nos jours? Peut-on vivre sans acheter de la nourriture, des
vêtements, des médicaments, sans louer un logement, sans travailler? Est-on libre de ne pas
conclure un contrat de travail ou de location, et chaque jour des dizaines de contrats de vente ou
de transports ?
1
Quant à l'égalité, a-t-elle jamais existé entre les individus? Y a-t-il une égalité entre un
1
locataire et son bailleur, entrc la société multinationale et chacun de ses salariés, entre le super ou
j
1
1
l'hypermarché et chacune dcs ménagères ou chacun des clients qui y font leurs achats?
1
1
De toute évidence, la liberté du cOllsommateur dans la conclusion du COlltrat est
1
1
illusoire et l'égalité utopique. La société économique a engendré de nouveaux rapports
i-11
contractuels dans lesquels le consommateur sort plus victime que cocontractant du professionnel
j
1
dans ses transactions quotidiennes. II doit consommcr tout ce qu'on lui propose. Et qui dit
1
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135 P '
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our s en convamcre, 1 su It (e passer (ans
cs rayons (es supermarches ou de suivre les I11cssag('s
1
1
publicitaires diffusés sur les ondes des radios ou sur les écrans des téléviseurs.
136 BIHL : op. cit. P. 13.

33
consommation de nos jours, dit adhésion aux conditions et aux prix de vente des produits et des
services, des assurances, des transports, des baux, etc ...
En fait, la consommation ressemble à un vaste terrain de chasse dans lequel Je
consommateur joue le rôle de lapin de garenne un jour d'ouverture. Les producteurs el
distributeurs se sont forgés un nombre d'armes considérable et remarquablement efficaces.
Aucun terrain ne leur est étranger dans ce « safari» du consommateur.
La stratégie des professionnels dans ce domaine est relativement simple. Il s'agit de
vendre et de vendre davantage. La réalisation de cet ohjectif suppose la connaissance dc
l'adversaire c'est-à-dire le consommateur qui n'est rien d'autre qu'une cible, son étude, la
prévision de ses moindres réflexes. Elle suppose aussi Je désarmement de ses réactions
défavorables ct leur remplaccment par lelle ou telle réaction favorable, la persuasion ainsi que la
conviction. C'est justcmcnt le rôle de la publicité '1x .
Certes, la publicité n'est nullcment l'essentiel du processus «producteur-distlibutem-
consommateur ». Elle est tout simplement l'une des techniques du marketing. Mais sa présencc
constante et permanente dans les esprits des consommateurs en fait le support principal, voire le
symbole de la société de consommation IV). Son importance dans le monde économique n'est plus
à démontrer tant son rôle cst capital dans le processus d'écoulement des marchandises produites.
Pour Henri LEFEBVRE, « la publicité possède ulle extraordillaire puissance... n'est-
elle pas la rhétorique de cette société ? N'imprèglle-t-elle pas le lallgage, la littérature et
l'imaginaire social?
La publicité ne tendrait-elle pas à fournir et même à devenir l'idéologie dominante de
cette société ». Et le philosophe de conclure: « la publicité prend l'importance d'une idéologie.
C'est l'idéologie de la marchandise. Elle .'le substitue à ce qui fut la philosophie, la morale, la
religion, l'esthétique» 140.
137 G. CAS: La défense du consomnlrlteur, op. cil. P. 15.
138 BIHL : op. cil. P. 32.
139 BIHL : op. cil., P. 36 ct 37
140 Henri LEFEBVRE: la vic quotidienne dans le monde, op. cil.

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34
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défavorables et leur remplacement par telle ou telle réaction favorable, la persuasion ainsi que la
conviction. C'est justement le rôle de la publicité DS.
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Certes, la publicité n'est nullement l'essentiel du processus « producteur-distributeur-
J1
consommateur ». Elle est tout simplement l'une des techniques du marketing. Mais sa présence
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constante et permanente dans les esprits des consommateurs en fait le support principal, voire le
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symbole de la société de consommation
. Son importance dans le monde économique n'est plus
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à démontrer tant son rôle est capital dans le processus d'écoulement des marchandises produites.
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Pour Henri LEFEBVRE, « la pllhlicité pO.'t!tède Ilne extraordinaire puissance... n'e.'lt-
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elle pas la rhétorique de cette société? N'imprègne-t-elle pas le langage, la littérature et
l'imaginaire social ?
La publicité ne tendrait-elle pas àfollmir et même à del'enir l'idéologie dominante de
cette société ». Et le philosophe de conclure: « la puhlicité prend l'importance d'une idéologie.
C'est l'idéologie de la lIIarc/zandi.'le. Elle .'le .'lllbstitlle à ce qui fllt la J1hilo.'loJ1hie, la morale, la
religion, l'esthétique »UO.
'. Vendre des idées et non des produits, telle est la fonction principale de la publicité,
d'après un directeur de marketing, et pour qui «le rôle des agences est d'influencer le
comportement humain defaçonfal'orable aux intérêts de leurs clients »U1.
La publicité tendrait-elle à transformer le consommateur en un objet dont le but est de
consommer les produits et services qu'elle lui présente?
En tout cas, elle rentèrme en clle tant d'excès qu'elle a fini par éveiller les esprits dont la
motivation première reste la protection du consommateur.
138 BœL: op. cit. P. 32.
139 Bila : op. cit., P. 36 et 37
140 Henri LEFEBVRE: la vie quotidienne drillS le monde, op. cil.
141 Voir en ce sens, Andrew CHETLEY : BOil pour l'exportation. Etude du Commerce Exlérieur Communautaire
de produits chimiques et pharmaccutiques. Doculllent publié par B.E.U.C. ; H.AI. ; I.C.D.A ; P.AN. ; E.E.B. ;
Lü.C.U., 300t 1985, P. 63.

35
C'est une torme de réaction sociale contre les mécanismes du marché qui, aussi bien du
côté de la production que de la distribution, ne prennent pas suffisamment en compte les besoins
essentiels des consommateursI4~.
Ce «combat des consommateurs» 1,14 pour la reconnaIssance de leurs droits donna
naissance à la ({ Consumers Union », première association crée en 1936 et eut, paradoxalement,
pour support les médias pervertis - presse, radio, télévision - acquis à la cause des annonceurs 145
La Consumers Union se développa lentement et n'atteignit le million d'adhérents qu'en
1970. Mais le mouvement consumériste prit son essor grâce au Président KENNEDY qui a, dans
un message prononcé devant le Congrès américain le 15 mars 1962, reconnu les droits
fondamentaux des co"so"''''atellr,~146.
Partant du fait que les consommateurs constituent Je groupe économique le plus
important et le seul à ne pas être eflèctivement organisé, alors qu'il devrait être priS en
considération et affecté par presque toutes les décisions économique, il prit position en leur
faveur en énumérant leurs droits essentiels:
« le droit à la sécurité, le droit d"être informé, le droit de choisir, le droit d'être
entendu )/47.
Le discours du Président KENNEDY qui contenait une énumération des actions déjà
engagées, à renforcer et de nouvelles mesures concrètes à adopter, marquait un tournant dans la
ligne jusque là suivie par les tenants du libéralisme classique. Il témoignait aussi d'une prise de
143 PIZZIO : op. cil. P. 12 : sur la conception large du consumérismc, voir D. WEISS ct Y. CHIROUZE: Lc
consumérisme, éd. Sirey, N° 2
144 DOYERE : op. cit.
145 FOURGOUX. MIHAILOV ct JEANNIN: op. cit.. P. AI.
146 Message du Président KENNEDY, précité.
147 Ibid.

36
conscience dans la nécessité. même dans lin Etat capilaliste aussi puissant que les Etats-Unis, de
!J
ne pJus parler exclusivemcnt cn termes de production et de décisions politiques, sans rcchercher
~,
j
1
Jeur répercussion sur cc partenaire économique digne de respect dans une démocratie, c'est-à-
1
t4R
dire Je consommateur

!
1
Le mouvement consuméristc américain ne s'csl cependant pas fait tout seul; il a acquis sa
1
1
notoriété grâce à la personnalité exccptionnelle d'un hommc, Ralph NADER. Celui-ci prit une
j
part prépondérante dans J'évolution des mentalités ct dans le succès de Ja lutte pour la cause des
1
1
j
consommateurs. En 1970, iJ attaqua la firme General Motors en arguant du caractère dangereux
:11
et insécuritaire de ses automobiles mises sur le marché. Le triomphe de l'action amena la firme à
1
,
retirer Je modèle dénoncé du m<lrché: 49 .
-il
1
1
Partant de la défense du consommateur à « J'état pur », Nader réussit à rassembler autour
1
de Jui une importante équipe de spécialistcs dans Lous les domaines '50. Combinant l'animation des
1
1
groupes de trav<lil et de pression, les armcs juridiques ct le détonateur publicitaire, il réllssit :1
i
1
contraindre le gouvernement américain à prendre dcs mesures dans /c dom<line des produits
.~1
alimentaires, des r<ldiations ionisantes ainsi que dans celui rclatif au travail dans les nJincs. Son
1
j
action se développa dans toutes les directions, notamment contre l' insta l1at ion des cent r;t les
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j
nucléaires, contre les grandes compagnics pétrolières qu'il considère comme favorisées par le
1
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gouvernement d'une façon intolérable, contre les produits dangereux tels que J'hexachlorophène.
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contre les radi<ltions des détecteurs d'armes dans les aéroports, les tarifs aériens, /cs marc!wndisc'.
1
dangereuses dans tous les domaincs, ctc ....
L'action de Nader alla au-delà du consulllérisllle, et dans un de ses ouvrages on IlIHI\\;,;t
lire Ja citation suivante : «Chaque COIl.'Wmllwteur, chaque association se doit de fa;n'
connaître SOIl 11léCo11te11temellt 11011 plus à ['1011 épicie/~ mais aussi au pays tout e11tier. VII
groupe de citoyells, POUrl'U qu'ils soit orgallisé de façoll (:[ficace, peut se défendre c011tre h'.\\·
agressiolls des gralldes elltreplises. Il faut mettre l'aCCCIlt sur le rôle que doit jouer h!
public»151.
147 Ibid.
148 FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: or. cil., P. A~.
t49 FOURGOUX, MIHAILOV el JEANNIN: or. cil., P. A~.
150 L'équipe était rérartie en rlusieurs groures, donl le Puhlic Inleresl Rescarch Grour.
151 Il s'agit de l'ouvr<lge intitulé « Le feslin empoisonné» ruhlié par R. NADER el M. GREEN en 197CJ, cilé par
FOURGOUX, MIHAILOV el JEANNIN. or. cil., P. A6

37
Outre Atlantique,
spécialemenl
en Occident,
Nader l'l'il
aux
yeux des
mililanls
consuméristes qui se multiplient ct s'organisellt, allure de « prophète »'52. Le mouvement
consumériste prit une dimension importante dans les pays de l'Europe Occidentale. A partir des
années 1970, le Conseil de l'Europe va se pencher de façon effective sur la protect ion des
consommateurs, tout en soulignant que l'intérêt de ccs derniers est lié à celui des commerçants
« honnêtes» 15] : « l'Etat a le devoir de promulguer ulle légi!·ilatioll protectrice ».
Dans sa 25~lllc session, l'Assemblée Consultative du Conseil adoptait une charte de
protection du consommateur dans laquelle elle invitait chaque Etat, conformément à ses
traditions propres, il mell re en oeuvre une polit ique générale ct active de prolecl ion du
l54
consommateur
. Par la même charte, le conseil, d:ms une recommandation '55, invitait les Etals.
à travers leurs ministres présenls, à étudier la possibilité d'é/ahorer une convention europt-cnm'
156
dans ce sens.
En Francc, par exemple, hormis la loi du )"r aoOt J 90S m, la première loi
consumériste votée dans cc sens fut celle du 22 décemhre 1972 relative à la protecl ion des
.,
1 l ' 1
l
' 1 ' '1 1~R
consommateurs en matlere ( e ( emarc lage ct (e vcnte a ( omlCI e· .
Aujourd 'hui, sous J'impulsion de l'Union Européenne, 1<9 et avec la multiplicat ion des
textes de lois y afférentes dans tous les pays memhres, la protect ion du consommateur est un rail
d ·
d '
. 1
160
a mIs ct un
l'Olt acquIs ( ans tous ces pays.
Depuis J993, il existe en France un Code de la consommation qui rassemble en son sein
tous les textes relatifs à la protection des consommateur. Ccci est un exemple probant de la prise
en compte effective des prohlèmes des consommateurs dans cc pays.
152 G. CAS: La défense du consoll1maleur, op. cil., P. 6.
153 Résolution 521 relative à la politique de protection du consommateur, adoptée par l'Assemblée le 16 mai 1972.
154 Résolution 543 du 17 mai 1973.
155 Recommandation 705.
156 FOURGOUX, MIHAILOY ct JEANNIN: op. cit., p. A7
157 Loi du 1er aoOt 1905 sur les fraudes ct les falsifications en matière de produits et de services, JO. du 5 aoOt
1905.
158 Loi n° 7211137 du 22 décemhre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage ct
de vente à domicile, J.O. du 23 décembre.
159 Beaucoup de textes relatifs à la protection des consomlllaleurs y sont régulièrement votés par la Commission de
Bruxelles dans l'intérêts des consommateurs des Etats de l'Union.
160 Si l'on prend l'exemple de la rrance, il existe fout un univers de textes législatifs et réglementaires deslinés il
protéger le consommateur dans sa fonction de consommation de tous les jours. Cf en cc sens tous les textes cités
dans cette étudc.

38
De tous les Etats membres des Nations Unies, seuls ceux du Tiers-Monde accusent
encore un retard dans le domaine, et ce, malgré le vote par l'Assemblée Générale dl'
J'Organisation des Principes Directeurs pour la Protection du Consommateur destinés à klll
servir de cadre juridique en la matière. Dans cette absence juridique pour ce qui concerne
l'adoption des textes relatifs à la protection du consommateur, les pays africains sont au premier
rang des Etats sans législations adaptées aux exigences de la défense des consommateurs.
VII - L'Afri(lue en marge du phénomène consumériste.
Alors que le consommateur des pays du Nord bénéficie plus que jamais d'une protection
confortable dans sa fonction de consommation, son homologue du Sud continue d'être exposé
aux abus de J'économie du marché. La raison est toute simple: les pays du Tiers-Monde, en
particulier ceux du continent africain, se remarquent par le vide juridique qui les caractérise en
matière de législations relatives à la protection du consommateur. Le phénomène consumériste y
est encore ignoré. Il s'ensuit une absence de contrôle des opérateurs économiques, fournisseurs
des biens et services aux consommateurs. Ce qui laisse la porte ouverte à tous les abus.
De toute évidence, l'absence quasi-générale des politiques et législatiolls appropriées
dans le domaine de la protection du consommateur favorise les pratiques commerciales douteuses
et dangereuses au détriment des populations locales. Ce vide législatif a transformé le continent
africain en un irrémédiable dépotoir de produits de toutes sortes : des produits de mauvaise
qualité aux produits dangereux en soi ainsi que des produits issus de la fraude. 161
On rencontre dans les circuits de distribution des produits périmés, des produits
dangereux par nature et dont la vente est soit restreinte, soit interdite dans les pays d'origine, en
l'occurrence dans les pays occidentaux,
parce que présentant des risques réc!s '('2 pOlit
l'environnement et/ou pour la santé des populations. Ce fut le cas en 1993 au Bénin olt tin navilc
français fut repéré au port de Cotonou avec sa cargaison de viande inapte à la consommation.
161 E. OBADINA : "La contrefaçon à l'assaut de l'Afrique" in "Vivre Autrement" nO 8/9 de novembre 19H8, p. IV
et suiv. ; S. N. DIALLO : "La contrefaçon des médicaments" in "Lumières Noires Magazine", Bimestriel n° 36,
octobre/novembre 1994, p. 17-18.
162 A. CHETLEY : op. cil p. 1 et suiv.; "Exposed Dcaclly Exporls : The story of European Communily Exports of
banned or wilhdrawn drugs to Ihe Third World" Publicalion of the W. E. M. O. S./Pharma Project. June 1991, p.
1 et suiv.

39
Celui-ci, après plusieurs péripéties et tentatives infructueuses dans d'autres pays du continent,
cherchait à déverser sa cargaison de viande dangereuse pour la santé des consommateurs sur Je
marché local/ 6 l. .
Outre ces produits, on y (rouve aussi, et en grande quan( ité, des produits issus de la
fraude, de la contrefaçon des médicaments aux falsifications des produits alimentaires. '64 Tous
ces produits sont distribués dans le grand public aux grands périls des utilisateurs et sous le
regard indifférent des pouvoirs publics locaux. lh)
L'absence de dénonciation de ces pratiques préjudiciables s'explique par le fait que ces
irrégularités sont souvent commises par des sociétés ou magasins d'Etat. Ce fut le cas en 1991 au
Burkina-Faso où les magasins et sociétés d'Etat furent concernés par dcs pratiques commerciales
irrégulières. Le mélange d'hypochlorite et le chlorure de sodium de l'eau de Javel affichait
régulièrement sur son étiquette 12% alors qu'en réalité il n'était que de 8%./6(, En 1990. lin
insecticide avait été vendu aux agriculteurs lequel devait les aider à débarrasser les cotonniers
d'un parasite bien connu. Mais contrairement aux affinnations des sociétés de commercialisation,
le parasite a survécu à la pulvérisation de l'insecticide qui, somme toute, n'était qu'un leurre. 'li7
De toute façon, ce sont des milliers de tonnes de produits dangereux ou douteux interdits
ou restreints de vente dans leurs pays d'origine qui sont régulièrement déversés sur les marchés
des pays d'Afrique aux périls de leurs populations. Tous ces produits sont écoulés aux grands
renforts et soins des campagnes promotionnelles ou publicitaires mensongères, abusives, voit c
extravagantes. J6R
A cela s'ajoute le commerce de la pollution: des immondices aux jndustrjes fumantcs en
passant par les déchcts toxiques. L'Afrique (tout comme les autres contjnents du Tjers-Monde)
est aussi devenue le dépositaire des matières ellcombrantes pouvant dégrader le cadre de vie
163 Cf "Consomll1atÎon-Dévc]oppcll1cnl" n" 9, avril 1991, Bull. Trim. eJ'lnl'o IOCU-ENDA, Dakar, Sénégal, p. J.
164 OB ADINA : arliclc prédlé, p. IV ct suiv. ; DJALLO : arliclc précilé, p. 17-18.
165 Ibid. ; CHETLEY : op. Cil, p. El suiv.
166 Ph HADO : "Quelle presse pour la promotion des droits du consommateur en Afrique 1" in "La Nation",
Quotidien Béninois d'infonnation du mardi 31 décembre 1991, p. 4.
167 Ibid.
168 A. CHETLEY et B. MINTZES : "Promoling hcalth or pushing drugs 1 : a eriticai examination of marketing of
pharmaccuticals", RA.I. Europe,
1992, Amsterdam. NecderJands, p. 6 ct suiv. ; "Les pays en voie de
développement: Les abus de la publicité pharmaceutique. Des clés pour ohserver. comprendre et agir", un dossier
réalisé par PIME. Eté 1993, p. 2 ct suiv.

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tenu de l'intcnlépelld:mcc qui existe ellllC l'l'IH: 11lIIllaill et SOli envirollllelllellt. SCllls Sl'IIIIII
étmJiés les dOlllaillcs l'clat ifs :1 la \\'l'lite dcs lllarcil:IIHlises cl allx prest:lliolls de servkes Icsqlll'l';
mettent Cil rclati<1I1 direclc les l'IOICssionllc!s ct les COnSOllllll:ltcurS. Ccci n~cessilc des lllllyens
adéquats susceptibles de l'cllllcllrc l'éradie:'1 ion du IIIa1 provcll:1Il1 du commerce ordinaire dcs
produits ct services.
VIII· Vns UII droit dc III l'OIlSO111111lifÎu Il ('II AfricilIc '!
Si l'abscnce qllasi -1~(~Ill:lalc de polit iqlles t't de Jégislnl iOlls appropriées en Illatil\\J(' dl'
protection du COllSOllllllalcllr cOlltÎlHlC de favllriser dl' l'raliqllcs ('onllllcrcia!cs </111111'11<;(";
pr~sentant de risquc:.; récls pllm la s:mlt: cl la s(~l'milé des pOpUI:ltiolls localcs, il va S:IIlS di, e 'I"C
la transforl1lation dll ('olllilWIII ah icaill l'Il di~pllioil des plOduils de lll:luvaisc qllalilt~ cl d"f:
produits d:lllgcrctlx Cllt pllm COIlS(:qllclll'C imllll:di:lle t1'(~1'(';"('" les a",.H·;e"ce.~ d:lllS k!, 1;IIll'!;
des personnes nvisées nux l'1111110 Il I('S C(lIlSUIIH~' i~;lcs.
Le souci de prol(~~n le ('OIlSOllllll:llcur cOlllle les (l'''(a(io".~ ma/,mi,ft'.\\· 011 Il,,; ('.l'n'o.... dl'
['économie de m"rc/,é l'Im'o(l',a dans plesqlle lolls Irs I);lYs dl1 conf incnt
la ('1(::11 iOIl
d'associations de COnSOllllll;llcl1l s,
La présidel1lc de l'Associatioll des Consolllmateurs du Mali (AS,CO.MA) 1':1 l'ml hj""
souligné Cil ces ll'rlllcs : ,,/Vot,(' "(f(',,(;o,, omÎt été .Hlr(",,( r('(l'mll' IJar le 11011 "",\\1'('1'( d,",
169 cr en cc :C;CIl:C; F. ROFoI i\\NTS PI' VIVIFH : l ,l'~ \\':Ii.'~"'0111~ dll plli~"n : lalllll'!' dl's t1,~dICI'llolti'l''''';, (Od, S:lnl' d,'
ln terre, l'nri:c; IlIHH, p.lll cl ~nlv, ; l', "Pi\\N : 1.'al J~l'nl Iloir : ('''ITUfllioll cl ~oll~··d~vcloppc"'ell'. voir l,III"
pr~d~~Ill('llt Il' l'Iwpilrc XV intit,,'" '" l'S 11l:lIl'h:lnds dl' 1:1 Illm'" ('d, 1l)~X, p, 251 cl ~lIiv. ; "l'n<; dl' vi,:;. 1'("" l",
d~chcl~ : vcr~ IIlle s(llid:lrill~ A1ri lJIl1'1Ft Il "IH' ('Il lIla1irle d"'llvirolllH'lIH'n!". 61. L'IIalllHlllnn Il}')O, p. Il el ',,,;v ; Jo:
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illlltl';lril'!'; cl
l'environncmcnt cn drnit COIllP:II(- ct i Ilh'II1:11 ional" ~OIlS la direct ion dl' M, PlU EUR, l'UF 19R5, p,20.'i cl Slli v. ; S,
SOUMASTIŒ : "Lcs déchels Îndllstrids el "Afriqlle" in "Afriqlle ('onlernpolilÎnc" N° Ifll (sp(-riall dll r'
trirncslrc 1992. p. 25<1 ct suiv, : C. Iln VllJENElIVF : "Les IllOU\\'l'lllcllls Irallsfrolllnibs dcs déehl'lS d:lII~!l'J('II'
(Con venli011 dl' Bâle cl droill'olllIlHUl:lllfairl')", Hl'vllc 1111 M:llch(; t'Ollllllllll, Il'' 3tto, octohle 1990, p, ,5(,X cl suiv, :
"MicUll vaut êlre pollué que IJlorl dl' lililll" (The ECOlllllllisl - I.ondres), in Courrier InlcrnnlÎonal N" 6X dl' Jeudi ;Jll
f6vrier 1992, p, 4 : .1. \\'/1)"'. (Thl' (ill:mliiln - LO\\ldll'~) "I.'c,portalion des dérhl'ls : un nouveau clllllnialisllw".
ibid. P. 5. ; O. C. MARRO()IIIN (I.a lima - Guatclllaia de la ASUIlCÎOll) : "Les pays du Nord veillent nOlis ('O\\lvri,
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des messages l'"blicifa;,c,\\' mllfm/f Irs l'roduif.\\' I/IIC~f.\\ l'II,,r la .ml/fé rf Il' bi('1/-(-tr (' tin
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L'aspect st~curilaire des plOduils Il'cst cepc/ld:1I11 P:IS la seule sollrce de I1llltiv:llj'II1 {If'
l'engagement des :lssocial ions dl' COlIsolllln:lIcurs aux cÎlk:; des pllpllialions locales l'Il \\'IIC d'\\11l
changement effectif de lem sort, ;\\ tT COlll('xle dl'YI bicl1 nél~:ll il. il l:lIIt ajouter celui de 1:1 II1i<;,' ('fi
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internationales, nol:1I11I11CIII le F,t\\l.1. (Fonds MOIH'taile 11I1('llWlion:1I) cl la B:lIIqtJ(' Î\\llllllli:t1\\"
avec son corlègl.: de COIlSl~qUClllTS 11l~lash',s pom lél populafilln des pays cont'l'Illfs.
La libéralis:ll;oll CXt'[',ssi\\t' dcs nlalchl'"" qui s'cll:;uil ;1 pom dkl.s illllllédi:l'S /:1 h:li';'\\' ""
pouvoir d'achat consécnlin' ;1 la hanssc des plix dt''; "IOdllil:; de IJll'lllii'lc tH~ccssilé, hl'",lk,' f
très défavorabk aux cOllsonllllafcurs :IY:lI11 les Illoyens lillalll'Îers insllllis:lIlls. ('cl a:;pccl dt' h
situation socio-écOllollliqllc Ilrl ~ l'migillc dl' la uéalioll lit- la Ligue dcs ('onSOIl1l11all'tll:; dll
BurkinLl-Faso (L.C.B.), ('Ollll11C l'a illdiqué. ~illslc tilft" son Sccrélélirc (iénélélll\\djoilli. l':IIllli
les principales r:lison~; él)'élnl Illot i\\'é lél CI éat ion dl' l';lssocial ion, il y a l'nI re aul l'CS « h' .\\(/IU';, do" \\
le cOlllexle de müe ('11 O('III'1'C dl' [Jro~H""I11('.\\' d'({;m(cl11('1/f str"cf"rd, de s'ass"rer lfl1r, .liTI'I'
à UII IIéoli1Jémli.\\·ml' l'IIfmÎ1U11If Illle l!",'oléc (/('S prix, {(, C011.\\oll"nal(!111· b"rkinabé .\\oit mic/lx
ill/ormé sur la qualité eth' cllOix drs Men\\" ('( S('1'l'i('('s l11i< "
Les motivat iOlls des élssocial ions dl' co nso I1\\lllalt' Il :
de','; ohjcctifs 10111
simples : informer ct édllqlJer le consonllwllellr, :1111"
"
"If'slalaires lit-
services à intégrer ks préocclIpations des C(l IlS0 Il lI11élt Cil 1'.
" , \\'lItlcprises COIlIl11cl'Cia!cs,
instaurer des relatiolls hasées sur le rcspcct dll di(~lIt·usa~( .... inforll1er le conSOIl1IJl:lfelll' sur se';
droits et devoirs afin de le rl'mlre l1\\(lins vlllnérahlc devant le profcs~;i(\\,,,
Cc
dcmier
aspect
revêt
une
importance
p:1I t iClllirre
dans
des
sOl'iétl~s
011
l'allalphabélisme prédomine alors qlle les infollnaliolls sur les produits ct services sonl 1i1l('llé~;
dans des langues étrangèrcs illcomprises ; cc qui pcut conduire le COIlSOlllmatcur à « pùl/f'1' " 1';11
d'immondices", ihid, p. :), : M, l'I~()\\VSE (Fill"ndal Times - LOIHiH's) : "SaIlVOIlS la planèle .. dcs '~l'(lIlf\\llli';I(':
ibid" p. 7.
170 Cf « CnIlSllI111l1alioll-Dével"l'pl'IIWlll " Il'' Il d';)nil Il)tt,'. null. \\()(" 1 ENDA pr6.·jlé. p. 1.
171 Cf « COIlS0I111ll:lIioll-I){-Ve! P I'I't'Illl'lIf " Il'' 1) d'rlVril 1')/).1, Hull. I()e(J FNIlA pll~I.·il{-, r, 1.
172 Cf « Consol1lll1al iOll-1 Jé\\'e1111'1'(,11lI'1l1 " Il'' Il d'él\\'fil l'N.1, BIIII, 10('( J ENDA précité, p, 2,

...'
42
ignorance. Or, cette situation est partt:ulièrement vraie en Afrique où la majorité dl!.'!
consommateurs est analphabète.
Aux côtés des associat ions de consommateurs, on note la présence de nomhreuses
organisations, lesquelles intègrent dans leurs préoccupations les problèmes des consonll1J:1teurs.
C'est le cas notamment de la Ligue Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
(L.A.D.H.P.)
présente
au
Sénégal
et
au
Mali,
de
J'Association
Démocratie
Lihert(~
Développement (D.L.D.) du Niger, de la Ligue Nigérienne de Défense dcs Droits de 1'1101111111.'
(L.N.D.D.H.),
de Syndicats et
des Organisations
Non
Gouvernementales
(O.N.n.)
de
développement comme ENDA Tiers-Monde basé il Dakar (Sénégal)l7J.
l1i
Certes, l'idée de la promotion des droits des consommateurs est nouvelle en Afrique;
i1
mais le rôle que jouent les associat ions locales sous J'impulsion de l'Organisation Internationale
1
~
des Consommateurs (O.I.c. ex. l.Ü.C.U.) lui permet de faire lentement et sûrement son chemin
sur le continent. La tenue régulière des Ateliers et Séminaires régionaux et sous-régionaux 174
sous l'égide de l'Ole et de ENDA Tiers-Monde ainsi que la réfcrence constante aux Principes
Directeurs des Nations Unies pour la Protection du Consommateur permettent d'éveiller les
consciences chez les politiques en vue d'une prise en mains des problèmes consuméristes il
l'échelle aussi bien nationale, régionale que continentale.
lj
j
L'acte le plus concret allant dans le sens du «combat »175 mené par les associations de
\\1~
consommateurs se vérifie dans la mi:.;e sur pied d'un comité de travail dont le but est d'élaborer
1\\
1
1
1
1
i).
173 cf « Consommation-Dévcloppcmcnt » n° 9 précité, p. 2.
1
174 On peut citer entre autres « la conférence dc l'IOCU)) tcnue à Nairohi en juin 19RR pour les pays anglophones
et animée sous le thème « Consommatcurs en Afrique, relcvons Ics défis », la conterencc 10CU-ENDA tenue ;1
1
Dakar du 21 au 25 nO'icmhrc 19RR pour les pays francophoncs ct ,miméc sous le thème «ConsOlllln<llcUI s
i
africains face aux politiques de développement », le Séminaire dcs Nations Unies sm la protection d"
consommateur pour les pays francophoncs d'Afrique organisé par le Dl;partelllent des Alfaires Econo1lliqucs el
~1
Sociales Internationales en mars J991. de l' Atel ier Régional de Dakar (Sénégal) du 1cr au 3 jui lIet 19C)2 i1\\ it ié par
J
IOCU-ENDA et tenu sous le thème « Principes Directeurs des Nations Unies pour la Protection du Consllmln:llcur
î
: Quelle application en Afriquc ?» (CclIlsOllllllatinl\\.Oévc!0fJPcmCnl, hull. lOeU-ENDA pr~dté, n° 8, llovclIlhrC'
1
1992. p. 5 ct suiv.), du Séminaire Régional IOCU-ENDA/APCEB tcnu à Cotonou (Bénin) du fi ail Il dl\\~c1llhr('
~
1993 sous le thème « Consommateurs dans la construction de la C.E.D.E.A.O. » (Consommation-Développcment.
i
bull. Précité, N° 11. décemhre ll}ln), du Séminaire Régional OTC-Lcn tenu à Ouagadougou du 10 ail 1,1 janvirl
:J,
1995 SOIIS le thème « Un an après la dévaluation du franc CFA: la réponse des consommateurs» (('onsllmuHltioll
1
Dévcloppment, hull précité. lIlai 1995. p. IV ct V).
!,
175 Cf 1. DOYERE : Le comhat dcs COnSoUlIllatClIrS, les éditions du CER F 1975. Paris.
ll
1
l

43
une législation modèle pour la protection du consommateur en Afrique. 176 Cette décision
répond au voeu émis par les associations dans la résolution Nf) 3.a. adoptée par les participants ail
Séminaire régional de Cotonou (Bénin) de décembre 1993. Cette résolution invite le Bureau
Régional de l'O.I.e., en concertation avec les associ,ltions, à élaborer, à l'échelle de la
e.E.D.E.A.O., un modèle de législation pour h protection des consommateurs qui serait adopté
par les parlements des Etats Mcmhres de l'Institut ion ou par 1ï nstitution elle-même.
L'intérêt d'une telle législation est qu'c1le pourra servir de «tableau de bord » aux Etats
dès lors qu'ils seront appelés à mcttre en évidence leur volonté de promulguer des lois dans cc
sens; à rü.N.U. dont les instances pourront se rendre compte de l'état d'avancement dans b
mise en place des structures juridiques relatives à la protection du consommateur en Afrique et
aux associations de consommateurs dans leurs efforts d'éducation, d'information ct de défCnsc
des intérêts individuels et collectifs des consommateurs.
De toute évidence. le rôle de rü.I.e. dans la vulgarisation des droits du consoll1ll1alellr cn
Afrique est grandiose ct ses efforts en vile d'un avènement d'un véritable droit de b
consommation dans les dilïcrents pays en voie de développemcnt sont palpables. Si la d,lte du \\)
avril 1985 reste importante d,ms l'histoire des consommateurs, car marquant la reconnaissance de
leurs droits au plan international par l'adoption par les Nations Unies de la Charte mondiale des
consommateurs, un pas supplémentaire vient d'être franchi le 28 juillet 1995 par l'Organisation
dans sa lutte pour l'amélioration de leurs conditions de vie.
Cette date restera sans conteste gravée dans \\cs annales du mouvement consumériste pour
la simple raison qu'elle symbolise le jour de l'adoption, à Genève, par le Conseil Economique ct
Social des Nations Unies, de la nouvelle résolution (~I;t, piss;mt le dom;];nc des Principes
Direeteurs pour la Protection des Consommateurs II :
, Celle
résolution a trait à un ensemble internationalelllent reconnu d'objectifs minimum pour la
protection
des
consommateurs
et
couvrant
des
domaines
tels
que
«la
sécurité des
176 Cf A. C. KANüUTE : « J\\~~ociations de consommateurs africaines face au défi du développcmcnt dan~ les
années 90 », communication préscntée au Symposium de la Comllli~si(ln Economique des Nations Unies pour
l'Afrique. Sénégal. Novcmore (l)()4. Ole (ex IOCU)-tEPWNROAF, p. 14, ; «Consommation-Développement» oull. Tri Ill,
d'Info. Publié par OIC-CI. n° 14. ()('Iohrc 1995. p, 2.
177 Cf« Consommation-Développcmcnt", DulL Trim, d'Tnfo, publié par O.1.C-C.I n° 14, oelobre 1995, p. 3.

44
consommateurs, les Ilormes des produits, l'éducatioll et l'infonnation, l'étiquetage et lt'"
recours des consommateurs» ln.
L'adoption de la résolution a pour effet de mettre à jour les pDpC par rapport aux
nouvelles données du commerce mondial. JI s'agit entre autre de l'augmentation de la croissance
de l'investissement extérieur direct ct des échanges internationaux et de l'apparition des pratiques
anticoncurrentielles 179 de la part des sociétés telles que la fixation des prix et le partage des
marchés, le plus souvent préjudiciable aux consommateurs.
Les p.D.p.C. tiennent désormais compte non seulement de ces nouvelles réalités du
commerce international, mais couvrent aussi les domaines relatifs à l'environnement, aux modèles
de consommation durable, aux performances des fournisseurs des services de base (industries de
l'eau, de l'électricité, du gaz ct des télécommunications) à l'heure de la privatisation des sociétés
publiques, et aux services financiers (banques, établissements de crédit, assurances, etc.)180.
Par ailleurs, l'information étant devenue plus internationale que jamais (elle pose le
problème de la sécurité des données, la propriété intellectuelle, l'impact culturel ct la protection
des consommateurs au plan international) les p.D.P.e. couvrent également ce domaine ainsi que
celui de la justice, notamment la nécessité de la mise en place de juridictions adaptées à la gestion
IRI
de litiges mineurs des consommateurs.
De façon générale, les efforts de l'OIC ct des associations de consommateurs locales en
vue d'un avènement d'un droit de la consommation sur le continent africain sont vivaces. Nous
n'en voulons pour preuve que «la charte des consommateurs pour les multinationales»
présentes en Afrique lancée le 13 octobre 1995 par l'orc ct les associations francophones en
conclave à Bamako (Mali)IR2.
Sous le thème « l'n~ressi01111aliser les organisations de consommateurs africaines », les
orientations des participants à l'atelier étaient nombreuses et pertinentes à savoir relever le déli
du mouvement consommateur comme partie intégrante du processus de développement en
178 Ibid.
179 1. HEMARD : Droit de la concurrence et protection des consommateurs, G.r. du 30 novembre 1971, Doctrine,
p. 575 et suiv.
180 Cf « Consommation-Développemenl », Bull. Trim. d' Info. publié par O.I.C-C.I n° 14, octobre 1995, p. 3.
181 Ibid.
182 Cf « Consommation-Développement », Bull. Trim. lJ'Info. publié par O.I.C-C.I n° 14, octobre 1995, p. 3.

45
Afrique,
professionnaliser
les
aetivités
de
planification,
de
gestion et
de
contrôle
du
développement d'une organisation de consommateurs, mohiliser les ressources ainsi que (;1
capacité à élaborer, formuler des programmes d'éducation formelle et non formelle appropriée à
]
' )
d' ,
1R1
eurs communaute, cu ture et tra Itton... .
L'objectif principal de l'Atelier est de développer l'expertise et les capacilés des
organisations de consommateurs dans les dom:1Ïnes qui constituent leurs activités pour la
consolidation et la survie de leurs institutions. 'H4 Quant à la charte, elle repose sur un fondement
bien précis: réguler le fOllctiollnement du marché des multillationales présentes ell IVriquc
dans l'intérêt des COIlS011"'lOteuni.
Cette charte dont l'esprit et le contenu visent l'instauration d'lUI climat de travail
transparent et convÏl'ial entre les multinationales et les consommateurs, et qui se trouve être
l'oeuvre de Consulllcrs International. comporte les grandes orientations relatives «aux Ilonnes
éthiques, aux questions de COllcurrence, aux pratiques de mise en marché, aux Ilormcs sur
les produits, à l'étiquetage des produits, à la disponibilité de l'information, aux garanties


,
IN5
amSl qu aux recours... »
.
La charte dont Je contenu est conforme à ]a nouvelle structure des PDPC issue de la
résolution élargissant leurs domaines d'action interpelle plus que jamais les gouvernements
africains sur la nécessité de mettre en place des structures juridiques susceptibles de protéger le
consommateur dans ses activités consuméristes de tous les jours. Autrement dit, l'interpellation
vise ici l'instauration d'ull véritable droit de la consommatioll en faveur des consommateurs
aussi bien à l'écltel/f! Ilatiollale, régiollale que cOlltillentale.
Mais, peut-oll vraiment parler d'un droit de la cOllsoml1wtion sans un réel et effectif
engagement de l'Etat dans le domaine de la protection du consommateur? La réponse n'est pas
aussi évidente qu'on peut l'imaginer, surtout, si J'on part du fait que J'avènement du droit de la
consommation dans les pays occidentaux fut le produit des pressions des mouvements
consuméristes.
IR.' « Consommation-Développement )', Bull. Trim. d'lnfo. publié par D.I.e-c.1 n° 14. octobre 1995, p. 1.
IR4lhid.
IRS Ibid.

46
Cependant, le rôle de faiseur de droit qui incombe à l'autorité étatique incile à une
réponse affirmative. L'existence effective d'un droit de la consommation est sujelle à lIlI
engagement sérieux de la part des pouvoirs publics en faveur de la protection de « l'être faible i)
qu'est de nos jours le consommateur.
Pour les pouvoirs publics africains, il s'agit plus que jamais d'une urgence, d'un devoir,
d'un impératif à réaliser vis-à-vis de leur population. Les exigences actuelles ainsi que les excès
du commerce intematiollal, voire du commerce tout court, recommandent la mise en place dans
chaque pays du Tiers-Monde, en particulier africain, non seulement des législations protectrices
du consommateur dans sa fonction de consommation quotidienne, mais aussi des législatiolls
adaptées aux cOlltextes écollomique, sociologique et culturel du milieu dans lequel elles
serollt appelées à s'appliquer.
1
l
Tout l'intérêt de la protection efficace du consommateur dans un pays repose sur le
respect de ces normes de base lors de l'adoption des législations protectrices par le législateur de
'1
lj
1
chaque pays. Elles sont essentielles en ce sens que l'inadéquation d'un texte de loi par rapport au
but poursuivi s'explique par le l'ail que leur prise en compte a été négligée lors de sa conception.
Aussi, leur prise en considération dans la réalisation des législations protectrices du
1
consommateur s'avère nécessaire si l'on veut obtenir des résultats probants, efficaces et sérieux
dans la protection. De toute évidence, l'amélioration du sort actuel du consommateur africain
passe par l'existence d'une certaine osmose entre la réalité vécue et les textes mis en place pour
i
guérir le mal. L'intérêt de tous les partenaires économiques - pouvoirs publics, professionnels et
1
consommateurs - est à ce prix.
j
l•1\\
IX - Annonce du plan.
Les développements ci-dessus réalisés montrent non seulement l'importance de la
protection du consommateur dans le phénomène de mondialisation du commerce moderne, mais
aussi l'urgence de l'action dans ce domaine pour ce qui concerne les pays en voie de
développement, en particulier les pays du continent africain. Le retard qu'accusent ces pays dans
la gestion des problèmes consuméristes exige des pouvoirs publics locaux des actions énergiques

47
et efficaces susceptibles non seulement de prévenir, mais aussi de ~tJérir le mal dont souffre le
consommateur local. Ce mal a deux origines: nationa1c et internationalc.
Au plan national, le consommatcur souffre des excès du commerce aussi hien local
qu'international du füit du vide juridiquc qui existe dans son pays pour cc qui conccrne sa
protection. Quand une législation existe, c'est de son inadaptation aux contextes économique.
sociologique et culturel que découlent les prohlèmes pour cc qui conccrnc la protection du
consommateur local.
Pour mieux protéger le consommateur contre les excès dans le commerce, il faudra <lU
préalable en chercher les causes. Et comme celles-ci sont plus d'origine externe\\H6 (les P,lYS
africains ont des économies extraverties, c'est-à-dire tournées vers l'importation des produits
manufacturés et l'exportation des matières premières) qu'interne. l'on devrait tout d'abord
commencer par analyser ces excès en mettant à nue la face cachée du commerce intcrnational.
Seule la maîtrise des effets pervers du colllmerce mondial sous le couvert de la libre
circulation des marchandises permettrait de mettre en place les panldes juridiques susceptibles
d'endiguer le mal qu' il véhicule. Encore faut -il que les stmctures juridiques mises en place
soient adaptées à l'ellvinmllemellt socio-écollomique et culturel du milieu dans lequel elles
sont appelées à être opérationnelles. Tout ceci pose le problème de la promotion des droits des
consommateurs par l'adoption des législations consuméristes, mais aussi celui de leur adaptabiJité
aux urgences du moment et aux réalités du milieu (pays, région, sous-région ou continent).
Au vue de ces analyses, notre travail s'articulera autour de trois grands axes, lesquels
constitueront les trois grandes parties:
La première partie concernera l'étude de « la face cachée du commercial international >'
génératrice de problèmes aux consommateurs du Tiers-Monde.
186 E. ODADINA : «La contrcra~'on à l'assaut de l'Afrique ", article précité, p. IV et suiv. ; A. CIIETLEY : op.
cit, p. 1 et suiv. ; A. CHETLEY et O. MINTZES : op. cil.. p. 6 et suiv. ; « Oeadly Exports : The story or european
communily ex ports of hanncd or withdrawll drugs 10 the Third World ", a Puhliculion of the WEMOS/Pharl11a
Project, June 1991, P. 9 rI sui\\'. ; « Les puys en voie de développement: les ahus de la publicité pharmaceutique ".
un dossier réulisé par PIME. Elé 1993, p. 1 cl slliv. ; A. Thiam : 30 pesticides à problème utilisés en Afrique.
Document puhlié par ENDA-TM, Dakar, Sénégal. p.• 4 el slIiv. ; D. WEIR ct M. SCHAPIRO : op. cil.

1
48
1
La deuxième intéressera « la promotion des droits du consommateur en Afrique ». Elle
nous permettra de
mettre en évidence
le bien
fondé
d'une
législation
protectrice dll
1
consommateur et la nécessité de sa mise en place dans les pays africains.
Enfin la troisième insistera sur la nécessité « d'adapter le système juridique aux exigences
de la protection du consommateur africain ». Cette dernière partie nous permettra de préscnter
J
les réalités africaines et l'intérêt d'adopter des textes à leur image, c'est-à-dire des textes qui
tiennent compte des ces réalités locales. Oc façon générale, les trois axes d'étude s'intitulent
1
comme suit:
!
Première Partie: La facc cachée du commerce international;
Deuxième Partie: La promotion des droits du consommateur en Afrique;
!i
Troisième Partie: L'adaptation du système juridique aux exigences de la protection du
1
consommateur africain.
t
f11
1
1
1
1
~tr,
1


50
Au début des années 1980, un professeur d'Anglais 1 opérant en Afghanistan, acheta
un paquet de Kool-Aid dans un bazar. 11 s'aperçoit avec étonnement que le produit
contenait des cyclomates dont l'usage était interdit depuis des années aux Etats Unis2 .
En Décembre 1982, dans l'état de Par, au nord du Brésil, les autorités locales ont
exhumé le cadavre d'un foetus issu d'une fausse couche au bout de huit mois de grossesse.
La mère, dont le nom n'a pas été révélé, a été victime d'un arrosage à l'aide de l'agent
défoliant orange (Tord on 155, fahriqué par DOW chimicals). Le foetus présentait des
3
diffonnités du crâne et de la colonne vertébralc .
Comme beaucoup d'autres produils interdits ou sévèrement réglementés dans les
autres pays, le défoliant est toujours disponible au Brésil grâce aux efforts de vente des
sociétés étrangères et de leurs débouchés "locaux,,4.
Le 8 Novembre 19R2, une ménagère de 31 ans à Singapour, souffrant d'arthrite
rhumatismale va consulter un généraliste qui lui prescrit des comprimés de phénylbutazonc.
Neuf jours plus tard, elle retourne le voir en se plaignant de maux de tête et d'une infection
du cou. Le médecin prescrit les même médicaments. Le jour suivant, elle se plaint de
démangeaisons et voir un médecin à l'hôpital. Le 19 Novembre, elle est admise à l'hôpital
de Singapour. Son état empire et eHe meurt le 27 Novembre).
Le médicament avait provoqué des boursouflures et des escarres de la peau en
grande plaques comme si elle avait eu des brûlures. L'autopsie révéla que les escarres
avaient entraîné l'exposition de chairs rouges à vif sur le corps. Ses lèvres, sa bouche et son
estomac avaient de nombreux petits ulcères6•
III s'agit de David WEIR, Coauteur de l'ouvrage" Cin:le or Poison, Pesticides and People in a Hungry World" ou
"Pesticides sans rrontières" avec Mark SCHAPTRO : Copyright. éd. française 1982. CETIM Déclaration de Berne.
E3 M, J.3M. Magasins du Monde. Cc lai! inallendu fut le point de départ de son enquête sur la vente des
pesticides dans le Tiers-Monde à l'issue de laquelle, en collaboration avec Mark SCHAPIRO, ils publièrent le dit
ouvrage.
1 D. WEIR ct M. SCHAPIRO : op. cil. P 7.
3 Andrew CHETT,EY : Ron pour
l'exportation : étude du commerce extérieure communautaire de produits
chimiques ct pharmaceutiques. Août 19H5. Document puhlié par BEC, HAT, PAN.; BER, IOCU. l' 1.
4 ibid.
5 ibid.
6 A. CHETLEY : op. cit. P 1.

Le professeur Chao 'l'zee CHENG, pathologiste judiciaire expérimenté, qui a
pratiqué l'autopsie, déclara il l'cnquête du juge d'instruct ion que le phénylbutazone était le
médicament qui a causé cette réaction violante7.
A Dakar (Sénégal) s'est aussi produit un drame semblable. Une femme alors en début
de grossesse; va consulter un médecin gynécologue afin de pmer il toutes les éventualités.
Le gynécologue, qui d'ailleurs avait diagnostiqué son état. lui prescrit des antibiotiques
formellement interdits pendant les débuts de grossesse. La prise de médicaments prescrits
lui occasionna de terribles maux de ventre. Elle retourna le voir et lui fit part de ses
douleurs et appréhensions. Celui-ci lui lit comprendre qu'il savait cc qu'il faisait et qu'un
médicament n'est efficace que quand il fait souffrir. La patiente continua à en prendre ct
par la suite, elle avorta8
Une autre Üüt non négligcable se produisit le 16 Juin 1980 en Nouvelle Guinée. Cc
jour là un pasteur présidnit un service religieux dans un vill:Jge. Lors de la communion, il
donna par erreur du Gramoxone (pesticide dangereux) au lieu du vin à quatre personnes
qui, toutes, moururent la semaine suivante'!.
Ces differents exemples, et enregistrés à différents cndroits du monde, illustrent un
problème général dont l'ampleur ne cesse d'augmenter : Le commerce des produits
dangereux. Ils montrent les conséqucnces extrêmes de cc commerce et du mauvais usage
qui s'ensuit habituellement la mort pour des victimes innocentes. Mais derrière ces morts
tragiques se cachent probablement des millions de cas douteux d'empoisonnements non
fatals
par pesticides et
d'effets
secondaires
résu Itant
de
l'usage
inapproprié d'un
médicament.
En effct, Ic problème de l'exportation des produits dangereux frappa l'opinion
publique Américainc de plcin /(Hlet en 1978 lorsqu'il fut révélé quc des stocks d'habits
d'enfants traités au Tris, un produit chimique hautement inflammable, interdit aux Etats
Unis, étaient tranquillement écoulés dans le Tiers-Monde et en Europe 10.
7 A. CHETl.EY : op. cil. P 1
8 Swaad A. DlAW WANE: "Ces médecins assassins" in" Le Tri" Magasine de l'association des Consommateurs
du Sénégal (AS. CO. SEN.), Dossier, P 2.
9 WEIR ct SCHAPIRO : op. cil. P 24.
10 ibid. P 7.

52
Par ailleurs, lorsqu'en Novembre 1979, la revue "Mother Jones" publia un article sur
la vente des pesticides dangereux et interdits dans le Tiers-Monde ll , la réaction tant aux
Etats Unis qu'à l'Etranger fut explosive. Elle conduisit les Nations Unies à adopter une
résolution sur le problème de l'exportation des produits dangereux. Tant les Etats Unis que
des pays du Tiers-Monde édictèrent diverses réglementations destinées à contrôler le
mouvement de ces produits dangereux - pesticides et autres l2 • Mais tout cela n'a été que
l'encre sur du papier.
Certes, dans les forums internationaux tels que l'O.C.D.E., l'Assemblée Générale des
Nations Unies, L'O.M.S., la F.A.O., et l'U.N.E.P., on rencontre de bonnes volontés. Les
différents interlocuteurs parlent souvent d'une seule voie en ce qui concerne le problème
relatif aux exportations dangereuses dans le Tiers-Monde et de la nécessité d'une
notification et d'un consentement préalable après information ; ils parlent aussi de la
nécessité d'un certain nombre de contrôles lJ . Mais lorsqu'il s'agit de traduire toutes ces
bonnes volontés dans la prat ique , les belles déelarat ions d'intention qu'on observe dans ces
forums internationaux sont vite oubliées '4 .
En 1983, un représentant de la Commission (européenne) déclara devant le
parlement Européen, alors que celui-ci discutait du problème des produits dangereux
interdits aux Etats-Unis ct qui sont susceptibles d'être exportés vers l'Europe : "La
Commission estime que tout pays participant au commerce international doit s'assurer que
les produits susceptibles de causer un danger immédiat aux consommateurs ne puissent
être exportés"'5. Mais pendant ce temps, les produits dangereux européens, eux, vont être
habilement exportés vers les pays du Tiers-Monde '6. Curieux paradoxe, n'est-ce pas?
En tout cas, lorsqu'un fabriquant retire lui même un de ces pesticides du marché
américain ou européen parce que des tests menés en laboratoire ont montré que le produit
engendrait des tumeurs, tuait les foetus ou causait des naissances prématurées, tout en
Il Cet article de Il Mother Jones Il ohlint en 19RO, le Il National Magasine Awards ", un prix récompensant le
meilleure reportage de l'année aux Etats-Unis; il fut écrit à la demande de l'"(nstitute for Food and develo(lll1cnt
Policy Il de san francisco, ulle organisation remarquahle pour son dynamisme et qui cherche à mobiliser le public
américain contre le mal développcmcnt.
12 WEIR et SCHAPrRO : op. cit. P 7.
13 A. CHETLEY : op. cit. P 79.
14 ibid.
I~ ibid.
r

proclamant à qui veut l'entendre qu'il continuera à l'écouler dans le Tiers-Monde, il y a lieu
d'être sceptique sur ces belles déclarations d'intention I7 .
Certes, aujourd'hui au niveau européen des directives lR dont le but consiste à
"contraindre" les autorités des Etats membres à procéder aux contrôles des exportations
des produits dangereux vers les Etats membres comme les Etals du Tiers existent. Mais cc
ne sont là que de faux-semblanl. l'approche adoptée jusqu'à présent étant celle du laissez-
faire.
L'interdépendance cnt rc les nat ions est
devenue une
réalité et
les échanges
commerciaux une ohligat ion. un passagc obligé. Ccux··ci doivent sc faire dans la loY,ll1lé
avee un maximum de transparence pour le bien·être du COI1Sllnllllaleur.
Mais cela n'est mailleureusement pas toujours le cas ct forcc est de constater que les
échanges commerciaux Nord-Sud se font d,1I1s certains domaincs au détriment des
consommateurs des pays du Sud.
Aussi est-il nécessaire pour l'harmonie dans les édwnges. de restaurer un eommerce
international à visage humain p,lr la mise en oeuvre des moyens adéquats - aussi bien d,ms
les pays importateurs que dans les pays exportaleurs - capables de préserver et de garantir
aux consommateurs du Sud la santé ct la sécurité dont ils ont tant besoin dans les
transactions internationales.
Cela nous amène à analyser celle partie sous deux angles: tout d'abord, nous nous
efforcerons de préscnter le commerce international sous son comportement incompat ible
avec le bien-être du conso1lJmateur en général et du consomma leur du Tiers-Monde en
particulier. Nous proposerons ensuite les essais de solutions susceptibles d'aider les pays
cibles à sortir leurs populations de cc système commercial inhumain et sans scrupule.
Somme toute, deux principales idées se dégagent de celte analyse: l'une relative aux
ecxès du commerce internat ional Nord-Sud et l'autre orientée vers la recherche des
16 ibid.
11 WEIR ct CHAPIRO : op. l'il PX.
18 CF. Règlemcnt C.E.E. N° 2·1.'i511)2 du l"l\\1l~cil dll Juillel 1<)92. COlIlTlIlanl les cxporlations ct imporlations de
certains produits chimiques dangcreux . .1. O. N" L 251 du 29/OR/92. l' li ct suiv.

54
solutions capables d'endiguer le mal qui en résulte. Ces deux grandes idées constitueront
les chapitres de cette partie lesquels s'intitulent comme suit:
- Chapitre 1 : l'exportation des produit~dangereuxà destination des pays en voie de
développement (P.Y.D.)
- Chapitre II : la protection du consommateur contre les dangers du commerce
international

CHAPITRE 1
.;:':::~.:',':~~~..,
L'EXPORTATION DES PRODUITSDANGn" "'''''r1
A DESTINATION DES PAYS
EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (P.V.p.j";
:H,':,·:,· .'
Tout d'abord il faut produire ; il faut ensuite trouver les débouchés pour les
marchandises produites ; et enfin les vendre là où elles peuvent l'être sans trop de
difficultés. "Si 1111 pay.5 illterdit l'otre prodllit, allez aillellrs, là où les l'elltes slmt ellcore
autorisées. C'e.5t ce qll '011 appelle faire de.5 a.tfaires " 19. Le commerce international de
ces dernières années rime avec tout cela et l'attitude ci-dessus observée est devenue la
devise des opérateurs. Les aflàires sont devenues le domaine de l'impitoyable. Au regard
des considérations morales et humaines, cela peut paraître anormal, mais la logique
économique n'a pas d'état d'âme.
De tous les temps, les échanges internationaux ont été considérés comme le moyen
permettant l'échange des valeurs marchandes entre différents agents économiques en vue
de l'amélioration de leur condition d'existence, qualitatives et quantitatives. Chaque partie
au commerce apportait sa contribution positive au bien-être de l'autre. Le commerce
international avait une bonne raison d'exister puisque la nuisance qu'il apportait à la partie
contractante n'était pas délibérée et relevait souvent du domaine accidentel.
19 David WEIR et Mark SCHAPIRO :"Pcsticidcs sans frontières" éd. Française 1982 P.J9 CETIM. Déclaration de
1
Berne E3M. I3M. Maga1.ine du Monde.

56
De nos jours, les orientations cOllunereiales internationales sont diflërentes. L'activité
économique internat ionale est plus orientée vers la réalisat ion du profit maximum que vers
la satisfaction des besoins et l'amélioration des conditiolls de vie ou du bien-être des
individus dans le monde. La règle d'or scion laquelle le but de l'activité économique est la
satisfaction et l'améliorat ion des condit ions de vie dc rtltllllanité toute ent ière est tombée
en désuétude. La course au gain a relégué au second plan la priorité naguère accordée au
consommateur et a transformé le commerce international en un domaine où tous les ahus
se rencontrent. La manilèstation de ces abus se trouvent avec plus d'intensité dans les
20
rapports commerciaux Nord-Sud .
Les échanges commerciaux Nord-Sud ne sont pas nouveaux. Caractérisées par des
rapports de force inégale, les relations commerciales qui unissent ces deux mondes se
manifestent le plus souvent (lU dét ri l1\\ent des pays dll Sud ct de leurs consommateurs.
En effet, Je développement des échanges commerciaux entre ces deux mondes au
cours de ces dernières décennies a été marqué p(lr l'exportation massive, p.. r les firmes
multinationales du Nord. des produits dangereux ou recollnus comme tels dans leur P,IYS
d'origine à destination des pays du Sud, plus particulièrement des pays pauvres.
Le but de ces opérations: se débarrasser de ces produits dangereux sur les marchés
"libres" des pays du Sud. Le manque dans les pays cihles d'institutions spécialisées
capables de procéder aux contrôles nécessaires des produits ct du matériel adéquat
susceptibles de fiabiliser ces contrôles rendent les exportations plus encourageantes21 •
A tout cela, déjà bien lourd ct difficile il gérer, vient se greffer la dernière trouvaille:
le commerce internat ional de la pollution. Celui-ci se caractérise par l'envoi dans ces P:1YS
du Sud des déchcts toxiques ct usines polluantes devellus trop encomhrants ct trop
dangereux pour les Cl11lS0lllnwtcurs dans le Nord.
D'une manière générale, le développement des échanges inlernationaux de ces
dernières années a lransfonné
les pays du
Nord.
Guidés par des
considéralions
20Rapport "Nord-Sud" : Expres~ion utilisée pour désigncr les relations ou échanges cOllllllerciaux entre \\cs pays
industriels et les pays du Tiers-Momie.
2'Andrcw CHETLEY : "Oon pour !'cxp0r!;ltion : Erudes du Commcrce extérieur Communautaire des produits
chimiques ct pharl11;lcculiques" Publié par le B.E. U.c.. HAl, JCDA, PAN, BEB, Lü.C.U., AoOt 1985. PP. 1 et
suivant.

57
mercantilistes dénuées dc tout scrupulc, les opérateurs tiClllll'nt rarement compte dl's
conséquences qu'engendrcnt
ces pratiques COlllllll'rcia\\es sur les consommateurs ct
l'environnement des pays d'accueil n.
Selon l'O.M.S. ( Organisation MOlldiale de la Santé ), pour ne citer que cct excmple,
dans le Tiers-Monde, unc pcrsonne en moyennl' est victime d'un empoisonnement par
pesticides toutes les minutes. Scs statistiqucs Font état d'un demi-million de personnes
empoisonnées chaque année ct que les pesticides sont la cause d'un décès toutes les ccnt
cinq minutes, soit cinq mille morts, voire plus par an.
A tout cela s'ajoute le nomhre inconnu de cancers, d'avortcments, de malFormations,
et de bébés mort -nés dont les pesticides sont la cause2J • L'environnement n'est pas épargné
: les effets des pesticides y sont indéniahles ct considérables.
Quand on sait que du D.D.T. dilué il UIJ dix milliardième dans de l'cau l'ntrave
sérieusement la crois~;anl'c d'huîtres ct que dcux milliardièmcs peuvent tuer certains crahes
et crevettes24, on lhSmit il la pensée dcs conséqucnccs écologiques des plus de deux
milliards de kilogrmnmcs de pcst icidl's produits anllllcllclllcnt dans le monde ct dont les
plus dangereux font ensuite l'objet d'exportation dans les pays sans déFense et où les
consommateurs sont dépourvus de moyens de protcction adéquats2~.
En ce qui concerne les produits pharmaccutiques, les statistiques en la matière sont
difficiles à obtenir, mais nomhreux sont les cas d'errets secondaires dont sont victimes les
usagers de médicaments inappropriés, d'usage interdit ou rest reint dans le Nord, avec le
plus souvent, la mort comme issue fatale 26 •
Il en va de même du côlé <lIillll'lllairc où Ics viel ill1es d'intoxications ducs aux
aliments avariés, corrompus ou inadaptés sonl dillieilcs à chiffrer du fail de l'ahsence de
statistiques en la matière.
22 François ROELANT du VIVIER: les Vaisseaux du Poison: la roule des déchets toxiques; éd Sang de la Icne,
Paris. 1988. pp 19 cl suivants, Voir également : " Pas de visa pour les déchets : Vers une solidarité
Afrique/Europe en mati~re d'environnemenl. 1'1'.17 cl suivant.
23 WEIR ct SCHAPIRO : op. cil. P. 19.
24 WEIR et SCHAPJRO : op. cit. P. 19.
25 WEIR cl SCHAPIRO : op. cil. P. 19.
!
26 A. CHETLEY : or. cil. P. 1 cl suivants.

58
Certes, la libre circulation ues marchanuises comporte des eXIgences : la loyauté ct
l'équité dans les transactions commerciales exigent que les produits et les services, pour circuler
librement, remplissent un certain nombre de conditions régissant la qualité et la sécurité afïn de
garantir au consommateur un usage sans dommage physiquc, matériel ou environnemental.
Mais ces exigences sont rarement observées de nos jours dans les transacfions
internationales. La priorité accordée au profït amène certains opérateurs du commerce
international à exporter dans les pays du Tiers-Monde des produits dangereux et interùits ùe
vente ou dont la vente cst sérieusement contrôlée dans leur pays d'origine et tout ccci au
détriment des consommateurs des pays d'accueil. Pour le bien des consommateurs de ces pays,
une étude de ce côté pervers et caché du commerce s'impose (Section II). Mais avant d'en
arriver là, l'analyse des exigences essentielles requises pour la libre circulation des marchandises
s'avère nécessaire (Section 1). L'étude de ce chapitre s'articulera donc autour de ces idées
maîtresses.

59
SECTION l :
QUALITE ET CIRCULATION DES PRODUITS ET SERVICES DANS LE
MONDE.
Pour circuler libremcnt, lcs produits et scrvices doivent être de bonne qualité. La
qualité est l'exigence fondamcntale de la libre circulation d'une marchandise. Mais avant
d'aborder son étude ( Sous-section II ), l'analyse d'une notion nous parait conséquente :
celle de produit et de service ( Sous-section 1).
Sous-section 1 : Notion de produit et de service.
Parler de la consommation, c'est s'intéresser avant tout aux produits et aux services,
termes économiques dont le vocabulaire juridique s'est enrichi ces dernières années27.
L'objet de la consommation est soit un produit, un service, soit les deux à la fois.
Cependant la définition précise de ces deux notions reste difficile à cerner (§ I) et cette
difficulté à leur trouver une définition précise demeure un problème en droit (§ II).
§I - Essai de définition de produit et service.
La prestation fournie par le professionnel au consommateur consiste en un produit
ou en un service. les contours des deux termes économiques restent cependant difficile à
préciser. Une approche de chaque notion permettra, peut-être, d'en saisir le sens générique.
27 Jean CALAIS-AULOY : Droit de la cOllsommatioll, )èrnc éd.
1992. P.155 n° 157 ; Gérard CAS ct Didier
FERRIER: Traité du droit de la consolllmation, 1986. P. 182. na 202.

60
A - Approche (te la IIotioll de produit.
La notion de produit recouvre en droit commercial un domaine extrêmement vaste.
le mot "produit" est utilisé pour désigner tous les biens, objet des actes de consommation
et concerne à la fois les biens meubles ct immeubles.
Pour les actes de consommation relevant de la catégorie des biens meubles, le mot
"produit" s'applique sans difficulté. Il sc substitue de nos jours au vocable moins utilisé de
"marchandises". Ccci exclut du champ de la notion de produit, les meubles incorporels à la
seule condition qu'il ne s'agisse pas de services2R •
En ce qui concerne les immeubles, une controverse subsiste quand à leur assimilat ion
aux produits proposés aux consommateurs. La doctrine majoritaire estime, il est vrai, que
le domaine des actes de consommation s'étend aux immeubles2'J.
Cette pOSItIon est confortée par un des
principaux
textes du
droit
de
la
consommation: l'article 35 de la loi du JO janvier 1978 sur les clauses abusives30 soit
l'article 1" 132-1 du Code de la consommation. Ce texte, qui vise tous les contrats sans
distinction passés entre professionnels et consommateurs, s'applique donc aux contrats de
nature mobilière comme immobilière. La commission des clauses abusives a par ailleurs
31
reconnu que ces contrats rentraient dans le champ de sa compétence

Mais la terminologie économique du mot "produit" véhiculé par le droit de la
consommation rend malaisée l'assimilation des immeubles à des produits. Aussi, dépassant
ce cas particulier des clauses abusives, la commission de refonte du droit de la
consommation, tout en soulignant que le mot "produit" pourrait dans la limite des cas
28 Encyclopédie du Droil Commcrcial : Droil de la consommation. P. 51. n" 465.
29 Encyclopédie de Droit Commercial précilé. n° 46R; CALAIS-AULOY : Droit de la consommation éd. 19R6. n"
1 et suivanls.
30 Loi n° 78-23 du 10 janvicr 197R, arl. 35.
31 CALAIS-AULOY cl L. l3IHL : Les clauses ahusives; 1983, GP. 1984.

61
englober les meubles corporels et les immeubles, tel que le logement J\\ s'est-elle refusée à
une telle extension.
Pour la commission, un produit est un chose mobilière, ce qui exclut les meubles
incorporels et les immeubles. Par cette analyse, elle rejoint la doctrine minoritaire. Pour
cette dernière, les opérations d'acquisition d'immeubles correspondent plutôt à des actes
d'épargnants désireux de réaliser un investissement ou un placemcnt et non à des actes de
consommation33 .
Ces différentes analyses amènent à la déduction suivante: un produit est un meuble
14
corporel susceptible d'être vendu et acheté dans le commerce • Les produits relèvent de la
catégorie des choses mobilières susceptibles d'appropriation, ce qui élimine les choses
communes35 • Il faut donc, lout simplement, entendre par produit, l'ensemble des biens mis
sur le marcbé par suite de l'intervention de l'homme qui les a fabriqués ou qui en assure la
distribution36. Certains sont des biens consomptibles (aliments, produits pharmaceutiques,
produits cosmétiques, etc.). D'autres sont des produits durables (ameublements, appareils
domestiques, voitures automobiles, etc.).
Bien qu'il soit reconnu comme renvoyant aux choses mobilières, le mot "produit"
aujourd'hui, dépasse, quant à son emploi, le cadre spécifique qui est le sien et il est utilisé
volontiers pour désigner certains services. C'est le cas des banques et établissements
fmanciers qui parlent de "produits financiers" à propos de nouveUes techniques qu'ils
proposent aux épargnants pour faire fructifier leur argene7•
Il en va de même des agences de voyage et des tours operators qui qualifient de
nouveaux "produits" une combinaison de services incluant les transports, les prestations
d'hôtellerie et de loisirs qu'ils proposent chaque année aux vacanciers3R • Aussi, pour lever
32 CALAIS-AULOY : Rnpport intermédinire de ln commission de refonte du droit de la consommation; dans
"Vers un nouveau droit de ln consommntion. Juin 1984. Documentation fmnçaise. P. 14.
33 G. CORNU: Ln protœtion du consommateur dans l'exécution des contrats; in Travaux de l'Association Hcnri
Capitant t. XXIV P. 134 ct suiv. W 4.
34 J. CALAIS-AULOY: Droit de la Consommation. 3iémc éd. 1992. P 155. W 157.
35 Encyclopédie Droit Comm. précité. N° 465.
36 CALAIS-AULOY : op. cil. W 157.
37 G. CAS et D. FERRIER: op. cil. P. 1H3. W 203.
>
;
38 ibid
1
J

62
J'équivoque qui cxi.\\1c enlie le" deux notions, Ulle approche de la notion de service est-e\\1e
nécessaire.
Il Approche de la IIotioll de ..,ervice.
Comme nous l'avons souligné plus haut pour les deux cas (produit et service ), la

, .
V)
notion de service, dans son accept ion courante, est une not ion à la fois Jnlpreclse
et
vague40 • Cette caractéristique est duc à la variété d'activités qu'c11e englobe.
Ce qui rcnd difficile la conception d'unc définition concrète, précise. Cette diftïculté
est aussi accrue par les divergences qu'entretiennent les économistes sur la question 41.
Tout ceci s'explique par le fait que la notion de service est une notion extensive ct
"
,
h
42
eterogene
.
En effet J'introduction de la notion de service dans le langage juridique a été J'oeuvre
41
de certaines lois cherchant à appréhender directement certaines activités économiqlles .
Or, la notion d'activité de service dans le droit économique s'oppose non seulement à
la fabrication, mais aussi à la distriblltion44 . La prestation de service est donc le contraire
45
de la vente d'un produit • Cette conception négative ct résiduelle de la notion de service
est justement celle qu'avait adoptée le code des
prix en vigueur à l'époque du
gouvernement de Vichy dans un article 75 quater, lequel article disposait: .. Est cOllsidéré
comme Uil service C(~ qui Il 'est pas Uil produit ,,46.
De la même manière certains auteurs ont estimé, à propos des ventes et prestations
de services avee prime, que la notion de service désigne l'ensemble des contrats
synallagmatiques autres que la vente, que ces contrats correspondent à une activité
39 Bernard GRELON : Les entreprises de services. éd. Economia 197H. r J. N° 4.
40 J. CaJais-AuJoy : op. cil. N° 157
41
Bernard GRELON : op. cil. Nn 4.
42 ibid. W 21 el suiv.
43 ibid. N° 12. P 7.
44 Bernard GRELON : op. cil. N° 13. P 7. Cependallt certains auteurs considèrent la distribution comme Ull
service. En ce sens voir CAS ct FERRIER: op. cil. N° 204 ct suiv. P 256.
4_~ B. GRELON: op. cil. W [J.
46 CAS et FERRIER: op. cil. W 2()~. P J X3.

63
commerciale,
artisanale ou
libérale, pourvu cependant
qu'il s'agisse d'une
activité
professionnelle47.
La catégorie des contrats de prestatioif'de service eomprend donc « les contrats en
vertu desquels une partie s'engage à rendre à l'autre un service appréeiable en argent; ces
prestations de services" grosso modo" correspondent à des ohligations de faire, alors que
le transfert de propriété d'un produit correspond ?I ulle ohligalion de donner »4R.
La commission ue rerontc du droit de la consommation s'est elle aussi rangée à la
conception négative de la prestat ion de service par rapport au produit. Elle appréhende le
concept en ces termes: « Aucun hien n'est vendu à titre principal par celui qui fournit le
service.
C'est en ce sens que le service se distingue du produit: le service n'étant pas un ohjet
de propriété, sa prestation Ile saurait donner lieu à un transrert de propriété »49. D'un autre
côté, le service se dist ingue du contrat de travail en ce sens qu'« aucun lien de
subordination n'existe entre celui qui fournit le service et celui qui le reçoit »50.
Cette conception négative de la notion de service se retrouve aussi dans le Droit
Communautaire dans la mesure où le Traité de Rome, dans ses articles 52 et 59, oblige les
Etats membres à supprimer entre eux les restrictions à la " Iiherté d'établissement" et à la "
libre prestation des services". En conséquence, il adopte la définition suivante: «Sont
considérées comme service, les prestations jOllT1lÎes normalement contre rémunération,
dans la mesure où el/es ne sont pas régies par les disposions relatives à la libre
circulation des marchandises, lies capitaux, des personne... »H.
Dans le sens de la définition. le Traité donne un liste des services
ceux-ci
comprennent notamment:
a- des activités de caraclère industriel
b- des activités de caractère commercial
47 M. PEDAMON cHé par Cas el FERRIER: op. cil. W 204. P 1H4.
48 CAS et FERRIER; op. cil. W 204. r 1R4.
49 Vers un nouveau droil de la consommai ion précilé. P. 15.
50 ibid.
51 CAS et FERRIER; op. cit. W 204. P 1R4.
1
1
.~

64
c- des activités artisanales
d- des activités de profession libérale.
Cette énumération évoque les articles 632 ct 633 du code de commerce dont les
rédacteurs, à défaut d'avoir pu dégager. un critère unique de l'acte de commerce, se sont
contentés de donner une listc qui échappe à toute idée générale.
Mais, par rapport aux définitions ou conceptions précédentes, le traité apporte à la
notion de service un élément nouveau, justifiant par là son caractère extensif et hétérogène.
Dans le sens du traité, la notion de service englobe des activités d'entreprise ct l'activité
individuelle de personnes exerçant une profession civile ( artisanale ou libérale) ou
commerciale.
Somme toute, l'élément positif caractéristique de service ou de sa prestation réside
dans la fourniture d'une main-u'oeuvre, ou plus précisément dans l'exécution d'un travail
accompli,
sans aucun
lien de subordination,
pour
le compte d'autrui52 .
Scion
la
terminologie du droit économique, le service se manifeste par l'incorporation d'une part
importante de valeur ajoulée dans son prix 51 .
Pour le juristc, cela signifie tout simplement que les scrvices sont constitués par des
obligations de faire. Autrement dit, les services sont des obligations de faire, fournis de
4
manière indépendante ct ne donnant pas lieu à la création ou à la cession d'un droit récf .
Le service désigne alors toute prestation qui peut être fournie à titre onéreux, mais qui
s
n'est pas un bien corporef . Il peut être matériel (réparation, nettoyage, hôtellerie,
transport etc.), financicr (assurance, crédit etc. l,ou intellectuc1 (soins médicaux, conseils
. 'd'
)%
Jun lques etc. . .
Mais quelles que soient les diflcrentes approches envisagées, l'équivoque entre les
deux notions est loin d'être levée, ce qui témoigne toujours d'un problème de définition.
S2 B. GRELON. op. cil. W 26.
S3 ibid. N° 26.
S4 ibid.
ss Jean. CALAIS-AULOY. op. cit. N" 157.
S6 ibid.

65
ill.:....Insuffisance des définitions des deux notions.
Théoriquement, ces différentes approches permettent de singulariser chaque notion
quand à sa finalité dans l'acte de consommation. Mais dans la pratique, la difficulté de
distinction refait surface (A), ct force est de constater une imbrication sémantique des deux
vocables avec pour résultat l'emploi de l'un à la place de l'autre et vice-versa (B).
A - Difficulté de distinction des deux notions.
La prestation fournie par le professionnel, avons-nous dit ci-dessus, consiste en un
produit ou un service. Cette prestation, en pratique peut comprendre à la fois un produit et
un service, le service pouvant être consécutif à la vente d'un produit57, ou la fourniture d'un
produit liée à la prestation de service5R • A ce stade des opérations commerciales, la
confusion s'installe et la difficulté de distinction d'une notion par rapport à l'autre devient
évidente. On peut ainsi aisément utiliser une notion à la place de l'autre59 •
La confusion est d'autant plus facile que certains professionnels sont à la fois
vendeurs de produits et prestataires de service~; sans qu'il soit possible de déterminer entre
ces deux activités laquelle est principale, laquelle est accessoire. Comme exemples, on peut
citer: le cas des garagistes qui sont à la fois vendeurs des véhicules ou voitures d'occasion
et réparateurs des véhicules de leurs clients; celui des hôteliers qui louent des chambres et
qui vendent aussi de la nourriture à leurs clients. Les deux opérations sont, quand à leur
nature juridique, différentes, mais d'un point de vue pratique intimement liées.
Au demeurant, la déconvenue d'un acheteur de véhicule d'occasion provient Je plus
souvent de ce qu'une prestation de service, en l'occurrence la remise en état du véhicule
par le garagiste avant la vente, n'a pas été effectuée de façon satisfaisante. JI peut en être
57 C'cst le cas notammcnt du Service après vcntc.
58 C'est Ic cas par cxcmplc dcs piècc détachécs néccssaircs à la réparation d'un apparcil; dcs produits alimcntaires
fournis par un hôtclicr ou un reslauratcuL
S9 CAS ct FERRIER. op. cil. W 201. P 110.

66
également du client d'un hôtel qui, en prétextant de la qualité des services (chambres ou
' )
. ,
'1"'
1~t 1
t
t
GO
nournture , en arnve a prelerer un 10 e par rappor un au re .
Si les cieux nol ions sont souvent employées J'une pour l'autre, c'est que la frontière
entre elles est difficilement identifiable. Et comme les problèmes de définitions sont
communs aux deux notions, les conséquences doivent-elles être aussi communes.
IJ Le pro1Jlème d'imbrication des deux notions et ses conséquences.
Le problème est que les mêmes causes produisent les effets. Aussi Je phénomène
d'imbrication exige-t -il, pour ulle meilleure protection du consonunateur, un réalisme
juridique.
C'est une question de bon sens ct d'équité contractuelle; ce que le droit positif a
parfaitement pris en compte. Les lois ct les règlemcnts inspirés de l'idée de la défense des
consommateurs le confirment et s'appliquent souvent à la fois aux produits et aux services.
C'est ainsi que certains textes écrits pour les produits ont été étendus aux services.
Tel est le cas notamment de la loi du lor août 1905 sur les fraudes originairement
applicables aux seules marchandises; de la loi du 10 janvier 1978 sur la protection des
consommateurs contre les produits dangereux aujourd'hui abrogée est remplacée par la loi
du 21 JuiJlet J98361 •
G2
Certes, certains auteurs
sc sont montrés un peu sceptiques à J'encontre de certains
textes en ce qui concerne leur adaptabilité aux services63 . D'autres textes en revanche sont
d'application beaucoup plus aisée, car ils concernent indifféremment les produits et Jes
services et vise dans leur ensemble certaines pratiques commerciales abusivesM .
Ainsi, en mati(~re d'information ct de protection du consommateur, les questions se
posent en termes pratiquement identiques, qu'on soit en face d'un professionnel vendeur
60 ibid. 205. P. 185.
61 Loi N° 78-23 du 10/01/1978 replacée par la Loi W 831660 du 21/0711983.
62 CALAIS-AllLOY : Droit de la consommation. 1ère éd- W 98.
63 11 s'agit de la loi du 1cr AoOt 1905 et la Loi du Juillet 1983 où l'art. 2 présente une rédaction plus aprr()prjl~c
aux produits.
64 C'est le cas de la Loi N° 72-1221 du 29 Décembre; de Loi W 73-1193 du 27 Décembre 1973 (art. 44); de la Loi
N° 78-23 du Janvier 1978 (arl. 35); de l'ordonnance du I cr Décemhre 1988. (art. 37-2).

67
d'un produit ou prestataire d'un service. Il en va de même pour les questions relatives à sa
sécurité.
D'une manière générale, les exigences ;sociales de santé, de sécurité, de protection
des intérêts moraux des consommateurs, auxquelles s'ajoute aujourd'hui la nécessité d'une
lutte contre le gaspillage et une utilisation plus rationnelle des ressources, commandent des
solutions semblables pour les produits et les services65 •
D'ailleurs, aucune raison particulière ne justifie qu'une réglementation différente soit
66
appliquée aux produits et aux services . Même la tendance juridique actuelle s'oriente vers
une extension des règles de la vente aux prestations de services. A cet effet, l'obligation de
garantie, suite logique de la délivrance d'un produit, est aujourd'hui considérée par le
67
décret du 24 mars 1978 comme également due par le prestataire de services .
L'extension mérite une attention particulière, car elle concerne un domaine spécial - celui
de la garantie - qu'un éminent juriste(,ll avait naguère soulignée comme étant l'un des éléments dl'
différenciation des produits et des services, en ce sens l'obligation de garantie n'est due en
principe que par le vendeur d'un produit. On sc dcmande si l'on ne se dirige pas tout simplemcnl
vers le qualificatif de "vente de services" reproché à Rcné SAVATIER69 et que certains auteurs
ont qualifié "d'hérésie en droit pur,,70
De toutes les façons, le consommateur veut bien qu'on lui épargne toutes ces querelles
juridiques. Tout ce qu'il demande, c'est qu'on lui présente sur Je marché des produits et services
sOrs, c'est-à-dire de bonne qualité et conformes à ses attentes.
65 CAS ct FERRJER : op. cil. N° 206. P 'R5.
66 C. MARTIN: Trnvnux prépnrntoires de la Loi du 22 Déc. 1972, Rnpport N° 2285 cité par CAS ct FERRIER:
op. cil. W 206. P 1R5.
67 Décret N° 78-464. du 24 Mnrs J97R, arl. 4 al.l "Dnns les conlrats conclus entre professionnels, d'ulle part. cl
d'autre pnrt, des non-professionnels ou des consommateurs, Je professionnel ne peut gnrantir contractuellement la
chose à livrer ou le service à rendre sans menlionner dairement que s'applique, en lout état de cause, la garnl1tie
légale qui ohlige Je vendeur proressionnel à gnrantir à J'acheteur contre toutes conséquences des défauts ou vices
cachés de la chose vendue ou du service rendu ".
68 René SA VA11ER: "Les venles de services"
D. J971. chrono P. 23 J. N° 23
69 René SA VATIER : "Les ventes de services" D. 1971. chrono P. 231. N° 23
70 CAS-FERRIER: op. cil. P 1R6. W 206
J
f
1
1
1
.~

68
Sous-Section II : ES(IUisse d'une théorie de la (I"alité des
produits et services.
L'offre des produits et services de qualité n'cst pas unc fin en soi; l'appréciation de
la qualité du produit ou service offert est subordonnée au respect d'un certain nombre de
conditions la régissant (~ Il). Mais avant d'arriver à l'étude de ces conditions, la
connaissance de la notion clic-même s'avère nécessaire (* 1).
§I - Notion de qualité des produits et services:
Définition et caractéristiques.
La sécurité du consommateur repose avant tout sur la qualité des produits et des
services qui lui sont offerts sur le marché. Cependant, aux yeux du consommateur, cette
notion demeure encore floue
tant en ce qui concerne sa définition (A) que ses
caractéristiques (8).
A - Définition de la qualité des produits et des services.
Qu'est-ce que la qualité? Le concept répond d'abord à une définition singulière (a) ;
et à travers cette singularité, étale son caractère supranational (b).
al Définition singulière du concept "qualité".
Tout consommateur dans ses actes de consommation quotidiens aspire à une chose:
se procurer des produits et services de bonne qualité, Mais demandez-lui ou à tous ceux
qui vous entourent de vous en donner la définition ; certains vous répondront en
produisant une définition évasive tournant autour des notions de valeur, de beauté, de bien,
de force, d'aspect, de con fi ance. etc 71 •
D'autres essaieront ou tentcront de vous l'explicitcr, mais seront en proie à des
difficultés. En revanche, demandez à un industriel ou à un prestataire de services s'il
fabrique des produits de qualité ou rend des services de qualité? TI vous répondra toujours
par l'affirmative avec un air offensé et sans la moindre hésitation.

69
Cependant, chacun, consommateur comme professionnel, perçoit ce qu'est la qualité.
Son
imprécision
fait
qu'on
adopte,
dans
certains
messages
à destination
des
consommateurs, un mode complémentaire de jugement indirect de la qualité en parlant des
produits soit de haut de gamme, soit de bas dé gamme, c'est-à-dire de niveaux de qualité72 .
Qu'entend-on cependant par" qualité"7
Longtemps, la qualité a échappé à toute définition juridique73 • Elle a pourtant fait
l'objet de plusieurs définitions dont la plus générale reste cette donnée par le .. Petit
Larousse ". En effet, Je .. Petit Laroussc " donne au termc .. qualité" un double sens. Pour
ce dernier, la qualité" c'est la manière d'être, bonne ou mauvaise, d'une chose; un état
caractéristique" ; mais c'cst aussi dans un sens plus appréciatif, la "valeur, la
performance élevée " qui cxclut tout aspcct négatif ct tcnd vcrs la perfection de l'objet.
Par ailleurs, d'autres définitions, plus tcchniques, ont été avancées à propos de la
qualité de l'objet industriel.
Certains auteurs définissent la qualité comme étant
«l'ensemble des caractéristiques qui différencient les unités individuelles du produit et
déterminent le degré d'acceptabilité de ces unités par l'acheteur»74.
D'autres voient tout simplement dans la qualité d'un produit "l'aptitude à l'usage"
qui est déterminée par les caractéristiqucs du produit quc l'utilisateur, et non le fournisseur
ou le vendeur, considère comme étant bénéfiques pour lui 75.
L'AFNOR (Association Française de Normalisation) quant à elle, dans un sens très
large et précis, défmit la qualité comme "l'aptitude d'un produit ou d'un service à
j
i1
satisfaire les besoins des utilisateurs76 ". Plus concrètement, c'est
"l'ensemble des
1!1
propriétés et caractéristiques d'lin produit ou service qui lui confère l'aptitude à
1
j
satisfaire des besoins exprimés ou implicites77 ".
i!
1
11Pélix DEPLEDT et Mnric-Thérèse CHEVAUER: « L'évnluntion de la qunlilé », in Consommateurs-Actunlité.
N° 278 du 6 mars 1981. P 4.
12 Jean PRUDHOMME: l'illlpératir qualité et sa rentabilité; Option qualité; Dossier N° 80. Janvier 1991. P. 6.
13 Lamy économique 1993 W8340, p. 1711.
74 KRAMER A. ct TWIGG n.A. cités par 1.L. MULTON el 1. DAVENAS dans leur article: "Qu'est-cc que la
qualité d'un produit alimentaire ct quels en sont les opérateurs, in « La qualité des produits alimentaires» ;
Techniques et documentation. Lavoisier 1985 p. 4
15JURAN J.M.;GRYMA r.M. et AlNGHAM R.S. cités par J.L. MULTON cl DAVENAS 1. dans "art. prédté p. 4
16AFNOR: Norme N.r. X50-109.
71 AFNOR: Norme N.P.X50=120. ar13-1
1
Jj
Î
1
~l

70
Plus qu'un vain mot, la " qualité" est une notion complexe; ct malgré une multitude
de définitions, le fond de leur contenu est loin d'être divergent. Ce qui confère à ce
concept un caractère supranational.
b) Supranationalité de la qualité.
Quels
que
soient
les
différents
horizons
auxquels
ils
appartiennent,
les
consommateurs sont égaux en droit ct en dignité, ils ont droit à cc qu'on leur fournissent
des produits ct des services capables de garantir leur santé ct leur sécurité qu'ils attendent
légitimement des productems ou des professionnels. Ils ne doivent souffrir d'aucune
discrimination concernant la qualité des produits ou des services qui leurs sont offerts; « la
qualité est l'affain~ de (ous la qualité est Ull voyageur salis passeport, sans
nationalité78 » elle doit prolïter à tous les eonsolllmatems quelles que soient les couches
sociales auxquelles ils appart ienllcnt.
Pour satisfaire cette condition, les opérateurs du commerce international doivent, au-
delà de l'aspect purement commercial, avoir en permanence à l'esprit, l'aspect humanitaire
de leurs activités, lequel consiste à fournir aux consommateurs des produits ct services de
qualité et conformes à leurs aspirations. Ccci éviterait qu'un produit ou service ayant f;\\it
l'objet d'une interdiction dans un pays puisse ensuite!:lire l'ohjet d'exportation dans un
autre, voire d'un continent à un autre79 • C'est ce vers quoi le commerce international doit
tendre. Encore faut-il connaître les différentes facettes de cette qualité afin de répondre aux
attentes des consommateurs.
78 Le Doclellf A. V. FEIGEMBAUM d,ms «La démarche qualité »; Option qualité N° 47. Janvier 1988. P. n.
79 Le problème des exportalions COlTlllllllHlUlaires des produits dangereux vers les pays du Tiers-Monde. BEUe
Actualités. Oct. 1985. N° 48. P. 5 cl slIiv.

71
n - Caractéristiques ou composantes de la qualité.
Les caractéristiques essentielles diftèrent scion que l'on est en face des produits
consomptibles ou des produits non consomptibles.
al - Produits consomptibles.
On s'intéressera ici essentiellement aux produits alimentaires. En effet, les produits
alimentaires sont des substances destinées à la consommation humaine, pouvant être
absorbées soit directement, soit après transformation ou préparation préalables. En sont
exclues les substances dont la consommation n'a pas pour but principal l'alimentation ou la
stimulation.
Sont assimilés aux produits alimentaires, leurs enrobages ou autres couches
~
protectrices également dest inés à être consommées ou dont la consommat ion doit être
1
~1
supposée80.
1
!
La qualité d'un produit alimentaire se caractérise par l'aptitude de ce produit à bien
j
nourrir (l'homme ou l'animal). C'est la qualité essentielle, la fonction de l'aliment étant
1
j
d'apporter à son consommateur, dans des conditions de sécurité complète, les nutriments
1
l
et l'énergie nécessaire à son métabolisme vital. Pour remplir ce rôle, plusieurs composantes
1
1
ou facettes de la qualité sont nécessaires ou indispensables à un produit alimentaire,
l!,
notamment:
- La qualité hygiénique: le produit alimentaire ne doit pas être toxique.
C'est une exigence de sécurité qui, en principe. est absolue. L'aliment ne doit comporter
aucun élément toxique à des doses dangereuses pour le consommateur, doses dont
80 Mme Marine GAUDEFROY-BERGMAN : Principes de hase de la législation allemande relative aux denrées
alimentaires. Dossier. Option qualilé. W 77. Ocl 1990. ~I de la L.M.D.G. P.12.

72
l'évaluation doit prendre en compte l'importance et la fréquence de consommation,
l'existence ou non d'un effet cumulatif et le degré de toxicitéH' .
- La qualité nutritionnelle : C'est l'aptitude uu produit à bien nourrirR2 • Cette
caractéristique comporte deux aspects:
• Un aspect quantitatif que représente l'énergie stockée sous forme chimique ct
qu'apporte l'aliment à la machine physiologique de l'homllle et qui est ensuite mesurable
H1
en bombe calorimétrique • Le con"ommateur de son côté peut rechercher, selon les cas,
un aliment très énergétiquc, c'cst le cas du sportif; ou un alimcnt peu énergétique, c'est le
cas des produits de ré'gime .
• Un aspect qualitatif qui consiste à recherchcr l'équilibre nutritionnel de l'aliment
au regard des besoins du consommateur ou d'un enrichissement d'un élément part iculier
(Vitamine, fer, ... ) ou encore d'une composition spéciale répondant à certaines pathologies
tels que les aliments sans sel ou sans gluten (Produits diététiques )H4.
- La qualité hédonique ou organolepthique : c'est une caractéristique très importantc
des produits alimentaires mais très subjective, car elle est variable dans le temps, dans
J'espace et selon les individus. Elle est d'une part d'un nivcau purement sensoriel et d'autre
part d'un niveau psychologique, lequel interfère continuellement avec le premier.
En ce qui concerne les produits pharmaceutiques et spécialement les médicaments, ils
doivent comporter les caractéristiques essentielles susceptibles de leurs eonférer les
facultés d'être soit préventifs ,soit curatifs pour leurs utilisateurs. Ils ne doivent pas être
source de danger pour ces derniers.
81 1. L. MULTON. ct 1. DA VENAS: art. précité. P. 5.
82 ibid. P. 6.
83 ibid. P. 6
84 ibid. P. 7

73
U) - Produits non consomptibles et services.
Un produit de qualité sc caractérise d':;hord par son absence de vice ou défaut
susceptible d'entraver sa bonne utilisation par le consommateur. Il se caractérise aussi par
sa conformité à l'attente légit ime des consolllmateurs auxquels ils sont proposéSR.~. Par
vice, il faut entendre tout défaut caché ou appmcnt que l'acheteur ne pourrait déceler
compte tenu de la nature de la chose vendue et dont il n' a pas cu connaissance au moment
de la vente (article 1642 .C.Civ.), ct qui a empêché un usage normal du bien acheté.
Il doit aussi présenter toute les garanties se sécurité nécessaires aux utilisateurs, il ne
doit pas causer des dommages aux consommateurs. Il importe peu « que le produit ait été
fabriqué dans le respect des règles de l'art ou des normes existantes ou qu'il ait fait
l'objet d'une autorisation administrativeR6 » bien qu'il soit « de règle qu'un produit non
conforme aux règles de l'art ct aux normes existantes, ou n'ayant pas obtenu les
autorisations administratives requises est défectueux R7» • C'est la confirmation législative
d'une jurisprudence constante.
Il en va de même pour un service. Le prestataire de service doit rendre un service
convenabJe et conforme aux attentes du consommateur, lequeJ doit Jui garantir une
jouissance paisibJe et sécuritaire.
D'un manière générale, le produit ou le service doivent comporter Jes éléments
positifs pour être de bonne qualité. Or, pour cette bonne quaJité dont a tant besoin Je
consommateur, certaines exigences ou impératifs s'avèrent nécessaires.
851. CALAIS-AULOY: op. cil. W IW. 1'.157.
86 Article I3R7-1 alinéa 2 C. civ. Voir Ghestin : L'avant projet de Loi sur la responsahilité du fait des produils
.,
défectueux: une refonte partielle du code civil.: Rev. de Jurisprudence COlllll1crci"lc. 1988. P. 212.
87 Article 1387-2. C. civ: Ghcslin : <lrl. Précité p. 21.1.

tf1~

74
ill...:.!,es impératifs de la qualité des produits et services.
La qualité, dit le « petit Larousse », c'est la « man;ère d'être bonne ou maUJla;se
d'ulle chose ». Le but du droit de la consommation est d'éliminer la mauvaise qualité pour
ne laisser circuler que la bonne. Quels sont, au demeurant, les critères de la bonne qualité?
La bonne qualité doit répondre à deux critères: les produits ct les services ne doivent pas
nuire à leurs utilisateurs fA) : ils doivent ensuite leurs procurer satisfaction, c'est-à-dire
leur être utiles (B). Innocuité et utilité sont deux exigences fondamentales de la bonne
qualité.
A - 11l11Ocuité des produits et serJI;ces.
Comment s'apprécie l'inllocuité des produits et services? Le caractère inoffensif des
produits et services s'apprécie par rapport aux consommateurs (a) et par rapport à
l'environnement (b).
al Innocuité à l'égard de la personne physique
du consommateur.
Comme nous l'avons souligné dans le paragraphe précédant, un produit ou un
service est de bonne qualité lorsqu'il est conforme aux exigences sociales. L'une de ces
exigences est la sécurité des personnes utilisatrices. Ceux-ci doivent offrir la sécurité à
laquelle on peut légitimement s'attendre. Ils ne doivent pas causer de dommages à ceux qui
les utilisent ; ils ne doivent pas porter atteinte à leur intégrité physique ; tout simplement,
ils ne doivent pas leur nuire.
L'innocuité doit s'entendre ici de façon générale, elle doit être totale, elle doit
s'apprécier par rapport à toute personne, propriétaire ou non, utilisatrice ou non,
susceptible d'être au contact du produit. Les consommateurs ne doivent pas être les seuls

75
concernés88• Un produit ou un service mis sur le marché peut présenter des dangers pour
des acquéreurs ou des utilisateurs professionnels et parfois même à des personnes qui n'en
sont ni acquéreurs ni utilisateurs. Exemple: un piéton victime d'un accident de circulation
causé par une voiture dont la direction est défectueuseR'l.
D'une manière générale les produits et les services ne doivent pas occasionner des
dommages ni à leurs utilisateurs, ni aux tiers. Par exemple: un produit alimentaire doit être
propre à la consommation, il ne doit pas intoxiquer celui qui l'absorbe; un transporteur
doit conduire les voyageurs sains et saufs à destination; un médicament doit avoir les
i~
vertus thérapeutiques qu'espère le patient, il ne doit pas altérer sa santé90• Les produits mis
~
1
sur le marché doivent être sains, marchants et loyaux, aptes à J'usage auquel on les destine
f
et pour lequel ils ont été achctés.
1
1
1
Quelle que sail la qualité promise, Je vcndcur sc doit de fournir une marchandise
1
1
saine et loyale. On peut dire là qu'il s'agit d'une obligation de résultat à laquelle est tenu lc
f
vendeur professionnel ou le professionnel prestataire de services.
1
Mais l'innocuité ne doit pas s'apprécier seulement par rapport aux personnes
physiques des humains, elle doit l'être également par rapport à l'environnement dans lequel
1
ils vivent.
1
1
i1
J
1
l
t
.,!
l1i
f
1
88 CALAIS-AULOY : op. cit. 3è éd. W 200. P. 201.
1
89 ibid.
90 Lamy droit économique; 1993. N° R3.40; CAS cl. rERRIER : op. cit. W 209. Voir également la Loi du 1er AoOt
i
1905 sur les fraudes ct falsifications en matière alimentaire.
J
,
1

76
Il) Innocuité à l'égard de l'environnement.
Tout comme entre l'homme et ses biens , il existe entre l'être humain et son
environnement un lien très étroit, une symbiose très manifeste, une interdépendance
caractérisée en ce qui conccrne son existence sur terre. L'hoJllme dépend entièrement de la
nature pour sa vie. Aussi, doit-il pour sa survie la préserver des dangers capables de porter
atteinte à son intégrité.
En end, la ver[u de la bonne qualité exige que les produits et les services en eux-
mêmes ne portent pas préjudice ni au consommateur, ni à son environnement. Ils doivellt
être « écologiques »91. Il est des produits et des services dont l'utilisation ne présente pas
de danger immédiat pour ceux qui les utilisent, mais qui à long terme, sont dommageables
ou peuvent J'être pour la collectivité toute entière, pour Je cadre de vien.
C'est le cas notamment des automobiles non équipées de pots d'échappement à
catalyse et qui rejettent des quantités énormes d'oxyde d'azote, d'oxyde et d'hydrates de
carbone dans l'atmosphère ; des usines qui rejettent également et continuellement des
quantités considérables de gaz polluants dans l'atmosphère. Tous ces rejets conduisent
inexorablement aux maladies que connaissent les forêts situées dans les zones où on
.
.
91
rencontre 1e p1us ces prO(1Ults et servlccs ..
Parfois le danger ou l"insécurité du consolllmateur ne réside pas dans le produit fini
lui-même tel qu'il lui est vendu, mais dans sa méthode de fabrication ou de production. Le
drame de « Minamata » nous permettra de comprendre de façon concrète cette acception
: «Dans une usine fabriquant selon un procédé inoffensif, des matières plastiques, un
91
C'est Je terme utilisé ue nos jours pour désigner les produits et les services « propres» vis-à-vis de
[' environnement.
92 CAS et FERRIER: op. cit. W 209
9.1 ibid. W 209.

77
ingénieur eut l'idée, pour améliorer la production, d'utiliser un catalyseur mercuriel, en
principe en circuit fermé.
Mais il Y a eu des fuites dans la mer où le mercure fut assimilé par le plancton, lui-
même absorbé par les coquillages et poissons. A l'extrémité de la chaîne alimentaire, les
personnes qui ont mangé ces produits de mer en sont mortes ou ont mis au monde des
enfants mentalement ou physiquement débiles »94. En tout cas, depuis quarante ans, dans
cette région du monde, le mot poisson, rime avec poison.
Un autre exemple: En 1951, en France, un produit apparemment inoffensif, le pain,
cause la mort de 5 personncs et affecte 250 autres consommateurs à Pont-Saint-Esprit. A
l'origine du drame, la contamination du froment par un pesticide puissant qui avait été
utilisé pour le protéger contre les prédateurs alors que les récoltes étaient encore sur pied.
Au bout de la chaîne alimcntaire, les intoxications des personnes ayant consommé le pain
fabriqué à partir du fromcnt contaminé')~.
Les exemples de ce
type
sont
malheureusement
nombreux96• Ils
montrent
parfaitement la connexion qui existe entre les problèmes de l'environnement et ceux de la
consommation. Pour une bonne protection du consommateur, une harmonie entre le
l'homme et la nature s'avère nécessaire. Dans ce cas, les fabriquants de produits se doivent
d'être vigilants dans leurs méthodes de fabrication, car «une vigilance accrue dans les
l
méthodes de fabrical ion constitue une autre composante de la recherche qualité »97. A
cette condition, on peut espérer fournir aux consommatcurs des produits qui leur seront
1
1
utiles.
1
1
1
lit
'1
!
94 Ce drame de Minamata s'est pnxJuit au Japon en 1956. En cc sens Voir Marc FALLON: Les accidents de la
consommation. Bruylant Bruxelles 1982. P8.
9~ Marc FALLON: op. cil. P. 7
96 ibid. P. 7 ct suivants.
97 CAS ct FERRIER: op. cit. W 209. P 189.
)

78
B - L'utilité des produits et services
Les produits et services sont de bonne qualité lorsqu'ils sont conformes aux besoins
des consommateurs. En plus de la sécurité, la conformité aux besoins se mesure par la
satisfaction retirée des produits ou des services acquis (a) ct par la durabilité de ceux-ci
(b).
H) LH satisfaction des besoins du consommateur.
A priori cette exigencc peut paraître dif1icile à remplir, car la satisfaction relève du
domaine subjectif et est avant tout une question de convenance. Un produit peut
parfaitement convenir à tel consommateur et être complètement inutile à tel autre, et il est
très difficile de concevoir des produits ou des services qui puissent satisfaire tous les
consommateurs. De plus les hesoins peuvent varier en fonction des goûts, des situations
individuelles, des impératifs ou des courants du moment: mode passagère, attrait du neuf
ou du durable, économie de croissance ou d'austérité9R , du milieu dans lequel vit le
consommateur99 •
Tout ceci peut paraître impossible à réaliser si l'exigence d'utilité est appréciée in
concreto, même si elle peut être réalisable« dans le cas où une caractéristique particulière
du produit ou du service a été prévue dans le contrat passé entre le professionnel et le
consommateur» 100.
L'exigence d'utilité ici s'apprécie in abstracto, c'est-à-dire par rapport aux
consommateurs moyens, car « les cOllsommateurs ne peuvent attendre que ce qu'il est
raisonnable d'attendre, dans des conditions économiques et techniques données »101. C'est
9R CAS el FERRIER: op. cil.
W 210.
99 Les besoins peuvent aussi varier en fonclion des régions, du pays, du continent.
100 CALAIS-AULOY : op. cil. 3in1<' éd. W 1fiO.
101 CALAIS-AULOY : op. cil. 3il"< éd. W J60.

79
pourquoi les professionnels se doivent de faire un effort pour mettre sur le marché des
produits et des services conformes à leurs attentes légitimes.
La conformité du produit et du service se caractérise par sa qualité d'usage, c'est-à-
dire son aptitude à s'adapter à l'usage auquel on le destine. Et c'est justement là que le
consommateur trouve sa satisfaction. Par exemple, pour le consommateur, la qualité d'un
produit alimentaire est intimement liée au plaisir qu'il éprouve en le mangeant, donc au
degré de satisfaction que cet aliment lui procure.
D'ailleurs, l'exigence d'utilité se justifie par les mutations qui ont affecté l'appareil et
les méthodes de production des biens et services, contrairement à l'époque où la
production était artisanale lO2 • La production industrielle en série et les nouveUes techniques
de distribution ont fait de chaque consommateur, à travers l'acquisition des biens et
services, un adhérant.
Le consommateur, dans chaque acte de consommation «se porte acquéreur d'un
produit dont les caractéristiques ont été définies par un fabricant, un promoteur, un
prestataire de service» 103. En fin de compte, il achète des biens ne présentant pas les
caractéristiques souhaitées, notamment les dimensions, la sécurité, la régularité, la
commodité, l'économie, l'adaptation à l'usage envisagé... Il est donc légitime d'exiger des
1
professionnels un minimum raisonnable.
i1
,~~
La jurisprudence, sur ce point, est ferme. Elle met à la charge des professionnels une
'ol
!

obligation
de
diffuser
des
produits
«efficaces
et
adaptés
aux
besoins
des
1
consommateurs »104.
j
i,
Mais la satisfaction ne peut à elle seule suffir pour rendre le produit ou service utile.
~:~
j
Ceux-ci doivent ensuite être durables.
î1.~
1j
~\\
102 CAS et FERRIER: op. cil. W 210.
103 idem.
104 Cassation cîv. Iho 22 novemhre 1978.1. c.P. enlreprise 1979. lI. 13163 noLe G. VINEY.

80
h) La durahilité des produits et services.
L'activité du professionnel consiste il conccvoir ct il réaliser des produits ou des
services destinés à une diffusion commerciale. Son hut ne se limite donc pas à satisfaire la
demande de ses propres cocontractants. Par son activité, il remplil une fonction qui va au-
delà du simple cadre économique, il remplit une fonction sociale.
De ce fait, le destinataire final du produit ou de service en attend, en plus de la
satisfaction immédiate, une utilité à long terme, une utilité qui puisse se prolonger dans le
temps, c'est-à-dire dans le fulur.
Certes, la concurrence permet aujourd'hui aux consommateurs de se procurer toute
une multitude de produits ct services qui donnent généralement satisfaction. Mais elle ne
conduit par nécessairement il J'amélioration de la qualité.
Parfois « l'inégalité des forces en présence pousse certains professionnels à mettre
sur le marché des produits ou des services de qualité douteuse, en les présentant sous le
.
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JOur e p us lavora l'»
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s peuvenl satls aIre cs esoms lIlune tats, mais a ong terme,
ils ne sont plus utiles parce qu'ils ne sont pas durables. Ce qui est contraire à l'attente
légitime des consommateurs qui, eux, espèrent des professionnels des produits et des
services utiles et durables, c'est-à-dire des produits et services adaptés aux nouvelles
raretés. Et la durabilité ne doit pas forcement suivre le rapport qualité-prix.
L'on s'interrogera, cerles, sur le recours au droit français et communautaire pour
définir les produits dans le commerce mondial. L'usage de ces droits se justifie par la
place prépondérante qu'occupent la France ct les Etats de l'Union européenne dans ce
commerce. Les dernières négociations du GATT/OVlC sont un témoignage important de
notre affinnation.
105 CALAIS-AULOY: op. cil. 3èmc éd W 162.

81
106
Le rôle considérable
qu'elles jouent et la place prépondérante qu'elles occupent
dans le commerce mondial fait d'eux des acteurs impotants dans la définition des normes
relatives à la qualité ct à la sécurité des produHs industriels.
Et l'internationalisation des échanges commerciaux exige aussi que les concepts de
produit et de service soient compris de la même façon partout Ol! ils circulent. Comme les
pays en voie de développement, en particulier les Etats A.c.P. (Afrique-Caraibes-
Pacifique) entretiennent des relations commerciales privilégiées avec l'Union européenne,
l'intérêt de l'usage des concepts français et communautaires pour ce qui concerne la
caractérisation des produits et services saute aux yeux.
De plus et comme nous avons déjà eu à le préciser dans l'introduction générale, les
rapports entre le droit français tout comme le droit communautaire et le droit des pays
africains sont très étroits. Il est donc nécessaire que ces pays dont l'économie est
principalement basée sur l'exportation des matières premières et l'importation des
produits finis ou de première nécessité maîtrise les contours juridiques qui gouvernent les
marchandises importées.
Seule la connaissance de ces éléments de droit permettra de faire la distinction
exacte entre les produits et services sOrs et ceux qui ne le sont pas. Ceci aura pour effet
de faciliter les contrôles de la qualité et de la sécurité, pratiques nécessaires pour la
sauvegarde de la santé des populations locales.
La référence faite à ces législations est donc motivée par le souci de montrer les
exigences fondamentales qui gouvernent une bonne qualité. Si ces exigences sont
nécessaires pour une circulation des marchandises et ùes services ùans le monde, force est
106
L'Union européenne est la plus grande puissance commerciale du monde. Ses activités commerciales
représentent plus d'un cinquième de l'ensemhle des échanges mondiaux de biens. Voir en ce sens «L'Uruguay
Round, un accord glohal au hénélice de l'Economie », in Offices des Publications Orncielles des Communautés
Européennes, L-29R5, Luxemhourg. Quant à la France elle est la quatrième puissance économique juste derrière
les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne.
)
1

82
de constater qu'elles sont constammcnt et volontairement violées dès lors qu'il s'agit de
réaliser le profit maximulll. Ceci se rencontre rréquemment dans le commerce international.
L'intérêt du recours au droit /ioançais et communautaire prend toute son importance
lorsque l'on découvre que les acteurs du commerce international responsables de cette
violation sont les entreprises originaires pour la plupart de Elats de rUnion européenne.
Elles violent les principes de hase qui gouvernent la qualité ùes produits et services dès lors
que ceux-ci ne sont pas destinés au marché domestique. Ce qui les amène très souvent à
expédier dans les pays extérieurs à l'Union des produits ct services dangereux ou
impropres à la consommation au grand détriment des populations des pays d'accueil. De ce
côté là, les pays du Tiers-Monde sont hien placés pour le savoir.

83
SECTION II:
LES AGISSEMENTS CONTRAIRES AU BIEN-ETRE DU CONSOMMATEUR
,
DANS
LE COMMERCE INTERNATIONAL
:
LE DEVERSEMENT DES
PRODUITS DANGEREUX DANS LES PAYS DU TIERS-MoNDE.
Les produits et les services, pour circuler librement, avons-nous dit ci-dessus,
doivent être de bonne qualité, c'est-à-dire être conforme aux besoins des consommateurs
et leur offrir la sécurité à laquelle ils peuventlégitil11cment s'attcndre.
Si cette eXIgence semble être respectée par les professionnels dans les pays
industrialisés à cause des contraintes législatives et réglementaires mises en place par les
pouvoirs publics, la règle d'or dans le commerce international, en particulier dans Je
commerce Nord-Sud, est cel1e du « laisser-faire ».
C'est ainsi qu'on assiste, avec la bénédiction des pouvoirs publics occidentaux ou
américains 107 et
la complicité de certaines organisations
internationales lO8 ,
à des
exportations massives par les firmes multinationales occidentales ou américaines, des pays
du Nord vers ceux du Sud, des produits dangereux interdits de vente ou dont la vente est
restreinte dans leur pays d'origine.
Les produits dangereux, objet de ces exportations et auxquels on s'intéressera
principalement sont les produits de consommation courante (Sous-Section 1) et les
produits de consommation indirecte, notamment les produits chimiques (Sous-Section II).
107 WEIR et SCHAPIRO : op. cit. P. 65.
108 ibid. P. 56.

84
Sous-Section 1 : Le conUl1erce international des produits
de consommation courante.
Par produits de consommation courante, il faut entendre les produits de première
nécessité. On s'intéressera dans ce domaine au commerce Nord-Sud des produits
alimentaires (§l) ct des produits pharmaceutiques (§11).
§l • Le problème de l'exuortation des pr()duil~ alimentaires douteux.
Les aliments sont des matières indispensables à la vie. Afin de préserver la santé ct la
sécurité du consommateur, leur commercialisation nécessite un minimum de loyauté. Ils
doivent donc être sains pour pouvoir circuler librement. Mais force est de constater la
violation de cette règle dès lors qu'il s'agit de réaliser le proiit maximum. Ceci se rencontre
dans les relations Nord-Sud où les abus sont monnaie courante. Toutefois, le crédit d'une
telle afftrmation est sujet à la démonstration de la réalité de ce commerce (A) et dont les
conséquences dommageables sur les consommateurs sont loin d'être négligeables (B).
A - lA réalité du commerce des produits alimentaires dans les P. V./J.
Les consommateurs dans le monde, selon leur milieu d'appartenance, se caractérisent
par leur différence de régime alimentaire. Or, l'objectif des multinationales alimentaires est
d'arriver à un monde uniformisé où tous les consommateurs mangeront les mêmes
produits. La réalisation de cet objectif a nécessité une stratégie essentielle : agir sur les
habitudes alimentaires des consommateurs du Tiers-Monde (a). Aujourd'hui, l'objectif est
atteint. Non seulement cette stratégie a permis de créer de nouveaux marchés, mais elle
permet aussi aux multinationales d'exporter vers ces pays leurs produits alimentaires de
qualité douteuse (b).

85
al Le changement de modèles de consommation dans les P.V.O.
La réalité quotidienne démontre souven('une vérité manifeste: elle nous montre que
les rapports de force souvent inégale entraînent une modification des comportements des
parties en présence. Cette vérité se vérifie à travers l'histoire des pays du Tiers-Monde et
continue aujourd'hui de se manifester dans les rapports Nord-Sud, plus précisément dans
le cadre de la division internationale du travail 109•
En effet, dans certains pays du Tiers-Monde anciennement colonisés, les habitudes
alimentaires sont depuis longtemps modifiées. En Afrique par exemple, le manioc, le maïs,
l'arachide, le riz sont devenus, depuis très longtemps, par la volonté des colonisateurs et
du fait de la capacité d'adaptation des paysans africains aux nouvelles plantes, des aliments
de base. Il y a eu diversification alimentaire. Cette diversification a même parfois pu
entraîner une amélioration de nutrition; mais le plus souvent, la dégradation a vite pris le
Aujourd'hui, le relais est assuré par les firmes commerciales alimentaires.
Soutenues par leur pays d'origine, elles poursuivent l'action sur les mutations des modes
alimentaires
par
des
politiques
publicitaires
agressives.
La
présence
importante
d'occidentaux dans les villes et les politiques d'aide alimentaire aux pays d'accueil jouent
aussi un rôle prépondérant dans cette entreprise d'uniformisation mondiale des habitudes
alimentaires III.
Dans la même perspective, l'occidentalisation de l'agriculture des pays du Tiers-
Monde devint une nécessité. A cet effet, le contrôle de semences s'avère nécessaire, car il
permettra aux multinationales non seulement d'intégrer le Tiers-Monde dans le commerce
109 La division internationale du travail se caractérise par deux pôles: le centre et la périphérie. La périphérie,
composée des pays du Tiers-Monde. a pour rôle la fourniture des matières premières au centre qui à son tour les
transforme en produits finis pour ensuite les distribuer dans le monde entier.
110 Alain Le SANN : « Les consommateurs sous influence: Impact sur les modèles alimentaires dans le Tiers-
Monde », in « La Lettre de Solagral », P. 16, Paris, Janvier 1982.
III ibid P.16.

86
des ressources génétiques des plantes, mais aussi de diriger son agriculture, et par là, son
réseau alimentaire.
A première vue, il parait impossible d'associer commerce international des semences
et dangers potentiels pour le Tiers-Monde. Les semences sont le point de départ de
l'agriculture et de l'horticulture. Elles sont le premier chaînon (maillon) de toute la chaîne
de production alimentaire. Elles sont essentielles. Le danger ne réside pas dans les graines
elles-mêmes, mais dans la concentration croissante du contrôle de leur commerce entre les
mains de certaines firmes occidentales déjà impliquées dans le commerce des produits
pharmaceutiques et dans celui des pesticides ll2.
En gros, la plupart des plantes alimentaires du monde ont pour origine des zones de
grande diversité biologique - Asie, Afrique ou Amérique Latine. Les espèces qui
réussissaient le mieux ont été transplantées dans d'autres parties du monde. Or, chaque
espèce unique court un danger constant de destruction par les parasites, les conditions du
sol et le climat. Ceci a entraîné, afin de préserver Je succès de l'agriculture, l'introduction
au cours des années, d'espèces plus résistantes. Les gènes utilisés pour obtenir ces espèces
ont été systématiquement extraits des zones de grande diversité génétique des pays en voie
de développement. Dans un monde où 55 % de l'alimentation humaine dérive seulement de
quelques plantes, la protection de la diversité des récoltes devrait être une haute priorité.
Cela n'est malheureusement pas le cas, car la diversité n'arrange pas les affaires des
multinationales llJ •
Alors que l'agriculture devenait une énorme industrie, les plantes ont été adaptées à
la production des récoltes uniformes, aux dimensions, aux couleurs et aux qualités
identiques. Alors que les paysans du Tiers-Monde s'intégraient lentement au système agro-
industriel global par la pratique des cultures d'exportation, on attendait d'eux aussi qu'ils
112Andrew CHElLEY :op. cil. p. 54.
113 Andrew CHETLEY :op. cil. p. 54.

87
utilisent les mêmes variétés culturales que les fermiers du Nord. Il en est résulté un
appauvrissement frappant la diversité des récoltes 114,
Au cours des dernières décennies, l'industrie des semences s'est concentrée de
manière dramatique, passant d'une foule de petites entreprises familiales à la domination
d'une poignée de grands groupes multinationaux, Ce changement s'est produit lorsque
plusieurs gouvernements européens et celui des Etats-Unis ont introduit une Jégislation
pour faire valoir « les droits des éleveurs végétaux », c'est-à-dire pour protéger par des
brevets le développement de semences spécifiques,
Deux importantes tendances expliquent le désir des multinationales d'avoir le
contrôle du commerce des semences dans le monde: la première est que ce contrôle leur
permettra de produire une variété de base d'une céréale susceptible d'être adaptée à un
vaste marché; la deuxième est qu'elles pourront désormais persuader les gouvernements et
les programmes d'aide étrangers de financer l'introduction des variétés nouvelles et même
1
d,
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,
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M
d 11<;
eur Istn utlon aux paysans enmers u
lers-
on e '.
Pour les compagnies productrices de pesticides, s'engager dans le commerce des
semences était parfaitement logique, car elles pouvaient en tirer profit de trois manières:
- Par l'application d'enduits chimiques protecteurs améliorant la croissance ou la
résistance aux parasites, ce qui accroît l'utilisation de leurs produits.
- Par la promotion de variétés spécifiques en même temps que des pesticides de la
compagnie, la publicité de l'ensemble des produits étant ainsi réalisé à moindre coOt.
114 Au cours des 50 dernières années, on a estimé que les fermiers indiens cultivaient plus de 30 000 variétés
différentes de riz, Le docteur H. K. JAIN, Directeur de l'Institut Indien de Recherche Agricole prédit cependant
que à la fin de siècle, cette diversité sera réduite à guère plus de 50 variétés, les dix premières comptant pour plus
des trois quarts des surfaces cultivées en riz du sous-continent. En ce sens voir Andrew CHETLEY : op, cit. P..54.
l
115 Andrew CHETLEY :op. cit. p. 54.
f

88
- Par l'association des recherches sur les semences et les pesticides afm d'arriver à
l16
des couples compatibles où l'lin « appelle» l'autre
.
La signification de tout cela en pratique, pour l'utilisateur final, a été clairement
expliqué par M. A. Adansi, chercheur en chef au centre de recherches sur les palmiers à
huile au Ghana: « Les compagnies multinationales ou transnationales sont une menace par
l'influence délétère qu'el1es exercent de multiples manières. Par exemple, en agriculture
végétales, on n'a pratiquement d'autres choix que de planter des variétés développées par
Sultons of England (Cardo) ou Burppe (USAlITT) ... et ensuite de les protéger avec les
pesticides produits par Shell Ltd, ICI ou Monsanto »117.
En tout cas, dans l'industrie des semences, l'une des façons de garantir aujourd'hui
des ventes répétées est de développer des semences hybrides stériles, c'est-à-dire ne se
reproduisant pas pour une seconde utilisation ou pas «vraiment ». Le fermier doit à
chaque fois acheter de nouvelles semences. En particulier polir les variétés assurant de
hauts profits, les paysans du Tiers-Monde sont encouragés à faire pousser des végétaux
des zones tempérées plutôt que des variétés tropicales, mieux adaptées et quelques fois
beaucoup plus nourrissantes. D'après Pat MOONEY : «Les compagnies n'ont d'autres
choix que de regarder les variétés traditionnelles comme des concurrentes de leurs espèces
hybrides et d'autres variétés brevetées... Les grandes compagnies s'efforceront toujours
d'éliminer celte concurrence. Le résultat: une érosion comnH'fciogénétique »118.
La réalité aujourd'hui est que: l'huile de soja exportée par les Etats-Unis remplace
de plus en plus en Afrique les produits locaux; le blé et le riz remplacent les céréales
locales; la bière, le vin, le nescafé, le coca-cola et autres, les boissons locales. Tout ceci se
116 Andrew CHETI...EY : op. cil. P. 56.
117 cité par Andrew CHETI...EY. op. cil. P. 56.
118 Pat MOONEY : Développement Dialogue. P. 115. cité par Andrew CHETLEY op. eil. P 58.

89
fait au détriment des consommateurs les plus défavorisés, car les produits se vendent à un
, f"
b
l ' 1
119
pnx Ixe au on vou 011' (CS exportateurs
.
Trouvant
parfois
le
soutien
de
certaines
élites
locales,
cette
politique
d'uniformisation alimentaire s'appuie souvent sur la bénédiction des organisations
internationales. En ce sens, la BIRD (Banque Internationale pour la Reconstruction ct le
Développement), dans son rapport en 1974 sur l'IRAN écrivait: «L'IRAN ne doit pas se
sentir vraiment vulnérable aux approvisionnements ct prix mondiaux, si une politique
logique d'imporLation à long terme est adoptée ... L'IRAN peut encore importer beaucoup
de produits agricoles moins chers que s'ils sont produits dans le pays... Les importations
peuvent donc être utilisées pour réduire le prix à la consommation »120.
Somme toute, l'objectif des multinationales devient de plus en plus, par la force des
choses, une réalité. La plupart des pays du Tiers-Monde ont perdu leurs habitudes
alimentaires. Au Sénégal, par exemple, la consommation des produits étrangers tels que le
riz et le blé est tellement rentrée dans les habitudes que « le retour au mil et au Sorgho est
,
l'
.
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121
U
~
perçu connne un retour a une a IInentatlon revo ue, pauvre, retrogra e»
.
ne enqucte
révèle qu'actuellement, au Sénégal, plus particulièrement à Dakar, la capitale, la
consommation moyenne est de 100 kg de riz/ habitant / an, de 29 kg de blé/ habitant! an el
seulement de Il kg de mil! habitant! an 122 . Et René DUMONT de dire: « Dakar n'est plus
africaine »121.
Aujourd'hui, les multinationales sont partout dans le Tiers-Monde. Leur objectif:
encourager les consommateurs à participer aux styles de vie occidentale par l'achat de
certains produits: laits condensés, boissons gazeuses, cigarettes, etc... ; et au demeurant,
influencer les politiques alimentaires des Etats en agissant sur les politiques agricoles.
119 Alain le SANN article précité P 16.
120 Ibid.
121 Alain le SANN article précité P 16,
122 Ibid.
123 René DUMONT, cité par Alain le SANN : article précité P. 16.

90
Tout ceci paraît maintenant être une réussite puisque cette politique d'uniformisation
a permis non seulement de créer de nouveaux marchés, mais elle permet aujourd'hui
d'exporter vers ces pays des produits alimentaires de qualité douteuse.
b) L'exportation des produits alimentaires.
L'exportation concerne une multitude de produits; elle va des produits douteux (1)
aux produits alimentaires inadaptés pour enfants (2).
]. L'exportation des produits alimentaires douteux.
L'activité commerciale est avant Lout un domaine d'intérêts égoïstes. Etant toujours
à la recherche de profit maximum, le commerçant ne fait jamais rien pour rien. Ses
investissements, son comportement, ses remises, ses rabais, ses ristournes, ses cadeaux,
etc... sont avant tout des actes dest inés à rendre la situation favorable à son activité. Aussi
longtemps que la situation lui sera favorable, il cherchera toujours à tirer le maximum
d'avantages à son profiL.
Un auteur l'a clairement souligné: « Aucune technologie n'est socialement neutre, et
à moins que l'on ne prenne des précautions spéciales pour l'éviter, toute technologie aura
tendance à bénéficier d'abord à ceux qui ont déjà le monopole du savoir, de la richesse et
.
d
124
U pouvOlr»
.
Une chose est sure, c'est que toute technologie, tout acte posé dans le commerce,
cherchera d'abord à profiter à son initiateur. Ceci n'est pas nouveau. George DUBY l'a
démontré à propos du moulin à eau, dont l'usage sur les grands domaines était généralisé
dès le IXème siècle en Europe. A ceLLe époque, les paysans trouvaient, certes, leur compte
en apportant leurs grains à moudre - cela leur évitait de longues heures de broyage à la
main - mais les redevances exigées par la seigneurie pour l'usage de cette technologie
étaient considérables. Les moulins d'un seul domaine du nord de la Gaule, par exemple,
124 GEORGE Susan: « les stratèges de la faim ». édition Grounauer; Genève. 1981, P. 182.

91
faisaient rentrer chaque année dans les greniers seigneuriaux autant de grains que l'on en
récoltait sur les immenses labours du domaine 125 .
Le désir des multinationales d'unifornû,<;er les hanitudes alimentaires mondiales en
agissant sur Ics modèles alimentaires des consommateurs du Tiers-Monde répond aux
principes commerciaux ci-dessus d(~crits. Il est certes évident que l'on n'arrivera pas à faire
des « eonsOlTlmateurs » des produits occidentaux, la rm~iorité des populations du Tiers-
Monde. Mais le travail déjù accompli dans ce domaine donne des résultats satisfaisants aux
firmes alimentaires occidentales. Il leur permet d'exporter vers ces pays tous les produits
alimentaires hors usage ou impropre à la consommation dans leur pays d'origine.
C'est ainsi que des marchands peu scrupuleux, préoccupés avant tout par leur souci
du gain, exportent vers ces pays d'énormes quantités de produits alimentaires corrompus,
avariés, périmés ou toxiques. Les pays d'Afrique et Amérique Latine sont les destinations
favorites.
La régularité de ces exportations dangereuses ne fait pas de doute et certaines
révélations les concernant ne sont connues du public qu'après coup, c'est-à-dire après
constatations des dommages causés aux consommateurs par les produits incriminés.
Les scandales concernant ces exportations ne manquent pas et l'illustration de
quelques uns permettront de situer la place du consommateur du Tiers-Monde, en ce qui
concerne son exposition volontaire aux risques (par les firmes alimentaires du Nord), dans
le commerce international.
Le cas des huiles frelatées, il y a quelques temps, au Cameroun est révélateur de cet
état de fait. Alertés par des cas d'intoxications, les responsables sanitaires camerounais
découvraient un stock d'huile helatée importée d'Indonésie. Par la suite, d'importantes
quantités de ce même poison furent découvcncs au Niger, au Nigéria et au Bénin. Dans
1
m George DUBY: cité par GEORGE Susan: op. cil. P. 182.
J

92
chacun de ces pays, les importateurs avaient triché sur la provenance, la qualité ct la
fiabilité des cargaisons afin d'écouler facilement leurs produits sur les marchés desdits
paysl26.
Des exportations similaires furent ohservées après la catastrophe nucléaire de
Tchernobyl en Avril 1986 des suites de laquelle beaucoup de bétail en Europe fut
contaminé. Pour ne pas perdre d'argent, d'énormes quantités de viande et de lait,
provenant du bétail contaminés ct abattus ensuite, furent exportés vers les marchés
« libres» d'Afrique et d'Amérique Latine.
C'est ainsi qu'en 1988, les autorités du Nigéria interceptèrent une cargaison de 9000
tonnes de viande radioactive, laquelle était destinée à être distribuée dans la population
pour consommation l27 • A la même période, on a pu remarquer deux cargos contenant de la
viande radioactive en provenancc de
la Hollande et
qui erraient
dans
les eaux
internationales au large dcs côtes du Congo, à la recherche d'un pays Africain preneur - ;1
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r 2R
tres
as pnx - e cette vlan c re usee un peu partout en 'uropc
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Si certains cargos ont pli être interceptés ou repérés, il n'est pas exclu que d'autres,
contenant de cargaisons semblables, aient pu passer entre les mailles du filet, compte tenu
des moyens de contrôles présents dans les ports Africains, et distribuer ensuite le contenu
dans la population des pays d'accueil.
En Amérique Latine, plusieurs pays ont fait l'objet de sollicitation de la part des pays
européens en vue de recevoir chez eux des cargaisons radioactives. C'est ainsi que le
Mexique reçut de l' Irl;111,1"
17 000 tonnes de lait en poudre contaminé au Césium 134 ct
137. Distribué en grande i
die dans la population, celle contamination n'a été manifesle
126 Voir en ce sens Yves AOULOLJ : Les sociétés de certification: limiers du commerce international, in Mn
Economie-Développement. N° 043 du 17-01-92.
127 Serge SOUMASTRE : Les déchets industriels ct l' Ali'ique, in Afrique contemporaine ND 161 (spécial) dll Icr
lrimestre 1992. P 25H.
128 Jean-Marlin MBEMI3/\\ : Mouvcmenls Trnllsfronlaliers de déchels toxiques: «Prohibition, libre-échange ou
liberté surveillée? », in « Pas de visa pour les déchets... » précilé. P 87.

93
qu'à la suite des trouble digestifs que la consommation dudit lait a engendré chez les
cadets de la Marine de Veracruz. La découverte de la contamination a entraîné, du coup, le
renvoi de la quantité restante, soit 1500 tonnes, au pays exportateur l29 • Au Brésil, non
seulement l'Irlande a essayé d'y exporter du lait radioactif, mais d'autres pays européens y
ont introduit aussi d'énormes quantités de viande radioactive lJo.
Outre le problème des viandes radioactives, il faut souligner celui relatif à la viande
aux
hormones
ou
anabolisants.
D'importantes
quantités
de
viandes
expédiées
régulièrement vers le Tiers-Monde provienncnt le plus souvent du bétail traité aux
hormones ou anabolisants intcrdits dans les pays exportateurs. Elles sont donc loin d'être
des viandes «propres» ou «sailles» 131. De plus, cette viande tout comme les autres
denrées périssables sont soumises à un régime con HlIII III : elles ne font jamais l'objet d'une
perte financière.
Dès lors qu'elles sont retirées de la vente pour cause d'expiration de la date limite de
consommation dans leur pays d'origine, elles subissent un nouvel étiquetage en vue d'une
nouvelle vente dans les pays du Sud.
Parfois l'étiquette est tout simplement enlcvée pour éviter d'attirer l'attention des
consommateurs des pays dest inataires. Et tout ceci se fait le plus souvent sous l'oeil
complice des autorités des pays d'origine 132•
129 Francis MESTRlES : Nestlé et la crise du lait au Mexique: Thèse, 3~ll1c cycle Sciences économiques 1989. P
184.
no Ibid.
13I Sur les veaux et boeufs traités aux hormones; voir « Que choisir » N° 262 Juin 1990. pp 38 et suivalJts.
132 Nous prenons pour preuve l'émissiolJ Télévisée« d'un soleil à un autre» réalisée sur «France 3 » le dimanche
28 mars 1993. Au TOGO, entre 1988 et 1989, d'importantes quantités dc poulets ct d'ailes de poulets sans
étiquette ou dont la fiahilité Cl't douteusc furcnt interdites de vente dans la population (Cf Arrêté Minisléricl N°
15IMCT/MEF du 18 septembre 1989 portant interdiction de l'importation des viandes congélées au Togo). Mais
bien avant eelle interdiction, une quantité importante fut écoulée sur le marché. Malheureusement cct Arrêté fut
abrogé par un autre Arrêté arrêté Ministériel N° II/MCT/MEF du 28 avril 1992. Ce qui n'est pas une bonne
mesure pour la protection de la santé et la sécurité de la population locale. Aujourd'hui il est à eraindre que la
viande de la vache folle britannique n'emprunte le même itinéraire et être à plus ou moins long terme expédiée
'.
dans les pays du Tiers-Monde, en l'occurrence les pays d'Afrique ..
1
?

94
Si l'on ajoute à cela l'inconstance de la chaîne du 1i-oid du fait de sa rupture régulière
et quand on sait le rôle qui est le sien dans le maintien de la qualité des aliments
périssables, on peut facilement imaginer tous les dangers potentiels que renferment ces

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a lments (estll1es a etre vent liS aux consommateurs es pays u
lers-
on e ...
D'un autre côté,
l'aide alimentaire aussi a sa place dans
cette
entreprise
d'exportation des produits alimentaires dangereux dans le Tiers-Monde. Que ee soit en
produits laitiers ou en produits céréaliers, elle consiste à envoyer dans les pays en voie de
développement, les excédents agricoles des pays développé,;.
Dans ces derniers, alors que la consommation stagne, la production est en constante
hausse ct les stocks s'accumulent. Dès que ces stocks atteignent un niveau élevé, les pays
développés cherchent un débouché sur le plan mondial. Et ce sont les pays du Tiers-Monde
qui se révèlent être collectivement le premier déhouché, notamment sous forme d'aide
alimentaire devant les pays de l'Est IH . Dans ce cas, le Tiers-Monde représente le premier
débouché des produits laitiers européens, qu'il les achète ou les reçoive sous forme d'aide
alimentaire 1.~5.
Le prohlème est que dans cette tentative d'écouler ses excédents sous couvert d'aide
alimentaire, l'Union européenne ne propose ou n'envoie aux pays concernés que des
« sous produits » du lait sans valeur noble et le plus souvent aux conséquences graves et
.
, . 'bl
l
' cl
cl cl'
116
ImpreVlsl
es sur a sante es consommateurs es ItS pays· .
Les produits céréaliers eux aussi n'échappent pas à la règle. Qu'ils soient exportés
sous forme commerciale ou d'aide, la qualité n'en est pas moins la même que ceux vendus
dans le pays d'origine. Ils sont même le plus souvent sans valeur nutritive notable. Certains
1.\\.\\ Dossier Qualité: LrI chrlîne du rroid: in Option qualité du 28 avril 1986. P. 12 et suivants
134 Bernard De L'HOMME: « Excédents laitiers vers le Tiers-Monde: Un cadeau empoisonné" in " 1:1 leth" ,f,'
Solagral »P 9. En t9H4, en équivalent lait, 7()-7So/" des exportations des produits laitiers de la j,II:1
destinés aux P. V. D. contre 10% seulement pour l'Europe de l'Est et ru .R.S.S.
m Ibid. P. 9.
136 Bernard De L'HOMME: article précité. P. 10.

95
sont parfois non consommahles, car ayant emmagasiné en leur sem certaines quant ités
nocives des produits phytosanitaires qui ont servi à les protéger contre leurs ennemis
naturels 137.
La réalité est que les produits alimentaires exportés vers les pays du Tiers-Monde
sont loin d'être tous des produits sains capables de garantir la sécurité des populations de
ces pays. Mais dans celte entreprise mercantiliste, celle relative au commerce des aliments
pour enfants reste la plus émouvante ct contradictoire à la fois.
2) Le commerce des aliments destinés aux
enfants dans les P. V.D.
Ce commerce s'est heaucoup révélé à travers son caractère spécifique dans Jes pays
du Tiers-Monde. En effet, la haisse régulière de la natalité et le retour en vogue de
l'allaitement maternel - qui avait connu un grand recul dans la première moitié du siècle -
dans les pays industriels curent pour conséquence le rétrécissement du marché des aliments
pour enfants ct des produits diététiques ct la limit al ion des possihililés d'expansion des
industries al imentaircs.
Pour les grands consortiums alimentaires, la recherche des nouveaux débouchés
s'avère nécessaire. Ceux-ci sont tout trouvés : ce sont les marchés «libres» et
«croissants» des P.V.D.
L'attirance pour ces pays vient du fait que la pénétration d'aliments infantiles ou
pour nourrissons y est encore faible, les naissances sont nombreuses et le niveau de vic
semble devoir s'éJeverl~8 .
La recherche de nouveaux marchés signifïait, pour les multinationales alimentaires, le
bouleversement des habitudes alimentaires des pays cibles. L'introduction de nouveaux
137 Voir la revue « Consommateurs Actualités» N° 242 du 25 Avril 1980. P 1 cl 2.
;
!

96
produits alimentaires pour nourrissons signitiait le changement des valeurs et des modèles
culturels des populations en cause.
L'affirmation tire son fondement d'une remarque toute simple basée sur l'impact que
ces nouveaux produits sont à même d'avoir sur les populations concernées car : «la
nourriture n'est pas seulement une collection de produits, c'est aussi en même temps llll
' 1
. .
1 d'
1 "
d
d'
119
d'
systeme (e commUllIcatlOll, Ull protoco e
usage, (e Situations,
e con mtes'
»,
une
façon concrète, c'est unmode de vic.
Or, dans les pays du Tiers-Monde, les consommateurs pauvres sont les plus
vulnérables aux stratégies de changements alimentaires, et parmi les pauvres , les plus
,
1
r
I.JO
M' 1
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, . .
exposes sont es enlants
.
ars es consl eratlons commercla es eurent tres VltC raison
des considérations humaines et
les aliments pour nourrissons appelés
succédanés
alimentaires pour nourrissons envahirent les marchés des P.v.D. vers la fin des années 50.
De façon généralc, lin produit est utile dès lors qu'il est adapté aux besoins du
consommatcur, ccci nécessite lors de sa fabricat ion, unc prise en considération du milieu
social dans lequel il est destiné à être diffusé.
Par exemple, les produits fabriqués et vcndus en France ticnnent compte de la culture
et de l'environnement du consommateur français. Les consommatcurs des autres pays de
l'ü.C.D.E. étant assez proches les uns des autres, les prohlèmes posés à ce propos sont
assez mineurs.
Mais s'agissant du consommateur du Tiers-Monde les problèmes à ce niveau sont
assez conséquents. Le cas des succédanés alimcntaires encore appelés laits maternisés est
encore plus révélateur. Mis au point dans les pays industrialisés, promus pour remplacer le
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - ~.- - - - - -
DR « NeSllé contre les bébés?» Un dossier réuni par le Groupe de (ravail Tiers-Monde de nrllH\\ . ,hiers lihres
348. éd Presses Universilaires de Grenohle. F. Maspcro. Paris. 1978. P 11. Jean-Claude BUF'" .I·~
1 \\"~sirr. N...
Comme Ncstlé ; A. Moreau; Pnris 1986. P 22.
119 Alain Le SANN. article précité. P 15.
140 Cf infra.

·~
97
lait maternel qui est gratuit et dont la qualité cst de loin supéricure, ils sont tout à la fois
coûteux et inséparables du mode de vie occidentale pour lequel ils ont été créés.
Les conditions qui ont entraîné leur création - recul de l'allaitement maternel - et les
précautions qui entourent leurs préparations - cuisines propres et adéquates, eau courante
propre, stérilisation efficace du hiheron, moyens financiers surfisants - font d'eux des
aliments inadaptés aux conditions de vie locales des populations des P.V.D. 141 • Cela n'a
cependant pas empêché les groupes cOllllllerciaux. lIIot ivés par les intérêts financiers, de les
introduire sur les marchés de ces pays et de les diffuser dans toutes les couches sociales de
la population avee toutes les conséquences dommageahles que cela cornporte l42 •
Au grief d'inadaptation de ces aliments inf,\\IItiles s'ajoute, par ailleurs, celui de leur
qualité. Selon une nutritionniste norvégienne, qui possède quelqnes années d'expéricnces
en Asie, les laits en poudre vendus dans ces pays nc sont p"s de même qualité quc ceux
vendus en Europe ou en Amériquc pur les mêmes firmes, la qualité y est de loill
inférieure 141. A l'infériorité de 1" qualité, il faut ajouter le cas des aliments pour enfants non
consommables parce que périmés et qui ensuite sont exportés vers ces pays après avoir
subis un nouvel étiquetage.
D'une manièrc générale, l'introduction des succédanés pour nourrissons dans le
Tiers-Monde marqua le début de ce qu'un auteur a appelé la « crise de l'alimentation
.
C
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1 4 4 ·
.
d
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mlantI e
ans ces pays
» ; cecI parce que pour mieux ven re,
es m· res
sont
encouragées à travcrs les promotions tapageuses menées par les compagnies, fabricants
des laits en poudre, à abandonner l'allaitement au sein en faveur du lait en poudre et du
biberon lequel lui sert d'instrument W ' . Ce que l'urbanisation et l'occidentalisation des
valeurs n'ont pas ménagé en ce sens qu'elles ont contribué à remcttre en cause la pratique
HI GEORGE Susan op. cit. P 1R4.
142 Nesllé conlre les héhés ? dossier précité. P 4ll.
143 GEORGE Susan: op. l'il. P 1R7.
144 GEORGE Susan: op. l'il. P 1R7.
14~ ihid. Voir égalemcnt F. MESTRIES : Thèsc précill(e. l' 2,fl). Ncsllé contre les héhés ? Dossier précité. l' 1.11 cl
suiv.

98
de l'allaitement au sein considéré cOlllme symbole d'un statut social dél~lVorisé (coutume
« paysanne»), comme une alleinte à une image exclusivement esthétique de la femme,
comme une pratique peu adaptée aux conditions de la vie urbainc, de la vie moderne,
notamment au travail des femmes.
En revanche, les laits maternisés sont présentés comllle ceux qui sont parfaitement
adaptés aux conditions dc vie modernc. il la vic urhaine. ù la nouvelle situation des femmes.
f
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,
11
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1 l'
l'
1
14r,
« aCI cs a preparer », consomma) es lOrs (U oyer ct ont gagner ( u temps
.
La réalité est que les dangers dc l'allaitemcnL arl ilicicl sont grands dans ces pays car
il est très difficile aux mères des ramilles d'utiliser ces aliments mtitîciels pour enfants
conformément aux prescripLions qui les accompagnent ct qui. de surcroît, sont de qualité
inférieure. En rabsence d'une contre- informat ion sur Ics dangers de cc lait et comme les
mères ne disposent pas du matériel culinaire adéquat pour une préparation efJïcacc dll
biberon, les infections se déclenchent en chaîne. ct le prix très élevé du lait en poudre
poussant fréquemment les mères à trop le diluer, on aboutit à la sous-alimentation des
bébés. C'est ainsi que des milliers d'en rants meurent chaquc année des su ites dcs prat iqucs
commcrciales sans scrupules des tîrmes occidentales, Quant aux survivants, ils ne s'en
sortent souvent qu'avec des lésions définitives!47
n - Les sui/(!s logiques du commerce des produits alimentaires
douteux et inadavtés dans les P, V.D.
On s'intéresscra uniquement au eommerce des aliments infùntiles et les dangers qu'il
a fait et continue de faire courir aux destinataires. Ce commerce a causé des dommages
aux nourrissons (h), et ces dOlllmages ont été le résultat de la crise de confiance (a) que les
.
Il
14R
' 1
J
'
d
'1'
campagnes promotlonne es tapageuses
ont pu creer c lez
es mercs
es ml leux
défavorisés du Tiers-Monde dans la domaine de l'allaitement.
146 Ihid. P. 249.
H7 « Nesllé contre les héb(-s " » Dossier plécilé, p 12.
14R Sur ces campagnes puhlicitaires excessives: Voir «
Nesllé conlre les héhés ?» Dossier précité. P 40 ct suiv.

99
a) L'allaitement maternel: une ()uestion de confiance.
Le lait maternel est Ic mcilleur aliment possible pour un bébé, non seulement du point
de vue nutritif, mais aussi parce qu'il immunise contre diverses maladies dans les premiers
mois de la vic. Cc n'est pas une simple hypothèse et toute discussion de l'alimentation
infantile devrait commencer par une déclaration claire en ce sens.
L'allaitement maternel est en effet une aŒ.ire de confiance que la mère a en elle, en
sa capacité de nourrir son pct it par son sein. Dans les sociétés traditionnelles, cette
confiance n'a jamais fait déhlllt. Cette confiance fut mise à l'épreuve par un médeein alors
présent au Nigéria. Celui-ci voulait, à travcrs une expéricncc dans un village, mesurcr les
quantités de lait maternel absorbées par les bébés. Alors que ses collaborateurs et lui même
priaient les mères d'amener les enfants pour les peser avant et après les tétées, de
nombreuses mères se mettaient à nourrir leurs enfants au sein sans les avoir fait peser, de
tel sorte que l'étude a dO être abandonnée. lis en déduisaient que la décision de donner lc
sein au bébé était prise ineonscicmmcnt alors quc l'intention de la mère était ailleurs '49 .
C'est là une preuve formelle que la confiance a toujours existé chez les mères du Tiers-
Monde.
Mais les firmes des produits pour nournssons ont, à travers leurs campagnes
promotionnelles, détruit cette confiance. Pour écouler leurs produits, clics ont souvent
avancé l'argument selon lequel, dans les pays du Tiers-Monde, beaucoup de mères sont
incapables d'allaiter au scin leurs hébés. L'incapacité d'allaitement dc bon nombre dc
mères dans le Ticrs-Monde était l'argumcnt justilicatif dcs vcntes des produits artificiels
pour enfants. Exception cependant J~tite d'un petit nomhre pour cause de maladie, il est
rare de trouver en Afrique ou dans d'autres pays du Ticrs-Monde des mères en état
d'incapacité physique d'allaiter leurs nourrissons.
149 Cf«
Nestlé contre les héhés '! » Dossier précité. P. 29.

100
Le rôle de la publicité dans cc contexte collllllercial a été d'innueneer la eonfiancc
des mères ell pénétrant leurs consciences. A cet eflet, bemlcoup cie messages publicitaires
présentent les laits artiltciels cOlllme des produits nécessaires ?J la eroissancc et à l'équilibre
biologique cles enrantsl~n. Partout ailleurs, le générique publicitaire est le même: «si la
mère n'a pas assez de lait. notre produit est là pour l'aider il compenser la différencel~' ».
Cette dynamique publicitaire a créé chez certaines mères la peur, la douleur,
l'inccrtitude, l'embarras quant à la manière de nourrir leurs enfants. Elle a même fini par
créer une certaine allxiété chez beaucoup de mères. Elles sont devenues si anxieuses il
l'idée de ne pas avoir sunïsallllllent de lait qu'elle ont fini par ne plus en avoir assez; ccci
parce que le réflexe qui assure le flux du lait maternel jusqu'au bout du sein répond il Ull
mécanisme nerveux que peut l:lcilerncnt perturber des émutions comme la peur, la douleur,
l,·
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l'
b
1~1 D
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b
l ' ,
mcertltu e,
em arras, etc.. -.
ans cet etat (esprrt,
eaucoup se sont ,ussees tenter par
l'expérience des laits artiliciels. Et les résullats à J'arrivée étaient désastreux pour leur
nournsson.
h) Les drames consécutil's à l'utilisation des laits artificiels
dans Ics P. V.D.
Depuis des millénaires, le lait maternel a toujours été considéré comme l'aJiment de
base le plus approprié pour les bébés: rien il mélanger, chauffer ou stériliser. La promotion
des laits artificiels sur les marchés a fait constater son l'ccliI dans l'alimentation de l'enfant.
Dans les pays Tiers-Monde, la tendance est très marquée dans les villes et partout ou
s'étend l'inlluence urbaine, notamment dans les villages, ceci parce que, quelque part entre
la ville et le village, circule r information qu'il existe ulle alternative au procédé
d'allaitement naturel au sein.
L'adoption des laits artiticicls passe par l'usage du biberon, accessoire indispensable
de l'allaitement. Or, pour la majorité des mères cie ces régions du monde ou la technicité
I~O« Ncstlé conlre les 11l(hés ?» Dossier ptù:ité. P 1:'1.; nUFFLE: op. l'il. P 29. sui\\'.
I~t « Nestlé contre les héhés '! )' Dossier précité. P 30.

101
est peu développée, le biberon n'est pas une alternai ive fiable. Pour une alimentation saine
ct équilibrée de l' cnf;lIIt, sa préparat ion exige que la mère rl'Illplisse certaines conditions
minimales de sécurité : hygiène de l'cau, du COIJlhusl iblc, des ustensiles, du lieu du
stockage, etc. ; connaissances suffisantcs en lIl:ltii.'rc d':dimcntalionl.'il.
Toutes ces consignes ont souvent fail
l'objet de rappel dans les brochures
publicitaires des différentes firmes opérant en Afrique. Au Malawi, Nestlé rappelait
constamment aux mères de laver soigneusement leurs mains « avec du savon avant de
préparer le repas du bébé» 1.'i4. En Afrique occidentale, la firme « COW & GATE» invitait
ses clientes à bouillir pendant 10 minutes le biberon ct la tétine dans une casserole
contenant beaucoup d'cau pour les recouvrirl.'i'i. Ccs recommandations s'accompagnent de
l'image étincelante d'une casserole d'aluminium posée sur tlne cuisinière électrique.
Mais la réalité dans tOHt cela est que la grande majorité des mères d'Afrique tout
comme dans les autres pays du Tiers-Monde, est analphahète. Elles ne disposent pas de
cuisinière électrique. Elles font la cuisine sur trois pierres supportant une marmite posée au
dessus d'un feu de bois. La marmite qui doit stériliser le biberon sert aussi à cuire le repas
familial. Il est alors vraisemblable que le biDeron ne sera pas préparé dans de bonnes
conditions. Pourtant, les enfants de ces Etats ali'icains vont être nourris avec le lait artificiel
«NESTLE », «COW & GATE» ou autresl.'ifi.
D'un autre côté, ct c'est le pire du problème, ces mères n'ont pas souvent accès à
une source d'cau pure, ct la pauvreté les amène ~l prolonger le lait artificiel, trop cher pour
elles, au-dcl~l de son utilisation raisonnable: le lait artificiel est donc dilué dans une cau
impropre à la consommat ion d:lI1s des proportions interdisant toute alimentation adéquate.
Les conséquences sc font moins longtemps :lttendre que dans le cas d'une infection. Le
nourrisson ne pouvant avaler qu'une certaine quantité journalière de liquide ne reçoit pas
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
1~2Iihid. P 29.
1~.1« Nestlé conlre les héhés ?" Dossier précilé. Il ~().; Susan GEORGE: op. cil. P. 187.
\\54 « Nesllé contre les hébés '! » Dossier précité P :\\0.
I~~ ibid. P :\\0.
156 « Nestlé contre les hébés ? » Dossier prêcilé P. 30.

102
suffisamment cie protéines, ni de calories. Le résultat est que la sous-alimentation tourne
rapidement en malnutrition et au pire, au marasme ct à la diarrhée'5?
Dans cette situation de malnutrition, dil un médecin, «le poids du hébé cesse
d'augmenter, puis haisse. et l'enfant se ratatine comllle un vieillard avant d'aboutir à l'état
de marasme. Quand l'état nutritionnel de l'enl:lI1t a atteint cc stade, il devient de plus en
plus vulnérable à l'infection. On sc trouve alors dans un cercle vicieux: l'enfant mal
nourrie attrape facilement la diarrhée, il devient incapable d'assimiler même la nourriture
qui lui est donnée. puisque son estomac ct ses intestins ne fonctionnent plus normalement,
par conséquent son état nutrit ionncl empire» le conduisant inéluctablement vers une mort
l5R
certaine

Quant
aux
survivants,
ils
s'en
sortent
avec
des
lésions
défmitives,
. ,
1 1
l ,')
1
.
1
.
.
tITeparal1 es' . e <:erveau est, en partIe,
a prinCIpale victmle de cette «
diarrhée du
I(,O
sevrage»
Le cerveau, cn général, atteint sa taille adulte en un temps relativement court, 80%
de la croissancc sc faisant entre les trois derniers mois de la grossesse et dans les 18 i't 24
mois suivant la naissal1lT. I.a m:llnlll rit ion <lmanl eclle période affecte la croissance du
cerveau en diminuant la dimension.
Certes, le cerveau est un organe complexe et aucun lien n'a pu encore être établi
entre ses dimensions et les mesures convellt ionnelles de son activité. La mesure de
l'intelligence et les facteurs qui l'affectent sont sujets à controverse. Cependant, dans une
étude, le professeur Jack l'IZARD, de l'Institute of Education de l'Université de Londres,
a apporté la preuve que les enfants victimes de malnutrition présentent un retard dans le
développement du langage et d'autres expressions de l'activité intellectuelle l61 •
m Susan GEORGE: op. cit. P. 1K7.
I~R Deseription d'un médecin rapportée dans « Ncstlé wntre les nénés'! » Précité. l'. 22.
l~CJ « Nestlé conlre les béhés '! » Dossier précité. P 22.
160 C'est l'expressioll utilisée pour designer. avec le plus de pertinence. le large éventail de troubles occasionnés
chez les hébés ùes l'.V.D rar les produits de l'inùustrie alimentaire.
161 « Nesllé contre les néhés '! » Dossier précilé. P. 23.

103
Cc retard dans le développement ne peut être impart i uniquement à la pauvreté cie
l'environnement maléricl el social, mais il esl au conlraire étroitement dépendant d'un
retard dans la croissance physique qui est lui-même un bon indice de malnutrition l62 .
Le manque d'argent pour acheter une qu;mtité su l1isante, l' hygiène déplorable en ce
qui concerne l'eau, le combustible, les ustensiles, le stock,lge etc., les connaissances
insuffisantes cles mères en matière <LlIimentation artificielle sont autant d'éléments qui font
du lait artificiel pour bébés un aliment inadapté aux réalilés clu Tiers-Monde. li crée plus de
dommages qu'il n'en préserve réellement. D,ms ces conditions, les P.V.D peuvent-ils
réellement se permettre le luxe de voir les laits de rempl,lccnlellt envahir leurs marchés '!
La réponse il cette question sel'lit sans équivoque, dénuée de toute ambiguïté, si Oll
arrivait à comprendre que toutes exportations il destination des pays du Tiers-Monde ue
sont pas seulement chargées de bonheur ct qu'elles peuvellt il plus ou moins long terme
causer d'énormes dommages aux consommateurs. Les produits pharmaceutiques ne font
malheureusement pas exception ù cette triste réalité.
§11 - Le COlUI11l'rCe des produits Ilharmaceuli(IUeS d~ms les P.V.O.
11 subsiste autour de cc commerce une problématique (A) tant les risques qu'on fait
courir aux conSOlllmateurs de ces pays sont nombreux «(3).
A - La problématique du commerce des produits
pllOrmaceutiques {lalls les l'. V.D.
La problématique vient du fait que la distrihution cie la m,~orité des produits
pharmaceutiques dans ces pays développe des contradictions (b) lesquelles contrastent
avec les vertus thérapeutiques reconnues à ces produits (a).
\\
J
Ifi2 Ihid. P. 23.
i
f

1()il
a, Les fal'lIHés des prOflllils (JhaUU:Il'cul i(llIcs.
Parler de « produits pharmaccutitp,es » pcut selllhler ([ priori chose simp1c à délinir.
Le sens générique reste cependant dinicilc ;1 cerner. Une approchc dl' la notion (1)
permettra de définirlc l'flle qui est le leur dans la vic de tOIlS les jours (2)
J - Nothm dl' produit pllanntlCI'l!}ique.
La nol ion dl' «
prodllil plwrIlwcculiqnc ù
IlOIlS
est offerte par deux arl icks
principaux: L'article L :-; Il du code frnnçais dl' la s:mlé publique ct l'article 1-2 dc 1<1
directive du Conseil de l'Union Européenne"", Ces deux articles nOlis donnent le sens
générique de « produill'harlllaceutiquc ) ;1 travcrs la définition originale du médicamcnt.
L'arlicle L. :-; 11 ;llinéa 1 du code rran~'ais de la sanlé pllhlique définit le médicament
eommc «toute suhstance 011 composil ion présentée comme possédant des propriétés
curat ives ou prévenl ives il l'l~gard des maladies humaines ou animales, ainsi que tout
produit pouvant être administré à l'homme ou à l'animal en vue d'étahlir un diagnostic ou
de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions organiques,
L'alinéa 2 étend la définition «aux produits coslllétiqucs et d'hygiène corporelle
contenant une suhstance ayant une action thérapeutique ou contenant des substances
vénéneuses.
L'alinéa 3 l'étend cnfin «aux produits diététiqucs qui rcnferment dans lem
composition des substances chimiqlles ou biologiques nc constituant pas clics-mêmes dcs
aliments. lTl<lis dont la présclll'c confère à ces produit s soit des propriétés spéciales
recherchées en 1hérapclIl iqllc diétél ique, soil dèS 11I(lpril~t(~S de \\C pas d' éprcuvc n,
Ces dé/initions légalcs n'cn ont pas moins été <lppréciées par la jurisprudencc, Elles
ont cu un accucil favor;lhlc du côlé des juridictions qui en font une application stricte.
- - - - - - - - - . _ - - -
1(,.1 Directive du conseil de l'Union Fump(:ennc n° (15/65 du 2X Janvier 1!j(I.').

105
D,lIls un arrêt dll () mars 1992, l' Assemhl(~e Plénière dc la cour de cassation a cassl-
et annulé un mrêt d'une cour d'appel qui, pour (kclarcr qlle la vitamine C 800 n'est pas 1111
médicament, ni pm présentatiol\\, ni par fonction, n'avail pas procédé au préalable il une
analyse concrète au sens de la .iurisrnrdence COlll1llUnallt aire afin de vérifier si celle-ci est
un produit qui peut être administré « en vue ... de ITSI;llller, corriger ou modilier des
fonctions organiques )',et i'lunc rccherche des propriétés philrJlI<1ccutiqucs de la vitamine C
800 en l'état actue 1de la connaissancc scient iliql\\e de ses rllndalil és d'emploi, de l'amp1c1ll"
.1
\\' fi"'
/
1
.
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1(,,1
r
'
ue sa (r uSlon ct (e il eonn;lIssance qu en ont cs consolllmateurs
. J~n conseqllence.
l'Assel1lhlée Plénière délïllil le médicaillent COllIJlle «(oille suhstancc ou composition
présentée comme possédant des prorriétés curatives 011 préventives :1 l'égard des maladies
humaines
(ou
anima lcs),
ou
dcst inées
i'I
l'est au rel'
ou
mod ifier
lems
l'onet ion"

16<;
orgamques»
.
De
ces
définit ions
sc
dégage
une
rCI\\I;m/"e
l"ondament,IJe
les prodllits
pharmaceutiques ne :;ont pas dcs simples produits ordinaires, ils ont lin rôle spécifique
qu'ils sc doivent dc lTlllplir vis-i'l-vis de tout eOIlSOl\\lIllateur éprouvant la nécessité de les
util iser.
2 - Râle des produits pharmaceutiques.
Il existe une diversité de produits pharmaceutiques qui, quotidiennement, sont
vendus aux consonlmateurs p,lrtout dans Il' monde. Mais ccux-ci, malgré leur diversité sc
doivent d'avoir quelque chose en commun : la vertu thérapeutique. Tout produit
pharmaceutique sc doit de guérir le mal donl est atteint le malade; il doit aussi, dans la
mesure du possible, permett re i'I son ut ilisatcur de sc prémunir ou de sc préserver contre
tout mal éventuel.
D'une manière quasi-g(~l\\ér;llc, quelle que soit sa nature - médicament pur et simple,
cosmétique ou diététique -, il doit remplir la fOl\\ction thérapeutique pour laquelle il a été
fabriqué. C'est l'essence même de tout médicament.
lM Asscmhléc Plénièrc !l)l)2. Oui!. civ. 1992. Asscmhlée Plénière. Il .1 ct suivanls
1
165 Ibid.
!

106
Auparavant, tout sc faisait au moyen de la pharmacopéc. Celle-ci, li l'exccption cie
quelques vaccins efllcaccs qu i st ilTlulaicllt la product ion par l' organismc d'anticorps contre
les maladies comllle la diphtérie ct la variole, n'était qU'U!l cmplâtre sur une jambe de bois.
La plupart des médicaments était de vagucs décoctions qui supprimaient les symptômes,
réduisaient la douleur ou faisaicnt dormir. On s'en rel1lett ait. pour l'essentiel, à J'organisme
1 ·
1
1 l'
A
,

1(,(,
UHTleme pour l'l'agIr cl repousser es ilia al les
.
Le dévcloPPCllll'llt de l"industrie pharlll:lCcut Î<JlIC rllt suivi d'clkts spectaculaires en
matière de ~anté. les Illl'dil·;ltllCllls anti!Jal't01 il'Ils, dl' la l;ltnille des slllfamides /i.lrcnt
découverts dans Ics almées llcnle. l.em découverle rul ,'>llivie de cellc de la pénicilline et cie
ses
dérivées.
Lcs
allnées
cinquante
virent
l' apparit iOIl
ct
le
développement
des
tranquillisants modernes, des contraceptifs par voic orak. des stéroJ'des et des drogues
cardia-vasculaires. Ccs anllées furent f:lstes pour les grandes s()ciétl~s pharmaccutiques l'Il
ce qui concerne les découvertes.
Cette période l:lsle sc prolongea jUSqU'l1l1X cnvirons des années quatre-vingt. Quand
aux médicaments ainsi produits, ils jouèrent leur rôle de f:1Ç0I1 efficace ct contribuèrent ~
l'amélioration fantastique de la santé de la POPUlilfionmondiale.
Les pays en voie de développement fUient les principaux ocné/ïciilires. Le laux de
mortalité infantile y a cOllnu une haisse considérahle ; on y il illlssi constaté un recul, voire
une disparit ion quasi-totnlc des maladies infeetÎCuses qui, naguèrc, dessimaicnt
les
.
, l b 7
popu1allons ellropeenncs
.
Aujourd'hui, le COllllllelce international a tout inversé, la course cffrénée au gallJ :J
relégué au second pl:ln Je rôle essentiel du médicament. Lc souci de vendre plus de
médicaments
transcende
celui
de
saI isfairc
les
besoills
es.'wI1tiels
et
vitaux
des
consommateurs. Si l'l'la sc remarque lacilelllent d,ms lous les pays de par la multitude de
produits mis sur le marché chaque année pm les mult inat ionales pharmaccut iqucs, le
commerce Nord-Sud est celui qui, à l'heure actuelle, est le plus révélateur de cet état
d'esprit.
1(,(, A. CIIET1.l~Y: op. cil. l'. ~.
Ib7 A. CHEn .EY: op. cil. \\'. ~.

107
h) Le commcrce « moderne» d('s m{>difamen's
dans les pays en voic de dévdolJ()(·I.II(~nt.
L'exportation et la dist rihul ion ucs méd icaments dans ces pays sc font de façnl1
anachronique. On tient raremenl compte des !}('SO;IlS réels de leurs consommateurs et on y
diffuse dans le commerce des médicamcnts de loute sorle, des plus supernus (1) au plus
dangereux (2).
1 lAI l'l'Iltl! dl',\\' médiclfIlll'llts SI!l'erl111,\\',
La finalité dc lout médic;llllL'nl esl ;1\\';)nl tO\\lt ln snlisf;ldion des hesoins sanil;lircs dll
consollUllateur. Pour alleindre l'elle linn 1ité, sa fabricat ion doit prcndre cn considérat ion Ic~;
éléments environnementaux du milicu dans lequel il est :lprK1é à êt re diffusé. Il doit êl rc
adapté aux réalités du milieu ct être essentiel pour le consommateur.
Si cette exigence semble être respectée dans les pays occidentaux, elle devient sans
fondement dès lors que les prouuits f:lhriqués sont destinés aux pays d'outre-mer. Les
fabricants n'hésitent pas à inonder les marchés de ces pays des produits dont la nécessité ct
l'efficacité sont douteuses. Aucun pays du Tiers-Monde n'échappe à cette triste réalité.
L'exemple de trois pays - Mexique (Amériquc latine), le Kenya (Afrique) ct la
Malaisie (Asie) - est révélateur de cet état de fait. Dans ces trois pays, le bureau cie
l'D.N.D pour l'étude des multinationales a constalé que les produits mis sur le marché par
les multinationales pharmaceutiques ne correspondaient pas aux hesoins sanitaires, ni aux
impératifs prioritaires de la s;lIlté publique des pays en cause, à l'exception des
antibiotiques. Les produits les plus vcndus dans ces pays étaient les vitamines et les
reconstituants quelles que puissent être par ailleurs les maladies spécifiques dl' chaque
paysl68.
L'excmple de ces lrois P,lYS n\\'st que le côté apparcnt des choses. Une étude pills
poussée concernant
cinq
pays du
Sud- Est
Asiatique
a
montré
qlle
l'emploi des
médicaments dans ces régions est devenu un gaspillage sans résultat. Des priorill~s
sanitaires, telles que le traitement de ln tuhcrculose el de ln malaria, ne sont pas prises Cil
!
16R /\\. CHETLEY: Pp. cil. /" 7

considération comme cela sc doit. ~clIlc 11111' 11('\\ ite p:'" il' dt"; 111;,l:ldit's l'si S(lH~llr'I', ' ,
encore incomplètement dallS hiell des Cl", 1\\1I lic'lI ('1 pl:I!T lit- lTS [li j'lfill": sallit:ljt"", "Il
consacre c1'énormes soml1les ;'1 des ]lotions sallS ill(l'lC'f 1(:('1. l'f ::1' S''':ljl'llt:lIll all 'l:lilclll",.1
A l'origine de ce gaspilla~e cl de ce dé::('qllilihre dll 111:lll'l1é, ln lillllCS dn M:",I"
Corrunun qui alimentent en ~rallde r;lrtie le m:lIcllé des prodllits ph:lI'In:ll"clItiqucs de 101",
pays. Par exemple, en 1976, elles ont roumi elltre 27';;, cl :'7(;;, dc l'ellscmhle dl":
importations pharmaceutiques de ces pays. pourcCllt:l'~C qlli ;Hljollrdïllii pCl11 :1\\ nil
'd' bl
,1(,<1
conSI l'ra
l'ment augmente
.
Des déséquilibres simil:lircs sc rctmll\\C"t
dalls <l':lIl1rcs P:I\\S
;11",
Pl ']"
42
'II'
1
171l
" 1 '
,
\\'"
\\'
1
11 Ippmes,
1111 Ions ( c pesos
0111 etc ( lï1CJl>;CS l'II"
/ It' ;';
. :'1'IJI'i J,
bien, est loin d'être un médic:ll11cnt importalli. hl rc \\,:111(' 11<', PI' :1 <11:'1('11':': ,1.1 Illiliill'"
d,'
pesos pour le traitement dc la 111;1I;:ria, In;lIadie Irès fla\\'(' d:III:; les ll-i'j,,"S !m;d,'" ,t
Selon
les
statistiqucs,
on
a
cOllsl:llé
qU'lI11C
gr:"H!l'
p:"li,'
dc':
ÎIIII''''':lli'''1
pharmaceutiques philippincs \\Tllait dll I\\I;"l'I1(' ('(11111111111 ':III"p,"'ll,1 1'; ('" III il,' 'f
Ce qui se passe aux Philippillcs se rCllllll\\C 1I11 11('11 p:llfollt </;IIIS k Il1"II!'" ''1
développement. Au Yémen (Ex Yélllen dll Nord), l'Il 19XO. lX'i dll 1(11;11 <\\1"; illlJ1l)lt:lli llll
pharmaceutiques étaient des vit:lI11ines ct des l'l'l'Oll:,t it Il;lII{S t ;lI1dis qllc "',;, :;('11 ICI111' 111 , 1
allé aux médicaments ùeslinés ù soi~ncr les trois fll~all dll p:'ys : b 1ll:1I;lIi:l. 1;, IlItH'll'III"'!
et la bilharziose. Au Sri Lankn, en 1977. 1;1 prodllel ion ph;11'Ill;1CClll iqlll' a <'tl' c0I1',1 il ",:, ' ']
plus de 50% par des préparatiolls vil:lI11il1ù's. dc l":lspiril1e l'l des rCIlII'tI!'>; ('Olllll' h 1,'11"
,
17'
reconstllllanls .
Même, la présence dc:; filllll's pl1anll:ll'clIl iqlll'S sIlr k 11'11 iloill' tI'! /l;IIl!'I:i,!t-':h l"
pas changé les ùonnées du prnhlèll1c, 1:11 JfJH l, (111 a <il'pCfI.<;l: lLms cc Il ;'\\>; 1:;()() I1lilli"I1': "
171
Takas
soit. 39 millions de doll:lI's cn remèdes, Selol1 1111 ('o!l1ÎIl' <l'c:q1('rls cn'l; ['"III
169 Ibid,
170 Peso: unité monétaire des Philippin,'s. C'est aussi l'unité IlHlIlrl;lire de plusieurs p;'ys d' Amériquc 1 :llin,'
171 A, CHETl.EY: op, cil. l', 7,
172 A, CHETLEY: op, cil. p. 7.
173 « Taka » : unité monélaire du Ball,ehdesh,

109
développer un usage rationnel des produits pharmaccul iques dans cc pays, «presquc un
tiers de cet argent a été gaspillé dans l'achat des produits sans nécessité, ou sans effet. tels
que des complexes vitaminés, des reconstituants, des remèdes contre la loux, des enzymes
digestives et tutti quanti» 174.
Au demeurant, le marché na! ional du Bangladesh esl conl rôlé il environ 47% par six
multinationales pharmaceutiques basées en Europe. L'une de ces firmes, la société Hoeehst
(Allemagne) fabriquait le « Polytamin Tonic >' considéré par le comité d'experts cOlllme
« une des médications les plus ;lhusives du marché ». L'argument avancé par la société
pour justifier la vente de cc produil vitaminé est qu'il est « indispel1sahle il des pays
souffrant d'un déséquilibre alimentaire »m. Le paradoxe, c'csl que les vitamines ne sont
pas un remède il la malnutrition. « La malnutril ion sc soigne micux avec de la nourriture
qu'avec des médicaments ct que les gens Illourront d'un manque de calories plutôt qlle
d,
d l'
l'
. .
17(,
un manque e
une ou
autre vlt:lI1l1ne»
.
Récusation raite de cet :Irgunwnl. il ne rcste plus tI"'lIne explication plausible: h";
marchés des pays du Tiers-r\\lnndc sonl des lieux 1',.i1'il(;~iés olt les lTlullinalion;II\\'<;
pharmaceutiques augmentent facilcillent leurs T)(lrls de ventes par l'exportation des
produits salls réelle efficacité pom les hesoins sanitaires des populations des pay~,
destinataires.
Dans cette entreprise cOllll11eràl1c, les firmes pharm;leeutiques du marché COll1lllUll
arrivent en tête; elles fournissent il plus de la Illoitié /cs importations en prndllÎls
pharmaceutiques dans le Tiendvlnnde. [Je ce f;lit. elles pnurront dirtïcilement dég;lger kil!
responsabilité dans le gaspill;lfc cl le déséquilihre du l11arclH~ des Il1t;dic:ll11ents dans ('("
pays.
Ces déséquilibres et gaspillages se /"onl non seulemcnt aux dépens des pays en cause,
mais aussi de leurs populations respectives. Ce que n'a pas manqué de souligner, à juste
titre, le comité d'experts du Bangladesh dans son analyse lïn:lle en ces termes: « Bien que
ces multinationales disposcnt de toute une technologie et de tout le savoir nécessaire pour
174 A. CHETLEY: op. cil. p. X.
mIbid.
i
176 Dr Martin SCHWEIGER: ciré par 1\\. CIIETLEY. op. cil. p. X.
J

110
fabriquer des médicaments de pointe aussi hicl\\ que des pwduits fondamentaux, clics St'
]ùnitent au Bangladesh à la préparat ion des l1Iéd iC:1t ions Irust l'cs. p;mni lesquels il Lill/
compter de nombreux produits salls erfet notahle ,> 177.
Cette remarque Ile sc limite pas seulemcnt au B:lnf/;ldcsh. clic est aussi v,ll:Jhlc <1:111';
les autres pays clu Tier~;-T\\1nndc. 1>l' pire dans tOl11 cela. ("csl qll'(ln l'.\\fll.:die missi dans (T';
pays des méd icament s hautelllenl d;lI1gereu:,<. ohjet d'in! cn 1icI j(ln ou dc rest l'icI ion dan'; k.
pays industriels.
2 - La 1'('l1le des mérUcall1elll,\\' dal1t:crcflx
Outre les produits illlli iles. lcs pays du Tiers- Monde sont aussi. pour les lïn1\\"
pharmaceutiques, des déhouchés sfirs pour leurs produits dangen'Il:'< inlerdits nll resln'illl
d'usage dans 1curs pays. SOIIS l'oeil cOll1plicc de kllrs P(lll\\()il~; flllbljes. elles exportell1 (l"
produits reconnus dangerellx ct innndent tr;ll1quillelllent le'; lllarchés dil «Iihres)· dc "
pays. Parfois, les produits incril11inés sont fahriqués sur place. dans certains de ces 1':1\\'
hors de tout contrôle, puis sont ensuite réexportés vers d',1IIlres pays pOLIr y être distrih,,(';
très facilement sous dl' nouveaux noms.
Les motivations commerciales prennent le pas sur les considérat ions humaines. les
risques encourus par les consommateurs sont rarement pris en compte. L' indust rie
pharmaceutiques n'a d'ailleurs pas manqué de le souligner. eoml11e on peut le constater
dans les déclarations de certains de ses représentants OLI responsables: « dans les pays oif
on doit faire face à la fois à des niveaux élevés dcs morhidités, au manque d'argent ct à I:J
pénurie du personncl qualifié, on peut plus facilelllcnt quc les pays riches du nord acceplef
d
.
l '
' l '
ln
que es traItements comportent <. cs risques c eves »

Tout
compte
f"it,
cc
SOllt
des
tonnes
de
médicamenls
dangereux
qlll.
quotidiennement, sont déversées sur les marchés de ces pays mlx risques ct périls de le Il 1s
consommateurs. Quelques exel11ples. non exhaustifs d';Jillclll'';. nous permettront d'illustrCl
cet étal de l'ail.
177 A. CHETI.EY: or l'il. p. ~.
I7R Déclaration dll Bureau d'Etude (\\'Ollllllli(l'le des prnhll-illcs de salll(' ()lIice or Jk:llh ":eonolllicsl, (""Llll"i"" ,1
l'industrie pharmaceutique: cité p:lr /\\. Chelley: op, cil. r. 12.

J 11
Le «PANALB» est un :lI1tihiolique très dangereux cl respoII.sahlc d'une ré:H'lÎ(l1l
allergique dans 20% des GIS. l'our cet effet, la loi :lIlléricaÎllc :1 interdit son usage sm l,
territoire américain. Cela n':l cependant ras cmpêché les cntrcprises alTl(~ric:1Ïllc'-: <k
l'exporter ct de le velldre d:1I1'-: plus de ::n P:IYS du Tin'; r'v1oll<ic SOllS le f;lllX nnlll tI,
« ALBAMYCIN.T. »17". Âu I\\kX iq1ll'. 1:1 vCllle d:ms les ph;" Ill:lcics. qlli représellte IC':~ .'i!
des médicaments cOnSOn1l1K~s. l'sI le dnlll:lillc des mull jll:lt ÎOJl;r/cs. [';11111; ces médical1l1'lll·.
nombreux sont d'une cffic,lcilé douteuse, voire lIocifs.
Un cas exemplaire est celui de n~ntero\\'ioforlll, antidilwrrhéiquc de CIBA Geigy, qui
a des graves effets secondaires. S'attaquant :mx syslèmes nerveux. fi a plusieurs ((lis
entraîné la mort de ses utilisateurs. Produit retiré de la vcnte au Japon à la fin des années
1970 et dans les autres pays industriels, il était toujours en vente au Mexique en 19R7 cl
dans d'autres pays du lïers-Monde IRo•
Le Chloramphénicol est un médicament très dangercux ct peut causer une maladie de
sang mortel et d'autres effets secondaires sérieux. lx1 Pour celle raison, son usage au
Danemark, en Allemagne, au RoyaulTle-Uni ct dalls d'autres p:lYs industriels est limité all:\\
cas aigus de lièvre typhoïde et paratyphoïde, aux méningites causées par les inl1uenza ri 1.'1
aux infections pouvant entraîner la mort cl contre lesquelles des antihiotiques moil1s
dangereux sont inefficaces ou contre-indiqués. Pourtant dans les pays du Tiers-Monde
comme le Mexique, il est en venle lihre, sans aucun avertissement concernant les dangers
liés à son utilisation lR2 . Au Pérou, on découvrit Cil 19R3 qu'on prescrivait une préparation
à base de chloramphénicol. produite p:lr la Iïrme it:lliellllc «Forlllitalia Carlo Erh;, l'.
comme traitement l'ont re les li ianltées infant iles. Les tahlell cs c!Joco latées él aient d,'
surcroît vendues dans une pet if e épicerie Cf Il i les présent aienl C()lJlIllC des « honbons ('(ln! J(
la diarrhée » 1X].
Un autre produit, le dipyronc. est lin analgésique qui reut causer une lllal;1(11l'
souvent fatale appelée « agranulocytose ». Son cas illustre aussi le d\\lé dangereux cie (('
179 Santos AKllETE: La q:clllil\\- <ks l',nduits illdllsliit'ls cl la p,oli"·lillll des ('OIlSIlIllII1afeurs. 'l'hl'.';\\' Ilii'·11 l"'·',
p.223.
I~O Jean-flalll DELEAŒ~: article l'I\\-cM. l'. ;:JO
I~I A. CHETLEY: op. cil. p. 12.
1~2 Ibid. P. 13.
I~J Ibid. P.13.

1 12
commerce dans les pays du Tiers-Monde. Il a été interdit de venle ct retiré des marchés
des pays industriels tels que le Royaullle-Uni, l'Àustralie ct la Suède. Il n'est pas en vente
non plus aux Etats-Unis. JI est aussi recommandé dans son cas de ne réserver son
utilisation qu'aux situations dése.spérées cl dans lesquelles la \\ie du malade est cn d,lIlgcr cl
où il n'existe auculle allemalive lhérnpcutiquc possihle.
Cependant, dalls les pays en dévcloppenlCnt. not,lIlll11cnl en Àrgclll ille ct (lU Bn~~;il.
les médicaments contcnant du dipyrone font parI il' dcs lllédic;lI11enls les pill" vendus SIII h'
marché/ 84• En Colomhie cornille cn Equateur, Hoeehst. In firmc ,iIlclll<lnde, rcconlln;Hlck S;l
marque «Novalgina », nntibiotique dangereux, pour le lr,lilelllelll dc lOlllc.s les a!l<"cljoll';
possihJes du mal de tête ail rhullle Cil passanl !lnr le cnllCCI. S,1I1S IOllte!iJis ,lverl il' d('.'.
risques que son utilis,llion petit faire courir ail cOllsomlll:lleur. (in alltrc prnduil c!nn,PI'I<'lI'
de la même firme, «NeOlllelu!lrilla », sc vend trè's lrnnqtlillelllcnt clnns tOI Ile l' 1\\1111'" Î<1'1i'
C
1
1 l
A I ,.
. ,1 ~~
entra e au moyen (e a mCfllc PU) IClfe
.
Les marchés africains sont aussi le thé~l re de ces divers produits dangerellx.
Beaucoup de médicaments n'ayant jamais subis de contrOle médical ou n'ayant pas reçu de
visa du Ministère de la santé de \\cur pays d'origine y sont exportés ct distribués S'HlS
difficultés, C'est le cas notamment des amphétamines ct des psychotropes. Aujourd'hui,
sur n'importe quel marché d'Afrique, Abidjan, Dakar, Lomé ou autres, on peut facilement
trouver des amphétamines qui, mélangées avec de l'alcool, sont hautelllent toxiques lR6•
On pourrait multiplier indéfiniment les exemples tant les marchés du Tiers-Monde
sont
devenus
de
véritables
champs
d'expérimentation
conllTlcrciale
des
produits
indésirables en Occident. Dans cette course au gain, les opérateurs Il'hésitcnt pas à utiliser
1
. J I '
. , .
.
Il
1R7
toutes
es armes commerCla es en
CUI'
posseSSIon, SI a HISlves SOlcnt··e cs
, pour
promouvoir le vente de leurs produits qui fiml pescr sur les ul ilisateurs des risques
considérables.
184 Ibid.
m Ibid,
186 M Mac(xlou N'DIY /\\ YE : « la dilllension du sOlls-dé"c10pPCIllCIlI cl l'ahscllce d'Ftat de droil l'Il Ali iqlll'
. ill
« Pas de visa... » prédlé, p. 10<1.
187 Cf infra.

l 1~1
JJ - Les résultats de la vente des pmd,,;t,\\, IJ1larmaallt;ques
dangereux dans les P. V./J.
La distribution des produits pharlllaceut iques dangereux dans les pays du Tiers-
Monde fait peser sur leurs consommateurs des dangers non négligeables. Nous essayerons
de les exposer (a) et d'en dégager leur fait générateur (h).
al Les dangers encourus par les consommateurs.
Ces dangers sc rencontrent essentiellement à deux niveaux : au stade de la
prescription des médicaments(J) ct celui de leur utilisation(2).
1 - Les dangers de /a .Hlmresa;pt;oll 011 de la
prescr;ptioll excess;"e des médÜ'alllellts.
Les mu Il inationales pharmaceut iques occidentales sont les principales pourvoyeuses
des médicaments dans le monde. Dans leur pays d'origine, la fabrication ct la distribution
des médicaments sont soumises à une réglementation rigourcuse.
CeJJe-ci va de la simple autorisation de mise sur le marché d'un produit à une
interdiction pure et simple de circulation dès lors que celui-ci est soupçonné du moindre
défaut susceptible de mettre en danger la vic du consommateur.
Mais tout cet nrsenal juridique perd de son el'lïcacité dès lors que les produits Cil
cause sont destinés à l'exportat ion vers le Tiers-Monde. Ainsi, on déverse librement cl
tranquillement dans les P. V. D. les médicaments de toute sorte.
La prolifération des
médicaments de tout genre dans ces
pays expose
les
consommateurs à divers risques parmi lesquels la surprescription médicale prend une place
importante.
En effet, lier Je risque ou Je danger à la surprescription des médicaments peut
j
paraître, a priori, paradoxal, certains traitements nécessitant la comhinaison de plusieurs
J

1 14
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1KR
C
l
1 1
1"
, 1
. . .
Il
me Icaments
.epellC anl. e ( anger Ica a surprescnpllon ex Iste.
trouve sa ,soli rcc
dans les campagnes intensives de prolllotion cOlllmerci;lies ,lllX<lllCllcs q' livrent les soci0t(:"
pharmaceutiques hasées dans ccs pays. Elles sont l'un des factems qlli conduisent ;1 I:t
prescription excessive des médicalllenls dans ces P;lYS.
Outre les afliches puhlicil;IÎres dans les médias (pres,,<'- ladio, tl:k:vision), 1;, pré';('JHï'
permanente des agents cOlllnlelTi;lllX dalls ces pays ct leurs visitcs lé!'"li('les :IUX l1lI~d('rill';
ne laissent pas ces demiers Îndiflerents. Cllarg(:s de prollH1uvoir la \\"l'Ille de" produit<; <h'
leur firme, ces agents COllllllClCiaux ;lITivClll loujours, p:ll la llHllnilllre d\\<C!t;lI1tilhlll';
grat uits et d' in format ions COli V;I illL',lIltes, il ohl enir des llH<dcc ins l' ;IS,,1II:I11('e de fin",;", il,'
dorénavant leurs produits ;'1 lems IJ;ltiellts, (\\. qlli cond"it il la ,Slll prescripl JOIl <1<-;
médicaments.
Or celte attitude du médecin est chmgereuse pour le consommateur, car elle conduit
à la surconsommation des médicaments ct parfois à la ruine des consommateurs les plus
défavorisés. Parfois, elle conduit à prescrire des médicaments pour guérir des maux pour
lesquels l'usage des médicaments n'est pas nécessaire,
Une enquête menée aux Philippines a montré que pour /e traitement des quatre
affections relativement simples ct très communes - /a fièvre, le ma/ de têle, Je ma/ de gorge
et les diarrhées - les médecins pré/eraient les thérapies :1 base de médicaments aux
thérapies sans médicaments. Sur les /53 médecins interrogés, tous prescrivaient des
médicaments pour les accès de lièvre, 93 % pour les Illaux de tête, XX% pour les tlIélliX de
gorge, 76% pour les diarrhées. La préférence de la majorité des médecins :dlnit ;1\\1\\
médicaments les plus [(~ccnts ct les plus chers; un pourcentage notable avait tendance :1
prescrire des remèdes d'une eflicacité douteuse telle que la pecLine de kaolin cOlllrc ln
diarrhée, plus de la moitié des médecins employait un éventail trè,<; Imge d'antibiot iquc.<;
1XC)
contre les maux de gorge
.
Une autre enquête rapporte le cas typique d'un lmlade au Yémen (cx- Yén1Cll dll
Nord). Le malade souffrait li' hémorragies Il<lS.J1cS. 0:1I1S son cas, b cautérisat iOll dc:-:
artères nasales ~mffisait Inrgrmcnl ponr empêcher ces llélllOllagic~;. Cc qui ~;igllilî(' qll'il
IRR J. HUET: «Le paradnxe des médicamenls el les risqucs de dévclo[1[1cll1clll )', o.s. 11)~7, chroll. l'. 71
IR9 Chet1cy : or. cil., p. 1J

115
n'avait besoin cl' aucune médical ion pour guérir. Mais, en deux jours, un médecin qualil il'
lui prescrit douze médicamcnts différcnts incluant des anl ihiol iqllcs. des vitamincs, dc':
gouttes nasales, des coagulanls sanguins, lin liqllic1c réhydr;ltant ct 1';1I1algésiquc (11'
.
1°f)
Hoescht, la novalgltl
.
Des cas semblables sc retrouvent un peu parI out dans le Tiers-Monde. Au Togo, la
surprescription hante les esprils des consommateurs, en parI iculier 1cs plus dél~lvorisés.")1
La crainte de ne pas pouvoir f,lire face aux contrainles lïnancièrcs des ordonnances
médicales bien chargées amène certains consommaleurs malades à renoncer aux visites
médicales et à se tourner vers les guérisseurs indigènes, courant ainsi le risque d'aggraver
leur mal. Ceux qui arrivent à faire face aux contrainles financières des ordonnances
médicales voient souvent leurs espoirs déçus, parce que cc Iles-ci sont souvent faites de
manière hasardeuse ou douteuse. Ces médicaments ainsi prescrits, non seulement ils Ile
peuvent pas guérir le mal dont est atteint le pal ient, m:lis ils peuvent aussi, dans le pire des
cas, être responsables de cerlaincs réactions secondaires ct provoquer par cc fait des
,n
complications pouvant aller jusqu'à la mort du patient
.
2 - tes dangers liés à ['lltili,Wltion des médicaments prescrits~
Outre les dangers de la surprescription, les consommaleurs dans le Tiers-Monde so1l1
aussi exposés aux risques que peut engendrer lin mauvais uS;lge des produits prescrits, l'Il
particulier les antibiotiques cl les 'lI1lihaclériens.
Les antibiotiques et les antibaclériens sont en général 1,1 classe dcs médicamenls donl
l'usage est le plus mal assuré dans les P.V.D. On conslale aussi qllïls renlrent dans 1:1
catégorie des médicaments les plus prescrits dans ces pays. Même pO\\ll' un simp1c rhul11c. il
y a des médecins qui recommandent des anl ihiot iques il leurs paticnt s. tJ!le ellqllêle a
évalué la proportion des anlibiotiques prescrits en hôpital, s,ms nécessité, à 220~J du lolal
de ceux qui y sont employés. llne ,mtre a 1110nllé que (iW:'f' des ordonn:lIlccs données:1 dc,';
malades atteints de rhume prcscrivaicnt des anl ihiol iqLlcs. Les alll ihiol iques ail aquclll le"
bactéries; or les rhumes SOllt C<lllsés p;lr Ull virus. Il est dOlIC inclTiclCC de traiter LIll rhllllH'
190 Ibid. p. 13 ..
191 Au Togo, celte peur des ordonnances médicnlcs sc rcnconlre surtoul dans les milieux rurnux ct dans les milieux
défavorisés des zones urhnines. 11 cn va de même dans les aulres pnys al'ricains, voire du reste du Tiers-Monde.
Voir aussi CHETLEY : op. cil. p. 1 cl suiv.
!1

.... 17%"·.
116
par un antibiotique. Non seulemcnt il est ineflïeaee, malS c'est aussI dangereux pour le
patient 193.
En effet, beaueoup de gens, aussi bien dans les pays industrialisée que dans les
P.V.D., ignorentlcs dangers qu'ils courcnt en intcrromp:lIIl 1111 traitcment d'antibiotiqucs, :t
supposer que ce traitement soit nécessaire. Les dangers vicnnent du f:lit que l' intetTupt ion
du traitement permet aux bact éries de devenir eneorc plus résisl ant es aux llIédicalllent s.
Or, dans la plupart des pays du Tiers-Monde, les antibiotiques se vendent COlllllle des
petits pains. On peut s'en procurer sans ordonnance et cn quantité variant de 1 à !OO. Ils
sont souvent vendus sans aueunc indication de posologie cl fréquelllllll'nt cmployés colllme
.
l'
1 1
1 l'
1q 1
protection contre une mu tItu( e ( e ma :l( les ..
Au Togo cOlllme partout ailleurs cn Afriquc, la vente <ks \\lll~dk';lIl1cnts notalllllH'llt
des antibiotiques, est fnite sur la place dcs grands marchés puhlics. ct !I:lIJS la plupart Il,,
temps, par des personnes iIlett rées opérant dans le sccteur in 1'( lflTll' 1. 1q,
En Inde, la manière aveugle <lonl les allt ihiot iques ont été pronllls, presnits el
employés, a fait qu'on s'est trouvé dans l'impossihilité d'clllaycr les épidémies Ik
salmonelle. bactérie voisine des bacillcs paratyphiques produisant lIne toxinl' :Igissant Slll k
système neurovégélat if ct le système lymphoïde de lïn'l'~;t in. Au cours d'unc <1(' (T';
épidémies, 80 bébés sont mOlls dcs atteintes d'une souche de s:lltnonelte qui était <lcvelllW
résistante à 5 antibiotiques, 690 étaient résist:lI1les il all IIloins Uil antibiotique, voil('
l96
plus
,
Les conséquences dues à la résistance des bactéries, furent plus lourdes en Amérique
Latine. A la suite d'une épidémic de dysenterie cie Shiga, 12500 personnes rurent tuées au
Guatemala et 2000 au Salv:ldor pendant l'année 1969. La typhoïde eut raison de fiOUO
192 A. CHETLEY: op. cit, p. 1 cl suiv.
19J A. CHETLEY: op. dl. p. 14., D. SEN(:I10R : « la consommatioll des médicaments en Afrique: la IHl!ljllll
congrue », in « Vivre Autrement» n° 1, novcmbre 19H4, Mngazine Trilll. dcs Consommateurs en Afrique. Dabl
(Sénégal), p. 21 et suiv.
194 CHETLEY : op. cit., p. 14.
195 cf infra, IIJème Partie, chapitre 1, Section J
196 A. CHETLEY: op. cit. p.
14. La salmonellose l'sI le nom geucnquc dc diverses infections cilies il \\!l\\('
salmonelle, qui comprennent ln fièvre typhoïde et les paratyphoït!cs, aiusi quc des toxi-infeclions nlill1cntaircs.

117
personnes au Mexique en 1972. !\\ l'origine, les hactéries responsahles a,lient résisté1lltes
ll
au chloramphénicol, à la tétracycline, à la streptomycine et aux sulfamides !7.
A ce danger s'ajoute encore un :Iutre non Illoins ncg\\ige,lhle : cclui lié à la vente dl";
médicaments dangereux ayant f;lit r ohjet de l'et rail dcs marchés dcs pays indust 1il' 1,;
Certains produits, en elTet, au stade de la consomll1ation, S01l1 respons;lh1cs de C('''élill';
effets secondaires graves. Les fahricallts, le pins souvent sous la pression des pouvoi, ,;
publics de leur pays. SOllt ohligl;s de les retirl'l' du circuit cOllllllcrcial. Les relr<lil';
équivalant à des pertes financières, ils sont rarement opérés (blls les [J<lYs du Tiers-Mon<!l'
Là-bas, loin de tout contrôle et de tout soupçon, les [)Joduils conlilHlent leur lilllc
.
l '
d
" ) . 1
1
l'lH
cucu atlOn au gran pen ue eurs usagers
.
Somme toute, le commercc des médicaments dangercux dans les pays du Tiers-
Monde présente des risques importants à leurs consommateurs. Le rnauvé1Ïs usage qu'on en
fait justifie qu'on situe les responsahilités.
h) Le fait génénlteur des riS(!ucs.
L'ensemble des risques encourus par les consommateurs des P. V.D. trouvent leur
source dans la priorité qu'accorde les industries pharmaceutiques au prolit (l), le fouI
corroboré par l'absence de contrôle du système(2).
l - Le profit commercial comme mobile d'exposition
des consommateurs aux risques.
Les principales activités commercialcs mondiales des lirtlles pharmaceutiques sont
caractérisées par un contrôlc centralisé dcs marchés. Cc contrf)le n'a pas seulement 1'0111
but de coordonner les activités de production pour le hien de l'humanité, il a aussi 1111
intérêt économique évident. Ce centralisme a pour hut la réalisat ion du profit maximum. ',;1
priorité accordée au profit engendre dcs crrcts néfastes pour Ics consommateurs dcs l'av~;
d'accueil. Ceux-ci sont le plus ressentis dans les pays palIVresl'l".
197 Ihid.
,
19R.HUET: article précité. p. n cl suiv, : ,< COllsollllllaICllls-Âclualill;)' Il'' ,(96, tt! février 19X(I,
199 CHETLEY : op. ciL" p. Il),
ll

1 ) H
En Asie du Sud-Est, unc étude mcnéc sm les marché,; dcs produits ph;mnacclltiq\\lf";
a révélé une vérité caractérist ique. Sm ces lll;\\rc!l(s, les pri;.; ;\\\\1 dé! ail Mpassaien! .iw;qn· :'1
300% les prix à l'importation. Les auteurs de l'élu<1e i"ais,lient le conllllcnlailc sniv:II'! :
«Ces augmentations sont en elks-lllên1l's C'(I"c~';i\\TS cl n'Ilni d (:qlliv;i1I"lt d;",'.
aucune aulre hr:1I1che industrielle. Un Iclni\\'l'atl (Il' " prolil ,. <PPj1o:;c dil("'kllK'nl ;111 "ir'll
être collectif des populal ions d'/\\sie du Sud-Est .) '<111.
Les prix de détail ne représentent pas une limite d,lI1S ce COnll11ClCe des prod'lits
pharmaceutiques. Avant même que les grossisles ct les détaillants aient pris leurs bénéfices.
la marge de profit venant dcs échanges cntre une compagnie"l1Ière ct ses liliales est
confortable. Dans cc cas, l'excmple d'un pays industriel. en \\'occmrencc la Gralllic
Bretagne nous permettra d'illustrer la situation clans \\cs P.V.D.
En 1978, en Grande Bretagne, l'industrie pharmacentique, dans son ensemble
affichait un taux de rémunérat ion <lu c"pital de 21 % l'an, soit YY" de plus que l'industrie en
général. En 1980, alors que cc taux avait décliné pom le reste de l'industrie. il atteignait
23% pour l'industrie pharmaccut ique. Une enquête d iligl'Illée plus t,II'(I par les pouvoirs
publics britanniques montre que l'industrie ph:IIl11<1celltique, p;lr 1:1 pr:tlique C<HlI';1I1ll' rll'
«transfert de prix »20', sous-cstim,lit les profits <:écJarés.
L'enquête concernait les prix demandés par « Roche » pour les composants act ifs <le
ses tranquillisants les plus célèbres, le libriuJ1l ct le valiul11. A la suite de cette enquête, les
pouvoirs publics découvrirent que « Roche» demandail un prix 40 fnis plus l~lc\\'é que cclui
du marché pour les inglÙJicnts. Ils sonl arrivés ù la conclusion qU';1l1 licil des 5% <le ('In/il
sur Je capital initialcIllent décl:lré entre 1966 ct 1()72, le PlOfil réel avoisillait les 7()(;~,'()~.
Toutes ces mélhodes sc renCCltltrcnt d:ms les P.V.D nil elles semhlent être le plus :1
l'aise. En Colombie, entre 1907 ct 1970, la s\\IIévaluat iOll des prix des IlIÙliC:IIIlCnts :t1lait
de 350 à 6500% par rapport au cours du marché internat ional. En Argent ine, ces prix (k:'~
médicaments vendus par les slIcc\\IIsales des trallsnat iOllalcs (~t;li('nl de l,\\.)% il :n()O':~ phI';
200 Ibid. p. 19
20\\ Un prix de transferl est le prix payé par IIne filiale il la cOlllpagnie l1Ièle pOlll l'achat dcs Illalil:rcs plrll1i~'I("
202 CHETLEY : op. cil., p. 20

119
élevés pour les médicamenls de huit catégorics tlJérapclIl iqllcs. comparés aux autres
201
produits importés de sources difrérenles

Au Bangladesh, en 1981, les producleurs hritallniques 1.<'.1., Wellcomc ct M"y ;1IIl!
Baker, demandaie11l tous ~ leurs filiales, cinq fois le prix <Ill marché pour les produils
pharmaceutiques de basc, Le caractère arbitr;lirc de ces prix fut démontré lorsque les
pouvoirs publics décidèrent
de sc
procurer les
m(~dic;lIJlcnls P;l1" appel d'offre<;
international. Avant celte décision, Ja firme briulI1nique « Becch;ull » pOil va il demander dc.,>
prix extrêmement élevés pour l'ampicillinc. Confronlée ~ une COlKllll"l'nCC réelle, elle
'd'
.
.
1
O()N 'Ill
re U1SaIt ses propres pnx ( c Cl 1(,'- •
Le cas de J'Afrique est exccpt jonllel. L' absence de st al i<;l iqlles d,1I1S cc dOlll;lilH'
empêche de montrer le nive;ll1 des prix pratiqués dalls ~;C', pays ct d"évaluer ensuite il-
pourcentage des profits ré<rlisés sur cc conlincnt. Mnis COllll11C d;lIlS la phI [1(11"1 des pays dl!
Tiers-Monde,
il ne l'ail
pas de
doute
que
les profil', qlle
réalisent
les
lirllll":
pharmaceutiques sur cc conf illelll solll cOllsid(~r;lhlcs. Dans CeS pays. la majorité (k~;
commandes des produits est f;1Ïte Pw" le corps Illédical. (>1', ("c dernier csl dircclcnli'ilf
influencé dans ces choix par 1cs Iïrmes dont les représcnt ,llll s opèrent sm place. On P(' III
aisément imaginer les proJils qui en résulleront pour les cOlllpagnics qui réllssirOll1 ;\\
arracher des contrats d'exclusivité de fourniture des médicamenls dans ces pays20~.
Ce comportement d'industrie pharmaccutique est parfailement illustré dans la
déclaration du Dr. Rainford qui résume les sentiments de nombreuses personnes dans le
Tiers-Monde: «II est à présent largement reconnu que le commerce inlernaliolwl, cl
particulièrement le commerce pharmaceutique Nord-Sud se f<lit sans aucune relation avec
les coOts réels supportés par les fournisseurs. Illais représenle plutCJt une des mani restai ions
les plus flagrantes de l'échangc inégal, dont l'efl(~1 ultime csl de créer ct de maintcnir le
sous-développement du Tiers-Monde» 206.
Tout ceci se confirme de plus en plus, car aucun moycn dc co nI n'l1c du système Il':\\
été mis en place pour essayer de réguler la machine.
20~ A. CHETLEY : op. cit. p. 20.
204 Ibid.
205. D. SENGHOR: [lrt. prée. \\' 21 ct SUÎVilllls
1

120
2 • L'absence dt' contrÔle du sWitèllW.
L'industrie pharmaceutique a contrihué all COUfS de ces dClIlières déccnnies a
l'amélioration de la santé publique. Grâce au développenlcnt des médicaments, elle a
puissamment sauvé d'innombrables vies. Cependant, il s'est produit dans cette branche de
l'industrie des abus de pouvoir qui ont mis cn danger la vic et la santé des millions
d'individus. Il ne s'agit pas de cas isolés que l'on peut négliger cOlllme s'ils étaicnf
« quelques bavures» d'llll systèl1le - par ailleurs pm (:lit - de production, cie clistrihution et
d'utilisation. L'obstination cles (:lhrieants à continuer d'exporter clans les pays clu Tins
Monde des produits reconnus dangereux et soumis, c111'1 eux, ;\\ des rcstrielipfJ<;
commerciales, voire à des interdict ions ct qui. cnsuile sc \\elHlent liI·hns coml1le de pet il';
pains, en est une preuve.
La convergcnce
des
intl~rêts entre
pouvoIrs
pllhlil's
occidcnl;lllx
cl
bll';
multinationales éloigne la machinc économique de J'indusl rie pharrl1;ICCUI ique dl' t(1111
contrôle. Et l'absence de contrôle du système ouvre droit ;IIlX ahus de toute sorte. ;\\11\\
abus que l'on connaît aujourd'hui dans les pays du Tiers-Monde.
Sanjaya
LALL,
un
intellectuel
indien,
résume
la
situation
de
l'indus1.!(·
pharmaceutique ct dcs cOllt s sociaux qui en résll Il cnt : « Dans les P. V. D.. les méd iCall1l'llh
sont trop chers, trop « modernes}) souvent utilisés de façon cX:lgérée par l'CUX qui onl 1<.":
moyens de les payer, el très inéga 1c l1Ie nt dist rihués. Sel de une [;1 ihlc propo.t ion lh' 1;,
population peut achetcr les médicamcnts fl1l1rnis par les 1l1ldtin:ltiull<1ks. De plus. «",
moyens financiers sont souvcnt mal employés si 1" on considère les hien f;lit s obtenus. Il";
médicaments bon marché ct efficaces dont a bcsoin la p:lrl ie pauvre de la population ne
sont pas fournis, car cc n'est pas dans cc secteur quc les profits des multinationales sont
réalisés,
Si l'on veut aller plus loin, le coût social de l'organis:ltion actuelle consiste nun
seulement à fournir les médicaments coûtellx et inadaptés il une élitc, mais aussi, Cil
l'absence d'un système alternatif d'innovation, de produclion et de cOlTlmcrcialisation, ;)
206 Cité par Andrew CHETLEY : op. cil. l' 20

J 21
rendre impossible pour les P. V. Il de f<lllrl1ir Jes médicaments cs"cmiels il la lIIajorité de
leur population. Le système I~xistant cs! en Cl' Ill" l'CS 1en Iles si pllissant qlle, sans réf(lflllC
majeure, il est un obstacle <1 Ul1e ,i1tclllalive simple d aisée qui consislerail ;', tCllllllir les
stocks adéquats de méclicalllcn1s csscnlid" hon malcllé ill1.'\\ pay:~ p;I1IVrcs. ))"1
Et le Dr HALFDAN, directelll gênela! de ]'Uf\\LS, d';ljnllkr de 1:1\\~(î11 amplifiée:
« Il y a 30 ans, le technologie moclemc de la santé vcnait jusfc de naître ct était pleine de
promesses. Depuis lors, son expansion n snrpnssé tous les rêves pour se nouer cn
cauchemars, tant elle est devcnue sllper-sophistiqllée ct sllpcr-cotîteuse. Elle dicte
déraisonnablement notre politiqlle de snnlé, dc sorte que cc qui est utile bénéficie à très
peu de gens, Basée sur cette tccllJwlogie, une éJJ0l111e indllstric médicale a grandi cn
renforçant les intérêts acquis qui Jui sont propres. COlll1lle l'npprenli sorcier, nous avons
perdu le contrôle - le controle socin! - de la technol(lgle ll1édicale. L'esclave de notre
imagination est devenu le maître de notre créativité. N(lllS devons maintenant réapprendre
à la maîtriser et à l'utiliser sagement pOlll' une santé libérée. t'et1e lutle est importante p01l1'
tous les pays, pour le P.V.D eUe es! cruciale >?J3 .
Le commerce Nord-Sud ne se limite pas cependant allX senls produits de
consommation courante. Il s'étend aussi il (1' au 1l'es IH(lr!nits dangerellx quc IWUS
appellerons ici les produits de consolllllJation indirecte.
Sous-Section II : Le commelTl' intl'rnational dl's JJrod~!!~.
de consommation in_dh:~g!.~
On s'intéressera plus particlllièrelllcllt all conllllcrcc des pn1dllits chillliques (*1) ct
aux dommages qui accompagnellt lem llsage dmlS les pays collcclIlés (Sil).
§I - Le comml'rce dl'S IJroduHs chimiqul's dans les ".V.D.
De tous les produits chillliques exportés vers les pays dll Tiers-rvl(lIHIc, seuls les
pesticides retiendront Ilotre attention. 1Jrilisés en agricllltllfe pnill protéger 1cs plants
207 Cité par CHE11,EY : op. cil.. p. 21. Salliaya 1,;\\1", cite le ca~ de l'lllrle oil RfI"ô rie la PoilU la' iOIl Il'a p<lS au':"
aux médicllments, Ceci esl llussi vlliable pOlir les antres pa)'s dll Tiers-Monde, rll pm1 il'lllir.:r pOlir l' Afriql\\e Pil la
majorité de la population l'st rurale
J08 Dr. HALFDAN : cité par A. Chetle')': op. cil. p. 2t

122
contre leurs ennemis mlturel", ils so1l1 de loin les plus usilés cl les plus vendus dans ces
pays. Leur commerce est tellemcnt florissallt (H) qll'()11 sc rcfuse de prendre ell
considération tous les problèmes qUI)s sont sllsccpl ibJcs de poser aux lit ilislltCurS dalls
ces pays (A).
Tout (rllbord, qu'est -cc qU'11ll pesticide? Le mol « pe.<.dici(k )} a été f()rmé ft p;ntir
du mot « pest)} pm leq licl les <lllg!c'-saxt'Ils désigllc les divel s Clll1clllis des cu It lIIes. I,c
pesticide est donc le produit sllsceplihle de (ktrllirc les « pesles \\}''!l'I . I\\Ltis comme t()llt
produit chimiquc, lcs pesticides spn! dangereux ct ppsent des pl nbkl11es aux "t.iJisélleurs
et à l' enviroIUlemene11) • ('c qui just ilic leur sévère rég k III Cil la li()u dans les pays
industriels. Pour promol\\v(lir les VCIltes des pesticides iutcrdils (hills les pays dJ<lni!ers aliX
législations laxistes (b), les industriels "'héslte,,t pas ccpel1daul ;1 (~II V:lnfr'i les wrtt,s (;1)
Le « succès)} que c()lInait :llljnurd'h"j la vcnle dcs pesticides dall<; les pays dll
Tiers-Monde est le résu1t:lt d'une psyc1rnse créée ct cntrèlelll1C p;lr rélnp.c titit de cell::-ci
par les
firmcs procluctrices, relayé el1suite p:ll ce!lai"s chcrchcllfs ct
l'crIaille:;
organisations int ema tiOlIII Ics. PPIII les i"dllsl riels, r elll ploi des l'cslicidc.;, cn p:lrf ienl i"1
dans les pays du Ticrs-I\\foJl(\\e, est I1l1e l1éccssifé, 1111 impétalil". 1\\ cél clld, lonl esl mis cn
oeuvre pour v[lufcr les vertns des Jlesticides ct encolIJ'agcl Icnl COIlSDJ11rlwliOIl aw;si
dangcreux2 qu'ils puissent palaÎlrc.
Par exemple, une brochure, subventionnée pnr des ill(lilslric!s, c1cu il les pcstici(ks
comme des «addit~fs essclllie/s}) pom 1'ngricnltme. 011 y déclnre f1n'interdire aux
agriculteurs l'emploi des pesticides « l1Iettmit cn dnl1gcr )e nivean de vie des lIIiJlions de
persOlUles, et que, d,ms les pays industrialisés, r el1lploi des pesticides est 11Il « f~lCtCur
209 Michel DESPAX : Envinml1cl1lcnl cl l'cssolll'ces tUllul"cIles : Pesticides ct produits <Jl1tiflar3sitai~'Cs à Uqgc
a~icole. Juris-c1asseur 1111"31, fascicule CH: .'i. 1987, Ilnl
2m ibid

123
important permettant aux agriculteurs de commercialiser, à un prix raisonnable, le produit
de haute qualité que demande la ménagère moderne »212.
On a attribué à l'emploi des pesticides une augmentation de deux pour cent (2%) par
an des rendements des récoltes au Royaume-Uni au cours de ces décades, et selon un
chercheur américain, aux Etats-Unis, la suppression de l'emploi de tout pesticide
entraînerait une augmentation des pertes des récoltes de 33 à 42%213. Même l'Organisation
des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (F.A.O.) en vante les vertus. Elle
estime que, sans l'emploi des pesticides, à peu près 50% de la production de coton du
Tiers-Monde seraient détruits214• La tentation est d'autant plus grande que des
programmes expérimentaux dans ces pays ont enregistré des rendements importants : les
rendements d'arachides se sont améliorés de 179% ; ceux du riz ont pratiquement doublé
avec un emploi «judicieux» des pesticides ; au Ghana, l'emploi des pesticides
(insecticides) a permis une augmentation des rendements de cacao jusqu'à 244%215.
On va encore plus loin, outre l'amélioration des rendements agricoles, les pesticides
ont permis de sauver beaucoup de vies humaines . L'emploi de la D.D.T. contre le
moustique anophèle, agent vecteur de la malaria, a joué un rôle important dans
l'éradication de la maladie. En 1970, après un programme de 15 ans, l'Organisation
Mondiale de la Santé (O.M.S) estimait que deux milliards de cas de malaria avaient été
évités et ainsi quelques quinze millions de vies sauvées216•
Avec ces mérites attribués aux pesticides, il y a de quoi jeter le trouble dans les
esprits des paysans du Tiers-Monde, séduire et susciter les envies à la consommation. Ceci
est d'autant plus vrai que le but des producteurs est de susciter un besoin mondial des
pesticides. A cet effet, la complicité des organisations internationales est de bonne augure.
Celles-ci forment ainsi avec les producteurs un réseau complexe qui stimule le commerce
mondial des pesticides. A des niveaux tout à fait différents, ces organisations ont joué un
211
Abou THIAM : 30 pesticides à problème utilisés en Afrique, Document publié par ENDA-TM, Dakar
(Sénégal), p. 5 et suiv.
212 A. CHETLEY : op. cit. p. 28.
213 Ibid.
214 Ibid.
215 Ibid.
( 216A.CHETLEY:op.cit.p.28.
1

124
grand rôle dans la stimulation du commerce mondial des pesticides,217 en particulier dans
les pays en voie de développement.
Dans le langage des économistes spécialistes en agriculture, ces institutions
internationales ont permis «d'intégrer» les paysans du Tiers-Monde au commerce
mondial des pesticides218• Ceci s'est réalisé grâce à deux facteurs importants contrôlés par
les puissants moyens des pays industrialisés: l'argent et l'information. Par l'argent, on
accordait à ces derniers des crédits garantis par les multinationales productrices des
pesticides pour leurs cultures. Au travers de l'information, on ne leur livrait que des
informations sur le bien-fondé des pesticides, sur leur côté positif, les dangers étant, quant
à eux, passés sous silence219•
Aujourd'hui, l'intégration a crée la dépendance et celle-ci est bien positive pour les
industriels, car elle permet, non seulement d'accroître les ventes, mais aussi d'éviter les
pertes en exportant dans ces pays du Tiers-Monde, les pesticides dangereux interdits de
vente ou de vente restreinte dans leur pays d' orgine.
bl L'exportation des pesticides dangereux à
destination des pays pauvres.
Indifférence ou complicité ? Il est très difficile de choisir entre ces deux mots
lorsqu'il s'agit de situer ou de justifier le principe du « laisser-faire» qu'adoptent les pays
industrialisés vis-à-vis des matières dangereuses en l'occurrence les pesticides dangereux,
que leurs propres pouvoirs publics ont restreint ou interdit de vente et qu'exportent ensuite
les fabricants vers les pays du Tiers-Monde. A défaut de pouvoir se situer, on peut dire
tout simplement que, par rapport au principe, ces deux termes riment ensemble car le
processus d'exportation se déroule dans la plupart des cas sous l'oeil bienveillant de ces
pouvoirs publics et parfois avec leur bénédiction. De toute évidence, une chose est bien
sure à l'heure actuelle: le Tiers-Monde est devenu un dépotoir22o des pays industrialisés.
Ce qui va suivre permettra de comprendre le bien fondé de cette affirmation.
217 TIllAM : 30 pesticides à problème en Afrique, op. cit, p. 5 et suiv.
218 David WEIR et Mark SHAPIRO: op. cil. p. 55 et suiv.
219 Ibid.
220 THIAM : op. ci t, p. 5 et suiv.

tortueuses et sales afin d'y :lCl'Olllplir Ull ll;\\\\,:li1 l"'('('I'Ii o lllH'1. 1(' c;lmioll 1('111''11 ''
lentement et sûrcmenl «Pacifïc slnTI ". pass<' dC\\,IIl( UIlC nlllgéc Il'clllrep(lls Ill';rc'i'; , !
s'arrête devant une pfate-fl'lI11e de cl1;lrgclllCIII. derrii:re l:t fahriqllc dl' pesticides III' I:t
société Amvac Chimic;ll CorpoJ:lIÎon, (In palllH';l1l illdique
/.OIlC de circullllion lilllill~l',
d
Seul le pcrsonnel autorisé cs! :HIIll;S :lIldc 1;1 dc l'ct le lilllill',', LI. des h;lri Is hlell c 1:1 ir. d, ";
fûts de 113 litres sont c1wrgés sur la sCllli-remorqllc,
Après le pleill, le transporl sc dirige vers l'ulle des <IulolOules qlli sillonnent la régioll
et pénètre dans le flot de la circllbtioll qui s'écoule i'tlr:lvers le IWYs. Le challrl'eur a Slll /ili
des numéros de téléphone à alerter en C1S d'urgellce ct des inslructions spécialcs au C;l'; Ilii
le liquide incolore et inodore cOlllelll1 d:lllS Ics h:nils vicndrait ;1 s'écl1npper. ;\\11<1111
déchargement, aucun transfert du c!l:lrgelllellt toxique Il'est :llllorisé sur le P:lITl'UI S (II'; l,'
conduit aux doeks d'expéditioll pour 1\\~tr;1I1gcr.
Le pesticide contenu d;1I1s les lOIs hleu c1:lir esl dll 1,2dibr(ll1lo-~-ehloroprol':uw,
appelé aussi DBCP. Ce peslici<ie est llllnélllalocide, elliC:lCe cOlltre les petits vers appck':
nématodes qui s'attaquelll :1l1X l'I1Iii s : :111:111:1,. hall;lIll's. ;igrtll1leS, 1kpuis 1()}!l. :', 1;,
demande de J'EPA, il fut illienlil de H'lIte ;111, f'I:"s (inis p:ucc ljll'il pr(lvoljl1e le C;1I1C('I ,.,
rend les êtres stériles. Ccpclld:1I11, 1:1 société 1\\111\\':11:. cOlltinuc de l'cxporter vers le, P;I)'; 0111
Tiers-Monde, plus particulièrement dalls les P:1YS Oil l'oll cull ive des h;lIwncs, des ;111:IP:\\;,
des agrumes et du coton 22l . « L'interdiction du nBCI' :lI1X Et:lts-Unis ne représcnte :IIHllll
problème pour nous, déclare cn suhstance le lesponsahle, ("esl cn f;tif la meilleure ch",
qui pouvait nOlis arriver. NOliS ill' IHHlvons plus vendre ici, nwis p:nlout ailleurs, ("'''1
encore possible. De tOlite 1ll:lllilTC. c'c',( l'njll1ll:ltion qui ;1 loUjolll~; été Ilotrc prirwil"d
marché ,,222.
Le cas du « l'!los\\cl ", lin ;lIltlC pesfi,jck d;lnrCJCII\\. est 1111 (''{('Illple (l'fi Ioil
frissonner puisqu'illl1onlre le jcu :lllque/ sc li\\Tenl les lllullill:ltiolWles cl pouvoirs pll"li l '
des pays industrialisés d:1I1s l'exportation des produits dangclcux.
22/ D. WEiR cl M. SHÂI'IRO : op. l'il. p 7..7 sui\\'.
222 Ibid. p. 29.

Phosvel est \\'appcll<lliol\\ cxcltl,jve dOlll]('L' a Lill ()J1~;lllOph()';l'll;lle. du nfllll dl'
leptophos, qui attaque les centles n('lvcux, ('c (llOdllil flll lancé Sllt le m"lcl\\(' [1;11 h
Velsicol Chemieal Corpol<ltioll, Lill(' hl;lIlche dl' l'él1orllll' clllrL'pri,(' NllIlh West Indllslli,<,
grand distributeur de tous les prndllils p().';'ihks. dll \\Vlli,ky d'lItl\\ S;lIk » allx ';(111'
vêtements « fruit of tlle 1,1'0111 ".
l'Office Américain pour la Sécurilé de l' Ilygièllc dn Tr:I\\'ail «)SI 1/\\ l. révéla que ,1<-';
ouvriers d'une fabriquc de Velsic(ll ;', naypOlI. ;111 Tcx;\\s, ;Ivaiellt été alteinls de gr;l\\!'';
troubles du système nervcux centlal. l,L'urs C;II1wr:l<lcs dL' trav:lilles :lvaicnt surnomlnés h";
«Zombis du Phosvcl ». Ccs trollhks sc m:lIliksl;,ient p;lr \\111 1ll:lIlqUC de coordin:lt iOll (ks
mouvements, une incap<lcité de parler ou de penser cl<lirelllellt.
Les ouvriers intentèrent UI1 procès à la comp<lgnie Yelsieol. Le juge saisi ordonna I:I
fermeture de l'usine où élail fabriqué le produit ct dOllt l'EI'A n'a j:lIl1ais autorisé hl velite
aux Etats-Unis,
La compagnie bénéfici:lit seulelllcnt d'un pertlllS d'lIllC :lllnée pOIll" erfectllcr d(":
expériences. Cependant. la décision du juge n' a P;\\S empOché 1:1 s()l'il~1 é de l'ont il1uer Il' ':
"1"')1,
ventes vers l'extérieur, nOlall1l11cnt dans les pays du Ticr.s-f\\l()l1de'· . I)e plus c'csl I:t II;":
célèbre et officielle Agencc Américaine pour le Développelllenl International (l/.S.ALD)
n1
qui finançait ces opérations au titre du progralllme d'aide au développell1ent
. 11 a failli.
suite au procès intenté par des groupelllents écologiques, '"1C déeisioll de justice rnLII
mettre fin à cctte pratique22.'i. Ce qui l'l'sIc encore à vérifier.
Parmi les pesticides exportés d'Amérique, 25% ilU l110ins S(lnt des ploduits illle,di!',
ou sévèrement contrôlés : en1<lills d'entre eux Il'0111 11l('lIIe j:lIllais étt~ oflicicllcllJr'1l1
enregistrés aux Etals-Unis. fkallcoup n'ont 1';IS été :1Il:1Iys(s ol1jtTI iVt'lllt'nt lJIlanl ;', 1'''1
action sur la santé hUlllaine ou "cll\\'ironllCIllt'Il1.
D'aulres pesticides sont des l'''l,ons bicil COlmus, ri l'OH sait pertinel11ll1enl qllïl';
sont à l'origine de c:lIlcers. de rll;llli 1Iflla1jOlis cOllgênit :dc,s cl de 111l1t al iOlls gênét iq 11<";
22.1 D. WEIR cl M. SHAPIRO: op. cil
p.:10 'IIi\\'.
224 Ibid. p. 31.

1
i
127
1

Pourtant, la loi fédérale américaine sur les insecticides, fongicides cl autres prnduÎh,
1
!
stipule clairement que les pesl icides inl l'rd il s ou non emegisl rl~s~~(i peuvenl êl re léga!cn wnl
1
exportés227• C'est ainsi qu'au tnlvers de la loi, on aulorise chaque année, l'exporlat ion <lc<;
i
dizaines de milliers de kilos de DflCr, d'Heptacld<lf'c, de chlordane, de BHC de l.inclal1c,
1
~;, Ip~%~'f!~l"'fJl~hd9!plirr: piel~lq~~ Çç.Sl pr<)~hJits SÇÜÇ/l! 1Ç,(Hl~i41~rçs epITmlC1~n)IH,lad'lg€il'OIlX' pl 1111
il
l
être librement utilisés aux Etals-Unis~~H.
Dans ce commerce S,1I1S sClllpule. les enl reprises europl~cllIles Ill' sont ras cn Il'';I''
elles y participent activement. L'exemple de la "die/drine" est démonslratif".
La "dieldrine" est un insecticide; elle a élé décrite COnlJ11C étant pent-CIIC' .< h 1'111 '
polluante des substances chimiques connues ;.'. L'O.M.S. la classe COI11l11e exlrêmelli"l1l
dangereuse. En 1981, la C.E.E. ,1 interdil sa comlllerci,1Iis;11 ion cl son emploi d,IllS les P;I\\'
membres. Le Japon l'a interdile conllne com!l0s;11l1 dans les pesl icidcs pour évilc) 1111"
contamination de l'environnement.
On compte au moms 20 autres pays industriels qui onl inll'lclit ou sé\\'('.1l'1l1''''
restreint son emploi. Pourtant, comme les ,1lIlres produils dangereux, 1;, ('.E.E a ,11 Il Pl l',,:
son exportation vers les pays du Tiers-·MoIHJc 2.'<'.
Pour la société Shell établie aux Pays-Bas, cl de loin Il' plus gr'11ld producleur dl'
monde des pesticides, «le l'<lit que la C.E.E. n'ait pas imposé de con/r{'tlc à ['exporlalioll
pour la dieldrine est une bénédiction »m. Cetle compagnie produit entre 80 ct 90% de
toute dieldrine, plus précisément quelques 500 tonnes des composants du triple évelll.1Î1
des «drines » - dieldrine, aldrine et endrine - donl 98% sont destinés ~ l'exportation hors
de la C.E.E. En 1978, la production de la dieldrine seule fut eSlimée ü 7:')0 lonnes 2 \\1.
Par ailleurs, lors de l'incendie de l'usine Sandoz à Bille en Suisse le 1er novemhlc
1986, fut découverte une grande c<lrgaison des prodl.lils chimiques tous desl in«(s :1
m Environmental Defense Fund C. US-Ain, liS DislriLl Court; Dislricl of ColulTlhi,l, Civil Aclioll Il'' 7') oc;lIll
226 Tout nouveau pesticide destiné il êlre 1I1ilisé (lUX Elnls.. l1nis doit êlre i1rrrOllV(~ par l'Agence fé<!l(r:i1c 1"1ul 1:1
protection de l'Environnement (EPA : Environrnenlal Prolcc1i(ln Al!cllcy).
227 WEIR et SHAPIRO: (lp. cil. p. 12.
228 D. WEIR ct M. SHAPIRO: op. cil. r. 13.
229 A. CHETLEY : op. cil. p. 30.
230 Ibid.
231 Ibid,

12R
l'exportation vers le Tiers-Monde. La Halle cn ku contenait <JIn tonnes de pesticides dplll
360 tonnes appartenaient à la liste cie l'ONU des substances part iculièrement dangereuses
et qui font l'objet d'interdiction ou de restriction dans les pays industrialisés, ct qui sont
malgré tout destinées à l'exportation vers le Tiers-Monde, soit : endosulfan (2 tonnes).
parathion (13 tonnes), phénylacétate de mercure (1,5 tonne), captofol (O.16tonne)212.
Le comble c'est que, comme l'a d'ailleurs fort hicn souligné un memhre <k
l'Organisation Panaméricaine de la Sanlé (l'.A.II.0.), le Dr 11:lrold IIubbard, (' b
fabrication de ces produits, leur transporl, leur stllckage, leur enregistrenlenl et leur enti<'If'
distribution ne sont soumis à aucune vérification quelconquc »m. Ainsi, ces pesticide:
hautement toxiques sont-i Is répandus dans le monde enl ier, en part iClllier dans les P:I ys
pauvres, sans le moindre contrôle.
Quand on sait que même des pest icides « sOrs )'. donl r lisage n\\"-:1 soumis :1 :1l1l'1I11"
restriction, peuvent avoir des ellets néfastcs sur les hOllllllCS cl sm l'cllvirOllllCn1<'1l1
lorsqu'ils sont utilisées sans discernement dans le Tiers-Monde, on peut aisément il11:1gillcl
les conséquences qui résulteront cie l'usage de ces peslicides h:nllement toxiques.'ll d:lI1<;
ces pays pauvres. Mais cc sonl cles considéraI ions qui sont loin d'émouvoir les vendeurs, k
commerce de ces produits étant tellement florissant.
n . VII commerce 11or;,\\'.\\'mrt.
Au-delà de la réalité sur les dangers imlllédiats ou pote nI icls de ces produits ~;('
dégage un constat amer: il s'agit toul simplement d'un COlTlnlCrCC cn pleine expansioll (;,)
et les arguments pleuvent de parI out pourjustifier celte entreprise (h).
a) lln marché en expansion.
Malgré les dangers qui entourent leur ut ilisal ion, en part iculier dans les pays cn voie
de développement, la certitude est qu'on est en face d'un COlTllTlerce Cil pleine expansion.
Les ventes mondiales des pesticides connaissent aujourd'hui lIll boom sans précédent.
232 Jean-Paul DELEAGE: Les risques écologiqucs et sociaux dc l'exporlalion des d6chcls toxiques. in .< 1';IS cl"
visa pour les déchcts: vers une solidarité Arriquc/Europc cn matièrc Jc l'cnvironncment ,> p. 19.
233 WEIR ct SCHAPIRO: op. cil. p. 1.1.
234 TIIIAM : op. cit. p. 5 et slliv.

129
L'industrie chimique produit environ deux milliards de kilogrammes de pesticides par
an, plus d'un demi-kilogramme par habitant du globe. Presque tous sont produits dnns les
pays industrialisés. Dans les années 1980, près de 20% de celte production nnnuclle étaient
exportés vers les pays du Tiers-Monde. Aujourd'hui, cc pourcentage a presque douhlé ;
m
pour l'Afrique, il a plus que quintup\\é
. Ces pays représentent aujourd'hui une p,lrl
importante dans la consommation mondiale dl' pcsticides, en particulier des pesticides
dangereux.
D'une manière générale, le marché des pest icides dans ces pays est en pleine
expansion et l'intérêt que leur portent les f~lhricant sn'est pas moins neulre. Cet intérêt esl
la conséquence directe d'une séric de contraintes commerciales dans leur pays d'origine.
En effet, le marché de pesticides dans les pays induslriels est au hord de la saturaljoll.
La diminution des terres arahles ct la volonté manilCste d'une plus grande réglelllcnialic1I 1
gouvernementale des types de pesticides ont enlraÎné un rélrécisselllent du marché ct 1111<'
baisse considérable des ventes. Pendant cc temps, dans les P,IYS en voie de dévcloppen\\l'Ill.
le marché est grand ouvert, sans resl rict ion légale ,nlcmle. l'our l'indust rie des pest icidcs,
ces pays constituent ou représentent une au haine cOllllllerciale dont l'exploitation S',IV('I('
nécessaire. Aussi, par des méthodes commerciales suhtiles, et un réseau mondial de
succursales et de maisons affiliées, les mu Il ;nal ionalcs ont-elles intégré ces pays dans lt'
supermarché des pesticides.
Que ce soit en ville ou dans les eampagnes des pays concernés, la publicité des
sociétés productrices de pesticides fait partie du décor. Quelle que soit la langue utilisée, le
message publicitaire est Je même: « seule I10tre marque de pesticides l'01lS assurera ml(]
bonne récolte »236. Là-bas, loin des yeux de ccux qui en réglementent l'utilisation dans leur
pays d'origine, les fabricants exaltent les vertus des pesticides interdits217 •
D'un autre côté, l'expansion du marché de ces produits est assurée ct pérennisée par
les filiales des sociétés-mères productrices des produits chimiques. Implantées dans les
i
1
m WEIR et SCHAPIRO: op. cil. p. 14.
!

236 WEIR et SCHAPIRO: op. cil. p. 47 .
1
237 Ibid p. 48.

l:m
P.V.D, ces filiales importent dcs s()ciétés-Illère~ leurs prodllil s illtcrdils et en assurent 1:1
distribution dans les pays concernés.
Par exemple, dans un cc nt re d' approvisiPllne ment de l' Associat ion des !Crrllicl S
Kenyans à Nairobi (Afrique de J'Esl), lIll reporter remarl/II:) de l':ddrinc, du Bell ct dll
m
Chlordane
, dont l'usage, dans la plupart des cas, est illterdit aux Etals-Unis tout Cpnlll1"
dans les autres pays industriels, en venle sur les rayons ct cités dans l'invclltailc dt'
l'Association. Ces produits étaient vendus par les filiales Inc;lIcs des sociél«(s europ(\\~I111("; :
m
ICI, Boyer et Shell
.
Parfois, la vente, dalls ces pays, des pesl icides dallgneux interdits, est assurée ;111
moyen
d'un
contournement
Il,lhilc
de
ln
réglementation
dl1
pays
d'origine.
Ll's
multinationales expédient séparément les di Ilcrelltes composant s chimiques du pest j, ici"
interdit vers un pays du Tiers-Momfc. I,;'-bas, elles le filh, iquent sans d«(r;1l1gcll1cllt d;pl':
des usines appelées usines dc «.formula/ion'>. De IiI, le pesticide ain,si lilbriqué peUl (IIi'
réexporté et distribué, hors de tout contrôle, dans n'importe quel aulre pays du lins
M
d
L
'1' é
' '1
1 1
1
1
.
240
on e.
a l'ca It est qUI sera venl u l ans e IIlonl l'entIer SOIIS un nouveau npm
.
Le
Tiers-Monde
est,
somme
toute,
dcvellu
Ull
champ
d'expérimentation
commerciale des produits chimiques agricoles. L'industrie des pesticides l'a fort !lien
reconnu puisqu'elle déclare en substance à cct effet : «s'il y a seulemellt que/quc.\\'
pesticides "vraiment dangereux", l'endroit où ils restent vendables, c'est bien le Tiers-
Monde »241. Cette déclaration est confortée par les pourcentages des parts de marchés
existant dans ce domaine. Si globalement, dans les deux dernières décennies, les pays en
voie de développement représentaient i't peu près 20% du m:lrché mondial des [lest icidcs.
dans les ventes des pesticides les plus dangereux, cc pourcenl,lge s'élevait jusqu'il 39';';,.
Or, aujourd'hui, la consommation des pesticides dans ces pays :1 presque douhlé ; cc
qui vraisemblablement porterait au double le pourcentage des pesticides dangercllx
exportés vers ces pays puisque la fabrication mondiale ne cesse d'augmenter chaque année.
238 Voir en ce sens THIAM : op. cil., p. 7 ct suiv.
239 WEIR et SCHAPIRO: op. cit. p. 4R.
240 WEIR et SCHAPIRO: op. cil. p. 4R.
241 A. CHETLEY : op. cil. p. 37,

131
Mais de ce côté là, les arguments ne manquent pas pour justilicr cc conllnelTC dangcn'lI\\
pour les populations de ces pays.
« Est-ce mal d'aider le mOl1de aframé à. se 110m.,.;r ? " demanda i'l l1lJ enquêtellr lin
responsable de la compagnie Velsicol, prenanl la défense des ventes de Phosvel de la
société dans les pays d'outre-mer, après son interdiction aux EI<1Is-Unis 212 .
Un autre responsable, cette fois-ci, de la cOlllpagnie Rolm ct Ilaas, défendant le
même point de vue aflirme : « les hommes Ile mom.,.ol1( pas de faim parce qu 'Oll cour'
certains risques ell tuant les insectes Iluisibles »241.
D'une manière générale, les parasites agricoles et la failll dans \\cs pays en voie de
développement sont les éléments essentiels autour desquels touillent les arguments des
industriels exportateurs des pesticides dangereux. L'argument le plus constamment avanl'l5
par les industriels pour justifier la vente des pesticides intenlils dans ces pays est qlle la
production alimentaire cn sera augmentée. A cet cffCt, MONSANTO, le plus gr'lI1d
tabricant américain des pesticides, déclare: « Des milliers de gens dans le monde n'onl
déjà pas assez à manger, sans produits chimiques, cc sernit encore pire »2-11.
Le Dr D. G. HESSA YON de l'Associ:ltion agro-chillliqlle britannique, déclare de
son côté : « le fait de ne pas pulvériser les clllt ures tropiea Ics serait de toute évidellcc
désastreux et la faminc qui en résulterait serait la plus grande C;ll<lstrorhe qllc le monde aif
• •
24~ E l '
1
.
l'
1
.
1 .
JamaIS connu» '.
t lien (es gcns scralent ( accon avec tous ces r'lIsonncments. llllSqllC
le monde sous-développé a oesoin de pesticides pour améliorer sa production de nourrit\\1lc
et éviter la famine, les dangers que représentent les pesticides sont un mal "éassa;rc, U1W
partie du prix qu'il doit payer pour éviter cette famine.
Certes, les insectes dévorent 1I1le grallde pallie de 1I0S ressources alilllentaires qll'ils
attaquent dans les champs, les silos ou les l'ntl CP(ÎI s, lors des transport s ct dans les pet iles
242 WEIR cl SCHAPIRO : op. cit. p. li>'
W
WEIR cl SCHAPIRO : op. cil p. 19.
244 A. CHETLEY : op. cil. p. 41.
24~ Ibid. p. 41.

réserves domestiques246. Parlant des insectes nuisihles. 011 li même dit qUl' «sur rl1l1ll\\ll'
journée de travail effectuée dans les chmnps. les jardins (1\\1 vf'lgel s. dellx l1elues sonl
destinées à nourrir les hôtes qui Ile sont ras ilnités ,,'11.
Une étude a même (k~lllontré que les plI';lsi(('<; détruisel!! Cil l1lO\\,ClIllC lin liers li, ':
récoltes alimentaires mondiales au cours de la clOis';;III(C. de
1:1 moisson ct
dl'
l'emmagasinage, en particulier d,IIlS les pays cn voie de dévclnppelllC'ut oi, les c1él:![lts ,';' Illt
plus grands.
On évalue même ù 4()','{· les pntcs des I«('olles dlf('s :IIIX 1':If;l.si1cs cn 1\\11\\(:' itjlh'
Latine248 .
Mais tous ces arguments ci-dessus aV,1I1l'l<S pOlir just ilïer la vente Ill<lssive, dans (TS
pays, des pesticides interdits sonnent creux : ils nc sont pliS lùnL!(-s. l,cs prendre l'Il
considération ramènerait ft conclure que 1<1 plupart des pest icides expédiés dans ces l':IY~;
sont employés pour augmenter les récoltes Ilécess,lires <'t
l'alimentation de
Ielll~;
populations.
Dans le Tiers-Monde, la plupart des pesticides sont utilisés pour les cultures de luxe.
destinées à l'exportation ct non celles qui fOlllnissent la nourriture aux popuJat ions:'!".
C'est une réalité qu'on rencontre partout en Afrique comme dans les autles pays du Ticrs-
Monde.
En Afrique de l'Ouest, notamment au Togo, la majorité des insect icides utilisés pli'
les paysans le sont pour les cultures d'exportation Iels que le colon, le cafe ct le cacao. De
plus, ils le font souvent sans la moindre assistance d'un encadreur agricole; ce qui l<lis,<;e
facilement présager des conséquences qui s'ensuivront car, cOlllme cela arrive souvenl,
celui-ci se contente de quelques cxplical ions sOlllmaires anx paysan<; sm l'usage de;
pesticides en leur possession, expl ications que !Id Illêllle parfo;,s ne lll'IÎt lise pas très hien' ;i1.
246 M. DES PAX : article précité, n" (l.
247 M. DES PAX : article précité. n"6.
248 A. CHETLEY : op. cil. p. 2X.
249 WEIR et SCHAPIRO: op. cil. p. I,l; i\\. CIIFr'LEY : op. cil. p, 42,
2.~O Originaire de ce pnys, notre an:llyse esl hasée sur noIre cOllnaiss.lnCl' du milieu,

1:~:~
En Indonésie, de grands dOlll:lincs consan6s i'i dcs cnllmes d'cXpOIl;ltion - lIoix (k
coco, café, canne à sucre et caou1cllouc - COnSOlllllH'lIt IIl1e 'In;1111 ité de pest icidcs vi11i't ["IIi"
plus grande que celle utilisl:e P;II les petits pmpriél:lin's 11;1";lillallt pour Ics mlll Il'''
locaux, ct ccci en dépit du I;til que ces dcmiel s clIll ivcllt des surfaces sepl foi'; ,dll':
étendues que celles des dom;lincs des cullure,s d·cxportation"!.
En Amérique centrale, l'ail rcnversan(, les ']W}'t, de la va1cur totale de la prodllct jOli
agricole - surtout du café, du C;lcao ct du colon - sont exportés, en dépit de la faim el de 1;1
malnutrition qui règnent dans ces contrées. Ll culture du coton est l'une de celles qlli
demandent le plus de pesticides.
Au Salvador, pays minuscule, la produclion de coton ;lhsorhe Il' cinquième de toul le
Parathion mortel utilisé dans le monde. On emploie chaque ;11111ée 750 kilogralllllH";
d'insecticide par kilomètre carré des champs de colon du P;IY<'~:>.
Dans la quasi-toi alité des cas, les peslicides exportés vers le Tiers-Monde solll
destinés à développer les cultures d'exporlation, Une enquêle hien menée dans les allll(~es
1980 le confrrme et estime que 70% des pesti.:idcs employés dans le Tiers-Monde Sl'Ilt
utilisés pour les cultures destinées à l'exportation, qu'elles soicnt alimentaires - l'ail:,
cacao, canne à sucre, fruits, légumes d'hiver - ou non alimcnl:lires - coton, caolltchouc.'~l.
Il est alors «impossible d'affirmer avec ohjcetivité que l'emploi des pesticides d;ms le
Tiers-Monde aide à comhattre la faim cl la malnutrition, Pour lutter cOlltre la (;lÎm, il lallt
mettre entre les mains des pauvres le pouvoir de faire pousser ou d'acheler la nouITill11"
dont ils ont besoin. Les pesticides sont un élélllenl cent ra 1de l' ;lgriclI ltmc commercia le rlii
Tiers-Monde: ils échouent souvent il aider l'agriculture viVI ii"re ,/' '.
Mais au lieu d'aider ces pays i'lmieux produire les alimellts pOI\\l' leurs popuhti(lll';. h
technologie les oblige à manipuler des produits hautement toxiques. cause de l'mlCCl';, dr'
malformations congénitales. de slérililé cl de maladies du sysfr>ll1e nerveux.
251 WEIR et SCHAPJRO : op. cil. p, 1\\0.
m WEIR et SCHAPIRO : op. cil, p. J9 el 40.
253 Ibid. p. 39,
i
)
254 A. CHETLEY : op. cil. p. 42.
,f
~
1
1
1
l
1

De toute façon, les dommages causés par l'usage des pest icides snnt eonsidl~rahlc<,
dans les pays du Tiers-Monde.
dangereux d.ms les l'.V.D.
Les dommages dont sont responsahles les pesticide') dan.'; les P.V.D. sonl loin d'(II('
négligeables: il y a les dommages causés aux persol1nes physiques dcs consornmatellls (A)
et les dommages matériels il l'envinll1llCment (n).
Les dommages que cause l'elllploi iUCllllSidùé des Iwsl icidcs dalls Ir' 1l111llfk l'Ill j",
sont importants. En 1972, l'O.M.S. avait estillll~ il. ,')00,01)1) k nomhre :llllluei des (';1'
d'intoxications par pesticides, dont 9200 ayant ellfl:lÎllé la fIloll. I.cs !';IYS du Tins MOlldt'
représentent
seulement
1YJ,)
de
la
COIlSOnllllat ion
mOIHlialc
des
pest icides,
Il];11':
enregistrent environ 50% dcs CIS d'intoxications cl prt's des ,'1-1 des décl's. Si les (';\\':
d'intoxications augmentent proportiollnellement il la consolllllnlioll des pesticides (!t'pui';
1972, soit 5% par an, on enregistrerait des millions de vict imes dalls le Illonde dont pills d"
m
la moitié dans le Tiers-MoIHic
.
Toujours, d'après les statist iques de l'O.I'li1.S., les pesticides sont la cause d'un décl",
toutes les cent cinq minules, soit au lotal sono morts P;lI' an. Ces slalisliques restent
cependant silencieuses sur le nombre de cancers, d'avortements, de malformations ct de
bébés mort-nés provoqués par l'usage des peslieidesl~6.
Selon Virgil FREED, ('-
"Ilsultant cie l'LJS-i\\I D2'i7, le laux d'empoisonnement aux
pesticides dans le Tiers-Mon(t
Ileize fois plus élevé que celui des Elats-Unis, ma)!!lé
b
1
'f' 1
.. 1
1
)~R
un usage eaucoup pus massl le pesllell cs <. ans cc pays·· .
Toutes ces estimations mont renl hien l' illlport allee des dOll1mages dus à r usage d('~;
pesticides dans le Tiers-Monde. Les raisons essentielles il cct l~tal de rail sont mulliples.
2S5 Voir la revue« Consommateurs-Actualité », n"1(H du 4 llovemhre 19W). p, 10-S : WEIR ct S( '1"\\1'11-''' ' "1'
cit. p. 19.
256 WEIR ct SCHAPIRO: op. cil. p. 19.

Dans les pays du Tiers-Monde. le Illaléricl ;I<kqllal pOlir JH'rllJcftre 1111 lI';;I!", ,1,
pesticides sans grands dangers pour les III ilis:llclIIS !:Iil <klatll. r~';d'SCI1('(' d,' """!'
imperméables, de comhinaisol1s. dl' hol!cs ,'1 dl' lc,pil:lft'llIS rClId 1'''',:11'(' dr'~; 111' ;1;, !,I
plus périlleux.
La plupart des paysans ll1:lIlipulcnl Il;~:uli(~'r('Ill\\'111 Cl"; produilS san:; :ltlCIII1l' )111 d., Il' ,"
'("Il
spéciale et sont constmlllllcnl cxposés atlx dkts lksdits I\\('sl icidcs . , Pl dall~; ces ,,;!,j,,\\1'
l'envoi des pesticides h:lll\\clllent lnxiqlles n'l'st pa, de n:ll11rc ;1 :ln;l1lgcr ks l'hosc,s,
A Culiaean, dans le Nord du Mcx iq Ill', nil sc fn HI\\'CI1! de vasl cs pl;1I11 :11 joll'; d,'
tomates pour les supermarchés américains, les médecins du gouverneillenl sign;liclll !j,l'il,.
voient chaque semaine un ou deux empoisOllllel1lcnl s dus aux pesl ieides, cl parfois (ks
ouvriers atteints de convulsions. COlIlIlle ces derniers ne hénéficicnt d';1I1CUn c(lnrl~ dl'
maladie payé, ils retournenl souvent lout de Sll il e au 1ra va il et lem él al empire, '1'0111 (", l,'"
deux ou trois semaines, l'hôpital fcdéral de Cllliacnll "oigne un ouvrier agricole pOlil "',..
anémie aplastique, maladie du sang consécutive ;'1 rlls;lge de pesticides conlclI:\\llf dll
chlore, pesticides utilisés dallS 1:1 régiol1. Ellvirun la 111l1ili(~ dcs viclillll'S cn I1ICUI""I),
En Amérique centrale. selon lIll rapporl
dl'
l' Im:lilill
dl'
l~l'chl'\\chcs \\'\\ ",
Technologie Industrielle, l'ICAITI'(i'. plus de qllatorze mille elllpOiSOllllClllCnts el qll;lI;l1l!\\
décès causés par des pesticides ollt été enregistrés l'Il11T 1<)72 ct lIn.') d;lns les pl:1Il1:lli",,'
de coton des plaines côtières du P;leifïqlle, Le chiffre n~el est cntaincl1lcllI bC:llICOII/l ph"
élevé, mais impossible à détcfllliner'(12,
Au Pakistan, en Asie, à des milliers de ~ilolll(\\I'cs de l'/\\m;,iqlle <Tlllr:"', !.
pesticides tuent aussi. En 1976, 2C)()() personncs tOlllh(\\rclll Il1al"dcs cl :'1 d'Cll!I" ,II,
moururent à callse du «Malall1ion >.>, peslicidc fù 111'11 i l'Il gr;1I1dc pallie p:lr 1:1 ('(\\11'1",\\11';'
« American cyanalllid » de New- York cl par la '( 1....1ollll'disl.lll ». 1I1le COIII(1:tgllic il11;'I'II'
2S7 US-AID: United Stale, I\\~'cflry "'1 Inll'IILilillll:t1 p('II'IIII'I'1'111''III' l'Ilrl':lIIÎ","i"" ,!'(IIIIC' I!t'Ill'III ,"
s'occupant de la cllopémf ion :Ill dl;,C Il 'f'JWIIIl'fll.
m WEIR ET SCHAPIRO: op, l'if p, l'),
259 Au Togo pClldant les SCllll'tlCCS, les paysans, S:III, :IIII'III1l' l"II!o'l'lioll IIlili';!'II! 1"tIIs 'lI:tÎll, 1'''"' \\11' l "l'
,
:
pesticides Œndrinc) clics grains av:!n[ Icllllllisc l'Illenc 1'0111 qlH' kt: oiq'j\\llX Ill' !t'\\ dl;tt'lIClll 1':1':.
260 WEIR cl SCHAPIRO : op, l'it, p, 20
261 ICAITI: InstÎtulo CI:.'nlI'O;lmriC:lIlo dl' Inl'cs/Î!':rI'ÎOtl y !cC'11I10!",PÎ:l Indll"IIÎ;t1 INonprolil 1",;,';11' Il '" J',IIl;
.,
fundcd hy U,N. and 5 Cl'nrml Americain ('ollnlries),
262 WEIR cl SCHAPIRO: op, l'il. p, :'0 cl 21,
1

J :H;
Ce « Malathion » faisait partie d'ull progr;ulllllt' (:!;Ihli P:lI le l~ollvcn]('n1l'1I1 dcs FinI'; , Illi .
pour l'éradication de la ll1ar;lriaHI~.
En Afrique, les victimes des peslicides so1l1 aussi nOlllhrellses. EIH·olllar-:{<.; ;1 l'll';;l!'''
des pesticides par les pouvoirs puhlics ;1 (1 ;I\\'ns les (,;lIl1p:lgnes de 11IodellJis;11 ion d,
l'agriculture, le nombrc c/'cmpoisollncnlcnts cl <le Illorts ;nlglllclllelli cl1:](I"C al1née <I:II]S Il''
rangs des paysans. Le Gr;1I110,\\one, pesl ici<lc confcn;1I11 </11 P:II;1(I',al. cc dé.<.;!lcrhalll 11101 li'.
a tué au moins 18 personnes en quatre ans sur les h:luls pl:llcallx de l'ouest de la NO(l\\I'II,
Guinée où on l'utilise d.ms les planlalions de c;lIë cl d;ms les jardins. ('c c!liUrc Ile rellil,'
t
t 1
b
' 1 l
' 1 . ,
~
l
' l
,'(, 1
pas pour au an
e nom re l'CC {CS persounes tllees. cc Ul-el pOlrv;1I1t l'Ire p us c eve
,
En Afrique de l'Ouest, d;1I1S 1:1 rt~giol1 du Cap-Vell, cc SOl1t des gens illclll(~<;.
ignorant jusqu'à la dénomination du produit, qui assurent la eOllllllcrcialisation <I('S
pesticides agricoles pourtant répulés très dangereux. Que sc [1;lssc-t-illors<]ue le Ilwr;lÎcl1l'1
illettré se rend chez un comll1erçant analphabète, lui 'lllssi, pOlir se proc\\II'cr un pest il' ide'!
Qu'en est-il du dosage, ÔU délai ô'utilisation, <lu lieu d'entrepos'lge ? /);1I1S ces
circonstances, on peut aisément imaginer les conséquences Slll les consomllJateurs. Et <Ial1';
ces conditions, la chaîne des victimes s'allonge. Cc rut le cas dans ulle petite ville (Ill
Sénégal appelée Diohine. Dans cette ville, une <lame s'était procurée ulle houteille vide dc
pesticide pour y mettre sa provision d'huile devant servir Ii la prépllralion du repas (:l11lili:lI
A la [m dudit repas, 16 personnes Illoururent intoxiquées. Vérification faite, on .1 plI
constater que la bouteille portait l'étiquette « acide sulrurique »1(,'.
En général, l'industrie des pesticides prétend qu'un empoisol1l1ellleni mortel ;111:\\
pesticides est rare, et semhle surln,,( dll allx ,lccidenls (flend,llll le tran~;plllt par eXl'lllpl"),
aux suicides ou aux crimes. Les prolCssionllels vOlll même ,iusqu'iI allilml'r que si (,,,,
instructions sont respectées. 1',lgricu/teur « co",,,ftCI/( » S,lit Cllnllllt'nt manipuler ct \\11 ili',"1
ces produits. Ils reconnaissent eependanl qu'il peut hien cn ê:lre alllrcment c!;1I1<; l,"
P.V.D. 266 Combien d'agriculteurs cOlllpétents peut-on recenser dans les P,lYS arric;lil1<; ')
Ces pays sont essentiellement agricoles ct la plupart des paysans ne savent ni lire, ni écl iH' :
263 Ibid. p. 22.
264 WEIR et SCHAPIRO : op, cit. p, 2,t,
265 A. SANTOS: thèse précitée, op, cil. p. 21 X.
266 A. CHETLEY : op. cil. p. :n

l ,)~
. ) 1
ce qui laisse imaginer la suitc des évènenl<'nls qU:lIll :1 l'us;lfe des pe~;f jc;<!('S ql1ïb :III1Pfll!
manipuler.
Même clans les pays industriels, il peut y ,lvoir des prohli'nll's i1lT sujel, 1Jne cn<I'II"II'
menée en Grande-Bretagnc a montré qllc ~(1% des agricultc\\lIs ne re<;oivenl :l1II"111li'
formation pour l'usage et la sécurilé des pesticides. r~lIe n10nlrc ;mss; que 11I0ins dl' 21)';
utilisent des vêtements de protect ion, que J9% ne lisent même pas l' ;n/ùrmal ion géIH~r:t II'
sur les pesticides, que plus du quart trouvcnt celtc in/()f1nal ion difficile il comprcnd le' cl
plus de la moitié utilisent un équipemcnt incorrect. Bien <]U';lllcun C;lS lJlortel dû :\\ l'lIsa,pl'
des pesticides n'ait été signalé au cours de ccs dernières :InlllÇeS, honnis un petit n(1II1"II'
d'empoisonnements, on constatc d'lIne façon alarmante \\111 taux de trouhles plll.s (~lcv( ("11l'/
1
f
d,
.
.
l
'1
.
'hl
es en ants
ouvriers agnco es a CUI' n;IISS;lIlCC" .
Aux Etats-Unis, d'après les cstinl:ltions de l'E.P.Â,, les pesticides provoqll('"t l'"
moyenne
14 mille cas d'empoisonnemen[s P;II' ;lI/foX • {Jill' (~tl,dc. L,ile sur
1}:1t!1
manipulations de pesticides (Floride), bit étnl d'lin taux trois [()is pins élc\\"(~ de déel"; 1':1\\
cancer du poumon, 22(70 des pays;lIls du Nehrasb ut ilisant des org:lIlopho<.;pholl"
manifestent des symptômes cliniqucs d'crnpoisollnclllclll P:U"11('sticides/("'.
Si les pesticides ne sont pas utilisés sans risques dalls les pays indusi riels, si de Il,11,
statistiques sont enregistrées dans ces P;lYS, not:lIlllllenl :lllX FI;lts-llnis 011 la pltlp:1I1 d, .
gens peuvent lire les mises en garde illlprilnées sm les él ilJucttes. 011 Illle plli'';'.;"",'
institution gouvernementale, ['E. P.;\\, surveille b réglelllell( :11 iOIl des pesl icidcs. cl oit l,
syndicats d'ouvriers agricoles luttellt pour proléger la s;llllé dl' lem.s 1I\\('1l1hleS, d"if ''il
s'attendre à voir ces mêmes pesticides ulilisl~s S;llIS ri~;qtll's (hns le Tin',; 1\\1i\\fl<!c. SIIlIIIl!1
lorsqu'on y vend les plus d:lIlgerell'\\ ?
La réalité est que \\cs estim:lliolls des victillles dcs l'l'~;ticides f:lilcs l'Il dilectioll d,'
P.Y.O. sont bien en dessous du nomhre 1'l~cI. D;lIls l'CS p:1YS 01" l'accès ;lI1X .soins médic;llI\\
est limité, les statistiques POllV;lIlt dOllner Ic chiffrc cxnct des victilllcs des pcsticides S(l111
267 A. CHETLEY : op. cil. p, :n
268 WEIR cl SCHAPIRO: p. 15.
269 A. CHETLEY : op. cil. p. :n.

difficiles à obtenir. L'cxemplc de l'Amériqllc Centralc pelll SYlllholisCI ;1 lui 1(1[11 ~;("li (T
manque de statistiqucs fiables sllr les victimes des pest icides.
Dans
cctte
région,
cnlre
11J71
ct
1()76,
011
;1
emq,isl Il'
l')J)()O
(,;1',
d'empoisonnements par pesticides. Cependanl, lin mt-decin qlli illspeclait seulemelll dt'Il'l
hôpitaux ruraux au Nicaragua, IrollV;l 400 C'lS270. Cc qlli "lisse .illl~C1 de la 11011 li:\\bilill; <III
chiffre des victimcs élalé sur la période 1(J71-]976,
Au problème de stalistiques fi;lbles, ,s'ajoute cehli des di;t,!~llo~;li('.', nl()1I1:s (h' h 1';'11
des médecins. Ceci s'expliyue par le lail qlle beallcoup de lll(:dccillS ('onllaissclIl Ill;" l, "
symptômes manifestés par les in!oxical ions ;lllX pesl il'ides, P:lr ('\\('Ill[1k, 1111 Il,,:(h in
brésilien, en examinant une jeullc tille de 14 ans, affirma qu'elle ,<;ollllr:lii des tlllllh1...
nerveux alors qu'il s'agiss;lit d'ulle illloxicliioll due au ''1);II;l(ll1:II'', '"l pc;lieide l';'
d
f 1 ·
,
1 ('
' ( '1
'! 1
angereux a )nque par aOmp;I~lIle"
le \\'10Il '"
.
De façon générale, \\cs pesticidt'S SOll! 1111 11<'all d:II1S I;t Tiers t\\lolllh'. 11111' de,', (;,,,.1,
les mieux documentées sur les intoxications par pesticides provielll dll SI i r .;1Ilk:i (/\\,j,,)
Celles-ci deviennent significatives Illl'squ'on les compare ;lUX ;nllrcs l':lII.ses de dél'l\\s. l'Il
1977, on a enregistré plus de décès dus aux pe,sticidcs, soit llll lolal dl' (l'X pcrsonlles. CflH'
ceux causés par la malaria, le télanos, la diphtérie, la coqucluche ct la polio réunis, soif 1111
"7'
total de 646 personnes- -.
Si les chiffres des effets immédiats sont susccpl iblcs d' csl imat ion, en revanche, CCII X
des effets à long terme dcs pest icides sur la santé humainc sont inexistant s. Or, beallCl1l1p
de pesticides sont à l'origine des cancers qui sc développcnt SOIlVl'llt pl\\l';ic\\lrs :Illfléc'; ;'1'1 ,',,;
la manipulation du produit. D'autres f:\\voriscnl les fausses-couches ct Ics 1l1:J1forJll:I' iOIl'; ;t
la naissance.
Un pesticide, le "Keponc", est une cause dïn/Crtilité chez l'holllme. On a d6'PII\\TI1
tout récemment que six désherbants contenant de l'ioxynil - dont plusiclll's ont l<lé mis ':111
le marché depuis plus de 20 ans sans rrnhlèlllcS apP;lrcnls - snn! i\\ l'origine clt-';
270 A. CHETLEY : op. cil. p. H
271
.
14
op. CIl. p..
272 Ibid. p. 34.

malformations à la naJss,lIlcc cllez les annllallX de lahmaloirc. <)u ':rdviendra·l il d!"'.
personnes qui les ont manipulés depuis ces ann(~cs pas.s(~es '1'7\\.
Comme on peut le constalcr, les cons0qllclll"l'S Ij(~es ;', l'IIS;II'<' (ks p"sticid('<; d:lll. Ir-
Tiers-Monde sont redout,lhles, Elles Ile Ic son! pas sCllklm'I1I pOlir lïH 1lllllle, 11'::11'1'1 II,
pesticides, elles le sont mIssi pOllr l'cllvimllllclllcnt.
Les pesticides sont unc Illenacc pour l'ellvirollnclllcnl. 1)'111 US;l!'C S;1I1<; discct IWIIiIIII
fail peser sur la nature d't'nonncs d:lI1.!'C1s: cnllt:lI11ill:llinll du lllili<'11 (<;nl). desIlIlClinll d, il
faune et de la flore, elllpnisonnclllcnl des <;(1I1IlT<; :tliIllCnl:1ill'<;, polllltion dl' l'air.
Les pesticides sonl, dans la plupart des cas, appliqué<; de façon n,(~c;1I1iqu(', SC"lll ,l, '
modes d'emploi établis ;1 l'avance par Ics l;,hricallls. l,cs 'lpplic:ltions répolldcnl rall'III'I.I
de manière adéquate à la men,lCC hiell précise d'un flé,lIl, dans un dOIll<line détclfnill':
D'après des évaluaI ions r;,isonnahks, les fcnniers anl(~ricaill<; pOllITaicnl n'duire Il'11'
emploi d'insecticides de 35% :1 50':!> salls que la qualité de lems lécoltes dilnillill'. Il
suffirait qu'ils traitent selon les besoins ct non en sc ,.01<.' r;1I1 1 ;1 un mode d'eillploi pn'(~t,t1)li
En Amérique centrale, des chercheurs Ollt calculé qlle la quanl ité de pest icides ul ili~;(<;
(spécialement pour le Parathion) esl de 40% plu<; élevée que néccssaire pour allcindlc 1111
.
d
d '
'74
oplImum e pro uctlon~ .
Le problème est que tous ccs modes d'elllploi préétahlis conduisent à un ll~;ll~~'
excessif au détriment de l'environnement. Dans les pays du Tiers l'vlollde l'li rOll rl'IH,'OIlI!l'
les pesticides les plus dangereux, le sort de l'cnvironnelllcllt esl pllls pn'occupalll dll f;lil
des excès de toute sorte.
En général, les pesticides so1l1 ulilisés dans les cldlures d'cxportalion COlllll1l' l,'
coton. Mais il arrive souvenl quc les lrois qllarts des pcslicides 1'"IVl'risés Il),1111 1'1'111
complètement leur out. El les résidus toxiqlles COllt:lI11incnl 1:1 tCITe.
----------------~
m A. CHETLEY : op. cil. p, 3,1.
274 WEIR cl SCHAPIRO: oJl. cil. p. '''.

140
Certains résidus commc ccux de la D.D.T. slnfiltrent dans le sol cl y dememenl 11<""
longtemps, La plupart d'entrc eux pénètrent d,ms les plantes cl s'accllnlltlcnt peu :1 pell '"
long des chaînes alimentaircs. Ces résidus dans la plupart des cas sonl ~ l'origine de h
pollution de certaines sources d'cau vilales pour les p;lysans ct dont l'usage peul, à plus nll
.
1
fI'
1
' 27~
mOInS ong terme, a tecter l'ur sante '.
Les cultures vivrières comme le maïs, Je haricot ct hien d';1l11re,s encore ne sOllt P;I-;
épargnées. Celles-ci sont sou vent l'ont alllinées palce lI' l' c Iles sc 1101' \\'('111 pll'S des C Il:,,, Il'''
des cultures pulvérisées. Du fait de la pollution dl' l',lir, les Il;îtllt:lges :lussi SOllt ('olll:lIllill'~'
et avec eux les animaux qui s'y trouvent, donc l'élevage·'I".
Comme on peut le constater, l'emploi inconsidéré des pest icides pcul, dans celLlill,
cas, mettre en péril la faunc et la norc (terrestres ou aquatiques) de IOille ulle l'6,eioll. J';"
leurs effets désastreux, ils peuvent bouleverser J'équilihre l~c(llogiql'e d'lllI "lilicu:17 .
Les excmples dans cc domaine s(lnl nOlllhlcllX cl se ICIlCOllIl<'Il1 pallnl,l r1;lll', l"
monde et plus particulièrement dans le '1ïers-~,1ondc.
En 1982, les pesticides furent ~ r origine d' imporl anls dOllllllages aqllat iqlJl's l'Il
Thailande. La pollution des eaux de rivières ct des canaux d' irrig;ll ion enl raÎna la l1I(lrl rlc'
plusieurs millions cie poissons. Cerl<lines estimations évaluèrent les pertes il quelques cinq
millions de kilogrammes de poissons, pour une valeur de quelques dix millions de dollar';
américains. Pour les pauvres en Thaïlande, cela signifiait la perte d'une importante sourn'
de protéines bon marché, Les pesticides, responsables de ces dommages, élaient ut ilisés
dans les rizières et dans les plantations de caoutchouc. Les mêmes dommages flllTnl
enregistrés en Malaisie au début des années 19HO. Les pertes causées allx pays;lJls, q"j
dépendaient de la pêche pour augmenter leurs rcvenus agricoles, s'élevaient ~ envilOn ·11l
millions de dollars par j our2?R.
Au Nigéria, la « dicldrine » ne s'est pas seulemcnl contentée des ennemis nallllt+:
des cultures. Elle pollua les forêts ct les sources (t'emlx cl détruisit plusieurs espèce';
275 M. DESPAX : articlc précité, p. 3, n° 7: WEIR el SCIIAI'IRO : op. cil. Il. 20 el 21.
276 WEIR et SCHAPIRO : op. cil. p. 21.
.277 M
.
D
espax:
'
artlc lc
" t
prcCl 'c, p 1
.. ,11 "7 .
278 A. CHETLEY : op. cil. p. 29 ct 30.

] il 1
d'insectes inoffensifs, de poissons, de chauves-souris ct d' écurcui Is. l' ne espèce de sin}'c";
fut pratiquement décimée, donc éliminée. Dans certaines réginn, elle s'est infiltrée dal1'; '"
]
"
1
7
12
. '7'1
so et y restee tres ongtel11ps (entre
ct.
mOl s r .
Tous ces effets néfastes des pesticides sllr l'cnvironlwlllenl SI' renconl1<'nl d:"l
presque toutes les régions ,lgricoles du 1110nde cn dévc loppemenl. I.a l'ont ;llJlin;lt j'III d,
l'environnement met le consol11mateur dans un cercle vicieux. Pour (T demier. il (' 1
désormais impossible de ne p,IS manger. boire ct respirer les pesticides COIIlIll<' 1"iI]II'! ,-
l'incident suivant enregistré d,lIls le \\'illage de Tolima en ('ololll!Jie oi, l'("pand;,/'/' If,
insecticides se fait par avion:
«
Au bruit de 1';lvjoll, les pays:lIllleS ~;t' précipill'rcnl hors de "'IIIS /Il:\\1';(l\\)\\. l' 11,
couvrirent leurs puits, conduisirent les enf;lIl1s t'I le hét;,il ;) l'ahri, <1<"1;1<'11'\\Il'nl le lill,!'(' d,
lignes. Déjà au loin, une grasse et line pluie oh~:clfrciss;lil les v:I';lt'S Ândc';
Puis, pendant que « la tempête humaine \\) s'avançail dans la vall(e de Tolilll:!. k':
femmes claquèrent portes ct fenêtres. Volant has, l'avion répandait des pesticides p:lltoll1 .
au-dessus des canaux servant ;L la lessive el à la vaisselle. all-desslls des Illaisons, au-dcs s ,,';
des vergers, au-dessus du petit hôpital Oll les ouvriers étaient traités quand le poison ks
rendait sérieusement malades, Les cihles prillcip;lIes étaient les grands champs de coton cl
de riz dominant la vallée. Mais le pilote ne coupait pas l';llilllelltation des gicleurs qU;lIId il
volait d'un champ à l'autre. Rien ne lui échappait.« Après le Jl,lssage des avions, dis;lil
l'une des femmes, les poulets deviennent comme saouls, tournent en rond ou tOJ1lbent )'.
Dans les champs, c'était pire. Là, les paysans pris dans le nuage chilnique, avail'nt
encore moins de protection quc les poulets. Ils rcspirnient le poison Cil altclldalll qlll' Il'
brouillard se dissipe et retournaicnt vile au travail. JI n'y avait P:IS dl' choix pOlll If":
paysans de la vallée de Tolima »2XO
Cet exemple des paysans Colomhiens I\\lontre l'engrenage dalls lequel vivenl k':
consommateurs du Tiers- Monde du Llif des pest icidcs c1angcrcu X. <)u' iIs les maniplI knt 'li 1
279 A. CHETl_EY : op. cil. p..11.
280 A. CHETLEY : op. cit. p. 37.

142
non, la contamination de l'cnvironncment les maintient dal1s lin circuil d'Clllpoisonl1ClIll'lll
continu.
Tout compte fait, le contexte actuel du cOllllllerec illternatÎon:d esl vicil~, " \\1:lti"'lk
de façon quasi-permancntc les d:tn~crs <\\onl les pa)'s f:lihles Cil SOlll ks pl incil':tI, '
victimes. Aussi, pour sc pr<l\\(~!~cr. l'CS p:1YS doivcnt-ils 11]('111(' cn (WII\\T(' des 11111'./'11
adéquats capables de les préservcr contre l'envoi. par les préda1cllls <\\11 Cnl1ll11l'I' ('
international, des produits dangereux il l'inférieur de leurs frontières Il:1Iionalcs. :111111'111,"1
dit, sur leurs marchés nationaux.

CHAPITRE II
tlCessez de vous servir de nous comme d'un dépotoir! S'exclama un haut responsable
d'Etat du Kenya, le Kenya déteste que l'on se serve des pays du Tiers-Monde comme des
laboratoires ou des dépotoirs pour des produits chimiques qui ont été interdits ou qui n'ont pas
été con~enablement testéstl1 .
Ce cri désespéré n'est pas un cas isolé, mais se veut seulement être l'écho des milliers de
cris des victimes innocentes d'un commerce sans scrupule. Par-dessus tout, il exprime le désarroi
dans lequel se trouvent les pays du Tiers-Monde réduits à l'impuissance devant les excès du
commerce international. Ces excès ne se limitent pas aux seuls produits chimiques, ils concernent
aussi les produits de consommation courante dont les produits pharmaceutiques et les produits
alimentaires. Bref, ils concernent tout ce qui peut avoir une valeur marchande?
Si
les
conséquences
de
ces
pratiques
commerciales
sur
l'homme
comme
sur
l'environnement sont difficiles à quantifier, 3 on s'accorde cependant à reconnaître qu'elles sont
considérables dans cette partie du monde4 devenue les poubelles des pays riches. 5
\\
'L'exclamation est du ministre du Développement et de l'Hydraulique du kenya 1<; Dr GIKONYO, alors qu'il
participait à une réunion du P.N.U.E .CfWEIR et SCHAPIRO: op. cit . p. 75 .
\\
2 A.CHETLEY : op . cit . p .1 et suivants.
\\
i
3L'absence de statistiques dans ces pays explique en partie cette difficulté. A celle-ci vient s'ajouter les diagnostics
"
,
erronés dans le cas d'empoisonnement par pesticides.
j
4WE1R et SCHAPIRO:op.cit. p. 19 et S
5ibid. p.27 et suivant

144
En
1972,
l'O.M.S
a
fait
une
estimation
prudente
d'environ
500
cas
annuels
d'empoisonnements accidentels par pesticides dans le monde entier6 . L'OXFAM, extrapolant ces
chiffres, suggère que jusqu'en 1981, il dût y avoir 29000 victimes, la plupart (72%) dans les
P.Y.O.?
Les statistiques relatives aux risques résultant de l'usage non approprié d'un médicament
sont plus difficiles à obtenir. Si l'on tient compte de ce qui se passe dans les pays développés,8 on
peut aisément estimer que des milliers de gens dans ces pays sont victimes des réactions négatives
des médicaments, réactions dues soit à une prescription en doses excessives,9 soit à une
prescription extrêmement dangereuse lO • Il faut aussi souligner le manque d'information relative
aux victimes des effets indirects des médicaments.
Un autre effet à long terme est l'impact des produits chimiques sur l'environnement et
leurs conséquences sur la santé future. Le nombre et l'effet des carcinogènes libérés dans l'air, la
terre et l'eau ont pour résultat d'intensifier la recherche anti-cancéreuse I1 •
Que cela concerne les pesticides ou les produits pharmaceutiques, la sot1rce des risques
est la même. Elle réside dans le manque d'information sur les dangers potentiels que l'on peut
rencontrer lors de leur utilisation. Le besoin d'avoir une bonne information est capital pour la vie
du destinataire; et cette information doit, bien sûr, circuler. Ceci est particulièrement important
pour les exportations des produits du Nord vers le Sud.
La majeure partie du marché mondial des produits pharmaceutiques et des pesticides est
contrôlée par des compagnies implantées ou dirigées depuis les pays membres de l'Union
Européenne.
6CHETLEY: op.cit. p.2
7Andrew CHETLEY: op. cit, p. 2
sibid. Aux U.S.A., on a estimé en 1974 que 30 000 morts par an étaient dus aux réactions négatives des
médicaments lesquelles occasionnent environ 2 milliards de dollars en frais médicaux et d'hospitalisation. Une
étude antérieure faite en 1971 suggérait que le nombre des décès pourrait s'élever à' 130 000. Au Royaume Uni,
une étude datant de 1979 a révélé qu'au moins 2 patients sur cinq recevant des médicaments de leur docteur
souffrent d'effets secondaires.
\\
9ibid. le collège royal des médecins du Royaume Uni a indiqué qu'une prescription en dose excessive constitue la
cause de majeure d'effets contraires, surtout chez les patients âgés, et a noté qu'un patient âgé sur dix est
hospitalisé uniquement ou partiellement à cause des réactions néfastes des médicaments.
IOibid. p. 1.
IIlbid. p. 2

145
Les compagnies installées en Europe couvrent un cinquième (115) des ventes mondiales
des médicaments et près de la moitié des exportations. Plus des deux cinquièmes (2/5) des ventes
mondiales des pesticides et 61 % du marché des exportations sont dans les mains des industriels
européens 12. Du fait de cette forte concentration en Europe des fIrmes fabricant des produits
pharmaceutiques et des pesticides et de cette forte percée dans le marché des exportations,
l'Union Européenne se doit d'assumer une responsabilité particulière: celle de garantir que ce
sont bien les mêmes normes d'utilisation qui sont recommandées partout où ses produits
circulent. Or cette responsabilité est rarement assumée 13•
En 1980, un rapport de l'ü.C.D.E. révéla que dans la majorité des 24 pays industriels où
avait lieu l'enquête, les produits exportés ne comportaient aucune mention des exigences requises
par les réglementations de sécurité des pays d'origine, que ce soit de façon explicite ou
implicite 14• L'excuse habituelle donnée par les gouvernements des pays concernés pour se
soustraire à l'application de ces normes à l'exportation consiste à dire : faire ainsi, serait "s'ingérer
dans la souveraineté des pays importateurs,,15.
Le problème de la lutte contre les exportations dangereuses ne se situe pas aujourd'hui au
stade des initiatives, mais plutôt dans la volonté de les mettre en pratique pour enrayer le mal '6.
En 1977, 1978 et 1979, des résolutions furent adoptées par le comité exécutif du
programme des Nations Unies pour l'Environnement (P.N.U.E.) ; celles-ci obtinrent le soutient
total des P.V.D. représentés. Elles demandèrent de façon répétée aux Nations industrialisées
d'empêcher les exportations des produits chimiques potentiellement nuisibles dont l'usage est
interdit ou restreint dans leur pays d'origine tant qu'une information préalable n'aurait pas circulé
et que les autorités du pays destinataire n'auraient pas donné leur accord 17.
l2 A. CHETLEY : op.cit, p. 79.
U Si ces contrôles sont plus rigoureux à l'intérieure de l'Union, ils
sont en revanche plus complaisants dès lors
que les produits sont destinés à être exportés hors de l'Union, en particulier vers les pays du Sud. La directive n°
2455-92 du conseil du 23 juillet 1992 concernant les exportations et importations de certains produits chimiques
ne pourra pas pallier ces insuffisances cllf elle ne s'occupe que des procédures de notification et de consentement
préalable après information. Cf. 1.0 ..L 2;; 1 du 29-08-92.p.13.
14 CHETLEY : op.cit.p. 68.
15 ibid
16 ibid
17 A. CHETLEY:op.cit. p. 68

146
De plus, en 1979, L'Assemblée Générale des Nations Unies approuva la résolution
AlRES/34/173 appelant ses Etats membres à partager l'information détenue sur les produits
chimiques interdits et à décourager l'exportation de tels produits vers d'autres pays, en
concertation avec les pays importateurs l8 •
On enregistra, certes, de bonnes volontés dans ce sens,19 mais elles sont loin d'être
suffisantes pour empêcher les risques de circuler.
De façon paradoxale, ces pratiques commerciales forment un cercle sans fin. Elles ne
préservent pas, loin s'en faut, les intérêts des consommateurs des pays exportateurs des produits
incriminés dans la mesure où ces produits à hauts risques (pesticides en particuliers) s'utilisent
principalement dans les plantations de fruits et légumes ou dans les cultures d'exportation
destinées à être commercialisés dans le Nord20•
La vente des produits pharmaceutiques et des pesticides ne peut pas être considérée
comme un commerce ordinaire car il concerne la santé et le bien-être de l'homme.
18 A. CHETLEY;op.cit. p. 68.
19 ibid: p .69 : La législation belge sur la santé et la nocivité des aliments et des produits pharmaceutiques se
réfere autant aux produits domestiques qu'aux produits exportables. En France, la loi du 21 juillet 1983 sur la
sécurité des consommateurs concerne aussi bien les produits domestiques que ceux destinés àl'exporlation (arL2).
En 1974, le gouvernement japonais a promulgué une loi interdisant l'utilisation sur le territoire national du B.H.C
et du D.D.T. Cette loi précise que l'exportation desdits produits n'est pas possible que si le pays importateur
approuve l'importation et qu'il est parfaitement informé de l'interdiction des deux produits au Japon. Au mois de
mars 1985, le gouvernement hollandais a adopté un amendement à sa législation sur l'environnement et les
produits nuisibles. Celui-ci exige une déclaratipn préalable faite à la fois au gouvernement hollandais et au
gouvernement de la nation importatrice sur tous les produits mentionnés par 1a1égis1ation et destinés à
l'exportation, et cela sans compter le consentement préalable du gouvernement importateur, condition
indispensable pour que l'exportation se fasse.
20 C.f Weir et Schapiro : op. cit p. Il et suiv.; Santos Akuété, thèse précitée, p. 221.

147
Or sa manifestation actuelle obéit beaucoup plus à des considérations mercantilistes qu'à
des préoccupations relatives à la santé et à la sécurité du consommateur, en particulier dans les
pays du Tiers-Monde21 •
L'enjeu pour la protection du consommateur du Tiers-Monde est grand et il est du
domaine des pays concernés d'agir pour faire changer les choses. L'action interpelle tous les
acteurs du commerce international.
L'interpellation est cruciale pour les P.V.D. Ceux-ci se doivent de prendre des mesures
judicieuses et concrètes pour
préserver la santé et la sécurité de leur population contre les
exportations dangereuses(section 1). Pour ce faire, ils auront besoin d'un concours extérieur, en
l'occurrence des pays d'origine des marchandises pour garantir de façon efficace et permanente
cette santé et cette sécurité dont a tant besoin tout consommateur(section II).
SECTION 1:
LA
PRESERVATION
DE
LA
SANTE
ET
DE
LA
SECURITE
DU
CONSOMMATEUR.
Prévenir la maladie est plus efficace et moins coûteux que d'essayer de la traiter ensuite.
Dans le domaine de la protection du consommateur, ce devoir de prévention relève de la
compétence des pouvoirs publics, seuls habilités à prendre des mesures concrètes (sous-section 1)
capables d'exclure des marchés nationaux des produits et services non-conformes aux attentes
sociales (sous section II).
21
En 1977, lorsque l'O.M.S. exprimait sa préférence en faveur d'une liste de 220 médicaments de base
(médicaments essentiels) pour les pays du Tiers-Monde, la réaction de la Fédération Internationale des
Associations des Fabricants de Produits Pharmaceutiques ( I.F.P.M.A) fut virulente: "L'industrie pharmaceutique
estime que les arguments médicaux et économiques avancés par l'O.M.S. pour justitier sa liste de médicaments de
base sont fallacieux et que l'adoption des recommandations du rapport de l'O.M.S. pourrait conduire à une sous-
médication et à une réduction du niveau de la santé actuel". Joseph STETLER, président de l'Association
.. Américaine des producteurs de médicaments ( P.M.A) ajouta à cet effèt : "Ce serait une bien piètre approche
commerciale" que de se rallier à la liste proposée par O.M.S. Quant au vice-président de 'IFPMA, il s'empressa de
répondre à ceux qui ne comprenaient pas leur réticence à l'encontre de la liste de l'O.M.S. :"Vous ne voulez tout
de même pas que nous soutenions des politiques qui vont à l'encontre de nos intérêts".
C.f pour tout cela A. CHETI..EY : op . cil. p. 5 et 6

148
Sous-section 1 : les mesures sécuritaires de protection du consommateur.
Le salut du consommateur dans les P.V.D. est subordonné à la prise de conscience des
pouvoirs publics quant à leur désir de protéger leur population contre les dangers du commerce
international. Et ce désir de protection passe avant tout par l'instauration dans chaque Etat d'un
système de contrôle fiable des importations (§ 1), système dont l'effectivité dépendra du
dynamisme qu'on lui insufflera (§ II).
§I - Le contrôle qualitatif des importations.
Le contrôle pour être efficace et utile aux consommateurs doit avoir une ligne directrice :
- une procédure.
- des modalités.
A - La procédure de contrôle des importations.
Le contrôle doit viser d'un côté les produits alimentaires (a) et de l'autre les produits non
alimentaires et les services (b) dont la mise sur marché national peut être de nature à
compromettre la santé et la sécurité de la population, consommateurs ou simples utilisateurs.
al Le contrôle des produits alimentaires.
Le phénomène mondial de la libéralisation économique et le développement des moyens
de communication et de transport,
favorisent aujourd'hui et de
manière
remarquable,
l'envahissement des marchés africains comme ceux du reste du Tiers-Monde par des produits de
toutes sortes22• Le secteur alimentaire n'en est pas moins épargné, bien au contraire, il est le plus
durement frappé23• Il est alors nécessaire d'accorder une vigilance particulière dans les contrôles
qui y sont consacrés, si contrôle il y a, tant la santé et la sécurité des consommateurs y sont
intimement liées.
22Victorine Ayodélé AGUIAR:"Des produits périmés sur nos marchés" in "TOGO-PRESSE" quotidien Togolais
d'infonnation. n° 4135 du 18 Décembre 1993. p. 1 et 4.
23ibid

149
Les professionnels sont toujours tentés d'annoncer les qualités ou caractéristiques des
produits qu'ils mettent en vente sur les marchés. Le but des contrôles publics est de vérifier le
bien fondé de leurs allégations.
Dans des pays où le secteur informel est majoritaire 24 et à travers lequel s'opèrent toutes
les infùtrations possibles des marchandises illégales et dangereuses, le contrôle public de la
qualité des produits vendus devient un impératif incontournable. Il est donc nécessaire que les
contrôles se fassent au stade où l'on peut agir le plus efficacement possible, c'est-à-dire, au stade
du débarquement des marchandises dans les ports ou du gros, avant la distribution de celles-ci
vers la multitude des points de ventes dans le pays.
Le but d'une telle manoeuvre consiste à éviter la prolifération des produits périmés,
avariés ou inadaptés à tous les coins de rue et sur les marchés publics, stade où les contrôles, si
sérieux soient-ils, pourraient s'avérer inefficaces pour le bien-être du consommateur.
Le contrôle ne doit pas, par ailleurs, se limiter aux seules mentions que comporte
l'étiquette, il doit aller au-delà et chercher à établir 'la corrélation existant entre celles-ci et le
contenu de l'emballage. Autrement dit, le contrôle doit concerner aussi bien le contenant que le
contenu et chercher à vérifier la conformité du contenu avec les déclarations écrites que
comportent le contenant.
hl Le contrôle des autres produits et services.
Les dangers dans la consommation ne se limitent pas seulement aux produits alimentaires.
Ils s'étendent aussi à d'autres produits et aux services. Face aux risques qui ne cessent de
s'accroître sur les marchés africains,25 il est important de prendre des mesures nécessaires pour
protéger le consommateur dans tous les secteurs de la consommation.
Les produits dont il sera question ici, sont ceux qui de près ou de loin intéressent la santé
et la sécurité du consommateur ou de l'utilisateur. Il s'agira plus particulièrement des produits
pharmaceutiques et des pesticides26• Les dommages dont ils sont responsables dans les
populations du Tiers-Monde exigent de la \\part des pouvoirs publics une mise en place d'une
24 Victorine Ayodélé AGUIAR:"Des produits périmés sur nos marchés" in "TOGO-PRESSE" quotidien Togolais
d'information. n° 4135 du 18 Décembre 1993, p. 1 et 4..
25 Cf. le Rapport d'activités du II Janvier 92-31 Mars 1993 de la ligue des consommateurs du BURKINA-FASO.

150
procédure en vue du contrôle de leur distribution, laquelle se fait aujourd'hui de façon
'
h
'7
anarc Ique" ,
Tout comme pour les produits alimentaires, le contrôle doit avant tout porter sur la
vérification de l'exactitude des mentions de l'étiquette avec les caractéristiques du produit. Ceci
suppose la connaissance des procédés de fabrication du produit en cause ; chose difficile à
réaliser dans les pays du Tiers-Monde compte tenu de leur situation dans le domaine technique
relatif à ce genre de travail.
De toute façon, l'infériorité technique dans ce genre de contrôle amènera les autorités
concernées à vouer une confiance aveugle aux déclarations que comportent l'étiquette ou
l'emballage28 ; ce qui n'est pas de nature à sécuriser le consommateur. Outre les mentions de
l'étiquette et de l'emballage, le contrôle doit aussi viser l'emballage lui même, surtout sa capacité à
conserver le produit dans de bonnes conditions pour une consommation ou utilisation future sans
risque.
Un tel contrôle permettra d'éliminer des circuits de' distribution non seulement les produits
périmés, mais aussi les produits dangereux interdits d'usage dans leur pays d'origine. Mais cette
dernière approche ne sera possible que si les autorités de contrôle du pays d'accueil mettent en
oeuvre une procédure spéciale de contrôle: celle de vérifier, à travers les autorités de contrôle du
pays d'origine du produit, si le produit en cause a été ou non interdit ou restreint de vente dans
leur pays. Ceci ne peut se faire que dans le cadre des relations basées sur la confiance mutuelle
entre les autorités de contrôle des pays développés et celles des pays du Tiers-Monde.
En ce qui concerne les services qui, d'ailleurs, relèvent des activités à caractère industriel
et commercial, une procédure spéciale en vue d'un contrôle efficace s'impose. Dans ce domaine,
aussi, une coopération avec les autorités de contrôle du pays d'origine s'avère nécessaire. Celle-ci
26 Cf supra, chapitre 1
27 cf Akuété SANTOS: Thèse précitée, p. 218 ; WEIR et SCHAPIRO : op. cil., p. 23 et suiv., A. CHETLEY : op
cil. p .5 et suiv.
28 Le danger de celle confiance aveugle réside dans le fait que ces informations que contiennent les étiquettes 01
emballages sont rarement fiables, certains industriels contournant les procédures de contrôles par des procédés
maquillage, de falsification ou de dissimulation d'infonnations. cfCHETLEY : op. cil., p. 9 et suiv.

151
permettra d'éviter "l'atterrissage" dans les pays du Tiers-Monde des services préjudiciables à la
santé et à la sécurité des consommateurs et à l'environnement dans ses différentes composantes29.
B - Les modalités du contrôle.
La nécessité de protéger à tout prix le consommateur exige de la part des autorités de
contrôle une défmition précise· des modalités en fonction desquelles les contrôles doivent
s'opérer, qu'il s'agisse des produits alimentaires (a) ou d'autres produits de grande consommation
ou des services (b).
al Les modalités du contrôle des produits alimentaires.
En ce qui concerne les produits alimentaires, il est important que des contrôles se fassent
de manière régulière en fonction d'un programme défmi à l'avance par les autorités qui en ont la
responsabilité. Ceux-ci doivent porter indifféremment aussi bien sur les produits nationaux que
sur les produits importés même si ces derniers sont des cibles prioritaires.
En effet; la plupart des produits se distinguent dans les transactions internationales par
leurs signes particuliers appelés signes de qualité. Ces signes garantissent la qualité du produit
commercialisé. Pour un contrôle efficace, il est nécessaire de mettre au point une stratégie
spéciale de contrôle qui permettra de distinguer la bonne qualité de la mauvaise, les fraudes dans
le domaine étant tellement fréquentes.
Les signes de qualité permettent aux producteurs, transformateur et distributeur de
valoriser et de différencier les produits mis en vente. Ils sont nombreux dans l'agro-alimentaire.
On peut citer par exemple : les labels agricoles, les appellations d'origine, les produits issus de
l'agriculture biologique ou de zone de montagne, etc.30• La protection du marché local contre les
produits de toutes sortes passe par la maîtrise de ces signes; ceci permettra de distinguer les vrais
des faux et d'éviter ainsi l'envahissement des marchés nationaux des produits dangereux issus de
la fraude.
29 Voir Edith WENGER : article précité, p. 207 et suivants.
)
30 Alain SOROSTE : "Signes de la qualité agro-alimentaire: les projets européens", Option Qualité. n° 81 février
1981, p. 2.

152
hl Les modalités du contrôle des autres produits et services.
Outre les produits alimentaires, certains produits issus des importations mettent
particulièrement en danger la santé et la sécurité des consommateurs. Pour éviter que ces
produits ne causent des dommages irréparables aux utilisateurs, un contrôle a priori de leur
conformité aux exigences de la protection physique de ces derniers s'avère nécessaire31~
Le contrôle a priori veut que les produits issus des importations n'accèdent au marché
national qu'après des autorisations expresses des autorités chargées de leur contrôle. Celles-ci
doivent porter sur des produits aussi divers que les spécialités pharmaceutiques destinées à
l'homme ou les médicaments destinés aux animaux, les produits chimiques, notamment les
pesticides destinés à l'agriculture, les semences et plants, les automobiles ou tout autre produit
susceptible de causer des dommages aux utilisateurs. Toutes les autorisations ne doivent viser
qu'un seul but: la protection de la santé et de la sécurité du consommateur32~
Si les produits alimentaires se distinguent dans la plupart des cas par leurs signes, les
produits non alimentaires ou autres produits (produits industriels, produits agricoles non
alimentaires et biens d'équipement) se distinguent par des signes appelés certificats de
qualification. Ces certificats attestent que les informations fournies au consommateur sont
exactes et que les caractéristiques spécifiques ont fait l'objet d'un contrôle par un organisme
33
distinct du professionnel concerné et agréé par l'administration du pays d'origine .
Dans les P.V.D., s'il est possible de procéder aux contrôles de tous les produits issus des
importations, il est bénéfique d'accentuer ces contrôles dans les secteurs où la santé et la sécurité
du consommateur sont menacées par la vente des produits dangereux: il s'agit des secteurs des
produits pharmaceutiques et des produits chimiques, en l'occurrence les pesticides.
Pour ces deux secteurs, il est nécessaire de mettre en place dans chaque pays, un système
de contrôle efficace. Non seulement ces produits doivent être soumis à une autorisation expresse
de mise sur le marché, ils ne doivent en outre être délivrés que par des professionnels spécialisés:
3\\ CAS et FERRIER: op. cil., p. 210.
31 CAS et FERRIER: op. cil., p. 210.
33 "Les signes de la qualité" Option Qualité n° 5, Avril 1988, p. 3.

153
pharmaciens pour les spécialités pharmaceutiques,
pharmaciens ou docteurs
(médecins)
vétérinaires pour les médicaments destinés aux animaux; Ingénieurs agronomes ou Encadreurs
34
spécialisés dans l'agriculture pour les produits chimiques, notamment les pesticides . Le lien
existant entre ces produits et la santé du consommateur exige la prise de telles précautions.
Les exemples dans ce domaine sont nombreux et témoignent de ce lien étroit : la
pharmacie vétérinaire intéresse directement la santé des consommateurs, les substances absorbées
par les animaux peuvent en effet, au dernier stade de la chaîne alimentaire, être consommées par
35
l'homme . Il en va de même des pesticides: utilisés de façon inconsidérée, ils peuvent eux aussi
s'accumuler tout le long des chaînes alimentaires et être consommés par l'homme à qui ces
aliments sont destinés36. Ainsi, faute de précautions et de contrôles sérieux, la vie des
consommateurs sera constamment mise en péril par les importations dangereuses.
En l'absence de moyens matériels pour procéder à certaines opérations techniques dans les
contrôles, certains pays du sud pourront effectuer leurs contrôles des produits pharmaceutiques
et chimiques (pesticides) en se référant aux listes essentielles établies par l'O.M.S. dans ce
domaine.
3
Le recours à ces listes essentielles de médicaments ? et de pesticides de base,38 leur
permettra non seulement de faciliter leurs opérations de contrôle, mais aussi d'éliminer du marché
les produits qui n'y figurent pas. On pourra par ce biais éliminer les produits inutiles et les
produits dangereux.
Cependant ces contrôles ne seront bénéfiques pour les populations des pays concernés
que si on y met de la volonté du côté des pouvoirs publics pour les rendre dynamiques.
§II - La dynamique du contrôle.
Le contrôle des importations relève du domaine de l'autorité publique, la promotion de
son efficacité aussi. C'est une responsabilité qui lui incombe dans sa mission de protection des
34 CAS el FERRIER: op. cil., p. 21!.
35 ibid.
36 ibid; WEIR et schapiro: p. Il.
37 A. CHETLEY:op. cil. p. S.Consommateurs-Actualités n° 393 du 28 Octobre 1983 p. 1 et 2.
38 CHETLEY:op. cil. p. 44.

154
citoyens nationaux (A). Elle peut toutefois, pour des raisons de fiabilité des contrôles, déléguer
cette responsabilité aux organismes spécialisés (B).
A - Le contrôle des produits et services: une responsabilité des
pouvoirs publics.
Pour opérer des contrôles sérieux et fiables, il faut avant tout créer des institutions
spécialisées dont le rôle sera d'effectuer ces contrôles (a) ; il faut aussi renforcer par-dessus tout
le rôle des services douaniers (b).
al La création d'institutions spécialisées.
Les produits et les services d'importation ou nationaux ne doivent pas être source
d'accidents, de maladies ou d'intoxications; ils ne doivent pas être source de dangers permanents
pour les utilisateurs.
Pour résoudre tous ces problèmes de consommation, un contrôle a priori des
marchandises ou services avant leur première mise sur le marché s'avère né~essaire. Or celui-ci ne
peut s'opérer de manière aléatoire; son effectivité nécessite le concours des services spécialisés
dans ce domaine.
Les P.V.D. ont besoin d'effectuer des contrôles sérieux sur les marchandises et services
avant leur entrée sur leur marché national. A cet effet, la création des services spéciaux affectés à
cette tâche s'impose. Ils auront pour mission d'observer le fonctionnement du marché dans toues
ses composantes, de veiller et de garantir son bon fonctionnement dans tous les domaines :
qualité, loyauté des transactions, prix, pratiques commerciales ou concurrence39 •
Mais la création des services spécialisés n'est pas une fm en soi. Encore faut-il les doter
d'infrastructures adéquates pour l'accomplissement de leur mission dans de bonnes conditions.
Or le problème est que les P. V.O. manquent dans ce domaine d'infrastructures aussi bien
humains que matériels. Au plan humain, les P. V.O. manquent de personnel compétent pour le
contrôle et la réglementation relatifs aux problèmes de consommation. Au plan technique, le
4o
matériel d'analyse est pratiquement inexistant •
39Lamy Droil Economique 1993. n° 840\\.
~oEdilh WENGER : article précilé, p. 208.

155
L'utilité publique des services spécialisés dans le contrôle passe par la résolution des
problèmes d'infrastructures. Les pouvoirs publics doivent non seulement former le personnel dans
ce domaine, ils doivent aussi équiper ces services de matériel spécialisés notamment de
laboratoires d'analyses au moyen desquels les produits à risques pourront être éliminés du marché
national.
b) Le renforcement du rôle des services douaniers.
Dans la plupart des P.Y.D., le service des Douanes est resté dans sa mission traditionnelle
: celle qui consiste à renflouer les caisses de l'Etat par la perception des taxes fiscales sur les
entrées et sorties des marchandises. L'importance des recettes fiscales qu'il collecte annuellement
pour le trésor public ne doit pas faire oublier son rôle essentiel de protecteur de l'espace
économique du pays. Dans cette optique, les contrôles opérés pour déjouer les entreprises de
trafiquants de drogues ou d'armes permettent de protéger la santé et la sécurité des populations41 •
Dans les P.Y.D., un contrôle plus actif devrait être attribué aux services des Douanes
dans le domaine de la protection du c·onsommateur. Dès lors que les agents des Douanes sont
chargés de contrôler sur l'ensemble du territoire national les entrées et les sorties des
marchandises, une mission plus accrue dans le contrôle de la conformité des produits importés est
nécessaire pour le bien être du consommateur. Il leur appartiendra à cet effet de s'assurer de la
conformité des marchandises importées aux exigences des consommateurs locaux42•
j
La quasi-faiblesse ou l'absence de rigueur dans ces contrôles douaniers a transformé les
!
J
marchés des P. Y.D. en lieux privilégiés des produits et services dangereux, contrefaits, falsifiés
t
ou corrompus43
1
• Une réorganisation des services des Douanes avec en prime un élargissement de
1
leur mission dans le sens de la protection du consommateur peut être un élément de réponse aux
1
1
problèmes des importations dangereuses. A ce titre, l'action des services Douaniers devrait
1
i
J
s'exercer dans différents domaines: santé, sécurité, information, environnement.
1
Dans le domaine de la santé et de la sécurité, une vigilance accrue devrait être observée
par les services douaniers : ils pourront par exemple s'opposer à l'importation des médicaments
41 Bernard GAUDILLERE: "la Douane protège aussi les consommateurs" in Consommateurs Actualités. n0466, p.
,
3.
/
42 ibid. p. 4.
43 B. GAUDILLERE : article prée., p. 4.

156
ou des produits chimiques dès lors qu'ils n'ont pas reçu une autorisation préalable des services
compétents dans ce domaine ; ils pourront aussi s'opposer à l'introduction dans leur pays des
produits présentant des risques sérieux pour l'utilisateur tels que les pyjamas pour enfants
44
fabriqués à l'aide de fibres cancérigènes . Quant aux produits alimentaires, leur contrôle devrait
être l'objet d'une surveillance particulière car les risques dans ce domaine sont très fréquents 45 .
Si une telle mission parait indispensable pour la protection de la santé et de la sécurité du
consommateur, sa réalisation est subordonnée aussi à la présence du matériel adéquat dans les
services douaniers. La présence par exemple des laboratoires d'analyses permettra de vérifier, à
travers les analyses d'échantillons prélevés sur les marchandises suspectes, la conformité de la
déclaration en douanes et les caractéristiques exactes du produit présenté ; ce qui permettra de
livrer aux consommateurs des produits sûrs avec des informations exactes46• La maîtrise des
procédés d'analyses avec du matériel sophistiqué permettra aux agents douaniers de démasquer
les produits suspects et dangereux, notamment les déchets toxiques, nuisibles à l'homme et à
l'environnement, qu'on introduit dans les P.V.D. en les faisant passer pour des matières
.,
47
prenueres .
La refonte du rôle des services douaniers aura un effet bénéfique pour les r.V.D. Tout en
permettant à ces services de remplir plus efficacement leur rôle de protecteur de l'espace
économique national, elle contribuera de façon indéniable à la protection de la santé et de la
sécurité du consommateur.
Mais, à présent, compte tenu de l'urgence du problème relàtif aux exportations
dangereuses à destination de ces pays, un recours aux sociétés spécialisées dans les contrôles des
marchandises importées peut être un palliatif indispensable pour. la sécurité des consommateurs
locaux.
44 B. GAUDILLERE : article prée., p. 4.
45 V. A. AGUIAR: art prée., p. 1 et4.
4(, B. GAUDILLERE : article prée., p. 4.
47 Cf. Roelants Du VIVIER: les vaisseaux du poison. éd. Sang de Terre. 1988. p. 37.

157
B - Pour un recours aux organismes spécialisés dans les contrôles.
L'intérêt d'un tel recours pour un pays (b) ne peut s'apprécier qu'à travers une
appréhension et une compréhension précises du rôle de ces organismes dans le commerce
international (a).
a) Rôle des organismes spécialisés dans le commerce international.
Limiers du commerce international, ces organismes spécialisés dans les contrôles sont
connus sous des appellations diverses: organismes certificateurs ou sociétés de certification pour
les francophones, "Compréhensive Import supervischeme" pour les anglo-saxons. Ces sociétés
proposent aux Etats des programmes de vérification des importations (PYI).
L'opération consiste à faire le gendarme économique pour le compte des Etats
demandeurs. Elles sont indépendantes et ont pour mission de vérifier la conformité des
48
marchandises importées avec les déclarations des opérateurs économiques .:.
Disposant de matériel sophistiqué pour réaliser efficacement les contrôles, un recours à
leurs services est tout indiqué pour la protection du consommateur dans les P.Y.D. contre les
importations dangereuses.
Les principales sociétés prestataires de ces services sont: la société S.G.S (société de
droit Suisse et leader mondial dans ce domaine), la société COTECNA (Suisse), la société véritas
(France) et la société SOCOTEC (France)49.
b) Les avantages du recours aux organismes spécialisés.
L'état actuel des fmances des Etats africains tout comme les autres Etats du Tiers-Monde
est désastreux ; et certains Etats pourraient arguer de la difficulté des moyens pour refuser de
solliciter l'intervention des sociétés de certification dans le contrôle de leurs importations.

48
Yves AOULOU : art. prée.; Dénise N'GUYEN-THANTH : Techniques Juridiques de protection des
J
consommateurs, Thèse de Doctorat en droit. Caen 1969. p. 190 ct suiv.
49 Yves AOULOU : art. prée.
1
ll
1

158
Certes, le recours aux organismes certificateurs est rémunérateur, mais leur intervention
est loin de peser lourd sur les finances de l'Etat demandeur50. Leur intervention est plus bénéfique
que coûteuse.
L'un des intérêts du recours aux organismes spécialisés est que leur intervention permet
de garantir la santé et la sécurjté des consommateurs locaux par des contrôles fiables des produits
importés. Palliant l'absence d'infrastructures adéquates dans ces pays, ils jouissent d'une
indépendance certaine et présentent par là la garantie de l'impartialité à l'égard de tous les
opérateurs51 • Intervenant dans les pays d'origine des marchandises contrôlées pour en certifier la
qualité et la conformité aux normes locales, ils ont l'avantage de bien maîtriser les outils de la
qualité des différents produits qu'ils seront appelés à contrôler dans les P.Y.D.52• Ils échappent
surtout à toute intinùdation "politique" et la seule présence de leurs experts suffit à décourager
les amateurs des pot-de-vin53. La neutralité et l'effectivité des contrôles qu'ils réalisent permettent
d'éviter au marché national l'entrée des marchandises contrefaites, falsifiées, corrompues, avariées
ou dangereuses, et c'est là un point positif pour la sécurité des transactions commerciales et
partant la sécurité du consommateur4 •
Au plan économique, le pays demandeur n'en est pas moins avantagé. Du côté de
l'exportateur, ces organismes passent au peigne fin les factures, comparant les prix indiqués à
ceux pratiqués sur le marché. En cas d'incohérence, le fournisseur est invité à ajuster ses
50 Les prestations des sociétés certificateurs sont rémunérées par les clients sur les bases d'une commission
d'environ 1% de la valeur totale des marchandises contrôlées. cf. Yves AOULOU : art. précité.
~I L'absence d'infrastructures adéquates pour procéder aux conLrôles fiables dans ces pays, en particulier dans les;
pays africains, a transformé ce continent en un territoire favori pour les prédateurs du commerce international. Cl:
en ee sens Yves AOULOU : art. prée.
52 ibid.
~3 ibid.
54 ibid.; G. J. MERAL: "l'agréage ct la preuve de la qualité" in "la qualité des produits alimentaires" prée. p. 36~
D. N'GUYEN-THANTH : Thèse préc p. 190 ct suivant.


159
prétentions. D'un autre côté, ces interventions permettent d'améliorer les recettes douanières des
Etats concernés55.
Somme toute, l'intérêt du recours est conséquent pour le pays demandeur. En attendant
une mise en place des moyens matériels capables de permettre des contrôles fiables, il est du
devoir des pays africains comme des autres pays du Tiers-Monde de recourir aux organismes
spécialisés pour contrôler leurs importations. Par ce biais, ils pourront éliminer de leur marché
des produits suspects, dangereux pour la santé et la sécurité de leurs populations.
Sous-section II : L'exigence sociale et la non-qualité.
Dans le droit de la consommation, le terme "non-qualité" désigne avant tout les produits
et services non conformes aux attentes sociales (§I). Il est du devoir des pouvoirs publics de
prendre des mesures concrètes pour éliminer du marché des produits et services non conformes
aux attentes sociales (§II).
§I - Les produits et services non conformes aux attentes sociales.
Un produit non conforme est un produit potentiellement dangereux pour la sécurité du
consommateur. Encore faut-il déterminer le danger qui l'habite (A). Si la non-conformité peut
s'apprécier par rapport à la nature du produit, il faut souligner qu'on peut l'étendre au produit
défectueux par le seul fait que celui-ci représente une menace potentielle pour la sécurité de
l'utilisateur (B).
55 A cet effet, le F.M.I. et la banque mondiale, devenus pratiquement, ajustement structurel oblige, "tuteurs" des
économies africaines, recommandent aux pouvoirs publics les services des vérificateurs internationaux ; ce qui
leur permettra de suivre de près leur balance de paiements. En tout cas, Ics
résultats ne sont pas négatifs pour
les pays qui ont tentés l'expérience comme le conlirme Oscar KNEUBUEHLER, un responsable de l'une des
sociétés concernées, la S.G.S : "Un an après dvoir passé un contrat avec nous, un de nos clients a vu ces recettes
douanières progresser de 58%. D'ailleurs certains pays africains comme le Ghana, le Nigéria, le Cameroun, le
Bénin, le Zimbabwe, le Maroc, la Tanzanie et la Guinée ont mandaté des vériticateurs pour suivre leurs
importations. Ce qui est de bonne augure pour la santé et la sécurité du consommateur dans ces pays. cf en ce sens
Yves AOULOU : arl. préc.

160
A - La détermination du danger.
Déterminer le danger, c'est avant tout le détecter, le localiser (b). Mais cet exercice
nécessite tout d'abord une bonne maîtrise, une bonne connaissance de la notion (a).
al Notion de produit et service dangereux.
L'art. 2 de la loi française du 21 juillet 1983 sur la sécurité des consommateurs qui renvoie
à l'art. 1er de la même loi défmit comme dangereux les produits « ne satisfaisant pas à l'obligation
générale de sécurité» c'est à dire ceux qui « dans des conditions normales d'utilisation ou d'autres
raisonnablement prévisibles par le professionnel» ne présentent pas «la sécurité à laquelle on
peut légitimement s'attendre» et « portent atteinte à la santé des personnes ».
D'après ce texte, le caractère dangereux d'un produit ou d'un service s'apprécie d'une part
par rapport aux conditions d'utilisation, et d'autre part par rapport aux pe~sonnes exposées.
Dans le premier cas; la sécurité que doit présenter le produit ou service est celle «à
laquelle on peut légitimement s'attendre» et non celle résultant d'une utilisation conforme aux
directives données par le fabricant56• Des fois, la nocivité du produit peut être prouvée à la suite
d'une expérience scientifique. Dans ce contexte, même utilisé dans des conditions normales, la
santé et la sécurité du consommateur n'en sont pas moins préservées. Nombreuses sont les
données statistiques qui le confirment57•
Dans ces conditions, les fabricants ou les distributeurs ne peuvent plus prétendre ignorer
le risque qu'ils font courir aux utilisateurs en continuant la vente de ces produits, surtout lorsqu'ils
ont été alertés par la presse, les services administratifs compétents, les organisations de
consommateurs, les organismes non gouvernementaux etc....58 • Ce cas s'identifie parfaitement aux
fabricants et distributeurs des produits chimiques, pharmaceutiques et alimentaires pour enfants
surtout et aux exportateurs des industries polluantes et des déchets toxiques.dans le Tiers-
Monde.
56 CAS et FERRIER: op.ciL p. 217, nO 238 ; FOURGOUX, MIKAILOV et JEANIN : Principes et pratiques du
Droit de la consommation. éd .Delmas 19983, p. e
57 Akuété SANTOS: Thèse précitée. p. 17.

161
Dans le second, l'appréciation du danger est plus subjective. Celui-ci s'apprécie par
rapport à l'utilisateur du produit. Un produit dangereux est celui qui, même dans des conditions
59
normales d'usage est capable de causer des dommages aussi bien à l'utilisateur qu'au tiers .
Quel que soit le produit mis en circulation, le problème réside dans la détection du danger
qu'il est censé véhiculer.
bl La détection du danger.
La non-conformité d'un produit se prouve par la mise à nu du danger qui l'habite. Mais
que faut-il faire pour en identifier le danger, source d'insécurité pour le consommateur ?
La résolution du problème passe par une mise en place d'un dispositif capable d'alerter sur
les risques d'utilisation d'un produit. Le but d'une telle procédure est d'arriver à dresser un
inventaire des accidents ou des dommages par catégories de produits ou services. Le rôle des
services administratifs dans cette démarche est capital, leur mission étant avant tout de protéger
le public contre les dangers exc~ssifs nés de l'usage de certains produits et services.
Si le contrôle a priori semble être un moyen efficace pour limiter l'introduction sur le
marché national des produits et services dangereux, il est loin d'être une fmalité. Certains
produits, en effet, ne se révèlent dangereux qu'au stade fmal de la consommation, et causent ainsi
des dangers sérieux aux utilisateurs.
Détecter un danger, c'est aussi organiser une sorte de contrôle a priori sur l'usage d'un
produit et d'en analyser les effets pervers qui en résultent. Le rôle du service chargé de cette
mission consiste à faire usage des moyens à sa disposition pour organiser une collecte et une
centralisation des informations relatives aux produits en cause.
Certes, dans les P.Y.D., certains consommateurs (la majorité malheureusement) ignorent
l'intérêt de telles informations et rechignent à les livrer au demandeur60• Réduits à l'impuissance
58 CAS et FERRIER: op.cil. p. 217.
59 A. SANTOS: Thèse précitée, p. 17 ; CAS et FERRIER: op.cit.. p. 217-218.
60 Luc BIHL : « la loi du 21 juillet 1983 sur la sécurité des consommateurs» in "Sécurité des consommateurs et
responsabilité du fait des produits défectueux" Colloque des 6 et 7 Novembre 1986 organisé par le Centre de Droit
des obligations de ('Université de Paris l, Panthéon-sorbonne, sous la direction de Jaques GHESTIN, P. 58.

162
devant certains dommages et renfermés dans un sentiment de résignation permanent, ils préfèrent
souffrir en silence que d'exposer leur souffrance à l'interrogateur61 •
Mais la fourniture des renseignements sur les dommages occasionnés par les produits
apparemment conformes dépendra de la volonté et de la détermination du service intéressé de
trouver des solutions aux problèmes de consommation des produits dangereux.
Faut-il compter sur les professionnels dans cette démarche? Il est peu probable, car des
professionnels honnêtes et soucieux de limiter les dangers dans la population deviennent de plus
en plus rares62 .
En revanche les médecins et les hôpitaux peuvent être une source privilégiée des
informations susceptibles d'aider à la détection des dangers, ce secteur étant un passage obligé
pour les victimes survivantes. Pour obtenir une collaboration de leur part une sensibilisation du
63
corps médical à cet effet s'avère nécessaire •
Pour obtenir des informations utiles et mener à bien la mission il est important d'éviter dans le
l
camp des professionnels les obstacles que peut susciter le problème relatif au secret
professionnel. Interdire l'opposabilité du secret professionnel et obliger "toute personne ayant
connaissance, à l'occasion de l'exercice de son activité professionnelle (ou "statutaire"), d'un
danger présenté par un produit ou un service" à transmettre au service compétent les
informations qu'elle détient peut être un moyen efficace pour un fonctionnement normal du
service de détection des dangers.
61 E. OBADINA : "La contrefaçon à l'assaut de l'Afrique ":in "Vivre Autrcmcnl" supplément n° 8-9. Nov. 1988. p
4
62 Luc BIHL : arl. prée. p. 58
63 ibid

163
B - L'assimilation du produit défectueux au produit dangereux.
Qu'est ce qu'un produit défectueux? (a). C'est par défmition un produit non conforme aux
attentes sociales. Comme tout produit non conforme, il peut être dangereux pour la sécurité de
l'util isateur (b).
al Notion de produit défectueux.
La notion de produit défectueux recouvre un domaine très large et encore mal défini.
Tout d'abord, on considère comme "produit" tout objet ou substance ayant une valeur
intrinsèque, au stade d'achèvement, ou sous forme de pièce détachée, ayant la vocation d'être mis
sur le marché de la distribution commerciale.64
La caractéristique essentielle du produit défectueux se résume à son défaut. Or il n'existe
pas de définition uniforme 'du défaut. On s'accorde cependant à le défmir généralement comme
l'inaptitude imprévisible du produit à une utilisation ordinaire, laquelle le rend déraisonnablement
dangereux pour son utilisateur65 . Un produit défectueux est donc un produit dont la non-
conformité se résume au défaut et qui le rend inapte à une utilisation ordinaire et raisonnable,
inaptitude qui n'a pas pu rentrer dans les prévisions du concepteur ou du fabricant.
La notion de défaut a aussi fait l'objet d'une définition européenne66 • L'article 1387-1 du
projet de Code civil français dispose: « U.n produit est défectueux:
- lorsqu'il n'a pas les qualités convenues ou qu'il est impropre :1: l'usage qui peut
être raisonnablement attendu;
- lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre. »67.
64 Perrine DUPIN de SAINT-CYR-MAREE: « la réparation des atteintes à la sécurité des consommateurs en Droit
Américain» in colloque de Paris 1 précité. p. 99.
65 ibid.
66 Directive n° 85/374 du conseil du 25 Juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions réglementaires et
administratives des Etats membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux.
67 Article 1387-1 de l'avant-projet de loi sur la responsabilité du fait des produits défectueux, destiné à introduire
la directive dans le Droit français.

164
La jurisprudence s'est largement inspirée de cette notion qui, il faut le souligner, est aussi
68
valable pour les services .
Le défaut du produit peut, en effet, avoir son origine dans la conception (défaut de
conception), dans la fabrication ou l'assemblage (défaut de fabrication ou d'assemblage) ou dans
l'instruction (défaut d'instruction)69.
b) Le caractère dangereux du produit défectueux.
Le caractère nocif du produit défectueux ne s'apprécie pas par rapport à l'usage auquel on
le prédestine, mais plutôt en fonction de la sécurité qu'on est en droit d'attendre du produit. Cette
sécurité attendue ne se limite pas à la seule personne partie au contrat de consommation ; elle
intéresse
aussi le grand
public.
Pour «protéger l'intégrité
physique et des
biens du
consommateur, la détermination du caractère défectueux d'un produit ou d'un service doit se faire
en fonction non pas de l'inaptitude du produit à l'usage, mais du défaut de sécurité à laquelle le
grand public peut légitimement s'attendre»70.
Le caractère public de la sécurité rend donc impossible toute défmition contractuelle du
défaut. Le défaut ne peut recevoir une définition contractuelle à travers la destination envisagée
71
en commun par les parties, puisque la victime peut être un tiers • Dans cette démarche, on tient
aussi rarement compte des méthodes de fabrication du produit. Il importe peu que celui-ci ait ou
non les performances convenues; on ne prend en considération que les dommages qu'il est
susceptible de causer aux utilisateurs72•
Somme toute, le régime de la responsabilité y afférent est d'une sévérité absolue. Le
professionnel responsable de la mise en circulation des produits défectueux s'oppose à toute une
série de sanctions, notamment la réparation intégrale des dommages subis par le ou les victimes
de son acte commercial73 ,
68 Jaques GHESTIN « L'avant-projet de loi sur la responsabilité du fait des produits défectueux : une refonte
partielle du code civil. » Rev. JP. Corn., p 19.
69 P. DUPIN de SAINT-CYR-MAREE: art. précité p. 98 à 99; Akueté SANTOS: Thèse prée., p. 19 et suiv.
70 J. GHESTIN : art. prée. p. 217.
71 ibid.
72ibid.
73 ibid.p. 216.

165
Par mise en circulation, il faut entendre juridiquement "le dessaisissement volontaire du
producteur ou celui qui, tel l'importateur, lui est assimilé, de telle sorte qu'il n'y ait transfert à un
tiers, non préposé de l'intéressé, extérieur à l'entreprise, des pouvoirs d'usage, de détection et de
contrôle qui caractérisent la garde de la chose pour l'application de l'article 1384, al. 1 du code
civil,,74. "Un produit est (donc) mis en circulation lorsque le professionnel s'en est dessaisi
volontairement."75
La mission des autorités de contrôle consiste à exclure du circuit commercial des produits
et services de mauvaise qualité et ne laisser circuler que ceux de bonne qualité.
§II- L'élimination des produits et services dangereux de la
circulation commerciale.
La réalisation d'un tel objectif est fonction d'une certaine dose de conscience du côté des
pouvoirs publics. Ceux-ci doivent prendre des mesures nécessaires à cet effet (A). Les mesures
ne doivent cependant pas être excessives, elles doivent être proportionnelles au danger qu'elles
sont censées combattre (B).
A - Les mesures d'élimination du danger.
Les mesures d'exclusion des marchandises dangereuses ne doivent pas avoir la même
teneur. Elles doivent être variés avec d'un côté les mesures d'ordre spécial (a) et de l'autre les
mesures d'ordre général (b).
a) Les mesures d'ordre spécial.
Il arrive, en effet, que certains produits apparemment inoffensifs soient introduits dans le
commerce. Dès lors, les dangers les concernant ne sont découverts qu'après coup.
Le but des mesures spéciales est de faire cesser d'urgence le danger dont ils sont
responsables. Ces mesures relèvent du domaine des dangers spontanés, graves et immédiats.
En cas de danger grave et immédiat, il revient aux autorités compétentes de s'enquérir des
informations nécessaires et de prendre des mesures urgentes pour faire cesser le danger. Elles
74 J. GHESTIN : art. prée., p. 218.
/
75 art. 1387-22 de l'Avant projet de loi sur les responsabilités du fait des produits détectueux. Voir en ce sens 1.
GHESTIN : art. prée .• p. 218.

166
pourront par exemple ordonner le retrait de la vente du produit incriminé aux professionnels ou
l'arrêt d'utilisation aux consommateurs qui en ont déjà la possession76•
Les mesures spéciales, pour être utiles aux consommateurs, doivent être le produit de la
maîtrise d'un certain nombre de paramètres dans le commerce, notamment un bon suivi des
produits et services, un éventail d'informations les concernant. Ceci permettra une large
ventilation des informations urgentes en cas de danger imputable à un produit ou à un service
particulier.
Une telle entreprise peut, certes, paraître chose difficile à réaliser dans les P.V.D. Mais
l'impossibilité de concrétiser un tel projet viendra surtout d'un manque de volonté des pouvoirs
publics, car dans ces pays, en particulier dans les pays d'Afrique, l'information circule plus vite
qu'on ne le pense. A travers les ondes des radios nationales, on pourra aisément réaliser ce genre
de projet nécessaire à la sauvegarde de nombreuses vies humaines dans les pays du Tiers-Monde.
h) Les mesures d'ordre général.
La finalité de ces mesures est d'arriver à interdire du marché les produits et services dont
le potentiel en risques est très élevé, risques inévitables dans une consommation ordinaire.
Hormis le caractère défectueux, certains produits sont naturellement dangereux soit parce
qu'ils renferment des substances hautement toxiques (produits chimiques et pharmaceutiques),
soit parce qu'ils sont inadaptés aux conditions de vie locales de leurs utilisateurs (lait artificiel
pour enfants dans le Tiers-Monde).
La protection de la santé et de la sécurité exige que ces produits ne puissent pas circuler
librement comme tout autre produit de grande consommation. Il est alors du domaine des
pouvoirs publics de prononcer des mesures d'interdiction à leur encontre. L'Inde a imaginé une
parade intéressante à cet effet: tous les produits tombant sous le coup d'une interdiction sur leur
lieu de fabrication ne peuvent être importés sur le territoire indien77.
Certes, cette barrière peut être facilement contournée par les procédés de maquillage, de
falsification et de dissimulation d'informations qui ont cours dans le commerce international nord-
76 L. BIHL : arl. prée. p. 59 ct suiv. ; CAS ct FERRIER: op. cil. p. 22 ct suiv.
77 Akuélé SANTOS :Thèse précitée. p. 217.

167
sud. Mais elle a quand même le mérite d'exister. Il en va de même du Bangladesh qui, par une
décision courageuse, a banni du marché national plusieurs milliers de médicaments coûteux, non
indispensables et parfois dangereux pour sa population,78 et du Kenya dont le gouvernement a
mis au point un "trousse" de 39 médicaments que l'on estime suffisante pour les besoins mensuels
d'un service de santé ruraf9•
IL est donc légitime pour les pouvoirs publics de tout Etat de prendre des mesures qu'ils
estiment nécessaires pour protéger leur population contre les risques que renferment certains
produits ou services. Encore faut-il que ces mesures soient proportionnelles au danger encouru.
B - Proportionnalité des mesures par rapport au danger et
respect des engagements internationaux.
Pour ne pas tomber dans l'arbitraire, il est préférable que les mesures d'interdiction
temporaire ou absolue se prennent dans la transparence et non' dans la discrétion. Elles doivent
être soutenues de preuves formelles et irréfutables, caractérisant la nature dangereuse du produit
ou son inadaptation aux conditions de vie du pays hôte.
Les principes 8 et 46 de la Charte des Nations Unies80 relative à la protection du
consommateur comportent des dispositions dans ce sens. Ceux-ci invitent les gouvernements,
lors de l'application des lois, règlements ou procédures de protection des consommateurs, à ne
pas faire obstacle au commerce international ainsi qu'à ses obligations. Autrement dit, les
politiques et mesures de protection des consommateurs se doivent d'être compatibles avec les
obligations qui gouvernent ce commerce. Ce qui sous-entend leur proportionnalité par rapport au
danger en cause.
78 Le gouvernement du Bangladesh s'est appuyé sur les observations de l'O.M.S. relatives à sa liste sur les
médicaments essentiels et les avantages qui en découlent pour prendre une telle décision. C'est la première fois
d'ailleurs qu'un gouvernement du Tiers-Monde ose prendre une telle décision, car celle-ci va à l'encontre d'intérêts
étrangers puissants, notamment les multinationales pharmaceutiques. Ce courage est d'autant plus remarquable
que le Bangladesh est l'un des pays les plus déshérités du monde et, que, de ce fait, il a continuellement besoin des
aides étrangères. cf. en ce sens: Consommateurs-Actualité, Octobre 1983 p. 2.
79 ibid.
80 Cf « Principes Directeurs des Nations Unies pour la Protection des Consommateurs», in «Consommateurs
Actualité » n° 470, 21 jun 1985, p. 5 et suiv.

168
Dans le cas des pesticides et des produits pharmaceutiques, la seule connaissance de
l'interdiction prononcée à leur encontre dans leur pays d'origine peut être une preuve sérieuse
pour justifier leur interdiction dans les pays d'accueil. Pour être en possession des listes des
produits interdits dans leur lieu de fabrication, il faudra créer un pont destiné à un échange
d'informations entre les autorités de contrôle du pays d'origine et celles du pays hôte du produit.
Ceci n'est possible que dans le cadre d'une coopération franche basée sur la confiance réciproque.
Les mesures d'interdiction prises à l'encontre d'un produit ou d'un service se doivent aussi
d'être compatibles avec les engagements internationaux du pays qui les a prises. Se conformer par
81
exemple à la liste des médicaments essentiels
établie par l'O.M.S. 82 peut être un moyen sûr
d'échapper aux contraintes liées aux engagements internationaux et aux pressions des différentes
multinationales. C'est aussi un moyen d'échapper aux exportations des médicaments dangereux
ou inutiles83.
De toute façon, le processus d'élimination du danger du circuit commercial ne doit pas
être limité à des actes ponctuels ou d'interdiction de tel ou tel produit, ceci pouvant être
contournés par des commerçants peu scrupuleux, habiles et experts dans l'art de tromper sur les
qualités des marchandises promises. La meilleure façon de protéger le consommateur contre les
dangers de la consommation réside dans les décisions qui, dans leur phase exécutoire, sont
capables de garantir sa santé et sa sécurité.
81
Les médicaments essentiels sont des médicaents sélectionnés pour répondre aux besoins courants, lesquels
offrent une valeur thérapeutique significative, un niveau acceptable de sécurité et qui sont d'une qualité
satisfaisante pour leur prix. Ce concept est à la base de la stratégie pharmaceutique adoptée par l'Organisation
Mondiale de la Santé (O.M S.) qui a établi une liste indicative d'environ 300 médicaments essentiels,
régulièrement mise à jour. En 1993, l'OMS était à sa 7ème liste de médicaments essentiels. cr en ce sens, Le
Dossier inti tuilé « Les Pays en Voie de Développement : Les abus de la publicité pharmaceutique », Dossier
réalisé par PIME, Eté 1993, p. 1.
82 V. Consommaleurs AClualités. OClobre 1983. p. 1 el 2.
83 ibid. C'esl d'ailleurs cc qui a motivé le Bangladesh dans sa courageuse décision. Une enquête réaliser par
l'O.M.S. en 1983 déclare que 70% des pays ayant participés à l'enquête avaient déjà établi une liste des
médicamenls essentiels à l'intention des services de santé des gouvernements. Ce pourcentage peut avoir '"
augmenler aujourd'hui.

169
SECTION II:
LA GARANTIE DE LA SANTE ET DE LA SECURITE DU CONSOMMATEUR
Garantir la sécurité et la santé du consommateur est une priorité qui relève de la
responsabilité des pouvoirs publics. Celle-ci doit se manifester aussi bien au plan national (sous-
section 1) qu'au plan international (sous-section 11).
Sous-Section 1 : La garantie de la santé et de la sécurité au plan national.
Au niveau national, elle passe par une moralisation de la profession d'importateur (§I) et
par une prise de conscience beaucoup plus accrue par les pouvoirs publics de leur degré de
responsabilité dans ce domaine (§II).
SI - La moralisation de la profession d'importateur.
L'importateur est un commerçant qui se trouve dans une situation d'''intermédiaire'' entre
l'étranger et le domestique. Les produits étrangers transitent par lui pour att<~rrir sur le marché
national. Il ne peut donc pas être tout à fait étranger à certains dommages subis par les
consommateurs et dont les produits étrangers en sont les principales causes. Sa responsabilité
peut donc être retenue dans certains cas. Mais nul ne peut être sanctionné sans aucune preuve de
sa culpabilité. Pour être responsable, encore faut-il connaître les obligations qui lui incombent (A)
et dont la violation peut justifier la prononciation de certaines sanctions (E) à son encontre..
A - Les obligations relatives à la profession.
La connaissance des obligations de l'importateur est essentielle pour la bonne maîtrise du
domaine (b). Mais leur définition repose sur une précision des contours de la notion (a).
al La notion d'importateur.
Qu'est-ce qu'un importateur ?

170
Pour des raisons déjà avancées plus haut, nous nous inspirerons une fois de plus du droit
français pour défmir la notion, ces règles étant susceptibles de transposition dans les pays en voie
de développement, en particulier dans les pays d'Afrique d'expression française. Cela est aussi
être valable pour les autres pays d'Afrique d'expression anglaise, espagnole et portugaise, les
réalités économiques, politiques, sociales et culturelles étant pratiquement les mêmes partout sur
le continent. 84
La jurisprudence, par souci de ne pas sanctionner indistinctement les professionnels qui
sont intervenus dans la distribution de marchandises importées, interprète de façon stricte la
notion d'importateur85• Elle en réserve la qualité à celui qui achète en son nom et pour son
compte des marchandises à l'étranger pour les revendre dans le pays où il exerce son activitë6. Il
est donc celui qui introduit le premier sur le marché national des marchandises d'origine
étrangères; c'est le premier responsable de leur mise sur le marché national.
Le législateur camerounais adopte une défmition qui va dans le même sens que la
française. Il définit l'importateur à travers son activité principale: celle qui consiste à acheter des
marchandises à l'étranger pour ensuite les revendre sur le marché national du pays où l'activité
est exercée. Est importateur celui qui conclut des contrats d'importation de marchandises hors de
son territoire national d'activité.
Et l'article 2.a) du Décret N° 931720/PM du 22 novembre 199387 fixant les modalités
d'application de la Loi N° 90/031 du 10 août 199088 régissant l'activité commerciale au
Cameroun définit l'importation comme «le contrat d'achat par lequel une personne ayant la
qualité de commerçant et appelé "l'importateur" acquiert des biens et services hors des frontières
nationales ou hors du territoire douanier national. Elle porte sur les matières premières, les biens
intermédiaires, les produits de consommation finale ou les services»
De façon générale, l'importateur doit être distingué du simple intermédiaire qu'est le
courtier et dont le rôle consiste à rapprocher un vendeur étranger et un acheteur national. La
chambre criminelle de la cour de cassation a eu à le préciser dans son arrêt du Il Juillet 1963 : à
84 Sur cc point, cf infra, mt partie, chapitre l, section II, sous-section II, § 1 : Les limites d'efficacité d'une
réglementation étatique solitaire.
8~ Lamy Droit économique J993. n° 9437.
86 ibid.
87 Décret n° 931720/PM du 22 nov. 1993, Juridis Info. N° 16, Législation, octobre-novembre-décembre 1993, p. 8.

171
89
propos de l'importateur, elle a dit que celui-ci était un acheteur et non un simple courtier . Il doit
aussi être distingué du commissionnaire qui, dans son rôle, se contente uniquement d'importer
pour le compte d'autrui90. Ce qui caractérise l'importateur des autres catégories professionnelles
citées, c'est qu'il est avant tout un commerçant, qualité que celles-ci ne possèdent pas et qu'exige
dans ses dispositions l'article 2.a) du décret camerounais précité.
La qualité de commerçant est donc nécessaire pour faire de celui qui introduit les
marchandises étrangères sur le territoire national non seulement un importateur, mais aussi un
responsable aux yeux de la loi en cas de détection du danger dans les marchandises importées, car
son activité est avant tout destinée à leur diffusion dans la population par la conclusion des
contrats de vente avec les consommateurs. D'où une attention particulière que les pouvoirs
publics se doivent de porter sur les acteurs de cette profession par la prescription des obligations
strictes de sécurité à leur encontre.
bl Les obligations de l'importateur.
D'après la notion ci-dessus définie, l'importateur est donc celui par qui les marchandises
étrangères arrivent sur le marché national. Pouvant à tout moment introduire, parfois sans le
savoir, des marchandises non conformes à la qualité requise, la logique de la protection de la
santé et de la sécurité des consommateurs exige qu'on mette à sa charge certaines obligations
spécifiques, en particulier celles relatives à l'autocontrôle de la qualité des produits importés
avant leur première mise sur le marchë l .
L'obligation d'autocontrôle est une obligation à deux exigences: elle consiste d'abord en
une obligation de vérification des marchandises importées; elle est ensuite doublée de l'obligation
de contrôle proprement dite92 .
Dans la procédure d'autocontrôle, la vérification est une opération ponctuelle et
épisodique. Elle consiste en une observation consciente des marchandises importées de manière à
isoler, le cas échéant, les marchandises remarquées comme non conformes aux attentes des
88 Loi n° 90/031 du 10 août 1990, Juridis Inro. W5, Janvier-février-mars 1991, Législation, p. 6.
89 Casso crim. Il Juill. 1963. Bull. civ. 1963, p. 256 ; D. 1964. p. 441, note J.-C. FOURGOUX.
,
90 Trib. correct. de Paris 30 Janvier 1974. G.P. 1974; 2; p. 529., note J.-c. FOURGOUX.
1
91 Lamy Droit Economique 1993. nos 8431.et suivants.
92 Ch. CASTANG: "Le contrôle qualitatif des importations", option qualité n° 20 Juill-Août 1985. p. 3.

172
consommateurs. En revanche, le contrôle a un caractère permanent et systématiques93. Il devrait
être fait obligation aux importateurs de mettre en place un système de contrôle qualitatif,
préalable à toute commercialisation sur le territoire national des produits importés. Le contrôle
devrait être antérieur à la première commercialisation, étant entendu que celle-ci est indépendante
des formalités de dédouanement, même s'il est souhaitable que ces deux opérations (première
commercialisation/dédouanement) soient confondues94.
Le contrôle devrait être permanent, régulier, aussi exhaustif que possible (sans pour
autant être à valeur statistique, ce qui serait irréaliste) et porter sur les règles de composition,
d'étiquetage, d'emballage des différents produits, lorsqu'il s'agit des denrées alimentaires (surtout
lorsqu'elles sont périssables)95. Pour les produits non alimentaires, en l'absence de normes
pouvant servir de référence, il serait plus judicieux et réaliste d'axer le contrôle sur la sécurité que
ceux-ci peuvent garantir à leurs utilisateurs96.
Afm de minorer les coûts, les contrôles pourront se réaliser par groupe d'importateurs
réunis par branche d'activité socioprofess!onnelle. Les importateurs pourront aussi, à défaut de
moyens matériels sophistiqués, recourir aux organismes certificateurs pour réaliser les contrôles,
ou aux laboratoires de contrôle ou d'essai publics au cas où les pouvoirs seraient en possession97 •
Le respect de cette obligation d'autocontrôle ne sera effective que lorsque sa violation
s'accompagnera de sanctions dissuasives dans la profession.
B - La responsabilité dans la profession.
En cas de violation de l'obligation d'autocontrôle, l'importateur devrait
VOIr
sa
resp'onsabilité engagée sur deux plans: sur le plan pénal et sur le plan civil.
a) La responsabilité pénale de l'importateur.
Faut-il sanctionner pénalement
l'importateur en cas de
violation
de
l'obligation
d'autocontrôle qui lui incombe?
93 ibid.
94 Ch. CASTANG: arl. prée. p. 3 C.F. supra. P. 155.
95 Ch. CASTANG: arl. prée. p. 3.
96 ibid.
97 Ch. CASTANG: arl. prée. p. 3. ; Lamy Droit Economique 1993. prée. n° 8436 et suiv.

173
Le souci de la protection de la santé et de la sécurité des consommateurs justifie que des
sanctions pénales soient prononcées à l'encontre de l'importateur lorsque celui-ci se rend
coupable de la violation de l'obligation qui lui incombe : celle de vérifier et de contrôler les
marchandises importées.
La nécessité de sanctionner pénalement l'importateur s'explique par le fait que la sanction
pénale est territoriale et qu'il est donc impossible d'atteindre le vendeur ou fabricant étranger. Au
plan national, l'importateur remplace le fabricant, il est le seul à être en relation directe avec ce
dernier et à ce titre paraît être le plus apte à opérer les vérifications destinées à garantir la
conformité de la marchandise aux exigences 10cales98 • Abstention dans les vérifications et
contrôles nécessaires peut être un élément déterminant caractérisant sa mauvaise foi et sa volonté
délibérée d'introduire sur le marché des produits non conformes.
Dans ces conditions, il ne pourra s'exonérer contractuellement en évoquant, par exemple,
une vente de marchandises telle qu'elles ont été importées99• La non-vérification ou le non
coptrôle des produits livrés de l'étranger fait peser sur l'importateur des sanctions pénales en
fonction de la gravité de la faute commise 100.
L'assimilation au plan de la responsabilité de l'importateur au fabricant s'explique aussi par
l'idée de garantie, garantie à l'encontre des acheteurs qui attendent de lui la fourniture des
produits sûrs, conformes à leur espérance 101. Il serait donc logique qu'une sanction pénale soit
prononcée à l'encontre de tout importateur coupable de trahison dans la relation de confiance qui
le lie aux consommateurs. Il appartiendra aux organes compétents de chaque pays de prononcer
des sanctions adéquates, dissuasives et conformes aux fautes commises et adaptées au contexte
économique et social de chaque pays. Le législateur a donc un réel devoir à remplir dans ce sens.
98 N'GUYEN-THANH : Thèse précitée, p. 98.
99 Casso crim. 2 avril 1984, Option Qualité, éd. Lamy. n° 10, p. 6.
100 cf. Lamy Droit économique 1993 nos 9421 et 9422.
101 N'GUYEN-THANH : Thèse précitée. p. 98.

174
b) La responsabilité civile de l'importateur.
Si la sanction pénale apparaît comme le résultat d'une négligence ou d'une abstention dans
les vérifications et contrôles, la reconnaissance de la responsabilité civile de l'importateur se
justifie ici par le désir de réparer les dommages causés aux acheteurs par la mise sur le marché
des marchandises non conformes.
La rmse sur le marché d'un produit s'entend d'un dessaisissement volontaire de
l'importateur de telle sorte qu'il y ait transfert à un tiers, non préposé de l'intéressé, extérieur à
l'entreprise, des pouvoirs d'usage, de direction et de contrôle qui caractérisent la garde de la
chose pour l'application de l'art. 1384, al. 1 du code civil français 'o2 .
La nécessité d~ sanctionner civilement l'importateur se justifie par la volonté de porter secours
aux victimes des produits non conformes. A cet effet, il s'avère nécessaire de mettre en place une
procédure d'indemnisation rapide pour les victimes dans leur plainte. Pour être dissuasive la
sanction se doit d'être sévère et la réparation du dommage intégrale. II appartiendra à chaque
législateur d'aménager ces sanctions réparatrices à ses réalités nationales.
Dans la garantie de la santé et de la sécurité du consommateur, il faut souligner cependant
qu'un rôle déterminant revient aux pouvoirs pùblics dans la limitation des risques relatifs à
certains produits.
102 Jacques GHESTIN : art. prée., p. 218.

175
§II - Le rôle des pouvoirs publics dans la protection de la santé et de
la sécurité du consommateur.
Les pays du Tiers-Monde se caractérisent aussi par un fort taux d'analphabètes dans la
population. Dans ces pays, la majorité des accidents de la consommation sont dus soit à un
manque d'informations, soit à la mauvaise information qui accompagne souvent les produits à
risques. Le problème des accidents est d'autant aggravé par la distribution anarchique de ces
produits. Pour limiter les risques, il est urgent d'agir au niveau de l'information (A) et de la
distribution de ces produits (B). Cette responsabilité incombe plus particulièrement aux pouvoirs
publics.
A - L'action administrative dans ['information.
La réalisation du risque dépend en grande partie de l'utilisation du bien acheté. Une
utilisation sans risque d'un produit est fonction de l'information qui l'accompagne et de la capacité
du destinataire à comprendre cette information. Pour un usage sans risque des produits étrangers,
il est impératif, dans ces pays du Tiers-Monde, d'exiger des vendeurs étrangers des informations
exactes (a) et adaptées (b) aux réalités sociales du milieu.
al L'exigence de la bonne information.
Les conséquences de l'usage de certains produits (pesticides en particulier) dans les pays
du Tiers-Monde sont redoutables lO3 • Elles sont le plus souvent liées au manque d'information qui
les accompagne. Il est rare de trouver des produits portant les mêmes renseignements que ceux
qu'ils comportent dans leur pays d'origine. Des étiquettes ou notices insuffisantes ou portant
intentionnellement de fausses informations y sont apposées ou introduites à l'intérieur des boîtes
(cas des notices) pour promouvoir les ventes.
Dans la plupart des cas, elles étendent la liste des bienfaits de chaque produit et passent
sous silence leurs inconvénients ou effets indésirables 104. Toutes ces insuffisances ou omissions
103 cf. Supra chapitre II. Section II.
104 WEIR et SCHAPIRO : op. cil. p. 24 ; CHETLEY : op. cil. p. 9 et suiv.

176
volontaires sont à l'arrivée responsables de nombreux désastres au moment de l'utilisation des
produits achetés.
Pour la sécurité du consommateur, l'élimination de ces risques du marché s'impose. Le
devoir relève du domaine de l'autorité publique. L'action des pouvoirs publics dans ce domaine
consiste à exiger des exportateurs que leurs produits comportent les mêmes mises en garde que
celles exigées dans leur pays d'origine (Etats-Unis, Europe... ). Cela revient à exiger la conformité
de l'étiquette à celle que comporte le produit dans son pays d'origine 105 • Pour éviter qu'une telle
exigence ne soit contournée par des procédés de maquillage, il est nécessaire pour les autorités
de contrôle de l'Etat d'accueil d'entretenir des relations sérieuses avec les agences de contrôle du
pays d'origine du produit. Ceci leur permettra d'obtenir des informations fiables sur les
caractéristiques des produits et d'échapper ainsi à la manipulation de l'entreprise exportatrice.
Toutefois, il est important, pour le bien du consommâteur, de faire suivre le non-respect
d'une telle exigence de sanctions dissuasives. Dans cet esprit, à titre d'exemple, le gouvernement
de Colombie, en 1979, frappa d'une amende les compagnies Hoechst et Shell pour avoir mis de
fausses étiquettes sur leurs pesticides, et les compagnies Dow, Velsicol, Ciba-geigy, Hoechst et
lO6
American
Cynamide
pour
avoir
vendu
des
produits
non
conformes

L'attitude
du
gouvernement Colombien est un exemple que les pays africains devraient suivre afin de donner
du crédit à leur exigence.
Cependant, une chose est d'exiger une bonne information, une autre est de pouvoir la
comprendre. Pour que la bonne information soit utile aux consommateurs, encore faut-il qu'elle
soit adaptée à leur environnement, à leur niveau de culture.
IO~ CHETLEY : op. cit. p. 9 ct suiv.
106 WEIR ct SCHAPIRO : op. cil. p. 24.

177
b) L'exigence d'une information adaptée à ('environnement
social et au niveau culturel des consommateurs.
Un aide soignant vint à l'hôpital du Mont Hagen (Nouvelle Guinée) pour chercher des
médicaments. Il apporta une bouteille de Gramoxone (pesticide très dangereux) vide pour y
mettre du sirop contre la toux.. L'étiquette portait bien la mention "poison" accompagnée de
toutes les instructions nécessaires, mais en anglais ; or combien d'ouvriers agricoles ou de
villageois peuvent lire l'anglais ?107 C'est la question que l'on se pose devant cet état de fait.
Au-delà de l'incohérence qui caractérise les informations que comportent les étiquettes ou
emballages des produits dangereux exportés vers les pays du Tiers-Monde, la seconde source de
problèmes réside dans leur inadaptation à l'environnement social, culturel et au degré de
connaissances intellectuelles de l'utilisateur.
Dans les pays où la plupart des gens concernés ne savent pas lire, à quoi peuvent bien
servir les avertissements collés sur les emballages des pesticides, aussi exacts qu'ils puissent être?
Contrairement à ce qui se passe en Europe ou aux Etats-Unis, les informations peuvent non
seulement être inexactes, mais aussi être libellées dans une autre langue que la langue officielle du
.
.
108
pays destmatalre
.
En France, par exemple, les produits fabriqués et destinés au consommateur français
tiennent compte de sa culture et de son environnement. Les consommateurs des autres Etats de
l'O.C.D.E. étant assez proches les uns des autres, les problèmes posés à ce niveau sont
relativement mineurs. De toute façon, dans chaque pays, le consommateur aura du produit
d'importation des informations libellées dans sa langue officielle109. En revanche, en Afrique
généralement, le produit espagnol, italien ou anglais sera tel quel dans un Etat d'expression
française 110.
107 WEIR et SCHAPIRO : op. cit. p. 25.
108 ibid; Akuété SANTOS: Thèse précitée. p 218.
109 Akuété SANTOS: Thèse précitée. p 218.
110 ibid.

178
Pour résoudre ce problème, la mise en place de certaines exigences s'impose. Dans un
premier temps, il faudra faire en sorte que les importations ne concernent que les biens dont les
indications sont libellées uniquement dans la langue officielle du pays importateur. S'agissant des
produits dangereux comme les pesticides, cela permettra de réduire les risques, mais seulement
dans les couches sociales lettrées qui, le plus souvent, ne sont pas directement concernées par les
manipulations des dits produits toxiques.
La deuxième parade consiste à adapter l'information à l'environnement social des illettrés,
des analphabètes incapables de lire les indications et contre-indications des étiquettes et
emballages. En attendant que les campagnes d'alphabétisation donnent des résultats à la mesure
des espérances, il est urgent de mettre en place un système d'étiquetage à l'aide de pictogrammes
simples et accessibles à tous ce dont le niveau culturel empêche de lire et de comprendre les
indications et contre-indications des différents produits à risques qu'on exporte régulièrement
dans ces pays. Ceci permettra, peut-être, de réduire les risques y afférent/II.
La fourniture d'une information sûre et adaptée peut certes permettre, dans certains
domaines de la consommation, de réduire les risques. Mais elle ne saura à elle seule suffIre à les
faire reculer si certaines précautions ne sont pas prises dans la commercialisation de certains
produits à risques.
B - L'action administrative dans la distribution.
Le devoir des pouvoirs publics est d'empêcher toute propagation des produits à risques
dans le commerce.
Pour limiter ces risques,
ils doivent
prendre certaines précautions
supplémentaires en contrôlant notamment leur vente (a) et leur usage (b).
III Akuété SANTOS: Thèse précitée. p 219.

179
al Le contrôle de la vente de certains produits à risques.
Si les empoisonnements aux pesticides sont beaucoup plus fréquents dans le Tiers-Monde
que dans les pays industrialisés, ce n'est pas seulement parce que les conditions de travail y sont
plus rudes, c'est parce qu'on y distribue aussi n'importe quel poison dans des sociétés où la
majorité des gens ne sait pas lire et n'a jamais été avertie des dangers que représentent les
produits chimiques.
Un membre de la F.A.O. raconte qu'en Indonésie, les petites boutiques vendent des
pesticides juste à coté des pommes de terre, du riz et d'autres aliments. Les gens en emportent
dans des récipients qu'ils ont sous la main: sacs de sucre, cartons de lait ou bouteilles vides de
Coca-Cola112.:. Cet exemple n'est pas un cas isolé. Cette attitude se rencontre un peu partout dans
le Tiers-Monde, notamment en Afrique. Là-bas le problème concerne davantage les paysans
analphabètes qui, exhortés par les autorités nationales d'utiliser les pesticides dans le cadre de la
modernisation de l'agriculture, s'y sont complètement impliqués. En Afrique de l'ouest, dans la
région du Cap-Vert, ce sont des gens illettrés, ignorant jusqu'à la dénomination du produit, qui
assurent la commercialisation des pesticides agricoles réputés pourtant très dangereux 113.
Du côté des produits pharmaceutiques, le problème reste aussi entier. La plupart des
médicaments - antibiotiques en général - sont en vente libre, hors des pharmacies. On peut s'en
procurer à des quantités voulues sans ordonnances et ce sur n'importe quel marché des pays
d'Afrique.
Au TOGO, ceux qui les vendent tout comme ceux qui les achètent n'ont qu'une idée
vague de leurs propriétés thérapeutiques 114. Cette liberté excessive dans la distribution des
médicaments laisse la porte ouverte à la prolifération des médicaments contrefaits ou falsifiés,
générateurs de grands risques pour les consommateurs 115.
j
1
112 WEIR et SCHAPIRO : op-cil., p. 23.
1
1
113 Cf. A. SANTOS: Thèse précitée. p 218.
114 ibid.
115 Yves AOULOU: article précité; E. OBADINA : "la contrefaçon à l'assaut de l'Afrique" in "Vivre Autrement"
n° 8-9 nov. 1988.pA et suivants.

180
Pour limiter les risques dans chaque Etat, il est urgent d'en réglementer la vente. En ce qui
concerne les pesticides, il est urgent d'en réglementer la vente en l'érigeant en monopole d'Etat;
ceci
permettra
d'assurer
de
façon
plus
sereine
leur
distribution.
Pour
les
produits
pharmaceutiques, l'interdiction de leur vente anarchique s'impose. Il faudra ensuite confier la
vente au seul monopole des sociétés de distribution pharmaceutique. Ce monopole certes existe,
mais son respect devrait être plus renforcé en interdisant la distribution sans garantie des
médicaments à tous les coins des rues. On pourra, peut-être, par ce moyen, éloigner certains
risques provenant de ce commerce parallèle.
hl Le contrôle de J'usage de certains produits à risques.
Limiter les précautions à la seule vente des produits à risques tels que les pesticides, si
"sûrs" soient-ils, peut s'avérer insuffisant dans des pays où les empoisonnements surviennent
surtout pendant l'usage. Outre la vente, il impotte- d'étendre la vigilance jusqu'à l'usage du
produit.
En effet, dans les pays du Tiers-Monde, les ouvriers 'tout comme les paysans sont
rarement avertis des risques qu'ils courent en maniant les pesticides. Ils le sont encore moins sur
les dangers de leur remballage. Or ces poisons dans ces pays changent fréquemment d'emballage.
Ils sont souvent versés dans de vieux bidons et maniés comme une inoffensive poudre blanche par
les paysans peu accoutumés aux poisons fabriqués par des hommes 116. Dans des villages, du
parathion (un pesticide très toxique) dans des bouteilles de Coca-Cola ou autres bouteilles
bouchées avec du papier journal et sans étiquette est chose courante. Le Gramoxone qui contient
du Paraquat, ce désherbant mortel, est parfois vendu dans des bouteilles de Coca-Cola; de plus, il
a la même couleur que cette boisson"?
Comme on peut le prévoir, les conséquences du remballage ne se font pas attendre, les
d
.
'1
1
d '
d'
b'
118
gens prenant par erreur u pOIson a a p ace u VIn ou
une autre OIsson
.
116 WEIR ct SCHAPIRO : op-cit., p. 15 à 16.
117 ibid. p. 23 à 24.
lIN ibid. p. 24. Le 16 Juin 1980, un pasteur présidait un service religieux au village de Tegu, près du Mont Hagen
en Nouvelle Guinée. Lors de la communion. il donna
par erreur du Garamoxone au lieu du vin à quatre
personnes. Toutes moururent au cours de la semaine suivante. En 1979, un jeune père acheta du Gramoxone ct le
mit dans une bouteille. Un jour, il demanda à son IiIs d'aller lui chercher à boire. L'enrant rapporta par erreur dl
Gramoxonc ct le donna à son père. A la première gorgée, le père réalisa que cc n'était pas de l'cau, mais c'é!;'
trop tard, il en mourut.

181
Le second problème se situe dans les emballages eux-mêmes. En effet certains paysans
utilisent les emballages vides à des fms alimentaires. Par exemple, le Gramoxone est légalement
vendu par le fabricant dans des bouteilles en plastique munies de poignées. Cependant, après
avoir utilisé le désherbant, les bouteilles deviennent un récipient idéal pour les villageois de la
Nouvelle Guinée qui y stockent leur eau potable l19,,-
Les accidents dus à cette réutilisation de l'emballage se rencontrent un peu partout en
Afrique. A Diohine (Sénégal), une dame s'était procurée une bouteille vide pour y mettre sa
provision d'huile devant servir à la préparation du repas familial, à la fm duquel 16 personnes
moururent intoxiqués. Vérification faite, la bouteille faisant office de récipient portait l'étiquette:
·d
If·
120
aCI e su unque
.
Le monopole de l'Etat dans la distribution des produits chimiques peut certes être un
élément important dans la limitation des risques. Il n'en demeure cependant pas moins qu'il doit
s'accompagner de sévères mises en garde contre les risques de remballage et de réutilisation de
l'emballage vide à des fms alimentaires. Si a priori on peut résoudre le problème de remballage ou
de changement d'emballage en insistant sur les risques d'une telle méthode, le seul moyen d'éviter
une réutilisation des emballages vides à des fms alimentaires consiste à obliger les paysans à les
ramener au service livreur après utilisation du produit. Ceux-ci pourront en conséquence être
détruits ou renvoyés au fabricant.
Mais le problème de la protection de la santé et de la sécurité du consommateur ne doit
pas demeurer uniquement une affaire nationale. Une grande partie des problèmes rencontrés à
l'intérieur trouve sa source à l'extérieur des frontières nationales. La logique veut aussi qu'on
cherche leurs solutions à l'extérieur des frontières nationales, notamment dans les pays étrangers
,
aussi bien dans les pays du Tiers-Monde que dans les pays industrialisés.
j
t]
1
119 WEIR et SCHAPIRO : op-cit., p. 24.
120 Famille et Développement. n°.31-32. Juill. 1982, p. 67.

182
Sous-Section II : La garantie de la santé et de la sécurité
au plan international.
Dans un monde de plus en plus dominé par les échànges internationaux, les efforts d'un
Etat ne peuvent à eux seuls suffire pour protéger sa population contre les dangers de la
consommation. Pour garantir une protection efficace aux consommateurs, une collaboration entre
Etats s'avère nécessaire. Pour les P.Y.D., cette collaboration est un impératif (§I). Pour les pays
industriels, elle relève plutôt d'un devoir moral vis-à-vis des premiers (§II), la plupart des
exportations dangereuses étant l'oeuvre de leurs entreprises multinationales.
§I - La garantie au plan régional. sous-régional ou continental de la
santé et de la sécurité du consommateur.
Pour être plus efficace, la protection du consommateur devrait, outre les efforts
nationaux, se développer au sein d'une coopération entre Etats du Tiers-Monde (A). Celle-ci
permettra à plus ou moins long terme d'asseoir une politique régionale ou continentale de la
qualité des produits et services dans ces pays (B).
A - La coopération interétatique dans le domaine de la
protectio/l du CO/lsommateur.
Pour qu'elle ait un intérêt pour le consommateur, cette coopération devrait être globale et
viser aussi bien l'aspect général Ca) que l'aspect technique Cb).
al La coopération sur le plan général.
Les accidents de la consommation ne sont pas souvent le fait du hasard ou d'une
malchance des victimes. Ils sont dans la majorité des cas, avons-nous dit plus haut, la
conséquence logique d'un manque d'informations : insuffisantes, fausses ou volontairement
tronquées pour des raisons uniquement commerciales. Dans les pays du Tiers-Monde,· on
rencontre rarement, à l'intérieur d'une même zone économique et géographique, des produits

183
étrangers de même nature (produits pharmaceutiques par exemple) portant les mêmes
informations 12 J •
Dans un contexte régional ou sous-régional, les gouvernements devraient s'efforcer de
résoudre ce problème en développant des accords de coopération dans ce domaine. Pour ce faire,
ils devraient instituer des mécanismes communs de contrôle des produits et services. Les organes
chargés du contrôle communautaire s'occuperont non seulement de la qualité des produits, mais
aussi de vérification de l'exactitude des informations et de leur concordance d'un pays à l'autre.
Par ailleurs, l'institution des mécanismes communs de contrôle aura pour avantage de
faciliter un échange d'informations sur les politiques nationales et les mesures relatives à la
protection du consommateur. Elle permettra en plus de revoir, de maintenir ou de renforcer les
mécanismes existants suivant les besoins l22 .
Pour être bénéfique aux consommateurs, la coopération devrait aller au-delà des seuls
échanges d'informations et intéresser le domaine de l'application des politiques de protection du
consommateur. Afin d'obtenir de meilleurs résultats à l'aide des ressources éxistantes, les
gouvernements pourront par exemple échanger des programmes d'information et d'éducation du
consommateur, organiser des programmes communs de formation et élaborer conjointement des
réglementations relatives à la santé et à la sécurité du consommateur123 • Tout ceci ne peut
néanmoins se faire sans l'apport de la technique, ce qui du coup nécessite aussi une coopération
dans ce domaine.
hl La coopération au plan technique.
La protection du consommateur passe par l'élimination des produits dangereux des
circuits de distribution. Mais il faudra avant tout en mai'triser les contours qui eux, sont du
domaine de la loi. Or, la réglementation du produit dangereux, en raison de son caractère
éminemment technique, requiert pour son élaboration à la fois un personnel qualifié, une
technologie de haut niveau, au moins proche sinon équivalente à celle ayant servi à la fabrication
du produit en cause. Ce qu'un pays du Tiers- Monde, africain en l'occurrence, ne pellt réaliser
121 cf. CHETLEY : op. cil. p. 9.
122 cr. La charte mondiale des droits des consommateurs O.N.V. principe n_. 43 a), in "Consommateurs-Actualité"
n° 470, 21 Juin 1985, p. 10.
123 La charte mondiale des droits des consommateurs O.N.V ibid. Principe n°. 43 b.

184
tout seul, en l'état actuel des choses. De plus, pour espérer une quelconque efficacité, il est
indispensable que le contrôle de cette réglementation soit assuré par des organismes techniques
spécialisés, alors qu'ils sont inexistants à ce jour.
La coopération aura pour dessein de combler ce vide juridique et technique que
l'incapacité singulière de chaque Etat laisse pérenniser. Les Etats membres de la coopération
désireux de protéger leurs consommateurs pourront dans un contexte régional créer ensemble des
laboratoires d'analyses qu'ils utiliseront conjointement. Ils pourront aussi ensemble mettre au
point des procédures d'analyses communes pour le bien de leur population respective l24 •
La réalisation d'une telle coopération ne nous parait pas impossible. Bien au contraire, les
P. V.O. offrent un cadre idéal pour la concrétisation d'un tel projet. Ces pays n'appartiennent-ils
pas à des communautés économiques régionales '25 ?
Ces regroupements économiques au sein desquels évoluent ces différents pays pourraient
servir de cadre idéal pour le développement des politiques relatives à la protection du
consommateur. Les organisations de consommateurs ouest africaines interpellent d'ailleurs leurs
gouvernements à oeuvrer dans ce sens à travers les différents séminaires régionaux tenus pour
promouvoir la vulgarisation des droits des consommateurs dans les différents pays de la sous-
région. 126
La gestion juridique et technique commune de la protection du consommateur
permettront, tout en tenant compte du prix et de la qualité, d'une part, d'améliorer les conditions
dans lesquelles les biens de première nécessité sont offerts aux consommateurs, et d'autre part,
d'éliminer du circuit commercial les produits de mauvaise qualité. tout en portant sur l'achat
commun des biens de première nécessité, elle permettra l'échange des renseignements sur les
diverses possibilités d'achat et la conclusion d'accords sur les spécifications régionales applicables
aux produits. Ce serait déjà un pas vers une assise d'une politique de la qualité.
124 Principe nO. 43 c.de la charte mondiale des consommateurs précitée.
125 Nous prendrons pour exemple l'Afrique dont les Etats appartiennent à des communautés économiques en
fonction de leur situation géographique : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(C.E.D.E.A.O) ; Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (C.E.D.E.A.C) ; Union du Maghreb
Arabe (U.M.A) etc...
126
Cf A. C. KANOUTE : «Consommateurs et construction de la C.E.D.E.A.O.», in «Consommation-
Développement» nO Il, décembre 1993, p. 1 ; voir également le Séminaire de Cotonou tenu sous le thèm·
«Consommateurs dans la construction de la C.E.D.E.A.O. », 6-11 décembre 1993, consulter les RésolutiOl.
adoptées à l'issue de ce Séminaire par les participants.

185
B - La promotion d'lllle politique régionale ou continentale de la qualité
des produits et services.
Parler d'une politique de la qualité dans un contexte régionale ou sous-régional pourrait
être qualifié d'absurde par un observateur non averti. Une telle démarche pourrait même être
appréhendé comme un luxe pour les P. V.D. Plusieurs raisons en justifient cependant la nécessité,
le bien fondé (a). Si nécessité il y a, encore faut-il en déterminer la démarche à suivre. A cet effet,
une politique normative nous parait la mieux indiquée pour aboutir à un résultat satisfaisant (b).
a) De la nécessité d'une politique régionale ou continentale
de qualité des produits et services.
Les raisons d'une telle démarche, avons-nous dit, sont nombreuses. Pour comprendre
l'urgence d'une telle politique, il faudra partir de quelques observations utiles faites autour du
commerce international dans ses différentes manifestations.
En effet, les échanges commercIaux entre les pays industriels se font de façon
harmonieuse et loyale. Si on prend l'exemple de la France, on peut dire qu'une grande partie de sa
production industrielle est destinée à l'exportation, principalement vers les marchés des Etats de
l'Union Européenne et de l'O.C.D.E. L'effort d'harmonisation de la réglementation des produits et
services dans l'optique de leur libre circulation dans tous les Etats de l'Union réduit de façon
notable
la possibilité d'exposer les consommateurs des différents
pays à des
dangers
considérables.
S'agissant du monde occidental en général notamment des Etats de l'O.C.D.E., il existe
de nombreuses dispositions de droit interne lesquelles restreignent le risque d'importation sur le
territoire national de produits comportant de graves dangers,127 même si l'on admet que des
particuliers voyageant à travers ces pays puissent en introduire un nombre limité l28. D'une
manière générale, l'existence des dispositions communes aux pays membres de l'O.C.D.E. 129
127
Le cas des vêlemenls dc nuil d'cnfanls lrailés au relardanl Tris importés dcs Elals-Unis rcslc asscz
exceplionnel.
128 L'affaire connu sous le nom dcs "huilcs cspagnolcs" offre un hon cxcmplc Ü ccl ciTe!.
1'9
t'
La
1"
'l"
d·1
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C. «
po llique a egar
ucs consommalcurs dans Ics pays de l'O.C.O.E 19R7-19H8.» O.C.O.E. Puris 1990.
p. 7 el suiv.

186
renforce de façon non négligeable la protection dans le domaine de la santé et de la sécurité par la
mise en place d'un système d'échange rapide d'informations sur les produits dangereux. 1:10
De leur côté, les Etats du Tiers-Monde, en l'occurrence ceux d'Afrique, se caractérisent
par leur faible production de biens ouvrés et corollairement par le besoin croissant d'importations
de produits de consommation courante conformément à la division internationale du travail. 1.' 1
Environ 25 à 30% des échanges extérieurs de la France se font avec ces pays. Il en va de même
pour les autres pays occidentaux. Il peut bien arriver - et cela arrive souvent - que des produits
dangereux par nature ou par défaut, donc des produits non conformes, fassent l'objet de ces
échanges et exposent ainsi leurs consommateurs à des risques importants.
Certes les normes internationales de sécurité existent, mais elles ne concernent que très
peu
de
produits. m
Elles
ne
peuvent donc
pas
garantir
suffisamment
la
sécurité des
consommateurs des pays du Tiers-Monde.
La meilleure garantie consiste en une prise en charge de soi-même. C'est pourquoi, outre
les normes intèrnationales de sécurité, les pays du Tiers-Monde se doivent d'avoir dans un
contexte régional ou sous-régional des spécifications de la qualité des produits qu'ils importent
afin de mieux garantir la sécurité de leurs consommateurs. A cet effet, seule la mise en place
d'une démarche de la qualité basée sur des normes régionales peut ouvrir la voie à une telle
perspective.
b) La normalisation comme politique raisonnable.
Une politique normative repose avant tout sur l'élaboration des normes servant de moule
à la qualité exigée. Avant de dégager l'intérêt d'une telle entreprise (2), il importe tout d'abord
d'en définir la notion (l).
130 Cf. Lamy Droit Economique 1993.nos 9009 à 9012.
131 La division internationale du travail est basée sur une spécilicité dans les tâches: le Nord produit des bicm
ouvrés et le Sud fournit les matières premières.
132 Normes I.S.0 (International Standing Organisation).

187
1 - La notion de norme.
Deux définitions caractérisent la notion: une purement technique et une réglementaire.
Selon la première, la normalisation est entendue comme "l'activité propre à apporter des
solutions d'application répétitive à des questions relevant essentiellement des sphères de la
science, de la technique et de l'économie et visant à l'obtention du degré optimal d'ordre dans un
contexte donné. Elle se manifeste généralement par l'élaboration, la publication et la mise en
"
.
d
1
,,133
app lcatlon es normes. .-
La seconde est l'oeuvre d'un texte de loi. A cet effet l'article 1er du décret du 26 Janvier
1984 dispose: « la normalisation a pour objet de fournir des documents de référence comportant
des solutions à des problèmes techniques et commerciaux concernant les produits, biens et
services qui se posent de façon répétée dans les relations entre partenaires économiques,
scientifiques, techniques et sociaux. » \\34
A l'origine, la normalisation était limitée aux' produits industriels et s'attachait à simplifier
et à unifier les fabrication et à en déterminer les caractéristiques - surtout dimensionnelles - afin
de permettre une interchangeabilité et une adaptabilité des matériels 13) La standardisation est
demeurée très longtemps son unique aspect. Celle-ci se proposait « la définition technique des
produits propres à satisfaire des besoins déterminés en éliminant les complications et les variétés
superflues afm de permettre une production rationnelle sur la base des techniques existant à un
moment donné. » 136
Mais chaque époque secrète ses besoins spécifiques en normes et réclame la définition de
"Stratégies normatives" propres. Aujourd'hui, la normalisation n'est plus seulement perçue sous
l'angle étroit de la rationalisation, mais comme le siège de nombreux enjeux : notamment la
protection de la santé et de la sécurité des personnes, la défense du consommateur et la loyauté
d
1 ·
Il
137 A
'
d 1
1"
~
l '
,
es re atlOns contractue es.
cet egar , a norma lsation apparaJt comme une a ternative a un
m Lamy Droit économique. 1993. n° 8454NF X 50-003
134 ArUcr du Décret n084-74 du 26 Janvier 1984lixantlc statut de la normalisation: J.O du Icr Février 1984. cf
Lamy Droit économique. 1993. n° 8552.
135 cf Lamy Droit économique. 1993. n° 8456.
136 M. VERNON: « l'arl.lcr, § Il de la loi du
Icr Août 1905 sur la répression des fraudes et la politique de
normalisation» D. 1965. p. 175.
137 Lamy Droit économique. 1993. n° 8456.

188
cortège de dispositions législatives et réglementaires coercitives pour tout pays désireux de
protéger sa population contre les dangers de la consommation venant aussi bien de l'extérieur que
de l'intérieur.
2 - L'intérêt de la normalisation.
Il ne peut y avoir de politique de qualité sans élaboration de normes. L'objectif de la
qualité totale est l'une des ambitions majeures de la normalisation '38_et la normalisation est le
fondement de toute politique de qualité. 119
Les rédacteurs de principes directeurs des Nations Unies pour la protection du
consommateur l'ont bien souligné dans le principe n° 24 en ces termes: « Les gouvernements
devraient aux niveaux national et international et suivant les besoins, formuler des normes,
facultatives ou non régissant la sûreté et la qualité des biens et services ou encourager
l'élaboration et l'application de telles normes et leur donner la publicité voulue. Il faudrait revoir,
de temps à autre, les normes et règlements nationaux relatifs à la sûreté et à la qualité des
produits, afin' de faire en sorte qu'ils soient conformes, si possible, aux normes internationales
, , 1
'
140
genera ement acceptees»
.
Les normes ne sont pas une contrainte supplémentaire imposée aux entreprises, elles sont
au contraire une condition nécessaire de leur crédibilité aux yeux des consommateurs. De façon
générale, la normalisation est un instrument utile à un double niveau:
Elle est tout d'abord utile au professionnel qui trouve généralement, dans sa soumission
volontaire aux contraintes des normes, l'assurance de réduire ses coûts de production par un
allongement des séries et la suppression des modèles superflus, d'améliorer la disponibilité des
variétés fabriquées, de diminuer ses frais d'investissement pour la recherche des produits, de
mettre en oeuvre une politique de qualité qu'apprécient les acheteurs professionnels et les
consommateurs l41 •
13& ibid.
I3'JJ._c. FOURGOUX et J.
MIHAILOY:
"La normalisation
en
tant
qu'instrument de
la
sécurité des
consommateurs". in colloque de l'Université de Paris 1 précité p. 29.
140 cf La charte des droits des consOImnuteurs des Nutions Unies précitée.
141 Lamy Droit Economique. 1993. n° S457.

189
Elle est aussi utile aux consommateurs pour qui elle constitue un instrument de protection
notamment dans les domaines de product'ion t(;)Uchant à la sécurité. 142 Par une définition de
produits et d'appareils assurant l'interchangeabilit~et,la fiabilité des éléments, l'aptitude maximale
à l'emploi auquel ils sont destinés, pouvant être utilisés le plus longtemps possible, offrant la
sécurité optimale ou garantissant, pour les denrées alimentaires leur innocuité et leur salubrité,
elle a vocation à participer à la mise en oeuvre juridique d'une politique de qualité, entendue dans
ses aspects principaux de protection de la santé et de la sécurité des personnes, de qualité de vie,
de protection de l'environnement, de lutte contre la pollution, de l'économie de l'énergie... 143
Pour les P. V.D, la normalisation offre une perspective favoraple à leurs consommateurs.
Faite dans un cadre communautaire par le biais de la coopération,[ e~e permettra une bonne
organisation commune des marchés et un contrôle efficace des produits et services qui y
pénètrent et circulent au grand péril de leur population. L'application des normes communes de la
qualité aura vocation à éliminer du circuit commercial des produits de qualité non satisfaisante, à
orienter la production de façon à répondre aux besoins des consommateurs, à faciliter les
relations commerciales sur la base d'une concurrence loyale, à diminuer les coûts de production, à
stabiliser les marchés en recherchant un ajustement optimal de l'offre et de la demande, à garantir
la sécurité des approvisionnements, intracoopératifs ou extracoopératifs, aux consommateurs ; à
permettre des prix raisonnables lors des livraisons aux consommateurs. 144
Le développement des normes permettra aussi d'assurer une meilleure information au
consommateur sur les caractéristiques de la marchandise par l'exigence d'un étiquetage très
complet lequel constitue en quelque sorte la carte d'identitê du produit. 145
Toutefois, la réalisation de cet objectif est liée à la volonté qu'ont ces pays de coopérer
pour le bien-être de leurs consommateurs. Elle est aussi liée, àsuppqser que cette volonté existe,
à la volonté des pays industriels, d'où part d'ailleurs la plupart des marchandises dangereuses,
d'aider ces pays dans l'accomplissement de cette mission.
142 FOURGOUX et MIHAILOV : art. prée. p.30.
143 Lamy Droit Economique. 1993. n° 8458.
144 J. ARMANTIER : "La coopération européenne en matière de contrôle de la qualité de fruits d. légumes". Rev.
de la consommation, septembre-octobre. 1990, p. 21.
145 ibid. p. 22.

190
§II - La garantie au plan mondial de la santé et de la
sécurité du consommateur.
Bien qu'ayant un caractère général, ce devoir de garantie interpelle plus particulièrement
les pays industriels du Nord, pays d'origine des marchandises dangereuses exportées légalement
vers les pays du Sud. Le problème des exportations dangereuses n'est pas appréhendé à sa juste
valeur dans le Nord (A). Et cette interpellation se veut être l'écho d'un appel désespéré en vue
d'une prise de conscience beaucoup plus accrue vis-à-vis du problème dans le Nord. Celle-ci
permettra d'obtenir des pays concernés un rôle actif et responsable vis-à-vis des exportations
dangereuses vers le Sud (B).
A - La dimension du problème dans les pays industriels.
Les réactions enregistrées de part et d'autre à l'encontre des exportations vers les P.V.D
des produits dont la commercialisation sur le marché domestique est interdite ou sévèrement
réglementée ont entraîné dans les pays exportateurs du Nord une certaine prise de conscience
dans les contrôles. L'efficacité de ces contrôles reste cependant limitée (b) tant ils sont le domaine
où règne une totale confusion (a).
al De la confusion dans le contrôle des
exportations dangereuses.
Les situations actuelles des contrôles des exportations des médicaments, des pesticides ou
d'autres produits de consommation - établis soit dans quelques Etats, soit au plan international -
donne l'image du plus grand trouble, de la plus grande confusion. Ce trouble dans les contrôles
est imputable aux législations nationales sur la sécurité des produits de consommation et ce pour
plusieurs raisons.
Les législations sur la sécurité des produits de consommation, lorsqu'elles existent au
niveau national, excluent de leur champ d'application les produits pour lesquels existent des

191
146
dispositions particulières, dont les médicaments et les pesticides.
A défaut de dispositions
particulières, c'est le vide juridique complet dans le domaine. Les dispositions nationales en
vigueur peuvent ne rien mentionner quant à leur. application éventuelle aux produits destinés à
l'exportation,147 ou autoriser les agents de contrôle nationaux à prévoir une série d'exceptions
pour les produits non destinés au marché domestique. 148 Ainsi, une étude réalisée en 1976 sur la
réglementation internationale des médicaments révèle que trois des principaux pays exportateurs
des médicaments - la France, la Suisse et le Royaume Uni - exemptent des dispositions nationales
prévues pour l'enregistrement des médicaments ceux destinés à la seule exportation. 149
Par ailleurs, lorsque les législations prévoient qu'en principe, un même traitement est
réservé aux produits destinés au marché domestique et à ceux destinés à l'exportation, 150 un large
pouvoir d'interprétation est laissé à l'administration quant à l'application effective de toutes les
dispositions de la loi et il est difficile d'évaluer la rigueur exacte avec laquelle sont mises en
oeuvre les règles en vigueur dès lors qu'il s'agit de produits d'exportation. 151
Les institutions internationales. ne font pas exception à la règle. Les principes par elles
énoncés dans ce domaine ne sont rien d'autre que des recommandations sans portée législative.
Elles ne lient que les gouvernements qui acceptent volontairement de s'y soumettre. 152
D'une manière ou d'une autre, il se dégage de la politique d'exportation des produits
dangereux, trois options dont la coexistence permet d'entretenir le flou: la politique du laisser-
faire, la politique de type informationnel et la politique restrictive.
La politique du «laisser-faire» se manifeste de la façon suivante : étant donné les
exceptions prévues par la législation nationale en ce qui concerne les produits dangereux et la
façon dont celle-ci est interprétée ou mise en oeuvre, ou en raison du silence de celle-ci, les
146 On peut citer comme exemple: la loi Française du 21 Juillet 1983 sur la sécurité des consommateurs; U.S.
Consumer Product safety Act. Toutes ces lois concernent les médicaments.
147 Loi Allemande de 1976 sur les médicaments.
14K Exemple: L'industrial Rescarch and Standards Acts de 1961 en Irlande; Consumer Salcty Act de 1978 au
Royaume Uni.
149 Cf. "l'exportation des médicaments dangereux des pays de la Communauté Européenne vers les pays du Tiers-
Monde". Recommandations du B.E.U.C et de l'l.O.C.U. en vue d'une législation communautaire. 34/85. p. 2.
150 C'est le cas de la Belgique et de la France.
151 Recommandations du B.E.U.C et de l'I.O.C.U. précitées. p. 2 et 3.
152 ibid. p. 3.

192
produits peuvent être exportés librement quand bien même leur commercialisation sur le marché
domestique se trouverait interdite ou sévèrement réglementée.
La politique de «type informatiollnel» se trouve être le domaine de la complaisance.
Elle autorise l'exportation des produits interdits, non approuvés ou réglementés sur le marché
domestique, mais seulement après avoir averti les autorités de contrôle du pays d'exportation de
l'intention d'exporter et après transmission de cette notification aux autorités de "contrôle" du
pays d'importation.
La politique « restrictive» exprime un désir de blocage de toute exportation dangereuse.
Les mêmes restrictions déclarées applicables au niveau du marché domestique le sont aussi pour
l'exportation et ce, sans la moindre exception. C'est une politique réaliste, encore faut-il qu'elle
puisse s'appliquer comme cela se doit.
Si la politique du laisser-faire est celle qui se manifeste le plus dans le commerce
international, il faut souligner que la présence des deux autres options entretient plus que jamais
l'ambiguïté dans les contrôles. Dans l'entretien de cette ambiguïté, la politique iriformationnelle
sert de tremplin pour éviter l'application de la politique restrictive. Ce qui rend du coup incertain
les contrôles basés sur ces différentes options.
Il) Les limites d'efficacité des options en présence.
Pour différentes raisons, aucune de ces options ne constitue une approche permettant de
mettre rapidement en oeuvre une politique efficace qui donne aux consommateurs des pays du
Tiers-Monde des garanties effectives vis-à-vis des produits d'importation. Les arguments contre
chacune de ces politiques sont nombreux.
L'inefficacité de la politique du laisser-faire est évidente car elle relève d'un laxisme
notoire. Tout d'abord, elle est inconvenante. De ce fait, elle met en cause la responsabilité morale
des pays disposant de la technologie et du savoir scientifique qui se doivent de ne pas exposer, au
moins sans information préalable, les consommateurs des pays du Tiers-Monde à des risques
jugés inacceptables pour leurs propres citoyens.
L'absence
d'infrastructures
législatives,
administratives et scientifiques adéquates dans ces pays pour contrôler efficacement les
importations rend encore plus évidente cette responsabilité. Qui plus est, cette politique met e

193
cause la réputation du pays d'exportation et l'image de marque de la qualité de ses produits et
dont les conséquences peuvent être la diminution des échanges commerciaux. Elle se traduit aussi
par la tromperie manifeste des consommateurs des pays étrangers en droit d'attendre d'un produit
fabriqué par un pays disposant de la technologie, de l'information scientifique et éventuellement
d'un certain renom pour la qualité de ses produits, qu'il soit au moins de la qualité et offre la
sécurité requise dans les pays d'origine. On peut tout simplement voir dans cette politique une
incitation à l'exportation susceptible de se traduire par une diminution du souci des fabricants
domestiques de veiller à la qualité de leurs produits puisque ceux-ci pourront de toute façon être
écoulés. L'orientation de la production vers les marchés moins réglementés peut entraîner des
perturbations du marché concurrentiel ; elle peut aussi être un danger pour les populations du
pays d'exportation car les produits exportés peuvent d'une manière ou d'une autre, être l'objet
d'une réexportation vers le pays d'origine.')J
La politique de type informationnel est de toute évidence un aménagement de la politique
du laisser-faire. Elle est le produit des initiatives engagées au niveau international lesquelles visent
la mise en place des techniques veillant' à l'information du pays d'importation sur les risques liés à
l'usage du produit importé. 154 Mais cette option est aussi moins efficace que la précédente dans la
protection des populations du Tiers-Monde.
Certes, elle a l'avantage de préserver la souveraineté du pays importateur tout en
prévoyant l'information de ce dernier. Mais au nom d'un principe généreux, elle refuse de tenir
compte des déséquilibres évidents qui, dans la réalité, caractérisent les positions respectives du
pays d'exportation et du pays d'importation. Une infrastructure législative et administrative
déficiente et une information scientifique incomplète empêcheront le plus souvent les autorités du
pays d'importation de prendre des décisions rationnelles à la suite de l'information communiquée
par le pays d'exportation. A cela s'ajoutent les pressions exercées par les sociétés multinationales
intéressées par ces transactions sur les gouvernements, les administrations, les chercheurs et le
15) Cr. Recommandations du BEUe ct de l'Lü.C.U. précitées. p. 4 ; WEIR ct SeAPIRO : op. cil. p. II ct suiv.
15~ cr. Recommandations du SEUe Ct de l'Lü.C.U. précitées. p. 4. En cc sens voir: Rapport rait au nom de la
commission de "environnement, de la santé publique ct de la protection des consommateurs du parlement
Européen sur l'ex.portation de diverses substances ct préparations dangereuses (Rapport Squarcialuppi), doc. 1.
458183, 27 Juin 1983 ; Résolution 37/137 de l'Assemblée Générale des Nations Unis sur la protection contre les
produits dangereux. pour la santé ct l'environnement, 1cr Décembre 1982 ; Recommandation de l'O.C.D.E. sur
./1
l'exportation de produits chimiques interdits, doc. c(84)37, 4 avril 1984 ; Recommandation de l'ü.C.D.E. sur les
procédures de retrait des produits dangereux.. avril 1981 ; Recommandation de l'O.C.D.E. sur la sécurité dcs
produits de consommation, 1979.

194
monde médical du pays d'importation. Une telle politique repose avant tout sur une fiction
juridique et connaît au niveau international, les mêmes limites et les mêmes lacunes que J'on
s'entend à reconnaître à une politique de la consommation restreinte aux seules mesures
d'information des consommateurs.
Par ailleurs, l'efficacité de cette politique dépend en fait de la communication effective de
l'information par les autorités du pays d'exportation aux autorités du pays d'importation. En cc
sens les recommandations existantes restent vagues sur des questions aussi importantes que la
nature exacte de l'information à transmettre, à qui et comment.
L'obligation d'un étiquetage conforme à celui requis dans le pays d'exportation peut ne
pas constituer l'étiquetage le plus adéquat pour assurer la protection de la population du pays
d'importation. Il est donc clair que toute politique qui vise à contrôler les exportations des
médicaments ou des pesticides dangereux, doit étendre son contrôle à l'étiquetage des produits
exportés et apprécier le caractère adéquat de ce dernier par rapport à l'environnement social l55 du
pays d'importation. La seule conformité aux règles prescrites sur le marché domestique ne devrait
en aucune manière constituer une garantie de "bonne" information pour les pays d'importation. 156
La politique restrictive sans exceptions est de toute évidence un leurre. Elle est d'ailleurs
combattue par les représentants de l'industrie pharmaceutique et des pesticides. Ceux-ci
prétendent que les pays d'exportation n'ont pas à imposer leurs propres critères de sécurité aux
pays d'importation et que ces derniers doivent conserver la maîtrise de leur décision. On retrouve
là, l'argument de souveraineté qu'utilise très largement d'ailleurs la Commission Européenne. Ces
représentants rétorquent aussi que la position concurrentielle du pays d'exportation risque d'être
affaiblie au regard du commerce international si les normes de qualité et de sécurité fixées par ce
pays sont plus rigoureuses que la moyenne, et que les réglementations édictées pour la
commercialisation desdits produits peuvent s'avérer irrelevantes et ne pas se justifier dans les pays

.
d
1';7
IlnportatlOn ..
Mais au-delà des différents arguments avancés contre ces différentes .options, une
évidence demeure: le problème des exportations dangereuses concerne la santé et la sécurité de~
m cr supra: b) l'exigence de l'in!<Jrmation adaptée à l'environnement social ct au niveau culturel de
consommateurs
156 Cr. Recommandations du BEUC ct de l'l.Ü.C.U. précitées. p. 5.

195
populations du Tiers-Monde. Et cette évidence interpelle plus que jamais la conscience des pays
industriels pour une protection mondiale des consommateurs. C'est un devoir moral qui leur
incombe.
fi - Pour une plus grande responsabilité des pays industriels dans la
protection des consommateurs du Tiers-Monde.
Assumer une telle responsabilité reviendra à mettre en place une politique de contrôle
strict et objectif des exportations dangereuses au niveau de chaque Etat (a). Et dans cette
démarche, il est souhaitable que l'Union Européenne (b) tout comme les Etats-Unis (c) ainsi que
les Nations Unies (d) jouent un rôle important.
a) Pour une politique de contrôle strict et objectif des exportations
des produits vers les P. V.D.
Au plan international, la protection du consommateur devrait reposer sur le principe selon
lequel tout produit interdit dans un pays ne puisse faire l'objet d'exportation par celui-ci. Dans cet
esprit, les produits dont la vente est réglementée dans un pays d'exportation devrait, a priori, être
réglementés dans le pays d'importation. Mais pour des raisons pratiques permettant de tenir
compte de rares cas particuliers et de crainte de voir s'installer une situation de prohibition qui
encouragera sans aucun doute la fraude aussi bien dans les pays d'exportation que dans les pays
d'importation, de préférence à un système aveugle d'interdiction totale, il est souhaitable de
recourir à une politique basée sur un contrôle objectif et strict des exportations des produits
comme les médicaments et les pesticides vers les P.Y.D.
Une telle politique doit reposer sur les principes suivants:
- égalité de traitement entre les produits destinés au marché domestique et ceux
destinés à l'exportation;
- admission d'exceptions et de licences spéciales d'exportation prévues à cet effet,
sur la base de principes et de moralités définis et mis en oeuvre avec les parties concernées, dont
les consommateurs.
157 cr. Recommandations du BEUe ct de l'l.Ü.C.U. précitées. p. 6.

196
- établissement d'une procédure d'exemption objective et transparente qui empêche
les autorités nationales et européennes de contrôle d'exercer tout pouvoir discrétionnaire.1)~
Dans le principe N° 1, la règle première à appliquer doit consister en la présomption qu'un
produit interdit au plan national ou retiré du marché domestique ne peut être exporté. La même
présomption doit s'appliquer aux produits non encore enregistrés, comme c'est le cas des
médicaments et des pesticides; à ceux dont l'usage n'est certes pas interdit mais réglementé, aux
pesticides et autres produits déclarés non conformes aux normes de sécurité, d'efficacité, de
présentation ou d'étiquetage dans le pays d'exportation. Cette présomption est aussi valable pour
tout médicament ou pesticide non encore approuvé par les autorités du pays d'importation. 1)9
Si la règle première est celle d'une interdiction de principe, des exceptions peuvent
cependant être prévues dans certains cas spéciaux et sous certaines conditions. La démarche ci-
dessus prônée, peut donc aboutir, sous certaines conditions précises, à l'établissement d'un
système de licence pour l'exportation des produits interdits, retirés de la vente, non enregistrés ou
non conformes aux normes diverses qui en restreignent la libre commercialisation dans le pays
d'origine. Les principes et les modalités des transactions sont, dans ce cas, définis par les parties
en cause. 160
ivlais au risque d'avoir l'exception devenir la règle, il est nécessaire de mettre en place une
procédure d'exemption stricte capable de garantir la transparence du système. A cet effet, il
convient d'une part, de préciser soigneusement les étapes de la procédure à suivre et notamment
les éléments d'information que doit fournir le candidat-exportateur en vue d'étayer sa demande;
d'autre part de laisser aux autorités du pays d'importation la maîtrise de la décision finale, tout en
ayant veillé, auparavant à engager avec elles un processus actif de négociations qui dépasse la
seule communication passive de l'information.
Si
la
procédure
de
demande
d'une
licence
d'exporter
concerne
les
produits
pharmaceutiques, le dossier de demande devrait comporter les informations suivantes:
- désignation précise du médicament concerné; appellations diverses des éventuels
médicaments similaires ou équivalents disponibles sur le marché du pays d'importation et du pays
m cr. Recommandations du BEUC et de l'l.Ü.C.U. précitées. p. 6.
15'1 Cr. RecOlllmandations du BEUC et de l'l.Ü.C.U. précitées. p. 6.

197
d'exportation; une information détaillée sur l'efficacité thérapeutique du médicament concerné. Il
est également important de préciser si le médicament concerné se trouve sur la liste des
médicaments essentiels établie par l'O.M.S. ;
- raisons de l'interdiction prononcée à l'égard du médicament, de son éventuel
retrait du marché domestique ou de sa non conformité aux normes du pays d'exportation;
- pour un médicament non encore enregistré, les mêmes exigences que celles
prescrites dans le cadre de la procédure d'enregistrement préalable en vigueur dans le pays
d'exportation;
- la preuve que le médicament répond aux prescriptions diverses de la législation
du pays d'importation;
- emballage prévu pour la commercialisation du médicament dans le pays
d'importation (mentions et présentation) ;
- un aperçu des techniques promotionnèlles notamment publicitaires, qUi seront
utilisées pour sa commercialisation dans le pays d'importation. Il est essentiel que le contrôle qui
s'instaure dépasse les seules questions liées à la qualité, la composition, l'efficacité thérapeutique
et la sécurité du médicament concerné et couvre ainsi le caractère essentiel de ce médicament tel
que défini par l'O.M.S. ainsi que l'emballage et les techniques de commercialisation auxquelles il
sera fait recours. 161
Outre ces informations, la communication du dossier de demande devrait s'accompagner
d'éventuelles
remarques
objectives
des
autorités
d'exportation
aux
autorités
du
pays
d'importation. Ces remarques auront pour objet d'éclairer ces dernières dans la prise de la
décision finale.
Mais qui dit procédure d'exemption dit risque d'arbitraire et risque de voir l'exemption
devenir la règle, vidant ainsi de tout sens la législation adoptée à cet effet. Pour éviter ce risque, il
est dès lors essentiel que l'octroi de la licence d'exporter résulte de l'accord de l'ensemble des
parties concernées et que les raisons qui le justifient soient rendues publics.
160 cr Recommandations du BEUC cl de l'IOCU précitées, p.7.
161CF. Recommandations du BEUC ct de l'Lü.C.U. précitées. r. 8.

198
hl Le rôle de J'Union Européenne dans la protection de la santé et
de la sécurité des consommateurs du Tiers-Monde.
L'Union Européenne entretient des relations commerciales privilégiées avec la plupart des
pays du Tiers-Monde notamment les pays d'Afrique, des Caraibes et du Pacifique l62 et peut de ce
fait jouer un rôle dans la garantie de la sécurité des biens de consommation courante ou non
légalement exportés vers ces pays. D'autres motifs comme ceux pouvant justifier l'adoption par
un Etat d'une politique de contrôle de l'exportation des médicaments ou des pesticides rendent
urgente l'intervention de l'Union Européenne pour une meilleure protection du consommateur
dans le commerce international Nord-Sud. A tous ces motifs justificatifs viennent s'ajouter les
considérations liées à la réalisation des objectifs du Traité de Rome aujourd'hui élargi par celui de
Maastricht.
D'une manière générale, l'intervention de l'Union Européenne doit être motivée par deux
raisons fondamentales:
- La raison liée à la responsabilité morale et éthique de l'Union Européenne.
- La raison liée à la sauvegarde de l'image de marque et de réputation des produits
des pays de l'Union et donc de l'Union elle-même.
Par ailleurs, l'information et la protection du consommateur sont un des objectifs
prioritaires de l'Union Européenne. Le but est d'aboutir à "une Europe de citoyens à visage
humain". De là, la reconnaissance qu'elle fait des droits fondamentaux du consommateur, oblige
ses institutions à s'intéresser aux effets, sur les consommateurs des pays tiers, des politiques de
production et de commercialisation appliquées par des entreprises appartenant aux pays de
l'Union. En tant qu'Institution internationale responsable, il est du devoir de l'Union Européenne
de mettre en oeuvre un programme d'information et de protection des consommateurs aussi bien
locaux que des pays tiers, destinataires des produits des pays membres de l'Union. Elle a aussi le
162 Ces reiations commerciales se manifestent dans le cadre de la convenlion A.C.P.lCEE (Afrique-Caraïbo
Pacitique/Communauté Economique Européenne) devenue Union Européenne depuis Novembre 1993.
"

199
devoir de contribuer à la mIse en oeuvre des recommandations et des programmes d'action
décidés par d'autres instances telles que l'ONU, la WHO et le Conseil de l'Europe.
Cette participation aux diverses initiatives internationales devrait aider à la mise en place
d'un contrôle international uniforme et véritablement efficace ayant notanunent l'avantage de
placer les exportateurs de médicaments ou pesticides des pays de l'Union sur un pied d'égalité
avec les exportateurs des pays industriels tiers '63 .
A cet effet,
un effort en
vue d'un
rapprochement des politiques commerciales et notamment des politiques d'exportations des pays
membres s'avère nécessaire. Cette approche aura le mérite d'éliminer les distorsions de
concurrence entre entreprises d'exportation des pays membres, qui résulterait de l'application par
certains Etats membres, des règles plus souples pour l'exportation des médicaments ou d'autres
produits à risques circulant sur leurs marchés respectifs. 164
L'avantage d'une telle politique n'est pas négligeable pour l'Union Européenne : elle
permettra d'éviter le danger des réimportations à l'intérieur de l'Union des produits dangereux
exportés et de limiter ainsi les effets négatifs d'une politique de laiss~r-faire sur la qualité et la
sécurité des médicaments et pesticides produits et commercialisés à l'intérieur de l'Union. 165
Pour être efficace à tous les niveaux, l'intervention de l'Union Européenne dans la
protection du consommateur contre les exportations dangereuses doit déboucher sur une mise en
place d'une centrale Européenne d'information alimentée par trois sources principales:
- La première relève du domaine des pays membres qui, à leur niveau, devront aVOIr
l'obligation de communiquer l'ensemble des décisions relatives à la commercialisation des
médicaments, pesticides ou autres produits interdits ou réglementés sur leurs marchés respectifs:
mesures d'enregistrement, décisions d'interdiction ou de retrait, règles diverses relatives à
l'étiquetage, à la publicité et à la promotion desdits produits, licences d'exportation octroyées et
motifs les justifiant, informations en provenance des pays d'importation.
- La seconde sera alimentée par les centrales existantes au niveau international (WHO).
16.1 Cf. Recommandations du BEUC et de l'l.Ü.CU. précitées. p. 9.
164 ibid. p. 10.
1(,5 ibid.

200
- La troisième proviendra des systèmes d'échange d'informations publics et privés
(O.C.O.E, LO.C.U, B.E.U.C. etc.)166.
Cependant, l'utilité de la centrale d'information est subordonnée à la constitution d'une
banque européenne d'informations réunissant des informations sur les mesures d'interdiction et de
retrait des produits du marché, sur les règles de leur commercialisation, sur les licences
d'exportation accordées suivies de leurs justifications. En conséquence, il sera fait obligation au
pays d'importation d'avertir cette banque de toute anomalie constatée lors de la commercialisation
sur son marché du produit importé (accidents, effets secondaires non prévus... ). Les informations
ainsi rassemblées serviront à alimenter les banques d'information dont la mise en place est
encouragée au plan international (WHO, liste ONU)'67.
Néanmoins, pour une efficacité de son travail au plan international, il est urgent que
l'Union Européenne définisse, dans ses programmes de développement, une assistance technique
et administrative aux P. V.O. afm de les aider à mettre en place une infrastructure de contrôle
adéquate des produits importés, notamm~nt des médicaments et des pesticides. Les Etats-Unis
n'en sont pas moins intéressés par cette remarque.
cl Le rôle des Etats-Unis dans la protection de la santé et
de la sécurité des consommateurs du Tiers-Monde.
Dans le domaine relatif à l'exportation des produits dangereux à destination des pays du
Tiers-Monde, on peut tout simplement dire qu'il n'existe aucune différence entre les Etats-Unis
et les pays de l'Union Européenne pour ce qui concerne le contrôle des entreprises productrices.
Tout comme la politique de type informationnelle en Europe, il existe aux Etats-Unis une
procédure de notification mise en place par l'EPA (Environmental Protection Agency) Cl) en vue
de réguler les excès commis dans ce commerce par les entreprises américaines. Mais celle-ci
s'avère inefficace pour contrôler de façon adéquate les exportations des produits dangereux vers
les pays du Sud ainsi que les dangers qui en découlent. II est donc du devoir de l'Administration
Américaine de prendre des mesures plus énergiques susceptibles de protéger la santé et la
lM Cr. Recommandations du I3EUC et de ITa.c.U. précitées. p. Il.
167CF. Recommandations du BEUC et de l'l.a.c.u. précitées. p. 11.

201
sécurité des consommateurs des pays du Tiers-Monde par un renforcement du contrôle des
entreprises productrices (2).
1- La procédure de notification de l'E.P.A. et ses insuffisances à
protéger les consommateurs du Tiers-Monde.
La procédure de notification est une disposition légale qui exige des exportateurs des
produits dangereux, en l'occurrence des pesticides interdits ou restreints de vente sur le marché
domestique, qu'ils avertissent les gouvernements des pays d'importation des dangers que
comportent ces produits ainsi que les risques qui accompagnent leur usage. C'est une disposition
réglementaire dont le but consiste à faire obstacle à l'autorisation sans restriction d'envois de
pesticides ou autres produits dangereux dans le Tiers-Monde. 168
Mise en place par l'EPA en 1979, et soutenue par le Congrès, la procédure ne donne à
['institution qu'un pouvoir limité. Elle ne lui permet pas de bloquer l'exportation desdits produits
même si leur caractère dangereux s'avère évident pour la santé et la sécurité de leurs
destinataires. Elle met tout simplement à la charge de l'exportateur l'obligation de notifier à
l'acheteur le caractère dangereux du produit à livrer, notamment l'envoi à l'importateur d'une
déclaration l'informant du non enregistrement ou de l'annulation de l'enregistrement aux Etats-
Unis du pesticide incriminé en raison de son caractère trop dangereux. L'importation du produit
n'est rendue possible qu'après réception par l'EPA de l'accord du pays importateur, quitte à
l'institution d'envoyer la notification au Département d'Etat qui fait suivre l'information au
~
.
.
d
'
1
.
169
lonctlOnnaire
u pays concerne par a transactIon.
Mais la défense du consommateur dans les pays du Tiers-Monde ne saura se limiter à la
seule action des pouvoirs publics en direction des marchandises étrangères. Protéger le
consommateur c'est aussi s'occuper du système commercial interne en ce qui concerne son
organisation, car la volonté délibérée d'exporter les produits dangereux vers les pays du Tiers-
Monde se justifie par le fait que les marchés internes des pays cibles sont réputés être des
marchés "libres" sans réglementation aucune en cc qui concerne le domaine relatif à la protection
168 WEIR et SCHAPIRO: op. ciL, p. 67.
169 Ibid. p. 67-68.

202
du consommateur. Restreindre la liberté "excessive" des ces marchés peut être une démarche
importante pour la protection du consommateur dans ces pays.
La procédure met aussi à la charge de l'EPA l'obligation de faire savoir au gouvernement
de l'Etat importateur les raisons du non-enregistrement du produit en cause. Le but de la
démarche est d'aider le pays importateur dans la prise de la décision finale avec les conséquences
qui en découleront. 17O
Toutes ces exigences relatives à la procédure de notification sont rarement satisfaites.
Tout d'abord, l'EPA, dans le domaine des pesticides, communique rarement ou n'explique pas
toujours de façon adéquate aux gouvernements étrangers importateurs les motivations qui
accompagnent l' interdict ion ou la restriction de tel ou tel pesticide. Ensuite, les notifications - à
supposer qu'elles soient observées - sont habituellement envoyées aux importateurs locaux 171 des
pays d'accueil des pesticides indésirables dans le pays d'origine. Or il est fort peu probable que
l'importateur de pesticides ait un quelconque intérêt à informer les paysans des dangers potentiels
du produit. Enfin, les fonctionnaires locaux du Ministère de l'Agriculture chargé de ces
différentes importations ont souvent des liens très étroits avec l'industrie des pesticides. Le
constat n'est pas propre à un pays particulier, il est valable pour tous les pays du Tiers-Monde.
Une remarque sérieuse a été faite par le Dr Harold HUBBARD de l'Organisation Panaméricaine
pour la Santé à cet effet : «Les persolllles qui utilisellt les pesticides et celles qui ell
réglemelltellt l'usage SOllt les mêmes. Dalls chaque pays, il s'agit d'1lI1 petit groupe de gells
ell étroite relatioll. »172
Par ailleurs, les limites d'efficacité de la procédure de notification sont notoires. Tout
d'abord, elle offre toutes les facilités pouvant permettre son contournement par les acteurs de ce
commerce, notamment la possibilité de faire produire les pesticides par les filiales des sociétés
mères basées sur le sol américain. C'est une parade que l'industrie de pesticides n'a pas mise
longtemps à trouver.
D'ailleurs parlant à un des fonctionnaires de l'EPA et responsable de cette législation, un
haut responsable d'une multinationale n'a pas hésité à lui dire que les compagnies expédieraient
\\70 WEIR et SCHAPIRO : op. cit
p. 68.
171 C'est notamment le cas en Amérique Centrale avec les importateurs qui vendent leurs produits il la compar
Castle & Cooke. cr en ce sens, WEIR et SCHAPIRO : op. cil., p. 6S.
...

203
tout simplement les pesticides à des filiales des pays intermédiaires, tels que la Suisse, et ensuite
les réexporteraient vers les pays du Tiers-Monde.
Dans ces conditions, la Suisse recevrait des notifications sans valeur juridique aucune,173
ce qui laisse la porte ouverte à toutes les exportations en direction des pays les moins scrupuleux
en la matière, en l'occurrence les pays en voie de développement
La procédure présente ensuite une seconde faiblesse: la notification n'est exigée qu'avec
le premier envoi d'un produit chimique donné, expédié dans l'année à un pays donné. Elle reste
muette sur la quantité à livrer ainsi que sur sa périodicité. Or il s'agit là d'une indication
essentielle qui motive la décision de son éventuelle interdiction. 174
Enfin, la troisième faiblesse de la procédure est qu'elle ne comporte aucune eXigence
coercitive pouvant permettre à l'EPA de forcer son respect. Le défaut de soumission d'une
entreprise n'est suivi d'aucune sanction. 175 Ce qui en soi n'incite pas à pas une vision optimiste
quant au résultat qu'elle est censée produire en faveur des consommateurs des pays d'accueil des
pesticides dangereux en provenance des Etats-Unis. Qui plus est, l'industrie de pesticides a réussi
à vider la procédure de sa substance essentielle, celle qui consiste à attendre la réponse du pays
d'accueil après notification. 176 Elle a réussi à faire supprimer cette clause capitale servant de
justificatif quant à la réalité de la notification opérée par l'entreprise exportatrice du produit
dangereux. Ce qui rend la vérification de sa mise en oeuvre plus aléatoire, et ceci au détriment du
consommateur.
On peut tout simplement dire que, et ce, malgré l'existence de cette procédure, que la
politique qui prévaut aux Etats-Unis est aussi celle du «laisser-faire» pour ce qui concerne
l'exportation des produits dangereux à destination des pays du Tiers-Monde. Et face à la
politique du laisser-faire, la morale et l'éthique sociale exigent qu'on trouve des solutions
adéquates susceptibles de mieux protéger les consommateurs des pays auxquels l'incapacité
technique empêche de réaliser pleinement et efficacement cette mission.
172 Dr Harold HUSSARD, cité par WEIR et SCHAPIRO : op. cit; p. 68.
173 WEIR et SCHAPIRO : op. cit; p. 68.
174 Ibid.
175 MILEY, cité par WEIR et SCHAPIRO: op. CiL, p. 69
17(, Ibid., p. 68.

204
2 - Pour une plus grande responsabilité des Etats-Unis dans
la protection de la santé et de la sécurité des consommateurs
du Tiers-Monde.
L'assurance de cette responsabilité passe nécessairement par un renforcement des
contrôles des exportations des produits dangereux à destination des pays dont les technologies
sont incapables d'en détecter les dangers. Elle passe aussi par une réglementation plus sérieuse du
domaine tant la santé et la sécurité des populations en dépendent.
Certes, les efforts dans cette voie ne font pas défaut, mais seule leur concrétisation dans
les faits est à même de protéger le consommateur aussi bien du Sud que du Nord contre les
dangers véhiculé par ce commerce sans «visage humain », guidé avant
tout
par des
considérations financières.
En 1979 par exemple, le Département d'Etat organisa une conférence spéciale pour
discuter de la question et invita des représentants de l'Amérique Latine, de l'Asie et de l'Afrique.
Les fonctionnaires de l'EPA saisirent l'occasion pour dévoiler leurs nouvelles dispositions
relatives à la procédure de notification. Les écologistes, sous la direction de Jacob SCHERR du
«Conseil pour la Défense des Ressources Naturelles », insistèrent pour que l'on mette fm à
l'exportation sans contrôle des pesticides dangereux. 177 Des représentants des pays du Tiers-
Monde, tel que Samuel GITONGA du Kenya, déclarèrent : «Notre réglementation des
. 'd
t '
d 'b t
178
pestlcl es en es a ses eus.»
Quant aux autres délégués des autres pays du Tiers-Monde, ils firent d'horribles
descriptions concernant l'utilisation des pesticides, y compris les décès, la destruction de
l'environnement, ainsi que les techniques trompeuses de marketing des grandes compagnies
multinationales. 179
Outre son caractère symbolique rappelant les problèmes renc<mtrés par les populations
des pays d'accueil, cette conférence ne déboucha sur rien d'autre que sur une simple conclusion
177 WEIR cl SCHAPIRO : op. cil; p. 69.
\\
17K WEIR cl SCHAPIRO : op. cil., p. 69.
\\. ....
179 Ibid.

205
laquelle
reconunanda
«une
étude
plus
approfondie
et
une
meilleure
coopération
internationale» dans le domaine relatif à la protection des consommateurs contre l'exportation
des produits dangereux.
Dans la même année, « le groupe de travail inter-agences de la Maison Blanche» fut créé
par le Président CARTER pour remplir le même rôle. Installé sous la dénomination « Groupe de
travail pour une politique d'exportation des substances dangereuses », il a pour objet d'établir
des directives pour réglementer l'exportation des produits dangereux, y compris les pesticides,
les médicaments, les contraceptifs et les vêtements d'enfants traités au Tris. 180 Certains membres
du groupe issus du « Conseil sur la Qualité de l'Environnement» du Département d'Etat et de
l'EPA poussèrent à la mise sur pied d'une réglementation sévère capable d'endiguer le flot des
exportations dangereuses.
Mais les intérêts antagonistes des compagnies chimiques soutenues par les Départements
du Commerce, de l'Agriculture et du Trésor et par l'Eximbank favorables aux exportations
s'opposèrent au projeL I81 Ces divergences d'intérêts rendirent quasiment impossible la mise en
place de reconunandations de nature à réguler les effets néfastes du conunerce des produits
dangereux d'origine américaine. D'ailleurs les statistiques annuelles concernant les exportations
de pesticides du Département du Commerce occultaient les informations indispensables au bon
fonctionnement du Groupe de Travail. Et l'absence d'informations sérieuses et fiables rendait
pratiquement impossible la distinction entre pesticides dangereux et ceux dont la vente était
autorisée. 182
De toute évidence, une idée principale préoccupait le Groupe de Travail mis en place par
le Président CARTER: sauver « l'image de marque » des Etats-Unis quelque peu ternie par les
exportations dangereuses. On peut à cet effet citer cette réflexion tenant lieu d'avertissement faite
par le Groupe de Travail:
180 Le Tris est une substance chimique très inllammable ayant servi à traiter les vêtements, et qui provoqua une
série d'accidents spectaculaires au cours desquels des enfants furent gravement brûlés. Lorsque l'Administration
Américaine interdit la vente des vêtements traités au Tris, les fabricants se trouvèrent avec d'immenses stocks sur
les bras, dont les grandes quantités furent discrètement écoulées à l'étranger, notamment en Europe où ils furent
répérés., ibid. P 70. Nul doute qu'ils aient aussi fait l'objet d'exportation dans les pays du Tiers-Monde où les
)
techniques de détection des dangers des objets de consommation sont quasiment inexistants.
181 Ibid. P. 70.
182 Ibid.

206
«Si les Etats-Unis n'exercent pas une vigilance toute particulière sur l'exportation de
certains produits à très hauts risques, illterdits ou à utilisation restreinte, représentant une
menace considérable pour la santé et la sécurité et pour l'environnement, nos liens
économiques et diplomatiques avec d'autres pays pourraient être mis en péril. Les citoyens et
les gouvernements de pays étrangers qui reçoivent ces produits directement, ou qui, innocents
spectateurs, ont à en souffrir indirectement, pourraient manifester des dispositions toujours
plus hostiles à l'égard des U.S.A. et de ses produits. »183
Mais cet avertissement se gardait de parler de l'exportation d'usines pour la fabrication
sur place des produits dangereux ainsi que de leur fmancement par le gouvernement ou par des
institutions de crédit qui lui sont rattachées, telles que l'Eximbank, l'Opic ou la Banque
Mondiale. 184 Ce qui était là une habile stratégie de détournement de responsabilité vis-à-vis des
victimes des exportations des produits dangereux.
Certes, des recommandations relatives à des mesures de notification plus sévères furent
adoptées par le Groupe de Travail. Les exigences étaient strictes : un gouvernement devait non
seulement être averti avant qu'un pesticide non enregistré ou à usage restreint aux Etats-Unis,
soit envoyé dans son pays, mais en plus il devait en faire la demande spécifique (expresse) pour
" 1 '
'd"
qu 1 SOit expe le. IR~'.
Mais ces exigences relatives à la notification ignoraient un paramètre, voire une évidence
qui, somme toute, reste valable jusqu'alors: la plupart des pays du Tiers-Monde n'ont pas les
moyens de contrôler les pesticides - pour ne citer que cet exemple - ou de mesurer les dangers
qu'ils représentent. Plus les gouvernements de ces pays en charge des décisions finales dans ce
domaine sont parfois plus sensibles aux besoins et pressions des compagnies multinationales
qu'au bien-être de leurs propres populations.
La procédure de notification assujettie à une réponse positive des gouvernements
importateurs donnerait aussi libre court à la conclusion des accords ou l'obtention des demandes
spécifiques motivées par des contreparties financières des entreprises productrices. 186
IS.l Rapport tinal du Groupe de Travail de la Maison Blanche, eité par WEIR et SCHAPfRO : op. cil.. p. 71.
IS~ WEIR ct SCHAPIRO : op. cit; p. 71.
lK~ WEIR ct SCHAPIRO: op. cit; p. 71
Ise, Ihid.
\\

207
Par ailleurs, et contrairement au Groupe de Travail de la Maison Blanche, le Groupe de
Recherche sur la Santé de Ralph Nader préconisa l'interdiction pure et simple de toute substance
interdite ou à usage limité aux Etats-Unis, l'exportation de ces produits devant être laissée à
l'appréciation souveraine de l'EPA et eu égard aux circonstances exceptionnelles avancées par le
pays importateur ou la compagnie exportatrice.
Quant aux recommandations du Groupe de Travail de la Maison Blanche, elles reçurent,
malgré leurs insuffisances et leur caractère symbolique, force de loi par un décret du Président
CARTER, promulgué cinq jours avant la fin de son mandat en janvier 1981. Mais quelques
semaines plus tard, le Président REAGAN abrogea le décret dans sa totalité, réduisant à néant les
efforts du Groupe de Travail. 187 Le problème redevint donc entier et l'insécurité des populations
du fait des exportations dangereuses totale, aucun obstacle juridique ne pouvant désormais
empêcher les compagnies d'écouler tranquillement leurs produits dans les pays du Tiers-Monde.
* Les efforts du Congrès en vue de la protection des
consommateurs
du
Tiers-Monde
contre
les
exportations
dangereuses.
A la fin de l'année 1978, le Congrès organisa des « hearings » 188 sur l'exportation des
produits interdits vers les pays du Tiers-Monde. Mais cette audition ne déboucha sur aucune
règle de droit de nature à freiner ou à empêcher le déroulement de ce marché dangereux pour les
populations des pays d'accueil.
En [980 et 1981, le représentant démocrate de Maryland, Michael BARNES, proposa un
projet de loi dont la portée vise la restriction de façon significative de tous ces produits
dangereux. Cette loi aurait pour objet de forcer les exportateurs à obtenir un permis du
gouvernement avant d'expédier leurs produits outre-mer. Pour l'obtention dudit permis, certaines
187 WEIR et SCHAPIRO : op. cil., p. 72.
188 « hearings » : il s'agit d'une procédure politique propre aux Etats-Unis consistant à faire venir devant des
commissions constituées par le Congrès ou le Sénat des personnes représentant des miteux les plus divers de la
population en vue de les entendre s'exprimer sur un sujet donné. Il s'agit parfois d'experts d'un très haut niveau,
et parfois de simples citoyens n'ayant aucune compétence particulière sur le plan technique. Ibid. p. 72.

208
conditions devaient être satisfaites par les acteurs de la transaction. Ces exigences sont les
suivants:
« - Le gouvernement du pays importateur devrait approuver et demander le produit pour
que celui-ci puisse être exporté;
«-
Le gouvernement américain devrait s'assurer que les avantages potentiels de
J'exportation sont plus importants que les risques encourus par les populations;
«- Le produit devrait suivre la réglementation américaine en matière d'étiquetage des
produits et être accompagné d'instructions faciles d'utilisation par la population du pays
importateur;
«- Les éléments constitutifs des pesticides interdits, par exemple, aux Etats-Unis ne
recevraient pas l'autorisation d'être exportés à l'étranger afin d'éviter que ces mêmes pesticides
ne soient fabriqués outre-mer. »189
Ce projet de loi paraît, surtout en ses deux derniers points, coriforme à la logique
protectrice des intérêts des pays d'accueil ainsi que de la santé et de la sécurité de leur
population. S'il est important de fournir une information adaptée au niveau de compréhension
pratique des populations locales, la garantie de leur santé et de leur sécurité vaut plus que toute
autre surenchère commerciale ou politique attachée à l'image de marque de tel ou tel autre pays.
Et au nom de cette urgence sociale que sont la santé et la sécurité des consommateurs de tous les
pays, tout produit ou toute substance dangereuse et interdite ou restreinte de vente dans un pays
pour des raisons sanitaire et sécuritaire des populations ne devrait pas être autorisé à
l'exportation. C'est le principe de l'interdiction absolue de circulation commerciale valable pour
tous les pays et bénéfique à tous les consommateurs, de quelques horizons qu'ils puissent
appartenir qui devrait gouverner ces produits dangereux.
On retrouverait dans ce principe une manifestation de la solidarité internationale,
notamment entre les pays du Nord, détenteurs de la technologie capable de détecter les dangers
qui habitent ces produits, et ceux du Sud, privés de moyens de contrôle fiables dans ce domaine.
189 WEIR ct SCHAPIRO: op. ciL, p. 72-73.

209
Et cette solidarité aurait pour but essentiel la sauvegarde de la santé et de la sécurité des
populations du Sud.
Mais aussi porteur que puisse paraître ce projet - surtout en ses deux derniers points -, il
n'a pas eu de suite législative sous la Présidence républicaine. Ce qui laisse croire que le
problème des exportations des produits dangereux américains à destination des P.Y.D. reste
entier, les intérêts commerciaux l'emportant sur les considérations humanitaires. Et à défaut d'un
engagement formel des pays d'origine des multinationales exportatrices des produits dangereux
nuisibles aux consommateurs du Tiers-Monde, il est urgent que la plus grande Institution
Internationale au monde prenne des initiatives en vue de réguler ce conm1erce sans scrupule: il
s'agit entre autres des Nations Unies.
d) Rôle des Nations Unies dans la protection des consommateurs
du Tiers-Monde contre les exportations dangereuses.
Le premier acte symbolique des Nations Unies dans ce domaine fut posé en décembre
1979 par l'Assemblée Générale : elle adopta une résolution encourageant les Etats membres à
échanger les informations sur les produits chimiques et pharmaceutiques dangereux ayant été
interdits dans leur pays d'origine et à décourager leur exportation vers d'autres pays.190
Mais cet appel des Nations Unies est rarement entendu. De plus, l'échange d'informations
en lui-même s'avère insuffisant pour endiguer le mal. Encore faut-il savoir s'en servir pour le bien
de sa population. Il ne s'agit là que d'une simple notification sans portée juridique contraignante
pour les compagnies exportatrices des produits redoutés. Ce qui est en soi un acte juridique sans
grande valeur sociale pour les populations des pays d'accueil des produits interdits ou restreints
de vente dans les pays d'origine des multinationales exportatrices.
/1
190 WEIR el SCHAPIRO: op. cil.,. p. 77.

210
S'élevant devant l'Assemblée Générale des Nations Unies contre l'utilisation des pays du
Tiers-Monde comme dépotoir par le monde industrialisé, Noël BROWN, le représentant nord-
américain du Programme des Nations Unies pour J'Environnement, n'a pas hésité à le souligner:
« Nous voudrions bien plus qu'une simple information indiquant à un gouvernement qu'un
produit est interdit. Pourquoi l'est-il? Nous voulons une information chimique de base.
Quels en sont les effets secondaires ? Quels en sont les dangers ? Nous voulons des
1· ·
l'
191
exp IccltlOns comp etes. »
De toute évidence, les Nations Unies disposent officiellement de peu de pOUVOIr pour
empêcher l'exportation des produits dangereux vers les pays pauvres. Mais elles disposent tout
de même d'une force capable de dissuader les entreprises exportatrices d'accomplir trop
tranquillement leur besogne : «fixer l'attention internationale sur les vendeurs et les
fabricants de ces produits pourrait au moins faire réfléchir à deux fois ceux qui se servent du
Tiers-Monde comme d'un dépotoir. »192
Si l'on prend l'exemple spécifique des produits chimiques, en l'occurrence les pesticides,
les Nations Unies à travers leurs ailes ou institutions parallèles telle que la FAü pourront
encourager les scientifiques dans la confection d'étiquetage adapté aux réalités locales des pays
destinataires. Le choix des couleurs ou des dessins ou des avertissements rédigés dans les langues
locales peuvent être autant d'éléments essentiels et déterminants susceptibles de prévenir la
réalisation des accidents lors de la consommation de ces produits dangereux par nature. A l'instar
de l'OMS, la FAO peut même aller plus loin et concevoir une liste des pesticides essentiels pour
les besoins des pays du Tiers-Monde. Et comme il n'existe aucune source d'information fiable sur
l'écoulement des produits toxiques à l'échelle du globe, la conception, comme l'a fort bien
réclamé BROWN, d'un «Registre International des Produits Chimiques Potentiellement
Toxiques »193 peut être une bonne chose. Il permettra de distinguer non seulement les pesticides
dangereux des moins toxiques, mais aussi de pouvoir suivre leur circuit commercial de par le
monde, de leur lieu de fabrication - en général dans un pays industrialisé - à leur destination dans
les pays du Tiers-Monde. Ce sera là une bien bonne manière de limiter les dégâts causés par ces
191 WEIR cl SCHAPIRO : op. cil. .. p. 77.
\\
192 Ibid.
193 Ibid.

211
produits, car le contrôle de leur distribution entraînera une baisse de leur consommation et par
conséquent des accidents qui en résultent.
Mais les Nations Unies ne pourront jouer un rôle dans la supervIsion du commerce
mondial des produits dangereux à destination des pays en voie de développement sans la
participation effective des pays développés intervenant dans ce commerce. C'est dans cette
logique que les derniers accords du GATT/OMC de Marrakech nous interpellent en ce sens qu'ils
apportent un éclairage nouveau dans ce domaine.
* L'Acte final GATT/OMC de Marrakech: l'accord relatif à
l'inspection avant expédition de marchandises dans les PVD.
L'inspection avant expédition est la pratique qUi consiste à recourir à des sociétés
privées spécialisées pour contrôler dans le détail les expéditions de marchandises commandées à
l'étranger'94 . Le contrôle concerne essentiellement le prix, la quantité et la qualité des
marchandises importées. Cette pratique qui est utilisée par les pays en voie de développement a
non seulement pour but de sauvegarder les intérêts financiers nationaux, mais aussi de pallier les
insuffisances des infrastructures administratives relatives au contrôle de la quantité et surtout de
la qualité des produits importés.
L'inspection avant expédition a été incluse dans le projet l95 d'accord des travaux relatifs
aux mesures non tarifaires à l'initiative de l'Union européenne. Elle fut introduite dans l'Acte
final signé à Marrakech le 15 avril 1994196• L'accord figurant dans l'Acte final comporte des
obligations bien précises vis-à-vis des parties contractantes exportatrices à l'égard des utilisateurs
de la procédure d'inspection avant expédition. Ces obligations sont la non-discrimination dans
l'application des lois et réglementations nationales, la publication dans les moindres délais de
194 Cf supra Section l, Sous-section l, §II -B- dudit chapitre.
195 « Le projet d'Acte linal de l'Uruguay Round », résumé diffusé le 19 novemebre
1993 par la Division de
l'information et des médias du GATI à Genève, in EIS (europe information service), Eurepansion, Europolitique
n° 1906 du 1cr décembre 1993, document, p. 2.
196
Cf en ce sens Organismes Economiques Internationaux,
Documents rassemblés ct publiés par Lois
SABOURIN, Agence de Coopération Culturelle ct Technique, Collection Retour aux Textes, La documentation
française, Paris, 1994, p. 215 ct suiv.

212
toutes les lois et réglementations applicables en la matière et l'apport d'une assistance technique
si demande leur est faite.
Cet accord qui légitime et légalise la pratique de l'inspection avant expédition des
marchandises opérée par les sociétés privées à la demande d'un certain nombre de pays en voie
de développement a un côté positif pour les consorrunateurs de ces pays en ce sens qu'il
comporte en son sein une obligation relative au contrôle de la qualité des produits importés. Une
l97
directive
de l'Union européenne destinée à mettre en oeuvre les textes de l'accord a été
adoptée par le Conseil à cet effet. L'article 1er de cette directive dispose: « La présente directive
s'applique aux activités, sur le territoire douanier de la Corrununauté européenne, d'une entité
d'inspection avant expédition qui, pour le compte de gouvernements ou d'entités publiques de
pays tiers, effectue des contrôles de la qualité, de la quantité ou de prix des marchandises
destinées à être exportées vers le territoire de ces pays tiers (programmes d'inspection avant
expédition) ».
Si l'article 1er reconnaît le principe de l'inspection avant expédition, l'article 2 de son côté
laisse à l'appréciation des Etats membres le soin de soumettre les activités concernées à une
notification préalable, exigence devant s'appliquer de manière non-discriminatoire.
Quant à l'article 3, il se contente de délimiter le domaine d'application de l'inspection
avant expédition. La notification exigée à l'article 2 couvre deux catégories d'activités. La
première concerne l'inspection matérielle de la marchandise avant son exportation. Cette
exigence permet de vérifier si l'expédition est conforme aux spécifications du contrat quant à la
qualité et la quantité et si les règles et normes prévues par le pays importateur ou reconnues
internationalement sont respectées (article 2 a.). La deuxième est relative à « la vérification du
prix et, le cas échéant, du taux de change, sur la base du contrat entre l'importateur et
l'exportateur, de la facture pro forma et, le cas échéant, de la demande d'autorisatior
d'importation. » (article 2 b.).
Certes, cet accord inclus dans l'acte fmal du GATT/OMC présente des avantages pour le:
consommateurs du Tiers-Monde en ce qui concerne le contrôle de la qualité.
197 Directive du Conseil 94/0226(ACC) du 05/10/94 sur les inspections avant expédition pour les exportation~
provenance de la communauté, Documents FR 06 Il 02. W de catalogue: CB-CO-94-451-FR-C, ISBN 921-;
80975-2. Oflice des publications orticiel1es des Communautés européennes, L- 2985, Luxembourg.
\\

213
Mais il n'empêche que la procédure reste à l'appréciation du pays exportateur en ce sens
les exigences relatives à la transparence complète dans les informations fournies peuvent être
difficilement observées. Cela peut se rencontrer lorsque les intérêts économiques du pays

198
exportateur sont en Jeu.
L'efficacité de la procédure peut aussi trouver ses limites lorsque le contrôle est enfermé
dans un délai trop court ne permettant pas à la société contrôleuse d'exercer correctement son
travail. Qui plus est, la procédure n'est profitable qu'aux seuls pays capables de s'offrir les
services des sociétés vérificatrices des marchandises.
Quelles que soient les objections qu'il est censé soulever, cet accord relatif à l'inspection
avant expédition a le mérite d'exister. Encore faut-il qu'il soit mis en oeuvre par les pays
exportateurs concernés. De toute évidence, son introduction dans l'Acte fmal de l'Uruguay
Round confirme l'absence de scrupule qui caractérise le commerce international Nord-Sud pour
ce qui concerne l'exportation des produits dangereux dans les pays du Sud et le péril auquel sont
exposées leurs populations.
Mais au-delà de toutes ces initiatives dont l'objectif vise la maîtrise des dangers provenant
de la vente des produits dangereux dans les P.V.D., les Nations Unies ont une autre obligation
essentielle à remplir en vue de la protection effective des consommateurs de ces pays. Et dans
cette perspective, le vote en 1985 par l'Assemblée Générale des Nations Unies des Principes
Directeurs pour la Protection du Consommateur n'en est pas moins innocent.
Loin d'être un texte de loi internationale d'une portée stricte et contraignante, l'adoption
desdits principes offre un cadre idéal pour la promotion interne par chaque Etat, en particulier les
populations des pays en voie de développement qui sont sans défense dans ce domaine, des droits
des consommateurs locaux.
198 L'exemple de « la vache folle» britannique et les enjeux économiques que cela soulève est à ce point de vue
révélateur de la transparence dans les informations dès lors que celles sont de nature à empêcher la conclusion du
contrat ou la vente des marchandises d'un secteur donné. cr en cc sens « Vache l'olle» in Le Figaro du 28 mars
1996, p. 1 Cl les articles P. SOCEV, 1. DUPLOUICH. F. NODE-LANGLOIS, Dr C. PETITNICOLAS, D.
TACET, V. De VEZINS et Dr M. VIGY, p. 12, 16 et 40 ct le Figaro économie, p. 1 ; du 26 mars 1996, ct les
articles de M. BIETRY. P. BOCEV, J. DUPLOUICH, A. HELlOT, Dr M. PEREZ, Dr C. PETITNICOLAS, ct D.
/
TACET p. 9 ct 13 el le Figaro économie, p. 1 etH; du 23 mars 1996, articles de J. DUPLOUICH, P. LANOY, Dr
M. PEREZ ct D. TACET, p. 12 ct 32.

214
Si la solidarité internationale paraît nécessaire pour se protéger contre les exportations
dangereuses, l'épanouissement du consommateur local ne saurait en dépendre éternellement,
d'où la nécessité pour chaque pays de s'offrir un cadre juridique valable et adapté pour la
résolution des problèmes de consommateurs susceptibles de se produire sur son territoire
national.

- Conclusion de la Première Partie:
,
,
)

216
L'exportation à destination des pays du Tiers-Monde des produits dangereux interdits ou
restreints de vente dans leur pays d'origine n'est plus aujourd'hui une invention ou imagination
débordante de l'esprit. C'est un fait, une réalité palpable qu'il est impossible de nier tant la
démonstration des actes et leur reconnaissance par les puissances industrielles, pays d'origine des
l
entreprises multinationales responsables, sont là pour attester de la véracité de ce commerce. S'il
est légitime et licite de faire du commerce, il est en revanche déloyal d'exposer inutilement les
consommateurs aux risques connus d'avance par le corrunerçant. Or c'est justement le jeu auquel
se livrent les compagnies exportatrices des produits dangereux dans les P.V.D.
Certes, les intérêts financiers motivent les opérateurs du commerce international, ils le
conditionnent et le sous-tendent dans toutes ses composantes ainsi que dans toutes ses
manifestations. Mais ils ne doivent pas prévaloir sur la garantie de la santé et de la sécurité des
destinataires des produits mis en circulation. Cela irait à l'encontre de l'essence même du
commerce entendu comme la manifestation des activités lucratives dont le but est de satisfaire les
besoins essentiels et vitaux des consommateurs. Oeuvrer ou agir dans le sens contraire en
privilégiant les considérations financières sur les considérations humanitaires reviendrait à'
détourner le commerce de son objet principal qui est: la satisfaction aussi bien en qualité qu'en
quantité
des
besoins
élémentaires
et
vitaux de
la clientèle,
entendue
l'ensemble
des
?
consommateurs.-
Si l'on part du fait selon lequel la santé et la sécurité du consommateur sont essentielles
dans toute activité économique, leur garantie s'avère importante et interpelle tous les acteurs de
la vie économique aussi bien nationaux qu'internationaux. Au plan national, comme nous l'avons
déjà souligné, les pouvoirs publics ont un important rôle à jouer pour la sauvegarde de la santé et
de la sécurité de leur population contre les prédateurs du commerce international.
Et conformément aux solutions ci-dessus avancées3, la vigilance dans les contrôles est
essentielle pour la réalisation de cet objectif. Au plan international, l'aide plus que jamais urgente
des pays détenteurs de la technologie4 est indispensable pour le démasquage des maquilleurs des
produits dangereux préoccupés par le souci du gain au mépris de toutes les règles de la morale et
1 cr supra, chapitre 1
!1
2 Cf. supra, ibid.
/
J Cf supra, chapitre 2
4 cr supra, ibid.

217
de l'éthique sociale. Leur position de pays hôte des entreprises exportatrices est un atout
indéniable dans la réalisation de cet objectif essentiel pour les populations des pays d'accueil des
produits indésirables.
L'interpellation vise aussi les opérateurs. Une prise de conscience s'avère nécessaire de
leur côté. Elle leur permettra de restaurer le commerce dans sa fonction primitive, celle qui
consiste à exercer ses activités lucratives dans le sens du bien-être de la clientèle. Et qui dit bien-
être, dit prise en compte de la santé et de la sécurité des consommateurs lors de la fabrication ou
de la production des biens destinés à la grande distribution. Autrement dit, les produits offerts sur
les marchés doivent présenter toutes les garanties sanitaires et sécuritaires auxq uelles on peut
légitimement s'attendre.5 Cela est non seulement valable pour l'homme-consommateur, mais
aussi pour son environnement.
Certes, la défense du consommateur dans les pays du Tiers-Monde est urgente, mais elle
représente un ensemble assez vaste, homogène et hétérogène à la fois, et de ce fait ne saura se
limiter à la seule action des pouvoirs publics en direction des marchandises étrangères.
.
.
Protéger le consommateur, c'est aussi s'occuper du système commercial interne pour ce
qui concerne son organisation, car la volonté délibérée d'exporter les produits dangereux vers les
pays du Tiers-Monde se justifie par un constat simple: les marchés internes des pays cibles sont
réputés être des marchés "libres" sans réglementation aucune dans le domaine relatif à la
protection du consommateur.
Restreindre la liberté "excessive" des ces marchés peut être une démarche importante
pour la protection du consommateur dans ces pays. Et cela passe nécessairement par une
promotion des droits des consommateurs dans ces pays. D'ailleurs, les principes directeurs des
Nations Unies incitent les Etats membres à oeuvrer dans ce sens là.6
Sans doute, on voit dans le vote de ces principes, une exhortation des pays membres, en
particulier les P. V.O., à prendre en main le destin de leur population face aux dangers que
véhicule le commerce moderne, qu'il soit national ou international. L'interpénétration des
économies fait qu'aucun pays ne peut plus vivre en autarcie. La fluidité des échanges incite à plus
5 Ibid.
(, cr la Charte mondiale des consommateurs, spécialementl-Objectifs, ainsi que tous les principes suivants.

218
de précautions quant à la qualité des produits quotidiennement distribués sur les marchés
internes. Aussi, la protection des consommateurs locaux exige-t-elle qu'on assortisse la liberté du
commerce et de l'industrie7 de certains garde-fous susceptibles de prévenir les excès : la
promotion des droits du consommateur est un passage obligé pour atteindre cet objectif.
7 G. LESOURD : « Liberté du commerce et défense des consommateurs », G.r. du 24 juin 1975, p. 380 et suiv.
t

DEUXIEME PARTIE:
LA PROMOTION DES DROITS DU
CQNSOlVIMATEUR EN AFRIQUE.

220
La morale et les affaires ne font pas bon ménage. Leurs rapports sont souvent difficiles.
Ceci n'esl pas nouveau el il serait vain de rechercher dans l' histoire la première tromperie sur la
marchandise vendue, la première démarche abusive, la première vente d'un matériel défectueux,
la première manifestation d'un comportement déloyal quelconque à l'occasion d'une vente'.
Rien de tout cela, aujourd'hui, n'a changé, et on s'accorde volontiers à reconnaître que
ces difficultés s'aggravent sous l'influence de deux facteurs:
Le premier facteur d'aggravation est le développement des méthodes de persuasion et du
progrès technique: la meilleure connaissance des ressorts psychologiques sur lesquels repose un
achat permet une meilleure orientation des choix; le développement de puissants médias rend les
sollicitations plus pressantes persuasives ; l'élaboration des produits et des marchandises prive
l'acheteur, profane de la technique, de tout contrôle. Ces progrès psychologiques et scientifiques
sont autant de facilités qui pèsent sur une conduite parfaitement loyale. 2
Le second facteur du risque de déloyauté se trouve dans la modification des structures de
production et de distribution la rupture de l'équilibre entre vendeur et acheteur. 3 Un contrat
intervenu entre un vendeur professionnel et un consommateur n'est pas toujours un exemple
d'équilibre. Sur les marchés, les consommateurs sont traqués. Ils se trouvent devant une
multitude de produits dont ils ignorent tout, ce qui rend difficile toute appréciation relative à la
qualité, donc à l'utilité des produits offerts.
De toute évidence, le développement économique a fait du consommateur un être faible, il
n'est plus « roi» ni « l'égal» du professionnel dans ces différentes transactions. Si théoriquement
il l'a été en vertu du principe du consensualisme qui gouverne les contrats synallagmatiques, la
production de masse, la distribution en série et
la complexité des produits vendus offrent un
avantage quasi-certain au professionnel. Celui-ci du seul fait qu'il détient l'information sur les
différents
produits mis sur le marché occupe une position privilégiée par rapport au
consommateur. Or, l'information est essentielle, voire capitale pour la bonne utilisation des
produits vendus. Pour qu'elle soit utile, encore faut-il qu'elle soit exacte ; ce qui n'est
malheureusement pas toujours le cas dans les pays du Tiers-Monde.
1 Paul PIGASSOU : « L'entreprise face au consommateur» DUNOD Entreprise. éd. Bordas. Paris 1978. P. XV.
2 ibid
J Paul PJGASSOU : ibid.

221
Certes, on exige du professionnel qu'il communique au consommateur une information
loyale. Mais celui-ci n'en fait pas un poids supplémentaire dans sa conquête du marché. Bien au
contraire, la communication de l'information, loin d'être un simple mot à la mode, est devenue un
argument commercial, une composante essentielle des mécanismes éconoI1Ùques, dans la mesure
où elle provoque et accompagne l'indispensable transfert de biens produits vers les marchés de
consommation. Et si la parole était jadis un art, la communication publicitaire, par exemple, tend
à devenir une technologie que son impératif d'efficacité peut rendre contestable.4
La réalité de nos jours est que le contrat n'est plus ce qu'il était. Le progrès technique en
a bouleversé les données.
La multiplication des produits proposés aux consommateurs
s'accompagne aujourd'hui de techniques très variées de diffusion et l'apparition de plus en plus
fréquente des contrats d'adhésion, parfois truffés de clauses abusives, fragilise davantage la
situation du consommateur dans ses différentes transactions. Le contrat n'est plus l'instrument
juridique qui permet d'équilibrer les prestations réciproques et « la libre discussion du prix et des
conditions de vente entre vendeur et acheteur, telle qu'elle avait été conçue en 1804 par les
rédacteurs du code civil, est un cliché périmé »5 .
Dans ce climat économique où les rapports de force deviennent de plus en plus inégaux, il
est évident qu'un rééquilibrage s'impose. Le consommateur a besoin d'être protégé contre la
puissance croissante du professionnel.. Pour les pays africains, il s'agit là d'un domaine où
l'urgence de l'action s'impose.
Les Nations Unies ont sans doute compris la nécessité en votant le 9 avril 1985 les
«Principes Directeurs Pour la Protection des Consommateurs» dont le but est d'aider
la
promotion des droits des consommateurs dans les pays membres, en particulier dans les pays en
voie de développement6.
Alors que les actions sont régulièrement enregistrées dans d'autres pays du Tiers-Monde,
en particulier dans les pays d'Amérique Latine, en vue de l'intégration desdits Principes dans les
~ « Des marchands d'illusions...àux lichiers des crédules ». Consommateurs - Actualités» N° 449 du 25 Janviel
1985. P. 1
5 P. PIGASSOU : op. cil. P. XV.
i>
Principes Directeurs Pour la Protection du Consommateur. Nations Unies, New York 1986, cf. égalemcn
Consommateurs - Actualités N° 470 du 21 Juin 19H5.

222
droits nationaux pour promouvoir le bien-être du consommateur,7 les pays africains, en
l'occurrence leurs Gouvernements, restent insensibles aux problèmes des consommateurs.
Dix ans après leur adoption, un seul Etat a réussi à faire un petit pas dans le sens souhaité
par les Nations Unies. Il s'agit de l'Etat du Cameroun. En effet, la loi Camerounaise du JO août
199üK régissant l'activité commerciale dans ce pays consacre un titre entier à la protection du
consommateur, soit au total Il articles.
Ces dispositions régissent trois domaines principaux: le domaine relatif à l'information du
consommateur, le domaine relatif aux pratiques commerciales restrictives et le domaine relatif
aux clauses abusives. Ce qui en soi-même est insuffisant pour un consommateur traqué partout.
Mais cette loi a quand même le mérite d'exister pour le bonheur du consommateur camerounais.
Bien avant cette loi, l'Etat camerounais possédait dans son arsenal législatif, une loi régissant la
publicité et votée le 16 décembre 1988. Ce qui en soi n'est pas négligeable.
Pendant ce temps, dans les autres pays africains, les problèmes restent entiers. Outre les
. problèmes relatifs à la santé et à la sécurité du consommateur, eux-mêmes liés au manque de
contrôle sérieux des circuits de distribution, le véritable débat s'articule autour des rapports de
force professionnels-consommateurs. Entre les parties en présence, l'équilibre est rarement atteint
dans une transaction commerciale. La superpuissance du professionnel le place dans une position
privilégiée, le plus souvent au détriment du consommateur. Et la balance des avantages
réciproques ne cesse de pencher au profit du premier.
A ce déséquilibre contractuel viennent s'ajouter les dangers issus du déversement
quotidien des produits issus de la fraude. De toute façon, les procédés déloyaux dans le
commerce sont monnaies courantes sur les marchés africains. Et le consommateur a besoin d'en
être débarrassé. Tout relève donc du domaine du pouvoir public, l'activité législative étant du
ressort de l'Etat. Mais à quand cette aide de l'Etat providence? Nul ne peut le dire à l'heure
actuelle.
Une
chose
reste
cependant
certaine
en
Afrique
:
les
problèmes
rencontrés
quotidiennement par le consommateur ont engendré une émergence du mouvement consumériste,
7 Cf Sur cc point, David HARLAND : «Implementing The principales of the United Nations Guidelines l'or
Consumer Protection », The Indian Law Institute. (Reprint) Université de Genève. Faculté de Droit, Centre de
documentation en droit de la consommation. P. 197 et suivants.
S Loi W 90/031 du 10 Août 1990 Régissant l'Aetivité Commerciale au Cameroun. Juridis Inro N° 5 Janvier -
Février - Mars 1991. P. 5 et sui vants.

223
un mouvement qu'on peut qualifier d'irréversible9, un mouvement qUI tient sa légitimité des
principes directeurs des Nations Unies.
Les problèmes du consommateur africain sont liés au manque de volonté politique des
gouvernements en place et de leur incapacité à reconnaître son existence juridique distincte dc
celle du citoyen ordinaire. Pourtant le moment est venu pour ces gouvernements de prendre en
considération les problèmes des consommateurs. Ceci permettra d'asseoir pour eux une véritable
législation protectrice, si légère soit-elle, mais garante de l'équité contractuelle dans les rapports
consommateurs-professionnels. L'exemple camerounais est à ce point de vue révélateur
d'enseignements.
De toute évidence, il s'agit là d'un problème dont l'urgence de l'action dépasse le cadre
strictement national. Parrainé par les Nations Unies, le problème consumériste a pris une
dimension mondiale qu'aucun Etat à l'heure actuelle du libéralisme «criant» ne peut se
permettre le luxe d'ignorer, ni de nier l'existence. Tous les Etats ont aujourd'hui un devoir
impératif de protéger leurs consommateurs.
Pour les consommateurs africains, ceci ne va pas de soi. Le bénéfice de cette protection
légitime passe d'abord par la reconnaissance de son existence juridique donc de sa situation de
faiblesse contractuelle dans ses rapports avec le professionnel que la technique rend de plus en
plus puissant.
En d'autres termes, nous plaidons, par ces mots lapidaires, pour une véritable
reconnaissance du droit à la protection du consommateur africain. Sans cette manoeuvre, la mise
en place d'une législation capable de promouvoir l'équité dans les transactions commerciales
paraîtrait une mission impossible. La protection de l'équilibre contractuel passe donc par la
reconnaissance du droit du consommateur à la protection.
'i cr. Sur cc point: A. C. KANOUTE : Organisations de Consommateurs à la croisée des chemins. Notes de
voyages, in Consommation - Développement. Bull. Trim. de IUCU - ENDA N° 8 Nov. 1992. P. 1 ct 4 :
« Mouvement Consommateur Africain: La consolidation », in Consommation - Développement N° 9. Avril 1993.
P. 1 ct suivants; Alpha SALL : « Et pourtant elles tournent », in Consommation - Développement. N° 10 No'~
1993. P. 1; KANOUTE: Consommateurs ct Construction de la CEDEAO : in ConsommatÎoo -Développelnen
N° Il Déc. 1993. P. 1; « Le mouvement Consommateur : un l'acteur de changement », in Consommation-
Développement. N° 12. Déc. 1994. P. 1.

224
Deux idées fortes se dégagent donc nettement de notre analyse de la situation du
consommateur africain lesquelles constitueront les deux principales orientations de cette partie:
- La reconnaissance du droit du consommateur à la protection (chapitre 1).
- La protection de l'équilibre du contrat dans les rapports professionnels-
consommateurs ( chapitre Il ).

CHAPITRE 1
",,:J\\'::
",'.•',.,"'.'" "",,}:'
c"-:::")
>l~i:ik A .tA PROTE~;
Le 9 avril 1985, l'Assemblée Générale des Nations Unies adoptait sans vote la charte
mondiale des droits des consommateurs. Cette décision unanime des membres de l'auguste
Assemblée venait ainsi de consacrer un domaine - celui du droit de la consommation - jusque là
négligé par certains pays et ignoré par d'autres, mais que les évènements socio-économiques
rendaient inévitables. Cette charte
mondiale des consommateurs qui est le fruit d'un travail
accompli depuis dix ans 1 venait de reconnaître aux consommateurs une revendication légitime, un
droit fondamental: celui de la protection de leur santé, de leur sécurité ainsi que de leurs intérèts
matériels et moraux.
Ainsi,
«pour
la
première
fois
dans
l'histoire,
l'organisation
mondiale
la
plus
représentative », venait de marquer « son accord sur les principes et l'interprétation mondiale
commune portant sur ce qui constitue les étalons et les mesures fondamentales équitables et
saines en matière de protection du consommateur »2.
Dans une lettre adressée à l'ensemble des membres de l'organisation les invitant à fèter
l'évènement, M. Lars BRüüM, à l'époque Directeur de l'Lü.C.U., donnait les raisons d'une
telle adoption : «Nous sommes dans un monde qui présente des normes bien trop ditl:èrentes
dans le commerce international - des mesures de sécurité, des mises en garde, des normes de
1 Celte précision est donnée par Mr Lars BROOM, à J'époque directeur de l' IOCU, cf, en ce sens Consommateurs-
Actualité N° 470 du 21 juin 1985, P. 5 : voir également D. HARLAND : Implementing the Principlcs of the
United Nations Guidclines for Consumer Protection, in the lndian Law [nstitute (Reprint), vol. D : 2. Université
de Genève, faculté de Droit, Centre de documentation en droit de la consommation, P. 189 et 190.

226
qualité et même des éthiques dissemblables. Ainsi, les orientations générales forment lIne base
nouvelle et solide pour nos efforts, lesquels visent à rendre le marché sain et plus sensible aux
besoins du consommateur, où que ce marché soit situé. ».1
Partant du fait que ce souci de protection doit porter sur tous les peuples du monde, M.
Lars BROOM ajoutait : «Nous voulions qu'il y ait accord international selon lequel ne pas
causer préjudice à son voisin, ne pas tromper et ne pas tirer d'avantage déloyal devienne une
règle mondiale. C'est cette règle d'or que les Nations Unies viennent d'adopter sans vote. »4
En effet, la charte mondiale des consommateurs n'a pas la connotation d'une loi
internationale s'imposant aux Etats. Elle est plutôt un ensemble de principes directeurs dont le
but est d'orienter les Etats membres de l'O.N.V. désirant protéger leurs consommateurs vers les
points juridiques essentiels de cette protection. Autrement dit, la charte contient des orientation~
générales, des bases juridiques essentielles destinées: «ù aider les Etats membres - en particuliet
les P.Y.D. - à établir où à maintenir chez eux une protection adéquate du consommateur, [
faciliter des modes de production et de distribution adaptés aux besoins et aux souhaits de~
consommateurs, à encourager la pratique de normes de conduites élevée, chez ceux gu
s'occupent
de
la
production
de
biens
et
de
services
et
de
leur
distribution
au~
consommateurs ... »5
Si les principes de la charte n'ont pas la force obligatoire d'une loi international,
contraignant les Etats membres à en observer les prescriptions, ils n'en comportent pas moins un
force obligatoire d'ordre moral.
Outre gue leur élaboration a pris en compte les intérêts et les besoins du consommatel
de tous les pays et des pays du Tiers-Monde en particulier compte tenu de la position souver
désavantageuse de leurs consommateurs sur le plan économique et du point de vue de l'éducatic
et du pouvoir de négociation, elle a aussi montré le domaine relatif à la sécurité desdi
consommateurs.
.1 Voir Consommateurs-Actualité N° 470 du 21 juin 19l:15 précité, P. 5.
4 Ihid.
s <.:1' La charte mondiale des droits des consommateurs, 1- Objectifs, principe N° \\, points a), b) ct c),
Consommateurs-Actualité N° 470 précité, P. 5.

227
Ce volet «sécurité» s'entend d'une exigence fondamentale : celle de permettre au
consommateur de jouir du droit d'obtenir des produits qui ne sont pas dangereux, c'est-à-dire
des
produits sains et inoffensifs. Et ceci n'est pas réalisable sans
la promotion d'un
développement économique et social juste, équitable et soutenu.6
Plus qu'une loi internationale, la charte des Nations Unies des droits des consommateurs
a une portée très étendue. Son objectif est de mettre toutes les Nations du monde, membres de
l'Institution,
au
diapason
des
nouvelles
données
économiques
et
sociales
qUI
ont
considérablement bouleversé l'équilibre des rapports entre le monde économique composé de
producteurs et distributeurs et le monde social composé des consommateurs, et ce, au détriment
du second. Ce déséquilibre des rapports entre producteur ou distributeur et consommateur est le
fruit de la technique. Le progrès technique, en rendant les objets de plus en plus complexes, a fait
perdre à l'homme J'efficacité de son libre arbitre et avec elle la sérénité dans ses choix.?
Cette difficulté du consommateur à cerner de plus près son environnement économique
immédiat a suscité dans les pays économiquement avancés des réactions législatives et
réglementaires importantes. L'objectif était de protéger le consommateur de plus en plus soumis
aux conditions du producteur ou du distributeur, plus globalement des professionnels du
commerce. Le consumérisme était donc né, du moins dans les pays économiquement avancés, les
pays en développement restant en marge du phénomène. Mais une chose reste certaine
aujourd'hui: le consumérisme est un fait incontournable qu'aucun pays ne peut ignorer.
En adoptant en 1985, les principes directeurs pour la protection du consommateur dans le
monde, les Nations Unies ont par ce fait légitimé le phénomène, invitant du coup les pays en
développement à intégrer dans leur politique générale les problèmes relatifs à la défense des
consommateurs. Elles n'ont fait que reconnaître et confirmer une réalité économique et un
phénomène social qui, internationalisation du commerce oblige, se veulent désormais mondiaux.
Plus qu'une simple charte sans aucune force obligatoire quant à sa mise en oeuvre sur le plan
juridiquc, le vote du 9 avril 1985 interpelle tous les pays absents du concert consuméristc pour sa
réalisation. En somme, c'est un véritable plaidoyer pour une prise en compte des problèmes des
(, cr La charte mondiale des droits des consommateurs, 1- Objectifs, princi[lc N° l, points a), b) et cl, in
Consommateurs-Actualité N° 470 précité, P. 5.
i
7 Th. IVAINER : « De l'ordre technique à l'ordre publiquc tcchnologiquc », JCP 1972, l, 2495 ; GHESTIN ct
i
DESCHE: Lavcntc,LGDJ 199ü, W S l9ctsuiv, P. 16ctsuiv.

228
consommateurs, un appel adressé aux pays visés pour prendre des mesures juridiques en vue
d'adapter le marché des biens et des services aux aspirations des consommateurs.
Ceci est un fait important, d'autant plus important qu'il exige de la part des Etats
concernés, en particulier les P.Y.D, une réorientation, voire un recentrage de leur politique
générale, car avec la nouvelle donne économique due au progrès technique, de nouvelles
obligations naissent, celles qui consistent à garantir la santé et la sécurité de sa population contre
les diverses tentations malsaines et déloyales qui prennent place dans le commerce. Au-delà de
toute spéculation législative ou réglementaire, c'est d'une véritable cure d'assainissement du
circuit commercial en vue d'adapter Je marché des biens et des services aux exigences juridiques
et économiques dont il est question ici.
Si l'intégration des principes de la charte connaît un certain succès dans les autres pays du
Tiers-Monde, notamment dans les pays d'Amérique Latine, d'Amérique Centrale, d'Asie, du
Pacifique et des Cara·lbes,8 force est de constater que plus de dix ans après son adoption par les
membres de l' Assemblée Gén~rale des Nations Unies, le message véhiculé par cette charte reste
incompris en Afrique. Pourtant le consommateur africain est celui qui, dans le monde entier,
éprouve le besoin d'être protégé. Le paradoxe s'explique par le fait que la notion de
consommateur sujet de droit, entité juridique détachée du citoyen et susceptible d'être protégé
contre les dangers de la consommation est encore mal perçue en Afrique.
La mise en pratique des principes des Nations Unies passe nécessairement par la
reconnaissance du concept « consommateur» détaché du citoyen ordinaire ainsi que de son droit
à la protection contre les dangers de la consommation quotidienne. La protection du
consommateur est plus que jamais une urgence en Afrique. L'urgence de la protection se justifie
par la manifestation des faits et dont le consommateur se trouve être la victime : les marchés
africains sont des places commerciales sur lesquelles se rencontrent tous les abus possibles, de la
vente des produits inadaptés aux besoins des populations à la distribution des marchandises dont
les prix trop élevés dépassent largement leur pouvoir d'achat, notamment celui des populations
défavorisées. La « poubélisation » du continent par des marchands véreux fait qu'on rencontre
aussi des produits issus des procédés de fabrication malhonnêtes, déloyales, notamment des
produits
falsitiés
ou
contrefaits
de
consommation
courante
(produits
pharmaceutiques,
N D. HARLAND : article précité, P. 197 ct suiv.

229
alimentaires) ou autres (matériels mécaniques, électroniques, pièces détachées etc.), de la
tromperie commerciale et des produits corrompus ou périmés.9 Toutes ces réalités économiques
et sociales actuelles exigent des pouvoirs publics africains une prise de conscience en vue de
J'assainissement du circuit commercial. La garantie de la santé et de la sécurité du consommateur
en dépend.
La sauvegarde du consommateur passe dans ces conditions par une rruse en place des
moyens juridiques susceptibles de le protéger contre ces produits douteux. Mais la perspective
législative n'est envisageable que si les problèmes des consommateurs sont reconnus comme tels,
comme des exigences sociales de notre temps, des «maladies économiques» issues du progrès
technique et auxquelles il faut opposer une thérapeutique appropriée, car L'homme est tout
d'abord, en raison sa nature, un consommateur avant d'être citoyen d'un pays. Et en tant que tel,
il a besoin de sécurité dans ses choix consuméristes, dans ses différentes transactions. Ceci n'est
pJus évident de nos jours. Sa sécurité est de plus en plus menacée au fur et à mesure que la
technique avance offrant plus d'ingéniosité aux fraudeurs. Le rôle des pouvoirs publics d'un Etat
est de garantir cette thérapeutique à ses populations en les protége<1nt contre les marchands
indélicats et leurs produits nuisibles.
Deux exigences essentielles incombent aux pouvoirs publics africains vis-à-vis de leurs
consommateurs :
-Prendre en considération les problèmes des consommateurs en vue d'adapter le
marché des biens et des services à leurs attentes (Section 1)
- Assainir le circuit commercial par des moyens législatifs et réglementaires
appropriés (Section II)
9 S. N. DIALLü : « La contrefaçon de médicaments », in Lumières Noires Magazine, Bimestriel N° 36, octobre-
1
novembre 1994, P. 17 ct 1g., également E. üBADINA : «La contrefàçon à l'assaut de l'Afrique », in Vivre
Autrement N° 8-9 Nov. 1989, supplément, P. IV ct suiv.

230
SECTION 1 :
LA PRISE EN COMPTE DES PROBLEMES DES CONSOMMATEURS EN
AFRIQUE
OU
LA
NECESSITE
D'ADAPTER
LE
MARCHE
AUX
EXIGENCES OU ASPIRATIONS SOCIALES.
Le commerce est une activité qui, par essence, met en relation trois catégories d'individus
: producteurs, distributeurs et consommateurs. Si la production en est la base, la consommation,
elle, en est la finalité. Les rapports entre ces trois catégories d'individus se nouent au travers d'un
contrat: la vente, le plus usuel des contrats. JO Si l'augmentation de la production relève des lois
économiques, c'est au droit en revanche que revient le privilège de définir le cadre juridique et de
promouvoir l'organisation économique apte à satisfaire les besoins du consommateur. 11 Cela
relève du domaine de l'autorité des pouvoirs publics. Or, dans les pays africains,
la
réglementation
telle
qu'elle
existe
actuellement
n'est
pas 'de
nature
à
protéger
les
consonunateurs. 12 La satisfaction de cette exigence passe par une réorganisation du système
commercial actuel. Cela ne peut se faire sans action des pouvoirs publics. L'action doit viser
deux pôles bien précis: l'amont et l'aval. En amont, l'action devrait porter sur l'offre des
produits et services (Sous-Section 1). En aval, elle devrait s'intéresser à l'ensemble des
consommateurs, demandeurs desdits produits et services (Sous-Section II).
10 J. GHESTIN ct B. DESCHE : op. cit, Y. NEGRO: Droit de la vente, 1990, Vuihcrt, Paris; D. XARDEL : la
vente, PUF 1992, Paris; L. BlHL : Droit de la vente, Dalloz 1987 ; B. GROSS: Droit de la vente, PUF 1978 ; C.
DUCOULOUX-FAVARD: Droit de la vente, Eyrolles 1991, P. XV.
Il Ph. MAUNV AUD « La protection des consommateurs », 0 1981, chrono P. 49.
Il L'exemple camerounais en est une illustration. Si le législateur camerounais a senti la nécessité de faire une 10'
pour donncr une nouvelle orientation à l'activité commerciale, c'est qu'il a sans'doute remarqué que l'ancicnne 10'
(LOI N° 80/25 du 27 novembre 1980) ne satisfaisait pas à toutes les conditions relatives à l'équité dans Ic~
transactions commerciales, à la justice contractuelle.

231
Sous-Section 1 : L'action en amont des pouvoirs publics ou
l'action sur l'offre des produits et services.
Les principes Directeurs des Nations Unies en leur point
2 disposent
: «Les
gouvernements devraient élaborer, renforcer ou maintenir en vigueur une politique déterminée de
protection du consommateur en s'inspirant des principes ci-après... »13.
Et parmi les principes énoncés, « la protection des consommateurs contre les risques pour
la santé et leur sécurité» vient en première position. On remarque ensuite dans l'ordre «la
promotion et la protection des intérêts économiques ».14 On ne pourra réaliser les objectifs tracés
par ces principes, en l'occurrence la protection de la santé et de la sécurité et des intérêts
économiques des consommateurs (§II) sans un véritable contrôle du service de distribution (§I).
§I - Le contrôle de l'exécution du service de distribution.
,
La nécessité d'un tel contrôle s'explique par le lien très étroit qui existe entre le droit de la
distribution et celui de la consommation. Les deux disciplines s'interpénètrent (A). Aussi est-il
légitime
d'exiger
des
professionnels
distributeurs
une
offre
adaptée
aux
besoins
des
consommateurs (B).
A - Les rapports entre distribution et consommation.
Le droit de la distribution tout comme le droit de la consommation est une discipline
Jeune. Les deux disciplines sont apparues à la même époque. Elles se jouxtent, voire
s'interpénètrent « car elles intéressent toutes les deux une même activité économique: la mise sur
le marché des produits et services. »15 Mais elles correspondent à des points de vue différents.
Le doit de la distribution est un droit professionnel c'est-à-dire largement inspiré par les
professionnels eux-mêmes. '6 De ce fait il envisage les divers schémas d'organisation de la
IJ Principe N° 2 de la charte mondiale des consommateurs.
14 Principe N° 3- a) el b).
15 CAS et FERRIER: op.cil. W 274, P. 257.
16 CAS et FERRIER: op.cil. W 274, P. 257.

232
diffusion et de l'écoulement des produits et la mise en place des différents opérateurs, en sc
préoccupant essentiellement des droits et obligations de ces opérateurs les uns envers les autres.
Les divers systèmes de distribution et le choix entre ces systèmes sont essentiellement
envisagés en termes d'efficacité professionnelle: circuits longs ou circuits courts,17 distributeurs
subordonnés ou indépendants,18 distribution libre ou intégrée 19 ... Les questions de protection ou
d'information des consommateurs ne sont, pour les spécialistes du droit de la distribution qu'une
donnée, qu'un ensemble de contraintes dont les professionnels de la distribution doivent tenir
20
compte.
Le droit de la consommation quant à lui place le consommateur au centre de ses
préoccupations. Il ne s'intéresse aux techniques de distribution que dans un seul but: en détecter
et en supprimer les aspects dangereux pour le consommateur. 2 \\ Il s'agit d'éliminer les méthodes
commerciales agressives ou déceptives, celles qui portent atteinte au consentement ou à la
personnalité du consommateur, celles aussi qui sont la source de renchérissement de la vie. 22 En
le faisant, le droit de la consommation vise une chose
adapter la distribution aux besoins des
consommateurs.
17 On oppose p<lrtois les eircuits courts qui mettent en oeuvre très peu ou pas d'intermédiaires entre le produeteur
et le consommateur, aux circuits longs dans lesquels se trouve une chaîne de professionnels qui assurent la
fonction de distribution (cf J.-M. MOUSSERON: Droit de la distribution. Litec 1975. p. 34)
IS L'opposition est souvent retenue entre, d'une part, les distributeurs subordonnés qui doivent exécuter les ordres
donnés ou la mission confiée par les producteurs et se trouvent de cc lait dans l<l situ<ltion juridique du sai<lrié ou
du l11<lndataire, et, d'autre part, les distributeurs indépendants qui bénélicient, en principe, d'Une totale autonomie
d<lns l'accomplissement de leur fonction de distribution
l')
On parle généralement de distribution intégrée pour traduire la façon dont les entreprises, tout en demeurant
juridiquement indépendantes, concourent à un même processus de distribution. (Y. GUYON: Droit des Aflaires.
Economica 1980. p. 735.
~o CAS ct FERRIER: op. cit. p. 258, W 274
21 CAS et FERRIER: op. cit. p. 258, W 274
~~ ibid.

233
B - Vne distribution adaptée aux besoins des consommateurs.
Comment adapter la distribution aux besoins des consommateurs dont on sait que les
goûts ne cessent de varier? Tout simplement en l'envisageant sous l'angle d'un service rendu
auxdits consommateurs. 23 Mais, parce qu'elle concerne généralement l'écoulement des produits,
et qu'une distinction traditionnelle est faite entre les produits et les services,24 la distribution est
25
rarement envisagée comme constituant elle-même un service.
En effet, on peut défmir la distribution comme l'ensemble des opérations juridiques et
matérielles par lesquelles un bien est vendu après le stade de sa production, ou une prestation de
service fournie après le stade de sa conception, au consommateur fmaf 6• L'article 2 f) du Décret
N° 931720/PM du 22 novembre 1993 fixant les modalités d'application de la loi N° 90/031 du 10
août
1990 régissant l'activité commerciale au Cameroun défmit
la distribution comme
« l'ensemble des structures, des voies et moyens commerciaux concourant à l'offre de vente des
biens et produits aux utilisateurs intermédiaires et/ou aux consommateurs. »27
L'efficacité de la distribution est presque toujours envisagée du point de vue du
professionnel, pour lequel le système de distribution le meilleur est celui qui permet de vendre le
plus de produits, au prix le plus rémunérateur, dans le temps le plus court. C'est en fonction de
cet objet que sont mises au point, par des spécialistes, les méthodes de ventes, les techniques de
commercialisation, les campagnes publicitaires...28
Ce point de vue ne peut être envisagé du côté du consommateur pour qui une distribution
efficace est celle qui le conduit à acheter le produit qui correspond à ses besoins, à un prix
raisonnable, en mettant à sa disposition des informations complètes et loyales.
11 CAS ct FERRIER: op. cil. p. 258. W 274
14 1bid.
15 Ibid.
16 CAS et FERRIER, op. cil. W 173, P. 158.
17 Juridis Information
N° 16, Législation, octohre-novemhre-décemhre 1993, P. 8.
18 CAS et FERRIER, op. cil. P. 257, n° 273.

234
Vu sous cet angle, la distribution constitue en soi un service rendu aux consommateurs et
qUI, comme les autres services, doit être adaptée aux besoins des acheteurs. Et comme cette
vision des choses ne s'impose pas d'elle-même aux professionnels de la distribution, les pouvoirs
publics doivent s'y impliquer davantage et harmoniser le commerce de distribution par ùes
moyens législatifs ou réglementaires. Ceux~ci. permettront de contrôler son fonctionnement,
l'information et le respect dû aux consommateurs qui en sont les principaux usagers. 29 C'est
justement vers ces objectifs que tendent les PDPC en leurs points 13-23-27 et 30.
En ces divers points, les Nations Unies n'ont pas manqué l'occasion d'attirer l'attention
des gou vernements des pays en développement sur cet aspect de la distribution. Aussi, incitent-
elles ces gouvernements à «rechercher dans leurs politiques à assurer (à ce) que les
consommateurs tirent le maximum d'avantages de leurs ressources économiques ». Ceci n'est
possible que si les gouvernements se donnent «pour objectifs des normes de production et
d'efficacité satisfaisantes, des méthodes de distribution adéquates, des pratiques commerciales
loyales, une commercialisation associée à l'information et une protection efficace contre les
pratiques qui pourraient nuire aux intérêts économiques des consommateurs et à leur liberté de
choix »30. Elles encouragent aussi l'adoption ou la continuation « des politiques - dans le cas où
celles-ci sont déjà mises en place - visant à assurer une distribution efficace des biens et services
aux consommateurs.
L'objectif de telles politiques, c'est d'assurer la distribution des biens et services
indispensables, lorsque cette distribution est menacée comme cela est parfois le cas, notamment
dans les zones rurales. Allant plus loin, le principe 27 des Nations Unies exhorte les
gouvernements à la création d'installations de stockage et d'installations commerciales adéquates
dans les centres ruraux, à des incitations visant à amener le consommateur à faire preuve
d'initiative personnelle et à l'amélioration du contrôle des dispositions en vertu desquelles les
31
biens et services de première nécessité sont fournis dans les zones rurales.
S'appuyant sur ces mêmes principes, les associations de consommateurs africains, réunies
en « Atelier Régional» les 1cr, 02 et 03 Juillet 1992 ont interpellé les gouvernements africains sur
la promotion et la protection des intérêts économiques du consommateur. Dans leurs résolutions
29 CAS cl FERRIER, op. cil. P. 257, n0273.
30 PDPC N° 3.
31 ibid N° 27 a)

235
finales, elles ont lancé un appel aux gouvernements africains « afin qu'ils prennent des mesures
nécessaires pour que les biens et services de première nécessité soient mis à la portée des
consommateurs, en s'assurant que:
1- Ces biens et services de première nécessité, y compris les produits alimentaires, l'eau,
l'habitat, les soins de santé soient de qualité à protéger et à promouvoir le bien-être et la santé du
consommateur ;
2- Les prix de tels biens et services soient également à la portée des consommateurs;
3-
De
tels
biens et
services
soient
distribués de
manière à atteindre
tous
les
consommateurs, y compris ceux du monde rural;
4- Toute politique d'ajustement structurel qui sacrifierait le bien-être du consommateur à
faible revenu quant à l'acquisition de biens et services essentiels ne soit pas acceptée. 32
Une telle interpellation faite plusieurs années après l'adoption des Principes Directeurs
des Nations Unies pour la 'Protection du Consommateur prouve qu'en la matière, rien de très
concret n'existe en Afrique. Signe que le terrain législatif est encore vierge et nécessite une mise
en valeur rapide. Le Cameroun, seul Etat africain (à notre connaissance) à avoir mis en place une
législation relative à la protection du consommateur,33 n'a cependant pas failli à la règle. Le
législateur Camerounais a prévu dans les « Dispositions Générales» de la loi régissant l'activité
commerciale au Cameroun, un article à cet effet. Il s'agit de l'article 3 qui dispose: « L'activité
commerciale doit s'orienter notamment vers:
- La satisfaction des besoins du consommateur tant au niveau des prix que de la
qualité des biens et services offerts;
- La création d'emplois et la formation professionnelle;
- La stimulation des activités de production des biens et serVices, et de la
compétitivité de l'économie nationale;
J2
Atelier Régional : Principcs Dirccleurs dcs Nations Unics pour la Protcclion du Consomma leur. Quelles
application en Afrique. Résolulion l, « Consommation-Développcmcnt », Bull. d' [n 10. Trim. IOCU-EN DA N° X,
nov. 1992, P. 6 .
.13 Loi n° 90/03 1 du 10 aoûl 1990 précilée.

236
- La rationalisation et l'assainissement des circuits de distribution;
- L'amélioration de la qualité de la vie;
- L'animation de la vie urbaine et rurale. »
Ce texte en ses alinéas 1-4-5- et 6 tient compte du consommateur et de son bien-être,
sans préjudice aux activités commerciales qui ont lieu dans le pays. Il est donc conforme aux
objectifs des principes des Nations Unies. C'est aussi l'objet du Droit de la Consommation qui,
sans mettre en péril les règles de la distribution, vise positivement d'ailleurs « à la transformer en
un véritable service et même - bien qu'il soit géré le plus souvent par des personne privées - un
service public »34 avec la principale caractéristique que peut comporter un tel service : la
sécurité.
§II - La sécurité du consommateur comme but du contrôle.
Lorsqu'en 1962, le Président américain KENNEDY lança un appel pour que divers droits
soient reconnus aux consommateurs, il cita en prerruer le droit à la sécurité. Depuis cet appel, ce
droit est devenu la revendication la plus constante des organisations des consommateurs dans
tous les pays d'économie de marchë5. Les Nations Unies dans leur charte mondiale des droits
des consommateurs n'ont pas négligé le domaine. Dans la Partie III réservée aux Principes
Directeurs eux-mêmes,36 le domaine relatif à la sécurité physique occupe la première position.
La sécurité est donc un droit fondamental auquel tout consommateur a droit, et en tant
que tel, elle doit être préservée à tout prix par une législation appropriée (A). Pour forcer son
respect par les professionnels, il serait souhaitable de subordonner son manquement à une
réparation du dommage causé (B).
A - Le droit du consommateur à la sécurité.
Parmi les problèmes que pose la protection des consommateurs, ceux de la santé et de la
sécurité sont de loin les plus importants. L'apparition de la société de consommation n'a pas été
34 CAS ct FERRIER: op. cil. P. 257, W 273.
35 CALAIS-AULOY : « Sécurité des consommateurs », in « Sécurité des consommateurs cl responsabilité du l'ai
des produits défectueux, Colloque des 6-7 novemhre 1986, Celltre de Droit des Ohligatiolls de l'Université d,
Paris l, Panthéon- sorbonne, sous la direction de J. GHESTIN, P. 225.
36 Cf la charte mondiale pour la protection des consommateurs: 1- Ohjectifs, 11- Princi[)es Généraux.

237
sans multiplier les atteintes à la sécurité du consommateur et sans créer de risques nouveaux. Le
type même de production à la chaîne qui ne peut éviter les accidents de fabrication, la distribution
de masse avec tout ce qu'elle comporte d'anonyme, le défaut ou l'insuffisance de mise en garde
ou d'explication sur ['emploi de produits, la recherche de profits maximum qui ont lieu trop
souvent au détriment de la sécurité des usagers, les techniques nouvelles ou les matériaux
nouveaux utilisés sans une expérimentation suffisante sont générateurs de nombreux dangers
nouveaux.:17 Devant cet enjeu, on comprend aisément que l'usager des produits et services ait
besoin de protection, donc de sécurité contre un environnement économique qu'il ne maîtrise
plus. Ce besoin est d'autant plus grand dès lors que ['on a en face de soi des usagers beaucoup
moins avisés comme le sont justement la majorité des consommateurs africains (a). Ce besoin de
sécurité est une exigence légitime qui a un fondement juridique bien défini (b).
al Le besoin de sécurité du consommateur en Afrique.
Dans le principe N° 9 de la charte mondiale des Nations Unies sur les droits des
consommateurs, on peut lire les dispositions suivantes: « Les gouvernements devraient adopter
les mesures appropriées, notamment un cadre juridique, des règles de sécurité, des normes
nationales ou internationales et des normes facultatives, ou encourager leur adoption, et
encourager la tenue à jour d'état sur la sûreté des produits, de manière à avoir la certitude qu'ils
sont sans danger tant pour l'usage prévu que pour une utilisation normalement prévisible. »
Le but de ce principe n'est pas seulement d'inciter les pays membres de l'O.N.U. à
adopter des législations protectrices des consommateurs, mais d'y inclure dans ces législations
des règles destinées à garantir la sécurité des consommateurs. Si cette exigence s'impose
aujourd'hui, c'est pour des raisons bien précises: l'avènement de la société de consommation
menace la sécurité des consommateurs et « entraîne des ruptures d'équilibres aux conséquences
incalculables» 38.
37 L. BIHL: « Le droil du consommateur Il la sécurité », Gaz. Pal. Du 28 avril 1979, P. 200.
.18 L. BI HL : « Le droit du consommateur Il la sécurité », Gaz. Pal. du 28 avril 1979, P. 200.

238
En
effet,
l'utilisation de
certains produits
peut
parfois
provoquer de
véritables
catastrophes. Cela a été le cas du «Talc Morhange »19. C'est encore malheureusement le cas
aujourd'hui dans toutes les filières commerciales où la distribution génère des dangers enfermés
dans les produits. On pourrait citer de nombreux exemples d'aliments avariés, d'appareils qui
explosent ou implosent, des jouets dangereux etc. 4ü. La complexité croissante des produits ct
services mis sur le marché rend les accidents plus fréquents et leurs conséquences plus
dramatiques.41
Pour ce qui est des pays du Tiers Monde, plus précisément des pays d'Afrique, l'absence
de statistiques dans ce domaine empêche de mesurer l'ampleur des dégâts causés par les produits
et services offerts. Une chose cependant reste certaine: dans cette région du monde, les accidents
de consommation dans la vie quotidienne sont une réalité qu'il est impossible de nier. 42 Comme
['ont bien souligné deux éminents auteurs, « il est (bien) certain que les homicides et blessures par
imprudence infligent aujourd'hui à la société un dommage cent fois plus important que les
meurtres et les violences»43.
On peut, certes, discuter à perte de vue sur des chiffres et des statistiques, et
comparativement aux accidents de la consommation qui font plusieurs milliers de morts et des
centaines de milliers de blessés, les meurtres et les violences de droit commun ne sont rien.e!e!
Déjà en Avril 1975, face aux dangers de la consommation, les organisations de
consommateurs françaises, dans leur proposition de loi-cadre qui constituait en quelque sorte leur
« programme commun» de consommateurs revendiquant le droit à la sécurité, rédigeaient dans
leur article 3, un texte qui est resté toujours célèbre. Cet article dispose: « Tout consommateur a
droit à la santé et à la sécurité. Le producteur ou le distributeur est responsable de l'innocuité des
,1~ D. N'GUYEN-THANH-BOURGEAIS : «La sécurité des consommateurs: Réllexions sur ]'aITaire du Talc
Morhange », D. 1981, chronique, P. 87 et suiv. Le Talc Morhange est un rroduit d' hygiène corrorelle. Fabriqué
pour les jeunes enfants et largement diffusé sur le marché, il a causé, en 1972, la mort de 36 nourrissons et
provoqué 167 intoxications, dont 8 ont entraîné des inlirmités ù vie. Une erreur de fabrication (le talc contenait
plus de 6% d'hexachlorophène H.C.P., bactéricide toxique à cclle dosc) étail à l'originc du drame. Voir égalcmcnt
CALAIS-AULOY : Droit de la consommation, 3 è éd., Dallo/. 1<)<)2, P. 200.
411 CALAIS-AULOY : op. cil. P. 200.
41 Ibid.
42 MM IMBERT ct LEVASSEUR, cités par BIHL : «Droit pénal de la consOl1lnlation », Gal.. Pal.
Il)H6, 1cr
scmestre, P. 360.
4]
CALAIS-AULOY et BlHL : «Droit de la consommation : lc droit du consommateur à la protcction »,'
(Troisième Journées du droit dc la consommation, Paris, la et2 déccmbrc 197H), JCP 1979, n° 7617, P. 65.
44 BlHL : « Droit pénal de la consommation », article précité, P. 360.

239
biens et des services qu'il offre ou met en vente, sur le plan de la santé ou de la sécurité du
consommateur. Le non-recours à des composants ou procédés cie fabrication interdits ne peut
constituer une preuve suffisante de cette innocuité. Tout bien ou service présentant ou
susceptible de présenter un danger pour la santé ou la sécurité du consommateur, devra être
immédiatement retiré du marché par simple ordonnance du Président du tribunal de Grande
Instance statuant en référé ou du juge d'instruction. Le fait de mettre sur le marché un bien ou un
service présentant ou susceptible de présenter un danger pour la santé ou la sécurité du
consommateur, dans les conditions normales d'utilisation, constitue le délit puni des peines de
l'article 1 »45.
Ce besoin de sécurité des consommateurs français connut quelques années plus tard une
consécration législative par le vote de la loi du 21 Juillet 1983 relative à la sécurité des
consommateurs.46 L'art 1er de cette loi dispose:
« Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou
dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présentt:;r la
sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé
des personnes ».
Et l'article 2 de la même loi de renchérir:
« Les produits ne satisf<lisant pas à l'obligation de sécurité prévue à l'art 1er sont
interdits ou réglementés dans les conditions fixées ci-après... »
Quant à l'art 3, il donne, « en cas de danger immédiat », au ministre chargé de la
consommation et aux ministres intéressés le pouvoir de faire cesser le danger par tous les moyens
'1
47
et ou qu't se trouve.
45 BIHL : « Le droit du consommateur à la sécurité », article précité, P. 201.
46 Loi N° 83/660 du 21 juillet 1983 relative à la sécurité des consommateurs ct modifiant diverses dispositions de
la loi du 1el août 1905, JO du 22 juillet 1983.
47 « Le ministre chargé de la consommation et le ou les ministres intéressés peuvent suspendre par arrêté conjoint,
pour une durée n'excédant pas un an, la 1~lhrication, l'importation, l'exportation. la mise sur le marché à titre
gratuit ou onéreux d'un produit ct faire procéder à son retrait en tous lieux où il se trouve ou à sa destruction
lorsque celle-ci constitue le seul moyen de raire cesser le danger. Ils ont également la possihilité d'ordonner la
diffusion des mises en garde ou de précautions d'emploi ainsi que la reprise en vue d'un échange ou d'une
modilïeation ou d'un remboursement total ou partiel.
Ils peuvent dans les mêmes conditions, suspendre par arrêté conjoint la prestation d'un service », article 3, al. 1 ct
2.

240
Au plan européen, le problème de la sécurité des consommateurs fut tout d'abord posé
par la directive du 25 Juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives,
réglementaires et administratives du fait des produits défectueux48 , Et par produit défectueux, il
faut entendre tout produit qui « n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre
compte tenu de toutes les circonstances et notamment:
a- de la présentation du produit;
b- de l'usage du produit qui peut être raisonnablement attendu;
c- du moment de la mise en circulation» (art 6. al 1 de la directive).
S'agissant de la sécurité des consommateurs, le législateur européen ne s'est pas contenté
de la seule directive du 25 juillet 1985 spécifique aux produits défectueux. Il est allé plus loin en
adoptant le 29 Juin 1992 une directive relative à la sécurité générale des produits. 49 Dans le titre
II intitulé « obligation générale de sécurité» l'al. 1 de l' art. 3 de la directi ve dispose:
« Les producteurs sont tenus de ne mettre sur le marché que des ''produits sûrs" »50.
Il en va de même des distributeurs lesquels « sont (également) tenus d'agir
diligemment afin de contribuer au respect de l'obligation générale de sécurité, en
particulier en ne fournissant pas de produits dont ils savent ou auraient dû estimer,
sur la base des éléments d'information en leur possession et en tant que professionnel,
qu'ils ne satisfont pas à cette obligation. Ils doivent notamment, dans la limite de
leurs activités respectives, participer au suivi de la sécurité des produits mis sur le
marché, en particulier par la transmission des informations concernant les risques des
<18 Directive W85/374/CEE du Conseil du 25 juillet 1985, lOCE du 7 août 1985, N° L 210, P. 29.
<19 Directive W92159/CEE du Conseil du 29 juin 1992, lOCE du 11 août 1992, W L 228, P. 24.
50
Par «produit sûr », il faut entendre «tout produit qui, dans des conditions d'utilisation normales ou
raisonnablement prévisibles, y compris de durée, ne présente aucun risque ou seulement des risques réduits à un
niveau bas compatibles avec l'utilisation du produit et considérés comme accc(1tablcs dans le respect d'un ni>.'cau
de protection élevé pour la santé et la sécurité des personnes, compte tenu, en particulier, des éléments suivants:
- dcs caractéristiques du produit, notamment sa composition, son cmballage, ses conditions d'assemblage cl
d' entrel ien,
- de l'effet du produit sur d'autres produits au cas où on peut raisonnablement prévoir l'utilisation du premier avec
les seconds,
-de la présentation du produit, de son étiquetage, des instructions éventuelles concernant son utilisation ct
élimination ainsi quc de toute autre indication ou information émanant du productcur,
-des catégories de consommateurs se trouvant dans des conditions de risqucs graves au regard de l'utilisation du
produit, en particulier des cnfants» (article 2- b. de la directive du 29 juin 1992).

241
produits et par la collaboration aux actions engagées pour éviter ces risques» (art.3
al.3 ).
Les mêmes obligations incombent aux producteurs dans la limite de leurs activités
respectives, mais dans une proportion un peu plus stricte que les distributeurs (art.3 aI.2).
L'analyse des législations relatives à la protection de la sécurité des consommateurs à
travers le droit français et le droit Communautaire n'est pas neutre. Il s'agit de montrer la place
qu'occupe la protection de la sécurité du consommateur dans les pays membres de l'Union
Européenne. Il en va de même dans les autres pays industrialisés. Le but des principes des
Nations Unies est de rendre possible, sinon de promouvoir cette protection du consommateur
dans les pays où elle n'existe pas encore, en particulier les pays d'Afrique. Sur ce point, il est
regrettable que le législateur Camerounais n'ait pas prévu une seule disposition pour régir ce
domaine qui, dans les principes des Nations Unies, occupe la première position. Certes, la loi
camerounaise, un modèle du genre en Afrique rappelons le, évoque dans son article 7
d' « inspeGtion technique de la qualité ou de la quantité» de « tout produit fabriqué ou importé
« au Cameroun» et ce, en respectant les «normes» conformément à la législation et à la
réglementation en vigueur »51. Mais il s'agit là d'une disposition insuffisante quant à la garantie
de la santé et de la sécurité des consommateurs.
D'un point de vue général, l'analyse de la sécurité des consommateurs en France et dans
J' Union Européenne peut être utile aux Etats africains, car destinée à mettre ces Etats sur la voie
de la réglementation relative à la sécurité. Il existe en effet, entre les Etats africains et les Etats
Européens une certaine tradition législative, plus précisément une parenté entre leur droit
respectif. Ceci est le ti'uit d'une évolution historique liée à la colonisation. Si l'on prend l'exemple
des Etats africains d'expression française, la présence du droit français se fait toujours sentir.
Bien que ces Etats aspirent à une indépendance législative, le poids du droit français reste
constamment dans les habitudes.
SI Loi W 90/031 du 10 août 1990 précitée.

242
Dans certains pays, il reste la référence52 . Ceci est aussi valable pour les Etats
d'expression anglaise et les Etats lusophones. Au lieu de s'abstenir de légiférer, ces Etats
pourraient s'inspirer des législations respectives de leur métropole pour asseoir un véritable cadre
juridique des règles de sécurité pour la protection de leurs populations. L'inspiration en matière
législative est bien chose normale. Elle se fait entre pays industriels. Elle pourrait bien se Ülire
entre pays industriels et pays en développement. C'est donc un acte légitime. Ce dont il faut bien
se garder, c'est une transposition pure et simple des lois des Etats d'inspiration. Cela ne pourra
pas cadrer avec les réalités locales, même si on sait que le fondement juridique du droit à la
sécurité n'est pas forcement tributaire de ces réalités.
h) Le fondement juridique du droit du
consommateur à la sécurité
Le droit à la sécurité du consommateur existait bien avant sa création législative dans les
sociétés de consommation occidentales ou sociétés hautement industrialisées.
Illustrons cette affIrmation par une référence historique de la jurisprudence française que
nos systèmes juridiques connaissent bien parce que les praticiens l'étudient souvent.
Avant la société de consommation, il y a déjà longtemps, la jurisprudence française s'est
attachée à développer cet aspect du droit à la sécurité. La société industrielle du XIX'~lIlc siècle,
constituait déjà une sonune de dangers suffisants pour donner ample matière aux Tribunaux de se
pencher, et de tenter de résoudre des problèmes juridiques que les rédacteurs du Code civil ne
pouvaient avoir aperçus. Les créations les plus hardies de la jurisprudence vont naître dans ce
domaine au début du siècle dans les années 1911/ 1913, notamment l'invention par les arrêts de
la Cour de cassation du 21 novembre 1911 53 et du 27 janvier 191354 de l'obligation de sécurité
dans le contrat de transport, l'interprétation audacieuse des articles 1641 et suivants du Code
52 L'inl1uence des droits des anciennes puissances coloniales se ressent à tous les niveaux: administratif, civil
commercial et autres. Si l'on l'exemple du Togo, les cex!es civil, commercial, pénal, administratif, etc., sOJlt
constamment utilisés comme eodes de référence aussi bien dans l'enseignement supérieur, notamment il
l'université, dans l'administration ainsi que dans les instances judiciaires.

243
civil pour protéger l'acheteur contre les conséquences des vices cachés de la chose vendue dès
193055 et dans les autres domaines, toute la jurisprudence dans le domaine la responsabilité des
cliniques, de responsabilité médicale, hôtelière etc.56.
Bien que le terme consommateur n'ait pas été expressément cité par les juridictions
saisies, les solutions avancées n'en sont pas moins à son avantage. L'objectif poursuivi était la
protection de sa sécurité dans son rôle de voyageur ou d'acheteur d'un bien quelconque. Dans
cette logique, «le droit à la sécurité (du consommateur) est probablement la partie la plus
ancienne du droit de la consommation »57, Quel est donc son fondement juridique? La réponse à
cette question n'est pas aussi simple qu'on pourrait le croire.
On pourrait dire que le droit à la sécurité du consommateur prend sa source dans le
contrat qui le lie au professionnel. Celui-ci est obligé à la garantie de la sécurité du
consoJ!llllateur puisqu'il est à l'origine du lien juridique qui le lie au consommateur. C'est le
producteur ou le distributeur qui crée « l'environnement contractuel »58 dans le but d'attirer le
client pour nùeux vendre ses produits. Dès lors, il apparaît comme normal qu'il soit responsable
de la sécurité de ce client dont il a provoqué la venue.59
En raisonnant ainsi, on met de côté ceux ou celles qui n'ont pas un lien de droit avec le
producteur et distributeur alors qu'ils peuvent être amenés à subir une atteinte à leur sécurité
physique par le ou les produits achetés par une autre personne. On vise ici le tiers non
contractant. On n'a pas le droit à la sécurité parce qu'on est contractant, mais parce qu'on est
simple consommateur. 11 faut donc rechercher le fondement juridique du droit à la sécurité
ailleurs, au-delà du champ contractuel. Ce qui nous amène à explorer un autre horizon, un autre
domaine: celui relatif à la sécurité générale.
Le droit à la sécurité du consommateur serait-il une obligation générale incombant à tout
professionnel? On serait tenté de répondre par l'affIrmative. D'ailleurs, le second principe des
51 Naissance de l'ohligation de sécurité: Casso Civ. 21 nov. 1991, S. 1912, l, 73, note LYON-CAEN; D. 1913,1.
249, noie SARRUT (transport maritime de personnes)
54
Casso COI11. 27 janvier 1913, S. 1913, 177, eonel. SARRUT, note LYON-CAEN (transport terrestre de
pe rson nes).
55 BIHL : « Le droit du consommaleur à la sécurité », article précilé, p. 201.
51. Ibid.
57 Ibid.
5R L'expression est de BIHL, article précilé, P. 201.
59 Ibid.

244
Nations Unies relevant du domaine de la «sécurité physique» des consommateurs, soit le
principe 10 dans l'ordre général de numérotation, incite les gouvernements à adopter des
législations s'inscrivant dans cette logique. Ce principe dispose : les gouvernements devraient
« s'assurer, par des politiques appropriées, que les biens produits par les fabricants sont sûrs tant
pour l'usage prévu que pour une utilisation normalement prévisible. Ceux dont la tâche est de
mettre des produits sur le marché, en particulier les fournisseurs, exportateurs, détaillants ct
autres (ci-après dénommés « les distributeurs ») devraient veiller à ce que, pendant qu'ils en ont
la garde, ces produits ne perdent pas leur qualité de sûreté par suite d'une manutention ou d'un
entreposage. Il faudrait indiquer aux consommateurs le mode d'emploi des produits et les
informer des risques courus, dans l'usage prévu comme dans une utilisation normalement
prévisible. Les informations essentielles en matière de sécurité devraient être transmises aux
consommateurs au moyen de symboles internationaux si possible ».
Ce principe directeur des Nations Unies ne préjuge pas dans ses dispositions de la qualité
de contractant ou de non contractant du consommateur. Il pose une règle générale: celle d'une
sécurité obligatoire pour tous les consommateurs.
La directive 92/59/CEE du conseil du 29 Juin 1992 relative à la sécurité générale des
produits s'inscrit parfaitement dans cette ligne de conduite du principe des Nations Unies. On y
trouve, dans ses définitions respectives de « produit sûr »60, de « produit dangereux »61, de
« producteur »62 et de « distributeur »63, tous les mots clés qui font la force de ce principe et qui
lui donnent une résonance de portée générale.
Le gouvernement chinois ne s'en est pas moins écarté de cette ligne directrice. Dans sa loi
du 31 octobre 199364 relative à la protection des consommateurs, il y a consacré ce principe.
Parmi les principaux droits du consommateur, la sécurité vient en première ligne. Les
('(l Article 2 h) dc la directive du 29 juin 1992 précitée, cf pour ses dispositions la note n° 50.
(,1 Article 2 c) de la même directive. Par « produit dangereux ", il faut entendre « Tout produit qui ne répond pas à
la définition du produit sûr au sens du point b) dudit article.
r.} Article 2 d) de la directive du 29 juin 1992.
(d Article 2 e) de la directive
6-1 La loi de la Répuhlique Populaire de Chine en matière de protection des droits et intérêts des eonsommateurs a
été adoptée le 31 octohre 1993 par la Commission Permanente de l'Assemhlée Populaire Nationale et a élé
promulguée le même jour par le Président. Cette loi est rentrée en vigueur le 1er janvier 1994. Elle délinit les
droits fondamentaux des consommateurs, les obligations et les responsabilités des agents économiques impliqués
dans lél fourniture de biens ou de services, le rôle des eomités de eonsommateurs et les pénalités en cas de violation
des droits et intérêts des consommateurs. Cf en cc sens, BAKER et Mc KENZIE : «\\(l protection des
consommateurs en République Populaire de Chine ", Gaz. Pal. Du 22-23 mars 1995, P. 7.

245
professionnels opérant en République Populaire de Chine doivent tout faire pour assurer la
sécurité des consommateurs chinois. Ceux-ci ne doivent pas «subir de préjudices sur leur
personne ou sur leurs biens lorsqu'ils achètent ou utilisent une marchandise, ou bénéficient de
.
d
.
65
prestatIOns e servIce» ..
Seuls les gouvernements africains ne s'intéressent pas pour le moment à cette ligne
directrice des Nations Unies. Pourtant le moment est venu pour s'y intéresser et mettre en place
un véritable droit pour garantir la sécurité du consommateur.
Bien avant ce principe de Nations Unies, la loi française du 21 juillet 198366 faisait de
l'obligation de sécurité du consommateur une obligation sui generis.
Cette loi dite loi LALUMIERE, énonce clairement une obligation de sécurité dans son
alticle 1er lequel dispose:
« les produits et services doivent, dans des conditions normales d'utilisation, ou dans d'autres
conditions raisonnablement prévisibles. par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on
peut légitimement s'attendre, et ne pas porter atteinte à la sécurité des personnes ».
Ce texte de droit positif est particulièrement explicite : les professionnels, fabricants de
produits ou prestataires de services, ne doivent pas porter atteinte à la sécurité des personnes,
c'est-à-dire porter atteinte à l'intégrité physique d'autrui, que la personne victime soit un
contractant ou un tiers. 67
cr
65 I
poinl relalif aux droits des consommateurs définis par la loi chinoise du :1 1 octobre 1993.
(
66 Loi nO 83-660 du 21 jui Ilet 198:1 relative à la sécurité des consommateurs, la. 22 juillet 198:1, p. 2262 ; D. Et
A.L.D. 1983. p. 389.
1
67 Yvonne LAMBERT-FAIVRE: «Fondement ct régime de l'obligation de sécurité », D. 1994, p. 82.

246
L'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation68 désormais mIse en oeuvre
dans le cadre de la loi BADINTER du 5 juillet 198569 transcende la traditionnelle dichotomie
contractuelldélictuel. Elle s'applique non seulement aux dommages causés à des tiers, mais
encore aux victimes transportées en vertu d'un contrat de transport qui les lie au professionnel
transporteur. 70
Dans le cadre européen, nombreuses sont les directives qui ont pour objet la garantie de la
sécurité des personnes.
Outre la directive du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits précitée et
inspirée de la loi française du 21 juillet 1983, on peut citer celle du 25 juillet 198571 laquelle met
en oeuvre la responsabilité des fabricants du fait des produits défectueux. L'obligation de sécurité
générale du fabricant y est sanctionnée par une responsabilité univoque, que la victime soit un
consommateur contractant ou non.
La responsabilité médicale et l'indemnisation de l'aléa thérapeutique va aUSSI dans ce
sens.
L'affaire dramatique de la contamination postransfusionnelle par le VITUS du sida a
72
conduit le législateur français à créer un Fonds d'indemnisation spécifique
devant lequel la
qualité de victime du sang contaminé est nécessaire et suffisante.
(,H « Accidents de la circulation: analyse ct rétërences » in Yvonne LAMBERT-FAIVRE, Droit des assurances,
Dallo!. H" éd. 1992, nOs 707 à 877, et le Droit du dommage corporel, Dalloz 1993,2" éd. N°S 466 à 565.
(>~ Loi nO H5/677 du 5 juillct 19H5, J.O. 6 1985. (Article IC')
70 Yvonne LAMBERT-FAIVRE: article précité, p. 82.
71
Directive (C.E.E) na 85/374 du Conseil du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des disposition~
réglementaires et administratives des Etats membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux:
J.O.C.E. du 7 août 19H5, na L 210, p. 29.
72 Loi na 91 -1406 du 31 déc. 1991, artiele 47, J.O. 4 janvier 1992, p. 184 ; D. ct A.L.D. 1992,96.

247
On peut citer dans ce sens la directive européenne du 14 juin 1989 qui a pour objet de
garantir la sécurité et l'efficacité des dérivés stables du sang considérés comme des médicaments
et la loi française du 4 janvier 199373 relative à la sécurité en matière de transfusion sanguine et
cie médicament qui en est son prolongement au plan national.
On pourrait multiplier des exemples dans maints domaines dans lesquels l'obligation de
sécurité conserve une place univoque ou autonome dans le champ d'application des législations
modernes. Une chose est certaine comme l'a affirmé un auteur :
« l'obligation de sécurité est univoque, générale et indivisible et ne se laisse pas enfermer dans un
cadre contractuel aussi artificiel dans la réalité concrète que dans la fuyante analyse juridique »7~.
En fait, pourquoi une telle obligation à la charge des producteurs, distributeurs et
prestataires de services? Cette obligation mise à la charge des professionnels s'explique par une
raison toute simple: c'est parce que la distribution est considérée comme un service, et en tant
que tel, elle doit être une source de satisfaction pour le destinataire, quel qu'il soit. Et qui dit
satisfaction, dit absence de nuisance, donc préservation de la santé et de la sécurité7:>.
Mais cela ne va pas de soi. Et comme on ne peut pas interdire à l'homme de consommer,
ce serait l'empêcher de vivre, le minimum qu'on puisse faire, c'est de le protéger contre une
consommation nuisible.
C'est justement l'objectif des principes directeurs des Nations Unies.
7J Loi n° 93/5 du 4 janvier 1993 rclaive à la sécurité en matière de transfusion sanguine et de médicament, J.O. 5
janvier' 993, p. 237 ; D. et ALD. 1993, 154.
74 Yvonne LAMBERT-FAIVRE: article précité, p. 83.
75 CAS et FERRIER: op. cil. N° 277.

248
L'intégration de ces principes dans les législations nationales en Afrique nécessite la mise
en évidence d'une nouvelle conception, voire d'une conception adaptée de la sécurité des
produits et services. La fabrication en série et la distribution massive des biens de consommation,
dont l'impact sur la santé et la sécurité est souvent mal appréhendé pour les consommateurs
locaux,
impliquent
qu'une
nouvelle
philosophie
du
droit
régissant
les
rapports
entre
professionnels et consommateurs soit dégagée76 •
La justification en est la suivante : en raison de leur activité économique consistant a
mettre sur le marché des produits et services destinés à la consommation, les professionnels, et
parmi eux, plus spécialement les fabricants, assument une réelle responsabilité sociale. Un
certain nombre d'obligations découlant de cette activité, dont le droit à la sécurité du
consommateur, devrait échapper à l'emprise des volontés contractuelles pour devenir de
véritables devoirs légaux à l'égard des consommateurs, d'autant plus que ceux-ci pris
indi viduel1ement, n'ont pas la capacité de se défendre efficacement.
Tout le problème qui se pose aujourd'hui en Afrique se ~onçoit en termes plus simples:
l'absence de lois et règlements susceptibles de garantir cette sécurité. En réalité, le problème
n'est pas de dicter des lois et règlements pour la commodité de l'esprit, mais de veiller à leur
application et à leur bon respect par les professionnels. Et dans ce sens, on ne peut aujourd'hui se
donner le luxe d'affirmer que le consommateur camerounais est plus tranquille en ce qui concerne
sa sécurité que le consommateur kenyan, togolais, tunisien ou namibien pour le simple fait qu'il
77
existe un texte de loi protecteur des consommateurs au Cameroun . C'est là tout le paradoxe des
pays africains: la présence des lois dans la théorie, et leur inapplicabilité dans la pratique.
Un commerçant qui ouvre au public ses magasins ou tout autre local destiné à son
négoce, doit veiller à ce que toutes les mesures de sécurité soient remplies afin que les acheteurs
ne subissent aucun dommage pendant leur passage dans les lieux. Il doit aussi veiller à ce que ses
produits
ou
services
préservent
la
sécurité
des
usagers.
Même
en
l'absence d'une
réglementation spécifique, la préservation de la sécurité des consommateurs s'.impose. aux
professionnels.
76 PIZZIO : Droit de la consommation, Encyclopédie Dalloz, Droit commercial, 1987, P. 54.
77 La loi camerounaise N° 90/031 du 10 août 1990 ne comporte aucune disposition relative à la protection de la,
sécurité du consommateur. Ce qui laisse à celle loi un vide juridique important que le législateur se doit de
comhler.

249
Il s'agit là d'une obligatioll !;énérale qui, comme nous avons déjà eu à le souligner,
dépasse le cadre contractuel pour embrasser le délictuel. C'est une obligation à fondement
contractuel et délictuel puisqu'elle engage le professionnel envers la victime même en l'absence
d'un lien contractuel78 . C'est « un droit fondamental »79, voire naturel, dont le but est de limiter
les excès dans le commerce puisque, par les contraintes qu'il impose, les biens de consommation
ne pourront entrer sur le marché qu'à la seule condition de satisfaire à l'obligation générale de
sécurité.
Un arrêt de la Cour de cassation l'a d'ailleurs consacré depuis le Il octobre 1983. En
l'espèce, pour sanctionner le manquement par le fabricant à l'obligation de renseigner l'utilisateur
sur les dangers présentés par le produit et les précautions à prendre lors de son emploi, la Cour
suprême s'est démarquée des juges du fond en n'invoquant pas la responsabilité contractuelle
alors que ceux-ci s'étaient placés sur les deux fondements, contractuel et délictuel, en raison de la
8o
qualité du contractant ou de tiers des victimes du dommage .
En le faisant, la Cour de cassation a clairement mont~é que l'obligation de renseignement
sur les risques d'utilisation est devenue à l'égard de tous, y compris du contractant, un devoir ne
prenant pas sa source dans la convention, mais plutôt dans l'existence d'une véritable obligation
légale de sécurité.
Certes, l'obligation de sécurité est bien connue sur le plan contractuel et outre qu'elle
n'apporte aucun bouleversement du droit, elle paraît parfaitement adaptée aux mécanismes
juridiques de la consommation. Mais, celle-ci évolue avec la complexité des produits et le cadre
contractuel ne suffit plus à lui tout seul à donner à l'obligation sa véritable nature juridique. Le
droit à la sécurité trouve son fondement juridique non plus dans le contrat, mais dans
l'obligation générale faite au commerçant de ne livrer sur le marché que des produits sûrs, sains,
loyaux et marchands81 • Sur ce point, la jurisprudence de la Cour de la cassation a fait une avancée
considérable. De façon générale, elle met à la charge du vendeur professionnel une obligation
générale de sécurité pour les dommages causés par les produits vendus.82
7S CAS ci FERRIER: op. cil. N°S 277 ct sui v., PIZZIO : op. cil P. 69 cl suÎv.
7') CALAIS-AULOY ct BIHL : artide précité, P. 65.
sn Casso eiv. Il octobre 1983, Bull. Civ. l, n° 228 ; J. HUET, obs. R.T.D. Civ. 1984, 731 ; 1. HEMARD et B.
BOULOC, obs. R.T.D. Commercial 1984,719.
SI Cf Principes N°S 9-12 des Nations Unies; article 2 b) de la directive CEE du 29 juin 1992 précitée.
s" D. ARUE: « L'obligation de sécurité du vendeur professionnel", RJ.D.A. 1993, p. 409.

250
Le premier arrêt faisant état de cette obligation est l'oeuvre de la première Chambre civile
de la Cour de cassation en date du 20 mars 198983 . Par cet arrêt, la Haute juridiction censure une
décision d'uneCour d'appel ayant admis la responsabilité du vendeur d'une téléviseur qui avait
implosé. Sur le terrain de la garantie des vices cachés, cette solution de la première Chambre est
justifiée parce que l'antériorité d'un vice par rapport à la vente n'était pas établie. Mais le plus
important, c'est que la cassation a été prononcée au visa de l'article 1135 du Code civil et non de
l'article 1641 et suivants du même Code. Dans son «Attendu» principal, la Haute juridiction
s'exprimait en de termes très clairs et précis: « le vendeur professionnel est seulement tenu de
livrer des produits exempts de tout vice ou de tout défaut de fabrication de nature à créer un
danger pour les personnes ou les biens ».
La référence au « danger» de la chose évoquait naturellement l'obligation de sécurité en
même temps qu'elle rappelait la terminologie utilisée par la Directive communautaire du 25 juillet
1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux laquelle engage la responsabilité du
producteur lorsque le produit mis en circulation «n'offre pas la sécurité à laquelle on peut
légitimement s'attendre» article 6). Ce qui confère 'implicitement mais sûrement à cette
responsabilité un caractère autonome et extracontractuel.
La position adoptée par la Haute juridiction dans l'arrêt du 20 mars 1989, et qui consiste
à fonder la responsabilité du vendeur sur une obligation de sécurité autonome par rapport à la
garantie des vices cachés lorsque l'acquéreur se plaint de dommages causés par la chose, allait
très vite trouver confirmation dans les autres décisions rendues ultérieurement par la même
Chambre. Deux arrêts rendus au cours de l'année 1991 ont permis de se fixer sur la position
initiée en 1989. Dans un arrêt du 22 janvier 19918~, la première Chambre civile proclame
l'existence d'une obligation de sécurité à la charge des fabricants et vendeurs de produits de
beauté et leur impose de ne livrer que des produits qui « ne présentent normalement pour les
utilisateurs aucun caractère dangereux ». Un autre arrêt de la même Chambre, en date du Il
juin 1991 85 , consacre l'existence d'une obligation de sécurité autonome dans le contrat de
vente.
8.1 Casso Civ. 20 mars 1989, D. 1989,1. P. 381 notc MALAURIE; Bull. Civ 1 n° 137; Rcsp. Civ. Et assur. 1989,
comm. W 230 ; R.T.D.civ. 1989, p. 756, obs. P. JOURDAIN
8~ Casso Civ. 1ère 22 janvicr 1991, Bull. Ci v. l, n° 30 ; R.T. D. civ. 1991, p. 539, obs. P. JOURDAIN.
85 Casso Civ.
lè,e Il juin 1991, Bull. Civ. l, n° 201 : Contr. Conc. Consom. 1991, comm. N° 201 , obs L.
LEVENEUR; R.T.D. civ. 1991, p. 114, obs. P. JOURDAIN; 1.CY. 1992, IV. 158.

251
La Haute juridiction a confirmé sa jurisprudence relative à cette obligation de sécurité
86
autonome du fabricant ou vendeur professionnel dans un autre arrêt en date du 27 janvier 1993
87
et tout récemment dans son arrêt du 17 janvier 1995 . Dans les deux dernières décisions, les
motivations ont la même substance même si elles s'accompagnent d'une précision supplémentaire
venant de l'arrêt du 17 janvier 1995 : « le vendeur professionnel est tenu de livrer des produits
exempts de tout vice ou de tout défaut de fabrication de nature à créer un danger pour les
personnes ou les biens. Il en est responsable tant à l'égard des tiers que de son acqéreur ».
La jurisprudence de la Première Chambre civile de la Cour de cassation est très claire:
l'obligation de sécurité est une obligation autonome, indépendante de la garantie des vices
cachés. Cette autonomie de l'obligation de sécurité la range dans la catégorie des droits naturels
auxquels tout le monde peut prétendre. Pour ce qui concerne les produits mis en circulation,
l'obligation de sécurité intéresse aussi bien le contractant que le tiers utilisateur du bien ou non.
Le droit à la sécurité est donc tout simplement un « droit naturel ». Et qui dit atteinte à ce droit,
dit naturellement responsabilité et indemnisation"
B - L'indemnisation des atteintes à la sécurité du consommateur.
Toute politique de sécurité doit allier à l'effort de prévention, le souci de parvenir à une
réparation automatique des dommages causés par les produits et services dangereux. L'activité
économique du fabricant, qui consiste à concevoir, à fabriquer et à mettre sur le marché des
produits, l'expose à une responsabilité particulière : celle de réparer les dommages que ses
produits peuvent causer à autrui. Il convient de déterminer le principe de la réparation (a) et sa
justification(b).
al Principe de la réparation du dommage.
Les principes directeurs des Nations Unies n'ont pas prévu cette possibilité pour le
consommateur d'obtenir réparation en cas d'atteinte à sa sécurité physique par le produit acheté.
Il s'agit là d'une omission regrettable d'autant plus que le droit à la sécurité est un droit sacré,
86 Casso Civ 1ère 27 janvier 1993, Bull. Civ. l, nO 44; Resp. civ. el assur. 1993, comm. N° 130; D. 1994, Somm.
238, obs. OTOURNAFOND; RT.D. cïv. 1993, p. 592, obs. P. JOURDAIN.
87 Casso Civ. 1è.e 17 janvier 1995, D. 1995, p. 350, note P. JOURDAIN.

252
fondamental dont le but est de fiabiliser davantage les produits mis sur les marchés divers. Sans
doute, les rédacteurs desdits principes ont-ils laissé ce domaine relatif à la réparation des
dommages pour défaut de sécurité des produits à l'appréciation souveraine des gouvernements
respectifs des Etats membres des Nations Unies. N'empêche qu'ils auraient quand même dû
mentionner cette possibilité dans leurs lignes ou principes88 . Il appartient maintenant aux
gouvernements africains et des autres pays du Tiers-Monde de prévoir cette possibilité cie
compensation des atteintes à la sécurité du consommateur dans leur législation respective, si
toutefois la décision et la volonté leur venaient d'intégrer ces principes dans leurs droits
nationaux.
Ce régime de responsabilité sans faute n'a pas échappé à la vigilance du "législateur"
européen. Et l'adoption par le Conseil des Communautés Européennes de la directive du 25
juillet 1985 en matière de responsabilité du fait des produits défectueux répond à la logique selon
laquelle « seule la responsabilité sans faute du producteur permet de résoudre de façon adéquate
le problème, propre à notre époque de technicité croissante, d'une attribution juste des risques
inhérents à la production technique moderne» 89.
L'article l''' de cette directive dispose
«le producteur est responsable du dommage
causé par un défaut de son produit ».
Aux termes de la présente directive, le terme «produit» désigne tout meuble, à
l'exception des matières premières agricoles et des produits de la chasse, même s'il est incorporé
dans un autre meuble ou dans un immeuble... Le terme «produit» désigne également
l'électricité» (art. 2 de la directive)9o.
En
incluant
«l'électricité»
dans
la
catégorie
de
produit,
la
directive
mnove
considérablement. Si l'on prend l'exemple des pays d'Afrique, il n'y a aucun doute que
l'électricité est à l'origine de pas mal de déboires ou malheurs domestiques du fait soit d'une
installation défectueuse, soit d'une insuffisance dans l'installation du système de sécurité. Si une
telle disposition était introduite dans les législations africaines, elle aurait pour effet de limiter les
88 D. HARLAND, article précité, P. 242.
89 crie second « Considérant» de la directive du 25 juillet 1985 précitée.
90 Par « matières premières agricoles», on entend les produits du sol, de l'élevage et de la pêcherie, à l'exclusior.
des produits ayant subi une première transromlation, article de la directive du 25 juillet 1985 précitée.

253
dégâts non seulement domestiques, mais aussi urbains91 • La responsabilisation des professionnels
en sortirait agrandie et la sécurité des usagers renforcée.
Mais il Y a encore quelque chose de plus intéressant dans la directive et qui, à notre avis,
pourrait être une source d'inspiration législative ou réglementaire pour nos Etats : il s'agit de la
définition du terme « producteur ». L'article 3 de la directive distingue trois catégories de
producteur. Selon l'al. 1 dudit article: le terme « producteur» désigne « le fabricant d'un produit
fini, le producteur d'une matière première ou le fabricant d'une partie composante, et toute
personne qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou
un autre signe distinctif ». Il s'agit là d'une définition originale du terme «producteur» entendu
comme inventeur ou concepteur de la matière ayant causé le dommage.
A cette définition, l'alinéa 2 apporte un rajout, en intégrant dans le cercle des producteurs
« Toute personne qui importe un produit dans la Communauté en vue d'une vente, location,
leasing ou toute autre forme de distribution dans le cadre de son activité commerciale ». En cas
de dommage causé à autrui, cette personne répondra « au même titre que le producteur ».
.
.
L'alinéa 3 apporte une autre solution ou une autre voie de recours à la victime en intégrant le
fournisseur dans le champs d'application de la directive. Il dit en substance: « Si le producteur
du produit ne peut être identifié, chaque fournisseur en sera considéré comme producteur, à
moins qu'il indique à la victime, dans un délai raisonnable, l'identité du producteur ou de celui
qui lui a fourni le produit. Il en est de même dans le cas d'un produit importé, si ce produit
n'indique pas l'identité de l'importateur visé au §2, même si le nom du producteur est indiqué ».
L'intégration de telles dispositions dans nos législations peut être une source de sécurité
rassurante pour les consommateurs lesquels pourraient s'adresser à tout intermédiaire dans le
circuit commercial - distributeurs, détaillants ou autres - pour obtenir réparation du préjudice
causé par tout produit défectueux. De plus, ces dispositions ont le mérite de refléter le profil des
économies des Etats africains essentiellement extraverties, c'est-à-dire tournées vers l'exportation
des matières premières et l'importation des produits manufacturés souvent à J'origine des
dommages pour défaut de sécurité. On y trouvera dans l'importateur la qualité de producteur
'li
Les accidenls domesliques conséculifs aux courts circuils, aux prises mal inSlallées ou mal prolégées fonl de
nombreuses viclimes surtoul dans les rangs des enfants. Quanl aux dégâls urbains, ils sonl souvenl le produil des
lignes à haule lension pendanl les orages ou des courts circuils provoquanl des incendies. La mise en place d'une

254
pour intenter tout recours en réparation. La seule obligation qui incombera à la victime serait de
prouver le dommage - ce qui ne sera pas très difficile à faire, étant dit qu'il Y a des dommages qui
parlent d'eux-mêmes -, le défaut du produit et le lien de causalité entre le défaut et le dommage
(cf. art. 4. de la directive).
Le gouvernement chinois ne s'est pas non plus écarté de cette ligne de conduite en ce qui
concerne la réparation des dommages que les produits défectueux pourraient être amenés à
causer aux consommateurs locaux. Ainsi, accorde-t-il à travers sa loi du 31 octobre 1993 relative
à la protection des consommateurs un droit à réparation adéquate en cas d'atteinte portée à leur
personne ou à leurs biens. 92 Ce qui suscite admiration pour un pays dont l'économie est
essentiellement basée sur le modèle communiste.
b) Justification de la responsabilité du producteur.
La responsabilité de plein droit qui s'impose aujourd'hui au producteur trouve sa
justification dans lajonction sociale qu'il est appelé à remplir comme l'a clairement souligné un
autéur : «Tant dans le domaine contractuel que délictuel, la responsabilité du fabricant s'oriente
vers la responsabilité causale »93. Pourquoi une telle attitude des diverses législations vis-à-vis du
producteur? C'est parce qu'il est au centre de toute activité commerciale. Mais au-delà de cette
position dans le commerce, des motifs d'intérêt public, se fondant sur deux arguments
fondamentaux expliquent cette sévérité vis-à-vis du producteur :
- Le fabricant est le mieux placé pour prévoir et prévenir les risques que font
counr les produits, tant économiquement, par la répartition du coût de la réparation des
dommages dans ses dépenses d'entreprise, que socialement, car c'est lui qui est à l'origine du
produit. Il doit donc supporter ce risque, même si aucune négligence ne peut lui être imputée.
tcllc réglcmcnullion dans nos pays aura Ic mérite de responsabiliser davantagc Ics prolcssiOlUlcls .el dC.cL'él~[ u!
environncmcnt plus sécurisant pour les usagers.
n Voir la loi chinoise du 31 octobre 1993 sur la protection des consommateurs précitée.
93 PERRINE DUPIN DE SAINT-CYR-MAREE : « La réparation des atteintes à la sécurité des consommateurs ("
droit américain )), in Sécurité dcs consommateurs ct responsahilité du fait dcs pr<x.!uits délcctueux, colloque dcs )
7 novcmbre 1986 précité, P. 97.

255
- La sécurité du public exige que le fabricant soit garant de ['innocuité de ses
produits. Il s'agit donc d'une responsabilité de plein droit ne relevant pas du domaine
contractuel.9.j
En conséquence, il doit y avoir responsabilité de plein droit du fabricant ou producteur
(au sens de ['art.3 de la directive du 25 juillet 1985) dès lors qu'un produit qu'il a mis sur le
marché, sachant qu'il serait utilisé sans inspection, se révèle avoir un défaut et cause un dommage
à autrui (utilisateur ou non). C'est ce qu'on a appelé aux Etats-Unis la "Strict product liability".
Ce régime de responsabilité reçut cette formulation en 1965 dans la deuxième édition du
"Restatement of tors" dans ses sections 402 A et 402 B et connut un essor remarquable dans la
majorité des Etats Fédérés.95
Par ailleurs, si pendant longtemps, il n'est pas apparu opportun de distinguer la
responsabilité du fabricant de celle du vendeur, cette conception cède le pas devant l'idée selon
laquelle le fabricant est investi d'une fonction sociale lui imposant des obligations spécifiques à
l'égard du public. Celles-ci doiven~ être conçues comme de véritables devoirs légaux impératifs
sans qu'il soit nécessaire de prendre en considération la qualité de contractant ou de tiers de la
victime. 96 L'obligation d'autocontrôle97 y trouve, sans doute, son fondement dans la mesure où
elle met à la charge des professionnels une obligation de vérifier la sécurité des produits et
services avant leur mise sur le marché, même en l'absence d'une contrainte prévenant d'une
réglementation spécifique. Cette vision sociale de la production à le mérite d'unifier le droit à la
réparation des consommateurs victimes et d'éviter de canaliser la responsabilité sur le seul
vendeur, dernier professionnel en contact direct avec l'acheteur final. Elle s'explique aussi par la
logique selon laquelle il n'y a pas de distribution sans production.
Si la sécurité est un droit, la réparation en est la conséquence en cas d'inobservation, et
l'existence d'une obligation générale invite à une appréciation objective du défaut de sécurité sur
le plan de la réparation. 98 Sans doute, le droit à la réparation des dommages subis explique
'J4 Ces argumenls onl élé développés dès 1944 par le juge TRA YNOR dans l'arrêl Escola / Coca Cola BOllling Co.,
cilé par PERRINE DUPIN DE SAINT-CYR-MAREE, arlicle précilé P. 97.
'J) Ibid.
'J6 CAS cl FERRIER: op. cil, n° 265.
'J7 PIZZIO, op. cil, P. 60, nOs 560 el suiv.
'J8 PIZZIO, op. cil., P. 70.

256
l'unification des notions de faute contractuelle ct délictuelle : les biens mis sur le marché
doivent présenter les mêmes exigences de sécurité pour l'ensemble des consommateurs.
Comme les mêmes causes produisent les mêmes effets, il est donc légitime de faire
bénéficier du droit
à la réparation tous les dommages que peut subir l'ensemble des
consommateurs - contractuels ou non - du fait du défaut de sécurité des produits offerts par la
distribution. C'est la voie qu'a, semble-t-il, emprunté la Cour de cassation dans l'arrêt du Il
octobre 1983 en sanctionnant le manquement à une obligation de renseignement à l'égard des
,
d '
99
acquereurs et es tiers.
Cette solution, adoptée deux années plus tôt avant l'avènement de la directive du 25
juillet J 985 en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, portait en elle-même les
éléments de la «strict product liability» américaine et 1es prémisses de la future directive
européenne dans ce domaine.
Non seulement cette solution répond à l'équité, mais elle ne permet pas aussi les clauses
limitatives ou exonératoires de responsabilité (article 12 de la directive), car il s'agit là d'une
reconnaissance d'obligations professionnelles analysées comme de véritables devoirs légaux à
l'encontre des consommateurs. lOG Dans cette optique, la distribution peut être considérée comme
un véritable service social, générant plus de droits que d'obligations pour les consommateurs.
Mais, une chose est de préserver la sécurité des gens dans leurs actes de consommation
quotidiens, une autre est de les amener à en tirer bénéfice, à s'en servir pour leur protection
individuelle, voire collective. Sur ce point, tous les consommateurs, de quelque horizon qu'ils
appartiennent, ont des lacunes. Les consommateurs africains en ont davantage. Le devoir
prioritaire qui incombe aux pouvoirs publics africains est de les amener à en prendre conscience
au moyen d'actions concrètes et définies. Il faut pour ce faire agir sur les consommateurs eux
mêmes en vue d'améliorer leur bien-être quotidien. C'est le sens véritable de l'action en aval des
pouvoirs publics.
99 Casso civ. 1 1 octobre 19~n précité.
IlX) G. VINA Y, noIe sous civ. ,he 22 novembre 1978, Jep éd. C.I 1978, IJ 16J.

257
Sous-Section II: L'action en aval des pouvoirs publics ou l'action
sur la demande des produits et services.
Le droit de la consommation est une discipline juridique encore inconnue dans les pays
d'Afrique. Hormis quelques personnes avisées animant les quelques rares associations de
consommateurs, la majorité de la population ignore ce qu'est ce droit. Certains la considèrent
comme une « mode importée »101. C'est tout un îlot d'ignorance qui entoure la matière. Et la
première action à faire dans ce domaine consiste à éveiller l'instinct des consommateurs par des
actions sensibilisatrices concrètes. C'est aux pouvoirs publics qu'incombe au premier chef cette
responsabilité. Pour former le consommateur de demain, avisé et vigilant dans ses actes de
consommation, pour construire un consumérisme majeur (§II), il faudra aider le consommateur
dans ce domaine, lui apprendre à mieux connaître cette nouvelle discipline, à mieux la découvrir
pour organiser sa propre défense (§I).
§I - L'aide publique aux consommateurs.
Aider le consommateur, c'est mettre à sa disposition les moyens adéquats lui permettant
de s'épanouir dans ses différentes transactions commerciales. Cette aide peut être réalisée sous
diverses formes, notamment par l'institution d'un service public d'assistance aux consommateurs
(A) qui organisera la défense de leurs intérêts et par la mise en place des moyens juridiques
permettant de régler les litiges de consommation (E).
A - L'institution d'un service public d'assistance aux
cOllsommateurs.
La première question qui vient à l'esprit est le rôle qu'un tel service serait appelé à jouer
.dans une société comme la nôtre, c'est-à-dire la société africaine. La tâche essentielle du service

258
serait l'intégration du consommateur dans la nouvelle donne économique. Il s'occupera d'une
part, de son éducation et de sa formation, et d'autre part, de son information sur les produits et
services mis sur le marché. Pourquoi une telle entreprise?
L'objet d'une telle démarche est simple et s'explique par le fait qu'il n'est pas possible de
protéger et d'aider le consommateur sans une participation active de celui-ci. Les qualités d'un
« bon consommateur» n'étant pas innées, pas plus que ne l'est la connaissance de la qualité des
produits cl services, ni celle du droit de la consommation qui de surcroît, comme nous avons déjà
eu à le souligner, est un droit encore ignoré en Afrique, l'initiation d'une telle entreprise s'avère
nécessaire. Il est donc urgent que le consommateur puisse à la fois bénéficier d'une éducation et
d'une formation appropriées (a) et disposer des informations nécessaires (b) pour effectuer des
choix lucides et éclairés.
a) L'éducation et la formation du consommateur.
Le prIncipe 31 de la charte mondiale des Nations Unies pour la protection des
consommateurs dispose : « Les gouvernements devraient mettre au point des programmes
généraux d'éducation et d'information du consommateur ou en encourager la mise au point en
ayant présentes à J'esprit les traditions culturelles de la population intéressée ... »
Cette portion du principe, spécialement rédigé pour les pays du Tiers-Monde, témoigne
de l'importance de l'éducation dans la vie d'.tmcollsommateur. Sa première place dans l'ordre
des mots du principe devant « l'information» témoigne aussi de l'importance que les rédacteurs
ont sentie quant à son rôle dans la formation d'un consommateur averti. De toute façon,
l'éducation du consommateur lui est utile à un degré double: d'un coté, elle lui apprend à
exercer son esprit critique en abandonnant son attitude passive dans ses actes de consommation,
elle lui offre aussi les moyens de maîtriser ses choix, en sachant reconnaître ses besoins; d'un
autre côté, elle permet de décoder et d'utiliser l'information qui lui est fournie. Tout en
distinguant l'éducation du jeune consommateur (1) de celle de consommateur adulte (2), une
variante commune les rassemble tous les deux: elle se doit d'être adaptée aux réalités du milieu
social, économique et culturel du consommateur (principe n° 31 in fine).
10\\
cf en ce sens A. SALL : « Mouvement Consommateur africain
la consolidation », in Consommation-
Développement, N° 9, avril 1993, P. 1.

259
1 - L'éducation et la formation du jeune consommateur.
«L'enfant est Je père de l'homme» a dit un philosophe ; et ceCI pour exprimer
l'importance de l'éducation dès le bas âge. L'éducation à la consommation du jeune enfant
n'échappe pas à cette réalité. Les Nations Unies ont consacré un principe à cette réalité. Dans ce
principe, elles incitent non seulement à l'éducation du consommateur dès son jeune âge, mais
aussi elles souhaitent que celle-ci puisse « faire partie intégrante de l'enseignement, de préférence
dans le cadre des matières déjà inscrites aux programmes d'études» (principe N° 32 de la
charte).
De
façon
générale,
ce
pnnClpe
des
Nations
Unies
place
l'éducation
de jeune
consommateur au premier plan de ses priorités dans l'éducation générale des consommateurs. Ce
qui signifie par là que les Etats destinataires du message dont ce principe est porteur doivent en
faire une priorité dans leurs programmes d'éducation et d'information du consommateur.
Conscientes
de
l'importance
que
représente
une
telle
initiative,
les
associations
de
consommateurs des ,différents pays d'Afrique, réunis en « Atelier Régional» les 1er, 2 et 3 juillet
1992 à Dakar (Sénégal) n'ont pas manqué l'occasion d'en faire un rappel à leurs gouvernements
dans ce sens.
Dans leurs résolutions relatives à « l'éducation et à l'information du consommateur »,
elles invitent les gouvernements africains à « introduire dans le programme scolaire, aux niveaux
du primaire, du secondaire et du supérieur des sujets (d'études) en rapport avec l'éducation du
consommateur, incluant la vulgarisation des P.D.P.C. ».102
Deux bonnes raisons expliquent cette considération vis-à-vis du jeune consommateur.
D'une part, il dispose de temps et d'une grande capacité d'intérêt; d'autre part, son entourage
peut en bénéficier du fait de l'influence délétère dont il peut être sujet.
Si les écoles, collèges, lycées et autres peuvent être des sites privilégiés de cette initiation
considérée comme fondamentale, il n'en demeure pas moins que le contenu de l'enseignement
\\02 A. SALL « Atelier Régional: Principes Directeurs des Nations Unies pour la Protection du Consommateur:
Quelle application en Afrique. », Résolution N° 3 relative à l'éducation ct à ('information du consommateur, in
« Consommation-Développement» N° 8 1992, P. 6.

260
éducatif peut être une pierre d'achoppement. 103 Là-dessus, le principe 33 de la charte apporte une
réponse. Il définit les domaines sur lesquels devraient porter les programmes relatifs à l'éducation
et à l'information du jeune consommateur, notamment les domaines aussi importants de la
protection du consommateur que sont:
« a- La santé, la nutrition, la prévention des maladies à vecteur alimentaire, les aliments
frelatés;
« b- Les dangers que présentent les produits;
« c- L'étiquetage des produits;
« d- La législation appropriée et les moyens d'obtenir réparation, ainsi que le nom des
institutions et organisations de protection du consommateur ;
. , '
« e- Les renseignements sur les poids et mesures, les prix, la qualité, les conditions de
crédit et l'existence de produits de consommation de première nécessité;
« f- La pollution et l'environnement, le cas échéant».
Le but de ces diverses orientations éducatives dans l'enseignement est de mettre le jeune
consommateur en osmose avec son environnement économique immédiat. Il vise aussi à
développer chez lui le sens de l'esprit critique en lui faisant découvrir le côté caché des choses
qu'il semble connaître, mais qui en fait, ne montrent que leurs apparences. 104 Mais la réussite de
ces programmes éduc.atifs est fonction du degré d'imagination et d'adaptation pédagogiques des
lm « Le 'consumérisme », Pangloss N°
13, Fondation Nationale des Entreprises Publiques 1983, P. 53 ;
« Formation des jeunes consommateurs: comment intervenir à l'école? », C-A INC Hebdo N° 54, 17 avril 1987,
P. 13 et suiv. ; C. LION-MERIC : « L'éducation à la consommation à l'école: un enseignement "transversal ou
marginal" ? », INC Hebdo N° 795, 18 décembre 1992, P. 17 et suiv.
10-l L'éducation à la consommalion dès l'école aura pour mission de faire comprendre au jeune consommaleur
qu'il peUl, à l'aide de sa propre rét1exion surmonler les pièges de la publicité, améliorer la valeur d'usage de son
argenl et comprendre la réalilé des phénomènes de l'économie de marché. Dans le but de mûrir cette capacité de
réllexion chez le jeune consommaleur, on pourrait organiser des aClivilés d'éveil, et surtoul sous l'orme de jeux
concernant la publicité, les prix, la production, la dislribulion ... L'âge idéal des enfants au collège pourrait
permettre de diversilïer et d'approl'ondir les activilés. On pourra ainsi mener des rét1exions sur les diverse~
méthodes de vente, les prix; programmes des visites d'éludes dans des centres de production et de distribution dè~
lors qu'il en exisle dans le périmèlre géographique de l'Ecole, du Collège ou du Lycée concerné, réaliser d,"
sondages, des expositions ou des articles relatifs à la consommation. Dans les Lycées, l'étude des phénomènes ~
consommation peut y trouver sa place dans les cours d'initiation économique et sociale, d'économie familiale t.
sociale. Non seulemenl l'élève y trouvera son intérêl, mais aussi le niveau de l'éducation s'en trouvera élevé e
deviendra plus abstrait. Voir en ce sens, Pangloss N° 13 précité, P. 56.

261
enseignants, bases de relais naturels et indispensables dans l'éducation de tous les jours. lOS En
effet, si imagination et adaptation pédagogique sont possibles, elles ne vont tout de même pas de
soi. Elles supposent la formation des formateurs, c'est-à-dire des enseignants. Le caractère
interdisciplinaire du droit de la consommation rend nécessaire et obligatoire un recyclage des
enseignants afin de les rendre plus opérationnels, c'est-à-dire plus aptes à animer ces nouvelles
activités. Cette entreprise est encouragée par le principe N° 37 de la charte des Nations Unies.
Celui-ci en substance exhorte les gouvernements des pays en développement, donc Africains, à
«organiser ou encourager des programmes de formation destinés aux éducateurs, aux
spécialistes des moyens d'information et aux conseillers de consommateurs pour leur permettre
de participer à l'exécution de programme d'information et d'éducation du consommateur ».
Pour la réalisation d'un tel projet, la création des structures pédagogiques s'avère
,o6
nécessaire.
Nous pensons que les Ecoles Normales, lieux naturels de formation initiale et de
recyclage des maîtres (instituteurs), peuvent servir de cadre idéal pour la réalisation d'une telle
idée. On pourra ainsi, à cette fin, organiser des séminaires régionaux dont le but sera de
compléter la connaissance des formateurs.
10.' Ibid.
106 Ibid P. Sg.

262
2 - L'éducation et la formation du consommateur adulte.
Le prmclpe 31 in fine des Nations Unies dispose : « ... Il faudrait, en élaborant ces
programmes, tenir compte en particulier des besoins des consommateurs défavorisés, tant dans
les zones rurales que dans les zones urbaines, y compris des consommateurs à faible revenu et
ceux dont le niveau d'alphabétisation est bas ou nul ».
Ces
dispositions
s'adressent
non seulement au
consommateur
adulte,
malS
plus
particulièrement à J'adulte du Tiers-Monde dont la situation géographique (rurale ou urbaine),
sociale, économique et culturelle (consommateur à faible revenu, au niveau d'alphabétisation bas
ou nul) ne lui permettent pas de se défendre à armes plus au moins égales avec le professionnel.
De plus, ces consommateurs défavorisés n'ont pas les moyens, ni le pouvoir, ni la capacité
d'appréhender correctement la valeur qualitative et quantitative des produits qu'ils achètent. Il en
va de même de l'impact que ces produits pourraient avoir sur leur vie aussi bie!1 sur le court que
sur le long terme, notamment au plan de la santé et de la sécurité. Ce sont des consommateurs
vulnérables qui ont besoin d'aide pour mieux consommer.
Pour ces derniers, une autre démarche s'impose pour plusieurs raIsons: Tout d'abord
parce qu'ils ont déjà des habitudes de consommateur; de plus on ne pourra les atteindre par le
biais d'un canal unique qu'est l'école pour l'enfant. Leur éducation nécessite donc la diffusion
des messages ciblés, véhiculés par des médias spécialisés lesquels devraient tenir compte de leur
appartenance socioculturelle. Dans leurs résolutions n° l, 2 et 4 relatives à J'« éducation et à
J'information du consommateur en Afrique », les associations de consommateurs n'ont pas
manqué d'attirer l'attention des gouvernements sur ce point. Dans ces résolutions, elles ont par
ailleurs appelé leurs gouvernements à :
« appuyer les efforts des militants des associations de consommateurs dans le domaine de
l'information et de la formation des consommateurs tant au niveau formel qu'informel. A cet
effet, le théâtre et d'autres formes de communication pourraient servir à sensibiliser surtout les
consommateurs illetlrés ;
« appuyer les médias dans le domaine de la publication et de la diffusion des information:,
en leur donnant les moyens nécessaires;

263
« permettre aux groupes de consommateurs de traiter les problèmes de consommation au
moyen des médias et dans les langues nationales ».107
Les journaux consuméristes, conçus pour la cause pourraient en effet jouer un rôle
efficace dans ce domaine grâce aux articles de fond qui sont capables de dépasser le côté factuel
des problèmes pour alimenter une réflexion propre au lecteur 'os . Mais cette réflexion n'est pour
l'instant valable que pour le consommateur occidental qui a, à ses services, une abondante presse
consumériste. Pour ce qui est de l'Afrique, cette presse est quasi-inexistante. l09 Même dans les
quelques rares pays où elle existe 110 son apport éducatif ne touche que quelques individus, le
cercle, souvent restreint, de ses lecteurs.
De façon générale, le consommateur africain a besoin d'éducation. Son statut social et
culturel la rend encore plus urgente. Pour aboutir à une fin utile, celle-ci devrait viser trois
objectifs essentiels:
- apprendre au consommateur à maîtriser sa consommation (c'est-à-dire à exercer son
esprit critique, à savoir définir se's besoins et à gérer au mieux son budget) ;
- apporter au consommateur une véritable «culture industrielle» laquelle lui permettrait
de comprendre les informations d'ordre technique concernant les produits;
- apprendre enfin au consommateur à vouloir et à savoir rechercher l'information qui lui
est fournie sous diverses formes: publicité, étiquetage, tests, comparaison des prix ... lll
107 cr« Atelier régional» des 1er, 2 et 3 juillet 1992. précité, résolutions relatives à l'éducation et à /'inlormation
du consommateur, in « Consommation-Développement ". N° 8, nov. 1992, P. 6.
108 Pangloss N° 13 précité, P. 30.
109Ph. HADO : « Quelle presse pour la promotion des droits du consommateur en Afrique? '>, quotidien béninois
d'information « La Nation >, du 31 décembre 1991, rubrique « société '>, N° 382, P. 14
110 Ibid.; à l'exception de l'Ile Maurice où l'information-consommation connaît une extrême vitalité grâce au
dynamisme des associations locales des consommateurs. tous les autres pays sont quasiment absents dans ce
domaine. En île Maurice, il existe deux magasines publiés par l'association MAPBIN/CHAN : « un million de
consommateurs» publié depuis 1990 et dont le but est de promouvoir les droits et les intérêts des consommateurs.
Un second magasine publié par MAPIlIN INFORMATION avec le soutien de l'UNICEF est destiné aux mères ct
nourrissons ct traite des questions relatives à l'allaitement ct il la santé inl~llltile. Malgré ce dynamisme, il n'est
pas sûr que cette information puisse hénélicier aux personnes illetlrées. Dans les autres pays comme l'Algérie, le
Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Sénégal, le Bénin etc. l'information sc fait par à-coups, notamment à
l'occasion de grands scandales ou de grands problèmes économiques comme cc fut le cas en janvier 1994 après la
dévaluation du F. CFA. Cf également «les notes de voyage" d'Amadou C. KANOUTE «Organisations de
consommateurs à la croisée dcs chemins» in Consommation-Développement N° 8, Nov. 1992, prée. p. 1 et suiv.
III Pangloss N° 13, précité, P. 57.

264
Cette entreprise éducative pourra rencontrer un succès si l'on met en évidence certains
procédés
ordinaires
susceptibles
de
véhiculer
les
idées
éducatives
en
direction
des
consommateurs. Nous pensons plus particulièrement aux campagnes de sensibilisation, aux
expositions, aux émissions télévisées et/ou radiophoniques. Sur ces derniers points, un exemple
mérite d'être cité: celui de l'APCEB (Association pour la Protection du Consommateur et cie
son Environnement au Bénin). Pour l'éducation du consommateur béninois, cette association a
reçu, en 1993 des pouvoirs publics du Bénin, l'autorisation de démarrer un programme radio
hebdomadaire d'information et d'éducation des consommateurs avec en prime un échange
d'émissions du même genre réalisées par «le consommateur averti» et produit par la
Radiotélévision Sénégalaise et des journalistes sénégalais. Elle a par ailleurs reçu du Ministre de
l'Education Nationale, l'autorisation d'élaborer et de mettre en oeuvre, conformément aux
principes des Nations Unies, un programme d'éducation à la consommation pour les écoles
béninoises. 112 Ce qui en soi est une avancée considérable dans la volonté de mettre en place un
système éducatif du consommateur par le biais de l'information dont ces programmes sont
porteurs.
bl L'information du consommateur.
L'information du consommateur est ressentie par tous les responsables du mouvement
consumériste comme étant une priorité: une information sérieuse est une condition nécessaire au
choix du consommateur libre et responsable. Or, le consommateur en Afrique ignore largement
ses droits et achète les yeux fermés, souvent inconscient des subtilités du marketing et des pièges
d
·
. 1
ID
es pratIques commercIa es. .
Les rédacteurs des principes des Nations Unies ont parfaitement tenu compte de ce
handicap des consommateurs des pays en développement. Ainsi, après avoir appelé dans le
principe 31 les gouvernements desdits pays «à mettre au point des programmes généraux
d'éducation et d'information du consommateur ou en encourager la mise au point, en ayant
présentes à l'esprit les traditions culturelles de la population intéressée ..·. », ils ont pris soin de
préciser à la suite dudit principe les dispositions suivantes: « ... Ces programmes devraient avoir
112 Consommation-Développement, N° 9, avril 1993, P. 4.
111 Pangloss N° 13 prée., P. 32.

265
pour objet d'informer le consommateur averti, capable de choisir en connaissance de cause entre
les biens et services qui lui sont proposés et conscient de ses droits et de ses responsabilités. »
Ces dispositions du principe 31 des Nations Unies montrent la place qu'occupe
l'information dans le droit de la consommation et l'intérêt qu'ont les pouvoirs publics des
différents pays à la promouvoir. Cet intérêt, en effet, est grand pour tout pays aspirant à une
protection efficace de sa population. Il l'est davantage pour les pays africains encore « novices»
dans la matière. 114
La raison est la suivante: Dans une conception économique libérale, l'information sur la
consommation permet d'éviter le recours à des réglementations aux contraintes trop nombreuses.
C'est un domaine sensible dans lequel pouvoirs publics et professionnels devraient ensemble
déployer beaucoup plus d'efforts pour mieux servir les consommateurs. Malheureusement, la
plupart des professionnels ne jouent pas le jeu dans ce sens là. La promotion de l'information du
consommateur relève donc du domaine des pouvoirs publics, seuls détenteurs des moyens
capables de contraindre toute pers?nne, physique ou morale, à honorer ses obligations.
C'est d'ailleurs la voie qu'a suivie le gouvernement Camerounais dans sa Loi du 10 Août
1990 régissant l' acti vité commerciale au Cameroun.
Dans ses articles 20, 21 et 22, la Loi oblige les professionnels à informer de façon loyale
le consommateur. Celui-ci se doit d'être informé sur les prix (article 20, alinéa 1) et sur les
caractéristiques essentielles et garanties des produits et services (article 21.a. ) ainsi que sur les
conditions de vente desdits produits et services (article 20, alinéa 2)115. Il en va de même de
l'article 9 l'Ordonnance N° 17 portant réglementation des prix et des circuits de distribution au
TOGO. 116 Pour les besoins d'information du consommateur, les dispositions de cet article exigent
que «le prix de toute marchandise vendue en magaSIn (soit) clairement indiqué avec sa
114 En général, l'information consumériste, à supposer qu'elle ex.iste, est réservée à une élite sociale, autrement
dit, â des lellrés. Encore faut-il que celle-ci lise les journaux. concernés, c'est-à-dire les journaux. eonsuméristes
porteurs d'information. De plus, elle est austère et annueuse au lieu d'être claire et simple. A l'inverse, les articles
et émissions grand public diffusés par les médias traditionnels ne relatent pas toujours les informations les plus
utiles au public. Un effort de sensihilisation des journalistes intéressés s'avère done nécessaire pour le hien du
consommateur. Un autre domaine de l'in\\<JrInation intéresse l'Etal. Il vise l'ouverture de la grande presse aux.
associations de consommateurs à des fins d'Înl<lrmation de la base. Un effort des pouvoirs publics dans cc
domaine est aussi sollicité. Voir en ce sens, Pangloss N° 13 précité, p. 58.
115 Cf infra: L'obligation d'in formation du professionnel dans la vente
116 Ordonnance N° 17 du 22 avri 1 1967 portant réglementation des prix. et des circuits de distribution au Togo,
artiele 9, alinéa l, lO N° spécial du 5 mai 1967. P. 1 et suiv.

266
dénomination exacte ct conforme aux usages commerciaux soit sur ]' objet ou sur l'emballage ou
récipient, soit sur une pancarte afférente à un même lot d'objets identiques, en monnaie locale et
par unité d'objet de poids ou de contenance» (article 9 alinéal).
Mais ce genre d'information intéresserait plus les personnes lettrées que les non lettrés,
c'est-à-dire les consommateurs défavorisés, notamment la population analphabète. Aussi, d'un
point de vue général, l'information recommandée a-t-elle besoin d'être ciblée pour être bien saisie
par le destinataire. On vise par là les milieux défavorisés des zones rurales où le besoin
d'information se fait le plus urgent. Une bonne information nécessite cependant beaucoup
d'efforts,
notamment
tinancier.
Pour résorber ces diflïcultés,
l'Etat
pourrait solliciter la
collaboration des professionnels pour qui J'information peur être synonyme de compagne
publicitaire, à condition de rester dans les limites du raisonnable. 117
Mais, l'éducation et J'information ne sont qu'une étape dans J'aide dont a besoin le
consommateur pour mieux cerner le nouveau monde économique. Si avisé et averti qu'il puisse
J'être, il ne pourra pas, dans certaines circonstances, empêcher les différt?nds de naître des suites
soit d'un malentendu, soit d'une tromperie sur la marchandise. La meilleure façon de le protéger
est de prévoir les conditions dans lesqueIles de tels litiges pourront être réglés.
B - L'aide au règlement des litiges de consommation.
Dans la partie "E" relative aux «Mesures permettant aux consommateurs d'obtenir
réparation» le principe 28 des Nations Unies dispose:
« Les gouvernements devraient instituer ou faire appliquer des mesures d'ordre juridique
ou administratif pour permettre aux consommateurs ou, le cas échéant, aux organisations
concernées, d'obtenir réparation, par des procédures, officielles ou non, qui soient rapides,
équitables, peu onéreuses et d'utilisation facile. Ces procédures devraient tenir compte, en
particulier, des besoins des consommateurs à faible revenu» (P.D.P.D. N° 28 ).
117 Pour ce qui concerne l'information sur les produits ct services, une clarification de la frontière entre publicité
propagande et information s'impose. L'établissement d'une déontologie plus respectueuse y contribuerait ct t
serait donc pas la moins utile: moins de publicité affective, moins de publicité sans fondement. Pour couronner ~
tout, il serait souhaitable que les droits ct devoirs des professionnels soient diffusés à J'intérieur de chaque branch,
d'activité par les organismcs professionncls et les chambres de commerce et d'industrie.

267
Comme les litiges entre individus se règlent pour la plupart des cas soit devant les
tribunaux d'Etat, soit devant les institutions spécialisées établies à cet effet, l'objectif de ce
principe est d'amener les Etats membres des Nations Unies, en particulier les Etats en
développement, à mettre toutes ces structures en place pour les besoins de leurs populations.
Mais ces institutions et tribunaux ne seront vraiment utiles aux consommateurs de ces pays que si
leur accès s'en trouve facilité. Il s'agit donc, dans un premier temps, pour nos Etats de faciliter
l'accès des tribunaux aux consommateurs afin de leur permettre de résoudre leurs problèmes de
consommation (a). Mais au-clelà cie cct aspect purement procédural, ce dont nos consommateurs
ont vraiment besoin en ce moment, c'est l'instauration d'une véritable autorité de marché, une
sorte d'ombudsman il l'al'ricaine dont Je but sera cie gérer les problèmes ou litiges dérivant de la
consommation (b).
al L'accès à la justice.
Le droit d'ester en justice est un droit fondamental reconnu à tout citoyen d'un Etat de
droit. Mais, rares sont ceux qui l'exercent vraiment dans les pays africains pour se faire entendre
et ainsi obtenir réparation des torts qui leur ont été causés dans leurs conflits individuels. 118
Pour ce qui est des problèmes de consommation, il serait vain de vouloir en chercher leur
existence devant les tribunaux. On ne trouvera pas l'ombre d'une trace. Cela ne voudrait pas dire
que les marchés africains sont vides de ces problèmes. C'est juste une question de mentalités des
opérateurs ou partenaires économiques. Plusieurs raisons expliquent cette situation:
- La première vient du fait que les consommateurs ignorent leurs droits dans ce domaine,
ils ne savent pas qu'une voie leur est ouverte devant les tribunaux d'Etat pour résoudre leurs
litiges ou conflits divers, si insignifiants soient-ils. Composée en majorité des populations
traditionnelles rurales (70 à 80 % de la population de chaque pays africain), la masse des
118 Les ,culs litiges qui cntraînent la présence des populations traditionnclles dcvant les tribunaux d'Etat sont ceux
relati fs aux accidents de circulation routière, Et même dans ces litiges où leur présence est souvent exigée en tant
1
'que victime de la partie civile ou témoin du drame, ils finissent par se lasser et par se résigner du fait accompli à
cause de la lenteur des procédures judiciaires. Et comme cela arrive très souvent, c'est le ministère public qui,
seul, suit la procédure jusqu'à son terme devant les tribunaux répressifs.

268
consommateurs n'est pas accoutumée à résoudre ses litiges devant les tribunaux d'Etat. Dans les
milieux ruraux, tout se résout devant les chefs traditionnels.
Or, les problèmes de consommation dépassent de loin le cadre de leur compétence et de
leurs connaissances. Il existe, certes, dans cette masse de consommateurs, des personnes qui
n'ignorcnt rien des voies judiciaires existanles. Elles pourraient donc les utiliser comme moyen de
recours en cas de litige dans leur fonction de consommation. Mais la complexité de la procédure,
sa lenteur et le coût des frais de justice sont là pour les en Elissuader, voire les décourager de
toute tentative.
- La seconde raison est plutôt d'ordre psychologique, elle-même liée au milieu social dans
'lequcl évoluc l'individu. L'état psychologiquc du consommateur le conduit à une certaine
banalisation des faits, à une certaine résignation devant les problèmes auxquels il est confronté,
surtout lorsqu'il n'est pas en mesure de trouver lui-même la ou les solutions. De façon succincte,
le comportement du consommateur vis-à-vis de la justice se résume en quelques mots: le manque
de confiance dans la justice. Au lieu de s'engager dans une voie sans issue, il préfère ne rien
tenter et laisser les choses continuer comme si de rien n'était. Et les «choses» continuent
effectivement, au grand désarroi des consommateurs résignés, impuissants à changer le cours des
évènements. 119
Quand on sait que tout récemment, dans le mois d'Août 1994, pour avoir été brûlée par
un café servi trop chaud par un des restaurants Mc Donald, une vieille dame américaine (Etats-
Unis) s'est vue allouer par des juges américains des dommages-intérêts d'un montant de plus de
quinze millions de francs français (15.000.000 FF)120, l'intérêt d'aider le consommateur africain
saute aux yeux et devient plus que jamais urgent.
L'aide ne va tout de même pas être facile à réaliser. L' élément «confiance» étant
ébranlé, il faut commencer par le rétablir par des actes concrets, notamment par la mise en place
des mécanismes judiciaires à la portée des consommateurs et par la mise en évidence des mesures
119 Voir A. C. KANOUTE : « Associations de consommateurs africaines face au défi du développement dans les
années 90 ". Communication présentée au Symposium de la Commission Economique des Nations Unies pour
l'Afrique, Sénégal, novembre 1994, IOCU, Régional Oflïce for Africa, p. 5 et suiv.
120 Source d'information: Journal d'information Télévisée de 20 h de TF1, France 2 et 3 des 22 et 23 août 1994.

269
susceptibles de leur permettre d'obtenir réparation dans les meilleurs délais des torts dont ils sont
les victimes. Qui dit meilleurs délais, dit simplification des procédures, officielles ou non. Les
mêmes droits devraient être accordés aux organisations des consommateurs.
Les procédures doivent non seulement être rapides, mais elles doivent aussi être
équitables, peu onéreuses, utiles et faciles d'accès comme le souhaite le principe N° 28 des
Nations Unies. Il y a lieu de tenir compte dans ces procédures, des besoins du consommateur à
faible revenu 121. Les structures mises en place devraient avoir pour nùssion le règlement des
litiges découlant d'une faute caractérisée du professionnel (dégâts causés aux appareils,
suspension arbitraire de la fourniture, commercialisalion d\\~n produit au-delà de sa date de
péremption etc ... ), ou tout autre litige né des transactions courantes.
Pour la garantie de l'impartialité dans le règlement des litiges de consommation, il serait
souhaitable - c'est d'ailleurs le voeu des associations de consommateurs à travers l'une de leurs
résolutions - que les structures en place soient « composées de l'Administration compétente, du
représentant des consommateurs et de celui du vendeur (ou prestataire) concerné ».122
Pourquoi ne verrait-on pas, pour les besoins de la cause, la création des « tribunaux»
spécialisés dans le jugement des plaintes des consommateurs et qui leur soient (aussi bien
géographiquement que financièrement) faciles d'accès et adaptés au contexte culturel et
. l '
f"
7 1'3
SoClO oglque a ncam .•.
Ces tribunaux devraient tenir compte des coutumes et des traditions africaines, du degré
de culture et d'instruction des populations aussi bien urbaine que rurale et de la situation sociale,
économique et financière des populations en cause. Ils doivent aussi mettre en évidence le
caractère spécifique du commerce africain et à travers lui, celui de son consommateur,
analphabète et vulnérable.
En attendant la mise en place de telles structures, nous pensons qu'une mise à la
disposition des consommateurs et de leurs associations de la gratuité des procédures peut être
une bonne chose pour la défense de leurs intérêts. Ce serait, à notre avis, la meilleure façon de
121 Atelier Régional de juillet 1992, Résolution IV relative aux "Mesures permettant aux
-
consommateurs d' ~btenir
réparation", « Considérant N° 1 »reprenant le principe N° 28 de la charte des Nations Unies pour la protection du
consommateur, in « Consommation-Développement» N° 8, nov. 1992 précité, p. 7.
122 Ibid. « Considérant N° 6 ».
.

270
familiariser les consommateurs avec la justice d'Etat et de leur faire comprendre que l'Etat veille
sur leur bien-être.
b)
L'institution
d'un
ombudsman
africain
pour
les
consomma teurs.
Au-delà de l'ouverture des portes des tribunaux aux plaintes des consommateurs, le
principe N° 29 des Nations Unies invite les gouvernements des pays concernés à « encourager
toutes les entreprises (visant) à régler les différends avec les consommateurs à l'amiable,
équitablement et avec diligence, et à créer des mécanismes volontaires, dont des services
. consultatifs et des procédures de recours officieuses susceptibles d'aider les consommateurs ».
Les dispositions de ce principe incitent à une réflexion: l'on se demande si les rédacteurs
ne cherchent pas à travers ce principe à encourager la coexistence des initiatives ou procédures
extrajudiciaires
auxquelles
les
consommateurs
pourraient
s'accoutumer
plus
facilement,
contrairement aux procédures officielles dont l'issue n'est souvent pas agréable. Le contexte
sociologique et culturel précédemment décrit l2-+ nous incite à répondre par l'affirmative.
De toute façon, pour la résolution des litiges en dehors du cercle judiciaire, la solution de
ce principe n'en est pas moins la bonne. Mais la réalité consumériste africaine nous amène à
penser à autre chose, et à nous demander si la solution « idéale» ne se trouve pas dans la
création d'un véritable ombudsman des consommateurs, institution ayant fait ses preuves dans les
pays scandinaves dans le domaine de la protection des intérêts pes consommateurs.
En effet, qu'entend-on par l'ombudsman des consommateurs?
L'ombudsman est un organe neutre dont la mission consiste à apporter sa médiation dans
le
règlement
des différends entre
professionnels et
consommateurs.
Il a
une
vocation
essentiellement consumériste. Aussi, ne devrait-il pas être « ni un ministre, ni un serviteur, ni un
ange systématiquement exterminateur, ni un "petit rapporteur", ni un juge, mais un véritable
médiateur» 125. C'est une sorte de « comité d'arbitrage chargée de trancher, au sein des sociétés
concernées, les litiges dont la nature et l'objet seront défmis par les parties, ce, nonobstant les
m Ibid. P. 7 ; voir également KANOUTE, « Communication ... au Symposium... » précitée, P. 1 cl suiv.
124 Cf supra, a) l'accès à lajuslice.

271
tribunaux d'Etat »126. Il faut cependant se garder d'en faire une caricature d'ombudsman à la
suédoise. L'ombudsman africain devrait en refléter la configuration géopolitique, c'est-à-dire être
d
'
1
1
. l '
d
. 127
a apte au contexte cu ture et SOCIO oglque
u terrOlf
.
Une fois mise en place, l'ombudsman devrait être indépendant de l'Etat et des partenaires
économiques, disposé de l'autorité nécessaire pour le tri des réclamations, pour apprécier le bien
fondé, et si possible obtenir des solutions rapides. II pourra sur simple coup de fIl informel, faire
céder les producteurs, distributeurs ou annonceurs fautifs. 128 Arbitre disponible, intervenant de lui
même ou à la demande des consommateurs, il devrait, après avoir apprécié le caractère des faits
qui lui seraient soumis, procéder de la façon suivante:
- recueillir des explications et tenter de convaincre l'auteur des pratiques préjudiciables
aux consommateurs de cesser ou d'apporter des modifications jugées nécessaires;
- sur le producteur, distributeur ou l'annonceur résiste, l'ombudsman pourra prévenir
immédiatement par une contre-publicité le public et ce avant toute décision de justice;
- et si l'intéressé ne s'inclinait toujours pas, il pourra provoquer les poursuites en
transmettan t le dossier à la juridiction répressive. 129
Mais les réalités du pouvoir africain peuvent-elles permettre le bon fonctionnement d'une
telle institution? Qu'il nous soit permis d'en douter. Et cela s'explique. Les institutions, neutres
par définition, sont moins appréciées par les pouvoirs publics en Afrique. L'Etat se méfie
toujours d'une instance autonome dont le contrôle lui échappe. II veut que tout vienne de lui et
fonctionne sous son oeil bienveillant. Les administrés de leur côté peuvent craindre, légitimement,
la main mise du pouvoir ou des puissantes firmes commerciales sur une institution, même à
l'origine indépendante, qui, pour l'être réellement, a besoin de la sécurité fmancière. LlO C'est
donc tout un problème d'influence externe ou de récupération de l'institution qui se pose dans
125 J.-c. FOURGOUX : «Droit de lu consommation: raut-il une loi-cadre ou un véritable ombudsman? », G.P.
1975, 2 è semestre, p. 7.
126
«Atelier Régional» de juillet 1992, résolutions relatives aux "Mesures permettant aux consommateurs
d'obtenir réparation". in « Consommation-Développement » N° 8, nov. 1992, p. 7.
127 Supra, voir a) L'accès à la justice.
l2R FOURGOUX, MIHAILOv ct JEANNIN: Principes et pratiques du droit de la consommation, éd. Delmas,
1983, p. A20 ; M. T. CHEVALIR : « Protection du consommateur en Suède », in Consommateurs-Actualité, N°
f
334 du 28 mai 1982, p. 5 et suiv.
i
129 J.-c. FOURGOUX : article précité. p. 734.
IJO FOURGOUX, MI HAlLOY et JEANNIN: op. cil. p. A20

-.-'... ".~
272
nos pays. Espérons que l'évolution des mentalités permettra de faire la part des choses et de
concrétiser de telles idées pour le bien du consommateur, donc pour le bien de tous. Ce sera le
moyen adéquat pour construire un consumérisme majeur, autrement dit un consommateur éveillé
et averti pouvant faire face à ses responsabilités et remplir convenablement son devoir d'agent
économique dans la nouvelle donne de l'économie moderne.
§II - Pour un consumérisme majeur...
Nous savons tous, comme nous avons déjà eu à le souligner plus haut, que la formation et
l'information sont deux piliers essentiels favorisant l'accession du consommateur à son rôle de
partenaire économique viable. Et si l'ombudsman est nécessaire pour parvenir à ce stade, c'est
que l'Etat n'est pas sans reproches dans son comportement vis-à-vis du consommateur.
Si l'aide de l'Etat est sollicitée dans les problèmes relatifs à la protection des droits du
consommateur, c'est parce qu'elle revêt une importance capitale aux yeux de l'opinion publique
dans nos pays. Cela s'explique par le fait que c'est l'Etat qui régit l'ordre juridique à l'intérieur de
ses frontières nationales. Cette aide, si aide il y a, ne devrait pas se borner au seul rééquilibrage
des rapports de force entre professionnels de droit privé, puisque c'est principalement d'eux dont
il s'agit ici, et les consommateurs. Cette mise au point trouve sa raison d'être dans les diverses
activités commerciales dans lesquelles l'Etat est impliqué. En effet, l'Etat d'aujourd'hui est
producteur à travers ses entreprises publiques. Et à ce titre, le rééquilibrage des rapports de force
le concerne aussi. Ce qui n'est pas toléré, ce qui n'est pas licite de la part d'un producteur ou
annonceur privé, ne devrait pas l'être davantage lorsqu'il s'agit c1'un service puhlic ou d'une
.
.
]
III
entreprIse natlüna e ..
L'Etat ne devrait pas proclamer favoriser l'accession du consommateur à l'éducation et
aux informations lui permettant de maîtriser ses choix, de reconnaître ses besoins et d'utiliser à
bon escient son pouvoir d'achat et dans le même temps montrer le mauvais exemple à travers ses
entreprises publiques. Les pouvoirs publics ne peuvent pas prétendre affranchir le consommateur
des manipulations auxquelles se livrent les professionnels et en retour utiliser les mêmes procédés
132
que ces derniers pour le piéger.
De tels comportements seraient non seulement contraires à
l'éthique, mais aussi aux principes directeurs des Nations Unies en leurs points 13 à 19 relatifs à
DI Pangloss N° 13 précité. p. 29.
D2 CAS et FERRIER: op. cil. W 342, p. 325.

273
la « promotion et protection des intérêts économiques des consommateurs» et en leurs points 31
à 37 relatifs aux « programmes d'éducation et d'information» des consommateurs. Ils seraient
aussi contraires aux résolutions des associations des consommateurs, lesquelles ont d'ailleurs
repris dans lesdites résolutions les principes ci-dessus cités des Nations Unies. 133
Si ces remarques s'imposent, c'est pour des raisons bien précises. De nos jours, les
pouvoirs publics prennent une part importante dans l'économie nationale, en particulier dans les
pays africains où les situations de monopole d'Etat ne sont pas rares. 134
Ils peuvent, sous prétexte de protéger le consommateur, prendre des mesures incitatives
ou dissuasives tendant à orienter la demande vers des produits qu'ils jugent conformes à la
défense des intérêts des consommateurs ou aux siens. En fonction de quelques considérations
parfois étrangères à la défense des consommateurs, ceux-ci peuvent être contraints à utiliser
certains produits ou services ou à s'en détourner. Certes, des circonstances exceptionnelles
peuvent justifier de tels agissements. Mais ils ne doivent tout de même pas devenir la règle.
Autrement dit, l'Etat doit se faire ,une discipline, être exigeant pour lui même et pour ses
administrés. Son comportement ne devrait pas être en contradiction avec les règles qu'il édicte.
C'est de l'autodiscipline dont il est question ici, sinon ce serait une porte ouverte à tous les abus.
Et dans ces conditions, il serait très difficile de pouvoir adapter le marché aux intérêts de
consommateurs, conformément aux principes directeurs des Nations Unies.
ID « Atelier Régional » de juillet 1992, in « Consommation-Développemnt » N° 8 précitée, p. 6-7.
134
Cette situation commence par s'estomper avec les politiques d'ajustement structurel imposées par les
institutions financières internationales, notamment le FMI et la Banque Mondiale. On assiste ainsi à un
désengagement progressif des Etats africains dans la direction et gestion des entreprises ou sociétés commerciales
naguère contrôlées par les pouvoirs publics.

274
SECTION II :
L'ASSAINISSEMENT DU CIRCUIT COMMERCIAL OU LA NECESSITE
D'ADAPTER
LE
MARCHE
AUX
EXIGENCES
JURIDIQUES
El
ECONOMIQUES.
En invitant les pays en voie de développement à intégrer dans leurs législations nationale~
les principes directeurs pour la protection du consommateur, les Nations Unies aspirent à ur
objectif essentiel: mettre le marché des biens et des services au service des consommateurs. Si lé
service suppose la satisfaction des besoins du consorrunateur, celle-ci, en revanche, nécessite uné
adaptation du marché aux exigences juridiques et économiques. Cet objectif ne pourra être atteint
sans une cure d'assainissement du circuit commercial. De toute évidence, la protection de~
intérêts du consommateur est sujette à la prohibition de certaines pratiques commerciale~
nuisibles: il s'agit d'un côté des pratiques commerciales restrictives (Sous-Section 1) et dE
l'autre, des pratiques commerciales déloyales (Sous-Section II).
Sous-Section 1 : La prohibition des pratiques commerciales restrictives.
Dans les années 1960, la plupart des Etats africains, alors nouvellement indépendants, onl
adopté des législations régissant l'activité commerciale sur leur territoire. A l'intérieur de ce~
législations, on trouve des dispositions classiques protectrices du consommateur et relatives am
pratiques commerciales restrictives. C'est le cas notamment des pays comme le Togo qui é:
réglementé le refus de vente et de prestation de service dans l'intérêt du consommateur. 135 L'Eta'
camerounais dans sa nouvelle loi régissant l'activité commerciale au Cameroun n'a pas négligé lé
domaine. 136 A l'instar de ces deux pays, toutes les législations africaines comportent en leur seir
des dispositions interdisant, en théorie, le refus de vente d'un professionnel à un consommateu
m cr « l'Ordonnance N° 17 du 22 avril 1967 portant réglementation des prix ct des circuits de distribution
précitée, article 25.
136 Loi N° 90/031 du 10 août 1990 régissant l'activité commerciale au Cameroun, article 24. Ce texte n'est qu'~
reprise de l'article 8 a) de l'ordonnance de '972 prohibant le refus de satisl:ïire les commandes d'un acheteur, v~­
en sens J.-M. NYAMA : « Commentaire de la loi du 10 août 1990» in Juridis Inro N° 5, Janvier-Février-Mar
1991, p. 19.
1

275
(§I). L'intérêt qu'on accorde à ce dernier fait qu'on trouve dans les différents codes pénaux, des
dispositions sanctionnant le non-respect du principe relatif au refus de vente du professionnel
(§II).
§I - La prohibition du refus de vente et de prestation de service.
L'interdiction faite au professionnel commerçant de refuser de vendre un produit ou de
rendre un service quelconque à un consommateur consacre un principe très simple: le droit du
consommateur à l'achat des biens et services mis sur le marché CA). Ce droit du consommateur
n'est tout de même pas absolu. Le commerçant peut le mettre en péril ; pour cela, il lui faudra
apporter des motifs légitimes justifiant son refus. Le droit du consommateur à l'achat trouve
donc à travers cette porte ouverte au professionnel une limite à sa manifestation CB).
A - Le droit du consommateur à l'achat des biens et services mis sur le
marché.
L'article 24 de la loi camerounaise dispose : «Il est interdit de refuser, sauf motif
légitime, à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service dès lors que la
demande du consommateur ne présente aucun caractère anormal par rapport aux pratiques
habituelles du fournisseur et de ses biens. »137
Ce texte de l'article 24 de la loi camerounaise n'est pas, dans sa substance, différent du
texte français de l'article 30 de l'ordonnance du 1er Décembre 1986 consacrant le refus de vente
et de prestation de service au consommateur. Celui-ci dispose : «II est interdit de refuser à un
consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime... »138 Il
n'est pas non plus très différent du texte de l'article 25 alinéa 3 de l'ordonnance togolaise du 22
Avril 1967 portant réglementation des prix et des circuits de distribution au Togo. Le texte de
l' article 25 alinéa 3 assimile « à une pratique de prix illicite: le fait de refuser de satisfaire, dans la
mesure de ses disponibilités et dans des conditions conformes aux textes en vigueur et aux usages
commerciaux, aux demandes des acheteurs des produits ou aux demandes des prestations de
service, lorsque ces demandes ne présentent aucun caractère anormal, qu'elles émanent des
137 Loi N° 90/031 du 10 aoûl 1990 précilée, arlicle 24.
138 Article 30 de l'Ordonnance W 86/1243 du 1er décembre 1986 (modifiée par la loi W 87/499 du 6 juillet 1987
JO du 7 juillet) relalive à la liberlé des prix el de concurrence, JO du 9 décembre 1986.

276
demandeurs de bonne foi et que la vente des produits ou la prestation des services n'est pa~
1
interdite par un règlement de l'autorité publique »1: 9.
Tous ces textes, quelle que soit la différence de rédaction qu'ils comportent, ont un point
commun: ils reconnaissent au consommateur un droit fondamental, celui de pouvoir bénéficier.
sans aucune restriction possible, de tous les produits et services qu'il serait en mesure de St
procurer sur le marché. La seule obligation qu'il a à sa charge serait celle de payer le prix dL
produit ou du service, objet de l'achat. Pourquoi un tel droit à l'actif du consommateur?
Cela s'explique aisément. Ce droit reconnu au consommateur résulte de l'état d'offn
permanente à laquelle sont « astreints» les professionnels, plus particulièrement les distributeurs.
Cette position qui est la leur fait peser sur eux une obligation: celle de servir le public. '4(
Dès lors que l'offre est acceptée, le contrat est formé et il doit être exécuté en bonne et dUt
forme. D'ailleurs, la théorie de l'offre permanente au public a été souvent et surtout utilisée pOUl
déterminer le moment de la formation du contrat, ce dernier se trouvant formé par la seult
141
déclaration de volonté de 1; acquéreur du produit ou de l'utilisateur du service offert.
Le service de distribution doit avoir en plus de la sécurité, la continuité, et ceci doit St
faire dans la légalité, sans aucune discrimination au préjudice de tel ou tel consommateur. 142 Sau
«motif légitime» justifiant le refus de vendre,'43 le droit du consommateur à l'achat est un droi'
«sacré» et se doit d'être protégé par des mesures dissuasives.
B - Les limites du droit de consommateur à l'achat.
Le refus de vente de la part d'un professionnel n'est justifié que si celui-ci avance unt
raison valable pour motiver sa réticence. Les textes camerounais et français ci-dessus cité:
l'interprètent autrement et la qualifient de «motif légitime »144. Encore faut-il savoir ce qu'm
entend par ce vocable? Une précision de l'expression s'avère donc nécessaire.
139 Article 25 de l'ordonnance N° 17 du 22 avril 1967 précitée.
140 CALAIS-AULOY\\: Droit de la consommation, op. ci t, 3'~m< éd. N° 158; CAS et FERRIER: op. cit. N° 275.
141 RlPERT el ROBLOT: Traité élémentaire de Droit commercial, 9ème éd. N° 2491 ; CALAIS-AULOY : op. c'
W 158; CAS et FERRIER: op. cit. W 275.
142 CAS et FERRIER: op. ciL, N° 275; Lamy Droit Economique 1993, nOs 1841 et suiv.
143 Lamy Droit Economique 1993, N° 1843.
144 L'article 24 de la loi camerounaise du 10 août 1990 et l'article 30 de l'ordonnance du le' décembre 1986.

277
En effet, la notion de « motif légitime» est une notion vague et imprécise. Par là, elle
donne au juge un large pouvoir d'appréciation. Si l'on se réfère à l'article 24 de la loi
camerounaise, on constate que le législateur ne légitime pas le refus de vente du professionnel
« ... dès lors que la demande du consommateur ne présente aucun caractère anormal par rapport
aux pratiques habituelles du fournisseur et de ses biens ». Ce qui signifie, a contrario, qu'une
« demande» du consommateur qui présente un «caractère anormal» peut être un «motif
légitime» du refus de vente du professionnel. Quant à l'appréciation du « caractère anormal» de
la demande, il appartiendra au juge du tribunal saisi de le déterminer.
Le texte togolais (article 25, alinéa 3 sus-cité) n'emploie pas l'expression «motif
légitime ». Mais il laisse percevoir les points ou arguments juridiques sur lesquels le vendeur peut
fonder son refus. Selon le texte togolais, le professionnel est en droit de refuser la vente (aux
consommateurs) lorsque les demandes « présentent (un) caractère anormal ». On retrouve là les
termes employés par le texte de l'article 24 de la loi camerounaise. Il peut aussi refuser la vente
lorsque les demandes ne proviennent pas des consommateurs de «bonne foi », ou lorsque « la
vente des produits ou prestations des services» demandés est «'interdite par un règlement de
l'autorité publique ». A ces trois faits justificatifs du refus de vente, le texte de l'article 213,
alinéa 2 du code pénal togolais du 13 Août 1980 ajoute un quatrième. Il reconnaît au
commerçant détaillant le droit de refuser de vendre à l'acheteur dès lors que celui-ci «demande
au-delà de ses besoins dans le but de revendre les produits au public »145. On voit dans les
textes togolais une énumération (non exhaustive) des faits justificatifs du refus de vente d'un
professionnel. Il n'en demeure pas moins qu'ils sont soumis à l'appréciation souveraine des juges
du fond.
Pour ce qui est du droit français, avec lequel le droit des pays africains d'expression
française a une « parenté », la notion de « motif légitime» y est diversement appréciée. Elle peut
être invoquée dans les cas où la demande du consommateur s'avère anormale 146 ; elle peut aussi
être avancée pour contrecarrer la mauvaise foi du demandeur. 147
1
145 L'article 213 alinéa 2 de la loi n° 80-1 du 13 août 1980 instituant Code pénal togolais, JO Numéro Spécial,
1
imprimerie EDITOGO, dépôt légal n° 20.
i
146 Lamy droit économique, n° 1843.
j
147 Ibid.

278
Mais, là aussi, le libre arbitre du juge est toujours présent. Celui-ci peut lui permettre
d'aller au-delà de ces deux cas. Le juge peut se référer, comme l'ont d'ailleurs souligné certains
auteurs, « à l'effet du refus sur le jeu normal de la concurrence »148. Le refus peut être fondé sur
une interdiction édictée par un texte législatif ou réglementaire, interdiction correspondant au fait
justificatif général (d'ordre de la loi ou de l'autorité légitime).149
Le pouvoir d'appréciation du juge peut lui permettre de VOIr dans l'indisponibilitt
matérielle d'un produit un motif légitime ayant justifié le refus du commerçant. 15O
L'article 25 de l'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 n'en a pas moins négligé CE
point. 151 En utilisant l'expression « ... dans la mesure de ses disponibilités... », le législateur (
entendu laisser une porte de sortie au professionnel qui ne serait pas en possession matérielle dL
produit demandé. Côté français, le juge peut aussi voir le motif légitime mettant hors de cause lE
commerçant le fait qu'un service n'entre pas dans la spécialité professionnelle du prestataire. 152
Tout compte fait, le texte togolais relatif au refus de vente n'est pas très différent du textE
français, pas plus que ne l'est le texte camerounais. Il comporte des dispositions qui reflèten't bier
l'interprétation jurisprudentielle en la matière en France. La seule différence qui existe entre le~
deux droits réside dans la traduction pratique des textes existants. Le vide jurisprudentiel dans k
domaine de la consommation en Afrique en est la preuve évidente. Le moment est donc venu dt
mettre le consommateur dans ses droits en appliquant de façon convenable les textes épar:
existants en sa faveur. Ceci nécessite aussi une information et une éducation du consommateu
dans ce domaine. Un rôle qui incombe au premier chef aux pouvoirs publics. En tout cas, le jug<
qu'il soit africain ou français, dispose, dans ce domaine, d'une latitude assez importante; il lu
appartiendra donc d'user de son pouvoir souverain d'appréciation pour déterminer la légitimit,
ou non d'un refus de vente à un consommateur.
14S CA VALDA et LUCAS de LEYSSAC : « Commentaire de l'ordonnance du 1cr décembre 19H6... », ALD 19H
W77.
14') Article 327 du code pénal français.
ISO Casso crim. 16 juin 1981, D 1982, p. 190, note SFEZ ; lCP 1982, II W
19707, obs. CHAPUT; RTD Ce
1982, P. 290.
151 L'article 25 de l'ordonnance togolaise n° 17 du 22 avril 1967 précitée.
152 CALAIS-AULüY : « l'ordonnance du 1er décembre 1986 et les consommateurs », D. 1987, chrono P. 140;.
M. NYAMA : "Commentaire de la loi camerounaise" précité, p.19.
J

279
Toutefois, la protection d'un consommateur ne se limite pas aux seules dispositions
relatives au refus de vente. D'autres formes de ventes anormales ont elles aussi fait l'objet de
réglementation avec pour seul objectif la protection du consommateur.
SIl - Les autres ventes prohibées.
Les législateurs africains - camerounais et togolais en l'occurrence - ne se sont pas
seulement contentés d'interdire le refus de vente à un consommateur. Certaines formes de ventes
qui lui sont préjudiciables ont été également interdites. Si l'on se réfère au législateur
camerounais, on constate que sa loi interdit deux formes de ventes : la vente dite « à boule de
neige» (article 26) et la subordination de la vente à certaines conditions (article 25).
L'article 26 de cette loi dispose: « sont interdites les ventes pratiquées selon le procédé
dit "de la boule de neige" ou tout autre procédé analogue consistant à proposer à une personne
de collecter des adhésions, des inscriptions, de placer des bons ou tickets de façon à acquérir des
marchandises à une valeur inférieure à leur valeur réelle, voire gratuitement ». Une telle vente
repose su'r un principe tout simple : pour obtenir la gratuité de la marchandise proposée ou la
réduction de son prix, chaque client pressenti devrait trouver d'autres participants, qui à leur
tour, feront la même chose que leur parrain et ainsi de suite. Le caractère chimérique de cette
opération fait, qu'en raison de la progression géométrique de la participation, le nombre de
clients devient si élevé, en quelque temps, qu'il ne sera plus matériellement possible de tous les
satisfaire. \\53 Ce qui est en soi une mauvaise manière de traiter les consommateurs.
L'article 25 de la même loi interdit le fait de « subordonner la vente d'un produit à l'achat
concomitant d'un autre produit ou d'un service, ainsi que de subordonner la prestation d'un
service à celle d'un autre service ou l'achat d'un autre produit ». Cette disposition qui est une
reprise, plus ou moins intégrale, de l'article 8 de l'ordonnance camerounaise de 197i 54 n'est pas
différente du texte togolais de l'ordonnance du 22 Avril 1967. Tout comme le texte camerounais,
l'article 25 alinéa 5 de cette ordonnance interdit: « le fait de subordonner la vente ou l'achat d'un
produit ou la prestation d'un service quelconque, soit à l'achat ou la vente concomitante d'autres
t
1
153 l-M. NY AMA : article précité, p. 19.
j
154 L'article 8 a) de l'ordonnance camerounaise de 1972 prohibait déjà le refus de satisfaire les commandes d'un
l
acheteur, voir en ce sens NYAMA, article précité, p. 19.
.

280
produits, soit à l'achat ou à la vente d'une quantité imposée, soit à la prestation d'un autre
service ».
Cependant, nulle part ailleurs, on ne trouve dans l'ordonnance togolaise, des dispositions
interdisant les ventes dites « de la boule de neige ». Signe que le commerce a depuis longtemps
évolué et avec lui les différentes formes de ventes. Il y a là une invitation adressée au législateur
togolais en vue d'une réactualisation de ses textes relatifs à la protection des consommateurs-
citoyens.
Mais au-delà de ce vide juridique concernant la vente «à la boule de neige »,
l'ordonnance'du 22 Avril comporte en son sein, une disposition d'importance non négligeable au
profit des consommateurs. L'article 25 alinéa 4 interdit « le fait de pratiquer des conditions
discriminatoires de prix qui ne sont pas justifiées par des argumentations correspondantes du prix
de revient de la fourniture ou du service» 155.
Ce texte qui interdit les majorations illicites des prix est proche du texte de l'article 8 de
l'ordonnance camerounaise de 197'2, lequel assimilait à une majoration illicite de prix « le fait de
subordonner la vente d'un produit ou la prestation d'un service quelconque à l'achat concomitant
d'autres produits »156.
Cette comparaison permet de relever la similitude qui existe entre les textes rédigés par
les pays africains dans les années 1960 et au début des années 1970, lesquels avaient d'ailleurs un
caractère général, car s'occupant de toute la population, sans distinction aucune, en tant que
citoyens et non en tant que consommateurs. De toute façon, dans leur portée générale, ils
protègent les consommateurs. Ils ne sont pas non plus éloignés du texte français de l'article 30 de
l'Ordonnance du 1cr Décembre 1986 lequel interdit le fait « ... de subordonner la vente d'un
produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un produit ou d'un autre
service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achal
d'un produit ».
Mais comme le souhaitent les Nations Unies à travers leurs principes directeurs, le
nouvelles données du commerce nécessitent une réadaptation des législations adoptées au débu
155 L'article 25, alinéa 5 de l'ordonnance (ogolaisc du 22 avril 1967 précitée.
156 L'Ordonnance camerounaise de 1972 précitée. voir en ce sens le commentaire de NY AMA précité, p. 20.
i

281
157
des années 1960 et 1970.
C'est justement l'exe~ple qu'a donné le législateur camerounais à
travers sa loi du 10 Août 1990, laquelle consacre des dispositions spécifiques à la protection des
consommateurs. Cependant, malgré leur caractère général, on trouve à l'intérieur de ces
législations des dispositions sanctionatrices. Tout commerçant qui enfreint les dispositions
prohibant le refus de vente et des ventes anormales s'expose à des sanctions.
§III - La protection du consommateur par la sanction du refus de vente
et des autres ventes prohibées.
Le refus de vente non justifié est un délit pénal en droit togolais et camerounais (A). Il en
est de même pour les autres ventes prohibées (B).
A - La sanction du refus de vente au consommateur.
L'article 40 de l'Ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 dispose: «Les infractions
prévues à l'article 25 sont punies d'un emprisonnement d'un mois à deux ans et d'une amende de
5.000 F à 2.000.000 F CFA ou à l'une de ces deux peines seulement ».158 Quelques années plus
. tard le Code pénal du 13 Août 1980 confirmait cette sanction relative au'refus de vente. L'article
213 alinéa 1 dudit code dispose: «Sera puni de 20.000 à 100.000 F d'amende le commerçant qui
aura refusé la vente d'un article ou produit en pratiquant une discrimination injustifiée envers les
acheteurs ou en conditionnant la vente par l'achat d'articles ou produits différents réunis
artificiellement en un lot unique. »159 Sur le principe de la sanction du refus de vente, l'article 213
alinéa1 n'est pas différent de l'article 40 de l'ordonnance du 22 Avril 1967. Le seul point de
divergence réside dans la forme de la sanction. L'article 213 alinéa 1 n'a pas seulement allégé le
plafond de l'amende qui passe de 2.000.000 FCFA à 1.000.000 F.CFA. Il a aussi écarté de son
champ d'application la peine d'emprisonnement qui frappait les coupables du refus de vente.
La loi camerounaise du 10 Août 1990 punit aussi le refus de vente injustifié. Pour la
nature de la sanction, la loi se reporte aux dispositions de l'article 326 du Code pénal
camerounais. En cas de récidive, le maximum des peines prévues par les articles 326 et 256 du
~
d '
1
'
d
bl 160
meme co e pena est porte au ou e.
157 Loi n° 90/031 du 10 août 1990 précitée.
158 L'Ordonnance togolaise n° 17 du 22 avril 1967 précitée.
159 cf le Code pénal togolais du 13 août 1980 précité.
160 Loi n° 90/031 du 10 août 1990 précitée.

282
En droit français, c'est l'article 33 du décret du 29 décembre qui punit pénalement la
violation de l'interdiction du refus de vente. Il prévoit pour le coupable des peines d'amende pour
les contraventions de cinquième classe, soit 3.000 à 6.000 F et, en cas de récidive, 5.000 à
12.000 F. 161
L'on s'interrogera, sans doute, sur le bien fondé de ces sanctions pénales et sur l'absence
des sanctions civiles, lesquelles paraissent convenir mieux à la situation. Le problème est que
l'action en responsabilité civile est généralement, pour le consommateur, hors de proportion avec
l'intérêt en jeu, c'est-à-dire, le refus qui lui est opposé. Aussi, renoncerait-il à porter l'infraction à
la connaissance du juge. Pour que les dispositions prohibitives ne restent pas lettre morte, il nous
paraît logique de les assortir de sanctions pénales, dont le rôle est essentiellement dissuasif. 162
Le large pouvoir d'appréciation dont dispose le juge dans ce domaine lui donne un rôle
important dans l'administration des sanctions. La jurisprudence française ne manque pas
d'exemples dans ce sens. C'est ainsi qu'un garagiste s'est vu reprocher ce délit pour avoir refusé
de renouveler au propriétaire d'une voiture le contrat réservant un emplacement de son garage. 163
Le même délit a été évoqué à l'encontre d'un pharmacien pour avoir refusé de délivrer des pilules
contraceptives à une cliente '64 et du restaurateur qui a refusé de servir un repas à un handicapé
physique '65 et du commerçant qui a refusé de vendre un article exposé en vitrine '66. Tout
récemment, la Cour de Paris a condamné pour le même délit un restaurateur pour avoir refusé de
servir un croque-monsieur à une table au motif que cette consommation n'est servie qu'au bar,
alors que le client était accompagné d'une personne ayant commandé un plat du jour, et qu'il
aurait été obligé de se séparer d'elle en venant consommer son croque-monsieur au bar l67 .
161 L'article 33 du décret n° 86/ 1309 du 29 décembre 1986 fixanlles conditions d'application de l'ordonnance ne
86/1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, 10 du 30 décembre 1986 modifié
par le décret n° 88/479 du 2 mai 1988,10 du 3 mai J988.
162 CALAIS-AULOY : « L'ordonnance du 1er décembre 1986 elles consommateurs », D. 1987, chron., p.140.
163 Trib. Corr. Seine 9 nov. 1965, RTD Com 1966, p. 380, obs. 1. HEMARD. Dans la même affaire. Paris 1L
octobre 1966, lCP 1967, II, J 14936, note GUERIN: Casso Crim. 8 novembre 1967, lCP 1968, II, 15353, D. 196~
p. 365, Trib. Corr. Paris, (31 <ch.) 29 juin 1987, G.P., 2, p. 56S.
164 Dijon 12janvier 1979, lCP (Cl) 1979, Il,13004. Mais après dcux arrêts de cassalion, notamment cass crim l(
juill. 1978, lCP 1978, Cl, 1979, li, 12957, note CHAPUT; lCP 1979, Il, 19125; G.P. 1979, l, p. 199; D. 1979
IR, p. 180, obs. ROU10UDE de BOUBEE, le pharmacien, enfin de compte, a été relaxé, la régularité de
prescriptions médicales au regard des dispositions du code de la santé publique pouvant être, en l'espèce
contestée.
165 Casso Crim. 20 mai 1985, Rev. Conc. Cons. 1986, n° 35, p. 42. Il s'agit aujourd'hui, depuis la loi du 13 janv!
1989, d'un cas de rerus de prestation de service.
166 Trib. Corr. De Macon, 26 juin 1985, inédit, n° 956, eité dans Lamy droit économique 1993, n° 1843.
167 Paris ( 13< ch A). 24 septembre 1991, lCP éd. G 1992, IV, p. 21, n° 199.

283
Pour condamner, le juge doit, en effet, se l.ivrer à un exercice intellectuel et rechercher
l'absence de motif légitime justifiant le geste du professionnel. Pour n'avoir pas procédé à cette
investigation, une cour d'appel qui avait condamné les dirigeants d'un établissement thermal pour
avoir refusé (de traiter) un curiste suivi par des médecins ne faisant pas partie de cet
J69
établissement,J68 a vu sa décision censurée par la Cour de Cassation.
Tout le problème qui se pose en Afrique est celui de l'effectivité de ces sanctions, le
consommateur n'étant pas habitué à porter ses affaires devant les tribunaux d'Etat. Une fois
encore, on se trouve confronter à un problème d'éducation et d'information du consommateur
quant à la possibilité de saisir les tribunaux pour les litiges de consommation. Ce qui se résume à
une connaissance minimale de ses droits et devoirs dans sa fonction de consommation.
De toute façon, le juge saisi d'une plainte concernant le refus de vente se doit de motiver
sa décision. Il ne pourra le faire que s'il se livre à un exercice d'investigation sérieux. Mais le
refus de vente n'est pas la seule forme de vente pénalement sanctionnée. D'autres formes de
ventes préjudiciables au consommateur sont également sanctionnées par le~ lois ci-dessus citées.
B - La sanction des autres ventes prohibées.
Tout comme le refus de vente, la pratique injustifiée « des conditions discriminatoires de
vente ou des majorations discriminatoires de prix» prévue à l'article 25 alinéa 4 de l'ordonnance
du 22 Avril 1967 est passible de peines prévues à l'article 40 de ladite ordonnance et à l'article
213 alinéa 1 du code pénal du 13 Août 1980. Les mêmes peines sont applicables à celui qui
subordonne « la vente ou l'achat d'un produit ou la prestation d'un service quelconque, soit à
l'achat ou à la vente concomitante d'autres produits soit à l'achat ou à la vente d'une quantité
imposée, soit à la prestation d'un autre service» (article 25 alinéa 5, ordonnance 1967).
Le législateur camerounais a aussi prévu des sanctions pour ceux qui conditionnent leurs
ventes «par l'achat d'autres produits ou services» ou qui les font
à des conditions
discriminatoires» 170. Pour les coupables de ces délits, la loi a prévu une amende très élevée: 50
168 Pau 16 nov. 1988, G.P. 12 septembre J 989, note MARCHI.
169 Casso Crim. 14 mai 1990, D. 1990, IR, p. 180; adde Paris 9è ch A. 21 mai 1991, G.P. 12 septemhre 1991,
jurisprudence, p. 12, note MARCHI.
J
170 La loi camerounaise du 10 août 1990 renvoie pour ces sanctions à l'article 31 nouveau de la loi n° 89/011 du
j
28 juillet 1989 ayant modiliée certaines dispositions de l'ordonnance de 1972, voir en cc sens, NY AMA, article
j,
précité, p. 23.

284
% du bénéfice réalisé ou 5 % du chiffre d'affaires réalisé. 17I Quant à la vente «à la boule de
neige », elle est réprimée par l'article 326 du code pénal camerounais. J72 Pour ce qui est du"
législateur français, il punit ceux qui subordonnent «la vente d'un produit à l'achat d'une
quantité ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que la prestation
d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit» à la même peine que celle
prévue à l'article 33 du décret du 29 décembre 1986 ; soit 3.000 à 6.000 F pour le premier délit
et 5.000 à 12.000 F en cas de récidive.
Mais les pratiques commerciales restrictives ne sont pas les seuls problèmes dont
souffrent les consommateurs africains. D'autres pratiques anormales minent aussi leur VIe
quotidienne et ils ont besoin d'en être protégé. Il s'agit des pratiques commerciales déloyales.
Sous-Section II : La prohibition des pratiques commerciales déloyales.
Des pratiques commerciales déloyales, on en rencontre une variété dans l'activité
économique de tous les jours. Seules nous préoccuperont les pratiques qui sont de nature à
entamer la santé et la sécurité du consommateur dans ses actes de consommation quotidienne. Il
s'agit notamment de la fraude dans le commerce, laquelle se dédouble soit en falsification, soit en
contrefaçon des produits mis sur le marché (§I) et des tromperies sur les qualités physiques et
substantielles des marchandises (§ II). Pour protéger efficacement la santé et la sécurité des
consommateurs, il faut au préalable procéder à l'incrimination de ces pratiques dangereuses.
§I - La protection de la santé et de la sécurité du consommateur
par l'incrimination de la falsification ou de la contrefaçon.
L'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 n'a pas réglementé le délit de falsification ou de
contrefaçonl73 des marchandises. La loi camerounaise du 10 Août 1990 régissant l'activité
commerciale au Cameroun n'en comporte aucune trace dans ses dispositions. Il s'agit pourtanl
171 Arlicle 31-6) loi n° 89/0 Il du 28 juillel 1989 précilé.
172 NYAMA : arlicle précilé. p. 19.
173
Le
r. 1 '1-
.
,.
s lermes « la S\\ (callOn» el «conlre açon» seron1 employés indiflëremlTIenl dans celle élude, le sel-
étymologique étant pratiquement le même.

285
174
des pratiques commerciales qui ont court quotidiennement en Afrique.
Paradoxale attitude des
législateurs africains ou légitimation des comportements déloyaux pourtant dangereux pour la
population? Il est difficile d'y apporter une réponse. Pour apprécier et mesurer l'ampleur des
problèmes posés par le phénomène des fraudes en Afrique, il faudra tout d'abord cerner la notion
de falsification et de contrefaçon (A). La connaissance du domaine permettra d'appréhender la
situation et d'envisager les sanctions appropriées pour freiner, voire arrêter la prolifération ou la
propagation des produits dérivés (8).
A - Notion de falsification ou de contrefaçon.
Falsifier vient du latin « falsum facere » qui signifie faire un faux, déguiser, altérer un
produit ou une marchandise. Ce peut être une denrée alimentaire, un produit pharmaceutique au
sens le plus large du terme ou tout autre produit quelconque susceptible d'être ~onsommé. Il en
va de même pour la contrefaçon qui est une «copie» ou imitation illicite ou trompeuse des
produits commerciaux. Ces deux termes sont utilisés pour désigner les manipulations illicites des
marchandises dangereuses pour la santé et la sécurité des consommateurs.
Par définition, la falsification ou la contrefaçon, c'est l'art de faire un « faux produit» 175,
d'en altérer la nature ou les qualités 176.
Elle est en conséquence une fraude qui s'exerce directement sur le bien, porte atteinte à sa
qualité intrinsèque et en constitue, de ce fait, une manipulation interdite 177 dans les pays qui l'ont
réglementée: c'est notamment le cas de la France avec la loi du Icr Août 1905 sur les fraudes et
falsifications en matière de produits et services 178.
174 S. N. DIALLO : «La contrefaçon des médicaments ». in « Lumières Noires Magazine ». Bimestriel na 36
octobre-novembre-décembre 1994, p. 17-1 ~ ; E. OBADINA : «La contrefaçon à\\ l'assaut de l'Afrique». in
«Vivre Autrement n° 8-9 novembre 1988, supplément, p. IV et suiv.
175 N'GUYEN-THANH : Thèse précitée, p. 75.
176 Ibid.
177 N'GUYEN-THANH : thèse prée., p. 75 ..
er
178 Loi du 1
août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits et service, J.O 5 août 1905.

286
Certes, toute
manipulation dont un produit peut faire l'objet n'est pas forcément une
fraude. Mais la difficulté majeure réside dans la capacité à discerner les manipulations licites des
manipulations
illicites
lesquelles
constituent
outre
mesure
des
falsifications
ou
des
contrefaçons 179. En effet, le repérage des manipulations interdites suppose l'existence d'une
réglementation spécifique régissant le domaine des fraudes. Ceci est loin d'être le cas dans les
pays africains.
L'absence des textes spéciaux régissant les fraudes dans le commerce a transformé les
pays africains en des marchés de prédilection pour les opérateurs indélicats et sans scrupule. Ceci
est valable pour les produits alimentaires et davantage pour les produits pharmaceutiques,
notamment dans le domaine des médicaments où la contrefaçon cause d'énormes dommages.
L'exemple le plus tragique est celui du Nigéria où 109 enfants trouvèrent la mort en 1990, après
avoir absorbé un « sirop antalgique» qui contenait comme excipient du Diéthyléneglycol (solvant
industriel très toxique) au lieu et place du Prophyléneglycol (excipient normal).'8ü
Toutefois, lorsqu'un règlement ou un,e loi existe et donne la définition d'un produit, en
établit impérativement la composition, détermine les manipulations autorisées et interdites, toute
violation de ce règlement ou de cette loi constitue en principe un fait matériel de falsification ou
de contrefaçon. Constitue donc une falsification (ou contrefaçon), « la fabrication des produits
dans des conditions qui ne sont pas conformes à la réglementation» 181.
Il existe en effet plusieurs sortes de falsifications ou de contrefaçons 182. Le cas le plus
fréquemment rencontré est celui de l'addition au produit visé (denrée alimentaire, médicament,
cosmétique etc...) d'un produit (chimique) nouveau non autorisé de nature à en altérer la qualité.
La falsification consiste en ce cas à ajouter quelque chose à un produit destiné à la vente. 183 C'est
notamment le cas de la pratique du « mouillage» du lait qui consiste à y ajouter de l'eau pour en
179 N'GUYEN-THANH : Thèse précitée, p. 75.
180 DIALLü: article précité, p. 17.
181 Casso Crim. 3 octobre 1991, Bull. Info. ; Casso 15 décembre 1991, p. 23 ; Lamy droit économique 1993, ,
9309 et suiv. N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 75.
182 Lamy droit économique 1993, nOs 9309 et suiv.
183 Ibid. ; N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 75

287
augmenter la quantité au détriment de la qualité,'84 tout comme le fait de mélanger du beurre à la

185
marganne. .
Si la réglementation est obligatoire pour caractériser le délit de falsification ou de
contrefaçon, elle n'en est pas moins nécessaire pour son existence. Le délit n'est pas à tout prix
subordonné à l'existence d'un texte de loi. La fabrication d'un produit en violation des usages
186
professionnels loyaux et constants peut également constituer une fraude.
Dans ce cas, la notion
de manipulation interdite ou non autorisée, qui cadre avec l'existence d'une loi, est remplacée par
la notion de manipulation « anormale» du produit, le caractère anormal étant apprécié à la fois en
l87
fonction des usages loyaux et constants du commerce
et de son résultat final. 188
Le fait matériel de falsification ou de contrefaçon existe, sans nul doute, dans le cas de
modification de la composition normale, d'après les usages, d'un produit (denrée ou médicament,
etc.), par altération des éléments qui le composent ou par amoindrissement de ses qualités
substantielles.
A titre d'exemple, constitue une manipulation interdite,
génératricé du
délit de
falsification, le fait de traiter la viande avec un appareil attendrisseur à l'insu de l'acheteur. '89 Il
s'agit là d'une manipulation dont le but est de modifier la contexture et les propriétés spécifiques
du produit. En écartelant les tissus, l'attendrisseur modifie de façon profonde les éléments
chimiques et accélère le processus de fermentation. 190
L'altération par addition est de loin la pratique la plus courante de falsification ou de
contrefaçon, mais elle n'en demeure pas moins le seul procédé utilisé par les fraudeurs. La
falsification peut être également opérée par soustraction ou retranchement d'un élément entrant
dans la composition normale du produit. L'exemple le plus classique est celui de l'écrémage du
184.Cass. crim. 4 décembre 1979, lCP 1980. IV, p. 73 ; casso crim 28 avril 1981, N° 80/93/919, inédit, cité dans
Lamy droit économique 1993, n° 9311 ; cass crim 20 octobre 1982 n° 81/91/906, inédit, cité dans Lamy droit
économique 1993, n09305.
185 Cass crim 7 déc. 1895, Bull. Crim 1895, p. 521.
186 Cass crim 16 déc. 1926, D.H. 1927. p. 100; G.P. 1927. p. 367 « prétendue eau de \\leur d'oranger» ; 9 avril
1932, S, 1933, 1, p. 275 ; Aix 6 déc. 1961. D. 1962. somm., p. 91 : addition contraire aux usages de la profession
de fécule de pomme de terre à des« calissons d'Aix» ; Trib. Corr. Seine 17 nov. 1966, lCP 1967, Il, 15009, note
GONDRE ; cass erim 5 oct. 1967, G.P. 1967, Il. p. 253 : gateau «quatre quarts » daris la composition duquel le
beurre a été remplacé, contrairement aux usages commerciaux, par une autre matière grasse.
187 Voir les arrêts cités sous la note 168
J
188 Idem.
189.Paris 19 mai 1961, lCP 1962, 12176. 1ère espèce n° A.P.

288
lait, qui le prive de certains éléments ou de certaines de ses propriétés essentielles ou
naturelles. 191 L'élément soustrait peut être substitué par lin autre avec la ferme intention cie faire
croire aux acheteurs qu'il s'agit d'un produit original, en J'occurrence du lait entier. I'J2
Au Burkina-Faso (Afrique de l'Ouest), ce procédé a été utilisé par les contrefacteurs de
médicaments. Suite à la substitution d'un «excipient normal» de l'aspirine par du « talc», de
nombreux cas d'eczémas consécutifs à la consommation de l'aspirine contrefaite ont été
enregistrés dans la population. 193 Ce qui est là un signe évident de la présence permanente des
produits contrefaits en Afrique, lesquels gangrènent tous les circuits de distribution. 19.J Dans la
majorité des cas, dans un produit composé de plusieurs éléments, la falsification proviendra d'une
répartition quantitative anormale de c~s éléments, au détriment du consommateur. 19S
La falsification peut aussi exister sans qu'il y ait altération par addition, ni altération pal
soustraction. Elle proviendrait dans ce cas d'une manipulation contraire aux règlements et au>
usages.
Ce principe a été affIrmé par la Cour de cassation à propos du réchauffement du vin dan~
le but d'en augmenter le degré alcoolique196 ou de son irradiation par des rayons ultraviolets I9?
D'une manière générale, le problème posé par le marché des produits contrefaits Ot
falsifiés est une réalité qu'il est impossible de nier. Si aucun marché au monde ne semble êtn
épargné par le phénomène, les marchés africains sont de loin les plus fournis en produit
contrefaits ou falsifiés. Faute de législations appropriées, les fraudeurs continuent d'exposer le
consommateurs à des dangers permanents. La préservation de la santé et de la sécurité de
consommateurs passe par l'élimination des marchés locaux des produits issus de la fraude et pa
la sanction de leurs auteurs.
190 N'GUYEN-THANH: thèse précitée, p. 76.
191 Casso Crim. 5 oct. 1967, Bull. crim. n° 242, cf note n° [68.
192 Lamy droit économique 1993, n° 9313 ; B. BOULOC: « La responsabilité des I"abricants ct distributeurs
Economica 1975, p. 351.
193 DIALLO : article précité, p. 18.
194 Ibid., cf également E. OBADINA : « La contrefaçon à l'assaut de l'Afrique », article précité, p. 1V ct suiv.
195 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 76, n° 184.
196 Casso Crim 13 mai 1975, Bull. Crim , n° 342.
197 Casso Crim. 26ocl. 1961, D. 1962, p. 63, note LIOTARD et BERGERET.

289
B - La protection du consommateur par la sanction des
fraudeurs et par l'obstacle à la vente des produits
falsifiés ou contrefaits et de produits assimilés.
Pour des raisons déjà avancées plus haut, nous nous réfererons au droit français pour
apprécier les sanctions relatives au délit de falsification ou de contrefaçon.
Pour résumer la notion générale de falsification, il faut sans doute se référer à une
ancienne décision jurisprudentieJJe. Cette décision - qui va plus loin - et qui a été rendue à propos
des denrées alimentaires, précise : «la falsification des denrées alimentaires consiste non
seulement dans J'altération frauduleuse des produits qui la composent, mais encore, soit dans la
substitution d'éléments autres que ceux qui entrent dans leur composition normale, soit en faisant
subir à la physionomie des produits, de quelque manière que ce soit, un changement de nature à
en varier ou déguiser la composition naturelle, et ce sans que le public en soit averti» \\98.
Dans une autre décision en date du 12 Février 1964, la chambre criminelle de la COUf de
cassation a soulevé un principe lequel tend à élargir le domaine de la falsification ou de la
contrefaçon.
D'après cette chambre, «J'adjonction d'une substance, fut-elle de même nature que
certains composants naturels d'un produit, réalise J'élément matériel de la falsification dès
J'instant qu'elle a pour but et pour résultat de dissimuler la médiocrité de la marchandise ou
d'accréditer faussement la pureté de son origine» 199.
Ces deux décisions nous montrent les diverses facettes du délit de falsification ou de
contrefaçon. Deux démarches sont nécessaires pour éradiquer le mal: punir les fraudeurs (1) et
faire obstacle à la vente des produits falsifiés ou contrefaits (2).
a) La protection du consommateur par la sanction des fraudeurs.
La falsification ou contrefaçon est un acte grave générateur de préjudice aussi bien au
producteur qu'au consommateur. Le préjudice du producteur se résume souvent à une perte
j
198 Lyon 2 janvier 1908, D. 1908, p. 82.
199 Casso Crim. 12 lëv. 1964, O.S. 1965, 1., p. 808, note FOURGOUX.

290
d'argent du fait de la concurrence déloyale dont il est l'objet en raison des produits falsiftés ou
contrefaits. 2oo Le consommateur de son côté court un danger beaucoup plus grave: l'atteinte à sa
santé et à sa sécurité par les produits issus de la fraude. 201
D'un côté comme de l'autre la fraude est nuisible, mais à des degrés divers. L'arrêt de la
nuisance passe par la punition de son auteur, le fraudeur falsificateur ou contrefacteur. En
d'autres termes, la protection des consommateurs est sujette à une soumission à des peines
dissuasives toute personne qui se rendrait coupable des actes de falsification ou de contrefaçon à
leur détriment. Qui dit « peines dissuasives» dit sanction pénale, elle même liée à la présence des
textes spéciaux en la matière.
Or, dans ce domaine, les pays africains brillent par leur absence. Comme nous avons déjà
eu à le souligner plus haut, il n'existe dans aucun pays africain un texte réglementaire ou de loi
sanctionnant ces délits.
Même la loi camerounaise du 10 Août 1990202 qUi a consacré un certain nombre de
dispositions à la protection du consommateur est restée muette sur la question. Il s'agit là d'un
mutisme coupable, car de nature à encourager les fraudeurs appréhendés sous l'angle
économique comme des délinquants.
La limitation des dangers découlant de la fraude commerciale, voire leur élimination
« complète» des circuits commerciaux passe par une mise en place au niveau de chaque Etat,
d'une réglementation ou d'une législation sérieuse et rigoureuse, à vocation essentiellement
pénale et dont le but serait de sanctionner les coupables.
Par personnes coupables, il faut entendre d'une part, des personnes qui falsifient ou
'contrefont des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, et certains autres
produits, et d'autre part des personnes qui exposeront, mettront en vente ou vendront des
denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, des boissons ou des produits
zoo Selon une des conclusions lirées du colloque organisé à Paris par la Fédération Internationale dc~
Fonctionnaires Supérieures de Police sur les contrcraçons, celles-ci représenteraient un marché mondial dc 1:
milliards de dollars, c'est-à-dire 6% du chiffre d'aflaires mondial du médicament cl 15% de ('ensemble d
"industrie de la contrefaçon. Dans le même temps, les médicaments contrefaits laisaient chez les consommatel'
des milliers de morts, cf sur cc point DIALLO. article précité, p. 17-18.
201 Ibid.
202 Loi n° 90/03 I du JO août 1990 précitée.

291
agricoles ou naturels qu'ils savaient être falsifiés ou contrefaits, corrompus ou toxiques ou des
203
substances médicamenteuses falsifiées ou contrefaites.
L'exigence de la répression des fraudeurs n'est pas neutre, elle n'est pas non plus
nouvelle. Elle s'explique en de nombreux cas par la prédominance de l'idée de la protection des
consommateurs, singulièrement lorsque la falsification est nuisible à la santé de l'homme ou
204
lorsqu'elle est toxique.
Au Xyè siècle - pour ne citer que cet exemple du Moyen Age français -, l'on ne
plaisantait pas avec les fraudeurs. A l'encontre des contrevenants, les peines étaient assez sévères
et bien adaptées. On pouvait lire :
« Tout homme qui aura vendu du beurre contenant « Navets, pierres ou autres choses»
sera bien curieusement attaché à notre pilori, puis ledit beurre sera rudement posé sur sa tête et
laissé tant que le soleil ne l'aurait entièrement fondu. Pourront les chiens venir le lécher et le
menu peuple l'outrager par de telles épithètes diffamatoires qui lui plaira sans offenser Dieu ni le
roi.
« A tout homme qui aura vendu du lait mouillé sera mis un entonnoir dedans la gorge et
ledit lait mouillé sera entonné jusqu'à temps qu'un médecin ou un barbier dise qu'il n'en peut
plus, sans danger, avaler davantage. »205
Barbares de telles sanctions? On peut se demander si notre civilisation du XXè siècle qui
laisse quasi-impunément des producteurs ou distributeurs faire avaler à des millions de
consommateurs de multiples produits trafiqués ou de tonnes de produits chimiques à haute dose
n'est pas plus « sauvage» que celle qui faisait entonner à l'auteur de ces fraudes ses propres
produits '1206
Il est, certes, impossible de retourner à de telles sanctions, mais il serait aussi inadmissible
de laisser impunis les auteurs des fraudes massives lesquels déversent des quantités considérables
des produits falsifiés ou contrefaits et nocifs pour les utilisateurs. Pour les pays africains, terrains
203 B. BOULOC : ~< La loi de 1905 en tant qu'instrument de la sécurité des consommateurs », in «Sécurité des
consommateurs et responsabilité du fait des produits défectueux », colloque des 6-7 novembre 1986 précité, p. 15.
1
204 N'GUYEN-THANH, thèse précitée, p. 76, n° 184.
205 L. BIHL : Consommateur, défends-toi !, éd. Dénoël 1976, p. 11-12.
j
206 BIHL : Consommateur, défends-toi !, éd. Dénoël 1976, p. 11-12.
'i

292
de prédilection des fraudeurs, il est urgent de prendre des mesures dissuasives afin d'assurer le
maximum de sécurité de leurs populations. Le but des sanctions, c'est d'empêcher les coupables
de causer de nouveaux dommages à leurs concitoyens ou autres et de dissuader les autres d'en
commettre de semblables207 ; après tout c'est la protection de l'intérêt public, donc de l'intérêt
général qui est en jeu. Et pour le sauvegarder, il ne faudra pas seulement se contenter de
sanctionner les coupables, il faudra aussi faire barrage à la vente des produits falsifiés ou
contrefaits.
b) La protection du consommateur par l'obstacle à la vente
des produits falsifiés ou contrefaits et des produits assimilés.
Si la falsification est ainsi reconnue comme étant un acte grave, elle doit, autant que
possible, être prévenue, voire empêchée de produire ses effets. La loi doit non seulement
mCrImmer la falsification proprement dite, mais aussi un certain nombre de faits connexes ou
assimilés.
Au nom de l'intérêt public, donc général, les actes pouvant n'avoir en droit cormnun
qu'un caractère préparatoire du délit de falsification devraient être punis comme un délit
consommé, au moins d'une peine propre à le prévenir par son pouvoir d'intimidation.
Les pouvoirs publics devraient aussi, au nom de l'intérêt général, sanctionner l'exposition.
la mise en vente ou la vente des produits falsifiés ou assimilés, ou des produits propres à effectuel
la falsification, ainsi que la provocation à leur emploi par le moyen des brochures, circulaires
208
prospectus, affiches, annonces ou instructions quelconques.
Il n'est pas nécessaire que le
207 BIHL : «Le droit pénal de la consommation », G.P., 29 mai 1986, p. 360.
20B On peut citer, à titre d'exemple, la décision du tribunal correctionnel de Paris en date du 7 mai 1968 (GP 3
août-3 septembre 1968) dans laquelle les juges ont reconnu coupable du délit de mise en vente et de venle d
produits propres à effectuer la falsilication des denrées alimentaires, un industriel spécialisé dans le domain
\\ d'antiadhérance des métaux et qui proposait aux fabricants de poêles antiadhésives un traitement au Iluon. Il lel
livrait des acides destinés à la Iixation du fluon, notamment de l'acide chromique dont les propriétés toxique
cancérigènes et allergènes sont bien établies. La couche extérieure au fluon était par elle-même dépourvue
toxicité, mais elle n'était pas totalement imperméable et laissait passer des liquides qui pouvaient être contami,;.
par la surface sous-jacente; l'acide chromique pouvait se transformer à une température dc 450°C en oxyde (
chrome, substance soluble en milieu acide et susceptible de contaminer les aliments acides.

293
produit utilisé soit lui même interdit, mais seulement qu'il soit propre ou apte à effectuer la .
f 1 'f"
1
f
209
a SI lcatlon ou a contre açon.
La limitation ou l'élimination de la fraude passe aussi par la lutte contre la détention et la
vente des denrées alimentaires corrompues ou toxiques, lesquelles sont assimilées au délit de la
falsification, alors même que ces denrées n'ont fait l'objet d'aucune falsification.
Si la falsification implique une altération par la volonté de l'homme, la corruption et, dans
certains cas la toxicité, suppose l'altération d'une denrée par elle-même ou par accident. 2lO Ce
n'est pas la corruption ou la toxicité que la loi se doit de punir, mais le fait d'offrir des
marchandises corrompues ou toxiques au public, voire le fait de les détenir sans motif légitime. Et
ceci suppose un contrôle sérieux et rigoureux.
La corruption existe lorsque l'altération est assez profonde pour que la marchandise
offerte comme denrée alimentaire soit impropre à l'alimentation à laquelle elle est destinée. Le
caractère de corruption résultera souvent de dispositions de la réglementation impérative qui,
pour de nombreux produits, détermineront' les conditions dans lesquelles la denrée est
corrompue. Dans tous les cas, la question de savoir si un produit est ou non corrompu est un
problème de fait soumis à l'appréciation souveraine des juges du fond.
La toxicité quant à elle n'est pas à confondre avec la corruption. Elle peut sans doute
provenir de celle-ci lorsque la décomposition organique provoque un développement des toxines.
Mais la toxicité peut provenir d'autres causes, notamment des propriétés d'une denrée à l'état
naturel ou du traitement que l'on a fait subir à la marchandise. 211 De façon générale la toxicité se
définit comme la «caractéristique d'une substance dont l'ingestion à des doses minimes ou
normales peut provoquer chez le consommateur normal des accidents pathologiques et présenter
'
d
212
un anger pour sa sante»
.
209 Par exemple, cass crim 20 avril
1961, Bull. Crim. 1961, p. 410 ; JCP 1961, 12285, note 1 VIVEZ: la
détention d'acide monobromacétique en vue du nettoyage des fUts n'cst pas légitime, alors qu'aucun tcxte ne
permet que cet acide puisse être mis en contact d'une façon quelconque avec les denrées alimentaires; cass crim
Il février 1967, S. 1967, p. 129, note LIOTARD: détention de Ferrocyanure de Potassium.
210 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 77.
211 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 77. Une denrée alimentaire qui doit être conservée au rroid jusqu'à sa
consommation peut devenir toxique si elle est absorbée sans que cette précaution ait été respectée.
212 l-C FOURGOUX et G. JUMEL: Traité de droit alimentaire, Frantec, Paris 1968. n° 15.2-2.

294
Mais la santé et la sécurité sont deux mots très importants dans le vocabulaire
consumériste. Leur protection ne saurait se limiter à la lutte contre les seules atteintes portées à la
qualité intrinsèque des biens de consommation. Pour une protection complète, il faudrait aussi
incriminer les actes contraires à la loyauté des transactions, notamment les tromperies sur les
marchandises.
§II - La protection du consommateur par l'incrimination des
tromperies sur les marchandises.
L'article 114 du code pénal togolais du 13 Août 1980 dispose: « Sera puni de deux mois
à deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 20.000 à 200.000 F.CFA ou d'une de ces
peines seulement, tout commerçant ou fabricant qui aura mis en vente, livré ou proposé de
mauvaise foi des marchandises, objets, instruments ou substances n'ayant pas la qualité loyale et
marchande, ou n' ayant p~s le poids ou la mesure indiquée. »
Ce texte, qui réprime le délit de tromperie, reste en revanche muet sur sa défmition.
Qu'entend-on par tromperie sur la marchandise? La réponse à cette question requiert une étude
de la notion (A). La connaissance de celle-ci nous permettra d'examiner avec certitude et clarté
les divers cas de tromperies susceptibles d'être sanctionnés pour le bien du consommateur (E).
A - Notion générale de tromperie.
Une tromperie suppose une action, allégation ou présentation susceptible de marquer 1<:
réalité. 213 En d'autres termes, la tromperie sur la marchandise se caractérise par la volontt:
d'induire en erreur le contractant acheteur.
II ressort de cette définition que la notion de «manoeuvre déloyale »214 constitu(
l'essence même de la tromperie. Celle-ci se distingue alors du dol civil, même si elle garde avel
.
"
1
~ l 'i
Ul certams pOInts communs.- .
213 Lamy droit éconorniquc 1993. n° 9328.
214 N'GUYEN-THANH, thèse précitée, p. 78.

295
Si la caractérisation du dol civil est subordonnée à l'existence d'un contrat, il en va
autrement du délit de tromperie générale sur la marchandise qui, pour exister, n'a nullement
besoin d'un contrat. Il constitue outre
mesure un stratagème, une malice du vendeur en vue
d'attirer toute une foule de contractants. Il préexiste au contrat lequel constitue le but à atteindre.
la [malité de sa mise en oeuvre. Cette illégitimité de son existence devrait conduire les législateurs
africains à le réprimer et à prohiber «tout procédé tendant à créer un équivoque », toute
216
indication de nature à tromper l'acheteur.
Ce n'est malheureusement pas le cas dans les pays
africains pourtant reconnus comme étant les foyers de ces pratiques déloyales. Certains pays
comme le Togo ont dans leur code pénal des dispositions réprimant le délit de tromperie sur la
marchandise. Mais cette existence des textes répressifs confine à une fiction juridique, car
rarement appliqués pour les besoins de la cause.
La protection des intérêts des consommateurs eXige non seulement une véritable
réglementation du domaine, mais aussi une application effective et rigoureuse des textes pénaux
existants. Certes, les actes susceptibles d'être réprimés auront un lien plus ou moins étroit avec le
contrat qui, en définitive, fait acquérir un bien au consommateur.
Mais ils ne s'y intègrent pas totalement, car la répression des fraudes se traduit par des
actions pénales au service de l'intérêt collectif des consommateurs, et qui n'ont forcément pas
pour soutien des rapports contractuels déterrninés. 217
A ce propos, il a été jugé qu'en matière pénale, «le juge n'a pas à se préoccuper des
conditions commerciales et juridiques du contrat, l'intervention de l'agent des fraudes étant
extérieure au contrat lui-même ».218
S'agissant toujours du dol civil, il est prouvé qu'il est une « erreur provoquée» et n'est
sanctionné qu'en cas d'influence déterminante de l'erreur provoquée sur le consentement du
contractant. Ce qui n'est pas le cas en droit pénal lequel sanctionne la tromperie en elle-même. Il
215 Ibid.
216 Cass crim 25 mars 1965, D. 1965, J, p. 231 ; cass crim 24 mars 1958, D. 1958, J, p. 583, note AUTESSERRE.
217 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 78.
218 Nîmes 1er juillet 1955, D. 1955, J., p. 747, note LIOTARD; comparer Trib. Corr. Avesnes 3 avril 1962, ICP,
1962, II, 12933, note A. P. ; Gaz. Pal. 1962, II, p. 51.

296
ne s'agit pas de prononcer la nullité d'une vente pour erreur dirimante, maIs de réprimer une
manoeuvre déloyale de nature à causer préjudice au consommateur. 2J9
En effet, si la tromperie en elle-même est considérée comme un délit susceptible de
sanction, il serait logique de subordonner la tentative de tromperie à la même sanction. Ceci
s'explique par le souci d'étouffer, avant qu'il ne soit trop tard, tout agissement déloyal. Peu
importe alors dans ce cas que la vente n'ait pas été parfaite au sens civil du terme; dès lors que la
tromperie s'est manifestée par un commencement d'exécution suffisamment grave et caractérisé,
Il
d · d' ~
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e e se Olt
etre repnmee.~~
Une telle sanction se justifie par le fait que, des tromperies, en elles-mêmes minimes,
insignifiantes, si elles ne sont pas sanctionnées dans l'immédiat, peuvent avoir, par leur répétition,
des conséquences fâcheuses pour les consommateurs, tout particulièrement lorsque les achats
sont réguliers et ont pour objet des biens de consommation courante. 221
De façon générale, la tromperie, lorsqu'une réglementation impérative existe pour les
produits et services - ce qui n'est malheureusement pas le cas dans les pays d'Afrique - consiSte à
faire croire que les produits et services mis sur le marché sont conformes à la réglementation en
vigueur alors qu'ils ne le sont pas.
Cependant, comme pour la falsification, le délit de tromperie n'est pas forcément lié à
l'existence d'un texte de loi, réglementaire ou non. La référence à l'usage professionnel est
largement suffisante. L'utilisation d'une dénomination conforme à l'usage professionnel est un
acte constitutif de tromperie susceptible de sanction. 222
La tromperie est donc un acte d'appréciation. Elle consiste à garantir une qualité qui, en
réalité, n'existe pas; ou à créer une confusion entre des biens de qualités différentes. C'est le cas
notamment du marchand de volailles qui fait passer pour « poulets fermiers» de véritable~
219 L'existence du délit de tromperie n'exclut pas des délits plus graves tels que l'escroquerie, lorsqu'il y a cmplo
de manoeuvres frauduleuses au sens de l'article 405 du code pénal français. Tel est le cas du vendeur qui a pris ur
faux nom et dont la manoeuvre a été corroborée par les allirmations d'un tiers. Exemple: cass crim 5 octobrt
1967, GP 1967, lI, p. 308 ; Rev. Sciences crim. 1968, p. 367, obs. BOUZAT.
220 La tentative de tromperie est soumise aux conditions du droit pénal général. Un commencement d'exécution cs
donc nécessaire. Mais la jurisprudence depuis longtemps admet que celui-ci est sul1ïsanllnent caractérisé p,'
l'exposition au public de la marchandise n'ayant pas les qualités annoncées: casso crim. 14 avril 1885, S. 1885
p.311.
221 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 78, n° 192.

297
poulets issus d'un élevage industriel,223 de la vendeuse de pagnes qui présente ses tissus de
qualité inférieure «java» comme étant de véritables «wax hollandais »224, du marchand de tapis
qui met en vente des tapis faux ou de jute reproduisant des dessins orientaux comme étant de
véritables et authentiques tapis d'Orient,225 du boucher qui mélange une viande malsaine,
insalubre, provenant d'animaux abattus clandestinement - parce que malades - à de la viande
inspectée par les services vétérinaires afm de la faire passer pour viande saine aux yeux du
"26
consommateur,~
etc.
Dans ces différents cas, nous nous trouvons en présence d'un fait matériel de tromperie
dès lors qu'est employé un procédé qui tend à créer l'équivoque ou la confusion dans l'esprit du
public sur la qualité réelle de la marchandise et qu'ainsi le professionnel n'a pas loyalement
informé sa clientèle.227
Dans tous les cas, il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait tromperie, qu'un préjudice ait été
causé à la victime. Ce qui est pris en considération et sanctionné, c'est l'intention frauduleuse et
non ses conséquences. Ainsi, la vente des denrées altérables ,après la date limite de consommation
constitue une tromperie, sans qu'il y ait lieu de savoir si les aliments litigieux étaient devenus
impropres à la consommation ou non. 228
De même, le délit est consommé si une automobile est vendue comme neuve dès lors que
ce véhicule a été déjà immatriculé et bien qu'il soit « techniquement neuf »229. « En défmitive, le
préjudice en matière de tromperie réside moins dans une atteinte à des intérêts matériels ou
m Lamy droit économique 1993, na 9327.
m Trib. corr. Angers 3 mai 1961, Ann. fais français 1962, p. 190 ; cass crim 28 mai 1974, GP 1974, II, p. 620.
224 L1 distribution des pagnes au Togo est assurée par les célèbres « Nanas Benz » dont la réputation commerciale
dépasse largement les frontières nationales. Dans ce commerce de pagnes, le «Wax » représente la qualité
supérieure et le « Java» la qualité intermédiaire. Seules les initiés (femmes commerçantes le plus souvent) sont à
même de faire la distinction entre les deux degrés de qualité. Aussi prolite-t-on très souvent de la naïveté, voire de
l'ignorance de certains clicnts, cn majorité les femmes venant des milieux ruraux, pour les tromper sur la qualité
désirée. On peut ainsi leurs vendre le pagne «Java» aux prix du «Wax» dès lors que l'unité de «Wax»
demandée fait défaut dans le lot des pagnes restant à distribuer.
225 Angers 29 mars 1962, JCP 1962, II, 12681, note DELPECH.
226 Cf l'article de presse malienne de K. MAÏGA : « Abattage clandestin: un constat alarmant », Enquête publiée
par l'Hebdomadaire« Les Echos» du Mali, na 231 du 29 janvier 1993.
227 Le mutisme ou les réticences mêmes du vendeur peuvent'c<)f1stituer le fait matériel de tromperie: Paris 14 nov.
1968, D 1969, J, p. 61, note D. S.
228 Casso crim. 8 mars 1983, l3ul!. Crim., p. 161.
229 Casso Crim. 26 mai 19!D, l3ul!. Crim 1983, p. 391 ; R.T.D.Com 1984, p. 512, obs. BOUZAT; dans le même
sens Angers 2 juin 1983, GP 1984, I, p. 115, note DAVERAT : substitution sur un véhicule d'occasion, d'un
moteur de 9 CV à un moteur de 7 CV.

298
corporels que dans un mépris de consentement de l'acheteur. Celui-ci s'est trouvé frustré de la
vérité»2J0.
Il nous reste maintenant à cerner les divers cas de tromperies dont le consommateur peut
être l'objet et qui nécessitent un encadrement législatif dans les pays africains si l'on veut
protéger les consommateurs contre les vendeurs indélicats.
B - Les divers cas de tromperie sur la marchandise.
Il existe plusieurs sortes de tromperies sur les marchandises. Sans trop aller dans
les détails relatifs à chaque type de tromperie, on se contentera d'en exposer les cas les plus
rencontrés. Mais comme nous avons déjà eu à le préciser, nous nous inspirerons du droit français
régissant le domaine et qui, somme toute, est susceptible de transposition dans les pays d'Afrique
pour des raisons précédemment avancées. L'énumération nous est donnée par l'article 1er de la
loi française du 1cr Août 1905.
- Tout d'abord, il ya la tromperie sur l'espèce: l'espèce est, en effet, définie comme 1::
« réunion de plusieurs êtres, de plusieurs choses qu'un caractère commun distingue des autres dL
même genre »231. On distingue notamment des espèces différents parmi les plantes, les animaux
Le fait de tromper sur la race d'un animal, par exemple, constitue une tromperie sur l'espèce.232
- Il Y a ensuite la tromperie sur la nature : la nature est l'ensemble des caractère
particuliers, des dispositions qui distinguent les êtres ou les choses. La tromperie sur la nature e~
réalisée lorsque la manoeuvre porte sur les caractéristiques même du produit.2.13 Il est d'aiIleur
difficile de tracer avec précision la limite entre les notions de «nature» et de «qualitÉ
substantielles»234.
:!JO 1. PRADEL: Rev. Sciences Criminelles 1984, p. 336.
1.11 cf Le Dictionnaire « Larousse ».
m Paris 22 novembre 1922, D.P. 1924, Il, p. 78; BOUZAT: obs. R.T.D.Com. 1977, p. 358.
m Par exemple: cass crim 8 juin 1965, Bull crim 1965, n° 228 : margarine vendue pour du beurre.
2J4 Lamy droit économique 1993, n° 9335. infra.

299
- Il Y a aussi la tromperie sur la composition ou sur la teneur en prmclpes utiles. La
tromperie sur la composition existe lorsque la composition du produit n'est pas conforme à celle
annoncée sur l'étiquette235 ou lorsqu'un produit n'a pas la composition correspondant à sa
236
dénomination de vente.
Quant à la tromperie sur la teneur en principes utiles, son existence se
caractérise par la perte, par le produit vendu, notamment à l'épreuve du temps, de l'efficacité
attendue par l'acheteur. 237 Tel serait également le cas de l'eau de robinet vendue comme une eau
minérale.238
On dénombre aussi dans l'énumération de l'article 1er de la loi de 1905, d'autres cas de
tromperies telles que les tromperies sur l'origine ou sur l'identité de la marchandise. Il y a
tromperie sur l'origine lorsqu'un vendeur fait passer pour «fermiers» des poulets issus d'un
élevage industriel 2390U de « produits de la ferme» des fruits et légumes provenant d'une société
de vente en groS. 240 Lorsque l'origine de la marchandise est la cause déterminante de la vente, la
connaissance par le vendeur que l'indication sous laquelle il présente sa marchandise est de nature
à faire croire à l'acheteur qu'elle a une origine différente de son origine réelle suffit à constituer
l'élément de mauvaise foi passible de sanction. 241
Quant à la tromperie sur l'identité, l'article 1er la défmit comme « la livraison d'une
marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l'objet du contrat )). Pour la réaliser, l'auteur
procède quelquefois à la suppression, à l'altération ou à la modification des signes distinctifs de la
marchandise. La tromperie sur l'identité peut, par exemple, s'opérer par le remplissage des
récipients (bouteilles, boîtes, etc.) avec des produits autres que ceux qui sont revêtus de cette
242
marque.
A l'énumération de la loi de 1905, la loi du 10 janvier 1978 relative à la protection des
consommateurs en· ajoute d'autres cas. Il s'agit des tromperies qui portent sur « l'aptitude à
235 Paris 24 juin 1974, GP 1975, l, p. 61, note MEGRET.
236 Trib. Corr. Dijon, 8 otobre 1985, B.LD. 1986, n° 9, p. 37 : fromage blanc ne présentant pas le taux de matière
sèche requis; Bordeaux, 4 octobre 1989, B.LD. 1990, n° 10, p. 24 : albumine d'oeufs dans des foies gras de
canard.
237 Casso Crim 4 février 1860, D.P. 1866, l, p. 239 : livraison de graines de vers à soie devenues stériles.
\\ 238 Trib. COlT. Paris, 10 février 19 mars et 10 avril 1987, B.LD. 1988, n° 1, p. 70.
239 Casso Crim. 28 mai 1974, G.P. 1974, II, p. 620.
240 Toulon 29 avril 1982, cité par BOUZAT, Rev. Sciences criminelles 1982, p. 138.
241 Lamy droit économique 1993, n° 9338.
242 Casso Crim. 8 octobre 1974, D. 1975, p. 610, note R. PLAISANT: mise en vente des « Pastis» dans une
bouteille de « Ricard ».

300
l'emploi, les risques inhérents à l'utilisation d'un produit, les contrôles effectués, les modes
d'emploi ou les précautions à prendre ».
Mais de tous les cas, la tromperie sur les qualités substantielles est de loin le cas le plus
243
rencontré.
Si l'affirmation n'est pas discutable, il subsiste cependant un petit problème
concernant sa caractérisation. Que faut-il entendre par «qualité substantielle» ? Plusieurs analyses
ont été avancées à ce niveau.
En droit civil, une théorie objective se fonde sur les qualités qu'on attribue normalement à
un produit. ~.j4 Néanmoins, la jurisprudence semble s'être fiXée dans le sens d'une conception
subjective et considère les qualités que le contractant avait personnellement en vue et sans
245
lesquelles il n'aurait pas contracté.
Autrement dit, «les qualités substantielles sont les
caractéristiques d'une marchandise ou d'un service que la victime a eu en vue lorsqu'elle a
contracté et en l'ensemble desquelles elle n'aurait sans doute pas contracté, ou aurait contracté à
des conditions différentes »246.
En pratique, la jurisprudence ne fait aucune distinction entre ces différentes conceptions.
Tantôt, elle se réfère à ce qui « normalement» ou « dans la plupart des cas» détermine l'acheteur
à contracter.~47 Dans ce cas, l'existence d'une réglementation publique ou d'usages constants fera
présumer le caractère substantiel de la qualité. Tantôt, elle considère la catégorie particulière de
consommateurs que le vendeur s'engage à satisfaire.~48
Mais, un fait demeure patent: toutes ces formes de tromperie sont monnaie courante dans
les pays africains. Il est donc du devoir des pouvoirs publics de prendre toutes les dispositions
nécessaires pour assainir les marchés de toutes ces pratiques déloyales. C'est un des aspect~
essentiels de l'équilibre des prestations réciproques, lequel constitue l'essence même de la
reconnaissance du droit du consommateur à la protection. Sauront-ils s'inspirer des réalités ou de
W
Lamy droit économique 1993, n° 9341.
244 AUBRY ct RAU: Cours de Droit civil français, tome IV, par BARTIN, 6è éd. W 343 bis.
245 Exemple: Paris Il mars 1947,0. 1949,J,p.148;cassciv27lcv. 1957,0. 1957,J,p.231.
w. Lamy droit économique 1993, n° 9341.
247 Cass; crim. 18 octobre 1966, JCP. 1967, Il, 14986, note 1. VIVEZ; Trib. Corr. Seine, 22 juin 1962, G.P. 196~
II, p. 99. Vente sous la dénomination fausse de rôti de viande préalablement attendrie à l'insu du consommateur.
248 Un boucher vendait sous la dénomination fausse de viande « Kasher » de la viande provenant d'animaux no
immolés selon les rites de la religion israélite. Cette viande avait toutes les qualités substantielles et nutriti,·
requises généralement par les consommateurs. Mais le tribunal correctionnel de Scîne a jugé que le délit·
tromperie était constitué car, eu égard à la clientèle à laquelle était destinée la viande, une qualité considér~
su stantielle faisait défaut: Trib; corr. Seine, 6 janvier 1964, G.P. 1964, 1, p. 447.

301
l'expérience des pays rompus dans le domaine des traitements de ces comportements malsains
pour assainir leurs marchés locaux? Tout dépend du sens et du degré des responsabilités que l'on
se donne au sein de la société à l'intérieur de laquelle l'on évolue.
r
,

CHAPITRE II:
Les relations entre professionnels et consommateurs se nouent au moyen d'un contrat de
vente bien ou de prestation de service, actes juridiques I~s plus rencontrés dans le commerce.
En effet, qu'est ce qu'un contrat au sens juridique du terme?
Le Code civil français auquel nous nous référerons tout au long de ce travail pour des raisons
déjà avancées plus haut, nous donne la définition du contrat dans son article 1101 D'après ce
texte « le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers
une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose»
Le contrat est donc un instrument juridique créateur de droits et d'obligations pour les
parties contractantes. Ces droits et obligations sont-ils équitablement réparties entre les parties ')
Cette question pose le problème de l'équilibre des prestations réciproques entre les parties à un
contrat, question plus que jamais d'actualité de nos jours dès lors qu'il s'agit d'un contrat conclu
entre un professionnel et un consommateur.
Pour certains auteurs le contrat est une oeuvre de volonté des parties, et en tant que tel, il
est conforme à leurs intérêts. Nul ne peut vouloir ce qui n'est pas conforme à ses intérêts.

303
C'est en peu de mots la thèse qu'a soutenue Kant l . Cela conduit à l'équilibre des intérêt~
des contractants. Dans cette même logique, Fouillée, un philosophe du XIX è1llc siècle a déclan
dans une formule ramassée: «Qui dit contractuel, dit juste »2 Cette maxime de Fouillée sc
vérifie-t-elle aujourd'hui? Le droit contractuel contemporain participe-t-il de cette logique?
Si la formule de Fouillée peut trouver sa justification au siècle précédent - cela l'est.
encore à vérifier -, on peut difficilement l'admettre de nos jours. Au XIXème siècle, J'industrie e
le commerce se pratiquaient de façon artisanale. Les relations entre producteur et consommateu
avaient un caractère personnet3. Quelle que puisse être la nature de la transaction, le contrat (d,
vente ou de prestation de service) se concluait à la suite d'une discussion portant sur ses élément
essentiels ..J C'était le règne de l'autonomie de la volonté.
Avec la période contemporaine, le contrat a changé de physionomie. De très nombreuse
ventes, et sans doute la plupart, se concluent dans des conditions tout à fait différentes, lesquelle
sont difficilement conciliables avec les postulats de base sur lesquels repose le principe d,
l'autonomie de la volontéS
L'utilisation de contrats types et l'absence de négociation qui caractérisent les condition
de vente ou de prestation de services sont le résultat de la centralisation des pouvoirs de décisiol
dans [es mains des producteurs et des distributeurs. Elle est aussi la conséquence directe de
relations contractuelles de masse.6
Le nombre et la répétition de vente, la rapidité nécessaire de leur conclusion,7 e
l'intervention des préposés qui n'ont aucun pouvoir de décision, interdisent en fait, dans 1
distribution moderne des biens, toute négociation susceptible de modifier les modèles prérédigé
1 Kant: Eléments métaphysiques de la doctrine du droit, Traduction de BARNI, 1854, p. 53, cité par ROLAND (
BOYER: Droit civil, Obligations, 2. Contrat, Litec, 1989. p. 5.
2 Par ROLAND et BOYER: op. cil. p. 5.
1 GHESTIN et DESCHE : La vente, LGDJ 1990, p. '6, ne 20 et les références citées .
.J J. BOULANGER: Volonté réelle et volonté déclarée. in Liber Amicorum Baron Frédéricq, 1966, 1. l, p. '9(
200, cité par GHESTIN et DESCHE, op cit, n° 20.
5 GHESTIN et DESCHE : op. cit, p. 17, voir notamment l'évolution contemporaine du droit des contrats, Journé.
R. SAVATIER, J985, « Le droit eontemporain des contrats », Travaux c(x)rdonnés par L. CADIET, préface de (
CORNU, 1985-' 986, par GHESTIN et DESCHE, op. Cil .. p. 17.
(, GHESTIN et DESCHE : op. cit, p. 17 ; voir notamment l'évolution contemporaine du droit des contrai
Journées R. SAV ATIER, 1985, « Le droit contemporain des contrats", Travaux c(x)rdonnés par L. CADlf
préface de G. CORNU, 1985-1986, par GHESTIN et DESCHE, op. cil., p. 17.

304
par les services spécialisés. R L'agencement du contrat qui sert à limiter, smon à mesurer les
risques qu'entend assumer son rédacteur,9 constitue un élément indispensable à la gestion des
entreprises 10. L'adhésion du contractant est psychologiquement facilitée par l'utilisation des
textes imprimés, le plus souvent intangibles, et par le sentiment d'une égalité de traitement,
facilement confondue avec la justice. 11
A cela s'ajoute l'intervention de plus en plus fréquente de l'ordinateur qUi accentue
encore l'abstraction des relations contractuelles. Incapable de traiter une donnée qui ne figure pas
dans son programme, l'ordinateur, même s'il peut engager un dialogue, n'admet aucune
discussion. 12
Une autre paire de manche est celle de la complexité des produits vendus et des services
rendus et avec eux celles de leur circuit de production et de commercialisation. Aux rapports
d'antan, le plus souvent personnels, ce sont substituées les relations contemporaines empreintes
d'anonymat. 13 Une simple pièce de monnaie dans un distributeur adapté à un produit suffit
largement pour se le procurer. Ce peut être un café, une boisson ou un aliment quelconque ou
toute autre chose susceptible d'être vendue par un tel procédé.
Toutes ses pratiques commerciales ont pour effet d'entamer considérablement la situation
du consommateur en la fragilisant davantage devant un professionnel que la technique rend de
plus en plus fort. Certes, les marchés sont de plus en plus fournis et abondent de produits. Les
relations où le contractant conserve un visage humain n'ont pas non plus disparu.
Mais elles ont perdu de leur efficacité, leur sens commercial basé sur la négociation. Les
fùières qu'empruntent, à travers les frontières,
les produits mis sur les marchés sont
inextricablement complexes. Dans cette « valse» commerciale, ou les produits vendus sont
7 ibid., H. G. LESER: «L'évolution du contrat en droit allemand avec un bref aperçu du droit anglais », in
« L'évolution contemporaine du droit des contrats ». Journées R. SAV ATIER, PUF 1986, p. 84, n° 13, par
GHESTIN et DESCHE, op. cil., p. 17.
8 G. BERLIOZ: op. cil. (thèse précitée), p. 13, nO 12 ; sur les contrats d'adhésion, ou « contrats de guichet» et le
transport de masse, voire R. RODIERE: Droit des transports terrestres et aériens, Sirey 1973, p. 155 et 158 ; i~
éd. 1977, n° 278, p. 327 s.
9 GHESTIN et DESCHE : op. cil., p. 17, n° 20.
10 G. BERLIOZ: op. cil. P. 20 et suiv., nOs 23 et sui v., A. WEILL et F. TERRE: Obligations, 2~ éd. N° 95. Ces
auteurs montrent bien la complexité du contrat d'adhésion et son adaptation technique aux besoins de l'entreprise.
11 GHESTIN et DESCHE: op. cil. p. 17, n° 20.
12 Ibid., BERLIOZ: op. cit p. 24 et suiv., n° 34 à 40.
13 Th. IVAINER ; « De l'ordre technique à l'ordre public technologique », lCP 1972, l, 2495, doctrine, n° 2.

305
souvent de haute technicité, l'éthique ne suffit plus à protéger l'utilisateur ou la victime. 14 On
recherchera moins désormais la bonne ou la mauvaise foi que la compétence ou l'incompétence,
en nous opposant le profane au technicien,15 sinon le consommateur au professionnel.
S'agissant de la technique, il faut reconnaître qu'elle sépare et oppose de nos jours l'initié
au non initié à tel point qu'elle est devenue « une source permanente de déséquilibre dans les
rapports humains où, à tous les échelons des filières économiques le degré d'initiation est
inégalement réparti »16. Ce déséquilibre est plus remarqué dans les rapports entre professionnels
et consommateurs. Il s'accentue chaque jour davantage - du moins dans les pays africains - par le
pouvoir reconnu à la production et à la distribution de masse et aux entreprises prestataires de
services de prérédiger les contrats qu'elles proposent aux consommateurs.
Cette «rédaction unilatérale du contrat est une source de graves abus »17 car elle permet
d'y insérer des clauses abusives à leur avantage. Comme l'observe un rapport de la chambre de
commerce et de l'industrie de Paris,18 l'abus peut intervenir «dès lors que le rédacteur d'un
contrat uniformément applicable à un grand nombr~ de contractants en profite pour insérer des
clauses qui allègent ses propres obligations et alourdissent sans contrepartie celles de ses
cocontractants ».
Ce même rapport cite quelques unes des clauses les plus courantes l9 : « le vendeur fixe le
prix de la vente selon son propre tarif au jour de la livraison ; il se réserve la possibilité de
modifier les caractéristiques de la chose commandée sans réduction du prix; il s'exonère en tout
ou partie de la garantie légale en matière de vices cachés; la date de livraison est donnée à titre
purement indicatif et le retard n'engage aucune responsabilité; ... le transport de la fourniture
s'effectue aux risques exclusifs de l'acheteur; ... des clauses pénales sévères à sens unique sont
prévues ; des clauses de prorogation tacite ou automatique lient le client pour une durée :
14 Th. IVAINER ; « De l'ordre technique à l'ordre public technologique ", lCP 1972. I. 2495, doctrine, n° 3.
15 ibid, n° 3.
16 Th. IV AINER ; « De l'ordre technique à l'ordre public technologique ", lCP 1972. I. 2495. doctrine, n° 5.
17 GH ESTIN ct DESCHE : op. cil. p. 17
IS « Les clauses abusives dans les contrats de consommation ", p. 3, rapport présenté au nom de la Commission d'
commerce intérieur par M. GIBERGUES, dont les conclusions ont adoptées par la chambre de COlllmerce et (.
l'Industrie de Paris dans sa séance du 8 avril 1976, cité par GHESTIN et DESCHE, op. cil., p. 18.
19 Le rapport précise que celle liste est extraite de l'article de MM PRELLE et ALESSI: « Les contrats d'adhésior
et la défense du consommateur », in G.P. 1973, doctrine, p. 713.

306
l'insertion de clauses compromissoires ou attributives de compétence favorise une seule
.
20
partie» .
De façon générale, la production en série et la consommation de masse ont fait perdre au
contrat sa réelle valeur juridique. La prérédaction du contenu par le professionnel met le
consommateur dans une situation délicate. Ne pouvant en discuter les termes qui lui sont
imposés, il n'a plus qu'un choix à faire: «adhérer ou renoncer à acheter, à se déplacer... »21
observant le contrat moderne, un auteur a souligné: « Au lieu d'être... le moyen de concilier les
intérêts divergents des parties, le contrat devient le moyen par lequel une partie dicte ses
conditions. Le contrat d'adhésion sert à fonder un nouvel ordre féodal »22
Une chose reste certaine aujourd'hui; c'est que les mouvantes réalités technologiques ont
changé la physionomie des rapports contractuels. L'inégalité des parties à un contrat de vente ou
de prestation de services n'est plus à démontrer. Elle est plus qu'évidente. Elle s'impose à telle
enseigne qu'elle influe sur l'équilibre du contrat. Peut-on bannir ce déséquilibre? Cela est moins
sûr, le progrès technique ne. cessant de l'aggraver. Mais, on peut tout de même le corriger, le
réduire entre les parties par certains artifices juridiques, telle que la loyauté contractuelle.
Exiger la loyauté dans les rapports contractuels, c'est exiger des parties, en l'occurrence
de la partie la plus forte et dont le pouvoir peut être de nature à fausser l'équilibre des
prestations, un certain comportement, une certaine dose d' honnêteté, de sincérité susceptible de
préserver la justice contractuelle. Une telle exigence amène, a contrario, à lutter automatiquement
contre les comportements déloyaux dans les rapports professionnels/consommateurs et contre
tous les abus dans les contrats.
Si cette correction du déséquilibre du contrat dans les rapports entre professionnels et
consommateurs se ressent de plus en plus dans les pays développés, on constate avec un certain
désarroi qu'elle n'est même pas à l'ordre du jour dans le calendrier des législateurs des P.Y.D.,
20 BERLIOZ: Le contrat d'adhésion, thèse précitée, p. 37, nO 59.; A. RIEG : Contrat type et contrat d'adhésion,
Trav. Rech. Inst. droitcomp. De Paris, 1. XXXIII 1970, p. 109, n° 9, par GHESTIN et DESCHE, op. cil. P. 18 ; -
adde Rapport du comité d'experts auprès du Conseil de l'Europe sur la protection des consommateurs con Ire les
clauses abusives des COl1trats, C.C.l. (76) 8, 31 mars; ce rapport comporte une liste ct une analyse détaillée des
clauses abusives les plus courantes en Europe, par GHESTIN ct DESCHE, op cit, p. 18 ; -G. PAISANT : Dix ans
d'application de la réforme des articles 1152 cl 1231 du code civil relative à la clause pénale (loi du 9 juillet
1975), Rev. Trim. Droit civil 1985, p. 648, n° 2, -voir GHESTIN : Contrat, formation, n° 609 et suiv.
21 BIHL : Consommateur, défends-toi!, Dénoël 1976, p. 126.
22 BERLIOZ: Le contrat d'adhésion, op. cil. P. 127.

307
en paniculier des pays d'Afrique. Elle est donc loin du début. Pourtant le moment est venu de
voler au sécours du consommateur de ces pays en mettant en oeuvre des législations susceptibles
de rétablir cet équilibre rompu par le progrès technique et la complexité croissante des produits
mis sur le marché. Il ne s'agit pas d'un simple devoir législatif, c'est une urgence sociale que la
logique de l'économie de marché impose aujourd'hui aux pouvoirs publics de chaque pays. Cela
l'est encore plus pour ceux des P.Y.D., en l'occurrence ceux des pays d'Afrique.
Le rétablissement de l'équilibre contractuel entre les parties passe donc nécessairement
par une lutte à tous les niveaux:
De
façon
générale
par
la
lutte
contre
la
déloyauté
dans
les
rapports
professionnels/consommateurs (Section 1).
- De façon particulière par la lutte contre les clauses abusives dans les contrats (Section II).

308
SECTION 1:
LA
LUTTE
CONTRE
LA
DELOYAUTE
DANS
LES
RAPPORTS
PROFESSIONNELS - CONSOMMATEURS.
Nous avons présenté en partie dans le chapitre précédent le rôle des pouvoirs publics dans
la promotion des droits du consommateur. L'autre dimension de la tâche qui leur incombe
consiste à s'impliquer davantage dans l'instrument juridique qui naît des rapports entre les
professionnels et les consommateurs des suites des transactions commerciales qui s'opèrent entre
eux, c'est-à-dire le contrat. Il s'agit, en d'autres termes de veiller à la protection de l'équilibre du
contrat issu des relations entre les deux partenaires économiques. Or, qui dit équilibre dans un
contrat de consommation, dit loyauté du professionnel dans ses rapports avec le consommateur.
Le rôle des pouvoirs publics est de l'amener à respecter cette obligation au moyen d'une
législation appropriée.
Mais lutter contre la déloyauté, c'est aussi veiller à ce que le consommateur obtienne des
garanties dans ses achats quotidiens, car l'équilibre d'un contrat se mesure aussi à travers les
degrés de satisfaction que l'on obtient du bien acheté. En cas de non-satisfaction, seule la
garantie permettra au contractant consommateur de rééquilibrer sa prestation. Or, cette voie de
recours, cette vision de l'équilibre du contrat très présente dans les sociétés de consommation
occidentales fait défaut en Afrique. La protection de l'équilibre du contrat passe aussi par la mise
en place des législations susceptibles d'obliger les professionnels à garantir leurs ventes.
Deux principales idées se dégagent donc de cette analyse. Elles concenent :
- d'un côté la loyauté du professionnel dans la vente ou la prestation de service (Sous-Section 1)
- de l'autre la garantie du professionnel dans la vente des biens ou dans la prestation de service
(Sous-Section II)

309
Sous-section 1 : L'obligation de loyauté du professionnel
dans la vente ou la prestation de service.
La vente est Je contrat le plus usuel dans le commerce. Pour sa validité, un échange de
consentements réciproques, éclairés et lucides s'avère nécessaire. Si la lucidité est fonction de
l'état d'esprit de chaque individu, de chaque partie au contrat, l'éclairage du consentement de
l'acheteur relève du domaine du vendeur, seule partie au contrat maîtrisant ou connaissant pour
le moins la marchandise objet de la transaction. Or, éclairer un consentement, c'est informer
suffisamment son cocontractant. Et l'information dans ces conditions doit être loyale. Il pèse
donc sur le professionnel vendeur un devoir d'information obligatoire vis-à-vis de son
cocontractant consommateur (§I). Et ce devoir d'information se doit d'être exécuté loyalement
( ~II).
SI - L'obligation d'information du professionnel dans la
vente ou la prestation de service.
« L'obligation est le lien de droit par lequel une personne est tenue à une prestation
envers une autre »23. Si l'on s'en tient à cette définition, on peut dire que le professionnel est tenu
à une certaine obligation vis-à-vis du consommateur en ce qui concerne son information. Ce
devoir d'information du professionnel est souvent mal ou pas du tout compris en Afrique (A).
Comprendre ce devoir, c'est mettre en évidence les exigences qui s'y attachent (B).
A - Le problème relatifà l'information du professionnel
dans la vente ou prestation de service en Afrique.
Après avoii' dans le principe N° 31 appelé les gouvernements des pays en VOle de
développement
à mettre
en
place
des
programmes
d'information
et
d'éducation
dl
2.l G. RIPERT et J. BOULANGER: Traité de Droit civil, l. Il, Ohligations, L.G.DJ. 1957, p. l, n° 2.

310
consommateur, les rédacteurs des P.O.P.D. invitent également les professionnels à en faire
autant. Le principe N° 3S dispose «les entreprises devraient, le cas échéant, organiser des
programmes d'information et d'éducation du consommateur sur des sujets
pratiques et
pertinents, ou participer à l'exécution de tels programmes ».
i
j
Ce principe montre que le consommateur africain souffre d'un manque d'information et a
besoin de ce fait du concours aussi bien des pouvoirs publics que des professionnels de droit
privé.
En effet, dans les pays africains, outre les informations relatives à l'affichage des prix sur
les marchandises en vente, il est rare, voire impossible, de voir des dispositions législatives ou
réglementaires
obligeant
les
professionnels
à
fournir
des
informations
spécifiques
au
consommateur lors de la conclusion du contrat.
S'agissant des dispositions relatives à l'obligation d'affichage des prix, on peut citer à titre
d'exemple le texte togolais de l'Ordonnance du 22 Avril 1967. Ce texte dispose : «le prix de
toute marchandise vendue en magasin doit être clairement indiqué avec sa dénomination exacte et
conforme aux usages commerciaux soit sur l'objet ou sur son emballage ou récipient, soit sur une
pancarte afférente à un même lot d'objets identiques, en monnaie locale et par unité d'objet de
poids ou de contenance» (article 9 al. 1). Il en va de même du texte de l'article 20 al. 1 de la loi
camerounaise du 10 Août 1990 qui dispose: «Tout vendeur ou prestataire de service doit, par
voie de marquage. d'étiquetage, d'aftichage ou par tout autre moyen approprié, informer le
consommateur sur le prix ».
A J'exception du texte camerounais de l'article 20 al.2 qUI eXige «pour les biens de
consommation durable» une information du professionnel sur « les caractéristiques essentielles et
garanties », toutes les autres législations, notamment l'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 est
muette sur la question. Ce qui laisse au professionnel une marge de manoeuvre assez large et
qu'il utilise souvent à son avantage.
En général, J'information fournie par le professionnel au consommateur africain est
empreinte « d'astuces frauduleuses ». Loin d'éclairer son consentement, elle vise plutôt à
masquer la réalité pour l'amener à contracter. La loyauté dans J'inforlnation fait défaut, ce qui a
souvent des retombées néfastes sur l'équilibre du contrat. On n'informe pas pour éclairer le choix
du consommateur, mais plutôt pour l'amener à acheter à tout prix, même si J'objet acheté n'est

311
pas conforme à ses besoins, aux besoins exprimés par le client dès ses premiers contacts avec le
vendeur. Cette déloyauté fait de nombreuses victimes dans la consommation, Je plus souvent dam
les rangs des populations rurales et analphabètes.
La loyauté dans la vente veut que l'information qUI oriente le client se fasse dans b
règles de J'art, c'est-à-dire selon certaines exigences y afférentes à ]a profession commerciale. 1
n'appartient qu'aux pouvoirs publics de les faire respecter au moyen de la réglementation.
B - Les exigences relatives à l'obligation du professionnel
d'informer le consommateur.
Plusieurs exigences mettent à la charge du professionnel un devoir d'information vis-à-vi~
du consommateur. 11 y a les exigences d'ordre moral (a), les exigences liées à la négation dt
l'information (b) et les exigences liées à la positivité de l'infonnation (c).
a) Les exigences morales du devoir d'information du professionnel.
Si nous partons du fait selon Jequelle professionnel dans les pays africains n'est soumis
sauf exception,24 à aucune contrainte législative ou réglementaire en matière d'information vis-à-
vis des consommateurs, on peut tout de même trouver sur le terrain de la morale des obligation~
lui incombant dans ce domaine.
Pour ce qui est de la morale, il est souvent observé que celle-ci a « une fin individuelle, 1<:
perfection personnelle de l'homme »25, contrairement au droit qui a pour objet « l'organisation d,
la vie en société»26. Le Doyen Carbonnier a dit à ce sujet: « le droit a pour but le maintien d(
28
l'ordre social; la morale, le perfectionnement intérieur de l'homme >P. .Thomasius
de son côt(
29
s'est exprimé à ce sujet à travers une formule classique, laquelle fut reprise par Kant . Selon ce
24 Loi camerounaise n° 90/031 du 10 août 1990 précitée, article 20.
25 «La morale vise à l'épanouissemenl spirituel de l'homme» : Ph. JESTAZ, « Pouvoir juridique Cl pouvoi
moral », R. T. D. Civ 1990, p. 631.
26 MARTY ct RA YNAUD : Droit civil, tome l, Introduelion générale. Sirey, p. 62 ; LARROUMET : Droit dvi
tome 1, introduction à l'étude du droit privé, Eeonomiea, 1984, n° 56, p. 31.
27 J. CARBONNIER : Droit civil, tome 1, Introduction - Les personnes, PUF 1987, n° 3, p. 27.
28
Philosophe et jurisconsulte allemand (1655-1728) eilé par M. FABRE-MAGNAN dans sa thèse
« t
l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie », LGDJ 1992, p. 38.
29 Infra, note 246.

312
auteur, le droit s'occuperait des actes extérieurs, la morale des actes intérieurs ou intentions.
Mais cette formule n'a pas reçu l'adhésion de certains auteurs qui ont émis des critiques en son
30
encontre .
De toute façon, et par opposition à la morale, les règles du droit, dès lors qu'elles
existent, sont sanctionnées par l'Etat en cas de violation. Kelsen dit à ce sujet: « L'ordre social
que nous appelons la morale est composé de normes prescrivant ou permettant une conduite
déterminée, mais ne statuant pas d'actes de contrainte destinés à sanctionner la conduite
contraire»31. En revanche, «le caractère obligatoire de la règle de droit est garanti par des
sanctions qui sont appliquées par les autorités étatiques ou sous leur contrôle»32.
Du côté de la jurisprudence, certaines décisions ne sont pas restées insensibles aux
éléments de la morale. Même si celles-ci « ne sont pas un reflet complet de la morale, (elles) en
constituent tout de même un révélateur assez intéressant» 33.
En effet, pendant longtemps, « la jurisprudence (française) a paru poser, sur ces points, un
principe négatif. Qui ne parle pas ne trompe pas. La morale n'impose pas de donner des armes
contre soi,34 en révélant à celui avec qui l'on traite les inconvénients qu'il peut y avoir pour lui à
35
s'engager . Il appartient donc à l'autre contractant de défendre ses intérêts.
Mais avec le net développement des obligations d'information à la charge des
professionnels rencontrées dans toutes les législations protectrices des consommateurs adoptées
10 Voir par exemple H. BATIFFOL: La philosophie du droit. Que sais-je? PUF 8" éd. 1989, p. 121. L'auteur
critique celle formule en ce qu'elle méconnaît qu'un système juridique qui ne tiendrait pas compte des inlentions
serail non seulement barbare, mais aussi impraticable.
JI KELSEN : Théorie pure du droit, adaplé de l'allemand par H. THEVENAZ, éd. De la Baconnière-Neuchâtel,
coll. Elre et Penser, Cahiers de philosophie, i éd. J 988, p. 78, cité par FABRE-MAGNAN, thèse précitée, p. 38.
12 GHESTIN et GOUBEAUX : Traité de droit civil, sous la direction de lGHESTIN, Introduction Générale,
LGDJ, 3" éd. 1990, n° 30, p. 25.
33 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 39.
14 Celle idée se retrouve dans un principe fondamental de procédure pénale reconnu dans de nombreux droits
étrangers. Ainsi, en droit anglo-saxon, un témoin a le droit de refuser de témoigner si son témoignage risque de
l'exposer à des poursuites pénales: c'est ce qu'on appelle la « sclf~incriminary evidence» ; V. M. ZANDER
« Cases and Materials on the English Legal System », éd. Weiden Icld and Nicolson, 5" éd. 1988, P 368, par
FABRE-MAGNAN, thèse précitée, p. 39. Celle excuse n'est cependant pas admise en droit positif français: voir
G. STEFANl, G. LEV ASSEUR etB. BOULOC: Procédure pénale, précis Dalloz 1i éd. 1984, n° 530, p. 605.
35 1 FLOUR et J.-L. AUBERT: Droit Civil, les Obligations, vol. 1 : L'acte juridique, coll. U. Armand Colin, 5è
éd.1991,parAUBERT,no211,p.I64;6èéd.1994,nos214s,p.147s.

313
36
par les Etats occidentaux
et certains Etats ayant introduit les principes des Nations Unies dans
leurs droits nationaux;17 a fait que ce raisonnement commence par être en recul.
Ce développement s'est fondé sur un élargissement du concept de bonne foi et de loyauté
dans le droit des contrats, lui-même sujet à l'inégalité croissante injuste et choquante qui est
progressivement apparue entre des parties à un contrat. 38
Faute de législations contraignantes en matière d'information du consommateur, nous
pensons que la morale en elle même peut être une source d'obligations du professionnel dans ce
domaine.
«En
matière
d'obligation
d'information,
les
attitudes
moralement
souhaitables
pouvaient être ainsi schématisées: d'une part, penser tout ce que l'on dit, d'autre part, dire tout
ce que l'on pense »39 dans le bon sens. La première exigence - penser tout ce que l'on dit - est
classique. Le contractant ne doit rien affirmer sans être parfaitement sûr de ce qu'il avance, et ce,
pour ne pas induire l'autre en erreur. Cette réalité ici a l'aspect du devoir traditionnel de ne pas
40
41
mentir , fondamental en morale . Mais il faut, en second lieu, dire tout ce que l'on pense. 42
Cette obligation e~t apparue beaucoup plus récemment en droit. II s'agit ici d'un degré
supplémentaire de loyauté et de franchise puisque le contractant est tenu d'agir de façon positive.
Dès lors qu'il connaît une information dont il soupçonne l'importance pour son interlocuteur, il
36 C'est le cas notamment de la France avec les lois y afférentes: loi n° 78/22 du
10 janvier 1978 relative à
l'information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit; loi n° 78123
du 10 janvier 1978 relative à la protection et à l'information des consommateurs sur les produits et services; loi
n° 891421 du 23 juin 1989 relative à ['information et à la protection des consommateurs ainsi qu'à diverse
pratiques commerciales.
37 C'est le cas notamment de la Chine avec sa loi du 31 oetobre 1993 précitée. Il en va de même des Etats dc
l'Amérique Latine, de l'Australie ct de la Nouvelle Zélande ainsi que des Etats des Caraïbes, voir en ce sens D.
HARLAND, article précité, p. 197 et suiv.
38 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 39.
39 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, P. 41.
40 Ibid. Il s'agit ici d'un aspect particulier de ce devoir de ne pas mentir, car celui qui ment est en principe sûr
qu'il ne dit pas la vérité, tandis qu'une obligation d'information peut être sanctionnée lorsque le débiteur a donné
une information dont il n'était pas sûr qu'elle soit fausse.
41
V. E. KANT :Métaphysique des moeurs, panie, doctrine de la vertu, librairie philosophique J. VRIN,
Bibliothèques des textes philosophiques, 1968, introduction et traduction de A. PHILûNENKû. Selon "auteur.
« La plus grande transgression du devoir de l'homme envers lui-même considéré uniquement comme être moral
(envers l'humanité en sa personne), est le eontraire de la véracité: le mensonge ».
.
42 Ceci ne vaut cependant pas en dehors des contrats, car la morale n'exige jamais de tout dire. Alain déclarait ~
ce sujet: «Il y a deux manières de ne pas mentir: l'une est de dire tout ce qui vient, et qui ne vaut rien; l'aue
qui est de ne pas trop croire aux improvisations de l'humeur. Prise ainsi, la conversation polie est bonne;'
ALAIN: Les passions et la sagesse, bibliothèque de la Pléiade, édition établie et présentée par G. BENEZE
préface de A. BRlOûUX, N.R.F. Gallimard, 1972, p. 1225 et suiv.

314
4J
doit la lui communiquer. Cette obligation de l'information doit être spontanée.
Cette obligation
s'explique ainsi par le fait que l'on ne doit pas profiter de la faiblesse d'autrui, lequel ne peut
avoir conscience des informations importantes pour lui. 44
Cette situation, cet état de faiblesse caractérise le consommateur africain qui, dans la
majorité des cas, achète des produits dont il ne maîtrise aucune donnée technologique et
informationnelle.45
Certes, la morale exige de ne pas tromper autrui; mais il serait encore plus bénéfique au
consommateur d'imposer une obligation positive d'aider autrui. Les droits africains devraient
prendre en considération ces deux exigences: passer d'une exigence de loyauté entre les parties à
une volonté d'aider et de protéger la partie la plus faible, impliquant un devoir positif d'informer
celui qui ne peut pas s'informer. C'est ce sur quoi vont porter les développements qui vont suivre
: non à la négation d'infomlation, oui à la positivité d'information.
b) Les exigences liées à la négation de l'information.
Ces eXIgences sont liées à la morale et reposent sur des principes très simples :
l'obligation faite au professionnel de ne pas tromper autrui. On dénombre dans ce domaine
plusieurs principes moraux admis depuis fort longtemps en droit positif. Ainsi en est-il des
obligations de bonne foi, d' honnêteté, de loyauté46 pesant sur les parties à un contrat.
L'obligation de loyauté'~7 désigne «soit la sincérité contractuelle (dans la formation du
contrat), soit la bOllnefoi contractuelle (dans l'exécution du contrat) »48. Elle« impose de façon
générale de s'abstenir de tout dol. Cette obligation pèse tant sur les débiteurs que sur les
créanciers ; le débiteur ne doit rien faire qui empêcherait le créancier de retirer l'avantage
escompté du contrat; le créancier ne doit rien faire qui rendrait l'exécution du contrat plus lourde
~3 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 41 ; sur l'information spontanée, v. infra.
~~ Ibid.
~) infra.
~6 V. Y. PICOD : Le devoir de loyauté dans l'exécution du contral, thèse Dijon 1987 ; STARCK: Droit civil,
Obligations, tome 2, Contrat, Litec, 3è éd. 1989, par ROLAND ct BOYER, nOs 1142 ct suiv., p. 468 ct suiv. ; Y.
JOUHOUD, «La loyauté dans les contrats d'assurance »,
rapport de
la Cour de Cassation,
1985, la
Documentation Française, p. 9 ct suiv.
47 PICOD : thèse précitée; STARCK: op. cil. nOs 1142 ct sui v .
48
Ibid. ; v. également le vocabulaire Juridique, Association H. CAPITANT, publié sous la direction de G.
CORNU, PUF, 2" éd. revue et augmentée 1990, p. 488.

315
au débiteur »49. Ainsi s'analyse l'obligation de loyauté dans le contrat entendue comme un.
obligation de ne pas nuire à autrui.
L'obligation d'honnêteté quant à elle est issue directement de la morale. C'est un
expression moins usitée dans le vocabulaire juridique50. Cela n'empêche cependant pas certaine
juridictions du fond d'en faire, dans leurs arrêts, une ligne de conduite bien stricte pour les partie
à un contrat. Dans un arrêt du 21 Novembre 197551 la cour d'appel de Paris a estimé qu'au-dei
« des dispositions légales, la bonne foi contractuelle ajoute un devoir d'honnêteté élémentaire d
renseigner le cocontractant sur tous les événements propres à l'intéresser, sans avoir à lui laissE
le soin ou la chance de le découvrir dans les cent quarante pages d'un règlement d
copropriété ». De son côté la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a, dans un arrêt du 2
Février 1991,52 soutenue une cour d'appel, qui avait annoncé une faute d'une agence immobilièr
venderesse dans une transaction commerciale. La faute de l'agence a consisté à ne pas avo
déclaré à la partie acheteuse les charges affectant les terrains vendus ou les éléments équivalent:
En conséquence, la cour d'appel a assimilé cette abstention ou omission dans l'information à u
« manquement à la bonne foi et à l' honnêteté ».
Quant à la bonne foi proprement dite, elle est une obligation morale entendue au ser
classique du terme en droit des contrats. C'est l'obligation « d'agir» de bonne foi, d'avoir u
comportement loyal qui regrouperait, selon le vocabulaire juridique de l'association Hen
Capitant53 , « le souci de coopération », « l'absence de mauvaise volonté », « l'absence d'intentic
malveillante» et «l'obligation d'agir avec loyauté dans le respect et de la fidélité al
engagements ». L'exécution du contrat de bonne foi est, selon la plupart des auteurs, soit ur
49 STARCK: Obligations, Contrat, op cil. n° 1143, p. 470.
50 Selon le dietionnaire Lillré, l'honnêteté est « la con!()fInité à ce qui est honnête ».Est honnête ce qui (
« conforme à la bienséance », ou eneore « conrorme à la probité, à la vertu », dictionnaire lillré, tome
Gallimard, Hachelle, 1967, p. 585.
51 Paris 21 nov. 1975, D. 1976, somm. p. 50.
52 Casso Civ. 26 rév. 1991, Bull. Civ., J, n° 73, p. 47.
53 Vocabulaire Juridique de l'Association H. CAPITANT précité, 1990, p. 104.

316
54
obligation d'exécuter Je contrat conformément à l'intention des parties , soit une obligation
d'exécuter fidèlement le contrat doublé d'une obligation de coopération.55
La bonne foi dans le contrat suppose également que l'on ne doit pas «chercher à tirer
avantage d'une situation qui fait échec à certaines prévisions contractuelles, à un certain équilibre
de prestation »56. On doit reconnaître la bonne foi « comme un principe directeur de la formation
du contrat. L'obligation d'être de bonne foi vise à maintenir un certain équilibre entre les parties
à un contrat »57. Ainsi, lors de la conclusion tout comme pendant l'exécution du contrat, une
partie ne doit-elle pas chercher à tirer avantage de la vulnérabilité de son cocontractant. La
dépendance d'une partie à l'autre ne doit pas être source d'exploitation abusive de la partie la
plus faible par la partie la plus puissante?
Ces trois principes qui sont universels, s'accommodent donc à toutes les sociétés et
peuvent de ce fait justifier, comme c'est le cas le plus souvent, une obligation d'information entre
cocontractants. Mais, à mesure que la technique évolue, les rapports d'inégalité s'accentuent
entre cocontractants. Aussi de nouvelles obligations d'information, plus exigeantes, ont-elles été
progressivement mises à leur charge. Ce sont les exigences liées à la fourniture d'une information
positive.
c) Les exigences liées à la positivité de l'information.
Il s'agit ici des exigences positives, lesquelles obligent le professionnel à aider autrui aux
fins d'équilibre des prestations réciproques par le canal de l'information utile. Et s'il Y a une
chose qui fait défaut aux consommateurs en Afrique, c'est bien cette information utile que le
professionnel est censé leur fournir.
54 Selon AUBRY ct RAU : « Les conventions doivent être exécutées de bonne foi, c'est-à-dire conformément à
l'intention des parties, ct au but en vue duquel elles ont été formécs », (Droit civil français, 6" éd. 1942, par
BARTIN, 1. IV, § 346). Rcchercher l'intention des parties implique interpréter le contrat ct c'est pourquoi, pour
de nombreux auteurs, le commentaire de l'article 1134-3 du code eivi 1 est rait avec cel ui des articles 1156 ct
suivants dudit Code. Ibid, par ESMEIN 1952.
5~ STARCK: Obligations, Contrat, 1. 2 op. cil. nOs 1144 ct suiv. ; voir également VOUIN : La bonne foi, notion ct
rôle actuels en droit privé français, thèse BORDEAUX 1939, n° 43; PICOD : « L'obligation de coopération dans
1
l'exécution du contrat », JCP 1988, l, 3318
56, FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 43
57, FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 43
58 Ibid.

317
Si l'on revient à la «règle morale », on pourrait dire qu'elle ne posait par le passé aucune
difficulté. Ce qui signifie que tout contrat était plus ou moins juste; les rapports de force entre les
cocontractants étant à l'époque très faibles. Kant a dit à ce propos: « Quand quelqu'un décide
quelque chose à l'égard d'un autre, il est toujours possible qu'il fasse quelque injustice, mais
toute injustice est impossible quand il décide pour lui-même »59.
Mais avec notre ère, les inégalités se sont accrues entre cocontractants avec l'aide du
progrès technique. 60 Ces rapports de force inégale sont moins marqués en Occident qu'en
Afrique où les consommateurs, en majorité analphabètes ou d'un degré d'instruction limité,
consomment à l'aveuglette des produits issus d'importation, parfois très dangereux pour leur
santé et leur sécurité parce que de qualité douteuse. 6l Pour éviter « l'exploitation de l'homme par
l'homme que la morale réprouve» et pour « assurer la loyauté du contrat »62, il a été nécessaire
de moraliser le contrat dans les pays occidentaux. Ce qui a donné naissance à une nouvelle règle
morale en matière d'obligations contractuelles en général, et d'obligation d'information en
particulier, facteur « d'équilibre» des contrats. Aujourd'hui, dans ces pays, le législateur et les
juges veillent particulièrement à la protection de la partie la plus faible dans les contrats. Cétte
évolution qui s'est traduite de façon notable, a donné naissance à ce qu'on appelle aujourd'hui
droit de la cOllsommatioll ou des COllsolllllzatelirs. 61
La réduction des inégalités dans les rapports contractuels en Afrique passe par la
nécessaire moralisation du contrat. Le législateur tout comme les juges ont effectivement un rôle
à jouer dans ce sens. Cela exige d'ores et déjà que l'on introduise de nouveaux concepts
généraux, notamment certains devoirs moraux traditionnels dans le droit des contrats, devoirs tels
que la coopératioll64 , la collaboratioll65 , l'elltraide, l'assistallce66 entre les parties, « autant de
59 KANT: Doctrine du droit, Traduction BARN!, p. 169, cité par FABRE-MAGNAN, thèse précitée, p. 43.
60 IVAINER : article précité; STARCK: op cit, nOs 269 et suiv., 623 et suiv., 645 et suiv.
61 Supra, 1ère Partie, Chapitre l, Section II.
62 RIPERT : La règle morale dans les obligalions civiles,LGDJ, 4è éd. 1949, na 40, p. 74.
6:1 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 43.
(,.j STARCK: op cit, nOs 1144 et suiv. ; PICOD : « L'obligation de coopération dans l'exécution du contrat », JCP
éd (G) 19HH, l, 3318 ; G. MORIN«
Le devoir de coopération dans les contrats internationaux », in Droit et Pral.
du COIll. Inter. 19HO, p. 9 et suiv.
65
J. MESTRE«
D'une exigence de bonne foi à un esprit dc collaboration », R.T.D.Civ. 19H6, p. 101
«L'évolution du contrat en droit privé français », in «L'évolution contemporaine du droit des contrats ..
Publieations de la Faculté de Droit et des Sciences Sociales de Poitiers, Journées R. SAVAT1ER (Poitiers, 24-25-
octobre 1985) PUF 1986, p. 41 ct suiv., et spécialement p. 51 « un souhait de collaboration ».
66 M. GENDRE-DEVOIVRE : « Collaboration et assistance entre parties au contrat », thèse Clermont 1 198/.

318
termes qui font désormais partie des index de tous Jes ouvrages juridiques généraux »67. Il s'agit
là de nouveaux principes moraux, caractéristiques de l'évolution actuelle de la morale en
.
68
'bl
d
d"
l'
'l'b
169
vIgueur
et susceptJ
es e con UIre a un nouve eqUI 1 re contractue
.
Les législations modernes convergeraient dans ce sens, vers la recherche d'une certaine
70
justice contractuelle, justice dans laquelle l'accent serait mis sur la bonne foi contractuelle.
S'agissant de l'obligation de coopération71 , elle existe aussi bien lors de la formation du
contrat que pendant son exécution et consiste en un « travail en commun )72 entre les parties au
contrat. Elle s'oppose cependant à l'exigence traditionnelle en ce que « la bonne foi permet
simplement, de façon en quelque sorte négative, de sanctionner les déloyautés manifestes ») alors
que « l'exigence, ou, plus exactement, l'esprit de collaboration est plus formateur des caractères
en impliquant, de manière positive, des attitudes, des comportements convergents au service d'un
intérêt contractuel commun )73.
Elle est en revanche une application de bonne foi dans l'exécution des contrats, prise au
sens Jarge du terme.74 « L'obligation de coopération exiSte en pratique toutes les fois que les
parties n'ont pas des intérêts complètement antagonistes, mais poursuivent au contraire, au moins
pour partie, des objectifs communs )/5. Il s'agit des situations particulières qui se rencontrent
aussi dans des contrats particuliers tels que des contrats internationaux à long terme qui ont pour
but la réalisation d'un projet en commun, ou encore des contrats de livraison de matériel
informatique qui ont la définition en commun des objectifs poursuivis par l'acheteur. 76
L'obligation de collaboration, quant à elle, a une portée très relative. Elle signifie que
l'on aide autrui sans contrepartie bien précise, bien définie. Elle crée à la charge du créancier,
67 FABRE-MAGNAN: lhèse précilée, p. 44.
6~ Ibid.
69 J.-1. BARBIER! : « Vers un nouvel équilibre contractuel? Recherche d'un nouvel équilibre des preslalions dans
la formalion cl l'exéculion du conlrat », thèse Toulouse 1981 ; MESTRE: « L'évolulion du contrat en droit privé
français », article précilé, spécialemenl p. 46 el suiv. : « Un souci d'équilibre ».
70 G. CORNU: « Regards sur le Titre III du Livre III du Code Civil », Cours de D.E.A. 1976, n° 260.
71 DEMOGUE a écril à cc propos: « Les conlrats formenl une sorte de microcosme. C'esl une petile société où
chacun doil travailler dans un bUI commun, qui cst la somme des buts individuels, poursuivis par chacun,
absolument comme dans la société civile ou commerciale. Alors, à l'opposilion entre le droil du créancier cl
l'intérêt du débiteur, lend à se substituer une certaine union», Traité des Obligations, lome VI, 1931, n° 3.
n Vocabulaire Juridique de l'Associalion H. CAPITANT précité, p. 146.
/
7.1 MESTRE: « D'une exigence de bonne foi à ('esprit de collaboration », article précité, p. 100, n° 2.
74 WEILL ct TERRE; Droil Civil, Les Obligations, précis Dalloz 1986. nO 357, p. 361.
75 FABRE-MAGNAN: lhèse précitée, p. 45.

319
l'obligation de faciliter l'exécution du contrat dans les limites dictées par les usages ct la bonne
foi »77. On retrouve une fois de plus la bonne foi dans la manifestation des obligations
contractuelles. Pour ce qui est de l'obligation d'assistance, elle se définit comme une obligation
d'apporter « une aide d'ordre matériel, moral ou physique (soutien, appui, soins) à une personne
en difficulté»78.
De toute évidence, il est aujourd'hui consacré que le développement de toutes ce~
obligations d'information dans les contrats s'inscrit dans une stricte logique: la protection du
contractant le plus faible. Elle participe notamment d'une obligation de collaboration et
79
d'assistance
et traduit l'obligation de chacun de ne pas profiter de la faiblesse ou d'une faiblesse
quelconque de son cocontractant.80
On retrouve ici l'idée de justice cOllllllutative. Cela dit, si les parties au contrat ne sonl
pas d'égale puissance - ce que l'on rencontre plus ouvertement en Afrique -, si l'une ne connaît
pas certaines informations essentielles, le contrat peut ne pas être juste. C'est cette idée de justice
sociale qui explique parfois l~ sévérité croissante manifestée souvent à l'encontre de certain~
professionnels tenus, d'après les tribunaux, d'une obligation d'information particulièremenl
lourde. sl
Certains auteurs vont même jusqu'à dire qu'ils sont tenus à une moralité un pel
particulière. Selon M. Le TOURNEAU82 , les devoirs généraux du professionnel «ne se limiten
pas à de froides obligations, disons de technicien, car le professionnel pratique des vertus
L'honneur, l'amitié, la courtoisie, la patience, tiennent leur rôle dans la vie des affaires ». Il Vi
même jusqu'à citer d'autres vertus telles que la politesse ou la générosité.
76 Ibid. n° 53, p. 45, et n° 438.
77 STARCK: op. cil. nO 1144, p. 471.
78 Vocabulaire Juridique de l'Association H. CAPlTANT précité, p. 72.
79 GENDRE-DEVOIVRE : thèse précitée.
80 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 45, n° 54.
81
Lorsque la chose, objet du contraI peut s'avérer dangereuse lors de son usage par le consommateur. :
jurisprudence fait ohligation au contractant prolCssionncl de prendre l'initiative d'cn informer l'autre et de Il
demander dans quelles conditions il compte l'utiliser, sans attendre qu'on lui rasse connaître l'usage auquel c'-
était destinée, voir en ce sens, cass cam 15 juin 1976, hull civ IV, n° 207, p. 179 ; dans le même sens, COI11 6 '\\
1976, bull. civ IV, nO 308, P. 258.
"
82 Ph. LE TOURNEAU « Les prolcssionncls ont-ils du coeur? », D.
1990, p. 22 ; - La responsabilité ci\\'i
professionnelle, Economica 1995, p. 5 et suiv.

320
Tout le problème est que ces vertus ne sont pas seulement réservées ou valables aux seuls
professionnels. Elles le sont aussi pour les individus en général, même si Jeur respect est à un
degré moindre.
Le droit dispose donc de nombreux moyens pour faire pénétrer la« règle morale dans les
obligations civiles »8:1. De nombreux devoirs généraux tel que le devoir classique de bonne foi
peuvent servir de fondement à des obligations d'information dans les contrats. 84 Tout le problème
est de savoir comment va s'exécuter, dans la pratique, ce devoir d'information qui pèse d'une
manière ou d'une autre sur le professionnel?
§II - L'exécution du devoir d'information du professionnel
dans la vente ou prestation de service.
Le professionnel vendeur ou prestataire de service est tenu de fournir information aux
consommateurs. Pour la mise en oeuvre de J'obligation, il faudra distinguer selon que
l'information à fournir est obligatoire (A) ou facultative, voire spontanée (B).
A - L'exécution du devoir d'information obligatoire du professionnel.
L'obligation d'information obligatoire qui pèse sur le professionnel s'exécute selon des
modalités bien précises (a) ; elle s'articule autour d'un contenu bien défini (b). Pour son bon
respect, il serait souhaitable de subordonner sa violation par des sanctions appropriées (c).
a) Les modalités d'exécution du devoir d'information
obligatoire des professionnels.
Le professionnel dans ses rapports avec les consommateurs est tenu d'un devoir principal
: celui de renseigner son cocontractant sur le contrat en cours de formation (1). Mais certaines
circonstances peuvent l'amener à dépasser le cadre restreint de renseignement et aller au-delà. On
S.l RIPERT : La règle morale tians les obligations civiles, LGDJ, 4" éd. 1949.

321
glisse ainsi tout doucement dans le domaine réservé à la mise en garde et au conseil. Il s'agit là
des prolongements de l'obligation principale de renseignement (2). II faut bien dire que les
exigences relatives à l'infOlmation obligatoire ont un fondement juridique bien défini (3).
1 - Le renseignement comme modalité principale.
L'obligation de renseignement n'est pas à proprement parler une nouveauté de la période
contemporaineS). Mais elle a pris, de nos jours une dimension importante avec le développement
de
la
consommation
et
du
contrat
d'adhésion.
Ainsi,
rencontre-t-on
dans
les
pays
économiquement avancés, une multiplication des interventions législatives ou réglementaires86 en
vue de donner au contractant, surtout face au professionnel, une connaissance suffisante des
données contractuelles.
En quoI consiste cette obligation ? Elle consiste pour le professionnel à orienter la
décision
du
partenaire
consommateur.
Elle
a
pour
objet
d'informer
le, cocontractant
consommateur, de porter à sa connaissance certains éléments d'information de façon purement
objective, en vue de lui permettre de décider en toute liberté.87
Cette vision des rapports contractuels entre professionnels et consommateurs est l'oeuvre
de la doctrine. En effet, depuis plusieurs décennies déjà, elle a relevé à travers la jurisprudence88,
84 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 47 ; STARCK: op cit nOs 1140 et suiv.
85 Auparavant, on peut citer diverses manifestations: loi du 1er août 1905 relative à la répression des fraudes,
plusieurs fois modifiées; loi du 13 juillet 1930 imposant à l'assuré de déclarer exactement toutes circonstances de
nature à faire apprécier par l'assureur les circonstances qu'il prend à sa charge; loi du 29 juin 1935 sur la vente
du fonds de commerce obligeant le vendeur à énoncer dans l'acte de cession certaines mentions relatives i-
l'origine de propriété, aux charges grevant le fonds, au chiffre d'affaires-et aux bénéfices ...
86 Les textes français \\cs plus marquants sont les suivants: loi du 1er juillet 1971 sur le crédit différé (art. 54) ; 10
du 3 janvier 1972 sur le démarchage financier; loi du 22 décembre 1972 sur la vente et le démarchage à domicil<
; loi du 10 janvier 1978 en matière de crédit à la consommation; décret du 4 octobre 1978 pris sur l'application d(
la loi du 5 août 1905 en cc qui concerne les véhicules automobiles; loi du 22 juin 1982 dite loi QUILLIOT ; 10
bancaire du 24 janvier 1984 et le décret du 24 juillet 1984 ; loi du 12 juillet '1984 définissant la location-acccssim
à la propriété immobilière; loi du Il juin 1985 sur les contrats de capitalisation; loi du 23 décemhre 1986 tendan
à favoriser l'invcstissement locatif ... ; décret du 22 décembre 1987sur \\c contrat de garantic et de service après
vente.
87 STARCK: op cit n° 269, p. 113-114.
ère
- 88 La plus ancienne jurisprudence puhliée faisant, pour la 1
fois, rétërencc à une obligation d'instruire de
chose l'acheteur, date de la lin du XIXènl< siècle. A propos d'une vente de bicyclette, la cour de cassation a, dt
un arrêt du 27 juin 1893, D.P. 1893, II, 573, admis subsidiairement à un problème de vice caché cette obligatio~
Sur ['histoire de l'élaboration jurisprudentielle de l'obligation, voir DUCOULOUX-FA VARD : op cit, p. 115 1
suiv.

322
l'existence d'une obligation générale de renseignement au stade de la formation du contratR~ à
l'égard de celui qui ne peut pas s' informer9o.
C'est une obligation précontractuelle d'information, laquelle s'impose au professionnel
dans leurs diverses relations avec les consommateurs, profanes ou non.91 Certains auteurs ont
même pu écrire: « l'obligation de renseignement constitue l'une des composantes de l'équilibre
contractuel relative non seulement à la qualité et aux prix, mais aussi à l'utilisation de la
chose »92.
Vue sous cet angle, l'obligation faite au professionnel commerçant de renseigner le
consommateur sur ses marchandises n'est pas LIn modèle du genre. Si l'on prend exemple de
l'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967~-\\ il n'oblige les commerçants à informer les
consommateurs que sur le prix des marchandises (article 9 de ladite ordonnance précitée), le reste
des informations, pour la plupart essentielles. à la discrétion des professionnels. Or, en Afrique,
dans la majorité des cas, comme nous avons déjà eu à le sOLlligner~4, les dangers ou accidents de
la consommation ne surviennent pas parce q~e le consommateur a acheté tel ou tel produit plus
ou moins cher, mais parce qu'il y a eu mauvais usage, conséquence d'une insuffisance ou absence
d'information sur les caractéristiques, les modes d'emploi, voire les mises en garde des produits
consommés quotidiennement.
Quand on sait que l'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 reflète, en général, en ce qui
concerne l'information des professionnels, la physionomie des législations des pays africains, le
sort du consommateur africain n'est pas des plus enviables au monde. Un effort pour l'exigence
d'information plus utile du professionnel s'avère donc nécessaire. Cet effort, un seul pays (à
notre connaissance) jusqu'à ce jour l'a plus ou moins réalisé. Il s'agit de l'Etat du Cameroun.
Le législateur camerounais a, dans sa loi du 10 Août
1990 régissant
l'activité
commerciale, à travers l'article 20 de ladite loi, soumis le professionnel à une obligation
d'information dépassant le cadre de l'information sur le prix. Il exige du professionnel qu'il donne
H9 M. De JUGLART: « L'obligation de renseignement ». RT.D.Civ 1945. p. 1.
90 FLOUR ct AUBERT: Obligations, vol. l, éd. 1991. n° 21 l, éd. 1994, na 214 s.
91 LUCAS de LEYSSAC : « L'obligation de renseignement », in « L'information en droit privé », LGDJ 1978, [1.
306.
92 H. L. et J. MAZEAUD: Droit civil, T. Ill, vol. 2, Prinei[1aux contrats, 6 è éd., par de JUGLART. na 950, p. 256.
93 L'ordonnance togolaise na 67117 du 22 avril 1967 précitée. Le texte de celle ordonnance est inspiré par l'article
37-I-a de l'ordonnance française du 30 juin 1945.

323
. au consommateur des informations sur les caractéristiques essentielles et garanties, ainsi que les
conditions de vente des produits mis en circulation.
Quant aux modalités particulières de publicité des prix, des caractéristiques essent ielles et
des conditions de vente de certains produits ou services, elles pourront être déterminées par voie
réglementaire (article 20 al. 3 loi du 10 Août 1990). Pour la mise en valeur de l'information ct
pour les besoins de compréhension du consommateur, le texte de l'article 21.a) de la même loi
exige du professionnel qu'il délivre, «lors de chaque vente, une notice rédigée en français ou
anglais, rappelant les caractéristiques essentielles du bien en cause et précisant l'étendue et la
durée de la garantie accordée au client et rappelant en outre les dispositions relatives à la garantie
légale des vices cachés ».
La loi camerounaise, par rapport à l'ordonnance togolaise, a le mérite de mettre en
évidence tous les contours de l'obligation d'information ou de renseignement mise à la charge du
professionnel face au consommateur. Elle intègre dans la logique juridique la logique économique
c'est-à-dire la techni~ité croissante qui gagne chaque jour d'avantage la fabrication des produit.s
les plus courants. Elle prend aussi en considération une autre logique : la logique sociale du
consommateur africain lequel reste ignorant non seulement du mode de fabrication du produit
qu'on lui vend, mais aussi des composantes qui ont servi à sa confection.
Aussi, en raison de sa propre compétence technique ou professionnelle, le législateur met-
il à la charge du vendeur professionnel l' obligation de renseigner le consorrunateur profane qu'il a
en face de lui et à qui l'inexpérience ou l'incompétence empêche de s'informer véritablement.9.' Il
s'agit, pour le professionnel, d'une obligation liée à la compétence, donc à l'activité exercée, et
elle ne saurait s'étendre à des informations ne relevant pas de cette activité.96
Si la logique de l'obligation est admise, il subsiste tout de même un problème en ce qui
concerne son objet, voire sa source. L'obligation d'information prend-elle naissance dans le
contrat? La réponse n'est pas aussi simple qu'on pourrait l'imaginer.
Si, (/ priori, le contrat peut être considéré comme un « objet» et une « source » légitime~
de l'obligation, sa présence ou son existence n'est tout de même pas indispensable pour l,
l)~ Cf supra, I<rc Partie, chapitre IL
l)~ Casso Civ. 15 janvier 1971, bull. civ. III. 25.

324
manifestation
de l' obligation97 , le professiOImel pouvant être tenu d' lU1e obligation
d'infonnation vis-à-vis d'un tiers consommateur avec qui il n'est lié d'aucun contrat98 .
Mais, il n'en demeure cependant pas moins que l'existence d'un contrat confère a
l'obligation d'information une particularité indéniable et renforce son caractère obligatoire.
Ainsi, manque-t-il à son devoir d'information le notaire qui ne renseigne pas sur la date de
caducité prochaine du pemüs de construire99 , le médecin qui n'éclaire pas sa patiente sur les
risques de l'opération l'empêchant de prendre sa décision en toute cOImaissance de cause100 .
Si l'on revient à la logique sociale, un problème de taille se pose : celui de
l'analphabétisme. Si l'exigence d'information du professionnel se réalise conformément aux
prescriptions littérales du texte de l'article 21.a) de la loi camerounaise précitée, il va de soi
qu'elle ne pOWTa toucher qu'une minorité de la population lettrée, la majorité étant
analphabète ou insuffisamment instruite pour maîtriser ou comprendre les contours de
l'infonnation fournie. A cela s'ajoute aussi l'absence de suivi des textes votés darls la pratique
commerciale quotidienne. C'est là un autre point sur lequel une réflexion s'impose si l'on veut
satisfaire toutes les couches sociales du pays (on reviendra sur ce problème plus loin)101 .
Tout ceci pose le problème de la fournitme d'une information utile au consommateur.
Ce qui exige du professionnel qu'il aille plus loin dans ses démarches ou obligations et qu'il
fourrüsse plus d'information utile au consommateur. Ayant particulièrement à faire alLX
consommatems moins avertis, donc profarles pom la plupart, tout le problème et de savoir
jusque où le professionnel doit-il aller dans son devoir d'infomlation obligatoire? On retrouve
là les accessoires ou prolongements de l'obligation de renseignement que le professionnel se
doit de maîtriser dans ses rapports avec les consommateurs.
2 - Les prolongements de l'obligation de renseignemelll
ml professionnel
Parler des prolongements de l'obligation de renseignement, c'est recOIUlaître au
professiOIUlel certaines obligations supplémentaires dans son rôle d'infomlateur. Pom
96 CAS el FERRlER: op cil, p.381, n° 392
97 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 17 et suiv.
98 Ibid., nO 19.
99 Civ. 1è1e, 12 nov. 1987,0 1987, IR, 239
100 Civ. 1ère, 19 avril 1988,0 1988, IR, 125
101 Cf infra

325
comprendre cdte sihration clu professiolmel, il faudrait sans doute revenir à l'analyse tàite par
la jUIispl1ldence sur l'objet de l'obligation de renseignement. D'un côté, elle considère le
renseignement comme une obligation tàite
au
professiomlel d'attirer l'attention du
consommateur sur les aspects particuliers de la convention.
1
11 2 Certains auteurs l'ont assimilé
à llne obligation de description. 1li3 D'un autre côté, elle l'interprète comme une obligation
dont le but consiste à mettre en garde le consommateur contre certains daIlgers liés à l'usage
du produit ou senrice 1'1:1 et certains risques lies ~l l'opération elie-même 105. On assimile
l'obligation de renseignement à un autre devoir supplémentaire: celui pour le professionnel,
de conseiller sur l'opportunité de conclure l'opération envisagée 1"t..
Au vu de cette anal)rse jlllisp11ldentielle, deux devoirs supplémentaires sont à la charge
du professionnel: c::ux de mise en garde et de conseil. Nous éhrdierons tour à tour ces deux
devoirs supplémentaires mais essentiels dans le renseignement. Nous les comparerons ensuite
pour voir en quoi ils ditTerent l'un de l'autre.
2-1. La mise en garde dans l'obligation
de re~ementdu professionnel.
l\\ilettre en garde quelqu'un, c'est, certes, lui
fownir une information.
Mais
l'infonnation ici foumie n'a pas la connotation d'WI simple renseignement. Elle a pour but
d'attirer, en insistant, l'attention du consommateur sur les risques qu'il y aurait à ne pas en
tenir compte. La mise en garde consiste donc à attirer l'attention du' cocontractant sur un
aspect négatif de la convention, ou de la chose objet du contrat 107 C'est principalement contre
un danger, un risque, que l'on est tenu de mettre en garde quelqu'un.
Cet aspect de l'infonnation peut avoir son importance dans les sociétés africaines à un
double titre: du point de vue de l'éducation du consommateur en général, et aIlalphabète en
102 Cass civ 14 déc. 1982, D. 1983, IR, 131 ~ cass civ 8 déc. 1978, D. 1979, IR, 136; 17 fév. 1975, R.T.D.Com.
1977, 151, obs. J. HEl'vLAJU).
103 DUCOULOUX-fAV,AJU): op cit. p. 14.
104 N'GU'lEN-TIL'\\NH-BOURGEAlS el J. REVEL: " Ll responsabilité du fabricant en cas de violation de
l'obI igalion de renseigner le consonunateur sur les dangers de la chose vendue» JCP 1975, I, 2679.
105 Casso civ. 9 déc. 1975, bull civ, n° 361 ; lCP 1977, n, 18538, note MALINVAUD; D. 1978,205, note R.
SAVATlER ; le fabricant doit infonner l'utilisateur sur certaines conditions d'emploi de la chose.
106 C. LUCAS de LEYSSAC : article précité, p. 335.
107 FABRE-l\\1AGNAN: thèse précitée, n° Il, p. 9, n° 467, p. 381.

326
particulier, et du point de vue de la limitation des accidents dus à la non observation des contre-
indications accompagnant les produits consommés, à l'ignorance de certains consommateurs et à
la prise de risques inconsidérés de certains consommateurs.
L'intérêt de la mise en garde de l'information est qu'elle rend le renseignement plus sûr et
tïabJe : «elle exige du débiteur professionnel non seulement qu'il fournisse une information
objective, mais encore qu'il souligne les conséquences, objectives elles aussi, à déduire de cette
information, le tout dans une perspective de risque, de danger à éviter» 108. L'obligation dans ce
cas, va s'exécuter par la fourniture d'instructions d'usage à l'acheteur. 109 Ce qui signifie que le
professionnel doit renseigner l'acheteur des restrictions, contre-indications et incompatibilités qui
affectent l'usage de la chose vendue "0. Une certaine doctrine qualifie ce devoir «d'obligation de
mode d'emploi» III.
Une mise en garde dans l'information peut également avoir pour objet de souligner un
inconvénient d'un comportement particulier. Dans ce cas le professionnel aura pour rôle d'attirer
l'attention de son client sur le danger, les aspects négatifs d'une chose, d'un comportement.
.
.
Dans la phase précontractuelle, la mise en garde porte sur l'adéquation de la décision -
par exemple la conclusion, la modification, ou encore la résiliation du contrat - à l'intérêt, aux
besoins du créancier de l'obligation. Pour ce qui est de l'exécution du contrat, la mise en garde
sera faite contre une mauvaise utilisation de la chose objet du contrat ou, de façon plus générale,
contre un risque d'inexécution du contrat, ou encore un risque de dommage pouvant
,
'
.
l
1JO
accompagner
executlon ~.
La mise en garde, pour être efficace, doit s'accompagner de détails bien précis sur les
risques encourus en cas de son non-respect par le consommateur. Cela est surtout vrai lorsque le
consommateur court un danger particulièrement grave. Pour prendre le cas de l'Afrique, une telle
mise en garde pourrait s'avérer fort utile pour les usagers des produits dangereux. Pour ce qui
est, par exemple, des pesticides, le marchand devrait avertir l'utilisateur paysan agriculteur ou
maraîcher sur les dangers d'une utilisation sans gants du pesticide vendu, sur les risques d'une
107 FABRE-MAGNAN: lhèse précilée, na Il, p. 9, na 467, p. 381.
\\OK FABRE-MAGNAN: lhèse précilée, na Il, p. 9.
109 Cass eiv 7 lëv. 1979, D 1979, IR, \\88; casso corn. 3 janv. 1977, bull. civ. IV, na 3.
110 GHESTIN : Le conlral : formalion, op cil, n° 504, p. 559 ; G. VINEY : La responsabililé : condilions, n° 511.
III DUCOULOUX-FA V ARD : op. cil., p. 114.

327
dose excessive, sur Jes risques d'une réutilisation de l'emballage du produit, sur les risques de
contact avec la peau, sur les dangers de la manipulation du produit par les enfants etc ... , soit tous
les dangers ou dommages qu'un tel produit est capable de causer aux utilisateurs. Le même
exemple est valable aussi pour les autres secteurs conunerciaux, notanunent celui des produits
pharmaceutiques et cosmétiques.
A propos des produits cosmétiques, une attention particulière devrait être attirée sur des
bombes aérosols, surtout les bombes aérosols contenant des insecticides destinées à lutter contre
les moustiques et d'usage très fréquent en Afrique. Il serait plus sécurisant pour le consommateur
si le professionnelle mettait davantage en garde contre les risques d'une pulvérisation à proximité
d'une flamme ou d'une quelconque braise de feu ou source incandescente.
S'agissant des dangers ou dommages qu'une pulvérisation à proximité d'une flamme ou
d'une source incandescente peut causer, on peut citer le cas de Dénis BENOLIEL qui, pour avoir
allumé une cigarette après une pulvérisation d'une bombe aérosol, fut complètement brûlé et
défiguré par les flammes. Cet homme qui porta plainte devant le tribunal de Senlis contre la
société fabricante ou productrice vient d'avoir gain de cause devant ledit tribunal.
Devant le tribunal, il fut reproché à la société Reckitt et Colman-France, fabricante de
l'aérosol d'avoir «en pleine connaissance de cause sur la dangerosité du Néocide Fulgurant (... ),
... imprudemment négligé d'informer correctement les utilisateurs sur les risques d'explosion liés
à une utilisation normale ou anormale »111, du produit. Ce qui est là une violation grave du devoir
de mise en garde.
U ne telle affaire serait restée lettre morte ou sans suite judiciaire en Afrique pour la simple
raIson que le consommateur ne bénéficie d'aucune protection juridique. Sous un autre angle,
cette affaire nous montre l'intérêt qu'une mise en garde peut avoir sur la sécurité des individus et
les dégâts qu'une abstention ou omission est susceptible de causer au consommateur usager.
De toute façon, la mise en garde se doit d'être suffisamment explicite, claire pOUl
permettre au créancier de mesurer l'ampleur du danger ou du risque sur lequel on attire unE
112 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 467, p. 3S \\-3S2.
"-
11.1 Sur l'atraire de ce consommateur victimc surnommé /'« homme sans visage» par la presse, cr cn attcndant ~.
parution de la décision encore en appel, l'article de presse dc J.-F. GUYOT: « Aérosol: victoire de l'''homm
sans visage". », in Figaro dujelldi 13 avril 1995.

328
attention l14 • Les accidents de la consommation étant suffisamment graves et relativement plus
réguliers et élevés en nombre dans les pays d'Afrique, une prise de conscience dans ce domaine
nous paraît tout indiquée. Pour limiter ces risques, notamment dans les zones rurales tout comme
dans la masse sociale analphabète, on pourrait à l'aide des symboles, des signes, des
pictogrammes ou tout autre moyen d'expression adapté, comme nous avons déjà eu à le
souligner plus haut! I.~, informer les populations sur les dangers des divers produits consommés.
Pour ce qui est de l'explicitation ou de la clarté de la mise en garde, il faut dire que la
Cour de cassation est d'une sévérité extrême. Aussi, a-t-elle approuvé une cour d'appel d'avoir
condamné le vendeur d'une colle à base de néoprène à réparer une partie des dommages causés
par
son
inflammation,
après
avoir
relevé
qu'en
raison
du
fait
que
le
produit
était
« particulièrement inflammable» aucune des deux étiquettes apposées sur l'emballage de la colle
ne comportait de renseignements suffisants «sur les périls dont la colle était porteuse ».
Elle a motivé sa décision sur le fait que le degré, très élevé, de la colle nécessitait une
information beaucoup plus explicite que le symbole signifiant «facilement inflammable» qui y
figurait, étant entendu que si l'utilisateur avait eu son attention attirée par des avertissements
adéquats, il aurait pris les précautions nécessaires 116.
De toute évidence, pour les besoins de la cause, nous souhaiterions, dans nos pays
(africains), qu'on explique au destinataire de l'information pourquoi il est, en pratique, dangereux
d'adopter tel comportement, plutôt que le lui interdire sans raison concrète. Dire à un
consommateur qu'un usage sans précaution des pesticides ou qu'une réutilisation de son
emballage à des fins alimentaires peut lui causer la mort, qu'une pulvérisation d'un insecticide à
côté d'un feu peut provoquer un incendie de la maison, qu'une consommation abusive ou
désordonnée des médicaments peut aggraver ou compliquer son état de santé, etc, nous parait
tout indiqué pour exposer la réalité des problèmes qu'une simple explication théorique et évasive
des dangers des produits en cause. Examinons maintenant le cas du conseil du professionnel dans
l'information du consommateur.
II~ Voir rar exemple, civ. l"'" 13 mai 1986, hull. civ. l, n° 128, p. 128. La cour de cassation déclare qu'" il
j
fI
appartient au fabricant d'un revêtement à hase de mousse de polyuréthane d'cn conmlÎtre le caractère facilemenr
inllammablc et d'informer sul1ïsammentl'acheteur des risques ct des limites d'utilisation d'un tel matériau »,
Il'i cr supra, 1ère Partie, chapitre Il.
116 Civ. 1ère Il octobre 1983, bull. civ. 1, n° 228, R.T.D.Civ. 1984, p. 731.

329
2-2. Le conseil dans l'obligation de renseignement
du professionnel.
Le conseil est défini, selon le dictionnaire Littré, comme une « Opll110n exprImée pou
, f '
,
f .
117
0
d
·1'
l '
.,
d
engager a
aIre ou a ne pas
aire»
.
onner
onc un consel
a que qu un en matlere
l
consommation, c'est non seulement lui donner une information brute, mais aussi lui montrer le:
déductions que l'on peut en tirer, l'attitude que l'on doit adopter dans telles circonstances Ol
conditions! IR.
D'une manière générale, c'est l'orienter dans sa pnse de décision en lui donnant de.
informations objectives, des informations sur l'opportunité de tel ou tel comportement à suivre
Le conseil prend ici l'allure d'une présentation d'un bilan avec d'un côté les avantages et d,
]' autre les inconvénients des divers comportements ou choix possibles 119. Rappelons tout dl
même que celui qui reçoit un conseil n'est pas obligé de le suivre, ce qui n'est pas le cas pour };
mise en garde.
Du point de vue juridique, il faut dire que la notion de devoir de conseil du professionne
est diversement interprétée par les auteurs. Certains trouvent dans le conseil un élément subjectit
Ainsi, en matière de vente par exemple l'obligation de conseil apparaîtrait en cas d' inadaptatio
de la chose aux besoins de l'acquéreur, tandis que l'obligation de renseignement concernerait le
d
. 1 '
'1
h
d
120
angers 111 1erents a a c ose ven ue
.
Cette analyse ne reflète pas vraiment la réalité en ce sens qu'un vendeur peLIt bien êtr
amené à conseiller son client sur le mode d'emploi d'un produit complexe, satisfaisant à se
besoins et dont la mauvaise manipulation peut s'avérer dangereuse pour sa sécurité. Au stad
précontractuel, un vendeur doit essayer d'éclairer par ses renseignements et conseils, lesque
renseignements et conseils ont pour but de permettre à l'acheteur d'apprécier les produits e
l21
fonction de ses besoins. Il y a ici le conseil sur l'opportunité du contrat
et ceci e
117 Dictionnaire Littré, l. l, Gallimard, Hachette 1967, p. 691.
liN FABRE-MAGNAN: thèse précitée, nO Il, p. 9.
119. FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 11, p. 9.
120 J. HUET: Responsabilité du vendeur et garantie contre les vices cachés, Litec, 19H7, nOs 46-H3, p. 'i2-H 1.
121 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, p. 384, n° 470.

330
particulièrement valable lorsqu'on est en présence d'une multitude cie produits pouvant satisfaire,
a priori, les mêmes besoins. Du coup cette approche du conseil ne nous permet pas de bien le
distinguer du renseignement à l'état brut, pas plus de la mise en garde.
D'autres auteurs, suivis par certains arrêts, assimilent le devoir de conseil à une obligation
contractuelle, le distinguant de la simple obligation de renseignement qui, pour eux, serait une
obligation précontractuelle. Cette vision des choses n'est pas forcement la bonne, étant entendu
que « le contenu et la portée de l'obligation d'information» sont « indépendants de la nature -
contractuelle ou délictuelle - de la sanction encourue» 122 en cas de violation de ladite obligation
par le professionnel.
Ces précisions terminées, il faut revenir sur la nature même de l'obligation de conseil. En
quoi consiste-t-elle ? Elle consiste en un renseignement plus pointu que la simple information de
routine à laquelle est habitué le professionnel dans sa vie de vendeur, et qui nécessite une énorme
patience. Le conseil se distingue du renseignement par son contenu, par le degré de l'information

123
transmise
.
L'obligation de conseil implique en effet, une mise en lumière de l'opportunité même de
certaines décisions telles que celles de conclure - ou de ne pas conclure 124 - le contrat envisagé 125,
ou encore par exemple d'exercer ou non une option offerte par une convention. «Le conseil
correspond donc à la mise en relation du renseignement brut avec l'objectif poursuivi par le
créancier de l'obligation d'information »126.
En quoi une telle obligation peut-elle être utile aux consommateurs africains? L'intérêt
pour le consommateur africain de bénéficier du conseil du professionnel dans sa fonction de
consommation est grand, ceci parce qu'on trouve en Afrique des consommateurs moins avertis
qu'en Occident, donc ayant plus besoin d'assistance et de conseil dans leurs achats. Ceci est
surtout valable lorsque l'on est en face des produits de haute technologie tels que les appareils hi-
fi, les radios, magnétophones, téléviseurs, micro-ordinateurs, automobiles, etc. Le conseil du
121 Ibid., n° 465, p. 380 et n° 470, p. 384.
12J FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 471, p. 385.
124 L'obligation de conseil inclut le devoir de déconseiller son client de conclure un contrat non conforme à ses
besoins, voir en cc sens, Le TOURNEAU: « Les professionnels ont-ils du coeur? », D. 1990, p. 22 ; - La
responsabililé civile professionnelle, Economica 1995, p. 55 et suiv.
125 LUCAS de LEYSSAC : article précité, p. 305 ct suiv.
126 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 471, p. 385.

331
professionnel aura comme avantage d'éclairer et d'orienter le client novice, donc profane, dans
ses choix en fonction de ses besoins immédiats ou lointains.
Un vendeur de micro-ordinateurs pourra par exemple dire à son client qui éprouve des
difficultés ù choisir parmi les différentes marques présentes dans le magasin: si vous voulez un
ordinateur juste pour vos traitements de textes, telle marque avec telle mémoire (256 M.O) de
disque dur vous suffira largement. Mais si vous voulez plus tard introduire le multimédia c'est-à-
dire le CDROM, il vous faudra un ordinateur plus performant, par exemple un PC 486 DXII.
Support Zif, Evolutive en DX4, 256 Ko de mémoire cache, 8 M.O de RAM, 420 et plus de
disque dur etc 127. Il pourra aussi lui dire : pour ce qui est des logiciels, tel peut vous rendre
service dans l'immédiat, mais il est moins performant que tel autre. Celui-ci vous aidera dans vo~
travaux, mais si vous voulez un petit plus, je VOLIS conseille celui-là.
On trouve dans cette façon d'informer du professionnel des conseils destinés à orienter le
client en fonction de ses besoins immédiats et futurs sur le matériel qu'il ne connaît pas et dont i
ne maîtrise aucune donnée techniqu~, ni technologique.
Le même comportement dans l'information est valable pour un encadreur agricol(
vendeur des pesticides et d'engrais vis-à-vis du paysan en quête du produit adapté pour se~
cultures.
Un encadreur doit conseiller le paysan sur l'opportunité d'utiliser tel pesticide ou te
engrais pour ses cultures maraîchères ou vivrières parce que moins toxique que tel autre pesticidl
ou engrais. Un pharmacien doit conseiller le patient sur l'avantage à utiliser un médicament moin
cher mais de même efficacité qu'un autre médicament vendu à un prix relativement plus élevé. l
s'agit ici d'un rapport qualité / prix. Ce qui est loin d'être négligeable pour un consommateur iss'
d'un milieu défavorisé. Un garagiste doit conseiller son client sur l'intérêt qu'il a il acheté un
nouvelle voiture au lieu de réparer l'ancienne dont le coût lui reviendrait beaucoup plus cher.
A propos du garagiste, on peut citer comme exemple un arrêt d'une cour d'appel, leqUl
fut l'objet d'une censure par la chambre commerciale de la Cour de cassation française pOL
défaut de base légale. En et'tet, L1ne cour d'appel avait condamné une cliente d'un garagiste
payer à ce dernier une somme importante correspondant au montant de la réparation effectue
127 Sur le devoir dc conscil du fournisscur du matéricl informatique, voir J. HUET: op cil., nOs 75 S., p. 71 s.

332
sur une voiture de peu de valeur qu'elle lui avait fait conduire pour constater, selon elle, « un
cognement dans le moteur », au motif que le garagiste n'était tenu d'aucun devoir de conseil.
L'arrêt fut cassé par la chambre commerciale pour la simple raison « qu'en se déterminant ainsi,
alors qu'en sa qualité de technicien spécialiste de la mécanique automobile, [Je garagiste] avait
l'obligation professionnelle d'éclairer son client incompétent sur l'opportunité des réparations
que celui-ci pouvait croire à tort efficaces ou avantageuses, la cour d'appel n'a pas donné de base
légale à sa décision »128 au regard des articles 1134 et 1135 du Code civil 129 .
L'obligation de conseil est donc plus contraignante pour le débiteur professionnel qu'on
n'aurait pu l'imaginer, surtout lorsqu'il a en face de lui un consommateur profane, de surcroît
analphabète. Ce qui est parfaitement le profil des consommateurs en Afrique. Pour une
consommation plus utile, adaptée à leurs besoins immédiats et futurs, un conseil du professionnel
sur l'opportunité de l'achat s'avère donc nécessaire.
Qu'il s'agisse du renseignement à l'état brut ou de ces accessoires, l'obligation pour le
professionnel d'~xécuter toutes ces tâches repose bien sur quelque chose. L'analyse du régime
juridique permettra d'éclairer ce domaine.
12H COlll. 25 rév. 19X 1. hull. civ. IV, nO 109. [1. X3.
129 L'ohligation d'information a une incidence sur Ic conscntcmcnt d'un contractant. Sur l'utilisation de ces dcux
textes, voir FABRE-MAGNAN, thèse précitéc, n° 436 cl suiv.

333
3 - Le régime juridique de l'obligation de renseignement
du professionnel.
Pour des raisons de rapports très étroits existants entre le droit français et le droit africain
et déjà avancées plus haut, nous nous appuierons sur le droit français pour montrer le régime
juridique sur lequel repose l'obligation d'information ou de renseignement du professionnel dans
ses relations avec le consommateur.
S'agissant de l'obligation de renseignement, de nombreuses justifications ont été avancée~
pour asseoir son régime juridique. Selon une opinion doctrinale restée isolée, l'obligatior
reposerait sur l'article 1602 clu Code civil cl' après lequel le vendeur est tenu d' expliquel
clairement ce à quoi il s'oblige: «qui pend le pot dit le mot »IJü. Il s'agirait là d'une obligatior
précontractuelle, l'obligation de conseil faisant partie intégrante de l'obligation de délivrancel'I
Un autre auteur voit' là l'application de la théorie générale des vices cachés ll2 .
Certains ont soutenu que tout dériverait de l'article 1135 du Code civil qui oblige no/
seulement à ce qui est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la le
donne à l'obligation d'après sa naturel". D'autres auteurs ont considéré que le préjudice caus
par un manquement à l'obligation cie renseignement devrait être sanctionné par les règles de
responsabilité délictuelle (article 1382 du Cocle civil)"~
D'autres encore y voient une obligation précontractuelle soumise au régime de 1
responsabilité délictuelle, car s'exécutant au moment ch.: la formation clu contrat et non au stad
de son exécution. u:; L'abstention dans le renseignement constituerait une réticence dolosive d
professionnel dictée par la volonté d'amener l'autre à contracterl.16.
1.10 ROLAND cl BOYER: Adages, p. X76.
1.11 BIHL: Le droit de la venle, Dalloz \\tJX6. n° 1262.
1.12 B. GROSS: La nOlioll d'obligation de garanlie dans les contrats, LGDJ.
\\.1.1 CALAIS-AULOY : Droit de la consommation, Dalloz, 19X6, n" 27.
1.'4 R. RODIERE: Répertoire Civil. v. Responsahilité Conlractuelle. n° 47.
11~ J. SCHMIDT:« La sanction Je la l:mte précontractudle", R.T.D.Civ. (tJ70, p. 72; cass civ 24 mai !tJ72:.....'
civ \\II, na 22~
1
1 6.CAS ct FERRI ER : op. cil., p. ~X2, na ~tJ4.

334
Cependant, toutes ces interprétations diverses ne pourront pas s'appliquer lorsque
l'obligation s'exécute après la formation du contrat. 137 A ce stade, l'obligation de renseignement
devient une obligation contractuelle de renseignement qui s'analyse comme une suite légale de la
convention 138, un accessoire de l'obligation de délivrance 139 , ou encore une application du
principe général de bonne foi qui doit régir les relations contractuelles l40 .
Devant cette incertitude quant à la détermination du fondement juridique de l'obligation
de renseignement, certains auteurs en sont arrivés à contester l'existence même de cette
obligation. '4 ! D'autres, en revanche, ont relevé le caractère de la distinction entre obligation
précontractuelle et contractuelle de renseignement et l'enchevêtrement des notions de formation
et d'exécution du contrat. 142
A vrai dire, les fondements les plus fréquemment invoqués sont au nombre de deux. Le
premier dérive du dol qui, d'après la jurisprudence, peut être constitué par le silence de l'une des
parties dissimulant à l'autre un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de
1" 1
contracter '.
Dans la mesure OlI l'on accueille le concept de réticence dolosive, on consacre
indirectement, certes, mais non moins sûrement l'existence de l'obligatioll de renseignement.
Quoi que chacun soit gardien de ses intérêts, la bOlllle foi exige un millimum de révélations
quant aux prestations offertes, surtout quand il y a inégalité entre les parties, provenant soit de la
supériorité économique, soit de la compétence professionnelle de l'une d'entre elles.'""
Mme le Professeur FABRE-MAGNAN trouve même dans cette inégalité entre les parties
« le principal fondemellt de l'obligation d'illformatioll », « l'élément psychologique servant à
m CAS ct FERRIER: op. cil., p. 382, n0394.
m C. Civ , article 1135; cass corn. 16 ocl. 1973, lCP 1974, IL 17846, note MALINVAUD ; cass corn 25 juin
1980, R.TD.Civ 1981, 157, note DURRY: le fabricant de peinture qui conseille mal son client.
139
LE TOURNEAU: La responsabilité civile, LGDJ, n° 1368 ; - La responsabilité civile professionnelle,
Economica 1995, p. 55 ct suiv. ; BIHL: Le droit de la vente, Dalloz 1986, p. 207.
140 C. Civ. article 1134 ; B. STARCK: Droit civil : le~ Obligations, n° 1899.
141 13. BOCCA RA : « Dol, silence et réticence », G.P. 1953, l, 24. Nous ne partageons pas cct avis en ce sens qu'il
serait absurde de croire que celui qui vend n'est tenu à aucune obligation d'in formation vis-à-vis de celui qui
achète un ohjet dont il maîtrise aucune donnée technique, ni technologique.
..
142 CALAIS-AULOY : «L'information des consommateurs par les prolCssionncls» in « Dix ans de droit de
")
l'entreprise », p. 985. L'auteur estime qu'il taut renoncer à la distinction entre les deux ordres de responsabilités
("
et admellre qu'il existe une responsabilité prolCssionnclle.
143 STARCK: les Obligations, op. cil. W 273, p. 117-118.
144 STARCK: les Obligations, op. cit. N° 273, p. 117-1 18.

335
m~surer œtle inégalité »IL'. Cct ékmcnt psychologique rellète l'état d'esprit cI'un contractant (li
regard de l'information l"CCcléc. sa recherche étant plus importante chez le débiteur d
l'obligation que chez le créancier.I~() On vise dans ce cas l'intention du débiteur, laquelle se déftn:
comme étant la « résolution intime d'agir dans un certain sens, donnée psychologique (relevar
cie la volonté interne) qui, en fonction du but qui la qualifie, est souvent retenue comme élémer
constitutif d'un acte ou cI'un fait juridique J47 , parfois comme critère d'appréciation de s
licéitél~~ » 14~.
Il arrive parfois ~l la jurisprudence de viser expressément l'obligation de loyauté. Dans u
arrêt du 21 Novembre 1975 1"0 la cour de Paris déclare dans un attendu sévère : «en plus de
dispositions légales, la bonne foi contractuelle ajoute un devoir d'honnêteté élémentaire d
renseigner le contractant sur tous les évènements propres à l'intéresser, sans avoir à lui laisser]
soin ou la chance de les découvrir dans les 140 pages d'un règlement de copropriété». 0
retrouve là, la notion de bonne foi précédemment annoncée clans les exigences morales. Ce qui lt
confère une assise particulière dans l'obligation de renseignement, du moins pour ce qui concerr;
son fondement.
Le second fondement se trouve dans l'article 1382 du Code civil et débouche St
l'allocation cles dommages et intérêts, soit comme complément de la réparation à la suite d'ur
annulation pour erreur''il, soit en remplacement d'une annulation pour dol l 'i2, soit à titre de put
indemnité en dehors de tout vice de consentement. Et dans cette dernière hypothèse,
responsabilité du médecin pour défaut de renseignement ou d'information occupe une pla<
.
l 'i,
Importante" .
I~'i FABRE-MAGNAN. thèse précitée. na 240, p. 1X7.
I~(, Ibid.
W
Exemple: L'intention libérale. l'intention frauduleuse, l'intention de nuire, l'intention de rendre servil
respectivement caractéristique de la donation, de la fraude, du délit stricto sensu et de l'ahus de droit, de la gesli.
d'affaires.
14~ Exemple: L'intention immorale. cause impulsi\\'e et déterminante.
I~~ CORNU: Vocabulaire Juridique. Association H. CAPITANT précité, I<)X7, p. 42X, v. Intention. Scion
Dictionnaire Littré. l'intention serail « l'action de tendre l'esprit, et, par suite. le mouvement de l'âme par Icq\\
on tend ;\\ quelque fin ".
1:\\0 Paris 21 nov. 1<)75,0. 1976, somll1. 50.
1)1 Civ 3è 29 nov: l%X, GY. 1%<).1, 63.
IS2 COll!. 14, mars 1972, D. 1<)72, p. 653, note GHESTIN ; R~p. DcI'rénois 1973, art. 302<)3, na 3, p. 446."
AUBERT. -Civ lb,' 4 janvier 1<)75, lCP 1975, Il IXIOO, note ch. LARROUMET ; D. 1975, p. 405, llOllF
GAURY ; R.TD.Civ. j<)75, p. 537. n° l, ohs. G. DURRY; Rép. DcI'rénois 1975, art. 31<nO, na 49, p. 1532,'('
AUBERT.
IS.l STARCK: Ohligations, op. cil.. n° 274, et sui\\'.

336
Quels que soient les fondements de l'obligation de renseignement, un autre problème se
pose à son niveau: celui de sa nature juridique. S'agit-il d'une obligation de moyens ou d'une
obligation de résultat? Une précision à ce niveau s'avère aussi nécessaire.
Le problème ne se pose pas lorsque l'obligation de renseignement est l'objet même du
contrat. Il s'agit dans ce cas d'une obligation de moyens 154. La difficulté d'interprétation
réapparaît lorsque l'obligation ne concerne pas l'objet même du contrat mais son accessoire,
lorsqu'elle se greffe par exemple sur un contrat de vente. Sur ces points, les interprétations
doctrinales ct jurisprudentielles ne divergent pas tellement de celles précédemment avancées sur
le fondement de l'obligation.
En effet, il y a obligation de moyens lorsque le débiteur ne s'est engagé qu'à utiliser tous
les moyens à sa disposition pour atteindre le résultat souhaité, c'est-à-dire faire preuve de
diligence et de prudence. En revanche, il y a obligation de résultat lorsque le débiteur s'est
l55
engagé à atteindre un résultat précis, sauf existence d'un cas de force majeure
. Les auteurs
s'accordent à ce sujet pour affirmer que la distinction dépend principalement du caractère plus ou
moins aléatoire de l'obligation, et également du rôle plus ou moins passif du créancier de
[' bl'
.
l'iCl
o
Igatlon.·
De toute façon, la tendance juridique de ces dernières années reconnaît à l'obligation de
renseignement un régime variable : elle peut être une obligation de moyen ou de résultat en
fonction des circonstances de la cause,
La quasi-totalité de la doctrine reconnaît que l'obligation de renseignement est une
l5
obligation de moyens ? dès lors qu'elle constitue l'obligation principale de contrat, notamment
un contrat de conseil'5!!. Il en va de même des obligations accessoires d'information « parce
qu'elles sont susceptibles de plus ou de moins, selon les circonstances, d'être les obligations

15~ G. VINEY : « La responsabilité des entreprises prestataires de conseil », JCP 1975, 1,2750.
1 .
155 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 484, p. 395.
15Cl STARCK: op. cil. nOs 977 et suiv., p. 406 et suiv.
157 Ph. MALA URIE ct L. A YNES : Droit civil, les ObligatiOns. Cujas, z" éd. 1990, n° 636, p. 348.
I5M R. SA V ATIER : « Les contrats de conseil professionnel en droit privé », D. 1972, chron., p. 137.

337
d' information '59 , de conseil et de renseignement qui pèsent notamment sur un grand nombre de
professionnels, sont des obligations de moyens» 160. De façon générale, le débiteur s'engagerait à
mettre en oeuvre tous les moyens à sa disposition afIn de renseigner et de conseiller son client ou
son cocontractant.
Du côté de la jurisprudence, on note une constance dans ce sens 161 . Aussi, de nombreuses
décisions prennent-elles le soin de relever une faute avant de condamner un contractant sur le
fondement d'un manquement à son obligation d'information. Ceci se justifIe par le fait que le
professionnel ne maîtrise pas le résultat des conseils qu'il donne à son client ou cocontractant
162
étant dit qu'il ne pourra le contraindre à les suivre.
Mais,
dans
certaines
conditions,
le
concours
de
circonstances
peut
amener
la
jurisprudence à alourdir les obligations d'information de certains professionnels, et ce dans un but
de protection accrue de leurs clients. Même s'ils admettent de plus en plus facilement la faute du
professionnel de nature à engager sa responsabilité, les juges y voient toujours dans l'obligation
d,' f '
bl"
d
161
ln ormatlon ~ne 0
Igatlon e moyens. .
Cette ülçon de voir les choses est contestée par certains auteurs, notamment par Mme le
Professeur FABRE-MAGNAN qui, dans certaines circonstances, voit dans l'obligation de
renseignement une obligation de résultat. L'auteur s'exprime ainsi: « le débiteur qui connaît - ou
doit connaître - llne information sur un fait pertinent, est tenu de la communiquer à ce
dernier »16~. Selon l'auteur, il pèse sur un tel débiteur une obligation matérielle de transmettre lIne
information et cette obligation matérielle de transmission est une obligation de résultat. Aussi,
distingue-t-elle « l'obligation de rechercher l'exacte information ou le bon conseil, qui est une
159 V. A. ABOUKORIN : L'obi igation de renseignement et de conseil dans l'exécution des contrats, thèse Dijon
1989,. L'auteur wnclut dans sa thèse en énonçant (p. 337) que « les applications de l'obligation de renseignement
ct de conseil dans les différentes catégories de contrats présentent des caractéristiques communes: il s'agi l
toujours d'unc obligation de moycns duc par un contractant professionnel au profit d'un contractant profane ». Ur
point dc vue que nc partagent pas certains auteurs, notamment FABRE-MAGNAN dans sa thèse précitée.
160 LARROUMET : Droit civil, l. 3, les obligations, le contrat,
Economica, 2~ éd. 1990, n° 618, p. 610 ct n° 378
p. 335 ; également R. SAVATiER : « Les contrats de conseil professionnel en droit privé », D. 1972, chron, P
137. Selon l'autcur. le donneur de conseil « ne s'engage pas à l'infaillibilité ».
161 La 1"'< chambre civilede la Cour de cassation a déclaré dans un arrêt du 10 février 1987 (bull. civ. 1 n° 43. I~
32), que « l'agent immobilier est tenu d'une obligation de eonseil à l'occasion des opérations réalisées par so
entremise, Il\\llamment en ce qui concerne la disponibilité des londs nécessaires à la réalisation effective d
l'opération, et celle obligation, qui est de moyens, doit s'apprécier en fonction des circonstances de la cause et..,
particulier, de la volonté, de la situation et des connaissances des parties »,
162 COLLART-DUTILLEUL ct DELEBECQUE : Contrats civils ct commerciaux, Dalloz 1993, n° 223.
16:1 FABRE-MAGNAN: thèse précitée. n° 485, p. 396.

338
obligation de moyens, de l'obligation matérielle de transmettre cette information, qui reste une
obligation de résultat »1(,5.
Nous partageons l'analyse de Mme le professeur FABRE-MAGNAN parce qu'il arrive
parfois que le résultat (c'est-à-dire le dommage) « parle de lui-même» sans qu'il soit nécessaire à
la victime de rapporter une preuve complète. 166 C'est notamment le cas pour les victimes
d'empoisonnement par pesticide dans les pays du Tiers-Monde pour défaut de transmission
d'information par les vendeurs ou de la victime de la bombe aérosol, que la presse a surnommé
« 1 ' homme sans visage », à qui Je défaut de transmission matérielle de l'information a causé un
" d'
. ,
bl
1
d '
167
preJu lce IlTepara e pour e restant e sa vie.
De toute façon, l'obligation de renseignement est due par tout professionnel, vendeur ou
prestataire de service. 16x Elle est plus que nécessaire dans nos sociétés africaines où le niveau
d'alphabétisation est encore très bas, et où la majorité de la population ne sait ni lire, ni écrire;
elle est tout simplement opportune. Et à défaut de position tranchée sur le régime juridique de
l'obligation, on peut tout simplement dire que l'obligation de renseignement réside dans
['économie même du contrat, et c'est parce que les choses produites et vendues sont de plus en
plus soumises à la technicité croissante qu'elles nécessitent l'intormation et l'éducation du
consommateur. Encore faut-il déterminer le contenu de l'information susceptible d'assurer de
façon efficace cette éducation.
b) Le contenu de l'information obligatoire.
L'information du professionnel doit dans un premier temps porter sur l'objet du contrat
(1) ; elle doit aussi concerner les droits et obligations des parties au contrat (2).
11>~ Ibid, n° 493, p. 401.
11>5 FAI3RE-MAGNAN : thèse précitée, nO 49X, p. 405.
161, COLLART-DUTILLEUL et DELEI3ECQUE : op. cil. n° 223.
11>7 cf l'article de GUYOT: « Aérosol, victoire de l'homme sans visage », Figaro du jeudi 1J avril 1995, rubrique
« Notre vie ».
(,S GHESTIN : Le contrat, LGDJ,
19X8, n° 504 et suiv., p. 555 et suiv. ; GHESTIN : Conformités et garanties
dans la vente, LGDJ, 19XJ, nOs 95 et suiv., p. \\03 et suiv. ; GHESTIN : La vente, LGDJ, 1990.

339
1 - L'information sur l'objet du contrat.
L'information du professionnel est nécessaire pour l'éclairage du conscntcment dL
consommateur. Elle est même considérée dans certains cas comme une condition de validité dL
contrat. 16<) C'est pourquoi elle se doit d'être complète, claire et sans équivoque afin de permet trl
au cocontractant de se décider en toute lucidité. Pour remplir ces conditions certaines exigencc~
s'imposent au vendeur professionnel dans ce domaine.
Le
professionnel
vendeur
doit
dans
un
premier
temps
livrer
au
consommateu
l'information sur le prix. Il s'agit de Ilnformation la plus attendue et la plus déterminante au;
yeux de celui-ci. '70 La publicité des prix est nécessaire dans les rapports entre professionnels e
consommateurs. Elle a pour but de permettre une exacte information des consommateurs quan
aux prix effectivement pratiqués « ... elle constitue un des principes fondamentaux de la libn
concurrence ... »
La publicité des prix est nécessaire parce qu'elle conditionne le choix du consommateUl
.
.
« ... La clientèle ne peut exercer un choix en toute connaissance de cause que si elle est Ci
mesure d'en connaître le prix sans difficulté. En l'absence d'une limitation autoritaire de celle-c
la nécessité de l'information est d'autant plus évidente que la seule protection du consommateu
réside précisément dans la Ülculté qui lui est donnée de pouvoir effectuer des comparaisons aval:
toute décision» 171 .
Dans les pays africains comme le Togo, le domaine des prix est le seul où la loi e~
intervenue pour protéger les consommateurs. Mais J'absence ou l'insuffisance des contrô les ren
cette protection aléatoire et inefficace, la publicité des prix étant de moins en moins salishlitt
Pour l'intérêt du consommateur, il serait souhaitable que les pouvoirs publics procèdent à un
1(.'1 CALA1S-AULüY « L'information des consonllllateurs ... ». article précité, p. C,HD.
170 CAS et PERRIER: op. cil., n° 3t)7.
171
Exposé des moti lS de l'arrêté n° 2512lJ 1 du 16 septembre 11)71 relati r au marquage, Ù "étit] uetage c
l'anichage des prix. LI circulaire du directeur général du (Onllllercc ct des prix du 14 janvier IlJ72 ~
l'application de cct arrêté précise, de manière restrictive, la notion de consonllllateur entendu Clllllll1e
consolllmateur lïnal. Voir en cc sens CAS et PERRIER, op. cil.. n" 3t)X.

340
réadaptation des textes relatifs à la réglementation des pnx aux réalités du marché 172 et à un
contrôle beaucoup plus accru des professionnels en ce qui concerne la publicité des prix.
La deuxième exigence du professionnel concerne l'information obligatoire sur les produits
et services.
Le problème ne se pose pas du côté des produits, ils peuvent eux-mêmes constituer un
support d'information avec les indications portées sur les emballages et les étiquettes. L'étiquette
peut à elle seule permettre au consommateur d'obtenir une information sur les lieux de vente. 173
Comme l'a soutenu un auteur, J'étiquette est devenue « un vendeur silencieux »174.
Pour remplir sa fonction informative, l'étiquette doit mentionner la dénomination de vente
du produit, le nom du fabricant ou du commerçant responsable, le pays d'origine, la quantité en
poids ou en volume, la date de péremption pour les produits altérables 175, l'énumération par
ordre d'importance décroissante des composants et celle des additifs 176 etc.
L'obligation d'information sur les produjts poursuit un double objectif: elle Vlse d'un
côté, à assurer la loyauté de l'offre, et de l'autre, à préserver la santé et la sécurité des personnes
: tel est le cas des mentions obligatoires informant et mettant en garde les utilisateurs de produits
cosmétiques et produits d' hygiène corporelle, spécialités pharmaceutiques, matériaux et objets au
contact des produits destinés à l'alimentation, tabac et d'une manière générale les produits
dangereux. 177
Contrairement aux produits, l'information sera beaucoup plus difficile à fournir ou à
apprécier dès lors que l'offre concerne un service. Le service est une prestation immatérielle sur
la qualité ùe laquelle une information préalable peut difficilement être assurée. Aussi, dans ce
172 Les lois sont très ancicnnes dans ce domaine. C'est notamment le cas de j'ordonnance togolaise n° 17 du 22
avril 1967 portant réglementation des prix el des circuits de distribution au Togo, article 9. Sur le caractère
inadapté de ces lois aux nouvelles réalités socio-économiques du mi 1ieu dans lequel elles sont appelées à
s'appliquer, cf l'article collectif de HADO, DABIRE, KI ABOU ct GUEYE : « Un constat peu encourageant »,
avec exemples particulier du Bénin, du Burkina-Faso, du Mali et du Sénégal, in « Vivre Autrement» N° 8/9,
Novembre 1988, Magazine des consommateurs en Afrique, publié par E.N.D.A. Tiers-Monde, Dakar, Sénégal.
17\\ Même si elle sert dans la plupart du temps les intérêts commerciaux des vendeurs qui uti lisent l'espace j()urni
par l'emballage COlllllle support publ icitaire.
1741. PILDITCH: «Le vendeur silencieux », cite par CAS et FERRIER, op. CiL, n° 399.
m Un produit altérable est un produit dont la durée de conservation est limitée dans le temps, le plus souvent très
courL
11(, CAS ct FERRIER: op. CiL, n° 399, p. 387.
177 Ibid., p. 388.

341
domaine l'information va-t-cllc directcment ou indirectcmcnt porter sur le prcstatairc. Seule une
réglementation des différents services peut permettre de résoudre cc problème.
La réglementation peut, par exemple, porter sur les conditions d'accès à la profession: on
pourra ainsi cxiger
cl
obtcnir
des
informations
relatives
à
l' honorabilité,
il
J'aptitude
professionnelle ou il la garantie financière du prestataire de servicc. 17O La réglementaI ion peut
aussi porter sur les conditions d'exercice de la profession: on pourra dans ce cas précis exiger
des informations relatives à la tenue el délivrance des documents commerciaux ou comptables
spécifiques, modalités particulières de réception de foncls elc. 17'i
La satist~lction des conditions d'accès et par voie de conséquence des critères de qualité
de professionnel constituerait une preuve de l'assurance de la qualité de la prestation.
Cette satisfaction devrait se concrétiser par l'attribution d'une carte professionnelle ou
d'une licence dont le prestataire doit faire état dans ses relations avec les consommateurs, soit er:
les produisant, soit en indiquant dans ses documents commerciaux, ou par voie d'affichage le
numéro cie sa licence ou de sa carte professionnelle. IRa On pourra même hller au-delà et attester 1<
qualité de prestataire de service par un signe distinctif. 'R'
2 - L'information sur les droits et obligations des parties.
L'obligation faite au professionnel d'informer le consommateur ne doit pas se limitei
seulement aux produits et services. L'obligation d'information du professionnel doit auss
concerner la convention dans sa globalité, c'est-à-dire couvrir les droits et obligations des partie~
en présence.
Mais cela
n'est
malheureusement
pas
toujours
le cas dans
nos
pays.
Certain
professionnels malhonnêtes passent sous silence leurs propres obligations et les droits reconnu
aux consommateurs ceci, dans le but d'éviter d'éventuelles recours en cas de mauvaise exécutio
du contrat. Afin de permettre au consommateur de jouir de toutes les prérogatives que Il
contère le contrat, la loi devrait obliger le professionnel il faire cas des obligations qui Il
17S CAS cl FERRIER: op. cil.. n° 400.
17'1 CAS cl FERRIER: op. cil., n° 400.
ISO CAS cl FERRIER: op. cil., n° 400.
ISI Ibid.

342
incombent et des droits dont le consommateur peut se prévaloir en cas de litige. Cette exigence a
pour but d'amener les professionnels, naturellement enclins à ne pas souligner leurs propres
obligations et les droits reconnus aux consommateurs, à donner un minimum d'indications sur le
contenu de la convention qu'ils proposent et soumettent à la signature. 182
Une telle procédure ne sera efficace que si elle s'accompagne de sanctions dissuasives,
lesquelles amèneront les professionnels à avoir un minimum d'égards et de considérations pour
les consommateurs analphabètes.
cl La protection du consommateur par la sanction de la
rétention fautive de l'information obligatoire.
Toute obligation, pour être respectée, doit s'accompagner d'une. sanction en cas
d'inexécution. L'ordonnance togolaise du 22 Avril 1967 prévoit pour « les infractions aux règles
de publicité des prix prévues aux-articles 9 et 25 »précités '83 une peine «d'emprisonnement d'un
mOlS à six mois et une amende de 2.000 à 2.000.000 F.CFA ou l'une de ces deux peines
seulement» (article 39 de ladite ordonnance).
L'article 36 de la loi camerounaise du JO Août 1990 prévoit des peines principales et
accessoires prévues à l'article 326 du Code pénal camerounais, toute personne (physique ou
morale) qui violerait les dispositions de la présente loi, notamment, pour ce qui nous concerne,
les dispositions relatives à la protection des consommateurs. Il s'agit là des sanctions dont on
peut douter de l'efficacité en raison de leur aspect trop strict découlant du caractère particulier
du droit pénal.
Une autre démarche peut être envisagée pour ce qui concerne les sanctions relatives à la
rétention fautive de l'information, démarche sans doute plus adaptée à la pratique commerciale:
il s'agit notamment de la disparition rétroactive de l'acte juridique (1) et de la réparation du
préjudice subi par le consommateur en raison de la rétention de l'information (2).
182 Ibid., n° 401.
IS,
.
cl supra.

343
1 - La disparition rétroactive de l'acte juridique.
La disparition rétroactive d'un acte juridique résulte soit de son annulation, soit de sa
résolution.
La résolution concerne en général les contrats synallagmatiques. Elle est prononcée pour
sanctionner une mauvaise exécution desdits contrats. Dans le cas qui nous concerne, elle pourrait
être réservée à la violation d'une obligation d'information ayant une incidence sur l'exécution
d'un contrat. 184
La résolution pourrait donc intervenir toutes les fois que la méconnaissance d'une
information a entraîné une inexécution suffisamment grave des obligations nées du contrat. 185
Mais il est rare de rencontrer dans la pratique une résolution d'un contrat pour violation d'une
obligation d'information. Cela s'explique par le fait que l'exécution d'une telle obligation, qui en
général est accessoire, n'est jamais suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat. Une
controverse subsiste cependant sur le caractère rétroactif ou non de la résolution. '86 La
rétroactivité étant en principe acquise dès lors qu'il y a résâlution du contrat, elle a lieu toutes les
f ·
'Il
'\\ 1 187
OlS qu e e cst pOSSlO e.
La résolution étant rarement prononcée, nous nous intéresserons plutôt à l'annulation,
sanction classique d'un vice du consentement dans la formation d'un contrat. Celle-ci doit être
étendue à la réparat ion des vices déterminants affectant tout autre consentement, même émis au
l88
cours de l'exécution d'un contrat
, c'est-à-dire, en d'autres termes, à la sanction d'une des
conditions de formation de tout autre acte juridique. 189
IS~ L'action en résolution a un reglme différent de l'action en annulation. Sur ce point, voir GHESTlN .
Conformités et garanties dans la vente. LGDJ 1983, n° 193, p. 177 et suiv. GHESTIN: Droit civil: la fonnatior
du contrat, 3i: éd., LGDJ 1993, n° 16 ; Ph. MALAURIE : Droit civil: les obligations, éd. 1994-1995, éditiom
Cujas, n° 540 ; 13. STARCK par H. ROLAND et L. BOYER: Obligations, 2 - Contrat, 5i: édition, Litec 1995, n'
~69; J. CARI30NNIER: Droit civil, tome 4. les obligations, 18i: éd. PUF 1994, nO' 185 et suiv. ; 17i: éd. 1993 n°
185 s ; 16" 1992, nOs 185 s ; idem pour les éditions antéricures ; La jurisprudence exige aussi que les deux action:
soient nettement distinguées: casso civ. Ii:le 4 octobre 198~, bull. civ. l, n° 265, p. 1~3.
\\s5 GHESTIN: Conl"orJnÎtés et garanties dans la vente, op. cil., n° 176. p. 155.
IS(, La controverse existc surtout il propos des contrats il exécution successives. Voir en ce sens 1. CAR130NNIER
Droit civil. tOllle 4, les obligations PUF 1994, n° 1X6 : la rétroactivité est écartée pour ces types de contrats. L,
contrat prend fin pour l'avenir, mais les effets passés demeurent acquis. On
réserve le nom de « résialtion »c
cette résolution non rétroactive, qui n'est rien d'autre qu'une simple dissolution anticipée du contrat.
Is7 Elle dépend dc la prestation fournie: voir FABRE-MAGNAN: thèsc précitée, n° 589.
ISS Ibid., nO' 407 et 589.
IS9 FABRE-MAGNAN: thèse précilée, N° 338

344
Dès lors, J'annulation d'un contrat n'est rien d'autre que la conséquence directe de
l'annulation d'une décision particulière: celle de conclure un contrat. 190 Dans ce cas, annuler un
contrat revient à sanctionner la violation d'obligations d'information ayant une incidence sur Je
consentement du contractant. Et la loi peut ou non organiser cette nullité à travers des
dispositions spéciales. On verra successivement le cas de la nullité absolue et de la nullité partielle
en cas de violation de l'obligation d'information par le professionnel.
1-1. L'annulation totale de l'acte juridique.
L'annulation d'un acte juridique, en particulier d'un contrat, ne peut être prononcée que
lorsque l'obligation d'information a une incidence sur le consentement d'un contrat.
Pour ce qui nous concerne, seule l'annulation du contrat pour réticence dolosive nous
intéressera,
l'annulation du
contrat
pour erreur
n'impliquant
pas
toujours
la
violation
concomitante d'une obligation d'information. Ceci s'explique par le fait que l'obligation
d'information requiert toujours l'existence d'un élément psychologique non obligatoirement
compris dans l'erreur. 1\\lJ
En
effet,
la
réticence
dolosive
implique
toujours
la
violation
d'une
obligation
d'information. Et l'annulation du contrat conclu entre un professionnel et un consommateur
devrait intervenir toutes les fois que le débiteur a recelé sciemment une information déterminante
du consentement de son cocontractant, et ceci, dans le but de l'inciter à conclure le contrat
contre son intérêt. ln
11 serait sans doute intéressant de préciser le régime de l'annulation en matière de vice du
consentement. La nullité dans ce domaine est soit absolue, soit relative en fonction de l'incidence
de l'information recelée sur le consentement du contractant. 1\\1) Aussi, la violation d'une
obligation d'information, caractéristique d'une réticence dolosive en matière de consommation
devrait-elle suivre le même régime que celui des vices du consentement. Leur inexécution
entraînerait donc une nullité relative.
l'Ill Ibid., n° 3R9.
"..
l'II FAbRE-ivtAGNAN : op. cil. N°S 351 et 590.
192 Ibid. W 590.
1'1.\\ Le problème ne se posc pas pour les obligations d'information ayant une incidence sur l'exécution du contrat,
leur violatioll Ile pouvant entraÎncr l'annulation du contraI. Voir en ce scns, FABRE-MAGNAN: thèse prée, n°
591.

345
Une autre explication peut-être apportée à cette démarche. Puisque la nullité a pour but la
protection de la rartie la plus faible, on est là en présence d'un ordre public de protection. 194 Cet
ordre public de protection justifie aussi que le prononcé de la nullité se fasse de façon relative. '95
Comme l'a souligné un auteur, « il serait en effet injuste de permettre à la partie qui a recelé une
information de se prévaloir de sa faute pour demander la nullité du contrat qui lui serait devenu
défavorable ».1%
1-2. L'annulation partielle de l'acte juridique.
L'annulation partielle pourrait être prononcée lorsque l'irrégularité constatée en matièrE
d'information n'a porté que sur une partie du contrat. Ce qui signifie par là que le défau'
d'information n'a pas complètement entamé le consentement du contractant. Dans ce cas, il serai
loisible que les juges prononcent une nullité simplement partielle du contrat, limitée à la partie dl
contrat entachée d'irrégularité. Il peut s'agir d'une ou de plusieurs clauses que le juge pourrai
déclarer inopposables au cocontractant. 197 La jurisprudence française applique fréquemment cettE
sanction en matière d'obligation d'information, les juges déclarant inopposable à un contractan
une clause dont le cocontractant n'a pu prendre connaissance avant l'émission du consentement.
Pour ce qui concerne la protection du consommateur africain, il appartiendra al
législateur de chaque Etat de prévoir l'organisation d'une telle nullité. La loi pourrait prévoir pa
exemple que la nullité sera limitée à une clause du contrat. Ceci aura un effet bénéfique pour \\;
partie la plus Ülible, surtout dans les contrats d'adhésion tels que les contrats d'assurance. Mai
avant toute annulation, dans le silence de la loi, le juge appelé à limiter l'annulation à une 01
plusieurs clauses devrait vérifier si les clauses litigieuses n'ont pas eu un caractère déterminan
19~ Sur la Ilotioll d'ordre puhlic de protection, voir G. COUTURIER: « L'ordre public de protection, heurts
malheurs d'ulle vieille notion neuve », in Etudes offertes à Jacques FLOUR, Répertoire du Notariat Dcfrénoi
1979, p 95 el suiv. GHESTIN: Traité de droit civil, t. 2. le contrat: formation. LGDJ, 3" éd. 1993 ; nOs 136
suiv.
195 GHESTIN : Traité de droit civil, t. 2, le cOlltral : formation. LGDJ, 2" éd., 19lŒ, n° 742, p. glO. La nu~'
relative est unanimement reconnue par les auteurs. Mais la notion d'ordre public de protet,1ion ne rencontre f
leur tOlalc adhésion.
196 GHESTIN : Le contrat: formation, op. cil. n° 779, r. 930.
197 Voir Cil particulier Ph. SIMLER: La nullité partielle des actes juridiques. LGDJ. 1969.

346
dans la volonté des parties au contrat. On vise là le respect par le juge de l'autonomie de la
volonté, le respect de la volonté déclarée des parties. 198
De toute façon, en pratique, la nullité partielle n'est essentiellement utilisée que pour les
clauses
accessoires du
contrat. 199 Il
s'agit
principalement des clauses qui
régissent
la
responsabilité des parties, notamment la clause pénale, la clause limitative ou exclusive de
responsabilité, la clause attributive de compétence, la clause de réserve de propriété, etc. En
revanche, si un des contractants n'a pas donné son accord sur une des conditions fondamentales
du contrat, le prix par exemple, c'est le contrat dans son entier qui doit être annulé.
En effet, la nullité partielle du contrat est surtout utilisée dans le domaine relatif aux
contrats d'adhésion. Ce type de contrat étant rédigé à ['avance par l'une des parties, en
l'occurrence le professionnel économiquement plus fort, il n'est pas évident que l'autre partie, en
apposant sa signature au bas du contrat, ait eu pleinement conscience de l'étendue des
engagements qu'il souscrit, faute d'avoir pu lire le contrat avant la signature. Ceci est d'autant
plus évident lorsque le consommateur est insuffisamment instruit pour comprendre ce type de
clauses, ou purement et simplement analphabète.
Lïntérêt de la nullité partielle, c'est qu'elle pourra protéger les consommateurs contre les
abus dans la rédaction des contrats types ou contrat d'adhésion truffés de clauses pièges ou
abusives. :wo Et cette nullité devrait être étendue à tous les modes particuliers de stipulations des
clauses, tels que les billets, les bordereaux, les fiches de dépôt, les affiches, les documents
1
1
?Ol
annexes, es documents post-contractue s, etc.-
2 - La réparation ou ['allocation des dommages-intérêts.
Pour amener les professionnels à respecter leurs obligations relatives à l'information, il
serait souhaitable de subordonner la violation d'une telle obligation à la réparation du préjudice
subi par le consommateur dès lors que la réticence dolosive du professionnel lui en aurait causé
l'J~ Sur les autres conditions nécessaires pour que le juge puisse prononcer la nullité partielle du contrat, voir
GHESTIN : op. eil, nOs XXI el suiv., p. 1016 el suiv.; sur le respect de la volonté déclarée des parties, v. Cass COI11
27 mars 11)1)0, bull ci v IV n° l)3, p. 62.
i'l'lGHESTIN: op. cil, nOXXJ, p. 1016.
}(Xl V
Infra. sous-section Il de la présente section.
}Ol FABRE-MAGNAN: lhèse précitée, n0592.

347
un. LI victime n'aura dans ce cas qu'à prouver deux choses: l'existence du dommage et le lier
de causalité entre la réticence dolosive du professionnel et le dommage causé.
La réticcnce dolo:;ive, donc fautive, doit avoir été à l'origine du dommage pour pouvoi
engager la responsabilité du débiteur de l'obligation. Une réticence, même- fautive, qui n'a pa
entraîné de dommage ne peut engager la responsabilité du débiteur.
Ainsi, dans l'affaire Denis Benoliel ou l'affaire de « l'homme sanS visage », le tribunal d
Senlis s'est appuyé sur une négligence de la société fabricante de l'aérosol dans l'information d
consommateur pour condamner solidairement le P.D.G. Lucas Beyeler et son groupe à verser
la victime une provision de 2 millions de Francs de dommages-intérêts pour la réparation de so
préjudice, Une provision de 1,4 millions à la sécurité sociale au titre de frais médicaux et un
autre provision de 350.000 Francs aux membres de la f<lmille les plus proches de la victime. 202
Dans ses attendus, le tribunal reproche principalement au fabricant d'avoir fait preuve d
négligence dans l'information du consommateur en ces termes : malgré un arrêté interministéri,
publié un an plus tôt, Reckitt & Colman ne s'étâit pas décidé à l'époque du drame à mentionm
sur l'emballage la composition de son aérosol. La présence du butane ou du propane, gaz tri
inflammables, était ainsi dissimulée. Le fabricant se contentait de préciser qu'il ne fallait pé
pulvériser vers un corps incandescent.
« Manifestement, un tel conseil était nettement insuffisant. La société aurait pu prévo
que certains utilisateurs sont des fumeurs ». Le tribunal reproche aussi à la société « qu'elle r
pouvait ignorer que la diffusion de son aérosol dans un local fermé peut créer avec l'atmosphè
Ull mélange explosible... Alors qu'il est conseillé sur l'étiquette de fermer portes et fenêtres »203.
Il faut cependant préciser une chose. Lorsque l'obligation d'information a une inciden,
sur le consentement d'un contractant, les dommages intérêts devraient suivre le régime de
responsabilité délictuelle?04 Quant à
la sanction
relative à
la
violation des obligatio
d'informat ion ayant une incidence sur l'exécution du contrat, il serait cohérent de les soumet!
au régime de la responsabilité contractuelle. èO'i Pour cc qui est des dommages-intérêts, on devr
~o~ GUYOT: article précité.
201 GUYOT: article précité.
20·1 FABRE-MAGNAN: thèse précitée, n° 3n et suiv.;
20) Ihid.

348
faire confiance au juge pour déterminer aussi bicn leur mode de calcul quc leur 11l011lallt ; il s'agit
lù des questions de fait liées ù J'appréciation souveraine des juges du fond. Dès lors que le
préjudice existe et le lien de causalité entre la rétention fautive et le préjudice de la victimc établ i,
la réparation doit suivre. C'est une question de logique et d'équité contractuelle.
Mais au-delà de l'information obligatoire à laquelle sont soumis tous les professionnels,
une autre exigence, somme toute moins contraignante, demeure à leur passif et qu'ils se doivent
aussi d'honorer: il s'agit de l'information facultative ou spontanée.
B - L'information facultative ou spontanée du professionnel.
Outre J'information obligatoire à laquelle sont astreints tous les vendeurs et prestataires
de services pour des raisons d'inégalités dans les rapports contractuels, il est important de
souligner que certains professionnels livrent de façon inattendue des informations spéciales à
leurs clients, sans doute pour orienter davantage leur choix. Peut-être s'agit-il là d'une obligation
« naturelle »20(, d'information. L'important dans tout cela, c'est qu'on y trouve un brin de
loyauté,' qualité chère et extrêmement rare dans ce genre d'exercice. Ceci est valable aussi bien
pour les professionnels du secteur privé (a) que du secteur public (b).
a) L'exécution de l'information facultative ou spontanée
dans le secteur privé.
« Vne bonne information, a dit un auteur, est Ull argument publicitaire »207. Mais à la
différence de la publicité, l'information spontanée n'a pas nécessairement pour but principal et
immédiat de convaincre le client. Elle résulte tout simplement d'une autodiscipline des
r '
1 20X
prolesslonne s.
20(, CALAIS-AULOY : L'information des consommateurs par les professionnels ". article rrécilé, n° 41.
/
207 Ibid .. p. 9X9.
20H B. BONJEAN : « Le droit à l'information des consommateurs », in « L'information en droit privé", Travaux
de la Confërenl:C d'Agrégation sous la direction de Y. LOUSSOUARN et P. LAGARDE, LGDJ, Paris. lome CUI,
p. 368 et suiv.

349
L'information spontanée, qu'elle soit d'initiative individuelle209 ou collective210 ,
vise à révéler au consommateur certaines indications sur les qualités ou caractéristiques
des produits ou services qui lui sont proposés. Elle peut consister, pour le profèssionnel, à
Üùre connaître au consommateur les signes distinctifs des produits 211 ou même à faire
reconnaître par un tiers la qualité du produit mis en vente. 212
Aussi fàcultatives qu'elles soient, ces informations ont Wle valeur contractuelle. 213
Ainsi, quels que soient les moyens utilisés pour rendre son produit plus attrayant, le
professionnel se doit-il d'être loyal d<.Uls ses différents propos. Il ne peut d'un côté fournir
une infonnation et de l'autre prétendre que celle-ci n'a qU'lm caractère indicatif et ne
l'engage donc pas 214 Le devoir de loyauté s'impose au professionnel même dans les
informations foumies de façon volontaire. Il importe donc que les renseignements donnés
spontanément « aient un contenu préci~, UIle acception communément admise pour éviter
que le consommateur soit abusé })215 . Pour que l'infonnation, même facultative, soit
accessible à touS: donc compréhensible, il faut la dormcr dans un langage commun.216
209 Il s'agit, en effet, de l'infomlation d'origine individuelle concernant les marques. Un conunerçant peut
imaginer une étiquette, un autre une note explicative ou un éçrit, lesquels vont au-delà des informations
légalement obligatoires. Ces initiatives pleines d'intérêt, pour les consonunateurs, restent le plus souvent dans le
domaine du non droit. Cf en ce sens, CALAlS-AULOY : «L'information des consonunateurs .par les
~rofessionnels. », article précité, p. 989.
10 Il s'agit ici de l'information dérivant de l'initiative collective des professionnels. Un accord collectif, souvent
encouragé par l'Etat, préétablit un système d'infonnation auquel chaque protèssiormel reste libre d'adhérer ou de
ne pas adhérer. CALAlS-AULûY : "L'information des consommateurs par les professionnels », article précité, p.
990.
211 Sur les signes distinctifs des produits, voir B. BûNJEAN : article précité, p. 368 et suiv.
212 CAS et FERRIER: op. cit., n° 407.
213 CAS et FERRIER: op. cit., n° 405.
214 La jurisplUdence considère que mème les documents publicitaires ont une valeur contractuelle: cass civ 10
nov. 1963, bull civ 1427 ; cass cil' 18 mai 1966, bull civ 1 236 ; Paris 3 mai 1967, G.P. 1967, il, 34 ; TGI Paris
1el' mars 1982, G.P. 1982, l, 100. A propos d'une « note de présentation », de programme inunobilier sur
laquelle le professionnel avait mentiormé « cela ne constitue pas un document contractuel et les renseignements
n'ont qu'un caractère indicatif et prévisiormel », le tribunal de conunerce de Paris a jugé que« les réserves de
style ne pouvaient aller à l'encontre de promesses Connelles contenues dans les documents, ces réserves cessant
d'être valables quand eUes contredisent directement l'action ou atteignent son principe irmnédiat », voir Triu.
Com Paris 28 nov. 1977, pal GHES1lN, colloque Assoc. Droit et Com Bougival ENAJ. 1978, p, 230. Pour
GHESTIN, la force obligatoire de ces documents repose sur un principe de cohérence intellectuelle; on ne peut
~as promettre ce à quoi 1'Oll ne s'oblige pas.
15 CAS et FERRlER op. cit., n° 410.
216 lbid.

350
bl L'exécution de l'information facultative ou spontanée
dans le secteur public.
La notion de protection du consommateur s'identifie le plus souvent à une atlàire
de rappcnis entre professionnels de droit privé et leurs clients acheteurs. L'usager du
service public, il Ümt le dire, n'en est pas moins un consommateur et à cet effet il a lui
aussi besoin d'être protégé dans ses relations avec les professionnels de droit public. 11 a
besoin cl' être infonne.
Ceries, le secteur public jouit dans tous les pays d'un statut particulier. !vlais il
comporte des entreprises telles que les sociétés d'économie mixte, les sociétés d'Etat, les
établissements publics à caractère industriel et commercial. La nécessité de protéger les
consommateurs devraient amener les pouvoirs publics à SOlilllettre ces sociétés, ne serait-
ce que dans le domaine relatif à l'information, aux mêmes règles que celles des
entreprises privées, car l'usager d'un service public a le même besoin d'infonnation que
le client d'une entreprise privee. 217
Somme toute, l'infol1natioll spontanée est une véritable nécessité dans les pays
africains. !vla.is l'usager consommateur est rarement servi. Dans nos administrations, on se
soucie fort peu d'infonner l'usager. Une solide tradition du secret, considéré d'ailleurs
comme un privilège pour celui qui s'y trouve, jointe à un ceriain mépris pour l'usager, a
tàit de l'admirùstration un orgamsme replié sur lui-même, tèrmé, égocentrique, voire
0, 1~
anacluonique. - C
217 CALlùS-AULOY:« L'infonnalÎoll des consormnateurs par les professiomle!s », mticle précité, p. 992.
218 Ibid.

351
Pour renclre senïce a l'usager, l'admullstratlOll dans les P.VD. clevralt remédier Cl
l'cllè carCl1C\\: cl'll1t<')1ll1,ltll)n EUe devra pour ce L:me simplifier ses lllélJwcles. remettre el1
CIUSé 1<1 reg le clu secrè! èl pOl1er rinfonnationJusqu'a l'usager. sans at1èllclre qu'û vieJUlc
la chercher. Le législatèur devrait cie son coté assl'uplu la règle « nul n'est cense ignorer la
loi» De cette manière. r usager pourra échapper a un règlement en invoq uanl l'ignorance
dans laquelle l'administration]' Cl tenu.
Outre l'infonmlllon,
le
prot~sslOJlnd
,:.-,1
knu
pOll! les
bCSOlIh
d'équité
contractuelle de garantn les biens ct [es services qu'll vend allx consollllllakurs
Sous-Section II - Le l!roblème relatifà la garantie du professionnel
dans la vente.
L'une des e:>:lgenccs du clrolt de la consommatIOn est que lès blClb mis sur le:
marché présentent les Cjualite5 rcqll1ses et pour lesquelles Ils ont aé achètes Ils dOIvent
être sùrs et appolter Ull lllllllJllUm de sallsÜtct!on <1 bu lltmsakllT, leqllel Ile c!c)it souf[nr
fi' aUClll1 dommage clu (J kur lisage
cO' cst clonc lln l~lbCè,lU d'obligatIons et de
garantie, laqueUe relève du clomame du prof~SSlOrll\\eL C'est un.: eXlgenœ essentielle cie lé1
vente I§II). Mais cette eXlgence est loin d'être respectée clans les pays d'Afnque ($>1), et
ceCI aU détnment des consommateurs IOC3lLX

352
§I - Les données du problème en Afrique.
Ces données se comprennent à travers des faits fâcheux résultant du vécu quotidien de
certains consommateurs dans leurs transactions (A) et du déséquilibre qui s'ensuit entre les
prestations, conséquence du vide juridique en la matière (B).
A - L'absence d'obligation légale relative à la
garantie du professiollnel dans la vellte et le
vécu quotidien du COIlSOlIlllUlteur.
Les déboires des consommateurs africains dans leurs rapports avec les professionnels sont
monnaie courante sur les marchés locaux. Nombreux sont les consommateurs qui ont été
victimes d'une manière ou d'une autre d'un achat d'un matériel technique (radio, téléviseur,
montre, magnétophone etc ... ) sans résultat satisfaisant à cause du vice dont il était affecté et qui
n'ont pu faire réclamation ou obtenir gain de cause chez le commerçant parce qu'ils n'étaient
.
.
'19
mUnIs d'aucune garantIe.-
Une telle attitude s'explique par le fait que l'ordonnance togolaise du 22 avril 1967 qui
est jusqu'à présent le seul texte régissant la vente des marchandises au Togo ne fait aucune
obligation au commerçant de délivrer la garantie au consommateur acheteur.
La seule «obligation
», encore faut-il c'en soit une, qui incombe au commerçant
concerne la délivrance de la facture, et ce, à la demande de l'acheteur (article 9, al. 2 de ladite
ordonnance). Ce qui signifie a contrario que l'absence de demande de J'acheteur le prive
automatiquement de la délivrance de la facture qui est pourtant une preuve indéniable de l'achat.
L'article 9, al 2 va encore plus loin dans sa protection des commerçants. Il dispense les
marchands amhulants de la délivrance de toute facture. Or, il est reconnu que la majorité de la
population, en particulier les consommateurs défavorisés, font leurs achats chez ces marchands
219 Un cxcmple nous pcrmet d'illustrer nos propos. Nous somllles en lIlars 1~X6 à Lomé (Togo). Un ami étudiant,
alors voisin de chambre alla au grand marché de Lomé pour l'aire ses courses. [1 revient quelques heures plus tard
avec une montre de marque « Mortima » achetée au prix unitairc de 2.S00 F.CFA chez un marchand de la place.
A son retour chez lui, la montre avait, à sa grande stupéfaction, cessé de fonctionner. N'étant muni d'aucune
racture, ni de bon de garantie, il se résigna à tenter un quelconquc recours qui, de Ioule façon, Il 'aurail pas abouli.

353
ambulants, ce secteLlr étant le seul où le débat sur les prix est possible. De plus, il s'agit d'un
secteur commercial très présent dans les pays africains. Il est donc souhaitable que les
consommateurs obtiennent une protection de ce côté là.
Le second exemple concerne l'achat d'un poste téléviseur effectué par un fonctionnaire de
la place. Quelques mois après l'opération, le poste tombait en panne. La facture n'accordait à ce
dernier qu'un service après-vente limité uniquement aux réparations et ce aux frais de l'acheteur.
L'impuissance de l'acheteur l'amena à accepter la seule alternative qu'on lui proposait, le
remplacement du téléviseur défectueux étant pratiquement impossible. Ce qui en soi n'est pas
loyal vis-à-vis du consommateur acheteur.
Ces deux exemples, qui ne sont pas des cas isolés, montrent l'intérêt de la garantie dans la
vente et l'urgence qui s'impose dans ce domaine pour l'intérêt des consommateurs locaux, car le
vide juridique qui s'en ressent comporte des conséquences qui ne sont pas bonnes pOUl
l'acheteur
B - Conséquences de l'absence d'obligation légale relative
à la garantie du professionnel dans la vente.
La conséquence immédiate est que le défaut de garantie du professionnel crée ur
déséquilibre manifeste dans les prestations réciproques. Si la garantie a pour but de rassurer lé
client quant à la fiabilité du matériel acheté, il est évident que le vendeur déséquilibre le~
prestations réciproques dès lors que son engagement à garantir la qualité des biens vendus fai
défaut. Ceci est d'autant plus nécessaire que le progrès technique rend les objets plus complexes
Et la complexité qui en résulte empêche le consommateur de déceler le défaut ou vice dès le
premiers contacts avec la marchandise. Ceci est d'autant plus vrai que le consommateur est UI
proüme dans le domaine où il investit son capitaL Et en Afrique, il n'y a pas que des profane.
mais des consommateurs profanes doublés d'un analphabétisme caractérisé. D'où l'intérêt de 1
garantie.
La deuxième conséquence résultant du vide juridique est l'avantage important que celui-l
accorde au professionnel sur le plan économique. N'étant obligé à aucune garantie, il n'e;
soumis à aucune perte financière résultant du remplacement du matériel défectueLlx ou de ~
réparation. Un autre avantage et non des moindres se trouve dans la liberté dont il dispose qm
à l'opportunité d'accorder ou non la garantie à son client. Et dans le cas où un professiol1l
décide d'accorder une garantie à un client, la fixation du délai lui revient de facto. Ce délai;

354
Togo dépasse rarement six mois pour les matériels électroniques. Ce qui est en soi insuffisant
pour la manifestation des vices cachés. Qui plus est, il est le plus souvent assorti de clauses
inadrIÙssibles, abusives limitant ou empêchant de fait la jouissance de la garantie ["Jar le
220
consommateur.
La troisième conséquence est la suite logique de la seconde. Le vide juridique dans nos
pays légitime d'une manière ou d'une autre le comportement des professionnels en ce qui
concerne la liberté de délivrance de la garantie. Ce qui est en soi anormal, la garantie dans la
vente étant une créance légitime du consommateur et un moyen d'équilibre des prestations
réciproques. Ce que nous allons démontrer dans le développement qui va suivre.
§II - L'exigence de la garantie du professionnel dans la vente.
La vente est un contrat et en tant que tel, les prestations des parties doivent faire l'objet
d'un équilibre, même s'il est impossible d'atteindre un équilibre parfait. Le vendeur ne s'acquitte
pas de son engagement en remettant la chose vendue à l'acquéreur. A quoi bon pour ce dernier
de recevoir un bien s'il n'est pas certain de le' conserver ou si les défauts risquent d'en
compromettre J'usage. C'est justement pour éviter une telle déconvenue à l'acheteur que la loi -
du moins dans les pays économiquement avancés - oblige le vendeur à garantir le bien vendu.
Ceci n'est malheureusement pas le cas dans les pays africains et les exemples de quelques
consommateurs togolais cités plus haut reflètent bien l'état de la situation du consommateur en
ce qui concerne le problème de la garantie dans la vente.
Notre propos est de restituer ce droit à garantie, somme toute légitime, au consommateur
en faisant comprendre son bien fondé (C) et son intérêt pour ce dernier (0). Mais il faudra au
préalable définir les qualités à garantir (A) et le domaine que la garantie du professionnel est
appelée à couvrir (B).
220 Cf infra, section II dudit chapitre. La clause habituellement inscrite sur la facture est ainsi lihellée : « Ni repris.
ni échangé, garantie trois mois pour réparation uniquement », voir Annexe, cf la facture ùe la société KOEIH &
CO délivrée à Mme FALOLA le 13 novembre 1995 suite à l'achat d'un réfrigéraleur !BERNA il Colon ou (Bénin),
facture N° 000569.

355
A - Les qualités à garantir.
Elles sont au nombre de trois : qualités matérielles, qualités économiques, qualités
juridiques.
- Les qualités matérielles: ce sont des propriétés physiques, chimiques ou techniques
relatives à la matière (or massif, métal argenté, pureté d'un diamant) à la forme, à l'aspect, à la
solidité. Bref, il s'agit des propriétés relatives aux qualités intrinsèques de la marchandise. Cette
notion de qualités matérielles recouvre aussi deux autres notions : les qualités assurant
l'utilisation et le fonctionnement normal et durable de la chose, les qualités influençant
directement la valeur de la chose:':' 1, notamment l'ancienneté ou l'authenticité 222d 'un objet d'art.
- Les qualités économiques : ce sont des faits déterminés et objectivement constatables
relatifs au rendement ou à la valeur de la chose vendue: rapport qualité/prix, rendement d'un
immeuble.:':"
- Les qualités juridi9ues : elles consistent pour le vendeur à garantir à l'acheteur un usage
paisible du bien acheté contre une éventuelle éviction d'un tiers se prévalant d'un quelconque
224
droit subjectif sur ce bien.
B - Le domaine de la garantie.
Garantir une marchandise ou un serVice, c'est s'engager à couvrrr l'acheteur ou le
bénéficiaire du service contre deux choses: contre les vices ou défauts de la marchandise ou du
service (a) et contre un éventuel trouble de jouissance dont il pourrait être victime en raison de
l'éviction d'un tiers ou du propre fait du vendeur ou du prestataire de service (b).
221
F. CHAUDET: « La garanlie des dél~luls de la chose vendue en droit Suisse ct dans la Convention de Vienn
sur les conlrat, de vente internationale de marchandises », in « Les contrats de vente internationale (
marchandises », édité par F. DESSEMONTET, coll. CEDIDAC, Lausanne 1991, p. 95
w.lbid., p. 96.
m F. CHAUDET: ar!. précité, p. 96.
224 Ibid.

356
al L'obligation pour le professionnel de garanti."
le consommateur contre les vices ou défauts
de la marchandise.
L'article 21.a) de la loi camerounaise du 10 Août 1990 dispose: « Toute entreprise
commercialisant au Cameroun à l'état neuf des biens de consommation durables, qu'ils soient à
usage professionnel ou non, est tenue de délivrer, lors de chaque vente, une notice rédigée en
français ou en anglais, rappelant les caractéristiques essentielles du bien en cause et précisant
l'étendue et la durée de la garantie accordée au client et rappelant en outre les dispositions
relatives à la garantie légale des vices cachés ».
En reconnaissant au consommateur le droit d'obtenir une garantie du professionnel, le
législateur innove par rapport à ses pairs africains et aux textes qui régissent l'activité
commerciale dans les autres pays du continent. La référence faite à la garantie légale qui n'est
rien d'autre que celle de l'article 1641 Code civil français 225 prouve que le vendeur doit une
double garantie au consommateur: la garantie conventionnelle exigée par le texte de l'article
21 .a) et la garantie légale de l'article 1641 du Code civil français. L'allusion faite à la garantie de
l'article 1641 du Code civil montre une fois de plus que le droit français n'a pas complètement
pris congé dans les pays d'Afrique d'expression française et que son influence demeure
quasiment intacte.
L'obligation de garantie du professionnel est une suite naturelle de la vente. 226 C'est une
exigence de loyauté qui répond à un but légitime : permettre au consommateur de profiter
pleinement de sa transaction. D'après l'article 1641 du Code civil français, « le vendeur est tenu
de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage
auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise,
ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus »227.
m Pour s'en convaincre, il suflit de se réfërer au commentaire de cette loi réalisé par NYAMA, Juridis Inl'o n° 5
Janvier-Février-Mars 1991, législation, p. 18.
1
226 1. HUET: Contrats Civils et Commereiaux : Responsabilité du vendeur et garantie contre les vices cachés,
Litcc 1987, p. 7.
227 Les mêmes dispositions ligurent dans l'article 1641 uu code civil belge, l'article 1540 du Code néerlandais cl
l'article 1522 du code civil du Quéhec, cités par GHESTIN : conformités ct garanties dans la vente, op. cit. p. 16.

357
Le texte de l'article 1641 parle de défaut de la chose sans toutefois en donner une
délïnition. Qu'entend-on par défaut de la chose?
La chose vendue a certainement un défaut si elle est détériorée ou abîmée. Il s'agit là
d'une définition matérielle ou conceptuelle du défaut. 228 Dans la qualification du défaut de la
chose, on peut encore aIJer plus loin et prendre uniquement en considération «toute manière
d'être de la chose vendue, toute qualité de cette chose, qui la rend inapte à l'usage auquel on la
destinait »229. On voit là une notion fonctionnelle du défaut. Enfin, selon une troisième
qualification, une chose peut être déclarée défectueuse dès lors qu'elle ne satisfait pas à l'une de
ses qualités convenues entre les parties. La définition du défaut dans ce cas est alor~
contractuelle. 230
En droit français, les définitions matérielle et contractuelle du défaut ont tendance à SE
confondre. Tout d'abord, d'après l'article IMI du Code civil, la garantie n'est due que s
l'absence de la qualité convenue affecte l'usage de la chose. Ensuite l'inaptitude à l'usage doi'
résulter d'une manière d'être de la chose, c'est-à-dire de ses qualités. Enfin, l'usage auquel or
destine la chose suppose une destination connue du vendeur et entrée par là dans le chamI
contractlle1. 231 « Un usage spécial implique des qualités correspondantes, dont le vendeur ne peu
garantir l'existence s' il a ignoré la destination envisagée par l'acheteur» 2J2.
lU GI-IESTIN : op. cit., p. 16.
22') Ihid.
2111 Ihid., Le lien entre la garantÎe et celle des qualités promises est exprimé en droit allemand par J'article 459 (
BG.B. Son alinéa 1<' énonce une disposition voisine de celle du code civil français, tandis que le second alin(
soumet également il la garantie les cas dans lesquels le vendeur a assuré l'acheteur de l'existence de certain
qualités de la chose. Sur ce point, voir B. STALIDER : « Conformités ct garanties dans les ventes international
d'objets corporels en droit allemand», in «les ventes inltrnationales de marchandises», 1981, p. 127 ct 13
L'article 197. alinéa 1 du code suisse des obligations vise aussi les qualités promises et les défauts qui donne
égalell1entlieu à la garantie. Voir en ce sens, B. STAUDER. et H. STALIDER : «Conformités et garanties dans 1
ventes internationales d'ohjets mobiliers corporels en droit suisse », ibid, p. 164.
211 Casso Com. 8 nov. 1972, bull. civ, IV p. 266, n° 282, qui, pour justifier l'application de la garantie des vi,
cachés, relève que le vendeur «avait une connaissance exacte de la destination des matériaux qui lui étai<
commandés ». - 6janvier 1982, hull. civ. IV, na 7, p. 5. - 4 décembre 1950, bull. civ. 11\\, na 365, p. 262.
232 GHESTIN : La notion J'erreur en droit positif actuel, thèse 1963, 2è éd. 1971, p. 329, na 28 I.

358
De toute façon, la définition du défaut ne fait pas ['unanimité au sein de la doctrine. On y
2 n
voit les tenants d'une conception classique, matérielle et conceptueJJe :
c1'un côté, et les
234
partisans d'une définition plus moderne, contractuelle et fonctionnelle
de l'autre.
Dans la logique des choses, il serait plus cohérent et réaliste d'adopter la définition
fonctionnelle plutôt que la définition conceptuelle. Comme l'a bien souligné un auteur, « il n'y a
pas à distinguer entre une cause, le défaut, et une conséquence, (mais) l'inaptitude de la chose à
l'usage auquel elle est destinée »235. Ce qui est essentiel, en effet, pour l'acheteur, ce n'est pas
l'objet lui-même, c'est l'utilité qu'il en attend, s'il s'agit d'un consommateur, ou la valeur que lui
confère cette utilité, s'il s'agit d'un marchand »236. La chose est donc défectueuse dès l'instant
qu'elle est inapte à l'usage auquel elle est destinée ou que son aptitude est réduite au point «que
l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix» s'il l'avait su.
La jurisprudence a une conception plus large du défaut. Le rôle des juges du fond, en
l'occurrence des juges consulaires, est essentiel car c'est eux qui, souvent en dernier ressort,
tranchent le plus grand nombre de litiges issus de la pratique des affaires. Ils développent ainsi
leur jurisprudence en imprimant une indéniable orientation à la pratique des commerçants
professionnels.
Certes, la référence à Llne défmition conceptuelle du défaut pour délimiter le domaine
m
propre à la garantie apparaît dans quelques décisions.
En outre, de nombreuses décisions visent
des altérations ou des détériorations de la marchandise. Il en ainsi, par exemple, d'une farine à
24ü
l'odeur nauséabonde2J8 , de salaisons avariées219 de conserves fermentées
, d'un vin atteint de la
m BAUDRY-LACANTINERIE et SAIGNANT: Vente et louage, 3" éd. 1908, p. 422, n° 414; AUBRY et RAU:
Droit civil, l. V, p. 106; RIPERT el BOULANGER: Droit civil, l. III, p. 509, na 1527 ; 1. HEMARD : les contrats
commerciaux, l. 1, vol.2, 1953, 195, na 275, in Traité théorique et pratique de J. ESCARRA, E. ESCARRA et 1.
RAOULT; RICARDO FUBINI: obs. R.TD.Civ. 1930, p. 463, na 8 ; et Nature juridique de la responsabilité du
vendeur pour les vices cachés, R.TD.Civ. 1903. p. 279, spéc. n° 8.
234 GHESTlN: thèse précitée, p. 341, na 292 : etl'applieation des règles spéciliques de la vente à la respollsabilité
des fabricants et distributeurs, 1975, p. 14, n° 15. Ph. Le TOURNEAU: La responsabilité civile, \\982, na 1752.
m GHESTIN : Conl(lfInités et garanties dans la vente, op. cil., p. 18.
2.16 Ibid.
237 Rouen, 3 mars 1909, Rec. luI'. COI1l. du Havre, 1909. Il, 4; Rouen, 29 llIars 1911, ibid, Il, 77; Trib com. Le
Havre,27 novembre 1922, ibid, 1922.1,205: Bordcaux, 23 mai 1977, lCP 197H, IV, p. 319, G.r. du 7 février
1978, pour des fromages avariés.
m Trib. Corn. du Havre, 30 juin 1885, Rec. luI'. du Havre, 1892. 1, 119. Par GHESTIN in « Confomité et garantie
dans la vente », op cit p. 203.
m Rouen, 8 février 1879, Rec. luI'. du Havre, 1879, Il, 63. Par GHESTIN in « Confomité et garanties dans la
vente », op cit p. 203.

359
241
maladie de la tourne
, ou de fromages gonflés et dégradés sous l'action de ferments ou agents
microbiens 2'i2.
Mais la garantie des vices cachés est également appliquée à des différences atteignant la
W
nature
physique
ou chimique de
la chose,
notamment
par
l'addition
de
substances
244
étrangères
, ou l'identité même du produit245 . Elle joue également à l'égard de qualités qui Ile
tiennent pas à la nature matérielle de la chose, telles l'origine ou l'époque246, l'année de sortie
d'un véhicule247 , la provenance prohibée à l'importation248 , ou frappée d'un droit prohibitif249 , ou
qui ne l'expriment pas de façon indirecte, telle fait pour une automobile d'avoir été accidentée 2.:'11.
Certains arrêts cependant admettent à l'inverse une définition étroite du défaut afin
d'écarter le bref délai de l'article 1648 du Code civil. C'est ainsi qu'après avoir constaté que la
cause des dommages était « l'installation défectueuse» d'une machine à traire les vaches dont la
dépression était excessive, un arrêt de la Cour de Paris en date du 13m.ars 19782) l, déclare que
l'acheteur « fonde son action non pas sur l'existence d'un vice caché, mais cumulativement sur
lin défaut technique de l'installateur et l'incapacité de celui-ci d'assurer correctement et utilement
2·10 Trib com Nanles. 1er avril 1911, Rec. lur. du Havre, 1911,1,360. Par GHESTIN in «Conformilé el garantie~
dans la venle », op cil p. 203.
w Paris 219 juillet 1922, GP 1923,1,39.
242 Bordeaux, 23 mai 1977 précité.
241 Paris 26 juin 1979, Société Technique de Productions Industrielles cl Comptoir Lyon Alemand Louyo!. pour ur
alliage dont la composition ct les qualités mécaniques n'étaient pas stahles. Par GHESTIN in «Conformilé e
garanties dans la vente », op. cit , p. 203.
244 V. Par exemple le mélange d'une matière minérale à une marchandise destinée à la nourriture du hétail. Trio
Com. Marsei Ile, 3 août 1X9X, lourn. lur. Corn. et mar., 1899, l, 214, - Le suerage ct le moui liage d'un vin. Rcnne~
25 mai IX99, Rec. Jur. Com. Nantes, 1900, I, 138. - L'addition d'huille de coton à de l'huile d'olive. Trio. COll
Marsei Ile 21 mars 1XXX, loufll. lur. Corn ct Mar. 1888, l, 21 1. Cités par GHESTIN in Con rormité et garantie
dans la vente. op. cit p. 203.
245 Pour du blé d'automlle livré au lieu du blé de mars, Trib civ Seine 13 juin 1893, DP 1X94, H, 510.
246 Douai 31 juillet IX95, D. 1895, l,54.
w Rouen 29' j,lnvier 1965, G.P. 1965, l, somlll. 29.
24X Trio com ~Iu Havre, 9 décembre 1X90, Ree jur du Havre, 1,33. Par GHESTIN, op ci!., p. 204.
249 Trib com du Havre 29 mars 1904, ibid, 1, 6X. Par GHESTIN, op ci p. 204.
250 V. en ce sens. Amiens,
14 décemhre 1967, D. 1968,399, note LEPOINTE ; lCP I%X. IV, 84. - Rouen
lëvrier 1967. GP 1%7, Taol. v o, Vente en général, na 59 ; R.T.D.com. 1968, p. 112, obs 1. HEMARD ..
Montpellier 12 fëvrier 1962, D. 1962, p. 641 ; lCP. 1%2, Il, 12741, note DISOL cl Cass civ. r"o 25 avril 197'
GP 1979, Il, SOI1lI1l. P. 431, qui refuse de voir un défaut dans celle circonstance
251
15è chal1lbre. Guyoll cl Charriau. Par GHESTIN, op cit, p. 204.

360
son obligation de conseil », ce qui rendait applicable l'article 1147 du Code civil cl écartait le bref
délai de l'article 1648252 •
Un autre arrêt de la même Cour en date du 6 juillet 1979 écarte le bref délai de l'article
1648 en admettant expressément le cumul de la garantie des vices cachés et de la « non-
conformité du véhicule », s'agissant, il est vrai, d'une différence de poids réel de celui de sa
è
description dans les documents contractuels, ce qui était bien une non-conformité stricto sensu ".
La Cour de cassation de son côté dégage une jurisprudence avec deux courants qui
paraissent assez contradictoires.
Une
première
tendance,
qui
semble
aujourd'hui
nettement
minoritaire,
admet
l'application de la garantie des vices cachés en dehors de tout défaut au sens matériel ou
conceptuel et parce que l'objet vendu était inapte à sa destination. On peut citer en ce sens un
arrêt de la Chambre commerciale en date du Il mars 1965è)~ qui admet la résolution pour vice
caché de la vente d'un bateau de rivière vendu comme étant apte à la navigation maritime.
Il Ya aussi l'arrêt de la 1ère Chambre civile du 18 mai 1966255 , qui admet l'annulation pour
vices cachés assortie de dommages-intérêts de la vente d'un moulin de ferme inapte, malgré les
affirmations du vendeur, à fournir une mouture d'avoine utilisable pour l'élevage des porcs. Il en
va de même de l'arrêt de la Chambre commerciale du 23 janvier 1978256 qui voit dans la fausse
indication de l'année de fabrication ( 1951 au lieu de 1959) d'un bulldozer d'occasion un vice
caché. La même Chambre a dans un arrêt du 3 janvier 1977257 , visé expressément l'article 1641
252 V. Dans le même sens, à l'égard de riz infecté d'insectes, Paris, Sè ch., 6 janvier 1978, Tradax International cl
Saules, qui écarte la garantie des vices cachés au profit de l'inobservations des conditions fixées au contrat. - A
l'égard d'une machine déshydrateuse de fientes à système de désodorisation qui dégageait en fait une audcur
è
nauséaoonde, Paris, 2S ch., 20 décembre 1979, Sté de Ricke cl Guillemin, qui écarte l'article 1648 en observant
« que l'oojet vendu ne présente pas de défaut empêchant son lonctionnement, mais n'est pas conforme aux
stipulations du contrat en raison d'une insuffisance de mise au point... qui ne permet pas au dispositif de
désodorisation d'atteindre son résultat », mais ajoute un peu plus loin que le lonctionnement pratique du dispositif
était « défectueux» - Adde, Paris, Sè ch., Il juillet 1979, Enault cl Automobiles Peugeot, qui, après avoir admis le
caractère de vice apparent du mauvais fonctionnement des poutres de la capote, écarte l'action rédhibitoire, mais
admet une inexécution partielle par le vendeur-constructeur de son obligation de délivrance con tonne.
mS è ch., Ets. Gruau cl Auxiliaire de ferblanterie.
254 Bull. Civ, III, p. 278, n° 306.
255 Bull. Ci v., l, p. 236, n° 308.
256 Bull. Civ. IV, p. 26; G.r. 1978, l, Somm. P. 205.
257 Bull. Civ., IV, p. 3 ; G.r. 1977, II, p. 461, note A. PLANCQUEEL.

361
du Code civil pour admettre la garantie due par un vendeur qui n'a pas lTlis en garde l'acheteur
contre une difficulté d'emploi~5H.
Mais l'intervention de la Cour de cassation se rencontre souvent dans des espèces ail le:
différences de régime des actions en garantie des vices cachés et en non-conformité son
déterminantes au succès de la demande. Elle opère alors la qualification en fonction du crit'::r
conceptucl du défaut, quitte à affIrmer en fonction des espèces que le fait incriminé n'est pas c
défaut.
Elle affirme aussi de façon formelle la distinction entre ViceS, altérations, de l'o!J1
l'endu, et la différence de qualité ou de nature de la prestation promise, qui seule peut êl
qualifiée de non-conformité au sens strict du terme et par opposition aux vices cachés259.
De façon générale, le vice caché ou le défaut est celui qui, tout d'abord, rend la chl
impropre à son usage normal; il est constitué par toute inaptitude de la chose ne lui permett
pas de répondre à l'usage auquel elle était destinée. C'est un problème de fait, et en tant que
il est laissé à l'appréciation des juges du fond~60.
Mais le problème n'est pas aussi simple qu'on peut l'imaginer, car une certaine confu:
subsiste dans la distinction entre te vice caché et la non-conformité. Et là dessus, on a ass
avant le revirement opéré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans son;
du 5 mai 1993261 , à une opposition radicale entre cette chambre et la troisième de la mème (
sur l'articulation des actions ouvertes à l'acheteur déçu, et plus précisement, de la garant it
vices cachés et de la responsabilité pour délivrance défectueuse. Contrairement à la troi~
chambre, la première assimilait le vice caché à la non-conformité de l'objet livré. Ce qui e
nature ~l semer une confusion dans les différentes actions reconnues à l'acheteur en c
deconvenu du bien acheté.
En effet, au moment de la vente, et aux termes convenus pour son exécution, le \\'(
est tenu de l'obligation de délivrance, obligation essentielle et d'ordre public qui ne peut sa
2,X Adde en malière immobilière, Cass civ 3è, 23 janvier 1979, D. 19XO, p. 412, noIe F. STEINMETZ, qui
de vicc caché des vues plongeanles d'un hÔlel ue cinq élages sur Uil pavillon uonl les uocul11enls pul~
avaienl insislé sur la sauvegarde ue l'intimilé ues acquéreurs.
2''1 Voir en cc sens GHESTIN : Conformilé el garanlies uans la venle. op. cil., p. 205.
21>0 Req n février 1991, D.P. 1916,1,231.

362
262
l'idée même de ventc.
Postérieurement à la vente, le vcndeur est tenu à dcs obligations dc
garantie qui n'en sont que des prolongements : garantie des vices cachés (qui vidcrait la
délivrance de toute portée réelle en fait) ; garantie contre l'éviction (qui la viderait de sa portée
juridique en droit en privant l'acheteur du droit qu'il a acquis).
D'après cette analyse classique, la délivrance est conforme dès qu'est satisfaite ]a
condition d'identité de la chose. La conformité s'apprécie à l'instant même de la délivrance par
rapport à la chose promise et à ses caractéristiques annoncées : si la chose livrée est bien
matériellement celle qui a été promise avec les caractéristiques prévucs, l'obligation de délivrance
est remplie. En revanche, le vendeur ne remplit pas cette obligation si certaines caractéristiques
convenues font défaut. Ainsi s'analyse classiquement l'obligation de délivrance au sens classiquc
du tenne?63 Les déconvenues que peut ensuite essuyer l'acheteur à l'usage de la chose vendue
relèvent elles de la garantie des défauts cachés, préciscment définis comme ceux qui rendent la
chose impropre à l'usage auquel on peut légitimement s'attendre (article 1641 C. Civ.).
La cohérence des obligations chronologiques du vendeur est donc claire : la délivrance
264
concerne tout ce qui est apparent
et s'éteint par la réception de la chose. Quant à la garantie,
elle ne prend seulement que le relais de ce qui est caché.
Cette cohérence des obligations du vendeur a connu des bouleversements aux alentours
des années 1970. Avec l'appui de certains auteurs, une fraction de la jurisprudence avec à sa tête
la première chambre civile de la Cour de cassation s'est prise à effacer la frontière chronologique
séparant l'obligation de délivrance de celle de la garantie pour les ramener à une seule obligation
connue sous l'appellation de « délivrance conforme ».265. Dans ses différents arrêts, la première
chambre civile s'est exprimé en de termes très clairs à ce sujet: « l'obligation de délivrance ne
"61 Casso Civ 1ère 5 mai 1t)93, D. 1t)t)3, p. 506, noIe A. BENABENT ; D. 1t)t)3. SOlllm. commentés. p. 242. obs. O.
TOURNAFOND.
"6" A. BENABENT, noIe sous Casso Civ léll' 5 mai 1t)t)3, D. 1t)t)3. p. 506.
"63 Ibid. ; -« Conformilé cl vices cachés ùans la venle: l'éclaircie ». D. 1t)t)4. chron., p. 115; O. TOURNi\\FOND
: « les prétendues concours d'aclions clic conlral de vente », D. It)Xt). chrono p. 237 cl suiv.
è
264 Civ. 3
20 janv. 19R2, Bull. Civ. 111. n° 20; D. 19R2, IR. 225 ; Com. 12 lb. 19RO, D. It)RI. p. 2n. noIe
AUBERTIN.
"h5 A. BENABENT, note sous Casso Civ lè.e 5 mai 1993, D. 1993, p. 506.

363
consiste pas seulement à livrer ce qui a été convenu, mais à mettre à la disposition de l'acquéreur
une chose qui corresponde en tous points au but recherché »266.
Cette position de la première chambre civile a rencontré le ralliement de la chambre
. 1
7
26
d
1
~
E l l "
1
l'
.
['
commerCIa e
e a meme cour.
e avait aussI reçu par avance. se on
expression e un auteur
« l'onction implicite »268 d'une assemblée plénière. 269
Par rapport à cette jurisprudence, l'obligation de délivrance conforme prend toute autre
dimension car elle s'inscrit dans la durée et se prolonge après l'exécution de la vente: l'achetelll
déçu par la chose à l'usage pourrait mettre en jeu la responsabilité du vendeur au titre d' Ull(
délivrance non conforme, alors que, cJassiquemenl.
la
voie ouverte
pour cette période
postcontractuelle est celle de la garantie de vices cachés. 270
Cette extension de l'obligation de délivrance revient à la confondre avec la garantie de:
ViceS cachés. Et dans les deux cas, l'action de l'acheteur est fondée sur le fait que la chost
vendue ne fournit pas le résultat attendu. Dès lors tout vice de la chose est considéré commt
constituant en' même temps un défaut de conformité: ce qui permet de requalifier une action el
garantie des vices cachés en une action en responsabilité pour délivrance non conforme, et de 1;
faire échapper au bref délai de l'article 1648 du Code ci vi L motivation réelle des arrêts. 271
Si elle est approuvée par certains, il n'en demeure pas moins que cette remise en cause d,
c7
l'agencement naturel et chronologique des deux actions a été critiquée par d'autres auteurs.
Elle a aussi rencontré la résistance de la troisième Chambre civile de la Cour de cassation qL:
s'exprime en ces termes: dès lors que la chose livrée est identiquement celle vendue (par s
2M Civ. l'"'' 20 mars 1989, Bull. Civ. I, N° 140; - V. Aussi Civ. 1ère 14 février 1989, Bull. Civ. l, na 84 ; Il dé-
1989, ibid. l, n° 393 ; 8 nov. 1988, ibid. l, n° 314 : 29 janv. 1991, ibid., l, na 41 ; lCP 1992, II, 21935, no
GINESTET; D. 1992, Somm. 201, obs. TOURNAFOND.
267 COlll. 22 mai 1991, Bull. Civ. IV, n° 176; D. 1992, Somlll. 200. obs. TOURNAFOND; 18 fév. 1992, Bull. l'
n° 82; 1'" déc. 1992, ibid. IV, nO 389; D. 1993. SOIllIll. 240. obs. TOUNAFOND.
26X A. BENABENT : noIe sous Casso Civ l "rc 5 Illai IlJ9l. D. IlJlJl, p. 506.
269 Cass., Ass. Plén., 7 lëv. 1986, D. IlJ86, 29l. cl la notc ; JCP IlJ86, Il, 20616, nolc MALINVAUD : D.
IlJ8
SOIllIll. 185, ohs. GROUTEL.
270 A.
I3ENABENT : article précilé, p. 115 : -
nolc sous Casso Civ 1"'" 5 Illai 19'n, D. IlJlJ3, p. 506 ;
TOURNAFOND: article précilé, p. 238 cl suiv.
271 A. BENABENT: noIe sous Casso Civ lèlC 5 Illai 1993, D. 19lJ3, p. 506.
272 REMY, RTD civ. 1983,755; MALAURIE ct A YNES : Con IraIs spéciaux, na 286 ; GHESTIN cl DESCHE :
venle, nO < 763 S. ; TOURNAFOND : arlicle précilé, D. 1989, chrono P. 237.

364
nature et sa qualité), ses défauts éventuels ne relèvent que de la garantie des vices cachés et non
m
de l'obligation cie délivrance.
C'est à toute cette divergence d'analyse que la première Chambre de la Cour de cassation
a mis fin en opérant un revirement total dans son arrêt du 5 mai 1993274 . Elle l'a fait dans un
« Attendu» bien explicite: « les vices cachés, lesquels se définissent comme un défaut rendant la
chose impropre à sa destination normale, ne donnent pas ouverture à une action en responsabilité
contractuelle, mais à une garantie dont les modalités sont fixées par les articles 1641 et suivants
du Cocle civil ».
Par ce revirement, la première Chambre rétablit de la manière la plus nette la frontière
entre responsabilité contractuelle et garantie. Ceci est d'autant plus remarquable de cette
Chambre que quelques semaines plus tôt, elle amorçait déjà un timide changement de position.
Dans un arrêt du 10 mars 1993, elle avait rejeté la critique adressé à un arrêt d'appel d'avoir
retenu le jeu de l'article 1648 du Code civil sans se placer sur le terrain de l'obligation de
délivrance « dès lors que devant les juges du fond, il n'avait pas été invoqué un manquement du
vendeur à son obligation de délivrance »27", ce dont il résultait que la cour d'appel n'était pas
tenue de modifier le fondement juridique de la demande, alors que qu'auparavant de telles
hypothèses donnaient lieu à cassation au motif que les juges, chargés de dire le droit, auraient dû
276
eux-mêmes rétablir le fondement juridique du défaut de délivrance
.
Le revirement de l'arrêt du 5 mai 1993 fut confirmé par plusieurs autres décisions de la
même chambre rendus dans le même sens. On peut citer entre aut [es l'arrêt du 27 octobre 1993
277 dans lequel la haute Chambre a rejeté un pourvoi en des termes presque identiques à ceux
prononcés dans l'arrêt du 5 mai 1993 : «les défauts qui rendent la chose impropre à sa
destination normale constituent des vices définis par l'article 1641 du Code civil, qui est donc
l'unique fondement possible de l'action formée contre le fabricant d'ull chauffe-eau électrique qui
27.1 Civ l", 25 janv. 19~9, Bull. Civ. III, na 20 ; 27 mars 199\\, ihid. III, n° 107 ; D. 1992, p. 85, note KARILA et
SOIl1Il1. 200, ohs. TOURNAFOND; JCP 1992, Il, 21935, noIe GINESTE:T; 13 oct. 1991, Bull. Civ. III, n° 249;
D. 1903, SOIl1I1l. 139, ohs. TOURNAFOND.
27-1 D. 1993. SOl1lm. 242, ohs TOURNAFOND.
275 D. 1993, SOI1lI1l. 240, obs. TOURNAFOND.
èoe
276 V. par exemple, Civ.
l
16 avril 1991, SOI1lI1l. 196, ohs TOURNAFOND, et 265, ohs A. PENNEAU ; D.
1993,186, note 8RETI::AUDEAU; Corn. ICI déc. 1992 et 22 mai 1901 précités; Civ. 1ère 14 lev. 1989, Bull. l, n°
83; - sur l'aspect procédural de la question, cf NORMAND, ohs RTl) civ. 1903,413.
ère
277 Casso Civ. 1
27 ocl. 1993, Bull. Civ. l, nO 305. - Autres espèces: Civ ("'c, 8 décembre 1993, Bull. Civ. l, n°
362 (rejet du pourvoi) ; Casso Civ. lèoc, 16 juin 1993, Bull. l, n° 224; JCP 1993, 1,3727, na 28, obs. G. VINEY.

365
préscnte a l'intérieur une fuite provenant d'un cJél~lut de montage ou de serrage d'un joint en
lISIl1C >1.
D'après toute cette jurisprudence, le vicc caché est défaut qui rend la « chose impropre li
sa destinatioll norJJlale ». et en évoquant la destination normale de la chose vendue, la Cour de
cassation, ~l travers la position unique désormais adoptée par les deux chambres, met à juste titre
l'acœnt sur le caractère ()J~jecti;l du vice qui nuit à l'usage de la chose quelle que soit son
utilisation. tandis que le dél~lLlt de conformité présente un caractère subjectif puisqu'il n'existe
qu'au regard d'une promesse contractuelle déterminée. Pour plus de précision et afm d'éviter
toute confusion susceptible d'intervenir dans la pratique, un auteur propose de défmir le vice de
la chose vendue comme une « anomalie» ou une « défectuosité », de même que l'on parle de
« mal façons» en matière de responsabil ité des constructeurs. è7~
Cette analyse du défaut ou du vice emprunté de la doctrine et à la jurisprudence françaises
explique l'importance de la garantie contre les vices dans la vente. Aux yeux des consommateurs
africains, elle revêt une importance capitale non ~euJement pour les besoins de sécurité du bien
acheté. mais aussi pour le rétablissement de l'équilibre des prestations des contractants. Aussi, au
besoin de sécurité, justification traditionnelle de l'obligation de garantie dans les contrats,279
èw
s'ajoutc-t-eIJe une exigence plus ou moins consciente d'égalité entre les aeheteurs.
Pourquoi une telle exigence nous parait plus que jamais une nécessité urgente pour les
consommateurs africains ? Pour des raisons découlant de la nouvelle donne économique
contemporaine. En effet, la plupart des contrats de vente porte aujourd'hui sur des biens
fabriqués en série. Ceux-ci sont ensuite mis sur le marché en des milliers d'exemplaires. La
logique et l'équité veulent que les acheteurs d'un même modèle qui ont contracté aux mêmes
conditions de prix, soient placés sur un pied d'égalité quant à la qualité de l'objet acheté. Il
apparaît donc difficilement tolérable que certains d'entre eux soient pénalisés parce qu'ils ont eu
la malchance de se voir livrer une exemplaire défectueux. 281 Or, l'absence d'obligation faite au
~7S O. TOURNAFOND : note sous ibid. D. 1994, SOIllIll. 239.
~7') 13. GROSS: La notion d'ohligation de garantie dans le droit des contrats, thèse, LGDJ, Préface D. TALLOt
p. 1 ct suiv.
~SIl P. ANCEL : La garantie conventionnelle des vices cachés dans les conditions générales de vente en matièr
l110hil ièrc. R.T. D.Colll 1979, p. 203.
2S1 Ihid

366
professionnel de garantir les biens vendus fait de nombreux consommateurs locaux des victimes
sans défense.
Que ce soit dans l'achat d'un poste-radio, d'un poste-téléviseur, d'une montre ou de tout
autre matériel techniquement complexe, rares sont les consommateurs qui bénéficient cl' une
garantie en bonne et due forme du vendeur. 2H2 D'ailleurs, la majorité des acheteurs ignorent leur
droit à une garantie contre les vices lors de l'achat de tel matériel.
Si ignorance il y a, c'est parce qu'il n'y a jamais eu d'obligation légale dans ce domaine,
une absence d'obligation, entretenue par le défaut de politique générale relative à la protection
des consommateurs. Cela est aussi valable pour la garantie contre l'éviction.
b) L'obligation pour le professionnel de garantir
le consommateur contre l'éviction.
La garantie d'éviction est essentielle, mais reste ignorée des consommateurs. Elle
concerne rar~ment les objets mobiliers, mais fait incontestablement partie des obligàtions du
m
vendeur.
Celui-ci doit garantie dans deux cas : contre toute éviction dont il pourrait être
directement responsable Cl) et contre toute éviction venant d'un tiers (2).
1 - La garantie contre ['éviction du fait personnel.
2H4
«Qui doit garantie, ne peut évincer» a pu dire une certaine doctrine
laquelle fut
inspirée par un adage. Ceci s'explique par le fait qu'il existe entre la garantie du fait personnel et
J'obligation de délivrance un lien très étroit. Le vendeur ne peut donner d'une main et reprendre·
de J'autre. Il pèse sur le vendeur une obligation de garantir à l'acheteur «la possession paisible
de la chose vendue» (aI1icle 1625 du Code civil français).
En effet, contrairement à la garantie des vices cachés qui
a
fait
l'objet d'une
réglementation du moins au Cameroun, il n'existe dans aucun pays africain des textes de loi
obligeant Je professionnel à garantir le consommateur contre une éventuelle dépossession du bien
2X2 cr supra, A- Les données du problème en Afrique.
2X.1 Article 1626 et suiv. du Code civil français; I3IHL : le droit de la vente, Dalloz 1986, nOs 493 cl suiv.
2X·' COLLART-DUTILLEUL et DELEBECQUE : op. cil., n° 248 ; C. HOCHART : La garantie d'éviction dans la
vente, thèse Université Paris l, L.G.DJ., p. 19.

367
acquis. Ce qui laisse augurer de l'inexistence d'une telle protection. Une fois de plus. nous allons
nous inspirer des textes étrangers, en l'occurrence français, pour expliquer la raison d'être d'une
telle exigence.
En quoi consiste la garantie d'éviction du fait personnel ? Elle consiste en unc
interdiction, plus précisément en une abstention: le vendeur ne doit personnellement pas portcr
atteinte à la propriété, à la possession ou à la détention de l'acheteur. 285 L'obligation ne se limite
pas au seul vendeur, cocontractant direct de l'acheteur, elle incombe aussi à ses ayants-cause
286
univcrsels
et «induit l'existence d'une obligation de ne pas faire transmissible et, de plus,
indivisible »287.
De façon générale, le vendeur ne doit occasionner ni troubles de droit, ni troubles de fait
à la possession ou à la propriété de l'acheteur. Par trouble de droit, il faut entendre toute atteinte
à la possession ou à la propriété de l'acquéreur que le vendeur prétend fonder sur un droit,288
289
sauf si l'acheteur a consenti à ce droit lors de la vente.
Constitue en revanche un trouble de fait
toute atteinte que le vendeur ne fonde sur aucun droit. 290
291
Toutefois, il Y a lieu de noter que la garantie du fait personnel est d'ordre public
et
oblige le vendeur nonobstant toute convention contraire. Elle est aussi perpétuelle. 292 S'il est
2
permis aux parties d'en étendre librement l'objet ')" son caractère d'ordre public leur interdit de
l'éluder. Il y va de l'intérêt des parties en ce qui concerne l'équilibre des prestations. C'est une
obligation à la fois naturelle et légale qui a un effet protecteur indéniable pour l'acheteur : le
2S' HOCHART : thèse précitée, p. 14.
2S6 lbid ., p. 22; civ l'''" 5 mai 1987, bull. civ. 1 n° 142.
2S; Chacun des héritiers du vendeur est tenu pour le tout à la garantie due par son auteur. Civ. 1ère 6 janvier 1962,
I. 313 ; mais la sanction consiste dans l'indemnisation de l'acheteur, elle se divise entre les hériLiers puisque son
objet- paiement d'une somme d'argent - est divisible.
288 Exception faite du droit d'agir en nullité ou en résolution de la vente elle-même, le vendeur porte alleinte à la
situation de son acheteur lorsqu'il s'aflirme propriétaire titulaire d'un autre droit réel (usufruit, servitude... ) ou
tituhlÏre d'un droit personnel (bail...) sur le bien vendu. Le but de la garantie, c'est de lui interdire de se prévaloir
du droit qu'il inv<Xjue, v. COLLART-DUTILLEUL et DELEBECQUE : op. ci!., n° 249 ; HOCHART : thèse
précitée, nOs 52 et suiv., p. 36 et suiv.
289 Idem.
290 COLLART-DUTILLEUL et DELEBECQUE : op. cil., n° 250 ; HOCHART : thèse précitée, p. :n ct suiv. W'
47 et suiv.
291 Trib. civ. Scine 5 juillet 1943, lC.P. 1944, éd. Notariale Il, 2250 ; G.P. 1943,2, 156; Trib. civ. Orléans viiI
25 nov. 1955, G.P. 1956, l, p. 91 ; D. 1955, SOI11Ill. 114, -Paris 5 juillet 1967, D.S. 1967, p. 730, note GUYENOT
292 HOCHART : thèse précitée, n° 13, p. 20.
29, Elle le font d'ailleurs par le biais d'une clause de non-concurrence à la charge du vendeur. V. COLLART
DUTILLEUL et DELEBECQUE : op. cil., n° 251.

368
sortir du joug arbitraire du vendeur, lequel pourrait d'ailleurs bien lui vendre sans rcstriction son
produit et ensuite J'évincer totalement ou partiellement, par un trouble quelconque au motif que
le contrat l'a exonéré de la garantie du fait du personnel. 294
«En fait, comme l'a souligné un auteur, l'obligation de garantir son fait personneJ
mériterait indépendamment de son acception juridique un traitement sémantique particulier il
replacer plutôt dans un contexte éthique : participant de ce que la morale et l'éthique
commandent à un individu de ne pas faire, elle équivaut à un devoir de loyauté sacré, propre à
dissuader à jamais le vendeur d'entreprendre toute action ou velléité préjudiciable pour l'acheteur
comme le rappelle l'adage « qui doit garantie, ne peut évincer» 29).
2 - La garantie contre ['éviction du fait d'un tiers.
Outre la garantie du fait personnel, le vendeur a aussi l'obligation d'assurer à J'acquéreur
la protection contre tout trouble de jouissance pouvant venir d'un tiers quelconque. Cette
garantie est aussi naturelle que la précédente, celle du fait personnel. Son évidence fait que même
les textes des articles 1625 et 1626 du Code civil ne l'ont p'as prévue exprcssément. Il s'agit Iii
d'une obligation positive à laquelle le vendeur reste soumis. De ce fait, il doit empêcher que des
tiers ne portent atteinte à la propriété, à la possession ou à la détention de l'acquéreur. 2Y6 Mais
contrairement à la garantie du fait personnel, la garantie d'un tiers est plus restreinte. Elle n'est
due par le vendeur que si le trouble dont est victime l'acheteur-consommateur s'analyse en un
trouble de droit. 297
La restriction du domaine de cette garantie s'explique par le fait que le vendeur est censé
mieux informé que l'acquéreur sur les droits existant sur la chose vendue. Cette responsabilité lui
impose d'avertir son cocontractant de toutes les charges réelles et personnelles qui grèvent Je
bien vendu.29l\\ Cela dit, il est donc bien placé pour prendre la défense de J'acheteur devant les
tribunaux afin de faire rejeter les demandes ou prétentions des tiers qu i tendent à se voir
~
d
'
.
1
h
~99 E
h
l'
h
.
l '
reconnaJtre
es prerogatlves sur a c ose. -
n revanc e,
ac eteur est mlcux p acc par rapport
29~ Ibid.
m HOCHART : thèse précitée, na 13, p. 21.
296 H. L. et J. MAZEAUD: Leçons de droit civil, par De JUGLART, 1. 3, vol. 2, 7< éd. 1987, na 954.
297 13. GROSS: Le droit de la vente, Que sais-je, PUF 1978, p. 50; 13IHL: Le droit de la vente, op. cil., na 495.
29X
B. GROSS : La notion d'obligation de garantie dans le droit des contrats, t!lèse, Paris 1964, n° 206, par
HOCHART, thèse précitée, na 84, p. 59.
299 B. GROSS: ihid, - droit de la vente, op. cil., p. 50.

369
au vendeur pOLIr lutter contre les troubles de fait venant des tiers: quelle garantie, par exemple, le
vendeur peut-il apporter à l'acheteur en cas de plainte de ce dernier contre des dégradations
causées ù son immeuble par ses propres voisins 'Poo Il appartiendra à l'acheteur dl' sc défendre
contre de telles atteintes à sa jouissance.
Une chose cependant reste certaine: c'est que le vendeur doit garantie à l'acheteur. Cc
qui n'est pas le cas du donateur. 301 Cette garantie s'impose également aux ayants cause universels
du vendeur. En tant que prise de défense de l'acheteur évincé, la garantie est indivisible,02 et
chaque covendeur ou héritier pur et simple en sera tenu pour le tout, par opposition à l'obligation
d'indemnisation. 303 La vente de la chose d'autrui fait naître aussi à la charge du vendeur une
obligation de garantie du fait des tiers lorsque le véritable propriétaire vient à revendiquer son
droit sur la chose vendue. 304
Si la garantie est due, à quel moment est-elle censée produire ses effets? Elle rentre en
action en cas de trouble manifeste venant d'un tiers, dès lors que le risque d'éviction de
l'acheteur est présent lors que le risque devient sérieux. La simple menace de trouble ne suffit pas
à déclencher l'obligation de garantie. Le trouble doit être actuel et non simplement éventuel,'O:i
"
, l
"
106
b l '
,.
bl
' . .
lU7
anteneur a a vente et non posteneur,'
un trou
e constItuant une venta e eVlctlon.
li nous reste maintenant à déterminer le régime juridique de toutes ces garanties
auxquelles le consommateur a droit.
C - Le régime juridique de la garantie.
Parler du régime juridique de la garantie, c'est rechercher avant tout son fondement
Celui-ci doit être recherché dans deux directions: du côté de la délivrance de l'objet acheté (a) e
du côté des règles régissant la responsabilité contractuelle du vendeur ou prestataire de servict
(b).
'IXI Ibid. p. 50.
Jill HOCHART: lhèse précilée, nOs 19 el X4.
102 Ibid., nO' lX el X4 .
.10.1 Ibid.
1lJ.1 GROSS: lhèse précilée, n° 118.
10'i BI HL : Droil dc la vente, op. cil., n° 495.
10C. Ibid., GHESTIN : la venle, op. cil., 0°'793 el suiv .
.107 I3IHL: op. cil.. n0495 ; GHESTIN: ibid.

370
a) Garantie et obligation de délivrance.
Le vendeur a deux obligations principales après la conclusion clu contrat de vente avec
l'acheteur: celle de délivrer le bien acheté et celle de garantir ledit bien ù j'acheteur (article 1603
C. civ.)
La délivrance précède la garantie, elle est la suite logique du contrat de vente intervenu
entre l'acheteur et le vendeur. Il s'agit là d'une obligation naturelle qui s'impose à tout vendeur
quelle que soit son appartenance géographique (Afrique, Amérique, Asie, Europe, Océanie). Ce
qui signifie par la même occasion que tout acheteur, de quelque horizon qu'il soit bénéficie de la
délivrance dès lors que les conditions du contrat de vente sont réunies. Mais il y a un droit dont
ne bénéficient pas tous les acheteurs : la garantie du bien acheté. laquelle constitue une
obligation imposée au vendeur. Ce droit dont ne bénéficient pas tous les acheteurs, pour des
raisons liées au "vide juridique" caractérisant leur pays dans ce domaine,'Os repose bien sur une
règle de fond qui prend naissanèe dans le contrat de vente : le résultat,'°'l suite logique de la
délivrance du produit acheté. Le vendeur professionnel est tenu d'une obligation de résultat, et
en tant que tel, il doit livrer un produit apte à l'usage pour lequel il a été acheté. lIO
Cette analyse est peut -être évidente, mais pour des besoins de clarté, nous nous
inspirerons une fois de plus du droit français pour justifier le fondement juridique de la
garantie. Ceci pourra, pour des raisons que nous avons déjà évoquées plus haut, raisons relatives
aux rapports entre le droit français et africain, motiver les gouvernements des pays africains à
s'intéresser davantage au sort du consommateur en ce qui concerne son droit à garantie.
Le vendeur, avons-nous dit, est tenu, en tant que débiteur d'une obligation de résultat, de
livrer une chose ou un produit apte à l'usage pour lequel il a été vendu. Nous nous permettons de
dire que ceci n'est pas nouveau.
Ce raisonnement fait penser à la responsabilité civile sans faute de l'article 1384, al. 1a du
Code civil qui a conduit la jurisprudence à voir dans cet article tout d'abord une présomption de
J08 Cf supra: A- les données du problème en Afrique.
JO'! GHESTIN : Conformités et garanties dans la vente, op. cil. N° 262, p. 25X.

371
faute, puis une présomption de responsabilité, et, enfin, une règle de fond. Dc la l11él1le façon que
la responsabilité du fait des choses inanimées s'est développée autour des termes de l'art ie le
er
1384, alinéa 1 , et des notions de garde, de fait de la chose ou de chose, la responsabilité clu
fabricant et du vendeur professionnel se développe aujourd'hui autour de la notion de défaut ou
vice et de son caractère occulte, soit pour l'acheteur, soit pour le vendeur.
Toutes ces règles ne sont pas étrangères en Afrique.
Les règles relatives à la
responsabilité aussi bien contractuelle que délictuelle sont enseignées dans les Facultés de droit
des différents pays africains. Qui dit responsabilité civile en Afrique, fait immédiatement pensel
aux articles 1382 à 1386 du Code civil français. Il en va de même pour la responsabilité
contractuelle avec les 1142 et suivants du même Code. Ce qui signifie par la même occasion qUt
le droit français est constamment présent dans les pays africains.
La référence faite par le législateur camerounais à la garantie légale édictée par les article~
1641 et suivants du Code civil en est une illustration. Tout le problème est de pouvoir traduirt
dans les faits tout ce qu'on apprend et l'adapter aux réalités locales, notamment économique e'
sociale. Ce qui du coup légitime notre démarche en ce qui concerne l'explication du fondemen
juridique de la garantie inspiré du droit français.
S'agissant de la garantie du professionnel dans la vente, on s'accorde à reconnaître qu' elle
est une règle qui consiste à faire peser sur les vendeurs professionnels et fabricants une obligatiol
de résultat, laquelle obligation est d'ordre public: « ils sont tenus de livrer un produit exempt dl
défauts apparents, ou cachés; ou, plus précisément, en se référant à Iadétinition fonctionnelle 01
contractuelle du défaut, un produit apte à l'usage pour lequel il a été vendu »\\11. Pou
comprendre cette obligation, il faut partir de la créance principale de l'acheteur: celui-ci a droit
la délivrance de la chose vendue.
La délivrance, pour être libératoire, doit porter sur un objet conforme, exempt de défaut
ou vices, donc un objet apte à l'usage pour lequel on le destine et pour lequel il a été vendu (
acheté. La non-conformité doit être prise au sens restreint du terme, elle s'assimile. ici à ur
anomalie, une altération de l'objet vendu et en prévision de laquelle une garantie est exigible. L
.110 Le TOURNEAU: La responsabililé civile, op ciL, n° 1793: «le résultaI cstla livraison <..l'une chose dépoun
<..Ic vice, c'csl-à-<..Iirc aptc à l'usagc pour Iequcl clic a été vcndue.
111 GHESTIN : Conformités ct garanties dans la vente, op. cil., na 262, p. 25X

372
garantie est due parce qu'il y a délivrance. Elle n'a plus de raison d'être dès lors que la délivrance
fait défaut.
La garantie répond donc à la logique selon laquelle le consommateur doit être protégé des
défauts de l'objet livré. En ce sens, l'obligation de délivrance a été analysée comme ulle
obligation positive. 312 Il s'agit donc d'une obligation de résultat, ou, selon une terminologie
voisine, d'une obligation déterminée, le seul fait de la délivrance entraînant la responsabilité du
111
. vendeur sans qu'il y ait à démontrer sa mauvaise foi ou une négligence particulière de sa part.
M. Le Professeur Le TOURNEAU y va avec une affirmation plus tranchée: «l'obligation de
garantie proprement dite est l'exemple type de l'obligation de délivrance ».114.
La conformité du produit livré est aussi dans l'obligation de délivrance ; il s'agit
également d'une obligation de résultat. Le seul fait de livrer un produit dépourvu d'une qualité ou
atteint d'un vice le rendant inapte à l'usage pour lequel il a été vendu et acheté constitue en lui-
même une faute,:1I5 elle-même synonyme de mauvaise exécution de l'obligation de délivrance.
Et en cas de m~uvaise exécution de cette obligation, la garantie restera le seul argu!nent
fondamental
316
de l'acheteur insatisfait ou victime d'un dommage.
A ce stade de la livraison,
l'obligation de délivrance devient un instrument de la protection de ]' acquéreur insatisfait et la
garantie une institution d'ordre pathologique qui n'apparaît qu'en cas de difficulté, de déception
de l' acheteur." 7
De toute évidence, la garantie repose sur la délivrance, et la délivrance trouve en la
garantie un complément indispensable à l'équilibre des prestations réciproques dans le
contrat. JI8 On peut même dire que la garantie trouve en la délivrance son principal fondement et
laquelle délivrance sert de tremplin pour la mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle.
m C. ATlAS: « L'obligation de délivrance conforme ", D. 1971, p. 1.
m GHESTIN : Conformités et garanties dans la vente, op. cil., na 262, p. 259.
314 Le TOURNEAU: «Conformité et garantie dans la vente d'objets Illobiliers corporels", RT,D.Civ 19XO, n"
14.
315 GHESTIN : Conformités et garanties dans la vente, op. cil., na 262, p. 259.
3161. HUET: op. cil., na 17.
m C. ATlAS: article précité, p. 1.
318 C. ATlAS: article précité, p. 2; LE TOURNEAU:« Conformité ct garantie ... ", article précité. p. 236, n° 14.

373
Tout ce raisonnement ci-dessus avancé est aussi valable pour la garantie d'éviction en cc
sens qu'elle constitue un prolongement de l'obligation de délivrance. WJ Le professionnel ne
peut donner par une main et reprendre l'objet donné par une autre. Une telle attitude aura pOUf
effet de mettre en évidence l'inexécution de l'obligation de délivrance, laquelle est censée
transférer la propriété du bien à l'acquéreur.
Les deux notions de garantie des vices cachés et de garantie d'éviction sont mêmes
voisines. Leur rapprochement a même séduit de nombreux auteurs. ~20 Certains sont même allés
jusqu'à prétendre que le « vice caché» nuisant à l'usage de la chose, l'acheteur d'une chose
atteinte d'un tel vice subit une «éviction d'usage »321. Il est vrai que gênant effectivement
l'utilisation matérielle de l'objet, l'éviction peut, en ce sens, se concevoir conune un vice, mai~
comme parallèlement elle entrave le droit de propriété et la jouissance de l'acquéreur, il s'agirai'
m
donc plus précisément, pour certains, d'un vice juridiqueJn ou vice du droit
.
De toute façon, ces différentes thèses illustrent parfaitement la tendance à la confusior
des deux garanties qui se dessine dans l,a production doctrinale moderne. 324 Elles sont de plu:
indifféremment utilisées par les tribunaux pour condamner le vendeur, ou reste plus silencieux su
les ressorts de leur décision.
Certes, la responsabilité contractuelle du vendeur n'est engagée que si la preuve de s
faute est rapportée325 . On peut donc poser en principe que les obligations assumées par 1
vendeur professionnel sont traitées comme de simples obligations de moyens ou de prudence e
de diligence. Cette appréciation doit être nuancée en ce qui concerne le domaine relatif au défaL
ou des vices cachés de la chose, objet du contrat. De ce côté et par l'effet de l'attraction de
solutions admises, «une jurisprudence aujourd'hui bien établie, affirme que la livraison d'u
119 HOCHART : thèse précitée, n° 324, p. 257.
m P. GUYOT: De la garantie d'éviction en droit romain ct en droit français, thèse 1855 ; BAUDR'
LACANTINERlE, T XIX, n° 391, cités par HOCHART, thèse précitée, n° 347. p. 273.
m MM. MAZEAUD par De JUGLART : Leçons de Droit civil, T. III, i
vol., Principaux contrats: Vente
Echange, 7è éd. 1987, Montehrestien, nO 977, p. 247. -Dans le même sens voir RANDOUX, note sous casso Co
21 oc!. 1974 et casso civ. III 3 déc. 1974, J.c.P. 1975, Il, 1X176.
322 1.-J. BURST: « La portée de la clause de non-garantie dans les contrats de cession de brevets d'invention
cas d'annulation du brevet », D. 1976, l '6.
m HOCHART : thèse précitée, nOs 113 et 347. Celle notion de « vice de droit» est contestée par de nombre
auteurs.
324 GROSS, thèse précitée, p. 14.

374
produit défectueux suffit à établir la faute du fabricant ou du distributcur }20. Vis-à-vis du
fabricant ou du vendeur professionnel, la jurisprudence a créé une véritable obligation de résultat
concernant la qualité des produits qu'il met en circulation.327
Dans cette logique la première Chambre civile de la Cour de cassation a admis qu'une
« société exerçant une activité commerciale consistant notamment à vendre des photographies à
certaines entreprises de presse en vue de leur publication dans des journaux ou des magazines,
était, en cette qualité, tenue de fournir à ses clients des clichés propres à l'usage aux quels ils
étaient destinés et tels, en particulier, que cet usage ne présente pas un caractère illicite» el
qu'ainsi cette société « qui ne s'est pas assurée du consentement de » l'intéressé « à la publication
du cliché la représentant, avait commis une faute en vendant ce cliché et... devait être tenu de
garantir la société» ayant publié la photographie « des condamnations prononcées contre
elle»m. Le défaut est défini par l'impropriété de la chose vendue à son usage, la publication, et
ce défaut suffit à caractériser la faute du vendeur. Un autre arrêt de la même Chambre a admis
qu'un vice de conception pouvait s'analyser « eu égard aux circonstances de la cause, en un
manquement du fabricant-vendeur à son obligation de délivrer une machine conforme à sa
destination normale, ce qui exclut l'application de l'article 1648 du Code civil »329.
La Chambre commerciale de la Cour de cassation a, par deux arrêts successifs"O, admis
de façon très nette qu'un matériel insuffisant, défectueux et inutilisable peut être considéré
comme non-conforme à sa destination sans qu'il en résulte qu'il soit différent de celui prévu au
contrat. La même démarche a été suivie par la Cour de Paris'" qui statuant au vu des conclusions
prises par M. G. PAIRE, Avocat général, a dit de façon pas très claire: « indépendamment de la
garantie due par le vendeur du fait des vices cachés de la chose vendue et dont la poursuite est
enfermée dans le bref délai de l'article 1648 alinéa 1 du Code civil, le vendeur (est) tenu, au titre
m V. Casso Civ. 1ère 4 octobre 1967, G.P. 1967, Il, 314 ; D. 1967, p. 652 ; Bull. Civ., l, 206 ; JCr 1968, Il,
15968, note N. DEJEAN DE LA BATIE. - Casso cam. 19 mars 1973, D. 1973, IR, p. III. - Angers 7 Inars 1967,
D. 1968, SOInIn. P. 2; R.T.D.eiv. 1973, p. 138, obs G. DURRY.
326 G. VINEY : Rapport, in La responsabilité des fabricants et distributeurs, p. 76, n° 10.
m Casso Civ. 21 mars 1962, Bull. Civ., 1,155. - 5 mai 1964, Bull. Civ., 1,181. - 16 mars 1966, Bull civ, Il, 249.-
Casso Civ. T', 2X avril 1972, Bull. Civ., Ill, n° 233, p. 167. - Casso Civ. 1"1", IXjuillet 1972, Bull civ., 1, n° IX9, p.
164. - Casso Civ. 3", 5 déccmbre 1972, D. 1973, p. 601, note 1. MAZEAUD. - Cass civ. Xjuillet 1974, JCr 1974,
IV, 234. - TGI Bernay, 18 mars 1964, G.r. 1964,1,457. - cr Le TOURNEAU, Responsabilité civile, W 1764.
328 Casso Civ. 1ère, 15 décembre 19XI, Bull. Civ., 1, n° 384, p. 324.
329 Casso Civ. 15 novcmbre 19X5, lCP. 19X6, IV, 65.
330 Casso Cam 15 mai 1972 - 16 juillct 1973, JCP 74, 17X64, note 1. GHESTIN.
331 Paris, 15 X 1986, D., 1987, Il, 334.

375
de son obligation de délivrance, de livrer à son cocontractant. .. (des produits) répondant aux
exigences des stipulations contractuelles, lesquelles (impliquent) une qualité propre à une
utilisation normale ». Par celte décision, la Cour de Paris précise à juste titre qu'une telle action
pour non-exécution de l'obligation de "délivrance conforme" exclut toute limitation de la
garantie stipulée sur le fondement de l'article 1648 du Code civil.
La règle paraît donc désormais établie avec comme corollaire celle selon laquelle
l'acquéreur - comme le sous-acquéreur - dispose nécessairement d'une action contractuelle
puisqu'il «jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur ».332
Il Y a là, semble-t-il, une extension de la notion de l'obligation de conformité due par le
vendeur fabricant ou le professionnel, mais aussi d'une obligation de sécurité, laquelle s'étend, à
tout utilisateur, même à un non-contractant. On retrouve là l'obligation naturelle de délivrer une
chose conforme et exempt de vice, donc une chose utile au consommateur.
L'obligation de sécurité qui pèse sur le vendeur professionnel est une obligation de
sécurité autonome indépendante de'la garantie des vices cachés laquelle exige la mise en oeuvre
des articles 1641 et suivants du Code civil. Sur ce point, les arrêts de la première Chambre civile
de la Cour de cassation auxquels nous avons déjà fait dans le fondement du droit à la sécurité dL
consommateur dans la vente commerciale sont formels.
Si l'on prend l'exemple de l'arrêt du Il juin 1991, on constate que les faits de l'espèct
démontrent en eux-mêmes la volonté de la Haute juridiction de détacher cette obligation dt
sécurité de la garantie des vices cachés afin de mieux protéger le consommateur. En l'espèce, le:
acquéreurs d'un mobile home décédèrent à la suite d'une intoxication due à l'oxyde de carbone
dégagé par le chauffage au gaz équipant le véhicule. Le bref délai imparti à l'acquéreur pa
l'article 1648 du Code civil pour actionner le vendeur en garantie des vices cachés étant écoulé
les ayants droits furent admis à se prévaloir de la responsabilité contractuelle de droit commur
Cette attitude de la Cour de cassation vise expressément l'obligation de sécurité du vendeur. L
visa de sa décision l'a clairement montré puisque la Haute juridiction a condamné le vendeL
professionnel en invoquant son obligation de sécurité qui consiste à « ne livrer que des produi
exempts de vices ou de tout défaut de fabrication de nature à créer des dangers pour lt
m Cass Ass. Plén. 7 décembre 1986, (2 espèces) lC.P. 19X6, Il, 20616, noie MAUNY AUD ; D. 19X6, Il, 2S
note A. BENABENT; R.T.D.eiv. 1986, p. 606, ons REMY; G.r. 1986, Il, 543, note HERLY.

376
personnes ou les biens »331. Cette jurisprudence que la première Chambre de la Cour de cassation
335
confIrmera à travers les arrêts respectifs du 27 janvier 1993 334 et du 17 janvier 1995
montre la
volonté de ses magistrats de distinguer la garantie des vices cachés de l'obligation de sécurité du
vendeur professionnel désormais autonome.
La Cour de cassation est même allé plus loin dans sa décision du 17 janvier 1995
puisqu'elle a reconnu la responsabilité contractuelle de l'établissement d'enseignement qui,
«tenu d'assurer la sécurité des élèves qui lui sont confiés, est responsable des dommages qui
leur sont causés non seulement par sa faute, mais encore par le fait des choses qu'il met en
oeuvre pour l'exécution de son obligation contractuelle »336.
Ce motif de l'arrêt, très doctrinal, rappelle, dans son contenu comme dans sa formulation,
la disposition de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil. A la référence «aux choses que l'on a
sous sa garde », J'arrêt substitue seulement celle des choses mises en oeuvre pour exécuter
l'obligation. Il met en évidence pour les besoins de sécurité du consommateur la responsabilité
m
contractuelle du fait des choses.
C'est une innovation de la Cour de cassation, car on admettait jusque là que si la vente
contient bien une obligation de sécurité quant aux choses, celle-ci se coule dans le moule de la
m
garantie et se plie à son régime.
Et comme nous avons déjà eu à le dire, cette louable initiative
de la Haute juridiction trouve sa source dans le droit communautaire, en l'occurrence dans les
dispositions de la directive du 25 juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux,
laquelle engage la responsabilité des producteurs pour défaut de sécurité de leurs produits. Cette
directive n' ayant toujours pas été transposée dans le droit français, la Haute juridiction a entendu
à travers ses différents arrêts pallier la carence du législateur français. 319
.
Cette attitude est
d'autant plus justifier que la Cour de justice des communautés européennes fait obligation au
Hl Casso Civ. 1ère Il juin 1991 précité.
134 Casso Civ. 1ère 27 janvier 1993 précité.
m Casso Civ. l"re 17 janvicr 1995 précité.
33(, Ibid.
m Ibid. voir la note p. 354.
J38 Patrice JOURDAIN: « L'obligation de sécurité (à propos de quelques arrêts réccnts) », G.P. 1993,2" Sem., p.
1173.
3.19 L'Etat français, cn rctard dépuis Je 31 juillet 1990, a été condamné pour manqucmcnt ();lr la Cour de Justice
des communautés européennes sur recours de la Commission, mais n'a pas pour autant obtempéré (CJCE, 13 janv.
1993, aiT. C-293-91, Ree. CJCE l, p. 1 ; D. 1993, p. 566, note CLERGERŒ ; Europe 1993, n° 121.

377
juge national d'interpréter son droit « à la lumière du texte et de la finalité» des directives non
,
140
encore transposees.
Toutes ces règles ci-dessus évoquées sont valables, pour toutes les sociétés, quelle qUt
soit leur milieu géographique. Elles ont donc une valeur universelle. La seule différence réside
dans l'appréciation des faits lors de leur mise en valeur dans les systèmes juridiques nationaux
Elles pourraient donc pour des raisons déjà avancées plus haut être adaptables et applicables el
Afrique pour le bien du consommateur. L'inspiration serait donc légitime. Après tout, le drai
français de la garantie ne s'est-il pas lui aussi inspiré du droit romain pour ensuite l'adapter à se
réalités économiques et sociales ?341
La logique économique contemporaine justifiée par l' mternationalisation des échanges de
biens ouvrés veut qu'on s'inspire des règles de la garantie et de sécurité gouvernant ces bien
dans leur pays d'origine pour mieux cerner les méandres des diverses sortes de responsabilités e
protéger efficacement les consommateurs locaux. Après tout, la garantie dont nous prônon
l'exigence dans la vente en faveur du consommateur ne trouve-t-elle pas son second fondemer
dans les règles régissant la responsabilité contractuelle?
.140 CJCE, 10 avril 1984, Von Colson et Kamann, afT. 14- ln" Ret:. CICE, p. 1891 ; et HARZ, aiT. 7lJ-83, .
CJCE, p. 1921 ; 13 nov. 1990, Marleasing, arr. 106-89, Ret:. CICE 1, p. 4135 ; lCP 1991, Il, 21658, not\\
LEvEL; 16 déc. 1993, Wagner Mircl, aiT. 334-92, Rec. CICE 1, (1- 6tJ II ; 14 juill. 1994, Paola F. Dori/Rccrcb
arr. 91-92, lCP 1995, Il, 22358, note P. LEVEL.
341 HOCHART : thèse précitée, n° 316, p. 247.

378
b) Garantie et inexécution des obligations nées du
contrat de consommation.
La créance dc garantie confere à son bénéficiaire une protection qu'un auteur délïnit
comme suit: « garantir, au sens général du mot, c'est préserver d'un préjudice soit en empêchant
Je préjudice de se produire, soit en réparant les suites du préjudice s'il se produit »342.
Dans le langage juridique actuel, l'expression « responsabilité civile» recouvre l'ensemble
des règles qui oblige l'auteur d'un tort causé à autrui à réparer ce dommage en offrant à la
victime une compensation. 343 Or, il est pratiquement inconcevable, voire impossible, d'avoir à
l'intérieur d'un même ordre contractuel deux responsabilités autonomes, l'une d'elles s'identifiant
en plus par un régime spécial qu'est celui de la garantie.
De ce point de vue, les auteurs sont à peu près unanimes à considérer que la garantie
emprunte beaucoup de ses solutions au droit de la responsabilité contractuelle et en adopte le
schéma général. 344
En effet, la responsabilité contractuelle fait suite à une inexécution d'une obligation née
du contrat. II en va de même de la garantie dont le but est de combler les défaillances résultant
d'une délivrance défectueuse du bien acheté. De ce point de vue, on peut dire que la délivrance
de la garantie du professionnel équivaut à une reconnaissance implicite de sa responsabilité
contractuelle vis-à-vis de l'acquéreur par rapport au produit vendu. 11 s'engage par sa garantie à
réparer tous les donunages que le bien acheté est à même de causer ~\\ l'acquéreur, ou tout
dysfonctionnement interne qui l'empêcherait de produire le résultat recherché.
Il est donc évident que la garantie occupe une place dans la responsabilité contractuelle. Il
nous reste maintenant à la définir. Cette définition, nous l'emprunterons à un auteur qui. dans une
thèse méritoire intitulée « Essai d'une théorie générale de la garantie en matière de droit. Oc la
\\12 BEUDANT, cité pllr HOCHART: ihid, n° :"\\ 17. p. 24K.
ql G VINEY : Traité de droit civil, les ohligations, la responsahilité : conditions, LGDJ 19K2, n° 1. p. 1.
!,

379
garantie d'éviction en fonction de la responsabilité ». M. LARIVIERE a tenté de situer la
garantie par rapporl à la responsabilité. Dans cette tentative, il en est arrivé à la conclusion selor.
laquelle l'obligation de délivrance trouve son fondement dans l'obligation faite au vendeur dt.'
transférer la propriété de la chose vendue,345 autrement dit, l'obligation pour le vendeur de livrer
la chose à l'acheteur.
Au terme d'une intéressante spéculation relative à l'intersection de ces deux ensemble~
récursoires, il propose une défmition apparemment solide de la garantie : «le parallélisme de~
notions de garantie et de responsabilité découle de la nature même des choses, puisque lé
garantie, obligation de réparation qui intervient comme sanction de l'inexécution de l' obligatior
essentielle du contrat translatif n'est au fond, qu'un aspect de la responsabilité ; envisagé{
unilatéralement du seul côté du débiteur, celui qui doit transférer le droit, objet de la conventior
et qui n'exécute pas.
La garantie, loin d'être une théorie spéciale, se place tout naturellement dans les cadre:
généraux de la responsabilité contractuelle ; c'est une obligation de réparation et l'action qui 1;
sanctionne n'est qu'une a~tion en responsabilité pour inexécution d'une obligation »346.
Cette définition qui a eu l'adhésion d'éminents auteurs,347 voit en la garantie un corollaire
de la vente. La garantie se justifie par l'obligation faite au vendeur de transférer la propriété, donl
de livrer la marchandise objet de la transaction intervenue entre l'acheteur et le vendeur. Le droi
de la consommation assujettissant le vendeur à l'obligation de délivrance de la chose
l'application des règles de la garantie des vices cachés et de la garantie d'éviction pourrait s'
concevoir comme la sanction du manquement à cet engagement synonyme d'inexécution de
obligations nées du contrat.
La délivrance est donc l'obligation autour de laquelle s'articule la bonne ou la mauvais
exécution du contrat, voire son inexécution totale. Cette délivrance précède la garantie et pel
même dans certains cas l'englober. Elle constitue la première étape dans l'exécution du contra
son exécution fidèle est le signe et la condition du respect de la convention dans son ensemble."
344 B. GROSS: La notion d'obligation de garantie dans le droit des contrats, thèse 1963, n° 237, p. 230 ; H. L.
1. MAZEAUD, 7~ éd. par M. De JUGLART, op. cit. W 970, p. 286 ; Y. LARIVIERE: Essai d'une théor
générale de la garantie en matière de translCrt de droit. De la garantie d'éviction en fonction de la responsabilir
thèse 1944, p. 337, par HOCHART, thèse précitée, p. 248.
m HOCHART: thèse précitée, n° 319, p. 149.
346 LARIVIERE: thèse précilée, Paris 1944, n° 61, p. 142-143 et n° 72, p. 163.
347 PLANIOL et RIPERT : Traité pratique de droit civil français, T. X, les conlrats civils par HAMEL, GIVOF
et TUNC, 2~ éd. 1952-1957.
34H ATlAS: article précité, p. 2.

380
L'obligation de délivrance doit être exécutée conformément à l'objet du contrat, aux prévisions
contractuelles. D'ailleurs, la mise en oeuvre de l'obligation de garantie est sans londcmcnt d~s
lors que le contrat lui-même n'a pas été exécuté dans son principe, autrement dit, si la délivrance
149
n'a pas été accomplie ..
Et la délivrance n'est complète que lorsqu'elle s'accompagne d'une
garantie susceptible de permettre un rééquilibrage des prestations en cas de mauvaise exécution.
Si telle semble être la portée de J'obligation de délivrance, il va de soi que le débiteur en
supporte les avenants dus à certaines défaillances dans la livraison.
De même qu'il y a inexécution du contrat lorsque le débiteur de l'obligation, c'est-à-dire
le vendeur, s'abstient d'effectuer toute remise, qui l'assure de manière incomplète ou sans égard
aux conditions du temps ou de lieu, il y a également inexécution dès lors que celui-ci livre une
chose non conforme (comportant des défauts ou vices) aux données contractuelJes, étant entendu
le sens large qu'il convient d'attribuer à la notion de non-conformité. 150 Il en ira de même si le
créancier acquéreur venait, à subir une éviction du fait du débiteur vendeur ou du fait d'un tiers.
D'ailleurs, le contrat aura-t-il, par son apparence d'exécution, semblé épuiser ses effets,
qu'il n'est pas impossible à l'acheteur d'apporter plus tard la preuve que le vendeur n'a pas
véritablement fourni la prestation à laquelle il s'était engagé. 1i' On tombe dans ce cas dans
l'inexécution
proprement
dite
du
contrat,
condition
indispensable
pour
enclencher
la
responsabilité. C'est précisément là aussi que rentre en jeu le mécanisme de la garantie du
professionnel, car, «ce qu'on appelle traditionnelJement obligation de garantie n'est en définitive,
d'après un auteur, que l'expression de la responsabilité contractuelle encourue en raison de la
découverte tardive d'une contravention à la délivrance »152.
Si la garantie constitue un prolongement de l'obligation de délivrance, eIJe trouve en la
responsabilité
contractuelle
un
aboutissement.
Aussi
la
délivrance
et
la
responsabilité
contractuelJe constituent-elles les deux fondements de la garantie dont la mise en oeuvre suppose
une inexécution ou une exécution défectueuse ou défaillante du contrat dans son ensemble .
.\\.1') Ibid .
.150 M. ALTER: L'obligation de délivrance dans la vente de meubles corporels, t!lèse, LG.DJ. 1972, na 144 .
.\\.\\1 Ibid.
\\\\2 Ibid.

381
De ce point de vue, on voit que la garantie peut être d'une grande utilité pour le
consommateur africain, lequel s'identifie à un consonunateur dont les prestations ou achats sont
rarement garantis. Sur ce point, il faudra se référer aux développements faits dans ce sens un peu
353
plus haut.
Ce qui compte dès à présent, c'est de montrer en quoi la garantie dans toutes ses
dimensions (vices cachés et éviction) peut-elle présenter un intérêt pour le consommateur
africain ')
D - L'intérêt de la garantie pour le consommateur africain.
Il faut distinguer selon que la garantie est accordée pour les vices cachés (a) ou selon
quplète concerne la protection du consommateur contre l'éviction (b)
al L'intérêt de la garantie contre les vices cachés
pour le consommateur.
Il s'agit ici d'exposer de manière concrète les avantages qu'une garantie (légale ou
conventionnelle) est à même d'apporter au consonunateur cn cas d'octroi de celle-ci par lt
professionnel vendeur.
Si ['on prend l'exemple de l'article 21 de la loi camerounaise du 10 août 1990 précitée, or
constate qu'il exige du vendeur une garantie conventionnelle sans préjudice, bien sûr, de lé
garantie légale des vices cachés prévus à l'article 1641 et suivant du code civil français. Ce qu
signifie par là que le législateur camerounais a fait une transposition pure et simple des règles d.
la garantie du droit français. Laissons de côté la garantie conventionnelle et examinons la garanti.
légale de l'article 1641 et suivants du Code civil pour voir si clle est de nature à résoudre le
problèmes de garantie du consommateur africain en général et camerounais en particulier.
Tout d'abord la garantie légale suppose pour sa mise en oeuvre la réunion de plusieUI
conditions. Elle exige conune première condition l'existence du vice et son caractère occulte. El'
exige comme deuxième condition son antériorité à la vente. Elle exige enfm conune troisièn
condition la gravité du vice.
Si la première condition peut être considérée comme une fait justificatif de l'octroi de
garantie, ia deuxième, elle, n'en est pas moins une condition gênante pour le consommateur. r
m cr supra, A- Les données du problème en Afrique.

382
exige en effet de J'acheteur une preuve de l'antériorité du vice à la vente. Or, cette preuve ne se'l:a.
pas aisée à rapporter. Elle le sera encore pour un consommateur moins averti comme c'est
justement le cas du consommateur africain. Ce qui déjà fragilise la position du consommateur et
pénalise ses intérêts.
Quant à la troisième condition, elle exige un vice ou défaut d'une extrême gravité, un vicc
dont la gravité doit rendre l'appareil inapte à l'usage pour lequel il a été vendu et acheté, ou
diminuer tellement cet usage qu'il justifie une diminution du prix. L'exigence de la gravité du
défaut nous amène à déduire que la garantie légale ne couvre que les défauts qui affectent l'utilité
1S4
de Ja chose et non seulement son agrément.
Outre ces conditions, la garantie légale exige pour sa mIse en oeuvre que l'action de
l'acheteur soit exercée dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du
lieu où la vente a été faite. Ce bref délai, qui est de un an à partir de la découverte du vice (
article 1648 c.civ.), ajouté aux conditions sus-citées font de la garantie légale, une garantie
difficile à mettre en oeuvre, même pour les consommateurs avisés. Cette difficulté de mise en
,
.
oeuvre fait quplète est d'une utilité moindre pour le consommateur français pour qui eète a été
instituée. La majorité des consommateurs ignorent son existence, du moins son contenu et ce
malgré la mention informative imposée par]' article 4 du décret du 24 mars 1978.1SS
De ce point de vue, la garantie légale de l'article 1641 du code civil n'est pas une garantie
m
adaptée aux réalités africaines.
Elle ne pourra donc pas être utile aux consommateurs profanes,
voire analphabètes pour la simple raison que ceux-ci ne pourront pas la mettre en oeuvre pour
protéger leurs intérêts. Il faudra donc trouver une autre formule plus adaptée aux réalités locales.
En effet, si le but de la garantie est de permettre un rééquilibrage des prestations
réciproques, cela voudrait dire que sa mise en oeuvre devrait poser moins de problèmes au
bénéficiaire. La garantie conventionnelle a le mérite de satisfaire à cette exigence.
N
P. ANCEL : article précité, na 14, p. 212 ; GHESTIN : Con formilé ct garantie dans la vente, op. cil., na 295 ;
la cour d'appel de Nîmes a, dans un arrêt du IX déc. 19XO (O. 1983, p. 29, note LARROUMET), jugé pour une
voiture automobile, «que les turbulences d'air se produisant lors de l'ouverture d'une des deux vitres arrières du
véhicule ont diminué seulement l'agrément de la chose, mais ont été sans inlluence sur son utilité économique ct
objective ct ont porté sur une qualité accessoire du véhicule qui n'a pas présenté toutes les qualités de confort que
l'acquéreur en attendait, ct qu'elles ne peuvent en conséquence constituer la preuve d'un vice de nature à justilier
la demande « en réduction du prix ».
m Décret na 78/464 du 24 mars 1978, JO 1er avril 1978; O. 1978,228; JCP 1978, III, 4752 .
.151, Infra, 1II~lIIe Partie, chapitre I, section 1

383
La garantie conventionnelle offre au consommateur un intérêt considérable par rapport ù
la garantie légale dans la mesure où eUe le dispense de toute preuve relative à J'antériorité du
défaut, à sa gravité et à son utilité. Elle couvre tous les vices de fabrication ou de matière ains
tous les défauts de fonctionnement.
Cette formule générale laisse, certes, place à certaines exclusions. Mais celles-ci nt
distinguent pas en fonction de la gravité du vice apprécié au regard de l'usage de l'appareil. 157
Cette différence se justifie par la finalité même de la garantie conventionnelle, dont ellc
accuse bien ainsi le caractère spécifique. Si l'on prend l'exemple de la garantie légale, ell<
accorde à l'acheteur deux actions : une action en résolution de la vente ou une action el
diminution du prix ; mais ces actions ne sont possibles que si le défaut est suffisammen
important. Aussi la mauvaise fixation d'un écrou susceptible de provoquer une faible vibration d.
l'appareil, par exemple, ne paraît-elle pas suffisante pour autoriser àe telles actions. 358
En revanche, la garantie conventionnelle ayant pour objet même la réparation gratuite d·
l'appareil peut parfaitement s'appliquer aux imperfections 'les plus minimes, dès l'instant quplète
m
peuvent réellement donner lieu à l'intervention d'un technicien.
Le principal avantage que pourra tirer le consommateur de la garantie contractuelle, c' e~
la gratuité totale ou partielle des réparations, autrement dit, du service après-vente durant tout
la période fixée dans le contrat. Dans cette hypothèse, la garantie couvrirait trois postes : 1
fourniture des pièces destinées à remplacer celles qui seraient défectueuses ; la fourniture de 1
main-d'oeuvre compétente afin de réaliser la réparation ; les frais de déplacement (il e~
cependant exceptionnel que ceux-ci soient totalement gratuits).36o
Vu sous cet angle, la garantie conventionnelle peut être un bon argument juridiql
d'équilibre des prestations réciproques en Afrique. Mais son efficacité nous paraît un peu limitf
en raison du délai très court qui est fixé dans le contrat pour sa mise en oeuvre, habituellement l
an, parfois deux dans les pays où son exigence est requise. Une telle durée nous paraît très cour
pour une manifestation d'un vice. Il serait souhaitable que ce délai soit allongé davantage afin 1
m GHESTIN : Conformités et garanties dans la vente, op. cil., n° 295, p. 312.
m GHESTIN : Conformités et garanties dans la vente, op. cil., n° 295, p. 312.
359 Ibid.
}6U Ibid. W 298, p. 313.

384
correspondre à la durée normale pendant laquelle l'objet vendu doit être apte à son usage. Dans
la mesure où la garantie conventionnelle l~xerait un délai correspondant à la durée utile normale
de l'objet vendu, elle énoncerait une règle beaucoup plus satisfaisante que la garantie légale non
adaptée aux intérêts des consommateurs africains.
Cette démarche suppose avant tout que la garantie conventionnelle soit effective, une
réalité. Or, ceci n'est pour l'instant qupune fiction juridique. Mais dans l'hypothèse où l'exigence
de la garantie deviendrait évidente par le biais dpune loi, une démarche plus réaliste nous paraît
nécessaire. Au lieu de laisser coexister deux garanties à l'intérieur d'un même contrat, une fusion
des deux en une seule garantie obligatoire pour tout professionnel serait plus raisonnable et plus
profitable aux consommateurs.
On pourrait ainsi faire la synthèse des avantages de la garantie légale et de la garantie
conventionnelle et les regrouper sous une seule garantie et ainsi fixer un délai unique, cinq ans
par exemple. Ceci aurait le mérite de sortir le professionnel de l'absence de délai dans lequel l'a
laissé la garantie légale de l'art. 1641. Une telle garantie aura aussi le mérite de la garantie
conventionnelle dépendante de la trop bonne volonté du vendeur, car jusqupici cette garantie est
considérée dans les
pays africains comme un cadeau
offert,
une faveur
accordée
aux
consommateurs. Aussi est -elle exécutée plutôt comme une faveur qupln vertu dpune véritable
obligation juridique.
Un autre avantage de la garantie des vices cachés est quplète est transmissible. Elle ne
s'arrête pas au seul acquéreur initial, elle se transmet à tous les sous-acquéreurs de la chose.
C'est un accessoire de la chose et à ce titre elle se transmet avec la chose lorsqupelle fait l'objet
361
de ventes successives.
De toute évidence, l'important dans cette procédure, c'est que l'acheteur jouisse de la
chose comme il en avait l'intention avant l'achat. L'objet livré doit présenter l'aptitude nécessaire
à le satisfaire. C'est ce que l'on appelle la« notion fonctionnelle» de la conformité à propos de la
garantie des vices cachés. Ainsi, le vendeur doit -il délivrer à l'acheteur non seulement la chose
1
.161 J. HUET: or. cil., n° 470 cl suiv.

385
vendue, malS aussi et surtout, une chose ne comportant pas de défauts cachés. n'apparaissant
qupà l'usage et le rendant impropre à la destination envisagée. 362
b) L'intérêt de la garantie contre l'éviction pour
le consommateur.
Le vendeur ne pouvant pratiquement pas troubler la paisible jouissance de l'acquéreur,
l'intérêt de la garantie contre l'éviction se manifeste surtout dans le cas dpune éviction venant
d'un tiers. Cet intérêt diffère selon que l'éviction est totale (1) ou simplement partielle (2).
1 - L'intérêt de la garantie contre l'éviction dans
le cas dpllne éviction totale.
L'éviction totale signifie la perte complète du bien par l'a-cquéreur. Cette situation n'est
pas rare. Elle est même fréquente et se rencontre dans les cas où l' objet de la vente se trouve être
un objet volé. Or, le vol n'est pas un cas à part. C'est un phénomène de société qui se rencontre
partout dans le monde. Le consommateur africain a donc besoin d'être protégé contre toute
éviction d'un tiers dont le fait générateur serait le vol. C'est justement là que la garantie du fait
d'un tiers prend toute son importance.
En effet, dans le cas dpune éviction totale, la garantie, dans la mesure où elle lui est
accordée, conférerait à l'acheteur plusieurs droits sur le vendeur. L'acheteur évincé peut, équité
contractuelle oblige, réclamer au vendeur la restitution du prix payé, des fruits accompagnant le
bien, des frais engagés et si possible des dommages-intérêts. 363
L'obligation pour le vendeur de restituer le prix qupil a reçu se justifie pleinement. Elle
constitue la conséquence logique due au fait que l'acquéreur ne peut plus disposer, ni jouir du
bien en contrepartie duquel il a versé le prix. lM L'acquéreur a droit à cette restitution, même
lorsque le vendeur a écarté la garantie dans le contrat de vente, à moins qupiln'ait acquis le bien
en acceptant le risque d'éviction. l65
362 BIHL : Le droit de la venle, Dalloz' 986, p. 233.
363 COLLART-DUTILLEUL ct DELEBECQUE : op. cil, n° 260 ; GHESTIN el DESCHE : La venle, LGDJ 1%··
n° 822 ; HOC HART : thèse précitée, nO' 192 ct suiv.
3M GHESTIN ct DESCHE: op; cil., n° S23 ; HOCHART: thèse précitée, nO' 192 et suiv.
365 V. L'article 1629 du code civil. En acceplant cc risque, l'acquéreur a conclu un contraI aléatoire.

386
La restitution du prix pour le vendeur va dans la logique même des choses, on pellt y voir
une obligation naturelle. Elle est due même si le bien a diminué de valeur, quelfe que soit
J'importance de cette diminution et CJ uelle qupln soit la cause. 366 Elle s'impose même si la
diminution est due à un cas fortuit ou à une négligence de l'acquéreur. 367 Mais dans le cas où la
détérioration a profité à J'acquéreur, le vendeur ne sera plus tenu de rembourser que le montant
36x
du prix diminué du profit réalisé.
Outre la restitution du prix et indépendamment de la bonne ou mauvaise foi du vendeur, il
y a lieu d'indemniser et de façon complète l'acheteur. L'indemnisation devrait porter sur les fruits
que l'acheteur pourrait être contraint de remettre au tiers évinceur, ainsi que les frais et coûts
accessoires, qupils soient liés à la vente (frais de contrat...) ou à l'éviction (frais de
'd
) 369
proce ure ....
Le bien peut avoir pris une plus-value entre le jour de la vente et celui de l'éviction ;370 il
peut même avoir subi des réparations et améliorations diversement utiles. 37I Il Y a lieu de tenir
compte de tout cela dans le montant qui sera alloué à l'acquéreur pour indemnisation. Celui-ci
.
.
pourra même avoir droit à des dommages-intérêts complémentaires dans le cas où il parvient à
faire état d'un préjudice distinct et non encore indemnisé : remboursement de l'indemnité
d'occupation qupil a dO verser au tiers,372 frais de déménagement, perte de jouissance, préjudice
373
moral etc.
De toute façon, la garantie est de protéger l' acq uéreur, lequel ne doit pas souffrir de
l'éviction du tiers. Ainsi, le garagiste qui a, de bonne foi, acheté une voiture volée et l'a ensuite
1(,(, GHESTIN cl
DESCHE : op. cil., na xn : COLLART-DUTILLEUL cl DELEBECQUE : op. cil., nO 260 :
HOCHART: lilèse précilée na 193 cl suiv .
.1(,7 1hid. : voir égalemenl l' arlicle 1631 du code civ i 1.
.1(,X Article 1632 c. civ.; ihid., HOCHART: lilèse précitée, nOs 196-197 .
.1(,<1 COLLART-DUTILLEUL ct DELEBECQUE : op. cit.. na 260 ; HOCHART : thèse prée. n° 200 .
.170 Civ. ]é
16 janvier 1991, bull. civ. III na 26 : D. 1992. 109, note TESTU : R.T.D.Civ. 1992, 40X, obs.
GAUTIER.
171 Paris 22 nov. 1955, G.P. 1956,1,97. L'article 1635 c. civ. Précise que, si le vendeur il vendu de mauvaise roi le
1
ronds d'autrui, il doit égalemenl remhourser il l'acquéreur les dépenses même volupluaires et d'agrément qu'il a
l'ailes sur le ronds.
172 Civ. y' 8 oc\\obre 1974, J.c.P. 1974, Il,17930, ohs. THUILLER.
17.1 Représenlanl. 2 déc. 1890, D.P. 1891, l, 47X; Paris 2 mars 1987, D. 19X7, I.R. 72.

387
revendue à un particulier, devra garantir celui-ci de l'éviction dont il souffre du fait de la saisie de
1
·
l'
:174
a vOiture par la po [ce:
Tous ces développements théoriques peuvent être mis en pratique en Ah'ique pOUl
protéger les intérêts des consommateurs contre d'éventuelles évictions des biens acquis. Sur cc
point, une inspiration des règles du droit français et des autres droits étrangers est souhaitable
l'éviction étant la même partout. Sauf preuve contraire démontrant que le consommateur africaÎl
n'a nullement besoin d'une telle protection, la logique des transactions commerciales, voudrai
qupon la lui accorde. Il appartient donc aux pouvoirs publics de la lui offrir.
2 - L'intérêt de la garantie d'éviction dans le cas
dpune éviction partielle.
Dans le cas dpune éviction partielle, l'acheteur dispose dpune option : il peut résilier 1
contrat de vente si l'objet de l'éviction a eu un caractère déterminant dans son consentement. L
résiliation se fera dans ce cas dans les mêmes c0nditions que celle de l'éviction totale. J75 E
revanche, si l'éviction partielle s'avérait insuffisante pour justifier l'anéantissement du contrat d
vente ou si l'acheteur choisit de le maintenir, le remboursement se fera proportionnellement à 1
valeur de la partie du bien dont il est évincé, et ce, en tenant compte de la plus-value prise par 1

d
. 1
376
len epUIs a vente.'
Certes, la situation de l'acquéreur est moins avantageuse que dans le cas dpune évictio
totale. Mais elle a le mérite de résoudre le problème d'équilibre des prestations réciproque
Toutefois, l'acheteur peut demander et obtenir des dommages-intérêts complémentaires s'
justifie d'un préjudice réel du fait de l'éviction,m le tout laissé à l'appréciation des juges du fone
Cette situation du consommateur en droit français n'est pas spécifique à sa société et pel
bien parfaitement s'accommoder avec la situation de son homologue africain. Tout le problèn
est de pouvoir la mettre en oeuvre en l'adaptant aux réalités locales. Là encore, nous ne penso
174 Pour un garagiste qui vend une automobile avec des r'aques d'immatriculation l~llsifiées. Civ. 2~ avril 19'
D. 1976, I.R. 204 ; voir en matière immobilière, mais la règle serait la même dans une vente Illohilière ; ci'
janvier 1967, D. 1967,430; 12janvier 1982, I.R. 136.
m COLLART-DUTILLEUL et DELEI3ECQUE : op. cil., n° 261 ; GHESTIN et DESCHE : or. cil., nOs 82'<
suiv. ; HOCHART : thèse prée., nOs 213 et suiv.
.17(, Ihid.

388
pas qupil y ait beaucoup d'obstacles d'ordre juridique, économique, social et culturel susceptibles
de mettre en échec son adaptation.
Les seuls obstacles possibles en ce qui concerne la garantie en général (vices cachés et
éviction) sont ccux que pourraient constituer les clauses que les professionnels seraient tcntés de
mettre en ocuvre pour l'empêcher de produire tous ses effets. C'est à ces clauses qupil faudra
s'attaquer si l'on veut que la législation protectrice instaurée à cet effet permette au
consommateur de profiter pleinement de sa garantie.
SECTION II:
LA LOTTE CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LES CONTRATS
CONCLUS ENTRE PROFESSIONNELS ET CONSOMMATEURS.
Le problème des clauses abusives a été souligné par les rédacteurs des principes directeurs
des Nations Unies pour la protection des consommateurs (P.D.P.C). Le point 19 desdits
principes invite les gouvernements des pays membres, en particulier des pays en VOle de
développement, à mettre en oeuvre des moyens juridiques susceptibles de protéger les
consommateurs contre les « abus contractuels comme les contrats léonins, l'exclusion des droits
essentiels dans le texte des contrats ou l'imposition de conditions de crédit exorbitantes ».
Les dispositions de ce principe visent de façon générale les clauses abusives incluses dans
les contrats conclus entre professionnels et consommateurs. Si dans les pays développés la lutte
contre les clauses abusives commence à porter ses fruits grâce aux différentes réglementations en
la matière, le problème reste entier dans le pays du Tiers-Monde, en particulier dans les pays
cI'Afrique (Sous-Section 1). Le moment est donc venu de porter secours <lUX consommateurs en
réglementant le domaine des clauses abusives clans les contrats proposés auxdits consommateurs
1
m Ibid.

389
par les professionnels. Ce sera là une bonne manière de rendre les contrats conformes à l'ordre
public économique (Sous-Section II).
Sous-Section 1 : Le problème relatif aux clauses abusives en Afrique.
Dans un premier temps, il t~lUdra chercher à connaître la clause abusive. L'étude dc 1;
notion s'avère donc nécessaire (sI). Si les clauses abusives posent problème en Afrique, c'cs
vraiscmblablement parce qu'elles sont présentes dans les contrats. Et ces contrats sont le plu
souvent ceux qui sont habituellement proposés aux consommateurs. L'illustration de J'ampleur dl
problème des clauses abusives passe par l'étude de leur manifestation (*11), laquelle est la suitl
logique du "vide juridique" qui caractérise les pays africains en la matière (*III).
SI - La notion de clause abusive.
L'étude de la notion de clause abusive suppose deux démarches ou analyses essentielles
une définition de la notion (A) et un exposé des critères pouvant permettre son identification (B)
A - Définition de la clause abusive.
Nous venons de parler de l'absence de textes régissant le domaine des clauses abusives e
Afrique. Cette affirmation est atténuée par l'existence d'un texte de loi traitant des clause
abusives dans la législation d'un Etat africain. Il s'agit de l'article 27 de la loi du 10 Août [99
régissant l'activité commerciale au Cameroun. C'est un texte (à notre connaissance) unique e
son genre en Afrique. Pour les besoins de notre définition, nous nous inspirerons de ce tcxte ain
que des textes étrangers, notamment français et communautaire.
D'après l'article 27 de la'loi camerounaise, «sont réputées non écrites, les clauses d,
contrats conclus entre professionnels et consommateurs et qui sont en fait imposées al
consommateurs et confèrent un avantage excessif aux professionnels en leur permettant de ~
soustraire, pour partie ou en totalité, à leurs obligations légales ou contractuelles ».
En France la clause abusive est définie par l'article 35, alinéa 1cr de la loi du 10 janvi
1978 sur la protection et l'information des consommateurs, devenue aujourd'hui J'article L. 13~
al. 1cr du Code de la consommation. Cet article disposc :

390
« Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs,
peuvent être interdites, limitées ou réglementées, par des décrets en Conseil d'Etat pris après avis
de la commission instituée par l'article 36 (l'article L.132.2 du Code de la consommation), en
distinguant éventuellement selon la nature des biens et des services concernés, les clauses
relatives au caractère déterminé ou déterminable du prix ainsi qu'à son versement, à la
consistance de la chose ou à sa livraison, à la charge des risques, à l'étendue des responsabilités el
garanties, aux conditions d'exécution, de résiliation, résolution ou reconduction des conventions
lorsque de telles clauses apparaissent imposés aux non-professionnels ou consommateurs par un
abus de puissance économique de l'autre partie et confèrent à cette dernière un avantage
excessif» .
De telles clauses, selon l'article 35, alinéa 2 (l'article L.132-1, alinéa 2) sont réputées non
écrites.
A quelques exceptions près, du moins pour ce qui concerne la portée inégale du système
de I?rotection mise en place par les textes ci-dessus cités (nous reviendrons là-dessus), les
dispositions de l'article 35, al. 1cr et celle de l'article 27 de la loi camerounaise sont très voisines.
Le texte communautaire en raison de sa consistance, ditlère sensiblement des textes
français et camerounais. D'après J'article 3 alinéa 1er de la directive du 5 avril 1993, une clause est
considérée comme abusive:
« Lorsqu'en dépit des exigences de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un
déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat. » m
Ce texte, dans son ensemble, est très proche de la définition qu'avait avancé le conseil de
l'Europe dans sü résolution 76-47 du 16 Novembre 1976 relative aux clauses abusives dans les
contrats conclus avec les consommateurs. La clause abusive est définie par la résolution comme
m Directive CEE n093/13 du Conseil du 5 Avril 1993. Article 3 alinéa 1er J.O.C.E. L. 95, 21 Avril 1993. P. 29.
Pour son commentaire, voir Mario TENREIRO: «Les clauses abusives dans les contrats conclus avec les
consommateurs », Rev. Contrats-Concurrence-Consommation, éd. Techniques Juillet 1993. Chronique P. 2 et 5.
Avant l'adoplion de la directive, la commission avail déjà consacré cc critère dans son règlement n03932192 du 21
Décemhrc 1992 concernant des assurances (J.O.C.E. N° L.39X, 31 Décembre 1992. P.7). Ce règlement inclul
l'exemplion des accords entre entreprises concernant des « conditions types de conlrats d'assurances » et contient
une liste "noire" des clauses interdites. On y trouve cependant une aulre disposition permettant le relrait de
l'exemplion par la commission lorsque les «conditions types d'assurances », objel des accords, eontiennenl
d'autres clauses qui créent au détriment du preneur d'assurance un déséquilibre signilicatil' entre les droits ct les
obligalions découlant du contraI ».

391
« toute clause ou toute combinaison de clauses qui entraînent dans le contrat un déséquilibre des
droits ct obligations all préjudice des consommateurs »-1,79_
Le texte communautaire conserve cependant un avantage sur les textes camerounaIS.
français et du Conseil de l'Europe en cc sens qu'il introduit dans son sein le principe de la bO/l1U
pJi cOfltractuelle au sens objectif du terme. Il s'agit en effet, d'un critère supplémentaire qu
fonctionne comme « moyen d'évaluation globale des différents intérêts impliqués» et qui suppose
que le professionnel traite le consommateur de « façon loyale et équitable» en prenant en compte
.
,~
1/ . .
380
ses «mterets egltlmes»'
.
Depuis le IV' février 1995, le législateur français a harmonisé les différences qui existen
entre le texte français relatif aux clauses abusives et le texte communautaire. La loi N° 95-96 dl
)'0' Février'H 1adoptée à cet effet a transposé un faible nombre de dispositions de la directive N
93113 du 5 Avril 19933~2 ; les articles L.132-1 à L.133. 1 du Code de la consommation répondan
déjà en grande partie aux exigences communautaires. Désormais, la clause abusive au regard d,
la loi française se définit comme suit:
« Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs
sont abusives, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non
professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de
parties au contrat» (Article L. 132-1, al. 1. nouveau du Code de la consommation).
La définition est donc élargie, un déséquilihre du contrat pouvant exister sans qu'il y a
abus de puissance économique.
La déiïnition de la clause abusive connue, la difiïcuIté à résoudre se trouve maintenar
dans l'appréciation de son caractère abusif et ses critères d'identiiïcation au sein d'un contrat, or;
ou écrit.
.\\7') Voir en cc sens Agnès CHAMBRAUD et Marie-Odile THIRY: « Prorosition de directive relative aux. claw
abusives", INC HEBDO n° 704. 3D Novembre 1990. P. Il.
,xo TENREIRO: Chronique rrécilée. P. 2. Voir aussi le "ConsiJérant N° 16 Je la Jirective N° 93-13 du 5 !'
1993 précitée.
,XI Loi N° 95-96 du
1<" Février 1995 concernant les clauses abusives el la présentation des contrats el régiss;
diverses activités d'ordre économique et eommercial. J.O 2 Février 1995 .
.lX} Direclive W 93/13 Ju 5 Avril 1993. J.O.C.E L 95.21 AvriI19l}3. P.29.

392
lJ ~ Appréciation et critères d'identification des clauses
abusives dans les contrats.
Comlllent apprécie-t-on le caractère abusif d'une clause dans un contrat? Il s'agit là d'une
question de I~tit (a) dont l'analyse est subordonnée à la détermination des critères qui en
permettent J'identification (b).
al L'appr-éciation de la clause abusive dans un contrat.
Tous les textes ci-dessus cités sont formels sur un point : ils appréhendent la clause
abusive par rapport au contrat conclu entre un professionnel ct un consommateur. Pour apprécier
le caractère abusif d'une clause, encore faut-il que celle-ci figure dans les documents contractuels.
La clause doit donc dans un premier temps être insérée dans lin contrat. Il s'agit là d'une
condition qu'on retrouve aussi bien dans le texte français, communautaire que camerounais, seul
texte traitant du problème en Afrique. La forme et le type du contrat ainsi que son support
importent peu. Ce peut être un bon de commande, une facture, un bon de garantie, le type de
contrat, un bordereau ou un bon de livraison, un billet, un ticket contenant des stipulations ou des
références ù des conditions générales préétablies, une police d'assurance, etc. ; l'important est que
le contrat en cause soit un contrat conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou
consommateur'S1.
Selon la nouvelle loi française relative aux clauses abusives,s4, l'appréciation du caractère
abusif de la clause dans un contrat peut se faire en se référant aux règles de droit commun,
notamment aux dispositions des articles 11 S6 à 1161, 1163 et 1164 du Code civil.
Or, il s'agit là des règles très usitées dans les législations africaines d'expression française,
le Code civil ainsi que les autres codes du droit français servant de référence dans les Etats
francophones d'Afrique. L'application de telles dispositions ne devrait pas apparemment poser de
.1Xl Sur l'évolution de la jurisprudence quant au scns donné ù ces notions, V. Notamment: G. PAISANT: « Les
nouveaux aspects de la luite contre les clauses ahusives », D. 1988 chrono. 253 chrono 253; - « De l'eflicaeité de la
1ulte contre les clauses abusi ves » (à propos d'un arrêt de la cour de Paris du 22 Mai 1986 D. 19H6. P. 563), D.
1986 chron .. 299 et s. ; G. BERLIOZ: « Droit de la consommation ct droits des contr<lts", J.c.P. 1979. l, 2954 ; J.
HUET: « Les hauts et les bas de la protection contre les clauses abusives » ( à propos de la loi du 18 Janvier 1992
renforçant la protection des consommateurs), J.c.P éd. G.
1992. 3592; Voir également la définition du
consommateur par la directive n° 93-13 du 5 Avril 1993 (arL 2-b).

393
problèmes majeurs. Encore faut-il pouvoir les adapter aux réalités socio-économiques du terroir,
les législateurs des différents Etats africains ayant très souvent tendance à transposer les règles de
droit appli4uécs en France dans leur Etat respectif sans mettre en relief les réalités de \\cur milieu
social, économique ct culturel.
Quant au mutisme observé par le légisJateur français à l'égard de l'article 1162 C. CIV.
dans scs références aux règles de droit commun, il s'explique par le fait que cet article a été repri~
par l'article 3 de la loi du 1CI Février 1995 précitée.
Le caractère abusif d'une clause contractuelle s'apprécie également « en tenant compte dt
la nature des biens ou services qui font l'objet du contrat et en se référant, au moment de l,
conclusion du contrat à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toute~
les autres clauses du contrat, ou d'un autre contrat dont il dépend » (article 4 alinéa 19 directiV{
CEE n° 93-13). Cette disposition a été reprise- parla nouvelle loi française relative aux clause:
abusives (Loi n095-96 du 1cr Février 1995 précitée). Suite à cette loi, l'article L.132-1 alinéa:
nouveau du Code de la consommation se lit comme suit:
« Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1 J61, 1163 e
1164 du Code civil, le caractère ahusif d'une clause s'apprécie en se rétërant au moment de 1.
conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'
toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans u
autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépend juridiquement ru
de l'autre».
Celle dernière disposition de l'article L.132-1 al.5 recouvre par exemple le cas où u
contrat est annexé à un autre contrat principal.
Si le contrat est considéré comme l'instrument juridique sans lequeJ aucune appréciatio
du caractère abusif d'une clause n'est possible dans les rapports professionnels-non professionne
ou consommateurs, il faut cependant souligner que cette appréciation ne doit porter « ni sur
détinition de l'ohjet principal du contrat du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de
rémunération du bien vendu ou service oftCrt » (article L. 132-1, al. 7 nouveau) issu de la loi
95-96 du 1cr Février 1995).
1~~ Loi n° 95-96 du 1" révrier 1995 précitée.

394
Cette disposition est une reprise plus ou moins intégrale de l'article 4 alinéa 2 de la
directive CEE 93-13 du 5 Avril 1993. D'après cet article: « l'appréciation du caractère abusif des
clauses ne portc ni sur la définition de l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation entre le prix
el la rémunération, d'une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d'autre part,
pour autant quc ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensibles ».
A contrario, une rédaction obscure et incompréhensible des clauses litigieuses peut
amener le juge à prendre en considération les cas exclus par l'alinéa 2 de l'article 4 de la directive,
notamment la définition de l'objet principal du contrat, l'adéquation entre le prix et la
rémunération, d'une part, les services ou les biens i\\ fournir en contrepartie d'autre part. C'est
justemcnt ce qui découle du "Collsidérant 11°19" de ladite directive qui, après avoir écarté pour
les besoins de son application, dans ce considérant, la prise en considération de "l'objet principal
ùu contrat ou Je rapport qualité/prix de la fourniture ou de la prestation dans l'appréciation du
caractère abusif d'une clause, précise par la suite: «que l'objet principal du contrat et le rapport
qualité/prix peuvent, néanmoins, être pris en compte dans l'appréciation du caractère abusif
d'autres clauses. »
Pour cc qui concerne les contrats d'assurances, domaine de prédilection des clauses
abusives, la directive prend soin de préciser à travers le "Considérant" que dans ces contrats,
« les clauses qui définissent ou délimitent clairement le risque assuré et l'engagement de l'assureur
ne font pas J'objet d'une telle appréciation dès lors que ces limitations sont prises en compte dans
le calcul de la prime payée par le consommateur ». On retrouve là encore le problème lié à la
clarté, à la compréhension et à la consistance de la clause dans le contrat.
Confrontés à un "vide juridique" dans ce domaine'x,,, il n'en demeure pas moins que les
législateurs africains devraient s'inspirer de tclles règles pour asseoir un véritable arsenal législatif
et réglementaire pour protéger leurs consommateurs. Les rapports économiques et historiques
qui les lient aux pays de l'Union européenne sont autant d'éléments favorables pour une
adaptation de certaines règles de droit dérivant de l'économie contemporaine. Les règles relatives
aux clauses abusives en sont une parmi tant d'autres. Ceci est d'autant plus urgent que les clauses
abusives existcnt dans tous les pays, notamment dans les pays où la répression est inexistante. El
.J
!
lS5CLinfra.

395
l'Afrique est un contincnt sur lequcl cette répression t:st absente du I~lil de l' inadéquation de~
textes légi lati Cs ou réglementaires en la matière.
Pour des raisons déjà évoquées, nous pensons qu'une inspiration des systèmes législatif-
et réglementaires aussi bien français que communautaire serait un moyen adéquat pour assurel
une protection sérieuse et efficace des consommateurs locaux trop souvent «étouffés» par le~
clauses abusives dans leurs contrats conclus avec les professionnels.
De toute I~lçon, Je secours dont a tant besoin le consommateur, et plus particulièremen
africain est fonction de la capacité qu'auront les organes compétents à reconnaître ces clauses qu
empoisonnent son existence. Or, la reconnaissance des clauses incriminées à l'intérieur d'UI
contrat est sujette à la maîtrise de leurs critères ou éléments d'appréciation.
Il) Les critères d'appréciation ou d'identification des
clauses abusives dans un contrat.
Pour qu'une clause puisse être considérée comme abusive, la réunion de plusieurs critère
s'avère nécessaire. Les textes camerounais, français et communautaire ci-dessus évoqués, mellen
en évidence les critères à partir desquels, une clause peut être qualifiée d'ahusive. Bien avant 1.
vote et l'adoption de la loi n° 95/96 du 1~r Février 1995 dont le but est d'harmoniser le texlt
français relatif aux clauses abusives avec le texte communautaire en la matière, le droit françai
des clauses abusives était régi par les dispositions de l'article 35 de la loi du la Janvier 1978 su
la protection et l'information des consommateurs des biens et des services, soit l'article L.132-
du Code de la consommation.
Les critères retenus par ce texte diffèrent sensiblement de ceux de l'article 3 alinéa 1~r d
la directive N° 93-13 du 5 Avril 1993, mais ont largement inspiré le législateur camerounais dor
le texte relatif aux clauses abusives est très voisin. Bien qu'ayant fait l'objet d'une harmonisatio
au plan communautaire, les critères retenus par l'article 35 de la loi du la Janvier 1978, so
l'article L.132-1
du Code de la consommation, n'en sont pas moins importants dans '
détermination des clauses abusives dans les contrats.
Nous nous intéressons dans un premier temps à [eur analyse (1). Nous examinerons dat
un deuxième temps, les nouveaux critères retenus par le texte communautaire (art. 3 al. 1 de
directive du 5 Avril 1993), soit l'article L.l32-1 alinéa 1~r nouveau du Code de la consommatit

396
français issu cie la loi n° 95/96 du 1cr Jëvrier 1995 (2). On déterminera dans un troisième temps
l'intérêt de l'analyse dcsdits critères pour le droit africain (3).
1 - Les critères d'appréciation ou d'identification retenus
par ['article 35 français et l'article 27 camerounais.
L'article 35 de la loi clu 10 Janvier retient expressément deux critères d'appréciation:
« l'abus de puissance économique» et « l'avantage excessif ». L'article 27 de la loi camerounaise
du 10 Août 1990 ne retient expressément qu'un seul critère: « l'avantage excessif », l'abus de
puissance économique restant sous-entendu, l'avantage excessif qu'il en résulte d'une clause
abusive étant la suite logique de la puissance économique du professionnel sur le non-
professionnel ou consommateur.
De toute façon, en droit français, les critères retenus par l'article 35 de la loi du 10 janvier
1978 ont jeté le trouble du côté' de la doctrine qui n'a pas manqué de dénoncer unanimement le
flou de ces deux expressions·JSCl . Où commence « l'abus de puissance économique» et qu'est ce
qu'un « avantage excessif » '? C'est ce que nous chercherons à savoir à travers l'analyse de ces
deux critères qui, rappelons le, jouent de façon cumulative.
1-1. L'abus de puissance économique.
Pour
qualifier
une
clause
d'abusive,
celle-ci
d'après
l'article
35
(L.132-1
C.
consommation), doit avoir été « imposée ... par un abus de puissance économique... » En effet,
qu'est-ce qu'un abus de puissance économique? Et qu'entend-on par cette expression?
,SI> Ph.
DELEBECQUE, note sous Aix-en-Provence. 20 Mars 1980. D. 1982.131; H. BRICKS: Les clauses
abusives, Thèse Montpellier, L.G.DJ (Paris) 1982. Spéc. W 168; L. I31HL: « La loi n° n-23 du 10 janvier 19n
sur la protection ct l'in()rmalion du consoll1maleur », J.c.p 197H, Doctrine, 1,2909; G. BERLIOZ: « Droil de la
consommation et droit des contrats », JCP 1979. Doctrine, 1,2954; J. GHESTIN : Le contrat: formalion, L.G.DJ
1988, n° 600 cl suiv. ct les rélërences citées.

397
L'expression conserve toute sa valeur et fait penser, tout naturellement d'ailleurs, à un
vice du consentement entendu sous J'angle de la contrainte. celle-ci ayant atteint la volonté du
non-professionnel ou consommateur clans son élément "liberté "m.
Loin du vice de violence au sens de l'article 1112 du Code civil, il s'agit plus précisément
d'un abus de situatioll qui permet à l'une des parties, en particulier la plus forte économiquement,
d'imposer ses condil ions à l'autre, abus que l'on a parfois rapproché du dol à travers la notion
, ,
1 1 d '[
t ,1 xx
gencra e (c
e oyaue
.
En réalité, l'abus de puissance économique ne concerne pas les vices du consentement, i
sc rattache plutôt à ['abus de droUJ8'J. Certes. la loi reconnaît au professionnel, de façon implicite
la possibilité de dicter ses conditions au consommateur, mais il ne doit user abusivement de ct:
pouvoir à ses dépens'~o. On retrouve une analyse conforme à la définition de "l'abus de droit'
entendu comme un détournement de la finalité sociale des droits subjectifs,,391.
Un autre problème se pose cependant, à propos de l'abus de puissance économique e
concerne la prérédaction unilatérale des contrats proposés aux consommateurs. Ce droit qu'on
les professionnels sur les consommateurs, constitue-t-il un véritable droit subjectif dont seu
l'usage abusif serait à réprimer ? En effet, si la prérédaction de contrats standardisés es
aujourd'hui une nécessité technique inéluctable'92, il n'est en revanche pas évident que L
rédaction unilatérale de ces contrats types soit légitime'')'. Elle constitue l'exercice d'un pouvoi
de fait et non celui d'un droit subjectif1'J4. Il semble donc diftïcile dans ces conditions de voir dan
.'X7 GHESTIN : "Le contrat", op. cil. n° 601. P 685.
1RX Ibid., Y. PICOD : Le devoir de loyauté dans l'exécution du contrat, thèse 1987. L.G.D.J 1989 p. 21 et 5; (
PAl SANT : « De l'ertïcacité de la IUlle contre les clauses abusives» UI propos d'un arrêt de la cour de Paris du :
Illai 1(86). [) 1986, p. 301.
]S') Cr. infra.
\\'10 GHESTIN: "Le contrat", op. cil. n° 601. p GX5.
\\')\\ Celle conceplion des droits subjectifs est de JOSSERAND qui voit dans ces droits des prérogatives "accordé
aux individus dans l'intérêt bien compris de la société toul cntière ; les exercer dans l'intention de nuirc il aut!
est évidellllllcnt contraire il celle linalité sociale". Cité par GHESTIN respectivemcnt dans "Le contrat" précité
601 ct dans "L'abus dans les contrats" G.P. I<>KI i' Sem. (1. 379. V. également GHESTIN : "Introduc
générale", nOs 718 ct suiv ..
,92 GHESTI N: "Le contrat ", op. cil. nOs 75 cl (JO 1.
.w'lhid. N° 601.
\\9~ GHE5TIN: "Le contrat", op. cil. nOs 68 ct 5, 7X e15; nOs 601 ..

398
l'interdiction des clauses abusives une simple application de la notion d'abus de droit395 .. Cette
notion est trop floue, trop vague pour en espérer sa généralisation 396 .
La portée de la prohibition des clauses abusives dans les contrats que nous prônons pour
la protection du consommateur africain, va au-delà du simple abus de droit. On y trouve, certes,
dans l'imposition des clauses abusives aux consommateurs une certaine manifestation de l'abus de
puissance économique. Assimiler cette manifestation à un exercice abusif d'un droit subjectif
reviendrait à légitimer le comportement des professionnels auteurs des clauses abusives dans les
contrats avec les consommateurs.
Le problème des clauses abusives est une question de fait qui met en jeu l'équité et la
loyauté contractuelle que le droit se doit de rétablir. C'est donc une affaire d'équilibre des
prestations réciproques dans le contrat, équilibre que met en péril la puissance du professionnel.
C'est ce déséquilibre que vient d'ailleurs mettre en évidence le second critère.
1-2. L'avantage excessif.
Pour être considérée comme abusive, une clause doit non seulement avoir été "imposée
au consommateur ou non-professionnel par un abus de puissance économique du professionnel,
mais elle doit aussi conférer à celui qui l'a imposée « un avantage excessif» au détriment du non
professionnel ou consommateur. Selon l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, "l'avantage
excessif' est le second critère distinctif de la clause abusive par rapport à une clause normale et
sans lequel le qualificatif d'abusif ne saurait être retenu, les deux critères jouant de façon
cumulative.
Ce critère de l'article 35 se rapproche du "déséquilibre significatif' contenu dans le texte
communautaire. Il n'est pas non plus loin de "l'exécution indûment défavorable" ou de
"l'exécution significativement différente" dont fit état ledit texte. On y trouve le vide de l'équité
que seule la bonne foi contractuelle permet de rétablir.
J95 Ibid. n° 601.
396 H. BRICKS: thèse précitée P. 41. Selon l'auteur « l'arbitraire des juges y serait, en erret, plus que partout
ailleurs dangereux puisqu'on leur reconnaît le rouvoir d'annuler, d'interpréter les situations contractuelles sans
aucune organisation pratique, sans l'rein, ni directive », lC.P 1988, éd. (G), l, 3343, également Jaques MESTRE
et Anne LAUDE « l'interprétation "active" du contrat par le juge », in "Le juge ct l'exécution du contrat" colloque
LD.A Aix-en-Provence, 28 mai 1993, avant-propos de l MESTRE, P.U.F 1993, P. 9 ct suiv. ; D. MAZEAUD:
«Lcjuge face aux clauses abusives », in colloque IDA prée. p. 23 ct suiv ..

399
D'ailleurs, « l'avantage excessif» dont fait allusion l'article 35 ne figurait pas dans le projet
initial du gouvernement français de l'époque. Lors des débats parlementaires, on l'a tout
simplement préféré au « déséquilibre manifeste» qui était le critère d'appréciation initialement
retenu dans le projet gouvernemental397.
La formule «déséquilibre manifeste» a été écartée au profit de « l'avantage excessif»
sans doute parce qu'elle évoquait de façon excessive la lésion ,98 , notion qui, telle qu'elle existe en
droit positif français, est totalement inapplicable aux clauses abusi ves399 .
En tout cas, par sa combinaison d'un élément objectif - avantage excessif - et d'un élément
subjectif - la contrainte résultant d'un abus de puissance économique -, le texte de l'article 35 est
très proche des diverses législations étrangères en ce qui concerne la prohibition des clause~
abusives dans les contrats conclus entre les professionnels et les non-professionnels ou
consommateurs4OO • De toute façon et quelle que soit la formule utilisée, J'idée est bien la même. L
y a dans les deux cas une atteinte à lajustice contractuelle. La différence tient seulement à l'objet
de l'abus qui, dans la lésion, porte sur les prix, et dans les clauses abusives, sur les clause~
excessives concernant surtout l'exécution du contrat; mais d'une manière générale, le résultat
final est toujours le même, c'est-à-dire un « déséquilibre... des droits et obligations des partie~
40\\
»
Cependant, malgré cette quasi-suffisance des critères de l'article 35 dans l'appréciation de~
clauses abusives, le droit français a connu une certaine évolution dan ce domaine à travers la 10
95-96 du 1cr février 1995 destinée à harmoniser les textes français relatifs aux clauses abusive:
avec le droit communautaire. Ce dernier, plus consistant, met en oeuvre à travers la directivt
93113 du 5 avril 1993 de nouveaux critères d'appréciation des clauses abusives. Essayons de le
analyser afin de voir en quoi ceux-ci pourraient être utiles au doit africain.
397 cr. article 28. Travaux préparatoires Sénal. Doc. 306. P. 23
m GHESTIN : le contrat: op. cil., n° 602. Il faut toutefois souligner que la formule "déséquilibre manifcstl
ligurait dans la résolution du Conseil de l'Europe dont s'est inspiré Ic gouvcrncmcllt français dc l'époquc du vr
de la loi du 10 Janvier 1978 sur les clauses abusi ves.
J99 Sur l'analyse de la lésion par rapport aux clauses abusives, voir H. BRICKS: thèse précitée. P. 48 cl suiv ..
400 GHESTIN: Le contrat, op. cil. nOs 576 ct 602 ; voir égalemcnt CHAMBRAUD ct THIRY: Articlc précité.
13.
40\\ GHESTIN : Le contrat, op. cil., n° 602.

400
2 - Les critères d'appréciation ou d'identification des
clauses abusives retenus par l'article 3 de la directive
CEE 93-13.
D'après l'article 3, §1 de la directive 93-13 « une clause de contrat n'ayant pas fait l'objet
d'une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l'exigence dc
bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et
obligations des parties découlant clu contrat ».
Ce texte renferme en son sein cieux éléments cI'appréciation du caractère abusif des
clauses abusives: "le déséquilibre significatif' et "la bonne foi". Ce qui est loin du nombre
initialement
retenu
clans
la
proposition
de
directive402 ,
soit
au
total
quatre
éléments
d'appréciation:
"déséquilibre
significatif',
"exécution
indûment
défavorable",
"exécution
significativement différente" et "bonne foi". Sans doute les rédacteurs de texte fmal ont-ils vu une
certaine ressemblance entre les trois premiers éléments d'appréciation, en conséquence de quoi,
ils les ont re.groupés sous la tutelle d'un seul critère : le déséquilibre significatif, leur existence
pouvant toujours être mise en évidence lors de l'appréciation du caractère abusif d'une clause
dans un contrat.
Deux éléments d'appréciation sont donc retenus par le texte de l'article 3, §1 de la
directive 93-13 du 5 Avril 1993 : le déséquilibre significatif et la bonne foi. Il importe de les
analyser pour appréhender leur portée. Il faut souligner que pour l'application effective desdits
critères, le Conseil a établi à l'annexe de la directive "une liste indicative et non exhaustive des
clauses qui peuvent être déclarées abusives" (article 3, §3).
2-1. Le déség uilibre significatif.
Le texte de l'article 3, §I parle de "déséquilibre significatif'. Ce texte qui reprend
intégralement, à quelques exceptions près, les éléments d'appréciation de la proposition de
directive, met en jeu un critère bien diftïciJc à cerner quant à son appréciation. Qu'est-ce qu'un"
déséquilibre significatif' ? En quoi consiste-t-il ? Comment J'apprécie-t-on et par rapport à quoi?
A partir de quel seuil un déséquilibre provoqué par la présence d'une clause dans un contrat
peut-il être qualifié de «significatif» ?

401
Toutes ces questions ont leur importance dans la mesure OLI le terme «significatif»
contenu dans le texte de l'article 3, §I pose une certaine limite à la notion principale de
déséquilibre. Cette remarque est d'autant plus importante que cette limitation n'avait pas été
envisagée dans la résolution 76-47 du Conseil de l'Europe du 16 Novembre 1976 relative aux
clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs. Comme nous avons déjà cu 2
le souligner, la clause abusive est défmie dans ce texte comme « toute clause ou toute
combinaison de clauses qui entraîne dans le contrat un déséquilibre des droits et obligations au
préjudice des consommateurs ».
Par rapport à ce texte, on voit que la restriction de la notion de déséquilibre par J'article 3.
§I de la directive ne sera pas une appréciation facile à mener. L'appréciation du déséquilibre
"significatif' sera donc fonction de la finesse d'analyse du juge saisi du caractère abusif d'une
clause dans un contrat, à la seule condition qu'on lui en laisse l'opportunité. Ce qui n'est pas le ca~
en France, même si cela va de soi maintenant depuis le célèbre arrêt du 14 mai 1991 dc h
première Chambre civile de la Cour de cassation, laquclle a reconnu au juge la faculté de déclaret
de son propre chef le caractère abusif d'une clause'contractueIIe40J .
En
J'espèce,
il
s'agissait
de
J'hypothèse
récurrente,
de
la
perte
de
pellicule~
photographiques par un magasin auquel elles avaient été confiées pour leur développement, et IL
Haute Juridiction a estimé que la clause figurant sur le bulletin de dépôt et exonérant lé
commerçant de sa responsabilité pouvait être considéré, par les juges d'appel, comme procurant ~
ce dernier un avantage excessif: elle présentait donc un caractère abusif et devait être réputé{
non écrite404 . « L'attendu» principal de l'arrêt est ainsi rédigé : « Attendu, ensuite, qu'ayan
relevé que la clause figurant sur le bulletin de dépôt exonérait le laboratoire de tOUl(
responsabilité en cas de perte des diapositifs, le jugement attaqué, dont il ressort qu'une te lit
clause procurait un avantage excessif à la société, locataire d'ouvrage, et que celle-ci, du fait dl
sa position économique, se trouvait en mesure de l'imposer à sa clientèle, a décidé à bon droit qUI
cette clausc revêtait un caractère abusif et devrait être réputée non écrite ».
~()~ « Proposition de directive relative aux clauses abusives ", J.O.C.E.E-C n° 243 du lX septembre 19lJO.
~()3 Civ.li:rc 14 mai 1991 JCP. 1991, Il,21763, note G. PAISANT, petites affiches du 8 Juillet 1991, n0 81, n
Théo HASSLER; D. 1991,449, note J. GHESTIN; voir également à cc sujet J. HUET: « Les hauts et les has l
la protection des clauses ahusives»
(à propos de la loi du
18 Janvier 1992 renf()rçant la protection df
consommateurs) J.c.P éd. G. 1992,3592, docl., p. 273.
~(j.j Ibid.

402
Ce rapprochement de l'analyse du déséquilibre « significatif» avec les réalités du droit
français s'explique par le fait que ce dernier vient d'harmoniser ses textes relatifs aux clauses
abusives avec les textes communautaires à travers la loi 95-96 du 1er février 1995. Désormais, on
ne parlera plus « d'avantage excessif» ou « d'abus de puissance économique », mais plutôt de
« déséquilibre significatif» (article L.132-1, alinéa 1er nouveau du Code de la consonunation).
Or, le droit français continue à privilégier l'appréciation administrative du caractère abusif d'une
clause sur le judiciaire. En ce sens l'article L. 132-1 a1.2 nouveau dispose : « Des décrets en
Conseil d'Etal, pris après avis de la Commission instituée à l'article L.132-2, peuvent déterminer
des types de clauses qui doivent être regardées comme abusives au sens du premier alinéa ».
Au vu de ce texte, le rôle essentiel dans le dispositif d'élimination des clauses abusives est
joué par le gouvernement qui bénéficie dans sa tâche de l'assistance de la Commission des clauses
abusives. Cette dernière peut bien émettre des recommandations tendant à la suppression des
clauses qu'elle tiendrait pour abusives parce que créant un déséquilibre significatif entre droits et
obligations des parties. Mais elles ne seront suivies d'effet qui si le gouvernement juge de
l'opportunité de les transformeî" en décrets.
Toute l'efficacité du système français contre les clauses abusives repose donc sur les
décrets d'application40s . Aussi, une clause d'un contrat peut-elle bien se révéler abusive selon la
lettre de l'article L.132-1 nouveau du Code de la consommation, soit l'article 3 de la directive,
mais elle n'en demeure pas moins licite tant qu'elle ne fera
pas l'objet d'un décret
d'interdiction406 . On voit donc à travers ce système que l'efficacité d'élimination des clauses
abusives est bien limitée en France.
La directive exhortant les Etats membres à prendre « les mesures nécessaires afin d'éviter
la présence de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un
professionnel» (Considérant n02l), il serait plus pratique que le législateur français remplace le
contrôle administratif par le contrôle juridictionnel. Cela collerait beaucoup plus à la réalité
économique et sociale, car la notion de déséquilibre mise en exergue par le texte communautaire
405 G. PA1SANT : « De l'eflicacité de la IUlle contre les clauses abusives» (à propos d'un arrêt de la cour de Paris
du 22 mai 1986 chronique. P. 300; Angéline-Florencc NGOMO: « Les clauses contractuelles abusives (Esquisse
comparative des droits camerounais ct français) », Rev. lur. Arr. 1992-1993 p. 140.
406 PAISANT: « De l'eflicacité de la IUlle contre les clauses abusives », Chronique précitée, p.300 ; A-F NGOMO
: article préci lé, p. 140.

403
s'apprécie peŒ rappor1 à l'économie générale du contrat d non par rapport l1 la clausè eUe-
m~1T1e
Or, le juge est le mieux placé pour apprécier ce déséquilibre « sign~fica1if». Ce qui ne
sera pas le cas pour le gouvernement qui, à notre avis, a mieux à faire que de s'introduiJe dans
la peau du juge
Le législateur fiançais semble avoll' entendu le souhait émis par la Commission
européerme dans sa diJective du 5 avril 1993. La portée du deuxième alinéa de l'cuticle L 132-
1 du Code de la consommation recormaIssant au seul gL)UVemement le pouvoiJ de déclarer
abusive une clause de contrat, après avis de la Commission des clauses abusives, est atténuée
par l'avant dernier alinéa dudit texte issu de la loi du 1el tevrier 19954(0 , Le texte de cct alinéa
recOImait désonnais au juge la possibilité de déclarer une clause de contrat abusive dès lors
qu'elle est de nature à rompre l'équilibre entre le professionnel et le consommateur
cocontractant. Les dispositions de cet alinéa sont ainsi écrites: <{ le contrat restera applicable
dary;; toutes ses dispositions autres que celles 'Jugées"
abusives s'il peut subsister sans
lesditès clauses» (article L. 132 -1 al. 8 C, Consom.).
La 101 du 1er févIier 1995 redonne ainsi au juge le pouvoir d'apprécier souverainement
le domaine relatif am, clauses abusives, car le déséquilibre significatif dont il est qucstion ici
est avant tout un problème de fait dont l'analyse relève purement et simplement du juge du
fond Après tout, la directive n'a-t-elle pas choisi la « bOllne foi» comme second élément
d'appréciation du caI'actère abllsifd'lllle clause dans un contrat? Il s'agit UJ d'une notion bien
comme en droit français tout comme en droit africain, tout particulièrement d'expression
française, Il tàudra maintenant proceder à l'analyse de ce second élément d'appréciation
2-2. La bOlUle foi.
Le texte de l'article 3 de la directive pmle de « l'exigence de bOlme foi» cornIlle un
second élément d'appréciation du caractère abusif d'une clause. Cet article introduit ainsi le
principe de la bonne foi (au sens objectif de J'expression) en droit européen. Ce concept,
familier aLLX droits continentaux est, en revanche, étranger aLLX systèmes juridiques des Pd)";';
407 Loi N° 95-96 du 1'" Février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contraIs cl régissant
diverses activités d'ordre économique et corrunercial. JO 2 Fév,-ier 1995.

404
de la Common Law et des pays scandinaves408 . Pour cette raison, il a été jugé nécessaire de
l'expliciter dans un «considérant» : il s'agit d'un critère supplémentaire qui fonctionne
comme «moyen d'évaluation gLobale des différents intérêts impliqués» dans un contrat et
qui suppose que le professionnel traite le consommateur de «façon Loyale et équitable» en
prenant compte de ses « intérêts Légitimes» (Considérant nO 16 de la directive 93-13 CEE).
Même avant l'adoption de la directive, la Commission avait déjà consacré ce critère
dans son règlement n03932/92 du 21 décembre 1992409 concernant l'application de l'article 85-
3 du Traité de Rome dans le domaine des assurances, domaine de prédilection des clauses
abusives. Ce règlement inclut l'exemption des accords entre entreprises concernant des
,
«conditions types des contrats d'assurance» et contient une liste «noire» de· clauses
interdites. On y trouve cependant une autre disposition permettant le retrait de l'exemption par
la Commission lorsque les « conditions types d'assurance », objets des accords, contiennent
d'autres clauses qui « créent au détriment du preneur d' assurance (donc du consommateur
dans le cas qui nous concerne) un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations
découlant du contrat »410
De toute façon, dans l'appréciation du caractère abusif d'une clause dans un contrat,
pour ce qui est du critère de la bonne foi, il faudra « prêter une attention particulière à la force
des positions respectives de négociation des parties, à la question de savoir si le
consommateur a été encouragé par quelque moyen à donner son accord à la clause (ce qui est
souvent le cas dans nos pays) et si les biens ou services ont été vendus ou fournis sur
commande spéciale du consommateur» (Considérant nOI6). Telle est donc l'explication que
la directive donne pour ce qui concerne l'appréciation du critère de bonne foi dans les clauses
contractuelles abusives.
Tout le problème est de savoir en quoi toutes ces analyses relatives auxdits critères
peuvent-elles être utiles au droit africain qui, pour l'instant, reconnaissons-le, est (presque)
vierge de toute législation ou réglementation relative aux clauses abusives (cf infra).
408 V. en ce sens M TENREIRO : Chronique précitée P.2.
409 Règlement CEE n03932/92 du 21 décembreI992. JOCE n° L 398 du 31 décembre 1992, p.7.
410 V. TENREIRO : Chronique précitée P.2; V. note n° 7.

405
3 - L'intérêt de l'analyse des critères d'appréciation
ci-dessus étudiés pour le droit africain.
L'étude des critères d'appréciation ci-dessus relevés peut être utile au droit africain à u
double point de vue: sur un continent vierge de toute législation ou réglementation appropriée e
la matière, cette étude donne l'occasion de connaître les clauses abusives à l'intérieur d'un ou dt
documents contractuels (3-1); de cerner leur côté subtil pour mieux appréhender leur régiIT
juridique (3-2).
3-1. La connaissance des clauses abusives
comme premier intérêt.
Si les législations protectrices des consommateurs sont quasi-inexistantes en Afrique, le
textes relatifs à la protection du consommateur contre les clauses abusives dans les contra
conclus avec les professionnels le sont davantage. S'agit-il d'une simple abstention du législate\\
dans œ domaine, ou d'une ignorance légitime de la matière?
Le motif du vide juridique importe peu. L'important est de pouvoir le combler par dt
textes appropriés adaptés aux réalités socio-économiques de chaque pays. Ceci nécessite ava
tout une connaissance réelle de la matière, une maîtrise des instruments juridiques susceptibles (
convenir au moule socio-économique du terroir. Or, pour bâtir un système juridique fiable, out
la prise en compte des réalités sociologiques, culturelles et économiques du milieu, l'exigen.
d'un ou des textes de référence ayant déjà fait leur preuve s'avère nécessaire. Et les text
français tout comme les textes communautaires n'en sont pas moins une référence. De tou
évidence, les rapports historiques qui lient les deux systèmes juridiques (africain et europée
justifient une telle référence.
D'ailleurs, l'analyse du système juridique des pays africains d'expression frança
témoigne de la large inspiration dont le droit français est la source. L'exemple de l'article 27 (
la loi du 10 août 1990 précitée) relatif aux clauses abusives et de l'article 35 (de la loi du
janvier 1978), soit l'article L.132-1 ancien concernant également les clauses abusives, en est L
illustration.
410 V. TENREIRü: Chroniquc précitée P.2; V. notc n° 7.

406
Ces deux textes, à quelques exceptions près liées à la rédaction, sont les mêmes quant à
leur portée411 • Même dans cette spirale d'inspiration, certains législateurs africains n'hésitent pas
à transposer purement et simplement certains textes français dans leurs systèmes juridiques
nationaux; ce qui, à notre avis, n'est pas une bonne chose, les contextes socio-économiques et
culturels n' étan t pas les mêmes.
Si l'inspiration à partir d'un système juridique plus complet est légitime pour tout pays en
phase de construction du sien, elle n'en demeure pas moins néfaste dès lors qu'elle se manifeste
par une transposition pure et simple du système étranger à l'intérieur de son système juridique
national. L'inadéquation des réalités locales avec le système transposé met en péril l'existence
même du droit avec en prime, à plus ou moins long terme, une léthargie des textes transposés,
leur application s'avérant quasiment impossible. Ainsi, malgré la présence des textes, on aboutira
à un système de non droit ou d'absence totale de droit, l'autonomie juridique de l'Etat en cause
étant pratiquement entamée.
C'est justement ce qui se passe dans les systèmes juridiques africains à l'intérieur desquels
coexistent deux réalités: les réalités françaises (du moins pour les pays d'expression française) à
travers les textes transposés et lesquels sont inapplicables parce qu'inadaptés, et les réalités
africaines sans textes appropriés pour les régir. Or, ce fonctionnement hybride n'est pas un idéal
juridique de base permettant une mise en place effective des textes susceptibles de protéger de
façon efficace et pragmatique les consommateurs locaux, en particulier dans le domaine relatif
aux clauses abusives. Ce résultat, seule une inspiration intelligente permet de l'atteindre. Et les
textes ci-dessus analysés sont bien là pour mettre le législateur de chaque pays à l'épreuve.
Une autre approche nous amène aussi à trouver dans ces textes un intérêt évident pour les
législations africaines. A l'heure du libéralisme ambiant dans le monde, l'expérience des grandes
puissances économiques a montré que l'indépendance juridique n'est plus à la mode,
l'internationalisation des échanges incitant à une harmonisation des législations,412 voire à une
vue d'ensemble des problèmes socio-économiques sous un même angle juridique pour ce qui
concerne leur solutioll.
'"j
,
411 cf supra: voir §I-, A- Définition dc la clause abusivc. Sur cc point voir égalcmcnt A-F NGOMO : articlc
précité P.138.

407
Ainsi, certains problèmes socio-économiques se manifestant dans un pays, voire dans une
région donnée, peuvent trouver leurs solutions dans un autre pays ou dans une autre région ayant
déjà subi l'épreuve. Tout est question de l'usage qu'on en fait. Le problème des clauses abusives
répond à cette logique. Très présentes dans les contrats conclus entre les professionnels et les
consommateurs locaux, elles ont pour auteurs les compagnies européennes ou américaines basées
en Afrique. Or, de telles clauses sont réputées non écrites dans leur pays d'origine413 . La
meilleure façon de les combattre serait de s'inspirer des textes répressifs en vigueur dans les pays
d'origine des auteurs. Dans cette logique, les textes français et européens peuvent bien répondre
aux espérances des consommateurs locaux en ce qu'ils permettent d'appréhender le régime
juridique des clauses abusives dans les rapports entre professionnels et consommateurs.
3-2. La connaissance du régime juridique des
clauses abusives comme second intérêt.
Nous avons parlé dans le développement précédent de la clause réputée non écrite. Elle a
aujourd'hui conquis de manière indiscutable son droit de cité dans le domaine du droit des
contrats414 , du moins dans les pays économiquement avaHcés. Plus qu'une simple sanction, elle
participe à une forme d'interventionnisme positif plus ou moins étendu destiné à limiter la liberté
des parties et à influencer sensiblement le contenu du contrat415 en modulant les excès dans un
intérêt général.
Réputer une clause non écrite procède d'une volonté délibérée416 de faire respecter une
norme afin de garantir un minimum de sécurité contractuelle417 • Encore faut-il pouvoiI
l'appréhender, la distinguer des clauses normales à l'intérieur des documents contractuels au ca~
où le contrat est matérialisé par un écrit. Et c'est là justement que rentre en jeu l'intérêt dE
l'analyse ci-dessus 'réalisée pour le droit africain, car «cette forme moderne d'expression dE
412
L'intégration économique régionale ou sous-régionale incite à une plus grande harmonisation des texte
relatifs à la protection des consommateurs, C'est notamment le cas au sein de l'Union Européenne où 1
Commission s'y attèle dans cette tâche.
41) Vincent COTIEREAU« La clause réputée non écrite », lCP éd. (G.), l, doct, 3694, p. 315 et s. Article L.13:
1 al.6 du nouveau Code de la Consommation. ; « Considérant» 11°21, Directive CEE 93/13 du 5 avril 1993.
,114 Voir COTIEREAU : article précité P, 315.
415 Voir en matière de baux d'habitation, L n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 4; en matière de contrat de société, c.',
art. 1843-5 al. 2, 1844-1 al. 2, 1844-10 al. 2; voir aussi L. 24 juillet 1966, art. 42 al. 4, art. 56 al. 5, art. 57 al. 3,
art. 58.
416 l-L. I3ERGEL : Théorie générale du droit, Dalloz 1985,2 è éd, P.58.
417 C.Civ. art. 1843, in fine.

408
l'interdit connaît aujourd' hui une éclosion de nature à légitimer une approche globale et
h '·
41Rd
J
.
synt etique»
e a notlon.
Autrement dit, pour réputer une clause d'abusive, la prise en compte de certains éléments
tant objectifs que subjectifs est nécessaire, éléments difficiles à comprendre dès lors qu'on n'a
pas suffisamment d'expérience dans le domaine de la réglementation économique, c'est-à-dire la
réglementation mettant en relief les relations entre les personnes physiques ou morales
(professionnels) de droit privé et leurs cocontractants clients ou acheteurs (consommateurs).
D'où la nécessité de s'inspirer des expériences aussi bien législatives, réglementaires que
jurisprudentielles, les clauses abusives les plus usitées étant le plus souvent insérées dans les
contrats standards rédigés par les mêmes professionnels de par le monde.
Si l'appréhension de la clause abusive dans un contrat relève de l'appréciation souveraine
du juge ou de l'organe compétent spécialement installé à cet effet419 , il va sans dire que de
nombreuses interrogations peuvent apparaître quant à son régime juridique.
La clause abusive, donc réputée non écrite, relève-t-elle de la notion classique et
conservatrice de l'ordre public politique420 ; au nom duquel le législateur s'autorise, en vertu de la
défense de l'Etat, de la famille ou de la morale, à donner un caractère impératif à une règle ayant
pour objet d'interdire aux particuliers de conclure certains contrats ou de stipuler certaines
clauses, ou de la notion contemporaine de l'ordre public englobant l'ordre public social dit de
protection et l'ordre public de direction '1421 La réponse n'est pas aussi simple qu'on peut
l' imaginer.
En effet, la chambre commerciale de la Cour de cassation répute non écrite la clause
attributive de compétence insérée dans un contrat conclu entre un commerçant et un non-
422
commerçant, et ce quelle que soit la partie qui s'en prévaut
. Dans le même temps, la Cour
d'appel de Paris décide du contraire, considérant que seule la partie non commerçante peut se
m COlTEREA U : arlicle précilé P. 315.
41')
Même si la loi nouvellc (Loi n095196 du Ir' févricr) consacre implicilemcnl le pouvoir du jugc quant :1
l'appréciation du caraclère ahusif(cf. les articles 1156111161,1163 ct 1164 C.Civ.), c'esltoujours la commission
des clauses ahusives qui demeure l'organe compélent chargé de recenser les clauses ahusives dans les contrats
?
conclus entre professionnels ct consommateurs en France.
1
420 V, Ph. MALAURIE cl L. A YNES : Droit civil, les obligations, éd. CUJAS, 1992, P.2g0 ; éd. 1994-95, n° 527
s, p. 290 s.
•121 COlTEREAU : arlicle précité, P.317.
<\\22 Casso Com. 2gjuin In3; Bull. Civ. IV, nOlg9.

409
prévaloir des dispositions de l'article 48 du nouveau code de procédure civile en qualité de
bénéficiaire exclusif de la protection423 .
Les deux juridictions défendent chacune une position, La première défend l'organisation
et le fonctionnement du service de la justice, c'est-à-dire l'ordre public politique. La seconde, en
revanche, se ré/ère à l'ordre public contemporain social de protection pour défendre le faible
424
contre le fort
.
42S
Si l'hésitation jurisprudentielle
est légitime, elle n'est en revanche pas tout à fait
justifiée, car il est « aussi vain qu'inutile de vouloir rattacher» la clause abusive donc « réputée
non écrite à un type particulier d'ordre public »426. Par exemple. en réputant non écrites les
conditions ou les charges grevant un acte de disposition à titre gratuit - ceci n'entre pas vraiment
dans notre propos, mais cela nous aidera à comprendre la suite - lorsqu'elles sont impossibles,
immorales ou illicites, l'article 900 du Code Civil emprunte à l'ordre public classique mais cette
m
fois-ci en tant que défenseur de la famille et de la morale
. Protéger la famille impose d'interdire
les clauses exigeant du gratifié qu'il renonce à une succession non encore ouverte42~ ou à son
429
droit de demander le partage des biens indivis
comme celles ayant pour effet de priver les
410
héritiers du délai légal pour faire l'inventaire et délibérer
ou de limiter le d!'oit d'un héritier
411
réservataire de disposer de sa réserve
.
m
En revanche, lorsqu'il intervient en matière de louage d' immeubles
, de contrat de
411
414
construction de maisons individuelles
, ou de contrat d'assurance
pour remédier aux abus
m Paris, 4"cl1. A. 18mai 1977, lCP 78, éd. G. II, 18877, note 1. A.
-12-1
L'ordre
public
classique,
traditionnellement
négatif parce
que
source
d'interdictions
s'oppose
[
l'interventionnisme positif de l'ordre publie contemporain soucieux de déterminer le contenu du contrat dt
manière à éviter le sacrifice de l'intérêt général au profit des intérêts particuliers.
La distinction est souvent diflicile à mettre en oeuvre. V. Sur ee point l-L AUBERT et Ph. BIHR : la locatiOl
d'habitation. SIREY 1990, p. 217 : «Protéger les faibles ou diriger l'économie sont des ohjectifs distincts. Mai:
dans l'application, les deux raisons d'intervenir se mêlent si bien quc des mesurcs ohjcctivement identique:
Ilcuvelll avoir, suivant le cas, "une ou l'autre finalité; de même mesure unique les cumulc parfois ».
-125 L'hésitation jurisprudcnticllc ticnt surtout à l'objet de la dérogation prévue à l'articlc 4X du nouveau code J.
Ilrocédure civile limité à la compétencc tcrritoriale.
-12(, COTrEREAU : article précité P.317.
-127 Ibid.
-12S Casso Civ. 1"'< 30 avril 196X.
-12') Casso Rép. 25 novcmbre 1940 D.H. 1940209.
-130 Casso Rép. 1<1 juin 1942 D.C. 1943, (10, notc J. C.
-1q Casso Civ. Ih <, 20 novcmbre 1955. Bull. Civ. 1, n0423.
1'2 Décrct 30 scptembrc 1953; art.35 ct 35-1; C. Rural, art. LAI 1-1 et s., L. 6 juillet 19X1J, art. 5.
1.1' C.COllstL ct hab., art. L 231-3.
-1'l C. Ass, Art. L 21 1-6.

410
susceptibles d'être commis à l'occasion de la formation pUIS de J'exécution de contrats
d'adhésion, le législateur s'inscrit dans le cadre de l'ordre public social de protection. S'il vient
à réputer non écrite la clause tendant à faire renoncer la caution au bénéfice de subrogation aux
droits, hypothèq ues et privilèges du créancier435 , son interdiction dépasse la simple protection
individuelle de la caution aux fins de garantir le bon fonctionnement du crédit dans le cadre d'un
436
ordre public de direction économique
.
Au vu de cette analyse, on voit que l'ordre public a un contenu «à géométrie variable »
dont le seuil d'analyse est laissé à la discrétion du juge. Ce que ne manquent pas de nous révéler
les critères ci-dessus étudiés. En ne voulant pas enfermer la clause abusive, donc réputée non
écrite, dans un ordre public437 déterminé, les législateurs aussi bien français qu'européen ont
voulu laisser une marge d'appréciation au juge. Ce qui veut dire par là que celui-ci peut soulever
d'office un motif de nullité tiré du caractère abusif d'une clause d'un contrat qui lui est soumis.
Pour les Etats africains où de telles dispositions sont inexistantes, il s'agit là des
remarques dont l'apport n'en sera pas moins positif pour les lé~islations futures, d'autant plus
que leurs systèmes en sont vierges. De toute évidence, l'intérêt de toutes ces analyses pour ces
pays ne sera compris que si l'on étudie le régime, si régime il y a, des clauses abusives en Afrique.
§II : Le régime des clauses abusives en Afrique.
Il serait vain, voire inutile de vouloir rechercher dans les législations des pays africains des
textes de loi spécialement votés pour interdire les clauses abusives dans les contrats conclus entre
~3) CCiv. ar!. 2037.
m La réforme des procédures civi les d'exécution avec les arliclesl244- 1 et 1244-3 Cciv., parlant du postulai que
les siluations de surendellement constituent à l'échelon national un frein à la consommation et un danger pour
l'économie toule entière, s'inscrit dans le même sillon. V. égalemcnt ['article 1944-1 al.2 CCiv. qui répute non
1
écrites les stipulations allribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société en l'exonérant de la totalité
i
des pertes. La protcction de l'associé exclu, comme la sanction de l'associé totalitaire, constituent autant de
moycns de préserver la formule sociétaire dont l'économie de tout Etal a besoin pour prospérer.
m L'article L 132-1 al.9 déclare «d'ordre public» Ioule les disposilions dudil arlicle. Ce qui signifie que les
parties à un contrat ne pourronl y déroger par la loi contractuelle.

411
professionnels et consommateurs. A quelques exceptions près, les systèmes juridiques africains se
caractérisent par un vide législatif et réglementaire en la matière (A). Ce qui Il' est pas sans
conséquences dans les rapporls professionnels-consommateurs (B).
A - Clauses abusives et absence de textes régissant le
domaine en Afrique.
Les exceptions auxquelles nous venons de faire allusion se trouvent être celles certaiœ
Etats dans lesquels les législateurs ont eu la bienveillance de voter des textes relatifs i
l'interdiction des clauses abusives dans les contrats entre professionnels et consommateurs. Avan
l'étude de ces exceptions dans le système juridique africain (b), il nous faut au préalable produir(
les preuves des allégations relatives au "vide juridique" qui caractérise tous les autres Etat:
africains (a).
a) Les preuves du vide juridique relatif aux clauses
abusives en Afrique
Trois sortes de preuves nous permettrons de situer notre analyse et d'étayer nos propo
pour ce qui est du vide législatif et réglementaire relatif aux clauses abusives en Afrique.
La première et non des moindres se trouve être celle des Nations Unies. En invitant le
Etats membres, en particulier les Etats en voie de développement, donc les Etats africains,
prendre des mesures de nature à « protéger les consommateurs des abus contractuels comme le
contrats léonins, l'exclusion de droits essentiels dans le texte des contrats ou l'imposition d
conditions de crédit exorbitantes» (Principe N° 19 des Nations Unies), les rédacteurs de
principes des Nations Unies pour la protection des consommateurs venaient de faire par ce text
un constat important: celui du vide juridique caractérisant la plupart des pays membres.
Les principes directeurs, dans leur ensemble, sont conçus en vue d'aider les pays du Tier~
Monde à asseoir dans leurs systèmes juridiques des législations protectrices des consommateu:
locaux. Ils
sont en eux-mêmes une preuve évidente et concrète du "vide" ou de la caren<
législative ou réglementaire qui caractérise la plupart de ces pays, dont les pays africains.
Pour ce qui est des clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels,
consommateurs, les dispositions du principe N° 19 des Nations Unies constituent une preuve 1

412
cette carence législative et réglementaire des pays du Tiers-Monde, et notamment les pays
africains.
La seconde catégorie de preuve est constituée par les résultats des enquêtes menées dans
différents pays africains auprès des instances locales. Les résultats des enquêtes, qui ne sont rien
d'autre que la réunion des informations fournies par les associations locales des consommateurs
et par les divers ministères et administrations concernés, mettent en relief l'état de la protection
juridique des consommateurs dans les pays cités.
Que ce soit en Afrique de l'ouest4:J8, de l' Est4:J9, Centrale440 ou Australe441 , l'état de la
situation juridique du consommateur est le même: le consommateur ne bénéficie d'aucune
protection juridique sur le plan général, pas plus qu'il n'en bénéficie dans le domaine particulier
que constitue celui des clauses abusives dans les contrats conclus avec les professionnels. Ce qui
constitue, plus de dix ans après le vote des principes directeurs des Nations Unies pour la
protection des consommateurs, un constat amer.
La troisième catégorie de preuve est l'oeuvre des organisations de consommateurs
africaines ainsi que certaines organisations tant nationales qu'internationales concernées par la
cause des consommateurs africains. Réunies en Atelier Régional le 1èl, 2 et 3 juillet 1992 à Dakar
(Sénégal) et lassés de l'attentisme des Etats africains pour ce qui est de la mise en place des
m En Afrique de l'Ouest, les pays concernés sont: le Nigéria, le Ghana ct le Mali.
- au Nigéria : les in!ormations ont été fournies par les deux plus grandes associations de consommateurs du pays:
« CEPCON » et « Consumers Union », ainsi que par le Ministère Fédéral de la Santé, de l'Alimentation et des
Produits Pharmaceutiques.
- au Ghana: les inlormations ont été fournies par «Consumers Associations», l'organisation locale des
consommateurs.
- au Mali: les informations ont été délivrées par l'ASCOMA (Association des Consommateurs du Mali).
Source d'information V. Ms Edith KUDA MUSHORE : « The state of consumer protection legislation in
Africa », IOCU, Africa Transition Programme. The HAGUE, The Netherlands February 1994 P.9 et s.
mE. KUDA MUSHORE : op. cil. p. 21 et s. En Afrique de l'Est, les informations concernant l'état de la situation
du consommateur ont été tournies par: « Malawi Bureau of Standards» pour le Malawi; « University of Dar es
Salaam» pour la Tanzanie; «The Uganda Consumers Protection Association» ct «Action tor Developpement»
pour l'Ouganda; « Mapbin chan» pour l'Ile Maurice.
~4D Ibid P. 32 ct s. En Afrique Centrale, l'information sur la situation juridique du consommateur au Zaire a été
fournie par « ACRIDI », organisation locale de consommateurs.
441 Ibid., p.39 ct s. En Afrique Australe, sont concernés par l'enquête:
- le Botswana; source d'information: «The Departement of COllsumers Afülirs in the Ministry of Trade and
Commerce» ;
le
BOPHUTHATSWANA
source
d'information
«The
Consumer
Council
of
BOPHUTHATSWANA» (Hereinarter CCS) ;
- la Namibie: source d'information: « Namibian Consumer Lobby» (NCL)
- Afrique du Sud (South Arrica) : source d'information: The SACC (South Arrica Consumer Council).

413
législations protechices des consommateurs inspirées des Principes des Nations Unies, elles
n'ont pas hésité à voter des résolutions ou recommandations allant dans ce sens. S'agissant
des clauses abusives dans les contrats, les organisations participantes ont exprimé quatre
recommandations invitant les gouvemements africains à :
1) « prendre des mesures visant à supprimer dans les contrats d'adhésion les clauses
abusives qui contrevierment aux intérêts du consommateur et à inclUIe les clauses qui
présentent leurs droits essentiels}) ;
2) «rendre nulle toute loi et toute clause dans un conh'at qui enfreint le droit du
consommateur à poursuivre une société en dommages-intérêts et à recourir à l'exécution
forcée de celle-ci» ;
3) «créer auprès des sociétés détenant le monopole pour la fourniture des services
essentiels un système de contrôle indépendant qui assure par aillems la révision des clauses,
services, et prix et veiller à ce que la fourruhlre de services et biens essentiels ne soit
suspendue pendant la procédure contentieuse» ;
4(' «prendr'e les mesures obligeant que tout contrat d'adhésion soit établi en un
langage clair, en gros caractère d'imprimerie, précisant les droits et obligations du
consommateur, ainsi que ceux du vendem, producteur de biens et prestataire de services »~42 .
Au-delà de ces preuves qui sont loin d'éh'e démenties, il nous reste une chose: étudier
les exceptions qui pennettront de confllmer la règle.
b) Les exceptions au "vide législatif" africain en matière
de clauses abusives.
De ce vide juridique qui caractérise tout le continent africain en matière de législation
protectrice du consommateur et plus particulièrement dans le domaine relatif alLX clauses
abusives, seuls trois Etats dérogent à la règle pour la simple raison qu'ils possèdent chacun
dans sa législation commerciale, des textes protégeant le consommateur contre les clauses
abusives dans les contrats conclus avec les professionnels, 11 s'agit du Cameroun, de la
TanzaJùe, et du Zimbabwe,
442 Pour ces résolutions, voir « Atelier Régional: Principes Directeurs des Nations Unies pour la Protection du
Consonunateur, Quelle application en Afrique », Consommation & Développement, Bull. d'Info, IOCU-ENDA
N° 8, Novembre 1992, P,6-7,

414
Au Cameroun, comme nous avons déjà eu à le souligner dans nos précédents
développements, le législateur a, dans la loi du 10 août 1990, consacré Il articles à la
protection du consommateur. Parmi ces Il articles, l'une des innovations essentielles de cette
loi est l'interdiction des clauses abusives dans les contrats conclus entre professiormels et
consommateurs443. L'article 27 de la loi répute «non écrites les clauses des contrats conclus
entre professiormels et consommateurs et qui sont en fait imposés aux consommateurs et
confèrent un avantage excessif aux protèssiormels en leur permettant de se soustraire, pour
partie ou en totalité, à leurs obligations légales ou contractuelles ».
En Tanzanie, suite à
certains scandales commerciaux444 dont les retombées furent
dramatiques dans le pays, le législateur vota une loi dans le but de protéger et les commerçants
et les consommateurs. Cette loi destinée à rétablir l'équité et la loyauté dans les pratiques
commerciales comporte en son sein des dispositions relatives aux clauses abusives dans les
contnts conclus entre professiorUlels et consommateurs. Ces dispositions prévoient que {< les
contrats de forme standard doivent être enregistrés devant le Comité des Pratiques
443 Pour le commentaire de cette loi, V. J-M NYAMA, article précité P.2I.
444 Trois scandales majeurs amenèrent le gouvernement tanzanien à céder aux pressions des associations de
consommateurs et à faire adopter une loi par le parlement pour la protection des consommateurs. Les trois
scandales sont les suivants:
1- Une grande compagnie commerciale a été surprise en train de vendre des conserves de tomates dont la date
limite de consommation était largement dépassée. Hormis les lois coloniales archaïques, le gouvernement ne
trouvait dans le système juridique actuel de textes de loi permettant la répression de telles infractions. La seule
amende prévue pour ce genre d'infraction s'élevait à 100 dollars US.
2- L'autorité de chemin de fer était capable de démentir toute responsabilité vis-à-vis de ses clients passagers
parce que c'est un service public.
3- L'autorité nationale de distribution d'eau a fourni pendant six mois de l'eau non traitée. Conséquence:
plusieurs personnes tombèrent malades, certaines en sont mortes. Dans le pays, il n'y avait aucun recours légal
contre les responsables de telles pratiques donullageables pour la population.
Toutes ces révélations ont eté fournies par Mr. Jonathan NJAU, responsable d'une association de consommateurs
1
en Tanzanie, lors de ('assemblée plénière 3 de l'IOCU à Hararé (Zimbabwe). Cf. Pour les déclarations: The legal
Framwork Consumer Protection, in Plenary 3. Document publié à cet effet par le Bureau Régional de l'IOCU
basé à Hararé, p.13.

415
Commerciales, lequel a l'obligation de les examiner pour voir s'ils sont raisonnables »445.
Autrement dit, le Comité des Pratiques Commerciales en Tanzanie examine tous les
contrats standards ou d'adhésion pour voir si les clauses qui y sont insérées sont des clauses
normales, équitables pour toutes les parties au contrat.
Au Zimbabwé, deux récentes innovations législatives ont été introduites dans le système
juridique national en vue d'aider les consommateurs locaux à se défendre eux-mêmes dans leur~
rapports avec les professionnels. Partant du fait que la loi contractuelle n'est pas toujours un
modèle d'équité et qu'il est souvent très difficile à un consommateur moyen de triompher dan~
une affaire où les termes du contrat sont très injustes, la Commission de Développement des Loi~
au Zimbabwé persuada le gouvernement d'introduire un projet de loi relatif à la protection de~
droits contractuels des consommateurs. Après adoption, la loi offre deux possibilités de
rééquilibrage des prestations contractuelles dans les rapports professionnels-consommateurs:
- les parties à un contrat de consommation pourront demander au tribunal un réexamen
des termes du contrat si ceux-ci s'avéraient injustes pour l'une des parties. Le Tribunal pourra
donner suile en annulant le contrat (ou les clauses litigieuses) ou en imposant seulement en partie
son cxécuLÎon.
- le tribunal peut se saisir d'office pour réexaminer les termes d'un contrat qu'il juge
injusle.
- la loi comporte en annexe une liste des clauses abusives
lesquelles
pourront
automatiquement être qualifiées d'abusives. Il s'agit là d'une liste «noire », les ministres
concernés ayant le pouvoir d'ajouter d'autres clauses à la liste annexée, sur ordre, après
446
consultations
.
La possibilité offerte aux divers ministres concernés en vue d'ajouter à la liste originale
une autre catégorie de clauses contractuelles, montre que la liste annexée n'est pas exhaustive. S;
on ajoute à cette démarche les pouvoirs considérables reconnus au juge dans l' interprétation de~
conventions entre les parties de droit privé, on en arrive à la conclusion selon laquelle lé
W
Ibid: Les points essentiels de la loi tanzanienne furent aussi rapportés par MI'. J. NJAU. Cette toi proteetrio
des consommateurs est la conséquence directe des scandales ci-dessus énumérés.
~~(, Ces innovations du législateur zimbabwéen ont été rapporlées par le Président de la Commission d·
Développement des Lois de l'Assemblée Nationale zimbabwéenne.

416
législateur zimbabwéen a mis en place un arsenal législatif capable de lutter efficacement contre
les clauses abusives rédigées par les professionnels véreux et sans scrupules.
Si les législateurs camerounais et zimbabwéen font confiance au juge pour régler le
problème posé par les clauses abusives dans les contrats conclus entre les professionnels et les
consommateurs, il en va autrement pour le législateur tanzanien, lequel confie à une Commission
le soin de les déclarer anormales au moyen d'un examen des contrats standards ou prérédigés, et
que l'on appelle communément contrat d'adhésion. Cette procédure n'est pas très différente de
la française, procédure dans laquelle le législateur laisse à la Corrunission des clauses abusives le
soin de les recenser dans le circuit commercial et de faire des recommandations au gouvernement
qui, ensuite, se chargera de les déclarer non écrites au moyen d'un décret pris en Conseil d'Etat.
Mais il subsiste tout de même deux petites différences entre ces deux procédures. La
première différence réside dans les méthodes de recherche des clauses abusives. Alors que la
Corrunission française doit aller à leur recherche, la loi tanzanienne, elle, fait obligation aux
professionnels de soumettre tous leurs contrats prérédigés ou standards à la Corrunission des
pratiques conunerciales qui, ensuite, se chargera d'en examiner le bien fondé des clauses qui y
sont insérées.
La seconde se situe dans les pouvoirs. Alors que la Corrunission des clauses abusives en
France n'a qu'un pouvoir de recommandation, la Corrunission tanzanienne elle, a un pouvoir
d'élimination des clauses abusives. Ce qui est un pouvoir non négligeable, donc dissuasif vis-à-vis
des professionnels. Ainsi, en France, la Commission peut bien faire des recommandations
relatives aux clauses abusives, mais celles-ci n'en demeurent pas moins licites tant que le
gouvernement ne les a pas rendues nulles par décret. Il s'agit là d'une action limitée, donc moins
dissuasive que ne l'est l'action tanzanienne.
Mais ce système français d'élimination des clauses abusives vient d'être aménagé par la loi
na 95-96 du 1cr février 1995447 destinée à intégrer la directive communautaire na 93-13 du 5 avril
1993 relative aux clauses abusives dans le droit français. Le nouvel article L. 132-1 du Code de la
consommation reconnait désormais au juge le pouvoir autonome de déclarer abusive une clause
1
W
Loi n° 95-96 du 1cr février 1995, lep 1995, éd. G. 67286.

417
d'un contrat dès lors qu'elle cst de nature à déséquilibrer les prestations réciproques entre ur
professionnel eL un consommatcur.44S
Bien que n'usant pas des mêmes procédés de lutte contre les clauses abusives, ces troi~
législations d'exception en Afrique ont un point commun: elles semblent toutes viser uniqucmen
les clauses limitatives de responsabilité et les clauses de non-responsabilité, laissant de côté Ic
clauses pénales. Quand on connaît l'habileté dont font preuve les professionnels dans la rédactiOl
des contrats d'adhésion, il rcste fort à penser que l'appréciation du caractère abusif des clause
insérées dans ces contrats ne manquera pas de susciter d'énormes divergences.
S'agissant des clauses pénales, il est d'usage lorsque l'on rédige un contrat, de prévoir le
obligations qui en découlent en cas d'inexécution ou de retard dans l'exécution par l'une de
parties au contrat. Ces manquements sont souvent sanctionnés par une clause pénale qui fixe pa
avance le montant de l'indemnité à payer par la partie fautive. Cette façon d'agir bénéficie encor
dans les pays concernés, tout comme dans les autres pays africains, d'une liberté contractuell
quasi totale, en ce sens que l'évaluation forfaitaire fixant les dommages-intérêts ne peut, e
principe, ni être amoindrie, ni augmentée pour raison d'équité449 .
Si l'on regarde du côté du droit français, on constate qu'il ne manque pas de dispositior
dans ce domaine. L'article 1152 du Code civil dispose à cet effet que «lorsque la COll ventio
porte que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme (d'argent) à titre a
dommages et intérêts, i/ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ».
Le juge, dans cet exercice a, à sa disposition, un autre texte lui permettant d'interven
pour réguler les excès. Il s'agit de l'article 1231 dudit Code qui dispose: « la peille peut êtJ
modifiée par le juge lorsque l'obligation principale a été exécutée en partie ». Mais il ne s'a§
là que d'un texte supplétif qui peut se révéler inefficace dans deux cas : lorsque l' obligatic
principale est insusceptible d'exécution partielle et lorsque la clause pénale a été stipulée 1
prévision d'une exécution partielle450. Ce qui signifie par là que l'article 1231 est d'une port
limitée et ne pourra de ce fait contrer l'intangibilité des clauses pénales posée par l'article I l
c.civ. Il ne pourra donc éviter certains abus dans ce domaine.
44H Sur l'analyse de celle consécration législative du pouvoir du juge dans l'élimination des clauses abusive~
infra: « l'interprétation du contrat [Jar le juge », à la lin dudit chapitre.
449 Voir en cc sens J-M NY AMA : commentaire précité P.21.

418
Sans doute le silence des textes africains dans ce domaine s'explique par le fait que ces
clauses sont souvent insérées dans les contrats conclus entre professionnels eux-mêmes et ne
peuvent donc de ce fait exister dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs.
4
Mais la relativité de la notion de professionnels et de non-professionnels ou consommateurs 'i1
incite à plus de prudence, de finesse et de prévoyance dans la rédaction des textes. Si l'on veut
éviter des désagréments aux consommateurs, le problème des clauses abusives doit être pensé de
façon beaucoup plus large, et sous divers angles4'i2. C'est d'ailleurs l'orientation que donne le
principe n019 des Nations Unies, lequel ne s'est pas contenté de désigner une seule catégorie de
clauses abusives.
L'assurance d'une véritable protection du consommateur contre les clauses abusives
passe nécessairement par ce canal là. Les textes camerounais, tanzaniens et zimbabwéens ne sont
donc que des débuts de solutions. Mais ils ont quand même le mérite d'exister car, par leur
présence, ils limitent les dégâts. Ce qui ne serait pas le cas avec un "vide juridique"
pur et
simple. Ils sont cependant des exemples conséquents que les autres législateurs se doivent de
'suivre, quitte à choisir les solutions adéquates adaptées à leur système éC0nomique ainsi que les
organes compétents habilités à se charger de la recherche et de l'élimination des clauses abusives
dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs.
450 J.-M. NY AMA : commentaire précité P.. 21.
451
Les notions de « professionnels» et de « non-professionnels» ou « consommateurs» sont diversement
interprétées par la jurisprudence. La notion de non-professionnel ou consommateur n'est plus, apparemment,
interprétée de façon étroite. Elle a connu une évolution jurisprudentielle, laquelle résulte en particulier d'un arrêt
de la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation du 28 avril 1987 (D. 1988. 1, note DELEBECQUE ; D. 1987,
somm. 455, obs. Aubert; JCP 1987, II, 20893, note Paisant) qui a considéré une société commerciale comme un
consommateur habilité à se prévaloir des textes de 1978 relatifs aux clauses abusives. V. 1986 IR 393 obs. Aubert.
On pourrait donc dire que désormais c'est la conception la plus large qui prévaut en jurisprudence: la notion de
consommateur atteindrait jusqu'au professionnel dès lors que ce dernier contracterait hors de la sphère habituelle
d'activité. sur ce point V. G. PAISANT : « Les nouveaux aspects de la lutte contre les clauses abusives» Chrono
Précitée P.253 et s. ; 1. HUET: « Les hauts et les bas de la protection contre les clauses abusives» art. Précité
P.271 et s.; B. MARTIN: « Le consommateur abusif» D. 1987 Chrono P.150 et s.; Charles GIAUME : « Le non-
professionnel est-il un consommateur? », P.A. 1985 n° 88 p. 25 et s.; V. Casso Civ. 1ère 14 mai 1991 JCP 1991, II,
21763, note PAISANT; P.A. 1991 n° 81 du 8 juillet 1991 note Th. HASSLER; C. A. Besançon 10 juin
1994,
Rev. Contrats-Concurrence-Consommation, Janv. 1995, p. 18. Mais cette extension jurisprudentielle de la qualité
de consommateur au professionnel a connu un rebondissement. La Cour de Cassation à travers sa première
Chambre civile a encore opéré un revirement en affirmant dans un arrêt du 24 novembre 1993 (J.c.P. 1994, éd.
E., II, 593, note L. LEVENEUR ; Contrats, Conc., Consom. 1994, Chrono 3, obs. LEVENEUR ; D. 1994, Somm.
P. 236, obs. PAISANT) que le caractère abusif d'une clause limitative de garantie « ne pouvait être invoquée à
propos d'un contrat conclu entre professionnels ». Celle nouvelle jurisprudence de la première Chambre civile a
été confirmée dans ses récents arrêts du 24 janvier 1995 (lC.P. 1995, éd. E., pan. 355 ; Contrats, Conc. Consom.
1995, comm. 84, note LEVENEUR; D. 1995, p. 327, note PAISANT; Bull. Civ. l, n° 54.) et du 21 lëvrier 1995
(J.c.r. 1995, éd. G., II, 22502 ; J.c.P. éd. E. 1995, II, 728).
452 Cr. NY AMA : commentaire précité P.21.

419
B - Les suites logiques de l'absence de textes ou la
manifestation des clauses abusives dans les contrats
conclus entre professionnels et consommateurs.
L'importance de l'étude exige que l'on s'intéresse tout d'abord au domaine de la
manifeslation des clauses abusives (a). Nous nous occuperons ensuite des victimes de ces abus
contractuels (b) afin de bien mettre en évidence leur degré de nuisance chez les consommateurs.
a) Le domaine de la manifestation des clauses abusives en Afrique.
Il faut d'entrée souligner que les clauses abusives touchent tous les secteurs de
l'éconOlTlle en Afrique. Elles se manifestenl aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur
public.
Dans le secteur public, les abus se rencontrent essentiellement dans quatre servIces
l'Eau, l'Electricité, le Téléphol)e et le Transport. Tous ces services ont partout ailleurs le statut
de sociétés d'Etat dont le but esl de satisfaire les besoins essentiels des usagers. Malgré leur
statut, des sociétés n'en sont pas moins différentes de celles du secteur privé en ce qui concerne
l'insertion des clauses abusives dans les contrats qu'elles proposent à leurs abonnés.
Disposant d'un monopole d'exploitation et de distribution de ces services essentiels, elle~
n' hésitent pas à profiter de leur position dominante pour abuser contractuellement de~
consommateurs453 . Aussi, trouve-t-on souvent dans leurs formulaires d'abonnement des c1ause~
draconiennes, inacceptables, donc injustes pour les usagers. Ce qui est d'ores et déj~
incompatible avec leur statut orienté plus vers la satisfaction des besoins vitaux de la populatior
donc de l'intérêt général au sens le plus large possible de l'expression. Or, qui dit intérêt général
dit souplesse dans la gestion du service orienté vers ce but, cet objectif. Mais la rédaction de:
contrats d'abonnement dans ces sociétés n'est pas un modèle du genre, elle prouve simplement le
contraire. Les exemples ne manquent pas pour illustrer nos propos.
m cr. Le « séminaire régional: Dévaluation: An 1. Résolutions ct Plan d'action» en leur point III relatir al
services publics (Eau, Electricité, Téléphone, Transport), in «Consommation-Développement», Bull. d'Inr
Trim. publié par OIC-ENDA, W spécial Mai 1995 P. V.

420
Si l'on prend le cas des sociétés d'exploitation et de distribution d'Eau, de l'Elcctricité et
du Téléphone, on constate que, dans presque tous les pays africains, où elles jouissent d'ailleurs
d'un monopole absolu, elles intègrent dans leurs formulaires d'adhésion ou d'abonnement des
clauses ou stipulations invraisemblables, telles que l'obligation pour un nouvel abonné occupant
les mêmes locaux de payer les arriérés laissés par son prédécesseur, la réclamation de factures
,
1 .
,
454
remontant a p uSleurs annees
.
Si au Sénégal, de telles pratiques abusives ont pu être abandonnées grâce à la pression de
\\' ADEETél (Association pour la Défense des Abonnés à l'Eau, à l'Electricité et au Téléphone)
455
qui n'a cessé de les dénoncer
, il n'en demeure pas moins qu'elles continuent à avoir libre cours
dans d'autre pays456. Au-delà de ces stipulations relatives aux arriérés de paiement, on peut en
recenser d'autres, toujours à l'actif desdites sociétés. C'est le cas notamment des clauses de non-
responsabilité ou de limitation de responsabilité en cas de dommages causés au matériel
domestique par des coupures intempestives de courant ou des courts circuits ou encore en cas de
dégâts causés par les fuites d'eau. Il en va de même des clauses qui donnent à ces sociétés le
pouvoir de suspendre à tout moment et sans préavis leur prestation dès lors qu'un retard
intervient dans le paiement des droits d'abonnement. De toute façon, les contrats dans ces
services sont rédigés d'une telle manière que les clauses qui y sont insérées sont toutes à
l'avantage de la société à telle enseigne qu'elles déséquilibrent complètement les prestations
réciproques. Les usagers n'ont d'autre choix que de subir.
Le service des transports ne fait pas mieux non plus pour les consommateurs usagers des
transports publics en ce qui concerne la rédaction des clauses abusives. Dans les pays où ces
transports existent comme c'est le cas au Nigeria, les pouvoirs publics prennent le soin d'inclure
dans les contrats de base des clauses de non-responsabilité contre tout dysfonctionnement du
457
service, voire contre tout dommage dont pourrait souffrir le passager pendant le transport
.
454 cf. Consommation-Développement. Bull. d'Info. Publié par OIC (ex IOCU)-ENDA, N°2 Avril 1993, p.6.
455 Ibid J'ADEETél a choisi de se spécialiser dans ces trois domaines pour mieux défendre les intérêts des
ahonnés.
456
Au Togo, les clauses abusives se rencontrent dans les contrats d'abonnement rrorosés par la CEET
(Compagnie Energétique ct Elcctrique du Togo), par la Régie Nationale des Eaux, ct par le Service des
Télécommunications. Il en va de même au Ghana avec les contrats proposés par The Ghana Sewerage Corporation
l
(GWSE), The Eleetricity company of Ghana (ECG) et The Telephone Company of Ghana (l'CG). Les mêmes
pratiques se rencontrent au Zaïre dans les contrats proposés par SNEL, REGIDESCO, SONAS, ONPTE, INSS ct
par Air Zaïre. Cf en ce sens E. K. MUSHORE : op. cil., p.17 et 32.
457
cf en ce sens E. K. MUSHORE: op. cit. p. 9.

421
Par exemple, si un car ou bus assurant le transport public tombe en panne, aucun
compensation ou remboursement n'est dû au passager. Celui-ci doit chercher et prendre un autr
458
bus à ses propres frais
. Si ce n'est pas le transport terrestre, c'est autour des compagnies d
transports aériens d'imposer leurs modèles de stipulations abusives dans les billets vendus au
voyageurs; clauses relatives le plus souvent à la limitation ou à l'exclusion de toute responsabilit
en cas de pertes, de vols de bagages ou de dommages causés aussi bien aux bagages qu'au
passagers pendant le transport. Ces clauses se rencontrent dans tous les pays qui disposent (
compagnies aériennes de transport assurant la desserte des lignes intérieures. C'est le c<
notamment du Nigeria avec « Nigeria Airways », du Zaïre avec Air Zaïre, etc.-l59•
Dès lors que les services publics, exploitant et distribuant des biens essentiels pour l,
besoins vitaux les plus élémentaires de la population, usent des clauses inacceptables pOl
désavouer leurs clients ou pour couper court à tout éventuelle réclamation pouvant venir d'eux,
n'est plus besoin de chercher trop longtemps pour se faire une idée d~ la situation juridique (
consommateur en ce qui concerne sa protection contre les clauses abusives contractuelles. l
mauvais exemple que ·donnent les services publics, donc l'Etat, institution suprême qui a
pouvoir de légiférer pour rendre illégitimes et illicites de tels comportements abusifs, ne peut ql
donner libre court à de telles pratiques dans le secteur privé.
Et dans le secteur privé, les clauses abusives se manifestent partout ailleurs en Afrique.
l'on prend le cas du Zaïre, les clauses abusives sont présentes dans toutes les branches 1
l'activité commerciale du secteur privé. Les clauses de non-responsabilité ou exclusive 1
responsabilité sont utilisées par les vendeurs de tabac, des produits de santé, des produ
d'hygiène et de beauté, de vêtements et par les gérants des centres de distraction pour enfants461
Une autre catégorie de clauses que les anglo-saxons appellent « repressive standard fOI
contracts » - littéralement «contrats standards répressifs» - est la caractéristique principale
commerce au quotidien. Qu'on achète un outil ou un instrument, un bien d'équipement,
458 cr cn cc sens E. K. MUSHORE : op. cil. p. 9.
459 Ibid p.9. et p.32. On pcut citer également Ics cas du Ghana avec «Ghana Airways », du Gabon avcc\\
Gabon, de la Guinée avec Air Guinée. En bref. toutes les compagnies aériennes nationales sont concernécf
Arrique.
460 cr en ce sens MUSHORE : op. cil. P. 32.

422
appareil domestique ou électroménager, même une paire de chaussures, ces clauses sont toujours
présentes dans les reçus délivrés par les vendeurs46 1•
Par exemple, au Zaïre, les mentions d'une clause abusive d'un reçu standard délivré lors
de l'achat sont ainsi libellées : «In the event that good supplied are not fit for purpose, the
supplier is not liable »462. Littéralement, cela signifie tout simplement ceci: « Dans le cas où les
produits livrés ne conviennent pas à l'usage envisagé, le fournisseur n'est pas responsable ».
On voit dans ces formes de clauses, une sorte de sanction pour le consommateur en raison
de son mauvais choix. Ceci n'est pas seulement valable pour le consommateur zaïrois; de telles
463
clauses se rencontrent aussi dans d'autres pays, notamment au Nigeria, au Malawi, etc.
.
A côté de ces abus contractuels qui relèvent du commerce de détail dans le secteur privé,
il faut, dans la rédaction des contrats standards truffés de clauses abusives, réserver une place de
choix aux compagnies d'assurances, aux agences de voyages, aux Hôtels-restaurants, aux
compagnies aériennes privées, aux transports privés, aux laboratoires de développement et de
tirage des photos, aux entreprises gérant les garages automobiles, bref à toutes les entreprises
prestataires de services tournées vers un but lucratif.
Domaine de prédilection des clauses abusives, toutes ces entreprises n' hésitent pas à
profiter du vide juridique qui caractérisent les pays hôtes, surtout du mauvais exemple donné par
les sociétés publiques, pour mettre en évidence, dans les contrats qu'ils proposent à leurs clients,
des clauses abusives de toutes sortes (clause pénale, clause limitative ou exclusive de
responsabilité, clause attributive de compétence, clause concernant les garanties dues, clause de
réserve de propriété, clause concernant les recours, etc.) et ceci au grand détriment des
consommateurs qui, au lieu d'être des cocontractants égaux, deviennent plutôt des victimes d'un
système commercial trop libéral.
hl Les victimes du "vide juridique" en matière des
clauses abusives.
Si l'on se réfère aux développements précédents, on constate que le paysage juridique
africain offre très peu de solutions pour la lutte contre les clauses abusives dans les contrats.
461 Ibid.
462 cr en cc sens MUSHORE : op. cil. p. 32.

423
Hormis quelques rares exceptions, la majorité des pays africains ne possède guère de législation
pour protéger leurs consommateurs contre ces abus contractuels. Et le manque de texte
spéciaux en la matière transforme les consommateurs, contractants naturels, en de simple
victimes sans recours d'un système commercial dépourvu de tout contrôle.
Exposés quotidiennement à la pratique des contrats abusifs, les consommateurs n'ont plu
que la résignation comme refuge de leur désillusion de contractants floués, impuissants à changt
le cours des événements. Cette impuissance se remarque aussi bien dans le commerce de déta
des biens ouvrés que dans celui des prestations de services.
Si l'on prend l'exemple du consommateur nigérian, il est dans une situation è
vulnérabilité par rapport au vendeur lorsqu'il fait n'importe quel achat. Ceci s'explique par ur
raison toute simple: au Nigéria, il y a une pratique standard qui consiste pour un vendeur è
biens d'inscrire sur les reçus qu'il délivre à ses clients une clause de non-responsabilité qui e:
ainsi libellée: « Once the goods are purchased or taken away from the premises, they cannot t
returned by the purchaser »464. L}ttéralement, cette clause signifie ceci: « Les biens (produit:
une fois achetés ou sortis des locaux commerciaux, ne peuvent plus être rapportés p;
l'acheteur» .
Le paradoxe dans tout ça est qu'il s'agit d'un comportement autorisé par la loi fédéra
nigériane, laquelle donne le droit à tout commerçant vendeur de produits d'insérer sur son reç
une clause destinée à l'éviter de remplacer tout produit déjà acheté et sorti du magas
commercial. Drôle d'autorisation, pourrait-on dire. En tout cas il s'agit bien d'une autorisatic
anormale pour un Etat qui n'a aucune législation protectrice des consommateurs. Et là où cet
autorisation frise à l'absurdité juridique, c'est qu'elle ne tient aucunement compte des intérê
aussi bien juridiques que pécuniaires des acheteurs.
Or, dans la plupart des cas - comme cela arrive souvent dans nos pays - la qualité d
produits quotidiennement vendus est non seulement très moyenne, mais aussi les vendeL
n' hésitent pas à mettre sur les marchés, et ce de façon délibérée, des produits issus de la frau
et des produits frelatés. Comme il est dans l'habitude du consommateur de rencontrer sur
marché des biens vendus avec des clauses de non-responsabilité ou de désaveu insérées dans
~(,\\ cr MUSHORE : op. cil. P. 9, 22 ct :n
~M V. E. K. MUSHORE: op. cil.. p. 10.

424
reçus, celui-ci y est contractuellement lié465 . Ce qui du coup en fait une victime. Et les
consommateurs dans leur ensemble se savent victimes des clauses injustes, maIs aucun recours
légal à leur portée ne permet de les dénoncer.
Au Malawi (Afrique de l'Est), la situation n'est guère brillante pour les consommateurs en
ce qui concerne les clauses abusives. Ces excès contractuels au quotidien n'ont pas laissé le
monde des affaires inditférent qui, conscient des problèmes que de telles clauses causent aux
consommateurs, a senti la nécessité de voler au secours des victimes et d'instituer en son sein Ull
code
de
bonlle
conduite,
telle
que
l'exigence
d'un
«label pour
les
nourritures
,
b ll'
466
preem a ees»
.
Mais quoi qu'on fasse, la fréquence des clauses abusives s'est généralisée à tel point
qu'au Malawi, lorsque les consommateurs font leurs achats au quotidien, ils savent par avance
qu'ils ne disposent d'aucun support juridique pouvant leur permettre de rapporter les produits
achetés, même s'ils sont défectueux ou inutilisables467 . L'achat des produits est synonyme
d'acceptation tacite des clauses qui sont inscrites sur les reçus ou dans les documents qui les
accompagnent. En cas de déconvenue du produit acheté, le consommateur n'a d'autre solution
que de compter sur l'intégrité du vendeur. Ce qui n'est pas souvent chose évidente. Ne disposant
pas d'un droit automatique de retour du produit en cas de non-satisfaction, la seule voie de
recours possible dont peuvent se prévaloir les consommateurs victimes pour obtenir réparation
des torts que leur causent les clauses incriminées, reste celle d'une action en justice contre le
vendeur ou fournisseur. Mais cette seule solution peut s'avérer inutilisable dès lors qUè l'on a
affaire à un achat de petite valeur. La solution, dans ces conditions, serait d'instituer par un acte
législatif, au niveau national, que tous les biens achetés peuvent être retournés dans un délai de 7
jours et que le consommateur (en cas de non-satisfaction) sera remboursé intégralement.
A en juger par l'expérience des autres pays dans ce domaine, notamment des pays
occidentaux tel que la France ou les autres pays membres de l'Union Européenne, une telle
disposition encouragerait effectivement le rétablissement d'un bon climat entre les partenaires
économiques, et permettrait ainsi au consommateur d'exercer librement son choix conformément
aux dispositions du principe N° 13 des Nations Unies. D'après ce principe, le droit du
•,
,1(,5 V. E. K. MUSHORE : op. cil., p. 10.
~M Ibid, p. 22.
~(,7 E. K. MUSHORE : op. cil, p. 22

425
consommateur à la liberté de choix des biens et services offerts sur le marché est un droit illimité
car, il s'agit d'un droit dont le but est d'accorder au consommateur une certaine flexibilité dans
ses choix. Aussi, ne devrait-il pas être anéanti par des clauses rédigées par des commerçants.
U ne autre variété de clauses devant lesquelles succombent les consommateurs est celle
rédigées par les entreprises prestataires de services, notamment les compagnies d'assurance e
autres dont nous avons déjà énuméré la liste plus haut, liste qui d'ailleurs n'est pas exhaustive. LI
caractère draconien de ces clauses, rédigées à l'avance par l'entreprise et qui n'offrent d'autre
solutions que l'adhésion dès l'instant qu'on a aucun moyen de les contester, émut un auteur à te
point qu'il déclara: «Je frissonne quand je relis souvent les contrats que j'ai signés. Mai
pourquoi les lirais-je? Ils me sont imposés; je n'ai d'autre choix que l'adhésion »468.
En effet, ce type de contrat étant rédigé à l'avance par l'une des parties, en l'occurrence
le professionnel, donc la partie la plus forte, il n'est pas évident que l'autre, c'est-à-dire le non
professionnel ou consommateur, en apposant sa signature au bas du document, ait eu pleinemen
conscience de l'étendue des engagements qu'il prend, faute en général d'avoir lu attentivement le
contrat4(,l). Encore faut-il pouvoir le lire. Ce qui n'est pas souvent à la portée des consommateur
africains, la plupart ne sachant ni lire, ni écrire. Même pour ceux qui arrivent à franchir ce
obstacle, il ne leur est pas souvent facile de comprendre la portée générale des clauses, celles-c
,
1
l
'd' ,
d
d
b
b'
470
etant e p us souvent re Igees ans es termes 0 scurs et am 19U5
.
Cette remarque est aussi valable pour les autres modes de stipulation des clauses, tels que
les billets, les bordereaux ou bons de livraison, les affiches, les documents annexes, les document
post-contractuels, les fiches de dépôt, les factures, les bons de garantie et les types de contrat, le
471
tickets contenant des stipulations ou des références à des conditions préétablies, etc.
.
De toute évidence, la lecture du contrat devient moins systématique lorsque l'on sai
qu'on n'a pas le pouvoir d'en modifier les clauses qui y sont insérées. Elle n'est même plu
nécessaire lorsqu'on ne sait pas lire.
·HIS G. BERLIOZ, discussion après son intervention intitulée « obligation de renseignement et devoir de consei~
in Les contrats d'adhésion el la proleetion des consommateurs, ENAJ 1978 P. 248.
<16') V. FABRE-MAGNAN: thèse précitée P. 471.
470 Th. IV AINER : « L'ambiguïté dans les contrats », D. 1976, Chrono p. 153 ct S.
m Ph. LE TOURNEAU: La responsabililé civile. D. 1982, 3è éd, W 366 cl s, p. 125 et S.

426
Dans ces conditions, l'offrant, en particulier dans le cas d'url contrat d'adhésion, est
tenu à plusieurs obligations d'information sur le contenu du contrat. Il a l'obligation
négative de ne pas dissimuler certaines clauses du. contrat défavorables au cocontractant. II
a aussi, et ce de façon plus contraignante, l'obligation positive d'attirer l'attention de son
cocontractant, même seulement potentiel, sur certaines stipulations du contrat en cours.
Cela, celtes, se fàit dans les pays africains, mais de façon mOlllS bien, le plus
souvent au détriment des consommateurs. Comme nous avons déjà eu à le dire, la majorité
des consommateurs ne sait pas lire, mais est souvent appelée à s'engager dans des contrats
d'adhésion, notamment la souscription des contrats d'assurance pour garantir la sécurité de
leurs biens ou celle de leurs proches (famille) ou encore celle des tiers dans le domaine de la
responsabilité civile Pour ne pas démotiver leurs clients, les compagnies d'assurance dans
la présentation des conditions générales de souscliption de la police, rédigent la plupaIt des
clauses impOltantes en de très petits caractères, lesquels n'incitent guère à la lechlre 'mème
pour les perSOlmes avisées. Elles n'attirent pas non plus leur attention sur l'importance de
telles clauses pourtant essentielles aussi bien dans la fOImation que dans l'exécution du
contrat.
S'agissant des consommateurs analphabètes, elles passent, dans leurs explications
générales des conditions du contrat, sous silence ces différentes clauses essentielles et
capitales dans l'émission du consentement. Dans l'ensemble, les assurés ne prennent
véritablement pas comlaissance de la portée de telles clauses qu'après la réalisation du
sirlistre, celles-ci leur étant opposées au moment de la mise en oeuvre de la garantie de
l'assureur. Faute de moyens légaux pouvant leur pennettre de contester leur validité, ils
deviennent des victimes d'un système qu'ils ont cru instaurer à leur avantage. Pour éviter
ou limiter de tels déséquilibres contractuels du fait des clauses abusives, la pIise des
mesures adéquates s'impose dans les pays africains comme le souhaite le plincipe N° 19
des Nations Unies.

427
Sous-Scction II : La protection du consommateur contre les
c1aus<.'s abusives en Afrique.
L~s développements ci-dessus nous montrent le rôle très important que joue une
clausè (lbusive dans le déséquilibre d'un contrat intervenu entre un professionnel et un
consommateur. Le rétablisseIllènt de l'équihbre ainsi faussé passe nécessairement par
l'dimination des clauses incrimineès du circuit conmlercial (§II). îvlais, l'expérience des
grandès ènclémies a souvent montré qu'il vaut mieux, pour éviter le pire, prévenir que
guérir Aussi, une lutte efficaœ contre les clauses abusives en Afrique devrait-elle passer
par leur prévention (§I).

428
§I - La prévention des clauses abusives par la réglementation.
Prévenir
\\cs
clauses
abusives dans
les contrats conclus entre
professionnels et
consommateurs relève d'un impératif nécessaire en Afrique (A). C'est bien là un moyen plus ou
moins efficace pour limiter les déséquilibres manifestes dans les prestations réciproques. Mais
cela ne peut se faire qu'au moyen d'une réglementation adéquate en la matière (B).
A - De la nécessité de la réglementation des clauses abusives
dans les contrats.
Dans une économie libérale en pleine expansion dans le monde et dans laquelle tous les
abus contractuels sont possibles, la recherche de la sécurité contractuelle quant aux clauses y
afférent est un souci permanent de tout consommateur. Si ce souci est partagé par toutes les
sociétés de consonunation de masse dans lesquelles s'est généralisé l'usage des contrats types
dans les relations producteur ou distributeur et consommateur, il n'en demeure pas moins qu'il
est diversement apprécié dans les pays du Tiers-Monde.
Si l'on prend le cas des sociétés occidentales, on constate qu'au cours des deux dernières
décennies, presque tous les pays ont estimé nécessaire de se doter d'une législation spécifique sur
la protection des consommateurs472 , en particulier pour les préserver des conséquences
m
préjudiciables des clauses abusives
. Illustrons cette remarque par quelques exemples.
De l'autre côté de l'Atlantique, on peut citer le Québec où, parmi les 363 articles de la
Loi du 22 décembre 1978 pour la protection des consommateurs474 , doit être mis en exergue
l'article 8 qui dispose que « Le consommateur peut demander la nullité du contrat ou la réduction
des obligations qui en découlent lorsque la disproportion entre les prestations respectives des
parties est tellement considérable, qu'elJe équivaut à de l'exploitation du consommateur, ou que
J'obligation du consommateur est excessive, abusive ou exorbitante ».
Côté européen, outre la législation française47:i dont nous avons déjà t~lÏt cas dans les
développements précédents, on peut citer deux autres législations qui ont particulièrement retenu
472 C'est le cas notamment de tous les pays membres de l'Union Européenne.
mG. PAISANT : « Oc l'efficacité de la lutte contre les clauses abusives ». D. 1986, P. 302.
474 Sur la présentation générale de cette loi, voir 1. L. BAUDOIN, chronique de droit civil québécois, RTDCiv
1980 p.465.
475 Cf Loi du 10 janvier 1978 prée. Art. 35.

429
l'attention des juristes : il s'agit de la loi allemande du 9 décembre
1976 et de la loi
luxembourgeoise du 25 août 1983. La loi allemande sur les conditions générales du contrar176,
dans son paragraphe 9, pose la règle générale selon laquelle «les dispositions des conditions
477
générales d'affaires
sont inefficaces lorsque, contrairement aux impératifs de la bonne foi, elle,
désavantagent le partenaire contractuel du stipulant de manière déraisonnable ». Après l'énonc
du principe, la loi n'a pas manqué d'énumérer un catalogue d'une quarantaine de clause
inefficaces. Dans ce catalogue, elle distinguait deux types de clauses : une «liste nOire
composée de clauses nulles en tout état de cause et une « liste grise» dont l'appréciation d
caractère abusif est laissée au pouvoir du juge.
La loi luxembourgeoise du 25 août 1983 contient également une disposition qui réput
abusive, donc non écrite, toute clause d'un contrat de fourniture de biens de consommation ou d
services
qUi
entraîne
«un
déséquilibre
des
droits
et
obligations
au
préjudice
d
consommateur »47&. Bien que cette loi renvoie à l'appréciation du juge, elle a cependant étab
une liste noire de 20 clauses considérées comme abusives.
Ainsi, à l'instar de l'Allemagne et du Luxembourg - ou de la France - plusieurs Etats aus~
bien européens qu'outre-Atlantique ont souhaité, bien avant l'adoption des Principes Directeur
des Nations Unies en la matière, assurer la protection de leurs consommateurs contre les clause
abusives.
La démarche des pays européens correspondait aux voeux émis par le Comité de
ministres du Conseil de l'Europe qui, «considérant que l'existence de clauses abusives dans le
contrats de fourniture de biens et de services et l'absence de législation adéquate en cette matièr
mettent les consommateurs dans une situation d'infériorité préjudiciable à leurs intérêts ».
recommandait aux gouvernements des Etats membres, à travers une résolution du 16 novembr
1976479 , «de créer des instruments efficaces, juridiques et autres, afin de protéger lE
consommateurs» contre ce type de stipulations. Plus précisément, il était recommandé « de pOSf
476 G.H. ROTH: « La nouvelle loi allemande sur les conditions générales du contrat ». Rev. Int. Dr. Comp. 197
359 et s; A. RIEG : « La lutte contre les clauses abusives dcs contrats », Etude Rodièrc, D. 19R 1, P. 2R 1 et s.
« Les clauses abusi ves et le consommateur en R.F.A » Rev. 1nI. Dr. Comp. 19R2 905 et s.
477 Suivant le paragraphe le' de la loi, il s'agit Je « toutes les conditions contractuelles préformulées pour l
multitude de contrats que l'une des parties au contrat (stipulant) lixe à l'autre lors de la conclusion du contrà
(cl" A. RIEG article précité P. 916).
47K cI"G. PAISANT: De l'eflicacité de la lulle contre les clauses abusives D. 1986 P. 302.

430
comme principe» que, dans les contrats standardisés de fourniture de biens et de services, toute
clause entraînant « un déséquilibre des droits et obligations au préjudice des consommateurs» fût
déclarée « abusive» pour en tirer les conséquences appropriées. En annexe de la résolution, 31
clauses susceptibles de rentrer dans cette catégorie étaient proposées.
Certes, toutes les législations qui en sont issues n'ont plus la même forme en raison de
l'intégration de la directive CEE 93113 du 5 avril 1993 dans toutes les législations des pays
membres au plus tard le 31 décembre 19944~(). Mais les textes relatifs aux clauses abusives issus
des législations nationales conservent tout de même leur fond dans la mesure où l'intégration a
pour objet d'harmoniser les législations au
niveau communautaire
afm de donner aux
consommateurs de tous les Etats membres la même protection.
L'intérêt de la résolution, au-delà des pays du Conseil de l'Europe, est d'avoir soulevé le
problème des clauses abusives dans les contrats et dont la solution aux problèmes posés par ces
clauses aux consommateurs passe nécessairement par une intervention législative.
En adoptant les' principes directeurs pour la protection du consommateur et plus
particulièrement le principe N° 19 relatif aux clauses abusives, les Nations Unies n'ont fait que
confirmer sous une autre forme la résolution du Conseil à l'échelle mondiale. Et ce principe, loin
de concerner les pays occidentaux, interpelle plus les pays du Tiers-Monde sur un problème
devenu universel, les contrats standardisés étant présents partout avec leur cortège de clauses
abusives.
D'une manière générale,
il invite ces
pays à une
intervention législative ou
réglementaire pour protéger leurs consommateurs contre de telles stipulations contractuelles. Il
s'agit donc là d'une nécessité impérieuse, d'une urgence absolue soumise à l'appréciation des
différents gouvernements des pays encore concernés par le vide juridique en la matière.
Et dans ce vide législatif relatif à la lutte contre les clauses abusives, les pays africains,
contrairement aux autres pays du Tiers-Monde, notamment ceux de l'Amérique Latine, de
l'Amérique Centrale, des Cara'lbes, du Pacifique Sud, de l'Asie et du Pacifique48 1, occupent les
,{
479 Le texte de celle résolution et de ses annexes a été publié Jans le rapport sur le projet de ioi rclatir à la
protection et à l'information du consommateur (Doc. Sénat N°376. 2°session ordo 1976 - 1977, p. 141).
4RO V. L'article 10, §2 Directive 93/1 J du 5 avril 1993 précitée.
4RI
Cf David HARLAND : «Implementing the principes or the United Nations
guidelines l'or consumer
protection ", in « 111e Journal of Indian Law Institule " vol. 3J : 2 1991 P. 197 ct S.

431
devants de la scène et brillent par leur présence dans l'arène des pays sans législations
.
d 1
48ry
protectflces e eurs consommateurs
-.
Dans ce sens, les résolutions votées par l'Atelier Régional de Dakar en Juillet 1992 n'ont
pas seulement pour objet de faire constater le vide juridique concernant les législations
protectrices des consommateurs dont celles relatives aux clauses abusives, mais d'attire
l'attention des différents gouvernements africains sur l'urgence du problème et partant, 1
situation du consommateur local dans ses différentes opérations commerciales. Ces résolution
invitaient les différents Etats africains à une seule action : mettre en place des législation
protectrices du consommateur en Afrique. Et, celle relative aux clauses abusives n'en fait pa
moins partie de l'ensemble.
B - La mise en place des règles protectrices contre les
clauses abusives dans les contrats.
li s'agit de mettre en oeuvre trois types de règles: celles qui ont POUI' objet d'éliminer le
abus dès la formation du contrat Ca), celles dont le but consiste à éliminer ces abus lors d
J'exécution du contrat ou des abus tendant à limiter ses effets Cb) et celles dont le but consiste
ouvrir toutes les voies de recours au consommateur Cc).
al La mise en place des règles d'élimination des clauses
abusives relatives à la formation du contrat.
Sans aller jusqu'à nous substituer au législateur de chaque pays, notre but object
consiste à l'aider dans sa tâche en mettant en exergue les clauses qu'il ne devrait pas perdre d
vue lorsqu'il sera appelé à jouer son rôle de faiseur de lois dans ce domaine. Certaines clauses d~
la formation du contrat sont de nature à entamer l'équilibre des prestations réciproques. Let
contrôle dès les premières rencontres de volontés des parties s'avère donc nécessaire. Il s'agit dt
clauses:
- ayant pour objet ou effet de constater l'adhésion du non-professionnel ou consommatel
à des stipulations contractuelles dont il n'a pas une connaissance effective4X1 ;
IX2 cr supra, « A- Clause abusive et vide juridique en Afrique ».
·IX.' GH ESTIN : Le contrat, op. cil. n0611.

432
- concernant la détermination du prix, c'est-à-dire « des clauses dans lesquelles, sans motif
valable, le prix n'est pas déterminé, ni déterminable selon les critères spécifiés dans le contrat et
raisonnables du point de vue des consommateurs» d'une part, et « des clauses empêchant le
consommateur de dénoncer le contrat lorsque l'augmentation du prix en application des
stipulations du contrat est excessive du point de vue des consommateurs484 ;
- des «clauses stipulant que malgré l'engagement immédiat du consommateur, le
professionnel se réserve le droit de confirmer son propre engagement dans un délai et des
conditions qu'il fixe485 ;
- des «clauses restreignant l'obligation pour le fournisseur de respecter les promesses
faites, les garanties accordées ou les engagements pris par lui-même, son préposé ou son
486
agent»
;
- des clauses ayant pour objet ou effet de permettre au professionnel de retenir des
sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci renonce à conclure ou à exécuter le
contrat, sans prévoir le droit, pour le con'sommateur, de percevoir une indemnité d'un montant
équivalent de la part du professionnel lorsque c'est celui-ci qui y renonce4X7 ;
- des clauses ayant pour objet ou effet de prévoir la possibilité de cession du contrat de la
part du professionnel, lorsqu'elle est insusceptible d'engendrer une diminution des garanties pour
le consommateur sans l'accord de cel ui _ci488 ;
- des clauses ayant pour objet ou pour effet de déroger à la règle selon laquelle « toute
information ou publicité suffisamment précise engage le professionnel qui la fournit ou qui
l'utilise»489.
Toutes ces clauses ci-dessus énumérées, et qui sont loin d'être limitatives, se manifestent
souvent au moment de la formation des contrats. Et dans les pays où il n'existe aucune législation
appropriée pour les rendre inopérantes, il va sans dire que l'équilibre du contrat est déjà faussé
dès sa formation, parfois dès le début des pourparlers. Aussi la connaissance de telles clauses,
484 Ibid n° 612.
485 Ibid.
486 GHESTIN : Le contrat, op. cil. n° 613-1.
487 cr la liste des clauses abusives de la directive 93/13 CEE clause d).
488 Ibid clause p).

433
apparemment normales dès les premières lectures, peut-elle être de nature à stimuler les
législateurs africains dans la perspective de faire des lois susceptibles d'apporter un équilibre dès
la formation du contrat entre les prestations réciproques.
Mais la garantie de l'équilibre ne se limite pas seulement au moment de la formation du
contrat. L'équilibre est souvent mis en jeu au moment de l'exécution du contrat puisque c'est l~
que celui-ci est censé produire ses effets. Et les clauses qui en sont souvent responsables /1(
pourront être efficacement combattues que si elles sont connues du législateur.
b) La mise en place des règles d'élimination des clauses
abusives relatives à l'exécution ou aux effets du contrat.
L'urgence de l'intervention législative est très souhaitée d'autant plus que ces clauses son
de loin les plus nombreuses dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs d.
par le monde entier. Il s'agit notamment:
1- Des clauses qui portent atteinte à la force obligatoire du contrat. Il en existe plusieur
sortes dans le commerce. Dans cette catégorie, on englobe:
- les clauses qui subordonnent l'exécution du contrat à la volonté du fournisseur
Ces clauses sont abusives en ce sens que la force obligatoire du contrat ne lie que 1
consommateur, le professionnel n'assumant réellement aucune obligation;
- les clauses autorisant le professionnel à résilier le contrat de façon discrétionnair
sans accorder la même faculté au consommateur;
- les clauses concernant la modification de l'objet du contrat;
- les clauses concernant la date de livraison;
1 ·
l'
f' . d 1 l'
.
490
- les clauses re atlves au leu ou aux raIs e a Ivralson
.
2- Des clauses qui visent à écarter les conséquences de la réciprocité des obligations.
4K9 GHESTIN : Le conlrat, op. cil. n° 613-2.
4')0 J. GHESTIN : Le contrat, op. cil. p. no, n° 615.

434
Les contrats synallagmatiques, tels que la vente, se caractérisent par la réciprocité des
obligations. Il en résulte que chacune des parties peut refuser d'exécuter sa propre obligation si
l'autre partie n'exécute pas la sienne; c'est le jeu de l'exception d'inexécution. Chacune des
parties peut ainsi obtenir la résolution judiciaire du contrat si l'autre partie persiste à ne pas
s'exécuter. En outre, les créances réciproques des parties s'éteignent normalement par voie de
compensation, ce qui constitue une garantie de paiement particulièrement forte 491 • Doivent être
considérées comme abusives les diverses clauses par lesquelles le professionnel entendra écarter à
son profit la réciprocité de toutes ces obligations. Concrètement, il s'agit:
- des clauses concernant le versement du prix;
- des clauses interdisant au consommateur d'exiger une compensation entre
l'obligation du professionnel et ses propres obligations;
- des clauses concernant la résolution judiciaire du contrat au cas d'inexécution
492
des obligations du professionneI

3- Des clauses concernant les garanties dues. Nous partons de l' hypothèse selon laquelle
le consommateur africain bénéficierait, en vertu de la loi, de toutes les garanties (légale et
conventionnelle) dans toutes ses transactions commerciales. Dans les contrats conclus entre
professionnels et non professionnels ou consommateurs, il pèse sur les premiers, une obligation
de garantie d'origine légale. Elle est d'ordre public. Le vendeur ne peut en aucune manière
l'aménager à sa guise. Il peut en effet ajouter à la garantie légale, une garantie complémentaire
résultant des stipulations contractuelles. Il peut, en principe, l'aménager comme il l'entend, en ce
qui concerne les conditions comme les effets à la seule condition de ne pas donner à ses
obligations un caractère potestatif, c'est-à-dire de ne pas faire dépendre leur exécution de son
appréciation arbitraire493 . Toute clause qui tendrait à éluder le caractère d'ordre public de la
garantie légale au profit de la garantie contractuelle sera considérée comme abusive. Il en sera de
même de la garantie contractuelle dont les conditions et les effets seraient potestatifs4'!4.
491 Ibid, na 618 p. 725.
492 J. GHESTIN : Le contrat op. cil. p. 726, na 620.
493 GHESTIN : «Clauses de garantie », in Les contrats d'adhésion et la protection du consommateur; Juin 1918
p. 195 et s.
494 J. GHESTIN : Le contrat, op. cil. N° 622.

435
4- Des clauses qui concernent la reconduction tacite du contrat. Une clause esl abusivE
lorsqu'elle enferme le consommateur dans un délai raisonnable pour la dénonciation du contrat. 1
en va de même lorsqu'elle donne la faculté au professionnel de prolonger le contrat pour um:
, . d d"
bl 49'i
peno e eralsonna e '.
5- Des clauses visant à alléger la responsabilité du professionnel. Il s'agit notamment:
- des clauses dont la portée est d'exonérer le professionnel de sa responsabilité en c,
d'inexécution, d'exécution défectueuse, partielle ou tardive496 ;
- des clauses dont le but consiste à « limiter l'indemnité due par le professionnel E
cas d'inexécution, d'exécution défectueuse, partielle ou tardive497 •
6- Des clauses visant à aggraver la responsabilité du consommateur. C'est le cas d(
clauses qui ont pour objet d'imposer au consommateur, en cas d'inexécution du contrat par celu
ci, une obligation excessive, notamment financière49S .
7- Des clauses visant. à accorder au professionnel le droit de déterminer si la chose livH
ou le service fourni est conforme aux stipulations du contrat ou de lui conférer le droit exclu~
d'interpréter une quelconque clause du contrat499 .
8- Des clauses visant à accorder au professionnel le droit de modifier unilatéralement
sans raison valable les termes du contrat tout comme les caractéristiques du produit à livrer ou c
service à fournir'iOo.
Dans le cas des points 7 et 8, il s'agit des clauses qui portent atteintes aux droits (
consommateur en ce sens que la force obligatoire du contrat ne joue que dans un seul sens, cel
du consommateur.
Mais au-delà de toutes ces clauses qui sont loin d'être exhaustives dans leur énumératio
il y a lieu aussi de prendre en considération un certain nombre de stipulations abusives c
4')
Ibid N° 621, P. 727.
4% 1. GHESTIN : Le conlrat op. cil. N°621-1.
.1'17 GHESTIN : Le contrat, op. cil. N° 621-2.
4~~ Ibid N° 623.
4~9 cr Liste des clauses abusives, Directive CEE 93/13, clause m).
)00 Liste des clauses abusives, Directive CEE 93/13, clauses j) e[ k).

436
concernent les éventuels recours auxquels le consorrunateur pourrait se tourner en cas de
déséquilibre manifeste dans les prestations pour rétablir la justice contractuelle.
c) La mise en place des règles d'élimination des clauses
abusives concernant les recours.
Certaines clauses insérées dans les contrats ont souvent pour objet de suppnmer ou
d'entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur en
l'obligeant notamment à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des
dispositions légales, en limitant indûment les moyens de preuve à sa disposition ou en lui
imposant une charge de preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait revenir normalement au
professionnel50J . Ce qui aura pour objet de détourner les avantages du contrat au profit du
stipulant, c'est-à-dire le professionnel.
Vu sous un autre angle, on peut distinguer dans ce genre de stipulations trois catégories
de clauses abusives:
Dans un premier temps, on a les clauses abusives relatives à la procédure, elles-mêmes
ramifiées en trois types de clauses:
- les clauses concernant les délais et les formalités préalables. De telles clauses ont
pour objet d'imposer au consommateur un délai anormalement court pour faire des réclamations
au fournisseur. Ces clauses sont abusives en ce sens qu'elles enferment le consommateur dans un
délai contraire aux usages commerciaux. Le délai de réclamation dépend, en fait, de la nature du
produit et de l'objet de la réclamation, et ne peut donc être fixé a priori502, de surcroît pour une
seu le partie, en l'occurrence le professionnel.
- les clauses concernant la juridiction compétente. De telles clauses sont abusives
parce qu'elles ont pour objet ou pour effet de déroger aux règles légales de compétence50\\. Aussi,
doivent-elles être déclarées non-écrites.
5111 cr Lisle des clauses abusives, Directive CEE 93/13, clause q).
502 V. GHESTIN : Le contrat, or. cil. N° 625.
50.1 GHEST N
.
6

1
: or. CIL N° 26.

437
- les clauses concernant les frais de procédure. Ces clauses sont qualifiées Je plus
souvent d'abusives parce qu'elles ont pour objet ou pour effet d'obliger le consommateur à
rembourser les frais et honoraires exposés par le professionnel pour le recou vremenl de sa
créance sans obliger réciproquement le professionnel à rembourser les frais et honoraires exposés
par le consommateur pour obtenir l'exécution du contrat504 . L'obligation étant à sens unique, la
théorie de la réciprocité s'en trouve écartée; d'où le caractère abusif de telles clauses. Elles
doivent donc être réputées nulles et de nullité absolue.
Dans un deuxième temps, on recense les clauses relatives à la charge de la preuve. D
telles clauses doivent être déclarées abusives dès lors qu'elles ont pour objet ou pour effe
d'imposer au consommateur la charge de la preuve incombant normalement au fournisseur 0
professionnel505 . Il s'agit pour le législateur de démontrer par cette attitude que non seulement le
dispositions impératives en la matière ne peuvent faire l'objet de clauses contraires, mais aus:
que de telles clauses ne peuvent écarter sans abus les dispositions supplétives de la loi di:'
l,·
I l '
.
506
mstant que ce es-cI eXistent'
.
On a dans un troisième temps, les clauses qui concernent le fond. Il s'agit ici des clause
qUI tendent à interdire ou à limiter les actions en justice des consommateurs ou les voies d
recours qui leur sont ouvertes. Elles ont pour objet ou effet d'obliger le consommateur
renoncer à faire valoir ses droits et prétentions en cas d'inexécution ou de mauvaise exécution d
contrat par le professionnel, nonobstant la faute de ce dernier. Sauf au professionnel à produÎl
que de telles clauses ne lui procurent aucun avantage anormal, les clauses qui ont aussi
fâcheuse ambition de limiter les moyens de preuve dont peut se prévaloir le consorrunateur pOL
démontrer le contraire doivent être déclarées nulles, donc non écrites507 •
Mais quand on connaît les artifices, voire l'ingéniosité dont peuvent faire preuve lt
professionnels pour contourner les règles qui se trouvent sur leur chemin, cela incite à beaucOl
plus de prudence et à ne pas se fier aux seules règles spéciales votées en la matière. L'efficaci
dans la lutte contre les clauses abusives exige aussi que l'on prenne en compte toutes les règl,
de droit pouvant aider à résoudre le mal, notamment le droit des contrats.
5O·l GHESTIN : Le contrai, op. cit, N° 626-1.
50) Ibid, N° 627.
)0(, Ibid, N° 628.
50? GHESTIN : Le contrai, op. cil. N° 628.

438
SIl - De l'efficacité de la lutte contre les clauses abusives:
le recours au droit des contrats.
Le droit commun des contrats ne connaît pas de façon concrète un système général de
prohibition des clauses abusives. Mais il contient en son sein des techniques (A) et des principes
(B) qui pourront aider à limiter les effets des clauses abusives dans les contrats.
A - Le recours aux techniques du droit commun des contrats.
Ces techniques se trouvent dans le code civil français et concernent notamment les
conditions de validité du contrat énoncées à l'article 1108 dudit code. Or, nous avons déjà fait
cas des relations qui existent entre le droit des pays africains d'expression française et le droit
français lui-même, dans le domaine des contrats. Sur ce point toutes les dispositions du code civil
relatives à la formation du contrat ainsi qu'à son exécution ne sont pas étrangères en Afrique.
Elles sont connues aussi bien des facultés de Droit que des tribunaux qui s'en inspirent beaucoup
pour les besoins de la pratique.
Ces dispositions du Code civil, bien que n'étant pas expressément faites pour les clauses
abusives, peuvent incontestablement permettre leur contrôle en exigeant la réunion des conditions
énoncées à l'article 1108508. Le contrat d'adhésion509 doit satisfaire à ces conditions car il reste en
effet un contrat, malgré les discussions sur sa nature'iIO, et en tant que tel, il doit répondre à
toutes les conditions de validité du contrat. Ceci explique peut-être la raison pour laquelle la
jurisprudence a toujours exigé, dans ce genre de contrat, J'existence d'un accord de volontés des
parties même si le consentement de l'une se réduit à l'adhésion à un document prérédigé par
l'autre.
Or, la vérification de l'existence du consentement consiste à rechercher chez l'adhérent la
connaissance des clauses que le contractant veut lui imposer, autrement dit la portée de
50S L'article
1108 c.civ. dispose: « Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention: le
consentement de la partie qui s'oblige; sa capacité de contracter; un objet ccrtain qui l'orme la matière de
l'engagement; une cause licite dans l'obligation ".
509 BERLIOZ, Le contrat d'adhésion, 2é éd. p. 56 ct s.; WEILL et TERRE: Droit Civil: les obligations, 2é éd. N°
98; TERRE, SIMLER et LECQUETTE: Droit Civil: les obligations Sé éd., Dalloz 1993, nOs 188 s ; GHESTIN :
Le contrat, op. ciL, note 191 ; MARTY et RAYNAUD, Droit Civil, tome 1,1<' vol., 2é éd., 1988, sirey, nOs 129 s;
tome II ICI vol. 1989, N° 117; H. J. et L. MAZEAUD ct F. CHA BAS : Leçons de droit civil, tome II, ICI vol., 8é
éd., Montehrestien 1991, N° 87 et suiv. et les nOs correspondants dcs éditions antérieures.

439
l'adhésion51' . De ce côté, les tribunaux opèrent une distinction entre les clauses qui figurent sur le
document signé et celles qui ne le sont pas. Sont généralement considérées comme valables pour
avoir été acceptées, les clauses qui figurent dans le document contractuel, sauf si elles rcstent
plus apparentes parce qu'illisibles ou écrites en caractères minuscules5l2 , soit parce qu'clics
figurent au verso sans renvoi explicite513, soit parce qu'elles sont rédigées dans une langue autre
514
que celle du destinataire
. De la même manière, une jurisprudence bien établie décide que les
clauses
ne figurant pas sur le document contractuel ne font pas partie du contrat et sont
inopposables à l'adhérent qui n'a pas pu les connaître515 .
On peut faire un rapprochement entre cette jurisprudence et l'ancien article 1N du décret
du 24 mars 1978 qui prohibait dans les rapports entre professionnels et consommateurs, le~
clauses dites de renvoi ou de référence, dont l'objet ou l'effet est de constater l'adhésion du clie
à des stipulations contractuelles non-reproduites sur l'écrit qu'il signe. Encore faut-il que celui-
sache lire et comprenne la portée desdites clauses. Ce qui n'est pas forcément le cas en Afriqu
En tout cas, sur l'ensemble de l'analyse jurisprudentielle, on peut dire que le droit commu 1
réalise une justice élémentaire entre contractants. Ce que le droit de la consommation - même)
ce droit reste encore ignoré sur le continent africain - a été incapable de maintenir516. Quant aLl x
clauses imprimées sur un document (facture, ticket, bon, etc.) l'absence de protestation du clie! t
, , .
,
.
d
517
n equlvaut pas a une acceptatIOn e sa parr
.
t
Certes, l'existence du consentement est nécessaire à la validité du contrat. Mais
consentement, pour être valable, doit être exempt de vice. L'éclairage du consentement assure ur
équilibre relatif du contrat. Aussi, la théorie des vices du consentement peut-clle jouer un rôfé
non négligeable dans la protection du consommateur. Et les tribunaux y recourent souvent poJ,
rétablir la justice contractuelle.
--_._---------~
SJ(I HAURIOU : Principes de droil public, Paris, Sirey 1916, P. 123 cl S.
511 I3ERLIOZ : op. cil.
512 Agen, 2 janv. 1925 R.T.D.Civ. 1925 P. 644, obs. J.A. PlOT; Casso Civ. 2lJ Nov. IlJ56, D. 1957, somlll. lJl.)
TG! Paris 20 mai 1968, G.P 1968, Il,135.
51} Casso Civ. 1ère 28 avril 1971, JCP 1972, Il, 17280, obs. I30itard ct Rabut; 3 Illai IlJ7lJ, Jep IlJ7lJ, IV, 221; TG
Paris, 20 mai 1968, GP 1968, Il, 135.
51~ Sur J'ensemble de la question, v. H. I3rieks: Thèse précitée, spéc. N° 261 S.
SIS A propos d'une clause d'irresponsabilité en matière de transport routier, V. Casso (0111.31 janvier IlJ50,.
1950 P. 241; Rouen 17 fév. 1967, D. 67, somm. 94 à propos d'une clause allributive de compétence dans
contrat de lransport maritime.
SI6 A.-F. NGOMO : article précité P. 145.
SI7 H. I3RICKS : op. cil., Spée. N°S 257 S.

440
D'après l'article 1109 du Code civil, texte bien connu en Afi-ique, ct auquel certains
auteurs veulent donner une portée bien spécifique, une interprétation propre:il8, « il n'y a point de
consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par
violence ou surpris par dol ».
Prenons le cas du vice de la violence. Bien qu'ilexiste aujourd'hui des méthodes de vente
dites « agressives »519, ce vice du consentement ne convient guère au cas qui nous intéresse, car
le professionnel n'oblige pas - il ne peut d'ailleurs le faire - le consommateur à contracter en lui
inspirant « la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent»
(article 1112 C.Civ.). Les quelques rares applications jurisprudentielles du vice de violence se
sont manifestées dans des cas où l'une des parties se trouvait en situation de dépendance
économique par rapport à l'autre52o. Ce qui est un fait rare dans les relations professionnels-
consommateurs.
Pour ce qui est de l'erreur, elle ne nous est pas non plus d'un grand secours en tant que
vice de consentement susceptible d'aider à l'éradication des clauses abusives dans les contrats.
Certes, un contrat contenant des clauses abusives est un contrat déséquilibré dans lequel les
obligations d'une partie - le consommateur - n'auront pas de contrepartie suffisante à la charge
de son cocontractant - le professionnel. Partant de ce constat, le contractant victime peut soutenir
qu'il a signé un contrat qu'il croyait juste et équilibré, mais qu'en fait, il a commis une erreur,
laquelle requiert une nullité du contrat. Si légitime que puisse être son erreur, une telle
argumentation
sera
difficilement
acceptable
parce
qu'en
matière
d'erreur,
les
nullités
jurisprudentielles n'existent que dans le cadre d'une erreur sur la «substance ».
Dans un premier temps, il doit s'agir d'une erreur sur les qualités substantielles de l'objet
des prestations contractuelles521 . L'erreur de droit n'entraîne la nullité que si elle a provoqué une
erreur de fait portant sur l'objet du contrat.
518 Georges VIVIEN, « De l'erreur déterminante et substantielle », RT.D.Civ. 199:2.,305 et s.
519 J. CALAIS-AULOY : « Les ventres agressives », D. 1970, P. 38 et s.
il
520 Paris 27 sept. 1977. G.P. 78, l, 110, noIe Le Guyenot. Cet arrêt a été rendu dans un litige opposant deux
professionnels en situation d'inégalité. Mais les principes qu'il invoque pourraient être appliqués dans un litige
entre un consommateur et un professionnel. Sur la question, voir CALAIS-AULOY : Droit de la consommation,
3è édition Dalloz 1992, nO' 135 et s., P. 127 et s.
521 MAURY: « De l'erreur sur la substance dans les contrats à titre onéreux », Etude CAPITANT 1939, P. 491 s ;
1. GHESTIN, Le eontrat, LGDJ 1980, nO' 368 et s. ; Encycl. Dalloz, voir Erreur; Ph. MALINVAUD : « De
l'erreur sur la substance », S. 1972, Chrono P. 215 et s.: VIVIEN: article précité.

441
En revanche, l'erreur sur les effets juridiques que doit produire le contrat reste sans
influence sur sa validité. Or, les clauses abusives portent généralement sur les effets juridiques du
contrat. Ce qui du coup écarte tout le bénéfice que pourra tirer le plaignant en invoquant l'en~eur
pour obtenir la nullité des clauses litigieuses. De plus, pour être source d'annulation du contrat,
l'erreur doit avoir eu un effet déterminant dans l'émission du consentement du contractant. Or,
on peut difficilement croire que l'élément déterminant du consentement du consommateur ait été
la recherche d'une stricte équivalence dans les prestations réciproques.
Dans un deuxième temps, admettre la nullité du contrat sur la simple constatation d'un
déséquilibre entre les prestations contractuelles serait reconnaître l'erreur sur la valeur co
e
cause générale de nullité des contrats. Or, ceci ne cadre pas bien avec les dispositions du Co e
m
civil qui a réglementé la lésion dans un domaine d'application restreint
.
La troisième et dernière raison concerne la victime elle-même. Celle-ci ne poun a
bénéficier d'une nullité pour erreur sur les qualités substantielles si elle a commis une errel 1
grossière, impardonnable52J , et de ce fait, ne mérite plus la protection de la loi. Elle ne pourra P' ~
non plus obtenir la nullité du contrat si le cocontractant professionnel n'a pas pu connaître e
caractère essentiel que présentait pour elle la qualité sur laquelle elle s'est trompée524 . Dans
a
mesure où elle porte généralement sur les qualités substantielles de l'objet des prestatio ~
contractuelles et non sur les clauses du contrat, l'erreur n'est pas d'une très grande utilité pour e
consommateur en tant qu'instrument de protection contre les clauses abusives. Elle est no ~
seulement difficile à utiliser, mais aussi sa sanction peut se révéler inadaptée à la situation. Il no
reste maintenant à recourir au dernier vice de l'article 1108, c'est-à-dire le dol.
Le dol comme instrument de la lutte contre les clauses abusives nous paraît plm
concevable. Le dol permet, en effet, d'annuler le contrat dès lors que les manoeuvres pratiquée~
par l'une des parties ont déterminé le consentement de l'autre (article 1112 C.Civ.). La nullité du
contrat peut donc être prononcée dès lors qu'une partie au contrat a trompé l'autre nor
seulement sur les qualités de la chose ou la nature du contrat, mais aussi sur l'équilibre dc~
.
'[525
prestatIons ou sur tout autre moti
.
m A.-F. NGOMO :arl. Prée. P. 146.
m CALAIS-AULOY : Droit de la consommation, op. cil. na 135.
524 GHESTIN : Le eontrnt, op. cil., nOs 368 et suiv.
m A-F. NGOMO :arl. prée. p. 146.

442
Dans la manifestation vice de dol, il n'est pas nécessaire de procéder à une distinction
entre dol déterminant du consentement à l'ensemble du contrat (dol principal) susceptible
d'entraîner l'annulation du contrat, et le dol n'ayant concerné que certaines clauses du contrat
(dol incident) lequel n'ouvre à la victime qu'une action en responsabilité civile. Cette distinction
classique est aujourd'hui de moins en moins observée526. La jurisprudence semble même admettre
l'annulation pour dol incident527 .
La notion de dol a même vu son champ d'application être élargi par la jurisprudence qui
l'admet d'une part dans l'hypothèse d'abus de situation 528 , et d'autre part, dans l'hypothèse d'un
simple mensonge, même en l'absence d'autres manoeuvre, et surtout au cas de simple
réticence529• Dans le premier cas, le cocontractant n'est plus victime d'une erreur, mais de
manoeuvres déloyales par lesquelles l'autre partie exploite son infériorité. Dans le second cas, il y
a risque que le consommateur se heurte à un « insurmontable» problème de preuves, car les
mensonges, les artifices, les ruses déployés pour ['amener à contracter n'ont généralement aucun
témoin. Au-delà de toutes ces difficultés, il y a le problème relatif à la tromperie commerciale.
Celle-ci est souvent considérée. comme normale dès lors qu'elle n'est pas excessive, seule
condition pouvant entraîner la nullité du contrat.
Quoi qu'on puisse dire, parmi les trois vices du consentement, le dol nous paraît le vice le
mieux adapté pour répondre aux problèmes posés par les clauses abusives aux consommateurs
africains, surtout analphabètes, même si à bien des égards, la protection que sa mise en oeuvre
53o
apporterait peut se révéler insuffisante
. Reste maintenant à rechercher l'efficacité annoncée du
côté des principes généraux du droit commun des contrats.
526 A.-F. NGOMO :arl. préc. p. 146
527 Corn. 22 déc. 1954, D. 1955,254; 24 mars 1972,0.72,653. GHESTIN rait remarquer que la victime d'un dol
incident bénéficie d'une certaine option: J'annulation ou, si clic prélère, un réduction du prix et des dommages-
intérêts. V. Note sous Corn. 14 mars 1972; Corn. 2 mai 1994, Bull. IV, n° 145.
m Colmar 30 janv. 1970, lCP 1971, 21609, qui décide que les manocuvres qui ont provoqué le consentement par
lassitude sans qu'il y ait erreur sont suflisantes pour entraîner la nullité du contrat sur la base de l'article 1116 C.
Civ. Mais cet arrêt reste un cas isolé.
529 GHESTIN : « La rétieence, le dol et l'erreur sur les qualités substantielles », D. 1971, Chrono 247 et S. ; Le
contrat, op. cil. ; M. De lUGLART: « L'obligation de renseignement dans les contrats », RT.D.Civ. 1945, P. 1 s.
5JO CALAIS-AULOY : Droit de la consommation, op. cil., nOs 135 et s. ; A-F NGOMO : arl. préc. P. 146.

443
B - Le recours aux principes généraux du droit commun des cOll/ra/s.
Il Y a dans le droit des contrats des principes généraux qui peuvent permettre dc luttcr
efficacement contre les clauses abusives et de rétablir l'équité entre les contractants. Nou~
faisions allusion notamment à la théorie de l'abus de droit (a), à la bonne foi contractuelle (b) el à
l'interprétation du contrat par le juge (c).
a) Clause abusive et abus de droit dans les contrats.
L'abus est défIni par le Littré comme « l'usage mauvais que l'on fait de quelque chose»
il ajoute de façon plus précise « coutume, usage mauvais, qui s'introduit ». Dans cette second
acception, le mot « abus» s'applique assez bien aux clauses abusives visées par les différente
lois citées plus haut. Il s'agit d'interdire ou de réglementer les mauvaises pratiques contractuelle~
devenues si courantes que l'on a pu dire ou soutenir qu'elles constituaient une sorte de coutum
ou tout au moins d'usage professionnel, dans la mesure où ces clauses étaient imposées pl.'
l'ensemble d'une profession, dans ses conditions générales de vente par exempleS3 !.
En général, dans la théorie des contrats, il y a abus lorsqu'il est fait un mauvais usag
d'un contrat. Ainsi, tout contrat illicite ou annulable est-il certainement un contrat abusi(12. Mai~
pour donner au terme « abus» son véritable sens, il faut recourir à une définition plus juridique t
plus précise. La théorie juridique a, en effet, dégagé une notion particulière de l'abus, qui est cell
de l'abus des droits, autrement dit, l'usage mauvais que l'on fait d'un droit subjectif~33. Le dro
subjectif constitue l'ensemble des prérogatives que la loi accorde à son titulaire. Celles-ci ne sor
jamais accordées de façon absolue. Il y a une mesure à respecter dans leur exercice. On tomb
dans l'abus à partir du moment où la mesure est dépassée.
De façon générale, la notion d'abus ne présente de véritable intérêt qu'en présence dE
534
droits subjectifs qui accordent à leur titulaire des prérogatives nettement définies
. CE
prérogatives ne font pas défaut chez les professionnels rédacteurs des contrats d'adhésio
porleurs des clauses injustes à l'égard des consommateurs.
531 GHESTIN : « L'abus dans les eonlrals », G.P. 20 aoûl 1981, docl. p. 379 ; H. BRCKS : Thèse prée. p. 41.
m GHESTIN : « L'abus dans les eonlrals » • arlicle prée. p. 379.
m Ibid.
534 Ibid.

444
Et l'usage est déconcertant, voire éprouvant pour ces derniers dans les pays dépourvus de
tout texte législatif ou réglementaire protecteur comme c'est le cas des pays d'Afrique.
Comme nous avons déjà eu à le souligner, les contrats proposés aux consommateurs en
Afrique sont de plus en plus des contrats d'adhésion535 pour lesquels le principe du
consensualisme confme à la fiction et. apparaît pour une part inadaptée536. En réalité, le
consommateur, lorsqu'il conclut un tel contrat, consent véritablement à l'essentiel (chose et prix).
Mais ce faisant, il est censé également donner son consentement à diverses clauses accessoires, le
plus souvent prérédigées et dénommées « conditions générales ».
Le vendeur prend d'ailleurs généralement soin de faire apposer la mention «lu et
approuvé », chacun sachant bien que le consommateur signe les yeux fermés537• De plus, quelle
portée aura une telle signature si d'aventure elle était l'oeuvre d'un analphabète comme c'est
généralement le cas dans les pays africains ? Une chose est sure : la signature aura pour effet de
confIrmer et d'accepter à son détriment le déséquilibre contractuel préorganisé par le rédacteur
des clauses anormales.
Nous pensons que le consommateur peut trouver dans la théorie de l'abus de droit une
solution à ce problème de déséquilibre contractuel organisé d'avance par le biais des prérogatives
que le droit subjectif confère au professionnel. Nous savons bien que le critère essentiel autour
duquel fonctionne la théorie de l'abus est l'intention de Iluire m . Cette exigence n'est plus
requise539• La jurisprudence toute récente n'exige plus forcément l'intention de nuire540• Voilà qui
colle bien à la situation que nous défendons. Le contractant en position économique forte qui tire
un profIt excessif et injuste abuse de son droit. L'abus de droit s'étendrait même... à l'abus du
droit de ne pas renouveler une relation contractuelle541 .
D'application fréquente dans le domaine contractuel et très présente et usitée dans le
langage juridique africain, le recours à cette notion, à ce principe de création jurisprudentielle542 ,
m cr supra V. La Sous-section 1de la présente Section, §Il B.
536 COLLART-DUTILLEUL et DELEBECQUE: op. cil. W 97.
S37Ibid.
538 L. CADIET : « Abus de droit », Encyclopédie Dalloz 31 août 1992, p. 6.
539 ibid P. 3.
540 Civ. 1ère 6 déc. 1989, D. 1990,289 note GHESTIN ; lCP 1990, Il, 21534, note DELEBECQUE ; civ. 1ère 14
mai 1991, D. 1991 449, note GHESTIN ; Petites Affiches 8 juillet 1991, note HASSLER.
541 Obs. 1. MESTRE, R.T.D.Com. 1992,392.
.
542 Sur cc point V. L. CADIET : « Abus de droit », op. cil. p. 3, n04.

445
permettrait de sanctionner «une frange d'excès contractuels ISSUS des violences économique~
actuelles »543. Le recours à l'abus de droit dans nos sociétés (africaines) sera bénéfique al
consommateur à un double titre:
- il permettra de sauvegarder l'intégrité du consentement de façon beaucoup plus Jargl
que ne le pourrait la théorie des vices du consentement. Son usage permettrait de prendre el
considération non seulement les nouvelles données du droit de la consommation telles que le:
situations d'urgence et les conduites agressives544qui provoquent chez le consommateu
l'étourderie, la timidité ou la précipitation, mais aussi certaines «bavures» contractuelle
ignorées par la théorie tel que le « bon dol ».
- il donnera l'occasion d'assurer une protection unilatérale plus eftïcace et plus adaptée cil
545
consommateur en état de faiblesse
.
Si son application dans le domaine du droit de 1.
consommation reste assez exceptionnelle, il n'en demeure pas moins que le principe en lui-mê111
n'a jamais fait l'objet d'une contestation quelconque546. Certes, les décisions qui semblen
l'appliquer ne s 'y réfèrent pas expressément5 17
.
.
Mais on a toujours estimé que la loi du la janvier 1978 sur les clauses abusives n'av'li
pas enlevé au juge le pouvoir de recourir à la théorie générale de l'abus de droit548 . Le contra' r
aurait été une aberration, une stupidité législative car l'abus de droit, à l'exception des autr
pays européens qui le consacrent législativement549, est une création jurisprudentielle
France550. Il s'agit là d'un contrôle judiciaire qui s'exercerait ainsi parallèlement à celui de l'excè
d ,., d '
1
l
' 1
5~ 1
ep a mIs pour es causes pena es"
.
543
En cc sens voir Christian LAPOYADE DESCHAMPS, cours polycopié de droit civil, Maîtrise 1992/S
l30rdeaux l, spéc. P. 32 ct S., cité par A.-F. NGOMO : article précité P. 148.
'44 V. CALAIS-AULOY : « Les ventes agressives », arl. prée.
,~5 LAPOYADE DESCHAMPS: Cours polycopié de droit civil, op. cil., par Ngol11o, arl. prée., p. 148.
546 NGOMO : arl. prée., p. 148.
547 Civ. Ihe 14 mai 1991, D. 1991, 1,442, note Ghestin; P. A. 5 juillet 1991, note Hassler.
548 GHESTIN : Le contrat op. cil. n° 502, 604;
éd 1993 nOs 310 ; 330 ; « L'abus dans les contrats» précité,
383.
549 Voir en ee sens L. Cadiet : op. cil., n° 4. L'article 2 du code civil suisse pose un principe scion lequel « l'ab'
manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi ». Il en va de même des codes civils allemand (arl.226), iwli·
('11'1.833), autrichien (ar1.1295 al.2), espagnol (ar1.281 ), luxembourgeois (arl. 6 al. 1cr).
550 CADIET: op. cil., p. 3 n° 4.
551 G. PAISANT : « De l'eflicacité de la lutte contre les clauses <lbusives » arl. prée., p. 30, n° 6 ; NGOMO : a
prée., p. 148.

446
Sur
ce
contrôle
judiciaire,
la
Cour
de
Cassation
a
même
sous-entendu
qu'indépendamment du système des lois de 1978 et de 1988, le juge pourrait « refuser de faire
application d'une clause contractuelle claire et précise» dès lors qu'elle « serait constitutive d'un
abus de nature à la priver d'effet »552. Une décision de la Cour d'appel de Paris, dans cette
ascension judiciaire de l'abus, va jusqu'à envisager une fusion entre clauses abusives et clauses
pénales, sans en différencier le traitement juridique comme l'avaient suggéré certains auteurs))'.
Ainsi, une clause pénale pourrait-elle aussi être qualifiée d'abusive.
De toute évidence, lorsque l'abus a été commis, il faut le corriger. Les clauses abusives
dans les contrats n'en sont pas moins des abus de droit d'une partie au contrat sur l'autre,
généralement la plus faible. D'une manière générale, le retour aux mécanismes correcteurs,
notamment à la théorie de l'abus de droit, manifeste l'unité de l'abus dans les contrats.
S'il est plus souvent utile de prévenir l'abus, il est aussi logique de reconnaître que la
prévention ne pourra empêcher les abus de se commettre. Alors, une fois commis, ces abus
doivent être corrigés. Sur ce p'oint, la théorie de l'abus apparaît corrune un moyen « idéal» pour
remédier à l'injustice provoquée par la ou les clauses litigieuses. La théorie de l'abus de droit
apparaît ainsi comme un « procédé d'équité modératrice à la disposition du juge »554.
Elle peut s'appliquer à n'importe quelle prérogative conférée par la loi... ou par le contrat.
Elle a une « virtualité d'application illimitée »555. A nos juges (africains) de savoir s'en servir
pour rétablir l'équité, la justice contractuelle souvent mise à rudes épreuves par les clauses
abusives des professionnels. Ne permet-elle pas au juge de mesurer la bonne foi du contractant
auteur des clauses abusives?
b) Clause abusive et bonne foi contractuelle.
Pour faire intervenir la bonne foi dans la résolution des problèmes posés par les clauses
abusives,
nous aurons une fois de plus recours aux étrangers,
notamment français et
communautaire. Le droit français parce qu'il traite de la bonne foi dans le Code civil, nous ne le
dirons pas assez, celui-ci étant très usité clans les anciennes colonies françaises cl' Afrique; le c1roit
m Civ. 1ère 6 déc. 1989, D. 1990,289, note Ghestin; JCP 1990, II, 21534, note DELEBECQUE.
553 SINAy
CITERMANN : «Clauses pénales et clauses abusives: vers un rapprochement », in «Les clauses
abusives dans les contrats types en France et en Europe », Coll. Droit des affaires, LGDJ 1991, p. 167.
554 CARBONNIER : Droit civil, Les obligations T. IV, 14ème éd. n° 230.

447
communautaire parce que la directive 93113 du 5 avril 1993 relative aux clauses ahusives t~lÎt de
la bonne foi un des critères essentiels d'identification ou d'appréciation d'une clause abusive dan~
le contrat conclu entre un professionnel et un consommateur.
Aux termes de l'article 1134 alinéa 3 du code civil, «les conventions doivent êtl"(
exécutées de bonne foi ». Cette disposition a donné lieu à plusieurs interprétations doctrinale~
quant à la portée de la bonne foi. Selon la doctrine classique la bonne foi de l'article 1134 al.3 dl
Code civil est un simple résumé des règles d'interprétation des articles 1156 et suivants du même
code qui n'ont elles-mêmes aucun caractère impératif56. Il s'agit là d'une thèse qui a pour obje
de rattacher la loyauté contractuelle à l'intention commune des parties557 .
Selon le courant moderne, la disposition de l'article
1134 al.
3 est un moy(
d'assouplissement du contrat. Elle est «un correctif à ce qu'a de trop rigide le dogme (
l'autonomie de la volonté »558, un instrument de dirigisme contractuel, un mode de conciliatic
du contrat et de la loi559.
DEMOGUE, de son côté, affirmait que les obligations n'existaiènt pas aveuglement po
elles-mêmes mais pour un but utile et social560. Par ce rapprochement entre bonne foi et b
social, cet auteur a eu le mérite de dégager la bonne foi de la commune intention des parties. (
qui donne à la bonne foi une certaine autonomie et fait d'elle un principe de droit « soumis à s
règles propres »561. De sorte, «le contrat formé, ses effets subissent une sorte d'objectivation;·
n'est plus seulement un lien personnel entre deux ou plusieurs personnes privées, mais u
situation juridique qui intéresse l'ordre social»562.
555 MALAURIE et A YNES: Droit civil, Les obligations, 2" éd. 1990, p. 61; H. BRICKS: thèse précitée. p. 26.
556 Voir par exemple: Com. 19 janvier 1981, Bull. Civ. l, n° 34, p. 25. Pour une étude détaillée de' ces prohlèn
voir J. DUPICHOT : « Pour un retour aux textes: défense et illustration du petit guide ilne des arlidcs 115
1164 du Code civil », in Etudes Jacques FLOUR, 1979, P. 179 et S.
m Yves PICOD : Le devoir de loyauté dans l'exécution du contrat, thèse précitée, [J. X1 n° 62.
mG. LYON-CAEN: « De l'évolution de la notion de bonne foi », R.T.D.Civ. 1946. n° 9, [J. X2.
mlhid.
560 Code ci vi 1annoté, IV, art. 1134, n° 160.
561 PICARD et PRUD' HOMME: « De la résolution judiciaire pour inexécution des ohligations » R.T. D.Civ. 19
P.61 et s.
562 J. F. PILLEBOUT : « Recherches sur l'exception d'inexécution », LGDJ 1971, n° 201, p. 29X.

448
VOUIN lui a choisi une position intermédiaire qui le conduit à nier toute véritable portée
563
à la notion de bonne foi contractuelle
. Comme a pu le dire un auteur, cette discussion
doctrinale sur la place de la bonne foi contractuelle par rapport à la volonté des parties procède
564
d'un faux débat
. Toujours selon cet auteur, « si la bonne foi contractuelle n'incarne nullement
la volonté contractuelle, elle n'a pas pour autant vocation de la limiter. Sa fonction est de justifier
des obligations que la volonté des contractants ne permet pas de déceler. La loyauté contractuelle
intervient là où le contrat ne dit rien, c'est-à-dire là où il serait illusoire d'invoquer une prétendue
'
. ,
d
.
ffi
.
,
565
vo1onte qUI ne s est pas u tout ou ll1SU tsamment expnmee»
.
En réalité, la bonne foi traduit, que ce soit en droit français, en droit romain ou en droit
allemand566, deux attitudes mentales distinctes dont l'examen permet de comprendre qu'un
éminent auteur ait pu la considérer comme « la plus juridique des règles »567. Elle sera tantôt
une disposition de l'intelligence (c'est la bonne foi protégée), tantôt une disposition de la volonté
(c'est la bonne foi exigéei 6H •
Dans le premier c~s, elle constituera une technique permettant de protéger la croyance ou
569
l'ignorance légitime d'un droit subjectif ou d'un fait matériel
. A l'opposé, la mauvaise foi en
sera la connaissance.
Dans le second cas, celui qui nous intéresse plus spécialement, elle correspond à la
loyauté exigée dans la formation et dans l'exécution des actes juridiques. Elle apparaît alors
570
comme une référence de comportement, imprégnée par la règle morale chère à RIPERT
, et
563 R. VOUIN : « La bonne foi: notion et rôles actuels en droit privé français », thèse, Bordeaux 1939, LDGJ n°
58, p. 103. L'auteur reconnaît volontiers qu'« entre la volonté et la loi, la bonne foi paraît susceptible de
s'interposer avec succès parce qu'elle semble procéder à la fois de l'une et de l'autre. Dans ce sens, elle paraît
intervenir au sein même de la protection légale du contrat pour l'assouplir, l'individualiser et la rendre plus
proche de ce qu'en fait ont voulu les parties. Et, à l'inverse, au coeur du contrat dans le domaine le plus réservé de
la volonté autonome, la même bonne foi vient introduire un élément objectif et légal ».
%4 Y. PICOD : thèse prée. p. 82.
565 Ibid.
566 Y. PICOD : « L'exigence de la bonne foi dans l'exécution du contrat », in Le juge et l'exécution du contrat,
Colloque. IDA 28 mai 1993, P. 58; le droit allemand oppose la croyance erronée (guter glaubcn) à la loyauté (treu
und glauben).
567 G. CORNU: «La bonté du législateur", R.T.D.Civ. 1991 P.283.
56X Y. PICOD :ar1. prée. P. 58.
569 Cette acception est consacrée en droit des obligations, notamment par les règles relatives à leur extinction, tels
que les articles 1239, 1240, 1299 c. civ.
570 G. RIPERT: La règle morale dans les obligations civiles, LGDJ 4è éd. 1939.

449
dont le retour dans les obligations civiles comme commerciales en cette fin de siècle est très
57l
remarqué
.
Ce devoir de loyauté est largement connu et reconnu dans la procédure d'élaboration du
contrat: la théorie du dol ci-dessus analysée, les concepts d'obligations précontractuelles et
contractuelles de renseignement précédemment étudiées, et d'obligation de négocier de bonne foi
en sont l'émanation la plus directe572• Dans la phase d'exécution du contrat, la bonne foi est une
directive édictée par l'article 1134 al. 3 du code civil, le législateur ayant renoncé à appréhender
« l'irréductible diversité des situations» 573.
Pourtant du fait que la bonne foi peut aider à équilibrer les prestations réciproques,
574
certains auteurs ont souhaité l'extension de l'article 1134 al. 3 à la formation du contrat
, car un
contrat dont la bonne foi a été absente lors de sa formation ne pourra pas s'exécuter de bonne
foi, la tricherie due à la mauvaise foi de l'une ou l'autre des parties ayant faussé l'équilibre dès le
départ.
575
Si la bonne foi est considérée comme un principe
de droit demt le but est d'introduire
« la franchise, la droiture, la fidélité »576dans les relations contractueUes, il va de soi qu'eUe est un
facteur de rétablissement de la loyauté dans les engagements5?7. M. Le Professeur GHESTIN
écrit à ce propos: « Le principe de bonne foi consacre une exigence générale de loyauté dans les
relations contractuelles, sans conférer au devoir de loyauté découlant de l'article 1134 du code
"1
1
d
.
.
sn
CIVI
va eur e pnnCIpe autonome »'
.
Certes, il arrive, et cela arrive très souvent, qu'un contractant s'écarte de cette exigence
de foi à travers teUe ou teUe clause contractueUe. Ce contractant n'a pas forcément l'intention de
nuire à son cocontractant, mais est simplement animé par le désir d'obtenir un avantage anormal
par des procédés déloyaux. C'est dans cette optique, et en visant l'article 1134 al. 3 du Code
571 V. B. OPPETIT : « Elhique el vie des affaires », in Mélanges Co\\omer 1993. P. 319 et s.
m Y. Picod : arl. rréc. r. 59.
m G. CORNU: « Regards sur le Titre III du Livre Il du code civil », cours de DEA de droit privé, Paris, Les
cours de droit, 1977, P. 56 et s. Cité rar Picod dans l'article ci-dessus cité p. 59.
574 V. En ce sens les observations de F. AUQUE: R.T.D.Civ. 1992 P. 459.
m Certains auteurs voient dans la bonne foi un grand principe juridique d'une valeur supra-légale. On cite parffl
ces auteurs Domat, Cambaccres, Bigot de Prcmaneu, etc.
576 Cambaceres, cité rar Picod, thèse préc. P. 85.
m F. AUQUE : obs. préc. p. 459.
578 GHESTIN : Le contrat, op. cil. nOs 185 et 186.

450
civil, que la Cour de cassation a d'abord implicitement laissé entendre qu'il n'était pas impossible
qu'elle autorisât le juge, sans son contrôle, à sanctionner les attitudes manifestement déloyales
des parties, autrement dit, les déséquilibres contractuels579 •
Au fait, la bonne foi se révèle être ainsi, au fond un certain comportement des parties au
contrat, lequel doit être loyal, ce qui suppose qu'aucune n'abuse des droits que lui confère sa
situation. Et cette obligation positive de loyauté s'entend de manière extensive580• Dans cette
logique, le contractant doit s'abstenir d'avoir recours à des procédés malhonnêtes pour obtenir le
consentement de l'autre, il doit aussi s'interdire de profiter de la situation de faiblesse ou
d'infériorité dans laquelle les circonstances auront placé ce dernier581 • C'est dans cette logique
aussi de rétablissement de l'équité contractuelle, de la justice contractuelle que le législateur
européen a introduit l'exigence de bonne foi dans sa directive relative aux clauses abusives.
Comme principe de droit visant à faire intervenir la sincérité dans les relations
contractuelles, la bonne foi a été considérée par Domat, dans sa tentative d'opposer lois
immuables et lois arbitraires, comme une de des lois immuables, autrement dit, une loi
.
' 1 '
f f '
582
ommpresente, en tous leux et en tous temps et ne sou rant aucune exception
.
Un auteur n'a pas hésité à dire que l'article 1134 al. 3 consacrerait « un grand principe
juridique d'une valeur supra-légale »583. Issue de la morale dont le droit s'inspire pour ériger ses
grands
principes juridiques,
elle
serait
valable
et
utilisable
dans
toutes
les
sociétés
contemporaines. Aussi pourrait-on recourir au principe de la bonne foi pour rééquilibrer les
,
1
prestations faussées par les clauses injustes. Mais tout ceci interpelle le juge qui, pour jouer
pleinement son rôle, devrait se livrer à un exercice casuistique : celui de l'interprétation de la
volonté des parties.
cl Clauses abusives et interprétation du contrat par le juge.
Pour une fois encore, on partira du droit français des contrats pour proposer des solutions
pour la résolution des problèmes posés par les clauses abusives dans les pays d'Afrique. Ces
solutions pourront très bien être mises en évidence sans trop de difficultés d'autant plus que le
579 Civ. 1ère 6 déc. 1989, D. 1990, 289, note Ghestin ; JCP 1990, éd. Ent., II, 15902, obs. DELEBECQUE.
580 A-F. NGOMO : article prée. p. 149.
581 Ibid.
582 DOMAT, cité par Y. PICOD : thèse prée. p. 84 et 85.

451
droit français n'est pas un droit inconnu en Afrique, ses différents codes étant devenus des
sources d'inspiration pour les différents législateurs africains.
En affirmant, par exemple, que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à
ceux qui les ont faites », l'article 1134 al. 1 du Code civil pose un principe essentiel et
fondamental de souveraineté de la volonté des parties. Les fondements de ce principe sont bien
connus : liberté et égalité des contractants, impératif de sécurité, de prévisibilité de leurs droits et
obligations. Sa portée l'est également, tant à l'égard des parties qu'à l'égard du juge584•
Pour ce qui est du juge, cet article s'impose à lui, il ne saurait donc pas, sous prétexte
d'équité ou pour tout autre motif, modifier le contenu du contrat sous peine de s'exposer
systématiquement à la censure de la Cour de cassation585 • Il a donc l'obligation de respecter
toutes les clauses du contrat. Et cette exigence concerne, au demeurant, aussi bien les clauses
réellement discutées par les parties que les clauses préétablies par l'une d'entre elles, ou encore
les fameuses clauses dites de style, reproduites dans l'acte sans que les parties y aient prêté une
réelle attention ou en aient vraiment saisi le sens586•
Cette primauté de la loi contractuelle s'impose dès lors que les termes du contrat sont
clairs et compréhensibles. Elle perd sa force et s'estompe lorsque les stipulations contractuelles
sont obscures ou ambiguës. Dans ces conditions, la loi reconnaît au juge un rôle actif
d'interprète. Le Code civil le souligne très clairement dans plusieurs de ses articles, notamment
les articles 1156 et 1157 dans lesquels il utilise le verbe «devoir ». Dans l'article 1156, il est dit
qu'« on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties
contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ». L'article 1157 précise que
« lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel
elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun ».
Cela dit, ce rôle actif du juge est plus ou moins accentué en fonction des circonstances.
Dans certains cas, l'interprétation du juge se justifiera par une volonté équivoque des parties
matérialisée par des stipulations obscures ou ambiguës. Mais dans d'autres cas, ce pouvoir qui lui
583 Voir en ce sens la note 541.
584 Jean MESTRE et Anne LAUDE « L'interprétation "active" du contrat par le juge », in Le juge et l'exécution
du contrat, Colloque I.D.A. précité P. 7.
585 Casso Soc. 9 octobre 1985, R.T.D.Civ. 1986,342, obs. J. MESTRE; Corn. 9 octobre 1990, R.T.D.Civ. 1991, p.
113.

452
est reconnu peut l'amener à créer, à modifier, sans le dire, le contrat, à l'orienter vers une plus
grande justice contractuelle. Ce pouvoir d'interprète reconnu au juge peut être bénéfique aux
consommateurs, pourquoi dès lors ne pas l'étendre à leur profit?
Si le juge est autorisé à rechercher dans les conventions la commune intention des parties
à une convention, c'est en vue d'y rétablir une certaine justice contractuelle. Ceci signifie que le
juge devra s'efforcer de reconstituer ce que les parties ont véritablement eu en vue, ce qu'elles
ont concrètement voulu, ce sur quoi elles sont réellement tombées d'accord au moment de la
conclusion de l'acte. Cette situation n'existe pour le juge que dans le cas d'une obscurité ou
ambiguïté incontestable des termes du contrat, comme nous avons déjà eu à le dire plus haut.
En effet, l'ambiguïté est effective lorsque les documents contractuels sont imparfaits. Leur
imperfection peut provenir de plusieurs sources: l'ambiguïté des termes contractuels peut naître
d'un malentendu, d'une maladresse dans la rédaction, d'une insuffisance, voire d'un excès dans la
rédaction587 .
Il Y a des contrats dont l'ambiguïte est plus fréquente que d'autres. Si ceux-ci sont le plus
souvent soumis à interprétation, en raison des problèmes qu'ils posent lors de l'exécution du
contrat, dans les pays comme la France588, ils bénéficient toujours dans les pays africains de
l'inactivité des juges dans ce domaine. C'est le cas notamment du contrat d'assurance qui reste
congénitalement complexe dans sa rédaction non seulement parce qu'il ne porte pas sur un
événement certain et déterminé, mais également parce qu'il est un contrat d'adhésion dans lequel
coexistent des dispositions générales prérédigées avec des clauses particulières manuscrites589•
Pour protéger l'adhérent contre les dangers de la rédaction unilatérale des contrats truffés
de clauses abusives, les juges utilisent souvent un mode d'interprétation orientée, du moins fort
active, qui se fonde sur des directives d'interprétation qui ne sont pas
légales mais
, .
590
pretonen nes·
.
586 Cf Civ. I1I i\\ 3 mai 1968, Bull. Civ. Ill. n° 184.
'87 MESTRE et LAUDE: article prée. P. 10.
m Sur les principaux contrats interprétés, voir notamment M. H. MALEVILLE: « Pratique de l'interprétation des
contrats, étude jurisprudentielle », P.U. Rouen, 1991, P. 305.
,89 MESTRE et LAUDE: art. Prée. P. Il.
,90 Ibid. P. 15.

453
La jurisprudence française dont l'influence est très forte dans les pays africains, fait
application des articles 1602 et 1162 du" Code civil pour résoudre le problème de l'ambiguïté des
stipulations contractuelles. L'article )602 dispose: « Le vendeur est tenu d'expliquer clairement
ce à quoi il s'oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur ». Quant à
l'article 1162, il énonce que « dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé,
et en faveur de celui qui a contracté l'obligation ». Ces dispositions se retrouvent aussi dans la
directive 93/13 CEE du 5 avril 1993. L'article 5 de cette directive dispose: «Dans les cas des
contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces
clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le
sens d'une clause, l'interprétation la plus favorable au consommateur prévaut ».
En décidant que l'obscurité ou l'ambiguïté de certaines stipulations doivent s'interpréter
contre le stipulant, c'est-à-dire contre celui qui a eu l'initiative et qui a rédigé le contrat, les
rédacteurs des textes ci-dessus cités ont vu juste. Et la justesse de cette solution a été soulignée
par d'éminents auteurs591 : L'adhérent, ou « celui qui contracte l'obligation» ne participe en
aucune façon à la rédaction du tontrat. Il est donc juste que l'interprétation se fasse en sa
faveur592 . M. Le Professeur Ph. SIMLER a même écrit à propos de l'article 1162 du Code civil :
« ainsi entendu, l'article 1162 est devenu un instrument privilégié d'interprétation des contrats
d'adhésion»593. Ce texte s'inspire sans doute de la célèbre maxime de Loysel selon laquelle « Qui
d· 1
~94
vend le pot,
It e mot »-
.
Ce phénomène contemporain, où le juge vient au secours de la partie la plus faible au
contrat dès lors qu'une stipulation n'est pas totalement claire est bien connu et peut être illustré
par quelques décisions jurisprudentielles:
- Il s'agit ici d'un contrat d'adhésion: l'interprétation concernait une stipulation d'un
contrat d'assurance-vie relative à la détermination des bénéficiaires. L'assureur refusait de faire
droit à une demande en paiement formée par une veuve en se retranchant derrière les termes de la
police, et en faisant observer que les enfants simplement conçus «ne vivaient pas au foyer de
è
è
591 J. CARBONNIER: Droil civil, Les obligalions, T. IV, 18è éd., nOs 142 s; idem l7è éd.,
16è éd., 15 éd., 14 éd~
P. 236; MARTY et REYNAUD: Les obligalions , tome l, 2è éd. 1988, sirey, nOs 240 s ; lame 2, n° 219, P. 201 ;-
G. BERLIOZ op. cit. nOs 242 et s.
592 Voir en ce sens toute la jurisprudence relalive au conlral d'assurance.
59:1 Juris-classeur Civil: art. 1156 à 1164, n° 57.
594 Cilé par MESTRE et LAUDE: arl. prée., p. 15.

454
l'assuré ». La Cour de cassation lui. a donné tort en observant que «si les conditions
d'application du contrat d'assurance-décès doivent être appréciées au moment de la réalisation
du risque, la détermination des enfants à charge vivant au foyer doit être faite en se conformant
aux principes généraux du droit, spécialement à celui d'après lequel l'enfant conçu est réputé né
chaq ue fois qu'il Y va de son intérêt, étant observé que la majoration du capital-décès, lorsqu'il
existe des enfants à charge, est destinée à faciliter l'entretien des enfants »595.
- Ici, le litige concerne le contrat d'assurance-vol, et le juge, dans son intervention, était
appelé à préciser le sens à donner à la clause d'introduction clandestine du voleur, c'est-à-dire à
l'insu de l'assuré, contenue dans la police d'assurance: la cour de cassation a approuvé le juge
d'avoir décidé « qu'à l'entrée clandestine, qui s'entend de tout entrée réalisée à l'insu de l'assuré
et dans un but illicite, doit s'assimiler toute manoeuvre crédible de nature à tromper l'assuré sur
l'identité et les intentions véritables de celui auquel il ouvre éventuellement sa porte »596.
Il Y a aussi des pratiques qui consistent à faire suivre une clause imprimée par une clause
manuscrite. Le juge, en cas de contradiction entre ces deux types de clauses, privilégie la
.
.
première sur la deuxième parce qu'elle est censée refléter mieux la volonté des parties597 .
Toujours dans le but d'accroître la protection de la partie présumée plus faible, la
jurisprudence
ne
manque
pas
d'imagination.
Ainsi,
fait -elle,
par
voie
d'interprétations
« complétives », découler du contrat, et ce, en l'absence de la volonté expresse des parties, des
obligations qui relèvent de l'idée qu'un contractant professionnel doit éclairer par l'information
son cocontractant profane sur l'opération que réalise le contrat, c'est-à-dire sur l'objet et
l'opportunité à conclure le contrat en vue tant sur le plan technique que pécuniaire5911 •
Cette obligation de renseignement qui se double parfois d'une obligation de conseil et de
mise en garde suppose « une appréciation qui oriente la décision de l'autre partie, ou même dans
certains cas, se substituer à celle-ci »599. On retrouve à travers cette obligation l'idée de bonne
foi, de confiance nécessaire à la conclusion d'un contrat d'adhésion6°O. Et cette idée de bonne foi
S95 Cîv. 1ère, la déc. 1985, Bull. Civ. 1 W 339; Rev. Tr. Dr Civ. 1987, P. 309, obs. J. MESTRE.
596 Civ. 20 mars 1989, Bull. Civ. 1 n° 124.
597 G. BERLIOZ: op. cit. N° 250 et s. et les références citées.
598 LUCAS de LEYSSAC : « L'obligation de renseignement dans les contrats» in L'information en droit privé,
LGDJ 1978 prée.
599 1. GHESTIN : Le contrat, op. cit., n° 458.
600 G. BERLIOZ: op. cit., p. 103.

455
contractuelle qui comporte« l'obligation pour le professionnel de mettre le profane à son niveau
de connaissance pour traiter à armes égales »601 exclut nécessairement l'idée d'abus602.
On voit donc clairement que l'interprétation du contrat est un moyen de protection nor:
négligeable du consommateur adhérent contre les clauses abusives. Toutes ces règles existent
dans les pays africains. Les juges aussi existent ainsi que les tribunaux. Les litiges entre
professionnels et consommateurs en matière de clauses abusives abondent eux aussi. Lé
coexistence entre les règles du Code ci\\·il et les règles locales est bien présente et la survivance.
voire l'int1uence déterminante des premières sur les secondes, est un fait patent. Pourquoi alor~
ne pas utiliser ces règles du Code civil ou autres, quitte à les adapter aux réalités locales, pOUI
venir au secours des consommateurs qui éprouvent tant le besoin d'aide dans le domaine relatil
aux clauses abusives?
Cette intervention active du juge dans le contrat pour éliminer les clauses abusives dans
les rapports entre professionnels et consommateurs et son caractère autonome n'ont-elles pas
reçues une confIrmation implicite du législate~r français dans sa loi du 1cr février 1995 ? Le
nouvel article L. 132-1, tout en conservant le système d'élimination des clauses abusives par
décrets, reconnaît au juge, et ce à titre principal, le pouvoir d'éliminer les clauses abusives dans
les contrats conclus entre professionnels et consommateurs. Comme l'a clairement souligné ur.
auteur, « les plus sceptiques se rassureront par la lecture de l'avant dernier alinéa du même article
en ce qu'il fait allusion aux clauses "jugées" abusives »603. Les travaux préparatoires ne laissent
aucun doute : pour le législateur, il était clair que le texte nouveau reconnaissait au juge le
pouvoir de déclarer une clause abusive sans que celle-ci ait été préalablement interdite par ur.
décret60-l.
Par ce texte, le législateur a opéré un alignement· sur la jurisprudence de la première
Chambre civile de la Cour de cassation du 14 mai 1991 605qui, contrairement aux dispositions de
l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978, et au prétexte de les appliquer, reconnaissait au juge le
601 Théodore IVAINER : « De l'ordre technique à "ordre public technologique », lep 1972 II 2495 spéc. na 37 e
s.
602 A.-F. NGOMO : art. prée., p. t51.

456
pouvoir autonome de déclarer une clause abusive, alors même que celle-ci n'avait fait l'objet
d'aucune interdiction par décret.
Suite à cette jurisprudence, le décret n° 93-314 du la mars 1993606 réformant la
Commission des clauses abusives donnait aux juges, en son article 4, la possibilité de la saisir
pour avis. Cet article dispose : «lorsqu'à l'occasion d'une instance, est soulevé le caractère
abusif d'une clause contractuelle, le juge peut demander à la Commission des clauses abusives,
par une décision non susceptible de recours, son avis sur le caractère abusif de cette clause, tel
que défini à l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 ... » On voit là une sorte de consécration de la
solution admise le 14 mai 1991 par la première Chambre civile de la Cour de cassation, sinon
quel serait l'intérêt de cette nouvelle procédure si le juge ne pouvait supprimer des contrats que
des ciauses déjà expressément interdites par décrets gouvernementaux ?607 Le rôle de la
Commission consisterait donc à contribuer à l'harmonisation de la jurisprudence en la matière.
Cependant, et malgré le décret n° 93-314 du la mars 1993, la Cour de cassation a continué de
compléter à sa guise le système qu'elle a inauguré le 14 mai 1991 : gardienne de l'unité du droit,
elle contrôlerait elle-même la notion de clause abusive en substituant le cas échéant sa propre
appréciation à celle du juge du fond608 .
L'alignement de la loi du 1er février 1995 sur la jurisprudence du 14 mai 1991 a donc été
voulu. Comme l'a souligné un auteur, en le faisant le législateur n'a rien fait d'autre que de se
rendre « aux raisons de la Cour de cassation »609. D'ailleurs, la solution aujourd'hui retenue par le
législateur français est d'une logique absolue : elle exprime un juste retour aux sources
60.1 G. PAISANT : « les clauses abusives et la présentation des contrats dans la loi n° 95-96 du 1er février 1995 »,
D. 1995, p. 104.
604 Déclaration Fosset, J.O. Sénat (CR), 16 nov. 1994, p. 5569.
605 Casso Civ. lèr< 14 mai 1991,0.1991, P. 449. note J. GHESTIN; 0.1991, IR, p.163 ; RTO civ. 1991, p. 526,
obs. J. MESTRE; T. HASSLER: « Clause abusive et perte d'une pellicule photo: un arrêt important: casso civ.
1ère 14 mai 1991 », in Petites Affiches 8juillet 1991, n° 81, p. 18.
606 JCP 1993, éd. G .. III, 66060 ; Y. CHARTIER « la réforme de la Commission des clauses abusives », lCP 1993,
Act. n° 15 ; M. KERNINON : « la réforme de la Commission des clauses abusives », Rev. Conc. Consom., nov.-
déc. 1993, p. 12.
607 G. PAISANT : « les clauses abusives et la présentation des contrats dans la loi n° 95-96 du 1" tëvrier 1995 »,
D. 1995, p. 104.
('oK Casso Civ. 1ère 26 mai 1993, O. 1993,568, note PAISANT; JCP 1993, n, 22158, note BAZIN; Bull. civ. 1, n°
192.
(,0') PAISANT : « les clauses abusives et la présentation des contrats dans la loi n° 95-96 du
1" tëvrier 1995 », O.
1995, p. 104.

457
puisqu'elle figurait dans le projet de loi 1978. Et le projet du Code de la consommation de 1990
,
l
d
l
~
610
va ega ement ans e meme sens.
Certes, la protection est limitée, le juge ne pouvant apprécier que la clause litigieuse et
non l'ensemble du contrat. Mais, en refusant d'appliquer une clause abusive parce qu'ambiguë,
ou en contradiction avec le sens du contrat dans son ensemble, il réduit par là même le
déséquilibre provoqué par cette même clause. Et c'est là que résident l'essence et le mérite de
l'intervention active du juge.
610 Doc. Fr., coll. Rapp. Oflïciels, avril 1990, article L. 104.

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE ~
\\

459
Nous avons, à travers les deux chapitres que comportent cette partie, rrus en exergue
quelques problèmes, sinon les problèmes essentiels des consommateurs en Afrique tout en
prônant la promotion ou la mise en valeur de leurs droits élémentaires, et ce, avec comme points
d'orientation les Principes Directeurs des Nations Unies en la matière.
Si la recherche de l'équilibre des prestations réciproques demeure l'objectif primordial,
voire essentiel dans toute mise en oeuvre des législations ou réglementations protectrices, cet
objectif ne pourra être atteint que si l'on reconnaît en Afrique ['existence juridique du
consommateur en tant que tel, détaché du citoyen. Ceci relève certainement du devoir des
pouvoirs publics.
Les principes des Nations Unies sont clairs dans ce sens. Nous n'en voulons pour preuve
que les mots ou termes utilisés au début des dispositions de chaque principe. Chaque principe
débute par les termes: «Les gouvernements devraient... », sig!1e manifeste d'une interpellation
directe, d'une invitation directe, mais non obligatoire, à prendre en considération les problèmes
des consommateurs dans leurs rapports avec les professionnels et à légiférer en vue de les
protéger contre les excès de tout bord. Si cette invitation à mettre en place des législations
protectrices n'est soumise à aucune contrainte de la part des Nations Unies, il n'en demeure pas
moins qu'elle est vivement souhaitée. On voit là une sorte de responsabilité morale des Nations
Unies vis-à-vis des consommateurs de tous les pays.
Mais si les lois sont nécessaires pour assurer la protection des consommateurs de chaque
pays, elles ne leur seront profitables que si elles sont adaptées à leurs réalités locales. Il s'agit
sans aucun doute d'un simple détail, mais d'un détail très important et dont la non prise en
considération enlèverait aux lois votées toute leur efficacité. Ce détail, les Etats africains
devraient l'avoir en vue au moment où leurs gouvernements auront le loisir de voter des lois
pour protéger leurs consommateurs.

TR01S1EME PARnE:
L'ADAPTATION DU SYSTElVIE JURIDIQUE
AUX EXIGENCES DE LA PROTECTION
DU· CONSOMMATEUR AFRICAIN.

461
A chaque région du monde correspond un type de société déterminée, et à chaque société
s'identifient des réalités bien spécifiques. Ces réalités correspondent à des modes de. vie
particuliers et cette différence dans les comportements confère à chaque peuple une originalité
singulière. Le continent africain n'échappe pas à cette vérité universelle. Bien au contraire, il
révèle une originalité sur tous les plans: social, économique et culturel.
Sur le plan social, son originalité se remarque dans les structures claniques et tribales de
sa population, et ce quel que soit le pays désigné.
Sur le plan économique, il se distingue des autres continents par son retard caractérisé
dans tous les domaines : une participation très peu significative dans le commerce mondial, un
secteur commercial ambivalent avec d'un côté le secteur informel majoritaire, et de l'autre le
secteur moderne limité aux classes privilégiées, un retard dans le progrès technique, une
insuffisance ou absence d'investissements dans la recherche, des exportations des produits
dangereux et/ou douteux sur ses divers marchés, un théâtre d'opération des contrefacteurs ou
falsificateurs des produits vendus dans le commerce mondial, un niveau de vie très bas de la
population, une inadéquation entre les produits vendus et les besoins essentiels des populations,
une intlation galopante des prix au-dessus du pouvoir d'achat des populations à faible revenu, etc.
Sur le plan culturel, il se caractérise par une diversité linguistique remarquable doublée
. d'une diversité culturelle propre à chaque Etat, un taux d'analphabétisme très élevé, surtout dans
les couches sociales défavorisées ; une sous ou absence d'informations concernant les produits
vendus sur les marchés, une insuffisance de connaissances des populations des nouvelles données
économiques et commerciales qui entraîne une absence de choix éclairé et lucide des
marchandises distribuées, une insuffisance de culture qui empêche la maîtrise de l'usage des
produits devenus plus complexes, etc. Toutes ces différences par rapport aux autres continents
font de l'Afrique un continent particulier.
Certes. la diversité des réalités particulières propres à chaque continent fait la richesse de
l'humanité. Mais elle peut aussi faire le bonheur de l'homme dès lors qu'elles sont conjuguées de
façon harmonieuse avec le droit, discipline régulatrice de l'équilibre et de la stabilité sociale d'un
Etat. Quand l'Association Sénégalaise pour la Défense de l'Environnement et des Consommateurs
(A.S.D.E.C.) organise des causeries religieuses (musulmanes)'à des fins sensibilisatrices pour les

462
consommateurs locaux J, elle fait là montre d'une certaine spécificité de la société sénégalaise que
le législateur se doit de ne pas ignorer. Quand la "Consumers' Association of Ghana" (C.A.G.)
invite l'Eglise à faire l'éducation du consommateur2, elle expri~e là un~ certaine originalité de la
société ghanéenne, et à travers elle la société africaine à l'intérieure de laquelle toute institution a
Ull
rôle spécifiquc ~I jouer dans la /ulle pour J'amélioration des conditions de vie du
consommateur.
Dans les exemples cités, il s'agit, pour ces deux associations, "de sensibiliser les
populations en partant de leurs propres références socio-philosophiques et culturelles ,,3. Ce qui
est une bonne manière de faire passer le message relatif à la nécessité de défendre les intérêts des
consommateurs.
Si l'on prend l'exemple du Sénégal, on peut dire que l'initiative de l'A.S.D.E.C. a reçu un
accueil favorable de la population locale. "Les notabilités politiques et religieuses ont toutes
reconnu la justesse et la pertinence de la défense de la cause des consommateurs qui entrent en
conformité avec les préceptes du Livre Saint (le Coran). Beaucoup d'entre elles ont, au cours de
leurs interventions, fermement promis de sensibiliser leurs disciples et fidèles afin qu'ils militent et
défendent les justes causes"~ qu'incarnent les associations dans leur lutte pour un devenir meilleur
des consommateurs.
Du côté du Ghana, l'appel de la c.A.G. aux autorités religieuses fut lancé lors du
symposium organisé par l'église anglicane sur le thème "libéralisation du commerce et les intérêts
des consommateurs"S et auquel était conviée l'association. Celle-ci, après avoir présenté les droits
et devoirs du consommateur, appela l'Eglise à intégrer son éducation dans ses activités.
S'appuyant sur les effets pervers de cette libéralisation, notamment
la facilité quant à
J
"Malheur aux fraudeurs qui lorsqu'ils font mesurer la marchandise pour leur propre compte, exigent la pleine
mesure et qui, lorsqu'eux-mêmes mesurent ou pèsent pour les autres, leur causent préjudice et perte. Ceux-là ne
pensent-ils pas qu'ils seront ressuscités en un jour terrible, le jour où les gens se tiendront débout devant leur
Seigneur ?" ( Coran: sourate 83, versets 1 à 6). C'est par cette invocation divine tirée du Saint Coran qui légitime
ainsi du point de vue religieux le principe de la défense du consommateur que l'Imam de la ville de Thiès (ville
située à 70 km de Dakar, Sénégal), a ouvert les causeries religieuses organisées par l'A.S.D.E.C. Ces causeries se
sont déroulées dans la nuit du 13 au 14 décembre 1994 à la Cité "Lmy" en présence d'une foule nombreuse,
attentive et intéressée. Les nombreux fidèles présents furent convaincus par les arguments tirés à la fois de leurs
expériences de la vic courante ct des enseignements du Coran. Voir en ce sens, "Consommation-Développement"
W 12, Bull. d'Info. Trim. IOCU-ENDA, décembre 1994, P.6.
2 "Consommation-Développement" N° 11, décembre 1993, P. 2.
:1 "Consommation-DéveloppemenL" N° 12 précité, P.6.
4 "Consommatioll-Développement" N° 12 précité, P. 6.

463
l'introduction des produits de qualité douteuse, l'invitation adressée à l'Eglise vise une plus grande
sensibilisation par les prêtres des fidèles de leur paroisse lesquels doivent recevoir les éléments
d'éducation nécessaires sur la nutrition, l'alimentation, la salubrité pouvant leur permettre de se
,
6
proteger.
A juste titre, on peut citer l'exemple musulman. L'interdiction de manger du porc ou de
boire de l'alcool n'est -elle pas une première application de l'influence de la religion sur la
protection du consommateur? Ces deux interdictions sont motivées par le souci de la protection
de la santé du consommateur. S'agissant du porc, l'interdiction de sa consommation est basée sur
le fait que cet animal est censé renfermer dans sa chair de nombreux parasites nuisibles à la santé
de l'homme. Les expériences scientifiques de ces dernières années le confirment. Certains
médecins ne conseillent-ils pas leurs patients de s'abstenir de consommer du porc? C'est le cas
notamment des malades du diabète, en l'occurrence le diabète gras. Pour ce qui concerne
l'interdiction cie la consommation des boissons alcoolisées, son fondement repose aussi sur la
protection de la santé et de la sécurité du consommateur. Les différentes maladies causées par sa
consommation sont médicalement confirmées. C'est le cas de la cirrhose du foie, pour ne citer
que cet exemple.
L'adoption de la Loi EVIN7 pour réguler la publicité du tabac et de l'alcool en est une
confirmation des dangers gue ces produits sont à même de faire courir aux consommateurs. Le
nombre des victimes d'accidents de la circulation routière est une preuve des dangers que la
consommation d'alcool fait courir non seulement à son consommateur, mais aussi aux tiers.
D'une manière générale, ces formes originales d'approche des populations à des fins
sensibilisatrices sur les problèmes de la consommation mettent en évidence une idée qui s'appuie
sur
un
principe
tout
simple
: "l'efficacité des
politiques et
stratégies
de
défense des
x
COIlSOlllillaleurs doit reposn sllr les références culturelles" ct sociales des populations ciblcs .
Elles sont conformes au souhait exprimé par le principe N° 31 de la charte des Nations Unies qui,
dans le cadre de la mise en place des structures protectrices du consommateur, invite les
5 "Consommation-Développemcnt" , N° 11, P.2.
6 Ibid.
7 Loi n° 91/32 de janvier 1991 dite Loi EVIN
8 "Consommation-Dévcloppcment" N° 12 précilé. P. 6.

464
gouvernements des Etats membres à « mettre au point des programmes généraux d'éducation et
d'information en ayant présentes à l'esprit les traditions culturelles des populations intéressées ».
L'adaptation
des
structures juridiques
protectrices
aux
réalités
nationales,
sous-
régionales, régionales, voire continentales s'inscrit même dans la terminologie juridique des
rédackurs de la charte qui l'ont présentée connue un cadre juridique d'inspiration et non comme
une législation modèle s'imposant à tous (principe N° 2). Ce qui implique de la part des Etats
concernés, en particulier des P.V.D donc des pays africains, une mise en place des systèmes
juridiques protecteurs reflétant la configuration socio-économique et culturelle de leur terroir,
identifiables à l'ensemble des problèmes rencontrés quotidiennement par les populations locales.
Cette idée concernant l'adaptation des législations protectrices des consommateurs n'est
pas nouvelle. Déjà en 1988, soit trois ans après l'adoption des Principes Directeurs des Nations
Unies pour la Protection du consommateur, sa mise en oeuvre fut vivement réclamée par les
participants à la première conférence des consommateurs pour l'Afrique francophone et
lusophone composés des représentants des associations de consommateurs, des organisations de
développement ct d'action sociale, des médias, des divers organismes publics et du mouvement
international des consommateurs. Dans la première partie de leur déclaration, les participants
exigeaient des gouvernants « l'application de lois et normes adaptées aux conditions africaines
qui protègent ks consommateurs contre les technologies, produits et services dangereux »9.
L'exigence de j'application des législations et normes adaptées aux réalités africaines
répondait à l'urgence du moment et avait pour but de sortir le plus rapidement possible le
continent du contexte dans lequel il se trouvait à l'époque pour ce qui concerne les exportations
des produits dangereux à destination de ses différents pays.
Mais avwll toute chose, l'application d'un texte de loi suppose d'abord son adoption; et
celui-ci ne sera bénéfique à la population intéressée que si elle est conforme à ses attentes. Et un
texte conforme aux attentes des populations est un texte q.ui prend racine dans la structure
fonctionnelle d'une société pour proposer des solutions idoines à ses problèmes.
9
Première Conférence des Consommateurs pour]' Afrique francophone et lusophone tenue à Dakar (Sénégal) de
21 au 25 novembre 1988 organisée par IOCU-ENDA. Résolution N° 3. c).

465
S'agissant des consommateurs africains, on peut dire qu'il s'agit d'un texte dont les
grandes orientat ions visent «la recherche de la satisfaction des besoins essentiels de tous les
consommateurs, urbains et ruraux, particulièrement en ce qui concerne une alimentation
suffisante et équilibrée, l'habillement, l'abri, les soins de santé, l'hygiène, l'éducation et l'accès à
la culture qui est la leur; la garantie d'un recours effectif pout les consommateurs qui se sentent
lésés, particulièrement les plus démunis» 10.
Les orientations doivent aussi couvrir les domaines relatifs à la fourniture d'une
information adéquate et précise et l'éducation du consommateur, à sa protection contre les
. produits de mauvaise qualité, les systèmes de prix abusifs et les pratiques commerciales
inacceptables, à la prise en considération dans les projets d'éducation, pour la consommation et
l'environnement, des cas des populations ou des couches sociales les plus vulnérables ou
défavorisées Il.
La mlsc en place cie telles structures juridiques suppose, en pratique, une prise en
considération des moeurs et des traditions inhérentes au pays dans lequel le droit est élaboré, des
cultures qui ont façonné les usages en vigueur dans les rapports entre personnes et qui imposent
au juriste sa manière de raisonner, donnant ainsi un sens aux concepts qu'il utilise 12 • Certains pays
du Tiers-Moncle ont réussi à bâtir des systèmes juridiques originaux malgré les contradictions
internes de leurs structures sociales.
C'est notamment le cas de l'Inde qui, malgré l'émiettement politique, linguistique et
culturel de ses communautés, la diversité en droit des statuts personnels de ses ressortissants
(hindous, musulmans, « laïc »), la multitude des pratiques et des usages qui sont en vigueur, a
réussi à bâtir un système juridique original inspiré de ses réalités locales l3 •
;
10 Première Conférence des Consommateurs pour l'Afrique tenue à Dakar du 21
au 25 nov. 1988 précitée,
cI
Résolution W 3. b) cl c).
}
Il Ibid. Résolution W 3. f), g) et Il).
12 P. GEERAERTS : " Le droit des affaires et l'Inde: ordres juridiques, pratiques d'affaires et sources du droit »,
in droit ct pratiquc du commerce international (international trade law and pratice) 1989, tome 15, N° 3, P. 423.
13 P. GEERAERTS Ibid. PA23 et suiv.

466
Il en
va
de
même de la Chine 14 qui a adopté une législation
protectrice des
consommateurs propres à ses réalités en s'inspirant des textes de la Charte mondiale des Nations
Unies pour la protection des consommateurs.
Tout compte fait, l'élaboration des textes adaptés aux spécificités des populations
concernées par leur application est une question d'ordonnancement juridique du législateur. Cet
exercice requiert le concours de certains corps sociaux. Pour ce qui concerne la protection du
consommateur, le principe N° 6 de la Charte des Nations Unies exige qu'on prenne en
considération le rôle positif que sont susceptibles de jouer les universités à travers le corps
professoral et les organismes de recherche publics et privés dans l'élaboration des politiques y
afférentes.
Les dispositions de ce principe ont toute leur importance quand on évalue le rôle marginal
que jouent toutes ces institutions dans l'élaboration des politiques législatives et réglementaires
dans nos pays. Leur participation effective et active dans la mise en place des structures
juridiques nationales contërerait aux textes qui en seraient ISSUS une plus grande originalité
proche des préoccupations des populations.
Dc façon générale, l'invitation à intégrer les composantes sociales dans l'élaboration des
structures juridiques relatives à la protection du consommateur est un moyen efficace de
concevoir des législations tirées des réalités locales. C'est aussi une bonne manière d'impliquer
ces composantes sociales dans la mise en valeur des textes adoptés par les instances habilitées.
Deux exigences essentielles s'imposent donc aux pouvoirs publics africains pour ce qui
concerne la mise en place des structures relatives à la protection du consommateur: adopter des
législations protectrices adaptées aux réalités locales et imposer leur respect ou les mettre en
valeur au moyen d'une vulgarisation intensive. Et dans cette dernière tâche, une part importante
de travail incombe au mouvement consommateur local dont le rôle dans la promotion des droits
du consommateur africain s'avère prépondérant. Notre étude dans cette partie du travail
s'articulera donc autour de deux chapitres:
14 BAKER & Mc KENZIE : « La protection des consommateurs en République Populaire de Chine», (China
Lcgal devc!Il!1IllClll) ; Gal" Pal. de Mercredi 22 ct jeudi 23 mars 1995, P, 7 cl suiv,

467
- Chapitre 1 : l'instauration d'un droit protecteur tiré des réalités africaines.
- Chapitre II : le rôle du mouvement consommateur dans la vulgarisation des droits du
consommateur local.

CHAPITRE 1:
"Les Principes Directeurs des Nations Unies pour la Protection du consommateur, quelle
application en Afrique ?" Ce fut le thème de l'Atelier régional tenu à Dakar (Sénégal) du 1er au 3
juillet 1992 sous l'égide de l'Organisation Internationale des Consommateurs (ex. I.O.c.u.) et le
Programme o IC-E.N.D.A. pour l'Mrique de l'Ouest l . Si les principes directeurs des Nations
Unies constituent un cadre juridique pouvant servir de point de repère dans la mise en place des
.législations protectrices des consommateurs, la question "quelle application pour l'Mrique'' posée
dans le thème de travail du séminaire revêt toute son importance. Elle met en relief le problème
relatif à la spécificité de chaque région, voire de chaque continent et de sa prise en compte dans
l'adoption des textes protecteurs du consommateur.
L'adaptation des législations ou réglementations aux réalités locales est essentielle pour la
maîtrise des contours juridiques d'un pays. C'est même un facteur important pour la bonne
gouvernance d'un Etat, lequel permet de contenir la stabilité sociale du seul fait de la
compréhension par les justiciables du bien fondé de l'existence d'une règle de droit. Les
législations consuméristes n'échappent pas à cette réalité, bien au contraire, leur force
contraignante ou
obligatoire
repose sur leur
cohérence
avec les
manifestations
socio-
économiques et culturelles du milieu dans lequel elles sont appelées à s'appliquer. Les textes
consuméristes sont, de façon générale, le reflet de la situation 'Socio-économique et commerciale
d'un milieu déterminé. Leur support juridique repose sur toutes ces réalités du marché, lieu de
rencontre de l'offre et de la demande.
1 Voir, Alpha A. SALL : "Protection du consommateur. Atelier régional", in "Consommation-Développement" N°
8, novembre 1992, P 5.

469
L'insistance sur la nécessité pour les pays africains de tenir compte des réalités de leur
terroir lors de la mise en place des législations protectrices des consommateurs préjuge d'une
crainte légitime : celle de la transposition pure et simple des expériences vécues ailleurs, en
particulier dans les pays développés, sur leur territoire. L'histoire juridique de ces pays est pleine
d'exemples de cc genre. C'est ainsi qu'on a pu rencontrer dans certains pays africains, plusieurs
années après leur indépendance, des reproductions identiques des textes de lois ou règlements
.identiq LIes il ceux du pays de provenance, le plus souvent de l'ancien pays colonisateur avec
lequel ils ont gardé des liens très forts 2 . Il s'ensuit ainsi une inadéquation entre les textes votés et
les besoins juridiq Lies des populations locales dans des pays où les urgences en la matière sont des
plus cruciales.
Promouvoit' une législation protectrice adaptée aux besoins des consommateurs, c'est
mettre en évidence la politique d'inspiration basée sur le substrat juridique tracé par les principes
directeurs des Nations Unies pour la protection du consommateur. «Ce faisant, chaque
gouvernement doit fixer ses propres priorités dans le domaine de la protection du consommateur,
en fonction de la situation économique et sociale du pays et des besoins de la population et en
ayant présent à l'esprit les coûts et avantages des mesures envisagées »3. L'utilité d'une
législation pour une population est fonction de sa capacité à refléter les données socio-
économiques et culturelles d'un Etat et dont les repères sont facilement identifiables par les
personnes concernées par son adoption.
Cette image législative ou réglementaire n'est réalisable que si l'on intègre lors de la
conception des textes tous les éléments spécifiques propres à chaque Etat,mais qui ne préjugent
en rien les caractéristiques communes qui les singularisent par rapport aux autres pays du monde.
Ces caractéristiques sont essentielles, elles conditionnent le fonctionnement de la société africaine
prise dans son ensemble et dans son originalité. Elles concernent la spécificité aussi bien de son
commerce que de son consommateur.
2 Il suffit pour s'en convaincre de faire un tour d'horizon des législations des pays d'Afrique d'expression française.
On y rencontrera des textes de lois identiques ou presque à certains textes français, avec parfois, comme cela est
souvent le cas, des discordances notoires par rapport aux réalités locales de ces pays. Certains pays, par exemple,
continuent d'appliquer les textes du code civil à leurs populations, lesquelles n'ont aucun trait commun avec la
population française.
3 Principe N° 2 Je la Charte des Nations Unies pour la protection du consommateur.

470
Pour ce qui est du consommateur, on peut dire qu'il révèle une singularité particulière.
Les populatio ns africaines sont composées en majorité de consommateurs analphabètes et fragiles
que la situation socio-économique expose à tous les abus venant des professionnels. Ce sont des
consommateurs défavorisés que le droit se doit de prendre en charge pour mieux protéger le
pouvoir d'achat que rend
précaire leur faiblesse de moyens financiers.
L'Organisation
Internationale des Consommateurs (O.I.e.) n'a pas manqué de plaider leur cause lors de son
dernier congrès tenu à Montpellier (France) du 26 au 30 septembre 19944• Les problèmes
auxquels sont confrontés les consommateurs défavorisés ont particulièrement été au centre des
réflexions pour la simple raison que la libéralisation économique des services et de la distribution
des produits de base rend de plus en plus précaire la consommation des populations à faible
revenu). Ceci témoigne de l'importance de cette spécificité caté,gorielle dont il faut tenir compte.
Toutes ces réalités communes aux P.Y.D, en particulier aux Etats africains, sont autant
d'éléments pertinents que le droit de la consommation se doit de ne pas ignorer. Leur intégration
ou leur prise en considération lors de l'élaboration des textes protecteurs des consommateurs
serait une belle manière de protéger le consommateur contre les aléas ou problèmes rencontrés
quotidiennement dans sa fonction de consommation. Ce serait aussi la preuve formelle de l'effort
des législateurs dans la compréhension du principe selon lequel le droit positif d'un Etat se
construit à partir des réalités socio-économiques et culturelles de celui-ci à un moment précis.
Une législation protectrice efficace doit nécessairement être fondée sur cette vision du droit. Et le
droit de la consommation n'échappe pas à cette réalité juridique, bien au contraire, la disparité qui
existe dans les niveaux de développement économique entre Etats exige une adaptation
permanente du droit protecteur des consommateurs à la manifestation socio-économique du
milieu dans lequel ceux-ci évoluent.
L'adaptation constante des textes protecteurs des consommateurs est une exigence
fondamentale qui s'impose aux pouvoirs publics faiseurs de lois, car à mesure que la technique
avance, la complexité des produits tout comme leurs méthodes de vente évoluent, rendant les
consommateurs défavorisés hors du coup pour ce qui concerne l'égalité de traitement dans les
transactions commerciales.
1 voir "Consommation-Développement" N° 12, décembre 1994, Bull. d'Infa. Trim. IOCU-ENDA, P. 10.

471
L'O.I.e y voit une obligation pour les gouvernements des P.V.D d'adopter des mesures
économiques et juridiques adaptées afin de mieux protéger les consommateurs défavorisés dans
leurs transactions de tous les jours contre les marchands indélicats guidés avant tout par le souci
du gain, et si possibles les inclure selon les termes spécifi.ques dans le dispositif de l'O.N.Uo. Les
participants au congrès de l'O.I.e. n'ont d'ailleurs pas hésité à apporter leur soutien aux
consommateurs défavorisés par l'invitation faite aux institutions internationales pour une révision
de leurs politiques afin de se conformer à un réel besoin relatif au développement social7•
Si le consommateur défavorisé est au centre de nos préoccupations, il reste évident que
l'amélioration de sa situation dans une conjoncture économique internationale difficile passe
nécessairement par la prise des mesures juridiques basées sur les tribulations économiques qu'il
subit ou vit au quotidien. L'essence du consumérisme repose sur cette vision réaliste du droit. On
ne peut protéger efficacement le consommateur qu'en élaborant des textes adaptés à son
environnement économique.
L'orientation des textes ne peut donc ignorer la configuration socio-économique du
milieu. Les deux sont intimement liées, l'une étant la conséquence logique de l'autre. Les
interpénétrations sont donc vivaces, et leur prise en considération s'avère nécessaire. Et cette
situation juridique du consommateur des P.V.D nous amène à envisager l'étude de ce chapitre
sous deux angles biens précis : les réalités africaines dans la mouvance du droit de la
consommation et l'intégration de ces réalités dans le processus d'élaboration des textes en vue de
la défense des consommateurs. Nos deux sections s'articuleront autour de ces deux axes d'études
- Section 1 : Droit de la consommation et réalités africaines.
- Section II : L'intégration des réalités locales dans le processus d'élaboration des textes.
) lhid .. voir é!!:alel11Cl1l David HARLAND : "Implementing the principles of the United Nations Guidelines for
,
CIlllSlll11er PI"I~tec(i()l1" ; The Illdiall Law Institutc, (reprint), Université de Genève, Faculté de Droit, Centre de
'
Documentation l'Il Liroit de la consommation, P. 224.
(, Résolution adoptée par les participants au dernier congrès de l'OIC (ex IOCU) à Montpellier (France), voir en ce
sens "Consol11l1latiol1- Développement" précité, N° 12, décembre 1994, P. 10.
7 Ibid.

472
SECTION 1 :
DROIT DE LA CONSOMMATION ET REALITES AFRICAINES.
Le droit de la consommation, selon la défInition avancée plus haut8, est entendu comme
« l'ensemble des règles applicables aux rapports entre professionnels et consommateurs »9. Vu
sous un autre angle, il est perçu comme un « ensemble de règles qui ont pour but de protéger les
consommateurs» 10. Quelle que soit la défInition retenue, l'important réside dans la [malité. Et
l'objectif poursuivi par les règles régissant la matière est, dans la plupart des cas, la protection du
consommateur. Or, pour être effIcaces, encore faut-il que ces règles consuméristes soient
adaptées aux réalités du milieu dans lequel elles sont appelées à s'appliquer. Le législateur,
organisateur du système juridique proteeteur ne saurait done ignorer les aspeets soeio-
économiques et culturels de son pays. C'est une exigence essentielle que rend incontournable
J'approche contemporaine du phénomène consumériste (Sous-Section II). Cette exigence
législative ou réglementaire est d'autant plus urgente que le tontinent africain, à l'instar de ses
pairs du Tiers-Monde, comporte ou revêt des réalités toutes particulières (Sous-Section 1).
Sous-Section 1 : Le particularisme des réalités commerciales
et sociales africaines.
Parler du continent africain en ce qui concerne ses réalités, c'est lui reconnaître certaines
spécificités propres. Il s'agit en effet, des particularités ou des spécifIcités liées à son
environnement économique, social et culturel. Dans le domaine économique, le continent africain
se caractérise [Xli' un commerce peu ordinaire, un commerce traditionnel par sa manifestation. Ce
qui donne à cette activité un aspect bien singulier, un caractère bien spécifique. A cet aspect vient
s'ajouter une autre variante, elle-même liée au contexte socio-économique et culturel du
continent: La variante « consommateur ». Sur ce point, l'Afrique se singularise aussi par un type
de consommateur déterminé que la situation économique, sociale el culturelle rend facilement
identifiable à cause de sa spécificité.
R Voir sU[Jra, « Introduction Générale ».

473
Deux points essentiels nous intéresseront dans cette sous-section : le point relatif à la
spécificité du commerce africain (§I) et celui relatif à la spécificité de son consommateur (§II).
§I . La spécificité du commerce africain.
Tout comme les autres pays du Tiers-Monde, les pays africains se caractérisent par une
économie nationale bipolaire: l'économie réglementée ll et l'économie informelle, reflet même
de leur identité sociale et culturelle. 12 Le commerce est donc ambivalent. Dans cette
ambivalence, seule l'économie informelle occupera notre attention (A). Elle forme un ensemble,
un tout où toutes les diverses formes d'activités s'opèrent. Reflet de la société traditionnelle, elle
est le domaine de prédilection des activités ambulantes lesquelles ne constituent guère un gage de
sCircté pour le consommateur en cas d'un besoin de réclamation. Pour ces raisons, cet aspect
particulier de l'économie informelle nécessite une analyse séparée afm d'attirer l'attention du
législateur sur les éventuels soucis des consommateurs opérant dans ce secteur d'activité (B).
A - Vn commerce dominé par l'informel.
Le commerce informel est une réalité indéniable dans les pays africains. La part
prépondérante qu'occupe cette activité au sein des économies de ces pays est unanimement
reconnue aussi bien dans les plus hautes sphères des instances nationales qu'internationales. Il
. s'agit là d'une aftïrmation dont la preuve s'avère nécessaire (a). Mais plus que la preuve elle-
même qui n'est ricn d'autre qu'une confirmation de la réalité africaine, c'est le domaine même du
commerce en question qu'il faut chercher à cerner ainsi que son impact sur les populations
locales (b).
al La part prépondérante du commerce informel
dans les économies at'riCê:lincs.
Les arguments ou élémcnts devant nous servir de preuve ne sont pas des éléments
juridiques, mais plutôt économiques lesquels devront nous permettre de qualifier le volume
commercial qu'occupe l'informel dans l'économie des pays africains. L'intérêt de cette approche,
<)
J. CALAIS-AUtOY: Droit de la consommation, 3è éd., Dalloz 1992, p. 18, n° 21.
10 J. CALAIS-AULOY : Droit de la consommation, 3è éd., Dalloz 1992, p. 18, n° 21.
Il Il s'agit dcs activités commerciales enregistrées ou immatriculées au registre du commerce et des sociétés.

474
de cette démarche est qu'elle servira de support aux solutions juridiques que nous proposons plus
loin pour résoudre les problèmes des consommateurs s'approvisionnant dans ce secteur.
En c1'rer, Ic commerce informel, encore appelé «économie populaire urbaine », est une
dynamique qui se développe un peu partout en Afrique. En témoigne un extrait du rapport des
Nations Unies sur cette économie urbaine en Afrique: «Dans les pays en développement, le
secteur informel se développe pratiquement partout... En Afrique subsaharienne, le secteur
informel s'est développé au rythme de 6,7% par an entre' 1980 et 1989, soit à un rythme
beaucoup plus rapide que celui du secteur moderne. Entre 1980 et 1985, alors que le secteur
moderne n'a créé que 500.000 emplois sur le marché du travail urbain, le secteur informel en a
créé quclqucs 6 millions. En 1990, le secteur informel employait plus de 60% de la main d'oeuvre
urbaine, soit plus du double du secteur moderne. »13
Cette importance du secteur informel en Afrique a aussi été soulignée par le Président
sénégalais, ABDOU DIOUF, dans une de ses allocutions dont nous allons citer l'intégralité de
l'extrait pour éviter de détourner les mots employés de leur contexte:
«la dijfïculté extrême surgit maintenant qu'iL existe d'autres priorités et d'autres
langages, notamlllent ceux du Fonds Monétaire InternationaL (FMI) et de La Banque MondiaLe.
Pour e/lX, L'essentieL réside dans Le remboursement des dettes et dans ce qui Le conditionne:
l'accroissement des exportations et des rentrées en monnaie extérieure. Le marché mondiaL, où
l'AFiqlle pèse si peu, étant censé assurer Le déveLoppement et La prospérité. A lravers ses
« conseils» qui sont autant de contraintes,
Le coupLe «bretton-woodien» dicte Les Lignes
essentielles de l'action d'ulle majorité des pays africains « sous ajustement ».
Cmlllncllt poursuivre une politique sociaLe et environnementaLe ejjïcace dans Le Long
terme quand prime Le besoin d'argent frais conditionné par toute une Liste de contraintes
imposées par l' extérieure '!
,
12 Elle est constituée du petit commerce (sédentaire ou ambulant) parallèle qui s'opère sur les places spécialement
;
réservées à cet effet ou au bord des voies (routes ou/et rues) dans tous les pays africains, voire du Tiers-Monde.
13 Nations Unies: Extrait du « rapport mondial sur le développement humain» ; PNUD, Paris] 993,
p. 45. Voir
en ce sens, la revue « Vivre Autrement », publication de E.N.D.A. Tiers-Monde, n° spécial, septembre 1993,
rSSN n° 0850/8194, p. 1], Sénégal.

475
Non sei/leillent on affaiblit l'Etat, accusé de tous les maux, mais on lui demande de
ll/ener des réj(Jlïl1es, ell partie justifiées, les plus aillples et les plus d~ffïciles jamais engagées.
On lui dell/al/de en ilIêll/e telllps de réorganiser sa politique, de la toumer essentiellement vers
l'exportation et le marché mondial, quitte à laisser largement pour compte un ensemble
d'activités qi/i, dans les d(ffërentes grandes villes de ce continent, occupe 50 cl 80% des
travoilleurs, et (ji/ 'Oll appelle « l'informel ».
En privilégiant le remboursement de la dette et les exportations,
on oblige les
gouvernell/ents à s'écarter à la fois d'un but essentiel, la lutte contre la pauvreté, et d'un point
d'appui indispensable, la masse des producteurs de biens et de services qui, en dehors du
sectei/rilloderne, s'activellt etfont vivre une large part de la population. C'est là une situation
COlllllllllle cl la l//(zforité des Etats d'Afrique et extrêmement difficile. »14
Loin d'être un commerce banal, marginal réservé aux petits opérateurs limités en
C<1pitaux, le sectcur informel joue un rôle important dans les économies africaines. C'est un
scctcur réguhlleur des carences de l'économie officielle ou réglementée, représentatrice des
modèles mimétiqucs inadaptés et incapables de satisfaire les besoins essentiels de la majorité de la
population. Par la capacité d'adaptation de ces opérateurs et par l'extrême variété de leur offre,
le commerce informel permet de satisfaire les besoins de la majorité des consommateurs à faible
revenus, donc incapables de s'approvisionner dans le secteur dit moderne. 15
L'autre point important de ce secteur se trouve dans sa capacité contributive à l'économie
générale. On estime de l'ordre de 50 à 70% sa contribution au produit national brut dans tous les
pays africains. Ce qui en soi n'est pas une estimation négligeable, même si cette contribution n'est
pas citée dans les chiffres officiels. 16
Somme toute, le commerce informel ou populaire apparaît comme un pan de la réalité
socio-économique des pays africains, voire de tous les pays du Tiers-Monde 17 qui s'impose de
I~ Extrait de l'Allocution du Président sénégalais Abdou DIOUF: «Une ère nouvelle de partenariat global »,
parus dans le quotidien d'information «Soleil» du Lundi 15 juin 1992. Voir pour l'extrait cité, «Vivre
Autrement », n° spécial, septembre 1993 précité, p. 1.
15 T. et D. BEN ABDALLAH: Economie populaire urbaine/secteur formel: une dynamique pour l'avenir? in "
« Vivre Autrclllent » ne spécial, sept. ] 993 prée., p. 10.
lb Ibid.
17 Au Mexique, le commerce ambulant réalise un chiffre de vente annuel équivalent à 13,3 milliards de dollars
US. Il réalise un revenu net d'environ 5,33 milliards de dollars US. Pour les détails, cf. «Vivre Autrement» na
Spéc. sept. 1993, p. 9.

476
lui-même. C'est un domaine d'activités que tout législateur soucieux de la protection des
consommateurs se doit de ne pas ignorer s'il veut réellement mettre en place des textes de lois
adaptés répondant vraiment aux problèmes quotidiens des intéressés tant son champ d'opération
est très vaste.
b) Le domaine d'exercice du commerce informel ou populaire.
Le commerce informel touche presque tous les secteurs d'activité de l'économe africaine,
du secteur de la production au secteur des services en passant par celui de la distribution. Il s'agit
cI'un commerce fluide qui répond à presque tous les besoins des populations locales, en majorité
des populations à faibles revenus (défavorisées) parce qu'en adaptation permanente. Qu'il
s'agisse de se nourrir, de se loger, de s'habiller ou d'acquérir tout autre bien nécessaire à la
18
consommation, le consommateur y trouve son compte.
Selon qu'il soit fixe (sédentaire) ou
mobile (ambulant), il offre toute une gamme de biens et services à sa clientèle.
Outre les produits alimentaires frais ou cuisinés destinés à satisfaire tous ceux qUI ne
peuvent pas se payer un plat ou un repas dans les restaurants modernes, on y trouve également
« cles vêtements à tous les prix - depuis la friperie jusqu'au drap ou Tergal» ou des tissus ou
pagnes cie tout genre -, « des services de beauté - depuis le coiffeur des rues jusqu'au vendeur de
crème » ou d'autres produits cosmétiques - «des transporteurs - du car rapide brinquebalant
jusqu'au pousse-pousse« en passant par les taxi-autos ou taxi-motos ».
On y trouve également des matériaux de construction d~ toute nature - depuis la feuille de
tôle galvanisée jusqu'au commutateur électrique - du matériel électronique - depuis les postes
téléviseurs jusqu'au radios portables en passant par les chaînes hi-fi -, des pièces détachées des
engins à deux ou à quatre roues, « des meubles - depuis le tabouret jusqu'au matelas de papier et
coton compacté sous enveloppe de tissus fleuris - »19, des jouets d'enfants, des produits
pharmaceutiques (médicaments) ... , bref, tout ce qui est susceptible d'être vendu dans le
commerce. Et chaque opérateur pourra compléter cette liste non exhaustive en fonction de son
expérience personnelle sur le terrain.
18 T. et D. ABDALLAH: article prée., p. la.
19
1. BOUGNICOUT, R. NDIAYE et EL HADJ SY : Désencombrements humains, comment fabriquer les
pauvres. Désencombrer pour relancer? in « Vivre Autrement » n° spécial, sept. 1993 précité, p. 2.

477
En effel. si ce type de commerce existe, c'est parce qu'il a aussi sa clientèle qui lui est
'propre et souvent très fidèle. La fidélité de cette clientèle est tout d'abord due à la proximité des
services rendus ou des biens vendus, proximité qui évite d'aller satisfaire ses besoins de
consommation plus loin du lieu où l'on habite. Le second facteur de fidélité, donc d'existence de
cc commcrcc. sc 1rouvc dans le fractionnement des prix. On y pratique de meilleurs prix, dcs prix
abordables, lesqucls «s'adaptent fort bien au manque de ressources, soit permanent, soit
périodique» èO des acheteurs des biens ou bénéficiaires des services rendus.
Certes, les produits offerts dans ce commerce sont loin d'être comparables à ceux vendus
dans les supermarchés ou dans les boutiques modernes en ce qui concerne leur qualité et leur
durabilité. Mais ils ont le mérite de répondre aux besoins essentiels de la grande majorité de la
èl
population localc.
La modulation des prix en fonction du rapport qualité/prix et en fonction de
la bourse du client, et qui plus souvent est le résultat d'un marchandage intervenu entre
l'achcteur et le vcndeur lequel peut parfois, en fonction de sa bonne humeur, vendre à perte pour
s'all,lcllcr LIll clicnl ou salisfaire ses besoins de liquidités dirticiles, fait de cc commerce un l'ail
social inconlournahle.
De façon générale, le commerce informel est un phénomène de société en Afrique dont il
faudra tenir compte à un double point de vue : Tout d'abord parce qu'il est le résultat d'un
phénomène culturel, et à ce point de vue, il représente l'identité de l'Afrique et de ses
consommateurs
; ensuite parce qu'il recèle en son sein un grand
nombre de clients-
consommateurs dont la protection s'avère nécessaire. Il représente une réalité commerciale
concrète que le droit de la consommation se doit de ne pas ignorer. Et dans la logique, une
attention particulière doit être accordée au commerce ambulant qui représente une grande part,
voire un pan important de ce commerce.
B - Vil commerce dominé par l'ambulant.
COIllIllC nous avons déjà eu à le souligner22 , le commerce ambulant fait partie intégrante
de l'aclivilé informclle, donc non réglementée. Cependant il se singularise à l'intérieur de ce
:<l Ihid.
'1
.
- Ihld
22 Cf supr,]

478
grand ensemble qu'est l'informel par la non sédentarité de ses acteurs. Pour mieux cerner ses
contours, son domaine (b), l'étude de la notion s'avère donc nécessaire (a).
a) Notion du commerce ambulant..
Le commerce ambulant est de loin l'activité lucrative du secteur informel que l'on
rencontre le plus dans les pays africains tout comme dans les autres pays du Tiers-Monde. Il
s'oppose au commerce sédentaire en raison de la mobilité permanente de ses acteurs.
Dans les législations africaines
relatives
à
l'activité commerciale,
notamment
la
distribution des biens artisanaux ou industriels, il est souvent fait allusion aux marchands
ambulants sans toutefois en donner une défmition concrète. C'est le cas notamment de
l'Ordonnance togolaise du 22 avril 1967 dans laquelle il a été fait mention des «marchands
ambulants» dans l'article 9, alinéa 2 du Titre II relatif aux modalités de vente des marchandises
sans qu'on en rencontre leur définition nulle part. Les dispositions de cet article sont ainsi
libellées:
« Le prix de toute marchandise vendue en magasin doit être clairement indiqué avec sa
dénomination exacte et cOl~forme aux usages commerciaux soit sur l'objet ou sur son emballage
ou récipient, soit sur une pancarte afférente à un même lot d'objets identiques, en monnaie
locale et par unité de ou de contenance.
A la demande de l'acheteur, une facture doit lui être obligatoirement délivrée sauf pour
ses (lchats (Il/X marchands ambulants. »23
Cette exception faite aux marchands ambulants en ce qui concerne la délivrance de la
facture d'achat témoigne non seulement de leur existence juridique en tant que tel, mais aussi de
·Ieur singularité et cie leur spécificité par rapport au commerce réglementé. Cette spécificité a
aussi été relevée par le législateur camerounais dans le décret N° 931720/PM du 22 novembre
1993 fixant les modalités d'application de la loi N° 90/031 du 10 août 1990 régissant l'activité
commerciale au Cameroun. Après avoir défini le commerce sédentaire comme « l'activité exercée
en permanence dans les installations d'immeubles, par toute personne physique ou morale ayant
~.1 Articlc 9 al inéa :2 dc l'ordonnance n° 17 du 22 avril 1967, JO du 5 mai 1967, N° Spécial.

479
la qualité de commerçant »24, il en oppose celle de conunerce ambulant dans les termes suivants:
« /e commerce ambulant de détail ou colportage est l'activité exercée en permanence, d'un
marché périodique à un autre, par toute personne physique' ayant la qualité de commerçant
détaillant, Ile disposant pas d'installations de ventes fixes, travaillant seule ou aidée par les
Sl'[(/.I' II/clllhrcs di' .1'0./(111/;//(' »25.
Au regard de cette définition, seules les personnes physiques pratiquant la vente des
.marchand ises ~lll dél ail ct Il' ayant pas cl' installations fixes peuvent se voir reconnaître la qualité de
marchands ambulants. Ce qui exclut toutes les personnes morales, lesquelles sont souvent
reconnues fixes par le biais de leur siège social ou de leurs locaux commerciaux ou de leurs
iIlslall al ions.
Cette activité ambulante, le législateur camerounais la distingue du commerce dit de
« buyan-sellam » qui est « l'activité permanente d'achat en tout lieu du territoire pour la vente en
l'état au détail des produits du cru dans les marchés aménagés à cet effet, activité développée par
toute personne physique agissant seule ou aidée par les seuls membres de sa famille »26.
11 en va cle même de la vente à la sauvette qui est « l'activité permanente d'achat en tout
lieu du territoire national pour la vente en l'état des produits industriels non encombrants, sur des
étals non immeubles situés dans une aire libre, en bordure des voies ou dans les lieux publics
aménagés et autorisés à l'intérieur d'une agglomération urbainé ; cette activité est développée par
toute personne agissant seule ou aidée par les membres de sa famille ».27
En droit français, l'activité ambulante est défmie comme « toute profession ou activité
exercée sur la voie publique, sur les halles, marchés, champs de foire ou de fête ou par une voie
de démarchage dans les lieux privés et ayant pour objet soit la vente d'un bien mobilier, soit la
conclusion d'un contrat de location ou de prestation de services ou d'ouvrage, soit la
"",
21
Article 2. Il) du décret na 931720/PM du 22 novembre 1993 fixant les modalités d'application de la loi n~
90/031 du 10 août 1990 régissant 1'activité commerciale au Cameroun précité.
~5 Article 2. i ) du décret n° 93/720/PM du 22 novembre 1993.
26 Article 2. j) du décret n° 931720/PM du 22 novembre 1993.
27 Artic1c 2. k) ibid.

480
présentation d'un spectacle ou d'une attraction »2.8, Rentrent dans le champ d'application de cette
définition, toutes les activités non sédentaires exercées de façon indépendante.
A quelqucs exceptions près, cette définition peut être rapprochée de la défmition de
l'activité ambulante donnée par le législateur camerounais. Mais la définition française présente la
particularité d'être plus détaillée, et par voie de conséquence, plus complète. Alors que la
définition eal1lerounaise détcrmine le caractère ambulant d'un commerce par le déplacement
permanent des acteurs en fonction de la périodicité des marchés fréquentés, la définition française
le caractérise par ses divers points de vente.
Cette définition requiert notre adhésion parce qu'elle répond parfaitement à la logique du
commerce ambulant, car ce qui motivent les vendeurs ambulants, ce n'est pas seulement la
périodicité des marchés, mais aussi les divers lieux où ils sont en mesure de rencontrer des clients
susceptibles d'acheter leurs marchandises; d'où leur mobilité permanente. Cette définition a aussi
le mérite de refléter parfaitement le profù du marchand ambulant africain qu'on retrouve un peu
partout dans les villes et villages, notamment sur les diverses places des marchés, sur les voies
publiques sur les lieux de fête, et qui, par voie de démarchage, se promène de maison en maison
pour proposer sa marchandise en vue de la vente, ou ses services dès lors qu'il s'agit d'un
prestataire de services. Les législateurs africains pourraient s'inspirer de la définition française
pour recentrer leur définition du marchand ambulant.
Somme toute, la notion de commerce ambulant exclut donc de son champ d'action toutes
les personnes effectuant des opérations de démarchage pour le compte des établissements fixes
ou régis par des textes particuliers. 29 Il en va de même des individus dont les activités se limitent
au transport des personnes ou des biens mobiliers,3o des colporteurs de presse ou des billets de
28 Loi n° 69/03
du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités .ambulantes et au régime applicable aux
personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe. Voir l'article 1er du décret du 31 juillet 1970.
29 Article L. 751-\\ clu cocle du Travail relatif aux voyageurs représentant placiers; L. N° 66/1 01 0 du 28 déc. 1966
}
(D. 1967, 31) relative à l'usure ct aux prêts cI'argent ; Décret du 25 cléc. 1958 (D. 1959, 132) relatif aux agents
cOlllmerciaux et le Décret n° 65171 clu 29 janvier 1965 (D. 1965,93) tendant à "organisation de l'industrie des
assurances.
:\\0 La juris[lrudencc ne considérait du reste pas comme marchands ambulants les livreurs, même percevant une
commission en [llus de leur salaire, mais ne faisant pas de commerce personnel (crim. 27 mai 1921, D.P. 1921, l,
182).

481
loterie sur la voie publique, des professionnels effectuant dans une ou plusieurs communes des
tournées de vcnte ou de prestations de services à partir d'établissements fixes.'1
b) Domaine du commerce ambulant.
L'activité ambulante faisant partic intégrante du secteur informel, son domaine d'activité
ne diffère en rien de celui dudit secteur. Pour la découverte du domaine du secteur ambulant, l'on
devra se reporter ù l'étude déjà réalisée à ce sujet sur le secteur informel'2.
Mais au-delà de cette précision, il y a tout de même une autre réalité qui s'impose à nous
et qui mérite donc étude: c'est relative à la spécificité du consommateur africain.
§II - La spécificité du consommateur africain.
Les pays africains se caractérisent par deux types de consommateurs : une catégorie plus
ou moins avertie, mais peu nombreuse, et une autre catégorie non avisée qui représente la
majeure partie de la population. Cette deuxième catégorie de consommateurs comporte en son
sein un grand nombre d'« analphabètes », peu enclins aux nouvelles données technologiques que
contiennent les produits mis sur le marché. Et cette ignorance des nouvelles réalités économiques
modernes fragilise leur position devant les vendeurs professionnels peu décidés à leur faire des
« cadeaux» dans ce domaine. Ce qui les rend de plus en plus vulnérables.
Nous étudierons succcssivement le caractère spécifique de cette grande masse de
consommateurs (A) et leur état de vulnérabilité dans leurs rapports avec les vendeurs et
prestataires de services professionnels (B).
A - Un consommateur « analphabète ».
Un analphabète, dans le langage courant, c'est celui qui n'est pas instruit et de ce fait ne
sait ni lire, ni écrire. Notre démarche ne va pas dans le sens de cette vision étroite de
l'analphabétisme laquelle doit être écartée.
\\1
Les colporteurs de presse sont soumis aux prescriptions de l'article 18. Loi du 29 juillet 1881 (D.P. 1881, IV,
(5) sur la liberté de presse ... Pour le reste, v. P.-J. DüLL : Marchands ambulants et forains, Encyclopédie Dalloz,
Droit Commercial !lJS7. [1. ! el suiv.
" Cr. supra

482
La notion cie consommateur « analphabète» doit être entendue ici dans son sens large.
L'expression désigne non seulement le consommateur non instruit, mais aussi tout consommateur
dont le degré cl' instruction ne lui permet pas de comprendre la réalité économique nouvelle qui
l'entoure. Il s'agit en l'occurrence du consommateur dont le niveau intellectuel ne donne pas
toute la capacité cl la lucidité nécessaires susceptibles de lui permettre d'éviter les pièges tendus
par les professionnels de la vente ou de la publicité, voire du marketing.
Nous les assimilons aux analphabètes au sens classique du terme parce que, malgré leur
faculté à déceler le sens des mots écrits noir sur blanc sur les pancartes publicitaires, ou à écouter
les messages véhiculés par les annonceurs, la perception de leur réalité économique, de leur
véracité par rapport au but poursuivi par leurs auteurs leur échappe. Dans ses conditions, le
langage commercial leur est étranger comme l'est l'écriture pour celui qui ne sait pas lire.
La caractéristique particulière des pays africains, voire du reste du Tiers-Monde, est
d'être peuplés en grande majorité - environ 70 à 80% de la population de chaque pays - par cette
catégorie spéciale d'individus dont l'ignorance inhibe «les comportements de consommateur
critique, averti et actif»33. Cette méconnaissance de la réalité, des rouages de l'économie de
marché due à l'absence de discernement conduit le consommateur se trouvant dans cette
situation à avoir une attitude plus ou moins négative, résignée, voire fataliste devant les
problèmes rencontrés dans leur fonction de consommation quotidienne.
Le sentiment d'impuissance qui en résulte rend le consommateur apathique devant ses
propres problèmes, près à souffrir en silence et à dire : «Eh bien ! Cela est arrivé, que vais-je
faire ? »14 Que que lq u' un de plus avisé veuille bien lui apporter son aide, il lui répondra avec
t
/
N
' 1 "
d
35
net ete:«
on, non ce n est pas a peille, c est une perte e temps. »
De façon générale, beaucoup de consommateurs en Afrique, pour cause d'analphabétisme
doublé d'un manque d'information, ignorent leurs droits et partant, ne réalisent pas qu'un
dommage causé dans leur fonction de consommation ou' qu'une lésion subie dans leurs
différentes transactions sont susceptibles d'être réparés par leurs auteurs. A ce titre, une enquête
l
" Voir cn cc scns. A. C. KANOUTE : « Associations de consommateurs africaines face au défi du développement
;,
uans les annécs l)() », Communication présentée au Symposium de la Commission Economique des Nations Unies
. pour l'Afrique. Sénégal, Novembre 1994, IOCU-IEPWAIROAF, p. 5.
• -1 E. OBADINA : « La contrefaçon à l'assaut de 1'Afrique », in « Vivre Autrement» n° 8-9, novembre 1988,
su[)[)lémcnl, [). IV.

483
. menée par le programme O.I.e.-E.N.D.A pour les besoins d'une session de formation des
formatrices en activités de consommation-développement au Sénégal - pays réputé avoir une
légère avance sur ses pairs d'Afrique francophone de l'Ouest dans le domaine associatif - est
révélatrice cie cct état d'esprit de la majorité des consommateurs africains. Cette enquête menée
auprès d'un échal1tillon de 190 associations de femmes membres cie la FA.FS. (Fédération de~
Associar ions Féminines du Sénégal) dans les dix régions du Sénégal en 1990, a donné b
résultats suivants:
- «79% des répondantes s'estimaient avoir été lésées au moms une fois dans um:
transaction. Sur les 79%, 48% déclaraient ne s'être pas plaintes de leur préjudice.
- « 53% des interrogées qui ne se sont pas plaintes n'ont pas jugé nécessaire de le faire
Elles voyaient dans cette démarche une certaine perte de temps. Dans une certaine mesure, c' es!
le fatalisme qui l'emporte sur le réalisme, les lésées préférant s'en remettre à Dieu, seul Etn:
habilité à rendre la justice. Parfois l'absence de plainte est la conséquence d'un défaul
d'information, les lésées ne sachant où se plaindre pour faire entendre leur voix.
« 40%
des
répondantes
se
sont
plaintes
dont
54%
auprès
dl
boutiquier/grossiste/marchand, 2% auprès de la presse, 6% auprès du délégué du quartier ou de~
amIS ...
- «Aucune d'entre elles ne s'était adressée à l'une des structures chargées de lé:
protection des consommateurs »36.
Une chose cependant est de porter plainte, une autre est d'obtenir gain de cause
d'obtenir satisfaction par la réparation du préjudice subi pour cause de lésion ou de défectuosité
de la marchandise achetée. Et comme cela arrive souvent dans ce genre de réclamation, e'es'
l'habileté du commerçant qui l'emporte sur la naïveté du consommateur plaignant. Dans ce~
circonstances, on quitte ainsi tout doucement le domaine de la fatalité pour embrasser celui de lé
vulnérabilité laquelle empêche un consommateur peu averti, et de surcroît analphabète, dl
rivaliser, de lutter à armes égales contre un professionnel rompu aux affaires et sur un terraiJ
qu'il maîtrise mal ou qu'il ne connaît pas du tout. La vulnérabilité est aussi un autre mal, un autro
" Ihid.
,t, KANOUTE : C0l1l111lllliC<lti0I1 ... [mSCilé~. p. 5.

484
handicap qui caractérise le consommateur africain et le singularise par rapport à ses homologues
des pays développés.
B - Vn consommateur vulnérable
L'état de vulnérabilité du consommateur africain est un état de circonstance lié à la
personne même de l'individu (a).C'est aussi une situation de faiblesse dans laquelle le niveau de
connaissance intellectuelle prend une place très importante (b).
al La vulnérabilité liée à la personne même du consommateur.
Avant toute chose, qu'il nous soit permis de faire une remarque importante. A l'exception
des règles relatives à la capacité que l'on retrouve dans nos systèmes juridiques, a priori, le
consommateur (particulièrement) vulnérable n'existe pas de façon avouée sur le plan du droit
pur.:17 Tous les consommateurs, en général, sont présumés égaux en droit et ne peuvent donc
prétendre bénéfic ier d'un régime particulier de protection. On retrouve le même raisonnement
dans le domaine économique où j'on considère que « dans une fabrication de masse et également
lIn~ distribution de masse, il ne peul être t~lit de distinction entre les dirférentes catégories de
clients ».lS.
Doit-on cependant, à travers ces analyses, conclure que le consommateur fragile n'existe
pas ? Par rapport aux réalités de la vie économique de tous les jours, une réponse affIrmative
serait dénuée de tout fondement. Et le profIl du consommateur africain, vulnérable dans tous ses
aspects, sous toutes ses facettes, conforte notre position.
Sile consommateur particulièrement vulnérable n'existe pas ou existe peu sur le plan
juridique et n'a pas d'existence avouée sur le plan économique, son existence ne fait aucun doute
sur le plan sociologique et sur le plan psychologique.39 Et c'est sur ces deux terrains que nous
allons rechercher la vulnérabilité du consommateur africain. Comment en serait-il autrement,
puisque celui-ci ne bénéficie d'aucune protection juridique, son existence étant confondue à celle
du citoyen?
17 Artic1c 1124 C. Ci\\'. français .
.18 B1HL : « La protection du consommateur particulièrement vulnérable », Cahiers de Droit de l'Entreprise 1985,
na 2, p.:14: J.c.P. éd. Notariale 1985,9397 .
.
19 Ibid.

485
Si
l'existence du
consommateur vulnérable ne fait
aucun doute
en
Afrique,
la
caractéristique ou ]'1 délimitation du domaine des personnes présumées vulnérables peut être une
source de discussion enrichissante, tout consommateur pouvant, a priori, être victime d'une
quelconque int1uence, ruse ou manipulation d'un professionnel relativement habile dans l'art de
convaincre ses clients. Tout dépend du secteur commercial dans lequel on se trouve.
Mais qud que soit le secteur d'opération, trois catégories de personnes peuvent
néanmoins être considérées comme des consommateurs particulièrement fragiles, vulnérables et
partant, susceptibles d'abus de faiblesse des professionnels sans scrupule.
Il s'agit tout
particulièrement des jeunes, des populations défavorisées des milieux urbains et des populations
issues des milieux ruraux. Toutes ces personnes constituent des cibles privilégiées pour les
vendeurs de technologies modernes.
Commençons tout d'abord par les jeunes lesquels ne correspondent pas forcément à la
catégorie juridiquc des mineurs. Ils font, à travers les techniques modernes du marketing, l'objet
4o
des marchés importants.
Leur fragilité découle tant dc leur inexpérience que de leur sensibilité
particulière à la « mode» et à la publicité. 41 L'exemple type en Afrique est celui de la publicité
des marques de tabac. Celle-ci a réussi à travers des spots publicitaires inadmissibles, mais
« convaincants» et « séduisants », à entraîner une masse considérable de jeunes (collégiens,
lycéens et autres) dans la consommation du tabac.
Alors que des mesures réglementaires et législatives sont prises en Amérique et dans les
pays européens en vue d'une restriction, voire d'une suppression totale des spots publicitaires en
faveur du tabac et de l'alcool, le continent africain et ses pairs du reste du Tiers-Monde, en raison
de leur potentiel humain de fumeurs et de consommateurs d'alcool et de l'absence de textes
sanctionnant les abus commerciaux ou publicitaires dans ce domaine, sont devenus les nouvelles
cibles privilégiées des industries ou firmes multinationales opérant dans ces secteurs. 42
La
deuxième
catégorie
de
personnes
fragiles
est
constituée
de
la
masse
de~
consommateurs issus des milieux urbains défavorisés (bidonvilles). Elles constituent unE
,10 BIHL : idcm, 11 s'~lgil, cn Crrel, des marchés comme: la presse, les bandes dessinées, les disques (Compact':
Disques ou C.D), les HI-FI, les articles de sport, les vêlements, les molos, les bicyclettes, les V.T.T. (Vélos Tov
Tcrr:lin). les b,ll~ldcl1n; (Walkman). elc.
Il Ihid.

486
catégorie de consommateurs particulièrement Vl.Ùnérables non seulement en raison de leur
origine sociale, mais aussi et Sllltout de l'illusion qu'elles entretiennent dans leurs rêves à
s'offrir un jour les produits oules services qui leur tiennent à coeur.
Il s'agit là d'un état social et psychologique importants où l'illusion se mêle à la
réalité quotidienne et dont n'hésitent pas à profiter les marchands véreux, notamment les
démarcheurs à domicile et les marchands ambulants dotés d'une habileté sans faille dans
l'art de vendre. Les agences publicitaires ne s'en servent pas non plus moins. Utilisant les
comportements ostentatoires de leur vécu quotidien, elles n'hésitent pas à agir sur leur
psychologie en vantant les màites et les qualités des produits ou tes services de leurs rêves
et auxquels ils ne pourTont avoir accès qu'en faisant des choix qui consacrent ou sacrifient
l'essentiel de leurs maigres ressources.43
La troisième catégorie de personnes vuhlérables est constituée de consommateurs
issus des zones mrales (villages et campagnes). Leurs origines sociale et géographique les
prédisposent à une li<'lgilité sans commune mesure avec les catégories précédentes. Plus ou
moins coupés cles réalités urbaines, donc des réalités modernes, malgré une certaine
« fluidité dèS rèliJli(llls villes-campagnes }}44 , les consommateurs des milieux ruraux sont
4s
des cibles privilégiee:, des marchands d'illusions
De plus « la perception des styles de vie urbains comme les modèles à mimer }}46 les
arnène à prendre pour vérité comptant tout ce qui vient de la ville. Aussi, n'hésite-t-on pas à
utiliser leur crülulité, leur naïveté, leur absence de discernement du vrai et du faux, leur
ignorance de la qll<dité des produits et des services vendus, à des fins exclusivement
commerciales. Ft 011 embrasse là le domaine relatif à la vuhlérabilité liée à tille carence ou
insuffisance culturelle ou intellechlelle.
42 Voir « Consonunation-Développement », Bull. Trim. d'Info. publié par I0C;U-ENDA, n° 9, avril 1993, p. 7 et
SUIV.
43 KANOUfE : Cormnunication... précitée, p. 5.
44 Ibid.
45 Ils sont des cibles privilégiés des marchartds de vêtements, des cosmétiques, des montres, des radios, des
magnétophones, des vélos, des motos, des pièces détachées, des engins mécartiques ou électroniques, etc. V.
également (( Les marchands d'illusions aux fichiers des crédules », in « Consonmlateurs-Actualité », n° 449, 25
janvier 1985, p. 2-_).
46 Ils sont des cibles privilégiés des marchands de vêtements, des cosmétiques, des montres, des radios, des
magnétophones, des vélos, des motos, des pièces détachées, des engins mécartiques ou électroniques, etc. V.
également « Les marchands d'illusions aux fichiers des crédules », in « Consommateurs-Actualité », n° 449, 25
janvier 1985, p. 2-3.

487
b) La vulnérabilité liée au degré de connaissance
intellectuelle du consommateur.
C'est un t~1it qui est plus ou moins liée au cas précédent ci-dessus analysé. La
vll1Jl~rabi1it~ ici met en exergue la faiblesse de l'intelligence et l'insuffisance du niveau
cult11re1 de l'individu. Et là encore on retrouve les mêmes individus, les mêmes personnages
dont le droit devrait s' ClCCUPCr. Il s'agit des catégories de persormes précédemment citées:
les p.:rsonnes analplwbètes et les persormes modestement instmites.
On part ici cil! pnncipe selon lequel le consommateur n'est« rù abstrait, ni lucide, rù
raisormable », In,lis llTl ëtre « fi:lible dont le droit commence à asSiller la protection »47 . Il ne
s'agit pas d'un ~tat cie faiblesse physique, mais d'un ensemble de circonstances lié à un
manque de cOJUlaiss,IIll'eS relatives au nouveau monde de la consommation, alLX nouvelles
teclmologies clont Jes contours sont difficiles à maîtriser par les non initiés. Plus que des
consomnwkurs
<\\
/'étt1
pur
(analphabètes,
modestement
instmits
ou
JeUIles
consommateurs salls expénence), c'est de l'ensemble des consommatems profanes au
sens propre du temle dont il est question ici. Et qui dit profane, dit absence ou insuffisance
notoire cl: cOllnaissilllces clans le clomaine concerné par la transaction consumériste en
cours il' ('jJGI,i1 il)11 (li, 1,1 P,I Il iClilarlté ck l' Ajj-ique est cl' être peuplée en majorité par ce type
cie consommateur
L't~xplica tion -:st toute simple : l'économie des pays afii.cains étant extravertie,
c'est-zl-c1ire toumée vers l'exportation des matières premières et l\\rnportation des produits
ouvrés, la population se retrouve en tàce des produits de consommation complexes dont
les cClntours sont difficilement rmûtrisables. Et quand on est analphabète ou de culture
intelleCTuelle modesTe, point n'est plus besoin de démontrer les difficultés rencontrées dans
les tnmsactions et les manipulations ou abus defaiblesse qui s'ensuivent.
Telles sont les réalités socio-économiques et culturelles qui caractérisent les pays
afii.cains et qu~ le ch'oit se doit de prendre en considération afin d'introduire Wle certaine
hannonie entre les textes et le vécu quotidien des consommateurs. Le droit africain actuel
répond-il ô cette nécessitëi ? C'est ce que nous chercherons à savoir dans l'analyse du
phénomène consurnàiste contemporain.
47
CALAlS-AULDY
«La protection légale et réglementaire du consormnateur, lacunes et excès », 111
«Nouvelles données pour un droit de la consommation », Dalloz 1973, p. 50.

488
Sous-Section II : Les exigences consuméristes face aux réalités africaines.
48
Le consumérisme est un fait social inévitable que la consommation de masse
rend plus
que jamais indispensable. Si la consommation est présente partout, elle ne se manifeste cependant
pas de la même manière, son développement étant fonction des réalités socio-économiques de
chaque milieu, voire de chaque pays. Il y a un besoin pourtant qui se manifeste partout avec la
même envie : c'est de la protection que ressentent et revendiquent tous les consommateurs
quelles que soient leur origine, leur situation géographique, économique ou sociale. Le système
juridique
actuel
des
pays
africains
satisfait-il
à cette revendication légitime de leurs
consommateurs? L'analyse de la situation socio-économique de la consommation (§I) nous
permettra d'apporter une réponse à cette question (§II).
§I - L'analyse de la situation socio-économique de la consommation.
Il est pratiquement impossible de parler de la protection du consommateur sans se référer
aux données économiques, celles-ci ayant provoqué la situation dans laquelle se trouve
aujourd'hui l'homme contemporain communément appelé acheteur, client ou consommateur
selon le sens ou la terminologie donnée à chacun à ces termes. Si l'on part de ces postulats'de
base, on arrive à la conclusion selon laquelle le phénomène 90nsumériste contemporain repose
sur deux concepts fondamentaux: un basé sur le social et un autre fondé sur l'économique et la
technique. Le phénomène consumériste actuel serait donc un fait de société (A) ; il serait aussi le
résultat ou la conséquence directe de l'évolution économique et technique de notre temps (B).
A - La consommation, un fait de société.
Hormis les objets qui ont une valeur marchande et qui mettent le plus souvent en contact
vendeurs et acheteurs lors des transactions commerciales, rares sont les domaines de l'activité
humaine qui ne peuvent être rattachés au monde économique. On pourrait dire que nous
« consommons de la culture, de J'environnement, de l'administration, de la politique, etc. Dans
ces conditions le consommateur ne ferait qu'un avec l'individu dans tous ses aspects de la vie
. j'
cl <)
quotl( lenne» .
·IS G. KATONA: L;I société Je COllSOIlHlJalioll Je masse, éJ. Hommes cl Techniques 1966.
49 « Le consumérisme », Pangloss n° 13 , Fondation Nationale des Entreprises Publiques, 1983, p. Il.

489
Mais là n'est pas notre propos, car ce serait se livrer aux délices de « tout est dans tout, et
réciproquement »50. Aussi, nous astreindrons-nous à la conception restreinte de la consommation,
c'est-à-dire la consommation envisagée dans son acception la plus courante. En tant que fait
social, nous analyserons donc la consommation comme l'activité qui régit les rapports entre les
professionnels vendeurs de produits ou prestataires de services et les acheteurs desdits produits
ou les bénéficiai l'es des services rendus ou réalisés.
Envisagée dans cette logique, la consommation constitue un élément fondamental de
l'équilibre du marché puisqu'elle s'identifie, en termes économiques, à la demande. Or, qui dit
marché, dit rencontre de deux volontés: l'offrant et le demandeur, termes que l'on rencontre en
droit
de
ln
consommation
respectivement
sous
le
vocable
de
«professionnel»
et
« consommateur ». Le droit de la consommation n'est docc pas un droit intrus, mais une
51
discipline plus ou moins autonome
cherchant à réguler les effets pervers de l'économie de
marché.
En quoi consiste l'économie de marché? Elle se résume à l'entreprise dont l'objectif est
de vendre les produits qu'elle fabrique aux consommateurs. Or, aucune stratégie d'entreprise,
aucune implantation durable, aucune offre de biens ou de services ne peut rencontrer de succès s:
elle aboutit à la commercialisation de produits qui ne répondent pas aux besoins de
consommateur final. Le consommateur est donc celui par qui toute la prospérité arrive.
S'agissant des besoins du consommateur, il faut toutefois souligner que ceux-ci ne sont
pas les mêmes partout - même si on retrouve dans la quasi-majorité des cas, des produit~
identiques vendus dans tous les pays du monde entier. Ils varient en fonction des réalités socio-
économiques et culturelles de chaque continent et à l'intérieur de chaque continent de chaqué
pays. La diversité des besoins fait aujourd'hui du consommateur, naturellement pour des raisom
relatives au gain d'argent, un être placé au centre des préoccupations des producteurs. Ceux-c
ne peuvent plus, certes, ignorer la nécessité de garantir sa santé et sa sécurité, d'éviter dt
l'induire en erreur, de lui proposer un produit de qualité sous peine d'être privés de leur sourC(
de profil.
iO IÙcm.
51 Sur le caractère autonome ou non du droit de la consommation, voir J.-P. PIZZIO : Droit de la consommatior
Enyclopédie Dalloz, Droit commercial, 1987, p. 26 et suiv.

490
Mais il s'agit là d'une vue d'esprit qui est vite oubliée dès lors que la loi ne les y oblige
pas formellement ct rigoureusement par des contrôles adéquats et opportuns. Encore faut-il avoir
les moyens susceptibles d'assurer de tels contrôles. Au-delà de toute cette analyse, une chose
cependant reste certaine: le souci de faire consommer est un fait incontournable, inhérent à toute
stratégie d'entreprise. 52 C'est une réalité que tout législateur se doit de ne pas ignorer, le
consommateur étant au centre des préoccupations de tout fabricant de produits ou prestataire de
services.
Pourtant. le terme même de « consommateur» est médiatiquement peu heureux dans nos
pays et l'expression «protection du consommateur» quasi-absente, contrairement aux pays
occidentaux OLI elle renvoie à un univers ou arsenal de t~xtes législatifs et réglementaires
conséquents. 53 Il suffit, pour s'en convaincre, de faire un tour d'horizon des législations des pays
africains. A l'exception de la législation de l'Etat du Cameroun,54 on y cherchera sans résultat la
part du droit consacré à la protection du consommateur.
L'explication de cette carence législative relative à la protection est toute trouvée: le
consommateur n'est pas la préoccupation essentielle des pouvoirs publics africains. En dehors
des situations d'interventions ponctuelles consécutives, par exemple, à un accident grave ou à un
scandale de grande ampleur dans la consommation, ou de problèmes particulièrement aigus, sa
protection, si protection il y a, ne figure pas au premier plan des priorités gouvernementales.
Cette attitude des gouvernements africains a eu pour conséquence de mettre le concept de
« consommateur» en marge de la majorité de la population qui perçoit la notion de
«consommation comme une caractéristique» propre aux «sociétés d'abondance »et par
conséquent « un luxe pour les sociétés en développement »55. Dans une autre mesure, la notion
en elle-même est perçue comme une activité réservée à une certaine élite des villes africaines,
56
comme un domaine réservé des privilégiés
de la société. Ainsi, la notion de consommateur
serait-elle ignorée de « plus de 60% de la population africaine ». Ceci justifie qu'on n'enregistre
.'2
A. CI\\I~NELU1TI : « Consommation ct société» in Rcv. Françaisc d'Administration Publiquc, octobrc-
1
déccmbre 1990. na 56, [). 581.
f
'.1 cr Tous les tcxtes cités cn la matièrc dans eclte étude.
)·1 V. La loi camerounaise na 90/031 du 10 août 1990 et son décret d'application na 931720/PM du 22 novembre
1993 précités .
. ).' KANOUTE : Communication ... précitée, p. 4.
)6 Ibid.

491
]' éclosion des associations de consommateurs que dans les grandes villes, notamment dans les
capitales. 57
Pourtant, la consommation n'est pas uniquement un phénomène urbain. Les milieux
ruraux sont aussi concernés par ce phénomène. Si les nouvelles méthodes de distribution des
produits et des services sont à même de permettre un drainage "desdits produits et services jusque
dans les zones rurales, et ce, en raison de la fluidité des relations villes-campagnes, il n'en
demeure cependant pas moins que certains besoins essentiels y sont rarement satisfaits (eau,
énergie, alimentation, produits pharmaceutiques).58 Ceci est contraire aux souhaits formulés par
59
les rédacteurs des principes directeurs des Nations Unies . Mais l'accès des ménages aux médias
(radio, télévision), leur permet de vivre au quotidien tous les mérites que la publicité ou le
marketing ne cesse d'attribuer aux nouveaux produits vendus sur les places commerciales avec
un seul objectif: inciter les ménages à consommer.
Tous ces consommateurs (urbains ou ruraux) ont besoin d'être protégés. Ce besoin de
protection se justifie par le fait que l'acte de consommation met, sauf exception, un particulier en
face d'une entreprise ou d'un professionnel dont la puissance ne cesse de croître au fur et à
mesure que la technique avance, rendant ainsi illusoire laprétendue égalité entre contractants.
B La consommation, une conséquence de l'évolution
économique et technique.
Le droit de la consommation, tel qu'on le conçoit dans·les pays où son existence est réelle
et effective, n'est pas, comme les autres branches du droit, un ensemble uniforme, homogène,
sorti tout armé du cerveau des théoriciens. Ses règles ont été créées de façon pragmatique et
progressive, pour faire face à des situations ressenties comme anormales ou à des problèmes
nouvcauxC,il issus des nouvelles données économiques et techniques et que le droit des contrats
. est incapable de (·t?souùre. Il s'agit donc d'un droit jeune. Parti à l'origine du droit économique
,) Ihid
'
" K:\\NOUTI: : COJIIIIlUllic~\\ti()Il ... l'récitée, p. 4.
'CI cf principes Ile' .'S : 39 ; 40 : 41 lesquels considèrent ces besoins comme vituux, donc prioritaires pour le~
populatinlls. Cil particulier celles des P.Y.D.
"li Ch. I3AI3USIAUX : « Le droit de la consommation, retlet de l'évolution économique et technique ", in Rev.
Frçse d'Adm. Puh!.. ocl.-dée. 1990, n° 56, p. 625.

492
61
auquel il reste très lié, il n'a acqUIs son autonomie que très récemment et difficilement
d'ailleurs. Ce qui justifie qu'il ne fait l'objet d'un enseignement spécifique que dans quelques
62
facultés. Son contour exact est d'ailleurs très délicat à délimiter.
Droit de la protection de l'individu-consommateur, puis de l'affirmation du mouvement
consommateur, il est - comme le droit du travail auquel il ressemble par plus d'un trait - sensible
à la conjoncture politique, aux évolutions de la société et aux mutations économiques.63
Depuis quelques décennies, des mutations de grande ampleur se sont produites aussi bien
dans les modes de consommation que dans les idées, les stratégies et les structures économiques:
l'internationalisation et la libération des échanges multiplient les biens et les services offerts sur
les marchés. A cela s'ajoutent le droit de la concurrence et la concentration des entreprises, et
avcc clic, la sophisl ication des techniques de production et de distribution.
Le développement considérable des techniques liées à l'informatique - télématique,
monétique entre autres - a accru sensiblement les possibilités pour les entreprises de séduire la
clientèle et de répondre à ses besoins.
La puhlicité se fait aujourd'hui au moyen des lettres personnalisées, envoyées à des
centaines de milliers d'exemplaires grâce aux micro-ordinateurs et aux machines de traitement de
textes. Elle utilise des automates d'appel téléphonique. On peut passer des commandes par
.téléphone, par Minitel et également depuis quelques années procéder au télé-achat64 , pratique
commerciale très développée aux Etats-Unis.
Certes, la plupart de ces techniques ne sont pas encore connues dans les pays du Tiers-
Mancie comme c'cst le cas notamment des pays d'Afrique. Mais elles ne tarderont pas à se faire
connaître, intcrnationalisation des échanges oblige.65
La réalité de nos jours est que toutes ces transformations économiques et techniques ont
pour effet direct de modifier considérablement les rapports de force entre les différents
partenaires économiques.
La suite logique de cette modification est l'enregistrement du
j
(;1
PIZZIO : op. cil. n" :'75 ct suiv.
(;" Ibid .. BABUSIAUX : article [1récité.
6.1 BABUSIAUX : article [1récité, p. 625.
(,.1 BABUSIAUX : article précité, [1. 628.
(,5 Ibid.

493
déséquilibre contractuel entre producteurs/distributeurs d'un côté et consommateurs de l'autre. n
s'agit d'un déséquilibre qui doit être rétabli. Mais ce devoir de rétablissement de l'équilibre
rompu relève du domaine de l'autorité publique, en l'occurrence de l'Etat, régulateur des
rapports contractuels entre agents économiques opérant à l'intérieur de ses frontières nationales.
Son rôle de défenseur et garant de l'intérêt général l'y oblige à accomplir ce devoir.
La réalisation d'une telle exigence, d'un tel devoir est sujette à la définition d'un cadré
juridiquc bien prée is adapté aux circonstances de la cause. De façon concrète, c'est une invitatior
à la mise en place dcs moyens juridiques adaptés aux réalités locales dont il est question ici. Dam
cette perspective, les pays africains, en l'occurrence leurs gouvernements respectifs, devraienl
s'inspire r dcs expériences vécues ailleurs. Certes, rien n'est directement transposable d'un pays ~
l'autrc. îvlais « l'expérience immédiate de la vie résout les problèmes qui déconcertent le plm
l"
Il'
('ô
Il1te 1gence pure)) .
S'inspirer des expériences des autres pays, notamment des pays avancés dans ce domaine.
est aussi la preuve que le consumérisme n'est pas un fait social qui concerne uniquement le~
sociétés industrielles, mais un reflet de l'évolution économique et technique, évolution à laquellé
tout Etat doil s'adapter.
A cct cfrel, tout Etat doit intégrer dans sa politique générale des règles de droit
suscepl ibles de protéger sa population, donc ses consommateurs, contre les déséquilibre~
contractuels qll1 en découlent ou contre l'insuffisance ou l'absence de sécurité de certain~
produilS vendus ou services rendus. C'est une nécessité plus que jamais incontournable, b
systèmcs juridiques en place étant impuissants pour éviter tout déséquilibre ou danger dans h
consommation,
SIl - Le phénomène consumériste et les systèmes traditionnels
de protection du consommateur en Afrique.
Au-delà dc toutes les spéculations juridiques dont le droit de la consommation fai
souvent l'objet, il y a une réalité qui reste toujours au centre des préoccupations des défenseur~
de cette nouvelle discipline: les droits du consommateur. Le phénomène consumériste n'est riel
66 Pangloss na 13 précité, p, 9.

494
d'autre qu'une manifestation avouée de la défense des droits des consommateurs (A), droits que
les systèmes juridiques traditionnels ne peuvent protéger que dans un cadre très limité (B).
A Le phénomène consumériste et les droits
légitimes du consommateur.
Les consommateurs constituent le groupe économique le plus important dans le monde.
Si leur existence légale est plus ou moins reconnue dans les pays hautement industrialisés, ils
restent encore en Afrique et dans certains pays du Tiers-Monde la seule entité sociale et
économique à ne pas être effectivement organisée. Ce qui ne leur permet pas de jouir d'un statut
juridique particulier susceptible d'avoir une incidence sur le plan économique et d'en affecter les
décisions de nature à leur causer préjudice, de quelque nature qu'il soit.
La prédominance de cette situation en Afrique s'explique par un fait - dont nous avons
déjà fait cas plus haut -: la notion de consommateur est encore mal perçue en Afrique et quelque
part, on n'arrive pas à réaliser, à se faire à l'idée que celui-ci puisse avoir un statut juridique
particulier distinct de celui du citoyen, ayant des droits susceptibles d'être protégés par un texte
de loi el
défendus
par des organisations spécialement créées à cet effet.
Pourtant le
consommateur existe, ses droits aussi, droits confirmés par J'adoption par les Nations Unies des
Principes Directeurs pour la Protection des Consommateurs.
Les droits du consommateur sont fondamentaux. En les légitimant, les Nations Unies font
peser sur les Etats membres de l'organisation une obligation morale qui convie tout Etat à
garantir leur réalisation dans le circuit commercial. Mais de quels droits s'agit-il? Les droits du
consommateur encore ignorés ou négligés dans les pays africains sont les suivants:
- Le droit à la sécurité: c'est le droit qu'a le consommateur d'être protégé contre la vente
de produits ou la prestation de services comportant un risque pour la santé ou la vie. 67
- Le droit à l'information: c'est le droit qu'a le consommateur d'être protégé contre la
mauvaise information, la publicité, l'étiquetage ou toute autre pratique frauduleuse, trompeuse,
ou de nature à induire gravement en erreur, et de recevoir les éléments d'information
indispensables pour faire un choix éclairé et lucide.68
1
l
67 cf principes nOs 9 ; 10 ; Il et 12 de la charte des Nations Unies pour la protection du consommateur.
68 cf principes nOs 13 à 23 de la charte des Nations Unies pour la protection du consommateur.

495
- Le droit de choisir, c'est-à-dire d'être assuré dans 1(\\ mesure du possible d'un accès ~
une variété de produits et de services à des prix compétitifs.69
- Le droit d'être entendu: c'est le droit d'être assuré que les intérêts des consommateur~
sont pleinement et favorablement pris en considération dans la formulation de la politique dL
gouvernement, ct qu'ils recevront un traitement équitable et rapide dans ses tribunaux.7o
- Le droit à la protection, à l'assistance et à la réparation des dommages. Il s'agit d'ur
droit qui concerne, d'une part, les risques et les préjudices dus à des produits dangereux, lesquel:
exigent l'institution des règles de surveillance et des normes minimales pour éliminer ou réduire l,
danger de la mise sur Je marché des produits nocifs71 , et d'autre part, les alteintes portées au;
intérêts économiques du consommateur - abus de pouvoir du vendeur se traduisant dans le:
contrats types, méthodes de vente agressives, insuffisance d'un service après-vente raisonnable
n
pratiques restrictives de la concurrence, publicité induisant en erreur, etc.
Le consommateu
doit pouvoir « recourir sans difficulté, à peu de frais, à une juridiction nationale ou, pour le:
petites réclamations, à un arbitrage officiel» pour obtenir réparation du dommage qui lui a étt
, 7 '
cause ..
- Le droit à la formation, à la représentation et à la consultation.74
- Et enfin, le droit à un environnement sain, préservé de toutes pollutions: industrielles
· .
h
7S
C tlTIlques et autres ..
L'exigence d'une législation adaptée en vue de la protection desdits droits est souhaitét
parce que les systèmes juridiques actuellement en vigueur dans les pays africains se révèlen
insuffisants, inefficaces, voire limités pour assurer une telle protection.
<>~ cf Principes nOs 13 ct 17 de la charte des Nations Unies pour la protection du consommateur.
70 cf Principes nO' 13 à 23 : 28 à 37 de la charte des Nations Unies pour la protection du consommateur. V
Egalement KENNEDY's Special message to the Congress on protecting Consumer Interest, March 15, 1962
4
Puhlic papcrs or the President, p. 235, cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit., p. A
71 cr Principes nOs C);1 12: et 38 à 42 de la charte des Nations Unies précitée
72 cr Principcs nOs 13 Ù 23 de la charte précitée
7.1 cr Principcs nQS 28 :1 30 de la charte précitée.
71 cr Principes n"s 31 :137 de la charte précitée.
" cr Principes nUs 32 et 42 de la charte précitée. V F. TOURE DIA : « La place de l'environnement dans J
consommation », Dakar, E.N.D.A. 1988 (MODEV, 5), in Dossier Documentaire sur la consommation publié pa
E.N.D.A. Tiers-Monde, p. 21.

496
B - Les insuffisances des systèmes juridiques traditionnels
de protection du consommateur.
Le consumérisme constitue une réaction contre les insuffisances et les excès du libre jeu
du marché dont le consommateur individuel se trouve être- la victime. Visant avant tout la
régulation du marché ou du commerce en général, donc de l'économie dans toute sa globalité,
par le droit, il n'est pas à confondre avec l'expression « politique de la consommation» dont
l'orientation concerne tout autre chose que la protection du consommateur. Cette vision du
marché, très pratiquée dans les pays les moins avancés, ne doit pas être compris dans un sens
.étroit, mais dans son acception la plus large laquelle englobe l'ordre public économique.
Une politique de la consommation bien menée tout comme un ordre public économique76
bien orienté peuvent, dans une certaine mesure, défendre les intérêts des consommateurs, voire
les protéger d,ms [Ollte leur dimension. Mais ils ne peuvent en aucune manière se substituer au
droit de la consommation spécialement conçu à cet effet. La politique de la consommation (a)
clans son sens étroit ct l'ordre public économique (b) sont donc deux notions bien différentes.
Elles ne sont donc pas à confondre avec le droit de la consommation dont nous prônons
l'institutionnalisation en Afrique tant les objectifs poursuivis par chacun d'eux sont différents et
les degrés de protect ion offerte au consommateur complètement inégaux.
a) La politique de la consommation et ses insuffisances
dans la protection du consommateur.
La protection du consommateur poursuit un objectif indépendant de la politique de la
consommation.
La politique de la consommation nécessite des choix au niveau de la collectivité nationale.
Ces choix ne sont pas toujours faciles à réaliser et ne sont pas séparables de la politique du
gouvememen t. 77
76 D. N'GUYEN-THANH-BOURGEAIS : Les contrats entre professionnels et consommateurs et la portée de
l'ordrcpuhlicdans les loisScrivenerdu IOjanv.1978etdu9juill. 1979,D.S.1984,chron.,91 etsuiv.
77
1. DELORS : Exposé introductif au Comité national de la consommation du
19 juin
1982, cité par
FOURGOUX. MIHAILOV ct JEANNIN: op. cil., A4 ct B 14 •

497
Pour bien cerner la différence entre ces deux approches, certaines analyses s'imposent.
Celles-ci pourraient peut-être nous permettre de lever l'équivoque qui entoure ces deux notions.
L'économie de marché repose sur une certaine contrainte qui fait son charme: celle de la
liberté de concurrence. Faut-il, par exemple, entretenir en survie, grâce à des subventions, une
entreprise régionale pour maintenir géographiquement l'emploi? Faut-il aussi tenir compte de
l'al tacllement dcs .salariés il l'entreprise, alors que la charge de cette survie sera supportée par
J'ensemble des contribuables et que l'entreprise soutenue, dans une économie libérale où prévaut
la libre concurrence, pourra gêner le développement d'autres entreprises plus compétitives,
susceptibles de rendre davantage de services aux consommateurs?
Comment concilier les intérêts incompatibles du consommateur, usager des transports
publics, et ceux du contribuable; ceux du consommateur de voyages confronté à l'action des
salariés du secteur des transports (grève des salariés des chemins de fer ou des aiguilleurs du
ciel) '?7s
De toute évidence, une chose reste toujours certaine. Quelle que soit la situation,
l'opposition entre les intérêts des différentes parties en présence, salariés-producteurs et des
consommateurs (même si ceux-ci sont des salariés) subsistera toujours. On ne pourra jamais la
faire disparaître par un simple choix de politique écononùque ou de consommation, si déterminée
soit-elle.
Le problème de la consommation est spécifi.que. La défense du même travailleur dans ses
besoins et son comportement de consommateur ne peut être assuré par le syndicalisme travailleur
- celui-ci a autre chose à faire,79 - mais plutôt par le mouvement consommateur - associations de
consommateurs et groupements habilités, Celui-ci ne pourra le faire que s'il dispose de textes de
lois spécialement votés pour les besoins de la cause. C'est ce qu'on désigne sous le vocable ou le
générique particulier de « Droit de la consommation ».
On trouve le fondement de la démarche dans une analyse toute simple: celle-ci repose sur
le rail qu'il n'y ;\\ pas de consommation sans production, et que la solution des conl1its entre
7S FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. ciL, p. BI4 ; 1. CHEVALIER: «Les droits du consommateur
usagcr clc scrviccs puhlics », Rev. Droit Social, février 1975, p. 75 et suiv.
79
iv1. ROCARD : Intervicw, 50 millions de consommateurs, 1975, cité par FOURGOUX, MlHAILOV el
JEANNIN. op. cil.. p. n 14 .

498
partenaires économiques, producteurs et consommateurs, ne peut être trouvée dans un équilibre
qui tienne compte à la fois de la relation entre les besoins à satisfaire et les contraintes réelles de
la production, cie l'intérêt de chacun des partenaires, et de façon primordiale, de l'intérêt de la
w
collectivité.
On
ne
peut obtenir un
tel résultat
à partir uniquement d'une
politique
de
la
consommation, car celle-ci ne suit pas forcement les intérêts des consommateurs. Elle est, loin
81
s'en faut, le reflet des options qui concernent à chaque fois la shucture et la stratégie de l'EtaL
Ainsi, loin des préoccupations consuméristes, la politique de la consommation suit plutôt
l'évolution de la situation économique et politique du pays. Parfois, on y voit dans sa conduite,
une empreinte de l'ordre public économique.
b) L'ordre public économique et ses limites dans la
protection du consommateur.
Si la politique de la consommation résulte d'un choix, voire d'une orientation politique
d'un pays, peut-on imaginer, dans ce contexte, un droit de la consommation affichant une
neutralité clans toutes ses manifestations? Rien n'est moins sûr.
En tout cas, comme nous avons déjà eu à le dire, l'objectif du droit de la consommation,
c'est qu'il serve de base arrière à la protection du consommateur. En ce sens, il doit être un outil
susceptible d'être mis en oeuvre par tout gouvernement, parce qu'il n'aurait d'autre but que
d'assurer la protection du consommateur, c'est-à-dire, l'individu envisagé dans fonction de
consommation, la loyauté des rapports production/distribution/consommation, dans un souci de
1· ,
bl
8?
mora Ite accepta
e par tous. -
Mais un problème subsiste, il ne faut pas se le dissimuler. C'est que le droit n'est pas
neutre, il l'est de moins en moins. Comme l'a souligné un auteur, il n'est plus cette « construction
technique... indispensable pour donner à la règle morale la précision nécessaire et fonction
législative »81. II ret1ète plus les projets gouvernementaux que la volonté d'ériger une éthique
sociale. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'une chose à faire: regarder les divers projets de loi des
/
ôa rOURGOUX. tvlIHAILOV el JEANNIN: op. cil, p. B 14
ôl Ibid.
ô2 FOURGOUX. MIHAILOV ct JEANNIN: op. cil, p. B 14
ô.1 RIPERT : La règlc morale dans les obligations civiles. op. ciL, p. 204.

499
gouvernements qui se succèdent dans les différents pays à chaque changement de majorité. Au
lieu de rester dans un cadre technique, le droit se sépare chaque jour davantage de la morale pour
84
devenir l'expression d'une politique.
Et sous prétexte de défense sociale, il servira à faire régner
un ordre public économique, plus directionnel que de protection, mobile, opportuniste, artificiel,
s5
c'est-à-dire, amoral et contraignant.
Dans cette dimension, le droit est plus une forme de police
économique qu'un instrument technique au service de la justice sociale.
Certes, l'ordre public économique peut servir à défendre la cause des consommateurs
lorsqu'elle contient en son sein un ordre social. C'est le cas notamment des règles d'ordre public
qui entendent protéger, en droit civil contractuel, les faibles contre les forts, qui veulent assurer
aux premiers les droits qu'exige une bonne justice sociale, qui prétendent les affranchir de
l'oppression dont peut les entourer le jeu impitoyable d'une liberté des contrats, déséquilibrée par
l'économie moderne. 86
Toutes ces règles protectrices s'inspirent directement d'une éthique, non d'une technique.
L'ordre public ainsi construit n'est rejoint par l'ordre public é~onomique que lorsque ce dernier,
dépassant sa technique propre, en arrive à ses finalités lointaines87 , car l'expansion favorisée par
l'ordre public économique doit profiter, en fin des comptes, à la justice sociale. A cette dernière
étape, le plan économique intègre une part d'idéal social dans sa logique; il s'élève, du niveau de
la technique, à celui de l'éthique. C'est un changement d'horizon où il rejoint largement les
ss
techniques juridiques.
De façon générale, si l'on veut vraiment aider le consommateur du Sud (Tiers-Monde) on
devrait éviter ~I l'ordre économique toutes sortes d'égarements possibles. Mais ceci n'est pas
chose racilc ~l réaliscr, car avant d'atteindre ce sommet, l'ordre public tient à son existence
propre."'! Cc CJui rait d'aillclll's sa particularité par rapport au droit de la consommation.
De toute façon, on ne peut concevoir un droit de la consommation sujet à un choix
politiquc. Celui-ci ne rentre pas dans cette logique. Il répond plutôt à des choix pratiques, liés
s~ rOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op. ciL, p. B'~
x) R. OTTENHOH : « Le droit pénal et la fonction du contrat civil », nOs 116 et sui v., également R. SA VATIER ,
«L'ordre public écnllomique », D. 1965, p. 37.
", SA V ATIER : « L' urclre public économique », D. 1965, p. 38.
X7 SA VATIER : « L'orure public économique », D. 1965, p. 38
SS SAVATIER : « L'ordre public économique », D. 1965, p. 38
S') Ibid.

500
aux réalités du milieu dans lequel il est appelé à être appliqué, à être mis en oeuvre. Aussi, au-
delà de toute considération politique soumise à des choix orientés dans la consommation, parfois
en contradiction avec les intérêts légitimes des consommateurs, les nécessités du moment
exigent-elles que l'on s'inspire des réalités économiques, sociales et culturelles de chaque pays ou
région pour asseoir des systèmes juridiques protecteurs en fonction du vécu quotidien des
consommateurs
locaux.
L'essence
du
consumérisme,
entendu
droit
protecteur
des
consommateurs, répond à cette logique.
SECTION II :
LE PHENOMENE CONSUMERISTE EN AFRIQUE : LA NECESSITE
n'UNE REGLEMENTATION ADAPTEE AUX REALITES LOCALES.
Adapter le droit de la consommation aux réalités africaines, c'est prendre en considération
les exigences ou aspirations des consommateurs locaux dans la mise en place des législations
susceptibles de les protéger dans leurs transactions quotidiennes. Cette nécessité est valable non
seulemcnl ù J'échelle nationale (Sous-Scction 1), mais aussi ~lU plan régional, sous-régional ou
contincntal (Sous-Section II)
Sous-Section 1 : La prise en compte, à l'échelle nationale,
des réalités locales dans la mise en place des législations
protectrices des consommateurs.
Lc commerce africain, comme nous déjà eu à le souligner au début de ce chapitre, est
ambivalent: d'un côté le secteur traditionnel dominé par l'informel et l'ambulant et de l'autre le
secteur moderne réglementé. D'un côté comme de l'autre, la clientèle est mobile et opère dans
l'un ou dans l'autre secteur en fonction des besoins du moment et du niveau des revenus. Les
législations protectrices dcs consommateurs, pour être efficaces, doivent concilier ces deux
1
cntités commercialcs apparemment antinomiques, mais pratiquement complémentaires. Pour le
législateur de chaque pays, le problème de la conciliation ne se limite pas non seulement au plan

501
de la détermination du domaine à réglementer (§I), mais aussi des moyens réglementaires (§II) à
mettre en oeuvre pour protéger efficacement le consommateur, de quelque bord qu'il se trouve.
SI - Le domaine de la réglementation commerciale en Afrique
I\\égklllcnll'r le commerce, c'est l'encadrer par des règles de droit de manière à éviter ou
;1
iinlill'l lou." IL'" l:garL'lllents ou abus possibles. Or, les abus cOllllllerciaux sc conslalen{ plus
souvenl au stade de la conquête de la clientèle qu'au moment de la conclusion de la transaction.
Pour mieux protéger le consommateur, il serait loisible de s'attaquer aux sources du mal,
notamment aux diverses méthodes cooullerciales modernes (A) ou traditionnelles (B). Ceci
permettra d'éviter qu'on abuse de sa faiblesse (C
A - La réglementation des méthodes modernes de vente:
la réglementation de la publicité commerciale en Afrique.
La publicité est une pratique commerciale moderne dont le but est de promouvoir la vente
d'un produit ou c!'un service en vantant ses mérites au public. Avant toute découverte de ces
différents contours, il faudra au préalable connaître le but pour lequel la publicité est faite, c'est-
à-dire la vente. Qu'est-ce que la vente?
Sans trop aller dans les détails, il faut dire que la vente intéresse aussi bien l'économiste
que le juriste.
Pour les économistes, la vente est le contrat qui réalise l'échange des biens entre les
hommes par l'emploi de la monnaie. Elle se distingue du troc en ce qu'un bien est remis er
échange non d'un autre, mais d'une somme d'argent90
Pour le juriste, la vente est le contrat par lequel la propriété d'une chose est transférée ~
un acquéreur en contrepartie d'une somme d'argent. 91 Cette défmition reste certes proche de
celle qui convient aux économistes, à la seule différence qu'elle est imprégnée des principes dl
consensualisme et de la théorie des obligations. Elle sous-entend que le transfert de propriété é
lieu par le seul effet de l'échange de consentements entre l'acheteur et le vendeur.
00 GHESTIN Cl DESCf-1E : La venle, op. ciL, nOs 36 el suiv., p. 33 el suiv. ; D. XARDEL: La vente, PUF 1992, r
5 Cl suiv. ; Y. NEGRO: Vente, Vuibert 1993, p. 15 et suiv. ; BIHL : Droit de la vente, Lilec 1987
DUCOULOUX-FAVARD : op. ciL, p. 1 ; A. REID : Les techniques modernes de vente et leurs applications
Publj-Union 1971, p. 9 et suiv.
91 Ibid., voir égalemel1lles articles 1582 et suiv. C. Civ.

502
Mais la vente d'un objet n'est pas un art simple. Autour de celui-ci se manifeste tout un
écheveau d'artifices destinés à attirer le client et parmi lesquels la publicité joue un rôle très
important.
En effet, la nécessité de réglementer la publicité en Afrique, voire dans les autres pays du
Tiers-Monde, répond à un souci essentiel : celui de la protection du consentement du
consommateur. Cette nécessité s'est avérée urgente à un observateur africain, alors participant à
une conférence sur l'émergence de l'économie du marché en Europe de l'Est tenue à Berlin. Au
cours de cette conférence, les contributions sur le thème «Consommateurs et publicité» ont
retenu son attention en raison de leur pertinence par rapport aux réalités africaines. Il en est
arrivé à la conclusion selon laquelle, «sans un contrôle effectif, les consommateurs deviennent
facilement laproie des publicités agressives et trompeuses »92.
On peut citer, à titre d'exemple, les publicités sur les alimentations au biberon, sur les
médicaments et sur les pesticides en Afrique. 93 Il s'agit des dérives publicitaires auxquelles les
. pouvoirs publics devraient remédier au moyen d'une réglementation adaptée et des contrôles
adéquats (b). Mais avant toute chose, pour les besoins de la connaissance, la présentation de la
publicité commerciale s'avère nécessaire (a).
a) La publicité dans le commerce.
La publicité est une arme commerciale pour les annonceurs et une méthode de vente
efficace pour les commerçants dont les produits sont vantés. Loin d'être vraiment sincère, elle
couvre un domaine où les excès sont souvent commis dans le seul dessein d'attirer le maximum
de clients possible. Mais au-delà de tous ses excès dont personne ne nie l'existenc~ (2), elle
représente aussi un concept dont la découverte ne serait pas moins utile au consommateur (l).
(
92 V. « Consommation-Développement» n° 8, nov. 1992, p. 9.
93 cr supra, Iè'< Partie, chapitre 1

503
1 - La notion de publicité commerciale.
La promotion des marchandises à des fins commerciales n'est pas contraire à la loi. La
publicité commerciale est donc un acte licite (1-2). On ne saurait cependant appréhender cette
licéité sans au préalable cerner la publicité dans sa définition singulière (1-1).
1-1. Définition de la publicité commerciale.
Nous nous intéresserons à la définition donnée par le législateur camerounais dans sa loi
N° 88/016 du 16 décembre 1988 régissant la publicité au Cameroun.94 L'article 2 de cette loi
définit b publicité commerciale comme « un ensemble de moyens utilisés ou mis en oeuvre à
travers des supports pour faire connaître une entreprise ou en vue d'inciter le public à l'achat ou
à la consommation d'un produit ou d'un service ».
Contrairement au droit camerounais, et hormis certaines notions dont font état des textes
spéciaux,9., il n'existe pas de définition juridique générale de la publicité en droit français. La
carence ne se l'ail cependant pas ressentir. La notion a fait l'objet d'une multitude de définitions
de la part de la doctrine. On en dénombre aussi une du côté du doit communautaire. Côté
. doctrinal, la publicité est définie comme « l'ensemble des techniques à effet collectif utilisées au
profit d'une entreprise ou d'un groupement d'entreprises afin d'acquérir, développer ou
maintenir une clicntèle »96. Une autre approche considère la publicité comme « l'ensemble des
moyens mis en ocuvre pour faire connaître au public une entreprise, une enseigne, une marque,
un produit ou unc prcstation de service en vue de vendre »97. Cette finalité doit exister pour qu'il
y ait publicité commerciale, sinon on serait dans le domaine d'une simple information.
Si la publicité se détermine par son but, qui est d'exercer une incitation à la
consommation au public ou à une partie de ce public, elle se caractérise aussi par les techniques
mises en oeuvre lesquelles relèvent de l'activité créatrice. Elle est une technique de création
particulière appliquée au eommerce. 9R Le dictionnaire « Petit Robert» la défmit comme « le fait,
')1
Lui na 88/0 16 du 16 déccmbrc 1988 régissant la publicité au Cameroun, Juridis Inra na 3, oct.-nov.-déc. 1990.
Législation. p. 81 Cl suiv.
')) Loi ne 7911150 du 29 déc. 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes (article 3), JO 30 dé
1979 ; Décret na 92/280 du 27 mars 1992 relatif à la publicité et au parrainage audiovisuels (article 2).
')(, B. De PLAS ct H. VERDIER: La publicité, coll. « Que sais-je? », J2é éd. 1974 ; 1.-1. BIOLAy : Promotion de~
vcntes el Droit de la publicité, 1ère éd. Delmas I991, Paris, p. 172 et suiv.
97 DUCOULOUX-FA VARD : op. cil., p. 80.
nO. MAYER: Droit pénal de la publicité, Masson 1979, p. 9.

504
l'art d'excrcer lInc action psychologique sur le public à des fins commerciales» et le Flammarion
parle « d'ensemble de moyens mis en oeuvre pour porter une chose à la connaissance du public ».
A l'échelle européenne, la publicité est définie comme « toute forme de communication
faite dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dans le but de
promouvoir la fourniture de biens et de services y compris les biens immeubles, les droits et
obligations »')'J. Cette définition est plus large et plus complète.
Mais quelle que soit la définition adoptée, la publicité recouvre la même signification. Elle
a pour but de vanter le produit ou le service, objet de l'annonce. L'objet de l'annonce est de le
faire connaître au public. La publicité est donc tout à la fois informative et incitative, car
« l'annonce la plus persuasive dans son intention comporte toujours un minimum d'information,
ne serait-ce que le nom du produit» 100. Et tout ceci, dans]' ensemble, est parfaitement licite.
1-2. Licéité de la publicité commerciale.
«Produire Il'est rien, le tout est vendre. Pour vendre, il faut être deux. Le
consommateur est l'indispensable partenaire. »101
Ce postulat de base et d'évidence (qui a été posé par un éminent auteur et non par un
publicitaire) appelle un corollaire : la publicité qui tend à faire vendre un produit ou un service,
c'est-à-dire à le faire acheter, correspond à un objectif licite. Pour faire vendre, il faut mettre en
valeur.
L'art de bien vendre commence par savoir présenter sa marchandise sous le meilleur
éclairage possible afin d'amener le chaland à acheter. 102 Par conséquent, la louange, l'emphase ne
sont pas blâmables en elles-mêmes. 103 L'astuce d'une présentation flatteuse
n'est pas
répréhensible. 1ü4 L8 jurisprudence française n'a-t-elle pas définie la publicité comme l'art qui
'1'1
Dircuivc n° X4/450 CEE du
JO sepl.
1984 relative au rapprochement des dispositions législatives,
réglementaires et administraivcs des Etats membres en matière de publicité trompeuse, lO.C.E. 19 sept. 1984, nO
L 250, p. 17.
100 R. LEDUC: « Le pouvoir puhlicitaire », Bordas 1974, p. 32 .
. lOI
G. CORNU: « Rapport sur la protection du consommateur et l'exécution du contrat en droit français », in
Travaux cie l'Association H. CAPITANT, T. XXIV 1973, p. 131 et suiv.
102 DUCOULOUX-fA VARD : op. cil., p. 79 ; V. également A. L. REID: op. cil., p. 51 et suiv.
10) FOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op. cil., p. Cil
IO.j DUCOULOUX-FA VARD: op. cil., p. 79.

505
« consiste soit il vanter un produit, soit à faire miroiter des conditions avantageuses pour inciter
.le consommateur il acheter? »10.\\
De toute façon, dans une économie de masse, la publicité influence globalement le
consommateur. Ceci justifie les fortes dépenses engagées par les producteurs pour sa conception
et son annonce. IO!' Ses défenseurs n'hésitent pas à la présenter comme « un élément essentiel de la
commercialisation » et qu'à ce titre, « elle rend un service indispensable tant au consommateur
qu'à l'industrie, au commerce et à l'économie tout entière »107. On lui attribue une sorte de
. .
l' .
,~
"
1 10X
miSSIon ( Interet genera .
En tout cas, et quel que soit le pays où elle se réalise, les tribunaux locaux reconnaissent à
la publicité cette mission d'intérêt général dès lors qu'elle est porteuse de message sincère. Dans
cette logique, une cour d'appel française n'a d'ailleurs pas hésité à dire: « la vente moderne est
fondée sur la publicité. Celle-ci a pour but de faire connaître le produit ou le service au
.
liN
publIc»
.
Au-delil cie cette fonction, une autre exigence est requise : la publicité doit aVOIr une
intention. Une annonce qui se contenterait cie la seule information n'est pas une publicité. A cet
effet, il a été jugé qu'un commerçant - en l'occurrence un bijoutier - qui informe (mal) un client
qui se présente spontanément n'a pas fait acte de publicité. 110 Il en va de même d'un article de
presse ou d'un film documentaire, même si à l'occasion de ce travail d'information on a été
lll
amené à parler d'un produit.
En ce qui concerne le support publicitaire, il faut souligner qu'aucune eXIgence n'est
requise pour sa forme. Ce peut être la voix d'un camelot ou celle d'un speaker de radio, l'image
d'une affiche ou d'une page de revue, le spot publicitaire audiovisuel ou tout autre document
écrit, remis ou présenté au client éventuel. 112 Le support peut même être le bon de commande Ol
105 Paris 7 avril 1978 inédit, cité par FOURGOUX, MIHAILOY et JEANNIN: op. cit, p. Cil
106 FOURGOUX, MIHAILOY et JEANNIN: op. ciL, p. Cil; Y également« Consommation-Développement» n'
8. nov. 1992 prée .. p. 9. En 1987,200 milliards de dollars furent investis dans la [Jublicité. Aux Etats-Unis, le
dépenses publicilaircs conslitucnt « le hudgct d'information le plus élevé du monde ».
1117 FOURGOUX, MIHAILOY ct JEANNIN: op. ciL, p. Cil.
lOS Ibid.
10'l Douai. 2lJ oClo!Jrc 1975. A.P.1. 1976, 164.
IIIl Cass lJ rév. 1982. Bull. crim., na 129.
III C\\SS 17 mars 1l)81. inédil. cilé par DUCOULOUX-FA YARD: op. cil., p. 80.
112 DUCOULOUX-FA YARD: op. CiL, p. 80.

506
l14
la facture ll3 , le menu d'un restaurant, le papier d'emballage
et l'étiquette fIxée au produit et
répondant à l'information obligatoire des produits alimentaires'ou dangereux" 5, enfIn l'estampille
·
1
d
116
sur e pro Ult.
Quelle que soit la forme sous laquelle se manifeste une annonce, une seule et unique
exigence est requise: la loyauté du message publicitaire. Si cette exigence semble être respectée
. dans les pays industriels grâce aux contraintes législatives et réglementaires, ceci est loin d'être le
cas dans les pays du Tiers-Monde, en l'occurrence dans les pays africains, où les marchés
nationaux sont devenus les lieux de prédilection de tous les abus dans ce domaine.
2 • Les abus de la publicité libre.
Ils sont très diversitiés dans le monde des affaires. Mais seulement deux formes d'abus
publicitaires nous intéresseront et pour la simple et unique raison qu'elles sont essentielles et
qu'autour d'elles gravitent toutes les autres. Il s'agit de la publicité mensongère (2-1) et de la
publicité équivoque ou ambiguë (2-2).
2-1. La publicité mensongère.
Il est de prIncIpe que la part de vérité qu'on acco!'de ü la publicité comme moyen
d'information du consommateur n'est pas objective et que dans la plupart des cas, celle-ci, au lieu
cl' informer, vise pl utôt ü attirer le consommateur vers le produit, objet de l'annonce.
Certes, pour parvenir à ses fIns, une publicité doit nécessairement privilégier les bons
aspects du produit ou du service qu'elle veut faire consommer. Sa nature même lui impose une
telle démarche, c'est-à-dire le choix d'un éclairage particulier, l'artifIce de présentation est
souvent nécessaire et il apparaîtra comme un dolus bonus. Mais l'existence de cette tromperie
légère, inhérente à toute publicité 117 ne doit pas être source de tromperie manifeste. IIS
ID Cass 21 mai 1974, D. 1974, p. 579 ; crim. 13 nov 1980, bull. crim., n° 766.
11·1 Casso erim. 26jllin 1978, bull. crim. 1978, n° 566.
115 Casso crim. 4 déc. 1978, bull crim n° 896; cass 25 juin 1983, Rev Trim Drt Cam 1984, p. 537, G.P. 1983, p.
14.
116 Cass 2~ nov. 19~:I. R.T.D.Com 1984, p. 554, l'estampille sur un service de vaisselle.
117 MAYER: op. cil.. p. 74.
Ils Y. de CH/\\NTEROC ct R. F/\\I3RE: Droit de la publicité ct de la promotion des ventes, Dalloz 1986, p. 138 ct
slliv.; 1.-J. I3lüL/\\ Y: op. cil., p. 165 ct suiv.

507
Ccci n' csl malheureusement pas le cas sur les marchés africains et du reste du Tiers-
Monde.
Dans
ces
pays,
les
excès
publicitaires
n'épargnent
aucune
branche
d'activité
commerciale. La raison est toute simple: la quasi-totalité de ces pays n'a aucune législation dans
ce domaine. Et dans le cas où celle-ci existe, on constate une défaillance notoire de son
application. Cc lJui laisse libre cours à toutes sortes d'extravagance en la matière. Aussi, la
stratégie des lÏlîl1CS opératrices est -elle basée sur le mensonge, élément indispensable pour mieux
vendre. Les masse-médias cn sont les supports favori, et sur ce point, ils sont utilisés pour
perpétrer toutes les formes d'abus possibles.
Les exemples de ces excès ne sont pas rares ; ils sont bien au contraire nombreux. La
présentation de quelques uns permettront d'apprécier le bien-fondé de nos accusations.
Des campagnes publicitaires abusives amènent des sociétés pharmaceutiques comme
E.MERCK (Allemagne) à affIrmer en Afrique orientale que son médicament, vendu sous le nom
de « Pasuma Strong Potency » (Pasuma à haute efficacité) «améliore la qualité des érections ».
Un médecin qui s'aperçut qu'on usait de ce genre de publicité pour les «potency drugs », ou
médicaments à haute efficacité dans chacun des sept pays qu'il visitait, exprimait sa stupéfaction
en ces termes: « je ne pouvais en croire mes yeux. Je n'avais jamais vu aucune société sérieuse
émettre de telles prétentions en Europe» 119.
La deuxième remarque concerne les stéroïdes anabolisants. Ceux-ci sont reconnus pour
leurs effets secondaires tels que: arrêt de la croissance chez les enfants, stérilité, masculinisation
des petites filles, développement sexuel prématuré chez les petits garçons.
Mais dans sa campagne publicitaire, la firme hollandaise « ORGANON » les a présentés
comme remèdes contre la malnutrition, le manque d'appétit et les insuffisances de croissance
chez les enfants. Aux Philippines, l'un des produits spécifiait: « il n 'y a pas de contre-indication
PO
pOlir les enfants» - .
Quand 011 sait que la principale source d'information des professionnels de santé
concernant les produits pharmaceutiques se réduit au matériel de publicité les accompagnant, les
rislJue.s de la publicité clans ces pays sautent aux yeux.
Il') A. CI-lETLLY • \\lp. cil., p. Il.

508
Dans le domaine alimentaire, les exemples ne sont pas rares non plus. A cet effet, le texte
d'un slogan publicitaire diffusé en Côte-d'Ivoire et dans la plus part des pays africains au début
des années 70 est révélateur. En voici la teneur: « Nescafé relUl les hommes plus forts, les
femmes pLus joyeuses et les enfants pLus intelligents »m.
Telle est l'une des faces que présente la publicité commerciale en Afrique. Et si le
message n'est pas basé sur le mensonge, il est façonné de manière à entretenir le flou dans la tête
du consommateur. Et on tombe là dans le domaine de la publicité équivoque.
2-2. La publicité équivoque.
A défaut de mensonge pur et simple, les professionnels font souvent recours à d'autres
méthodes beaucoup plus fines, plus subtiles pour piéger leur cible et l'amener à contracter. L'une
d'entre elles est la publicité ambiguë, équivoque.
La publicité équivoque, c'est la zone d'ombre qui subsiste entre la publicité mensongère
ou trompeuse et la publicité « irréprochable ». Cette zone est nécessairement floue, car ses limites
sont en réalité imprécises:
- d'un côté l'existence du dolus bonus inhérente à toute publicité rend théorique la notion
de publicité irréprochable, de telle sorte que la frontière entre la publicité correcte et la publicité
équivoque est difficile à tracer.
120 D' après une enquête très documentée de l' 10CU en 1982 sur les stçroïdes anabol isants. Voir en ce sens A.
CHETLEY : op. CiL, p 12.
121 Voir « Nestlé contre les bébés'? », Dossier précité, p. 40.
Au Nigéria, par exemple, les spots publicitaires concernant le lactogen (lait artificiel Nestlé pour enfant)
étaient dilTusés il longueur de journée sur les ondes nationales. On pouvait entendre: « lactogen est hon pour le
bébé» ou « Toi qui est mère, aie conliance en lactogen. Si par hasard tu ne pouvais pas allaiter toi-même ton
enfant, demande lactogen à la droguerie, Tout ce que contient le lait maternel se trouve aussi dans lactogen. Mère,
soucie-toi de la santé de ton petit et donne lui ce qu'il y a de meilleur: donne-lui lactogen ».
« Pour l'<lliment<ltion du bébé <lU cours des premiers mois»
1
« Pour les pays tropicaux: Aboron, le produit naturel contre les diarrhées ».
Au Brésil, on a présenté le « lactifero », un succédané de Nestlé comme « un aliment plus rationnel, plus
hygiénique. une précieuse découverte de la pharmaceutique, un super aliment qui permet à l'enfant de se passer de
sa mère », on a même pu dire que: «c'est avec le lait du premier biberon qu'on commence à former le citoyen »,
in « La lettre de Solagral », Paris n° 34, février 1985. p. 23.

509
- de l'autre, la publicité équivoque est difficile à distinguer de la publicité mensongère,
car, en pratique, il n'existe pas de séparation nette entre l'affirmation mensongère, le propos
, , l'"
.
l '
h b'l 122
exagere,
InSInuation ou a suggestIOn un peu trop ale.
L'équivoque peut, en effet, résulter de l'ambiguïté deS' termes employés dans la publicité
ou de l'utilisation de certains titres dans le message et qui sont de nature à créer la confusior:
dans l'esprit du consommateur. 123
De toute évidence, la survivance de telles pratiques commerciales est bien réelle et le vide
jurid iq ue lJU 1 caractérise la plupart des pays a l'ricains est un ballon d'oxygène qui entretient lem
croIssance. Pour la protection du consommateur, une réglementation du secteur s'avère
nécessai re.
Le législateur camerounais, contrairement à ses pairs africains, n'a pas failli à ce devoir. Il
prohibe, dans sa loi du 16 décembre 1988 124 , aussi bien la publicité équivoque que la publicité
mensongère ou tout autre procédé de vente susceptible d'induire en erreur son consommateur.
L'article 12-1 cette loi dispose à cet effet : « Sont proscrites toutes références qui
puissent déconsidérer une entreprise ou un produit spécifique, ainsi que toutes déclarations ou
présentations visuelle qui offensent les bonnes moeurs, l'ordre public et la morale en général, ou
qui soient de nature par voie d'omission, d'ambiguïté ou de mensonge délibéré, à abuser de la
confiance du consommateur ».
Dans la même logique l'article 12-2 poursuit
« Est proscrit tout procédé de nature à
induire en erreur sur :
a) les caractéristiques du produit (composition, fabrication, utilité, origine commerciale ou
géographique ... ) ;
b) les services après-vente: la reprise, la réparation ou l'entretien;
c) l'étendu de la garantie attachée au produit ;
\\.
122 II s'agit notamment de l'usage irrégulier de titres de personnalités politiques ou publiques ou d'autres titre~
susceptibles de créer la confusion.
m D. MA YER: op. cil., p. 127.
1"4 Loi na RRI016 du 16 déc. 19RR régissant la publicité au Cameroun, Juridis Inra n° 3 Spécial oct-nov-dée. 1990
p. RI.

510
d) les qualités, prix, valeur et conditions d'achat d'autres produits offerts sur le marché et
les services inhérents à l'achat de ces produits ».
«Le professionnel de la publicité n'est dégagé de sa responsabilité (que) lorsque les
promesses indiquées dans (les alinéas précédents) ont fait l'objet d'une information dûment
conununiquées par l'annonceur» (article 12-3). Ce qui n'est tout de même pas une porte de
sortie pour le professionnel, celui-ci étant tenu de justifier le bien fondé de ses allégations.
Par ces dispositions, le législateur camerounais offre au consommateur une protection
plus ou moins certaine contre les campagnes publicitaires trompeuses. Il donne aussi à l'autorité
compétente ayant en charge la surveillance du marché, un arsenal juridique susceptible de lui
permettre d'effectuer des contrôles adéquats, notamment dans le domaine publicitaire.
b) L'obligation d'un contrôle administratif de
la publicité commerciale en Afrique.
Voter des lois n'est rien. Le plus important est de permettre aux bénéficiaires de jouir de
leur existence. Ceci passe forcément par l'assurance de leur respect par les pouvoirs publics. Le
secteur publicitaire n'échappe pas à cette contrainte. Pour protéger les consommateurs contre les
excès ou abus publicitaire, un contrôle permanent, régulier et vigilant de la publicité commerciale
s'avère nécessaire.
Dans cette logique, deux types de contrôles nous paraissent essentiels pour en limiter,
voire en éliminer les effets pervers : le contrôle a priori ou contrôle préventif et le contrôle a
posteriori ou contrôle curatif.
1 - Le cOlltrôle prévelltifde la publicité commerciale.
Nous allons unc rois dc plus citcr l'cxcmplc du législateur camcrounais qui a voté deux
articles à cet effet. Tout d'abord, l'article 21 de la loi ND88/0 16 du 16 décembre 1988 relative à
la publicité au Camcroun dispose: « L'Etat exerce un contrôle sur l'activité publicitaire par le
biais du Conseil National de la publicité ». Il s'agit là d'une reconnaissance expresse du rôle de
l'Etat dans la conduite des affaires commerciales s'opérant sur le territoire national. Quant à
l'article 22, il se contente de fixer le rôle imparti à l'organe étatique investi dans cette mission de
1
contrôle. Ce texte dispose : «Le Conseil National de la publicité dont l'organisation et le
fonctionnement sont fixés par voie réglementaire, est chargé:

511
- d'émettre un avis sur tous les projets de textes relatifs à la publicité;
- cie
veiJler à la bonne observation de la déontologie professionnelle et de le
réglcmcntation cn la matière;
- d'examiner pour émettre un avis sur elles, les demandes d'autorisation administrative er
vue de l'exercice de la profession publicitaire ».
Au-delà de toutes les difficultés que l'organe compétent est à même de rencontrer dans l::
pratique, le mérite des textes camerounais est d'exister, existence qui peut avoir un effet plus Ol
moins dissuasif chez les publicitaires. Les autres Etats du continent trouvent là un exemple i
. suivre. L'important dans ces dispositions est le pouvoir donné au Conseil National. de la publicite
« d'émettre un avis sur tous les projets de textes relatifs à la publicité ». Cette latitude lui donm
le pouvoir d'autoriser ou de refuser une annonce (1-1), l'accord ou le refus étant subordonné al
langage utilisé par le publicitaire pour faire passer son message (1-2).
1-1. L'autorisation d'annonce du message publicitaire.
L'obligation de soumettre le contenu du message publicitaire à une autorisatior
d'annonce est une obligation particulière. Elle trouve sa raison d'être dès lors que l'annonc(
concerne des produits spécifiques.
En effet, certains produits destinés au grand public sont des produits sensibles. Pour évite:
tout aléa ou dommage à leurs futurs utili~ateurs, la vérification du message publicitaire desdiU
produits avant loute difCusion ùans le grand public est une nécçssité impérative. La garantie de h
sécurité du destinataire justifie la prise de telles précautions, car tout mensonge ou tau
équivoquc dans le message peut être de nature à induire en erreur. Ce qui aura pour résultat de
provoquer des conséquences fâcheuses chez l'utilisateur fmal. 125 Tel est notamr:lent le cas, pa
exemple, de la publicité des produits pharmaceutiques (médicaments et cosmétiques) ou de:
produits chimiques dangereux et toxiques.
Au Cameroun, la publicité de tous ces produits est soit interdite, soit soumise à un.
autorisation expresse des organes administratifs compétents.
C'est le cas des
produit
pharmaceutiques dont la publicité est soumise à l'autorisation du ministre de la santé publique \\

512
des hauts responsables du corps médical spécialement désignés ou nommés pour représenter
l'ensemble de la profession. L'article 19 de la loi N° 88/016 du 16 décembre 1988 qui réglemente
cette publicité dispose: « Est interdite la publicité des produits dangereux et toxiques. Toutefois,
'la publicité des produits pharmaceutiques peut être autorisée par les autorités compétentes en
matière de santé publique ». L'emploi des termes « peut être» n'est pas neutre. Il est significatif.
C'est un témoignage que l'autorisation n'est pas automatique et qu'elle n'est accordée qu'après
examen du projet publicitaire et de l'opportunité de l'annonce du message.
La priorité accordée à la sécurité des personnes justilÏe la démarche du législateur
camerounais, démarche législative importante dont devraient s'inspirer ses pairs africains pour le
bien de leurs consommateurs.
Pour que le contrôle soit vraiment préventif, il est souhaitable qu'il s'organise à l'intérieur
d'un délai pendant lequel aucune publicité relative au produit, dont l'annonce est sollicitée, ne
pourra être mise en oeuvre. Ainsi, la publicité ne sera-t-elle effective qu'après obtention de
J'autorisation administrative. Si ce pouvoir semble aller de droit au Ministère de la santé pour ce
qui concerne les produits pharmaceutiques - et ce dans tous les pays -, l'autorisation relative à la
publicité pour les produits chimiques et les pesticides devraient faire l'objet d'une étude sérieuse
par les Ministères concernés, respectivement le Ministère de l'environnement et celui de
l' agricul ture.
Ces secteurs commerciaux sont des domaines où les abus publicitaires sont les plus
remarqués dans les pays du Tiers-Monde. 126 Aussi, devrait-on vérifier le langage utilisé dans le
message avant toute délivrance d'une autorisation de diffusion.
1-2. Le contrôle du langage publicitaire.
S'il faut subordonner toute annonce à une autorisation (expresse ou tacite) de l'autorité
compétente, il convient de l'assujettir à un langage clair et net du message, dénué de toute
ambiguïté.
L'art publicitaire, avons-nous dit, consiste en J'intervention d'exposés persuasifs qui ne
soient ni vrais. ni bux, mais dont le but est de conquérir le public. Le piège tendu au
i
125 D. MA YER : op. cil.. p. 60.

513
consommateur peut bien se trouver soit dans la langue employée, soit dans l'image, soit dans les
mots. 127 Aussi, le contrôle du langage utilisé est-il nécessaire pour démasquer les pièges.
La première exigence à formuler à l'encontre des annonceurs est l'utilisation d'un langage
accessible ~l tous, qui soit compris ct parlé par le public moyen. On vise ainsi la protection du
consommateur vulnérable ou ülible. Pour satisfaire cette exigence, les messages doivent être
rédigés dans la langue officielle ou les langues nationales les plus parlées dans le pays.
Parfois la dinïculté à cerner le contenu ou la portée du message sc trouve non dans la
langue, mais dans l'image ou les mots utilisés. L'autorité de contrôle dans ce cas doit se fixer une
exigence: n'autoriser que la diffusion des messages clairs, sans ambiguïté ni tromperie aucune. Si
la non-clarté du message est due à la présence de certains termes dans le texte, il est nécessaire
d'exiger leur définition préalable afin de lever toute équivoque.
Cela peut cependant ne pas être une « solution miracle» 128, l'ambiguïté pouvant résulter
de la présentation générale du texte que de l'utilisation de tel ou tel mot pris individuellement. 129
Dans ces conditions, c'est l'ensemble du texte qu'il faudra revoir pour éviter toute confusion
dans l'esprit du consommateur.
Dans tous les cas, le message publicitaire doit être dépouillé de tous ses abus, de son
langage subter[-uge pour pouvoir bénéficier d'une autorisation d'annonce dans le grand public du
Tiers-Monde. C'est là une exigence essentielle pour le respect du public de cette partie du
monde. Un auteur a dit à cet effet: « Si la publicité veut être respectée par les consommateurs et
par le public, elle doit elle-même respecter le public, ne pas mettre de fantaisie dans l'exactitude
sous prétexte que le message passera mieux et ne pas dire aujourd'hui l'inverse de ce qu'elle a
.
'1'
1JO
exp11l11e 11er»
.
12(, A. CIIETLEY : op. cit., p. 11-12. V supra,« La publicité mensongère ».
1"7
Dans les pays africains, notamment au Togo, le marché des cosmétiques se trouve être le domaine de
prédilection des publicités mcnsongères ou ambiguës. Sous couvert des allégations mensongères, beaucoup dt
jcnl1llCS analphabètes, donc par conséquent fragilcs, se sont défigurées le visage après avoir utilisé des produits dt
heauté inadaptés au climat tropical ou issus dc la contrefaçon. Nous basons notre al'firmation sur notn
. connaissance du milicu èlI égard aux abus commerciaux qui s'y manifestent le plus souvent au détriment de
CUnSOJllIll.llcurs locaux profancs ct moins avcrtis contre les subtilités des marchands véreux préoccupés avant t\\,
1Xlr le souci du g<lin f<lcilc.
.
1", L'cxpression est de D. MA l'ER: op. CiL, p. 131.
129 D. MAYER: op. cil.. p. 131.
1.'11 FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil., p.C 16

514
Pour l'autorité de contrôle, l'accent doit être mis plutôt sur la crédibilité que sur la vérité.
Il s'agit d'un exercice de dialectique pour les partenaires en présence. l3 ! L'adaptation s'avère
donc nécessaire si J'on veut réussir un contrôle efficace.
2 - Le contrôle a posteriori ou le contrôle curatif du
message publicitaire.
L'objet de cette démarche consiste à contrôler les publicités dont les projets ne sont pas
soumis ü une obligation de dépôt. Il s'agit d'une procédurc de suivi des annonces publicitaires.
Le travail ici vise ü vérifier d'une part, le bien fondé des allégations publicitaires, et d'autre part,
J'opportunité dc leur di l'fusion.
2-1. Le contrôle a posteriori des
allégations publicitaires.
La radio ct la télévision sont de loin les moyens d'information les plus utilisés dans le
monde. C'est aussi les médias qu'utilisent il grande échelle les publicitaires dans leurs campagnes
promotionncllcs. Dans les pays du Tiers-Monde, ils dominent le débat dans la mesure où la
majorité de Ja population est rurale et s'intéresse peu ou prou à la presse écrite, conséquence
directe de l'analphabétisme. 132 dans les milieux ruraux, la radio est incontestablement le média le
plus dominant donc le plus usité pour la divulgation de diverses informations, si l'on considère
que le message publicitaire en est une. C'est d'ailleurs à travers les ondes des radios nationales
que la firme Nestlé, pour ne citer que cet exemple, a fait parvenir ses messages mensongers et
équivoques relatifs à la vente de ses laits artificiels dans les milieux ruraux, vente suivie des
conséquences que l'on s'accorde aujourd'hui à reconnaître dramatiques pour les nourrissons de
ces pays.131 C'est dire l'importance que peut avoir un spot publicitaire sur la psychologie de ces
consommateurs fragiles.
D'une manière générale, la sauvegarde de la loyauté, de la décence, de la moralité et de la
véracité du message doit être la priorité de l'autorité chargée de contrôler la publicité. Elle doit
constamment inviter lcs annonceurs, sous peine de sanctions, à se conformer quotidiennement à
ces principes et présenter autant que possible des messages ayant un «intérêt artistique,
1
"
1'1
Ibid.
m cr. supra, « UIl c0l1s0mmateur analphabète ».
l3l el'
N
l'
1 b'b' n o '
,.,
"

est e contre es
e es : »,
ossler precIte.

515
documentaire ou éducatif» 134. Ainsi, les messages ne doivent-ils contenir aucun élément, aucune
allusion de nature à choquer les convictions morales, religieuses, philosophiques ou politiques de
l'auditoire. De même, aucun propos, aucune allusion ne doit porter atteinte au crédit de l'Etat.
Les messages doivent assurer autant que possible «l'information du consommateur et
correspondre à un effet d'accroissement de la qualité et de réduction des prix des produits et
.
IVi
services» ..
Le message peut parfois ne présenter aucune allusion mensongère ou de nature
équivoque, mais comporter toutefois des insuffisances capables d'induire en erreur le destinataire.
Une fois de plus, le but du contrôle a posteriori est d'amener l'auteur de l'annonce à
compléter ces carences en mentionnant « les avertissements et précautions d'emploi nécessaires à
l'information du consommateur »136.
2-2. Le contrôle a posteriori de l'opportunité du
message publicitaire.
Le tabagisme tout comme l'alcoolisme sont devenus de nos jours les fléaux mondiaux.
Devant les développements de graves maladies dues à l'abus de tabac 137, un journaliste a pu
écrire; « La lulle contre le tabagisme est une grande cause nationale »"~.
Aujourd' hu i. cet tc cause est entendue, notamment par l'Organisation Mondiale de la Santé
(OMS) qui lance un cri d'alarme en direction des usagers de ces produits dangereux pour la
santé, ct surtout en direction des pouvoirs publics de chaque pays pour une plus grande
réglementation de nature à limiter l'incitation à leur usage. Ce cri est entendu dans les pays
économiquement avancés. La publicité du tabac et de l'alcool est interdite en France. IJY Il en va
de même dans la plupart des pays industrialisés comme les Etats-Unis. Alors les fIrmes
multinationales productrices du tabac et de l'alcool ont trouvé une parade à toutes ces mesures
restrictives de la consommation de leurs produits. Elles ont transféré leurs efforts promotionnels
sur les continents les moins lotis dans le domaine relatif à la protection du consommateur, dont
l'Afrique.
13{ r:OURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: 0[1. cil., [1. l~
13) FOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: op. CiL, p. 1 2
136 D. MAYER: op. cil., p.72.
137 FOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: op. CiL, p. G24
J\\~ cr. le journal « Le Monde» du 1XsC[1t. 1975, cilé [1al' FOURGOUX, MIHAIOV ct JEANNIN: 0[1. cit., [1. G24

516
Certes, le commerce du tabac et de l'alcool est une source de revenus pour le trésor
public à travers les diverses taxes dont il est l'objet dans les pays du Tiers-Monde. Mais ces
avantages financiers ne doivent pas prendre le dessus sur les dangers qu'il est susceptible de faire
courir aux usagers des produits qu'il véhicule. L'impératif de la santé du consommateur devrait
motiver l'interdiction de la publicité du tabac et de l'alcool sous toutes ses formes ; radio,
'l' . .
140
te eVlSlon, presse, etc ...
A défaut d'interdiction pure et simple, une autre alternative peut être tentée: celle qui
consiste à prévenir le consommateur des risques qu'il prend en consommant ces produits. Par
exemple, en guise de contre-publicité informative et éducative, le consommateur-rumeur devrait
être averti des risques encourus par l'inscription de la mention: « dangereux pour la santé ». Cet
avertissement existe depuis fort longtemps dans certains pays industriels, notamment aux Etats-
Unis où il est fait obligation à tout producteur et distributeur de tabac de mentionner sur
l'emballage: « Warning : the surgeon general has determined that cigarette smoking is dangerous
to your health »I~I. En France, la mention de cet avertissement est obligatoire depuis le vote de la
Loi N° 91/32 clu 10 janvier 1991 interdisant la publicité du tabac et de l'alcool l42 sur l'ensemble
du territo ire nat io nal. Sur les cl ifférents emballages de cigarettes, on peut lire les mentions
suivantes: «Fumer provoque des maladies graves. », « Fumer nuit gravement à la santé. »,
« Femmes enceintes. fUiller nuit il la santé de votre enl~mt. », « Fumer provoque le cancer. », ou
« Pour être en bonnè santé, ne fumez pas. », etc.
L' avert isselllent doit être clair pour le consommateur. Il doit comporter aucune allégation
susceptible de mettre le doute dans son esprit. Dans cette logique, le Tribunal de grande instance
de Quimper a ordonné, le 14 juin 1995, à la société Rothmans Tobacco Cie de modifier les
mentions inscrites sur les emballages de l'ensemble de ses paquets de cigarettes. Ces emballages
comportaient la mention «selon la loi n° 91-32 ». le Président du Tribunal estime qu'il y a là
« 1/11 trol/!JIe 1!/{/lIij"estell1el1t illicite... la référence à la loi précédée de la préposition' 'selon' '...
1.1'1 Ibill. p. C,IO : I)c CHANTERAC cl FA13RE : op. cil., p. :'27 ct suiv.
1·1Il II . j
C""
"
1
C
.
D'
)Il, p.
J-'
; vOIr cga CIllCllt «
OIlSOllllllalIOIl- cvcloppcmclll", Il'' X IlOV. 1992 p. 9.
141 FOURGOUX, MIHAILOV el JEANNIN: op. cil., p. G 27
0
142 Loi 11
91/32 de janvier 1991 dile Loi EVIN.

517
insinue dans l'esprit du consommateur l'idée qu'il s'agirait d'une mesure technocratique sans
/ . hl j'
1
' .
143
venta
e OIU Cillent samtazre ».
Le procédé peut paraître ingénieux pour les pays du Tiers-Monde, mais encore faut-il que
la mention soit lisible, le truquage pouvant amener les promoteurs à inscrire l'avertissement en
sombre sur roncl sombre. De toute évidence, il ne pourra profiter qu'aux seuls consommateurs
sachant lire et comprendre les mentions apposées sur l'emballage. Pour ce qui est des
consommateurs analphabètes, l'usage des pictogrammes indiquant le caractère dangereux de la
consommation clu tabac peut être une source d'information préventive pour préserver leur santé.
Il appart ienclra clans ce cas à l'autorité compétente chargée du contrôle de faire respecter les
prescriptions législatives ou réglementaires en vigueur votées à cet effet.
Parallèlement à cette démarche, il serait aussi souhaitable de procéder, à titre préventif, à
l' éducat ion du jeune consommateur par une information dispensée dans les établissements
scolaires ou partout où cela peut s'avérer possible, ainsi que du consommateur adulte.
Les prnblèmcs des consommateurs du Tiers-Monde ne se limitent pas aux seuls abus
publicitaires des promoteurs usant des méthodes modernes pour faire passer leurs messages
commerciaux. 0l,érant la plupart cie leurs achats sur le marché parallèle ou informel, ils ont aussi
besoin d'être protégés contre les méthodes parfois agressives et abusives qu'utilisent les
professionnels dl' cc secteur commercial.
B - La réglementation des méthodes traditionnelles
de vellte : l'encadrement du secteur informel.
Les services que rend le secteur informel à l'ensemble de la population en Afrique sont
considérables. On ne peut en dire autant pour la sécurité des lI'ansactions qui y sont conclues, les
contrôles des opérateurs étant pratiquement inexistants. Mais on ne saurait rendre service aux
consommateurs locaux en prônant son élimination pure et simple du circuit commercial. I44 Cette
élimination serait illogique en ce sens qu'il constitue, dans la quasi-majorité des cas, la principale
source de revenus pour certaines catégories sociales défavorisées des milieux urbains comme
1i.1 TGI Quimper, 15 juin 1995, inédit, voir en cc sens, « La \\eUre de la distrihution », Juin 1995, Bulletin puhliée ..
p.\\r !\\ssoci'llion Droil de la Distrihution, Montpellier, sous la présidence du Pr J. M, MOUSSERON, p. 4.
111 BUGNICOURT. NDIA YE ct EL HADJ SY : article précité, p. 1 et suiv. Sur les problèmes rencontrés par les
vendeurs ,1I11hulanls du secteur inrormcl au Sénégal, voir tous Ics articles puhliés à cet cne:t dans « Vivrc
Au{rement » n° spécial. septemhre 1993 précité.

518
ruraux. 145 L'insécurité du consommateur dans ce secteur vient du fait qu'il constitue le couloir
qu'empruntent régulièrement certains produits falsifiés ou contrefaits pour pénétrer sur le marché
national.
Or ces produits issus des procédés de fabrication déloyaux et anormaux sont le plus
souvent très dangereux pour la santé et la sécurité des utilisateurs finaux. La protection du
consommateur passe donc par un encadrement juridique de ce secteur très vital pour les
consommateurs locaux ct l'économie nationale.
L'cncadrcment juridique signifie réglementation du secteur. Il ne s'agit pas d'une
réglementation au sens classique du terme, laquelle aboutirait à une fiscalisation de la profession
et à un contrôle trop rigoureux et parfois violent des opérateurs, mais d'une réorganisation, d'une
restructuration du sccteur qui aboutirait à un regroupement par catégories socioprofessionnelles.
Au-delà de toute spéculation politique, la démarche vise plus une légalisation de la
profession par la dotation d'un statut juridique particulier à partir duquel aussi bien les produits
. vendus que leurs vendeurs pourraient être contrôlés efficacement avec un seul objectif: assurer le
maximum de sécurité aux usagers de ce secteur. Le contrôle ne pourrait cependant être
réellement efficace que si chaque opérateur était muni d'un titre de rattachement qui le lie
directcment ;\\ sa catégorie socioprofessionnelle.
De t~lçon générale, la réorganisation du commerce informel doit se faire sous deux angles
: une structuration du secteur par catégorie socioprofessionnelle (a) et une délivrance d'un titre
de rattachement à chaque opérateur selon sa catégorie socioprofessionnelle d'appartenance (b).
Les marchands sédentaires posant moins de problèmes - ils sont facilement retrouvables en cas de
déconvenue dans la transaction -, nous nous intéresserons essentiellement aux marchands
ambulants. Toutefois. les remarques que nous ferons dans cette étude relative au commerce
ambulant seront aussI valables pour les marchands sédentaires opérant dans la même branche
commcrc iale.
/
145 Ibid. ; 1. TINKER : « Légaliser la vente ambulante de nourriture », in « Courrier ACP-CEE » n° 110 juillet-
Août 1988, Dossier, p. 74.

519
al La nécessité d'un regroupement des opérateurs du
secteur informel par catégories socioprofessionnelles.
Comme nous l'avons ci-dessus souligné, le commerce ambulant fait partie intégrante du
mode de vie des populations africaines, voire de l'ensemble du Tiers-Monde. Et contrairement
aux spéculations faites de part et d'autre,146 sa disparition n'est pas imminente; loin s'en faut, il
est en nette progression, une progression favorisée par la crise. généralisée que traversent tous les
pays de cette partie du monde.
Une enquête permet d'affirmer que l'urbanisation et la modernisation des villes
entraîneront non pas une baisse, mais une augmentation du nombre des vendeurs ambulants
disséminés dans le tissu urbain: le long des routes, près des marchés, des cinémas, des hôpitaux,
des écoles ... 1·17
Au lieu de les combattre'.j~ ou de faire semblant de les ignorer, la solution au problème
que pose le commerce ambulant se trouve dans la capacité des pouvoirs publics à encadrer le
milieu de façon à le rendre plus profitable et utile à tous les citoyens. Il s'agit, en effet,
d'aménager la profession en en délimitant de façon précise les contours, quitte à exclure de son
champ cl' act ion certains produits sensibles ou à risq ues tels que les produits pharmaceutiques et
les produits chimiCJues.
La flllalité de l'encadrement par la réglementation ou par la légalisation est d'aboutir à un
regroupement des commerçants ambulants par catégories socioprofessionnelles, c'est-à-dire en
fonction de la spécialité vendue. Chaque groupement pourra ainsi se doter d'un règlement
intérieur à partir duquel il canalisera les activités de ses membres.
Mais la tâche la plus délicate dans cette entreprise revient aux pouvom publics qUI
doivent éviter Llne réglementation trop lourde et trop contraignante. Une trop grande exigence
146 TIN KER : article précité. p. 73.
147 TINKER : article précité. p. 73.

520
de leur part pourrait entraîner des découragements, voire des ré.ticences des opérateurs. Ce qui en
soi ne sera pas une méthode réglementaire. En tout cas, pour l'harmonie de la réforme, on devra
pouvoir contrôler aisément tous les acteurs. Et on ne pourra le faire que si ces acteurs sont munis
d'un titre, c'est-à-dire d'une carte professionnelle indispensable pour les besoins de la cause.
hl La nécessité d'un titre de rattachement pour les
opérateurs du secteur informel.
Le contrôle d'une personne repose avant tout sur la vérification de son identité. Celle-ci
peut s'avérer impossible dès lors que le titre de l'intéressé fait défaut. Aussi, pour les besoins de
commodité dans le contrôle de la profession, est-il nécessaire que les opérateurs soient pourvus
d'un
titre
de
rattachement
permettant
de
les
identifier
par
rapport
à
leur
catégorie
socioprofessionnelle. Concrètement, le titre de rattachement n'est rien d'autre que la carte
professionnelle que l'individu est en droit d'attendre de sa catégorie socioprofessionnelle. Il
confère la qualité de commerçant ambulant à son titulaire.
En (~ljt, l'aménagement du secteur ambulant n'est pas une fin en soi; le but recherché se
situe dans la rcsponsabilisation des personnes qui y opèrent. Dans cette logique, la carte
professionnclle est une valeur sure. Pour des raisons pratiques, sa délivrance devrait être laissée à
l'autorité compétente de la commune ou du milieu dans lequel le commerçant exerce son activité.
Il serait aussi souhaitable que son attribution soit facilitée par des formalités administratives
légères ct qu'elle reçoive le contreseing du responsable de la catégorie professionnelle
d'appartenance. Mais il y a une exigence que tout candidat à la carte professionnelle doit
satisfaire: justifier d'un domicile fixe,149 élément incontournable pour l'attribution de la carte.
En effet, si la carte professionnelle sert de référence au contrôleur et de passeport au
commerçant, elle est loin d'être d'une très grande utilité aux consommateurs qui, dans la majorité
des cas, sont analphabètes. Pour les protéger contre les commerçants indélicats, il doit être fait
obligation à toul commerçant amhulant ou sédentaire du secteur informel de délivrer des
l,IR Certains pays du Tiers-Monde interdisent la vente ambulanle de nourriture.
Ils la considèrenl comllle un
anachronisme dans les vi Iles Illodernes ct craignent que les visiteurs étrangers la prennent pour un signe extérieur
du Tiers-Monde. Voir en ce sens TINKER : art. prée. p. 72. C'est notamment le l'as au Sénégal où les vendeurs
ambulants furent Cil 199:\\ 1'ohjet des mesures énergiques de la part des pouvoirs publics pour des motifs
«d'encomhl'emellts» des voies publics, encombrements de nature à nuire à l'image de marque du pays aux yeux
des touristes étrangers: voir en cc sens, « Vivre Autrement» n° spécial de septembre 1993 précité, p. 1 ct suivants
149 Lamy Droit Economique 1993, N° 3746 ; DüLL : « Marchands ambulants ct forains », Encyclopédie Dalloz,
Droit Commercial 1987, n° 21..

521
attestations ou reçus de vente après chaque opération commerciale. Ceci est surtout valable pour
les vendeurs des matériels techniques sophistiqués lesquels nécessitent une garantie du
professionnel. Là encore, le responsable de la catégorie socioprofessionnelle d'appartenance a un
rôle à jouer. Et ces attestations pourront servir de preuve d'achat qui fait souvent défaut dans les
différents recours.
De façon générale, la démarche vise une plus grande protection du consommateur contre
la tentation d'abus de faiblesse qui, reconnaissons-le, s'apprécie de façon relative.
C - Le problème relatifà l'abus de faiblesse du
consommateur dans le commerce.
L'abus de faiblesse des consommateurs est un abus de circonstances. Il ne concerne pas
les professionnels exerçant normalement leurs activités, mais. naît là où l'efficacité marchande
s'accompagne de méthodes commerciales agressives, cristallisant manoeuvres et artifices, là où
les intérêts élémentaires des consommateurs sont totalement ignorés. ISO
Pour protéger le consommateur contre les méthodes commerciales ci-dessus dénoncées,
encore faut-il déterminer son seuil de vulnérabilité (a). Ceci ne peut se faire sans une appréciation
concrète de l'abus en relation directe avec la personne même du consommateur et de son
environnement social. Autrement dit, pour mieux protéger le consommateur africain, les
circonstances du milieu dans lequel il évolue exigent qu'on fasse de l'abus un délit susceptible
d'être apprécié souverainement par les juges du fond, en l'occurrence les juges spécialisés dans
les affaires de consommation dont nous souhaitons vivement la mise en place (b).
al Le seuil de vulnérabilité du consommateur.
Le consommateur africain est par sa nature vulnérable. La difficulté qui se pose ici n'est
pas la caract~risation de son état de faiblesse, mais la détermination du seuil à partir duquel sa
vulnérabilité peuL être appréciée. Sur ce dernier point, nous nous inspirerons de l'analyse faite à
cet effet en droit i'ranç,lis pour proposer des solutions susceptibles d'être adaptées aux situations
particulières en Afrique.
150 M. LEROUX: « L'abus de faiblesse des consommateurs », Rev. Concurrence-Consommation n° 72, murs-avrï
1993, p. 4.

522
L'appréciation du profil du consommateur victime ou susceptible de l'être, et qui de ce
fait doit être protégé, peut susciter des controverses selon que J'on examine le cas du
consommateur isolé ou des consommateurs pris collectivement.
Dans les différents cas de protection, on a l'habitude de se référer au consommateur
moyen. Si telle est la référence, l'appréciation demeure incertaine. Faut-il s'en remettre à une
définition abstraite à la I~lçon du «bon père de famille» tirée du code civil français ou bien
dessiner un «portrait robot» en tenant compte des circonstances de la transaction, s'il s'agit
d'une opération individuelle, ou de la toxicité de la publicité par rapport à l'ensemble de la cible,
s'il s'agit d'une agression collective ?151 En d'autres termes, doit-on apprécier in abstracto ou in
COllcreto ?
L'appréciation in abstracto suppose, à titre d'exemple, qu'un texte publicitaire « doit être
compris et interprété en fonction de ce que comprendra et interprétera le consommateur moyen,
normalement intelligent et attentif» 152. Dans ce cas, on fait abstraction de la situation du
consommateur atteint individuellement. L'abstraction ne prend pas forcement en considération le
quotient intellectuel de l'individu 15J, mais plutôt sa capacité minimale à se défendre devant un
professionnel. On prend en considération la moyenne représentative.
En revanche, l'appréciation in concreto prend en considération la personne même du
consommateur et met en évidence le quotient intellectuel de l'individu dans ses rapports avec le
professionnel. C'est le domaine de la distinction du droit de la vente entre l'acheteur profane et
l'acheteur professionnel averti, de la même spécialité que le vendeur. 154 Ainsi ne peut-on pas
comparer le consommateur qui se plaint d'avoir été piégé dans une opération où il était concerné
à titre individuel et de façon isolée à un consommateur moyen envisagé in abstracto.
Et comme on ne peut à chaque fois « faire souffler le consommateur dans le ballon» pour
déterminer SOIl degré non d'alcool, mais de vulnérabilité, qui n'a pas forcément de rapport avec
1.\\1 FOLIRCOUX, rvllll/\\ILOV cl JEANNIN: op, cil., p, Cl?
1.\\2 Trih l'OITCL'! lie l.von 1X ~cplclllhrc Ili75, inédil. cité par FOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: ibid,
1'1 Dan~ L1ne tr;1I1~alïJ()n 110rlanl ~L1r Lin Illalériel Hi-Fi ou ~ur une Jllolocyclclle, un jeune garçon qui cst « fan»
scra plLl~ ;Iple il ~c lldclldrc qu'un con~ollll1lalcur pourvu dc diplômcs dans dcs domaincs différcnts ou cxcn,:anl de
Jourucs rcsponsahililé~ il la lête d'unc cnlrcpri~c : voir cn cc scns, FOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN, op.
cil., p. Cl?
1\\.llhid.

523
son quotient intellectuel '55 , la logique voudrait que l'appréciation se fasse par rapport au
consommateur type représentatif de la moyenne de la cible. Dans ce cas, la description du
consommateur susceptible d'être victime de l'agression ou de l'abus du professionnel,
l'appréciation de sa capacité devront se faire in concreto. 156
L'analyse est -elle la même du côté de la jurisprudence? Rien n'est moins sûr. En tout cas,
la jurisprudence française, dont s'inspirent très souvent les juges des pays d'Afrique d'expression
française, a une interprétation assez libérale de l'abus qu'elle considère comme un délit.
b) L'appréciation jurisprudentielle de J'abus de faiblesse.
Les tribunaux n'établissent pas de distinction entre l'appréciation in abstracto et
l'appréciation in concreto. Les juges les utilisent de façon cumulative pour qualifier le délit
d'abus de faiblesse. Plusieurs critères sont mis en évidence dans leur démarche: il y a d'un côté,
les critères liés au niveau intellectuel de la victime, et de l'autre, ceux inhérents à son
environnement social.
1 - Les critères liés au niveau intellectuel de
individu consommateur.
Ce sont des critères qui font appel à l'intelligence et au niveau culturel de l'individu. Dans
ces conditions, on part de l'analyse selon laquelle le consommateur n'est 'ni abstrait, ni lucide, ni
raisonnable », mais un être « faible dont le droit commence à assurer la protection »157. Pour les
pays africains, c'est un être faible dont le droit devrait s'occuper désormais, sa protection n'ayant
jamais été à l'ordre du jour dans les priorités de leurs gouvernements. C'est donc un domaine
vide que les pouvoirs publics se doivent de combler par des textes juridiques appropriés.
S'agissant du consommateur lui-même, une remarque s'impose: il est important de
souligner que le consommateur à l'état pur ou sauvage qui se laisse le mieux tromper n'est pas le
consommateur organisé, cultivé ou conseillé qui lit les revues spécialisées. Celles-ci, encore faut-
,.
1\\5 Ibid., p. C I7 voir note 129.
156 Ibid.
157 CALAIS-AULOY : « La protection légale et réglementaire du consommateur, lacune et excès », in « Nouvelles
données pour un droit de la consommation », Dalloz 1973, p. 50.

524
il qu'eUes existent, apportent un appui aux consommateurs « les plus instruits et les plus fortunés,
c'est-à-dire ceux qui nécessitent le moins besoin de protection» 158.
D'une manière générale, si le consommateur a besoin du droit pour sa protection, il ne
saurait cependant avoir d'excuse si le sens de la publicité est« évident pour le moins averti »159.
Considérant le consommateur moyen comme « un homme doué d'un peu de raison », la Cour
de Paris a estimé que celui-ci «n'est pas dupe d'une certaine publicité »160, prétendre le contraire
« serait sous-estimer de façon injurieuse le niveau intellectuel du consommateur moyen» 161.
A l'intelligence, les tribunaux associent le niveau culturel de l'individu, c'est-à-dire le
degré de connaissances acquises. On glisse ainsi tout doucement dans la catégorie des
162
consommateurs profanes
. Partant de cette situation, les tribunaux nationaux africains devraient
16
s'attacher à la circonstance qu'une annonce publicitaire s'adresse à des profanes .1 et non à des
consommateurs avertis. Dans cette vision de la fragilité, on pourrait s'inspirer de la décision de la
Cour de Nîmes. Celle-ci a condamné certaines allégations qui étaient destinées à des gens
ignorant tout de la question et dès lors beaucoup plus crédules que vulnérables. 164
A l'analyse de cette décision, on la croirait rendue exprès pour répondre aux besoins des
consommateurs africains qui sont non seulement pauvres et sous-éduqués dans le domaine, mais
aussi crédules aux propositions malhonnêtes des vendeurs sans morale. Aussi, le corps judiciaire
africain, voire des autres pays du Tiers-Monde, devrait-il tenir compte de ce que l'annonce
s'adresse à «un public de culture et de moyens modestes »165. Prendre en considération cet
aspect pratique de la vie consumériste en Afrique, c'est se conformer à la réalité socio-
économique de la majorité des consommateurs défavorisés de sa population.
~ 1. MARCUS-STEIFF : «L'information comme mode d'action des associations de consommateurs », Rev.
Française de sociologie, XVIII 1977, p. 86 à 107, cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit., p.
C18.
Colmar 9 sept. 1982, GP 1982, II, somm. 390, note FOURGOUX.
A
Paris 4 avril 1977 inédit, cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit, p. C19 ; dans le même sens,
A
Paris 12 avril 1983, GP du 23 juin 1983, note MARCfII : « sauf à considérer le public comme atteint d'arriération
mentale» ; Trib correct Pontoise 25 mars 1983 inédit cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit, p.
C19
"
,1
Douai (ch. D'accusation) 2 mars 1982 inédit, cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. ci t, p. C19
A
cf supra, notamment les développements déjà réalisés sur la vulnérabilité du consommateur"
EX
A
"Consommateur" " africain
Paris 21 juin 1978, inédit cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit., p. C19
A
Nîmes 25 octobre 1974, inédit cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. ciL, p. C 19.
A
Trib. Correct. Evreux, 23 Janv. 1975, GP 1975, II, 806 et la note.
A

525
2 - Les critères liés à l'environnement social du consommateur.
Certaines circonstances dérivant du milieu social du consommateur peuvent être sourc·
166
de sa fragilité dans ses rapports avec le professionnel
. La vulnérabilité peut être momentanée e
être le fait de l'émotion l67 consécutive à certaines pannes domestiques dont la gravité ne pouva:
bl
1
168
A
,
"
etre appreclce convcna ement par e consommateur
.
La crédulité du consommateur peut même être source de profit pour le professionne
celui-ci abusant de l'occasion pour lui faire passer des transactions sans réelle utilité. Ce peut êtr
la facturation de travaux inutiles ou d'appareils sans rapport avec les besoins réels du client à 1
suite des pannes bénignes justitiant des réparations mineur~sl69 ou la vente de produits 0
d'appareils à la venu thérapeutique très limitée, voire inadaptée pour le destinataire l7O•
L'abus de faiblesse se rencontre aussi dans la fixation des prix, Le professionnel peu
exploiter la fragilité de l'acheteur en lui faisant souscrire des engagements à des prix exorbitant
l71
sans rapport avec ceux pratiqués sur le marché
d'autant plus que les prix préalablemen
,
. .
172
annonces paraIssaIent avantageux
,
En toute équité, les tribunaux dans leur appréciation ne négligent aucune manoeuvre. L
perméabilité du consommateur peut être le fait d'agissements divers tels que l'insistance dans 1
négociation 173 , le démontage intégral d'appareils pour impressionner les clients et conclure à 1
nécessité d'acheter un modèle neuf, ou l'enlèvement systématique des appareils remplacés pou
l74
éviter toutes contestations ultérieures
, les manoeuvres d'intimidation par des
visite
prolongées 175, la détérioration d'installations pour pousser à leur remplacement 176.
cf supra, « Un consommateur· EX "Consommateur" • vulnérable ».
A
TGI Moulins 3 déc 1980, par LEROUX, article précité.
A
Paris 22 mai 1991 ; Toulouse 26 sept. 1991 ; TGI Paris 22 sept. 1991, par LEROUX, article précité.
A
Toulouse 26 sep!. 1991 prée. ; TG! Paris 22 sept. 1991 prée. ; TG! Bobigny 13 juillet 1991, par LEROUX
A
article prée.
LEROt1:,\\,: article précilé. p. 42.
A
,
Toulouse 2() sep!. IlJ91 prée. ; Versailles 13 Illai 1991 par LEROUX, ibid. ; TGI Niee 29 juillet 19X6 r
LEROUX. ihid.
· !';\\IîS 22 IlI;li IlJlJ 1 prée.
· T(il l'oilic'rs 2·11Llin [1)IJ2, I)ar LEROUX. ar!. prée.
· 1';lris 22 Illai 1IJ'J 1 fl'·c:c. ; '1'(;1 130hign)' 13juillcl IlJlJ 1 prée.
, Paris 0 juin Il)ÙÙ par LEROUX, ar!. prée.
'TGl Bohigny 13juillet 1991 prée.

526
Toutes ces circonstances sont des indices sur lesquels s'appuient les juridictions pour
caractériser le délit d'abus de faiblesse. Ces indices n'en sont pas moins présents dans les
rapports entre professionnels et consommateurs en Afrique. Aussi, la prise en considération de
tels indices s'avèrent nécessaires pour une bonne protection contre l'abus de faiblesse. Ceci est
d'autant plus urgent que l'état de fragilité du consommateur africain est beaucoup plus visible, ce
qui n'est pas le cas de son homologue français, européen ou américain.
Toujours dans l'appréciation des critères de l'abus de faiblesse, les juges prennent en
considération la violation délibérée des règles protectrices des consommateurs tels que l'absence
m
d'information sur les prix, les devis signés après travaux, etc.
. Le consommateur, dans cette
dernière circonstance, est privé de tous ses droits essentiels : ne pouvant faire jouer la
concurrence, il ne pourra pas apprécier la portée de ses engagements. Dans cette situation, il est
bien soumis au bon vouloir de son cocontractant. C'est pourquoi les juges, dans leur analyse, ne
devraient exclure aucun élément d'appréciation. Les juges français le font déjà. Les juges
africains devraient s'inspirer de cette méthode et prendre en considération tous les indices
susceptibles de les éclairer, car le consommateur à protéger, c'est bien celui «dont la crédulité
risque d'être exploitée» 178. Or, le profil du consommateur africain s'identifie à celui du
consommateur fragile et crédule. Aussi, pour sa protection, la mise en place des moyens
juridiques adaptés à sa situation économique sociale et culturelle s'avère nécessaire.
§II - Les moyens réglementaires nécessaires ét adaptés pour
une protection efficace.
L'efficacité de la protection passe nécessairement par une réglementation adaptée aux
nécessités du moment (B). Mais avant cette ultime étape se pose au préalable le problème du
choix dcs textes. Qucl caractère doivcnt avoir les tcxtes qui sont appelés à régir les droits du
consommateur africain? Telle est la question à laquelle tout législateur doit répondre avant toute
entreprise législative ou réglementairc (A).
A - Le caractère des textes protecteurs du consommateur en Afrique.
Le droit de la consommation ne se construit pas fortuitement. Il s'élabore au moyen de la
législation et la réglementation directe. L'efficacité de la protection ne rime pas avec la quantité
• Leroux: article précité, p. 43 .
• FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. ciL, p. C2ü.

527
des textes volés, mais plutôt avec leur qualité, leur faculté à répondre aux urgences du moment, à
résoudre ou à limiter les problèmes que rencontrent les consommateurs dans leurs activités
quotidiennes.
Si la présence des textes de lois est nécessaire pour les besoins de la cause, l'on devrait
bien se garder de tomber dans le travers de la prolifération des textes aux détails somptuaires, qui
appelle, comme l'ont dit certains auteurs, le souhait d'une «très sérieuse abréviation »179.
L'explication est toute simple: une quantité excessive de règles de droit est aussi néfaste que
l'absence de toute règle écrite: même les professionnels ne s'y retrouveront pas, a fortiori les
t
"
, 180 E
d
fi". .
d
consommateurs que ces tex es sont pourtant censes proteges
.
t quan
on a a lalre,
ans un
pays, à une grande majorité de consommateurs qui ne sait ni lire, ni écrire, l'intérêt de la
remarque saute aux yeux.
L'int1ation réglementairc ou la réglemcntation sauvage, comhinée aux usages en cours
dans le commcrce, eux-mêmes « plus ou moins connus du public, tantôt ndmis, tantôt contestés
par les tribunaux, l'administration et les partenaires économiques, ne pourront apporter qu'unc
insécurité dans les relations juridiques» 18/.
Dans ces conditions, il y aura impossibilité quant à l'interrogation des tribunaux sur la
nature des textes à prétention réglementaire ou législative. Il n' y aura aucun moyen non plus pour
. l'administré (averti), contraint de faire la synthèse des prescriptions de tous ordres, de faire juger
préventivement ce qui est licite et ce qui ne l'est pas devant les tribunaux répressifs. Et comme
les tribunaux ne peuvent être interrogés à « blanc» (il leur est même interdit de dire le droit
AFOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: 0[1. cil., [1.137.
I~ll L'administration doit «veiller à cc que les réglementations qu'elles édicte évitent de succomber au
perfectionnisme, de s'avérer contradictoires, de stériliser J'innovation et prennent en compte, lorsque c'est
[1ossiblc, les normes et s[1écifications internationales» par A. DORIS ON : Rev. Française de Marketing, 1983/3.
Le Secrétaire d'Etat français à la consommation déclarait au Sénat le 3 juin 1983 : « Le droit de la consommation
est régi par un très grand nombre de textes - diront certains - quelque peu éparpillés et disparates, au point que les
spécialistes sont un peu submergés par cette abondance et ne s'y retrouvent pas très bien, a fortiori les citoyens»
(J.O. Débats Sénat 4 juin 1983, p. 1373).
1'[ Sur les usages comme source de réglementation ct sur leur prise en considération par [es tribunaux, voir : ca~
crim 6 l'év. 1974, D. 1974,493, note Fourgoux ; décisions de relaxe en raison de l'incertitude des usages: Lyon 6
Illai 1966, D. 1966.547; Paris la déc. 1975, D. 1976, somm. 23 ; décisions contradictoires très motivées pour les
calissons: Trih correct Aix, 17 avril 1961, inédit (relaxe), cité par FOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op.
cil .. p. \\3'); Aix 6 déc. 1961, D. 1962, s0ll1m.91.

528
théorique sans le rattacher, en matière pénale, aux faits constituants le chef d'accusation),
l'insécurité s'accroîtra et l'administré-consommateur s'enlisera dans le marécage182 .
Le problème est, en effet, posé et il faudra bien le résoudre. La répression a toujours joué
un grand rôle dissuasif dans la prévention des délits. Le droit pénal peut être un recours sérieux,
une solution à notre problème. Il faudra donc lui accorder une place dans la gestion des
problèmes consuméristes (a) en l'accompagnant toutefois des mesures à caractère réparateur et
. prophylactique (b).
al La place du droit pénal dans la gestion des
problèmes consuméristes.
Les initiatives privées et les moyens de droit civil, commercial et administratif ne suffiront
pas pour protéger efficacement les consommateurs s'ils ne sont pas accompagnés de sanctions
pénales.'~; Si l'on veut faire du droit de la consommation une «véritable police de
consommation »IS-l, il serait raisonnable qu'on assortisse ses obligations de sanctions pénales,
surtout lorsque celles-ci font l'objet d'une réglementation. 185 La santé et la sécurité, lorsqu'elles
sont en péril, plaident pour cette démarche.
L'intérêt pour le droit pénal dans le domaine de la consommation est motivé par un
élément essentiel qui est en lui et qui fait sa particularité par rapport aux autres disciplines
juridiques: il s'agit de son caractère répressif. Aussi le but social de la répression plaide-t-il en sa
faveur pour une sauvegarde de l'harmonie et de la loyauté dans les relations commerciales.
En effet, la sanction pénale présente de nombreux caractères. Elle revêt, certes, un but
moral et individuel tendant au châtiment d'un délinquant et partant, à son rachat et sa réinsertion
dans la société. Mais la sanction pénale ne s'arrête pas là. Elle a aussi un but social et joue un rôle
dans la protection des faibles contre les puissants et dans la restauration d'équilibres sociaux. 186
On trouve dans cette fonction du droit pénal, l'objectif essentiel du droit de la consommation.
IX2FOURGOUX, MIHAILOY ct JEANNIN: op. cil., p. 13 9
IX) Conseil de l'Europe. Affaires Juridiques: « Le rôle du droit pénal dans la protection des consommateurs »,
Strasbourg 1983, p. 14.
IX4 R. SA YY : « La protection des consommateurs », Société de Législation Comparée, 2è Journées Juridiques
Franco-Nordiques, 1973.
185 FOURGOUX, MIHAILOY et JEANNIN: op. cil., p. 8 9.
IS(' BIHL : « Droit pénal de la consommation », G.P. 1986, 1er semestre, p. 360.

529
Certains auteurs voient dans cette fonction utilitaire de la peine le rôle essemiel du droit
pénal. Selon ces auteurs, « La fonction capitale de la peine est sa fonction utilitaire. La peine a
pour but d'empêcher le crime, c'est une mesure de prévention »187. De plus, si l'on considère les
lignes
qUI
suivent,
on
les
croirait
spécialement
écrites
pour
les
rapports
professionnels/consommateurs: « Les lois les plus sages ont pour but naturel d'étendre à tous
les hommes les avantages de l'existence et de combattre tout ce qui tend à les concentrer sur
un petit nombre et à accentuer d'un côté la puissance et le bouclier, et de l'autre la faiblesse
et la misère» lBS
Somme toute, le droit pénal est un instrument indispensable pour la défense sociale et le
recours à ses services serait susceptible, grâce à l'effet d'intimidation, de « stimuler chez le
professionnel le sens de ses responsabilités » et de « prévenir le trouble causé par une activité
.
189
Imprudente ».
Certes, il existe dans la doctrine un courant de pensée favorable à une dépénalisation du
droit de la consommation. 190 Mais l'importance de son rôle social, de sa fonction utilitaire ne
rencontre aucune opposition. Il subsiste cependant une petite nuance chez les partisans d'un droit
pénal de la consommation. Certains plaident en faveur d'une limitation des sanctions, d'une
fixation des pénalités modérées, réellement applicables par les tribunaux, car ils voient dans
l'inflation
réglcmentaire,
dans
la
«surprotcction
du
consommateur»
au
moyen
de
la
multiplication des tcxtes, une « invitation à la non-application plus ou moins tolérée );.191.
D'autres, et non des moindres, dont les magistrats, n'y voient pas d'inconvénients et
croient que la vertu d'intimidation est capitale: « la loi pénale suffIrait à dissuader en raison de la
l , ·
, II
.
d .
19"
menace t leonquc qu e e contien rmt»
".
En délinitive, si l'on s'accorde sur le principe que le droit est utile pour le consommateur
ct qu'en même temps une inflation des textes peut lui être néfaste, une seule alternative reste à
notre portée: la conciliation des deux idées pour offrir à J'intéressé une protection efficace. Une
IS7 BOUZAT: Tr~lité de droit pénal, Dalloz 1963 et 1965, Paris, p. 295.
ISS l,l' fn1l(!:llL'ur cil! tir()il PL;I1;t1 : RECCARL'\\. cité par B1HL : article précité, r. 360.
l,"~ N'(JUYLN-Tt-j:\\i\\tl : lllèse précilée, n° 141-:.
190 BIHL : article précité, r. 35~ ct suiv.
191 G. RAYMOND: " Les techniques de venle au regard du droit rénal », G.r. 1973, Il, p. 303.
1'12 A. TOUFFi\\IT ct J.-13. HERZOG: " Le problème Je la répression pénale des entellles économiques en droit
fr;lnçais ", J.c.P. 1%7. :!047

530
dépénalisation de la matière serait la pire des solutions qu'on puisse choisir et le pire des services
qu'on puisse rendre aux consommateurs.
Si la sanction pénale paraît tout indiquée pour châtier les délinquants économiques, l'on
ne devrait tout de même pas oublier les victimes de leurs comportements déloyaux, c'est-à-dire
les consommateurs lésés. Aussi, pour leurs intérêts, est-il nécessaire d'adopter des solutions
intermédiaires que sont les mesures à caractère réparateur et prophylactique.
Il) L'adoption des mesures à caractère réparateur
et prophylactique.
La protection du consommateur ne peut cependant pas exclusivement être assurée au
moyen de sanction dont la prévision et l'application seraient dissuasives. Dans une économie de
masse, il est plus important d'empêcher la prolifération du dommage par l'intervention rapide,
d'informer le public, et si un produit toxique est mis en vente, d'alerter les consommateurs et de
le faire retirer de la vente. 193
Sur le plan judiciaire, la cessation
immédiate
d ~une publicité ou d'une action
promotionnelle peut être ordonnée en utilisant les procédures appropriées.
Au plan civil, le tribunal pourra ordonner la suppression, l'enlèvement ou la confiscation
de la publicité illicite. L'autorité administrative pourra prendre des mesures d'efficacité
immédiate comme la coupure d'électricité pour les enseignes lumineuses ou l'occultation des
panneaux-réclames incriminés. 194
Au plan pénal, le tribunal correctionnel pourra prononcer des sanctions qui ont à la fois le
caractère des peines accessoires et des mesures d'inf0rmation du consommateur. Ce peut être la
publication des jugements, l'affichage à la porte d'un établissement ou l'annonce rectificative sur
une page bien visible d'un journal à grande audience nationale ou sur les ondes des radios et/ou
télévisions nationales. 19)
Les mêmes mesures peuvent être demandées à titre de réparation par une partie civile: le
mal fait par llne annonce mensongère est supposée rattraper par une publication réparatrice ou
193 FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil., p. BIO.
194 Code français des débits de boissons, article L 21.
195 FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil., p. B Il.

531
une diffusion ù la radio ou à la télévision. Lorsqu'une campagne publicitaire illicite a été réalisée
par voie d'affiches, les mêmes panneaux pourraient être utilisés à titre de représailles pour rétablir
la vérité auprès des passants. L'annonce rectificative, comme la publication du jugement ou
l'affichage à la portc de l'établissement constituent des mesures prophylactiques, « le moyen le
plus utile pour mettre le public cn garde »196.
Comme ricn n'est transposable d'un pays à l'autre, un effort d'adaptation de la législation
relative à la protection du consommateur s'avère nécessaire. Cet effort relève de la compétence
du législateur de chaque pays.
B - L'adaptation des textes aux circonstances de la cause.
Une chose est (Je voter les lois protectrices des consommateurs, une autre est de le faire
dans les règles de l'art. Cette remarque sous-entend un problème essentiel: celui de l'adaptabilité
des lois et règlements \\fotés.
Aucun texte de loi, ni règlement ne peut véritablement être utile à une personne s'il ne
reflète pas les réalit,:s du milieu dans lequel il est appelé à être appliqué. L'adaptabilité suppose
un certain nombre de caractères de la part des textes votés. Autrement dit, les règles à instituer
devraient être:
- claires, condensées ct le moins nombreuses possibles, pour être facilement comprises et
utilisées:
- assurées d' Line publicité suffisante pour être connues de chacun,
partenaires
économiques et admi~)istration ;
- capables cie permettre d'aboutir rapidement à la cessation du trouble et à la réparation
du dommage causé _
- mises au point, après concertation des partenaires économiques, en tenant compte des
,besoins réels des consommateurs (de tous bords), comme des impératifs de la production, avec
\\.
1"(' Tril), Correct. Pau, 22 nO\\', 1072. inédit. cité par FOURGOUX. MIHAILOY ct JEANNIN: op, cit., p. B II .

532
un arbitrage indispensable à l'échelle étatique, à raison des choix politiques auxquels il y a lieu de
procéder dans l'intérêt de la collectivité. 197
Tout compte fait et à la lumière des développements réalisés jusqu'alors, un constat se
dégage : c'est que tout ramène toujours à l'Etat qui, vis-à-vis des consommateurs, a des
obligations considérables. Celles-ci sont motivées par le fait que c'est à l'organe étatique que
revient la responsabilité de régir l'ordre juridique à l'intérieur de ses frontières nationales.
L'élaboration des lois dont il a le monopole l'interpelle à agir en vue de rétablir l'équilibre
et l'équité dans les rapports socio-économiques, notamment dans le circuit commercial, afin de
protéger le plus faible contre le plus fort.
Mais s'agissant des problèmes de consommation, cette responsabilité singulière de l'Etat,
ne saurait
à elle seule sutfu' pour assurer une meilleure protection
au consommateur.
L'insuffisance se justifie par des raisons pratiques consécutives à certaines réalités propres aux
pays africains, notamment le caractère artificiel de leurs frontières.
Aussi, est-il nécessaire de prendre en considération ces réalités en instaurant une
coopération entre Etats dans le domaine de la protection du consommateur. Ceci permettra
d'assurer Je maximum de sécurité à leurs populations.
Sous-Section II : La prise en compte à l'échelle nationale régionale,
sous-régionale ou continentale, des réalités africaines dans la mise
en place des législations protectrices des consommateurs.
Prendre en compte les problèmes des consommateurs dans un contexte régional, sous-
régional, voire continentale, c'est satisfaire à l'un des souhaits exprimés par le titre IV des
principes directeurs des Nations Unies pour la protection du consommateur. A travers ce titre
relatif à la coopération internationale, la charte des Nations Unies invite les gouvernements des
Etats membres cie l'Organisation, en particulier ceux des pays en voie de développement, à
J
coopérer entre eux en vue d'offrir à leurs populations une meilleure protection dans leurs
197
.
l'
FOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op. CI!., p. B -.

533
différentes transactions (principe N° 43 de la charte). L'interpellation faite par la charte des
.Nations Unics conccrne les P.V.D à un double point de vue: d'un côté, elle souligne les limites
d'unc réglcmcntalion solitairc clans un monde en pleine expansion motivée par la libération des
échangcs (~l) ; dc l'autre, elle montre l'intérêt d'une telle coopération aussi bien pour les
consommateurs que pour leur Etat respectif (§II).
SI - Les limites d'efficacité d'une réglementation étatique solitaire.
Si ]a réglementat ion protectrice étatique peut être considérée comme une fin en soi, une
nécessité absolue en raison de son caractère régulateur du circuit commercial à l'intérieur de ses
frontières nationales, elle peut cependant être mise en péril par sa propre insuffisance à maîtriser
cerl;tines réalités propres aux Etats africains ct à leurs populations. Les réalités ainsi évoquées
sont inhérentes au fonctionnement de ces Etats. Ceux-ci se caractérisent par la perméabilité de
leurs frontières (A) et par la facile mobilité de leurs populations (B).
A Les limites d'efficacité dues à la perméabilité des frontières.
L'une des principales caractéristiques des Etats africains est la fluidité de leurs frontières
nationales. Celles-ci sont en général considérées comme des passolfes au travers desquelles
s'infiltrent toutes sortes de marchandises, des marchandises périmées aux marchandises de
mauvaise qualité en passant par les contrefaites ou les falsifiées. Toutes ces marchandises se
retrouvent sur les marchés africains au grand péril de leurs usagers. Plusieurs raisons expliquent
cet état de fait:
Il Ya tout d'abord l'absence de rigueur dans les contrôles des marchandises aux frontières
de chaque Etat. La grande majorité des commerçants opérant dans le domaine de l'import/export
sont des professionnels rompus aux affaires. La périodicité ou de la régularité de leur présence
aux frontières des Etats font d'eux des habitués de la procédure de contrôle, et par conséquent
des agents chargés du contrôle des marchandises à la douane. Ceci a pour effet de créer des
relations de contïance entre les deux parties, l'administration douanière et le groupe de
commerçants opérant à l'échelle internationale.
La conséquence logique de ces relations de confianc~ est la substitution des contrôle,
sérieux par de simples contrôles de routine aux effets préventifs limités, et ce, aux périls des
futurs usagers des marchandises importées. Ainsi, par ces relations de confiance suivie d'une

534
négligence coupable dans les contrôles, les marchands profitent-ils pour introduire sur les
marchés nationaux des produits douteux, malsains contrefaits ou falsifiés au mépris de toutes les
dispositions protectrices interdisant leur commerce.
La seconde raison se trouve au niveau des moyens techniques. Pour effectuer des
contrôles sérieux et efficaces, la présence des matériels techniques sophistiqués est essentielle.
Or, la plupart des Etats africains ne dispose pas de ce matériel nécessaire susceptible de permettre
des contrôles normaux à leurs frontières.
L'efficacité du contrôle suppose que le contrôleur ait à sa disposition l'équivalent du
matériel ayant servi à la fabrication de la marchandise, objet du contrôle. Le manque de moyens
financiers empêche les Etats africains, voire du reste du Tiers-Monde, d'équiper leurs services
douaniers de tels matériels. Cette carence dans le matériel t.echnique fragilise la position des
contrôleurs de bonne volonté et renforce davantage l'audace des marchands véreux, sans
scrupule, motivés uniquement par le souci du gain au mépris de toute valeur morale.
La troisième raison est relative à l'absence de rigueur et de sérieux dans l'application des
quelques rares textes prohibitifs votés. Les agents de l'administration, chargés de faire respecter
'la loi sur tout le territoire, font souvent preuve d'un laxisme inadmissible dans l'accomplissement
cie leur fonction.
Certains vont même jusqu'à utiliser les textes
prohibitifs à des
tins
d'enrichissement. Pour ces agents, la prohibition est un moyen commode d'enrichissement en ce
scns quc Je commerçant importateur de la marchandise prohibée paiera le service rendu pour
éviter toute saisie pm les agents douaniers. L'aftïrmation n'est pas dénuée de fondement et
l'exemple illustré d'un fait vécu au Nigéria permettra de justifier nos propos,
En effet, nous sommes en février 1988 au Nigéria où le Ministre de la santé venait
d'interdire par arrêté J'importation de savons contenant du mercure et de crèmes et de lotions
blanchissantes renfermant de l'hydroquinone. Le mercure est hautement toxique et endommage le
foie; l'hydroquinone est cancérigène. L'interdiction était motivée par le fait que l'usage de ces
produits issus de la contrefaçon fut dramatique. Tous les usagers eurent leur visage défiguré. 198
1
198 E. üBADINA : « La contrefaçon à l'assaut de l'Afrique », (Traduit de l'anglais par F. DABlRE), in « Vivre
Autrement» N° 8-9 novembre 1988, Supplément, p. V.

535
Le texte prohibitif disposait en effet que quiconque fait la publicité, importe, expose
vend un de ces savons hygiéniques ou une de ces crèmes blanchissantes énumérées serait mis ;
arrêts. Mais deux mois après la mise en vigueur de ce texte, tous ces produits interdits circulai
ouvertement dans le pays aux grands risques et périls de tous les consommateurs. Tout ce
avait changé était le prix; celui-ci était en nette augmentation. 199 Les produits interdits vena
ainsi de refaire leur apparition sur les marchés nationaux nigérians malgré les dispositi
juridiques prohibant leur diffusion dans la population. La pénétration des marchés nationaux a
rendue possible grâce à la complicité de certains agents chargés de leur élinùnation au moyen
contrôles sérieux.
Interrogée sur la question, la présidente de l'association des femmes importatrice~
marché de Lagos a répondu en des termes très laconiques, convaincants, mais surtout inquiét
pour l'ensemble des pays africains. A juste titre, elle précisa que «ses membres ne pouva
acheter des produits prohibés salis la complicité de cellx qlli SOltt supposés réglementel
.
.
200
IIllportatIOI/S»
.
Toujours au Nigéria, le même Ministre de la santé avait également interdit sept soc
pharmaccutiques pour distribution de médicaments peu fiables. L'une d'elles qui lança SI
marché des ant ibiotiques présumés douteux, prétexta avoir obtenu une autorisation du Mir
de la sail té.
Un olTiciel du Ministère de la santé qui tentait de justifier le dysfonctionnemer
l'administration de contrôle donna un éclairage noyveau de l'état de
vérification
marchandises aux frontières des Etats africains. Ses propos furent rapportés par un journal
cn ces termes : «Soit les médicaments n'ont pas été emballés sous le label de pre
pharmaceutiques (ce qui implique la corruption ou des défaillances dans les procé
d'inspection douanière), soit le certificat de l'inspection a été obtenu de manière frauduleuse
Ce qui en soi voulait tout dire sur l'état des contrôles des marchandises aux frontières africai
199 Ibid.
200 Ibid.
2111 E. üBADINA : article précité, p. V.

536
Quoi qu'on dise, la gamme des produits douteux qui traversent régulièrement les
frontières africaines est énorme. 202 Si ce n'est pas le sel - destiné au départ à dégager les rues en
203
hiver dans les pays occidentaux - qui est vendu au lieu et place ,du sel norma1
, ce sont les pièces
détachées contrefaites ou des pneus automobile de qualité douteuse qui sont vendus au lieu et
place des vrais avec pour conséquences de nombreux accidents meurtriers sur les routes
2o
nationales. ') On recense aussi des bouteilles de gaz non conformes aux normes de sécurité
internationalement reconnues205 . Et quand on sait que le marché du Nigéria demeure le principal
centre d'approvisionnement de la plupart des commerçants du secteur informel de la sous-région
ouest al'ricaine, la prolifération de tous ces produits sur les autres marchés régionaux est vite
enregistrée.
De toute façon, la référence à la corruption des personnes chargées de prévenir la vente
des produits prohibés et dangereux soulève un point sensible sur lequel il convient de réfléchir.
Elle confirme non seulement la fluidité des contrôles douaniers, mais montre aussi l'état de
« fragilité» dans lequel se trouverait une législation ou une réglementation si elle est faite dans un
cadre solitaire. Aussi, complète et rigoureuse que puissent paraître ses dispositions, son champ
d'action peut s'avérer limiter si les Etats voisins ne s'aventuraient pas dans la même direction.
Son efficacité ainsi que son utilité s'en trouveront donc compromises pour des raisons liées non
seulement à la fluidité des frontières, mais aussi à celles relatives à l'extrême mobilité des
populations africaines.
B - Les limites d'efficacité dues à la facile mobilité des personnes.
La conJiguration géopolitique actuelle de l'Afrique est un héritage colonial. Tous les Etats
africains - la même réflexion est aussi valable pour les autres Etats du Tiers-Monde - sont des
ensembles issus du découpage des conquêtes coloniales des puissances occidentales. Le tracé des
frontières pendant la décolonisation n'a pas tenu compte des réalités sociologiques et culturelles
des populations locales. Des populations qui, jadis, appartenaient à une même communauté ont
été divisées et se sont retrouvées sans le vouloir, au lendemain des indépendances, citoyens
d'Etats diftërents. L'Afrique figure aujourd'hui parmi les continents qui comptent le plus d'Etats
102 Ibid.
203 Ibid.
20~ Ibid.
205 Ibid.

537
au monde, mais sa carte géopolitique ne reflète en rien les réalités sociologiques et culturelles de
sa population. Les populations ont, certes, été divisées, mais elles ont gardé les liens
sociologiques, culturels et familiaux qui les unissaient avant leur séparation forcée.
Cette remarque est valable dans tous les ensembles régionaux du continent: en Afrique de
l'Ouest entre les populations du Togo et du Ghana, du Togo et du Bénin; du Mali, de la Guinée
et du Sénégal; du Niger, du Nigéria et du Bénin; du Burkina-Faso, du Bénin et du Togo, etc. ;
en Afrique de j'Est entre les populations de Djibouti, de la Somalie et de l'Ethiopie, etc. ; en
Afrique Centrale entre les populations du Cameroun, du Tchad et de la République de
Centrafrique; du Cameroun ct clu Gabon; clu Congo, clu Zaïre ct cie l'Angola, etc. ; cn Afrique
Australe entre lcs populations clu Burundi et du Rwanda, etc. ; en Afrique du Nord entre les
populations clu Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie, de la Libye et de l'Egypte. Tous ees exemples,
chacun pourra les multiplier en fonction de ses propres ~xpériences, de ses connaissances
personnelles des liens sociologiques et culturels des différentes tribus africaines.
Ce rappel cie l'histoire des Etats africains n'est pas neutre, il a pour but de recentrer le
débat de la mobilité des populations africaines dans leur contexte historique. Pour toutes ces
populations, la notion cie frontière nationale n'existe pas. Héritage de la colonisation, les
. frontières étatiqucs sont artificielles pour ces populations injustement divisées. Partant de ce fait,
elles n'ont pas besoin de passeport, ni d'un quelconque titre de voyage pour effectuer leurs
incessants dép lacements d'un pays à l'autre avec pour seul objectif: rencontrer les siens restés de
l'autre côté cie la barrière. Ces déplacements peuvent aussi avoir pour but de faire du commerce.
Mais cela reste des cas isolés si l'on met hors circuit les commerçants considérés comme tel en
raison cie leurs activités quotidiennes.
Aussi. un Etat peut-il officiellement fermer ses frontières pour des raisons politiques -
comme c'est le cas très souvent -, mais cela n'empêchera pas pour autant ses citoyens de se
déplacer pour rencontrer les leurs au-delà de ses frontières. Ceci est particulièrement vrai pour le
Togo, le Bénin et le Ghana que nous connaissons bien. C'est une réalité propre à l'Afrique et à
ses populations.
La relation entre cette réalité et le droit de la consommation est toute simple : le..
déplacement incessant et incontrôlé des populations peut être de nature à mettre ,en péril toute
législation protectrice faite dans un cadre solitaire. Ceci s'explique par le fait qu'un Etat peut fort
bien interdire la vente ou l'importation d'un produit qu'il estime dangereux pour la santé et la

538
sécurité de sa population. Mais si les autres Etats voisins n'ont pas estimé nécessaire cette
interdiction, la ou les marchandises prohibées pourront bien être introduites sur son territoire par
le biais des achats effectués sur les marchés des Etats voisins par ses propres nationaux en
déplacement dans ces pays, achats effectués soit pour leur propre usage, soit pour celui de leurs
familles restées sur place dans le pays d'origine.
Le résultat peut aussi être enregistré dans le sens contraire. Ignorant l'interdiction, ou
estimant le ou les produits prohibés moins chers, les citoyens des Etats voisins n'ayant pas
interdit leur vente peuvent bien les apporter à leurs parents restés de l'autre côté de la frontière
en guise de présents de voyage.
L'introduction des produits interdits peut aussi être le fait de certains marchands véreux
ou sans scrupule qui, bénéficiant de la complicité de certains agents de douane206 , pourront
facilement les acheminer sur les différents marchés nationaux pour ensuite les distribuer dans la
population. Ainsi, les produits interdits par un pays peuvent bien se retrouver sur ses différents
points de vente soit par le jeu la solidarité familiale, soit par le fait des mercantilistes indélicats
guidés avant tout par le souci du gain. La mobilité des personnes d'un Etat à l'autre et vice-versa
. peut très bien avoir des incidences fâcheuses sur application des législations protectrices des
consommateurs au plan national.
La fluidité des frontières ainsi que la facile mobilité des populations sont deux réalités
incontournables en Afrique que ne devraient pas négliger les différents législateurs appeler à se
pencher sur les modèles de textes de lois applicables à la situation actuelle du consommateur
local. Leur prise en considération est donc souhaitée d'autant plus que leur seule expression est
capable de mett re en échec toute tentative juridique destinée à améliorer la situation du
consommateur dans son ensemble (économique, sanitaire et sécuritaire). Aussi, l'efficacité de la
protection passe- t-elle nécessairement par une action concertée dans un cadre coopératif au
niveau régional ou sous-régional. On vise là une action purement coopérative entre les différents
Etats en vue asseoir une législation protectrice plus cohérente et adaptée aux réalités sociales,
économiques et culturelles de la région ou de la sous-région.
.
1
206 Cf supra «A- Les limites d'enicacité dues à la perméabilité des frontières », voir également E. OBADINA :
article précité, p. V

539
SIl - Réglementations protectrices des consommateurs et
devoir de coopération entre Etats en Afrique.
Comme le démontrent les développements ci-dessus, la viabilité d'une législatior
protectrice des consommateurs est d'une efficacité limitée dès lors que l'Etat ne dispose pas de
moyens techniques adéquats pour assurer un contrôle sérieux, rigoureux et permanent à se~
frontières. Nous avons déjà eu à le souligner dans les analyses précédentes, notamment dans h
partic relative au contrôle qualitatif des importations. 207 Les produits de mauvaise qualitf
traversent facilemcnt les frontières africaines parce que les pays en cause ne disposent pas ou son
. dépourvus dc moyens sophistiqués pour détecter leur qualité douteuse. S'il est légitime, voin
recommandé de légiférer pour donner aux consommateurs un cadre juridique de protection
encore faut-il pouvoir mettre en oeuvre les règles protectrices ainsi mises à sa disposition.
Si cette mise en évidence trouve ses limites dans un cadre solitaire, elle peut en revanchf
être d'une très grande efficacité dans un contexte coopératif. On retrouve ainsi la connotatiol
juridique du célèbre adage populaire selon lequel « l'ullioll fait la force ». La coopération doi
tout d'abord s'entendre dans le sens de la collaboration entre Etats en vue d'offrir am
consommateurs une meilleure protection possible (A). Mais l'entreprise coopérative doit aussi se
s'orienter vers le rutur ct projeler à plus ou moins long terme une harmonisatioll des législation~
des différents Etats parties à la coopération, voire une promotion d'une législation protectricf
commune pOlir tous les Etals membres de la coopération (B).
A . La collaboratioll elltre Etats dalls le domaille relatif à
la protectioll du cOllsommateur.
La collaboration est souhaitée et encouragée par la charte mondiale des Nations Unie~
pour la protection du consommateur dans les principes N°S 43 et suivants. Mais cette forme de
coopération ayant déjà fait l'objet d'une étude poussée dans le chapitre II de la Première Partie
notamment dans la partie relative aux contrôles qualitatifs des importations, nous ne reviendron:
208
pas là-dessus. L'on devrait donc se référer à cette partie de l'étude pour de plus amples détails
207 Cr. supra: l"Ie Partie: Chapitre Il, section Il, sous-section l, *1 ,A·
20S Supra, J"le Partie. chapitre Il, section II, sous-section J, §J, A-.

540
La collaboration entre Etats en vue d'une meilleure protection du consommateur est aussi
souhaitée par les associations de consommateurs présentes sur le continent africain. Lors de
l'Atelier Régional tenu à Dakar (Sénégal) en juillet 1992, parmi les résolutions votées, une des
résolutions invitait les Gouvernements des différents Etats pour qu'ils « s'emploient à coopérer
pour satisfaire 1cs revendications des consommateurs, et à mettre au point des mécanismes de
concertation au niveau régional concernant le contrôle de la qualité des produits de l'aide »209.
Cette résolution conforme au souhait des rédacteurs des principes directeurs des Nations
Unies a été reconduite lors du Séminaire Régional de Cotonou (Bénin) organisé en décembre
1993
et
dont
le
thème
ainsi
libellé
:
«Consommateurs
dans
la
construction
de
la
C.E.D. E.A.O. »210 Ce qui est
révélateur de l'état d'esprit des participants. Dans la perspective
d'une collaboration positive, les Etats membres de l'institution pourraient s'inspirer des
expériences vécues ailleurs, notamment ceJles de la Communauté Economique Européenne en
matière de protection du consommateur. Ccci est aussi valable pour les autres ensembles
économiques existants sur le continent africain.
L'intérêt de la défense du consommateur dans un cadre concerté est que l'action
collective offrirait aux consommateurs de chaque Etat une sécurité transactionnelle aussi bien
dans l'espace (géographique) que dans le domaine relatif aux coûts fmanciers (les prix). Mais la
réussite de
la collaboration passe nécessairement par une même
vision des
problèmes
consuméristes sur le plan juridique. Les Etats membres de la coopération devraient donc
harmoniser leurs législations pour mieux appréhender les problèmes consuméristes sous un même
angle.
B - De l'harmonisation des législations à la promotion
d'Cille législation commune.
Lors de l'Atelier Régional de Dakar de juillet 1992, dans le volet relatif à la coopération
régionale entre Etats en matière de protection des consommateurs, les associations participantes
ont adopté des résolutions invitant leurs gouvernements respectifs à agir dans ce sens. Dans
~Oy Atelier Régional de Dakar des Icr, 2 cl 3 juillcl 1992 précité, volet VI relatif il la Coopération Régionale,
Résolution nO 1.
210
Séminairc Régional IOCU-END/\\/APCE8 de Cotonou du 6-11
déccmhrc
19'13, in «Consol11l11ation-
Développcmcnt » n" 1 l, déccl11brc 1993.

541
l'intérêt des populations de la sous-région, les associations ont lancé un appel aux gouvernements
pour qu'ils:
« entreprennent d'harmoniser et d'appliquer les lois sur la circulation des personnes en
Afrique afin de promouvoir celles des biens et des services essentiels;
« étudient et adoptent les modèles de législation commune appropriée à la protection des
consommateurs de la région;
« s'assurent que les intérêts économiques des consommateurs de tous les?ays membres
de la Communauté Economique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest (C.E.D.E.A.O.) soient pris en
compte au plus haut niveau de prise de décision de cette institution, notamment en y assurant leur
,

01 1
representatlOn ». ~
Ces recommandations qui ont été reprises lors du Séminaire Régional de Cotonou en date
du 6 au Il décembre 1993 visent un seul et même objectif: que le consommateur appartenant à
une région ou sous-région ait la même protection juridique quel que soit son pays d'origine.
Or, la réalisation d'un tel objectif n'est possible que si les Etats coopèrent et harmonisent
leurs législations protectrices en matière de santé, de sécurité ainsi que dans le domaine relatif à la
protection des intérêts économiques des consommateurs. Ceci n'est pas un objectif insur-
montable ; la réalisation de cette idée est plutôt une question de volonté politique.
Si l' harmonisation des législations protectrices est souhaitée afin d'obtenir partout où l'on
sera un degré de protection équivalent, elle n'est cependant qu'une étape intermédiaire, l'objectif
étant d'aboutir à plus ou moins long terme à une législation c~mmune et unitaire dans le domaine
de la protection des consommateurs appartenant à un même ensemble régional. La démarche a ur
mérite. Au-delà de la cohérence des textes, elle vise à rassembler les Etats membres autour d'une
seule et même cause : celle de la protection du consommateur laquelle est vue aujourd'hu
comme un impér,ltif social à la charge de tous les Etats membres de l'Organisation des Nation~
Unies.
211
Atèlier Région:J1lic [)akdJ" du lél au.1 juillet 1992 précité. volet relatif à la coopération Régionale, Résolution
N°S 2: :; : 4 : in « l'on,ol11ll1ali()n-Dévèlo[l[1èl11ènt }) n" ~. nov. 1992, p. 7.

542
L'adoption à l'unanimité des Principes Directeurs pour la Protection du Consommateur
par les membres de l'Assemblée Générale de l'Organisation est une preuve évidente et concrète
de cet impératif social gouvernemental. Les associations de consommateurs africaines, dont le
combat se résume ü ce souhait, ont même fait preuve d'initiatives encourageantes dans cette
perspective de la législation commune. Motivées dans leur lutte pour l'amélioration du sort du
consommateur africain, elles se sont engagées, lors du Séminaire Régional de Cotonou, sous
l'égide de l'Organisation Internationale des Consommateurs (O.Le. ex. LO.C.V.), à élaborer au
niveau de la e.E.D.E.A.O, donc au niveau régional, un modèle de législation pour la protection
des consommateurs inspirés des principes directeurs des Nations Unies, lesquels consacrent de
nombreux droits des consommateurs, notamment le droit à l'information, à la réparation des torts
et préjudices, ü la représentation, à la satisfaction des besoins essentiels et à la qualité des biens et
services.
L'objectif des associations de consommateurs est de la faire adopter par les parlements
des Etats membres de la e.E.D.E.A.O. ou par l'Institution elle-même.212 On pourra ainsi, par
cette voie, forcer la main aux différents gouvernements pour qu'ils s'intéressent enfin aux
problèmes des consommateurs locaux.
Ce forçage de la volonté des Etats est aUSSi un témoignage, une preuve que les
associations locales ont un important rôle à jouer pour la promotion des droits des
consommateurs en Afrique. Et comme elles n'ont pas le pouvoir de faire les lois et règlements
pour garantir la protection de leurs populations, la mission qui leur revient est de suivre
concrètement leur application sur le terrain afin de permettre aux consommateurs de profiter
pleinement de leur protection juridique.
212 Séminaire Régiollal de CotollOU du 6 au Il décemhre 1993 précité, in « Consommation-Déve]o[l[lement » n°
11. décembre 1()l)'. Dossier Spécial. p. 1.

CHAPITRE II
Le 28 janvier 1988, le secrétaire d'Etat français chargé de la consommation, de la
concurrence et de la participation réunissait à Paris les représentants des mouvements
consommateurs français, européens et nord-américains pour un séminaire sur l'avenir du
consumérisme dans les pays industrialisés 1. La rencontre, qui a regroupé 70 représentants de 12
pays, était motivée par un but essentiel : appréhender le rôle que "peut et doit jouer le
mouvement consommateur dans une économie de marché développée, compte tenu de
l'interpénétration croissante des économies des pays industrialisés et de certaines convergences
des politiques économiques,,2 Il s'agissait, de façon générale, de mesurer "l'intérêt pour
.
l'économie
d'un
pays
d'avoir des
consommateurs
plus vigilants
et
plus
responsables.,.
L'émergence ou la revitalisation d'un pouvoir consommateur alerte est de nature à rendre la
capacité des entreprises à développer des produits et des services de qualité et plus sûrs, et à
modérer l'évolution des prix par un meilleur fonctionnement de la concurrence,,3 Le secrétaire
d'Etat français voyait dans le pouvoir consommateur "un levier de la compétivité économique,,4.
Cette rencontre, qui eut lieu entre pouvoirs publics et représentants des consommateurs
des pays où la protection juridique du consommateur est déjà consacrée, met en relief une donnée
impol1ante : le rôle du mouvement dans une écollomie libérale. La mondialisation de cette
économie à travers la libéralisation des échanges conforte davantage ce rôle.
1 cr INe IIEBDO W:,l{O : :' lëvrier ll)l{l{ : P .1,
: Allocution de Jean ARTHU JS. secrétaire d'Etat français il la consommation en J 9Sg. INC HEBDO N° 5. ibid.
3 Ibid,
,1 Allocution de Jean ARTHUIS. secrétaire d'Etat français il la consommation en 1988, [NC HEBDO N°), ibid

544
Ce rôle du mouvement consommateur, bien que timidement observé dans les P. V.D,
commence par faire son chemin. Cette affIrmation repose sur l'avancée considérable enregistrée
dans les rapports entre pouvoirs publics et représentants des associations de consommateurs dans
ces pays. Si l'on prend l'exemple de l'Afrique, plus particulièrement de l'Afrique de l'Ouest, on
constate qu'une ouverture en vue d'une franche et constructive collaboration s'est faite entre les
pouvoirs publics locaux et les organisations représentatives nationales. Ceux-ci, à travers leurs
chefs d'Etat, viennent d'accepter un partenariat avec le mouvement consommateur africain en
octroyant ~I l'O.I.e. (ex. LO.C.U.) le statut d'observateur à la e.E.D.E.A.O ..~.
Cet acle des chefs d'Etat répondait au voeu exprimé dans la résolution N° 2 par les
organisations de consommateurs lors du Séminaire Régional organisé ù Cotonou (Bénin) en
décembre 1993 sous l'égide de l'O.I.e.-E.N.D.A. 6. La résolution mandatait le Bureau sous-
régional de l'O.Le. basé à Dakar (Sénégal) pour solliciter la -représentation des associations de
consommateurs « au sein des organisations régionales qui formulent des politiques affectant les
consommateurs, notamment la C.E.D.E.A.O., et, au besoin, assurer leur représentation ».
L'acte des chefs d'Etat traduit non seulement la volonté des pouvoirs publics d'accepter le
mouvement consommateur comme un partenaire important dans la lutte pour l'amélioration
des conditions de vie des populations locales, mais aussi "la reconnaissance que le processus
d'intégration"
passe
nécessairement
par
"la
mise en place de
réelles politiques de
développement pour et par les populations elles-mêmes"?
La prise en considération du rôle du mouvement consommateur a aUSSI été mise en
évidence au niveau des instances des Nations Unies.
La
placc
de
choix
accordée
au
mouvement
consommateur
dans
le
processus
d'émancipation du consommateur africain s'est traduite par l'adoption par la Commission
Economique cles Nations Unies pour l'Afrique des résolutions en vue cie faciliter la promotion
des organisations de consommateurs africaines. Ces résolutions furent adoptées à l'issue d'ur
symposium qui a duré deux jours et au cours duquel le mouvement consommateur africair
...
j
V. A. C
KANOUTE : "L~ mouv~ment consommateur: un l'acteur de changement" in "Consommation
Développement". Bull. d'lnro. Trim. IOCU-ENDA
N° 12, décembre 1994 ; P. 1. L'aeœptation du statu
d'ohservateur cie l'OIC au sein de la CEDEAO rut décidée au sommet de J'institution de 1994.
(, cr "Consol11mateuf-Déve\\orrement" ; N° Il ; déccmhr~ 1993; voir Dossier relatif au séminaire de Cotonou.
7 Voir A. C. KANOUTE : "Le mouvement consommateur: un facteur de changement" ; article précité, p. J.

545
présenta et discuta le rôle qui lui incombe dans le processus de développement du continent
africain à l'horizon du troisième millénaire8.
Toutes ces marques d'inlérêts en direction du mouvement consommateur africain
expriment quelque chose d'important: "seuil/il c/zallgemellt de comportemellt des acteurs que
SOllt le COllsolllllulteur, le producteur et l'Etat est à même de produire les facteurs porteurs de
l'élllergellce d'lIlle société où la prodllctioll et la vente des biens et services sont réellement
toumés vers la sati!Jfactioll des besoills esselltiels du COllsollllllatellr"~. Si on part du principe
que "le droit de la consommation est un droit de la production avec ses obligations et ses
interdictions pléthoriques"IO, les efforts pour l'avèllement d'une telle société restent à la charge
de deux acteurs, le consommateur à travers ses représentants et l'Etat.
Si l'Elat a pour rôle de faire des texles de lois ou règlements destinés à régir l'ordre
juridique à l'intérieur de ses frontières nationales, il n'a en revanche pas la capacité ou la volonté
d'assurer leur respect par les différents acteurs concernés, vivant ou non sur son territoire. Cela
est particulièrement vrai dans les pays africains où l'application des textes est rarement observée
de façon convenable par les agents chargés de sa mise en oeuvre. Si l'on prend l'exemple des
textes relatifs à la protection du consommateur, on peut en dénombrer au moins un dans chaque
pays, voire plusieurs dans certains.
Bien qu'inadaptés aux nouvelles données économiques actuelles, la plupart des textes
datant de l'époque colonialel' , on observe très rarement ou pas du tout leur mise en oeuvre en
faveur des consommateurs. La plupart des textes réglementent les prix des marchandises de
première nécessité vendues dans le commerce 12. Mais cela n'empêche pas les commerçants de
fixer arbitrairement
leurs pnx au
plus grand désarroi des consommateurs.
Cela s'est
particulièrement vérifié au lendemain de la dévaluation du FCFA survenue en janvier 1994 où les
8 Voir A. C. KANOUTE, Ibid.
9 Ibid.
III FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil. voir la page relative à 1'« Avertissement ».
Il Voir en ce sens, Philippe HADO, Ferdinand DABIRE, Bamba KlABOU et Amadou GUEYE : "Le contrôle de
la qualité des aliments: un constat peu encourageant" ; in "Vivre Autrement" N° 8/9 Novembre 1988 , revue
publiée par E.N.D.A. Tiers-Monde, Dakar (Sénégal), P. 6 et suiv. Les auteurs analysent respectivement les cas du
Bénin, du Burkina-Faso, du Mali et du Sénégal, pays dans lesquels les législations en faveur des consommateurs
n'ont guère évolué depuis la décolonisation. Ce qui l'ait de ces législations des supports juridiques inadaptés aux
,nouvelles réalités socio-conomiques, donc incapables d'assurer convenablement la protection des consommateurs
locaux.

546
prix des marchandises ont connu une envolée spectaculaire dans les pays membres de la zone
Franc, allant du Jouble au triple, voire au quadruple ou quintuple du prix de chaque marchandise
d'avant la dévaluation 1
1 .
Si l'on prend le cas du Zaïre, on constate que le gouvernement contrôle les prix des
marchandises en se servant des textes du décret du 21 mars 1931. Aucun amendement n'est venu
jusqu'alors réadapter le décret de 1931 aux nouvelles réalités économiques du moment, pas plus
qu'aucune loi n'est venue améliorer le domaine relatif à la disponibilité, à la vente et au choix des
produits ou de services de première nécessité, selon qu'ils sont de bonne ou de mauvaise
·
1 ,14
qua Ite .
En effet, la vocation du
mouvement consommateur est d'oeuvrer en faveur de
l'accessibilité aux produits de première nécessité pour la satisfaction des besoins essentiels
se
loger, se nourrir, se vêtir, se soigner, s'éduquer, s'informer, se déplacer, etc. IS •
Les critiques lancées par l'A.C.I.M. (Association des Consommateurs de l'Ile Maurice)
contre la construction du métro léger interpellent le gouvernement sur le coût financier et social
du projet et ses répercussions sur les services qui en découleront l6 .
De son côté, l'A.S.D.E.C.(Association Sénégalaise pour la Défense de l'Environnement et
du Consommatcur) avec l'appui des structures gouvcrnementales sénégalaises vient en aide aux
populations défavorisées par la mise en place dans leurs quartiers des centrales d'achat leur
permcttant d'accéder aux produits de première nécessité '7 . Au-delà de ces deux approches, la
satisfaction des besoins du consommateur reste la préoccupation essentielle des associations
locales ; elle motive et justifie les actions du mouvement consommateur dans toutes les
directions.
12 C'est le cas notamment de l'ordonnance togolaise N° 17 portant sur la réglementation des prix ct des circuits de
distribution; J.O. du 5 mai 1967, N° spécial.
l, Cfsur cc point, "Consommation-Développement" N° II de décembre 1993; P. 5 et suiv. ; les enquêtes réalisées
par l'association "Qualité Plus" de la Côte d'Ivoire au premier semestre de l'année 1995 sur les produits de
première nécessité, notamment les médicaments dont les prix ont augmenté de l'ordre de 52,5% pour les anti-
biotiques, de 55,7'ii' pour les anti-intllammatoires ct de 67,2% pour les anti-paludéens. Enquêl.es publiées dan'
"Consommation-Développement" de mai 1995, P. VII.
.
11 \\'(ilr Ms. Edilil kUll;\\ MUS/IORE: 'l'Ile Stale Ol'Consumer Protection Legisl;ltion ln Arrica : Towards A Stron~
Ami Elkctive ConsuIller I\\\\ovemenl In Arrica ; IOCU; Arrica Transition Programme ; The Hague ; The
Netherlands. february 1994 ; P.32.
1'; Voir en cc sens. "Consommation-Développement" l3ull. d'Inro.Trim. OIC-ENDA .. N° 14, octobre 1995, P. 2.
II>
A. C. KANOUTI: : "Le mouvement consoillmateur : un l'aclcur de changement"; Ibid. N° 12, P. 1.

547
Ce rôle du mouvement consommateur dans la société moderne lui confère une dimension
sociale spécifique : celle qui consiste à oeuvrer de concert avec les pouvoirs publics,
régisseurs
et régulateurs de
l'ordre juridique
étatique dans
l'intérêt des
citoyens-
consommateurs. C'est l'importance de cette dimension sociale qui fait du mouvement
consommateur un partenaire incontournable dans la gestion des affaires consuméristes et exige de
lui un recensement, voire un suivi des textes votés en faveur du bien-être du consommateur, en
vue de leur meilleure exécution par les professionnels concernés.
L'association marocaine de consommateurs (A.M.C.) n'a pas failli à ce devoir. Aussi, a-t-
elle, ~l peine un an après sa création, eu l'heureuse initiative de regrouper les textes législatifs
(environ 200 textes) relatifs à la protection du consommateur dont l'existence était connue des
seuls initiés en la matière (responsables et fonctionnaires)18. L'acte de l'A.M.C. mérite d'être salué
parce qu'il permet de résoudre momentanément au Maroc un problème propre et commun à tous
les pays d'Afrique : celui de la vulgarisation des textes susceptibles de permettre aux
consommateurs de mieux appréhender leurs droits et devoir/ 9•
Et comme les problèmes sont communs, les solutions peuvent aussi être communes. Ce
qui nous amène i déduire que les solutions appliquées dans un pays, peuvent aussi l'être dans les
autres.
Se pose alors la question relative à la transposition d'une loi d'un Etat africain dans un
autre Etat du continent. Le problème. à notre humble avis, ne se posera pas, car ces Etats qui, par
définition sont des P. V.O., ont des caractéristiques particulières: celles qui consistent à avoir les
mêmes problèmes dans les mêmes domaines. Et celui de la protection du consommateur ne fait
pas exception à la règle, bien au contraire, il les rassemble dans un vaste ensemble qui fait d'eux
des Etats dont les marchés de biens et de services sont largement ouverts aux prédateurs du
commerce national ou international. On peut citer, à juste titre, l'exemple du F.M.I. (Fonds
Monétaire International) qui applique à tous ces pays les mêmes plans d'ajustement structurel au
motif qu'ils ont les mêmes problèmes économiques. Cela peut aussi être valable pour les textes
de lois qui sont susceptibles de transposition d'un pays à l'autre.
l
..
17 Ibid.
18lbid. N° 13, avril 1995, P. 3.
19 Consommation-Développement N° 13, avril 1995, P. 3.

548
De façon générale, les diverses interpellations faites par le mouvement consommateUl
africain aux différents gouvernements vont dans ce sens. C'est le cas notamment des appels lancé~
par les associations locales nigéri,mes, maliennes, burkinabés, sénégalaises, etc ... , lesquelleE
"soulignent l'urgence de la mise en place d'un environnement législatif approp'ié au cOlltextl
actuel de libéralisation et favorable à l'émergence d'un .consommateur plus averti, plw
critique et plus actif'2o. Concrètement, l'A.D.E.E.TéI./Sénégal (Association de Défense de:
Abonnés à l'Eau, à l'Electricité et au Téléphone) a demandé, le 12 octobre 1994, lors de s,
rencontre avec Je Ministre sénégalais de l'Economie, des Finances et du plan, l'organisation d'U!
caclre cle concertation sur les Principes Directeurs cles Nations Unies pour la Protection dl
. Consommateur votés par Je Sénégal avec la communauté internationale21 •
La rencontre s'acheva sur ]a reconnaissance par le ministre du rôle majeur des association:
cIe consommateurs ct sur l'engagement du gouvernement à les appuyer clans leur tâche
notamment en matière d'information et de communication22 .
De son côté, le Secrétaire Exécutif Adjoint cie la C.E.D.E.A.O. a, lors de la première
Foire [nternationale organisée le 02 juin 1995 par l'Institution en vue de la lutte pour une
meilleure qualité cles produits distribués, souligné le rôle principal qui revient au mouvemen

consommateur ali"icain dans l'incitation à l'amélioration de la qualité de ces produits vendus am
consommateurs.
Prenant le consommateur comme le moteur de toute activité économique, raison pOUl
laquelle il constitue la cible de tous les producteurs et prestataires de services, le Ministre
sénégalais du Commerce, de l'Artisanat et de l'Industrialisation souligna l'intérêt qu'ont le~
pouvoirs publics africains "à veiller au respect des droits des consommateurs en leUl
permettant d'accéder à une gamme de produits assez large,,2J.
Tous ces égards exprimés aussi bien par les pouvoirs publics locaux que par le~
institutions internationales (sous-régionales, régionales ou de dimension mondiale) en directior
du mouvement consommateur ressemble fort bien à une sorte de consécration, laquelle doit être
20 Consommatioll-Dévcloppcmcnl N° 13, avril 1995, P. 3.
21 cr. "COIlS01llI11atioll-Dévcloppcmcllt" N° 12 précité, P. 6.
22 Cf. "ConsoIl1matioll-Développcmcnt" N° 12 précité, P. 6.
D Ibid. N° 14. octobrc 1995, P. 2.

549
clairement définie et reconnue juridiquement. Ils témoignent aussi du rôle non négligeable que
joue et continue de jouer le mouvement consommateur en faveur des populations locales.
Les développements qui vont suivre pourront paraître à certains endroits moins juridiques
que les précédents. Mais leur consécration est nécessaire, car ils sont une preuve de l'important
rôle que joue le mouvement consommateur africain pour la promotion des droits du
consommateur local. Ils seront, certes, émaillés d'exemples d'actions des associations sur le
terrain. Mais leur énumération s'avère nécessaire, elle l'est d'autant plus que l'avènement d'un
véritable droit de la consommation sur le continent africain en dépend, car ce droit qui est
actuellement consacré dans les pays développés n'est rien d'autre qu'un aboutissement des
actions menées par les organisations en vue dc son avènement.
Ces précisions sont autant plus nécessaires qu'elles visent à prévenir tout observateur non
avisé que le clroit cie la consommation n'existe pas cn Afrique et que sa présence sur ce continent
se manifeste au travers les actions, séminaires ou ateliers des organisations locales dont les
.structures fonctionnelles sont encore embryonnaires. Ce qui témoigne une fois de plus de la tâche
prépondérante qui revient au mouvement consommateur dans la vulgarisation des droits du
consommateur local dans un contexte sociologique difficile et dans un environnement
législat~fdéfavorable ri son action.
Somme toute, le rôle social et économique capital que remplissent les associations de
consommateurs exige de la part des pouvoirs publics africain unc consécration officielle du
mouvement consommateur dans sa plénitude. La requête est essentielle et se justifie amplement
car elle a un intérêt évident. Et comme l'a souligné M. Amadou C. KANOUTE, Directeur du
programme OIC-ENDA pour l'Afrique de l'Ouest, «aucune disposition, aucun principe ne
saurait prendre corps et s'affirmer s'il Il 'y avait pas une force sociale qui se chargerait d'en
être porteuse pOlir son affirmation et son application dans notre vie de tous les jours, c'est-à·
d "
d
" 1 70/
1re,
ails notre vecu ree »- .
Dans le domaine de la consommation, le mouvement consommateur représente cette
force sociale capable de promouvoir l'affirmation et l'application des textes votés dans la vie de
tous les jours. Il s'agit, comme l'indique le thème de travail de la rencontre du 13 octobre 1995 de

550
Bamako (Mali) des associations de consommateurs, de "professionnaliser les organisations de
consommateurs africaines" dans leur mission d'aide aux consommateurs.
Cette consécration juridique que nous réclamons a pour fmalité de faire des associations
de consommateurs des partenaires indiscutables des pouvoirs publics dans la lutte pour
l'amélioration du sort des consommateurs africains. Et le gain de cette partie est sujet au
dynamisme des act ions des associations sur le terrain. Ce dynamisme ne leur fait pas défaut, CE
que nous tenterons de démonter tout au long de cette dernière phase du travail. Le~
développements cie ce chapitre s'articuleront donc autour de deux sections principales:
- Section 1 : La consécration du mouvement consommateur ;
- Section Il : La finalité de la consécration du mouvemènt consommateur.
SECTION 1 :
LA CONSECRATION DU MOUVEMENT CONSOMMATEUR.
Consacrcr
le
mouvement
consommateur,
c'est
reconnaître
à
l'ensemble
de~
consommateurs Lin droit à la représentation pour la défense de leurs intérêts (Sous-Section l)
Mais l'expression « Mouvement Consommateur» est une notion vaste. Loin de se limiter au;.
seuls représentants légitimes ou groupements spécialement créés à cet effet, elle englobe aussi el'
son sein ci' autres organisations ou institutions acquises à la cause des consommateurs, er
particulier ceux des P.Y.D. Comme les associations légalement constituées pour la circonstance
l'intérêt des populations locales exige qu'on reconnaisse aussi à ces organisations parallèles k
statut de représentants légitimes des consommateurs (Sous-Section II).
2·1
A. M. KANüUTE. cité par A. SALL uans son article «Protection uu consommateur. Atelier régional. "
Consommation-Développement, n° 8, nov. 1992, p. 5.

551
Sous-Section 1: La reconnaissance du droit du consommateur
à la représentation.
Les principes directeurs des Nations Unies pour la protection du consommateur ont été
rédigés autour de plusieurs objectifs. Parmi ceux-ci, le droit du consommateur à la représentation
prend une place importante. En invitant les gouvernements des pays membres «à faciliter la
formation de groupes de consommateurs indépendants» (principe N° 1.e), les rédacteurs desdits
principes consacraient un droit inaliénable et sans la réalisation duquel toute législation
protectrice serait dénuée de support juridique important. La consécration de ce droit passe
nécessairement par la reconnaissance du droit des consommateurs à se constituer librement en
associations pour la défense de leurs intérêts (~I). Elle exige aussi qu'on accorde à ces
associations une aide logistique nécessaire pour leur permettre de réaliser pleinement leur mission
(§II).
§I - La concrétisation du droit du consommateur à la représentation:
la création d'associations de consommateurs.
Bien avant le vote des principes des Nations Unies pour la protection du consommateur,
l'existence des associations était subordonnée au bon vouloir des pouvoirs publics. Leur rôle
social était pratiquement inexistant. Certes, pour la commodité juridique, on trouve dans les
différentes
législations
des
pays
africains
des
passages
relatifs
aux
associations
de
consommateurs. C'est le cas notamment du code pénal togolais du 13 août 198025 qui, en
matière de tromperies, reconnaît aux associations de consommateurs certaines prérogatives.
L'article 116 de ce code dispose: «Les associations de consommateurs sont habilitées à faire
poursuivre les auteurs de tromperies ct à se porter parties civiles, notamment pour obtenir la
rectification de la publicité mensongère par les mêmes supports ». Mais ces prérogatives sont
rarement (ou pas du tout) mises en oeuvre, soit parce qu'il n'existe aucune association
susceptible de provoquer l'application des textes au profit des consommateurs, soit parce que le
ou les associations existantes craignent d'éventuelles représailles du fait des revendications ou
cri tiq LIes.
25 Loi n° ~O/l du 13 août 19~O instituant Code pénal togolais, JO Numero Spécial du 13 août 1980, p. 1 ct suiv.

552
En votant les principes directeurs pour la protection du consommateur, les Nations Unies
ont en quelque sorte légitimé le droit à la formation des associations de consonunateurs , à leur
existence pour la défense des intérêts des populations locales (A). Mais pour l'efficacité dans
l'action, l'existence d'une association doit être effective. L'effectivité est donc la condition
essentielle sur laquelle repose l'utilité d'une association (H). Cette utilité ne saurait cependant
être bénéfique à la cause des consommateurs que si l'association préserve son indépendance par
rapport au pouvoir politique et économique (C).
A - La légitimité du droit à la création des associations
de COllS011ll1zateurs.
Les consoll1mateurs éprouvent dans la vie de tous les jours de nombreux besoins que Il
droit doit leur garantir. Parmi ceux-ci figure le droit à la représentation incarné par le~
associations de consommateurs. L'exigence de cc droit se justifie à un double titre:
TOUL d'abord parce que l'environnement africain est mûr pour l'émergence des groupe:
organisés de consommateurs pour la défense de leurs intérêts. Les éclosions d'associations dl
consommateurs clans presque tous les pays clu continent est une preuve concrète de cettl
maturité.
Ensuite. le droit légitime pour les consommateurs à s'organiser en groupes autonome
indépendants pour la défense de leurs intérêts a été reconnu par les Nations Unies dans leur
principes directeurs relatifs il la promotion des droits du consommateur dans le monde, el
particulier dans lès r.Y.D. Le principe N° 3 est le domaine de l'énumération des différent
besoins des consommateurs parmi lesquels figure le droit à la représentation.
Ce principe reconnaît aux consommateurs de chaque Etat membre de l'Organisation
« droit de constituer des groupes ou des organisations de consommateurs et autres groupe
pertinents, et (la) possibilité, pour ces organisations, de ülÏre valoir leurs vues dans le cadre de
décisions les concernant» (principe N° 3.f). En adoptant ce texte, les rédacteurs des principe
directeurs reconnaissaient par la même occasion, le droit légitime des consommateurs à 1
création de leurs associations, à leur existence et à leur action pour la défense de leurs intérêt:
Les associations de consommateurs trouvent dans ce principe non seulement la consécration
~
leur légitimité, mais aussi le droit d'exiger des pouvoirs publics locaux la mise en place di
législations adaptées pour protéger les droits des consommateurs pris dans leur ensemble.

553
D'ailleurs, marchant dans cette logique légitimiste et reprenant en filigrane les dispositions
du principe N° 3 des Nations Unies, les associations existantes sur le continent ont, au cours de
l'Atelier Régional de Dakar, voté des résolutions ou recommandations allant dans ce sens à
l'adresse des pouvoirs publics africains. Les participants à l'Atelier exigeaient des gouvernements
des Etats africains des actions concrètes dans le domaine de la protection des consommateurs, à
savoir qu'ils:
« veillent à assurer la représentation des consommateurs à tous les niveaux de la prise de
décision sur tout ce qui les concerne et ce en accord avec les principes de démocratie;
« mettent au point des politiques favorables aux consommateurs et donnent force de loi
au principe selon lequcl aucune décision n'est prise concernant l'intérêt économique du
consommatcur sans consultation avec les organisations des consommateurs »26.
La réalisation de tous ces souhaits exprimés par les rédacteurs desdites recommandations
'est sujette à l'existence dans chaque pays d'une ou plusieurs organisations de consommateurs
agissant et répondant en leur nom. Or, pour être vraiment utile, opérationnelle et participer à la
prise dc décision comme l'indique le principe N° 3.f, ainsi que les résolutions suscitées,
l'existence à elle seule ne saurait suffire. Celle-ci n'est qu'une étape transitoire dans la vie d'une
association.
La participatlon active à la prise de décision affectant la vie de tous les
consommateurs est subordonnée à une existence effective de l'association.
B - L'effectivité des associations de consommateurs.
L'utilité de l'existence d'une association de consommateurs est fonctio~ de son
effectivité. Par ce vocable, il faut entendre la capacité de l'association à se faire reconnaître
comme représentant légitime des consommateurs au moyen d'actions concrètes sur le terrain et à
parler en leur nom. L'effectivité rime ici avec représentativité du groupement (a). Elle est aussi la
base ou le fondement sur lequel repose tout agrément de l'organisation par les pouvoirs publics
locaux (b), agrément sans lequel aucune action d'envergure ne saurait être menée par
l'organisation pendant toute son existence.
;
26
Atelier Régional des 1er, 2 et 3 juillet 1992 précité. Résolutions V relative à la représentation du
. consommateur, in Consommation-Développement, N° nov 1992, p. 7.

554
a) L'effectivité par la représentativité de l'association.
Si l'on pan du fait que j'effectivité d'une association ne dépend pas de sa création, mai
de sa représentativité, une question se pose: en quoi consiste la représentativité d'une associatio
de consommateurs '1
La représentativité d'une association consiste dans un premier temps en sa capacité.
parler au nom de tous les consonunateurs pour la défense de leur cause. La légitimité de !'actiOI
réside ellc aussi dans la force qu'a l'organisation à mobiliser les militants ou l'ensemble de:
consommateurs (1:1 majorité en général) pour la défense de leurs intérêts.
Pour les associations al'ricaines naissantes, la tâche s'avère difiïcile à réaliser, mais elle
n'est tout de même pas insurmontable. La justitication vient du f~lit que l'adhésion à une
organisation de consommateurs est dépourvue de contrepartie immédiate, surtout pécuniaire,
pour l'adhérent. Pour les populations en proie à des difficultés quotidiennes de tous ordres, le
pari d'une adhésion massive s'avère illusoire.
Certes, on enregistre des groupes de volontaires et de bénévoles s'investissant à temps
plein aux activités des groupes déjà opérationnels sur le con~inent, mais l'absence d'avantages
pécuniaires immédiats pour les adhérents freinent les ardeurs, les initiatives des populations,
surtout défavorisées, enclines à rechercher leurs moyens de subsistance au quotidien. La
mobilisation des populations et leur adhésion à la cause commune sont des défis auxquels sont
(ou seront) confrontés les associations africaines pour la défense des consommateurs. Si elles
constituent pour l'heure leur faiblesse, les surmonter serait synonyme de triomphe pour la cause
consumériste. Cela passe nécessairement par la réalisation d'actions concrètes sur le terrain pour
27
le compte de l'ensemble des consommateurs.
La représentativité, dans un deuxième temps, met en évidence d'autres éléments
d'appréciation. Il y a tout d'abord l'ancienneté de l'association. Elle tient une place de choix dans
l'appréhension du caractère représentatif de rassociation. Celle-ci doit avoir existé depuis un
27
cr int"ré\\

555
certain temps dans le pays. Cette durée est d'au moins un an en France.28 Ce délai nous parait
raisonnable en ce sens qu'il permet à l'association nouvellement créée de s'adapter à son
environnement et de justifier d'un certain crédit de confiance au sein de la population de base
ainsi que du pouvoir politique et économique. L'appréciation du caractère effectif d'une
association de consommateurs est un domaine réservé à l'administration et en tant que tel, il
appartiendra aux pouvoirs publics de chaque pays de déterminer le délai à l'intérieur duquel son
existence pourrait être prouvée.
Il Y a ensuite un second élément d'appréciation qui est lui-même lié au premier.
L'association doit justiJier d'une activité effective ct publique exercée dans le pays en vue de la
défense des intérêts des COnSOll1ll1a[curs et comptcr en S~)I1 sein un nombre surtisant dc
cotisants. 29 Si le premier volet relatif à l'activité effective et publique semble réalisable parce que
dépendant du dynamisme des dirigeants de l'organisation, le second nous paraît difficilement
accessible pour des raisons déjà avancées dans le premier critère relatif à la représentativité. Le
manque d'adhérents ajouté à l'insuffisance des ressources des quelques rares membres ne
permettront pas de satisfaire à cette exigence. Il s'agit des réalités locales dont devrait tenir
compte tout législateur appelé à se pencher sur la question de la représentativité des associations
des consommateurs africaines.
Enfm le troisième élément d'appréciation de la représentativité n'est pas non plus très loin
des deux premiers auxquels il reste intimement lié. Il se rattache au mode de fonctionnement de
l'association, notamment sa capacité à mobiliser les adhérents, à sensibiliser l'opinion publique
sur les problèmes de la consommation, sa répartition nationale, son mode de recrutement des
adhérents,
sa capacité à informer et son
indépendance30,
élément essentiel pour son
épanouissement. Ces critères d'appréciation seront plus faciles à vérifier sur le terrain d'autant
plus que l'action d'une association peut difficilement passer inaperçue dans des pays où de telles
actions font cruellement défaut. La constatation d'actes concrets au bénéfice des consommateurs
serait une preuve évidente de l'existence effective d'une association vouée à la cause des
consommateurs. C'est aussi la preuve de sa représentativité, condition essentielle pour bénéficier
d'un agrément de la part des pouvoirs publics.
2S CAS ct FERRIER: op. Cil, p. 152, na 167.
29 CAS cl FERRJER: op. Cil, p. l52, na 167.
J
10 INC HEBDO Il
583, 26 I·év. 1988, p.S.

556
Il) L'agrément, suite logique de la représentativité.
Agréer une association de consommateurs, c'est lui reconnaître le droit d'user de
certaines prérogatives dont l'exercice est nécessaire pour l'accomplissement de sa mission. Si le
principe même cie l'agrément n'est pas contesté (l), une certaiRe polémique ou controverse existe
autour de l'usage que pourraient en faire les éventuels bénéficiaires.
Le point central de cette controverse s'articule autour des chevauchements qui existent
entre l'agrément d'une association de consonunateurs et son action politique. Le principe de
l'agrément et ses zones d'ombre avec l'action politique de l'association bénéficiaire seront donc
examinés afin de mieux cerner les liens qui existent entre eux (2).
1 . Le principe de l'agrément d'une association de
consommateur
S'il est plus facile de créer une association, il n'est en revanche pas de même pour
l'obtention de l'agrément. L'existence d'une association n'est pas une condition d'acquisition de
l'agrément, même si celle-ci précède son octroi. Pour bénéficier de l'agrément, l'association doit
être effective, donc représentative. Quelle est la valeur juridique de l'agrément pour une
association de consommateur ?
L'agrément
permet à une association d'obtenir certains droits d'ordre judiciaire,
notamment le droit d'agir en justice pour la défense des intérêts individuels et collectifs des
consommateurs. L'agrément est donc un passeport accordé à 'une association de consommateurs
en vue de la défense des intérêts collectifs de ses membres devant les tribunaux d'Etat.
L'agréll1l'nt
cst
donc
r<'Hlclamcntalcmcnt
ct
signilïcativcmcnt
important
pour
les
consommateurs. Accordé en fonction de la représentativité de l'association, il permet de jauger
son efficacité sur le terrain. Aussi devrait-il être limité dans le temps afin d'obliger l'association
bénéficiaire à travailler plus sérieusement et à rendre fidèlement compte de leurs activités à leurs
membres. 31 Cette limüation de la durée de l'agrément est observée dans les pays déjà avancés
dans le domaine de la protection du consommateur. C'est notamment le cas en France où la durée
est laissée ~\\ l'appréciation souveraine de l'administration. Les pouvoirs publics africains devraien
'"
,li L,lIllY Droit ECOIlOlllillllc 1993.11° 6546.

557
s'inspirer des expériences vécues ailleurs et les adapter aux contextes socio-économiques et
culturels de leurs terroirs.
Dès lors que l'agrément a pour effet de générer des droits et de produire des obligations à
l'encontre de l'association bénéficiaire, une certaine logique juridique s'installe dans le champ
visuel des délivreurs et bénéficiaires de l'agrément. Accordé pour un but déterminé, il devrait faire
l'objet d'un retrait dès lors que l'orientation statutaire n'est pas respecté par l'organisation
32
bénéficiaire. Il devrait en être de même si l'association venait à perdre son indépendance • Il
appartiendra aux pouvoirs publics locaux de définir la procédure légale à partir de laquelle
l'agrément pourrait être accordé à une association.
2 - Agrément et action politique.
L'agrément, comme nous l'avons ci-dessus défini, est un passeport juridique pour toute
association bénéficiaire. Il lui ouvre toutes les portes dont l'accès est nécessaire pour les besoins
de la cause qu'elle défend. Un problème peut cependant se poser dans la pratique, notamment
l'utilisation qu'une association pouvait faire de son agrément. On touche là les limites d'action de
l'association bénéficiaire de l'agrément. Et qui dit limite, dit implicitement interférence entre
action associative exercée dans le cadre syndical et action politique orientée plus vers les
considérations partisanes. Une association peut-elle, dès lors qu'elle est agréée, recourir à une
action pol itisée pour réaliser son objectif?
La réponse à cette question n'est pas aisée et dépend de beaucoup de paramètres. Nous
nous inspirerons cependant de la jurisprudence française pour essayer d'apporter un début de
réponse qui, précisons-le, n'est pas standard. Dans une espèce soumise ü son appréciation, à la
même question, la cour de Paris s'est justement contentée de définir le rôle essentiel d'une
association de consommateurs, lequel consiste en une mission d'informations "sur la mauvaise
qualité, la nocivité intrinsèque et le coût exclusivement élevé des produits distribués dans le
commerce, en dénonçant les abus relevés au terme d'enquêtes sérieuses"D.
Dans la logique de cette jurisprudence, on peut citer, dans le cadre africain, l'action de la
ligue des consommateurs du Burkina-faso (LCB) dans la protection de la santé et des
32 Cf. infra
.13 Paris 13 Juin J 973, inédit, cité par FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cit, p. U4

558
consommateurs locaux. Répondant à l'interpellation par voie de presse d'une consommatrice su
les ventes frauduleuses de maïs altéré par l'aflatoxine, la LCB, après une enquête minutieuse su
les risques encourus par les hommes et les animaux ayant consommé le céréale, a sai~
l'Inspection Générale d'Etat et la Direction de l'Office National des Céréales afm de faire interdir
la distribution puis la vente du produit incriminé. Un point de presse organisé par l'association e
collaboration avec les chercheurs et nutritionnistes a conclu à des risques élevés de cancers de fe
dû à l'ingestion d'aliments contaminés par l'aflatoxine BI. Selon les normes, une dose de
mtcrogrammes par kilogramme devient toxique pour l'homme. La teneur maximale autorisé
pour le bétail est de 5005 micro grammes par kilogramme. L'action de la LeB eu pou
conséquence immédiate la destruction par l'Office National des Céréales (OF.NA.CER) de 500
tonnes clu maïs contaminés dont 1000 tonnes reprises à un commerçant qui les avait acheté POL:
nourrir son bélail et qu'on a ensuite trouvé sur le marché destiné à la distribution pour les besoin
des consommateurs.3~
Cette alerte provoquée par la L.C.B. amena les pouvoirs publics du Burkina-faso
diligenter une enquête en vue de déterminer les responsables et de remédier aux irrégularités dan
la gestion du stock de maïs aflatoxine.
Vu sous un autre angle, une autre juridiction apprécie l'exercice des droits conférés pé
l'agrément de façon différente et avec une subtilité tout à fait conciliante avec l'action politiqm
Tout en considérant que la nouvelle orientation d'une nouvelle association pour développer un
stratégie cie groupe
cie pression et prendre l'initiative en créant l'évènement n'était pa
susceptible de lui faire perdre l'agrément, le tribunal d'instance de Paris (I6èrne Arrondissement)
admis que le changement permettait à un salarié de l'association de faire jouer en sa faveur 1
clause de conscience, prévu à l'accord de l'établissement, parce que les actions provocatrice
mises sur pied paraissent correspondre à J'abandon du principe, jusque là respecté
d'un
information guidée par un souci d'objectivité et d'impartialité"').
Cette position, qui n'est pas très tranchée, laisse cependant une porte ouverte à touf
tentation dès lors que l'action vise la défense des intérêts des consommateurs. Elle devrait t01
\\
0
\\.l Consolllmation-Développement, Bull. <1')111'0. IOCU-ENDi\\, 11
9, avril 1993, p. 4.
35 Ibid.

559
simplement être motivée par une double exigence: l'objectivité et l'impartialité de l'association
dans sa compagne d'information.
Au-delà de toute cette position jurisprudentielle, et sans toutefois préjuger de leur
fondement juridique nous pensons que l'action de l'association des consommateurs devrait être
neutre de toute visée politique, autonomie du consumérisme oblige. Mais dans certaines
circonstances, le sort du consommateur est lié à la politique de consommation adoptée ou défmie
par le gouvernement en place. Face à cette réalité politique, économique et sociale, la question
relative au rôle social de J'association peut être difficilement ignoré, et leur interpellation pour une
éventuelle action ne saurait être jugée comme une manifestation de comportement dépassant le
cadre de leur compétence. Somme loute, c'est un problème de crédibilité des actions des
associations de consommateurs agréées qui se trouve posé, avec en prime celui de la récupération
.politique chère aux régimes africains.
La question de frontière entre l'agrément et l'action politique reste donc entière. Tout au
plus, il s'agit là d'un problème de fait lié à l'appréciation des juges du fond. Dans cette logique, il
va sans dire que l'indépendance de l'association agréée sera un facteur déterminant qui pèsera
lourd dans la décision des juges appelés à statuer sur la violation de l'agrément accordé.
C - L'indépendance des associations créées.
En invitant les pays membres, en particulier les P.Y.D, «à faciliter la formation des
groupes des consommateurs indépendants », les rédacteurs des principes directeurs des Nations
Unies pour la protection des consommateurs consacraient ainsi un mot symbole sans la présence
duquel toute association légalement constituée perd tout crédit. fl s'agit du mot « indépendant ».
Si la création des associations de consommateurs est souhaitée en Afrique en vue de la
défense des intérêts des populations, leur existence n'a de valeur pour ces derniers que si elles
sont indépendantes et exercent leurs activités loin de toute pression extérieure à l'institution.
L'indépendance d'une association est un gage important de son existence, de son crédit,
un facteur essentiel pour son équilibre interne et externe. Elle conditionne le bon fonctionnement
i
et la bonne marche de ses activités. Aucun acte crédible, louable ne pourra être posé dès lors que
l'indépendance fait défaut. Comment apprécie-t-on cependant l'indépendance d'une association
de consommateurs ? Celle ci s'apprécie par rapport aux forces extérieures à l'organisation,

560
notamment, les pouvoirs économiques et le pouvoir politique, deux centres intérêts que le~
activités des associations sont à même de mettre à rudes épreuves.
En effet, l'indépendance d'une association suppose la gestion autonome de ses activitè
sans influence ou interférence extérieure, avec lucidité et objectivité, le tout au bénéfice de l,
. collectivité des consommateurs. Cettc vision des choses peut, a priori, paraître illusoire dans de~
pays Africains longtemps soumis aux régimes des partis uniques et où l'Etat semble avoir la mail
misc
sur
toutes
les
activités
ü caractère associatif.
Cet
obstacle
n'est
cependant
pa:
incontournable et il peut, Ü notre avis, être franchi par la pluralité des associations. CeW
dénlarclle peut être pcn;uc commc la meilleure garantie contrc toute tentative de récupération, (h
•. 1
.
1
1(,
que quc 1
1
)or( C]U 1 SOIt.'
L'intérêt de l'indépendance pour les associations est inestimable. Si d'un côté elle leu
permet d'échapper ü toute pression extérieure susceptible d'influencer la conduite souveraine de
leurs actions pour le bien de tous les consommateurs, d'un autre côté elle leur offre un statu
privilégié: la possibilité de s'affirmer comme des interlocutrices valables et incontournables det
pouvoirs publiques et du pouvoir économique.
Au Mali, par exemple, l'Assemblée Nationale ne manque jamais de prendre régulièremen
l'avis de l'association des consommateurs du Mali (ASCOMA) avant l'adoption d'une loi
chaque fois que les intérêts des consommateurs et des usagers sont en jeu. L'association es!
consultée par les pouvoirs publics sur les questions touchant aux intérêts des consommateurs. Er
1993, l'organisation fut associée aux consultations qui avaient été menées par la nouvelle
Assemblée du Mali sur le projet de texte portant sur la réglementation de l' indemnisation de~
victimes d'accidents causés par les véhicules terrestres.
Dans la même logiC]ue, l'organisation fut saisie par le Ministère de la justice et des droit~
de l'homme atin d'avoir son avis sur le projet de texte relatif à la tixation des horaires e'
émoluments des commissaires priseurs et huissiers de justice du Mali. Les propositions faites pal
l'organisation lors de cette consultation furent toutes retenues. L'association siège aussi am
conseil d'administration de l'office de RadioTélévision Malienne et de l'Agence de Presse et dt
.1(, COl1soll1matiol1-Dévclopr cll1cl1l , N° 9 précilé, p. 3.

561
Publicité. Sa présence n'en est pas moins remarquée à la commission de visa cinématographique
et d'égal accès aux médias d'Etat.\\]
Le même traitement est accordé à l'Association pour la Protection du consommateur et
de
son
Environnement
au
Bénin
(APCEB).
Cette
organisation
siège
aux
conseils
d'Administration des divers orgal1lsmes et est consultée par les ministères et structures
officielles.18
Au Burkina-Faso, la L.eB. (Ligue des Consommateurs du Burkina) tient le haut du pavé dans la
représentation des consommateurs. Les pouvoirs publics trouvent en cette organisation un
représentant légitime et un interlocuteur valable pour la défense des intérêts des consommateurs.
Cette légitimité rut confirmée par la rencontre qui a en lieu entre la L.C.B. et la commission
financière de l'Assemblée des Députés du Peuple afm d'obtenir la suppression d'une T.V.A de
10% sur les factures d'eau potable servie par l'Office National de l'Eau et de l'Assainissement
que le gouvernement envisageait de faire passer à 15%.39 A cette rencontre qui fut couronnée de
succès au profit de la L.C.B., il faut ajouter la participation de l'organisation à la première
Conférence Annuelle de l'Administration Publique (CAAP) tenue en septembre 1993.40
Le même rôle est joué par l'Association des Consommateurs de l'Ile Maurice (A.C.I.M)
qui a mené une campagne de protestation devant les pouvoirs publics contre la construction du
métro léger en Ile Maurice. 41 Au Sénégal, un des premiers actes du nouveau ministre du
commerce et de l'artisanat (en charge de la protection des consommateurs) après sa nomination
en 1993, a été une rencontre avec l'ensemble des associations de consommateurs42 , reconnus
comme représentants légitimes des consommateurs.
Toutes ces considérations ou tous ces égards manifestés dans les pays cités vis-à-vis des
organisations de consommateurs sont les résultats ou les conséquences logiques de leur
effectivité et de l'indépendance qui anime la conduite de leurs,activités. L'indépendance est donc
nécessaire pour l'épanouissement « total» d'une association de consommateurs, pour la gestion
tranquille de ses activités et pour la revendication de ses droits et de ceux de la population tout
,1
,7 Consommation-Développement. N° 9 précité, p. 3.
• .1S Consommation-Développement, n° 9 précité, p. 1.
.19 Ibid. N" 11, décemdre 1993, p. 2.
~() Ibid.
~I Consommation-Développement, n° Il, décemdre 1993, p. 2.

562
entière qu'clic csl censée représenter. L'indépendance est une couverture efficace clont il ne fau
jamais se séparer si l'on veut rester un représentant digne, un interlocuteur valable, un défenseu
objectif ou impartial des droits des consommateurs. C'est un outil indispensable auquel il faudrai
apporter tous les soins possibles,
Un problème commun à toutes les associations de défense des consommateurs subsist
cependant en Afrique: celui de leur « jeunesse ». De celui-ci dérivent tous les autres: le manqu
d'expérience et le besoin urgent de moyens pour vivre, faire fonctionner et mener à bien 1er
mission de défenseur des consommateurs. Elles ont donc besoin d'aide, de tout bord, e
particulier de l'Etat. Cette insuffisance, ce déficit de moyens peut-il être une source de 1er
fragilité? Tout dépendra de la manière dont l'aide sera conçue aussi bien par les pourvoyeurs qu
par les bénéficiaires.
§II - L'obligation d'aide aux associations de consommateurs.
Le mouvement consommateur est encore à l'état embryonnaire. Initiative de quelque
individus de bonne volonté,
il a besoin de soutien logistique pour pouvoir s'implanh
durablement. Le mouvement consommateur africain a donc besoin d'aide et cela relève d'ur
nécessité absolue (A). Pour l'efficacité du soutien, l'aide devrait être orientée dans des do maint
bien précis (B).
A - La nécessité de ['aide aux associations de consommateurs.
L'aide des associations de consommateurs s'impose en Afrique. On peut même l'assimil·
à une urgence. C'est une nécessité impérieuse qui s'explique par un constat de l'état des lieux
"la jeunesse" de toutes les organisations des consommateurs, Si la volonté y est toujou
présente, les moyens matériels et tinanciers pouvant permettre de remplir correctement le
mission font défaut. Il s'agit d'un handicap important que les structures des associations so
incapables de combler à elles toutes seules. Et cela s'explique par la précarité de leurs moyens
la « fraîcheur » de leur existence.
-lè lhicl .. nO ] 0, !10\\'. 19')3. p. 1.

563
En effet, à quelques exceptions près, la plupart des associations de consommateurs sont
de création récente ; leur existence juridique date de la fin des années 1980.43 Si l'on prend
l'exemple de l'Afrique de l'Ouest, jusqu'en 1988, il n'existait dans cette région qu'une et une seule
association, la "Consumer Education and Protection Council of Nigeria (C.E.P.CO.N)"44.
Depuis 1988, on a enregistré la naissance d'un grand nombre d'associations, certains pays
en comptant même plusieurs. 45 Les raisons avancées pour justifier cette éclosion sont nombreuses
et tiennent en quelques points: l'absence de normes dans les pays africains susceptibles d'obliger
les producteurs et distributeurs à livrer des produits adaptés aux besoins locaux, les mauvaises
prestations des services publics, les abus dus aux monopoles ou positions dominantes,
généralement imputés aux sociétés d'Etat gérant les domaines vitaux comme l'eau, l'électricité, le
téléphone ou le transport (surtout urbain), la faiblesse du pouvoir d'achat, l'insuffisance des
services gouvernementaux chargés du contrôle de la qualité des produits, etc ...46
A cette situation déjà intenable, était venue s'ajouter la prise de conscience des initiateurs
consécutive à un phénof!lène anormal: l'Afrique était en train de devenir un dépotoir des produits
bannis dans les pays du Nord, des médicaments interdits en occident et vendus dans les pays
pauvres, des denrées irradiées ou impropres à la consommation, des déchets industriels
dangereux ou de façon globale, tout ce qui était indésirable ou reconnu comme tel dans les pays
industrialisés.47
Mais, aussi constructive et réaliste que puisse paraître une telle démarche, l'efficacité des
associations de consommateurs reste limitée, faute de moyens matériels et financiers pouvant
permettre la promotion de leurs actions. Une chose est de naître, une autre est de pouvoir vivre
et être utile pour la cause à l'origine de laquelle la naissance a été provoquée. Aussi, certaines
associations n'ont d'existence qu'au plan juridique. Pour ce qui concerne leurs activités, rares sont
les actes concrets enregistrés à leur actif, leur bilan social se révélant complètement négatif. Il
43 « Consommation-Dévcloppcmcnt » précité, n° 9, avril 1993, p. 1.
44 Ibid.
45 Consommation-Dévcloppcmcnt » précité, n° 9, avril 1993, p. 1.
46 Ibid.
47 Ibid.

564
s'ensuit une conséquence sociale directe: la méconnaissance de leur existence par la masse de~
consommateurs.48
Le manque ou l'insuffisance de moyens matériels et tinanciers est donc une cause dt
blocage de la dynamique du mouvement consonunateur africain. L'utilité sociale des associations
de consommateurs passe nécessairement par son déblocage au moyen d'une aide logistique
adéquate. Dans cette vision des choses, la démarche des pouvoirs publics du Burkina-Faso now
paraît être une avancée importante dans l'appréhension de l'urgence de l'aide dont ont tant besoir
les associations locales.
Alors qu'il recevait une délégation de la Ligue des Consommateurs du Burkina (L.CB
venue lui présenter leur programme d'activités pour l'année 1994-1995, le chef du gouvernemen
du Burkina-Faso a non seulement apporté son soutien à l'organisation, mais aussi ressenti i<
nécessité de "trouver les voies et moyens pour soutenir financièrement les activités de la L.CB.'
et au besoin, par voie de recommandation à divers bailleurs (bilatéral, multilatéral, ONG
susceptibles d'apporter leur appui à l'association. 49
L'urgence de l'aide des associations africaines est donc une réalité. Encore faut-il pouvoi
déterminer les domaines dans lesquels cette aide est censée être caractéristique pour le grand bier
des consommateurs.
B - Le domaine de l'aide aux associations de consommateurs.
L'accès du consommateur au rang de partenaire économique est fonction de la capacité dt
ses représentants légaux qui assurent sa défense à constituer un "pouvoir compensateur" asse;
fort, organisé, informé susceptible d'entreprendre des actions collectives et efficaces et se fairt
entendre
par
condescendance
par
les
professionnels.50
L'utilité
des
associations
dl
consommateurs en Afrique est cependant limitée par la carence de moyens adéquats pouvant leu
permettre de mener des investigations nécessaires à l'accomplissement de leur mission.
Certes, les associations de consommateurs locales bénéficient de quelque richesse e'
ressources humaines dans divers domaines (Avocats, Médecins, Professeurs d'Universités (
4S Au Togo, il existe une association de consommateurs basée à Lomé. Mais l'absence d'actes concrets posés pOl
le compte des consommateurs fait qu'elle est totalement méconnue du public.
49 « Consommation-Développement », bull d'info IOCU-ENDA précité, n° Il, décembre 1993, p. 2.

565
d'Ecoles, Ambassadeurs, Economistes, Communicateurs, etc.), lesquelles sont prêtes à s'engager
et à s'investir auprès des "leaders" desdites' associations en cas de sollicitation de leur part.
D'autres richesses sont à mettre aussi à J'actif des organisations de consommateurs
représentatives telles que l'engagement d'autres personnes (jeunes, femmes ou chômeurs) qui
contribuent par leur concours en énergie, force, entregent et temps au développement de
l'organisation. Il en va de même des diverses consultations dont sont l'objet ces associations par
les institutions nationales (gouvernement, parlements, conseils économiques et sociaux) sur des
sujets spécifiques51 , lesquels sont souvent en relation avec les problèmes des consommateurs.
Mais toutes ces "richesses" sont autant de valeurs qui ne masquent en rien les multiples
problèmes des associations de consommateurs africaines et qui constituent en conséquence les
principaux traits de leur faiblesse. Toute la difficulté est de pouvoir les identifier selon leur degré
d'urgence.
Tout d'abord, il yale problème du financement : les organisations de consommateurs
africaines manquent de ressources financières pour mener à bien leurs activités. La carence
financière s'explique par la difficile situation économique des adhérents, laquelle ne permet pas à
l'organisation de compter sur leurs cotisations.
A cette réalité s'ajoute le manque d'expertise, de compétence sur certains aspects
particuliers du travail pour développer l'organisation, notamment la recherche de fonds auprès
des particuliers, des ONG ou d'autres institutions internationales susceptibles de permettre à
l'organisation de combler le vide dû à l'absence de cotisations des adhérents.
Ces difficultés à générer des ressources financières internes à l'organisation sont autant
d'indices négatifs qui freinent ou bloquent les plans d'actions des diverses organisations de
consommateurs en Afrique. 52 Aussi, le fossé entre ce qui devrait être fait sur le terrain et les
moyens financiers des associations s'élargit-il chaque jour davantage. 53 L'évidence est que cette
situation des associations locales n'est pas de nature à favoriser une certaine symbiose avec la
masse des consommateurs.
50 CAS ct FERRIER: op. cit., n° 110.
51 A. C. KANOUTE : «Communication présentée au Symposium de la Commission Economique des Nations
Unies pour l'Afrique» précitée, Sénégal, novembre 1994, p. II.
52 Ibid.

566
Le second problème est la conséquence directe du premier et est d'ordre matériel e
technique. Le manque de ressources financières rend difficile l'acquisition d'un local pouvar
servir de siège à l'association. L'absence de siège équivaut à un manque de bureau, de personm
permanent susceptible d'accueillir les consommateurs, de faciliter leur identification, 1er
information, voire leurs réclamations ou plaintes.
Ce contexte de survivance difficile rend quasiment impossible la présence de l'organisatio
dans les coins les plus reculés du pays, dans les villages et campagnes, endroits où les besoins d
ses services sont des plus ressentis, la majorité de la population étant analphabète.
Au problème du local vient se greffer un troisième d'ordre technique.
Il touer
essentiellement le domaine relatif à J'équipement. Dans ce secteur également les associatior
éprouvent un grand besoin d'aide. Elles manquent d'équipements simples et nécessaire
notamment les laboratoires d'analyses, pour être fonctionnelles et opérationnelles sur le terraÏJ
L'absence du matériel technique constitue un handicap important qui empêche un contrôle norm
et effectif de la qualité et de la sécurité des biens mis en circulation.54
Toutes ces difficultés rencontrées par les associations africaines de consommateurs r
sont pas insurmontables. Les solutions à tous ces problèmes sont toutes liées à la volonté d(
parties concernées par la cause consumériste au premier rang desquelles se trouve l'Etat. Cet!
première position dans la hiérarchie des parties concernées s'explique: garant de la santé et de
sécurité de sa population, son aide à toute organisation oeuvrant pour la réalisation de CI
objectif est indispensable. Celle-ci peut être assimilée à un devoir d'assistance, laquelle
consisterait en une fourniture de moyens matériels, techniques et financiers. L'assistance f
moyens logistiques permettra ainsi aux bénéficiaires de réaliser l'objectif commun en remplissal
convenablement leur mission vis-à-vis de la masse.
La nécessité d'une telle assistance est comprise par les pouvoirs publics ghanéens. Ceu
Cl, à travers le gouvernement, se sont engagés à appuyer les organisations de consommateu
dans le pays.
5.1 « Consommation-Développement », bull d'info IOCU-ENDA précité, nO 8, novembre 1992, p. 1.
5~ « Consommation-Développement », bull d'info IOCU-ENDA précité, n° 8, novembre 1992, p. 5.

567
Reconnaissant dans· le mouvement consommateur une force complémentaire, malS
indispensable dans l'amélioration des conditions de vie des populations africaines, le Secrétaire
Général du gouvernement a appelé, dans une allocution, à la formation d'associations de
consommateurs solides qui puissent soutenir les efforts du gouvernement en poussant les
producteurs à améliorer la qualité des biens de consommation commercialisés sur les marchés. 55
Le jeu de ce rôle n'est possible que si les associations légalement constituées jouissent
d'une certaine autonomie en moyens d'investigations; or, ces moyens leur font cruellement défaut
à l'heure actuelle. C'est dans cette perspective que le gouvernement du Burkina-Faso a, en janvier
1994, lors d'une rencontre avec la Ligue des Consommateurs du Burkina (LCB), promis de
trouver les voies et moyens pour soutenir financièrement les activités du mouvement, au besoin
en les recommandant à divers bailleurs de fonds bilatéraux, multilatéraux et aux ONG,
institutions susceptibles d'apporter aux organisations locales un soutien logistique important.
Outre l'Etat, la seconde partie dans la hiérarchie des parties concernées par la situation
des consommateurs se trouve être. les organisations elles-mêmes. Leur vocation à incarner la
légitinùté dans la représentation des consommateurs les oblige à une certaine neutralité dans
l'observation de la situation socio-économique, politique et culturelle du terroir. La manifestation
de cette attitude est sujette à une certaine indépendance financière et matérielle.
Incapables (pour le moment) de générer des ressources internes propres, la recherche (par
les associations) des sources d'appui logistique extra-étatiques peut être un moyen efficace
55 Allocution de Mr D. S. BOATENG, Secrétaire Général du gouvernement ghanéen, prononcée en plein air à
Holy Gardens (Accra) le 15 mars 1992. Cf en cc sens, « Consommation-Développement », bull d'Înfû IOCU-
ENDA précité, n° 8, nov. 1992, Rubrique: « Les associations célèbrent la Journée Mondiale du Consommateur ».

568
d'équilibrer les forces de soutien et de préserver leur indépendance, élément essentiel pour L
gestion, le fonctionnement normal et impartial des organisations. 56
Somme toute, les sources d'appui pouvant permettre aux associations africaines d
consommateurs de préserver leur indépendance existent. La question se pose beaucoup plus e
terme de moyens à leur accès plutôt qu'à leur disponibilité. L'information concernant ces source
d'appui n'est souvent pas accessible. Et le problème n'est toujours pas à l'heure actuelle résoh
Aussi, l'Ole (ex IOeU) s'attache-t-elle à réaliser une pochette d'information sur la recherche dt
financements pour. appuyer ses organisations membres insuffisamment fournies ou équipées e
moyens matériels techniques et financiers. 57
Les organisations africaines trouveront dans ces sources d'appui une aubaine pour
sauvegarde de leur indépendance nécessaire à la réalisation de leurs objectifs. Et comme c(
sources d'appui sont le plus souvent des institutions vouées à la même cause que les organisatior
locales, leur rôle dans la protection des droits des consommateurs n'en sera pas moins utile al
populations africaines.
Sous-Section II: La prise en compte du rôle des groupements
parallèles dans la défense des droits des consommateurs.
Le principe n034 de la charte des Nations Unies dispose: « les gouvernements devraie
encourager les organisations des consommateurs et d'autres groupes intéressés, y compris 1
56 Les performances réalisées par quelques associations sont autant d'indices encourageants qui incitent à
optimisme quant à l'avenir de la démarche proposée. Au Ghana, la "Consumer Association" a imaginé une pan
pour combler son délieit de moyens matériels en organisant en 1992 un séminaire d'une journée chez un de
membres, tous frais couverts par l'association. Le suceès du séminaire fut remarquable et l'association réalisa
de ses objectifs prioritaires, à savoir, t~lire passer le message de son existence et de son rôle au sein de la soci
ghanéenne. Au Mali, l'Association des Consommateurs du Mali (AS.CO.MA.) effectua des enquêtes sur la qua
ct le prix du pain, du sucre ct de la viande à Bamako (capitale du Mali) en se servant de ses ressources humai
ct lïnancières internes. La Consumer Education and Protection Council of Nigeria (CEPCON) bénéficia de
côté, au niveau national, dc l'appui de l'UNICEFINigéria pour célébrer la journée mondiale des consomm:"...
sur une semaine en y incluant, un séminaire de deux jours sur l'allaitement maternel. Quant à l'Organisation
Consommateurs du Niger (OR.CO.NI.), clic a été invitée par le PNUD/Niger à les rapprocher dès que la miSé
place du département d'appui institutionnel aux jeunes ONG scra cllCctive. Ce qui, à notre avis, serait déjà cl-
faite, la proposition datant de 1992. Cf en ce sens « Consommation-Développement » n° 8, p. 1 et 4.
57 Ibid.

569
moyens d'information, à entreprendre des programmes d'éducation et. d'information, à l'intention
notamment des groupes de consommateurs à faible revenu des zones rurales et urbaines. »
Si la légitimité des associations des consommateurs en tant que représentants légaux de la·
masse des consommateurs est de mise, elle se pose en termes beaucoup plus ambigus pour ce qui
concerne les autres groupes intéressés parallèles, mais acquis à la cause consumériste. Ces
groupes d'une extrême diversité sont très nombreux en Afrique où ils jouent un rôle considérable,
indéniable auprès des populations locales, en particulier rurales. Leurs activités n'étant en rien en
contradiction avec les objectifs poursuivis par les représentants légaux des consommateurs, une
reconnaissance juridique au même titre que les représentants officiels des consommateurs devrait
leur être accordée pour la défense de la cause commune.
Cette reconnaissance, aussi symbolique qu'elle puisse paraître, serait un geste juridique
salutaire pour le consommateur local. Ces groupements intéressés étant très diversifiés sur le
continent, notre attention se focalisera essentiellement sur deux types de mouvements, les plus en
vue
dans
la
protection
des
intérêts
des
consommateurs.
Ces
deux
mouvements
sont
respectivement le mouvement coopératif (§I) et les organisations non gouvernementales ou ONG
(§ II).
§I - Le mouvement coopératif et la cause consumériste.
Nous nous intéresserons plus particulièrement aux coopératives de consommation dont
les orientations structurelles et fonctionnelles entrent logiquement dans les objectifs poursuivis
par les associations de consommateurs. En effet, la coopérative de consommation peut être
définie comme un ensemble de consommateurs qui créent une entreprise chargée de leur vendre
les biens et services dont ils ont besoin. C'est une technique collective de défense des intérêts des
consommateurs qui consiste à leur faire assumer la responsabilité d'une entreprise de distribution
et à soustraire ainsi au secteur capitaliste une partie de son activité. 58
Dans cette logique, l'Association Sénégalaise pour la Défense de l'Environnement et des
Consommateurs (A.S.D.E.C.) a créé une coopérative des consommateurs en vue de "modeler"
les effets de la dévaluation du franc CFA intervenue en janvier 1994.59 Fonctionnant comme une
58 CAS ct FERRIER: op. cil., n° 113.
59« Consommation-Développement », bull d'info IOCU-ENDA précité, n° 12, décembre 1994, pA.

570
centrale d'achat qui acquiert des produits au prix de gros pour les redistribuer aux membres e
aux consommateurs à des prix très abordables avec des marges bénéficiaires très faibles, elle
joucnt un rôle social régulateur très important chez les populations à faibles revenus 01
60
économiquement défavorisées.
Guidée par le souci de valoriser les produits locaux, elle évite le
intermédiaires et signe directement des protocoles d'accord avec les groupements de producteur
nationaux pour l'approvisionnement en denrées locales. 61
Cette stratégie va dans le sens des souhaits exprimés par les rédacteurs de la chan
mondiale des consommateurs dans le principe n022 qui dispose: « Les gouvernements devraien'
dans le contexte national, promouvoir la formulation et l'application par le secteur privé, e
coopération avec les organisations des consommateurs, des codes sur la promotion des ventes t
autres pratiques commerciales, afin de veiller à ce que le consommateur bénéficie d'un
protection adéquate. Le secteur privé, les organisations de consommateurs et les autres partie
intéressées pourraient également conclure des accords à l'amiable. Ces codes devraient recevo
toute la publicité voulue ».
Les termes «autres parties intéressées» introduits dans les dispositions du pflnclp
indiquent clairement la volonté des rédacteurs de la charte de ne pas laisser le monopole de 1
protection du consommateur aux seules associations légalement constituées et déclarées à cc
effet, mais de l'étendre aussi aux groupements susceptibles de jouer un rôle dans ce domaine. C
62
qui est notamment le cas des groupements coopératifs et des ONG .
La coopérative des consommateurs créée par l'A.S.D.E.C. ne déroge pas à cette règle. ~
la régulation des effets économiques et sociaux de la dévaluation du FCFA a été à l'origine de ~
création, elle concilie cependant avec succès des activités destinées à éduquer le consommateur t
à l'orienter davantage vers la consommation des produits locaux plus accessibles à son budge
L'amélioration de la qualité nutritionnelle des mets demeure aussi l'une de ses préoccupatiol
essentielles.61 Parallèlement, elle mène des actions auprès de ses membres pour la sauvegarde (
l'environnement en vantant notamment les mérites des fourneaux améliorés nécessaire pour ur
(,(J Ibid.
61 Ibid.
62 cr inrra « §II- Les O.N.G. au service de la cause consumériste»
63 « Consommation-Développement» n° 12 précité, p. 4.

571
économie d'énergie et une meilleure protection de l'environnement,64 Toutes ces activités
orientées vers l'amélioration des conditions d'existence du consommateur répondent à la logique
coopérative entendue dans le sens originel du terme.
En effet, la première coopérative de consommation fut fondée en 1844 dans un faubourg
industriel de Manchester (Angleterre) entre une trentaine d'ouvriers tisserands. Celle-ci devait
6s
fournir un exemple au monde entier.
Les Pionniers de cette entreprise, encore appelés
« équitables pionniers de la Rochdale », ouvrirent le premier magasin coopératif de type moderne
et posèrent les principes toujours admis aujourd'hui comme fondement de toute organisation
,
.
d
.
66
cooperative e consommation.
En France, la Fédération Nationale des Coopératives de Consommation (EN.C.C.) fut
créée en 1912 à Tours. Considérée comme représentative du mouvement coopératif français, elle
assure la représentation et la défense, au plan national, des familles associées au sein des sociétés
67
coopératives de consommation.
L'objet de la EN.C.C est « la substitution au régime compétitif
et capitaliste actuel, d'un régime où la production sera organisée en vue de la collectivité des
consommateurs et non en vue du profit» (article 2 des statuts de la F.N.C.C.).
Mais quel que soit son objet, un constat général se dégage de nos jours pour ce qui
concerne le mouvement coopératif. Celui-ci souffre d'un "affaiblissement idéologique,,68. Cette
situation de fait lui vaut certaines critiques venant de tout bord, surtout des groupements
représentatifs des consommateurs. Pour ne citer que l'exemple de la EN .c.c. en France, on
constate que son statut de représentant des consommateurs lui est contesté. L'ouverture de ses
magasins à tous les consommateurs, les méthodes de vente ou de distribution mises en oeuvre, le
puissant ensemble industriel et commercial qu'elle constitue aujourd'hui, fait qu'elle s'apparente
64 Ibid.
65 CAS et FERRIER op. cil., p. 113; J. DOYERE: Le combat des consommateurs, éd. CERF 1975, p. 160 et suiv.
66 DOYERE : op. cil., p. 160 et sui\\'. Le 28 décernbre 1844, à Rochdale, une des plus grises cités industrielles du
Lancashire en Angleterre, vingt-huit tisserands rassemblèrent dans une arrière-chambre des marchandises: de
l"
l'huile, des lentilles; des pois secs, des bougies ... C'était le soir après le travail, il l~lisait froid, et personne n'osait
enlever les volets et commencer la vente. Puis l'un d'eux se décida et l'ouverture de celle boutique d'un nouveau
genre mit la ville en rumeur. C'était les 1"'" jalons qui devaient servir d'exemple au monde entier.
67 DOYERE : op. cil., p. 160 et suiv
6H Ibid. ; CAS et FERRIER: op. cit, na 114 ; J.-L. FAUGlER : Les groupements de consommateurs en France,
thèse, Montpelli~r 1967.

572
aux grands groupes capitalistes.69 Par sa puissance économique, le mouvement coopératif recè
une ambiguïté de plus en plus évidente.
Du côté des consommateurs, on dénonce un système qui se situe "économiquement, d
deux côtés de la barrière: production et consommation" et on arrive parfois à s'interroger sur
réalité de l'appartenance du secteur coopératif au mouvement de défense des consommateurs
Du côté des groupements de commerçants, on reproche aux coopératives d'entreprises f
constituer un secteur "para-commercial" qui leur fait une concurrence, selon eux, déloyale. 71
Tous ces jugements, valables en Occident et dans le reste des pays où la puissance d
coopératives est évidente et observable sur le terrain, n'en sont pas moins pertinents pour 1
coopératives africaines. Il s'agit des comportements au travers desquels celles-ci se doivent de :
pas tomber si elles veulent servir la cause des consommateurs, être leurs représentants légal
auprès des pouvoirs publics et du monde économique.
Dans cette perspective, les conclusions d'accords avec le secteur privé prônées
souhaitées par le principe Nb 22 de la charte des Nations Unies, en association avec 1·
organisations de consommateurs, sont autant de moyens pratiques qui peuvent dissiper to
malentendu dans le partage des rôles entre les organisations de consommateurs d'un côté et h
commerçants professionnels de l'autre. L'exemple de la coopérative de consommation créée p
l'ASDEC est à ce titre révélateur de l'état de collaboration qui peut exister entre une organisatic
de consommateurs et les commerçants chargés de son approvisionnement en produits (
première nécessité.
L'obligation d'associer le mouvement coopératif à la lutte pour la défense des droits dl
consommateurs répond aussi à une certaine logique ou réalité; elle s'explique par le fait que
mouvement coopératif est le plus ancien mouvement des consommateurs, de dimensic
internationale des instances où s'élabore le droit de la consommation. Dans certains pays,
constitue souvent le seul système collectif de défense des consommateurs. C'est notamment le C,
69 DOYERE: op. ciL, p. 167 et suiv. ; CAS cl FERRIER: op. cil., n° 114.
70
L'Union Féd~ral~. des. Consommaleurs (U.F.c.) en France contesle notamment la représentativité
~ouvemcnt coopcratd : vOir en cc sens, CAS el FERRIER: op. ciL, n° 114' DOYERE .
'1
159
.
CAS cL FERRIER: op. cil., n° 114.
' . Op. CI., p.
el SUIV.

573
au Japon et en Suède. 72 L'exclure entièrement de la mouvance représentatrice des consommateurs
serait synonyme non seulement d'injustice, mais aussi de privation d'un atout considérable pour
. des pays qui
font
leurs premières expériences dans
le domaine de
la protection des
consommateurs.
Dans les pays africains où
l'éclosion des
associations de défense des
consommateurs commence à peine, les coopératives de consommation peuvent être une source
d'expérience enrichissante et servir de point de repère sérieux aux jeunes organisations engagées
dans la lutte pour l'amélioration de la situation du consommateur dans son ensemble. Cet objectif
n'en est pas moins celui que s'assignent les ONG qui sillonnent actuellement tous les pays du
Tiers-Monde.
§II - Les Organisations Non Gouvernementales (O.N.G.) au
service de la cause consumériste.
Qu'est-ce qu'une O.N.G. ? La notion en elle-même n'est pas facile à cerner. Elle est
ambiguë et difficile à enfermer dans une définition singulière.73 Les critères de défmition retenus
par l'O.C.D.E., les Nations Unies, l'Union des Associations Internationales, l'Institut du Droit
International ou le Conseil de l'Europe sont loin d'être identiques. 74
Par ailleurs, dans la tentative de défmition avancée, trois faisceaux d'indices ont été pris en
considération pour caractériser une O.N.G. :
- un rapport spécifique avec l'argent: dans ce postulat de base, les valeurs de gratuité, de
désintéressement et de bénévolat sont fortement revendiquées. Les O.N.G. sont des associations
sans but lucratif (A.S.B.L.) comme on le dit en Belgique ou dans certaines de ses anciennes
colonies, notamment le Zaïre, le Rwanda, ou le Burundi. En Grande Bretagne, elles sont régies
72 Au Japon, le mouvement coopératif est extrêmement puissant: à la base, le fonctionnement est assuré par des
cellules de quelques familles entretenant entre elles des rapports étroits. Ces cellules militantes élisent parmi leurs
membres des délégués à des groupements qui constituent entre eux des centres d'achat et lancent de multiples
initiatives dans le domaine social et éducatif. Les groupements régionaux élisent des représentants à la « Coop-
Japon », organisme représentatif des consommateurs à l'échelon national. Cf en ce sens, CAS et FERRIER: op.
cil., n° 114 (note n° 5). Pour ce qui concerne la Suède, le mouvement coopératif y joue également un rôle très
important dans la délense des intérêts des consommateurs. Plus d'un ménage sur trois est aflilié à une, voire
plusieurs coopératives qui, dans différents domaines, ont pour but de détendre les intérêts de leurs membres. Voir
en ce sens, M. T. CHEVALIER: « Protection du consommateur en Suède », in « Consommateurs-Actualité », n°
334,28 mai 1982, p. 3 et suiv.
7J J.-D. MULLER: Les a.N.G. ambiguës, éd. L'Harmattan 1989.

574
par la Charity Law. Aux Etats-Unis, on parle de Private Yoluntary Organisation (P.Y.O.). L(
refus du lucratif sépare donc les O.N.G. des entreprises, surtout des entreprises opérant :
l'échelle internationale. 75
- un rapport spécifique à l'espace Nord-Sud, l'espace international se trouvant en quelqu
sorte réduit à sa dimension Nord-Sud. Ce champ faisant l'objet de représentations spécij~ques e~
aussi le théâtre des transactions et flux divers. Les travaux d'un séminaire organisé en 1987
Paris ont notamment consisté à élaborer une typologie des O.N.G. à partir de leur représentatio
de l'espace Nord-Sud.
- un rapport particulier aux Etats, aux gouvernements, aux partis et, de façon plI
générale, à la politique. L'universalisme inhérent à l'idéologie humanitaire ("Rien de qui e:
humain ne peut être étranger") bannit en principe toute espèce de parti pris. Les O.N .G. SOI
donc des organisations non gouvernementales. Tel est le nom qu'on leur donne et qu'ellé
"
d
76
reven Iquent.
Des trois indices cités, l'apolitisme semble donc être le plus déterminant. Mais quelle qL
soit leur nature, leur objet, une chose reste certaine aujourd'hui : les O.N.G. jouent un l'Ô
indéniable et considérable dans les rapports Nord-Sud, en particulier dans la coopération pour
développement. 77 Dans les pays du Sud, leur nombre n'a cessé d'augmenter. 78 Le succi
rencontré dans les différents domaines font qu'elles sont devenues des partenaires incontournabh
dans les relations Nord-Sud. 79
Petites ou grandes,
anciennes ou
nouvelles,
nationales (Iocales)o
ou étrangère
confessionnelles ou laïques, indépendantes ou rattachées à un syndicat, une municipalité, un pal
74 Voir par exemple: Union des Associations Internationales, Yearbook of International Organisation, 1983/19
; K. G. Saur, Munich (notamment "introduction de l'édition 1983). Voir aussi O.C.D.E. Répertoire des O.N.
actives dans le domaine de la coopération pour le développement, 2 vol. Paris 1981 : cités par Sophie BESSI:
« Les Associations d'Aide au Tiers-Monde à la croisée des chemins », Dossier in Problèmes Politiques et Social
n° 615,15 septembre 1989, p. 6 (note n° 3).
75 Voir Charles CONDAMINES: « Fric, business et bons sentiments », dossier, n° spécial publié par « Croissal
des jeunes nations ", Paris, mai 1987 ; « Le grand bazar de la charité », Le Monde Diplomatique, Paris, sept. 1S
: cités par BESSIS: dossier précité, p. 6 (note 4).
76 BESSIS: dossier précité, p. 6 ; V. HORDAN : Les métiers de la solidarité internationale, éd. L'Harma'
1993, p. 29.
."
77 En 19X5, les O.N.G. des divers pays de l'O.C.D.E. ont transféré vers les pays en développement plus de qm
milliards de dollars, soit plus de 10% de l'aide publique au développement. Voir en cc sens, BESSIS, dos~
précité, p. 5.
78 Ibid., p. 5 et suiv.

575
politique ou une église; avec ou sans volontaires, de courte ou longue durée, spécialisées ou non
sur un village, un pays ou un continent tout entier (du Sud), concentrant ou non leurs efforts sur
un domaine particulier (santé, agriculture, environnement,
ülbrication de prothèses pour
handicapés, etc.), les O.N.G. sont à même d'aider les consommateurs dans leurs difticultés
quotidiennes. L'exemple de E.N.D.A. Tiers-Monde, une O.N.G. pour l'Afrique de l'Ouest basée à
Ro
Dakar (Sénégal), est à ce titre révélateur .
Ces O.N.G. n'ont-elles pas pour but d'oeuvrer avec les pays hôtes dans le sens du
développement
? Or,
le
développement
vise
avant
tout
le
bien-être du
citoyen,
son
épanouissement. Et la politique relative à la protection du consommateur n'en va pas moins dans
ce sens là ; bien au contraire, l'amélioration des conditions de vie du consommateur reste l'une de
ses priorités.
Il est donc du devoir des pouvoirs publics de faire bénéficier aux consommateurs, à la
population tout entière les atouts considérables dont peut disposer une O.N.G. pour la résolution
de certains de leurs problèmes sociaux, car la mission d'une O.N.G. tourne toujours autour de
.
.
l'aide des personnes les plus défavorisées par les conditions économiques ou de la protection de
l'environnement. La réalisation de ce devoir passe par la reconnaissance à l'ONG un rôle
significatif dans la défense des consommateurs. Leur reconnaître ce rôle serait consacrer le
"mouvement consommateur" dans sa plénitude.
Mais une chose est d'être consacré, une autre est de pouvoir remplir convenablement le
rôle pour lequel la reconnaissance a été sollicitée et la consécration affirmée. Ceci nous conduit
directement à nous interroger sur le but de cette consécration, surtout du rôle proprement dit des
groupements concernés dans la défense des droits des consommateurs.
79 Ibid.
MU Infra, voir également le « Dossier documentaire sur la consommation» réalisé par E.N.D.A. Tiers-Monde avec
l'aide des principales associations de consommateurs des pays concernés. On y trouve d'importants et précieux
conseils adressés aux ménages pour une meilleure consommation, un meilleur usage de leurs ressources aussi bien
lïnancières, matéricllcs.qu' énergétiques.

576
SECTION II :
LA
FINALITE
DE
LA
CONSECRATION
DU
MOUVEMEN
CONSOMMATEUR.
La consécration est un acte louable, mais elle n'est rien d'autre qu'un acte (
conscience des pouvoirs publics dont le but est de reconnaître aux divers groupements
réclamant de la cause consumériste la capacité et la légitimité dans la défense des droits d,
consonunateurs. L'important n'est pas d'être consacré ou reconnu dans ses droits conférant l
rôle déterminé au bénéficiaire, mais de pouvoir faire usage de cette reconnaissance (
consécration à des fins utiles.
La consécration du mouvement consommateur ne pourra être bénéfique, profitable "
consommateur que si elle sert sa cause. Ceci suscite une interrogation sur le rôle exact, concr·
des divers groupements impliqués dans la défense de ses intérêts.
Sile jeu des rôles peut sembler évident en raison de l'objet justifiant la création de chaql
groupement, il en va tout de même autrement pour le partage de ces rôles dès lors que k
groupements concernés sont guidés par un même but.
S'agissant de la défense des droits des consommateurs, le rôle de chaque groupemeJ
variera en intensité selon qu'il soit spécialement créé à cette fin, et c'est le cas des organisatior
de consommateurs (Sous-Section 1), ou selon qu'il soit un groupement parallèle oeuvrant c
concert avec les associations pour la défense de la noble cause : on vise là les groupemen
intéressés que sont les mouvements parallèles aux organisations de consommateurs (Sou:
Section II).

577
Sous-Section 1 : La défense de la cause consumériste par les
associations de consommateurs.
L'utilité d'une association de consommateurs par rapport à la masse dont elle est censée
défendre les droits est fonction de sa capacité à jouer pleinement son rôle en faisant usage des
voies et moyens que lui offre le système juridique en place. Conformément à la logique légaliste,
on conçoit que toute association de consommateurs, dans l'accomplissement de sa mission
sociale, n'a pas que des droits; elle a aussi des devoirs auxquels elle doit se soumettre pour les
besoins de sa crédibilité.
Si les droits que lui reconnaît le système juridique national peuvent être interprétés
comme une autorisation administrative lui permettant de remplir convenablement son rôle au sein
de la société (§I), les devoirs, eux, peuvent être vus comme des garde-fous juridiques destinés à
l'empêcher d'abuser ou d'outrepasser les pouvoirs que lui confere la loi. Ce qui confme à une
certaine obligation d'autodiscipline de l'organisation dans la réalisation de sa mission (§II). Mais
au-delà du cadre strictement national réservé aux organisations locales, une place de choix doit
être faite à l'Organisation Internationale des Consommateurs (O.1.c.)81 qui joue un rôle important
dans la promotion des droits des consommateurs dans les différents pays du Tiers-Monde (§III).
§I - Le rôle des associations locales dans la défense des
droits du consommateur.
Les consommateurs des P.V.D souffrent de nombreuses carences, lesquelles constituent
leurs points faibles dans leurs rapports avec les professionnels. Parmi celles-ci, l'information et
l'éducation occupent les tout premiers plans des nécessités à combler pour l'équilibre des relations
contractuelles. En nombre de principes adoptés par les rédacteurs de la charte des Nations Unies,
elles arrivent en deuxième position juste derrière les principes relatifs à la "Promotion et
NI Ex.. [OCU : International Organisation of Consumers Union.

578
Protection des intérêts économiques des consommateurs,,~2. Ceci témoigne de l'importanc
accordée ~l cc domaine dans l'énumération des problèmes rencontrés par les consommateurs dal
les pays les moins avancés.
En invitant les gouvernements des pays intéressés à « mettre au point des programm
généraux d'éducation et d'information du consommateur ou en encourager la mise au poir
(tout) en ayant présent à l'esprit les traditions culturelles de la population intéressée... » (princil
N° 31), les rédacteurs des principes des Nations Unies soulignaient là un point important sa
lequel aucun consommateur ne saurait faire un choix libre et lucide. Si la conception d
programmes, selon le principe N° 31, relève du domaine des pouvoirs publics, il n'en demeu
pas moins que leur exécution effective ne sera possible sans le concours des associations (
consommateurs. En tant que représentants légaux, les organisations des consommateurs ont Ui
double mission:
- éclairer le consommateur dans sa fonction de consommation par le biais de l'informatic
et l'éducation (A) ;
- s'impliquer davantage dans les réalités socio-économiques en vue d'une plus granc
efficacité dans la défense des intérêts des consommateurs (8).
A - L'éclairage du consommateur par le biais de l'information
et de l'éducation.
Il faut partir du fait selon lequel l'information et l'éducation sont des éléments essentiels
incontournables pour le consommateur peu avisé et sans lesquels il ne peut accéder au rang (
consommateur lucide et averti. Représentants légitimes, il pèse sur les organisations (
consommateurs africaines un devoir d'éducation et d'information vis-à-vis de, leur base (c
devoir que celles-ci s'évertuent avec application à accomplir avec les moyens du bord (b).
82 Le domaine relaitir aux « Programmes d'éducation et d'information» comporte 6 principes contre Il pour cc
concernant la « Promotion et (la) Protection des intérêts économiques des consommateurs ». Voir en ce sens, «
Charte Mondiale des Consommateurs» précitée.

579
al Le devoir d'information et d'éducation du consommateur
à la charge des organisations africaines.
La majorité de la population africaine est essentiellement rurale à l'intérieur de laquelle on
recense un grand nombre d'analphabètes, Toute cette majorité de population est donc profane
dans la quasi-totalité des produits industriels qui leur sont vendus, En invitant les divers
gouvernements des pays du Tiers-Monde, donc
africains,
à concevoir des programmer
d'information et d'éducation susceptibles d'élever le profane au rang du « consommateur averti,
capable de choisir en connaissance de cause entre les biens et services qui lui sont proposés et
conscient de ces droits et de ses responsabilités» (principe N° 31), les rédacteurs des principes
directeurs des Nations Unies pour la protection du consommateur soulignent l'importance de
l'information dont le but est d'éclairer le consentement du consommateur que la complexité des
produits rend de plus en plus ignorant. Ce qui le rend encore plus fragile devant les artifices ou
manoeuvres orchestrées par les agences publicitaires pour rendre le produit plus attrayant.
Mais en insistant sur la nécessité de tenir compte, dans l'élaboration de ces programmes
d'information et d'éducation, «en particulier des besoins des consommateurs défavorisés tant
dans les zones rurales que dans les zones urbaines, y compris des consommateurs à faible revenu
et ceux dont le niveau d'alphabétisation est bas ou nul» (principe N°31 des Nations Unies), les
rédacteurs ont touché là un point sensible et propre au continent africain dont la grande majorité
de la population est concernée par cette situation.
Si les dispositions du principe 31 s'adressent directement aux gouvernements pour ce qui
concerne l'élaboration des programmes relatifs à l'information et l'éducation du consommateur,
l'exécution de cette mission relève du devoir des organisations locales préoccupées par
l'amélioration du sort du consommateur. En quoi consiste ce devoir?
Le devoir des organisations en matière d'information et d'éducation du consommateur se
résume en une ou plusieurs campagnes d'information ou d'explication destinées à mieux faire
connaître les produits et services qui lui sont offerts sur les marchés et tous les artifices
publicitaires ou promotionnels qui entourent ou accompagnent leur vente. L'éducation du
consommateur profane ou analphabète à la consommation moderne est à ce prix, Toutes les
organisations représentatives sont unanimes sur ce point et reconnaissent voiontiers que ce

580
domaine constitue la tâche la plus urgente à accomplir parles associations de consommateurs. f
Sur quoi
repose cette reconnaissance unanime de l'importance de l'information dans 1
consommation? L'explication est toute simple.
« L'information est un élément essentiel sans lequel les consommateurs ne peuvel
exercer [CUl' pouvoir de décision et effectuer un choix éclairé»H4 ; ce qui rentre dans la ligr
directrice prônée par le principe N° 31 de la charte des Nations Unies pour la protection c
consommateur. En eftet, si l'importance de l'information dans la consommation est perçL
comme telle, le devoir des associations représentatrices dans sa diffusion est une exigenl
capitale. Dans une certaine mesure, elles se doivent « de susciter toutes actions orientées dans
sens de l'information des consommateurs, de diffuser toutes informations susceptibles d'éclair
les acheteurs sur la qualité et l'ensemble de l'exercice de leur fonction économique »85 (
« d'associer tous les consommateurs à leur propre défense, en aidant à leur information »86.
Si l'information des associations de consommateurs est indispensable, c'est parce qu'e:
constitue un «contre-pouvoir de la publicité» dont le mess~ge est rarement une sour,
d'information objective. 87 Mais aussi fournie que puisse paraître une information, elle n'est ut
au destinataire que dès lors que celui-ci la comprend. Se pose alors le problème relatif al
moyens d'information ainsi qu'aux méthodes employées pour sa diffusion dans la masse d
consommateurs.
b) Les moyens de communication ou de diffusion de
J'information éducative des associations locales de
consommateurs.
Divers moyens de communication sont utilisés par les associations locales à des f
informatives et éducatives en direction des consommateurs. Certaines associations utilisent c
revues ou publications spécialisées pour diffuser les informations qu'elles estiment nécessai:
pour les populations. C'est le cas notamment de la "Consumer Education and Protection Cour
S.\\ N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 227.
•.
S~ FOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op. cil., p. U4•
S5 Slatuts de "U.F.e. (article 2), crN'GUYEN-THANH: thèse précitée, p. 243 ct suiv.
Sf> Statuts du Laboratoire Coopératif d'analyses ct de recherches, cf N'GUYEN-THANH : thèse précitée. p. 233

581
of Nigeria (CE.P.CO.N.)" qui, après un arrêt de parution de sept ans, a relancé, en avril 1993,
son Bulletin Trimestriel d'Information "The Consumer".88 D'après le président de l'association, "le
bulletin aura pour vocation de susciter l'émergence d'une conscience critique des consommateurs
nigérians, d'éduquer le public sur les qualités des aliments, de l'eau, des habits, des équipements
ménagers, les services auxquels ils ont recours : téléphone, transport, électricité, etc ... ,,89. Le
bulletin
aura
aussI
pour
mission
d'informer
les
consommateurs
sur
leurs
devoirs
et
90
responsabilités.
La démarche fut saluée par le Directeur de l'Institut de Normalisation du
Nigéria qui, à l'occasion de la cérémonie officielle de lancement du journal, "a fait part de la
volonté du gouvernement d'appuyer tout groupe prêt à travailler sincèrement pour la défense des
consommateurs,,91. Ceci augure de la volonté des pouvoirs publics de collaborer avec les
organisations représentatives en vue de l'amélioration des conditions de vie du consommateur. Le
premier numéro du bulletin "The Consumer" a fait état entre autres des résultats du test que
J'organisation a réalisé sur les papiers hygiéniques vendus au Nigéria. 92 Ce qui est en soi une
avancée considérable dans le traitement de l'information fournie aux consommateurs. La même
méthode d'information est utilisée par l'association des consommateurs du Mali (AS.CO.MA.)
qui gère un organe bimensuel d'information "Le Consommateur,,93 dont le but est de renseigner
au maximum les populations sur les produits et services qui leur sont présentés sur les marchés
locaux.
Mais aussi réaliste que cela puisse paraître, cette méthode recèle en elle des limites parce
qu'elle n'aurait d'impact que sur les consommateurs avisés, sachant lire et écrire et de surcroît
abonnés ou intéressés par la lecture de tels magazines ou journaux ; d'où la nécessité de
rechercher d'autres moyens plus adaptés au profil du consommateur africain.
La méthode la plus simple et la moins onéreuse possible, et qui de loin toucherait les
consommateurs défavorisés, consisterait à organiser des réunions ou séminaires de sensibilisation.
Celles-ci comportent en elles-mêmes une dose d'information et d'éducation des consommateurs et
pourraient les accoutumer à certains réflexes, former leur jugement, leur discernement et faire
87 N'GUYEN-THANH : thèse précitée précitée, p. 22X ; B1HL : «Le droit d'expression des consommateurs »,
G.r. 1978. ICI Semestre, p. IX6.
\\
yi
88« Consommation-Développemenl » n° 9 d'avril 1993 précité, p. 6.
89 Ibid.
90 Ibid.
91 Ibid.
92« Consommation-Développement », bull d'info IGCU-ENDA précité, n° 10, novemebre 1993, p. 4.

582
ainsi d'eux des acheteurs conscients et responsables.9~ La nuse en oeuvre de cette fonn
d'inl<Jrl11ation ct d'éducation exige des associ;ltions locales un effort d'adaptation pOLir un
meilleure connaissance de leur rôle par le public, en installant, par exemple, des permanence
clans les quartiers urbains défavorisés et dans les coins les plus reculés du pays. endroits où le
besoins d'aide des associations sont des plus urgents. Tout cela devrait s'appuyer sur u
programme cI'actions bien définies et permettant d'orienter l'information éducative dans toutes le
clirections possibles, en utilisant diversement les méthodes les plus accessibles. Les moyer
moclernes cie diffusion de la pensée, des masse-médias telles que la presse écrite, la radio, !
télévision peuvent être un support idéal pour ce genre d'entreprise. Ils pourront donner pll
d'ampleur à l'information véhiculée?'
Cette démarche dans la fourniture de l'information n'a pas été ignorée par les associatior
locales représentatives. Certaines ont conçu leur programme d'information autour des campagm
d'éducation et de sensibilisation dans les quartiers urbains sur les problèmes de la consommatioJ
C'est le cas de l'Association pour la Défense de l'Environnement et des Consommateui
(A.D.E.C.) au Sénégal qui, dans la recherche de nouvelles approches pour l'éducation (
l'information du consommateur et le développement de la base de l'organisation, a, autour d'c
programme national de "YENDOU" (Journées de Causeries dans les Cellules) arrêté par
Bureau Exécutif National (RE.N.), sensibilisé les populations sur le thème intitulé "Qu'est-ce ql
le mouvement consommateur"96, ainsi que sur la nécessité d'une organisation de consommateu
97
dans la défense de leurs droits et de leur environnement.
A travers ces campagnes de proximit,
l'organisation cherche "à s'adapter aux réalités socioculturelles des populations,,98. C'est aussi
99
moyen approprié et de loin le plus efficace pour approcher les populations.
Les campagnes (
l'ADEC s'inscrivent dans le cadre des recommandations de l'Atelier de formation des responsable
de cellules, organisé les 19-20 et 21 novembre 1992 avec l'appui du programme JOCU -END
1oo
Tiers-Monde.
<13 Ibid .. p. 3.
94 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 22H.
95 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 22H ; BIHL : « Le droit d'expression des consommateurs », arJ"
précité. p. 1H6 ; Pangloss, nO 13 précité. p. H2.
\\.
')(, « Consommation-Dévcloppcmcnt » n° 10 précité, p. 5.
97 Ibid.
9X Ibid.
99 Ibid.
100 Ibid.

583
Au Zimbabwé, le programme d'information et d'éducation du Conseil des Consommateurs
du Zimbabwé (CCl.)est plus tourné vers la sensibilisation des consommateurs ruraux. Partant
du fait que les consommateurs au Zimbabwé, plus particulièrement ceux des zones rurales, sont
considérablement marginalisés et exploités dans leurs transactions quotidiennes, à cause de
J'ignorance de leurs droits et des voies de recours pour obtenir réparation, le CCl a entrepris
depuis septembre 1992 une série de campagnes destinées à sensibiliser ces consommateurs ruraux
sur leurs droits et devoirs 101 dans la consommation. Ponctuée par une série d'ateliers de
"formation des formateurs" sur les droits du consommateur dans les neuf provinces que compte
le pays, avec J'appui tinancier du programme OIC (ex. IOCU), J'activité sensibilisatrice du CCl
est orientée vers des objectifs bien définis, il savoir: « - mettre en place une structure de travail
viable et efticace avec les autorités gouvernementales locales, les groupements de femmes et les
O.N.G ; - analyser les problèmes des consommateurs défavorisés; - former les formateurs sur les
techniques d'éducation et de protection des consommateurs; - leur permettre de produire des
informations
sur
J'éducation
du
consommateur
; -
établir
des
groupes
de
travail
des
consommateurs et des groupes de pression dans tout le pays »102. L'efficacité et le dynamisme du
mouvement lui ont permis d'organiser cinq ateliers en deux mois (septembre et octobre 1992) 103 ;
ce qui laisse présager d'une suite heureuse pour les consommateurs ruraux.
Outre les campagnes de proximité, les associations locales utilisent aussi les voies des
ondes nationales pour promouvoir l'information éducative des consommateurs. C'est le cas
notamment de J'Association pour la Protection du Consommateur et de J'Environnement au Bénin
(A.P.CE.B) qui, en accord avec le Ministère de la Communication, a lancé en janvier 1993, à la
101 « Consommation-Développement» na 9, avril 1993, p. 6.
\\02 Ibid.
101 Ibid. L'éducation à la consommation des populations en zones rurales a aussi été le thème du séminaire de
sensibilisation qu'ont organisé, avec l'appui de l'OIC, les associations des consommateurs de l'Ile Maurice
MAPBIN/CHAN et ACIM du 24 au 27 août 1993 à Mont Choisy. Ibid, na 10, nov. 1993, p. 2. Partant du constat
selon lequel "'es populations des milieux ruraux vivent dans des conditions de subsistance (di tlici les), loin des
centres de décisions socio-politiques et économiques et forment cependant le plus gros segment de populations
marginalisées de la communauté", les associations locales participantes au séminaire se sont engagées à
"poursuivre ces actions d'éducation. de formation et d'information visant la satisfaction de besoins essentiels de ces
rmpulations : accès aux biens et services essentiels, représentation, etc ... " ibid, na 8, nov. 1992, p. 2. Cet
~
engagement rut précédé par l'acceptation par le ministère de l'éducation et de la science du "projet d'éducation des
\\
consommateurs" élaboré par l'association MAPBIN/CHAN pour les jeunes consommateurs. Ce projet pilote, dont
la concrétisation
rut autorisée après plusieurs années de débats entre l'association et les
représentants
gouvernementaux. vise à conscientiser les élèves des établissements secondaires sur leurs droits, responsabilités et
rôles en tant que consommateurs. Ibid. Initié en 1992, le projet est destiné à être étendu à tous les établissements
scolaires de l'Ile Maurice si les résultats s'avéraient satisraisants. ce qui est en soi une bonne méthode pour la
formation d'un consommateur avisé et libre dans ses jugements.

584
radio,
Lin
programme d'éducation et d'information des consommateurs.
Elle échange s(
émissions avec celles réalisées par "Le consommateur averti", programme produit par la Rad
Télévision sénégalaise et des journalistes sénégalais. ,(I~ Comme son homologue mauricienne,
MAPBIN/CHAN, l'association a aussi reçu du Ministère de l'Education Nationale J'autorisatic
pour initier un programme scolaire destiné à éduquer ct à informer les jeunes consommateu
1
l
' 1
'
bl'
d'
d
10'i
(ans es eco es et eta
Issements secon ,lIrCS
u pays. .
Toutes ces initiatives conjointes entre pouvoirs publics, l'arC et les associations (
consommateurs destinées à éduquer et à informer convenablement les consommateurs locaux,
plus
particulièrement
les
consommateurs
ruraux,
rentrent
dans
la
ligne
directrice
d
recommandations proposées par la Ligue des Consommateurs du Burkina-Faso (LCB)
adoptées par les participants de l'Atelier régional de Dakar (Sénégal) de juillet 1992 106 . Dans s
propositions, la LCB encourageait les associations:
- «à développer des axes de coopération ou de collaboration avec les organisatio
engagées dans la promotion et la défense des intérêts des consommateurs, notamment 1
structures et agences gouvernementales, les organisations syndicales, les associations de femm
et les organisations rurales;
- « à s'employer à intégrer dans leurs stratégies la défense et la promotion des intérêts d
consommateurs ruraux et urbains, et particulièrement les plus défavorisés, afin de trouv
ensemble des solutions idoines à leurs préoccupations ».107
C'est dans cette vision des choses que la Kenyan Consumer Organization (K.CO)
entamé en 1993 des sessions de formation en consommation des femmes rurales, milieux où
méconnaissance des droits des consommateurs se pose avec le plus d'acuité. L'association y
démarré l'éducation des consommateurs en créant des centres de sensibilisation de prise en char.
des problèmes en zones rurales. I08 En Zambie, le Comité des droits de la Femme a suivi la mêr
démarche. Outre son objectif principal qui consiste à protéger les droits de la femme dans 1
problèmes relatifs à l' héritage et à la vie conjugale, le comité mène aussi des actions dans
10-l «Consornmalion-Développemem» n° 8, nov. [992, P. 3 ; n° 9 avril 1993, p. 4.
105 « Consommalion-Développemenl » n° 8 précilé, p. 3 ; n° 9, p. 4.
106 Ibid. N° 8, nov. 1992, p. 7.
107 Ibid.
IOS« Consommalion-Développement »., n° 9, avril 1993, p. 5.

585
domaine de la consommation en vue de conscientiser des consommateurs dont il juge le niveau
très bas.I()~ II s'occupe notamment des problèmes alimentaires tels que la conformité des mentions
inscrites sur l'emballage du rroduit avec son contenu en quantité et en qualité, la défectuosité des
emballages, etc. IIO Une brochure a même été éditée à cet effet en 1992, à l'intérieur de laquelle
furent cataloguées toutes les lois relatives à la vie au quotidien avec en prime un chapitre
consacré aux droits des consommateurs. III
Toutes ces démarches des associations locales en vue de l'amélioration des conditions de
vie des consommateurs sont autant d'actes significatifs qui méritent encouragements eu égard au
déficit de moyens matériels et financiers auxquels elles sont confrontées. Ces exemples peuvent
être dénués de fondement pour un observateur peu averti des problèmes du consommateur
africain. Ils témoignent cependant non seulement de leur existenc'e, mais aussi de l'important rôle
social que les organisations locales sont à même de jouer auprès des populations pour la
protection de leurs droits essentiels dans leurs acti vités consuméristes de tous les jours.
Mais aussi valeureux qu'ils puissent paraître, ces actes à eux seuls ne sauraient suffire
pour permettre au consommateur de s'épanouir pleinement. En plus de ces actes louables,
l'épanouissement du consommateur exige de la part des associations locales une plus grande
présence sur le terrain par le moyen d'une implication sérieuse.
B - L'implication des associations locales dans la défense
des intérêts des consommateurs.
L'implication est un acte de détermination réalisé dans le but de finaliser un objectif bien
défini. Pour ce qui concerne les associations de consommateurs dont le rôle se résume à la
défense des intérêts des personnes qu'elles représentent, l'implication prend dans ces conditions
le sens d'un engagement total aux côtés de la masse pour la défense de la cause commune. Dans
l'intérêt du consommateur, elle suppose une certaine
liberté d'action de l'association,
représentante officielle de l'ensemble des consommateurs (a). Elle exige aussi d'elle la
manifestation d'actes concrets sur le terrain (b). Elle justifie parfois certaines décisions fortes ou
IO'J Ibid., n° 8, nov. 1992, p. 3.
110 Ibid.
III Ibid.

586
énergiques prises dans le but cie protéger les intérêts des consommateurs
c'est le cas le ph
souvent lorsqu'une association appelle au boycottage d'un ou de plusieurs produits d'ul
entreprise (c).
a) La liberté de manoeuvre comme condition essentielle
pour une bonne défense des intérêts des consommateurs.
La liberté d'action est une exigence essentielle pour la conduite normale des opératio
des
associations
de
consommateurs.
Sa
manifestation
exige
deux
droits
fondamental
inaliénables pour les organisations représentatives des consommateurs: le droit à la critique d
produits et services (1) et le droit à la comparaison de leur qualité (2).
1 - La liberté de critique des produits et services.
L'information des consommateurs est l'une des conditions essentielles de leur protectio
Idéalement, cette protection vis-à-vis de la qualité des biens et services exige que les acheteu
disposent de tous les moyens techniques nécessaires que donne la science moderne pour accéd
directement au contrôle et à la connaissance de ces produits et services. Ceci n'est pas cho
envisageable pour les consommateurs pris individuellement, et qui, de surcroît, sont analphabèt·
dans leur majorité si l'on prend l'exemple des
pays du Tiers-Monde.
Même pour l
consommateur avisé, le résultat interviendrait au
bout d'une longue dépense de temr
d'attention et d'argent. Encore faut-il que ce résultat soit à la mesure de ses espérances, car qu
qu'il fasse, des éléments substantiels de choix lui échapperont, n'ayant pas en sa possession 1·
moyens d'investigation nécessaires pour les discerner. 112
Contrairement au consommateur individuel, les associations, en tant que représentar
officiels, peuvent jouer pleinement ce rôle en exerçant un contrôle direct sur la qualité des bier
préalable à toute information de masse. L'intérêt d'un tel acte est c~pital. La publ~
~
112 N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 243.

587
comlHerciale ne diffuse que les bons côtés d'un produit et passe sous silence ses défauts. Par le
même temps, eJJe atteint tous les consommateurs ou presque. Il est donc légitime que les
représentants des destinataires du message publicitaire vérifient le bien fondé des allégations et
fassent connaître la contrevérité aux consommateurs. C'est le but de l'information-critique,
laquelle consiste à citer ouvertement les marques des produits de mauvaise qualité. Elle peut aller
au-delà et signaler effÏcacement les hausses abusives de prix et dénoncer les abus, voire les
scandales dans le domaine de la consommation.I!.1 L'exercice de ce droit exige une dose
d'impartialité avec pour seul souci la défense des intérêts des consommateurs et non le discrédit
de tel rabricant ou distributeur au profit de tel autre.
Sur le continent africain, on enregistre quelques actions posées dans ce sens par certaines
associations de consommateurs. Elles sont rares, symboliques, mais hautement significatives pour
les débutants en la matière, car eUes dénotent ou témoignent de la volonté des associations
locales de lutter pour un devenir meilleur du consommateur. C'est le cas notamment de
l'Association des Consommateurs du Mali (AS.CO.MA.) qui oeuvre constamment pour la
promotion de la qualité des produits et services au Mali. Se basant sur le constat selon lequel les
marchés du Mali, tout comme ceux des autres pays de la sous-région, sont devenus de véritables
dépotoirs des produits avariés et falsifiés, et que les consommateurs s'y approvisionnent à cause
de leur prix abordable et du fait de leur faible pouvoir d'achat, l'association a organisé en
décembre 1992, un séminaire aux fins de dénoncer toutes ces pratiques nuisibles que l'absence de
contrôle et d'intervention efficace des services techniques étatiques entretient chaque jour
davantage la pérennité. 114 Organisé avec l'appui du programme IOCU-ENDA et l'Institut
Sénégalais de Normalisation, les participants ont passé en revue tous les problèmes rencontrés
par les consommateurs maliens, tout comme leurs semblables des autres pays du continent, tels
que les problèmes relatifs à la supercherie des commerçants en Afrique: avec d'un côté, le
problème d'identification des produits due à l'absence d'indication de leurs éléments constitutifs,
de leur valeur nutritive, voire de leur prix; et de l'autre, le problème des emballages (embaUages
non adaptés, rouiUés ou non biodégradables) et des cas de falsification ou de modification des
dates de péremption ou des dates limites d'utilisation pour les produits périssables. lls
; )
110« Les cOllsommateurs Cl Icurs associations », in «Collsolllmateurs-Actualité », na 236, 14 mars 1980, p. 1.
II~
C
.
D'
1
a cc>
, . ,
S
«
Ollsommatloll- eve oppemCll1 » Il .., prectle, [J .•.
115 Idem, p. 6.

588
L'ampleur des problèmcs recensés amena les participants à prendre certaines disposition
non moins négligcables quanl à leur portée sécuritaire pour l'ensemble des consommateurs. Elle
consistent dans la saisinc du vendeur responsable ou auteur de l'infraction. L'information do
ensuite être portée à la connaissance de l'association des consommateurs. Celle-ci aura pOL
t,khe d'approcher les autorités compétentes, démarche à la suite de laquelle une campagn
d'information à grande échelle sera entreprise. 116
La procédure est ingénieuse, mais elle recèle certaines failles en ce sens qu'elle nou
paraît trop longue pour régler les cas urgents, lesquels nécessitent une réaction rapide dans le
délais raisonnables. Aussi, sa mise en pratique peut-elle s'avérer d'une utilité assez limitée pour 1
sécurité des consommateurs vis-à-vis des produits suspects. Mais elle a quand même le mérit
d'exister pour le plus grand bien des consommateurs maliens, car elle peut avoir un caractèr
dissuasif. Cependant pour offrir aux consommateurs une plus grande sûreté quant à la préventio
des risques inhérents à un éventuel usage du ou des produits incriminés, il serait louabl,
d'intégrer dans la procédure, les mesures relevant des cas d'urgence où la prise de décision
rapides pouvant ·limiter les dangers s'impose, notamment la saisie du ou des stocks restants de
marchandises suspectes jusqu'aux résultats finaux des laboratoires d'analyses.
D'importantes recommandations furent néanmoins votées à l'issue de ce séminaire,
savoir: « - la reconnaissance de l'AS.CO.MA. par l'Etat comme Association d'utilité publique;
la collaboration AS.CO.MA.-Services Techniques et Organismes Nationaux et Internationaux;
la mise en place d'une équipe pluridisciplinaire chargée d'inventorier, de relire les textes épar~
relatifs à la consommation en vue d'en faire un seul, la tenue des états généraux de l,
consommation; - l'appui institutionnel de l'Etat auprès des bailleurs de fonds et l'élaboration de~
.
1
1
.
d 1
1"
117
normes natIOn a es pour a promotion
e a qua Ite»
.
Représentante privilégiée des consommateurs auprès des organismes publics et étatiques
la même association a, suite à la dévaluation du franc CFA intervenue en janvier 1994, lancé ur
appel au gouvernement et aux opérateurs économiques pour limiter la hausse des prix, et al
besoin, "en formulant des propositions concrètes contenues dans un plan d'action pour atténue:,
les effets néfastes, améliorer la qualité des produits locaux, mieux protéger le consommateur \\
l.,
116 « ConsommalÎon-Dévcloppcmcnt » n° 9 précité. p. 6
117 « Consommation-Développcmcnt » n° 9, avril 1993, p. 6.

589
son pouvoir d'achat.ll~ Conjuguant ses efforts avec ceux des autres organisations sociales, tels
que les syndicats, ellc il amené les pouvoirs publics, en l'occurrence le gouvernement. ~l prendre
une série de mesures en vue de limiter la hausse des prix, et d'assurer l'approvisionnement correct
l19
de la population en denrées de première nécessité tout en protégeant son pouvoir d'achal.
Les
mesures prises concernent entre autres le gel des prix, le renforcement de la politique de
médicaments essentiels et la subvention des fournitures et de matériels scolaires. 120
L'AS.CO.MA. a par ailleurs dégagé - toujours dans le but de minimiser les effets de la
dévaluation sur les populations - de nombreuses perspectives d'avenir pour le consommateur
local, notamment un projet de création de centres d'approvisionnement du consorrunateur pour
les antennes AS.CO.MA. du district de Bamako (capitale du Mali), un projet d'étude avec l'ACDI
(Agence Canadienne pour le Développement International) intitulé "Mission AS.CO.MA.", dont
le but sera d'organiser la collecte, d'analyser et de faire la synthèse des informations sur les prix et
leur évolution sur les marchés de Bamako et des capitales régionales, et enfin, un projet de
création d'une société interafricaine : "la Boutique du consommateur africain ,0121.
De
son côté,
la Ligue des Consommateurs du
Burkina-Faso (LCB)
a,
avec
la
collaboration de l'hebdomadaire "le journal du soir", publié à l'attention des consommateurs du
Burkina., en décembre 1994, une liste des différents prix des produits alimentaires proposés sur
les marchés locaux. 122 Jugeant nécessaire l'intérêt des consommateurs de comparer les prix pour
opérer les meilleurs achats possibles, la Ligue s'est engagée à renouveler l'expérience, et ce, de
façon régulière, au moyen d'enquêtes sérieuses permettant de relever les divers prix pratiqués
dans les points de vente. Déterminée à étendre l'expérience à tous les autres produits courants
non encore concernés, la Ligue a fait appel aux consommateurs et aux commerçants pour qu'ils
lui fournissent sur les prix pratiqués sur les marchés ; ce qui lui permettra de faire jouer la
concurrence au profit du consommateur. Elle a par ailleurs dénoncé la pratique des prix
exorbitants ou excessifs de l'Office Nationale des Eaux (O.N.EA) qui applique des "tarifs
118 Idcm, n° 14, Illai 1995, p. VII.
Iig IdCIll.
120 Idcm.
121 « Consommation-Développcment »n° 14, mai 1995, p. VII.
po
C
.
D'
1
°
d'
-- «
onsomma!lon- eve oppement », n 12, ecclllbre 1994, p. 5.

590
pirates,,'2' depuis la dévaluation du franc CfA, pratique que l'organisation trouve non justifiée (
préjudiciable au pouvoir d'achat des COnSOI1lI11ateurs. 1è-l
La même critique a été avancée au Sénégal par l'Association de Défense des abonnés
l'Eau. à l'Electricité et au Téléphone (A.D.E.E.Tél) qui a exigé des services concernés "
publication précise de l'ensemble des composantes du prix de revient: 1- de la taxe de base de
SONATEL ; 2- du m' d'eau de la SONEES ; 3- du kw/h de la SENELEC, ainsi que des factun
détaillées pour tous ces services pour permettre aux consommateurs de les analyser et de fai:
des propositions de correction"'2), Il en va de même des associations de consommateu
ivoiriennes, UNICO et "Qualité Plus", qui ont, à travers leurs enquêtes sur les marchés locau
permis de limiter les effets néfastes des hausses des prix qui ont suivi la dévaluation du frai
CFA. "Qualité Plus" qui a pour objet la recherche de la qualité des biens et services, s'e
particulièrement préoccupée du problème de la santé, notamment de l'hygiène alimentaire et d.
problèmes économiques liés au traitement des maladies. Elle publia à cet effet un docume
d'information à l'attention des autorités étatiques et des consommateurs sur les conditiOl
d'hygiène dans les marchés, de la restauration de la rue et dans les restaurants populaires. El
mena ensuite une enquête quasi-systématique sur les augmentations des médicaments constata
des augmentations moyennes pour les anti-paludéens de l'ordre de 67,2% ; pour les anl
int1ammatoires de l'ordre de 55,7% et pour les antibiotiques de l'ordre de 52,5%.126 Cette enquê
qui a suscité l'admiration des participants du séminaire de Ouagadougou (Burkina-Faso) aui
l'attention du gouvernement ivoirien sur la gravité de la situation et permit de freiner l'int1ation (
ces pratiques préjudiciables aux consommateurs.
L'information critique est essentielle pour l'éveil des consommateurs. Elle fait donc parI
de la mission des organisations mobilisées pour la défense des intérêts des consommateurs ne p
la leur reconnaître rendrait impossible toute discussion économique relative à la qualité,
illusoire le rôle d'informateurs et d'éducateurs qui relève de leur domaine. 127
,
12.1 L'cxprcssioll cst du rcprésclltant officicl dc la LCB
"-
12~ « Consommation-Développcmcnt », n° 12,.p. 5.
125 «Consommation-Développcmcnt », n°
Il, déccmbrc 1993, p. 7. A titrc d'cxcmplc, Ic m.1 d'cau potablc
vcndu Ü 80 francs CFA aux maraÎchcrs de l~lçon illimitéc alors qu'il s'élève jusqu'à 500 francs CFA aux ménag
12(, Ibid., n° 14, mai 1995, p. VII.
127 N'GUYEN-THANH : thèsc précitéc, p. 247.

591
Certes, la "jeunesse", le manque de cadres et de techniciens et la faiblesse des moyens
financiers sont autant d'obstacles capables d'empêcher une action véritablement efficace. 12,
Encore que ce problème peut être résolu par le biais de diverses aides aussi bien nationales
qu'internationales. D'ailleurs, dans sa stratégie d'appui aux associations de consommateurs en
Afrique, l'OIC (ex
10CU) a inscrit
le développement institutionnel au centre de
ses
préoccupations. En 1993, le programme Afrique de l'OIC et les organisations membres des pays
développés à travers la Fondation Colston Warne de la Consumers Unions des Etats-Unis ont
apporté leur aide financière (surtout) aux associations de l'Afrique en vue de leur consolidation:
acquisition d'un siège, équipement.
travaux
de
recherche,
élargissement de
la
base de
l'organisation. Pour l'exercice 1993, les associations suivantes ont bénéficié de cette aide :
l'AS.CO.MA. (Mali), la Consumers Association (Ghana), la L.C.B. (Burkina-Faso), l'A.D.E.C.
(Sénégal), la C.E.P.C.O.N. (Nigeria) 129, soit quelques unes des quelques rares organisations les
plus actives sur le continent.
Le droit à l'information critique est donc un droit fondamental pour les organisations de
consormnateurs. On devrait le leur reconnaître, et ce, quelle que soit la force institutionnelle de
l'association. Quitte à ce qu'il constitue un contre-pouvoir potentiel nécessaire dans les rapports
entre les organisations de consommateurs et le monde de la production et de la distribution.
2 - La liberté dans la comparaison des produits et services.
Tout comme celui de l'information critique, le droit à la comparaison des produits et
services répond lui aussi à l'obligation qu'ont les organisations de consommateurs de satisfaire
une exigence essentielle : celle relative à l'information du consommateur par ses représentants
officiels sur la qualité des produits et services qui lui sont offerts sur les marchés. L'intérêt de la
manoeuvre est double: d'un côté, elle permet la diffusion d'une information objective et complète
; de l'autre, elle contribue à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des biens et services de
consommation. 130
1/
128 « Consommation-Dévcloppcment », n° 8 novcmbrc 1992, p. 1 ct 4.
129 « Consommation-Développemcnt », n° 10, nov. 1993, p. \\.
uo N'GUYEN-THANH : thèse précitée, p. 245 ; B1HL : «Lc droit d'cxpression des consommatcurs ", article
précité, p. 187.

592
Il existe, certes, diverses techniques tant nationales (surtout clans les pay:-. développé:
qu'internationales tels que la normalisation, la certification de la qualité, l'étiquetage inlormat
clont la mise en place permet d'apporter au consommateur certains renseignements sur k
produits vendus. Mais ceux-ci ne concernent que les caractéristiques positives des biens désigné
Le consommateur n'est pas renseigné sur les défauts de la marchandise - et il en existe toujours
pas plus que sur les inconvénients pratiques de l'utilisation trop régulière de tel ou tel appareil. 111
Motivée par le souci légitime de livrer aux consommateurs une information objective,
comparaison permet de pallier cette carence dans l'information livrée par les professionnels. POl
l'équilibre de l'information, il serait logique qu'on reconnaisse ce droit aux associations locales.
s'agit d'un moyen original d'information fondé sur un substrat scientifique communément appe
"essais comparatifs des biens de consommation" 1:12.
En quoi consiste un essai comparatif? "L'étude comparative des biens offerts sur
marché menée par une organisation de consommateurs pour le compte de ses membres ou c
public, avec publication des résultats, constitue une technique de contrôle de la qualité 1
,· f
. .
,,11\\
d ln ormatlon Importante ".
La méthode est née aux Etats-Unis en 1929, à la suite de la publication d'un livre de Mi
STUART et FJ. SHLINK, intitulé "Your money's worth", autrement dit "Le prix de VOtl
argent". A la suite de ce livre, les auteurs furent conduits à créer la "Consumers Research", q
mit au point la méthode des essais comparatifs telle qu'elle est encore pratiquée aujourd'hui, ne
seulement aux Etats-Unis, mais aussi dans la plupart des pays économiquement développés.ll~
Il ne s'agit pas de transférer une méthode occidentale dans les pays africains - ce qui n'e
d'ailleurs pas faisable, les modes de vie étant complètement différents, voire opposés -, mais (
s'en inspirer et de l'adapter aux réalités du commerce africain tel que décrit dans le chapit
précédent. m
Et puis l'information n'a pas de
frontière,
surtout lorsqu'elle concerne l,
consommateurs.
1.11 N'GUYEN-THANH : thèse précilée, p. 245.
1.12 Ibid. ; BIHL : article précilé, p. 187.
I1J Ibid.
1.1·1 N'GUYEN-THANH : lhèse prée., p. 245.
1.15 cr supra.

593
D'ailleurs. la méthode est originale, elle traduit
une volonté d'indépendance des
consommateurs ù l'égard des
producteurs.
Cependant,
le système d'échantillonnage des
différentes marques ct d'unalyscs en laboratoires seront confrontés aux difficultés déjà évoquées:
Je manque de moyens matériels pour réaliser une comparaison parfaite. Il ne s'agit pus là d'un
problème insurmontable. Le droit ne crée-t-il pas souvent les moyens de sa réalisation? En tout
cas. les consommateurs, de leur côté. y trouveront beaucoup d'avantages. Ce sera pour eux une
bien belle manière d'effectuer un mcilleur achat possible en fonction du budget de tout un chacun
et en tenant compte du rapport qualité/prix. Aussi l'intérêt du consommateur mérite-t-il qu'on
attachc une importancc au drOlt à la comparaison.
La Kenyan Consumers Organization (KCO) a accru ses activités dans ce domaine depuis
1992. Les essais comparatifs font désormais partie intégrante de son programme d'activités.
L'association procède à des tests comparatifs dans son propre laboratoire sur tous les aliments
suspects, notamment sur les boîtes de conserve. 136 Effectués par son propre personneL les tests
qui, pour l'instant, ne concernent que les produits alimentaires, sont destinés à être étendus aux
autres produits de consommation tels que les textiles: Forte de ses résultats et de son initiative
combien valeureuse. l'association a lancé une campagne d'information destinée à encourager les
,
l'
' 1 b '
d'
1
137
0
consommateurs a envoyer tout a Iment suspect a son a oratOIre pour
ana yses
.
n retrouve
là une initiative dont la portée serait de nature à décourager, du moins à limiter, le déversement
des produits douteux sur les marchés nationaux.
De façon générale, la reconnaissance du droit à la comparaison aux organisations de
consommateurs peut avoir un aspect positif sur la qualité des biens offerts sur les marchés, car
elle peut être une source de pression supplémentaire, mais non négligeable, pour les producteurs
et distributeurs. Les tests effectués en laboratoire sont aussi un moyen d'assainissement contre les
produits de mauvaise qualité issus le plus souvent des filières commerciales de la fraude.
L'essai comparatif constitue donc une véritable technique de contrôle de la qualité aux
mains des consommateurs. La technique est intéressante en ce qu'elle tend à permettre à un
consommateur
d'accéder
à
la
connaissance
objective
et
technologique
des
biens
de
consommation. 13X Elle a un mérite indéniable en ce qu'elle permet d"opposer à la publicité, quand
;
/
..
•,...,.1
\\,(, " Consommalion-Développemenl » n° 8 prée., nov. 1992, p. 3
U?lbid.
"8 N'GUYEN-THANH : lhèse prée.. p. 246.

594
cela est néccss~me dans l'intérêt du consommateur, une "contre-publicité". C'est lù un aspec
positif important de la liberté d'infonnationiJ'J.
Le test comparatif est aussi intéressant en ce qu'il est un domaine exclusivement réscn
~IU\\ seub consommateurs. Aucun producteur n'a donc le droit, d'une manière ou d'une autre, (
faire usage des résultats obtenus. La jurisprudence française dont s'inspirent les juges africail
des pays francophones, est formelle sur ce point. '40
La comparaison joue donc un rô le important clans la vie des consommateurs. C'est L
élément d'information d'une importance non négligeable qui, en raison de son impact s
l'ensemble des consommateurs, permet de préparer le terrain pour les actions futures.
Il) Les actions des associations de consommateurs sur le terrain.
Diverses actions en faveur des consommateurs peuvent être menées par les organisatio
représentatives aussi bien sur le terrain économique que sur le terrain juridique. Trois d'entre l'Il
nous intéresseront principalement : il s'agit des actions relatives à la protection des intér€
économiques du consommateur (1), ù la défense de ses intérêts judiciaires (3) et enfin celles de
le but consiste ~I le prémunir contre les dangers de la consommation (2).
1 - La protection des intérêts économiques du consommateur
par les associations représentatives.
La défense des intérêts économiques des consommateurs fait partie intégrante c
missions des organisations de consommateurs. C'est même un des tout premiers devoirs que lé
reconnaissent les rédacteurs des principes directeurs des Nations Unies pour la protection
consommateur. Après avoir invité les gouvernements des pays membres à « redoubler d'effo
pour empêcher des pratiques préjudiciables aux intérêts économiques des consommateurs
assurant l'application des lois ct normes obligatoires par les fabricants, les distributeurs et
autres fournisseurs de biens et de services ... », les rédacteurs de ce texte ajoutèrent à la suil
1\\'J Ibid .. p. 245.

595
« ... 11 faudrait
encourager les organisations de consommateurs à surveiller les pratiques
préjudiciables, telles que l'adultération des produits alimentaires, la publicité mensongère ou
exagérée et les pratiques frauduleuses dans les prestations de services» (Principe N° 14 de la
charte des Nations Unies).
L'emploi clans les dispositions du principe du terme «encourager» au lieu et place clu
terme « reconnaître» n'est pas neutre. Il démontre tout simplement une reconnaissance implicite
du rôle des organisations de consommateurs dans la défense des intérêts de leur base. C'est aussi
une confirmation de la préexistence de la légitimité des organisations à remplir ce rôle. Ce qui du
coup place ce volet de la défense au tout premier rang des devoirs qui incombent aux
organisations ofticiellement reconnues à cet effet. L'importance du devoir est d'autant plus
capitale que les organisations africaines évoluent dans un environnement social où le pouvoir
économique des porulations à défendre est très bas. Ce qui leur contère un pouvoir d'achat très
limité dans un contexte économique difficile.
L'exercice de ce rôle sur le terrain par les organisations locales dans leurs activités
quotidiennes n'en est pas moins ressenti dans certains pays africains. Dans cette vision des
choses, la Kenyan Consumer Organization (K.eo.) dénonça en 1992, dans une campagne de
critique, les augmentations abusives des frais postaux et des tarifs téléphoniques faites par le
Kenyan Post and Télécommunications Council (K.P.T.C) entendu Office des Postes et
Télécommunications du Kenya. La critique était fondée sur le fait que les augmentations de tarifs
ne s'accompagnaient pas d'une amélioration des services rendus aux usagers. 141
La CEPCON emprunta la même démarche pour dénoncer les hausses arbitraires de prix
sur les produits de première nécessité (aliments par exemple) survenues en 1993 au Nigeria. La
constance de la situation eut pour conséquence la tenue d'un séminaire les 14 et 15 juin 1993
animé sous un thème révélateur de l'état d'esprit du moment des initiateurs, thème intitulé
comme suit : «Face à la hausse des prix, quelles solutions pour nourrir le pays »142,
L'organisation du séminaire eut pour conséquence immédiate la mise sur pied d'« un guide
1-10 « La puhlication par un professionnel d'un test comparatif d'experts ou des tiers, sur les avantages et les
inconvénients comparés de ses produits et de ccux des maisons concurrentes constitue un dénigrement », voir en
cc sens, Paris IC' fév. 1934, Ann. 1934, p. 227; 19 mars 1956, Ann. 1956. p. 180. cités par N'GUYEN-THANH:
thèse prée., p. 247.
1-11 « Consommation-Développement » n° 8 précité, nov. 1992, p. 3.
1-12 « Consommation-Développement» n° 10 de novembre 1993 précité, p. 4.

596
indicatif (des prix! au niveau de chaque Etat - le Nigeria est UI1 Etat fédéral -cl au l1i\\'cau d
gouvernement fédéral, de manière ù pouvoir donner des éléments susceptibles de conduire il de
,
l
141
1/
so utlons »
ae equales.
Mais de Lous les actes posés par les organisations locales en faveur du conSOml11ateL
pour cc qui concerne sa protection économique, les plus significatifs furent remarqués ;
lendemain de la dé\\'aluation du franc CFA, fait qui affecta considérablement le pouvoir ct' acll
des populations des quatorze Etats membres de cette Communauté Financière Africaine (CFA),
Au Burkina-Faso, la LCB (Ligue des Consommaleurs du Burkina-Faso) a publié
l'attention des consommateurs et avec le concours de l'hebdomadaire "le Journal du soir", UI
liste des différents prix des produits alimentaires proposés sur les marchés locaux. Ceci eut po
effet immédiat de permettre aux consommateurs défavorisés de comparer les prix pratiqués da:
les divers points de vente. Elle dénonça par ailleurs la surenchère des prix pratiqués par l'Offi<
National des Eaux (O.N.EA) au détriment des consommateurs les plus démunis. 14-1
Au Sénégal. l'ADEC a mis en place une centrale d'achat des produits de premiè
nécessité en faveur des consommateurs les plus défavorisés. Achetés au prix de gros, les produ:
sont redistribués aux membres à des prix incluant des marges bénéficiaires très faibles. Cet
action a permis non seulement de réguler les effets négatifs de la dévaluation, mais aussi 1
soustraire les consoinrnateurs aux spéculateurs de prix et aux rétentions des stocks de produ
qui ont suivi l'événement sur les différents marchés nationaux.I-I) Toujours au Sénég;
l'A.D.E.E.Tél. a fait suspendre la sIgnature par le ché! de l'Etatdu cahier de charges de la Socié
Nationale de Télécommunications en raison de la présence dans ce dernier des clauses abusiv
incluses au détriment des consommateurs. La demande de sursis à signature fut accordée et
document retourné à la société l'enjoignant d'entamer des discussions avec les usagers regrouç:
en associations. '46 L'A.S.D.E.C. de son côté s'est purement et simplement engager à dénoncer
quotidien
les spéculateurs véreux, entreprise que
l'association
mène bien à travers c
communiqués de presse et des enquêtes sur le terrain. 1-17
)-1,\\ Ibid.
)-1-1 Ibid. N° 12 décembre 1994, p. 5.
1-15 Voir A. C. KANOUTE: «Colllmunication.présentée au Symposium ... » précitée, p. 15.
)-1(, Ihid.
1-17 « Consommation-Dévcloppcmcnl " n° 13 d'avril 1995, p. 5.

597
Au Burundi, la hausse des prIX fut aussi dénoncée par l'association locale, A.BU.CO'
(Association Burundaise des Consommateurs). Elle concerne l'augmentation de plus de 66% des
prix de transport inter-urbain survenue au début de l'année 1995, augmentation qu'elle juge_
périlleuse pour les consommateurs locaux, en particulier les plus dét~lvorisés économiquement. '4R
Quant à l'A.P.C.E.B., elle a tout simplement interpellé les pouvoirs publics béninois, en
l'occurrence le gouvemement, pour qu'ils prennent des mesures pouvant permettre de :
« 1- de relever Je pouvoir cl' achat des populations:
2- stabiliser les prix des produits de première nécessité;
3- de réduire Je montant de la T.V.A. sur les productions, la supprimer sur l'eau,
l'électricité et les biens de première nécessité:
4-
associer
tous
les
partenaires
SOCiaUX,
notamment
les
associations
de
consommateurs à toute mesure visant à relever le pouvoir d'achat et à améliorer l'environnement
,
.
149
economlque »
Elle a par ailleurs invité les opérations économiques à une solidarité nationale pour éviter
' d
1
. , .
d '
d ' d l '
1
1
1so
tout exces ans es augmentations et a tel1lr compte
u I1lveau e VIC es popu atlons oca es..
Tous ces exemples cités sont loin d'être exhaustifs. Ils ont cependant une valeur
symbolique et significative. lis témoignent non seulement de la \\'olonté des organisations
nationales d'oeuvrer pour le changement dans la situation des consommateurs. mais aussi de
l'important rôle social qu'elles jouent dans la société africaine. Ces efforts ne se limitent pas au
seul domaine économique, ils s'étendent aussi au contrôle de la fiabilité sécuritaire des produits
distribués sur les marchés nationaux.
2 - La protection de la santé et de la sécurité du consommateur
par les associations représentatives.
La santé et la sécurité des consommateurs sont aussi au centre des préoccupations des
organisations locales investies dans la mission de défense de leurs intérêts. Déjà en juillet 1992,
146 Ibid., p. 4.
149
« Consommation-Développement ", na 1l, décembre 199~, p. 6.
150 Ibid.

598
lors de la I"encontre régionale entre diverses associations officielles à Dakar, une idée forte avai
été émise pal" ]a LeS dans cc sens. S'appuyant sur la résolution 39/248 de l'Assemblée Général
des Nations Unies sur ks Principes Directeurs Pour la Protection du Consommateur, elle propos
une recommandation qui fut par la suite adoptée par les participants à J'Atelier. «Consiclérar
l'importance de l'aide alimentaire (ct médicale) provenant des O.N.G. en temps de crise ct 1
nécessité d'assurer la sécurité ct la CI ualité des biens de consommation essentiels distribués
travers le monde, notamment les produits distribués» aux populations du Tiers-Monde en temr:
de crise. la LCB invitait « les S2.ouvcrnements, les organisations intergouvernementales et nOl
'--.
"'"-'
'-'
gouvernementales. dont le champ d'action touche la distribution de l'aide alimentaire, d
s'assurer que leur aide correspond entièrcrnenl aux normes fixées par le Codex Alimentarius è
l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (F.A.O.) et l'Organisatio
Mondiale de la Santé (O.M.S.) ou le cas échéant, à d'autres Normes internationales reconnue
notamment celles en vigueur dans le pays donateur» 1.'1.
Au Mali, l'AS.CO.MA.. avec la collaboration du projet APEX (Projet pour l'Amélioratio
de ·la Productivité Animale et de l'Exploitation), organisa dans la même année (du 20 septembI
au 5 octobre 1993) des tournées de sensibilisation sur la qualité du lait et des sous produil
vendus dans le district de Bamako (capitale du Mali).''i2
Au Nigéria, les actions du CEPCON en faveur de la prévention de la santé et de
sécurité du consommateur sont aussi recensées. Participant à un séminaire organisé par
"Standards Organization of Nigeria) en octobre 1993, l'association saisit l'occasion pour appek
les pouvoirs publics à une plus grande surveillance des normes dans l'intérêt du consommateL
local. Dans son allocution, le président de l'association, Chief A. DUROJAIYE, a appelé k
autorités nigérianes à veiller à la qualité des produits et services proposés aux consommateur
L'appel à la surveillance des normes concerne aussi bien les produits locaux que les produi
importés, notamment les produits pharmaceutiques, les biens mécaniques tels que les voitures 1
surtout les produits alimentaires. L'appel lancé en direction des pouvoirs publics était fondé sur
l'il
« Conso1l1malion-Développe1l1enl» n° 8. nov. 1992, Alelier Régional de Dakar des 1er, 2 el 3 juillel 19S
Résolulion proposée par la Ligue des Consolllmaleurs du Burkina-Faso (L.c.I3.) ct adoptée par les partieir;<ll
Suile à celle inilialive, la LCI3 lança en 1993, "une opération mains propres" deslinée à sensibilisei':.
conSOl11maleurs ainsi que les professionnels dislribuleurs de prexluilS direclemenl consommables sur les conclilic
J'hygiène nécessaire à la sanlé. La LCI3 veUI, à 1ra vers celle démarche, apporter sa eomri!lulion il \\'améliorali
des eondilions d'hygiène de vic aussi bien dans les familles que dans les reslauranlS, hôtels, bars, cIe, Ibid n°
avril 1993, p. 3.

599
nombre dc renes en vies humaines enregistré dans la p0[Julation en raison de la consommation
des [Jroduits de mauvaise CJualité, le [Jlus souvent issus de la fraude.!'iJ
L'association a par ailleurs lancé en 1994 un a[J[Jel au Président de l'Association des
Pharmaciens Nigérians en vuc de la fourniture d'information plus com[Jlète sur les produits
rharmaccutiques
vendus au
Nigeria.
L'Association a exigé
la
fourniture
d'informations
élémentaires tels que: le nom et l'adresse du fabricant: la date de fabrication et d'exriration ou de
pérem[Jtion du produit: k poids net de la com[Josition du [Jroduit ; les dispositions concernant
l'emballage après utilisation du rroduit, surtout dans le cas où le rroduit vendu s'a\\"érait être Ull
produit toxique.I'i-l Parallèlement à ces revendications, l'association organisa un Atelier de
sensibilisation destiné à prévenir les populations contre l'usage des médicaments issus de la
contrefaçon. Encore faut-il [Jouvoir les reconnaître par rapport aux médicaments authentiques.
Ce qui n'est pas chose évidente pour les populations locales, surtout lorsqu'elles sont rurales et
analphabètes. Là encore. beaucoup d'efforts sont à déployer pour éviter des aventures
désagréables aux populations concernées. Ceci n'est guère possible sans la mise en place des
structures de contrôle efficaces capables de détecter les prClduits douteux. aux frontières ou à
tous les points s[Jécialcment dressés à cet effet, avant leur introduction dans les circuits ou filières
de distribution dans la masse.
En effet, la tenue de l'Atelier initié par le CEPCON se justifiait par le fait que le Nigeria
était devenu un centre de prolifération des produits contrefaits, dont les médicaments. Le
phénomène de la contrefaçon des produits pharmaceutiques a atteint un tel degré qu'un officiel de
['O.M.S. a pu, devant le nombre de morts de personnes dus à leur usage (l09 enfants morts après
avoir ingurgité un sirop dont les ingrédients étaient faux), le comparer à un "meurtre de
masse" l'i:i. L'urgence de la situation a nécessité de la part de l'association une initiative visant à
regrouper les pharmaciens, les officiels chargés de la répression des fraudes et les consommateurs
dans un ensemble homogène dont le rôle consiste à définir les mécanismes permettant de livrer
aux utilisateurs une meilleure information sur les médicaments vendus. Une bonne information
I:\\} Ibid., n° II, déccmbre 1993, [l.9.
1:\\.1
«Consommation-Dévclo[l[lemcnt", n° Il, déccmbre 1993, p. 9.
15-l « Consommation-Dévclo[l[lement » n° 12, décembre 1994, p. 5.
1:\\5 KANOUTE : « Communication présentée au Symposium ... " précitée, p. 16 ; voir également S. N. DIALLO :
« La contrefaçon des médicaments ", article précité, p. 17-18.

600
permettra d'otTrir aux usager, des lllédicameiHs une protection adéquate par le fait qu'elle let
fera courir moins de risques lors cie leur consommation.I'i('
La Consumer" Association 01" Ghana (CAG) a de son côté mené une élude visa
J'identilïcation et le retrait du marché gh,méen des médicaments antidiarrhéiques dangereux pal
I
enfants. 'i7 La démarche de l'association fut adoptée après J'observation des cas de traitemen
inadéquats dc la diarrhée inj~lIltile notés par les médecins et nutritionnistes du mouvement air:
que la découverte des médicaments interdits d'usage ou de vente dans les pays occidentaux. Ut
campagne de sensibilisation fut lancée par l'association auprès des décideurs politiques en (
rctrait des produits incrimmés. Cette campagne fut sUIvie de propositions concrètes (
mouvement destinées à éliminer le danger résultant de la consommation desdits produits dans
Dans la même ligne directrice, et pour cause deùialThée et d'infections générales dt
enfants, les pouvoirs publics gabonais, sous l'impulsion des associations locales, ont interc
l'importation d'aliments pour bébés âgés de moins de six mois. Cette interdiction est une réactie
contre les "tactiques extrêmes de marketing des multinationales et leurs effets sur la malnutritie
des
nourrissons" 1;9
D'après un constat de
l'Hôpital de
Libreville (capitale du
Gabon
l'interdiction eut des effets positifs sur l'état de santé des nourrissons. L'introduction de
politiques exclusives d'allaitement provoqua "la disparition totale de la diarrhée et des infectioJ
généralisées" ainsi "qu'une importante baisse du taux (de 25% à 1%) d'infections digestives'"
réputées très graves pour les bébés. La baisse considérable du taux d'infections de 25% à 1% e
une donnée non négligeable eu égard au nombre de bébés dont la santé fut préservée par l'effet e
l'interdiction.
Au Bénin, on a enregistré un acte de grande importance posé par l'APCEB en vue de
protection de la santé et de la sécurité du consommateur dans le secteur informel. Face é
développement
fulgurant
de
l'alimentation de
rue,
l'association a entrepris des
sesslo;
d'éducation à l'hygiène alimentaire dans les écoles primaires et secondaires du pays. E
1)(> KANOUTE: «Collll1lunication présentée au Symposium ... » précitée, p. 16.
1)7 Ihid.
I<S Ihid.
159 Information rapportée par l'Organisation« Bahy Milk Action» basée en Angleterre, Update 15 octohre 199·
cf. cn cc sens,« ConsolTllllation-Développement » n° 13 d'avril 1995, p. 4.
Ih() Ihid.

601
collaboration avec la Direction de l'Alimentation et de la Nutrition Appliquée, elle pl"ojerte de
vulgariser lès technologies simples de protection des aliments auprès des femmes vendeuses
d'aliments dans les enceintes scolaires afin de réduire les risques de santé publique.l(iI
Toutes ces initiatives des associations sur le terrain sont autant d'actes concrets destinés ~l
assurer aux consOl1lmateurs une garantie plus ou moins certaine contre les risques de la
consommation. Mais elles nc seront vraiment éfficaces et profitables au consommateur que si
elles sont soutenues par des textes législatifs ou réglementaires destinés à prévenir et à garantir sa
santé et sa sécurité. Elles témoignent cependant de la volonté des associations de maintenir Je
"cap" pour déboucher sur une véritable prise en compte des droits des consommateurs, droits qui
sont susceptibles d'être défendus devant les juridictions d'Etat dès lors que les circonstances
l'exigent.
3 - La protection des intérêts judiciaires des consommateurs
par les organisations représentatives agréées.
La défense çles intérêts des consommateurs devant les juridictions d'Etat est une tâche que
les associations agréées sont amenées à accomplir pour la promotion et le respect de leurs droits,
les droits de j'ensemble des consommateurs. Ces intérêts peuvent être d'ordre individuel, auquel
cas, on parle d'assistance apportée au consommateur se trouvant dans l'incapacité de se défendre
tout seul (3-1).
Us peuvent aussi être collectifs
parce qu'ils concernent
l'ensemble des
consommateurs. Dans ces conditions, l'association, plus impliquée, est partie prenante à
l'audience devant le tribunal saisi. On parle dans ce cas de défense des intérêts collectifs des
consommateurs (3-2).
3-1. L'assistance judiciaire du consommateur
par les associations agréées.
Dans une correspondance adressée au Ministre de la justice de J'Etat Fédéral du Nigeria
en 1994, l'association locale pour la défense des droits du consommateur, la CEPCON, a ülÎt état
d'un cas pratique qu'elle souhaite effectif au Nigeria. Il s'agit d'obtenir du Ministre saisi, la mise
sur pied de juridictions d'Etat susceptibles de régler les litiges mineurs entre consommateurs et
161 KANOUTE : « Communication présentée au Symposium... » précitée. p. 16.

602
producteurs/distributeurs des biens ou prestataires de services. I('2 Il s'agit en r occurrence dl
trihunaux spéciaux dont la mission serait de régler les litiges de consommation.
La réalisation de cc souhait (réclamé de vive voix) exprime un désir réel: celui de donne
au consommateur les chances de faire valoir ses prétentions devant les tribunaux ci\\ils en cas l
conJlil avec lin professionnel de droit commercial. Ces tribunaux qui sont déjà opérationnels (
Zimbabwe, au Kenya ct en Afrique du Sud doivent satisfaire à certaines exigences pour pouvc
répondre pleinement aux besoins des consommateurs. Ils devraient être d'accès facile aussi bic
géographiquement que linancièrement pour les plaignants. Ils devraient aussi pou\\oir se saisir d,
plaintes concernant les montants modestes, peu élevés : ce qui aura pour effet d'encourager l,
consommateurs qui hésitent à réclamer leurs droits et qui parfois y renoncent pour des raiso
financières liées aux frais de justice et à la lenteur de la procédure dans les juridictio
ordinaires. rh.,
Si le souhait de la CEPCON est légitime et réaliste, sa concrétisation - qui est une lll'gene
- ne saurait profiter aux consommateurs sans un investissement des organisations locales à leu
côtés. Dans des pays où les populations sont peu accoutumées à régler leurs affaires devant l,
tribunaux civils, une information doublée d'une éducation des associations représentatives s'avè
nécessaire. Les consommateurs auront besoin d'une assistance, notamment de celle de leu
représentants officiels pour mieux cerner les contours juridiques de l'affaire et s'accoutumer al
règlements des litiges de consommation - aussi mineurs qu'ils puissent paraître - par vo
judiciaire. En quoi consiste cette assistance ?
L'assistance consiste, pour une organisation de consommateurs, à apporter son aIe
directe au consommateur qui en a urgemment besoin, en lui fournissant, par exemple, 1
éléments de droit nécessaires à sa défense en cas de conflit l'opposant à un professionnl
L'organisation, dans ces conditions, peut se rendre utile sous trois formes d'action, notamment:
- par la fourniture des consultations juridiques gratuites aux consommateurs. Un
service peut s'avérer fort utile pour trois raisons essentielles: la première est liée à la difficu
que pourrait rencontrer le consommateur, avisé ou
non, dans la recherche d'un juri~
expérimenté dans les problèmes de consommation. La deuxième est d'ordre pratique et s'expliè
I/>! « C0I1S0mlll<lIÎol1-DévC!oppclllcnl » n° 12, déccmbrc 1994, p.S.
1/>\\ Ibid.

603
par le fait que l'intérêt de la plainte pellt ne pas justifier la consultation cI'un praticien privé. 16-1 La
troisième cnlin est d'ordre fll1ancier : clans le cas où la consultation cI'un praticien s'avérait
nécessaire, il serait très difficile ü un consommateur moyen de payer les honoraires ou frais y
afférent. Toutes ces contraintes ou clifficultés sont autant cI'obstacles qui sont cie nature à faire
reculer les plaintes, laissant les victimes enfermées clans leur résignation et les clélinquants
économIques courir en toute impunité. L'organisation des consommateurs, dès lors qu'cllc
emploie des juristes s'occupant cles affaires semblables, peut fournir ü la victime tous les conseils

.
'J
.
d
fl' 16'
necesS,lires a a gestIon u con IL"
- par des manoeuvres visant ü favoriser le règlement amiable des réclamations, source de
cliftërend. Cette démarche va dans le sens souhaité par le principe N° 29 de la charte des Nations
Unies pour la protection des consommateurs. Ce principe encourage « toutes les entreprises a
régler les différends avec les consommateurs, Ü l'amiable, équ itablement et avec diligence, et à
créer des mécanismes volontaires, dont des services consultatifs et des procédures de recours
officieuses susceptibles d'aider les consommateurs ». Les organisations de consommateurs
pourront dans ce cas jouer un rôle dans la recherche d'un accord entre consommateur et
professionnel. Ce dernier pourrait être disposé à accepter les plaintes d'un consommateur isolé si
une organisation de consommateurs appuie sa réclamation. Cela pourrait même amener un
professionnel soucieux à coopérer avec l'organisation dès lors que celle-ci détient certains
pouvoirs, notamment des pouvoirs lui permettant de porter à la connaissance du public les faits,

d 1
l '
166
o Jet e a p amte.
- par l'aide qu'elle pourrait apporter au consommateur pour lui permettre de faire valoir
ses droits, Cette aide va aussi dans le sens souhaité par le principe N° 30 de la charte des Nations
Unies, lequel exige aussi bien des pouvoirs publics que des organisations indépendantes
représentatives, la fourniture « aux consommateurs des renseignements sur les voies de recours et
autres procédures dont ils peuvent se prévaloir pour régler leurs différends ». Cette exigence est
fondée sur le fait que certains consommateurs ne connaissent pas leurs droits. Ils représentent la
1
16-1
Cf. Conseil de l'Europe.
Affaires Juridiques
: « La
proteclion juridique des
intérêts collectifs des
" /
consommateurs par les organisations de consolllmateurs ». Recommandation na R (81) 2 ado(1lée par le Comité
des Ministres du Conseil de l'Euro(1e le 2} janvier 1981, (1. 17, Strasbourg.
165 Ibid.
16(,
Cf. Conseil de l'Euro(1e.
Affaires Juridiques : «La protcction juridique des
intérêts collectifs des
consommateurs par les organisations de consolllmateurs ». Recolllmandation na R (81) 2 ado(1lée par le Comité
des Ministres du Conseil de l'Europe le 2J janvier 19X l, p. 17, Strasbourg.

604
majorité de la population des pays africains. Ccux d'cnlre les consommateurs qui connaissent
peine leurs droits ignorent le plus souvent leur mise en valeur. les "oies cl moyens légaux 0
juridiques pour obtenir réparalion des torts subis. La ltiche des organisations dans ce.s conditiot
consiste, d'un côté comme de l'autre, il éveiller les consciences en vue d'un usage rationnel 1
efficient de leurs droits.
En dehors des deux calégories, il existe une troisième qui a e)]e aussi besoin d'assistanc
Elle est composée de consommateurs non ignorants de leurs droits ni de leur mise en oeuvr
mais limité.\\ dans leurs revendications par le coût trop souvent élevé des frais de justice. A cct
troisième catégorie, l'organisation des consommateurs peut porter assistance dès lors qu'elle en
la possibilité. en prenant en charge les frais de procédure qui. si elle aboutissait, serait bénéfique
la cause de tous les consommateurs. 1(,7 Encore que tous ces problèmes relatifs aux frais ou coû
trop élevés de la justice pourraient très bien trouver leurs solutions si les pouvoirs publil
venaient à mettre en évidence r idée de créat ion des tribunaux pour lit iges relevant de
consommation, faciles d'accès pour tous, aussi bien financièrement que géographiquement. J6R
De
façon
générale,
il
faudra
aussi
prévoir l'aide juridictionnelle pour tous
Il
consommateurs. A cet effet, les organisations locales pourront signer des conventions avec Il
barreaux en vue d' obtenir d'eux des consultatations et assistances judiciaires gratuites pour "
consommateurs dét~lYorisés, La présence des avocats dans les instances dirigeantes de certain,
associations peut être de nature il apporter une solution à cc problème d'aide juridictionnelle.
Outre ces différentes formes d'assistance, les organisations de consommateurs pourraie
également jouer un rôle très utile dans la promotion des systèmes volontaires de conciliation
d'arbitrage et/ou coopérer au bon fonctionnement des dits systèmes dans l'intérêt de tous lt
consommateurs. Ceci serait conforme aux dispositions des principes N°S 29 et 30 de la Charte d,
Nations Unies relative à la protection du consommateur.
Mais la mission de défense des intérêts des consommateurs ne s'arrête pas il la seu
assistance des dits consommateurs devant les juridictions d'Etat. Elle s'étend aussi il la défen
1(,7 Cr. Con sei 1 ùe l'Europe, Affaires Juriùiques, précitées, Recommandation na R (81) 2 du 23 janvier 1981, p,
Strasbourg.
I(,S Cr. supra

605
des intérêts collectifs de l'ensemble des consommateurs. C'est l'essence même de l'cxistencc des
associations de consommateurs.
3-2. La défense des intérêts collectifs
des consommateurs par les associations
agréées.
Un ancien secrétaire d'Etat français chargé de la consommation disait ceci:
"Une
économie de liberté implique que les consommateurs puissent pleinement exercer leur rôle
,
,
.
.. ,,16')
d agents ccon0l11lques aclIts
.
Ce rôle actif relève du domaine des organisations représentatives. Or, l'activité d'une
organisation de consommateur est fonction de la capacité qu'elle a, à défendre les intérêts de ses
membres, si possible devant les juridictions d'Etat dès lors que certains faits économiques sont de
nature ü porter atteinte à l'ensemble des consommateurs. La capacité n'est pas une fin en soi, mais
est plutôt liée à l'agrément de l'organisation par les pouvoirs publics, lequel lui donne la possibilité
d'ester en justice pour défendre les intérêts collectifs des consommateurs. Nous pensons que ce
droit devrait être accordé aux associations de consommateurs africaines afin de mieux représenter'
sur le plan judiciaire les intérêts trop souvent piétinés des consommateurs locaux sans défense.
L'intérêt de l'action en justice des associations pour la défense de l'intérêt collectif est
double: d'un côté elle répond à un souci de sécurité judiciaire des consommateurs individuels.
Au-delà des frais de justice et de la lenteur des procès qui sont en eux-mêmes des éléments
dissuasifs dans l'action individuelle, l'action de l'association se justifie par le fait que le respect des
droits de tous les consommateurs ne pourra pas être obtenue par des actions individuelles. D'un
autre côté, pour défendre la cause de tous les consonunateurs, il sera périlleux de s'en remettre
taujours au ministère pubhc pour l'application des règles érigées à cet effet. L'inefficacité de cette
voie s'en trouvera facilement démontrée, parce que le ministère public n'agit qu'au pénal, et il ne
le fait que dans les cas jugés par lui, les plus graves, de sorte que des pans entiers du droit de la
consommation échappent à son action. Pour le respect de ce droit, il faudrait permettre aux
16~ M. ARTHUIS cité par CALAIS-AULOY, dans son article : "Les actions en justice des associations de
consolllmateurs" (Colllmenlaire de la loi du 5 janvier 1999). D. 1999. P .193.

606
associalions
cie
consommateurs
d'agir
cn
justicc
pour
défendre
l'intérêt
collectif
cie
lm
consommateurs
.
Celte [1thsibililé d'agir cn justice existe dans le droit français. Elle a d'ahord été ]'ocuvr,
171
de la loi du 27 déccmbre 1973
, dite loi ROYER qui, à travers ['article -1-6, donnait le droit au
associations
de
consommateurs d'exercer «devant
toutes
les juridIctions
l'action
CIvil·
rdllivement
aux
faits
portant
un
préjudice direct
ou
indirect
ù l'intérêt
collectif de
consommatl'urs ». Cette disposition était regardée, à juste titre, comme l'une des plus important,
du droit cie la consommation. Ce droit reconnu aux associations a été renforcé par la loi clu
janvier ll)~èl i 7~ relative aux actions en justice des associations agréées de consommateurs et
l'information des consommateurs,
Jusqu'en 1988, il était couramment admis que l'action de l'article 46 de la loi ROYEF
était largcment ouverte, comme semblait r indiquer l'expression « devant toutes les juridictions»
Mais la première Chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 16 janvie
1985 171 adopta unc position plus restrictive. Pour cette Chambre, les mots «action civile;
désignaient uniquement ['action en réparation d'un dommage causé par une infraction ù la 10
pénale. Cet arrêt qui est fondé sur un argument de texte contestable oU\\Tait une brèche dans j;
défense des consommateurs: la partie non répressive du droit de la consolllmation échappait i
l'action des associations. Or, cette partie est loin d'être négligeable: on y trouve notamment le~
dispositions relatives aux clauses abusives, domaines de prédilection des litiges de consommation
C'est pour combler la brèche ouverte par l'arrêt de 1985 que la loi du 5 janvier 1988 fu
votée, texte inspiré des travaux de la Commission de refonte du droit de la consommation 17~. Le~
dispositions de cette loi n'introduisent pas, contrairement à ce qu'on attendait d'eUe, l'action dt
groupe. Elle n'autorise pas les associations à représenter en justice les intérêts individuels de~
COnS0l11l11ateurs 175 . Elle est moins ambitieuse et se borne à réformer ce qui avait été prévu par lé
loi de
1973 à savoir l'action exercée par les associations dans
1" intérêt collectif de~
consommateurs.
170 CALAIS-;\\ULOY: Les actions en justice des associations de consommateurs, an. rréc
r 19~.
171 Loi n° n/l19~ du 27 décembre 19n d'orientation du commerce cl de l'artisanal. dite « Loi ROYER ».
172 Loi n° HH/l4 du 5 janvier 19HH I72 relative aux actions en justice des associations agréées de consommateurs ct
l' information des consomllt<lleurs, JO du 6 janvier 19HH.
17.\\ Cass civ. 16 janvier 1985. D. 1985. p. 317, note AUBERT; J.c.P. 1985, Il; 20484, note CALAlS-AULÜY.
17·1 Propositions pour un nouveau droit de la consommation, La Documentation française 19H5, p. 130 et 131.

607
Les législateurs africains devraient s'inspirer de cette loi pour ouvnr aux associations
locales la VOie d'une action judiciaire pour la défense des intérêts de l'ensemble des
consommateurs. Si cette reconnaissance aux associations du droit d'agir en justice est souhaitable
pour la protection des intérêts judiciaires des consommateurs africains, elle ne devrait pas sc
limiter aux seuJes actions relatives il la déICnse de l'intérêt collectif des consommateurs. Elle
devrait être plus révolutionnaire et ouvrir la voie il l'action de groupe destinée à représenter les
intérêts individuels des consommateurs. Cela est d'autant plus important que les litiges de
consomm<ltion mettant en évidence les intérêts individucls sont plus nombreux que ceux mettant
en cause rintérêt collèctif dcs consommateurs. Cela est encore vrai en Afrique où les
consommateurs pris individucllcment peuvent difficilement ddendre leurs intérêts devant les
juridictions d'Etat. Notre l'l'quête se justifte davantage par le fait que le droit de la consommation
est encorc un droit inconnu sur le continent. Ainsi, la représentation en justice par les associations
pour défendre les intérêts aussi bien individuels que collectifs peut être une bonne chose dans la
limitation des abus dans le commerce. Il est régretable que le législateur camerounais n'est pas
prévu cette possibilité d' action ~n justice pour les organisations locales de consommateurs dans
sa loi n° 90/31 du 10 aoüt 1990 176 régissant l'activité commerciale au Cameroun. Mais ce pays
n'est qu'il ses débuts pour ce qui concerne la mise en place des textes relatifs à la protection du
consommateur. Et on peut espérer qu'à l'avenir le législateur pourra combler cette carence
législative.
De façon générale. par intérêt collectif, il faut entendre "l'intérêt commun à un ensemble
de consommateurs lésés par un acte de large diffusion."I77 Un acte de large diffusion peut être
une publicité trompeuse. un défaut constaté sur les objets fabriqués en série, une irrégularité
commise sur les modèles de contrat habituellement proposés aux consommateurs. Certes, la
notion de large diffusion peut dans certaines circonstances prêter à discussion, Mais dans le cas
qui nous concerne, elle cadre bien avec la réalité et est donc susceptible d'être retenue comme le
signe de l'intérêt collectif, lequel se situe il mi-chemin entre l'intérêt individuel de chaque
consommateur et l'intérêt général de l'ensemble des consommateurs. L'action de l'association
trouve donc sa place entre l'action individuelle de la victime et l'action exercée par le ministère
11) Sur l'actioll de groupe. \\'oir« Propositions pour un nouveau droit de la consommation », ibid.
l7h Loi na 90131 du 10 août 1990 régissant l'activité commerciale au Cameroun, in luridis in l'o. lanvicr-Févricr-
Mars 1991, na 5, Législation. p. 5.
177 M. ARTHUIS cité par CALAIS-AULOY/ art préc. p 194.

608
puhlic. CC\\ diverses actions ne s'excluent pas, elles se complètent, car un même I~lit peut lésc
simultanément ces trois catégories d'intérêts l7X •
L'action cie j'ass()ci~ltion ne vise pas forcément à obtenir la conclamnation (1c j'auteur cie
raits anormaux et le versement des dommages-intérêts pour préjudice collectif. Plus qu'une actio
en responsabilité, l'action vise plus à ohtenir du tribunal saisi la cessation par j'auteur assigné de
agissements illicites. Nous nous trouvons dans la compétence du juge des référés. L'associatio
pourra par exemple. demander au tribunal "la disparition d'une publicité trompeuse, le retrait d'li
produit non conforme à la réglementation (encore faut-il que celle-ci existe) ; la suppression d'un
clause illicite dont la présence est constitutive d'infraction pénale,,'79 "... la suppression de clause
abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels au
consommateurs". 1so Mais l'association peut se const ituer partie civile dans une action pénal
introduite par le ministère public et de ce fait demander des dommoges-intérêts à l'auteur de
faits incriminés pour préjudice collectif.
Le mot "cessation" ne doit cependant pas être compris (à tout prix) comme une injonctio
.
.
négative. La cessation d'un acte peut aussi résulter d'une injonction positive. Dans la défense de
intérêts collectifs. une association peut, par exemple, demander l'insertion dans un contrat typ
des mentions exigées par la loi ou exiger le respect des règles concernant l'affichage des prix. 1S1
Comme exemple illustratif de la défense des intérêts collectifs des consonm1ateurs devan
les tribunaux d'Etat, on peut citer l'action de l'association des conSOl1lli1ateurs de l'Ile Mauric
(ACIM).
En Novembre
1989 une décision gouvernementale avait revu le montant de
redevances-télé à la hausse. Le montant de l'augmentation s'élevait à un pourcentage de 4009
soit environ 1 à 5 dollars U.S. pour une seule chaîne. Une réprobation générale accueillit cett,
augmentation.
A l'initiative de
l'ACIM,
un
comité
national
composée des
fédération
commerciales et de certaines a.N.G. fut établi pour protester contre cette hausse excessive. Ce
effort fut récompensé par une annulation de l'augmentation pour 26% de la population, 1
situat ion demeurant inchangée pour les 74% restant. Entre temps, une loi fut votée. Celle-c
l'aisait obligation à toute personne possédant un poste téléviseur de payer la totalité des frai~
liS CALAIS-AULOY: article prée, p.194.
17') article 3 de la loi N° g8-14 du 5 janvier
1988 relative aux actions en justice des associations agréées c
consonunaleurs. J.O. 6. janvier 1989.
1su article 6. de la loi N° 88 -14 du 5 janv. 1988
.précisé.

609
redevance compnse, ;\\ la compagnie d'Electricité. Le non-respect de cette ohligation entraÎnait
immédiatement la suspension de la livraison du courant par la compagnie. [1 Caut toutefois noter
qu'en Ile Maurice, la redevance-télé figure sur la facture d'électricité de j'abonné.
Arguant de la non-constitutionalité de cette loi, l'ACIM porta tout d'abord l'al1aire devant
le tribunal de première instance qui la débouta. Elle fit ensuite appel, mais elle n'eut pas gain de
cause devant la juridiction du second degré. Elle forma un pourvoi en cassation devant la cour
Suprêmc de J'Ile. L'arrêt rendu le 9 janvier 1992 en faveur de l'ACIM consacrait ainsi une victoire
des consommateurs dans la défense collective de leurs intérêts. Cet arrêt demanda à la compagnie
nationale de ne plus, dorénavant. suspendre la fourniture d'électricité en cas de refus de paiement
dc 1a red
'1 ' 1
evance-te e pour es consommateurs. x"
1
L'ACIM obtint entre autres de la cour, J'obligation pour la compagnie de rembourser les
sommes indüment perçues au détriment des consommateurs. En effet, lors du processus
d'informatisation du système de comptabilité de la compagnie, les factures des abonnés avaient
été multipliées par deux. L'association porta J'affaire devant le Tribunal de première instance.
Déboutée, elle fit appel sans succès. Le pourvoI en cassation lui donna raison contre la
compagnie d'Electricité de l'IJe Maurice. 700.000 millions de francs C.F.A., soit environ
2.600000
lx1
dollars U.S. furent remboursés à 180 000 abonnés.
Ce succès de r organisation
devant la cour suprême, qui intervint après quatre ans de procédure, est un modèle de réparation
que les associations peuvent obtenir pour J'ensemble des consommateurs grâce à la justice.
Toujours en Ile Maurice, une autre action en justice a été introduite en 1993 par
MAPBIN-CHAN,
association
soeur
de
J'ACIM,
contre
les
représentants
de
la
firme
Colgate/Palmolive au non de plus de 50 personnes, victimes des dommages causés par la
consommation de la pâte dentifrice "Colgate,,'8~. La consommation de cette pâte a, en effet. laissé
des marques indélébiles du fait de l'extrême toxicité de la matière. Les plaintes dirigées au
préalable contre les fabricants par les victimes elles-mêmes avaient pour but d'obtenir les
dommages-intérêts en leur faveur. Suite à ces plaintes faites dans les normes de règlement des
)
j
i
IXI CALAIS-AULOY : arliclc précisé. p. 195
IX2 Voir cn cc sens "consoJnmalion-dévC!oppclllcnl", bull. Irim. d'int'o. IOCU-ENDA. N° 8 Novcmbrc 1992. p. 2.
IXl V A C
KANOUTE
C
. .
"
. ,
.
.
. -.
.:
oJnJnunicallon au symposlulll. .. precitee p. 15
I~~ cl'. Consol11l11alion-DéveloppeJnenl. N° 9 Avril 1993. Bull dïnfo. IOCU ENDA. p. 5

610
conllils à l'amiable enlre entreprises et consoI1ll11ateurs 1o ', les représentant:-. de la 1-11î11e prirent de
engagements devant déboucher sur la réparation des domI1lages subIS par les \\iCI\\mes. Le
engagements des représentants de la firme portaienl entre autres sur le retralL du produ
localement fabriqué qui était à l'origine des dommages et son remplacemenl par le proclu
importé qui serait vendu au même prix que l'incriminé. Ils portaient également sur l'abstenlion cl
ne plus en fabriquer localement ainsi que la ferme intention de détruire le stock incriminé e
présencc des membres de J'association MAPBIN-CHAN. Tous ces engagements n'ayant pas éI
respectés. l'association décida de porter l'affaire devant les Juridictions d'Etat afin d'en oblen
l·exécution.
Devant les juridictions inférieures, le témoignage des victimes sur leurs malheurs pellT
d'obtenir de la part des fabricants, un ferme engagement pour ce qui concerne le remboursemeJ
des frais médicaux par elles déboursés pour se faire soigner. Mais non satisfaite de la décisio:
l'association MAPBIN-CHAN, tout en appelant le Ministère de la Santé à prendre "les choses c
main,,'K6 pour ce qui concerne la garantie cie la santé et de la sécurité des consommateurs dans
vente et l'usage des produits qui leur sont proposés, s'est pouf\\ue en cassation devant la COl
Suprême afin d'obtenir d'elle, un dédomI1lagement plus conséquent. plus adéquat des victimesl~
Nul doute qu'elle obtiendra gain de cause compte tenu de l'extrême sensibilité des magistrats de
Cour Suprême à la cause des consommateurs.
Il reste que tous ces actes posés par les deux associations de l'Ile Maurice sont d,
exemples de
représentation
responsable et efficace
dont
devraient
s'inspirer
les
autn
organisations actives du continent africain.
Si le droit d'agir en justice est essentiel pour la défense des intérêts collectifs d,
consommateurs, il ne devrait cependant pas être reconnu à toutes les organisations qui prétende
exister pour la cause des consommateurs. Au risque de voir se multiplier des actiol
intempestives exercées par des associations pour lesquelles l'intérêt collectif servirait de masque
d'autres intérêts, il est souhaitable et raisonnable à la fois de ne réserver ce droit qu'aux seul,
I~) cr. Principe N° 29 de la charte des Nations Unie~ pour la protection du Consommateur
IXC> L'expression est du porte-parole de l'asstx:iation MAPI3IN-CHAN, M .. J.
JHUGROO. d. Conso-Dévpl. N°
avril 1993 prée. p. 5
IX7 Conso-Dévpl. N° 9 avril 1993. p. 5.

611
associations etTcctivcment rcprésenlatives'RR. La sélection dcs associations pourrait sc faire par Je
biais de J'agrél1lenl 'R'I. Cc serait lil LIn moyen cftïcacc qui rcrmettrait de limiter les ahus ct d'éviter
ainsi les heurts consécutifs àun appel au boycott d'une marchandise déterminée.
cl Les associations de consommateurs et
le hoveoit des produits et services.
Le hoycott est unc sone d'appel il la grève des achats lancé contre le ou les produits ou
les services d'unc entreprise ou société commerciale rour des raisons particulières. L'opération
consiste pour unc association cie conSOl1lmatcuLS il inciter, dans un communiqué, l'ensemble des
consommateurs il s'abstenir d'acheter un ou l'ensemble clcs produits d'une entreprise ou de faire
appel à ses servicesl'I(). Si l'opération a tout pour déplaire à l'entreprise cible, le but souvent
recherché est la protection des intérêts des consommaleurs (1). L'analyse de quelques exemples
de boycott organisés par certaines associations africaines nous permettra de justifier nos propos
(2).
/ - Le recours au bOl'cott dans la protection des
intérêts des consommateurs
Le boycott n'étant pas contraire à la loi clans aucun pays au monde 191. son recours pour
protéger d'éventuels intérêts des consommateurs est un acte licite (1-1). Mais la validité de cette
licité est sujette au respect de certaines limiles (1-2).
1-1. La Iicéité de l'appel au boycott.
Le boycott des consommateurs a souvent été comparé à la grève des salariés d'une
entreprise, et ceci, pour une raison toute simple : dans les deux cas, il s'agit d'une action
concertée en vue de faire aboutir une revendication comllllllle. 192
Considérée comme une arme normale du mouvemenl consommateur, la menace du
boycott est prise très au sérieux dans tous les pays à économie libérale. '9J Cette légitimité du
recours à la grève des achats a été reconnue en France par un ministre de l'économie en 1980.
I~~ J. CALAIS-AULOY : "Ics actiolls cll.iuslicc des associatlolls dc cOllsommalcurs" articlc préc. p. 19~.
I~'I cr supra « l'agrément dcs associations dc consommalcurs »
1'10 FOURGOUX, MIHAILOY ct JEANNIM : op. cil. p. u?
l'II Idem; v. égaiemclll, CAS cl FERRIER; op. Cil p 164. N° IX2.
1'12 CAS cl FERRIER: op. cil. p. 162.N° 181.

612
Clôtur'lnl un culluclue organisé sur "le !,ou\\o!r éL'OnOllllque des consomnlateurs", le mllllS
<él'liL dans Ulle de ses allocutions, nlontré la\\'(Hahk aux actions de boycott organisées [laI'
Ilq
C'
l'
consommateurs
.
'etait a une rcconnaissance implicite de la licéité de "rappel au hoycot
l.'instilul national de la consommation (LN.C), établissement public pourtant investi d\\
nllss!on l!'II1!'ormati\\)n "ur les produit" et services. <est \\'U pour sa part. interdit d'appeler (
L'onSOll1maleurs au boycotL pour une raison autre que celle qu'on peut imaginer: celle de ne 1
empiéter sur le rôle mIlitant des groupcments de consommateurs I9), A moins d'aller au-delà et
l'accompagner d'unc démonstration de lorcc ou de masse, qui consisterait à acheter les prociL
ct les brCIkr sur la place publique à grand renfort de publicité, le boycott n'est en réalité "qu\\
lormc d'lI1formation destinée à prévenir le [lublic d'un danger. C'est donc un acte légal et 1
conséquent parfaitement licite, Mais la licéité ne V~1 pas cie soi, elle est subordonnée au respect
certaines conditions, notamlllcnt :1 l'oblectivité el à l'exactitude de toute information,i%
boycott est licite dès lors qu'il est exercé:
- à des fins exclusives de protection du consommateur ;
- pour des moti fs graves ct justifiés, 197
Pour ne pas tomber dans l'illégalité, encore faut-il observer les limites imposées d~
l'exercice de cc droit.
1-2. Les limites du droit d'appel au boycott.
Le boycott est une arme légitime à laquelle peuvent recourir les consommateurs organi~
pour défendre leurs intérêts, Si sa licéité n'est contestée dans aucun pays du monde, il n'y est r
non plus accueilli à bras ouverts, ceci en raison des périls auxquels il expose les entreprises cibl
Les consommateurs. en se détournant massivement des produits d'une entreprise ou d'u
profession, peuvent la conduire à la ruine et son personnel au chômage l9H , Aussi, la riposte q
constitue le boycott doit-elle être proportionnée à l'importance des abus commis au préjudice (
1'1.' FOURGOUX, MIHAllOY cl JEANNIN: op, cil., p, 117,
l')~ Colloque organi~é à Paris du 15 au 17 oclohre t980, cilé par CAS Cl FERRIER: op cil, p, 164, N° 182,
l'J:'' CAS cl FERRIER: op ,cil. p. 164, N° 182: Lamy droil Economique 1993, N° 8919,
1% Sur l'mllrancc cl le dénigremenl injuslilïé des produits: Trih, wm, l'aris, 27
février 1978, inédit, Cilé
FOURGOUX, MIHAllOY Cl JEANNIN: op ,cil, p, Us: sur les limites de l'information-boycott, cL"Nestlé COI
les béhés ')" Dossier prée. cl le jugement du Trih de l3erne du 24 juin 1976 qui s'en esl suivi,
1'17 FOURGOUX, MIHAILOY cl JEANNIN: op, cil .pU s
l'!S Lamy Droil Economique: 1993, N°89/9,

613
consommateurs l')'). "Un appeJ sans nu~ncc, ni objectivité au boycottage" d'un produIt quelconque,
peut être de nature ù engager la responsabilité de j'organisation, auteur de l'appe!:'O().
Quelles que soient les Irolltières assignées au boycott, il est cependant un point sur lequel
prolCssionnels ct consommateurs paraissent s'accorder: iJs considèrellt le boycott comme une
"
l '
,,-01,
,
'J'
1
1
r
d"
1(p
d
.
arille tltulle -
a nutl Iser que orsque toutes cs autres tOrInes
acllons- - sont
emeurces sans
effet. Il en sera ainsi notamment lorsqu'un groupement de consommateurs, après avoir essayé
sans succès les autres moyens d'action mis à sa disposition, Jancera un mot d'ordre de boycottage
jusqu'à ce que le producteur ou prestataire de services visé ait mis fm à une pratique menaçant !es
consommateurs dans leur santé, leur sécurité, leurs intérêts matériels et moraux, la levée du
boycott ne devant intervenir qu'une fois la revendication satisfaite"ol. Cette pratique a été mise en
évidence par certaines associations locales atin d'obtenir des professionnels concernés la
satisfaction des revendications qu'elles jugent légitimes pour Jes consommateurs.
2 - La mise ell évidence du droit d'appel au boycott
par les organisations de consommateurs.
L'exercice du droit d'appel au boycott des produits a déjù été mIS en pratique par trois
organisations en vue de protéger les intérêts des consommateurs. Il s'agit de l'association
MAPBIN-CHAN de l'Ile Maurice et des deux principales associations du Nigéria, le "Consumer
Times
Association
(C.T.A)"
et
le
"Consumer
Education
Protection
Couneil
of
Nigeria"(C.E.P.CO.N)". Ces deux ordres de boycott furent lancés pour protester contre les
hausses excessives des prix de certains produits de consommation courante.
Tout a commencé au début de l'année 1993 en Ile Maurice où l'association MAPBIN-
CHAN lança un ordre de boycott des boissons gazeuses. L'action consistait à amener les
embouteilleurs desdites boissons à réduire Jes prix de vente de leurs produits, prix qu'ils ont
199 Lamy Droit Economique 199J. N° X919.
200 Pour avoir arpelé
"sans nuance, ni ohjectivité au hoycottage de la viande de veau", l'Union Fédérale des
Consommateurs (UFC), s'est vue intligée une condamnation par la première Chambre civile de la Cour de
Cassation ct invitée à cesser sous astreinte, son appel au hoycott, au motif que cettc association dc consommateurs
"nc pouvait prétcndre êtrc afli-anchic des règlcs applieablcs cn matièrc de rcsponsahilité civile, ni raisonnablemcnt
1
soutenir qu'un appel au boycottage de la viande dc veau ne devrait pas être apprécié par référcnce aux notions dc
i
mesureetdcprudence".Cassciv; l''·e, 14 lëv.1989. G.P 20 mai 19X9,p.IX.
201
SAN DRIN: Rapport au colloque sur "Le pou voir économiquc dcs consoll1matcurs" Paris 15-17 oct. 19XO;
Ministère de l'éconoll1ie. éd. p73.
202 Interventions auprès du fabricant, des pouvoirs [)ublics, Campagnes de presse, actions cnjustice ...
20\\ CAS et FERRIER: or. cit. p.IM. n° 1XJ.

614
cxagéréll1cIlt augmenté après la libéralls;iI ion dc.s I1rl\\ desciih produits par les pouvoirs public
L'ordre cil' hoycott avait aussi une portée éducaliH', laquelle visait ü amener les conSOlllmateu
MaLlïiciel1s ~t utiliser d'autres boissons locales tcllcs que ''l'Aljouda'', le lait pastcurisé Jugées pit
saincs par l'Associatioll.
Cette idée de boycott prISe au cours d'une Assemblée Générale de l'Association fut suiv
d'une campagne cle distribution à travers toute l'Ile, de 100.000 formulaires aux consommateur
Ceux-ci devaient .signer ces formulaires appelant au boycott et les retourner ensuite
['associatioll. signature qui était synonyme d'adhésion au projet de boycott.
Les mèm
formulaires furent aussi envoyés aux fédérations syndicales, aux institutions pnmalres
secondaires, aux organisations non-gouvernementales ainsi qu'aux forces vives du pays. Averti(
officiellement du projet de boycott généralisé de leurs produits en raison de l'augmentatÎc
excessive des prix par l'association. les compagnies travaillant dans la mise en bouteilles de
boissons gazeuses furent invitées à réviser leurs prix à la baisse. Ce qu'elles firent immédiatemel
au grand bonheur des consommateurs mauriciens20I . La pression de l'effet du boycott venait ain
de donner aux consommateurs ce que la négociation n'avait pas pu obtenir, à savoir la baisse d(
pnx.
Au Nigéria, les augmentations abusives cles prix ont aussi été à l'origine du boycott mass
du pain qui a duré une semaine à l'appel des deux principales organisations du pays. En 199,
l'association des boulangers augmenta le prix du pain de l'ordre de 45 à 65%. Ce qui éta
contraire à la promesse de réduction à 30%. Face à ce comportement commercial anormal que
CEPCON et la CTA qualifièrent de "mauvaise foi", le boycott devenait le recours nécessail
pour faire cesser l'acte préjudiciable, et ccci, "à cause de la tendance à l'exploitation comparé
aux privations généraux auxquelles font face les consommateurs nigérians .. 20s . Ce boycott,
premier du genre, eut un taux de réussite de l'ordre de 60% selon les observateurs. Fortes de c
succès qui leur permit de faire fléchir les boulangers, les deux principales associations se SOI
engagées ü organiser des boycotts massifs saisonniers, contre l'exploitation de certains secteu
comme le transport, la poste, la fourniture d'eau et d'énergie dès lors que la gestion desdi
. d
'
l '
, ~,
' d
206
secteurs serait c nature a entamer es mterets cconol11lques es consommateurs
.
::!O·I Cr. COllsolllmation-Développement. N° 9, avril 1993.(1.4 et 5.
20~ « Consolllmation-Développemcnt ", N° 12. Décembrc 1994. p.5.
206 Idcm.

615
Les organisations des consommateurs onl donc clans le hoycott une arme légitime et
efficace pour défendre leurs intérêts. Mais, il s'agit d'un couleau ;'1 double tranchant dont il
faudrait se méfier. Son usage nécessite donc une dose cie précaution. car ù vouloir trop le brandir
avec "zèle", on peut toutefois tomber dans l'irrégularité ct engager sa responsabilité. Son
utilisation rationnelle exige de la part des organisations de con"ommateurs un minimum de
discipline interne. II y va de leur crédibilité.
SIl - l.:autodisciplinc des associations de consommateurs.
Dans sa mission d'éclaireur de la masse des consommateurs. une organisation de
consommateurs n'a pas que des droits, elle a aussi des obligations (a). Celles-ci lui imposent un
certain nombre de contraintes dont la non-observation peut être de nature à engager sa
responsabilité vis à vis du monde professionnel (b).
A - Les obligatiolls des associations de consommateurs.
La liberté d'information sur les produits et services dont jouissent les associations de
consommateurs est LIn droit fondamental et inaliénable. En même temps, elle fait peser sur elles
un certain nombre de devoirs: le devoir de prudence et d'objectivité dans j'information207 .
Sachant que toute information erronée ou injustifiée sur LIn produit ou un service est
susceptible d'engendrer de graves conséquences à l'entreprise concernée, toute critique venant
d'une association de consommateurs se doit d'être crédible et loyale.
La prudence et l'objectivité auxquelles sont conviées les associations leur imposent en
premier lieu un devoir essentiel : celui de contrôler les informations qu'elles sont appelées à
diffuser20s • Ceci suppose un minimum de vérification de l'information à divulguer. Certes, "toute
vérité utile aux consommateurs devrait pouvoir être dite", sans obstacle. Mais il faut reconnaître,
comme l'ont d'ailleurs aftirmé certains auteurs, que le droit de critique est "U1l véritable service
public" ; aussi, l'information qui en découle se doit-elle d'être "sérieuse,,20Y si l'on ne veut pas
induire en erreur le consommateur qu'on prétend informer.
1
207 Lamy Droil Ecollomique Il)l)l, N° !N52 et suiv. ; FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil. p.U IO .
20S Lamy Droit Ecollomique Il)l)l. NU WJ5l.
20'! D. GANACIA-MITZ et P.-F. DIVIER: "La presse el le droit de critique des pnxluits". G.P. 11)75.2, docl.. r
514.

616
1.L' Illl'ille devoil' cie prudcnce ct cl'objectivité oblige les informateurs que sont le
orgallis~lli()lh repré:--énLlti\\cs de COIlS()ll1l11ateu r." Ü préciser les procédés qui Ollt été mis en oeuvr·
pOli! fOlldél' bll'~ COllCluSIOIlS:'IO L'1I11P()ssibilité cle fournir des précisions:'ll, ou le fan de le
foncler sm cie :--Illlplcs hypothèses que les données actuelles de la science ne permettent pas cl
\\élillel ou cie c()lllill11CI :';: peut êtle constitutive de faute de nature à engager la responsabilité cl
l'associatioll. ~lUlcur cie Id critique.
Dé toute é\\idcIlCè. "il n'y a pas de présomption de bonne foi, d'impunité de princip
fondée sur la lilLtlité légitime de l'information: la preuve clc la bonne foi cloit être chaqué foi
rapportée par l' assoc iatioll pour se j usti fic l''' 211.
Cette l'l'marque. venant d'émll1ents auteurs,
Ile préjuge en rIen la légitimité de
associations cie consommateurs à défend l'e les intérêts de l'ensemble des consommateurs. S'il leu
est reconnu le droit de dénoncer les abus du monde économique, encore faut-il que 1.
dénonciation ne se transforme-t-elle pas en une campagne de diffamation dirigée contn
l'entreprise cOllcernée. La dénonciation doit être soutenue par des preuves concrètes et sérieuses.
Les organi.sations de consommateurs sont donc conviées, en raison de la fonction socialf
qu'clics excrccnt ct de l'influencc Lju'elles peuvent avoir sur le choix des consommateurs, à unt
obligation d'objectivité et de prudence dans la gestion de l'information à livrer au public. Celle-c
doit être "exacte, impartiale, et digne de contiance", d'olt une "vigilance toute particulière er
raison de la portée et du retentissement de l'information donnée,,:"-l. Le non-respect de cette
obligation peut être source de responsabilité de l'association, auteur de l'information.
B - les responsabilités des associations de consommateurs.
Pour apprécier le degré de responsabilité d'une association en raIson de son rôlé
d'informateur du public, il faudrait sans doute se référer à la jurisprudence française. notamment
aux principes dégagés avec netteté par le Tribunal de Grande Instance dans l'affaire Klebel
Colombes: "Si une association de consommateurs peut légitimement révéler à des usagers de:
210 CA. Paris 12juII1 1962. D.I962. p. 55.
211 CA. Bruxelles. 26 juin 1969. Journal des Trib.
1970. (1 151, cilé dans Lamy Droil Economique. 1993. N
8954.
212 Trih. civ. Seine. 20 novcmbre 1957. G.P. 1958.1.(1.94. à (1ropos des effels cancérigènes du (1ain.
2I.l rOURGOUX. f-.IIHAILOV el JEANNIN: 0(1. ciL (1. U".
21" Paris 6 l'évrier 19n. D. 19n. I.R. 304

617
di.?fectuosili.?s ou les dangers des produits mis sur le marché Cl saisir éventuellement en cas
d'mgcncc les autorités compétentes d'une demande de retrait desclils produits, cette possibilité a
pour corollaire l'obligation cie se livrer à cles étucles préalables objectives ct sérieuses pour livrer
au public une Information impartiale et respectueuse des droits des tiers.,,21)
Ainsi, pour avoir exigé sans fondement, sans véritications préalables, le retrait du marché
des pneus fabriqués par la socléti.? Klcber-Colombes, l'U.F.C. a vu sa responsabilité retenue au
plan civil pour avoir "mallqué il ses obligatiolls de prudence", et au plan pénal pour diffamation
21
par le Tribunal de Grande Instance de Paris. (' Le jugement fut, certes, infirmé par la Cour
d'appel qUI a décidé de surseoir à statuer .iusqu'~1 ce que le Conseil d'Etat, saisi dans le même
217
temps, se soit prononcé sur le danger des pneus en question.
Or clans un arrêt du 30 juin 1982,
le Conseil d'Etat a considéré que l'usage des pneumatiques litigieux ne présentait pas, pour la
sécurité dcs automohilistes, un danger de nature à justifier leur retrait du marché2l8 . Ce qui du
coup donnait raison au Tribunal de Grande Instance.
Dans une autre alTaire relativement plus ancienne,. la cour d'Appel de Rennes a retenu la
responsabilité cI'une association locale cie consommateurs pour avoir reproduit dans un tract des
informations alarmistes ct erronées sur des produits alimentaires et des boissons, malgré la
défense de cette association s'appuyant sur le fait que son objet cie protection et d'information des
consommateurs "la dispensait de toute obligation d'objectivité, par conséquent lui permettait de
publier un document sans vérification,,2J<).
220
De son coté, le Tribunal de Commerce de Paris
, dont la décision fut confirmée en
appel,221 a retenu la responsabilité civile de l'association éditrice à l'égard d'un constructeur
d'appareils électroménagers dans une espèce oLI l'erreur était évidente. La revue de l'association
. présentait <lU lecteur comme contenant 226 litres un réfrigérateur dont la capacité était en réalité
de 265 litres; et les commentaires qui suivaient accusaient le fabricant de tromper sur ce point les
consommateurs. Selon la cour, "une erreur incontestée sur une caractéristique essentielle de
2\\) T.G.!. Paris
Il) !lOV. Il)XO. D. 19X 1. 436. no[e 13. BOULOC; plus généralement, G. GOURDET : "Droit de
,
critique et conS()\\l1malioll" Rcv. Trim. Droit. C01ll. 19XO. P. 25 et suiv.
i
21(, T.G.!. Paris. Nov. 19XO ci-dcssus Cilé.
f
217 C.A. Paris 23 Juin 19X2. Consol11nla[ellrs-Actualilés 19X2. na 326.
m C.E. 30 juin 19X2. Rec. Lehon 19X2. p. 249. cité dans Lamy Droit économique 1993. na 9014.
211) C.A. Rennes 20 mars 197X. 50 millions de Consommateurs, seplelll11re 1978. na 93. p. 51
220 Trib. COIll. Paris 17 juin 1974. G.r. 24 JUIN 1975. p. 149 (UFC clAnhllr Manin).
221 C.A. Paris 16 avri 1 1976. G.I'. 1976. 1. pAl X

618
1';II' pdrl.'J! '(1ll1lliS ;1 C~~;ll comparatil" par une associatioll de consommateur, dont elle d\\'dit
avertie p;lr le fahriquant, constitue une faute dès )ors que les résultats publiés sc fondent sur
élémclll 111l.'\\;tC[ cl Cil flrcnt les conclusions crronées".
l\\lr ailleurs. la Cour de cassation, dans UIlC albire plus récente, a adopté LInt: allitl
hcaucoulJ plus sévère. Elle a considéré qu'une association avait commis une faute de natur
cngager .~a rcspons;tbilité civile, Jès lors qu'elle a pl'ésenté au public comme une certitude
caraclèrc d;lf1gcrell\\ de certains médicaments expérimcntés sur des animaux, alors que
résult;l!> de celle e\\péncncc nc permcttaient de dég;lger qu'une hypothèse scientifique 222 .
Oc même la Cour d'appel de Paris, dans llne affaire beaucoup plus récente, a cond,m
pour "campagnc llè dénigrcmcnt" injuslifié. une association de consommateurs cm'ers
constructeur de \\'oiturcttes, ccci pour avoir présenté un vice de construction prétendum
mortel, qu'aucun élément probant n'étayait, sur un ton inconciliable avec son devoir d'objecti\\'
sans procéder aux \\'êritications qu'elle avait le devoir impérieux d'effectuer avant de divulguer ~
~~~
opinIon
De toute é\\iJencc. l'objectivité et la prudence sont les exigences fondamentales requise
['encontre des informations dont les associations en sont les auteurs. En d'autres tenr
"l'intention légitime. la sincérité et le sérieux constituent les trois critères d'une information l'
coupable. même si elle portc atteinte aux droits dcs tiers,,22-l.
Ainsi "l'exercice du droit à l'information des associations ou des orgal1lsmes.
prétendent à l'indépenJance économique par rapport aux producteurs ou annonceurs, quelle qu
soit la foilne ct l'intention (boycott), ne les dispense-t-il pas d'accomplir leur mission" dans,
conditions conformes à l'intention de la communication: informer le public en se prévalant d't
qualité, d'une neutralité, d'une aptitude privilégiées, c'est diriger le consommateur el, en
d'erreur, le détourner d'un choix naturel, à son détriment comme à celui du producteur lésé2~).
tout cas, «l'objectivité ne supporte pas le qualificatif améniant (injurieux ou blessant
J'objectivité passive. ne serait qu'une objectivité altérée »~~6.
222 Cass
Ci \\" 2<. 12 ré\\'. 1006, D. 1006. p. 150,
22.' C.A. Paris 20 lb. 11)00. D. )1)00. I.R, p. l:n.
22~ FOURGOUX, MIHAIlOV cl JEANNIN: op. cil., p. 412.
m FOURGOUX, MIHAILOV ct JEANNIN: op. cil. p. ul~.
226 Idcm.

619
L'information clu consommateur par les associations chargées d'assurer sa défense
"néœssile donc b plus extrême prudence,,""7. Présentée d'ailleurs comme une contre-puhlicité,
elle peut lui être aussi néfaste que la publicité mensongèrc dès lors qu'elle lui est fournie avec une
margc suffisante d'eITeur""'.
Si les organisatiuns localcs en Afrique sont censées représenter Jes consommateurs dans
les limites de leurs possibilittSs el) Ylie de dél'cnclre leurs droits, on ne devrait pas perdre de vue le
rôle éminent que jouc l'Organisation Internationale des Consommateurs (O. I.e. ex-IOCU) dans la
promotion de ces droits aussi bien cn Afriquc que dans le reste du Tiers-Monde.
SIII - Rôle de l'Organisation Internationale des Consommateurs
(O.I.e) dans la promotion des droits du consommateur en Afrique.
L'O.I.C est une tëdération d'organisations de consommateurs dont le travail consiste à
assurer la protection et la promotion des droits des consommateurs à l'échelle internationale. Elle
assure la coordination de l'expertise et de l'expérience de plusieurs associations dans presque
tous les pays du monde. Fonctionnant à partir de ses bur~aux régionaux et sous-régionaux -
Penang (Malaisie) pour l'Asie et le Pacifïque : Santiago (Chili) pour l'Amérique Latine et les
Car<ùbes ; Hararé (Zimbabwe) pour l'Afrique -, l'Organisation s'est véritablement impliquée,
pour ce qui concerne ce dernier continent, dans la gestion des problèmes consumériste en vue de
promouvoir la vulgarisation des droits du consommateur dans cette partIe du monde (A). Cette
implication de l'orc se manifeste sur le terrain par l'organisation d'activités concrètes en vue de
l'mtégration des principes directeurs des Nations Unies dans les législations nationales et de
J'adaptation du consommateur local aux réalités économiques du moment (B).
A - L'implication de l'O.l.C dans la vulgarisation des
droits du consommateur local.
Organisation~~9 à vocation internationale, l'O.I.C s'intéresse au plan mondial, à tous les
problèmes présents ou futurs des consommateurs, en particulier ccux des P. Y.D encore sous ou
pas du tout protégés et OLI elle joue un rôle important clans la promotion de leurs droits
conformément aux principes des Nations Unies (a). Mais s'agissant des P.Y.D, une implication de
,,7 T.G.I, Toulouse 2 juin 19X2. inédit, Ü propos de la reproduction du tract de Ville-Juive pour une association
locale de COnSOnlll1aleurs. cité par FOURGOUX, MIHAILOV cl JEANNIN: op. cil. p. U I I..
22K FOURGOUX, MIHAILOV et JEANNIN: op. cil., p. U'·l.

620
plu" l'l1 plu~ lïOis";lI1tc l'l1 faVl'lIr du C0I1S01ll111i1tCUI" ,1I'ricain S'l'st faite ressentir ces derniers temp
sur Il' conllllcill. (\\~Ik-ci v'ise ù aicler le mOllvement consommateur a!"ncain dans ses dforts pou
Li [)I"(lnlotion aJl1si ljlle la vulgarisation Jes droits du consommateur dans tous les pays d'Afriqu
(h J,
il) L'Ü.I.e dans la lutte pour la pr-omotion et [a vulgarisation
des cl mits du consommateur dans [e monde.
Les actions Jc l'OIC en yue de l'amélioration du sort du consommateur dans le mond
SO!1l diversilïées, Elles touchent tous les domaines en relation avec l'activité consumériste. 0
peut cependant les regrouper en deux catégories: il y a d'un côté, les actions relatives à 1
protection Je la santé ct de la sécurité du consommateur, et de l'autre, celles qui sont orientée
vcrs la prolecLion Je ses intérêts économiques,
1 - Les actions de l'Ole relatives cl la protection de la santé
et de la sécurité des consommateurs.
Lors de son XIY"ll1è congrès tenu ù Montpellier (France) en septembre 1994, l'OIC (e>
IOCU) a posé plusieurs actes dont les orientations sont motivées par le souci de changer le véc
quotidien du consommateur des P.Y.D. Parmi ces actes. on recense entres autres les questior
essentielles relatives ~t la protection de la santé et de la sécurité des consommateurs des P.Y.l
ainsi que de l'environnement, élément indispensable ù leur survie et à leur épanouissement.
Pour ce qui concerne la santé et la sécurité, d'importantes résolutions furent adoptées pc:
les participants dans l'intérêt du consommateur, S'appuyant sur une des résolutions du congrè
de l'Organisation tenu à Madrid (Espagne) en septembre 1991, les participants ont vivemer
critiqué certaines pratiques qui sous-tendent le commerce du tabaé10 malgré ses inconvénients (
qui le développent au mépris de la santé des usagers. Il s'agit notamment des pratiques relatives
la sutwention, ü la publicité et au "sponsoring" qui sont très bénéfiques aux firmes productricE
de tabac.
Ces pratiques commerciales, telle que la subvention, sont facilitées par certains pays dOl
les lïrmes productrices sont originaires. On peut citer entres autres les Etats-Unis c'
229 L'OIC a son siègc ù Londres (Angleterre) Oll sonl aussi logés le Programme pour les Eeonomies Développée
le Programme pour les Economics en transition ell'Unilé pour les Campagnes cl Politiques Globales.
210 CI" Consol1l1llalion & Développcment N° 12; Bull. Trim. d'!nl"o. OIC-ENDA ; déccmbre 1994 prée. p. 8

621
subventionnent des rlrouuits tabatiers jugés iITI[Jro[Jres ;1 la consommat ion sur le marché local ct
Cluisont ensuite exportés vcrs c1'autres pays, en particulier dans les r.Y.D. Forte de cc constat ct
« bec aux énormes défis Ciue doivcnt relever les systèmes cie santé publiqLle ct
privéc ». ct
s'appuyal1t sur le volct « santé pour tous» pour l'an 2000 réalisé rar l'OMS clans son
programme relatif ù la santé, l'Organisation Internationale des Consommateurs a fait voter par les
participants unc résolution invitant ses 111emores Ù « rousser l'OMS ct les gouvernements ù
I1lClll'e en placc des r1ans d' act ion adaptés ct cnïcaces» pou vant permettre d' atte indre les
ohjcct ifs fi xés dans ce prograI11l11c. è\\ 1
Outre celle recommandation.
le congrès a non seulement encouragé l'utilisation
rationnelle des produits pharmaceutiques, mais aussi demandé aux Etats la mise «en oeuvre des
politiques nationales sur les médicaments dans l'esprit du concept des médicaments essentiels
de l'OMS »et la livraison « aux consommateurs et agents de la santé une information tïable et
1
objective dans ce domaine »2 2.
Des P!'opositions concrètes furent aussi enregistrées dans le domaine relatif à la. sécurité
des
consommateurs,
notamment
dans
le
domaine
alimentaire
et
dans
le
secteur
de
l'environnement. En matière alimentaire, et dans le but d'améliorer la transparence des procédés
des normes dans ce domaine. une résolution a été adoptée par les participants au congrès de
1994. Celle-ci invite « les associations des consommateurs à davantage travailler à l'int1uence de
la Commission Codex Alimentarius2J3 par l'élaboration de registres publics sur le profil et les
matériels des délégués nationaux et des membres des comités et par la mise sur pied des Comités
Consultatifs Nationaux sur le Codex »2l4. S'agissant de la biotechnologie alimentaire, notamment
de la transformation génétique des produits, la résolution souhaite que les consommateurs soient
suf1ïsamment avertis des risques qu'ils courent en consommant ces produits et ce au moyen d'un
2l5
étiquetage informatif adéquat et de la surveillance quant à l'utilisation de ces produits.
Pour ce qui concerne le volet environnement, les participants ne furent pas insensibles aux
menaces qui pèsent sur lui. Partant du fait que celui-ci a des incidents directs et indirects sur la
consommation, le congrès a relevé les atteintes qui lui sont portées tels que l'efl'et de serre et la
l
1
è.lI "Consoillmalion-D~veloppeillent"na 12 pr~cité. p.l'\\.
~.l' "Consommation-Développement" n° 12 précité, r.~.
~1.1 Le codcx alimcntarius. Rev. Concurrencc-Consommation n° 35, p. 9 ct suiv.
21.1 Ibid. p. 9.

622
dégradat ion de la couche d'ozone qui sont de graves Illenaces puur la survie dl' L'()nSUll1l11atcur
Aussi, sa protection doit-elle être une des préoccupations centrales des Etats et de ... organis:dio[
internationales. Dans celle optique. les institutions ayant Il' pouvoir de décision ilLJssi bien d~1I
les instances nationales qu'intcrnationales se doivent de prendre leurs responsabilités dans l
domainc. notamillent par la mise en place «des stratégies il la fois persuasives et coercitives
ainsi que « de ... technologies efficaces, compatibles avec la protection de l'environnement ),2'1>.
Si l'élaboration des programmes cl des politiques appropriées est nécessaire po
l'ohtention cies résultats concrets. ceux-ci une f()is initiés doivènt concourir à la réductil
suhstantielle de ces formes de consommation domestique, industrialisée, commerciale
agricoté'7. Dans celle vision des choses, l'élaboration ct la promotion des stratégies alternati\\
moins coOteuses, plus accessibles et non brevetées sont nécessaires. Leur vulgarisation devr
être laissée sous la responsabilité des organisations dc consommateurs qui, par des campagn
dïn!ormation rondement menées, les porteront à la connaissance du public pour leur mise
pratique2~x. Ce souhait émis par l'OrC témoigne de son l'Clic actir dans la lutte pour l'amélioraü
des conditions de vic du consommateur dans le monde.
2 - Les actiolls de l'Ole relatives à la protectioll des illtérc
écollomiques des COIlSOlllllUlteurs.
Les efforts de l'OIC en faveur du consommateur couvre!1l aussi le domaine économiq
pris dans toutes ses dimensions. D'importantes résolutions furent adoptées par les participants
congrès de Montpellier en vue d'améliorer la condition du consommateur dans ce domai,
Celles-ci sont justifiées par plusieurs raisons. Elles sont toutes d'ordre mondial. Il y a te
d'abord le phénomène de la mondialisation de l'écollomie dont les multiples bccttes int1LH
très largement sur le niveau et la qualité des produits destinés ü la consommation. Ensuite
généralisation de la libre circulation des produits et des services dans un contexte de cr
économique permanente est une donnée qui frappe durement les économies les moins avancée~
intluence considérablement le pouvoir d'achat des populations des P.V.D. En1ïn l'accord
l'Uruguay Round, dans certains de ses aspects, n'est pas de nature à présenter des avant a
2.\\5 Ibid.
Ibid. P. X.
2.17 Le codex alimenlarius. Rev. Concurrence-Consommation n° 35. p. X.
2.\\~ Consommation & Développement N° 12 prée. PX.

623
1
pour les consommateurs:"') On peut citer entre autrcs les mesures visant ~l sanctionner les
.~
f
entreprises étrangères pratiquant le «dumping» sur le marché d'un autre pays, c'est-il-dire,
1
J
vendant leurs marchandises il des prix relativement bas par rapport aux prix pratiqués par les
1
entreprises
locales,
il
verser
il
ses
dernières
des
«droits
antidumpll1g
ct
des
droits
j
compensatoires »:'1IJ dès lors que celte pratique leur cause préjudice. Si cette mesure permet dans
1
une certaine de rétablir la conCUITcnce sur des bases saines ct loyales, il feste qu'elle rél1alise L1ne
grande majorité de consommateurs ü Caihlc revenus en leur bloquant "accès aux marchandises de
même qualité que celles produites par les entreprises locales il un prix relati\\ement bas. Une telle
mesure n'est pas de nature il présenter des avantages pour les consommateurs en cc sens qu'elle
inl1ue considérablement sur leur pouvoir crachat. Et dans cette situation, les consommateurs des
P.Y.D. sont les plus exposés quant à l'accès aux produits de première nécessité à un prix
relativement abordable. Par ailleurs, la libéralisation excessive prônée par cet accord est de nature
il favoriser l'exportation des produits dangereux ou impropres il la consommation dans ces pays
dépourvus de moyens de contrôles adéquats pour détecter leur degré de nocivité. Ce qui accroît
les risques pour leurs consommateurs.
Devant tous ces constats, les participants au congrès de l'OIC (ex. IOCU) ont. il travers
des résolutions, exhorté les associations de consommateurs pour qu'elles fassent pression sur les
Etats et les Organisations Internationales afin d'obtenir d'eux le respect des principes du
multilatéralisme accompagnés de mesures visant à protéger les intérêts des consommateurs:'41.
Des campagnes ont par ailleurs été sollicitées en vue d'obtenir la restriction de l'accès des P.Y.D
à la propriété intellectuelle (y compris les brevets) ct la réglementation sur l'investissement
étranger et des
normes de
sécurité alimentaire et sanitaire:'4':'.
Les
associations
de
consommateurs ont aussi été encouragées par le congrès « à mener une lutte hardie pour
promouvoir les intérêts économiques des consommateurs dans le commerce international par des
campagnes
en
faveur
de
l'application
de
la
déclaration
ministérielle
sur
l'assistance
21'> Consommalion & Développemenl N° 12 préc. PX.
!
.,
2~1I Cf en cc sens« L'Accord Général sur les tarifs douaniers el le commerce (GATT) ct t'Org<lIlisation Mondiale
du Commerce (OMC), précisement le D(X;U1l1elll l'clatir Ù l'Accord du GATT, article VI. in Organismes
Ecollomiques Inlernationaux, Dœulllents rassemblés cl publiés par Louis SAI30UR1N, Agence de Coopéralion
Cullurelle ct Technique. Colleclion Relour aux Textes. La doculllentation française, Paris 1994, p. 215 el suiv.
w Louis SAI30URIN. op. cil P 9.
2~2 Ibid.

t
1
1
1
!
626
1
~
pmnlOUVOlr sur les trois continCllts du Tiers-Monde ~l travers ses diverses contrihutions aussI hi~
l'
cn matériel clu\\~n nlllyens lïnancicrs comme nous Je montre l'exemple afl'icain,
î~
h) L'Ole dans la lutte pour la [)l'omotion des droits
1
du consommateur en Afl"Î<!ue.
j
j
\\
Pour apprécier la valeur de l'implication de l'OIC dans la lutte pour la promotion cq,~
1
droits du consommateur en Afrique. il faudrait partir de l'analyse de ces droits basés sur f
taxonomie des pays africains en ce qui concerne la présence plus ou moins active c,
J
~
!
organisations de consommateurs, Sur ce point, les pays africains se classent en trois üran4
<:-
~
catégories:
,
J
~
:1
II y a tout c1'abord les pays sans organisations de consommateurs connues. Ils représent~
1
un peu plus du tiers (1/3) des pays africainsè-lS Il y a ensuite les pays où le mouvement est
1
,1
è
1
pleine émergence. Ces pays sont, en nombre, légèrement au-dessus du premier groupe .J9, Il J
1
l
enfin Je dernier groupe composé de pays où les organisations de consommateurs s
1
relat.ivement \\·alides. Ils sont peu nombreux et représentent moins du tiers de l'e,nsemble des pa
,j
J
composant le continent africainè'o,
!
~
f
1
Cette taxonomie qui permet de cerner de plus près le degré de développement l
'.
mouvement consommateur, et par conséquent la nature et l'état des droits du consommateur 101
1
témoignent du retard pris par ce continent dans la promotion des droits du consommateur. El
1
!li
1
:1
J
justifie aussi l'implication de plus en plus croissante de l'OIC sur ce continent en vue
l
contribuer ù la vulgarisation rapide desdits droits.
Le rôle actif de l'OIC sur le continent africain se manifeste à partir de son Bure;
Régional basé à Hararé (Zimbabwe). S'appuyant sur deux programmes sous-régionaux, celui 1
l'Afrique de l'Est et Australe et celui de l'Afrique de l'Ouest et du Centre, la stratégie du Bure,
régional de l'OIC s'articule autour de deux axes prioritaires basés sur la taxonomie des Et;.
africains en matière de protection du consommateur: il y a d'un côté, la stratégie basée sur l'ap .
ù l'émergence d'associations et leur' développement institutionnel; de l'autre, celle orientée Vé
i
"articulation et la définition de politiques et de campagnes sur les thèmes de consommation.
\\
2·IX cr C. A. KANO LITE : Communicalion au symposium ... précitée. p. 8.
2·1'1 ibid. P 9.
2,0 ihid, PlO.

627
L'appui Ù l'émCl"gencc d'associations èl kur développement institutionnel comprend des
préoccupations comme "le développement ct la diflusion cie matériels d'éducation, l'organisat ion
d'ateliers de formation sur les techniques utiles au développement des organisations (recherche de
financcment, techniques de recherciJe, techniques de négociation et de communication, etc.),
l'échange d'informations ct d'expériences ~l lravns les hulletins de liaison, l'appui avec des
suhventions pour l'étahlissement el l'équipement des organisations, etc.,,2)1.
La stratégie relative ~l l'artIculation ct ù la définition des politiques de campagnes sur des
thèmes de consommation est plus orientée vel's la masse des consommateurs et préfigure le rôk
des organisations de consommateurs ~l son égard. Préoccu[Jée par J'amélioration du sort de ces
derniers, clic est plus tournée vers leur sensibilisation, élément essentiel pour leur intégration dans
les nouvelles données de J'économie moderne. Les thèmes autour desquels la sensibilisation est
perçue comme prioritaire sont ceux qui concernent Je commerce et l'économie, la santé et la
sécurité des produits, l'alimentation et la nutrition, J'information et J'éducation du consommateur
(perçue comme un thème transversal), la relation entre le consommateur et son environnement,
les 'services publics tels que l'eau, J'énergie (électricité et gaz) et transports; la' normalisation et les
services financiers 2)2.
La mise en oeuvre de toutes ces stratégies est sujette ù la réalisation de deux exigences
essentielles:
- l'existence d'un environnement législatif f~lvorabJe à la protection des consommateurs
accompagné des mécanismes d'application adaptés aux réalités locales;
- la représentation des consommateurs dans les instances décisionnelles pour y véhiculer
2
des perspectives proches de leurs préoccupations quotidiennes )\\,
Et la réalisation de ces exigences fondamentales relève du domaine des pouvoirs publics,
c'est-à-dire de l'Etat.
)
i
2:\\1 KI\\NOUTE: "Collllllunication ... précitéc, p 12. 2:\\2 ibid.
2:\\\\ C. 1\\. KI\\NOUTE : cOllllTlunicatioll au symposium ... précitéc, p. 12. Cr. égalcmcnt cn cc scns « Consommatioll-
Dévcloppclllcnl » N° 9 avril 1992, p. Cl, N° 10, P. 5.

628
Il) Les afti\\'iti's de l'Ole pOUl' la vulgarisation des droits
du consommateur en Afrique.
[lk~s SOlll IH)llll1reuses, Cl l'on ne saura les énumérer toutes. Aussi, nous conlenleron
nous de Cller les principales, celles qui ont eu un impact plus ou moins considérable dans
population. Il \\' a lOtit d'abord les activités relatives à l'information et à l'éducation (
consomm~llèur ( Il : cnsuite viennent celles dont le but vise ~I obtenir des pouvoirs publics IOGII
l'adoption des législations protectrices des consommateurs ainsi que la reconnaissance de le
droit à être rcpn5scntés dans les instances nationales régionales ct sous-régionales pour la défen
de leurs intérêts (2).
J - Les actil'ités relatives il ['information et à
l'éducation du consom/llateur.
En dehors de ses bureaux sous-régionaux, la présencc de l'OIC dans les autres pa
d'Afrique se manifestc à travers les associations loe<iles. Elle participe à l'information et
l'éducation des consommateurs par le soutien ou la collaboration qu'elle apporte auxdil
associatiolls dans ce domaine. La réalisation de ses ambitions se manifeste par l'assistance qu'e
leur apporte dans leurs efforts en vue d'offrir au consommateur une meilleure information
éducation possible.
Conformément à l~l dimension de sa tâche, les interventions de l'OIC sur le continent
manifestent par la tenue d'Ateliers régionaux dont le but consiste en la vulgarisation des dre
des consommateurs dans le domaine relatif à l'information et à l'éducation. On peut citer à 1
effet plusieurs Ateliers organisés dans ce sens par le Bureau Régional de l'OIC-Afrique. C'est
cas notamment de l'Atelier de Formation de Formatrices en Activités de Consommation
Développement tenu à Mbour au Sénégal en 1991. Trente-cinq futures formatrices de 1
associations de la Fédération des Associations Féminines du Sénégal (FAFS) venant de
régions du Sénégal ont participé à cet Atelier autour des thèmes suivants:
- Le consommatcur critique : le débat autour dc cc thème visait plusicurs objectib'
que la découverte des comportemcnts d'achats, la rccherche de l'inlormation sur les produit:

629
\\eur~ ~uhstituts, la lecture critique du Illessage puhlicitaire ainsi que la portée éconolllique el
environnenlenl;t!e des choix de conSollllllation 2'~:
- Le conSOllllllalèur actif: ;[ travers cc Illoduk, J'/\\telier vcut former le conSOlllnlateur il
une l1leilleure connaissance cles stl"uctmes chargées de sa protection, à la maîtrise des lllocLtlités
de leur saisine ainsi que les stratégies de prise en charges de~ différentes réclamations qu'il sera ;[
méme d'introduire 2",;
- Le consolllmateur solidaire:
par' cc thème, l'Atclier vise essentiellement les jeunes
associations en mettant il leur dispositioll les informations susceptibles de leur permettre de
renforcer leurs caracités organisationnelles, kurs techniques et sources de recherche de
financements ainsi que ks tcchniques d'une représentation efficace devant les instances aussi bien
~.
1
. . . .
')Ô
etatlques qu extra-etatlques- .
La mission des 3S formatrices consiste en la démultiplication de la formation reçue auprès
des membres de leur association respective. D'une manière générale, elles auront pour rôle de
s'investir d~ll1s l'éducation de l'ensemble des consommateurs de leur région. Ce qui au'ra pour effet
de révolutionner leurs comportements dans leurs actes de eonsolllmation quotidienne.
En Ile Maurice, l'OIC a aussi tenu en j 99J en collaboration avec les deux associations
locales un Atelier sur l'éducation des consommateurs ruraux. L'Atelier qui a regroupé 16
associations de consommateurs de 15 pays a perlllis "de présenter et d'échanger les activités
d'éducation des consommateurs menées par les associat ions en zones rurales, d'identifier les
stratégies utilisées, (et) de définir les priorités d'action,,2:\\7 dans un cadre concerté pour le bonheur
des consommateurs des pays des associations rarticipantes ainsi que des autres pays dont les
associations sont encore absentes dans le concert du mouvement consommateur africain.
L'Atelier a débouché sur la mise en place par les participants d'un groupe de travaiVréseau
africain sur l'éducation du consommateur pour l'échange d'expériences, l'appui technique et
1
1
2)·1
KANOUTE : cOllllllunication au SYIllPOSlulll ... prcCllcc. p, 12. CL égalemcnt cn cc scns «Consommalion-
Dévclo(1(1clllcnt » N° <) avril 1<)<)2, p. 6, NP 10, 1>. 5.
2:;, ibid.
N,A. C.KANOUTE: Communication au symposium ... précitéc, (1. 12.
2)7 A.C. KANOUTE: commullicalioll au sym(1osiulIl ... (1réciléc, P. 12.

630
lïl1;II1Lïer:1 id ré;tllsallun (les prU!L'[S ,1'édul';lli()11 lorl11uks pdr !curs organisations", groupe
2
Ir:I\\;liI/IL:se;llI dOl1l la comilindtiol1 est dssurée p;lr le Bureau Régional de l'Organis;tlion \\S
L'Ole a. p;u ailleurs. organisé en 1991 ~I Dakar (Sénégal) et ù Nairobi (Kenya) de
:\\tellel'" de sL'nsihilisdli,)ll-I()lîl1alH)n des Journalj,.;!es aux problèmes de consommation, (
AtelIers lmt regroupé 74 COI11IllUI1icalL'urs de la presse écrite. parlée et audiovisuelle de 24 p,
africains, L'ohjectil est de "susciter la cllilahoration entre les associations naissantes et les médi
présenter el échangcr (ks techniques d'an;lIyse ct de présentation de l'information sur
prubl~mes (k cOlholllmation. (ct) de Ll\\lllîSer le lr"ilelllent de 1'il1formation-consommation p(
une meilleure protection (Cl) éducation de," c()nsommateurs,,2S~. Les résultats des deux Ateli
ont eu pour conséquences immédiates l'organisation par les associations locales, en collaborat
avec
les
Journalistes
locaux.
des
seSSIons
nationales
d'éducation
et
d'information
(
consommatcurs
dans
le,.;
dilférenLs
pays
africains
pour
le
plus
grand
bien
de
le
2
consommateurs (1\\) Mais les activités clc 1'0lC nc s'arrêtent pas aux seuls domaines concern
l'information ct l'éducation cles consommateurs, celles-ci vont au-delù pOllL' en embrasser d'autl
notamment ccux relatifs ~l la législation protectrice d ù la représentation cles consommateurs.
2 - Les activités relati~'es il l'adoption des législations
protectrices et il la représentation des COnSOI1l11l{lteurs.
Les efforts de 1'0lC en faveur des droits des consommateurs sur le continent africain sc
énormes. On cite parmi ceux-ci les efforts déployés auprès des différents gouvernements (;
d'obtenir non seulement j'adoption des 'légis1ations -protectrices desdits droits, mais aussi l
reconnaissance de ces consommateurs ù la représentation dans les différentes instances aussi b
nationales qu'internationales.
Les efforts déployés en vue de l'adoption par chaque Etat d'une législation protectl
s'expliquent par plusieurs raisons. Depuis l'adoption en J 985 des principes des Nations Unies
son Assemblée Générale, lesquels donnent aux gouvernements, surtout ceux des P. Y.0, un ca
ü utiliser lorsqu'ils élaborent ou renforcent leurs politiques et législations en matière de protec!
des consommateurs, peu de progrès ont été faits dans cc sens dans les P.Y.O. S'il existe d
2SX ibid. P. 13.
",') ibid., voir sur cc point l'arlicle de presse publié par Philippe HADü : "Quelle presse pour la promotion
droits du consollllll,lleur en Afrique '/" in ]ouranal "La Nation" du 31 déL:Clllbre 19lJ 1 P. 4 (Rép. du Bénin).

631
l)l\\~sllue (ous les pays une législation en hlveur du consomnlateur. le plus souvent d;lI1s le domaine
relatif' à la réglementation des prix, il résulte, selon un constat général, que celle-ci est loin d'être
en cOIlI<Hnlité avec l'ensemble des droits évoqués dans les principes directeurs pour la protection
è61
des COnSOn1l11ateurs votés par l'Assemblée Générale des Nations Unies
. L'absence de structures
d'éduc;lt ion, le manque d'inl<JrI11ation et de laboratoires équipés pour le contrôle des produits, la
réduction des ellectil"s affectés aux activités relatives à la protection des consommateurs sont
autant de points qui témoignent du vide législatif ct du manque de volonté (politique) ~l prendre
èüè
en mains les problèmes consuméristes dans les P.Y.D. clonc dans les pays africains
.
Face ü ce vide législatif, deux Ateliers sur les Principes Directeurs des Nations Unies pour
la Protection du Consommateur ont été initiés par l'OIC en juillet 1992.respectivement à Dakar
(Sénégal) et à Kadoma (Zimbabwe)è63. La tenue de ces deux Ateliers avait pour but de f~lÎre le
point sur l'état d'application de ces PDPC. A cet effet. trois documents de base conçus à partir
d'études réalisées par des conseillers du programme OIC-Afrique ct de certains avocats cics
associations nationales des consommateurs ont permis de mesurer le fossé qui existe entre les
è64
législations nationales et les PDPC
. Les études réalisées mettent en évidence les contours cies
espaces linguistiques et/ou culturels des pays dont les législations furent choisies comme
échantillon en matière de protection juridique des consommateurs. On retrouve entre autres la
législation d'inspiration française avec le cas du Sénégal, la législation anglorhone à partir du cas
è6
du Kenya ct la législation d'inspiration néerlandaise à partir de l'exemple du Zimbabwe :\\. Le
choix de ces trois pays n'est pas neutre. Il est motivé par des raisons liées à la colonisation et les
rarports juridiques qui lient ces pays à leur ancienne métropole. Il s'explique aussi par le fait les
législations des pays africains sont principalement faites autour ces trois exemples d'inspiration.
Aussi, tout modèle de législation qui en ressortirait à l'issu des travaux, serait une composante
équilibrée des réalités sociales, économiques et culturelles de tous les pays, l'objectif des
rarticirants étant de mettre concevoir une législation applicable partout en Afrique. C'est donc
tout un problème de dispositions de législatives transposables d'un pays à l'autre que les
2(,11 ibid.
j
2(01 cf cn cc sens Alpha A. SALL : " Protection du consommateur en Afrique". Atelier Régional de Dakar du 1"' au
1
3 juillet 19lJ2, in Consommation-Développelllent N° X. Nov. 1992 précilé, p. 5.
2("
cL en cc sens Alpha A. SALL: " Protection du consolllmateur en Afrique". Atelier Régional de Dakar du 1er au
3 jui Ilet 1992, in Consommation-Développement N° X, Nov. 19lJ2 précité, p. 5.
~h.\\ cL en cc sens Consommation-Développement N° X précité p.5.
26·1 cr. A. C. KANOUTE : Communication au symposium ... précitée. p. 13.
2(,) ihid.

632
participanh aux deux Ateliers ont \\'oulu mettre en place pour le bien du conS0l1111l:1leur local.
quelque pays qu'il soit, car quel que soit le pays d'appartenance. le consommateur alriC:lln l'e~
le même. confronté ~l Ull seul problème: celui de sa protection dans ses actIvités COllSull1érlStes
tous icSIOLII·S.
Ces deux Ateliers qUI ont regroupé plusieurs p<trtlclpants. notamment des organis:llic
cie consommateurs el syndicales, cI'institutions universitaires et cie clépartements ét:ltiques charÉ
de la protection du consommateur, ont permis d'informer et sensibiliser les décideurs politiques
économiques sur les droits des consommateurs ~I travers l'existence des PDPC. Ils ont au
permis de rechercher des mécanismes susceptibles de faciliter la mise en oeuvre par
associations en collaboration avec les structures étatiques desdits principes par la faveur de
mise à nu des défaillances qui existent entre ces principes ct les législations nationales aClUelles'
Si l'on prend comme référence l'Atelier Régional de Dakar tenue du J'I au 3 juillet l'j'
on constate que son apport fut considérahle pour ee qui concerne les eXigences émIses
l'encontre des pouvoirs publics africall1s. A l'issue de cet Atelier, plusieurs recommandatic
furent adoptées par les participants, notamment les résolutions relatives ù l'éduc:ltlon et
l'information du consommateur, aux mesures rermettant d'obtenir réparation, au cont
cI'adhésion, à la représentation du consommateur et sa protection conformément aux PDPC
Toutes ces recommandations furent soumises aux dirtërents gouvernements, en particulier
chef cie l'Etat sénégalais, ~I l'époque président en exercice cie la Communauté Economique [
Etats cie l'Afrique cie l'Ouest (C.E.D.E.A.O) et de l'Organisation de l'Unité Africaine (O.U.A.r
Les associations participantes devraient entre autres demancler ù leur gouvernement respec
cI'écrire au Département cles Affaires Economiques ct Sociales Internationales cles Nations Un
en vue de la tenue cI'un séminaire africain sur la protection du consommateur. les Nations Un
acceptant d'organiser un séminaire pour faciliter l'application des PDPC dès que la demande St
bite par trois gouvernements africains2(1). Les cliverses pressions des associations locales (
débouché sur des demandes lesquelles ont abouti tout récemment à la tenue d'un Symposium 1
2(,(, ibid. P. 14.
267 Alpha A SALL : ar!. Précité, p. 5.
2(,S ihid,
2(,') Alpha A SALL: Article précité, P .. 5. ,

633
la COlllmission Econoillique des Ndl iOI1S Unies pour l'r\\rl'ique en no\\cl1lhre 1()lJ4 d Da!-;ar
(Sénégal lc70
L'intérêl dl' la tenue des Ateliers a été considérahle pour l'émancipation des droits du
consolllnlaleur en !\\l'rique. Ils ont permis dl' mettre en place lku\\ groupes de travail elfll'al'es
chargés de conseientisL'r lès pouvoirs publics en vue d'une plu:-- grande prise en considération des
problèmes de leurs consommateurs. Ces cieux groupes cOll1posé:-- entre autres cles avocats ayant
réalisés les études dont les documents ont servi de point de repère aux participants dans le
domaine législatif, des leaders des associations ct Icursjuristes ont été chargés par lesdits
participants d'élaborer une législation modèle pour la protel'lion des consommateurs en
c71
Afrique
. Tous ces efforts visent à obtenir des Nations Unies ct de ses institutions spécialisées
telle que la Commission Economique pour l'Afrique une l'ranche collaboration en vue de
l'organisation de la consultation africaine pour la prOll1otlon ct l'adoption d'une législation
c7c
appropriée sur la protection du consommateur en Afrique
.
Le développement du mouvement consumériste étant {Out acquis à la cause des
consommateurs, celui-ci ne saurait connaître d'épanouissement sans L1ne véritable représentation
du consommateur dans les instanœs décisionnelles aussi bien au niveau national, régional que
sous-régional. Ainsi, la représentation du consommateur dans ces instances revêt-elle une
importance capitale dans l'axe de travail de l'OIC en Afrique. A travers ses Bureaux Régionaux.
l'Organisation oeuvre pour meilleure représentation des consommateurs dans les différents pays
africains. Un Atelier sous-régional en date du 6 au Il décembre 1993 organisé par le Bureau
Régional de Dakar et par l'Organisation Internationale pour l'Environnement et le Développement
du Tiers-Monde (ENDA) à Cotonou (Bénin) a mis en évidence l'importance de la représentation
des consommateurs dans les instances décisionnelles de la sous-région. Le thème de l'Atelier
"Consommateurs dans la construction de la CEDEAO" est en lui-même révélateur de l'état
d'esprit aussi bien des organisateurs que des participants. On a noté entre autres la présence de
plusieurs associat ions de la sous-région ainsi que des inst it ut ions internat ionales travai liant pou l'
l'intégration économique africaine ct européenne. II s'agit notamment de la Communauté
Economique Des ELats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), du BlII'eau Européen des Unions des
'711
l' A C KANOUT['
C
. .
"
. ,
1
.
-
c.
,
.
~:
OllllllunlcallOll au SYIllPOSIUIll ... prcCllcc. p.
cl SUIV.
271 KANOUTE : COllllllunicalion au symposium ... précitée. p. 14.
mibid.

(:;34
Cellule lntolînclk' dTlud,,'s cl de 1<,,''''II,,'rdc pOUl 1" Clesti,\\ll de Ilnformation sur les I:changl
(ClNI~R(;I\\:) (Il' \\,\\ 13dl1l)uè r\\fri,,'dlne de Lkveloppcl1lcnl (BADr~c<. L'Alclier fuI placé sous
signc de ['échdngc "d'e.\\pél·iencès en vu,,' d'élahorer ct "le proposer aux gou\\'ernCl1le[lts des pa:
cl'Afriquc lie l'Ou,,'.s!. de, JI1éClIli.sl1les pOLIr Id prise en compte des intérêts des consol1lmaleu
èn
dans la cllnstruction du marché sOlls-régional
.
T,,'nant compte "cles nomhreuscs contraintes qui freinent le hon fonctionnement cl
a-,sociations de consommateurs de 1" sous-région, contraintes relatives ü la sensihilisation cl
consol1lmateurs cl au.\\ campagnes cI'adhésion. au manque d'équipements pour Je contrôle cl
produits. au manque d'informations approprié~s ct opportunes sur les marchandises dangereu~
Cl ù risque en provenance d'autres pays, à la répression politique des organisations et de lcl
responsahles sur le plan local, aux dilïïcultés ;1 collectc[' des fonds pour le financement de !el
act ivités. :lll manq ue de coopérat j(\\n avec les inst it Ut ions internat lona les", mandat est donné
Bureau sous-régional de l'OIC en concertation avec les associations memhn~s ct en collaborati
aveC Je Bureau International de j'Organisation pour expliquer le bien fondé de la représentati
des consommateurs dans les instances nationales ct intcrnationales. Plusieurs résolutions ont'
adoptées ù cet effet par les participants. L'une des résolutions mandatait le Bureau sous-régio
de l'Ole (ex. lOeU) "de sollicitcr leur représentation avec un statut d'observateur au sein (
organisations régionaks qui formulent des politiques affectant les consommateurs. notamment
CEDEAO cl, au besoin. assurer cette rqJrésentation"è7:i (résolution N° 2). Cctte requête de
résolution a été accueillie favorablement par les chefs d'Etats de la CEDEAO lors du sommet
è76
l'institution en 1994
. Les autres résolutions mcllent à la charge du Bureau Régional plusie
devoirs, notamment l'obligation:
- « d'identitier les installations de contrôle appropriées en vue de leur utilisat
par les associations membres (résolution N° J) ;
27,l ihid.
~~:
27·1 ihid.
m cl'. "Séminaire Régional
Consommateurs dans la constructioll de la CEDEAü" organisé par IC
ENDA/APCI:B du () au
Il
décemhre
1<)<):-\\ :1 Cotonou (Bénin), résolution
N° 2,
in
"Consomma
Développcment N° 11 de décembre 1<)9.\\ précitée.
27h cf ell cc sens AC. KANOUTE : Le mouvement conSOl\\lI1latcur : un 1~lcteur de c1wngement; in Consomma
Développement N° 12 ; décembre 1994, PI.

635
- d'élahorer au niveau de la CEDI~AO un modèle de législation pour la protection
des Cllnsollllll;l!eurs qui .serail adopté par les parlements des Elats membres ou par la CEDEAO
clic-même (résolution N° :1)277
l'oules Cl'S rl;so[uli\\)ns élaborées par les associations cles consommateurs cl .sounllses a
r~lpprécia[ion des Llats membres onl Ulle portée générale: même si Je pouvoir législatil' relève du
domaine él~llique, elles monlrent la volonté cles organisations locales à prenclre en mains la
cleslll1éc des COllS0l1lmateurs de [;1 sous-région clans un caclre concerté avec leurs gouvernements
respeclil's en vue de ['améliorati'1I1 du sorl du consoml1lateur. Elles prouvent par la même
oCClSlon que le développement clu mouvement consumériste est d'abord une affaire cles
organisations de consommaleurs pris cn leur qualité cie représentants de la masse cles
consommateurs qui reuplent un Etal. Celte qualité n'appartient cependant pas aux seuJes
organisat ions 0 llïc ie Iles reconnues en tanl que te Iles, ceri ains groupements parallèles s' intéressenl
également ~l la cause consumériste. Et leur rôle clans cc domaine est loin d'être négligeable.
Sous-Section II : La protection du consommateur par les
groupements parallèles intéressés par la cause consumériste.
Les groupements parallèles aux organisat ions cie consommateurs mais intéressées par la
cause des consommateurs sont les coopératives ct les Organisations Non Gouvernementales
(ONG). Nous nous intéresserons à elles pour la simple raison qu'elles jouent un rôle important
dans la détCnse des intérêts des consommateurs. Aussi, l'exposé de leur contribution dans la
gestion des rroblèmes quotidiens des consommateurs nous paraît-il tout indiqué pour une prise
en considération de leur statut de représentants légaux dans la politique consumériste des Etats
africains,
SI - La défense des intél'êts des consommateurs pal" le mouvement coopératif.
Pour justifier la revendication avancée en hlveur des coopératives de consommation pour
leur intégration clans le statut cie représentanls légaux des consommateurs clans la vie de tous les
jours, il faut partir du rrincipe N° 27 des Nations Unies relatifs aux circuits de distribution des
177 cr Annexes pour le rcstc dcs Résolulions adoptécs ü l'issue de cc Séminairc.

636
picinclllcill le" hcsoil1s des con"Olllll1;llcurs l'Il produits dc première nécessité, cc pllnCl!
cncourage en son point b) « la création de cooréralives de consommateurs ct des activitt
COnlllll'lci;tics COnllL'\\CS. aInSI quc la dillusion des renseignemenh ù leur sujet. en particulier cial
iL's !llI1L'" ruralcs " P;ll ces di.spositilll1s, les rédacteurs reconnaissent l'immense cOlllribuli(
qu'une l'(wpérati\\c cst ;\\ Illème d'apporter aux consommateurs, surtout dans les r.Y.D. Le rô
des coopérativcs de consolllillation clans la défense des intérêts des consommateurs est clOI
conflrlllé par le principc 27-bl des Nations Unies. Elles contribuent ;\\ J'amélioration cl
conditions dc VIC cles consolllmateurs non seulement par la distribution des biens et des servic
de prcmière néccssité de qualité ilTéprochabk. c'est-à-dire acceptable par tous (A), mais aw
par la Illise à leur disposition d'informations utiles pour leur sécurité dans leur fonction (
consomlllation (8).
ri - L'action des coopératives de consommation dans la
distribution des biens et services de première nécessité.
Toute coopérative a Ul1 statut. Les coopératives de consommation ne dérogent pas à
règle. Et SI l'on se réfère à leur statut. on constate que la distribution des biens de premiè
nécessité à leurs membreS' ainsi qu'à l'ensemble de la population reste leur préoccupatic
principale. A celte vocation propre aux coopératives de consommation s'ajoute une aut
caractéristique basée sur un objectil'essel1tiel: celui de l'amélioration de la qualité marchande cl,
biens venclus aux consommateursè7S . Dans les pays olt elles jouent le rôle des associations (
consommateurs, celle tâche est devenue leur préoccupation principale. C'est le cas notamme
clans les pays nordiques tels que la Suède, le Danemark et la Norvège ainsi que du Japon. Da'
ces pays, les coopératives de consommation remrlacent les associations de consommateurs. EII·
font oflïces de représentants légitimes et légaux des consommateurs dans la défense de leu
S'agissant de la distribution des produits de première nécessité, on peut citer l'exemple 1
la coorérative créée par l'Association Sénégalaise pour la Défense de l'Environnement et d
Consommateurs (ASDEC) dont l'apport en produits de première nécessité fut très bénéfique a,
1
consommateurs locaux au lendemain de la dévaluation du FCFA. S'approvisionnant chez'
nx N'GUYEN-THANH : Thèsc préciléc, p. 234.
27') cr. Lc Consumérismc, Pangloss NU 13 précilé. p. 51 cl suiv.

637
producteurs loc~Jllx avec qui elle a sIgné des protocoles d'accords, la cré~ltion de celle
coopél'alive a des cllets très positifs sur le marché local. Salis sc substituer aux C0l11l11l'r<;ants, la
. coopérative a, dans sa l"onction de distributrice de produits, permis "de réguler les prix des
produits ct de moraliser le marché dans le sens d'un alignement confcHmc ù la n~glemcntation :
plus de rétention de produits, plus de spéCltlation ... ,,2so
Elle a surtout permis de développer chez le consommateur un réflexe de consommateur
avcl·ti ct actif, qualités très recherchées dans un contexte de libéralisation du marché. Elle a aussi
cu comme conséquencc logique de "susciter un très fort courant de sympathie et d'adhésion dont
J'Association créatrice fut le grand bénéficiaire,,2sl. Mais l'aspect le plus important de sa création
reste sa dimellsion sociale. Implantée dans la banlieue de Dakar (Sénégal), plus précisément dans
un quartier populaire composé cIe catégories sociales cIéfavorisées, économiquement faibles. la
coopérative a, lors des pénuries artifïcielles cIe l'huile, de riz, etc., provoquées par des marchands
véreux, permis aux membres cIe ('association d'approvisionner en produits de première nécessité
les populations de ces zones urbaines. Les produits leur furent vendus aux prix ollïcieJs, c'est-à-
.
OS"
dire <lbordables pour elles' -.
Cet exemple montre non seulement l'important rôle qu'une coopérative de consommation
est capable de remplir dans les sociétés que sont les nôtres, mais aussi l'extraordinaire
complémentarité qui existe entre ces deux entités juridiques que sont une association de
consommateurs et une coopérative de consommation, d'où l'intérêt de leur intégration dans le
statut de représentants légaux des consommateurs.
Pour ce qui concerne l'investissement des coopératives de consommation dans Je domaine
cIe l'amélioration de la qualité des produits vendus, il met tout simplement en relief une réalité qui
en somme n'est pas nouvelle. Des exemples tirés du passé des pays ayant une forte expérience
dans le domaine coopératif peuvent servir de références à ces affirmations. Si l'on prencI l'exemple
de la FNCC en France, on constate que dans les années 1956, celle-ci a, lors de son congrès
annuel, inscrit dans son programme, le problème des "rapports entre la coopération et la sailté
'81
des COllsomIlUlteurs'" ..
)
1
2XIJ cf. COllsoll1matioll-Développcmcllt N° 12 de déccmhre 1994 précitéc. p. 4.
1XI ihid.
1X2 ihid.
2X.1 N'GUYEN-THANH : Thèsc précitée, p 234.

638
En cr1Ct. dalls leur fonction de distributrices des biens écollomiques, les LoopéLltives
consoml1latioll vendent aux COIlSOlllm~ltL'urs des biens de qualité inyaic, qu'elles ont. s()it ~ll'hc
soit fabriqué e/les-mêmes. Fidèles ù leur tradition. elles essaient de concilier le ",juste pJ'Ï:>.:" , '
est leur symbole. ~'t la <jualité2'4. C'est le n'lIe que joue pratiquement la "COOP.SYN.T(
(Coopérat ive Syndicale de COllsommation du Togo), Cette coopérative a été créée par
CN.T,T. (Confédération Nationale des Travailleurs du Togo) pour aider les travai/lems togo
;1 se procurer les produits de première nécessité ;\\ un prix abordablc, Elle rend aussi cl'énolï
services aux consommateurs non tra\\'~lIlleurs ayant des revenus très bas ou issu~; cles ma~
populaires défavorisées, cc qui en soi, une avancée considérable dalls Ja gestion des problèl
consuméristes par les coopératives cie consommatioll,
Dans le domaine spécifique relatif à l'amélioration de la qualité, l'exemple du "Iaboratt
coopératif d'analyses ct de recherches" en France est ;\\ cc titre révélateur. Créé en [955,
laboratoire a joué ct continue de jouer un rôle important dans l'amélioration de la qualIté
biens vendus. Sa mission consiste à apporter aux sociétés coopératives un concours scienlIfl'
et technique dans leur action pour la sauvegarde ou pom l'amélioration de la qualité des bien~
consommation. D'après ses statuts, «il contribue à la défense des consommateurs et ;'
protect ion de la santé publique en procédant ù cles contrôles, études et recherches sur les prod
de consommation, leur qualité et lem emploi »2,5
Les coopératives de consommation en Afrique sont. à l'heure actuelle, loin d'avoir un
statut. Mais au-delà des moyens matériels qui font défaut, l'exemple du laboratoire cClopél
d'analyses et de recherches est révélateur du rôle d'une coopérative dans une société
consommation. A la théorie traditionnelle du "juste prix", les coopératives africaines devra
ajouter à leur modèle fonctionnel L1ne autre variante par le biais des expériences vécuès aille
notamment les expériences françaises et suédoises. Elles pourront ainsi, par cette muta
fonctionnelle, se rendre davantage utiles à leurs adhérents ct ù l'ensemble des consommatt
aussi bien dans le domaine qualitatif qLle dans celui relatif à la communication de l'information
2KI ihid, P. 233,
2KS N'GUYEN-THANH : Thèse précilée. p. 233

639
B - L'actiol/ des coopératives de COI/SO/lll/wtÎOI/ dal/s
la diftilsiol/ de l'il/formatiol/ aux COI/.\\O/lI/lw{('urs.
La maîtrise de l'information est eS.sentielle dans les trans~lctions COn1l11l'1l·i~t1e". Cette
donnée est comprise par les coopérativcs dl' cOnSOl1l111ation qui. sans qu'on s'en remlL' compte.
jouent un rôle indéniable dans cc domaine en favcur du consommateur. L'action qui sc manifeste
de la façon la plus simple possible est masquée par la qualité de coopérateur du de"tin~ltaire de
l'information diffusée par la coopérative. Le fondement de la diffusion de j'infollllation au
coopérateur repose sur Je lien juridique qui le rattache il la coopérative. Ce lien de droit qui
existe entre la coopérative et le coopérateur met il la charge de la personne morale qu'est la
coopérative une obligation de fournir ù ce dernier l'information à un double titre: d'abord en sa
qualité d'adhérent, et ensuite commc acheteur.
Dans le premier cas. la coopérative rend compte. au moins une fois par an, aux adhérents
- donc aux consommateurs qui ont accepté c1'en t~tire partic -, en dehors des activités
administratives et financières. de l'ensenlble de ses acti\\'ités commerciales ct techniques. Il s'agit
là d'un test quasi-permanent d'évaluation du service au sens large, tel qu'il est perçu par ccux
auxquels il est destiné2x6 . Juridiquement, cette information ct consultation ont lieu lors des
Assemblés Générales qui se tiennent selon le calendrier fixé dans les statuts respectifs de chaque
coopérati ve.
Dans le second cas, la coopérative diffuse aux adhérents pris dans leur qualité d'acheteurs,
donc de consommateurs, une information complémentaire qui peut revêtir plusieurs formes selon
les moyens dont elle dispose. Il peut s'agir de plusieurs réunions d'information par an autour des
thèmes variés intéressant les consommateurs. Ce type d'information est souvent publié dans les
presses spécialisées, pour les coopératives qui en possèdent, ou vulgarisé au moyen des méthodes
modernes de diffusion de l'information2x7 .
La méthode a un intérêt en ce sens qu'elle protite à l'ensemble des consommateurs. qu'ils
soient adhérents ou cie simples acheteurs occasionnels. Elle est ef1icacc ct utile parce qu'elle est
,
guidée et lTIotivée par un souci majeur des organes compétents : celui cie donner aux
J
m'ihid.
m N'GUYEN-THANH : Thèse précilée.. 2:n.

G40
1;1 pléll'rl'Ill'L' ;11I\\ l;{llIUL'!k>; iL'" Illll" l"\\llllclk~ L'[ l'Ill! Cil ~,Irk qUl' leur" géranh~,)il'nl le 111le
ini'olîl1é po""illlcè:i;;
Ub; POUITOl11 de Ll' lait con!l"ibuCl' il 1';ullélioratlon des condllions de vie des Lonsommalel
arricains. La réalisation de cette idéc c-,t ronl'lion de l'utilisation que l'on lera cie' Icurs outils ou
l'oricntation quc 1\\1Il donnera ù /curs acti\\ité"è")
Le sens de l'illtérêt social. donc COlbUl1lériste. dépend en grande partie des adhérents c
en tant que consomm<ltcurs, ne devraient pas se désintéres"er du but social, en fait, de la rai~
d'être de leur institution. C'est justel11elH le cOl11porlemel1l qu'observent les adhérents de
coopérative créée par l'ASDEC au Sénégal. le~qucls la perçoi\\ent comme une "structure utile'
pour les eOnSOll1mateurs défavorisés. Lcs l'oopératcurs ne doi\\'cnt pas confondre "le magasin
la coopérative avec celui de la société .succursale d'en race ':'!I. En d'autres termes, le client
doit pas remplacer l'adhérent-sociétaire. !vbis ce sens de l'intérêt général dépend aussi (
pouvoirs publics, lesquels se doivent de ne pas aflîchcr leur i/ld~ffére/lce vis-à-vis
coopératives dont les l'l'forts en raveur c1cs consommateurs sont évidents. De telles coopérati'
méritent encouragement ct assistance de l'Etat cn raison de leur but ou orientation sociale.
dans ce contexte, l'initiative de l'ASDEC au Sénégal rentre dans le cadre de cette logique
soutien qui incombe aux pouvoirs publics ct qu'ils se doi\\'ent d'assumer avec un maximum
l'es ponsab il ité.
Certes. les coopératives sont "dewnues des entreprises commerciales ct il n'est p
évident "qu'elles s'abstiennent de tous les procédés. singulièrement dans l'ordre de la réclame, (
l'on reproche au secteur privé":'): On peut donc craindre que celle-ci s'intéressent plus (
èSH N'GUYEN-THANH : Thèse précitée, p. 2l4.
èH')
Les coopératives peuvent être uliles aux consolllillaieurs africains si on Jeur donne les Illoyens d'a
néccssaires pour la réalisalion dc leurs objcctifs sociaux, Sur le rê>1e dcs uXlpératives dans la défense dcs il1~
dcs COllSOllllllaleurs, cl'. l'article de M. 1'. CHL:VAUER
"La protcClioll du consommateur ell Suède"
COllsolllmaleurs-Aclualilé, N° ll4 ; 2X Illai l0X2, p. 4 el suiv.
è')lJ cr. COllsollllllalion-Dévcloppelllcnl N° 12 de déccmbre 1004 précité. p. 4.
~'!1 N'GUYEN-THANH : Thèse précitéc. p. 2:1-1.
~')è ./. MEY NAUD : "Lcs groupemcnls de défcnse dcs consollllnaieurs". l'cv. écollollliquc 1<)61, p. 161.

641
préoccupations des productcurs qu'à ccllcs relatives à la défense des consommaleurs~'J\\. iVlais
l'idéal éjUl' reprl;sentenl les coopératives illCilent i\\ l'optimisme en l'<lveur des consomillaieurs.
D'ailleurs le !ilit d'être il clleval cntre le monde des producteurs ct celui des consommaleLHS pcut
être unl' ,source d'cnrichissement sUI1plél11entaire pour j'information et l'éducation du second.
ConJuguant le désintéressement qui caractérise 1',letÎon d'une association de consommateurs ,lvec
la connaissancc pratlquc des pilélloll1ènes commerciaux, la coopérative peut faire pmllLLr aux
.
,
'
,
. , '
,
.
'9~
consommateurs qUI s y II1tercssent une certaIne expenence economlque- .
Les buts ct le rùle du mouvemcnt coopératif ne diffèrent donc en rIen de ccux des
,lssociations de consomll1<lteurs. Il cn va de même des Organisations Non Gouvernementales
(ONG).
SIl - La défense des intérêts des consommateurs par
les Organisations Non Gouvernementales (ONG).
Le cont,inent africain est actuellement le théâtre de plusieurs ONG. Toutes ont un but
avoué : oeuvrer et lutter quotidiennement pour l'amélioration des conditions de vie des
populations autochtones. Par leurs actions, elles contribuent directement ou indirectement à
l'amélioration du bien-être des consommateurs. La campagne sur l'alimentation des nourrissons
africains dans les années 1970 en est une illustration manifeste. Lancée en 1973 par la publication
réalisée par l'ONG anglaise "War on Want", cette campagne a dénoncé les conséquences trop
souvent mortelles de la substitution du lait en poudre au lait maternel, encouragé par les firmes de
l'agro-alimentaire. La campagne s'est appuyée sur un très long travail d'enquête sur les pratiques
commerciales des 11rmes295 . L'act ion a non seulement éveillé les consciences, mais aussi mis à nu
les pratiques commerciales malsaines et inhumaines des firmes mises en cause296•
2')3 cr. La déclaraI ion de MI'. Lc Ministre MansllOlt en
1961, à l'époque président de la COlllmission de la CEE.
Journées d'éludes euro[1éennes
1961. Ce[1cnoant, en raison de la place qu'clics occupent dans le secteur
prolCssionnel, les coopératives de consol\\lmillion pourraient jouer un rôle d'assainisselllent du marché, en utilisant
~,
toules les techniques juridiques;\\ la disposition des pnxlucteurs et distributeurs, en particulier en IUILant contre la
i
concurrence déloyale, citée par N'guyen-Thanh : Thèse précitée, p. 234. C'est d'ailleurs celle technique qui
!
consiste ;1 battre les collllllerçanls professionnels ù leur propre jeu qui a été utilisée par l'ASDEC lors de la création
dl: sa coopérative de consolllmation avec toute l'eflicacité que cela a connu pendant les périodes dc pénuries
anitïcielles provoquées par les marchands véreux préoccupés avant tout par le souci du gain.
2')1 N'GUYEN-THANH : Thèse précitée, p. 234.
2')
Sophie BESSIS: Dossier précité, p. 47.
~"(' cf, "Nestlé contre les héhés '!" Dossier précité.

642
I.'~\\eil de~ conscience~ a conduit ~ix ans plu~ tard :'1 la créalion dc l'I.\\3.F.r\\.!'
(Inll'111:lllon:t113:lhy Food Aclion Nctworkj, ré~l'aulJui coordonne :IU Ill\\\\'aU intclJl:tllollal Ltctio
de plu~ de l'l'nt gmupe~ locaux, Pratiquant le "Iohhying" (prcs~ion) ;IUplè~ de." gouvèlllelllenl
occidentaux. 1';lcll0n de cc ré~eau a abouti en 1981 ü l'adoption d'un codc de conduitc. un cod
.
....IJ7
réglclllenLlIll 1c~ pratiques cOllllllerciales des fllîlleS d'aliments pour nourrisson~- . C\\'~ l'mit
avalent pour but de limiter les abus ou cxcès dans les prolllotion~ ct caJllpagne~ publicitaires dl
IÏlJlleS distributrices des produits incriminés en les mettant de\\',ll1t leurs responsabilités race au
drames des mères arricaines utilisatrices-victimes de leurs substituts de lait lllaterneI2~s.
Pour cc qui est des ONG basées en Afrique. on s'intéressera ü certaines d'entre elles, e
particulier ~I ENDr\\-Tiers-Monde qui, par son action salvatrice, ct s'appuyant sur une politiqL
bien délÏnie (A). oeuvre
constamment ct efficacemcnt en faveur des consommateurs avec
collaboration des associations locales (8).
A - La politique de l'Orgallisation ENJ)A.-Tiers-Mollde ell Afrique.
ENDA-Tiers-Monde, comme l'indique Il' sigle, est une ONe; Internationale dont le ht
déclaré est de protéger l'environnement des pays du Tiers ivlonde tout en oeuvrant pour ln
développement. Mais l'êlre humain el son environnement sont interdépendants. On ne peL
prétendre protéger l'un sans se préoccuper des problèmes de l'autre.
La protection d
consommaleur el celle de son environnement sont donc deux eXIgences indissociables; d'o
l'action conjuguée de l'Organisation dans les deux sens.
La démarche de l'Organisation est simple. Préoccupée avant par le souci du bien-être de
populations les moins favorisées, elle agil avec les groupes de base locaux à partir de leut
besoins cl de leurs objectif,>. Tout en appuyant la recherche d'un développement alternatif ü tOL
les niveaux et des types de formation qui le rendront possible, elle contribue de faço
conquérante à la définition et à la mise en oeuvre d'un développement au service du plus gran
2
nombre '!'! Ainsi, de façon concertée et impliquée, l'Organisation oeuvre pOLIr l'émancipation (
consommateur africain. Divers actes posés dans ce sens témoignent de sa volonté d'éveiller
2')7 S
BESSIS: Dossier précité, P. 47 ; G. HAMILTON: Les cntreprises Illullinationa!cs : elTels cl lillliles lj
codes de conduites internationales, PUF 19X4.
2'), Sur ces call1pagnes prolllotionnelles et publicitaires excessives et tapageuses. cf. "Nesllé contre les héhés
Dossier précité.

643
consclcncc du conSOJllmatcur ;1i'!"lclin cl dc ."on abnégation a lui portcr assistance pour son
B - Ouelques lIctiollS des ONG dallS la défense des illtérêts du
COIISO/lllllllteur Cil A/i-igue.
DCll\\ ONC 1l()(IS intérL'sscr\\)nt cssentidlement pour ce qui concerne l'exposé des actions
en favcu!" dcs consomJllateurs locaux. Outre Enda-Tiers-lvlonde dont l'action dans ce domaine est
considé!";I!)k. on s'intércssna égalemcnt ù l'OTDC (Organisation Tunisienne Pour la Défense du
Consommatcu l').
Pour ce qui concerne ENDA, son oeuvre en faveur des consommateurs est grandiose.
S'appuyant sur cles associations locales de consommateurs dont elle ne cesse d'encourager
l'éclosion. l'émngence ct la promotion, l'Organisation joue un rôle important dans l'éducation, la
formation ct j'information du consommateur. En collaboration avec l'OIC (ex. IOCU), elle cultive
le sens critique du consommateur africain en lui fournissant les moyens matériels susceptibles
d'éveiller son intellect. Les deux organisations publierit, il cct effet. dillérentes revues 100 destinées
~l éveillcr sa conscience en lui présentant les diverses facéties et pièges des pratiques
commercialès. en dénonçant leur caractère agressif Cl/OU extravaganr'OI . Ensemble. elles mettent
aussi en évidcnce, preuves à l'appui, les divers produits ou les diverses consommations
dangereuses mises sur le marché au péril des utilisateurs'o". C'est notamment le cas du tabac dont
les effets néfastes sur la santé humaine ne sont plus à démontrer. Les victimes du tabac dans le
monde sont nombreuses. A mesure que leur nombre tend à baisser en occident, leur courbe
évolue de façon vert iginellse, ascendante dans les pays du Tiers Monde. Cette évolution
s'explique par le fait qu'avec la nouvelle vague réglementaire Cil Europe et aux Etats-Unis.1O.1, les
pays d'Afrique comme tous les autres pays du Tiers Monde sont devenus les marchés de
2')'1 cf. en œ sens, tous les N°S du bull. d'inro. "Consommation-Développcmcnt" précités, ainsi quc le "dépliant"
préscntant l'Organisation dans sa structurc fonctionncllc .
.lm ENDA public régulièrcmcnt : - Environncmcnt Africain (Cahicrs d'étudc du milieu ct d'aménagement du
tcrritoire) : - Vivre Autrcment (Magazinc Trimcslriel) : - Documcnts : Etudes et rcchcrchcs : nombrcux titrcs sur
Ics divcrs problèmcs et aspects du dévcloppemcnt dans Ic Tiers Monde: - "Consommation-Développcmcnt" en
collahoration avcc l'Ole (Bul/ctin Trimcstricl d'Inl'ormation).
.\\111 Voir Cil cc sens, Consommation-Développcmcnt. Novembrc 19<)2, NU X, Jl. 9 .
.\\()~ Ihid. N" 9, avril Il)l)l, P. 7 ct suiv .
.\\0.1 cf. La loi fran«aisc N°l) 1-32 du 10 jan vier Il)<) l, J.O du 12 j;m vicr Il)<) l, Illodiliant la loi N° 76-616 du 9 jui llet
1l)76 relative Il la lullc contre Ic tabagismc. La loi du 10 janvier 1l)l)1 encorc appelée "Loi EVIN" intcrdit toutc
propagalldc ou puhlicité, dircctc ou indirc<.:tc, Cil I;\\vcur du tahac ou dcs produits du tahac, ainsi que toute
distrihulion gratuite.

Conclusion de la Troisième Partie.

644
1)1l..;d1 k'l..'[ Il )~] ,It..- i'tIH!USIIIC 11IOlluL'llin: du [~lha( aVC( son cortègc de Illessages jlublicitaires
jll\\1I11011i1IlIWls 111)1'" du (lllllllllill 'I:I
P;ll ;lllleUI'. kll\\/rollllelllL'llt constitue l'ensemble des systèmes naturels. SOCi~IUX
cuilulcis (lll les l..'lIlSllllllllatcurs tirellt leurs subsistances. Si l'.oeu\\'re de l'Organisatioll (on,istl
sorll!' le L'lllhlllllnl~ltcU,. de l'impasse par le canal de la valorisation de ses droits toujours igno
llU 11Cgllgcs pdl les pouvoirs puhllcs et le monde économique, ses activités visent ccpendan
I;qlpeler ks llhligalion, Llue cc, dl'Oits entraillent pour les bénétÏciaires vis-à-vis de la naturc 1
1l0U,s cntour\\.'. autrclllCll1 dit l'environnement. Parmi ccs obligations, on en dénombre une qui
trouvc êtrc l'L'sscntiellc : c'est ['obligatio/l de faire respecter les droits élémelltaires relatif
l'obtentio1/ d'ull el/virolll/emellt sain'O'i L'être humain étant indissolublement dépendant de
Ilature. "scule une politique dynamique de rrotection c1es ressources de l'environnement
ticndrait compte des actions de sel/sibilisatioll. d'il/formatioll ct d'éducatio/l ellvirolllzemen{(.
dc prél'el/tion ct de lutte col/tre les pollutions assureraient un minilllum de qualité de cadre
VIC des consom11lateurs,,<I)Ü
Forte de son statut diplomatique ct consciente des problèmes du consommateur afric<
l'Organisation. ü travers les associations cie consommateurs, use de son influence auprès (
c1il'lCrents gou"ernements africains alÏn d'obtenir d'eux l'intégration dans les législations nation<
des Principes Directeurs Pour la Protection du Consommateur votés à l'unanimité par
membres des N;llions Unies en avril 1985 et dont les agences sont prêtes à s'allier ~
~tssociatiolls locales africaines pour en assurer la promütion107.
L'OTDC oeuvre allssi de son côté pour le bien du consommateur tunisien. Créée le
février 1989. elle est reconnue d'utilité publique par décret de J'exécutif de l'Etat tunisien. Elle
une ONG cl caractère socio-écollomique qui oeuvre pour la défense de la santé et de la sécu
des consommateurs tunisiens. Forte de sa reconnaissance ofticic!le en tant que défenseur légit'
III 1 Sur Ics ondcs dcs radios ou dcs télévisiolls nationaks. on enregistrc des spots publieilaircs inadmissit
notammcnt ks mcssagcs suivanls : "Gauloisc, la eigarcttc dcs hommcs I()rts" ; "Les hommes qui savent ce ([
fonl, fumcn! Rotlllllan King Size" ; "Marlboro. la cigarelle au goût agréahk, la eigarelle la rlus vendue d,:~~
l\\londe". Pour [llus d'inl()rlllalions sur la lTlontée vCrligineuse de la venlc, de la consonllnalion des eigarel~
Afrique ainsi quc des COllst~quences qui en découknt, voir "Consonllllation-DévC!orpcmenl". N° 9, avril 1
Bull. Trim. d'Info. OIC-ENDA. P t 0 ct suiv ..
10' Voir. TOURI: DIA Fatima: "La place de l'environllemellt dans la eonsolllmalion", documenl puhlié
ENDA. 19:-1:-1, in Dossicr Documcnlaire sllr la consollllllation, p. 21.
30i, ibid.
\\07 cf. "Consolllntalion-DévC!oppemcnl" N° X. nov. 1992 préc. P. 4.

645
L]Udlrl'-\\lngl Illllll' (1 i')()()()()) ~ldhérellh depuIs ~Ioûl 1l)l)--l -, clic d réussi ~'l ratiollaliser une partie
du secteur i/~{on"cl en signdnl une convention d\\L'C l'Union TunISienne de l'Induslrie, du
CUllllllerL'e ct de l'f\\nisdnaL la Cildlllhre Syndicale :\\alionale des Réparaleurs de voilures
dUlolllllhlks. /\\ l'inlérieur de cetlL' cunveillil)n .sonl défll1is les droilS el ohligalions du réparateur
Cl ks Ill'ldalilés de règkJl1enl des lillgl'S entre celui-ci ct le consommateur client1()~,
Cet te expérience de l'O~'C; lunislelll1e esl un signe démonstrat if qu'on peut réorgalliser,
VUlre restructurer l'illforll/cl pour mieux protéger le consommateur contre l'insécurité juridique
qui pré\\aut dans cc secleur. C'est aussi une preuve évidenle du rôle qu'une ONG est il même de
jouer dans la déICnse clès consommateurs dès lors qu'on lui reconnalt le statLlt de représentant
officiel et légil ime de ces consommateurs. Il s'agit là d'une expérience enrichissante dont
devraient s'inspirer les autres Etats africains en accordanl aux différentes ONG le désirant le
statut de représentants légaux des consommateurs locaux. Pdr cet acte on rendra énormément
service au consommateur qui a tant besoin d'aide d'où qu'clic vienne.
,l'
l
.HIS ihiJ. N" 12. décemhre 1<)<)4, P. 7.

1 1
,}

647
« Ces dernières années, j'ai appris quelque chose de très essentiel. J'ai découvert le Code
de Manou. J'avoue avoir eu l'impression que tout ce que nous connaissons d'autre, en fait de
grands codes de morale ne semble en être que l'imitation, sinon la caricature: à commencer par
la morale égyptienne; et Platon lui-même me paraît avoir tout simplement été bien instruit par un
Brahmane. »1
Celle idée met en évidence l'importance de l'originalité dans la conception et la mise en
place des législations clans un pays. Elle est essentielle en ce sens qu'elle permet de réaliser une
harmonie entre les lois ainsi adoptées par les pouvoirs publics et les références socioculturelles et
économiques du pays. Cela est particulièrement vrai pour les législations relatives à la protection
des consommateurs, les abus en la matière étant fonction du niveau de maîtrise des données ou
réalités économiques et commerciales par les clients acheteurs. Or dans ce domaine, le
consommateur africain est particulièrement en retard sur les nouvelles techniques inventées par
les professionnels de clroit privé pour séduire les clients et écouler leurs marchandises. Ce qui lui
vaut parfois d'être victime des agressions publicitaires ou promotionnelles2 des professionnels
sans scrupule motivés par l'appât du gain facile. Sa protection juridique nécessite donc des lois
adaptées à sa condition de consommateur victime des abus commerciaux des professionnels
locaux qui, profitant du vide législatif et réglementaire, mettent en oeuvre des méthodes de vente
difficilement praticables dans les autres régions du monde. Cette exigence essentielle relève du
devoir du législateur de chaque Etat.
Mais l'important n'est pas cie voter les lois, encore faut-il pouvoIr les mettre en
application. Tout ceci pose le problème de l'exigence de leur respect par les parties concernées
par leur adoption. C'est justement l'intérêt de J'existence du mouvement consommateur qui se
veut être une force sociale susceptible cie mettre en valeur les législations mises en place pour les
consommateurs locaux. Les pouvoirs publics trouvent donc dans le mouvement consommateur
un partenaire indispensable et incontournable dans la réalisation des projets relatifs à la protection
des consommateurs locaux. Cette affirmation va dans le droit fù de la citation déjà avancée de
Alpha A. SALL selon laqucllc « aucune disposition, aucun principe ne saurait prendre corps et
s'affirmer s'il n'y avait pas une force sociale qui se chargeait d'en être porteuse pour son
1
Frédéric NIETZSCHE, 31
mai
1888. Apostille aux « Lois de Manou », traduites par A.
Loiseleur
DESLONGCHAMPS. Paris, éditions d'Aujourd'hui, 1976, cité par P. GEERAERTS, chronique précitée, P. 423.
2 J. CALAIS-AULOY : «Les ventes agressives », chronique, D.S. 1970, P.37 et suiv.

648
affirmation et son application dans notre vie de tous les jours, c'est-à-dire dans notre vécu réel »3
Cette citation, qui met en exergue une idée essentielle, exprime une réalité sociale. Elle met er
évidence l'importance du mouvement consommateur dans la réalisation des objectifs juridique
tracés par le législateur dans la ITÙse en place des textes relatifs à la protection de
consommateurs: c'est que dans la mise en oeuvre des structures juridiques destinées à protége
les conSOlllillateurs locaux, le rôle du mouvement consommateur est essentiel. Aussi les pouvoir
publics se doivent-ils, pour le bien clu consommateur local, de conjuguer leurs efforts avec le
organisations représentatives a/in de concrétiser sur le terrain les textes protecteurs adoptés p,
les parlementaires nationaux ou régionaux pour ce qui concerne les textes votés à l'échelJ
régionale, notamment dans les ensembles économiques comme la C.E.D.E.A.O. 4
l
A.
A.
SALL : ,< Protection
du
consommateur en
Arrique.
Atelier régional »,
in
«Consommatior
Développement », N° ~, nov. llJlJ2, P. 5.
~ cr en ce sens, les projets des organisations des consommateurs conccrnant l'élaboration à l'échelle régionale, e
l'occurrence au niveau de la CEDEAO, d'un modèle de législation pour la protection des consommateurs lequ<
serait soumis aux lins d'adoption aux dirrérents parlements des pays membres de l'institution. Voir, Résolution l\\
3,'1 du Séminaire régional dont le thème de travail rut ainsi libellé: « Consommateurs dans la construction de .
CEDEAO », in «Consommation-Développement» N° II, décembre 1993, voir spécialement la partie réservée ê
Séminaire ainsi que les résolutions qui en ont résultés.
l

650
La lecture des pages qui précèdent nous montre les immenses droits dont pourraient jouir
les consommateurs des P. V.D., en particulier des pays africains, mais qui restent lettre morte du
hlit de leur non prise en considération par les pouvoirs publics locaux. S'agit-il d'une simple
insouciance ou d' une négligence coupable ? Nul ne pourra répondre concrètement à cette
question tant le choix entre ces deux expressions s'avère difficile.
L'intérêt cie l'interrogation prend une dimension supplémentaire si l'on met en exergue le
vide juridique qui existe en Afrique en ce qui concerne la mise en place des législations
protectrices des consommateurs, et ce, malgré le vote à l'unanimité par l'Assemblée Générale des
Nations Unies des Principes Directeurs pour la Protection du consommateur à l'attention des
pays membres.
En vérité le problème de principe est extrêmement simple. La société de consommation
est de nos jours une réalité que nul ne peut nier. Elle constitue une société nouvelle, une étape
nouvelle de la société capitaliste. 1 Et comme toute forme sociale nouvelle, elle entraîne
nécessairement des risques nouveaux. De même que le XIXè siècle a rendu indispensable une
protection des travailleurs, de même la société de consommation rend nécessaire une protection
des consommateurs. Le rôle du pouvoir politique est de protéger les vivants à l'intérieur de la
sphère nationale contre les risques sociaux que la vie économique et sociale sont à même
d'engendrer à une période donnée. L'exigence de nos jours de la protection du consommateur
réponcl à cet impératif né du progrès économique et technique. Ceci cadre avec une vision très
simple et réaliste des choses: la société de consommation a créé des risques qui n'existaient pas il
y a quelques décennies. De ce fait, l'aménagement des structures étatiques, notamment sur le
plan juridique, en vue de leur adaptation aux nouvelles données économiques et technologiques
s'impose donc à tout Etat, à tout pouvoir politique soucieux de répondre aux attentes de sa
population pour ce qui concerne
la sécurité des biens et services vendus sur les marchés

0
natIonaux.-
1
1 BIHL: Consommateur. défends-toi! , éd. Dénoël, Paris 1976, p. 239.
2 Ihid.

651
L'analyse
des
Principes
Directeurs
des
Nations
Unies
pour
la
Protection
de
Consommateurs nous montre les grandes orientatiolls tracées par leurs rédacteurs dans ce sen
Si ces principes n'ont pas la force obligatoire d'une loi internationale, en l'occurrence celle d'v
traité, leur vote ou adoption par l'Assemblée Générale des Nations Unies témoigne de l'urgenc
du problème des consommateurs dans le monde, en particulier ceux des P.Y.D., de la nécessi'
de leur offrir une protectioll décente et efficace dans leurs activités consuméristes de tous If
JOurs.
Ces principes qui représentent Ull cadre juridique d'illspiration pour les P. Y.D dans
conception des législations consuméristes, comportent des objectifs et ciblent des domaines bie
définis.
S'agissant des objectifs, les grandes V1Slons qu'ils symbolisent témoignent de la nor
adéquation qui existe entre le monde de la production et de la distribution et celui dt
consommateurs. De façon générale, les PDPC comportent les objectifs suivants: a) aider les pa~
à établir ou ù maintenir chez eux une protection adéquate du consommateur; b) faciliter dt
modes de production et de distribution adaptés aux besoins et souhaits des consommateurs; (
encourager la pratique de normes de conduite élevées chez ceux qui s'occupent de la productio
de biens et de services ct de leur distribution aux consommateurs; d) aider les pays à mettre u
frein aux pratiques commerciales abusives de toutes les entreprises, aux niveaux national t
international, lorsque ces pratiques sont préjudiciables aux consommateurs ; e) faciliter
formation de groupes de consommateurs indépendants ; t) promouvoir la coopératio
internationale dans le domaine cie la protection du consommateur; g) favoriser la constitution d
marchés donnant aux consommateurs un plus grand choix à moindre prix.'
Quant aux domaines concernés, ils touchent ce qui èst en rapport avec la santé et 1
sécurité du consommateur. La priorité dans la démarche est d'offrir au consommateur un tot;
épanouissement dans ses activités de consommation de tous les jours. Sont ainsi visés k
domaines tels que la sécurité physique des consommateurs, la promotion et la protection de
intérêts économiques des consommateurs, les normes régissant la sûreté et la qualité des biens ('
'consommation ct dcs services, les circuits de distribution des biens et services de prem\\ie
nécessité de st inés aux consommateurs, les mesures permettant aux consommateurs d' obten
'cl"" LèS principes dil'ècteurs des Nations Unies pour la protection du consommateur », I- Objectifs.

652
réparation, les programmes d'éducation et d'information, et les mesures s'appliquant à des
domaines
prioritaires
particuliers
comme
les
produits
alimentaires,
l'eau,
les
produits
pharmaceutiques, les pesticides et les produits chimiques. 4
De toute évidence, la réalisation de tous ces objectifs est sujette à la volonté politique des
pouvoirs publics du Tiers-Monde, en particulier africains. Sur ce point, il n'est sans doute pas
exclu que les gouvernements des pays d'Afrique ont besoin d'une assistance urgente pour leurs
consommateurs. Le besoin, en particulier pour les groupes les plus pauvres et les plus vulnérables
de la population, de produits alimentaires sûrs et en quantité suffisante, d'abris et de services
médicaux, pour ne citer que ceux-là, n'est plus à démontrer. Et la non mise en évidence des
principes des Nations Unies dont le but vise l'amélioration des conditions de vie des populations
défavorisées n'est pas de nature à arranger les choses, en particulier le sort de ces populations
malheureuses.
Certes, la mise en place des structures juridiques protectrices des consommateurs ne
peut à elle seule suffir pour changer le cours des choses, mais elle constitue une prémisse
indispensable au réajustement des abus commerciaux commis au détriment des personnes non
avisées dans le domainc Oll ils sont commis. Elle constitue un t~lcteur essentiel et nécessaire au
rétablissemellt de l'équilibre cOlltractuel rompu par l'inégalité des parties dans les transactions
consuméristes de nos jours.
Mais ce rêve d'une société «juste» est aussI sujet à l'application effective des
législations
protectrices
mises
en
place
pour
protéger
le
consommateur
contre
la
« superpuissance» du professionnel. Ce problème se pose parce que dans les pays du Tiers-
Monde, en particulier dans les pays d'Afrique, le suivi des lois votées, pour ce qui concerne leur
application aux domaines visés, est rarement observé. Il s'ensuit ainsi un laxisme inadmissible
dans l'exigence du respect des textes adoptés au détriment de toute la communauté. Ce qui fait
qu'on aboutit le plus souvent à une situation de «Iwn droit », et ce, malgré la présence des
textes régissant le domaine concerné. Mettre en place des institutions spécialisées pouvant
assurer le cOlltrôle effect~f du respect des textes élaborés, en l'occurrence des textes relatifs à la
(
protection des consommateurs, nous paraît tout indiqué pour dcs pays encore « timides» pour
ce qui concerne leur engagement dans le domaine. Pourquoi ne verra-t-on pas la création dans
~ ihid. voir II-Les principes généraux.

653
chaque pays d \\111 ministère spécial de la consommation dont le rôle serait de gérer If
problèmes y afférent? La présence d'une telle institution aura pour effet de réguler les problèm,
de consommation en coordonnant les initiatives d'où qu'elles viennent.
Parallèlement aux institutions spécialisées, un rôle devrait être accordé aux associatio
de consommateurs ainsi qu'aux organisations intéressées par leur défense. Le consumérisr
n'est-il pas une forme de réaction sociale contre les mécanismes qui, tant au niveau de
production qu'à celui de la distribution, ne prennent pas suffisamment en compte les besoi
essentiels des cO/lsommateurs '15
Selon Je mouvement consumériste, ces besoins sont principalement analysés sous l'an~
d'une discipline relativement nouvelle, le marketinl qui méconnaît les intérêts réels d
consonunateurs en les intégrant au sein des préoccupations de l'entreprise, dont le princiI
objectif demeure de connaître le marché pour assurer l'écoulement de ces produits. 7 Certes,
satisfaction des besoins des consommateurs est nécessairement un des objectifs fondamentaux
marketing, sans lequel l'entreprise serait condamnée à court terme. Mais, cette satisfaction è
besoins n'cst pas conçue comme une tin en soi; bien au cont·raire, elle est un moyen permettan
l'unité dc production qu'est l'entreprisc d'accroître ct de lidéliser une clientèle dans un marc
R
fortement concurrentiel.
Dans cette logique commerciale, les abus ne sont pas rares. Et
marketing qui est une arme efficace dans ce genre d'exercice, génère très souvent des ab
préjudiciables aux consommateurs.9 S'il implique une étude de marché qui leur est généraleme
bénéfique, il s'intéresse aussi aux motivations cachées de l'acheteur pour orienter sa décision. IO
Par ailleurs, la politique de produits des entreprises reste tributaire du coût de producti
qUI est susceptible d'avoir des incidences sur la sécurité, la qualité et la garantie c:
marchandises offertes au public. Cctte politique peut également se caractériser par de faus~
innovations ou encore un vieillissement planifié des produits. La recherche de la clientèle pt
5 PIZZIO : op. cil. P. 12. N° 54.
(, Ibid .. N° 55.
ï PIZZIO : 1111 . cit .. p. 12, N" 55
, ihid.
'. ..:1 l'II ..:e SCIIs, " Lcs 11dY.' cn vOie de tkveloppelileill : les dbus de la publicité pharmaceutique ", Do"ier réa
pdr l'lM!:. 1:115 Il)l)l, p.1 cl suiv. : CHETLEY ct MINTZES : « ProlTIoting heallh or pushing urugs ? A l'rit
e\\;11l1inalion 01" 11I;lr~eling 01" pharmaceulicals", publié par HAl (Health Action International) Europe, 1<;
Amsterdam. p. 7 ct suiv.
I{) PU/JO: Op.Cll.. p. 1-', n' 55.

654
aussi conduire ù dc nombrcux excès. 11 L'entrcprise peut développer une politique cie marque
destinée uniquement à créer une fausse différenciation des produits pour justifier des variations
de prix. Une politique de vente axée sur la captation de la clientèle risque de mettre en oeuvre des
techniques de promotion ou de publicité déloyales l2 .
Dès lors que le consumérisme a pour objectif de revaloriser la fonction de consommation
qui doit devenir la finalité première de l'activité économique ge production et de distribution, il
implique, en premier lieu, la reconnaissance de droits fondamentaux aux consommateurs pour
qu'ils bénéficient d'une protection suffisante face au libre jeu du marché. Mais, la revalorisation
commande aussi, en second lieu, que les consommatcurs puissent agir cux-mêmes et constituer
un contre-pouvoir susceptible de rééquilibrer leurs rapports avec les professionnels. 13 Or,
seules les associations de consommateurs ainsi que les organisations parallèles intéressées sont à
même de jouer ce rôle face aux professionnels.
Les activités du mouvement consommateur africain sont révélatrices dans ce domaine.
L'apport actif de 1'0.I.e. dans la promotion de ce mouvement n'en est pas moins présent. Le
statut d'observateur '4 que lui reconnaissent les pays membres de la CEDEAO au sein de
l'Institution est le signe évident d'une prise de conscience progressive du problème consumériste
par les pouvoirs publics de la sous-région.
De toute évidence, la vulgarisation des droits du consommateur en Afrique ne saurait se
faire sans l'apport du mouvement consommateur africain. Ce serait protéger le consommateur
contre lui-même. Et puisque là n'est pas notre objectif, l'intérêt du consommateur local exige
qu'on y associe ses représentants légaux ou officiels dans la gestion de sa protection. Le rôle
qu'ils sont à même de jouer dans l'information, la formation et l'éducation de leur base est un
atout indéniable que l'on se doit d'intégrer dans les réalités consuméristes. Ce rôle est encore
d'autant essentiel que l'on a en face des consommateurs peu ou pas du tout avertis dans les
affaires de consommation moderne. Or, le consommateur africain a la particularité d'avoir ce
profil, lequel exige non seulement une initiation dans l'art de revendiquer ses droits dans ses
rapports avec le professionnel, mais aussi une éducation très poussée pour bien utiliser
Il ibid., n° 56.
12 D. WEISS et Y. CHIROUZE: Lc consumérisme, 1994, Sircy, p.297.
IJ PIZZIO : op. cil., p. 13, N°S 57-58.
14 cf « Consommation-Dévcloppcmcnt » N° 12 précité, p. 1.

655
j'information mise à sa disposition. Ce qui nécessite un travaIl de terrain, domaine propre au:
associations de consommateurs et aux organisations parallèles ou intéressées.
De façon générale, il ne s'agit pas d'opposer les différents partenaires économiques
pouvoirs publics, professionnels et consommateurs -, mais d'oeuvrer dans le sens d'une frallch
.collaboration pour le bien de tous. Ceci n'est possible que si chacun des partenaires en présenc
prend conscience de ses devoirs el responsahilités dans ses activités de tous les jours, e
l'occurrence dans ses rapports contractuels avec les autres acteurs de l'économie nationale. Cett
remarque interpelle plus les acteurs de la vie commerciale moderne de nos pays que les simple
consommateurs auxquels les produits sonl proposés. Dans cc contexte, l'arbitrage de l'autorit
étatiquc, régulatrice du système juridiquc interne est nécessaire.
Mais, bien qu'il soit arbitre, l'Etat n'en est pas moins concerné par cette pme d
conscience. Ceci se justilie par le fait que l'Etat joue aussi parfois le rôle de producteur et d
distributeur des biens et des services aux consommateurs. Il en oriente aussi les choix par 1·
simple fait qu'il est le décideur en matière de politique de la consommation. Certaines décision
relatives à la consommation peuvent aussi être motivées par des mobiles purement politiques e
être incompatibles avec les intérêts des consommateurs. Le qSle des pouvoirs publics dans Cl
domaine est de privilégier les intérêts des consommateurs par la prise des mesures compatible.
avec leurs préoccupations quotidiennes.
Sans toutefois oublier la part prépondérante de l'ordre public économique dans cette
dimension décisionnelle des pouvoirs publics locaux, il convient de souligner que toute politique
de la consommation axée sur les préoccupations essentielles des consommateurs locaux est dt
nature à stimuler l'économie nationale. Et dès lors qu'on a affaire à des pays économiquemen
faibles, il va sans dire que la mise en place des politiques orientées vers la protection adéquate e
efficace des consommateurs peut être un « balloll d'oxygèlle » pour l'économie nationale. Ce qu
signilie que l'engagement d'un Etat à mettre en place des structures juridiques susceptibles dt
protéger sa population contre les tentations malsaines de l'économie moderne ne saurait en riel
être un obstacle, voir un frein à l'arrivée des investisseurs étrangers. Bien contraire, la présenc'
dc tclles structures peut être d'un attrait considérable en ce sens qu'clle traduit la « propreté» '.cl
marché rwtional et la volonté des pouvoirs publics locaux d'assainir le circuit commercial et de
lutter contre lcs marchands indélicats, en l'occurrence les fraudeurs et autres marchand~
d'illusions acteurs de la concurrence déloyale.

656
Les pouvoirs publics locaux ne sauraient donc se réfugier derrière la fragilité de leur
économie pour se dérober devant leurs responsabilités quant à la prise des mesures juridiques
susceptibles de protéger leurs consommateurs. C'est un devoir politique, économique et surtout
moral qui
incombe aux gouvernements des pays du Tiers-Monde, en particulier aux
gouvernements des pays africains. Se refuser à le remplir serait non seulement synonyme de
renoncement devant les difticultés rencontrées par leurs populations dans leurs activités
consuméristes de tous les jours, mais aussi de légitimation des pratiques commerciales
généralrices dcsdiles dilTicullés.
Tout compte fait, le constat est là et «l'autopsie» de la situation socio-économique et
culturelle des pays du Tiers-Monde, en particulier des pays d'Afrique, démontre que le
consommateur de ces pays a besoin de protection dans le phénomène de mondialisation de
l'économie. Le contexte actuel du commerce moderne et les dangers qu'il véhicule exigent une
telle protection. Et le message des Nations Unies à travers leurs principes directeurs est un cri
d'alarme porté spécialement en direction des pays en voie de développement, dont les pays
d'Afrique, pour la sauvegarde de leur population contre ces dangers. L'efficacité de la protection
du consommateur dans ces pays passe nécessairement par leur mise en évidence dans la pratique.
C'est une simple question de choix et de volonté politiques. Et entre l'adoption à l'unanimité des
principes par les membres de l'Assemblée Générale des Nations Unies et leur intégration dans les
systèmes juridiques nationaux, il n'y a qu'un pas à faire, pas que les gouvernements des pays
d'Afrique se refusent de franchir. Si cette étude peut contribuer à éveiller les consciences des
pouvoirs publics locaux, aider à gravir cette marche supplémentaire nécessaire à la mise en place
des structures juridiques pour la protection du consommateur dans sa fonction de consommation
quotidienne, alors nos efforts dans la réalisation de ce travail n'auront pas été vains.

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- Loi du l" ,wÎl! \\l)05 ~llr k:~ Ildlldcs ct lès litisiliC:lli(îllS cn matière de produits et de serviœs,
J.O. clu 5 aoüt 1905.
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COnS0ll1111,tleurs. JO. Cl. janvic:r 1988.
- La loi ii','Illçaisc: W'l)j-32 du 10 janvier 199] (ou "Loi EVIN"), .1.0 clu 12 janvier 1991,
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JO cIu ï juillet) rdative ~j la libel1e des plix et de concurrence, JO ,du 9 décembre 1986.

686
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-A-
Abus de droit 325; 3RO; 424; 425; 42(); 427
Abus de faiblesse 4M; 4()6; 500; 502; 504; 505; ()50
Abus cie situation 379; 423
Action en justice 40(); 584; 586; 588
Aclministration 13; 147; 186; 236; 272; 340; 467; 50(); 510; 512; 513: 514; 534; 535; 539; 540
Agrément 365; 369;532;534;535;536;537;538;584;590
Analphabète 37; 96; 131; 256; 259; 314; 31 (); 318; 322; 33(); 425; 460; 4() 1; 462; 466; 493; 545; 558
Asselllhlée Générale des Nations Unies 2; 47; 141; 205; 20R; 220; 223; 577; 610; 629; 630; ()35; MO
Association cie consommateurs 396; 532; 533; 534; 535; 536; 538; 540; 543; 556; 584; 590; 592; 594; 595; 597; 616; 620
-B-
Barbares 281
Biells de consommatioll 10: 193; 2'Hl; 241: 2S4: 2/\\(,; 300: 344; 410; :'i46; 571; 572; 577; () 17; 630
BOlllle foi 266; 267; 303; 304; 305; 30(); ,'07; .lOS; .I(),); .1 10: .124: 325; 3()9; 373; 374; 3S 1; 3R3; 3RCi; 3S7; 410; 424; 427; 42R;
429:430;431;435::'i95: ()42: 651; 6:'i3
13oycoti :'i()5; 590; 59\\; :'i 1)2; 593: 5')·1: 597
13urL'<l1I l~égiol1al (,OS
-c-
Cenificatioll 87; 152; 571; M3
CertlltL,llioll de la qu,llité 571
Ch,lmbre de commerce 295
Clause dhus\\\\'e 372; 37,: ,,74: 375; 379: 3/\\ 1; 3R4; 3/\\8; 3')0; 391; 392; 403; 40S; 42/\\; 43()
COIllJ1lèrCe <llllhulailt 454; 45(); 457; 45R: 459: 4()0; 497; 49R
COlllllle[W illformel 452: 453; 454; 455; 45(); 497; @O
COlllmerceillternat["Il<lI,',):41;42;43;47:48,49:50:51;53:()5:77;78;79;81;86;87: 101: 114: \\\\(): 137; 142: 143; 152;
15,,: 1(j 1: 1()2: 180: 1R7: 1R9; 193; 20/\\; 21 1; 220: 444; ()02: 043
Commerce moderne 41; 212; 635
Comillerce réglemellté 457
('<'[11 [11 <'I,'L' sédL'Il[;llrl' ,1"7
CllI110[ï1l[lé()S: 7.': 74: 14·1: 1·17: ISO: 1"1,1,"2: 1".1: 154: 15(,: 15S: I()S: 171: lil9; 192; 305: 3c19: 350: 356: 357; 3()O; 3(,3;
,'67: 441: ,"64: ()IO

688
Formation du contrat 266; 304; 306; 308; 312; 323; 324; 412; 414; 419; 430
Fraude commerciale 280
-G-
Garantie dans 1,1 vente 342; 343; 347; 357: 650
Gouvcrnelllenr 23; 31: 57; 130; 131: ] 4l: 162: 171: 197: 201: 202: 203; 205: 239; 244; 255; 355; 381: 382; 385; 396; 397:
398:448:474;475;477: 525; 527: 538;540:543; 544;546; 560;567:569:575; 576;61 1
Groupclllents 121: 476: 529: 547: 548: 549: 550: 551: 552; 554; 555; 562: 591; 614: 619; 642; 652
-H-
Harmonisalion 180: 378; 389; 518: 519; 520
- 1 -
Il11portation 42; 76; 84; 88; 113; 141: 149; ISO; 165: 172; 180; 187; 188; \\ 89; 190; 191: 192: 194: 195; 196; 207; 234; 244;
<07: 348:466; 513: 516: 579
Indclllnls,lliun 1CJ9: 242: 352; 354: 3CJ'); 53')
1llllépcIII1,IIlCC 4: 153; 23CJ: 38'); 448: 531: 534; .53CJ: 538: 53'): 540: 54CJ; 547: 572: 5')7
Inl"orl11dtlon du CUnSUl11l11dlCUr 217: 248; 249: 250; 252; 253; 254; 255; 27'>: 303; 31 '): 33CJ: 37'): 41 1; 485: 4')4; 50'): 557; 561;
570: 598: 61 1: 622: 643
Intérêts dcs cunSOllllll,IIL'urs 32: 1"II: 23'): 253: 260: 2CJ3: 285: 3()7; :no: 441: 474; 475: 477: 534: 537: 53'): 540: 548: 552:
557:563:564; 565: 566:569: 580: 583:590:5')2;602; 613;614;615;619;620;634
- J -
Juridictions 39; 99: 237; 305; 39\\: 505: 580: 581; 583: 584; 585; 586; 589
Jurisprudencc 4: 13; 14; 15; 16; 17: 68; 74: 99: 15C); 165: 237; 272; 27'>: 286; 290: 302: 309: 312: 315; 324; 325: 327; 333;
335; 339: 347; 349; 350; 355; 358;375:400;419:420:423;425;434:435;459:484:502:536; 57'>;595
Justiec 4: 21: 39; 121; 225: 257; 258: 260; 261: 294: 296: 308; 309: 382: 391; 406: 417; 418: 420; 427; 431; 433; 462; 478:
535; 539;580;581;583; 584;585:586: 587: 588;589;590; 645; 662
-L-
I.é~llllllité 218: 2h8; )31: 533: 540: .54h: :q8: ,5)5: 574: 5')0: 595
I,d'C, lé dll L'''llllllL'ITC 23: 213
Litigcs 14: 3C): 248: 25CJ: 257: 25'): 2CJO: 27'>: 347: 43CJ: 580; 581; 583: 585; 586; 624

690
Obligation dc rcnscigncmcnt 241; 246; :III; :112; :115: 319: :120; 323; 324; 325: 326; 327; :128; 407; 423; 435; 641; 646; 649;
651
Obligation clc résultat 70; 326; 327; 355: 356; :157; 359
Obligation c1c sécurité 234; 2:17; 242; 360
OmoudSlll,ln 257: 260; 261; 262: 647
Opératcurs éconollliqucs :13: 152; 567
OrganiS<lIlons dc consolllillatcurs )C)
Organisations c1cs conSOIllIll,ltCUrS 231; 259; 532: ,~41; 547; 549; 557: )')4, (,27
Org,lIlisations Non Gouvcrnclllcntaies 37; 541-:: 55"
- p -
P,lrielidires éCollonll'iues 11-:2
P,lyscn l'OICclc c.lél'cioppelllcilt 2: .1: .14:.11-::41:42;49:76:81:1-:9: 101; 102; 119;.124: 126; 127: 165; 198; 20(J;207; 20S;
216: 264: 299: :171: 51 1: 632: 635: 658: 61-:9
Pcstlcldcs 42: 45; 46; 47: 52; 81: 82: 83: 117: 118; 119: 120; 121: 122; 123; 124: \\25; 126; 127: 128: 129; 130; 131: 132; 133;
134: 135; IJ(J: 1.\\7; 138: 139; 141; 144; 147; 148: I(JJ; 170; 171; 172; 173; 174; 175: 185; 186: 189; 190; 191: 193; 194;
195: 196: 197: 198: 199: 200: 201; 20.1: 205: 317; 318; 321; 481; 491; 631; 657
Poul'oirspublics3;34;41;78; 105: 112; 113: \\14: 115; 119; 121; 131; 142; 143; 144; 148; 149; 150; 154; 160; 161; 162; 164;
166: 169; 170; 171; 173; 196; 2 \\ 1; 212; 224; 225; 226; 228; 247; 254; 255; 261; 262; 263: 268; 282; 290; 297; 298; 300;
301: 329; 339: :\\70; 402; 438; 445; 449; 469; 481; 489; 494; 4CJ8; 499; 502; 522; 523; 526; 527; 528; 530; 531; 532; 534;
535;5:16:537; 539; 540; 543;546;551;554;555;557;560;563; 568;576;577;579;582; 583;584;592; 593;606;607;
611;612;619; 623:626;629;6:11;633;634;635
Préjudicc 21: 23; 71: 221; 231; 244; 266; 279', 286; 287; 323; 328; 3:12; 336; 337; 361; 364; 369; 370; 373: 376; 384; 410: 411;
441;462; 473; 585; 587; 591;602
Prestation dc scrvice 57: 58; 60; 228; 264; 265; 272; 292; 293; 296; 298; 299; 310; 458; 473; 482
Principes Dircctcurs pour la Protection dcs COnSOnllllatcurs 473; 610
Procluit ,1lil1lcntairc 64; 66; 70; 74: 652
produit dangereux 107; 156: 158: 178; 198: 239
Produit pil,lrillaccutiquc 99; 100: 275
Proillotion des l'cntcs 486: 549: 6:17
Protcctlon des C0I1S0lllnl,llcurs 3: 5: 12: 14: 22: 2:1: 32: 38: 39: 61: 106: 152: 162; 188: 190; 193; 200; 202; 204; 213; 225; 226;
231: 21'): 24·1; 245: 248: 270: 27': 280: 281: 28'): 2%: 30:1; 332: \\,~ 1: 371: 37,~: 384: 389; )C),': )c)5: .196: 407; 40'): 4.18;
44,~: 455: 462: 5ll7; ) 19: 520: 521: 52,1: ';.12: ,~38; 540; 552: 562; 582; 60(,; (J09; 612; 614: 626; 627: 629; 631; 642; 643;
649; 65l: 6';5: 65S; 662
Puolicllé C0l1l111erci,llc 480: 4S 1; c+82; 4S:\\: c+S7: 4::19: ';66
publicité équivoque 485: c+87: c+S8
PuoliClté mcnsol1gèrc 22: 4S5: 4S7: 488: 491; 530: 574; 598
-Q-

ANNEXES

709
ANNEXE 1:
Charte des Nations Unies, Textes législatifs, réglementaires et résolutions.

Département des affaires économiques et sociales internationales
PRINCIPES DIRECTEURS
POUR LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR
NATIONS UNIES
New York, 1986

PRINCIPES DIRECfEURS l'OUR LA PRaTECrJON
a)
Protection des consommateurs contre les risques pour it'ur sanlt el 3
OU CONSOMMATEUR
leur stcurilé;
1. - OBJECTIFS
b)
Promotion et protection des inléréts économiques des consom-
1.
Compte tenu de. Intérêts et des besoins des consommateurs de tous
mateurs;
les pars. en paniculier des pars en développement, et de la position sou·
c)
Accés des consommateurs à l'information voulue pour faire un choil
venl désavantageuse des consommateurs sur le plan économique et du
éclairé, selon leurs désirs et leurs besoins:
poinl de vue de l'éducation el du pouvoir de négociation, et considérant
ci)
Educalion des consommateurs;
que les consommateurs doivent Jouir du droit d'obtenir des produits qui ne
e)
Possibilité pour le consommateur d'obtenir une réparation effective;
sonl pas dangereu. el qu'il impone de promouvoir un développement éco-
fi Droit de constituer des groupes ou des organisations de consomma-
nomique et social juste, équitable et soutenu, les présents principes direc-
leurs et autres groupes peninents et possibilité, pour ctS organisations, de
teurs pour la prolection du consommaleur visent:
faire valoir leurs vues dans le cadre des décisions les conœrnanl.
a)
A aider les pays à établir ou à maintenir chez eu. une proteclion
:i
4.
Les gouvememcnts devraient fournir ou maintenir l'infrastructure
adtqu31e du consommateur:
nccessaire pour élaborer el appliquer des poliliques de protection du con-
1 b) A facililer des modes de production et de dIStribution adaptés aux
!
sommateur et en suivre la mise en œuvre. Il impone de veiller particulière-
besoins el aux souhaits des consommateurs;
ment à ce que les mesures de protection du consommateur soient appli-
'1'
c)
A encourager la pratique de normes de conduite élevée. chez ctUl
quées A l'avantage de 10US les secteurs de la population, notamment la
•. qui s'OC'C1Jpent de la production de biens et de services et de leur distribu-
population rurale.
. lIOn aux consommateurs:
5.
Toutes les entreprises devraient rewecter I~ lois et rétlements des
j ci) A aider les pays à metlre un frein aUl pratiques commerciales abu-
pays où elles opérent. Elles devraient aussi se conformer aUl dispositions
î sives de lOutes les entreprises, aUl niveaul nalional et international, Ion·
peninentes des normes internationales de protection du consommateur,
j
.
• •
. •
·lque ces pratiques sont pceJud,ctables au. consommateurs;
que les autorités compétentes du pays intéresst ont acceptées. (Toute men·
\\.
e)
A faciliter la formalion de groupes de consommateurs indépenlUnu:
tion ultérieure de. normes internationales doit s'entendre A la lumière du
l fi A rromouvoir la coopération internationale dans le domaine de la
présent paragraphe.)
1protection du consommateur;
6.
Il faudrait tenir compte du rôle positif que les universités et les ofll-
;1
g)
A favoriser la constitution de marchés donnant aUl consommateurs
nismes de recherche publics et privés peuvent jouer dans J'élaboration de
1un plus !J'lnd choi. à moindre prix.
politiques de protection du consommateur.
II. - PRINCI?ES GENERAUX
Ill. - PRINCIPES DIRECTEURS
2.
u<; gouvernements devraient élaborer, renforcer ou maintenir en vi·
7.
Les principes directeurs suivants devraient s'appliquer A la fois aux
~gueur U~ politique d~temùnéede proteciion du consommateur en s~inspip
biens et serviœs d'orig.ine nationale et au. imponations.
Jrant de. principes énoncés ci-aprés. Ce faisant, chaque gouvernement doit
8.
En appliqUAnt tous r~emenls ou procédures assu:llnt la protection
jfi.er se1 propres priorités dans le domaine de la protection du consomma-
du consommateur, il faudrait veiller Ane pas en faire des obstacles au·com·
iteur, en fonction de la situation économique et sociale du pays et des be-
merce international et à leur compalibilité avec les obligations de ct
lsoins de la population et en ayanl présenls à l'esprit les coüts et avantages
commerCe.
'!dcs mesures en vlsagées.
A. - Sécurité physique
J.
L", principes directeurs Visent à répondre aux besoins légitimes
9.
Les gouvernements devraient adopter des mesures appropriées, no-
ici-aprb:
tamment un cadre Juridique. des régies de stcurité, des normes nationales

traités loyalemcnl et elles devraient satisfaire aux disposilions léples en vi·
O. - Cir(lJl/s de dislribUlion des biens et u>rvices
5
gueur, notamment en fournissant une information suffisammenl exacte
de premil're nécessilé deslinés alU consommall'Wrs
pour Que Ics consommaleurs puis..:nt prendre une décision indépendante,
27.
Les gouvernements devraient, le cas échéant. envisaier;
en toute connaissance de cau..:, et en veillant à ce que l'information fournie
a)
O'adopter ou de continuer d'appliquer des politiques visanl • assu·
soit exacte.
rer la distribution efficace des biens et ..:rvices aux ocnsommateurs; il fau·
21.
Les gouvernements devraient encourager toutes les panies concer·
drait, le cas éch~ant, envisager d'adopter des politiques paniculiéres pour
nées à faire circuler librement des informations exactes sur tous les aspects
assurer la distribution de biens et services indispensables, 10I'$Que celte dis-
des produits de consommalion.
tribution est mena~ comme cela est parfois le ca,. notamment dan. les
22.
Les gouvernements devraient, dans le contexte nalional. promou-
zones rurales. De telles poliliques pourraient pr~voir une assi.tance à la
voir la formulation et l'application par le ..:ctcur privé, en coopération
créalion d'inslJlllation. de stockage et d'installations commerciale. adé-
avec les organisations de consommateurs, de codes sur la promotion des
quate. dan. les centm ruraux, des incilJllions visant à amener le consom·
ventes et autres pratiques commerciales, afin de veiller à ce que le consom·
mateur' faire preuve d'initiative personnelle et l'amélioration du conlrOle
mateur bCn~ficie d'une protection adéquate. Le secteur privé, les organisa-
de. dispositions en venu desquelles les bien. et servi= de première néces·
lions de consommateurs et les autres panies int~ressées pourraient égale-
sité sonl fournis dans le. zones rurales;
ment conclure des accords à l'amiable. Ces codes devraient recevoir toule
b)
O'encoul'aJer la création de coopératives de ocnsommaleurs et des
la publicit~ voulue.
activités commerciales connexes, ainsi que la diffusion de renseignements'
23.
Les gouvernements devraient revoir régulièrement la législation re-
leur sujet, en paniculier dans les zones rurales.
lalive aux poids et mesum et s'assurer que le ménnisme d'application de
E. - Mesures permellanl alU consomlTl<lfeurs
celte législation est adéquat.
d"obfenir réparai ion
28.
~ gouvernements devraient instituerou faire appliquer des mesu·
res d'ordre Juridique ou admini.tralif pour permellre aux consommateurs
c. - Normes régissanl la surelé el/a Qua/fié
ou, le cas éch~3nt, .u~ organisations concernées, d'obtenir rtparation par
des biens de consommai ion et des services
des pr~urcs, officielles ou non, qui soient rapides. ~uitables, peu oné·
24.
Les gouvernements devraient, aux nivtaux national et internalio-
reu..:. et d'utilisation facile. Ces proc~ure~ devraient lenir corn pie en par·
nal el suivant les besoins, formuler des normes, facululives ou non, régis-
ticulier des besoins des consommateu'l à faible reyenu.
sant la sûret~ et la qualité des bien~ et ..:rvias 0" encourager 1'~laboralion
29,
Les gouvernements devraienl encourager toutes les entreprises 1 rt·
et l'application de telles normes, et leur donner la publicité voulue. Il fau-
gler le. ditlèrends avec les consommateurs à l'amiable, tquiubkment et
drait revoir de temps à autre les normes et règlements nat,onaux relatifs à
avec diligence, et • créer des mécanismes volonlJlire~, donl des services
la sûret~ et à la qualité des produits, afin de faire en sone qu'ils soieni con-
consultatifs el des pr~ures de rc<;ou'l officieuses su=plibles d'aid:r les
fonnes, si possible, aux nonnes internationales généralement accept~.
cons.ommaleun.
25.
Lorsque les conditions économiques locales condui..:nt à appliquer
30.
Il faudrait fournir aux consommateun des ren..:ignemen15 .ur les
une norme infèrieure à la norme internationale généralemenl acceptée, il
voies de recours et autres pr~ures dont ils peuvent se prtvaloir pour rt·
ne faut épargner aucun effon pour relever celte norme le plus tôt possible,
gler les ditlèrends.
26.
Les gouvernements devraient encourager el assurer la mi..: en place
de services chargés d'éprouver la qualité des biens et services de première
F. - Programmes d"édu(alion el d"infOl'lTI<llion
nécessil~ destinés aux consommateurs et d'en cenificr la sureté, la qualité
) 1.
~ louvernements devraient meltre au point des programmes gé.
et l'efficacité.
néraux d'~ucalÎon et d'information du consommaleur ou en enCO<Jrager la

i
40,
Eau. Les gouvernements devraienl, dans le cadre des buts et obJcc,
IV. - COOPfRATlON INTERNATIONALE
7
jtifs ~x~s pour la Œcennie inlernationale de l'eau pol.able et de l'as$3inis~·
43.
Les gouvernemenls devraient, en paniculier dans un contexte ft·
Iment, formuler, conlinuer à appliquer ou renforcer des poliliques nalions·
gional ou sous·régional :
~.cs vi$3ntàam~liorerl'approvisionnementencau potablc,ainsi quela
a)
Instituer des m~anismes facilitanl les èchanges d'informations sur
, iSlribulion et la qualité de celle cau,' Ils devraienl dûment veiller à choi·
les politiques nationales ct les mesures relalives à la protcction du consom·
ir des niveaux appropriés de service, de qualité el de technologie, à mellre
mateur, ou revoir, maintenir ou renforcer les mécanismes existants suivanl
):n placc des programmes d'édueallon ct à encourager la communaulé
t
les besoins:
l' panIClp<:r.
~
b)
Coopérer ou encourager la coopération dans le domaine de l'applica.
!
tion des politiques de protection du consommateur, afin d'obtenir de meil·
41.
Produits pharmaceutiques. Les gouvernements devraient élaborer
leurs résultats à l'aide des ressources existantes, Dans le cadre de celle
bu continuer à appliquer des normes adéquales, dO' disposilions ct des 'l·S·
coopération, ils pourraient notamment créer ensemble d.. s laboratoires
iémes de r~~ementation appropriés pour assurer la qualité et l'ulili$3tion
d'analyse ou les utiliser conjointement. mettre au point des proddures d'ana·
orrccte des produils pharmaceuliqucs grâce à une politique nationale sur
lyse communes, ~hanger des programmes d'information et d'~ducation
cs produits pharmaceutiques qui pourrait viser, entre aUlres, l'achat. la
du consommateur, organiser des programmes communs de formation ct
iSlribulion, la production, les accords de licence. les systémes d'enregistre·
élaborer conjointement des réglemenlations:
ent et la fourniture d'tnformations véridiques sur les produits pharma·
utiques. Ils devraient à celle fin préler une attention paniculièrc aux Ira·
cl
Coopérer pour améliorer les condillons dans lesquelles les biens de
première n~cessitl: sont ofTens aux consommateurs, en tenant dûment
aux et aux recommandations de l'Organisation mondiale de la santé. En
e qui concerne eenains produits, l'utilisalion du système de ceni~cation
compte du prix et de la qualité. Celle coopéra\\ion pourrait poner SUI
l'achat commun de biens de première nécessité, l'échange de renseigne.
e la qualité des produits pharmaceutiques faisant l'objet d'échanges inter·
ments sur les diverses possibilités d'achat et la conclusion d'accords sur 1e1
ationaux adopté rar l'Organisation mondiale de la $3nté Cl d'autres sys·
mes internationaux d'information devrail étre encouragée. Des mesures
spéci~cations régionales applicables aux produits.
evraienl aussi êlre prises, suivant les besoins, ;>our encourager l'utilis..ation
44.
Les gouvernements devraient créer des réseaux d'information con·
e mèdicaments sous leurs dénominations communes intcmationa.
cernant les produits interdits. retirés du marché ou rigoureusement rt&Je-
s (OCI), en s'inspiran' des travaux efTectués par l'Organisation mondiale
mentés ou renforcer ceux qui e,istent, afin dc p<:rmellre aux pays impona.
Je la santé
leurs de se protéger ccmme il eor,vienl des efTels nocifs de ces produits.
45.
Les gouvernemenls devraient veiller à cc que la qualilé des produits
,~42.
Outre les domaines prioritaires indiqués ci·dcssus. les gouverne·
deslinés à des pays diffèrents et Jes renseignements concernant ces produits
'~enls devraient adopler des mesures appropriées dans d'aulres >e<:teurs,
ne présentent pas. suivant les pa)'s, des "arialions qui pourraient être pftju·
jels les pesticides et les produits chimiques. eu égard, selon les cas, à l'ulili.
d!ciables aux consomma leurs.
jolion, la production cl le stockage des produits. en tenanl comple des in·
46.
Les gouvernements devraient veiller à cc que l'application des poli·
~rmalions relatives à la s.Jrlté cl ~ "en\\'ironnement que les gouvernements
tiques cl des mesures de protec1ion du ronSOnlmatcur ne fasse pas obstacle
~x.igent évenluclh:menl des fahricants, qui doivent les faire figurer sur l'cm·
au commerCe Întcrnalional cl que ccs politiques et mesures soient con·
~lIage des produils.
formes aux obligalions de ce commerce.
)

1
l
r /(5/f
i
Année -
No 354
NUMERO
SPECIAL
5 Mai c1967,
t12<
NAL OFFICIEL
LA REPUBLIQUE TOGOLA 15E
LOIS
ET
DECRETS
REYES.
DEqSIONS.
Cm::ÙLAIRES,
AVIS,
COMMUNICATIONS,
INFORMATIONS
ET
ANNONCES
PARAISSANT
LE
la
ET
LE
16
DE
CHAQUE
MOIS
A
LûME
ABONNEMENTS
ABONNEMENTS ET AN.NONCES Il'
ANNONCES ET AVIS DIVERS
- -
1
• HD~C1 ft o;e~ 'OT1 ~'U".HJOrr. 1r~l"Iço" .. l Cll.
'~k
OrdinUre
_, . . • . . .. 1.300 Irs
800 lrS
Pour
les
aoonnem6nu,
annonoe:s
et ii La ligne
80 ln
Avion
3.300 Irs 1.700 lrs
rédamatJOns
,'adresser à l'EDITOCO ,1
minimum. •• •• . . .• .. . • . . • . . • . • •. . .•
2SC fn
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c
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-
-
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Tél. : 37.18 -
LOME..
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_. 3.750 frs ~.3oo (rs
Ils commencenl pu le premier numéro
minimum
2.50 En
( An comptant à rimprimerie:
75 lu
d'un mo,s ec ~ tenninent pu le dernier
ta ) Pu porteur ou par poste :
numéro d'un des qw.tre trimestres.
Diroctio:J,
RédAction
et
Adminéstrau<rtl
1
h.. 1Togo, frlnce et aUCres ParI
d'uprernon française
90 (rs
Les abonuements c>t annonces sonl paya·
Cabinet
du
Présideot
de
a République
Etranger : Porc en sus.
bles d·avwoo.
Télépbone 27-01 -
LOME
SOMMAIRE
OBDONNANCES
ORDONNANCE No 17 dll 22 ao/il196ï porJant rjg/~mmJaJion
ORDONNANCES
dr.r prix et ÙJ circlliu dr dirtriblltion.
LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
.~7
VU le-; ordonnances ne: 15 et 16 du 14 avril 1967;
Vu la loi du 14 mars 1942 promul~ée par arrêté no 317 du
/vnI -
~o
Ordonnance
.17 ~ortanl r.égl~e?talion dee prix
13 juin 1942;
,
et des Clrcull6 de dl~lnbullon .....•....
,
.
Yu le décret no 64-21 du 15 février 1964 portant résdeznen.
tatiOn du contrôle des prix et .rocks ;
lvril ~ Ordonnance nD 18 autorisanl la République togo·
l .
Jaise à avaIi~er. en faveur de la BraS&ilrie
1
Sur proposition du ministre du co=eroe. de l·~duslrie. .nu
tourisme
do Bénin.. un crédit il moyen terme de
et du plan ;
i
80.000.000 de franc,
.
7
Le conseil des ministreo entendu,
1
lml -
Ordonn~nce nO 19 créant une cour spéciale mili·
;1
t811e
.
7
ORDONNE
hai -
Ordonnance 11° 20 relati~e au re8pttl de -).1 polili.
·:·~:1
TITRE 1
1
'.
qne de réconciliation nalionale ......•. " ..
8
.i
" ' \\
DE LA REGLEMENTATION DES PRIX
.. ; ~:.: .:
...
.... .....:.;.
..
...
Article premier. -
Le prix de vente.! la consommation iaté· ·'(.r
lrieure ~es produitA d'origine ou de fabrication locale et des m.u•.:-{.ç,
cbaodoo d'importation ainsi que les prix de cession des services :.:;
ACTES
DU
GOUVERNEMENT
sont) i b r e s . . . . :
DE
LA
REPUBUQUE
TOGOLAISE
.
lut. 2. -
Toutefois en vue de 54uvegarde~ le pouvoir d'a~t
~
du tonsommateur et de CClDCTibuer efficacement au développement . ,
~conomique et social du pays de-s décisions relatives au prix de
IOEOI""'. ARREn:S, DECISIONS ET cmCULAl/Œ'l
tous produits et muchandises et de tous services peuv::nt Hre pri-
ses
"1
-
par arrêtés interrninistérie-ls du ministre du commerce,
.'
i
PRESIDENCE DE LA RD'UBUQUE
de l'industrie, du tourisme ~du plan el' du ministre in·
téressé, pour les produits et ~rvice. dont i. liste figure
.':
t7
au tableau annexé 2 la .pr~te ordonnt<;e ;
.,--:•..-:'~~
2 -
~I -. Décret n° 67·99 portanl organisation de la Ii!>re
par arrétés du ministre du cornnierce. de l'industrie.: du·....\\
1
y
concurrence
'
.
8
tourisme"ct du plan pour 'to'us les aÙtres produits, mu,~­
. chafldj,,-~ et services
~
.... ):
."
.'.' ".
:....::~
.------~--------------

t'I"I,.••-• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •tll!l~:••$
,,"
j~ Mai 1967
JOURNAL OPPICIEL DE L'A RE.PUBLIQUE TOGOuAISE
3
1
,~
Il
Art. 11. -
Le prix dt revient des produits et marchandises
'détachées, se~nt déterminés en su,s des éléments énu-
rigine ou de fabrication locale- est fixé dans les conditions sui·
mérés 'au, paragraphe précédent.
·
.....•·
• ~s :
.
3) en cas de mise en ven te dans un lieu différent de
. t .
1) Valeur du produit
ou des matières premières
fournis sur
celui de l'importation, les frais de transport et de manu-
1
1
.
,
i
P ace ou Importes
tention grevant la marchandise du magasin de gros a\\1
2) Coûr de la transformation Ou de la fabricabon
[>oint de destination finale,
1
1
3) Prix d'achat au produneur ou -:lU fabricant, le cas échéant
J\\n. 1 S. -
En cas d'intervention d'intermédiaires
J
en tre le grossiste et le 'pétaillant, ;la remise accordée·
4) Frais de manutention, de transport, d'assurance·transport
l
et éventuellement de retour et de location des emballages.
par le grossiste est partagée entre les intermédiaires à:
l'exclu,sion du miniml.1m de remise qUi revient toujours
J Art. 12. ~ Les tarifs des prestations 'de servic~s,oont
au, détaillant ou de la marge qui pourra être accordée à;
~és après étude des éléments constitutifs des prix de
ce dernier,
tient.
.'
Lorsqu'une marchandise fait l'objet d'un transbordement ou
~
i
.Les prix de revient des produi ts pharmaceutiques,
d'uoe import3.tion dans un autre Etat, et d'une réexportation de cet
·.is livres et journaux sont dhermines suivant le~ US:l~
Etat .lU Togo, les prix de vente de Cette marchandise ne pourront
s
1 commerciaux.
en aucun cas excéder les prix de vente de ces marchandises impor.
1
tées directement du pays d·origine. Toutefois des dérogations pour·
l Art. 13. - Les ventes en gros ou demi.gros doivent
'
,ront être accordées par les ministres .intéressés pour des circoostan·
e faites aux commerÇ1nlS r:ltcntés, il l'administration.
\\ces exceptionnelle" après avis du ministre du commerce, de l'jn-
dustrie, du tourisme et du plan.
ftoutes sociétés d'économie mixte, tous établissements
blics. toutes mutuelles agricoles ct routes coopérati-
fs réguiièrement constituées suivant les usages du corn·
TITRE III
hce.
DE L'ORGANISATION DU CONTROLE DES PRIX
1 Les fournisseurs sont tenus de délivrer une facture
ous les commerçants et re\\"endeurs, acheteurs
Art. 16. -
Le contrôle des prix est assuré, sous l'a utorit~ du
de mar·
ministre du commerce, de l'jndustrie, du tourisme et du plan par,
, ndises sur place qui doivent l'exiger de leurs fournis·
le serv ice d u contr~le des prix.
urs. Cene facture devra portel' notamment un numérO'
rdre, le nom et l'adress~ de \\'endeur et de l'acheteur.
Art. 17. -
Sont habilités à procéder à des contrôles et à cons·
quantités, la nature, la qualité et les prIx unitaires et
later les infractions à la présente ordonnance, le; zb~nts .s;ti'men·
•taux des produits et m:lrch~;ldises vendus, la date de,
tés s:.:i,·;;nts :
j vente, la signature du verdeür ct ceci avant ,toute mi.
!
-
le chef du service du contrôle des prix ;
en vente.
1
-
les inspecteurs du service du contrôle des prix
Dans.1e cas')de wClérés ravjtaillant leurs propre~'
~,ccursaks ou comptoirs. ces indications ~doivent être'
-
les contrôleurs du service du contrôle des prix
~rtées, en l'absence de facture sur tout document en,
-
les adjoints de contrôle des prix.
,nant lieu.
.
.
~
Peuvent également être habilités à procéder il ces contrôles et
1
En ce qui concerne les .produ i[S et marchandises
à constater 'les infractions visées ci-dessus, il .Ia demande du min.is-
pu,mis à contrôle, les prix de \\"ente au détai(' limite à
tre du commerce,
de l'ind ustrie,
du tourisme et du
plan, et sur
pmé doivent figurer sur les factures ou documents,'
.présentation d'une décision, d'urU délégation ou d'une réquisition
Velle qoc soit la d(\\<;tin:llion d~ la m:lrchandisc au To-
délivrée par celui-ci ;
p.
les chefs de circonscription administrative
j
Art. H. -
Le prix licite de vente au odétaild'une'
-les officiers et agents de police judicuire
~archandise est obtenu en ajoutant au prix de revient,
rI
les agents du E>ervice des douanes et des contributions di·
qu'il est déoomplé à 'l'article la, les éléments sui.'
rectes
unts :
,
toute autre catégori-::de fonctionnaires assermentés, habili·
.
1) u,ne marge bénéficiaire brute couvrant le bénéfice"
tés par arrété ministériel,
:!s charges et frais d'explOitation générale tels que ceux
et pour ce qui les concerne
personnel, des impôts el taxes. des travaux, fourni·
-
les agents du service de l'élev~ge et~es industrÎea animves
.res et services e>,:térieurs, de tramports lel.:déplaccment,
gestion Ct financiers des dotations, au,x comptes d~
-
les agents
du service
du condi.tionnement des
produits
vision et amortissement, ainsi que les redevances aux
agricoles,
ganismes professionnels, les pertes et avaries. les remi-
,:s, les frais définitifs résultant de la consigrùltion des
Art. lB. -
Conformément
aux dispositions de
l'alinéa 3 de
hballages etc... .
.
l'article 3 de la présente ordona.ance, tes produits et marchandise.
lpeuvent être soumi~ il déclaration obligatoire de stocks.
~ 2) les frais de montage pour les représentants de
'.r~
~ranoes
Dans ce cas, les personnes visées i l'artide 17c.i-dessus lOO.t
:.
offrant des
à leur Clientèle, disposant"
également habilitées i procéder i des contrôles et l consuter l'~:
.' u,n service spécialisé après vente et Jétenant des pièces
xactitude des déclarations faites.
. ·;.L
1
,,:;-...
.~~~j~­
:j:i-~
,. -
.•. _----._--.

:::;::~~~~~~r" ('\\<B~,[,:';~
"..,"'<
........~
. JOURNAL OFFICIEL DE ·LA REPUBLIQUE -TOGOLAISE
5
• ~
J
;.~:~e fait de nepas,pr&nter'i la première dem~de,~es f~c:
de transaction, le chef du, service du contrôle, .des prix tnnsmet le
1 tionnaires ~r~ _,du cont1'61~ des ptlx,1cs, stru~~~ de
-','dossier au parquet pour la suite judiciaire à ',a~ner.·
1 prix, les factureS ct les ~ocuments authentiques lust~flant
Le'parquer doit aviser il' ministre du coàun:rce. de l'industrie,
ks prix de re'l"ient. ks pflX de vente en gros, de demI-gros
du tourisme et du plan dans le d~lai de soixante joun à compter
i
ou de détail. '
de la réception du dossier, de la décision qu'il a prÎlle.
'
,.(krt., '.26, - ~~t pa56ibles de sanctions au regard de la présen-
~~nlU1lce,les mfracttons sUIvantes:
TITRE VIl
LkirefuS de' communication de documents ;
A '~'.~:.\\... : . .
DES SANCTIONS
1
....~. '~".'
; ,';-';ù'.d.issimulation ou le défaut de documents
'"
,:(:J~ppositionà
Art, 33, -
Le ministre du commerce, de 1'industr~. du tou·
1"Glction d~ f;nctio?naires,~s .à J'at:ticl<F
.Jisme et du plan
peut açcQrderau délinq~t le bénéliq: d'une
~tàlmi que les iojur:=s e,t vOie. "te ~&ItCOrnnll~ea~ leur ~~.:d
::.tIansactioQ pécuniaire
si les
renseignements' ~è<:uiillüs sur son
:~~{ti'ooobsUntl'app1JGatlOn des articles du Codepeml qut.r(-,, r,.; compte sont favorables et s'il n'y a pas récidi"'e dans un âèlai d'un
7;~,primeMlcs infractio<is commises contre tous ag=ts chargés,'", "an dC'puis Is dernière infraction, La trans.aetion ,pfffi1l=' 'peut être
'~,,:dü contrôle des prix.
'
. assortie du maintien ou non de la s3.isie prévue à l'artiülc 31 ci-des-
.
lSUS.
:,
-
'
. ~ , 27, -
E.t ~gale~ent considérée comme ~fraction, IaprGl- ,
!
dt:. marché noir consistanri faire ou tenter.i}e faire usage 'de
Les modalités
de la tran5aetion et du pa'iemc:nt. s'effectuent
~.,.;>vresfraUdUleu.se.s.t~IlCS~~e.l'omissioo,oulafalsification commesuit:
itures, la tenue de comptabilite occulte, 1absence de facture.
-
un avis de la transaction est donn~ au délinquant. soit di·
'emise ou ~ perception de &oulte occulte, ainsi que route autre
rectement, soit pat pli recommao'dé avec avi$ de réception
vre tendant à dissimuler soit l'opération incriminée; soit son
postal ;
tèn:: soit ses conditions véritables,
.
.
.. ' .
.
.
-
un 'l'ete de transaction portant l'indi'catio~ et h signature
i
du débiteur, le montant <:t la date de.14. t:ansaction,cst
TITRE VI
!
transmis au trésor~r-payeur au momC'nt du versement du
j
montant de la transa~ion par le d~nquant.
Le paiemen.t dt la transaction doit êtree{feetué d4.ns le délai
.d'un mois i compterdujoUf' de lA notification ckToffre de tran-
saction. .

f:...- - - - - -....------~-
..··-..
~~t
5 Mai 1967
JOURNAL OPPICIEL DE LA REPUBLIQUE TOGOLAISE
7
Les biens confisqués ou acquis à l'Etat sont remis à l'admiois-
ORDONNE:
ion des domaines qui procède à leur aJiénation dans les condi-
s fixées par les lois et règlements.
.
Article premier -
La Répu.blique togolaise est au-
torisée à avaliser. à concurrence de quatre vingts mil-
l Art. 54. -
La rép3rtition du produit des pénalités et des con-
lions (80.000,000) de francs, k
crédit à moyen terme
Ltions recouvré~s en vertu .d~s dispo.si~ions de la .présente ordon-
~ce
sollicité par la Brasserie du Bénin, et destiné GU fman- .
est détermmee pu arrete du mlOlstre des fman,es.:
cement des opérations relatives à l'augmentation de la
i
capacité de production de la Bras~rie du Bénin.
Art. 55. -
Les foncl.Jnnaires et agents visés à l'article 17 ci·
~us percevront sur les fonds du budget de l'Etat des remises à
Art. 2. -
Pouvoir est donné au Président de la Ré-
~on de 5 % au maximum.du montant des transactions interve-
publique de signer la con,'ention nécessaire à cette fIn.
ts ou des amen?~s inf!i!!~es étant entendu ~ue c~s r~ises ~e
trront étre superJeures
a 5.000 frs par affaIre.
01 depasser le
Art. 3. -
Le ministre des finances et de l'économiQ
Jrt de la solde de base annuelle du fonctionnaire ou de ragent.
, et le ministre du commerce, de l'industrie, du tourisme'
.~
1
et du plan sont chargés, chacun e:1 ce qui le concerne.
Art. 56. -
Les sanctions et peines édictées par la présente or-
de l'exécution de 1:l présente ordonnance qui ser:l publiée!
inance se substituent à toute. sanctions et peines prévues par les
au JournaL officiel de la République togolaise.
Jes antérieurs à raison des infractions visée. ·au titre V.
Lomé, le 22 avril 1967
J Art. 57. -
Des circulaires d'application prises par le minis-
Lt Cl E. Eyadéma
Idu co~~er~e. de J'industrie. d.u, tour!sme et du plan fi~eront
flr:~~~I~:~SdappltcatlondesarretesPflSenvertudelapresente ParlePrésidentdelaRépu,blique:
Le ministre des tinolices et de l'économie.
••... Art. 58. -
Toutes dispositions antérieures contraires à la pré-
B. Djobo
. e ordonnance sont abrogées. et en particulier la loi du 14 mars
2 promulguée au Togo par arrété no 317 du 6 juin 1942 et le
Le ministre du. ct>mmerce, de l'industrie. du tourisme eL
jret no 64-21 du 15 février 1964.
.
du, plan,
1Toutefois les dispositions prévues à la présente ordonnance oe
P, Eklou
~tpasobstacle àl'applicationdudécretno65-4 du6janvier
.•. 5 autorisant. 1: blocage de~ prix et Ms arrété~ réglementant les
.•• -, parus anteneurement. L artIcle 56 de la presente <;>rdonnance
ORDONNANCE No 19 du 25·4-67 créant une cour spé-
•• eure cependant applicable.
ciale militnir~,
1
l Art. 59. - La présente ordonnance sera exécutée comme loi
J41 Répuhlique togolaise.
LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
1
Lomé. le 22- avril 1%7
Yu -les ordonnances no
1 du 14 janvier 196ï et 110 15 du
i1
Lieutenant-Colonel E. Eyadéina
14 anil 1967; .
Vu la loi modifiée du 9 mars 1928 portant ~ de justice
militaire pour l'année de terre;
Le conseil d~ ~inistres entendu.
j.
ANNEXE
4
ORDONNE
j Produits énergétiques : électricité, eau. carburants
, Article premier -
En attendant la ffiiseen place
Produits des mines et carrières
des juridictions chargées de l'application du code <iejus-
Produits agrièo1es togolais
tice militaire, il est créé une cour spéciale mil.itaire qu~
connaîtra des crimes corrtmis 'par 'des militaIres dan!
Tarif des services de transport
l'exercice de leur fonction.
l
'
;. Tarif de location et de vente des immeubles et terrains_
Art. 2. -
La cour spéciale militaire est présidée 'par. '.
un officier supérieur assisté de deux officierS subalter-'
l
lies. de trois sous-officiers et d'un militaire du mOine
~PONNANCENo18du,22-4-67autorisantlaRép"ù. corpsetdu.mêmegrac:equ~l'accusé.
.. bllque togolaise Q avaliser, el.' 1'lt'eur de la Brasseris
Le président et les membres de la cour :;ont ~o..'l1­
du Bénin, un crédit il moyen terme de 80.000.000 le
,més par arrêté du ministre de la défense nationale..
francs,
.
1 .
Art. 3."::'" Les membres de la cou.r ,spéciale ;cnilitai7.
j
LE PRESroE~'T DE LA REPUBLIQUE.
re ne peuvent être récusés.
t......···Vulaconventiond'établissemententrelaRépub.I~Queto~o­ . Art.4.- Leministè~pu.blicprèsdelaC9U~'6p& .;
· e et la Brasserie du Bénin, en date du 30 avril 1966;
ciale militaire est représenté par u,n otficier désigrié .pa~,,~1
· Vu la 'lettre de la ~rie du Bénin, en date du 24 Dlan
;
le ministre de 1;1. défense nationale;
"';1
Sur proposition du minis~ des finllIlOel5 et ~ rOOonomie
j
part.
Art. 5. -
Un défenseur qui peut être pris .parmi
R dumini.tre ducommerce, del'industrie), du tourisme'
· u p:an "d'autre parl ;
, ,
' .
. .
1~ officiers ou ,?us~fficie~ est désigné ~'<>ff~ par 1:::..
, Le oonsei.l det ministres ebtendu. .
' -
jt111nisu-e de la défense natJonale pou,r assIster l accusé; '_
.
.
oc;-
,
..
;

uridls t o n°5
LEGISLATION
Janvier - Février - Mars 91
,. ArtIcle 8.-
jUstifiées par des contreparties réelles.
,', (a) L'exercice d'une activité commerciale au
,
(b) Tout producteur, grossiste ou importateur est
ameroun par un étranger est subordonné à l'obten-
tenu de communiquer à tout revendeur qui en fait la
n, d'une agrément préalable dans les conditions,
demande son barème de prix et ses conditions de vente.
t~es par. voie réglementaire.
.',
Anlcle 14.-
(b) Toutefois, toute personne physique ou morale
Est interdite toute revente d'un produit en l'état à
rangère qui veut exercer une activité commerciale
un prix inférieur à .son prix d'achat effectif, ce dernier
Cameroun jouit des mêmes droits que ceux qui
s'ent~ndant du prix porté. sur la facture d'achat, majoré
nt accordés aux étrangers et spécialement aux
des frais d'approche jusqu'à rendu magasin plus les
, merounais de la ~ême profession dans le pays dont· ,
taxes~
. ,
le a la nationalité.
Toutefois, cëUe disposition n'est pas applicable
(c) Les personnes physiques et société étran-
lorsque le revendeur peut démontrer que la nature des
ères régulièrement établies au Cameroun et y
produits en cause eVou les conditions du marché ne
ployant une activité commerciale à la date de publi-
lui permettraient pas de pratiquer un prix plus élevé.
tion de la présente loi sortdispensées de l'agrément·
ArtIcle 15.-
smentionné.
Toute vente faite par une entreprise commerciale
Article 9.-
à une autre doit donner lieu à délivrance d'une facture.
Nonobstant les dispositions de l'article 8 a) ci-
Toute facture doit mentionner le non commerc.ial
essus, l'activité commerciale est exercée. sans agré-
ou la dénomination sociale le numéro d'immatricula-
ent préalable par les personnes suivantes:
tion au registre du commerce et l'adresse du vendeur
, (a) Toute personne physique ayant la nationalité
ainsi que la désignation la quantité le prix unitaire et la
'un pays avec. lequel le Cameroun a conclu une
prix total des marchandises vendues.
onvention assimilant les nationaux de chacun des
Les mêmes dispositions sont applicables aux
ays aux nationaux de l'autre en ce qui concerne
prestations de services.
'exercice d'une activité commerciale.
Anlcle 16.-
(b) Toute société commerciale comportant des
Sont interdites toutes actions concertées,
qpitaux étrangers, dont le siège social est situé au
conventions et ententes expresses ou tacites, tendant_
ameroun et dont 51 % au moins du capital est détenu
notamment à :
.
ffectivement, directement ôu indirectement, par des
- restreindre l'accès au marché ou le libre exerci·
ersonnes physiques de nationalité camer9unàise.'
ce de la concurrence par d'autres entreprises;
ArtIcle 10.-
- entraver la détermination des prix par le libre jeu
Toute société commerciale étrangère qui veut
du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou
'établirau Cameroun pour y exercer une activité com-
leur baisse;
erciaJe peut soit constituer une société dont le siège
- fixer des quotas de production ou de 'vente;
st situé au Cameroun, soit ouvrir une représentation
- répartir les marchés ou les sources d'approvi-
ommefti~le conformément à la législation et à la
sionnement.
_
églementation en vigueur.
Les dispositions du présent article ne s'appli-
Aitlcle 11.-
quent pas aux pratiques qui résultent de l'application
l
Les contrats de distribution et de représentation
d'un texte législatif ou réglementaire .
~omme~ciale doivent être établis par écrit. Les parties

,1,
Article 17.-
lléterminent librement l'étendue et les conditions de
Est interdite l'exploitation abusive par une entre-
li ~urs droits et obligations dans le respect des lois et
prise ou un groupe d'entreprises d'une position domi-
'
tèglements en vigueur.
nante sur le màrché intérieur.
j
Anlcle 18.-
litre III - De la Concurrence
Il est créé un Conseil de la concurrence, dont la
composition, les modalités de saisine et de fonctionne-
ment seront précisées par voie réglementaire.
Article 12.-
,
Le Conseil de la Concurrence examine, sur des
Les prix des produits et des services sont Iibre-
bases économiques, si les Pratiques dont il est saisi
,'ment déterminés par le jeu de la concurrence sur le
entrent dans le champ des dispositions des articles 16
t'marché sous réserve des interdictionsci-aprèsfrap-
., rant
et 17 ci-dessus et remet un rapport à l'issue de son
c~rtaines pratiques anti-concurrentielles prévues
in'struction à l'autorité de tutelle.
ux articles 13, 14, 15, 16, 17 et 18 ci-dessus.
Le- Conseil
Toutefois, la fixation des prix.de certains produits
d~ la Concurrence est également
compétent dans les mêmes conditions, pour l'applica-
,et services: ,de première nécessité notamment, peut-
tion des dispositions des articles 13 a} et 14 ci-dessus.
être soumise à la procédure d'homologation préalable
La saisine du Cons.eil de la Cotlcurrence est un
conformément à la législation en vigueur.
Article 13.-
préalable obligatoire à toute action contentieuse enga-
J .' (a) Est interdite pour toute entreprise. commer-
gée par "Autorité de tutelle à l'encontre des entre-
prises qui contreviennent aux dispositions des articles
1ciale la pratique à l'encontre d'une autre entreprise de
13 a), 14, 16,et 17 de la présente loi.
!prix ou de conditions de vente discriminatoires et non
ID
.

lJuridis info nOS
.
LEGISLATION
Janvier - Février - Mars 91
laprès avoir été datée et signée par les deux parties.
Article 33,-
!
c) Le client dispose d'un délai de quinze (15)
Les dispositions des articles 19 à 22 de l'ordon-
~.
J.,.jours, jours fériés compris, à compter de la signature
nance n° 72/18 du 17 octobre 1972 ainsi que les
, u contrat, pour y renoncer par tout moyen écrit, daté
amendes forfaitaires prévues à l'article 31 nouveau de
;et signé porté à la connaissance du démarchéur et
la loi n° 89/011 du 28 juillet 1989 modifiani l'ordonnan-
'. éceptionné par lui. En cas de courrier postal, le
ce n° 72/18 susvisée sont applicables en cas d'infrac-
achet de la poste fait foi. Ce délai est prorogé
tion constatée par procès-verbal aux dispositions de la
usqu'au premier jour ouvrable suivant lorsqu'il .expire
présente loi sous les réserves suivantes
n samedi, un dimanche ou un jour férié et chômé.
a) le délai de quinze jours visé à l'article 19 de .
· oute clause du contrat par laquelle le client abandon-
l'ordonnance précitée telle que modifiée par la loi n°
e son droit de renonciation est nulle et non avenue.
79/11 du 30 juin 1979 est porté à 30 jours et court à
·
A l'expiration de ce délai et en l'absence d'une
partir de la date de remise du procès-verbal à l'entre-
enonciation, le contrat entre automatiquement en
prise concernée;
· igueur.
b) en ce qui concerne les infractions aux disposi-
i
(d) Tant que le contrat n'est pas entré en vigueur,
tions des articles 13 a), 14, 16, 17 ci-dessus, l'Autorité
il ne peut être exigé à quelque titre que ce soit un
de tutelle ne peut porter plainte qu'après avoir recueilli
fue,conque paiement du client.
l'avis du Conseil de la Concurrence, ainsi qu'il est dit à
i
.(e) Les démarc.heurs do~vent être obligatoirement
l'article 18 ci-dessus;
palanés ou mandataires du vendeur ou du prestataire.
.c), aucune transaction n'est permise en cas d'in-
1
fraction aux dispositions de l'article 8 ci-dessus relatif à
Titre V
l'obtention préalable de l'agrément administratif pour
.,' Constatation des Infractions et Sanctions
l'exercice d'une activité commerciale par un étranger et
,
en cas de manquement à l'obligation d'assurer le servi-
!
ca après-vente prévue à l'article 21 de la présente loi.
;
Art/cie 31.-
Article 34.-
j
Les infractions aux dispositions de la présente loi
En ce qui concerne les cas spécifiquement visés
l ~nt
t constatées par procès-verbal établi par les au présent article, des mesures particulières peuvent
'., gents des services du commerce, de contrôle des
être prises par l'Autorité' de tutelle qui peut notamment:
•. rix et de la concurrence, spécifiquement et dûment
- décider d'office la fermeture de l'entreprise ou
~abilités par l'Autorité de tutelle.
mettre le contrevenant en demeure de régulariser sa
l'
L'officier de police judiciaire peut intervenir dans
situation dans un délai maximum de trente jours, en
~a constatation des infractions aux dispositions de la
cas d'exercice sans agrément d'une activité commer-
~ésente lo~. Dans ce cas, il est tenu d'en aviser immé-
ciale par un étranger;

latement 1agent assermenté du service du commer.
- prononcer l'interdiction de distribuer le bien dont
r ,
, e. des prix ou de la concurrence.
le service après-vente est reconnu inexistant ou défec-
,
Les dispositions de l'article 16 de l'ordonnance n0
tueux après une mise en demeure enjoignant le
172/18 du 17 octobre 1972 portant régime général des
contrevenant à régulariser son activité dans un délai
prix sont applicables aux dits procès verbaux, lesquels
maximum de quatre mois;
t::l0ivent être établis, à peine de nullité dans les quinze
. décider, après, avis du Conseil de la
lours suivant la date des constatations qu'ils relatent.
Concurrence, des mesures tendant au rétablissement
;
Un exemplaire de chaque procès-verbal est
de la concurrence dans le cas des ententes et abus de
transmis à l'Autorité de tutelle.
domination visées aux articles 16 et 17 ci-dessus ainsi
Article 32.-
que des infractions aux dispositions des articles 13 a)
Après avoir justifié de leur qualité et remis au res-
et 14 de la présente loi.
t>onsable de l'entreprise en cause une notification indi-
Article 35.-
~uant l'objet de leu~ enquête, les agents visés à l'ar-
Toute opposition, toutes injures ou voies de fait à
licle 31 ci-dessus peuvent, aux heures d'ouverture de
l'égard des agents visés à l'article 31 ci-dessus, sont
j'entreprise en cause, demander communication à
punies des peines prévues aux articles 156 et 157 du
foute entreprise commerciale de tout document pro-
Code Pénal.
fessionnel nécessaire à "accomplissement de leur
Article 36.-
~nquête et en obtenir copie. Ils peuvent accéder à
Sous réserve des dispositions des articles 37 et
~ous locaux à usage professionnel et recueil/ir, sur
39 ci-dessous, les infractions aux dispositions de la
~Iace ou dans leurs bureaux, toutes informations ou
présente loi sont passibles des peines principales et
~xplications.
accessoires prévues à l'article 326 du Code Pénal.
1
En cas de besoin, "agent verbalisateur, à l'excep-
Article 37.-
lion de l'officier de police judiciaire, peut procéder à la
Est puni des peines prévues à l'article 256 du
~aisje des produits objet de l'infraction conformément
Code Pénal celui qui:
jaux dispositions de l'article 17 de l'ordonnance n0
- viole les dispositions relatives à "établissement
,172118 du 17 octobre 1972 suscitée.
des étrangers:
- omet d'organiser ou organise de façon défec·

11p.Textes sanscommentaire
~i
1.2.1. Lois et Ordonnances
1
III Loi N° 88/016 du 16 décembre 1988
régissant la publicité au Cameroun
L'Assemblée Nationale a délibéré et adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit:
CHAPITRE 1- DISPOSITIONS GENERALES
b) la recherche de moyens graphiques, rédactiôn-
j
nels et audiovisuels devant permettre à une entreprise de
Article 1er - La présente loi régit la publicité et
t.....
traduire en termes publicitaires ses objectifs commerciaux;
fxercice de la profession de publjcitaire.
c) l'élaboration des plans média à transmettre àux
sociétés ou aux structures de régie.
Article 6 - 1) L'agence de régie de publicité: .
a) est une structure professionnelle chargée
~ Article2-Lapublicitéestdéfinieparlaprésente
i comme un ensemble de moyens utilisés ou mis en
•• uvre à travers des supports pour faire connaitre une
1 treprise ou en vue d'inciter le public à l'achat ou à la
d'assurer la commercialisation des espaces publicitaires
pnsommation d'un produit ou d'un service.
d'un support publicitaire;
1
Article 3 . Les principaux supports publicitaires
b) élabore les techniques qu'elle transmet aux
jilisés au Cameroun sont:
supports;
1
-la radiodiffusion;
c) représente le support auprès de ses clients et
j
- la télévision;
peut utiliser à cette fin des courtiers et des démarcheurs en
j
- le cinéma;
publicité.
!
·Ia presse écrite;
2) Les sociétés et autres structures de régie
- l'affiche;
agréées sont seules habilitées à effectuer des achats
• les enseignes lumineuses;
d'espaces auprès des supports.
- les voitures publicitaires ou tout procédé ana- .
Article 7 - La fonction d'agence conseil est
~ue;
incompatible avec celle de régisseur.
,1
-
tout autre support créé du fait du progrès de la
Art/cie 8 - Le courtier ou le démarcheur est un
fience et de la technologie moderne.
collaborateur d'une agence de régie de publicité rémunéré à
.!
Article 4 - la profession de publicitaire s'exerce
la commission. Il dOÎt être titulaire d'une carte professionnel-
lns le cadre:
le délivrée par les autorités compétentes dans les conditions
i
-des agences conseils en publicité;
fixées par voie réglementaire.
';
- des agences de régie de publicité;
Article 9 - Est considéré comme affichage publici-
'1
-des courtiers en publicité.
taire tout tract ou prospectus, tout visuel imprimé, tout cais-
l
Art/cie 5 - Une agence conseil en publicité est
son lumineux ou tout auto-eollant apposé sur des supports
ie société agréée assumant des fonctions spécifiques,
situés aux abords des routes, sur les meubles et tes
ttamment:
.
immeubles, et destinés aux usagers de la voie publique, à
1
a) J'utilisation de méthodes créatives et de marke-
l'exception de ceux apposés sur les meubles et immeubles
du siège social, les centres de distribution ainsi que les
..
i•.!9, ainsi que de stratégies publicitaires globales basées sur
tobjectifs marketing de "annonceur;
représentants commerciales.
1
.1
1,l
î

fridis irifo n° 3 spécial
LEGISLATION
Juil. - Août- sept. 90
A défaut de paiement, les objets saisis peuvent
être mis en vente aux enchères par le trésor public, confor-
mément à la procédure de recouvrement forcé des créances
de l'Etal. En tout état de cause, la destruction des objets
dont la détention est illicite est ordonnée par décision du
Ministre chargé de la publicité.
Article 31 - En cas de récidive, ou de commission
des infractions prévues aux articles 33, 34, 35, 36 et 37 ci-
dessous, le Ministre chargé de la publicité peut, nonobstant
l'intervention d'une amende ainsi que prévu à l'article 28 ci-
dessus, prononcer les sanctions administratives ci-après:
• retrait de l'autorisation;
- fermeture temporaire ou définitive de l'établisse-
ment.
Le mis en cause objet d'une telle sanction ne peut
obtenir une nouvelle autorisation pour exercer la profession
de publicitaire avant un délai de trois ans, et les objets saisis
sont confisqués puis soumis à la vente aux enchères
publiques, ainsi qu'il est prévu à l'article 30 ci-dessus,
Article 32 - Lorsque les faits constatés sont
constitutifs d'une infraction pénale, sans préjudice des droits
de la victime ni des attributions du Ministère public, tels que
définis par les textes en vigueur, le Ministre chargé de la
publicité ordonne au responsable provincial chargé de la
publicité de transmettre l'original du procès-verbal ainsi que
les objets saisis, au parquet territorialement compétent, aux
fins de poursuites judiciaires. Copie de cette correspondan-
ce est adressée au Ministre chargé de la Justice.
Dans ce cas, les juridictions compétentes statuent
conformément au droit commun, nonobstant le règlement
administratif intervenu en application des articles 28 à 31 de
la présente loi.
Article 33 - Est puni conformément à l'article 264
du Code Pénal, celui qui, à travers la publicité, porte atteinte
à la pudeur ou aux bonnes moeurs.
Article 34 - Est puni des peines prévues à l'article
240 du Code Pénal, celui qui fait une publicité mensongère.
Article 35 - Est puni des peines prévues à l'article
344 du Code Pénal, celui qui fait une publicité de nature à
causer un dommage physique, matériel, mental ou moral
aux enfants et adolescents, ou à compromettre leur édu-
cation.
Article 36 - 1) Est puni des peines prévues à
l'article 305 du Code Pénal, celui qui fait une publicité por-
tant atteinte à la dignité ou à la considération d'une per-
sonne.
2) Le délai de prescription de l'action est celui
prévu par les articles 305 paragraphe 4 et 307: paragraphe 3
du Code Pénal.
·3) Les poursuites ne peuvent être engagées que
sur plainte de la victime ou de son représentant légal ou
coutumier, mais jusqu'à la condamnation définitive, le retrait
de la plainte arrête l'exercice de l'action publique.
Article 37 - Est puni des peines prévues à l'article
228 paragraphe 2 du Code Pénal, celui qui .a fait de la publi-
cité sur un produit pharmaceutique, sans l'accord préalable
des autorités compétentes en matière de santé publique.
CHAPITRE VI - DISPOSITIONS DIVERSES
Article 38 - Les personnes physiques ou morales
de nationalité camerounaise ou étrangère, exerçant la pro
ID
J

Juil. - Août- Sept. 90
LEGISLATION
Jurldis lrifo n° 3 spédal
1
promulguée puis publiée au Journal Officiel en français et en
1
! fession de publicitaire au Cameroun à la date de l'entrée en
anglais.
!
vigueur de la présente loi, disposent d'un délai de six mois
j
pour se conformer à celle·ô.
YAOUNOË, le 16 décembre 1988
'1
Artle,. 39 - La présente loi sera enregistrée.
b PrtSsld.nt d. r. RtSpubllqUl
~uf8fYA

ONSOMMATION
iocu
DEVELOPPEMENT
enda' ,
Consommateurs dans la
construction de la CEDEAO
Cotonou 6-11 d6cembre 1993
RESOLUTIONS
à Cotonou, Réputique du Bénin <1J 6 au 11 décembre 1993, à l'initiati\\le
5 . d'élaborer et de développer en concertation avec le Bureau
Organisation Internationale des Ûnions de Consommateurs (IOCU), de
International, des stratégies vi~t à (X"~ des tonds adéQuats lXXJf ajl;1er!es
nisation Internationale jXlUr l'Environnement et le Dévelowemenl du Tiers-
Asoooalions dl consommateurs a mellre sa ~ œs P.fpg-ammés œ5eosibilisalion
(ENDA) el de l'Asroaatioo lXXJr la Protection du Consooimateur et de son
efficaces en éducation dl consommateur el une stratégie de recrutement sur une
période de deux ans.
.
nt au Bénin fAPCES), lesorganisations ci-a(X"ès on! cjg;ufé <1J thème
mmateurs dans a Constructioo (le la CEDEAO...
6 . d'élaborer et de développer en concertation ~vec les Asrocialions
1· Associalioo ~r la Protection du Consommateur el de son
membres ell'Oraanisati01lnlemationale ure méthodolOQIe adéoJate IW' p:lfTT]ettre
nement au Bénin (APCEB)
aux associationS d'obtenir lJle réparation légale dans ITntéfët des consorttmateurs
pris individuellement ou collectivement.
2· Association des Consommateurs du Burkina· Faso (ACS)
7 - d'établir en collaboration avec l'Organisation Internationale des
3 . Ugue des Consommatoors du Burkina -Faso (LCS)
relations de coIlaboratiOO avec les autres organisations qui poursuivent les mëmes
buts que les Associations de Consommateurs de la région.
4· Developmenl Action Througtl se" Help (DASH), GAMBlA
1 5-Consumers' ASSOCIalion 01 Ghana (CAG)
8 - d'intormer les gojJvemements sur les a\\,anta~s à tirer des
organisations de consommateurs tortes et de mesures j:ralJqueS telles que :
6 - National Consumer Caunal of Uberia (NCCL)
• la réducllon des cOOls dans le domaine de la santé
7· Assooalion des Consommateurs du Mali (ASCOMA)
• la protection de "environnement
• l'égali1é dans la société
8 - Organlsahon des Cons?mmateurs du Niger (ORCONI)
i
• Oes mécanismes effectifs de concurrence
9 . Consumer Edocalion and Protection Counal ot Nigeria (CEPCON)
9· de coocevoir et de développer des méthodes éducationnelles Qui
10· Christian Action for Na1ional Deveb(X"Oenl (CHRIS TAC), NIGERIA
permettront d'atteindre les populations analphabètes en ce qui concerne les droits
du consommateur,
11 . Association ~ur la Dèlense des ADon nés à l'Eau, à l'Electricité et
'phone (ADEETéll. SENEGAL
. 10· œ développer des campagnes d'éducation et de sensibilisation en
12· Association QOUr la Defense de l'EnVIronnement et des
collaboralion avec les mëdla
mmaleurs (ADEC), SENEGAL
11 -de corœvoirelœ œvelopperenconœrtation mec les organisations
13 - Ugue Africaine des DrOIts œ l'Homme et des Peuples. Section du
membres une méth~ approp!jée visant à renforcer leurs relations avec les
(LADHP)
média et la participation de' èes derniers au~ activités des organisations de
consommateurs aux niveaux national et sous-regt0naL
14· Groupoolent d'Action Ecor.orniqJeel SOOalede Tove (GADESTO),
12 ·de.corœvoir li de déveJ~r ooconœrtation a-.oc les organisations
membres et en collaboration avec l'Or
isation Internationale des directives et
15 - Consumer Coundl of Zimbabwe (CCZ)
des ~ adéouats pour la coIIede, a manutention elle transport des (X"oouils
dangereux devant élre soumis à un tes1 de contrôle.
16· Communaulé Economique des Etats de l'Atrique de /'Ouesi
AO)
13 - de demander à IOCU, en collaboration a~1e BEL.(; elles aulres
17 -BJreau Eurcpéen desUnionsdeConsomnaleur (BEUC), BELGIQUE
réseaux d'associations similaires œ prendre We iniliati'oe permettant d'empêd)er
l'exportation vers l'~ de tout p-6duit ou serviœ 00nt la commercialisation el la
"
18· ComrnissiXl des Communautès Eur~nes (CCE), BELGIQUE
consommation ont été IOter<iles sur le marché européen .
,19-CelluleIntormeDed'EtudesetdeRecherchepourlaGestionde 14-d'enQagerlesleadersdesassociationsœconsommateursàcbnœr
'.' ation sur les Edlanges (CINERGIE / SAD / OCDE): COTE D'IVOIRE .
l'exemple en consolhnlanlles produits locaux lorsque cela esi conforme à l'intérêt
des consommeteurs
t,Al'lS9JedesdiscuSSIonsapprofondiessurlelhémedeleurrencontre,
spirant des expériences des inSlJ1utions africaines, européennes et autres
15 - de demander la conœDlion des normes sous-régionales et la
•. isations s'intéressant aux consommateurs, les PlJ1icipanls recommandent:
. création de laboratoires de contrôle de là quaI~é des (X"oduits,
.
,
1- Que les orgarlisations de consommateurs en AfriQue de
16 - d'entre(X"endre
cooperent entre elles et traVaillent sous
des démarches au(X"ès des institutions travaillant à
la supervision de l'IOCU p'oor
l'inléQration économique comme CINERGIE afin de mener des éluœs pour mieux
e des buts et oqectifs communs par le !jais du Bureau Régional œDakar.
œmê'r!es impacts sur les consommateurs, œs poIiti<p;!s mises en oeuvre dans la
2 . Que l'organisation char~ de la su~sion éctJarge et
sous-regton,
les informations sur les activités des associations de consommateurs, les
isations sous-régionales et les institutions intemati~es.
17 - d'en aooeler aux ~\\'(lfnements des Etats memtres œla CEDEAO
afin qu'ils inscrivent les activitéS d'éducation, d'information et de P.Oteclion du
Par aiUeurs, ~ knJ des norntreus:lS contrairœs ~ui "eileit le lxJn
consommateur ~ par leurs associations çomme auestions prïoritajres au
nement des assxialioos lb consommateursœ la oous-régiC!1, contraintes
cours de leurs ~atidns avec l'Union Europeenne en tant que pays Afrique-
àla sensibilisation des COOSOI1llnatelrsel aux <3llpElgles d'ad1ésion aJ
Caraibes-PaciftqUe (ACP), en vue d'obtenir le financement de telleS aétivités,
d'équipements pour le contrôle des pro<1Jits, au manque drlflformatiOns
'ées et opportunes sur les marchandises dangereuses et à ~ue en
18 - de veiller à ce Que la CEDEAO harmonise les activités des
d'autres pays, à la répression
ministères dl l'immgatioo dans
~ des organisations et de leurs
~ dfIé1'enls Elats en vue d'lJl meilleur traitement
des consommateurs par les agents chargés de /"Immigration,
es sur le pan local, aux diffiëultés à collecfer des fonds pour le
nt de leurs activités, au manque œ coopération avec les institutions
r
19 - de veiller à ce Que des mesure$. uroentes soi~ises par les
~=~' lesparticip(llts d:>ment niandat au Bureau sous-r~ œIOCU
i gouvernements des Etats memlres de la CEDEAO pour fa
'
JI
. avaclesassociationsmentresetencollaborationavecl'ürganisation
"acœs des
)opulations aux soins de santé.
tionale :
.
1 - d'identifier les insœtlations de contrôle appropriées en vue de leur
20 - de willer à ce que la CEDEAO crée dans sa strucllJ'e un bureau
chargé de la
'on
politique des consommateurs.
par les associations membres.
2 -œ solliciter leur re(X"ésentation avec un statut d'observateur au sein
21 - de veiner à ce que la sensibilisation aux Pfoblèmes des
isOOonsrégi~ klrmlJentdesJX)Üti<JJesaffeclarlt Iesconsommaleurs
CQflSOlTU1lateurssoitintéQ!'ée dans leS ~ d'éducatilll scaairesdes Etats
nt la CEDEAO et, au besoin, assurer cette re(X"ésentation.
membres ainsi que danS leurs JX'ogarnmes d'alphabétisation des adultes.
3a-d'élaborer al ni't'eaU œ la CEDEAO un modèle œlégislation poor
\\
22 - Enflfl les participants notent que dans la quasi total~é des Etals
'on des consommateurs qui serait adoptéè par les Parlements des Etals
membres de la CEDEAO, ~ proqrammes d'arustement ou d'ur~ sont mis en
es ou par la CEDEAO ale même.
oeuvrQ et que ceux<i combil\\oor souvent la llauSie œs prix et la baisse des
salaires.
, 3 ~ • d'élabore;r et de développef en consut~tion 8'oee les associations
Acet égard, ils ~t leurs vives préocctpltions Ql;.Iarlt aux réoercussions œ
gallfS3tion Internationale des mesures ~OPOeeS et opportunes en vue
ces P.'QQrammes sur la vie des ménaqes et en 8J)pElBent aux Etats afin !lU~ls
et esécuritédes ~sablesœsassociàliOflSrnenb'esoontrela rép"ession
asoodetilles associations œconsomrtrateurs au nëi::essalre dialogue social qu'II
dans l'exercice de leurs tonclions.
• pour les assooations membreS sur les gra.nds problèmes qui affectent les
œ
aut
oor à ce Slliel
.
Les
j1ièipants reaffirment aussi leur cooviction qt!e les associations de
leurs partagent avec les synlicats de travailleurs certains ~edifs
communs et encouragoolle dévelowement des relations de coIlaooration avec
mateurs dans les pays membres.
eux.
~' 4·d'élaOOrer.etdedévelopperdesméthodesawropriéesderomote-
.
, n° 1J, décembre-/993-

RÉSOLUTIONS ET PLAN OIACTION
j
l r manque de surveillance par les
Des hypothèses non encore vérifiées
associations de consommateurs doivent
rvices chargés du conlrOle de prix.
laissent entrevoir que les causes de cette
de concert avec les services compétents.
Face au constat que ces services n'ont
baisse du chiffre d'aNa ire pourraient être
mener des actions d'information et
• PAGE V
les moyens (humains, matériels et
dOe à:
d'éducation sur les bienfaits de l'iode.
nciers) pour accomplir leurs missions,
MAI 1995
- "utilisation d'autres sources
associations de consommateurs
d'approvisionnement en eau par les
itent les Etats à mettre en œuvre des
consommateurs;
itiques qui créent un environnement
- une utilisation plus rationnelle de
orable à la concurrence sur le marché.
l'eau;
Les associations s'engagent à mener
- des charges liées au fonctionnement
enquêtes de prix sur différents biens
des sociétés qui ne seraient pas couverles
ervices dans leurs pays respectifs et
par les hausses appliquées sur les pnx
hanger ces informations entre elles.
après la dévaluation.
Les participants ont
souligné la
Les associations de consommateurs
essité pour leurs organisations
vont entreprendre des enquêtes et études
Les associations de consommateurs
puyer les efforts des membres de
afin de mieux appréhender les niches de
apprécient l'adoption dans diNérents pays
s communautés à s'organiser sous
surcoOt
répercutées
sur
le
des lois sur la concurrence, les priX et le
e de coopératives ou de centrales
consommateur.
contentieux économique. Ces législations
hat en gros des produits de première
Les associations vont échanger entre
permettent à l'environnement juridique
essité afin de baisser les coOts et de
elles les informations sur les pratiques
d'être plus en phase avec le contexte de
surer une accessibilté régulière à ces
des sociétés dans leurs pays respectifs
libéralisation économique induite par la
· uits.
pour pouvoir les intégrer dans leurs
mise
en
œuvre
des
Politiques
es associations de consommateurs
relations avec les compagnies nalionales
d'Ajustement Structurel (PAS).
· eprendrontdesenquêtes de prix dans
Les gouvernements doivent revoir la
Les organisations de consommateurs
archés sur les produits de première
fiscalité (TVA, douanes) à l'égard des
s'engagent à mener des actions auprès
essité et en diffuseront les résultats
services de base
et repercuter les
des autorités de leurs pays pour pouvoir
d'orienter leurs membres el leurs
annulations de dettes sur les prix 2U
assumer la fonction de représentation
munautés dans leurs achats.
consommateur.
qui leur revient au sein des commissions
près
avoir
échangé
leurs
Les
associations ont
souligné
nationales de la concurrence
ériences pour la promotion
de la
l'obligation qu'ont les sociétés d'eau
Elles s'engagent à mener des actions
sommation des produits locaux, les
d'informer· les consommateurs sur les
auprès des autorités de leurs pays en
icipants ont réitéré leur volonté à
résultats des contr61es de qualité
vue d'acquérir la possibilité d'ester en
rsuivre leurs actions dans cette vOie:
effectués.
justice au nom de leurs membres.
en travaillant avec les instituts et
Les
participants
invitent. les
L'intérêt de ta mise en place de
nes de recherche pour la diffusion
compagnies africain8s de servlce~
juridictions pour litiges mineurs. faciles
technologies simples à même
essentiels (eau, élec:rlclté, téléphone.
d'accès géographique, financier et social
surer "hygiène alimentaire;
transport)
à étudier les ~odalltés
a encore été souligné par les participants.
en répertoriant auprès des instil~ts
pratiques en vue qe créer des Industries
Les associations s'engagent à mener
entaires ,des universités, les produIts
de fabrication et ( ou de se constituer en
des actions en vue de l'installation de
entaires locaux substituables aux
une centrale d'achat pour J'acquisition de
pareilles institutions.
.
uits importés, en valoriser les qualités
matériels et produits réduisan! ainsi les
Les associations mèneront des actions
i!ionnell~s et leurs effets bénéflq ues
coOts afin que cela sa traduise ç-ar des
contre les pratiques qui lèsant leurs
a santEr auprès de leurs membres et
baisses de prix aux consommateurs.
intérêts économiques comme les hausses
munautés;
Les associations de consommateurs
de prix arbitraires, les rétentions de stock,
à partir de ces inforrrntions collectées
s'engagent à
mener des actions
le manque de publicité des prix sur les
enant des activités d'éducation
d'information,
d'éducation
et
de
marchés et les pénuries artificielles.
eurs membres, afin de rehausser la
sensibilisation:
.
Les associations invitent 10CU à
. lité nutritionnelle des mets;
- sur les questions de sécurité des
parechever le projet de législation modèle
en veillant à dénoncer la publicité
appareils et installations domestiques;
pour la protection du consommateur.
rès des consommateurs qui ne sont
- pour une utilisation rationnelle et
à même de faire une lecture critique
économique de l'eau et de ('énergie;
messages publicitaires de certains.
- sur les gains et économies réalisables
uits alimentaires dontles qualités'
par la bonne gestion de ces biens;
itives ne sont pas prouvées par des .
- sur les moyens simples de contrOle
erches objectives;
-
- '., -
et de test des appareils de mesure
(compteur d'eau par exemple) par le
consommateur lui-même.
:' :,~:.:.., -
- sur les informations relalives à la
lecture des factures délivrées par les
sociétés prestataires des services pubftcs
1- LeS participants ont vivement
cités.
regretté la suspension de ra~at des
- sur les informations relatives aux
billets entre les pays CFA de rAfnque de
procédures contentieuses lors des conflits
l'Ouest et ceux d'Afrique Centrale. 81es
opposant les consommateurs et les
invitent les Etats et les autorités des
sociétés preslataires des services pubflCS
Banques Centrales à lever celle
cités.'
suspension qui frêne considérable~nt
Les participants ont expri~é leur
la mobilité des hommes, des capitaux
souhait de voir les sociétés de services
enlre ces deux zones partageant la même
es pouvoirs publics doivent veiller à
essentiels leur permettre d'accéder aux
monnaie.
ue,les sociétés d'eau, d'électricité et
informations sur les structures des prix
2 - Les participants regrettent la vente
léphone disposant d'un monopole
de leurs produits.Des aclions seroot
aux coosommateurs africains via l'Europe
loitation et de distribution de ces
entreprises auprès de ces structure:> afin
de nos produits qui augmente les prix au
essentiels, ne profitent pas de leur
de les sensibiliser sur cette néceSSité.
consommateur final (poisson, haricots
'on dominante pour abuser des
Les associations de consommateurs
·mmateurs.
verts).
Les
Etats
et
opérateurs
demandent à leurs Etats de renoncer aux
économiques devraient commercer
'importance de ces secteurs a été
taxes comme la TVA sur les services
direclement entre eux en Afrique.
re soulignée par les participants
publics (eau, électricité, téléphone ,
culièrement dans cette phase post-
A cet effet les assocciations de
transport) et de maintenir les tranches
luation où les prix de ces produits et
consommateurs s'engagent à favoriser
dites sociales pour les mêmes selVlCes
ices ont subi une hausse de 15 à
les échanges sous régionaux de. prod~~ts
dans les pays où elles existent et de \\es
o.
locaux par la mise en place de diSPOSitifs
instaurer là où il n'yen a pas.
appropriés en tenant compte que
es visites effectuées auprès de ces
leur
Les Etats sont invités à inlroduire fiode
mission n'est pas
tures ont révélé qu'elles perdaient
de s'engager dans les
dans l'alimentation des populations
activités de production et de distribution
la phase actuelle entre 5 et 10"10 de
surtout là où l'eau de boisson provient
des biens et services.
· chiffre d'allaire.
essentiellement
de
forages.
Les


710
ANNEXE II:
Mouvement Consommateur: Taxonomie des pays africains.
!
~
. 1
,

Pays sans organisations de
consommateurs connues

1
6
1 - Algérie
2 - Angola
3 - Cap Vert
14
4 - Centrafrique
....
5 - Ethiopie
6 - Guinée Bissau
7 - Guinée Conakry
8 - Ile de la Réunion
9 - Libye
10 - Madagascar
Il - Mauritanie
12 - Mozambique
13 - Rwanda
a
14 - Seychelles
15 - Sierra Leone
8
16 - Somalie
17 - Soudan
18 - Tchad

Pays où les organisations
de consommateurs sont

relativement développées
1 - Afrique du sud
2 - Burkina Faso
3 - Ghana
4 - Ile Maurice
5 - Kenya
6 - Mali
7 - Nigéria
8 - Sénégal
9 - Tunisie
10 - Zimbabwe
,~----------~----------~------------

711
ANNEXE III:
Quelques factures d'achat et leurs clauses abusives illustrant l'absence de garantie
en Afrique.
· 1
;

SHALIMAR
COMPTANT
I~
.t..vef'lue
de la Llbéretion
Tokoin Prolong<ôe B. P. 2075
Tél, 21 <:2 16/21 31 98
Lomé - T.:>go
ReeU
000177
*
~JS..\\5..(._._._ __._._.._
.._.
Lomé, le
M ....__.-._......... - - -
.
_._.
_..
Doit
-
Vente
Il
1
_R_è_f_._:_O_u"_n_lit_é-;
D_E_S_IG_N_A
__T_I_O_N
I-u_n_ite_i_re~'li_T_O_T_A_U_X_ t
r
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Il
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1
ii
j
il
j
~1
1
1
1
II
il
JI
Le< Marchandise. vendue., ne sont ni oarantle. ni changement
Slonelure du clleni
Dlr~ _~
Ignature du
--
~
#
.Jf

,
SHALIMAR
B. P.2075
N~ QQQï99
Lomé· Togo
_
Date ..
AtlccL/9k
_._._.._,..
.-----
//)
~-\\i
..~~/Tl ;-c: ,.;-v/ /-
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\\~
c:3 .12t:~{J '/~L
--------.
----;p.,"
.. ~ .---
;ÇijjtIA-
.'-O~
------
_~~.-/
Pas de garantie
non/reprise
"--'---
(
i

SANGA.fVl Gi~IH~rllÎ
Commerce (Tokoin)
11l1pü~; . EX1'0r;
i97 A ...·ent)~ c'e 1:J Ljbéro~io:"'
Tg n 00 21
lamÉ Togo
B. P. ùJ804
.. .pl J
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Lame le --:L/--
...
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,1
l'
1
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1

,"~_··\\1~*·';.
.;", ,
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M
08636
8. P. 3467 LaME
l
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Tél. 21-40·78/21,08-78
~t!J11If)
!_._.:.-
_
.
Date
_
_ ..
CUENT _.~.!Z,
_ _
!c' '
"Oz-t..;
I -
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'1
I Quanrité 1
DESCRIPTION
1
PRIX
i MONTANT
j
i.....d G~!~....~??~? .. }t~~-j 19...9.'.7..9; 1
i__ _ : r;?f./.y!:::~~
:..... ./.../. 1
1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
.
q..SS:?
I
,
f

Ets I{~MIliLS
Carré 208
Mlssèbo
FACTURE
l-J~
9dO
B. P. 2781
Tél. 312458
COTONOU (R B)
COTONOU L"S ._--1.3.::fr-:_~_2~ :_.__
Doit__~~tJf r.UJ! ELUI !.fJtL -AL-D..6..
(.
~2-21lJ_._._A.:zitt'-
-
- ~.
-- .........

712
ANNEXEIV:
Les abus de la publicité dans les pays en voie de développement : quelques
exemples illustratifs.
l
!

/'
~ES PAYS EN DEVELOPPEMENT:
-1
1
LES ABUS DE LA
/
PUBLICITE
PHARMACEUTIQUE
pes clés pour observer, comprendre et agir
li
i
Un dossier réalisé par PIME ..
Eté 1993

kUIlljues qui l'SI SIHlllllS ,HI\\ SCilles IIIIS ~l:'Il-lalcs
JI,II,till:lellll'lll. '11i1S Iè l'I~:I\\l'lt d'tlllC inlollll,lli"1l
"nc~rnant 1,1 pressl', 1:1l j'ail. la S11Uali')1l l'sI ill',lu-
sl'iL'llti/ïqul', Oll <lssisll' au lk\\l'ioppelllcill de largl's
ll'ur' plus l'llilfusl' cl Sl' prl'k' :, Ipus k,s :lhllS, Dl'
l',IIIlI';lgnl's plllllloi iOlll1l'1 lès l'n dirccl iOIl dll gr,tnd
k, nOlllhrl'u.\\ .Î0urll<lU\\ Illl:dil'au.\\ ,ollt tïll;lIll'CS l'Il
pllhlic pour L1c,s 1ll~:diclIlll'llts Ill' pouvalll (1 l'l' ddi-
~:'il'url' par/il' p;lr les n':Cl'ltl" (lllhilcil:lirl's, Il kllr
\\rl:' qlll' sur prl'SlTiplioll. Lill récellt l'\\ell'l,k l'si
J-t p<lr cOllséqucllt ditlicile d'ènll'llrc IlçS :I\\i" cri-
j'ollrlli par 1,1 clillpagile 1;lp;lgl'lISl' qui ,1 prèl'l:dl:,
·1~jUc,S sur les Illl:dil';lllll~llts 1',11' cr;,illk' lk IKrdrl' dc
d,Ill' certaills pays eUlllpL:l'IlS, I:t COl11llll'rei,tiis:ltioll
JL'l'icusl',' sourccs dl' lïn'U1Ll'lllcnl. 1',11' ;lilkurs, le
dU\\ïll!lulri/JI(J/I, Illl:dicIIlll'lll ;lI1til11igr;lIlleU,\\
(l,,),
.~'\\~I()p(ll'1l1clli dl' IlOll\\'l'llcs l'oll;lhor<llions
Lcs la"oratoires Gla,\\l) onl délihérémellt choisi de
hllrauuclks ~nlrl' l:dilcLIr,; cl ;lllIllllll'CUrs lbns
"prél)arcr k lerrain" en prL;scnlalll leur prodllll
!~:Iah('ralion de Illl'SS;l!!CS pubill'itaires il formc
COlllllle le traitl.'m~1l1 Illirack dc la migrainc, dl'
1
<-
rJaclionnel1e ne pl'rlllel l',1S dc distinguer aisé-
façon à créer unc (fcl~)amk de,.; paticnt,.; plus fOlk
~cnt prolllotion ct informatilHl.
qlle les résistancl.'s élatiqul's ou médicales,
i
,es labora foires Brisfol-Myers-Squibh
Trourlez le mensonge!
réfendenf-i1s nourrir les Africains?
----4--'---l
rœ 1! ~ \\;1»" B.
PJl.1' 1gde \\11.DDe a.
rœ 1rt1œYiWr 8.:
CmfPRlMÉS PAR JOVR'
DETIiI&RIŒ
TOFTSIMPLEltfm!
Ce dttpIiant publicitaire a été diffusé au Congo en 1992. Au bas du verso. sous une forme compacte el peu lisible, sont présentées les
mentions légales, Les indications données sont celles qui figuraient lors de sa commercialisation en
1962 et non pas celles de la
monographie révisée en 1985,
5
1;
u~J

lexemple des antidiarrh~iques. L'OMS a
la promolion lks méclicalllenlS anticliarrhéiques
l
j'·"flllll:I·;.k dalls UII rapilori l'II Il)l)() qUl' la plu-
lIlat!:tptés l'onduit i, détournL'r les rL'ssources tïnan-
j,JI dc~ :lIl1idiarrhéiqlll's l'\\lIIlIIlCI\\'i:tlis,:s Ile soient
l'i.\\rl's des pays l'n dévcioppelllL'nl, de l'approvi-
1"
tllil!'", ,,1;1I1~ k- IrailL'lllc'nl <ks di:lrrhl:l's ;!:~lIi.'s
SiO!lfl~!nl'nt
t,·;
en ~>.."l~: de réhyd=-ala!Îtlll par voie orale.
l'l'Il ";1111 l'II r:lisOIl dl' kur 11l;IU\\';IIS rapporl
qui peflnettrail'nl la survie de milliers cl'enfants
lIl,'lïc,', ri~qlll's, (\\'pl'lldaIlI. lks l'L'nlainl's (Il'
chaque aflnée.
lll1L'~, :CI,llldes l'I Jll'liIL'.S, "Olllilllll'lll :llÎlIl'lklllL'IlI
l ,'IlI1lIIl,']c'j:tli';llillll dl' l',', IJrlltillih, 1,:1 111\\11110-
,
La promotion incontrôlée des antibio-
1111 de, :lllIl,liarrhéiqlles L'olltriiJlI" i\\ (klllllllll'r \\cs
tiques pose également des problèmes cruciaux,
j
Ilil'nls du principallrailL'lllL'nl \\T;liIl1L'lll 1I1ik- dans
Les laboratoircs Roussel réalisent une promotion
îplupan ,Il', diarrhées inr;lIltiks. ks ~L'ls dL: réhy-
intensive en Afrique francophone de céfo!Oximc
latation p:lr voie oralL. CL'ux-ci pL'lïllettent de
(CI a foran°. l'épila losporine de troisième généra-
litèr etlicxemel1l la désll\\dratation causée par la
tion) pour une liste d'indications beaucoup plus
11-
.
' l ' ' ' - d
b
J"
frr 1ee. qUI est a
Olïgll1C
e nol11 rL'UX (eces.
ékndue que celle autorisée en France (2). De
ls répercussions économiqlles dl' cet usage irr<l-
m~me, Bayer vante au Nigéria l'efficacité de la
'tnnel sont également considérables. Le marché
ciproj7uxaci/[c (Ciproxin c • quinolone) dans toutes
les infectiofls, y wmpris d'origine inconnue (2),
•..II.... ndiaL pL'lIf tous les produits antidianhéiquès en
.~3-19i\\,t a été estimé à 438 millions de dollars
Une enquête a montré qu'èn 1986, sur 506 médica-
) et la diarrhée infantile continuè œpendant de
ments antidiarrhéiques différents commercialisés
tr annudkment 4 millions L~'enfant~ de moins de
dans 11 régions du monde. 60 lIo contenaient au
jJq ans dans les pays en \\'Ole dè developpement
fl.
moins un antibiotique (23). La promotion abusive
Un chèrcheur a estimé qu'il faudrait environ
des antibiotiques a deux conséquences. D'une part
~ à 300 millions de dollars pour fournir la quan-
clic conduit à utiliser des antibiotiques récemment
l
.•
commercialisés. coûteux, alors même que des anti-
t·.·.· de sels dè réhydratation par voie orale néces-
.•re pour éviter la majeure partie des décès liés
biotiques plus anciens ct moins chers, tels que la
. maladies dianhéiques (4). En d'autres termes,
pénicillinc, sont efficaces dans de très nombreuses
1
l
pathologies. D'autre part, la prescription ination-
neIle des antibiotiques, et par exemple l'utilisation
en médecine générale dans les pays en voie de
développement de certains antibiotiques réservés à
l'usage hospitalier dans les pays développés, favo-
rise l'apparition de résistances multiples qui pour-
raient avoir à terme des répercussions dramatiques
sur les possibilités de traitement efficace des mala-
dies infectieuses,
Les conséquences de la promotion des
médicaments sont particulièrement préoccu-
pantes dans les pays aux ressources limitées
comme les pays en développement, mais égale-
ment les pays de l'Europe de l'Est récemment
convertis au libéralisme économique. Les autorités
sanitaires, sont rarement en mesure de faire appli-
quer les réglementations nationales, si elles exis-
tent. De ce fait, les laboratoires pharmaceutiques
peuvent multiplier les abus sans crainte de sanc-
tions. Par ailleurs, l'information diffusée par les
autorités sanitaires ou par des associations de pro-
fessionnels de santé indépendants, n'est pas encore
très développée et les documents promotionnels
constituent souvent la source d'information unique
aucoup de médicaments inutiles dans ce dép6t de
, ;caments d'un village au Mali.
des prescripteurs.
7
. - . -
Ia!IIlIIlIIiI
-._,.-.__
,
J

.
1
l code de la EFPIA. l'our l;\\' ilcr ul1l'l'TlIÎlr-
. -~"'I-;I-dire lJu'clIL' reconn;IÎl, par Iii même, faire de
jll'lIl du projl"
lk dil'l'l'Iivc ClIJ"l)écIlIIC sur la
la prolllolion pour des indiL'atiolls 11011 approuvées,
~!!,:ill' plt;\\l'Ill;ICl'llliquc, b I:l;d,;ratillj] 1:Ul'll\\ll;CII-
ù' qui l'si rllrllll,lklllCll1 inlcrdit par la directive
;
,iL':' ..\\:;",,',.ilÙlIl:, ,1<' l':llduslril' l'h;UilldCl'lIli'lUl'
,UroPL;CIlJ\\L' L'I la plupal ides iégisiations nalio-
11'1:\\ 1. rl'~nllipaili les sl'i/,c P;I\\" prOdUCll'llrS dl'
Il~lic.., !
jlil';llIll'lIlS d'ElIn'pl' 1l,'cidclllak, ;1 ;ld'IPk; ,..,011
l.e l'oeil' dL' la 1::1-'1'\\;\\ l'lll\\lportL' la même :lmhi-
11l'c l'l'd",'
::lIïté quc
l'Il Il)l) "
;I\\llllil';thle ;1l1 l' j;lIlvil'l' 1')1)]
le l'Illk dl' la 1:111\\1 Cllllccrnani les puhli-
~iu.., l;trd~-';).
,ill;' '\\k r;lppL'I", qui, \\<111 [ L'II plluvanl comporter
,~i C,lIlIr;II,1,'II1('1I1 ;IU l'mil' (iL' 1;1 1:11 :\\'1. iL' l'O'IL' llL'
.. 1,/ "" 10 il/dit'''fi''I/S Ir IlliliS<lfiOIl oillsi qll'lIl1l'
jr:"J.\\ i'r~\\l'i,'l' hil'II qllL' ',oUi 11l;lll'I'id IlL' pn)-
,i,'cI"r"li"lI l'Olll'i,\\(' dOllll<lllf Il'.1' r<liso/ls IJOlir Ics-
j'1I1 ;lllpr;Il;L'" dllil illl'iUrl' l'iairclllclll L" lisihk-
'1111'1/('.1' Il' Inodllif eSf U','Ollllllllll,h; polir fcl/c 011
il Ics illll111llaljolls tï!!,urallt dans IL' réSUllll; dcs
rdles il/dil'UfiO/l (.1') ". nc sonl pas soumises aux
~'léristiqucs du pl'lld:Jil. il préS('nlL' également
m;;mes exigellccs que les autres publicités.
;'andcs insutïisanccs, Il y est inscrit que « fOI/fI'
Le code dL' la EFPIA lllL'ntiolllle également que
l,rl//(Jfi, '1/ dOllnée dlil/s Il' I//(Jféric! dl' p1'0!l10-
" l'hal/Ill' (/ssociOfioli n!CI//IJrl' do'" àahlir des Pl'{)-
1doif pOl/j'oil' éfu' érorà' ef r il/(o!ïl/lif/IJI/
l'àlllrcs adéql/ofes, d'llIll' l'''u (~tï/l de s'assllrcr
~e doif l;fl'e /{I/II'II;C à 10 dl'/l/lil/de des n/{;dccins
l/IIC .l'CS affiliés sc ('(JI/fonl/cllf OIiX exigences du
!Iires !"'(1(',~,\\ionnc!s de ,ml/fi;, Ce{{l' ild(JI'f/W-
l'ode l'Ul'upécli Cf dll code /Iofio/lal en v(~lIeur,
1ffarée IlC doif fOllf((ois pos hrl' fOl/l'nil'
J ollfre porr (dill d'il/sfmire fOlife plaillfc pOlir 110/1
t"e la del//ol/de porrc .l'III' 10 l'iilidifé d'il/dico-
l'l'Speer de ('cs codes n, Celte exigence est restée
1appl'Olll'ées dOl/s roI/fol'isorioIl dl' //lise sur Ic
lettre morte jusqu'à présent dans la plupart des
thé '>, La EFPIA considère donc qu'il n'est pas
pays européens,
bitablè que les laboratoires pharmaceutiques
~nent directement les prescripteurs quand les
larions ont été approuvées par les autorités
La position de la FMFSGP. La Fédération
~ires, Par contre elle juge utiie de les infomler
~londiale des Fabricants de Spécialités Grand
!d les indications ne sont pas approuvées,
Public (FMFSGP) qui regroupe 50 associations
nationales, n'a pas promulgué de code, Elle estime
qu'il serait inapproprié ou même contraire à l'inté-
rêt général de tenter d 'harmoniser la réglementa-
tion au niveau international du fait de la diversité
des situations (34), Elle estime également que la
publicité en faveur de pro,duits en vente libre ne
peut servir qu' à faire connaître un produit et à en
signaler les indications approuvées et ne peut pas
être utilisée efficacement pour transmettre des
informations de base détaillées qui doivent par
contre figurer sur l'étiquetage. Il est regrettable
que cette déclaration de la FMFSGP ne précise pas
dans quelle mesure les consommateurs choisissent
les produits, si c'est en fonction de leur étiquetage,
ou parce qu'ils se souviennent d'une publicité!
Les laboratoires Merck, Sharp 8,
Dohme ont caché les mentions
légales.
Un prix à gagner pour celui
qui les découvre!
, parue ~ns ·Le P?armacien d'Afrique· (janvlfév. 1992),
ucune ra/son médicale de prescrire en ville une
~•inolonetellequelanorfloxacineenpremièreintention
" infections courantes, compte tenu de leur prix éfevé et
.' fficacité qu'if faut préserver,
1
!
i~'
--"'w -"'-,~~f~~
~_OIl':~,.~,-..,
5. .

I!0'
, ,
..
~ . -....------....
l

~sse
l'llll\\' lé, anicles ; le, 1'1Iblicitl's sOllt ai,él1lCIlI tlilk-
médicale·
rl'llciable, dc, articles: les pllblicités ne S01l1 accl:p-
1
'aissez-faire
tél" qlll' si le produit concernl' la n1L;decine ct. a l;ll;
~
aulorisé p~lr 1;1 FDA : le, publicités sunt ClHltr(llées
,
par k COlllilé de ré,!;tclioll afin dl' ,'a"urer lJlI'elle,
îllégil"
,uivil'S par le, iOllrll~lll:\\ 11l1;dic;lll:\\
Il'ulll'n'l'Ill p;" le hUIl gOÎlt : ks allllllllCeUrS Ile
1.;
'CHl!
l' di\\èI"'I's. C.\\·ruilhj,'urn;III:\\. l1ul;lIlllllellt
1';1'
l'i
:1\\\\'111., de I~I dall' de l'IIblicalil1n d'ull anick
10l1t l';lrtil: dl' lïl1tl'rn~lt,ul1;i1 Suc'il'ty 1,1"
1;IV"Uhk ou défavorahle il leur, produits: k, puhli-
~dlLtil1' lISDB) Il';IC('\\Ï)tl:llI ;Iunllle puhlil'ill;
cr
I:ilL;s pour un produit Ile Sl'nl pa, l"acées il côté
L,ramir ie'ur lotaie' il1,kpelld~II1Cl:.
f
d'arli(lcs sur ce produit; le nombre de pages de
ne
j
pul)iieilé, Ile doit pas excéder le flPl1lbre de pages
hl
d·article,. LèS éditeurs des ·· ..\\,nnals·· doutellt de b
1 - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - . - - - - ,
41
l"ai'~lbilité d'un contrôle plu, rigoureux. qui exige
de
des compétences techniques lrès pointues et beau-
coup de lravail.
En France, l'Union des .'\\'nnOl1eèUrS (UDA) a
Il(
adaplé en 19R5 conjointemelll Jvec l'Ordre Natio-
in
nal dèS Pharmaciens et le SyndicH National de
Abus d<l noramidopyrlne
l'Industrie Pharmaceutique (Sl"IP), un "code

.~...• ••Ut,,~·. "n~""s'-'1t"~
'-')dM", O,COWhi...... &1Ia1s",,·
d'éthique de la con1l11unic.ltion sur le médicament"
le
_l'r~ .. r~
Pas d'Imodium'
qui comprend « les prillCl/Jes :.;élléro/lX d' /Ille
cc
pour les enfants
SI
Ln...--.....~
érhique de /' in/onl/oriol/ » et <, d,'s disposiriolls
ttId~~.Mph-'<
d'a/llOdiscipline » concernant l' infonnation oralè
Ivennectlne
u~o"~.r....r"-><~
personnalisée et collective, écrite ct audiovisuelle.
UllÛNrlfr't~N~
Plus récemment, en 1989, une convèntion intitulée
Diarrhées aiguês chez l'enfant
La~f~-ilI~_plan4.M.Jk
.....,.4·
"Infonnation sur le médicamènt et publicité rédac-
,,--
tionnelle" a été signée par le Syndicll National de la
~
....
QcI:Ia
..
ci
~ .. _ t
1._ ....._ _
.....
Presse Médicale (SN PM) et l'Union des Annon-
fe
.~_
~ I:::=~-'
· r - . .
.--.:... _-
......- -
.--..
ceurs atïn d'introduire d'avantage de transparence
- ,
0_----
c:
~=_.-=
entre les journaux médicaux et lès laboratoires
p
:1
........ ",
_:=-0.::-:::' i__
..
'1-
...._
1
phannaceutiques. Cette chane distingue d'une part
P
l
$
ct ' ~ ~
"l'information rédactionnelle indépendante de
d
-:::..-
toute relation contractuelle avec un annonceur" et
l'
f
Itin du Prescripteur· est le premier bulletin
"la publicité rédactionnelle". Dans ce dernier cas,
Il
ant d'information sur les médicaments publié en
il doit être précisé que la rédaction a été réalisée
e
, ancophone. Il appartient au réseau de l'International
~OrugBulletins(l50B),dontl'objectifestde
sur la base d'une documentation fournie par tel
P
, ir /'information indépendante sur le médicament
JI
les pars.
laboratoire. Si un des auteurs es! le salarié d'une
\\
finne, il doit être fait mention de ses fonctions au
V
sein du laboratoire. Si le texte est écrit par un labo-
fi
~utres
v
ratoire, il doit comporter la mention "publication
journaux exigent que les publicités
d
réalisée à l'initiative de tel laboratoire".
t;
Îconfonnes aux réglementations locales, sans
En pratique, la dépendance financière de nom-
1
lsouvent se donner les moyens d'en contrôler
breux journaux médicaux à l'égard des labora-
)cation effective,
toires phannaceutiques est telle que ces déclara-
d
bals of Internai Medicine, journal médical
tions restent souvent purement formelles. Par
r
ttionalement reconnu qui vient de publier
ailleurs, le statut professionnel précaire'de nom-
~
;te sur les publicités dans les journaux médi-
breux journalistes médicaux et l'attrait des, séjours
c
l
éricains (7), a expliqué sa propre politique
et des voyages offerts par les laboratoires 'ne sont
P
) atière (40) : toutes les publicités sont placées
pas des éléments de nature à favoriser l"application
•• i et à la fin du journal et ne sont pas insérées
s.trictc de principes déontologiques.

l-.-=:;;;;::;::;;;::;:;;:::::;;;:::;;~::::;:::;:::::;;;;::;:~
ni /)('('till(,. Les lal1oralOin:s Parkc-Davis n'ont four-
1 •
ni aucune preuve justifiant l'utilisation de la !Jarc l -
1I/lIlIIvcill(, ()lI)
l~
1
Traitement des MST
d'origine
Les affirmations publicitaires ont été tota-
bactérienne
lement ou partiellement supprimées pour 1(,
alllrcS produits. A la demande d'cxplications SUI 1;\\
noticc accompagnant un sirop dc tétrtlcycline :IU
Pérou (Qucl11iciclina SO), dans laquelle les rréclU-
tions d'emploi paraissaicnt insuffisantes, les labo-
ratoires Carlo Erba ont répondu: « celle IlOtice (/
100 ...
d~itl été réFisée et tro/ll'ée obsolète...Cependall!.
~)
~ ,
dalls quelques pays, /a Illise à jour des 1I0ticcs
Il' l'st pas faite m'f!(' la rapidité désirée» (61) .
"
Dans certains cas, la modification porte sur la
!; UNE GELULE
"' ,
le soir
fonnulation des mentions publicitaires: la mention
12 JOUI'$ minimum
~.
>.".'}u: BOITE
, EGALE
.
TRAITEMENT
"sans danger" (ou encore "san.~ risque", "sûr" ),
l
traiter les partenaires
!
~ EVITELASTERILITE
ne peut être utilisée qu'à condition d'être assortie
<D
des réserves qui s'imposent (24), Les laboratoires
1rln-.rw-"~1,-_."" ... <1~'"
.-..r....... ~"" <01,' 27~, '~'...."" llo.rg,(....Joro"
TO'l v.' :.:.J."
Rhône-Poulenc ont fait la promotion aux Philip-
-Médecine d'Afrique NOire" (déc 1990),
pines en 1988 du vaccin TétracoqO (diphtérie,
Aucune mention légale,
coqueluche, tétanos et poliomyélite) comme étant
«/e seul nOUI'eall l'accin rotalement sûr ct
Avant et après
efficace» (62), Les laboratoires Rhône-Poulenc ont
retiré cette affinnation reconnaissant qu'aucun qes
une lettre du MaLAM
vaccins connus actuellement n'est efficace à
100 % et que tous peuvent entraîner des effets
secondaires,
Dans d'autres cas, les laboratoires ont accepté
de retirer des affirmations publicitaires qui
n 'étaient pas prouvées scientifiquement et de linù-
ter les indications de leurs médicaments. Les labo-
ratoires Hoechst ont fait la promotion de FestalO,
une association à base de bile de boeuf, dans les
pays en développement pour des indications mul-
tiples : « troubles digestifs chroniques .. perle
d'appétit chez les personnes âgées .. pour amélio-
t
f-
rer la digestion, stimuler /' appétit et gagner du
I
1
poids chez
1
/' enfant .. pour améliorer la digestion
1
en cas d'infection intestinale .. pOlir accélérer la
cOlll'alescence après une opération ou une maladie
1
pénible .. pour soigner les troubles dûs aux indi-
gestions .. troubles digestifs chroniques d'étiologie
1
inconnue .. troubles 1igestifs nerveux, etc. » (63).
1
Suite à l'action du MaLAM, les laboratoires
1
Hoechst ont réduit les indications à « troubles diges-
tifs liés à un dysfonctionnement pancréatique ».
t
Cependant, les amél iorations annoncées, même
!
si elles constituent un bon indicateur de l'impact du
1
dialogue, ne sont pas toujours suivies d'application
!
sur le terrain.
19
~------------------'---_':"--_'-""":'--":"'------ 1f

l'lllllrôlé~s avec rlacebo dOllt :1 Il'onl ras été
publié~s (70). En France, le diclionnaire Vidal
1lN.' rrécise qu~ LoftylO est indiqué cOlllme « rrai-
ICI/ICIII srl/lfJlolllillique de la c1i1l1dicario/l inrelïnil-
1,'1111' des IIrrériolwrhies c!froniqlles ohlirértlllleS
do' I/ICIIllires ill(àiellrs (ail ,\\'I(/(Ie 2) »,
L-:\\ I:thoratoir~s Servi~r recommandent en Ar;l-
bic' Saoudite la slilbutiamine (Arcalioll 200°), pour
((lUI Lill ensemble d'indications: « slImu'llage phy-
si'll((, cr illlel/eclJJel. rrollhles de la méJl1oire. " ..
~
Jf..,/...r ...t~l C·,I;".·'"''
l'M'''C~·,;f'''-''.'
I,(luhles psychosomariqlles de la ménopause el
,l~"",,",~(';f;'t.,.,.u~
~':JflIf'~~ m",m(J'lo!>
l'hl':: les persollnes âgées, .. , » (71). Aux questions
nI~(,ll.S"t"'·;',1
NB O/ltNto"l(Jl~,"'I<~
du MaLAM, les laboratoires Servier répondent que
1"/"("Cl.... ~fl>o~t'.·..dL~t."n
l:Ivrur dllOoJ' JIIr.>t'l~t)t"t"'_tfl
P~'<J'S(-i>"lU<tI,"""",,'Vpr
1
;]V OCI1m{'fff' ..,.. "lA 'V\\"
« l,II/.\\ de 40 cssais cliniques comprenanr des
CIIlI1oU".ssymor.'\\mt'O'I""':
,
essilis cliniques cOlltrôlés Ollr éré réalisés et prou-
cou", t1ôJ (}~'If.;,~ if'!f<.'ilrXr,Joei
fM~UttI oJu ,"*~1 ,]i;J"~
~0I'('.t1liJn.'IoYl
n'I/I l'aclil·iré d' Al'ca lion 200° dans le rraitemenr
~I oa la rnl!"mrw..,. J -
sYlllplOmatique de l'asthénie fonctionnelle" La
monographie approuvée par le ministère de la
samé français arreste de la qualiré de ces études ».
En France, Je dictionnaire Vidal 1993 précise que
Arcalion 200° est « proposé dans le rraitemenr
,\\~\\'I/lprol/1ariquedes asthénies fonctionnelles ».
En Indonésie, aux Philippines, au Pakistan, en
Thaïlande, les laboratoires Fannitalia Carlo Erba
font la promotion de nicergoline (SennionO) dans
à la loupe- parue dans le numéro de mars 1992 de la
"Prescrire ",
de nombreuses indications: guérir « la cause et les
symprômes de l'insuffisance cérébrale chronique ».
« les démences séniles et préséniles », « Jo maladie
de Parkinson », etc. (61).
Ces divers exemples témoignent de la dérive
e dictionnaire français
pour un même médicament entre les indications
Vidal à 3 vitesses
reconnues dans les pays développés et les indica-
tions revendiquées dans les pays en développe-
dictionnaire Vidal contient les monographies des
ment. Ce phénomène de double standard est très
icaments autorisés par le ministère de la santé
largement pratiqué comme l'a montré l'analyse
France. Dans sa préface, il est précisé que les
systématique des publicités diffusées en Afrique
tions sont libellées différemment selon qu'elfes
francophone réalisée par PIMED (voir p.3).
ou non prouvées scientifiquement:
indications sont portées directement sans men-
L'ambiguïté du libellé des indications du diction-
particulière lorsque leur efficacité est communé-
naire Vidal est utilisée pour cautionner des indica-
t connue et (ou) démontrée par des essais di-
tions reconnues comme non prouvées en France
es contrôlés, conformes aux prescriptions de
mais affirmées comme telles dans les pays en
té ministériel du 16 décembre 1975,' qui prévoit
développement (voir encadré ci-dessous).
ssais contrôlés ; ,
" " , , '
indications thérapeUtiques 'Sont préèédé~s de la
ti~n: ·propfJs,é'déU?~;u; ,Iqr~ue le~ :.~p:écialités
ècJent une ou plusieu~, propriétés pharmacolo-
., . ~.
.
.

"
l '
'..
"\\~' . 'oC,.\\ ....
, " _ .
" "~l.:...
',C
.,'.
es 'reconnues' ét qu'en' raison'de leur alÏéiènneté,'
ridications thérapeutiques-n'ont pas pu' êtré'mises'
• ence par des essais' cliniques, tels qu'ils sont
par l'arrêté du 16 décembre 1975 ;;
, ;:, 1
.ndications thérapeutiqu~s,sont précédées de la
~~n : ·Utili~é. comm~.••·, \\OU,·utilisé da~,s..., en
ence d'actMté spécifique actuellement déf1Jon-"
lorsqu'il s'agit 'de
ILedialogueavec
l'industrie
pharmaceutique
spécia~tés' dont, dans l'état
el des connaissances, l'actj~é spécifique reste à
Iir. bien que leur utilisation corresponde à des
Les, ~ettres .mensuelles questionnent systémati-
es de prescription ou d·a~omédication.'
"
quement les laoorato;res Ph~aeeuttques_su_r_le~_ J _

v e r
l
I\\n ohl'ious q~r1lng poinl lor df,lll., 10 conlrol promotional pracliccs is with
!
Lexotan
advcrlising, 110\\\\<'1([, a., a scnl\\H allornc)' for thc l'leIV )'0'-// Times has pointcd ou
en calma..
- -
";dl ad"crlislng i,> inherenlly rni';Ieading Thal's how you sellthings,"'!
11
1
Ih"
\\\\'nrld
lIeallh
(Jr~anl',III"11
';Iuch published ill 1990 found Ih;n 1'1
1
(\\\\'lll)i h:l'; 'l'I nlll ,nille nllillllllllll Il"
1h')', or 1 Il aU\\TrllSemClll5 for mculell
qUIITlllenl'
Illl
adl'erll,ellienh
ln
Ils
llial appeared in the Ceyloll Meâluli.l"l
I:lhical
CrllCm
['li
",1 \\'lhc 111.1 1 Drllg
1101 in Sri Lanka in 1985 and 1986 prc"
Prolllolion 'i The'>c II1cludc: the IlllellLI·
cd information aboul [he generic n;1Il
tional non'propllct~ry or genellc n'll1lCS
ind icallons, dosage, adverse erfeCis a
of .III actilT ingredlenls: the aml'unt of
connaindications n A slUd~' camed c
active ingredlcllI(si per dpsage ;lInl the
III
sel'eral de\\'eloping countries dUr!
usu;il
pr
rl'Cnllll1lCnded
do'>age,
thc
1987 and 1988 found that ",htle Sl\\!
names
pf ail\\'
additiona!
Ingredients
improvements could be round Ifl 1
known 10 cause problems (such a'> aller·
procluct listings in prescribing guid,
gy); appro,'cd
Iherapeullc
uses:
sicle
UIlJllsllfied claims of efficacy or s'lfl
cffeCls and ach'crse reaC!lons, precau-
colltlnue
ta
proliferale"
in
PI~
tions, warnlllgs and cOlllraindications:
advenising materials·6
major Il1leraellllllS, namc and address
';'llllqllilliserad, TliblllJa Medica, Oerober 1990,
or
the lllanufaCllJrer or disllihutor: rder-
ence ta sCientifJc Illerature as appropri-
ate.
The \\\\'HO gUldelines stale
that
adl'erlisenlenls shnulcl he "fully consis-
tent" \\l'ilh Ihe appwHd data sheet for the
drug
HowClTr, a ClllllnlOll prac!lce 15 for
companies lL1lllake clalllls Ihat cannat be
substanti;lled ln analyzing Ihe Inforl1la-
tian supphed by Sl.\\ manufacturers ta
subslantiale cl;lims Illade in adlTrlise-
ments, the ~1cdILd Lobby for ApproplI-
ate Marketing (MaL:\\M) found that out
of 67 slUdies, only 31 provided original
data relevant ta the questions asked, Of
these 31, only 13 \\l'cre controlled studies,
and onl)' '3 Il'Cre r:Jndol1lised douhle-
blincl slliclie<;
h'cn Ihese had one or
j
11l0re sCIIOUS rnethodologicii Oaws, Ie;ld-
in!?, Mal :\\11,110 el\\llt'Iude Ihal nOlle of the
eOlllp;lnle' 'UI)I,It".! ,llllll;tI tli;i1 rC'jHlrh
thal hllili Il t'Il' 'lll'Illlillally l',d,d :llld
supporll'd Ihe adl'clI"lng clallll~,"
,\\ltlwugh the 'lluatioll is h,HI III
industrialtscd eOUl1llieS, il is gennall)'
lIluch \\l'orse ill cleveloping counlrie." "

i
LProvidei 4 major
hoemopoielic
focton
folie otid.
Vitomin B11.
Vilomin C and
Nitorinomide

The
Federation of Medical and Sales
Representatives' Associations of
India (FMRAI)
arc
10,000 pharmaceullcal
Sales promotion in India
ings, seminars or Cl1nferences held Wilhoui
Multinational
companies currentl~'
funding from Ihe phannaceutical companies
in India, of which aboul ïOO
comml aboui 55% of Ihe market in India.
The drug companies regularly sponsor ·dine
products nalionall)'. The OIh·
Trenus in Ihe medicine markel arc always
and \\\\ine" meelings. Tbn' also sponsor tours
sel by the mullinallOnals and copied bl' ln-
of opinion makers wllhm the country and
or local companies. An cs-
dian eompanies.
abroad. \\Vbile promoling linetac (rani ti-
ln the past, multinalionals aggressive-
dme), Glaxo ill\\'iled 150 dOClOrs and their
Iy promoted lheir, research capacities anu
families (0 the [our largest cities and emer-
by lhe industf)'. The fM RAI was
the high qualitl' of Iheir drugs. Howe"er,
tained them III n\\'e-star hOlels
Roussel
as a !rade union in j 960 when
o"er lime it became e"ident that almost ail
acbie"ed similar success promoting iLS drug,
;
mullinalionals produce lhe drugs sold in In-
CombiOam, a combination of ibuprofen and
teulical sales represenlali"es \\Vere
t
uia through small-scale Indian companies.
paracelamol. Douars wcre in"ited (0 hotels
'i
tred under Ihe trade union la\\\\'s.
The slyle anu cOlllent of promotion
to hSlen 10 lectures by a doclOr in support of
!
ha"e rauically changed in the last six ~'ears
Ihis irrational produci This \\Vas followed by
fMRArs members are co"ered hy
,
Cornpanies now mainl)' confine lheir promo-
dinner and Ihe UOClors \\Vere given a bone
tionalmalerials to nip chans which sales reps
china Ica SC( FM RAI" seriousl)' considering
jour legislalion and many lTIuhina-
must retum 10 lhe company after lhe promo-
",belher in fUIUle lb members sbould refuse
\\mpanies ha"e gi"en formaI recog-
1ional l'l'l'le is compleled. The l'om panics
10 arrange or allend such meelings.
mention contraindications and side cffecl5 in
'i FMRAI as a lrade ul1lon for Iheir
tiny Iellcrs or cise say lhat the compam' ma)'
FMRAl's role
ps in India. fMRAI has 15,000
be contaCieu for delailed information
As a union of sales representao\\'Cs,
Urban doclOrs are visiled bl' an average
FMRAI has had a ke)' role fighting for
.~ and has main offices in 21 slales,
of 20 sales reps per day. but doclOrs in rural
changes in pharmaceUlical marketing. FM-
j-{)ffices in 220 lowns. MOSI sales
heahh sub-cenlres are rarell' visiled. In Ihe
RAI was Ihe firsl group in lndia 10 raise lbe
i
cilies, sales reps are asked 10 detai! at leasl five
issues of unlimited profil bl' the multina-
pdia are paid salaries and sorne in-
ne'" producl5 and 10 remind doclOrs of lhree
tionals, produclion of essemial drugs and
tamOUnling
olu producl5. This often bccomes impossible
unelhical sales promollon. Since 1976, FM-
10 10-30% of lheir in-
t
duc 10 lhe long queue of patienl5 (and other
RAI has consistently campaigneu on a
achie\\'emcnl of sales largets. No
sales reps) wailing 10 sec Ihe UOClOr. II is al-
range of issues that ha"e included efforts 10
f!1edium-sized corn panics pal' sales
ways difficuh for a doclor 10 Iislen 10 the pre-
SI op production of spurious and substan-
scntation bccause he or she cannot afforu
uaru urugs; hait malprac,i(cs ln sales prn-
rsivcl)' oi\\ a commission basis.
more than tlnee minutes per <;;1 les rep
motion. reuuce drug pnces; [('nlO\\'e irr;l-
Some companies ha"e re(enlly begun
tional drugs frolll tlll' market; and eSlabhsh
10 senu promolional malerials 10 uoclors b)'
a national drug pollcy. lt \\Voulu like lO sec
courier inslead of sending a sales rep. In lhe
lhe role of the sale5 representalive changed
absence of olher cbanncls of information,
dramatil'all~' from promotion 10 informa-
tbis syslem makes il less Iikcly lhal adverse
tion pW\\'ision anu post-marketing surveil-
urug reaclio~s and l'om plaints ahout prod-
lance wilhin a nallonal cNporation for the

:,..~.'i.,...
~,
"
~
'~ fil
, "
~~,
DON'T HOLD
o 1JLIrrhL";11.".1..\\i~()lt'
mt· ....... of din. iI1'lPIlrJllt· ... ,
.Ind t:l'rTll'\\ 11:
~; HI: "Y'"
!t'Il\\
i
jDaily Inquirer. 30 OCI. 1991.
ru IlglH dl.lrrl1t".l. ~()Ui
olt! c.\\l;lrrlll';1 ;,"L'dILI'
pntainir,g attapulgilf .. ",do not have significanl
[Il I l l "
1\\ : l l l f ' l i l .11 1/\\
ieal activity. and should nol be used la treal
IN.
'ltuppl'd ~ \\HIl" di)..:l_'''tl\\T
in children," The rational use of drugs in Ihe
l'ulhlll,n"
'<1\\ 111.-": "CIII
!.""Ie !'''r the pure, while pill.
,1
Irlp I(l llic h;ll!ll(llJlIl
tnl of acule diarrhor,l in (hi{dren,
Ill'l !rapplll):
leva, 1990. p66)
dï"uhca Ill,
t\\.l"l"plllg ~dl th( '''L' 1:~lIHI·
l!'ttapulgite,
rIlll":'! 1Il.'lIc..k "uur IJoJ,'
(.";111 hl' d:lIl)..:e'!"ou:-..

1"1 Il' .....dl·. IIIUt!t'rll \\\\";I~
1'" li J p\\Jrd~' yc HJr ... " ... ll'1I1
\\\\ nll IUH.'ahau.
Hllt'.liull )..:.Il· .... Il! \\\\'lllk
1I1lI1lL·dl.lh.:ly lu gel lIt!
01 dlarrhea. So Y(JUI
s\\'~lt'Ill ....tan .... ou: t'lean.
l'f'r!1III!!t+. PfllER
<l'nd Y/Ill ,Io:t·t tl1lllp/I..'ll·
\\fiiÎI!!fÎi;1t1 MADE'r
It'hd t
ing the news -
,/ S....rIU4lS PfRSIS1. CONSf,Jl1 A pt4YSICIAN
......... ~ --.................. ...-....._'..
,
'
g more drugs
"
;en Glaxo applied 10 1he DUKh
tllllry aUlllllril)' wllh 'b 111'\\\\' allll·
preparation, Illligran (o,urnalrip-
~<.)O, Ihl'Te \\Vas widespll'atl LO\\'eT.
11l' Idl'\\'i~il1l1 new~ ;\\Ild III maJIlI
j'l, .lllti 111,lgazlllC, \\\\ 11<"11 Il W.h
iii 1"I1·.l' III JUill' Il)lJl d'nl' \\\\;1'
de~preatl Illll'l<",1 III dit" IIIl'dl.I,
sidèTable emphasl' "Il lhl' bll'ak-
charal"ll'T of Ihe drtlg, thl' large
of
people
who
sulll'I
fmm
, and the opponulllIY now for
hem 10 be free from Ihl' pall1 of
Manilla Bulletin, 14 Ocl, 1991. No side effects mentioned or inlera~'
, DoctOTS wcre fan'd Wllh a he<,,')'
menlioned, Contradictions incomplete: Menbendazole should not bt '
from palicnLS 10 prcscnbl' Ihe drug,
used in children under 2 or people wilh renal 01 liver failure; dosap
,1
differs for differenl worm inlections; the ad suggests mixing it wilh
01 drinks, but is is insoluble in water of alcohol. Company: Janssen. i '
1

The hidden
persuader
A popular dramatic series On lclevi-
sion in the
Netherlands is Mediseh
Centrul1\\ West (Medical Cemre West). Il
provides some excellenl "exposure possi-
bililies" ror thugs. Recenl episudes have
fe'llUrcd W)'eth's sleeping tablet, Normison
(lcmazepam),
Schering's
antihislaminc,
Clarilin (loraladine) and a discussion
aboul new contraceptives. A repon in lhe
DUlCh
newspaper Volkskrant
on
16
Januarl' 1992 - "Er Zil een vermogen in
Medisch Centrum West" (There is a
fonune in
Medical Centre
Wesl) -
exposed sorne of lhe tricks being used bl'
sponsors lO get such promotion across ta
unsuspecling viewers.
-.,..._.'*'01'-.4........'*'0,..._ .... _
An_ ..... _eu_.-.a~.An_ ... _1ood
".lllQgar_1lla_hl_._b'Il_.._ ...._
ThaI'. """,..,_T-.,do
.... z _ _
'11- .
lngrolIarOI -
'.,
To~~"'OOlAd"""'jIDUI'
_ _ ....
1b'l1nadII.....
' ' ' -
Promoting mis use of antibiotics: Tetracycline is
NOT recommended for local application on cuts
and wound. Polymixin is useful for gram·negative
bacteria' only: most skin infections are gram-
~~
lM Enuer
positive. Company: Pfizer.
For~ . ~ "
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llans-I'eter i lauser, who was hl'au DI l!lll'malionaimarketing al Ciba-Gei~y ln 1983, J:' dear
on this point: "Il useu III be lhal R&!) came up wilh produCls and said -You sel! lhem'. !\\t1\\\\". as
competilion gels fiercer and the induslfY approaches maturit)', the markeling end becomes nh\\re
important'" Six years latn, anolhl'r Ciba-Gclg)' official, Dr Ilarrie James, head of marketing
developlllent. lold his colleagues al ail indust!')' meeting in Ilrussels thal, because of the likc!iht\\od
of liule real innovalion in drug research, "Wc face a dccreasing probabilil)' of SlICCCSS and the new
SlTaleg)' is 10 OUlInanoeuvre the competition.--;
Harr)' Schwartz, a Ieading apologist for the US pharrnaceulical induslry. exp\\ains lhal this
situation leads lo sorne conOicl because:
··WHAT THE INDUSTRY WANTS sa 8AOLY THESE DAYS - Ta 'BE VALUED FOR IT5
CONTRIBUTIONS TO SOCIETY' - IS NOT WHAT THE GAME IS NORMALLY ABOUT.
THE PHARMACEUTICAL BUSINESS - UKE EVERV OTHER BUSINESS IN THE US -
15 ABOUT MAKrNG MONEY. AND IT IS TOWAROS THE GOAL OF MAKING THE MOST
POSSIBLE
MONEV THAT
INDUSTRY EXECUTIVES
NORMAL LV
DEVOTE
THEIR
ENERGIES DAY IN AND DAY OUT."6
Any doubl about whether the foc us of the industry is on the well-being of ilS customers and the
public health goals of the comrnunities in which ilS produclS are used, or on the well-being of the
corporate balance sheet'is erased br looking atthe ratio of indust!'}, funds devoted la R&D versus mar-
keting. On average, the international industry spends sorne 7-10% of ilS sales turnover on R&D,C and
around 15-200/0 of ilS tumol'er on marketing8 - in olher words, two 10 three limes as much is spent on
marketing and promotion as on research.
We've developed a habit
ofgetting doctDrs ln
put pen ln paper.
S.U".. OMJTNAlION ge_tr.les .dwrtt.Uh;;l
ln s,,,,p'lh, .'«l !'u,nUi ff41hIU)s. iOC1011 ,..nt. GVC
ellt"t" tltlAd1 ""nll,. Jo (tIe trltlU lha. l)nf
..ur 011 af sr,ct .,ill'lill 1.0 mOfUlIs 01 .. Mw

c'fIlp.;gn blit~., ...
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111'1 uch 1'1h'ClI CIMAI "urduS
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SbouN'o) eCU'. 4odl!llf' la. Khbbl"'9
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713
ANNEXE V:
Le commerce informel en Afrique: quelques exemples illustratifs.

Commerce informel sédentaire à Lomé (Togo) et à Cotonou (Bénin).
Vente li l'étalage des produits phamaceutiques : des antalgiques... aux antibiotiques de toutes
sorte.\\: Ils sont le plus souvent i.'lSUS de la contrefaçon avec tous le." dangers que cela comporte pour 1
leurs consommateurs.

Vente ambulante des cosmétiqueS à Lomé. Les produits sent rassemblés dans un récipient que la
vendeuse emporte sur sa tête en faisant le tour des rues et des maisons pour distribuer sa
marchandise.
. ... . ....- - .,
t
..
~
. -
Vente à l'étalage des cosmétiques à C'otonoll (Bénin).

v
'" .
;.
1.'
Vente à l'étalage du matériel électrique: ampoules, prises, multiprL\\'es, réchauds, etc.
.~"
--~---'

VI\\
Vendeuses ambulantes de produils divers à Lomé:
produitfi pour lutter contre les moustiques,
savons, sandalettes, etc.

\\)\\1\\
Vendeur ambulant de produits servant à désodoriser les chambres ainsi que des médicaments en
comprimés (aspirine, nivaquine, etc) enfermés dans de petites bouteilles (Lomé). Tous ces produits
sont rassemblés dans une corbeille que le vendeur tient dans sa main.
j

~'.".'~
.'4;'9 .~,. •.. ~"•• "'.,...:
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Des fruils. tles h;glll/!e,I', tle,l' IJOII '
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tlel . J
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, II/l'n",
~' /11(/1'/'1,,;, li /',111//1;. {(',l'\\'e/llIJle il
1(/ loile " 1111 Ilellll/(' 1/(11'/ é/}/o/ll I,ur
1(1/11 t/e clIlIl,,"rs ,'1 t/'IIi/<'lIn (1lllfllfl 1
... 1
-. Il .('jJ(J~('j.
LO\\'E
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XII

,;
~LI
l'l'ljlllj1C'llll'lll li';lI1al) 'l' l't dl: conlrô-
~s
k Ill;,,, ;111,,1 p;lr k (k.,.;lrroi créé r>ar
1 ; il) ',''1 1L'l'
de ('OIlIIllIS\\lOn national<:
encore de normes précises
dl' \\'1,;\\ c'\\ ,iL' n()rIl1;ills;ltion en Illatiè-
Il' lit' qlLilill; ,iL', produits ;ililllcntai-
I"L'''.
r--bll:J" ,'c', alHlIllalil'" iL's lahora-
toire, d';III;ilysc ;ilillll'lll;\\ire ct d'au-
1
Mali,
rays
essl'nticlklllent
lllent.'L;[;int donné 1'i1llpol1ance par-
tre, SL'r\\ Il'CS nationaux (le ,erVICC
'ok,
trois structures
étatiques
ticulière dl' j'olhe ct dl' la demande,
(l'hygil'nL' ct la Direction réllionaic
ent actuellement des activités de
de la s;lnlé) chargés du contrôle de la
rôle de la sécurité des rroduits
En revanche, la 1~lrine. en gL;néral
qualité
Lks
rroduits
alimentaires,
entaires. \\1 s'agit:
ne hénéficie que d'une analyse épi-
donc de b préservation de la santé
sodique en vue de détenninn sa \\'a-
des COnSl1lllmateurs. allichent
une
leur marchande al! sanitaire.
du laboratoire de toxicologie ct
grande disponibilité quant à l'infor-
e bromatologie de l'Institut na-
Tou les ces ana 1yses qu i sont ellcc-
mation sa ine et gratu ite des consom-
tional de recherche en santé ru-
tuées dans le cadre d'un contrôle de
mateurs, Une rrocédure qui est en-
lique (laboratoire de rélërence)
qualité visent dl?UX cibles essl?ntiel-
core rel! utilisée. il est vrai. du fait
pour les expertises toxicologi-
les: la conformité de la denrée ali-
de l'ignorance ou des réticences des
mentaire
avec
les
normes
ct
le
consommateurs,
ues ct le contrôle oc la qualité
, es denrées alimentaires,
contrôle sanitaire dont la préoccupa-
Pour ;l1tl?indre un optimum d'elli-
tion est
la
recherche d'une cause
cacité, Il? contrôle alimentaire au
du laboratoire central vétérinai-
d'altération du produit (contamina-
Mali, selon M. Boubacar Sidiki Cis-
,re,
,.....N.7:J1!",~,.t,,'. "r:;.,-~.~, -t,~"'''-. -f!'- L.-~·t!;f~''..
4'
:·tfr.
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.....rah.
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_ ,

. et du laboratoire de biochimie
du Centre nation'al de recherche
§ 4J~ ,.~:
-' v..~
. 1 "~~i
zootechnique, ces deux derniers
étant actifs dans le domaine du
contrôle des produits alimenta!-
res d'origine animale (viande et
,~Q~j;
~
"_<J
lait),
1It-
.
.~
le premier laboratoire qui est la
ture de référence dépend du mi- .
re de la Santé publique et des
ires sociales, les deux derniers
comme organisme de tutelle, le
stère chargé des Ressources na-
. les et de l'Elevage.
mission de ces structures s'arti-
autour du contrôle de la qualité
denrées alimentaires, l'expertise
ologique, enfin l'étude et la re-
che dans les domaines de toxico-
l~:: :~~}~2~:'\\~
(aspect toxique) et de bromato-
Les consommateurs eux-mêmes den-aient faire plus preu'c de prudence de"ant certaines
(qualité alimentaire).
conditions d'hygiène de certains commerçants.
tion
se, chef du laboratoire de toxicolo-
d'origine
bactériologique
du
hniquement,
ces laboratoires
chimique). Ces analyses ou contrôles
gie et bromatologie de l'InstiBH na-
aptes à analyser l'eau, la farine
ont souvent contribué
,réales locales, les produits lai-
à éclairer ia
tional de recherche en santé publi-
lanterne
du
consommateur:
par
que, doit reposer sur une base juridi-
(lait en boîte ou de mammifère,
exemple la détection de farine de
que adéquate avec un laboratoire
maternel), les conserves alimen-
fraude avariée ou contaminée et li-
central de contrôle.
(les sardines, tomates et légu-
vrée à la consommation publique,
, les boissons sucrées, le sirop,
Pour M. Boubacar Sidiki Cissé, le
ou la vente de produits laitiers dont
queurs et huiles végétales.
contrôle alimentaire au Mali doit vi-
la date de péremption est dépassée
ser des objectifs essentiels comme la
produits font l'objet d'analyse
(il n'est pas rare, d'ailleurs, d'acheter
protection du consommateur contre
ique ceci en fonction des mis-
une boîte de lait sans aucune indica-
les risques propres à compromettre
d'inspection de la Direction
tion compréhensible).
sa santé et les fraudes commerciales.
nale de l'hygiène publique et de
Face à ces périls qui menacent la
Ce contrôle pennettra le développe~
'nissement
qui
interviennent
santé des consommateurs, des res-
ment de l'industrie et des échanges
ois ou par quinzaine.
sources
humaines
compétentes ct
des produits alimentaires.
jus de fruit font l'objet d'une
suffisantes existent.
Leur efficacité
,yse systématique. Leur contrôle
est 'Souvent contrariée par l'insuffisan-
tue beaucoup plus régulière-
ce, la vétusté ou l'inadéquation de
Bamba KIABQU
,;;.,
VIVRE AUTREMENT N0 8-9 - NOVEMBRE 1988

'/vr
leurs. Il peut dlCLluer aussi des ana-
I\\'ses Cil matière de rérressioll, pour
lies atl;lires de justice. des hesoins
militaires, pour des p'\\Iticuliers. À
charge pour eux d'Cil assulller les
frais.
De ri us, si le Bu reau du contrôle
de
la qualité de
la direction du
Contrôle économique compte des
tcchniciens de l'industrie alimentaire
parmi son effectif, ceux-ci sont par-
fois si absorbés par la routine ad-
ministrative que leurs missions tech-
niques en sont paralysées.
\\X~, CunSOlHlnateürs
;\\ i' c;ca rt
Les consommateurs sont peu for-
més il exercer un quelconque contrôle
sur les produits qu'il consomment.
Pou rta nt
certai nes
expériences
concluantes méritent d'être générali-
sées quand elles sont facilement assi-·
milables.
Ainsi un instituteur d'une ville de
"intérieur avait appris à ses élèves à
se méfier de certains aliments que
des marchands proposaient à la sor-
tie de l'école. Les commerçants dont
les aliments n'étaient pas bien proté-
gés de la poussière et des mouches
ont ainsi vu leurs produits boycottés
par les enfants.
En effet. avec la libéralisation ac-
tuelle de divers secteurs de l'écono-
mie il faut craindre que les consom-
mateurs ne soient victimes d'indus-
).-
.
triels et commerçants plus soucieux
~ ."
de profits que de la qualité de leurs
produits.
sommateur seul face au '·endeur: un contrôle au toucher, à la '·ue, à l'odeur. .
Afin de prévenir donc une situa-
ujours efficace.
tion dangereuse, une nouvelle strat~­
gie dans le contrôle est en tram
n sont soumis à des contrôles:
versitaire de technologie (ENSUT),
d'être mise en place à travers les
e de terre, pâtes alimentaires.
la Faculté de médecine, l'institut de
points saillants suivants:
in, dattes. boissons gazeuses.
technologie alimentaire (ITA).
éréales. etc.
Les résultats des analyses sont
- Une adaptation de la législation·
ndant le laboratoire souffre
transmis au service de répression des
actuelle,
sous-équipement chronique et
fraudes qui fait saisir et détruire les
- l'établissement de normes ali-
ut procéder qu'à un nombre
lots de marchandises de qualité dan-
mentaires, en collaboration avec
'mité d'analyses dans ses pro-
gereuse ou impropre à la consomma-
l'Institut sénégalais de normali-
aux. 11 s'agit des analyses or-
tion humaine..
sation,
ptiques (concernant la cou-
- un
meilleur
encadrement
de
la consistance. l'arôme•... ) et
Le recours à des services exté-
l'artisanat alimentaire,
·ologiques.
rieurs présente nnconvénient de dé-
- l'encouragement à
la création
lais parfois incontrôlables et limite
cernant les analyses d'un autre
d'associations
de
consomma-
donc sérieusemerH la rapidité de
(taux
d'irradiation.
toxicolo-
teurs plus dynamiques et une
contrôle~
le laboratoire travaille en col-
information plus large à leur en-
tion avec des structures exté·
Le laboratoire Mut intervenir à la
droit.
mieux équipées comme celles
demande et est sollicité par des com-
Amadou GUEYE
cole nationale supérieure uoi-"
IT'erçants importateurs ou exi>orta-
,
!
VIVRE AUTREMENT No 8-9 - NOVEMBRE 1988
.
....
\\
:~
1

TABLE DES NIATIERES

694
ÎNmODUCTION GENERALE
1
~,
1- Les sources jlllicliqlles d'inspir~tioll.
............................................................... 3
f\\ - Ll' droit liallç·ais....
B - Le droit comnlllnautaire..
.. ........ 5
II - Notion de consoml1laleur..
.
9
f\\ . Analyse dt I~ notion ....
. .9
1\\ - D"finition du COlisomluattlll' t'n droil positif. .
.. ....... Il
W - llis!oirt cje la défellse du consolillnalelll'....
) 1
.... ~~
IV - La socidé de cOllsommation .......
.28
v - Le consonunaleur. victime de I~ soridé écollonuque...
.
32
\\1 - Naiss~nce du ronsulIIéIisl1le.
.. 35
vu - L'AliiCju{' enillilrgc du pliénom('ue ronslllllélislc·.....
38
j
\\lII . Vers un droit de la consonumtion en ADique ? ..
... ~o
!
[\\ -AJUJOnce du plan
46
-1
jPRÈMIERE P.'illTIE :
~
!i
lLA FACE CACHEE DU COIVIMERCE
.49
!
t\\;
JINTEHNAIIONAI, DI':S iVIARCIIAI'I DIS /<:S
.49
~
1CIIAPITIZE 1.
L'EXPDRTXnON DES PRODUITS Di\\NGEIŒUX
.55
i\\ DESTIN;\\l'ION DES PA 'y'S.
. .. 55
EN VOIE DE DEVELOPPEl'vŒNf WVl)).
..... 55
SeClio Il J .'
QI/alité et ciJ'wfalion des PI'OdIliL5' et sel'I'ices dans le monde
.
.
59
Sous-section l • Notion de produit el de service..
..
59
§I . Essai de définition de produil el service ..
.. 59
A - ApprorlJt de la notion cit' produit
..
.
60
f1 - ApprorlJt de I~ notion dt servict..
.. .. 61
§ll - Insuffisance des définitions des dtux notions
.. 65
A - Difficulté de distinction des deux notions
..
.
65
B - Le problème c1'imblic~lion des c1enx notions et ses conséquences.
..
66
Sous-Section II: Esquisse d'une théorie de la qualité des ........
.
68
produits et services.
.
68
§I - Notion dt qualité des produits et s<-l'vices
................................................ 68
lktinition el c'lfacl'·risliques.
..
68
A - Détinition de la quali!" (ks plOdnits el des strvices .
.
68
a) Définitioll ~illgllliü{' (iii ('OIICl-P' "qllalik"
..
.. ...... 68
1J) Supr~naliollalil(- dt la qu,ùill·.
.
70
B - Caractéristiques ou composant<-s de la qualité......
..
71

696
2 - Le:s dangers lié's ~ l'utilisation des médicaments presclits
..
........... 115
b) Le: fail gé'néralellJ de:s lisques.
.. ... 117
1 - LI;' protlt cOllU11ercial COn1l11e mobile: d'exposition .....
des COllSonll11ateurs aux lisque:s.
..117
2 - L'absl;'ncl;' (i(- contrôle dn système:...
.120
Sous-Se:ction TI . L,c. commel(e inlelllationai dts produits .....
de consonullation indiJtcte:..
.
121
§I - Lt COnlJ11<:I'Ce de:s produits chimlquts dans les P. V.O
..
.
121
.-\\ - La problématiqne: clu commerce de:s pe:sticides dans les P.\\!.D
..
.
122
.... 122
cle:stinalion cleO' Ilays pauvre:s.
... 124
1\\ - Lin conulIe:rce: Ilonss;nll ..
.128
a) Un marché tn expansion ...
. . . . . ..... 128
b) LI;'S arguments en présellct.. ..
.. .. 131
§II - Les retombées ou répercussions de l'usage des pesticides
dangereux dans les P. V.O
.
.
134
A - Les conséquenÇ('s dommageables sur les consommateurs
.................. 134
................................. 1E
............................ 143
Section J :
lapréservalion de la S(1J1té et de la sécurité du consommateur
147
Sous-section 1: les mesures séculitaires de protection du consonUllateUl'.
148
§I - Le contrôle qualitah.f des importations
148
A - La procédure de contrôle des impoltations
..
.
148
a) Le con1J'ôle des produits alim<:ntaires
..
.
148
b) Le contrôle des aulres produits et services
..
.
149
B - Le'S modalités du conlrôle....
.
151
a) Les modalités clu contrôle de:s produits alimentaires ...
.
151
b) Lts modalités du contrôlé cles aulres produits et services......
.. .... 152
§Il - La (!)lHllnique du coutrole..
..
153
A - Le corjlrôle db produils el services: une responsabilité des
pouvoirs publics....
.
154
J
a) La création d'instil1.1tions sptcialistes.
.
154
b) Lt relù'orCtment du rôle des strvices douaniers.
.
155
B - Pour un rtcours aux organismts spécialisés dans lés contrôlés .......
.. .. 157
a) Rolt des organismes spécialisés dans le commerce inlenwtional..
. ...... 157
....... \\57
SOIl",-stcllon li : L:e\\igcncc ,ociak l'lla 1I()ll-'1nalil~.
.
l.~()
~I - Le'S produits el strvices non ('onf0I111éS aux altm!éS socialts.
.
159

698
de qualité cles produits et services .......
................................................ 185
b) La nOIlnalisation comme politique raisonnable
..
..
186
1 . La notion cie nOIlne...
.
187
2 - L'intérêt de la nOIlnalisalion...
..188
§J1 . La garantie ail planillondial de la ,anlé l'I (it- la .....
>'écwité du consomnwleur.......
190
A . La dimensioll du problèrne dans les pa)'s industriels
..
. ......... 190
a) De la confusion dans le contrôle des
.
exportations dangereuses
190
b) Les limites cI'efficacité des options en présence
192
B . Pour une plus grande responsabilité cles pays industIiels dans la protection des consonunateurs du Tiers·
l' Ioncle
,
,
,
195
a) POlU' une politique de conlrôle s!licl el objectif des exportations des produits vers les P.V.D
195
b) Le rôle de' l'Union Européenne dans la protection de la santé el cie la séctuilé des cOllsommateurs du Tiers-
I\\!onde
..
... 198
c) Le rôle des Etats'Unis dans la protection cie la santé et ....
de la sénilité des consonunateuls du Tiers·!vIonde
..
.
200
1- La procédure de notificalion de l'E.P.A. el ses insuffisances à protéger les consommateurs du Tiers·
1\\'10nde
,
,
.
.
,
201
2 . Pour une plus grande responsabilité cles Etats· Unis dans
..
.
,
,
,.. 204
la protection de la sallté ('1 de la sénilité des consommat(·urs
................................. 204
du Tiers- MOII(k-.....
... 204
d) Rôle des Nations U,ùes clans la protection cles COIISOllUlJatelirs clu Tiers-Monde contre les exportations
dangereuses
.
.... 209
J. CONCUJ~:I')l'; DE LA PRElIIEEE P?.RTIE : .
.
215
!'.1IDEU\\.jEl\\·!E PARTIE:
~
JLA PROj\\·IOnON DES DROITS DV
.
,
~j
ICONSOrVfJ\\'Li\\TEUR EN AFRIQUE
219
1CHAPn"RI:: l :
,1fLA RECONNAISSANCE DU DROIT DU
iCONSCli'vThIATEUR A LA PROTECTION.
.
,
225
1 Sectioll 1 :
i La jJl'lse ('IJ compte des jJl'Oblèmcs des COII.lOlllma1ew:r ell Aj/"ique 0/1 la lIécessité d 'adap/er le mm'Cflé 011.\\
e.\\igenC('souwpimfiolissociaJes
,............
...,...................
230
Sous·Section 1: L'action en alllont cles pouvoirs publics ou
..
l' nctioll sur l' offrt dts produits et servin's
..
......
231
~I . Le contrôlé' d('I'(');l-clllioll dll sClvin' (it- distlilllltion.
.. .. 231
A - Les rappOIh entre disllilllltioli el COllsolllJlwtioll
.
... 231
Il - \\lJl(' dislliill1lioll adaptée all.\\ IJ('soi"" dcs COIISOllllllalc·llrs.
.. .. 233

1
700
j
cles produits falsiliés ou cOlltrefaits et cles produits assi.milés
292
§II . La protection clu con;;Qnunateur par l'incrimination des trompelies sur Its marchanclises
294
A . Notion générale clt tromperie
..
.
294
B . Les clivers cas cie trompelie sur la mal chanclise
..
.
~8
'HAPITRE II:
E RETABLlSSHŒNT DE L'EQUILll3RE DU.
ONTRAT DANS LES RA.PPOlZTS
ROFESSIOl'-,TNELS . CONSOl\\ITvIATEURS ....
.
302
Sectioll J'
ra IlIlte 1'011 trI' 10 dëlovOllt,i dol/.\\· 11'.1' rO/J/)()}'t.l' JlJ'(~kssiolllJ('ls - COIiSOIIJJJ1a/ell!'S..
.
...... 308
SOII:"S('clion 1: L'obligalioll d(·loyallt(· (hl prokssionnd .
clans la v<:nlt sou la prestation clt sC'lvice
.......... 309
~l ·1. 'obligation d'infollllation dll IJlOksslollild dans la ...
vente ou la prestation (lé' stl'Vice....
... 309
A - Le problèllle relatif il l'info/mation clu professioIUlel..
clans la vente ou prestatiou cie service en A.ftique.......
. ....... 309
B - Les exigences relatives à l'obligation clu proftssionnel .
cI'infollner le consonunateur..
..
311
a) Les exigences morales clu devoir cl' infollllation clu professionnel.
....311
b l Les exigencts liées il la négation cie l' infollllation.
..
314
1
l') Les txigc'nces litts à la positivili- dt l'infollnation
......316
§II . L'('xécutiou clu clc'voir cI'infollnation clu proftssionnd
clans la \\'tnte ou prestation dt service.
.. 320
A - L'exécution clu clevoir d'infoIlllalion obligatoire clu professiolUlel.
............320
a) Lts moclalit(,s cI'txécution clu clevoir cI'infonnation
obligatoire cles prof(·ssionnels..
......320
1 - Le r('nstignemtnt comlllt lIlocialit(· principalt..
...... 321
2 . Le's prolongtllltnis clt l'obligation cie rtnstigncmeut..
clu plOfessioluJ('1.
... 324
2-1. La lIlise en garcle clans l'obligation ......
cie rtnseignellltnt du proitssiOlUlel
........ 325
!
2·1.. Le constil cLUIS l'obligation dt renstigntllltnt.
1
clu professiolUlel. ....
.
329
!
3 - Le régilllt jillicliqut cie l'obligation cie renseignemtnl. ...
1
cln proftssionntl. ........
.
333
1
J
b) Lt conttnu cie l'infollnation obligatoil'c,
.
..
338
\\
1 - L'infollnalion sur i'obj('1 clu contraI.
..
.
339
2 - L'infüllllalion S\\II" Ics clroits d obligations des paI1ics.
.
,
,
,341
1
l') La prottction clu consolllmaltl!l' parla sanction de la
.
{
!,t
rétention fautive cie l'infonnation obligatoirt
,
342
i
1 - La dispaJilioll rétroactiv(' dt l'acte jlllidiqn(· ..
.
,
,
343
1
1-1. L'aJUllllation totale cie l'acte jmidique
.
.
,
344
1
1
1
1
f
'i
,1
1
1