UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES
THEORIES ET REALITES DU DROIT
INTERNATIONAL HUMANITAIRE: CONTRIBUTION
A L'ETUDE DE L'APPLICATION DU DROIT DES
CONFLITS ARMES EN AFRIQUE NOIRE
CONTEMPORAINE
Thèse pour le Doctorat d'Etat en Droit
JURy
Président:
M.
Babacar GUEYE, Maître de Conférences Agrégé, Faculté des
Sciences Juridiques et Politiques - UÇAD - DAKAR.
Suffragants: "MM. Ibou DIAITE, Professeur, Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques - UCAD - DAKAR.
,..
Michel cyr DJIENA-WEMBOU, Agrégé des Facultés de Droit,
Professeur Titulaire - Université de Cocody - ABIDJAN.
El Hadj MBüDJ, Maître de Confërences Agrégé - Faculté des
Sciences Juridiques et Politiques - UCAD - DAKAR
Cheikh Tidiane THIAM, Maître-Assistant en Droit Public, Faculté
des Sciences Juridiques et Politiques -- UCAD - DAKAR

La Faculté n'entend donner aucune approbation
ni improbation aux opinions émises dans cette
thèse ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur.
-
1

Ce travail a été soutenu par l'Agence Francophone pour
L'Enseignement Supérieur et la Recherche (AUPELF-UREF) dans le cadre
d'une allocation de recherche
du Fonds Francophone de la Recherche 1998-2000.

Ce travail a été honoré d'une bourse
de recherches doctorales à l'Académie de Droit International de La Haye
de juillet à septembre 1999

DEDICACE
Au nom de Dieu, le Clément et le Miséricordieux et à son Prophète
Mohamed (P.S.L.)
Je dédie ce travail à mes parents pour tout le soutien et les conseils
qu'ils n'ont cessé de me prodiguer depuis toujours.

REMERCIEMENTS
Ce travail, fruit de recherches et de voyages, n'aurait jamais abouti sans le
soutien de nombreuses personnes (collègues, amis, parents) parmi lesquelles on peut
noter :
Babacar GUEYE, Maître de Conférences Agrégé en Droit Public, pour sa
confiance.
El Hadj MBODJ, Maître de Conférences Agrégé en Droit Public, Directeur de
l'Institut des Droits de l'Homme et de la Paix, pour son assistance indéfectible.
Daouda FALL, Chargé d'Enseignement, pour son amitié.
Cheikh Tidiane THIAM, Chargé d'Enseignement, pour ses conseils éclairés.
Papa Demba SY, Maître de Conférences Agrégé en Droit public.
Abdou Latif MBACKE et le personnel de la Délégation Régionale du CICR à
Dakar.
Mme Amsatou SOW SIDIBE, Maître de Conférences Agrégée en Droit Privé
pour toute son aide.
Professeur Michel GUILLOU, Recteur de l'AUPELF-UREF pour l'allocation de
recherches.
Professeur Geneviève BURDEAU, Secrétaire Général de l'Académie de Droit
International de La Haye pour la bourse de doctorat.
Professeur Henri PALLARD,
Université
Laurentienne,
Sudbwy,
Ontario
(Canada).
Jean Bernard MARIE, Secrétaire Général de l'Institut International des Droits de
l'Homme, Strasbourg (France).
Frieder VON SASS, Représentant de la Fondation Friedrich NAUMANN à
Dakar.
Fatsah OUGUERGOUZ, Conseiller Juridique au Greffe de la Cour Internationale
de Justice de La Haye.
Madame Dior DIENG, Secrétaire du CREDILA, pour sa patience et sa gentillesse.
Tous mes Collègues de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques.

RC.A.D.1.
Recueil des COlU'S de l'Académie de Droit International
RCJ.J.
Revue de la Commission Internationale des Juristes
RD.C.
République Démocratique du Congo (ex-Zaïre)
RD.P.
Revue de Droit Public
RECAMP
Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de
la Paix
Rec. C.l.l
Recueil des Arrêts et Avis de la Cour Internationale de
Justice
RENAMO
Organisation de la Résistance Mozambicaine
Res.
Résolution
RF.E.P.A.
Revue Française d'Etudes Politiques Africaines
RG.D.I.P.
Revue Générale de Droit International Public
RI.C.R
Revue Internationale de la Croix-Rouge (CICR)
R.I.S.S.
Revue Internationale des Sciences Sociales (UNESCO)
RlP.I.C.
Revue
Juridique
et
Politique,
Indépendance
et
Coopération
RS.A.
Recueil des Sentences Arbitrales
RS.D.
Revue Sénégalaise de Droit
RS.F.
Reporters Sans frontières
RUD.H.
Revue Universelle des Droits de l'Homme
RU.F.
Revolutionary United Front (Sierra-Léone)
S.A.D.C.
Southern African Development Community
S.A.D.I.e.
Société Africaine de Droit International et Comparé
(éditrice de la RADIC)
S.D.N.
Société des Nations
S.F.D.1.
Société Française de Droit International
S.F.O.R
Force de Stabilisation pour la Bosnie-Herzégovine
(OTAN)
S.P.L.A.lA.P.L.S.
Sudan Popular Liberation Army
S.W.A.P.O.
South West African People Organization (Namibie)
T.
Tome

M.S.F.
Médecins Sans Frontières
N.E.A.
Nouvelles Editions Africaines
N.P.F.L.
Front National
Patriotique
de
Libération (Charles
TAYLOR)
N.RA.
National Resistance Anny (Ouganda)
O.E.A
Organisation des Etats Américains
O.I.T.
Organisation Internationale du Travail
O.M.S.
Organisation Mondiale de la Santé
o.N.G.
Organisations Non Gouvernementales
O.N.U.
Organisation des Nations Unies
O.N.U.C.
Opération des Nations Unies au Congo
ONUMOZ
Opération des Nations Unies au Mozambique
ONUSOM
Opération des Nations Unies en Somalie
ONUVER
Opération des Nations Unies de Vérification en Etythrée
O.S.C.E.
Organisation pour la Sécurité et la Coopération en
Europe
O.T.AN.
Organisation du Traité de l'Atlantique Nord
P.A.C.
Pan Mrican Congress
P.A.I.G.C.
Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée et du
Cap-Vert
P.A.M.
Programme Alimentaire Mondial (ONU)
Parag.
Paragraphe
POLISARIO
Front pour la Libération de la SAGUIA AL HAMRA et
du RIO DE ORO
P.N.U.D.
Programme des Nations Unies pour le Développement
Prot. add.
Protocoles additionnels de 1977
P.U.F.
Presses Universitaires de France
RAD.I.C.
Revue Africaine de Droit International et Comparé
R.AS.D.
République Arabe Sahraouie Démocratique
RB.D.I.
Revue Belge de Droit International
RC.A
République Centrafricaine

I.c.R.c.
CICR
I.C.T.R.
TPIR
I.D.H.P.
Institut des Droits de l'Homme et de la Paix (Dakar)
I.I.D.H.
Institut International des Droits de l'Homme (Strasbourg)
lI.D.H. (San Remo) :
Institut International de Droit Humanitaire
I.U.H.E.I.
Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales
(Genève)
lA.
Jeune Afrique
J.A.E.
Jeune Afrique Economie
ID.I.
Journal de Droit International (Clunet)
IO.RS.
Journal Officiel de la République du Sénégal
L.G.DJ.
Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence
L.P.c.
Liberian Peace Council (Conseil de Paix Libérien)
L.RA.
Lord Resistance Anny (Année
de
Résistance
du
Seigneur (Ouganda)
M.D.
Le Monde Diplomatique
M.D.D.
Mouvement pour la Démocratie et le Développement
(Tchad)
M.F.D.C.
Mouvement des Forces Démocratiques de Casamance
(Sénégal)
M.F.U.A.
Mouvements et Fronts Unifiés de l'Azawad
MINUAR
Mission des Nations Unies pour l'Assistance au Rwanda
MINUOR
Mission des Nations Unies en Ouganda et au Rwanda
MISAB
Mission Interafricaine de Surveillance des Accords de
Bangui (République centrafricaine)
M.N.S.
Mouvement National Somalien
MONUL
Mission d'observation des Nations Unies au Libéria
MONUSIL
Mission d'observation des Nations Unies en Sierra
Léone
M.P.A.
Mouvement Populaire de l'Azawad
M.P.L.A.
Mouvement Populaire pour la Libération de l'Angola

F.AR.
Forces
Années
du
Rwanda
(gouvernement
d'HABYARIMANA)
F.A.R.C.
Force Africaine de Réaction aux Crises
F.A.RF.
Forces Années pour la République Fédérale (Tchad)
F.A.Z.
Forces Années Zaïroises (sous MOBUTU)
F.LA.A.
Front Islamique Arabe de l'Azawad
F.I.S.E.
Fonds International de Secours pour l'Enfance
F.L.E.C.-R
Frente para a libertaçao do Enclave de Cabinda
Renovada (Angola)
F.L.N.O.
Front de Libération Nationale de l'Ouganda
F.L.O
Front de Libération de l'Oromo (Ethiopie)
F.M.I.
Fonds Monétaire International
F.M.P.
Force Multinationale de Protection (Albanie)
F.N.L.A.
Front National de Libération de l'Angola
F.N.P.LL.
Front National Patriotique Indépendant du Libéria
(Prince JOHNSON)
F.N.T.
Front National du Tchad
FORPRONU
Force de Protection des Nations Unies en Yougoslavie
F.P.L.A.
Front Populaire de Libération de l'Azawad
F.P.R
Front Patriotique Rwandais
FRELIMO
Frente para a libertaçao de Moçambique
FROLINA
Front de Libération Nationale du Tchad
F.RU.D.
Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie
(Djibouti)
F.U.N.V.
Force d'Urgence des Nations Vnies
GANDAKOYE
Mouvement
"Les
Maîtres
de
la
Terre"
(Milice
d'autodéfense malienne)
G.A.N.T.R.Y.
Mouvement GOGRIAL AWEIL NYAMLELL TONJ
RUMBEK YIROL (Milice gouvernementale) (Soudan)
G.U.N.T.
Gouvernement d'Union Nationale de Transition (Tchad)
H.C.R
Haut Commissariat pour les Réfugiés

C jD.H.
Conférence Diplomatique pour la Réaffmnation et le
Développement du DIH applicable dans les conflits
armés (1974-1977)
CD.!
Commission du Droit International
CE.D.E.A.O.
Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (ECOWAS)
CG.
Conventions de Genève du 12 août 1949
C.I.C.R
Comité International de la Croix-Rouge
CU
Cour Internationale de Justice de La Haye
C.M.C.A.
Commission
de
Médiation,
de
Conciliation
et
d'Arbitrage (OUA)
CP.A
Cour Pennanente d'Arbitrage
CP.I.
Cour Pénale Internationale
CPJ.I.
Cour Pennanente de Justice Internationale
CRE.D.I.L.A.
Centre de Recherche, d'Etude et de Documentation sur
les Institutions et les Législations Africaines (Dakar -
UCAD)
CS.
Conseil de Sécurité (ONU)
CSU /SNA
Congrès de la Somalie Unifiée
C.V.R
Commission pour la Vérité et la Réconciliation - TRC
DécI.
Déclaration
D.H.A.
Department of Humanitarian Affairs (ONU)
D.I.H.
Droit International Humanitaire
D.J.P.
Droit International Public
ECOMOG
ECOWAS MONITORING GROUP
ECOSOC
Conseil Economique et Social (ONU)
E.DJ.A.
Editions Juridiques Africaines (Dakar)
E.lA.
Encyclopédie Juridique de l'Afrique
EPLFIFPLE
Erythrean People's Liberation Front
F.A.O.
Fonds
des Nations
Unies
pour l'Alimentation
et
l'Agriculture

T.A.M.
Tribunaux Arbitraux Mixtes
T.MJ.
Tribunal Militaire International (Nuremberg, Tokyo)
T.N.P.
Traité de Non-Prolifération Nucléaire
T.P.LR
Tribunal Pénal International pour le Rwanda
T.PJ.Y.
Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie
T.RC.
Truth and Reconciliation Commission
ULIMO-J
Mouvement Uni de Libération pour la Démocratie au
Liberia - Faction KRAHN (ROOSEVELT JOHNSON)
ULHv1.0-K
Mouvement Uni de Libération pour la Démocratie au
Uberia - Faction MANDINGUE (ALADII KROMAH)
UNAVEM
T.1ission de Vérification des Nations Vnies en Angola
V.N.D.RO.
'.nited Nations Disaster and Relief Office
V.N.ES.C.O.
United
Nations
Economic,
Science
and
Culture
;~'rganization
U.:N.LC.E.F.
'..-Tnited Nations International Children Emergency Fund
U.l~.I.D.I.R
United Nations Institute for Disarmament Research
U.NJ.T.A.
:Jnion pour l'Indépendance totale de l'Angola (Jonas
~' J\\VIMBI)
U.N.l.T.A.F
'nited Task Force (Force d'Intervention Unifiée)
U.N.L.A.
glIlda National Liberation Army
. T
U.P.D.F.
: Tganda People's Defense Force
Vol.
W.N.B.F.
,'.l Nile Bank Front (Front de la Rive Occidentale du
Z.A.N.U.
Zi,nbnbw:e African POp'~hr Union (1. NKOMO)
L.'
U
2:mbùbwe African National Union (R MUGABE)

RESUME
Le Droit International Humanitaire repose sur le sentiment d'humanité et la
protection de la personne humaine en période de conflit armé. Ses fondements éthiques et
moraux sont aujourd'hui solidifiés par une normativité de moins en moins contestée.
Toutefois, si les Etats africains ont majoritairement adhéré au DIlI, il n'en
demeure pas moins que certaines spécificités africaines en rendent sa réception difficile
et sa mise en œuvre malaisée.
Traumatisée par la traite négrière et la colonisation, l'Afrique Noire est en
proie de nombreux conflits armés aux multiples causes mais aux conséquences toujours
dramatiques: régression économique, flux de réfugiés et de déplacés internes,
mercenariat, participation d'enfants-soldats, génocide, etc.
TI en découle un décalage entre la théorie du Dili et les réalités africaines. De
nombreux obstacles liés à un usage du Dili en fonction d'intérêts étatiques et à un usage
immodéré du principe de souveraineté fgrèvent fortement la mise en œuvre du Dili. A
cela, s'ajoutent l'insuffisance d'information de la population civile et l'ignorance du Dili
par ses principaux destinataires.
Cet inventaire des lacunes des mesures de mise en œuvre du droit des conflits
armés doit être ~é par une actualisation du Dili et sa connexion étroite avec les
réalités africaines Iês plus prégnantes.
TI faudra dépasser le juridisme étroit du DIH dû à l'obsolescence des
SUMMA DIVISIO classiques et leur inadaptation aux conflits de type nouveau (ou
mixtes). Dans cette mouvance, la revitalisation des Conventions de l'OUA sur les
réfugiés et les mêrcenaires et le renforcement de la protection des femmes et des enfants,
restent plus que jamais d'actualité.
L'interaction constante de la politique avec le droit devra être surmontée par
une dépolitisation de l'action humanitaire, la répudiation du concept de droit d'ingérence
humanitaire et une juridicisation effective du droit d'assistance humanitaire.
En définitive, l'effectivité de la mise en œuvre du DIH en Afrique Noire
devra passer par une pénalisation renforcée des violations dudit droit. Les remèdes aux
faiblesses normatives et structurelles devront s'articuler autour de l'obligation de
respecter et de faire respecter le DIH, la nationalisation et la socialisation du Dili par les
Etats africains.

SOMMAIRE
INTRODUCTION
Section 1 - Précisions liminaires
Section II - Problématique du DIH en Afrique Noire Contemporaine
1ère PARTIE - DE L'IDEALISME AU REALISME : LES DIFFICULTES
D'APPLICATION DU DIH EN AFRIQUE NOIRE
TITRE 1er -
La difficile réception du Dili en Afrique Noire
CHAPITRE 1 - Un droit d'origine européenne
CHAPITRE II - L'écran du principe de souveraineté des Etats africains
TITRE II -
L'inadéquation de la mise en oeuvre du Dili
CHAPITRE 1 -L'ignorance du DIH par ses principaux destinataires
CHAPITRE II - L'insuffisance des mesures de mise en œuvre
Conclusion de la 1ère Partie
IIème PARTIE -
DU JURIDISME A L'ACTUALISATION: UNE THERAPIE
POUR LES DIFFICULTES DU DIH EN AFRIQUE NOIRE
TITRE 1er -
Pour une actualisation du contenu du DIH
CHAPITRE 1 - Pour un réaménagement du DIH
CHAPITRE II - Pour une dépolitisation de l'action hwnanitaire
TITRE II - Pour une mise en œuvre effective du DIH
CHAPITRE 1 - La pénalisation effective des violations du DIH
CHAPITRE II - Les impératifs et voies de la mise en œuvre du Dili
Conclusion de la Ile Partie
CONCLUSION GENERALE
ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

2
UBI SOCIETAS UBI JUS. Cet aphorisme, cher aux juristes, ne saurait mieux
traduire la nécessité de la codification du droit international humanitaire (D.I.H.) et la
fulgurance de son développement progressif.
Dans un monde marqué par la fin de la guerre froide et la survivance de ses
séquelles conflictuelles dans les pays du Tiers-monde, le Dili es~ plus qu'un impératif des
Etats, un droit des individus à la paix devant l'anarchie militariste ou la violence aveugle
des armées.
L'Afrique, continent martyrisé par toutes sortes de guerres, ne saurait ignorer
longtemps le DIH ni rester en marge du mouvement appelant à son respect.
Il convient d'apporter des précisions liminaires (Section 1) avant d'insister sur la
problématique du DIH (Section II).

.3
SECTION 1 - PRECISIONS LIMINAIRES
La notion de DIH doit être circonscrite (Paragraphe 1), distinguée de notions
voisines (Paragraphe TI) et replacée dans son processus de développement (Paragraphe ilI).
Paragraphe 1 - La notion de DIH
Nombreuses sont les définitions qui entendent cerner la notion (A) qui repose
sur une pluralité de sources (B).
A - Défmition
Plusieurs auteurs ont tenté de clarifier la notion de DIB. Ainsi Stanislaw
NAHLIK définit ce droit comme "l'ensemble des règles du droit international visant la
protection en cas de conflit anné, des personnes atteintes par les maux que cause un tel
conflit et par extension des biens n'ayant pas de rapport direct avec les opérations
militaires"(1). Pour sa part, Jean PICTET donne la définition suivante : "le droit
international hwnanitaire a pour but de réglementer les hostilités afm d'en atténuer les
rigueurs"(2). il ajoute par ailleurs que le DIH(3) ou droit des conflits annés constitue
"l'ensemble des dispositions juridiques internationales écrites ou coutumières assurant le
respect de la personne hwnaine et son épanouissement"(4).
(1) NAHLIK (S.E.), Précis abrégé de droit international humanitaire, RICR, juillet-août 1984, p. 1;
voir aussi DAVID (E.), Principes de droit des conflits armés, Bruxelles, Bruylant 1994, 792 p.
(2) PICTEr (J), Développement et principes du droit international humanitaire, Institut Henry
Dunant, Pédone, Genève, Paris, 1983, p. 7.
(3) Les Nations Unies utilisent, selon PICTEr, l'expression synonyme de "droit des conflits
armés" ou la notion associative de "droit international humanitaire applicable aux conflits armés".
(4) PICTEr (1.), Le droit humanitaire et la protection des victimes de la guerre, Institut Henry
Dunant, Genève, 1973, p.ll.

4
Au-delà de la diversité des appellations visant à en préciser les éléments
intrinsèques, les principes fondamentaux ou les règles essentielles, l'une des définitions les
plus complètes car synthétisant l'ensemble des défmitions déjà rencontrées demeure
indubitablement celle adoptée par le Comité International de .la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge (CICR), selon laquelle on entend par DIH : "les règles internationales
d'origine conventionnelle ou coutumière qui sont spécialement destinées à régler les
problèmes hwnanitaires découlant directement des conflits armés, internationaux ou non
internationaux, et qui restreignent, pour des raisons hwnanitaires, le droit des parties au
conflit d'utiliser les méthodes et moyens de guerre de leur choix ou protègent les personnes
et les biens affectés ou pouvant être affectés par le conflit"(5).
La définition fait appel à plusieurs sources de droit international.
B - Les sources du D.I.H.
En tant que branche du droit international public, le DIH emprunte les mêmes
sources. On peut signaler:
- Les sources conventionnelles: elles sont très nombreuses. On peut songer
à la Déclaration de Saint-Petersbourg de 1868, aux Conventions et Déclarations de La
Haye de 1899, aux Conventions et Déclarations de La Haye de 1907, au Protocole de
Genève de 1925, aux Conventions de 1980, 1993, 1997, etc.
On insistera plus
particulièrement sur les quatre conventions de Genève de 1949(6) et les protocoles
additionnels de 1977(7).
(5) Cf Les démarches du CICR en cas de violation du Dili, RICR n° 728, mars-avril 1981, pp. 79-
86.
(6) La 1ère Convention pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces
armées en campagne; la ne Convention pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et des
naufragés des forces armées sur mer; la me Convention relative au traitement des prisonniers de
guerre; et la IVe Convention relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. cf
"Les Conventions de Genève du 12 août 1949", Ed. CICR, Genève, novembre 1989, 251 pages.
(7) Les protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949 sont le
Protocole 1 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux et le Protocole n
relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux. Voir Les Protocoles
additionnels aux conventions de Genève du 12 aoüt 1949, Ed. CICR, Genève, 1977, 136 pages.

5
- Les sources coutumières
Avant la première convention de 1864, le DIH était davantage marqué par des
nonnes exclusivement coutumières ou des règles découlant d'accords bilatéraux ou
multilatéraux AD HOC. On citera à cet égard le Convenant de Sempach de 1393 plus
communément désigné sous l'appellation de "FRAUENBRIEF" du fait qu'il prévoyait des
dispositions protectrices pour les blessés et les femmes : "on les laissera intactes dans leur
personne et leurs biens"(8). On peut aussi relever les "CARTELS" conclus préalablement
entre les chefs d'années (Traité d'amitié et de paix signé par Frédéric LE GRAND et
Benjamin FRANKLIN)(9), pour l'échange et la rançon de prisonniers de guerre (Concile
de Latran de 1179(10) et Traité de Munster de 1648)(11). Ainsi, de 1581 à 1864, on ne
dénombre pas moins de 291 accords de cartels ou de "Capitulations" (accords pour la
reddition de places fortes) ou d"'Armistices" (accords pour la cessation des hostilités). Si la
plupart des conventions antérieures à la première guerre mondiale sont entrées dans le
domaine coutumier (Conventions de La Haye de 1899-1907), à l'inverse, des nonnes
coutumières ont été codifiées telle la célèbre Clause de MARTENS, mentionnée dans la
Ne Convention de La Haye du 18 octobre 1907 qui se lit ainsi : "En attendant qu'un code
plus complet des lois de la guerre puisse être édicté, les Hautes Parties contractantes jugent
opportun de constater que dans les cas non compris dans les dispositions réglementaires
adoptées par elles, les populations et les belligérants restent sous la sauvegarde et sous
l'empire des principes du droit des gens, tels qu'ils résultent des usages établis entre nations
(8) PICTET (1.), Développement et principes du Droit international humanitaire, op. cit., p. 27.
(9) PICTET (1.), ibid., p. 29.
(10) COURSIER (H.), Cours de cinq leçons sur les Conventions de Genève, CIeR, Genève, 1963,
109 p. : Selon l'auteur, le Concile "défendit de réduire en servitude et de vendre comme esclaves
les prisonniers de guerre. La coutume s'établit alors de libérer ceux-ci contre paiement d'une
rançon" (p. 64).
(11) COURSIER, ibid., p. 65, souligne que "l'article 43 de ce traité dit que les prisonniers seront
libérés sans rançon, de part et d'autre, sans aucune exception ni réserve".

6
civilisées, des lois de l'humanité et des exigences de la conscience publique"(12). Cette
clause porte le nom de Frédéric De MARTENS, diplomate russe qui l'inspira. Son intérêt
réside dans le fait qu'elle a permis de développer de nouvelles pistes de réflexion sur les
conflits internes ou les conflits mixtes, influençant ainsi la codification du DIH.
D'autres règles coutumières ont été abandonnées par les conventions
humanitaires postérieures. Il en est ainsi de la célèbre mais controversée CLAUSULA SI
üMNES qualifiée par PICTET de "disposition absurde selon laquelle les traités ne sont
applicables que si tous les belligérants en font partie"(13). La clause, norme coutumière
incluse dans l'article 2 de la IVe Convention de La Haye de 1907 sur les lois et coutumes
de la guerre(14), a été supprimée par l'article 25 de la Convention de Genève du 27 juillet
1929 sur l'amélioration du sort des blessés et des malades(15). Aujourd'hui, la réciprocité
est exclue comme condition d'application du droit humanitaire(16).
- Les principes généraux du DIH dégagés par la jurisprudence s'inspirent de
principes de l'article 38 du Statut de la CIJ(17) déjà circonscrits par la Cour Internationale
(12) VERRI (P.), Dictionnaire du Droit international des conflits armés, CICR, Genève, 1988, p.
73.
(13) PICTET (1.), op. cit., p. 40.
(14) Selon l'art. 2 de la convention susdite, la clause se lit ainsi: "les dispositions contenues dans le
Règlement visé à l'article premier ainsi que dans la présente convention ne sont applicables
qu'entre les puissances contractantes et seulement si les belligérants sont tous parties à la
Convention".
(15) L'art. 25 de ladite convention dispose: "Au cas où, en temps de guerre, un belligérant ne
serait pas partie à la convention, ses dispositions demeureront néanmoins obligatoires entre tous
les belligérants qui y participent". Cf Actes de la Conférence diplomatique convoquée par le
Conseil fédéral suisse et réunie à Genève du 1er au 27 juillet 1929.
(16) L'art. 60 paragraphe 5 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (in
Grands Textes de Droit international public (P.M. DUPUY), Dalloz, 1996, 877 pages) dispose :
"...Les paragraphes 1 à 3 ne s'appliquent pas aux dispositions relatives à la protection de la
personne humaine contenues dans des traités de caractère humanitaire, notamment aux
dispositions excluant toute forme de représailles à l'égard des personnes protégées par lesdits
traités".
(17) ABI-SAAB (R), Les principes généraux du Droit humanitaire selon la Cour Internationale de
Justice, RICR, n° 766, juillet-août 1987, pp. 381-389.

7
de Justice de La Haye qui, dans un arrêt important par ses conséquences politiques et
juridiques, s'exprime ainsi "... Si un Etat mouille des mines dans des eaux -quelles qu'elles
soient- où les navires d'un autre Etat peuvent avoir un droit d'accès ou de passage, sans
avertissement ni notification, au mépris de la sécurité de la navigation pacifique, cet Etat
viole les principes du droit humanitaire... "(18). La Cour précise: le fait que des "principes
de droit coutumier soient codifiés ou incorporés dans des conventions multilatérales ne
veut pas dire qu'ils cessent d'exister ou de s'appliquer en tant que principes de droit
coutumier"(19). Elle rappelle ainsi une jurisprudence constante: "l'existence de règles
identiques en Droit international conventionnel et coutmnier a été clairement admise...
dans les affaires du Plateau continental de la Mer du Nord"(20). Déjà, dans l'espèce Détroit
de Corfou, la CU affirmait l'existence de "certains principes généraux et bien reconnus tels
que des considérations élémentaires d'humanité, plus absolues encore en temps de paix
qu'en temps de guerre"(21).
La
"transcendance
des
pnnclpes
humanitaires"
selon
Umesh
PALWANKAR(22) est largement corroborée par le célèbre OBITER DICTUM de la CU,
dans l'affaire de la BARCELONA TRACTION qui reconnaissait l'existence d'obligations
des Etats "envers la communauté internationale dans son ensemble. Par leur nature même,
elles concernent tous les Etats. Les obligations dont il s'agit sont des obligations ERGA
OMNES"(23). A la suite de quoi la Cour ajoute : "... Car une telle obligation ne découle
pas seulement des Conventions elles-mêmes mais des principes généraux du droit
humanitaire dont les conventions ne sont que l'expression concrète"(24).
(18) Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua cl Etats-Unis
d'Amérique), fond, C.U., Rec. 1986, paragraphe 215, cité par ABi-SAAB, ibid., p. 386.
(19) Ibid., paragraphe 174.
(20) Ibid., paragraphe 177.
(21) Affaire du Détroit de Corfou, fond, CU, Rec. 1949, pp. 4-172, cité par ABI-SAAB, p. 385.
(22) PALWANKAR (D.), Mesures auxquelles peuvent recourir les Etats pour remplir leur
obligation de faire respecter le droit humanitaire, RICR, nO 805, janvier-février 1994, pp. 11-27.
(23) BARCELONA TRACTION, Light and Power Company, Limited, Arrêt CU, Recueil 1970,
paragraphes 33 et 34, op. cit., ABI-SAAB, p. 386.
(24) Activités militaires... , paragraphe 220, p. 114, cité par ABI-SAAB, p. 386.

8
Le Tribunal militaire de Nuremberg chargé de juger les criminels de guerre
nazis avait reconnu les Conventions de La Haye de 1907 comme liant même les Etats qui
n'en seraient pas expressément parties(25). Dans son arrêt du 1er octobre 1946 relatif au
procès des
grands
criminels
de
guerre,
le
Tribunal
affinnait en
substance
:
"Indépendamment des traités, les lois de la guerre se dégagent d'us et coutwnes
progressivement et universellement reconnus, de la doctrine de Junstes et de la
jurisprudence du Tribunal militaire. Ce droit n'est pas immuable, il s'adapte sans cesse aux
besoins d'un monde changeant. Souvent, les traités ne font qu'exprimer et préciser les
principes d'un droit déjà en vigueur"(26).
A la demande de l'Assemblée générale des Nations Unies(27), la Commission
du Droit international a dégagé ces principes découlant du procès de Nuremberg(28) :
1 - Responsabilité individuelle de tout auteur ou complice d'un acte criminel
selon le Droit international ;
2 -Non-exonération de la responsabilité par l'absence de sanction pénale en
droit interne ;
3 - Responsabilité pénale individuelle de toute personne même agissant en
qualité de Chef d'Etat ou de fonctionnaire, quel que soit son rang dans la
hiérarchie militaire ou civile;
(25) PICTET, op. cit., p. 107.
(26) Cf ROUSSEAU (CH), Le Droit des conflits armés, Paris, Pédone, 1983, p. 19.
(27) Voir Bulletin des Nations Unies, 1er août 1950, p. 108, cité par CAVARE (L.) et
QUENEUDEC (lP.), Le Droit international public positif Tome II, 2e éd., Paris, Pédone, 1969,
pp. 586-593.
(28) Cf DONNEDIEU DE VABRES (H), Le procès de Nuremberg devant les principes
modernes du Droit pénal international, RCADI, 1947, Tome l, pp. 477-582.

9
4 - Responsabilité individuelle même si la personne agit sur ordre de son
gouvernement ou de son supérieur hiérarchique;
5 - Droit à un procès équitable pour toute personne accusée de cnme
international(29).
Il s'y ajoute d'autres règles telles l'interdiction et la répression du génocide qui
constituent "des principes reconnus par les Nations civilisées comme obligeant les Etats en
dehors de tout lien conventionnel... "(30), ou encore les principes de l'article 3 commun
aux Conventions de Genève de 1949 considérés par la CIl, dans son arrêt du 27 juin 1986,
comme « des principes généraux de base du droit humanitaire». La Cour en concluait,
dans son Avis sur la licéité de la menace et de l'emploi de l'arme nucléaire du 8 juillet
1996 (paragraphe 87), que ces « principes et règles du droit humanitaire s'appliquent aux
armes nucléaires».
- Les Résolutions de l'ONU
Nombre de ces résolutions mentionnent le DIH qu~ au demeurant, est visé par
l'article premier de la Charte des Nations Unies dont les buts sont les suivants:
"(...) 3 - Réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes
internationaux d'ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire(31), en développant
et encourageant le respect des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales pour tous,
sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion.
(29) Ces principes ont été adoptés par les Résolutions 3 (1) de l'AG du 13 février 1946 (pour les
crimes de guerre) et 95 (1) de l'AG du Il décembre 1946 (pour les crimes contre la paix).
(30) Avis consultatif sur les Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime
de génocide, CU, Rec., 1951, p. 23.
(31) Souligné par nous.

10
4 - Etre un centre où s'harmonisent les efforts des nations vers ces fms
communes".
En application de ces dispositions, deux des organes principaux de l'ONU, le
Conseil de Sécurité et l'Assemblée générale, ont produit, à diverses reprises, des
résolutions relatives au respect du DIH et particulièrement en direction des populations
civiles(32).
Les résolutions du Conseil de Sécurité se sont considérablement multipliées ces
dernières années. Ainsi en 1973, lors de la guerre d'octobre (guerre du KIPPOUR), le
mandat de la Force d'urgence des Nations Unies (F.U.N.U.) indique que celle-ci "doit
coopérer avec les activités humanitaires du CICR dans la région". En outre, le Conseil de
Sécurité, en donnant mandat à la MINURSO(33), insiste sur le retour des réfugiés et la
libération des prisonniers sous les auspices du CICR au Sahara Occidental. Déjà en 1983,
le Conseil, à l'occasion de la guerre IRAKlIRAN, avait condamné les violations du DIH et
les attaques contre les populations civiles(34). Plus récemment, le Conseil, par la
Résolution 688 du 5 avril 1991, condamnait la répression des populations civiles
irakiennes et demandait l'accès immédiat à celles-ci de l'aide des organisations
humanitaires(35).
Le Conseil de Sécurité peut même imposer des sanctions à des parties dans un
conflit armé non international : ainsi, contre l'UNITA en Angola (Res. 1173 du 12 juin
1998), contre le RUF en Sierra Leone (Res. 1171 du 5 juin 1998). Dans la crise sierra
(32) Sur la distinction entre les résolutions de ces deux organes, cf. CASTANEDA (1.), La valeur
juridique des résolutions des Nations Unies, RCADI, 1970, l, vol. 129, pp. 221-331.
(33) Résolution S/RES/65S du 27 juin 1990.
(34) Résolution S/RES/540 (1983) adoptée à la 2493e séance du 31 octobre 1983.
(35) Sur les résolutions citées et d'autres exemples, cf. VEUTHEY (M.), «Mise en œuvre du Droit
international humanitaire et diplomatie multilatérale, Premier séminaire pour diplomates sur le
Dili, Genève, 25 avril 1992, CICR et Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales
(IUHEn », 29 pages.

11
leonaise, le Conseil, par sa résolution 1132 du 8 octobre 1997, décidait un embargo sur les
produits pétroliers et des restrictions aux déplacements des membres de 1ajunte de Johnny-
Paul KROMAH. Par sa résolution 1125 du 6 août 1997, le Conseil a également avalisé les
accords de Bangui sur la MISAB du 25 février 1997. Le Conseil de Sécurité a créé un
grand nombre de missions de maintien de la paix. On peut citer, entre autres, l'ONUMOZ
(Res. 797 de 1992), l'UNAVEM 1 (Res. 628 de 1988), l'UNAVEM II et III (Res. 976 de
1995), la MONUSIL (Res. 1181 du 13 juillet 1998), la FORPRONU (Res. 743 de 1992),
la SFOR (Res. 1088 de 1996), la FMP en Albanie (Res. 1101 de 1997), etc.
Les résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies ne sont pas en reste.
Tour à tour elle octroie le statut d'observateur au CICR(36), cite les protocoles additionnels
aux conventions de Genève(37), interdit d'attaquer les installations nucléaires(38), organise
en son sein la codification de la "Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi
de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets
traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination"(39), etc.
- Les Résolutions de la Conférence Internationale de la Croix-Rouee
et du Croissant-Rouge
La
Conférence,
composée
de
délégations
des
Etats-participants
aux
Conventions de Genève et Protocoles additionnels, des Sociétés nationales de la Croix-
Rouge et du Croissant-Rouge, du CICR et de la Fédération des sociétés nationales, est une
(36) Résolution N45/6 du 16 octobre 1990 de l'AGNU, 45e session, 31 e séance plénière.
Documents officiels, supplément N° 49 (N45/49).
(37) Résolution N45/38 de l'AGNU (1990).
(38) Résolution N45/58 "Désarmement général et complet".
(39) Résolution N45/64 du 4 décembre 1990. Cf pour une étude complémentaire, VIRALLY
(M.), la valeur juridique des recommandations des organisations internationales, AFDI, 1956, p.
66 et s. ; FLAUSS (F.), Les réserves aux résolutions des Nations Unies, RGDIP, 1981, Tome
LXXXV, pp. 5-37.

12
instance qui prend des décisions ou des résolutions à la majorité des voix exprimées (art.
17 de son Règlement).
La Conférence adopte et révise les statuts du Mouvement (formé du CIC~ de
la Fédération et des Sociétés Nationales) en tenant compte de l'évolution du DIH et de
l'ampleur des activités humanitaires.
Si les résolutions de la Conférence n'ont jamais eu force obligatoire pour les
Etats, "l'obligation juridique d'examiner de bonne foi les recommandations ou les
propositions issues de ces réunions, directement ou indirectement, est Wl minimum en
dessous duquel la participation des Etats à leur adoption n'aurait aucun sens"(40).
Certaines résolutions ont acquis Wle certaine importance : la Résolution XIV de
la Xe Conférence (Genève 1921) qui soulignait que "le CICR affirme son droit et son
devoir d'action secourable en cas de guerre civile, de troubles sociaux et révolutionnaires
(...), reconnaît que toutes les victimes de la guerre civile ou des troubles susdits, sans
aucune exception, ont droit d'être secourues, conformément aux principes généraux de la
Croix-Rouge" ; la Résolution VIIl de la XXe Conférence (Vienne 1965) qui a adopté trois
des
sept principes
fondamentaux
du
CICR
: HUMANITE,
NEUTRALITE
et
INDEPENDANCE(41) ; la Résolution de Manille de la XXlVe Conférence (1981) sur le
respect des droits de l'homme en période de conflit armé et la Résolution V de la XXVe
Conférence (Genève 1986) sur les mesures nationales de mise en œuvre du DIH.
(40) Cf SANDOZ (Y), Le droit d'initiative du CICR in Jahrbuch fur internationales Recht,
Gôttingen, Vol. 22, 1979, p. 370. Cf également Statuts du CICR du 24 juin 1998 abrogeant et
remplaçant les Statuts du 21 juin 1973, in RICR nO 831, septembre 1998, pp. 577-583.
(41) Les quatre autres principes sont l'IMPARTIALITE, l'UNITE, l'UNIVERSALITE et le
caractère BENEVOLE, cf PICTET (l), Les principes fondamentaux de la Croix-Rouge,
Commentaire Institut Henry Dunant, Genève, 1979, 90 pages.

13
La Conférence, qui se réunit tous les quatre ans, fixe la doctrine du Mouvement
et veille au développement du droit à partir des textes déjà en vigueur(42).
Le DIH s'apparente à d'autres branches du Droit international public.
Paragraphe II - Les notions voisines
Au regard des définitions précitées. le DIH, partie intégrante du Droit
international public (A), englobe mutatis mutandis le droit de la guerre, les droits de
l'homme et le droit du désannement (B).
A - Place du DIH dans le DIP
Le droit de la guerre est la mère du droit des gens. C'est en donnant une
expression théorique à la guerre que les précurseurs du droit des gens ont posé les jalons
duDIP.
La compétence traditionnellement reconnue à l'Etat de recourir ou non à la
guerre en vertu du principe de la souveraineté a été progressivement édulcorée par la Ile
Convention de La Haye du 18 octobre 1907 dite Convention Drago-Porter(43), limitée par
le Pacte de la Société des Nations (SDN) du 28 juin 1919 , mise hors-la-loi par le Pacte
Briand-Kellog ou Convention de Paris du 26 août 1928(44) et enfin interdite par l'art. 2 § 4
(42) Cf. PERRUCHOUD (R), Les Résolutions des Conférences internationales de la Croix-Rouge,
Institut Henry Dunant, Genève, 1979,469 p.
(43) Cette convention visait à restreindre l'emploi de la force pour le recouvrement de dettes
contractuelles, cf. MOULIN (A.), La doctrine de DRAGO in RGDIP, 1907, pp. 417-472 ; cf. LE
FUR (L.) et CHKLAVER (G.), Recueil de textes de DIP, Dalloz, 1934, p. 79.
(44) L'art. 1er du Pacte Briand-Kellog met fin à la compétence discrétionnaire de guerre de l'Etat.
Cf. texte du Pacte in Le FllR (L.) et CHKLAVER (G.), op. cit., p. 988.

14
de la Charte de l'ONU hormis les cas de légitime défense (art. 51) et d'actions menées par
le Conseil de Sécurité de l'ONU au titre du chapitre 7 de la Charte.
Droit de La Haye, droit de Genève, rus IN BELLO, JUS AD BELLUM, droit
de la guerre, droit international humanitaire, droit des conflits annés : la distinction n'est
pas toujours claire.
Au sens juridique, l'expression "droit de la guerre" et surtout la notion de
"guerre" sont abandonnées depuis la caducité du concept d'état de belligérance et la
désuétude du concept de guerre internationale(45).
Le terme "guerre" en Droit international répond à deux acceptions différentes:
le rus AD BELLUM (ou droit de faire la guerre, interdit par la Charte des Nations Unies)
et le JUS IN BELLO (ou ensemble de règles liant les belligérants lors d'une guerre) ou
Droit des conflits annés ou DIH et par commodité de langage synonyme de "droit de la
guerre".
Malgré la prohibition du jus ad bellum, le recours à la force année n'étant pas
déftnitivement éliminé dans la vie internationale, il est nécessaire "de soumettre son
déroulement au droit afm de limiter, autant que faire se peut, ses dangers et ses
dommages"(46).
Ce pragmatisme du jus in bello écarte le dicton selon lequel "le droit ne
réglemente pas la paix et n'a pas de place dans la guerre", maxime chère aux
polémologues, disciples de Hans Von CLAUSEWITZ qui soutenait que "l'on ne saurait
(45) CADOUX (Ch.), RANJEVA (R), Le Droit international public, EDICEF/AUPELF, 1992, p.
201 et s.
(46) NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (p.) et PELLET (A.), Droit international public, 4e
édition, Paris, L.G.D.J., 1992, p. 885. WILHELM (R.J.), Quelques considérations générales sur
l'évolution du Dili in T.M.C., Asser Instituut, Humanitarian Law of Armed Conflicts..., pp. 39-66.

15
introduire un principe modérateur dans la philosophie de la guerre sans commettre une
absurdité"(47).
Le réalisme ambiant du DIH a permis de dégager quatre conséquences allant
dans le sens de la modernisation de ce droit:
d'une part, le concept de "conflit armé" est préféré à celui de "guerre" car
recouvrant un éventail plus large de situations (guerre internationale,
guerre civile, guerre de libération, conflit territorial, d'autodétermination,
guerre frontalière, guérillas, etc.) ;
d'autre part, le DIH a pour objectif de "réglementer dans le cadre de l'état
de guerre substitué à l'état de paix, deux séries de rapports, ceux entre
combattants et ceux entre combattants et non combattants"(48) ;
-
ensuite, la distinction entre le droit de Genève(49) et le droit de La
Haye(50) perd toute signification depuis leur unification dans les
protocoles additionnels de 1977. De ce fait, la survivance de cette
distinction ne revêt qu'un intérêt historique et didactique;
-
~m, la distinction opérée par la doctrine depuis le Moyen-âge, dans le
Droit international public entre droit de la paix et droit de la guerre,
(47) Cité par TORRELLI (M.), Droit international humanitaire, Coll. Que sais-je ?, PUF, Paris,
1985,127 p.
(48) NGUYEN QUOC DINH, op. cit., p. 884.
(49) Le droit de Genève ou "droit humanitaire proprement dit, tend à sauvegarder les militaires
hors de combat, ainsi que les personnes qui ne participent pas aux hostilités", selon PICTET (1),
Développement et principes..., op. cit. p. 8 ; cf NAHLIK (S.E.), Droit dit "de Genève" et Droit dit
"de la Haye", unicité ou dualité, AFDI, 1978, Vol. XXIV, pp. 9-27.
(SO) Le droit de La Haye ou "droit de la guerre proprement dit, fixe les droits et les devoirs des
belligérants dans la conduite des opérations et limite le choix des moyens de nuire", PICTET,
idem., p. 8.

16
s'estompe progressivement. La plupart des manuels consacrent une place
importante au Dili ou droit des conflits annés(Sl).
Par ailleurs, l'exaltation des idéaux de paix, de respect de la dignité de l'être
humain, si vivaces dans le DIH, fait que la discipline n'est pas indifférente au désarmement
et aux droits de l'Homme.
B - Droit du désarmement et Droits de l'Homme
Le droit international humanitaire ne se rebelle pas d'être associé au
désarmement (1) ou aux droits de lhomme (2).
1 - DIH et désarmement
Les historiens cités par le Professeur Maurice TORRELLI affinnent que "sur
trois mille quatre cent ans d'histoire connue, il n'y a que deux cents cinquante ans de paix
générale"(S2).
De l'épée au fusil, de la bombarde aux missiles, les moyens de destruction
aveugle ont rendu obsolètes les distinctions COMBATTANTS - NON COMBATTANTS,
OBJECTIFS MILITAIRES - BIENS CIVILS.
Toutefois, la frontière entre le DIH et le droit du désarmement, reste poreuse du
fait que les accords conclus en matière de maîtrise des armements ont une égale incidence
sur le déroulement des conflits armés.
(51) Cf Nguyen QUOC DINH et alii, Droit international public, ouvrage précité; CAVARE (L.)
et QUENEUDEC (lP.), Droit international public positif, ouvrage précité; ROUSSEAU (Ch.), et
DUPUY (p. M.), Droit international public, Dalloz 1987,495 p. ; THIERRY (H), COMBACAU
(l), et alii., Droit international public, Montchrestien, 1986, 789 p.

17
Ainsi, si l'interdiction de la détention de certaines armes (chimiques, nucléaires)
relève du droit du désarmement, la prohibition de l'utilisation de ces armes est du ressort
du DIH (parce que violant les principes fondamentaux dudit droit). Le droit du
désarmement comporte deux volets : le désarmement proprement dit et la maîtrise des
armements.
Par désarmement, "il faut entendre de façon réaliste la limitation des armements
et l'interdiction et l'éventuelle destruction des armes inhumaines (tactiques et stratégiques),
ce qui suppose l'établissement d'un système de contrôle fiable et donc un minimum de
confiance entre adversaires potentiels et un contrôle aussi du commerce et du trafic des
armes"(53).
Quant à la maîtrise des armements ou contrôle des armements, il s'agit d'une
politique de ralentissement de la course aux armements de façon concertée entre les
grandes puissances détentrices de l'arme nucléaire.
Sur le plan conventionnel, la volonté de désarmement s'est traduite par la
démilitarisation de certaines zones(54), la dénucléarisation (traité TLATELOLCO du 14
février 1%7 pour l'Amérique Latine) ou la maîtrise des armements par des traités
bilatéraux (SALT l, SALT II, START et T.N.P.), ou par le Traité d'interdiction complète
des essais nucléaires de l'AGNU du 10 septembre 1996(55).
(52) TORRELLI (M.), op. cit., p. 3.
(53) CADOUX (Ch.), et RANJEVA (R.), op. cit., p. 204. Cf. également ZAKANE (V.), Contrôle
e
du commerce des armes et maintien de la paix en Afrique, Actes du 10 Congrès annuel de la
SADIC, Addis-Abeba (3-5 août 1998), ASICL-PROC. 10 (1998), pp. 309-319.
(54) Pour l'espace extra-atmosphérique, Traité de Moscou du 5 août 1963 ; pour le fond des mers
et des océans, Convention du Il février 1971 ; pour le continent antarctique, Traité de Washington
du 1er décembre 1959. Sur tous ces exemples, cf. Nguyen QUOC DINH, op. cit., pp. 923-933.
(55) L'Accord SALT 1 (Strategie Arms Limited Talks) du 26 mai 1972 et l'accord SALT II du 18
juin 1979 ont été conclus par les Etats-Unis d'Amérique et l'ex-Union des Républiques Socialistes
Soviétiques ainsi que l'Accord START (Strategie Arm's Reduction Talks) du 31 juillet 1991 ; à
l'opposé du T.N.P. (Traité de Non Prolifération Nucléaire) du 1er juillet 1968 qui viserait en
principe toutes les puissances nucléaires; cf. aussi pour l'Afiique, Traité sur la zone exempTh

18
Cependant, le cloisonnement avec le DIH n'est pas étanche depuis l'adoption de
la Convention de 1980 sur les annes classiques(56) et de la convention de 1977 sur
l'environnement(57) qui ont entraîné une convergence entre le droit du désannement et le
Dili.
Tout aussi évident est le rapprochement entre le DIH et les droits de l'Homme.
2 - DIH et droits de l'Homme
En tant que branches du DIP, les deux droits tirent leur fondement de sources
conventionnelles et coutumières. Si le DIH ne s'applique qu'en cas de conflit anné, les
droits de l'Homme s'appliquent en tout temps.
Le DIH impose à l'Etat de respecter et de faire respecter les obligations qu'il a
librement acceptées (Article premier commun aux quatre conventions de 1949 et article
premier du protocole additionnel 1 de 1977), obligations plus onéreuses que celles de
respecter et de garantir aux individus l'exercice des droits (Article 1er du Pacte des droits
civils et politiques de 1966).
d'armes nucléaires (traité de Pelindaba), Le Caire (Egypte), Il avril 1996 in RADIC, Vol. 8, 1996,
pp. 474-492. Ce traité signé par 49 Etats africains n'a été ratifié que par l'Algérie, la Gambie, la
Mauritanie, Maurice, Afrique du Sud, Zimbabwe, cf RADIC, vol. 10, 1998, p. 548.
Quant au Traité du 10 septembre 1996, il a été ratifié par des Etats africains comme le Sénégal, cf
loi nO 99-34 du 29 janvier 1999, in JORS N° 5834 du 3 avril 1999, p. 903.
(56) "Convention du 10 août 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes
classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets excessifs ou comme frappant
sans discrimination" avec ses quatre protocoles (sur les éclats non localisables, les mines et les
pièges, les armes incendiaires et les armes lasers) ; cf Doc. A/CONF/95115 in RICR, Vol. 63, nO
727, janvier-février 1981, pp. 43-50 et Doc. ONU/CCW/CONF.IJ7 pour le protocole IV sur les
armes aveuglantes à laser. Il faut signaler que la Convention de 1980 a été ratifiée au Sénégal par
la loi nO 99-40 du 29 janvier 1999, JORS nO 5834 du 3 avril 1999, p. 905.

19
Les droits de l'homme et le DIH se sont développés de manières différentes
bien que leurs racines spirituelles soient partiellement les mêmes et qu'à partir du XIXe
siècle on ait observé Wl parallélisme dans leur évolution(58).
L'idée moderne des droits de l'Homme, née de la philosophie, s'étant souvent
imposée après des révolutions, a été d'abord consacrée par le droit constitutionnel national
(Petition ofRights de 1628, Habeas corpus de 1679, Bill ofrights de 1689 en Angleterre;
Bill of rights de la Virginie en 1776 ; Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de
1789 en France) mais n'est entrée en Droit international que récemment(59).
L'internationalisation des droits de l'Homme se traduira par l'adoption de la
Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 complétée en 1966 par les pactes
internationaux relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et
culturels.
Une autre tendance des droits de l'Homme réside dans leur instrumentalisation
au niveau régional (Afrique, Amérique, Europe) qui offre me protection quasi-identique
des droits et libertés fondamentaux.
Parallèlement à la prise en charge des droits de l'Homme par l'ONU, Wle
méfiance de l'organisation apparaît à l'égard du droit de la guerre au motif que si elle s'en
occupait, l'opinion publique douterait de sa capacité de maintenir la paix(60).
(57) Convention du 18 mai 1977 sur l'interdiction d'utilisation des techniques de modification de
l'environnement à des fins militaires, adoptée par Résolution 31/72 du 10 décembre 1976 de
l'AGNU.
(58) Voir BUERGENTHAL (T.) et KISS (A.), La protection internationale des droits de l'Homme,
Précis, Editions N.P. Engel, Kehl, Strasbourg, Arlington, 1991 261 pages.
(59) Voir DOSWELL-BECK (L.) et VITE (S.), Le droit international humanitaire et le droit des'
droits de l'Homme, in RICR, mars~avril 1993, pp. 99-128.

20
Par conséquent, la Commission du Droit international éluda en 1949
l'inscription de la question dans son ordre du jour. L'évolution vers la convergence des
deux droits fut progressive.
En 1967, le Conseil de Sécurité, dans sa Résolution 237 soulignait que les
droits de l'Homme doivent être respectés par toutes les parties à un conflit, qui doivent
s'acquitter de toutes les obligations qu'elles ont acceptées dans les conventions de Genève
de 1949.
Le tournant décisif du rapprochement est matérialisé par la déclaration de la
Conférence internationale des droits de l'Homme tenue à Téhéran en 1968 qui précise que
les principes humanitaires doivent prévaloir en cas de conflit armé et par voie de corollaire
"la paix est la condition première du plein respect des droits de l'Homme et la guerre est la
négation de ces droits"(61).
En 1969, le rapport (A 7720 ) du Secrétaire général de l'ONU intitulé "Respect
des droits de l'Homme en période de conflit armé" mentionne au paragraphe 16 : "La
deuxième guerre mondiale a montré de façon concluante la relation qui existe entre
l'attitude révoltante d'un gouvernement à l'égard de ses propres ressortissants et l'agression
qu'il perpètre contre d'autres nations et, par conséquent, entre le respect des droits de
l'Homme et le maintien de la paix".
(60) Cf SCHINDLER (D.), Le Comité international de la Croix-Rouge et les droits de l'Homme,
in RICR, janvier-février 1979, pp. 3-15.
(61) Voir la Résolution XXIII intitulée "Protection des droits de l'Homme en cas de conflit armé",
Téhéran, 12 mai 1968 ; dans le même sens, la Résolution 2444 - Doc A17218 de l'AG du 19
décembre 1968, 23e session, supplément N° 18, page 50.

21
En 1970, l'Assemblée générale convient que "1es droits fondamentaux de
l'homme tels qu'ils sont acceptés en Droit international et dans les instruments
internationaux continuent de s'appliquer dans des situations de conflit armé"(62).
Depuis, la tendance de l'organisation mondiale est de faire usage du DIH en
examinant la situation des droits de l'Homme dans les Etats ou en abordant de grands
thèmes (discrimination raciale, torture, esclavage, génocide, environnement, droits des
peuples, réfugiés, droits de l'enfant et des femmes, etc.).
Le discours actuel sur les droits de l'Homme s'articule ainsi : toute personne est
dotée de certains droits qui conditionnent sa survie et son avenir et qui ne se conçoivent
pas en dehors de l'Etat.
Outre leur constitutionnalisation, la protection de ces droits part de la Charte
internationale des Droits de l'Homme (Déclaration universelle, les deux pactes de 1966 et
le protocole facultatif protégeant les droits civils et politiques)(63).
Le contenu des règles des droits de l'Homme épouse trois principales catégories
assimilées à tort ou à raison à des "générations"(64) :
la première catégorie (droits civils et politiques) correspond aux nonnes
du libéralisme classique: liberté d'expression, de croyance, d'assemblée
et d'association, garanties judiciaires et droits politiques;
(62) Cf Le droit international humanitaire et les droits de l'Homme, Fiche d'information N° 13,
Nations Unies - Campagne mondiale pour les droits de l'Homme, New-York, Genève; Cf aussi
BEDJAüUI (M.), éd., La guerre aujourd'hui: défi humanitaire, Paris, Collection Mondes en
devenir, Berger-Levrault, 1986, 288 p.
(63) Cf. DHOMMEAUX (l), De l'universalité du droit international des droits de l'Homme: du
PACTUM FERANDUM au PACTUM LATUM, in AF.D.I. 1989, p. 399 et s.
(64) Pour plus de détails, voir BUERGENTHAL (T.) et KISS (A), op. cit., pp. 12-29.

22
-
la deuxième catégorie (droits économiques, sociaux et culturels) est due à
l'influence des Etats socialistes, dans l'après-guerre : droit à la sécurité
sociale, au travail, à un niveau de vie suffisant et à l'éducation ~
-
la troisième catégorie (droits de solidarité), introduite par les Etats du
Tiers-Monde, se retrouve dans les résolutions des Nations Unies et dans
la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples : droit au
développement, droit à un environnement sain, droit à la paix.
Ces différentes catégories s'opposent (droits positifs ou négatifs) ou se
complètent (droits individuels ou collectifs).
Malgré l'intérêt de ces catégorisations, les droits de l'Homme sont indivisibles
et interdépendants même si, en ce domaine également, un relativisme culturel est
indéniable(65).
Tels qu'ils sont garantis dans les instruments internationaux, les droits de
l'Homme peuvent être restreints par les Etats sans qu'il en découle une violation des
obligations qu'ils ont assumées, ceci par trois mécanismes.
- la Limitation (Cf. art. 29 § 2 de la Déclaration universelle des Droits de
l'Homme du 10 décembre 1948) : les clauses de limitation permettent de rétablir l'équilibre
entre les droits individuels et les droits collectifs. Cependant, même dans ce cas, il existe
un noyau dur de droits indérogeables (droit à la vie, à l'intégrité physique, interdiction de la
torture, problème de la discrimination...).
(65) Cf Déclaration et Programme d'action de Vienne (Conférence mondiale sur les droits de
l'Homme, Vienne, 15-25 juin 1993). Doc. A/CONF.157/23, 12 juillet 1993, paragraphe 5.

23
- La Réserve (Art. 19 à 23 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le
droit des traités) : le droit international public permet à l'Etat, lors de la ratification d'un
traité, de ne pas accepter l'ensemble des obligations y afférentes. Mais cette possibilité n'est
pas illimitée.
- La Dérogation : plusieurs traités des droits de l'Homme prévoient la
possibilité de suspendre leur application, au moins en partie, lors d'une situation d'urgence
(art. 4 du pacte international des droits civils et politiques), en cas de guerre ou de situation
mettant en danger la sécurité ou l'indépendance des Etats (art. 15 de la Convention
Européenne des droits de l'Homme et art. 27 de la Convention Américaine des droits de
l'Homme)(66). nfaut mentionner qu'il ne saurait y avoir dérogation aux nonnes du noyau
dur qui s'apparentent incontestablement aux nonnes du Jus cogens(67).
En relation avec ce qui précède, la Charte Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples contient les mêmes catégories et englobe des restrictions identiques(68).
L'une des particularités de la charte est d'introduire une logique interactive entre
devoirs et droits, les premiers conditionnant les seconds. Curieusement, une série de
(66) Sur toutes les conventions citées, consulter "Droits de l'Homme et droit international", Ed. du
Conseil de l'Europe, Strasbourg, 1992, 466 pages ; ainsi la Déclaration universelle des droits de
l'Homme du 10 décembre 1948, pp. 11-19 ; le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels du 16 décembre 1966, pp. 20-33 ; le Pacte international re1atifaux droits civils
et politiques du 16 décembre 1966, pp. 34-59 ; La Convention de sauvegarde des droits de
l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, pp. 166-189 ; la Convention
Américaine relative aux droits de l'Homme du 22 novembre 1969, pp. 304-337 ; la Charte
Africaine des droits de l'Homme et des Peuples du 28 juin 1981, pp. 353-374.
(67) Voir art. 53 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, cf THIERRY
(H.), Droit et Relations internationales (Traités, Résolutions, Jurisprudence), Paris, Montchrestien,
1984,696 p.
(68) Voir MBAYE (K.), Les Droits de l'Homme en Afrique, Ed. Pédone, Paris, 1992,312 p.

24
limitations prescrivent la subordination de certains droits à leur conformité aux droits
nationaux: droits d'association et d'information(69).
Une fois mentionnée, la complémentarité des droits civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels, la Charte Africaine fait appel aux droits des peuples:
droit à l'autodéternrination, droit à la libre disposition des richesses et des ressources
naturelles, droit au développement économique, droit à la paix, à la sécurité et enfin le
droit à un environnement satisfaisant et global, ce qui pose des problèmes de mise en
œuvre(70).
Les dysfonctionnements de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples [organe de contrôle et de supervision des mécanismes de la Charte (art. 25 et
26)] ont conduit les Chefs d'Etat africains à souscrire à la création d'une Cour africaine des
droits de l'Homme(71).
Dili et Droits de l'Homme constituent des notions avec des spécificités mais
aussi des convergences.
La spécificité de la mise en œuvre des droits de l'Homme réside dans la
pluralité des mécanismes de protection. La plupart des grandes conventions organisent
leurs propres institutions de mise en œuvre: le Pacte international des droits civils et
politiques et son Comité des droits de l'Homme ; la Convention de sauvegarde des droits
de l'Homme et des libertés fondamentales et ses Commission et Cour européennes des
(69) Cf. LY (D.), La Charte Africaine des droits de l'Homme et des Peuples, Recueil de l'IIDH,
Strasbourg, 27e session d'enseignement, 1996.
(70) DIAlTE (1.), La notion de Peuple et l'application de la Charte des Droits de l'Homme et des
Peuples, in RS.D., octobre-novembre 1984, pp. 119-131.
(71) Voir le Protocole relatif à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples portant
création d'une Cour africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adopté à Ouagadougou le 9
juin 1998. Ce protocole a été ratifié au Sénégal par la loi nO 98-42 du 8 septembre 1998, JORS N°
5823 du 10 octobre 1998, p. 608.

25
Droits de l'Homme
; la Convention Américaine et ses Commission et Com
interaméricaines des droits de l'Homme; la Charte Africaine et ses Commission et Cour
africaines des droits de l'Homme et des Peuples, la Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants et son Comité contre la torture,
etc.(72). Quant au DIH, sa spécificité la plus marquante, sinon la plus exclusive, est
l'obligation faite aux Etats de promouvoir et de diffuser les instruments humanitaires, outre
celle déjà mentionnée de respecter et de faire respecter le DIH.
L'examen de ces spécificités ne doit pas faire perdre de vue les innombrables
convergences.
Ainsi, la Convention sur la prévention et la répression du cnme de
génocide(73) contient des dispositions faisant appel aux deux droits. De plus en plus, est
admise l'idée selon laquelle les Conventions de Genève établissent non seulement des
obligations liant les Etats contractants mais également des droits individuels dont les
personnes protégées jouissent et auxquels elles ne peuvent renoncer (art. 7/7/7/8 commun
aux quatre Conventions de Genève de 1949). Sm ce point, les deux droits ont la même
finalité: la protection de l'être humain face à l'exercice du pouvoir, voire de la force(74).
Un autre élément de rapprochement entre les deux droits est le principe de non
discrimination interdisant tout traitement discriminatoire basé sm la race, le sexe, la
religion ou les opinions publiques (art. 23 de la IVe Convention de Genève de 1949).
Un second niveau d'attrait des deux disciplines réside dans le fait que, même en
l'absence d'application ou en cas de défaillance du DIH, les victimes (de situations de
(72) Sur toutes ces conventions, consulter "ONU - Recueil d'Instruments internationaux. Droits de
l'Homme", New-York, 1988, 415 pages.
(73) Cf. DUPUY (F.M.), Grands textes de Droit international public, Dalloz 1996, 877 p.
(74) Voir PLATTNER (o.), Présentation du DIH et comparaison avec les droits de l'homme sous
l'angle de la mise en œuvre - 3 RADIC (1991), juin 1991, Tome 3, N° 2, pp. 339-345.

26
troubles et de tensions internes) peuvent toujours se prévaloir de la protection du noyau
indérogeable des droits de l'Homme qui s'applique en tout temps et en toutes circonstances.
Un troisième point de rencontre, et non des moindres, est l'appel lancé par les
droits de l'Homme à des dispositions du DIH (art. 38 de la Convention des Droits de
l'Enfant de 1989) pour les compléter ou inversement des nonnes humanitaires aux
dispositions des pactes de l'ONU de 1966 [art. 75 du Protocole additionnel l (garanties
fondamentales), art. 6 du protocole additionnel II de 1977 (poursuites pénales)].
Cet imposant arsenal nonnatif des deux disciplines révèle Wle longue
maturation du droit humanitaire.
Paragraphe III - Le processus de développement du D.I.H.
La pensée humanitaire a une origine qui se confond avec la jeunesse du monde.
Activité humaine par excellence, la guerre a suscité, par réaction, le besoin de secourir son
prochain. Le Dili a "des racines beaucoup plus profondes que l'ont cru longtemps les
auteurs européens aux vues étroites qui en plaçaient la naissance à la fin du moyen
âge"(75).
Les lois de la guerre ont une genèse et une portée universelles puisqu'on les
retrouve dans toutes les religions et toutes les civilisations anciennes(76).
(75) PICTET (J.), Développement et principes... , op. cit., p. 12.
(76) Cf VISWANATHA (S. V.), International Law in Ancient India, 1925; DRAPER (GIAD), La
contribution de l'Empereur AÇOKA MAURYA au développement des idéaux humanitaires dans
la conduite de la guerre, in RICR N° 812, mars-avril 1995, 77e année, pp. 215-232 ; COURSIER
(H), L'évolution du droit international humanitaire, RCADI 1960, pp. 361-465 ; COURSIER (H.),
"Cours de cinq leçons sur les Conventions de Genève", op. cit., p. 12.

27
L'infl~ence des idées religieuses (A) est considérable dans le DIH. Tout autant,
est la profondeur des idéaux humanitaires dans les traditions africaines (B). Ces idées et
1
traditions consti~ent un apport considérable à l'édification du DIH (C).
1
1
i
A ~ L'influence des idées religieuses
1
Le dIH est redevable des apports de la civilisation chrétienne (1) et de
1
1
l'islam(2).
1 - La chrétienté humaniste
1
1
1
sansléPudier l'héritage gréco-romain humanitaire(77), la théologie chrétienne
contribuera au .éveloppement des idées humanitaires à partir des enseignements de la
1
religion.
1
La c~étienté doctrinale médiévale avait développé deux conceptions juridiques
de la guerre : l~ guerre juste et la guerre régulière(78), théories qui se sont révélées
1
dangereuses par fes passions qu'elles suscitaient mais qui n'en ont pas moins profondément
marqué le DIH cpntemporain.
1
1
i
La guerre juste ou JUSTUM BELLUM, selon Pierre HAGGENMACHER,
1
"s'interroge au premier chef sur la licéité du recours à la force, qu'elle admet seulement en
i
riposte à un actq: illicite dont l'auteur refuse de faire réparation"(79). Elle diffère de la
1
(77) Sur l'apport ~e l'école stoïcienne grecque, cf. NGlNEN QUOC DINH, Droit international
public, op. cit., p. i40 et s. ; le droit romain a eu aussi une influence immense notamment avec le
JUS NATURALR ou JUS FETIALE et le rus GENTIUM des Institutes de JUSTINIEN, cf.
NGUYEN QUoci DINH, idem., p. 42.
(78) Voir HAGGijNMACHER (p.), Guerre juste et guerre régulière dans la doctrine espagnole du
XVIe siècle, in RIÇR N° 797, septembre-octobre 1992, pp. 450-462.
(79) HAGGE~CHER(p.), ibid., p. 451.

28
guerre régulière dont la préoccupation est toute autre car "au lieu de s'interroger sur la
licéité de la guerre, sur le tort conunis par une partie et les droits qui en résultent pour
l'autre, on se borne àc.onstater l'existence d'un état de guerre au sens fonnel"(80). A côté
de cette distinction, coexistait la séparation faite entre la Trêve de Dieu (interdisant la
guerre du Samedi Soir au Lundi Matin) et la Paix de Dieu (interdisant la guerre dans les
lieux de culte)(81). Cependant, la scolastique médiévale était plus préoccupée par les
controverses alimentées par la doctrine de la guerre juste qui, selon DRAPER, s'analysait
ainsi: "l'ordre naturel est un reflet de l'ordre divin. Le souverain légitime a le pouvoir
d'établir et de maintenir cet ordre. Comme la fm justifie les moyens, les actes de guerre
commis pour la cause du souverain perdent tout caractère de péché. Cette guerre est
déclarée juste, elle est voulue par DIEU; l'adversaire est, dès lors, l'ennemi de DIEU et il
ne saurait faire qu'une guerre injuste"(82).
. L'un des défenseurs les plus résolus de cette conception était SAINT
AUGUSTIN qui écrivait: "lorsqu'une guerre juste est en cours, c'est une bataille entre le
péché et la justice, et toute victoire, même lorsqu'elle est acquise par des pécheurs, est une
humiliation pour les vaincus qui, par le jugement de DIEU, endurent le châtiment ou la
punition de leurs mauvaises actions" (DE CIVITATE DEI, XIX, 15).
La scolastique médiévale portera cette doctrine à un niveau sans précédent. il
en était ainsi de Saint Thomas d'AQUIN qui, dans sa SOMME THEOLOGIQUE (II a, il a
e, q.40, art. 1), s'inspirant du DECRET de GRATIEN, soumettait la guerre juste à trois
conditions: elle doit être ordonnée par un souverain (AUCTORITAS PRINCIPIS) ; menée
pour une juste cause (JUSTA CAUSA) ; guidée par une intention pure (RECTA
(80) HAGGENMACHER(P.), op. cit., p. 451.
(81) Ces deux institutions sont aussi présentes dans la conception islamique ainsi que dans
certaines traditions africaines qui seront étudiées un peu plus loin.
(82) DRAPER (G.lA.D.), The conception of just war, cité par PICTET (1.), Développement et
principes, op. cit., p. 21.

29
INTENTIO) dans le but de rétablir le droit et la paix(83). Ces idées seront systématisées
par le théologien espagnol Francisco de VITORIA dans ses deux ouvrages "DE INDIS
RECENTER INVENTIS RELECTIO PRIOR" et "RELECTIO DE JURE BELLI".
VITORIA commandait de frapper les malfaiteurs (NOCENTES) et d'épargner les autres
ressortissants de la partie adverse (INNOCENTES). Il admettait qu'une guerre pouvait être
juste des deux côtés. Il est permis d'infliger certains maux à l'ennemi mais dans certaines
limites. Aussi distinguait-il les atteintes portées à sa personne et celles dirigées contre ses
biens.
Francisco SUAREZ (1548-1617) en essayant de fournir au droit des gens un
fondement de droit positif humain, reprendra certaines de ses idées précédentes. Après
SUAREZ, le JUSTUM BELLUM était admis dans quatre conditions: une guerre devait
être basée sur un juste titre ; reposer sur une juste cause ; relever d'une nécessité ; et être
sous-tendue par une juste conduite(84). Aujourd'hui, l'influence des idées médiévales se
fait encore sentir au point que l'on s'interroge sur une probable résurgence de la doctrine
des guerres justifiées.
L'humanisme de la chrétienté se retrouve dans la religion musulmane.
2 - L'Islam humaniste
L'Islam ne sera pas en reste de propositions de conduites humanitaires. Le Pro
MASSIGNON écrivait "l'Islam a devancé la chrétienté dans l'effort juridique destiné à
restituer aux barbares, étrangers comme esclaves, la personnalité humaine"(85).
(83) HAGGENMACHER (p.), op. cit., p. 453.
(84) ROUSSEAU (Ch.), le droit des conflits armés, op. cit., p. 17.
(85) Cité par PICTET (1.), Développement et principes, op. cit., p. 24.

30
La GUERRE SAINTE, tradition erronée du mot JIHAD (qui signifie plutôt
l'EFFORT COMMUN), exige le sacrifice et la renonciation à tout but profane. Elle
recouvre la guerre sur soi, la lutte corps et biens contre les bas instincts(86).
C'est
dans
ce
sens
que
le
Coran
contient
plusieurs
dispositions
humanitaires(87). Ainsi la SOURATE VIII (le BUTIN), Versets 67 et 68, dispose "il n'est
pas donné à un prophète de faire des captifs avant que l'ennemi ne soit écrasé ; vous
désirez les biens de ce monde alors qu'ALLAH désire vous donner l'autre monde"(88). La
Sourate IX (Le REPENTIR), 5e verset, précise les lois de la guerre : "lorsque les mois
expireront, tuez les idolâtres partout où vous les trouverez, prenez-les, assiégez-les, dressez
leur des embuscades. S'ils se repentent, suivent les prières, payent la "zakat", libérez-les,
ALLAH est clément et miséricordieux". Le principe de proportionnalité est magnifié dans
la SOURATE XVI (LES ABEILLES) dont les versets 126 à 128 préconisent: "Que votre
châtiment soit à la mesure du crime dont vous êtes victimes, mais il vous sera profitable
encore de vous armer de patience. Patiente donc, ta patience ne sera possible qu'avec l'aide
d'ALLAH. Ne t'afflige pas à cause d'eux et que leur machination ne cause point en toi
d'angoisse. ALLAH est avec les bienfaisants et ceux qui Le craignent".
Le Coran privilégie la dignité de l'homme élevé au-dessus de toutes les autres
créatures. Ainsi, la SOURATE XVII (LE VOYAGE NOCTURNE), verset 70, dispose :
''Nous avons certes honoré les fils d'ADAM. Nous les avons portés sur la terre ferme et la
mer. Nous leur avons attribué des nourritures excellentes et Nous les avons placés bien au-
dessus de beaucoup de ceux que nous avons créés".
(86) Voir SULTAN (H.), La conception islamique, in Dimensions internationales du droit
humanitaire, op. cit., pp. 17-60.
(87) BEN ACHOUR (Y), Islam et droit humanitaire, in RICR, mars-avril 1980 (tiré à part), ] 1
pages.
(88) Toutes les références coraniques sont extraites de : LE CORAN, traduction de CHEIKH SI
HAMZA BOUBAKEUR, 2 vol., Paris, Fayard, 1979,2197 pages; cf également CONAC (G.) et
AMOR(A.), Islam et Droits de l'Homme, Paris, Economica, 1994,97 p.

31
L'usage de moyens et de méthodes de combat ne doit pas être abusif. Et il est
dit dans la SOURATE II (LA GENISSE), verset 190 : "Combattez dans le chemin
d'ALLAH ceux qui vous combattent, mais ne soyez pas transgresseurs ! ALLAH n'aime
pas les transgresseurs".
Certains mois sont sacrés (ZUL-QA'DA, ZUL-HIJJA, MOHARRAM et
RAJAB) ainsi que certains lieux (LA KAABA, Sourate 2, verset 217). On ne doit ni faire
la guerre pendant ces mois ni la faire près de ces lieux.
Les HADITHS (traditions et enseignements du Prophète) reflètent cette
conception humaniste. Le Prophète MAHOMET (P.S.L.) recommandait à ses lieutenants:
"Partez en campagne au nom de DIEU et dans sa voie; combattez les infidèles, mais ne
trompez pas, ne trahissez pas, ne mutilez pas et ne tuez point d'enfants"(89). Un autre
hadith préconise un traitement humanitaire aux prisonniers de guerre : "Les captifs sont
vos frères et vos collaborateurs. C'est par la grâce de DIEU qu'ils sont en vos mains.
Puisqu'ils sont à votre merci, veillez à les traiter comme vous-même quant à la nourriture,
aux vêtements et à l'habitation. N'exigez pas d'eux un travail au-dessus de leurs forces,
aidez-les plutôt à accomplir leur tâche"(90). A l'un de ses généraux, le Calife ABU BAKR
conseillait: "Souvenez-vous que vous êtes sous le regard de DIEU, conduisez-vous comme
des hommes sans tourner le dos, mais que le sang des femmes, ou celui des enfants et des
vieillards ne souille pas votre victoire. Ne détruisez pas les palmiers, ne brûlez pas les
habitations, ni les champs de blé, ne coupez jamais les arbres fruitiers et ne tuez de bétail
que lorsque vous serez contraints de le manger. Quand vous accordez un traité, ayez soin
d'en respecter les clauses. Au fur et à mesure de votre avance, vous rencontrerez des
(89) BEN ACHOUR (Y.), ibid., p. 9.
(90) Cité par EREKSOUSSI (M.K.), Le Coran et les conventions humanitaires, in RICR.,
novembre 1960, (tiré à part), 12 pages.

32
hommes de religion qui vivent dans des monastères et qui servent DIEU dans la prière.
Laissez-les seuls, ne les tuez point et ne détruisez pas leurs monastères"(91).
L'humanisme sous-jacent des religions révélées était déjà présent dans les
séculaires traditions africaines.
B - Les traditions africaines
L'Afrique, berceau de l'humanité, possède une tradition séculaire d'humanisme.
Les proverbes, les contes de l'Afrique précoloniale portent la marque de la foi profonde
attachée à la dignité humaine. Du reste, le Pro Joseph OWONA remarquait que "le droit
humanitaire fait partie intégrante d'un patrimoine universel"(92). Cela est particulièrement
vrai de l'Afrique où "le système de pensée africain, étant essentiellement imprégné
d'humanisme, a généré des conceptions et des pratiques qui placent les peuples africains au
rang des civilisations humanitaires"(93). Un proverbe wolof ne déclare-t-il pas "NIT
NITA Y GARABAM" (l'homme est le remède de l'homme) ?
Le patrimoine culturel africain s'ordonne autour de valeurs cardinales de paix,
de justice, de vérité, de beau, de bien, de solidarité, principes dont la signification profonde
ne peut être comprise que replacés dans leur contexte social(94).
L'Africain n'est jamais seul. Il appartient à un lignage, une famille, un village,
une corporation, une confrérie, une clientèle, une caste(95).
(91) Cf BEN ACHOUR (Y.), op. cit., p. 9.
(92) OWONA (J.), Droit international humanitaire, in ElA, Tome 2, chap. XVI, p. 384.
(93) MUBIALA (M.), Les Etats africains et la promotion des principes humanitaires, RICR, mars-
avril 1989, p. 97 ; cf aussi LY (D.), Fondements humanitaires dans la société pulaar en Mauritanie
et au Sénégal, in RICR nO 832, décembre 1998, pp. 695-706.
(94) Cf MBAYE (K.) and NDIAYE (B.), The OAU, in Karel VASAK (éd.), Les dimensions
internationales des droits de l'Homme, Paris, UNESCO, 1978, 509 pages.

33
Un profond respect pour la personne hwnaine existait. Ainsi, un proverbe
burundais disait: «Mieux vaut être invalide que mort». Et cet autre proverbe Akan
(Ghana) faisait remarquer que «Même les morts n'ont de cesse d'accroître leur nombre.
Pourquoi les vivants ne feraient-ils pas mieux ? ». Un proverbe Xhosa (Afrique du Sud)
«UNYAWO-ALUNAMPUMLO» met l'accent sur la vulnérabilité des déracinés et la
nécessité d'offrir 1'hospitalité à l'étranger. Une philosophie humaniste se reflétait
également dans les termes Zoulou «UBUNTU» ou Sotho «BOTHO ». Sous l'angle
historique, on a coutume de citer la fameuse lettre du Roi MOSHWESHWE 1er du
territoire du BASUTOLAND (actuel Lesotho) en 1858 adressée au Président de l'Etat
libre d'Orange JAKOBUS BOSHOF comme une leçon d'humanisme africain contre les
violations des lois et usages coutumiers par les soldats BOERS.
Dans ces hypothèses, la guerre est réglementée par des conditions sévères.
Ainsi, Yolande DIALLO signale, en ce qui concerne le Sénégal, qu'il "existait Wle
véritable éthique de la guerre qui était enseignée à tout jeWle noble pour son futur métier
des armes. Ainsi, on n'achevait pas Wl ennemi à terre"(96). n était interdit aux femmes,
enfants, vieillards de faire la guerre. Leurs personnes étaient sacrées(97). Un proverbe
nigérien affirme : "Attaquer Wl village où il n'y a que des femmes et des enfants, ce n'est
pas la guerre, c'est du vol"(98). Les déclarations de guerre se faisaient par l'entremise de
griots "dotés de l'immunité diplomatique" ou par le roi lui-même, tel le Kaboka du
Buganda(99). Cependant, "là où il y a des hommes sages, la querelle n'entraîne ni dispute
ni bataille", dit cet autre proverbe de l'Afrique de l'Est. Ainsi, dans l'ancien royaume du
(95) Voir NGUEMA (1.), Perspectives des droits de l'Homme en Afrique: les racines d'un défi
permanent, in R.U.D.B., vol. 2, N° 2, 28 février 1990, pp. 49-63.
(96) DIALLO (Y), Traditions africaines et droit humanitaire. Tome l, CICR, Genève, 1978, page
8.
(97) Cf NDAM NJOYA (A.), La conception africaine, in Dimensions internationales du droit
humanitaire, pp. 21-30.
(98) DIALLO (Y), ibid., p. 19.
(99) BELLO (E.), African Customary humanitarian law, ICRC, Geneva, Oyez Publishing Limited,
p. 16 et p. 19, cité par OWONA, ibid., p. 385.

34
BUTWldi, des arbitres "ABASHINGANTAHE" pouvaient négocier l'arrêt des hostilités et
réglementer le comportement des combattants.
Des mécanismes d'arbitrage identiques se retrouvent chez les MASAI, les
LUGBARA et au Buganda(lOO). TI était interdit de détruire les récoltes, le bétail et les
points d'eau(lOl). Entre tribus de même ethnie, on excluait l'usage d'armes inhumaines
telles que flèches et lances empoisonnées car "on ne tue pas entre frères".
La guerre, affaire d'hommes, était régie par un véritable code d'honneur qui,
chez les MASAI, prescrivait de "ne jamais tuer les femmes et les enfants"(102).
Des zones d'asile étaient aménagées : arbre à palabre, Baobab sacré ou Bois
sacrés au Sénégal, sanctuaire du Nando dans les montagnes de Bandiagara chez les
Dogons du Mali, lieu dit Nianian à Koulikoro (Mali), arbre Mogonna Majanthi des
Kikuyus (Kenya), etc.
Des zones de trêve étaient soigneusement délimitées: cimetières, points d'eau,
etc. Les guerriers (Jambars chez les Wolofs), devenus prisonniers de guerre n'étaient
jamais massacrés mais entraient dans la famille comme captifs de case (Jaam).
Des trêves pouvaient être organisées pendant les périodes de récoltes ou de
semailles. Sur divers points, l'analogie de ces préceptes avec les règles des conventions de
Genève était si frappante qu'on pouvait conclure avec Yolande DIALLO : "la tradition
africaine, bien antérieurement aux accords de Genève, s'était préoccupée dans un contexte
(100) DIALLO (Y.), op. cit., p. 4.
(101) NlYUNGEKO (G.), La mise en œuvre du Dili et le principe de la souveraineté des Etats, in
RIeR W 788, pp. 113-141.
(102) DIALLO (Y.), ibid., p. 7.

35
très différent, de garantir une certaine fonne de protection aux victimes des conflits en
posant des principes et en fixant des règles"(lOJ).
A partir des idéaux inhérents aux religions et traditions culturelles, le DIH va
progressivement s'affmner.
c -L'édification du D.I.H.
Le développement du DIH est redevable des travaux de la doctrine moderne. fi
faut remonter aux écrits de Hugo De GROOT dit GROTIUS (1583-1645) qui fustigeait la
guerre de trente ans en ces tennes "Partout dans le monde chrétien, j'ai constaté un manque
de retenue dans la guerre qui ferait honte à des barbares. J'ai vu les hommes prendre les
armes pour des causes futiles, ou sans raison aUCWle, et j'ai vu que, dès que les armes
parlent, il n'y a plus aucun respect du droit divin ou humain. Tout se passe comme si, en
vertu d'un décret général, la furie publiquement lâchée, laissait libre cours à tous les
crimes"(104).
Pour
adoucir
les
atrocités
de
la
guerre,
GROTIUS
propose
des
TEMPERAMENTI BELLI : la guerre est légitime si elle est l' œuvre de l'Etat ; elle est
juste si elle répond à une injustice portée aux droits fondamentaux de l'Etat : droit à
l'égalité, droit à l'indépendance, droit à la conselVation, droit au respect, droit au commerce
intemational(lOS).
(103) DIALLO (Y.), ibid., pp. 21-22.
(104) GROTIUS (H.), "De JURE BELLI AC PACIS" (1625), Trad. française: Le droit de la
guerre et de la paix, par Hugues GROTIUS, Nouvelle traduction par Juan BARBEYRAC, Tome
ll, Bâle, Emmanuel THOURNEISEN, 1746, p. 419. Cf aussi HAGGENMACHER (p.),
GROTIUS et la doctrine de la guerre juste, Paris, P.UF., 1983, 682 p.
(lOS) NGUYEN QUOC DINH et alii, Droit international public, op. dt., p. 53.

36
Il sera suivi en cela par Emmerich DE VATTEL (1714-1768) qui écrivait : "du
moment que votre ennemi est désarmé et qu'il s'est rendu, vous n'avez plus aucun droit sur
sa vie... On doit se souvenir que les prisonniers sont hommes et malheureux"(106).
Ces idées ont été systématisées par Jean Jacques ROUSSEAU, lequel
prophétisait: "La guerre n'est point une relation d'homme à homme, mais une relation
d'Etat à Etat, dans laquelle les particuliers ne sont ennemis qu'accidentellement non point
comme hommes, ni même comme citoyens, mais comme soldats ; non point comme
membres de la patrie mais comme ses défenseurs... La fm de la guerre étant la destruction
de l'Etat, on a le droit d'en tuer les défenseurs tant qu'ils ont les armes à la main ; mais sitôt
qu'ils les posent et se rendent, cessant d'être ennemis ou instruments de l'ennemi, ils
redeviennent simplement hommes, et l'on n'a plus de droit sur leur vie. Quelquefois on
peut tuer l'Etat sans tuer un seul de ses membres. Or la guerre ne donne aucun droit qui ne
soit nécessaire à sa fm"(107).
Les adversaires de ROUSSEAU seront nombreux. Ainsi, LUTHER affmnait
que la "nécessité n'a pas de loi" (NOT KENNT KEIN GEBOT) ; NIETZSCHE qu"'une
bonne guerre sanctifie toute cause" et HOBBES attestait que "la guerre était naturelle à
l'homme"(lOS).
Néanmoins, le mouvement humaniste revêt un caractère irréversible. La
première tentative de codification du droit coutumier de la guerre terrestre, l'ordre du jour
N° 100 ou "Instructions pour le comportement de l'Armée des Etats-Unis en campagne"
rédigé par Francis LIEBER le 24 avril 1863 et adressé par le Président LINCOLN à ses
(106) VATTEL (E. de), "Le droit des gens ou principes de la loi naturelle appliquée à la conduite
et aux affaires des nations et des souverains", cité par DRAPER (G.I.A.D.), Développement du
DIH, op. cit., p. 90.
(107) ROUSSEAU (1.1.), Le contrat social, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1964, (3
volumes), pp. 357-358.
(lOS) Cités par ROUSSEAU (Ch.), Le droit des conflits armés, op. cit. p. 18.

37
généraux, tiendra largement compte des idées précédentes. Le Code LIEBER inspirera les
rédacteurs des Conventions de Genève(109).
L'humanisme de LIEBER préfigure l'action d'Henry DUNANT dont le
remarquable ouvrage "Un Souvenir de Solférino"(llO) sera le point de départ du
fonnidable mouvement de la Croix-Rouge.
En 1864, une Conférence diplomatique adoptera le 22 août, la première
Convention de Genève intitulée "Convention pour l'amélioration du sort des militaires
blessés dans les années en campagne"(lll).
L'étape suivante fut la DECLARATION DE SAINT-PETERSBOURG du 29
novembre-Il décembre 1868 à l'effet d'interdire l'usage de certains projectiles en temps de
guerre. Elle prohibait l'emploi de projectiles d'un poids inférieur à quatre cent grammes ou
chargés de matières fulminantes ou inflammables.
Ces principes seront développés par la Conférence internationale de la paix
tenue à La Haye qui adopta le 29 juillet 1899, six conventions(112).
(109) Pour un aperçu de quelques articles du Code LIEBER, cf DOSWELL-BECK (L.) et VITE
(S.), Le Dili et les droits de l'Homme, op. cil., p. 101.
(110) DUNANT (H.), Un Souvenir de Solférino, Ed. CICR, Genève, 1950-1990, Ed. Originale,
1862, 146 pages.
(111) Cette convention de dix articles se trouve en annexe de l'ouvrage précité de DUNANT. Elle
a été signée par des Etats Européens de l'époque : Bade, Belgique, Danemark, Espagne, France,
Hesse, Italie, Pays-Bas, Portugal, Prusse, Suisse et Wurtemberg.
(112) Il s'agit de la Convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre (réadoptée en
1907) ; de la convention pour le règlement pacifique des conflits internationaux; de la convention
pour l'adaptation à la guerre maritime des principes de la Convention de Genève de 1864
(réadoptée en 1907) ; de la déclaration interdisant de lancer des projectiles et des explosifs du haut
des ballons ou par d'autres moyens analogues nouveaux (modifiée en 1907) ; de la déclaration
concernant l'interdiction d'employer des projectiles qui ont pour but de répandre des gaz
asphyxiants (modifiée en 1925) et de la déclaration concernant l'interdiction d'employer des balles
qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain.

38
En juillet 1906, la Convention de 1864 fit l'objet de révision pour tenir compte
des insuffisances décelées lors des guerres austro-prussienne (1866), franco-allemande
(1870), russo-turque (1877), hispano-américaine (1898).
La deuxième Conférence de La Haye adoptera le 18 octobre 1907 un nombre
impressionnant de quatorze conventions dont les plus importantes demeurent la
Convention IV concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et son Règlement
annexé (toujours en vigueur) ; la Convention III relative à l'ouverture des hostilités et la
Convention XII relative à l'établissement d'une Cour internationale des prises.
Le développement des armes chimiques favorisera l'adoption du Protocole de
Genève du 17 juin 1925 concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants,
toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques, qui est toujours en vigueur.
L'expérience de la première guerre mondiale (1914-1918) sera mise à profit par
l'adoption de la convention relative aux blessés, malades de la guerre sur terre et de la
convention relative aux prisonniers de guerre de 1929.
Tout le droit de Genève sera remanié et concentré dans les quatre Conventions
de Genève de 1949, à leur tour complétées par les deux Protocoles additionnels de 1977.
D'autres préoccupations humanitaires ont, entre-temps, été incluses dans des
conventions conclues sous les auspices soit de l'UNESCO (Convention de La Haye du 14
mai 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé(113»), soit de
l'O.N.V. (Convention de Londres, Washington, Moscou du 10 avril 1972 sur l'interdiction
(113) Convention de La Haye du 14 mai 1954 pour la protection des biens culturels en cas de
conflit armé, cf NAHLIK (S.E.), La protection internationale des biens culturels, RCADI, 1967
(1), Vol. 120, pp. 66-159.

39
de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques(114),
Convention du 18 mai 1977 sur l'interdiction d'utiliser des techniques de modification de
l'environnement à des fms militaires ou à toutes autres fms hostiles(115) et la Convention
du 10 août 1980 et ses quatre protocoles(116».
Il est nécessaire de dégager la problématique du DIH.
(114) Convention du 10 avril 1972 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du
stockage des armes bactériologiques, cf. FISCHER (G.), La convention sur l'interdiction de la
fabrication des armes bactériologiques, AFDI, 1971, pp. 85-130. Cf. également au Sénégal, Décret
nO 75-1129 du 24 novembre 1975 ordonnant la publication de la Convention du 10 avril 1972
(JORS nO 4467 du 19 janvier 1976, p. 88).
(115) Cf. Supra, note 57.
(116) Cf. Supra, note N° 56.

40
SECTION II - PROBLEMATIQUE DU D.J.H. EN AFRIQUE NOIRE
CONTEMPORAINE
Définie par opposition à l'Mrique Blanche à la civilisation arabo-islamique,
l'Afrique Noire est identifiée ici à l'Afrique Subsaharienne comprenant l'Afrique de
l'Ouest, de l'Est, du Centre et l'Afrique Australe. Il s'agit de l'Afrique délimitée par les
Tropiques du Cancer et du Capricorne.
Dans l'expression "Afrique Noire", le concept de race noire, bien qu'imprécis
sur le plan scientifique parce qu'empli de caractères somatiques, prédomine. L'Afrique
représente le monde nègre avec une diversité de types génétiques soudanais, guinéen,
bantou, mélanésien.
Les sociétés traditionnelles africaines, du fait de la "croyance à la cosmogonie
de l'au-delà, attachent une importance vitale à l'être humain qui doit vivre en harmonie
avec son groupe, l'esprit communautaire l'emportant sur l'individualisme"(117). Quant à
l'Afrique contemporaine, elle porte la marque de la diversité de traditions cultuelles et
culturelles, de langues (Afrique lusophone, anglophone, francophone, langues nationales et
locales).
Il y a donc des Afrique mais une civilisation négro-africaine à grande tradition
orale et dont l'unité reste profonde car les sociétés africaines "ont participé à une manière
commune de sentir, d'agir, de penser, de vivre la même culture"(118). L'Afrique constitue
un creuset de cohabitation de l'univers mental du monde animiste, de l'univers mental du
monde chrétien et de l'univers mental du monde islamique(119).
(117) TEMPELS (R.P.), La philosophie bantoue, Présence Africaine, Paris, 5e édition, 1965.
(118) TRAORE (B.), De la genèse de l'Etat et de la Nation en Afrique, Présence Africaine, N°
127-128, p. 341 et s.
(119) Voir NGUEMA, op. cit., note N° 95.

41
Continent qui a connu des ponctions drastiques dans sa population et ses
ressources (traite des esclaves, colonisation), l'Afrique demeure un enjeu sur l'échiquier des
relations internationales par l'importance des conflits armés dans cette partie du monde.
Il faut analyser ces conflits (Paragraphe 1) restitués dans le contexte africain
(paragraphe II) avant de poser la méthodologie (Paragraphe III).
Paragraphe 1 - Le conflit armé
Envisagé sous l'angle exclusif et restrictif de la théorie des relations
internationales, le conflit armé est enfermé dans un certain nombre de paradigmes.
Il suppose un certain degré de violence, dépassant la simple tension, d'une
ampleur non comparable à de banals faits de terrorisme, de coups d'Etat ou d'émeutes
sporadiques, mais avec une organisation assurée(120).
En Afrique, ni l'expérience historique ni les contraintes démocratiques n'ont
freiné le recours à la force. Le culte attaché au principe de l'UTI POSSIDETIS JURIS
rappelle "qu'à de rares exceptions, les anciennes colonies ont accédé à l'indépendance sur
la base de leur configuration géographique coloniale"(121). fi en a résulté des litiges
frontaliers qui perdurent encore soit de façon latente soit de façon déclarée.
(120) CASADIO (F.), Concept et cadre stratégique, in Etudes polémologiques N° 30, 3e trimestre,
1989.
(121) HUENU (C.), La question de l'Etat et de la Nation en Afrique, in Présence Africaine N°
127-128, pp. 329-347 ; sur le principe de l'uti possidetis juris et les conflits territoriaux, cf. :
- PERSON (Y.), L'Afrique Noire et ses frontières in RFEPA N° 80, août 1978, p. 18 et s. ;
- STRAUCH (R), L'OUA et les conflits frontaliers in RFEPA, octobre 1967, p. 58 et s. ;

42
Le champ d'étude du conflit armé recouvre les domaines du stratège, du
polémologue et du diplomate transcendant ce que Raymond ARON traduit par l'expression
de "champ diplomatico-stratégique"(122) et qui es~ selon Stanley HOFFMANN,
"caractérisé par une stabilité au niveau central et global du système mais par une instabilité
aux niveaux inférieurs"(123).
En s'inscrivant dans le cercle du politique avec l'opposition entre le Centre (le
Monde Occidental) et la Périphérie (le Tiers-Monde), les relations internationales
africaines se meuvent autour de processus et de phénomènes de conf1i~ de rapports de
pouvoir et de coercition(124).
La théorie, expliquant les guerres par la recherche de puissance par l'Etat, en
l'analysant comme "la capacité d'une unité politique d'imposer sa volonté aux autres
unités"(125) et reposant sur l'idée que "la politique internationale comme toute politique
est politique de puissance"(126), ne donne pas une définition exhaustive du conflit armé
africain dont le caractère INTERETATIQUE est largement concurrencé, sinon battu en
brèche, par des aspects INTRAETATIQUES.
- SAiL (A), Actualité des conflits frontaliers en Afrique... , in 9 RADIC (1997), pp. 183-
194.
(122) ARON (R), Paix et guerre entre nations, Paris, Cal mann-Levy, 1962, 765 p.
(123) HOFFMANN (S.), L'ordre international in GRAWITZ (M.) et LECA (J.), Traité de
Sciences politiques N° l, Paris, P.UF., 1985 ; cf aussi HOFFMANN (S.), Une morale pour des
monstres froids: pour une éthique des relations internationales, Paris, Le Seuil, 1982, 754 p.
(124) Cf De SENARCLENS (p.), Le paradigme réaliste et les conflits internationaux in RI.S.S.
N° 127, février 1991, UNESCO, pp. 5-20.
(125) ARON (R), ibid., p. 58.
(126) MORGENTHAU (H.), Politics among Nations, New-York, A Knopf, 6e édition, 1965, p.
33 ; cf également GONIDEC (p.F.), Relations internationales africaines, Paris, LGDJ, B.AM.,
Tome 53, 1996,210 p.

43
Depuis 1945, la guerre dans le Tiers-Monde (auquel l'Afrique fait partie
intégrante) est une "constante de la politique internationale, sans que l'on sache
précisément si cet état de choses est transitoire ou quasi-pennanent"(127).
A ce propos, LE PRo Eric SUY écrivait: "qu'elles soient ouvertes ou larvées,
les crises africaines semblent pour la plupart avoir la même racine : la nature de l'Etat
africain (le Keny~ le Zaïre ou le Rwanda en sont des exemples parlants). Au cours de ces
trente dernières années, plusieurs dirigeants africains ont considéré l'Etat comme un bien
personnel, un patrimoine pour leur clan ou tribu. L'appareil étatique se retrouvait ainsi au
service des intérêts personnels des autorités politico-militaires"(128).
Zone d'alerte habituelle par les situations grosses de conflagrations potentielles,
le Tiers-Monde a fait l'objet d'une étude révélant que "les massacres perpétrés avec l'appui
d'un Etat à l'encontre de certains groupes ethniques ou politiques ont causé plus de pertes
humaines que toutes les autres fonnes d'affrontement violent réW1Ïes... en moyenne depuis
la fm de la deuxième guerre mondiale entre 1,6 et 3,9 millions de civils non armés ont péri
chaque décennie du fait de l'Etat"(129).
Le constat du nombre des victimes des conflits armés intraétatiques ou
interétatiques est alarmant. Le Pr. Eric SUY remarquait que "ces trente dernières années,
les conflits africains ont entraîné la mort d'environ huit millions de personnes. A côté de
ces pertes humaines, des millions d'individus ont été jetés sur les routes de l'exil et des
destructions matérielles incommensurables grèvent les maigres budgets publics de ces
(127) CHUBIN (S.), Les conflits dans le Tiers-Monde: tendances et perspectives irl RI.S.S. N°
127, février 1991, UNESCOIERES, pp. 153-170.
(128) Conflits en Afrique : Analyse des crises et pistes pour une réflexion. Rapport de la
Commission "Régions africaines en crise", Publications du GRIP, Bruxelles, 1997, p. 10.
(129) HARFF (B.), GURR (T.R), Genocides and Politicides since 1945. Evidence and
Anticipation, cité par STAVENHAGEN (R), Les conflits ethniques et leur impact sur la société
internationale in RI.S.S. N° 127, pp. 123-128 ; NNOLI (O.), Conflits ethniques en Afrique,
CODESRIA, Dakar, 1989,45 p.

44
pays parmi les moins avancés du monde. Et 500.000 à un million de Rwandais sont morts
au cours du génocide de 1994. La récurrence de la violence à grande échelle sur ce
continent a lourdement contribué au retard économique de ces jeunes nations par rapport
au reste du monde"(130).
Un autre constat est que la quasi-impossibilité de guerres entre les puissances
du fait de l'arme nucléaire a eu pour conséquence de transférer leurs conflits à la périphérie
du système mondial.
Depuis la dislocation du bloc oriental regroupé autour de l'ex-URSS avec la
chute du mur de Berlin en 1989, un nouveau redimensionnement du conflit armé s'est
traduit par la croissance exponentielle des conflits armés qui n'opposent plus deux ou
plusieurs Etats mais à l'intérieur d'un Etat, le gouvernement et un groupe d'opposants
réclamant l'autonomie ou la sécession pour une ethnie ou une région donnée(131).
De surcroît, la nature des conflits armés est largement influencée par le contexte
africain.
Paragraphe II - Le contexte africain
Le continent africain a connu les plus grands drames de l'humanité : l'esclavage
et la colonisation.
(130) Cf Conflits en Afrique... , op. cit., p. 9.
(131) Sur les impacts de ce changement, cf. CHUBIN, ibid., p. 157 ; cf. également
CHARPENTIER (1.), Autodétennination et décolonisation in Le droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes, Méthodes d'analyse... , pp. 117-133 ; CHAUMONT (Ch.), Le droit des peuples à
témoigner d'eux-mêmes, Annuaire du Tiers-Monde, 1976 p. 15 ; TEMMAN (F.), Vers quel type
d'ordre international ? L'ONU nouveau gendanne du monde? in Ordre et désordre dans le monde,
Cahiers Français N° 263, pp. 80-95. ; ZARTMAN (LW.), La résolution des conflits en Afrique,
Paris, L Harmattan, 1990, 269 p.

45
Ces deux données peuvent-elles sufftre à expliquer la pluralité des conflits
armés africains actuels ?
La survivance de certains conflits dont la genèse remonte à la colonisation
européenne ne saurait être prise pour me donnée générale. Cependant, l'éclairage colonial
laisse place à des supputations sur l'impact des aspects néo-colonialistes des conflits,
agitant le continent, qui seraient des prolongements des tensions Est-Ouest.
Certains conflits ont été alimentés par les grandes puissances et les complexes
militaro-industriels. A titre d'exemple, pour la période allant de 1991 à 1994, les livraisons
d'armes à destination de l'Afrique subsaharienne s'élevaient à 2.323 millions de dollars
américains. Les recettes des exportations d'armes se répartissaient ainsi : Etats-Unis (123
millions), la Russie (600 millions), la France (200 millions), le Royaume-Uni de Grande-
Bretagne et d'Irlande du Nord (300 millions), la Chine (200 millions), l'Italie (100
millions), autres pays Européens (300 millions) et autres pays non Européens (500
millions)(132).
L'Afrique reste le continent des excès avec des problèmes récurrents : la faim,
la pauvreté, la maladie, la sécheresse, les conflits armés, l'endettement extérieur, etc.
L'Afrique compte le plus grand nombre de réfugiés ou de personnes déplacées.
Elle englobe en son sein le plus grand nombre de pays parmi les plus pauvres et les moins
avancés économiquement de la planète.
Continent des contrastes, l'Afrique comporte des Etats couvrant de vastes
espaces (Afrique du Sud, Angola, Mauritanie, Nigéria, Soudan, Tchad, RD.C., etc.) et des
(132) Cf Source: Congressional Research Service, cité par Bernard ADAM in Conflits en
Afrique..., op. cit., p. 105.

46
petits Etats (Cap-Vert, Comores, Sao-Tome et Principe, Seychelles, etc.). La dimension
spatiale constitue Wl enjeu important avec les irrédentismes régionaux ou ethniques.
Les conflits territoriaux ainsi générés épargnent peu de pays. Rares sont les
Etats afii.cains qui n'ont pas connu de troubles ou tensions, armés ou non, entre les groupes
ethniques ou religieux qu'ils renferment.
il s'y ajoute des conflits nouveaux nés des élections démocratiques : guerre
entre opposants avec intervention des militaires, factions ou milices privées entrant
ouvertement en conflit armé, revanches d'opposants battus aux élections par des tentatives
de coups de force, surenchères politiques mettant directement en cause l'unité nationale,
rébellions et mutineries de soldats, etc.
Ces nouveaux conflits recouvrent des qualifications diverses:
conflits
destructurés, conflits identitaires, etc.
Les conflits destructurés sont marqués par l'absence totale ou partielle des
structures étatiques. Ainsi, des factions armées essaient de profiter de cette déliquescence
du pouvoir politique central pour s'en emparer. Ces groupes proliférant dans ce climat de
décomposition sociale et de disparition de valeurs humanitaires de référence, manquent
souvent de discipline militaire violant délibérément ou par ignorance le DIH (Somalie,
Liberia, Sierra-Leone, etc.).Quant aux conflits identitaires, ils sont caractérisés par des
stratégies à moyen et à long termes de « purification ethnique », par des déplacements
forcés de populations, voire leur épuration, dans Wle atmosphère de propagande, de peur,
de violence et de haine. Ces conflits exacerbant à outrance l'argument ethnique, remettent
en cause directement l'unité nationale (Rwanda, Burundi, etc.).
Dans ce contexte plein d'ambiguïtés et de subtilités (paradis des diplomates ?),
l'analyse des conflits est malaisée. Une méthodologie est nécessaire.

47
Paragraphe III - Méthodologie
L'actualité événementielle médiatise la multiplicité des conflits annés avec des
suites fâcheuses de longues cohortes de réfugiés, de problèmes de malnutrition et de
massacres généralisés.
Luc REYCHLER remarquait sur ce point que "l'image télévisuelle en Afriqpe
semble marquée du sceau de la misère amenée par les guerres civiles, le génocide, la
famine, les déplacements des réfugiés et les violations des droits de l'Homme''(13J).
Ces cortèges d'hot\\&urs mettent-ils à nu les carences de l'application du DIH en
-
Afrique? Est-ce à dessein
-
que les Etats africains transgressent le DIH ? A l'heure actuelle
où des efforts sont tentés pour réprimer les infractions humanitaires, s'inscrit-on dans une
logique d'ordre humanitaire nouveau ouvrant la voie au respect du DIB dans ce continent?
Cette série de questionnements tourne autour d'une problématique centrale: les
réalités africaines remettent-elles en cause les théories du DIB? En d'autres termes, quelle
est la contribution du continent africain en général, de l'Afrique subsaharienne en
particulier, à l'application du droit des conflits annés ?
La résolution de cette problématique s'ordonnera autour du choix d'un faisceau
de méthodes d'analyse.
L'emploi de la méthode déductive (raisonnement à partir d'hypothèses, de
prémisses pour dégager une proposition) permettra en allant du général au particulier,
d'inférer de l'analyse globale des conflits du Tiers-Monde, la similitude avec les conflits
annés africains et la part de ces derniers dans les situations de violence de cette partie du
(133) Cf Conflits en Afrique..., op. cit., p. 17.

48
monde. Toutefois, cette méthode a pour inconvénient le risque extrême de généralisation
des observations ou raisonnements à partir de ces cas singuliers. Elle ne restitue pas
entièrement les spécificités environnementales africaines avec l'implication de moins en
moins fréquente des ex-puissances colonisatrices, l'émergence de puissances régionales
(Afrique du Sud, Nigéria), l'action des forces de maintien de la paix de l'OUA, de la
CEDEAO, de la SADC ou les tentatives régionales récentes de coopération militaire à
l'image du RECAMP ou de la FARC. Dès lors, l'emploi de la méthode déductive sera
compensé par l'utilisation concomitante d'autres méthodes.
Aussi l'emploi exclusif de la méthode diachronique (du point de vue de
l'évolution dans le temps) ne sera pas suffisant en tant que tel. Certes, la convocation de
l'histoire d'un conflit anné interétatique ou intraétatique, la genèse d'une institution, la
consultation des textes et leur confrontation avec la pratique seront nécessaires. Toutefois,
ne sera retenue que la seule séquence temporelle après les indépendances africaines, à
l'exclusion de tout autre découpage chronologique.
Une autre méthode, celle de la « grille » aurait consisté en un quadrillage de la
zone considérée. La thèse aurait pu s'articuler autour des grilles suivantes :
-
un découpage par régions: Afrique Centrale, Afrique Occidentale, Afrique
de l'Est, Afrique Australe ~
-
un échantillonnage d'Etats: Etats de la région des Grands Lacs, Sénégal,
Sierra-Leone, Liberia, Etats de la Come de l'Afrique, Afrique du Sud, etc.;
-
une distribution par communauté linguistique: Afrique francophone,
Afrique lusophone, Afrique anglophone, Afiique de langue portugaise...
Le choix d'une seule de ces différentes options risquerait d'encourir le reproche
de la description et de la fragmentation. Il peut conduire à des répétitions dans les
exemples et à des enchevêtrements fastidieux.

49
Sans occulter totalement ces différentes méthodes, on leur préférera la méthode
synthétique (réunion en un ensemble cohérent de divers éléments de connaissance d'un
domaine particulier). Cette approche permettra de dégager les particularités des conflits
armés africains, sans prendre les Etats de façon isolée mais en les concevant comme
parties intégrantes d'un ensemble dont les composantes sont en relation de dépendance.
L'avantage de la méthode synthétique est d'englober les éléments d'une conformation
complexe, n'excluant aucune des méthodes précédemment décrites mais les corrigeant par
la compensation des incomplétudes d'une de ces méthodes par les avantages des autres.
La complexité du conflit armé africain mérite une appréciation totalisante
tenant compte des divers paramètres décrits. Les prétendues insuffisances du DIH et le
jugement porté sur l'inefficacité de son application serviront de points d'appui pour
contester les critiques, pour aider à une meilleure compréhension des difficultés
d'application et proposer des solutions pour rendre plus fluide la réception de ce droit.
En scrutant les rouages essentiels du DIH dans lesquels l'idéalisme le dispute au
réalisme, l'identification des causes de la non-application permettra de démultiplier les
succès des tentatives récentes de la répression des atteintes au DIH. Pour atteindre ces buts,
il faut circonscrire le sujet.
Pour des raisons tenant à la faible consistance des guerres aérienne et maritime
supposant des degrés de technologies militaires que ne possèdent pas la plupart des Etats
africains, l'objet de l'étude sera restreint aux conflits armés mettant en jeu les règles de la
guerre terrestre.
Pour
des
raIsons
temporelles,
l'expression
"AFRIQUE
NOIRE
CONTEMPORAINE" recouvre exclusivement la période post-indépendances (depuis
1960 pour les pays africains francophones), rejetant hors du champ d'étude les guerres
pendant la colonisation européenne qui ne seront évoquées qu'à titre purement historique.

50
L'engouement jamais affaibli du mouvement universel convergent vers le
respect des "DROITS HUMAINS"(134) rencontre des obstacles dirimants en Afrique.
L'idéalisme sous-jacent du DIH charriant des concepts plus moraux que
juridiques ne saurait expliquer la faillite de l'application. Le réalisme moderne enrobe le
Dili de facteurs pouvant imposer son succès.
De fait., l'accumulation sans cesse renouvelée de situations conflictuelles est
d'une amplitude telle que les spécialistes des relations internationales africaines pourraient
y découvrir la marque d'une opposition irrémédiable entre l'universalisme du DIH et le
régionalisme africain.
En passant de l'idéalisme au réalisme, il s'agit de recenser les difficultés
majeures d'application du DIH en Afrique Noire (1ère Partie). Les instruments théoriques
seront sollicités et confrontés aux données pratiques les plus rebelles à cette application.
Le juridisme étroit devra être ensuite surmonté ou plutôt tendre vers un
pragmatisme plus séant. Une thérapie succédera au diagnostic. Il s'agira de fournir un
remède approprié aux difficultés du DIH en Afrique Noire (Hème Partie). En se basant sur
des textes existants, en en renforçant le contrôle, il s'agira de réunifier, de revitaliser des
données éparses tant théoriques que pratiques pour réconcilier le droit international africain
aux vues du droit international général. Des éléments de LEGE FERENDA seront
concurremment employés avec des outils de LEGE LATA, sans perdre de we la prudence
supposée dans l'exercice d'un travail de cette nature.
(134) Expression inventée pour fédérer les droits de l'Homme et le Dili. Jean PICTET
(Développement et principes du DIH, op. cit., p. 10) souligne que: "le droit humain est constitué
par l'ensemble des dispositions juridiques internationales assurant le respect de la personne
humaine et son épanouissement".

51
1ère PARTIE
DE L'IDEALISME AU REALISME:
LES DIFFICULTES D'APPLICATION DU DROIT
INTERNATIONAL HUMANITAIRE
EN AFRIQUE NOIRE

52
Le Droit international humanitaire véhicule de puissantes valeurs de dignité et
de justice. La méfiance, longtemps entretenue par les juristes envers ces scories peu
nonnatives, est aujourd'hui dissipée par la solidité des sources décrites et des règles déjà
précitées.
Sans renier les aspects théoriques et pratiques, le DIB demeure assujetti à des
obstacles dirimants: sa difficile réception en Afrique Noire (Titre 1) et son absence de mise
en œuvre adéquate (Titre II).

53
TITRE 1- LA DIFFICILE RECEPTION DU D.I.H. EN AFRIQUE NOIRE
Le DIH, dans sa partie conventionnelle, doit faire l'objet d'une réception par les
Etats et doit être transfonné en dispositions nationales. Les Etats s'engagent à adopter des
mesures législatives ou réglementaires pour donner effet aux droits et obligations
consentis.
Un constat est cependant de rigueur : cette application est rendue malaisée par
des éléments intrinsèques au DIH. Quoique participant d'un mouvement universel par ses
idéaux (moraux, philosophiques, religieux, de civilisation, etc.), les valeurs et principes du
Dili sont largement d'origine européenne (Chapitre 1).
Cette européanisation majoritaire favorise la faible empreinte des spécificités
africaines dans le DIH actuel.
Un autre obstacle de taille (et d'ordre général) est le sacro-saint principe de
souveraineté des Etats. Le recours à ce principe par les Etats rend le DIH largement
tributaire des aléas conjoncturels de ces Etats dont la stabilité n'est pas le caractère
dominant (Chapitre II).

54
CHAPITRE 1 - UN DROIT D'ORIGINE EUROPEENNE
La doctrine s'est évertuée à situer dans le cadre européen l'origine des principes
et règles humanitaires actuels. Cette qualification d'un "droit réputé étranger"(135) réside
dans son caractère de nonne largement importée (Section 1). L'extranéité du DIH se révèle
d'autre part à travers la faiblesse de ses spécificités africaines (Section II).
SECTION 1 - Un droit largement importé
Les contours européens du D.I.H. sont fortement marqués, à l'image du droit
international classique (Paragraphe 1). Il en résulte que le D.I.H. est un droit d'adhésion
pour l'Afrique (Paragraphe Il).
Paragraphe 1 - Un droit aux contours européens
Il a été déjà fait mention de l'historique des idées humanitaires en Europe(136).
Ces principes imprègnent le DIH à un tel degré que son origine européenne ne peut être
niée.
L'Europe Occidentale a joué un rôle considérable tant sur le plan de l'exposé
des idées philosophiques que de leur codification. La doctrine classique, systématisée par
WITENBERG, reconnaissait qu"'il y a eu un droit international, fonné par les grands
congrès de Vienne, de Paris, de Berlin, qui avaient donné au monde la structure adaptée à
(135) Cf. OWONA (1), supra, note N° 92, p. 381.
(136) Voir, Introduction, Section l, Paragraphe Ill.

55
son temps. Le droit international a eu son plein épanouissement dans les Conventions de
La Haye et de Genève"(137).
Le Pro Henri COURSIER a mis l'accent dans ses cours, sur l'influence de la
chevalerie médiévale, qui prônait accessoirement, le respect de règles d'assistance et de
soins aux blessés et malades. Des traités, cartels et capitulations, quoique de portée
restrictive, ont frayé la voie aux conventions hwnanitaires du XIXe siècle(138).
Pierre HAGGENMACHER a précisé l'importance de la doctrine ecclésiastique,
le rôle du droit romain, la référence à la théorie du droit naturel dans l'établissement des
fondements aux règles humanitaires(139).
Ces principes et règles se retrouvent dans le constat qu'"on est redevable au
Moyen-âge de la division du droit international en droit de la guerre et droit de la paix,
division
reprise
par GROTIUS
et
que
des
auteurs
contemporains
continuent
d'adopter"(140).
A l'instar du droit international public, l'origine du DIH se confond avec
l'histoire européenne. De ce point de vue, le Pr. OWONA soutient que "le droit
hwnanitaire est né d'une pratique interétatique purement européenne"(141).
Ce caractère exclusivement européen est confmné par le fait que la première
Convention de Genève de 1864 était l'œuvre codifiée d'Etats tels que l'Autriche, Bade,
(137) Voir WITENBERG (1. C.), De GROTIUS à Nuremberg. Quelques réflexions, RGDIP, 1947
(Vol. 51), p. 99. Cf. aussi FLORY (M.), Le droit international est-il européen ? in L'avenir du
Droit international dans un monde multiculturel..., pp. 261-284.
(138) Cf. COURSIER (H.), Cours de cinq leçons..., op. cit., pp. 44-45.
(139) Voir HAGGENMACHER (p.), supra, note 78.
(140) Cf. NGtNEN QUOC DINH et alii : Droit international public, op. cit., p. 44 ; cf. aussi
GUGGENHEIM (p.), Contribution à l'histoire des sources du droit des gens, RCADI 1958, vol.
94.11, pp. 5-84.

56
Bavière, Espagne, France, Grande-Bretagne, Hanovre, Hesse, Italie, Pays-Bas, Prusse,
Russie, Saxe, Suède, Suisse, Wurtemberg(142).
Il faut prendre en compte également 1'00 des principes les plus anciens du DIH
appelé Principe d'humanité dont la base conventionnelle se trouve dans la Déclaration de
Saint-Petersbourg qui dispose: "les progrès de la civilisation doivent avoir pour effet
d'atténuer autant que possible, les calamités de la guerre.
Ce principe d'humanité dont l'utilité est liée au fait qu"'il comble les lacooes du
système des nonnes du DIH"(143), se rattache aux principes de CIVILISATION. Ainsi en
était-il de la IVe Convention de La Haye de 1907, visant dans son préambule le "désir de
servir encore, dans cette hypothèse extrême, les intérêts de l'humanité et les exigences
toujours progressives de la civilisationfl •
Panni ces éléments d'ordre civilisationnel, on intègre "le principe d'honnêteté et
de bonne foi dans le choix des moyens et méthodes de guerre souvent appelé, dans la
littérature occidentale, "principe de chevalerie"(144). Faut-il encore rappeler la célèbre
clause de MARTENS aujourd'hui entrée dans le droit coutumier et contenue dans le
préambule de la IVe Convention de La Haye de 1907 qui précise : "En attendant qu'un
code plus complet (...), les populations et les belligérants restent sous la sauvegarde et sous
l'Iempire des principes du droit des gens tels qu'ils résultent des usages établis entre nations
civilisées, des lois de l'humanité et des exigences de la conscience publique".
(141) Cf OWONA, op. cil., p. 381.
(142) Voir COURSIER, op. cit., p. Il ; et Henry DUNANT: "Un souvenir de Solférino", op. cit.,
notes 108 et 109.
(143) BLISCHENKO (J.P.), Les principes du Droit international humanitaire in Etudes et Essais
sur le DIH et les principes de la Croix-Rouge en l'honneur de Jean S. PICTET, Genève, La Haye,
CICR, Martinus NIJHOFF, 1984, p. 292.
(144) BLISCHENKO, ibid., p. 295.

57
Un grand nombre de conventions humanitaires de 1899 et 1907 contiennent des
expressions se référant aux "nations civilisées". Ces concepts relatifs au club restreint de
nations européennes, alors semes présentes dans les relations internationales, ont alimenté
une réaction hostile des Etats nouveaux et des Etats socialistes dès leur accession à la
souveraineté internationale. Ainsi, ces Etats ont considéré ces conventions sous l'angle de
la revendication d'un ordre juridique nouveau, moins européocentriste. C'est dans ce cadre
qu'ils ont dénoncé les principes généraux de droit de l'article 38 du Statut de la Cour
Internationale de Justice qui contient
"la malencontreuse fonnme
des
"nations
civilisées"(14S).
Les principes du DIH répondent à une aspiration, à un ordre public longtemps
restreint à l'Europe. Ds se nourrissent de coutwnes, c'est-à-dire "d'une répétition générale,
unitonne et prolongée dans le temps avec la conviction que l'observation de celles-ci est
obligatoire"(146).
Fruits d'une longue maturation dans le cadre européen, ces principes coutumiers
renforcent l'impression de fIliation occidentale du DIH et de son juridisme éloigné des
préoccupations africaines.
PICTET se situe dans ce sillage lorsqu'il admet que "tout ce droit n'est, en
s,omme, que la réaffmnation de règles coutumières plus anciennes, développées et
complétées au moment de la codification"(147).
Cette swimpression de principes européens est ainsi explicitée : "le Droit
international, tel que nous le concevons aujourd'hui, a été le produit de la pratique des Etats
(145) VIRALLY (M.), Panorama du Droit international contemporain, RCADI, 1983 (V), Vol.
181, p. 173.
(146) Cf. VERRl (p.), Dictionnaire du Droit international des conflits armés, op. cit., p. 39.
(147) PICTET (l), Développement et principes du Droit international humanitaire, op. cit., p. 107.

58
européens dans lID monde lIDiculturel, ou presque de culture unique et exclusivement
européenne"(1 48).
La place centrale de la personne humaine dans le DIH trouve son fondement
dans la philosophie libérale. Ce caractère individualiste, que le DIH partage avec les Droits
de l'Homme (ceux de la première génération), est intimement lié aux principes de
démocratie et de la civilisation occidentale(149). Or la philosophie des droits de l'Homme
a été depuis les grandes déclarations de droit de la fm du XVIIIe siècle, radicalement
individualiste(150).
A
cette
approche
individualiste
s'oppose
l'approche
communautaire
traditionnelle africaine dans laquelle l'individu n'acquiert de place que par rapport à son
lignage, sa caste, son ethnie(151). Dès lors, les réalités du monde noir se perçoivent à
contre-courant de l'approche occidentale.
Les substrats européens du DIH sont mis en exergue à travers le principe de la
souveraineté. Le principe de la souveraineté des Etats est le moteur des relations
intemationales, même s'il faut reconnaître avec le Pro VIRALLY que "la souveraineté est
lIDe notion à la fois maudite et exaltée : maudite par ceux qui voient en elle la cause de
toutes les faiblesses du Droit international et le rempart de l'égoïsme des Etats ; exaltée par
ceux pour qui elle est le plus solide rempart de l'indépendance des peuples"(152). n reste
que cette notion, de l'avis de Mohamed El KOUHENE, est "vieille comme l'Etat dont elle
(148) SUCHARITKUL (S.), L'Humanité en tant qu'élément contribuant au développement
progressif du Droit international contemporain, in L'Avenir du Droit international dans un monde
multiculturel, Colloque de l'Académie de Droit International de La Haye, La Haye, 17-19
novembre 1983, p. 415.
(149) Voir MEYROWITZ (H), Réflexions sur le fondement du droit de la guerre, in Etudes et
Essais sur le Dili..., pp. 419-431.
(150) Cf Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, N° 3, juillet 1990, Nemesis!Bruxelles, p.
231.
(151) NGUEMA (1.), Perspectives des droits de l'Homme en Afrique, op. cit., pp. 49-53.
(152) VIRALLY (M.), Panorama du droit..., op. cit., p. 76.

59
est l'Wl des attributs essentiels (...). Elle signifie que dans la pyramide des groupes humains
con.stitués, l'Etat se trouve au sommet. Sous l'angle interne, elle dit la compétence
exclusive de l'Etat, le monopole de législation, de juridiction et de contrainte sur les
individus composant la population nationale. Sur le plan externe, elle traduit le droit pour
lm Etat de gérer lui-même ses relations avec les autres Etats, à l'exclusion de toute
contrainte étrangère"(153).
Au sens classique, l'idée de souveraineté est en connexion avec la compétence
discrétionnaire de Etats de recourir ou non à la guerre. La souveraineté était alors conçue
par une société égalisée d'Etats ayant le même niveau de développement. C'est ce
qu'exprime Wolfgang FRIEDMANN en ces tenues: "Ceux qui jouaient un rôle actif dans
les relations internationales, et par suite les créateurs de Droit international, se réduisaient à
un club restreint de nations européennes auxquelles s'étaient jointes, au XIXe siècle, les
nations récemment apparues sur le continent américain. Le reste du monde, ou bien vivait
replié sur lui-même à l'écart du courant des relations internationales, ou se trouvait sous la
dépendance de nations occidentales"(154).
L'Afrique, en retrait de l'Histoire des Etats, était soumise à la colonisation.
L'accession à l'indépendance s'est traduite par une frustration ainsi exprimée par Joseph
OWONA : "une sourde hostilité s'est peu à peu manifestée à l'encontre du droit
international humanitaire, droit étranger et droit colonialiste par excellence, prétexte trop
souvent utilisé ex-nihilo par les impérialistes dans leurs opérations de domination sur le
continent africain"(155).
- - - - - - _ . _ - -
(153) EL KOUHENE (M.), La souveraineté entre "ordres anciens" et "ordres nouveaux" in Studia
Diplomatica, Vol. XLIV, 1991, N° 3, Bruxelles, p. 63 ; cf aussi CHAUMONT (CR), Recherche
sur le contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de J'Etat, in Hommage d'une
génération de juristes au Professeur BASDEVANT, Pédone, 1960, pp. 114-151.
(154) FRIEDMMJN ryI.), The Changing Structure of International Law, 1964, Traduction
française, Paris, Tendances Actuelles, 1971, p. 90 et s.
(155) Cf OWONA (J.), op. cit., p. 381, cf l'intervention de M. GANDA, représentant de la Sierra-
Leone à la troisième commission à New-York: le 23 novembre 1970 qui disait: "The Geneva

60
Progressivement les acteurs des relations internationales vont s'accroître avec
les vagues des indépendances après la deuxième guerre mondiale. L'arrivée des nouveaux
Etats va se traduire par le besoin de changer la structure trop européenne du droit des
relations internationales classiques pour tenir compte des nécessités de la coopération
internationale. Il en résulte que cette "prise de conscience de l'interdépendance, avec les
multiples domaines qu'elle embrasse, a donné naissance à toute une série de concepts et de
réglementation des comportements des Etats"(156).
Le Professeur Roberto AGO a souligné le rôle de ces Etats nouveaux qui
"avaient surtout surgi sur deux grands continents dont les peuples se réclament de
conceptions philosophiques, religieuses, morales, sociales et politiques variées, mais en
tout cas très différentes de celles qui dominent dans la grande majorité des membres
préexistants de la communauté intemationale"(157). Et Kéba MBAYE de constater qu"'ils
manifestaient alors à l'égard du Droit international, à l'élaboration duquel ils n'avaient pas
participé, une légitime méfiance"(158).
Cette prudence participe, selon le Pro WODIE, du fait que "The law of war or
the law of The Hague, dating from 1907, and humanitarian law, as defined by the four
Geneva Conventions of 12 august 1949, were both evolved by European States while
Africa was still divided, for the most part, into colonial territories"(159). Cette observation
convention and other mIes in force had been written at a time when guerilla warfare had not had
the signiflcance it did today", cité par VEUTHEY (Michel), Guérilla et Droit humanitaire, CICR,
Genève, 1983, p. 32.
(156) EL KOUHENE (M.), op. cit., p. 65 ; SAHOVIC (M.), L'influence des Etats nouveaux sur la
conception du Droit international, AFDI, 1966, pp. 30-49 ; COLIN (J.P.), Le rôle des Etats
nouveaux dans les transformations du droit international, Annales Africaines 1974, pp. 11-23 ;
COLIN (J.P.), Les Etats nouveaux et l'évolution du Droit international, Annuaire du Tiers-Monde,
1977, pp. 445-447.
(157) Cité par Kéba MBAYE, Droits de l'Homme et pays en développement, in Mélanges René-
Jean DUPUY, Humanité et Droit international, Paris, Pédone, 1991, p. 213.
(158) Idem, p. 213.
(159) WODIE (F.), Africa and Humanitarian Law, ICRC, 1986, n° 254, september-oetober 1986,
p.250.

61
se double de la précision que "l'on ne saurait perdre de vue que l'Etat colonial n'était pas
démocratique, mais répressif, autoritaire et paternaliste. La concentration des pouvoirs
législatif, exécutif et judiciaire entre les mains du gouverneur colonial avait abouti à la
mise en place d'un "Etat administratif' dont l'organisation était bureaucratique et
militaire"(160).
Ces propos expliquent le mépris affiché par le Portugal refusant l'application du
Dili dans ses colonies. Ains4 le Portugal exprimera une réserve aux conventions de
Genève, formulée comme suit: "ce qui doit être appelé conflit de caractère international
n'étant pas clairement défmi... le Portugal se réserve le droit dans tous les territoires soumis
à sa souveraineté, dans n'importe quelle partie du monde, de ne pas appliquer la matière de
l'article 3, dans ce qu'elle peut présenter de contraire aux dispositions de la loi
portugaise"(161). L'attitude de la France n'était pas différente, relativement à ses colonies
africaines(162).
L'importation du DIH par les Etats nouveaux africains s'exprime par leur
adhésion aux règles susmentionnées.
Paragraphe II - L'adhésion de l'Afrique Noire au D.I.H.
L'immense apport de la civilisation occidentale ne doit pas occulter
l'universalisme des idées humanitaires. En dépit des développements précédents sur le
(160) MBAYA (E.R), A la recherche du noyau intangible dans la Charte Africaine, in Le Noyau
intangible des Droits de l'Homme, Actes du VIle Colloque interdisciplinaire sur les Droits de
l'Homme, Patrice MEYER-BISCH (éd.), Editions Universitaires de Fribourg, Suisse, 1991, p. 208.
(161) PllLOlJD (C.), Les Réserves aux Conventions de Genève de 1949, RICR, mars-avril 1976,
p.13.
(162) Voir OWONA, op. cit., p. 381 qui mentionne les arrêts c.A. Montpellier, 24 novembre
1959, Cie d'Assurances La Nationale et autres, Société Purfina française, G.P. 1959, p. 16, 18 déc.
1959.

62
caractère étranger et importé du DIH, l'Afrique Noire constitue un terrain de prédilection à
l'application de ces nonnes.
A partir de l'espace européen, le DIH s'est universalisé, tirant profit de l'unicité
du genre humain, par-delà les continents, et de la croissance exponentielle des guerres dans
les Etats nouveaux. Il faut souligner qu'il s'agit d'un enjeu considérable. En clair,
l'expansion du DIH est porteuse d'un "pari audacieux parce qu'il prétend renverser les
barrières des langues, des cultures, des ethnies, de l'ignorance... avec des moyens dérisoires
et la seule force de la conviction que le message du droit humanitaire est intégré dans toute
grande culture, enfoui dans chaque homme"(163).
Cet enjeu inspire le propos selon lequel : "il serait patfaitement erroné de
limiter dans le temps et dans l'espace l'avènement du droit humanitaire. Il est connu que la
source principale du droit est la coutume. Or, en Afrique, la richesse des traditions qui a pu
être répertoriée, malgré la nature orale de leur transmission, affiche un nombre élevé de
dispositions coutumières en syntonie avec l'esprit du Droit international Humanitaire
contemporain"(164).
De par l'importance attachée à la valeur de la personne humaine, le système de
pensée africain place les sociétés africaines au rang de civilisations humanitaires.
L'identification des idéaux humanitaires dans les traditions africaines a été retracée par une
(163) Cf. SANDOZ (Y), Pertinence et permanence du Droit international humanitaire, in T.M.C.
Asser Instituut. The Hague : Humanitarian law of Armed Conflict, Challenges Ahead-Essays in
honour of Frits Kalshoven, Martinus NijhoffPublishers, Dordrecht/BostonlLondon, pp. 27-38.
(164) GACOND (Il), Droit international humanitaire et Droit de la guerre, Conférence sur le
Droit humanitaire pour les forces armées des Etats-membres de l'OUA, Nairobi, 2-6 décembre
1991, P.O.Box 73226 Denis Pritt Road, Nairobi, Kenya, pp. 9-20.

63
doctrine soucieuse d'en révéler l'ancrage(165). D'ailleurs, n'est-il pas normal que l'Afrique,
berceau de l'humanité, fournisse un terreau fertile à l'universalisation du D.I.H. ?
Les Etats africains, dans leur écrasante majorité, ont adhéré aux conventions
humanitaires. Par adhésion, on entend: lIl'acte par lequel un Etat qui n'a pas signé le texte
du traité, exprime son consentement définitif à être lié"(166). La Convention de Vienne de
1969 précise à cet effet: "Le consentement d'un Etat à être lié par un traité s'exprime par
l'adhésion :
a) lorsque le traité prévoit que ce consentement peut être exprimé par cet Etat
par voie d'adhésion;
b) lorsqu'il est par ailleurs établi que les Etats ayant participé à la négociation
étaient convenus que ce consentement pouvait être exprimé par cet Etat par
voie d'adhésion;
c) lorsque toutes les parties sont convenues ultérieurement que ce consentement
pouvait être exprimé par cet Etat par voie d'adhésion"(167).
Le Pro WODIE faisait remarquer à cet égard : lIHaving retumed to or achieved
independence in international life, a majority of African states succeded or acceded
without reservations to the four Geneva Conventions on humanitarian law as conceived on
the European model"(168).
(165) Voir BELLO (E.), African customary humanitarian law, op. cit., note nO 99 ; DIALLO (Y),
Traditions africaines et Droit humanitaire, op. cit., note 96 ; OWONA (l), Droit international
humanitaire, op. cit., note 92; LY (D.), Fondements humanitaires..., op. cit., note 93.
(166) NGUYEN QUOC DINH et alii, op. cit., p. 172.
(167) Cf Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, art. 15, in DUPUY (p.M.), Grands
textes...
(168) Cf WODIE (F.), Africa and humanitarian law, op. cit., p. 250.

64
L'adhésion des Etats africains à la plupart des conventions humanitaires n'a pas
cessé de susciter la perplexité de la doctrine parce que cette adhésion s'est opérée
majoritairement sans réserve. Le Professeur Joseph OWONA se prononce en ce sens: "le
plus remarquable dans cette adhésion aux quatre conventionS de Genève de 1949 est
qu'elle s'est faite partout sans réserve, c'est-à-dire sans déclaration unilatérale de la part
d'aucun des Etats contractants visant à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines
dispositions des quatre conventions de Genève dans leur application à cet Etat"(169).
Ce ralliement aux grandes conventions humanitaires s'est pourtant effectué
graduellement.
- D'abord, les conventions de La Haye de 1907 ont été reçues. Pour les Etats
francophones, "La République Française, qui assumait alors les relations extérieures des
pays de l'Afrique Noire Francophone, les adopta"(170).
Un seul pays, l'Ethiopie, a signé les IVe, V et Xe Conventions de 1907(171).
Aucun Etat francophone n'a cependant notifié à la Suisse (Etat dépositaire) un acte de
ratification ou de déclaration de continuité au droit de La Haye.
Toutefois, il faut signaler que les Tribunaux de NUREMBERG et de TOKYO
ont réitéré le caractère coutumier de la Ile et de la IVe Conventions de 1907. Dans son
arrêt précité du 1er octobre 1946, le T.M.!. de Nuremberg l'a entériné avec force(172). Ce
caractère coutumier est de plus en plus affirmé en dépit des contestations du Tiers-Monde
envers ces règles classiques qui ont pu servir à leur assujettissement colonial.
(169) Cf. OWONA (J.), op. cit., p. 383.
(170) OWONA, ibid., p. 383. La Convention IV et le Règlement annexé de 1907 ont été
promulgués en France par le décret du 2 décembre 1910.
(171) Cf. SCHINDLER (D.) et TOMAN (l.), The law of Armed Conflicts, Sijthoff & NoordhotI,
The Netherlands ; Henry Dunant Institute, Geneva, 1988, pp. 57-59.
(172) ROUSSEAU (Ch.), Le Droit des conflits armés, op. cit., p. 19; voir supra, note n° 26.

65
- Ensuite, seuls certains Etats africains ont clairement exprimé leur adhésion
au Protocole de Genève de 1925 : l'Egypte (1998), l'Ethiopie (1935) la Côte d'Ivoire
(1970), le Niger (1967), la République Centrafricaine (1970), le Rwanda (1964). Par
ailleurs, le Protocole de 1925 fera l'objet de déclarations de succession de la Gambie
(1966), du Lesotho (1972), de l'Ile Maurice (1968). A l'inverse, d'autres Etats se limiteront
à la procédure de l'adhésion: Afrique du Sud (adhésion avec réserve, 1930), Angola (1990,
avec réserve), Bénin (1986), Burkina Faso (1971), Cameroun (1989), Ghana (1967),
Guinée-Bissau (1989), Madagascar (1967), Malawi (1970), Nigeria (1968 avec réserve),
Sénégal (1977), Sierra-Leone (1967), Soudan (1980), Swaziland (1991), Tanzanie (ex-
Tanganyka) (1963), Togo (1971)(173). Cette impression de réticence des Etats africains a
été cependant dissipée par la Résolution A 2603 B (XXIV) de l'AGNU réaffmnant le
caractère général de la prohibition des armes chimiques et dont le vote a été
majoritairement soutenu par les Etats africains(174).
- De surcroît, les Etats africains ont adhéré mutatis mutandis, aux quatre
Conventions de Genève du 12 août 1949 sans faire de réserves(175). Il faut ici, recourir à
l'éclairage de la Convention de Vienne de 1969 dont l'article 2, paragraphe 1, d, dispose:
"l'expression "RESERVE" s'entend d'une déclaration unilatérale, quel que soit son libellé
ou sa désignation, faite par un Etat au moment où il signe, ratifie, accepte ou approuve un
traité ou y adhère, par laquelle il vise à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines
dispositions du traité dans leur application à cet Etat".
En adhérant le
28 juin 1951 aux Conventions de Genève, la France s'était
engagée à les respecter et à les appliquer sur tout son territoire, y compris ses
(173) Cf SCHINDLER (D.) et TOMA1~ (1.), Droit des conflits armés, CICR , nID, Genève,
1996, pp. 115-134.
(174) OWONA (1.), op. cit. p. 384.
(175) COURSIER (H.), Accession des nouveaux Etats aux Conventions de Genève, AFDI 1961,
pp. 760-761. Saufles réserves d'Angola et de Guinée-Bissau. L'Erythrée n'a pas encore adhéré aux
Conventions de Genève de 1949.

66
colonies(176). Le DIB de 1949 contient des règles dont l'idée inspiratrice n'est pas
éloignée de certaines valeurs culturelles africaines. Ce qui pennet d'expliquer, en dépit du
caractère européen d'origine et d'implantation du DIB, cette adhésion sans grande
contestation des Etats africains. Néanmoins, cette adhésion s'est faite différemment.
Certains Etats africains ont souscrit une déclaration de succession(177) aux
engagements de la République Française et du Royaume de la Belgique. Il s'agit, entre
ftlutres, du Bénin (14 décembre 1961), du Burundi (27 décembre 1971), du Cameroun (16
septembre 1963), du Congo (4 décembre 1967), de la Côte d'Ivoire (28 décembre 1961),
du Gabon (26 février 1965), de Madagascar (18 juillet 1963), de la Mauritanie (30 octobre
1962), du Niger (21 avril 1964), du Sénégal (18 mai 1963), du Rwanda (5 mai 1964), de la
République Centrafricaine (1er août 1966), du Togo (6 janvier 1962), du Burkina Faso (ex-
Haute-Volta, 7 novembre 1961) et de la République Démocratique du Congo (ex-Zaïre, 24
février 1961)(178). La pratique du dépositaire est révélatrice d'une prudence dans
l'adhésion. Selon ZIMMERMANN: "dépositaire des Conventions de Genève de 1949
comme de celles qui les avaient précédées, le Conseil fédéral suisse n'a pas considéré qu'un
Etat nouvellement indépendant y devenait automatiquement partie du fait que son
prédécesseur les avait ratifiées ou y avait adhéré"(179).
---~._-------
(176) OWONA, ibid., p. 383. Cf aussi en France, décret n° 52-253 du 28 février 1952 portant
publication des quatre Conventions de Genève de 1949.
(177) Selon l'art. 2, § 1, al. b de la Convention de Vienne du 23 août 1978 sur la succession d'Etats
en matière de traités: "l'expression "succession d'Etats" s'entend de la substitution d'un Etat à un
autre dans la responsabilité des relations internationales d'un territoire" in DUPUY (p.M.), Grands
textes...
(178) CICR, Rapport annuel d'activités 1994, Genève, 323 p. ; Voir également CICR, Geneva
Conventions of 12 august 1949 and Additional Protocols of 8 june 1977 : Ratifications,
Accessions and Successions as of 15 july 1996, CICR, DDM/JUR.96/4/1O, CPS 22, 8 p.
(179) ZIMMERMANN (B.), La succession d'Etats et les Conventions de Genève in Etudes et
Essais sur le droit humanitaire..., op. cil., p. 115.

67
Quant à la pratique du CICR, promoteur et gardien du DIH(180), elle se situe
aux antipodes de celle du dépositaire, puisque témoignant d'une automaticité dans la
succession aux Conventions de Genève. Cette doctrine, pour l'essentiel, peut s'exprimer
ainsi : "... un territoire accédant à l'indépendance demeure lié par les traités d'intérêt public
ou général. Ainsi les Conventions de Genève restent en vigueur, à moins que le nouvel
Etat ne répudie expressément ces traités... Cependant, le CICR souhaite que les
gouvernements de ces Etats confinnent, par une déclaration de continuité ou par une
adhésion, leur participation aux Conventions afm d'éviter toute équivoque"(181). Le
libéralisme de cette pratique est confirmé, dans le cas du Togo, lorsque le CICR, en
reconnaissant la Croix-Rouge Togolaise parmi les sociétés nationales du Mouvement de la
Croix-Rouge et du Croissant Rouge, a constaté que: "la République Togolaise était partie
aux Conventions de Genève de 1949 en vertu de la ratification de celles-ci par la France en
1951 "(182).
La préférence d'autres Etats francophones est allée vers la procédure de
l'accession ultérieure. Ainsi en est-il du Mali (24 mai 1965), du Tchad (5 août 1970) et de
la Guinée (Il juillet 1984).
Quant aux Etats africains anglophones, certains ont choisi l'adhésion en qualité
d'Etats indépendants et souverains : Afrique du Sud (31 mars 1952), Botswana (29 mars
1968), Ghana (2 août 1958), Kenya (20 septembre 1966), Malawi (5 janvier 1968),
Ouganda (18 mai 1964), Soudan (23 septembre 1957), Swaziland (28 juin 1973), Zambie
(19 octobre 1966), Zimbabwe (7 mars 1983), Libéria (29 mars 1954) ; tandis que d'autres
ont fait une déclaration de succession: Gambie (20 octobre 1966), Lesotho (20 mai 1968),
(180) Art. 4 al. le et 9 des Statuts du CICR et art. VI alinéas 4 et 7 des Statuts du Mouvement de la
Croix-Rouge et du Croissant Rouge in Manuel de la Croix-Rouge Internationale, 12e édition,
CIeR, Genève, 1983.
(UH) Cf RICR, juillet 1966, p. 354.
(lf82) Cf. OWONA (J.), op. cit., p. 383.

68
Namibie (22 août 1991), Nigeria (20 juin 1961), Tanzanie (12 décembre 1962), Sierra-
Leone (10 juin 1965)(183).
Un comportement différencié par rapport aux Conventions de 1949 marque
l'attitude des ex-colonies portugaises. L'adhésion simple de certains Etats comme le Cap-
Vert (11 mai 1984), Sao-Tomé et Principe (21 mai 1976), Guinée Equatoriale (24 juillet
1986) contraste avec les déclarations assorties de réserves de l'Angola (20 septembre 1984)
et de la Guinée-Bissau (21 février 1974).
La Guinée-Bissau a émis une réserve sur les articles 13 de la 1ère Convention et
de la Ile Convention et sur l'article 3 commun aux quatre Conventions, exprimée ainsi pour
ce dernier cas : "Le Conseil d'Etat de la République de Guinée-Bissau ne reconnaît pas les
"conditions" prévues dans le deuxième point de cet article concernant "les membres des
autres milices et les membres d'autres corps de volontaires y compris ceux des
mouvements de résistance organisés" parce que ces conditions ne conviennent pas aux
guerres populaires menées aujourd'hui"(184).
Ces réserves ne se comprennent que par rapport à la singularité de l'avènement
à l'indépendance de la Guinée-Bissau ou de l'Angola.
- EnfIn, d'autres conventions humanitaires ont suscité des réactions tout aussi
diverses. Ainsi, la convention pom la prévention et la répression du crime de génocide du 9
décembre 1948 a fait l'objet d'une adhésion de la France le 11 décembre 1948 et de la
(183) II faut préciser que pour les Etats suivants: Congo, Madagascar, Mauritanie, Niger, Nigeria,
Rwanda, Sénégal, Sierra-Leone, RD. Congo (ex-Zaïre), les dates indiquées sont celles du dépôt
des instruments auprès du Département fédéral des Affaires Etrangères de la Confédération
Helvétique. Pour tous les autres Etats, il s'agit de la date officielle de réception des instruments par
le dépositaire. Comme les protocoles de 1977, les Conventions de 1949 (entrées en vigueur le 21
octobre 1950) n'entrent en vigueur pour chaque Etat que six mois après la date de sa ratification,
adhésion ou succession.
(184) PILLOUD (Cl.), op. cit., p. 22.

69
Belgique le 12 décembre 1949. Le 13 mars 1952, le Secrétariat général de l'ONU s'est w
notifié rintention belge d'étendre l'application de ladite convention au Congo-belge et au
territoire sous tutelle (Rwanda-Burundi). Le Burkina Faso (14 septembre 1965), le Mali
(16 juillet 1974) ont adhéré à la Convention. Le Rwanda émettra une réserve à l'application
de l'article IX concernant la compétence obligatoire de la CU pour les différends relatifs au
génocide(185).
Pour ce qui est de l'adhésion, il faut particulièrement mettre en exergue les
déclarations concordantes de parties au conflit (mouvements de libération natioIlale
africains) faites conformément à rarticle % du Protocole 1 de 1977, d'application du droit
ou des principes hwnanitaires : A.N.e. (Déclaration au CICR du 28 novembre 1980),
S.W.A.P.O. (déclaration du 25 août 1981), E.P.L.F. (25 février 1977) et UNITA (25 juillet
1980)(186).
Le sort fait par les Etats africains aux protocoles de 1977 sera examiné plus
loin.
Il convient d'ajouter avec ZIMMERMANN, relativement au DIH qu"'aucun
Etat n'a jamais proclamé son refus de devenir ou de se reconnaître partie aux conventions
et qu.'aucWl Etat ne les a jamais dénoncées"(187). Cette assertion se vérifie surtout en
matière de succession parce que "l'Etat-successeur est tenu également de tout traité
déclaratoire de nomles coutumières existantes (art. 5 de la convention de 1978) et, a
fOltiOri, de conventions constatant des normes impératives (jus cogens) tels le Pacte
(185) Cf. OWONA (J.), ibid., p. 387. On peut ajouter que les Etats africains sub-sahariens suivants
ont ratifié ou adhéré à cette convention : Burkina Faso, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Côte
dlIvoire, Lesotho, Liberia, Mali, Mozambique, Namibie, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Tanzanie,
Togo, Ouganda, Zaïre, Zimbabwe; cf. SCHINDLER (D.) & TOMAN (l), Droit des conflits
armés, CICR & llID, Genève, 1996, pp. 907-936.
(186) Cf. VEUTHEY (M.), Guérilla et droit humanitaire, CICR, Genève, 1983, XXVI, 451 p.
(187) ZIMMERMANN, op. cit., p. 122.

70
Bri:and-Kellog de 1928 et la convention de 1948 sur la répression du cnme de
génocide"(188).
L'adhésion de l'Afrique Noire indépendante aux idéaux contenus dans les
conventions hwnanitaires laisse entière la question de la faible empreinte des spécificités
afjicaines dans le DIH.
SECTION II - Une spécificité africaine faiblement marquée
Si le DJ.H. de 1949 et de 1977 emprunte des éléments venant de différents
systèmes juridiques et de divers modes de pensée. la faiblesse de ses apports africains en
constitue la marque essentielle. Nonobstant l'adhésion ma:.l0ritaire des Etats africains aux
quatre conventions de Genève, leur participation à la conférence diplomatique de 1949
reste de portée très mineure. L'insignifiance du nombre des Hautes Parties contractantes
africaines est assez symptomatique de leurs faibles mérites dans la codification de 1949.
Les deux-tiers des Etats africains étaient encore sous le joug de la colonisation (Paragraphe
1).
Toute différente, représente la situation de 1977. Elle s'est traduite par une
participation, quantitativement et qualitativement, importante des Etats africains. La
majorité de ceux-ci avait accédé à l'indépendance. Les conférences de 1974-1977 offrirent
à ces Etats une tribune pour l'intégration de leurs revendications économiques, sociales et
culturelles dans les Protocoles de 1977. Le Dm est redevable au Tiers-Monde d'un
ensemble de règles. Mais le Tiers-Monde s'est également trouvé en situation d'opposition
avec d'autres systèmes de civilisation et de pratiques étatiques antagonistes qui ont
édulcoré bien de ses propositions d'amendements (Paragraphe II).
(188) NGUYEN QUOC DINH et alii, op. cit., p. 521.

71
Paragraphe 1 - Une participation mitigée à la conférence de 1949
Il faut, d'emblée, rappeler l'absence de la plupart des Etats africains à la
conference de 1949. On peut emprunter le raccourci du Professeur Joseph OWONA :
"l'Egypte et l'Ethiopie furent les seules "Hautes Parties" contractantes à signer, à l'origine,
l'acte final de la conférence qui élabora les quatre conventions. Les Etats d'Afrique Noire
française n'existaient pas encore"(189).
Convoquée par le Conseil fédéral suisse, la conférence diplomatique, pour
l'élaboration de conventions internationales destinées à protéger les victimes de la guerre,
s'est réunie à Genève du 21 avril au 12 août 1949 sous la présidence de M. Max
PETITPIERRE, Conseiller fédéral, Chef du Département politique.
La conférence a travaillé sur un texte ébauché par le CICR. Selon le
commentaire des Conventions de Genève, "Pour mener l'œuvre à bien, le Comité
international de la Croix-Rouge eut recours à sa méthode habituelle : réunir une
documentation complète, faisant ressortir sur quels points le droit devait être complété,
confirmé ou modifié, puis établir des projets de conventions, avec le concours d'experts
des gouvernements, des sociétés de la Croix-Rouge et d'autres sociétés de secours"(190).
Ce texte esquissé fut amendé en 1946 à Genève par la Conférence préliminaire
des Sociétés nationales de la Croix-Rouge, en 1947 par la conférence d'experts
gouvernementaux et en 1948 à Stockholm par la XVIIe Conférence internationale de la
Croix-Rouge(191).
(189) OWONA (J.), op. cit. p. 383.
(190) Commentaire des Conventions de Genève du 12 août 1949 (sous la direction de Jean
PICTET), VoL 1, Convention I, Genève, CICR, 1952,542 p. (ici p. 12).
(191) Voir ABI-SAAB (R.), Droit humanitaire et conflits internes. Origines et évolution de la
réglementation internationale, Institut Henry Dunant, Genève, A. Pédone, Paris, 1986, pp. 43-49.

72
La Conférence de 1949 s'est scindée en trois grandes commissions et une
commission mixte.
La Commission 1 avait pour mission de réviser la Convention de Genève du 27
juillet 1929 sur le traitement des malades et des blessés et la Convention de Genève du 6
juillet 1906.
La Commission II devait réviser la Ile convention de 1929 sur le traitement des
prisonniers de guerre.
La Commission III avait pour tâche d'examiner la nouvelle convention relative
à la protection des populations civiles(192).
Quant à la Commission mixte, "composée des trois comnnsslons siégeant
ensemble dès le début de la conférence sans retarder les travaux des commissions sur les
autres articles"(193), elle devait se charger de l'examen des articles communs aux quatre
futures conventions.
En outre, une Commission de coordination et une Commission de rédaction
s'efforcèrent d'hannoniser ces différents textes. Plusieurs groupes de travail se sont fOlmés
au sein des commissions pour donner quelque unité à ces textes épars.
La Conférence n'a pas dérogé aux habituels pnnclpes d'organisation des
conférences diplomatiques de codification. Après les travaux en commission, il fallait
procéder à l'examen de ces différents textes en Assemblée plénière. A ce niveau, le
Président PETITPIERRE faisait observer : "les débats en séances de commission ont un
caractère moins solennel que ceux de l'Assemblée plénière ; ils facilitent ainsi la recherche
(192) ABI-SAAB (R.), idem., pp. 50-51.
(193) ABI-SAAB (R), ibid., p. 51.

73
de solutions satisfaisantes. Le système, au surplus, peImet d'observer le pnnclpe,
indispensable à mon avis, de faire discuter tous les articles en commission avant de les
soumettre à l'Assemblée plénière"(l94).
Dix-sept délégations ont signé le 12 août 1949 les conventions. Les autres (le
restf~ des soixante-quatre délégations présentes à la Conférence) le firent soit à la séance
sol,ennelle du 8 décembre de la même année, soit après jusqu'au 12 février 1950. Les
.nouvelles Conventions de Genève sont entrées en vigueur dès le 21 octobre 1950 et elles
furent ouvertes à l'adhésion des pays qui n'avaient pas participé à leur élaboration(195).
Il faut ici rappeler que les quatre Conventions de Genève datées du même jour
traduisaient des préoccupations diverses. Ainsi, la Ile Convention "pour l'amélioration du
sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer" est une
reproducti.o~ une sorte de fac-similé de la 1ère Convention, qui, elle, est restreinte au cadre
de la guerre terrestre. Les dispositions des deux conventions se rapprochent étroitement
tout en couvrant des domaines différents, la guerre sur terre et la guerre sur mef.
Quant aux Ille et IVe Conventions, qui se rapportent au traitement des
prisonniers de guerre et à la protection des personnes civiles en temps de guerre, elles sont
plus longues et plus détaillées que les précédentes(196).
L'innovation de 1949 ne doit pas être exagérée car "la convention révisée, telle
qu'elle ressort des délibérations de la conférence de 1949, reste entièrement dans la ligne
traditionnelle. Elle procède de principes fondamentaux qui avaient déjà inspiré les versions
(194) Actes de la Conférence diplomatique de Genève de 1949, 2 vol., Berne, 1950-1951 ~ surtout
vol. II, A, p. 22.
(195) Commentaire des Conventions de Genève de 1949, Vol. l, op. cit., pp. 13-14.
(196) Cf. SANDOZ (Y.) et SURBECK (1.1.), Le droit de La Haye et les Conventions de Genève,
Premier séminaire africain francophone sur la diffusion du DIlL Tunis, 10 octobre 1979, Il p., in
Coll(~ction d'exposés du CICR, N° 002, Genève, 1979.

74
antérieures"(197). La révision de 1949 maintient les règles de base du droit de Genève tout
en les précisant et surtout en les adaptant à l'époque postérieure à la Ile guerre mondiale.
Néanmoins, certaines dispositions ont pu être considérées comme traduisant un
rel;u1 du droit humanitaire. Des illustrations peuvent en être données puisque le DIH de
1949 consacre la rétention du personnel sanitaire, abandonne le principe de la restitution
du matériel et ne favorise pas le développement de l'aviation sanitaire.
Mais les limites du droit de 1949 s'expliquent par le fait que "la conférence est
restée dans le domaine du possible ; elle n'a pas voulu maintenir ni instaurer des règles
irréalisables, dont l'inobservation n'eut pas manqué d'affaiblir des nonnes essentielles à
garder intangibles. Animée de la fenne volonté d'apporter aux victimes éventuelles de la
guerre les garanties humanitaires les plus étendues, la Conférence de 1949 est restée assez
réaliste pour les énoncer sous une fonne qui permette à tout Etat d'y souscrire"(198). Les
Conventions de 1949 restent dans le sillage des conventions antérieures. "n faut, pour
découvrir les buts exacts qu'elle se propose, remonter à la source, c'est-à-dire au préambule
de la plus ancienne. Voici ce que disaient les plénipotentiaires de 1864 : "Egalement
animés du désir d'adoucir, autant qu'il dépend d'eux, les maux inséparables de la guerre, de
~mpprimer les rigueurs inutiles et d'améliorer le sort des militaires blessés sur le champ de
bataille... "(199).
Une innovation importante marque le droit de 1949 : la IVe convention qui
protège les personnes civiles. Les Etats tirant les leçons de la seconde guerre mondiale qui
a coûté la vie à des millions de victimes civiles, ont voulu élargir la protection humanitaire
à celles-là qui sont démunies devant la rage meurtrière des combattants.
(197) Cf Note préliminaire in Les Conventions de Genève de 1949, CICR, Genève, 1989, p. 18.
(198) Commentaire des Conventions... , Vol. l, op. cit., p. 16.
(199) Commentaire... , Vol. l, ibid., p. 19.

75
Quant à la participation africaine, elle fut de faible ampleur. La plupart des
Etats actuels n'ayant pas encore accédé à la souveraineté internationale, seuls l'Egypte et
l'Ethiopie étaient présentes à la Conférence.
Mais la contribution de ces deux Etats reste marginale. Souvent, ils soutenaient
les propositions d'amendements d'autres Etats d'un Tiers-Monde vagissant encore dans ses
langes, à la recherche d'une aura de légitimité et d'une reconnaissance fonnelle.
Les discussions furent particulièrement houleuses. Les Etats du groupe
socialiste, ceux du Tiers-Monde et le groupe des Etats occidentaux se plaçaient, d'emblée,
dan.s une logique de confrontation idéologique. Il en résultait que les divergences politico-
idéologiques se répercutaient sur les positions des délégations.
A ce propos, la conférence a longuement débattu sur l'opportunité d'lUl
préambule qui se présenterait sous la fonne d'lUl article liminaire, d'un principe directeur
ou d'lUl exposé des motifs des Conventions.
Le CICR avait proposé le texte d'un préambule dont la teneur, identique pour
les quatre conventions, était la suivante:
"Le respect de l'être humain et de sa dignité est un principe universel qui
s'impose même en l'absence de tout engagement contractuel.
Ce principe commande qu'en temps de guerre, les personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités, et celles qui sont mises hors de
combat, par maladie, blessure, captivité, ou pour toute autre cause,
soient respectées, qu'elles soient protégées contre les effets de la guerre
et que celles qui souffrent soient secourues et soignées sans aucune

76
considération de nationalité, de race, de religion, d'opinions politiques ou
autre... "(200).
Ce texte de base fut la source de divers amendements qui traduisaient le souhait
des Etats d'en augmenter la teneur. Les Etats étaient partagés. Selon le commentaire,
"certaines délégations insistaient pour que l'on justifiât le principe du respect de l'être
humain par l'affirmation de l'origine divine de l'homme. Ce faisant, elles pensaient donner
plus de poids au préambule et, par conséquent, plus de force à la convention elle-
même"(201). Mais ce point de vue ne pouvait recueillir l'unanimité dans une assemblée
réunissant des Etats aux religions et philosophies aussi diverses. C'est pourquoi d'autres
délégations insistèrent pour que le préambule contînt des dispositions, plus réalistes, pour
la répression des violations des conventions. Mais la majorité militait en faveur de la
rétention d'un principe clair qui rencontre l'accord de toutes les parties, par conséquent sans
tenir compte de considérations religieuses ou partisanes d'un nombre seulement des Etats
signataires.
En définitive, on renonça à l'idée d'un préambule, qu'on remplaça par une
fonnule sèche et lapidaire, technique et neutre : "Les soussignés, Plénipotentiaires des
Gouvernements représentés à la Conférence diplomatique qui s'est réunie à Genève du 21
avril au 12 août 1949 en vue de réviser la Convention de Genève pour l'amélioration du
sort des blessés et des malades dans les années en campagne du 27 juillet 1929, sont
convenus de ce qui suit...".
Toutefois, l'absence d'un principe directeur ou préambule plus étoffé, n'était pas
'absolue. On retrouve l'idée inspiratrice des conventions, dans les articles 2 et 3 communs,
qui consacrent l'indivisibilité du principe du respect de l'être humain et de sa dignité en cas
(200) Cf Remarques et propositions du CICR. Document destiné aux Gouvernements invités par
le Conseil fédéral suisse à la Conférence diplomatique de Genève (21 avril 1949), Genève, février
1949, p. 8.

77
de guen-e internationale ou de tout autre conflit. L'impératif de la sécurité atteint son
apogée dans ce qui est considéré comme ooe sorte de "mini-convention" : l'article 3
commun aux quatre conventions qui crée un standard humanitaire que les Parties au conflit
sont tenues d'appliquer et de respecter en toutes circonstances, en cas de conflit non
international
Cependant, l'article 3 qui apparaît, selon le mot d'un délégué comme "ooe
convention en miniature", n'a pas été adopté sans de nombreuses controverses. L'enjeu des
dispositions du projet d'articles était considérable. Le Commentaire des Conventions de
Genève retient que : "La Conférence internationale visait donc expressément, et pour la
première fois, l'application par les parties à une guerre civile, sinon de toutes les
dispositions des Conventions de Genève, du moins des principes essentiels de celles-
ci"(202).
De nombreuses délégations s'opposaient à l'application de la Convention en cas
de guerre civile en arguant du fait que le projet du CICR couvrait les insurrections, la
rébellio~ l'anarchie, la désintégration de l'Etat, voire toutes formes de banditisme et qu'il
privilégiait la protection de l'individu au détriment de celle, non moins légitime, de l'Etat.
Derrière cette prise de position, s'alignaient les Etats du Tiers-Monde.
A l'opposé, les partisans du projet (en majorité les Etats occidentaux) faisaient
prospérer le sentiment d'humanité, la nécessité pour les insurgés d'avoir à se conformer aux
prescriptions du DIH, et défendaient l'idée d'une couverture humanitaire minimale pour les
rebelles tout en laissant au gouvernement légal la possibilité de réprimer, conformément à
sa législatio~ tous les actes contraires au maintien de l'ordre et de la sécurité intérieure.
(201) Cf Commentaire des Conventions de Genève... , Vol. l, op. cit., p. 22.
(202) Commentaire des Conventions... , Vol. l, op. cit., p. 44.

78
Devant les séries d'amendements et de contre-propositions qui ne satisfaisaient
aucune des délégations, on s'accorda à se limiter à la suggestion de la délégation française
qui, elle-même, reprenait une idée antérieure de la délégation italienne. Elle proposait que,
dans tous les cas de conflits armés non internationaux, l'application de la convention fut
limitée aux seuls principes de ceux-ci(203).
La conclusion qui ressort de ces laborieuses négociations est le caractère
mineur de la participation. Mais celle-ci n'a pas été un obstacle à la réception des
Conventions de Genève. Il est édifiant de noter qu'aujourd'hui ces conventions sont
devenues "les traités internationaux jouissant de l'adhésion la plus universelle"(204).
Actuellement, cent quatre-vingt sept Etats membres de l'ONU sont parties aux
Conventions de Genève(205).
Les lacunes décelées dans l'application des Conventions de 1949 relativement
aux conflits dans lesquels les protagonistes ne sont pas toujours des Etats (article 3, dixit)
et la nécessité de les résoudre de façon idoine, ont été évoquées pour justifier la
réadaptation du droit de 1949 par des protocoles additionnels.
(203) Actes de la Conférence diplomatique... , Il, B, pp. 9-15 et pp. 320-335.
(204) GASSER (H.P.), Le Droit international humanitaire : Introduction in HANS HAUG,
Humanité pour tous, Institut Henry Dunant, HAUPT, 1993, p. 13.
(205) Etat au 15 juillet 1996 ; cf supra note N° 178.

79
Paragraphe II - Une participation plus remarquée aux conférences
de 1974 -1977
« Le droit est largement tributaire des faits et plus particulièrement (...) le droit
intenlational public est le plus souvent l'expression des rapports de force et des
convergences d'intérêts entre Etats »(206).
A cet égard, divers groupes politico-géographiques (socialiste, arabe, africain,
latino-américain, asiatique et européen) ont eu à s'affronter ou à collaborer lors des
négociations sur les Protocoles de 1977.
La Conférence diplomatique sur la réaffrrmation et le développement du DIB
applicable aux conflits armés (ci-après C.D.D.H.) s'est déroulée en quatre sessions(207) et
a regroupé une majorité d'Etats véhiculant des conceptions philosophiques, idéologiques,
culturelles, écononùques et juridiques divergentes(208).
La base des discussions portait sur deux projets de protocoles préparés par le
CICR Fort de son expérience sur les multiples terrains de conflits, le CICR s'est aussi
attaché l'avis de deux conférences d'experts gouvernementaux tenues à Genève en 1971 et
en 1972. Ce travail d'ébauchage reçut l'appui de l'AGNU qui, par sa Résolution 2597,
adhéra à ce projet. Le Secrétaire général de l'ONU apportera sa caution à ces préparatifs
tt~xtue]s en invitant les Etats, le CICR et les autres organisations intéressées "à rechercher
(206) BRETTON (ph.), L'incidence des guerres contemporaines sur la réaffirmation et le
développement du DIH applicable dans les conflits armés internationaux et non internationaux, in
ID.!. (Clunet), 1978, p. 211.
(207) La 1ère session s'est tenue du 20 février au 29 mars 1974 ; la seconde du 3 février au 18 avril
1975; la troisième du 21 avril au 11 juin 1976; et la quatrième du 17 mars au 10 juin 1977.
(208) 124 Etats participèrent à la session de 1974 ; 120 à la session de 1975 ; 107 à la session de
1976 et 109 Etats à la sessîon de 1977.

80
la conclusion de nouveaux accords en vue d'améliorer la protection des civils et des
p'tisonniers de guerre et d'interdire l'usage de certaines méthodes de combat"(209).
Selon Philippe BRETTON, l'objectif poursuivi était le suivant : "l'intention du
CICR était à la fois de réaffmner certaines règles existantes, conventionnelles aussi bien
que co utumières et en même temps de les développer, compte tenu de toutes les mutations
ayant affecté les relations internationales depuis soixante-dix ans... "(210). L'émergence de
nou.veaux Etats issus des mouvements de décolonisation des années 50-60, a été le point de
départ d'une contestation des règles du droit classique qui, pour une large part, avaient
pennis leur domination. Cette revendication s'appuie sur leur volonté d'y intégrer leurs
préoccupations économiques et sociales et de conférer au Dili une nouvelle empreinte qui
ne serait pas suspectée "d'européocentrîsme".
La Conférence diplomatique (1974-1977) fut l'occasion de traduire ce besoin en
règles adaptées. à la nouvelle structure des relations internationales, dans le droit. Pour
mener à bien ces travaux, trois commissions principales (Commission 1 chargée de
questions juridiques communes aux deux protocoles, Commission II s'occupant de
questions relatives à la protection des blessés et malades et Commission III chargée de la
protection matérielle en général et de la protection des civils en particulier), une
commission de vérification des pouvoirs, un comité de rédaction et une commission AD
HOC sur les armes dites conventionnelles furent créés.
Les deux textes ont fait l'objet de discussions en séance plénière avant d'être
confiés pour examen détaillé aux commissions susmentionnées.
- - - - _ . _ - - - - -
Jo(
(209) BRETTON (ph.), "Le problème des méthodes et moyenSde guerre ou de combat" dans les
protocoles additionnels aux Conventions de Genève du 12 août 1949, in RG.D.I.P., 1978, vol. 82,
p. 34 (note 3 en bas de page).
(210) BRETTON (Ph.), Le problème... , idem., p. 35.

81
La participation des Etats africains aux différentes sessions, s'inscrit dans le
cadre de la stratégie globale du Tiers-Monde. A cet effet, plusieurs amendements ont été
proposés, discutés, soutenus par les Etats du Tiers-Monde. Ces amendements -qu'ils aient
prospéré ou non·· pennettent de dégager une vision globale de la participation africaine.
Cette participation a d'abord été favorisée par la pratique libérale de la Suisse en
matière d'invitations. Néanmoins, la spécificité de la Guinée-Bissau mérite d'être
soulignée. Son accession assez récente à la souveraineté internationale après une guerre de
libération nationale contre la puissance colonisatrice portugaise et l'attitude nuancée de la
communauté internationale sur sa reconnaissance en qualité d'Etat(211), avaient suscité
une incertitude qui n'a pu être levée qu'avec l'adoption par consensus d'une résolution
favorable à sa participation(212).
Sans prétendre à l'exhaustivité, l'analyse de l'apport du Tiers-Monde et des Etats
africains au Dn-I de 1977 portera sur la valorisation des guerres de libération nationale (1),
le statut des parties au conflit (2), les mercenaires (3), les moyens de guerre ou de combat
(4), les infractions graves (5) et le problème de l'utilité du Protocole II (6).
1 - La valorisation des guerres de libération nationale
Les guerres ayant eu pour cadre les Etats du Tiers-Monde ont marqué
particulièrement les règles de 1977. En effet, panni celles ayant une incidence sur le DIH,
on peut citer : "la guerre d'Algérie (1954-1962), la guerre du Biafra (1967-1970), les
guerres d'Angola (1961··1975) et du Mozambique et enfin les affrontements plus ou moins
(211) Cf FALL (1.), La reconnaissance de la Guinée-Bissau in Annales Africaines 1975, pp. 155-
172.
(212) Actes de la Conférence diplomatique sur la réaffirmation et le développement du droit
international humanitaire applicable dans les conflits armés, Genève (1974-1977), Département
politique fédérale, Berne, 1978,2 vol. (ci-après, Actes); Actes de la CDDH/SR, paragraphe 8.

82
violents et importants se déroulant en Afrique Australe"(213). Ces événements ont servi de
trame à la volonté de consécration des guerres de libération nationale comme conflits
armés internationaux. Déjà, en 1974, le Maroc et la Tanzanie co-auteurs d'un amendement
avec six Etats socialistes, avaient proposé l'intégration dans les conflits internationaux,
"des conflits dans lesquels des peuples luttent contre la domination coloniale et étrangère et
contre les régimes racistes". Cette position fut reprise par le Ghana(214). Le délégué du
Pakis~ d.ans son intervention, dira : "le concept de conflit armé de caractère international
s'applique, quand il s'agit d'un conflit armé tendant à la libération nationale ou à la
libérati'on dujoug colonialiste... "(215), Ce désir d'application du DIH aux "combattants de
la liherté" était lllle stratégie dirigée contre la politique d'Israël, de la Rhodésie et de
l'Afrique du Sud(216) et répondait au souci "d'hannoniser le droit humanitaire avec le droit
international contemporain"(217) par référence à la phraséologie habituelle des résolutions
onusiennes(218). La position du Ghana fut soutenue par le Nigeria, la Côte d'Ivoire et la
Yougoslavie(219). L'attitude du Tiers-Monde s'opposait au droit classique qui "repose sur
une distinction entre les forces régulières et les autres combattants. Les premières
bénéficient, de plein droit, du statut le plus favorable ; les seconds, dont la qualité n'est
admise que parcimonieusement, doivent répondre à des conditions à ce point rigoureuses
que l'exception accordée est pratiquement vidée de sa substance"(220). L'amendement du
Ghana sera appuyé par des Etats socialistes tels l'Albanie ou la Chine dont les
représentants ont parlé de "guerres justes" s'attirant ainsi les critiques des Etats occidentaux
(213) BRETTON (PH.), L'incidence.... , op. cit., pp. 209-210.
(214) BRETTON (ph.), ibid., p. 216 ; et Actes de la CDDH/SR 10 paragraphes 34-35 (Ghana) et
CnDH/SR 10 paragraphe 50 (Maroc).
(215) Actes de la CDnHlSR 1-22, p. 101.
(216) COLIN (J.P.), Les Etats nouveaux et l'évolution du Droit international, Annuaire du Tiers-
Monde, 1977, Berger-Levrault, pp. 445-447.
(217) ABI··SAA13 (G.), Les guerres de libération nationale et la Conférence diplomatique sur le
droit humanitaire, Annales d'Etudes Internationales, Genève, 1977, Vol. 8, p. 71.
(218) Les Etats du Tiers-Monde ont rappelé les Résolutions de l'AGNU suivantes: 2621 (XXV),
3103 (XXVIII), 3319 (XXIX) et Res. 2789 (XXVI).
(219) Actes de la CDDHJ1IUSR 30, 13 mars 1975, p. 208.
(220) SAI..MON (J.J.A.), La Conférence diplomatique sur la réaffirmation et le développement du
Dili et les guerres de libération nationale, RB.D.l, Vol. XIL 1977, Bruylant, Bruxelles, p. 354.

83
qui ont considéré cette expression comme véhiculant des préjugés moraux, philosophiques
ou religieux.
Prenant le relais du Ghana, l'Egypte proposa un amendement(221) soutenu par
les Ehits du Tiers-Monde, pour fonder le caractère international, au sens du DIH, des
guerres de libération nationale sur un concept déjà connu à travers la déclaration sur les
relations amicales(222), à savoir les guerres dans lesquelles les peuples luttent pour leur
droit à disposer d'eux-mêmes. Un autre amendement du Tiers-Monde, cette fois-ci
d'origine latino-américaine, voudra ramener les guerres de libération nationale aux semes
guen-es coloniales(223).
Poussés dans leurs derniers retranchements, les Etats occidentaux proposèrent
de rejeter tous les amendements précédents pour ne s'en tenir qu'à la seme clause de
Martens qui gouvernerait toutes les situations ultérieures non évoquées par les textes.
Finalement, il Y eut un rapprochement entre ces différentes positions étatiques
qui pennit l'adoption de l'article 1er du Protocole 1 par 87 voix (dont 20 Etats
africains)(224), un vote contre (Israël) et 11 abstentions (Etats occidentaux). L'article 1er
reprend la clause de MARTENS (en son alinéa 2) tout en tenant compte des
préoccupations du Tiers-Monde (en son alinéa 4). Dans sa version définitive, l'article 1er
est ainsi libellé :
Il 1. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à respecter et à faire respecter le
présent Protocole en toutes circonstances.
_._._-----_•._ -
(221) Ac1es CDDHll/l 1. ; voir aussi ABI-SAAB (G.), Wars of National Liberations and the
Geneva Conventions and Protocols, RCADI, Vol. 165, N, 1979, pp. 353-446.
(222) Cf Res. 2625 (XXV) de l'AGNU de 1970 "Déclaration relative aux principes du Droit
internationaL" in DtJPUY (P.M.), Grands textes de DIP..., op. cit., pp. 76-85.
,~223) Actes CDDHlII7S.
j(224) Les Etats africains francophones suivants ont voté cette disposition: Mali, Mauritanie,
Sénégal, Zaïre, Cameroun, Côte d'Ivoire, Tchad, Togo.

84
2. Dans les cas non prévus par le Présent Protocole ou par d'autres accords
internationaux, les personnes civiles et les combattants restent sous la
sauvegarde et sous l'empire des principes du droit des gens, tels qu'ils
résultent des usages établis, des principes de l'hwnanité et des exigences de
la conscience publique.
3. Le présent Protocole, qui complète les Conventions de Genève du 12 août
1949 pour la protection des victimes de la guerre, s'applique dans les
situations prévues à l'article 2 commun à ces conventions.
4. Dans les situations visées au paragraphe précédent sont compris les conflits
armés dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et
l'occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l'exercice du droit
des peuples à disposer d'eux-mêmes, consacré dans la Charte des Nations
Unies et dans la Déclaration relative aux principes du Droit international
touchant les relations
amicales
et la
coopération entre les
Etats
confonnément à la Charte des Nations Unies".
Le statut des guérilleros en fut, par la suite, stabilisé. Cette amélioration est
renforcée par l'article 44 du Protocole 1. Sa rédaction fut laborieuse. Les conditions
auxquelles les insurgés ou rebelles doivent se conformer pour bénéficier de la protection
du DIH furent jugées trop élevées par le Tiers-Monde(225). Pour la Côte d'Ivoire,
l'Algérie, le Camerowl et le Nigeria, le guérillero, lors d'une attaque, doit se distinguer de
la population civile en territoire occupé mais aussi dans les guerres de libération
nationale(226). A l'inverse, le délégué du Zimbabwe (Z.A.N.U.) soulignait que: "Les
membœs de cette organisation... ne pouvaient se distinguer de la population. Un guérillero
(225) Cf CHAUMONT (Ch.), A la recherche d'un critère pour l'intégration de la guérilla au droit
intemational humanitaire contemporain, in La Communauté internationale, Mélanges offerts à
Charles CHAUMONT, Paris, Pédone, 1974, p. 43.

85
dépend pour sa survie de sa confiance dans la population et de son étroite coopération avec
elle. TI dépend aussi de la population civile pour sa nourriture et quelquefois pour son
logement"(227). Le représentant du Z.A.N.U. s'appuiera sur l'argument selon lequel les
combattants de la liberté "ne peuvent s'offrir le luxe d'uniformes et d'emblèmes. Il n'est pas
rare d.e voir un guérillero livrer bataille, ayant pour seul uniforme un pantalon court en
lambeaux. La caractéristique de la guérilla est la grande inégalité qui règne entre les deux
f/arties, d'un côté le mouvement de libération nationale et de l'autre les armées des régimes
coloniaux et racistes" (228). Cette prise de position se rapproche de celle du délégué du Pan
Africanist Congress (P.A.C.X229). Les mouvements de libération nationale confinnent la
fonnule de Mao TSE TOUNG en vertu de laquelle la guérilla doit se mouvoir dans la
population civile comme "un poisson dans l'eau"(230).
Le texte de l'article 44 intègre ces préoccupations(231). Le principe de la
distinction entre combattants et non combattants reste maintenu, à l'exception des cas où
"en raison de la nature des hostilités", la séparation de la population ne peut pas se faire. En
tant que combattant, le guérillero capturé bénéficie du statut de prisonnier de guerre. S'il ne
porte pas ouvertement ses armes, il perd ce statut mais demeure sous la protection du DIH.
En défmitive l'article 44, en ses alinéas 3 et 4, se lit ainsi:
"... 3. Pour que la protection de la population civile contre les effets des
hostilités soit renforcée, les combattants sont tenus de se distinguer de la
population civile lorsqu'ils prennent part à une attaque ou à une opération
militaire préparatoire à une attaque. Etant donné, toutefois, qu'il y a des
situations dans les conflits armés où, en raison de la nature des hostilités, un
(226)1 BRETTON (ph.), L'incidence.. , op. cit., p.226.
(227) Actes CDDH!lWSR. 33-36, Annexe, p. 120, intervention du 24 mars 1975 (Z.A.N.U.).
(22f') Actes CDDHIIII/SR 33.36, idem.
(22'9) Actes CDDH/III/SR 33.36, Annexe p. 113, intervention du 24 mars 1975 (p.A.c.).
(23,0) Cité par VEUTHEY (M.), Guérilla et droit humanitaire, op. cil., p. 19.
(231) Les Etats africains francophones suivants ont voté le texte de l'article 44 : Sénégal, Côte
d'Ivoire, Mali, Mauritanie, Cameroun, Zaïre.

86
combattant anné ne peut se distinguer de la population civile, il conserve son
statut de combattant à condition que, dans de telles situations, il porte ses
annes ouvertement:
a) pendant chaque engagement militaire ; et
b) pendant le temps où il est exposé à la vue de l'adversaire alors qu'il prend
part à un déploiement militaire qui précède le lancement d'une attaque à
laquelle il doit participer.
Les actes qui répondent aux conditions prévues par le présent paragraphe
ne sont pas considérés comme perfides au sens de l'article 37, paragraphe
lc.
4. Tout combattant qui tombe au pouvoir d'une Partie adverse, alors qu'il ne
remplit pas les conditions prévues à la deuxième phrase du paragraphe 3,
perd son droit à être considéré comme prisonnier de guerre, mais bénéficie
néanmoins de protections équivalentes à tous égards à celles qui sont
accordées aux prisonniers de guerre par la Ille Convention et par le présent
Protocole. Cette protection comprend des protections équivalentes à celles
qui sont accordées aux prisonniers de guerre par la Ille Convention dans le
cas où une telle personne est jugée et condamnée pour toutes infractions
qu'elle aura commises... ". La valorisation des guerres de libération nationale
aura un prolongement avec la question du statut des parties au conflit.

87
2 - Le statut des parties au conflit
Le souci primordial des Etats nouveaux était (et demeure) la préservation de
leur souveraineté et de leur intégrité territoriale. Ceci transparaît dans les travaux de la
Conférence s'agissant du statut juridique des parties au conflit.
Selon le projet du CICR, l'octroi de statut juridique aux parties ne saurait
cOIÛérer aux insurgés et rebelles "mIe quelconque reconnaissance ou immunité pour éviter
toute action allant au-delà". Aussi, pour le représentant du Soudan, le Protocole 1 ne devait
être qu"'une simple concession" de la part des Etats qui accepteraient de l'appliquer à leurs
nationaux(232). Cette intervention recevra l'aval de Mr. BINTU, délégué du Zaïre(233).
Pour le CICR, toutes ces dispositions s'accompagnent de clauses de sauvegarde,
ménageant les susceptibilités des Etats.
Pour renforcer cette protection de l'Etat, le Nigéria proposa un amendement
pour condamner toute intervention autant de la part des Etats tiers au conflit que de celle
des organisations intergouvernementales ou d'ONG, ses craintes s'expliquant par son
f:xpérience de la guerre civile biafraise(234).
Aux termes de débats très animés, il fut admis que le fait d'appliquer le
Protocole et les Conventions, n'aura aUClUle incidence sur le statut des parties au conflit.
L'art. 4 du Protocole 1 reflète cette idée: "L'application des conventions et du présent
Protocole ainsi que la conclusion des accords prévus par ces instruments n'auront pas
d'dIet sur le statut juridique des Parties au conflit. Ni l'occupation d'un territoire ni
l'application des conventions et du présent Protocole n'affecteront le statut juridique du
territoire en question".
(232) Actes CDDH/SR 56, paragraphe 37 (EL HASSEEN EL HASSAN, Soudan).
(233) Actes CDDH, ibid., paragraphes 124-126 et CDDH/SR 50, Vol. VU, p. 106 (Explication de
vote, Zaïre).

88
Cette obsession de protection du statut juridique de l'Etat paraît encore plus
apaisée avec l'article 3 du Protocole II. Celui~ci est ainsi libellé:
"1. Aucune disposition du présent Protocole ne sera invoquée en vue de porter
atteinte à la souveraineté d'un Etat ou à la responsabilité du gouvernement
de maintenir ou de rétablir l'ordre public dans l'Etat ou de défendre l'unité
nationale et l'intégrité territoriale de l'Etat par tous les moyens légitimes.
2. Aucune disposition du présent Protocole ne sera invoquée comme une
justification d'une intervention directe ou indirecte, pour quelque raison que
ce soit, dans le conflit anné ou dans les affaires intérieures ou extérieures
de la Haute Partie contractante sur le territoire de laquelle ce conflit se
produit".
Cette victoire du Tiers-Monde a dissipé leurs craintes que le délégué de
l'Egypte résumait ainsi : "... plusieurs délégations du Tiers-Monde ont exprimé une
inquiétude légitime au sujet d'une éventuelle utilisation du Protocole II pour justifier une
intervention. Dans un monde où les menaces et les actes d'intervention, militaires ou
autres, sont courants, il importe de tenir compte de cette crainte"(235). Les Etats du Tiers-
Monde ont ainsi montré leur préférence pour une conception privilégiant le respect de la
souveraineté étatique ou la défendant en cas de remise en cause. Entre l'Etat "monstre
froid" et l'individu-rebelle· "avorton sublime" selon NIETSZCHE, le Tiers-Monde
privilégiait l'entité étatique(236). Une autre question, âprement discutée, concernait le
statut des mercenaires.
(234) Actes CDDH/I/239 (MALIK, Nigéria).
(235) Actes CDDH/I/SR 24, paragraphe 28 (ABI-SAAB, Egypte).
(236) BUIRETTE-MAURAU (p.), La participation du Tiers-Monde à l'élaboration du Droit
intemational. Essai de qualification - Bibliothèque de Droit International, Tome XC, LODI, 1983,
p.194.

89
3 - Le statut des mercenaires
Cette question souleva les débats les plus virulents. Les Etats occidentaux
étaient partisans de faire bénéficier les mercenaires des mêmes garanties et protections que
les autres combattants des forces armées d'une partie au conf1i~ tandis que l'hostilité du
Tiers-Monde était particulièrement vivace à l'encontre des mercenaires. Pour les Etats
africains, le statut des mercenaires ne pouvait se rapprocher de celui du guérillero luttant
pour une cause légitime.
Le représentant du Nigeria au groupe de travail de la Commission III eut ces
propos très durs : les mercenaires sont "des chacals au visage inhumain assoiffés de sang
africaln"(237), qui défendent des intérêts colonialistes, racistes ou néo-colonialistes(238).
Le Nigeria prendra la tête d'une croisade jetant l'anathème sur les mercenaires en proposant
une série d'articles déniant tout statut de combattant ou de prisonnier de guerre au
mercenaire(239).
Des délégations africaines proposèrent d'élargir la gamme des mercenaires pour
y intégrer les mercenaires "idéologiques"(240) ou "politiques et subversifs"(241) dans le
dessein de réprimer plus sévèrement ceux-ci.
(237) Cf BRETTON (ph.), L'incidence..., op. cil., p. 135.
(238) Dans le même sens, cf Déclaration du délégué de la Côte d'Ivoire - CDDHIllI/SR 13-40,
intervention du 15 décembre 1975, p. 293.
(239) Actes CDDHIIIIIGT 82, avril 1976.
(240) Actes CDDHIIIlI SR 57,29 avril 1977, p. 7, nO 21 (Zaïre). Pour le délégué du Zaïre, le texte
proposé était "une duperie" en encourageant "l'apparition d'une nouvelle catégorie de mercenaires,
ceux qui fondent leur action sur l'idéologie" qui combattent "aux côtés de rebelles par amour du
désordre et du sang", cf CDDH/III/SP. 57, p. 1%. Cité par El. KOUHENE (M.), Les garanties
fondamentales de la personne humaine en droit humanitaire et en droits de l'Homme, Martinus
NijhoffPublishers, p. 53.
(241) Actes CDDHIIII.SR57, 29 avril 1977, p. 8, N° 26 (Mauritanie). Pour le délégué de la
Mauritanie, certains mercenaires non motivés par l'appât du gain avaient plutôt des buts politiques
et subversifs. Cf CDDHIIIIISR57, p. 197. Cité par EL KOUHENE (M.), Les garanties
fondamentales..., op. cil., p. 53.

90
Le délégué du Mali militait pour Wle distinction entre le mercenaire et "celui
qui, pour des motifs plus nobles, s'engage dans des mouvements qui luttent pour la liberté
contre des régimes racistes et colonialistes rétrogrades"(242).
Le ressentiment le plus vif transparaît dans la proposition du Nigeria(243).
En défmitive, Wl compromis fut adopté, qui met en valeur la position africaine
même si le texte défInitif, de l'avis de la délégation mozambicaine(244) est en-deçà de ses
souhaits de supprimer tout droit, tout standard humanitaire minimum aux mercenaires. Le
statut du mercenaire est aujourd'hui juridiquement organisé par l'article 47 du Protocole 1
qui précise :
"1. Un mercenaire n'a pas droit au statut de combattant ou de prisonnier de
guerre.
2 - Le telme "mercenaire" s'entend de toute personne:
- - - - - - - - - - -
(242) Actes CDDH/IllISR.57, 29 avril 1977, p. 14, N° 51 (Mali).
(243) Actes CDDHJIIVSR 13-35 du 15 décembre 1975, p. 96, N° 28 (Nigeria). Toutefois, pour le
Nigeria auteur de la proposition d'article 47 (qui sera finalement adoptée grâce aux consultations
privées avec les différents chefs de délégation) : même si le mercenaire n'a pas droit aux statuts de
c;ombattant et de prisonnier de guerre, "il n'est pas question de refuser aux mercenaires les droits
dont ils doivent bénéficier, au même titre que le reste de l'humanité et les garanties fondamentales
prévues par le nouvel article 75. Seuls les droits accordés aux combattants et aux prisonniers leur
sont refusés".
CDDH/IIVSR.57, p.
194. Cité par EL KOUHENE (M.), Les garanties
tondamentales... , op. cit., p. 57. D'autre part, ce texte adopté en commission par consensus exclut
de la définition du mercenaire "les conseillers militaires, les ressortissants, les résidents du
territoire contrôlé par une Partie de même que les membres des forces armées dune Partie au
conflit ou d'un Etat". Cf. RICR, juillet 1977, N° 703, p. 387.
(244) Actes CDDHJlILI8R.57 du 22 avril 1977, p. 13, N° 47 (Mozambique). Cette délégation
souhaitait que la disposition englobe le recrutement, l'entnuÎlement, le rassemblement et la mise en
action des mercenaires ainsi que la responsabilité d'Etats encourageant ou autorisant cette activité.
Cf BRETTON (ph.), L'incidence... , op. cit., p. 236.

91
a) qm est spécialement recrutée dans le pays ou à l'étranger pour
combattre dans un conflit armé ;
b) qui en fait prend une part directe aux hostilités ;
c) qui prend part aux hostilités essentiellement en vue d'obtenir un
avantage personnel et à laquelle elle est effectivement promise, par une
Partie au conflit ou en son nom, une rémunération matérielle nettement
supérieure à celle qui est promise ou payée à des combattants ayant un
rang et une fonction analogues dans les forces armées de cette Partie;
d) qui n'est ni ressortissant d'une Partie au conflit, ni résident du territoire
contrôlé par une Partie au conflit;
e) qui n'est pas membre des forces armées d'une Partie au conflit; et
:t) qui n'a pas été envoyée par un Etat autre qu'une Partie au conflit en
mission officielle en tant que membre des forces armées dudit Etat". Un
autre problème qui aura divisé les délégations en 1977 a été celui des
moyens ou méthodes de guerre ou de combats.
4 - Les moyens ou méthodes de guerre ou de combats
Pour la clarté des développements, on distingue les moyens de combat qui
désignent les armes et les méthodes de combat qui correspondent à l'utilisation faite de ces
armes(245).
(2,45) Voir BAXTER (R.R), Comportement des combattants et conduite des hostilités in Les
Dimensions internationales du droit humanitaire, PédonelIHDIUNESCO, avril 1986, pp. 117-162;
BLIX (H.), Moyens et méthodes de combat, ibid., pp. 163-181.

92
Le texte du CICR n'envisageait que les moyens de combat, mais la conférence
'd'Experts gouvernementaux (Genève 1971) émit le vœu d'y ajouter la notion de
"méthodes" dans la perspective de l'élargissement des dispositions. Par la suite, des
controverses terminologiques aboutirent à un délaissement de l'expression "combat" au
profit du concept plus extensif de "guerre"(246) quoiqu'une survivance des tennes
abandonnés soit relevée aux articles 54 al. 1 ("FAMINE, METHODES DE COMBAT") et
51., al. 4, C ("méthodes ou moyens de combat") du Protocole I.
S'agissant des moyens ou méthodes de combat, un amendement dont les Etats
africains ont été co-auteurs, entendait, sans succès, introduire dans le Protocole 1, un article
intitulé : "Principes généraux pour la protection des ressources pétrolières et des
installations destinées à l'extraction, au stockage, au transport et au raffmage de
pétrole"(247). Cet amendement fut retiré en 1977. On peut en déduire que ces biens,
quoique d'une importance économique fondamentale, ne bénéficient pas d'une protection
spéciale du DIH. On n'interdit pas les attaques contre ces biens.
Cependant., une nuance doit être apportée à ce niveau. Le DIH interdit les
att.aques qui peuvent endommager durablement l'environnement naturel. De ce fait, toute
attaque d'installations pétrolières qui pourrait aboutir à une pollution fluviale ou maritime,
à la mise en péril des populations civiles, devrait être interdite par les chefs d'unités
combattantes.
Le principe cardinal d'interdiction de recourir à certains moyens et méthodes de
combat, dont l'origine remonte à l'article 22 du règlement annexé à la IVe Convention de
La Haye de 1907 sur les lois et coutwnes de la guerre sur terre, fut retenu par la nIe
Commission et inclus dans l'article 35 du Protocole [qui dispose:
(2416) Rapport de la IDe Commission, 2e session, CDDH/215/Rev.l du 15 décembre 1975, p. 19,
N'J 20.
(247) Actes CDDHlITI/GT.62/Rev.1 du 4 mai 1976 (Algérie, Nigeria, Egypte, Soudan...).

93
"1. Dans tout conflit anné, le droit des Parties au conflit de choisir des
méthodes ou moyens de guerre n'est pas illimité.
2. TI est interdit d'employer des annes, des projectiles et des matières ainsi
que des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus.
3. fi est interdit d'utiliser des méthodes ou moyens de guerre qui sont
conçus pour causer, ou dont on peut attendre qu'ils causeront des
dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel".
D'autre part, des délégations afro-asiatiques souhaitant la disparition d'un article
du projet du CICR sur la protection des biens indispensables à la survie de la population
civile (dont le pendant était déjà pris en compte dans le Protocole J) ont dû revenir sur leur
position à la suite de l'intervention énergique du représentaIit du Saint-Siège épaulé par
l'URSS et l'Algérie(248).
Les délégations se sont aussi opposées sur la définition des attaques. Les Etats
du camp socialiste, soutenus par les Etats africains, avaient proposé un article traitant de
l'agression colonialiste ou néo-colonialiste. Les réticences des Etats occidentaux (qui
s'estimaient visés) sur l'inopportunité d'un tel article traitant d'une question difficile parce
que discutée (référence était faite aux négociations sur la définition de l'agression ayant
débouché sur la Résolution 3314 (XXIX) de l'AGNU du 14 décembre 1974) conduisirent à
la recherche d'une solution de compromis qui ne faisait plus allusion à l'interdiction de
toute agression qu'au niveau du préambule.
Les attaques sont définies de façon lapidaire par l'art. 49 al. 1 qui dispose :
"L'expression "attaques" s'entend des actes de violence contre l'adversaire, que ces actes
soient offensifs ou défensifs". Quant au Préambule du Protocole 1, il satisfait aux diverses

94
exigences des deux camps, en son paragraphe 4 en disposant: "... Exprimant leur
conviction qu'aucune disposition du présent Protocole ou des Conventions de Genève du
12 août 1949 ne peut être interprétée comme légitimant ou autorisant tout acte d'agression
ou tout autre emploi de la force incompatible avec la Charte des Nations Unies".
En revanche, l'interdiction d'attaquer l'environnement naturel ne suscita guère
de contestation quant à la nécessité de sa protection en cas de conflit armé. L'article 55 du
P'rotocole 1précise, à cet égard:
"1. La guerre sera conduite en veillant à protéger l'environnement naturel contre
des dommages étendus, durables et graves.
Cette protection inclut
l'interdiction d'utiliser des méthodes ou moyens de guerre conçus pour
causer ou dont on peut attendre qu'ils causent de tels dommages à
l'environnement natureL compromettant, de ce fait, la santé ou la survie de
la population.
2. Les attaques contre l'environnement naturel à titre de représailles sont
interdites".
Par ailleurs, la Conférence traitera de la question de la répression des
infractions au D.I.H.
5 - Le problème des infractions graves
La contribution des Etats africains peut, ici, s'apprécier par rapport à
l'intégration dans le texte du CICR, de problèmes auxquels ils sont confrontés, qui
mena,";aient leur survie en tant qu'entités souveraines et mobilisaient leurs actions au niveau
(248) Actes CDDH/SR.52, paragraphes 79-82 (LUONI, Saint-Siège).

95
des instances internationales, en l'occurrence : "les pratiques de l'apartheid et les autres
pratiques inhumaines et dégradantes, fondées sur la discrimination raciale et qui donnent
lieu à des outrages à la dignité personnelle". Cette disposition qu'on doit à l'URSS a gagné
l'adhésion de la Tanzanie, de la Mongolie et de l'Ouganda(249).
L'Mrique du Sud, Etat visé, se retira des travaux, ce qui amena le Nigeria à
demander à la Conférence de prendre we résolution exprimant "la préoccupation" quant
aux suites de cette non-participation et enjoignant le Président de la Conférence d'obtenir
des assurances quant au respect par le gouvernement de Prétoria des Conventions de
Genève et des principes du DIH(250).
Un autre apport du Tiers-Monde est l'article 91 du Protocole 1 qui n'existait pas
dans le texte initial du CICR. L'Algérie et la Yougoslavie présentèrent cet ajout à la suite
de recommandations de la Conférence des pays non alignés à Colombo (Sri-Lanka, 1976)
qui exigeait "des réparations pour les pays en développement victimes des occupations
étrangères qui ont entraîné pour eux de graves pertes de vies et de biens en même temps
que la réduction et la dégradation des ressources naturelles et de toutes les autres
ressources de ces Etats, territoires et peuples"(251). L'article 91 traite du problème de la
responsabilité. Ses dispositions sont conçues en termes très généraux: "La Partie au conflit
qui violerait les dispositions des Conventions ou du présent Protocole sera tenue à
indemnité, s'il y a lieu. Elle sera responsable de tous actes commis par les personnes faisant
partie de ses forces armées". Une fois que ces différents points relevant du Protocole 1 ont
été traités, la Conférence s'attardera longuement sur la question de l'utilité ou non d'w
Protocole II sur les conflits armés non internationaux.
(249) Cette disposition est devenue l'article 85, § 3, c du Protocole 1 de 1977. Voir également
Actes CDDH/I/SR.47, 30 avril 1976, p. 9 et p. 49, et 3 mai 1976, p. 10.
(250) Actes CDDH/Res.7 (II), 7 février 1975.
(251) Cité par BRETTON (ph.), L'incidence... , op. cit., p. 243.

96
6 - Le problème de l'utilité du Protocole II
On peut exposer la conception afro-asiatique en ces tennes : "Les Etats du
Tiers-Monde étaient partisans, puisque les guerres de libération nationale contre le
colonialisme étaient intégrées dans le premier Protocole, de renvoyer tous les autres
mouvements de libération nationale au système de protection prévu par le deuxième
Protocole qui est beaucoup plus restreint"(252). Une fois ce résultat atteint, l'utilité du
second Protocole fut contestée. Lors de l'examen du texte de Protocole II du CICR en
séance plénière, le représentant du Nigeria tiendra les propos suivants, très significatifs
encore de nos jours:
"La délégation du Nigeria n'a cessé, depuis le début, de mettre en garde la
Conférence contre le danger qu'il risque de faire courir au maintien de la
stabilité dans les pays en développement... En effet, les situations qui y sont
évoquées se vérifieront, selon toute probabilité, dans les jeunes Etats tels que le
Nigeria et dans ceux qui naîtront de luttes armées contre les régimes répressifs
mentionnés à l'article premier du projet de Protocole I. Or, il est d'expérience
qu'au cours de telles luttes armées, nombreux seront les vautours qui
s'assemblent, prêts à s'abattre et à semer la confusion. Combien de guerres ont
été ainsi inutilement prolongées et combien de conflits, qui auraient pu être
localement réglés, ont été volontairement étendus par des marchands d'annes
ou des manipulateurs qui, trop souvent, n'étaient autres que des Etats qui,
prêchant l'humanitarisme, n'avaient en réalité dans le cœur d'autre souci que
celui d'empêcher les peuples qu'ils oppriment d'accéder à l'indépendance
politique et économique. Il est donc à craindre que, de nouveau, certains
éléments dépourvus de scrupule, n'hésitent pas le jour venu, à exploiter les
principes humanitaires -louables certes- exposés dans le présent Protocole, pour
(252) BUIRETTE-MAURAU (p.), op. cit., p. 195.

97
parvenir à leurs fms. Pour ces motifs, la délégation du Nigeria ne peut donner
au Protocole II, un appui sans réserve (...), en raison de la présence de quelques
articles qui risquent d'être utilisés comme "chevaux de Troie" pour justifier des
ingérences dans les affaires intérieures des Etats et pour miner la stabilité
politique des pays en développement"(253).
Toute extension de l'article 3 commun aux Conventions de Genève (dont le
Protocole II devait consacrer l'approfondissement) eut impliqué la restriction parallèle de la
liberté d'action des Etats dans leur sphère interne. D'après le projet du CICR, le Protocole
II avait flXé comme seuil d'application, une limite supérieure : "Le présent Protocole
s'appliquera à tous les conflits armés qui ne sont pas couverts par l'article 2 commun aux
Conventions de Genève.. .''' et posé une limite inférieure : "Le présent Protocole ne
s'applique pas aux situations de troubles intérieurs et de tensions internes, notamment aux
émeutes, aux actes isolés et sporadiques de violence et autres actes analogues"(254).
Trente-quatre délégations du Tiers-Monde dont le Cameroun ont voté contre le premier
article du Protocole II, faisant ainsi montre de leur opposition au seuil d'application
élevé(2S5) et redoutant des atteintes au principe de la souveraineté étatique. D'autres Etats
comme la Chine et l'Mrique du Sud ont même quitté la Conférence après la session de
1974.
Aussi ces Etats se défiaient-ils, à l'image de la Chine, de ce projet de Protocole
II : "Vu l'ambiguïté de l'expression "conflits armés non internationaux" qui peut donner
heu à des interprétations diverses, la Chine comprend les doutes et inquiétudes exprimés à
'cet égard et, dans ces conditions, pense que le projet de Protocole II, qui s'applique à la
guerre civile, pose des problèmes fondamentaux. Aussi la présente Conférence devrait-elle
axer ses discussions sur le projet de Protocole 1 et s'abstenir d'examiner le projet de
(253) Cf CDDH/SR.56, p. 201 cité par EL KOUHENE (M.), Les garanties fondamentales..., op.
cit., pp. 70-71.
(254) Article 1er du Protocole II.

98
Protof;ole II''(256). L'Afrique s'alignait en majorité sur cette position. Voici l'explication de
vote du délégué zaïrois : "Plusieurs dispositions de ce projet de Protocole II empiètent sur
les règles de droit interne des Etats et, par là même, compromettent dangereusement la
souveraineté et les compétences territoriales de ces Etats qui, confonnément au paragraphe
7 de l'article 2 de la Charte des Nations Unies, relèvent du domaine réservé. L'erreur de ce
projet de Protocole II, du moins de certaines de ses dispositions, a été de traiter sur un pied
d'égalité un Etat souverain et un groupe de ses ressortissants insurgés, un gouvernement
légal et un groupe de hors-la-loi, un sujet de droit international et un sujet de droit
inteme"(257). Dans la même veine, le délégué du Pakistan se faisait l'interprète des
inquiétudes du Tiers-Monde lorsqu'il proposait que "le concept de conflit armé non
international ne s'applique pas quand il s'agit d'un conflit armé engagé par un groupe racial
ou ethnique contre son propre gouvernement. De même, un groupe de population d'un
pays qui a réussi à se dégager de la tutelle étrangère et qui a acquis son indépendance
nationale, ne peut prétendre légitimement qu'un mouvement de sécession avec le
gouvernement national est une lutte pour l'auto-détermination"(2S8). D'autre part, le Tiers-
Monde préconisait une limitation de l'intervention des organisations humanitaires. Dans
tous les cas, toute offre de service d'organisme humanitaire devra respecter la souveraineté
étatique(2S9). En défmitive, le projet de Protocole II du CICR fut remanié et réduit: "Des
47 articles initiaux, seuls 28 se retrouvent dans le texte rmal; et sm ces 28 articles, 10 se
Cl55) Actes CDDHlSR49, Vol. VII, p. 85 (Explication de vote, Cameroun).
t256) Actes CDDWSR 12, paragraphes 14-20 (pI-Cfll-LUNG, Chine).
(257) Actes CDDHlSR56, p. 44 et s.
(258) Actes CDDHlSRl-22, p. 101. Le Pakistan proposera un texte de protocole II, simplifié
tenant compte des différentes préoccupations du Tiers-Monde, des Etats socialistes et des Etats
occidentaux. Le représentant du Pakistan, le Juge HUSSEIN dira, à ce propos, que ces dispositions
ne devaient pas dépasser : "les capacités normales de ceux qui auront à les respecter ; elles ne
doivent paraître toucher ni à la souveraineté des Etats parties, ni à la responsabilité du maintien de
l'ordre et de la légalité, et de la protection de l'unité nationale qui est celle de leurs gouvernements
ni pouvoir être invoquées pour justifier une intervention extérieure ; rien dans le Protocole ne doit
laisser supposer que les dissidents doivent être traités sur le plan juridique, autrement que comme
des rebelles", cf
CDDWSR49, pp.
60-61
cité par EL KOUHENE
: Les garanties
fondamentales... , op. cit., p. 67.
(259) Actes CDDHlIJ59, paragraphe 86 (BABA, Ouganda).

99
rapportent aux clauses finales"(260). Un "PACKAGE-DEAL" laborieux apaisant les
c:raintes des Etats du Tiers-Monde et les préoccupations de protection humanitaire de
rOccident, facilita l'adoption de ce Protocole II simplifié afin d'éviter de ne pas avoir de
Protocole du tout, nonobstant les nombreuses supputations sur les lacunes de ce texte(261).
L'origine européenne du DIH, entre autres obstacles à une meilleure réception en Afrique,
est doublée par les entraves inhérentes à la sauvegarde du principe de la souveraineté
étatique.
(260) ABI-SAAB (R), Droit humanitaire et conflits internes... , op. cit., p. 174.
(261) THIERRY (H), SUR (S.) et alii, op. cit., p. 539.

100
CHAPITRE II - L'ECRAN DU PRINCIPE DE SOUVERAINETE DES
ETATS AFRICAINS
Deux tendances contradictoires transparaissent à ce niveau. Le DIH, branche du
DIP, se préoccupe des Etats, principaux sujets et destinataires des normes humanitaires.
Plusieurs dispositions du DIH nécessitent l'intervention des Etats pour une application
adéquate. Le principe de la souveraineté, attribut essentiel ou caractère (critère) juridique
indispensable, constitue une marque de l'Etat impliquant sa capacité à être lié par des
engagements conventionnels. Le respect de ce principe est une donnée fondamentale du
Dili (Section 1). Toutefois, ce souci de préservation de l'espace étatique de toute nonne
contraire à la souveraineté laisse entrevoir une pratique africaine dont la lecture dévoile un
usage de ce principe à l'encontre du Dili (Section II).
SECTION 1 - L'admission du principe par le D.I.H.
En général, le DJ.H. s'inscrit dans la logique du DIP, consacrant depuis
l'époque classique, le principe de souveraineté, à travers le volontarisme étatique. Le
consensualisme dominant des règles du DIH reflète le respect de la souveraineté étatique
(Paragraphe 1).
En particulier, le développement d'un régionalisme prospère, tenant compte des
préoccupations d'Etats géographiquement proches et solidarisés par des intérêts de
voisinage, a rendu fluide la cohabitation d'un DIH à vocation universelle avec des règles
ayant pour cadre le continent africain (Paragraphe II).

100
CHAPITRE II - L'ECRAN DU PRINCIPE DE SOUVERAINETE DES
ETATS AFRICAINS
Deux tendances contradictoires transparaissent à ce niveau. Le DIH, branche du
DIP, se préoccupe des Etats, principaux sujets et destinataires des normes hwnanitaires.
Plusieurs dispositions du Dili nécessitent l'intervention des Etats pour Wle application
adéquate. Le principe de la souveraineté, attribut essentiel ou caractère (critère) juridique
indispensable, constitue Wle marque de l'Etat impliquant sa capacité à être lié par des
engagements conventionnels. Le respect de ce principe est une donnée fondamentale du
DID (Section 1). Toutefois, ce souci de préservation de l'espace étatique de toute norme
contraire à la souveraineté laisse entrevoir Wle pratique africaine dont la lecture dévoile Wl
usage de ce principe à l'encontre du DIH (Section II).
SECTION 1 - L'admission du principe par le D.I.H.
En général, le D.I.H. s'inscrit dans la logique du DIP, consacrant depuis
l'époque classique, le principe de souveraineté, à travers le volontarisme étatique. Le
consensualisme dominant des règles du DIH reflète le respect de la souveraineté étatique
(J~aragraphe 1).
En particulier, le développement d'Wl régionalisme prospère, tenant compte des
préoccupations d'Etats géographiquement proches et solidarisés par des intérêts de
voisinage, a rendu fluide la cohabitation d'Wl DIH à vocation universelle avec des règles
ayant pour cadre le continent africain (Paragraphe II).

101
Paragraphe 1 - Des règles respectant le principe de souveraineté
Le recours au principe de la souveraineté de l'Etat est fréquent dans le DilI
parce que: "le droit humanitaire est un droit d'Etat., conclu et appliqué par les Etats"(262).
Le principe de la souveraineté contient de multiples ramifications : égalité des Etats,
indépendance, respect de l'intégrité de l'Etat et du principe de sa compétence nationale.
Pierre angulaire du droit international(263), la souveraineté est souvent
assimilée à l'indépendance. Le Pr. VIRALLY l'admet: "Aux yeux de la plupart des
hommes politiques [... ] et d'abord des Etats nouveaux, la souveraineté est le rempart de
l'in.dépendance des peuples et il s'agit., donc, bien plutôt., d'en mieux assurer le
flespect"(264).
Se concevant comme un pOUVOIr initial, inconditionné et suprême, la
souveraineté compte deux volets, interne et externe. Au plan interne, elle suppose la
supériorité de l'Etat sur tout autre pouvoir (entité privée, démembrement de l'Etat ou autre
collectivité locale décentralisée) organisé en son sein. Au plan externe, elle fonde la
capacité juridique de l'Etat et légitime sa volonté de préservation de son autonomie d'action
et de décision dans la sphère des relations internationales. n en découle que l'Etat est en
même temps sujet et objet du droit international public. Le juge BEDJAOUI part de ce
biface identitaire de l'Etat pour cerner sa relation avec le droit: "Dès lors que l'on part du
postulat: qu'il n'existe aucune autorité supérieure à l'Etat., comment la nOlIDe de droit
international peut-elle être produite pour et être appliquée par cet Etat souverain? On
(262) PICTET (l), Développement et Principes..., op. cit., p. 104.
(263) Cf VIRALLY (M.), Une pierre d'angle qui résiste au temps: Avatars et pérennité de l'idée
de souveraineté, in Les relations internationales dans un monde en mutation, 1.u.H.E.!., Genève,
1977, Sijthoff-Leiden, pp. 179-195. VIRALLY remarquait que: "Parmi les concepts dont fait
usage le droit international, la souveraineté est, sans doute, le plus maudit et le plus révéré" (p.
179).
(264) V1RALLY, idem., p. 179. Cf. également Affaire de l'Ile Palmas, infra note nO 269.

102
devine qu'il n'existe qU'Wle seille réponse possible à cette question, à savoir que le droit
international n'a pu historiquement et ne pourra encore longtemps être autre chose qu'Wl
droit reposant assez largement sur le consentement, exprès ou tacite, des Etats. Cela donne
sa nature véritable et sa tonalité réelle à ce droit. 11 apparaît plus comme Wl droit de
coordination (entre les compétences toutes souveraines des différents Etats) qu'un droit de
subordination, comme l'est le droit interne qui régit des sujets, au besoin par la coercition
exercéf~ par l'appareil d'Etat"(265). Par conséquent, on conviendra que: "la souveraineté
confi';re directement à l'Etat la qualité d'auteur de la règle de droit; il peut, en effet;
s'engager directement sur le plan international soit par la conclusion de conventions
h:lternationales soit par l'adoption d'un fait opposable, toutes les deux créatrices
d'obligations juridiques internationales. Par ailleurs, la souveraineté fait de l'Etat un sujet
immédiat de droit international"(266).
La nécessité de la réunion de trois éléments constitutifs cumulatifs pour tout
Etat (territoire, population, pouvoir politique organisé) n'est suffisante que par l'adjonction
de deux éléments juridiques, à savoir la personnalité et la souveraineté.
La souveraineté dissout en elle les éléments de compétence personnelle,
matérielle et territoriale de l'Etat. Il est utile de rappeler, dans ce sens, les précisions du Pr.
VIRALLy : "dans l'ordre international, l'Etat dispose de la plénitude de la capacité
juridique internationale, en ce sens qu'il peut poser tous les actes juridiques du droit
international et est le destinataire actuel et potentiel de toutes les règles composant le droit
international général (c'est-à-dire valables erga omnès). Les autres sujets du Droit
(265) BEDJAOUI (M.), (sous la direction de), Droit international, Bilan et perspectives, Paris,
UNESCO, Pédone, 1991, p. 2.
(266) RANJEVA (R.) et CADaux (C.), Droit international public, op. cit., p. 81. Cf. également
eARRILLO-SALCEDO (lA), Droit international et souveraineté des Etats, ReADI 1996, Vol.
157, p. 60. L'auteur précise, à cet etfet : "La souveraineté peut donc être définie à la fois comme
l'expression et la garantie juridique de l'indépendance des Etats. Ainsi comprise, elle présente deux
aspects complémentaires: un aspect positif, le droit à l'exercice de la plénitude des compétences et

103
international n'ont qu'une capacité juridique restreinte: ils ne sont destinataires que de
règles de droit international spécifiques, qui leur sont spécialement destinées, ou de
certaines règles de Droit international général qui leur sont appliquées par extension. C'est
pour cette raison que le Droit international demeure, fondamentalement, un droit
"ïnterétati.que"(267)
Concept technique, la souveraineté reste le point nodal autour duquel gravitent
les relations des Etats membres des Nations Unies dont la Charte rappelle: "l'organisation
est fondée sur l'égalité souveraine de tous ses membres"(268). Rapporté au DJ.H., le
principe signifie que tous les Etats doivent respecter les obligations auxquelles ils ont
librement souscrites et leurs droits doivent être également respectés.
Critère international de l'Etat, la souveraineté insuffle un regain d'énergie à
l'indépendance. Ainsi, était-elle envisagée par l'arbitre Max HUBER dans l'affaire de l'ne
Palmas : "La souveraineté dans les relations entre Etats signifie l'indépendance.
L'indépendance, relativement à une partie du globe, est le droit d'y exercer à l'exclusion de
tout autre Etat, les fonctions étatiques. Le développement de l'organisation nationale des
EWLts durant les derniers siècles et, comme corollaire, le développement du droit
in1LernationaL ont établi le principe de la compétence exclusive de l'Etat en ce qui concerne
son propre territoire, de manière à en faire le point de départ du règlement de la plupart des
questions qui touchent aux rapports intemationaux"(269). Cette indépendance n'est pas,
pour autant, limitée par les devoirs de l'Etat. Le Pro ANZILOTTI dans sa célèbre opinion
dissidente dans l'affaire du Régime Douanier Austro-Allemand, abondait dans ce sens:
"Les limitations de la liberté d'un Etat, qu'elles dérivent du Droit international commun ou
des pouvoirs étatiques. et un aspect négatif, la négation de toute subordination juridique à une
volonté extérieure à celle de l'Etat".
(267) VlRALLY (M.), Panorama.... op. cit., p. 72.
(268) Article 2, paragraphe 1, Charte des Nations Unies.
(2(';9) Cour Permanente d'Arbitrage, 4 avril 1928, Recueil des Sentences Arbitrales, Vol. il, p. 838,
citée par THIERRY (H), Droit et Relations Internationales (Traités, Résolutions, Jurisprudence),
Paris, Montchrétien, 1984, p. 676,

104
d'engagements
contractés,
n'affectent,
aucilllement,
en
tant
que
telles
son
indépendEmce"(270). n en résulte que la capacité de l'Etat est lll1e conséquence de la
souveraineté. La CP.J.!. se prononçait ainsi : "La Cour se refuse à voir dans la conclusion
d'un traité quelconque, par lequel illl Etat s'engage à faire ou à ne pas faire quelque chose,
lll1 abandon de la souveraineté. Sans doute, toute convention engendrant une obligation de
ce genre apporte une restriction à l'exercice des droits souverains de l'Etat, en ce sens
qu'elle imprime à cet exercice lll1e direction détenninée. Mais la faculté de contracter des
engagements internationaux est précisément un attribut de la souveraineté de l'Etat"(271).
L'article 6 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités apporte
cette confinnation : "Tout Etat a la capacité de conclure des traités". Les Etats sont
titulaires de droits et d'obligations selon le Droit international. Le Droit international
humanitaire n'échappe pas à cette règle fondamentale. Tout engagement de l'Etat suppose
au préalable son consentement exprès ou tacite. Ceci découle d'une jurisprudence
longtemps établie par la CPJI dans l'affaire Lotus: "le Droit international régit les rapports
entre des Etats indépendants. Les règles de droit liant les Etats procèdent donc de la
volonté de ceux-ci, volonté manifestée dans des conventions ou dans des usages acceptés
gènéralement comme consacrant des principes de droit et établis en vue de régler la
coexistence de ces communautés indépendantes ou en vue de la poursuite de buts
communs. Les limitations de l'indépendance des Etats ne se présument donc pas"(272). Par
conséquent, toute obligation consentie doit se traduire soit par une action, soit par lll1e
omission (au sens de devoir de s'abstenir) puisque "la souveraineté n'implique nullement
que l'Etat peut s'afiTanchir des règles du Droit international. Au contraire, l'Etat n'est
(270) Cour Pennanente de Justice Internationale, Régime Douanier Austro-Allemand, 5 septembre
1931, Série NB, N° 41, p. 57, cité par NGUYEN et alii., op. cit., p. 406.
(271) c.p.n., Affaire du Vapeur Wimbledon, Arrêt du 17 août 1923, Série A, N° 1, p. 25 in
THlliRRY (H.), op. eït., p. 651.
(272) CPll, Affaire Lotus, Arrêt du 7 septembre 1927, Série A, N° 10, p. 18 in THIERRY (H),
op. cit., p. 652.

105
souverain que s'il est soumis directemen~ immédiatement au Droit international"(273).
Ceci constitue l'interprétation d'une attitude constante et dépourvue d'ambiguïtés~ de la CU,
selon laquelle l'Etat est une entité: "relevant... directement du Droit international"(274).
Dans cet ordre d'idées, la souveraineté, ensemble de pouvoirs~ de droits et
d'obligations, postule en retour l'obéissance au Droit international. L'Etat n'est pas libre de
faire ce qu'il veut. La clarification du Pr. CARRILLO-SALCEDO est édifiante à cet égard
: "En parlant de souveraineté, on n'entend pas dire que l'Etat échappe à l'empire de toute
règle de droi~ mais seulement qu'il n'y a aucun pouvoir établi qui soit supérieur à l'Etat; en
d'autres termes, les Etats indépendants n'ont au-dessus d'eux aucune autorité, si ce n'est
celle du Droit international. Certes, les Etats ne sont pas des créatures de l'ordre juridique
international: ils existent per se et de facto; le Droit international ne peut leur conférer la
souveraineté et il se limite à en prendre acte et à leur offrir sa protection. La souveraineté
des Etats n'est donc pas une délégation du droit international"(275).
La nécessité de faire régner l'ordre dans une société internationale où le degré
d'intégration est faible du fait de l'absence de tout législateur international supérieur aux
Etats impose le respect du Droit international car la société des Etats "n'est possible que
dans la mesure où les Etats qui Y participent n'agissent pas d'une manière arbitraire~ mais
conforment leur conduite à des règles qui limitent la liberté d'action de chacun des Etats et
établissent la façon dont ils doivent se comporter dans leurs relations mutuelles"(276).
- - - - - - - - - - - - -
(273) NGUYEN (Q.D.) et alii, op. cit., pp. 406-407.
(274) CU, Avis Consultatif, Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, Il avril
1949, Rec. 1949, p. 178, cité par Hubert THIERRY, op. cit., p. 656.
(275) CARRILLO-SALCEDO (lA), Droit international et souveraineté des Etats, RCADL 1996,
Vol. 157, p. 44.
(276) Cf. ANZILOTTI (D.), Cours de Droit international public, VoL J, Traduction française de
Gilbert GIDEL, Paris, Sirey, 1929, pp. 32, 42 et 51.

106
Subséquemment au principe de l'indépendance de l'Etat, son autonomie garantit
sa liberté d'action et de contraction. La conséquence qu'on en déduit est que l'Etat doit
obéir aux règles et décisions qu'il s'est imposées, de son propre chef, par son consentement.
La souveraineté étatique englobe la possibilité de consentir ou non aux
obligations juridiques. Il faut reconnaître que "le consentement des Etats qui est la soi-
disante base du Droit international n'est pas, comme on le suppose souvent, leur
consentement aux règles individuelles, mais leur consentement à adhérer à l'ordre juridique
international. En devenant membres de ce club, ils consentent à s'obliger par ses règles. En
contrepartie, ils reçoivent les avantages que l'on peut tirer des mêmes règles"(277).
L'Etat ne peut se soustraire à ses engagements dès lors que ceUX-Cl sont
l'expression d'une volonté libre, éclairée et alertée et que ses actes ne sont pas entachés de
vice rédhibitoire (art. 34 à 38 Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969). n
s'agit de la théorie très usitée des vices du consentement, consacrée aujourd'hui par les
articlt~s 48 à 52 de la Convention de Vienne de 1969 (l'erreur, le dol, la corruption du
reprè;entant de l'Etat, la violence ou la contrainte) et que l'article 53 continue par la
rétention de la norme de Jus Cogens dont la violation entraîne une nullité plus radicale que
celle des vices précédents.
Ces différents vices extirpés, l'Etat dispose d'une totale latitude de poser ses
normes réglementaires et législatives en conformité avec sa Constitution. Ce pouvoir
d'édiction des normes et de s'auto-organiser comme il l'entend sur le plan interne doit se
comprendre relativement à ses devoirs. En Droit international, la soumission de l'Etat à des
obligations ne le dépouille pas de sa souveraineté. L'adoption par le Droit international du
principe de la souveraineté n'est pas seulement conventionnelle, elle est aussi résolutoire.
Plusieurs résolutions de l'AGNU appellent au respect de ce principe. On peut citer, entre
(277) Cf. CHENG (B.), La jurimétrie : sens et mesure de la souveraineté juridique et de la
compétence nationale in lD.I., 1991, 118e année, N° 3, juillet-août-septembre, pp. 579-599.

107
autres, la Résolution 1514(278), les principes 1(279), 111(280), VI(28!) et VII de la
Résolution 2625(282), la Résolution 3314(283) et la Résolution 37/10(284). D'autres
c,onventions hwnanitaires recourent au principe : la Convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide(285) et la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes
de guerre et des crimes contre l'humanité(286), etc.
(278) Res. 1514 (XV) de l'AGNU: Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et peuples
coloniaux, ]4 décembre ]960, in DUPUY (p.M.), Grands textes de Droit international public, op.
cit., pp. 73··75 : le paragraphe 6 de la Déclaration dispose : "Toute tentative visant à détruire
partiellement ou totalement l'unité nationale et l'intégrité territoriale d'un pays est incompatible
avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies".
(279) Res. 2625 (XXV) de l'AGNU : Déclaration relative aux principes du Droit international
touchant les relations amicales et la coopération entre Etats, conformément à la Charte des Nations
Unies, 24 octobre 1970.ID DUPUY (p.M.), op. cit., pp. 76-85. La Déclaration proclame le Principe
l : « Les Etats s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à
l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit
de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies» (principe repris de l'art. 2 §
4 Charte de l'ONU).
(280) Le Principe ru de la Res. 2625 est "relatif au devoir de ne pas intervenir dans les affaires
relevant de la compétence nationale d'un Etat, conformément à la Charte" (A rapprocher de l'art. 2
§ 7 Charte de l'O~lJ).
(281) Le Principe VI est "le Principe de l'égalité souveraine des Etats".
(282) Le Principe VII est "le Principe que les Etats remplissent de bonne foi les obligations qu'ils
ont assumées conformément à la Charte".
(283) Res. 3314 (XXIX) de l'AGNU : Définition de l'agression, 14 décembre 1974 in DUPUY
(p.M.), op. cit., pp. 261-264, réaffirme (au point 7 de son préambule) : "Le territoire d'un Etat est
inviolable et ne peut être l'objet, même temporairement, d'une occupation militaire ou d'autres
mesures de force prises par un autre Etat en violation de la Charte et qu'il ne fera pas l'objet, de la
part. d'un autre Etat, d'une acquisition résultant de telles mesures ou de la menace d'y recourir".
(28") Res. 37/1 0 de l'AGNU : Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends, 15
novembre 1982 (1 § Il du dispositif) affirme "les Etats doivent appliquer de bonne foi,
confomlément au Droit international, toutes les dispositions des accords conclus par eux pour le
règlement de leurs différends".
(285) L'article V de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide du 9
décembre 1948 (adoptée par la Résolution 260 A (m) de l'AGNU, in Droits de l'Homme. Recueil
d'Instmments Internationaux (pp. 143-147) dispose : "Les Parties contractantes s'engagent à
prendre conformément à leurs Constitutions respectives, les mesures législatives nécessaires pour
assurer l'application des dispositions de la présente convention et, notamment, à prévoir des
sanctions pénales efficaces frappant les persomles coupables de génocide ou de l'un quelconque
des autres actes énumérés à l'article ID".
(286) L'article III de la Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes
contre l'humanité (adoptée par la Résolution 2391 (XXIII) du 26 novembre 1968 in Droits de
l'Homme..., ibid., pp. 147-151) dispose: "Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à
prendre, conformément à leurs procédures constitutionnelles, toutes les mesures législatives ou

108
Par ces dispositions conventionnelles, le DIH s'impose aux Etats pareillement,
ainsi qu'il découle de l'art. 56, al. 3, c du Protocole 1 de 1977 : "Les Conventions et le
prés/ent Protocole lient d'une manière égale toutes les Parties au conflit".
Les Etats sont débiteurs d'une double obligation : celle de respecter et de faire
respecter le DIH(287). Ces obligations découlent du principe selon lequel tout Etat
contractant doit agir de façon à ne pas priver les engagements souscrits, de tout objet.
L'application du DIH devra se faire de bonne foi en vertu du principe PACTA SUNT
SERVANDA. L'article 26 de la Convention de Vienne sm le droit des traités de 1969
affnme de façon péremptoire: "Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par
elles de bonne foi".
La plupart des dispositions du Droit international ne sont pas SELF-
EXECUTING (n'opèrent pas d'elles-mêmes). Elles nécessitent, pour leur application au
plan interne, l'adoption de mesures législatives et réglementaires par l'Etat
En vertu du principe de la souveraineté de l'Etat, l'application du DIH devra être
conforme aux règles constitutionnelles. Cette appropriation interne du DIH passe, a priori,
par le respect de l'ordre juridique national. Ainsi, les mesmes suivantes tendant à une
application rationnelle du DIH sm le plan interne, devront être compatibles avec les
normes législatives et réglementaires de l'Etat Le DIH prescrit aux Etats de s'obliger
internationalement sans méconnaître lems propres règles nationales, en se communiquant
autres qui seraient nécessaires pour assurer l'imprescriptibilité des crimes visés,..., tant en ce qui
concerne les poursuites qu'en ce qui concerne la peine ; là où une prescription existerait en la
maflère, en vertu de la loi ou autrement, elle sera abolie". La Convention de 1968 n'a été ratifiée en
Afrique que par le Cameroun (1972), la Gambie (1978), la Guinée (1971 avec réserve), le Kenya
(1972), le Nigeria (1970), le Rwanda (1975) et le Burundi (1997).
(287) Cf. ne Partie, Titre II de cette présente thèse.

109
les traductions des textes et des lois d'application(288), en favorisant la promotion et la
diffusion du DIH(289), en ratifiant(290) et en prenant d'autres mesures d'exécution(291).
En vertu du principe AUT JUDICARE AUT DEDERE, tout Etat peut juger les
personnes coupables de violations graves du DIH ou les extrader vers des Etats plus
intéressés par le respect de cette obligation.
En contrepartie des obligations énoncées ci-dessus, les Etats sont aussi titulaires
de droits. En conséquence du principe de la souveraineté, tout Etat peut dénoncer (ou se
retirer) les Conventions de Genève et les Protocoles(292) ou y adhérer(293) et proposer
des amendements(294). Les Etats disposent de la faculté de désigner ou non des
puissances protectrices en cas de conflit intemational(295) et de conclure des accords
spéciaux en vue de l'application(296).
Le principe de la souveraineté a aussi pour corollaire le respect des affaires
relevant du domaine réservé de l'Etat. Le DIH, par l'entremise de l'art. 1 al. 2 du Prot. II de
1977, fait prospérer cette idée en disposant : "Le présent Protocole ne s'applique pas aux
situations de tensions internes, de troubles intérieurs, comme les émeutes, les actes isolés et
s{)oradiques de violence et autres actes analogues qui ne sont pas considérés comme des
conflits armés".
- - - - - - - - - _ . _ - -
(288) Art. 48/49/128/145 des quatre Conventions de Genève et art. 84 du Protocole 1 de 1977.
(289) Art. 47/48/177/144 des quatre Conventions de Genève et art. 83 du Protocole 1.
(290) Art. 57/56/137/152 des quatre Conventions de Genève.
(291) Art. 80 du Protocole 1 de 1977.
(292) .Art. 63/62/142/158 des Conventions de Genève, art. 99 du Protocole 1 et art. 25 du Protocole
II.
(293) Art. 60/59/139/153 des Conventions, art. 94 du Prot. 1 et art. 22 du Prot. II de 1977.
(294) Articles 97 du Prot. 1 et 24 du Prot. II de 1977.
(295) Art. 8/8/8/9 des Conventions de Genève et art. 5 du Prot. 1 de 1977
(296) Art. 6 commun aux trois premières Conventions de 1949.

110
Le domaine réservé des Etats, sphère exclusive de compétences d'action et de
décision de l'Etat, a été défini ainsi par l'Institut de Droit international dans une Résolution
de 1954:
"Le domaine réservé est celui des activités étatiques où la compétence
de l'Etat n'est pas liée par le Droit international.
L'étendue de ce domaine dépend du droit international et varie selon son
développement.
La conclusion d'un engagement international, dans une matière relevant
du domaine réservé, exclut la possibilité, pour une partie à ces
engagements, d'opposer l'exception du domaine réservé à toute question
se
rapportant
à
l'interprétation
ou
à
l'application
dudit
engagement"(297).
Pour autant qu'on s'en tienne aux. engagements conventionnels, la définition
précitée n'a de valeur que rapportée à la soumission au Droit international. La CP11
abondait dans le même sens en soulignant : "La question de savoir si une certaine matière
rentre ou ne rentre pas dans le domaine exclusif d'un Etat est une question essentiellement
relative : elle dépend du développement des rapports internationaux... TI se peut très bien
que, dans une matière qui, comme celle de la nationalité, n'est pas, en principe, réglée par
le Droit international, la liberté de l'Etat de disposer à son gré soit néanmoins restreinte par
des engagements qu'il aurait pris envers d'autres Etats. En ce cas, la compétence de l'Etat,
exclusive en principe, se trouve limitée par des règles de Droit intemational"(298).
(297) Annuaire de l'ID.I, 1954, Vol. 45-II, p. 292, cité par NGUYEN, op. cit., p. 421.
(298) CPJI, Avis Consultatif, 7 février 1923. Décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au
Maroc, Série B, N° 4, p. 24, cité par NGUYEN, op. cit., p. 422.

III
La doctrine admet également le caractère évolutif du domaine réservé. Le Pr.
VIRALLY a fait lllle mise au point en ce sens: "L'expression même de "domaine réservé"
finalement, est contestable : le fait que sur un point détenniné quelconque n'existe aUClllle
obligation juridique ne signifie pas que le Droit international "réserve" cette question à la
compétence discrétionnaire de l'Etat, mais seulement que, en fait, aucune obligation
juridique internationale n'a encore été créée à son sujet. Or cette situation peut changer à
tout moment. Il n'est pas de domaine où le Droit international (droit coutumier ou droit
conventionnel) ne puisse pénétrer pour des raisons de principe. li ne s'agit jamais que d'un
stade dans le développement du droit. La seule question pratique est donc celle de
l'existence ou de l'inexistence, à un moment donné et dans un cas déterminé de règles et
d'obligations internationales"(299).
Il en appert que les matières relevant du Droit international sont exclues du
domaine réservé selon l'Institut de Droit international, dans sa résolution précitée sur "la
détennination du domaine réservé et ses effets"(300).
Les Etats excipent, par ailleurs, de l'obligation du respect des nécessités
militaires, à laquelle le DIH est particulièrement attaché puisque: "le droit hwnanitaire a
été et restera le résultat d'un compromis entre les nécessités de la guerre et de l'ordre
public, d'une part et les exigences de l'humanité, d'autre part"(301). Le respect de ces
nécessités explique l'omniprésence de clauses spéciales telles que "dans la mesure du
possible", "s'il en est besoin", "pour autant que le besoin s'en fait sentir", "en cas de
nécessité" disséminées dans le droit de 1949 et de 1977.
(299) VIRALLy (M.), Panorama..., op. cit., p. 82.
(360) Cf. Art. 3 de la résolution, sur rapport de Charles ROUSSEAU, Annuaire de 1'1.0.1., 1954,
Vol. 45, Tome II, p. 292 et s. ; cf. aussi DAVID (E.), Portée et limite du principe de non-
intervention, RBDI 1990 (2), Bruxelles, Bruylant, pp. 361-362.
(301) VEVTHEY (M.), Guérilla... , op. cit., p. 9.

112
D'autre part, le consentement de l'Etat ne sera pas lié à l'application du DIH par
un autre Etat ainsi que cela découle de l'abandon du principe de la réciprocité
(CLAUSULA SI OMNES) et de l'art. 60, § 5 précité, de la Convention de Vienne de 1969
sur le droit des traités.
Un autre volet du domaine réservé réside dans le droit pour tout Etat de jouir de
la plénitude et de l'exclusivité de sa compétence exécutive, législative et juridictionnelle
sur les personnes et les biens relevant de sa compétence nationale. Ce principe s'énonce
comme: "l'existence en Droit international de domaine de compétences dans lequel l'Etat
souverain jouit de la compétence de principe et l'exerce d'une manière discrétionnaire et
absolue qui échappe à l'autorité de tout autre sujet de droit"(302). Une des expressions les
plus fortes de la souveraineté se traduit par l'aménagement d'un domaine propre, protégé
contr€~ toute immixtion étrangère. Cette acception est celle retenue par l'art. 2, § 7 de la
ChwLte de l'ONU qui dispose: "Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les
Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence
Dnaionale d'un Etat, ni n'oblige les membres à soumettre des affaires de ce genre à une
.procédure de règlement aux termes de la présente Charte ; toutefois, ce principe ne porte
en rien atteinte à l'application des mesures de coercition prévues au chapitre VII"(303).
Le pnnClpe
de
la compétence nationale
s'analyse
en une
obligation
fondamentale de respecter l'intégrité territoriale de l'Etat. Il est inclus dans le DIH par l'art.
3, al. 2 du Protocole II de 1977, ainsi libellé: "Aucune disposition du présent Protocole ne
sera invoquée en vue de porter atteinte à la souveraineté de l'Etat ou à la responsabilité du
gouvernement de maintenir ou de rétablir l'ordre public dans l'Etat ou de défendre l'unité
nationale et l'intégrité territoriale de l'Etat par tous les moyens légitimes".
(302) RANJEVA (R.), et CAnaUX (C.), op. cit., p. 83.
(303) Pour des développements plus détaillés, cf VERDROSS (A.), Le principe de la non-
intervention dans les affaires relevant de la compétence nationale d'un Etat et l'article 2 (7) de la
Charte des Nations Unies in Mélanges Charles ROUSSEAU, La Communauté Internationale,

113
Une des applications de la souveraineté se trouve dans la faculté laissée à tout
Etat de souscrire ou non à une déclaration d'acceptation de la compétence de la
Commission d'établissement des faits prévue à l'art. 90 du Protocole 1 de 1977.
Enfm, l'ensemble des droits et obligations de l'Etat n'exclut pas l'existence d'un
standard minimwn humanitaire prescrit par l'article 3 commun aux quatre Conventions de
Genève qu~ tout en restant dans la logique du respect du principe de la non-intervention,
crée un espace propre où l'Etat doit stinterdire de légiférer de façon restrictive.
La Charte de l'OUA consacre le principe de la souveraineté de l'Etat avec la
même vigueur que les règles du DIH.
Paragraphe II - Des règles corroborant des principes de l'OUA
Depuis sa mIse en place institutionnelle, l'OUA(304) n'a cessé d'attirer
l'attention des juristes africains ou africanistes tant par sa politique normative que par la
pratique de ses cinquante-trois Etats-membres.
Le Pro
KAMTO relevait l'existence d'une
expectative cnllque envers
l'Organisation "que cc soit pour dénoncer ses faiblesses voire son inutilité, ou moms
fréquemment, pour exalter ses succès pourtant certains"(305).
Paris, Pédone, 1974, pp. 267-276 ; cf également DAVID (E.), Portée et limite du principe de non-
intervention in RBDI 1990/2, pp. 350-367.
(304) L'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) créée le 25 mai 1963 à Addis-Abeba (Ethiopie)
'regroupe les Etats Africains du continent, Madagascar et les îles voisines de l'Afrique (Maurice,
Comores, Sao-Tomé et Principe, etc.) ; cf Charte de l'OUA du 25 mai 1963, Règlements intérieurs
et Protocole de médiation, de conciliation et d'arbitrage du 21 juillet 1964, OUA, Division de la
Presse et de l'Information du Secrétariat Général, Addis-Abeba, Mai 1981.

114
L'exégèse du droit de l'OUA devra s'affranchir de l'ambiguïté exprimée par la
doctrine africaine: "La tendance quand on étudie l'OUA, est de l'affubler d'une mission qui
ne lui était pas assignée et qui, en tout état de cause, ne relève nullement de sa Charte. Ce
prisme d'observation défonne les perspectives d'analyse et donne de l'Organisation
continentale l'image de ce qu'elle n'est pas"(306).
Au titre d'organisme régional (l'Afrique est considérée comme une région au
sens juridique et géopolitique)(307), l'OUA secrète un droit en fùiation naturelle avec les
règles de l'ONU(30S). Il n'est pas étomlant de retrouver, au niveau de la politique
nOlmative de l'OUA, des principes et nonnes du DIP en connexion avec le DIH.
L'OUA cultive la prééminence du principe de l'égalité souveraine des Etats-
membres. L'affirmation de ce principe par l'art. 3 § 1 constitue "l'expression et la garantie
juridique de l'indépendance" des Etats-membres(309). La Charte de l'OUA consacre
"l'égalité absolue des Etats afiicains"(310).
S'agissant d'une autre facette du principe de la souveraineté, le principe de la
non ingérence dans les affaires intérieures des Etats, il fait partie intégrante des fondements
nonnatifs de l'OUA (art. 3 § 2 de la Charte). Plusieurs résolutions rappellent ce principe à
l'occasion des multiples conflits armés auxquels sont confrontés les Etats afiicains. En
1977, le Conseil des ministres de l'OUA prenait une résolution(311) condamnant
POS) KAMTO (M.), PONDI (JE.) et ZANG (L.), L'OUA: Rétrospective et perspectives
africaines, Economica, Paris, 1990, p. 7 ; SOURANG (M.), Faut-il modifier la Charte d'Addis-
Abeba du 25 mai 19637, Annales Africaines 1984-1985, pp. 67-78.
(306) KAMTO (M.) et alii, op. cit., p. 15.
(307) Cf. GONIDEC (p.F.), Existe-t-il un Droit international afiicain 7, 5, RADIC (1993), p. 243
qui affirme: "Nous tenons pour acquis que l'Afrique peut être légitimement envisagée comme une
région, tant sur le plan des relations internationales que sur celui du Droit international".
(308) Voir art. 55 Charte de l'ONU (Accords et organismes régionaux) et Préambule Charte OUA.
(309) DJIENA-WEMBOU (M.C.), L'OUA au XXIe siècle: Bilan, Diagnostic et Perspectives.
Bibliothèque Afi;caine et Malgache, Tome 52, Paris, LGDJ, 1995, p. 78.
(310) GHALI (B.B.), L'Organisation de l'Unité Africaine, Paris, A. Colin, 1979, p. 38.
(311) CM/Res.527 (XXVIII), 28e session ordinaire à Lomé (Togo) du 21 au 28 février 1977.

1I5
l'agression année de mercenarres contre le Bénin et "rejetant toute ingérence qu'elle
provienne d'Wl Etat africain ou d'une source extra-continentale"(312). A sa XIVe session
ordinaire, la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement se faisait l'écho de ce
problème par l'adoption d'une résolution prohibant les interventions dans les affaires
intérieures des Etats. La résolution AHGlRes. 85 réaffirmait la nécessité du respect de la
Charte de
l'OUA (§
1), sollicitait l'engagement des Etats africains à fenner
progressivement les bases militaires étrangères sur le continent (§ 2) et interdisait aux
puissances étrangères de s'ingérer dans les affaires intérieures des Etats africains (§ 3). Le
problème de l'ingérence suscite régulièrement la mobilisation des Etats africains qui ont
favorisé le vote de "la déclaration sur l'inadmissibilité de l'ingérence dans les affaires
intérieures des Etats et la protection de leur indépendance et de leur souveraineté"(313) et
de la "déclaration sur les relations amicales... " en 1970(314).
Un autre principe de l'OUA étroitement lié au précédent, est celui du "respect
de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de chaque Etat et de son droit inaliénable à
une existence indépendante" (art. 3 § 3 de la Charte).
L'OUA milite aussi pour "une condamnation sans réserve de l'assassinat
politique ainsi que des activités subversives par des Etats voisins ou tous autres Etats" (art.
3 § 5 de la Charte). Le problème de la subversion avait déjà fait l'objet d'une déclaration en
1965 demandant aux Etats-membres de :
"10) combattre individuellement ou collectivement et par tous les moyens
disponibles, toutes les formes de subversion ;
(312) Cf DJIENA-WEMBOU, op. cit., p. 79.
(313) Résolution 2131 (XX) de l'AGNU du 20 décembre 1965 in PELLET (A), Les Nations
Unies: Textes fondamentaux, PUF, Que sais-je?, N° 3035, 1995, pp. 50-52.
(314) Résolution 2625, op. cit., note nO 279.

116
2°) s'abstenir de lancer contre tout Etat africain une campagne de presse
ou de radio... ;
3°) ne pas susciter de dissension, ni à l'intérieur d'un Etat-membre de
l'OUA ni entre Etats-membres en fomentant ou en aggravant des
différends d'ordre racial, re1igie~ linguistique, ethnique ou autres;
4°) s'efforcer de favoriser le retour des réfugiés dans leur pays d'origine,
avec leur consentement"(315).
Il faut ensuite insister sur la particularité de l'histoire africaine qui justifie le
traitement privilégié dont bénéficie le principe du respect des frontières issues de la
décolonisation. Ce principe diffère de celui de l'intangibilité des frontières qui est :
"largement controversé en doctrine, tant son contenu parmI incertain ; on lui attache une
diversité de sens, parfois sans rapport réel avec sa signification exacte"(316). Une opinion
se dégage pour confIrmer qu"'en effet, il n'existe pas dans le droit de l'OUA un principe de
l'intangibilité des frontières"(317).
De même, la célèbre résolution de 1964 ne fait que mentionner l'engagement
des Etats africains "à respecter les frontières existantes au moment où ils ont accédé à
l'in.dépendance"(318).
- - - - - - - _ . _ . _ - - -
(315) DECL.AHG/Res.27 (il) du 25 octobre 1965, in Résolutions et Déclarations adoptées par la
Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA, 1963-1983, p. 37, citée par DJIENA-
WEMBOU, op. cit., pp. 80-81.
(316) KAMTO (M.), Critique de l'ouvrage de M. BENMESSAOun TREDANO : "Intangibilité
des frontières et espaces étatiques en Afrique", LGDJ, Paris, 1989; in Revue Juridique Africaine,
199011, Presses Universitaires du Cameroun, pp. 139-141.
(317) DJIENA-WEMBOU (M.C.), op. cit., p. 84.
(318) Résolution AHGlRes.16(I) de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, adoptée
au Caire le 31 juillet 1964, citée par DJIENA-WEMBOU, p. 84.

117
Le renforcement de l'implantation du principe du respect des frontières s'est
traduit par l'adoption de plusieurs résolutions du Conseil des ministres(319) ou de la
conférence de l'OUA(320).
Un autre pnnclpe, le non-alignement (mouvement auquel l'adhésion de
l'Afrique n'a jamais fait défaut et idée motrice des relations internationales du Tiers-
Monde) a pu servir de ferment à la contestation de l'ordre international classique mais aussi
de creuset pour un développement progressif du Droit international contemporain. Ce
mouvement procédant d'une volonté politique de distanciation vis-à-vis des blocs
occidental et oriental de la période de guerre froide, a reçu une sédimentation normative
dans l'''affumation d'une politique de non-alignement à l'égard de tous les blocs" (art. 3 § 7
de la Charte). L'OUA considère qu'il s'agit du "seul moyen acceptable de protéger la
liberté, la stabilité et la prospérité de l'Afrique"(321).
Les Etats-membres se préoccupent de "la grave menace à l'indépendance, à la
souvemineté, à l'intégrité territoriale et au développement harmonieux des Etats africains,
que constituent les ingérences dans les affaires intérieures des Etats" et s'évertuent à
appliquer "une solidarité et une coopération sans faille... pour préserver leur non-
alignement à l'égard des blocs"(322).
(319) On peut citer, entre autres, la Résolution CM/Res.676 (XXXI) du 18 juillet 1978 sur
l'intégrité territoriale de l'Afrique et des îles entourant le continent africain, la Résolution
CM/Res.869 oex.xvII) portant proposition de création d'une Commission de l'OUA sur les
frontières, etc.
(320) Cf également Déclaration AHG/ST.l (IV) du 14 septembre 1967 sur les relations entre le
Kenya et la Somalie, Résolution AHGlRes.90 (XV) sur le conflit entre la Somalie et l'Ethiopie,
Résolu.tion AHG/Res.93(XV) du 22 juillet 1978 sur le différend Ethiopie-Soudan, Res. AHG/Déc.
108 (XIV) 1977 sur le différend TchadlLibye, etc.
(321) Résolution CMlRes.12(1l) du 29 février 1964 (§ 1 du dispositif), citée par DJIENA-
WEMBOU, op. cit., p. 89.
(322) Résolution AHGlRes.85(XIV) adoptée au Sommet de Libreville (Gabon) du 2 au 5 juillet
19177.

118
Le principe de non-alignement laisse aujourd'luù dubitatif avec l'effondrement
du bloc socialiste et la mondialisation du libéralisme quoique le recentrage du mouvement
vers des problèmes de sous-développement semble se préciser. Mais l'exposé du principe
revêt une importance dans sa cOlmexion fréquente avec le principe de souveraineté.
Un autre aspect du raffennissement de la mobilisation des Etats africains est la
lutte contre le colonialisme et le néo-colonialisme, élément de légitimation des actions de
l'Organisation panafricaine qui "peuvent être répertoriées en au moins deux catégories
distinctes mais complémentaires. Il y a d'une part, les initiatives politico-diplomatiques
c,omprenant essentiellement les résolutions,
conférences et autres campagnes de
sensibilisation contre l'apartheid et d'autre part, le soutien actif à la lutte année menée par
les différents mouvements de libération (ANC, PAC, SWAPO) sous la coordination du
comité de libération de l'OUA"(323).
Quant au sort des réfugiés et la lutte contre le mercenariat, leur prise en
considération cumule dans une codification qui sera étudiée plus loin.
Une catégorie sociale particulièrement vulnérable, les enfants, a attiré l'attention
des Etats-membres. Une décIaration(324) suivie d'une Charte(325) expriment les réponses
il l'inquiétude notée par les Chefs d'Etats africains : "la situation de nombreux enfants
africains,
due aux
seuls facteurs
socio-économiques,
culturels,
traditionnels,
de
catastrophes naturelles, de poids démographique, de conflits armés, ainsi qu'aux
circonstances de développement, d'exploitation, de la faim, de handicaps, reste critique et
(323) KAMTO(M.) et alii, op. cit., p. 267.
1(324) Déclaration AHG/ST.4(XVI) sur les droits et le bien-être de l'enfant africain, adoptée à
Monrovia lors de la 16e session de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA
du 17 au 20 juillet 1979.
(325) Résolution AHGlRes.197(XXVI) portant Charte africaine des Droits et du Bien-être des
enfants africains adoptée à Addis-Abéba lors de la 26e session de la Conférence des Chefs d'Etat et
de gouvernement du 9 au Il juillet 1990. Le Sénégal a ratifié cette Charte du Il juillet 1990, par la
loi nO 98-41 du 8 septembre 1998, JORS du 10 octobre 1998, N° 5823, p. 600.

119
qUl~ l'enfant en raison de son immaturité physique et mentale, a besoin d'une protection et
de soins spéciaux"(326).
Les droits des enfants, des femmes et des réfugiés se rejoignent dans la Charte
Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples qui en constitue l'expression la plus
achevée(327).
Le complément indispensable de cette charte est le dispositif conventionnel mis
en place à la suite des conclusions d'experts gouvernementaux réunis au Cap et à
Nouakchott(328). Il s'agit, sans conteste, de la Cour Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples, créée par le Protocole du 9 juin 1998, dernier chaînon manquant pour une
protection renforcée de l'Homme africain.
En déflIÙtive, ces principes de l'OUA, incorporant la souveraineté, demeurent
indissociables du principe de l'art. 3 § 4 de la Charte, seule voie juridiquement possible de
"Règlement pacifique des différends par voie de négociation, de médiation, de conciliation
ou d'arbitrage". La création récente d'un mécanisme sur la prévention, la gestion et le
règlement des conflits -quoique confronté à des problèmes de démarrage- participe de cette
vision africaine de recherche de ]a paix(329).
Le principe de la souveraineté, auquel les Etats africains vouent un attachement
viscéral, est l'ossature principale de la Charte, le référentiel à la base des actions des Etats-
membres. Le principe gouverne les relations interétatiques africaines. Ce principe
axiologique se retrouve également dans les textes de DIH.
(326) Texte de la Déclaration, ibid., citée par DJLENA-WEMBOU, p. 121.
(327) Cf. supra, Introduction, sans préjuger des développements sur ces droits, cf. infra, 2e partie,
Titre 1, Chapitre J.
(328) Cf. supra, Introduction, Note N° 71.
(329) Cf. ESSOMBE-EDIMO (1.), Rôle des Etats-membres de l'OUA et le défi du nouveau
mécanisme sur la prévention, la gestion et le règlement des conflits, Actes du 6e Congrès annuel
de la S.ADJ.C. (5-8 septembre 1994), Kampala, ASICL. PROC. 6 (1994), pp. 73-87.

120
Le rapprochement théorique entre les principes de l'OUA et les principes du
DIH facilite une réception africaine de ce dernier. Toutefois, dans la pratique, des obstacles
dirimants, découlant d'une approche rigoriste du principe de la souveraineté, faussent
l'application du DIH.
SECTION II - L'usage du principe à l'encontre du DIU
L'exégèse des relations internationales contemporaines pennet Wle lecture
dualiste de la connexion du Dili avec la souveraineté étatique. D'Wle part, l'usage du
principe de la souveraineté découle d'Wle perception égocentrique lui faisant assurer lUle
fonction liée aux intérêts des Etats (Paragraphe 1). D'autre part, cette conception ambiguë
de la souveraineté se traduit par un détournement de l'application du Dili (Paragraphe II).
Paragraphe 1 - Un usage en fonction d'intérêts étatiques
La souveraineté est conçue comme un outil au service des Etats (faibles ou
forts) pour protéger leur indépendance et pour leur pennettre l'aménagement d'un
périmètre d'autonomie d'action et de décision spécifique.
Dans la réalité, les Etats envisagent l'instrument d'action qu'est la souveraineté
sous l'angle de leurs intérêts vitaux, économiques et de haute politique. Relativement au
DIH, cette utilisation s'opère en fonction des buts politico-stratégiques des Etats.
On peut percevoir cette conception étatique à travers l'analyse de trois
mécanismes fondamentaux du DIH, pratiquement ruinés par Wle invocation excessive et
abusive du principe de la souveraineté. Ce sont les rapports de belligérance, les puissances
protc(,,1rÎces et la Commission internationale d'établissement des faits.

121
1 - Les rapports de belligérance
Au début du siècle, le déclenchement des hostilités armées était entouré de tout
un cér'émonial. Les hostilités ne commençaient entre deux parties (il s'agissait tOl.Üours de
protagonistes étatiques) que sous la fonne d'une déclaration de guerre(330) dûment
m1otivée, notifiée au préalable à l'ennemi et dont l'effet était immédiat. La guerre pouvait
fdussi débuter après le procédé de l'ultimatum non suivi de réponse adéquate. Tout un rituel
diplomatique précédait la guerre. A cet effet, on opérait la distinction entre la
reconnaissance de l'état de belligérance et la reconnaissance de l'état d'insurrection. Par la
reconnaissance de l'état de belligérance, un Etat admettait l'existence d'un état de guerre
dans ses relations internationales avec un autre Etat. Par la reconnaissance de l'état
d'insurrectio~ un Etat constate un état de rébellion à l'intérieur de son territoire. Cette
dernière fonne de reconnaissance est d'autant plus rare qu'elle constitue un aveu pénible du
fait que « l'Etat attaqué convient fonnellement de son impuissance momentanée et prend le
risque de renforcer d'autant l'autorité des rebelles »(331).
Toutefois, le fonnalisme de l'institution de la belligérance est peu rigoureux car
"la reconnaissance n'est subordonnée à aucune autre condition de fond que le bon plaisir
dudit gouvernement -il s'agit d'un acte toujours facultatif- ; formellement elle est rarement
exprimée de manière catégorique, et il résulte plutôt du comportement même du
gouvelnement légal... "(332). A titre d'exemple de reconnaissance, la déclaration de guerre
du Congrès américain, le 4 juillet 1861, admettant la belligérance entre le gouvernement de
l'Union contre onze Etats du Sud, ou plus récemment, la déclaration de guerre de l'Exécutif
du Nigeria le 12 août 1967 adressée à l'Etat sécessionniste du Biafra.
(330) Cf. VERRI (p.), Dictionnaire... , op. cit., p. 43.
(331) ZORGBIBE (Ch.), Aux origines de la reconnaissance de belligérance in RICR N° 699, Mars
1977, p. 128.
(332) ZORGBIBE (Ch.), Aux origines..., ibid., p. 128.

122
Ce fonnali:sme a été rarement respecté. Les reconnaissances n'ont été souvent
que le résultat de faits accomplis. On peut en trouver quelques illustrations à travers des
accords de cessez-le-feu entre armées gouvernementales et rebelles. Ainsi, les accords de
Banjul de décembre 1999 consacrent exp~~s.__yerbis le MFDC comme principal
interlocuteur du gouvernement sénégalais dans la crise casamançaise. Les Accords de
Lomé du 27 juin 1999 et du 7 juillet 1999 entre le gouvernement d'Ahmad Tejan
KABBAH et le RUF de Forlay SANKOH, reconnaissent expressément le mouvement
rebelle par l'octroi de l'impunité à ses membres (amnistie pour les atrocités commises
durant la guerre civile) en échange du dépôt des armes et du retour à la paix.
La déclaration de guerre avait pour conséquence d'installer un état de guerre
entre les belligérants et l'application de l'ensemble des règles du droit de la guerre tant à
l'égard des nationaux du pays qu'à l'égard des ressortissants ou des biens ennemis(333).
L'incidence majeure de ce fait était qu'''il suffisait donc, théoriquement, qu'une guerre ne
fût pas légalement déclarée ou que, pour une raison ou une autre -telle, par exemple, la
non-reconnaissance par l'une des parties du Gouvernement de la partie adverse- l'état de
guelTe ne rut pas reconnu d'un des côtés, pour que l'applicabilité de la Convention pût être
niée. On voit le danger qui devait en résulter. Trop de contestations de la légitimité du
gouvernement adverse, de disparitions momentanées d'Etats souverains par annexion ou
par suite de capitulation, ont été invoquées comme prétextes à ne pas observer l'une ou
l'autre des Conventions, pour qu'il ne devînt pas urgent d'y remédier... Dans ces conditions,
(333) Cf ZORGBffiE (Ch.), Pour une réaffirmation du droit humanitaire des conflits internes, in
lD.I. (Clunet), Paris, 1970, p. 679 et s. ; Cf. Convention III de La Haye de 1907 sur l'ouverture des
hostilités qui disposait en son article 1er: "Les puissances contractantes reconnaissent que les
hostilités entre elles ne doivent pas commencer sans un avertissement préalable et non équivoque,
qui aura, soit la forme d'une déclaration de guerre motivée, soit celle d'un ultimatum avec
dédaration de guerre conditionnelle", in SCIDNDLER (D.) et rOMAN (l), Le droit des conflits
armés, op. cil., pp. 53-58 : Les Conventions III de La Haye de 1907 et N sur les lois et coutumes
de la guerre sur terre de La Haye de 1907 n'ont reçu l'adhésion ou la ratification que de l'Afrique
du Sud (1978), de l'Ethiopie (1935) et du Liberia (1914), cf. SCHINDLER (D.) et al., ibid., p. 63.

123
il est difficile d'admettre que ce respect soit attaché au fait matériel de la reconnaissance de
l'état de guerre"(334).
9(" La manifestation de l'ANIMUS BELLANDUM constituait, en outre, un critère
d'identification "dont l'absence même dans l'hypothèse d'une déclaration fonnelle de
belligérance... serait de nature à jeter des doutes sur l'authenticité de l'existence d'un état de
guerre entre les Parties en cause"(335). Dans cette mouvance, on distinguait la région de la
guefi'e (REGION OF WAR), c'est-à-dire "l'ensemble des espaces dans lesquels les
belligérants peuvent préparer et accomplir les hostilités" et le théâtre de la guerre
(THEATRE OF WAR) c'est-à-dire "les espaces dans lesquels les hostilités ont
effe(,;tivement lieu"(336). Aujourd'hui, cette distinction a fait long feu, rendue désuète par
la mobilité des champs de bataille et par l'emploi d'annes inhumaines dont les effets
s'étendent au-delà des aires de combat.
La déclaration, acte fonnel d'ouverture des hostilités(337), sanctionnait la
licéité des guerres. Son absence rendait la guerre illicite sans toutefois la dépouiller de tous
ks effets juridiques. A titre illustratif, une décision de la Cour d'Appel de Kiel
'J<.. (Allemagne), dans l'affaire G~E, semble se rattacher à cette conception: "La guerre de
1939 était contraire au Droit international parce qu'elle violait le pacte de Kellog de 1928,
le 1raité de non-agression gennano-polonais et d'autres engagements internationaux. Mais
il a été toujours reconnu dans la littérature du Droit international que même une guerre
iUégale reste une guerre au sens du Droit international et produit toutes les conséquences
dime guerre. La guerre est un état de fait qui entraîne des conséquences juridiques. Une
guerre illégale reste soumise aux lois de la guerre en dépit de la rupture des obligations
- _ . _ - - - - - -
(334) PICTET (1.) (sous la direction de), Commentaire des Conventions, Vol. I, op. cit., p. 30.
(335) ROUSSEAU (Ch.), Le droit des conflits armés, op. cit., p. 4.
(33~6) Cf OPPENHEIM, International Law, Tome n, 1955, p. 196, cité par ROUSSEAU (Ch.),
ibid., p. 64.
(337) Convention ru de La Haye de 1907 sur l'ouverture des hostilités, cf aussi VOELCKEL
(M.), Faut-il encore déclarer la guerre ?, AFDI, 1991, pp. 7-24.

124
internationales"(338). La déclaration de guerre, qui entraînait la reCOnnalssance de
belligérance, sera sacrifiée sur l'autel du Droit international classique. Plusieurs faits ont
conduit à son abandon.
D'une part, alors que la guerre constituait une affaire réservée aux Etats(339),
l'apparition de conflits avec des acteurs non étatiques, fait éclater le champ d'application du
concept traditionnel.
D'autre part, la sénescence de la déclaration de guerre sera vite accélérée par
l'émergence de conflits armés à une cadence excessive(340) doublée d'une absence de
toute déclaration fonnelle. Dès lors, le mécanisme de belligérance devient caduc. Le Droit
international coutumier en constatera la désuétude et l'article 2 alinéa 1 commun aux
quatre Conventions de Genève consacrera cette déchéance, en ces tennes : "En dehors des
dispositions qui doivent entrer en vigueur en temps de paix, la présente Convention
s'appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux
ou plusieurs des Hautes Parties contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu
par l'une d'elles".
Un autre niveau de réflexion est la réticence des Etats, en cas de conflit armé
interne, d'admettre l'existence de conflit de crainte d'influencer sur sa qualification et
surtout de reconnaître l'autre partie. Le minimwn humanitaire, prescrit par l'article 3
commun aux Conventions de Genève, pennet d'apaiser ces appréhensions. Son dernier
alinéa ne précise-t-il pas que: "l'application des dispositions qui précèdent n'aura pas
d'effet sur le statut des parties au conflit" ?
(338) Arrêt GARBE du 26 mars 1947, cité par ROUSSEAU, op. cit., p. 25.
(339) Cf. Cour Permanente d'Arbitrage, Sentence du Il novembre 1912 relative à l'affaire de
l'indf.:mnité de guerre turque envers la Russie, RGDIP, Documents, p. 21. La Cour constatait que la
guerre constituait "un fait international" au sens de fait interétatique, citée par ROUSSEAU, ibid.,
p.3.
(3.1,0) On peut raisonnablement penser ici aux BLITZKRIEG ("guerres-éclair") ou aux guerres
intermittentes.

125
Or, le droit classique de la reconnaissance de belligérance dans les conflits non
internationaux supposait que "cette reconnaissance et l'application du droit de la guerre aux
guerres civiles avaient un caractère facultatif et discrétionnaire pour l'Etat confronté à cette
situation"(341).
L'article 3 ouvre donc, à contrario, ooe automaticité d'application en disposant
en son alinéa premier: "En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international
et surgissant sur le territoire de l'ooe des Hautes Parties contractantes, chacooe des Parties
au conflit sera tenue d'appliquer au moins les dispositions suivantes :... ". Le Commentaire
des Conventions de Genève en donne l'interprétation suivante : "Naguère encore, l'on
considérait comme juridiquement irréalisable l'idée de lier par ooe Convention
internationale ooe partie non signataire et, qui plus est, une partie non encore existante,
dont on n'exige même pas qu'elle représente une entité juridique capable de s'engager
intt.'l1la6onalement.
ChaclUle des Parties sera donc tenue d'appliquer l'article 3, par le seul fait
qu'elle existe et qu'un conflit armé l'oppose à l'autre. L'obligation est, pour chacune d'elles,
inconditionnelle et unilatérale. C'est à dessein que la clause de réciprocité n'a pas été
prévue"(342). Il appert des dispositions de l'article 3, l'immédiateté d'application des
principes fondamentaux du DIB, rendant ainsi désuètes les conditions résolutoires de la
déclaration de belligérance dont la fm est ainsi définitivement consommée. La faillite de la
notion de belligérance devancera celle du mécanisme des puissances protectrices.
(341) DlN-TAN (1 NG.), Le droit des conflits armés non internationaux, in Le Droit
internationaL Bilan et Perspectives, Tome 2, Paris, UNESCOlPédone, 1991, p. 852.
(342) Commentaire des Conventions de Genève (sous la direction de Jean PICTET), Vol. l, op.
cit., p. 54 ; voir également ZORGBlBE (Ch.), La guerre civile, P.U.F., 1975, pour lequel: "La
reconnaissance de belligérance est un acte souvent implicite sauf en de rares cas, exemple : la
déclaration de guerre adressée le 12 août 1967 par l'exécutif nigérian à l'Etat sécessionniste du
Biafra alors que jusque-là, les autorités s'en étaient tenues à la fonnule de la simple opération de
police" (p. 42).

126
2 - Le problème des puissances protectrices
La survenance d'lUl conflit anné entre Etats aboutit irrémédiablement à la
ruptu'te des relations diplomatiques entre les belligérants. La prévision du mécanisme des
puis'3ances protectrices vise à pallier la défaillance de la protection diplomatique. Une
puissance protectrice est alors "l'Etat qui, avec l'accord de deux Etats, est disposé à assurer
auprès de l'un d'eux la protection des intérêts de l'autre et des ressortissants de celui-ci ou
des personnes qui dépendent de lui"(343). Plus qU'lUle institutio~ c'est lUl vieil usage et
non une création délibérée du Droit international. Selon le Commentaire des Conventions:
"L'origine de la Puissance protectrice remonte au XVIe siècle. Seuls les grands Etats
entretenaient des ambassades. Les ressortissants de moyens et petits pays, lorsqu'ils
résidaient à l'étranger, y étaient généralement privés de protection de la part de leur pays
d'origine. Cela n'allait pas sans inconvénients, surtout lorsque les mœurs, la législation ou
le degré de civilisation était très différents de ceux de leur patrie. Certaines grandes
Puissances, pour des raisons de prestige et d'influence, autant que par intérêt,
revendiquèrent alors et se firent reconnaître, par traité conclu avec le pays de résidence, le
droit de prendre sous la protection de leurs ambassades, les ressortissants étrangers
dépourvus de représentation nationale. Par la suite, l'initiative passa de la Puissance
protectrice à la Puissance d'origine"(344).
Les deux guerres mondiales achevèrent de convaincre de la nécessité d'lUle telle
institution, à la suite de l'article 86 de la Convention de Genève de 1929 relative au
traitement des prisonniers de guerre. Cette appropriation de l'institution par le DIH sera
renforcée par les articles 8/8/8/9 commlUlS aux quatre Conventions de Genève de 1949,
conçus en ces termes: "La présente Convention sera appliquée avec le concours et sous le
(343) ZEMMALI (A.), Mise en œuvre du Dili, Communication à la Conférence sur le Dili pour
les forces armées des Etats membres de l'OUA (CICR/OUA), Naïrobi, 2-6 décembre 1991, pp.
107-126.
(344) Commentaire des Conventions..., Vol. l, op. cit., p. 95 ; voir à ce sujet BALLALOUD (J.),
Droits de l'Homme et Organisations internationales : Vers un nouvel ordre humanitaire, Ed.
Montchrestien, Paris, 1984, 243 p. (surtout pp. 175-178).

127
contrôle des Puissances protectrices chargées de sauvegarder les intérêts des Parties au
conflit. A cet effet, les Puissances protectrices pourront, en dehors de leur personnel
diplomatique ou consulaire, désigner les délégués panni leurs propres ressortissants ou
panni les ressortissants d'autres Puissances neutres. Ces délégués devront être soumis à
l'agrément de la Puissance auprès de laquelle ils exerceront leur mission.
Les Parties au conflit faciliteront, dans la plus large mesure possible, la tâche
des représentants ou délégués des Puissances protectrices.
Les représentants ou délégués des Puissances protectrices ne devront en aucun
cas dépasser les limites de leur mission, telle qu'elle ressort de la présente Convention; ils
devront notamment tenir compte des nécessités impérieuses de sécurité de l'Etat auprès
duquel jJs exercent leurs fonctions. Semes des exigences militaires impérieuses peuvent
autoris(~r, à titre exceptionnel et temporaire une restriction à leur activité". Cette disposition
sera eomplétée par les articles 10/10/10/11 communs aux quatre Conventions qui
prévoient, en cas d'absence de Puissances protectrices, la possibilité de désignation de
SUBSTITUTS à celles-ci, et en dernier ressort (en cas de défaut de substitut), l'appel à un
--- --..-.,.-
organisme humanitaire impartial "tel que le Comité international de la Croix-Rouge" (art.
10/10/10/11, alinéa 3 in fine).
A l'exception des conflits de Suez (1956), de Goa (1961), du Bengladesh
(1971-1972) et des Falklands/Malouines (1982), le système des Puissances protectrices n'a
pas fonctionné. Partout le CICR a dû se résoudre à jouer ce rôle. Cette dépréciation
progressive du système des Puissances protectrices est largement tributaire de l'option des
Etats et des règles d'interprétation et d'appréciation unilatérales(345). Les Etats craignent
que l'on interprète la désignation de Puissance protectrice comme une reconnaissance
jmidique de l'autre Partie au conflit ou une restriction majeure à leur souveraineté. De plus,
- - - - - - - - - - - - -
(345) Voir TORRELLI (M.), Droit international humanitaire..., op. cit, pp. 90-94.

128
Wle autre raison à l'échec du système tient dans la difficulté de trouver des Etats neutres,
acceptable,s par les parties, capables d'assumer cette tâche et désireux de l'accomplir.
Le mécanisme des Puissances protectrices sera réaffinné en 1977 par l'art. 5 du
Protocole 1 qui assigne un rôle important au CICR, par l'offre de ses bons offices (alinéa
3); qui clarifie le fait que ni le maintien des relations diplomatiques, ni la protection
diplomatique ne font obstacle à la désignation de la Puissance protectrice.
L'article 5 apporte une réponse aux appréhensions étatiques. Son alinéa 5
mentionne expressément que la désignation et l'acceptation de Puissances protectrices
n'ont "pas d'effet sur le statut juridique des Parties au conflit ni sur celui d'un territoire
quelconque, y compris un territoire occupé".
Malheureusement, en dépit de ces diverses précautions, le système n'a pu être
appliqué de façon satisfaisante. La Seconde Guerre mondiale avait déjà ouvert une brèche
avec l'extension du conflit et la raréfaction des Etats neutres obligés à se comporter en
sorte d'arbitre humanitaire. La rapidité de certaines guerres a pu aussi contribuer à
l'annihilation du système qui est largement méconnu, sinon délaissé par les Etats-parties.
Le CICR est habitué à jouer le rôle de "substitut" ou "quasi-substitut" sans
préciser à quel titre il offre ses services car cette précision pourrait être une raison majeure
à les refuser. Cette ambiguïté fait que le CICR n'agit jamais comme mandataire d'une
Partie mais agit en son nom propre. A ce niveau, l'activité du CICR représente
effectivement une solution de rechange pour faciliter le respect des obligations
humanitaires de la Communauté internationale. Par ailleurs, pour pallier aux lacWles de
l'application du Dili, le Protocole 1 a prévu la création de la Commission internationale
d'établissement des faits.

129
3 - La Commission internationale d'établissement des
faits
Elle constitue une des innovations majemes du Protocole 1 de 1977(346). Elle
est prévue à l'article 90. Elle est composée de "quinze membres de haute moralité et d'une
impartialité reconnue" (art. 90, § 1, b in fine). Comme il est d'usage dans les institutions
interétatiques, les compétences requises de ces personnes se réfèrent à une bonne
qualification et à une représentation géographique équitable (art. 90, § 1, d). La
Commission est compétente, en vertu de l'art. 90, paragraphe 2, c, pom:
"i) enquêter sm tout fait prétendu être une infraction grave au sens des
Conventions et du présent Protocole ou une autre violation grave des
Conventions ou du présent Protocole ;
ii) faciliter, en prêtant ses bons offices, le retour à l'observation des
dispositions des Conventions et du présent Protocole",
Les parties au Protocole 1 ne sont liées à cette procédme qu'à la condition
qu'elles fassent, au préalable, une déclaration expresse ou un accord ad hoc (c'est-à-dire lN
CASU) de reconnaissance de la compétence de la Commission pour enquêter sm des
-----..
allégations émises par Wle partie ayant fait la même déclaration.
Pendant très longtemps, jugeant que la situation de conflit anné se prête mal à
ce genre d'investigation menée à la demande de la partie adverse (par définition, partie
ennemie), enquête toujoms sujette à caution, les Etats ne se sont pas empressés pour
participer à cette institution. Ces entraves ont fait végéter l'existence de la procédme,
condamnée à cette sorte de latence.

130
Il a fallu attendre le dépôt des instruments de ratification du Canada (vingtième
Etat à ldhérer à cette procédure) pour que la Commission débute ses travaux en 1992.
Néanm, 'ins, la défiance des Etats persiste puisqu'auclllle affaire n'a encore été soumise à la
Commis lion. En Afi:ique, les seuls Etats ayant souscrit à cette déclaration de l'art. 90 du
Protocoh 1 sont l'Algérie, le Togo, les Seychelles, le Rwanda, Madagascar, la Guinée, la
Namibie \\ t le Cap-Vert(347).
\\1algré toutes les précautions qui entourent la saisine de la Commission, la
participatio, des Parties à la procédure, le rapport confidentiel et qui protègent la
souverainett , les parties au Protocole éprouvent encore quelque appréhension à faire cette
déclaration.
Pa . ailleuI's, il faut déplorer le pouvoir, relativement restreint, de la Commission
qui ne fait que. refléter les limites du possible dans l'ordre international actuel.
Eni n, l'instrumentalisation du principe de la souveraineté a débouché sur une
pratique abusiv dans l'application du DIH.
para graphe II - Un usage immodéré du principe de souveraineté
Comp e tenu de l'objet du DIH, son application interpelle d'abord les Etats. Le
fait que les Etats oient souverains, ne devait pas constituer en soi llll obstacle légitime à
celle-ci. Il ne faut las perdre de vue que la volonté des parties est ici déterminante et il est
inconcevable de pl sser outre cette volonté. Sur le plan conventionnel, le consentement de
l'Etat implique, cm une rappelé plus haut, que l'application passe par des mesures internes
- - - - _ . _ - -
(346) KRILL (F.), [ 1 Commission internationale d'établissement des faits in R.I.C.R N° 788,
mars-avril 1991, pp. : )4-221.
(347) Etat des ratifica ions, accessions et successions au 15 juillet 1996, op. cit., note n° 179. Cf.
aussi RI.C.R., mars 1~ 99, N° 833, Vol. 81.

131
complémentaires d'exécution. Il s'agit, comme l'avait reconnu la C.P.J.I., d'un "principe
allant de soi", ce qui signifie qu'un Etat "qui a valablement contracté des obligations
internationales est tenu d'apporter à sa législation les modifications nécessaires pour
assurer l'exécution des engagements pris"(348).
Cette obligation fondamentale de l'Etat, qui est présumée être inconditionnelle,
apparaît néanmoins souvent liée aux intérêts politiques de l'Etat. En cette matière, si l'Etat
n'a pas une idée claire et immédiate de ses intérêts, l'application du traité en sera
longuement ou indéfiniment différée.
Au bénéfice de la primordialité incontestable, ressortissent les sources
conventionnelles et coutwnières du DIH. Les Etats ne peuvent pas ici jouer sur le caractère
flou des dispositions du Dili relativement à leurs obligations, pour s'en libérer ou pour en
réduire la portée.
Mais le problème de l'application demeure toutefois résiduelle au regard des
résolutions. La large marge de pouvoir discrétionnaire laissée à l'Etat conduit à Wle
appréciation unilatérale et conditionnelle des obligations résultant de nonnes résolutoires
ou jmisprudentielles. Une forte connotation politique et idéologique oblitère l'application
éclairée du Dili. Les différents courants idéologiques qui se sont opposés en 1949 et en
1977 (Blocs capitaliste,
socialiste, Tiers-Monde) ont transféré leurs conceptions
philosophiques, politiques, de civilisation dans le D.I.H.
La primauté du Droit international sur le droit interne suppose une
transfonnation des nonnes internationales et leur réception dans le cadre juridique de
l'Etat. il s'agit là d'une obligation désormais solidement ancrée dans le D.I.P. en vertu du
principe de bonne foi de l'article 26 de la Convention de Vienne de 1969 : "Tout traité en
(348) c.P.].!., Avis consultatif du 21 février 1925 sur l'échange des populations grecques et
turques, Série B, N° 10, p. 20, cité par NGUYEN et al., op. cit., p. 226.

132
vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi". Ce principe fondamental
du droit des traités "impose l'introduction dans l'ordre juridique interne des traités qui
établissent des droits et des obligations pour les particuliers. Cette introduction pennettra
aux. nonnes conventionnelles de s'imposer effectivement, comme n'importe quelle norme
du droit interne, vis-à-vis non seulement de toutes les autorités étatiques, gouvernants et
administration, à quelque échelon de la hiérarchie qu'elles se trouvent placées, mais encore
des ressortissants de l'Etat"(349).
Cette procédure d'introduction devra respecter la Constitution de l'Etat. Ce
dernier ne peut invoquer les insuffisances de son droit interne pour échapper à ses
engagements(3S0). Cependant, l'Etat est le seul à connaître de façon approfondie l'étendue
et la complexité de ses normes internes. Même s'il ne peut exciper des lacunes de son droit
interne, les méandres de son système constitutionnel et la procédure de réception
spécifique du Droit international (monisme ou dualisme) impliquent, en défInitive, la
nécessité d'une volonté sincère d'appliquer correctement l'ensemble des obligations
contractées.
En outre, le Droit international contemporain n'est pas régulé par la présence
d'organes législatif ou juridictionnel supranationaux. Les Etats, dans l'ordre de la société
internationale, prétendent ensemble participer à l'ensemble des fonctions exercées sur le
plan international tout en rejetant toute idée de soumission à un Etat rut-il militairement ou
économiquement puissant. Le Droit international, même s'il ne repose pas exclusivement
sur l'accord volontaire des Etats, est largement favorisé par la tendance des Etats à se
considérer comme soumis à ses règles.
L'Etat dispose d'une personnalité juridique qui lui permet de conclure des traités
générateurs de droits et d'obligations dans ses rapports avec les autres sujets de Droit
(349) NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (p.) et PELLET (A), op. cit., p. 223.
(350) Cf art. 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.

133
international. Ce pouvoir de conclure ces traités ou TREATY MAKING POWER.,
appartient à tout Etat souverain. Mais les Etats se détenninent en fonction de leurs intérêts
et non de façon altruiste. La carence institutionnelle de la société internationale, qui est
faiblement intégrée et qui ne génère qu'un droit de coordination entre des volontés
hétéroclites d'Etats à puissances militaire ou économique variées, entraîne une immixtion
considérable de la politique dans le droit.
Une interprétation exceSSIve du principe de souveraineté peut fournir une
première explication de la carence d'exécution constatée.
Sur un autre plan, on a pu justifier les lacunes en matière de répression des
infractions au Dili par les Etats, pour des raisons soit psychologiques (difficulté dans un
climat de violence ou de haine de l'ennemi de condamner les excès de zèle commis à son
encontre)(351) ; soit par le fait que la responsabilité des infractions incombe souvent aux
autorités elles-mêmes.
En cas de conflit armé international, la séparation des pouvoirs judiciaire et
politique est souvent compromise ou embrigadée par des passions violentes qui se
déchâment sans retenue.
En cas de guerre, la proclamation de l'état d'exception (état d'urgence ou état de
siège), véritable boîte de PANDORE, met en veilleuse les libertés fondamentales et
constitue une situation favorisant les violations graves du DIH. L'état d'exception substitue
une légalité de crise à une légalité nonnale. En principe, même en cas de circonstances
exceptionnelles, le standard minimum de l'art. 3 commun aux quatre Conventions de
Genève est toujours applicable, de même que le noyau indérogeable, intangible des droits
de l!'Homme. Mais les Etats s'arrangent pour se soustraire à leurs obligations (même en cas
"351) Cf SPILLMANN (K.R.) et SPILLMA.1\\JN (K.), L'image de l'ennemi et l'escalade des
conflits, in R.I.S.S., Vol. XLllI, pp. 59-80.

134
d'obligations de résultat) en invoquant la raison d'Etat ou l'état de péril de la nation, comme
causes absolutoires de leurs comportements attentatoires au droit.
Enfin, une série de mécanismes sont spécialement prévus pour la mise en
œuvre du D.I.H.(352). Nombre de ces mesures doivent être prises en temps de paix afin
d'éviter que des violations ne soient commises en temps de guerre. Les Conventions et
Protocoles étant à vocation Wliverselle, les mesures prévues pour leur application ne
varient pas de région à région.
Mais il faut constater globalement le laxisme des Etats, plus préoccupés par
leurs problèmes conjoncturels que par l'application de mesures prévues pour des situations
incertaines de conflit anné.
Il n'est point besoin de s'attarder sur l'artificialité de cette préférence. Du reste,
le Droit international public astreint, aujourd'hui, l'Etat à des obligations contraignantes qui
comportent Wle forte analogie avec les règles les plus pressantes du DIH(353). Ce sont les
nonnes du llJS COGEN§ qui ne laissent que peu de répit à l'Etat autoritaire. Il est admis
(quoique la notion de jus cogens soit très discutée) que le volontarisme étatique n'est pas
partout souverain (on peut songer aussi au Droit international coutumier). La volonté toute
puissante de l'Etat doit plier devant les hautes considérations humanitaires qui interpellent
tous les ordres juridiques. Ainsi, il faut admettre, selon Wle opinion doctrinale, que : "le jus
cogens en tant qu'ensemble de normes impératives limitant la liberté contractuelle des
parties, existe non seulement en droit interne mais également en droit intemational"(354).
(352) Pour le détail, cf Titre TI de la le Partie.
(353) NDIAYE (T.M.), Le jus cogens, in AA 1989-1991, pp. 95-117 ; Cf GOMEZ-ROBLEDO
(A), Le jus cogens international: sa genèse, sa nature, ses fonctions, RCADI, 1982, Vol 72, pp.
13-217.
(354) MAREK (K.), Contribution à l'étude du Jus cogens, cité par NDIAYE (T.M.), ibid., p. 98.

135
Les nonnes du jus cogens peuvent émaner des traités, de la coutume, des
principes généraux, voire des résolutions des organisations internationales. Le jus cogens
est difficile à circonscrire. On considère que ces nonnes impératives du Droit international
général doivent être constitutives d'une conviction partagée par "toutes les composantes
essentielles de la communauté internationale et, non seulement, par exemple, par les Etats
de l'Ouest et de l'Est, par les Etats développés ou en voie de développement, par ceux d'un
continent ou d'un autre"(355).
Les nonnes du jus cogens ressemblent aux principes fondamentaux du DIH qui
expriment les impératifs de la conscience universelle. Selon MIYAZAKI, ces principes
fonneraient une sorte de "droit humanitaire transnational"(356). Dans cet ordre d'idées, le
Pr. René-Jean DUPUY faisait remarquer que "l'humanité, à l'inverse de la nation dans les
analyses passéistes de COMTE ou de RENAN, pour lesquels le legs du passé était aussi
important que le présent, est le demain plus encore que l'aujourd'hui"(357).
La CU, dans plusieurs affaires, évoque la parenté des règles du DIH avec les
nOlmes du jus cogens, que ce soit dans l'affaire du Détroit de Corfou(358), ou de la
BARCELONA TRACTION dans laquelle elle précise : "Ces obligations découlent, par
exemple dans le Droit international contemporain, de la mise hors la loi des actes
d'agression et du génocide, mais aussi des principes et règles concernant les droits
fondamentaux de la personne humaine, y compris la protection contre la pratique de
l'esclavage et la discrimination. Certains droits de protection correspondants se sont
intégrés au droit international général ; d'autres sont conférés par des instruments
(355) AGO (R), Droit des traités à la lumière de la Convention de Vienne, RCADI, 1971 (ID), p.
223.
(356) MNAZAKI (S.), L'application du nouveau droit humanitaire, RICR, juillet-août 1980, p.
188.
(357) DUPUY (RJ.), Communauté internationale et disparités de développement, RCADI, 1970
(III), p. 210.
(358) Voir supra, Note nO 21.

136
internationaux de caractère universel ou quasi-universel"(359). Dans ce cadre, on peut
replacer les principes et règles du DIH. La notion de j~ coge]ls posée aux articles 53 et 64
de la Convention de Vienne de 1969 souffre, cependant, d'ambiguïtés par l'incertitude
~I/.ttachée à sa définition et les controverses politiques qui ont accueilli son insertion dans le
droit des traités(360). Malgré ses insuffisances (qui expliquent l'hostilité des Etats de
l'Europe Occidentale), la notion est installée au coeur du DJ.P. en tant que catégorie
normative.
Les règles du jus cogen~ .ou règles impératives du Droit international général
. -
bornent les compétences étatiques et limitent, en particulier, la liberté des Etats dans la
conclusion des traités internationaux.
Le droit n'épouse pas toujours la moralité mais le droit ne peut faire bon
ménage avec l'immoralité, voire l'illicéité de l'objet d'un traité. Très proche de la théorie
des traités immoraux, c'est-à-dire contraires aux bonnes mœurs(361), le jus cogens
s'affimle comme un concept autonome au respect duquel la communauté internationale a
particulièrement intérêt parce que sa violation porte atteinte à la conscience et à la dignité
humaines. Sans aller jusqu'à proposer une définition du ju!SggetlS, l'article 53 de la
Convention de Vienne de 1969 dispose : "Est nul tout traité qui, au moment de sa
conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général. Aux
fTtIlS de la présente convention, une norme impérative du Droit international général est une
norme acceptée et reconnue par la communauté internationale dans son ensemble, en tant
(359) CU, Arrêt de la Barcelona Traction Light and Power Company Limited (deuxième phase) du
5 février 1970, Recueil cn, 1970, p. 32.
(360) Cf PERRIN (G.), La nécessité et les dangers du jus cogens in Etudes et Essais sur le DIH,
op. cit.., pp. 751-759.
(361) Dans les affaires United States vs KRUPP and others, un tribunal militaire affirmait: "Nous
n'avons aucune hésitation à conclure que si LAVAL ou l'ambassadeur de Vichy à Berlin a conclu
un accord quelconque sur l'emploi des prisonniers de guerre français dans l'industrie allemande, un
tel accord aurait été manifestement contraire aux bonnes mœurs et, partant, nulll, cité par QUOC-
DINH (Ng.) et alii, op. cit., p. 196.

137
que norme à laquelle aucune dérogation n'est pennise et qui ne peut être modifiée que par
une norme du Droit international général ayant le même caractère".
Le Tribunal arbitral, dans l'affaire de la Délimitation de la frontière maritime
Guinée-Bissau/Sénégal apporte cet éclairage: "du point de vue du droit des traités, le jus
cogens est simplement la caractéristique propre à certaines normes juridiques de ne pas
être susceptibles de dérogation par voie conventionnelIe""(362).
Depuis l'adoption de la Convention de 1969 et en dépit des controverses
doctrinales sur l'étendue, la quintessence et la maniabilité du jU~Q~, la jurisprudence a
tenté de débroussailler la complexité de ces nonnes.
Dans l'affaire de la BarceIona Traction précitée, la CU énmnère dans son
OBITER DICTUM, des exemples de normes à ranger dans cette catégorie : les actes
d'agression, le génocide, les atteintes aux droits fondamentaux de la personne humaine,
l'esclavage et la discrimination raciale.
Dans l'Affaire du Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à
Téhéran, la Cour admet : "qu'aucun Etat n'a l'obligation d'entretenir des relations
diplomatiques ou consulaires avec un autre Etat, mais qu'il ne saurait manquer de
reconnaître les obligations impératives qu'elles comportent et qui sont maintenant codifiées
dans les Conventions de Vienne de 1961 et 1963"(363). La Cour poursuit, sur la même
affaire, mais dans son arrêt du 24 mai 1980 :"La Cour croit de son devoir d'attirer
l'attention de la communauté internationale toute entière, y compris l'Iran qui en est
membre depuis des temps immémoriaux, sur le danger peut-être irréparable d'événements
comme ceux qui ont été soumis à la Cour. Ces événements ne peuvent que saper à la base
un édifice juridique patiemment construit par l'humanité au cours des siècles et dont la
(362) Sentence du 31 juillet 1989, RG.D.I.P., 1990, p. 234.
(363) CU, Ordonnance du 15 décembre 1979, Rec. 1979, p. 20.

138
sauvegarde est essentielle pour la sécurité et le bien-être d'une communauté internationale
aussi complexe que celle d'aujourd'hui, qui a plus que besoin du respect constant et
scrupuleux des règles présidant au développement ordonné des relations entre ses
membres"(364).
Pour sa part, le Secrétaire Général de l'ONU, en dénonçant l'agression de
l'IRAK en 1980 contre l'IRAN, l'a qualifiée "de violation de l'interdiction de l'usage de la
force qui est considérée comme l'une des règles du jus cogens"(365).
L<:)~.. cogell~ tout en souffrant d'un défaut de clarification défInitionnelle,
représente une contribution révolutionnaire au développement progressif du DIP. A ce
titre, son rapprochement possible avec la notion de crimes internationaux, sa parenté avec
le DIlI (dans ses injonctions les plus pressantes), suggèrent une hiérarchisation (certes
encore embryonnaire) plaçant ces règles au-dessus de toutes les autres nonnes qui ne
seraient que dispositives.
Dès lors, le DIH devrait bénéficier d'un respect accru. Les Etats sont débiteurs
d'une obligation de confonnité soit de leur propre chef, soit sous les pressions
diplomatiques de leurs semblables, soit par la pression des ONG, de l'opinion publique,
visant à refréner l'abus de souveraineté pour intégrer en leur for intérieur l'intérêt bien
compris de l'application du DIH.
Le DIH doit être appliqué. Mais il est souvent mal appliqué. En dépit de son
caractère de droit d'origine européenne, le DIlI a largement été réceptionné par les Etats
africains. Ces Etats devaient traduire cette volonté d'adhésion à l'universalisation du DIH
en en intériorisant les règles dans leurs législations nationales. A cet effet, le principe de la
(364) CD, Arrêt du 24 mai 1980, Rec. 1980, p. 43.
(365) Rapport au Conseil de Sécurité du 9 décembre 1991 relatif à la responsabilité du
dlécIenchement du conflit IRAK-IRAN, S/23273, § 7, cité par QUOC DINH et alii, op. cit., p. 201.

139
souveraineté, véritable outil à double tranchant, peut servir soit à protéger les intérêts
économiques, politiques ou stratégiques des Etats, soit à créer une sédimentation plus forte
du DIH dans l'ordre interne.
Mais il semble que le principe de souveraineté ait été souvent dirigé à l'encontre
du DIH au lieu d'en constituer le vecteur fondamental. Cette tendance se retrouve dans les
mesures étatiques qui sont rares, incomplètes, inefficientes et inadéquates. Il faut identifier
les raisons de l'inadéquation des mesures de mise en œuvre du DIH en Afrique noire et
déterminer les incidences manifestes ou latentes de cette mauvaise application.

140
TITRE II - L'INADEQUATION DE LA MISE EN OEUVRE DU D.I.H. EN
AFRIQUE NOIRE
La mise en œuvre du DIH englobe le respect, c'est-à-dire l'application effective,
le contrôle de ce respect et la répression des violations éventuelles du DIH. Le respect des
obligations humanitaires dépend, au principal, de la réception dans le droit interne ou de la
volonté politique des Etats(366). Il se dégage toutefois d'une analyse approfondie de
l'attitude des Etats mais aussi du comportement des individus (peu imprégnés des arcanes
de ce droit) une tendance générale d'ignorance du DIH (Chapitre 1).
La mise en œuvre relève d'une primordialité immédiate si l'on songe au
contexte de guerre auquel se réfère le Dili. A l'instar de tout ordre juridique qui génère des
règles pour son application, le DIH n'acquiert de sens véritable qu'avec le respect des
règles édictées. Mais de l'observation de ces données générales semble découler un tableau
assombri où se profile l'insuffisance patente des mesures de mise en œuvre (Chapitre II).
(366) Cf. BRINGUIER (P.), Valeurs humanitaires et volonté politique des Etats in Le DIB :
Problèmes actuels et Perspectives d'avenir, Colloque du 13 au 14 décembre 1985, Centre de
Recherches et d'Etudes de Droit humanitaire et des Droits de l'Homme, Université de Clermont l,
Les Cahiers de Droit Public, Tome spécial, 187, pp. 143-149.

142
faits : ces autorités étatiques semblent faiblement préoccupées par la mise en œuvre
(Section 1) et la population civile paraît non concernée ou mal infonnée (Section II).
SECTION 1 - Des autorités étatiques peu concernées
L'expression "autorités étatiques" fait référence aux différentes personnes
morales de droit public, autorités nationales ou autres agents de l'Etat ayant une
quelconque responsabilité dans l'application du droit.
Si la plupart des dispositions humanitaires sont suffisamment claires pour ne
pas souffrir de failles dans l'exécution, les plus importantes d'entre elles nécessitent
pourtant une intervention de l'Etat.
Face à l'exigence de réception du DIH dans l'ordre interne, le comportement
requis des Etats se situe aux antipodes de ce qui devait être. Une diversité d'obstacles
s'oppose à une mise en œuvre adéquate du DIH en Afrique Noire (Paragraphe 1). Ces
entraves affaiblissent l'intervention étatique (Paragraphe II).
Paragraphe 1 - La diversité des obstacles
La mise en œuvre du DIH incombe au premier chef à l'Etat par l'entremise de
son pouvoir exécutif. Les mesures de mise en œuvre peuvent être prises par un ou
plusieurs ministères, le pouvoir législatif, les tribunaux, les forces armées ou d'autres
institutions étatiques.
Le contexte socio-culturel de l'Etat rétroagit sur l'application du DIH. Il est
évident que l'état de développement ou de sous-développement d'un pays pourrait avoir
une incidence majeure sur cette application au regard de la disparité des moyens de mise

143
en œuvre. De nombreux obstacles rendent aléatoire le respect du DIH(368). Le décryptage
du comportement des Etats face à la mise en œuvre du DIH offre un kaléidoscope d'images
déformées. Le manque d'empressement des Etats africains à assurer la promotion et la
diffusion dudit droit trouve des explications souvent distantes du domaine humanitaire.
Le contexte ambiant de paupérisation économique du continent explique
l'affectation prioritaire des ressources politiques, économiques, cogitives, à la lutte contre
le sous-développement(369). La politique africaine s'oriente, avant tout, vers des
problèmes de survie, de lutte contre la famine, la désertification, l'endettement chronique,
le chômage croissant, les pandémies, etc.
La lutte contre la pauvreté grève sévèrement l'énergie des Etats africains, peu
enclins (ou à tout le moins, faiblement déterminés) à prendre des mesures d'exécution du
Dili leur imposant un surcroît de dynamisme normatif. On conçoit alors que: "les
difficultés d'ordre matériel résultant de la grave crise qui sévit sur le continent détournent
l'opinion publique de tout effort de culture générale, y compris et à plus forte raiso~ de la
"culture humanitaire""(370).
L'objection principale contre l'argument de l'obstacle économique est son
caractère fallacieux. Une mise en œuvre adéquate du DIH vise à sauvegarder la p~
soubassement du développement. Ainsi, la promotion et la diffusion du DIH pourront
prévenir l'implication des enfants dans les conflits armés, freiner le nombre croissant de
réfugiés et de personnes déplacées et inverser la spirale de la violence, des pillages, viols et
traumatismes de la population civile.
(368) Cf. MUBIALA (M.), Les Etats africains et la promotion des principes humanitaires, RICR,
mars-avril 1989, pp. 97-116.
(369) Voir BELLO (E.), African customary humanitarian Law, op. cit., p. 82.
(370) MUBIALA (M.), ibid., p. 106.

144
Un autre frein à l'expansion du DIH repose sur les éléments culturels africains.
La culture de l'oralité dans les sociétés africaines s'oppose à un droit exclusivement écrit.
Une évidence doit être rappelée : les deux tiers des populations africaines vivent dans des
zones rurales où le taux d'alphabétisation est excessivement bas. Même pour la classe
privilégiée d'intellectuels africains, "l'enseignement de type occidental lui-même s'est
révélé, en grande partie, inadapté à la mentalité et aux besoins populaires, comme en
attestent de nombreux rapports de l'UNESCO''(371). Aux fins d'une bonne promotion,
l'utilisation à bon escient de structures traditionnelles existantes peut aider à la résolution
de cet obstacle.
Sm le plan social, l'Afrique Noire demeure attachée à ses structures lignagères
traditionnelles (etluùes, tribus, clans, castes)(372). Ces divisions sociales peuvent
quelquefois recouper (malgré de rares îlots de succès d'homogénéisation culturelle
d'origine occidentale), des regroupements par etluùe ou région au sein de l'appareil
politico-administratif de l'Etat, cultivant ainsi des antagonismes qui, en Afrique, peuvent
avoir des racines immémoriales ou coloniales. L'Afrique a suffisamment souffert des
conflits ethniques ou tribaux. Une diffusion efficace du DIH devra veiller à un égalitarisme
(entre milieu rural et milieu mbain, entre groupes linguistiques) pour ne pas frustrer ou
éveiller des velléités identitaires ou irrédentistes couvant toujours sous l'apparent ordre
étatique(373).
Ces entraves peuvent être attisées par l'action politique de l'Etat. La volonté de
se doter de tous les attributs modernes, au lendemain des indépendances, suscitait
" (371) MUBIALA (M.), ~, p. 146.
(372) Cf MBAYE (K.), Les réalités du monde noir et les Droits de l'Homme in RUDH, Vol. 11-3,
1969, p. 393 et s. ; voir également GAULME (F.), Tribus, ethnies et frontières in Afrique
Contemporaine, Numéro Spécial, 4e trimestre 1992, pp. 43-49.
(373) Cf HUENU (C.), supra, note N° 121.

145
l'embrigadement des particularismes locaux dans la recherche à tout pnx de l'unité
nationale(374).
L'importance allouée à cette tâche a conduit les Etats à promouvoir urt
nivellement administrati.( économique ou social des différentes circonscriptions. Unité
nationale et lutte contre le sous-développement mobilisent les Etats. Le principe de la
souveraineté servira, soit d'argument juridique contre les immixtions étrangères dans les
conflits internes ou internationaux, soit de prétexte abusif à la non ratification. Les Etats
sont prompts à invoquer la simple opération de maintien de l'ordre territorial en cas de
guerre civile.
Cette seconde variante explicative du comportement des Etats fait que :
"souvent même les gouvernements, pour des raisons politiques évidentes, répugnent à
reconnaître l'existence d'une situation de "conflit" interne caractérisé, à reconnaître aux
f1émeutiers" le statut de combattant. On demeure alors dans le type de situation où le
principe de souveraineté l'emporte sur le principe d'humanité, à l'exception toujours du
f;:uneux "noyau dur" des droits de l'Homme inaliénable (et encore à la condition que les
Etats en question soient parties aux conventions sur les droits de l'Homme, car ceux-ci sont
rarement reconnus de manière coutumière)"(375).
Cette tendance à l'auto-défense de l'Etat devance ses obligations, fussent-elles
hwnanitaires, et fait comprendre les raisons pour lesquelles « lorsque tout d'abord, leur
sécwité extérieure ou intérieure est en jeu, en cas de guerre ou de troubles intérieurs, les
Etats n'hésitent pas à s'affranchir du respect de tout ou partie de leurs obligations
humanitaires, y compris d'ailleurs de celles que pourtant ils ont explicitement acceptées.
1(374) Cf TRAüRE (B.), supra, note N° 118.
(375) TURPIN (D.), Droits de l'Homme et Droit International Humanitaire in le Dm : Problèmes
actuels et Perspectives d'avenir, op. cit., p. 21.

146
C'est donc pour eux, leur intérêt vital en tant qu'Etat prime les valeurs humamtaires et que,
en cas de contradiction, ils choisiront le premier au détriment des secondes »(376).
L'unité. nationale du pays (intérèt vital, par définition, pour l'Etat) a été
revendiquée par les militaires pour légitimer les coups d'Etat, putschs instaurant des
régimes divorçant avec toute institution ou législation démocratique. Le souci premier des
militaires africains de suspendre la Constitution et la légalité, peut retarder indûment
l'épanouissement du DIH.
Les régimes militaires africains issus de putschs (fondés de l'avis de ceux-ci sur
des raisons de lutte contre la corruption bureaucratique, des mœurs et la récession
économique, etc.), ne font pas du respect du DIB leur principale préoccupation(377).
A ces obstacles d'ordre politique, s'ajoutent des limites juridiques, avancées à
dessein pour différer l'application du Dili.
L'un des arguments les plus invoqués pour justifier les violations du DIB est
l'état de nécessité qui "n'est autre que l'état de celui qui se sent contraint à transgresser la
loi parce que seule cette transgression, et quel que soit le mal qu'elle entraîne, pennet
d'é'viter qu'un autre mal, plus -grand encore, se produise"(378). Les obligations
conventionnelles des Etats résultent avant tout du droit international. Toute violation
(376) BRINGUIER (P.), op. cil., p. 146.
(377) Sur l'importance des coups d'Etat en Afrique, consulter LAVROFF (D.G.), Essai de
typologie de la prise du pouvoir par les militaires en Afrique in RA.D.I.C., décembre 1989, Tome
1, N° 4, pp. 533-550 ; LUBEN (lD.), L'Afrique depuis 1958 : repères chronologiques, in Afrique
2000, N° 7, octobre, novembre, décembre 1991 ; MOUELLE-KOMBI II (N.), Pour une approche
prospective des problèmes politiques internationaux en Afrique, in Afrique 2000, N° 13, avril-mai-
juin 1993, pp. 29-38. ; VOHITO (S.) et LOUNGOULAH (G.L.), Forces armées et processus
démocratique en Afrique Subsaharienne in Afrique 2000, N° 6, janvier-février-mars 1997 ;
BENCHENANE (M.), Les coups d'Etat en Afrique, Paris, Publisud, 1983, 196 p.
(378) DAVlD (E.), Introduction au Dili : mise en œuvre et contrôle (problèmes choisis), Recueil
de rIIDH, Il e session d'enseignement (30 juin - 25 juillet 1980), Tome, 2, 41 p.

147
entraîne la mise en œuvre de la responsabilité, sauf en cas d'existence de circonstances
excluant l'illicéité.
En effet, il est admis que "les causes exonératoires de responsabilité font
disparaître l'un des deux éléments constitutifs de la responsabilité : soit le comportement
du sujet de Droit international en cause ne peut plus être considéré comme illicite ; soit le
manquement au Droit international ne peut plus être attribué à ce sujet de droit"(379).
L'état de nécessité évoque cette hypothèse d'admission "de la théorie du moindre mal en
cas de péril actuel et imminent mettant en danger les intérêts essentiels de l'Etat: par
exemple son existence, son statut territorial ou personnel, son gouvernement ou sa forme
même, son indépendance ou sa capacité d'agir [...] l'état de nécessité comme cause
exonératoire de l'illicéité est soumis à des conditions strictes et cumulatives que sont:
-la non exclusion de l'excuse parmi les causes exonératoires conventionnelles;
-le caractère ultime du recours à la violation de l'obligation internationale;
- le respect des droits et intérêts essentiels de l'Etat victime ;
- la compatibilité de la violation de l'illicéité avec les normes de JUS
cogens"(380).
(379) Cf NGUYEN QUOC DINH, DAILLIER (p.) et PELLET (A.), op. cit., p. 731.
(380) Cf RANJEVA (R.) et CADOUX (Ch.), Droit International public, op. cit., pp. 215-216 ;
voir dans le même sens, les conditions énumérées par Nguyen QUOC DINH et alii, op. cit., p. 735
"_ l'excuse ne doit pas avoir été écartée par un traité, expressément ou même dans son
esprit (ce qui exige un examen cas par cas de l'objet et du but de ce traité) ;
- la violation du droit était le seul moyen utilisable;
- cette violation ne doit pas porter atteinte à un intérêt tout aussi essentiel de l'Etat victime;
- il ne doit pas s'agir de la violation d'une nonne de jus cogens". Il faut souligner que ces
conditions sont reprises, telles quelles par l'art. 33 du projet de la C.D.!. de codification du droit de
la responsabilité des Etats (lère Partie) texte in DUPUY (p.M.), Grands textes, op. cit., pp. 819-
828.

148
Le DIP ne répugne donc pas à la rétention de l'état de nécessité comme cause
d'exonération partielle de la responsabilité pénale individuelle.
L'état de nécessité peut être un obstacle à l'application du DIH lorsqu'il est
avancé pour légitimer les abus perpétrés par les soldats dans diverses situations de combat.
Mais il demeure difficile à prouver même si les militaires ont trop souvent tendance à
exciper de cet état pour s'affranchir du respect des nonnes humanitaires.
Les incertitudes liées aux frontières de la notiol\\ déteignent sur l'évaluation du
degré de nécessité dans lequel se trouve le coupable, mais octroient au juge un grand
pouvoir d'appréciation pour la dispense de circonstances atténuantes.
L'état de nécessité n'a pas été retenu par la Conférence diplomatique de 1949,
laissant le soin aux législations nationales de résoudre le problème soit de façon expresse,
soit par application de dispositions générales découlant des codes pénaux.
L'état de nécessité se rapproche de l'excuse de l'ordre supérieur, thèse soulevée
à maintes reprises devant le Tribunal de Nuremberg par les responsables nazis (ici l'ordre
du FüHRER). A ce moyen de défense denière lequel se réfugiaient les accusés, le
Tribunal a répondu: "Les obligations internationales qui s'imposent aux individus priment
les devoirs d'obéissance envers l'Etat dont ils sont ressortissants. Celui qui a violé les lois
de la guerre ne peut, pour se justifier, alléguer le mandat qu'il a reçu de l'Etat, du moment
que l'Etat, en donnant ce mandat, a outrepassé les pouvoirs que lui reconnaît le Droit
international"(381). La Commission du Droit international dans son projet d'articles sur la
responsabilité internationale des Etats retient la formulation suivante en son article il : "Le
(381) Cf. NGUYEN QUOC DINH et alii, op. cit., p. 624.
Toutefois, le soldat est placé devant un lourd dilemme, selon EL KOUHENE "ou, il obéit à l'ordre
illicite reçu et sa responsabilité pénale peut être engagée pour infraction grave ou, il n'obéit pas et
c'est alors la justice militaire qui le sanctionne", EL KOUHENE (M.) : Les garanties

149
fait qu'un individu accusé d'un crime contre la paix et la sécurité de l'humanité a agi sur
ordre d'un gouvernement ou d'un supérieur hiérarchique ne dégage pas sa responsabilité
pénale s'il avait la possibilité de ne pas se confonner à cet ordre, compte tenu des
circonstances"(382).
L'excuse de l'ordre supérieur n'a pas été expressément adoptée à la Conférence
diplomatique de 1977. La seule disposition qui semble s'en rapprocher, est l'article 86 al. 2
du Protocole 1 qui précise : "Le fait qu'une infraction aux Conventions ou au présent
Protocole a été commise par un subordonné n'exonère pas ses supérieurs de leur
responsabilité pénale ou disciplinaire, selon le cas, s'ils savaient ou possédaient des
infonnations leur pennettant de conclure, dans les circonstances du moment, que ce
subordonné commettait ou allait commettre une telle infraction, et s'ils n'ont pas pris toutes
les mesures pratiquement possibles en leur pouvoir pour empêcher ou réprimer cette
infraction". Le Pr. lA. BARBERIS explique ainsi le mécanisme de la responsabilité
individuelle du soldat, qu'il ait agi sur ordre de son supérieur ou non : "Le fait qu'une
sanction individuelle soit appliquée à un membre des forces armées ayant violé le droit de
la guerre ne modifie pas sa situation d"'organe" de l'Etat. La sanction que subit le soldat
ayant commis un crime de guerre lui est appliquée pour avoir violé en tant qu'organe de
l'Etat, le droit de la guerre"(383).
Il en résulte que l'excuse de l'ordre supérieur n'est qu'une cause d'atténuation
très limitée de la responsabilité du subordonné(384).
fondamentales..., op. cit., p. 39. Cf. aussi VERHAEGEN (J.), La culpabilité des exécutants
d'ordres illégaux in Revue Juridique du Congo, 1970, pp. 231-232.
)(' (382) Cf. Nguyen QUOC DINH et alii, iQllL p. 625. Il s'agit du projet adopté en 1991 par la C.D.I.
Le TMI de Tokyo dans son jugement du 12 novembre 1946 réitérait le principe de la
responsabilité pénale des agents de l'Etat en dépit des ordres supérieurs.
(383) BARBERIS (lA.), Cours Général de DIP, RCADI, 1983-1, Vol. 179, p. 208.
(384) DAVID (E.), L'excuse de l'ordre supérieur et l'état de nécessité, in RB.D.I., Vol. XVI, 1978-
1979, l, Bruylant, Bruxelles, pp. 65-84 ; consulter également DAVID (E.), L'actualité juridique de
Nuremberg, in Procès de Nuremberg : Conséquences et Actualisation, Actes du Colloque
international, 27 mars 1987, Université Libre de Bruxelles, Bruylant, 1988, pp. 89-181 ; voir

150
Une autre questio~ la réciprocité, quoique défnùtivement résolue par le DIH
dans le sens de son obsolescence, reste malgré tout intériorisée par les stratèges étatiques.
L'article 2 commun aux Conventions de Genève de 1949 est pourtant explicite, en
disposant: "En dehors des dispositions qui doivent entrer en vigueur dès le temps de paix,
la présente Convention s'appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé
surgissant entre deux ou plusieurs Hautes Parties contractantes, même si l'état de guerre
n'est pas reconnu par l'une d'elles.
La Convention s'appliquera également dans tous les cas d'occupation de tout ou
partie du territoire d'une Haute Partie contractante, même si cette occupation ne rencontre
aucune résistance militaire.
Si l'une des puissances en conflit n'est pas partie à la présente Conventio~ les
Puissances parties à celles-ci resteront néanmoins liées par elle dans leurs rapports
réciproques. Elles seront liées en outre par la Convention envers la dite Puissance, si celle-
ci en accepte et en applique les dispositions".
Le DIP spécifie qu'en cas de guerre internationale, les traités bilatéraux entre
belligérants prennent fin. Quant aux traités multilatéraux, ils sont suspendus dans les
rapports entre belligérants mais restent en vigueur dans les relations entre les parties non
belligérantes et les belligérants. Toutefois, les traités bilatéraux ou multilatéraux conclus
spécialement pour la conduite des conflits armés subsistent en temps de guerre (traitement
de prisonniers de guerre, conduite des hostilités, interdiction de l'usage de certains moyens
ou méthodes de combat, etc.)(385).
également l'article 8 du Statut du Tribunal de Nuremberg qui dispose: "le fait que l'accusé a agi
conformément aux instructions de son gouvernement ou d'un supérieur hiérarchique ne le
dégagera pas de sa responsabilité mais pourra être considéré comme un motif de diminution de la
peine", cité par BLISHCHENKO (1.), op. cit., p. 341 ; cf. aussi AUBERT (M.), La question de
l'ordre supérieur et la responsabilité des commandants, in RICR, N° 770, mars-avril 1988, pp. 109-
126.
(385) VoirNGUYEN QUOC DINH et alii, op. cit., pp. 301-302.

151
Le DIH exclut, de ce fait, la réciprocité dans les conventions humanitaires.
Cette règle, concrétisée par l'abandon de la clause SI OMNES, n'est pas toujours respectée
par les Etats. En matière de politique internationale, les Etats sont guidés par leurs intérêts.
En cas de conflit anné, leurs comportements sont copiés sur les actions de l'ennemi.
Dans le contexte déraisonné des guerres, tout manque de retenue fait dégénérer
les combats et tout traitement disproportionné d'un camp sera apprécié à l'identique par
l'adversaire. Ces réalités des champs de bataille sont, tout autant, invoquées par les soldats
que par les gouvernements. On se souvient de l'exhortation belliciste d'ADOLF HITLER
dans son ouvrage "MEIN KAMPF" : "quand les peuples luttent pour leur existence, toute
considération humanitaire doit être éliminée"(386). Cette diatribe a malheureusement
constitué le lit de l'expansionnisme nazi. Certains dictateurs et fossoyeurs de l'humanité
reprennent cette idée basée sur la maxime latine INTER ARMA SILENT LEGE, ce qui ne
peut conduire qu'à une exagération militariste guère confonne à une application rationnelle
duDIH.
Le DIH constitue un barrage érigé contre la folie guerrière. Le droit ne se tait
plus devant le fracas des annes. Les victimes, Oes blessés, les malades, les naufragés), la
population civile bénéficient d'une protection juridique à laquelle ils ne pourront en aucun
cas renoncer de leur propre chef. Les Conventions de Genève ont posé péremptoirement
cette règle: "Aucune Partie contractante ne pourra s'exonérer elle-même ou exonérer une
autre Partie contractante, des responsabilités encourues par elle-même ou par une autre
Partie contractante en raison des infractions prévues à l'article précédent" (Art.
51152/1311148 communs aux Conventions de 1949).
(3'.16) Citée par Eric DAVID, supra, note N° 385. ADOLF HITLER faisant sienne la position
d'une certaine doctrine allemande (qu'il parrainait et qui est, aujourd'hui, tombée dans le discrédit)
dite "KRIEGSRASON GEHT VOR KRIEGSMANIER" ("les nécessités de la guerre priment la
manière de la faire"). Cette doctrine a été rejetée par le Tribunal de Nuremberg dans les affaires
PELEUS, MILCH et KRUPP.

152
Les différents obstacles ainsi énumérés affectent l'application du DIH. Dès lors,
il n'est pas surprenant qu'une faible amplitude des interventions étatiques sanctionne ces
diverses résistances à la mise en œuvre du DIH en Afiique noire.
Paragraphe II - La faiblesse des interventions étatiques
Ce qui caractérise l'application du DIH est la pluralité d'autorités devant
intervenir pour sa mise en œuvre. Diverses mesures d'exécution sont requises. L'article 80
du Protocole additionnel 1 de 1977 dispose : "1. Les Hautes Parties contractantes et les
Parties au conflit prendront sans délai toutes les mesures nécessaires pour exécuter les
obligations qui leur incombent en vertu des Conventions et du Présent Protocole. 2. Les
Hautes Parties contractantes et les Parties au conflit donneront des ordres et des
instructions propres à assurer le respect des Conventions et du présent Protocole et en
surveilleront l'exécution".
A cet égard, le DIH vise un certain nombre d'autorités étatiques.
1 - Il s'agit d'abord des services gouvernementaux, au premier rang desquels
il faut mentionner le ministère de la défense. L'administration militaire, les soldats, sous-
officiers, médecins militaires, officiers généraux et aumôniers doivent à ce titre, être
concernés par cette diffusion(387).
Un manque notoire d'initiation au D.I.H. des hommes de troupe est relevé alors
qu"'ils sont les plus enclins à violer celui-ci du fait de la nature de leur tâche. En première
(387') Cf art. ]er de la IVe Convention de La Haye de 1907 ; art. 127 de la me Convention et
article 144 de la IVe Convention de 1949. Dans le même sens, on peut citer l'article 25 de la
CClllvention de La Haye de 1954, l'article 83 du Protocole 1 et l'article 19 du Protocole II de 1977.

153
ligne sur les champs de bataille, ils sont souvent en proie à l'angoisse, à la peur voire à la
colère, ce qui les prédispose à un comportement attentatoire au droit de la guerre"(388).
En raison de l'importance de leurs fonctions, les commandants sont également
des cibles privilégiés. Les devoirs de ces hauts officiers sont mis en exergue en ce qui
concerne la prévention et la répression des infractions au DIH. L'article 83 al. 2 du
Protocole l attache une particulière importance à la diffusion : "les autorités militaires ou
civiles qui, en période de conflit anné assumeraient des responsabilités dans l'application
des Conventions et du présent Protocole devront avoir une pleine connaissance du texte de
ces instruments". Une disposition traite spécifiquement des devoirs des commandants :
l'article 87 du Protocole 1. Les commandants sont responsables des actes de leurs
subordonnés. Ds doivent s'attacher à empêcher la commission d'infractions par les soldats
(art. 87 al. 1) ; faire connaître l'étendue de leurs obligations aux hommes de troupe (art. 87
al. 2) ; et prendre des sanctions pénales ou disciplinaires à l'encontre des auteurs des
violations au DIH (art. 87 al. 3). Ces devoirs des commandants et des soldats sont d'une
nécessité absolue parce que "le respect des règles humanitaires fait, en d'autres termes,
partie de la discipline qui est elle-même la marque inaliénable d'une unité militaire
combative. Cela signifie que le respect du Droit international humanitaire n'est pas
seulement une obligation gênante, mais se trouve être dans le propre intérêt, bien compris,
des responsables des forces armées"(389).
Malgré les différentes interpellations du DIH, il faut constater un déficit
manifeste dans l'enseignement et la formation des membres des forces années africaines.
Peu d'Etats disposent de règlements militaires dignes de ce nom (Nigeria, Afrique du Sud,
(388) GUEYE (B.), op. cit., pp. 5-6.
(389) GASSER (H.P.), Introduction au Dili, op. cit., p. 87 ; il faut signaler l'excellent ouvrage
indicatif de modèles de manuels militaires, de Frédéric de MULINEN : Manuel sur le droit de la
guerre pour les forces armées, CICR, Genève, 1981,242 p.

154
Côte d'Ivoire, Bénin, Sénégal)(390). L'importance des manuels sur le droit de la guerre
pour des civils ou des militaires ne sera jamais assez mentionnée pour guider le
comportement humanitaire et éclairer les décisions des stratèges. Rares sont les Etats qui
associent à cette formation des conseillers juridiques, indiqués à l'art. 82 du Protocole 1 :
"Les Hautes Parties contractantes en tout temps, et les Parties au conflit en période de
conflit armé, veilleront à ce que des conseillers juridiques soient disponibles, lorsqu'il y
aura lieu, pour conseiller les commandants militaires, à l'échelon approprié, quant à
l'application des Conventions et du présent Protocole et quant à l'enseignement approprié à
dispenser aux forces années à ce sujet". L'Administration civile ou militaire a besoin d'être
secondée dans la vulgarisation du Dili.
2 - D'autre part, les Conventions humanitaires aménagent une place de choix
aux soins à accorder aux blessés, malades et naufragés. Cet aspect thérapeutique vise, en
particulier, l'intervention du ministère chargé de la santé. Le DIH protège les
établissements sanitaires, les services de santé, les navires-hôpitaux et autres véhicules
sanitaires. L'article 19 de la 1ère Convention de Genève de 1949 organise cette protection,
en ces tennes : "Les établissements fixes et les formations sanitaires mobiles du Service de
santé ne pourront en aucune circonstance être l'objet d'attaques, mais seront en tout temps
(390) Pour le Nigeria, cf. OPERATIONAL CODE OF CONDUCT FOR THE NIGERIAN
ARMY, issued apparently in July 1967 by MAJOR-GENERAL YAKUBU GOWON, HEAD OF
THE FEDERAL MILITARY GOVERNMENT published in KJRK GREEN (AH.M.) : CRISIS
AND CONFLICT IN NlGERIA A Documentary sourcebook, 1966-1969, Vol. 1, London, 1971,
pp. 455-457.
Pour la Côte d'Ivoire, cf. Décret nO 68-440 du 17 septembre 1968 portant règlement de discipline
générale dans les forces armées nationales, in Journal Officiel de la République de Côte d'Ivoire,
1968, 1806.
Pour le Bénin, cf décret n° 69-312 du 9 décembre 1969 instituant un règlement de discipline dans
les Forces armées béninoises, in Mise en œuvre du Droit International Humanitaire en Afrique,
Abidjan, 1997, p. 145.
Pour le Sénégal, consulter loi nO 94-44 du 27 mai 1994 portant Code de justice militaire, JORS n°
5602 du 15 octobre 1994, pp. 451-469 ; Décret n° 74-571 du 13 juin 1974 portant Règlement sur
l'emploi et le service de la gendarmerie in JORS n° 4368 du 22 juillet 1974, p. 1161.

155
respectés et protégés par les Parties au conflit. S'ils tombent aux mains de la partie adverse,
ils pourront continuer à fonctionner tant que la Puissance captrice n'aura pas elle-même
assuré les soins nécessaires aux blessés et malades se trouvant dans ces établissements et
formations.
Les autorités compétentes veilleront à ce que les établissements et les
formations sanitaires mentiOlmés ci-dessus soient, dans la mesure du possible, situés de
telle façon que des attaques éventuelles contre des objectifs militaires ne puissent mettre
ces établissements et formations sanitaires en danger"(391). Mais cette protection peut
cesser lorsqulllil en est fait usage pour commettre en dehors de leurs devoirs humanitaires,
des actes nuisibles à l'ennemi. Toutefois, la protection ne cessera qu'après sommation
fIxant dans tous les cas opportuns, un délai raisonnable et qui serait demeurée sans effet"
(art. 21 de la 1ère Convention).
Les personnes en rapport avec cette activité médicale sont également sous la
protection du DIH. Il s'agit des médecins militaires ou civils, infirmiers, sauveteurs,
ambulanciers "chargés, de façon permanente ou temporaire, de la recherche, de
l'enlèvement, du transport, du diagnostic ou soins aux blessés, malades ou naufragés,
prévention des maladies, administration et fonctionnement des unités sanitaires ou des
moyens de transport sanitaire"(392). Ce personnel comprend, en outre, le personnel
secouriste de la Croix-Rouge ou du Croissant Rouge, celui affecté à des services de
protection civile et celui des autres sociétés de secours volontaires dûment reconnues et
autorisées par leur gouvemement(393).
Pour l'Afrique du Sud, consulter WHITE PAPER ON DEFENCE : Defence in Democracy,
Department ofDefence, May 1996 et CIVIL EDUCATION MANUAL, September 1997, in TMC
Asser Instituut : Yearbook ofIntemational Humanitarian law, op. cit., p. 499.
(391) On retrouve cette protection aux articles 12 de la Ile Convention et 18 de la IVe Convention
de 1949 et art. 12 du Protocole 1.
(392) VERRI (P.), Dictionnaire... , op. cit. p. 95.
(393) Articles 24 à 32 de la 1ère Convention; articles 36 et 37 de la Ile Convention; articles 8 al.
c, 16 et 17 du Protocole 1 de 1977.

156
Il faut aussi souligner que cette protection ou immunité est largement
méconnue par les intéressés eux-mêmes.
Tout autant est ignoré l'usage du signe distinctift394). Il faut rappeler que le
signe héraldique de la Croix-Rouge fut adopté en 1863 par les sociétés de secours aux
militaires et en 1864 par les services de santé des forces armées. A la suite de la guerre
russo-ottomane, la Turquie, en 1876, exprima son désir d'adopter un croissant rouge à la
place de la Croix-Rouge parce que "la nature de ce signe blessait les susceptibilités du
soldat musulman". En 1899, à la Conférence de La Haye, les représentants des Royaumes
de Siam et de la Perse demandèrent pour leurs pays le droit d'utiliser la FLAMME
ROUGE et le SOLEIL ROUGE. En 1949, Israël proposa de conserver comme emblème, le
"BOUCLIER DE DAVID" (MAGEN DAVID ADOM) rouge sur fond blanc.
Depuis 1949, les débats sur les signes semblent être révolus, après que les Etats
aient proposé des symboles comme LA NICHE A PRIERES, l'ARC, LA PALME, LA
ROUE, LE TRIDENT, LA CEDRE et même... LA MOSQUEE(395).
Aujourd'hui, le signe le plus répandu est celui de la Croix-Rouge (sans aucune
signification religieuse mais adopté par déférence à la Suisse: inversion des couleurs de
son drapeau), du Croissant Rouge (pour certains pays islamiques), le lion et le soleil rouges
sur fond blanc pour l'lran(396). Actuellement, la Croix-Rouge ou le Croissant Rouge
(394) Cf. art. 38 de la 1ère Convention de 1949 et art. 85 § 2, lettre f du Protocole 1 ; voir
également BACCINO-ASTRADA (A.), Manuel des droits et devoirs du personnel sanitaire lors
des conflits armés, CICR, Genève, 1982, 77 p.
(395) Pour plus de détails sur l'historique des signes, cf. Commentaire des Conventions... , Vol. l,
op. cit., p. 330 et s.
(396) L'Empire Perse devenu la République Islamique d'Iran abandonna en 1980 ce signe au profit
du Croissant Rouge. Par contre le BOUCLIER DE DAVID ne fut pas retenu en dépit de la réserve
d'Israël qui s'entête à employer le bouclier (étoile juive à six pointes formée de deux triangles
entrelacés) dans son pays. Beaucoup de délégations ont considéré que cette réserve n'était pas
valable. La Société nationale israélienne qui porte le nom de "BOUCLIER DE DAVID rouge"
n'est pas reconnue par le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge.

157
protège le personnel sanitaire et religieux, les unités sanitaires et les moyens de transport
sanitaires.
Néanmoins, ces signes ont deux usages. Ce sont d'abord des signes protecteurs
en temps de guerre. En clair, ils ont pour but d'indiquer que : "les personnes ou les biens,
qui les arborent, bénéficient d'une protection spéciale et qu'ils ne doivent être l'objet de
violence"(397). Ce signe de protection (croix rouge sur fond blanc) qui doit être de grande
dimension par rapport à l'objet à désigner, constitue la manifestation ostensible de la
protection conventionnelle des personnes, des biens et des bâtiments fIXes ou mobiles (art.
44 al. 1 de la 1ère Convention).
Ce sont ensuite des signes indicatifs en temps de paix pour montrer le
rattachement d'une personne, d'une chose avec l'institution de la Croix-Rouge sans qu'on
en entende faire bénéficier de la protection de la Convention (locaux, publications de la
Croix-Rouge). Ce second symbole est de petite dimension (article 44 al. 2 de la 1ère
Convention).
On constate souvent des imitations, des usurpations et des abus graves tels que
la perfidie dans l'utilisation pourtant réglementée de l'emblème(398).
Sur le plan conventionnel, on ne connaît que les deux usages protecteur et
indicatif. Mais la doctrine distingue divers autres emplois du signe distinctif :
-
en tant que signe d'appartenance, le signe désigne les locaux et véhicules de
l'institution, sert d'insignes pour le personnel, de sceau pour les publications
et le matériel bureaucratique ;
(397) Cf VERRI (p.), dictionnaire..., op. cit., p. 114.
(398) Cf art. 53 de la 1ère Convention de 1949.

158
- en tant que signe décoratif, le signe figure sur les médailles et distinctions
honorifiques, affiches et décoration intérieure de locaux de l'institution;
- en tant que signe allusif, le signe peut être arboré sm les postes de secours,
ambulances en dehors de toute appartenance à la Société nationale de la
Croix-Rouge mais avec son autorisation(399}.
3 - L'intervention du ministère de la justice peut aussi être d'un apport
considérable. La bonne administration de la justice ne doit pas souffrir d'une ignorance du
DIH par les magistrats ou l'administration pénitentiaire.
Les magistrats sont appelés à appliquer les lois nationales d'exécution des
obligations étatiques en matière de DIH. Ainsi, des conflits de juridiction peuvent résulter
des lois d'extradition de personnes coupables de crimes internationaux (crimes de guerre,
crimes contre la paix, crimes contre l'humanité, violations graves du DIH). Avec la
création du TPIR et de la Cour Pénale Internationale, les juges nationaux peuvent être
saisis de questions de droit pénal international et de droit humanitaire. En vertu du principe
de la compétence universelle des juridictions nationales pour les crimes et infractions au
DIH, les magistrats auront à résoudre des conflits de lois ou de nationalités en rapport avec
la poursuite, l'arrestation, l'inculpation, le jugement, la détention ou le transfert de
Rwandais coupables de ces crimes en relation avec les événements survenus au Rwanda
entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. L'Administration pénitentiaire, auxiliaire de la
justice, ne doit pas être en reste. Elle devra être formée au respect des droits de l'Homme et
du DIH relativement aux personnes arrêtées, inculpées ou détenues.
4 - Un rôle non moins crucial est dévolu au ministère chargé de l'information
ou de la communication. Nul n'ignore l'importance des mass-médias pour une alerte

159
diligente en cas de catastrophes ou de famines dues aux conflits annés. Les journalistes de
la presse écrite, parlée ou télévisée constituent un auditoire recherché pour la diffusion du
Dili. La presse, véritable quatrième pouvoir, occupe une place de choix dans les stratégies
militaires ou humanitaires à court, moyen ou long tenne.
La liberté de la presse implique subséquemment le droit du public à être
infonné juste et vrai, même si la neutralité des médias n'est pas toujours réelle. Depuis la
fin des années 80, on parle de plus en plus de "l'effet CNN" (du nom de la chaîne télévisée
américaine CABLE NEWS NETWüRK rendue célèbre par sa couverture de la guerre du
Golfe en 1991). Dans le jargon journalistique, on entend par-là, qu"'une crise ne devient
réelle aux yeux du monde extérieur qu'à partir du moment où elle fait la une de
l'actualité"(400). Le pouvoir des images télévisées a un impact considérable malgré leur
caractère sensationnel, fragmentaire, biaisé, spectaculaire, voire banalisé. L'éventail des
événements couverts épouse un large spectre allant des tremblements de terre, inondations,
famine, aux guerres internationales ou civiles. Sans cesse confrontés aux dangers, les
journalistes disposent d'une liberté de traitement de l'infonnation mais souvent endiguée
par la concurrence commerciale féroce des autres médias et les limitations budgétaires qui
leur sont allouées. il en résulte un dilemme pour les journalistes notamment africains qui
"se trouvent de plus en plus devant ces douloureux déchirements où la passion aveugle ne
laisse qU'Wle faible marge de manœuvre. Vouloir infonner, analyser, commenter et
présenter une version équilibrée et correcte des choses, au moment où la diabolisation de
l'autre s'impose comme lUle tendance naturelle, entraîne des contraintes dont la profession
a du mal à se dépêtrer"(401).
.i.._ (399) Cf Le Commentaire des Conventions..., Vol. l, op. cit., pp. 373-375.
(400) Cf L'HUMANITAIRE ET LES MEDIAS in Croix-Rouge Croissant Rouge, N° l, Genève,
1996, p. 1.
(401) Cf RADIO ACTIONS N° Il, février 1997, publiée par l'Institut PANaS, Dakar, p. 3 ; cf
GUEYE (M.), Les médias dans les conflits: entre l'humanitaire, la propagande et l'objectivité,
Revue Africaine de Communication, CESTI, DCAD, mai-juin 1998, pp. 25-32

160
Ce constat révèle la difficulté à laquelle sont confrontés les journalistes de ce
continent où "la liberté de la presse reste un acquis fragile, le journalisme demeure Wl
métier à risque"(402). fi n'est pas étonnant que cette presse ait payé un lourd tribut en
Somalie, en Algérie, au Burundi et en particulier au Rwanda où, en 1994, plus de 50
journalistes ont été massacrés(403).
Les journalistes peuvent utilement contribuer à amplifier le
message
humanitaire et donc à sauver des vies. Mais ils sont souvent empêtrés dans des
considérations socio-culturelles, ce qui les oblige à opérer des choix, tant il est \\Tai que
"les contextes conflictuels ne favorisent pas souvent la libre collecte et la libre expression
de l'information. Entre deux camps en conflit, les intérêts partisans ne s'accommodent
guère du libre regard du journaliste. On a plutôt besoin d'hommes qui choisissent leur
camp" (404).
La relation entre les médias et les organisations hwnanitaires n'est pas toujours
empreinte d'une franche collaboration en dépit du fait qu'ils fonnent un couple dans lequel
le mariage de raison constitue un impératif de rigueur. Un professionnel de la BBC World
Service envisageait cette relation en ces tennes : "C'est comme un couple dont chaque
partenaire se sentirait trahi et menacé dans son intégrité par le comportement de l'autre [...].
Les médias doivent comprendre que les organisations hwnanitaires ne sont pas en quête
dime simple reconnaissance mais qu'elles ont leurs propres priorités et un message
spécifique et très précis à transmettre. Quant à ces dernières, elles doivent admettre que
tous les professionnels de l'information ne sont pas des vautours dénués de conscience et
de scrupules. Certains journalistes peuvent légitimement porter un regard critique sur leur
(402) RADIO ACTIONS N° Il, ibid., p. 4.
(403) Chaque année, l'O.N.G. REPORTERS SANS FRONTIERES publie son rapport dans lequel,
elle énumère le nombre de journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions dans des zones de
conflit.
(404) RADIO ACTIONS N° Il, op. cit., p. 3.

161
action, parce qu'ils sont très bien infonnés et parce que leur fonnation et leur fonction leur
confèrent une capacité d'analyse particulière"(405).
Une tendance se dégage de l'observation des conflits armés : ils sont
fréoLuemment entretenus par des batailles médiatiques des belligérants par leur presse
in1Lerposée. Ainsi "RADIO ONE" a contribué à la prise du pouvoir en Gambie de Yaya
J AMMEH ; "RADIO MOGADISCIO" a été âprement disputée par toutes les factions
somaliennes; "RADIO FREEDOM" a répandu le message des combattants de l'ANC ;
"RADIO VORGAN" ("La Voix de la Résistance du Coq noir") a largement favorisé la
poursuite des combats par l'UNITA ; "LA VOIX DE LA NAMIBIE" a fait connaître la
cause de la SWAPO ; la "RADIO DU SAHARA LIBRE" et la "RADIO DE LA
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE SAHRAOUIE" ont relayé les prétentions du
POLISARIO; la "VOIX DE LA REPUBLIQUE DU SOMALILAND" et "LA VOIX DU
SOUDAN" combattent le régime soudanais depuis l'Erythrée ; et la sinistre radio
flagramment impliquée dans l'instigation du massacre des Tutsis au Rwanda, est connue
sous le nom de "RADIO DES MILLE COLLINES"(406), ou encore la "VOIX DU
NORD", organe prônant le racisme anti-touareg du Mouvement GANDAKOY. Confronté
à la problématique des joumalistes(407), le DIH s'est attaché très tôt à leur protection.
De 1899 à 1949, on admettait que les correspondants de guerre, c'est-à-dire les
journalistes officiellement accrédités auprès des forces armées, devaient bénéficier du
statut de prisonniers de guerre en cas de capture, à la condition de présenter une carte de
légitimation délivrée par les autorités militaires compétentes.
(405) Propos rapportés par CROIX-ROUGE, CROISSANT ROUGE N° 1, op. cit., p. 3.
(406) RADIO ACTIONS N° Il, p. 5.
('''07) Cf. GASSER (H.P.), La protection des journalistes dans les missions professionnelles
périlleuses in RICR, janvier-février 1983, pp. 3-19 ; GHEBALI (YV), La problématique de la
protection internationale des journalistes en mission périlleuse in Le Dili : Problèmes actuels et
Perspectives d'avenir..., op. cit., pp. 107-113.

162
Depuis 1977, la protection du DIH couvre les correspondants de guerre mais
également les correspondants non accrédités. La généralisation de la protection a eu pour
conséquence d'octroyer le statut de personne civile à tout journaliste en mission périlleuse
(correspondants de guerre accrédités ou non).
L'art. 79 du Protocole 1 de 1977 organise ainsi les mesures de protection des
journalistes :
"1. Les journalistes qui accomplissent des missions professiOImelles
périlleuses dans des zones de conflit armé seront considérés comme des personnes
civiles au sens de l'article 50, paragraphe 1.
2. Ils seront protégés en tant que tels conformément aux Conventions et
au présent Protocole, à la condition de n'entreprendre aucune action qui porte
atteinte à leur statut de personnes civiles et sans préjudice du droit des
correspondants de guerre accrédités auprès des forces armées de bénéficier du statut
prévu par l'article 4 A.4, de la Ille Convention.
3. ils pourront obtenir une carte d'identité conforme au modèle joint à
l'annexe II au présent Protocole. Cette carte, qui sera délivrée par le gouvernement
de l'Etat dont ils sont les ressortissants, ou sur le territoire duquel ils résident ou
dans lequel se trouve l'agence ou l'organe de presse qui les emploie, attestera de la
qualité de journaliste de son détenteur" .
L'exception des correspondants de guerre reste donc maintenue. ils bénéficient
du statut de prisonniers de guerre en cas de capture (art. 4, A.4 de la Ille Convention de
Genève de 1949) en qualité de personnes qui suivent les forces armées sans en faire
directement partie. Mais ces dispositions semblent totalement méconnues des autorités
gouvernementales comme des journalistes eux-mêmes.

163
5 - Une autre cible non moins importante est le ministère de l'éducation.
L'action
de
ce
service
gouvernemental
est
d'autant
nécessaire
avec
le
développement inquiétant du phénomène des enfants soldats en Afrique.
En dehors des servIces gouvernementaux, l'intervention des parlements
africains, par le biais de la ratification, justifie la nécessité de diffuser les préceptes
humanitaires en direction des membres des assemblées législatives. L'adoption de textes
législatifs ou réglementaires constitue un objectif sans cesse réitéré par le DIH(408).
Les différents services de l'Administration peuvent intervenir de façon séparée
ou simultanément dans la mise en œuvre du Dili. La coordination d'activités
promotionnelles, aussi diversifiées, a été confiée, dans certains Etats africains, à une
commission interministérielle de mise en œUVTe du DIH, rattachée au pouvoir exécutif et
chargée d'étudier, de promouvoir, d'évaluer, de proposer, de conseiller, de suivre, de
soutenir, d'hannoniser les règles du DIH au niveau national et de servir de catalyseur entre
les forces politiques et sociales concernées. En Mrique, ces commissions ont été ainsi
instituées en Côte d'Ivoire(409), au Bénin(410), en Ethiopie(411), au Zimbabwé(412) et au
Sénégal(413). Des commissions ont été créées ou sont en cours de création au Cameroun,
(408) Cf art. 5 de la Convention sur le génocide ; articles 49/5011291146 communs aux
Conventions de Genève de 1949 ; art. 28 de la Convention de La Haye de 1954 sur la protection
des biens culturels et art. 85 du Protocole 1 de 1977.
(409) Décret nO 96-853 du 25 octobre 1996 créant une "Commission interministérielle nationale de
mise en œuvre du Droit international humanitaire" en Côte d'ivoire.
(410) Décret nO 98-155 du 17 avril 1998 créant au Bénin une "Commission nationale pour la mise
en œuvre du Dili", RICR, N° 833, Vol. 81, mars 1999.
(411) Commission nationale consultative sur le DIH et sa mise en œuvre, créée en février 1997.
(412) Comité interministériel des Droits de l'Homme et du Droit humanitaire créé en 1994, cf
R1CR N° 818, mars-avril 1996, p. 226.
(413) Au Sénéga~ l'organe est dénommé "Comité Interministériel des Droits de l'Homme et du
Droit international humanitaire"; décret nO 97-674 du 2 juillet 1997, JORS ~ 5755 du 2 août
1997, p. 289.

164
au Nigeria, au Togo, au Ghana, en Namibie, en Zambie,
en Afrique du Sud et en
Gambie(414).
En définitive, la faiblesse des interventions étatiques se reflète sur le niveau
d'infonnation des populations civiles africaines.
SECTION II - Une population civile peu informée
La promotion vise à introduire l'enseignement du DIH dans les programmes
d'instruction des militaires ou des civils et à en encourager la recherche pour que les
instruments humanitaires soient connus de toute la population de l'Etat.
La diffusion, autre facette de la promotion, élargit la palette des destinataires
classiques pom intégrer toutes les couches sociales.
Promotion et diffusion constituent les deux branches de la mise en oeuvre du
DilI. En Afrique Noire, la promotion en direction de la population civile comporte
beaucoup de lacmes (Paragraphe 1). Ces vicissitudes se rencontrent également au niveau
de l'enseignement du DIH (Paragraphe II).
-_.__. _ - _ . _ - - - -
(414) Selon des informations recueillies auprès des Services consultatifs du CICR, la Namibie a
créé en 1995 une "Interministerial technical Committee on Ruman Rights and Rumanitarian
Law"; l'Afrique du Sud a créé une "National Committee on Rumanitarian Affairs" le 21 juin 1995;
le Togo a une Commission interministérielle de mise en oeuvre du Dili créée par décision
interministérielle nO 97-031 du Il juin 1997. Et au Cameroun, le décret n° 90-1459 du 8 novembre
19910 a créé une Commission nationale des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales. Cf
TNIC Asser Instituut : Yearbook ofintemational humanitarian Law, op. cit., pp. 400-527. A cet
égard, la Gambie a décidé de créer le 12 août 1999 un Comité interministériel pour la mise en
œuvre du Dili par Lettre OP/260/300/01/(66) de la Présidence. Cf RICR, Vol. 82, N° 838, juin
2000, pp. 512-518.

165
Paragraphe 1 - Les lacunes d'une promotion
L'application du Dili sur le plan interne gagnerait en ampleur si la promotion
s'attachait à l'enseignement de valeurs positives et à la diffusion de normes humanitaires à
la population civile.
Les Conventions de 1949 et le protocole 1 de 1977 insistent sm la nécessité de
cette promotion, en disposant: "Les Hautes Parties contractantes s'engagent à diftù.ser le
plus largement possible, en temps de paix et en temps de guerre, le texte de la présente
Convention dans leurs pays respectifs, et notamment à en incorporer l'étude dans les
programmes d'instruction militaire et, si possible, civile, de telle manière que les principes
en soient connus de l'ensemble de la population, notamment des forces armées
combattantes, du personnel sanitaire et des aumôniers"(415).
En ce qui concerne les conflits armés non internationaux, le Protocole II se
borne à fonnuler en termes généraux, que : "Le présent Protocole sera diffusé aussi
largement que possible"(416).
L'infonnation de la population peut porter autant sm la protection dont elle doit
faire l'objet en cas de conflit armé que sur les sanctions pénales encourues en cas de
violations du DIH(417).
Les principes fondamentaux du DIH(418) gouvernent la mise en place du
dispositif humanitaire en garantissant aux personnes civiles, le respect de lem intégrité, de
(415) Articles 47/48/127/144 communs aux quatre Conventions de 1949 et art. 83 al. 1 du
Protocole l de 1977.
(416) Article 19 du Protocole additionnel II de 1977 ; cf BRETTON (ph.), La mise en œuvre des
Protocoles de Genève de 1977, Revue de Droit public et de la science politique en France et à
l'étranger, Vol. 95, 1979, pp. 379-423.
(417) Articles 49/50/129/146 communs aux quatre Conventions de Genève de 1949.

166
leur personnalité à l'exclusion de toute discrimination de nature raciale, linguistique,
culturelle et religieuse, et la sauvegarde des biens et des personnes civiles de toute attaque,
en leur qualité de catégorie non combattante.
La promotion du DIH souffre d'impetfections. En général, il faut déplorer
l'insuffisance d'information de la population civile africaine concernant la normativité
humanitaire et l'universalité du message qui la sous-tend.
En Afrique Noire, certaines ambiguïtés de la promotion appellent des critiques.
Il faut rappeler que l'essentiel de la mise en œuvre repose sur des instruments
écrits. Ce trait de caractère divorce avec une approche plus réaliste basée sur une culture
aJiicaine traditionnelle, c'est-à-dire orale dans son mode de transmission.
Dans une autre perspective, la distanciation requise dans la promotion entre le
milieu rural et le milieu urbain, n'est pas assez marquée alors que les priorités respectives
de ces deux zones de peuplement ne reposent pas sur les mêmes systèmes de valeurs ni sur
les mêmes stimulations émotionnelles.
Dans le cas spécifique du milieu rural, la promotion se heurte à la barrière de la
diversité des traditions culturelles. Nul n'ignore que les Etats africains englobent une
multitude de peuples, de tribus, avec des originalités ethno-culturelles très marquées et
différenciées.
D'autre part, l'opinion publique (phénomène émergeant en Afrique mais de plus
en plus confIrmé dans les sociétés occidentales) est sous-utilisée. Cette implication
populaire, tremplin à la diffusion du DIH, reste marginale. Le passage de l'opinion
(418) Cf PICTET (1.), Les principes du Droit international humanitaire, CICR, Genève, pp. 25-60
; PICTET (1.), Le Droit humanitaire et la protection des victimes de la guerre, op. cit., pp. 31-102.

167
publique nationale à l'opinion publique internationale revêt un caractère ténu, même si une
certaine progression (mondialisation/globalisation) dans l'appréhension de ce phénomène
se précise. Le Pr. TORRELLI met en avant ces aspects internationaux, en ces termes:
"Aujourd'hui, l'Humanité fait son entrée dans le Droit international. Sans abandonner son
contenu éthique, elle lui confère tout au contraire valeur positive en devenant un concept
juridique"(419). La valorisation de l'Humanité peut s'opposer à la souveraineté immodérée,
d'autant plus que "les tensions entre l'Humanité et la Souveraineté se retrouvent tant sur le
plan des modalités de contrôle qu'à celui de la sanction [.. .]. Sur le plan de la sanction, sans
doute, l'Humanité se présente-t-elle encore, souvent en accusatrice à la barre de la justice
mondiale (pour reprendre l'expression du Juge JACKSON du Tribunal de Nuremberg)
mais aujourd'hui, le tribunal est national et, lorsque le mal est fait, il ne reste plus que le
procédé classique de la réparation"(420). L'Humanité s'incarne dans cette opinion publique
dont l'éveil pourrait amoindrir l'usage
immodéré de la Souveraineté.
Concepts
antagonistes, Souveraineté et Humanité, inspirent le DIH en guidant l'orientation de ses
principes. Déjà, un siècle plus tôt, Louis PASTEUR reconnaissait cette dualité : "deux lois
sont aujourd'hui en lutte : une loi de sang et de mort qui, en imaginant chaque jour de
nouveaux moyens de combat, oblige les peuples à être toujours prêts pour le champ de
bataille, et une loi de paix, de travai~ de salut qui ne songe qu'à délivrer l'homme des
fléaux qui l'assiègent. L'une ne cherche que les conquêtes violentes, l'autre que le
soulagement de l'humanité. Celle-là sacrifierait des centaines de milliers d'existences à
l'ambition d'un seul ~ celle-ci met une vie au-dessus de toutes les victoires"(421).
vo et ms1ltutlonne
e a rruse en œuvre paraIt
~~~~il
Un autre
1 .
. .
Id 1
.
• ..
CQmp etemeB:t 19'1lme.
s'agit du service de la protection civile(422). Cette structure à fin humanitaire, se définit
comme un "secteur de la défense civile qui s'occupe du secours organisé en faveur de la
population civile -en cas de calamités naturelles, de désastres accidentels, ou de conflits
(419) TORRELLI (M.), Le Droit International Humanitaire... , op. cit., p. 75.
(420) TORRELLI (M.), op. cit., p. 97.
(421) TüRRELLI (M.), ibid., p. 97.

168
armés- dans le but de réduire au minimwn les pertes hwnaines et les dommages aux biens
de caractère civil"(423). Une~ence tefltle de la protection civile est constatée en
Afrique Noire. Une confusion est souvent faite entre les organismes de protection civile et
les services de sapeurs-pompiers ou les services de secourisme. L'absence d'implantation
d'une telle infrastructure se justifie peu du fait que son existence ne requiert aucune
technologie particulière ou onéreuse.
Sur un autre plan, la mise en œuvre du DIH, au risque d'un effritement dans les
efforts, doit également s'appuyer sur un enseignement adapté aux besoins de chaque pays.
Paragraphe II - Les lacunes d'un enseignement
On peut identifier ces lacunes à deux niveaux: celui de la population scolarisée
et celui de la population non alphabétisée.
Le niveau scolarisé révèle un enseignement réservé à une élite intellectuelle. Il
s'agit d'une éducation au DIH limitée à la frange populaire qui a accès à l'école occidentale.
Ce niveau recèle,
malgré tout,
des insuffisances marquées par la faiblesse
de
l'enseignement tant aux échelons universitaire que scolaire ou primaire.
(422) Articles 61 à 67 du Protocole l de 1977.
(423) VERRI (p.), op. cit., p. 101 ; cf également COURSIER (H.), Cours de cinq leçons, op. cit.,
p. 53 qui cite les tâches suivantes de la protection civile : "le service de l'alerte, l'évaluation, le
sauvetage des blessés, l'évacuation des morts, les premiers secours, la lutte contre le feu,
l'hébergement, le rétablissement d'urgence des services d'utilité publique (par exemple
l'approvisionnement en eau) et de nombreuses autres activités qui ont toutes pour but de pennertre
à la population civile de continuer à vivre après avoir connu les situations catastrophiques
engendrées par la guerre". Il faut noter qu'au Sénégal, il a fallu attendre 1993 pour voir s'édifier
une telle structure. Cf. Arrêté intenninistériel N° 9605 M.INT.'MEFP du 14 octobre 1993
approuvant les Statuts et le règlement intérieur du Fonds d'Intervention de la Protection civile,
JORS N° 5554 du 4 décembre 1993, pp. 411-414 ; v. également arrêté ministériel nO 4386 M.INT-
DPe du 22 juin 1999 fixant les modalités de déclenchement, de mise en œuvre et de levée du plan
national d'organisation des secours en cas de catastrophe (plan ORSEC), JüRS n° 5875 du 31
juillet 1999, p. 1174.

169
Or, il faut se rendre à l'évidence qu'en raison de sa complexité et du haut degré
d'abstraction de certaines de ses règles, cet enseignement est essentiellement académique.
Cet enseignement académique a Wle portée restrictive parce qu'excluant les
autres niveaux scolarisés qui ne sont pas moins sollicités dans la mise en œuvre du DIH.
L'importance de l'enseignement du DIH à destination de la population scolaire
s'impose donc comme Wle évidence pour cette raison que: "l'enseignement des principes
fondamentaux du droit des conflits à cette catégorie de public est d'autant plus nécessaire
que les enfants sont de plus en plus engagés comme soldats dans les conflits
contemporains... Cette diffusion aurait le double avantage de créer en eux Wl réflexe
humanitaire et de les préparer à des activités humanitaires concrètes"(424).
L'enseignement académique réservé à mI faible pourcentage de la population
risque d'atteindre Wl objectif limité. Une stratégie promotionnelle ex-cathedra est
nécessaire en appoint à l'enseignement universitaire. Ce dernier constitue, toutefois, Wle
priorité car : "l'Université a mIe mission qui consiste à fonner des hommes et non des
athlètes du savoir. Elle doit rappeler aux générations d'étudiants qui se succèdent sur ses
bancs, que même dans ces situations de guerre où toute règle semble abolie, il subsiste lm
droit minimal à respecter"(425).
La recherche et la promotion du dialogue inter-universitaire dans cette
discipline du Droit international public souffrent d'insuffisances. La production de textes et
de matériel didactique en Dili représente un volume très faible en Afrique. Une littérature
engagée, sortant des voies étroites de la spécialisation académique, est inexistante pour Wle
sédimentation du DIH : "visant à promouvoir les valeurs humanitaires contemporaines sur
(424) GUEYE (B.), op. cit., p. 6.
(425) Cf. MUBIALA (M.), op. cit., p. 110 ; voir aussi DAVID (E.), Diffusion du Dili à
l'Université, RICR N° 764, mars-avril 1987, p. 158.

170
toile de fond des préceptes ancestraux"(426). Il est illusoire de limiter l'enseignement du
Dili à la population scolarisée. Toute la population civile est interpellée à quelque niveau
intellectuel que ce soit, par les dispositions conventionnelles ou coutumières du DIH, du
fait qu"'une meilleure connaissance des règles de Genève peut, en effet, contribuer à
réduire les horreurs auxquelles on assiste chaque fois que des civils prennent les armes
notamment dans les guerres civiles. Mal préparés, incontrôlables, ne connaissant rien au
droit des conflits armés, ils le violent d'autant plus facilement"(427).
La "stratégie promotionnelle afro-humanitaire"(428) implique un enseignement
adapté à la mentalité et aux représentations culturelles de chaque pays, aux spécificités
linguistiques de chaque ethnie ou groupe clanique.
Il s'agit là d'un vaste programme dont la réussite requiert le concours des
juristes pour décrypter les aspérités du DIB, aider à la traduction des textes en langues
nationales en en suggérant l'interprétation la plus adéquate. Les propos suivants, empruntés
à Son Excellence Monsieur François-Xavier NGOUBEYOU à la XXVe Conférence
internationale de la Croix-Rouge illustrent la nécessité de cet enseignement : "... La
connaissance du droit international humanitaire n'est pas un bien superflu en Afrique,
surtout si l'on se rappelle que ce continent détient le triste record en nombre de réfugiés, et
vient en bonne place en ce qui concerne le nombre de prisonniers de guerre, des détenus
politiques, des blessés graves et des personnes déplacées. Or, l'assistance à toutes ces
personnes, la protection et la recherche des solutions à leur situation exigent une
connaissance des principes fondamentaux des règles internationales qui régissent cette
situation... La connaissance de ces règles de droit international humanitaire peut contribuer
à améliorer le traitement réservé aux malheureuses victimes des turbulences politiques et
militaires, améliorer leur sort et faciliter les processus de recherche de solutions de leur
(426) MUBIALA (M.), ibid, p. 114.
(427) GUEYE (R), op. cit., p. 7.
(428) Expression empruntée à MUBIALA (M.), op. cit., p. 109.

171
retour à la vie normale. En d'autres termes, nous pensons que la diffusion du droit
international humanitaire doit être considérée comme lU1 complément indispensable de la
fourniture d'aide matérielle"(429).
La promotion et l'enseignement du DIH vont de pair pour Wle meilleure
information de la population civile. La mise en œuvre du DIH est loin d'être suffisante, eu
ég3Jrd à sa complexité et à la déficience législative.
(429) Cité par MUBIALA, op. cit., p. 116 ; cf. également L'Application du droit humanitaire,
Centre dEtudes et de Recherches du Droit international et des Relations internationales, Yves
SANDOZ (sous la direction de), Académie de Droit International de La Haye, Martious Nijhoff
Publishers, Dordrecht/Boston/Lancaster, 1987, 106 p.

172
CHAPITRE II - L'INSUFFISANCE DES MESURES DE MISE EN
OEUVRE
La mise en œuvre suppose l'édiction, au plan national, de normes législatives ou
réglementaires spécifiques. Cette appropriation normative par l'Etat ne saurait durablement
s'affermir qu'à la condition d'une application intelligible, et aisément accessible du DIH,
s'affranchissant de la complexité de la matière.
Cette complexité,
reflet d'un juridisme étroit et dogmatique,
entache
d'imprécision la mise en œuvre du DIH en lui attachant une réputation de discipline
foncièrement ardue.
La complexité du DIH résulte de l'extrême diversité des mesures requises. Un
constat d'insuffisance de la législation et de la réglementation nationales humanitaires se
dégage de l'examen de la pratique africaine. Les lacunes de l'application trouvent leur nid,
soit dans la complexité des mesures de mise en œuvre (Section 1), soit dans le nombre
pléthorique de ces mesures (Section II).

173
SECTION 1 - Des mesures de mise en œuvre complexes
Les critiques portées au DIH s'ingénient à mettre en exergue la complexité des
mesures de mise en œuvre. Le droit des conflits armés offre le spectacle d'une LEX
SPECIALIS au contenu dogmatique révélant l'hermétisme sous-jacent de son application
(Paragraphe 1). Cette difficulté prend sa source dans l'extrême diversité des mesures
requises (Paragraphe II).
Para2raphe 1 - L'hermétisme du droit des conflits armés
Destiné à régir un contexte particulier, le DIH renferme plusieurs niveaux de
complexité liés à la détermination du régime juridique applicable aux multiples situations
de combat, au caractère fluctuant de la qualification de ses normes et à l'enchevêtrement
des statuts des personnes intervenant dans les conflits armés.
1 - Un premier indicateur du degré de complexité réside dans la distinction
fi)ndamentale entre COMBATTANTS et NON COMBATTANTS. Si la signification
initiale de cette division était simple et ne prêtait lieu à aucune équivoque, aujourd'hui, le
DIH la rend plus vague et plus extensive. Ainsi, au regard du droit positif, par combattant
on entend un membre des forces années(430) (à l'exception du personnel sanitaire et
religieux), mais également un membre des milices ou des corps de volontaires, réunissant
les conditions suivantes :
(430) Selon l'article 43 alinéa 1er du Protocole l de 1977 : "les forces armées d'une Partie au
conflit se composent de toutes les forces, tous les groupes et toutes les unités armés et organisés
qui sont placés sous un commandement responsable de la conduite de ses subordonnés devant
<:tette Partie, même si celle-ci est représentée par un gouvernement ou une autorité non reconnus
par une Partie adverse. Ces forces armées doivent être soumises à un régime de discipline interne
qui assure, notamment, le respect des règles du Droit international applicable dans les conflits
armés".

174
"1°_ d'avoir à leur tête ooe personne responsable pour ses subordonnés;
2°- d'avoir 00 signe distinctif fixe et reconnaissable à distance;
3°_ de porter les annes ouvertement; et
4°_ de se conformer dans leurs opérations aux lois et coutumes de la
guerre"(431), et qui appartiennent à l'ooe des parties au conflit (art. 4, ~
2 de la nIe Convention de Genève de 1949).
La troisième Convention de Genève complète cette catégorie en y intégrant les
membres des mouvements de résistance et des forces années se réclamant d'oo
gouvernement non reconnu par l'adversaire (art. 4, A, 3). Une difficulté supplémentaire
concerne l'admission dans cette liste, des personnes civiles d'oo territoire non occupé qui, à
l'approche de l'ennemi, prennent spontanément et volontairement les annes. Cette situation
qualifiée de "levée en masse" est juridiquement reçue pour autant que ces personnes
:respectent les lois et coutumes de la guerre et portent ouvertement leurs armes. On admet
alors que la personne participant à ooe levée en masse perd son statut de personne civile
avec les garanties y relatives mais acquiert le statut de combattant avec les droits et devoirs
qui y sont afférents. Au titre de l'article 4, A, 6 de la Ille Convention, ces personnes
peuvent revendiquer le droit d'être traitées comme des prisonniers de guerre en cas de
capture.
Quant aux non-combattants, une défmition simple mais usuelle les circonscrit
aux membres de la population civile. A celle-ci, on assimile la personne qui ne participe
(431) Art 1er du Règlement de la guerre sur terre, annexé à la IVe Convention de La Haye du 18
octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre.

175
pas aux hostilités. La population civile et les personnes civiles(432) sont protégées des
exactions, représailles, déplacements forcés, attaques sans discrimination, en somme
contre les menaces et dangers résultant d'opérations militaires(433).
Mais la distinction entre combattants et non-combattants prend un relief encore
plus trouble avec certaines personnes aux positions statutaires non clarifiées, ou à tout le
moins, controversées: l'espion, le saboteur, le terroriste, etc.
L'espionnage reçoit un traitement particulier. Selon le Dictionnaire du Droit
International des Conflits mmés : "Une nonne générale du Droit international stipule que
sera considéré comme espion celui qui, agissant clandestinement et sous de faux prétextes,
recueille ou cherche à recueillir des infonnations militaires dans le territoire contrôlé par
l'adversaire. L'espion pris sur le fait ne pourra être puni sans jugement préalable. L'espion
qui, ayant rejoint ses propres forces armées est capturé plus tard, est traité comme
pnSOnnIef
de
guerre
et
n'encourt
aucune
sanction
pour
ses
actes
antérieurs
d'espionnage"(434). L'espionnage en temps de guerre désigne essentiellement: "l'acte ou
la tentative de recueillir par des moyens clandestins, des infonnations militaires sur
l'ennemi. C'est le caractère clandestin de l'activité et l'intention de tromper, chez l'espion,
qui distingue l'espionnage de l'acte de reconnaissance d'éclaireur ou de surveillance
effectuée par des forces militaires ou des membres des forces armées"(435). L'espion (art.
46 du Prot. 1 de 1977) a un statut hybride.
(432) Les Conventions et Protocoles insistent souvent sur la dualité terminologique. Mais il est
admis que la population civile est fOlmée de personnes civiles. La seule réserve à faire est qu'une
personne civile peut perdre ce statut en participant aux combats, mais la population, en général,
conserve un statut privilégié d'entité non belligérante.
(433) Cf art. 51 du protocole 1 de 1977.
(434) Voir VERRI (P.), op. cit., p. 52.
(435) BAXfER (RR.), Comportement des combattants et conduite des hostilités (Droit de La
Haye), in Les Dimensions internationales du Droit humanitaire, op. cit., p. 141.

176
Une personne, revêtue de l'unifonne des forces années, sera considérée comme
exerçant Wle activité licite de renseignement (art. 46 al. 2). Mais si elle se cache et se
confond dans la population civile, elle sera traitée en espion et n'aura pas droit au statut de
prisonnier de guerre.
On peut ranger dans la catégorie de personnes au statut très discuté, les
mercenaires(436). Le mercenaire a la particularité de ne pas être Wl membre de la
population civile mais aussi d'être exclu de la catégorie des combattants au statut de
belligérant privilégié. Sa situation a pourtant fortement évolué. Selon le Pr. BAXTER :
"depuis des siècles, des mercenaires ont combattu dans les conflits annés internationaux ou
internes... Toutefois, ni au titre du règlement de La Haye de 1907 ni au titre des
Conventions de Genève de 1949, ni à celui du Droit intemational coutumier, les droits des
combattants ou des belligérants ne leur ont été refusés ou, après leur capture, ceux de
prisonniers de guerre... Cependant, à l'époque de la décolonisation et des guerres de
libération nationale, les excès des mercenaires au Congo, au Biafra, en Angola, dans la
Rhodésie de l'époque (Zimbabwe) et ailleurs ont conduit beaucoup d'Etats à considérer que
les mercenaires sont des criminels"(437).
La situation du mercenaire se complique lorsqu'elle se double de la qualité
d'espion. Le DIH n'apporte pas de solution tranchée à ce niveau. Mais dans l'hypothèse
déjà évoquée de l'art. 46 al. 2 du Proto l, l'espion bénéficie du statut de combattant alors que
le mercenaire n'a droit ni à ce statut ni à celui de prisonnier de guerre. L'art. 47 al. 1 du
Proto 1 règle cette question de façon laconique: "Un mercenaire n'a pas droit au statut de
combattant ou de prisonnier de guerre".
- - - _ . _ - - - - - -
(436) Cf supra, le Partie, Titre 1, Chapitre II, Section II, Paragraphe II ; et infra, Ile Partie, Titre 1.
(437) BAXTER (R.R.), op. cit., p. 144.

177
Quant au terroriste(438), son activité est interdite dans les conflits armés
internationaux ou non internationaux(439). Le manque de définition du concept de
terrOlisme n'a pas empêché les négociateurs des Protocoles de 1977, de condamner les
attaques visant à répandre la terreur parmi la population civile(440).
Une situation voisine représente le groupe dénommé "SABOTEURS". Si la
catégorie n'a pas été retenue conventionnellement, le droit classique de la guerre ne
méconnaît pas les actes de sabotage opérés par des partisans ou des commandos. Dans ce
dernier cas, l'activité est rendue licite s'il s'agit de militaires prenant pour cibles des
objectifs militaires(441).
2 - Une autre SUMMA DIVISIO du DIH, la distinction entre OBJECTIFS
MJLITAIRES et BIENS CIVILS demeure une source de perplexité par l'indétermination
dl~s catégories qu'elle renfenne.
Un objectif militaire constitue une cible qu'on peut attaquer. A cette fin,
peuvent faire l'objet d'attaques, les membres des forces armées adverses mais également
les biens "qui, par leur nature, leur emplacement, leur destination ou leur utilisation
apportent une contribution effective à l'action militaire et dont la destruction totale ou
partielle, la capture ou la neutralisation offre en l'occurrence un avantage militaire précis"
(art. 52 § 2 du Prot. 1).
(438) Ambiguïté suprême, le DIH ne définit pas la notion de terrorisme mais interdit les actes de
terrorisme envers la population civile; voir GASSER (H.P.), Interdiction des actes de terrorisme
dans le Droit international humanitaire, in R.I.eR., juillet-août 1986, pp. 207-221.
(439) Art. 4 § 2, d du Protocole II de 1977 et art. 33 de la IVe Convention de 1949.
(440) Art. 51 du Protocole 1 de 1977.
(441) Cf VERRI (P.), op. cit., p. 111. L'auteur retient que dans la terminologie militaire, "le
sabotage est une méthode de guerre dont la licéité ou l'illicéité est déterminée par des éléments
étrangers à la notion de sabotage telle qu'elle existe en droit interne. En fait, les conditions dont
dépend la légalité du sabotage contre l'adversaire ont trait: a) à la qualité des exécutants; b) à
l'objet du sabotage; c) aux moyens et méthodes employés. En ce qui concerne les exécutants, seuls
les combattants sont autorisés à commettre des actes de sabotage".

178
A contrario, les biens de caractère civil ne doivent pas subir d'attaques ou de
représailles (art. 52 § 1). Au sens du Protocole I, un bien civil se défInit comme "un bien
qui est nonnalement affecté à un usage civil tel qu'un lieu de culte, une maison ou autre
type d'habitatio~ ou une école..." (art. 52 § 3).
La catégorie des biens civils est extensive. On y incorpore les biens
indispensables à la survie de la population civile(442), les biens culturels(443).
L'environnement naturel constitue un appendice des biens de caractère civil avec lesquels
il partage le même régime juridique(444). Dans la conduite des hostilités, il est prohibé de
causer des dommages étendus, durables et graves contre l'environnement naturel,
susceptibles de compromettre la santé ou la survie de la population civile (art. 35 § 3 du
Prot. 1de 1977).
(442) L'art. 54 du Prot. 1 de 1977 énumère les denrées alimentaires, les zones agricoles, les
récoltes, le bétail, les installations et réserves d'eau potable et les ouvrages d'irrigation. Ces biens
doivent être exempts de représailles (art. 54 § 4). Il est interdit de les utiliser pour affamer (art. 54
§ 1) ou pour provoquer le déplacement des populations civiles (art. 54 § 2).
(443) La Convention de La Haye du 14 mai 1954 et les articles 53 du Prot. 1 et 16 du Prot. fi de
1977 donnent une liste exemplative des biens culturels protégés : les monuments historiques, les
l;mvres d'art, les édifices et lieux de culte, les sites archéologiques, les musées, les dépôts,
bibliothèques, archives et collections scientifiques. Les vols, détournements, vandalismes et
utilisations de ces biens à des fins militaires ou pillages sont interdits. Une abondante littérature
peut être consultée: NAillJK (S.E.), La protection internationale des biens culturels en cas de
conflit armé, RCADI, 1967 (1), Vol. 120, pp. 66-159 ; NAillJK (S.E.), Protection des biens
culturels, in Dimensions Internationales du Droit humanitaire..., op. cit., pp. 237-249 ; BOLLA
(G.), Protection des biens culturels pendant les conflits armés, Recueil des Cours de l'llDH, 5e
session d'enseignement (1-26 juillet 1974), Strasbourg; TOMAN (1.), La protection des biens
culturels dans les conflits armés internationaux : Cadre juridique et institutionneL in Etudes et
Essais sur le DIH..., op. cit., pp. 355-375.
(444) Cf. KISS (A.), Les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1977 et la
protection des biens de l'environnement, in Etudes et Essais sur le DIH, op. cit., pp. 181-192 ;
BOUVIER (A.), Travaux récents relatifs à la protection de l'environnement en période de conflit
armé, RICR W 798, novembre-décembre 1992, pp. 578-591 ; PRIEUR (M.) et DOUMBE-BILLE
(S.), Droit de l'environnement et développement durable, PULIM 1994, Paris, 352 p.

179
Plusieurs conventions protègent l'environnement(445). Par environnement
naturel, on entend : "l'ensemble des conditions physico-chimiques et biologiques qui
pennettent et favorisent la vie des êtres vivants"(446). A cet effet, l'ensemble du DIH est
tiraillé entre deux principes contradictoires, difficilement conciliables et qui en rendent
l'application onéreuse : les nécessités militaires et les nécessités humanitaires. Dans une
analyse de cette tension, le Pr. FAUCHILLE écrivait: "L'humanité, dans la guerre, ne peut
prétendre à plus que ne le pennet le but de la guerre. Tout ce qui irait au-delà est non
seulement inutile mais nuisible, on doit garder un juste milieu entre l'exagération
humanitaire qui méconnaît les exigences inéluctables de la force des choses et
l'exagération militariste qui nie le droit, ne voit que la force et les besoins de la
force "(447). Tout en prenant le contre-pied des affmnations de CICERüN selon
lesquelles: "les lois se taisent dans le fracas des armes", il faut admettre que le Dili ne doit
pas faire fi des considérations militaires dans l'aménagement d'un espace d'épanouissement
des nécessités humanitaires. fi convient de souligner que "le résultat du compromis entre la
nécessité militaire et le but humanitaire doit être un règlement qui impose des limites
effectives à la puissance guerrière sans toutefois la rendre impossible là où elle peut
s'exercer de façon légitime"(448).
(445) Cf Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, de la transmission et
du stockage des armes chimiques du 13 janvier 1993 ; Convention sur l'interdiction d'utilisation
des techniques de modification de l'environnement à des fins militaires, adoptée par l'AGNU par
Résolution 31/72 du 10 décembre 1976 et entrée en vigueur le 18 mai 1977, dite Convention
ENMOD ; Principe 24 de la Déclaration de Rio de Janeiro, Conférence des Nations Unies sur
l'Environnement
et
le Développement (3-14 juin
1992),
doc.
NConf.
151126 in De
CHAZOURNES (L.B.) DESGAGNE (R.) et ROMANO (C.), Protection internationale de
l'environnement, Pédone, Paris, 1998, 1117 p. (pp. 41-49).
(446) VERRI (p.), Dictionnaire..., op. cit., p. 52.
(447) FAUCI-llLLE (p.), Traité de Droit International Public, Tome II: Guerre et Neutralité, Paris,
1971, paragraphe 1009.
(448) GASSER (H.P.), Interdiction des actes de terrorisme... , op. cit., p. 18 ; cf également
EUSTATHIADES (CT.), La réserve des nécessités militaires et la Convention de La Haye pour la
protection des biens culturels en cas de conflits armés, in Hommage d'une génération de juristes...,
op. cit., pp. 183-209.

180
3 - Un troisième indicateur de difficulté réside dans la variété des moyens de
combat et, par conséquent, dans la pluralité des régimes juridiques en cause. Le DIH
distingue une grande diversité d'armes.
- En ce qui concerne les armes classiques (armes à feu, cartouches,
projectiles mais aussi bombes à main, mines, torpilles, armes incendiaires), certains types
sont interdits par la Déclaration de Saint-Petersbourg de 1868 (s'agissant des balles qui
s'ép~Ulouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain), par la Convention de
Ge;nève de 1980 en son Protocole 1 (pour les armes aux éclats non localisables), par la
:même Convention en ses Protocoles II, III et IV (respectivement pour les armes
incendiaires, les mines et pièges, les armes à laser aveuglantes).
- S'agissant des armes bactériologiques qui visent à "infliger aux hommes et
aux animaux des maladies et altérations morbides en utilisant des insectes nocifs ou autres
organismes vivants ou morts ou leurs produits toxiques"(449), leur emploi, stockage et
fabrication sont interdits(450). De même, demeurent prohibées les armes chimiques, c'est-
à-dire qui provoquent l'asphyxie, la toxicité, l'irritement et les lésions chez l'homme et les
ammaux.
L'usage de ces différentes armes doit être guidé par la préoccupation de ne pas
tuer ou blesser par trahison ou perfidie, et de ne pas provoquer des maux et souffrances
superflus (art. 35 à 37 du Prot. 1 de 1977).
- L'ambiguïté et la complexité de la réglementation conventionnelle laissent
hors du champ d'application du DIH, l'arme la plus meurtrière qui soit: l'arme nucléaire.
(4;49) VERRI (p.), op. cit., p. 22 ; cf. aussi Res. 2603 (XXIV) de l'AGNU du 16 décembre 1969
alinéas A, a et b, in SCHINDLER (D.) et al., Le droit des conflits armés, op. cit., pp. 141-144.
i(450) Voir Protocole de Genève concernant la prohibition d'emploi à la guerre, de gaz asphyxiants,
toxiques ou similaires et des moyens bactériologiques du 17 juin 1925 et Convention sur

181
Une telle lacWle laisse-t-elle augurer de la licéité d'emploi de cette anne ? Les différentes
l~onférences diplomatiques humanitaires en avaient évité la discussion devant les réticences
des puissances nucléaires et leur volonté de privilégier des négociations entre les seuls
Etats intéressés. La situation actuelle n'est pas plus claire quoiqu'Wl avis consultatif ait
tenté d'apporter quelques lumières en ce domaine(451).
Dans un raisonnement initial, la Cour faisait prospérer l'idée de l'illicéité de ces
annes en précisant que celles-ci "sont potentiellement d'une nature catastrophique..., leur
pouvoir destructeur ne peut être endigué ni dans l'espace ni dans le temps. Ces annes ont le
pouvoir de détruire toute la civilisation, ainsi que l'écosystème tout entier de la planète" car
"le rayonnement ionisant est susceptible de porter atteinte à l'environnement, à la chaîne
alimentaire et à l'écosystème marin dans l'avenir, et de provoquer des tares et des maladies
chez les générations futures"(452).
La CU poursuivait par la mention que la nouveauté des annes nucléaires
n'exclut pas que le DIB s'y applique(453). Il en appert: "eu égard aux caractéristiques
uniques des armes nucléaires..., l'utilisation de ces annes n'apparaît guère conciliable avec
le respect de telles exigences"(454).
Dans Wle seconde étape, faisant la balance entre les exigences militaires dont la
légitime défense et les considérations de dissuasion exprimées par les puissances
nucléaires à travers divers instruments tels les traités de TLATELOLCO du 14 février
1967 et de RAROTONGA du 6 août 1985 et le traité de non-prolifération des annes
l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques
(biologiques) ou à toxines et leur destruction - Londres, Moscou, Washington, la avril 1972.
(451) CU, Avis consultatif du 8 juillet 1996 sur la licéité de la menace ou de l'emploi des armes
nucléaires et le droit humanitaire, in RIeR N° 823, 7ge année, janvier-février 1997, Numéro
Spécial, 128 p.
(452) Avis consultatif, paragraphe 35.
(453) Avis, paragraphe 86. Comme l'avaient d'ailleurs reconnu le Royaume Un~ les Etats-Unis et
la Russie.

182
nucléaires(455), la CU concluait, au regard de cette pratique : "Au vu de l'état actuel du
Droit international, ainsi que des éléments de fait dont elle dispose, la Cour ne peut
cepe:ndant conclure de façon définitive que la menace ou l'emploi d'armes nucléaires serait
licite ou illicite dans une circonstance extrême de légitime défense dans laquelle la survie
m ème d'un Etat serait en cause"(456).
Cette décision de la C.Ll qui ménage les partisans et les adversaires de la
licéité, a pu être considérée, dans le langage juridique, comme un cas de "NüN-LIQUET"
(Non-avis ou non-conclusion) puisque la Cour exprimait son incapacité à se déterminer
conformément à l'attente d'application des principes du Dili.
4 - Enfin, une autre observation sur l'hermétisme du DIH se situe au niveau
de la grande inflation terminologique des zones dites humanitaires. De nombreuses zones
d'appellations différentes ont été recensées et se rapprochent dans leur domaine
d'application.
Il s'agit d'abord des zones démilitarisées, désignant des lieux où les actes
d'hostilité tels que la détention, l'emploi, le stockage d'armes sont prohibés. C'est un régime
conventionnel applicable à une partie déterminée du territoire d'un Etat et portant
interdiction de toute manifestation de puissance militaire dans cette zone.
(454) Avis, paragraphe 95. La Cour rapporte ces conclusions aux exigences humanitaires.
(455) Avis, paragraphe 96. Sur le T.N.P., cf. Introduction supra, note N° 55 ; sur le traité de
RAROTONGA,
cf
COLARD
(D.),
Droit
des
Relations
Internationales.
Documents
fondamentaux, Paris, 2e éd., Masson 1988, pp. 150-153.
(456) Avis consultatif, paragraphe 105 E. Une grande partie de la doctrine a critiqué cette attitude
et a qualifié la décision de non-liquet. Cf. MC. CORMACK (T.L.M.), Un NON-LIQUET sur les
armes nucléaires. La Cour Internationale de Justice élude l'application des principes généraux du
Dm in R1C.R., N° Spécial 1997, op. cit.,pp. 82-98. A cet effet, on peut rappeler le précédent
d'avis négatif de la CPJI, le 23 juillet 1923, (Statut de la Carelie Orientale, Série B, N° 5) qualifié
par Sir HERSH LAUTERPACHT de "NEGATIVE OPINION".

183
Les zones démilitarisées sont voisines des zones neutralisées. Ces dernières se
réfèrent à la même idée inspiratrice. Selon le Commentaire des Conventions de Genève
"elles tendent..., au moyen de la concentration dans une zone déterminée, à protéger des
effets des opérations militaires les personnes qui ne participent pas aux hostilités, ou qui
sont mises hors de combat"(457). Elles sont créées par accord entre les parties au conflit,
dans les régions de combat et sont destinées à abriter les blessés et les malades,
combattants et non combattants et population civile étrangère aux hostilités se trouvant
dans cette région (art. 15 de la IVe Convention de 1949).
Sans préjuger de la parenté entre ces deux zones, il faut encore souligner
l'existence des zones et localités sanitaires, des zones et localités de sécurité ou des zones
et localités sanitaires et de sécurité.
Les zones et localités sanitaires sont: "organisées hors de la région des combats
pour mettre à l'abri des armes à longue portée, et surtout des bombardements aériens, les
blessés et malades, militaires ou civils"(458).
Ces zones se rapprochent du régime dévolu aux zones et localités de sécurité
qui, elles, désignent des zones "organisées hors de la région des combats pour mettre à
l'abri des annes à longue portée, et surtout des bombardements aériens, certains éléments
de la population civile dont la faiblesse requiert une protection particulière : enfants,
vieillards, femmes enceintes, etc... "(459).
Pour élargir la gamme des bénéficiaires de ces zones humanitaires, le Dili a
combiné ces zones en créant le système des zones et localités sanitaires et de sécurité qui
(457) Commentaire des Conventions..., Vol. IV, p. 139.
(458) Commentaire , Vol. IV, ibid., p. 129.
(459) Commentaire , Vol. IV, ibid., pp. 129-130.

184
associe les régimes juridiques de ces composantes(460). En procédant ainsi, le DIH
renforce également la complexité du régime juridique présidant au traitement de ces zones.
La distinction entre ces zones est très ténue. La confusion est toujours possible
entre zones et localités sanitaires et zones et localités de sécurité, entre zones démilitarisées
et zones neutralisées. Certaines zones ont un champ d'application plus étendu et la
coïncidence dans leur nature et régime juridiques n'est pas à exclure.
Ces divers paramètres de complexité se retrouvent dans la mise en œuvre du
DIH. Caractériser le DIH de droit au contenu hermétique revient également à insister sur la
pléthore des mesures de mise en œuvre à envisager.
Paragraphe II - La pléthore de mesures de mise en œuvre
Outre l'obligation fondamentale de respecter et de faire respecter le DIH, l'Etat
a à sa charge l'obligation de prendre des mesures législatives ou réglementaires,
conformément à son ordre constitutionnel, propres à assurer l'exécution de ses
engagements conventionnels.
La pennanence de ces obligations impose une continuité dans l'action
normative. L'efficacité pratique de la mise en œuvre suppose l'imprégnation des autorités
concernées de l'ensemble du contenu des normes humanitaires.
(460) Cf. art. 23 de la 1ère Convention de 1949 pour les zones et localités sanitaires et art. 14 de la
IVe Convention de 1949 pour les zones et localités sanitaires et de sécurité. Il faut aussi noter
l'existence des LOCALITES NON DEFENDUES ("VILLES OUVERTES"), art. S9 du Prot. l, ou
encore dans le cadre de l'ONU de zones préventives, de zone protégée par l'ONU (Res. 769 du 30
juin. 1992 sur la FORPRONU), de zone d'interdiction de survol (Res. 781 du 9 octobre 1992 et
Res. 816 du 31 mars 1993 sur la FORPRONU et l'OTAN en ex-Yougoslavie).

185
L'introduction du DIH dans l'ordre interne doit tenir compte des diverses règles
constitutionnelles et, par suite, de la volonté politique délibérée d'en fIxer la teneur
nationale et d'en soutenir l'application en vertu du principe PACTA SUNT SERYANDA.
Il est indispensable, pour éviter que le DIH ne reste lettre morte, d'adopter ces
mesure:s dès le temps de paix pour Wle effectivité renforcée en cas de conflit armé(461).
Le principe directeur de la mise en œuvre consiste en la clarification de la
relation. entre le droit interne et le droit international. L'Etat doit régler la question des
norme's applicables aux Conventions et Protocoles, concernant la force exécutoire des
traités conclus dans l'ordre juridique interne(462).
Les
Parties
doivent
s'informer
mutuellement
sur
les
mesures
pnses.
L'importance de la mise en œuvre n'a d'égale que le nombre particulièrement
impœssionnant des mesures à prendre. A titre indicatif, sans prétendre à l'exhaustivité,
chaque Convention ou Protocole suggère à l'Etat des mesures de mise en œuvre à
e~l.Vlsager.
Ains~ s'agissant des Conventions de Genève de 1949, on ne dénombre pas
moms d'une centaine de prescriptions à respecter et à compléter sur le double plan
législatif ou réglementaire.
Au titre de la 1ère Convention de 1949, l'Etat a Wle obligation de légiférer ou de
réglementer sur la délimitation et le fonctionnement des zones et localités sanitaires (art.
23), l'organisation de la protection du personnel des sociétés nationales de la Croix-Rouge
et du Croissant Rouge et des autres sociétés de secours reconnues (art. 26), les limitations à
(461) Cf FURET (M.F.), MARTINEZ (J.e.) et DORANDEU( H), La guerre et le droit, Paris,
f'édone, 1979, pp. 206-230.

186
l'emploi du signe de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge et des exceptions à cet usage
(art. 44), l'inclusion dans le Code pénal des sanctions aux infractions au D.J.H. (art. 49) et
la répression des abus du signe (articles 53 et 54)(463).
Pour le cas spécifique de la Ille Convention de 1949, l'Etat doit définir la
catégorie des personnes protégées, spécifier les critères d'appartenance des personnes à ses
forces armées(464) ; établir la liste des grades (art. 43) et réglementer la mise en liberté sur
parole (art. 21). L'Etat doit incorporer dans sa législation nationale ou dans ses règlements
administratifs, les conditions générales d'internement et de travail des prisonniers de
guerre, l'emploi ou la réception des secours qui leur sont destinés, les ressources
pécwùaires, la création d'un bureau national de renseignement sur le sort des prisonniers de
guerre et des personnes disparues au combat (art. 121) et d'un service des tombes (art.
122), la répression des abus et des infractions à la Convention sur le traitement des
prisonniers de guerre (art. 129 à 131).
En ce qui concerne la IVe Convention sur la protection des personnes civiles en
temps de guerre, plusieurs de ses dispositions en appellent à l'Etat, pour créer, adapter,
innover, par une législation ou une réglementation appropriée, dans les domaines suivants :
les sanctions pénales (art. 146 à 148), le statut de l'internement (art. 79 à 135), la création
des zones de sécurité (art. 13 à 16), la protection des hôpitaux et du personnel civils (art. 18
à 20), l'usage du signe de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge (art. 63), l'identification
des enfants en bas âge, ou orphelins (art. 24 et 50 de la IVe Convention), etc.
Les mesures à prendre en vertu du Protocole 1 de 1977 sont encore plus
détaillées: la fonnation de personnel qualifié aux opérations de secours et d'assistance en
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
(462) Cf. Mesures Nationales de Mise en œuvre. Résolution V de la XXVe Conférence
Internationale de la Croix-Rouge, CICR, Genève, octobre 1991,30 p.
(4€i3) Conformément à la délimitation de la présente étude, le traitement de la guerre maritime (TIe
Convention de Genève de 1949) n'en fait pas partie.

187
relation avec les sociétés nationales (art. 6), l'édiction de règles de protection des unités
sanitaires et leur localisation loin des objectifs militaires (art. 12), les missions médicales
(art. 16), l'identification du personnel des unités et des transports sanitaires (art. 18),
l'organisation de la recherche, de l'enregistrement des personnes disparues (art. 33),
l'inhwnation adéquate des personnes décédées par un organisme spécial à créer (art. 34).
Dans l'étude, la mise au point, l'acquisition d'une nouvelle anne, une réglementation
m.éticuleuse devra porter sur les circonstances et les limitations d'emploi de celle-ci (art.
36). Un régime de discipline interne devra s'appliquer aux forces armées (art. 43). Dans
toute la mesure du possible, les objectifs militaires seront éloignés des zones à forte
population (art. 61 à 67). Dans la répression des infractions, l'article 75 prescrit le respect
de garanties fondamentales. La protection des femmes (art. 76), des enfants (art. 77) fera
l'objet de mesures particulières. La diffusion (art. 83), les lois d'application (art. 84), les
mesures d'exécution (art. 80) pourront faciliter la mise en œuvre pour autant que la
législation prévoit des sanctions pénales pour dissuader ou réprimer les violations du DIH
(art. 85). Une responsabilité particulière a été attribuée aux commandants militaires pour
veiller à l'application des règles de comportement des combattants (art. 87). Tout Etat peut
souscrire une déclaration d'acceptation de la compétence de la Commission internationale
d'établissement des faits (art. 90) destinée à enquêter sur les allégations de violations du
DIH par Wle Partie ayant fait la même déclaration.
Dans le sillage du Protocole l, mais dans le domaine des conflits armés non
internationaux, le Protocole II institue des obligations permanentes pour la sauvegarde des
garanties fondamentales de la personne humaine (art. 4), pour la détention des personnes
privées de liberté (art. 5), la protection générale de la mission médicale (art. 10) et la
diffusion du DIH. Une évaluation préalable de la législation en vigueur permettra de
quantifier les besoins normatifs car "chaque pays a des besoins et des priorités différents en
matière de mise en œuvre du Droit international... Pour le DIH, une école de pensée
(464) Une carte d'identité spéciale pourra satisfaire à cette exigence (articles 4 et 17 de la IDe
Convention).

188
classique tient pour importantes les sanctions pénales, les dispositions légales contre
l'emploi abusif du signe distinctif et les dispositions administratives"(465). Toutefois une
certaine technologie entre en ligne de compte concernant l'utilisation ou la signalisation
efficace des établissements et moyens de transports sanitaires(466). L'installation de
systèmes électroniques, de signaux lwnineux et de signaux radio pennet d'identifier plus
sûrement les établissements, transports et formations sanitaires(467).
Une certaine pléthore des signaux d'identification caractérise, par ailleurs, le
Dili, originalité justifiée par les nécessités d'une protection rapprochée de catégories
spéciales de personnes ou de biens.
Ainsi, selon les cas, un signe distinctif spécial protège ces personnes ou ces
biens contre la violence. Ces signes sont constitués par :
- la Croix-Rouge (ou Croissant Rouge) sur fond blanc pour le personnel
sanitaire et religie~ les unités et moyens de transport sanitaires (art. 23 de la 1ère
Convention de 1949 ~ et Annexe l, Projet d'accord relatif aux zones et localités sanitaires,
art. 6) ;
- des bandes obliques rouges sur fond blanc pour les zones et localités
sanitaires et de sécurité (art. 14 de la IVe Convention de 1949 ~ et Annexe 1, Projet
d'Accord relatif aux zones et localités sanitaires et de sécurité, art. 6) ;
(465) FLECK (D.), La mise en œuvre du Droit international humanitaire: problèmes et priorités,
RICR, N° 788, mars-avril 1991, p. 151.
(466) Cf Résolutions 17 (Emploi de certains moyens d'identification électroniques et visuels par
des aéronefs sanitaires) ; 18 (emploi de signaux visuels pour l'identification des moyens de
transport sanitaires) ; 19 (Emploi des radio-communications pour l'annonce et l'identification des
moyens de transport sanitaires), adoptées à la 4e Session de la Conférence diplomatique de 1977 in
Les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève du 12 août 1949, CICR, Genève, 1977,
pp. 107-116.
(467) Cf Annexe 1 au Protocole 1 de 1977, Règlement relatif à l'identification, surtout articles 5 à
8.

189
- un écusson formé d'un carré bleu-roi et d'un triangle bleu-roi au-dessus du
carré pour les biens culturels (art. 53 du Protocole 1; art. 16 du Protocole II; et Convention
de La Haye de 1954) ;
- un triangle équilatéral bleu-roi sur fond orange pour les personnes, les
installations et le matériel de la protection civile (art. 15, Annexe 1 du protocole 1) ;
- un groupe de trois cercles orange vif disposés sur un même axe pour les
ouvrages et installations contenant des forces dangereuses (art. 16, Annexe 1 du Protocole
1);
- des signes spéciaux, à déterminer par accord entre Parties au conflit, pour
les localités non défendues, les zones neutralisées ou démilitarisées.
De surcroît, il faut noter l'usage du drapeau blanc protégeant les parlementaires
en cas de pourparlers ou de reddition et l'obligation de mentionner les sigles PG ou IC pour
la protection des camps de prisonniers de guerre ou d'internés civils.
La mise en œuvre du DIH, par son hermétisme et la pluralité des mesures
incombant à l'Etat, révèle une insuffisance qualitative. La complexité de la mise en œuvre
se conjugue avec une législation déficiente en Afrique.

190
SECTION II - Une législation humanitaire déficiente
Au risque de voir le DIH s'étioler et devenir un tenne plat et incohérent, la mise
en œuvre demeure une impérieuse nécessité sur le plan national. L'Etat est débiteur d'une
obligation d'appliquer, d'exécuter les nonnes du DIH dans son cadre territorial.
Sous l'impulsion du pouvoir exécutif (véritable maître d'œuvre), le parlement
devra adopter une série de mesures, imprimant son cachet national à ces règles établies sur
le plan international. Si le rôle du législateur est tout tracé, il faut, à la vérité, remarquer
que les mesures indiquées sont rares en Afrique (Paragraphe 1). Le pouvoir exécutif et le
pouvoir législatif doivent concourir à remplir le fossé entre "les mots et les conduites",
pour reprendre les expressions de LACHARRIERE(468).
Ces lacunes quantitatives, reflet de la faiblesse des interventions étatiques,
peuvent, en sens inverse, être le résultat d'une concurrence entre divers instruments
législatifs ou réglementaires (Paragraphe II).
Paragraphe 1 - Une législation peu fournie
L'Afrique moderne peut se fonder, par le truchement de sa philosophie
empreinte d'humanisme, sur ses présupposés traditionnels pour établir un tissu humanitaire
densifié et consistant.
Certaines règles du D.I.H. ne diffèrent pas fondamentalement de l'humanisme
africain. C'est dans cette rencontre entre des valeurs culturelles traditionnelles et des
nonnes codifiées, que se situe la réception du D.I.H.

191
Toutefois, la réception du DIH, dans l'ordre juridique interne, va au-delà de la
simple adhésion ou ratification des conventions de 1949 et des Protocoles de 1977. Une
fois reçu dans j'ordre national, le DIH doit être complété par les mesures déjà énumérées.
Les Etats, faut-il le rappeler, doivent veiller continuellement à la garantie politique de
l'exécution, autant par les pouvoirs exécutif, législatif que judiciaire (création d'une somme
jurisprudentielle abondante et cohérente).
Il faut tirer Wl autre constat : la mise en œuvre souffie aussi de lacunes
quantitatives. Aujourd'hui, le DIH s'est étoffé. fi ne se limite plus aux traités de 1949-1977.
Son champ d'action couvre des domaines variés, des matières soit complémentaires des
anciennes conventions, soit dissemblables par Wle extension à des zones auparavant
VIerges.
En s'attachant à l'exégèse de la Convention de Genève de 1980 et de ses trois
premiers Protocoles, on note que seuls les Etats suivants y ont adhéré: Bénin (27.03.1989),
Niger (10.11.1992), Sénégal (29.1.1999), même si d'autres Etats africains les ont
simplement
signés
:
Nigeria
(26.01.1982),
Sierra-Leone
(1er.05.1981),
Soudan
(10.04.1981) et Togo (15.08.1981). Or, les Etats africains se devaient d'intégrer dans leur
droit positif ces traités, en traduisant les règles en action.
D'autre part, la Convention de 1948 sur le génocide n'a pas reçu un meilleur
accueil(469), en dépit des violents conflits irrédentistes ou ethniques antérieurement ou
postérieurement à l'effroyable génocide rwandais de 1994.
Le DIH quitte le champ clos de 1949-1977 pour relayer les préoccupations
d'organisations internationales telles que l'O.N.V., l'U.N.E.S.C.O., l'O.U.A., le H.C.R., etc.
(468) LACHARRIERE (G. de), La réglementation du recours à la force: les mots et les conduites,
in Le droit des Peuples..., Mélanges Charles CHAUMONT, op. cit., pp. 347-362.
(469) Cf. supra, Titre. 1 de la 1ère Partie, note N° 186.

192
Ces traités, à l'instar de celui de l'OUA sur les réfugiés de 1969 ou de
l'UNESCO pour la protection des biens culturels de 1954, ont été faiblement ratifiés ou
mis en œuvre. On doit s'en inquiéter si on se réfère au nombre impressionnant de réfugiés
africains mais aussi à l'importance qualitative du patrimoine culturel africain(470).
Quant à la Convention sur les droits de l'enfant de 1989, elle fait l'objet d'Wle
attention législative ou réglementaire très faible. On peut, à l'évidence, le constater à
travers le recrutement et l'exploitation des enfants comme soldats dans les conflits libérien,
rwandais, angolais, congolais, etc.
Pour sa part, la Convention ENMOD de 1977 met l'accent sur l'interdiction de
modifier l'environnement à des fins militaires(471). Si on s'attache à l'observation de
certains conflits africains se déroulant dans des zones forestières, on peut s'alanner de
l'absence qualitative ou quantitative de mesures nationales, à ce niveau(472).
(470) La Convention de 1954 a été ratifiée par six Etats africains: Burkina Faso (1969), Cameroun
(1961), Côte d'Ivoire (1980), Gabon (1961), Soudan (1970 avec réserve) et Ghana (Déclaration de
succession 25 juillet 1960).
Le Protocole additionnel de 1954 sur les biens culturels a été signé par le Burkina Faso (1987), le
Cameroun (1961), le Gabon (1961), le Ghana (succession 1960), la Guinée (1961), Madagascar
(1961), le Mali (1961), le Niger (1976), le Nigeria (1961), le Sénégal (1987), le Zaïre (1961).
Cf. SCHINDLER (D.) et TOMAN (J.), Le Droit des conflits armés, op. cit., pp. 1047-1092.
(471) L'environnement est aussi protégé lors des conflits armés. Cf art. 225, Partie XII de la
Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Montego Bay, 10 décembre 1982; articles 35
et 55 du Protocole 1 de 1977 ; article 20 de la Charte mondiale de la Nature (Res. 3717, AGNU 28
octobre 1982), et paragraphe 5, 1 (principes généraux) de la même Charte qui déclare: "La nature
sera préservée des déprédations causées par la guerre ou d'autres actes d'hostilité", Documents
officiels de l'AGNU, 37e session, supplément N° 51 (N37/51), p.
19 (1983), in DE
CHAZOURNES (L.B.), DESGAGNE (R) et ROMANO (C.), Protection internationale de
l'envirOImement, op. cit., pp. 35-40 ; Convention de l'OUA sur la conservation de la nature et des
ressourœs naturelles, Alger 15 novembre 1968, in DE CHAZOURNES et alii, op. cit., pp. 134-
146 ; Convention de l'OUA sur l'interdiction d'importer des déchets dangereux en Afrique et le
contrôle de leurs mouvements transfrontières, Bamako, 30 janvier 1991, in DE CHAZOURNES et
alii, pp. 752-776, etc.
(472) La Convention de 1977 (mais adoptée par l'AGNU en 1976) au 1er janvier 1999, a été
signée par le Bénin, l'Ethiopie, le Ghana, le Libéria, l'Ouganda et le Zaïre mais n'a été ratifiée que
par le Bénin (30.06.1986), le Cap-Vert (3.10.1979), le Ghana (22.06.1978), le Malawi

193
La Convention d'OTTAWA de 1997 sur les mmes antipersonnel dont
l'élaboration a été précédée par une campagne publicitaire mondiale exceptionnelle, a
certes, fait l'objet d'une majorité de signatures des Etats africains, mais reste encore en
attente de ratification et de mise en vigueur. Sur les théâtres d'opération, les mines
terrestres continuent leur œuvre destructrice au Sénégal, en Angola, au Liberia, au Soudan,
au .Mozambique, etc.
Les Conventions de 1972 sur les annes bactériologiques et de 1993 sur les
annes chimiques sont pratiquement absentes des législations africaines(473).
Certes, ces conventions portent sur des annes de haute technicité, à la limite de
la science-fiction pour les Etats africains, mais ne sont pas une vue de l'esprit pour les Etats
occidentaux.
(05.10.1978), Maurice (9.12.1992), le Niger (17.02.1993), Sao-Tomé et Principe (05.10.1979). Cf
SClllNDLER (D.) et TOMAN (l), op. cit., pp. 173-190.
(473) La Convention de 1972 a été signée par l'Mrique du Sud, le Botswana, le Burkina Faso, le
Burundi, le Cap-Vert, le Congo, l'Ethiopie, le Liberia, Madagascar, le Malawi, le Mali, le Gabon,
la Gambie, le Ghana, le Lesotho, Maurice, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la République
Centrafricaine, le Rwanda, la Sierra-Léone, la Somalie, la Tanzanie, le Togo, le Zaïre. Mais elle
n'a été ratifiée que par les Etats suivants: l'Mrique du Sud (3.11.1975), le Botswana (5.2.1992),
l'Ethiopie (26.05.1975), le Rwanda (20.05.1975), Sao-Tomé (24.08.1979), le Ghana (6.6.1975), la
Guinée (20.08.1976), la Guinée-Equatoriale (16.01.1989 à Moscou et 29.07.1992 à Washington),
le Kenya (07.0"1.1976), Maurice (11.01.1973 à Londres, 15.01.1973 à Moscou et 7.08.1972 à
Washington), Le Nigeria (ratifications à Londres, Moscou, Washington en 1973), le Sénégal
(26.03.1975), les Seychelles (à Londres, Moscou et Washington en 1979), la Sierra~Leone (à
Londres, Moscou et Washington en 1976), le Togo (10.11.1976), le Zaïre (28.01.1977), le
Zimbabwe (05.11.1990), soit 25 Etats signataires mais dix-neuf Etats ratifiant (Cf SCIDNDLER
et TOMAN, op. cit., pp. 145-172).
La Convention de 1993 a été signée par 41 Etats africains mais n'a encore été ratifiée que par
vingt-trois Etats: le Lesotho (7.12.1994), Maurice (9.2.1993), les Seychelles (7.04.1993), le Bénin
(14.5.1998), le Burkina Faso (8.7.1997), le Cameroun (16.09.1996), la Côte d'Ivoire (18.12.1995),
la Guinée-Equatoriale (25.4.1997), Gambie (19.5.1998),
le Ghana (9.7.1997), la Guinée
(9.6.1997), le Kenya (25.4.1997), le Malawi (11.6.1998), le Mali (28.4.1997), la Mauritanie
(9.2.1998), la Namibie (27.11.1995), le Niger (9.4.1997), le Sénégal (20.07.1998), l'Afrique du
Sud (13.9.1995), le Swaziland (20.11.1996), la Tanzanie (25.06.1998), le Togo (23.4.1997) et le
Zimbabwe (25.4.1997).
Cf Etat des ratifications au 1er janvier 1999, in TMC Asser Instituut : Yearbook ofIntemational
Humanitarian Law, Vol. 1, 1998, pp. 400-527.

194
C'est surtout dans le domaine pénal qu'on situe le talon d'Achille de la mise en
œuvre. Le DIB, en énonçant les principes généraux, confie aux Etats le soin de concrétiser
la. mise en œuvre par l'adoption de sanctions appropriées. L'art. 146 de la IVe Convention
de 1949 ne laisse aucun doute sur l'importance de cette prescription, en disposant, en son
alinéa premier: "Les Hautes Parties contractantes s'engagent à prendre toute mesure
législative nécessaire pour fixer les sanctions pénales adéquates à appliquer aux personnes
ayant commis, ou donné l'ordre de commettre, l'une ou l'autre des infractions graves à la
présente Convention, définies à l'article suivant". L'Etat doit rechercher, pourswvre,
arrêter, détenir, juger ou extrader les personnes enfreignant ces règles.
Mais par sanctions pénales, on entend non selÙement l'institution d'une
nomenclature d'infractions mais également la répression de ces infractions. L'expression
recouvre aussi plusieurs significations: "elle peut se référer :
a) aux sanctions à appliquer aux internés civils et aux prisonniers de guerre
responsables d'infractions aux lois, règlements et ordres généraux
auxquels ils sont soumis ;
b) aux sanctions à appliquer aux personnes ayant commis des crimes de
guerre ou autres infractions au droit des conflits annés ;
c) aux sanctions à appliquer aux commandants responsables d'omissions;
d) aux sanctions à appliquer aux personnes responsables d'actes de
génocide"(474).
(474) VERRI (p.), Dictionnaire..., op. cil., p. 112 ; cf. art. 49/50/129/146 communs aux quatre
Conventions de Genève de 1949 et article 85 du Protocole 1 de 1977.

195
La législation à promulguer porte sur la fixation, pour chaque infraction, de la
peine (nature, étendue et proportionnalité) aussi bien pour les nationaux que pour les
ennemis.
Mais l'intégration dans les Codes pénaux africains de dispositions particulières
sm" la répression des crimes de génocide, des crimes de guerre et autres violations graves
du DIH, reste assez faible. Même pour les pays considérés comme les plus progressistes
dans ce domaine, l'incorporation demeure partielle. Ains~ le Sénégal a entrepris de sévir
contre la tentative, la commission ou la complicité de torture(475). Ce progrès vers la
prévention et la répression des infractions au DIH est salutaire quoique le domaine couvert
outrepasse le cadre strict des conflits armés pour embrasser les situations de troubles ou de
tensions internes, les violences policières dans le cadre ordinaire du maintien de l'ordre
public.
En revanche, les Etats africains privilégient la répression pénale des infractions
à la sécurité intérieure, qualifiant ainsi les actes des mouvements insurrectionnels, de
guérillas, de rébellion à l'autorité souveraine de l'Etat.
Ces Etats punissent souvent de la peine capitale, les actes de rébellion sans
entourer les condamnations de garanties humanitaires suffisantes.
(475) Cf Loi nO 96-15 du 28 août 1996 sur la torture, complétant le Code pénal, JORS N° 5709 du
5 octobre 1996, p. 421. Pour la Côte d'Ivoire, loi nO 81-640 du 31 juillet 1981 portant Code pénal
modifiée par la loi n° 95-512 du 6 juillet 1995 qui sanctionne les infractions contre le droit des
gens (Chapitre J, Titre J, Livre II) dont le génocide (Art. 137), les crimes contre la population civile
(Art. 138), les crimes contre les prisonniers de guerre (Art. 139) ; cf Mise en œuvre du DIH en
Afrique, op. cit. pp. 105-111.
Pour le Cameroun, cf art. 106 al. 2 et 9 de la loi nO 65LF du 12 novembre 1965 portant Code
pénal, modifiée, qui punit l'enrôlement et le recrutement sans autorisation des individus sur le
territoire national pour le compte de forces armées étrangères, cité par OLINGA (A.D.):
Considérations sur les traités dans l'ordre juridique camerounais, in 8RADIC (I996), pp. 283-308.

196
D'autres infractions graves (au sens des Conventions et Protocoles) ne sont pas
toujours prévues par les Codes pénaux. Les infractions graves, "violations déterminées des
nonnes du droit des conflits armés"(476) sont considérées comme des crimes de
gueITe(477). Ces infractions graves sont : l'homicide intentionneL les expériences
biologiques, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des
atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé, la destruction et l'appropriation de biens
non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon
illicite et arbitraire, le fait de contraindre les prisonniers de guerre ou une personne
protégée à servir dans les forces armées de la Puissance ennemie, le fait de priver un
prisonnier de guerre ou autre personne protégée de son droit d'être jugé régulièrement ou
impartialement, la déportation ou le transfert illégal d'une personne protégée, la détention
illégale d'une personne protégée, la prise d'otages et les infractions graves déftnies dans les
articles 11 et 85 du Protocole 1 de 1977(478). Selon le Pro Henri COURSIER: "Ces
articles dressent devant la conscience internationale le tableau des "infractions graves",
violations qui, si elles restaient impunies, signifieraient la dégradation de la personnalité et
la suppression du concept d'humanité"(479).
La mise en œuvre du DIH est encore affaiblie par une dispersion législative
africaine agp;Tavée soit par la concurrence avec d'autres règles émanant de disciplines
voisines, soit par la rivalité entre des nonnes universelles et des nonnes régionales.
Pour J.a Guinée, Cf. Code pénal Loi n° 98/036 du 31 décembre 1998 qui contient les articles 525 à
688 intitulés « Infractions d'ordre militaire », Voir RICR N° 838, op. cit., p. 512.
(4'76) VERRI (p.), Dictionnaire..., op. cit., p. 66.
«.177) Art. 85 § 5 du Protocole 1 de 1977.
1(478) Art. 50/51/130/147 communs aux quatre Conventions de 1949 ; cf. aussi GASSER (HP.),
Le Droit international humanitaire: Introduction..., op. cit., pp. 92-96.
(479) COURSIER (H), Cours de cinq leçons... , op. cit., p. 39.

197
Paragraphe II - Une législation concurrencée
Les obligations, auxquelles les Etats arncains sont assujetties, peuvent
s'enchevêtrer, coïncider et se recouper. C'est le dilemme auquel les Etats sont confrontés
lorsque la même matière est régie à la fois par un traité à caractère universel et Wl traité à
caractère régional.
D'autre part, du fait de la convergence des sources et des normes du DIH et des
droits de l'Homme, il n'est pas rare que les instruments internationaux s'interpénètrent, se
chevauchent, convergent ou divergent.
A titre exemplatif, le terrorisme, la prise d'otages, le génocide, la torture,
l'ap81theid, la piraterie sont réglementés par le DIH et par les Droits de l'Homme(480). Ces
interférences génèrent Wle concurrence normative.
La comparaison approfondie des deux disciplines peut aboutir à une préférence
à mettre en œuvre les dispositions des Droits de l'Homme, souvent plus connues ou plus
stabilisées.
L'existence de mécanismes de contrôle, de surveillance et de supervision de
l'application de ce droit, l'exigence de soumission de rapports périodiques à des institutions
teIlles que le Comité des Droits de l'Homme, la Commission des Droits de l'Homme, la
Sous-Commission de lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des
minorités, le Comité contre la torture, la Commission Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples, etc., la mise en place des procédures 1235 et 1503 de l'ECOSOC(481),
(480) Cf supra, Introduction.
(481) Cf Résolution 1235 (XLII) du Conseil Economique et social de l'ONU, 6 juin 1967, 147ge
séance plénière: la procédure 1235 consiste pour la Commission des Droits de l'Homme et la
Sous-Commission de Lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités, à

198
renforcent le caractère contraignant des Conventions des Droits de l'Homme en astreignant
les Etats à des obligations plus spécifiques et plus impératives.
Mais la concurrence ne doit pas être exagérée si la complémentarité des
Conventions doit renforcer la protection de la personne hwnaine. Ainsi, si les Conventions
de DIH ne définissent pas le terrorisme, la prise d'otages, le génocide ou l'apartheid
(pourtant prohibés par le droit de 1949-1977), le recours aux Conventions des Droits de
l'Homme pourra éclairer sur la détennination de ces notions(482).
En revanche, la concurrence serait négative s'il en découlait une caducité par
défaut d'application des dispositions humanitaires par les Etats africains signataires des
deux séries de traités.
L'application du Dili peut être tributaire d'une autre concurrence, celle-là entre
des nonnes à portée universelle et des nonnes géographiquement restreintes à une région.
examiner toutes les violations flagrantes des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, y
compris la politique de discrimination raciale et de ségrégation, ainsi que la politique d'apartheid
dans tous les pays, en particulier dans les pays et territoires coloniaux et dépendants. La
Commission des Droits de l'Homme peut entreprendre une étude approfondie sur ces violations et
faire un rapport sur les résultats de cette étude à l'ECOSOC qui décidera de l'issue de
l'investigation.
La Résolution 1503 (XLVIlI) du 27 mai 1970, 1693e séance, consiste, pour la Sous-Commission
précitée, à désigner un groupe de travail composé de cinq de ses membres chargés d'examiner les
communications reçues par le Secrétaire Général de l'ONU concernant des violations flagrantes et
systématiques des Droits de l'Homme dont on a des preuves dignes de foi. Le groupe de travail fait
un rapport destiné à la Sous-Commission qui peut, si elle le juge nécessaire, attirer l'attention de la
Commission des Droits de l'Homme qui peut décider de faire soit une nouvelle étude, soit une
enquête en collaboration avec l'Etat concerné (dans ce dernier cas, on peut créer un Comité spécial
d'enquête). Les mesures envisagées seront confidentielles et la Commission pourra faire des
recommandations à ce sujet au Conseil Economique et Social. Cf BUERGENTHAL (T.) et KISS
(A), op. cit., pp. 198-201.
(482) Art. II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9
décembre 1948 ; art. 1er de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 ; Convention internationale contre la prise d'otages
du 17 décembre 1979 et Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime
d'apartheid du 30 novembre 1973 in BUERGENTHAL (T.) et KISS (A), op. cit., pp. 165-168.

199
Il n'est pas rare que dans des domaines semblables, interviennent une convention
multilatérale universelle et une convention multilatérale limitée à l'Afrique.
On peut s'en convaincre par l'examen des conventions sur la iutte contre le
mercenariat(483), sur la protection des réfugiés(484), les droits de l'enfant(485) qui ont
une assise continentale (OUA) et quasi-universelle (ONU).
Si l'article 103 de la Charte des Nations unies tranche le différend en faveur des
normes universelles, en disposant : "En cas de conflit entre les obligations des Membres
des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre
accord international, les premières prévaudront", le recours à l'article 52 du même traité,
(483) Convention de l'OUA sur l'élimination du mercenariat en Afrique du 5 mai 1977 ;
Convention de l'ONU du 4 décembre 1989 sur les mercenaires. Cf. SCHINDLER (D.) et TOMAN
(J.), Droit des conflits armés, op. cit., pp. 1281-1295.
La Convention de l'ONU a été signée par six Etats africains : Angola (28.12.1990), Cameroun
(21.12.1990), Congo (20.06.1990), Mauritanie (adhésion le 09.02.1998) Nigeria (4.4.1990), Zaïre
(20.03.1990). Trois Etats africains l'ont ratifiée, Les Seychelles (12.03.1990), le Togo (25.02.1991)
et le Sénégal (loi nO 99-55 du 29 janvier 1999, JORS nO 5834 du 3 avril 1999, p. 908).
La Convention de l'OUA a été signée par 16 Etats africains dont l'Angola et la Guinée (sans
ratifier) et ratifiée par 20 Etats: Bénin (3.05.1982), Burkina Faso (21.08.1984), Cameroun (8 juin
1987), Congo (9.7.1988), Ethiopie (16.06.1982), Ghana (21.8.1978), Lesotho (21.01.1983),
Liberia (9.06.1982), Mali (25.08.1978), Niger (16.08.1980), Nigeria (24.06.1986), Rwanda
(1.06.1979), Sénégal (8.1.1982), Seychelles (15.10.1979), Soudan (22;04.1983), Tanianie
(22.03.1985), Togo (05.05.1987), Zaïre (13.07.1979), Zambie (15.02.1983) et Zimbabwe
(14.02.1992).
(484) Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique
du 10 septembre 1969 ; Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au sta~t des réfugiés et
'f sonProt.ocole du4 oetebre i957, Doc/HCR/IP/I0/FRE.
;v.- ~I ~A- \\~(,~
(485) Convention de l'ONU du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'Enfant et Charte
Africaine des droits et du Bien-être de l'enfant, Addis-Abeba (Ethiopie), juillet 1990. Doc.
CABILEG/153fRev. 2. La Charte de 1990 a été signée par le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun,
le Cap-Vert, le Congo, Djibouti, le Gabon, Maurice, l'Ouganda, le Rwanda, la RASD, le Sénégal,
les Seychelles, la Sierra-Leone, la Somalie, le Swaziland, le Togo et la Zambie. Néanmoins, seuls
huit Etats africains l'ont ratifiée : le Bénin, le Burkina Faso (10.07.1992), le Cap-Vert
{ler.09.1993), Maurice (27.02.1992), l'Ouganda (21.10.1994), les Seychelles (27.02.1992) et le
Zimba.bwe (22.02.1995). Cf SCHINDLER (D.) et rOMAN (J.), Le droit des conflits armés, op.
cit., pp. 1033-1036. Le Sénégal a ratifié la Charte de 1990 par la loi nO 98-41 du 8 septembre 1998,
JORS n° 5823 du 10 octobre 1998, p. 600.

200
pennet lDle autre lecture privilégiant les conventions régionales, en vertu de la maxime
latine LEX SPECIALIS DEROGAT GENERALIS.
Entre Etats africains, la priorité d'application est en faveur de la convention
spécifique à leur aire géographique.
Toutefois, une exception, à ne pas écarter, est la solution proposée par l'article
30 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 : "Lorsqu'lDl traité précise
qu'il est subordonné à un traité antérieur ou postérieur ou qu'il ne doit pas être considéré
comme incompatible avec cet autre traité, les dispositions de celui-ci l'emportent". Or,
l'article 52 de la Charte de l'ONU a souvent été interprété dans ce sens(486).
Dans tous les cas, les conventions établissant des normes de jus cogens au sens
des articles 53 et 64 de la Convention de Vienne de 1969, ont des effets ERGA OMNES,
supplantant ceux des autres traités.
On peut rarement imaginer que des conventions établies sous l'égide ou sous les
auspices de l'AGNU puissent violer les normes du jus cogens ou être contraires à la Charte
elle-même.
Une présomption de priorité de validité s'attache aux dispositions des
Conventions de l'ONU. TI leur est concédé une priorité d'application, étant entendu que les
Etats, par la contraction de traités, se sownettent à des obligations contraignantes au
premier rang desquelles on trouve celles découlant de la Charte de l'ONU.
Dans le cadre régional, les Etats africains appliquent les conventions de l'OUA
en tout ce qu'elles ne sont pas contraires à la Charte de l'ONU. Du reste, les Etats-membres
(486) NGUYEN QUOC DINH, et alii, op. cil., p. 206.

201
prennent régulièrement la précaution de mentionner que leurs Conventions s'inscrivent
dans le sillage des conventions de l'ONU.
Cependant, un problème incident peut surgir en cas d'antériorité de la
Convention africaine. La question est survenue concernant la Convention sur le
mercenariat de 1977 qui a devancé celle de l'ONU de 1989.
Une solution classique du D.I.P. résulte de l'application de l'adage LEX
POSTERIOR, DEROGAT PRIORI, ce qui reviendrait à mettre la Convention africaine
dans une position subsidiaire.
Dans la pratique, le faible pourcentage de ratifications de la Convention de
l'ONU, les aléas de son entrée en vigueur, militent en faveur de la Convention africaine qui
créerait \\IDe pseudo opinio juris continentale.
Mais c'est de la conjonction des effets des conventions et des efforts
diplomatiques que pourrait émerger une solution intermédiaire qui dissiperait la
concurrence.
Cette option jouit de la préférence de l'art. 89 du Protocole 1 de 1977, qui
précis.e : "Dans les cas de violations graves des Conventions ou du présent Protocole, les
Hautes Parties contractantes s'engagent à agir tant conjointement que séparément, en
coopération avec l'Organisation des Nations Unies et conformément à la Charte des
Nations Unies".
Au demeurant, les quatre Conventions et les deux Protocoles précisent qu'ils
seront enregistrés au Secrétariat des Nations Unies(487).
(487) Articles 64/63/1431159 communs aux quatre Conventions de Genève de 1949, article 101 du
Protocole 1 et article 27 du Protocole Il de 1977.

202
CONCLUSION DE LA 1ère PARTIE
Le DIH repose sur un certain nombre d'axiomes : la nécessité de concilier les
exigences nillitaires et les exigences humanitaires, la protection des populations et des
biens civils, un standard humanitaire minimum en cas de conflit interne, le respect de
l'environnement, la restriction des choix de moyens de nuire à l'ennemi, les principes
fondamentaux de l'action du CICR, promoteur de ce droit, etc.
Ce droit pléthorique est rendu plus complexe par les spécificités africaines
venant interférer avec son application.
Perdus dans les méandres d'austères programmes de développement structurel
du F.M.I. et de la Banque Mondiale (B.I.R.D.), les Etats africains s'attachent surtout à la
résolution de leurs problèmes économiques.
La priorité accordée à la lutte contre le sous-développement relègue souvent au
second plan., les préoccupations humanitaires.
Il faut s'en inquiéter. L'Afrique reste le continent dans lequel le nombre des
conflits armés connaît une progression constante. Ces conflits d'origine ethnique, politique
ou géostratégique avec l'intervention d'ex-puissances colonisatrices ou de puissances
régionales émergentes, ont de multiples causes mais génèrent des conséquences toujours
semblables: mouvements de réfugiés et de déplacés internes, utilisation de mercenaires,
génocides
et/ou
ethnicides,
participation
d'enfants-soldats,
famine,
malnutrition,
délabrement d'infrastructures économiques, corruption à grande échelle, déperdition
croissante des valeurs culturelles traditionnelles, etc.(488).
(488) KOSIRNIK (R.), Les Protocoles de 1977. Une étape cruciale dans le développement du
droit international in RICR N' 827, 7ge année, Dossier : vingt ans de Protocoles additionnels,
septembre-octobre 1997, p. 533. L'auteur constate, dans cette lancée, que : "les conflits

203
L'application du DIH s'en trouve affaiblie. Il s'y ajoute la propension des Etats à
ne légiférer qu'en fonction de leurs intérêts sécuritaires.
La souveraineté, arme immodérée, à la disposition de l'Etat, est détournée de sa
fonction
utilitaire : pennettre une réception fluide
du Droit international dans
l'ordonnancement juridique interne. L'inculcation du DIH à la population africaine, son
intériorisation totale par les Etats passent par la levée de ces différents blocages s'opposant
au mouvement universel convergeant vers le respect des droits humains (DIH et Droits de
l'Homme).
Il faut le répéter. L'application du DIH n'entrave en rien le développement
économique des Etats. Le volet humanitaire est une composante du volet économique. La
str-atégie de la recherche de la paix constitue un élément de la stratégie du développement
économique. Aucun programme de développement ne peut s'inscrire dans la durée s'il
n'intègre pas la dimension pacifique. Nul n'ignore la relation étroite entre le développement
économique, social et culturel et le respect des Droits de l'Homme et du DIH.
Les prémisses d'une politique humanitaire africaine bien compnse doivent
s'attacher à remédier aux difficultés du DIH.
La thérapie impose que l'on passe des données éparses et abstraites du DIH à
des règles plus concrètes et actualisées.
contemporains reflètent de moins en moins les objectifs traditionnels de la guerre, à savoir la lutte
pour le pouvoir politique ou la conquête d'un territoire. Les principales racines de la violence se
trouvent dans les phénomènes suivants: la dilution du pouvoir et de l'Etat, le mal-être économique
et la crise ethnico-identitaire. On oscille entre l'absence d'éthique, la disparition de valeurs
traditionnelles et la promotion d'une morale de l'exclusion. Ce sont souvent des situations de non-
droit. Même le droit international humanitaire n'y a plus, ou plus guère, sa place".

204
Ile PARTIE
DU JURIDISME A L'ACTUALISATION:
UNE THERAPIE POUR LES DIFFICULTES
DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE
EN AFRIQUE NOIRE

205
Une fois cernées les difficultés d'application du DIH en Afrique Noire, il faut
s'interroger sur la pertinence nonnative de certaines de ses dispositions, soit du fait de leur
inadaptation aux conflits déstructurés du Tiers-Monde, soit en raison de l'éclatement des
catégories juridiques traditionnelles. Face à ces situations nouvelles, pour éviter de
s'enfenner dans de vaines contradictions, le DIH doit s'inscrire dans une perspective
évolutive, de développement progressif, en s'adaptant aux réalités contemporaines (Titre
1er).
Le juridisme étroit du DIH doit être dépassé. Une mise en œuvre effective alliée
à Wle sédimentation nationale du DIH constitue des remèdes essentiels aux faiblesses
structurelles et nonnatives du droit des conflits armés (Titre II).

206
TITRE 1 - POUR UNE ACTUALISATION DU CONTENU DU DIH
Le D.I.H. est écartelé entre deux exigences antinomiques:
- d'une part, la nécessité de son développement progressif entraîne son
ouverture à des domaines vierges à la codification;
- d'autre part, la complexité des règles déjà codifiées milite en faveur d'une
simplicité, dépouillée de tout juridisme artificiel ramené à des distinctions anciennes.
Ces
exigences
se
combinent
pour
légitimer
un
plaidoyer
pour
un
réaménagement du D.I.H. (Chapitre 1).
Mais le DIH -droit majoritairement interétatique- peut difficilement se dissocier
de la politique des Etats. La genèse, la conduite et le règlement des conflits annés vont
fréquemment de pair avec la politique internationale. Or, les Etats ne perçoivent le D.I.H.
qu'à travers le prisme défonnant de leur souveraineté interne ou externe. il en résulte une
intrusion considérable de la politique dans le droit.
Les conflits annés appellent souvent l'intervention militaire ou humanitaire,
consentie ou non, d'Etats voisins ou d'ex-puissances colonisatrices sinon des forces de
l'ONU, de l'OUA ou de la CEDEAO. Cette intervention interfère avec des intérêts
stratégiques faussant une application dénuée de parti-pris. C'est dans cette logique qu'il faut
insérer l'action humanitaire.
L'imbrication, entre les motifs humanitaires et les motifs politiques, aboutit à la
prédominance des facteurs politiques. L'exégèse du conflit anné africain est porteuse d'une
nécessité incontournable: la dépolitisation de l'action humanitaire (Chapitre II).

207
CHAPITRE 1 - POUR UN REAMENAGEMENT DU DIH
Un grand nombre de règles peu compatibles avec les exigences des guerres
modernes se retrouvent dans le DIH, traduisant une certaine incomplétude. Ces
insuffisances du DIH peuvent être détectées à deux niveaux.
Le pretnler rnveau permet de faire le constat d'Wl ensemble de nonnes
humanitaires enserrées dans des limites étroites qui ne permettent pas aux règles de
déployer leurs pleins effets. Ces limites se ramènent, pour l'essentiel, aux aspects
théoriques dudit droit.
Ces entraves constituent des imperfections du Dili dont l'amélioration implique
le respect d'un impératif a priori simple: dépasser le juridisme étroit du D.I.H. (Section 1).
Le second niveau est révélateur d'insuffisances d'ordre pratique. Le DIH, en
Afrique Noire, souffre d'un manque de vigueur dans l'application et de continuité dans
l'action nonnative. La majorité des conventions humanitaires a été adoptée sous l'égide ou
sous les auspices de l'OUA Les engagements des Etats africains au niveau universel ont
pu ainsi être réaffirmés à l'échelle continentale. Mais on note un relâchement effectif dans
les efforts de ces Etats. Ces conventions -qui sont toujours en vigueur- semblent avoir
perdu leurs énergies premières. Les Etats ne les appliquent pas ou les appliquent de façon
partielle, c'est-à-dire circonstancielle. Un réaménagement du DIH s'impose à ce niveau,
pour réadapter ces conventions aux réalités africaines les plus prégnantes.
Un second impératif permettra de surmonter ces écueils : revitaliser les
conventions humanitaires de l'OUA sur les réfugiés, le mercenariat et la protection des
enfants (Section il).

208
SECTION 1 - Dépasser le juridisme étroit du DIH
Le fonnalisme excessif du DIH se ramène aux SU_~ DI\\1SIO qui sont,
pour la plupart, éloignées de la pratique. Ces référentiels humanitaires se réduisent à des
classifications juridiques abstraites et artificielles (Paragraphe n.
Si ces distinctions ont pu se justifier à une certaine époque (dite classique)
correspondant à la naissance et à la consolidation du DIH, les mutations politiques,
juridiques, sociales et culturelles, depuis la :fin des années 80, appellent à l'érection d'un
nouveau corps de règles dépouillées de toute rigidité nonnative (paragraphe fi).
Paragraphe 1- L'obsolescence des SUMMA DIVISIO du DIU
Deux principales distinctions gouvernaient jusqu'ici le DIH : celle entre droit de
La Haye et droit de Genève et celle entre conflits armés internationaux et conflits armés
non internationaux..
Ces SUMMA DIVISIO obéissaient à un souci de clarification et de
simplification d'un ensemble marqué par une pléthore de règles disparates et non
ordonnées. Ces classifications présidaient au traitement de la plupart des règles du Dili.
Elles continuent, aujourd'hui encore, à être utilisées mais dans un dessein purement
pédagogique..
La distinction entre le droit de La Haye et le droit de Genève perd de son
actualité et de sa cohérence juridiques dès lors que les règles proprement humanitaires
rivalisent avec les règles de conduite des combats. Cette classification cède, alors, la place
à la tendance unificatrice qui essaie de promouvoir une unité réelle des règles de La Haye
et de Genève (1).

209
Quant à la distinction entre les conflits acmés internationaux et les conflits
armés non intemationa~elle s'estompe devant la conCWTence de nouvelles règles, devant
la mixité de plus en plus prononcée de la nature de certains conflits armés, ou avec
l'admission de nouvelles catégories qui n'entrent plus dans le schéma de différenciation
classique (2).
1 - Pour une véritable unicité des règles de La Haye
et de Genève
La doctrine s'est efforcée de distinguer, dans le droit des conflits armés, entre le
droit de La Haye et le droit de Genève.
Aussi, selon SANDOZ et SURBECK, "au sens strict, le droit de Genève est le
droit humanitaire, c'est-à-dire le droit consacré à la protection des victimes des conflits
armés. Le droit de La Haye est un droit légèrement différent, qui traite non pas de la
protection des victimes, mais de la conduite des hostilités, d'où son autre nom de "droit de
la guerre"(489). Pour THIERRY, SUR, COMBACAU et VALLEE, "le droit des conflits
comport1e traditionnellement deux aspects : certaines nonnes ont trait à la conduite des
hostilités et il est souvent dit qu'elles relèvent du "droit de La Haye" par référence à la
Convention de 1907 et à son annexe sur les lois et coutumes de la guerre. D'autres nonnes
ont trait à la protection des victimes de la guerre et relèvent du droit humanitaire ou "droit
de Genève", par référence aux conventions conclues dans cette cité depuis 1864 sous les
auspices de la Croix-Rouge Internationale"(490). Quant à Henri COURSIER, il explique le
!';ens de cette distinction par le fait que : "Les Conventions de Genève concernent la
- - - - - - ------------
(489) SANDOZ (Y.) et SURBECK (ll), Le droit de La Haye et les Conventions de Genève, in
Premier séminaire africain francophone sur la diffusion du DIH (Tunis, 10 octobre 1979),
Collection d'exposés du CICR, p. 1_
(490) THIERRY, (H), corvrnAcAu (1), SUR (S.) et VALLEE (Ch.), Droit international public,
Montchrestien, Précis DOMAT, 3e éd., 1981, p. 534.

210
protection des pf:rsonnes contre l'abus de la force tandis que les Conventions de La Haye
posent avant tout des règles interétatiques sur l'usa.ge même de la force"(491).
Sur le plan de l'exposé des idées, la distinction est assez claire.
Alors que les Conv~ntions de La Haye visent en premier lieu à réglementer la
conduite des hostilités armées, en interdisant aux armées des Etats belligérants d'attaquer
certaines personnes, certains objectifs, et de recourir à certains moyens et certaines
méthodes de guerre, les Conventions de Genève ne traitent que de la protection des
personnl~S tombées au pouvoir de l'ennemi (blessés, malades, naufragés, prisonniers de
guerre et personnes civiles).
Ces deux droits, d'inspiration humanitaire, sont étroitement liés dans leur
genèse même si leur évolution ultérieure s'est faite différemment.
Le droit de Genève remonte à 13, 1ère Convention de 1864 réadaptée par la
Convention du 6 juillet 1906, laquelle sera remaniée par les Conventions de Genève du 27
juillet 1929 sur le traitement des prisonniers de guerre et pour l'amélioration du sort des
blessés et des malades dans les armées en campagne. Les Conventions de 1929 seront
complètement révisées par les quatre Conventions de Genève du 12 août 1949(492). Quant
au droit de La Haye, il a été créé par les cotIDérences de paix tenues à La Haye en 1899 et
1907. En effet, le 29 juillet 1899, six conventions et déclarations seront adoptées.
(491) COURSIER (H.), Covrs de cinq leçons..., op. cit., p. 10.
(492) Cf supra, IntroduC"âon.

211
Une nouvelle conférence internationale de la paix, convoquée le 18 octobre
1907, sera à l'origine de l'adoption d'un ensemble de quatorze Conventions et Déclarations
révisant et réadaptant les conventions de 1899(493).
L'examen de ces séries de traités permet le constat suivant: le droit de La Haye
VIse les Etats, traite des nécessités militaires et réglemente le comportement des
combattants, tandis que le droit de Genève ne donne pas "aux Etats de droit contre les
individus à la différence des textes de La Haye. A Genève, s'est ouverte une ère qui donne
la primauté à l'homme et aux principes d'humanité"(494).
Les deux droits ont des caractéristiques dissemblables.
Ainsi, le droit de La Haye ou droit relatif à la conduite des hostilités, s'inspire
du principe d'humanité qui implique que soient bannis les actes de barbarie et que ne soient
licites que les moyens et méthodes de guene justifiés par les nécessités militaires. A ce
titre, les armes meurtrières, occasionnant des blessures et des maux superflus, sont
interdites: gaz, armes biologiques (bactériologiques:) telles que les bactéries, mycètes,
rickettsies, armes chimiques, projectiles et balles «DUM-DUM », balles qui s'aplatissent,
poisons, armes à éclats non localisables, mines, pièges, armes incendiaires, armes
aveuglantes à laser, etc. L'éthique du dro,tt de La Haye s~ordonne autour des principes
suivants:
le choix des méthodes ou moyeIt~ de guerre n'est pas illimité;
-
l'interdiction d'employer des armes causant des maux superflus;
-
la prohibition des attaques visant .à répandre la terrevr parmi la population
civile;
- la prohibition des attaques sans discri rnjnation ;
(493) Cf supra, Introduction.
(494) PICTET (1), Développement et principes..., op. cit., p. 8.

212
- la distinction entre population et biens à caractère civil et combattants;
- l'interdiction de la perfidie, d'attaquer les personnes "hors de combat";
-
l'interdiction d'ordonner qu'il ne soit pas fait quartier;
- l'interdiction des représailles contre les personnes et biens civils, etc.
Le
droit de
Genève
ou
droit
humanitaire
proprement
dit,
s'occupe
essentiellement des victimes de la guerre et protège les blessés, malades, naufragés, le
personnel sanitaire et la population civile nationale, ennemie ou alliée. Le droit de Genève
est aujourd'hui contenu dans les quatre Conventions de Genève de 1949. L'éthique, que
promeut ce droit, s'articule, pour l'essentiel, autour de la distinction entre combattants et
non combattants. Le droit de Genève traite du statut du prisonnier de guerre, du régime des
internés civils, de l'occupation, du statut de la personne civile (femmes, enfants, réfugiés,
journalistes).
Cependant, la distinction entre les droits ne doit pas occulter les analogies entre
les deux séries de règles. Ainsi, VEUTHEY mentionne qu' :"on a dit que les règles de La
Haye étaient "permissives" parce qu'autorisant implicitement les belligérants à employer
certains moyens de nuire à l'adversaire, tandis que les règles de Genève auraient été
"limitatives" visant principalement à la protection des personnes mises hors de combat. Les
règles de La Haye ne sont toutefois pas dépourvues de caractère humanitaire, contenant
aussi un fond de protection réciproque des combattants ainsi d'ailleurs aussi que des
personnes civiles(495). L'Institut de Droit international s'est prononcé en ce sens dans sa
Résolution 1, à sa session de ZAGREB. L'article 2 de la Résolution stipule: "Les règles de
caractère humanitaire résultant du droit relatif aux conflits annés (. ..) comprennent
notamment a) celles qui concernent la conduite des hostilités en général (...) ; b) celles qui
sont inscrites dans les Conventions de Genève du 12 août 1949 ; c) celles qui tendent à
protéger la population civile en ce qui concerne les personnes et les biens"(496).
(495) VEUTHEY (M.), Guérilla et droit humanitaire, op. cit., p. 5 (note en bas de page nO 20).
(496) VEUTHEY, ibid., p. 5 (note en bas de page nO 21).

213
La dichotomie droit de La Haye - droit de Genève sera, à plusieurs reprises,
battue en brèche. Un sensible rapprochement s'est graduellement dessiné.
- De prime abord., une amorce timide d'attrait entre les deux séries de règles
s'est fait sentir avec la Convention de La Haye du 29 juillet 1899 qui transposera à la
guerre maritime les principes de la Convention de Genève du 22 août 1864.
- Ensuite, la Convention X de La Haye de 1907 procédera à l'adaptation à la
guerre sur mer des principes de la Convention de Genève de 1906. Cette dernière devint la
Ile Convention de Genève de 1949 pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et
des naufragés des forces années sur mer.
- La distinction sera de plus en plus ténue avec le Protocole du 17 juin 1925
concernant la prohibition de l'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires
et de moyens bactériologiques. Ce protocole, quoique ressortant par sa matière du droit de
La Haye, sera adopté dans la ville de Genève.
Deux autres Conventions pour la protection des biens culturels en cas de conflit
armé et sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines annes classiques,
respectivement adoptées à la Haye le 14 mai 1954 et à Genève le 10 octobre 1980,
remettent en cause la distinction par le bris opéré au monopole de préparation des projets
de conventions humanitaires jusque-là détenu par le CICR. La Convention de 1954 et celle
de 1980 ont été adoptées sous les auspices de l'UNESCO et de l'ONU.
D'autre part, si en 1949, le droit de La Haye fut laissé hors des débats par les
plénipotentiaires qui étaient plutôt motivés par le rejet épidennique de tout ce qui touchait
à la guerre, la convergence entre les deux droits sera accentuée par l'adoption des
Protocoles de 1977 conclus dans un environnement différent avec l'émergence du Tiers·
Monde, la dilution de la guerre froide et l'engagement du processus de décolonisation.

214
La confusion entre droit de Genève et droit de La Haye est aujourd'hui réalisée
dans les Protocoles de 1977. Ainsi, le Titre 1 du Protocole additionnel 1 traite du droit de
Genève (blessés, malades, naufragés, morts, services sanitaires, victimes de guerre).
Les Titres III et IV traitent respectivement de la définition des combattants et de
leur comportement, de la conduite des hostilités (droit de La Haye) tout en abordant les
questions de protection civile et des secours (droit de Genève).
Quant au Protocole II qui a subi de nombreuses amputations en raison des
controverses idéologiques relatées plus haut, il réalise une absorption faible mais réelle du
droit de La Haye dans le droit de Genève. En particulier, son article 13 maintient le
principe de l'interdiction des attaques contre la population civile.
On peut en déduire que "cet ensemble composite, démontre que la distinction
entre le droit dit "de Genève" ou droit des victimes de la guerre, et le droit dit "de La
Haye" ou droit relatif à la conduite des hostilités et à l'administration des territoires
occupés, est artificielle et a cessé d'exister"(497).
La distinction entre droit de La Haye et droit de Genève perd de sa pertinence
initiale. Progressivement, on note une convergence entre les deux droits. Mais l'unicité doit
gagner en cohérence et en consistance. Concrètement, la conjonction des deux séries de
règles se fonde sur des principes communs. Droit de Genève et droit de La Haye découlent
du concept d'humanité: "le droit de Genève et le droit de La Haye s'inspirent l'un et l'autre
de principes humanitaires. L'oo et l'autre ont pour but de mettre fm à la violence..."(498). fi
s'agit de protéger l'être humain dans sa dignité et dans son intégrité physique. Ces
principes, qui gouvernent les deux droits, forment un tout indissociable.
(497) De PREUX (1.), Les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève, in RICR N° 827,
7ge année, septembre-octobre 1997, p. 508.
(498) COURSIER (H.), Cours de cinq leçons..., op. cit., p. 10.

215
La distinction n'est d'aucune utilité pratique. Son opérationnalité est douteuse.
On ne saurait diviser la souffrance selon qu'elle est infligée à la personne civile ou au
soldat. L'humanité est un concept universalisant dans l'espace et dans le temps.
La distinction ne garantit pas une protection renforcée du DIH. Elle est
discriminatoire et ne se justifie pas sur le plan juridique. Aussi, est-il judicieux de se ranger
à l'avis de la doctrine qui considère plus utile de "mettre l'accent sur le caractère
essentiellement protecteur du droit humanitaire en le dégageant de controverses juridiques
et politiques relatives au statut des conflits, des parties à ces conflits, des territoires en
question, et surtout des personnes et des biens protégés pour lui faire retrouver son sens
fondamental"(499).
L'unité du DIH doit être consolidée. Il faut accentuer le caractère protecteur du
DIH au détriment de qualifications stériles et abstraites, gouvernées, moins par des
nécessités humanitaires que par des considérations juridiques infondées.
Dès lors, un langage réaliste doit sem de soubassement à cette unité : "le droit
humanitaire ne peut non plus se concevoir comme une abstraction juridique ou
philosophique, un ensemble de normes idéalistes, en dehors de la réalité politique et
militaire contemporaine"(500). En clair, la victime (soldat ou personne civile) ne trouve
aucun intérêt dans une application à double vitesse du DIH. n faut, à la vérité, admettre
que les moyens et méthodes de combat ne tont aucune discrimination dans les victimes.
Or, le message du DIH réside dans la protection des blessés et malades de tous les camps
et la sauvegarde de la vie de la population civile toute entière qu'elle soit nationale, alliée
ouennenue.
(499) VEUTHEY (M.), Guérilla..., op. cit., p. 8.
(500) VEUTHEY, op. cit., p. 9.

216
La conduite des hostilités n'est pas éloignée de ces idées. Le droit de La Haye
est inclus dans le droit de Genève. Il faut s'en convaincre puisque
: "cette distinction
souvent faite en doctrine entre "droit de Genève" et "droit de La Haye" (...) semble
dépassée par l'évolution des travaux actuels dans ce domaine, qui portent sur l'ensemble et
du "droit de Genève" et du "droit de La Haye", le caractère humanitaire de ce dernier ayant
été clairement reconnu et l'interdépendance entre ces deux branches du droit n'étant plus à
démontrer"(501).
Concurrencé par le droit de Genève, le droit de La Haye a perdu de sa netteté
initiale. De plus en plus, cet ensemble de règles, basé sur des dispositions relatives au
déclenchement de la guerre, au processus de déclaration de la guerre, au déroulement des
hostilités, souffre d'un manque d'actualisation (puisque réduit et cantonné au champ clos
des traités de 1899-1907). fi en résulte que certaines de ces règles sont devenues désuètes.
Pire, elles sont concurrencées par des dispositions du Droit international public (Amnistie
et traités de paix, par l'interdiction du Jus ad bellum et l'existence du Jus cogens).
Dès lors, il est nécessaire que le droit de La Haye puise dans les linéaments du
droit de Genève pour une efficience accrue du DIH. Il en appert que le droit de Genève
constitue le prolongement du droit de La Haye. La plupart des règles de conduite des
hostilités ne sont réellement pertinentes que par l'accompagnement des dispositions
relatives à la protection humanitaire. La conclusion qui s'impose est l'interdépendance des
deux droits. L'évolution actuelle du DIH va dans ce sens. La réalité des guerres
contempomines commande cette immersion indistincte des deux séries de règles dans le
Dili lato sensu. Tout autant, a tendance à se préciser une contestation d'une autre SUMMA
_....---
DMSIO : la distinction entre conflits internationaux et conflits internes.
-----
(501) VEUTHEY, op. cit., p. 8 ; cf NAHLIK (S.E.), Droit dit "de Genève" et Droit dit "de La
Haye", unicité ou dualité, op. cit., pp. 9-27.

217
2 - Pour un abandon de la distinction conflits armés
internationaux
conflits
armés
non
internationaux
Le DIH repose également sur un autre pilier: la distinction entre conflits armés
internationaux et conflits armés non internationaux (ou internes).
La guerre, qu'elle soit internationale (au sens d'interétatique) ou civile (au sens
d'intraétatique) constitue l'une des activités les mieux partagées par les différentes
civilisations humaines.
Si l'on remonte à l'Antiquité, les guerres entre cités grecques, les conquêtes de
Rome, de l'Egypte pharaonique, révèlent que l'activité guerrière est étroitement associée à
l'évolution de l'humanité. Aujourd'hui, les nombreux conflits annés, qui n'épargnent aucun
continent, démontrent, plus qu'il n'en est besoin, l'actualité de la guerre et sa permanence
dans le temps et dans l'espace.
Depuis l'avènement du Droit international, et pendant très longtemps, les
conflits armés internationaux étaient les seuls réglementés. La guerre était encore perçue
comme un volet de la politique internationale des Etats. Selon l'expression de Hans Von
CLAUSEWITZ, "la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens". Cette
formule est reprise par MAO TSE TOUNG qui la considère ainsi: "Une guerre éclate pour
lever les obstacles qui se dressent sur la voie de la politique, quand celle-ci a atteint un
certain stade qui ne peut être dépassé par les moyens habituels (...). Lorsque l'obstacle est
levé et le but politique atteint, la guerre prend tin"(S02).
(S02) Ces deux citations sont extraites de l'ouvrage de VEUTHEY, (M.), Guérilla et Droit
humanitaire, CICR, Genève, 1983, page 19 (note en bas de page nO 49).

218
Il en résultait que le Dili s'adressait, avant tout, sinon exclusivement, aux Etats.
Le droit de La Haye interpellait les Etats tant en ce qui concerne l'ouverture des hostilités,
la déclaration de la guerre, le comportement des combattants que le déroulement des
combats, la neutralité de puissances tierces ou la cessation des hostilités par l'armistice et
les traités de paix. Pour leur part, les Conventions de Genève de 1864, 1906 et 1929 et de
La Haye de 1899-1907 régissaient seulement les prérogatives et les obligations étatiques.
Mais, en marge de cette réglementation, s'était constituée la coutume de la reconnaissance
de l'état d'insurrection. Le droit classique entendait par là qu'un Etat pouvait,
discrétionnairement, reconnaître l'existence d'insurgés sur son territoire.
Cette déclaration formelle entraînait automatiquement l'application intégrale du
droit de la guerre (prévu à l'époque en principe entre les seuls Etats), aux rapports entre cet
Etat et la partie insurrectionnelle. Tel était l'état du Dili jusqu'à l'adoption des Conventions
de 1949. Cette évolution est corroborée par la doctrine: 'Jusqu'en 1949, en effet, le droit de
la guerre ne pouvait être applicable en cas de conflit interne que si la qualité de belligérant
était reconnue aux insurgés par les autorités de l'Etat et cette "reconnaissance de
belligérance" procédait d'une compétence discrétionnaire. Mais dans ce cas, l'ensemble du
droit de la guerre devenait applicable aux belligérants reconnus. Les conventions de 1949
ont largement innové en prévoyant l'application de plein droit à la guerre civile, non pas de
toutes leurs dispositions, mais de normes minimales déflnies par un article 3 commun
rédigé en termes identiques dans chaque convention"(503).
En 1949, une innovation importante est introduite dans le Dili : l'article 3
commun aux quatre Conventions de Genève, lequel : "édicte le principe d'une protection
minimale dans le cadre des conflits non internationaux ainsi que le droit du CICR d'offrir
ses services dans de telles circonstances"(504). Cet article 3 "convention en miniature"
(503) TIllERRY (H), COMBACAU (J.), SUR (S.), VALLEE (Ch.), op. cit., p. 532.
(504) GACOND (1.1.), Droit international humanitaire et droit de la guerre, op. cit., p. 4. Le Pr.
Stanley HOFFMANN compare l'article 3 à ce qu'il appelle "HARD CORE OF HUMAN

219
selon l'expression du Pr. PINTO, institue un standard minimum basé sur "des principes
fondamentaux d'humanité que l'on ne peut transgresser quels que soient les engagements
juridiques, sans être accusé, à juste titre, de se conduire en barbare"(505). L'article 3
instaure la reconnaissance expresse des conflits armés non internationaux et recommande
l'application de principes minimums d'humanité même en cas de conflits dans lesquels les
protagonistes ne sont pas seulement des Etats.
L'article 3 des Conventions de 1949 préfigure l'extension du DIH à la protection
des biens culturels en cas de conflits armés par la Convention de l'UNESCO de 1954 dont
l'article 19 oblige même les parties à un conflit armé non international à "appliquer au
moins les dispositions de la Convention qui ont trait au respect des biens culturels". Cette
adaptation de l'art. 3 de 1949 aux biens culturels jalonne un élargissement du DIH, prétexte
à une nouvelle codification cumulant dans l'adoption en 1977 d'un protocole additionnel II
aux Conventions de Genève de 1949, réservé exclusivement aux conflits internes.
Accessoirement, en 1977, le DIH s'est enrichi d'une nouvelle catégorie de
conflits armés internationaux. En effet, à côté de la guerre internationale classique, on
constate l'existence de conflits dans lesquels les peuples luttent contre la domination
coloniale, l'occupation étrangère et contre les régimes racistes(506).
Depuis l'adoption des deux protocoles additionnels aux Conventions de Genève
de 1949, le DIH distingue trois types de situations:
RIGHTS" (plancher commun) en référence au noyau de droits indérogeables par opposition aux
autres règles des droits de l'Homme qualifiées de "plancher mobile", cf. HOFFMANN (S.), Une
morale pour des monstres froids: pour une éthique des relations internationales, Paris, Seuil, 1982,
p.132.
(505) SANDOZ (Y.) et SURBECK (ll), Le droit de La Haye et les Conventions de Genève, op.
cil., p. 7.
(506) Cf. supra, Titre. l, Chapitre l, Section II, Paragraphe II, de la 1ère Partie.

220
- les conflits armés internationaux : guerres internationales, guerres
d'occupation (au sens de l'article 2 commun aux quatre Conventions de 1949), guerres de
libération nationale contre la domination coloniale, l'occupation étrangère et les régimes
racistes (article 1 al. 4 du Protocole 1 de 1977) ;
- les conflits armés non internationaux: guerres civiles au sens de l'article 3
commun aux quatre Conventions de 1949, guerres au sens du Protocole II et autres conflits
non internationaux ;
- les situations de troubles intérieurs(S07) et de tensions internes(S08).
Cette SYMMA DMSIO- préside au traitement des principales situations
conflictuelles. Toutefois, cette distinction perd du terrain devant des formes de violences
nouvelles dans lesquelles l'application du DIH devient malaisée, du fait de l'emploi de
nouvelles méthodes de combat inusitées auparavant.
(507) Cf. GACOND (1.1.), op. cit., p. 2 : "Les situations de troubles intérieurs sont celles où, sans
qu'il y ait à proprement parler de conflit armé non international, il existe cependant sur le plan
interne, un affrontement qui présente un certain caractère de gravité ou de durée et comporte des
actes de violence. Ces dernières peuvent revêtir des formes variables, allant de la génération
spontanée d'actes de révolte à la lutte entre des groupes plus ou moins organisés et les autorités au
pouvoir. Dans ces situations, qui ne dégénèrent pas nécessairement en lutte ouverte, les autorités
au pouvoir font appel à de vastes forces de police, voire aux forces armées, pour rétablir l'ordre
intérieur" ; cf. également EIDE (A.), Troubles et tensions intérieurs, in Dimensions internationales
du Droit humanitaire..., pp. 279-295.
(508) Quant aux tensions internes, il peut s'agir, soit de situations de tensions graves sur le plan
politique, religieux:, social ou économique, soit de séquelles d'un conflit armé ou de troubles
intérieurs. Ces situations présentent les caractéristiques suivantes : arrestations massives, nombre
élevé de détenus de sécurité, torture et mauvais traitements, suspension de garanties judiciaires
fondamentales, disparitions, actes de violence, mesures restrictives de liberté à grande échelle, etc.
; voir dans ce sens HARROFF-TAVEL (M.), L'action du CICR face aux situations de violence
interne, R1CR N° 801, mai-juin 1993, pp. 211-237.

221
Il en résulte une dépréciation progressive de la distinction. De nombreuses
raisons peuvent être avancées pour préconiser l'abandon de cette SUMMA DIVISIO à la
...
pertinence critiquable.
En fait, il existe une tendance mondiale à la diminution des conflits annés
internationaux. Les références aux guerres de libération dans les Conventions et Protocoles
ne sont plus d'une grande actualité. La dernière citadelle du racisme ou de l'apartheid
qu'était la République Sud Africaine a divorcé avec cette pratique au début de la décennie.
La Namibie est devenue indépendante. Les situations de guerres de décolonisation sont
pratiquement reléguées dans le passé. Les conflits interétatiques africains sont caractérisés
par une faible fréquence : Ethiopie-Etythrée, Somalie-Ethiopie, Cameroun-Nigeria,
Burkina Faso-Mali, Tchad-Libye, Ouganda-Tanzanie, etc.(S09).
A l'inverse, on note une augmentation substantielle des conflits annés non
internationaux. Cette caractéristique des conflits internes est une donnée mondiale. Selon
Evan LUARD "sur les 127 conflits annés importants de la période s'étendant de 1945 à
1986, 17 ont été des conflits de décolonisation, 24 des guerres de "frontières" motivées par
des revendications territoriales et 73 des guerres intra-étatiques"(S10). La recrudescence
des conflits annés internes est une constante en Afrique. Mais devant la complexité de ces
conflits, le nombre des acteurs, les horreurs et les conséquences de ces situations, il devient
de plus en plus difficile de cerner avec précision le concept de conflit anné non
international.
(509) Cf MINH (T.V.), Les conflits, in Encyclopédie Juridique de l'Afrique, Tome 2 : Droit
international
et
Relations
internationales,
pp.
311-340
;
GONIDEC
(p.F.),
Relations
internationales africaines, op. cit., surtout Chapitre ID, pp. 147-172.
(510) Cf LUARD (E.), The BLUNTED SWORD. THE EROSION OF MILITARY POWER IN
MODERN WORLD POLlTICS, Londres, Tauris 1988, pp. 57-79, cité par REZA-DJALILI (M.),
Analyse des conflits du Tiers-Monde
: éléments d'une typologie,
in RISS, N°
127,
UNESCO/ERES, février 1991, p. 176 ; voir également WONYU (E.), AHOYO (AF.) et
MOUELLE KOMBI n (N.), Les guerres en Afrique indépendante, in Afrique 2000, NO 5, avril-
mai-juin 1991 ; BADUEL (p.R), Le territoire d'Etat entre imposition et subversion: exemples
saharo-sahélien, in CULTURE et CONFLITS, N° 21-22, springlSummer, 1996, p. 41 et s.

222
Le tableau se présente ainsi : "les situations susceptibles d'être qualifiées de
conflit armé non international sont très diverses et souvent complexes. Comme le relève la
doctrine, les hostilités peuvent prendre la fonne d'opérations militaires classiques ou de
guérilla; les parties qui s'affrontent peuvent être des factions politiques ou des classes
sociales, des ethnies ou des groupes religieux ; l'enjeu du conflit peut être le régime
politique d'Wl Etat existant ou la création par sécession d'un nouvel Etat"(511). La
définition du conflit armé non international n'est pas toujours simple. Si le principe du
conflit interne ressort du fait qu'il s'agit d'un conflit n'opposant pas des Etats, la diversité
des hypothèses dans lesquelles les belligérants ne sont pas des Etats et la multiplicité des
acteurs amènent à se poser des questions sur la nature, l'étendue et les limites de ce type de
conflit.
Théoriquement, au sens des Conventions et Protocoles, les conflits armés non
internationaux sont "des affrontements armés qui se déroulent dans les limites de la
juridiction d'Wl Etat, c'est-à-dire sur le territoire d'un seul Etat, et ce entre le gouvernement
dUne part, et des groupements armés insurgés, d'autre part. Les membres de ces groupes,
qu'ils soient appelés insurgés, rebelles, révolutionnaires, sécessionnistes, combattants de la
liberté, terroristes (...), se battent soit pour prendre le pouvoir ou pour bénéficier de plus
d'autonomie dans l'Etat, soit dans un but de sécession et pour fonder leur propre
Etat"(512). En effet aux tennes de l'article 1er du Protocole II, les conflits armés non
internationaux
:"se déroulent sur le territoire d'Wl Haute Partie contractante entre ses
forces armées et des forces armées dissidentes ou des groupes armés organisés, qui, sous la
conduite d'un commandement responsable, exercent sur Wle partie de son territoire, Wl
contrôle tel qu'il leur pennette de mener des opérations militaires continues et concertées et
d'appliquer le présent Protocole".
(511) DiN-TAN (IN.), Le droit des conflits annés non internationaux, in BEDJAOUI (M.), éd.,
Droit international: Bilan et Perspectives, Tome 2, Pédone, Paris 1991, p. 853.
(512) GASSER (HP.), Le Droit international humanitaire: Introduction, op. cit., p. 72.

223
Mais la définition ci-dessus souffre de nombreuses imperfections. D'abord,
rares sont les conflits dans lesquels les insurgés ou
belles reconnaissent de jure l'autorité
du DIH et acceptent d'appliquer ses dispositions.
nsuite, de nombreux conflits internes
persistent sans que les rebelles soient organisés de açon martiale. EnfIn, les conflits non
1
internationaux dans lesquels on note une absence d~ contrôle durable des rebelles sur une
1
portion du territoire, sont légions.
1
1
1
i
!
Malgré les définitions complexes,
hi doctrine reconnaît qu'un confli~
!
intervenant sur le territoire d'un Etat entre deux lethnies différentes, pour autant qu'il
1
réunisse les caractères nécessaires d'intensité, de durte et de participation, peut être qualifIé
de conflit armé non international(513). Dans cette ~ptique, peuvent être rangées dans les
conflits armés non internationaux, les situations s~vantes : les massacres entre Zulus et
1
Xhosas, les guerres entre clans en Somalie(514), les iaflTontements entre Hutus et Tutsis en
J
1973 et 1994 au Rwanda(515), les massacres entrel Tutsis et Hutus au Burundi en 1972,
1988, 1995(516), la guerre larvée entre sédent4rres négro-africains du Mouvement
GANDA KOY et nomades touaregs au Mali en mL 1994(517). De même, les hostilités
i
entre l'armée gouvernementale et toute autre faction jmnée s'inscrivant dans une logique de
sécession, rentrent dans cette catégorie.
i
1
En Afrique Noire, de nombreux confltts répondent à cette caractéristique :
1
aflTontements entre Ibos d'une part, Haoussas et! Yorubas d'autre part, préludes à la
i
1
sécession du Biafra le 30 mai 1967 proclamée: par le Colonel Emeka Odumegwu
1
1
1
1
(513) Cf VERRI (p.), Dictionnaire..., op. cit., p. 37.
1
(514) Cf
VIRCOULON (Th.), La crise somalienne lin Afrique Contemporaine N° 177, 1er
trimestre 1996, pp. 3-16.
1
(515) Cf BRAECKMANN (C), Génocide planifié au Jltwanda, in Le Monde" Manière de Voir,
Conflits de. fin de siè.cle..., pp. :4-77 ; B~C.l<MANN (C), Terreur Africaine: Burundi,
Rwanda, Zaire : les racmes de la VIolence, Pans, Fayard, 11996, 347 p.
(516) Cf BRAECKMANN (C), Le Burundi, à son tO~, saisi par la peur in Le Monde, Manière
de voir..., op. cit., pp. 78-80.
i
(517) Cf BAQUE (ph.), Fragile règlement dans le cqnflit touareg, in Le Monde, Manière de
voir..., op. cit., pp. 81-83.
i

224
OJUKWU(518) ; lutte armée contre les indépendantistes casamançais du MFDC(519) ;
accrochages entre l'armée et les rebelles du FRUD en Djibouti(520) ; lutte armée du FLE
contre l'armée Ethiopienne(521) ; heurts sanglants entre années et touaregs de l'ARLA, du
FPLA, du FIAA, du MFA réunis au sein des Mouvements et Fronts unifiés de l'AZAWAD
(MFUA), au Niger et au Mali(522) ; rébellion de la RENAMO, soutenue par les régimes
sud-africains, de Peter BOTHA et de De KLERK au Mozambique(523) ; rébellion en
Ouganda des fanatiques religieux de la LRA, du FLNO, de l'UPDF et du WNBF(524),
lutte du RUF de Foday SANKOH en Sierra-Léone(525) ; multiples factions ethniques
Krahn (ULIMQ-J), Mandingue (ULIMO-K), du NPFL de Charles TAYLOR, du FNPIL
de Prince JOHNSON en lutte entre elles et contre l'année nationale et les soldats de
l'ECOMOG(526); rébellion de l'APLS de John GARANG au Sud-Soudan sur fond de
rivalités entre population blanche et ethnie noire DINKA, d'opposition religieuse entre
musulmans et chrétiens et de rébellion de l'AISS (Riek Machar Teny DHURGON)(527),
conflits annés interminables entre FARF, FROLINA originel, forces du GUNT, factions
(518) Cf. HENTSCH (Th.), Face au blocus: la Croix-Rouge Internationale dans le Nigeria en
guerre (1967-1970), I.UH.E.I., Genève, 1973, 307 p. ; cf. également MERTENS (p.), Les
modalités de l'intervention du CICR dans le conflit du Biafra, AFDI 1969, pp. 183-209.
(519) Cf. MARUT (Jc.), Les voix discordantes de la Casamance, in Le Monde, Manière de
voir..., op. cit., p. 88.
(520) Cf. L'Annuaire Jeune Afrique 1994, pp. 144-145.
(521) L'Annuaire, op. cit., p. 151.
(522) Voir BOURGEOT (A), Révoltes et rébellions en pays touareg in Afrique Contemporaine
N' 170, 2etrimestre 1994, pp. 3-19.
(523) Afrique Contemporaine N° 144, octobre - novembre - décembre 1987, La Documentation
Française et N° 137, janvier - février - mars 1986.
(524) Cf. L'Annuaire, op. cit., pp. 212-213.
(525) Le Monde, Manière de voir..., op. cit., p. 87 ; cf. L'Annuaire..., op. cit. pp. 227-228. Cf.
BLUNT (B.), Paix fragile en Sierra- Leone, in Le Monde Diplomatique nO 549, décembre 1999, p.
14; BLUNT (B.), La Sierra Leone mutilée in Manière de voir nO 49, ATLAS 2000 des conflits, Le
Monde Diplomatique, 2000, 100 p.
(526) L'Annuaire..., ibid., p. 176 ; cf. aussi Le Monde, Manière de voir..., op. cit. p. 86 ;
GAILLARD (ph.), Liberia, le chaos et la barbarie, Jeune Afrique N° 1846 du 22 au 28 mai 1996,
pp. 27-29 ; MELEDJE-DJEDJRO (F.), La guerre civile du Liberia et la question de l'ingérence
dans les affaires intérieures des Etats, RBDI 1993, n° 2, pp. 393-436.

225
de Hissène HABRE, GoukoWlÎ WEDDEYE et d'Idriss DEBY sur toile de fond
d'hégémonie libyenne et d'appui matériel français, entre 1979 et 1996(528) ; guerre entre
l'UNITA et le MPLA, entre le FLE-C et l'Année Angolaise(529), etc.
Toutefois, si certains conflits africains peuvent aisément être qualifiés, d'autres
sont rebelles à toute classification. Ainsi, un grand nombre de coups d'Etat militaires sans
atteindre une grande intensité de durée ou de violence, ne sont pas toujours des conflits
internes (même si deux parties de l'armée se disputent le pouvoir) bien qu'ils dépassent le
seuil de troubles ou de tensions internes.
De même, les émeutes populaires années, les tentatives de coups d'Etat avec
emploi de mercenaires, les raids de l'aviation sud-africaine contre les bases de l'ANC en
Angola, au Mozambique ou au Botswana peuvent-ils être considérés comme des conflits
non internationaux ? Concrètement, les affrontements entre Sénégalais et Mauritaniens en
avril 1989(530) sont-ils constitutifs de conflits internationaux (fonnellement, il n'y a pas eu
d'hostilités armées entre les deux gouvernements même avec la rupture de leurs relations
diplomatiques) ou de conflits internes (du fait de la dimension ethnique du conflit) ou de
simples
situations
de
troubles
intérieurs
? Dans tous ces cas,
les
réactions
gouvernementales devant ces conflits à la qualification ambiguë, se caractérisent
invariablement par la réfutation de leur caractère de conflit armé au profit d'une auto-
(527) Cf Afrique Contemporaine n° 144 ; voir également MARCHAL (R.), chronique d'une
guerre oubliée: le Sud-Soudan des années 1990, in L'Afrique Politique, 1995, Le Meilleur, le Pire
et l'Incertain, pp. 73-91 ; voir aussi RICRjuillet-août 1989, N° 778, pp. 380-383.
(528) L'Annuaire..., pp. 237-238.
(529) Cf Le CICR dans le monde 1990, Genève, 28 pages ~ cf. RICR N' 778, juillet-août 1989, p.
382; Cf Afrique Contemporaine N° 137, Mars 1986 ; N' 138, juin 1986 ; N° 142, juin 1987 ; N°
144, décembre 1987.
(530) Cf. RICR N° 778, op. cit., p. 380 ; cf. également le CICR dans le monde 1990, op. cit., pp.
5-6 ; voir aussi PARKER (R.), The Senegal-Mauritania confliet of 1989 : a fragile equilibrium,
Journal of Modem African Studies, Vol. 29, n° l, march 1991, pp. 155-171 ; cf. Résolution
CM/1217 du Conseil des ministres de l'OUA de juillet 1989 sur le conflit Sénégal-Mauritanie.

226
qualification de simple trouble à l'ordre public appelant l'intervention des forces de sécurité
intérieures.
Ces diverses situations ébrèchent fortement la distinction. La ligne de partage
entre conflit anné non international, conflit anné international et troubles et tensions
internes devient poreuse, instable.
Ains~ les luttes années entre factions politiques au sein de l'Etat, lorsqu'elles
atteignent un seuil de violence extrême, constituent un conflit interne. On peut penser à la
guerre civile congolaise entre les milices "COBRAS", "NINJAS" et "ZOULOlJS"(531).
--_
, - - - -
-,.--
.•..
,.---
Par leur degré variable d'intensité dans la violence et la durée, les luttes années entre
factions politiques ou les mutineries de soldats peuvent aussi constituer des situations à mi-
chemin entre le conflit interne ou de simples tensions et troubles intérieurs (mutineries au
Bén~ en Centrafrique et en Guinée-Conakry).
Mais c'est surtout avec l'apparition de situations conflictuelles en marge de la
SUMMA-RJVISI<L classique, que le schéma de classification perd de sa signification
première. Il s'agit de conflits déstructurés, de type nouveau ou conflits mixtes. En effet,
selon la doctrine : ttun même conflit peut répondre à la fois au critère interétatique et au
critère intra-national et avoir un caractère mixte, c'est-à-dire apparaître comme un conflit
international dans les relations entre certains belligérants et comme une guerre civile entre
d'autres belligérants"(532).
(531) Jeune Afrique N° 1921, du 29 octobre au 4 novembre 1997, Spécial Congo, pp. 57-73.
(532) NGUYEN QUOC-DINH, DAILLIER (P.) et PELLET (A.), op. cit., p. 883 ; cf. aussi
TORRELLI (M.), Stratégies juridiques et stratégies militaires in Mélanges René-Jean DUPUY,
Paris, Pédone, 1991 (382 p.) : L'auteur relève les lacunes du Protocole II, au sujet des conflits
mixtes : "Le Protocole II de 1977 a sans doute apporté des améliorations mais ses conditions
sévères de mise en œuvre donnent à l'Etat tout loisir pour en refuser l'application. La guerre civile
reste une sorte de maladie honteuse car elle bafoue l'autorité souveraine. Mieux encore, les
diplomates réunis en 1974 n'ont pas voulu préciser le régime des conflits internes -
internationalisés alors que 9/1 Oe des conflits internes relèvent de cette catégorie. Cette stratégie du
non-droit laisse ainsi entière la liberté de manœuvre de tous les Etats" (p. 311).

227
Le DIH se retrouve alors devant une impasse, un no man's land juridique
dangereux car "ces situations intermédiaires sont souvent lourdes d'atteintes aux droits des
individus. Mais les Etats préfèrent refuser l'état de conflit armé qui limite leur action et
préserver ainsi leur souveraineté à l'égard de situations qui, dès lors, ne relèvent que de leur
ordre interne, sous réserve des règles du Droit international des Droits de l'Homme qui
seraient applicables"(533).
Ces situations de conflits armés mixtes fourmillent en Afrique. On peut citer
certains conflits internes bénéficiant d'appui militaire, fmancier, logistique ou de mise à
disposition de conseillers militaires par des puissances régionales africaines ou extra-
continentales au Tchad (interventions libyenne et française) ; en Angola (interventions
américaine, soviétique, cubaine et de l'Afrique du Sud) ; au Mozambique (avec les mêmes
acteurs) ; les activités extérieures de la France sous couvert d'accords de défense ou
d'assistance en Mauritanie (contre le POLISARIO), en Djibouti, en RDC (ex-Zaïre), en
Centrafrique, au Tchad, etc.(534) ; les guerres civiles dans lesquelles plusieurs pays
voisins interviennent: la guerre en RDC (ex-Zaïre) avec la participation de l'AFDL de
KABILA, des années d'Ouganda, du Rwanda, du Zimbabwé et de rebelles congolais, les
mutineries de soldats et la guerre civile avec les interventions du Sénégal, de la Guinée-
Conakry, des pays de langue portugaise et de l'ECOMOG en Guinée-Bissau, la guerre
(533) DUY-TAN (IN.), Le droit des conflits armés non internationaux..., op. cit., p. 858.
(534) Cf. MALLEIN (l), Applicabilité et application du Dili : Les cas des conflits où la France
est impliquée, in Le Dili, Problèmes actuels et Perspectives d'avenir..., op. cit., pp. 83-96. Cf.
MANIN (A.), L'intervention française au Shaba., AFDI 1978, p. 184 et s. ; ANGO ELA (p.), La
coopération militaire franco-africaine et la nouvelle donne des conflits en Afrique, in Relations
Internationales et Stratégiques N° 23, Automne 1996, p. 178 et s. La France a conclu des accords
de défense ou de coopération militaire avec les Etats africains suivants: Bénin (1975), Burkina
Faso (1965), Burundi (1974), Cameroun (1974), Centrafrique (1960), Comores (1978), Côte
d'Ivoire (1961), Djibouti (1977), Gabon (1960), Guinée (1985), Guinée-Equatoriale (1985),
Madagascar (1973), Mali (1986), Maurice (1979), Mauritanie (1987), Sénégal (1974), Tchad
(1976), Togo (1976), Cf Ministère des Affaires Etrangères : Liste des traités et accords de la
France en vigueur au 1er octobre 1988 par SURBIGUET (M.F.) et VAGOGNE (p.), Paris,
Direction des Journaux Officiels, 1176 p. Cf. aussi SPIRY (E.), Interventions humanitaires et
interventions d'humanité: la pratique française face au Droit international, RGDIP, 1998, p. 407-
434.

228
civile en Sierra-Léone et les interventions du Nigéria et de la Guinée en 1991 ; conflits
internes internationalisés en Somalie entre les six "familles de clans" Hawiyé, Daarood,
Isaaq, Dir, Digil, Rahanweyn, de l'ASS de Mohamed Farah AIDID, du MNS et du
CSU/SNA avec proclamation de la sécession du SOMALILAND, rivalités entre AIDID et
Ali Mahdi MOHAMED et l'intervention américaine avec l'opération RESTORE HOPE du
f " " ' " " - - " " - '
9 décembre 1992 et sa relève par l'ONUSOM le 4 mai 1993(535); intervention de l'année
sénégalaise pour rétablir le régime de Daouda lAWARA après le coup d'Etat de Kukoï
Samba SANYANG en 1981 ; coups d'Etat aux Comores avec intervention de mercenaires
de Bob DENARD; guerre du Shaba en 1977, etc.
On constate que ces conflits comportent des aspects internationaux et internes.
Cette mixité rend la distinction peu opérante. Sous l'angle géostratégique, ces conflits
entraînent surtout l'implication de grandes ou de moyennes puissances qui s'affiontent par
Etats ou autres protagonistes interposés, formant et défaisant les alliances au gré de leurs
intérêts politiques ou économiques.
En réalité, la dichotomie opérée par le DIH entre les conflits instaure une
discrimination fondée sur le fait que "deux régimes juridiques s'appliquent aux conflits
armés. C'est la frontière entre Etats qui marque la différence: une guerre entre deux ou
plusieurs Etats est un conflit international ; des hostilités se déroulant sur le territoire d'un
seul Etat constituent un conflit anné non international (ou interne)... "(536). Mais
l'existence des conflits de type nouveau fausse la classification, milite en faveur d'un
abandon de la S~SIO et son adaptation aux guerres contemporaines.
L'implosion des critères traditionnels conduit à la recherche de nouveaux critères de
(535) Cf VIRCOULON (Th.), supra; cf aussi COMPAGNON (D.), Somalie: les limites de
l'ingérence "humanitaire". L'échec politique de l'ONU, in L'Afrique Politique, 1995, op. cit., pp.
193-202 ; SINDJOUN (L.), Lecture tropicale des conflits somalien et yougoslave: pour une
épistémologie du détour et de la connexion, in Afrique 2000, avril- mai - juin 1994.
(536) GASSER (HP.), op. cit., p. 22.

229
classification des conflits déstructurés de cette fin de siècle(537). Ces situations de conflits
internes intemationaIisés(538) sont grosses de danger pour la personne humaine démW1Îe
devant la négation de l'existence de conflit par les Etats et les parties rebelles. L!§1.TMM~:\\
D~!9 s'appuyant sur la présence ou non d'Etats, n'est plus à même de rendre compte de
l'extrême diversité des conflits actuels. Sur le plan juridique, le DIH ne peut prétendre les
régir par la seule application de l'art. 3 des Conventions de Genève (valable en toutes
circonstances). Dès lors, il faut se ranger à l'avis de GASSER, c'est-à-dire se contenter "de
solutions de fortune sur la base desquelles on recherchera dans chaque cas le droit
applicable aux relations particulières entre les diverses parties au conflit"(539).
L'artificialité de la SUMMA DIVISIO vient également du fait qu'elle entraîne
---,._-----
une discrimination dans la protection de l'individu selon les conflits en lui octroyant plus
de droits en cas de conflit international et moins, en cas de conflit interne. En effet, selon
GASSER: "les Conventions de Genève, avec les Protocoles additionnels, consacrent vingt
articles aux conflits armés internes et près de 500 aux conflits internationaux. Et pourtant,
sur le plan humanitaire, les problèmes se posent de la même manière, qu'une arme à feu
soit utilisée à l'intérieur des frontières d'un Etat ou à travers les frontières. Ce traitement si
visiblement différent de situations semblables s'explique par la notion de souveraineté des
Etats"(540). Cette attitude correspond à une logique qu'il convient d'inverser. Aujourd'hui,
les conflits internes sont plus nombreux que les conflits internationaux du fait
de
l'interdiction du JUS AD BELLUM avec l'art. 2 § 4 de la Charte de l'ONU et, inversement,
---
------
en raison de la non-interdiction par le Droit international de l'usage de la force à l'intérieur
des frontières de l'Etat.
(537) Cf Le Monde, Dossiers et Documents: L'état des conflits dans le monde, 1988 ; voir aussi
STAVENHAGEN (R), Les conflits ethniques et leur impact sur la société internationale, RISS N°
127, op. cit., pp. 123-127 ; REZA-DJALILI (M.), Analyse des conflits du Tiers-Monde: éléments
dune typologie, op. cit., pp. 171-179.
(538) Pour une analyse détaillée, cf SCHINDLER (D.), Le Dili et les conflits internes
internationalisés, in RICR N° 737, septembre-octobre 1982, pp. 263-272.
(539) GASSER (H.P.), Le Dili... , op. cit., p. 83.
(540) GASSER (H.P.), ibid., p. 22.

230
La distinction entre le droit des conflits armés internationaux et le droit des
conflits armés non internationaux repose sur une summa divisio classique qui ne tient pas
compte des mutations contemporaines de la nature des conflits appelant à un changement
de stratégie et de nouvelles fonnes d'action pour parer aux effets des hostilités. Toute la
difficulté actuelle réside dans le traitement juridique des conflits inter-forces rebelles, ou
des combats entre des milices sécessionnistes et claniques et les forces de maintien de la
paix de l'ONU ou de l'ECOMOG, ou entre des factions politiques reconverties en
mouvements de rébellion et les forces armées gouvernementales. Dès lors, appliquer le
Dili à ces diverses situations en se fondant sur la seule SUMMA DIVISIO relève d'une
pure gageure.
Le DIH n'est pas adapté aux conflits mixtes.
Paragraphe II - L'inadaptation du DIH aux conflits de type
nouveau
L'obsolescence des SUMMA DIVISIü avait permis de dégager une première
-
---~
conclusion préconisant particulièrement l'abandon de la distinction entre conflits armés
non internationaux et conflits armés internationaux, en raison de l'existence de multiples
conflits qui ne rentraient pas dans les catégories susvisées.
Une autre alternative au déclin des SUMMA DIVISIO conduit à recommander
une double solution fondée, d'une part sur l'élargissement de la gamme des conflits internes
(1) ; et d'autre part, l'extension du DIH aux armes cruelles et aux armes nouvelles (2).
La première branche de l'alternative a pour fmalité de rendre à la distinction
entre conflits internationaux et conflits internes, sa signification véritable en faisant
bénéficier au DIH d'une simplicité dégagée de la complexité des conflits hybrides.

231
La seconde branche de l'alternative a le mérite d'adapter le DIH. Concrètement,
de nombreux conflits armés, internationaux ou non, entraînent l'emploi de nouvelles armes
que le DIH actuel ne peut toujours prévoir. il s'agira de faire en sorte que le droit soit
conforme aux faits.
1 - Pour un élargissement de la gamme des conflits
internes
L'impuissance des SUMMA DIVISIü dans la tentative pour rendre compte de
--,..-_.~~,~._.~, - .-"..~--- ._,..
la complexité et de la diversité des conflits armés, doit servir de trame à la recherche de
nouvelles pistes de réflexion intégrant les conflits de type nouveau.
Il en résulte qu'une investigation poussée permet de conclure à un élargissement
de la gamme des conflits internes. Cette incorporation des autres types de conflits dans les
conflits internes pourrait emprunter deux voies :
- d'une part, l'élargissement du DIH en direction des situations de troubles et
de tensions internes ;
- d'autre part, son ouverture vers les conflits mixtes.
a - L'élargissement du DIU en direction des
situations de troubles intérieurs et de tensions
internes
L'exégèse du droit des conflits armés révèle un grand nombre de situations
échappant à toute réglementation conventionnelle. il s'agit des troubles et des tensions
internes. L'article 1 al. 2 du Protocole II de 1977 exige un seuil élevé d'hostilités pour son

232
application, excluan~ de ce fai~ ces situations :"Le présent Protocole ne s'applique pas aux
situations de tensions internes, de troubles intérieurs, comme les émeutes, les actes isolés et
sporadiques de violence et autres actes analogues, qui ne sont pas considérés comme des
conflits armés". Cette disposition est donc restrictive en ce sens qu'elle ménage les
susceptibilités des Etats en abandonnant à leur emprise souveraine le traitement de tout ce
qui se passe à l'intérieur de leurs frontières.
Historiquemen~ la non-application des Conventions et Protocoles aux
situations de troubles et de tensions trouve son origine dans le fait que : "lorsque les pays
du Tiers-Monde eurent obtenu que certaines guerres de libération soient considérées
comme des guerres internationales, la conclusion d'un Protocole relatif aux conflits annés
non internationaux leur parut inutile. Seul un texte de compromis proposé par le Pakistan
pennit l'adoption du Protocole II''(541). Les juristes occidentaux ont critiqué cette
approche du Tiers-Monde motivée par ses craintes. A titre illustratif, l'intervention suivante
du délégué de l'Inde en 1977 est révélatrice d'une position commune privilégiant la
souveraineté étatique : Il ... Les dispositions du Protocole II ne feront que militer contre la
souveraineté des Etats et constitueront une ingérence dans leurs affaires intérieures. Les
situations intéressant l'ordre public dans un pays sont strictement l'affaire de l'Etat
souverain et ces problèmes doivent être traités conformément à la législation interne du
pays"(542).
L'enjeu du Protocole Il était ainsi précisé par la délégation indienne: "Ce que
l'on demande aux gouvernements, c'est de traiter avec indulgence certaines personnes
auteurs de graves infractions, tandis que d'autres citoyens, qui auraient osé se rendre
(541) DUY-TAN (IN.), Le droit des conflits armés non internationaux..., op. cit., p. 856 (note n°
27, bas de page).
(542) CDDHlSR49, Vol. VII, p. 81 (explication de vote, Inde), cité par ABI-SAAB (R), op. cit.,
p. 151.

233
coupables d'infractions analogues, se verraient appliquer toutes les ngueurs de la
loi... "(543).
Mais si les Conventions et Protocoles ne régissent pas les situations de troubles
et de tensions internes, ces dernières n'échappent pas aux règles du droit. Le Droit
international des Droits de l'Homme s'applique en tout temps et en toutes circonstances.
Son noyau dur de droits indérogeables s'applique même en cas d'état d'exception(544). TI
en est de même de l'article 3 commun aux Conventions de Genève qu~ grâce à une
interprétation téléologique, a pour vocation de s'appliquer à tout conflit de caractère
interne. En cas de situation de troubles ou de tensions, l'individu peut s'appuyer sur "deux
béquilles" selon l'expression du Pr. TURPIN (DIH et Droits de l'Homme).
Cependant, les limites entre les conflits internes et les troubles et tensions
intérieurs sont vagues. La porosité de la frontière rend malaisée la distinction classique du
fait de la mixité actuelle des conflits armés.
En effet, les recoupements font que: "ces diverses formes de conflit peuvent
s'enchaîner l'une à l'autre, être simultanées, se suivre dans le temps, se concentrer dans un
espace réduit ou au contraire essaimer sur des pays voisins. La Conférence diplomatique
sur le droit humanitaire n'a certes pas pu dissiper toutes les ambiguïtés juridiques : la
coexistence
d'affrontements
entre
troupes
étrangères
d'une
part,
entre
forces
gouvernementales et insurgés d'autre part, n'est pas peu fréquente et augmente la
complexité juridique, politique et humanitaire"(545). Ces arguties juridiques n'ont jamais
empêché le fait que les Etats disposent de la possibilité d'utiliser la force à l'intérieur de
(543) CDDH, ibid., p. 82, cité par COLIN (J.P.), Guerres et luttes armées ou : le droit introuvable,
in RBDL Vol. X VI, 1981-1982, p. 218.
(544) EIDE (A), Troubles et tensions intérieurs in Dimensions internationales du Droit
humanitaire, op. cil., pp. 279-295.
(545) HERCZEGH (G.), Etat d'exception et droit humanitaire in Recueil des Cours de l'IIDH,
Strasbourg, 1983, et RICR N° 749, septembre-octobre 1984, pp. 275-286.

234
leurs frontières pour rétablir la paix et maintenir l'ordre public. En effet, selon GASSER:
"le Droit international n'empêche pas les autorités nationales de traduire en justice des
rebelles capturés et de les faire condamner sur la base de la loi pénale du pays"(546).
Les Etats n'acceptent pas les atteintes à leur souveraineté et s'empressent à nier
l'existence de tout conflit armé de caractère international ou non face à ces situations de
troubles. Là encore, le DIH doit jouer un délicat rôle d'équilibrage entre le respect de la
souveraineté des Etats et la nécessité de la protection des victimes. Ces deux exigences ne
sont pas toujours inconciliables et peuvent se combiner pour renforcer la protection du
Dili : "même les nécessités militaires et les exigences de la souveraineté étatique en
général, loin d'être des obstacles à l'application du droit humanitaire, commandent son
respect, jusque et y compris dans la guérilla"(547).
La doctrine admet que les situations de troubles et de tensions internes, sans
relever du droit des conflits armés, "n'échappent pas aux obligations qui résultent des
dispositions générales du Droit international concernant la protection des Droits de
l'Homme"(548).
Une solution consisterait à élargir la gamme des conflits non internationaux en
y intégrant les situations de troubles et de tensions internes.
L'évolution du DIH appelle son ouverture à ces derniers domaines vierges de
toute codification humanitaire, chasse encore gardée de la souveraineté étatique car il est
dans la nature du Droit international d'évoluer. Le Pr. CONDORELLI souligne que "la
norme suivant laquelle, pour le Droit international, l'organisation de l'Etat est un domaine
(546) GASSER (HP.), op. cit., p. 79.
(547) VEUTHEY (M.), Guérilla..., op. cit. p. XXV
(548) VEUTHEY (M.), Guérilla, op. cit., p. 9 ; cf. également GASSER (HP.), op. cit., p. 84 : "De
telles situations ne sont pas soumises au Droit international humanitaire. Pourtant, elles sont

235
réservé par excellence souffre des exceptions dont le nombre a tendance à croître au fur et
à mesure qu'augmentent les règles requérant des Etats des résultats... Le domaine réservé
des Etats tend à se rétrécir comme une peau de chagrin"(549).
D'autre part, l'expression "conflits annés non internationaux" gagnera en
objectivité et en complétude en couvrant un champ d'extension maximale.
Ensuite, pour remédier aux nombreuses lacunes du Protocole 11(550), certains
auteurs ont proposé des codes de bonne conduite pour les troubles et tensions
intemes(551). D'autres recommandent une extension du code de conduite pour les
responsables de l'application des lois adopté par résolution de l'AGNU 31-169 du 17
décembre 1979 dont les huit articles commentés instaurent des règles humanitaires minima~
valables pour toutes les situations de trouble à l'ordre public, que toutes les forces de l'ordre
(armée, police, gendarmerie...) doivent respecter(552).
Ces différentes proposlt:Lons énoncent de façon succincte les pnnclpes
humanitaires communs à tous les types de conflits. Elles opèrent de surcroît la jonction
susceptibles de créer, sur le plan humanitaire, des problèmes tout à fait comparables à ceux des
guerres civiles".
(549) CONDORELLI (L.), L'imputation à l'Etat d'un fait internationalement illicite: solutions
classiques et nouvelles tendances, RCADI 1984, VI, Tome 189, p. 32 ; cf ARANGIO-RUIZ (G.),
Le domaine réservé. L'organisation internationale et le rapport entre le Droit international et le
Droit interne, RCAnI 1990, Vol. VI, Tome 225, pp. 9-485.
(550) Cf ABI-SAAB (A), Droit humanitaire et conflits internes... , op. cit., p. 152. Selon l'auteur,
à la différence de l'article 3 de 1949 qui ne comporte pas de limitation de contrôle territorial : "...Le
champ d'application du Protocole fi est limité d'une autre manière encore. En effet, il ne peut
s'appliquer qu'aux conflits armés se déroulant entre les forces armées d'une Haute Partie
contractante et des forces armées rebelles, et non pas à des conflits se déroulant entre forces
rebelles elles-mêmes".
(551) MERON (Th.), Projet de déclaration-type sur les troubles et tensions internes in RICR N°
769, 1988, pp. 62-80 ; cf aussi GASSER (HP.), Code de conduite pour troubles et tensions
internes in RICR N° 769, 1988, pp. 53-55.
(552) Cf NDIOUR (LT.C.B.), Opérations de maintien de l'ordre et Dili, in Conférence sur le Dili
pour les forces armées des Etats-membres de l'OUA (Naïrobi, 2-6 décembre 1991), 313 p., pp. 27-
40.

236
souhaitable entre DIH et Droits de l'Homme en pennettant à l'article 3 de 1949 de déployer
ses pleins effets et au noyau indérogeable des Droits de l'Homme d'affmner sa
pennanence. Elles visent ainsi à pallier aux insuffisances du Dili contemporain(553) et à
contribuer au débat actuel sur l'opportunité d'une nouvelle codification façonnant ainsi une
"cuirasse" hwnanitaire pour les situations de troubles et de tensions. Une solution
alternative est à rechercher dans l'extension du droit des conflits internes aux conflits
mixtes.
b - L'élargissement du DID aux situations de
conflits mixtes
Les conflits annés contemporains sont caractérisés par l'imbrication fréquente
de situations internes et de facteurs internationaux. Comme l'affinne GASSER: "Rares
sont les guerres civiles qui ne sont pas, d'une manière ou d'une autre, en rapport avec des
événements internationaux. Et il est peu fréquent qu'un conflit se déroule entièrement
"derrière des portes closes". L'influence de pays tiers prend diverses fonnes et peut aller
jusqu'à l'intervention de forces années"(554). Un rapport du CICR à la XXVIe Conférence
internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge (Genève 1995) faisait le constat
alannant de la désintégration des structures étatiques du fait des conflits de type nouveau :
"Ces structures, souvent déjà faibles et fragiles avant l'éclatement du conflit, n'ont plus
aucune emprise sur les événements et ne peuvent assurer, ni le respect du Droit
international hwnanitaire, ni l'approvisionnement minimal nécessaire à la survie de la
population civile. Cette carence favorise l'émergence de nombreuses entités non étatiques.
Pendant le conflit, de multiples groupes annés (souvent des dizaines, voire davantage) sont
engagés dans les hostilités"(555).
(553) Cf BOTHE (M.), Conflits annés internes et Dili, in RGDIP 1978, N° 1, vol. 82, pp. 18-102.
(554) Cf GASSER (H.P.), Le DIH, Introduction..., op. cit., p. 83.
(555) Cf texte du Rapport, in RICR N° 818, mars-avril 1996, p. 231.

237
Certains conflits annés sont marqués par la présence de forces de l'ONU qui
peuvent mener des opérations de maintien de la paix ou d'imposition de la paix.
Ainsi, les opérations de maintien de la paix (dont le fondement ressort du
Chapitre VI de la Charte) ont une action non coercitive. Elles ont pour mission le respect
des cessez-le-feu, des lignes de démarcation et la conclusion d'accords de retrait de
troupes. A ces missions traditionnelles et temporaires, peuvent s'ajouter des tâches de
surveillance des élections, d'acheminement et de protection de secours humanitaires et
d'aide à la réconciliation nationale. Ces opérations doivent rencontrer le consentement des
parties. A cet effet, l'ONU conclut avec chaque Etat fournisseur de contingents de soldats
de la paix, un accord conforme aux buts et principes de la Charte. L'usage de la force n'est
alors permise qu'en cas de légitime défense.
Pour les opérations d'imposition de la paix (relevant du chapitre VII de la
Charte), elles sont conduites par des forces mobilisées par l'ONU ou par des Etats, des
groupes d'Etats ou des organisations régionales sur autorisation du Conseil de Sécurité, ou
à l'invitation de l'Etat concerné. Ces forces peuvent user de mesures coercitives pour
s'acquitter de leur mission et le consentement des parties n'est pas obligatoire.
Toutefois, cette distinction
a perdu de sa fermeté. Elle a éclaté en sous-
distinctions entre opérations de consolidation de la paix (ensemble de décisions prises à la
fin d'ml conflit pour affermir la paix et prévenir le retour des hostilités et englobant la
création et le renforcement d'institutions nationales, la surveillance d'élections, la défense
des droits de l'homme, la mise en œuvre de programmes de réinsertion et de
reconstruction) et opérations de rétablissement de la paix (visant à faciliter le dialogue
entre belligérants, à promouvoir la réconciliation nationale et à institutionnaliser la paix).
Ces distinctions ont un caractère flou, mouvant avec les formules nouvelles associant
étroitement des opérations classiques de maintien de la paix et des opérations coercitives

238
(ONUSOM J et II, ONUMOZ, ECOMOG, MONUL, MONUSIL, ONUVER, UNAVEM
J, II et III, etc.).
De nombreux conflits, à l'origine de caractère interne, ont eu des répercussions
internationales. TI en est ainsi des luttes entre clans ou ethnies au Liberia ou en Somalie qui
ont entraîné l'intervention des forces de l'ECOMOG ou de l'ONUSOM. Ces conflits
mixtes, avec effondrement de structures gouvernementales ou militaires, rendent de moins
en moins aisée l'application du Droit international humanitaire(556). La mixité des conflits
peut aussi revêtir initialement la fonne de conflits internes tels que les conflits séparatistes,
irrédentistes, les luttes ethniques ou révolutionnaires. L'Ancien Secrétaire Général de
l'ONU, M. BOUTROS BOUTROS-GHALJ soulignait à ce propos: "ces conflits de type
nouveau placent le personnel de maintien de la paix de l'ONU face à des problèmes que
l'on n'avait pas vus depuis l'opération du Congo en 1960. (...) On a affaire non seulement à
des armées régulières mais également à des milices et à des civils annés peu disciplinés et
avec des structures de commandement mal définies (... ) ; il s'agit de guerres de guérilla
avec des fronts de combat imprécis. Les civils sont les principales victimes et,
fréquemment, le contrôle' des civils apparaît comme le principal objectif de la
guerre"(557). La caractéristique commune de ces conflits mixtes est de poser des
problèmes juridiques complexes.
Ainsi, un conflit interne, mais internationalisé par l'intervention de forces
étrangères, des Etats membres de l'ONU, de l'OUA ou de la CEDEAO, soulève des
difficultés qui se ramènent à la question suivante: les forces d'interposition ou de maintien
(556) Cf BIERZANEK (R.), Quelques remarques sur l'applicabilité du DIH des conflits armés
aux conflits internes internationalisés, in Etudes et Essais sur le Dili..., op. cit., pp. 281-290 ; cf
également FORSYTHE (D.P.), La guerre civile et le droit international, RGDIP, 1996, pp. 553-
578.
(557) Supplément à un Programme de Paix, document du Secrétariat Général, Nations Unies,
New-York Al50/601199511, 3 janvier 1995 ; cf également BRAECKMANN (C.), Rebelles et
parrains se partagent le Congo, in Manière de voir n° 49, ATLAS 2000 des conflits, 100 p. ;

239
de la paix doivent-elles respecter le DIH ? Fonnellement les organisations internationales
ne sont pas parties aux Conventions de 1949 et aux Protocoles de 1977 même si ces textes
sont enregistrés aux Nations Unies et que ces institutions se réfèrent à l'idéal de paix et de
coopération de l'organisation mondiale.
De surcroît, en dépit de la conclusion, sous ses auspices ou sous son égide, de la
Convention de 1977 sur l'environnement, de la Convention de 1980 sur les annes
classiques et de la Convention de 1997 sur les mines anti-personnel, celles-ci n'engagent
pas juridiquement l'ONU qui n'est ni un gouvernement ni une organisation possédant des
forces années qui lui sont propres (même si cette dernière a la capacité juridique).
Sur le plan de l'éthique et de la morale, les organisations universelles ou
continentales dont les buts et principes s'ordonnent autour de la paix et de la coopération
des Etats, doivent respecter le DIH. Ces principes et idéaux ne s'opposent pas à ce que les
forces de maintien ou de rétablissement de la paix inscrivent leurs activités militaires dans
le respect des traités humanitaires(558). La logique juridique commande que ces forces
VIRCOULON (Th.), Au cœur des conflits, l'Etat, in Afrique Contemporaine nO 180, 1996, pp.
199-208.
(558) Cf MINDUA (A), L'intervention armée de la CEDEAO au Liberia: Illégalité ou avancée
juridique? in RAD.I.C., juin 1995, Tome 7, N° 2 ; cf BAXTER (RR), Comportement des
combattants et conduite des hostilités, in Dimensions internationales du droit humanitaire... , op.
cil., p. 127: "Aucun des traités visant à protéger les victimes de guerre ne contient des dispositions
concernant son applicabilité à des opérations auxquelles participeraient les forces des Nations
Unies. Tandis que les forces opérant sous l'égide des Nations Unies ne sont pas censées faire des
prisonniers de guerre, ou "occuper" un territoire, il y a bien certaines stipulations expresses des
conventions humanitaires, par exemple sur la protection des blessés et des malades, qui sont
applicables aux opérations des forces des Nations Unies. Précisément pour cette raison, il est
statué, dans les règlements relatifs à ces forces qu'elles doivent observer les principes généraux du
droit humanitaire", Ex. : Secrétariat Général - N.V. Règlement de la Force d'urgence des Nations
Unies en Egypte. Doc. ST/SGBIUNEF 1, CHAP. VI, Section 44 ; voir aussi à ce sujet SANDOZ
(Y), L'application du droit humanitaire par les forces armées de l'Organisation des Nations Unies,
in RICR, sepl.-octobre 1978, 60e année, N° 713 ; cf EMMANUELLI (C.), La Convention sur la
sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé: des rayons et des ombres, in
RGDIP, Vol. 99, 1995, pp. 849-880. ; cf également loi nO 99-41 du 29 janvier 1999 autorisant le
Président de la République du Sénégal à ratifier la Convention sur la sécurité du personnel des

240
d'intervention intègrent dans leur stratégie le volet humanitaire, soit par le biais d'lUl
mémorandwn d'accord signé entre les organes exécutifs de ces organisations et le CICR,
soit par toute autre déclaration fonnelle d'acceptation de l'application des principes du
Dili.
Mais l'application du droit des conflits armés n'est pas simplifiée par
l'entrelacement de divers facteurs politiques, religieux, sociaux et culturels dans les conflits
entre mouvements de libération (ex: UNITA et MPLA), entre factions d'lUl même
mouvement de rebelles, dans les luttes contre des régimes oppressifs. A titre d'exemple, on
peut citer une situation de conflit mixte assez caractéristique des conflits africains: en
décembre 1998, le conflit armé entre les forces armées gouvernementales de la Sierra
Leone d'Ahmad Tejan KABBAH, appuyées par l'ECOMOG et des milices des CIVIL
DEFENCE FORCES composées de chasseurs traditionnels KAMAJORS de la tribu
MENDE, KAPRAS de la tribu TEMNE et TAMABOROS de la tribu KORANKO, d'lUle
part et les rebelles du RUF de Foday SANKOH soutenus par les putschistes déchus de la
Junte de Johny-Pol-KROMAH, d'autre part.
D'autres interrogations subsistent : Concrètement, doit-on appliquer le
Protocole 1 ou le Protocole II dans les guerres opposant les forces de l'ONU, OUA ou
CEDEAO ou SADC, d'une part et les rebelles, d'autre part ? Entre les années des rebelles
et l'armée de l'Etat territorial, doit-on appliquer automatiquement le Protocole II en faisant
fi des aspects d'internationalisation?
Les conflits mixtes ne bénéficient pas d'lUl traitement simplifié. Au nom de leur
sécurité intérieure ou extérieure, les Etats voisins, en fonction de leurs intérêts
hégémoniques, interviennent, soit aux côtés de rebelles (ex: en 1998, les armées rwandaise
et ougandaise soutiennent la rébellion contre le Président KABILA de la RDC) soit aux
Nations Unies et du personnel associé, adoptée à New-York le 9 décembre 1994, JORS n° 5834 du
3 avril 1999, p. 905.

241
côtés du gouvernement (ex : le soutien des années de l'Angola et du Zimbabwe au régime
de KABILA ou encore l'intervention de l'année sud-africaine au Lesotho, sous couvert de
la SADC).
En principe, le Droit international admet l'intervention des forces années d'un
Etat tiers en cas d'accord de défense ou par consentement de l'Etat territorial. Il en résulte
que : "la participation d'un Etat tiers à une guerre civile, à l'invitation et aux côtés du
gouvernement, est licite sur le plan du Droit international. En revanche, l'intervention aux
côtés des insurgés constitue une ingérence illicite dans les affaires intérieures de l'Etat
concerné; elle est, ainsi, contraire au Droit intemational"(559).
Mais le DIH ne règle pas de façon satisfaisante ces questions. Certains auteurs
ont proposé que soient résolues ces difficultés au cas par cas. n en est ainsi de la doctrine
qui suggère ce qui suit :
"1- Entre gouvernement et insurgés, l'article 3 et le Protocole Il
deviennent applicables.
2 - Entre un gouvernement et un Etat qui intervient aux côtés des
insurgés, c'est le droit des conflits annés internationaux qui
s'applique.
3 - Entre un Etat qui intervient aux côtés du gouvernement et les
insurgés, l'article 3 et le Protocole II deviennent applicables.
(559) GASSER (HP.), Le Dili..., op. cit., p. 83. Voir également BENNOUNA (M.), Le
consentement à l'ingérence humanitaire dans les conflits internes, Paris, LGDJ, 1974, 236 p.

242
4 - Entre les Etats qui interviennent des deux côtés, le droit des conflits
annés internationaux est valable"(560).
Ces solutions, trop générales, ne tiennent pas compte de l'extrême complexité
des conflits africains.
Une solution pom résoudre ces difficultés peut consister en Wl rapprochement
de ces diverses situations avec le régime applicable aux conflits annés non internationaux.
La raison principale tient dans le fait que la caractéristique dominante de tous ces conflits
réside dans leurs aspects internes. En effet, l'origine des conflits est d'ordre interne:
déliquescence des structures étatiques, lutte pom le pouvoir ou pour la sécession, famine,
catastrophes économiques ou écologiques, conflits de recouvrement ou d'afImnation
d'identité culturelle, etc. Il est donc logique d'en rechercher la solution dans le cadre de
génération de ces conflits.
Cependant, le recoms au droit des conflits annés non internationaux pom régir
ces situations d'enchevêtrement de régimes juridiques ne saurait constituer Wle solution
exhaustive. Le droit des conflits internes contient peu de règles de conduite des hostilités.
Cette lacune résulte de 11;1 suppression, en 1977, de toute la partie du droit de La Haye, du
Protocole II.
L'élargissement du droit des conflits internes par l'adjonction des conflits
mixtes aura le mérite de simplifier l'application du DIH. Le droit des conflits armés non
internationaux (art. 3 de 1949 et Protocole II de 1977) devra être complété par les principes
?< (560) GASSER (H.P.), ic!gu, p. 83 ; cette complexité est le reflet de la dissémination de la
violence. Selon l'analyse du Doyen TORRELLI : "La guerre moderne n'est pas seulement totale,
elle est aussi devenue mondiale. Elle mobilise tous les acteurs, elle se déroule sur tous les théâtres,
elle joue de toutes les formes de la violence". Cf. TORRELLI (M.), Stratégies juridiques et
stratégies militaires... , op. cit., p. 310.

243
généraux de
conduite des hostilités années,
empruntés
au droit coutumier ou
conventionnel.
Ains~ tous les conflits mixtes tomberont sous le régime de l'article 3 et du
Protocole II tout en bénéficiant des principes du DIH régissant la conduite des hostilités.
La révision du DIH est nécessaire. Les enjeux de l'adaptation sont ainsi
explicités : "le droit des conflits annés non internationaux prévus par l'article 3 commun
aux Conventions de Genève et le Protocole II n'est pas parfait. Il laisse dans l'ombre un
grand nombre de problèmes et ne parvient pas à l'entière protection des individus (...). Si
de nouveaux instruments devaient être créés néanmoins, il serait alors nécessaire qu'ils
puissent apporter une réelle amélioration dans la protection des êtres humains victimes des
conflits annés"(561).
Ces enjeux tendent à la conjonction de la lettre et de l'esprit du DIH car: "le but
n'est pas tellement une nouvelle codification, mais un enracinement des valeurs et normes
existantes, si possible même en les étendant progressivement par une interprétation et une
application généreuses. C'est la tâche qui est maintenant à accomplir"(562).
C'est dans ce sens qu'il faut inscrire les conclusions du séminaire international
tenu à Bamako (Mali) en juillet 1996. Ce séminaire prônait l'éveil d'une culture
démocratique et l'amélioration des relations entre civils et militaires. Ce séminaire a permis
à un Général hollandais Henny Van Der GRAAF de proposer un "code de conduite
(561) DUY-TAN (lN.), Le droit des conflits..., op. cit. p. 864.
(562) VEUTHEY (M.), Guérilla..., op. dt., p. XL. L'auteur cite, plus loin, dans son ouvrage,
Richard R. BAXTER pour lequel, ce qui comptait le plus, était "de mettre davantage de substance
humanitaire et moins de subtilité juridique ("more matter and less art") dans la conception actuelle
du droit humanitaire" (p. 10).

244
régissant les relations entre le militaire et le civil"(563), suivant les grandes lignes du code
de conduite sur les aspects politico-militaires de la sécurité, adopté par les Etats de l'OSCE
en décembre 1994. Le Code de conduite pour les forces années et de sécurité, amSl
proposé, repose sur les éléments suivants :
- la subordination de l'institution militaire au pouvoir politique,
- la codification des droits et devoirs des militaires dans le droit national,
- le recrutement et la mobilisation en confonnité avec les droits de l'homme,
- l'enseignement du DIH et des Droits de l'Homme aux civils et militaires,
- l'enseignement spécifique en Droit international et national des responsabilités
au plan pénal des militaires,
- le respect du droit par le personnel militaire d'encadrement et de
commandement,
- la jouissance effective de leurs droits hmnanitaires et de leurs libertés
fondamentales par les personnels des Forces années et de sécurité,
- la fonnation des militaires confonnément aux Conventions de 1907, 1954,
1949, 1977, 1980 et aux besoins du service,
(563) Van Der GRAAF (H.), Pour un code de conduite régissant les relations entre le militaire et
le civil, in Lettre de l'UNIDIR, N° 32/96 ; La prévention des conflits en Afrique de l'Ouest ;
réduire le flux d'armements, pp. 100-102.

245
- le non-emploi des Forces années et de sécurité pour restreindre l'exercice
pacifique et légitime des droits individuels et civiques ou des groupes ou
pour les priver de leur identité nationale, religieuse, culturelle, linguistique
ou ethnique,
- la réduction du rôle de l'armée au strict minimwn dans les opérations de
maintien de l'ordre,
-la valorisation de l'image de marque de la Fonction militaire,
-la neutralité des Forces armées et de sécurité et leur mise hors du jeu politique,
- la création d'un climat de confiance entre militaires et civils par des
programmes d'information et de sensibilisation,
- le consensus entre partis politiques sur le respect de la neutralité des Forces
armées et de sécurité,
- la non-ingérence de la population civile et des pouvoirs politiques dans la
gestion interne et spécifique des domaines militaires,
- l'organisation de débats réguliers entre civils et militaires pour une bonne
compréhension mutuelle,
- le contrôle effectif sur les Forces armées et de sécurité par les autorités
constitutionnelles investies de la légitimité démocratique(564). Ce code a
(564) Ce séminaire, organisé par le gouvernement malien, a réuni officiers supeneurs,
représentants de l'ONU, de l'OUA, de l'ANAD, du Centre des Nations Unies pour les Droits de
l'Homme, des pays voisins et d'experts des Etats-Unis, du Canada, de l'Allemagne et d'Afrique du

246
pour ambition d'engendrer une culture de la paix, de prévenir les conflits de
basse intensité et de renforcer la coopération entre le niveau opérationnel et
la réflexion politique et stratégique.
L'inadaptation du DIH aux conflits de type nouveau appelle une réflexion sur la
protection juridique relative aux annes nouvelles.
2 - Pour une extension du D.I.H. aux armes nouvelles
et aux armes cruelles
Depuis l'adoption de la Convention de Genève de 1864, le Dili s'est toujours
inscrit dans une logique évolutive. Du reste, l'ouverture du DIH à des domaines de la
guerre encore vierges de codification est un passage obligé pour adapter ce droit aux
réalités des guerres contemporaines. C'est au niveau de la réglementation des moyens de
combat cruels et inhumains ou de nouvelles technologies en matière d'armement que le
Dili devra élargir son champ d'application.
a - S'agissant des armes cruelles, celles-ci ont connu une évolution dont
l'origine remonte à la Déclaration de Saint-Petersbourg du Il décembre 1868 proscrivant:
"l'emploi (...) de tout projectile d'un poids inférieur à 400 g, qui serait ou explosible, ou
chargé de matières fulminantes ou inflammables". La déclaration énonçait une prohibition,
toujours en vigueur, l'interdiction de causer des maux superflus. Son préambule disposait:
"Considérant (...) que le seul but légitime que les Etats doivent se proposer pendant la
guerre est l'affaiblissement des forces militaires de l'ennemi; qu'à cet effet, il suffit de
mettre hors de combat le plus grand nombre d'hommes possible ; que ce but serait dépassé
par l'emploi d'armes qui aggraveraient inutilement les souffrances des hommes mis hors de
Sud. Ce séminaire faisait suite à la demande adressée en octobre 1993 par le Président KONARE
au Secrétaire Général de l'ONU de fournir son assistance pour la collecte d'armes légères illicites
proliférant dans le pays, dans le contexte de la rébellion touareg et des milices armées du
Mouvement GHANDA KOY.

247
comba~ OU rendraient leur mort inévitable ; que l'emploi de pareilles armes serait dès lors
contraire aux lois de l'humanité"(565).
Cette interdiction sera réitérée par la Déclaration de La Haye du 29 juillet 1899
concernant les balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain,
dites balles "DUM-DUM" (du nom du village de l'Inde où elles étaient produites). Ces
balles entaillées en fonne de croix pour élargir la blessure qu'elles devaient causer, avaient
des effets cruels. fi s'agissait de projectiles "à enveloppe dure dont l'enveloppe ne
couvrirait pas entièrement le noyau ou serait pourvue d'incisions".
Le principe de l'interdiction d'infliger des maux superflus incitera les puissances
occidentales à prohiber le poison et les armes empoisonnées (art. 23 al. 1, lettres a et e du
Règlement de La Haye sur les lois et coutumes de la guerre terrestre de 1907). Ce principe
humanitaire acquiert donc un caractère coutumier progressif L'interdiction vise "à atténuer
les maux provoqués par la guerre, à empêcher les violences inutiles ou disproportionnées
par rapport à l'objectif poursuivi qui est de vaincre l'ennemi. .. "(566).
La constance et la régularité du rappel de cette interdiction attestent de sa
positivité. Le Pro Eric DAVID pense que cette interdiction "exprime une des règles les plus
essentielles du Droit international humanitaire, à savoir que la violence dont on peut user
contre le combattant ennemi en temps de guerre ne doit servir qu'à le mettre hors de
combat de la manière la moins douloureuse possible... En d'autres termes, il faut éviter que
l'emploi d'une anne aboutisse nécessairement à massacrer ou à faire affreusement souffrir
ceux qu'elle touche directement ou indirectement"(567).
(565) Cf BLIX (H), Moyens et méthodes de combat in Dimensions internationales du droit
humanitaire..., op. cit., p. 167 et s.
(566) TURPIN (D.), Droits de l'Homme et Droit international humanitaire, in Le Dili: problèmes
actuels, op. cit., p. 15.

248
Aussi, en 1925, ce principe justifia l'interdiction d'armes d'une cruauté infmie :
les gaz asphyxiants, toxiques ou similaires "ainsi que de tous liquides, matières ou
procédés analogues". Le principe qui renforce le respect des exigences humanitaires repose
en outre sur la proportionnalité.
Le principe de la proportionnalité commande qu'''il doit exister un rapport
raisonnable non seulement entre les moyens militaires mis en œuvre et les destructions
entraînées mais aussi entre ces mêmes moyens et le but escompté ou plutôt sa valeur sur le
plan militaire. On ne tire pas au canon sur des moineaux"(568). Le Protocole de 1925
interdit donc l'emploi des armes B ou biologiques (c'est-à-dire qui utilisent des organismes
vivants) et C ou chimiques (c'est-à-dire qui utilisent des substances toxiques à effets
pathologiques).
Cependant, le traité de 1925 a suscité beaucoup de dissensions. S'appuyant sur
le principe du "FIRST USE", certains Etats ont assorti leurs ratifications de la réserve du
droit de riposter par arme chimique à Wl premier emploi de ces armes. D'autres comme les
Etats-Unis, qui ne l'ont ratifié qu'en 1975, exceptent de l'interdiction "les armes dites non
léthales c'est-à-dire dont les effets ne sont pas mortels tels que les gaz irritants employés
dans l'ordre interne pour réprimer les manifestations"(569).
Le Protocole de 1925, laissant encore planer le spectre de la guerre
microbienne, sera complété par la Convention du 10 avril 1972 sur l'interdiction de la mise
au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à
toxines et sur leur destruction.
(567) DAVID (E.), Evolution du droit humanitaire en un droit du moindre mal, in Le Dili :
problèmes actuels..., op. cit., p. 31.
(568) GASSER (H.P.), Introduction...., op. cit., p. 60.
(569) THIERRY (H), COMBACAU (l), SUR (S.) et VALLEE (Ch.), Droit international
public..., op. cit., p. 536.

249
L'interdiction
des
maux
superflus
connaîtra
encore
une
expression
conventionnelle renforcée avec l'article 35 du Protocole 1 de 1977, qui dispose, en son
alinéa 2 : "n est interdit d'employer des armes, des projectiles et des matières ainsi que des
méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus".
Compte tenu du grand nombre de conflits armés non internationaux et du fait
que le Protocole 1 vise les conflits internationaux, l'Institut international de Droit
humanitaire de San Remo, en 1989-1990, a identifié parmi les cinq principes humanitaires
à respecter dans tout conflit non international, le principe de l'interdiction des maux
superflus(570). Le respect des exigences humanitaires ne disparaît pas avec les hostilités
années. La Convention de 1980 a le mérite de le rappeler. TI s'agit d'une convention
ambitieuse qui porte l'intitulé de "Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi
de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets
traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination" et de ses trois protocoles
du 10 octobre 1980(571).
Son Protocole 1 prohibe les armes à éclats non localisables par rayons X dans le
corps humain (bombes à fragmentation et à billes en matière plastique).
Le Protocole II interdit les mines, pièges et autres dispositifs (mines terrestres,
pièges à apparence inoffensive ou attrayante, dispositifs ou munitions automatiques ou
télécommandés).
(570) Cf Déclaration de San Remo sur la question des règles du DIB relatives à la conduite des
hostilités dans les conflits armés non internationaux, in RICR, septembre-octobre 1990, N° 785, p.
415 et s., citée par le CICR, Doc. 1991, CI/6.1/1 : Réaffirmation et développement du DilI.
Protection des victimes des conflits armés non internationaux contre les effets des hostilités, 8 p.
(571) Textes dans la RICR, janvier-février 1981, pp. 20-34. Trois Etats africains ont adhéré à la
Convention de 1980: Bénin (27/03/1989) Niger (10/11/1992), Botswana (31/09/1998). D'autres
Etats l'ont signée sans ratifier: Nigeria (26/01/1982), Sierra Leone (1/05/1981), Soudan
(10/0411981), Togo (15/08/1981). Cf SCIDNDLER (D.) & TOMAN (l), Droit des conflits
armés, op. cit., pp. 195-200. Quant au Sénégal, il a ratifié la Convention de 1980 en 1999 (supra,
note nO 56).

250
Le Protocole III interdit l'emploi des annes incendiaires (lance-flammes,
fougasse, obus, roquette ou d'autres conteneurs incendiaires tel que le phosphore ou le
napalm). Le Protocole en interdit en outre l'emploi contre la population civile, les forêts ou
autres types de couverture végétale(572). A cet égard, il faut mentionner que des bombes
incendiaires ont été déversées, selon un représentant du CICR au Nigeria sur les
populations civiles des villes biafraises le 22 février 1968 et des bombes chimiques sur la
population de l'Abyssinie en 1935-1936(573).
La Convention de 1980 sera complétée par un quatrième Protocole du 13
octobre 1995 interdisant les annes aveuglantes à laser. L'article 4 du Protocole IV vise les
annes à laser provoquant la cécité permanente chez des personnes dont la vision est non
améliorée et une invalidité grave équivalente "à une acuité visuelle inférieure à 20/200,
mesurée aux deux yeux à l'aide du test de Snellen"(574).
Dans l'intervalle de temps séparant les Protocoles de la Convention de 1980, un
autre prolongement des traités de 1925-1972 interdit les annes chimiques : la Convention
de Paris du 13 janvier 1993 qui interdit leur mise au point, fabrication, transmission et
stockage(575).
Enfin, l'interdiction des armes inhumaines et cruelles atteignit son point
culminant avec la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production
(572) Cf PICTET (1.) : Développement et Principes... , op. cit., p. 70 et s. ; SANDOZ (Y.),
Interdiction ou restriction d'utiliser certaines armes classiques, RICR, janvier-février 1981, 35 p.
(573) Ch. ROUSSEAU, Chf. RGDIP, 1968, p. 231, cité par MERTENS (p.), Modalités de
l'intervention du CICR dans le conflit du Nigeria, in AFDI 1969, pp. 183-209; BAUDENDISTEL
(R..), La force contre le droit : le CICR et la guerre chimique dans le conflit Italo-Ethiopien de
1935-1936 inRICRN° 829, mars 1998, pp. 85-110.
(574) Cf texte du Protocole in DOSWELL-BECK (L.), Le nouveau Protocole sur les armes à
laser aveuglantes, RICR N° 819, mai-juin 1996, pp. 289-321.
(575) Rares sont les conflits africains dans lesquels on a constaté l'emploi d'armes chimiques.
Cependant, le gouvernement angolais avait accusé, le 6 juillet 1987, l'armée sud-afrilaine d'avoir

251
et du transfert des mines anti-personnel et sur leur destruction, adoptée à Oslo le 18
septembre 1997 et ouverte à la signature à Ottawa les 3 et 4 décembre 1997(576).
On peut se réjouir de l'interdiction de cette aune à la nocivité particulièrement
excessive(577). Malheureusment, les mines anti-personnel continuent encore leur oeuvre
destructrice en dépit de leur utilité militaire marginale, révélée par une étude d'officiers
supérieurs, parrainée par le CICR(578). L'étude démontre que les mines tuent plus de
civils que de combattants et qu'elles ont des effets dramatiques sur les victimes.
Le problème des mines antipersonnel retient particulièrement l'attention du fait
de leur prolifération en Afrique. Leur emploi se généralise dans les conflits annés
intraétatiques, que ce soit en Angola, en Ethiopie, au Sénégal, au Rwanda, au Soudan, en
Ouganda, au Zimbabwé, en Guinée-Bissau, dans les deux Congo, etc. L'Afrique est le
continent le plus touché par ce fléau. Une étude du CICR affinne qu"'elle compte à elle
seule 30 millions d'engins enfouis dans le sol de 18 pays. Ceux qui sont les plus affectés
sont l'Angola avec plus de 9 millions de mines terrestres, le Mozambique (2 millions), la
Somalie (l million). D'autres pays: l'Ethiopie, l'Erythrée et le Soudan sont aussi confrontés
à des situations graves de mines antipersonnel. Le Rwanda, le Libéria et la Libye ont eux
aussi des problèmes de mines mais à moindre échelle. La recrudescence de l'utilisation de
utilisé ces types d'armes dans le sud du pays. Cf. Afrique Contemporaine N° 144, octobre-
novembre-décembre 1987, 26e année, Chronique, La Documentation Française.
(576) Texte reproduit dans la R.A.D.I.C., Vol. 9, N° 4, décembre 1997, pp. 984-997 et dans la
R.I.C.R ND 827, septembre-octobre 1997, pp. 603-619. L'opinion publique mondiale a été alertée
par la formidable campagne médiatique orchestrée par 1000 ONG coordonnées par l'Américaine
Jody WILLIAMS, qui a précédé la signature de la Convention d'Ottawa. Cette campagne contre
les mines a obtenu le 98e Prix Nobel de la Paix en octobre 1997.
(577) Sur les blessures occasionnées par les mines et leurs effets physico-psychologiques, cf.
Mines Terrestres: Une action s'impose. Le DIH, Document du CICR, mars 1995 avec préface du
Médecin-Chef du CICR, Dr. Rémi RUSSBACH, 42 p.
(578) Cf. Les Mines Terrestres Antipersonnel. Des armes indispensables? Emploi et Efficacité des
mines antipersonnel sur le plan militaire, Etude réalisée à la demande du CICR, Genève, mai 1996,
84p.

252
ces engins néfastes s'explique par le le fait qu'ils sont peu coûteux et faciles à se
procurer"(579).
La lutte pour l'interdiction des annes particulièrement cruelles est confrontée au
défi posé par l'anne nucléaire. Nul n'ignore les effets monstrueux de cette anne
expérimentée à Hiroshima et à Nagasaki. Relativement au DIH, l'emploi de l'anne
nucléaire ne respecte pas la distinction entre combattants et non-combattants. Son
utilisation bafoue l'interdiction de l'article 35 du Proto 1 qui dispose, en son alinéa 1 : "dans
tout conflit anné, le droit des parties au conflit de choisir des méthodes ou moyens de
guerre n'est pas illimité".
Les concepts de "guerre propre" ou de "frappes chirurgicales" par des vecteurs
nucléaires ont fait long feu. Peu d'annes sont suffisamment précises pour ne toucher que
les seuls objectifs militaires, hormis les bombes à radiation renforcée dites bombes à
neutrons, présumées contrôlables(580). Or il ne fait aucun doute que l'anne nucléaire doit
être classée panni les moyens de combat les plus cruels, frappant sans discrimination les
civils et les militaires. La CU a admis explicitement que les principes humanitaires
"s'imposent (...) à tous les Etats qu'ils aient ou non ratifié les instruments conventionnels
qui les expriment"(581). La CU les qualifie de "principes intransgressibles du Droit
international coutumier"(582). L'anne nucléaire enfreint le principe de proportionnalité,
(579) Cf INFO-CICR N° 7, septembre-octobre 1995, publiée par la délégation régionale du CICR
à Dakar.
(580) Cf MARTINEZ (JC.), La problématique du nucléaire et des autres armes de destruction
massive, in Le DIH : problèmes actuels... , op. cil., pp. 151-158 ; COLIN (J.P.), Guerres et luttes
armées ou: le droit introuvable, in RBD.l, Vol. XVI, 1981-1982, 1, Bruylant, Bruxelles, p. 223 ;
SFDI : Le droit international des armes nucléaires, Pédone, 1998, 206 p.
(581) Cf C.lI., Avis consultatif sur la licéité de l'arme nucléaire..., parag. 79, Supra note nO 429.
(582) Avis, parag. 79, idem.

253
l'interdiction de causer des maux superllus, les principes d'humanité et de conscience
publique(583).
Cependant, si les principes du DIH s'opposent à la licéité d'emploi de l'arme
nucléaire, aucune de ses règles n'en interdit expressément la fabrication, le stockage ou
l'emploi. Lors de la Conférence diplomatique de 1977, les grandes puissances avaient
refusé que les Protocoles couvrent le domaine nucléaire et avaient précisé: "qu'elles
n'envisageaient pas d'aborder la question de l'arme nucléaire dans le cadre d'une
Conférence diplomatique consacrée à des négociations sur le développement du
DIH"(584).
Une partie de la doctrine a invoqué la disparité existant entre le DIH et le droit
du désarmement pour signifier que l'interdiction de toute arme nucléaire repose, au
préalable, sur l'adoption de mesures complémentaires dans le cadre du désarmement, de la
fabrication et du commerce de ces armes par les principales puissances qui sont plus
motivées par des intérêts d'équilibre géostratégique dans un but dissuasif que par l'emploi
des armes de destruction massive(585).
L'arme nucléaire reste un défi au DIH. Aucune Convention n'interdit l'usage et
la possession de cette arme. Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires
(Comprehensive Nuclear Test Ban Treaty) du 24 septembre 1996 a été signé par 158 Etats
à l'exclusion des Etats-Unis d'Amérique, de la Fédération de Russie, de la Chine, de l'Inde
et du Pakistan. Le développement progressif du DUI, en direction de l'arme nucléaire,
constituera dans les années à venir, le principal challenge au DIH. A cet effet, le DIH devra
(583) Depuis sa Résolution 1653 (XVI) de 1961, l'A.G.N.V. n'a pas cessé de condamner l'emploi
de cette arme, qu'elle soit tactique ou stratégique, comme violant les principes de la Charte et de
l'humanité.
(584) GASSER (H.P.), op. cit., p. 65.
(585) GASSER (H.P.), ibid., pp. 64-66 ; PICTET (J.), Développement et principes... , op. cit., pp.
61-69 ; De la GORCE (p.M.), Washington relance la course aux armements, in Le Monde
Diplomatique N° 549, op. cit., pp. 4-5.

254
non seulement prohiber l'emploi, le stockage, la fabrication mais aussi la production de
l'arme nucléaire qu'elle soit réservée à des fins offensives ou défensives, tactiques ou
stratégiques.
Sans être tout à fait désarmé, le DIH voit son extension vers l'emploi de l'arme
nucléaire, contestée par les puissances détentrices. Mais l'urgence du développement
progressif du DIH en direction de cette anne est toujours pendante.
b - Au-delà de l'anne nucléaire, un autre défi, au développement du DIH, est
constitué par les armes nouvelles. Anticipant sur les innovations techniques des industries
de l'armement, le Protocole 1 de 1977 dispose en son article 36 : "dans l'étude, la mise au
point, l'acquisition ou l'adoption d'une nouvelle anne, de nouveaux moyens ou d'une
nouvelle méthode de guerre, une Haute Partie contractante a l'obligation de déternriner si
l'emploi en sera interdit, dans certaines circonstances ou en toutes circonstances, par les
dispositions du présent Protocole ou par toute autre règle du Droit international applicable
à cette Haute Partie contractante".
L'art. 36 appelle des observations. Cet article est la transposition de l'article 34
du projet de Protocole 1 proposé par le CICR, conçu en ces termes: "dans l'étude et le
développement de nouvelles armes ou méthodes de guerre, les Hautes Parties contractantes
s'assureront que leur emploi ne causera pas de maux superflus". Ce projet avait suscité
beaucoup de controverses. Selon le Pro BRETION, "la Ille Commission lui réserva un
accueil mitigé, certains délégués doutant du réalisme de cet article, vu le secret inhérent à
l'étude et à la conception d'armes nouvelles ; mais il y eut cependant une tendance très
nette, du côté des délégations scandinaves et socialistes, pour étendre la portée de cet
article, les délégations occidentales étant plus réservées"(586). Les critiques adressées au
futur article 36 portaient, outre sur le secret entourant les recherches expérimentales
d'armes, sur la difficulté d'instaurer un système de contrôle efficace (les plénipotentiaires

255
avaient refusé une proposition du Mexique tendant à la création d'un Comité sur
l'interdiction ou la limitation d'emploi de certaines annes conventionnelles). L'art. 36 vise
aussi bien les pays producteurs que les pays acheteurs qui ne disposent d'aucune possibilité
de pression sur les fournisseurs. L'art. 36 met l'Etat en face de ses responsabilités en lui
octroyant de facto un pouvoir d'auto-évaluation d'annes qui peuvent dépasser son niveau
technologique. Cet article trouve un fondement lointain dans le principe des maux
superflus.
Cependant, certains auteurs comme les Pr. COLIN ou MARTINEZ pensent que
les innovations technologiques en matière d'annement tendent à octroyer une grande
précision aux armes qui pourront ainsi n'atteindre que des objectifs militaires. D'autres
auteurs comme PICTET réfutent ces assertions, en tirant enseignement de l'accroissement
des souffrances engendrées par les annes nouvelles(587). Ainsi, malgré leur haut degré de
perfectionnement, les mines anti-personnel font plus de ravages dans la population civile
que parmi les combattants.
L'application de l'article 36 est difficile. Le CICR reconnaissait les obstacles
posés par la disposition : "Il y a à cela plusieurs raisons : tout d'abord, la plupart des
renseignements portant sur la recherche et la mise au point de nouvelles technologies en
matière d'annement sont couverts par la règle du secret absolu pour des raisons de sécurité.
Par conséquent, on ne dispose en général d'infonnation au sujet d'une nouvelle anne
qu'après son apparition sur le marché de l'annement ou lorsqu'elle se trouve à un stade
avancé de sa mise au point"(588). Néanmoins, ces difficultés doivent conduire à un
renforcement du contrôle des annements. Certaines annes de technologie de pointe comme
(586) BRETTON (ph.), Le problème des méthodes et des moyens de combat..., op. cit., p. 61.
(587) Cf CICR, Rapport sur la protection des victimes de la guerre. Conférence internationale sur
la protection des victimes de la guerre, Genève, juin 1993, SS p.
(588) Cf CICR, Doc. C.I/6.3.2/1, XXVIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du
Croissant Rouge (Budapest, novembre-décembre 1991), 40 p. (ici p. 4).

256
les lasers de combat pourraient être contrôlées en raison de leur coût exorbitant et du
nombre restreint de leurs acheteurs potentiels.
Mais une autre inquiétude, à ce niveau, est représentée par"la recherche actuelle
orientée vers les armes à laser portatives à des fins anti-capteurs et antipersonnel(589). Le
IVe Protocole de 1995 n'interdit pas les armes à laser non aveuglantes.
Nonobstant l'interdiction d'annes cruelles, les industries d'armement en France,
Suisse, Italie, Suède, Chine, Singapour, Afrique du Sud, Allemagne, Iran, Irak, Pakistan,
Inde, Russie, Corée, Egypte, etc., n'ont jamais été aussi florissantes, alimentant des foyers
de tension partout dans le monde et en particulier en Afrique.
Aujourd'hui, l'effort de réflexion sur les annes nouvelles est towné vers les
armes légères (LIGHT WEAPONS) et les annes de petit calibre portatives ou
transportables par véhicule léger (SMALL ARMS). Ces types d'armes individuelles
prolif'erent en Afrique. En effet, en 1996, le Chef de la Mission consultative du Secrétaire
Général de l'ONU sur le contrôle et la collecte d'armes légères dans la sous-région saharo-
sahélienne (Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tchad), Mr.
William ETEKI-MBOUMOUA, constatait qu"'En Afrique de l'Ouest en particulier, et en
Afrique en général, les frontières des Etats sont "poreuses" et les armes "fùtrent1' en
conséquence à travers ces frontières avec une très grande facilité"(590). Cette prolifération
d'armes légères hypothèque fortement le développement des pays africains en accroissant
l'appauvrissement du continent.
(589) Cf Doc. CICR 6.3.2/1, op. cit., p. 7.
(590) ETEKI-:MBOUMOUA (W.), Désarmement, développement et prévention des conflits en
Afrique, in Lettre de l'UNIDIR, N° 32196, p. 83. Cf La Déclaration de moratoire sur l'importation,
l'exportation et la fabrication des armes légères en Afrique de l'Ouest, adoptée par la 22e session
de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de la CEDEAO, Abuja, 30-31 octobre 1998,

257
Sm le plan conventionnel, aucune réglementation ne vise expressément les
armes légères ou de petit calibre. En 1980, la Conférence des Nations Unies sur les armes
classiques a achoppé sur ce type d'armement. Seule une résolution sur les annes de petit
calibre enjoint aux gouvernements de "faire preuve de la plus grande prudence dans la
mise au point de systèmes d'armes dans ce domaine de façon à éviter une inutile
intensification des effets traumatiques desdits systèmes"(591) et les invite à poursuivre la
réflexion sur ces types d'armes.
Il est indéniable que ces armes engendrent les souffrances les plus vives du fait
qu'elles utilisent des balles qui éclatent ou se défonnent en pénétrant dans le corps humain,
des balles à effet de bascule ou à ondes de choc causant un grand transfert d'énergie.
Le développement progressif du DIH en direction des armes nouvelles est un
défi considérable. li doit aller de concert avec une volonté affinnée des Etats d'endiguer le
commerce
des
annes,
de
contrôler
le
flux
des
armements.
Il
faut
réitérer
conventionnellement l'interdiction de causer des maux superflus(592) ou restreindre
certains emplois militaires d'une énergie donnée, prohiber la cruauté extrême induite par
l'emploi d'armes telles que les mines bondissantes, les engins à explosifs gazeux ou les
armes à faisceau d'énergie dirigée.
in RADIC N° 11, 1999, pp. 190-192 ; ZAKANE (V), Contrôle du commerce des armes et
maintien de la paix en Afrique, ASICL. Proc.lO (1998), op. cit., pp. 309-319.
(591) Point 6 de la Résolution, cf SANDOZ (Y), Interdiction ou Restriction d'utiliser certaines
armes classiques..., op. cit., p. 15.
(592) Le principe de l'interdiction des maux superflus a été réaffinné par les résolutions de
l'AGNU 2444 (XXIII) du 19 décembre 1968 ; 2675 (XXV) du 9 décembre 1970 et la résolution de
l'Institut de Droit international du 9 septembre 1969 à sa Session de Bâle. Cf. BAXTER (RR), op.
cit., pp. 148-152. A ce propos, la Suisse a proposé un projet de Ve protocole, en août 1994, lors de
la 3e session du groupe d'experts, qui porterait sur ces armes et réactualiserait l'interdiction des
balles DUM-DUM depuis 1899 ; cf. PROKOSCH (E.), Le projet suisse de protocole relatif aux
armes et munitions de petit calibre, in RICR N° 814, juillet-août 1995, pp. 454-471. Selon l'auteur,
ce projet interdirait "l'emploi de telles armes et munitions qui, à une distance de tir de 25 mètres ou

258
Il appartient aux Etats d'intérioriser la nécessité du développement du DIH à ces
armes cruelles et inhmnaines. Faute d'une telle réglementation, l'application du DIH sera
sans cesse différée par les Etats qui se jouent des lacunes conventionnelles. A cet égard, un
cinquième protocole à la Convention de 1980 pourrait porter sur les annes légères et les
armes de petit calibre, à moins que les Etats ne s'accordent sur une interprétation extensive
des articles 35 et 36 du Protocole 1 de 1977 de façon à couvrir ces types d'armes.
Le juridisme étroit du DIH à travers l'obsolescence de ses SUMMA DIVISIO et
son inadaptation aux méthodes et moyens de combat nouveaux, doit être surmonté. Cette
opération doit être complétée par une relecture des Conventions africaines de Dili.
SECTION II - Revitaliser les Conventions de l'O.U.A.
Depuis sa création, l'OUA s'est résolument attaquée aux problèmes qw
menaçaient la cohésion de ses Etats membres et qui faisaient craindre une rupture de la
paix à l'échelle continentale. En effet, les Etats africains sont confrontés à des difficultés
liées à la maîtrise de mouvements de population, à la lutte contre le mercenariat
(Paragraphe 1) et à l'épineux problème de la protection des femmes et des enfants dans les
conflits armés (paragraphe II).
En s'attachant à la résolution de ces problèmes, l'Afrique a adopté des
conventions jugées très révolutionnaires pour l'époque parce qu'octroyant une protection
humanitaire plus généreuse que des conventions de l'ONU de même nature.
Aujourd'hui, cette avancée des conventions de l'OUA est fortement ralentie par
les obstacles liés aux enjeux géostratégiques des conflits armés africains. Ces écueils,
plus, libèrent une énergie supérieure à 20 joules par centimètre dans les 15 premiers centimètres de
leur trajectoire dans le corps humain" (p. 454). Ce projet est resté en l'état.

259
imprévisibles à l'époque de l'adoption de ces traités, expliquent le large décalage entre les
tennes conventionnels et la pratique des Etats.
Dès lors, il faut insuffler un regain de vigueur à la lettre et à l'esprit de ces
conventions pour en dégager une lecture nouvelle s'adaptant au contexte de l'après-guerre
froide et aux conflits de type nouveau.
Paragraphe 1 - Pour une protection renforcée des réfugiés et des
déplacés et la répression du mercenariat
En dépit de l'adoption des Conventions de 1969 et de 1977, l'Afrique offre
encore le spectacle d'un continent déchiré par des conflits armés sanglants, très souvent
attisés par l'intervention de mercenaires, et avec ses suites tragiques de réfugiés ou de
déplacés internes.
Devant la complexité croissante de ces situations, le DIH africain doit s'adapter
en renforçant la protection des réfugiés et déplacés internes (1) et la répression du
mercenariat (2).
1 - La protection des réfugiés et des déplacés internes
Depuis quelques décennies, le continent africain est confronté à des cnses
majeures avec pour résultante, les mouvements de population. Le spectacle de milliers
d'Africains, fuyant la sécheresse, la famine, les combats, franchissant les frontières, est
devenu banal. Une étude du H.C.R. révèle que: "les vastes mouvements de réfugiés et de
personnes contraintes à l'exil sont devenus une caractéristique du monde contemporain.
Jamais encore dans l'histoire récente, des foules aussi nombreuses, dans autant d'endroits
du globe, n'avaient été obligées de quitter leur pays ou leur communauté pour chercher

260
refuge ailleurs. Jamais encore le problème du dépiacement massif de populations n'avait
tant préoccupé les Nations Unies et ses Etats membres"(593).
L'Afrique abrite la plus importante, sinon la plus anCIenne population de
réfugiés du monde sans compter le nombre impressionnant de personnes déplacées à
l'intérieur de leur propre pays. Dans le passé, on avait tendance à considérer le droit des
réfugiés comme une branche à part, compartiment des Droits de l'Homme. Mais c'est
oublier l'unité fondamentale du droit dans ses objectifs et ses principes généraux.
Aujourd'hui, il faut envisager le phénomène des réfugiés dans son ensemble,
c'est-à-dire en identifiant ses causes(594), la solution tout en incluant la prévention. Le
droit des réfugiés est indissociable des Droits de l'Homme et du DIH. A cet effet, l'article
14 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948 dispose:
"Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile
en d'autres pays".
Très tôt, l'ONU a été confrontée à ce problème. La Convention de Genève du
28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, donne une défmition(595) limitée aux
(593) nc.R. :Les réfugiés dans le monde. En quête de solutions, Ed. La Découverte, Paris, 1995,
p. Il ; cf également MILANDOU (J.), Les difficultés de l'OUA face au règlement des conflits en
Afrique et la protection des personnes déplacées, in Actes du 6e Congrès annuel de la SADIC
(kampala, 5-8 sept. 1994) - ASICL. PROC.6 (1994), pp. 16-20.
(594) Cf OWONA (J.), Droit international humanitaire..., op. cit., p. 390. Pour l'auteur, les causes
sont multiples: "Il y a d'abord les conflits entre Etats afiicains (type Angola/Zaire). Il y a les crises
internes des Etats (Tchad avec deux cent soixante-six mille réfugiés au Cameroun, Burundi où cent
cinquante mille réfugiés ont fui les affrontements de 1972) et la répression organisée contre les
opposants internes. Il y a également eu les crises de décolonisation résultant des guerres de
libération en Angola, en Guinée-Bissau, au Sahara espagnol qui ont eu une répercussion sur les
territoires avoisinants de l'Afrique francophone".
(595) Recueil de traités et autres textes de Droit international concernant les réfugiés, RCR,
Genève, 1982, pp. 11-32. La Convention de 1951 définit le réfugié, en son article 1, A.2, comme la
personne qui "craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa
nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses origines politiques, se trouve
hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer

261
personnes devenues réfugiées par suite d'événements majeurs survenus avant le 1er janvier
1951.
A l'inverse, le Protocole de New-York du 31 janvier 1967 relatif au statut des
réfugiés, élargit la définition précédente, quelle que soit la date à laquelle les personnes
visées ont été contraintes de quitter leur pays ou leur lieu de résidence(596).
Cependan~ il reviendra à l'Afrique (continent qui connaît les plus grands
exodes : Come de l'Afrique, Région des Grands Lacs, Afrique de l'Ouest) de fournir la
définition la plus achevée. L'article 1er, alinéa 2, de la Convention de l'OUA régissant les
aspects proPres aux problèmes des réfugiés en Afrique, adoptée à Addis-Abeba le 10
septembre 1969, précise: "Le terme "réfugié" s'applique également à toute personne qui,
du fait d'une agression, d'une occupation extérieure, d'une domination étrangère ou
d'événements troublant gravement l'ordre public dans une partie ou dans la totalité de son
pays d'origine ou du pays dont elle a la nationalité, est obligée de quitter sa résidence
habituelle pour chercher refuge dans un autre endroit à l'extérieur de son pays d'origine ou
du pays dont elle a la nationalité"(597).
L'Assemblée Générale de l'ONU a entériné cette définition(598) qw sera
reprise par le Comité exécutif du Haut Commissariat pour les Réfugiés dans ses
conclusions de 1981 sur le problème de la protection en cas d'affiux massif de personnes
de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans
lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite
crainte, ne veut y retourner" ; Cf. également au Sénégal, Décret n° 72-995 du 26 juillet 1972
ordonnant la publication de la Convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28
juillet 1951 (JO.R.S. nO 4246 du 2 septembre 1972, pp. 1434-1440.
(596) Art. 1er § 2 du Protocole de 1967, in Recueil de traités..., op. cit., pp. 42-46 ; Cf. loi n° 69-13
du 12 février 1%9 autorisant le Président de la République du Sénégal à ratifier le Protocole relatif
au statut des réfugiés du 31 janvier 1967, signé à New-York le 29 septembre 1967, JO.R.S. nO
4018 du 15 mars 1969, p. 320.
(597) Texte reproduit dans le Recueil des traités., " op. cit., pp. 227-240.
(598) Res. 34/61 A.G.N.V. du 29 novembre 1979.

262
en.quête d'asile(599). On retrouve cette définition dans la Déclaration de Carthagène du 10
décembre 1984 sur les réfugiés(600).
Plus de 90% de réfugiés africains fuient des pays pauvres pour des pays voisins
plus pauvres. Certains ont été chassés par des conflits de tout geme. Les pays d'origine et
d'accueil sont l'Angola, le Botswana, le Burkina Faso, le Burundi, la R.C.A., le Congo-
Brazzaville, la Côte d'Ivoire, la R.D.C., Djibouti, l'Ethiopie, la Gambie, le Ghana, la
Guinée, la Guinée-Bissau, le Kenya, le Liberia, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le
Nigeria, le Rwanda, le Sénégal, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan, le Swaziland, la
Tanzanie, le Togo, l'Ouganda, la Zambie et le Zimbabwe, etc.(601). Aucun pays du
continent n'est épargné. Les jeux stratégiques auxquels se livrent les puissances
occidentales ont des répercussions sur la paix et la sécurité en Afrique. Or, nul n'ignore la
relation étroite entre l'absence de développement économique et social, le non respect des
Droits de l'Homme et l'apparition de nouvelles situations de réfugiés.
La cause directe d'un exode est souvent un danger imminent qui menace la vie
et la sécurité, engendrant l'intolérance, le racisme et la xénophobie.
Dès lors, il est inévitable que la connexion se fasse entre les aspects de paix, de
sécurité et de recherche de bien-être que seule une réponse globale pourrait satisfaire dans
le cadre d'une coopération multilatérale(602).
Les mouvements massifs de populations ont une incidence sur la paix(603).
Ces flux de réfugiés et de déplacés sont générés par les conflits annés. De même, on
(599) HCR, Doc. N° 22 (XXXll) HCR/IP/ENG/REV1989.
(600) Déclaration adoptée par le Colloque sur la protection internationale des réfugiés en
Amérique Centrale, au Mexique et au Panama: problèmes juridiques et humanitaires, Carthagène
(Colombie), 19-22 novembre 1984.
(601) Cf DJIENA-WEMBOU (M.c.), L'OUA à l'aube du XXIe siècle..., op. cit., p. 216.
(602) Cf Res. 2625 (XXV) de l'AG.N.U. du 24 octobre 1970 portant déclaration relative aux
principes du Droit international touchant les relations amicales..., supra, Introduction.

263
constate une instrumentalisation des réfugiés dans les conflits(604). Souvent ces
déplacements massifs sont utilisés à dessein par les parties belligérantes pour créer des
situations conflictuelles : purification ethnique, violations systématiques des Droits de
l'Homme et autres formes d'intimidation physique et mentale, état de dévastation des
infrastructures économiques, politique de la terre brûlée, etc. Ces flux massifs et inattendus
provoquent de plus en plus de difficultés en matière de sécurité pour le pays d'accueil. n
arrive fréquemment que des annes soient introduites dans les camps de réfugiés. Des
réfugiés peuvent soutenir activement des groupes de rebelles ou des mouvements
d'opposition à l'intérieur de leur pays, ce qui crée Wl climat d'insécurité.
On a pu noter également en Afrique, les frictions et tensions entre les nouveaux
arrivants (réfugiés ou déplacés) et la population résidente. Des dommages durables à
l'environnement et à l'infrastructure des pays d'accueil peuvent être involontairement créés
par l'occupation de vastes étendues, l'utilisation de bois, de puits ou de systèmes de
distribution d'eau.
De même, ces mouvements peuvent rentrer dans les stratégies de certains Etats
qui utilisent les flux et reflux de personnes pour déstabiliser les pays voisins. Par ailleurs, à
côté d'authentiques réfugiés, il faut déplorer la présence de criminels manipulateurs qui se
servent de la population réfugiée comme d'un rempart ou d'Wl otage humain. A cette fm,
l'article 2 al. 6 de la Convention de 1969 insiste sur la nécessité d'éloigner les camps de la
(603) Cf aC.R Les Réfugiés dans le monde. Les personnes déplacées: l'urgence humanitaire,
Ed. La Découverte, Paris, 1997, 295 p. ; ac.R Les Réfugiés dans le monde (l'enjeu de la
protection), Ed. La Découverte, Paris, 1993, 191 p. ; GOODWIN-GILL (G.S.): The Refugee, in
Intemationallaw, Clarendon Press, Oxford, Oxford University Press, 1983, 318 p.
(604) Cf REFUGIES N° 110 : La crise des Grands Lacs : chronique d'une tragédie, HCR,
Genève, Hiver 1997, 31 p. et INFO-CICR N° 6 ; Ziguinchor, le CICR au secours de 2800
personnes déplacées, CICR, Dakar, août 1995 ; on trouve également une illustration du lien entre
accroissement des mouvements de population et conflits armés à travers l'exemple du conflit
casamançais qui a conduit à l'abandon de 231 villages, au déplacement de 5000 familles (soit
60000 personnes) et 20000 cas psychiatriques, Cf Sud Quotidien na 2063 du 18 février 2000, p. 2;

264
proximité des frontières : "Pour des raisons de sécurité, les pays d'asile installeront, dans la
mesure du possible, les réfugiés à une distance raisonnable de la frontière avec leur pays
d'origine". En 1997, le Sénégal a demandé au HCR de délocaliser les camps de réfugiés
casamançais trop proches de la frontière avec la Guinée-Bissau, soupçonnés d'abriter les
rebelles du M.F.D.C. L'éloignement des camps des frontières a été également préconisé
par la déclaration des Etats membres du Comité exécutif du HCR de 1985.
A ce propos, les Etats d'asile et tous les Etats intéressés doivent s'abstenir de
fomenter des troubles et d'encourager la résistance armée depuis les camps, car "l'octroi du
droit d'asile constitue un acte pacifique et humanitaire et ne peut être considéré par aucun
Etat comme un acte de nature inamicale" (art. 2, al. 2 Convention OUA). Les Chefs d'Etat
et de Gouvernement de l'OUA en 1969 ont mis particulièrement l'accent sur la sécurité et
ont traduit ce souci dans le préambule (§ 4). "...4. Désireux d'établir une distinction entre
un réfugié qui cherche à se faire une vie normale et paisible et une personne qui a fui son
pays à seule fm d'y fomenter la subversion à partir de l'extérieur... ".
Cela implique la prise de mesures visant à séparer la population civile des
éléments armés (art. 3 al. 2 Convention de 1969). Cette disposition s'inspire de celle de
l'article 4 de la Déclaration sur l'asile territorial de 1967 qui dispose : "Les Etats qui
accordent l'asile ne doivent pas permettre que les personnes auxquelles l'asile a été
accordé, se livrent à des activités contraires aux buts et principes des Nations Unies"(605).
Les mouvements de réfugiés et de déplacés peuvent déboucher sur des menaces
à la paix et à la sécurité, sur une saturation des capacités d'accueil de l'Etat-hôte s'ils ne
sont pas canalisés à bon escient pour éviter de faire de ces personnes des bouc émissaires
Cf aussi MUBIALA (M.), Les Nations Unies et la crise des réfugiés rwandais, RBDI 1996,2, pp.
493-516.
(605) Déclaration sur l'asile territorial, AG.N.D., Res. 2312 (XXII) du 14 novembre 1967, in
Droits de l'Homme, Recueil des Instruments internationaux, New-York/Genève, 1988, pp. 320-
322.

265
du chômage dans le pays d'accueil. On a pu expliquer ainsi les cas d'expulsions massives
de 200.000 réfugiés africains du Ghana en 1969, de 150.000 de Zambie en 1971, de 5.000
asiatiques d'Ouganda en 1972 et de deux millions d'Africains du Nigéria en 1983 et 1985,
de 5.000 Camerounais du Gabon en 1982 et de 10.000 Ghanéens de Côte d'Ivoire en 1985,
etc.(606).
Le parcours classique des réfugiés ou déplacés est parsemé d'embûches : fuite,
asile, refoulement ou rapatriement. La situation du réfugié génère une grande souffrance.
Déjà en 431 av. lC., le philosophe grec Euripide le constatait : "il n'existe pas de plus
grande douleur que la perte de sa terre natale".
Sur le plan juridique, l'éclatement des catégories traditionnelles est largement
consommé depuis l'émergence du phénomène de personnes déplacées à l'intérieur de leur
propre pays, à la suite de conflits internes ou de type nouveau.
Si le mandat du HCR est clairement défini concernant la protection et
l'assistance des réfugiés, dans les faits le HCR n'a pas de mandat conventionnel sur les
déplacés internes. Dans la réalité, le HCR a dû s'en occuper en étendant aux personnes
déplacées la couverture juridique des réfugiés. Mais le HCR n'intervient pas seul. Le CICR
et les organismes du système onusien ont une égale part dans l'assistance(607).
Aujourd'hui, le nombre des déplacés internes dépasse largement celui des
réfugiés. Cette nouvelle donne des mouvements des populations a poussé l'ONU à
redéfinir les critères régissant l'engagement du HCR auprès des personnes déplacées.
(606) RICCA (S.), Les migrations internationales africaines, Paris, L'Harmattan, 1989, 280 p. ;
GENDREAU (F.), La dimension démographique des conflits africains, in Afrique Contemporaine
nO 180, 1996, pp. 129-141.
(607) Cf PLATTNER
(D.), La protection des déplacés internes lors d'un conflit armé non
internationa~ RICR N° 798, novembre-décembre 1992, pp. 592-605; MAURICE (F.) et De

266
Désormais toute intervention de ce genre du HCR nécessite au préalable une requête
spécifique de rA.G.N.U. ou de l'ECOSOC, du Conseil de Sécurité ou du Secrétaire
Général et, concession faite à la souveraineté, le consentement de l'Etat concerné. Quant au
HCR, il s'est fixé comme condition d'intervention, l'accord de toutes les parties concernées,
l'appui de la communauté internationale le libre accès à la population affectée(60S). En
1992, l'ONU a créé le poste de représentant du Secrétaire Général des Nations Unies pour
les personnes déplacées à l'intérieur du territoire, confié au Dr. Francis M. DENG.
Le statut des personnes déplacées est absent de la Convention de 1951 mais
également de celle de l'OUA de 1969. II s'agit là d'une grande lacune qui laisse aux Etats
d'accueil des déplacés, l'entier pouvoir discrétionnaire de refuser l'intervention du HCR ou
de tout organisme pourvoyeur d'aide humanitaire. Cette situation fraie la voie à des
violations graves, à des arrestations et détentions arbitraires, au viol des femmes, à
l'enrôlement, la prise d'otages, l'esclavage ou le vagabondage des enfants(609).
Si le phénomène des réfugiés et des déplacés est souvent perçu par Wle
approche exclusivement conflictuelle, il n'en ressort pas moins qu'on peut inscrire ce
problème dans une dynamique de paix. Cet aspect est méconnu. L'expérience montre que
la présence de déplacés ou de réfugiés peut avoir Wle influence bénéfique dans le pays
d'accueil par l'attrait de l'assistance internationale, par l'apport de nouveaux savoir-faire,
par la stimulation de l'économie locale, par la vitalité intellectuelle et l'enrichissement de la
COURTEN (1.), L'action du CICR en faveur des réfugiés et des populations civiles déplacées, in
RICR N° 789, janvier-février 1991, pp. 9-22.
(60S) Cf. RCR Les personnes déplacées, in Réfugiés N° 103, L 1996, Genève, 30 p. (p. 5). Le
problème des personnes déplacées a fait l'objet de décisions et recommandations de l'ONU à
caractère non contraignant et qui pourraient être l'ébauche de futurs éléments statutaires et
normatifs. Cf. Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre
pays. Doc. ONU E/CN4/1998/53/Add. 2 du Il février 1998 ; Compilation et Analyse des Normes
juridiques protégeant les personnes déplacées, Doc. ONU E/CN4/1996/52/Add. 2 du 5 décembre
1995, inRICRN° 831, septembre 1998, pp. 585-597.

267
diversité culturelle. L'exemple de la nation américaine est souvent édifiant. On se plaît à
citer
des
hommes
comme
EINSTEIN,
Sigmood
FREUD,
Victor
HUGO,
SOLJENITSYNE, le Prophète MOHAMET, etc.. comme ayant connu les affres de l'exil
mais également comme ayant contribué au rayonnement de leur pays d'accueil.
La question des réfugiés dépasse le simple problème de la charité pour devenir
une question de politique internationale. L'ONU, dans le cadre de la sécurité collective,
peut jouer un rôle dans le processus de réconciliation et de rapatriement. Différentes
mesures peuvent être initiées pour démultiplier les chances de paix : négociations d'accords
de paix, démobilisation et démilitarisation des combattants, surveillance du respect des
Droits de l'Homme, relance de la reconstruction économique et sociale, etc.
Quant aux Etats, ils devront s'abstenir de créer ou de renforcer les facteurs
engendrant ces mouvements de réfugiés.
De ce point de vue, les Etats africains doivent initier des législations libérales
en matière de réfugiés et de déplacés. La création de commissions nationales constitue
donc un complément indispensable à la ratification des Conventions sur les réfugiés(610).
L'adoption d'un droit national des réfugiés devra englober la protection des déplacés
(609) Cf RCR, Les enfants réfugiés, Principes directeurs concernant la protection et l'assistance,
Genève 1984, 199 p. ; Cf BRAUMANN (R.), Le dilemme humanitaire, Paris, Ed. Textuel, 1996,
106p.
(610) La majorité des Etats africains ont adopté des lois instituant une commission pour les
réfugié: loi de 1967 complétée en 1974 et 1982 au Soudan; décret de juillet 1984 au Bénin;
ordonnance de 1976 créant une délégation générale pour les réfugiés au Gabon; loi nO 68-27 du 5
août 1968 portant statut des réfugiés modifiée par la loi nO 75-109 du 20 décembre 1975 (JORS nO
4468 du 22 janvier 1976, p. 102), décret nO 72-939 du 25 juillet 1972 relatif à la Commission des
réfugiés (JORS n° 4247 du 9 septembre 1972, p. 1463) et décret nO 76-014 du 9 janvier 1976
relatif à la Commission d'éligibilité au statut de réfugié (JORS nO 4470 du 31 janvier 1976, p. 155)
au Sénégal, etc. Au niveau de l'OUA, le Bureau pour le placement et l'éducation des réfugiés
africains (B.P.E.RA.) est l'outil de conception de la politique de l'organisation en matière de
réfugiés; cf OWONA (1.), op. cit., p. 391 et s. ; BAL (A), Du droit d'asile, in Revue EDJA N° 8,
décembre 1998, pp. 1-11 ; DEGNl-SEGUI (R), Le droit d'asile et les réfugiés, in Colloque de la
Société Française de Droit International, mai-juin 1996, Paris, Pédone, 1997.

268
internes. Cette lacune des Conventions de 1951 et 1969 peut être comblée soit par leur
élargissement aux personnes déplacées en adoptant un protocole additionnel à la
Convention de l'ONU ou de l'OUA, soit en créant une nouvelle institution différente du
HCR pour prendre en charge ce problème, soit en appelant les Etats à l'initiation d'une
législation appropriée couvrant les réfugiés et les déplacés internes.
La prévention reste également la forme de protection la plus efficace. Le
respect du principe de non refoulement (art. 33 de la Convention de 1951), le rapatriement
volontaire (art. 5 de la Convention de l'OUA de 1969) doivent contribuer à développer une
synergie de paix. Dans le cas où l'asile n'est plus possible, il faut respecter la lettre de la
Convention de 1969 qui consiste à la réinstallation dans un pays d'accueil ou, à défaut,
solliciter un pays tiers (art. 2 § 4 de la Convention de l'OUA).
Un aspect essentiel de la prévention est la mise en place d'un dispositif d'alerte
précoce pour identifier les causes des mouvements, les limites de l'intervention et préparer
l'action ultérieure par la coordination des organismes gouvernementaux, des ONG et la
mobilisation de la communauté internationale.
A l'instar de la Convention de l'OUA de 1969 sur les réfugiés, la Convention de
1977 sur le mercenariat devra être revisitée par rapport aux nouvelles formes de ce fléau.
2 - La répression du mercenariat
Le mercenariat fait partie des plus vieux métiers du monde(611). L'histoire
africaine retient l'exemple des mercenaires d'Abam OHAFIA et d'ABIRIBA employés
dans l'IBOLAND au 14e siècle, des soldats d'OYO utilisés en 1784 lors de l'attaque de
(611) TERClNET (l), Les mercenaires et le Droit international, in AF.D.I., Vol. 23, 1977, pp.
269-293.

269
BADAGRY par l'année du Danhomé, et des mercenarres touaregs des mvaslOns
marocaines, etc.(612).
La pratique perdit de son ampleur pendant la période coloniale. Après les
indépendances, elle resurgit, tel un fléau, pour menacer la stabilité des Etats africains.
Rares sont les Etats qui n'ont pas été concernés par le problème des mercenaires. Ces
derniers sont intervenus au Bénin (Raid sur Cotonou le 16 janvier 1977), au Congo-
Kinshasa (depuis 1960), au Tchad (Légion Islamique), au Sénégal (en Casamance), en
Guinée-Bissau, en Guinée (Invasion des troupes portugaises et de mercenaires), au
Zimbabwe (problème de la Rhodésie), au Mozambique (aux côtés de la RENAMO), en
Angola, en Mauritanie (avec le Polisario), aux Seychelles, au Togo, Ouganda, Nigeria,
Soudan, etc.
L'activité néfaste des mercenaires est liée étroitement à l'histoire de l'archipel
des Comores qui a particulièrement souffert des méfaits de ces soldats de fortune. Le
tristement célèbre Bob DENARD alias Gilbert BOURGEAUD alias Saïd Moustapha
MAHDJOU, ancien quartier-maître français, qui a opéré au Bé~ en Angola, au Nigeria
et au Congo, renversa le Président Ahmed ABDALLAH le 3 avril 1975 pour installer à la
place Ali SOILIH. Il mettra fin de son propre chef à l'aventure présidentielle de SOILIH
pour remettre en place ABDALLAH le 13 mai 1978. Le mercenaire français commit le 29
novembre 1989 un coup d'Etat qui coûtera la vie à Ahmed ABDALLAH. il intervint à
nouveau le 28 septembre 1995 pour déposer le Président Saïd Mohamed DJOHAR et
confier le pouvoir à un obscur capitaine du nom de Ayouba COMBO chef de la garde qu'il
avait contribuée à fOimer, avant de se rendre aux troupes françaises qui l'avaient assiégé à
MORONI, le 5 octobre 1995(613).
(612) Cf OWONA (l), Le droit international humanitaire..., op. cit., p. 392.
(613) Cf L'Annuaire Jeune Ailique 1994, pp. 132-133 ; le Nouvel Ailique-Asie N° 74, novembre
1995: DENARD, corsaire de l'empire perdu, par Francis LALOUPO, p. 23.

270
Loin de constituer un épiphénomène, le mercenariat représente la face obscure
des relations internationales africaines, et un danger pour l'intégrité des Etats africains.
Il suscita en réaction une prise de conscience commune de ces Etats pour
l'élimination de ce fléau, constituant un obstacle majeur à l'expression de leur souveraineté
et frayant la voie au néo-colonialisme, au racisme, à l'apartheid et à la violation du droit
des peuples à disposer d'eux-mêmes.
Sur le plan juridique, la situation créée par le mercenariat était sans précédent.
En effet, il faut reconnaître avec le Pro OWONA que : "le plus étonnant était que le droit
humanitaire ne s'était jamais intéressé à ce métier, l'un des plus vieux du monde pratiqué
depuis l'antiquité"(614). Nonobstant le mutisme des Conventions de Genève de 1949, le
Conseil de Sécurité de l'ONU prit, très tôt, des résolutions sur J'activité des mercenaires:
Résolutions 161 A du 21 février 1961 (sur l'évacuation des mercenaires du Congo), 169 du
24 novembre 1961 (opération RUMPUNCH de l'O.N.U.C.) et 199 du 30 décembre 1964.
Des Etats africains portèrent plainte devant le Conseil contre les mercenaires. Le Conseil
de Sécurité prit des résolutions pour condamner ces agressions : résolutions 266 du 14
octobre 1966 (plainte du Congo contre le Portugal), 237 ( révolte des mercenaires de
MOBUTU le 3 juillet 1967), 289 du 23 novembre 1970 (plainte de la Guinée contre le
Portugal), 405 du 14 avril 1977 (plainte du Bénin contre le Raid de mercenaires sur
Cotonou du 16 janvier 1977)(615), 507 de 1982 (agression contre les Seychelles, des
mercenaires de Mike HOARE, commanditée par l'Afrique du Sud le 26 novembre
1981)(616).
A diverses reprises, le Conseil de Sécurité fut confronté au problème du
mercenariat en Afrique lors de l'examen des "question congolaise, question des territoires
(614) Cf OWONA (1), op. cit., p. 388.
(615) Cf MALLEIN (1), La situation juridique des combattants dans les conflits armés non
internationaux, Thèse, Université de Grenoble, ORT, 1978, pp. 153-214.

271
administrés par le Portugal, de l'application de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance
aux pays et peuples coloniaux, de la Déclaration relative aux principes du Droit
international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats, des Droits de
l'Homme en période de conflits armés, de la définition de l'agression, de la politique
d'apartheid du gouvernement sud-africain, de la non intervention dans les affaires
intérieures d'un Etat"(617).
L'A.G.N.U. s'est aussi penchée sur la question du mercenariat. A la suite des
résolutions 2395 du 12 décembre 1968, 2465 du 20 décembre 1968, 2708 du 14 décembre
1970, elle a adopté la résolution 3103 (XXVIII) du 12 décembre 1973 intitulée "Principes
de base concernant le statut juridique des combattants qui luttent contre la domination
coloniale et étrangère et les régimes racistes", dont le paragraphe 5 dispose: "l'emploi de
mercenaires par les régimes coloniaux et racistes contre les mouvements de libération
nationale luttant pour leur libération et leur indépendance du joug du colonialisme et de la
domination étrangère, est considéré comme un acte criminel et les mercenaires doivent en
conséquence être punis comme criminels"(618).
La pratique du mercenariat, "véritable plaie aux relations interafricaines", selon
Mme TERCINET, fut aussi condamnée par plusieurs résolutions de l'OUA(619).
L'organisation panafricaine créa une Commission spéciale sur le mercenariat (Res. 12
novembre 1967). Son Conseil des ministres, par sa résolution du 12 décembre 1970
condamna "tous les mercenaires qui ont envahi la République de Guinée ainsi que toutes
les forces qui ont participé au plan pour cette agression"(620). Sa résolution CM/Res. 527
(XXVIII) de février 1977 fustige "l'agression armée contre la République Populaire du
(616) Cf L'Annuaire Jeune Afrique, 1994, pp. 225-226.
(617) TERCINET (1.), op. cit., pp. 270-271.
(618) BAXTER (RR), op. cit., p. 144 et s. ; cf NGUYEN (Q.D.) et alii, op. ch., p. 494.
(619) Résolutions du Conseil des ministres du 10 septembre 1964 et de la Conférence des Chefs
d'Etat et de gouvernement du 14 septembre 1967 appelant toutes les Nations à punir le mercenariat
comme un crime, etc.
(620) Afrique Contemporaine N° 53, 1971, p. 13.

272
Bénin et rejette toute ingérence qu'elle provienne d'un Etat africain ou d'une source extra-
continentale"(621). En 1970, à sa 7e session à Lagos, le Conseil des ministres décida, par
la résolution CM/RES. 17 (VII), de compléter la charte "par une convention relative à
l'interdiction de recruter, former, équiper des mercenaires aussi bien qu'à l'interdiction du
passage de tels mercenaires et de tout équipement qui leur est destiné dans tous les pays-
membres de l'OUA" (Paragraphe 9)(622).
La recrudescence du mercenariat entraîna en réaction une intensification de la
lutte contre le phénomène. Deux précédents célèbres, les procès de Luanda et de
Khartoum, marquent le début de la répression des excès perpétrés par les mercenaires.
Lors de ce qui est considéré par le Pr. OWONA comme "le Nuremberg des
mercenaires", ouvert le 13 juin 1976 à Luanda (Angola), treize mercenaires (américains,
britanniques et français), furent jugés dans un procès public, médiatisé par la présence de
nombreux journalistes étrangers. Capturés par le MPLA (devenu le gouvernement
d'Angola), ils furent condamnés sévèrement: quatre (dont deux convaincus de mercenariat
et deux d'avoir commis des crimes contre la paix) furent exécutés, et les neuf autres furent
punis d'une peine d'emprisonnement allant de seize à trente ans de réclusion criminelle. Ce
procès souleva beaucoup de controverses juridiques.
Selon un auteur, "juridiquement la charge décisive qui fut retenue contre deux
des accusés, n'existait pas. Le crime de mercenariat n'était pas alors un crime de Droit
international. Les résolutions de l'OUA condamnant le mercenariat en 1967 et 1971, que le
juge Teixeira DA SILVA invoqua dans son réquisitoire, ne pouvaient pas juridiquement se
substituer au droit des gens en vigueur pour les besoins de la cause"(623). Mr. Mac
DERMOT, Président de la Commission internationale des juristes, considérait que le
(621) DJIENA-WEMBOU (M.C.), L'OUA. .., op. cit., p. 79.
(622) DJIENA-WEMBOU, op. cit., pp. 86-89.
(623) MALLEIN (1.), La situation juridique..., op. cit., p. 220.

273
mercenariat n'était pas Wl cnme. Le Professeur SCHWARZENBERGER dénonçait
"l'assimilation des mercenaires aux pirates et leur mise hors la loi en Afrique"(624). Le
Département d'Etat américain prétendait "qu'il n'y avait aUCWle raison, du point de vue des
lois nationales ou du Droit international, de juger et de condamner les mercenaires et M.
Robert CESNER, l'avocat des Etats-Unis, réclama pour eux la protection intégrale des
Conventions de Genève de 1949 (articles 82 à 88) qui ne disaient rien d'explicite les
concemant"(625).
A Khartoum (Soudan), s'ouvrit le 1er août 1971, le procès d'un Chef de
mercenaires célèbre, Rolf STEINER, livré par l'Ouganda au Soudan pour son soutien
militaire actif aux rebelles Anyanyas du Sud-Soudan(626). Le Tribunal d'exception formé
d'officiers supérieurs le jugea devant un public composé de représentants de la presse
internationale. STEINER fut accusé de quatre chefs d'inculpation: entrée et séjour illégal
au Soudan, importation clandestine de matériel et exercice illégal de médecine ;
fomentation d'activités subversives pour le compte de puissances étrangères ; et
commandement de rébellion armée et atteinte à l'unité et à la sécurité du Soudan.
Condamné à mort, sa peine fut commuée à vingt ans de réclusion criminelle. Mais il fut
libéré le 30 mars 1974.
Ces procès renforcèrent la volonté des Etats africains de répression du
mercenariat et constituèrent Wl prélude à Wle conventionnalisation de la lutte contre ce
fléau. En juin 1972, Wl rapport du Comité d'experts de l'OUA proposa Wl projet de
Convention dite de RABAT dont l'article premier dispose : "la présente convention
caractérise comme mercenaire tout individu qui n'ayant pas la nationalité du pays contre
lequel ses actions sont dirigées, est employé, s'enrôle ou se lie volontairement à Wle
personne, à un groupe ou à \\IDe organisation... ". Cette convention ne vit pas le jour. Mais
(624) Cf OWONA (1.), op. cit., p. 388.
(625) OWONA (1.), idem., p. 388.
(626) Cf MALLEIN (1.), La situation juridique..., op. cit., pp. 218-219.

1
l1
, cl
274
elle sera reprise sous une autre fonne par la Commission internationale d'enquête, lors du
procès de Luanda (dont faisaient partie le Sénégalais Abdoulaye WADE, le Béninois R.
OOSSOU et le Congolais A. MOUELLE) qui préconisa l'adoption d'une convention sur la
prévention et la suppression du mercenariat.
Fruit de ces deux projets, la Convention de l'OUA sur l'élimination du
mercenariat en Afrique fut adoptée le 5 mai 1977 lors de sa 14e session à Libreville
(Gabon). Cette convention intervient avant l'adoption du Protocole 1 de 1977 dont l'art. 47,
!i
consacré aux mercenaires, leur refuse le statut de combattant et de prisonnier de
guerre(627). Par rapport au Protocole l, la Convention de l'OUA contient une définition
1
plus exhaustive en qualifiant le mercenaire de criminel. Son article 1er al. 1 définit le
j
!
mercenaire ainsi: "le terme de mercenaire s'entend de toute personne:
!
tj
1
i
a - qui est spécialement recrutée dans le pays ou à l'étranger pour
j
li;;
combattre dans un conflit armé ~
b - qui en fait prend une part directe aux hostilités ~
c - qui prend part aux hostilités en vue d'obtenir un avantage personnel
et à laquelle est effectivement promise, par une Partie au conflit ou
en son nom, une rémunération matérielle~
d - qui n'est ni ressortissant d'une Partie au conflit, ni résident du
territoire contrôlé par une Partie au conflit ~
e - qui n'est pas membre des forces armées d'une Partie au conflit~ et
(627) Cf supra, Titre I, Chapitre l, Section II, Paragraphe II.

275
f - qui n'a pas été envoyée par Wl Etat autre qU'Wle Partie au conflit en
mission officielle en tant que membre des forces armées dudit Etat".
La Convention élargit la définition à l'individu, groupe ou association,
représentant de l'Etat qui "dans le but d'opposer la violence armée à Wl processus
d'autodétermination, à la stabilité ou à l'intégrité territoriale d'un Etat, pratique l'un des
actes suivants :
a) abriter, organiser, financer, assister, équiper, entraîner, promouvoir,
soutenir ou employer de quelque façon que ce soit des bandes de
mercenarres ~
b) s'enrôler, s'engager ou tenter de s'engager dans lesdites bandes;
c) permettre que dans les territoires soumis à sa souveraineté ou dans
tout autre lieu sous son contrôle, se développent les activités
mentionnées dans l'alinéa a) ou accorder des facilités de transit,
transport ou autre opération des bandes sus-mentionnées" (art. 1 al.
2).
Le Protocole 1 de 1977 confrrrne le statut des mercenaires de l'art. 3 de la
Convention africaine qui dispose: "les mercenaires n'ont pas le statut de combattants et ne
peuvent bénéficier du statut de prisonnier de guerre". La Convention considère que le
commandement des mercenaires constitue une circonstance aggravante (art. 2). Elle met en
cause la responsabilité pénale individuelle du mercenaire (art. 4), et celle générale de l'Etat
et de ses représentants (art. 5). Elle exhorte les Etats à prendre "toutes les mesures
nécessaires pour éliminer du Continent africain les activités des mercenaires..." (art. 6). La
peine la plus sévère de la législation nationale punira cette infraction (art. 7 et 8).

276
La Convention de l'OUA ne dépouille pas le mercenaire de garanties judiciaires
reconnues à tout justiciable en vertu du principe du traitement national (art. Il). La
doctrine reconnaît l'application à l'individu-mercenaire des droits protecteurs de l'art. 3
commun aux quatre Conventions de Genève de 1949.
L'assistance mutuelle (art. 10), l'extradition (art. 9) doivent s'exercer dans un
esprit de coopération et dans le respect des principes des Chartes de l'ONU et de l'OUA.
L'ONU renforcera cette tendance répressive par la résolution 34/140 du 14
décembre 1979 de l'Assemblée Générale, où elle décide "d'envisager des mesures efficaces
pour interdire le recrutement, l'instruction, le rassemblement, le transit et l'utilisation des
mercenaires"(628).
Dix ans plus tard, l'ONU adoptera la Convention de New-York du 4 décembre
1989. Cette dernière est plus complète que celle de l'OUA puisqu'elle interdit le
recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires.
En effet, une des lacunes de la Convention de Libreville réside dans l'absence
de prohibition totale du recrutement des mercenaires. Cette lacune est comblée par la
Convention de l'ONU qui, en plus, étend l'interdiction du mercenariat au-delà du conflit
armé, à "tout acte concerté de violence" portant atteinte à l'ordre constitutionnel ou à
l'intégrité territoriale de l'Etat.
La Convention de 1977 s'adresse aux Etats et se situe exclusivement dans
l'hypothèse de conflit international par la réglementation des obligations de ses Etats-
membres. Elle semble exclure les hypothèses aujourd'hui banales d'emploi de mercenaires
dans les conflits internes. Elle ne prétend pas s'étendre aux conflits annés internes
(628) Citée par NGUYEN (Q.D.) et alii, op. cit., p. 894.

277
internationalisés, dans lesquels sévit un regain de dynamisme du mercenariat tels que le
coup d'Etat de Bob DENARD contre le Président DJOfiAR l'emploi dans les rangs des
FAZ de MOBUTU(629) et de l'AFDL de KABILA en 1997 de mercenaires, leur
utilisation dans la guerre civile congolaise par les camps de LISSOUBA et de
NGUESSO(630).
Dans les années 70, les bandes de mercenaires étaient aisément recensées :
"CLUB DES OIES SAUVAGES en Afrique du Sud du Colonel fou Michael HOARE,
SECURITY ADVISORY, Service britannique de Lee ASPIN, L'AFRO-AMERICAN
TECHNICAL ASSISTANCE de Lany MITCHELL. .. "(631).
Aujourd'hui, le mercenariat prospère grâce à des magazmes tels que
"SOLDIERS OF FORTUNE" ou des sites d'INTERNET, ce qui accentue la difficulté de
maîtrise du phénomène. Des agences de mercenaires se dissimulent derrière d'influentes
sociétés de sécurité : l'américaine MILITARY PROFESSIONAL RESSOURCES INe.,
l'israélienne LEVDAN, la sud-africaine EXECUTIVE OUTCOMES, les britanniques
SANDLINE INTERNATIONAL, SALADIN etJ. & S. FRANKLIN(632).
D'autres sociétés diversifient leur activité de mercenarre, en assurant la
protection de mines(633). Certaines comme EXECUTIVE OUTCOMES veillent sur les
(629) Les FAZ combattaient aux côtés de 280 mercenaires européens sous la direction du Belge
Christian TAVERNIER, cf Sud Quotidien N° 1143 du mardi 28 janvier 1997.
(630) Cf Jeune Afrique N° 1921 du 29 octobre au 4 novembre 1997, p. 63 : emploi de
mercenaires ukrainiens par les milices de LISSOUBA. Dossier Spécial Congo.
(631) Cf OWONA (J.), op. cit., p. 392.
(632) Cf Courrier International N° 389 du 16 au 22 avril 1998, p. 24 ; Sud Quotidien N° 807 du
mercredi 13 décembre 1995, p. 10 : le look du mercenariat par Franck KUWONU.
(633) Cf Jeune Afrique N° 1896 du 7 au 13 mai 1997, pp. 14-17: Les marchands de Sécurité, par
François SOUDAN.

278
intérêts de sociétés pétrolières en Angola (GULF-CHEVRON ou PETRANGOL), sur la
sécurité des mines diamantiferes en Sierra-Léone(634).
Par ailleurs, les mercenaires comme Bob DENARD, Siegmund MUELLER
Enzo Generali DEULIN, Costas GEORGIUS, Jean SCHRAMME, Jhon BANKS, Hans
KRAEMER Rolf STEINER sont aujourd'hui relayés par la nouvelle génération des
mercenaires venus des pays de l'Europe de l'Est: croates, ukrainiens, tchétchènes(635). A
côté de mercenaires-"terroristes" de la LEGION ISLAMIQUE DE KHADAFI, on note la
présence d'Africains monnayant leurs armes dans les conflits internes(636).
La Convention africaine est tombée dans une sorte de léthargi~. Son application
est marginale. Seule une coopération renforcée et une répression plus grande par des lois
pénales pourraient enrayer le mercenariat en Afrique et dissuader les aventuriers en mal de
sensations fortes.
On constate une violation de la Convention à travers la dissimulation de la
présence des mercenaires sous l'appellation de CONSEILLERS militaires, d'Instructeurs
ou de chefs de sécurité. Ce mercenariat nouveau s'accompagne du développement
inquiétant de "mercenaires africains".
Les Conventions de l'OUA et de l'ONU mettent en exergue le caractère
d'extranéité de l'origine du mercenaire, gardant un mutisme sur ces Africains recrutés en
Ouganda, en Guinée-Bissau, au Rwanda, au Liberia pour combattre soit aux côtés des
rebelles soit dans les rangs des années gouvernementales.
(634) Cf Le Monde Diplomatique, octobre 1996, pp. 22-23 : Lucrative reconversion des
mercenaires sud-africains, par Laurence MAZURE.
(635) Cf. Courrier International N° 389 : Les combattants tchétchènes, des mercenaires très
convoités, p. 24.
(636) Jeune Afrique N° 1751 du 28 juillet au 3 août 1994, p. 16 et s. : Touaregs. Le combat des
hommes de nulle part par Francis KPATINDE.

279
A ce niveau, le durcissement des sanctions dans les codes pénaux nationaux
peut constituer une politique dissuasive dans la répression du "mercenariat interne". Les
Etats africains, tout en comblant les lacunes de la réglementation conventionnelle, doivent
s'attacher à renforcer la lutte contre le mercenariat par la volonté sincère d'appliquer ces
conventions et prendre toutes les mesures adéquates pour éviter l'emploi de mercenaires
sur le continent africain. Malgré la signature solennelle de la Convention de 1977 par la
majorité des Etats africains, il faut déplorer la non-adhésion ou l'absence de ratification de
celle-ci par trente et un (31) Etats membres de l'OUA: Algérie, Angola, Botswana,
Burundi, Cap-Vert, République Centrafricaine, Djibouti, Tch&L Comores, Côte d'Ivoire,
Guinée Equatoriale, Erythrée, Gabo~ Gambie, Guinée, Guinée-Bissau, Kenya, Libye,
Madagascar, Malawi, Mauritanie, Mozambique, RASD, Sao Tomé et principe, Sierra-
Léone, Somalie, Afrique du Sud, Swaziland, Ouganda.
Au renforcement des législations africaines par l'application des Conventions
de 1969 et de 1977, devront s'ajouter des mesures plus efficaces pour la protection des
femmes et des enfants africains.
Paragraphe II - Pour une protection efficace des femmes et des
enfants dans les conflits armés
Parties intégrantes de la population civile, les femmes et les enfants jouissent de
droits au titre de la protection générale en faveur des personnes civiles.
Toutefois, la spécificité de ces catégories vulnérables de la population civile a
été à l'origine de l'adoption par le DIH de règles spéciales en faveur des femmes (1) et des
enfants (2).

280
En dépit de l'existence de ces règles générales et spéciales, la violation
croissante de ces nomes dans les conflits amtés africains légitime un plaidoyer pour un
renforcement de cette protection.
1 - La protection des femmes
L'aménagement d'une protection du DIH au profit des femmes existe depuis
1929. Cependant, il faut reconnaître que l'implication des femmes dans les conflits annés
ne date pas de l'époque contemporaine. L'histoire moderne reconnaît leur participation
dans beaucoup de guerres et leur mobilisation sans précédent pour l'effort de guerre et le
travail dans les industries d'armement lors de la seconde guerre mondiale.
En Afrique, les exemples de reines-soldats de l'Egypte pharaonique et des
royaumes ASHANTI ou d'Angola, des Amazones du Danhomé, de Yacine Boubou du
royaume du Walo et d'Aline Sitoé DIATTA de Casamance, démontrent que l'activité
guerrière n'était pas toujours l'apanage exclusif des hommes. Mais pour la plupart des
peuples africains comme les Masaï, "la guerre étant une affaire d'hommes, les femmes, les
vieillards et les enfants ne participaient pas au combat"(637). Un culte protecteur
s'attachait à la sauvegarde de la femme, dont "l'idée maîtresse (...) est que la femme
représente "l'origine", "la source" de la vie. Si l'on tuait les femmes au cours des combats,
on ne tarderait pas à tarir le flot de la vie. Ce respect des femmes constitue la base du
respect de la vie"(638).
Les femmes sont tantôt victimes tantôt participantes au combat. Le DIH
contemporain tient compte de ces divers aspects en réglementant le statut des
(637) DIALLO (Y), Traditions africaines et droit humanitaire, II, CICR, Genève, 1978, p. 6.
(638) DIALLO (Y), ibid., p. 8.

281
femmes(639). Les femmes font partie des éléments les plus vulnérables de la population.
Elles figurent, en grande proportion, dans la catégorie non combattante mais payent un
lourd tribut dans les conflits armés. Selon une étude réalisée par le CICR, "pendant un
conflit armé ou des troubles intérieurs, la femme n'est pas épargnée. Elle endure les mêmes
souffrances que l'ensemble de la population civile : exécutions sommaires, torture,
internements arbitraires, déplacements forcés, prises d'otages, menaces et intimidations...
Elle subit aussi les effets directs ou indirects des hostilités, que ce soient les
bombardements, trop souvent indiscriminés, la famine ou les épidémies..."(640).
Au titre de la protection générale, la femme-personne civile bénéficie des
dispositions prévues à l'article 48 du Protocole 1 de 1977 : "En vue d'assurer le respect et la
protection de la population civile et des biens de caractère civil, les Parties au conflit
doivent en tout temps faire la distinction entre la population civile et les combattants ainsi
qu'entre les biens de caractère civil et les objectifs militaires et, par conséquent, ne diriger
leurs opérations que contre des objectifs militaires". Les règles concernant l'interdiction
des attaques contre la population civile et l'immunité des personnes et biens civils (art. 51
et 52 du Prot. 1) et les règles de protection contre les effets des hostilités s'appliquent
intégralement à la femme non combattante. Une résolution de l'AGNU abonde dans ce
sens, en déclarant :
"(...) 4 - Tous les efforts seront faits par les Etats engagés dans un conflit
armé, dans des opérations militaires sur des territoires étrangers ou dans des
opérations sur des territoires encore sous la domination coloniale, pour épargner
aux femmes et aux enfants les ravages de la guerre. Toutes les dispositions
(639) Cf. KRILL (F.), La protection de la femme dans le droit international humanitaire, in RICR,
novembre-décembre 1985, pp. 1-30.
(640) CICR, Edition Spéciale: Les femmes et la guerre, Genève, COMREX, août 1995, pp. 4-5.
Voir également l'étude suivante qui révèle toutes les difficultés auxquelles sont confrontées les
4500 femmes-soldats démobilisées après la guerre d'indépendance de l'Erythrée. Cf PEREZ-
VITORIA (S.), Les Femmes d'Erythrée ne désarment pas in Le Monde Diplomatique, janvier
1997, p. 10.

282
nécessaires seront prises pour assurer l'interdiction des mesures telles que les
persécutions, les tortures, les représailles, les traitements dégradants et les
violences, en particulier dans la population civile que constituent les femmes et les
enfants.
5 - Toutes les fonnes de répression et de traitement cruel et inhumain
appliquées aux femmes et aux enfants notamment l'emprisonnement, la torture, les
fusillades, les arrestations en masse, les châtiments collectifs, les destructions
d'habitations, les déplacements par la force, que commettent les belligérants
pendant les opérations militaires ou dans les territoires occupés, seront considérées
comme criminelles"(641).
La protection de la femme est assortie de garanties fondamentales valables en
cas de conflit international (art. 75 du Prot. 1) ou de conflit interne (art. 4 du Proto II). Cette
protection couvre le traitement humanitaire, la non-discrimination et l'inviolabilité de la
dignité humaine en toutes circonstances (art. 3 commun aux quatre Conventions de 1949).
Le DIH instaure une disposition égalitaire au profit des femmes, ainsi conçue : "Les
femmes bénéficient en tous cas d'un traitement aussi favorable que celui qui est accordé
aux hommes" (art. 14 de la Ille Convention de 1949).
Le principe d'une protection spécifique à la femme est prévu à l'article 27 al. 2
de la Ne Convention de 1949 : "la femme est spécialement protégée contre toute atteinte à
son honneur, et notamment contre le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à la
pudeur".
(641) Res. 3318 (XXIX) de l'AGNU du 14 décembre 1974, portant Déclaration sur la protection
des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflit anné, in Droits de l'Homme, Recueil
d'instruments internationaux, Nations Unies, GenèvelNew-York 1988, pp. 370-372.

283
Le
pnnclpe
de
non-discrimination
n'excluant
pas
de
traitement
préférentiel(642), une sollicitude spéciale justifie une protection supplémentaire des
femmes enceintes ou en couches et des mères d'enfants en bas âge (art. 50, IVe
Convention). Ainsi, l'internement des femmes (art. 75 § 5 du Protocole l, art. 85 § 4 de la
IVe Convention), l'examen de leur cas (art. 132 de la IVe Convention), la nourriture (art.
89, IVe Convention), les soins (art. 91) et la protection des femmes enceintes ou en
couches et des mères d'enfants en bas âge (art. 76 § 2, IVe Convention) obéissent à des
règles particulières.
Un surcroît de protection humanitaire s'ajoute aux dispositions précédentes.
L'art. 76 § 3 du Prot. 1 énonce que "dans toute la mesure du possible, les Parties au conflit
s'efforceront d'éviter que la peine de mort soit prononcée contre les femmes enceintes ou
les mères d'enfants en bas âge dépendant d'elles pour une infraction commise en relation
avec le conflit armé. Une condamnation à mort contre ces femmes pour une telle infraction
r ne sera pas exécutée". Cette protection s'étend aux situations de conflits armés non
internationaux (art. 6 § 4 du Prot. II).
Les femmes peuvent aussi être des personnes combattantes. Selon l'étude
précitée du CICR,
"certaines femmes participent activement aux hostilités,
soit
indirectement, dans les réseaux de renseignements ou de résistance, ou dans des usines,
soit directement en portant les armes. Si elles courent alors le risque d'être blessées,
détenues ou internées, voire tuées, elles n'en ont pas moins le droit d'être traitées avec
humanité, lorsqu'elles tombent au pouvoir de l'ennemi"(64J).
(642) Cf KRILL (F.), La protection des femmes..., op. cit., p. 6. L'auteur justifie ce traitement
spécial, en ces termes : "L'égalité pourrait facilement se muer en injustice, si elle était appliquée à
des situations inégales par nature, et sans tenir compte de circonstances fondées sur l'état de santé,
l'âge et le sexe des personnes protégées".
(643) Cf CICR, Edition Spéciale: Les femmes et la guerre..., op. cit., p. 5.

284
Les femmes-soldats ont droit à la même protection que les autres combattants.
Capturées, elles deviennent des prisonnières de guerre soumises aux dispositions de la Ille
Convention de Genève : égalité de traitement (art. 88), internement dans des locaux
séparés (art. 97 à 108), etc.
Malgré ces protections, la femme figure trop souvent au premier rang des
victimes des conflits annés. Selon Wle estimation du H.C.R. "sur 23 millions de réfugiés et
25 millions de personnes déplacées dans leur propre pays, près de 80% sont des femmes et
des enfants"(644). Les mauvais traitements et les violences sexuelles de la part des
guérilleros ou des soldats constituent souvent leur lot. Ainsi, la Fondation de France
rapporte que pendant le génocide rwandais de 1994, "toutes les femmes adultes et les
jeunes filles ayant passé l'âge de la puberté qui ont survécu aux massacres ont été
violées"(645). Or, ces abus et sévices sexuels sont rangés dans la catégorie des infractions
graves (art. 147, IVe Convention).
Les femmes sont le pilier de la famille. Elles sont directement concernées par le
sort de leurs époux ou enfants, qu'ils soient victimes ou combattants. Trop souvent, elles
sont sous la menace d'explosions de mines en travaillant dans les champs, en ramassant du
bois de chauffage ou en allant puiser de l'eau. Elles souffrent fréquemment de la
dépossession de leurs droits les plus élémentaires. TI en est ainsi des femmes somaliennes
réfugiées victimes des pratiques courantes de viol et d'enlèvement, dans les camps(646).
Des zones de protection spéciale peuvent être instaurées pour les personnes
civiles les plus vulnérables (art. 14, IVe Convention). Ainsi, un grand nombre de femmes
ont été regroupées en 1994 dans la "Zone humanitaire sûre" au Sud-Ouest du Rwanda
(644) Les femmes dans les situations de crise, in Croix Rouge Croissant Rouge N° 1, 1995,
Genève, p. 3.
(645) Cf MARSHALL (R), Réfugiées Féminin Pluriel, in Réfugiés N° lOO-II - 1995, RC.R,
Genève, pp. 3-9.
(646) Cf. Réfugiés, Afrique, in Réfugiés N° 96, II, 1996, Genève, RCR, p. 20.

285
grâce à l'opération TURQUOISE initiée par la France sous mandat du Conseil de
Sécurité(647).
Malgré la grande palette protectrice du DIH, les femmes constituent les
premières victimes des conflits armés. Un vide juridique est perceptible relativement à la
protection des femmes déplacées internes ou réfugiées. Aucune règle spéciale ne les vise
expressément ni au titre de la Convention de Genève de 1951 ou du Protocole de 1967, ni
au titre de la Convention de l'OUA de 1969. Or, le pourcentage énorme des femmes dans
la population réfugiée ou déplacée plaide largement en faveur de l'adoption de dispositions
spécifiques.
Certes, les Conventions de 1951, 1967 et 1969 traitent des réfugiés de façon
indifférenciée sans spécification d'âge ou de sexe, mais une protection spéciale en
complément de la protection générale fournirait un cadre juridique mieux adapté aux
conflits modernes. A l'instar de la lutte contre le mercenariat ou de la protection des
enfants par voie conventionnelle, une réglementation plus exhaustive devra couvrir les
différents aspects de la protection humanitaire en destination des femmes.
A ce propos, en 1989, des experts de la Commission Africaine des Droits de
l'Homme et des Peuples, Mme DUARTE et Mr. DANKWA ont été choisis par leurs pairs
pour réfléchir sur un projet de protocole facultatif, à la Charte de 1981, destiné à la
protection des femmes. Ce projet est encore en ébauche. Si le texte prenait forme, il
fournirait un complément nécessaire à la protection des femmes, composante essentielle de
la protection des Droits de l'Homme et des Peuples.
(647) Cf MINDUA (A), De la légalité de la zone de sécurité française au Rwanda, in RAD.I.C.,
Tome 6, 1994, pp. 643-652 ; MBADINGA (lM.), Considérations sur la légalité des interventions
militaires étrangères dans la crise du Rwanda (1990-1994), RADIC, mars 1998, Tome 10, N° 1,
pp. 1-30.

286
Les lacunes décelées dans la protection des femmes peuvent être retrouvées
dans certaines insuffisances de la protection des enfants.
2 - La protection des enfants
La protection de l'enfance remonte à la Déclaration sur les droits de l'Enfant
adoptée en 1924 par la S.D.N. sur l'initiative de deux O.N.G., britannique (SAVE THE
CHILDREN) et suédoise (RADA BARNENX648). Cette déclaration dite de Genève
prévoyait un traitement non discriminatoire des enfants, leur droit à la protection et à des
soins spéciaux.
En 1939, la Déclaration fut amendée dans le cadre de l'élaboration d'un projet
du CICR de convention pour la protection des enfants en cas de conflit armé. Mais ce
projet resta lettre morte avec le déclenchement des hostilités(649).
Après la deuxième guerre mondiale, les Conventions de Genève de 1949 vont
aménager une protection générale de l'enfant-personne civile ainsi qu'une protection
spéciale de l'enfant-soldat. Parallèlement à cette prise en charge par le DIB, l'ONU adopta
le 20 novembre 1959 une déclaration des droits de l'enfant approfondissant celle de 1924
par l'intégration de l'assistance sociale, de l'éducation et l'inculcation d'idéaux de paix et de
fratenùté.
En raison de leur caractère peu contraignant, ces textes produisirent peu
d'effets. Néanmoins, l'enfance prit une importance conventionnelle plus soutenue en 1966
avec les articles 23 et 24 du Pacte International sur les droits civils et politiques et l'article
(648) Cf. SINGER (S.), La protection des enfants dans les conflits armés, in R.I.C.R., mai-juin
1986, pp. 1-40.
(649) Cf. DUTLI (M.T.), Enfants-combattants prisonniers, in RICR N° 785, septembre--octobre
1990, pp. 456-470.

287
10 du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels. L'AGNU va
s'engager dans ce sens en adoptant la résolution 3318 de 1974 sur la protection des femmes
et des enfants en période d'urgence et de conflit anné(650).
Ces textes seront renforcés en 1977 par le Protocole 1 (art. 77 et 78) et le
Protocole II (art. 4 et 6) couvrant les conflits annés internationaux et non internationaux et
marquant \\Dl progrès considérable dans la protection de l'enfant.
Cette protection sera parachevée par la Convention de l'ONU du 20 novembre
1989, relative aux droits de l'enfant, dont l'article 38 opère la jonction entre les dispositions
du DIH et celles précédentes de l'Organisation universelle(651).
Une africanisation de cette protection se traduit par l'adoption de la Charte
Africaine des Droits et du Bien-être de l'Enfant(652). Ce traité fut précédé en 1979 d'une
déclaration à l'intitulé identique(653).
La Convention de l'OUA défInit l'enfant comme "tout être humain âgé de
moins de 18 ans" (art. 2). Cette disposition est plus restrictive que celle de l'article premier
de la Convention de l'ONU de 1989 qui précise: "Au sens de la présente Convention, un
enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est
atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable".
(650) Cf supra, note N° 641.
(651) Texte de la Convention, in Droits de l'homme en Droit international, Ed. du Conseil de
l'Europe, op. cit., pp. 124-151.
(652) Res. AH.G./Res. 197 (XXVI) de la 200 Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de
l'OUA, Addis-Abéba (3-7 juillet 1990) portant Charte africaine des Droits et du Bien-être de
l'Enfant, Doc. CAB/LEG/153/Rev.2. Voir supra note n° 485.
(653) Déclaration sur les droits et le bien-être de l'enfant africain, adoptée à la 100 session de
l'OUA, Monrovia (17-20 juillet 1979), Res. AH.G./ST.4 (XVI) ; cf DJIENA-WEMBOU (M.c.),
L'OUA .., op. cit., p. 121.

288
Réagissant à cette définition, les gouvernements de Djibouti et de la Mauritanie
se sont réservé le "droit de ne pas appliquer les articles de la Convention qui seraient
incompatibles avec la Charia islamique"(654). Cette réserve ne semble plus d'actualité
depuis que l'Organisation de la Conférence Islamique (O.C.I.) a demandé à ses membres
d'adhérer à cette Convention. Néanmoins, d'autres Etats en ont une conception large. Ains~
l'Argentine conçoit que : "le mot "enfant" doit s'entendre de tout être hwnain du moment
de la conception jusqu'à l'âge de dix-huit ans". La Chine, le Luxembourg et la France
considèrent que l'application de l'article 6 sur le droit inhérent à la vie ne doit pas interférer
avec les politiques de planification familiale. Quant au Royaume Uni de Grande-Bretagne
et d'Irlande du Nord, elle déclare que "la Convention n'est applicable qu'en cas de
naissance vivante"(655).
Malgré ces réserves et déclarations interprétatives, la Convention sur les droits
de l'enfant jouit d'une adhésion quasi-universelle(656).
Les définitions de l'enfant, énoncées ci-dessus, souffrent d'une grande
imprécision. Elles introduisent une variabilité dans la détermination du terme "enfant" en
voulant tenir compte de tous les systèmes juridiques nationaux. Ceci peut prêter à
confusion puisqu'on assimile l"'enfant" au "mineur". Or, le terme "mineur" englobe l'enfant
et l'adolescent. Cette variabilité se traduit par l'indéternrination de l'âge de la majorité. En
effet, cet âge varie du fait qu'il "correspond à des critères sociaux, religieux, culturels ou
juridiques par lesquels une société reconnaît le passage à l'âge adulte, et il n'existe pas
(654) Cf UNICEF: Le progrès des Nations, 1995, New-York/Genève 1995, 48 p. (ici p. 31).
Djibouti a fait cette déclaration lors du dépôt de ses instruments de ratification en date du 6
décembre 1990 et la Mauritanie a émis cette réserve lors de la signature le 26 janvier 1990 ; cf
SCIDNOLER(D.) & TOMAN (1.), Droit des conflits armés, op. cit., pp. 1025-1029.
(655) Cf UNICEF, ibid., p. 32.
(656) Au mois d'avril 1994, 166 Etats étaient parties à la Convention, cf R.e.R., Les enfants
réfugiés, Principes directeurs concernant la protection et l'assistance, Genève 1994, p. 19.

289
nécessairement de corrélation entre les différents critères détenninant ce demier"(657). A
titre illustratif, le judaïsme peut considérer l'enfant comme adulte dès l'âge de treize ans et
accepter sa participation aux rituels religieux. Pour l'Islam, la majorité est liée à la puberté,
sans préjuger des différences notables entre les commWlautés culturelles. Pour les sociétés
animistes africaines, le passage à l'âge adulte est lié à des cérémonies d'initiation telles que
la circoncision ou l'excision.
L'âge de la majorité peut différer de l'âge militaire qui est "l'âge auquel un
individu peut être appelé à remplir ses obligations militaires (conscription) et/ou l'âge -
habituellement un an ou deux auparavant- auquel il peut se porter volontaire pour le
service, avec ou sans consentement parental. Dans le contexte national, cette expression
s'applique également à la période durant laquelle le citoyen est astreint aux obligations
militaires (par exemple, entre dix-sept et trente ans)"(65S). Dans certains pays, il peut être
inférieur à celui de la majorité comme en Mauritanie (16 ans), en Afrique du Sud (16 à 17
ans) et Namibie (16 ans). Dans d'autres Etats, l'âge de la majorité (très souvent 18 ans) ne
coïncide pas avec l'âge militaire qui lui est supérieur comme au Sénégal, au Botswana, en
Côte d'Ivoire, au Gabon, en Gambie et au Malawi(659).
Les Conventions sur les droits de l'enfant de 1989 et 1990 souffrent
d'imprécisions que le DIH n'arrive pas à résoudre. A plusieurs reprises, le DIH mentionne
l'âge de 15 ans comme âge limite ou âge de discernement "au-dessous duquel l'enfant doit
jouir d'une protection spéciale. TI est généralement admis qu'au-dessus de quinze ans, le
~
i. développement des facultés de l'enfant ~ teUeS que des mesures spéciales ne s'imposent
pas systématiquement avec la même nécessité"(660). Or, en Afrique, les enfants de 15 ans
(657) COHN (1.) et GOODWIN-GILL (G.), Enfants-soldats. Le rôle des enfants dans les conflits
armés. Une étude pour l'Institut Hemy-Dunant, Genève, Coll. Droits et Libertés, Ed. Méridien,
Québec, 1995, p. 27.
(658) Cf COHJ~ (1.) et GOODWIN-GILL (G.), op. cit., p. 28.
(659) Cf CORN (1.) et GOODWIN-GILL (o.), ibid., p. 24.
(660) Cf DUTLI (MT.), op. cit., p. 458. L'auteur cite à l'appui de cet argument, le commentaire
des protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, éd. par

290
peuvent avoir la confonnation physique des adultes et être des combattants potentiels sans
acquérir toute la maturité émotionnelle et le jugement des adultes. Le DIH ne tient pas
compte de ces probabilités, puisque l'article 77 du Protocole 1(661) et l'article 4 du
Protocole 11(662) n'empêchent pas le recrutement et l'enrôlement d'enfants à partir de l'âge
de quinze ans.
Les Conventions de l'ONU et de l'OUA insistent sur les principes de l'intérêt
supérieur de l'enfant dans toute décision le concernant (art. 3 al. 1 de la Convention de
1989 et art. 4 al. 1 de la Charte de 1990), et de non-discrimination (art. 2 Convention 1989
et art. 3 Charte 1990).
Le nombre impressionnant d'enfants dans les conflits armés africains ne cesse
de susciter l'inquiétude de la communauté internationale(663). Une étude du CICR révèle
qu"'au cours des dix. dernières années, les conflits armés ont, selon les estimations, entraîné
la mort de 1,5 million d'enfants, et en ont chassé six fois plus de leur foyer"(664).
L'ampleur du phénomène a atteint de telles proportions qu'en 1993, sur recommandation
de l'Assemblée Générale, le Secrétaire Général de l'ONU désigna Mme Graça MACHEL
pour étudier l'impact des conflits armés sur les enfants. Son rapport, présenté en 1996,
Yves SANDOZ, Christophe SWINARSKI, Bruno ZIMMERMANN, CICR, Genève 1986, p. 924,
paragraphe 3179.
(661) L'article 77 alinéa 2 dispose: "Les Parties au conflit prendront toutes les mesures possibles
dans la pratique pour que les enfants de moins de quinze ans ne participent pas directement aux
hostilités, notamment en s'abstenant de les recruter dans leurs forces armées. Lorsqu'elles
incorporent des personnes de plus de quinze ans mais de moins de dix-huit ans, les Parties au
conflit s'efforceront de donner la priorité aux plus âgées".
(662) L'article 4 al. 3, lettre c dispose: "les enfants de moins de quinze ans ne devront pas être
recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilités".
(663) Cf. JEANNET (S.) et MERMET (l), L'implication des enfants dans les conflits armés, in
RICR NU 899, mars 1998, pp. 111-113 ; cf. Nations Unies, Secrétariat Général, l'enrôlement
d'enfants dans des forces armées gouvernementales et non gouvernementales. Doc. ONU
FJCN/Sub. 2/1992/35, 25 janvier 1992. L'UNICEF a produit le 15 juin 1999 une déclaration selon
laquelle 12.000 africains de moins de 18 ans participent à des conflits armés; citée par Afrique
Contemporaine N° 191, juillet-décembre 1999, p. 98.
(664) Cf. CICR, Les civils dans la guerre, op. cil., p. 8.

291
démontre que « les conflits annés compromettent le développement de l'enfant sur tous les
plans : physique, mental et émotionnel. Les effets dans chaclUl de ces domaines
s'accumulent et interagissent de sorte que pour être efficace, l'assistance doit être intégrée.
On ne saurait bien comprendre l'impact des conflits armés sans envisager les effets
collatéraux sur les femmes, les familles et les systèmes d'entraide communautaire qui
protègent les enfants et leur donnent la sécurité nécessaire à leur développement »(665).
La situation de l'enfance est particulièrement critique en Afrique. Une étude
sectorielle conjointe de l'OUA et de l'UNICEF estime qu"'un grand nombre des 150
guerres qui se seront déroulées dans le monde ont eu l'Afrique pour champ de bataille. Sur
les 20 millions de blessés, le nombre des enfants africains victimes pourrait atteindre 10
millions"(666). Quant au CICR il décrit l'effondrement des valeurs sociales caractérisé par
"l'anarchie, le glissement de la société vers la tolérance de tels comportements, par simple
négligence [ce qui] viole tous les principes que le Droit international prône depuis sa
naissance. En réalité, jamais les enfants n'ont été aussi mal protégés"(667).
De nombreuses violations des droits de l'enfant émaillent les conflits africains:
recrutements forcés d'enfants de moins de quinze ans, par le régime de Mengistu Hailé
MARIAM pour lutter contre les rebelles de l'EPLF et par le mouvement rebelle de l'APLS
au Soudan ou par le NPLF de Charles TAYLOR, au Libéria. En 1986, l'armée du NRA de
MUSEVENI comptait dans ses troupes 3.000 enfants de moins de seize ans dont 500 filles.
De son côté, la RENAMO recrutait des enfants pour lutter contre l'armée gouvernementale
mozambicaine(668).
(665) MACHEL (G.), Conséquences des conflits armés sur les enfants. Quelques points saillants,
Nations Unies/UNICEF, New-York, 1996, Doc. A151/306 et add. 1, p. Il.
(666) Cf L'avenir de l'Afrique : ses enfants, Etude sectorielle OUAIUNICEF, Conférence
internationale pour l'assistance des enfants en Afrique, Dakar, 25-27 novembre 1992, p. 201.
(667) CICR,Les enfants dans la guerre, Genève, juin 1995, p. 5 ; Cf P ANIZZO (E.), Les enfants
dans la guerre, le cas du Mozambique, in Afrique Contemporaine, Numéro Spécial, 4e trimestre
1996, pp. 142-159.
(668) COHN (1.) et GOODWIN-GILL (G.), op. cit., pp. 41-59.

292
Le recrutement (forcé ou volontaire) de ces enfants n'obéit pas à un schéma
unifonne. Mme MACHEL considère que "certains sont simplement appelés sous les
drapeaux, d'autres sont recrutés de force ou kidnappés et d'autres encore sont forcés à
rejoindre les rangs des groupes annés pour défendre leurs familles"(669). Ces combattants
très féroces parce que drogués ou ivres, endoctrinés et désespérés commettent les exactions
les plus horribles(670).
Une autre illustration des horreurs de la guerre est constituée par la situation des
enfants-réfugiés ou déplacés internes. En 1995, le CICR dénombrait quarante mille enfants
non accompagnés (entre 7 et 17 ans) au Rwanda(671). En 1996, l'UNICEF recensait vingt
mille enfants perdus de la guerre au Soudan et évaluait à 330.000 et 490.000 le nombre
d'enfants morts en Angola et au Mozambique entre 1980 et 1988 du fait des mines, des
soldats et de la famine(672).
Ces enfants sont constamment soumis à des violences sexuelles instituées en
annes de guerre dans un but d'humiliation de l'autre camp et de purification ethnique. La
situation des enfants détenus reste préoccupante. Ainsi au 9 décembre 1996, 1711 enfants
étaient emprisonnés dans les geôles rwandaises du fait du génocide. En Ouganda, ils
étaient 270 enfants (entre 6 et 15 ans) détenus du fait de la guerre civile(673).
(669) MACHEL (G.), op. cit., p. 28.
(670) CF. Croix-Rouge Croissant Rouge N° 3, 1995, La guerre sans règles par Urs KELlER, pp.
7-9 ; voir également Jeune Afrique N° 1846 du 22 au 28 mai 1996 : Liberia. Le chaos et la
barbarie, par Philippe GAILLARD, pp. 27-29.
(671) INFo-CICR N° 6, août 1995 : Les enfants perdus de la guerre, p. 2.
(672) UNICEF, La situation des enfants dans le monde, New-York/Genève 1996, p. 21.
(673) Cf. Trop tôt pour le crépuscule, trop tard pour l'aube. L'histoire des enfants pris dans les
conflits, in Chronique des Nations Unies NO 4, 1996, p. 15 ; Voir Rapport annuel UNICEF 1996,
p.29.

293
A ces drames, il faut ajouter l'émergence d'un phénomène nouveau constitué
par l'enlèvement, la prise d'otages d'enfants dans un but d'esclavage au Soudan(674) ou en
Ouganda(675).
En dépit des largesses de la réglementation conventionnelle en tant que
personne civile (IVe Convention de 1949) ou de combattant-prisonnier (Ille Convention de
1949 et Protocole 1 de 1977), accompagnées par les dispositions protectrices des
Conventions de l'ONU et de l'OUA(676), de nombreuses imperfections peuvent être
décelées dans la protection juridique de l'enfant en période de conflit anné.
Ces différents textes occultent le phénomène des enfants déplacés internes. Ce
vide juridique se double d'Wle absence de protection en cas de situations de troubles
intérieurs et de tensions internes. En principe, l'article 3 de 1949 prétend régir ces
situations. Mais l'inapplication de cet article contenu dans Wle convention destinée a priori
à la guerre entre Etats, engendre des lacunes, que certains auteurs comme MERON (avec
son projet de déclaration-type) ou GASSER (avec son projet de code de conduite) et
l'Institut des droits de l'Homme de Finlande(677), essaient de combler.
En outre, Wl groupe de travail de la Commission des Droits de l'Homme de
l'ONU a adopté en 1995 un projet de protocole facultatif à la Convention de 1989 qui
(674) Cf Jeune Afrique N° 1770, du 8 au 14 décembre 1994, p. 74.
(675) Cf H.C.R. Réfugiés N° Ill, p. 6 : enlèvement d'enfants dans un but sexuel, initiatique et
guerrier par la LRA de Joseph KONY ; Cf Nations Unies, Formes contemporaines de l'esclavage:
l'adoption d'enfants à des fins commerciales et l'enrôlement d'enfants dans des forces armées
gouvernementales et non gouvernementales. Doc. ONU E/CNA/Sub. 2/1990/43, 26 juin 1990.
(676) Ces dispositions protectrices sont diverses: interdiction de recrutement au-dessous de l'âge
de 15 ans (art. 22 Charte OUA et 38 Convention ONU), mesures pour la réadaptation physique et
psychologique (art. 39 Convention de 1989), protection des enfants-réfugiés (art. 22 de 1989 et 23
de 1990), protection contre la violence sexuelle (art. 34 de 1989 et 27 de 1990), mesures en faveur
d'enfants non accompagnés (art. 9 de 1989 et 25 de 1990) et d'enfants de mères emprisonnées (art.
37 de 1989 et 30 de 1990), etc.

294
bannirait le recrutement avant l'âge de dix-huit ans. Le CICR appuie ce projet et a préparé
en octobre 1997 un argumentaire à l'effet de soutenir l'interdiction du recrutement avant
dix-huit ans, et de la participation directe ou indirecte, volontaire ou forcée d'enfants dans
les conflits armés(678).
Ce projet, encore en discussion, devra pour une efficience accrue s'étendre aux
enfants réfugiés, déplacés internes, détenus ou internés, non accompagnés et même couvrir
leur situation en cas d'état d'exception (troubles et tensions internes).
L'Afrique devra s'engager dans ce combat. Un protocole additionnel
(obligatoire ou facultatif) à la Charte de 1990 pourrait renforcer la lutte contre ce fléau qui
gangrène la jeunesse du continent. Au-delà du dépassement du juridisme étroit du DIH
universel et la revitalisation du DIH régional africain, le développement progressif du droit
des conflits armés devra surmonter le défi de l'interpénétration de facteurs politiques et de
facteurs juridiques.
(677) Déclaration sur les règles humanitaires minimales, Institut des Droits de l'Homme, Abo
Akademi Turku/Abo, Finlande 1991. Citée par COHN (1.) et GOODWIN-GllL (G.), op. cit., p.
188.
(678) Cf. Argumentaire du CICR Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les
conflits armés, in R.1.c.R. N° 829, mars 1998, 80e année, pp. 113-132.

295
CHAPITRE
II -
POUR
UNE
DEPOLITISATION
DE
L'ACTION
HUMANITAIRE
La dernière décennie du vingtième siècle est marquée par l'existence de
nombreux conflits armés. La fin de la guerre froide et l'avènement d'un monde unipolaire
ont entraîné la dilution des conflits de type idéologique, opposant les grandes puissances
(Etats-Unis d'Amérique et ex-URSS).
Par conséquent, l'apaisement des sociétés
occidentales a transféré les conflits à la périphérie du système international (Afrique, Asie)
avec les conflits d'auto-détennination-sécession, conflits ethniques, etc. Parallèlement à
cette variation de la nature des conflits, un activisme humanitaire de bon ou de mauvais
aloi (selon les cas) s'est fait jour dans le but d'assister les populations devant le danger
résultant de ces conflits.
Sans prétendre endiguer les violations et exactions commises dans ces conflits,
l'action humanitaire s'est assignée pour but de soulager autant que possible les souffrances.
Elle se définit comme "toute opération de secours en we d'apporter de l'extérieur une
assistance (médicale, alimentaire et matérielle) à une population menacée dans sa survie.
Et ce, sans préjuger par qui elle est menée (ONG, services gouvernementaux, unités
militaires) ni dans quel contexte elle se situe (catastrophe naturelle ou conflit armé)"(679).
L'action humanitaire est souvent confondue avec des termes voisins tels que l'assistance
humanitaire (supposant l'accord de l'Etat), l'ingérence humanitaire (dénotant l'absence de
consentement de l'Etat) et l'initiative humanitaire (attribuée au CIeR et à l'Etat territorial).
La politique de l'action humanitaire, présupposée neutre, impartiale, sans
connotation politique, est confrontée à un dilemme: comment démêler les références et
(679) Cf Une certaine idée de l'homme: DIB et Droits de l'Homme, Document ACAT N° 54,
Paris, 1996, p. 64.

296
arguments juridiques des prrnClpaux protagonistes et des autres intervenants, les
motivations politiques cachées derrière le paravent humanitaire et la furie guerrière niant le
droit pour prôner une militarisation effrénée ?
C'est au nom d'un droit et/ou devoir d'ingérence que s'est forgée une ligne
doctrinale politisant fortement l'assistance humanitaire. Ce "droit" colportant des aspects
moraux et éthiques, est le fruit d'une bonne conscience des Etats occidentaux. n contient,
pourtant, de dangereuses implications. Dès lors, seu1e sa répudiation en tant que concept
juridique pourrait entraîner une dépolitisation de l'action humanitaire (Section 1).
En revanche, l'assistance humanitaire, consistant "à se porter au secours des
popu1ations civiles en détresse, dont le droit à la vie est gravement menacé, avec le
consentement préalable du ou des Etats concernés"(680), en se dépouillant de toutes les
scories non juridiques qui rendent sa perception malaisée, devra se fortifier au contact du
droit pour gagner en plus d'effectivité (Section II).
SECTION 1 - La répudiation du "droit d'ingérence humanitaire"
,(
Sur le plan .théorique, l'ingérence humanitaire consiste à .se porter au secours
des popu1ations civiles menacées dans leurs personnes et leurs biens du fait de catastrophes
naturelles ou du fait de l'homme, même sans consentement préalable de l'Etat territorial
concemé.~
Ce concept, élevé au rang de droit par une partie de la doctrine, se définit
comme : "les règles par lesquelles un tiers étranger peut porter assistance à une popu1ation
victime d'une catastrophe naturelle ou subissant les affres d'un conflit"(681). Cependant,
l'installation de cette notion au cœur du DIP n'est pas acquise. Ses fondements ne sont pas
(680) Cf une certaine idée de l'homme, op. cit., p. 64.

297
consolidés. La notion charrie des réminiscences de principes anciens dits d'intervention
d'humanité (Paragraphe 1) et semble légitimer les interventions militaires (Paragraphe II).
Paragraphe 1 - L'ingérence comme survivance des interventions
d'humanité
La notion d'ingérence humanitaire est liée à la prolifération des situations
conflictuelles(682). Elle est alimentée par la volonté de sauter l'obstacle de la souveraineté
étatique pour acheminer l'aide humanitaire vers les populations en détresse.
L'idée prit fonne lors d'une conférence intitulée "Droit et morale humanitaire",
tenue à Paris du 26 au 28 janvier 1987. Ses promoteurs, le médecin Bernard KOUCHNER
et le Professeur Mario BETTATI ont montré l'impuissance des ONG humanitaires face au
refus des Etats de les laisser accéder aux victimes des conflits armés et autres catastrophes
et leurs difficultés à travailler : "dans un ordre juridique international qui ne leur consent
aucune personnalité de droit et partant aucune protection"(683).
Ce "devoir d'ingérence" reçut une écoute attentive de la part des autorités
françaises. Déjà en 1981, le Président MITTERRAND, à Mexico, parlait "de délit de non
(681) Idem., p. 65.
(682) Cf. DUPUY (R.J.), L'action humanitaire in T.M.C. Asser Instituut. Humanitarian law of
Armed Conflict. Challenges Ahead, Martinus Nijhoff Publishers, DordrechtIBostonlLondon, 668
p. ; le Professeur DUPUY fait remarquer que: "le XXe siècle aura banalisé le tragique. Après
deux Guerres Mondiales, le foisonnement des communications amoncelle les nouvelles de
catastrophes naturelles naguère moins promptes à parvenir, celles des sinistres causés par des
technologies mal maîtrisées,le tout sur un fond de conflit armé, entremêlant les belligérances :
guerres interétatiques, civiles, transnationales, subnationales, culturelles, raciales, révolutionnaires,
de conquête ou de libération, idéologique ou religieuse. Autant de démentis à la formule de
GIRAUDOUX: "la paix est l'intervalle entre deux guerres" (p. 69).
(683) DUPUY (R.J.), op. cit., p. 71. Les Actes de cette conférence ont été publiés dans l'ouvrage
BETTATI (M.) et KOUCHNER (B.), Le devoir d'ingérence, Ed. Denoël, Paris, 1987,300 p.

298
assistance à un peuple en danger pour en déplorer l'inexistence juridique"(684). il en
appelait encore, le 5 octobre 1987, à combler cette lacune en ces tennes : "Parce qu'elle est
celle de chaque homme, la souffrance relève de l'Universel. Le droit des victimes à être
secourues dès lors qu'elles appellent au secours et secourues par des volontaires qui se
veulent professionnellement neutres, dans ce qu'on a appelé, il y a peu, "le devoir
d'ingérence" humanitaire dans les situations d'extrême urgence, tout cela, n'en doutons pas,
figurera un jour dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Tant il est vrai
qu'aucun Etat ne peut être tenu pour propriétaire des souffrances qu'il engendre ou qu'il
abrite"(685). Le Ministre des Affaires Etrangères, Roland DUMAS mettra la diplomatie
française au service de cette idée. Il affirmait: "le droit de l'humanité prime le droit des
Etats, qu'il devrait toujours inspirer ce dernier et que le devoir d'assistance humanitaire, de
plus en plus partie intégrante de la conscience universelle moderne, demande donc à
s'inscrire dans la législation internationale sous la fonne d'un droit d'ingérence
humanitaire"(686).
Ce "droit", selon KOUCHNER "se dessine au nom de l'indignation et de la
solidarité (et est) un droit nouveau de l'assistance à personne en danger, fondé sur une
morale de l'extrême urgence"(687). Ce "droit" aurait quelque relation avec les Droits de
l'Homme et de l'avis du diplomate français Jean-Marc ROCHEREAU De La SABLIERE,
trouve droit d'entrer dans les relations internationales puisque "les violations des Droits de
(684) TORRELLI (M.), De l'assistance à l'ingérence humanitaires? in RICR N° 795, mai-juin
1992, p. 239.
(685) Cité par TORRELLI, op. cit., p. 239 ; Sur l'ingérence, voir GUEYE (B.), "La
marginalisation de l'OUA dans le règlement des différends en Afrique" Revue Internationale de
droit africain, EDlA 1985, pp. 9-45.
(686) DUMAS (R), La France et le droit d'ingérence humanitaire, in Relations Internationales et
Stratégiques N° 3, 1991, p. 57 ; cf aussi CORTEN (O.), et KlEIN (p.), Droit d'ingérence ou
obligation de réaction non armée, RB.D.L, 1990, 2, pp. 368-440 ; SPIRY (E.), Interventions
humanitaires et interventions d'humanité: la pratique française face au Droit International,
R<JDUP,1998,pp.407-434.
(687) KOUCHNER (B.), La morale de l'extrême urgence in Le devoir d'ingérence..., op. cit., p.
272.

299
l'Homme deviennent d'intérêt international lorsqu'elles prennent de telles proportions,
atteignant la dimension de crime contre l'humanité"(688).
Cette "poussée normative de l'humanité dans le domaine des Droits de
l'Homme qui retentit sur celui du droit humanitaire"(689), s'appuie sur une stratégie
résolutoire consacrée dans les cénacles onusiens. La première expérimentation d'une
intervention dite humanitaire accompagnée d'un emploi de la force eut lieu en Iraq à la
suite de la résolution 688 du Conseil de Sécurité. Auparavant, l'Assemblée Générale de
l'ONU, avait adopté en 1988 et en 1990 deux importantes résolutions qui allaient
révolutionner le DIH.
li s'agit d'abord de la résolution 43/131 du 8 décembre 1988, intitulée
"Assistance humanitaire aux victimes de catastrophes naturelles et situations d'urgence du
même ordre". De l'avis du Pr. RAYNAL, cette résolution "intègre l'assistance humanitaire
dans l'action globale de l'ONU en matière de Droits de l'Homme. Elle invite les Etats à
faciliter la mise en œuvre de cette assistance et affinne le caractère indispensable de l'accès
aux victimes"(690). Elle souligne le rôle des organisations internationales dont elle salue
"l'importante contribution à l'assistance humanitaire" (§ 4 et préambule alinéa Il). La
résolution, tout en mettant en exergue le principe de subsidiarité à travers le rôle premier
dévolu à l'Etat territorial, reconnaît que les ONG humanitaires devraient bénéficier, en cas
d'urgence, de larges facilités d'accès et d'intervention auprès des populations en danger. La
résolution mentionne qu"'à côté de l'action des gouvernements et des organisations
intergouvernementales, la rapidité et l'efficacité de cette assistance reposent souvent sur le
(688) Cf DJIENA-WEMBOU (M.C.), Le droit d'ingérence humanitaire: un droit aux fondements
incertains, au contenu imprécis et à géométrie variable, 4, RADIC (1992), p. 570.
(689) Selon TORRELLI (M.), op. cit., p. 246.
(690) RAYNAL (Il), Du devoir d'assistance au droit d'ingérence : l'ONU et le nouvel ordre
humanitaire international in AS.I.C.L., Proc. 5, RADIC 1993, p. 86.

300
concours et l'aide d'organisations locales et d'organisations non gouvernementales agissant
dans un but strictement hwnanitaire"(691).
Reprenant les mêmes thèmes, la résolution 45/100 du 14 décembre 1990 du
même intitulé que la résolution 43/131, préconise la création de "couloirs d'urgence" pour
permettre ou faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire. Ce texte de l'AGNU invite
tous les Etats "dont les populations ont besoin d'Wle telle assistance à faciliter la mise en
œuvre par ces organisations de l'assistance humanitaire, notamment l'apport de nourriture,
de médicaments et de soins médicaux, pour lesquels un accès aux victimes est
indispensable" (§ 4)(692).
De la revendication à l'affinnation du droit d'ingérence, le pas va être franchi
par le Conseil de Sécurité avec l'adoption des résolutions 688 du 5 avril 1991 et 794 du 3
décembre 1992. A la différence de la résolution 688 "où étaient invoquées les violations
des frontières commises par les réfugiés irakiens comme menace contre la paix et la
sécurité, la résolution 794 se réfere à la seule situation intérieure en Somalie et aux
violations du DilI qui Ysont commises"(693).
La célèbre résolution 688 impose à l'Irak l'obligation de permettre un accès
immédiat des organisations hwnanitaires à la population en détresse dans toutes les parties
de son territoire national. Selon MUBIALA, l'opération faisant suite à l'adoption de cette
résolution avec la création de zones de sécurité pour les populations kurdes, "peut être
considérée comme la première application de la doctrine de l'ingérence hwnanitaire de
type modeme"(694). Pour DJIENA WEMBOU, la prudence s'impose puisque "le moins
que l'on puisse dire, c'est que les défenseurs du droit d'ingérence hwnanitaire oublient trop
vite de mentionner le paragraphe 3 de la même résolution 688 aux termes duquel le
(691) Cf TORRELLI (M.), op. cit., p. 246.
(692) Cf MUBIALA (M.), L'ingérence humanitaire in 5 RADIe (1993), pp. 402407.
(693) Cf RAYNAL (J.I.), op. cit., p. 87.

301
Conseil de Sécurité "insiste pour que l'Iraq pennette un accès immédiat des organisations
humanitaires à tous ceux qui ont besoin d'assistance dans toutes les parties d'Iraq"(69S). Ce
"droit d'ingérence" ne toucherait à la souveraineté qu'en cas de refus de l'Etat irakien de
déférer aux injonctions du Conseil de Sécurité.
Dans tous les cas, cette résolution fut saluée par Roland DUMAS comme "sans
précédent dans l'histoire puisqu'elle prévoit et permet un droit d'intervention dans les
affaires intérieures d'un Etat"(696). La diplomatie française se plut à rappeler l'allocution
du Président MITTERRAND à l'ouverture de la Conférence sur la sécurité et la
coopération en Europe (CSCE) sur les Droits de l'Homme, le 30 octobre 1989, dans
laquelle il affinnait que "le devoir de non ingérence s'arrête où naît le risque de non-
assistance"(697).
Quant à la résolution 794, elle traduirait une nouveauté dans l'action onusienne
par la décision du Conseil de Sécurité de recourir à la force armée pour encadrer et garantir
la distribution de l'aide humanitaire en Somalie(698).
Ce "droit" ou "devoir" d'ingérence rappelle étonnamment un concept ancien dit
de l'Intervention d'Humanité, et constitue une survivance ou une remise au goût du jour de
cette conception tant décriée, au début du siècle.
La théorie de l'intervention d'humanité se défmit comme: "celle qui reconnaît
pour un droit l'exercice du contrôle international d'un Etat sur les actes de souveraineté
intérieure d'un autre Etat contraires "aux lois de l'humanité" et qui prétend en organiser
(694) MUBIALA (M.), op. cit., p. 404.
(695) DJIENA-WEMBOU (M.c.), op. cit., p. 574.
(696) DUMAS (R), op. cÏt., p. 60.
(697) Cité par TORRELLI (M.), op. cit., p. 246.
(698) Cf MINDAOUDOU (D.A.), Le système des Nations Unies et le droit d'ingérence
humanitaire, in ASICL. Proc. 5, RADIe (1993), Actes du 5e Congrès annuel de la Société
Africaine de Droit international comparé (Accra, 20-24 septembre 1993), pp. 22-35.

302
juridiquement le fonctionnement. Suivant cette doctrinf, chaque fois que les droits
humains d'un peuple seraient méconnus par ses gouvernants, un ou plusieurs Etats
pourraient intervenir au nom de la Société des Nations, soit pour demander l'annulation des
actes de puissance publique critiquables, soit pour empêcher à l'avenir le renouvellement
de tels actes, soit pour suppléer à l'inaction du gouvernement en prenant des mesures
conservatoires urgentes, et en substituant momentanément leur souveraineté à celle de
l'Etat contrôlé"(699).
Le Professem DUPUY, quant à lui, défInit celle-ci comme : "un droit des tiers à
accorder une assistance humanitaire correspondant au devoir de l'Etat territorial de
l'accueillir favorablement"(700).
Mais la doctrine classique reconnaissait la grande variabilité de l'intervention
qui pouvait être déguisée ou manifeste, à forme brutale ou par simple contrainte
diplomatique(701). Elle admettait, en outre, que l'intervention d'humanité obéissait à des
conditions. Ainsi, pour ROUGIER : "trois principes paraissent conditionner toutes les
applications possibles de la théorie de l'intervention d'humanité. Pour qu'une intervention
d'humanité soit légitime, il faut: "1°- que le fait qui la motive soit un fait de la puissance
publique, et non le fait de particuliers ; 2°-que ce fait constitue une violation du droit
humain, et non une simple violation de droit national positif ; 3°_ que l'intervention
réunisse certaines conditions d'opportunîté"(702).
Malgré les arguties et spéculations juridiques pour asseoIr cette notion,
beaucoup de contestations s'élevaient à l'encontre de son application. Le Pro ROUGIER
(699) ROUGIER (A), La théorie de l'intervention d'humanité, in RGDIP, Tome xvrr, 1910, p.
472. Cette théorie était présente en filigrane dans les œuvres de SUAREZ, VITORIA, LOCIŒ,
GROTIUS mais était plutôt contestée par VATTEL et KANT. Cf Droit et Humanité, Actes N'
67-68, Les Cahiers d'Action Juridique, Paris, septembre 1989, p. 58.
(700) Cf DUPUY (p.M.), Droit International Public, Précis Dalloz, Paris, 1992, p. 75.
(701) Cf ROUGIER (A.), op. cit., pp. 468-472.

303
n'en disconvenait pas. L'intervention offrait toujours un visage partial et unilatéral. Elle
demeure donc critiquable car "toutes les fois qu'une puissance interviendra au nom de
l'humanité dans la sphère de compétence d'une autre puissance, elle ne fera jamais
qu'opposer sa conception du juste et du bien social à la conception de cette dernière, en la
sanctionnant au besoin par la force... Ainsi, l'intervention d'humanité appanu.{ comme un
moyen juridique ingénieux d'entamer peu à peu l'indépendance d'un Etat pour l'incliner
progressivement vers la mi-souveraineté"(703). On comprend alors pourquoi la théorie a
toujours bénéficié d'un préjugé défavorable. Selon Mme ALlliERT : "dans l'histoire des
relations internationales, les exemples d'intervention d'hmnanité ne manquent donc pas ;'
pourtant, malgré ces précédents, les auteurs ne sont pas unanimes pour approuver ce type
d'intervention"(704)
Le Professeur PEREZ VERA lui donnait "le sens étroit d'ingérence active d'un
Etat ou d'un groupe d'Etats dans les affaires intérieures d'un autre Etat en vue de lui
imposer le respect des droits fondamentaux de l'individu"(70S).
n en résulte que de nombreuses interventions ont été justifiées par des motifs
humanitaires. Celles-ci pouvaient rencontrer l'assentiment de l'Etat territorial dans lequel se
déroulaient les violations des Droits de l'Homme et du DIH : interventions françaises au
Congo en 1964 et 1978, en Centrafrique en 1979(706).
Mais la plupart de ces interventions n'étaient pas validées par une demande ou
une autorisation de l'Etat Ainsi on a coutume de citer le RAID israélien du 4 juillet 1976
(702) Cf Droit et Humanité, op. cit., p. 60.
(703) ROUGIER (A.), op. cit., p. 472.
(704) Cf ALIBERT (Ch.), Du droit de se faire justice dans la société internationale depuis 1945,
LGDJ, Paris, 1983, 732 p., surtout le chapitre ID consacré aux Interventions d'humanité (pp. 247-
305), p. 248.
(705) Cité par ALffiERT, op. cit., p. 247.
(706) ALffiERT (Ch.), op. cit., pp. 253 et 262.

304
sm l'aéroport d'Entebbé en Ouganda pom délivrer des otages juifs pris par un commando
palestinien qui avait détourné un avion(707).
A l'inverse, d'autres interventions dites d'humanité s'accompagnaient de
représailles ou étaient motivées par un traité ou un accord de défense. Ces interventions
étaient souvent critiquées en raison de l'emploi de la force qui occultait toujours l'aspect
humanitaire de l'opération.
Des interventions d'humanité du XIXe s. des puissances européennes en favem
de chrétiens persécutés dans l'Empire Ottoman à l'intervention pom la protection des
ressortissants nationaux et des biens d'un Etat, il n'y a qu'un petit fossé que franchit la
théorie du SELF-HELP dite de l'AUTo-PROTECTION. Elle s'analyse en un dérivé de
l'intervention d'humanité car "l'Etat intervenant invoque ici sa propre souveraineté: en
l'espèce, il cherche à assmer le respect de son droit de protéger ses ressortissants à
l'étranger"(70S).
Le Professem QUOC DINH range l'opération d'Entebbé, celle de la Belgique
au Congo en 1964 et celle de la France au Shaba (ex-Zaïre) en 1978 dans les hypothèses
d'application de ce prétendu droit d'intervention d'humanité(709).
TI en appert un lomd soupçon pesant sur l'intervention d'humanité qui cache
souvent des arrière-pensées de domination, de conquête ou de néo-colonisation. Cette
doctrine a paru trouver une confmnation ambiguë dans cette sentence de MAX HlTBER
(707) ALffiERT (Ch.), op. cit., p. 267 et S., NGUYEN Quoc Dinh et autres, op. cit., p. 448.
(70S) NGUYEN (Q.D.), op. cit., p. 871.
(709) Ibidem., p. 871 ~ Cf. également CHARVIN (R), Notes sur les dérives de l'humanitaire dans
l'ordre international, RBDI, 1995, 2, pp. 468-485, qui relève que: «la civilisation occidentale
ressent, par ailleurs, constamment le besoin non seulement de justification à ses actes
(particulièrement ceux qui lui permettent de dominer le reste du monde) mais d'autojustification:
si l'opinion interne des pays occidentaux n'est pas très exigeante, elle a du moins le mérite

305
exprimée pourtant sur un mode de prudence : "ll est incontestable qu'à un certain point,
l'intérêt d'un Etat de pouvoir protéger ses ressortissants et leurs biens doit primer le respect
de la souveraineté territoriale, et cela même en l'absence d'obligations conventionnelles. Ce
droit d'intervention a été revendiqué par tous les Etats, ses limites seules peuvent être
discutées"(71 0).
il existe une méfiance envers ces interventions qui rappellent trop souvent « la
diplomatie de la canonnière »(711). On peut en trouver une illustration par le fait que "la
doctrine, très généralement, rejette la licéité de l'intervention humanitaire même dans sa
conception restreinte, à savoir l'intervention armée pour sauvegarder ses propres citoyens
dans un autre Etat"(712).
Le continent africain peut faire l'économie d'une telle théorie. En effet, sa
colonisation "ne se parait-elle pas de motivations humanitaires, philanthropiques et
scientifiques ?"(713). Cette théorie a des relents de néo-colonialisme, qui est la situation
dans laquelle "un Etat, tout en respectant apparemment la souveraineté d'un Etat se
substituait en fait à l'action de cet Etat sur des points fondamentaux altérant ainsi son
identité"(714). A ce propos, il convient de rappeler avec Ignacio RAMONET que "pacifier
d'exister et d'éprouver le besoin de s'apprécier positivement, sans sombrer dans le cynisme» (p.
470).
(710) Rapport du 23 octobre 1924, Affaire des réclamations britanniques dans la zone espagnole
au Maroc, in RS.A., Vol. II, p. 641, cité par NGUYEN Quoc Dinh et alii, op. cit., p. 871.
(711) Cf DUPUY (RJ.), L'action humanitaire~ op. cit., p. 68.
(712) SANDOZ (Y), Droit ou devoir d'ingérence, droit de l'assistance: de quoi parle-t-on? in
RICR 1992, N° 793·798, p. 227 ; cf VIRALLY (M.), Panorama du Droit international, op. cit., p.
118. Selon VIRALLY, "le droit de protection de l'Etat national s'est trouvé évidemment limité
quant aux moyens de sa mise en œuvre par le principe de la prohibition".
(713) BULA-BULA (S.), L'idée d'ingérence à la lumière du nouvel ordre mondial in 6 RADIe
(1994), Tome 6, nO 1, mars 1994, p. 23.
(714) Rapport de la C.D.I. sur les travaux de sa 40e session, 9 mai-29 juillet 1988, p. 119, cité par
BULA-BULA, p. 25.

306
et administrer sont de vieux alibis coloniaux, seraient-ils mieux acceptés aujourd'hui sous
le paravent de l'action humanitaire" ?(715).
Derrière l'objectif visant à mettre un terme aux traitements contraires à
l'humanité, se profIlent des appétits d'impérialisme, de recherche de matières premières ou
encore d'extension de sphères d'influence.
A titre exemplatif, on peut citer quelques cas intéressants d'intervention sous le
label "humanitaire" : intervention militaire allemande à Mogadiscio en 1978 pour délivrer
des otages allemands ~ interventions françaises à Bangui en 1978, au Rwanda en 1990 à
Djibouti en 1992 avec des motivations diverses ~ intervention militaire américaine en
Somalie (1992) suivie des "forces multinationales" puis de celles de l'ONU, etc.(716).
Au tenne de cette incursion démontrant le lien entre intervention d'humanité et
droit ou devoir d'ingérence, il sied de se remémorer, aujourd'hui plus que jamais, cet
OBlTER DICTUM de la CU dans l'affaire du Détroit de Corfou. La Cour précisait: "Le
prétendu droit d'intervention ne peut être envisagé par elle (la Cour) que comme une
manifestation d'une force, politique qui, dans le passé, a donné lieu aux abus les plus
graves et qui ne saurait, quelles que soient les déficiences présentes de l'organisation
internationale, trouver aucune place dans le Droit international. L'intervention est peut-être
moins acceptable encore dans la fonne particulière qu'elle présentait ici, puisque réservée
par la nature des choses aux Etats les plus puissants, elle pourrait aisément conduire à
fausser l'administration de la justice internationale elle-même"(717).
L'intervention d'humanité ne pennet pas d'occulter ces interventions militaires.
(715) RAMONET (J.), Intervenir, in Le Monde Diplomatique, janvier 1993, p. 1, cité par
MINDAOUDOU, op. cit., p. 26.
(716) Cités par BULA-BULA (S.), op. cit., p. 32.

307
Paragraphe II - L'ingérence comme forme de légitimation des
interventions militaires
L'idée de droit ou de devoir d'ingérence constitue souvent un paravent derrière
lequel se profilent, à côté de prétendus motifs humanitaires, des désirs inavoués
d'interventions militaires. L'idéologie de la force se pare fréquemment du manteau du droit.
Mais la notion d'ingérence est confuse et plurielle. Sajuridicité incertaine ne se conçoit que
par rapport aux mutations conceptuelles et structurelles des relations internationales de
cette fm de siècle. Ainsi, on a pu parler d'ingérence structurelle, d'ingérence politique ou
d'ingérence écologique(718) ou alors de cinq fonnes d'interventions(719).
Cette floraison tenninologique faisant appel à des stratégies de dissimulation,
est sous-tendue par des justifications peu convaincantes des Etats intervenants. A ce
propos, des autems comme Mme ALIBERT ont démontré que l'intervention (ou
ingérence) n'est jamais désintéressée : "Si c'était le cas, les interventions d'humanité
seraient fort nombreuses, car dans le monde rares sont les Etats qui respectent
scrupuleusement les Droits de l'Homme"(720).
De nombreux prétextes fallacieux ont été avancés pour justifier ces
interventions. A titre illustratif, en 1976, le gouvernement sud-africain, en envoyant des
troupes militaires en Angola s'était retranché derrière l'argument de la demande présentée
par le gouvernement portugais "pour protéger la vie des travailleurs et préserver les
(718) Cf BULA-BULA (S.), op. cil., p. 32.
(719) Cf. BETTATI (M.), in Le Monde des Débats N° 4, janvier 1994 : le Doyen BETTATI
distingue l'intervention immatérielle civile (procédure de contrôle des Droits de l'Homme) ;
l'incursion matérielle civile illicite (Entrée d'ONG humanitaires comme les FREJ'TCH DOCTORS
sur le territoire d'un Etat sans son accord) ; l'intervention matérielle civile licite (Entrée d'ONG
dans le cadre du Dili et des résolutions de l'ONU avec l'accord exprès ou tacite de l'Eta1;) ;
l'intervention matérielle armée licite (dans le cadre du Chapitre VII de la Charte de l'ONU)et
l'ingérence préventive (ou diplomatie préventive).
(720) ALmERT (Ch.), op. cil., p. 250.

308
installations" du barrage de Calueque. Le Premier Ministre VORSTER justifia, a
posteriori, cette action en ces tennes : "Le gouvernement portugais qui ne pouvait alors le
faire, a demandé à l'Afrique du Sud de continuer à appliquer des mesures de protection
qu'elle avait prises et de rester sm les lieux jusqu'au moment où il pourrait assumer cette
responsabilité". Cette attitude sera contredite par le Portugal qui la qualifia de "violation de
territoire"(721).
De même, lorsque le Conseil de Sécurité, par la résolution 794 du 3 décembre
1992, autorisa une intervention année pour protéger l'aide humanitaire en Somalie, il prit le
soin de mettre en avant un argument fictif du consentement de l'Etat somalien dont le
gouvernement avait disparu malgré l'auto-proclamation du Président par intérim Ali
MAHDI. Cette fausse justification était ainsi relevée par Didier OLINGA : "En prétendant
répondre à des appels lancés par la Somalie, le Conseil de Sécurité entretient, sans
convaincre, l'illusion d'une intervention consentie par un Etat membre dans ses affaires
intérieures"(722).
Le Secrétaire Général de l'ONU remarquait également qu'il n'existait à
l'époque: "en Somalie aucun gouvernement qui puisse demander ou autoriser un tel recours
à la force". Pour BOUTROS BOUTROS-GHALI, il s'agit là "d'une situation nouvelle...
atypique... non préwe par la Charte"(723) dans laquelle l'utilisation du chapitre VII se
faisait sans l'agrément d'un Etat.
(721) Sur cette affaire pleine de rebondissements, cf ALlliERT, op. cit., p. 252.
(722) OLINGA (AD.), A propos de l'ingérence humanitaire de l'ONU en Somalie: réflexions sur
le fondement et la portée de la résolution 794 (3 décembre 1992) du Conseil de Sécurité, in
RU.D.H., Vol. 6, N° 12,30 décembre 1994, p. 451.
(723) Cités par SOREL (lM.), La Somalie et les Nations Unies, in AFDI, Vol. xxxvm, 1992, p.
72 et p. 74.

309
Sans préjuger du droit du Conseil de Sécurité en vertu du chapitre VII de mener
des actions coercitives en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix ou d'un acte
d'agression, le consentement de l'Etat faisait, en l'occurrence, défaut.
En 1979, en Centrafrique, la France, au nom de l'ingérence humanitaire pour
faire cesser les crimes et autres violations des Droits de l'Homme perpétrés par
BOKASSA, a "accompagné" selon le communiqué officiel français, le coup d'Etat visant à
évincer ce dernier et à installer David DACK0(724).
fi faut également mettre l'accent sur l'absence de formulation rigoureuse des
concepts de droit ou de devoir d'ingérence(725). L'un de ses défenseurs les plus résolus,
relevait, lui-même, que la notion est "dépourvue de tout contenu juridique" puisqu'elle
signifie "l'action de s'immiscer, sans en être requis ou sans en avoir le droit, dans les
affaires d'autrui"(726).
Les Etats ont toujours éprouvé le besoin de se justifier même en cas d'invasions
ouvertes prétextant soit le droit de légitime défense,
soit le
consentement à
l'intervention(727). L'invocation de sentiments "humanitaires", de bonne conscience ne
suffit donc pas pom prouver la pmeté des intentions des acteurs. C'est pourquoi la
démonstration de ces motivations humanitaires devra sunnonter les suspicions légitimes
des Etats africains, en particulier, dans lesquels "il est (...) compréhensible que le doute
envahisse la mémoire collective des victimes habituelles des actions "humanitaires"
années. A tout le moins, celles-là peuvent légitimement chercher à savoir les motivations
(724) Cf SINKONDO (1.), Principe de souveraineté, droit des peuples et sécurité en Droit
international contemporain, in Revue Penant, 100e année, N° 802, janvier-mai 1990, pp. 26-27.
(725) Cf BULA-BULA (S.), op. cit., p. 23.
(726) BETTATI (M.), Un droit d'ingérence? in R.G.D.I.P., 1991, p. 641.
(727) Pour une analyse exhaustive, cf BENNOUNA (M.), Le consentement à l'ingérence
humanitaire dans les conflits internes, Paris, LGDJ 1974,236 p.

310
réelles qui conduisent certaines puissances à brandir l'alibi humanitaire dans leur politique
africaine depuis plus d'un siècle !"(728).
Cette notion d'ingérence jetée en pâture aux Junstes est un "concept non
défmi"(729). Certes, les Etats parties à des conventions humanitaires ou de Droits de
l'Homme ont un droit de regard sur ce qui se passe chez les voisins. Mais ce droit de
s'interroger comporte-t-il un droit d'agir lorsque ce regard "révèle des choses
inacceptables?"(730). Lorsque cette action s'insère dans le cadre du mécanisme de sécurité
collective de l'ONU, on pourra l'admettre quoique de façon nuancée. A l'inverse, ce droit
d'agir mêle indistinctement morale et droit, règle juridique et voeu pieux, "bard law" et
"soft law". Ces confusions, dans l'expression, entretenues par certains milieux juridiques,
étaient ainsi relevées par Mme Monique CHEMILLIER-GENDREAU : "dans le débat
actuel sur le devoir d'ingérence, la charité et la justice sont mélangées. Le droit est la
tentative des sociétés pour établir une certaine justice. Il n'a rien à voir avec la
charité"(731). Le droit d'ingérence est dépourvu de base conventionnelle. Aucun article de
la Charte de l'ONU ne le consacre. Il s'oppose surtout à la nonne clé de voûte du système
onusien: le principe de la souveraineté des Etats(732). De plus, aucune OPINIO JURIS
constitutive d'ébauche de coutume ne vient confinner sa juridicité.
Enfin, la jurisprudence internationale ne reconnaît pas le droit d'intervenir dans
un Etat sans son consentement.
Au surplus, les résolutions onusIennes sur le prétendu "nouvel ordre
humanitaire international" sont trop circonstancielles et peu constantes pour offrir au "droit
d'ingérence" une quelconque assise cohérente. Cette notion est imprécise, son incertitude
(728) Cf BULA-BULA (S.), op. cit., p. 31.
(729) Cf SANDOZ (Y), Droit ou devoir d'ingérence..., op. cit., p. 225.
(730) SANDOZ (Y), ibid., p. 226.
(731) CHEMILLIER-GENDREAU (M.), Ingérence, charité et Droit international, in Le Monde
Diplomatique, janvier 1993, p. 5.

311
résidant dans le caractère peu différencié des tennes employés (droit ou devoir). Elle a été
critiquée en raison de sa "géométrie variable" du fait de la promptitude du Conseil de
Sécurité à l'appliquer aux Etats pauvres et de sa coupable amnésie à l'expérimenter dans
d'autres foyers de tensions. Le Pr. DJIENA-WEMBOU atteste de cette versatilité:
"l'observation des faits internationaux et de la pratique du Conseil de Sécurité nous amène
à conclure que le droit d'ingérence humanitaire en gestation a été marqué, dès sa
conception, par des considérations politiques et stratégiques, dans la mesure où les
réactions des Etats, tout comme celles du Conseil de Sécurité, n'ont pas toujours été
constantes face aux divers cas de violations massives des Droits de l'Homme opérées dans
le monde"(733).
Ce "droit" ou "devoir" d'ingérence contredit l'article 2 paragraphe 7 de la charte
de l'ONU consacrant le domaine réservé de la compétence nationale. Le Droit international
reconnaît le principe de la souveraineté et interdit l'ingérence dans les affaires intérieures
des Etats. Plusieurs résolutions ont affermi ce dernier concept. On peut citer outre la
résolution 2625 du 24 octobre 1970, la résolution 36/103 de l'AGNU du 9 décembre 1981
sm "l'inadmissibilité de l'intervention et de l'ingérence dans les affaires intérieures des
Etats" qui souligne: "le devoir de s'abstenir d'exploiter ou de défonner les questions
relatives aux droits de l'homme dans le but de s'ingérer dans les affaires intérieures des
Etats et d'exercer des pressions sur les Etats ou de susciter la méfiance ou le désordre à
l'intérieur des Etats ou des groupes d'Etats entre eux"(734). Auparavant, l'AGNU avait
adopté le 21 décembre 1965 une "Déclaration sur l'inadmissibilité de l'intervention dans les
affaires intérieures des Etats et la protection de lem indépendance et de leur
souveraineté"(735).
(732) DJIENA-WEMBOU (M.c.), Le droit d'ingérence humanitaire... , op. cit., pp. 571-576.
(733) DJIENA-WEMBOU (Mc.), op. cit., p. 586; cf WECKEL (ph.), Le chapitre 7 de la Charte
et son application par le Conseil de Sécurité, AFDI 1991, pp. 165-202.
(734) Citée par TORRELLI (M.), De l'assistance à l'ingérence humanitaires, op. cit., p. 247.
(735) Res. 2131 (XX) de l'AGNU du 21 décembre 1965.

312
Ce principe de l'inviolabilité de la souveraineté est réaffinné par l'article 3 du
Protocole II de 1977. Les seules exceptions reconnues sont les actions coercitives du
Conseil de Sécurité relativement au chapitre VII et la légitime défense individuelle ou
collective de l'art. 51 de la Charte de l'ONU. En effet, selon la doctrine : "mise à part la
légitime défense, toutes les autres prétendues exceptions n'ont pas pu créer l'érosion de la
règle de l'interdiction du recours à la force, qu'il s'agisse du droit de poursuite, de la
protection par l'Etat de ses nationaux à l'étranger, l'intervention par invitation, l'action
militaire contre le terrorisme, la défense de la démocratie, les représailles années, le droit
de se faire justice (Self-Help), l'état de nécessité. Toutes ces prétendues exceptions ont été
tenues pour illégales au regard du droit intemational"(736).
Même dans la perspective de la légitime défense, "la régularité de telles
interventions est soumise à deux conditions : que ce soit bien l'autorité gouvernementale
légitime qui fasse appel à une assistance extérieure; qu'il y ait bien agression année et non
lutte de factions internes. Ne pas respecter la première condition est s'exposer à une
violation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Ne pas respecter la seconde est
commettre une violation de l'article 51 de la Charte"(737).
Cette faculté "subsidiaire, provisoire et contrôlée"(738) que constitue la
légitime défense ne doit pas occulter le principe de non-intervention, lequel est ainsi
précisé par la CU : "D'après les formulations généralement acceptées, ce principe interdit à
tout Etat ou groupe d'Etats d'intervenir directement ou indirectement dans les affaires
intérieures d'un autre Etat (...). Cet élément de contrainte, constitutif de l'intervention
prohibée et fonnant son essence même, est particulièrement évident dans le cas d'une
(736) MUBIALA (M.), L'ingérence humanitaire, op. cit., p. 406 ; cf BULA-BULA (S.), L'ordre
juridique à l'épreuve des réalités, RADIC, mars 1993, Tome 5, N° 3, pp. 67-83.
(737) Cf QUOC-OINH (NG.) et alii, Droit international public, op. cit., p. 866 ; voir également
CASSESE (A.), Commentaire de l'article 51, in COT (IP.) et PELLET (A), La Charte des
Nations Unies. Commentaire article par article, pp. 769-794; ZOUREK (1), La notion de légitime
défense enDroit international, Annuaire de 1'1.0.1., 1975, pp. 1-80.
(738) Expression utilisée dans QUOC-OINH et alii., op. cit., p. 864.

313
intervention utilisant la force, soit sous la fonne directe d'une action militaire soit sous
celle, indirecte, du soutien à des activités années subversives ou terroristes à l'intérieur d'un
autre Etat"(739).
Le pnnclpe de non-intervention souffre de l'exception de l'intervention
sollicitée ou consentie par l'Etat territorial. Dans le cadre d'accords de défense, l'Etat
territorial peut aliéner volontairement sa souveraineté en acceptant l'intervention année
d'Etats signataires de l'accord en we de l'aider à défendre son territoire. Ainsi, en Afrique,
on a constaté l'intervention militaire française sur l'appel du gouvernement légal au
Sénégal en 1962 lors des événements qui ont conduit à la fin de la première République
(1960-1962); au Gabon en 1%4 (après l'enlèvement du Président Léon MBA) et en 1990
(émeutes à Libreville et à Port-Gentil); au Tchad en 1983 (opération MANTA) sur l'appel
du Président Hissène HABRE, en 1986 (opération EPERVIER), etc. ; à Djibouti en 1991
(opération GODORIA); au Zaïre (République Démocratique du Congo) en 1977 lors de la
guerre du Shaba sur l'appel du Président MOBUTU, etc.(740).
Le principe de non-intervention ne doit pas constituer en soi un obstacle au
respect des Droits de l'Homme car "les Droits de l'Homme bénéficiant désonnais d'une
protection internationale cessent d'appartenir à la catégorie des affaires qui relèvent
essentiellement de la compétence nationale des Etats"(741). Cette résolution de 1989 sur
"la protection des Droits de l'Homme et le principe de la non-intervention dans les affaires
internes des Etats", relativise le principe de souveraineté au nom des Droits de l'Homme.
Ainsi, pour l'ancien Secrétaire Général de l'ONU, Mr. PEREZ DE CUELLAR, : "le
(739) CU, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (NicaragualEtats-
Unis), Fond. arrêt du 27 juin 1986, Rec. 1986, paragraphe 205, Cité par QUOC-DINH, op. cit., p.
869.
(740) Cf Sud-Quotidien Nt' 749 du jeudi 05 octobre 1995, p. 10.
(741) Résolution de l'Institut de Droit international, Session de Saint-Jacques-de-Compostelle, in
Annuaire de l'I.D.I., vol. 63-11 (1990), Annexe ID, p. 340 et s. ; cf. THlERRY (H), Le principe de
non-intervention et la protection internationale des Droits de l'Homme, in Recueil des Cours de
l'llDH, Ile session d'enseignement, Strasbourg (30juin-25 juillet 1980), Tome 1.

314
principe ne serait qu'affaibli si l'on devait en conclure que la souveraineté comporte, en
elle-même, à notre époque encore, le droit de massacrer des populations civiles, de les
décimer systématiquement ou de les contraindre à l'exode sous le prétexte de contenir des
troubles ou une insurrection" (742). Il en découle, qu'aucun Etat ne peut se délier de sa
responsabilité internationale en prétextant sa souveraineté.
Il n'empêche cependant que les concepts-alibis de "droit" ou "devoir"
d'ingérence ont eu le grand mérite de jeter une lueur vive sur les insuffisances actuelles du
Droit international général "exigeant une voie corrective qui n'est offerte ni par la coutume
ni par les conventions"(743).
Ce concept sera donc répudié au motif principal de son emploi en vue d'un
assujettissement prononcé et subtil des Etats nouveaux à propos desquels Manfred LACHS
écrivait "beaucoup de ces nouveaux Etats indépendants ont été soumis à de nouvelles
formes de dépendance, à de nouvelles dictatures. L'aube de la liberté ne s'est jamais levée
en ce qui les conceme"(744).
Si le droit ou devoir d'ingérence humanitaire abrite des préoccupations
politiques d'arrière plan qui empêchent jusqu'à présent la consécration juridique
incontestable de la notion, à l'inverse le devoir d'assistance malgré sa faiblesse normative
et sa quête d'un domaine d'élection confirmé, contient des aspects juridiques certains.
(742) PEREZ DE CUELLAR (1), L'anarchie ou l'ordre, Rapports annuels 1982-1991, Nations
Unies, New-York, 370 p.
(743) ESSOMBE-EDIMO (1), Le droit d'ingérence humanitaire, une effectivité en mouvement in
5 RADIC (1993), N° 3, octobre 1993, p. 500.
(744) LACHS (M.), Le Droit international à l'aube du XXIe siècle, in RGDIP, Tome 96, 1992,3,
Paris, Pédone, pp. 531-532, cité par ESSOMBE-EDIMO (1.), op. cit., p. 502.

315
SECTION II - La juridicisation effective du devoir d'assistance humanitaire
Le devoir d'assistance humanitaire, loin d'être un succédané au "devoir" au
"droit" d'ingérence humanitaire, quoique présent dans certains aspects du DIH, demande à
s'inscrire de façon indélébile dans le Droit international général.
Si le droit ou devoir d'ingérence a été répudié au nom des atteintes graves au
principe de la souveraineté et des violations manifestes du principe de non-intervention, le
devoir d'assistance humanitaire, quant à lui, s'insère dans le cadre du consentement de
l'Etat à l'aide humanitaire des organisations locales ou non gouvernementales étrangères.
Cependant, force est de constater que ce concept doit s'affennir au contact du
droit. A l'analyse, le devoir d'assistance contient beaucoup de linéaments juridiques mais il
doit gagner en cohérence à l'épreuve de la réalité.
La grande variété des acteurs intervenant dans le domaine de l'action
humanitaire donne une impression de désordre et de manque de coordination appelant une
redéfinition de leur rôle pour une plus grande efficience dans la destination de l'aide
humanitaire (Paragraphe 1).
La création d'un cadre jwidique cohérent et moins politisé, contenant des règles
assujettissant les innombrables acteurs humanitaires au respect de la souveraineté de l'Etat
territorial, devient une exigence incontournable pour asseoir durablement le devoir
d'assistance humanitaire (Paragraphe II).

316
Paragraphe 1 - La redéfinition du rôle des acteurs de l'action
humanitaire
Concept et qualificatif, l"'humanitaire" ne cesse d'être évoqué, ces dernières
années, dans les conférences internationales et d'être utilisé comme une panacée
universelle
dans
tous
les
conflits
armés.
Les
Etats,
les
organisations
intergouvernementales, les organisations non gouvernementales, les militants des Droits de
l'Homme, les mouvements de tous ordres revendiquent l'aura de l'humanitaire pour justifier
leurs actions de secours et présenter à ce qu'il est convenu d'appeler la "communauté
internationale" l'apparence d'un activisme de bon aloi pour secourir les populations en
danger.
Au-delà de la diversité des motivations "humanitaires", apparaît une confusion
entre le souhait et le rée~ l'opposition entre l'idéologie guerrière et la veine humaniste, et le
mélange de tennes juridiques.
Jamais auparavant, le DIH n'avait bénéficié d'une telle publicité, ni fait l'objet
de telles dénaturations. Un kaléidoscope d'acteurs se réclamant de l'humanitaire est apparu
sur la scène internationale violant volontairement ou non la souveraineté des Etats pour
participer à l'aventure de la mode humanitaire. Ce foisonnement d'intervenants impose
l'édification d'une politique de coordination et d'hannonisation.
En 1991-1992, l'ONU a créé un Département des Affaires Humanitaires dont le
dessein avoué était de clarifier le rôle de tous ces acteurs et de coordonner les aides et
secours pour une plus grande efficacité dans la distribution de l'aide humanitaire.

317
Cependant malgré cet effort de création, le problème de la pluralité des acteurs
crée un enchevêtrement incroyable dans l'acheminement, l'accès, la distribution et le suivi
de l'aide humanitaire.
Une redéfmition du rôle des acteurs de l'humanitaire constitue une nécessité
incontournable, car "la plupart des conflits armés et des situations d'urgence complexes
donnent lieu à un "pluralisme déchaîné"(745). Le Pro DUPUY s'insurge contre cette
diversité: "La multiplicité d'organismes de secours est de nature à entraîner des double-
emplois inutiles et dispendieux. Elle requiert la mise en place d'une coordination des
efforts"(746).
Il en résulte une politisation de l'humanitaire se traduisant d'Wle part, par cette
multiplication des intervenants dans l'action humanitaire et d'autre part, par la
médiatisation très forte de toute action humanitaire accompagnée par les caméras des
chaînes de télévision dans une volonté de fournir aux pourvoyeurs d'aide la justification
audiovisuelle de la destination de leurs subsides.
Sur le terrain, le monopole de l'assistance humanitaire du CICR ou des
organismes du système de l'ONU, cède la place à l'irruption d'acteurs nouveaux, entraînant
une concurrence féroce entre les divers intervenants dans leur désir peu voilé de voir les
Etats se désister du "métier humanitaire" pour s'en revêtir l'exclusif privilège et s'affranchir
de leur consentement.
A côté des organismes spécialisés comme l'UNICEF (Assistance en faveur des
enfants), l'OMS (intervention en matière de politique sanitaire et d'épidémies), la PAO et le
PAM (pour juguler la famine en soutenant les politiques agricoles et alimentaires), le
(745) FORSYTHE (D.P.), Le CICR et l'assistance humanitaire: analyse d'une politique, RICR N°
821, septembre-octobre 1996, p. 567.
(746) DUPUY (RJ), L'action humanitaire..., op. cit., p. 69.

318
H.C.R. (Réfugiés), on constate la présence de nombreuses ONG telles que le CICR (dont
la place est prépondérante dans le domaine humanitaire en vertu de son mandat défini par
ses Statuts et les Conventions et Protocoles de Genève), Médecins Sans Frontières (MSF)
(assistance médicale), Action Internationale contre la Faim (AICF) (assistance dans la
réhabilitation énergétique et nutritionnelle), OXFAM (assistance nutritionnelle et
sanitaire), etc.
La diversité de ces ONG, associations privées à but non lucratif, justifie les
nombreuses tentatives de classification qui opèrent la distinction entre les ONG de
l'urgence dites "sans frontiéristes" ( agissant en vue de catastrophes naturelles ou non), les
ONG de développement dites "tiers-mondistes" (agissant sur les causes de développement)
et les ONG de défense des Droits de l'Homme (dénonçant les violations et éduquant à ces
droits)(747).
Cette pluralité requiert la tnlse en place d'un cadre juridique approprié
ordonnant les interventions pour éviter ces concurrences et innombrables décès parmi le
personnel des associations humanitaires qui agissent en "FREE LANCE" sans une
protection juridique ou militaire quelconque.
La redéfinition du rôle des acteurs humanitaires revêt une importance
particulière d'où la nécessité de la coordination. Une Table Ronde de l'Institut de Droit
International Humanitaire de San Remo (Italie) préconisait cette collaboration du moment
qu': "elle s'inscrit dans la complémentarité des mandats des acteurs (ONU; CICR, ONG).
Le Inter Agency Standing Committee joue, à cet égard, un rôle déterminant. Le mandat
(747) Sur cette classification, cf. DOC. ACAT (Action chrétienne contre la tOIture) N° 54, 1996 :
une certaine idée de l'Homme: Dili et Droits de l'Homme, Paris, 1996, p. 53.

319
confié au DRA et son rôle vont dans la bonne direction mais des progrès restent à réaliser
et des règles à préciser"(748).
Le Department of Humanitarian Affairs (DRA) n'a été conçu que pour
coordonner les activités de secours d'urgence des agences spécialisées (HCR, UNICEF,
PAM). Devant assurer la relève de l'UNDRO (spécialisée dans les secours en cas de
catastrophes), le DRA n'a pas pu assumer pleinement son rôle.
Le D.H.A. assure une coordination au même titre que l'Inter Agency
Committee qui réunit les agences onusiennes, le CICR et certaines ONG.
Mais il faut souligner l'existence d'une cascade de coordination en ce domaine.
Ains~ le CICR a également un mandat de coordination des activités humanitaires des
sociétés nationales du Mouvement International de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge.
De même, une coordination entre ONG serait souhaitable pour éviter une dispersion dans
leurs efforts. Dans ce sens, il faut saluer l'adoption d'une sorte de Code de bonne conduite
liant le Mouvement de la Croix-Rouge et quelques grandes ONG. Le Code stipule que: "le
droit de recevoir et d'offrir une assistance humanitaire est un principe humanitaire
fondamental dont devraient bénéficier tous les citoyens de tous les pays"(749).
Les opérations de secours effectuées dans les zones de conflits annés présentent
fréquemment le spectacle d'une division de travail entre le CICR, le HCR, l'UNICEF et le
PAM. Ainsi, l'UNICEF a été dans les années 80 au Soudan "le chef de file des institutions
des Nations Unies. Le CICR et l'UNICEF ont conclu un accord précisant le mandat et le
lieu de leur action respective"(750). Ce partage des tâches a été également expérimenté au
(748) International Institute of Humanitarian Law. XIXth Round Table on current Problems of
international humanitarian law : Conflict Prevention. The humanitarian Perspective (29 august-2
september 1994), San Remo, Italy, p. 157.
(749) Texte reproduit in RICR N° 817, janvier-février 1996, p. 126.
(750) FORSYTHE (D.P.), op. cit., p. 568.

320
Rwanda en 1994 où "le CICR a travaillé à l'intérieur du pays avec d'autres organisations
comme MSF, tandis que le HCR et d'autres se consacrent aux quelque deux millions de
civils nécessiteux au Zaïre et ailleurs"(751).
Toutefois, même s'il faut Wle concertation entre le CICR et les organismes
onusiens, la spécificité du mandat du CICR et ses obligations statutaires d'impartialité, de
neutralité lui imposent une certaine distanciation en vue de parer à toute velléité de
politisation de l'action humanitaire(752).
Par ailleurs, en vertu de son droit d'initiative hwnanitaire(753), le CICR dispose
d'une prérogative exclusive conférée par l'art. 6 al. 1 des Statuts du Mouvement
International de la Croix-Rouge. Celle-ci lui pennet de proposer ses services sans que cela
soit considéré comme ayant une quelconque influence sur la qualification du conflit ni que
cela soit une ingérence.
L'activité de certaines ONG, volet essentiel du système humanitaire mondial,
n'a pas manqué de susciter des interrogations. L'apparence humanitaire de leurs actions
révèle souvent des accointances avec les Etats dont elles peuvent, volontairement ou non,
constituer les instruments de leur politique étrangère. De plus en plus transformées en
courtiers du développement, les ONG fournissent également un tremplin politique à leurs
leaders en mal de publicité. Leur prolifération ne répond à aucune nécessité et un système
de coordination plus rationnel évitera ces gaspillages de ressources pourtant de plus en plus
limitées.
L'action humanitaire doit être dissociée de l'action politique. Un Symposium de
1994 à Genève, préconisait à cet effet que "l'hwnanitaire ne saurait être une fin en soi.
(751) FORSYTHE (D.P.), idem., p. 568.
(752) Cf SANDOZ (Y.), Droit ou devoir d'ingérence..., op. cit., p. 232.

321
C'est pourquoi il ne saurait, non plus, servir de substitut à la responsabilité politique des
Etats de rechercher la paix, ni d'alibi ou palliatif pour l'absence de volonté politique ou
pour son impuissance. TI ne convient pas qu'il ne soit réduit qu'à un volet de la négociation
politique ou qu'il lui soit conditionné, comme ce fut malheureusement le cas en Angola ou
au Liberia. Si la négociation politique échoue, l'action humanitaire est alors paralysée et
son impartialité bafouée. Dans tous les cas, elle est politisée et affaiblie"(754).
En effet, la collision entre l'action humanitaire des ONG et l'action politico-
militaro-humanitaire de l'ONU implique souvent des interférences nuisibles aux opérations
de secours de caractère impartial et sans discrimination défavorable. Les difficultés des
ONG à acheminer l'aide humanitaire vers la population somalienne ont été largement
interprétées comme résultant du manque de politique éclairée de l'ONU dans le règlement
et la gestion du conflit(755).
Le foisonnement des ONG humanitaires doit conduire à la recherche d'lm cadre
juridique adéquat basé sur une coordination de leurs actions. Ces ONG devront être
soumises à des exigences de professionnalisme, d'objectivité et de non sélectivité. Elles
devront tenir compte des besoins des populations locales (nourriture, médicaments, soins,
vêtements, engrais, etc.), respecter les habitudes alimentaires, les mœurs et us et surtout
adopter une ligne de conduite sous-tendue par une neutralité sans compromission.
(753) Cf. SANDOZ (Y), Le droit d'initiative du CICR, in Jahrbuch fur internationales recht,
Gôttingen, Vol. 22, 1979, pp. 352-373.
(754) De COURTEN (1), L'exercice du mandat humanitaire dans le contexte du maintien de la
paix, in Symposium sur l'action humanitaire et les opérations de maintien de la paix. Rapport,
Genève, 22-24 juin 1994, CICR 1995, p. 35.
(755) Cf. COMPAGNON (D.), Les limites de l'ingérence "humanitaire". L'échec politique de
l'ONU, in L'Afrique politique, 1995, pp. 193-202 ; SOREL (lM.), La Somalie et les Nations
Unies, in AFDI, Vol. XXXVllI, 1992, pp. 61-88 ; CHEMILLlER-GENDREAU (M.), Portée et
limites de l'ingérence humanitaire en Afrique, in Afrique Contemporaine N° 180, 1996, pp. 229-
241.

322
Elles devront éviter de tomber dans le piège des autorités politiques tout en
négociant avec celles-ci l'accès aux victimes. Les Etats peuvent vouloir soit orienter l'aide
hwnanitaire vers les populations "pacifiées" soit dénier tout accès aux civils se trouvant
dans les zones occupées par les rebelles ou conune en Ethiopie en 1988 utiliser "les
secours internationaux pour attirer les civils dans des projets de réinstallation, de manière à
les éloigner des zones de rébellion"(756).
Les ONG sont ainsi confrontées à des difficultés d'accès à la population civile
en cas d'absence d'autorité politique. Elles devront négocier leur présence pour éviter les
détournements d'aide ou s'attacher les services de groupes armés pour leur protection
comme le CICR en Somalie en 1992.
L'importance d'une clarification du rôle des acteurs hwnanitaires dans Wl cadre
de coordination approprié, devra s'appuyer sur une consolidation du concept de devoir
d'assistance hwnanitaire.
Paragraphe II - Les contours du devoir d'assistance humanitaire
L'imprécision tenninologique relative à l'ingérence hwnanitaire, retentit sur
l'assistance humanitaire. La doctrine reconnaît que "le droit à l'aide humanitaire n'est pas
défIni dans le Droit international avec la précision nécessaire. Si l'existence d'un tel droit
est incontestable, son contenu reste flou, faute des nonnes souhaitables"(757). En effet, un
flou conceptuel entoure l'expression de droit d'assistance, souvent utilisée en concurrence
(756) Cf. FORSYTHE (D.P.), op. cit., p. 557.
(757) ESPIELL (H.G.), Les fondements juridiques du droit à l'assistance humanitaire, in Colloque
International sur le droit à l'assistance humanitaire, Actes (paris, 25-27 janvier 1995), UNESCO,
19%, p. 12.

323
avec d'autres notions telles que le devoir d'assistance humanitaire, le droit à l'assistance
humanitaire et le droit à l'aide humanitaire(758).
Concept évolutif dont la genèse remonte au XIXe siècle, l'assistance
humanitaire a pris Wle dimension novatrice "en raison notamment de la nouvelle
configuration idéologique, économique et stratégique du monde moderne"(759).
L'assistance humanitaire, en elle-même, consiste en une opération se traduisant
par "l'apport extérieur de services sanitaires, de biens alimentaires ou matériels au profit
des victimes d'un conflit, qu'il soit interne ou international. Depuis ces dernières années, le
concept même d'assistance humanitaire a subi des avatars nécessitant une amélioration
dans ses modalités de mise en œuvre afin de faciliter l'accès aux victimes, de protéger le
personnel des sociétés de secours et de coordonner ces actions, pour qu'un "îlot
d'humanité" s'impose même au pire agresseur"(760).
L'assistance humanitaire ne saurait se limiter à une distribution de nourriture.
Elle devra couvrir également l'assistance spirituelle et religieuse sans compter la protection
des victimes des conflits armés. Ces dernières bénéficient, par l'entremise du DIH, d'un
droit à l'aide consacré aux articles 70 du Protocole 1 et 18 du Protocole II de 1977 et aux
articles 23 et 59 de la IVe Convention de 1949.
En outre, l'assistance humanitaire devra répondre aux besoins de la population
nécessiteuse: distribution de rations alimentaires, réhabilitation nutritionnelle, construction
de camps pour réfugiés ou déplacés, approvisionnement en eau, installations de
dispensaires, d'hôpitaux de campagnes, d'unités chirurgicales et orthopédiques, etc.
(758) Cf SCIDNDLER (D.), Le droit à l'assistance humanitaire: droit et/ou obligation? in
Colloque international sur le droit à l'assistance... , ibid., pp. 34-38.
(759) DIENG (A.), L'action du système des Nations Unies et le droit à l'assistance humanitaire, in
Colloque international sur le droit à l'assistance..., op. cit., p. 47.
(760) DIENG(A.), idem., p. 47.
..... "',

324
Le concept d'assistance humanitaire allie la morale (solidarité dans le besoin,
sociabilité), l'éthique (fondement d'une morale humanitaire) et le droit(761). La pluralité
ainsi induite a poussé une partie de la doctrine à opérer la distinction entre "le droit de
demander ou d'obtenir une assistance humanitaire et le droit d'insister pour fournir lIDe telle
assistance (...). En règle générale, il apparaît qu'il n'existe pas à l'heure actuelle, de droit de
lege lata d'apporter une telle assistance, mais son exercice est subordonné au consentement
de l'Etat intéressé"(762). 11 en résulte que, pour certains juristes comme ESPlELL, le droit
d'assistance humanitaire appartiendrait à la catégorie des "nouveaux droits" dont la
positivité appelle à un renforcement nonnatif sans que "cela ne constitue aucunement a
priori un obstacle à son existence en tant que tel, si le cadre actuel du Droit international le
permet et si ce droit résulte de la conjonction, de la confluence, d'autres droits déjà
consacrés"(763).
L'assistance humanitaire se ramifie en droits et devoirs. Les obligations liées à
l'aide humanitaire constituent le devoir d'apporter une aide humanitaire aux populations en
détresse. Elles sont assorties d'un droit des victimes à recevoir cette aide, de la demander et
d'y accéder.
Ce droit à l'assistance humanitaire en faveur des victimes n'existe pas en tous
temps. Si le DIH l'admet pour les victimes des conflits internationaux ou non
internationaux, sa mise en œuvre est difficile dans le contexte d'hostilités ouvertes. A
l'inverse, on pourrait croire que ce droit à l'aide serait plus favorisé dans les cas de
catastrophes naturelles ou de tensions internes. TI n'en est pourtant pas ainsi. Dans toutes
les hypothèses, la souveraineté des Etats devra être respectée, en même temps que le
corollaire de l'assistance aux victimes, le droit à la vie.
(761) Cf ZANGID (C.), Fondements éthiques et moraux du droit à l'assistance humanitaire in
Colloque international..., op. cit., pp. 3-10.
(762) DINSTEIN (Y), Les conséquences juridiques des atteintes au droit à l'assistance
humanitaire in Colloque international..., op. cît., p. 39.
(763) ESPIELL (HG.), ... op. cît., p. 18.

325
L'assistance comporte alors un volet sécuritaire, une protection qui "contient
donc un ensemble de règles qui cherchent à garantir à la personne tombée aux mains d'une
partie adverse une certaine qualité de vie et une certaine dignité, mais en tennes réalistes,
c'est-à-dire en tenant compte de la nécessité militaire"(764).
L'assistance hwnanitaire devra s'inscrire dans le cadre du consentement de
l'Etat. Le DIH en tient largement compte par l'incorporation de clauses de sauvegarde de la
souveraineté. Ce consentement, corrélatif au principe de la bonne foi, résulte des
engagements souscrits par les Etats en adhérant aux Conventions hwnanitaires. Le
Professeur rORRELLI s'accorde à reconnaître l'existence de "droits que l'Etat a reconnu à
ses ressortissants victimes du conflit sur la base des articles 71717 et 8 des quatre
Conventions ou sur celle de l'article 18, paragraphe 2 du Protocole II. Confonnément aux
articles 54 du Protocole 1 et 14 du Protocole II, il lui est interdit d'utiliser la famine comme
méthode de guerre"(765).
L'admission d'lD) devoir d'assistance hwnanitaire, outre son inscription dans le
DIB, repose sur d'autres instruments juridiques, notamment les résolutions 43/131 du g
décembre 1988, 45/100 du 14 décembre 1990 ("Assistance hwnanitaire aux victimes des
catastrophes naturelles et situations d'urgence du même ordre"), 46/182 ("Renforcement de
la coordination de l'aide hwnanitaire d'urgence de l'ONU") du 19 décembre 1991(766).
Ce droit/devoir d'assistance a pris une grande ampleur à la suite de la résolution
de l'Institut de Droit international du 13 septembre 1989 dont l'article 5 dispose: "l'offre,
par un Etat, un groupe d'Etats, une organisation internationale ou un organisme
hwnanitaire et impartial tel que le Comité International de la Croix-Rouge, de secours
(764) Cf Symposium sur l'action humanitaire et les opérations de maintien de la paix. Rapport, op.
cit., p. 111.
(765) TORRELLI (M.), De l'assistance à l'ingérence humanitaires ? ..op. cit., p. 243.
(766) Cf SCillNDLER (D.), op. cit., p. 34 ; BLONDEL (IL.), L'assistance aux personnes
protégées, in RIeR N° 767, septembre-octobre 1987, pp. 471-489.

326
alimentaire ou sanitaire à Wl Etat dont la population est gravement menacée dans sa vie ou
dans sa santé ne saurait être considérée comme Wle intervention illicite dans les affaires
intériemes de cet Etat. Toutefois, de telles offres de secours ne peuvent, notamment par les
moyens mis en œuvre, revêtir des apparences d'Wle menace d'une intervention armée ou de
toute autre mesure d'intimidation ; les secours seront accordés et distribués sans
discrimination.
Les Etats sur le territoire desquels de telles situations de détresse existent, ne
refuseront pas arbitrairement de pareilles offres de secours humanitaires"(767).
L'assistance humanitaire bénéficie également d'une reconnaissance à travers les
"Principes directeurs concernant le droit à l'assistance humanitaire" adoptés par l'Institut
international de droit humanitaire à San Remo en 1992(768).
fi appert de ces différents textes que pour revêtir le caractère d'une action licite,
l'assistance humanitaire devra répondre aux exigences des principes de souveraineté et de
subsidiarité.
La souveraineté implique la non-absence du consentement étatique. Elle se
retrouve dans le principe de subsidiarité qui reconnaît "en premier" à l'Etat territorial "la
faculté d'organiser, de déclencher et de conduire l'assistance humanitaire"(769). En cas de
défaillance de cet Etat, il revient à la communauté internationale d'intervenir "en second"
par le truchement de l'ONU et des organisations indépendantes et neutres.
(767) Cf. Annuaire de l'I.D.I., Vol. 63-II (1990), Annexe ID, p. 345.
(768) Cf SCHINDLER (D.), op. cit., p. 34.
(769) DIENG (A.), op. cit., p. 48.

327
Ce privilège de l'Etat, marqué du sceau de la souveraineté, a été affmné avec
force par la résolution de l'AGNU 43/131 qui admettait le rôle prioritaire de l'Etat dans
"l'initiative, l'organisation, la coordination et la mise en œuvre de l'assistance humanitaire".
En cas d'insuccès, l'intérêt supeneur de l'humanité commande que l'Etat
territorial accepte la proposition de secours des autres membres de la communauté
internationale. Dès lors, le consentement doit se traduire soit par une sollicitation de l'Etat
territorial soit par l'accord tacite de son gouvernement. Il en résulte, a contrario, que
l'intervention sollicitée par les rebelles ou les opposants politiques serait d'une licéité
douteuse.
La CU abondait dans ce sens, dans l'affaire entre le Nicaragua et les Etats-Unis:
"On voit mal en effet ce qui resterait du principe de non-intervention en Droit international
si l'intervention, qui peut déjà être justifiée par la demande d'un gouvernement, devait aussi
être admise à la demande de l'opposition à celui-ci. Tout Etat serait ainsi en mesure
d'intervenir à tout coup dans les affaires intérieures d'un autre Etat"(770).
La Cour en arrive à la précision qu"'iI n'est pas douteux que la fourniture d'une
aide strictement humanitaire à des personnes ou à des forces se trouvant dans un autre
pays, quels que soient leurs affiliations politiques ou leurs objectifs, ne saurait être
considérée comme une intervention illicite ou à tout autre point de vue contraire au Droit
international"(771). Si l'assistance doit se borner à une action impartiale, neutre et sans
discrimination, il faut noter, toutefois, que selon la Cour "l'appui fourni (...) sous forme de
soutien financier, d'entraînement, de fournitures d'armes, de renseignements et de soutien
logistique, constitue une violation indubitable du principe de non-intervention"(772).
(770) CIl, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Arrêt du 27 juin
1986, § 246, Rec. 1986, p. 126, cité par QUOC DINH et aiii, op. cit., p. 419.
(771) CIl, Activités militaires, Rec. 1986, § 242, pp. 125-126.

328
La CU conclut en dégageant une véritable théorie de l'aide : "pour ne pas avoir
le caractère d'une intervention condamnable dans les affaires intérieures d'Wl autre Etat,
non seulement l"'assistance humanitaire" doit se limiter aux fins consacrées par la pratique
de la Croix-Rouge, à savoir "prévenir et alléger les souftTances des hommes" et "protéger
la vie et la santé, faire respecter la personne humaine" ; elle doit aussi, et surtout, être
prodiguée sans discrimination à toute personne dans le besoin... "(773).
Une fois ces conditions respectées, l'assistance ne revêt ni le caractère d'une
agression ni celui d'une intervention d'humanité.
Les Etats n'ont aucWl devoir à imposer de force une aide humanitaire à des
victimes se trouvant dans d'autres pays, en revanche, selon le Pro SCHINDLER, "ils ont le
devoir de faciliter l'assistance humanitaire prêtée par d'autres Etats, des organisations
intergouvernementales ou des organisations non gouvernementales. Si des mesures
coercitives sont prises à rencontre d'un Etat, les approvisionnements destinés à satisfaire
des besoins essentiels de l'être humain doivent en être exemptés"(774).
(772) CD, idem., p. 125.
(773) CD, Activités militaires, op. cit., pp. 124-125, § 243, cité par PARTSCH (K.J.), Sujets actifs
et passifs du droit à l'assistance humanitaire in Colloque international sur le droit à l'assistance... ,
op. ci1., p. 30.
(774) Cf SCHlNDLER (D.), op. cit., p. 37 ; cf également les MOHONK CRITERIA FOR
HUMANITARIAN ASSISTANCE IN COMPLEX EMERGENCJES adoptés en 1994 par la
Conférence Mondiale des Religions pour la paix, appelant les Etats membres de l'ONU à
"reconmu"tre le droit à l'assistance humanitaire et le devoir de la fournir et ; reconnaître et garantir
le droit des organisations humanitaires d'avoir accès aux populations en danger dans les situations
d'urgence complexes" HARDCASTLE (R.I.) et CHUA (A.T.L.), Assistance humanitaire: pour un

329
Le droit ou devoir d'assistance humanitaire peut s'implanter durablement dans
le Droit international général à partir du tremplin du Dili. Pour ce faire, il devra se nourrir
de principes et règles consacrés tels que le principe de souveraineté, le principe de
subsidiarité, le droit à la vie et au respect de la dignité humaine.
L'actualisation
du
contenu
du
DIH
constitue
un
soubassement
au
développement progressif du DIH à l'orée du XXIe siècle. Elle devra s'appuyer sur les
ressources offertes par une mise en œuvre effective, à l'écart des sentiers de la politisation.
droit à l'accès aux victimes des catastrophes naturelles in RICR N° 832, décembre 1998, pp. 633-
655 (ici p. 645).

330
TITRE II - POUR UNE MISE EN OEUVRE EFFECTIVE DU D.I.H.
Le D.LH., à l'instar des autres branches du Droit, est soumis à une tension entre
la théorie et la réalité. Si la nécessité du Droit apparaît comme un facteur essentiel
d'épanouissement de la société, l'effectivité de la nonne juridique s'apprécie, en définitive,
par la solidité des moyens mis en œuvre pour sanctionner son éventuelle violation.
Dans cette perspective, la doctrine n'a pas manqué de recenser les insuffisances
manifestes de la mise en œuvre du DIH. La carence repose sur un certain nombre de
défauts dans la fonnulation théorique et dans l'expression pratique de la nonne
humanitaire.
Ce diagnostic d'insuffisances, effectué dans les développements antérieurs,
appelle, en réaction, la fonnulation de solutions aux obstacles à la sédimentation africaine
duD.LH.
Dès lors, l'application effective doit s'appuyer sur des sanctions pénales visant à
réprimer tous les manquements constatés à la règle humanitaire. Pour ce faire,
l'accompagnement de la mise en œuvre par des nonnes précises de comportement et! ou de
résultat, doublées au besoin par l'institution de mécanismes répressifs, représente une des
données tendancielles du Dili contempomin.
A cette fin, l'instauration de juridictions répressives pennanentes ou Ad Hoc,
par l'effet d'intimidation, de dissuasion et de punition escompté, constitue un progrès
supplémentaire dans la voie d'une mise en œuvre plus complète en direction des Etats et
des populations.

331
Toutefois, la répression des violations du Dili, prolongement de la mise en
œuvre, devra s'afIi"anchir à son tom de certaines déficiences constatées. A ce niveau,
l'exégèse du DIH offre une première solution: seule une pénalisation effective, alliée à une
volonté politique inébranlable des Etats, pennettra de sunnonter les faiblesses nonnatives
et structurelles dans la répression des violations du DIH (Chapitre 1).
Il en résulte que le rôle du juge constitue l'un des maillons les plus importants
dans la chaîne d'édification et de consolidation du DIH. Cependan~ une répression
déraisonnée des infractions hwnanitaires, risque de détourner les Etats de la voie
juridictionnelle pour rechercher d'autres cadres plus appropriés de règlement de lems
différends.
Au niveau national, le DIH devra s'articuler autour des mesures d'application de
nature législative ou réglementaire. TI s'y ajoute le rôle de la population, destinataire
privilégié de la diffusion du DIH.
Une autre solution aux insuffisances détectées, réside dans la "nationalisation"
et la "socialisation" de la mise en œuvre, voies obligées pour une efficacité accrue du DIH
(Chapitre il).

332
CHAPITRE 1 - LA PENALISATION EFFECTIVE DES VIOLATIONS DU
D.I.H.
L'idée d'une justice pénale internationale n'est pas nouvelle. Elle remonte, selon
les historiens du Droit pénal international, au procès de Pierre De HAGENBACH
coupable d'atrocités commises à l'encontre des habitants de la ville de Breisach au ISe
siècle(77S).
Toutefois, les premières expériences modernes faites en faveur d'une justice
pénale internationale trouvent leur fondement dans les articles 227 à 230 du Traité de
Versailles du 28 juin 1919 sur la base desquels devait être déféré l'ex-Empereur allemand
GUILLAUME II à un Tribunal international pour "offense suprême contre la morale,
internationale et l'autorité sacrée des traités". Malheureusement, cette expérience fut un
échec par suite du refus des Pays-Bas de le livrer à la justice. On recourut à un autre
expédient, l'organisation à LEIPZIG de procès d'une douzaine d'accusés allemands qui
furent condamnés à des peines symboliques(776).
En 1920, la S.D.N. jugea prématurée l'idée lancée par le Comité Consultatif des
Jmistes d'une Haute Cour de Justice Internationale.
n faut attendre la fin du second conflit mondial pour constater les progrès du
Droit pénal international. Suite à la guerre, les alliés vainqueurs ont institué des Tribunaux
militaires internationaux à Nuremberg (8 août 1945), à Tokyo (19 janvier 1946) et à
(775) Cf SCHABAS (W.A.), Justice pénale internationale: Dissuasion et lutte contre l'impunité,
in Recueil des Cours de l'IIDH, 28e session d'enseignement, Strasbourg (30 juin -25 juillet 1997),
pp. 123-133.
(776) Voir TAVERNIER (p.), L'expérience des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-
Yougoslavie et pour le Rwanda in RICR N° 828, 7ge année, novembre-décembre 1997. Dossier :
Juridiction pénale internationale et Dili : Les Tribunaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda,
p.647.

333
Rastatt (Zone française d'occupation en Allemagne), pom juger les criminels de guerre
nazis et japonais.
C'est autour de la notion de crime contre l'humanité(777) que s'est nouée la
volonté de créer un Tribunal pénal international. A cette violation du DIH, s'ajouteront
d'autres crimes internationaux tels que le génocide, les crimes de guerre et les crimes
contre la paix.
Après 1946, la justice pénale internationale végétera longtemps dans l'oubli, de
loin en loin ressuscitée par des propositions doctrinales de cours pennanentes à
compétence wùverselle.
Les progrès viendront, un demi-siècle plus tard, avec la création par le Conseil
de Sécurité, du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (Résolutions 808 du 22
février 1993 et 827 du 25 mai 1993) et du Tribunal pénal pour le Rwanda (Résolution 955
du 8 novembre 1994).
Le Tribunal pour le Rwanda siégeant à Arusha (Tanzanie) en est bientôt à sa
sixième année d'existence. fi a capitalisé une certaine somme jurisprudentielle dont
l'analyse révèle de nombreuses difficultés organisationnelles et fonctionnelles. fi en résulte
que la pénalisation effective des violations du DIH ne manque pas de souffrir des
insuffisances entravant le bon déroulement des travaux de cette jmidiction (Section 1).
Les difficultés rencontrées par le Tribunal d'Arusha pennettent de dégager une
double voie corrective :
(777) Cf GRAVEN (1), Les crimes contre l'humanité, in RCAnI 1950 (1), Vol. 76, pp. 432-601 ;
NAHLIK (S.E.), Le problème des sanctions en Dm, in Etudes et Essais sur le DIH..., pp 469-481~
ARTUCIO (A), L'impunité et le Droit international in Rencontres Internationales sur l'impunité
des auteurs des violations des Droits de l'Homme..., pp. 191-208 ; DUPUY (p.M.), Observations
sur le crime international de l'Etat, R.G.D.I.P., 1980, n° 1 et 2, pp. 449-486.

334
- d'une part, au niveau régional, une africanisation plus poussée de la
juridiction pénale pourrait optimiser la mise en œuvre du DIH ;
- d'autre part, au niveau universel, la création récente d'une Cour criminelle
K
internationale (si elle était dépouillée de lacunes déjà diagnostiquée~ offrirait, mutatis
mutandis, une solution alternative ou complémentaire aux difficultés de la répression des
infractions humanitaires en Afrique (Section II).
SECTION 1 - Le Tribunal d'Arusha face aux entraves à la répression des
violations du DIU en Afrique
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (ci-après T.P.I.R) a été créé à
la suite de graves violations du DIH commises lors du génocide de 1994 qui a fait plus
d'un demi-million de morts panni les Tutsis(778).
Ce Tribunal a vu le jour après bien des propositions tendant à la création
d'instances juridictionnelles pour juger les crimes de guerre commis par les Etats-Unis
d'Amérique au Vietnam ou pour faire le procès de Saddam HUSSEIN coupable
d'agression contre l'IRAN(779).
(778) DJIENA-WEMBOU (M.C.), Le T.P.I.R. - Rôle de la Cour dans la réalité africaine in
RADIC N° 828, p. 731. Cf MAISON (R), Le crime de génocide dans les premiers jugemems du
TPIR, RGDIP 1999, pp. 129-145.
(779) Cf TAVERNIER (p.), L'expérience des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-
Yougoslavie et pour le Rwanda, in RICR N° 828, op. cil., p. 648 ; CISSE (C.), Premier bilan des
activités judiciaires du TPIR, in Annuaire africain de Droit international, Vol. 4, 1996, pp. 269-
278.

335
Les massacres des Tutsis par les Hutus ont débuté le 6 avril 1994 après que
l'avion qui ramenait à Kigali, les Présidents JWandais Juvenal HABYARIMANA et
bunmdais Cyprien NTARYAMIRA, fut abattu(780).
Ces tueries avaient été longtemps préparées et attisées par la Radio Télévision
des Mille Collines et le journal extrémiste Kangura(781).
Devant les horreurs perpétrées, la Commission des Droits de l'Homme de
l'ONU, lors de sa session extraordinaire du 24 au 25 mai 1994, désigna le doyen René
DEGNI-SEGUI pour enquêter sur la situation(782).
Son rapport préliminaire du 28 juin 1994 révéla toute l'ampleur du génocide et
la nécessité, soit de créer Wl Tribunal ad hoc, soit d'étendre les attributions du TPI pour
l'ex-Yougoslavie(783).
(780) Voir FALL (E.) et KAIDI (H.), Rwanda, Silence on tue ! in Jeune Afrique N° 1742, 34e
année, du 26 mai au 1er juin 1994, pp. 16-18. Cf. OUGUERGOUZ (F.), La tragédie rwandaise du
printemps 1994 : quelques considérations sur les premières réactions de l'ONU, in RGDIP 1996,
Vol. 100, N° 1, pp. 149-177 ; VIDAL (C.), Le rapport parlementaire français sur la tragédie
rwandaise, in Afrique contemporaine nO 189, 1er trimestre 1999, pp. 77-80.
(781) Cf PETER (C.M.), Le TPIR : obliger les tueurs à rendre compte de leurs actes, RICR N°
828, op. cil., pp. 741-742 ; Cf. CHRETIEN (lP.), Rwanda: les médias du génocide, Paris,
Karthala, 1995, 397 p.
(782) Cf. MUBIALA (M.), Le Tribunal international pour le Rwanda, RADIC, octobre 1995,
Tome 7, N° 3, p. 610 et s.
(783) Cf Commission des Droits de l'Homme, 51 e session, Point 12 de l'ordre du jour provisoire :
Question de la violation des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, où qu'elle se
produise dans le monde, en particulier dans les pays et territoires coloniaux et dépendants. Rapport
sur la situation des Droits de l'Homme au Rwanda, soumis par M. R. DEGNI-SEGUI, Rapporteur
Spécial de la Commission des Droits de l'Homme, en application du paragraphe 20 de la résolution
1994 S 3/1 de la Commission, en date du 25 mai 1994. UN. ECOSOC. Doc N° E/CN.4I1995.7, 28
juin 1994 in REFUGEE SURVEY QUATERLY, UNHCR, Vol. 13, N° 2 et 3, Automne 1994, pp.
116-138 et pp. 139-147. Selon le Doyen DEGNI-SEGUI : "des familles entières sont décimées,
grands-parents, enfants. Personne n'y échappe, même pas les nouveau-nés" (p. 8). Ce rapport sera
complété par trois autres rapports du 12 août 1994 (Doc. ONU EiC.N.4/1995/7), du Il novembre
1994 (OOC. ONU EiC.N.4/1995/70) et du 18 janvier 1995 (DOc. ONUE/C.N.4I1995/71).

336
A la suite du rapport, le Conseil de Sécurité créa une Commission d'experts
composée de M. Atsu-Koffi AMEGA (Togo), Mme Haby DIENG (Guinée) et M. Salifou
FOMBA (Mali). Le rapport de cette Commission aboutissait aux mêmes conclusions que
celles du rapport précédent(784).
Le TPIR sera créé à la suite de la résolution 955 du 8 novembre 1994 du
Conseil de Sécurité. Son siège fut établi à Arusha, par la résolution 977 du 22 février 1995
et l'accord de siège fut signé le 31 août 1995 entre l'ONU et le gouvernement
tanzanien(785).
La création du TPIR a suscité des émules puisqu'on a proposé de copier cette
structure pour juger les crimes de guerre commis en Tchétchénie, au Burundi, en R.D.C.
(ex-Zaïre)(786).
Toutefois, de nombreuses critiques avaient accueilli cette création de triblUlaux
"qui masqueraient la politique des grandes puissances marquée du sceau de la
sélectivité"(787).
Même si la création du TPIR visait à résorber la lacune de la responsabilité
individuelle pour violation du DIH, le Professeur DJIENA-WEMBOU note que "s'agissant
d'lBl organe judiciaire institué par un organe essentiellement politique dans un contexte
-;..
(784) Nations Unies. Rapport préliminaire de la Commission d'Experts indépendants( établie
conformément à la résolution 935 1994) du Conseil de Sécurité, Doc. 8/1994/1125, 4 octobre
1994, pp. 31-32, inMUBIALA(M.), op. cil., p. 611.
(785) Doc. SIRes.l955 (1994), 3453e séance, Texte reproduit dans RADIC, Tome 6, N° 4,
décembre 1994, pp. 683-695 ~ cf. MORRIS (V.) & SCHARF (M.P.), The International Criminal
Tribunal for Rwanda, New-York, Transnational Publishers Ine., 1998, 2 vol. (743 p., 572 p.).
(786) TAVERNIER (p.), op. cit., p. 648.
(787) TAVERNIER (p.), ibid., p. 649.

337
international en pleine mutation, il convient de s'interroger sur les considérations politiques
qui ont entouré la création et la mise en place du Tribunal... "(788).
Pour sa part, le Tribunal pour l'ex-Yougoslavie considère cet avènement
comme "... un progrès considérable dans la lutte contre les violations des Droits de
l'Homme et répond à la préoccupation fondamentale de voir la justice internationale
contribuer à l'instauration d'une paix réelle et durable dans les pays déchirés par des
conflits armés et où la dignité même est bafouée sur une grande échelle"(789).
Les critiques les plus véhémentes sont celles proférées par l'Ambassadeur
rwandais au Conseil de Sécurité, M. BAKURAMUTSA pour lequel l'existence du TPIR
n'était
mue
que
par
le
souci
d' «apaiser
la
conscience
de
la
communauté
internationale »(790).
Ces critiques ont conduit le Rwanda à voter contre la résolution 955 alors
même que le vœu de création du TPIR avait été le fait du gouvernement rwandais par
l'entremise d'une lettre du 22 septembre 1994 de son représentant permanent à l'ONU,
adressée au Président du Conseil de Sécurité(791).
(788) DJlENA-WEMBOU (M.C.), op. cit., p. 732 ; cf PHILPOT (J), Le Tribunal pénal
international pour le Rwanda: la justice trahie, in Etudes internationales, Vol. 27 (1996), N° 4,
Québec, décembre, pp. 827-840 : Pour PHILPOT, le TPIR "n'est ni indépendant, ni impartial, ni
permanent. Il ne relève ni d'un consensus international émanant de l'Assemblée Générale des
Nations Unies, ni d'un quelconque traité basé sur l'égalité souveraine de toutes les Nations... C'est
un tribunal ad hoc du vainqueur créé par le Conseil de Sécurité sur demande de la partie
victorieuse de la guerre d'agression, le nouveau gouvernement du Rwanda, dominé par le Front
Patriotique Rwandais" (p. 830).
(789) Cité par DJIENA-WEMBOU, ibid., p. 739.
(790) Cf DOC. ONU SIPY.3453, p. 16, cité par DUBOIS (O.), Les juridictions pénales nationales
du Rwanda et le Tribunal internationaL in RICR N° 828, op. cit., p. 765.
(791) DOC. S/I994/1115 du 28 septembre 1994, cité par APTEL (C.), A propos du Tribunal pénal
international pour le Rwanda, in RICR N° 828, p. 724.

338
D'autres hostilités se sont manifestées devant la création du TPIR par la voie
institutionnelle au détriment de celle conventionnelle qui avait les faveurs de l'Afrique. Le
fondement statutaire du TPIR a été centré autour des articles 39 et 41 (Chapitre VII) de la
Charte de l'ONU, plaçant le génocide dans le champ de la menace à la paix et à la sécurité
internationale. La préférence du Tiers-Monde allait plutôt au fondement du Chapitre VI sur
le règlement des différends(792).
Cependant, il faut reconnaître, à l'heure actuelle, que les réticences africaines se
sont progressivement estompées depuis le Sommet de l'OUA à Hararé (Zimbabwe) en juin
1997(793). L'organisation du TPIR (paragraphe 1) comme son fonctionnement
(paragraphe II) se heurtent à de nombreuses difficultés.
Paragraphe 1 - Difficultés relatives à l'organisation du Tribunal
d'Arusha
Depuis sa création, le TPIR est confronté à un grand nombre de difficultés
entravant le bon déroulement de la répression des violations du DIH commises lors du
génocide de 1994.
De prime abord, des critiques se sont élevées au sujet de la localisation du TPIR
à Arusha. Il semble que le choix de cette ville ait été dicté par le fait qu'elle avait servi de
lieu de négociation des "Accords d'Arusha" de partage de pouvoir entre le FPR et l'ex-
Président HABYARIMANA. De surcroît, cette localisation obéit à des arguments
géographiques, économiques et politiques. C'est ce qui résulte du rapport du Secrétaire
Général de l'ONU, qui explique que des raisons de justice et d'équité commandent cette
(792) Cf DJlENA-WEMBOU, op. cit., p. 735.
(793) A ce Sommet, le Secrétaire Général de l'OUA a recommandé aux Chefs d'Etat et de
gouvernement (Rapport du 25 mai 1997) d'apporter leur coopération aux travaux du TPIR. Cf
DJlENA-WEMBOU, op. cit., p. 736.

339
localisation dans un territoire neutre pour éviter une justice sélective(794). Il fallait écarter
les soupçons pesant sur le gouvernement rwandais du FPR "perçu comme celui des
vainqueurs
cherchant à utiliser la justice internationale
comme
instrument de
vengeance"(795).
Un autre argument a été avancé, celui de la déliquescence des infrastructures
judiciaires rwandaises détruites lors du génocide. Cet argument est fallacieux puisque,
même à Arusha, des travaux ont été nécessaires pour équiper les salles d'audiences et le
centre pénitentiaire.
Le gouvernement rwandais du F.P.R. n'a pas manqué de critiquer ce choix. En
effet, parmi les motifs de rejet de la résolution 955 par le Rwanda, il a invoqué sa
frustration de ne pas abriter le TPIR dans le but de contribuer à l'effort de lutte contre
l'impunité et de répondre aux attentes du peuple rwandais éprouvé dans sa chair et son
sang(796).
Cependant, la résolution 955 n'exclut pas la possibilité pour le TPIR de se
"réunir ailleurs quand il le jugera nécessaire pour l'exercice efficace de ses fonctions" (§ 6
in fine). En outre, son règlement de procédure et de preuve dispose en son article 4 : "une
chambre peut, avec l'autorisation du Président, exercer ses fonctions hors du siège du
Tribunal si l'intérêt de lajustice le commande"(797).
(794) Rapport du 13 février 1995 du Secrétaire Général en application du paragraphe 5 de la
Résolution 955 (1994) du Conseil de Sécurité, S/1995/134 cité par DUBOIS (O.), op. cit., p. 766.
(795) Cf DUBOIS (O.), op. cit., p. 767 ; Cf. PlllLPOT (1.), op. cÎt., p. 830.
(796) Cf MUBIALA (M.), Le Tribunal international pour le Rwanda, op. cit., p. 614.
(797) Règlement de procédure et de preuve, adopté le 29 juin 1995. Nations Unies. Tribunal pénal
international pour le Rwanda. ITR/3/Rev.l, première session, 26-30 juin 1995, La Haye, Pays-Bas
in 7 RADIe (1995), pp. 726-759. Ce règlement fut amendé le 6 juin 1997 (cf RADIC, décembre
1998, Tome 10, N' 4, pp. 767-800).

340
Ces controverses sont aussi alimentées par l'éclatement de la localisation des
organes puisque le siège du TPIR est à Arusha, celui du Procureur à La Haye et le bureau
du Procureur adjoint à Kigali. nen résulte un grand nombre de déplacement de personnes
et de matériel entre ces trois villes, compliquant à souhait la procédure.
D'autres difficultés ont trait à l'organisation du TPIR. Le Tribunal comprend
trois organes : les chambres, le parquet et le greffe.
Les deux chambres de premier degré (art. 27 à 29 du Règlement précité) et la
Chambre d'Appel (art. Il du Statut du TPIR) sont composées de onze juges. Les
candidatures sont présentées par les Etats membres de l'ONU et les Etats observateurs. Le
Secrétaire Général établit ensuite, une liste restreinte de douze à dix-huit candidats
représentatifs des principaux systèmes juridiques du monde, qualifiés et intègres. fi revient
enfin à l'Assemblée Générale d'élire six juges pour un mandat de quatre ans renouvelable
(art. 12 du Statut précité).
Ces six juges du TPIR, siégeant en première instance (soit trois par chambre)
élus en mai 1995 sont: Laïty KAMA (Sénégal), Président; Yakov A OSTROVSKY
(Russie), Vice-Président; Lennart ASPEGREN (Suède), Tafazzal HOSSAIN KHAN
(Bangladesh), Navanethem PILLAY (Afrique du Sud) et William Hussein SEKULE
(Tanzanie)(798).
Le mandat du Président est de deux ans, renouvelable une fois. Il est élu par ses
pairs (art. 18 et 19 du Règlement). Dans l'exercice de ses fonctions, il est assisté d'un Vice-
Président élu dans les mêmes conditions (art. 20 et 21 du Règlement). Le bureau du TPIR
est formé du Président, du Vice-Président et du doyen des Présidents des Chambres de
première instance (art. 23). Des dispositions sont relatives à la préséance, à la récusation, à
l'empêchement et à la démission des juges.

341
Le greffe(799) est placé sous la supervision d'Wl greffier ayant rang de Sous-
Secrétaire Général adjoint des Nations Unies, désigné par le Secrétaire Général après
consultation du Président du Tribunal. Il est assisté d'Wl greffier adjoint et d'Wl personnel.
Une division d'aide aux victimes et aux témoins se trouve sous sa responsabilité (art. 34 du
Règlement)(SOO).
L'originalité du TPIR se révèle au niveau de deux organes (le Procureur et la
chambre d'appel) qu'il partage avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
(TPIY).
Le Procureur du TPIY assurant les mêmes fonctions auprès du TPIR dispose
d'une grande indépendance(SOl). fi bénéficie de l'assistance d'ml procureur adjoint et d'ml
personnel(S02), désigné par le Secrétaire Général de l'ONU sur proposition du
procureur(S03).
Les cinq juges de la chambre d'appel du TPIY(S04) siègent à la chambre
d'appel du TPIR. Cette chambre peut confinner, annuler ou réviser les décisions des
chambres d'instance. Toutefois, l'appel n'est recevable que si le recours porte sur une "a)
(798) Cf APTEL (C.), op. cit., p. 722.
(799) Art. 30 à 36 du Règlement de procédure et art. 16 du Statut du TPIR annexé à la résolution
955.
(800) En février 1997, M. Agwu Ukiwe OKALI (Nigeria) a été nommé responsable du greffe en
remplacement de M. Andronico 0. ADEDE (Kenya).
(801) Cf art. 15 du Statut du TPIR et art. 37 et 38 du Règlement de procédure.
(802) En août 1995, seule une dizaine de personnes se trouvaient au bureau du procureur adjoint à
Kigali. Cf Premier rapport annuel d'activités du TPIR, du 30 juin 19%, Doc. ICTR/3/CRP3, (Doc.
ONU A/511399-SI19%1778) cité par Cécile APTEL, op. cit., p. 725.
(803) Jusqu'en septembre 1999, le procureur était Mme Louise ARBOUR (Canada) qui a remplacé
en octobre 1996 M. Richard 1. GOLDSTONE (Afrique du Sud). Le procureur adjoint pour le
TPIR est Bernard MUNA (Cameroun) qui succède à Honoré RAKOTOMANANA (Madagascar).
Mme ARBOUR, nommée Présidente de la Cour suprême du Canada a été remplacée par Mme
Carla DEL PONTE.

342
erreur sur un point de droit qui invalide la décision ; ou b) erreur de fait qui a entraîné Wl
déni de justice" (art. 24 du Statut du TPIR).
La révision de la sentence d'appel n'intervient qu'en cas de découverte de faits
nouveaux, sur l'initiative de l'accusé ou du procureur(SOS). Dans l'accomplissement de
leurs fonctions, juges et greffiers, procureurs et personnel disposent, à des degrés variables,
de privilèges et immunités diplomatiques (art. 29 du Règlement).
En dépit d'une structuration aussi détaillée, des lacunes organisationnelles sont
apparues dans la pratique.
Depuis son installation au premier semestre de 1995 jusqu'à une période
récente, le Procureur a été dans l'impossibilité de prendre connaissance des enregistrements
d'incitation au génocide de la Radio Télévision des Mille Collines(S06). TI a fallu recourir
aux services des traducteurs et interprètes pour comprendre le sens de locutions employées
telles que "INTERHAMWE" (ceux qui se tiennent debout), "IMPUZAMUGAMBI" (ceux
qui combattent ensemble) désignant les milices extrémistes Hutus, ou de tennes comme
"INYENZI" (Cafards) utilisé à la place de Tutsis, ou "travailler" et "débroussailler" pour
signifier, tuer des Tutsis(807).
Ensuite, à la dispersion des locaux entre les Pays-Bas, le Rwanda et la
TaD7JlDie, est venu s'ajouter Wl éparpillement des lieux d'emprisonnement. Cette
ventilation s'appuie sur l'art. 26 du Statut, qui dispose : "Les peines d'emprisonnement sont
exécutées au Rwanda ou dans Wl Etat désigné par le Tribunal international pour le Rwanda
(S04) Art. 107 à 119 du règlement de procédure. Il s'agit en décembre 1998 de : Antonio
CASSESE (Italie), Li HAOPEI (Chine), Gabrielle KIRK MC DONALD (Etats-Unis), Ninian
STEPHEN (Australie), LaI Chand VOHRAH (Malaisie).
(SOS) Art. 25 du Statut et art. 120 du Règlement de procédure.
(S06) Cf Décision du TPIR DU 14 août 1997, Affaire N° ICTR-97-32-DP, p. 3, cité par APTEL
(C.), op. cit., p. 725.
(807) Cf MUBIALA (M.), op. cil. p. 613.

343
sur la liste des Etats qui ont fait savoir au Conseil de Sécurité qu'ils étaient disposés à
recevoir des condamnés. Elles sont exécutées confonnément aux lois en vigueur de l'Etat
concerné, sous la supervision du Tribunal"(SOS).
il est à craindre, à ce propos, que les condamnés ne soient pas soumis aux
mêmes conditions de détention puisque les Etats ne disposent pas des mêmes capacités
qualitatives d'infrastructures pénitentiaires(S09). Dans cet ordre d'idées, la candidature de
peu d'Etats africains serait accueillie favorablement, eu égard à l'état des prisons africaines.
Or, il serait d'un grand effet dissuasif si les prisons rwandaises abritaient des condamnés du
TPIR On pOWTait ainsi vérifier le désir d'impartialité et de justice équitable du
gouvernement rwandais.
D'autre part, le manque de personnel se fait sentir. Jusqu'en janvier 1997, sur les
cent soixante quatre postes de juristes, traducteurs et enquêteurs prévus, soixante quatorze
étaient encore à pourvoir.
Des raisons d'impartialité avaient conduit à exclure le recours à tout personnel
rwandais. Quant au gouvernement rwandais, il a récusé les enquêteurs français et belges,
les
suspectant
de
duplicité
et
d'avoir
soutenu
le
régime
génocidaire
d'HABYARIMANA(S10).
L'image de respectabilité du TPIR a été érodée avec le scandale qui a poussé à
la démission pour manque d'efficacité du Procureur adjoint RAKOTOMANANA et du
greffier ADEDE.
(808) En application de cet article, six Etats ont proposé leurs services : Autriche, Belgique,
Danemark, Norvège, Suède et Suisse; cf. DJIENA-WEMBOU (M.c.), op. cil., p. 746 (note de bas
de page N° 10).
(809) Cf. TIETCHEU (l), Rwanda: un Tribunal en mal de soutien, in Jeune Afrique Economie
du 6 janvier 1997, NO 232, pp. 72-73.
(810) Cf. DUBOIS (O.), op. cil., p. 765.

344
Un autre problème entravant l'activité du TPIR concerne ses locaux. Jusqu'en
décembre 1997, il ne disposait que d'une seu1e salle d'audience et d'une salle pour les
procès utilisées alternativement par les deux chambres d'instance. Pour pallier ces
insuffisances, me solution consisterait à recourir à la jonction d'instances prévue à l'article
48 du Règlement de procédure, voie qui pennettrait de mieux établir les dessous de la
machination génocidaire(811).
La création du TPIR visait à concilier deux exigences opposées, d'une part
juger les auteurs des violations du DIH commises en 1994 et lutter contre l'impmité des
responsables, et d'autre part pennettre la réconciliation nationale tout en évitant les
velléités de justice vengeresse.
La difficu1té de rapprocher ces exigences aura des répercussions sur le
fonctionnement du TPIR.
Paragraphe II - Difficultés relatives au fonctionnement du Tribunal
d'Arusha
L'Wle des originalités des événements rwandais de
1994 réside dans
l'enchevêtrement des qualifications juridiques susceptibles de s'appliquer à cette situation.
Initialemen~ il s'agissait d'm conflit anné non international entre les forces
gouvernementales (F.A.R.) et les rebelles tutsis et hutus modérés du F.P.R. A cette
dimension interne, sont venus se greffer des aspects internationaux tels que le soutien de la
France et du Zaïre aux FAR et celui de l'Ouganda au FPR. TI en décou1e Wle mixité
renforcée, à l'image du conflit Yougoslave auquel il est souvent mis en parallèle.
(811) Selon le Procureur adjoint : "La conspiration est la clef pour comprendre les événements du
Rwanda. En regroupant les accusés, nous pouvons mieux présenter comment ils se sont organisés,
c'est un moyen de comprendre l'histoire", cité par UBUTABERA, Journal indépendant
d'informations sur le TPIR, N° 15, 7 août 1997, Arusha, p. 1, cité par Cécile APTEL, op. cit., p.
729.

345
Le Professeur TAVERNIER le confinne : "En effet, les conflits Yougoslave et
lWandais mêlent étroitement les aspects internes et les aspects internationaux. Dès lors, il
serait arbitraire de séparer ces deux types de conflits, bien que le Droit international et le
droit humanitaire aient prévu des règles différentes pour ces deux catégories de
\\situations"(812).
L'interaction des différentes qualifications et l'ampleur du génocide ont une
incidence sur le fonctionnement du TPIR.
'i--
D'abord, il fallait résoudre le problème du droit applicable : COMMON LAW
?C..
(droit coutumier) ou CIVIL LAW (droit civil) ? Selon l'option préférée, des conséquences
différentes en découleront au niveau de la procédure pénale. Le problème réside dans le
fait que "le Statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, repris par celui du
TribW18l pénal pour le Rwanda a été préparé par le Service juridique des Nations Unies et
par des juristes fonnés au droit anglo-saxon. Il est donc fortement inspiré par la common
law qui avait déjà été appliquée à Nuremberg"(813). Or, dans les pays anglo-saxons
(common law), la procédure est accusatoire à l'opposé des pays européens de droit
continental (civillaw) dans lesquels la procédure est de type inquisitoire.
Cependant, la domination du COMMON LAW a été amoindrie dans la pratique
par les chambres du TPIR qui utilisent indifféremment et sans ordre de priorité les deux
systèmes juridiques(814).
d'informations sur le TPIR, N° 15, 7 août 1997, Arusha, p. 1, cité par Cécile APTEL, op. cit., p.
729.
(812) Cf. TAVERNIER (p.), L'expérience des Tribunaux pénaux..., op. cit., p. 660.
(813) TAVERNIER, op. cit., p. 655.
(814) Voir Affaire Georges RUTAGANDA, arrêt du 6 mars 1997 de la chambre de première
instance 1 (Request for examination of an order of the Tribunal) ~ Affaires jointes Clément
KAYISHEMAet Obed RUZINDANA, Arrêt du 17 avril 1997 de la chambre de première instance
fi (Probative Value ofWitness Testimonies) ; et Affaire Joseph KANYABASm de la chambre de
première instance II, Arrêt du 18 juin 1997 sur la compétence du Tribunal, in HARHOFF (F.), Le

346
Des différences notables existent entre les deux types de procédures. Dans le
système de droit civil, la partie adverse est instruite des charges pesant contre elle et
dispose du droit à la défense. Les juges apprécient la valeur des preuves. A l'inverse, dans
le système du common Law, Ilseul l'acte d'accusation (parfois accompagné des pièces à
l'appui) est porté à la connaissance des juges le premier jour du procès. A mesure que le
procès avance, il arrive alors souvent que des débats contradictoires s'engagent au sujet de
la recevabilité des preuves, à la suite des objections formulées par l'une des parties"(815).
Le rôle du juge differe dans les deux systèmes : "dans les juridictions de droit
civil, les juges sont tenus de jouer lors du procès un rôle actii: directif: alors que dans un
système de droit coutumier, ils tendent à laisser davantage les parties contrôler le cours du
procès et à lem permettre de formuler les questions et de déterminer quelles preuves sont à
porter devant le tribunal"(816). Ensuite, l'importance de la règle du précédent est plus
accenWée dans les pays de common law, contrairement aux pays de droit civil dans
lesquels les revirements jurisprudentiels sont toujours possibles.
De smcroît le libellé des arrêts et jugements n'est pas identique. Dans le
système de common law, les décisions sont exposées longuement, avec des opinions
dissidentes détaillées alors que dans le système de droit civil, la concision dans la
fonnulation des arrêts et jugements est de tradition.
Ces divergences entre COMMON LAW et CML LAW imposent de la part
des juges, un grand effort d'imagination et d'adaptabilité pour dénouer les complexités
procédurales. De plus, ces systèmes juridiques admettent des variantes. Ainsi, le système
de droit civil ne fonctionne pas de la même manière en France et en Allemagne. fi en est
de même pour le système de common law pour les Etats-Unis et l'Australie.
Tribunal international pour le Rwanda: présentation de certains aspects juridiques, RICR N° 828,
p.718.
(815) HARHOFF (F.), op. cit., p. 719.

347
nrevient, en définitive, aux juges de combiner les aspects des deux systèmes,
d'innover, de faire œuvre de jwisprudence novatrice car, en la matière, les précédents de
Nuremberg, Leipzig ou Tokyo s'étaient constitués sur le mode anglo-saxon.
En dehors du droit applicable. we vive controverse a opposé le procureur et le
gouvernement lWandais au sujet du nombre des suspects. L'ampleur du génocide démontre
que tous les segments de la population y ont participé. Les prisons rwandaises regorgent de
détenus dont la participation aux massacres n'est ni directe ni évidente. Le gouvernement
FPR a recensé près de 30.000 suspects alors que le procureur n'en retient qu'une centaine
de responsables. Quant au Rapporteur Spécial des Nations Unies. le Doyen DEGNI-
SEGUI, il dénombre cinquante-einq instigateurs du génocide(817).
Le procureur est confronté à un autre dilemme : certaines personnes accusées
de génocide ont obéi à des instincts de vengeance envers les meurtriers des membres de
leur famille. Comment dès lors dénouer le complexe écheveau de suspects génocidaires, de
ceux coupables d'homicide sur les génocidaires ? Le FPR refuse de condamner l'acte de
vengeance d'lID soldat de son camp et n'accepte, mutatis mutandis, de compétence
qu'envers les crimes commis avant sa prise du pouvoir en juillet 1994.
Le TPIR est un triblIDal ad hoc. Toutefois, devant les difficultés d'appréhension
des coupables, le jugement des principaux suspects risque de s'inscrire dans une séquence
temporelle assez longue. Selon les prévisions les plus optimistes, le TPIR ne pourra juger
au rythme actuel qu'une vingtaine de suspects par an. A titre illustratif, jusqu'en janvier
1997, il n'avait inculpé que vingt et Wle personnes(818).
(816) HARHOFF (F.), idem., p. 719.
(817) Cf OUGUERGOUZ (F.), La tragédie rwandaise, op. cit., p. 175.
(818) Cf Jeune Afrique N° 1769 du 1er au 7 décembre 1994, p. 24. La lenteur du rythme des
inculpations ne cesse d'étonner alors que le nombre d'arrestations augmente régulièrement. Ainsi,
le 2 août 1999, trois anciens ministres du gouvernement intérimaire de 1994 ont été arrêtés et
transférés à Arusha. li s'agit de Jérôme BICAMUMPAHA, Justin MUGENZI et Prosper
MUGlRANEZA. Ces personnalités viennent allonger la liste des principaux instigateurs dont

348
Les principaux instigateurs des massacres ont fui le Rwanda. il faut les
localiser. A cette fin, la coopération des Etats est nécessaire. Les juridictions nationales
peuvent lancer des mandats d'arrêts intemationaux(819) ou poursuivre les suspects se
trouvant sur leur territoire(820) ou encore, se baser sur la liste des principaux responsables
du génocide, établie par le gouvernement de Kigali.
En vertu du principe de la compétence universelle de l'art. VI de la Convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948, le TPIR et les tribunaux
nationaux peuvent concurremment juger les personnes présumées responsables de
génocide et autres violations du DIH.
Le statut du TPIR accorde une primauté au Tribunal d'Arusha. Le procureur
peut, à tout stade de la procédure, demander "aux juridictions nationales de se dessaisir en
sa faveur confonnément au présent statut et à son règlement"(821).
Casimir BIZIMUNGU (ex-Ministre de la Santé), Joseph NZIRORERA (ex-Président de
l'Assemblée Nationale),
Juvenal
KAJELUELI (ex-Bourgmestre de Mukingo),
etc.
Cf
ICTR/lNFO-9-2-195 F. Site Internet: HTTP//WWW.lCTR.org.lindictments-fhtml.
(819) n en fut ainsi pour le Colonel Théoneste BAGOSORA arrêté au Cameroun sur la base d'un
mandat de la Belgique. Il sera inculpé par le TPIR et transféré à Arusha. Cf. APTEL (C.), op. cit.,
p.726.
(820) Ains~ les dossiers relatifs à Joseph KANYABASlll et Elie NDAYAMEAJE ont été
instruits par des juges d'instruction belges alors que celui d'Alfred MUSEMA l'a été par un tribunal
militaire suisse. Le TPIR a dessaisi de ces affaires ces tribunaux. Cf. TPIR, affaire n° ICTR-96-8-
D, affaire nO ICTR-96-15-T et affaire nO ICTR-96-13-D; citées par APTEL (C.), op. cit., p. 727.
(821) Voir également art. 8 al. 1 du Statut du TPIR annexé à la résolution 955. Ains~ en 1996,
Jean Bosco BARAYAGWIZA fut jugé aux Etats-Unis d'Amérique (condamnation au civil) ; le Il
juillet 1996 un tribunal du Canada reconnaissait la participation d'un dignitaire rwandais Léon
MUGESERA au génocide pour "incitation directe et publique à commettre le génocide" ; avant
l'adoption de la loi française 96-432 du 22 mai 1996 portant adaptation de la législation française
aux dispositions de la résolution 955 (in J.D.I.. vol. 123, 1996, NO 3, pp. 795-796), la Cour d'Appel
de Nîmes rendit un arrêt le 22 mars 1996 disqualifiant en faits de tortures les faits de génocide
reprochés à l'Abbé Wenceslas MUNYESHYAKA dont la Cour d'appel de Paris avait ordonné
l'arrestation par un arrêt du 6 novembre 1995 (in RGDIP 1996, 1, Vol. 100, p. 814). Cette affaire
souleva beaucoup de polémiques autant que celle par laquelle Elizaphan NTAKIRUTIMANA,
président de l'Eglise des adventistes du 7e jour à Mugonero, a été relaxé le 17 décembre 1997 par
le juge Texan Marcel NOTZON (Cf lN RE Elizaphan NTAKIRUTIMANA, U.S. District Court
for the Southem District of Texas, Laredo Division 988 F. Supp. 1038, 1997. U.S. District, Lexis

349
Le procureur dispose de pouvoirs étendus. Il peut demander au juge de délivrer
des ordonnances de transfert et de détention préventive. Cette possibilité de l'art. 40 bis du
règlement de procédure et de preuve a été utilisée à l'encontre de douze suspects dont
l'ancien Premier ministre du gouvernement intérimaire d'avril à juillet 1994(822).
Malgré ces pouvoirs, le procureur a été vivement critiqué. Il a été accusé de
lenteur, d'inefficacité, de ne pas poursuivre les véritables responsables. Les Etats africains
se sont longtemps méfiés du TPIR, méfiance qui ne s'est dissipée qu'après le Sommet
d'Hararé de 1997 et la décision du Gabon, du Cameroun et du Kenya de transférer à
Arusha des criminels poursuivis par le tribuna1(823).
pp. 205-209). Le juge refusa son extradition vers le TPIR décidant que l'AGREEMENT signé
entre le gouvernement américain et le TPIR en date du 24 janvier 1995 n'était pas constitutionnel.
Toutefois devant le scandale, Elizaphan sera arrêté un mois après sa libération.
Toujours dans le cadre de la compétence universelle, la Belgique a adopté une "loi du 22 mars
1996 relative à la reconnaissance du TPIY et du TPIR et à la coopération avec ces tribunaux" (in
Revue de Droit pénal et de Criminologie. Vol. 76 (1996), N° 7-8, pp. 855-888) et le Rwanda, une
"loi organique N° 96/08 du 30 août 1996 sur l'organisation des poursuites des infractions
constitutives du crime de génocide ou des crimes contre l'humanité commises à partir du 1er
octobre 1990" qui classe les auteurs des différentes formes de participation au génocide en
Catégorie l (planificateurs, organisateurs, incitateurs, superviseurs et encadreurs), en Catégorie li
(auteurs, co-auteurs ou complices d'homicides volontaires et d'atteintes graves contre les personnes
ayant entraîné la mort), en catégorie ID (autres criminels) et en Catégorie IV (la personne ayant
commis des infractions contre les propriétés).
Selon l'art. 14 de la loi, les personnes de la première catégorie encourent la peine de mort, la 2e
catégorie, la perpétuité, les 3e et 4e catégories des peines d'emprisonnement moindres, cf
MAISON CR.). op. cit.. p. 145.
(822) Art. 8 al. 2 du Statut. Conformément à cet article, la procédure de dessaisissement a été
utilisée dans les affaires N° ICTR-96-2 D, ICTR-96-5-D ; ICTR-96-6D et ICTR-96-7-D ; cf
APTEL (C.), op. cit., p. 727 et Affaire Jean KAMBANDA ICTR 97-23-S du 4 septembre 1998, in
10 RADIC (1998), pp. 836-853.
(823) Le Kenya, en particulier, a facilité, par le montage de l'opération "NAKI" du 18 juillet 1997, .
l'arrestation et le transfert à Arusha de hauts dignitaires du régime génocidaire d'avril 1994.

350
11 reste que la faiblesse des moyens financiers(824) et l'ampleur des tâches
dévolues aux enquêteurs retardent considérablement le traitement des dossiers(825).
Serait-ce là le prix à payer pour une justice équitable et impartiale?
Sans doute, faut-il nuancer la critique puisque le revers de la médaille est
illustré par la justice expéditive des tribunaux nationaux rwandais, souvent peu
respectueux des droits à la défense. Un rapport du Haut Commissaire aux Droits de
l'Homme mentionne que sur 143 jugements rendus au 30 juin 1997, soixante et une
personnes ont été condamnées à mort et seulement six acquittées(826).
Une difficulté supplémentaire a trait à la détermination de la compétence du
TPIR On peut identifier quatre niveaux de compétence : Ratione loci, Ratione materiae,
Ratione personae et Ratione Temporis.
(824) 36,8 millions de dollars de budget ordinaire et 8 millions de dollars de contributions
volontaires. Le TPIR réclamait un budget de 46 millions de dollars; cf TIETCHEU (1.), op. cit.,
p.73.
(825) Selon les estimations, le traitement d'un dossier prendrait en moyenne plus de quatre mois,
étant donné le grand nombre de suspects dont Jean KAMBANDA (Premier ministre du
gouvernement intérimaire), Pauline NYIRAMASUHUKO (Ministre de la Famille et de la
Ir(
Promotion de la Femme dans@ce gouvernement) et son fils Arsène Shalome NTAHOBALL
l'ex-préfet de Butaré, Sylvain NSABIMANA, Hassan NGEZE, éditeur du journal extrémiste
Kangura, le colonel Gratien KABILIGL le commandant Aloys NTABAKUZE et le premier non
rwandais arrêté, le journaliste de la RTLM, le belge Georges Henri RUGGIU. Il faut noter que
l'ex-bourgmestre de la ville de Taba, Jean-Paul AKAYEZD a été condamné le 2 octobre 1998 à
une peine d'emprisonnement à vie (TPIR, Chambre de première instance L Décision relative à la
condamnation, le procureur c/Jean-Paul AKAYEZD, Affaire N° ICTR-96-4-T). La peine est
identique pour l'ancien Premier ministre du Rwanda (1993-1994), Jean KAMBANDA (Affaire N°
ICTR-97-23-9 du 4 septembre 1998 de la même chambre) ; cf MAISON (R), Le crime de
génocide dans les premiers jugements du TPIR, RGDIP, Vol. Cm, 1999, pp. 129-145 ; CISSE
(C.), Premier bilan des activités judiciaires du TPIR, in Annuaire Africain de Droit international,
Vol. 4, 1996, Kluwer Law International, The HagueILondon/Boston, 1997, pp. 269-278.
(826) Human Rights Field Operation, in Rwanda (00)., Genocide trials to 30 june 1997. Status
report as of 15 july 1997, Doc. HRFOR/STRFT/5211115 july 1997IE, p. 3, cité par DUBOIS, op.
cit., p. 776.

351
S'agissant de la compétence ralione loci, le TPIR est chargé de juger les
violations du DIH commises par des Rwandais sur les territoires aérien et terrestre du
Rwanda et dans les pays voisins(827).
La compétence ratione personae se rapporte aux personnes physiques(828). Le
Statut apporte la confirmation d'un des principes du Droit pénal international les plus
établis depuis Nuremberg : le principe de la responsabilité individuelle des instigateurs,
auteurs, co-auteurs, complices, qu'ils
soient simples agents de l'Etat ou hauts-
fonctionnaires, subordonnés ou supérieurs hiérarchiques, civils ou militaires(829).
La compétence ratione temporis recouvre les actes perpétrés durant ces
événements entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 (art. 7 du Statut). Le choix de cette
séquence temporelle est arbitraire. De l'avis de nombreux observateurs, les massacres
d'avril 1994 découlent d'un plan machiavélique dont la genèse remonte bien avant 1994.
La compétence ratione materiae est extensive. Elle englobe les violations
graves du DIH (art. 1er du Statut), dont le génocide (art. 2), les crimes contre l'humanité
(art. 3) et les violations de l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève et du
Protocole additionnel Il de 1977 (art. 4 du Statut).
Le génocide, tenne inventé par le juriste polonais Raphaël LEMKlN en 1944, a
fait l'objet d'une défmition codifiée à l'article Il de la Convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide, selon lequel il s'agirait de meurtres et autres crimes
graves "commis dans l'intention de détruire en tout ou partie, un groupe national, ethnique,
racial ou religieux comme tel... ".
(827) Art. 7 du Statut du TPIR
(828) Art. 5 du Statut du TPIR.
(829) Art. 6 du Statut du TPIR.

352
L'art. 1de ladite Convention dispose : "le génocide, qu'il soit commis en temps
de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit des gens". Les Statuts du TPIY et du
TPIR reprennent textuellement l'énumération de ces actes de génocide:
"2.
a) Meurtre de membres du groupe ;
b) atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des membres du
groupe;
c) Sownission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ~
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ~
e) Transfert forcé d'enfants d'un groupe à un autre groupe ~
3) Seront punis les actes suivants:
--
a) le génocide;
b) l'entente en vue de commettre le génocide;
c) l'incitation directe et publique à commettre le génocide ;
d) la tentative de génocide ~
e) la complicité dans le génocide" (art. 2 al. 2 et 3 du Statut).
Une question tenninologique se pose : le génocide est-il synonyme d'épuration
ou de purification ethnique ? Le génocide viserait la destruction d'un groupe tandis que

353
l'épuration tendrait à l'exclusion d'un groupe. Cette distinction appelle des nuances. Les
événements de 1994 englobaient à la fois des crimes de haine ethnique, des viols, tortures,
déplacements forcés de population, c'est-à-dire des actes de génocide et d'épuration
ethnique.
L'interdiction de génocide constitue une obligation ERGA üMNES reconnue
dans l'affaire de la Barcelona Traction de 1970. Auparavant, la CU relevait en 1951 : "La
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide révèle l'intention des
Nations Unies de condamner et de réprimer le génocide comme "un crime de droits des
gens" impliquant le refus du droit à l'existence de groupes humains entiers, refus qui
bouleverse la conscience humaine, inflige de grandes pertes à l'humanité, et qui est
contraire à la fois à la loi morale et à l'esprit et aux fins des Nations Unies (Résolution
96(1) de l'Assemblée générale, Il décembre 1946)"(830).
Toutefois, les éléments constitutifs de génocide sont difficilement rapportables.
Ainsi, le génocide ne s'étend pas à l'intention de détruire un groupe politique ou culturel
même si relativement au Rwanda, FPR et FAR constituaient des groupes aux motivations
politiques et culturelles opposées.
Ensuite, en droit pénal, l'infraction comporte un élément matériel m81S
également un élément moral. Or, il est difficile d'établir chez l'accusé, l'existence d'une
intention de génocide. A cette fin, la CDI, dans son commentaire du projet de code des
crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, précisait: "Toutefois, l'intention générale
de commettre l'Wl des actes énumérés, associée à une conscience diffuse des conséquences
probables de cet acte pour la victime ou les victimes immédiates, ne suffit pas pour qu'il y
(830) Cf Réserves à la Convention sur le génocide. Avis consultatif, Recueil des arrêts, avis
consuhatifs et ordonnances, 1951, Rec. 1951, p. 15. Cité par ROBERGE (M.C.), Compétence des
Tribunaux ad hoc pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda concernant les crimes contre l'humanité et le
crime de génocide, in RI.C.R N° 828, op. cit., p. 707.

354
-h.
ait crime de génocide. La défmition~ce crime exige lUle disposition d'esprit ou une intention
spécifique concernant les conséquences globales de l'acte prohibé"(831).
Doit-on également faire la distinction entre homicide et génocide? A ce propos,
le TPIY dans l'affaire KARADZIC et MLADIC, apportait quelques éclaircissements
susceptibles de guider la jurisprudence du TPIR sur l'élément moral : "L'intention
spécifique au crime de génocide n'a pas à être clairement exprimée (...). L'intention peut
être inférée d'un certain nombre d'éléments, tels que la doctrine générale du projet politique
inspirant les actes susceptibles de relever de la définition de l'article 4 ou la répétition
d'actes de destruction discriminatoires. L'intention peut également se déduire de la
perpétration d'actes portant atteinte au fondement du groupe, ou à ce que les auteurs des
actes considèrent comme tels, actes qui ne relèveraient pas nécessairement en eux-mêmes
de l'énumération du paragraphe 2 de l'article 4, mais qui sont commis dans le cadre de la
même ligne de conduite"(832).
Le statut du TPIR s'étend aux crimes contre l'humanité. Son article 3 reprend
les dispositions du Statut du T.M.I. de Nuremberg annexé à l'Accord de Londres du 8 août
1945 dont l'article 6 énumérait dans la catégorie des crimes contre l'humanité :
".. .l'assassinat. l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte
inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre ou bien les
persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux lorsque ces actes ou
persécutions, qu'ils aient constitué ou non lUle violation du droit interne du pays où ils ont
été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du
Tribunal, ou en liaison avec ce crime".
(831) Rapport 1996 de la CDI, Doc. ONU A/SI/ID, p. 88, cité par ROBERGE (M.c.), op. cit., p.
708.
(832) Procureur cl Radovan KARAnZIC et Ratko MLADIC. Examen des actes d'accusation dans
le cadre de l'article 61 du Règlement de procédure et de preuve. Affaire IT-9S-S-R6l, Il juillet
1996, parag. 92 et 94, in ROBERGE, op. cit., p. 709.

355
Cette défmition assez restrictive (puisque liant ce crime aux crimes de guerre et
contre la paix) a été élargie par la Loi N° 10 du Conseil de Contrôle allié pour l'Allemagne
du 10 décembre 1945 qui Y incluait: les "atrocités et délits comprenant, sans que cette
énumération soit limitative, l'assassinat, l'extennination, l'asservissement, la déportation,
l'emprisonnement, la torture, le viol ou tous autres actes inhumains commis contre toute
population civile et les persécutions pour des motifs d'ordre politique, racial ou religieux,
que lesdits crimes aient constitué ou non une violation de la loi nationale dans le pays où
ils ont été perpétrés"(833).
Après la deuxième guerre mondiale, les juridictions nationales emprunteront
d'autres types d'incrimination. La défmition du crime contre l'humanité prendra un relief
particulier avec le procès d'EICHMANN, inculpé en vertu de la loi israélienne de 1951 sur
le châtiment des nazis et des collaborateurs des nazis. Le droit israélien énumérait comme
crimes contre l'humanité, les actes suivants : "assassinat, mauvais traitements, ou
déportation pour des travaux forcés ou pour tout autre but, de la population civile des ou
dans les territoires occupés ; assassinat ou mauvais traitements, des prisonniers de guerre
ou des personnes en mer ; exécution d'otages ; pillage des biens publics ou privés ;
destruction sans motif des villes et des villages ; et dévastation que ne justifient pas les
exigences militaires"(834).
La Cour de Cassation française, lors du procès de Klaus BARBIE, accentue le
caractère imprescriptible des crimes contre l'humanité et les identifie comme "...les actes
inhumains et les persécutions qui, au nom d'un Etat pratiquant une politique d'hégémonie
idéologique, ont été commis de façon systématique, non seulement contre des personnes
en raison de leur appartenance à une collectivité raciale ou religieuse, mais aussi contre les
(833) Citée par Marie-Claude ROBERGE, op. cit., p. 700.
(834) ROBERGE (M.C.), Ibid., p. 702.

356
adversaires de cette politique, quelle que soit la fonne de leur opposition"(835). Elle
rejoint l'idée inspiratrice de la Convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes de
guerre et des crimes contre l'humanité.
La Cour d'Appel
des Etats-Unis,
dans
l'affaire
DEMJANnJK contre
PETROVSKY, reconnatt le principe de l'Wliversalité des crimes contre l'hwnanité et la
possibilité d'extrader vers tout pays (en l'espèce, Israël) tout individu collaborateur des
nazis (en l'occurrence un garde de camp de concentration) en s'appuyant sur la Constitution
d'Israël de 1950 et la loi précitée de 1951 même si certains aspects du crime en question
relèvent du simple assassinat au regard des lois américaines(836).
Quant à la C.D.I., dans son projet de Code des crimes contre la paix et la
sécurité de l'humanité adopté lors de sa 48e session en 1996, elle a une approche
exhaustive incluant des actes tels que: "la discrimination institutionnalisée pour des motifs
raciaux, ethniques ou religieux comportant la violation des libertés et droits fondamentaux
de l'être humain et ayant pour résultat de défavoriser gravement une partie de la population
(et) d'autres actes inhumains qui portent gravement atteinte à l'intégrité physique ou
mentale, à la santé ou à la dignité humaine tels que mutilations et sévices graves"(837).
Pour le TPIR, les crimes contre l'humanité sont "ceux commis dans le cadre
dime attaque généralisée et systématique dirigée contre une population civile, quelle
qu'elle soit, en raison de son appartenance nationale, politique, ethnique, raciale ou
religieuse... " (art. 3 du Statut). Cette approche diffère de celle de l'art. 5 du Statut du TPIY
qui traite plutôt d'actes "commis au cours d'un conflit anné, de caractère international ou
interne... ".
(835) Arrêt du 20 décembre 1985, in ID.!. (Clunet), 1986, pp. 129 à 142, cité par ROBERGE
(M.C.), op. cil., p. 702.
(836) DEMJANJUK v. PETROVSKY, 776 F. 2nd 571 (6th Circuit 1985), cert. denied, 475
U.S.l016 (1986), cité par ROBERGE, p. 703.
(837) Cf ROBERGE (M.C.), op. cit., p. 704.

357
Au sens de l'art. 4 de son Statut, la compétence du TPIR s'exerce également
envers les personnes ayant commis des violations de l'article 3 commun aux quatre
conventions de Genève de 1949 et du Protocole additionnel II de 1977. A cet égard, le
TPIR rejoint l'art. 5 du Statut du TPIY, puisqu'il se réfère aux règles des conflits armés non
internationaux.
Au-delà des aspects de conflit anné, ces dispositions entendent également
s'appliquer à des actes commis par des civils non annés Gournalistes, médecins, prêtres,
éditeurs, hommes d'affaires)(838).
Certaines infractions rangées dans la catégorie de crimes contre l'humanité, se
retrouvent dans celle des violations de l'art. 3 et du Protocole II : assassinat, viol, actes
inhumains, etc. Des risques de chevauchement sont à craindre. Ainsi en est-il du TPIR, qui
dans l'affaire du Colonel BAGOSORA, a préféré l'inculper sous plusieurs chefs
d'accusation (génocide, crimes contre l'humanité et violations de l'art. 3 et du Protocole
II)(839).
Le Statut du TPIR a prévu un certain nombre de garanties judiciaires pour
l'accusé, au rang desquelles on peut énumérer la présomption d'innocence, le droit à
l'assistance d'Wl avocat, le droit à une justice sans retard excessif, le droit à Wl interprète, le
droit à la défense (art. 20).
Il consacre également des pnnclpes fondamentaux du Droit pénal telles
NULLUM CRIMEN NULLA POENA SINE LEGE, et NON BIS IN IDEM(840).
(838) Ainsi en fut-il de l'ancien bourgmestre de la ville de Taba, Jean Paul AKAYESU, du vice-
président de la milice interhamwé, Georges Anderson RUTAGANDA, du préfet de Kibuyé,
Clément KAYISHEMA et de l'homme d'affaires Obed RUZINDANA
(839) Cf PETER (C.M.), le TPIR : obliger les tueurs à rendre compte de leurs actes, in RICR N°
828,op.crt.p.745.
(840) Cf DONNEDIEU DE VABRES (H.), Le procès de Nuremberg devant les principes
modernes du Droit pénal international, in RCADI, 1947, Vol. 70, Tome l, p. 526 et s.

358
Pendant l'enquête, tout suspect dispose de droits prévus à l'art. 42 du Règlement
de procédure, et l'enregistrement des interrogatoires pourra se faire sous la fonne sonore ou
vidéo. Toutes les pièces de la procédure sont transmises, dès que possible, par le procureur
à la défense (art. 66 du Règlement), sauf si cela devait nuire à la conduite ultérieure des
enquêtes.
L'échange des moyens de preuve se pratique avant le début du procès. La
défense pourra produire soit une défense d'alibi en demandant la comparution de témoins
de décharge, soit un autre moyen de défense, y compris plaider l'aliénation mentale (art. 67
du Règlement précité).
L'article 69 du Règlement de procédure organise des mesures de protection des
victimes et des témoins (non-divulgation de leur nom en cas de danger exceptionne~
assistance de la division d'aide, etc.). L'art. 75 du même texte accentue cette protection en
octroyant la possibilité d'emploi de pseudonyme, de huis-clos, d'altération de l'image ou de
la voix, etc.
Les chambres pourront accueillir tout élément de preuve, vérifier son
authenticité, sans être liées par les règles de droit interne (art. 89 dudit Règlement).
La libéralité de la procédure se traduit aussi par la recevabilité d'éléments
généraux de preuve "pennettant d'établir l'existence d'une ligne de conduite délibérée, dans
laquelle s'inscrivent des violations sérieuses du Droit international humanitaire..." (art. 93
du Règlement).
Il faut relever aussi les difficultés procédurales relatives à l'audition des
témoins. La première audition n'a eu lieu que lors du procès d'AKAYEZD le 17 janvier
1997. Le recours à des témoins anonymes est une pratique peu comante. Le TPIR éprouve
beaucoup de difficultés à faire témoigner les victimes qui ont peur de représailles

359
ultérieures. Quant au fonctionnement de la division d'aide, elle demeure encore à l'état
végétatif. Le TPIR n'admet pas la preuve par déclaration assennentée (AFFIDAVIT) qui
ne pennet pas de contre-interrogatoire, pratique largement utilisée par le TMI de
Nuremberg.
La recherche de preuves relève alors de la gageure. Le fait de travailler dans un
environnement culturel et une langue différents, complique la tâche des enquêteurs. Dans
ce contexte, de nombreuses preuves peuvent disparaître ou être falsifiées si le nombre
d'enquêteurs n'est pas suffisant.
Devant les difficultés d'arrestation des suspects, on s'est interrogé sur la
possibilité de procès IN ABSTENTIA (par contumace). Au regard des droits des accusés,
une telle politique ne semble pas avoir été consacrée.
Les principes de la CûMMûN LAW abondent dans ce sens, à l'inverse du
système du CIVIL LAW dans lequel, une telle procédure serait possible. L'absence de
procès par contumace correspond alors "aux aspirations des pays de tradition anglo-
saxonne qui refusent, au nom des exigences d'un procès équitable (fair trial, due process of
law) qu'un procès puisse se dérouler en dehors de la présence de l'accusé"(841).
Pour contourner cette lacune, le TPIY a recouru à la procédure de l'art. 61 de
son Statut, considéré comme "un succédané imparfait du jugement par contumace"(842)
qui consiste à organiser une audience publique avec comparution de témoins devant une
chambre d'instance qui dispose de toute latitude de confinner, compléter ou modifier l'acte
d'accusation et de délivrer contre l'accusé absent, un mandat international transmis ensuite
à tous les Etats.
(841) TAVERNIER (p.), L'expérience des tribunaux..., op. cit., p. 657.
(842) ASCENSIO (H.) et PELLET (A.), L'activité du Tribunal pénal international pour l'ex-
Yougoslavie (1993-1995), in AF.D.I., 1995, p. 110.

360
Jusqu'ici, le TPIR n'a pas avalisé cette possibilité.
Sur le même registre, peut-on surmonter ces difficultés en recourant à
l'enlèvement de suspects par des commandos spéciaux comme dans le cas d'EICHMANN?
Cette procédure extrême a été employée pour la capture d'un accusé du TPIY avec l'aide de
l'OTAN et de la SfOR. Malheureusement, cette opération s'est aussi soldée par la mort
d'un des accusés(843).
Le déroulement des procès du TPIR peut être ralenti par d'autres difficultés. Il
en est ainsi de la règle de Droit pénal bien connue sous le nom NON BIS IN IDEM(844).
Ce principe s'oppose à ce qU'Wle personne soit jugée deux fois pour le même fait (par un
tribunal national et le TPIR). Mais une dérogation à ce principe a été instaurée dans le cas
où la juridiction nationale aurait jugé l'accusé pour un crime de droit commun (art. 9, al. 2,
lettre a, du Statut) ou sans garanties suffisantes d'impartialité et d'indépendance (art. 9, al.
2, lettre b du Statut).
Le Règlement de procédure et de preuve du TPIR apporte quelques
aménagements en prévoyant la possibilité de dessaisissement des tribWlaux nationaux, et
en cas de refus le recours au Conseil de Sécurité (art. 13).
L'idée inspiratrice de cette disposition a été combattue par le gouvernement
rwandais qui a invoqué la violation par la résolution 955 de l'article 6 de la Convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide, reconnaissant Wle compétence
"concurrente et indépendante"(845) des tribunaux nationaux et internationaux en la
matière.
(843) Cf TAVERNIER (p.), op. cit., p. 658.
(844) Prévue à l'art. 9 du Statut du TPIR.
(845) Cf. Mémorandum du gouvernement rwandais sur l'installation du Tribunal international pour
le Rwanda,Kigali, 4 novembre 1994 (polycopie), cité par Mutoy MUBIALA, le TPIR...., op. cit., p.
616.

361
Le TPIR avait été instauré dans le but de lutter contre l'impwùté des principaux
responsables du génocide et des autres violations du DIH perpétrés en 1994 au Rwanda, et
de faire cesser leurs effets. Mais l'exigence d'une justice équitable commande aussi la prise
en compte des objectifs de reconstruction et de réconciliation nationales.
La difficulté de combiner ces exigences asymétriques conduit à la recherche
d'autres solutions, aux faiblesses nonnatives et structurelles constatées.
SECTION II • Les remèdes aux faiblesses normatives et structurelles de la
répression des violations du DIH en Afrique
Depuis leur accession à la souveraineté internationale, les Etats africains sont
confrontés à de nombreux conflits annés. Ceux-ci sont également révélateurs d'une
pluralité de violations du DIH.
Les récentes tentatives visant à réprimer ces infractions humanitaires ont
achoppé sur des obstacles d'ordre strocturel et nonnatif Si certaines insuffisances sont
inhérentes à un mimétisme institutionnel prononcé, d'autres découlent du manque de
volonté des Etats de traduire en actions les règles auxquelles ils avaient consenties.
Il en appert que pour remédier aux faiblesses déjà diagnostiquées, il serait
nécessaire d'adhérer à une justice pénale de proximité allant vers une africanisation
répressive (Paragraphe 1) sans négliger le recours incontournable à une universalisation
répressive corrigeant les lacunes présentes des tribunaux ad hoc (Paragraphe II).

362
Para2raphe 1 - Pour une sédimentation africaine de la répression
des violations du DIB
Depuis sa mise en place, le TPIR a fait la preuve d'insuffisances tant au niveau
organisationnel qu'au niveau fonctionnel. Ces lacunes ressortent, pour l'essentiel, du
caractère de justice importée puisque le TPIR possède, à quelques légères nuances
adaptatives près, les mêmes Statut, règlement de procédure et de preuve que son aîné, le
TPIY. Ce mimétisme exacerbé a conduit certains juristes à s'interroger sur le degré
d'originalité du TPIR, étant entendu que cette juridiction partage des liens institutionnels
prononcés avec le Tribunal de La Haye tels la Cour d'Appel et le Procureur(846).
Ce rapprochement trop étroit semble divorcer avec une approche purement
africaine de la justice pénale. L'organisation et le fonctionnement du TPIR ne reflètent pas
suffisamment des valeurs africaines de justice et d'équité. Les prénùsses du TPIR portent
l'empreinte d'une justice d'origine européenne et d'un Droit pénal hérité de Nuremberg. Il
en découle un certain déphasage entre la machinerie institutionnelle ainsi créée et sa
réception par les populations africaines. Ces lacunes ne sont que l'exsudation du défaut de
concordance entre une justice désincarnée et les réalités africaines les plus manifestes.
Pour remédier à cet état de fait, deux directions de recherche s'offrent pour
mieux africaniser le TPIR :
- d'une part, intégrer certaines valeurs africaines à l'image de la Cour
Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (1) ;
(846) MUBIALA (M.), Le Tribunal international pour le Rwanda: vraie ou fausse copie du
Tribunal pénal international de l'ex-Yougoslavie? in RG.D.I.P., 1995-4, pp. 929-954.

363
- d'autre part, se rapprocher d'lUle authentique justice africaine dépouillée de
ses effets infamants (avec lUl vainqueur et Wl vaincu) à l'instar de la Truth and
Reconciliation Commission (T.Re.) (Commission pour la Vérité et la Réconciliation) (2).
1 - La Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples a été
créée par le Protocole du 9 juin 1998 relatif à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et
des Peuples, adopté lors du 34e sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA
tenu à Ouagadougou du 1er au 10 juin 1998(847).
L'avant-projet du Protocole a été l'œuvre d'experts gouvernementaux, de la
Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et de la Commission
Internationale des Juristes, réunis au Cap en 1995 et à Nouakchott en 1997(848).
La création de la Cour vise à remédier aux laclUles et dysfonctionnements de la
Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples(849).
La Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples adoptée le 27 juin
1981 met l'accent sur les wleurs africaines de civilisation et magnifie les structures
sociales telles que la famille, la communauté, dans le respect dû aux personnes les plus
vulnérables (femmes, enfants, vieillards, handicapés). La Charte instaure un équilibre entre
droits de l'Homme et droits des peuples, entre droits civils et politiques et droits
(847) Cf supra, Introduction, note N° 71.
(848) Cf Projet de protocole relatif à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
portant Charte Africaine des Droits de l'Homme et des peuples, Réunion des experts
gouvernementaux sur la question de la création d'une Cour Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples (6-12 septembre 1995), Le Cap, Afrique du Sud. DOC. OAUILEG/EXPJAFC/HPR/(l). 2e
Réunion des experts gouvernementaux juridiques pour la création de la Cour Africaine des Droits
de l'Homme et des Peuples (11-14 avril 1997), Nouakchott, Mauritanie. OUAJEXPJIURlCAF
DHPIRAP(2), in 9 RADIC 1997, pp. 440-448.
(849) Cf BOUKRIF (H), La Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples: un organe
judiciaire au service des Droits de l'Homme et des Peuples en Afrique, in 10 RADIC (1998), pp.
60-87.

364
économiques, sociaux et culturels, entre droits et devoirs. Elle situe l'individu au centre de
la famille, de la société et de l'Etat. Elle énumère un ensemble de droits collectifs à côté
des droits classiques de la première génération.
Organe de supervision et de contrôle du respect des obligations instaurées par la
Charte, la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples ne dispose que de
fonctions quasi-juridictionnelles assez amoindries et ne peut adresser que des
recommandations.
Pour pallier ces insuffisances, la Cour Africaine(850) -dont le mode de saisine
(article 5) est ouvert à la Commission, à l'Etat plaignant, à l'Etat dont la victime est
ressortissante, à l'Etat accusé- a compétence pour tous différends et affaires relevant de
l'intetprétation et de l'application de la Charte Africaine, du Protocole de 1998 et de tout
instrument africain applicable et relatif aux Droits de l'Homme. Cette compétence large est
salutaire, en ce sens qu'elle peut s'étendre à toutes conventions de Droits de l'Homme,
auxquelles les Etats africains font partie au niveau régional ou continental, sous l'égide ou
les auspices de l'OU~ de la CEDEAO, de la SADC, etc.
Le mode de saisine acquiert un relief supplémentaire avec la possibilité pour les
individus et les ONG (art. 5 al. 3 et art. 34 al. 6) d'introduire directement sans passer par le
tamis de la Commission (mais à condition que l'Etat partie ait fait au préalable une
déclaration d'acceptation de la compétence de la Cour en ce domaine), des requêtes en cas
d'urgence ou de violations graves, systématiques et massives des Droits de l'Homme (y
compris en cas d'infractions au DIH)(851).
(850) Selon l'article 2 du protocole, la Cour complète, par ses fonctions de protection, celles de la
Commission.
(851) De l'avis de Hamid BOUKRIF "La Cour aura donc à connaître des violations et atteintes aux
Droits de l'Homme en même temps qu'elle aura compétence pour connaître des requêtes des
minorités et des ethnies ou de leurs représentants qui s'estimeront légitimement fondés à réclamer
des droits que le gouvernement central aura refusé d'octroyer ou que les institutions officielles
n'auront pas respecté ou auront délibérément violé", op. cil., p. 62.

365
La composition de la Cour s'ordonne autour de onze juges (art. 11), élus au
scrutin secret par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement (art. 14). Ces juges
élisent pour un mandat de 2 ans renouvelable une fois le Président et le Vice-Président (art.
21).
Il est souhaitable, à cet égard, que la Cour admette, en son sein, des spécialistes
du Droit pénal mais également des juristes internationalistes.
La Cour a la possibilité d'émettre des avis consultatifs à la demande des Etats
membres de l'OUA ou d'une organisation africaine reconnue par celle-ci (art. 4).
La Cour, dont le Protocole n'entrera en vigueur que trente jours après le dépôt
du quinzième instrument de ratification ou d'adhésion (art. 34 al. 3), rend des décisions
exécutoires que les Etats doivent appliquer dans le délai imparti par la sentence (art. 30).
Les arrêts sont notifiés au Conseil des ministres qui en assure l'exécution pour
le compte de la Conférence (art. 29). Un rapport récapitulant les activités de la Cour est
soumis annuellement à chaque session ordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de
gouvernement (art. 31).
Le Protocole relatif à la Cour Africaine recèle,
cependant,
quelques
insuffisances. On peut déplorer l'inexistence de voies d'appel (art. 28 al. 2) même si la
possibilité d'un recours en révision dans la seule hypothèse de faits nouveaux, a été
aménagée (art. 28 al. 3). En outre, des risques de chevauchement et de concurrence de
compétences entre la Commission et la Cour, peuvent se poser pour les avis consultatifs et
l'intetprétation de la Charté que les deux organes peuvent délivrer. En effet, il faut
reconnaître que "La possibilité de donner des avis consultatifs et d'interpréter la Charte et
les autres instruments pertinents des Droits de l'Homme, est donnée par la Charte à la

366
Commission alors que le Protocole additionnel à la Charte en donne la prérogative à la
Cour"(852).
D'autres lacunes peuvent également être relevées, notamment la possibilité pour
un Etat de saisir la Commission sur la base de l'article 5 du Protocole en même temps que
celle de recowir à la Cour en vertu de l'article 47 de la Charte Africaine, ce qui ne manque
pas de semer "quelque peu la confusion entre les rôles respectifs de ces deux organismes.
Le Protocole ne prévoit pas de cas de saisine concomitante par un Etat des deux
organismes comme il ne défmit pas les critères de compétences et les conditions dans
lesquelles la Commission est tenue de se dessaisir d'une affaire au profit de la Cour"(853).
Des zones d'ombre recouvrent donc les relations entre la Cour et la Commission. Ainsi, il
faut noter que "le Protocole ne précise pas non plus les conditions dans lesquelles la Cour
renvoie une requête devant la Commission ni les raisons d'un renvoi, confonnément à
l'article 6.3 du Protocole qui dispose que "la Cour peut connaître des requêtes ou les
renvoyer devant la Commission"(854).
Il est souhaitable que la Cour, une fois installée, s'attache dans son règlement de
procédure et de preuve à adopter, à clarifier ces points obscurs. En faisant l'économie des
insuffisances de tous ordres du TPIR, la Cour Africaine devra s'appuyer sur les valeurs
culturelles positives proches du vécu social des populations africaines.
2 - La Commission Vérité et Réconciliation: une autre voie de
recherche de l'africanisation de la justice pénale est constituée par l'expérience originale
sud-africaine.
(852) BOUKRIF (H.), La Cour Africaine..., op. cit., p. 81 (note de bas de page N° 34).
(853) BOUKRIF (R), ibid., p. 71 (note de bas de page n° 28).
(854) BOUKRIF (H.), idem., p. 71.

367
fi faut rappeler que la création du TPIR visait à répondre également aux
impératifs de la reconstruction et de la réconciliation nationales au Rwanda. Cependant.,
force est de reconnaître que l'aspect répressif a pris le pas sur ces considérations. Le T.RC.
a voulu divorcer avec une approche purement répressive. Cette perspective essentiellement
nationale, il est vrai, s'inscrit dans le processus de fm de l'apartheid et d'avènement d'une
société nouvelle, multiraciale et démocratique. La création du TRC remonte aux premières
élections législatives véritablement démocratiques d'avril 1994, sanctionnées par la victoire
de l'ANC de Nelson MANDELA. Le nouveau Parlement adopta la Constitution
intérimaire du 22 décembre 1993 fondée sur trente-quatre principes constitutionnels. Cette
Constitution contenait également une déclaration sur l'unité et la concorde nationales, et
sur les injustices de la période de l'apartheid (1948-1994) et précisait l'objectif de création
d'une société fondée sur la démocratie, les Droits de l'Homme et la réconciliation. Elle
comprenait également le texte suivant : "Afin de favoriser cette réconciliation et cette
reconstruction, l'amnistie serait accordée pour les actes, les omissions et les délits à
motivation politique et commis dans le courant des conflits du passé. A cette fm, le
Parlement., en vertu de la présente Constitution, adoptera une loi défuùssant une date-limite
précise..."(855). Cette amnistie suscita beaucoup de sentiments de frustration et de
ressentiment dans la population majoritairement noire. Ainsi, l'AZAPO saisit la Cour
Constitutionnelle
d'un
recours
visant
à
déclarer
les
décisions
d'amnistie
inconstitutionnelles. Dans son arrêt célèbre par ses conséquences politiques, juridiques et
sociales, la Cour se prononce en faveur de la constitutionnalité de la procédure de la
Commission.
Selon la Cour, "les participants aux négociations antérieures ont considéré avec
sagesse que la tâche d'ériger un tel ordre démocratique nouveau était des plus ardues en
raison de l'histoire passée, des émotions profondes ainsi que des injustices inacceptables
qu'elle avait créées ; et que cet objectif ne saurait être atteint sans un engagement résolu et
(855) Cf Annexe à la Constitution, loi 200 de 1993, cité par ERASMUS (G.) et FOURIE (N.), Le
Tribunal pénal international pour le Rwanda... in RICR N° 828, op. cit., p. 758.

368
généreux en faveur de la réconciliation et de l'unité nationale. Convaincus que jamais les
iIüustices du passé ne pourraient être entièrement rectifiées, ils ont jugé qu'il pomrait être
nécessaire, dans certains domaines essentiels, de refermer le livre du passé"(856).
Cette solution représente un compromis réaliste permettant d'atteindre les
objectifs d'Wle société réconciliée avec elle~même en exorcisant les démons de son passé.
Le rapport du IRC de 3000 pages (cinq volumes) représentant trente mois
d'enquêtes et plus de vingt mille auditions(857), a été rendu public le 29 octobre 1998. il
contient les dépositions des victimes, des témoins, les aveux des coupables ainsi qu'un
ensemble de recommandations sur la prévention des violations des Droits de l'Homme à
l'avenîr(858).
Dirigé par l'ex~archevêque, Prix Nobel de la Paix, Desmond TUTU, le TRC a
remporté un succès indéniable en dépit des nombreuses critiques sur sa partialité et sur la
non-inculpation de nombreux criminels dont les chefs de police ayant ordonné les
exécutions et tortures sur les membres de l'ANC, du PAC, de l'AZAPO, etc.
Le rapport du IRC accuse l'ANC de violations des Droits de l'Homme dans ses
camps d'entraînement. L'ANC a intenté une action en justice pour extirper ces passages du
rapport, requête rejetée par la Haute Cour du Cap.
(856) AZAPO and Others, v. The President ofthe Republic of South Africa, 1996 (8) BCLR 1015
(CC), 1020, paragraphe 2, MAHOMED 1., Cité par ERASMUS (0.) et FüURIE (N.), RICR N°
828, p. 758.
(857) Ces chiffres sont fournis par Jeune Afrique Economie N° 277 du 14 décembre 1998 au 3
janvier 1999, p. 71.
(858) Ce rapport a été prévu par la Section 3 (l) de la loi sur la promotion de l'unité et de la
réconciliation nationales de 1995 (Promotion of National Unity and Reconciliation Act), cité par
ERASMUS (0.) et FOURIE (N.), op. cit., p. 759.

369
L'ANC a violemment critiqué le fait qu'une quinzaine de noms (dont celui de
rex-Président Frédérik De KLERK) figurant sur les listes d'accusés, aient été rayés du
document final. Le rapport n'a épargné ni le parti nationaliste zoulou (INKHATA
FREEDOM PARTY) de Mangosuthu BUTHELEZI, ni le parti néo-nazi (Mouvement de
Résistance Afrikaner AWB) ni le PAC, ni Winnie MADIKIZELA MANDELA
"politiquement et moralement responsable" des méfaits de son entourage. fi a mis en cause
des journalistes, médecins, juges, hommes d'affaires, religieux et universitaires ayant
soutenu et collaboré avec le régime d'apartheid(859).
Au demeurant, même si certaines critiques sont fondées, le TRC a révélé le
"caractère dramatique, par bien des aspects, de ses activités; les Sud-Africains auront
entendu par son truchement des révélations ahurissantes (de la bouche, dans certains cas,
de responsables politiques de premier plan demandant à bénéficier de l'amnistie) quant aux
actes du gouvernement précédent et, dans une moindre mesure, des mouvements de
libération"(860). L'impact médiatique des auditions du TRC a été amplifié par la
retransmission radio-télévisée. On a pu assister aux aveux de Winnie MANDELA, aux
pleurs de Mgr. TUTU et à la divulgation des secrets entourant de nombreux crimes(861).
La Commission Vérité et Réconciliation était composée d'un comité sur les
violations des Droits de l'Homme, d'un comité sur l'amnistie et d'un comité sur les
réparations et les réhabilitations.
(859) Cf supra, Jeune Afrique Economie N° 277, p. 71.
(860) Cf ERASMUS (0.) et FOURIE (N.), op. cit., p. 759.
(861) L'aveu était la condition de l'amnistie. Ainsi que le rappelait la Cour Constitutionnelle dans
l'affaire AZAPO, p. 1028, paragraphe 17, "sans ces mesures d'encouragement, rien n'inciterait ces
personnes à révéler ce qu'elles savent et à avouer ce que désirent tant savoir les demandeurs. Avec
ces mesures d'incitation, il devient possible d'atteindre les objectifs qui sont fondamentaux pour
faire naître la morale d'un nouvel ordre politique", in ERASMUS (G.), et FOURIE (N.), op. cit., p.
759; cf également MAZIAU (N.), Le processus d'adoption de la nouvelle Constitution d'Afrique
du Sud: la recherche du consensus et de la consultation populaire, in Droits AFricains, 1995-1996,
N° 15-16, Sorbonne, pp. 47-57.

370
En raison des nombreux crimes et délits d'ordre politique, les travaux du comité
sur l'amnistie ont été les plus médiatisés. Toutefois, le comité sur les réparations et les
réhabilitations n'avait pas un rôle secondaire du fait qu'il recevait les demandes en ce sens
des victimes et pouvait formuler des recommandations d'urgence, de nature provisoire et
des mesures à long tenne.
Des garanties judiciaires de DUE PROCESS OF LAW et de FAIR TRIAL
entouraient le déroulement des audiences, conformément au BILL OF RIGHTS et aux
dispositions sur les droits et libertés de l'article 35 de la Constitution sud-africaine du 6 mai
1996.
L'exemple sud-afiicain vélùcule des aspects moraux évidents dans l'approche
d'une justice éloignée de considérations dichotomiques de vainqueur et de vaincu. Cette
africanisation de la répression des violations des Droits de l'Homme et du DIH rappelle
l'héritage socio.culturel africain fondé sur des valeurs cardinales de repentir, de pardon, de
renonciation à la vengeance, d'absolution, d'écoute et de compréhension. En cela, le TRe a
mieux réussi que le TPIR Sans préjuger des développements futurs des activités du TPIR,
la réconciliation entre Hutus et Tutsis et la reconstitution de la société rwandaise pourront
difficilement s'établir sur la base de procès. Même si la peine de mort a été écartée du statut
du TPIR, le caractère indigne et iJûarnant de la culpabilité des instigateurs et des
exécutants perdurera au-delà de la sentence prononcée.
L'expérience sud-africaine a valeur d'exemple. Les Etats africains devront
méditer cette solution. L'adoption de lois nationales sur les crimes contre l'humanité, les
crimes de guerre et les autres violations du DIB, devra intégrer la préoccupation essentielle
d'apaiser les foyers de tension par d'autres voies que celle d'une répression brutale, fut-elle
d'origine judiciaire ou gouvernementale.

371
Une autre alternative, à mettre en parallèle avec les solutions afilcaines, est
représentée par une universalité répressive dénuée des insuffisances précitées.
Paragraphe II - Pour une répression universalisée des violations du
D.I.H.
La Cour pénale internationale se présente comme l'un des aboutissements de
nombreuses propositions pour une répression universelle des violations du DIH.
Les premières expériences de justice pénale internationale remontent au
tribunal formé en 1474 par des juges originaires d'Alsace, d'Autriche, d'Allemagne et de
Suisse. Ce tribunal jugea Pierre de HAGENBACH accusé de violations des lois de DIEU
et des hommes (meurtre, patjure, viols et autres crimes) pendant qu'il occupait la ville de
Breisach.
Depuis ce procès, l'idée d'un tribunal international ne cessera de resurgir à
chaque époque. Parmi les nombreuses propositions allant dans ce sens, il faut relever l'idée
d'un des fondateurs du CICR, Gustave MOYNIER, lancée le 3 janvier 1872 de création
d'1Ule "institution judiciaire internationale propre à prévenir et à réprimer les infractions à
la Convention de Genève"(862).
Après le demi-succès des tribunaux de Leipzig et Rastatt(863), les T.M.!. de
Nuremberg et de Tokyo ressusciteront avec force le besoin d'lllle criminalisation et d'1Ule
répression internationales.
(862) Cf Projet de Convention pour la création d'une institution judiciaire internationale propre à
prévenir et à réprimer les infractions à la Convention de Genève, in RICR N° 829, mars 1998, pp.
76-78.

372
Une autre proposition à relever est celle du juge français au T.M.I. de
Nuremberg, Henri OONNEDIEU DE VABRES, de création d'une Com criminelle en mai
1947(864).
En marge de ces propositions, la Commission du Droit international fut chargée
en 1948 par l'AGNU d'étudier la question d'Wle Cour criminelle pennanente internationale.
Du fait de la guerre froide et des antagonismes entre les blocs oriental et occidental, la
question fut longuement différée pour ne resurgir qu'à l'occasion de la proposition de la
délégation de Trinité-et-Tobago à la:fin des années 80.
L'AGNU avalisa cette proposition par diverses résolutions: 47/33 du 25
novembre 1992 (priant la C.D.I. d'élaborer un projet de statut d'une Cour criminelle
pennanente) ; 50/46 de 1995 (créant Wl Comité préparatoire) ; 51/627 du 16 décembre
1996 (fixant l'objet et le but d'une Conférence diplomatique sur la question) ; 52/160 du 15
décembre 1997 convoquant celle-ci à Rome (du 15 juin au 17 juillet 1998).
Le statut de la Cour pénale internationale fut adopté à Rome le 17 juillet
1998(865). nn'entrera en vigueur que "le premier jour du mois suivant le soixantième jour
après la date du dépôt du soixantième instrument de ratification, d'acceptation,
d'approbation ou d'adhésion auprès du Secrétaire Général de l'Organisation des Nations
Unies" (art. 126 du Statut).
(863) Cf. BENNOUNA (M.), La création d'une juridiction pénale internationale et la souveraineté
des Etats, in AF.D.I., 1990, pp. 299-306.
(864) HALL (C.K.), Première proposition de création d'une Cour criminelle internationale
permanente, in RICR N° 829, pp. 59-75 : L'auteur cite la proposition faite par DE VABRES le 13
mai 1947 intitulée: "Mémorandum présenté par le délégué de la France. Projet de création d'une
juridiction criminelle internationale". Doc. ONU AIAC. 10/21 (1947).
(865) Statut de la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998 à Rome. DOC. ONU
A/CONF. 183/10.

373
L'organisation de cette Cour (ci-après c.P.!.) s'ordonne autour de la Présidence,
des Sections des appels, de première instance et préliminaire, du Bureau du Procmeur et du
Greffe (art. 34).
La Présidence se compose d'un Président, d'un premier Vice-Président et d'un
second Vice-Président élus par leurs pairs à la majorité absolue (art. 35 du Statut).
Dix-huit juges jouissant d'Wle haute considération morale, d'une expérience
reconnue en matière de Droit pénal et de Droit international, élus en tenant compte d'une
répartition géographique équitable et de la représentation des principaux systèmes
juridiques du monde, complètent la composition de la Cour (art. 36 § 3, a et b du Statut).
D'autres critères de sélection des juges ont été retenus, notamment l'équilibre, autant que
possible, entre les sexes et l'exigence d'une expérience des problèmes relatifs à la violence
sexuelle et à la violence contre les enfants (art. 36 § 8).
Le parquet se compose d'un Procureur assisté de plusieurs procureurs adjoints
(art. 42 § 2). Organe distinct de la Cour, le Procureur dispose d'une large indépendance
(art. 14 et 15), tempérée par la possibilité pour le Conseil de Sécurité de l'ONU de le
dessaisir (sursis à enquêter ou à poursuivre) en vertu des mesures prises dans le cadre du
chapitre VII de la Charte (art. 16 du Statut). Le rôle du Procureur viendra également en
complément de l'action du Conseil de Sécurité qui pourra lui renvoyer Wle affaire (art. 13,
b).
De même, l'intervention du Procureur est liée au dépôt d'une plainte par un
Etat-partie ayant préalablement souscrit une déclaration d'acceptation de la compétence de
la c.P.!. (art. 4 § 2).
Le greffe s'occupe des aspects extra-judiciaires, de l'administration et du service
de la Cour. il se compose d'un greffier, d'un greffier adjoint et d'une division d'aide aux

374
victimes et aux témoins (sur le modèle de celles du TPIY et du TPIR), comprenant un
personnel spécialisé dans les problèmes de tramnatismes psycho-sociaux (art. 36 et 43).
La Cour est subdivisée en trois chambres (Sections) : une Section préliminaire,
une Section de première instance et une Section des appels (art. 34, b).
L'originalité de la CPI réside dans la création de l'Assemblée des Etats-Parties
(sorte de Conseil d'Administration) dont la mission est de contrôler la gestion
administrative de la Présidence, du Procureur et du Greffier, d'examiner et d'approuver le
budget de la Cour et de vérifier les rapports et activités de son propre bureau. Ce bureau se
compose d'un Président, d'un Vice-Président et de membres élus par l'Assemblée. Cette
nouvelle structure' constitue une sorte de magistère moral et surtout financier des activités
de la CPI (art. 112 du statut).
Dans le cadre de ses compétences Ratione loci et Ratione temporis, la Cour
exerce ses pouvoirs et fonctions sur tous les Etats-Parties de tous les continents et agit de
façon permanente (art. 5 à Il).
Dans cette perspective, à l'opposé des tribunaux Ad Hoc d'Arusha et de La
Haye, la Cour instituée à Rome (mais qui siégera à La Haye) n'est pas limitée dans le
temps. A cet égard, des difficultés risquent de se poser pour ces tribunaux Ad Hoc à la fin
de leur mission. n serait souhaitable que la nouvelle Cour hérite des contentieux non
encore vidés par ces tribunaux.
Les crimes internationaux relevant de la compétence de la Cour comprennent
l'agression (art. 5 § l, d et § 2), les crimes contre l'humanité (art. 7), le crime de génocide
(art. 6), les crimes de guerre (art. 8) dont les inftactions graves aux Conventions de Genève
de 1949 (art. 8 § 2, a), les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux
conflits armés internationaux (art. 8 § 2, b), les violations graves de l'article 3 commun aux

375
Conventions de Genève de 1949 en cas de conflit armé non international (art. 8 § 2, c), les
autres violations aux lois et coutumes applicables aux conflits armés non internationaux
(art. 8 § 2, e) et les attaques contre "le personnel, les installations, le matériel, les unités ou
les véhicules employés dans le cadre d'une mission d'aide humanitaire ou de maintien de la
paix conformément à la Charte des Nations Unies" (art. 8 § 2, b, ru).
L'étendue de ces compétences appelle quelques remarques. Le Comité
préparatoire du projet de Statut ne s'est pas mis d'accord sur l'inclusion dans le texte de
crimes tels que le trafic illicite de stupéfiants et autres substances psychotropes, le
terrorisme international, etc. il en résulte qu'un grand nombre de crimes internationaux
échappent à la compétence de la Cour pour être régis par des Conventions particulières.
Or, il s'agit là d'une vacuité du Statut devant l'ampleur sans précédent et récurrent des
crimes de sang ou ceux liés au trafic des stupéfiants. De même, le statut omet dans la liste
des crimes de guerre, l'emploi d'armes nucléaires, biologiques, à laser aveuglantes et des
mines antipersonnel.
Le déclenchement de la procédure (non rétroactive de la Cour) se traduit par la
saisine de la Cour soit sur plainte d'un Etat-partie au Statut, soit sur l'initiative du Procureur
autorisé en cela par la Section préliminaire, soit à la demande du Conseil de Sécurité
agissant en vertu du chapitre VIT de la Charte(866). il faut noter que la CPI peut exercer
ses fonctions et pouvoirs sur le tenitoire de tout autre Etat non-partie à son Statut par
convention signée avec cet Etat àcet effet (art. 4 § 2 in fine).
La Cour applique les dispositions du Statut et de son Règlement de procédure et
de preuve (à adopter), les traités en vigueur, les principes et règles du Droit international,
(866) Aux termes du Statut (art. 16), le Conseil de Sécurité peut demander à la Cour de surseoir à
ses enquêtes et poursuites pour douze (12) mois renouvelables par une résolution adoptée en vertu
du chapitre VU de la Charte des Nations Unies.

376
les principes généraux du droit dégagés par elle à partir des lois nationales, sa propre
jurisprudence et tout texte pertinent des Nations Unies (art. 21).
Le pouvoir bloquant du Conseil de Sécwité en vertu de l'art. 16 du Statut de la
CPf signifie que la Cour doit s'abstenir de connaître d'lUl différend ou d'lUle situation
Pendants devant le Conseil de Sécwité agissant dans le cadre du maintien de la paix et de
la sécurité internationale.
Toutes les critiques adressées aux triblUlaux Ad Hoc trouvent, à ce niveau, un
écho. Le lien entre la CPI et le Conseil de Sécwité est si étroit que l'efficacité jwidique de
la première s'appréciera en termes de capacité à se dégager des appréciations politiques du
second.
Il faut également noter que l'action de la CPI est "complémentaire des
jwidictions criminelles nationales" (art. premier in fine). Son intervention ne visera qu'à
remédier à l'épuisement des voies de recours internes, à leur inefficacité ou inexistence ou
à leur blocage volontaire ou involontaire. Le Statut de la Cour pénale internationale rejoint,
sous cet aspect, les dispositions de nombreuses conventions des Droits de l'Homme
instituant des mécanismes juridictionnels de contrôle de leur application.
Sur un autre registre, le Statut a résolu dans le bon sens l'antagonisme entre
CO~ON LAW (système retenu pour les actes préparatoires à l'acte d'accusation) et
CML LAW (instruction à charge et à décharge, participation des victimes à la procédure
et possibilité de bénéficier de réparations) en les associant étroitement dans la procédure
(art. 74 et 83).
Le Statut de la CPI s'inscrit dans le cadre du respect des Droits de l'Homme. A
cet égard, en vertu des dispositions pertinentes de la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme de 1948 et des deux Pactes de 1966, la peine de mort est exclue de la gamme des

377
peines susceptibles d'être prononcées. La peine maximale prévue est l'emprisonnement à
perpétuité (art. 77 § 1, b). Les autres peines peuvent être l'emprisonnement à temps de 30
ans au plus, la confiscation des profits, biens et avoirs acquis en relation avec le crime, des
amendes et toute autre amende prévue par le Règlement de procédure (art. 77 et 109).
Sous cet aspect, le Comité préparatoire avait proposé des interdictions d'exercer
des fonctions publiques et pour les personnes morales l'interdiction permanente d'exercer
toute activité ou temporaire, la confiscation et la fenneture de l'établissement.
Les peines d'emprisonnement seront purgées dans un pays désigné par la Cour
sur Wle liste d'Etats ayant accepté de recevoir les condamnés (art. 103). Toutefois, il serait
préférable que ces condamnés soient incarcérés dans les prisons de l'Etat-siège (les Pays-
Bas) pour éviter la dispersion géographique tant décriée au TPIR et au TPIY. Cependant,
le Statut réduit au minimum l'éparpillement des organes en prévoyant la location dans
"l'Etat-hôte" (pays-Bas) de la Présidence, de la Cour, du Bureau du Procureur et du Greffe.
Les droits des accusés et des suspects tels que le recours contre la décision de
culpabilité ou de peine, l'indemnisation en cas de condamnation ou de détention
injustifiées, ont été prévus par le Statut (art. 55, 67, 81 et 85). La Cour se conforme aux
principes généraux du Droit pénal(867), tels que les principes NULLUM CRIMEN SINE
LEGE, NULLA POENA SINE LEGE, la non-rétroactivité de la loi pénale, la
responsabilité pénale individuelle des auteurs, co-auteurs, complices, qu'ils soient simples
subordonnés ou supérieurs hiérarchiques (même en qualité de chef d'Etat), civils ou
militaires, qu'il s'agisse d'une infraction par action ou par omission (ACruS REUS). La
CPI devra tenir compte de l'élément psychologique, c'est-à-dire l'intentio~ l'état d'esprit
(MENS REA). Toutefois, elle n'a pas compétence envers les personnes âgées de moins de
dix-huit (18) ans à l'époque de la commission du crime (art. 26) ni à l'égard des personnes
morales.

378
La compétence de la Cour est subsidiaire. Elle n'intervient qu'en cas de
défaillance des recours juridictionnels internes. Cette concession à la souveraineté étatique
découle du principe de la juridiction wllverselle permettant à tout Etat, en vertu de la règle
AUT ruDICARE AUT DEDERE de poursuivre les personnes coupables de crimes contre
l'humanité, de génocide, de crimes de guerre sans requérir le consentement préalable d'un
autre Etat ou de l'extrader vers tout autre Etat intéressé.
La mise en œuvre du Statut dépend étroitement de la coopération pleine et
entière des Etats (art. 86 à 102). Le Statut prévoit le recours à l'Assemblée des Etats-parties
(qui prendra les mesures de son choix) ou au Conseil de Sécmité (si la Cour avait été saisie
sur renvoi d'lUle affaire par le Conseil) en cas de défaillance de l'Etat requis (art. 87 § 7).
Cette coopération recouvre l'identification et la recherche de personnes, la localisation de
biens, l'enregistrement des dépositions y compris les dépositions sous serment,
l'interrogatoire des suspects, la conduite de l'enquête et l'inspection sur place et sur pièces
(art. 93).
Les plus grandes difficultés, que rencontrera la Cour, se trouvent dans le fait
que le Statut n'admet pas de réserves (art. 120). Mais cette précaution peut être contournée
par les déclarations interprétatives des Etats qui, au moment où ils deviennent Parties,
peuvent n'accepter qu'après une période de sept ans, la compétence de la Cour pour les
crimes de guerre commis sur leur tenitoire ou par leurs ressortissants (art. 124).
Si cette disposition est commandée par un souci d'accueillir le plus grand
nombre de ratifications, on peut s'alarmer sur l'éventualité de vider le statut de son objet et
de son but. La pratique internationale révèle que sous le couvert de déclarations
interprétatives, se cachent de véritables réserves(868).
(867) Cf Chapitre ID du Statut, articles 22 à 33.
(868) On doit noter à cet égard que le Sénégal est le premier Etat à ratifier le statut de la Cour
pénale internationale (sans réserves, conformément au Statut) (3.12.1997). Mais les Etats-Unis

379
L'adhésion au Statut est complétée par la faculté laissée aux Etats de souscrire
une déclaration d'acceptation de la compétence de la Cour. Il s'ensuit que toute latitude est
laissée aux Etats de choisir pamlÏ les crimes retenus, ceux dont ils poWTont être justiciables
(avec leurs ressortissants) devant la Cour.
Malgré les succès de la Conférence de Rome de 1998, certaines dispositions du
Statut demeurent en-deçà des espérances pour une répression efficiente des violations
graves du Dili et des Droits de l'Homme. Les concessions faites à la souveraineté des Etats
constituent des entraves q~ compte tenu de l'état actuel de la communauté internationale,
sont difficiles à distraire du Droit international public.
Toutefois, l'existence de la Cour pénale internationale demeure un acquis
considérable que la pratique subséquente devra affermir par une jurisprudence hardie et
novatrice divorçant de l'approche intrinsèquement politique du Conseil de Sécurité. TI
revient, en définitive, aux Etats de prouver leur volonté de punir les violations du DIH.
Mais auparavant, leur volonté politique devra être mesurée à rame de la mise en œuvre du
Dili.
d'Amérique, la Chine, l'Inde, Israël, Qatar, Libye, Soudan ont voté contre, la plupart des Etats
arabes se sont abstemJs. Toutefois, 144 Etats ont signé l'Acte final.

380
CHAPITRE Il - LES IMPERATIFS ET VOIES DE LA MISE EN OEUVRE
DUDIH
La mise en œuvre du DIH constitue le complément nécessaire de l'adoption des
conventions humanitaires. Faut-il rappeler que cette exigence commande la prise par les
Etats de mesures nationales (législatives, réglementaires ou pratiques) pour appliquer les
obligations internationales auxquelles ils ont librement consenties ?
Dans les Etats monistes, l'introduction sur le plan national des conventions et
traités est automatique. A l'opposé, dans les Etats dualistes, l'insertion des nonnes
internationales dans le droit interne, demeure une exigence supplémentaire.
La mise en œuvre du DIH obéit à des impératifs qui se résument pour l'essentiel
à l'obligation de respecter et de faire respecter le DIH (Section 1).
L'avenir du DIH dépend étroitement de son application au niveau interne. A
cette fin, la mise en œuvre doit emprunter deux voies irréductibles :
- d'une p~ sa "nationalisation" pour incorporer les règles internationales
dans l'ordonnancement juridique national;
- d'autre p~ sa "socialisation" pour propager les règles et pnnclpes
humanitaires dans le cadre de la promotion et de la diffusion au niveau de la population
civile et des combattants destinataires des mesures de mise en œuvre du DIH (Section TI).

381
SECTION 1 - L'obligation de respecter et de faire respecter le DIH
Cette obligation est contenue dans l'article premier commun aux quatre
conventions et à l'article premier du Protocole I. Cette obligation, conçue comme un
préalable à la consolidation du Dili se subdivise en deux volets complémentaires : une
obligation de respecter et une obligation de faire respecter le DIH.
La première exigence fait de l'Etat le débiteur principal des mesures à prendre.
Ces dernières peuvent consister en des obligations de faire ou de ne pas faire, des
obligations de comportement ou de résultat (Paragraphe 1).
Le second impératif fait de l'Etat un intermédiaire, un médiateur en cas de
violations du Dili par un autre Etat pour ramener ce dernier au respect de ses obligations
(paragraphe II).
Paragraphe 1 - L'obligation de respecter le DIH
L'article premier commun aux quatre Conventions de Genève dispose : "Les
Hautes Parties contractantes s'engagent à respecter et à faire respecter la présente
Convention en toutes circonstances". Cette obligation est reprise telle quelle par l'article
premier alinéa premier du Protocole additionnel 1 de 1977. Même si cette disposition est
absente du Protocole II de 1977, la doctrine admet que l'idée inspiratrice de cette obligation
s'étend au droit des conflits annés non internationaux par l'entremise de l'article 3 commun
aux quatre conventions de 1949. TI en découle que "par ce biais, donc, l'obligation de
"respecter et faire respecter" les Conventions s'applique aussi aux conflits armés non
internationaux et, de ce fait même, s'étend aux différentes règles qui complètent et

382
développent les Conventions dans ce secteur, même en l'absence d'Wle réitération
explicite"(869).
L'obligation de respecter le DIH découle des engagements conventionnels de
l'Etat. En vertu du principe PACTA SONT SERYANDA, l'Etat qui accepte des obligations
spécifiques, doit assurer l'application fidèle des traités pertinents en prenant un certain
nombre de mesures d'ordre interne. Ces mesures, de nature juridique ou pratique (ordres,
instructions, directives) en conformité avec l'ordre constitutionnel et le système juridique
constituent le prolongement nécessaire des dispositions conventionnelles.
Tout Etat qui signe, ratifie ou approuve Wl traité, doit l'appliquer. L'obligation
de respecter le DIH est donc inhérente à toute Convention. Les Conventions humanitaires
ne font que réitérer avec force une obligation coutumière. Cette obligation implique pour
chaque Etat (Partie ou non à Wl conflit), en temps de paix ou de guerre, de donner un
contenu concret aux obligations souscrites.
Historiquement, cette formule remonte à l'article 25 al. 1er de la Convention de
Genève du 27 juillet 1929 pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les
années en campagne et à l'article 82 al. 1er de la Convention de Genève du 27 juillet 1929
sur le traitement des prisonniers de guerre.
Toutefois, ces Conventions liaient l'obligation de respect à l'abandon de la
clause
de réciprocité SI üMNES.
L'obligation de
respect est
conçue
comme
inconditionnelle, libérée de la logique de réciprocité. La violation de cette obligation par
un Etat n'exempte pas les autres Etats de son respect.
(869) CONDORELLI (L.) et BOISSON DE CHAZOURNES (L.), Quelques remarques à propos
de l'obligation des Etats de "respecter et de faire respecter" le Droit international humanitaire "en
toutes circonstances," in Etudes et Essais sur le Dili..., op. cit., p. 17.

383
L'autonomie de cette obligation de respecter s'affmnera progressivement avec
les Conventions de 1949, en même temps qu'elle "conserve en entier sa signification déjà
soulignée (de proscription de la logique de la réciprocité) lorsque les règles à respecter se
sont transformées de conventionnelles en coutumières"(870).
Les Conventions de Genève approfondissent cette obligation avec l'interdiction
de représailles(871). Elle est confinnée par le Protocole 1de 1977(872).
Ces obligations du DIH sont qualifiées d"'obligations absolues" par le
Secrétaire Général de l'ONU qui, se référant à l'article premier des Conventions de
Genève, conclut qu'il "semble donc que l'application de ces instruments ne dépend pas
d'une condition de réciprocité"(873).
L'exclusion de la réciprocité trouve une expression renforcée avec l'art. 60
paragraphe 5, précité de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969,
concernant les traités de caractère humanitaire.
L'obligation de respect du Dili acquiert une nature coutumière. fi en appert que
"sur chaque Etat pèse donc, d'une part, l'obligation de faire lui-même tout ce qui est
nécessaire pour que les règles en question soient respectées par ses organes ainsi que par
l'ensemble des personnes relevant de sajuridiction"(874).
(870) CONOORELLI (L.) et BOISSON DE CHAZOURNES (L.), op. cit., p. 20.
(871) Cf art. 46 de la 1ère Convention de 1949, art. 47 de la ne Convention, art. 13 al. 3 de la me
Convention et art. 33 al. 3 de la IVe Convention.
(872) Cf art. 51 al. 6 (protection de la population civile contre les effets des hostilités) ; art. 52 al.
1 (protection des biens civils) ; art. 53 lettre c (protection des biens culturels) ; art. 54 al. 2
(protection des biens nécessaires à la survie de la population civile) ; art. 55 al. 2 (protection de
l'environnement naturel) ; art. 56 al. 4 (protection des ouvrages et installations contenant des forces
dangereuses).
(873) DOC. ONU N7720 du 20 novembre 1969, Rapport du Secrétaire Général. Respect des
Droits de l'Homme en période de conflit armé, p. 33, paragraphe 82.
(874) CONDORELLI (L.) et BOISSON DE CHAZOURNES (L.), op. cit., p. 24.

384
L'obligation fait appel à une nationalisation du DIH puisque l'Etat devra
conformer à tous les niveaux, son droit interne à ses obligations humanitaires.
L'obligation de respecter le DIH, "noyau dur" des mesures de mise en œuvre, se
retrouve dans d'autres dispositions pertinentes des Conventions de 1949 : art. 45
(exécution) et 48 de la 1ère Convention (traductions et communication des lois
d'application pour les blessés et malades des années en campagne); art. 128 de la IVe
Convention (mêmes dispositions concernant les prisonniers de guerre) ; art. 145 de la IVe
Convention (mêmes dispositions pour les personnes civiles) et art. 80 du Protocole 1
(mesures d'exécution).
Les Conventions humanitaires doivent être complétées par des mécanismes
internes législatifs ou réglementaires. Cette obligation se double de la prescription générale
selon laquelle les Parties au conflit devront faire cesser toute violation du Dili.
Pour parvenir à un véritable respect du DUI, les Etats devront combiner les
obligations de moyens avec les obligations de résultat. Les moyens de mise en œuvre sont
indispensables pour asseoir les obligations humanitaires dans le cadre territorial. L'Etat
devra en vérifier l'application et s'astreindre à la prévention de la violation. Des mesures de
prévention et de répression devront constituer l'arsenal normatif humanitaire de l'Etat.
Par leur adhésion aux traités humanitaires, les Etats ont pris l'engagement de
respecter et d'appliquer leurs dispositions mais aussi d'en diffuser le contenu. Cette
entreprise devra s'assortir de l'obligation de faire respecter le Dili.

385
Paragraphe II· L'obligation de faire respecter le O.I.H.
L'obligation de respecter le DIH concerne l'Etat. Son objectif est de lier les
organes de l'Etat et l'ensemble des personnes sous sa juridiction.
A l'inverse, l'obligation de faire respecter le Dili crée des rapports multilatéraux
entre l'Etat et les autres membres de la communauté des Etats. fi s'agit là d'obligations
croisées et de type collatéral dont tout Etat se présente comme étant l'agent d'exécution.
De surcroît, cette obligation onéreuse, implique de la part de l'Etat me
participation active et un devoir à s'adresser à tout Etat violateur du Dili dans le dessein de
le ramener à un respect nonnal.
Seconde branche de l'obligation contenue aux articles preIDIers
des
Conventions de Genève de 1949 et du Protocole 1 de 1977, l'obligation de faire respecter le
Dm est porteuse d'une solidarité dans l'application du DIH. Elle octroie à l'Etat un titre
d'action pour obtenir des autres Etats le respect des prescriptions humanitaires.
Toutefois, cette obligation laisse planer une incertitude quant à sa signification.
Les Conventions ne prévoient ni le sens ni la portée de l'obligation. Compte tenu de la
diversité et de l'inégalité économique et militaire des Etats, la mise en oeuvre de
l'obligation dépend en tout état de cause du poids diplomatique des Etats et surtout de la
volonté politique alertée des Etats les plus influents de la communauté internationale.
L'obligation de faire respecter le Dili fait peser sur l'Etat Wle obligation "d'agir
par tout moyen approprié afin que ces règles soient observées par tous, et en particulier par
les autres Etats"(87S).
(875) CONDORELLI (L.) et BOISSON DE CHAZOURNES (L.), op. cit., p. 24.

386
Le Commentaire des Conventions de Genève(876) lui confère le sens d'une
obligation selon laquelle tout Etat est tenu d'intervenir auprès d'un Etat défaillant pour
l'amener à Prendre des mesures propres à assurer ou à rétablir le respect des normes
humanitaires.
Le caractère universel des Conventions de Genève permet d'expliquer la
Présence d'une telle obligation.
nfaut alors s'interroger sur le contenu de l'obligation. Peut-on lui donner le sens
d'une obligation ERGA OMNES (dans le sens de l'Affaire de la BARCELONA
TRACTION) octroyant à tout Etat, la possibilité d'une ACTIO POPULARIS "envers la
communauté internationale dans son ensemble"(877), soutenue par un intérêt juridique au
respect de ces droits dont la violation heurterait les consciences humaines ?
Le rapprochement étroit entre l'obligation de faire respecter et les obligations
ERGA OMNES se traduit par l'existence d'un "droit-devoir"(878) d'obtenir le respect des
Prescriptions humanitaires soit par des démarches individuelles ou collectives soit par tout
autre moyen licite.
Toutefois, si l'obligation de faire respecter le DIH ne pose pas de grandes
difficultés à l'intérieur du cadre territorial, elle risque de heurter la souveraineté des autres
Etats en s'étendant hors des frontières nationales.
On conçoit les difficultés pour satisfaire cette exigence. Dans l'ordre interne,
cette obligation peut être remplie grâce à l'arsenal normatif et coercitif de l'Etat. Sur le plan
(876) Cf Commentaire des Conventions de Genève, op. cit., p. 27 (Ière Convention).
(877) CU, Affaire de la Barcelona Traction Light and Power Co, Rec. 1970, paragraphes 33 et 34.
(878) Selon l'expression de CONDORELLI et BOISSON DE CHAZOURNES, op. cit., p. 30.

387
interne, l'obligation demeure un complément nécessaire à toute mesure de mise en œuvre
initiée dans le cadre tenitorial de l'Etat.
Concrètement, Wle panoplie de possibilités s'offre à l'Etat pour remplir
l'obligation de faire respecter le D.I.H.(879).
Le premier moyen dont dispose l'Etat, consiste en des pressions diplomatiques
(protestations, dénonciations publiques, démarches individuelles, missions de bons
offices...). L'Etat plaignant pourra également saisir la Commission internationale
d'établissement des faits au cas où l'Etat violateur aurait également reconnu la compétence
de cette structure conformément à l'article 90 du Protocole 1 de 1977.
L'Etat peut initier des mesures coercitives ne comportant pas l'utilisation de la
force armée, sans préjudice des cas de légitime défense individuelle ou collective (art. 51
de la Charte de l'ONU) et des actions menées par le Conseil de Sécurité en vertu du
chapitre 7.
Les Etats ont également recours à des mesures de rétorsion (actes inamicaux
mais licites, visant à répondre à un acte antérieur inamical licite ou illicite) : expulsion de
diplomates, rupture des relations diplomatiques, réduction ou suppression d'aide publique,
etc.(880).
La possibilité d'opter pour des mesures de représailles (appelées "contre
mesures" Par la COI) n'est possible que si elle répond à la définition de la COI selon
laquelle : "l'illicéité d'un fait d'Wl Etat non confonne à Wle obligation de ce dernier envers
un autre Etat est exclue si ce fait constitue une mesure légitime d'après le droit
(879) PALWANKAR (D.), Mesures auxquelles peuvent recourir les Etats pour remplir leur
obligation de faire respecter le DIlI, in RICR N° 805, janvier-février 1994, pp. 11-97.
(880) Cf. PALWANKAR (D.), op. cit., p. 18.

388
international à l'encontre de cet Etat, à la suite d'un fait intemationalement illicite de ce
dernier Etat"(881).
De plus, ces mesures devront être précédées d'une sommation non suivie d'effet
satisfaisan~ et obéir à la logique de la proportionnalité, ne viser que l'Etat responsable et
respecter, bien entendu, les principes du Dlli(882).
Parmi ces mesures de représailles non armées possibles, on peut citer
l'embargo, la restriction sur les ventes d'armes, sur le transfert technologique, la restriction
aux exportations ou importations, gels de capitaux, suspension d'accord aérien ou
interdiction d'atterrissage d'avions commerciaux, etc.(883).
Hypothèse extrême, le Conseil de Sécurité, en vertu de l'article 41 de la Charte,
peut initier des mesures en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'actes
d'agression telles que l'inteD11ption partielle ou complète des relations économiques, des
communications sur terre, air et mer, la rupture des relations diplomatiques, etc.(884).
Enfin, DLTIMA RArIO REGUM, les contre-mesures années (illicites en
principe en cas d'intervention unilatérale d'un Etat) peuvent être décidées par le Conseil de
Sécurité, non sur la base du DIH mais sur le fondement de la Charte de l'ONU. La raison
invoquée est que: "ce serait tout de même un comble de voir le Droit international
humanitaire dont la philosophie est de ne pas lier son application au jus ad bellum, devenir
lui-même prétexte à intervention armée"(885).
(881) Projet d'article 30 sur la responsabilité des Etats, in Annuaire de la Commission du Droit
international, 1979, Vol. 2, p. 128.
(882) Cf Affaires NAULILAA du 31 juillet 1928, in Recueil des Sentences arbitrales, Vol. n, p.
1023, et LYSNE du 30 juin 1930, in Recueil, op. cit., p. 1052. Cf NGUYEN QUOC DINH, op.
cit., p. 1225.
(883) Pour le détail, cf. PALWANKAR(U.), op. cit., p. 19.
(884) PALWANKAR, op. cit., p. 22.
(885) Selon Yves SANDOZ, cité par Umesh PALWANKAR, op. cit., p. 16.

389
L'attitude de la CU ne s'en éloigne pas, puisqu'elle admet que "l'emploi de la
force ne saurait être la méthode appropriée pour vérifier ou assurer le respect de ces
droits"(886).
Dans une moindre mesure, l'AGNU peut par ses recommandations, inciter l'Etat
à se conformer au DIH en s'attachant au besoin l'aide d'autres Etats, en nommant des
rapporteurs spéciaux pour enquêter sur ces violations, ou en faisant recours aux
organisations et accords régionaux.
L'importance des obligations de respecter et de faire respecter le DIH en toutes
circonstances donne toute la mesure de la nécessité de la mise en œuvre. Plus qu'une autre
discipline, le DIH requiert des Etats des obligations de comportement se traduisant par des
actions aussi bien au niveau national qu'au niveau international.
L'irrespect du DIH est sanctionné par la mise en jeu de la responsabilité de
l'Etat par action ou omission. L'Etat ne doit pas permettre la perpétration et la perpétuation
de comportements criminels ou délictuels à l'encontre du DIH sur son territoire. En
complément de cette obligation, l'Etat est débiteur d'une obligation partagée avec les autres
Etats, d'assurer le respect entier des engagements par l'entremise d'actions à initier pour
prévenir ces violations du DIH.
L'obligation de respecter et de faire respecter le DIH en toutes circonstances
prend toute sa dimension par l'aménagement de voies de mise en œuvre aux plans national
et social.
(886) Cf CU, Arrêt Nicaragua cl Etats-Unis d'Amérique, Rec. 1986, paragraphe 268, p. 134.

390
SECTION II - Les voies "obligées" de la mise en œuvre du DIH
Pour être respecté, le DIH doit être connu. L'application peut emprunter un
grand nombre de voies, qui se ramènent pour l'essentiel à deux volets:
- d'une part, le DIH doit s'adapter au contexte socio-culturel de l'Etat qui s'en
approprie l'essence en le transfonnant en règles nationales (Paragraphe 1) ;
- d'autre part, le DIH doit être porté à la connaissance de toutes les couches
de la population de l'Etat. n s'agit d'amener la communauté nationale à l'intériorisation des
préceptes essentiels de cet ensemble pléthorique de règles humanitaires (Paragraphe II).
Paragraphe 1 - La nationalisation du DIH par les Etats africains
La nationalisation implique que l'Etat traduise en règles nationales (lois,
règlements, ordres, instructions et directives) les obligations internationales découlant des
traités humanitaires qu'il a ratifiés. Dans la réalité, on a constaté des manquements à ces
obligations.
Divers arguments ont été avancés pour justifier ces insuffisances. On a fait
valoir que l'obstacle majeur réside dans le principe de souveraineté des Etats et par voie de
corollaire, leur manque d'empressement à donner un contenu concret à leurs engagements.
Une autre cause d'inapplication a été identifiée dans les difficultés d'assurer une
compatibilité entre nécessités militaires et nécessités humanitaires. Enfin, on a défendu
également l'idée selon laquelle la guerre serait un jeu ésotérique hennétique aux civils.

391
Ces argwnents de certains polémologues de l'Ecole de CLAUSEWITZ cèdent
aujourd'hui le pas devant l'ascension irrésistible des exigences des Droits de l'Homme et du
DIH.
L'action nationale de l'Etat doit suppléer à ses engagements internationaux. Il
est dès lors admis que seul l'avènement d'un Etat de droit, d'une société de liberté, d'une
démocratie multipartisane et d'une année nationale républicaine pourront maximiser les
chances d'une applicabilité du DIH en Afrique(887).
Compte tenu de leur pouvoir directit: de commandement, de l'édiction des
normes de comportement et de monopole de la contrainte armée, les milieux
gouvernementaux sont prioritairement concernés par la mise en œuvre du DIH.
Le pouvoir exécutif devra inspirer les règles nationales d'exécution du DIH par
les différents ministères.
Ainsi, les destinataires principaux de la mise en œuvre sont les militaires. Le
ministère des Forces Armées est interpellé au premier chef. Les cadres de ce ministère
devront être édifiés sur l'importance du contenu du DIH, chargés qu'ils sont de
l'organisation et de la gestion des différentes branches des services militaires(888). Cette
administration doit inciter, superviser, contrôler, édicter des circulaires, des notes de
(887) Cf TSHIYEMBE (W.), Droit international humanitaire et l'avènement d'un Etat républicain,
d'une armée nouvelle et d'une défense nationale: Essai prospectif pour l'Afrique des années 2000,
inRJ.P.I.C. N° 2, 400 année, avril-juin 1992, pp. 191-200.
(888) Pour la Côte d'Ivoire, cf décret n° 98-609 du Il novembre 1998 portant organisation du
ministère de la défense (Journal Officiel de la République de Côte d'Ivoire du 10 décembre 1998,
p. 1273-1275) et Arrêté du ministère de la Défense nO 0057/MD/CAB du 15 avril 1999 instituant
au sein du Service de la Justice Militaire et du Droit Humanitaire, un bureau pour la diffusion du
Dffi(RICRN° 835, septembre 1999, vol. 81, p. 691).
Pour le Bénin, cf Notes de service N° 468/MDIFAB/DGMIDEP du 13 juillet 1987 et N° 91-
004/EMA/B.E.S.S. du 22 février 1998 créant un comité de suivi du Dili chargé de l'enseignement
au sein des Forces Armées Béninoises (Mise en œuvre du DIH en Afrique, op. cit., p. 145).

392
service, bréviaires, guides et règles de comportement du soldat dans les champs de bataille.
Des manuels sont nécessaires pour pacifier et civiliser le comportement des hommes de
troupe et les astreindre à un régime de discipline militaire(889).
De surcroît, l'institution de cours martiales composées d'officiers instruits des
règles du DIH devra compléter l'arsenal nonnatif. Destinataires privilégiés des règles du
DIH, les forces armées doivent bénéficier d'une instruction militaire faisant largement
place au DIH(890).
L'intégration du volet humanitaire est de plus en plus remarquée dans
l'instruction des armées africaines. On peut s'en convaincre à travers l'examen des
nouvelles formes de coopération militaire expérimentées récemment dans le continent.
La C.E.D.E.A.O., par ses Protocoles de Non-Agression de Lagos du 22 avril
1978 et d'Assistance mutuelle en matière de défense de Freetown du 29 mai 1981 a institué
un mécanisme de sécurité collective régionale(891), avec des forces armées alliées de la
communauté, communément désignées forces de l'ECOMOG.
(889) En 1998, le CICR (Délégation régionale de Dakar) a co-produit avec les Forces Armées
Sénégalaises un Manuel du Soldat en marge de la formation de 1500 officiers et soldats de quinze
bases militaires (cf CICR-Info Dakar, N° 10, avril 1999, p. 6). Ce manuel a été traduit en anglais
(pour les forces armées gambiennes) et en portugais (pour les forces armées bissau-guinéennes).
(890) TI faut saluer à cet égard l'important travail de diffusion et de promotion du Dili par le CICR.
En 1999 à Dakar, des cycles de formation ont été organisés à l'Ecole Nationale de Police en
direction des officiers de police, gardiens de paix et de prison. Le CICR a également organisé une
journée de réflexion sur le Dili pour les Forces Armées Maliennes le 5 février 1999 à Bamako
(voir CICR-Info N° 10, avril 1999, p. 7).
Le CICR a été l'initiateur d'un atelier sur le DIH sur le thème: «MILITARY AID TO CIVlL
AUTHORITY» à l'Ecole Supérieure de Guerre d'Abuja le 14 février 1997. Un autre atelier sur le
droit des conflits armés s'est tenu au "COMMANO and STAFF COLLEGE" à Jaji dans l'Etat de
Kaduna (du 4 au 6 mars 1997). Cf Mise en œuvre du DIH en Afrique, op. cit., pp. 140-141.
(891) TSIDYEMBE (W.), L'OUA face à un nouvel ordre de sécurité régionale, Présence Africaine
NO 146, 1988, pp. 25-60 ; NDIAYE (T.M.), La prévention et la gestion des conflits en Afrique: les
exemples du Tchad et du Liberia, Revue Démocraties Africaines N° 1, janvier-février-mars 1995,
Dakar, pp. 12-16 ; MELEDJE-DJEDJRO (F.), L'OUA et le règlement des conflits in Afrique
Contemporaine, Numéro Spécial, 4e trimestre 1996, pp. 209-215.

393
Ce dynamisme a inspiré l'Union du Maghreb Arabe (U.M.A.) à créer, en
janvier 1990, une structure de sécurité dénommée Conseil pour la défense commune dont
la mission est l'hannonisation des politiques de défense, l'assistance en cas d'agression et la
renonciation au sein de l'ensemble créé à entretenir ou favoriser des activités subversives
(Art. 14 et 15 du Traité constitutif de l'D.M.A.).
fi faut signaler l'existence de la SADC, système de sécurité en Afrique Australe
avec son forwn pour la médiation et l'arbitrage qui a pennis de sunnonter la crise
constitutionnelle du Lesotho en août 1994(892).
Les Etats-membres de l'OUA ont institué un Mécanisme pour la prévention, la
gestion et le règlement des conflits qui prévoit la possibilité de la constitution et du
déploiement de missions civiles et militaires d'observation et de vérification.
L'OUA avait pennis la création d'une force de maintien de la paix au Tchad
(Res. CM/769 (XXXIV)). En 1993, elle avait créé une mission de protection et
d'observation pour le rétablissement de la confiance au Burundi (MIOB) lors des violences
interethniques Hutus-Tutsis.
D'autres organismes de défense ont été institués comme l'ANAD en 1977
regroupant le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le
Sénégal et le Togo pour la défense des Etats-membres contre toute agression extérieure.
Parallèlement à ces initiatives au niveau continental ou régional, une volonté
nouvelle de mettre sur pied des mécanismes opérationnels affranchis des lourdeurs
organisationnelles (OUA, SAOC, CEDEAO) et des difficultés financières, s'est traduite
par des programmes de coopération de type original.
(892) Cf Treaty of the Southem African Development Community (17 august 1992) in 5 RADIC
(1993), pp. 418-435.

394
Le manque de moyens de l'OUA pour financer les opérations de maintien de la
paix, les expériences malheureuses de l'ONU et des grandes puissances intervenant
militairement sur le continent africain, ont été à la base de l'idée des forces de RECAMP.
Le Général Amadou Toumani TOURE déclarait à cet effet: « L'Afrique a des hommes, les
compétences aussi. Ce qui lui manque, c'est le renforcement des capacités africaines de
maintien de la paix »(893). L'idée fut lancée à New-York, en mai 1997. Elle résulte du
constat tiré par un haut-fonctionnaire français Jean de GLIANIASTY, selon lequel "les
armées africaines ne jouent pas encore le rôle qui pourrait leur revenir dans la stabilité du
continent. Elles ont les moyens humains de participer à des opérations lourdes mais
manquent souvent de moyens logistiques, de transports adaptés et de la fonnation
spécifique à ce type d'intervention"(894).
Le concept de RECAMP fut mis sur pied lors de la conférence diplomatico-
militaire, tenue à Dakar du 20 au 23 octobre 1997, initiée par les Etats-Unis, la France et la
Grande-Bretagne et soutenue par l'OUA, l'ONU et l'ANAD.
L'objectif visé était la constitution de forces africaines capables de participer à
des opérations de maintien de la paix avec une large composante humanitaire de protection
de l'environnement civil par des opérations d'assistance matérielle.
Le volet opérationnel du RECAMP se révélera à travers diverses manœuvres
militaires conjointes.
Ainsi en fut-il de "GUIDIMAKHA 98". TI s'agissait de manœuvres militaires
qui se sont déroulées du jeudi 26 février au lundi 2 mars 1998 à l'Est du Sénégal et
réunissant 1400 soldats sénégalais, 650 mauritaniens, 900 français, 63 britanniques et 40
(893) Propos rapportés par le Soleil du jeudi 23 octobre 1997, p. 2.
(894) Rapport sur le Séminaire opérationnel sur le RECAMP, Dakar (22-23 octobre 1997), p. 3.
Cf aussi De BELLESCIZE (G.), Le maintien de la paix en Afrique: la France et le programme

395
marines avec la présence d'observateurs de l'ONU, du HCR, du Cap-Vert, du Ghana, de la
Gambie, de la Guinée-Bissau et de la Guinée-Conakry. La logistique militaire (600
véhicules et 30 avions de combats) était fournie par les pays donateurs (Etats-Unis, France,
Grande-Bretagne)(895).
Il faut aussi citer les manœuvres (<< COHESION KOMPIENGA 98» à la
frontière du Burkina Faso, du Togo, du Bénin et du Niger) avec la participation de 3000
soldats originaires de ces pays, du Ghana, du Tchad, de la Côte d'ivoire, d'observateurs
américains, français, britanniques, canadiens et des représentants de l'ONU et de l'OUA.
L'objectif déclaré était la mise en valeur des capacités africaines de maintien de la paix
avec la gestion des problèmes humanitaires(896). On peut aussi citer les exercices
«TULIPE» (dans l'Océan Indien) en 1999 et «NANGBETO» au Togo en février 1997
avec le soutien des forces françaises.
A côté du RECAMP qui intègre la dimension humanitaire (protection des
populations civiles et des victimes telles que les personnes déplacées et réfugiées), il faut
citer d'autres programmes unilatéraux.
Il en est ainsi des programmes américains FLINTLüCK II A (expérimenté au
Mali du Il juin au 8 juillet 1997) et de l'ACRI (Initiative Africaine de Réaction aux Crises)
initiée au Sénégal du 21 juillet au 21 septembre 1997. Ces programmes pour la création de
forces africaines de réaction aux crises (FARC) ont pour ambition d' «identifier,
organiser, équiper, former, aider au déploiement et conseiller des forces africaines capables
de conduire des opérations humanitaires ou des opérations de maintien de la paix, qui
garantiraient un environnement sûr, soit pour les réfugiés, soit pour des personnes
RECAMP, in Afrique Contemporaine N° 191, juillet-septembre 1999, pp. 7-28.
(895) Pour le détail, cf Soleil du mercredi 25 février 1998, p. 2 ; du samedi 28 février au dimanche
1er mars 1998, p. 4 ; du 2 mars 1998, pp. 7-8 ; Le Matin du samedi 28 février au dimanche 1er
mars 1998, p. 4 ; Jeune Afrique N° 1939 du 10 au 16 mars 1998, pp. 34-37.
(896) Jeune Afrique Economie du 17 mai 1998, p. 134.

396
déplacées et qui faciliteraient l'acheminement de l'aide en vue d'endiguer la souffrance des
populations et de ramener la paix »(897). Ces programmes associant le volet humanitaire
avec la présence du HCR, du CICR, d'AFRICARE, de VISION MONDIALE sont
financés par les Etats-Unis à hauteur de 15 millions de dollars. Une équipe de "Bérets
Verts" américains des forces spéciales assurera le suivi de la formation au Sénégal, au
Mal4 en Ouganda, au Malawi et en Ethiopie(898).
Le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord a, pour sa part,
conçu l'exercice "BLUE HUNGWE" au Zimbabwe en 1997 dans le but de doter l'Afrique
Australe de capacités de maintien de la paix et l'opération "BLUE CRANE" (grue bleue)
en Afrique du Sud en avril 1999 dans le même dessein.
Le RECAMP a connu un regain de vigueur avec les manœuvres de "GABON
2000" regroupant, le 15 janvier 2000, huit Etats de la CEEAC (Communauté Economique
des Etats de l'Afrique Centrale) : Burundi, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée-Equatoriale,
République Centrafricaine, Sao Tomé et principe, Tchad et Cameroun, assistés pour la
X- logistique, l'encadrement et la formation par huit Etats occidentaux (France, Etats-Unis,
Royaume Uni, Italie, Espagne, Belgique, Portugal et Pays-Bas). L'objectif était de tester
l'intervention sous le mandat de l'ONU et l'égide de l'OUA d'une force interafricaine de
maintien de la paix, en l'occurrence par la formation et l'équipement d'un bataillon de 600
hommes(899).
Malgré le bénéfice certain de l'expérience pour les armées africaines, ces
diverses initiatives divisent les Etats africains. Le Colonel Mouhammar KADHAFI a
exprimé son opposition à ces manœuvres financées par l'Occident et à un commandement
(897) Cf. ARMEE-NATION N° 19, octobre 1997, p. 32.
(898) Cf. Le Soleil du jeudi 19 mars 1998, p. 16 ; Le Matin du mercredi 30 juillet 1997, p. 15 ; De
BEILESCIZE (G.), Le maintien de la paix..., op. cit., pp. 20-21.
(899) Sud-Quotidien W 2036 du vendredi 18 janvier 2000, p. 7.

397
des forces africaines par des "forces étrangères"(900). Quant au Nigeria, favorable plutôt à
des opérations du type ECO~OG, il "s'oppose fennement à la mise sur pied d'Wle force
de maintien de la paix avec l'appui logistique et fmancier de "forces étrangères", en
l'occurrence dépêchées par des capitales occidentales"(901).
En dépit des critiques, ces opérations peuvent pennettre d'éviter des dépenses
militaires colossales et n'empêchent pas la signature de pactes de non-agression et
d'accords de coopération de sécurité commune. Elles n'ont nullement l'ambition de dégager
la communauté internationale de ses obligations en vertu de la Charte de l'ONU mais
d'accroître l'efficacité de la participation des années africaines et de démultiplier
l'intériorisation du DIH par les soldats africains.
Sur un autre registre, la répression des violations du DIH emprunte de plus en
plus la voie juridictionnelle. Par conséquent, les magistrats du siège et du parquet devront
être informés du DIH du fait qu'ils auront à appliquer les conventions hwnanitaires en
matière de génocide, de crimes contre l'humanité, d'infractions graves au DIH.
La nationalisation du DIH peut passer par l'introduction dans la fonnation des
magistrats, d'Wl module sur le Droit pénal international, le Droit de la guelTe et la mise en
œuvre du DIH. L'action des magistrats devra être complétée par les instructions du
ministre de la justice. De nombreuses règles du DIH (notamment la nIe Convention de
Genève de 1949) traitant des prisonniers de guelTe et des internés civils (IVe Convention)
interpellent les agents de l'administration pénitentiaire. En tant qu'auxiliaires de justice, une
connaissance du DIH est particulièrement appropriée.
Une grande diversité de règles du DIH s'adressent aux agents des ministères de
la santé (infirmiers, médecins, sage-femmes, ambulanciers, etc.), de la communication
(900) Idem, p. 7.
(901) Jeune Afrique Economie du 17 mai 1998, p. 134.

398
(journalistes et autres professionnels de l'infonnation), de l'environnement (pour protéger
l'environnement pendant les conflits annés).
La nécessité de créer des services de protection civile est particulièrement mise
en exergue par le DIH(902). Ce service assure un rôle complémentaire(903) à celui des
brigades de sapeurs-pompiers et partage les traits spécifiques d'un service d'action
civique(904).
Concernant le pouvoir législatif, un rôle important lui est assigné pour le vote
des lois de mise en œuvre du DIH, notamment sur la protection de l'emblème de la Croix-
Rouge ou du Croissant Rouge, sur le statut des sociétés nationales(90S), sur le règlement
de discipline militaire, l'organisation des cours martiales, le code de justice militaire, la
création de commissions nationales de mise en oeuvre du DIH(906), et la répression des
infractions graves(907), etc.
(902) Cf. art. 63 de la IVe Convention et art. 61 à 67 du Prot. 1.
(903) Cf. pour le Sénégal, supra, note N° 401.
(904) Cf. Décret 98-302 du 10 avril 1998 fixant les règles d'organisation et de fonctionnement du
Service civique national au Sénégal in JORS N° 5799 du 2 mai 1998, pp. 349-351. Ce Service vise
à conscientiser les citoyens sur leurs devoirs, à initier les jeunes aux actions de développement, à la
discipline, au respect de leur identité culturelle, etc.
(905) Pour le Sénégal, la Société Nationale de la Croix-Rouge a été reconnue d'utilité publique par
le décret n° 63-055 du 29 janvier 1963 (JORS du 16 février 1963, p. 234) complété par le décret n°
63-597 du Il septembre 1963 (JORS du 2 novembre 1963, p. 1461). Sur l'emblème, cf à titre
d'exemple, la loi nO 97-2 sur la protection de l'emblème et le nom de la Croix-Rouge, Journal
Officiel de la République du Cameroun., 47e année, N° 2, 1er février 1997, p. 31. Dans cette
mouvance, le Togo (Loi du 27 décembre 1999) et la Guinée ont également adopté des lois
protégeant l'emblème de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ainsi que la Namibie par un
PARLIAMENT ACT de 1991 (CICR-Information, N° 12, avril 2000, p. 5).
(906) Au Sénégal, l'organe est dénommé Comité interministériel des Droits de l'Homme et du DIH
créé par décret nO 97-674 du 2 juillet 1997, JORS n° 5755 du 2 août 1997, p. 289.
(907) Cf. Loi nO 96-15 du 28 août 1996 sur la torture, complétant le titre il du chapitre 1 de la
Section 1, paragraphe l, art. 295-1 du Code pénal du Sénégal, JORS NO 5709 du 5 octobre 1996, p.
421 ~ Cf. Loi congolaise n° 8-98 du 31 octobre 1998 portant définition et répression du génocide,
des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, RICR N° 835, vol. 81, septembre 1999, p.
688~ Loi sénégalaise nO 69-29 du 29 avril 1969 relative à l'état d'urgence et à l'état de siège, JORS
N° 4029 du 10 mai 1969, pp. 571-573.

399
La nationalisation du Dili exige au préalable l'identification des priorités.
Quatre niveaux de connaissance pourront être recensés et inculqués en fonction de la
catégorie de destinataires.
Au grand public, des notions élémentaires de DIH devront être enseignées.
Pour les élèves, soldats et milieux gouvernementaux, des connaissances générales seront
nécessaires. Aux commandants, officiers, médecins militaires, brigades prévôtales (police
militaire) et journalistes, il faudra enseigner des connaissances spécialisées. Aux milieux
académiques, des connaissances d'expert graduées selon le cycle de formation seront
nécessaires.
La nationalisation du Dili gagnera en fluidité par l'analyse préalable des
rapports entre Droit international et droit interne, par le recensement des aspects juridiques
et pratiques des Conventions de Genève et des protocoles additionnels et par
l'identification des normes susceptibles de s'appliquer avant, pendant et après les conflits
armés.
Toutefois, le succès escompté de la nationalisation du DIH par l'appropriation
étatique des règles internationales, dépend étroitement de l'imprégnation de règles et de
valeurs humanitaires à la poplÙation civile.
Paragraphe II - La socialisation du D.I.H. par les Etats africains
Le DIH doit sortir du vase clos de l'intellectualisme, descendre des cimes de
l'académisme pour être intériorisé par la poplÙation civile.
Les poplÙations civiles doivent être respectées et protégées en vertu de la IVe
Convention de Genève de 1949 et des deux Protocoles additionnels de 1977. En dépit de

400
l'argument selon lequel les conflits annés concernent à titre principal les forces
combattantes (gouvernementales ou rebelles), la réalité des guerres contemporaines atteste
du nombre élevé de victimes parmi les populations civiles. Cette vulnérabilité des
personnes civiles fragilise la protection du DIH. De nombreuses règles interdisent les
attaques contre la population civile, les représailles sur les personnes et les biens civils et
postulent la création de zones de sécurité pour les mettre à l'abri de l'escalade des conflits.
Ces dispositions ne doivent pas seulement être respectées en temps de guerre.
Elles sont également valables en temps de paix. Pour atteindre les objectifs de protection et
d'assistance, la permanence de ces obligations à la charge des Etats devra être relayée par
une promotion et une diffusion des principes et règles humanitaires en direction de la
population civile.
La socialisation du DIH devient une exigence inéluctable même si la plupart
des règles du Dili s'adressent aux Etats. La connaissance du DIH par la population civile
peut créer une contrainte morale et politique envers les gouvernants.
De plus en plus, les stratégies politico-économiques des Etats intègrent
l'important volet de l'opinion publique. En outre, la diffusion peut permettre d'inverser la
tendance à l'accroissement du rôle des civils dans les conflits internes et d'amoindrir la
spirale de violence meurtrière dans les guerres civiles du fait du manque d'éducation et de
vulgarisation du DIH.
Toutefois, la socialisation du Dili, pour être efficace, devra s'attacher à
l'identification des priorités de la population et au recensement des vecteurs de
transmission du message humanitaire.
Il faut rappeler que l'essentiel de la mise en oeuvre du DIH se fonde sur des
instruments écrits au mimétisme occidental prononcé puisqu'empruntant des voies

401
modernes de transmission. Or, la socialisation du DIH doit tenir compte des besoins et des
schémas de représentation mentale de l'univers africain. Ainsi, la diffusion atteindrait
mieux les objectifs de conscientisation populaire en associant les modes usités de
transmission coutumière qui font appel aux griots, aux contes, légendes et proverbes (dont
le fonds humanitaire est à redécouvrir) surtout si le message est destiné aux populations
rurales trop souvent rebutées par le caractère écrit du droit moderne.
Dans cette optique, des émissions radiophoniques ou télévisées périodiques en
langues nationales ou locales pourraient amplifier la socialisation. Par ailleurs, il ne faudra
pas négliger des outils de communication souvent dépréciés dans leur valeur monétaire en
Afrique mais aux impacts populaires sans commune mesure: les arts (musique(908),
cinéma, peinture, bandes dessinées), autant de supports médiatiques qui, utilisés au dosage
adéqua~ pourraient renforcer l'action des autorités gouvernementales.
La socialisation devra emprunter deux voies différentes selon que le public soit
constitué de populations rurales ou urbaines.
En milieu urbain, l'effet incommensurable de la publicité moderne sur
l'inconscient des citadins peut utilement servir la diffusion du DIH. En milieu rural, la
promotion devra, autant que possible, répudier les voies classiques de la mise en oeuvre
pour suivre le canal des chefferies traditionnelles, de la hiérarchie religieuse, des
associations villageoises, des mouvements de femmes sans négliger les ressources des
mythes, des rites et du folklore.
(908) A ce propos,il faut saluer le projet "SO WHY 7" du CICR regroupant six musiciens africains
: Youssou NDOUR (Sénégal), Papa WEMBA (RD.C.), LAGBAJA (Nigéria), Lourdes Van
DUNEM (Angola), Lucky DUBE et Jabu KHANYlLE (Afrique du Sud), qui ont accepté en 1997
de faire un disque fustigeant les horreurs de la guerre et appelant à la paix.

402
La "stratégie promotionnelle afro-humanitaire"(909) à l'égard du milieu urbain
non scolarisé peut être exécutée par l'entremise des campagnes publicitaires, des séances
cinématographiques et des documentaires diffusés à la radio ou à la télévision.
Dans un milieu de culture orale, on peut également emprunter les moyens de
communication de masse en les adaptant au contexte rural. Les ressources du riche folklore
africain (danses, rites, mythes, contes, proverbes), les oeuvres d'art (peinture, sculpture), la
musique traditionnelle peuvent contribuer favorablement à la promotion du DIH. La
vulgarisation du DIH doit s'appuyer sur le recensement des valeurs civilisationnelles
positives du groupe de la population ciblée. Le recours aux langues nationales, la
mobilisation des communicateurs traditionnels seront autant d'outils pédagogiques pour un
enseignement de qualité en direction du monde rural. fi faudra surtout éviter de transposer
tel quel un enseignement destiné a priori aux universitaires dans le réceptacle du milieu
rural sans en épouser les spécificités locales.
Dans cette veine, une expérience tentée en Somalie, intitulée "Projet AKARA",
mérite d'être rapportée. fi s'agit d'un mode original de promotion et de diffusion par le
CICR, dans un pays marqué par Wle absence d'autorités étatiques, par Wle rupture des
chaînes de commandement et par une anarchie de guerres claniques érigées en système. Le
projet allie la représentation de pièces théâtrales magnifiant les valeurs humanitaires
traditionnelles et le respect du DIH par les civils et les combattants.'
Une autre expérience du CICR labellisée "PUT HUMANITY FIRST" et tentée
au TRANSKEI en Afrique du Sud, ciblait les dirigeants des commWlautés noires, blanches
et métisses, les forces de sécurité et la population en général avec Wl accent particulier sur
la jeunesse.
(909) Expression empruntée à Mutoy MUBIALA : Les Etats africains et la promotion des
principes humanitaires, op. cit., p. 109.

403
En raison des nombreux troubles ethniques entre XHOSAS et ZOULOUS, des
divergences syndicales et de l'existence de mouvements extrémistes de tous bords, cette
expérience a pu désamorcer certaines tensions, séquelles de la période de l'apartheid(910).
Les lacunes de la promotion du DIH en Afrique portent également sur la mise à
l'écart de la diffusion des membres de la société civile, notamment les associations de
jeunes, les mouvements de femmes, les O.N.G., etc. Or, ces catégories pourraient endosser
un rôle puissant de relais de transmission du DIH.
La diffusion du Dili devra également s'affranchir de la barrière des langues et
des cultures. Une promotion adéquate doit se concilier avec les exigences spécifiques de
chaque groupe ethnique ou minorité linguistique. Le développement d'une culture de paix
implique une mise en oeuvre accessible aux masses populaires. Toute politique de
diffusion ignorant le fort taux d'analphabétisation risque d'être vouée à l'échec.
Le rôle des sociétés nationales de Croix-Rouge devra s'amplifier. Ces sociétés,
en leur qualité d'auxiliaires des pouvoirs publics devront éclairer, conseiller les Etats pour
une meilleure prise en compte du facteur humanitaire dans l'élaboration des politiques
gouvernementales et dans le déroulement des opérations militaires, y compris dans les
simples manœuvres d'entraînement des troupes. Ces sociétés peuvent contribuer à former
un personnel qualifié pour ses opérations de secours et d'assistance, à promouvoir les
idéaux de paix, de respect et de tolérance auprès des jeunes Volontaires de la Croix-Rouge
ou d'autres organismes similaires (Pionniers, Eclaireurs, Coeurs Vaillants, Ames
Vaillantes, Scouts, etc.).
(910) Sur ces deux projets, consulter CONFLICT PREVENTION, THE HUMANITARIAN
PERSPECTIVE in International Institute of Humanitarian Law, XIXth Round Table on current
problems of International Humanitarian Law (29 august - 2 september 1994), San Remo, Italy,
1994, pp. 88-95.

404
Pour atteindre Wl public élargi, certaines Sociétés nationales ont entrepris Wle
œuvre de collaboration. n en est ainsi de l'ACRüFA (Association des Croix-Rouge et
Croissant-Rouge d'Afrique Francophone) regroupant dix-sept Sociétés nationales. A Wl
niveau plus resteint, on peut citer le groupe de Praïa regroupant les Sociétés nationales du
Cap-Vert, de la Guinée-Bissau, de la Guinée-Conakty, de la Gambie, du Sénégal, le CICR
et la Fédération des Sociétés nationales pom hannoniser lems activités et amorcer Wle
stratégie régionale concertée et intégrée.
La socialisation du DIH peut s'appuyer sm l'enseignement et l'éducation
scolaire des jeunes. Ainsi, avec le filtrage approprié, l'enseignement du DIH pourra débuter
dès le niveau préscolaire. Il s'agira d'inculquer le réflexe humanitaire dès le jeune âge. Un
enseignement basé sm des supports pédagogiques adaptés à la mentalité enfantine, pourrait
par des jeux de rôle, des pièces de théâtre, des ouvrages illustrés ou des bandes dessinées,
éveiller lem conscience humanitaire.
Le niveau scolaire ou primaire doit être mieux sollicité. n s'agit de rentabiliser,
valoriser l'éducation civique ou sanitaire, matière de plus en plus marginalisée. Dans le
cadre de leçons de morale, on potrrrait introduire l'enseignement du DIH en magnifiant les
valeurs hwnanitaires de dignité et de respect des libertés d'autrui. Pour accroître le succès
de cet enseignement, on pourrait, à la fm du cycle élémentaire, intégrer à l'examen Wle
matière (facultative ou obligatoire, principale ou complémentaire) comportant l'étude
simplifiée du droit humanitaire et des Droits de l'Homme (notamment les droits de
l'enfant).
Le niveau secondaire (lycées et collèges) est insuffisamment formé. L'éducation
civique, devant englober le volet humanitaire, est souvent limitée au premier cycle. Il s'agit
d'élargir cet enseignementjusqu'à la classe de Tenninale. Dans cette logique, une matière à

405
option, portant sur les droits hmnains, pourra être intégrée dans les épreuves du
Baccalauréat.
Au niveau universitaire, l'enseignement du DIH (qui entretient des relations
certaines avec le Droit constitutionnel, le Droit pénaL les Libertés publiques, les Droits de
l'Homme) peut être introduit à tous les niveaux (du premier au troisième cycle). Toutefois,
cet enseignement académique devra être précédé d'une évaluation de la législation
nationale en vigueur, des lacunes de celle-ci à la lumière des obligations conventionnelles,
du coût et des objectifs. A côté des cours magistraux, une immersion du public
universitaire dans le DIH peut emprunter la voie de séminaires, de sessions
d'enseignement, etc.
La socialisation et la nationalisation du DIH sont complémentaires. Elles
impliquent l'application du Dili. Mais l'application du DIH est tributaire de sa réception
nationale. Pour maximiser l'exécution des obligations conventionnelles, le DIH doit être
porté à la connaissance de la population. Dès lors, la nationalisation et la socialisation du
Dili demeurent des impératifs incontournables pour asseoir une politique humanitaire
crédible et amener les Africains à comprendre le message humanitaire et à en intérioriser
les préceptes.

406
CONCLUSION DE LA Ile PARTIE
A l'instar des autres branches du DIP, le DIH ne peut s'épanouir en dehors de
l'action des Etats. Tributaires de la volonté étatique, à travers ses attributs de la
personnalité juridique internationale et de la souveraineté, les obligations conventionnelles
de l'Etat font reposer, sur ce dernier, le sort des conventions. il appartient à chaque Etat,
par le biais de son pouvoir exécutif et/ou législatif, de donner un contenu précis et détaillé
aux obligations conçues sur le plan international.
En vertu du droit des traités, s'il est reconnu que l'Etat dispose d'une grande
latitude de choix dans les modes d'expression de son consentement à être lié aux traités,
une fois son accord donné et s'il est exempt de vices, la règle PACTA SUNT SERVANDA
lui devient opposable.
TI en ressort qu'en vertu du principe de la bonne foi, l'Etat est tenu d'assurer ses
engagements en se comportant de manière à ne pas priver le traité de son objet. TI en va de
sa responsabilité.
Corrélativement à ses engagements, l'Etat doit appliquer les Conventions
humanitaires dès lors que son acceptation s'est traduite par la signature, accession,
ratification, adhésion ou approbation.
Le DIH est un composite de règles et de principes insérés dans un grand
nombre de conventions internationales à vocation universelle ou régionale soumettant
l'Etat à une cascade d'obligations. Ces obligations majeures, sans doute plus onéreuses que
dans toute autre branche du DIP, sont d'une nature particulière.

407
En effet, les obligations de respecter et de faire respecter le DIH impliquent de
la part des Etats, un surcroît de dynamisme normatif mais également une action incessante
pour implanter ces principes et règles.
Dans cette logique, la nationalisation du DIH et sa socialisation supposent une
action consciente de l'Etat qui doit cerner les valeurs et les principes humanitaires et les
transcrire en engagements fermes d'application.
Plus qu'aucune autre discipline juridique, le Dili dépend de la politique
normative de l'Etat et de la volonté des gouvernements de la mettre en œuvre.
La mise en œuvre du DIH, pour être complète, devra s'appuyer sur le respect de
la hiérarchie des normes au niveau interne (lois, règlements et autres mesures).
A cet égard, l'optimisation de la mise en œuvre est conditionnée à la maîtrise
d'un triptyque :
connexion entre la politique de l'application et le degré de compréhension
du DIH par les décideurs politiques (gouvernement, administration) ;
instruction en DIH des forces armées (à tous les échelons du
commandement) ;
diffusion et promotion du DIH en direction de la population civile.
La conjonction gouvernants-soldats-population représente le noyau central
de la mise en œuvre. La maîtrise de ces axes permettra à l'Etat de satisfaire à ces
engagements en exerçant, à chaque niveau, le dosage approprié de promotion et de
diffusion du DIH.

408
En complément de ces mesures de mise en oeuvre, l'Etat devra aménager des
sanctions aux violations du DIH. il importe, au préalable, que l'Etat dispose de codes
pénaux, de lois et décrets punissant les infractions humanitaires. La formation des
magistrats et des auxiliaires de justice pourra démultiplier les chances de propagation du
DIH.
En application du principe de Droit pénal AUT JUDICARE AUT DEDERE,
les auteurs de ces violations devront être traduits devant les juridictions internes ou, à
défaut, être extradés vers tout Etat qui démontre d'un intérêt suffisant au respect de cette
prescription, compte tenu du principe de la juridiction universelle des crimes contre
l'humanité, des crimes de guerre et des infractions graves au Dili.
L'expérience des tribunaux Ad Hoc (TPIR et TPly), malgré les nombreuses
vicissitudes constatées, a porté à l'attention de l'opinion publique, l'importance de certains
crimes et délits internationaux et la nécessité de les réprimer quels qu'en soient les auteurs.
Cet aspect dissuasif est accru avec la création de la Cour pénale internationale
qui, en dépit de ses difficultés de démarrage, constitue une avancée spectaculaire dans la
protection des Droits de l'Homme et du DIH et une brèche ouverte dans le rempart du
principe de la souveraineté des Etats, trop souvent utilisé pour dénier le respect des droits
de la personne humaine.

409
CONCLUSION GENERALE
Sir Hersch LAUTERPACHT écrivait : "Si le Droit international est... le point
de fuite du droit, le droit de la guerre est encore plus manifestement le point de fuite du
Droit intemational"(911).
Il faut admettre que le DIH contient de faibles moyens de contrainte. Ceux-ci
sont, pour l'essentiel, laissés à la discrétion des Etats dont les motivations majeures sont
fondées sur leurs intérêts géostratégiques et politiques les plus immédiats.
c7l...,.te~
Il en est ainsi depuis l'~énement de l'institution étatique. En intégrant ces
..--
données, le DIH, depuis la 1ère Convention de Genève de 1864, nIa cessé de connaître une
évolution fulgurante couvrant de nouveaux domaines tout en essayant, tant bien que mal,
de réglementer l'usage de méthodes ou de moyens de combat toujours plus meurtriers.
A défaut d'éradiquer totalement la guerre dans les relations internationales
contemporaines, le réalisme impose d'en encadrer l'exercice pour en humaniser, autant que
possible, les effets. Ce réalisme est teinté d'une dose d'idéalisme, la croyance au meilleur
de l'humanité, sa capacité à surmonter ses erreurs et à lier ses actions à la Raison.
Cet idéalisme, en se conjuguant avec le réalisme, a permis de dégager quelques
points nodaux, autour desquels s'articule le DIH : la nécessité de concilier les exigences
militaires et les exigences humanitaires, la distinction entre combattants et non-
combattants, la restriction du choix des moyens de nuire à l'ennemi et la distinction entre
personnes et biens civils et objectifs militaires.
(911) Cité par EL KOUHENE (M.), Les garanties... , op. cit., p. 164.

410
Ces principes du DIH, volet du DIP, s'inspirent du sentiment d'humanité présent
dans toutes les cultures et centré sur la protection de la personne humaine en situation de
conflit armé. Ces fondements éthiques et moraux sont renforcés par une normativité de
moins en moins contestée.
Aujourd'hui, le DIB connaît un regain de vitalité non seulement à travers les
textes initiés par le CICR, l'AGNU, l'UNESCO ou l'OUA mais également grâce à des
principes coutumiers réaffirmés, des résolutions progressistes et une jurisprudence
innovante.
Copiant la structure-mère du DIP, le DIH en a hérité les défauts. Concrètement,
l'effectivité du DIH est similaire à celle du D.I.P.. Son efficacité dépend, en grande partie
(hormis quelques dispositions objectives relevant des règles ERGA OMNES, de JUS
COGENS ou de droit coutumier), de la volonté souveraine des Etats. Ce volontarisme est
particulièrement mis en exergue au niveau de la mise en oeuvre.
Comme l'ont souligné les Professeurs FURET, MARTINEZ et OORANDEU :
"la diffusion du droit humanitaire, pour indispensable qu'elle soit, reste très largement
tributaire de la bonne volonté des Etats. Or ceux-ci ne semblent pas s'enthousiasmer pour
cette tâche : ils invoquent soit le manque de moyens ou de cadres compétents (pour
disposer de conseillers juridiques, par exemple), soit le syndrome tlmaniaco-subversir' et
son corollaire, l'équation tlinformation assurée = rébellion facilitée"(912).
Sans intenter un nouveau procès à la souveraineté, honnie et exaltée à la fois, il
faut reconnaître que le DIB demeure assujetti à des obstacles d'ordre étatique : les
difficultés constitutionnelles, législatives ou réglementaires de sa réception dans l'ordre
interne. Les Etats africains n'échappent pas à ce constat.
(912) Cf FURET (M.F.), MARTINEZ (Je.) et DORANDEU (H.), La guerre et le droit, op.
cit.,p. 223.

411
L'avènement d'un Etat de droit reste donc une priorité en Afiique. A l'aube du
troisième millénaire, la protection des droits fondamentaux devra également, tout en
s'ancrant dans l'universalisme, intégrer les spécificités africaines les plus marquantes qui
rétroagissent sur les tenants et aboutissants des conflits armés africains.
Si la vague des hostilités armées interétatiques est en train de se tarir, les
conflits armés internes ne cessent d'hypothéquer lourdement l'avenir de ces jeWles Etats.
Malgré l'option proclamée de respect des droits et libertés fondamentaux, les
Etats africains sont confrontés à d'immenses difficultés de maîtrise de leur espace
tenitorial où l'irrédentisme local ou régional, nourri par des groupes fortifiés par leur
identité dialectale ou culturelle, peut se poser en termes de rupture de l'unité nationale.
Sur le plan interne, nen n'empêche les Etats de repnmer sévèrement
conformément à leurs législations pénales, toute tentative de sécession ou toute action de
rébellion consommée sans entourer les condamnations de toutes les garanties humanitaires
pourtant prévues dans les Conventions de Genève de 1949 ou les Protocoles additionnels
de 1977.
En réalité, les Etats ne sont pas les seuls transgresseurs du DIH. Les forces
rebelles ou dissidentes et les mouvements sécessionnistes ne se sentent pas concernés par
l'application du Dm du fait qu'ils n'ont pas signé les Conventions humanitaires ou n'en
connaissent pas l'existence.
Cette ignorance entraîne une dissémination considérable de la violence à travers
le phénomène des enfants-soldats, les exactions contre la population civile, la
recrudescence du problème des réfugiés et des déplacés, la prolifération des conflits
destructurés ou de type mixte à genèse interne mais à extension internationale.

412
Ces conflits annés ont des coûts exorbitants. Selon une étude réalisée par un
groupe de recherches belge, les coûts sont variés:
n. coûts humanitaires (morts, blessés, déplacés, réfugiés, famine) ;
- coûts politiques (perte de soutien de l'opinion mondiale, rupture de la
démocratie, cOffilption politique et désintégration de l'Etat de droit) ;
- coûts matériels ou économiques (dommages de guerre, destruction,
manque à gagner pour le tourisme) ;
• coûts écologiques (destruction des forêts (politique de la terre brûlée) et des
parcs nationaux) ;
- coûts sociaux (éclatement des familles, orphelins de guerre, victimes de
viol);
- coûts de nature culturelle (trésors historiques détruits, perte d'identité des
nomades éleveurs, substitution d'W1e culture de paix par une culture de
guerre) ;
- coûts psychologiques (dégâts psychiques, pertes de repères, dégénérescence
humaine) ;
- coûts spirituels (sentiments de haine aveugle, négation de l'humanité de
l'autre)"(913).
(913) Conflits en Afrique: Analyse des crises et pistes pour une réflexion, op. cit., p. 23.

413
Ces constats alarmants des conflits arnlés africains mettent à nu les difficultés
d'application du DIH. Toutefois, ces carences semblent de plus en plus amoindries par la
nouvelle dynamique tendant à la conjonction entre les nonnes humanitaires et les nonnes
du JUS COGENS ou les règles ERGA OMNES. A cette tendance, vient se greffer une
juridictionnalïsation prononcée de la répression des violations du DIH, déjà amorcée par
les T.M.!. de Nuremberg et de TOKYO, poursuivie par les tribunaux Ad Hoc de La Haye
et d'Arusha et que la c.P.!. devra consolider dès l'entrée en vigueur du statut adopté à
Rome en 1998.
Ces tendances augurent d'une meilleure prise en compte du D.I.H. dans les
préoccupations des Etats qui ne peuvent plus se retrancher derrière la théorie du domaine
réservé pour violer impunément les droits de la personne et empêcher la communauté
internationale d'avoir un droit de regard et de dénonciation. Ceci est confirmé depuis la
résolution précitée de l'Institut de Droit international à sa session de Saint-Jacques-de
Compostelle en 1989 constatant que "les Droits de l'Homme bénéficiant désonnais d'une
protection internationale, cessent d'appartenir à la catégorie des affaires qui relèvent
essentiellement de la compétence nationale de l'Etat" et qui en concluait que : "les
démarches diplomatiques, de même que l'expression purement verbale de préoccupations
ou de désapprobations au sujet de violations quelconque des Droits de l'Homme, sont
licites en toutes circonstances".
La modération de cette démarche de l'LD.!. écarte toute référence à la
controversée théorie de droit/devoir d'ingérence humanitaire dont les fondements
juridiques sont trop instables pour que la notion s'installe au cœur du D.I.P.
Il reste que, malgré ses succès pourtant certains, le DIH a encore de nombreux
défis à relever dont le moins important n'est pas l'arme nucléaire. Dans cette perspective, le
développement progressif devra se nouer autour de l'interdiction de cette arme tant au

414
niveau de la production, de l'emploi, du stockage, de sa transfonnation que de son transfèrt
technologique.
Tout aussi ardue demeure la maîtrise des conflits armés internes dont la
résolution suppose lUl dialogue entre toutes les composantes de la population civile,
l'amélioration des relations entre civils et militaires et une initiative militaire régionale
intégrée par des fonnes de coopération à l'image du RECAMP, de l'ANAD, de
l'ECOMOG ou de la SADe.
L'avènement d'un Etat de droit, d'tille société de liberté, d'une année
républicaine et d'lUle citoyenneté cultivée sont des défis à relever par les sociétés africaines
modernes.
C'est dans cette perspective qu'il faut replacer la problématique de l'application
du droit des conflits annés en Afrique. Certes, les Etats sont plus avertis de leurs devoirs
envers leurs citoyens et la communauté internationale. Mais cette tendance devra être
renforcée par une vulgarisation du DIH en direction de toutes les couches sociales et
s'intégrer dans les politiques gouvernementales. Seule cette promotion peut constituer un
palliatif ou lUl dérivatif à ces innombrables violations constatées dans tous les conflits
armés africains.

415
ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES

1- Ouvrages Généraux
II - Ouvrages spécialisés
III - Articles, Cours, Colloques, Séminaires
IV - Principales Conventions du DIH
V - Publications du C.I.C.R., du H.C.R. et de l'UNICEF
VI - Documents de l'ONU, de l'OUA, de la CEDEAO
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1864 :
Convention pour l'amélioration du sort des blessés dans les armées en
campagne - Genève, 22 août 1864.
(Publié in Nouveau Recueil Général des Traités dit Recueil de Martens -
1ère série, Vol. 18, p. 612 et s.).
1868 :
Déclaration de Saint-Petersbourg à l'effet d'interdire l'usage de certains
projectiles en temps de guerre - Saint-Petersbourg, 29 novembre-Il
décembre 1868.
1899 :
Déclaration
concernant
l'interdiction
d'employer
des
balles
qui
s'épanouisent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain - La Haye,
29 juillet 1899.
lie Convention de 1899: Convention concernant les lois et coutumes de la
guerre sur terre, La Haye, 29 juillet 1899 (Texte, ibid. Ile série, Vol. 26, p.
949 et s.).
1906 :
Convention sur l'amélioration du sort des blessés et malades dans les
armées en campagne - Genève, 6 juillet 1906 (abrogée).
(Manuel de la Croix-Rouge Internationale, 1953, p. 22 et s.).
1907: -
Convention TIl relative à l'ouverture des hostilités - La Haye, 18 octobre
1907.
Convention concernant les droits et les devoirs des puissances et des
personnes neutres en cas de guerre sur terre - La Haye, 18 octobre 1907.
IVe Convention de 1907 : Convention concernant les lois et coutumes de
la guerre, La Haye, 18 octobre 1907.
Règlement de 1907 : Règlement concernant les lois et coutumes de la
guerre sur terre, annexé à la susdite convention.
(Textes in Nouveau Recueil Général des Traités, 3e Série, Vol. 3, p. 461 et
s.).
1925:
Protocole concernant la prohibition de l'emploi à la guerre de gaz
asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques -
Genève, 17 juin 1925.
(Texte in SCHlNDLER (D.) & TOMAN (1.), pp. 115-138.).

449
1929: -
1ère Convention de 1929 : Convention pour l'amélioration du sort des
blessés et malades dans les armées en campagne - Genève, 27 juillet 1929
(abrogée).
(Manuel de la Croix-Rouge Internationale, 1953, p. 64 et s.)
Hème Convention de 1929 : Convention relative au traitement des
prisonniers de guerre, 27 juillet 1929 (abrogée)
(Texte, ibid. p. 77 et s. / Texte in Le FUR (L.) et CHKLAVER (G.),
Recueil des textes de Droit international public, 2e éd., Paris, Dalloz 1934,
p.1029)
1949: -
1ère Convention pour l'amélioration du sort des blessés et malades dans les
forces armées en campagne - Genève, 12 août 1949.
IIème Convention pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et
des naufragés des forces années sur mer - Genève, 12 août 1949.
IITème Convention relative au traitement des prisonniers de guerre -
Genève, 12 août 1949.
Ne Convention relative à la protection des personnes civiles en temps de
guerre - Genève, 12 août 1949.
(Textes in Les Conventions de Genève du 12 août 1949, CICR, Genève,
novembre 1989,251 p.).
1954: -
Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé
(UNESCO), La Haye, 14 mai 1954 et
Règlement d'exécution de la Convention et
Protocole pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé.
(Textes in SCHINDLER (D.) & TOMAN (l), Droit des conflits armés, pp.
1047-1090).
1972 :
Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du
stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur
destruction, Londres/Moscou/Washington, 10 avril 1972.
(Texte in RGDIP 1973, pp. 345-350).
1976 :
Convention ENMOD
: Convention sur l'interdiction d'utiliser des
techniques de modification de l'environnement à des fins militaires,
adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies par la Résolution
31/72 du 10 décembre 1976 (ouverte à la signature et à la ratification du 18
au 31 mai 1977 à Genève).
(Texte in SCHINDLER (D.), & TOMAN (l), Droit des conflits annés, pp.
173-180).

450
1977: ...
Protocole 1 : Protocole additimmel aux Conventions de Genève du 12 août
1949 relatif à la protection des victimes des conflits annés internationaux,
adopté à Genève le 8 juin 1977 (ouvert à la signature à partir du Il
décembre 1977).
...
Protocole II : Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août
1949 relatif à la protection des victimes des conflits annés non
internationaux, adopté à Genève le 8 juin 1977 (ouvert à la signature à
partir du Il décembre 1977).
(Textes in Les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève, CICR,
Genève 1977, 136 p.).
1980 :
Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes
classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets
traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination, Genève, 10
octobre 1980 (Doc. ONU. NCONF/95/15).
Protocole relatif aux éclats non localisables (Protocole 1).
Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et
autres dispositifs (Protocole II).
Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des armes
incendiaires (Protocole III).
(Textes inRICR, Volume 63, N° 727, janvier-février 1981, pp. 20-34).
1993 :
Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, de la
transmission et du stockage des armes chimiques, Paris, 13 janvier 1993.
(Texte in DUPUY (P.M.), Grands Textes de Droit international public, p.
357).
1995 :
Protocole sur les armes à laser aveuglantes, Genève, 13 octobre 1995
(Protocole
N
à
la
Convention
du
10
octobre
1980).
Doc
ONU.lC.C.W.lConf 1/7.
(Texte in RICR N° 819, mai-juin 1996, p. 322 et s.).
1996 :
Protocole révisé sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines,
pièges et autres dispositifs.
1997:
Convention d'Oslo du 18 septembre 1997 sur l'interdiction de l'emploi, du
stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur
leur destruction, ouverte à la signature Ottawa les 3 et 4 écembre 1997.
(Texte in R.A.D.I.C., Vol. 9, N° 4, décembre 1997, pp. 984-997 et RICR
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octobre 1979, Collection d'exposés du CICR, Genève, Il p.
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Mise en œuvre des protocoles de 1977, RICR, Genève, juillet-août 1980, 7 p.
3 -
Les démarches du CICR en cas de violations du DIH, RICR N° 728, mars-avril
1981, pp. 79-86.
4 -
Le CICR en Afrique: Rétrospective 1980-1985, 24 p.
5 -
Résolution de Manille, XXIVe Conférence Internationale de la Croix-Rouge,
RICR N° 733, janvier-février 1982, pp. 12-24.
6 -
CICR, Bulletin: Edition spéciale ANGOLA 85-86, 15 p.
7 -
CICR, Bulletin: Edition spéciale MOZAMBIQUE 1987, 16 p.
8 -
Statuts du CICR, RICR N° 770, mars-avril 1988, p. 157.
9 -
Le CICR dans le monde, 1988, Genève, 25 p.
10 -
CICR: Agence Centrale de Recherches du CICR, Genève, 1989, 15 p.
Il -
CROIX-ROUGE
-
CROISSANT
ROUGE,
Portrait
d'un
mouvement
international, CICR, 1989, 30 p.
12 -
Activités extérieures du CICR, 1989, RICR N° 778, juillet-août 1989, pp. 380-
383.
13 -
Le CICR dans le monde, 1990, Genève, 28 p.
14 -
Rapport d'activités du CICR, 1990, Genève, 32 p.
15 -
Respect du DIH : réflexions du CICR sur cinq années d'activités (1987-1991),
Genève, décembre 1991,23 p.
16 -
GACOND (J.1.), DIH et droit de la guerre. Conférence surIe DIH pour les forces
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pp. 107-126.
19·
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des victimes des conflits annés non internationaux contre les effets des hostilités,
8p.
20 -
CICR. Doc. CI/6.3.2/1. XXVIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du
Croissant Rouge, Budapest (novembre-décembre 1991), 40 p.
21·
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23 -
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1993,32 p.
24 -
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25 -
CICR : Somalie, Genève, 23 mars 1993, 7 p.
26·
CICR Rapport d'activités 1994, Genève 1994,323 p.
27 •
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28 -
CICR: Edition Spéciale: ANGOLA, Genève,mai 1994, Il p.
29 -
CICR: Edition Spéciale: RWANDA, Genève, septembre 1994, 12 p.
30 -
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31 -
CICR : Les enfants dans la guerre. Edition Spéciale, juin 1995, 30 p.
32 -
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33 -
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34·
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1995, 15 p.

453
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36 -
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37 -
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39 -
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42 -
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demande du CICR, Genève, mars 1996,84 p.
46 -
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47 -
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48 -
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B- ac.R.
53 -
REFUGIES N° 96 : AFRIQUE (II), 1994, 30 p.
54 -
REFUGIES N° 100: Femmes réfugiées (II) 1995,30 p.
55 -
Les réfugiés dans le monde. En quête de solutions, Paris, Ed. La Découverte, 264
p.
56 -
REFUGIES N° 103 : Les personnes déplacées (1), 1996, 30 p.
57 -
Les réfugiés dans le monde (l'enjeu de la protection), Paris, Ed. La Découverte,
1993, 191 p.
58 -
Les réfugiés dans le monde: les personnes déplacées: l'urgence hwnanitaire,
Paris, Ed. La Découverte, 1997,295 p.
59 -
HCR. Recueil des traités et autres textes de Droit international concernant les
réfugiés, Genève 1982, 397 p.
60 -
HCR. Les enfants réfugiés : principes directeurs concernant la protection et
l'assistance, Genève 1994, 199 p.
61 -
RCR Principes directeurs concernant les enfants réfugiés, Genève, août 1988,45
p.
62 -
REFUGIES N° 110, La crise des Grands Lacs. Chronique d'une tragédie, HCR,
Genève, Hiver 1997, 31 p.
63 -
Conférence d'Arusha de 1979 consacrée aux réfugiés africains. Rapport de la
Conférence sur la situation des réfugiés en Afrique. HCR/140/12179.
64 -
Comité Exécutif du HCR, Conclusion N° 46. Rapport de la 38e session du 22
octobre 1987. Doc. ONU/A/A.C 961702.

455
~5 - Comité Exécutif du RCR Conclusions de 1981 sur le problème de la protection
1
en cas d'affiux massif de personnes en quête d'asile. Doc. 22 (XXXII)
HCR/IPIENG/Rev. 1989.
-UNICEF
Rapports annuels UNICEF 1994-1998.
UNICEF. L'avenir de l'Afrique: Ses enfants. Etudes sectorielles OUNUNICEF,
Conférence internationale pour l'assistance des enfants en Afrique, Dakar, 25-27
novembre 1992.
68 -
UNICEF. La situation des enfants dans le monde, 1996, New-York, 41 p.
69 -
UNICEF. Trop tôt pour le crépuscule, trop tard pour l'aube. L'histoire des enfants
pris dans les conflits. La guerre contre l'enfance, Chronique des Nations Unies,
Volume xxxm, N° 4, New-York, Department of Public Infonnation, mars 1996,
80p.
70 -
UNICEF. Le progrès des Nations, New-York/Genève, 1995, 48 p.
VI - DOCUMENTS DE L'QNU, DE L'QUA, DE LA CEDEAO
A -
ASSEMBLEE GENERALE, organes, institutions et commissions spécialisées
de l'ONU: Site internet: http://www.UN.org
1 -
Res. N3(I) de l'AGNU du 13 février 1946 "Extradition et châtiment des criminels
de guerre".
2 -
Res. N95 (1) de l'AGNU du Il décembre 1946 "Confinnation des principes du
Droit international...", Textes in SCHINDLER (D.) et TOMAN (1), Droit des
conflits armés, op. cil., pp. 1309-1310.
3 -
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre
1948, Res. 260 A (III) de l'AGNU du 9.12.48, texte in SCRINDLER et TOMAN,
pp. 907-936.
4 -
Res. 498 (V) du 14 décembre 1950 relative au statut du RCR.
5 -
Convention relative au Statut des réfugiés, 28 février 1951, Res. 429 (V) de
l'AGNU du 14 novembre 1950.
6 -
Res. 1514 (XV) du 14 décembre 1960 relative à la Déclaration sur l'octroi de
l'indépendance aux pays et peuples coloniaux, in DUPUY (P.M.), Grands
Textes..., op. cil., pp. 73-75.

456
Res. 1642 (XVI) du 24 novembre 1961 demandant que l'Afrique soit une zone
dénucléarisée.
Res. 2106 A (XX) du 21 décembre 1%5 portant Convention sm l'élimination de
toutes les formes de discrimination raciale, in Droits de l'Homme, Recueil
d'Instruments Internationaux, op. cit., pp. 55-69.
9-
Res. 2131 (XX) du 21 décembre 1%5 portant Déclaration sur l'inadmissibilité de
l'intervention dans les affaires intérieures des Etats et la protection de leur
indépendance et de leur souveraineté, in PELLET (A.), Les Nations Unies. Textes
Fondamentaux, PUF 1995, Que-sais-je? N° 3035, 128 p.
10 -
Res. 2312 (XXII) du 14 décembre 1967 portant Déclaration sm l'asile territorial,
in Droits de l'Homme. Recueil..., pp. 320-322.
~-i J"'rl. ",'c-'~
11-
Protocole du 4..e8tsère 1967 à la Convention sur le statut des réfugiés, Res. 2198
(XX) du 16 décembre 1966.
12 -
Res. 2444 (XXIII) du 19 décembre 1968, "Respect des Droits de l'Homme en
période de conflit armé", Docwnents officiels de l'AG, 23e sessio~ supplément
N° 18, p. 50, Doc. A/7218 (1969), texte in SCHINDLER et TOMAN, pp. 325-
326.
13-
Acte final de la Conférence Internationale des Droits de l'Homme, Téhéran (22
avril - 13 mai 1968), New-York, Nations Unies, 1%8 (Doc. A/Conf./32/41)
surtout la Résolution XXIII concernant le respect des Droits de l'Homme en
période de conflit armé, in SCHINDLER et TOMAN, pp. 321-324.
14 -
Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre
l'hwnanité du 26 novembre 1968, Résolution 2391 (XXIII) du 26.11.68, in
SCHINDLERetTOMAN, pp. 1315-1316.
15 -
Res. A 2597 (XXIV) de l'AGNU du 16 décembre 1969.
16 -
Res. 2625 (XXV) de l'AGNU du 24 octobre 1970, "Déclaration relative aux
principes du Droit international touchant les relations amicales et la coopération
entre les Etats, confonnément à la Charte des Nations Unies", in DUPUY (P.M.),
Grands Textes..., pp. 321-324.
17 -
Res. 2674 (XXV) de l'AGNU du 9 décembre 1970 (Guérilla).
18 -
Res. 2675 (XXV) de l'AGNU du 9 décembre 1970 "Principes fondamentaux
touchant la protection des populations civiles en période de conflit armé",
Docwnents officiels de l'AGNU, 25e session, Supplément N° 28 (1971), p. 76,
Doc. A 8028 (1971), in SClllNDLER et TOMAN..., pp. 329-330.

457
19 -
Res. 2676 (XXV) de l'AGNU du 9 décembre 1970.
20 -
Res. 2677 (XXV) de l'AGNU du 9 décembre 1970.
21-
Res. 2787 (XXVI) de l'AGNU du 6 décembre 1971.
22 -
Res. 2852 (XXVI) de l'AGNU du 6 décembre 1971 "Respect des Droits de
l'Homme en période de conflit anné", Documents officiels de l'AGNU, 26e
session, Supplément N° 29, p. 29, Doc. A/8429 (1972).
23 -
Res. 2853 (XXVI) de l'AGNU du 6 décembre 1971 invitant les Etats à enseigner
et à diffuser les Droits de l'Homme en période de conflit anné.
24 -
Res. 3074 (XXVIII) de l'AGNU du 3 décembre 1973 "Principes de la coopération
internationale en ce qui concerne le dépistage, l'arrestation, l'extradition et le
châtiment des individus coupables de crimes de guerre et de crimes contre
l'humanité", in SCHINDLER et TOMAN, p. 1327.
25 -
Res. 3103 (XXVIII) de l'AGNU du 12 décembre 1973, "Principes de base
concernant le statut juridique des combattants qui luttent contre la domination
coloniale et étrangère et les régimes racistes", Documents officiels de l'AGNU,
28e session, Supplément N° 30, Vol. 1, p. 153, Doc. A/9030 (1974), texte in
SCHINDLER et TOMAN, pp. 733-736.
26 -
Res. 3314 (XXIX) de l'AGNU du 14 décembre 1974 sur la définition de
l'Agression, Documents officiels de l'AGNU, 2ge session, Supplément N° 31, p.
30, Doc. A/9631 (1975), in DUPUY (P.M.), Grands Textes..., pp. 261-264.
27 -
Res. 3318 (XXIX) de l'AGNU du 14 décembre 1974 sur la protection des femmes
et des enfants en période d'urgertce et de conflit anné, in Droits de l'Homme.
Recueil..., pp. 370-372.
28 -
Res. 3450 (XX) de l'AGNU du 9 décembre 1975 "Déclaration sur la protection
contre toutes les formes de torture et de traitements cruels, inhumains et
dégradants".
29 -
Déclaration Universelle des Droits des Peuples (Alger) du 4 juillet 1976, in
COLARD (D.), Droit des relations internationales. Documents Fondamentaux, 2e
édition, Paris, Masson, 1988, p. 71.
30 -
Document des Nations Unies A/32/44, Annexes 1 et II consacrés aux Protocoles 1
et II de 1977.
31 -
Document des Nations Unies A/Conf.l95/15 reproduisant la Convention de
Genève de 1980 et les Protocoles 1, II et ID de 1980, in RICR N° 727, Vol. 63,
janvier-février 1981, pp. 43-58.

132 -
Res.
36/103 de l'AGNU du 9 décembre
1981
portant Déclaration sur
l'inadnùssibilité de l'intervention et de l'ingérence dans les affaires intérieures de
l'Etat.
133 -
Res. 37/10 de l'AGNU du 15 novembre 1982 portant Déclaration de Manille sur
le règlement des différends, in DUPUY (P.M.), Grands Textes..., pp. 329-336.
\\34 -
Charte Mondiale de la nature, New-York 28 octobre 1982, AGNU, Res. 37/7,
Documents officiels de l'AGNU, 37e session, Supplément N° 51, Doc. N37/51,
p. 19 (1983), in Laurence BOISSON De CHAZOURNES, Richard DESGAGNE
et Cesare ROMANO: Protection internationale de l'environnement..., pp. 35-40.
35 -
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, Res. 39/46 de l'AGNU du 10 décembre 1984, in SCHINDLER et
TOMAN..., pp. 957-973.
36 -
Res. 43/131 de l'AGNU du 8 décembre 1988, "Assistance humanitaire aux
victimes des catastrophes naturelles et situations d'urgence du même ordre", in
DUPUY (p.M.), Grands Textes..., p. 17.
37 -
Convention sur les droits de l'enfant, Res. 44/25 de l'AGNU du 20 novembre
1989, in SCHINDLER et TOMAN..., pp. 1023-1032.
38 -
Convention du 4 décembre
1989 contre le recrutement,
l'utilisation,
le
financement et l'instruction de mercenaires,
Res.
44/34 de
l'AGNU,
f i
SCHINDLER et TOMAN..., pp. 1289-1298.
39 -
Nations Unies. Formes contemporaines de l'esclavage : l'adoption des enfants à
des :fins commerciales et
l'enrôlement des enfants dans des forces années
gouvernementales et non gouvernementales. Doc. ONUIE/CN 4/Sub.2/1990/43
du 26 juin 1990.
40 -
Res. N45/6 de l'AGNU du 16 octobre 1990 "Attribution du statut d'observateur
au CICR".
41-
Res. N45/64 de l'AGNU du 4 décembre 1990.
42 -
Res. N45/100 de l'AGNU du 14 décembre 1990 « Assistance humanitaire aux
victimes des catastrophes naturelles et situations d'urgence du même ordre », in
SCHINDLER et TOMAN, pp. 940-942.
43 -
Res. N46/182 de l'AGNU du 19 décembre 1991 "Renforcement de la
coordination de l'aide humanitaire d'urgence de l'ONU", in SCHINDLER et
TOMAN..., pp. 943-944.

459
Comité des droits de l'enfant. Rapport sm la 2e session. Doc. ONU/CRC/C/I0 du
19 octobre 1992.
Comité des Droits de l'enfant. Rapport sur la 3e session. Doc. ONU/CRC/C/16 du
2 mai 1993.
46-
Déclaration et Programme d'action de Vienne. Conférence mondiale sur les Droits
de l'Homme (Vienne, 14-25 juin 1993). Doc. A/Conf. 157/23 du 12 juillet 1993.
47-
Rapport sur la situation des Droits de l'Homme au Rwanda par René DEGNI-
SEGUr, Rapporteur spécial de la Commission des Droits de l'Homme, DOC
E/CN4/1995/7 du 28 juin 1994, in Refugee Survey Quaterly, UNHCR, Vol. 13,
N° 2 et 3, Automne 1994, pp. 116-118.
48 -
Rapport sm la situation des Droits de l'Homme en application du Paragraphe 20
de la Résolution S-3/1 du 25 mai 1994 par René DEGNI-SEGUI, Doc.
E/CN4/1995/12 du 12 août 1994, in Refugee Survey Quaterly, UNHCR, VoL 13,
N° 2 et 3, Automne 1994, pp. 139-147.
49-
Rapport sm la situation des Droits de l'Homme au Rwanda du Il novembre 1994
par René DEGNI-SEGUr, Doc. E/CN.4/1995/70.
50-
Rapport sm la situation des Droits de l'Homme au Rwanda du 18 janvier 1995,
DOC.FJCN4/1995/71.
51-
Projet de la C.D.I. de Codification du droit de la responsabilité des Etats (1ère
partie) in DUPUY (P.M.), Grands Textes..., pp. 819-828.
52-
Projet de la C.D.!. de statut d'une Cour criminelle internationale, in DUPUY
(F.M.), Grands Textes..., pp. 829-855.
53 -
Compilation et Analyse des Normes juridiques protégeant les personnes
déplacées. Doc. ONU FJCN4/1996/52/Add.2 du 5 décembre 1995.
54-
Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur
propre pays. Doc. ONU E.lCN4/1998/53/Add.2 du Il février 1998, in RICR N°
831, septembre 1998, pp. 585-597.
55 -
Circulaire du Secrétaire Général des Nations Unies du 6 août 1999, U.N. DOC.
ST/SGB/1999/13 Respect du DIH par les forces des Nations Unies, in RICR N°
836, décembre 1999, pp. 806-811.

460
B - CONSEIL DE SECURITE
1-
Res. S/Res/540 (1983), 2493e séance du Conseil de Sécurité de l'ONU du 31
octobre 1983, in WELLENS (K.C.), Résolutions et Déclarations du Conseil de
Sécurité..., p. 464.
2 -
Res. 628 du 20 décembre 1988 (Unavem 1).
3 -
Res. S/Res/658 du 27 juin 1990 sur la MINURSO (Sahara Occidental), in
WELLENS..., p. 95.
4 -
Res. 687 du 3 avril 1991, Documents officiels du Conseil de Sécurité, SIINF/47,
p. Il et s., in De CHAZOURNES..., p. 984.
5 -
Res. 688 du 5 avril 1991, Documents officiels du Conseil de Sécurité, SIINF/47,
p. Il et s., in De CHAZOURNES..., p. 985.
6 -
Res. 733 du 23 janvier 1992 sur la situation en Somalie, in WELLENS..., p. 312.
7 -
Res. 746 du 17 mars 1992 (Somalie), in WELLENS..., p. 313.
8 -
Res. 751 du 24 avril 1992 portant création de l'ONUSOM 1 (Somalie), in
WELLENS..., p. 315.
9 -
Res. 767 du 27 juillet 1992 (Somalie) : corridors humanitaires.
10 -
Res. 775 du 28 août 1992 (Somalie).
Il -
Res. 794 du 3 décembre 1992 portant création de l'UNITAF (Somalie).
12 -
Res. 797 du 16 décembre 1992 portant création de l'ONUMOZ (Mozambique).
13 -
Res. 808 du 22 février 1993 (Tribunal Pénal pour l'ex-Yougoslavie).
14 -
Res. 813 du 25 mars 1993 (Liberia).
15 -
Res. 814 du 26 mars 1993 portant création de l'ONUSOM II (Somalie).
16 -
Res. 929 du 21 juin 1994 (Rwanda), in DUPUY (P.M.), Grands Textes..., pp. 308-
310.
17 -
Res. 955 du 8 novembre 1994 (Rwanda), Statut du TPIR, S/Res/955 (1994).
18 -
Res. 977 du 22 février 1995 établissant le siège du TPIR à Arusha.
19 -
Res. 1088 du 12 décembre 1996 (Yougoslavie).

461
20 -
Res. 1101 du 28 mars 1997 (Albanie).
21 -
Res. 1125 du 6 août 1997 (République Centrafricaine).
22 -
Res. 1132 du 8 octobre 1997 (Sierra Leone).
23 -
Res. 1171 du 5 juin 1998 (Sierra Leone).
24 -
Res. 1173 du 12juin 1998 (Angola).
25 -
Res. 1181 du 13 juillet 1998 (Sierra Leone).
C - ORGANISAnON DE L'UNITE AFRICAINE
1 -
Charte de l'OUA du 25 mai 1963, Règlements intérieurs et Protocole de 1964,
OUA, Division de la Presse et de l'Infonnation du Secrétariat Général, Addis-
Abéba, mai 1981.
2 -
Résolution C.M.IRes. 12 (II) du Conseil des Ministres de l'OUA du 29 février
1961 sur le non-alignement.
3 -
Déclaration de l'OUA sur la dénucléarisation de l'Afrique (Le Caire, 17-21 juillet
1964).
4 -
Résolution AHG/Res.
16 (1) de la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement de l'OUA du 31 juillet 1964 portant Protocole de médiation, de
conciliation et d'arbitrage.
5 -
Déclaration AHG/Res. 27 (II) du 25 octobre 1965 portant Déclaration sur le
problème de la subversion.
6 -
Résolution C.M.IRes. 17 (VII) sur le mercenariat.
7 -
Déclaration AHG/STI (IV) du 14 septembre 1967 sur les relations Kenya-
Somalie.
8 -
Convention africaine sur la conservation de la nature et des ressources naturelles,
OUA, Alger, 15 novembre 1968, in DE CHAZOURNES et alii..., pp. 134-146.
9 -
Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en
Afrique du 10 septembre 1969.
10 -
Résolution CM/Res. 121 (IX) sur les relations ONU/OUA.

462
Il -
Résolution CMlRes. 527 (Lomé, 21-28 février 1977) sur le mercenariat.
12 -
Résolution AHGlRes. 85 (XIV) adoptée au Sommet de Libreville (2-5 juillet
1977).
13 -
Convention sur l'élimination du mercenariat en Afrique du 5 mai 1977, adoptée à
Libreville par la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement des Etats-
membres de l'OUA le 3 juillet 1977, in SCHINDLER et TOMAN, op. cit., pp.
1281-1287.
14 -
Résolution AHG/Res. 90 (XV) sur le conflit Somalie-Ethiopie.
15 -
Résolution AHGlRes. 93 (XV) du 22 juillet 1978 sur le différend Ethiopie-
Soudan.
16 -
Résolution CM/676 (XXXI) du 18 juillet 1978 sur l'intégrité territoriale.
17 -
Résolution C.M./769 (XXXIV) sur la force de maintien de la paix au Tchad.
18 -
Résolution
C.M./869
(XXXVII)
portant
proposition
de
création
d'une
Commission de l'OUA sur les frontières.
19 -
Déclaration sur les droits et le bien-être de l'enfant, 16e session, Monrovia (17-20
juillet 1979). DécI. AHG/ST.4 (XVI)
20 -
Résolution C.M./1153 (XLVIII) sur le déversement des déchets nucléaires et
industriels.
21-
Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, Naïrobi (Kenya) 28 juin
1981, in Droits de l'Homme en Droit international..., pp. 353-374.
22 -
Résolution C.M./1217 de juillet 1989 sur le conflit Sénégal/Mauritanie.
23 -
Résolution AHGlRes. 197 (XXVI) portant Charte Africaine sur les droits et le
bien-être de l'Enfant, Addis-Abéba (9-11 juillet 1990), DOC.CAB/LEGI153/Rev.
2, in SCHINDLER et TOMAN..., pp. 1033-1038.
24 -
Déclaration AHG/Décl. 1 (XXVI) du Il juillet 1990, Déclaration sur la situation
politique et socio-économique en Afrique.
25 -
Convention sur l'interdiction d'importer des déchets dangereux en Afrique et le
contrôle de leW'S mouvements transfrontaliers, OUA, Bamako le 30 juin 1991, in
De CHAZOURNES et alii..., pp. 752-776.
26 -
Résolution CM/1529 (LX) portant projet de traité sur la dénucléarisation de
l'Afrique (Mai 1994).

463
î27 -
Réunion des experts gouvernementaux sur la question de la création d'une Cour
africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (6-12 septembre 1995), Le Cap
(Afrique du Sud), Doc. OAU/LEGfEXP/AFC/HPR (1).
28 -
Traité sur la zone
exempte d'annes nucléaires
en Afrique
(Traité de
PELINDABA) fait au Caire (Egypte) le 11 avril 1996, in RADIC 1996, Vol. 8,
pp. 474-492.
29 -
2e Réunion des experts gouvernementaux juridiques pour la création de la Com
Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (11-14 avril 1997), Nouakchott
(Mauritanie), OUAlEXP/JURlCAFIDHPIRAP (2), in 9 RADIC (1997), pp. 440-
448.
30 -
Protocole relatif à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
portant création d'une Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples,
adopté à Ouagadougou (Burkina Faso), le 9 juin 1998, in 9 RADIC (1997), pp.
962-970.
31 -
Rapport sur le séminaire opérationnel sur le RECAMP, Dakar (21-23 octobre
1997),ONU/OUAIANAD, 100 p.
D - COMMUNAU'fE ECONOMIOtTE DES ETATS DE L'AFRI2VE DE
L'OUEST (CEDEAO)
1 -
Déclaration de moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des annes
légères en Afrique de l'Ouest, adoptée par la 22e session de la Conférence des
Chefs d'Etat et de Gouvernement de la CEDEAO à Abuja (Nigeria), 30-31
octobre 1998, in RADIC 1999, Vol. 11, pp. 190-192.
2 -
Mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la
paix et de la sécurité adopté par la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement de la CEDEAO à Abuja (Nigeria), 30-31 octobre 1998, in 11
Y
RADIC (1999), pp. 161-185.

464
vu -JURISPRUDENCE
1 -
Cour Pennanente d'Arbitrage, Sentence du 11 novembre 1912 relative à l'affaire
de l'indemnité de guerre turque envers la Russie, in RGDIP 1912, Documents, p.
21.
2 -
C.P.J.I., Affaire des décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc,
Avis consultati.t: 7 février 1923, Série B, N° 4, Rec. CPJI 1923.
3 -
C.P.J.I., Affaire de la Carélie Orientale, Avis consultatif 23 juillet 1923, Série B,
N° 5, Rec. 1923.
4 -
c.P,J.I., Affaire du Vapeur Wimbledon, 17 août 1923, Série A, N° 1, Rec. 1923.
5 -
c.P.J.!., Affaire de l'Acquisition de la nationalité polonaise, Avis consultatif 15
septembre 1923, Série B, N° 7, Rec. 1923.
6 -
Affaire des réclamations britanniques dans la zone espagnole au Maroc, sentence
arbitrale du 23 octobre 1924, in R.S.A., Vol. II, p. 641.
7 -
C.P.J.I., Affaire de l'Echange des populations grecques et turques, Avis consultatif
du 21 février 1925, Série B, N° 10, Rec. 1925.
8 -
c.P.J.I., Affaire de certains intérêts allemands en haute Silésie polonaise, 25 mai
1926, Série A, N° 7, Rec. 1926.
9 -
CP.J.!., Affaire du Lotus, arrêt du 7 septembre 1927, Série A, N° 10, Rec. 1927,
p.4.
10 -
AFFAIRE de l'lie Palmas, 4 avril 1928, Sentence arbitrale de Max HUBER,
RGDIP 1935, Vol. 2, p. 156.
Il -
CP.J.!., Droit des minorités en Haute Silésie, Ecoles minoritaires, Arrêt du 26
avril 1928, Série ~ N° 15, Rec. 1928.
12 -
Affaire du NAULILAA. Responsabilité de l'Allemagne à raison des dommages
causés dans les colonies portugaises du Sud de l'Afrique, Sentence arbitrale du 31
juillet 1928, in R.S.A., Vol. II, p. 1011.
"-
13 -
Affaire du "LYSNE". Responsabilité de l'Allemagne à raison des actes commis
postérieurement au 31 juillet 1914 et avant que le Portugal ne participât à la
guerre, Sentence arbitrale du 30 juin 1930, in RS~ Vol. II, p. 1035.
14 -
CP.J.!., Affaire des Communautés gréco-bulgares, Avis consultatif du 31 juillet
1930, Série B, N° 17, Rec. 1930.

465
15 -
c.P.J.I., Régime douanier austro-allemand, Avis consultatif du 5 septembre 1931,
Série AIB,N° 41, p. 37.
16 -
Affaire PELEUS (Heinz ECK, August HOFFMANN, Walter WEIBPFENNIG,
Hans-Richard LENZ et Wolfgang SCHWENDER), Tribunal de Hambourg 1945
(Membres de l'équipage de l'U-BOOT 852 ayant volontairement exterminé les
survivants du navire-marchand PELEUS).
17 -
UNITED STATES v. Erhard MILCH (Luftwaffe Case), 13 novembre 1946-17
avril 1947, in Jugements du TMI de Nuremberg, Vol. 2, 898 p.
18 -
UNITED STATES v. Alfred KRUPP et al. (Industrialist Case), 16 août 1947-31
juillet 1948, in Jugements du TM! de Nuremberg, Vol. 9, 1539 p.
19 -
C.ll., Affaire du Détroit de Corfou, arrêt du 9 avril 1949, Rec. CU 1949, p. 4.
20 -
CU., Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, Avis
consultatifdu 11 avril 1949, Rec. 1949, p. 174.
21 -
CU, Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de
génocide, Avis consultatif du 28 mai 1951, Rec. 1951, p. 15.
22 -
CU, Droits des ressortissants américains au Maroc, Arrêt du 27 août 1952, Rec.
1952,p.176.
23 -
CU, Affaires du Plateau continental de la Mer du Nord, Arrêt du 20 février 1969,
Rec. 1969, p. 4.
24 -
CU, Affaire de la Barcelona Traction Light and Power Company Limited (2e
phase), Arrêt du 5 février 1970, Rec. 1970, p. 3.
25 -
CU, Affaire du Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran,
Ordonnance du 15 novembre 1979, Rec. 1979, p. 3.
26 -
CU, Affaire du Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran,
Fond, Arrêt du 24 mai 1980, Rec. 1980, p. 3.
27 -
Cour de Cassation (France), Arrêt du 20 décembre 1985, Klaus BARBIE, Bull.
des Arrêts de la Cour de Cassation, 1985, p. 1038.
28 -
Cour d'Appel (Etats-Unis d'Amérique), Affaire DEMJANJUK v. PETROVSKY,
776 F, 2nd 571 (6th Circuit 1985), Cert. denied, 475, U.S. 1016 (1986).
29 -
CU, Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-
ci, Arrêt du 27 juin 1986, Rec. 1986, p. 14.

466
30 -
CD, Affaire de la délimitation de la frontière maritime entre la Guinée-Bissau et le
Sénégal, Sentence arbitrale du 31 juillet 1989, RGDIP 1990, p. 204 ; Rec. 1991, p.
52.
31-
Cour d'Appel de Paris, Affaire Paul TOUVIER, 13 avril 1992 ; Casso crim. 21
octobre 1993.
32 -
CD, Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires, Avis consultatif du 8
juillet 1996, Rec. 1996,371 p.
33 -
CD, Licéité de l'utilisation des armes nucléaires par \\ID Etat dans \\ID conflit armé,
Avis consultatif du 8 juillet 1996, Rec. 1996,371 p.
34 -
TPIR (Arusha), Affaire Charles SIKUBWABO, ICTR 96-10-T et ICR-96-1-T.
35 -
TPIR, Affaire ICTR-96-8-D, 11 janvier 1996 (dessaisissement de la Belgique),
Joseph KANYABASHI, in AJ.I.L., Vol. 92 (1998).
36 -
TPIR, Affaire André NTAGERURA, ICTR-96-10-T.
37-
TPIR,
Affaire
Elie
NDAYAMBAJE,
ICTR-96-15-T,
11
JanVIer
1996
(dessaisissement de la Belgique).
38 -
TPIR, Affaire ICTR-96-9-I du 19 juin 1996 (confinnation de l'acte d'accusation
contre Ladislas NTAGANZWA, ancien bourgmestre de Nyakizu).
39 -
TPIR, Affaire ICTR-96-13-D, 12 mars 1996 (dessaisissement de la Suisse)
(Tribunal militaire de cassation), Alfred MUSEMA.
40 -
TPIY (La Haye), Procureur c. Radovan KARADZIC et Ratko MLADIC, Affaire
I.T.95-5-R61, Il juillet 1996.
41 -
TPIR (Arusha), Affaire 1CTR-96-11-1 du Il juillet 1996 (Acte d'accusation contre
Ferdinand NAHIMANA, Directeur de la Radio Mille-Collines).
42 -
Cour d'Appel de Nîmes (France), Arrêt du 22 mars 1996, Affaire du Révérend
Père Wenceslas MUNYESHYAKA, in RGDIP 1996, Vol. 100, p. 184.
43 -
TPIR, Affaire ICTR-96-12-I du Il juillet 1996 (Acte d'accusation contre Anatole
NSEGIYlJMVA, Colonel des Forces armées rwandaises).
44 -
TPIR, Affaire ICTR-96-14-I du 11 juillet 1996 (Acte d'accusation contre Elizer
NIYlTGEKA, ministre de l'Information du gouvernement intérimaire).
45 -
TPIR, Affaire Jean BOSCO BARAYAGWIZA, ICTR-97-19-I.

467
146 -
TPIR, Affaire Laurent SEMANZA, ICTR-97-20-I.
47 -
TPIR, Affaire Arsène SHALOM NTAHOBALI, ICTR-97-21-I.
48 -
TPIR, Affaire Hassan NGEZE, ICTR-97-27-1.
49 -
TPIR, Affaire Aloys NTABAKUZE, ICTR-97-30-1.
50 -
TPIR, Affaire Georges RUGGIO, ICTR-97-32-1 (Jownaliste belge à la RTMt).
51-
TPIR, Affaire Georges RUTANGANDA, Arrêt du 6 mars 1997, Chambre de
première instance 1(Request for examination of an order of the tribunal).
52 -
TPIR, Affaires jointes Clément KAYISHEMA et Obed RUZINDANA, Arrêt du
17 avril 1997 de la Chambre de première instance II (Probative value of witness
testimonies).
53 -
TPIR, Affaire Joseph KANYABASHI, Arrêt du 18 juin 1997, Chambre de
première instance II (compétence), in A.J.I.L., Vol. 92 (1998), N° 1, pp. 66-70.
54 -
TPIR, Affaire ICTR-97-32-DP, Décision du 14 août 1997.
55 -
Cour Constitutionnelle, AZAPO and others v. The President of the Republic of
South Africa, 19%, BCLR 1015 (CC) 1020.
56 -
TPIR, Procureur c. Jean-Paul AKAYESU, Affaire ICTR-96-4T du 2 octobre
1998, Chambre de première instance l, Décision relative à la condamnation, in
AJIL, Vol. 93 (1999), pp. 195-205.
57 -
TPIR, Procureur c. Jean KAMBANDA, Affaire ICTR-97-23-S du 4 septembre
1998, jugement portant condamnation, inRADIC, Vol. 10 (1998), pp. 836-853.
Site internet http://www,IeTR.org.indictments-f.html.
58 -
TPIY, Procureur c. ERDEMOVIC, Affaire IT-96-22-A, Arrêts du 29 novembre
1996 et du 7 octobre 1997, in NIL 1998,2, pp. 282-287.
59 -
TPIY, Procureur c. TADIe, Affaire IT-94-1-T, Décision du 10 août 1995
(Chambre de première instance II), Décision du 2 octobre 1995 (Exception
d'incompétence) et Arrêt du 7 mai 1997, in AJ.I.L. 1997,4, pp. 718-721.

468
hn - PRINCIPALES RESOLUTIONS DE L'INSTITUT DE DROIT
~
INTERNATIONAL
ET
DE
L'INSTITUT
DE
DROIT
INTERNATIONAL HUMANITAIRE
«La distinction entre les objectifs militaires et non militaires en général et
notamment des problèmes que pose l'existence des armes de destruction
massive ». Résolution adoptée par l'IDI lors de la Session d'Edimbourg le 9
décembre 1969.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (l), Le droit des conflits armés, pp. 327-
328.
~ -
« La protection des Droits de l'Homme et le principe de non-intervention dans les
affaires intérieures des Etats ». Résolution adoptée par l'IDI lors de sa session de
Saint-Jacques-de-Compostelle le 13 septembre 1989.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (l), op. cit., pp. 953-956.
J3 -
« Le principe de non-intervention dans les guerres civiles », Résolution adoptée
par l'IDIlors de sa session de Wiesbaden le 14 août 1975.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (l), op. cit., pp. 1255-1258.
4 -
«Déclaration sur les règles de Droit international humanitaire relatives à la
conduite des hostilités dans les conflits armés non internationaux ». Adoptée par
le Conseil de l'IDIH de San Remo le 7 avril 1990.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (1), op. cit., pp. 1261-1264.
5 -
« Les conditions d'application des règles humanitaires relatives aux conflits armés
aux hostilités dans lesquelles les Forces des Nations Unies peuvent être
engagées ». Résolution adoptée par l'IDI à sa session de Zaghreb le 3 septembre
1971.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (l), op. cit., pp. 1273-1276.
6 -
«Les conditions d'application des règles, autres que les règles humanitaires,
relatives aux conflits armés aux hostilités dans lesquelles les Forces des Nations
Unies peuvent être engagées ». Résolution adoptée par l'IDI à sa session de
Wiesbaden le 13 août 1975.
Texte in SCHINDLER (D.) et TüMAN (l), op. cit., pp. 1277-1280.
7 -
Résolution sur «La détermination du domaine réservé et ses effets », Session
d'Aix-en-Provence, in Annuaire de l'IDI, Vol. 45, Tome II, 1954, pp. 292-293.
8 -
Résolution sur « Les effets des conflits armés sur les traités », Session d'Helsinki,
in Annuaire de l'IDI, Vol. 61, Tome II (Délibérations), 1986, pp. 278-283.
9 -
«Principes directeurs concernant le droit à l'assistance humanitaire », Résolution
adoptée par l'IDlli de San Remo en 1992.

469
IX - ARTICLES DE JOURNAUX
1-
Annuaire Jeune Mrique 1994, publié par le Groupe Jeune Afrique, Paris,
JAPRESS 1994.
2 -
BLUNT (E.), Paix fragile en Sierra Leone, Le Monde Diplomatique N° 549,
décembre 1999, p. 14
3 -
BLUNT (E.), La Sierra Leone mutilée, in Le Monde, Manière de voir N° 49,
Atlas 2000 des Conflits, 100 p.
4 -
BRAECKMANN (C.), Génocide planifié au Rwanda, in Le Monde, Manière de
Voir, Conflits fin de siècle, pp. 74-77.
5 -
BRAECKMANN (C.), Le Burundi à son tour saisi par la peur, in Le Monde,
Manière de Voir, Conflits de fin de siècle, pp. 78-80.
6 -
BRAECKMANN (C.), Rebelles et parrains se partagent le Congo, in Le Monde,
Manière de voir N° 49, 100 p.
7 -
BACQUE (Ph.), Fragile règlement dans le conflit touareg, in Le Monde, Manière
de voir, Conflits de fin de siècle, pp. 81-83.
8 -
BETTATI (M.), Indispensable ingérence, Le Monde des débats N° 4, janvier
1994.
9 -
CHEMILLIER-GENDREAU (M.) : Ingérence, charité et Droit international, Le
Monde Diplomatique, janvier 1993, p. 5.
10 -
De La GORCE (P.M.), Washington relance la course aux armements, in Le
Monde Diplomatique N° 549, décembre 1999, pp. 4-5.
Il -
DOSSIERS et DOCUMENTS. L'état des conflits dans le monde, 1988, Le
Monde.
12 -
FALL (E.) et KAIDI (H.), Rwanda, silence on tue ! Jeune Afrique N° 1742, du 26
mai au lerjuin 1994, pp. 16-18.
13 -
GAILLARD (Ph.), Libéria : le chaos et la barbarie, Jeune Afrique N° 1846 du 22
au 28 mai 1996, pp. 27-29.
14 -
JeWle Afrique N° 1769 du 1er au 7 décembre 1994, p. 24.
15 -
Jeune Afrique N° 1939 du 10 au 16 mars 1998, pp. 34-37.
16 -
Jeune Afrique Economie N° 277 du 14 décembre 1998 au 3 janvier 1999, p. 71.

470
17 -
Jeune Afrique Economie du 17 mars 1998, p. 134.
18 -
KPATlNDE (F.), Touaregs. Le combat des hommes de nulle part, Jeune Afrique
N° 1751 du 28 juillet au 3 août 1994, p. 16 et s.
19 -
KUWONU (F.), Le look du mercenariat, Sud-Quotidien N° 807 du mercredi 13
décembre 1995, p. 10.
20 -
LALOUPO (F.), DENARD, Corsaire de l'empire perdu, Le Nouvel Afrique-Asie
nO 74, novembre 1995, p. 23.
21 -
Les
combattants
tchétchènes,
des
mercenaires
très
convoités,
Courrier
International N° 389 du 16 au 22 avril 1998, p. 24.
22 -
Le Matin, quotidien sénégalais du mercredi 30 juillet 1997, p. 15.
23 -
Le Matin du samedi 28 février au dimanche 1er mars 1998, p. 4.
24 -
Le Soleil du 1er février 1996.
25 -
Le Soleil du 6 février 1996.
26 -
Le Soleil des 13 et 14 avril 1996.
27 -
Le Soleil du jeudi 23 mars 1997, p. 2.
28 -
Le Soleil du mercredi 25 février 1998, p. 2.
29 -
Le Soleil du samedi 28 février au dimanche 1er mars 1998, p. 4.
30 -
Le Soleil du hmdi 2 mars 1998, pp. 7-8.
31 -
Le Soleil du jeudi 19 mars 1998, p. 16.
32 -
MARUT (lC.), Les voix discordantes de la Casamance, in Le Monde, Manière de
voir..., p. 88.
33 -
MAZURE (1.), Lucrative reconversion des mercenaires sud-africains, Le Monde
Diplomatique, octobre 1996, pp. 22-23.
34 -
PEREZ-VITORIA (S.), Les femmes d'Erythrée ne désarment pas, in Le Monde
Diplomatique,janvier 1997, p. 10.
35 -
RAMONET (1.), Intervenir, in Le Monde Diplomatique, janvier 1993, p. 1.

471
36 -
Spécial Congo, Jeune Afrique N° 1921, du 29 octobre au 4 novembre 1997, pp.
57-73.
37 -
SOUDAN (F.), Les marchands de sécurité, Jeune Afrique N° 1846 du 22 au 28
mai 1996, pp. 27-29.
38 -
Sud-Quotidien N° 749 du jeudi 5 octobre 1995 : les interventions françaises en
Afrique, p. 10.
39 -
Sud-Quotidien N° 1143 du mardi 28 janvier 1997.
40 -
Sud-Quotidien N° 2036 du 18 janvier 2000.
41 -
Sud-Quotidien N° 2063 du 18 février 2000.
42 -
TIETCHEU (J.), Rwanda: un tribunal en mal de soutien, in Jeune Afrique
Economie du 6 janvier 1997, N° 232, pp. 72-73.

472
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
1
SECTION 1 - PRECISIONS LIMINAIRES
3
Paragraphe 1 - La notion de DIH
3
A - Définition
3
B - Les sources du D.I.H
4
Paragraphe II - Les notions voisines
13
A - Place du DIH dans le DIP
13
B - Droit du désarmement et Droits de l'Homme
16
1 - DIH et désarmement
16
2 - DIH et droits de l'Homme
18
Paragraphe III - Le processus de développement du D.I.H.
26
A - L'influence des idées religieuses
27
1 - La chrétienté humaniste
27
2 - L'lsbun humaniste
29
B - Les traditions africaines
32
C - L'édification du D.I.H
35
SECTION II - PROBLEMATIQUE DU D.I.H. EN AFRIQUE NOIRE CONTEMPORAINE
.40
Paragraphe 1 - Le conflit armé
41
Paragraphe II - Le contexte africain
44
Paragraphe III - Méthodologie
47
1ère PARTIE - DE L'IDEALISME AU REALISME: LES DIFFICULTES D'APPLICATION DU
DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE EN AFRIQUE NOIRE
51
mRE 1- LA DIFFICILE RECEPTION DU D.I.H. EN AFRIQUE NOIRE
53
CHAPITRE 1- UN DROIT D'ORIGINE EUROPEENNE
54
SECTION 1 - Un droit largement importé
54
Paragraphe 1 - Un droit aux contours européens
54
Paragraphe II - L'adhésion de l'Afrique Noire au D.I.H.
61
SECTION II - Une spécificité africaine faiblement marquée
70
Paragraphe 1 - Une participation mitigée à la conférence de 1949
71
Paragraphe II - UIle participation plus remarquée aux conférences de 1974 -1977
79
1 - La valorisation des guerres de libération nationale
81
2 - Le statut des parties au conflit..
87
3 - Le statut des mercenaires
89
4 - Les moyens ou méthodes de guerre ou de combats
91
5 - Le problème des infractions graves
94
6 - Le problème de l'utilité du Protocole II
96
CHAPITRE II - L'ECRAN DU PRINCIPE DE SOUVERAINETE DES
ETATS AFRICAINS
100
SECTION 1 - L'admission du principe par le D.I.H.
100
Paragraphe 1 - Des règles respectant le principe de souveraineté
10 1
Paragraphe II - Des règles corroborant des principes de l'OUA
113
SECTION II - L'usage du principe à l'encontre du DIH
120
Paragraphe 1 - Un usage en fonction d'intérêts étatiques
120
1 - Les rapports de belligérance
;
121
2 - Le problème des puissances protectrices
126
3 - La Commission internationale d'établissement des faits
129
Paragraphe II - Un usage immodéré du principe de souveraineté
130
TITRE II - L'INADEQUATION DE LA MISE EN OEUVRE DU D.I.H.
EN AFRIQUE NOIRE
140
CHAPITRE 1 - L'IGNORANCE DU DIH PAR SES PRINCIPAUX DESTINATAIRES
141
SECTION 1 - Des autorités étatiques peu concernées
142
Paragraphe 1 - La diversité des obstacles
142

473
Paragraphe II - La faiblesse des interventions étatiques
152
SECTION II - Une population civile peu informée
164
Paragraphe 1 - Les lacunes d'une promotion
165
Paragraphe II - Les lacunes d'un enseignement..
168
CHAPITRE II - L'INSUFFISANCE DES MESURES DE MISE EN OEUVRE
172
SECTION 1 - Des mesures de mise en œuvre complexes
173
Paragraphe 1 - L'hermétisme du droit des conflits armés
173
Paragraphe II - La pléthore de mesures de mise en œuvre
184
SECTION TI - Une législation humanitaire déficiente
190
Paragraphe 1 - Une législation peu fournie
190
Paragraphe II - Une législation concurrencée
197
CONCLUSION DE LA 1ère PARTIE
202
Ile PARTIE - DU JURIDISME A L'ACTUALISATION: UNE THERAPIE POUR LES
DIFFICULTES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE EN AFRIQUE
NOIRE
204
TITRE 1 _POUR UNE ACTUALISATION DU CONTENU DU DIH
206
CHAPITRE 1 - POUR UN REAMENAGEMENT DU DIH
207
SECTION 1 - Dépasser le juridisme étroit du DIH
208
Paragraphe 1- L'obsolescence des SUMMA DlVISIO du DIH
208
1 - Pour une véritable unicité des règles de La Haye et de Genève
209
2 - Pour un abandon de la distinction conflits annés internationaux - conflits armés non
internationaux
217
Paragraphe II - L'inadaptation du DIH aux conflits de type nouveau
230
1 - Pour un élargissement de la gamme des conflits internes
231
a - L'élargissement du Dili en direction des situations de troubles intérieurs
et de tensions internes
231
b - L'élargissement du DIH aux situations de conflits mixtes
236
2 - Pour une extension du D.J.H. aux armes nouvelles et aux armes cruelles
246
SECTION II - Revitaliser les Conventions de l'O.u.A.
258
Paragraphe 1 - Pour une protection renforcée des réfugiés et des déplacés et la répression
du mercenariat
259
1 - La protection des réfugiés et des déplacés internes
259
2 - La répression du mercenariat
268
Paragraphe II - Pour une protection efficace des femmes et des enfants
dans les conflits armés
279
1 - La protection des femmes
280
2 - La protection des enfants
286
CHAPITRE II - POUR UNE DEPOLITISATION DE L'ACTION HUMANITAIRE
295
SECTION 1 - La répudiation du "droit d'ingérence humanitaire"
296
Paragraphe 1 - L'ingérence comme survivance des interventions d'humanité
297
Paragraphe II - L'ingérence comme forme de légitimation des interventions militaires
307
SECTION II - La juridicisation effective du devoir d'assistance humanitaire
315
Paragraphe 1 - La redéfinition du rôle des acteurs de l'action humanitaire
316
Paragraphe II - Les contours du devoir d'assistance humanitaire
322
TITRE TI - POUR UNE MISE EN OEUVRE EFFECTIVE DU D.I.H.
330
CHAPITRE 1 - LA PENALISATION EFFECTIVE DES VIOLATIONS DU D.I.H.
332
SECTION 1 - Le Tribunal d'Arusha face aux entraves à la répression des violations
du Dili en Afrique
334
Paragraphe 1 - Difficultés relatives à l'organisation du Tribunal d'Arusha
338
Paragraphe II - Difficultés relatives au fonctionnement du Tribunal d'Arusha
344
SECTION Il - Les remèdes aux faiblesses normatives et structurelles de la répression des
violations du Dili en Afrique
361
Paragraphe 1 - Pour une sédimentation africaine de la répression des violations du Dili
362
Paragraphe II - Pour une répression universalisée des violations du D.I.H
371
CHAPITRE II - LES IMPERATIFS ET VOIES DE LA MISE EN OEUVRE DU DllL
380

474
SECTION 1- L'obligation de respecter et de faire respecter le DIH
381
Paragraphe 1 - L'obligation de respecter le Dili
381
Paragraphe II - L'obligation de faire respecter le D.LH.
385
SECTION il - Les voies "obligées" de la mise en œuvre du DIH
390
Paragraphe 1- La nationalisation du DIH par les Etats africains
390
Paragraphe II - La socialisation du D.I.H. par les Etats africains
399
CONCLUSION DE LA Ile PARTIE
.406
CONCLUSION GENERALE
409
ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES
.415