UNIVERSITE MONTESQUIEU - BORDEAUX IV
Faculte des Sciences Economiques et de Gestion
FINANCEMENT BANCAlRE ET GESTION
DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES CAMEROUNAISES
THESE
POUR LE DOCTORAT NOUVEAU REGIME EN SCIENCES DE GESTION
Presentee et soutenue publiquement le 16 Fevrier 1996 par:
Mme UM-NGOUEM Marie Therese
D.E.A. en Sciences de Gestion
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1.1~~
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Directeur de Recherche
M. G. HIRIGOYEN
-
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Professeur al'Universite Montesquieu - Bordeaux IV
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Directeur de l'I.R.G.A.E
;~
~l~:(
Suffragants
M. B. BEKOLO-EBE
Professeur, Vice-Recteur de l'Universite de Douala
M. S. EVRAERT
Professeur a l'Universite Montesquieu - Bordeaux IV
M. D. GOUADAIN
Professeur a 1'LA.E. de Poitiers
M. B. SAPORTA
Professeur a l'Universite Montesquieu - Bordeaux IV
Les recherches objet de la presente these ont ete menees au sein du GEREA,
Laboratoire Associe Francophone - LAF 202, dans le cadre d'un programme
pluriannuel de recherche sur l'Intermediation Financiere Formelle
et Informelle et le Developpement de l'Entreprise en Afrique.

En la memoire de mon pere ;
A ma famille et aux amis qui ont su
m'encourager ;
A Germaine,
Laurence et Maryse ;
A Michel,
tout particulierement pour
sa confiance en ce travail et pour sa
tendresse...

REMERCIEMENTS
Je tiens a exprimer ma gratitude a M. le professeur Gerard
HIRIGOYEN qui a accepte de diriger ce travail. Je 1ui suis
reconnaissante de 1 'avoir ouvert sur la Finance d'entreprise.
Puisse-t-i1 trouver dans cette th~se l'essentie1 de ce qu'il en
attend.
Le Groupe d'Etudes et de Recherches en Economie App1iquee
s'efforce de maintenir a 1 'Universite de Doua1a un cadre
scientifique
de ref1exion, que ses membres trouvent ici
l'expression de ma reconnaissance
- pour 1es critiques et consei1s qu'i1s ont bien vou1u
m'apporter tout au long de ce travail;
- pour m'avoir associee a 1eurs etudes et enqu~tes dont
j'esp~re avoir su tirer profit.
Mes remerciements vont aussi a Madame NGALLE Jacky,
Madame NDOUMBE Debora et Monsieur LIGAN Simon de 1 'Universite
de Doua1a pour avoir, avec beaucoup de devouement et d'amitie,
dacty10graphie et mis en forme cette th~se.
Enfin, comment ne pas exprimer toute ma gratitude au
Professeur Bruno BEKOLO-EBE, V.i ce-Recteur de J' Uni versi te de
Doua1a, qui fut, a10rs qu'i1 etait en annee de licence, mon
premier professeur d'Ecol1omie au Co11~ge de "la Retraite "
Avec beaucoup d'amitie et aussi beaucoup de rigueur et de
fermete, i1 a accepte de
co-diriger cette th~se. Ce travail
est un
modeste hommage a ses brill ants enseignements et a
l'amour du travail bien fait.

SOMMAIRE
FINANCEMENT BANCAIRE ET GESTION DES PETITES ET MOYENNES
ENTREPRISES
(PME)
CAMEROUNAISES
INTRODUCTION
Iere Par tie
L'ANALYSE DU PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT DES
PME CAMEROUNAISES :
L'Importance du Probleme du Financement
Chapitre I
L'Analyse
des
PME
camerounaises
mode
d'organisation
et
mecanismes
de
fonctionnement
Section I
La
Definition
et
les
problemes
des
PME
camerounaises
Section II
Le Probleme general du financement des PME
l'importance des res sources externes
Section III
La specificite du probleme de
l'investissement dans les PME
Chapitre II
Le
Probleme
de
l' adapta tion
des
PME
aux
conditions bancaires de financernent
Section I
L'Appareil conventionnel de financement et
les exigences du recours au credit
bancaire
Section II
Les
Mesures
d'accompagnement
du
financement bancaire des PME
Section III
Circuits Informels de Financement
manifestation de complementarite ou de
Concurrence ?

IIeme Partie
L'ANALYSE DE QUELQUES EXPERIENCES
DE PME
CAMEROUNAISES
DU
SECTEUR
MODERNE
ET
DU
SECTEUR INFORMEL
Chapitre III
Les
difficultes
de
developpement
des
PME
industrielles
: etude de trois entreprises
du secteur moderne
Section I
Les
Problemes
financiers
de
la
PME
camerounaise ou la contrainte de la monnaie
de credit
l'exemple de l'entreprise
Milky-Way
Section 11
Les Risques du probleme technologique dans
les
PME
l' exemple
de
l' entreprise
"Le
Camerounais"
Section III
Les
problemes
de
gestion
des
PME
camerounaises
l'exemple
de
la
societe
"CONFITEX"
CHAPITRE IV
Les Conditions de developpement des PME du
secteur informel
: Analyse de trois cas
Section I
Definitions traditionnelles et tentative de
redefinition
de
la
PME
informelle
camerounaise
Section 11
Analyse du secteur informel camerounais
des
exemples de dynamique prop re
Section III
La Speci fici te du probleme du financement des
PME informelles
Conclusion Generale
Annexe
Bibliographie
Table des Matieres

INTRODUCTION GENERALE

- 4 -
Les PME figurent, depuis bien plus d'une vingtaine d'annees,
parmi
les
unites
de
production
dont
les
pouvoirs
publics
camerounais
ont
choisi
de
promouvoir
la
creation
et
le
developpement. L'une des explications de l'interet particulier
porte aces entreprises est que celles-ci sont considerees comme
l' un des poles de creation des emplois,
l' un des instruments
privilegies du developpement du tissu industriel camerounais. La
strategie nationale de developpement fait donc une large place
a leur promotion.
Un tel choix nous semble d'une importance considerable quant
a l'avenir industriel et economique du pays dans la mesure Oll il
suppose
la
mobilisation
de
nombreuses
ressources
humaines,
techniques financieres etc ... On peut des lors s'interroger sur
la pertinence de ce choix des pouvoirs publics, ses espoirs, ses
enjeux. On s'en preoccupe d'autant plus que les premiers bilans
etablis quelques annees apres la mise en oeuvre de la politique
de promotion de PME font conclure a un echec1 par rapport aux
efforts fiscaux,
financiers,
organisationnels ... deployes.
En realite,
qu'il s'agisse des premiers constats d'echecs
ou
de
ceux
que
l' on pourrai t
etablir
aujourd' hui,
ce
qu' il
importe de souligner dans un cas comme dans
l'autre c'est la
prise de conscience que le developpement des PME ne se realise
pas
automatiquement.
En
fait,
il
s'agit
d'entreprises
assez
particulieres que nous essayons precisement de definir a travers
leurs particularites et les problemes qui en decoulent.
Ce constat etait deja fait par 1e
Consei1 Economique et Socia1 reuni
a Yaounde au Cameroun en sa session
de Mai 1984. On 1ira & ce sujet 1e Rapport
du Consei1 Economique et Socia1 du Cameroun,
session de Mai 1984.

Leurs principales caracteristiques sont donc :
-
La propriete individuelle ou familiale du capita1 2a qui
explique pour une large part la faiblesse de leurs fonds propres
et la place du financement externe;
Une
organisation
sommaire
de
l'activite
liee
a une
personnalisation
de
l'entreprisea~ a
la
concentration
des
differentes fonctions au profit du proprietaire du capital et qui
a pour principale consequence d'importants problemes de gestion;
-
La maniere dont s' operent
les choix sectoriels et qui
permet de comprendre l'importance du probleme technologique.
En realite,si le terme PME semble ici plutot generalisant,
il ne nous fait pas perdre de vue les variantes de comportement
qui peuvent exister d'une PME a une autre. Nous pensons a ce
sujet que leurs differences fondamentales se revelent dans le
mode de resolution de leurs problemes.
Et,
sur ce plan,
nous
voulons souligner le clivage qui apparait entre deux grands types
de PME, les PME modernes et les PME informelles. En effet, si le
comportement
dans
les
premieres
est
fortement
dependant
des
determinants
financiers
dans
les
autres,
la
decision
d'investissement
est
davantage
liee
aux
determinants
technologiques.
11 importe donc de bien souligner que les appelations de PME
moderne
et
de
PME
informelle
dans
cette
etude qualifient
le
comprtement
de
chaque
type
d'entreprise,
celles
du
secteur
organise
de
l'economie
et
celle
du
secteur
informel1
"non
organise"
2a
-
On peut l i r e . ce sujet les analyses qu'en font
:
-
G.
BIRIGOYEN,
Contribution. la
connaissance des
comportements
financiers des moyennes entreprises
(MEI)
familiales,
these d'Ktat en Sciences
de Gestion, Universite de Bordeaux I,
1984.
- B.
SAPORTA,
Strategie pour la PME, edit Monchretien,
Paris,1986.
~b - Cette structure simple s'apparente a 1 'organisation entrepreneuriale
etudiee
par
R.
MINTZBERG.
Pour
l'auteur,
elle
caracterise
l'entreprise
individuelle dont le proprietaire contr61e toutes les fonctions et est a la base
de toutes les decisions.

On lira a ce sujet G.
KOENIG,
Les
theories de la Firme,
Edit ECONOMICA,
Paris 19~p.
Nous avons volontairement, pour un approfondissement
de
la
caracterisation
des
PME
informelles,
renvoye
la
presentation detaillee de ce type de PME dans notre chapitre
IV.
Nous pourrons ainsi mieux precis er leur importance sans
rompre l'equilibre de ce passage.

- 6 -
Nous
ne
rapprochons
pas
la
PME moderne
de
l' entreprise
moderne definie par A. D. CHANDLER 4, ce concept supposant pour
l'auteur au moins trois caracteristiques essentielles :
l' entreprise moderne
a
remplace notamment aux USA,
la
petite entreprise traditionnelle ;
elle
possede
de
nombreuses
unites
operationnelles
distinctes
sa direction est assuree par une hierarchie de cadres
salaries.
Le
terme
moderne
dans
notre
approche
ne
traduit
nullement les memes preoccupations pour au moins deux raisons.
- D'abord la PME moderne est loin d'etre l'evolution d'une
forme precedente de PME.
- Ensuite l'organisation sommaire de ses activites l'eloigne
definitivement de l'entreprise moderne de CHANDLER.
La caracterisation des PME camerounaises et leur typologie
permettent ainsi d'insister sur l'importance des problemes poses
par la promotion et le developpement de ces entreprises.
Si
l'analyse
courante
des
PME
camerounaises
souligne
l'interet d'un bon diagnostic des problemes,
elle met surtout
l'accent sur les difficultes liees au financement S dont les plus
On peut lire a ce sujet, D. CHANDLER Alfred,
la Main Visible des Managers, Edit. Economica,
Paris 1988 p 3-13 et p 317-349.
-
11 existe sur ce point une abondante litterature
qu'on ne ne peut pas citer dans son integralite.
On peut neanmoins lire sur ce sujet :
GEREA,
Integration des circuits financiers
formels et informels et dynamique de developpement,
projet de recherche presente par le GBRBA en reponse
a l'appel d'o££res du reseau Bntrepreneuriat : £inan-
cement et mobilisation de l'epargne, Working paper

du GBRBA,
1993,
13 pp.
TANGAKOU SOH R., le Financement des PME au Cameroun:
R61e Respecti£ des Activites Formelles et In£ormelles,
These de Doctorat de Lyon 11, Octobre 1994.
FOUDA H.
;TOULOUSB J.M.
; BRENNER G.,
les Tontines et la
Creation d'Bntreprises au Cameroun,
in HENAULT et M'RABET,
l'Bntrepreneuriat en A£rique Francophone
: Culture,
Financement et Developpement.

- 7 -
saillantes sont la faiblesse des capitaux propres et l'absence
d'un
marche
financier
expliquant
la
primaute
du
financement
bancaire dans la structure des ressources des PME.
Certes, les recherches precedentes ont le merite de mettre
en relief la carence en fonds propres des PME et de poser le
probleme des conditions bancaires de financement dont les plus
preoccupantes
sont
celles
des
taux
d'interet,
du
terme
des
credits,
des
garanties
exigees.
Mais
leur
approche
demeure
sectaire dans la mesure 00 celles-ci tendent a ramener au seul
financement tout le probleme de la creation et de la valorisation
de la PME.
Notre participation a la reflexion nous amene aujourd'hui
a aller au-dela de ce qui existe deja et a mettre en lumiere
d'autres centres d'interet~
I
INTERET DE L'ETUDE
Nous nous interrogerons alors non plus seulement sur la nature
du credit bancaire,
mais aussi et surtout sur les differents
comportements que ce financement traduit et induit. Nous pensons
que
l'integration
de
ces
comportements
de
meme
que
leur
interaction
expliquent
davantage
l'ampleur
des
problemes
quotidiens des PME ainsi que leur incidence sur la maniere dont
les PME camerounaises sont gerees.
Le role de l'environnement
financier dans la decision d'investissement des PME camerounaises
5bls-
YONDO M.,
le Financement des PME camerounaises, Revue
Camerounaise de Management,
nO 3-4 1986 p162-174.
BEMGA D.
L., Contribution des Banques et des Tontines au
Financement de la PME/PHI au Cameroun, Working Paper du
GEREA, Universite de Doua!a, Mars 1994,
21 pp.
OGOLONG A.,
Problemes de Financement des PME au Cameroun
M6moire ESSEC, Centre Universitaire de Douala,
1984.
GUERTIN J., Gestion PM/PHI,
Sachons evaluer nos
chances et compter d'abord sur nos propres mayens,
Revue Cameroun.is. de Management,

nO 5,
1985.
MENGUENE G., Appreciation des Dossiers de Financement
des PME Camerounaises par les Banques,M6moire ENSET,
Universite de Douala, AoQt 1992,

78 pp.

- 8 -
apparait donc bien mieux tout comme son poids en tant qu'element
fondamental de leur existence. Et si les determinants financiers
occupent une place de choix dans la decision d'investissement
parce
qu' ils
decri vent
plus
clairement
le
comportement
d'endettement des PME, ils ne devraient pas eluder l'importance
des autres determinants. Car en effet, il existe d'autres volets
tout aussi importants qui sont l'aspect technologique et l'aspect
de la gestion6 de l'activite, ceux-ci relevant egalement d'autres
niveaux de comportements d'endettement de ces entreprises.
La
prise
en
compte
de
1 'ensemble
de
ces
principaux
determinants contribue a notre avis a une meilleure intelligence
du probleme des PME en general et de celui de leur gestion en
particulier. Et,
ce probleme de la gestion des PME etant dans
notre
etude
essentiellement
pose
par
rapport
au
financement
bancaire,
nous
parlerons
donc
souvent
de
la
gestion
de
l'endettement
des
PME
pour
traduire
la
maniere
dont
les
res sources d'emprunt affectent l'ensemble du fonctionnement de
l'activite dans toutes ses dimensions financiere,
technologique
et de gestion proprement dite.
Nous voulons donc ainsi faire ressortir les relations qui
s'etablissent entre le comportement d'intermediation des banques
et le comportement d'endettement des PME camerounaises.
Nous preciserons
cet obj et d' abord, la methodologie adoptee
ensuite, le plan retenu enfin.
Pour une definition classique de la qestion,
on pourra dire avec
P.
DRUCKBR,
qu'elle est une decision rationnelle et informee.
On lira a ce sujet
:
-
P. DRUCKKR,
les Entrepreneurs, Edit J.
C.
LATTES -
L'Expasion/Bachette,
1985, p 193-233.
On peut lire eqalement
:
-
P.
LASSEGUB, QU'est-ce que la gestion ? Tout.
QU'a-t-elle ete
jusqu'a present? Rien.
Que veut-elle devenir ? Quelque
chose,
in Melanges offerts a P.
VIGRBUX, Collection Travaux et Recherche
de l'IPA-IAE de Toulouse,
1981, pp 493 et suiv.
-
J.
C.
USUNIER et Alii,
Introduction a la Recherche en Gestion,
Edit Economioa,
Paris 1993, p 9-12.

11 -
L'OBJET DE L'ETUDE
11 consiste en l'analyse du comportement d'intermediation
des banques puis de celle du comportement d'endettement des PME
de maniere a mettre en evidence les implications de l'un sur
l'autre et plus particulierement celles du financement bancaire
sur la maniere dont les PME sont gerees.
a
- Le COmportement d'Intermediation Bancaire au Cameroun
Une partie des flux monetaires et financiers dont ont besoin
les PME leur viennent des intermediaires financiers. Et, plus le
poids
de
ces
financements
sera
grand
dans
l'ensernble
des
ressources de l'entreprise,'plus l'action des intermediaires sera
determinante sur le niveau et la qualite de l'activite.
Au cameroun,
la fonction d'intermediation est assuree en
grande
partie
par
les
banques,
celles-ci
representant
la
principale structure conventionnelle de financement de l' acti vi te
economique. Ce monisme du systeme financier accroit dans ce pays
l'importance du role que les banques ont a jouer dans la creation
des
PME
et
dans
leur
evolution.
L' interet
de
l' analyse
est
davantage
renforce
par
le
fait
qu'il
s'agit
d'un
contexte
financier speci f ique. Cet te speci fici te n' est pas uniquement 1 iee
a l'absence d'un marche financier dans cette economie. Elle tient
egalement a la maniere dont le systeme bancaire est organise, a
ses fondements,
a ses mecanismes de fonctionnement.
On ne saurait en effet faire l'economie d'une clarification
de 1 'architecture particuliere de ce systeme bancaire au regard
de l' incidence que celle-ci pourrai t
avoir sur sa capaci te a
repondre aux sollicitations des PME camerounaises. On verra alors
que le systeme bancaire ici est caracterise par l'appartenance
du Cameroun a la Zone Franc et plus precisement a la zone BEAC7 •
Le Cameroun,
comme nous 1e savons, est membre de 1a zone BEAC
qui fonctionne au sein de 1& zone franc a cBte de 1'UMOA et
de 1a Banque Centra1e des I1es Comores.


La
construction
qui
en
decoule
est
fortement
marquee
par
l'existence d'une Banque Centrale commune a plusieurs Etats, ceux
de
la
sous-region
concernee.
L'un
des
traits
saillants
de
l' evolution du
systeme bancaire de
ce pays
est
le caractere
permanent des aj ustements
et des
re formes.
On pourrai t
ci ter
parmi les temps forts de ce processus, les reformes bancaires de
1973 puis de 1985, la restructuration de l'ensemble du systeme
bancaire
commencee
en
1989,
la
deval ua tion
du
franc
CFA de
Janvier 1994.
Certes les deux dernieres reformes ne sont pas
propres au Cameroun. Mais leur impact sur l'evolution des PME va
etre considerable.
Si ces etapes successives visent a accroitre l'adequation
du
systeme
bancaire
aux
objectifs
propres
de
l'appareil
economique,
elles aboutissent davantage
a un comportement de
liquidi te
et
de
marge
bahcaire.
Celui-ci
se
revele
dans
la
tendance
haussiere
des
taux
d'interet,
le
gel
des
credits
d'investissement depuis 1985-1986 et la surliquidite des banques
observee ces derniers temps.
De ce fai t,
l' interrogation sur
l'efficacite de ces reformes en terme notamment d'amelioration
des conditions du credit bancaire demeure. 11 semble meme qu'il
y ait comme une persistance de l' insatisfaction des agents a
deficit de financement vis-a-vis du systeme financier officiel.
Elle
se
revele
dans
1 'emergence
et
l'effort
actuel
de
restructuration des circuits informels d'epargne et de credit
dont les plus connus sont les tontines.
Et,
a notre avis,
la
comprehension du probleme du financement et de la gestion des PME
au regard des caracteristiques propres de ces entreprises passe
par l'analyse du fonctionnement de chacun de ces circuits. Leur
evolution quant a elle,
depend du res eau de relations qui va
naitre entre ces deux systemes. Ce dernier sera determinant pour
la
creation
de
mecanismes
de
financement
appropries
a
la
specificite
des
problemes
financiers,
technologiques
et
de
gestion de ces unites de production.
11
nous
apparai t
donc
a
ce
ni veau
que
le
comportement
d'endettement traduit le niveau et la qualite des mecanismes mis
en oeuvre.

-11-
b
- Le Cornporternent d'Endetternent des PME Camerounaises
En effet, si le credit apparait dans les PME camerounaises
comme
le
point
de
depart
du
processus
d'accumulation,
la
dynamique qu'il cree ne s'obtient pas de fa~on automatique. Elle
suppose la realisation d'un surplus suffisant pour assurer le
service de la dette et la poursuite des operations de production.
C'est
par
rapport
a
cette
double
preoccupation
de
remboursement de la dette et de perennisation de l'entreprise que
doivent etre analysees les conditions de credit et la reaction
qu'elles
suscitent
de
la
part
des
PME.
Ainsi,
le
caractere
impersonnel
des
mecanismes
de
financement
lie
a une gestion
commune de la Banque Centrale,
la suppression depuis 1989 des
credits bonifies en faveut des PME,
la tendance haussiere des
taux
d'interet
dans
la
zone
temoignent
de
conditions
de
financement peu favorables au regard des faiblesses des PME. La
rigidite
de
ces
conditions
determinera
les
capacites
de
developpement des PME sur le triple plan financier, technologique
et de la gestion.
- Sur le plan financier,
l'inadequation des conditions de
credit pose de nombreux problemes dont ceux :
du terme des credits, des couts financiers et des charges
recurrentes ;
· de la duree du differe de remboursement, du paiement des
interets
intercalaires
c'est-a-dire
ceux
exiges
avant
que
l'activite ne genere une tresorerie interne suffisante ;
des
echeances
incompatibles
avec
la
rentabilite
de
l'affaire ;
de
la
primaute
des
garanties
frustrant
les
unites
potentiellement rentables des financements necessaires.
- Sur le plan technologique, les PME connaissent egalement
des difficultes. Celles-ci sont inherentes :
· a l'anteriorite du probleme du financement qui ne permet
pas toujours d'evaluer les risques lies aux choix sectoriels,
surtout dans les PME modernes ;
· a la precarite des bases technologiques et aux exigences
de maitrise de l'outil de production;

- 12-
a 1 'aggravation des couts de production qui decoule de la
modici te
des
credi ts
longs,
d' une
gestion
approximati ve
des
stocks des pieces de rechange,
du poids de la remuneration de
l'assistance technique ...
- Sur le plan de la gestion, les problemes ici sont souvent
le resultat :
. d'une volonte de contr6le de l'entreprise notarnrnent dans
son
evolution
financiere
d'oll
cette
organisation
simpliste
souvent observee dans les PME ;
. d'un comportement deviant visant a recuperer les capitaux
propres
investis
au
fur
et
a mesure
du
durcissement
des
conditions du credit.
L'analyse des mecanismes du
financement
bancaire
et des
conditions appliquees aux PME peuvent ainsi constituer une cle
de lecture du comportement general de ces entreprises et des
difficultes qu'elles rencontrent dans leur activite et dans leur
processus de developpement. On est en particulier amene a faire
un certain nornbre d'hypotheses.
III
HYPOTHESES ET METHODOLOGIE
Nous preciserons d'abord les hypotheses formulees puis la
methodologie adoptee.
A
LES HYPOTHESES
La formulation des hypotheses suscite a notre avis au moins
deux questions.
- Le comportement specifique des PME camerounaises est-il
une
consequence
du
financement
discriminatoire
du
systeme
bancaire ?
-
Le mode de resolution de leur probleme de
financement
traduit-il des differences fondamentales entre les deux grands
types de PME que nous avons definis ?
Nous pensons effectivement que la reponse a chacune de ces
deux questions permet de formuler les hypotheses suivantes :

- 13 -
-
Hypothese 1
L'endettement exerce un effet de levier
financier
sur
les
capitaux
propres.
De
ce
point
de
vue,
l' evolution
des
condi tions
du
financement
bancaire
est
determninante sur le comportement des PME.
-
Hypothese
2
La
speci fici te
du
comportement
de
ces
entreprises met bien en evidence les dispari tes qui
existent
entre les deux grands
types de
PME definis qui
sont
les
PME
modernes et les PME informelles.
B
LA METHODOLOGIE
Nous
avons
retenu pour notre
analyse
6 exemples de
PME
choisies dans
les secteurs moderne et
informel de l' economie
camerounaise. lls devront nous aider sur la base des hypotheses
definies, a clarifier la specifici~e des comportements de chacune
des entreprises. Nous insisterons ainsi sur la maniere dont leurs
problemes se presentent ou surgissent,
sur leur ampleur et sur
les differentes solutions qui y sont apportees. Nous explorerons
en meme temps des possiblites de solutions alternatives.
Le
choix
des
cas
a
ete
guide
par
deux
considerations
essentielles :
la
representativite
des
unites
etudiees.
Ces
unites
figurent
parmi
les
plus
importantes
sur
le
plan
de
l'investissement, de la part du marche a couvrir de telle maniere
que leur absence ou leur presence est fortement ressentie.
- la nature et 1 'importance des problemes qu'ils permettent
de soulever. On peut alors circonscrire les questions principales
relatives aux PME camerounaises en general.
Les
PME
etudiees
sont
bien
des
exemples
concrets
d'entreprises nationales. Nous avons, pour leur analyse, exploite
a
la
fois
les
interviews
que
nous
ont
accordees
les
proprietaires-dirigeants et leurs collaborateurs, les documents
comptables
et
financiers
obtenus
aupres
des
banques
ayant
participe au financement de leur projet, surtout pour celles du
secteur
moderne.
Nous
avons
aussi
eu
recours
aux
documents

- 14-
fournis par les PME elles-memes, par les organismes d'appui et
de conseil, par les tontines financieres.
Nous avons pu b~n~ficier ~galement des r~sultats d'enquetes
men~es dans
le domaine du financement
des
PME camerounaises,
notamment celles effectu~es par les membres du Groupe d'Etudes
et de Recherches en Economie Appliqu~e (GEREA) de l'Universit~
de Douala. Nous y avons souvent ~t~ associ~e, soit en tant que
membre du GEREA,
soi t
en tant qu' ancien cadre de banque pour
participer a l'~laboration du questionnaire et a la critique des
r~sultats. Nous avons ~galement profit~ des travaux de recherches
d'~tudiants de l'Ecole Sup~rieure des Sciences Economiques et
Commerciales
(ESSEC)
de Douala au Cameroun.
Les
r~sultats de
leurs enquetes nous ont ~t~ d'un grand apport meme lorsque nous
n' avons pas particip~ a la r~alisation de celles-ci. Quelquefois,
nous avons ~t~ approch~e par les ~tudiants concern~s pour un avis
technique principalement pour la partie relative au financement
bancaire. Nous avons aussi dans l'ensemble mis a profit notre
exp~rience de dix ann~es au service de la Banque Camerounaise de
D~veloppement (BCD)
dont cinq en tant que chef de service de
credits aux PME.
Nous avons, pour r~pondre aux principales pr~occupations de
notre ~tude, articul~ notre travail en deux parties :
- la premiere partie sera consacr~e aI' analyse du processus
de d~veloppement des PME camerounaises.
- la deuxieme partie mettra en lumiere,
a partir d'~tudes
de cas, les diff~rences de comportement qui existent au sein d'un
ensemble,
les
PME,
dont
1 'appellation g~n~ralisante pourrait
faire penser a un groupe homogene.
Nous aurons alors :
lere partie
: L'Analyse du processus de d~veloppement des PME
Camerounaises
l'Importance
du
probleme
du
financement.
2eme partie
L'Analyse de quelques exp~riences de PME
Camerounaises du Secteur Moderne et du
Secteur
Informel.

Iere PARTIE
L'ANALYSE DU PROCESSUS DE
DEVELOPPEMENT DES PME CAMEROUNAISES
L'IMPORTANCE DU PROBLEME DU FINANCEMENT

- 16-
INTRODUCTION
La strategie nationale de developpement economique et social
accorde une place de choix a la politique de promotion des PME.
Du
discours
industriel
des
pouvoirs
publics
aux
plans
quinquennaux
de
developpement,
la
priorite
est
clairement
etablie. Pourtant, l'evolution des structures mises en place en
vue du
financement
et de
la promotion des
PME ainsi que
les
resultats actuels obtenus ne traduisent pas encore le role de
levier dans l'economie que lIon attend de ces entreprises.
Quelles
sont
en
realite
les
particularites
de
ces
entreprises ? Qu'est-ce qui fait l'interet de celles-ci, quelle
est
l'economie
de
ce
choix
dans
la
politique
industrielle
nationale,
les espoirs et les perspectives dans
le
sens de la
creation d'une economie mieux articulee axee sur les PME ?
Les constats d' echecs qui peuvent etre
fai ts par rapport am~
objectifs
de
creation
d'un
appareil
economique
introverti
participent de la prise de conscience qu'il existe des goulots
d'etranglement aussi bien au niveau des PME - elles-memes qu'au
ni veau
de
leur
environnement
monetaire,
financier
et
socio-
economique dont elles dependent etroitement.
Quels sont donc d'une part les handicaps propres des PME,
et d'autre part les causes externes des echecs ainsi constates,
les uns exercant sur les autres un effet amplificateur ?
Quelles sont,
par rapport aux PME,
la nature et la specificite
du cadre qui doit soutenir la reussite de cette experience en
matiere
d'industrialisation
?
Quels
en
sont
les
elements
determinants et les possibilites de concourir a la realisation
d'une croissance et d'un developpement economique
auto-entretenu ?

17
Telles
sont
les
questions
essentielles
au;~quelles nous
tenterons d'apporter des ~l~ments de 'r~ponse dans notre premier
chapitre. Les developpements qui y seront faits montreront qu'il
s'agit
ici
d'entreprises
d'un
type
particulier
dont
les
caracteristiques
sont
a la fois une force et une faiblesse.
Manifestement, cette ambivalence n'a pas toujours facilit~ les
relations avec son environnement et plus particulierement avec
le systeme financier quasiment constitu~ du systeme bancaire dont
les
cr~dits
repr~sentent non
pas
un
adjuvant
mais
plut6t
l'essentiel des res sources n~cessaires a leur activit~.
Comment
s'est
constitue
ce
systeme
bancaire
dont
les
orientations
ne
semblent
pas
s'integrer
a la logique de
£inancement d'un processus d'industrialisation base sur les PME?
Cette
situation
du
systeme
bancaire
par
rapport
au}{
choi::
politiques nationaux a n~cessit~ une r~flexion dans le sens d'une
meilleure adaptation des moyens au}{ objectifs. Les reformes qui
en
ont
resulte
dont
notarnment
celles
de
1973,
1985,
la
restructuration du systeme bancaire de 1989,
puis la devaluation
du franc CFA par rapport au franc francais de Janvier 1994 ainsi
que les structures d'accompaqnement creees ont-elles ameliori la
poli tique
de
promotion
des
PME
et
contribue
a l' effort de
construction d'un appareil de production viable?
l ' emergence
actuelle
de
circui ts
non
conven tionnels
de
financement
dont
les
plus
connus
sont
les
tontines
semble
traduire une insatisfaction des agents economiques vis a vis du
systeme financier traditionnel.
Quele
sont
les
apports
de
ces
pratiques
informelles
d'eparqne et de credits dans l'effort de promotion des PME ?
Quelles relations vont naitre entre cas deux ensembles, vont-ils
se
completer
ou
rivaliser,
et
quel
en
sera
l' impact
;sur
la
redynamisation
du
systeme
bancaire
en
desagregation
et
l'autonomisation de l'economie nationale ?

- 18 -
Nous voudrions repondre a chacune de ces interrogations dans
notre deuxi~me chapitre. Nous verrons alors que l'inaptitude du
syst~me bancaire a imprimer aux PME une dynamique reelle est liee
au fondement meme de la pratique monetaire nationale qui est
celle de la zone franc a laquelle appartient le Cameroun. Les
reformes
successi ves pour
rendre notre
s yst~me bancaire plus
efficient et les mesures d'accompagnement de l'effort financier
interieur
ne
sont
pas
encore
suffisantes
pour
garantir
les
resultats
escomptes.
11
subsiste
toujours
une
grande
insatisfaction chez les agents a deficit de financement qui se
revele dans
la creation et
les
efforts
de
structuration des
circuits informels d'epargne et de credit.
La comprehension du probl~me du financement des
PME,
au
regard des caracteristiques propres qu'elles presentent, passe
par l' analyse du fonctionnement de chacun de ces circui ts de
financement. Son evolution, quant a elle, dependra du reseau de
relations qui s'etablira entre eux et qui sera determinant pour
l'avenir de l'un et de l'autre, pour l'elargissement et la mise
en place d'un systeme financier mieux etoffe, pour la creation
de mecanismes de
financement
et
de produi ts
appropries
a la
specificite de l'appareil de production. Car, celui-ci est appele
a repondre aux besoins d'une economie nationale qui n'echappe pas
aux contraintes d'un contexte international 00 l'on est soit
productif et competitif soit absent et marginalise.
Cette double contrainte explique bien :
les
interrogations
formulees
ci-dessus
et
qui
se
rapportent aux particularites des PME Camerounaises d'une part
et au systeme financier appele a promouvoir leur developpement
d'autre part;
- La construction de cette premiere partie qui nous permet
de
repondre
aux
questions
soulevees
en
insistant
sur
l'interaction des comportements des PME et du systeme financier.
Nous aurons ainsi
Chapitre I - L'Analyse des PME Camerounaises :
modes d'organisation et mecanismes de fonctionnement
Chapitre 11 - Le probleme de l'adaptation des PME aux conditions
bancaires de financement.

· CHAPITRE I
L'ANALYSE DES PME CAMEROUNAISES :
MODE
D 'ORGANISATION ET MECANISMES
DE FONCTIONNEMENT

- 20-
INTRODUCTION
Sous
l' appellation generalisante de
PME
se dissimule un
ensemble heterogene d'unites soit artisanales, de petite taille
ou alors de taille moyenne, soit organisees ou informelles mais
dont
les
caracteristiques,
a la faveur du contexte socio-
economique
ont
polarise
sur
elles
l' attention
des
autorites
camerounaises. Les atouts qui leur sont communement reconnus par
rapport a la grande entreprise sont :
- leur qrande flexibilite par rapport a l'environnement et
aux fluctuations
de
la
conjoncture et
dont
elles
tirent
leur
force de resistance a la crise ;
- leur capacite a creer des emplois a des couts relativement
bas.
Ces
trai ts
particuliers
des
PME
ont permis
d' expliquer
l'interet qui leur est porte.
Il importe main tenant de s'interroqer sur les conditions
de
creation
et
de
dlweloppemen t
des
PME,
sur
leur
mode
de
fonctionnement et sur leurs possibilites reelles de justifier et
de soutenir l'espoir qui a ete place en elles en tant que piece
mai tresse de l' industrialisa tion de 1 f Economie camerounaise. Nous
verrons donc que les conditions dans lesquelles les PME se creent
traduisent ou engendrent de nombreuses faiblesses qui peuvent
s'eriger en obstacles dirimants a leur developpement.
Nous essayerons dans ce chapitre de comprendre ce qu'est une
PME. Nous nous appuyerons alors sur le cas particulier des PME
camerounaises
que
nous
tenterons
de
definir
puis
d' en
circonscrire les problemes majeurs. Nous exposerons ensuite le
probleme
general
du
financement
de
la
creation
et
du
developpement de ces uni tes de production.
Nous
ferons
ainsi
ressortir l'importance du credit dans le financement de leurs
activites.
Enfin,
dans la logique credit-investissement,
nous
analyserons les determinants de la decision d'investir dans les
PME.
Nous
verrons
alors
que
les
determinants
financiers
y
occupent une place particuliere.

- 21 -
Ces trois principales preoccupations sont ressorties dans
les trois sections suivantes
:
Section
I
La
definition
et
les
problemes
des
PME
Camerounaises
Section 11 -
Le probleme general du financement des PME
l'importance des ressources externes
Section III - La specificite du probleme de l'lnvestissement
dans les PME

- 22 -
SECTION
I
LA DEFINITION ET LES PROBLEMES DES PME
CAMEROUNAISES
La difficul te
majeure
a
laquelle on
se
heurte dans
les
etudes
sur
les
PME
est
de
pouvoir,
au-dela
des
definitions
considerees comme generales, donner au concept de PME un contenu
bien precis qui rende compte de la specificite du contexte socio-
economique analyse.
On rappelera d'abord quelques definitions generales de la
PME
puis
on
tentera
de
preciser
les
particulari tes
des
PME
camerounaises ainsi que les problemes qU'elles soulevent.
§1
Les Definitions Generales de la PME
Generalement,
on distingue deux courants qui definissent
avec des cri teres differents la PME.
- Un premier courant s'appuie sur des grandeurs objectives
et quantitatives telles que :
- les capitaux propres ;
- le niveau des investissements
- le personnel employe
le total du bilan.
Ainsi,
par
rapport
a
la
grande
entreprise,
la
PME
se
definirait par des montan~relativement faibles de l'ensemble de
ces variables.
Une telle demarche suppose des reajustements permanents des
donnees chiffrees dans le temps et selon chaque contexte. Car,
au fur et a mesure que les conditions economiques changent,
les
chiffres n'ont plus la meme signification. Ce type de definitions
semble davantage repondre a des besoins statistiques pour des
programmes
de
plani fication
ou
d' organisation
de
l' acti vi te
economique.
Et,
s' i 1 renseigne a travers des chi ffres
sur ce
qu'est une PME,
il presente un double inconvenient quant a son
exploitation.
D'abord
il
differe
selon
l'initiateur
de
la
definition,
ensuite il necessite des revisions permanentes qui
suivent le rythme de la conjoncture economique.

- 23 -
Une
deuxieme
approche
fait
appel
a des
cri teres
qualitatifs
ayant
trait
a
la
propriete
du
capital,
a
1 'organisation et a la distribution des fonctions,
puis a la
gestion.
La PME serait alors cette entreprise Oll le capital appartient a
un seul individu qui, dans le souci d'en conserver la propriete,
cherche a assumer toutes les fonctions essentielles de son unite
de production en depi t
de
tous
les problemes de
gestion qui
pourraient naitre d'une telle organisation.
Ainsi, quelle que soit sa forme juridique, la PME conserve
son "statut" d'entreprise personnelle5 tout au moins jusqu'a la
disparition de son createur. La disparition du fondateur ou son
retrait
de
l'affaire
donnent
alors
a la PME un caractere
fami 1ia1 6 •
11 fa ut soul igner a ce ni veau que l' importance des
problemes de succession ou de transmission de l'entreprise sera
fonction du degre d'acceptation et de preparation de celles-ci.
La PME,
quelle que soit son evolution,
se caracterise par une
relation etroite entre
la propriete du capital,
1 r initiative
entrepreneuriale et les decisions de gestion.
L'un des aspects positifs de cette approche repose sur le
fait qu'elle est plus souple et plus large permettant de definir
des PME de differentes economies.
Elle devrait donc completer
utilement les indications chiffrees et faciliter la distinction
entre la PME et la grande entreprise d'une part et entre les PME
dont celles du secteur informel
et celles du secteur moderne
d'autre part.
11 nous semble que ces deux approches sont plus complementaires
qu'exclusives.
C'est d'ailleurs dans une synthese de ces deux
points de vue que le Small Business Act de 1953 a propose une
-
On lira eqalement a ce sujet, G.
BIRIGOYEN,
Contribution a la connaissance des comportements
finanoiers des Moyennes Entreprises Industrielles
(MEI)
Familiales. These de Sciences de Gestion,
Universite de
Bordeaux I,
1984 p.?
Cette analyse est eqalement celle de A.
GAULTIER,
O.
GELINIER,
l'Avenir des entreprises personnelles
et familiales,
hommes et techniques,
2erne ed.i. tion,
Paris 1975
p.
19 cite par G.
BIRIGOYEN,
Coptribution
a la connaissance des comporternents financiers des Moye~~~s
Eptreprises industrielleQ
(MEI)
familiales op cit. p.7.

· 24-
d~finition de la PME qui allie ~ la fois des crit~res qualitatifs
et quantitatifs :
~
- qualitativement, une PME se reconnait ~ son ind~pendance
dans la propri~t~ et dans l'exploitation puis ~ sa non dominance
du secteur ;
quantitativement,
elle
se
distingue
par
rapport
~
certaines
variables
dont
le
nombre
des
employ~s,
le
chiffre
d'affaires.
Une telle d~finition de la PME semble assez op~rationnelle
parce que plus compl~te que celles qui ne tiennent compte que des
uns ou des autres crit~res.
§2
Definition de la PME Camerounaise
L'ensemble des d~finitions courantes de la PME camerounaise
tendent
~
privil~gier
l'approche
quantitative,
s'appuyant
davantage sur des criteres quantifiables. Et, des d~finitions pas
toujours
uniformes
ont
~t~
avanc~es selon
les
utilisateurs.
Parfois pour le meme utilisateur,
les d~finitions ont ~volu~ au
fur
et
~ mesure
du
temps.
Les plus
usuelles
sont
celles des
insti tutions
ou
organismes
d' interventions
impliqu~s dans
la
cr~ation,
la
promotion
ou
le
d~veloppement des
PME.
Nous
retiendrons ici celles du Minist~re des Finances,
du Code des
Investissements, du Fonds d'Aide et de Garantie des Cr~dits aux
Petites et Moyennes Entreprises 7 •
a)
Pour le Ministere des Finances
(MINFI)
Suivant l'arret~ n0286/MINFI/CE du 14 avril 1982 portant
conditions de banque, la PME est toute entreprise quelle que soit
sa forme juridique, dont la majorit~ du capital et les dirigeants
sont
nationaux,
dont
le
chiffre
d' affaires
n' e~{c~de pas
125
millions de francs CFA, dont les fonds propres ne d~passent pas
50 millions et, les encours de cr~dits par caisse ~ court terme,
40 millions.
Toutes ces conditions doivent etre remplies ~ la
fois.
-
Le Fonds de Garantie et d' Aide aux Peti tes et Moyennes
&ntreprises en abreq6,
FOGAPE est un organisme public cr66
par d&cret pr6sidentiel nO 75/238 du 2 avril 1975.
11 a alors pour mission de garantir les cr6d1ts bancaires
aux PME. Depuis quelques ann6es son action a 6t6 6tendue
au financement de projets d'investissement des PME.


)
- 25 -
Cet
arrete
sera modi fie
par
un
nouveau
te}~te,
l' arrete
n0131/MINFI/CE
du
7 mars
1983
portant
conditions
de
banque,
celui-ci
revise certains des
chiffres precedents.
Une PME se
reconnaitrait a10rs aux donnees suivantes
-
un
chiffre
d' affaires
n' excedant
pas
250 millions
de
francs CFA
- des fonds propres ne depassant pas 50 millions de francs
CFA
les encours du credit par caisse a court terme n'etant pas
superieurs a 40 millions de francs CFA.
Ces chiffres vont une fois de plus evoluer avec l'arrete
n0931/MINFI/DCE/D
du
2
mai
1986.
L'on
retient
les
cri teres
sui vants
pour
definir
les
PME
eligibles
au
taux
d' escompte
preferentiel :
le
chiffre
d'affaires
n'excedant
pas
500 millions
de
francs CFA
-
les encours d'utilisation des credits a court terme ne
depassant pas 100 millions de francs CFA. Toutes ces conditions
devant
etre remplies
a la fois. Et,
lorsqu' elles
le sont
le
reescompte de la BEAC des credits d'equipement sollicites par les
PME nationales ainsi definies peut atteindre 80 % du cout total
des investissements.
Ces definitions du ministere des finances ont pour principal
objectif de ~~t~~g~r, dans le cadre d'une politique de soutien
aux projets d'investissement des PME, les entreprises eligibles
aux conditions privilegiees des credits refinances par la Banque
des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC).
b)
Pour le code des investissements
Le code des investissements definit les PME a travers les
conditions requises pour etre agree au regime C, regime des PME~
du
code.
Ainsi,
peuvent
y
etre
agreees
les
entreprises
qui
satisfont aux exigences suivantes :
- participation des nationaux au capital social a hauteur
de 65 % au moins ;
- cout de creation d'emploi relativement faible ;
- garantie de formation professionnelle continue ;
niveau
des
investissements
cumules
inferieurs' a 500
millions de francs CFA constants.

)
- 26 -
c)
Pour le FOGAPE
Peut recourir aux financements de l'organisme, au titre de
PME, toute entreprise quelle que soit sa forme juridique dont :
- 51 % au moins du capital et des dirigeants sont
camerounais ;
- le chiffre d'affaires est inferieur ou egal a un milliard
de francs CFA ;
-
les investissements cumules n'excedent pas 500 millions
de francs CFA ;
- les encours de credit par caisse a court terme ne
depassent pas 200 millions de francs CFA.
Les definitions de la PME dans ces trois cas sont basees
sur des grandeurs reelles dont :
le chiffre d'affaires
les encours de credit
le niveau des fonds propres
- le taux de participation des nationaux au
capital social ;
le niveau des investissements
- le cout de creation d'un emploi.
Mais d'une definition a l'autre les indicateurs retenus ne
sont pas toujours les memes. Et,
meme lorsque l'un ou l'autre
indicateur est utilise dans
des
definitions differentes,
les
valeurs qu'ils ont ne sont pas toujours identiques. Ainsi,
sur
un plan global l'on ne dispose pas d'une definition unique et
rigoureuse de la PME camerounaise. Cette absence d'une definition
coherente et operationnelle pose un probleme reel ressenti dans
les
milieux
universitaires
ou
professionnels
tels
que
les
conseils
juridiques
ou
economiques
qui
s'interessent
quotidiennement a la vie et au developpement des PME.
Le
meme
malaise
est
per~u
au
niveau
des
autorites
economiques.
Et,
le
VIe
Plan
Quinquennal
de
Developpement
1986/1991 prevoyait deja une etude sur 1 'harmonisation de la
definition de la PME. Toutes ces apprehensions nous confortent
dans l'idee de la necessite d'une redefinition de ce concept.

- 27-
Dans
le
but
de
mieux
circonscrire
la
PME
dans
ses
differentes formes et ses problemes specifiques il nous parait
indispensable de partir d'autres criteres. Et, ceux de l'approche
qualitative plus large et plus souple nous semblent etre une base
interessante pour une definition plus precise et plus adequate.
§3
Caracteristiques et problemes de la PME camerounaise
La
PME
camerounaise
peut
etre
definie
a travers deux
caracteristiques principales relatives a la fois a la propriete
du
capital
et
au
mode
de
financemen t
de
l' activi te
puis
a
l'orqanisation et a la structure qui en decoulent.
Cette caracterisation permet de comprendre et de poser les
problemes de la PME.
3.1
La propriete du capital et la faiblesse des fonds
propres
:
La PME est une entreprise a l'echelle humaine ou familiale
generalement
dirigee
par
un
seul
homme
qui
en
supervise
et
contr61e toute l'activite. Celui-ci assume ou voudrait en assumer
toutes
les
fonctions
financiere,
administrative,
technique,
commerciale.
C'est
lui
qui
a
la
propriete
du
capital,
independamment
de
la
forme
juridique
de
l'affaire.
Lorsque
l' entreprise est une societe de personnes ou de capi taux,
le
capital est souvent dans la realite apporte ou detenu en majorite
par une meme personne. Les autres actionnaires ou associes sont
alors,
le cas echeant,
les membres d'une meme famille ou tout
simplement choisis dans le cercle des amis pour servir de prete-
nom, ne de tenant qu'une part insignifiante du capital. En effet,
Creees
a partir de cercles restreints d' amis ou de proches
parents, les PME n'arrivent a rassembler que de faibles montants
de res sources financieres. Les raisons sont multiples.
-
D'abord le caractere familial qui preside souvent a la
constitution de l'entreprise quelle que soit sa forme juridique,
limite
le
capital
initial
aux
seules
possibilites
de
"la
famille". En outre, la peur du risque liee a la decision de creer
une
entreprise
et
le
faible
gout
pour
les
investissements
industriels
reduisent
a peu de choses l' apport ini tial. La
constitution d'un capital en dehors de l'entreprise est sbuvent

- 28 -
plus
attrayante
et
peut
paraitre
moins
risqueeB •
Or,
l'observation de l'economie camerounaise dans la situation de
crise
qu'elle
traverse
a l'heure
actuelle
remet
en
cause
l' opportuni te
d' un
certain
nombre
de
placements.
Ainsi
par
exemple au niveau du systeme bancaire,
la crise s'est traduite
par la fermeture de nombreuses banques ne garantissant plus la
recuperation de l'integralite des depots a terme effectues dans
ces
banques
et
encore moins
la
remunera tion de
ceux-ci.
Les
bilans de liquidation etablis a fin mars 1990, environ neuf mois
apres
la
mise
en
liquida tion
de
la
Banque
Camerounaise
de
Developpement
(BCD),
la Cameroon Bank
(CAMBANK),
la Banque de
Paris
et
des
Pays-Bas
Cameroun
(PAR1BAS)
revelent
des
tam~
d'indemnisation
catastrophiques
qui
sont
respecti vement
pour
chacune de ces
Banques,
es times
a 16 %, 7 % et 24 % 9
Ces
chiffres tout de meme assez pessimistes amenent a reflechir sur
l'opportunite de tels choix.
La situation des placements dans l'immobilier n'est guere
meilleure. Les loyers ont connu une baisse de plus de 50 % ces
dernieres annees. L'Etat qui est l'un des plus gros clients est
oblige de resilier une grande partie de ses contrats de location
en application de mesures prevues par le programme d'ajustement
structurel etabli dans le'cadre des accords de confirmation avec
le Fonds Monetaire 1nternational 1o • Encore plus, la fiscalite des
revenus sur les placements mobiliers et immobiliers n'est pas des
plus souples. Les taux d'imposition applicables pour ces revenus
sont
a)
pour les revenus immobiliers
:
11
est
prevu
une
taxe
proportionnelle
sur
les
revenus
locatifs de tous les immeubles situes a l'interieur du Territoire
camerounais. Les revenus imposables sont ceux de la location des
immeubles batis, des terrains a usage commercial ou industriels,
d'outillages pour etablissement industriel attaches au fonds a
perpetuelle demeure.
La taxe est fixee a 20 % du montant des
-
Il s'aqit la de problemes soUleves par la Theorie
des ohoix de porte-
feuille sur laquelle nous reviendrons ulterieurement.
-
Bllans de liquidation de BCD, CAMBANK et PARIaAs au 30 mars 1990.
to
_
Voir Republique du Cameroun, Dbclaration de Str!tbgie
et de Relance Economique, mal 1989.

- 29 -
revenus peryus.
En
outre,
d'une
maniere
generale
il
existe
pour
les
proprietes baties ou non, une taxe fonciere etablie annuellement.
Le tarif de base est progressif et fonction de la superficie de
l'immeuble. Ce tarif est compris entre 2 500 F et 62 000 F CFA.
A cette taxe fonciere il faut ajouter,
une
taxe additionnelle
egale a 25 % de celle-ci et des droits afferents aux operations
foncieres tels que les morcellements, l'etablissement de titres
fonciers.
b)
Pour les revenus mobiliers
:
la
taxe proportionnelle
sur
les
revenus
des
capi taux
mobiliers
(TPRCM)
dont le taux est de 16,50 % sur les revenus
peryus par les residents et 25 % pour les non residents 11 ;
la surtaxe progressive dont
le taux varie sui vant les
paliers de revenus.
Parallelement des mesures particulieres sont amenagees pour
les investissements effectues par les PME. Ainsi, les avantages
du Code des Investissements du Cameroun prevoient entre autres,
une exoneration fiscale sur les resultats obtenus pendant une
periode de huit ans a compter de la premiere vente ou prestation.
Mais cette seule consideration ne suffit pas toujours, de telle
sorte que lIon peut seulement affirmer que la fiscalite est un
facteur explicatif du niveau d'investissement des entreprises
sans pouvoir dire dans quelle mesure elle affecte la decision
d'investissement des entrepreneurs" 12 •
L'objectivite au regard
des avantages fiscaux ne domine pas toujours les motivations du
patron de la PME. Autant une confiance dans son affaire peut le
pousser a y engager tout son patrimoine personnel jusqu I a sa
caution personnelle aut ant le faible gout du risque d'investir
amene, lorsque la securite des placements a l'interieur diminue;
u
-
On lira a ce sujet J. P. ANDRIEUX et J. J. LECAT,
Afrique Centrale quide J'Uridique Fiscal, 1987.
Dossiers Internationaux p 191.
On peut lire eqalement J. Alibert, Le precis fiscal
du Cameroun, 1988-1989, EDIENA pp 35-37.
"
-
C. NJOMGANG, L' absorption du Capital au Cameroun
(1965-1980)
Edit. Berqer-Levrau1t, Paris Septembre 1986, p 78.
L' auteur souleve ie! le problem.. de l ' ~act financier
de la fiscalit6 sur la decision d'investir.
Cette question est au centre de la th60rie financiere
dhve10ppee par Modiq1iani et Miller et a l ' oriqine de
nambreuses controverses qui sont encore d'actualit6
aUjourd'hui ainsi que nous le verrons par la SUite.

- 30 -
a des placements a l'etranger plus remunerateurs et plus
securisants soit tout simplement a des depenses somptuaires pour
la consommation.
L'apport des res sources financieres peut donc etre limite
involontairement lorsque la surface financiere du fondateur de
la PME est faible. Elle peut aussi l'etre volontairement lorsque
sa preference va a des operations simples considerees par lui-
meme comme plus rentables ou quand il est reticent a ouvrir le
capital social a des personnes qui n'appartiennent pas au cercle
familial. Une telle participation dans le capital de l'entreprise
est per9ue pour beaucoup comme une intrusion dans leur affaire,
une menace d' immixtion dans
leur gestion donc le risque d' en
perdre le contr61e et meme la propriete. Ce type d'attitude est
d'autant plus accentue que la taille de l'unite est plus petite.
Pour
des
unites
d'une
envergure
moyenne,
des
possibilites
d'ouverture du capital existent meme si les conditions sont tres
selectives. Mais en l'absence d'un marche financier formel ou de
toute
autre
organisation
permettant
d' informer
sur
les
opportunites qui existent,
le niveau des fonds propres des PME
est reste tres bas.
Dans
tous
les cas,
celui-ci
satisfait difficilement au
minimum reglementaire de 20 %par rapport au cout total du projet
que
les
banques
exigent
pour
leur
participation
dans
le
financement.
Meme
lorsque
ce
pourcentage
est
atteint,
il
s'obtient grace a divers biens en nature surevalues, et quelques
fois
a
des
credits
con~actes
aupres
d'autres
sources
tradi tionnelles
ou non.
Ces
differents
comportements ont une
double implication
d' abord,
a
court
terme
la
PME
se
trouve
dan"s
l'impossibilite de faire face aux imprevus tels que des hausses
de prix des equipements ou de la matiere premiere, des erreurs
dans les previsions des depenses. Elles peuvent ainsi creer des
retards ou des decalages dans le demarrage des projets ;
-
ensuite a terme,
1 'entreprise peut atteindre un niveau
d'engagement
qui
compromette
la
realisation
d'une
activite
rentable pouvant generer une capacite d'autofinancement'et des
possibilites de developpement. Le risque majeur qu'encourt

- 31 -
l'entreprise est celui d'une charge d'endettement difficile a
supporter de telle sorte que l'activite s'en trouve bloquee ou
reduite a un etat vegetatif. Le poids des frais financiers peut
etre tel que l'entreprise,
si elle doit les couvrir, ne puisse
plus assurer une exploitation normale ni soutenir la concurrence
des unites produisant les memes biens, de maniere a se maintenir
sur le marche. La faiblesse des ressources propres pose donc a
la PME un probleme de maitrise des couts financiers ou de fa~on
plus
globale
celui
de
la
mai trise
du
cout
du
capi tal.
Une
deuxieme caracteristique egalement
liee a la maniere dont se
creent la PME, permet de la definir.
3.2
L'Organisation sommaire de l'activite
Nous avons dit que la faiblesse des fonds propres dans la
PME est liee au caractere familial et a l'echelle humaine de sa
creation. L'idee d'entreprise est donc le fait d'un individu qui
cherche a preserver la propriete de son capital. 11 voudrait pour
l'assurer etre le seul a decider de la vie actuelle et future de
l'entreprise, pour cela il concentre entre ses mains toutes les
fonctions
essentielles.
Des
lors,
le
fonctionnement
de
l'entreprise va dependre des capacites reelles de 1 'entrepreneur
a definir les objectifs, a determiner a temps les besoins et les
moyens requis tant au niveau financier, que technologique, humain
etc. En d'autres termes la vie de l'entreprise dependra de ses
aptitudes a anticiper ou a saisir des opportunites qui s'offrent
a l'entreprise.
Seulement, la necessite d'une organisation structuree dans cette
perspective
n' est
pas
toujours
bien
perc;ue
pas
plus
que
la
complexite des taches techniques. Et,
generalement,
la gestion
dans la PME se fait au jour le jour. Et,
quand des prevision~
sont faites elles portent sur une periode relativement courte qui
confirme le principe d'une navigation a vue. La structure qui
decoule de la personnalisation des PME ne peut etre que tres
sommaire, parce que fortement centree sur une concentration des
fonctions au profit du proprietaire du capital. Les exemples de
delegation, montrent que celle-ci ne peut etre que partielle et

- 32 -
operee en faveur des membres de la famille 13 • Ces moyens utilises
peuvent
s' averer
contraires
ou
non
appropr~es aux
objectifs
poursuivis
qui
sont
ceux
de
controle
de
l'activite
et
de
maximisation du profit.
En
effet,
l'exercice
des
fonctions
de
l'entreprise
ne
s'improvise pas mais obeit a des exigences de formation et de
mai trise
des
taches
liees
a chaque fonction.
Ces
exigences
s'accroissent
avec
le
passage
de
l'activite
economique
des
secteurs agricoles, forestiers, miniers artisanaux ou cornmerciaux
au secteur industriel 14 • Le degre de technologie par exemple y
est plus important et en perpetuelle mutation. La competence est
donc une necessi te,
sur tout pour une economie cornme celle du
Cameroun,
qui s'est fixee un objectif de modernisation de son
tissu industriel par le biais de l'apport technologique des PME.
Cette organisation sornrnaire que s'impose le proprietaire de la
PME
a de
nombreuses
implications.
Elle
est
en particulier a
l'origine
d'un
probleme
important
celui
de
la
maitrise
technologique,
probleme
qui
peut
etre
analyse
a travers la
maniere dont s' operent les choix sectoriels et se defini t
la
politique industrielle.
3.3
L'Importance du Probleme Technologique
En realite, au niveau de l'entreprise, le choix de s'etablir
dans
un secteur d' acti vi te donne
ou dans
une
branche donnee
semble
souvent
etre
le
fait
du
hasard.
L'appreciation
des
difficultes
et
des
exigences
particulieres
de
l'activite
industrielle,
l' opportuni te meme de la decision d' investir ne
semblent pas toujours etre une preoccupation majeure pour les
dirigeants
des
PME.
La
structure
legere
dans
laquelle
elles
fonctionnent montre que 1 'importance du choix sectoriel n'est pas
toujours bien saisie de meme que la necessite de la maitrise
technique
requise
a
l' exercice
de
certaines
taches
de
-
La vie des entreprises,
Jeune Afrique Econamie, N° 127 janvier 1990
14
A. E. ELALAMI,
"Role de la Petite et Moyenne Entreprise dans le
D~veloppement et la Cr~ation de l'emploi, le cas de l'Afrique",
Revue P.M.O.
volume 3.

- 33 -'
l'entreprise.
D'ailleurs,
1 'engorgement
rapide
de
certaines
branches
telles
que
la
menuiserie,
la
boulangerie
temoigne
davantage d'une tendance A une copie facile de ce qui existe dejA
que d'une operation motivee et maitrisee15 • Et, 1 'observation des
faits montre que l'installation de nouvelles unites n'entraine
pas forcement une amelioration dans la qualite des produits par
rapport a ceux des entreprises existantes. Cette situation est
tout a fait comprehensible dans la mesure ou bon nombre de PME
naissent a l'occasion de Forum internationaux. Ceux-ci sont des
lieux Oll des constructeurs d'equipements industriels ou leurs
representants
commerciaux
font
connai tre
leur materiel.
Mais
c'est aussi le lieu Oll les choix d'equipements sont effectues
faute
d' une
participation plus
avantageuse
A ce marche.
Ces
equipements sont generalement de seconde main.
lls sont alors
reformes surevalues,
leur technologie etant depassee dans les
pays d'origine. Les problemes vont etre inevitables, le choix des
equipements se situant en amont et determinant le choix du projet
lui-meme15bis. Les differentes etapes se juxtaposent pour s' achever
dans des essais d' adaptation des machines au contexte et aux
besoins
nationaux16 •
On
verra
par
la
suite
avec
l'analyse
d'exemples concrets que pour les utilisateurs,
ces equipements
posent d'enormes problemes. L'outil de production est souvent mal
connu et surdimensionne,
les pannes sont frequentes A cause de
la
vetuste
des
machines
et
les
recours
au
constructeur
se
mul tiplient.
Les
delais
de
reaction de
celui -ci,
ceux de
la
livraison des pieces de re change causent de nombreuses ruptures
dans
le
rythme de
la production.
Des
solutions
sont
souvent
recherchees dans des essais d'adaptation de pieces fabriquees
localement ou alors dans le depannage par des techniciens "de
15
Ce constat est egalement fait par
l'Afrique industrie nO 287 du 1er novembre 1983
s'agissant des PMI agro alimentaires et du bois en Afrique.
15bis- On admet aujourd'hui que la technologie est un fondement
indispensable d'une competitivite durable. Lire a ce sujet
A. CH Martinet, Strategie, Edit Vuibert Paris 1983
pp 55-56 et 115 116.
Lire egalement R.N.
Foster, la ~~evipion de l'Evolution
Technolog±que dans la strategi~ ~. l'entreprise,
problemes economiques nO 1784 Jui~let 1982 pp 13-17.
-
E. HAGEN, Economie du D6veloppemant, Edit Economica, 1992,
traduction de R.
D.
IRWIN,
The Econammics of Development,
3e 6dit. p 251.

- 34 -
fortune".
Ces
di ff icul tes
techniques
allongent
le
cycle
de
production et deteriorent la qualite du produit. Entre temps, la
technologie continue d' evoluer dans
les pays dont on vi se le
marche du fait de l'etroitesse du marche local.
En effet,
les
capacites installees sont la plupart du temps sans rapport avec
les
capaci tes
d' absorption
du
marche
local,
les
equipements
n'ayant pas ete con9us pour ce marche la mais pour une demande
plus importante. Ces surcapacites effectives peuvent etre gerees
de deux manieres
soi t
les entrepr ises supportent des couts
implicites
de
sous
utilisation
du
capital
soit
elles
sont
confrontees a la question des debouches. Elles s'obligent dans
ce dernier cas a
la prospect ion et a
la conquete de marches
exterieurs dans les autres pays africains, dans ceux de la sous-
region UDEAC ou ceux de l'occident. La conquete d'autres marches
est souvent la seule solution pour assurer la survie donc couvrir
les charges fixes et assurer le developpement des PME. Mais les
conditions de participation a ces marches ne sont pas favorables
aux PME que la qualite des produits et les couts de production
rendent peu competitives. D'une maniere generale, il se pose donc
a la PME camerounaise un double probleme.
D'abord,
du fait du
choix sectoriel qu'elle effectue, la PME creee devient fortement
dependante des consommations intermediaires, pieces de rechange,
assistance technique,
matieres premieres.
Ensuite et toujours
compte tenu de ce choix, elle se contraint a l'exportation de ses
produits vers des marches qu'elle maitrise mal.
En fait,
le probleme ici ne se situe pas dans la r~cherche
de debouches mais dans
le
fai t
que celle-ci n' ayant pas ete
pensee au depart s'impose par la suite aces entreprises comme
une contrainte supplementaire sans doute difficile a desserrer.
Ainsi tels qu'ils sont effectues, les choix sectoriels sont
a l'origine d'enormes problemes de capacite, de marches et bien
entendu
de
gestion
causant
aux
entreprises
de
nombreux
prejudices. Si ces prejudices n'ont pas toujours ete suffisamment
bien apprehendes par les dirigeants des PME,
ils ne l'ont pas
plus ete ni par les institutions et organismes charges de la
promotion des PME ni par les autorites economiques elles-memes.
En
effet,
les
definitions
de
la
PME
telles
qu'elles
sont
formulees
par
les
institutions
et
organismes
de
promotion
privilegient de maniere explicite les aspects lies au financement

- 35 -
des PME. Le cote technologique n'est pratiquement evoque nulle
part.
Au niveau de
l'ensemble de
l'economie,
la preoccupation
technologique n'est pas plus explicite. L'inexistence d'etudes
sectorielles temoigne du peu d'interet que revet la question des
choix sectoriels.
Cette absence d'etudes n'est favorable ni a
l'orientation ni a la coordination de l'activite industrielle en
fonction de la maitrise technique des secteurs dans lesquels les
PME decident d' investir.
Cette entree
libre et
fortui te dans
l'industrie a exacerbe ce probl~me qui existait dej~ chez les
dirigeants de la PME et dont ils n'ont pas pu evaluer ~ temps
l'importance des prejudices.
Faute d'avoir suffisamrnent inteqre la donnee technoloqique,
le developpement auto-entretenu recherche a travers la promotion
des PME n' a pas pu etre assis
sur une poli tique industrielle
active qui reduise la contrainte exterieure. Et comme beaucoup
d'economies
du
Tiers-Monde,
l'economie
camerounaise
reste
grandement ouverte sur l'exterieur. La relation ici est dominee
par
des
mouvements
de
biens
et
services
et
de
capi taux
en
provenance de l'etranger. La balance des transactions courantes
par exemple est depuis plusieurs annees restee debitrice comme
on
peut
le
voir
~
travers
le
tableau
I.
Sur
plus
de
deux
decennies,
cette
situation ne
s' est
pas
renversee meme
si
~
certains
moments
il
y
a
eu
quelques
ameliorations
dans
les
chiffres.

- 36-
CAMEROUN
Tableau
1 _
BALANCE DES PAIEMENTS
IEn millions de francs CFAJ
19B2
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989'
1990'
1991'
1992
I. TRANSACTIONS COURANTES
· 26 805 ·156980 • 73822 ·252247 ·190841 ·2G8317
85776 ·110200 - 91 200
80000 ·121 200
A. Marchandises (FOBI
46 113
53906
229061
220326
153 227
76 299
191 436
147 400
180600
190000
164800
·Exportations
446 214
520804
694301
730649
719 256
507 465
528 182
562400
583 700
600000
474 BOO
.Importations
·400101 ·466898 ·465240 ·510323 -566029 -431 165
336746 .415000 -403 100
410000 ·310000
B. Services Nets
·170522 ·211 770 ·292 166 ·464238 ·311 973 ·314843 -257449 ·237600 -251 000 ·260000 ·272900
·Frais expedilion/marchandise.. 23229
15482 · 32057
28800 · 66 670 · 36 847
9864
-
·Autrcs transports
3141
3 170
4160 .
4096 .
1 350 .
4 556 · 21 855
111
111
·AUlres assuranccs
4643
3193 .
1011 .
3952 .
9660
5996
197
-
.Voyages el sejours
2734 · 11 106 • 20577 · 28 488 · 56 346
60982
73980
·Interels, dividendes
· 62 559 ·105 178 ·141 907 ·264 643
144 034 ·120545
146035
111
·Autres services prives NCA
· 88 042 · 80816 • 97 206 ·128 645
37 441
79 254
49840
·Transactions gouvernemenl.
7 544
7 175 .
5590 .
5614
3530
6661
612
C. Transferls lInilateraux nelS
2396
884 · 10717
8335 · 32 095 · 29 768
19 763
20000
20800
10000 · 13 100
·Secteur prive
21 067
27 700 · 33 778 · 44 853 · 42523
37 771 · 40 171 - 40600
32400
40000 · 31 100
·Secteur public
18671
28584
23061
36518
1042B + 8003
20408
20600
11 600
30000
18000
11. CAPITAUX A LT. NETS
76615
204 636
165 417
210389
31 304
129 215
75895 . 84 500
13700
50000 · 39000
A. Secteur prive
52 132
173541
111818
168 223
15760
8491
3870
68500
73700 - 40000
-
·Investissemenls directs
36615
81480
7712
141 971
6582
3596
20045
.Tirages sur emprunls
56917
45 537
111
·Amorlissemenls des emprunt
· 50 404
53388
111
111
·Autres
2363 .
3002
5370 .
5605
7080
1 618
8326
8. Secleur public
24483
31095
53599
42 165
47064
120724
72 026
153000
6000e
90000
39000
.Tirages sur emprunts
160303
166 855
141000
·Amortissement des emprunts
· 39 579
9,\\ 810
-102000
·Aulrcs
76
85
54
35
19
111
I11
ill
Ill. CAPITAUX A C.T. NETS
- 45377
5088
76 229
19344
138 776
2909a -110899
15 700
76700
20000 · 81800
·Credits commerciaux
1 246
17599
2B 427
13071
9 111
I 20084
8735
29300
·Aulres capilaux non bancaire -
4 945
3448
3850
5 379
24 532
29 702
43 143
59000
66600
· 98000
·Capilaux bancaires
51 568
26 135 ·10B 506
94
154 197
19 ,176 - 5B 421
14 700
3~ 400
I1I
16200
IV. ERREUnS ET OMISSIONS
1 271
1092 · 55 146
49 B89
7 B97
12708,1
56 173
G.100
,1692 · 44 ~100
V. FINANCEMENT EXCEPTIONNEL
93 700
148 500
A. Delle eXlerieure
78800
·Refinancemenls
111
111
111
-Reechelonnements
-Variation des arrieres
78800
· 18000
-Remises
8. Aulles linancemenls exceplion.121
14900
166500
VI. VARIATION NETTE DES
RESERVES /51
6084 · 43 690
39780 · 27375
28658
140 933 · 29093
10000
3-1 600
5308
16000
·Avoirs
1 151 · 44 374
40801
23503
31 257
1 598 · 28 185
31000
17000
4377
·Engagements vis·a·vis du FMI
83
1 455
1 053
4 122
3 194 -
2 B54
26 140
2300
2000
378
·AlIlres engagementsl3!
136
13
194
255
147
1'11 BB5
26610
25500
18,100
102J9
·Contreparties & reevalual.141
4 714
728
226B
505
448
304
438
2 200
1000
9·12
Sources: BEAC . FMI
131 Evenlllcllcment y comPllS posit',on debitrice en Comple d'OperallOns_
III Ventilalion non disponible.
(41 Con\\lcpartlcs des allocJlions des DTS Cl des reev2luailons.
12) Stabex, subventions du FMI
151 Signe 1- I = 3mcholalion ou excedent ; slgne I •
Cl aUlres linancements exceplionnels.
I = d~lel:OI alion ou deficll
I' J Estin1allons.

- 37 -
11
semble
meme
que
les
chiffres
se
soient
davantage
deteriores dans les periodes de forte activite economique. 11 en
est ainsi des soldes des periodes de 1981 a 1986-1987,
ils se
sont ensuite ameliores depuis 1988 jusqu'aux derniers chiffres
disponibles et qui correspondent a une periode de tres faib1e
activite.
Les
PME
se
creent
et
se
developpent
dans
cet
environnement.
Les matieres premieres,
l' assistance
technique
sont fournis de l'exterieur. Pourtant certains des couts lies a
cette dependance auraient pu etre evites.
Dans
la
si tuation
de
cr ise
que
traverse
le
Cameroun
a
l'heure actuelle, de jeunes cadres perdent leurs emplois dans les
grandes entreprises privees ou publiques.
D'autres sortent de
grandes ecoles d'enseignement technique locales ou etrangeres,
cons ti tuant
d' enormes
potential i tes
dans
des
champs
de
speciali tes varies. Mais la question de l' exp10i tation j udicieuse
de ce "capi tal-ma tiere grise" demeure. Elle amene de plus en pl us
as'interroger sur le bien fonde des espoirs d' une meilleure
maitrise technologique et d'un developpement industriel place
dans les PME au Cameroun.
Ce
probleme
technologique
soul eve
ici
ne
nous
semble
d'ailleurs circonscrit ni au cas des PME ni a celui de l'economie
camerounaise
du
fai t
de
la
maniere
simpliste
dont
il
y
est
traite.
11 semble etre le probleme general de l'economie sous-
developpee.
Les
politiques
industrielles
et
les
strategies
d'industrialisation
n'ont
pas
accorde
a
la
composante
technologique la place qu'elle meriterait d'avoir.
Et, ainsi que le dit G. CORM "en regle generale, ces theories du
developpement a la base des ideologies d'Etat dans les PVD ont
toutes contribue a declencher une course a l'investissement aUl~
fins
de
modernisation,
l'investissement
induisant
donc
des
importations massives et brutales d'equipements productifs de
l'exterieur et introduisant en profondeur le Tiers-Monde dans les
circuits
de
commerce
de
technologie
anime
par
les
firmes
mul tinationales"17. Les objectifs d' industrialisation vises dans
ces strategies n'ont pas toujours ete garantis. Leur realisation
a
meme
tres
vi te
bute
contre
les
inerties
des
defaillances
"
-
G. CORM, L'Endettement des Pays en Deve~oppement : Origines
et HbcanismBs. in Dette et D6ve~oppement. direction de
J. C. SANCHEZ Edit Pub~i-SUD. Paris 1982 pp 29-99.

- 38 -
technologiques et des problemes de gestion qu'elles induisent.
La
transmission
de
la
technologie
generalement
attendue
de
l'exterieur n'a pas pu se concretiser pour cette raison que, en
realite,
il
n'existe
pas
de
transfert
de
technologie.
La
"technogenie" d' un pays n' est pas transmissible par le seul biais
de
l'achat
de
ses
equipements
industriels,
une
technologie
industrielle
s' acquiert
par
une
creation
technique
nationale
ser ieuse18 •
Elle suppose une gestion consciente du potentiel humain, une
dynamisation de la recherche,
le developpement de la creativite
et de l'innovation.
Et,
dans le cas des PME camerounaises que
nous etudions,
la gestion des ressources humaines disponibles
sera decisive. Elle le sera d'autant plus que les problemes lies
aux
defaillances
technologiques
deteignent
sur
les
autres
fonctions de l'entreprise auxquelles le proprietaire ne peut plus
consacrer
suffisamment
de
temps.
En
outre,
l'efficacite
du
travail
exige
des
detenteurs
du
capi tal
qu' ils
acceptent
de
confier
le
management
de
l'entreprise
~
une
"intelligence
organisee". Celle-ci constitue ce que J. K. Galbraith denomme la
"technostructure"1!l chaque personne etant utilisee en fonction de
ses
connaissances,
de
ce
qu' elle
possede
de
mieux.
Dans
le
contexte de
liberalisation economique actuel,
le probleme du
choix sectoriel nous semble etre extremement important.
11 se pose avec beaucoup d'acuite aux PME et meme ~ de grandes
entreprises
industrielles
dans
les
economies
non
encore
industrialisees
preoccupees
par
la mise
en place d' un
tissu
economique articule.
Une voie dans la recherche d'une veritable integration du
tissu
industriel
a
ete
ouverte
par
les
analyses
sur
les
strategies de filieres de production20 • On definit une filiere de
production
comme
1 'ensemble
des
stades
aboutissant
~
la
fabrication
d' un ou de plusieurs
produi ts
finis
~ partir de
produi ts
bruts.
La
filiere
est
donc
etablie
sur
une
vision
10
-
G. NGANGO, Les Investissements d'Origine Exterieure en Afrique
Noire Vrancopbone
(Statut et Incidence sur le Developpement),
Edit Presence Africaine, 1973, p 382.
"
-
J.
K. Ga1.braitb, Le Nouvel Etat Industriel, Edit Gal 1 imard , 1968.
,. - On lira pour plus de details C. Stoffaijs La Grande
Menace Industrielle, Edit Calmann Levy, 1978.
-
On lira eqalemnt a ce sUjet, A.C. Martinet, strategie, ed. VUibert, Paris 1983 P. 179-188

- 39 -
verticale
du
processus
de
production
mettant
en
valeur
des
mecanismes de decision lies 21 • Elle est donc axee sur un secteur
de
biens
d'equipement
qui
tire
les
secteurs
de
biens
intermediaires et de biens de consonunation22 pour une plus grande
independance
vis
a
vis
des
mouvements
conjoncturels
internationaux.
Elle
s' appuie
donc
sur
une
approche
du
type
Input-Output encore appelee analyse fonctionnelle pour laquelle
les liaisons entre les differents secteurs d'une economie sont
fondamentales.
Wassily
Leontief
a
presente
sur
ce
suj et
une
matrice des relations appelee matrice des coefficients techniques
permettant de definir un multiplicateur matriciel.
En matiere de strategies industrielles, la politique des filieres
se distingue de celle des creneaux de production. En effet,
la
strategie des creneaux par contre repose sur la specialisation
dans des secteurs beneficiant de l'expansion du marche la plus
forte~ De ce point de vue, les filieres de production paraissent
un choix plus realiste dans une perspective d'industrialisation
par le biais des PME. Les caracteristiques des PME, leur mode de
fonctionnement et leurs problemes de gestion ne leur offrent pas
en effet les moyens de s'orienter vers une politique de creneaux.
Par contre leurs faiblesses pourraient etre attenuees dans une
organisation a l'interieur de filieres qui implique un effort
d'organisation,
la
valorisation
des
res sources
humaines
et
materielles locales par une meilleure gestion des resultats des
recherches
scientifiques
et
techniques
des
nationaux.
La
concretisation d'une telle demarche n'est pas evidente, parce que
lente et couteuse. Car, le temps de la politique industrielle est
le
temps
long,
tout
conune
celui
de
l' investissement
de
la
recherche et de la formation des equipes 23 • Et,
on est souvent
oblige de choisir entre d'une part ces delais importants mais
incontournables
dans
la mise
en
place
d' un
tissu
industriel
propre dont les effets multiplicateurs jouent a l'interieur du
pays et d'autre part des solutions faciles qui exposent a des
-
x. Greffe, Politique Kconomique, Edit Ecol1omica, Paris 111B7, P 540
-
Ce dAcopp~e en trois grands secteurs corr~ond ~ celui
qu' efEee~ue la Fr<isque HistoJ'ique da la DiFedtiotl da la
Statistique au cameroun.
••
-
C. STOFFAES. Objectifs Econamiques et Crit~res da Gestion
du Seeteur Public Industriel, in PrOblemes Econamlques,
Hebdoma.da.ire da la Documentation P'ran~a.ise,
nO 1B44 du 111 octObre 111B3 p 16-24.

- 40 -'
risques de technologisme 24 •
La redefinition de la PME nous a permis de mieux cerner le
processus de creation et de developpement des PME et de pouvoir
poser
les
principaux
problemes
lies
a
leur
mode
de
fonctionnement. Les PME doivent donc faire face
- d'abord a un probleme de couts financiers du fait de leur
difficulte de financement
ensuite
a
celui
des
couts
technologiques
et
des
consommations intermediaires inherents aux choix sectoriels et
a une organisation sommaire de l'activite productive.
- Enfin L'importance de ces couts est telle qu'elle pose a
ces entreprises d'interminables problemes de gestion.
Jusqu'ici nous avons fait une analyse globale sans tenir
compte des specificites qui pourraient exister d'une PME a une
autre. Une telle presentation degage une impression d'uniformite
et d'homogeite qui n'existe pas dans la realite.
11 s'agit en
effet d'un ensemble heterogene d'entreprises vivant chacune a sa
maniere ces problemes que nous venons de decrire. Nous tenterons
ainsi,
pour une analyse plus complete,
une
typologie des PME
camerounaises.
$ 4
Typologie des PME
Au dela du debat autour de
la notion de
secteur25 ,
nous
avons voulu batir notre analyse autour de deux principaux types
de
PME,
les
PME
du
secteur
moderne
et
les
PME
du
secteur
informel.
En effet,
la notion de
secteur implique une homogeneite
interne et une opposition avec les autres secteurs 26 que ne peut
"
-
IDEM
'S
_
On peut lire a ce sujet M. PENOUIL, Socio &conamie du
Sous-dSveloppement, op cit.pp 34-58.
-
IDEM

- 41 -
pas
toujours
nous
garantir
notre
typologie27 •
Nous
pensons
toutefois que le regroupement des PME en ces deux types nous
permet d'approfondir l'analyse de chacun des problemes souleves
ci-dessus.
11
devra
nous
permettre
de
decrire
leurs
manifestations,
d'apprecier leur ampleur ainsi que la maniere
dont ils sont resolu ou peuvent l'etre dans l'un ou l'autre cas.
En effet, les PME modernes et les PME inforrnelles abordent
differemment les problemes de financement de leur activite et
ceux de choix sectoriels.
Et,
c' est a travers les solutions
proposees dans chaque cas que nous faisons la distinction entre
ces deux types de PME.
4.1
Le critere du mode de financement :
Nous avons defini en partie les PME en nous appuyant pour
une grande part sur la faiblesse de leurs ressources propres.
Celle-ci
les
amene
a rechercher aupres d' aut res sources de
financement les capitaux necessaires a leur creation et a leur
developpement.
Certaines ont pu acceder aux credi ts bancaires, principale source
conventionnelle
de
financement
tandis
que
d' aut res
ont"- ete
astreintes a recourir uniquement a des circui ts informels de
credits.
27
L'heterogeneite de ces entreprises est egalement
soulignee par J.
BOROVITZ et J. P. PITOL-BELIN
qui degagent une typologie en fonction
du marche
couvert
(national ou regional)
et du type de produits
offerts distinguant ainsi
:
- Les sous-traitants ;
- Les PHE a marche regional ou national
- Les PHE de haute specialisation
On se rapportera pour cette analyse a l'ouvrage de
J.BOROVITZ et J.P. PITOL-BELIN, strategie pour la PHE,
Edit MC Graw - Bill, Paris 1984 p 9-11
- On peut lire egalement sur la complexite de ce concept
.B. SAPORTA, strategie pour la PME, Edit
Montchestien,
Paris 1986 p) . 21
.B. SAPORTA, L'Univers des PME et de leurs comportements,
cahiers de
Recherches de l'IAE de Toulouse,
nO 56, 1986, p~
44 .
. G. BRAC de la PERRIERE,
Rapport de Synthese -
l'entreprise moyenne dans le marche des capitaux, Banque nO 379
Decembre 1978 p
1321-1331 et A. GAULTIER, o. Ge1inier,
l'Avenir des Entreprises Personne1les et Faftdlia1es,
Bommes et Techni~es, 2eme Edit, Paris 1975 pp 100,
cite par G. BIRIaQYEN,
Contribution a la connaissance
des comportements (inanciers des Moyennes Entreprises
Industrielles
(HEI) Faftd1iales, These de Sciences de
Gestion, Universit, de Bordeaux I,
1984 P 4-5.

- 42 -
Pour
les
PME
modernes,
les
opportuni tes
de
financement
bancaire
ont
consti tue
le
facteur
determinant
de
la
decision
d'investir.
Celles-ci n'ont donc pas toujours ete preparees aux
problemes
de
gestion
pouvant
decouler
des
conditions
de
leur
entree dans l'activite industrielle.
Les difficult~s auxquelles
elles doivent constamment faire face sont multiples.
On peut citer essentiellement :
-
l'obligation
d'une
capacit~ de
financement
propre par
rapport au cout total des projets ;
-
le
cout
financier
de
cr~dits bancaires plus ou moins
adapt~s aux besoins exprim~s dans leur terme et dans
leur montant ;
l'importance
des
garanties
exig~es
par
rapport
aux
possibilit~s r~elles des entreprises
- les d~lais de mise a disposition des concours obtenus et
les charges r~currentes ;
la
n~cessit~
de
rechercher
ailleurs
des
ressources
compl~mentaires plus indiqu~es.
S'agissant des
PME infoDmelles,
elles
sont des unites de
production de dimension plus petite que les PME modernes. Quelque
fois elles n'ont meme pas d'existence juridique.
Contrairement
aux
PME
du
secteur
moderne,
elles
n ' on t
pas
pu
acceder
au
financement.
Nous
verrons
plus
tard
en
analysant
le
fonctionnement
des
circuits
informels
d'~pargne
et
de
cr~dit
et
plus
particuli~rement les tontines que celles-ci tendent de plus en
plus a etre des regroupements socio professionnels Oll tous les
membres se connaissent.
L' ~pargne mobilis~e en
faveur
de
chacun des
tontiniers
tient
compte de
I' importance de
son affaire
et de
ses
possibili t~s
r~elles de remboursement. L'appartenance a une tontine offre non
seulement la possibilit~ de se financer a partir des res sources
qui
y sont collect~es mais ~galement celle de b~n~ficier d'un
cadre d'apprentissage de la gestion favoris~ par l'implication
de chacun adh~rents dans le fonctionnement de la tontine et dans
la vie des entreprises financ~es. Ce mode de participation a la
vie de ces circuits de financement a cr~~ de v~ritables pools de
gestion
et
limit~
les
risques
d'impay~s
sur
les
cr~dits
consentis.
Ce
cadre
d'activit~ des
PME
informelles
a
~t~

- 43 -
favorable
a la minimisation des charges de gestion et a une
grande flexibilite par rapport a leur environnement economique
et financier.
Paradoxalement,
les
difficultes
d'acces
aux
credits
bancaires n'ont pas pose que des problemes aces entreprises.
Obliqees de s'accommoder de ressources souvent modestes, celles
qU'elles ont pu se procurer par autofinancement ou par emprunts
dans
la
tontine,
elles
ont
cree
des
structures
relativement
simples a la dimension de leurs possibilites de qestion.
Elles
se sont egalement, du fait de leur participation a la tontine,
ouvertes a l'effet de la synergie du groupe. Elles ont ainsi
accru leurs capacites de gestion et leur chance de developpement.
Elles susci tent de nombreux espoirs aujourd' hui et tendent a
justifier Martory pour qui "la PME constitue en Afrique encore
plus qu'ailleurs un instrument de developpement economique ... et
elle peut etre la grande entreprise de demain. Elle est aussi une
ecole
irrempla<;able
de
la
gestion
appliquee
entre
l' uni te
artisanale Oll l'on ne peut parler de gestion et la grande unite
qui possede ses propres procedures,
elle represente le lieu Oll
les hommes apprennent progressivement, au fil des experiences a
organiser,
administrer,
decider...
c' est
a dire a gerer,,28.
L'observation actuelle des PME ne nous permet peut-etre pas de
penser que celles-ci evoluent vers
la grande entreprise.
Par
contre, l'un des atouts dont beneficient les PME informelles est
le
contexte
financier
realiste
de
leur
creation
et
de
leur
developpement qui tient compte de leur surface financiere et de
leurs capacites d'endettement.
Cette exigence financiere en a
fait
des
entreprises
d'une
envergure
facilement
maitrisable
con<;ue uniquement pour repondre a des besoins reels et exprimes.
La PME informelle est donc res tee tres proche du consommateur
final dont elle peut suivre l'evolution des gouts et du pouvoir
d'achat,
lui
adapt ant
les
produits
et
les
prix
qui
lui
garantissent la fidelite de sa clientele. Cette grande souplesse
dans le
fonctionnement
lui confere sa force d' adaptation aux
besoins
d'un
marche
national
plus
ou
moins
vaste,
d'une
population de consommateurs de plus en plus diversifiee toutes
-
B. Hartory, Diagnostic et Gestion de la am Africaine.
&cole S~ri..rl!:''' de Cachan. Paris 1986. avan t prop01l.

- 44-
cat~gories de revenus confondues. Les conditions d'exploitation
ainsi cr~~es sont bien diff~rentes de celles que connaissent les
PME modernes.
En plus du critere du mode de financement,
celui du choix
sectoriel permettra de mieux etablir encore la distinction par
rapport a la dimension des entreprises, au mode de fonctionnement
qui
en
decoule
pour
chaque
secteur,
aux
implications
sur
la
gestion et sur la creation des emplois en particulier.
4.2
Le critere du choix sectoriel
L'analyse des PME du secteur moderne ne permet pas de penser
que les entrepreneurs dans ce secteur aient pleinement conscience
de la complexit~ du probleme technologique et de tous ceux qui
l' entourent et qui ont trait a la capaci t~ de production,
au
surdimensionnement et aux couts qu'il implique, a l'~tendue du
march~ etc.
En
effet,
les
choix
sectoriels
dans
les
PME
modernes
semblent prioritairement lies a des opportunites de financement
et a divers amenagements fiscaux, douaniers ou autres avantages.
Ainsi,
les
possibilit~s
de
financement
aupres
du
systeme
bancaire,
les mesures d'accompagnement de ce financement,
les
avantages du code des
investissements semblent donc etre les
principaux mobiles de la creation de ces entreprises. Le facteur
capi tal
qui
y
est
le
res sort
essentiel
de
la
production
a
tendance a occulter toutes les autres exigences de l'activit~
industrielle.
Cette
primaut~
du
facteur
financier
semble
d'ailleurs expliquer l'ant~riorit~ du choix des ~quipements par
rapport a l'~valuation meme du projet. C'est elle qui a aussi
contribu~ au surdimensionnement des PME modernes et a ~t~ a
l'origine d'importantes charges d'exploitation dont nous avons
d~ja parl~ et qui ont engendr~ des paradoxes dans le comportement
de gestion des entrepreneurs. Nous reviendrons ul t~rieurement sur
la signification de ces paradoxes.
Ainsi, par rapport au march~ local les PME modernes revelent
des dimensions bien trop grandes qui leur posent un probleme de
d~bouch~s pour leurs produits compliquant de plus en plus le
probleme de la r~sorption des couts li~s a l'exploitation.
L'aspect technique n'est donc pas toujours plac~ au point

- 45 -
de depart de
la decision d' investissement.
11 n' est pas plus
compte au moment de l'organisation et de la structuration de
l'entreprise, aucun interet particulier n'ayant ete accorde a la
fonction technique. On le voit a la concentration des taches en
faveur du proprietaire du capital qui n'a fait aucune place a la
specificite de chacune d'elles et a la necessite de la maitrise
de celles-ci. Cette omission qui se tradui t dans la "polyvalence"
du patron fonde alors tous les probl~mes de gestion auxquels sera
confrontee l'entreprise.
11 importe de preciser que le probleme du choix sectoriel
semble avoir ete aborde differemment dans les PME informelles.
Ici, l'entree dans le secteur s'est fondamentalement appuyee sur
la
formation
de
l' entrepreneur,
sur
la mai trise
pratique
et
technique
de
l'activite
dans
son
champ
de
specialite.
La
specialisation
semble
donc
de
rigueur
au
point
d' imposer
a
l'interieur de chaque type d'activite une forme d'organisation
faisant jouer la complementarite des unites.
Specialisation et complementarite se sont alors imposees a la
fois cornme support de
la production dans
la perspective d'un
ratio qualite-prix competitif et cornme la garantie d'un revenu
permanent.
Paradoxalement, bien que la complementari te apparaisse cornrne
une necessi te pour la survie de ces uni tes,
aucune tentative
d'organisation ou de creation de structures formelles n'a ete
observee.
Chacune
des
uni tes
cherche
a conserver et meme a
consolider son autonomie,
preferant etablir avec les autres un
syst~me d'echanges mutuels de services remuneres. Les modalites
de la remuneration sont generalement negociees et definies compte
tenu de l'intensite des echanges, de la nature et surtout de la
qualite des prestations.
Ainsi donc,
c'est dans cette dynamique propre que les PME
informelles
cherchent
encore
aujourd'hui
a poursuivre
leur
developpement. Elles ont ohoisi, contrairement aux PME modernes
de valoriser le tacteur travail pouvant recourir a la location
des equi..perMnts c;:ies entre~rises mieux installees souvent dans le
secteur m6d~rn~ pour realiser une partie de leur travaux.
Les
condi tions
qu' elles
se
sont
creees
ont
ete
propices
a

- 46 -
l'installation
de
jeunes
dip16m~s
et
techniciens
dans
les
domaines correspondant a leur formation sans que ceux-ci aient
besoin d'investissements importants des le d~part.
De nombreuses PME informelles se cr~ent ainsi sous la forme
d' emplois ind~pendants ou de micro entreprises employant quelques
personnes,
deux
a dix environ.
Le
caractere
sommaire
des
investissements
li~s
a ce mode de fonctionnement peut donc
expliquer la forte entr~e que l'on observe dans le secteur des
que la formation et la technique sont acquises. Certes, le cout
de
cr~ation d' un emploi
n' a
pas
encore
~t~ ~valu~ de
fa<;on
rigoureuse, on peut cependant, de maniere empirique, penser que
ce cout est relativement modeste.
Les estimations de d~penses
faites par le Fonds National de l'Emploi 29 ,
"FNE"
le montrent
bien. En effet, le budget de financement des emplois ind~pendants
et des micro-projets du FNE limite a un million et demi de francs
CFA le cout d'un emploi ind~pendant et a vingt millions de francs
CFA cel ui d' un micro proj et 30 •
De meme les d~lais relativement courts qui s~parent la fin
de
la
formation
des
techniciens
de
l' entr~e en
service
des
entreprises qu'ils cr~ent t~moignent d'une certaine aisance dans
la cr~ation des emplois dans le secteur informel.
L'ampleur du ph~nomene de la promotion des PME et l'int~ret
manifest~
par
de
nombreuses
~conomies
en
faveur
de
son
d~veloppement s'expliquent en grande partie par le r61e qu'on
attribue aux PME dans la cr~ation des emplois. Au moment ou la
tendance que connait une grande partie de l'~conomie mondiale est
le recul du nombre d' emplois cr~es, par la grande entreprise
depuis les ann~es 1970, les PME ont utilis~ de plus en plus de
personnes.
C'est
tout
au
moins
la
conclusion
a laquelle
aboutissent les ~tudes men~es par le Centre de Recherche Travail
et Soci~t~31.
"
-
Le Fonds National de l ' Enploi est un orqanisme a caractere
social cree par dacret presidentiel n° 90/805 du 27 avril
1990 clans le cadre de la dimension sociale du
Plan d'Ajustement Structurel.
-
F.N.E, Prospectus de presentation des missions et activites du FNE
~ - Centre de Recherche Travail et Societe, Les PHE creent-elles
des emplois 7 Sous la Direction de X. Greffe,
Edit Economica Paris 1984.

- 47 - .
Ces etudes montrent egalement que les resultats obtenus en
matiere de creation d'emplois par les PME ne sont pas homogenes
et var ient selon les pays et les secteurs d' act i vi tes 32 • Mais
d'une
maniere
generale
les
chiffres
indiques
sont
assez
significatifs du role des PME dans la resorption du chomage et
la creation de nouveaux emplois.
Ainsi, aux Etats-Unis les deux tiers des emplois crees entre
1969 et 1976 proviennent des PME et principalement de celles du
secteur tertiaire 33 •
Selon ces memes etudes,
dans de nornbrem~
pays
d'Europe,
de
1970
a 1980 la contribution des PME a la
creation des emplois est appreciable. En France et en Italie les
plus grandes performances dans ce domaine sont realisees par les
PME industrielles. Ces experiences se classent d'ailleurs parmi
les plus anciennes pour le continent europeen 34 • Les experiences
plus recentes du Danemark, des Pays-Bas, de la Belgique, de la
Grande-bretagne sont aussi une confirmation de l'efficacite des
PME par rapport au probleme de l'emploi.
Leur
taux
d'absorption
des
offres
de
travail
s'est
avere
extremement
eleve35 •
Les
PME
ont
egalement
contribue
a faire
baisser le taux de chomage au Japon. Elles recuperent la main-
d'oeuvre
que
liberent
les
grandes
entreprises
et
surtout,
absorbent une bonne partie de la population feminine 36 •
Au Cameroun la creation des emplois par les PME, surtout par
les
PME
modernes,
est
freinee
par
les
difficultes
que
ces
entreprises
rencontrent
et
qui
entravent
leur
developpement.
Cependant ces difficultes sernblent moins accentuees chez les PME
informelles qui peuvent donc etre plus efficaces dans ledomaine.
12
_
D.
Birch, The JOB Generation Process at Corporate Evo1ution :
A micro-based Analys~s, January 1991, Cambr~dqe Mass:
M.l.T Programm on ne~ghborhood and reg~onal change, 1979, 1991
C~t6 par D. BAROlN, La Resurgence Des Pet~tes Bntrepr~ses
aux Btats-Un~s ; Dynamique Bconomique et Cr6at~on d'Emplo~s
~n Centre de Recherche Travail et Soc~6t6, les PH& cr6ent-Blles
des Emplo~s 1, op c~t pp 275-299.
JJ
_
x. Greffe, Pr6sentation de 1'OUvraqe in Centre de Recherche
Travail et Soc~6t6, les PH& cr6ent-Blles des Emplo~s 1,
op c~t pp 1-15.
It
_
x. Graffo, Pr6sentation de 1'OUvraqe in Centre de Recherche
Travail et Soc~6t6, les PH& cr6ent-Elles des Emplo~8 1,
op d t pp 1-15.
ss
-
A. M. KUMPS et R. W~lter Wulghe, La prablema.t~que des
Pet~tes et Hoyennes Bntrepr~ses en Belg~que. Evolut~on et
Perspect~ves R6g~onales ~n Centre de Recherche Travail et
Soc~6t6, les PH& cr6ent-Elles des Emp1o~s op d t pp 149-169.
so
- B. LBCLEARC, Hodern~sat~on des PHI japonaises et Hutat~ons des
structures Produc~ves ~n Centre de Recherche Travail et
Soc~6t6, les PH& cr6ent-Blles des Epo~s 1, op c~t pp 251-274.

- 48 -
On pourrait meme pens er que la plupart des emplois crees par les
PME le sont plus grace a ce dernier type de PME.
Nous
avons
sur
la
base
des
approches
quantitative
et
qualitative du concept general de PME tente une redefinition de
la
PME
camerounaise,
l'objectif
de
notre
demarche
etant
de
pouvoir cerner l'ensernble des problemes lies a la creation et au
developpement de cette categorie d'entreprises. 11 nous est alors
apparu que trois problemes majeurs inherents a leurs conditions
de creation permettent caracteriser ces PME.
Le premier probleme est la faiblesse des ressources propres
qUl semble resulter de la forme individuelle ou familiale de la
formation de la PME. Et, la precarite financiere sous-jacente a
cet aspect de la creation de la PME amene a poser le probleme
plus general du financement de l'activite.
Le deuxieme probleme qui se pose aux PME camerounaises est
celui de l'organisation et de la gestion somrnaires qu'implique
la propriete individuelle du capital dans la mesure Oll celle-ci
traduit une volonte de contr61e de toute l'activite par le seul
proprietaire. La concentration des taches qui slen deduit exige
des aptitudes a assurner simultanement et efficacement toutes les
fonctions de 1 I entreprise. Et,
les entrepreneurs dans les PME
concernees ne semblent pas toujours reunir toutes les qualites
requises a cet effet.
Le
troisieme
probleme
est
relatif
a la maniere
dont
sloperent les choix sectoriels et qui ne semble pas suffisamrnent
integrer la composante technologique et les consequences qui en
decoulent en terme de capacite,
d'etendue du marche,
de couts
technologiques
et
de
charges
recurrentes.
Ce
probleme
est
a
plusieurs egards une manifestation de la difficulte pour le chef
de
1 I entreprise
a exprimer tout seul toutes les competences
utiles dans toutes les fonctions essentielles de l'entreprise.
Les defaillances dans la gestion des
PME se trouvent souvent
ainsi au point de depart ou alors au centre des autres problernes
technologiques et financiers qu I elles peuvent creer ou accentuer.
Ainsi donc, nous avons avec le recensement de ces problemes

- 49 ~
caracteristiques
et
a partir de la maniere dont ils sont
apprehendes tente une typologie des PME camerounaises. 11 nous
est alors apparu une difference de comportement entre les PME du
secteur moderne et celles du secteur informel telle que selon les
secteurs,
une
importance particul iere est accordee soi t
a la
composante financiere soit alors a la composante technologique
en
tant
que
principal
determinant
de
la
decision
d'investissement.
Manifestement,
chacune
de
ces
variables
financiere
et
technologique revet un interet different et est plus ou moins
privilegie par les entrepreneurs selon le secteur auquel
ils
appartiennent. On a pu cependant, rnalgre ce clivage,
se rendre
compte que l'un des problemes cornmuns a ces deux secteurs est la
faiblesse de leurs ressources propres. Nous allons donc dans une
deuxieme section presenter une analyse plus globale du probleme
du financement de la PME camerounaise. Nous examinerons d'abord
les differentes sources de financement, nous apprecierons ensuite
l'impact'de chacune d'elles sur la creation et la gestion de
l'entreprise. Nous verrons enfin les problemes particuliers que
le
recours
a
l'une
ou
l'autre
ressource
pose
aux
PME
carnerounaises.

- 50 -
SECTION 11
LE PROBLEME GENERAL DU FINANCEMENT DES PME
L'IMPORTANCE DES RESSOURCES EXTERNES
L'analyse du mode de constitution des fonds propres a permis
d'expliquer la faible proportion de ceux-ci dans les moyens de
financement des PME. Les principales causes de la modicite de ces
res sources
semblent
alors
etre
le
caractere
individuel
ou
familial
de
leur
formation,
l' absence
d I un
marche
financier
officiel favorable a une ouverture du capital a l'epargne locale,
la difficulte a apprecier le risque d'investir.
Cette precarite financiere qui caracterise la creation des
PME est sans doute a l'origine de la decision d'endettement de
ces entreprises. Cette necessite du recours a l'emprunt exige que
les objectifs de
l' entreprise soient
reprecises de maniere a
pouvoir
constamrnent
apprecier
l'impact
de
chaque
source
de
financement sur la realisation de ces objectifs.
La definition de la PME dans la section precedente laisse
entrevoir deux principaux objectifs
-
un objectif de
rentabilite qui
semble
etre
1 'une des
justifications de tout investissement productif
- un objectif de controle de l'activite qui se manifeste
dans la dimension humaine de ces entreprises et la volonte de son
maintien.
L'endettement de l'entreprise est ainsi comrnande d'un cote
par la recherche du profit maximum et de l'autre cote par le
desir
de
limiter
le
risque
qu'elle
identifie
au
desir
de
conserver le controle de l'affaire. Le taux d'endettement desire
est donc celui qui permet de satisfaire a ce double objectif.
Et theoriquement, le role des capitaux externes devrait etre la
creation d'un surplus, grace a la dynamique de l'investissement,
qui
assure
le
remboursement
du
credi t
puis
la
poursui te
du
processus
d' accumulation.
En
fai t,
le
veri table
probleme
du
financement des PME se situe au niveau de la realisation de ces
effets
positifs
attendus
de
l'endettement
donc
du
taux
d'endettement optimal. Si ce probleme se manifeste avec clarte
dans la creation et le developpement des PME camerounaises, son

- 51 -
importance
n'a
pas
toujours
ete
evidente
pour
la
theorie
financiere. L'une des premleres analyses systematisees autour de
la question a ete presentee par F. MODIGLIANI et M. MILLER qui
ont voulu dissocier les choix reels de l'entreprise de ses choix
financiers. En effet, la relation entre l'investissement, le taux
d'endettement, le taux de profitabilite a ete remise en cause par
ces deux auteurs pour lesquels la decision d'investissement est
entierement dissociable de celle de son financement. Ainsi :
. l'investissement sera it donc evalue de telle sorte qu'il
maximise la valeur actualisee des flux economiques ;
. l'endettement quant a lui est d'autant plus apprecie qu'il
procure une
economie d' impot
et
qu' il
permet
de
profi ter de
l' effet levier financier.
Dans ce cas il n' existe qu' un seul
obstacle a un accroissement infini de l'endettement, cette limite
etant fixee par le niveau des couts et les risques de faillite.
La controverse qui est nee de cette theorie financiere de
base a revele que les deux composantes reelles et financieres de
l'activite de production sont difficilement dissociables. Et une
fois de plus avec l'analyse du mode de fonctionnement des PME
nous voudrions contribuer a enrichir la discussion en montrant
les
implications des differents
types de
financement
sur
les
objectifs poursuivis par les PME camerounaises et la difficulte
meme a conduire un certain nornbre d'evaluations.
Nous presenterons dans cette section les deux principales
sources
de
financement
que
sont
l'autofinancement
et
l'endettement.
Nous analyserons d'abord l'autofinancement et la
controverse qu'il suscite en tant que "ressource gratuite" nous
soulignerons ensuite la place du credit dans le financement des
PME en insistant
sur
le role particulier de
la
quali te d' un
environnement financier pour l'entreprise en general et pour les
PME camerounaises en particulier.
$1
L'Autofinancement
:
L'autofinancement
consiste
pour
l'entreprise
a
substituer ses fonds propres a une epargne qui peut etre celle
des menages ou des administrations pour le
financement de sa

- 52 -
formation
du
capital,
pour
ses
placements
et
meme
pour
ses
prets 37 • L'autofinancement pour une entreprise suppose donc que
le
niveau
de
ses
res sources
soit
suffisant
pour
couvrir
l'ensemble de ses besoins.
L'importance qu'on reconnait a cette methode de financement
dans l'analyse economique semble trouver sa justification dans
le role qu'elle a joue dans l'economie des pays industrialises
au lendemain de la grande crise economique de 1929. Ainsi, apres
la crise economique et la ruine provoquee par les guerres puis
les ravages de l.'inflation on a assiste a la desagregation des
marches
financiers.
Ce
marasme
financier
va
obliger
les
entreprises a se retourner pour leurs problemes de financement
vers leurs seules ressources. Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni
la presque totalite des investissements des entreprises vont etre
couverts
pendant
cette
periode
par
l'autofinancement.
En
Belgique,
en Allemagne,
aux
Pays-Bas,
les
fonds
propres
des
entreprises
financent
alors
au
moins
les
2/3
de
leurs
investissements,
tandis qu'en France ils participent pour 64 %
et en Italie pour 46,6 %.
Ces
taux
d'autofinancement
des
entreprises
sont
particulierement eleves en comparaison de ceux qui sont pratiques
au Cameroun, la proportion generalement acceptee par le systeme
bancaire notamment pour les PME, s'etablissant a 20 % environ du
cout total des investissements a financer.
La preponderance des res sources propres dans la structure
financiere des entreprises occidentales dans un environnement
monetaire et financier particulierement difficile a permis de
placer
cette
methode
de
financement
"au
premier
rang
des
techniques de financement des investissements productifs et des
37
L'autofinancement des Entreprises, Actes du co11oque
du 10e anniversaire de l ' l.A.E.
facu1kte de Droit
et des sciences Economiques de Poitiers,
Dec.
1966.
On
lira ega1ement
:
-
P.
CONSO,
La Gestion Fiananciere de l'Entreprise,
Edit.
Dunod,
Tirage 1991 T1 pp 96-106 et T2 pp 574-576.
-
P.
BARANGER et Alii,
Gestion,
Edit. VUibert,
Paris 1985 pp 196-201.

- 53 -'
immobilisations industrielles 38 •
L'autofinancement constitue de ce point de vue une source
de financement importante pour l'activite de production. Mais,
la
realite
telle
qu'elle
est
observee
ailleurs
et
plus
precisement dans les PME au Cameroun nous amene a relancer le
debat
sur
le
bien
fonde
de
l' autofinancement.
En
effet,
la
controverse
autour
de
cette
technique
de
financement
de
l'entreprise resulte d'une presentation equivoque du concept.
L'ambiguite
nait
ainsi
d'une
approche
juridique
pour
laquelle les fonds apportes par les actionnaires sont remuneres
sous
forme de di vidende
statutaire et de superdi vidende.
Les
benefices realises et declares par une entreprise sont donc pour
une
part
affectes
a la reserve legale et pour l' autre part
distribues
sous
forme
de
dividendes
et/ou
destines
a la
constitution
ou
au
renforcement
des
comptes
de
reserves
facultatives et de report a nouveau. Cette presentation de la
gestion des benefices de l'entreprise pourrait faire penser a des
choix simples, a des decisions libres n'ayant aucune incidence
sur la vie de l'entreprise. L'impression de gratuite que donnent
de telles res sources nous permet a ce niveau de poser au moins
un probleme theorique,
celui du cout des capitaux propres dans
une entreprise.
Ce
probleme
est
sous-jacent
a I ' approche
financiere
du
concept d'autofinancement qui en precise le contenu permettant
ainsi
une
remise
en
cause
de
la
conception
juridique
des
resultats laisses sous forme de reserves dans l'entreprise.
1.1
Le Contenu du Concept d'Autofinancement :
D' une maniere generale l' autofinancement se defini t a partir
de
1 'ensemble
des
capitaux
propres.
Pour
une
entreprise
l'autofinancement comprend donc :
- les reserves de liquidites non utilisees ;
- le produit de la realisation des actifs a la suite des
operations de desinvestissement
les
benefices
nets
augmentes
des
amortissements
et
..
-
H.
Rudloff,
Kconomie Monlltaire National.e et Dllveloppement,
Edit. CUjas Paris, p 183.

- 54 _.
diminues des di videndes .39
L'autofinancement
est
ainsi
constitue
de
l'ensemble
des
ressources que
l' entreprise peut se procurer par elle-meme El.
travers
son
acti vi te
au
fur
et
El.
mesure
des
cycles
d'exploitation.
11 est mesure El. travers un certain nombre de
ratios
qui
synthetisent
l'aptitude
de
cette
exploitation
El.
generer
des
res sources
suffisantes
par
rapport
au
niveau de
l'activite ou par rapport aux emplois El. couvrir.
1.1.1
L'importance de l'analyse par les ratios:
Nous retiendrons quelques uns des ratios couramment utilises
pour soulever les problemes majeurs que pose l'autofinancement
aux PME.
Autofinancement
a)
Chiffre d'affaires ou production
Ce
ratio
cherche
El.
montrer
le
taux
de
sensibili te
des
res sources generees au niveau de la production ou des ventes
realisees et permet d'orienter une decision d'augmentation ou de
reduction du niveau de cette production. Son application aux PME
nous semble soulever au moins un probleme,
celui de l'aptitude
des PME El. reagir rapidement en conformite avec les renseignements
fournis
par
de
tels
indicateurs.
Les
decisions
en
matiere
d'investissements supplementaires pour accroitre la production
ou celles dans le sens contraire ne nous semblent pas toujours
faciles El. prendre quant on sait les contraintes financieres de
taux de credit,
de garanties dont les PME doivent constamment
tenir
compte.
Nous
reviendrons
dans
le
chapi tre
sui vant
sur
l' importance
particuliere
du
probleme
des
garanties
dans
le
financement
bancaire
des
PME.
Nous
pouvons
toutefois
deja
souligner s'agissant des desinvestissements que les equipements
de production dont disposent les PME sont generalement nantis en
faveur des banques qui contribuent en moyenne El. 80 % de leur
financement. La realisation de ceux-ci doit donc etre soumise El.
des decisions exterieures tant que les credits accordes ne sont
.. - Cette composition de l'autofinancement est presentee par
A. Quintart, Planification ~inanci~re in Encyclopedie de
Gestion, Economica, Paris 1989
P. Joffre, Y. Simon,
Editeurs pp 2050-2077.

- 55 -
pas entierement rembourses et qu'une main-levee de gage n'a pas
ete delivree. En outre, dans une conjoncture de crise economique
comme celle que connait l'economie camerounaise depuis quelques
annees, de telles realisations posent sur tout le probleme du prix
de cession et des risques de braderie.
De nombreux autres ratios sont utilises qui indiquent le
temps necessaire a une entreprise pour couvrir ses dettes par
autofinancement. C'est le cas du ratio ci-apres
Autofinancement
b)
Endettement total
Ce ratio traduit le rythme auquel une entreprise contribue
a sa solvabilite par ses seuls moyens internes. Des ratios plus
significatifs
sur
la
relation
entre
capitaux
propres
et
endettement seront analyses ulterieurement. Nous n'insisterons
donc pas sur le ratio de solvabilite qui sera mieux apprecie a
l'occasion de l'analyse du levier financier.
Un autre indicateur du role de l'autofinancement nous semble
d'un grand interet pour notre analyse,
il s'agit du ratio:
Investissement envisage
c)
Autofinancement
Ce
rapport
renseigne
sur
le
temps
necessaire
a une
entreprise
pour
rassembler
des
ressources
suffisantes
au
financement de sa politique d'investissement. Ce delai est court
pour des entreprises dont l'environnement et les conditions de
financement
et
d'exploitation
sont
telles
qu'elles
peuvent
realiser
des
resultats
positifs
et
constituer
des
reserves
importantes.
Ils
s' allongent
lorsque
les
resul tats
sont plus
faibles
ou
croissent
lentement.
Cette
situation
s'observe
generalement dans un environnement economique et financier marque
particulierement par des taux debiteurs eleves sur les credits
obtenus par les entreprises pour le financement de leur depenses
d'investissement.
Nous verrons que cet environnement est caracteristique du
cadre d'evolution des PME camerounaises,lequel s'est davantage

- 56··
deteriore avec la tendance a la hausse des taux d'interet et la
suppression des
taux boni fies
dans
le
cadre de
la poli tique
monetaire nationale.
L' autofinancement dans
ces circonstances
frustre
les
PME d' opportuni tes
interessantes d' investissement
impliquant l'existence d'un cout implicite qui permet de poser
ici
le
probleme
de
la
repression
financiere 40
au
sens
de Mc
Kinnon et Shaw.
En effet, ces auteurs soulignent dans leur analyse le role
du taux d'interet dans les economies nationales soulevant par ce
biais
le
probleme
de
la
determination
d'un
taux
d'interet
optimal,
celui
qui
stimule
le
mieux
l'investissement.
Nous
n'insisterons pas a ce niveau sur ce sujet. Nous approfondirons
la discussion sur l'importance de cette question dans l'analyse
de l'incidence du taux d'interet dans le financement bancaire des
PME.
Ainsi donc le niveau d'autofinancement dans
l'entreprise
depend des facteurs qui influent directement ou indirectement sur
la
qualite
des
resultats
et
qui
sont
prioritairement
les
conditions
de
financement
et
le
mode
fonctionnement
de
l'entreprise.
Toutefois d'autres facteurs non moins importants permettent
d' apprecier
la place
que
l' entreprise accorde
au
financement
interne de son acti vi te de production.
lIen est ainsi de la
methode d'amortissement pratiquee et de la politique en matiere
de distribution de dividendes.
1.1.2
Le
Role
de
la methode
d' amortissement
sur
le
niveau de l'autofinancement
Les amortissements
rentrent pour une
large part dans
la
composition
de
l'autofinancement
tout
au
moins
dans
les
entreprises industrielles.
11s meritent de ce point de vue un
interet particulier quant au choix de la methode a utiliser celle
-
E. Shaw, Financlai Deepninq in Economic Development,
Oxford University Press, N-Y- 1973, cite par C. EBOUE,
Les &ffets Maokd-Economiques de la Repression Financi~re
dans les P.R.D. in Rconomie Appliqu6e, Tome LXIII,
199O nO 4 P•. 1l3-121.
On lira eqa1ement sur cette question J. TCHUINDJANG ,
Monnaie Seivi tude et Li.berte.
Edit.
J. A. 1990, P 76-79.

- 5: -
de l'amortissement lineaire, celle de l'amortissement degressif
si
l' on
ne
retient
que
ces
deux
methodes.
Pour bien cerner
1 'importance
que
ce
choix
revet
pour
l'entreprise
nous
preciserons rapidement la place de l'amortissement dans notre
analyse.
Nous la situerons a deux niveaux :
a)
sur
le
plan
comptable
l' amortissement
est
la
constatation de la depreciation de la valeur des immobilisations
au fur et a mesure de l'utilisation de celles-ci.
Le taux d' amortissement doi t
alors
tenir compte de
leur
duree de vie presumee mais aussi des conditions de fonctionnement
des equipements de production a amortir,
lorsqu' il
s' agi t
de
ceux-ci. Cette prise en compte est fondamentale, surtout dans le
cas des PME camerounaises dont nous avons souligne les conditions
souvent desastreuses d'utilisation de l'outil de production.
b) ainsi, sur le plan financier, l'amortissement represente
une mise en reserves de fonds destines a terme a la constitution
du stock de capital ou autofinancement des investissements de
croissance par le jeu de l'effet Lohmann-RUchti, qui mettent en
exergue l'effet multiplicateur du fonds d'amortissement.
Cette approche est pourtant ambigue car elle fait croire a
un blocage de liquidites pour satisfaire a terme au besoin de
renouvellement des actifs en question. Dans la realite et plus
precisement en ce qui concerne les PME que nous etudions, il ne
s'agit
pas
d'un
mouvement
de
decaissements
veritables.
La
consequence de ce constat est qu'au moment ou l'entreprise a
besoin de remplacer le stock de capital vetuste, elle ne dispose
pas toujours des res sources programmees a cet effet. Et, plus le
taux d'amortissement est eleve plus la desillusion est forte. En
plus le mode de calcul de l'amortissement n'est pas neutre sur
le resultat. Qu'il s'agisse du resultat brut que l'amortissement
dirninue en tant
que
charge ou du resul ta t
net
qu' i 1 accroi t
artificiellement
du
fai t
de
I "avantage
fiscal
inherent
a sa
deductibilite de la base d'irnposition.
Ainsi l'amortissement influe a plus d'un titre sur le niveau
de l'autofinancement aussi bien par le biais du resultat net que

- 58 -
par
rapport
au
montant
meme
pour
lequel
il
figure
dans
la
formation de cet autofinancement.
Un mauvaise politique d'amortissement peut donc conduire a
des evaluations erronees des ressources propres de l'entreprise
et poser des problemes de financement des investissements.
Ces
insuffisances
permettent
de
faire
appel
a d ' autres
indicateurs du role de l'autofinancement,
ceux qui renseignent
mieux sur le cout de ce mode de financement de l'activite.
1.2
Le Cout des capitaux propres
L'importance de la
politique des "dividendes"
Nous
avons
jusqu'ici
pour
apprecier
les
capacites
de
financement
propre,
fait
appel
au concept
d' autofinancement.
Cependant il existe un concept voisin beaucoup plus large qui
exprime
l'efficacite
financiere
de
l'entreprise
dans
son
ensemble, celle issue de sa propre exploitation. 11 s'agit de la
capacite d'autofinancement. Elle est egale a l'autofinancement
augmente des dividendes. La comparaison de ces deux concepts nous
semble contribuer a des analyses approfondies sur la nature et
la pertinence des decisions majeures prises par les actionnaires
ou les dirigeants quant au mode de financement de l'entreprise,
sur la compatibilite de leurs objectifs lorsque dirigeants et
proprietaires sont des personnes distinctes.
Ainsi,
si
la
mise
en
reserve
des
benefices
permet
a
l'entreprise
de
disposer
de
ressources
generees
par
l' exploi ta tion,
les actionnaires n' y souscri vent que dans une
perspective
d'un
"dividende"
plus
eleve
a
terme,
d'un
enrichissement net. Car, la retention de la partie non distribuee
du benefice doit etre justifiee par une rentabilite plus grande
qui
compense
le
manque
a gagner
de
l'actionnaire
et
sa
renonciation a percevoir un dividende dans l'irnmediat. Parler de
dividende n'est peut-etre pas justifie dans ce cadre, etant donne
que les PME camerounaises, cornme nous l'avons deja dit, ne sont
pas cotees en bourse. Ce probleme a d'ailleurs ete pose par G.
H1R1GOYEN41
s'agissant
precisement
des
moyennes
entreprises
41
G.
HIRIGOYEN,
Peut-on parler d'une politique
de dividendes dans les moyennes entreprises
f&miliales non co tees ? in Analyse Financiere,
nO 436, Fev.
1984 pp 207-210.

- 59 -
familiales
non
cotees.
L'auteur
prefere
alors
parler
d'une
poli tique
de
prelevement
plut6t
que
d'une
poli tique
de
dividendes.
Si sur le plan theorique nous souscrivons a la these selon
laquelle
il est plus
judicieux de parler de prelevements,
la
pratique
dans
les
PME
camerounaises
s' accomode
davantage
de
l'usage du terme "dividende. Et, dans les entreprises qui sur le
plan
juridique
sont
consti tuees
sous
forme
de
societes
par
action,
la question du dividende revet un tres grand interet.
Celle-ci est meme
tellement
importante qu' elle est
souvent a
l'origine de graves problemes de gestion.
Car,
si la distribution du di vidende suppose theoriquement la
realisation prealable de benefices, dans les PME camerounaises,
cette condition ne semble pas toujours indispensable. En effet,
ces entreprises "confondent" couramment recettes et benefices,
la "distribution du dividende" pouvant alors etre reclamee en
1 'absence de resultats nets beneficiaires. Ce phenomene est pour
une grande part decrit a travers le paradoxe de la recuperation
du capital industriel 42 que nous analyserons plus loin.
Au-dela de ce biais,
l'approche du dividende en tant que
residu
par
rapport
a
la
capaci te
d' autofinancement
et
l'autofinancement nous semble pouvoir contribuer a une meilleure
appreciation
du
cout
des
capitaux
propres.
Elle
est
plus
plausible dans
I' hypothese 00 les detenteurs du capi tal
sont
confondus aux dirigeants. Dans cette optique,
le dividende est
per<;u comme une frustration de liquidites qui peuvent etre miem:
rentabilisees.
Un des modeles developpes dans
cette voie est
celui de J. E. WALTER (1956). Pour cet auteur il existe un taux
optimal de distribution de dividende correspondant au prix de
l'action maximum. 11 associe dans son analyse outre le dividende
et le benefice non distribue,
le rendement des investissements
puis le taux de capi talisation du marche 43 •
Ainsi tant que le reinvestissement des benefices est plus
42
On se reportera a ce sujet a l'exemple de
l'entreprise MILKY-WAY voir infra, chapitre III section I.
-
J.
K. Walter, Dividend Policy and Common stock Prices,
Journal of Finance, Mars 1956, cit6 par P. Conso. La Gestion
Financi6re de l'Bntreprise, Edit Dunod, 5e Edition,
Bordas Paris 1978, pp.
448-449.

- 60 -
rentable que les placements externes l'entreprise a avantage a
ne pas distribuer de dividendes. Cette analyse se situe dans la
perspective
d'un
pari,
celui
qu'induit
l'incertitude
des
placements des actionnaires. Si elle tend de ce point de vue a
infirmer
l' analyse de Modigliani-Miller
sur
la
neutralite du
dividende a l'egard de la valeur de l'entreprise,
elle permet
surtout la transition a d'autres analyses tout aussi importantes.
On pourrait citer a cet effet l'apport des modeles de Gordon,
Lintner,
Shapiro
sur
le
suj et 44
et
la
place
que
ces
auteurs
reconnaissent a la retention d'une partie des benefices et au
taux
de
distribution
des
dividendes
dans
le
financement
de
l'effort d'investissement de l'entreprise.
Ces differentes approches en terme de dividendes permettent
de refuter
la perception selon laquelle
les capi taux propres
constituent des res sources gratuites.
Elles montrent bien que
cornrne toutes les res sources les fonds propres ont leur cout qui
peut en particulier etre apprecie par le niveau du dividende
attendu par les detenteurs du capital .. Les etudes dans ce sens
concernent surtout les entreprises cotees en Bourse. Pour
ces dernieres,
le cours des actions est souvent considere cornrne
la valeur actuelle des revenus attendus par les proprietaires de
l'entreprise.
La valeur de l'action en to est donc donnee par la formule
suivante :
00
Po =
E
Dt (l+ke)-t
t=l
ou Dt=le dividende attendu sur la periode to-t
ke=le taux d'actualisation du marche.
-
M. J. Gordon,opt1mal investment and financing policy,
Journal of finance.
J. Lintner, Distribution of Incomes of corporation among
. dividen~, Retained Earning and Taxes.
Cit6s par P. Conso, la Gestion Financi~re de
l'Entreprise, op. cit. p 449,
On lira 6galement sur ce sujet G. HIRIGOYEN et J. P. JOBARD,
Financement de l'Entreprise : Evolution recente et
perspectives nouvelles in Encyclopedie de Gestion
op cit. pp 1221-1241.

61
Cette approche s'explique par le role que cette analyse fait
jouer
a l'actionnaire qu'elle identifie a un investisseur
financier
qui
s'est
defini
cornme
principal
objectif
la
maximisation de son gain. Elle renseigne donc utilement sur le
taux minimal requis par ce dernier tel que si la rentabilite des
capitaux propres est inferieure a ce taux le cours des actions
baisse et la richesse de l'entreprise diminue. Ce taux minimal
constitue ainsi le cout des res sources propres de l'entreprise.
Seulement,
ce mode d'evaluation pose un double probl~me celui
plus general du choix d'un taux d'actualisation et celui plus
particulier du cout des
capi taux propres des
entreprises non
cotees en Bourse.
Ces
deux
probl~mes
se
posent
a
un
certain
nombre
d'entreprises notarnment dans les economies Oll il n'existe pas de
marches financiers ou encore dans les cas Oll la dimension des
entreprises ne leur permet pas de rentrer en Bourse.
Les PME
camerounaises font parties de ces entreprises qui ne sont pas
cotees et dans lesquelles dirigeants et actionnaires sont souvent
confondus. De ce fait,
il n'existe pas a priori de probl~me de
divergence dans les objectifs definis par les uns et les autres.
1.3
L'evaluation du cout des fonds propres darts les PME
camerounaises :
Nous n'insisterons pas ici sur le probl~me du choix du taux
d' actualisa tion sur lequel
nous
reviendrons
plus
loin45 •
Nous
allons surtout souligner dans une approche specifique la place
du dividende en terme de niveau du risque pour les PME 4S et de la
valeur attribuee par l'entrepreneur lui~m~me a son entreprise.
Nous avons vu que la difference entre capacite d'autofinancement
et autofinancement permet d'obtenir le niveau du dividende fixe.
Cette difference traduit l'importance du risque qu'accepte de
prendre I 'entrepreneur quand il decide de reinjecter ou non dans
son uni te,
la
totali te
des
benefices
realises.
11
renseigne
egalement
sur
la
nature
de
ses
anticipations
et
sur
le
comportement vis a vis des objectifs fondamentaux que sont la
-
Voir Ultra, cb~. I aectioQ III
P. 94 - 99
Voir Ultra, chap.
I
Section III
p.
92 - 94

- 62 -
rentabilite et le contr61e de l'entreprise. On peut a ce niveau
distinguer deux types de comportements.
*
Les
entreprises
distribuant
un
faible
dividende
et
preferant
une
retention
importante
des
benefices
semblent
manifester un grand interet pour le financement propre de leur
activite
et
probablement
une
volonte
d'assumer
le
risque
d' entreprendre
et
de
conserver
sans
trop
de
contraintes
le
contr61e de leur affaire. Evidemment une telle decision implique
necessairement un cout d'opportunite, celui lie a une meilleure
affectation de ces res sources ou encore a un financement par
l'emprunt qui pourrait s'averer plus opportun et plus rentable
pour cette entreprise ;
*
Les
entreprises
qui
optent
pour
un
dividende
plus
substantiel par rapport aux benefices realises peuvent traduire
differentes preoccupations.
D'abord,
elles
peuvent
exprimer
une
maturite
dans
le
secteur ou l'activite qui leur permet d'orienter une partie de
leurs profits vers d'autres emplois ;
- 11 peut s' agir egalement d' anticipations pessimistes quant
a l'evolution de l'affaire, de la branche ou de tout le secteur
qui necessite une diversification, une limitation du risque, ou
le partage de ce risque avec des creanciers exterieurs. Dans ce
cas aussi,
l'appreciation du cout de chaque type de res sources
pourrait confirmer ou infirmer la compatibilite de la decision
avec les objectifs poursuivis.
-
On peut aussi
tout
simplement
faire
1 'hypothese d'une
gestion sommaire d'une PME par son proprietaire qui distrait les
benefices pour des depenses personnelles plus ou moins justifiees
par le niveau de l'activite. De telles defaillances peuvent alors
etre observees meme en l'absence de benefices, les recettes etant
tres souvent assimilees aux profits.
D' une maniere generale,
l' appreciation de la quali te des
decisions dans la PME peut etre fournie a travers la politique
en matiere
de
dividende.
Et,
le
taux
de
distribution de
ce
dernier ou mieux l'evolution de son importance par rapport a
l'autofinancement
peut
renseigner
sur
la
maniere
dont

- 63 -
l'entrepreneur evalue sa propre affaire au fur et a mesure du
temps. Cet indicateur peut s'ecrire de deux manieres
Dividende
a)
Autofinancement
Dividende
b)
Capacite d'autofinancement
Tel que l'accroissement du ratio traduit un bon risque et sa
diminution
un
risque
eleve.
On peut
tout
de
meme
sur
cette
deuxieme
explication
faire
mention
d' exceptions
eventuelles.
Celles-ci se rapporteraient a des PME jouissant d'une maturite
dans leur secteur ou leur branche qui justifie la distribution
d'un dividende important. Elles auraient donc ainsi acquis une
credibili te aupres des banques
locales qui
leur garanti t
des
possibilites certaines de credit.
La reference a differents indicateurs de la place attribuee
a l'autofinancement par l'entreprise en general et par les PME
camerounaises plus particulierement permet de poser le probleme
du taux d'autofinancement "desire" par les entrepreneurs, celui
qui leur permet de reduire la contrainte du financement externe.
Ce taux "desire" d'autofinancement,
les dirigeants de la firme
le definissent differemment selon que le contexte financier est
favorable ou hermetique expliquant certains clivages ainsi que
les raisons pour lesquelles cette technique de financement fait
l' obj et
de
nombreuses
cri tiques
tendant
a faire primer les
limites sur les avantages du financement par les fondspropres.
1.4. Avantages de l'autofinancement
Pour
les
tenants
de
cette methode
de
financement,
elle
comporte essentiellement deux grands avantages :
- elle presente dans l'immediat un cout relativement faible
et permet
de
ce
fait
une
economie
de
frais
financiers
dont
l'entreprise n'aurait pas beneficie en d'autres circonstances.
Elle evite des deperditions de capital sous forme de paiement
d'interets et favorise l'utilisation d'une masse plus importante

- 64-
des ressources, celles generees par l'exploitation. Ce cout des
benefices mis en reserves, est un cout comptable, un cout nul que
P.
VERN1MMEN
qualifie
de
"cout
explici te
des
benefices
reinvestis,,47.
- Elle soustrait l'entreprise aux tribulations d'un systeme
bancaire hermetique et procure a l'entreprise les moyens de ses
besoins. Elle confere a l'entreprise une certaine independance
vis
a vis des capitaux d'emprunts tel que chaque decision
d'endettement
corresponde
un
cout
de
l'endettement
plus
avantageux.
L'autofinancement se justifie davantage dans des secteurs
a faible rentabili te ou a rentabili te lointaine tel que les
agents a excedent n'osent pas risquer leur epargne.
Dans cette optique, J. TCHUNDJANG POUEM1 48 soumet la pleine
justification de l'autofinancement a une triple exigence
- que toutes les ressources du marche des capitaux soient
epuisees et que l'entreprise prouve qu'elle n'a pas pu reunir
l' epargne necessaire.
11
s' agi t
alors
d' un autofinancement
a
"posteriori" et non a "priori" ;
- que le consommateur ait la possibilite de se prononcer sur
la qualite du produit pour la conception ou l'amelioration duquel
la recherche est menee,
qu'il jouisse egalement d'une certaine
latitude dans la determination du prix de son produit
que
l'entreprise
tienne
compte
du
cout
reel
de
l'autofinancement qui est un cout d'opportunite4~.
Ces avantages de l'autofinancement semblent bien negligeables au
regard de ses effets "repressi fs "so et ses aspects equi voques "SI.
1.5.
Les Limites de l'Autofinancernent :
Sa principale limite decoule de son caractere repressif tel
que,
"l'autofinancement ferme aux africains le debouche ultime
" -
P. VERNIMMEN : ~inanee d'entreprise : logique et politique ;
Dalloz p. 271.
48
J. TCBUNDJJANG POUEMI, Monnaie,
Servitude et Libe%te
op cit pp 77-78 .
.. - J. TCHUNDJANG POUEHI, Monnue Servitude et Liberte op. eit.
P 77-78 .
.. - IDEM
., - P. VERNIMMEN, ~inanee d'Entreprise op eit.

- 65 -
de l'epargne,
la propriete du capital financier,
quel que soit
l'effort d'epargne qu'ils peuvent consentir, en meme temps qu'il
soutient
par
la
hausse
des
prix
la
prosperite
des
firmes
etrangeres. On comprend le danger que comporte l'encouragement
cl
1 I autofinancement preconise par certains experts,
la Banque
Mondiale en tete et applique par des gouvernements qui n'hesitent
pas cl donner des primes aux entreprises qui s'autofinancent 52 •
Cette technique de financement ecarte de la repartition des
fruits de
la croissance ceux qui
en ont le plus besoin.
Elle
favorise les grandes unites en position de Monopole qui du fait
de leur situation privilegiee peuvent jouer sur les augmentations
de prix,
accroitre encore davantage leurs marges beneficiaires
dej cl
elevees.
Cette
elastici te
-
prix
de
1 'offre
n' est
pas
concevable pour les PME dont 1 'engorgement de certaines branches
susci te
une
vi ve
concurrence
et
ne
tolere
pas
des
hausses
intempestives de prix. En plus les marges beneficiaires y sont
faibles
et
l' entreprise ne
peut pas
compter
sur
un
resul tat
extensible cl l'infini.
11 devient donc de plus en plus difficile de se contenter
des
seules
marges
d'autofinancement
et
d'etre
contraint
de
reculer le moment des operations d'investissement. La pression
de cette contrainte,
le co0t implicite qu'elle represente pour
l'entreprise apparaissent alors comme le facteur explicatif du
recours au financement externe. Celui-ci est alors per~u comme
le moyen pour assurer l'amelioration du processus de production
et partant la poursuite du processus d'accumulation.
Nous
allons
pour
ces
raisons
nous
interroger
sur
les
possibili tes
de
concretisation
de
ces
proj ections.
Celles-ci
semblent
essentiellement
basees
sur
l'effet
de
levier
de
l'endettement.
$2
Le financement externe des PME
Le role de l'effet
de levier financier
L'effet de levier s'exerce sur la rentabilite des capitaux
propres
et
est generalement
oppose
cl
l' effet de
dilution de
1 I augmentation
du
capi tal
pour
lequel
tout
accroissement
du
.. - J. TCHUNDJANG POUEMI, Monnaie. Servitude et Liherte op cit. p. 77

- 66 -
nombre
d'actions
a la suite d'une augmentation de capital
entraine ipso facto la baisse du benefice par action. L'effet de
levier financier exprime ainsi les conditions sous lesquelles la
dette de l'entreprise quelle qu'elle soit rehausse le taux de
rendement moyen du capital propre au-dessus du taux de rendement
moyen du capital. 11 joue egalement un role de stabilisateur de
ce taux en periode defavorable et celui d'accelerateur en periode
d'expansion.
En tant qu'instrument d'analyse il contribue a eclairer les
recherches dans le sens du maintien puis de l'accroissement du
rendement des fonds propres .
. Si on part du principe de l'equilibre structurel du bilan
puis de l' identi te du revenu disponible brut et de l' epargne
brute on peut ecrire :
EBE = FF+IS+EB
ou
EBE est l'excedent brut d'exploitation
FF represente les frais financiers
IS = l'impot sur les societes
EB
l'epargne brute
Le taux de profit P est eg~l au rapport du profit brut aux
capitaux investis et s'ecrit~.
EBE
P = ---------
CP+CE
On definit egalement le coat net des capitaux empruntes 1
tel que
FF
i
=
CE
Si on appelle 0, le poids des emprunts par rapport aux fonds
propres de l'entreprise on peut poser:
S3
Nous avons repris sur ce point la presentation
de l'effet de levier faite par F.
POULON,
dans son ouvrage Economie Generale,
Dunod,
Edit 1984 pp.
252-254.
On peut lire encore
:
-
P. VIZZAVONA,
Gestion Financiere,
Edit Atol,
Paris 1992 T1 pp 81-84 et 446-459.
-
G.
CBARREAUX,
Gestion Financiere Edit.
Litec,
Paris 1993 pp 295-307.

- 67 -
CE
a =
CP
a represente ainsi le levier d'endettement.
On
peut
a partir de ce qui precede,
exprimer
le
taux
d'accumulation du capital propre :
EB
EBE
FF
IS
=::::
- - - - -
-
qu'on peut encore ecrire
CP
CP
CP
CP
EBE
CP + CE
FF
CE
IS
[ (---------)
(----------) ]
[---- x ----]
CP + CE
CP
CE
CP
CP
EBE
CP
CE
FF
CE
IS
=
[( - - - - - - - - - )
(---- + ----)]
[---- }~ ----]
CP + CE
CP
CP
CE
CP
CP
Si on pose IS
a
On peut encore ecrire
CP
EB
= P (1 + a) - ia - a
ou encore
CP
EB
P + (P - i)
a -
a
CP
Pour
P
i
> 0,
cette
formule
tradui t
l' interet
de
l'endettement pour les entreprises dont il accroit la capacite
d'autofinancement.
En effet, de nombreuses etudes 54 ont revele une correlation
positive entre l'endettement et l'autofinancement pour souligner
le role primordial du credit dans l'accumulation.
I t
_
On cite sur CB point notaIrment lea etudes de la Centrale
des Bilans de la Banque de l"rance effectues par :
-
B. MICHA, C. D2SROOSSILL&S, HBLOCH, &volution de la
Situation des Kntreprises Industrielles. 1974-1976, Bulletin
Tr1m9striol de la Banque de l"rance, nO 27,
jUin 1978.
-
L. DELCAMBR&, L. HARY, Les &ntreprises Industrielles en 1978,
Bulletin Trimestriel de la Banque de Yrance, n° 33, Decembre 1979.
Ces 6tudes sont citees par Y.
POULON,
&:conomie Gilnerale,
op cit p. 254.

- 68 -
Ces
etudes
precisent
cependant
les
conditions
de
la
realisation
de
cet
effet
de
levier.
Ainsi,
cet
effet
joue
pleinement lorsque les pouvoirs publics n'interviennent pas pour
fixer autoritairement les prix ou les controler rigoureusement.
Car une telle intervention inciterait davantage a l'accroissement
de
la
dette
pour
financer
les
plans
d'investissement
que
l'autofinancement n'arrive pas a couvrir.
De ce point de vue,
l'effet
de
levier
apparait
comme
l'une
des
traductions
de
l'importance
des
determinants
financiers
dans
la
decision
d'investissement
mais
aussi
dans
le
developpement
de
l' entreprise.
Cette
approche ne
signifie
sur tout
pas
que
le
credit
n'ait
pour
une
entreprise
que
des
avantages.
crest
d' ailleurs
au
niveau
de
la
realisation
des
effets
posi tifs
attendus
de
l'emprunt
que
se
situe
le
probleme
des
PME
camerounaises.
En effet,
l' un des
elements au centre de
la
formule
de
l'effet de levier est le taux d'interet 55 ,
souvent identifie au
cout des capitaux empruntes. Au-dela des difficultes a en choisir
un,
le role que joue cette variable dans l'activite economique
est tres complexe.
11 l'est d'autant plus,
qu'il peut dans des circonstances
donnees produire l'effet inverse de celui que l'on en attend.
C'est ainsi qu'a la suite des analyses sur l'effet de levier
de l'endettement qui ont notamment permis de mesurer l'incidence
de l'emprunt sur la rentabilite des fonds propres on a vu se
developper un engouement particulier des
entreprises pour
le
financement par l'emprunt. L'une des consequences de ce fort taux
d'endettement est que en periode d'inflation, la dette contactee
se rembourse en monnaie depreciee et donc plus aisement compte
tenu de l'action de l'inflation sur les taux d'interets reels
qu'elle tend a diminuer. On pourrait d'ailleurs preciser sur ce
point que l' alourdissement de l' endettement pendant cette periode
n'a pas ete l'apanage des seules entreprises,
les menages eux-
memes n'ont pas echappe a l'attrait de l'emprunt justifie par
SI
-
Nous ne discuterons pas ici ~e r8~e de ~a determination
des taux d'inter3t. I~ sera an~ys6 daus ~e chapitre 11 et daus
~a dewd.ilme par tie au moment de ~'etude de cas de PH& et de
~'apprec1at1on de ~'importance du crGdit daus ~e deve~oppement
de ~'act1vite de production.

- 69-
l'effet de levier.
Pour les entreprises,
la baisse des taux reels a entraine
la reduction de la charge en frais financiers. Mais lorsque la
tendance se renverse et que a la periode d'inflation succede une
periode de deflation les taux d'interets reels tendent a s'elever
accroissant par la meme le poids des charges financieres.
L'analyse en terme d'effet de levier si elle permet de poser
le probleme general du taux d'interet amene egalement a insister
sur l'importance de la distinction entre taux d'interet nominal
et taux d'interet reel et sur les effets pervers de son omission
sur l'activite de l'entreprise. D'une maniere general cependant,
le ni veau du taux d' interet
inf 1ue
d' une
fac;on
certaine
sur
l'impact de l'effet devier qu'il peut accroitre si ce taux baisse
et
qu'il
tend
a
reduire
si
ce
taux
s'eleve.
Nous
verrons
d'ailleurs plus tard avec les exemples retenus pour illustrer
notre analyse que parce que les taux d'interets appliques aux
credits des PME sont eleves ils hypothequent totalement l'avenir
de l'entreprise.
Si l'effet de levier permet de poser le probleme du taux
d'interet
qui
apparait
explicitement
dans
sa
formule,
son
impulsion tient compte egalement d'autres aspects du financement
de l'entreprise qui bien qu'implicites ont une relation avec le
taux
d'interet
puis
avec
l'effet
de
levier.
Il
s'agit
en
particulier de la nature des credits accordes, de leur enveloppe
et de sa distribution par terme, de la compatibilite de ce terme
avec les delais de rentabilisation de l'investissement finance.
Ces differents points nous sernblent a la fois poser le probleme
du taux d'endettement optimal de l'entreprise en meme temps que
celui plus global des conditions de la realisation de l'effet de
levier de l'endettement. Et, nous verrons par la suite que les
PME
camerounaises
n' on t
pas
encore
pu
resoudre
ces
problemes
notamment vis a vis du systeme financier conventionnel. Elles ont
meme justifie par leur non resolution le recours a des emprunts
aupres du systeme informel d'epargne et de credit.
Nous avons donc par le biais de l'effet de levier financier
mis en exergue l'influence de l'emprunt sur la rentabilite des
capi taux propres de
l' entreprise.
Nous
avons
egalement voulu
preciser que cette influence est d'autant plus grande que les

- 70 -
conditions de credit sont plus favorables.
La fiscalite semble
de ce point de vue faire partie de ces conditions la.
2.1
L'ACTION SUR L'EFFET DE LEVIER
FISCALITE ET
FINANCEMENT EXTERNE
Le regime fiscal des emprunts est d'une maniere generale
moins onereux pour l'entreprise que celui applique au dividende.
De
ce
fait
pour
assurer
aux
actionnaires
une
remuneration
equivalente a celle d'un creancier l'entreprise devra realiser
un effort financier plus important qui tienne compte de l'imp6t
qui frappe le dividende.
L'explication de ce phenomene reside
dans
le
fai t
que
la
charge
d' interets
sur
les
emprunts
est
deductible du benefice imposable. La fiscalite de ce point de
vue,
apparai t
conune un facteur d' accroissemen t
de l' effet de
levier financier et justifie une fois de plus la place de choix
des determinants financiers dans la decision d'investissement.
Toutefois cet avantage fiscal n'a des implications inunediates sur
la tresorerie de l'entreprise que si l'activite permet de degager
des benefices.
11 ne nous semble pourtant pas que cette composante fiscale
du financement par l'emprunt joue un r61e particulier dans les
decis ions
financieres
de
la
PME
camerounaise.
Son
principal
probleme, ainsi que nous l'avons deja dit, semble etre celui de
se procurer des res sources suffisantes en fonction des emplois
prevus,
le
recours
a I ' emprunt
se
justifiant
davantage
par
l'incapacite
des
ressources
propres
a
couvrir
sa
depense
d'investissement
et
ses
besoins d' exploi tat ion .
Deux
raisons
majeures nous confortent dans cette position.
a) D'abord, le besoin pressant de fonds que manifestent les
PME est tel que celles-ci sont souvent portees a accepter des
conditions de taux d'interets, de terme de credit, de garanties
meme lorsqu'elles sont) peu propices a l'obtention de resultats
beneficiaires.
Les
condi tions
qui
leur
sont
imposees par
le
systeme bancaire sont en effet de nature a creer des tensions de
tresorerie dans
l' entreprise.
11 en est ainsi par exemple du
poids des echeances en principal. Ce poids sera d'autant plus

- 71 -
eleve
que
les
credi ts
sont
consentis
sur
des
periodes
plus
courtes.
Nous
insisterons
dans
le
chapitre
suivant
sur
la
preference des banques pour des credits a court et moyen terme
allant rarement au-dela de 5 annees.
De la meme maniere les garanties requises par les banques
peuvent egalement peser sur la tresorerie des entreprises. Ainsi
lorsque les PME ne peuvent pas se procurer directement par leurs
propres moyens les suretes demandees elles sont souvent amenees,
pour
satisfaire
a
cette
exigence
bancaire,
a
offrir
une
remuneration en contrepartie d'une caution hypothecaire ou d'une
caution
personnelle
d'un
parent
ou
drun
ami.
Le
paiement
a
effectuer peut se faire en une seule tranche ou per~odiquement
selon les accords passes et represente bien une sortie de fonds
qui affecte le niveau de la tresorerie de l'entreprise.
Le cadre
financier
des
PME exerce une
telle pression sur la
tresorerie qu'elle peut inhiber l'avantage fiscal attendu de la
dette.
b) A cette premlere raison qui tient plus a une defaillance
interne de la PME viennent se greffer des facteurs externes dont
le regime fiscal et le role reconnu au code des investissements.
En
effet,
le
code
des
investissements
dans
les
pays
sous-
developpes et sur tout au Cameroun a entre autres prevu depuis
1968 des dispositions fiscales en faveur des investissements dans
les PME. L'une d'entre elles porte sur une exoneration, pendant
une periode qui est passee de 5 ans a 10 ans, de l'impot sur les
benefices industriels et commerciaux pour cet amenagement du code
des
investissements
camerounais 56
ne
nous
semble
pas
d'une
maniere gEmerale etre une mauvaise ini tia ti ve de la part des
pouvoirs publics.
Cependant,
elle nous permet de souligner le
faible
role
qui
est
attribue
a la fiscali te par rapport au
financement externe des PME.
Ainsi,
l'interet de cet aspect fiscal du financement par
l'emprunt disparait avec des conditions de credit inadequates.
Mais,
il nous semble egalement ignore lorsque les entreprises
developpent
une
politique
d'autofinancement
de
leur
propre
initiative
ou
sous
l' impulsion
des
autorites
economiques
et
.f
_
Nous rev1endrons dans le chap1tre II sur l'importance du
code des 1nvest1ssements pour la cr6at1on et le
dllveloppement des PMK.

-12-
monetaires notamment lorsque celles-ci decident de la hausse des
taux
d'interet.
Cette
derniere
forme
d'incitation
a
l'autofinancement
est
celle
qui
a
prevalu
dans
les
PME
camerounaises ces dernieres annees avec la grande volatilite des
taux d'interets bancaires marquee par un tendance haussiere.
En effet jusqu'au 16 octobre 1990, les PME camerounaises ont
pu beneficier de conditions particulieres de financement aupres
du systeme bancaire grace a une pol i tique de taux d' interets
bonifies
pour
leur
creation
ou
pour
leur
developpement.
Paradoxalement
·au
moment
Oll
l'activite
economique
est
pratiquement bloquee a cause de la crise qui secoue le pays, le
conseil d'administration de la BEAC decide le 16 octobre 1990 du
relevement des taux d'interet debiteurs de 16,50 % a 18,25 % l'an
puis de la suppression pure et simple des taux de faveur reserves
jusque la aux activites prioritaires dont le financement des PME.
Cette
tendance
a
la
hausse
des
taux
d'interet
s'est
poursuivie sans qu'aucune mesure particuliere ne soit prevue pour
compenser ces conditions difficiles de financement.
Une telle evolution des taux d'interet n'est pas toujours
facile a prevoir et rend particulierement delicat le choix d'un
taux
d'interet,
celui
qui
permet
d'evaluer
l'impact
des
determinants financiers. C'est peut-etre la difficulte a obtenir
un taux d'interet proche de la realite qui explique la mauvaise
apprecia tion des proj ets d' investissement dans
les
PME.
Car,
l'installation des PME s'est faite,
surtout dans le cas des PME
modernes, a la suite d'etudes de faisabilite ayant conclu a la
rentabilite des projets concernes. Mais, les resultats concrets
comme nous le verrons dans le chapitre III laissent apparaitre
des resultats previsionnels peu fiables et tres eloignes de la
realite.
Il ne nous semble done pas que les determinants financiers
tels qU'ils sont evalues jusqu'ici puissent rendre compte de la
realite du role de l'endettement dans les PME camerounaises.
Il
est
sans
doute
important
que
l'on
determine
avec
plus
de
precision les conditions de la realisation des effets attendus
de l'emprunt.

- 73 -
En effet, au regard des difficultes qu'eprouvent les PME a
reunir les moyens financiers propres suffisants et a la lumiere
de l'effet de levier de l'endettement sur les capitaux propres,
la mecanique d'endettement en facilitant l'investissement semble
etre le moyen le plus sur pour perreniser le developpement des
PME. La realisation de cet objectif permet d'engager un processus
d'integration de l'ensemble de l'economie.
Cette
approche
du
financement
externe
de
l'activite
economique elargit considerablement le probleme du financement.
Elle
revet
une
double
dimension
englobante
et
specifique
en
presentant un enrichissement net destine a des emplois multiples.
Ainsi, la dynamique du surplus participe d'une exigence de choix
dans les emplois a financer.
La qualite de ces choix est donc
fondamentale dans la mesure Oll les gaspillages du surplus ou des
affectations
injustifiees
provoquent
une
rupture
de
rythme
d'accumulation. En outre, la dynamique du surplus a un caractere
selectif dans ce sens que son mouvement s'opere au travers d'une
hierarchisation dans les besoins et les objectifs poursuivis. La
question que suscite cette double contrainte de l'enrichissement
net par rapport a l'investissement dans les PME est de savoir
comment peuvent etre evaluees les condi tions d' un bon choix,
quelle est dans la hierarchisation des besoins de l'entreprise
le role assigne a l'investissement.

- 74 -
SECTION III
LA SPECIFICITE DU PROBLEME DE L'INVESTISSEMENT
DANS LES PME
Le
role
moteur
de
l'investissement
dans
le
processus
d' accumulation est constamment souligne par I' analyse economique.
Et
l'un
des
aspects
de
l'analyse
sur
ce
concept,
est
le
questionnement qu'elle permet sur la nature de l'investissement
dans
l' entreprise,
sur
les
facteurs
pris
en
compte
par
les
entrepreneurs dans leur decision d'investir, sur le role de leurs
anticipations
et
leur
comportement
actif
ou
passif
dans
la
regulation de l'activite.
Ainsi, l'une des caracteristiques de l'investissement c'est
le temps long et les etapes successives necessaires pour creer
une richesse. Cette variable s'apprecie alors sur un
double plan
economique et financier :
- Sur le plan economique il consiste en la creation d'un
capital physique qui contribue a l'activite de production sur
plusieurs cycles successifs ;
- Sur le plan financier, il se rapporte a l'immobilisation
de capitaux dans une perspective de profits.
Cette double nature de l'investissement met en lumiere, a
notre avis, deux aspects fondamentaux :
. d'abord l'investissement est un arbitrage entre le present
et le futur lequel conduit a engager une depense immediate puis
a en attendre les effets dans un futur plus ou moins lointain ;
. ensuite,
l'investissement est un pari; ainsi,
que l'on
raisonne dans un avenir certain ou dans un uni vers incertain57 ,
l'entrepreneur qui decide d' investir prend un risque.
11 peut
s'agir
aussi
bien
d'un
risque
economique
que
d'un
risque
financier.
Le risque economique tient a la variabilite possible des
57
J.
STENCEL introduit dans son analyse de
l'investissement la notion d'incertitudes
pour montrer que l'investisseur sacrifie les
certitudes du present aux promesses d'un futur
meilleur mais aleatoire et dont i l sait qu'il ne
sera pas conforms aux previsions. Nous n'introduirons
pas ici cet aspect de l'analyse.
On lira pour plus de details,
J.
STENCEL,
le Choix des
Investissements dans une Economie Incertaine,
Edit Entreprise Moderne d'Edition,
1977 pp 19-20 et 127-142.

- 7S -
resultats due
cl
des modifications pouvant
intervenir dans
la
concurrence,
la technologie,
la conjoncture ...
Quant au risque financier,
il se rapporte au recours cl des
capitaux d'emprunt pour boucler le financement du projet ou de
l'activite de l'entreprise.
Risque
et
anticipation
semblent
donc
etre
des
caracteristiques
importantes
de
l'investissement.
11s
nous
amenent cl nous interroger sur les formes de l'investissement, sur
la maniere dont s' operent
les choix,
sur
la particulari te de
l'investissement dans les PME camerounaises.
$1
Les differentes fonmes d'investissement :
Nous nous limiterons
ici cl l'analyse de l'investissement
producti f
par
opposi tion
cl
l' investissement
financier.
Nous
precisons
que
la presentation que nous
ferons
des differents
types
d' investissement58
n' est
nullement
restrictive
dans
la
mesure Oll le meme investissement peut etre caracterise par l'une
et l'autre forme cl la fois. Nous voulons surtout souligner dans
cette analyse les problemes majeurs que souleve d'une maniere
globale
l'utilisation
du
capital
cl
savoir
l'usure,
l'obsolescence,
la
sous-capitalisation,
le
surinvestissement
etc .. , Nous nous appesantirons chaque fois sur leurs implications
sur
la
creation,
le
developpement
et
la
gestion
des
PME
camerounaises.
1.1
Investissement en capital fixe et investissement en
capital circulant
Le concept d'investissement est lie cl celui de capital et,
les economistes s'accordent pour dire que la notion de capital
pose
un
probleme
de
definition59 •
D'une
fa~on
genera le
on
58
On peut lire a ce sujet :
- P. CONSO, La Gestion Financiere de l'Entreprise
op cit. T2 pp 424 et 561-564.
- M.N. AMALBERT, Econo~e d'entreprise, Edit DALLOZ/SlREI
3eme Edit. 1992 P 174.
51
-
On 1ira a ce sujet F. POULON, Economie Gbnera1e, Dunod,
Paris 1984 pp 241-279.
On 1ira ega1ement 1'artic1e de A. o 'Autume , Capita1 et
Investissement, Encyc10pedie d'&conomie op cit pp 913-933.

- 76 -
distingue sur ce point deux conceptions oppos~es
-
D' abord le capi tal est cons id~r~ corrune un ensemble de
res sources financieres en quete d'une r~mun~ration. Ce capital
lorsqu'il est poss~d~ par une entreprise au d~but de son activit~
de production va etre engag~ dans le processus de production,
sous forme d'investissement ;
- Le capital peut etre ~galement conyu corrune cette quantit~
physique de biens qui au terme du cycle induit un enrichissement
net.
Cette
accumulation
de
capital
suppose
le
recours
a
l'endettement ou a une autre forme de financement.
Ces
deux
. approches
ne
semblent
pas
d~fini ti vement
antagonistes.
Elles
devraient meme
etre
rapproch~es pour une
meilleure intelligence de la relation de circularit~ qui apparait
entre l'investissement et le capital et une appr~hension plus
large de la notion sous-jacente de cout du capital.
Le
processus
de
production
se
r~alise
en
effet
par
absorption totale ou partielle d'un ensemble de biens qui sont
par ce fait incorpor~s dans le produit fabriqu~, la distinction
entre capital fixe et capital circulant s'~tablissant dans la
maniere dont se r~alise cette incorporation. Ainsi, certains de
ces biens appel~s capital circulant et comprenant les matieres
premieres,
les
consorrunations
interm~diaires
disparaissent
totalement au terme du processus de production.
En fai t,
la notion de capi tal circulant est d' une grande
complexit~ et ne fait pas toujours l'unanimit~ des auteurs qui
l'utilisent. L'un des aspects sur lesquels elle permet d'insister
est celui de la prise en compte ou non de paiement du salaire
cornrne
~l~ment
constitutif
de
l'investissement
en
capital
circulan t 60 •
Nous n'avons pas voulu int~grer cet ~l~ment parmi ceux qui
composent
le capi tal
circulant a cause de I' h~t~rog~n~it~ du
salaire dans les PME, objet de notre analyse. La signification
du
salaire
nous
semble
diff~rente selon qu' il
est
pay~ aux
-
Une synth~se du d8bat est pr~sent~e par F. POULON, ainsi pour
A. SMITH la force de travail ne devrait pas faire partie
de l ' investissement en c..pita1 circulant tandis que Ricardo,
e1le en fait partie du fait mlime de l'hypoth~se du sa1aire de
subsistance pay~ ~ l'ouvrier, c'est aussi l'avis de Marxet de F. POULON.
On lira ~ ce sujet, F. POULON, Econamie ~n~ra1e, Dunod edit 1986 pp. 243-244.

- 77 -
ouvriers locaux ou aux techniciens etrangers et risquerait de
poser un probleme d'homogeneite.
Le capital circulant s'oppose ainsi au capital fixe dont le
stock demeure
present
dans
1 r entreprise
et
est
constitue de
l' ensemble
des
biens
d' equipements.
Certes,
cem:-ci
ne
disparaissent
pas
physiquement
dans
un
meme
processus
de
production mais ~ chaque etape ils subissent une "erosion" due
~ leur incorporation ~ la production. Cette forme de consommation
specifique aux biens de capital se traduit souvent dans l'usure
qui
est
une
depreciation
physique
au
fur
et
~
mesure
de
l'utilisation.Mais,
elle
se
manifeste
egalement
dans
l'obsolescence qui est plutot une usure economique due au progres
technique.
La prise en compte de la distinction entre investissement
en
capi tal
fixe
et
investissement
en
capi tal
circulant
est
fondamentale ici dans la mesure ou elle nous permet de soul ever
au moins deux types de problemes par rapport au choix de projet
d'investissement par les entreprises.
a) D'abord l'investissement concerne ~ la fois l'acquisition
de machines de production et celle de matieres premieres et de
biens intermediaires correspondant ~ la production ~ realiser.
Le choix de tout bien d'equipement doit donc s'effectuer dans
cette perspective, c'est ~ dire integrer l'ensemble des problemes
inherents
~
l'acquisition
de
matieres
premieres
et
biens
intermediaires necessaires ~ la fabrication du produit fini. 11
s'agit donc principalement de problemes de sources et de delais
d' approvisionnement qui peuvent
jouer considerablement,
ainsi
qu'on le verra pour les PME camerounaises, sur le cout final des
investissements et sur le rythme de la production.
b)
En outre,
les equipements n' ont pas une duree de vie
indeterminee. Leur choix doit donc tenir compte de leur age, de
l'evolution de la technique et des risques que prend l'entreprise
en
terme
de
couts
de
maintenance,
d' obsolescence,
de
competitivite. Ce dernier type de problemes qui resultent de la
depreciation du capital du fait de la production nous permet dej~
de
prevoir
ou
entrevoir
les
difficultes
de
fonctionnement
auxquelles devront faire face les PME dont les equipements sont
generalemen t importes et souven t de seconde ou de troisieme main.

- 78 -
11 nous introduit ega1ement a un autre type de distinction ou
seront
discutes
a un autre niveau 1es prob1emes d 'usure et
d'obso1escence.
1.2
Investissement de renouve11ement et
investissement net
Ainsi donc,
au fur et a mesure du temps,
les equipements
subissent une double degradation physique ou technique.
La
degradation
technique
depend
de
l'evolution
de
la
recherche et de son application a la production. Tandis que la
degradation physique est liee a la duree d'utilisation.
Les equipements qui se sont amortis au fur et a mesure de la
production
demandent
a
et re
renouveles
dans
un
souci
de
performance et sans doute de reduction des couts d'entretien.
L'un des problemes qui se posent alors est celui de savoir si le
renouvellement peut se faire a l'identique relativement au stock
initialement
installe.
En
d'autres
termes,
le
flux
d'investissement
induit par
la depreciation modifie
t-il
les
caracteristiques du capital de l'entreprise ?
En pratique chaque nouvelle machine incorpore du progres
technique tel que pour des generations de capital differentes.
L'entreprise ne peut pas disposer d'un capital homogene.
Sur le plan purement theorique ce probleme est analyse dans
les modeles a generations
et
repose sur au moins deux
idees
maitresses.
Premierement, le progres technique est incorpore au capital
et s'acquiert grace a l'investissement dans l'achat de machines
modernes.
Ce premier principe
implique
un
deuxieme
a
savoir
l'heterogeneite du capital. Au fur et a mesure de la mise en
place de nouvelles generations les entreprises doivent prendre
un certain nombre de decisions. Celles de declasser une partie
des equipements, de substituer le capital au travail ... Ainsi,
par dela le remplacement, l'enlreprise pour etre plus competitive
sur
le marche
est
contrainte
a
accroi tre
quali tati vement
et
souvent quantitativement son stock de capital en procedant a un
investissement net.

- 79 -
L'un des aspects importants de ce rappel theorique est qu'il
nous permet de soulever a travers les changements de techniques,
le
probleme
de
l' investissement
en
res sources
humaines
indispensables
au
fonctionnement
des
differentes
strates
de
capi tal.
Car,
le
changement
de
techniques
tradui t
bien
une
modification
dans
le
choix
effectue
parmi
des
techniques
disponibles
a
un
moment
donne
et
non
un
simple
changement
implicite lie a une innovation ou au progres technique. Cette
precision permet d'insister sur le role capital que joue dans ce
cadre
la
formation des
honunes
et
toutes
les
implications
en
matiere de couts. Sa prise en compte signifie pour l'entreprise
une planification de la formation, une budgetisation des couts,
une comparaison des avantages et des inconvenients du passage
d'une
technique
a
une
autre,
l'eventualite
d'un
retour
de
techniques 61 •
Si
le
probleme
du
capi tal
humain
se
pose
d' une
maniere
generale a l'entreprise, il revet un caractere particulier dans
les PME ou les aspects technologiques ou de gestion par exemple
ne sont pas toujours per~us comme faisant essentiellement appel
a la formation et surtout a la qualite de celle-ci. Nous avons

vu
s' agissant
des
choix
sectoriels
que
les
PME
informelles
accordent une attention particuliere a la maitrise technique pour
decider de l'entree dans une activite donnee. Cette entree y est
meme
souvent
subordonnee
a l'acquisition des connaissances
techniques et pratiques necessaires dans la specialite choisie.
Nous verrons dans les exemples de PME informelles qui vont suivre
que la duree moyenne de formation d'un entrepreneur-technicien
peut aller au-dela de 5 annees.
Cette place de choix accordee a la formation dans le secteur
informel ne se retrouve pas toujours dans les PME modernes ou le
chef d'entreprise meme lorsqu'il n'a pas les capacites techniques
requises cherche a assumer pour une grande part les principales
fonctions de l'entreprise. Le recours a des competences utiles
formees a differents niveaux secondaire, technique et superieur
n'est
pas
toujours
apprecie
par
ces
PME
conune
etant
un
..
-
Le retour de technique suppose clans ce cas qu' une technique
donn6e peut resurqir pour des niveaux clifferentes de la
r(,partition entre sala1re et profit.
On lira A ce sujet G. ABRAHAM-Frois,
Elements de
Dynamique &conomique, DALLOZ,
Paris 1977 pp. 125-138.

- 80 -
investissement indispensable.
De telles qualifications peuvent
meme quelques fois etre considerees comme une menace au controle
de l'entreprise par son proprietaire.
Neanmoins,
meme lorsque
l'entreprise peut envisager de former son personnel a certaines
fonctions
techniques
ou
autres,
les
condi tions
de
delais
de
formation et de couts sont telles que les PME ne sont pas souvent
preparees ales assumer. Cette forme d'investissement leur semble
ainsi trop couteuse par rapport a la charge financiere qu'elle
implique
mais
aussi
par
rapport
au
temps
d'absence
de
l'entreprise, temps pendant lequel le personnel a former ne sera
pas operationnel·.
Nous
ne
disposons
pas
de
chiffres
sur
les
plannings de
formation
dans
les
PME
camerounaises.
Mais,
d'une
maniere
empirique on peut dire que meme lorsque la formation initiale est
acceptee et prise en charge,
les PME etablissent rarement un
programme de formation continue ou de recyclage permanent de leur
personnel.
Ces
defaillances
en
matiere
de
formation
dans
les
PME
permettent
d'apprecier
l'opportunite
de
certains
types
d'investissement developpes dans ces unites de production ainsi
que 1 'aptitude de ces choix a resoudre les problemes techniques
ou technologiques de
la PME camerounaise sous
ses differents
aspects.
11 s' agi t
par exemple de
la question de la mai trise
technologique et de ses implications sur le fonctionnement de
l'entreprise lui permettant ou non de garantir le renouvellement
de son stock de capital. 11 s'agit egalement de s'interroger sur
la capacite de l'entreprise a generer des profits suffisants a
la realisation d'un investissement net. La prise en compte de ces
choix a ces deux niveaux nous conduit de la meme maniere a nous
questionner sur les possibilites de ces memes PME a resoudre le
probleme du ch6mage et a creer des emplois nouveaux a travers
leur politique d'investissement.
D'autres
distinctions
existent
sur
la
forme
des
investissements.
Nous
mettrons
ainsi
l'accent
sur
1 ' aspect
capacite ou modernisation.

- 81 -
1.3
Investissement de capacite et investissement de
rationalisation
:
Cette
typologie
permet
d'insister
sur
la
fonction
des
investissements
et
la
motivation
de
l'entreprise.
Ainsi
en
periode d'expansion les investissements de capacite permettent
d'accroitre l'offre et partant de conquerir de nouvelles parts
de marche. 11s traduisent ainsi une anticipation d'une demande
plus forte et la volonte de saisir des opportunites de profit.
Par contre,
lorsque
le ni veau de
l' acti vi te est
tel
que
les
charges salariales pe sent sur
les coG.ts de
l' entreprise,
les
investissements
de
rationalisation
apparaissent
comme
une
condition pour reduire le niveau de main-d'oeuvre a affecter a
la
production
de
maniere
a rester competi tif dans les prix
pratiques.
L'entreprise
investit
dans
ce
deuxieme
cas
pour
pouvoir reduire durablement ses couts dans la perspective d'une
amelioration des conditions de rentabilite.
Les facteurs types d' investissement semblent etre, bien plus
que le niveau de production,
l'evolution des prix relatifs des
facteurs. La distinction qui s'etablit ainsi entre investissement
de capacite et investissement de rationalisation semble ignorer
l'existence d'autres facteurs decisifs tels que le risque qui
d'ailleurs s'accroit dans les periodes de crise avec 1 'importance
des
variations
conj oncturelles
et
la
di f ficul te
a anticiper
efficacement. On ne saurait donc faire l'economie de la prise en
compte du risque dans la mesure Oll une decision d'investissement
et sa realisation engagent l'entreprise pour une longue periode.
Ainsi, si une anticipation de baisse de la demande implique une
suppression des excedents de capacite donc un desinvestissement,
il indispensable qu'une telle decision soit judicieuse. 11 en est
de meme si
l'entreprise anticipant un marche potentiel ou en
developpement decide d'accompagner la progression de la demande
en accroissant ses capacites de production. Le risque pris est
tel que l'entreprise pourrait se trouver en situation de sur-
capi talisation,
de
sur-investissement
Oll
le
volume
des
investissements
realises
est
superieur
a la capacite de
croissance de l'economie. Ce concept de sur-investissement dG. a
A.
BARRERE
est
donc
lie
a de mauvaises anticipations des
entrepreneurs sur la rentabilite d'une nouvelle accumulation de
capital.
11 importe tout de meme de preciser que la frontiere entre
investissement de capacite et investissement de rationalisation

- 82 -
est difficile cl etablir,
un investissement de rationalisation
pouvant tres bien s'accompagner d'un accroissement des capacites
de production et inversement.
Une fois de plus, ces deux formes d'investissement attirent
notre attention sur l'irnportance des capacites installees au sein
des PME.
La maniere dont
les decisions d' investissement sont
prises par ces entreprises est telle qu'elle leur pose cl la fois
des problemes de sur-dimensionnement et de couts d'oisivete du
capital. De plus la modernisation de certaines de ces entreprises
laisse entrevoirdes problemes de co ut des investissements et de
moyens de
financement,
de capaci tes d' absorption de la main-
d'oeuvre locale et du cout de formation des ingenieurs et des
techniciens
constituant
tous
des
points
qu'il
serait
utile
d' apprecier .
Nous
verrons
pl us
tard
dans
l' etude
d' exemples
concrets que la resolution de ces problemes n'est pas toujours
evidente pour les PME.
Les differentes formes d'investissement que nous venons de
presenter se rapportent toutes cl des formes classiques que lIon
rencontre couramment. Si les distinctions qu'elles permettent de
faire
sont
importantes,
elles ne
semble pas pouvoir traduire
toutes seules la complexite du probleme de l'investissement dans
les economies sous-developpees et plus precisement dans les PME
camerounaises.
11
existe
en
effet
d' autres
approches
du
probleme
qui
permettent de mieux saisir la particularite de l'investissement
dans ces PME.
1.4
La Complexite du problerne de l'investissernent dans
l'economie sous-developpee
On a pu cl la faveur de la crise deceler ces dernieres annees
une
forme
inhabituelle
d'investissement
qui
jusqu'ici
n'est
observee que dans les economies en developpement. Ce type
particulier
qualifie
d"'investissement
de
transit"62
par
B.
BEKOLO-EBE caracterise la formation du capital telle qu'elle se
.. - Ca concept est dU a B. BEKOLO-EBE, on lira a ce sUjet son article
intitule L'Investissement de Transit, Workinq Paper, GEREA, 1990.

- 83 -
realise pendant les periodes de grande croissance economique dans
des
entreprises
etrangeres,
notamment
dans
les
economies
africaines.
Pour
l'auteur,
l'''investissement
de
transit"
est
generalement
lie
a une decision d'investissement public a
l ' occasion d' appels d' offres pour I' execution de marches publics.
L' entrepreneur adj udica taire d' un de ces marches va investir
dans l'economie en limitant au minimum possible son apport en
capitaux
propres.
Le
financement
de
son
activite
va
done
s'effectuer, grace a la garantie offerte par le marche adjuge,
a partir des avances sur travaux qui lui seront consenties par
le
mai tre
d' oeuvre
et
egalement
par
les
emprunts
aupres
du
systeme
financier
officiel.
L' investisseur
redui t
ainsi
son
risque, le transferant pour l'essentiel au maitre d'oeuvre et au
systeme bancaire du pays 00 se fait l'investissement.
A l' inverse
et
bien que
la depense
d' investissement
se
rapporte a un marche local, elle se traduira par des transferts
reguliers a l'exterieur. Ces transferts se concretisent sous la
forme
d' achats
de
biens
d' equipement,
de
consommations
intermediaires, de paiement de la main-d'oeuvre etrangere dont
le
cout
represente
l'essentiel
des
charges
salariales
de
l'entreprise, du rapatriement des benefices degages. Le profit
genere par l'activite ne sera donc pas reinvesti localement meme
lorsqu'au
terme
du
marche
initial,
l'entreprise
engage
de
nouveaux. Cette
forme
d'investissement
est
generatrice
d'un
mecanisme de transfert de l'epargne interieure vers l'exterieur,
le
mouvement
s' accelerant
des
les
premiers
signes
de
ralentissement de l'activite economique dans le pays d'accueil.
Le processus
se prolonge
et
s' acheve dans
les
operations de
desinvestissement
auxquelles
l'entreprise
pro cede
facilement
lorsque la crise dure ou s'accentue.
La
realisation
des
actifs
de
l'entreprise,
du
reste
favorisee par la faiblesse du risque de l'investisseur, consacre
ainsi le caractere transitoire de cette forme d'investissement.
11
importe de
bien preciser
ici
la difference
que nous
etablissons entre ce type d'investissement appuye pour une grande
part
sur
le
financement
externe
et
la
creation
puis
le
developpement des PME camerounaises. Nous avons certes dans les

- 84-
developpements
precedents montre
la
faiblesse
des
res sources
propres des PME et la necessite pour ces entreprises de recourir
a des capitaux d'emprunt pour financer leur activite. Ainsi comme
l'investissement de transit,

l'investissement dans les PME est
largement tributaire de la dette qu'il fait naitre.
11 implique
egalement un certain nombre de
transferts vers
l'exterieur au
titre
d'achats
d'equipement,
de
consonunations
intermediaires,
d' acquisi tion
de
la
technologie
appliquee
aux
equipements
de
production. Par contre, a l' inverse de celui-ci, l' investissement
dans
les
PME
favorise
la
creation
des
emplois
donc
une
distribution locale des revenus en meme temps qU'il permet que
les profits generes par l'activite soient reinvestis au se in de
l'economie ou ils se sont formes.
Si
les
autori tes
economiques
ont
amenage
des
condi tions
favorables a l'investissement des entreprises a l'occasion de
l'execution de marches publics, elles semblent l'avoir fait dans
la perspective d'aider a la creation et au developpement des PME.
L'adjudication des marches a des grandes entreprises devait alors
induire
des
contrats
de
sous-traitance
en
faveur
des
PME
permettant
a celles-ci
de
participer
par
ce
biais
a la
realisation de ces marches.
Cet
objectif
ne
semble
pas
avoir
ete
realise.
Et,
cet
investissement a plut6t produit un effet d'eviction au detriment
des PME qui n'ont pu acceder ni directement ni indirectement aux
marches publics. De prime abord l'envergure des contrats semble
si importante qu'elle ne devrait mettre en competition que de
grandes entreprises de production de services dotees d'importants
moyens
financiers.
Manifestement,
1 'observation
revele
aujourd'hui qu'au demarrage de l'activite, la surface financiere
de ces entreprises n' est guere plus solide que celle des PME
locales.
Ce concept nouveau permet ainsi de poser de maniere globale
le probleme de la pertinence de certaines formes d' investissement
encouragees
specialement
dans
les
economies
non
encore
industrialisees.
11
relance
en
particulier
le
debat
sur
la

- 85-
relation
entre
investissement
et
accumulation 63
dans
ces
economies
dont
le
fonctionnement
differe
de
celui
des
pays
industrialises.
L'une des analyses systematisees en la matiere est celle de
Celso
Furtado
qui
a
permis
a l' auteur d' analyser les formes
d'investissement dans les pays du Tiers Monde et leurs effets sur
la
formation
du
systeme
economique
dans
les
economies
concernees 64 •
Les
investissements
dans
ces
economies
se
sont
realises
sous
la
forme
d' activi tes
productives
destinees
a
l'exportation.
L'introduction de
ces
activites
productives
a
entre autres
ete a l' or igine de
la creation d' un secteur de
production de services generateurs de flux de revenus d'un niveau
plus eleve. Ces nouveaux revenus semblent et re a l'origine de
l'introduction de modifications dans la composition de la demande
globale d'une part et de la formation d'un marche interne de
produits manufactures d'autre part. Ce marche est ainsi apparu
comme
une
opportuni te
qui
expliquerai t
pour
une
grande part
l'investissement dans le secteur industriel. D'ailleurs,
c'est
un
peu
sous
cette
forme
que
se
presente,
a notre avis,
la
naissance
de
certaines
des
PME
modernes
camerounaises
dont
certaines seront retenues comme exemples dans notre chapitre Ill.
La creation des unites industrielles locales dans ce contexte
s'appuie donc sur ce marche interne dans une perspective de parts
de marches croissantes de maniere a substituer leur production
aux importations.
Deux problemes majeurs decoulent de ce type
d'investissement
a)
D'abord
celui-ci
fait
appel
a des
equipements
de
production provenant de l'exterieur et con~us sans doute pour des
.3
_
Le debat autour du lien entre crolssance et investissement
est ancien et remonte A Ricardo lorsqu' i l fa1aai t
remarquer
que le taux de profit tire le taux de croiaaance. Lea
investiasements s'effectuant A concurrence des profits r~alis~s,
si le taux de profit d6crolt et s'annule, l'6conomie est menac6e
par la croissance ZMO. Keynes a a>cpr1m6 lea mAmes inqu16tudes
;
le f16chissement du taux de profit ou de l'efficacit6 marginale
du capital, la r6sistance A la baisse du taux d'int6rAt Bent une
menace pour l'incitation A investir et une voie ouverte A
la non croissance.
I.
_
Pour Itauteur la forme des investlssements dans cas 6conamdes et
l'6volution du systeme productif qui en d6coule permettent de
earact6riser le sous-d6veloppement en faisant un processus
historique autonome. On lira A ce sujet C.
Furtado,
Th60rie
du D6veloppement Economique, P.U.P'.
2eme 00. 1976 pp. 135-146.

- 36 -
marches
plus
vastes.
Les
adaptations
qui
peuvent
alors
etre
envisagees pour tenir compte du ni veau de
la demande
interne
entrainent
generalement
une
sous-utilisation
des
capacites
instal lees et des coQts de production eleves que l'exploitation
ne permet pas de couvrir.
L'entreprise est dans ce cas souvent amenee a produire en
de9a de son seuil de rentabilite.
L'une des consequences de cette situation est la fragilite
financiere
et
la
difficulte
de
l'entreprise
a
soutenir
la
concurrence apre de producteurs anciens sur le marche local et
dont les couts de production sont generalement maitrises a des
niveaux beaucoup plus bas.
lIs le sont d'autant plus que les
equipements ont ete depuis longtemps amortis.
Les
difficul tes
de
I' en treprise
s' aggraven t
encore
pI us
lorsque la demande se diversifie et que, pour suivre I 'evolution
des besoins exprimes par le consornmateur celle-ci doit investir
a nouveau de maniere a pouvoir s'ajuster. L'entreprise s'engage
des
lors
dans
un
processus
cumulatif
de
pertes
et
dans
un
mouvement vers l'impasse.
b)
11
arrive
egalement
que
l'entreprise,
consciente
de
l'importance de ses couts de production,
cherche a produire au
moins au niveau du point mort.
Elle se trouve confrontee cette
fois la a un autre probleme, celui de l'exiguite du marche devant
une fois de plus faire face a la concurrence de multinationales
occupant souvent une position de quasi monopole.
Ainsi,
aux problemes de maitrise de l'outil de production
viennent
s' ajouter ceux de
sous-utilisation des
capaci tes et
d'exiguite
de
marche.
L'ensemble
de
ces
problemes
a
pour
principale
consequence
la
gestion
de
flux
de
tresorerie
qui
n'arrivent pas a couvrir les couts de l'entreprise contribuant
a deteriorer davantage une situation financiere deja fragile. Ces
problemes
n' ont pas plus permis
a I ' entreprise de
faire
ses
prevlsions
d' exploi tat ion
et
de
tresorerie
et
d' etablir
une
veritable methode rigoureuse de gestion de son activite.
On
peut
egalement
souligner
dans
cette
mouvance
de
la

- 87 -
definition de formes irregulieres d'investissement et de leur
faible
impact
sur
le
processus
d'accumulation,
l'analyse
presentee par Carlo BENETTI.
L'auteur distingue trois formes d'investissements 65
dans les economies en developpement realisees dans une logique
de
destructuration-restructuration
de
ces
economies
par
le
systeme productif dominant.
a)
D'abord l'1nvestissement de substitution comrne son nom
l' indique,
cet
investissement s' explique par
la necessi te du
systeme productif dominant de se substituer au systeme productif
domine dans un double objectif :
- celui de creer des debouches aux produits exterieurs par
la destruction des formes locales de production ;
- celui d' ouvrir des sources d' approvisionnement en matieres
premleres
par
la
determination
de
secteurs
de
production
beneficiant prioritairement de flux d'investissement.
Comrne dans l'analyse precedente, l'expansion du systeme de
production local est fortement dependante de facteurs exogenes
mal maitrises.
Ce type d'investissement accroit la contrainte
exterieure et fait jouer a l'exterieur les effets positifs de
l'investissement.
b)
11 en est de meme de l'investissement de modernisation
qui
vise a operer un changement dans
la base
technique.
Cet
investissement
en
soi
n'est
pas
propre
a l'economie sous-
developpee, par contre c'est le contexte precis dans lequel il
se developpe qui tend a creer la particularite. Ces conditions
sont
a la
fois
celles
d'une
insuffisance
de
la
demande
interieure,
de
l'existence
d'un
potentiel
de
main-d'oeuvre
inexploite et qui ne trouvera pas de solution dans cette forme
d'investissement puis celui non moins important de dependance
technologique.
Car, cet investissement s'accompagne souvent d'un phenomene
de
delocalisation
du
capital
a l'origine des problemes de
transfert technologique,
de cout de maintenance d'equipements
-
C. BiNETT1, L'Accumulation du Capital dans les pays
capitalistes sous-d$veloppes. Cite par B. BEKOLO-EBE
dans son ouvrage, Le statut de l'Endettement Exterieur
dans l'ZCoDoaUe sous-d$veloppee, Edit Presence Africaine,
1985 PP 330-341. 11 presente dans ces lignes
l'econoaUe de l'analyse de BENKTT1 sur la question.

- 88 -
vetustes, de couts injustifies d'equipements obsoletes, de faible
competitivite des produits.
c)
Enfin l'investissement d'expansion dont les effets dans
les economies en cause se situent a l'oppose du role fondamental
qu'on
leur
a
reconnu
dans
la
croissance
des
economies
industrialisees.
L' impact
negatif
de
cet
investissement
est
similaire et meme plus amplifie que celui de l'investissement
de modernisa tion du fait de l' objectif d' elargissemen t de la base
productive qui le caracterise.
D'une
maniere
generale,
le
probleme
de
la
nature
de
l' investissement et celui sous-j acent de l' accumulation se posent
donc avec acuite dans les economies non industrialisees.
La plupart des traits ainsi releves peuvent aider a preciser
la specificite que les investissements revetent dans la mise en
place et l'evolution des PME Camerounaises. Leur particularite
peut etre saisie a plusieurs niveaux :
- D'abord les conditions de la technique dans cette economie
sont caracterisees par la mauvaise connaissance des equipements
pour
la
plupart
importes.
Ces
condi tions
doi vent
donc
etre
analysees comme des facteurs d'acceleration de la degradation de
l'outil de production. Les principales consequences dans ce cas
sont le taux d'amortissement eleve des machines installees, les
pannes
successives
necessitant
des
charges
de
maintenance
importantes,
les
delais
d'intervention
des
ingenieurs
et
techniciens etrangers detenteurs de la technique ... L'importance
des charges implicites et explicites resultant du mauvais etat
de
fonctionnement
des
usines
obe re
ainsi
la
tresorerie
de
l'entreprise
mettant
en
cause
la
realisation
des
formes
habituelles d'investissement deja citees.
C'est ainsi que les
dotations aux amortissements telles qu'elles peuvent apparaitre
dans
le
bilan
des
PME
ne
traduisent
pas
necessairement
la
constitution de res sources correspondantes pour le remplacement
des machines
vetustes.
Et,
si
la
constatation
comptable
des
amortissements est regulierement faite, a cause des problemes de
tresorerie,
elle ne s'accompagne pas d'une creation materielle
de fonds pour les operations de renouvellement de l'outil de
production.
En
outre,
comme
les
res sources
propres
des
PME
sont

- 39 -
caracterisees
par
leur
faible
niveau,
le
financement
de
l'activite necessite l'appel a des capitaux externes. Le niveau
des frais financiers tend ainsi a augmenter au fur et a mesure
de nouveaux emprunts sans que les conditions de la production
garantissent
la creation d' une
capaci te de
remboursement des
dettes contactees. Le mauvais fonctionnement technique des PME
eleve ainsi le niveau de leurs frais
financiers et hypotheque
ipso
facto
le
niveau
de
l'exploitation
et
celui
de
la
rentabilite. 11 rend alors difficile la formation d'un cash-flow
apte a financer le maintien du potentiel de l'entreprise puis
l' effort d' accumulation nette par
la crea tion d' une
capaci te
d'autofinancement.
Ainsi, la reconstitution du stock de capital et a fortiori
son accroissement
necessi tent
une
fois
de
pl us
le
recours
a
l'endettement la Oll la synergie de l'exploitation interne aurait
du jouer.
Le probleme est encore plus grave lorsque les entreprises
veulent
realiser
des
investissements
de
capacite
ou
de
modernisation.
L' importance des
capi taux
requis
nous
eloigne
encore
davantage
des
objectifs
de
maximisation
de
profit
poursuivis.
En effet,
nous avons vu que les choix sectoriels et les
choix de projets d'investissement essentiellement dans les PME
modernes
n'ont
pas
suffisamment
integres
certains
elements
fondamentaux. On peut citer par exemple le surdimensionnement des
usines, le faible taux d'utilisation des capacites, le cout d'une
technologie empruntee,
la difficul te a garantir une formation
continue du personnel et celle de sa gestion dans le sens d'une
affectation prioritaire aux generations nouvelles,
le probleme
meme de l'emploi que les PME sont supposees resoudre. 11 s'agit
la de points qui ne sont pas toujours pris en compte ou qui ne
le sont pas assez. L'une des resultantes de cette omission est
la
rapidi te
avec
laquelle
ces
equipements
se
deprecient
ou
deviennent obsoletes lorsqu'ils ne le sont pas deja au moment
meme
de
leur
acquisition
du
fait
du
phenomene
de
la
delocalisation.
Ce mode d'integration de l'investissement dans les PME agit
negativement sur l'efficacite marginale du capital et fragilise

-90-
les
entreprises
sur
les
plans
financier
et
technique
les
preparant
mal
a la concurrence des produi ts
importes
et
a
l'elargissement de leur part du marche. Cette fragilite debouche
necessairement sur la stagnation de l'investissement du se in de
ces unites de production, la reduction des marges beneficiaires,
l'aggravation du pilotage a vue de l'activite, le ralentissement
et meme le risque de blocage du processus d'accumulation.
Ces conditions difficiles de fonctionnement de l'appareil
productif nous am~nent a nous interroger sur la signification des
facteurs
qui
determinent
l' investissement
dans
les
PME
camerounaises.
Pour
cela
nous
ferons
d' abord
une
revue
des
determinants
courants
de
l' investissement.
Nous
apprecierons
ensui te
la
possibili te
de
leur
prise
en
compte
ou
de
leur
adaptation
au
contexte
precis
de
la
mise
en
place
des
PME
camerounaises.
$2
Les Dete~nants de la decision d'investissement
Nous avons dit que l'investissement des entreprises suppose
a la fois un arbi trage entre le present et le futur puis la
decision d'engager son capital dans une activite productive. 11
serait
actuellement
interessant
de
savoir
ce
qui
incite
un
entrepreneur
a un comportement d'investissement et ce qui
dete~ne son choix pour un type d'investissement donne.
2.1 -
Les dete~nants traditionnels de la decision
d'investissement
L'investissement est une operation qui se materialise dans
une depense immediate ou etalee sur une periode donnee, alors que
la
recuperation
du
capital
engage
devra
s'effectuer
progressivement sur plusieurs periodes. Le profit attendu d'une
telle operation semble donc constituer la base essentielle de la
decision d'entreprendre.
L'entrepreneur qui anticipe ainsi des profits le fait sur
la base des couts qu'il devra supporter.

- 91 ..
2.1.1 - Les anticipations des entrepreneurs
Pour
l'analyse
economique,
les
previsions
que
fait
un
investisseur quand a son activite puis au niveau de son profit
s'appuient sur l'observation de la realite telle qu'elle s'est
deroulee au fur et a mesure du temps.
L'entrepreneur
etudie
dans
ce
cas
l'evolution
d' une
ou
de
plusieurs
variables
lui
permettant
de
definir
sa
fonction
d'investissement.
Cette approche de la relation entre investissement et profit
nous semble pouvoir etre mieux comprise si on fait intervenir
dans l'analyse une autre variable, le cout du capital.
2.1.2
L'Importance du cout du capital:
La difficulte rencontree dans la definition de la notion de
capital et signalee dans le paragraphe precedent se retrouve une
fois de plus ici.
La tendance habituelle est de reduire le cout du capital au
taux
d'interet.
Mais,
meme
lorsqu'on
y
inclut
d'autres
composantes tels que le cout des fonds propres, les definitions
proposees sont getieralement orientees vers la determination du
seuil de rentabilite de l'investissement 66 • Le cout du capital
doit alors etre compris comme le seuil minimum de rentabilite
d'un projet d'investissement.
Une
meilleure
apprehension
de
cette
notion
de
cout
du
capital necessite une explication de son contenu. F. Poulon situe
une telle definition a trois niveaux :
a)
Le
cout
d'acces
au
capital
est
celui
que
supporte
necessairement un entrepreneur pour acceder
au
controle d' un
capital qu'il cherche a acquerir. Ce cout est different selon que
cette acquisition s'effectue par le biais d'un endettement ou
grace a des fonds propres qui eux aussi comportent un cout ou
encore grace a une combinaison de fonds propres et d'emprunts ;
b)
Cornme l'acquisition d'un capital suppose que celui-ci
sera mis
en exploi tation,
l' en treprise
doi t
en plus du cout
d'acces au capital supporter la charge d'amortissement, celle qui
f f
_
Une telle approcbe du capital est due a differents auteurs
dent PO. AP'TALION, B. Dubois, J. HALKIN, A. GRli'MILLET.
On lira A ce sujet, PO. Poulon, Economie Generale op cit p. 259.

92
-
assure
le
maintien
du
potentiel
de
production.
La
somme
de
l' amortissement
et
du
cout
annuel
d' acces
au
capital
permet
d'obtenir le cout d'usage,
c.
avec c = 8.q' + rq
ou
8
est le taux d'amortissement ;
q'
la valeur de remplacement du capital;
r
le taux d'interet annuel si on fait l'hypothese
d'un financement externe ;
q
le prix d'achat de l'equipement concerne.
c)
Au
co ut
d'usage
va
s'ajouter
le
cout
d'opportunite.
Celui-ci
designe
le
cout
supporte
par
un
capitaliste
lorsqu'il ne saisit pas de bonnes occasions d'investissement.
11
s'apprecie
egalement
comme
le
«manque
a gagner»
qui
decoule
d' un
investissement
moins
rentable
qu' un
autre.
La
complexite
et
la
difficulte
a faire une estimation chiffree
de
cet te
composante
du
cout
du
capi tal
rend
pI us
compliquee
son utilisation.
Ainsi,
le cout du capital se ramene souvent au seul co ut
d'usage qui est donc a la fois
- le taux d'interet des capitaux empruntes ;
- le cout des fonds propres dont essentiellement le
dividende des actionnaires ;
-
le cout du renouvellement des equipements.
Ainsi,
on peut a travers les notions de profits escomptes
et
de
cou.t
du
capital
comprendre
comment
se
determine
la
decision
d'investissement
de
l'entreprise.
Ces
notions
peuvent
donner
lieu
a d'autres formes de distinction des
facteurs
determinants
du
comportement
d'investissement
de
l'entrepreneur.
On peut ainsi distinguer
-
les facteurs financiers,
ceux qui se rapportent au cout
des capitaux ;
-
les facteurs
technologiques qui
favorisent
sur le plan
technique la prise de decisions et la realisation des profits
attendus ;
les
facteurs
lies
a la gestion et qui se rapportent
quant a eux a toutes les decisions au niveau de la direction
de l'entreprise,
au choix et a l'utilisation des facteurs de
production,
a l'organisation
de
la
production
et
de
sa
commercialisation,
etc.

- 93 -
D'une maniere generale ces trois types de facteurs influent
considerablement les uns sur les autres et s'imbriquent dans la
realisation des objectifs de profit de l'entreprise.
La
maitrise
de
chacun
d'eux
est
donc
une
necessite
pour
l'entrepreneur. Toutefois, l'un d'eux semble etre place au point
de depart et au coeur de l'activite,
occupant a ce titre une
place privilegiee dans
la
decision
d'investir.
Il
s'agit des
determinants
financiers
dont
nous
tenterons
de
montrer
1 'importance dans le developpernent de l'entreprise en general et
de la PME en particulier.
L'une des difficultes previsibles quant a l'application de
ces
determinants
financiers
au
contexte
particulier
des
PME
camerounaises
est
celle
de
l' estimation
de
ses
composantes,
celles couramment utilisees. 11 en est ainsi de l'evaluation du
cout du capital et de la difficulte a choisir un taux d'interet
surtout quand on sait que dans cette economie il n'e;{iste pas de
marche financier officiel dont le taux d'interet peut servir de
repere. La complexite du probleme est liee a l'existence de deux
taux d'interets au moins dont
le taux bancaire puis celui en
vigueur sur le marche informel des credits et de l'epargne, les
taux dans
les deux secteurs se formant differemment.
Ceux du
secteur bancaire sont ainsi fixes autoritairement alors que ceux
du secteur informel obeissent davantage a la loi de l'offre et
de la demande.
Ce
probleme
de
1 'evaluation
du
cout
du
capital
revient
lorsqu'on fait l'hypothese d'un financement sur fonds propres.
En
effet,
les
actions
des
entreprises
n' etant pas
cotees
en
bourse,
il est difficile de connaitre la valeur d'une ac~ion a
un moment donne donc le taux de rendement minimum exige par le
marche financier pour un placement en titre et de ce fait de
prevoir les dividendes a servir aux actionnaires. Le probleme est
meme plus ardu puisque l'entreprise doit decider auparavant de
l'affectation des benefices et de la distribution des dividendes
selon des cri teres propres.
L'appreciation
de
l'efficacite
des
choix
financiers
de
l'entreprise pose ainsi le probleme du choix d'un taux d'interet
permettant de determiner le cout des capitaux d'emprunts, celui
de
l'evaluation
du
cout
des
capitaux
propres
et
de
la

- 94-
determination
d'un
taux
d'actualisation
des
dividendes.
Le
probleme se
complique encore
lorsque
l' on introdui t
d' autres
aspects de la contrainte du financement dont le rationnement des
capi taux,
les
delais
longs
de
mise
a disposi tion des fonds
l' importance des garanties
exigees,
les
coQts
implicites des
transactions.
L'importance du probleme peut etre saisie ex-ante, au moment
de l'evaluation des projets ou ex-post au fur et a mesure de
l'exploitation.
Nous retiendrons a cette etape de l'analyse, les criteres
d'evaluation
des
projets
d'investissement.
Et,
dans
les
developpements suivants, surtout a l'occasion de l'etude de cas
de PME, nous apprecierons le comporternent de ces entreprises par
rapport aux criteres d'evaluation retenus.
2.1. 3
Les cri teres de choix des investissernents
Nous ne ferons pas ici une analyse exhaustive des cri teres
couramment utilises et qui sont la valeur actualisee nette,
le
taux de rendement interne,
le delai de recuperation du capital
investi. Ces cri teres sont certes d'une grande importance mais,
nous chercherons davantage a souligner ici les cri teres qui se
rapportent
etroi tement
a la decision d' investir dans la PME
camerounaise.
Nous avons en effet plusieurs fois rappele la faiblesse des
capitaux propres et la necessite du recours a l'endettement pour
la creation et le developpement des PME en general et des PME
camerounaises en particulier.
L'un des cri teres les plus significatifs pour l'appreciation
de l'impact du financement sur la rentabilite des investissements
est celui relatif a l'evaluation des flux de tresorerie att~ndus
de l'exploitation.
2.1.3.1
- Les previsions de flux de tresorerie
la vale~r
,
actuelle nette
L'analyse en terme de valeur actuelle consiste couramment
a comparer la depense d'investissement immediate a la succession
des
cash-flows
actualises
attendus
de
l' exploi ta tion pendant
toute la duree de vie des investissements.

- 95 -
Si .Io est la depense initiale d'investissement ;
.i
est le taux d'actualisation qui peut etre egal au
cout du capital ou generalement au taux d'interet
annuel moyen du marche ;
.P est l'horizon de l'operation
.Rp est le flux de liquidite ou cash-flow de la periode
P per<;u en fin de per iode 67 ,
n
VAN
=
E
l\\, (l+i) -p - I o
p=l
Cette formule de la valeur actualisee nette encore appelee
Good will ou quasi rente actualisee signifie que "la valeur de
tout
bien
de
capital
est
donnee
par
la
sornrne
des
valeurs
actualisees des revenus monetaires que la detention et la mise
en valeur de ce bien de capital permettent de realiser"~.
Theoriquement,
cette
valeur
actuelle 69
nette
permet
a
l'entreprise de juger de la viabilite ou de la non viabilite d'un
projet
d'investissement,
une
valeur
actuelle
nette
positive
traduisant la rentabilite de l'operation.
Ce concept cornrne les precedents semble d'un grand interet
pour
l' entreprise
qui
peut
ainsi
prevoir
l' evolution de
son
exploitation. Mais, plus que les deux aut res la valeur actuelle
nette renseigne sur le mouvement au fur et a mesure du temps de
la tresorerie permettant a l'entreprise de prendre a temps les
decisions ou les corrections qui s'imposent pour une activite
plus rentable. Mais ce probleme deja pose revient ici, celui du
choix du taux d'interet, du taux d'actualisation applicable pour
les PME. Car, a notre avis, les difficultes de tresorerie souvent
signalees dans les PME ont au moins une double signification.
a) Elles peuvent traduire des previsions de tresorerie trop
"
-
Cette approche financiere de la valeur a fait
l'objet d'une generalisation de la part de Irving Fisher
(1930) et est connue sous le nom de "Theor~ du capital-valeur".
On lira a ce sujet R. COBBAUT, Theorie Financiere,
Edit Economica 1987, p 30.
-
Idem, p. 31
Idem,
p
31.
On peut l~re encore G. CBARREAUX, Gestion Financiere,
op c~t. p 27-43.

- 96-
optimistes
confirmant
alors
le point
de
vue
selon
lequel
le
risque
d'entreprendre
n'est
pas
suffisamment
pris
en
consideration
par
les
entrepreneurs.
Mais
des
ecarts
de
tresorerie frequents peuvent tout simplement etre la consequence
d'une mauvaise estimation. 11 se pose a ce niveau un probleme de
redeploiement de criteres d'evaluation. Cette remarque s'adresse
davantage,
a notre avis,
aux PME du secteur moderne dont les
etudes de faisabilite ont souvent permis de decider en faveur des
projets d'investissement etudies, mais dont les resultats se sont
souvent
tres
significativement
ecartes
des
previsions
de
rentabilite etablies au moment de l'etude du projet.
b)
On pourrait aussi pens er a une autre explication, celle
d'une absence totale d'evaluation aidee par la complexite des
techniques classiques generalement utilisees.
C'est ce qui se
passe
apparemment
dans
les
PME
du
secteur
informel
ou
les
conditions
d'entree
et
d'installation
dans
le
secteur
sont
differentes
de
celles
de
l' entrepreneur
du
secteur
moderne.
Toutefois
cette
absence
d'evaluation evoquee
ici
ne peut etre
qu'apparente.
Et,
i l
nous
semble bien que
les
PME informelles
font a leur maniere une appreciation du risque qU'elles prennent
meme si celui-ci peut paraitre moins important a cause du faible
cout d'installation.
Nous verrons en effet avec les exemples de PME informelles
au
chapitre
IV,
que
le
coo.t
d'installation
dans
le
secteur
informel est relativement faible en comparaison de celui des PME
modernes. On verra egalement que le niveau des investissements
s'accroit avec le niveau de l'activite.
11 nous semble qu'il
s'agisse bien la d'un comportement d'investissement lie a une
forme d'evaluation particuliere, mais logique et circonstanciee
du
risque
ou
les
cri teres
ne
sont
plus
uniquement
le
taux
d'interet mais un ensemble d'elements plus complexes.
On peut ainsi a partir de ce constat reecrire pour les PME
Camerounaises la V A N.
Nous partirons de la formule habituelle de la V A N

- 97 -
n
V A N =
E
~ (1+i) -p -
1 0
p=l
ou ~ = taux d'interet annuel
moyen du marche.
Nous
avons
deja
fait
un
certain
nombre
d'observations
s'agissant du taux a appliquer pour les PME Camerounaises. Nous
avons en particulier dit
- qu'il n'y a pas de marche financier conventionnel et donc
pas de taux d'interet moyen du marche ;
-
que
ce
taux d' interet meme
s' il
etai t
defini,
serai t
insuffisant pour rendre compte des conditions de credit des PME
Camerounaises ;
que
d'autres
facteurs
technologiques
et
de
gestion
influent enormement sur les resultats de l'activite des PME et
peuvent
avoir
un
impact
tout
aussi
grand
que
celui
du
taux
d'interet.
Le taux d'actualisation comprendrait donc :
le
taux
d'interet
qui
serait
cornpris
entre
le
taux
bancaire et le taux effectif sur le marche informel. 11 serait
plus proche du taux bancaire pour les PME modernes eligibles au
credit bancaire et plus proche du taux sur le marche informel
pour les PME qui se financent uniquement sur l'autre marche. Ce
taux
d' interet,
nous
l' ecrirons
i'
parce
qu' il
a
une
signification
differente
de
celle
de
1
dans
la
formule
precedente.
Mais comme ce taux d'interet tout seul ne suffit pas pour
traduire les difficultes des PME a se financer a credit, on lui
adjoindra un taux d'interet implicite que nous appelerons ill.
Ce taux s'elevera avec le durcissernent des conditions bancaires
de
te~e et de garanties d'une part et l'importance des couts
technologiques
et
de
gestion
lies
cl
la mauvaise mai trise
des
equipernents
et
cl
une
faible
experience
industrielle
des
entrepreneurs d'autre part.

- 98 -
La valeur actuelle nette devient ainsi
n
V A N = E
I\\. (l+i '+i n ) -p - 10
p=l
Le
taux
d' actualisation
sera
donc
plus
eleve
pour
les
entreprises qui ont a faire face a un environnement economique
et
financier
hostile,
pour
celles
dont
les
condi tions
technologiques ou techniques sont precaires et pour celles enfin
dont la gestion est essentiellement atone. Nous verrons par la
sui te,
avec
des
exemples
concrets
que
i"
occupe
une
place
preponderante dans la vie et le developpement des PME et que l'on
pe ut etablir une relation entre i' et in de telle sorte que l'on
peut encore ecrire :
n
V A N =
E
I\\. (l+&i') -p -10
p=l
avec & = parametre > 1 ---->2
La
signification
de
&
decoule
en
realite
de
la
place
centrale qu'occupent les determinants financiers et que traduit
le
r61e
du
taux
d'inter@t
dans
les
di££erents
crit~res
d'appreciation des projets d'investissement. Ce r61e primordial
de i' nous permet de penser que si la qualite et la quantite des
res sources le permettent, l'entreprise peut ainsi en fonction de
ses
objectifs
acquerir
des
equipements
en
meilleur
etat
de
fonctionnement, requerir l'avis de divers conseils techniques et
en gestion, etablir un programme de formation continue pour son
personnel et eviter un pilotage a vue de son affaire. in a donc
une valeur positive dependant de i', evoluant dans le m@me sens
que i' et qui dans le pire des cas peut prendre la valeur de i'.
Une bonne determination du taux d'actualisation nous semble
@tre une operation indispensable pour l' etablissement des comptes
previsionnels d'exploitation et de tresorerie plus realistes par
une appreciation plus judicieuse d'un projet d'investissement

-
99 -
dans
une
PME.
Elle
confirme
une
fois
de
plus
l' existence
d' une
relation
etroi te
entre
la
valeur
d' une
entreprise
et
les choix financiers qu'elle peut effectuer.
La definition des PME camerounaises et l'analyse de leurs
caracteristiques
nous
ont
permis
dans
ce
chapi tre
de
poser
entre
autres
problemes
celui
de
l'insuffisance
des
fonds
propres
puis
de
relever
les
difficul tes
que
cette
carence
cree
dans
le
financement
du
programme
d' investissement
et
d'exploitation de ces entreprises.
Aussi
la lecture
que
nous
faisons
par
la
suite
du
role
theorique
de
l'endettement
suscite-t-elle beaucoup d'espoir pour les PME.
Elle revele en
effet
l'interet
du
financement
externe
pour
l'entreprise,
l'endettement
apparaissant
alors
comrne
un
facteur
d'accroissement de la capacite d'autofinancement.
Le recours a l'emprunt peut ainsi constituer une reponse
aux problemes de financement des PME qui peuvent par ce biais
desserrer
la
contrainte
du
financement
interne
et
realiser
leur
projet
de
creation
ou
de
developpement.
Toutefois,
l'effet de levier ne se
realise pas de
fayon
automatique.
11
n'est donc pas acquis du fait
du seul endettement.
Et,
c'est
cette difficulte que traduit la condition p-i>O de la formule
descriptive de l'effet de levier 7o •
Le
probleme
du
recours
aux
res sources
externes
pour
l' entreprise
en
general
et
pour
les
PME
en
particulier
se
resume
alors
dans
cette
condition.
11
semble
meme,
en
l'absence d'un marche
financier
officiel,
se poser avec plus
d' acui te
au
PME
camerounaises
que
cette
si tuation
astreint
quasiment
au
credi t
bancaire
en
tant
que
principale
source
conventionnelle de financement.
En
effet,
le
dispositif
officiel
de
financement
en
presence duquel se trouvent
les
PME est pour une grande part
constitue
du
systeme
bancaire.
11
importe
donc
de
s'interroger
sur
la
specifici te
des
problemes
inherents
au
financement bancaire des PME.
70 - Voir description de l'effet de levier supra p. 65-69.

CHAPITRE
I I
LE PROBLEME DE L'ADAPTATION DES PME AUX
CONDITIONS BANCAIRES DE FINANCEMENT

- 101 -
INTRODUCTION
Nous
nous
interesserons dans
ce
chapi tre
aux
condi tions
et exigences du systeme bancaire en matiere d'eligibilite aux
credi ts
qu' il
octroie.
Nous
insisterons
en
particulier
sur
les conditions de montant et de ter.me des credits,
sur celles
de
garanties
et
de
taux
d'interet.
Nous
pourrons
ainsi
au
regard
de
ces
conditions
du
financement
bancaire
et
des
problemes des PME deja soulignes,
apprecier l'aptitude de ces
entreprises a faire jouer sur leur activite l'effet de levier
attendu de leur endettement.
Precisement,
autour
de
ces
deux
axes,
celui
du
comportement
d'intermediation
des
institutions
de
credit
et
celui
du
comportement
d'endettement
des
entreprises,
s'est
developpe
une
controverse.
Deux
types
d'analyses
ont
ete
ainsi
faites
qui
nourrissent
un
important
debat
dont
on
pourra voir l'actualite s'agissant du probleme du financement
des
PME
camerounaises.
Dans
le
cadre
de
ce
debat,
une
premlere
analyse
met
en
evidence
les
mecanismes
du
marche
comme
facteur
determinant
du
processus
d' ajusternent
a
l'equilibre.
Cette approche est defendue par les
theoriciens
de
l' equilibre
du
marche
qui
considerent
la
rnonnaie
comme
faisant
l' obj et
d' une
offre
et
d' une
dernande.
Cette
theorie
de
l' equilibre
du
rnarche
fai t
trois
hypotheses
d' offre
de
rnonnaie ou chaque fois
la quantite de rnonnaie est deterrninee
par un agent different.
Dans
les
deux
prernleres
hypotheses,
l' offre
de
rnonnaie
est exogene et determinee soit par l'Etat,
soit par la Banque
centrale.
La
creation rnonetaire
est
alors
passive
parce
que
se
faisant
en
dehors
des
principaux
acteurs
de
l' acti vi te,
les agents a deficit.
La distribution du credit qui s'en suit
fait ainsi reference au concept de rnultiplicateur de credit.
Dans
la
troisierne
hypothese,
le
montant
des
credits
distribues est decide par les institutions de credit dont

- 102 -
l'activite s'appuie sur la demande des entreprises. L'offre de
monnaie dans ce cas est endogene et s'inscrit dans un cadre plus
dynamique,
celui du diviseur du credit.
La demande de monnaie
dans cette theorie est traditionnellement analysee du point de
vue des menages detenteurs de l'epargne pour definir les motifs
de la composition de leur patrimoine. L'offre et la demande ainsi
def inies
ne
peuvent pas
etre
egales
ex
ante.
L' equilibre du
marche s'obtient par ajustement soit du niveau des prix selon le
modele de la theorie quantitative,
soit par la flexibilite des
taux d'interet selon le modele Hicks-Hansen IS-LM,
soit encore
par ajustement des flux selon les modeles avec rationnement.
Quant
a
la
deuxieme
approche,
celle
de
la
theorie
du
circuit, elle presente l'economie comme un ensemble hierarchise
de flux 00 les flux monetaires jouent un role fondamental.
lls
relient les banques, les entreprises etles menages; les banques
etant
placees
au
sommet.
Cette
analyse
met
l' accent
sur
la
monnaie
en
tant
que
monnaie
de
credit,
c'est-a-dire
fondamentalement un actif adosse sur une creance que detiennent
les agents a deficit de financement sur le systeme financier. Il
s' etabli t
donc entre ces differents poles d' intervention
"un
circuit " de la monnaie durant lequel les entreprises doivent
realiser des profits suffisants pour satisfaire a la contrainte
monetaire l
Cette theorie rend compte de
la condi tion de
survenance de la crise.
La verification empirique de ces theories a permis dans des
reflexions
precedentes
la
classification
des
economies
par
rapport a l'un ou l'autre courant de pensee2
Et aujourd'hui,
la realite de l'economie camerounaise prouve l'actualite de ce
debat
sur
la
theorie
monetaire.
Cette
actualite nous
parait
particulierement enrichissante dans la mesure 00 elle revele une
situation
inhabituelle
00
ces
deux
aspects,
Economie
d'Endettement et Economie du Circuit pourtant distincts semblent
-
La contrainte monlltaire est dllf1n1e p:u: F.
PouJ.on comna
l'Ob11gat1on pour 1es entrepr1ses deb1tr1ces de sat1sfaire
A la condit1on de remboursement.
-
F. PouJ.on a vllr1f111 emp1r1quement la condit1on de
cr1se pour l'&conarn1e Fran9aise. On 11ra A ce sujet
F. PouJ.on. Thllor1e des lIconarn1es d' Endettement et
thllor1e du c1rcu1t face A la cr1se 1n Revue
d'Econam1e App11qulle N° 3 1993
pp. 467-494.

- 103-
se retrouver ainsi que nous le verrons par la suite,
au meme
moment dans la meme economie 3 • Nous pourrons alors voir que les
faiblesses
des
PME dues
essentiellement a la modicite de leur
surface
financiere
et
a leur mode de fonctionnement ne leur
permettent pas toujours d' acceder aux concours bancaires. Et meme
lorsqu'ils
y accedent,
les
conditions
de
taux d' interet,
de
montant et de terme des credits puis celles de garanties et de
delais
de mise a disposi tion des
fonds
sont
telles
qu' elles
gene rent
des
charges
financieres
lourdes
qui
pesent
sur
la
tresorerie des entreprises. Et,
le poids de ces charges tend a
s'elever
davantage
avec
les
defaillances
internes
des
PME.
Celles-ci sont essentiellement de nature technologique et sont
alors liees a la maniere dont s'operent les choix sectoriels,
notamment dans les PME modernes. Mais elles sont aussi fortement
tributaires d' une gestion et d' une organisation souvent soriunaires
de l'activite se faisant parfois au jour le jour.
11 apparait donc comme une inadequation entre la nature des
res sources offertes et le mode de
fonctionnement des PME qui
hypotheque les chances de remboursement des credits consentis.
Ce risque de survenance de crise a bien ete pressenti a la fois
par les pouvoirs publics d'unepart, et par les PME elles-memes
d'autre part obligeant les uns et les autres a la recherche de
solutions au probleme.
- Pour les pouvoirs publics, la solution a surtout consiste
en la mise en place de mesures etant a la fois d'ordre financier,
fiscal ...
- Pour les PME,
l'une des solutions vers lesquelles elles
se retournent de plus en plus est l'appel aux circuits informels
d'epargne et de credits qu'elles considerent comme une veritable
alternative pour un financement adapte a leurs besoins.
Notre analyse s'articulera donc en trois points:
D'abord nous nous arreterons sur la nature et l'importance
des problemes lies au financement bancaire des PME. (Section I)
-
H.ATTOUH s'est inte[[og~ sur lA ra[~nt~ de l'Economie
cam~[ounais~ A l'Economie d'8ndett~ment. On ~e rapportera
pour plu."1 de
d~t:aJ.l.9 A un ar:ticle r!~ 1 'auteIJr,
1 'f.conomle
Cam0I·olln~'.~e peut-elle ~tre cOll~l(i~r~e comlnp llt)~ ~cono,nie
d'~nlj~l:telnellt ? J.n R~vtJ~ Cat'l~rOU/lRi~e de managem~llt
0
11
1-4
19R6.

- 104 -
Nous verrons ensuite comment les pouvoirs publics ont
tente de resoudre ces difficultes et apprecierons les
resultats auxquels ils sont parvenus
(Section 11)
Nous analyserons enfin l'impact des solutions recherchees
par les PME elles-memes lesquelles consistent
essentiellement en l'appel au financement des tontines,
composante principale du'systeme informel d'epargne et de
credits. (Section 111)

- 105 -
SECTION I
L' APPAREIL CONVENTIONNEL DE FINANCEMENT ET LES
EXIGENCES DU RECOURS AU CREDIT BANCAIRE
La
fonction
fondamentale
des
banques
en
tant
qu'intermediaires financiers est de realiser une adequation en
quantite et en qualite des
flux monetaires et financiers
aux
besoins de l'economie , en privilegiant les secteurs consideres
comme prioritaires. On retrouve cette analyse chez J.H.DAVID qui
la resume en ces termes " ... Plus la qualite de l'intermediation
ainsi realisee dans une economie est grande, plus les res sources
disponibles dans cette economie sont utilisees dans de bonnes
conditions et plus la croissance de l'economie peut etre
rapide" 4
Le role d'intermediaires financiers est donc actif.
Et,
s' agissant
du
financement
des
PME,
il
s' identifie
El.
une
implication totale du banquier dans la vie de ces entreprises,
une parfaite connaissance des faiblesses et des forces de celles-
ci et une redefinition des ~odalites de participation efficace
au financement des besoins exprimes ou deceles.
Des lors,
la
prise en compte des particularites des PME devient une demarche
fondamentale
qui
integre
l'insuffisance
des
garanties,
la
faiblesse des fonds propres,
l' organisation tres simple de la
gestion, la difficulte El. produire des bilans classiques ... D'une
maniere generale, elle impose une approche individualisee telle
que les conditions de taux d'interet, de garanties, de montant
et de terme contribuent El. un denouement des credits consentis.
Comment cette fonction d' intermediation est-elle exercee par
les
banques
au
Cameroun
?
Comment
celles-ci
con~oivent et
appliquent-elles leurs conditions de financement aux PME ? Telles
sont les principales interrogations auxquelles nous tenterons
d' apporter
des
elements
de
reponse
dans
cette
section.
Nous
verrons
alors
que
la
nature
et
les
condi tions
des
concours
offerts par le systeme bancaire ne semblent pas fondamentalement
adaptees au financement de la production en general et El. celui
de
l'investissement
dans
les
PME
en
particulier.
Les
PME
pourraient donc difficilement El. partir du credit bancaire, mettre
en place une activite qui genere des ressources suffisantes pour
- J. R. David, la ~nnaie et la Politique Hon6taire,
Edit . . . Kconom!ca, 1986, p.143.

- 106 -
le
rernboursement
de
leur
dette
et
ensuite
pour
leur
investissement net.
$1-
Le role des banques dans le financement de
l'investissement des PME Camerounaises
Une meilleure
appreciation du
role
des
banques
dans
le
financement
de
la
creation
et
du
developpement
des
PME
au
Cameroun necessite un rappel des bases theoriques de la fonction
d'intermediation bancaire.
1.1-
L'importance theorique de l'intermediation bancaire
L' analyse
de
la
fonction
d' intermedia tion
dans
le
financement de l'investissement a permis a la theorie economique
de mettre en relief deux principaux types de comportements des
banques :
- un premier comportement privilegie l'activite de credit
en tant que mobile premier de l'activite bancaire. La creation
monetaire est alors endogene et est determinee par le niveau des
besoins de
l' economie.
Les
banques
en tant
qu' intermediaires
financiers
font
passer
la
distribution
du
credi t
avant
des
preoccupations de tresorerie et de recherche d'un financement.
Ce comportement est decrit par L et V.
LEVY-GARBOUA5
11 repose
sur le principe que le refinancement de la ban que centrale et la
liquidi te
du marche rnonetaire
sont
assures
aux
banques
tant
qu'elles acceptent d'en payer le prix. Elles definissent ainsi
elles-memes le niveau de leurs operations de credit en fonction
des besoins des entreprises, de leur disposition a se financer
au taux fixe et de leur rentabilite ;
un
deuxieme
comportement
accorde
la
primaute
a la
liquidite bancaire, et est fonde sur le concept du multiplicateur
de credit. L'offre de credits a l'economie est determinee par le
niveau
de
refinancement
tandis
que
sa
variation
depend
de
-
L. et v. LBVY-GAR!lOUA, le Comportement Bancaire,
le Oiviseur de Credit et l'Efficacite du Contr61e
Monetaire, Revue &conamique 1~72, citee par F.Poulon,
&conCllll1e Generale, op.c.1t. p 233.
On lira eqalen-ent sur ce mIlme su:let J. H. OAVlO, La Monnaie
et la Politique Monetaire.
Edit Econamica
2e edition 1~86, pp 140 et 141

- 107 -
l'evolution de la liquidite bancaire. Elle revet donc de ce fait
un caractere exogene.
La
creation
monetaire
et
la
distribution
du
credit
au
Cameroun semblent se rapprocher davantage ainsi que nous allons
le
voir
de
ce
dernier
type
de
comportement.
La
question
fondamentale que souleve cette analyse est de savoir comment vont
s' aj uster les besoins et
les capaci tes de
financement.
Cette
question qui est egalement au coeur du raisonnement de J.
R.
Hicks a permis d'expliciter le clivage economie d'endettement-
economie de marches financiers.
S'agissant de l'economie camerounaise,
cette meme analyse
va nous permettre d'apprecier comment un systeme bancaire situe
dans la logique du multiplicateur du credit peut faire face au},
problemes de financement de la depense d'investissement des PME.
Dans un contexte d'offre de monnaie exogene, la liquidite que les
banques
cherchent
a preserver est consti tuee d' une part des
res sources du refinancement et d'autre part de celles qui leur
reviennent sous forme de depots et dont une partie doit etre
transformee.
Cette
fonction
de
transformation
des
actifs
par
les
intermediaires
financiers
a ete decri te
dans
les
travaux
de
Gurley et Shaw6 et presente un double interet.
a) D'abord elle met en relief deux formes de dettes :
la dette primaire ou la dette directe des agents a
deficit de financement negociee directement aupres des
epargnants ; a ce stade les operations de prets et d'emprunts ne
font pas intervenir les institutions de credits;
puis
la
dette
indirecte
des
emprunteurs
ultimes
contactee par le biais de la dette des institutions financieres,
dette secondaire a l'egard des epargnants agents a excedents de
financement.
C'est
sous
cette
derniere
forme
que
sont
couramment
financees les operations d' investissement dans les economies sans
marches
financiers,
a l'instar de l'economie camerounaise.

-
John O. GURL&Y et Edward S. SHAN, La Monna.1e
dans une Theorie des Actifs Financiers Traduction du Centre
de Traduction. &conom1ques de P&RPIGNAN
Kdition Cuja.., Paris 1973 p.5.

'- 108 -
L'importance et le ni veau de
l' acti vi te des entreprises sont
alors determines par le comportement des intermediaires ;
b)
Ensui te
elle
fai t
intervenir
une
autre
fonction
de
l'intermediation qui consiste en la gestion des besoins et des
moyens de financement en transformant la maturite des depots en
fonction
de
la
nature
des
besoins
des
agents
economiques
emprunteurs ultimes. Elle assure ainsi la compatibilite entre les
besoins
expr imes
et
la
quali te
des
ressources
consti tuees
a
travers la distribution par terme de celles-ci. Le financement
de
la production depend
alors
de
la
capaci te
des
banques
a
transformer
les
depots
de
la
clientele
en
credits
d' investissement. Le dynamisme du processus de transformation des
maturites
des
depots
courts
en
credits
longs
determine
la
structure
par
terme
des
credi ts.
Ainsi,
la predominance
des
credits a court terme, que nous pourrons observer dans l'economie
camerounaise traduit la faiblesse du processus. En effet cette
transformation
ne
s' opere
pas
sans
risques.
Et
ce
sont
les
risques lies a ce processus qui sont a l'origine du debat autour
de la question7 •
La controverse s'est developpee autour de deux approches
- la REAL BILL DOCTRINE
- la SEDIMENT THEORY.
Pour la REAL BILL DOCTRINE, la maturite des credits ne doit
pas etre superieure a celle des depots tandis que pour la Theorie
de
la
sedimentation,
la
faible
maturite
des
depots
n'est
qu'apparente et la liquidite bancaire se renouvelle constamment
par
les
remboursements
de
credi ts,
les
res sources
du marche
monetaire, celles du refinancement de l'Institut d'emission, les
depots de base. Ces depots a court terme peuvent ainsi financer
les credits longs sans mettre en peril la liquidite des banques,
celle-ci etant entretenue par divers mecanismes crees sur le
marche monetaire et sur celui du refinancement.
L'efficacite des banques est donc fonction de la maniere
dont sont gerees leurs res sources et de la maniere dont celles-ci
-
One analyse succ1ncte c stir' -:d'e"'~lJlt est presentee par
M. ATTOOB, Le R6le des sanqli,t,( COIIIIlerciaJ.es dans la
Mobilisattorr et lo' ~=&~ ds l' Epargne au Cameroun in Revue
~~s~ d«~'
, Deux1eme et Troisieme Tr1mestre 1997.

- 109 -
sont distribuees entre credits longs et credits courts perrnettant
d'en assurer le total remboursement.
La distribution par terrne des credits apparait ainsi cornme une
autre fonction de gestion qui renforce et complete celle de la
transformation
en
precisant
davantage
les
contours
de
l'intermediation. La nature et la qualite du financernent sont
determinees par la capacite des banques a transformer les depots
de la clientele en credits a la production et ales affecter aux
emplois les plus judicieux de maniere a garantir la permanence
et la regularite de l'accumulation.
La banque au Cameroun ne semble avoir suivi l'evolution de
la
fonetion
d'intermediation
ni
au
niveau
de
la
creation
monetaire ni a celui de la collecte et de la transformation des
depots
nl
encore
a
celui
de
la
distribution
par
terme
des
credits, celle-ci s' etant essentiellement effectuee en faveur des
credits a court terme, malgre
les multiples reformes engagees
dont la plus recente est la
devaluation du franc CFA.
1.2
La creation de la monnaie de credit en faveur des
PME camerounaises
L'importance et la structure de l'offre de monnaie aux PME
locales
nous
semblent
etre
etroi tement
dependantes
des
possibilites de creation de la monnaie de credit dont nous avons
deja souligne le role moteur et qui elles-memes sont modulees a
partir
de
la
politique
monetaire
nationale.
Or,
l'une
des
particulari tes de cette creation monetaire est qu' elle intervient
dans
le
cadre
d' une
zone
monetaire,
la
zone
franc
ou
plus
exactement
dans
l' une des
enti tes
qui
la eornposent
laquelle
comprend les six Etats de l'Afrique Centrale reunis autour de la
Banque des Etats de l'Afrique Centrale,
(BEAC)8. La creation de
la monnaie
en
faveur
des
PME
renvoie
done
necessairernent
a
l' ensemble
du
systerne
financier
et
a la question de savoir
-
w zone franc est conpos6e aUjourd'hui de la France avec
ses departements et territoires d'outre mer, les pays li6s A
elle par une convention de compte d'operations : les Comores et
13 pays pour les deux zones d' lmU.ss10n de l ' Afr1que de
l'Ouest et de l'Afr1que Centrale.
Pour l ' Afr1que, les organes charg6s de la mise en oeuvre
de la coop6rat10n monetaire sont : pour l'Afr1que de
l'ouest, le Conse11 des Hinistres de l'Un10n Hon6taire Ouest
Africa1ne, organe suprllme de coordinat10n et la Banque des
Etats de l ' Afr1que de l ' Ouest, organe techn1que.
Tandis qu'en Afr1que Centrale, ce r61e est joue respect1vement
par un Com1te Hon6taire Hixte et la Banque des Etats de l ' Afrique
Centrale qui reunit le Cameroun, le Gabon, le Congo, la Rhpublique
Centrafrieaine, le Tehad, la Guinee Equatoriale.

- 110 -
comment
ses
structures
et
ses
mecanismes
de
fonctionnement
peuvent
generer
des
res sources
monetaires
et
financieres
suffisantes en qualite et en quantite pour le financement des PME
camerounaises. Nous
allons
donc
faire
un
bref
rappel
de
l'incidence du fonctionnement du systeme dans
son role et sa
capacite
de
creation
et
de
distribution
des
financements
sollicites
par
l'economie
en
general
et
par
les
PME
en
particulier.
1. 2.1
Les avantages lies a l'existence de la zone franc
L'evolution du systeme financier camerounais et sans doute
de celui des autres pays membres de la zone BEAC est marquee par
deux grands moments.
a) D'abord la mise en place de la BEAC chargee de la gestion
de la monnaie commune et issue des accords de Brazaville en 1972.
Ces accords en font la Banque des differentes banques des six
Etats de l'Afrique Centrale ,
dont le Cameroun, membres de la
zone d'emission B.E.A.C .. Nous verrons les implications de cette
architecture sur la capacite de creation de res sources monetaires
et
financieres
adaptees
aux
besoins
exprimes
par
les
PME
camerounaises.
b)
Ensuite, une impulsion nouvelle sera donnee au systeme
avec la reforme bancaire intervenue en 1973 et qui est le point
de
depart
des
reformes
financieres
qui
vont
suivre
dans
l'ensemble de la zone.
Les raisons de cette reforme nous semble-t-il,
sont liees
aux orientations originelles du
systeme
financier.
En effet,
celui-ci a ete construit au moment de la mise en valeur autour
de succursales de banques etrangeres filialisees par la suite
(B1AOC,
SCB,
B1C1C,
SGBC)
pour
facili ter
le
financement
des
activites de traite et des importations. D'autres institutions
financieres bancaires et non bancaires parmi lesquelles la Banque
Camerounaise de Developpement
(BCD) dont on appreciera le role
dans le financement des PME, s'y ajouteront par la suite.
Cependant,
l'evolution de la structure productive qui est
nee de la formation de revenus
importants et qui caracterise
cette forme d'activites au sens ou les decrivent C. FURTADO, C.

- 111 -
BENETTI 9 a surtout permis de mettre en exergue les faiblesses du
systeme bancaire face aux nouvelles preoccupations, celles de la
creation
d' un
tissu
industriel
permettant
de
repondre
cl
la
demande exprimee. On comprend donc mieux l'importance de cette
reforme pour l'ensemble de l'economie et plus particulierement
pour
les
PME
camerounaises.
Les
principaux
obj ectifs
de
la
reforme bancaire sont ainsi
l'accroissement
des
ressources
des
banques
et
plus
precisement de leurs depots
- la promotion du systeme productif ;
- une meilleure mobilisation des ressources monetaires et
financieres en vue du developpement et de la diversification de
la production ;
et
dans
cette
perspective,
des
moyens
d'action
plus
importants
permettant
aux
pouvoirs
publics
d' agir
plus
efficacement sur le systeme bancaire. La reforme visait donc le
renforcement des moyens necessaires au financement de l'appareil
de production et singulierement un meilleur encadrement financier
des
PME.
Cette
reforme
permet
ainsi
d'agrandir
le
paysage
bancaire camerounais qui passe de 5 banques avant la reforme cl
11 banques en 1985 totalisant 172 guichets contre 84 en 1974. 10
La consequence immediate sera donc une plus grande couverture
bancaire
de
l'ensemble
de
l'economie.
Il
s'en
suit
un
accroissement de la masse des res sources qui laisse penser cl une
diversification possible des activites.
S'agissant du cas precis des PME, des mesures particulieres
seront prescrites par les pouvoirs publics.
Il est ainsi demande aux banques commerciales de reserver
20 % de leurs concours au financement de l'investissement des
PME.
De
la
meme
maniere,
les
activites
de
la
Banque
Camerounaise
de
Developpement
vont
etre
reorientees
vers
le
financement
du
secteur
productif.
On
soulignera
surtout
la
9
On lira cl ce sujet les developpements
precedents sur l'analyse de ces deux auteurs,
. voir chapi tre I Supra p .. 85 - 99
10
-
B. BEKOLO-EBE, Ana1yse critique du SYlltems Financier de la
Zone BEAC et de lion Mle danll le Financement de l ' Economie,
Communication "au Sem1naire sur la Restructuration et la Supervision des
Systmnes Bancaires en Zone BEAC, du 26 au 30 octobre
1992 A Yaounde, 18 pp.

- 112 -
creation d'une cellule specialisee chargee du financement
et du
suivi des projets des PME. La promotion des PME apparait donc
comme la grande preoccupation,
la grande priorite des pouvoirs
publics.
Et
l'ensemble
des
mesures
decidees
devraient
donc
permettre aces entreprises de profiter de la forte expansion du
systeme bancaire.
L'une des manifestations de ces reformes sera en effet, une
amelioration
des
res sources
qui
va
se
traduire
dans
l'accroissement
des
emplois
des
banques.
Ainsi,
le
bilan
consolide des banques commerciales passe comme l'indiquent les
tableaux III et 11 2 •
de
67 191 millions en Decembre 1972
a
459 983 millions en Decembre 1980
El
1 028 565 millions en Decembre 1984
a
1 296 086 millions en Decembre 1988
et
El
1 399 492 millions en Decembre 1990.
Toutes ces ressources sont essentiellement constituees de
depots
qui
representent
67
% en
moyenne
de
l'ensemble
des
res sources et augmentent El un taux moyen de 22,60 % pour les
depots El vue et 30,9 % pour les depots El terme et d'epargne. Les
depots
de l'Etat quant a eux representent dans l'ensemble des
depots une part croissante de 8,33 % en 1972, ils passent a 24,36
% en
1980,
a
18,71
% en
1984 puis
a
32,57
% en
1988
pour
redescendre a 25,05 % en 1990. L'Etat est ainsi pendant longtemps
reste crediteur net du systeme.
Ces
avoirs aupres du systeme
bancaire constituant plus du 1/4 des depots des panques.

Tableau 111
-113-
SITUATION DES 8ANQUES COMMJ:RCIALES I.:T DE DEVELOPPEI~1~Nr PAR SECTEUR
CAMEROUN
1l'l1l1lillitJl1s ue In"",
,
' ( " -"
I
Fin de p~riodos
Encalsses
Depots a /a
AVL:ir:;
Crconccs
C,.;t!its
Totol
O.E.A.C.
cxtl:ri~;l/rs
sur I'E till
l! l'I:'~I'111;11'; L'
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1972
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625
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1973
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1974
1 877
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1975
1 999
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1976
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163 Ju9
1977
2475
2936
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13125
204590
229 U'1i
1978
3287
1 999
7105
16595
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295806
1979
3894
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I
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19389
323750
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1980
4 791
4150
7748
26681
416613
459983
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1979 Mars
2644
3398
6135
16898
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319 178
Juin
2022
1 182
3 G04
16731
29791H
321 537
Septembrc
2808
5192
8 G32
19364
300981
336877
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3894
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19389
323 750
356924
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1980 Mars
4712
3483
11 159
21 134
3'15065
385553
Juin
4275
3835
8 180
21 149
361 6'17
3990U6
. Septombre
3912
80'1'1
5 1'17
2705'1
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42677U
Deccmbro
4791
4 150
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1973
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1975
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1977
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1978
87464
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-
3618
1979
115 147
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-
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1980
129241
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- 22'173
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- 21 '164
Juin
127 137
94630
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-
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Creances
Creances sur l'economie
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exter.
sur
postes
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l'Etat
Entreprises
Inst. Financ.
Secteur
Tal'AL
Actif
passif
(1)
publiques
non mcmet.
prive
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15 577
23 929
49 813
-
-
678 740
678 740
-
767 959
1983
31 711
54 227
61 870
-
-
808 764
808 764
-
956 572
1984
18 889
134 163
69 384
-
-
806 129
806 129
-
1 028 565
1985
27 503
162 969
82 402
-
-
878 287
878 287
-
1 151 161
1986
44 911
41 218
115 687
-
-
986 212
986 212
-
1 188 028
1987
25 405
74 679
140 921
-
-
1 014 556
1 014 556
-
1 255 561
1988
29 353
117938
124 867
-
-
1 023 923
1 023 928
-
1 296 086
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1989
48 782
139 4Il
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191 129
2 907
887 416
887 416
131 597
1 520 747
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1990
41 245
36 632
86 046
182 574
2 098
894 448
894 448
156 443
1 399 492
1989 Mars
28 128
123 948
121 471
-
-
1 055 259
1 055 259
-
1 329 088
juin
38 980
137 618
123Z72
179 796
2 365
892 669
1 074 830
130577
1505 m
sept.
44 729
128 704
118 795
194 604
2620
879 185
1 076 409
153 882
1 522 519
Dec.
48 782
139 4Il
119 490
191 129
2 907
887 415
1 081 451
131 597
1 520 747
1990 Mars
31 520
36 312
120 549
191 233
3129
873 688
1 068 050
151 176
1 407 607
Juin
41 284
34 586
87 791
189 226
2748
882 907
1 074 881
143 539
1 382 081
Sept.
38 861
44 016
86 336
182 574
2 814
878 133
1 062 951
145 088
1 377 252
Dec.
41 245
36 632
86 046
182 574
2098
894 448
1 079 120
156 443
1 399 492
1991 Jan.
41 893
48 132
107 723
178 716
1 963
891 999
1 072 678
127 561
1 397 987
Fev.
40 496
49 743
108 818
177 254
2 366
884468
1 064 088
119523
1 382 668
Mars
40 021
44 661
112 184
176 841
2 963
877 189
1 056 993
117 865
1 371 724
Avril
u

,'iiU
Juin
Juil.
Aout
Sept.
Oct.
Nov.
Dec.
Source
BEAC,
Etudes et StatistiqueG
Mai 1991
p
225

- 115 -
La forte expansion que traduisent ces chiffres perrnet de
cornprendre les avantages de l'appartenance a la zone BEAC dans
la rnesure 00 celle-ci contribue par une gestion collective des
reserves
exterieures
a l'accroissernent des possibilites de
creation rnonetaire. Le systerne financier a donc pu par ce biais
accroltre
sa
capacite
de
creation
de
res sources
et
de
distribution des credits.
11 s'agit donc pour ce systeme, a l'instar de tout systeme
financier :
a) de participer a la creation des capitaux et on a pu voir
l'evolution positive des ressources de 1972 a 1990 avec un taux
de croissance annuel moyen de 27,8 %. Cette evolution offre donc
aux banques une certaine capacite de financement dont
devront
beneficier les PME.
b) d'accorder des credits aux agents a deficit par le biais
de la creation monetaire et de la transformation des depots. Et,
sur ce point,
les credits a l'economie suivent l'evolution des
ressources. lIs pas sent ainsi de 58 654 millions de F CFA en 1972
a 416 613 millions de F CFA en 1980 puis a 806 129 millions en
1984, 1 023 928 en 1988 et 1 079 120 millions F CFA en 1990. Le
montant des credits s'est donc accru au fur et a mesure du temps
avec 1 'amelioration des ressources. Nous verrons plus tard si ce
rnouvernent s'est opere en faveur des PME.
Cette evolution des res sources et des ernplois nous arnene a
pens er que le systeme financier s'est tres rapidement trouve en
face d'autres dimensions de la fonction d'interrnediation. Celles-
ci supposent en effet :
c)
des concours sous
forme de garantie pour des credi ts
interieurs ou exterieurs pouvant se rapporter par exemple au
financement de l'importation des equipements de production, des
consommations intermediaires des PME locales
d)
de
l'elargissement
de
l'activite
bancaire
a des
prestations de services telles qu'elles se developpent de plus
en plus dans les economies modernes et dont les Pme ont grand
besoin . Ces entreprises, au regard de leurs problemes de gestion
trouveraient dans un tel
environnement
financier
un appui en

- 116 -
conseils
et
en
gestion
appreciable.
L' importance
du
systerne
financier qui se degage de cette multiplicite des fonctions a ete
dej a soulignee par de nombrem~ auteurs dont J.M. Keynes, Gurley
et Shaw, Goldsmith ... , Scannavino plus recemment dans la theorie
de la firme bancaire. ll
On peut d'ailleurs apprecier, tout au moins par rapport aux
deux premieres fonctions, I' impact positif du cadre plurietatique
de la gestion de la monnaie. La gestion de la monnaie commmune
est en effet
assuree par la BEAC qui degage chacun des Etats
membres de la contrainte quotidienne d'une telle activite. Cette
centralisation de la gestion est facilitee par le mecanisme mis
en place a l'interieur de la zone qui en l'occurrence est le
mecanisme
du
compte
d'operations.
11
permet
en
meme
temps
d' assurer
la
garantie exterieure
de
la rnonnaie par
la
libre
convertibilite du
franc CFA en
franc
fran<;ais
puis
la
libre
transferabilite des capitaux,
aut ant de garanties qui du point
de vue des
PME camerounaises
leur simplifient en particulier
differentes transactiori~ dans les importations d'equipements et
de
matieres
premieres,
dans
la
remuneration
des
contrats
d'assistance
technique
et
de
toutes
aut res
operations
avec
l'exterieur. Le franc CFA qui est la monnaie utilisee dans la
zone est donc totalement garantie par la France,
pays leader.
L'evolution
du volume des credits qui accompagne l'utilisation
d' une monnaie stable au sein de la zone,
les possibili tes de
financement
exterieur
qu'elle
permet
sont
des
avantages
theoriques pour les parties prenantes au systeme.
On
verra
plus
loin
comment
les
differents
financements
interieurs et exterieurs ont pu contribuer au financement des PME
camerounaises. On pourra a ce moment verifier la concretisation
des avantages theoriques attendus de l'appartenance a la zone
BEAC. Et, le veritable probleme iei nous semble etre celui de la
materialisation des effets positifs du financement bancaire des
PME.
11
_
Scannavino,
Theorie de la firme bancair~ et
Integration des Marches des Capitaux,
Communication aux Journees AfS~-GR~CO ~fIQ CNRS,
Finance Internationale,
~tat Actu~i de la Theori~,
Universite d~ Bord~auy. I,
17-18 Mai 1990

- 117 -
1.3-
L'incidence des conditions du credit bancaire sur
le financement des PME
Le niveau de la creation de la monnaie de credit en faveur
des PME se mesure mieux a la nature des conditions de credit
pratiquees par les banques. Celles-ci se rapportent a la fois au
montant des credits et a leur terme, au taux d'interet et aux
garanties exigees.
1.3.1- La Preference pour les Credits a Court Terme
Les
banques,
dans
leur
fonction
de
distribution
de
la
liquidite, semblent avoir privilegie les operations a court terme
au
detriment
des
emplois
longs
plus
adaptes
aux
besoins
d'investissement dans les PME.
Ainsi, de 49 632 millions de francs CFA en 1972, ces credits
passent a 290 470 millions en 1980, a 482 172 millions en 1982 t
puis
576 787 millions
en
1984,
leur montant
a
ainsi presque
double en l'espace de
4 annees de
1980 a 1984. En 1988,
ces
credits s'elevent a 832 930 millions puis a 937 400 millions en
1989 et a 954 603 millions en 1990. Ces credits ont donc continue
a augmenter dans leur volume. Mais ils ont vu egalement leur
proportion se consolider avec le temps.
Alors qu'en 1980, ils representent 69,72 %de l'ensemble des
credits de la periode ; en 1984, ils constituent 71,55 % du total
des operations de credit contre 27,25 % pour les credits a moyen
terme et 1,20 % pour les credits a long terme. Cette tendance en
faveur des credits a court terme va se poursuivre et en 1988, ces
credi ts composent
81, 35 % des concours
des
credits bancaires
alors
que
les
credits
a moyen et long terme y figurent
respectivement pour
18,30 % et 0,35 % en 1989 et en 1990 puis
au fur et a mesure des difficultes economiques,
les credits a
long et moyen terme ne representent presque plus rien dans le
portefeuille des banques.
Cette
situation
semble
etre
liee
essentiellement
au
caractere deflationniste de l'offre de monnaie prevalant dans la
zone.

- 118 -
La
pratique
en
effet
dans
la
zone
consiste
en
la
determination prealable d'un stock de monnaie auquel la demande
et
les
besoins
de
l' economie
doi vent
s' aj uster.
Ce principe
decoule du mecanisme du compte d'operations et de ses regles de
fonctionnement.
La comprehension de ce principe necessite une
presentation du mecanisme de ce compte.
1.3.1.1
Le Mecanisme du Compte d'Operatipns
La
convention
de
cooperation monetaire
entre
les
Etats
mernbres de la BEAC et la republique fran~aise dispose :
article 2 -
" ce tte cooperation est fondee sur la garantie
illimitee donnee par la France a la monnaie emise par la Banque
et sur le depot aupres du tresor fran~ais de tout ou partie des
reserves de change des Etats mernbres qui prendront les mesures
necessaires a cet effet ... Les Etats mernbres mettent donc en
comrnun les gains en devises issus des transactions avec d'autres
pays pour garantir la circulation monetaire dans la zone. Nous
avons vu que cette mise en comrnun des reserves leur offre une
certaine latitude dans la creation de la monnaie. Mais, comrne en
contrepartie la France leur accorde sa garantie,
elle tend a
controler les mouvements d'entree et sur tout de sortie des fonds
a travers le mecanisme du compte d'operations. Et, c'est pour
sauvegarder les reserves ainsi constituees que des sanctions et
des penalites sont prevues. On les retrouve clairement exposees
dans
l' alinea
6 de
l' article
11
des
statuts
de
la BEAC qui
dispose ainsi
"Au cas 00 le compte d'operations serait debiteur pendant
trois mois consecutifs, les dispositions ci-apres entreraient en
vigueur de plein droit: les plafonds de reescompte, d'avance et
au tres
facil i tes
a court terme determines par le conseil en
application de l'article 36 des presents statuts sont reduits :
-
de
20
% dans
les
agences
dont
ladite
situation
fait
apparaitre
un
solde
debiteur
du
compte
de
ces
operations
exterieures ;

-11<,1-
-
de
10
% dans
les
agences
dont
ladi te
si tuation
fai t
apparaitre
un
solde
crediteur
du
compte
de
ses
operations
exterieures
d 'un montant
inferieur
El
15
% de
la circulation
fiduciaire
portee
El
cette
meme
situation.
Ces
reductions
s'appliquent aux plafonds anterieurement fixes par le conseil
pour les mois El venir ou El defaut,
aux plafonds determines par
lui
pour
les
mois
correspondants
de
l'annee
precedant
la
notification ... Dans les agences Oll les dispositions ci-dessus
sont applicables aucune nouvelle autorisation de concours El moyen
terme
ne
peut
et re
consentie
par
la
Banque.
Le
conseil
d'administration est irnrnediatement convoque. 11 delibere sur le
relevement du taux d'escompte, de pension et d'avance ... "
La severite de ces mesures qui vont de la limitation du
plafond d'escompte El la suspension des credits El moyen terme et
au relevement du taux des concours de la Banque est suffisarnrnent
contraignante et dissuasive. Elle a donc un effet reducteur sur
l'offre de credit dans la mesure Oll elle resserre la marg~ de
manoeuvre qu'un fonctionnement normal du mecanisme aurait petmis
d'elargir.
Manifestement,
ce
compte
presenterait
davantage
d'interet s'il permettait d'assurer la couverture du deficit des
differents Etats. Mais dans l'etat actuel des choses, ce regime
perd sa signification pour l'economie concernee tant qU'il ne
garantit
pas
cet
avantage
se
ramenant
alors
a une simple
contrainte au regard des penali tes et sanctions evoquees ci-
dessus
et
de
leur
caractere
deflationniste
prejudiciable
au
financement de l'investissement et essentiellem~nt de celui des
PME.
Ce mecanisme
affecte
ainsi
les
plafonds
des
concours
El
l'economie, cette limitation se repercutant sur les montants qui
pourraient etre cons acres au financement des PME. Car, plus ces
plafonds seront faibles plus la part El reserver aux PME
(20 %)
le sera egalement. On a tout de meme, pendant la periode de forte
croissance,
observe
un
relachement de cette contrainte.
Mais
d' une
maniere
generale
la
regIe
est
la permanence
de
cette
contrainte
dont
les
effets
nefastes
sont
plus
lourdement
ressentis dans les moments de basse conjoncture comme El l'heure
actuelle Oll la preoccupation majeure devrait etre celle de la

- 120 -
croissance donc de l'accroissement de la liquidite a affecter a
la
relance
de
la machine
economique.
Et,
sur
ce
point,
les
reformes
successives
n'ont
pas
fondamentalement
modifie
la
politique de cotes et de plafonds qui a plutot ete remplacee par
une politique de taux de croissance de la masse de credits.
Et,
ce qu'il importe de souligner ici est que l'offre de
monnaie conserve toujours son caractere exogene. Ainsi, lorsque
la BEAC definit le niveau de ses credits, les banques secondaires
determinent a leur tour et par rapport a ce dernier le montant
de leur refinancement puis de l'ensemble des credits a accorder
a l'economie.
Comparativement a 1 'ensemble des credits, les refinancements
de la BEAC en faveur des banques secondaires ont donc evolue
comme sui t
:
(voir tableaux I I 11 ,
I I 12 )
en 1972, 15 329 millions de F CFA contre un volume total de
credits a l'economie de 58 654 millions de F CFA soit 26,13 % de
refinancement BEAC ;
en 1980, 71 139 millions de F CFA de credits BEAC, 158 24g
millions en 1984
327 909
millions en 1988
273 364
millions en 1990
soit un taux moyen de refinancement de 24 % pour
l'ensemble des credits accordes par les banques commerciales et
de developpement.
Dans
l'ens~mble
de
ces
refinancements
seul
31,30
%
concernent les operations a moyen terme,
le reste 68,70 % se
rapportent aux operations a court terme,
celles a long terme
etant totalement absentes du reescompte BEAC.
La faiblesse ou mieux le caractere insignifiant des credits
d'investissement
a
l'economie
en
general
et
aux
PME
en
particulier
semble
etre modulee
sur
la
poli tique
en matiere
d'escompte appliquee par la BEAC. Ce mode d'aetion n'integre done
pas
la neeessi te de maintenir un
flux
de
creation monetaire
compatible avec la nature des besoins speeifiques des PME.
La transformation des credits n'a pas non plus ete favorable
a la structure des besoins exprimes par les PME. Les credits

- 121 -
d'investissement a long terme seraient plus confortables et plus
adaptes
pour
ameliorer
la
rentabilite
des
operations
par
l'allegement des charges financieres.
La modicite du profit deja soulignee dans ce secteur semble
en effet s'expliquer par l'environnement difficile dans lequel
se
creent
et
doi vent
evoluer
ces
uni tes
de
production.
Leur
environnement economique est fortement marque comme on a deja pu
le dire par la concurrence de grandes firmes multinationales dont
la politique en matiere de prix tend a evincer du marche des
produits
d'entreprises
jeunes
peu
competitives.
Nous
l'avons
aussi attribuee au mode de fonctionnement meme de ces PME qui
accroit les charges financieres et les charges recurrentes dont
la pression est lourdement ressentie au niveau des resultats de
l'entreprise.
Les
credits
a
long
terme,
ceux
dont
le
remboursement
s' etale sur une
longue periode et dont
le taux
d'interet est plus faible semblent mieux designes en tant qu'ils
participent de la reduction de cette pression et du maintien d'uD
flux de tresorerie permanent dans l'entreprise.
Mais, comme on l'a montre la tenue des credits a moyen et
long terme ne s'est pas amelioree.
En 1988, les credits a moyen terme correspondent a 18,30 %
du montant global des creances bancaires sur l'economie et ceux
a long terme, 0,35 % soit un total de 18,65 % pour les operations
a terme alors que celles a court terme constituent l'essentiel
de l'activite bancaire de la periode, c'est a dire 81,35 %.
En 1989 puis en 1990, on peut faire le me me constat, celui
d'un montant de credits de plus en plus derisoites affectes au
financement de l'investissement.
Cette situation durera sans doute encore avec la crise que
traverse le systeme bancaire et qui amene les banques a reduire
toujours davantage le delai de recuperation des fonds pretes de
maniere
a s ' assurer
un
certain
ni veau
de
1 iquidi te.
11
es t
interessant
de
s'interroger
sur
les
consequences
de
ce
comportement sur le probleme du financement des PME.

CREDITS A L'ECONOMIE
Tableau'" ,
CAMEROUN
( En millions de F CFA )
Fin de periodes
CONCOURS OE LA BEAC
CONCOURSOESBANQUESCOMMERC~LES
Effets
Eftets
Eftets
Eftets
C~dfts
C~dits
Debiteurs
Concours de
Total des
a C.T.
aM.T.
Total
escomptes
escomptes
aC.T.
aM.T.
divers
Autres
Total
banques de
c~dits a
escomptes
escomptes
a C.T.
aM.T.
develop.
reconomie
1972
11852
3477
15329
12040
16
24852
1208
888
634
39638
3687
58654
1973
12748
4187
16935
15108
23
28283
1075
547
757
45793
4973
67701
1974
12263
6510
18773
19420
39844
2070
1555
788
63677
5464
87914
1975
16261
8744
25005
20187
2483
50361
2262
2923
1635
79851
6588
111444
1976
15235
9682
24917
25715
4485
67973
5936
4411
1970
110490
7079
142486
1977
23028
21196
44 224
36436
5 716
92672
9961
6403
1050
152238
8128
204590
1978
32781
28415
61196
41696
7181
115040
21063
5797
1173
191950
13674
266820
1979
9136
35560
44696
40 631
9845
157249
38882
8500
5507
260614
18440
323750
1980
7179
36414
43593
44 302
11296
216272
66471
11189
4888
354 418
18602
416613
1979 Mars
40273
32880
73153
41125
7912
125915
22017
2329
2385
201683
15267
290103
Juin
33392
34728
68120
42099
8334
123355
29665
C"'l
4581
4270
212284
17514
297918
(,-J
Septembre
27655
33150
60805
38196
10983
127794
35587
4390
4806
221736
18440
300981
-<
Oecembre
9136
35580
44 696
40631
9845
157249
38882
8500
5507
260614
18440
323750
1980 Mars
13078
29060
42138
39831
13019
174966
44 619
7611
3357
283403
19524
345065
Juin
7274
32038
39312
46355
13055
176898
52878
9 m
3848
302811
19524
361647
Septembre
5253
34842
40 095
45218
11726
191643
59778
10572
4987
323924
18602
382621
Oecembre
7179
36414
43593
44302
11296
216272
66471
11189
4888
354 418
18602
416613
1981 Janvier
12194
39299
51493
45758
10172
229503
67482
11153
4888
368958
18602
439051
Fevrier
9976
42013
51989
38389
10610
232905
71596
8979
3959
366438
18602
437029
Mars
13982
43002
58984
40340
10694
243 701
73558
7873
4588
380754
18602
456 340
Avril
,
Mai
Juin
Juillet
Ao{)t
Septembre

Octobre
Novembre
Decembre

• Non compris traites sur I'exterieur et avances en comptes garanties par des eftets pubOcs et prives
Source: BEAC, Etudes et statistiques

Tableau 1112
Fin
DepOts
DepOts a
DepOts
Emprunts
Exte.rieurs (1)
Credits
Canptes
Autres
de
a vue
terme et
de
de
de
pastes
periodes
d'eparg.
l'Etat
la BEAC
capital
passif
Court
I'loyen et
TOTAL
terme
long terme
PASSIr
190 887
184 924
158 063
43 924
68 259
112 183
132 021
49 239
-59 358
1982
249 434
235354
127 472
45 237
50 104
95 341
162 669
62 364
23 938
1983
276 350
325 468
138 503
17 760
62 398
80 158
162 329
46 637
- 880
1984
278 381
437 838
143 653
47 282
54 193
101 475
129 981
64 215
- 4 382
1985
280 313
383 069
120 758
66 449
60 859
127 308
192 563
82 432
1 585
1986
215 903
290 706
221 574
64 131
87 471
151 602
341 549
101 341
-67 111
1987
226 438
308 290
258 275
45 535
87 282
132 817
327 909
111 670
-69 313
1988
281 202
316 980
189 773
151 478
77 489
228 967
294 327
119 512
89 985
1989
259 287
337 982
199 602
54 218
32 534
86 752
273 364
131 289
111 210
1990
206 492
331 292
278 848
37 765
74 980
112 745
323 056
122 108
-45 735
1989 Mars
250 664
284 594
223 563
152 798
82547
235 345
313 356
110825
86 920
Juin
276 860
317 263
183 862
162 084
79 062
241 146
275 839
124 949
102 600
Sept.
281 202
316 980
189 773
151 478
77 489
228 967
294 327
119 512
8S 985
Dec.
("'")
N
278 800
319 668
194 795
29 242
76 965
106 207
274 281
120 377
113 479
.......
1990 Mars
267 005
329 040
199 166
40144
36 769
76 913
287 477
123 368
99 112
Juin
264 001
331 809
209 287
42 912
31 438
74 350
266 896
122 569
108 340
Sept.
259 287
337 982
199 602
54 218
32 534
86 752
273 364
131 289
111 210
Dec.
269 112
333 316
202 002
41 779
32 534
74 313
281 873
131 807
105 564
1991 Janv.
260 370
334 690
197 565
42 469
32 536
75 005
278 108
131 454
105 476
-Fev.
256 885
337 845
192 169
44 966
32 534
77 500
270 954
135 110
101 261
Mars
Avril
Mai
Juin
,luil.
Aoiit
Sept.
Oct.
Nov.
Dec.
,
"
~
- ~
p
Source : BEAC, ETUDES STATISTIQUES
N° 182, Mais 1991.,
P
225

- 124 -
1. 3.2
Le Financement Discriminatoire au
detriment des PME
La principale caracteristique des credits bancaires pendant
toute la periode decrite ci-dessus
est cornme on
l' a vu leur
structure desequilibree.
Ainsi sur une periode de 10 ans de 1980 a 1990 les credits
a court terme representent a eux seuls environ 70 % de l'ensemble
des credits bancaires. Leur volume a augmente pendant la meme
periode de plus de 300 %, contre un accroissement de 61 % pour
les credits a moyen terme qui etaient a peine l'equivalent de
50 % des credits a court terme en 1980.
Cette distribution discriminatoire a l'egard des operations
d'investissement
permet
de
pens er
que
le
volume des
credits
allant aux PME est reste derisoire. Car, les credits a long terme
semblent les plus adaptes a la lenteur de l'assimilation de la
technologie et de la maitrise des equipements de production.
Cependant, outre le fait que les emplois a long terme des
banques,
c' est-a-dire ceux interessant
le plus
les PME,
sont
restes faibles, les credits a court terme n'ont pas davantage ete
orientes vers les PME.
Les res sources disponibles sont plutot
drainees
vers
les
operations
fortement
remuneratrices
plus
susceptibles de
garantir
les marges
bancaires.
On a meme pu
observer que c'est dans la repartition de ces credits a court
terme que la prescription des pouvoirs pUblics de consacrer 20
% du financement bancaire aux PME a ete le mieux suivie.
En effet,
les banques ont difficilement pu contribuer a
hauteur de 1/5 de leurs operations a moyen et
long terrne au
financement
de
l' investissement
des
PME.
Celles-ci
cherchent
souvent a transporter cette mesure des pouvoirs publics au niveau
des concours a court terme. Ceux-ci comprennent done aussi bien
les credits proprement dits que les operations de simple garantie
ne necessitant pas de mouvement de tresorerie, tout au moins dans
l'irnmediat. Par contre la part allouee annuellement aux credits
de
campagne
est
explici tement
renegociee
au
debut
de
chaque
carnpagne de recoltes de produits de rentes dont le cacao,
le
cafe, le coton ...

- 12:') -
C'est ce qui explique les fluctuations du niveau de la liquidite
a l'interieur d'une meme periode
;
celui-ci
s'accroissant
davantage avec les ouvertures des campagnes d'exportations de ces
differents produits. Ce comportement confirme le maintien de la
specialisation
de
l'economie
dans
l'exportation
de
quelques
produits de rentes comme le cacao et le cafe et dont les cours
sont
en
chute
libre
depuis
1987.
Ce
mouvement
qui
semble
irreversible si l'on se refere aux notes d'informations de la
BEAC12 contribue
a
la
baisse
des
revenus
nationaux
et
a
une
reduction
de
la
demande
qui
affecte
les
opportuni tes
d' investissement des PME dans un environnement financier hostile.
Cependant, si les banques de second rang n'ont pas pu faire
plus
d'effort
dans
le
sens
d'un
meilleur
financement
des
operations d'investissement et d'exploitation des PME,
elles y
ont ete aidees par les pouvoirs publics et meme par la BEAC pour
au moins deux raisons
- d'abord,
l'obligation de reserver 20 % du porte-feuille
des
banques
aux
operations
d' investissement
des
PME
n' a
ete
accompagnee d'aucune mesure de contr61e. L'observation de cette
disposi tion gouvernementale n' est donc pas facili tee en l' absence
d'un dispositif de contr61e permettant de sanctionner son non
respect ;
- ensui te,
la decision du conseil d' administration de la
BEAC
en octobre
1990
qui
porte
sur
la
suppress ion
des
taux
bonifies se repercute sur le niveau des credits a affecter aux
PME. En fait,
cette decision de la BEAC qui intervient dans un
contexte
de
crise
economique
vise
a
drainer
les
res sources
bancaires uniquement vers les emplois les plus efficients et les
operations 1es plus remuneratrices.
Et,
dans cette optique le
financement des PME ne semble pas le mieux indique compte tenu
des
difficultes
de
fonctionnement
et
de
rentabilite
de
ces
entreprises
deja
mentionnees.
Par
contre
les
operations
speculatives correspondent mieux a cette preoccupation.
Elles
sont certes aussi frappees par cette mesure qui ne leur permet
plus de beneficier de taux de faveur mais elles le sont moins que
les PME. Car,
les credits de campagne restent des operations a
"
-
BEAC, notes d'1nformat1ons 6conamiques et f1nanc1~re
1n Etudes et Stat1stiques n D 162, ma1 1989, n D 163 ju1n-ju111et
1989, n D 172 ma1 1990

- 126 -
pri vilegier,
tout
au moins
au
ni veau
de
l' enveloppe
a leur
consacrer,
en
comparaison
des
credi ts
d' exploi tation
et
d'equipement
des
PME
qui
semblent
ici
avoir
un
caractere
residuel.
La persistance de la discrimination au detriment du
montant des credi ts accordes aux PME,
semble etre etroi tement
liee a la maniere dont se prennent les decisions monetaires du
fait de la pluralite des Etats membres et de la presence d'un
pays
leader assurant
le pi lotage monetaire dans
la
zone.
Ce
caractere multinational de la gestion monetaire pose ainsi des
problemes de coordination de decisions monetaires et economiques
puis de
compatibil"ite des objectifs nationaux qui
impliquent
necessairement des charges pour les differents pays membres. Pour
l'Economie camerounaise et en ce qui concerne le financement des
PME,
le
poids
de
ces
charges
s'apprecie
en
terme
d'effet
d' eviction de ces entreprises priori taires,
faute
de pouvoir
prendre en compte leur specificite.
1.3.2.1
La repartition inegale de la charge inherente
au caractere multinational de la BEAC
La
prise
en
compte
de
la
realite
du
poids
inegal
des
economies des pays membres de la BEAC permet de s'interroger sur
la maniere dont la charge va etre repartie entre les differentes
parties prenantes.
a)
Ainsi,
s'agissant
de
la
coordination
des
decisions
monetaires au sein de la BEAC,
cadre ou on admet de maniere
implicite l'egalite des Etats, les economies les plus fortes se
retrouvent a egalite avec tous les pays membres. Et c'est le cas
du
Cameroun
dont
le
poids
de
l'economie
et
l'apport
aux
res sources de la communaute sont importants.
Ce probleme du defaut de ponderation des Etats a d'ailleurs
fai t
l' obj et
de
deba ts,
cl
1 r occas ion
des
travaux
du
groupe
d'Experts sur la question de l'Integration Economique en Afrique
Centrale 13 •
Et,
la
regIe de
la decision qui
est
celle de
la
majorite ici n'est pas de nature a garantir la primaute de ses
interets dans la proportion de sa participation au fonctionnement
"
-
On lira sur ce sUjet Les observations des Experts camerounais
sur le texte du RllsumG des conclusions et recomnandations
de la 3e Rllunion des Experts des 17 et 19 fllvrier 1992 A
YaoundS, 16 mars 1992, 4 pp.

- 127 ~
de la zone. Et,
on peut le voir,
la priorite accordee par les
pouvoirs publics camerounais a la promotion de la PME ne sera pas
suivie
dans
la
mesure
Oll
la
specificite
du
probleme
du
financement de ces entreprises est ignoree.
La
nature
des
solutions
necessaires
et
des
delais
de
reaction semblent bien au-dessus de la capaci te de la zone a
gerer toutes les imbrications issues de la separation du pouvoir
monetaire
et
des
pouvoirs
economiques
nationaux.
Et,
cette
gestion
collegiale
pose
dans
le
cas
particulier
des
PME
camerounaises le probleme de l' adequation des res sources offertes
aux besoins reels des entreprises. En effet ces PME ont besoin
de capitaux longs a des conditions souples de remboursement puis
d' une
implication totale des partenaires
financiers
dans
les
projets mis en place.
Les efforts dans ce sens nous semblent
difficilement realisables dans ce contexte multi etatique.
b)
Le probleme de la compatibilite des objectifs nationaux
Sur
cette
question
de
la
compatibilite
des
objectifs
nationaux, on se trouve en presence de preoccupations totalement
divergentes :
bl)
D'une
part,
on
est
confronte
El.
des
imperatifs
de
financement
de
la
croissance
de
l'economie
et
plus
particulierement des PME camerounaises. On a montre sur ce point
que le mecanisme du compte d'operations a un effet reducteur sur
la
capacite
de
creation
de
ressources
adaptees
aux
besoins
exprimes par les PME.
b2) D'autre part, le pays leader est davantage preoccupe par
la stabil isa t ion des pr ix.
Depuis 1984,
la France est engagee
dans un processus de desinflation competitive pour un franc fort.
Ceci explique des
regles
rigoureuses et des contraintes plus
fortes qui se transportent dans les pays satellites en terme de
limitation de
la garantie de
la monnaie donc de
la creation
monetaire.
Ainsi donc, l'ajustement face a ce conflit d'objectifs tend
El. s'effectuer au detriment de l'economie la plus faible qui devra
alors
en
supporter
la
charge.
Et,
dans
le
cas
precls
du
financement des PME, l'asymetrie de l'ajustement prend la forme
du rationnement des capitaux longs ou d'une fayon plus generale
d'une politique de credits selectifs comme on peut le voir a

- 128 -
travers
la lente evolution des
credits BEAC,
la distribution
discriminatoire
des
credi ts
qui
s' en
sui t
puis
leur
impact
deflationniste
sur l' ensemble des
creances sur l' economie en
general et sur l'investissement dans les PME en particulier.
11 importe de souligner sur ce point que ce probleme est loin
d'etre propre au Cameroun ou de maniere plus globale aux pays
satellites
de
la
zone
franc.
11
semble
etre
cornrnun
au
fonctionnement des zones optimales
(taux de changes fixes ou a
flexibilite limitee) avec pays leader. C'est tout au moins ce que
revelent les travaux de Mundell (1974) ou dans le cas de la CEE
les analyses de COHEN, MEL1TZ, OUD1Z (1988), AGL1ETTA (1990)
G1AVAZZ1
(1987) 14.
Le pays leader dans ces
zones presente une
double caracteristique.
11 est preteur en dernier ressort et sa monnaie devient
le vehicule des operations internationales et sert de reference
a l'ensemble du systeme ;
11 pe ut
faire
supporter la charge de l'ajustement aux
autres pays a travers une manipulation de son taux de change15 •
Dans l'exemple du SME, l'Allemagne apparait cornrne le pays pivot,
les autres pays suivant l'evolution du mark et modifiant leur
politique
monetaire
de
maniere
a maintenir constarnrnent les
parites 16 •
Cette
asyrnetrie
des
comportements
dans
l'exemple
France Allemagne semble assez surprenante parce que precisement
le S.M.E. est souvent apprehende comrne une tentative de reduction
de
cet te
asyrnetrie17 •
Pourtant,
la
France
dans
ce
cadre
est
It
_
On lira ca sujet Francesco GIAVAZZI,
A1berto GIOVANNINI,
HodQles du SHE : l'Europe n'est-elle qu'une zone Deuts-Che Mark,
Revue Bconomique nOpp. 641-666.
On lira bgalement :
-
B. BEKOLO, TOUNA MAMA, FOUDA OWUNDI,
Les Economies Africa1nes face a l' Europe de 1993,
presses universitaires du Cameroun, Yaoundh 1992.
- B. BEKOLO-EBE, La Communaute Monetaire : Atouts ou Obstacles a
l'Intbgration Economique, Groupe d'Etudes et de Recherches en
Bconomie Appliquee (GBREA) , Communication aux Journees du
"Club das Diriqeants des Banques d'Afrique I!"rancophone" ,
28-29-30 janvier 1992, Paris.
18
_
Francesco G1AVAZZI, A1berto Giou~nlni,
Hod8les d:u SHE, op cit pp 641-666.
11
_
Daniel COREN,
Jacques HELITZ, allIes OUOIZ. Le systeme
monetaire europben et l' lUIym6trie franc-mark,
Revue &conomique pp. 667-677.
11
_
Charles W'lP LOSZ, Mymstxy in the EMS :
Untentional or systemio ? , European Economio Review,
march 1989, vol 33, n° 213 pp. 310-320.

- 129
constamment amenee a s'ajuster par rapport a l'Allemagne.
On
peut
donc
comprendre
plus
aisement
la
logique
du
rationnement du credit aux PME a travers le mecanisme de creation
de la monnaie dans
la
zone BEAC et qui lui-meme determine le
montant et la structure de l'ensemble des credits a l'economie.
Le controle quantitatif des credits effectues par la BEAC
est en effet limitatif au regard de l'offre de monnaie du marche
du refinancement. Ainsi que le souligne A. D. BIDA-KOLlKA dans
un rapport de la BEAC,
"La maitrise de la liquidite et de la
croissance de la masse monetaire se fait essentiellement par un
controle
quanti tatif
du
credit,
opere
grace
a
des
plafonds
globaux de refinancement repartis entre l'Etat et les banques,
ces
plafonds
sont
generalement
fixes
une
fois
par
an"18.
Le
passage, deja signale, de la politique des cotes et des plafonds
a celle des taux d'accroissement de la masse des credits n'a pas
apporte
de
changements
aux
preoccupations
d' equilibre
de
la
politique monetaire et de credits dans la mesure 00 celle-ci ne
laisse que peu de place aux besoins reels des entreprises que
traduisent
les
banques
aupres
de
I' insti tut
d' emission.
Les
credits de la BEAC representent a peine le 1/3 des credits au
secteur prive et constituent a peu pres le 1/4 de I 'ensemble des
credits a l'economie ainsi que le montre les chiffres mentionnes
plus haut.
Ces conditions de montant defavorables aux PME ne vont pas
s'ameliorer au regard de la faible transformation des depots en
credits pour le financement de la depense d'equipement.
1.3.2.2
La Faiblesse de la Transformation des Depots
Bancaires et le Renforcement de la Selectivite
des Credits
La limitation du pouvoir de creation monetaire derivee du
regime permanent d' encadrement du credi t e s t
aggravee par le
comportement de liquidite des banques et la faible possibilite
.. - A.D. BlDA-KOLlKA, Gestion banca1re <!ans un environnement
d'ajustement structural: exp6rience de la BEAC, communication
au s~naire organis6 par l' Union Africaine de Management de
Banques pour le oeveloppement A Lom6 (13-18 mai 1991)
in BEAC, Etudes et Statistiques n° 182 mai 1991.

- 130 -
de transformation des depots en credits d'investissement. Ceci
transparait d'ailleurs de la lecture de l'article 25 des statuts
de
la
BEAC
qui
impose
aux
etablissements
financiers
la
consti tution de
reserves obligatoires,
le
respect d' un
ratio
entre
les
res sources
et
les
emplois,
des
plafonds
ou
des
planches, selon les cas, pour ces emplois 19 •
On le voit egalement a la maniere dont l'epargne ne semble
pas preoccuper particulierement le systeme bancaire ici, aucune
mesure d'incitation a l'epargne privee n'etant prise.
L'evolution du taux de remuneration de l'epargne en est un
vivant temoignage.
Ce taux est reste,
depuis plusieurs annees
comme nous le verrons ulterieurement,
inchange et maintenu a un
niveau bas au moment ou les taux debiteurs varient constamment
avec une tendance haussiere.
(Voir tableaux IV et V). Et, c' est
cet te passi vi te observee dans
la collecte des
ressources qui
s'etend au niveau de la transformation et de la distribution
discriminatoire des credi ts
au detriment des
PME.
Le systeme
bancaire dans ce cas ne peut pas donner l'impulsion dont a besoin
l' initiative privee,
alors
qu' "un
systeme monetaire
efficace
constitue une condition indispensable de la croissance effective
de l' ensemble de la collecti vi te "20.
u
-
La zone franc eat composee aujourd'hui de la Franoe avec
sea dbpartementa et territoires d'outre mer, lea pays lies a
&lle par une convention de compte d'operations : 1es Comores
et 13 pays pour 1es deux zones d' llmission de l ' Afrique de
l'OUest et de l'Afrique Centrale.
Pour l ' Afrique, 1es organes charges de la mise en oeuvre de
la cooperation IlIOnetaire sont : pour l ' Afrique de l ' ouest,
le Consei1 des Hinistres de l'Union Honetaire OUest
Africaine, organe suprllme de coordination et la Banque
des Btats de l'Afrique de l'OUest, orqane technique.
Tandis qu'en Afrique Central.e, le r61e est joue respectivement
par un Canite Honetaire Hixte et la Banque des Etats de
l ' Afrique Central.e.
-
J.
Gur1ey et E. Shaw, La Honnaie clans une Theorie des
Actifs Financiers,
tradUctIon du Centre de tradUctions
EConOffiiques de Perpignan, direction J. D. Labay,
Edit .. Cujas 1973, p. 178.

Tableau IV
CONDITIONS CREDITRICES PRATIOUEES PAR LESBANOUES
(en %)
CAMEROUN
Tableau.
IV
Depots a terme
Compte
Bons de caisse
d'epargne sur
Fin de periode
Depots a vue
(1)
3·6
6· 12
12 . 24
livret
6 mois
1 an
2 ans
mois
mois
mois
Taux unique
1982
3,50 -
4,75
3,50·
5.75
4,00 -
7,00
4,75·
7,75
7,50 ;
4,00· 7,50
4,75·8,25
5,50 - 8,75
1983
3,50- 10,00
3,50-11,00
4,00· 12,00
4,75-13,00
7,50 :
4,00·7,50
4,75 . 8,25
5,50·8,75
1984
3,50 - 11,00
4,00 - 12,00
4,75· 13,00
7.50
4,00·7,50
4,75·8,25
5,50-8,75
1985
3,50 - 11,00
4,00· 12,00
4,75 - 13,00
7,50~'
4,00 - 7,50
4,75·8,25
5,50·8,75
1986
3,25 - 10,50
3,75 - 11,50
4,50 - 12,50
7,25 -
3,75 - 7,25
4,50 - 8,00
5,25 - 8,50
1987
3,00 - 10,00
3,50 - 11,00
4,25 . 12,00
7,00 -
3,50 - 7,00
4,15 - 7,75
5,00 - 8,25
1988
3,25·
6,75
3,75 -
8;00
4,50 -
8,75
7,50 -
3,75-7,25
4,50·8,00
5,25 . 8,50
1989
7,50
7,50
7,50
8
~
7,50
7,50
7,50
1990
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,50
min. 7.50
1989
Mars
...-<
3,25 -
6,75
3,75·
8,00
4,50 -
8,75
0.50-'
3,75·
7,25
4,50 - 8,00
5,25 . 8,50
M
Juin
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,5b
7,50
...-<
Septembre
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,50
7,50
Decembre
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,50
7,50
1990
Mars
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,50
7,50
Juin
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,50
7,50
Septembre
7,50
7,50
7,50
8
7,50
7,50
7,50
Decembre
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,5
min. 7,50
.
1991
Janvier
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
Fevrier
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
Mars
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
Avril
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
Mai
min. 7,50
min. 7,50
min. 7,50
8
min. 7,50
min. 7;50
min. 7,50
Juin
Juillet
Aout
Septembre
Octobre
Novembre
Decembre
Le montant des depots a partir duquel la remuneration devient libre et negociable a ete ramene a 3 000 000 le 5 avril 1 989,mais taux plafonne a 10 %
pour I'Etat et les organismes publics.
(1) La remuneration sur les depots a vue a ete supprimee a partir de juin 1984.
Source
BEAC,
Etudes et Statistiques,
Juin- Juillet 1991

Tableau
V
CONDITIONS DEBITRICES DES BANQUES
(Hors taxes et commissions)
.. "
OUN
I aOleau - .v
Court terme
Moyen terme
Fin
de
Clientele privilegiee
Escompte d' effets
Decouverts
Vente atemperament
Clientele privilegiee
Clientele ordinaire
periode
Min.
Max.
Min.
Max.
Min.
Max.
Min.
Max.
Min,
Max.
Min.
Max.
1981
7,75 %
8,75 %
10,50 %
13,75 %
12,50 %
13,75 %
11,00 %
13,75 %
7,25 %
9,25 %
10,50 %
12,00 %
1982
7,75 %
8,75 %
11,00 %
14,25 %
13,00 %
14,25 %
11,50 %
14,25 %
7,25 %
9,25 %
11,00 %
12,50%
1983
7,75 %
8,75 %
12,00 %
15,25 %
14,00 %
15,25 %
12,50 %
15,25 %
7,25 %
9,25 %
12,00 %
13,50 %
1984
7,75 %"
8,75 %
12,00 %
15,25 %
14,00 %
15,25 %
12,50 %
15,25 %
7,25 %
9,25 %
12,00 %
13,50 %
1985
7,75 %
8,75 %
12,00 %
15,25 %
14,00 %
15,25 %
12,50 %
15,25 %
7,25 %
9,25 %
12,00 %
13,50 %
1986
7,50 %
8,50 %
11,50 %
14,75 %
13,50%
14,75 %
12,00 %
14,75 %
7,00 %
9,00 %
11,50 %
N
13,00 %
1987
7,50 %
8,50 %
11,00 %
13,00 %
12,00 %
13,00 %
11,00 %
13,00 %
7,00 %
8,00 %
11,50 %
12,00 %
'"
......
1988
I
8,50 %
9,50 %
12,00 %
14,00 %
13,00 %
14,00 %
12,00 %
14,00 %
8,00 %
9,00 %
12,00 %
13,00 %
11
8,50 %
9,50 %
12,00 %
14,00 %
13,00 %
14,00 %
12,00 %
14,00 %
8,00 %
9,00 %
12,00 %
13,00 %
III
9,50 %
10,50 %
12,50 %
14,50 %
13,50 %
14,50 %
12,75 %
14,50 %
9,00 %
9,70 %
12,75 %
13,50 %
.
IV
10,00 %
10,75 %
13,00 %
15,00 %
14,00 %
15,00 %
14,25 %
15,00 %
9,50 %
10,25 %
13,25 %
14,00 %
1989
I
10,00_%
10,75 %
13,00 %
15,00 %
14,00 %
15,00 %
14,25 %
15,00 %
9,50 %
10,25 %
13,25 %
14,00 % '
I1
10,88 %
12,88 %
15,00 %
15,38 %
15,00 %
15,38 %
15,00 %
15,38 %
10,50 %
13,25 %
14,25 %
15,88 % .'
III
10,88 %
12,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
10,50 %
13,25 %
14,75 %.
16,38 %
IV
10,88 %
12,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
;a,50 %
13,25 %
14,75 %
16,38 %
1990
/"
I
10,88 %
12,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
10,50 %
13,25 %
14,75 %
16,38 %
11
.10,88 %
12,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
10,50 %
13,25 %
14,75 %
16,38 %
III
10,88 %
12,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
15,50 %
15,88 %
10,50 %
13,25 %
14,75 %
16,38 %
IV
15,38 %
17,38 %
16,50 %
16,88 %
16,50 %
16,88 %
16,50 %
16,88 %
14,50 %
17,25 %
15,25 %
16.88 %
1991
I
15,38 %
17,38 %
16,50 %
16,88 %
16,50 %
16,88 %
16,50 %
16,88 %
14,50 %
17,25 %
15,25 %
16,88 %
11
III
. IV
Source
BEAC,
Etudes et Statistiques,
Juin -
Juillet 1991

- 133 -
D' une
maniere
gE!Derale
la
substance
de
la
fonction
de
transformation des actifs financiers est telle qu'il y a un lien
de causalite entre l'inventivite et la rentabilite bancaire. Elle
revet donc un caractere dynamique dont la traduction dans le
contexte camerounais serait la creation de conditions favorables
a la constitution et a la mobilisation de res sources adaptees
dans leur terme et dans leur montant dans un premier temps puis
dans
leurs
conditions
de
garanties
et
de
taux
d'interets
notamment dans un deuxieme t emps 21.
$2 - L'Importance du Niveau du Taux d'Interet
Le taux d'interet est en effet sur le plan theorique un
instrument important de politique monetaire et financiere. Au
niveau micro economique il n'est pas neutre,
apparaissant meme
comme un element strategique de gestion financiere. On pourrait
donc s'agissant de l'approche de la fonction d'intermediation
bancaire
telle
qu'elle
nous
apparait
dans
l'analyse
du
financement des PME,
formuler quelques interrogations.
Le taux d'interet est-il uniquement lie a la disposition du
preteur a preter ou non ?
De
fa~on
generale
le
taux
d'interet
integre
t-il
la
contrainte de remboursement des fonds pretes ?
Cette contrainte de remboursement liee au credit appelle un
certain nombre d' analyses parmi
lesquelles celles du cout du
capital et plus Precisement celle du niveau du taux d'interet.
2.1 - Analyse Theorique du Niveau du Taux d'Interet.
L'appellation
taux
d'interet
est
simplificatrice
parce
qu'elle ne designe pas qu'un seul taux. 11 en existe en realite
une multitude a partir desquels sont menees les analyses sur la
structure
des
taux,
leur
determinant,
leur
niveau
et
leur
evolution. Mais, l'on peut egalement dans une approche consacree
a un examen des facteurs influant sur son niveau et son evolution
" - Nous montrerons plus loin dans la Section III
que le dBveloppement de ces circuits financiers informels
semblent ~ l'heure actuelle constituer une vbritable
alternative au financement de l'investissement dans
lea PMK. Voir infra PP ... 209
et sui v.

- 134 -
parler
du
taux
d' inten~t
au
singulier.
On
al tere
pas
veritablement
la qualite de
l'analyse.
Une distinction reste
toutefois fondamentale,
celle entre taux nominal et taux reel
compte tenu du contexte inflationniste actuel.
C'est
ainsi
que
de
nombreux
auteurs
tels
que
Fisher,
Wicksell, Keynes ont analyse les facteurs agissant sur le taux
d'interet nominal.
Pour Wicksell, les anticipations de taux d'inflation et la
rarete des fonds pretables determinent le taux d'interet.
Pour Keynes, le taux d'interet resulte de la confrontation
de trois variables qui sont :
- le niveau de la masse monetaire ;
- l'arbitrage entre la monnaie et les titres;
- l'importance des reactions de l'economie reelle face au}:
fluctuations de la masse monetaire et du taux d'interet.
Ces analyses des determinants du taux d'interet se situent
plus
dans
le
cadre
de
marches
financiers 22
Oll
des
agents
economiques
peuvent
faire
des
choix
de
portefeuilles,
des
arbi trages
entre des
ti tres
courts
et des
titres
longs,
des
options
sur des
segments de marches pouvant alors
agir a la
hausse ou a la baisse sur le taux d'interet.
Le probleme ne semble pas se poser de la meme maniere dans
une economie Oll le credit bancaire est la principale forme de
financement et Oll les emprunteurs ultimes et les epargnants ne
peuvent pas toujours influer sur le niveau du taux d'interets.
D'autres
angles
d'approche
du
taux
d'interet
ont
ete
proposes qui permettent de poser le probleme du cout du capital
emprunte, de ses implications sur les resultats de l'entreprise
et l'evolution de son activite.
Elles expliquent mieux,
nous
semble-t-il,
I' importance du ni veau du taux d' interet en tant
qu'element fondamental de la gestion financiere.
De ce point de vue,
elles nous permettent de relancer le
22 - D. Lacoue-Labarthe, Analyse mon6taire, Bordas Paris p 305-328.
L'auteur pr6sente una analyse d6taille d6terminants des taux
d'int6rAts sur les march6s financiers. On lira 6qalement
l ' article de P. Artus,
structure par terme des taux
d'int6r6ts
: 6l6ments th60riques.

- 135 -
debat qui va sui vre sur la these de la repression financiere
developpee par Mc KINNON et SHAW et de mieux apprecier l'impact
du taux d'interet et du eout du credit dans le financement des
PME camerounaises.
Un autre type de distinction a ete fait sur les facteurs qui
reglent
le ni veau du
taux d' interet.
On distingue
ainsi des
facteurs internes et des facteurs externes determinant le taux
d'interet reel.
2.1.1.
-
Les facteurs Internes sont de deux ordres
- ceux qui se rapportent au comportement d'offre et de
demande de capital de telle sorte que tout element qui modifie
la demande ou l'offre de capitaux a un impact sur le niveau du
taux d'interet reel.
Le taux d'interet apparait done comme un
element d'orientation de l'investissement. Pour Keynes la baisse
du taux d'interet stimule l'investissement sauf quand on arrive
a la trappe a monnaie ;
il
existe egalement d' aut res
facteurs,
ceux qui
renvoient
aux
poli tiques
budgetaires
et
monetaires.
Ils
permettent soi t de favoriser l' investissement pri ve soi t de creer
un effet d'eviction financiere ; l'eviction pouvant etre totale
ou partielle selon que
1 'on se situe dans
la perspective de
l'analyse classique ou keynesienne.
2.2.
- Les Facteurs Externes
On peut en retenir deux
-
d'abord les
considerations liees au
taux de change,
l' economie
de
marche
etant
essentiellement
ouverte
sur
l'exterieur,
la politique de taux d'interet tient compte de la
position
de
la
monnaie
nationale
par
rapport
aux
devises
etrangeres que l'on appartienne ou non a une zone monetaire ;
ensuite
les
variations
des
taux
d'interets
des
economies fortes.
Precisement l'appartenance a une zone monetaire avec pays
leader oblige
regulierement
a l' ajustement du taux d' interet
national au taux d'interet du pays leader.

- 136-
Ces diff~rents facteurs internes et externes sont ceux que
les analyses theoriques proposent cornme determinants du niveau
du taux d' interet dans les
economies nationales.
Le probleme
actuel
que
posent
ces
analyses
est
de
determiner
le
taux
d'interet optimal celui qui stimule le mieux l'investissement.
C'est
le
probleme
que
souleve
la
these
de
la
repression
financiere. Selon celle-ci, il y a repression financiere dans les
pays en voie de d~veloppement parce que les taux d'int~rets sont
faibles
decourageant
l' epargne.
Un
relevement de ceux-ci
est
important pour un deplacement de la frontiere des possibilites
maximales
d'accumulation
et
une
affectation
judicieuse
de
l'~pargne aux investissements les plus productifs.
C.
EBOUE23
resume
dans
les
trois
proposi tions
sui vantes
cette these :
"1- 11
les systemes financieres des P.E.D. sont marqu~s
- du cot~ des marches de capitaux officiels, par une
insuffisante intermediation financiere de nature bancaire ou non
et l'inexistence de marches de fonds pretables longs;
du
cote
des
II marc hes"
souterrains"
par
une
desarticulation
et une
extreme segmentation des
processus de
collecte de l'~pargne qui est essentiellement liquide ;
112-"
la structure des taux d'interet reflete ce pro fond
des~quilibre :
sur
le
plan
officiel,
le
loyer
de
l' agent
est
control~ a des ni veaux bas,
les taux d' int~ret r~els negatifs
observes pendant de longues periodes diminuant l'incitation aux
placements
bancaires
et
surtout
renfor~ant
le
rationnement
traditionnel de l'offre de credit bancaire pourtant necessaire
a la depense d'investissement prive ;
23
_
C. EBOUE, 1es effets mac~o-economiques de 1a ~ep~ession
financie~e dans 1es P.E.D. in Economie App1iquee,
to~ LXIII 1990 nO 4 p 93.

- 137 -'
-
a l'echelle informelle les niveaux tres eleves de
taux d'interet reels positifs appliques aux prets contrastent
avec ceux appliques aux placements courts sur ce marche ou avec
les taux debiteurs appliques aux operations bancaires quelle que
soit leur duree.
"3-"
le niveau d'accumulation est donc contraint drOll une
demande insatisfaite de fonds pretables
~ car
la
decision d I investir
ex-ante,
resul te
outre
du
profit anticipe,
du comportement et du niveau de l'epargne, de
~sorte qu'il y a une correlation positive voire de causalite entre
ces deux variables. En effet Chenery (in Leff 1975) "avait deja
montre que dans la plupart des P.E.D.,
les investisseurs etant
en
meme
temps
epargnants,
l'accumulation
monetaire
precede
toujours la realisation de la depense d'investissement prive :
- la monnaie constitue donc un complement des actifs reels
et
rarement
un
substitut
a
leur
detention
car,
le
systeme
financier
etant
caracterise
par
la
faiblesse
du
volume
du
financement
externe,
toute
depense
importante
d I accumulation
envisagee, exige au prealable une augmentation des encaissements
necessaires ;
il n'y a pas par consequent arbitrage entre monnaie et
actifs physiques au sens traditionnel.
Les encaisses liquides
servent de "relai s" ou "conduits" selon 1 I expression de Mc KINNON
lui-meme, a la formation du capital, de sorte qu'epargne liquide
et accumulation du capital varient parallelement. 24
Cette these de la repression financiere fait deux
hypotheses
a)-
une
hypothese
de
la
complementarite
des
encaisses
reelles
et
des
actifs
reels
de
telle
sorte
que
1 I effet
de
richesse
est
analyse
en
fonction
du
revenu
reel,
du
taux
d'investissement, du taux de rendement reel de la monnaie
md ~ f(y/p,
I/Y, ~m-px)
Oll
md = demande de monnaie
~-px = rendement reel des encaisses monetaires.
Ainsi
une
augmentation
du
taux
d I interet
reel
sur
les
placements liquides accroit la valeur de la monnaie detenue sous
..
-
C. EBOOK, lea e£feta macro-econamiquea de la represaion
financi6re dana lea P.B.D. in Econamie Appliquee,
tome LXIII 1990 nO 4 p 93

- 138 -
forme
d'encaisses
et
egalement
les
possibilites
d' autofinancement. Mc KINNON admet toutefois qu' il existe une
trappe d'investissement, c'est-a-dire que pour un taux d'interet
donne ou la remuneration de la monnaie demandee est affectee a
des placements liquides confirmant la these de l'arbitrage entre
la monnaie et le capital.
C' est
egalement
de
cette
"trappe d' investissement"
dont
parle Shaw25 •
L' auteur la considere comme une contrainte a la
formation du capital, celle-ci s'alourdissant avec la faiblesse
ou mieux l'inexistence d'un veritable mode de financement direct
et indirect dans les P.E.D. et dont le principal responsable est
la pratique de taux d'interets bas.
La solution proposee par Shaw est de reviser a la hausse les
taux de remuneration de l'epargne privee pour renforcer le role
de l' intermediation d' origine bancaire particulierement, celle-ci
favorisant
une
activite
de
credit
plus
dynamique
et
donc
l'investissement.
Si
le
relevement
des
taux
debiteurs
a
favorise
la
consolidation des marges bancaires, elle ne semble pas avoir eu
l'impact escompte sur l'investissement ;
b)- l'arbitrage entre la monnaie et le capital fait appel
a une deuxieme hypothese. Celle-ci met en relief le caractere
decisif du taux de rendement des encaisses reelles en tant que
facteur
favorisant
l'intermediation
financiere,
l'epargne
et
partant
le
volume
des
capitaux
destines
au
financement
de
l'investissement.
Cette approche du niveau du taux d'interet dans les P.E.D.
telle que presentee dans la these de Mc KINNON et qui prescrit
le relevement du taux d'interet comme solution au probleme de
l'investissement
appelle
un
certain
nombre
de
remarques
s'agissant du cas precis de l'Economie Camerounaise.
- D'abord il faut faire une distinction claire entre les
taux
d' interets
debi teurs
et
credi teurs
et
preciseI'
que
la
politique appliquee au Cameroun en matiere des taux d'interet
"
- E. SHAW,
financial Deepning in Eeo·nomie Development,
Oxford University press, M-Y 1973, eitA par C. EBOUE,
Les efEets Maero-Eeonomiques de la rApression financi~re
dans les r.E.D., op elt.

- 139 -
n'est pas la meme pour ces deux taux,
leur evolution ne suivant
pas le meme rythme.
(Voir tableaux IV et V)
Ainsi ces dernieres annees,
alors que les taux debi teurs
BEAC ont
subi
successivement
plusieurs modifications
passant
depuis 1989 de 14,00 % a 15,88 % puis a 16,3 % et a 16,88 % pour
le
taux
a moyen terme a la clientele privilegiee, il passe
pendant la meme periode de 10,25 % a 13,25 % puis a 17,25 %.
Pendant la meme periode les taux crediteurs sont passes de
7,50 % a 8 % puis sont restes inchanges depuis plus de 3 annees
(voir tableaux IV et V) .
Une telleevolution discriminatoire des taux d'interets ne
semble pas traduire un soucis de stimulation de l'epargne et de
l'investissement. Elle est plus proche d'un comportement de marge
bancaire, qui n'etonne pas dans une logique de multiplicateur de
credit
ou
des
objectifs
de
liquidite
bancaire
priment
sur
l'activite de credit.
En realite, l'analyse de Mc KINNON a le merite de souligner
la valeur operatoire du taux d' interet sur l' accumulation du
capi tal.
Toutefois,
la nature de la repression qu' elle decri t
semble
etre
a l' oppose de celle que l' on observe dans une
economie comme celle du Cameroun.
C' est ainsi
que
le relevement des
taux d' interets qu' il
prone a certes ete observe ces dernieres annees,
l'un des plus
recents en date, celui decide en janvier 1992 faisant suite a la
hausse
des
taux
d' interets
franc;:ais.
Mais
ces
modifications
etaient maintenus a des niveaux peu remunerateurs pour les taux
crediteurs.
Si
cette
situation
a
permis
de
consolider
les
marges
bancaires elle a aussi et surtout rencherit le credit excluant
meme de celui-ci les operations jusqu'ici privilegiees telles que
les credits aux PME, par la suppression des taux bonifies. Elle
apparait en plus comme une censure a l'epargne privee dont le
niveau de remuneration ne tient pas compte de l'evolution du cout
du credit.
En
effet,
l'epargne
des
deposants
qui
devrait
etre
consideree comme la matiere premiere bancaire transformee pour
donner lieu au credit semble n'avoir que peu d'interet pour le
systeme bancaire.
Sinon comment pourrai t-on expl iquer que son

- 140 -
prlX n' evolue
pas
en phase
avec celui
des
autres
res sources
bancaires ?
Cette censure de l'epargne est d'autant plus forte qu'a la
difference du comportement des agents economiques sur les marches
financiers, les epargnants n'ont pas veritablement des moyens de
contrainte directs ou indirects obligeant les banques a reviser
leur politique de taux crediteurs.
D'ailleurs la tenue de ces taux, au moment Oll se developpent
les circuits d'epargne informelle et dont de nombreuses etudes
soulignent l'importance des res sources drainees, ne s'est guere
amelioree pour tenir compte d' une eventuelle
concurrence.
Ce
comportement bancaire nous conforte donc dans notre position et
nous
permet de
souligner une
fois
de
plus
I' indifference du
systeme bancaire vis a vis de l'epargne privee et partant vis a
vis de l'activite de credit. La repression financiere est bien
effective mais joue en sens inverse du processus decrit par Mc
KINNON.
Les
autori tes
monetaires
et
le
systeme
bancaire
en
"administrant" taux debiteurs et crediteurs n'ont pas permis aux
mecanismes du marche de jouer pour optimiser les comportements
d'epargne et d'investissement. En d'autres termes ils ont reprime
la sensibilite de l'epargne au taux d'interet crediteur et la
sensibili te
de
la demande
de monnaie
aux
taux debi teurs.
Ce
processus de repression est celui que decrit egalement TCHUNDJANG
POUEMI 26 • Pour ce dernier, la Banque Centrale en fixant son taux
d'interet
determine
tous
les
aut res
de
I' economie.
Et,
ses
competences devraient s'arreter a ce niveau pour permettre aux
lois du marche de jouer librement.
Pourtant,
dit-il
s' ag issant
particulierement
de
la
Banque
Centrale
Africaine,
celle-ci
est
descendue
dans
l' arene
economique fixant
elle-meme
les
taux d' interets
sur tous
les
marches. Le resultat de cette interference a ete la fixation de
taux
d'interets
crediteurs
si
bas
qu'en
tenant
compte
de
l'inflation, les taux d'interets reels, correspondent a des taux
negatifs.
Cette
forme
de
repression,
qu'il
qualifie
d' autorepression,
a davantage profi te
aux banques qui ont pu
.. - J. TCHUNDJANG POUEHI, Monnaie Servitude et Liberte,
op eit pp 78-83

- 141 -
ainsi se constituer des marges de plus en plus grandes au fur et
a mesure que les taux debiteurs s'accroissent tandis que les taux
crediteurs sont maintenus a des niveaux bas.
Ce
comportement
de
marge
bancaire
peut
avoir
des
consequences desastreuses lorsqu'il est pratique au sein d'une
economie en voie d'industrialisation. En privilegiant leur marge
par
le
biais
des
taux
debi teurs
appl iques
aux
credits,
les
banques
ne
tiennent
plus
compte
des
types
de
besoins
de
financement exprimes, de la particularite des differents projets
a financer. 11 en est de meme de l'ordre de priorite de ceux-ci,
de l'impact du cout du financement sur leur realisation et leur
developpement.
L'importance
que
prennent
alors
les
frais
financiers
dans
le
cout
total
est
telle
qu'elle
accroit
l'incertitude du denouement du projet d'industrialisation. Cette
incertitude
s'accentue
dans
les
PME
oil
tous
les
couts
sont
impressionnants, ceux de l'acquisition de la technologie, de la
gestion
des
stocks
de
matieres
premleres
notamment.
Manifestement,
l ' eloignement de la sphere de la construction
technologique et
des
sources
d 1 approvisionnement
en matieres
premieres en fai t
des consommateurs hesi tants
et parfois mal
renseignes.
11
s' en
suit
une
charge
dont
les
facteurs
d'accroissement sont multiples. Les plus significatifs sont par
exemple
l'allongement
des
delais,
l'absence
de
maitrise
de
l'evolution
des
prix
des
equipements
et
des
consommations
intermediaires,
le
cout
du
transfert
technologique,
le
taux
d'obsolescence,
le temps d'oisivete des machines,
les ruptures
de stocks qu'accroit encore davantage la devaluation du franc CFA
comme nous le verrons plus loin.
Le poids de ces couts est tel qu'il alourdit davantage le
cout financier des credits, constitue une veritable entrave aux
efforts de developpement des PME Camerounaises.
L'importance de la charge qu'implique cet ensemble de couts
nous a amene a definir dans les developpements precedents un taux
d'interet implicite i" qui tend a etre aussi eleve que le taux
explicite i,27.
27
-
Voir supra,
chapi tre I p 97 - 98

- 142 -
Ainsi,
parmi les facteurs qui accroissent i",
nous avons
cite
ici
surtout
les
difficultes
technologiques,
d'approvisionnement en matiere premiere et de gestion. 11 existe
egalement
dans
le
financement
bancaire
les
conditions
de
garanties qui elevent le niveau du taux d'interet implicite. Leur
impact est d' autant plus grand que celles-ci portent sur des
suretes reelles et personnelles que les PME ont de la peine a
rassembler
devant
parfois
les
obtenir
au
prix
d'un
loyer
regulier.
Ainsi
donc
l' analyse
de
la
distribution
des
credits
en
faveur des PME montre les nombreuses insuffisances des ressources
bancaires a financer efficacement les projets de creation et de
developpement de l'investissernent dans le secteur.
La
large
proportion
des
credits
a
court
terme
qui
caracterise cette distribution des capitaux, le role d'adjuvant
que jouent les refinancements BEAC et partant celui des credits
de
l' ensemble
du
systeme
nous
amene
a
nous
interroger
sur
l'existence d'autres ressources ayant contribue a la realisation
des projets d'installation et de croissance de ces entreprises.
Sur
ce point,
le
role
des
res sources exterieures
au
systeme
bancaire dont les lignes de credi t
Banque Mondiale et Caisse
Centrale de Cooperation Economique
(CCCE)
aujourd'hui
Caisse
Fran~aise de developpement (CFD) doit etre souligne. Ces concours
ont
ete generalement utilises
a
travers
la
Banque
locale de
Developpement,
(BCD)
qui a ete mise en liquidation comme nous
l'avons deja dit en Aout 1989.
Les concours octroyes sur ces lignes sont prioritairement
destines
aux
PME
camerounaises.
Nous
verrons
comment
cette
experience
qui
traduit
l' importance de
la mise
en oeuvre de
l'ensemble des fonctions de l'intermediation a ete menee. Nous
en apprecierons alors l'impact sur la promotion des PME.
$3
L'apport des Lignes de Credits Exterieurs dans le
Financernent des PME Camerounaises
Le recours aux credits exterieurs doit etre per~u ici comme
un appui au financement de la formation du capital dans les PME
situees
dans
un
environnement
Oll
l'offre
des
credits
est
rationnee.

- 143 -
D'une
maniere
generale,
le
financement
des
biens
d' equipement est considere par les banques commerciales comme une
tache devolue
aux banques de developpement
surtout
lorsqu' il
s' agi t
de
financer
les
PME
dont
le
taux
de
rentabili te
des
opera tions
ne
semble pas
eleve.
La B. C. D.
sera donc
souvent
sollicitee pour l'octroi des credits aux PME.
Ainsi, en 1981-1982, cette banque a finance 44 % des projets
PME par rapport aux credits a moyen terme octroyes, en 1982-1983,
48 % ; en 1983-1984, 41 % ; en 1984-1985, 40 %29.
Parmi
les
res sources
dont
disposait
la
BCD,
il
faut
mentionner
les
lignes
de
credits
exterieurs
dont
la
plus
exploi tee
a
ete
la
ligne
conjointe
BIRD-CCCE29 •
Cette
ligne
resulte d'un accord de credit de developpement (credit n° 575 CM)
passe
en
date
du
30
Juillet
1975
entre
le
gouvernement
camerounais et la Banque Mondiale par le biais de l'Association
Internationale de Developpement.
Conformement a l'article 11, section 2.01, l'A.I.D. consent
au gouvernement camerounais aux conditions stipulees dans ledit
accord, un credit d'un montant en monnaies diverses de la contre-
valeur de trois millions de dollars ($ 3 000 000)30.
Ce concours
est assorti de trois principales conditions
- d'abord l'obtention d'un pret CCCE d'un montant en francs
franc;ais
de
treize
millions
cinq
cent
mille
(13
500
000) 31,
permettant un financement conjoint a hauteur de 50 % pour les
fonds BIRD et 50 % pour ceux de la CCCE. 32
-
ensui te,
la
retrocession a la BCD de la totali te des
ressources du credit, cette banque devant en assurer la gestion.
Enfin,
la gestion de ces fonds devait etre assuree avec l'aide
d'organismes specialises d'assistance technique dont la SATEC,
28
_
Voir a ce 5ujet tableau VI P. 144
.. - Il ,,' agi t
de" ligne" de crlldit
ouvertes par la Banque
Hondiale et la Cai"se Centrale de Coop6ration
Econamique pour le financement de" PME.
"
- Traduction fran9Aise non offic1elle du texte Original
Anglais, Cr6dit N° 575 CM, R.
Buhler, 1975. p.
9.
J>.
_
IDEM p. 1
32 - IBIDEM P 2

- 144 -
Tableau VI : ACTIVITE PME DE LA BCD
( en millions
de F CFA)
SECTEURPME
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
Volume des credits PME octroyes
5272
4231
4244
3 815
Volume total des credits octroyes
31 216
29802
45661
42055
Evolution par rapport aI'annee
precedente
+ 133,27 %
- 19,74 %
+ 0,30 %
- 0,08 %
Pourcentage par rapport au total des
concours octroyes
16,88 %
14,28%
9,29 %
9,08 %
Pourcentage par rapport aux CMT
octroyes
44%
48%
41 %
40%
Source: Rapports d'activites BeD. 1983/1984 et 1984/1985

- 145 ~
l' AFCA 33 et la CAPME.
Les
res sources de ce credi t
BIRD-CCCE sont destinees
au
financement des PME dans tous les secteurs de la production a
l'exception de l'agriculture, du logement et du commerce34 •
L'analyse de l'impact de ce credit sur la dynamisation de
l'investissement dans les PME nous amene a trois observations
majeures quant aux beneficiaires du credi t,
aux condi tions de
mise en place et aux resultats obtenus.
3-1
Les Beneficiaires du Credit
Les
entreprises
de
moyenne
et
grande
envergure
ont
davantage beneficie des facilites offertes que celles auxquelles
ces credi ts avaient ete ini tialement ouverts, laissant apparai tre
un ecart considerable entre les previsions et les realisations.
Sur des previsions de creation de 60 petites unites d'un cout
moyen de 15 millions de F CFA, aucune entreprise n'a ete financee
pour
ce
montant
et
14
ont
obtenu
des
credits
pour
des
investissements compris entre 25 et 38 millions de F CFA.
Par
contre la majorite de la ligne a ete affectee a 21 unites dont
le cout des investissements etait superieur a 38 millions allant
meme jusqu'a 150 millions de F CFA.
(Voir Tableau VII et Tableau
VI I I) .
.. - SATgC : Soci6t6 d'Aide Technique et de Cooperation,
Soc16t6 d'Etat de la Rhpublique Fran~aise constitu6e
conform!!ment a l'article 2.1 de la loi du 30 Avril 1946
et a l'arr~t6 du 2 Novembre 1956.
- AFCA : Association pour la Formation des Cadres de l'Indus-
trie et de l'Administration, Organisms priv6 fran~ais a but
non lucratif, constitu6 conformement a la loi du 1er JUillet
1901 de la Rhpublique Fran~aise, Accord de cr6d1t n° 575 ot,
op cit. Article I.
34
_
IDEM,
article I l l .

-
146 -
Tableau VI I*
Previsions et Engagements sur Ligne de Credits
BIRD-CCCE.
PREVISIONS
ENGAGEMENTS PRIS
Investissements
Investissements
Nombre
(en millions de Nombre
(en millions de
F CFA)
F CFA)
Petites entreprises
Investissements
inferieurs
a 38 millions de F. CFA ....
60
870
14
357,2
Moyennes entreprises
Investissements
superieurs
a 38 millions de F. CFA ....
17
1.650
21
1.959,7
TOTAL
77
2.520
35
2.316,9
Source
BCD,
Document de synthese et d'evaluation au 31-11-81.
Sur
les
35
entreprises
ayant
beneficie
des
1.378,7 millions
de
F
CFA de credit de la B.C.D.,
seules
18 d'entre elles etaient en activite
au
30
juin
1981,
soit
deux
annees
apres
la
mise
en
place des
financements.
La situation genera le est la suivante au 30 juin 1981 :
18 entreprises representent des investissements de 1.064,6 millions de
F. CFA et des credits de 820,9 millions de F. CFA ;
5 projets n'ont pas ete menes a terme ;
2 entreprises ont ferme leur porte apres un demarrage difficile
10 entreprises n'ont pas encore commence leur exploitation.
*
Ce tableau a ete etabli dans le cadre de l'evaluation de la ligne
concernee. Lire a ce sujet F. COLAS, ligne de credit accorde a la
Banque Camerounaise de Developpement pour le financement des
Petites et Moyennes Entreprises,
synthese de l'evaluation et
propositions, Novembre 1981,
10 pp.

Tableau VIII _
SITUATlON J)~S FONDS lJ' AFFECTATiON ~T DES ~MPRUNTS
- 147 -
10 /
-
REFlNANCEM~NTS CCCE
.-
SOLDES DES
DATES
ENGAGEMENTS AU
MONTANT DES
30 JUIN 1990
SOClET~S
CONVENTIONS
CREDITS
---------------------------------------.----------
--------------------- ------~-----~--~----
SAFACAM
(550N)
12/04/1977
314 290 000
SAFACMl
(720N)
05/01/1979
144 000 000
!
S.P.F.S.
( 300N)
12/04/1977
150 000 000
I
SOHLI
(400M)
09/08/1977
126 350 000
Ii
MUKETE
(535t--1)
15/06/1979
501 562 500
SOLICAM
(725)
20/03/1979
362 505 000
II
CHALUTCAN
(432H)
17/07/1979
532 96/. 101 i
S.P.F.S.
( 1269111)
28/04/1980
1 015 989 056
I
COFRE~l - I
(20mU
23/12/1981
50 015 000
COFREH - II
( 150N)
23/02/1981
,25 040 000
SAFACAM
(700N)
16/12/1981
700 000 000
S.P.F.S.
(210001)
24/06/1982
2 100 000 000
SOCAVER
(200N)
16/12/1981
87 500 000
SOCAVER
(1 amI)
16/12/1981
43 750 000
FAEN
( lOON)
11/01/1982
70 000 000
PHE (AI)
(160H)
30/12/1975
7 794. 373
PME (2)
(J 75H)
18/04/1979
189 249 972
t
TOTAL .........................
5 987 010 002
.
. . _..
2''1 -
Autres emprunts speciaux PME.
DATES
SOLDE AU
ORGANISHES
CONVENTIONS
30 JUIN 1990
Conv. BAD/PME
(592H)
22/07/1979
235 236 241
Conv. AID
(513)
30/07/1975
909 354 400
Source
Tableau Extrait du Bilan de liquidation de la BCD au·30/06/1990.

- 14R -
Cette rernarque fai te a cette 1 iqne sur les beneficiaires des
financernents
BIRD
CCCE
reste
valable
pour
de
nombreux
financernents exterieurs dont les credits CCCE. Un recapitulatif
des entreprises financees sur cette ligne nous est presente dans
le Tableau VIII. Ces entreprises sont pour la plupart des grandes
unites
de production dont
les proprietaires
sont
en rnajorite
etrangers ressortissants du pays pr§teur.
Dans
ce
cas
comme
dans
celui
deja
developpe
de
l' investissernent de transi t, le contraste est la caracteristique.
L'investissement
beneficie
essentiellernent
aux
entreprises
etrangeres
alors
que
son
financement
assure
par
le
systerne
bancaire local vise a inserer les PME du pays d'accueil dans le
processus de production.
Ainsi,
dans "l'investissement de transit",
les operations
sont declenchees et encouragees dans la perspective d'un effet
d'entrainernent en faveur des P.M.E locales qui devront rentrer
dans
le
processus
de
production
par
le
biais
de
la
sous-
traitance.
Dans le cas des lignes de credits exterieurs,
les concours
sont or iginellernent
dest ines
aux
P. M. E locales.
Mais dans
la
realite les financernents mis en place profitent plus a de grandes
unites originaires du pays donateur par un effet d'eviction au
detriment des PME. Paradoxalement, la charge du remboursernent des
credits ainsi consentis incombe au pays destinataire des fonds,
cl
ses
epargnants
cl
son
systeme
financier.
Et,
dans
le
cas
d'espece,
les
lignes
CCCE,
les
lignes
BIRD
CCCE
sont
contregaranties par l'Etat Camerounais et gerees par la B.C.D.
Cette garantie signifie que les echeances de remboursement sont
automatiquement couvertes par la B.C.D que l'entreprise ait au
prealable paye ou non. La BCD supporte donc totalement le risque
financier de l'operation. Et pour la plupart de ces operations,
ce risque a ete veritablement assume. On le voit a travers les
soldes debiteurs des comptes des clients dans les livres de la
BCD en liquidation a la date du 30 Juin 1990 pour des credits
totalement echus.
Si
certains
d'entre
eux
dont
COFREM,
SOCAVER
ont
ete
totalement rembourses par les clients d'autres ne le seront sans

- ~ 49 -
doute jamais. Des actions de recouvrement forc~ ont ~t~ engag~es
a l'encontre de quelques cl ients parmi lesquels CHALUTCAM, mais
celles-ci n' aboutirons qu' a de faibles r~sul tats, les ~quipements
hypoth~qu~s n' ayan t pl us qu' une t re,s fa i ble valeur.
D' autres
dossiers
fon t
1 r obj P L
de
ren~gociations
et
de
moratoires qui consentent (Ies abawl'>J1s de cr~ances de plus de
50 %. On peut citer dans ce sens le cas de la SPFS.
L'effet d'~viction est
done 6'i'1 el aJllplifi~ pour les PME
dans
la
mesure
00
le
risque
est
tel
qu'il
entrave
le
remboursement du credit et r~duit davantage les possibilit~s de
distribution de credits en faveur des PME. Le financement des PME
par le systeme bancaire financier n'a donc pas pu v~ritablement
etre assur~ a partir des li gnes e::t~rieures.
11 importe de preciser que pou~ les quelques projets - PME
finances sur ces lignes on a observe une forte concentration des
entreprises
autour de dell::
poles
nouala et
Yaounde.
Ces deu:~
m~tropoles ont
ainsi
b~n~fici~ de
83
% des
cr~dits
aces
entreprises
(Tableau IX).
En
outre,
les
secteurs
privil~gi~s
sont
l'industrie
alimentaire
avec
notamment
les
boulangeries
qui
sont
des
activit~s a faible valeur ajout~e. En effet, ici le mat~riel de
production et la quasi totaJit~ des consommations intermediaires
sont importes. On a pu constater ~galement un engouernent pour la
menuiserie donc une faible diversification des activit~s. On le
voit egalernent a travers le Tableau IX.
Le
bilan de
l'activit~ -
FME a
partir de
ces
lignes de
cr~dit perrnet ainsi de dire que ces concours ont tout de rnerne
contribue a la creation d' un certain nornbre d r emplois a des couts
relativement bas,
le cout moyen par
ernploi
~tant d'environ 3
millions de
francs
CFA d' apres
les
estimations du
rapport de
synthese ~tabli par F. Colas deja cit~. Ces cr~dits ont egalement
offert quelques occasions de creation de PME nationales dont le
suivi va etre difficile a assurer avec la fermeture de BCD, piece
maitresse des structures de financement bancaire des PME, comme
le
rnontre
le
poids
de
cette
banque
dans
le
financement
des
credi ts a moyen terme dans les Tableau;: VI et X.
Ces
differents
avantages
du
financement
sur
les
credi ts
e::ter i eurs vont etre a t tenu~s par les di ff ici les condi tions de
mise en place impos~es aux PME.

- 150 -
Tableau IX
Classification par localisation
MONTANT
PROVINCES
DE LA L1GNE
% DE LA L1GNE
EN M.F.CFA
Uttora/",,,,, I"""""",,,
417
43
1111''''''''''''''''''''''
Cenlre-Sud,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,",,,,,,,,,,,,,,,,
388
40
Nord,,,
102
11" Ill' "" '" ",1"'" If""""
10
J , " " " " "
" ,
Duest,,, I"'" I"11",,,,,,,,,,,,,,, I"'"'''' 1,,,,,,,,
25
2
Sud-Ouest""
47
5
"111 1111""""'11'"'' 11"'" '" I'"
979
100
Classification par Secteur d'acfiv;fe
MONTANT
SECTEUR D'ACT/VITE
DE LA L1GNE
% DE LA L1GNE
EN M.F.CFA
Industria chimiqus"""""I"""""""""",
118
12
Industria alimentairs"""""""""""""",
335
34
Industn's bo;s"""""",111""",,,,,,,,,,,,,,,,,
190
20
Industde melalliqus""1""""""""""",,,
82
8
Industria maten"aux',II""',III',","""""','
77
8
Industrie textl7es et confection"""",,,,,,,
43
4
divers""""""""""""""""""""""""I'
134
14
979
100
Source : Document mterne de synthase elabore par la BCD au 29/10181
Deux provinces, Centre-Sud(1) et Uftoral, et al'inten·eur, deux poles:
Yaounde et Douala, Mnefient de 80% de la/igne de credit.
Les secteurs d'activite sont tous representes avec un accent sur le secteur alimentaire
avec la creation de 7 boulangeries sur 35 PME creees (2).
(1) -
Cette prOVince a ete eclatee en deux provinces distinctes, celle du Centre
et celle du Sud.

(2) -
Ce document concorde sur les points essen/iels avec celui elabore par la CCCE;
de legt}res differences apparaissent au niveau du nombre de PME pris en
consideration, le rapport de la BCD ne faisant pas mention des cinq entrepn"ses
n'ayant pas encore demarre et des deux qui ont interrompu leurs activites


Tableau X: RAPPORT ENTRE LE REFINANCEMENT DE LA BEAC ET LES CREDITS A L'ECONOMIE
AU 31 DECEMBRE DE CHAQUE CHAQUE ANNEE (EN %)
ELEMENTS
1973
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
Moyenne de
12 annees
CREDITS ACT
Banques commerciales

27
23
18
15
15
18
11
11
12
12
13
15
16
Banques de developpemen
42
38
71
55
47
32
38
39
56
57
42
43
47
CREDITS A MT
.....
Vl
Banques commerciales
67
58
47
32
47
43
36
29
34
39
39
31
42
.....
Banques de developpemen
52
65
60
65
69
52
48
45
38
30
35
36
50
TOTALMT
CREDITS A LT
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
Source: GEREA, Etude sectorielle sur le financement de I'economie camerounaise
Working Paper GEREA, Avril1989

- 152··
3.2-
Les Conditions de Mise en Place des Credits aUK PME
Elles
concernent
les
prealables
necessaires
a
la
mobilisation
des
fonds,
le
tam~
d' inten~t
applicable
aux
entreprises,
la duree du credit,
les garanties requises.
Le tirage sur les fonds fait intervenir de nombreuses etapes
et instances de decision. Ainsi, apres l'accord de la BCD sur un
proj et
d' investissement,
la
note
de
presentation doi t
etre
adressee
au
FOGAPE
dont
la
garantie
est
une
condition
indispensable puis le projet devra enfin etre agree par la BIRD.
Les instances de decision de chacune de ces institutions siegeant
a des moments differents,
les delais de mobilisation peuvent se
chiffrer a plusieurs mois,
compte non tenu du temps necessaire
pour l' etude du dossier au sein de la BCD,
et de celui de la
preparation de l'etude de faisabilite presentee par le promoteur
dans sa demande de financement.
On a pu ainsi faire le constat
d'une mobilisation tres lente dont l'inconfort est l'ecart entre
le
cout
initialement
prevu
et
le
cout
effectif
de
l'investissement au moment de son acquisition. Le corollaire en
est
les
difficul tes
de
realisation
du
depassement
du
budget
d'investissement, depassement qui incombe au promoteur ayant dej a
difficilement pu constituer son apport personnel selon le schema
convenu.
On retrouve ici le probleme du taux implicite d'interet dans
son
immense
di versi te.
Ainsi,
aces
lenteurs
et
aux
couts
supplementaires
qu'elles
impliquent
viennent
se
greffer
le
paiement des interets qui s'ils sont calcules a partir d'un taux
aligne sur celui des credits privi1egies de la BEAC- le taux de
sortie
toutes
taxes
comprises
de
la
ligne
etant
de
11
%-
soulevent d'autres types de problemes dont celui des interets
intercalaires
echus
avant
le
demarrage
effectif
de
l'exploitation.
Les
interets
intercalaires
sont
des
frais
financiers
calcules
a
I' entreprise
pendant
la
periode
de
franchise
du
remboursement du principal.
lIs sont souvent expliques par le
fait que l'entreprise dispose pendant cette periode de ressources
qui ont un cout. Ces interets sont donc reclames dans une phase

- 153 -
du projet Oll celui-ci n'a pas encore demarre ne pouvant donc pas
gene re
de
res sources
internes
pour
la
couverture
des
frais
financiers qui lui sont reclames. La pratique dans ces cas a ete
un
endettement
supplementaire
generalement
inclus
dans
le
programme
initial
pour
couvrir
a
terme
ces
interets
intercalaires. Leur existence est donc un exemple d'aggravation
de la charge financiere des PME35 •
Lorsque
les
programmes
d' investissement
ne
tiennent
pas
compte
des
hausses
de
prix
eventuelles
et
de
ces
interets
intercalaires, et ils ne l'ont pas toujours fait, les difficultes
financieres et les impayes deviennent inevitables. lIs le sont
d'autant plus que les secteurs privilegies par les lignes ont une
rentabili te
limi tee
et
une
charge
d' assistance
technique
et
d'assistance en gestion estimee dans le rapport de F. Colas en
terme de cout de l'assistance linvestissement a 50 %36. En outre,
la duree des credits consentie n'a pas favorise un etalement sur
une periode plus longue les differentes charges de l'entreprise.
Alors que les conditions initiales prevues par les conventions
allaient jusqu'a 15 ans, les durees d'amortissement accordees ont
ete en moyenne de 6 a 7 ans dont 1 a 2 ans maximum pour la
periode du differe. Ce delai de grace s'est avere tres court pour
des entreprises industrielles qui auraient eu besoin de plus de
temps pour l' installation des equipements,
la formation de la
main d'oeuvre, les premiers essais et la reaction du marche. Des
besoins ponctuels de tresorerie ont egalement pose d'importants
problemes, une fois les activites lancees. Les lignes de credit
n'ont pas prevu de financement de l'exploitation.
De meme,
la
structure
de
fonctionnement
de
la
BCD qui
jusqu' en
1985 ne
disposait pas de guichets, n'a pas facilite la couverture a court
terme d'importations de matieres premieres, de gestion des stocks
de
pieces
de
rechanges,
des
delais
entre
les
ventes
et
les
encaissements.
Les
entreprises
se
sont
retournees
vers
les
banques commerciales pour obtenir des escomptes et autres avances
pour
faire
face
a
leurs
charges
d'exploitation,
posant
un
-
Voir Supra, chapitra I
-
PO. Colas, ligna de =ed1t
accordea a la Banqua
camerounaisa de Devaloppement pour la financement
des Patitas et Hoyennes Entreprises, OF cit p 6.

- 154 -
probleme de garanties, qui jusqu'ici etait presqu'inexistant. En
dehors
de
la
garantie
systematique
du
FOGAPE
apportee
a
concurrence de 80 % du montant du credit,
les PME n'ont pas eu
a offrir des suretes reelles ou personnelles supplementaires.
Pourtant ces questions n'ont pas ete supprimees pour autant, se
reposant au moment des demandes des credits de fonctionnement aux
banques commerciales. Ainsi Cette ligne de credit, a l'instar des
concours financiers interieurs accordes aux PME,
a presente un
certain
nombre
d' imperfections
au
ni veau
de
l' etude meme
du
projet ; de son cout total, de sa rentabilite, de l'etendue de
son marche, ce dernier s'etant souvent avere tres etroit ou mal
cerne.
Ces
ecueils
se
sont
si tues
egalement
au
ni veau
des
condi tions de duree plut6t courtes au regard des
lenteurs et
imprevus dans le demarrage des projets industriels. De meme, la
mauvaise connaissance des equipements et leur faible maitrise
n'ont pas ete ameliorees par ces concours de nature uniquement
financiere. Les cadres techniques nationaux recrutes n'ont pas
ete en nombre suffisant et n'ont pas ete formes pour pouvoir
assurer un appui
technique
aux entreprises
instal lees . Ainsi
parmi le personnel BCD affecte au suivi des PME,
on ne compte
qu'un ingenieur en genie civil qui apporte son savoir faire dans
les
evaluations
des
constructions
notamment.
Le
probleme
technologique et de la formation adequate reste entier et se
repercute au ni veau des delais de demarrage generalement mal
estimes. Tous ces problemes entrainent des gaspillages de temps,
l' accumulation
des
interets
intercalaires,
les
mauvaises
conditions de stockages de matieres premieres,
et les risques
d'avaries tous prejudiciables a la rentabilite financiere des
projets et propices a l'accumulation des impayes.
En fait,
on a pu se rendre compte a travers toutes ces
difficultes a faire fonctionner normalement les PME et meme les
grandes entreprises que la veritable garantie du remboursement
des
credits
est
une
bonne
etude
du
projet
et
des
conditions
favorables a un deroulement normal de l'activite de production.
Si
les
ressources
externes
ont
donc
permis
d'engager
quelques operations de financement en faveur des PME, elles ont
aussi tres vite revele leurs limites.

- 155 -
Ainsi,
l'eligibilite aces ressources sournet l'entreprise
a des tracasseries adrninistratives de production de documents,
de gestion assez lourde par rapport a la nature des entreprises,
d'exigences de bilans etc ... toutes inherentes a des conditions
de financement rnoderne de l'activite.
La prise en compte des particularites des PME n'a pas ete
effective
expliquant
une
plus
grande
orientation
de
ces
res sources vers des grands proj ets d' investissement pouvant rnieux
repondre aux conditions de ce type de financement.
Ces concours n'ont donc pas pu resoudre dans sa profondeur
le probleme du financement des PME confirmant une fois de plus
la complexite de l' intermediation financiere et la necessite d'un
systeme financier propre pouvant mieux s'adapter aux problemes
particuliers des PME.
Faute de pouvoir l' etre, le systeme bancaire camerounais est
reste a la peripherie des problemes de financement de ces PME
alors
que
la
fragilite
financiere
de
ces
unites
et
leurs
difficultes
de
fonctionnement
necessitent
une
adaptabilite
constante. Cornrne on a pu le voir,
les rnesures adoptees jusqu'ici
et qui apparaissent cornrne autant de tentatives de connexion du
disposi tif financier aux besoins de l' economie ne parviennent pas
encore
a
produire
les
effets
attendus.
Et,
c'est
dans
la
perspective
d'une
plus
grande
plasticite
des
structures
du
systeme bancaire camerounais qu'il convient de situer la mesure
la plus recente qu'est la devaluation du franc CFA.
L'appareil
de financement saura-t-il donc tirer profit de la devaluation du
franc CFA de maniere a assurer une activite plus reguliere aux
PME
?
Existe-t-il
des
chances
d'un
meilleur
denouement
des
concours bancaires qu' il
s' agisse des credi ts directs ou des
concours exterieurs avalises par les banques locales ?
§4
L' !nfpact
de
lfil
Devaluation
du
Franc
CFA
sur
le
4'inartcement
(
des 1?ME
Decidee le 11 Janvier 1994,
la revision de la parite du
franc semble s'integrer dans le processus des reformes visant a

- 156 ~
rendre plus efficientes les economies de la zone franc 3? du fait
de l'insuffisance des plans d'ajustement structurel. Bien plus
cette operation nous apparait comme une nouvelle etape dans la
reforme du syst~me bancaire camerounais bien que celle-ci soit
une mesure generale pour l'ensernble de la zone.
Nous
voulons
ainsi,
au
regard
de
la
specificite
des
probl~mes des PME camerounaises et de la rigidite des structures
du syst~me bancaire deja soulignees analyser l'impact de cette
nouvelle reforme. Celui-ci nous sernble-t-il peut-etre saisi, au
moins
a
deux
niveaux
bien
qu'une
evaluation
de
l'operation
paraisse un peu prematuree a l'heure actuelle, juste un an apr~s.
-
D' abord au niveau
du cadre monetaire et
financier,
on
appreciera l' importance de cette mesure par rapport aI' evolution
des conditions de credits et essentiellement des taux d'interets
en faveur des PME ;
- Ensuite au niveau du cadre economique,
on verra comment
cette
reforme
a
ete
preparee,
les
mesures
d'ordre
institutionnelles en faveur des PME qui l'accompagnent. Nous en
deduirons
sinon I' incidence du moins
les
risques
previsibles
aussi bien :
*
sur
les
conditions
d'approvisionnement
en
mati~res
premi~res, pi~ces de rechange des PME que
*
sur la competitivite de leurs produits.
4.1-
Impact sur le Cadre Monetaire et Financier
La fragilite financi~re des PME qui se rev~le dans le faible
niveau des fonds propres et qu'aggravent les difficultes d'acc~s
aux credits bancaires et plus specialement aux credits a long et
moyen
terme a conduit comme nous l'avons vu au recours a des
ressources
exterieures.
Et
l' une
des
condi tions
de
la
mobilisation
des
financements
exterieurs
en
faveur
de
ces
entreprises est la garantie de l'Etat ou encore celle des banques
37
On lira sur les possibilites de renforcement
des economies de la zone par le biais de
la devaluation du franc CFA,

C. EBOUE, la
zone frAnc Frein ou aide au Developpement,
Laboratoire d'analyse et de Recherches Economiques

Universite de Bordeaux I,
Juin 1992 pp 16.

- 157 -
camerounaises. Ainsi quelle que soit la source du credit accorde
aux PME,
le systeme bancaire demeure le centre d' impulsion de
l'economie.
La
reussite
de
la
devaluation
suppose
donc
un
ajustement de
son comportement pour tenir compte des donnees
nouvelles imposees par cette operation.
L'observation empirique de la situation permet de degager
deux
aspects
marquants
au
ni veau
des
banques.
D' abord
l' impreparation de celles-ci et comme consequence logique,
le
renforcement de la rigidite des comportements.
4.1.1-
L'Impreparation du Systeme Bancaire
En
effet,
les
premiers
jours
de
la
devaluation
sont
revelateurs d' une absence totale d' anticipation par rapport ii une
situation qui etait latente provoquant au courant de l'annee 1993
des sorties massives de capitaux du Cameroun, de l'ordre de 180
milliards de francs CFA39 ,
soit environ l'equivalent de un tiers
du
budget
de
l'Etat
pour
l'annee
concernee.
Ce
mouvement
important
de
capi taux
represente
tout
de
meme
une
fui te
du
systeme qui fait supporter un cout d'opportunite eleve a la fois
aux banques et aux "agents a
deficit" dont les PME. En outre,
les
banques
avaient
deja
quelques
temps
avant
l'operation
suspendu
les
transferts
avec
l' exterieur
dont
notamment
les
reglements
des
factures
des
fournisseurs,
la
couverture
des
lettres
de
credi ts
confirmes,
le
paiement
des
echeances
des
credits exterieurs etc ... Le nombre impressionnant des proces en
cours
entre
les banques
et
les
entreprises
dont
les
PME
temoigne
du
caractere
impromptu
de
cette
decision
et
de
la
confusion qu'elle cree au niveau du systeme financier et partant
de l'appareil productif.
En effet,
bon nombre de banques saisies par leur client
n'ont pas execute a temps les ordres de paiement qui leur avaient
ete donnes.
Ces derniers reposent soi t
sur les decouverts et
credits obtenus, soit sur les "deposits" exiges et effectues par
39
-
B. BEKOLO-EBE, la devaluation du franc CFA et
ses consequences, Working Paper du G.E.R.E.A,
Universite de Douala, Avril 1994 pp 16.

- 158 -
les entreprises et plus particulierement par les
PME souvent
contraintes a constituer des provisions a hauteur de 100 % des
depenses envisagees.
Dans
tous les cas,
la non execution des
transferts
cause
d' enormes
prej udices
a
l' acti vi te
des
entreprises surtout pour les vulnerables financierement que sont
les PME.
Les
prejudices
sont
aggraves
par
une
quasi
absence
de
mesures internes d'accompagnement de la devaluation.
4.1.2-
La Faib1esse des Mesures Internes
L' une
des
mesures
effecti vement
observees
au
ni veau
du
systeme bancaire est la tendance baissiere des taux d'interet.
Toutefois cette mesure reste insuffisante pour une double raison
. D'abord le mouvement de baisse est faible au niveau des
taux
d'interets
debiteurs.
11
importe
meme
de
souligner,
s'agissant de celui-ci,
la confusion qui est faite entre taux
d'interets debiteurs et taux d'interets crediteurs et qui nous
a permis de contribuer plus haut,
au debat sur la repression
financiere. En effet, l'un des derniers reamenagements en date,
le huitieme depuis Janvier 1994 39 est intervenu en Decembre 1994.
11
vise
selon
le
communique
du
Gouverneur
de
la
BEAC 40
a
relanccer
les
investissementsproductifs
et
a
fixer
les
disponibilites a l'interieur de la zone.
(Voir Communique BEAC
et Tableau XI bis).
-
Voir tableau XI bis des conditions de banque.
40
On lira a ce sujet le Communique du Gouverneur
de
la
BEAC
publie
dans
le
Quotidien
National
d'informations, Cameroun Tribune du Mardi 13 Decembre 1994.

-159-
COMMUNIQUE - BEAC
Le Gouverneur de la Banque des Etats de I'Afrique Centrale « B.E.A.C » a decide, pour compter du 09 decembre
1994, de proceder au reamenagement des taux d'interlH de I'lnstitut d'Emission ainsi qu'il suit:
- Taux d'interl\\t des Appels d'offres sur le marche monetaire (TIAO) 7,75% au lieu de 8,5% ;
- Taux d'interl\\t des prises en pension (TIPP) 9,25% au lieu de 10,5% ;
- Taux de penalite rrp) 15% (inchange) ;
- Taux debiteur maximum (TOM) 16% (inchange) ;
- Taux crediteur minimum (TCM) 5,5% au lieu de 7,5% ;
- Taux des avances aux Tresors nationaux (a J'interieur des plafonds statutaires) 7,75% au lieu de 8,5% ;
- Taux des depOts speciaux des Banques et Organismes publics 4% au lieu de 3,5%.
Comme par le passe, cette baisse continue des taux d'interl\\t vise d'une part a relancer les investissements
productifs et a conforter la eroissance economique dans la Zone d'emission, et d'autre part, a fixer les disponibilites
qui y sont creees, a rapatrier les capitaux places a I'exterieur et enfin, a encourager la collecte de I'epargne
inteneure.
Ce dernier reamenagement des taux a ete rendu possible grace aux facteurs ci-apres :
- le niveau relativement satisfaisant des Avoirs en compte d'operation ;
- le differentiel d'interl\\t par rapport aux principaux partenaires exterieurs toujours favorable a la Zone d'emission ;
- la forte decrue des taux d'interl\\t sur le compartiment interbancaire du marche monetaire tant au niveau national
que sous-regional.
COMMUNIQUE - BEAC
Le Conseil d'Administration de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale s'est reuni en seance ordinaire le mercredi
07 decembre 1994 dans la salle du Conseil de ses Services Centraux a Yaounde, sous la presidence de Monsieur
Marcel OOUPAMBY MATOKA, ministre de l'Economie, des Finances, du Budget et des Participations de la
Republique Gabonaise, son president statutaire. Cette seance avait ete precedee, la veille d'une reunion du Comite
ministeriel de la Zone d'emission.
Passant en revue I'evolution des economies de la sous-region, le Conseil a releve que celles-ci presentaient
actuellement des signes d'un retournement favorable de conjoncture depuis la mise en ceuvre effective des
mesures arrl\\tees dans le cadre des programmes d'ajustement structure!. Des resultats satisfaisants ont ete
enregistres au plan, notamment, de la competitivite dans certains secteurs et de la maitrise des depenses
budgetaires. Toutefois, la reprise demeure extremement fragile et elle tarde a se generaliser a I'ensemble des
secteurs economiques.
Le Conseil a recommande la prUdence dans la poursuite de I'effort entame. 11 a souhaite que les partenaires
bilateraux fassent preuve d'une plus grande comprehension lors de I'evaluation des programmes en cours
d'execution. Ces programmes ont ete confectionnes sur la base d'hypotheses qUi n'ont pas integre les effets de la
retorme fiscalo-douaniere, concue avant la modification de la parites du FCFA. C'est pour cela que les realisations
en matiere de recettes budgetaires se sont situees en dE¥' des previsions.
Le Conseil a note avec satisfaction I'amelioration de la liquidite du systeme bancaire. Mais il a deplore le fait que
cette Iiquidite soit demeuree jusqu'ici oiseuse dans les ecritures des banques commerciales.
Aussi, a I'effet de creer res conditions d'un recyciage sain de cette sur1iquidite dans les circuits economiques
locaux, le Conseil a-t-i1 demande aux Autorites monetaires respectives et au Gouverneur de la Banque de prendre
toutes les mesures relevant de leur competence pour alleger le coOt du credit. Pour sa part, afin d'encourager les
etablissements bancaires a reduire le loyer de I'argent, le Conseil d'Administration a decide de ramener de 7,5% a
5,5% le taux crediteur minimum applicable par les banques. Cette mesure d'incitation devrait litre de nature a
appuyer les Gouvernements dans leur efforts de placer les economies sur la voie d'une relance durable et
soutenue.
Par ailleurs, examinant Jes questions ayant trait au fonctionnement et a la gestion de la Banque Centrale, le Conseil
a notamment approuve les comptes de I'exercice 1993-1994 et procede a I'affectation du resultat dudit exercice.
Fait a Yaounde, le 08 decembre 1994
Source: Cameroon Tribune du Mardi 13 Decembre 1994

Tableau XI bis
Conditions de Banque
(en pourcentage)
ENSEMBLE ZONE BEAC
Du
Du
Du
Du
Du
Du
Du
Du
Du
Du
Du
RUBRIQUES
01.06.93
12.07.93
01.10.93
30.12.93
14.01.94
20.06.94
01.07.94
25.07.94
12.09.94
24.10.94
15.11.94
au
au
au
au
au
au
au
au
au
au
au
11.07.93
30.09.93
29.12.93
13.01.94
19.06.94
30.06.94
24.07.94
11.09.94
23.10.94
14.11.94
...
1- Taux debiteur maximum
17,00
17,00
17,00
17,50
19,00
17,00
17,00
17,00
16,00
16,00
16,00
2- Taux crediteur minimum
7,75
7,75
7,75
7,75
9,00
8,00
8,00
8,00
7,50
7,50
7,50
3- Taux d'epargne sur livret
CAMEROUN
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
f--'
01
o
CENTRAFRIQUE
7,75
7,75
7,75
7,75
9,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
CONGO
7,75
7,75
7,75
7,75
9,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
GABON
8,75
8,75
8,75
8,75
9,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
GUI NEE EQUATORIALE
7,75
7,75
7,75
7,75
9,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
8,00
TCHAD
7,50-7,75
7,50-7,75
7,50-7,75
7,50-9,00
7,50-9,00
7,50-8,00
7,50·8,00
7,50-8,00
7,50-8,00
7,50-8,00
7,50-8,00
Source
Zone BEAC,
Bulletin du Marche Monetaire,
N° 5,
Novembre 1994,
p.
29.

- 161 -
L'on peut cependant constater que si le taux d~biteur est
maintenu
cl
16
%,
qui
est
le
ni veau
r~sul tant
de
la baisse
prec~dente, les taux cr~diteurs eux ont diminue de deux points
passant
de
5,5 % cl
7,5 %.
Dne
fois
de plus,
la distinction
necessaire entre les taux debiteurs et les taux crediteurs n'a
pas
~te
faite.
11
semble
donc
bien
difficile
de
contenir
l' epargne
El.
l' interieur
du
systeme
financier
officiel
si
sa
remuneration baisse. 11 semble tout aussi difficile de relancer
les financements bancaires si l' ~pargne, consecuti vement cl la
baisse des taux cr~diteurs, est d~tourn~e des circuits officiels.
En
outre
il
n'apparait
nulle
part
des
mesures
particulieres en faveur des PME.
Les taux privilegies naguere
appliqu~s El. ces entreprises n'ont pas pu etre r~tablis. De meme,
on note une persistance des emplois de tresorerie au detriment
des
cr~dits
cl
la
production
et
de
maniere
generale
El.
l' economie 41 confirmant
le comportement de marge bancaire des
banques au Cameroun.
Les op~rations de tresorerie des banques
sont realisees cl partir des retraits de leurs depots aupres de
la BEAC qui sont recycles aupres des correspondants exterieurs
gene rant un diff~rentiel favorable des taux d'interet de l'ordre
de 1,8 point en moyenne pour le cas fran~ais42.
On peut
donc
par
rapport
El.
ces
donnees
pens er
que
les
mesures d'ordre financier et monetaire sont peu favorables aux
PME dont le financement ne peut ni etre garanti, ni
etre adapt~
aux conditions particulieres de leur mode de fonctionnement. Ce
comportement tranche avec les efforts engages cl l'exterieur pour
soutenir les entreprises. Ainsi paradoxalement, les declarations
sur
les
mesures
externes
se
multiplient
au
lendemain
de
la
devaluation.
En effet, l'importance des mesures externes est saisissante
qu'il s'agisse de celles du FM1, de la Banque Mondiale ou de la
41
-
Lire a ce sujet, Bulletin du Marche Monetaire
de la zone BEAC nO
5 Novembre 1994 p.
7.
42
Lire egalement, Bulletin de Marche Monetaire
de la zone BEAC nO 15, Novembre 1994 p.
7.

'- 162 -
France.
la
Banque
Mondiale 43
decide
entre
autres
mesures
d'intensifier
ses
programmes
techniques
et
financiers
pour
soutenir les pays de la. zone.
Le
FMI 44
rend
pUblique,
le
11
Janvier
1994,
une
declaration appelant la communaute internationale a soutenir par
des financements appropries et l'allegement du service de la
dette,la reforme decidee.
La France quant a elle annonce un vaste programme d'aide
economique. Elle met notamment en place par l'intermediaire de
la Caisse Franyaise de Developpement
(CFD)
un fonds de soutien
pour les entreprises dont les PME.
Sans doute le financement de la CFD semble derisoire,
300
millions de
franc
fran yais 45 pour les 14 pays de
la zone.
En
outre,
les
entrepreneurs
rencontrent
d' enormes
di fficul tes
a
mobiliser ces ressources. Il convient toutefois de preciser que
meme si les actions engagees ou annoncees sont modestes au moins
elles
temoignent de
l' importance
de
la devaluation
et de
la
necessi te
de
l' accompagner
de
mesures
devant
en
assurer
la
reussite. La difficulte du systeme bancaire a s'ajuster donc a
tirer
puis
El.
faire
tirer
profit
de
cette
operation
laisse
entrevoir des consequences desastreuses pour les PME que nous
avons caracterise par leur vulnerabilite financiere.
Les consequences de l'impreparation du systeme bancaire et
de l'insuffisance de son appui monetaire et financier en faveur
des
PME
vont
etre
une
deterioration
du
contexte
financier
d'exploitation et de gestion des PME.
L'Association Professionnelle des Etablissements de Credit
au Cameroun evalue El. environ 55 milliards de
francs
CFA les
43
On peut lire sur l'ensemble des mesures adoptees,
le communique de Presse nO
94/544 de la Banque Mondiale ptUe
dans Cameroun Tribun e,
nO
5515 du 18 Janvier 1994,
quotidien
d'informations officielles.
44
Cette declaration est reprise dans
Cameroon Tribune nO 5516 op cit.
45
On lira a ce sujet, vers le naufrage de
l'Industrie camerounaise,
note du Syndicat
des Industriels camerounais,
SYNDUSTRICAM
de Fevrier 1994,
pp 16.

- l (jJ -
ordres
de
transferts
des
entreprises
qui
n' ont
pas
pu
etre
realises
au
moment
de
la
devaluation46 •
Les
implications
financieres immediates sont 1 'aggravation des encours des credits
pour boucler leurs operations,
le doublement des echeances des
credits exterieurs, ou l'arret des activites pour celles qui ne
peuvent pas beneficier de nouveaux concours bancaires.
Cette situation comme nous le verrons par la suite reduit
encore plus la capacite de remboursement des credits des PME. Et
ce contexte financier influe enormement sur le cadre economique.
4.2-
L'Impact sur le Cadre Economique
Le cadre economique est caracterise par une reforme fiscalo-
douaniere qui a vite montre ses limites quant a son efficacite
et sa capacite a creer un climat favorable a l'epanouissement des
PME.
Cette reforme pose en effet a l'egard des PME les problemes
analogues aux autres mesures d'accompagnement de la devaluation.
Elle
prevoi t
la
classi fication
sui vante
des
produi ts
et
des
droits de douane 47 qui leur sont appliques.
Produits de premiere necessite
5 %
- Matieres premieres, Biens d'equipement
et certains produits finis
10 %
- Biensintermediaires et certains
produi ts finis
20 %
Produits finis de luxe
30 %
Ces taux en vigueur suscitent deux remarques majeures.
- lIs s'appliquent indifferemment aux PME et a toutes les
autres
entreprises.
Les
PME
en
sont
d' autant
plus
affectees
qu'elles dependent enormement de l'exterieur aussi bien au niveau
des equipements de production que des intrants.
Lire & ce sujet, vers le naufrage de
l'industrie carnerounaise, note du
SYNDUSTRICAM op cit.
47
_
Vers le naufrage de l'Industrie carnerounaise,
note du SYNDUSTRICAM op cit. p.
7.

- 164 -
- lls semblent plus favorables aux produits finis importes
qui beneficient des memes
taux que
les matieres premieres et
materiels de production sinon des taux plus bas soit 5 % pour les
produits dits de premiere necessite. lls posent donc un probleme
a la competitivite des PME locales.
Cette faible competitivite des produits fabriques par les
PME va s'aggraver avec les couts de l'assistance technique dont
les contrats sont negocies en devises et la mise en application
depuis Juillet 1994
de la taxe sur le chiffre d'affaires. Cette
derniere qui s'eleve a 16,5 % est supportee par le consommateur,
rencherissant encore plus les biens et services offerts par ces
entreprises
qui
devront
alors
affronter
sur
le
marche
les
produi ts
des
entreprises
mul tina tionales
bien
introdui ts.
Ce
point
est
largement
developpe
dans
notre
chapitre
I I I
avec
l'exemple de la Societe Milky Way.
Le contexte financier et fiscalo-douanier cree pour appuyer
la devaluation du franc CFA semble inoperant tout au rnoins pour
les PME dont elle va exacerber les conditions de fonctionnement
et de gestion deja precaires. Les risques previsibles ou meme les
consequences deja observees sont le ralentissement de l'activite,
l'accentuation dll ch6mage,
la montee des tensions sociales ...
L'avenement de la zone
Ecu qui se met progressivement en
place et qui devra sans doute avoir une incidence sur la valeur
du franc CFA devrait deja etre integre dans les programmes de
relance des
economies de la zone. Sa prise en compte s'impose
des a present si l'on veut eviter les derapages precedents lies
pour une grande part au caractere impromptu de la decision.
Si les effets de la devaluation sont catastrophiques sur la
situation financiere des PME, cette mesure relance en particulier
la question du recouvrement des creances bancaires sur ces unites
de production.
$ 5-
Le problerne du recouvrernent des credits
bancaires aux PME
L' analyse
du
mode
de
financement
des
PME
a
partir
des
ressources
du
systeme
bancaire
local
nous
a
montre
que
les

- 165··
entreprises parviennent difficilement a concilier la qualite et
la quantite des financements re~us avec la nature des problemes
ressentis et exprimes. Cette situation s'est aggravee avec la
devaluation du franc CFA. On peut voir egalement que l'appel aux
credits exterieurs ne permet pas veritablement de resoudre le
probleme des PME dans la mesure ou ces concours ont plus profite
a des entreprises de grande envergure et pour ceux obtenus avant
devaluation, celle-ci en alourdit les echeances.
Cependant, le detournement de ces lignes de credit de leur
objet
initial
n'a
pas
systematiquement
apporte
au
systeme
bancaire les resultats escomptes du fait de son choix, celui-ci
devant plut6t gerer un portefeuille de creances compromises.
Certes, ces problemes de recouvrement qui apparaissent a la
suite de ce type de financement ne sont pas propres aces seules
entreprises.
Precisement,
elles
permettent
de
comprendre
les
limites de l'endettement et la difficulte pour une entreprise a
fonctionner
a
l'equilibre.
Bien plus
la difficulte
s'accroit
lorsque, comme pour les PME, des conditions defavorables internes
et
externes
se
conjuguent
comme
on
a
pu
le
voir.
Ici,
les
obstacles internes sont surtout lies au mode de fonctionnement
et de gestion des PME qu'aggavent les obstacles externes. Ceux-ci
quant
a
eux
se
rapportent
a un environnement economique et
financier generateur de charges recurrentes qui s'erigent en un
blocage
de
l'effort
d'investissement.
On
peut
donc
mieux
apprecier l' interet pour le systeme bancaire a redefinir des
conditions
de
credit plus
compatibles
avec
les
objectifs
de
rentabilite des PME,
etant entendu que
la rentabilite est la
meilleure garantie du remboursement des credi ts consentis. Ainsi,
le biais du probleme de la garantie exigee aux PME ou de fa~on
plus generale, la nature des conditions du financement bancaire
semble etre a l'origine du probleme du remboursement de la dette
des entreprises.
Au niveau des banques, deux attitudes au moins ont pu etre
observees dans une tentative de recouvrement de leur creance.
a)
Certaines banques ont opte pour l'inscription a leur
actif des impayes constates puis a l'octroi de nouveaux credits

- 166 -
pour couvrir ces memes impayes. Cette forme d'intervention est
inoperante sur le niveau de la production. Car, les concours rnis
en place ne s'accompagnent ni d'un mouvernent de tresorerie en
faveur de l'entreprise, ni de conditions de taux d'interet plus
souples.
A
contrario
de
telles
operations
ont
tronque
le
processus de
rehabilitation des
entreprises
en difficulte en
accroissant,
a la faveur de la tendance souvent haussiere des
taux d' interets debi teurs,
le poids de
la det te
a cause des
nouveaux frais financiers calcules sur les derniers engagements.
b)
D' autres
banques
ont
prefere
le
maintien
des
bases
anciennes de la dette. Mais, par rapport a cette base, elles ont
calcule des penalites au taux en vigueur aggravant davantage le
probleme. Elles ont ainsi a des entreprises qui ne pouvaient pas
regler leurs echeances, reclame des echeances plus importantes.
On
a
pu
evidernrnent
relever
des
cas
de
moratoires
bien
negocies et accompagnes de financements effectifs. Mais, d'une
maniere
generale,
les
banques
sernblent
paradoxalement
se
reorienter,
dans une conjoncture de faible activite,
vers des
actions intenses et energiques de recouvrement. Et, l'imposition
de
normes
prudentielles
par
la
BEAC
dans
le
cadre
de
la
restructuration du systeme bancaire accroit encore davantage la
place du recouvrement dans l'activite des banques.
De plus en
plus la
liquidi te bancaire qui pourrai t
s' ameliorer avec les
actions
de
recouvrement
est
orientee
vers
des
placements
de
portefeuille-juges plus rentables que le financement des PME. Ces
nouvelles fonctions du systeme financier nous amenent a poser le
probleme
du
risque
systemique
qui
se
traduit
dans
une
hypertrophie de la sphere financiere au detriment de la sphere
de production.
L'une des consequences a craindre de cette situation est le
retrecissement
du
systeme
productif
perc;u
cornrne
la
nouvelle
condition de l'expansion du systerne financier. On pourrait donc
craindre que le systerne financier s'engage irreversiblement dans
un processus interactif de restructuration.
En effet,
le processus de restructuration bancaire engage
depuis
Juillet
1989
a
condui t
a la fermeture de nornbreuses
banques et a une tentative de rehabilitation du portefeuille de

- 167 -
certaines
autres
banques.
A
l' heure
actuelle,
certains
etablissements de credit ont pu etre maintenus en activite par
des
fusions
absorptions
et
par
le
transfert
des
creances
compromises
El.
la
Societe
de
Recouvrement
des
Creances.
Nous
reviendrons
plus
loin
sur
l'importance
de
cette
nouvelle
structure
de
recouvrement.
Toutefois,
l'intensification
des
operations de recouvrement en situation de crise et telle que
nous les avons decrites n'en garantit pas un denouement heureux.
En
effet,
les
banques
sont
souvent
confrontees
au
refus
de
certains debiteurs de faire face El. leurs engagements pretextant
la crise. Cette
attitude des debiteurs est du reste favorisee
par l'inexistence de moyens veritables de coercition, par le cout
puis la lourdeur des procedures de saisie et de recouvrement
force. Toutes ces difficultes limitent l'effort des banques dans
le sens de l'amelioration de leur liquidite et reduisent l'impact
de la restructuration bancaire sur la relance de l'economie en
general et la promotion des PME en particulier.
La
passivite
du
systeme
bancaire
conventionnel
s'est
jusqu'ici manifestee El. travers la portion congrue El. laquelle sont
astreintes
les
PME puis
dans
les
condi tions
defavorables
de
credit n'en garantissant pas le remboursement. Maintenant, cette
passivite se revele encore davantage dans la quasi indifference
par
rapport
El.
la
recherche
d' al ternati ves
El.
des
ressources
officielles insuffisantes et inadaptees aux problemes poses par
les
PME.
Et,
precisement
sur
ce
point,
l' emergence
puis
le
developpement de circuits informels d'epargne et de credits 48 ne
semblent pas emouvoir particulierement la banque traditionnelle
ni meme l'inciter El. l'adoption de conditions particulieres de
captage du revenu et de mise en valeur des potentialites de ce
systeme. Car, celui-ci semble-t-il, parvient par une dynamique
propre El. drainer vers lui une masse importante de liquidites.
Ainsi,
cet
environnement
favorable
El.
une
acti vi te
concurrentielle n'a pas eveille un comportement plus actif. En
d'autres termes, les banques n'oIlt pas reussi El. se substituer El.
l'epargnant par une gestion efficiente de ses depots. Celle-ci
.. NOU8 rBv1Bndron8 plu8 loin 8ur le r8le particulier
da8 o1rcuit8 informe18 danB le financement da8 PMB
Voir infra,
8BCtion Ill, chapitre II

- 168 -
aurait
necessite
plus
d'inventivite
dans
la
creation
de
mecanismes
adaptes
de
collecte,
de
remuneration
et
de
mobilisation de 1 I epargne locale. Cet te dimension mul tiple semble
s I imposer comme une necessite El la fonction bancaire si bien
qu'aujourd'hui, des auteurs tels que M. Levy parlent de "nature
duale" de cette fonction pour expliquer les nouvelles fondations
du systeme.
Cette
duali te
qUl
selon M.
Levy
caracterise
I I activi te
bancaire, revet une double signification.
D' abord, elle consiste en la production d I actifs financiers.
A ce
stade
"I I existence
d I un
intermediaire
financier
et
sa
remuneration se justifient donc par le fait
qu' il assume des
actifs et des passifs differencies en termes d'echeanciers, de
risques et de divisibilite"411.
Sa capacite d ' innovation et la
souplesse de
ses mecanismes de
fonctionnement determinent
le
niveau de sa rentabilite.
Ensuite, elle fait appel El une prestation de services qui
renforce l'efficacite des produits financiers offerts en meme
temps qu'elle garantit la securite de l'epargne des deposants.
Les intermediaires financiers sont de ce fait amenes a assurer
le
suivi
des
projets
qu'ils
financent
et
a en verifier la
conformite aux clauses
du contrat
de
credit 50 •
lIs
cherchent
ainsi El eviter les risques de derapage par rapport aux bases
initiales qui pourraient entraver le recuperation des capitaux.
L'omission de cette dimension de l'evolution de la fonction
d'intermediation bancaire semble avoir une accointance avec la
deterioration
du
tissu
bancaire.
Le
processus
actuel
de
restructuration aurait permis d'esperer une evolution positive
de la situation dans une redefinition de la fonction bancaire en
rapport avec l'evolution de la theorie et celle de la pratique
dans
le
sens
de
la
construction
d I un
systeme
de
production
autonome.
-
Hiche~ Levy. ~a Rentabi~it6 Bancaire. Cahier I!'ran<;:aill.
Honnaie et ~inance N° 239 act-Dec.
lY99
La Documentation ~ran<;:aille Notice N° 3.
-
IDEM

- 169 -
Malheureusement, cet espoir semble objectivement vain.
En effet, dans le cadre de la restructuration engagee depuis
1989 et qui
aujourd' hui
est
en cours
d' achevement
on semble
irreversiblement poursuivre la voie de l'enlisement. C'est tout
au
moins
ce
que
revele
la
declaration
du
Directeur
General
Adjoint d'une grande banque cornrnerciale,
la S.G.B.C.,
au terme
des operations de restructuration financiere.
11 declare,
dans
sa definition du role de la banque cornrnerciale
"la banque exerce deux metiers dis tincts vis a vis de la
clientele.
Le premier est celui
de
recevoir et de
gerer les
depots de ses clients,
le second celui de preter de l'argent."
"la Banque ne cree pas de l' argent,
elle prete celui qu' elle
re<;oi t en depot "51.
On pe ut alors extrapoler l'evolution future de la situation.
Mais deja,
on comprend mieux les difficultes des entreprises a
obtenir des res sources adaptees a la nature de leurs emplois.
Elles s'expliquent dans ce contexte Oll 1es depots precedent les
credits determinant selon leur maturite le terme de ces derniers.
Cette
pratique
bancaire
nous
eloigne
totalement
de
la
construction theorique exposee precedernrnent. Elle fai t croire que
l'on
s'achemine
resolument
vers
de
nouvelles
periodes
de
restructuration.
Et
la reali te des
cas que nous
allons
analyser dans
le
chapitre III nous confirme ce caractere parcellaire du role de
la
banque.
Ainsi,
apres
la
mise
en
place
du
financement,
l'intervention du banquier dans les problemes des entreprises ne
se manifeste a nouveau que de fa<;on ponctuelle et principalement
quand surviennent des impayes.
Ce
comportement
s'inscrit
dans
le
prolongement
de
la
conception traditionnelle du role de la banque qu'il reduit a un
simple appui financier. "Une banque telle que la notre, nous dit
encore ce Directeur General de Banque,
n'est pas en mesure de
prendre
tous
les
risques
financiers
dans
un
projet
d'investissement. Ce n'est pas son role ... 1es banques sont la
pour
aider
l'entreprise
au
niveau
financier,
pas
pour
se
~- Cameroon Tribune nO 5099 25 mars 1992.
quot~d1en na~ona1 d'~nformat~on au Cameroun.

- 170 -
substituer A elle"~.
Le
role
du
banquier
est
ainsi
volontairement
redui t
A
l'octroi du credit et au maintien de la liquidite bancaire. On
peut donc comprendre le poids de la charge financiere des PME lie
A des conditions de credits qui ne tiennent pas compte de la
particulari te
des
PME.
Le
systeme
bancaire
auj ourd' hui
leur
applique
les
memes
conditions
de
taux
d' interet
que
celles
pratiquees pour les operations A caractere speculatif.
Cette
indifference
traduit
toujours
la
primaute
des
orientations initiales du systeme bancaire au moment de la mise
en valeur. De ce fait, l'evolution de la structure de production
n'a en rien modifie celle des conditions bancaires de financement
de l'activite economique.
Une approche plus consciente signifierait que les banques
se
sentent plus
impliquees dans
la vie des
PME
et dans
les
problemes
de
gestion
qu'elles
rencontrent
que
celles-ci
considerent
comme
leur
propre
echec.
Celui
des
entreprises
qu'elles encadrent - que les autorites monetaires et le systeme
bancaire constituent un ensemble au sein duquel les decisions
sont
coordonnees,
011
les
delais
de
reaction
permettent
une
intervention
en
temps
opportun.
L' experience
actuelle
de
la
degradation du systeme bancaire commencee avec les importantes
ponctions de l'Etat dans leurs avoirs aupres des banques n'a pas
pu etre arretee par un relais de l'appareil de production, cette
defaillance
n'entrainant
que
des
fermetures
en
cascade
de
plusieurs banques. 11 est une evidence aujourd'hui que systeme
bancaire
et appareil de production sont
interdependants .
•• -
cameroun Tr1.hune n· 5099
du 25 mars 1992 op cit

- 171 -
SECTION II
LES MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DU
FINANCEMENT BANCAIRE DES PME
C'est sans doute l'.importance de cette interd~pendance qui
explique
la
recherche
des
conditions
de
renforcement
du
financement bancaire, par le biais de mesures d'accompagnement
financieres et fiscales notamment.
La volont~ de suppl~er aux carences de l'interm~diation a
l'~gard
des
PME
explique
en
effet
l'adoption
des
mesures
sp~cifiques a caractere mon~taire et financier visant a accroitre
la qualit~ et la quantit~ des disponibilites en faveur de ces
entreprises. On peut relever ici les deux principales mesures
d'ordre financier dans ce sens.
- On peut ainsi citer l'obligation r~sultant de la r~forme
de 1985 et qUI est faite aux banques de consacrer 20 % de leurs
res sources au
financement
de
l' investissement des
PME.
Cette
disposition qui vise a r~duire la distribution discriminatoire
des
cr~di ts
a I ' ~gard des
PME
semble
avoir
~t~ mal
sui vie.
L' absence de controle de
l' application de
cette mesure ayant
permis d'inclure dans ce quota les engagements par signature, les
cr~dits a court terme et quelques cr~dits d'~quipement.
Comme
autre
mesure
a caractere
financier,
on
pe ut
~galement mentionner
le
d~ploiement d' une
poli tique
de
taux
d'int~rets
d~biteurs
pr~ferentiels
depuis
les
accords
de
Brazaville
en novembre
1972.
Ces
accords
nous
le
rappelons,
visaient entre autres a stimuler l'investissement dans la zone
BEAC. La s~1ectivite des taux d'interets declenchee depuis cette
p~riode devait alors profiter aux secteurs prioritaires dont font
partie les PME. L'observation de la politique appliqu~e dans ce
domaine a dur~ jusqu'en 1986, les taux etant rest~s relativement
stables se maintenant a des niveaux bas, 7,25 % par an pour le
minimun et 9,25 % pour le maximum. Cette bonne tenue des taux
privilegies s' est poursuivie
jusqu' en 1988 avec une
tendance
baissiere pour le taux maximum.
On peut donc dire
que pendant
toute
cette p~riode, une

- 172 -
politique monetaire 53 des taux moderes a ete prevue en faveur des
PME.
Toutefois,
cette politique
selective des
taux d'interet
semble cependant avoir montre ses limites aussi bien dans sa mise
en oeuvre que dans son evolution dans le temps.
Ainsi, elle semble avoir davantage profite a des operations
speculatives classiques comme on a pu le voir dans les passages
precedents et comme le soutient un rapport de la BEAC sur la
poli tique des taux d' interet dans la zone 54 •
Elle semble egalement s'etre arretee a un moment 00 elle
devait etre accrue pour relancer une activite economique en chute
libre. En effet,
l'evolution a la baisse des taux privilegies
s'est renversee depuis 1988. Et, les taux d'interets bonifies ont
regulierement augmentes (les taux normaux ont egalement suivi la
meme courbe ascendante) pour atteindre leur point culminant avec
la surchauffe de 1990. Cette situation a d'ailleurs suscite et
continue
de
susci ter
des
inquietudes 55
quand
a l' avenir de
l'investissement et notamment celui des PME 56 • Les limites de ces
mesures et la determination des pouvoirs publics a apporter leur
soutien a la promotion des PME ont conduit a la mise en oeuvre
d'autres
types
de
mesures,
toutes
destinees
a desserer la
contrainte du financement de la production. Ces mesures sont a
la fois d'ordre general puis d'ordre institutionnel.
Les
mesures
d'ordre
general
visent
a
assainir
l'environnement
et
se
rapportent
pour
une
grande
part
a
l' elaboration de
codes d' investissement dont
les
PME devront
tirer parti. Quant aux mesures a caractere institutionnel, elles
permettent
de
mettre
en
place
des
institutions
d'appui
au
financement bancaire situees en amont et en aval de celui-ci.
IJ _
Le" taux d' intllr~ts clans la zone "ont conj ointement
dllterminll" par le C.A. de la BEAC qui fixe
le taux d'e"compte ou le taux de base et
le" con"eil" nationaux de crlldit" qui
dllc1dent de" marqes bancaire"
-
On lira ~ ce sujet G. Ntanq, la politique
de" taux d'intllr~t, la demande de monnaie et
la reparti tion du crlldi t clan" le cas de la BEAC,
in Banque des stats de l ' Afrique Centrale,
Etudes et statistiques N" 172, ma1 1990 pp 110-118
-
L' une de" inquilltude" transpara1 t clan" l ' article
de B. BBKOLO et dont le "eu! titre e"t dllj~ significatif.
On lira ~ ce sujet B. BEKOLO,
la HaU8se de" Taux d'Intllr6ts :
R.elance ou 2'reinaqe ? op cl t .
-
Pour cette llvolution de" taux d'intllr~t
on "e rapportera au tableau
V de notre "ection I
P. 132

- 173 -
Toutes ces mesures affectent directement ou indirectement
les
condi tions
d' offre
de
credi t
ou
alors
celles
de
fonctionnement
des
PME.
Ainsi
les amenagements des codes des
investissements nous apparaissent comme une forme d'incitation
El
la
creation
des
PME
dans
la
mesure
Oll
ils
prevoient
un
allegement fiscal pour ces entreprises donc des perspectives de
rentabili te
meilleures.
Quant
aux
structures
d' appui
et
d'assistance creees, elles ont pour principal objectif de mettre
les banques en confiance dans leurs operations en direction des
PME.
Elles
doivent
ainsi par
la nature
des
services offerts
amener les banques El accroitre la liquidite El leur affecter et
d'une maniere generale El assouplir les conditions d'octroi des
credits. Ces mesures,
comme les precedentes, ont pour finalite
d'ameliorer
les
resultats
de
l'entreprise.
Et,
elles
y
participent non plus par le biais de l'avantage fiscal mais par
la reduction des charges financieres qu'implique le deploiement
de conditions de garanties moins onereuses et d'une gestion mieux
organisee.
Nous
verrons
alors
comment
toutes
ces
mesures
d'accompagnement
ont
ete
integrees
dans
le
comportement
d'intermediation des banques locales puis dans le comportement
d'endettement
des
PME.
Nous
pourrons
ainsi
apprecier
leur
incidence sur les objectifs de developpement des PME et partant
d'un systeme productif introverti.
Nous
analyserons
dans
un
premier
temps
les
mesures
El
caractere general et dans un deuxieme temps celles qui ont trait
El la creation d'institutions d'aide au financement des PME.
$1
Les Mesures d'Ordre Fiscal
Elles
se
traduisent
par
des
adapt ions
du
code
des
Investissements (voir tableau XII) . Nous allons pour mieux saisir
1 'importance
de
ces
mesures
resituer
ces
codes
des
investissements dans le contexte qui a preside El leur elaboration
et qui les fait apparaitre
comme une mesure de protection et
d'encouragement de l'investissement au Cameroun.

- 174 -
Tableau XII - CHRONOLOGIE DES CODES D' INVESTISSEMENTS AU CAMEROUN
TEXTES
IMPLICATIONS
1/ Loi n° 60-64 du 27 juin
Regimes A, B, C, D
1960 portant code des
investissements du
Cameroun Oriental
2/ Loi n° 66-LF-5 du 10 Juin
Adaptation aux institutions
1966 modifiant
Loi n° 64-
federales des Regimes
LF-6 du 6 Avril 1964
A, B, C, D
3/ Decret n° 68/DF/10 du
Regime special, Regime PME
16 Janvier 1968,amendement
loi 64/LF/6
du 6 Avril
1964
4/ Loi n° 84/003 du 4 Juillet
Renforcement des avantages
1984
particuliers aux PME
5/ Ordonnance n° 90/007
Durcissement des conditions
du 8 novembre 1990
anterieures
Source: Tableau reconstitue a partir des donnees des codes d'investissement

- 175 -
En
effet,
la
logique
et
l' ampleur
de
cette
protection
s'expliquent
par
rapport
aux
raisons
qui
ont
preside
a
la
creation des premiers codes des investissements. L'elaboration
des
codes
au
Cameroun, . comme
ailleurs
dans
les
aut res
pays
africains parvenus a leur souverainete politique a obei a deux
preoccupations majeures
garantir
d'une
part
aux
investisseurs
etrangers
la
securite et la rentabilite de leurs capitaux ;
assurer par ailleurs
a l' economie l' efficaci te et le
developpement
industriel
lui
permettant
de
consolider
l'independance politique acquise. Au-dela du debat autour des
contradictions entre ces deux objectifs puis des conditions de
reduction de celles-ci et dont une illustration est donnee a
travers
le
rapport
Jeanneney
sur
la
poli tique
fran<;aise
de
coopera tion
57,
les
codes
des
investissements
consti tuent
un
cadre cree pour orienter et developper le potentiel economique
du pays. Cette motivation economique du code des investissements
a
au
depart
privilegie
le
role
reserve
aux
investissements
et rangers 58.
11 en es t
ainsi du code de 1960 59 qui prevoi t
quatre
regimes
A,
E,
C,
D tous
favorables
aux
detenteurs
d'importants moyens financiers. Aucune reference nly est alors
faite aux PME. Ce code est suivi d'un amandement intervenu en
1964 qui ne change pas l'orientation premiere du code camerounais
d' investissement.
11
en
ira
de
meme pour
les
textes
qui
le
suivront.
La premiere modification majeure de ces
textes est
apportee par
l' amandement
de
1968
60
par
le
biais
duquel
un
regime special est cree et denomme explici tement Regime PME.
Celui-ci accorde pour la premiere fois des avantages specifiques
aux entreprises qui y sont agreees.
Ces avantages a caractere
51
_
L'econonde de ce rapport est presentee par G. NGANGO dans son ouvrage
intitu1e 1es 1nvestissements d'Origine Exterieure en Afrique Noire
Francophone, op cit p 139.
58
_
On 1ira a ce sujet G. NGANGO op cit.
On peut ega1ement se referer a B. BEKOLO, 1e statut
de 1'Endettement Exterieur op cit.
59
_
Ce Code est cree par 1a 10i nO
60-64 du 27 Juin 1960.
60
_
11 s'agit d'un amandement a 1a 10i 64/LF/7 du 6 Avri1 1964 et des
textes suivants qui tendaient a adapter aux institutions federa1es
1& 10i nO 60-64 du 27 Juin 1960 portant code des investissernents du
Cameroun Orienta1.

- 176 -
fiscal sont les suivants
- un taux global reduit a 5 % des droits et taxes per9us a
l' importation sur
les matieres premieres,
les materiaux,
les
machines et outillages directement lies a l'exploitation, a la
transformation ou a la production ;
- une exoneration sur ces achats lorsqu'ils sont effectues
localement.
Cette premiere insertion dans le code des investissements
de dispositions en faveur des investissements des PME se situe
dans la mouvance des exigences d'un contexte economique ouvert
aux nationaux. On peut deja noter a ce niveau l'anteriorite de
cet amandement aux structures d'appui dont le CAPME et le FOGAPE
sur lesquels nous reviendrons plus loin et qui vont constituer
le support institutionnel de l'ensemble des mesures en faveur des
PME.
L'elaboration et
la mise en application dans
les codes
davantage particuliers favorables aux PME repondent ainsi a un
double souci.
* D'abord celui de la revision du contexte fiscal du
fonctionnement des PME permettant d' etendre aces uni tes les
avantages reserves jusqu'ici aux investissements etrangers.
* Celui
ensuite
de
la
protection
de
l'investissement
national au regard de la concurrence des produits manufactures
importes
dans
un
systeme
productif
largement
tributaire
de
l'exterieur, meme pour certains biens de premiere necessite. La
politique industrielle engagee et axee sur le developpement des
PME a dans ce sens oeuvre en faveur de l'extension des regimes
speciaux aux entreprises creees dans ce secteur.
Mais l'amenagement le plus important realise dans le code
des investissements est celui qui a procede a un renforcement des
avantages jusqu'ici consentis a l'investissement productif dans
les PME.
1.1. -
Le Code d'Investissement de 1984 et le renforcement
des Avantages aux PME.
Ce code est cree par la loi n° 84/003 du 4 Juillet 1984. 11
vise a accroitre l'eventail des avantages existants accordes par
le texte de 1968. En realite, il s'agit, pour ce nouveau code des

- 177 -
investissements,
d' un
important
amandement 61
que
les
milieux
industriels camerounais considerent comme une veritable loi-cadre
sur
l'industrie
du
Cameroun 62 •
Le
regime
PME
change
de
denomination
et
devient
le
regime
C.
11
n'est
donc plus
un
additif
mais
une
integration
totale
a l'ensemble
de
la
legislation sur
les
investissements.
11
est
indispensable de
souligner
l' interE~t
d' une
telle
demarche
qui,
tout
en
reconnaissant
les particulari tes des
PME,
les
insere dans un
processus
global,
normal
et
coordonne
evi tant
des
actions
ponctuelles ou marginales pouvant avoir une portee limitee.
Ainsi,
le taux reduit des droits et taxes a l'importation
demeure
fixe
a 5 % pour les achats de matieres premieres et
equipements relatifs a la production. L'exoneration reste totale
pour les achats locaux.
Mais
la periode d'application de cet
avantage passe de 5 ans a 10 ans. En outre, pendant ces 8 annees
de ce regime de faveur,
l'entreprise agreee est exonoree
* de l'impot sur le capital;
* de la taxe sur la distribution du credit
* des droits d'enregistrement
* de l'impot sur les societes
* de l'impot sur les benefices industriels et commerciaux.
Toutes
ces
dernieres
dispositions
sont
nouvelles
et
n' apparaissaient
pas
dans
le
code
precedent.
La
portee
des
avantages
fiscaux
de
cette
nouvelle
loi
sur
le
statut
des
investissements
est
manifestement
plus
large.
Ses
nombreux
privileges apportent en effet une double protection a la PME.
D' une
part,
sa production est
protegee des
importations
des
produits similaires, toutes choses egales par ailleurs. D'autre
part,
la grande entreprise nationale ou etrangere exer<;ant au
Cameroun
ne
beneficie
plus
isolement
des
avantages
lies
a
l' importation des
intrants et des materiels et outillages de
production. De ce deuxieme point de vue, la PME dans la recherche
de debouches
et
la conquete de marches
exterieurs
se
trouve
61
_
Loi nO 84/003 du 4 Juillet 1984 portant code des
investissements au Cameroun.
62
_
GEREA,
Etude sur la definition d'une strategie
d'action pour le FOGAPE citant analyse faite dans
le bulletin annuel du syndustricam (1985).

- 178 -
protegee par rapport aux autres unites locales d'une dimension
plus importante.
Ces amenagements successifs se
sont d' abord realises dans
le
cadre d'une economie florissante avant les premiers signes de
flechissement
de
1986.
Ensui te on a
assiste
a une troisieme
adaptation du code des investissements, celle-ci intervenant dans
un contexte different.
1.2-
Le Code de 1990 et la Promotion des PME
Ce code est, cree par l' ordonnance N° 90/007 du 8 Novembre
1990 et il est utile de le replacer dans le contexte national de
crise et de resserrement de la liquidite des pouvoirs publics qui
a preside a son elaboration. Cette tension dans la tresorerie
semble etre une explication plausible de la nouvelle taxation qui
s'effectue
dans
un
souci
de
reconstitution
des
recettes
publiques. Ainsi la comparaison des avantages actuels et anciens
nous permet de faire la synthese suivante :
la duree des
avantages
accordes
se
limi te a la phase
d'installation de l'entreprise et est fixee a trois ans ;
- le taux reduit des droits et taxes a l'importation passe
de 5 a 15 % pour les memes emplois, la duree d'application etant
aussi reduite de 10 a 3 ans ;
- l'imp6t sur les societes est fixe a 50 % des resultats
beneficiaires a partir de la premiere annee d'imposition alors
que jusqu'ici les PME en etaient totalement exonerees pendant 8
ans ;
- la taxe sur la distribution du credit est reintroduite.
Ce document que l'on voudrait situer dans le prolongement des
amenagements precedents semble moins que ceux-ci " ... encourager
la
creation
et
le
developpement
des
activites
economiques
orientees
vers
la
valorisation
des
ressources
naturelles
nationales, la creation d'emplois et l'amelioration de la qualite
de la vie"o. Ainsi, contrairement a ce que laisse supposer cette
introduction
faite
par
les
presentateurs
de
la
nouvelle
legislation en matiere d'investissement,
on passe plut6t a un
durcissement des condi tions privilegiees jusqu' ici consenties aux
•• - Cameroun TribQne N" 4176,
30 Novembre 1990;

- 179 -
PME.
Ce
durcissement
est
d'autant
plus
preoccupant
qu'il
intervient quelques temps apres la suppression au mois d'Octobre
1990
des
taux d I inten::~ts bonifies appliques depuis plusieurs
annees aux activites prioritaires dont le financement des PME.
1.3
L'impact des adaptations successives du code des
investissements sur le fonctionnement des PME
Instrument privilegie d'incitation a l'investissement, les
pouvoirs publics ont voulu faire du code des investissements un
instrument de poli tique economique et de promotion des PME. Ainsi
dans
ses
formules
de
1968
et
1984
il
a
permis
de
reduire
considerablement les droits de douane sur l'outil de production
et incidemment le colit global des equipements et le delai de
recuperation
du
capital
investi,
toutes
choses
egales
par
ailleurs.
11
apparait
a
ce
titre
comme
un
coefficient
d' accroissement de la rentabi li te des investissements. Nonobstant
les derniers revirements de l'ordonnance 1990 elaboree dans une
conjoncture difficile,
l' application des dispositions du code
sont
de
nature
a stimuler la creation des PME grace a un
dispositif fiscal attrayant. Parallelement cependant, elle incite
a des depenses somptuaires. En effet, les avantages du code
s' attachent
a tous les equipements lies a la production et
certaines entreprises font passer dans cette rubrique de nombreux
achats de biens de luxe dont des vehicules somptueux souvent sans
rapport avec l'activite de production. De telles depenses qui ne
sont donc pas toujours liees a l'objet de l'entreprise tendent
a perturber le programme des investissements. Car elles se
realisent
par
une
amputation
des
res sources
initialement
destinees a l'equipement des usines et ateliers ou de la marge
de securite constituee pour la resorption des imprevus ou pour
le financement du fonds de roulement.
Si ce dispositif fiscal
souple a permis d'encourager l'investissement dans les PME il a
quelques
fois
aussi
produi t
des
effets
pervers
de
nature
a
reduire l'impact que l'on aurait pu en attendre. Pour ameliorer
toujours
les
conditions
d' exploi tation
et
de
financement
de
l'activite des
PME les pouvoirs publics etendront leur action
au cadre institutionnel. La specificite de cette intervention va
etre de pallier la fragilite financiere de ces entreprises en

- 180 -
meme temps que leur insuffisance de garantie. Elle devrait donc
rassurer
la banque
quant
au
denouement
de
ses
operations de
credi t l' amenant a reconsiderer son comportement d' intermediation
et d'assumer veritablement son role d'intermediaire financier.
$ 2-
Les mesures d'ordre institutionnel
Ces mesures sont a l'origine de la creation de structures
specialisees
dans
l'appui,
l'assistance
et
la
garantie
aux
proj ets PME. Ces institutions sont le CAPME 64 et la FOCAPE 65 •
2.1-
Le
Centre
d'Assistance
aUK
Petites
et
Moyennes
Entreprises (CAPME)
Cree en 1970 66 , il est un organisme d'assistance et d'aide
a la creation des PME. Sans etre un intermediaire financier, il
apparait comme l'une des premieres mesures formelles prises dans
ce domaine par le gouvernement camerounais 67 pour concretiser la
volonte politique de developpement des PME nationales. 11 a pour
vocation :
-
d' effectuer des etudes de
faisabili te et d' aider a la
confection des dossiers de demande de credits bancaires ;
- de coordonner les operations des organismes de promotion
des PME ;
- de former,
de perfectionner les dirigeants des PME,
le
personnel cadre et non cadre ;
- d'assiter les PME dans l'organisation administrative et
64
- Le Centre d'Assistance aux petites et moyennes
entreprises a ete cree le 20 mai 1970
conformement a la lo~ nO 70/LF/7 et au
decret nO 71/DF/332.
65
Le Fonds d'Aide et de Garantie aux Pet~tes
et Moyennes Entreprises
(FOGAPE)
-
Le Capme a ete cree le 20 mai 1970
conformement A la 10i N° 70/LF/7
et au d9cret N° 71/0F/332.
n_ Xl ex1.stait dlljA avant le CAPHE des institutions
etranqeres tel1es que la SATEC et l'AFCA qui ont
e8sentiellement dan" le cadre de
la liqne de cr6d1t BXRD-CCCE intervenu au cOte
du CAPHE pour appuyer le financement
de" entrepri"e" retenue".

- 181 -
comptable de leurs unites. 11 s'agit donc d'une mission qui vient
apaiser les apprehensions quant a l'evolution de la gestion des
PME.
Toutefois, le CAPME a besoin pour remplir ses fonctions de
cabinets d'etudes, de conseil de gestion, et de coordinateur des
operations
de
promotion,
d' importants
moyens
humains
et
financiers. Et, son activite dont elle doit tirer ces res sources
la met en rapport avec des unites dont la situation financiere
et
l' encadrement
sont constamment mis
en cause.
De ce
fai t,
celle-ci ne peut pas logiquement par sa seule activite generer
des res sources en quantite et en qualite suffisantes pour son
fonctionnement. En effet, les moyens financiers des PME dont nous
avons dit qu'ils sont caracterises par leur faiblesse s'erigent
en un obstacle pour un financement autonome de cette institution.
Cette
position
delicate
du
CAPME
laisse
entrevoir
des
difficultes
financieres
en
limitant
les
possibilites
d'intervention.
2.1.1-
L'Impact de l'Action du CAPME
Le
role
reconnu au CAPME
c' est-a-dire
celui
de
cabinet
d'etudes de faisabilite, de conseil et de formation a la gestion
sera ardu. Dans des conditions financieres difficiles, il ne peut
s'effectuer quIa travers des actions souvent ponctuelles et mal
coordonnees parce que continuellement interrompues par des "gaps"
de tresorerie. L'application de prix etudies compte tenu de la
modicite des revenus des beneficiaires des prestations du CAPMR
represente le principal blocage a son activite. Et, au-dela, du
fait que la facturation est insuffisante meme les prix avantageux
fixes ne peuvent pas toujours etre payes par les PME certes, a
cause de leurs problemes
financiers mais aussi
a cause d' une
mauvaise
appreciation
de
l' interet
du
service
qui
leur
est
offert. Nous avons vu que ces entreprises sont refractaires a une
immixtion dans leur vie, celle-ci etant souvent consideree comme
une menace de perte de souverainete pour le chef de l'entreprise.
Ce comportement
de
l' entrepreneur dans
la
PME
a
contribue a
deteriorer le cadre de travail du CAPME, cette degradation etant
ressentie a plusieurs niveaux.

- 182 -
a) Ainsi, les equipements des centres de formation technique
et pratique dont s'est dote cet organisme ont mal fonctionne et
n 'ont pas permis d'intervenir dans les reparations de pannes ou
la fabrication de piecesmecaniques du materiel de production des
entreprises.
Ces
equipements
ont
en
outre
ete
peniblement
remplaces.
b) Le mauvais fonctionnement du CAPME a egalement pose
des
problemes a l'elaboration d'etudes sectorielles. Celles-ci bien
que prevues n'ont pas pu etre concretisees. Pourtant il s'agit
d'un volet important de l'appui a la creation des entreprises
dans un secteur 00 les entrepreneurs ne peuvent s'offrir par
leurs seuls moyens de telles etudes. Et seule une action efficace
dans ce sens permet d'orienter le choix des investisseurs vers
des
acti vi tes
priori taires
et
vers
des
domaines
j uges
plus
rentables. Elle permet d'eviter l'engorgement constate dans des
acti vi tes qui ne degagent
qu' une tres
faible valeur aj outee,
astreignant les entreprises qui s'y engagent a une part de marche
restreinte et a une marge beneficiaire insignifiante.
L'etau financier s'est continuellement resserre autour du
budget de fonctionnement et d'investissement du CAPME, frustrant
les PME d'un outil indispensable dont l'importance des services
et
I' effet
de
synergie
sur
les
coo.ts
de
production
eut
ete
considerables.
La
gravite
des
charges
financieres
du
CAPME
explique sans doute sa fermeture intervenue a la fin de l'annee
1990.
Ce faible impact du CAPME conduit pour une grande part a la
creation d'un nouvel organe d'appui au financement des PME.
2.2-
Le Fonds d' Aide et de Garantie aUK Peti tes et Moyennes
Entreprises
(FOGAPE)
2.2.1-
Les Missions Initiales du FOGAPE
Le
FOGAPE demarre
au sein de
la
Banque Camerounaise de
Developpement (BCD)68 comme une cellule chargee exclusivement de
l'etude et du suivi des projets de petite et moyenne dimension.
68
-
Banque nationale de developpement creee par la
loi nO
61/0F 1961 et mise en liquidation
le 25 aoilt 1999.

- 183 -
La Banque Camerounaise de Developpement a alors entre autres
missions de promouvoir le developpement des PME industrielles et
artisanales. Son service d'appui aux PME y fonctionnera donc pour
canaliser cette action et orienter davantage vers les entreprises
concernees, les resources disponibles et jusque l~ reservees aux
professions liberales et aux credits sociaux 69 • En effet, avant
l'avenement du FOGAPE, les credits aux PME stagnent et ne forment
qu'uneproportion derisoire de 1 'ensemble des credits accordes 70 •
En 1972/1973,
ils representent 5, 5 % de l' encours global des
credits,
0,6 % en 1972/1974 et 0,5 % en 19741975. C'est cette
incongruite
de
l' attention
portee
aux
PME
qui
conduit
~
la
creation d'un Fonds d'Aide et de Garantie des Credits aux Petites
et Moyennes Entreprises du Cameroun71
(FOGAPE).
11 continuera
encore
~
fonctionner
~
l' interieur de
cette banque avant de
devenir totalement autonome. Mais dej~ son role se precise et se
diversifie.
Dans un premier temps,
le FOGAPE apporte sa garantie aux
credits
accordes par les
etablissements bancaires publics et
prives. Cette premiere etape caracterisee par un programme d'aide
au
financement
sera
etendue
~
une
activite
plus
complete
integrant le conseil au financement et le suivi des entreprises
financees. 11 doit dorenavant remplir une nouvelle mission, celle
de conseil en gestion. 11 devra aussi contribuer ~ l'acquisition
de meilleures connaissances manageriales, du savoir-faire pour
les entreprises mises en place et dont les insuffisances dans ce
domaine
figurent
en
bonne
place
parmi
les
causes
de
leurs
problemes de financement. 11 viendra ainsi ameliorer l'efficacite
des mesures dej ~ enclenchees dans ce domaine. A ce titre,
i 1
pourra completer l'action du CAPME situee en amont de la sienne.
69
_
Voir a ce sujet, rapport d'audit
de la BCD au 30/06/1989.
70
-
On consultera a ce propos
l'etude realisee par
GEREA, BEKOLO et Alii,
Etude sur la definition d'une strategie d'action
pour le FOGAPE, Centre Universitaire de Douala-Cameroun,
Janvier 1988, p. 29
71
-
Decret nO 75/252 du 9 Avril 1975,
portant creation du FOGAPE au sein de la BCD.

-·184 .:.
En
effet,
la
creation
du
FOGAPE
viendra
renforcer
et
depasser
cette
mission
de
conseil.
Le
FOGAPE
s'impliquera
davantage dans le processus de financement en offrant sa garantie
et
sa
contre
garantie
aux
banques.
Ainsi,
de
1975/1976
~
1978/1979 le nombre de dossiers
instrui ts et acceptes par le
FOGAPE passe de 3 ~ 49. Ces dossiers correspondent ~ un volume
de credits bancaires de 12,5 millions de francs CFA en 1975/1976
puis de 1403,7 millions de francs CFA en 1978/1979. LA croissance
couvre en moyenne 75 % du credit accorde. Les tableaux ci-dessous
retracent
l'evolution de
l'activite du FOGAPE de
1975/1976 ~
1978/1979 ainsi que sa repartition par banque.
Tableau XI
EVOLUTION DE L'ACTIVITE DU FOGAPE
Rubriques
1975/7976
1976/1977
1977/1978
1978/1979
Nbre doss.
3
37
30
49
Moyen./dos.
4MFCFA
12,7MFCFA
14,5MCFA
28,6MFCFA
Credo accordes
12,5M
468,9FCFA
433,9MFCFA
1403,MF
Mt. garantie
lOMFCFABO%
362,4FCFA%
339MFCFA
969,7/70%
Source . Ra pport d actlvlte FOGAPE l~/tJ/l~/~.
Si
le
volume
des
credits
aux
PME
a
augmente
avec
l' intervention du
FOGAPE,
on releve neanmoins
la timidi te de
l'action des banques commerciales ~~ s'engager pleinement dans
ces financements. Ce bilan d' une acti vi te d' intermediation encore
hesitante,
etriquee
du
fait
d'inerties
liees
~
un
champ
d'intervention limite et ~ des moyens insuffisants amene ~ une
reorganisation du FOGAPE en 1984. Cette reforme devra permettre
d'elargir les missions du FOGAPE ~ une activite directe de credit
et
d'accroitre
correlativement
ses
moyens
financiers
d'intervention face ~ l'insuffisance des efforts deployes par la
BeD.
2.2.2
La Reforme de 1984
En meme temps qu'elle etend le champ d'action du FOGAPE,
elle vise ~ ameliorer sensiblement la surface financierede cet

-185 -
organisme, a donner une signification reelle a sa garantie et a
sa contre-garantie
et
a
en
faire
un
intermediaire
financier
actif. 11 peut ainsi apporter directement son concours financier
aux projets qui lui sont soumis. Ce concours peut s'effectuer
sous forme de prise de participation ou d'octroi de credits. Les
credits qu'il accorde ne peuvent pas depasser 80 % des couts de
production surtout s'ils sont refinances aupres de la BEAC. De
meme,
le plafond de sa participation est fixe a 1/3 du capital
social des entreprises concernees.
Cette nouvelle dimension des mesures d'accompagnement du
financement bancaire, se caracterise, a l'analyse de l'evolution
de celles-ci, par leur progressivite. Et dans ce sens, la reforme
de 1984 permet d'accroitre les elements de ressources du FOGAPE.
Deux nouvelles sources
de financement lui sont alors ouvertes
-
la mise sur la distribution du credi t
(T.
D. C.)
per<;ue
aupres des etablissements de credit et des banques ;
- puis une dotation publique en capital alors fixee a un
milliard de francs CFA. Elles viendront s'ajouter aux revenus
tires de l'exploitation et des activites ?e placement de credit
et egalement aux res sources initiales dont
les
dotations
de
10
% sur
les
marges
beneficiares
annuelles des banques locales
- les commissions per<;ues sur les garanties aux operations
bancaires dont le taux annuel est compris entre 1,25 % et
1,50 % ;
- les revenus des placements effectues
- et les divers produits et profits.
La diversification des sources de revenus du
FOGAPE devrait
induire une activite intense en consolidant le support financier
de la politique nationale de promotion "et de developpement des
PME.
Evidemment l'effectivite et la disponibilite des res sources
attendues conditionneront la realisation des objectifs definis.
On
peut
neanmoins
deja
faire
remarquer
l'evolution
qui
transparait
dans
les
etapes
successives
de
la
politique
gouvernementale en matiere de soutien a la promotion des PME. Le
passage du discours politique a des mesures concretes tendant a
formaliser les actions en faveur des PME traduit l'importance du

- 186 '
probleme et la volonte d'y remedier. Le FOGAPE et auparavant le
CAPME
ont
ete
places
en
aval
et
en
amont
de
la
phase
de
financement.
Dans
leur
tache
de
conseil
et
d'assistant
en
gestion, leurs initiatives doivent ameliorer le savoir faire des
gestionnaires et des dirigeants des PME. Ceux-ci n'en seraient
que plus credibles dans leur relation avec les intermediaires
financiers.
Les re sui tats de ces actions devraient donc etre
accrus a l'extension des moyens operatoires du FOGAPE en tant que
mesure tendant a remodeler signicativement l'espace financier des
PME.
2.2.3
Les
Ressources
FOGAPE
et
la
Garantie
du
Financement des PME
L'une des principales incidences de la reforme de 1984 est
manifestement
la diversification
et
l' accroissement,
tout
au
moins
theorique,
des
ressources
du
FOGAPE.
La
composante
principale
de
ces
moyens
financiers
reste
la
taxe
sur
distribution
du
credit
qui
en
represente
les
90
%.
"
Comparativement a l'evolution des credits bancaire a partir de
1984,
cet
element
de
revenu
devrait
permettre
une
activite
importante
sui vant
la
courbe
ascendante
de
ces
creances
du
systeme
monetaire72
sur
l' economie.
Celles-ci
en
effet
progressent de la maniere suivante : 806,1 milliards de francs
CFA en 1984, 878,3 milliards en 1985, 986,2 milliards en 1988,
1081,4 milliards en 1989. Conformement a la reforme du FOGAPE de
1984 la T.D.C. decoule du niveau de cette activite ; meme si elle
n'est pas rigoureusement egale a 1 % de la masse des credits
octroyes, elle ne saurait en etre eloignee. Elle aurait pu l'etre
si la proportion des operations prioritaires non assujetties a
cette
taxe
etai t
substantielle
du
fai t
meme
des
condi tions
preferentielles qui sont les leurs. Mais tel ne semble pas etre
le
cas
car
de
l' avis
du
responsable
de
Recherche
et
de
la
Documentation aux services centraux de la BEAC : "les banques
mettent davantage l'accent sur les possibi1ites de denouement des
credits qu'elles ne financent l'agriculture, le logement social
72
-
Se rap,pdrter pour p~us de de.tai~ au tab~eau I I 2'
Ch ap i tre I I,
P.
114

- 187 -
et les PME representant des risques certains" 73 •
La clientele privilegiee que sont les PME et autres unites
des secteurs beneficiant de taux differencies occupe ainsi une
faible
place
dans
le
portefeuille
des
banques;
augmentant
d'autant
les
possibilites
de
creation
d'une
taxe
sur
la
distribution du credit et les opportuni tes de garantie et de
contra-garantie FOGAPE.
Ces concours qui peuvent aller jusqu' a 7 fois
le montant des
res sources74,
representent
en meme
temps
la
maj or i te
de
ses
interventions,
76
%
environ75 ,
dans
l'economie
ainsi
que
l'indique le tableau suivant sur lesressources et les quotas
d'affectation aux emplois.
Malheureusement, l' evolution des res sources du FOGAPE malgre
la
reforme,
ne
suit
pas
dans
les
faits
la
tendance
des
potentialites financieres. Ainsi sur des previsions de recettes
globales
de
16,4
milliards
de
FCFA
en
1985/1986,
les
encaissements
effectifs
s'etablissaient
a
2,2
milliards
par
rapport
a
l'exercice
precedent,
representant
un
taux
de
realisation
de
13,3
%76
La
T.D.C
qui
alors
a
elle
seule
constitue la quasi totalite des ressources, n'a pu etre liberee
que tres faiblement dans une proportion de 10 %77. Ce faible taux
de realisation a freine l'activite qui en d'autres circonstances
aurait
contribue
a
la
creation
d'un
important
tissu
d'entreprises,
les plafonds d'intervention par concours et par
terme y etant favorables et allant jusqu'a 200 millions de francs
CFA pour le court terme et 300 millions pour le moyen terme, la
priori te etant accordee a la creation de peti tes et moyennes
73
G. NTANG,
la politique des taux d'interet,
la demande
de monnaie,
la repartition des
credits dans le cas de la BBAC in Banque des
Etats de l'Afrique Centrale, Etudes et statistiques
nO 172, mai 1990 pp 110-118.

74
On lira a ce sujet B. BEROLO et Alii,
Etude sur la definition d'une strateqie
d'action pour le FOGAPE,
op cit p.
46.
75
Idem, p.
46.
76
-
Ibidem p.
38.
77
- Ibidem p.
44.

- 18R -
industries 79 •
Les resultats de l'action du FOGAPE tels qu'ils ressortent
des quatre tableaux suivants79 traduisent une reel le progression
des concours a partir de 1984. Celle-ci apparait dans le volume
et dans la diversification au niveau des secteurs,
l'industrie
etant privilegiee (60 %). Quant a la distribution spatiale, elle
est marquee par une preponderance pour le Centre (58,6 %) et le
Littoral
(17,4
%)
qui
representent les deux principaux poles
d'activite. Ces resultats auraient sans doute ete meilleurs en
l'absence des contraintes de liquidites de cet organisme.
Les
chiffres
en notre
possession donnent
une
tendance
sur
trois
exercices seulement. Mais celle-ci peut etre consideree comrne
suffisamment representative de la situation d'ensemble compte
tenu du fait que les problernes de disponibilite des recettes
attendues,
n'ont
guere
ete
resolus
depuis
1986.
Bien
au
contraire,
on evolue progressi vement vers une
dispari tion du
FOGAPE. Son activite de financement et de garantie des credits
aux PME est a l'arret depuis environ cinq ans. Et, la TDC qui
jusqu'ici lui etait attribuee, lui a ete purement et simplement
retiree.
79
_
Ibidem p.
46-47.
7g
_
Voir tableaux XII, XIII, XIV et XV ci-apres.

tableau_~ I. I
NIVEAU DES IN'I'ElNENrlrns SUIVANT LA NA1UR.E,LA FDRME
El' LE TERME 00 exNCOURS
(en milliers de
F CFA)
1984/1985
1985/1986
VARIATICN EN
1er SEMESTRE
CUMUL AIJ 31 mX::EMBRE 1986
M:mANT
NBRE
IVI
l\\TQPl;'
IVY
NBRE
IVY
l\\Tl:IDt:'
%
M:NI'ANT
%
GARANTIE
; ... Court terme
-
-
6-
95 90J
+95 90J
11
499 896
17
2,3
595 796
3,5
i :-~yen tenne
11
437 015
61
5 680 809
+5 243 794
25
1 188 841
I ... Long tenne
1
110 4CO
9~
1
+110 400
1
318 4CX)
X,g 7 ~ SAA 4§.~
If (fT SOUS 'TOTAT
11
4...i7 015
68
5 887 109
+5 450 ()Q4
37
2 007 137
116
15~
8 331 261
484

MARCHE
( 2) ... Cautionnements
6
353 098
150
1 847 158
+1 494 060
89
523 057
245
32,8
-2 723 313
15,8
(3) ~ mts directs
1
64 000
134
1 248 650
+1 184 650
83
1 139 262
218
29,2
2 376 912
13,8
-
-SOUS TOTAL
7
417 098
284
~ nqt; RnR
+2 678 710
172
1 662 319
463
62
5 100 225
?9_0
AUTRE3 PREl'S DIREX::TS
+391 661
15
230 543
35
4,7
622 204
3,6
... Court terme
-
-
11:
391 661
2
72 812
1 926 365
+1 727 399
39
565 277
115
15,4 \\
2 564 450
14,2
... Moyen terme
83
I
-
\\
1
43 600
0,2
... Long terme
1
43 600
+43 600
-
-
0,1
:-
( 4)
C¥)TTc::. 'lnT'AT
2
72 812
95
2 361 622
+2 162 66(,/
-s4
79~ ts;,:u
151
20.2
3 104 104
18.0
PARTICJPATION
+368 250
5
0,7
368 250
2,1\\
5
368 250
-
-
... Frets participatifs
-
-
199 957
+126 957
1
52 800
12
1,6\\
325 757
1,9 i
... Prises de participation
2
73 000
9
1
I
( t;) c;,nr IS: -'T'O'T'AT
2
73 lX.XJ
.L4
568 207
+495 207
1
52 800
17
;':,3
694 007
4.0 I
;
( 6) SlS 'IOr.AL RG!GM:Nl'
17
790 113
218 ... -_7_734 267
+6 -1944 154 ___.126
2 530 194
361
48,3
II 054 574
64,2
PIR SKNlffiRE
(7) SOUS TOTAL ~
PM 'ffiE3RER1E
5
209 812
243
4 052 329
+3 842 517
138
1 912 88?
380
t;1
7
F. 17t; n?::i
~R
(8) TOTAL
22
999 925
470
11 912 746
10 912 821
264
4 443 077
756
100
17 355 748
100
(6) == (l) + (2)
(7) == (3) + (4) + (5):
(8) == (6) + (7)
Source:
Etudes sur la Definition
d'une
Strategie d'Action
pour
le
FOGAPE,
Op
Cit,
p.
50
00
\\0

Tableau
XIII
Distribution
des
Engagements
par
Secteur
d'Activites.
1984/1985
1er
1985/1986
SEMESTRE
CUMUL AD 31/12/1986
1986/1987
,
NBRE
MONTANT
NBRE
MCM'ANT
NBRE
MaNTANT
~ %
M:1'ITANT
%
I lNIXJSTRIE
8
454 092
287
7 776 132
159
2 081 581
454 60,8
10 301 805
59,f
GC:MMERCE
3
142 500
95
1 413 553
54
1 143 923
-
19,4
2 699 476
15,]
SERVICES
5
193 778
61
1 723 013
30
911 938
96 12,7
2 828 729
16,2
AGRO-PASTORAL
2
21 215
6
425 000
5
76 583
13
1,6
522 798
2,9
ARTlSANAT
-
-
3
26 200
-
-
3
0,4
26 200
0,2
PROF. LIBERALES
4
188 340
13
528 347
8
138 920
25
3,4
855 flJ7
5,0
ENTREPRISES DIVERSES
-
-
5
30 000
8
90 631
13
1,7
121 131
0,7
o
0\\
.......
I
TOTAlJX
22
999 925
470
11 912 74:
264
4 443 076
100
17 355 756
100
Source
-Etudes-suri~-la Definition d'une Strategie d'Action pour le FOGAPE, OPe .CIT.
p.
52

Tableau
-XIV
DISTRIBUTION
SPATI~E
DES
ENGAGEMENTS
Q'\\RtINfIE
!CPVT ICJ\\N:M:NT !ffiETS DIRECfS !FRI SE a:. PAR- 'ffiETS PART I -
TOTPLD(
, .
I . .
' I
'TICIPATICN
,
CIPATIFS
"
,
,
"
,
!-------------------t-------------------------------------------------------------------------------------------------------0
,
' "
I
" ' "
"
~
!~!/'v{Nf!'Nf ! ~!MNf!'Nf ll'€RE!MNf!'Nf
1~!MNT!'Nf
!~!l\\.tNT!'Nf! f'ffiE.! %!
MNT!'Nf
"
%
"
!-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------=-------,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
I
I
,
,
-
,
,
0
! PD\\\\¥'OJI\\
-
! - -
4
"
0795·
6 .
126 cm"
"
"
-
-
-
0 "
1,3
136795
0,2
,
,
,
! CENIRE
64 ! 4 476 m, 149
'2016 418 , 232 , 3 111 m! 8
! 183 457
4
283 2D , 457 -, 67,2'
K) K)J 172
! 58,6
,
,
,
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5
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18 444 !
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1~483 ,
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-
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I
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9
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-
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23 ,3',1
!
324 615
!
1,9
1
,
!-----------------~------~-----~-----------~------~----------~------~----------~-----~------------~-----~----------~-----~------~----------------~-------!
1DTf"UX
! 116 '8' 331 2(0 I 245
! 2 m 313 ! 378 ! 5 ({}" 167 ! 12 ! 325 757
I
5
!
368 2D! 756 ! ID !
17 355 747
I
lCD
,
,
,
, ,
,
,
,
.J____ !
!
!
!
Source: Tableau de bord des engag6Tents jusqu'au 31-12-86, FCGAPE, Direction.

Tableau
XV
millS DES ACTIONS EN GARANTIE PAR ORGANISME PRETIlJR
(en rnilliers de F CFA)
1984/1985
1985/1986
1e;Qe~~
CUMUL All 31 D~ 1986
NBRE
MONTANT
NBRE
M'JNTANT
NBRE
MONT.ANT
NBRE %
MJNTANT
%
,
BCD
3.
104 100
5
331 200
4
422 013 :::12 'JO:,Er
857 313
J:I::4~~
B I A 0 C
5
97 975
5
3J6 400
5
3J6 400
15 12,9
511 567
6,1
B I C I C
3
234 940
8
13 120
1
13 120
12 10,3
634 294
7,6
IDSTON-BANK
-
-
1
24 (XJJ
2
)
39 960
3
2,6
63 960
0,8
CAMBANK
-
-
1
20 (XJJ
1
25 148
2
1,7
45 148
0,5
CHASE-BANK
-
-
3
58 400
-
-
3
2,6
58 400
0,7
PARlieflS
-
-
3
113 600
1
120 000
4
3,45
233 600
2,8
S C B
01
-
-
22
1 959 015
21
0\\
840 747
......
43 B7,1
2 799 762
33,6
SGBC
-
-
-
-
1
7 749
1 0,9
7 749
0,1
CFGtNIS>E3 EIRttCER3
-
-
5
,
()c'7 4q-,~
1
2~2 (XX)
6 5.2
1 289 493
-
Ps,5
FO.R'ITSSEURS
-
-
4
716 806
-
-
4
3,45
716 806
8,6
AUTRES
(1)
-
-
11
1 113 169
-
-
11
9,:0
1 113 169
lL3,4
TOTAUX
11
437 015
68
5 887 109
37
2 007 137
116
100
8 331 261
100
(1") La rubrique "autres" concerne les garanties accordees sans que la tanque soit toutefois
detenninee et pour lesquelles les pranoteurs sont a la recherche du fin:mcement.
Source:
Etudes sur
la Definition d'une Strategie
d'Action
pour le
FOGAPE,
p.
51

- 193 -
Ainsi,
le Tresor public aupres duquel la T.D.C. est payee
n'a pas pu en assurer le versement dans son integralite. Cette
retention va s'aggraver au fur et a mesure du temps, a la faveur
de
la
conjoncture particulierement difficile
que
traverse
le
pays. De meme~ ces distorsions n'ont pas pu etre enrayees malgre
l'ouverture d'un compte FOGAPE aupres de la BEAC Oll les banques
devaient directement se liberer des sommes dues au titre de cette
taxe. Cette situation etait previsible,
l'Etat ayant longtemps
ete
un
grand creancier du
systeme bancaire
camerounais.
Ses
difficultes entrainent celles de toute l'economie qu'il ne peut
plus
soutenir.L'une
des
consequences
en
est
les
nombreux
impayes, l'aggravation de l'illiquidite du systeme et le maintien
des
credi ts
selecti fs
au
detriment
des
PME
en
depi t
de
la
multiplication des mesures d'aide au financement bancaire de ces
unites de production.
$3
Analyse Critique du Role Central du FOGAPE dans
1 'Ensemble
des
Mesures
d'Accompaqnement
du
Financement des PME
Le
FOGAPE va
jouer dans
l' appui
au
financement
et a
la
promotion des
PME
un
double
role
;
celui
d' un
organisme
de
garantie
et
celui
d' un
intermediaire
financier.
Et,
c' est
a
travers sa mission de garantie qu'il apparait le plus comme le
pivot de toute la politique d'intervention des pouvoirs publics
dans
la
promotion
des
PME.
L'ampleur
de
cette
tache
est
particulierement ressentie a partir de la reforme de 1984. Si
avant cette periode,
les credits bancaires aux PME sont restes
derisoires,
ainsi
que
nous
l'avons
vu,
l'elargissement
des
sources de revenus du FOGAPE intervenu avec la reforme va etoffer
sa surface financiere et accroi tre la valeur effective de sa
garantie, de ses interventions directes et de l'impact des autres
mesures.
En effet, a partir de la garantie FOGAPE et du renforcement
des possibilites de couverture des engagements pris vis a vis des
banques creancieres des PME,
un certain nombre de blocages se
verront attenues. 11 en est ainsi des conditions de garantie et
surtout
des
suretes
reelles
et
personnelles
exigees
aces

- 194-
entreprises et que la garantie du FOGAPE va pouvoir remplacer.
Cette gar~ntie est apportee a hauteur de 75 % environ des credits
bancaire~foctroyes de maniere a limiter au minimum le risque de
perte d~~capital engage et faciliter l'acces des projets PME au
financement bancaire. Cette reforme ouvre et consolide la base
et la voie a une mise en application plus accrue des autres
mesures a caractere monetaire et financier puis fiscal. On a pu
alors observer sous son impulsion un accroissement de l'activite
bancaire vis a vis des PME. Mais l'impact de ce role central du
FOGAPE
sera
attenue
par
les
limites
rencontrees
dans
le
deploiement des moyens financiers theoriques prevus.
Le
principal
facteur
de
ce
blocage
nous
semble
etre
le
caractere
exogene
des
ressources
qui
ne
decoulent
pas
de
l'exploitation
propre
du
FOGAPE.
Cette
situation
pose
des
problemes
d'ecart
entre
les
ressources
potentielles
et
les
res sources effectivement collectees. Et, les decal ages entre les
previsions budgetaires et les rentrees effectives entrainent des
distorsions au moment de la realisation des garanties apportees
et entament la credibilite de l'organisme.
Le constat de cette defaillance du FOGAPE amene a reposer
le probleme de la repression financiere analysee dans la section
precedente BO et la difficulte de sa resolution.
La
preoccupation
de
marge
bancaire
est
en
effet
tellement
presente que l'appui financier aux PME est immediatement revise
des l'apparition des premiers signes d'accroissement du risque
financier.
La
reforme
du
FOGAPE
de
1984
n'a
ainsi
contribue
qu'a
attenuer les problemes de financement des PME sans les enrayer
definitivement, decouvrant la grande fragilite de ce support et
celle en general de l'action des pouvoirs publics pour la relance
de l'investissement dans les PME.
D'autres mesures sont envisagees mais n'ont pas encore pu
etre appliquees pour la creation d'un contexte plus approprie a
une
activite
a
la
dimension
des
besoins
de
croissance
de
l'economie et de ceux exprimes par les PME. 11 s'agit par exemple
de la transformation du FOGAPE en une banque. Si le projet a ete
..
-
voir supra, chapitre II, IIQction I
P. 135 - 142

- 195 -
formule il n'a pas encore pu etre concretise.
La conclusion a laquelle on abouti est que la solution aux
problemes
des
PME
doit
et re
repensee.
La
plasticite
des
structures
du
systeme
financier
officiel
nous
semble
incontournable
dans
la
perspective
d' une
action
efficace
en
faveur
de
la
creation et
du
developpement
des
PME ou de
la
relance de l'activite economique d'une maniere generale. Et de
ce
point
de
vue
la
concretisation
des
fonctions
theoriques
attachees a l'intermediation financiere est loin de pouvoir se
realiser de fa90n automatique. C'est egalement l'avis de G. GALZY
tel
qu' il
ressort
de
son
analyse
du
profil
du
banquier
de
l'entreprise dans une conjoncture de credit ressere. Ce dernier
doit en effet gerer deux situations contradictoires se fixant par
rapport a ses priorites. La mission du banquier semble donc plus
ardue
" ... dans un contexte paradoxal Oll il
faut
concilier un
encadrement du credit dont il n'y a pas de raison de voir la fin,
avec
la
necessi te
de
soutenir
I' acti vi te
des
entreprises
en
satisfaisant
leurs
besoins
financiers 81 ••• "
Et
c' est
dans
la
gestion du contexte decrit ici que se revele le plus l'incapacite
du
systeme
bancaire
camerounais
a
creer
un
environnement
financier apte a assurer le financement des PME.
En d'autres termes, cet environnement ne peut etre effectif
quIa
travers
la
resolution
du
probleme
de
la
repression
financiere qui determine la capacite des PME
a se financer a des
conditions regulieres de maniere a assurer le remboursement des
credits bancaires et a contribuer a la liquidite du systeme.
Faute de cultiver et de developper en son sein ces conditons
de son efficacite,
le systeme bancaire assiste actuellement a
l'explosion d'un systeme info~el d'epargne et de financement de
l'activite economique en general,
des PME en particulier.
Les
tontines,
composante
essentielle
de
ces
circuits
financiers;
revele l'ampleur et le dynamisme economique d'un type de PME que
le
systeme
bancaire
a
jusqu' ici
totalement
ignore,
les
PME
informelles. Les structures mises en place par les tontines ont
ainsi
cet
avantage
qu'elles
font
participer
toutes
les
potentialites a leur activite d'epargne et de credit.
n
_
GGrard Galzy, Le Prof!l du Banqu!er d'entrepr!se dans
lea annbes 1980. Revue Banque N° 431 aeptembre 1983. 5 pp

- 196 -
SECTION III
CIRCUITS INFORMELS DE FINANCEMENT : MANIFESTATION
DE COMPLEMENTARITE OU DE CONCURRENCE ?
Le
processus
d'accumulation
se
realise
a travers le
prelevement effectue sur les revenus presents des menages en vue
d'un investissement et d'une creation de
la richesse pour le
futur 82 . Ce prelevement qui constitue l'epargne est le resultat
d'une veritable renonciation a la consommation pour un "motif de
finance"83 dans la perspective keynesienne. En d' aut res termes,
la fraction du revenu prelevee va etre reinjectee dans le circuit
pour repondre a la demande de financement des entreprises. De ce
point de vue, l'epargne se distingue clairement d'un simple refus
de depenser, d'une thesaurisation et d'une fuite du circuit. Elle
apparai t
plut6t
comme
un
"stock
d' encaisses
circulantes" 84
offertes
par
des
agents
a. surplus,
en
d' autres
termes
des
res sources financieres susceptibles de participer a la formation
du
capital.
Cette
approche
de
l' epargne
est
celle
que
nous
retiendrons
dans
notre
analyse
des
circuits
informels
de
financement des PME. L'epargne apparait donc ici comme un acte
important dans la mesure ou elle va alimenter la liquidite du
systeme
financier
en
general
et
celle
du
systeme
financier
informel en particulier.
Elle intervient ainsi par ce dernier
canal dans le systeme productif et dans l'arbitrage entre la
monnaie et les titres.
Et,
grace a des mecanismes propres de
collecte
et
de
mobilisation
de
cette
epargne,
les
circuits
informels creent des res sources qui peuvent servir, entre autres,
au financement des PME.
Cette approche de l'epargne necessite une mise au point par
-
J.
TCHUNDJANG, Monnai.. , s ..rvitude et Lil>erte
op cH. p. 260
U
_
Le concept k ..yne..i ..n .... t repri .. par J.
1.".
Goux pour d.1 .. tinqu..r
parmi le.. encai ........ de tran..action, la partie affeot6e au
financement de l'Inve.. tissament.
On lira A ce ..ujet J.
1.".
Goux, la Th60rie Mon6taire de la
"Finance" chez Keyne.. : une reinterpr6tation,
in Revue
d'Econamie Po1itique nO 5, 1987 pp 592-612
.. - Cette expre....ion e..t ~runtee A U. Levy-Garboua et
B. Weyrnu11er dans 1eur ouvrage, Macro Econamie Comtenporaine,
2eme Edit. Econamica,
Paris 1981, p 198.

- 197 -
rapport
aux
developpements
precedents
sur
les
limites
de
l'autofinancement.
L'analyse de l'autofinancement dans le chapitre precedent
a en effet permis de mettre en exergue les limites de l'epargne
individuelle dans le financement de l'investissement. S'agissant
plus precisement du financement des PME par les fonds propres on
a
eu
a souligner l' importance des delais que necessite la
formation d'une epargne suffisante apte a couvrir le programme
des investissements puis les besoins de l'exploitation. 11 nous
est alors apparu que l'allongement des delais de mobilisation des
res sources represente pour lesentrepreneurs un certain type de
couts
plus
ou
moins
implicites
parmi
lesquels
un
cout
d'opportunite.
Actuellement avec l' analyse des mecanismes de fonctionnement
du systeme informel et de leur incidence sur le financement des
PME, nous verrons que l'epargne n'est plus un acte individuel.
Elle va se former au sein d'une collectivite qui fait beneficier
a chacun de ses membres d' un double effet de synergie et de
dimension.
Ces
effets
semblent
etre
lies
a la
contrainte
d'epargne qu'implique l'appartenance au groupe et qui justifie
l'existence meme de ce systeme au sein duquel la tontine occupe
une place de choix.
11 importe de preciser que notre etude se situe dans un
cadre financier marque, ainsi que nous l'avons vu, par un systeme
financier officiel etroit qui fait du credit bancaire l'une des
principales
sources
de
financement
de
l' acti vi te
economique.
Cette situation n'a pas particulierement profite aux PME a cause
de la rigidite des structures du systeme bancaire. Cette rigidite
transparait dans l'inefficacite des mecanismes de creation et de
mobilisation de ressources en faveur de ces unites de production:
Le
systeme
conventionnel
n'offre
ainsi
que
peu
d'alternatives
a la formation de l'epargne interieure. Et,
l'objection
couramment
faite
ici
est
que
l'insuffisance
de
l'epargne locale ne saurait justifier le cout que suppose la mise
en place d' une
infrastructure devant en assurer la collecte.
Cette assertion semble ~e moins en moins vraie. Et, le role que
joue la contrainte d'epargne dans le developpement des tontines

c. 198 -
est
revelateur
de
l'existence
d'une
epargne
substantielle
mobilisable
en
faveur
du
systeme
productif
et
plus
particulierement de l' acquisi tion des biens d' equipement dans les
PME.
L'inter&t de cette reflexion est donc de montrer dans un
premier temps comment s'exerce cette contrainte d'epargne et le
role
qu'elle
joue
dans
l'accroissement
des
disponibilites
monetaires et financieres de l'economie. Nous pourrons ensuite
dans un deuxieme temps apprecier la qualite de l'intermediation,
c'est a dire l'aptitude du systeme des tontines a repondre aux
besoins de financement des PME.
Telles sont les deux principales preoccupations que nous
retrouverons
dans
les
developpements
qui
vont
suivre.
Nous
pourrons
ainsi
a
partir
des
mecanismes
de
creation
et
d'affectation
de
la
liquidite
aux
PME,
degager
le
type
de
relations qui s'etablit entre les tontines et le systeme bancaire
moderne
ainsi
que
son
incidence
sur
la
dynamisation
de
ces
circui ts
informels
d' epargne
et
de
credi t.
11
importe
effecti vement
de
s' interesser
a la viabili te du systerne des
tontines et a son aptitude a pallier les carences des circuits
rnodernes
de
financernent
qui
font
obstruction
a la necessite
d'investir et de construire une economie a dynamique autonorne.
Son
importance
sera
donc
saisie
a travers sa place dans la
monetarisation de l' economie et dans sa fonction d' intermediation
en faveur des PME.
$1
Tontines et Creation de la Liquidite en Faveur
des PME
La tontine n'est pas
veritablement un phenomene
recent.
Manifestation d'une pratique d'epargne ancree dans la tradition
des
societes
africaines os ,
elle
semble
etre
l' un
des
lieux
privilegies au sein duquel l'epargne se constitue. La formation
de
l' epargne dans
le
systeme des
tontines
nous
semble alors
reposer sur un double principe
.. - FOUDA OWOUNDI, Evolution du Systeme Financier et Pratique
In£ormelle d' Epargne et da PrAte en A£rique Centrale, Thllee da
3llme cycle, Univereitll da Lyon 11, ma1 1907 306 pp.

- 199 c
a)
D' abord,
l' epargne ici represente une contrainte pour
chacun des mernbres du groupe et aucune raison n'est suffisante
pour justifier le non respect de ce principe. Chaque tontinier
est ainsi tenu de participer a concurrence du montant prevu a la
formation du lot du jour ;
b)
La
liquidite
ainsi
creee
est
destinee
a un emploi
generalement
bien
determine.
Initialement
dans
la
societe
africaine, de telles res sources ont permis d'assurer le passage
d'une periode de recolte a une autre, d'agrandir le cheptel et
de creer des tresors familiaux. Les associations qui se formaient
alors devaient repondre a ces exigences. Evidernrnent selon le
contexte, l'epargne s'est constituee sous une forme monetaire ou
non, suivant des affinites familiales, tribales ou ethniques ...
Mais, au fur et a mesure du temps les structures et le mode de
fonctionnement de la tontine ont evolue pour tenir compte des
preoccupations economiques du moment et des priorites exprimees
par chaque groupe de tontiniers.
Dans
le
cas
precis
du
Cameroun
que
nous
etudions,
la
diversite des tontines est frappante. Les recherches menees dans
ce domaine ont permis d'en presenter plusieurs types 86 que l'on
peut synthetiser autour de deux grandes
formes,
les
tontines
mutualistes
et
les
tontines
financieres.
Leurs mecanismes de
fonctionnement
nous
sernblent
suffisarnrnent
significatifs
pour
traduire 1 'importance des tontines dans l'economie camerounaise.
On y decouvre ainsi une rationnalite des comportements qui obeit
aux
deux
principes
de
contrainte
d' epargne
et
de
source
de
financement de la depense des agents economiques. Et, bien que
ces mecanismes de fonctionnement soient differents dans chacun
de ces deux cas,
on a pu se rendre compte de la presence de
proprietaires de PME parmi les tontiniers et de l'existence de
mecanismes particuliers permettant la participation du systeme·
des tontines au financement des PME camerounaises .
.. - On lira pour plus de details sur la typoloqie des tontines :
- B. BagOLQ-EBB, Le Syst~ des Tontines : Liquidit6,
IntermlldiaUon et C<mport8lllllnt d' Bparqne. Revue
d'Bconamie Politique, nO 4, 1989 pp. 616-638.
- G. DJOUMBISSIB, Franc-Contribuer : Sparqne dans la soci6t6
tradi tionneJ.le aEricaine, Sdi t. Li tteraires.
Douala-CameroUll.
- M. LIi':LART, L' Sparqne Informelle en Afrique : Les Tontines
Beninoises, Revue Tiers Honde,
nO 118, avril-juin 1989 pp 271-298.

- 200-
1.1
La Tontine a Caractere Mutualiste
Bien que l'aspect social soit primordial ici,
il n'inhibe
pas
l'aspect
financier
de
la
participation
a la
tontine
mutualiste 97 • Bien plus ce dernier en est meme l'un des ressorts
dans la mesure Oll il contribue au renforcement de la solidarite
des membres par la qualite de l'appui financier que la tontine
offre aux uns et aux autres.
1.1.1
Presentation de la tontine mutualiste
Les regroupements au sein de la tontine mutualiste se font
entre membres d'une tribu,
entre amis ou collegues en d'autres
termes,
entre des personnes qui se connaissent et qui desirent
renforcer
leurs
liens de solidarite.
C'est ainsi
que peuvent
alors se regrouper des entrepreneurs proprietaires de PME pour
elaborer ensemble des programmes et strategies d'entr'aide pour
le
mieux
etre
de
leur
activite.
Cette
entr'aide
n'est
veritablement
realisable,
surtout
lorsqu' on
se si tue dans
la
sphere de la production, que si l'aspect social de l'association
est soutenu par un support financier a la hauteur des besoins que
l'on cherche a satisfaire. La prise en compte de cette dimension
fianciere permet sans doute d'expliquer la multiplication des
mecanismes au sein de ce type de tontine. Ceux-ci sont :
- la tontine proprement dite (I)
la caisse de secours
(11)
- la caisse de prets
(Ill)
Ces differents mecanismes peuvent fonctionner separement Oll
se retrouver tous a l'interieur d'une meme association sur tout
lorsque celle-ci rassemble des chefs d'entreprises.
En
ce
qui
concerne
le
financement
de
l'activite
de
production
de
ses
membres,
la
tontine
fai t
fonctionner
essentiellement les mecanismes 1 et
Ill.
Le mecanisme 11 est
moins deploye dans ce cadre parce que les fonds qu'il permet de
n
_
La tontine mut.ua11ate peut itl:'e rapprochee des tontino8
de type I A III de B. BEKOLO, anal.ysOes dans "Le Systems des
Tontines, Liquidit6, Intermediation et Comportement d'Epargne,
op. c1t.
&11e s'apparente'~ement A 1a tontine ~tue11e d6crite par
L. LELART et GNANSOUNOU, Tontines et tontiniers sur 18S marches
afrj,ca1ns : le march" Saint 1oI1che1 de COTONOU, in African
Revj,_ of Honey, l'in'ahce and Bankinq, tinafrica - Jan. 99 pp 69-90.

- 201 -
degager sont principalement mobilises a 1 'occasion d I un evenement
heureux tel qu'une naissance,
un mariage ...
ou d'un evenement
malheureux
qui
peut
etre
une
maladie,
un
deces
etc...
Ces
res sources
sont
pour
la
tontine
une
encaisse
de
precaution
rarement affectee au financement d'emplois differents de ceux qui
en justifient l'existence.
Certes, lorsque la probabilite d'intervention est faible et
que 1 I on proj ette une prolongation de
la periode d' accalmie,
l'epargne de la caisse de secours peut etre pretee ou placee. Et
si cette epargne peut du fait de son affectation generer un gain
financier, l'une des observations que l'on peut faire ici est que
le choix de l'operation ne saurait perdre de vue l'interet de la
securite de l'epargne et celui d'une mobilisation rapide en cas
de necessite.
Quant aux mecanismes I et Ill,
ils sont fondamentalement
crees
pour
permettre
le
lancement
ou
le
developpement
d I une
activite productive.
1.1.2.- Le fonctionnement de la tontine proprement dite
Les participants a
la tontine,
et dans
le cas qui nous
interesse, les entrepreneurs dirigeants des PME conviennent d'un
calendrier a l'ouverture de chaque cycle de maniere a fixer a
l'avance le montant de la participation et le tour, c'est-a-dire
la
periode
a
laquelle
chaque
membre
beneficiera
de
la
contribution des uns et des autres a la constitution de l'epargne
globale.
La duree
du
cycle et
la periodici te
des
rencontres
varient en fonction de plusieurs facteurs a savoir le nombre des
adherents,
le montant du lot que l'on cherche a atteindre,
la
masse des besoins que l'on voudrait couvrir etc ...
DI une
fac;on
generale,
des
disposi tions
son t
prises pour
qu'un cycle se deroule en une annee environ a la condition que
cette duree n I al tere ni ne reduise
1 I importance de 1 I epargne
demandee. De tels arrangements visent a offrir a chaque tontine
l'occasion de renforcer sa surface financiere,
une precaution
qu'on aurait difficilement pu prendre en economisant tout seul
sur son revenu. Les res sources ainsi contituees seront a chaque
periode confiees a un membre different de telle sorte qu'au terme
d'un cycle chacun des elements de la tontine ait pu beneficier

"- 202 -
d'un tour.
Nous reviendrons plus loin sur la relation qui s'etablit
alors entre l' epargne et le credi t
et l' interet que celle-ci
revet
pour
une
PME.
La
tontine
simple
dans
le
cadre
du
regroupement des mernbres d'un meme corps de metiers tels que les
tailleurs,
les menuisiers,
les mecaniciens,
les electriciens,
bref des chefs de PME s'accompagne generalement d'une caisse de
prets.
1.1.3.- Le fonctionnement de la caisse de prets
La caisse de prets fonctionne parallelement a la tontine.
Si les versements a la tontine sont connus a l'avance par tous,
les depots a la caisse de prets sont laisses a la discretion de
chacun.
La regularite de l'epargne depend de la permanence du
revenu
de
la
vi tali te
de
l' acti vi te
de
production
de
l'entrepreneur
et
des
efforts
d'organisation
et
de
gestion
deployes
dans
le
sens
de
son
developpement
ou
de
sa
diversification. Le rythme d'approvisionnement de cette caisse
de prets
est
plus
eleve parmi
les
PME
qui
ont
une
acti vi te
continue et un revenu permanent. Les fonds deposes a la caisse
de prets constituent la masse des capitaux destines aux prets
auxquels sont eligibles tous les mernbres de la tontine mais aussi
des personnes externes a la tontine a condition que celles-ci
soient avalisees par un tontinier. Evidemment les operations de
prets sont assorties du paiement d'un interet a un taux fixe
d'avance par la tontine. Ce taux est toujours plus eleve pour les
emprunteurs exterieurs.
On
voit
donc
comment
a
ete
introduite
dans
la
tontine
mutualiste une composante financiere qui n'est pas imcompatible
avec le climat de solidarite a entretenir dans le groupe. Ce
mecanisme revet ainsi deux caracteristiques qui le distingue du
mecanisme I.
a) les versements dans le caisse de pret n'ont pas forcement
un caractere obligatoire et dependent souvent des possibilites
de chacun. L'epargne dans ce cas est facultative tant dans son
principe que dans son montant. Mais il taut dire que la tontine

- 203 -
exerce un effet psychologique qui est une forme de contrainte
indirecte poussant chacun des membres a participer a la caisse
de pret. Cette contrainte est d'autant plus forte que le niveau
des participations est generalement le thermometre de la sante
des affaires de chacun des entrepreneurs. 11 se developpe ainsi
une forme de concurrence ce qui se manifeste dans l'effort de
deposer a chaque periode le montant d'epargne le plus eleve. Si
l' une des moti vations de l' accroissement du taux d' epargne a
verser a la caisse des depots est l'efet produit sur les autres
membres ou l'admiration suscitee,
l'autre raison et sans doute
la plus evidente est le niveau de la remuneration attendue.
b) Ainsi, l'epargne constituee est affectee a des operations
de credi ts ouvertes aux participants et aux non participants
moyennant
un
taux
d' interet.
11
s' agi t
donc
d' une
acti vi te
onereuse dont le gain financier accroit la masse des res sources
appartenant a chacun des tontiniers. Ces res sources de la caisse
de
prets
viennent
donc
s'ajouter
a celles de la tontine
proprement dite pour constituer un volume de capitaux qui peuvent
etre affectes a des emplois productifs.
On peut donc voir a travers ces differents mecanismes le
role
joue par
la
contrainte
d' epargne
en
tant
que
l' un
des
facteurs d'accroissement du niveau de la liquidite en circulation
dans
le
systeme
financier
informel.
Des
enquetes menees
sur
l'importance de tels capitaux montrent que le volume des fonds
mobilises
par
les
tontines
au
Cameroun
depend
de
plusieurs
facteurs. Ces facteurs peuvent et re la zone consideree ; rurale
ou urbaine, la province, le type de tontine88 • On peut egalement
ajouter a ces determinants du niveau d'epargne la qualite des
participants,
la
nature
de
leurs
revenus,
celle
de
leurs
relations avec le systeme bancaire local etc ... Dans tous les
cas,
le
comportement
des
tontiniers
reste
soutendu
par
la
contrainte d'epargne qu'exerce les regles de fonctionnement de
la tontine .
..- Groupe d'li:tude et de Recherche en li:conomie Appl.iquee (GIi:RI1.A) ,
B. Bi:KOLO EBB (sous l.a direction de), enquAte sur
l.es Tontines dans l.es Provinces du Centre, du Littoral, de l.'Quest
et du Nord-Quest, note de sysnthese-programme tontines,
Recherches effectuees avec l.'appui de l.'UREF,
Wording Paper, GEREA 26 pp

- 204·
1.1.4.- L'Interet de l'Intermediation Directe :
le Lien entre l'Epargne et le Credit
L'interet de 1 'intermediation apparait a la maniere dont on
passe
de
l'epargne
au
credit.
Et,
ce
passage
s'effectue
diferemment selon que l'on se trouve dans la tontine simple ou
dans la tontine avec la caisse de pret.
A
- L'lntermediation dans la Tontine Simple
Nous avons vu a travers le fonctionnement du mecanisme I que
les sommes collectees a chaque periode du cycle vont a un membre
different du groupe. Et,
a tour de role chacun des tontiniers
peut beneficier de l'ensemble de
l'epargne que l'association a
pu collecter. La caracteristique dans l'attribution des lots est
que celle-ci s'effectue sans cout financier explicite. En effet,
la
fonction d I intermediation s' exerce en 1 I absence d I un taux
d'interet
remunerant
le
service
rendu
aux
beneficiaires
des
differents lots. L'epargne constituee par les tontiniers semble
etre ainsi distribuee gratuitement a toutes les parties prenantes
au systeme. S'il n'y a donc pas de taux d'interet evident connu
de tous, il est difficile de dire que les operations de credits
que
permet
la
creation
de
la
liquidite
sont
veritablement
realisees sans cout. 11 nous semble en effet qu'il existe ici un
cout implicite lie a la position dans le cycle. Ainsi pour celui
qui occupe le rang 1, il se voit accorde un credit egal
a Nv
00
N
au nombre de periodes du cycle
v = montant de chaque versement
L'un des points importants a souligner est que ce montant
de credit Nv est consenti a un taux d'interet nul. Nous restons
dans l'hypothese que dans un systeme 00 il Y a N participants,
chacun des participants est tenu de verser sa quote-part que nous
avons
appelee
ici
v.
Nous
pouvons
donc
preciser
que
le
beneficiaire du lot de rang 1, con@e tous les autres d'ailleurs,
participe egalement a la formation de son lot. Le credit qu'il
obtient en realite sera alors egal au lot qui lui est attribue
moins sa propre contribution v. Ce credit peut donc s'ecrire :
Nv - v. 11 est donc debiteur net du systeme, son solde debiteur

- 205 -
etant
Nv -v
Pour l'emprunteur de rang 2 qui deja epargne deux fois le
montant v,
son credit sera de Nv - 2v , l'emprunteur de rang j
quant a lui obtiendra un credit net egal a :
Nv - jv
Les sommes v,
2v,
... jv ... correspondent en quelque sorte
a
1 Iapport personnel des
tontiniers.
On peut donc
se
rendre
compte que l'apport personnel exige n'est pas le meme pour tous.
Et,
pour celui qui occupe le rang N,
il est au contraire du
beneficiaire de rang 1, preteur net jusqula la periode N - 1 et
son solde crediteur a cette periode est egal a Nv -
v.
A la
periode N,
le lot qui lui sera remis est constitue globalement
de son epargne pendant tout le cycle,
c'est-a-dire N periodes.
La somme Nv qu'il per90it represente son effort d'epargne,
de
l'autofinancement pour son activite de production puisque nous
nous pla90ns dans le cadre d'une tontine composee d'entrepreneurs
proprietaires de PME. Le coQt effectif que l'on pourrait attribue
au credit obtenu par chacun peut etre analyse en terme d'apport
personnel exige. Cet apport personnel est de plus en plus eleve
quand on s'eloigne des premiers tours.
Ainsi pour toutes les
positions intermediaires placees entre le rang 1 et le rang N,
la tontine joue un double role.
a)
Elle est un systeme d'epargne qui permet de constituer
un
apport
personnel
dans
la perspective
de
1 Iobtention d Iun
credit.
b)
Elle est un systeme de credit qui permet a un membre
donne de beneficier de l'epargne de tous pour les operations
individuelles. Mais la relation entre l'epargne personnelle et
le credit du groupe a un tontinier est differente de celle que
lIon
observe
dans
le
systeme
bancaire
classique
ou
l'accroissement du volume du credit est positivement correle avec
celui
de
1 Iapport
personnel.
En
effet,
dans
la
tontine,
le
montant
du
credit
diminue
au
fur
et
a mesure
que
celui
de
1 I apport personnel augmente,
1 Iun evoluant en sens inverse de
l'autre.
Le role de 1 'intermediation est par contre different lorsque
lIon sort des positions intermediaires. 11 est ainsi uniquement

- 206-
un systeme de credit pour le tontinier de rang 1 tandis qu'il
prend la forme d'une contrainte d'autofinancement pour la PME de
rang N. Le cout implicite de 1 'intermediation, puisqu'il n'y a
pas de taux d'interet formel,
s'eleve donc dans ce cas 00 l'on
se si tue
a
la
fin
du cycle.
Car,
l' epargne nette n' est pas
remuneree alor$ qu'elle subit parallelement une erosion due a
l'inflation et au temps necessaire pour la reunir. On retrouve
ici le taux d'interet implicite i". Ce taux i"
est d'autant
plus important que les beneficiares des tours precedents ont pu
profiter d'opportunites d'emplois productifs et de creation de
richesse nette.
Cependant,
l'effectivite
de
ce
cout,
contrairement
aux
developpements precedents sur les couts implicites des credits
aux PME,
doit etre relativisee.
En effet,
1 'organisation des
tours dans
la tontine mutualiste est tres
souvent concertee,
chacun se situant dans le cycle a la periode qui convient le
mieux
a
son
programme
d' investissement
ou
de
besoins
d' exploi tation. Comme la capaci te d' endet tement est theoriquement
la meme pour tous,
l'ordre de passage est etabli par tire au
sort.
Ce
tire
au
sort
n' est
souvent
que
l' un
des
elements
intervenant dans l'etablissement du calendrier. Le comportement
dans les cycles precedents apparait generalement comme un critere
determinant de la position dans le calendrier.
Cette derniere
consideration necessite que l'on attribue d'office les dernieres
places aux nouveaux venus.
11 s'agit dans ces cas d'une mesure
supplementaire de securite pour l'epargne collective et une forme
de garantie du remboursement du credit consenti. Au-dela de ces
precautions que peut prendre la tontine, il apparait une certaine
souplesse dans son fonctionnement qui permet des arrangements et
des modifications du calendrier initial dans des cas de necessite
exprimee et peut etre verifiee. Dans des cas de cession de tour~
l'une des exigences habituellement formulee par le cedant est que
son remplayant n'ait pas encore beneficie de son tour pendant le
cycle, que ce dernier soit en regIe avec la tontine et quelques
fois
qu'il
soit
avalise
par
l'un
des
membres
du
groupe.
l'importance de ce mode d'intermediation peut etre appreciee a
divers points de vue :
a)
D'abord,
il
offre
immediatement
une
encaisse
qui
correspond a autant de periodes de prelevement que l' on a de

- 207··
participants.
De ce
fai t,
le versement de chaque participant
raccourci
d'une
periode,
le
temps
que
la
constitution
de
l'epargne totale aurait exige des seuls efforts du gagnant de la
tontine. Si cette consideration est sur tout importante pour les
debiteurs nets du systeme, elle traduit essentiellement la mise
en circulation ~t la disponibilite d'une epargne qui aurait pu
soit rester oisive soit avoir un caractere discontinu.
En effet, si chaque membre devait individuellement realiser
des economies sur son revenu, dans un environnement bancaire o~
l'incitation
a
l'epargne
est
pratiquement
inexistante,
il
n'aurait comme alternative que la thesaurisation durant le temps
qu'il se serai t
fixe.
En outre,
si la contrainte n' etai t
pas
suffisamment forte il pourrait meme allonger durablement ce delai
et retarder d'autant l'utilisation des liquidites peniblement
degagees. A contrario la frequence des rencontres dans le cadre
de la tontine,
la regularite des cotisations et la contrainte
d' epargne
assurent
un
mouvement
monetaire
continu
profi tant
chaque fois au tontinier beneficiaire. Elles expliquent egalement
la caracteristique que LELART et GNANSOUNOU dans leur etude menee
sur les tontines a Cotonou, reconnaissent a cette association a
caractere mutualiste. lIs notent a cette occasion que ce type de
tontine accelere particulierement la circulation monetaireBg • Le
temps
d'immobilisation
des
fonds
est
relativement
court
et
lorsqu'il est conjugue a l'obligation de rembourser les sommes
peryues conformement au calendrier etabli, il devient un facteur
d'accroissement de la liquidite au sein de l'economie.
b) Deuxiemement du fait meme de la variable solidarite qui
predomine
dans
la
tontine
mutualiste,
l'accroissement
des
disponibilites
monetaires
en
circulation
participe
de
l' importance accordee particulierement a
chaque membre et au
respect dti a son tour. La regularite de chaque participation est
une
garantie
a I ' emergence
du
groupe
et
a
la
permanence du
processus,
les
res sources
qu'elle
procure
aux
tontiniers
permettant la realisation des previsions de depenses. Ainsi, les
relations
que
nous
etablissons
alors
entre
les
tontines
" -
M.
LELART et s. GNAN SOUNOU, Tontines et tonUnierB
sur leB march6B africainB : le march6 saint Micbel de Cotonou,
in African Revi_ of Money. I!'inance and Banking.
I!'inafrica - Jan 19B2 pp 6g-g0

mutualistes et les PME resident au moins a deux niveaux. D'abord
la tontine permet la transformation de la demande potentielle des
participants en une demande solvable. L'elasticite de la demande
par rapport au revenu et la deformation de la structure de la
consommation
avec
le
niveau
du
revenu90
sont
aut ant
d'opportunites ge production qui s'offrent aux PME et qu'elles
peuvent exploiter a leur avantage. C'est egalement des occasions
pour les PME commerciales et artisanales soit de renouveler ou
d'augmenter
leurs
stocks
soit
encore
d'acquerir
de
petits
equipements qui ameliorent leurs conditions de travail et leur
rentabilite.
c)
Troisi~mement le credit sera d'autant plus interessant
que l'on se situe au debut de la chaine. Le gain financier que
l'on en tire s'apprecie alors a partir des crit~res suivants :
- premi~rement par rapport au taux d'interet qu'on aurait
eu a payer s'il s'agissait d'un credit bancaire.
- ensuite par rapport au temps et au cout necessaires pour
constituer un dossier de demande de credit et pour reunir des
garanties personnelles ou reelles pour le banquier. En effet, on
a pu voir
que
l' obtention de
certaines
suretes
necessi te de
l'emprunteur des sorties immediates de fonds au titre de loyers
pour des titres fonciers empruntes a des amis ou a des parents,
ou de desinteressement pour les avalistes qui apportent leur
caution personnelle. Tous ces elements absents de la tontine sont
apprehendes comme un gain financier et des avantages reels qui
tendent a reduire le taux implicite. 11 est bien entendu que
l'importance du credit effectif dans ce type de tontine diminue
au fur et a mesure que l'on s'eloigne du premier rang,
cette
place etant elle-meme decidee en fonction de crit~res subjectifs
et objectifs evaluant la capacite d'endettement des intervenants
et garantissant
l' efficaci te du role
des
intermediaires
dans
l' allocation de
l' epargne aux
emplois
formules.
L' inten~t de
1 'intermediation dans la tontine simple reside davantage dans la
contrainte d'epargne qu'elle impose aux participants que dans la
recherche
d'un
rendement
financier.
La
situation
semble
par
..- G. ABRAHAM - P'roia, Econom1.e POILtique
Ed. Econom1.ca, Paris 1982 PP 223--229

- 209 -
contre differente dans les tontines avec caisse de prets.
B- L'Intermediation dans la Tontine avec Caisse de Prets
La tontine avec caisse de prets est une variante de la
tontine mutualiste a dominante financiere. Elle differe ainsi sur
ce point de la tontine simple dont le montant du lot est le meme
pour chaque participant, meme si nous avons separe a l'interieur
de celui-ci
la part representant
I' apport personnel de celle
constituee du credit de l'association. D'une maniere generale,
chacun obtient
un
lot egal
a Nv dans la tontine simple. Le
montant du lot change dans la tontine avec caisse de pret car a
Nv s'ajoute un montant de credit supplementaire appele v'. v' n'a
plus
les
memes' caracteristiques
que
v
dans
la
mesure
Oll
l'intermediation est onereuse et Oll il n'existe pas de relation
fixe
entre
le
nombre
de
tontiniers
et
v'.
On
a
vu
que
la
contribution a la formation de v' est facultative et son niveau
ne peut
etre connu qu' ex post.
On
le notera
donc
v'ij
pour
montrer qu'il peut varier d'une periode a l'autre, d'un tour a
l'autre.
Le tontinier de rang j re~oit donc a la periode i le montant
suivant
II!::::::===:=NV
lj~11
+=V'
Si
sur
la' somme
Nv
il
ne
paie
pas
d' interet
formel,
l'attribution de la somme V'lj est assortie d'un taux d'interet.
Nous
allons
donc
voir
comment
s' effectue
le passage de
l'epargne au credit ,et comment se fixe le taux d'interet dans
cette forme de tontine.
C
Le Passage de l'Epargne au Credit:
La caisse de pret est par essence destinee a une activite
de
credit.
Elle
prend
differentes
denominations
selon
la
specificite des operations pour lesquelles elle a ete mise en
place. Elle peut et re appelee par exemple caisse scolaire, caisse
outils
etc..
quand les
epargnants
destinent
leur
epargne
au
financement des depenses liees a la rentree scolaire ou a celles

- 210-
de
la
reconstitution ou de
l' amelioration des
outils et des
equipements
de
production.
L'intermediation
permet
dans
un
premier
temps
la
formation
de
ces
ressources
puis
leur
accroissement par le gain financier gene re par les operations de
credit de
la tontine.
Dans un deuxieme
temps elle permet la
transformation
de
l'epargne
en
credit
d'exploitation
ou
d'investissement selon la duree des tranches d'emprunts et le
caractere permanent ou non du cycle. Tres souvent les tranches
d'emprunt ont la meme duree.
Celle-ci varie entre 2 et 4 mois.
Elle peut etre allongee mais il s' agi t
globalement de delais
relativement
courts.
Cependant
il
existe
une
possibili te
de
renegociation des emprunts mais celle-ci s'accompagne de taux de
penali te
qui
s' accroissent
au
fur
et
a mesure du temps. Ce
systeme ne peut etre avantageux que si l'operation financee est
fortement remuneratrice.
Cette
transformation
de
l'epargne
permet
a la tontine
d'exercer
sa
fonction
de
distribution
de
la
liquidite.
L'allocation du credit dans ce type de tontine pose le probleme
de
la
determination
des
normes
d'attribution
de
l'epargne
constituee. Nous savons que dans le cadre de la tontine simple
les tours sont etablis a l'avance. Mais pour la caisse de prets
il n'existe theoriquement pas de tours et si par contre il y a
un taux d'interet explicite celui-ci est le meme pour toutes les
tranches d'emprunts. Ainsi ni le taux d'interet ni le tour ne
peuvent departager les postulants au credit lorsque la demande
s'avere
superieure
a l'offre. L'un des criteres couramment
utilise
dans
ce
cas
est
celui
de
la
capaci te
d' endettement
evaluee en
fonction de
l' epargne indi viduelle des adherents.
C'est elle qui determine le montant V'ij du tontinier j.
Si on appelle M, le montant total de l'epargne de la periode
enregistree dans la caisse de prets, L le montant des demandes
de credits formulees, 1ij la demande de credit du tontinier.
La capacite d'endettement sera donnee par un coefficient d qui
se determine
a partir de L, 1ij, M et aussi .B qui est la
frequence
et
le ni veau des
pal'ticipations du
tontinier a la
creation
des
ressources
non
pas
seulement
pour
la
periode
consideree mais pour toutes les periodes anterieures.
'=.B=)====!~
==,="""d===f=(=M=,=L=,=11.="J="
I l . ! : : : : /

- 211 -
avec O<ds:l
tel que
,
v i:l = d M
I
b===~o~n==p=e=u~t==e=n=c=o=r=e==erc=r~Jire que le lot total du tontinier de rang
jest egal a la somrne suivante
Nv + d M
Nous avons egalement fait l'hypothese que la caisse de pret
est ouverte aussi bien aux adherents qu' a des non-adherents,
moyennant pour cette derniere categorie d'emprunteurs la caution
d'un tontinier et le paiement d'un taux d'interet plus eleve.
Mais comrne dans cette forme de tontine le taux d' interet n' a
qu'un faible role dans la distribution du credit,
le montant a
accorder a l'emprunteur non membre sera au plus egal a celui
qu'on aurait accorde au tontinier avaliste. Dans le meilleur des
cas, l'aval du tontinier de rang j permet l'obtention d'un credit
C egal a :
C = d M
Dans tous les cas la qualite de l'intermediation determine
la capacite du systeme a ajuster l'offre d'epargne a la demande
de credit au niveau optimal 91 • Cette optimalite s'apprecie dans
l'aptitude des emprunteurs a rembourser le credit et a celle des
epargnants
a ameliorer constamrnent le niveau de l'epargne,
permettant au systeme d'accroitre la liquidite en circulation
dans le systeme,
dans l'economie et plus particulierement dans
le circuit de production constitue par les PME.
Cette
double
contrainte
qu'impose
la
fonction
d'intermediation au niveau du comportement d'endettement des PME
et a celui de leur comportement d'epargne s'exprime encore mieux
lorsque l'on introduit le taux d'interet dans l'analyse.
"
-
Cette optimalit6 ne doit pas n6cessairement Atre
comprise au sens paretien.

- 212 -
D
Le Role du Taux d'Interet dans les Tontines
La nature des arbitrages dans la distribution des res sources
aux emprunteurs nous a permis de dire que le taux d'interet ne
participe
pas
directement
a
la
hierarchisation
et
a
discrimination des besoins. Les etudes menees sur la tenue des
taux d'interets dans la tontine 92 montrent que le taux d'interet
est relativement fixe dans la tontine mutualiste.
11 se situe
entre 8 et 15 % pour deux mois,
le taux le plus frequent etant
de
10%93.
De
tels
taux
nominaux
semblent
de
prime
abord
usura ire . Mais la ,tontine dans son effort de resorption de la
repression financiere offre une remuneration de l'epargne et des
prestations
qui
sont
tels
qu'a
des
taux
nominaux
~leves
correspondent des taux effectifs relativement bas 94 • Ainsi,
le
tontinier defini t
un taux d I interet effecti f
qu' il
considere
comme
inferieur
au
taux
apparent
de
la
tontine
et
a
celui
pratique par le systeme financier officiel. 11 integre en outre
dans la definition de ce taux effectif des facteurs nouveaux qui
en reduisent davantage le ni veau.
On peut ci ter dans ce sens
l'allegement des conditions du credit et la grande souplesse du
systeme dans la creation de mecanismes de financement plus adapte
aux di fficul tes
de
gestion et
a
la
faiblesse
des
res sources
propres.
a) Ainsi,
les conditions de garantie se limitent souvent a
un avaliste, partie prenante du systeme, a un cheque depose en
garantie du credit ... On verra plus tard que ce dernier point est
favorable
a
l'etablissement
de
relations
avec
le
systeme
bancaire.
b)
S'agissant des conditions de remboursement des credits,
il est prevu des possibilites de moratoire.
Ainsi,
les delais de remboursement peuvent etre proroges
avec ou sans penalites pour tenir compte de l'evolution de la
n
_
B.
BKKOLO et R.
BlLONGO,
structure des Gains et des taux
d'~nt6r6ts dans les tont~nes : Quelques Etudes de cas,
COImII1~cation awe :journ<!les sc~ent~f~ques "I!'~nancement,
D<!lveloppement et Culture de l'Entrepreneur,
CASABLANCA, f<!lv. 1988, 18 pp .
..
..
IDEM
-
IBIDEM

- 213 -
conjoncture economique :
- des possibilites d'etalement des paiements peuvent etre
accordees
en
cas
de
difficultes,
adapt ant
l'echeancier
de
remboursement
a l'evolution de
la
tresorerie.
Toutes
ces
considerations absentes des conditions bancaires de credit font
de la tontine un circuit financier concurrent dont les atouts
semblent etre
- un taux d'interet effectif avantageux ;
une mobilisation rapide du financement
- un systeme de garantie souple ;
tous visant a minimiser les risques de non remboursement. La
place faite au taux d'interet et a la gestion du risque dans la
tontine est une traduction de l'infeodation de cette derniere aux
imperatifs de financement de l'economie et une reduction du poids
de la repression financiere.
La tontine mutualiste par la multiplicite de ses mecanismes
de
fonctionnement
et
de
leur
adaptabili te
a l' evolution des
besoins de production des PME innove dans une conjoncture OU les
res sources monetaires et financieres sont rares. Elle repense la
fonction d'intermediation dans une direction totalement ignoree
par
le
systeme
bancaire
officiel
lequel
a
prefere
dans
un
contexte de rarete des capitaux pratiquer une discrimination a
l'egard de l'investissement.
De ce point de vue, l'inventaire des mecanismes mis en place
dans la tontine mutualiste traduit principalement la prise en
compte du contexte socio-economique et financier. Le comportement
des
adherents
est
lie a la nature de leurs besoins et a la
disponibilite des ressources au regard de leurs sollicitations,
a la satisfaction qu'ils tirent de cet avantage et le caractere
tout
a fait secondaire du taux d' interet apparent dans leur
decision d'epargner et d'emprunter. On a ici une confirmation de
l'opinion
traditionnellement
admise
de
l'insensibilite
de
l'epargne individuelle au taux d'interet 95 • Cette these bien que
controversee trouve une autre confirmation dans les conclusions
du Rapport du Committee of the Working et the Monetary System au
-
Une analyse de l' 6vo1ution de 1a pens6e 6conom1que sur
1e prob18me des taux d'int6r6t est uti1ement pr6sent6e par
J.
P. Benolt, Taux d'int6r6t administr6s et Taux d'int6r6t
du march6 in D.
Ke....1er et P. A.
U1l.mo (ed) op eit.

- 214 -
Royaume-Uni. Ce rapport qui porte sur le mouvement de l'epargne
nationale au Royaume-Uni fait mention de nombreuses difficultes
a rattacher l'evolution de l'epargne individuelle au taux
d'interet 96 • Le point de vue developpe ici montre que l'analyse
du comportement d'epargne ne peut pas etre uniquement menee par
rapport
au
taux
d' interet .
Une
vue
pI us
complete
necessi te
l'intervention d' aut res
considerations,
celles
qui
tendent
a
relativiser l'importance des taux nominaux.
Si l'une des raisons d'etre de la tontine avec caisse de
pretspourrait
se
trouver
dans
la
recherche
du
rendement
financier des res sources epargnees, cette recherche du gain reste
moderee. Elle n'a donc qu'un faible impact dans l'intermediation.
Le comportement d'intermediation observe dans ce type de tontine
nous semble changer totalement dans la tontine financiere Oll le
gain financier est le mobile principal de toutes les actions.
1.2.-
Les Tontines Financieres
Celles-ci sont consti tuees essentiellement autour d' interets
financiers.
Elles
regroupent
des
hommes
d' affaires,
des
entrepreneurs commer~ants, industriels,
responsables de PME ...
L' element
caracteristique
du
groupe
est
la
recherche
de
la
prosperite de l'activite de chacun grace au rendement financier
de la tontine et aux possibilites de credit qui y sont offertes.
Les membres ne se connaissent pas toujours personnellement, mais
I 'integration dans la tontine passe forcement par un parrainage,
le
parrain
se
portant
alors
caution
de
la
personne
qu' elle
introduit.
Nous verrons plus tard que cette precaution a une
signi fication
bien
precise.
Les
sommes
a verser par chaque
tontinier sont fixees et sont generalement plus importantes que
dans le cas precedent Oll les motivations ne sont pas les memes·.
Et,
dans
les
tontines
financieres,
I' epargne
collectee
doi t
servir a financer des operations d'investissement, d'acquisition
d'immobilisation, ou d' exploi tation courante. Le comportement des
participants est ainsi lie a la nature des besoins, au cout des
res sources et a l'opportunite de leur affectation. La prise en
compte de ces considerations pour le tontinier se traduit dans
.f
_
Co rapport ost cite par J. P. Bonoit, IDEM

- 2i5 -
un mode particulier de fonctionnement tel que la disponibilite
de l'epargne n'est plus fonction de considerations sociales ou
d'entraide.
Celle-ci ne decoule pas non plus d'un calendrier
preetabli.
Mais
les
sommes collectees
sont mises
en vente a
chaque seance et cedees au dernier encherisseur.
La vente des
lots
s'accompagne
de
prelevement
d'interets,
la
somme
des
interets per<;us sur les "tours" vendus consti tuant gain financier
de la tontine 97 • Et,
c'est cette marge beneficaire,
ce surplus
realise par la tontine qui determine son role dans la creation
et I' accroissement des capi taux pour le financement de l' economie
en
general,
la·
creation
et
le
developpement
des
PME
en
particulier.
La philosophie qui soutend le comportement de l'individu se
demarque tout a fait de celle qui transparait du fonctionnement
de la tontine mutualiste bien que la justification de la tontine
quelle
que
soit
sa
forme
tienne
a la volonte commune de
rassembler des moyens financiers satisfaisants en quantite et en
qualite. L'analyse faite par J. NSOLE sur l'epargne populaire a
Yaounde,
au Cameroun et les conclusions auxquelles il aboutit
nous
confortent
dans
cette
posi tion.
De
son
point
de
vue,
I' epargne degagee par la tontine re pond a trois principaux motifs
les depenses
sociales,
la consommation et
I' investissement
economique 98 •
C' est egalement ce que FOUDA OWOUNDI qualifie de
reconsti tution des comportements monetaires 99 • Ainsi, I' actiondes
tontiniers par la contrainte d'epargne et les garanties qu'elle
impose participe de l' accroissement des disponibili tes monetaires
en circulation et concourt de cette maniere a la monetarisation
de l'economie.

Cette analyse est aussi confirmee par les resultats d'une enquete
menee par le GEREA sur les tontines au Cameroun. Cette etude qui
1,_
Cette forme de tontine correspond aux types IV et V d6crits
par B. BKKOLO. 11 1ea <11atingue par 1a cap.1ta1.1aation ou
1a non cap.1ta1.1aat.1on dea gains per~s A chaque per.1ode.
On 1.1ra A ca sUjet B. BBKOLO-BBB, 1.1qu.1<11t6, 1nteDm6d.1ation
et carportement d' Epargne, Revue d' 8conanie Po1ot.1que n· 4,
1989 pp 616-638
,.-
J. NSOLK, Techniques et Pratiques Popu1airss d I 6parqne et de cr6di t
(Dea or.1g.1nea de 1a Tontine en Afr.1que No.1re) •
Th~ae de 3e cyc1e, Un..1vera.1t6 Lyon 2, 1984. c.1t6
par I!'OIJDA OWOOND1, op c.1 t.
"-
FOUDA OWOUNDI, BvoluUon du Systilms F.1nancier et Pratique
.1ntorme11e d'Zpargne et de Prata en Afr.1que Centrale,
op c.1t ••

- 216 -
est
faite
dans
les
quatre principales provinces
du pays,
le
centre, le littoral, l'ouest, le nord-ouest, a permis de conclure
au
dynamisme
des
tontines
sur
ce
plan.
Celles-ci
auraient
contribue a
la mise en circulation d' un
important volume de
fonds.
La
meme .etude
fait
aussi
mention
d'un
phenomEme
de
transfert de l'epargne de la ville vers la campagne en vue de la
realisation de proj ets communautaires par des ressortissants d' un
meme village ou d'une meme region100 • L'une des particularites de
ce deplacement de I' epargne est I' elargissement de son champ
d'action, de son rayonnement qui offre a la population rurale
l'occasion
de
beneficier
des
effets
positifs
de
l'epargne
urbaine.
L'interet
de
la
distinction
faite
entre
les
tontines
mutualistes et les tontines financieres est de montrer comment
l'originalite
des
mecanismes
crees
a
chaque
circonstance
contribue
a
ameliorer
le
niveau
des
moyens
de
financement
necessaires aux besoins exprimes. La question que l'on pourrait
actuellement se poser est de savoir comment s'effectue le passage
de ces capitaux aux agents a deficit. En d'autres termes, comment
la
tontine
assure-t-elle
l'adequation
de
la
demande
des
ressources a l'offre dans la tontine financiere ?
Cette interrogation est fondamentale dans la mesure Oll la
reponse qu'elle apporte permet de mettre en exergue la fonction
d'intermediation dans cette tontine,
l'existence d'une epargne
potentielle et reel le etant deja prouvee par
la variete des
mecanismes
decrits
plus
haut.
En
effet,
les
resultats
de
l'enquete
deja
citee
sur
l'activite
des
tontines
dans
les
differentes
provinces
du
pays
confirment
la
realite
de
l'existence
d'enormes
res sources
exploitables.
Si
deja
les
mecanismes
precedents
dont
la
caisse
de
pret
revelent
une
activite annuelle evaluee entre 5 et 15 millions de francs en
moyenne, en terme de realisations, ces chiffres equivaudraient
au capital necessaire a la creation de 2 ou 3 PME selon les
.00 _
B. BIUtOLO et AlU : Rnqu6te aur lea tontinea dana lea provincea
du centre, du littoral, de l'oueat et du nord-oueat,
G&R&A, centre Univeraitaire de Douala, Cameroun. op cit.

estimations sur "Les Entreprises des Bamil~k~ au Cameroun"lOl. La
tontine financiere semble participer a la cr~ation d'un volume
de ressources mon~taires et financieres plus important.
1.2.1
La Mobilisation de l'Epargne dans les Tontines
Financieres
Le
fonctionnement
de
ce
type
de
tontine
sera
fondamentalement diff~rent du type pr~c~dent a plusieurs
~gards
d'abord du point de vue des agents ~conomiques
concern~s ; les participants a cette tontine sont essentiellement
des commer9ants, des entrepreneurs, des promoteurs industriels,
en tout cas des agents dont l'objectif est la maximisation du
gain financier. Leur comportement face a l'~pargne constitu~e y
est etroitement lie et d~termine le choix de se positionner comme
preteur et d'exiger la r~mun~ration la plus ~lev~e de son ~pargne
ou comme emprunteur et d'accepter d'en payer le prix ;
ensui te
du
point
de
vue
des
interm~diaires dont
le
principal instrument est le taux d'int~ret, le prix de l'argent
s'obtient par le m~canisme des encheres et d~partage les joueurs
de la tontine.
Les
consid~rations
purement
financieres
qui
sont
pr~dominantes dans toutes les actions des participants expliquent
la sp~cificit~ des m~canismes et instruments utilis~s ; le taux
d'int~ret en etant l'~lement fondamental. Ce dernier permet a la
fois
de
hi~rarchiser les
besoins
exprim~s et
de
typer
le
comportement du tontinier.
A-
Le Role Specifique du Taux d' Interet et la Typologie des
Comportements
Ainsi donc, la motivation essentielle dans cette tontine est
la maximisation du gain.
Les versernents des membres une fois
collectes
sont
vendus
aux
adh~rents. Le
taux
d' int~ret est
fluctuant,
l'~pargne du jour etant attribu~e au plus offrant.
101 - G. A. Brenner et AlU, le finanooment des Kntreprises des B~lek'
de Douala, Working Paper GER&A, Jan. 19n, 20 pp.

- 218 .:.
Toute consideration d'assistance ou d'entraide est alors ignoree
ou releguee au second plan.
La tontine prend alors la forme d'un veritable marche de
capitaux 00 lIon observe differents types de comportements qui
peuvent etre ramenes ici au nornbre de trois.
a)
Le tontinier emprunteur-encherisseur
Ce tontinier se trouve en face de res sources financieres
auxquelles
il
attribue
une
valeur
selon
ses
objectifs
de
production
et ses
opportuni tes
d I investissement.
11 defini t
ainsi un taux d'interet effectif, celui qu'il est dispose a payer
par la comparaison du taux apparent et de ses anticipations de
profit. On peut formuler ce taux effectif de la maniere suivante
ie = f(ia, p*)
avec ie = taux d'interet effectif
ia = taux apparent
p*
profit anticipe
Le tontinier participe aux encheres tant que ie < p*
(l) .
D~s que le niveau des encheres monte au-dessus de p*,
il nly a
plus d'interet a encherir donc a emprunter. Car, le rendement du
capital ne permettra pas de couvrir les charges financieres ou
de maniere globale 1 Iensemble des couts de production de son
acti vi te
industr ielle
ou
corrunerciale.
Ainsi
pour
ie
~ p*
1 Ientrepreneur differe sa decision d'emprunter a la tontine. Les
facteurs determiants de la decision d'investier de ce tontinier
se ramenent ainsi a la comparaison de ie et p*. On se place ici
dans le cas des PME du secteur informel, etant entendu que ces
entreprises nlont pas acces au credit bancaire.
Si
lIon
se
place
par
contre
dans
l'hypothese
de
PME
eligibles au credit bancaire, le tontinier definit des crit~res
supplementaires pour sa decision d'emprunt.
ie est alors fonction corrune dans le cas precedent de ia, de
p* mais egalement du taux d'interet bancaire i ' qui est le taux
explicite et· du
taux
i I I qui
est,
nous
1 Iavons
vu,
le
taux
bancaire implicite lie au durcissement des conditions bancaires
de financement. Ce taux devient alors
ie = f (ia, p*, i I, i I I )

- 219 -
On peut donc poser une condition (2)
telle que
ie < i' + i"
(2)
La participation aux encheres obeit alors a la realisation
des deux conditions (1) et (2)
c'est-a-dire :
ie < p*
ie < i' + i"
La decision d'investissement de 1 'entrepreneur resulte d'un
calcul en terme de cout d'opportunite et de minimisation du taux
d'interet
effectif
du
credie02 •
Ce
comportement
obeit
a
la
contrainte de remboursement du credit obtenu et d'accumulation
d'une richesse nette.
b)
On releve ensuite un deuxieme type de comportement qui
est
celui
du
tontinier-preteur.
Son
appreciation
du
taux
d'interet est differente.
Le prix nominal de l'argent epargne
revet une importance capitale. 11 ne se porte pas acquereur et
prefere une position d'agent a excedent qu'il juge sans doute
plus remuneratrice. Le tontinier qu'il privilegie est uniquement
le dernier encherisseur,
le
gagnant du
lot qui
assure
a son
epargne le rendement le plus eleve. Le tontinier-preteur compare
son gain a un taux crediteur que la banque est disposee a lui
assurer,
a
celui
de
la
tontine
evalue
en
nombre
de
Tours
gratui ts 103 et que l' on peut rapprocher du taux effecti f. On peut
ainsi ecrire
ie == f(i
ia)
En effet,
les tours gratuits resultent des gains cumules
tires de l'activite de la tontine qui reduisent la duree du cycle
des lors qu'ils constituent un ou plusieurs lots cessibles sans
101_
On lira to ce 8ujet :
B. BKKOLO-BBB, 1es tontines 1ien d'anticipation et de repartition
du pouvoir 6conomique, communication aux II Journees
Scientifiques du RSseau Entrepreneuriat de 1'UREF,
OT~~, 19-20 septembre 1991.
- C. EBOUE, 1es effets macro-6conomiques de 1a repression financiere
dans 1es PEO, in Economie App1iquee, tome LXIII,
1990, N° 4, pp 93-121.
- B. LEUNDB propose <\\ ce sujet une distinction entr~ 1e taux "apparent"
qui 96nera1ement semb1e usurier et 1e taux "effectif"
resu1tant du cofit d'opportunite de 1'operation <\\ rea1iser.
On peut 1ire <\\ ce sUj et, B. LBUNDE : l' Epargne Para11e1e :
l' ~rtance des Tontiniers dans 1a vie 6conomique du Cameroun in
1'Epargne et sa co11ecte. op cit. pp 83-88.
,.,- On peut ega1ement se referer <\\ 1a dilfinitiOD proposBe
pour ca terme par B. BUOLO : l' Epargne para11e1e :
Des 1iaisons possib1es entre 1e systems des Tontines et
1e systems financier officie1 in 1'Epargne et sa Co11ecte
en Afrique, actes du Co11oque de Caasab1anca ; pp 89-98.

220
qu'il
y
ait
eu
au
prealable
versement
effectif
des
sommes
contractuelles. Ce recyclage du benefice du tontinier est appele
"Tour gratuit". 11 est un versement implicite des participants
realise a partir des interets sur l'epargne vendue aux encheres
et reintegres tacitement dans le systeme.
Le
tontinier-preteur
cherche
a ma;dmiser son gain sans
prendre directement un risque d'entreprise. 11 importe cependant
de rappeler que le souci d'une activite permanente de la tontine
impose comme dans le type precedent, une minimisation du risque
d'illiquidite. Dans les tontines financieres les mesures prises
consistent a cr$er un cadre de suivi des unites financees par la
tontine, permettant de beneficier de l'experience ainsi que des
conseils des uns et des autres 104. Ces "clubs d I investissement"
et pepinieres d I entreprises 10.5 fonctionnent comme des structures
d'accompagnement
situees
autant
en
amont
qu'en
aval
du
financement. 11s informent sur les opportuni tes d I investissement I
la situation du marche,
les possibilites d'amelioration de la
gestion.
Cette
conception
dynamique
de
la
fonction
d'intermediation est une implication totale dans les affaires
financees, un engagement auquel se sont soustraits les banquiers
traditionnels. E~, pour le tontinier-preteur, la maximisation du
profit de l'emprunteur est le gage de l'effectivite de son tour
gratuit.
c)
11
convient
de
bien
le
distinguer
du
ton tinier-
speculateur qui veut maximiser son benefice en faisant monter les
encheres au niveau le plus eleve fut-il usuraire. On peut y voir
un double risque :
- celui de rendre le cr~dit inop~rant et de le soustraire
am:. nombrem:. avantages qu I on lui a jusqu I ici reconnu ;
- celui aussi de le rendre inaccessible et de constituer une
"epargne de speculation"106, oisive dans ce sens qu'elle ralentit
,..- Cet aspect de la fonction d'inte~diation est relev6 par
B. BE~OLO, le syst~ dos Tontines : Liquidit6,
Inte~d1ation et Comportement d'Eparqne op eit,
". - X. Greffe, Politique Kconamique op eit p 47~.
-
L'iJlportanee de ee cadre sera discut6e plus 10in
dans le rOle de la tontine dans le finaneement
des PHK du secteur informel • partir d'exemples eoncrets.
Voir chap. IV, Infra p.460
et sui V •
I"
_
Ce terme est 8I't\\lruntlt A. F. Poulon qui. I'utilise pour analyser
l'l!pargne sp'cu1ative che,. It.ynes.
Pour plus de ~tai1
on 1ira r. POULON op cit P 327

- 221 -
le regime de la croissance.
Si l'enjeu d'une telle operation est de maximiser son gain,
il peut egalement etre apprehende comme une concurrence deloyale
pour des unites de production operationnelles ou de nouveaux
promoteurs a la recherche de financements.
Cette epargne meme
offerte a des prix prohibitifs est acceptee dans un environnement
Oll il n'existe aucune alternative de financement de l'activite
economique. Ce comportement est tout aussi "repressif" que les
faibles
taux
d' interets
credi teurs
pratiques
par
le
systeme
bancaire. Ce comportement speculatif tend a etre de courage par
l'obligation faite au dernier encherisseur d'acheter le lot du
jour donc
de
supporter
la charge
de
son cout
eleve.
Et,
ce
mecanisme
introduit
dans
les
tontines
financieres
permet
d'optimaliser le gain du groupe, de pallier les insuffisances des
calculs individuels et une mauvaise appreciation du risque guide
par le seul taux d'interet nominal debiteur ou crediteur. On a
vu
dans
les
exemples
precedents
que
le
taux
nominal
peut
s' eloigner du
taux effecti f.
On peut aussi
a cette occasion
souligner
la
correlation
entre
les
taux
bancaires
et
ceux
pratiques par les tontines. Peu de statistiques sont disponibles
sur ce sujet. Neanmoins, une enquete menee sur la structure des
gains
et
des
taux
d' interets
dans
les
tontines
au
Cameroun
aboutit a des resultats qui divergent de l'observation courante
des taux apparents pratiques dans les tontines. Sous la reserve
d'une etude contradictoire,
elle aboutit a la conclusion selon
laquelle les taux d'interets debiteurs dans les tontines sont
inferieurs
a ceux du systeme bancaire,
tandis
que
les
taux
crediteurs leur sont voisins107 • Dans le cadre de cette enquete
et pour les deux cas de tontines avec encheres etudiees, les taux
d'interets sont ainsi presentes
- pour les taux debiteurs le taux maximum est de 3,042 %
pour la premiere tontine et 8,59 % pour la deuxieme.
Pour
la
meme
periode
les
taux
d' interets
bancaires
se
situent a 16 %.
Pour
les
taux
crediteurs
ils
sont
voisins
des
taux
101
-
B. BEKOLO et R.
BILONOO, 3A'structure dos gtins et
dos Taux d'1nt6rAts, op c1~.

- 222··
bancaires ainsi
qu' i ls
ressortent des
resul tats
concrets de
l' etude citee ci-dessus.
Les deux taux releves dans
les deux
tontines sont respectivement de 6,58 % et 7,78 % alors que le
taux bancaire pour cette meme periode s'etablit en moyenne
a 7,5 %. Ces conclusions suscitent alors un interet particulier
au regard des differents comportements et notamment en ce qui
concerne le tontinier emprunteur-encherisseur.
La
tontine
lui
ouvre
de
nouvelles
perspectives
sans
doute
absentes des conditions de financement que connait l'entreprise
qui elle, s'adresse a la banque pour son financement.
B
La Gestion de l'Epargne Collectee
Le
j eu
du
tontinier
1ui
procure
des
fonds
qu' i 1 devra
affecter au financement d'une activite lucrative.
Pour la PME,
cette
disponibilite
des
fonds
au
moment
Oll
le
besoin
de
financement est exprime favorise le demarrage ou le developpement
immediat de son unite . Ce gain en temps, et dans les delais de
mobilisation reduit la marge d'incertitude due aux imprevus, a
la depreciation monetaire et aux variations des prix.
En
effet,
l' impact
des
retards
dans
les
deblocages
des
differentes tranches de credit peut etre catastrophique pour un
projet, elevant considerablement le taux d'interet implicite et
faussant completement les previsions de rentabilite. Par contre
le
respect
des
conditions
de
realisation
d'un
programme
d'investissement conjugue a d'autres avantages de la tontine tels
que les tours gratuits et la stabilite du systeme du fait des
mecanismes crees sont des facteurs, de permanence de l'activite
de la tontine et aut ant de possibilites de credibilisation des
PME vis
a vis des circui ts modernes de credi ts. On a vu se
developper dans cette perspective une forme collective de gestion
du risque financier.
§2 -
Gestion du risque et fluidite de l'intermediation
dans la tontine
Le role central reconnu au taux d'interet effectif dans la
tontine en general et dans la tontine financiere en particulier
a
permis
de
bien
cibler
le
centre
d' interet
de
la
fonction

-' '223 -
d'intermediation et de souligner l'importance de la minimisation
du risque. Le lien de solidarite tisse a l'interieur du groupe,
la
garantie
que
chaque
membre
doit
representer
pour
ses
congeneres
participent
de
la
mise
en
oeuvre
de
facteurs
d'amelioration
et
de
continuite
de
l'activite mais
aussi
et
surtout de facteurs de reduction des risques d'insolvabilite.
En effet, le fonctionnement de la tontine peut etre perturbe
par I' illiquidite d' un membre. Mais, generalement des precautions
sont prises au debut du cycle pour que le risque soit minimise.
Une marge de
secur i te
est ainsi
consti tuee
qui
j oue un role
analogue a celui des reserves obligatoires. Elle permet de faire
face a des imponderables tels que des cas de maladie subite ou
de deces. Elle evite par ce biais des periodes de flottement et
des risques de defaillance des tontiniers prejudiciables a la
mobilisation normale des ressources. Une autre solution consiste
a mettre a contribution la banque en tant que preteur final. Le
tontinier particul ier,
menage,
commen;ant ou autre,
ti tulaire
d'un compte bancaire peut y recourir pour pouvoir faire face aux
echeances
de
la
tontine.
Les
facili tes
de
tresorerie
que
la
banque peut alors ouvrir a son client seront affectees de fa~on
indirecte a des operations de credits.
Parmi les dispositions
prises a l'interieur de la tontine pour garantir des cotisations
regulieres figurent egalement la connaissance personnelle que les
membres ont les uns des autres. Un reseau informel d' information 108
existe dans ce sens entre les differentes tontines, precisement
sur la qualite morale de chaque participant de telle sorte qu'un
antecedent dans
une tontine peut conduire a une exclusion du
systeme.
Cette minimisation
du
risque
est
un
atout
pour
le
developpement
de
la
tontine
grace
a son incidence
sur
la
permanence des
activites.
Plus
les
tontiniers
sont
solvables
moins on aura des impayes et par consequent moins de ruptures de
rythme. Le remboursement de leurs credits grace au dispositif mis
en place dans la tontine, eloigne alors de cette fonme de risque
-
Nous reviendrons dans lea d&veloppemants ult6rieurs
Bur les possibilit6s d'6larqiBBement du rOle de centrale
d'information de la tontine.

- 224 -
qui s' apparen te au
"risque du preteur" chez Keynes 109 •
L' auteur
le definit
comme
un manquement volontaire
ou
involontaire qui
soustrait
l'emprunteur a son obligation de desengagement.
Les
causes peuvent etre multiples; un detournement du credit de son
objet, une operation peu rentable n'ayant pas genere les revenus
attendus, une mauvaise gestion ou une simple thesaurisation. Le
resultat auquel on parvient est invarie ; il est une fuite du
circuit apprehende comme un facteur de crisellO •
La si tuation actuelle de crise ressemble sur ce dernier
point au contexte decrit par Keynes. La recession economique, la
baisse du niveau des activites qui en sont des manifestations
n'ont pas permis aux operateurs economiques de respecter leurs
engagements
par
rapport
au
systeme
financier
officiel.
Les
impayes se sont accumules avec des repercussions desastreuses sur
la tresorerie des banques creancieres avec en prime la mise en
liquidation de certaines d'entre elles et l'acceleration d'un
processus
recessif
cumulatif.
Ainsi,
faute
de
creer
des
structures flexibles, aucun systeme financier officiel ou non ne
peut s'adapter a son environnement.
L'interet de ce rapprochement est de montrer les divergences
dans les solutions apportees a la question du financement des PME
du point de vue du systeme financier moderne et de celui du
systeme informel. 11 marque ainsi l'originalite de la fonction
d'intermediation des tontines dans son aptitude a transformer les
facteurs
de
crise,
a remplir
la
monnaie111 ,
base
de
la
distribution des revenus et de la formation de l' epargne.
F.
POULON qualifie de facteur de crise tout ce qui raccourcit le
temps du circuit,
tout ce qui peut entraver la satisfaction de
la contrainte d'annulation de la monnaie112 et la continuite db
... -
J. M.
lI:eynell, Thllorie Gllnllrale de l.' ompl.oi de l' intllrllt
et de l.a monnaie, traduction de J. de LARGENTAYIi:,
Petite Bibl.iotheque Payot, Paris, 1982 p 149-157.
11. - ~. POULON, Macro-li:conom1e ~rofondie : li:quil.ibre Dllsllquil.ibre,
circuit. Edit. CUj as , Paris 1981 pp 327 et lIuiv.
-
J. TClIUNDJANG dllcrit l.a monnaie comne un bien vide que
la production rempl.it. Voir a ce sujet J. TCHUNDJANG op cit P 62 .
•"
-
On peut se rapporter , pour une analyse pl.us a;,profondie,
al.' ouvrage' de PO. POULON, Ma=o-EconOlnie Apprbfondie :
li:quilibre Dllsllquil.ibre, circuit, op cit pp 327 et suiv.

- 225 -
systeme. En effet,
la conception keynesienne de l'epargne fait
de la reinjection de celle-ci dans le circuit de production une
etape dans la recherche d'une solution au probleme pose et que
devront completer des alternatives de mobilisation de l'epargne
et
l'efficience
de
l'intermediation.
Le
dynamisme
des
intermediaires financiers et leurs capacites d'innovation sont
une
condition
de
maximisation
des
fonctions
de
demande
d'investissement et d'offre de capitaux dans une optique de recul
de la limi te des possibili tes maxima de production1l3 •
Et,
la tontine se propose de jouer ce role a I ' egard des
PME. Concretement ce role peut etre analyse a deux niveaux
- celui de la dernande d'abord ;
- celui de l'offre ensuite ;
en tenant compte chaque fois de la fonction principale des agents
economiques concernes.
a) - Premierernent, on peut dire que la tontine favorise la
creation
d'une
demande
effective.
En
d'autres
termes,
les
particuliers et les menages concernes obtiennent du fait de leur
appartenance a la tontine des possibilites d'accroitre a leur
"tour" leur pouvoir d' achat. Celui-ci leur permet donc de couvrir
facilement leurs depenses de consommation finale. La relation qui
s'etablit ici avec les PME resulte des caracteristiques de ces
unites. On a deja dit que leur proximite du consornmateur final
est un atout pour une adaptation aisee aux sOllicitations du
rnarche.
Elles
peuvent
ainsi
prendre
des
decisions
d'investissement en fonction de ces donnees.
b) - Deuxiemement, les PME essentiellement concernees sont
de
petits
cornmer~ants,
des
artisans,
de
micro-entreprises
industrielles ... Les res sources qui leur sont apportees dans ce
cas leur offrent un capital qu'ils peuvent investir dans leurs
acti vi tes.
La tontine,
ici,
apparai t
souvent cornme leur seule
source de financernent. C'est la conclusion a laquelle aboutissent
D. B. Argyle1l4 et G. A. Brenner et AlU1l5 , dans leurs etudes sur
,1>
-
J. TCHUNDJANG ; Mannate, Servi.tude et Lil>ert6
'" -
D. B. Argyle, Epargne et Taw< d'Int6ret dans 1es March6s
Financiers Ruraux in D. Kessler et P. A. Ullmo
(ed) ,
Epargne et D6veloppement, Actes du Colloque de Paris,
Ma! 1984, Pari., &conomioa 1985 pp 21-34.

- 226-
la mobilisation de l'epargne dans les pays en developpement.
Ces unites de petite dimension qui,
du fait du caractere
informel de leur existence et de leur fonctionnement, n'ont pas
pu presenter
au
secteur moderne
de
financement
des
elements
d'appreciation de leurs besoins et de leur credibilite trouvent
dans
la
tontine
un
allie
et
une
structure
dont
le
mode
de
financement
tient
compte
des
potentiali tes
et
des
capaci tes
reelles de l'emprunteur. Cette nouvelle position, les PME peuvent
ulterieurement l'exploiter comme un tremplin et une base d'acces
au secteur financier moderne.
La
plasticite
des
structures
dans
la
tontine,
leur
adaptabilite
a la specificite de chaque situation et leur
evolution loin des contraintes administratives constituent leur
principale force.
En plus,
toute l'epargne qu'elles collectent
s'adresse en priorite a ceux qui ont participe a sa formation.
Ce nouvel aspect de l'intermediation de la tontine a longtemps
fai t
defaut dans
le fonctionnement
des banques en pays sous-
developpes. Et, G. OHLIN dans son etude des arguments en faveur
de l'epargne des menages dans les politiques de developpements
denonce la pratique courante du detournement de l'epargne rurale
dans les economies en developpement car,
dit-il"
dans la
plupart
des
pays,
les
banques
d'epargne
rurale
orientent
l'epargne du secteur rural vers le secteur moderne urbain ; ceci
est largement deplore ... "116. Cette pratique bancaire, meme admise
en d'autres circonstances, est en desaccord avec l'ethique meme
de la tontine mutualiste ou financiere de telle sorte que l'on
a davantage assiste a un mouvement dans le sens contraire117 • La
fonction
d' intermediation,
dans
ce
type
de
tontine,
vise
en
priorite un developpement synchrone de I 'ensemble des tontiniers
par des systemes d'arbitrage qui correspondent a la specificite
des
problemes
a
resoudre
et
par
un
effort
permanent
d' accroissement des ressources financieres mais aussi monetaires .
... -
G. A. Brenner et Alii, le financement des entreprises
des BAMILEKB de Douala, Wording paper,
janvier 1991, 20 pp .
... - G. OHLIN, De Nouveaux Arquments en faveur de l'Epargne
des mtlnages dans los politiques de developpement ?
in D. Kessler et P. A. Ullmo op cit P 79-86
.., - On pout so reporter pour plus de dllta!l :..
l ' analyse fa! te plus hau t.

- 227 -
En
effet,
on
a
sur tout
jusqu' ici
mis
l' accent
sur
les
capacites
du
systeme
des
tontines
a ameliorer le niveau de
l'epargne. Nous allons actuellement voir l'incidence que cette
contrainte d'eparqne peut avoir sur la creation monetaire.
Et
dans ce sens nous mettrons en relief la nature des relations qui
s'etablissent alors entre les deux systemes financiers foomel et
infoomel.
$3 -
La nature des liens banque-tontine
On a vu avec l'appreciation du volume des ressources
creees par la tontine que celles-ci peuvent et re considerees
cornrne appreciables119 •
Dans
la
tontine
mutualiste,
la
moyenne
annuelle
des
caisses de prets est de 5 millions de francs CFA, la fourchette
variant entre 2 et 15 millions de francs CFAllg •
- Ces cotisations sernblent plus elevees dans les tontines
financieres le taux de versement minimum se situant entre 100 000
et 600 000 francs CFA pour les tontines observees.
Le nornbre
moyen d'adherents tourne autour de 25 personnes permettant donc
d'atteindre un volume d'epargne par periode de 15 millions de
francs CFA120 •
Les chiffres fournis par cette enquete representent pour une
grande
part
des
moyennes
generales
pour
une
tontine.
Des
interviews
avec
les
milieux
d'affaires,
gros
cornrner~ants,
industriels. ..
revelent
des
niveaux
de
cotisations
dans
les
tontines financieres bien plus importants pouvant atteindre la
sornrne de 5 milliards de francs CFA pour une periode.
Evidernrnent,
ces
chiffres
sont
loin
des
possibilites
d'epargne des PME mais l'importance des sornrnes en jeu temoigne
de
l' ampleur du phEmomEme de
collecte et de mobilisation de
l'epargne locale. Dans le domaine ou le systeme bancaire semble
ri ver
dans
le
conformisme
des
habi tudes
caracterise
par
un
desaveu des potentiali tes existantes et une pratique de taux
-
On lira ~ ce sujet, B. Bg~OLO et Alii, enqu6te
sur les tontines dans lea provinces du Centre,
du Littoral, de l'OUest et du Nord-Ouest op cit.
U' _
Idem
.20
_
Ibidem

- 228 -
demobilisateurs, la tontine se pose en systeme concurrent. Car,
elle capte et draine vers elle une epargne qui se detourne des
circuits conventionnels de depots. Mais cette relation ne nous
semble pas
definitive .dans
la mesure
Oll
le
volume meme
des
ressources
impose
un
transit
par
les
circuits
bancaires.
L'intervention des banques dans ce cas s'observe a
deux niveaux :
a) la tontine fait jouer a la banque un role de depositaire
de son epargne. En effet, en attendant le moment des rencontres,
certains
tresoriers
surtout
dans
les
tontines
mutualistes
deposent les fonds dans un compte en banque souvent ouvert en
leur propre nom. Mais, souvent le sejour de l'epargne a la banque
dans ces cas est d'une courte duree, sa finalite etant que celle-
ci soit pretee a des membres ou des emprunteurs exterieurs.
Dans
d' autres
cas
aussi,
des
depots
sont
effectuespar
des
beneficiares de lots qui font ensuite des retraits par tranches
en conformite avec le planning des depenses etabli. Les relations
entre la banque et la tontine a ce niveau n'ont donc pas d'impact
majeur apparent sur la creation monetaire.
b)
la
tontine
fai t
appel
aux
instruments
crees
par
le
systeme
bancaire
pour
constituer
des
garanties
d'un
bon
denouement de ses operations. Et, l'une des garanties couramment
utilisee est le depot d'un ou de plusieurs cheques en contre
valeur du montant per<;u auquel
s' ajoutent les
interets.
Dans
certaines tontines les cheques deposes sont signes en blanc pour
prevoir
les
cas
d' impayes
et
la
necessi te
d' Y inclure
des
interets au taux de penalites. La banque joue alors le role de
garant du bon fonctionnement de la tontine.
Mais
le
role de
la banque ne
se
limi te pas
a la seule
garantie qu'elle peut apporter. Ainsi, en cas d'incidents celle-
ci est amenee a intervenir en tant que preteur en dernier res sort
par la couverture du cheque emis par son client. En outre,
en
dehors meme d'une realisation de la garantie prise,
la banque
pe ut
en
accordant
un
decouvert
a son
client
salarie
ou
entrepreneur, pour le cas qui nous interesse,
faire participer
la tontine a la creation monetaire.
Ainsi la tontine par le biais de divers mecanismes accroit

- 229 -
le volume des liquidites en circulation en faveur de l'economie
rnais aussi en faveur des PME. Et les etudes effectuees dans ce
domaine permettent de souligner l'ampleur de son action dans le
financement des PME.
Sur
ce
point,
l'enquete
menee
sur
le
financement
des
entreprises des BAM1LEKE de Douala et dej a ci tee 121 abouti t a des
resul tats
interessants.
Selon
cette
etude,
les
PME
qui
ont
recours a la tontine pour se financer entretiennent peu ou pas
du tout
de
relations
avec
le
systeme bancaire.
Seulernent
ce
phenomene n'est pas suffisamment explique,
l'enquete ne disant
pas s'il s'agit d'une demarche volontaire et strategique ou d'une
fermeture du systeme bancaire a ces unites.
Neanmoins notre propre analyse nous conduit a un certain nombre
d'observations :
a)
la rigidite des conditions bancaires de financement et
la standardisation des techniques et instruments d'approche de
la clientele sont generalement considerees par les postulants aux
credi ts bancaires comme des charges supplementaires qui aggravent
le poids des couts financiers. Et,
lorsque l'offre des credits
a la tontine se fait a des conditions plus souples,
le recours
au
credi t
bancaire
tend
a s ' es tomper.
Nous
avons
pI us
haut
traduit ce comportement par le modele suivant
ie < i' + i"
Cette inegalite nous semble pouvoir expliquer la preference quasi
exclusive du credit de la tontine.
b)
il existe une autre explication plus simple du constat
fait par G. A. Brenner. 11 s'agirait donc du financement des PME
informelles par la seule tontine, celles-ci n'etant pas eligibles
aux concours bancaires.
'" -
1. G. A.
Brenner et Alii, le Financerrent des Entreprise.s
des BllMILEKK de Douala, OP c1t 20 pp

- 230-
3.1.-
La Signification de la Relation entre
Banques et Tontines
Si jusqu'ici on n'a pu deceler que tres peu de relations
directes
entre
banques
et
tontines,
on
assiste
cependant
a
l'heure actuelle a la naissance de liaisons plus directes et plus
formelles entre ces deux systemes financiers.
Et on peut a ce
stade se referer a des experiences nouvelles, celles de la Caisse
Commune d'Epargne et d'Investissement
(CCEI)
et de la Garantie
Mutuelle des Cadres
(GMC). 11 s'agit de deux etablissements de
credit issus du systeme des tontines et qui cherchent a innover
dans la creation d'instruments de captage et de mobilisation de
l'epargne tontiniere. Un des mecanismes mis place notamment par
la CCET vise a maintenir a l'interieur du systeme bancaire dont
elle fait partie cette epargne. Et, l'un des produits crees a cet
effet est appele "flash-cash" et est materialise par un rec;u que
l'on remet au tontinier ayant des disponibilites sur le compte
ouvert a son nom. Ce recepisse assimilable a un effet de commerce
est une double mesure de securite d'abord pour la tresorerie de
son initiateur lui evitant une sortie de fonds et ensuite pour
l'epargne du tontinier qu'il met a l'abri des risques de vol ou
de perte. Cet effet remis au tontinier et garanti par son depot
a une valeur de cash.
La denomination Flash-cash semble ainsi
liee au
fai t
que
ce depot
en compte doi t
etre
transfere du
deposant, proprietaire initial,
au gagnant de la tontine et ne
pourrai t
donc etre que d' une duree tres courte sans garantie
evidente
de
retour
vers
le
systeme
bancaire.
Au-dela
de
sa
formule actuelle, le flash-cash peut egalement etre developpe et
servir comme un titre negociable qui pourrait ainsi contribuer
a la creation d'un marche secondaire pour la tontine, assurant
a son detenteur la garantie de la convertibilite du titre emis
et au systeme financier une plus grande vitesse de circulation
de la liquidite.
11 est
utile de
souligner qu' en dehors
de
ces
liaisons
degagees
et
qui
d' ailleurs
n' en
sont
qu' a
leur
phase
d' experimentation,
les
relations
qui
s' etablissent
entre
les
circuits financiers formels et informels sont generalement une
initiative de la tontine. Dans ces cas les tontiniers se servent
de la banque pour pallier leurs deficits ponctuels de tresorerie

- 23J. -
et sur ce pointles difficult~s propres des banques ~ l'heure
actuelle pourront poser le probleme de la liquidit~ des tontines
qui ne peuvent plus recourir a la banque en tant que preteur en
dernier ressort.
Comme autre element pour etayer notre argumentation sur le
sens
des
relations
banque-tontine
dominee
du
reste
par
l'immobilisme des ~tablissements financiers,
la CCEl et la CMC
sont comme on l'a dit une ~manation de l'~pargne informelle. Leur
ouverture sur la tontine s'explique donc en partie par leurs
origines
communes
et
semble
faire
des
circuits
financiers
paralleles un tremplin a l'insertion du capital national dans le
secteur bancaire et la porte d'entr~e dans un systeme jusque la
hermetique. Et c'est cet esprit de cr~ativite et de recherche
permanente de nouveaux instruments d'adaptation des besoins aux
ressources qui apparait comme le principal vecteur du dynamisme
de l'interm~diation financiere des tontines.
Le
volume
des
ressources
gerees
par
la
tontine
et
1 'evolution des relations entre banque et tontine nous permettent
de tenter une caracterisation des liens entre les deux systemes.
Les tontines peuvent apparaitre de prime abord comme un systeme
concurrentiel du systeme moderne de financement dont elles ont
su
detourner
une
epargne
et
une
clientele
qui
s'averent
aujourd'hui non negligeables. En meme temps, i l nous semble bien
qu'il existe des liens de complementarite meme s'ils ne sont pas
formalises,
entre tontines et banques qui sont lies au role de
deposi taire
de
l' epargne
et
de
preteur
final
qu' assume
meme
inconsciemment le banquier. De ce fait, l'illiquidit~ que connait
le
secteur
bancaire
du
fai t
de
la
crise pourrai t
avoir
des
repercussions graves sur le fonctionnement des tontines. Et si
la banque
n'est
plus
solvable,
elle
ne
peut
plus
servir de
palliatif dans les cas de tension de tr~sorerie dans la tontine.
Le caractere informel de ce res eau de relations qui s'etablissent
entre banques et
tontines,
s' il
~tait jugul~, attenuerait ou
aplanirait
le
dualisme
financier
actuel
entretenu
par
des

.: 232-
strctures rigides du systeme bancaire camerounais122 • Le systeme
des tontines tel que nous l'avons decrit,
tontines mutualistes
et tontines financieres suscite un double interet a l'examen de
la maniere
dont
il
fai t
participer
les
agents
economiques a
l'activite de production.
D'abord, il offre a ceux-ci, compte tenu des preoccupations
des uns et des, autres,
un cadre socio-economique ou financier
favorable a la formation d'une epargne ignoree ou reprimee par
le
systeme
financier
moderne.
Ensuite
une
fois
l'epargne
collectee,
il
l'offre
a
un
cout
relativement competitif,
au
regard des taux d'interets bancaires, a des agents a deficit pour
le financement des depenses de consornrnation ou d'investissement.
Les
mecanismes
permissifs
de
ces
operations
definissent
des
cri teres de
hierarchisation des besoins pour une affectation
efficiente des res sources aux emplois privilegies.
Pour
les
PME,
la
participation
a
la
tontine
ouvre
des
perspectives soit de constitution d'un capital de depart soit de
developpement d'une activite deja existante.
Les occasions de
creation
d'une
entreprise
leur
sont
donnees
grace
a
la
disponibilite d'une epargne introvertie proposee certes a ceux
qui
participent
a
sa
formation
mais
aussi
a
ceux
qui
en
justifient la necessite. Quant a leurs possibilites de croissance
et
de
developpement,
elles
resultent
de
l'accroissement
du
pouvoir d'achat du tontinier mutualiste beneficiaire d'un credit
a la consornrnation. La demande solvable que ce nouveau pouvoir
d' acha t
exprime,
suggere des opportuni tes d' investissement et
d' accroissement
de
la
production.
Et
cornrne
l' une
des
caracteristiques souvent reconnue a la PME est sa proximite du
consornrnateur, celle-ci reagira d'autant plus facilement a cette
demande. D'autres occasions peuvent contribuer au renouvellement
In
De nombreuses analyses sont presentees sur 1es facteurs
d'entretien do dUalisme financier au Cameroun mais
ce phenomene n'est pas partieu1ier A ce pays.
11 semble Atre une situation qenerale dans 1es economies
en deve1oppement. On lira A ce propos :
B. BKKOLO et Alii, enqu&te sur 1es Tontines dans 1es Provinees
do Centre, du Littoral, de l'OUest et du Nord-OUest op cit.
S. diqeti, Eparqne rurale et finaneement de l'aqrieu1ture
in D. Ress1er et P. A. 01lJoo op eit.
FOODA OWOUND1, Evolution du systeme Financier et Pratiques
1nforme11es d'eparqne et de pr&t en Afrique Centrale, op. cit.
C. EBOU&, 1es effets macro-Economiques de la Repression
Financiere dans 1es PEn op. cit. pp 93-121

- 233 -
ou a l'amelioration des capacites productives de la PME. Ainsi,
la souplesse de son mode de fonctionnement semble favorable a la
PME,
celle-ci
trouvant
dans
la
tontine
des
ressources
immediatement
mobilisables
a
un
cout
avantageux
pour
son
programme d' investissement
et
ses
besoins d' exploi tation.
La
decision d'emprunter que l'entreprise prend alors decoule d'un
veritable calcul economique qui est egalement une incitation a
une saine gestion. De meme, le systeme de garantie mutuelle qui
fonctionne au sein des tontines et les differentes dispositions
prises pour limiter les risques d'insolvabilite sont aut ant de
contraintes dans le sens d'une gestion plus rigoureuse. On peut
aussi
dire
qu' elles
favorisent
le
remboursement
des
credi ts
obtenus et expliquent la vitalite du systeme.
Et si le recours a la tontine permet une mobilisation rapide de
res sources
relativement
bon
marche,
il
evite
aux
PME
les
vicissitudes du financement bancaire, l'importance d'une tontine
etant appreciee a son apti tude a garantir a ses membres des
conditions de reponses a leurs sollicitations.
L' amelioration des condi tons sociales, economiques et financieres
des adherents qui s'en suit est la preoccupation majeure dans les
tontines mutualistes tandisque dans les tontines financieres, la
maximisation du gain financier est le mobile du comportement de
l'epargnant. Au-dela des controverses autour de l'elasticite de
l' epargne
a
son
taux
de
rendement
reel123 ,
la
permanence
du
systeme
dans
le
cas
de
la
tontine
repose
sur
le
rendement
effectif de l'epargne,
en termes de solidarite du groupe ou de
gain financier barometres de la performance de la tontine.
Cette
valeur
reconnue
a
la
tontine
est
une
base
pour
la
consolidation de sa stabilite.
L'efficacite de la tontine est
maximisee
a
travers
son
role
strategique
d'intermediaire
financier,
dans
la
perspective
de
Shaw
(1973)
et
Mc
Kinnon
(1976), en meme temps qu'elle est une tentative de resolution de
la repression financiere au sens de notre analyse. De ce point
de vue sa vitalite et son mode de fonctionnement ont alors permis
-
Giovannin1
119S3)
rejette, A la suite de tests 6conomatriques
appliqu6s au secteur moderne de financement, l'hypol:bese de
l ' 6lastic1tlt p&lit1ve de l ' 6pargne au taux de rendeitMnt rool.
L'6pargne serail: p'lutat sensible A la stabilit6 qII'induisent
les r6formes financieres et A la performance des Institutions
Financieres. On consultera A ce sujet G. A.
Brenner et AlU op. cit.

- 234-·
de developper
une
importante
acti vi te
de
credi ts
croises
en
faveur
de
ses
adherents.
Cependant,
le
systeme des
tontines
connait
aussi
des
limites.
La
principale,
celle
liee
Et
son
caractere informel, nous semble resumer la situation.
Ainsi, comme toute activite informelle, celle des tontines
est difficile Et quantifier124 et souvent sujette Et confusions et
appreciations
sommaires.
Son
existence
informelle
dont
elle
semble en d'autres circonstances tirer parti, devient ainsi une
cause
de
ces
insuffisances.
Son
fonctionnement
est
essentiellement hermetique et ne fait intervenir qu'une faible
documentation. Les consequences de cette attitude peuvent etre
resumees en trois points :
l'activite
de
la
tontine
se
deroule
dans
un
cadre
restreint avec comme corollaire,
la difficulte Et la vulgariser
par
une
action marketing
et
Et
l' ouvrir
Et
des
capi taux plus
importants ; alors qu'une conception plus large pourrait en faire
un veritable marche financier primaire et secondaire
- une connaissance imparfaite de l'experience des autres qui
parce qu'elle n'est pas largement diffusee reduit l'importance
des ameliorations qu'on pourrait y apporter ;
- l'impossibilite de taxer les revenus qu'elle degage et de
la
relier
Et
1 'ensemble
de
l'economie
dans
le
sens
d'une
uniformisation des obligations fiscales auxquelles sont soumises
toutes les categories de revenus.
La politique industrielle du Cameroun developpee aut our de
la promotion des PME apparait ainsi,
Et la lumiere de l'analyse
qui precede comme une tache complexe et de realisation difficile.
L' atonie du systeme bancaire,
les contraintes de credi ts
selectifs obeissant Et la logique d'une offre de monnaie rigide
et d' un
systeme
financier
antiproductif
interferent dans une
politique
monetaire
deflationniste
fondee
sur
des
principes
d'equilibre.
Le
processus
d'ajustement
qu'induit
de
telles
preoccupations implique dans une zone monetaire Et pays leader,
... - w. W. POHMER&IINE et B. S. Frey font Une analyse des m!tthodes
poss1bles d'evaluation de l'econamie parallele.
Pour souligner Son iJIportance du point de vue de
la politique econamique d' une part et les difficultes <\\
la mesurer d'autre part.

- 235 ~
la France en l'occurrence, une charge d'ajustement qui echoit a
I' economie nat ionale,
sa tell i te.
Le poids de cet te charge est
d'autant plus preoccupant qu'il est particulierement defavorable
a la creation d'un tissu industriel de PME viables, capables de
redynamiser
l'ensemble
de
l'appareil
de
production
et
d'entretenir un processus autonome d'accumulation. Pourtant, de
multiples mesures de soutien ont ete deployees par les pouvoirs
publics mais elles se sont constamment heurtees a des forces
d'inerties qui en ont compromis les resultats. Les blocages sont
apparus a differents stades ; au niveau de l'incompletude des
mesures elles-memes,
a celui des moyens financiers devant en
permettre la mise en application,
a celui du systeme bancaire
insuffisament motive
par
la
nature
du
risque
et
les
marges
degagees sur les operations d'investissement dans les PME. Ces
imperfections ont ete aggravees par les difficultes propres des
PME
le
faible
esprit
d'entreprise
des
dirigeants,
des
defaillances
technologiques
et
manageriales
qui
ont
encore
restreint leurs possibili tes d' adaptation aux exigences bancaires
de
financement.
Toutefois,
on observe actuellement
comme des
eclaircies sous la forme de tontines assumant une double fonction
de monetarisation de l'economie et d'intermediation financiere.
Ces circuits informels, il faut les saisir non comme une simple
alternative au probleme du financement des PME mais plus comme
un
tremplin
et
une
structure
complementaire
susceptibles
d'etablir avec le systeme bancaire un res eau de relations utiles,
du fait de leur valeur operatoire dans la structuration du couple
besoins exprimes - ressources creees.

llame PARTlE
L'ANALYSE DE QUELQUES EXPERIENCES
DE PME CAMEROUNAISES
DU SECTEUR MODERNE ET DU SECTEUR INFORMEL

- 237 -
INTRODUCTION
Les developpements theoriques precedents sur la place du
financement bancaire dans l'activite des PME nous ont permis de
mettre en exergue l'evolution de la fonction d'intermediation
bancaire.
L'interet
de
cette
evolution
semble
etre
prioritairement la necessite d'une adaptation des mecanismes de
fonctionnernent des banques a la nature des operations puis a leur
complexite croissante. Et c'est sans doute dans cette mouvance
que l'on peut situer le vaste mouvement de reformes monetaires,
financieres,
institutionnelles et d'ordre general
intervenues
dans l'economie camerounaise visant a creer un systeme bancaire
plus apte a repondre aux besoins de financement de l'activite
economique.
Cependant,
la verification empirique de
l' impact de ces
reformes
ne
nous
permet
pas
jusqu'ici
de
conclure
a une
intervention efficace des banques dans le sens de la creation
d'une economie de production et dans celui de la resolution du
problerne du financement des PME camerounaises.
11 nous semble
meme
que
le
systeme
bancaire
mis
en
place
est
totalement
deconnecte
de
ces
objectifs.
Nous
allons
donc,
a partir
d'exemples de PME camerounaises, essayer de comprendre la nature
des
rapports
entre
ces
entreprises
et
le
systeme
bancaire
local.
Nous retiendrons ici 6 cas portant a la fois sur des PME du
secteur moderne et des PME du secteur informel, pour degager les
relations directes ou indirectes entre le systeme bancaire et ces
unites
d'une
part
et
d'autre
part
pour
en
apprecier
les
implications sur la gestion de l'activite des entreprises.
Les trois premiers cas nous permettront d'analyser dans le
chapitre III le comportement d'intermediation des banques et leur
impact sur les decisions essentielles et strategiques des PME
modernes.

- 218-
DEdinissant
les
PME
modernes,
nous
avons
souligne
essentiellement le faible niveau de leurs capitaux propres,
la
mauvaise maitrise de la technologie appliquee a la production,
une organisation sommaire et approximative en matiere de gestion.
Ces particularites posent des problemes d'adequation des
structures
de
fonctionnement
du
systeme
bancaire
et
des
res sources offertes aux besoins de financement specifiques des
PME. Elles suggerent de ce point de vue une remise en cause du
role classique de la banque, necessitant que lIon scrute d'autres
mecanismes de financement susceptibles d'optimiser le processus
de production.
Cette demarche participe de l'elargissement de la fonction
d'intermediation financiere. ELle nous offre l'occasion de faire
reference
a
des
formes
de
financements
deja
experimentees
ailleurs. 11 en est ainsi du capital-risque qui revele une
autre
dimension de l'intervention de la banque au profit des PME. De
ce
point
de
vue,
elle
implique
egalement
un
eclatement
des
structures bancaires traditionnelles.
On pourra ainsi pour l'illustrer s'appuyer sur differentes
experiences de financements de PME observees ailleurs dans des
pays africains membres ou non de la zone franc.
Le
plus
grand
avantage
qu' offrent
ces
nouvelles
formes
d'intermediation semble etre les possibili tes de resserrement des
rapports
banque-PME
et
leur
incidence
sur
la
gestion
des
entreprises. La simplification des rapports qu'elles induisent
est de nature a declencher des flux de decisions productives et
efficientes.
Le
point
de
depart
en
est
la
prise
en
compte
d' elements de gestion simples mais
fondamentaux
tels que
les
contraintes
de
remboursement
des
credits
obtenus,
la
budgetisation des emplois et des ressources, la programmation de
la production, la fixation des tarifs en fonction des contraintes
de
couts
et
de
marche,
l' organisation
des
circui ts
de
commercialisation.
Ces
differentes
experiences
pourraient
susciter
une
reflexion dans la maniere d'orienter une activite bancaire qui
soit mieux adaptee au contexte precis des PME nationales.
Les trois aut res cas seront presentes dans le chapitre IV.
Ils
traiteront des problemes que soulevent 1 'existence et le
developpement des PME informelles. Celles-ci constituent, ainsi

- 239w
que nous l'avons deja souligne dans la premlere partie, un type
original
d'entreprises
qui
repondent
aux
caracteristiques
reconnues
aux
autres
PME
et
en
meme
temps
s' en
distinguent
nettement. Les cri teres distinctifs sont la grande proximite du
consommateur final et la facilite d'adaptation aux fluctuations
du marche, l'absence quasi
totale de supports de l'information
financiere,
comptable,
technique
puis
tres
souvent
leur
inexistence juridique. Actuellement on constate que ces unites
occupent
une
part
importante
et
souvent
insoupc;onnee
de
la
population active.
Nous
essayerons
donc
dans
ce
chapitre
de
relever
les
mecanismes
et
instruments
de
valorisation
de
l'entreprise
informelle, la nature de ses ressources et ses relations avec le
systeme bancaire moderne. Nous tenterons ensuite de determiner
les
conditions
de
renforcement
de
sa
position
au
sein
de
l'economie.
Le
choix
de
cas
a
ete
guide
par
deux
considerations
essentielles :
- la representativite des unites etudiees en tant qu'elles
sont soit uniques dans le secteur, .soit choisies parmi les plus
importantes sur le plan investissement, part du marche a couvrir
et dont l'absence ou la presence sont fortement ressenties
la
nature
et
l'importance
des
problemes
que
leur
existence et leur fonctionnement permet de soulever, de maniere
a circonscrire les questions essentielles aux PME.
Cette approche,
nous semble-t-il, devra nous permettre de
degager
une
tendance
generale
des
problemes
poses
et
des
solutions possibles.
Nous presenterons d'abord chacun des cas en decrivant les
problemes tels qu'ils se presentent ou tels qu'ils ont surgi.
Nous soulignerons ainsi leur gravite et leur incidence sur le
developpement du processus d'industrialisation.
Nous verrons enfin quelles solutions ont ete apportees aces
problemes,
les limites qu'elles presentent et les alternatives
possibles. Nous tenterons de ce fait une generalisation et une
conceptualisation des solutions envisageables en nous appuyant
a la fois sur les cas etudies et sur les enquetes menees dans le
domaine du financement des PME.

- 240-
Nous proeedons done pour eette deuxieme partie, tout eomme
pour la premiere, en une analyse en deux ehapitres :
Chapitre
III
Les
diffieultes
de
developpement
des
PME
Industrielles : Etude de trois entreprises
du Seeteur Moderne.
Chapitre IV - Les conditions de developpement des PME du Seeteur
Informel. Analyse de trois cas.

CHAPITRE III
LES DIFFICULTES DE DEVELOPPEMENT DES
PME INDUSTRIELLES : ETUDE DE TROIS
ENTRE PRISES DU SECTEUR MODERNE
/

- 242-
INTRODUCTION
L'analyse courante des PME permet de relever les difficultes
rencontrees dans
le
f inancement bancaire des proj ets dans ce
secteur.
Cette
approche
est
reductrice
et
a pour principale
consequence de ramener au seul financement tout le probleme de
la creation et de la valorisation de la PME.
Or,
ce
constat
que
l'on
peut
faire
aujourd'hui
met
en
lumiere d'autres centres d'interets.
Certes, le credit bancaire
est un imperatif de survie pour
les PME modernes mais les problemes de ces entreprises ne sont
pas uniquement d'ordre financier. lIs se situent a divers autres
niveaux :
a celui de la maitrise de la technologie appliquee a la
production
a celui du choix meme du type d'activite
- a celui du dimensionnement de l'entreprise en rapport avec
les capacites de gestion des entrepreneurs;
- a celui de l'etendue du marche, des possibilites de
penetration de celui-ci et de la recherche de nouveaux
debouches.
Ces differents problemes,
nous les regrouperons en trois axes
majeurs de reflexion :
- le financement bancaire ;
- la dimension technologique ;
- les preoccupations de gestion.
Chacun de ces trois points sera aborde a la lumiere d'un cas
precis d'entreprise du secteur industriel.

- 243 -
Notre etude s'effectuera ainsi en trois sections a travers
lesquelles nous specifierons nos exernples d'entreprises :
- d'abord, l'unite de fabrication de lait va etre analysee
pour nous aider a comprendre les causes financieres des ruptures
de rythme de production dans une entreprise et ses consequences
sur
l' evolution
de
celle-ci.
Nous
verrons
alors
comment
une
entreprise disposant d'equipements
performants et d'un marche
porteur peut etre reduite a un pilotage a vue.
- ensuite, avec l'exernple de l'''1mprimerie le Camerounais"
nous apprecierons l'etendue des desastres que peuvent causer des
tatonnements
technologiques.
On
verra
comment
les
lirnites
techniques
ont
astreint
le
capi tal
a une quasi-oisi vete et
confirme le clivage des activites industrielles et commerciales.
- Enfin le cas "CONF1TEX" nous offrira l' occasion d' insister
sur les imperatifs de gestion d'une unite industrielle et plus
precisement lorsqu'il s'agit d'une PME.
11 importe de preciser que chacun de ces trois types de
problemes que voudrait souligner chaque cas precis pourrait tres
bien se retrouver dans l'un ou l'autre exemple. Cependant, chacun
d'eux revet un interet particulier, analyse dans le cas 00 il est
le plus expressif.
En outre, nous avons privilegie l'industrie dans la mesure
00
elle
nous
fournit
des
exemples
plus
complets,
plus
representatifs
donc
plus
susceptibles
de
nous
aider a mieux
circonscrire
les
principaux
problemes
lies
a
l'activite
econornique des PME camerounaises. Elle nous permet ainsi d'une
part d'aborder les aspects relatifs a la production en tant que
mobile des comportements et de mettre l'accent sur la mise en
oeuvre et l'evolution des decisions de gestion et de strategies
d'entreprise et d'autre part de situer l'ensemble par rapport a
la question du financement. Nous soulignerons alors son impact
sur la maitrise de l'outil de production, le positionnement sur
le
marche,
l' arneliora tion
de
la
qual i te
du
produi t
et
le
developpement
de
l'entreprise.
Cette
dernarche
suggere
des
considerations precises et indispensables, specifiques ou non a

- 244-
l'industrie.
Celles-ci
se
rapportent
essentiellement
a des
problemes de creation et d'accroissement de la valeur ajoutee,
aux efforts d'integration en amont et en aval et dont l'un des
roles
est
de
mesurer
l'effet
amplificateur
du
processus
d'industrialisation sur l'economie nationale.
Notre choix de ces trois entreprises que sont la societe Milky-
Way, unite de fabrication de lait, l'imprimerie le Camerounais,
la Confection Textile et l'Habillement obeit a des exigences de
representativite. et
de
specificite
du
contexte
industriel
camerounais. Pris dans des secteurs marquants et
dominants de
cette
economie,
ils
devront
permettre
a la fois d' expliquer
l'evolution chaotique qu'ont connu ou que connaissent beaucoup
de
PME
et
de
clarifier
la
nature des
relations
entre
leurs
difficultes
et
les
structures
de
fonctionnement
du
systeme
bancaire camerounais.
Les informations dans ces trois cas proviennent de l'analyse des
documents
comptables
et
financiers
des
entreprises,
de
l'exploitation de ceux fournis par les banques et autres parties
prenantes dans ces affaires.
Nous avons egalement profite des
nombreux
entretiens
que
nous
avons
eus
avec
les
chefs
d' entreprises,
leurs
collaborateurs
et
les
membres
de
leurs
familIes sur tout ceux qui interviennent dans la vie de ces PME.
Comme nous l'avons dit plus haut, nous aurons donc les trois
sections ci-dessous :
Section I - Les problemes financiers de la PME Camerounaise ou
la contrainte de la monnaie de credit: l'exemple
de
l'entreprise "MILKY WAY"
Section 11 - Les risques du probleme technologique dansles PME:
l'exemple de l'entreprise "Le Camerounais"
Sectionn III - Les problemes de gestion des PME Camerounaises
l'exemple de la Societe "CONFITEX"

- 245-
SECTION I
LES PROBLEMES FINANCIERS DE LA PME CAMEROUNAISE OU
LA CONTRAINTE DE LA MONNAIE DE CREDIT
: L'EXEMPLE
DE L'ENTREPRISE MILKY-WAY
Analysant
la
decision d' investissement
dans
la
premiere
partie,
nous
avons
releve
les
determinants
du
choix
de
l'entrepreneur parmi lesquels
les determinants financiers.
La
structure
financiere
est
en
effet
capitale
eu
egard
a
l'evolution de l'entreprise,
a sa strategie et a sa perennite
dans le temps. Son importance se traduit en termes de couts du
financement et s'·affirme, a la
maniere dont ils sont maitrises
dans toutes les turbulences de la conjoncture.
Des
exemples
de
PME
camerounaises
et
en particulier
la
societe Milky-Way nous en donnent une illustration.
Nous
verrons
a partir de cet te PME que la structure de
l'endettement est capitale dans la mesure 00 la charge financiere
qu'elle induit determine l'aptitude de l'entreprise a satisfaire
aux exigences de son activite
et a resister a l'adversite de son
environnement.
Cette
charge
est
d' autant
plus
decisive
que
la
societe
Milky-Way doi t
faire
face a la concurrence d' un
geant de la
filiere
laitiere
dont
elle
brise
une
situation
de
monopole
etablie depuis plusieurs annees.
Cette
charge
est
d' autant
plus
decisive
que
la
societe
Milky-Way doi t
faire
face
a la concurrence d' un geant de la
filiere
lai tiere
dont
elle
brise
une
si tua tion
de
monopole
etablie depuis plusieurs annees.
Nous presenterons d' abord notre entreprise dans son acti vi te
et le contexte de son evolution et analyserons ensuite les faits
exposes.

- :246 -
§1
La Presentation de l'Entreprise
1.1
La Creation
Creee
en Avril
1989,
la
societe Milky-Way
est
la
premiere
unite
industrielle
camerounaise
dans
la
filiere
laitiere,
jusqu'ici controlee totalement par la production des
firmes
mul tinationales
etrangeres
au
premier
rang
desquelles
figure le groupe NESTLE.
Elle existe sous forme d'une societe
anonyme et demarre avec un capital social de 220 millions de
francs
CFA qui augmentera progressivement.
Son montant et sa
repartition sont· retraces dans le tableau I ci-dessous.
1.2
Evolution du Capital Social de Milky-Way
(en millions de F CFA)
Tableau I
80/81
81/82
82/83
83/84
85/86
87/88
89/90
&
sui.
&
sui.
&sui.
Capi.t.
220
350
500
569
604
903
1 065
soci.al
Repart.
-pri.ves
Camero.
80 %
80
%
77
%
75
%
70
65
%
57
%
- SNl1
-
-
-
-
-
-
34 %
-
Etrang
20 %
20 %
23
%
25 %
30
15 %
9 %
Source : Donnees reconst1.tuees a part1.r de b1.1ans success1.fs de J. Entrepr1.se
Les variations du capital de Milky-Way suivent, cornrne nous
l'avons dit, un mouvement ascendant au fur et a mesure du temps.
Sa
repartition
se modifie
egalement,
mais
en
conservant
une
distribution
a I ' avantage
des
prives
camerounais,
dont
deux
actionnaires majoritaires, promoteurs de l'affaire.
Cette evolution du capi tal
semble repondre a deux types
d'objectifs :
D'abord
elle
corresporid
a
des
preoccupations
de
rentabilite qui sont d'ordre economique ;
. Ensuite, elle se rapporte a des ambitions d'independance
qui,
si elles n'ont pas un caractere purement economique n'en
1 -
Soci.ete Nati.onale d'Investi.ssement,
(S.N.I.)

- 247 -
sont pas
moins
importan tes .
Nous
reviendrons,
dans
la phase
analytique des
faits,
sur le role et les implications de ces
donnees
sur
les
couts
financiers
et
sur
l'environnement
economique de l'entreprise.
Trois annees apres la creation.de cette societe, l'usine est
instal lee et entre en production en Avril 1983.
1.3
La Structure financiire : le Montage Financier
Des le premier'bilan etabli deux mois apres en Juin 1983,
la structure financiere apparait fortement desequilibree.
Pour
2 293 millions d'immobilisations nettes, l'entreprise dispose de
1 288 millions
de
capitaux permanents
soit environ 56 % des
besoins reels.
Ce constat permet a priori de faire deux hypotheses pour
expliquer ce desequilibre.
- Selon une premiere hypothese,
on pourrait pens er qu'une
partie des investissements, soit 44 % de l'actif immobilise, a
ete
financee
sur des
ressources
a court terme, les capi taux
permanents ne permettant pas de boucler le financement.
-
Une deuxieme explication est possible
pour celle-ci
l'ensemble du financement des investissements a ete assure par
des capitaux longs. Mais une partie de ces capitaux a du etre
remboursee
avant
la mise
en service de
l' entreprise.
11 est
egalement
possible
que
ces
deux
cas
de
figure
aient
ete
conj ugues.
Mais
quelque
soi t
le cas,
ce desequil ibre es t
la
traduction d'un montage financier inadequat.
En
effet,
le
projet
demarre
sur
une
base
financiere
preoccupante, a forte dominance de ressources a court terme. La
consequence en est une exigibilite immediate dont la charge en
termes de service total de la dette ne tient pas compte des
delais de mise en exploitation.
Les principaux postes du bilan2 au 30/6/1983 se presentent
de la maniere suivante :
2
Lea chiffres sont donnees en millions de francs CFA.

- 243 -
Tableau II
Bilan au 30 Juin 1983
ACTlF
MONTANT
POURCENTAGE
· Actif immobilise
2 293
89,12 %
· Valeur d'Expl.
191
7,42 %
· Valeurs reali.
et Disponibles
89
3,46 %
TOTAL ...
2 573
100,00 %
PASSIF
MONTANT
POURCENTAGE
Capital social
500
18,97 %
· Dettes LMT
788
30,62 %
· Dettes CT
1 297
50,41 %
Resultat net
-12
-
·
TOTAL ....
2 573
100,00 01i
Le resultat obtenu en fin de periode laisse deja entrevoir
de nombreuses difficultes financieres si des mesures correctives
n'etaient prises immediatement, nous y reviendrons dans l'analyse
des solutions proposees pour resorber ce deficit. Auparavant nous
voulons presenter de fa~on exhaustive les conditions des credits
d'investissement consentis a l'entreprise.
La
societe
Milky-Way
beneficiera
pour
son
programme
d'investissements de trois credits distincts dont un credit a
moyen terme accorde. par un pool compose de banques locales et
deux credits exterieurs avalises par ce meme pool de banques.
-
Le
credi t
Moyen
Terme
Local
est
consenti
sous
les
conditions suivantes :
le montant : il s'eleve a 416 000 000 F CFA
la duree : elle est de 8 ans dont 1 an de franchise de
remboursement
les remboursements : il est prevu 14 semestrialites au titre des
paiements en principal
le taux d'interet
il est de 12,00 % l'an plus l'imp6t sur le
chi ffre
d' affaires
interieur
(rCAl)
alors
egal a 9,65 %
le financement
il ~st assure par le pool bancaire local sur les
ressources de la BEAC.
les garanties : elles sont constituees :
d'hypotheques
fermes
inscrites
sur
trois
terrains urbains situes dans la zone ou est implantee l'usine.

- :249 -
lls couvrent une superficie totale de trois hectares et ont une
valeur estimee en 1981, au moment de l'octroi des credits, a 30
millions de francs CFA ;
- du nantissement du fonds de commerce etendu au materiel
de production3 •
Ces garanties couvriront egalement les credits exterieurs
a moyen terme integralement avalises ou contre garantis par le
pool bancaire local. Ce dernier est compose de la BIAOC (50 %),
de la Banque PARIBAS (35 %), de la BCD (15 %).
2°/ Les Credits a Moyen Terme exterieurs
- Credit fran~ais COFACE
Le Montant du Credit : 480 675 000 F CFA
a majorer de 100 % du montant des primes dues a la COFACE
La Date butoir : 3 Aout 1982
La Date Limite d'Utilisation : 30 Novembre 1982
La Duree
5 ans
a compter de la reception provisoire de
l'installation
Le Taux d'Interet : 7,5 % l'an auquel s'ajoutent
- une commission d'aval de 1 % l'an
- l'ICAI de 9,65 %
Les Garanties
elles sont les memes que celles du credit moyen
terme reescomptable,· le credi t etant contre garanti par
le pool local.
- Le Credit Fournisseur Italien
Le Montant
183 600 000 F CFA
La Duree : 5 ans
Les Remboursements : en 10 semestrialites,
l'echeance de la
1ere etant fixee a 6 mois apres la date d'expedition
des
equipements.
Le Taux d' Interets
10 % l' an a majorer d' une commission
d'aval de 1 % l'an et de l'ICAI'de 9,65 %.
Les Garanties
elles
sont
les memes
que celles du credi t
COFACE.
3
-
Nos informations sont tirees des differentes
notes de presentation du dossier Mi1ky-Way
et essentie11ement du protoco1e interbancaire
du 10 Aoftt 1981 signe entre 1a BIAOC,

PARIBAS-CAMEROUN
et 1a B.C.D.

- 250 -
Ces
concours
accordes
Et
l'entreprise
en
aout
1981
forment
avec
un
capi tal
social
de
F CFA
350
millions,
une
enveloppe globale de F CFA 1 430 millions environ destines au
financement de la construction du batiment, de l'acquisition et
de l'installation de l'usine.
Deux annees plus tard,
au moment Oll l'entreprise entre en
exploitation
ces
res sources
permanentes
ont
diminue
de
142
millions de francs CFA dont 64,8 millions au titre de premiers
remboursements de c"redits. Ainsi au 30 juin 1983,
le passif Et
long et moyen terme s'etablit Et 1 288 millions de francs CFA
faisant
apparai tre une
structure
financiere
dans
laquelle
le
fonds de roulement est inexistant. En l'absence de cette marge
de securite, on pourrait alors s'interroger d'une part sur les
possibilites de la societe Et couvrir regulierement les depenses
en
biens
de
consommation
intermediaires,
principalement
les
matieres premieres dont une grande partie est importee, d'autre
part sur la qualite et la regularite de la production qui en
resultera.
1.4
Le Produit
Ces deux points relatifs Et la gestion des stocks de matieres
premieres et Et l'organisation de la production sont,
en effet,
au coeur de
l'activite quotidienne de
l'entreprise.
11s font
partie du type de decisions que l'analyse economique qualifie
avec
V.
Levy-Garboua
et
G.
Maarek
qualifient
de
decisions
immediates ou obligatoires car,
indispensables Et une obtention
durable
du produi t
fina1 4 •
11
s' agi t
de
decisions
liees
aux
objectifs de qualite, d'insertion sur le marche, de fidelisation
de la clientele de telle sorte qu'une perturbation au niveau de
l'approvisionnement en inputs pe ut avoir des effets desastreux
sur la dimension financiere. Les ruptures de stocks de matieres
premieres peuvent mettre en peril le rythme de fabrication du
produit et par consequent celui des ventes exposant l'entreprise
aux aleas de la tresorerie, Et des problemes d'echeances diverses
4
-
V. Levy-Garboua et G. Maarek, la Dette,
le Boom, la crise, Ed. Econornica Paris 1987 p.
119.

· 251 -
et l'empechant de saisir des opportunites de placement de son
produit. Les risques sont encore plus grands quand les matieres
premieres ne sont pas produites localement comme on l'observe
dans l' entreprise Milky-Way Oll la quasi-totalite des
composantes
du lait concentre sucre proviennent des importations et que des
delais
souvent
importants
separent
deux
livraisons.
Les
implications sont considerables essentiellement au niveau des
couts
financiers.
L' entreprise
ne
disposant
pas
de
fonds
de
roulement, elle est astreinte soit a des emprunts a court terme
pour une duree qui en accroit le cout soit a des ruptures de
stocks lorsque les credits ne peuvent pas etre obtenus dans de
bons delais.
Quel
qu'en
soit
le cas,
cette
situation
laisse
entrevoir des difficultes de tresorerie et d'equilibre financier
irreversibles
du
fait
des
effets
cumulatifs
de
charges
financieres qui compliquent toujours davantage la negociation de
nouveaux credits.
Si les problemes que pose le produit dans l'entreprise se
rapportent a des decisions immediates,
celles-ci ne sauraient
etr~
les
seules.
l'entreprise
en
matiere
de
produit
est
confrontee
a d ' aut res
types
de
choix
dont
les
choix
strategiques 5 • Ceux-ci portent entre autres :
- sur la politique de prix et de concurrence qui pose le
probleme
de
la
competitivite
par
rapport
aux
entreprises
concurrentes. 11 s'agit a ce niveau d'un point important pour une
PME comme la Milky-Way lorsqu'elle doit affronter sur le marche
une unite imposante comme NESTLE. La maniere dont ce probleme est
aborde par Milky-Way sera presentee dans le paragraphe suivant
relatif a l'environnement.
~ sur la politique de produits qui se rapporte au nombre de
produits
a
fabriquer,
a
la
diversification
ou
a
la
specialisation.
Ces choix strategiques sont d'une importance capitale car,
susceptibles d'hypothequer la viabilite d'une entreprise. Nous
5
-
U.
Levy-ga~boua et G. Maa~k, la Dette,
le Boom,
la C~ise op cit p 120.

252
le verrons bien dans le cas de Milky-Way.
En
ce
qui
concerne
sa
politique
de
produits,
cette
entreprise a decide de mettre sur le marche un produit unique.
Celui-ci est presente sous trois modeles ; le modele economique
d'un kilogramme,
le grand modele de 397 g et la petite boite de
78 g.
Ce conditionnement tient compte des differences dans le
pouvoir d' achat
et
de
la preference du
consommateur pour un
modele donne.
La distribution des ventes entre ces differents
modeles,
telle
que
proj etee
par
l' entreprise,
met
surtout
l'accent sur les boites de 397 g (57 % des ventes) puis sur celle
de 78 g (40 % des ventes). celles de 1 kg ne comptent que pour
3 %, ce dernier modele, etant davantage distribue par NESTLE. La
si tuation
financiere
confortable de
la concurrence oblige
la
societe Milky-Way a etre prudente par rapport a ses previsions
de vente sur ce modele precis. Elle doit d'autant plus l'etre
qu'elle n'anticipe qu'une protection partielle du marche du lait
concentre. Si cette protection etait aceordee,
elle
porterait
sur le grand et le petit uniquement. Elle se met done ainsi a
l' abri de
la
concurrence de NESTLE dont
l' aisance
financiere
permet d'exploiter les failles de l'adversaire.
Le probleme majeur auquel
l'entreprise Milky-Way va etre
confrontee
par
rapport
a ses
previsions
de
vente
sera
essentiellement celui du fonds de roulement dont nous avons dit
qu'il etait inexistant des le premier bilan. 11 va d'ailleurs se
degrader d'annee en annee ; Cette deterioration qui apparait bien
dans
les bilans successifs de l' entreprise presentes dans
le
tableau 1115 va etre catastrophique avec la devaluation du franc
CFA
imposant
le
doublement
du
budget
sur
les
depenses
a
l'exterieur.
5bis - Voir egalernent tableau VII infra p 263

TABLEAU III
MILKY-WAY
B.IUliS RF.SUHF.S
(en milllcms de F en)
A C '1' I
F
,
85/86
86/87
37/88
88/89
89/90
90/91
Actif inmobilise
1 223
1 227
1 081
903
857
709
Valeurs d'exploitation
250
276
341
328
348
145
Valeurs realisables
576
1 061
1 059
1 090
662
582
et disponib1es
2 049
2 564
2 481
2 321
1 867
1 436
PAS S I
F
85/86
86/87
87/88
88/89
89/90
90/91
(""')
~'"'\\
Capital social
604
903
903
1 065
1 065
1 065
N
Report a nouveau
(1 912)
(2 279)
(2 563)
(3 184)
(3 873)
(4 784)
Dettes a LMT
731
2 386
2 578
2 572
2 624
2594
Dettes a CT
3 258
1 833
2184
2527
2 962
3 101
Resultat net
(632)
(279)
(621)
(659)
(911)
(540)
2 049
2564
2 481
2 321
1 867
1 436
Sitaatico oette (1 940) (1 655) (2 281) (3 843) (4 784) (5 324)
Foods de roulement (717) (428) (1 200) (2 940) (3 927) (4 615)

- 254 -
L'une des implications de cette situation financiere est le
niveau
des
coQts
que
l'entreprise
doit
supporter
pour
s'approvisionner en matieres premieres. En l'absence d'une marge
de
securite,
l'entreprise
a
le
choix
entre
les
res sources
bancaires a court terme dont le coQt est superieur a celui des
capitaux perrnanents et sa tresorerie propre, celle qui resulte
des ventes.
L'un des inconvenients de cette derniere solution se situe
au
ni veau
des
delais
qui
s' ecoulent
entre
la
vente
et
les
encaissements effectifs. En situation de concurrence, ces delais
peuvent s'allonger du fait des exigences des clients, accroissant
les risques d'oisivete du capital, pendant que les charges fixes
sont maintenues a leur niveau habituel.
Les difficultes financieres sont encore plus aiglies lorsque
l'entreprise ayant opte pour un seul produit ne dispose d'aucune
source alternative de revenus. Or, la societe Milky-Way a choisi
de se specialiser dans la fabrication du lait concentre sucre.
Et, ce choix lui posera des problernes a plus d'un titre. 11 ne
lui permet pas de multiplier les sources de recettes et de se
menager
une
issue
pour
ameliorer
sa
situation
financiere
lorsqu'elle se trouve bloquee sur le rnarche.
En outre, par rapport a la concurrence du groupe NESTLE, la
specialisation dans le seul lait concentre sucre l'a fragilise
dans ses bases de competitivite. Et, NESTLE qui est solidement
irnplantee sur le marche camerounais offre en plus du lait une
gamrne
variee
de
produits
perrnettant
de
tenir
en
echec
un
concurrent par
la pratique du dumping
sur
le produi t
comrnun
sachant qu'il est possible de jouer sur le prix des autres biens.
certes,
l'analyse des
strategies d'entreprise attribue a
la
specialisation
un
certain
nombre
d'avantages
dont
les
rendements croissants et le8 couts moyens decroissants 6 en tant
6
-
On se reportera pour plus de details sur
ce sujet A J.
C. MERIGOT et A.
LABOURDETTE,
Elements de Gestion strategique des Entreprises,
Edit.

Cujas,
Paris 1980 p.
232 et suivantes.

- 255 -
que
facteurs
d'amelioration
de
la
situation
financiere
de
l'entreprise.
La
materialisation
de
ces
avantages
n' est
pourtant
pas
automatique et la specialisation peut meme devenir un handicap
precisement
dans
un
cadre
concurrentiel
Oll
les
entreprises
adverses beneficient des atouts d'une production diversifiee. La
reduction
des
risques
et
la
recherche
de
la
rentabilite7
apparaissent dans ce cas comme etant les atouts majeurs d'une
production diversifiee.
Nous ne nous etendrons pas sur la controverse autour de ces
choix strategiques d'entreprise. Nous pouvons toutefois observer
que la specialisation de Milky-Way dans un produit unique sur un
marche interieur etroit a considerablement limite les moyens de
defense de cette PME a son
environnement.
1.5
L'Environnement de l'Entreprise Milky-Way
La societe Milky-Way doit gerer un paysage economique et
financier hostile domine par la concurrence du groupe NESTLE dont
le produit et le LABEL se sont deja imposes sur le marche.
Ainsi, aux problemes d' equilibre financier de cette PME vont
s'ajouter
des
problemes
lies
a
la
concurrence
et
dont
la
consequence risque d'etre l'aggravation des premiers problemes
financiers de Milky-Way.
Pourtant,
toutes ces difficultes auraient pu etre evi tees
si elle consentait a une prise de participation de NESTLE dans
son Capi tal,
etant
entendu que celle-ci devai t
entrainer des
concessions au niveau du controle de Gestion.
Mais
la
reparti tion du
Capital
ainsi
que
son
evolution
montrent
que
NESTLE
n' en
est
pas
partie prenante
et
que
la
majorite des actionnaires sont des prives camerounais. Cette
7
J.
c. MERIOOT et A. LABOURDETTE, Elements de
gestion strategiques des Entreprises
op cit p.
232 et suivantes.

:. 256-
structure du capital que cherche a maintenir l'entreprise, ainsi
que nous l'avons deja dit, obeit a des ambitions d'independance
et de creation d'une unite veritablement contr6lee et geree par
des
nationaux.
La
tache
de
l' entreprise
n' en
sera
que
plus
hardie. Elle le sera d'autant plus que l'appui des banques n'est
pas
toujours
evident et
que
sa posi tion vis-a-vis
de NESTLE
engendre un confli t
d' interet.
Celui-ci
nai t
et evolue entre
cette firme multinationale qui entend conserver sa position de
monopole et cette industrie naissante confrontee a une situation
financiere difficile et qui malgre tout cherche a l'instar de
toute PME, a preserver son independance.
Les implications a craindre de cette si tuation conflictuelle
sont nombreuses. Les principales et les plus evidentes ainsi que
nous le verrons par la suite sont :
- l'importance de la charge financiere que devra supporter
l' uni te la plus vulnerable economiquement et financierement. Elle
est essentiellement liee aux couts de la competitivite dont le
niveau
tient
compte
de
l'enjeu,
aux
couts
financiers
des
res sources a deployer pour se maintenir sur le marche ;
- l'affaiblissement financier de la societe Milky-Way sous
le poids de ces couts et l'evolution previsible de la structure
du capi tal
en
faveur
de
nouveaux actionnaires.
Le
ni veau de
participation
de
ceux-ci
va
dependre
des
besoins
reels
de
l'entreprise en capitaux longs.
Cette evolution est
significative de
l' importance de
la
structure du financement et des charges recurrentes des credits
sur la realisation des differents objectifs de l'entreprise.
II
$2
Analyse des
Implications de la Monnaie de Credit:
Le Cout Financier et le Cout de la Competitivite
La creation du surplus est la principale justification de
l' investissement productif et, l' engagement de res sources surtout
lorsqu'il
s' agi t
d' emprunts,
dans
le processus de
production
resulte de cette anticipation d'accumulation nette.

- 257 -
Sa mat~rialisation n'en est pas pour autant automatique.
Elle n~cessite que les couts qu'implique l'activit~ ne s'~rigent
pas
en
un
obstacle
dirimant
pour
son
developpement
et
sa
perennite.
Et,
dans la vie des entreprises l'~volution de la
si tuation
financiere
est
en
grande
partie
liee
a celle des
charges qui pesent sur l'exploitation.
Dans
le
cas
de
la
societ~
Milky-Way,
de
nombreuses
difficul t~s
de
fonctionnement
telles
que
l' inadaptation du
process, la qualit~ des ressources, l'adversit~ de la concurrence
ont g~n~re des charges multiples qui apparaissent pour cette PME
comme autant d'inerties a vaincre.
Ainsi, des le d~marrage de la production, l'entreprise doit
se battre par rapport a son environnement economique et financier
qui est celui d'un march~ difficile a conqu~rir et d'un montage
financier d~s~quilibre. Elle doi t se battre ~galement par rapport
a ses propres choix ceux de sa sp~cialisation dans un produit
unique, du risque d'affronter un g~ant de l'industrie laitiere,
malgre l'effort financier propre que lui impose cette situation.
1'ensemble
des
exigences
qu'induit
ce
double
cadre
economique et financier se mat~rialise dans une multiplicit~ de
charges. Ces charges, on pourrait les ramener a deux grands types
de couts,
le cout financier et le cout de la comp~titivit~.
\\ \\ \\
2.1
Le Cout Financier des Credits a l'Entreprise
Milky-Way
l' analyse du financement de la d~pense d' investissement nous
a p~rmis de relever l'het~rog~neit~ du capital mis en oeuvre dans
le pr,lcessUS de production. C' est ainsi que I' acti vi t~ ~conomique
et principalement l'activit~ des entreprises fait appel a des
res sources propres et egalement a des ressources d'emprunt.
Et,
a la fave\\lr de I' effet de levier financier tel que

- 258 -
decrit
par
l'analyse
financiere B
ou
par
la
theorie
de
l'endettement 9 ,
le credit joue un
role parametrique dans
le
financement
de
l'investissement.
Il
est determinant pour les
entreprises a plusieurs egards.
Il leur offre la capacite de financer leurs actifs. Il leur
permet
surtout
de
pallier
immediatement
l'insuffisance
des
capitaux propres souvent soulignee comme un handicap majeur pour
la creation et l'evolution des PME. Des lors,
le faible niveau
des fonds propres ne constitue plus une justification suffisante
au blocage
de
la machine
economique.
A ce
titre,
le
credi t
perennise
l' acti vi te de production,
accroi t
les occasions de
produit, de croissance et de developpement. Au fur et a mesure
de 1 'accumulation qu'induit le credit, l'entreprise se desengage
et ameliore sa situation financiere.
Mais
si
l' endettement exerce
un
effet de
levier sur la
rentabilite de l'activite economique,
la concretisation de cet
effet
est
etroitement
liee
au
comportement
financier
des
principaux intervenants que sont les banques et l'entreprise et
qui se traduit essentiellement dans l'evolution de la structure
financiere et la maitrise des charges au niveau de l'entreprise.
La realite financiere dans les PME et singulierement dans
le
cas
Milky-Way
ne
semble
pas
toujours
corroborer
la
justification theorique de l'endettement. L'importance des couts
financiers dans cette entreprise a atteint un tel niveau qu'elle
semble etre auj ourd' hui
a
l' origine de
rapports
conflictuels
entre les banques et l'entreprise debouchant sur un veritable
paradoxe
observe
dans
le
comportement
des
dirigeants
de
la
societe vis-a-vis des credits et des exigences de remboursement
de ceux-ci.
8
-
J.
Fred WESTON and F.
Eugene BRIGHAM, managerial Finance,
seventh edition Copyright by Dryden Press Binsdale Illinois,
1981p.

555-574.
Les auteurs proposent une definition du concept d
levier
financier
et
analysent
son
itrq:>act
sur
les
resul tats
de
l'entreprise.
9
Pour une appreciation de cette approche,
quelques
modeles de la theorie de l'endettement sont repris et
analyses par B.
BEKOLO-EBE dans son ouvrage,
Le statut
de l'Endettement Exterieur dans l'Economie sous-deveoppee,
Edit Presence Africaine,

Paris 1985 pp 194-222.

- 259 -
Nous allons dans ce paragraphe explici ter la nature
du
comportement paradoxal des dirigeants de l'entreprise tel qu'il
nous est apparu. Nous avons deja souligne dans le chapitre 11 le
role des banques en tant qu'intermediaires financiers dans le
financement de la depense d'investissement. L'application de ce
role
theorique
au
cas
que
nous
etudions
nous
permettra
de
comprendre 1 'importance evidente de la fonction d'intermediation
a travers l'evolution de la structure financiere de cette societe
et ses implications sur les charges recurrentes de ses res sources
d'emprunt.
Elle
nous
permet
entre
autres
d'insister
sur
l'importance des
conditions de credits,
celles de montant,
de
terme et d'interet.
S'agissant
en
particulier
du
taux
d'interet,
celui-ci
apparait comme l'un des instruments fondamentaux de la politique
monetaire
et financiere. Ainsi, au niveau micro-economique, il
n' est
pas
neutre
parce
qu' il
est
un
element
strategique de
gestion financiere.
On pourrait alors ici rapprocher son role theorique de la
signification que lui donne le pool bancaire et le role que les
banques cherchent a lui faire jouer dans le cas Milky-Way.
S'agit-il pour elles de conserver a leur creance toute sa
valeur
ou
alors
de permettre
a I ' entreprise
de
restaurer
son
equilibre financier?
On appreciera donc mleux la qualite des solutions proposees
par les banques a cette societe lorsque celle-ci ne pourra plus
honorer les echeances de ses credits. On comprendra surtout le
plan de
redressement mis
en place et
le ni veau des
interets
calcules a cette entreprise en difficulte.
En effet,
l'importance de la charge
financiere est telle
qu'elle nous semble, dans le cas de la societe Milky-Way, exercer
une action particulierement repressive sur l'equilibre financier
de l'entreprise. L'etablissement de la creance consolidee a un
montant de 2 333 millions de
francs
CFA le montre
bien.
Le
niveau atteint par les engagements de l'entreprise signifie que

- 260 -
le taux d'interet effectif applique sur le credit initial s'eleve
a 18 % l'an ainsi que nous le montrera le plan de redressement.
Et,
cornrne en plus le pool bancaire applique a nouveau un tam::
d'interet de 8,21 % sur cette nouvelle dette de 2 333 millions,
il
est
difficile
de
penser
que
l'equilibre
financier
de
l'entreprise soit le principal element pris en compte dans le
comportement des banques du pool concerne.
2.1.1
-
L'Analyse du Comportement du Pool Bancaire
de la Milky-Way
Ces questions sont fondamentales dans la mesure ou elles
posent le probleme de l'adequation du financement bancaire a des
objectifs de production et de creation de la valeur au sein de
l'entreprise
et
du
role
que
joue
l'intermediaire
dans
ce
processus. Ce role s'apprecie a la quantite et a la qualite des
credits, c'est-a-dire aux conditions qui les accompagnent.
2.1.1.1
Montant des credits a l'Entreprise
L'actif net immobilise a la date d'etablissement du premier
bilan est evalue a la somme de francs CFA 2 293 millions. Les
credits
consentis
a
l'entreprise
pour
financer
ces
investissements se chiffrent a la meme date,
a francs CFA 788
millions soit 34,36 % de ceux-ci. Les capitaux permanents, c'est-
a-dire les fonds propres et les emprunts ne couvrent donc pas le
financement des besoins en irnrnobilisations.
L'entreprise s'engage ainsi dans un projet d'investissement
productif avec un budget deficitaire. Ne disposant d'aucune marge
de securite en termes de fonds de roulement, elle se risque dans
une gestion a vue d'une untie industrielle. Nous verrons par la
suite les difficultes qu'aura cette PME a concilier son deficit
et
les
contraintes
qui
pesent
sur
elle
dont
celle
du
remboursement de ses credits. Cette contrainte de remboursement
est egalement fortement influencee par les conditions de delais
et de taux d'interets.

- 26L -
2.1.1.2
Delai
et
Taux
d'Interets
des
Credits
a
l'Entreprise
Les delais consentis a l'entreprise sont en moyenne de 6 ans
pour les trois credi ts d' investissement obtenus.
Ils semblent
assez courts pour des investissements. En plus,
les premieres
echeances de remboursement sont exigibles avant meme la date de
mise en service de l'entreprise. De tels delais semblent tout a
fait inadequats,
les echeanciers des credits ne s'appuyant pas
sur la capacite du projet a generer des ressources suffisantes
pour assurer le service de la dette.
Les
taux d' interets des
credi ts
ini tiaux quant a eux se
situent entre 12 % et 7,5%. On peut degager, en tenant compte du
montant des credits un taux moyen de 9,66 % l'an. Ce taux nominal
se situe au voisinage des
taux preferentiels
applicables aux
operations privilegiees. Mais nous verrons par la suite que le
cout effectif des credits est de loin superieur a 9,66 %.
Nous allons actuellement tenter d'analyser l'impact de ces
conditions sur le niveau des couts de l'entreprise et sur le
developpement de cette uni te.
Car,
l' une des
consequences du
montage financier du projet Milky-Way a ete la deterioration du
fonds de roulement. Celui-ci est reste negatif d'annee en annee
ainsi que le retracent les tableaux VII et VII~. Cette absence
de marge de securite n'a pas permis a l'entreprise de parvenir
a un approvisionnement regulier en matieres premieres. La lente
evolution de l'activite en est une traduction. Si elle n'en est
pas la seule cause, elle a enormement fragilise l'entreprise
et
entame ses chances de competitivite.
,/~....\\
L' evolution de
l' acti vi te est en effet
lente,
et reste
encore en de~a du seuil de rentabilite. La capacite de production
installee est
de 7 000 tonnes de lait et l'entreprise couvre ses
charges
a partir d' un ni veau de production de 4 500 tonnes
environ. Or, comme nous le montre le tableau VIII qui retrace le
mouvement de l' acti vi te,
le point mort est a peine atteint en
1986/87 avec un niveau de ventes en volume de 4 284 tonnes. La
periode qui precede quant a elle connait un niveau d'activite

262
encore plus faible a cause des problemes techniques que rencontre
la
societe
au
debut
de
l'exploitation,
l'obligeant
a
des
changements
dans
l' assistance
technique
(voir
tableau
IV
de
1 'Evolution de l' Assistance Technique) 10.
Ainsi,
le premier procede de fabrication s'est rapidement
avere
inadequat.
Le premier partenaire technique bailleur du
process est specialise dans la fabrication du lait liquide. Les
tentatives d'adaptation de son procede a la fabrication du lait
concentre sucre n'aboutissent qu'a un echec.
Il en resulte de
nombreux
gaspillages
dont
l'une
des
manifestations
sera
la
deterioration du resultat net qui passe de -12,5 millions
en
1983 a -976,5 millions en 1984.
Les difficultes de l'entreprise sont donc aussi bien d'ordre
reel
que
d'ordre
financier.
Les
chiffres
ci-dessus
revelentmontrent un poids ecrasant des charges, etablissant les
couts de production largement au-dessus des produits obtenus. A
ce probleme, l'entreprise tent era d'apporter une solution. Mais
celle-ci restera insuffisante. Car,
apres les tatonnements des
premieres experiences,
l'entreprise conclut un nouveau contrat
d'assistance technique avec un autre groupe etranger. Le procede
est
mieux
mal trise
et
adapte
aux
equipements
en
place.
Les
resul ta ts
seront
irnrnedia ts .
Et,
sur
les
bases
de
meilleures
competences techniques et technologiques l'activite redemarre et
s'ameliore progressivement jusqu'en 1987. Puis,
elle flechit a
nouveau en 1988 sans doute a cause de la composante financiere
des difficultes de cette societe. D'ailleurs, durant toute cette
periode, c'est-a-dire pendant cinq annees d'exploitation Milky-
Way
se
situe
toujours
en
des sous
du
point
mort.
Le
seul
changement de process n'a pas reussi a relancer definitivement
la production.
De la m@me maniere que nous avons voulu relativiser l'impact
des
augmentations
du
capital
social
sur
les
resultats
de
l'entreprise, de la meme maniere, la solution technologique nous
semble inoperante sur le redressement financier recherche.
10
-
Voir tableau IV,
infra p.29l

Ta.blea.u VII
BII.AXS
RESm!F.S
(en millicms de F CF!)
AC
T I
F
PAS S I
F
82/83
83/84
84/85
82/83
83/84
84/85
Actif inmobilise
2292,7
2084,9
1509,7
Capital social
500,0
559,0
559,0
Val. d'exploitation
190,9
372,2
301,2
Dettes a LMT
787,5
824,7
787,6
Val. realisables et
88,8
443,7
548,4
Dettes a CT
1297,4
2152,3
2705,3
disponibles
Resultat net
(12,5)
(975,5)
(552,1)
°1
("'")
\\0
N
TOTAL
2572,4
2900,8
2459,3
TOTAL
2572,4
2900,8
2459,3
30/05/83
:illL'05/84
30/05/85
Activite (C.A)
40,3 Hs
1100,3 Hs
1650,6 Hs
Resultat net
(12,5 !".s)'
(5~j1,2 Ms
(562,1 Ms)
Situation nette
487,5 Hs
(:35,2 Hs)
(1034,5 Hs)2
Foods de roulement
(1017,7 l".s)
(1174,0 Ms)
(1855,7 Hs)
>.
-
Les parentheses tntduiBent tIDe valeur 00gative
des chiffres CODcerOOs
:2
_
L'Aodit spres ajustemerrt l'evaJ.oe a (1&45 !'\\s) lltl
30/06/85 et 8 (1652 88) BD 30/12/85.

"
!lJI.IY-WAY
Tableau VIII1
ms5ES
EVOLUTIOll DE L' AC'TIVITE
(en millions de francs eFA)
83/84
84/85
85/85
85/87
87/88
Ventes
en quantite
2 156 T
2834
T
3 582
T
4 284
T
3 383
T
en valeur
1 100 Ms
1 550
Ms
2 250
Ms
2 600
Ms
2 090
Ms
Resultat net
(651,2 Ms)
( 662,1 l-'.s)
(631,8 lIs)
(279,4 Ms)
(521
Ms)
Amortissements
378,0 Hs
581,9 Ms
517,3 Ms
291,7 Ms
250,1 Ms)
.;t
..0
='l
RE.MARQUES
La capacite de production aetuelle de l'unite installee est de 7 000 Tonnes.
Et a ce jour, l'Entreprise n'a pas encore pu atteindre
son seuil de rentabilite qui se situe au-dela de 4 000 Tonnes.

Tableau VIII2
mssE
MILKY-WAY
EVOLUTION DE Lt ACTIVITE
(en millions de francs eFA)
87/88
88/89
89/90
90/91
Ventes
. en quantite
3 383 T
2 495 T
2 307 T
1 471T

ell valeur
:;; 090 Ms
1 747
1 615
1030
LI"\\
Resw.tats
(621)
(659)
(91l)
(540)
\\0
N
lI.mortissements
250,1
184
414
271
Si tuationnette
12 281}
(3 843)
(4 784)
(5 324)
Ponds de Roulement
11 200}
(2 940)
(3 927)
(4 615)

- 266-
Nous voulons actuellement nous arreter sur d'autres types
de
solutions.
Nous
insisterons
particuli~rement sur
celles
proposees par les banques pour pallier l'insuffisance de celles
qui
ont
ete
apportees
jusqu'ici.
Nous
apprecierons
leur
originalite ainsi que leur aptitude a ameliorer les profits de
la societe Milky-Way.
2.1.1.3
Les Mesures de Redressement Financier
Dans le schema initial de financement tel qu'il ressort du
bi lan d I ouverture etabl i
au 30 j uin 1983,
les det tes a court
terme
sont
dej a tr~s
elevees
par
rapport
a 1 I ensemble des
ressources. Leur cout etant
plus eleve que celui des capitaux
permanents, une diminution du passif a court terme ne peut, pour
les banques, que reduire les charges financi~res et ameliorer les
resultats d'exploitation. Les solutions que l'Entreprise decide
alors
de prendre viseront
surtout
une
action directe qui
en
limite
la
croissance
ainsi
que
les
charges
financi~res
recurrentes. Une diminution du montant des dettes a court terme
implique
necessairement,
dans
notre
cas,
une
augmentation
consecutive des dettes a long terme et moyen terme du fait de la
consolidation des differents credits courts.
Cette mesure de redressement est con~ue en deux etapes :
d I abord,
les
banques
exigent
au
prealable
un
effort
financier supplementaire aux actionnaires
ensuite elles proc~dent elles-memes a la consolidation du
passif a court terme, tout au moins pour la partie concernant les
impayes sur les concours bancaires.
Le montant consolide comprend bien entendu le principal et
les interets non regles sur les trois concours obtenus. Cette
operation aura pour effet de porter les dettes a long et moyen
termes a 2 333 millions de francs
CFA soit une augmentation de
plus de 100 % en 5 ans.
Parti d'une enveloppe initiale de credits de 1 080 millions
de francs CFA, le montant du credit consolide auquel on parvient
ainsi que le nouvel echeancier sont donnes dans le tableau IX
tire du protocole de consolidation.

- 267 -
Les conditions de la consolidation sont les suivantes
- montant des cr~dits consolid~s : 2 333 millions ;
- dur~e 10 ans ;
- taux d'int~r~t 8,21 % l'an ;
- augmentation du capital social et lib~ration effective
permettant un remboursement partiel de 100 millions en
faveur des banques;
- abandon de cr~ances de 150 millions de francs CFA sous la
r~serve que le nouvel ~cheancier soit respect~.
On pourrai t
d~j a a partir de cet ~ch~ancier et de ses
conditions s'interroger sur l'impact d'une telle op~ration sur
la structure financiere.
Cette consolidation est done subordonn~e a une augmentation
de capital. Ces deux points sont combin~s pour avoir un impact
plus grand sur la sant~ financiere de la soci~t~. Seulement, 100
millions
de
francs
provenant
du
capital
libere
sur
les
augmentations
d~cid~es
en
1985
et
1986
sont
imm~diatement
affect~s au remboursement partiel des nouveaux engagements. A la
distraction de cette somme viendront s'ajouter les conditions de
la consolidation. Celles-ci ne semblent pas, en effet,
all~ger
la charge d'endettement de l'entreprise.
Nous avons calcul~ un taux d'int~r~t moyen de 9,66 % l'an
et estim~ a 6 ans la dur~e moyenne des remboursements sur les
trois cr~dits a moyen terme de la soci~t~. Ainsi, a
partir de
la somme de 1 080 millions correspondant aux cr~dits initiaux,
et pendant une p~riode de 5 ans,
le montant total des int~r~ts
devrait s'~lever a 347,7 millions de francs CFA. Au terme des
delais
de
remboursement,
le
service
total
de
la
dette
s'etablirait a 1 445,1 millions de francs CFA dont 365,1 millions
d'interets sur 6 ans et 1 080
millions de principal.
Pourtant, ces m~mes credits couteront en d~cembre 1986,
1 253 millions de francs soit une charge 3,5 fois plus ~lev~e
que
celle
que
l'entreprise
aurait
eu
a supporter avec un
financement plus adapte et un payement r~gulier de ses ~cheances.
Ce cr~dit de consolidation arr~t~ a la somme de 2 333 millions

- 268 -
de francs CFA comporte ainsi des interets effectifs calcules a
un taux superieur a
18 % l'an,
un taux difficile a supporter
pour une PME industrie11e dont la situation financiere est peu
enviable.
En effet, en dehors des
premieres echeances qui avaient ete
reglees,
et elles le furent nous l'avons vu,
avant la mise en
service de
I' usine
et
la production du bien susceptible de
generer de la tresorerie, les autres echeances n'ont pas pu etre
payees.
Ce choix conscient ou non d'imposer a l'entreprise un
cout
des
ressources
aussi
eleve
favorise
l' instaurartion
de
rapports
conflictuels
entre
ces
deux categories
d' agents.
Le
climat qui en
resul te coute cher a I ' economie tout entiere.
L'evolution de la situation observee au niveau de l'entreprise
s'apparente, en quelque sorte au vecteur de la condition de crise
decri te par l' analyse macro-economique du circui t. S' appuyant sur
le principe de I' effet de levier de l' endettement,
la societe
Milky-Way s'est engagee dans un projet d'investissement adosse
sur un financement bancaire. Les conditions de celui-ci ne lui
assureront pas un profi t suffisant indispensable au remboursement
des
fonds
empruntes.
Cette
cassure
s'opere
lorsque
l'enrichissement
net
des
entreprises
ne
couvre
pas
leur
endettement.
Et,
c'est
cet
ecart
qui
fonde
les
rapports
conflictuels entre les banques et l'entrepreneur, puis entre les
banques et l'economie.
Dans
le cas Milky-Way le conflit resulte
de conditions
bancaires peu
favorables a l'exercice d'une activite rentable.
La
mise
en
place
par
le
pool
bancaire
de
ce
credit
de
consolidation semble repondre aux seules exigences de garantie
de l'activite des banques. Les mecanismes et instruments choisis
le montrent. lIs ne peuvent donc produire qu'un effet limite par
rapport a l'equilibre financier que cette entreprise cherche a
atteindre. 11 en est ainsi du niveau du taux d'interet applique
a cette PME. Ainsi donc, le cout financier de cette consolidation
est
tel
qu' il
hypotheque
l' avenir
de
l' entrepr ise
et
est
generateur de rapports dont transparait une perte de confiance
mutuelle.

269
En effet, on le ressent dans le comportement qui s'en suit
tant au niveau de la banque qu'au niveau de l'entreprise :
- au niveau du pool bancaire,
celui-ci fait des anticipations
pessimistes quant a l'evolution future de l'entreprise. Des
le
depart, sa fonction il l'a volontairement limitee a l'octroi du
cr"edit et a des
interventions ponctuelles.
N'ayant pas voulu
s'impliquer "dans
la
Vle
de
l' entreprise,
il
n' a
pas
suivi
l'evolution technique de celle-ci.
Son intervention a l'heure
actuelle obeit a la logique initiale et ne se justifie que par
la constatation des irnpayes.
On pourrait bien penser dans ces
conditions
que
la
consolidation
comrne
solution
en
vue
du
redressernent financier participe essentiellernent de l'exigence
de liquidite bancaire. Le montant des interets qui l'accompagne
obeit a cette meme logiqu~,
en d'autres termes,
a un souci de
minimisation de perte et de maximisation de la remuneration du
capi tal bancaire.
11
importe des
lors de s' interroger sur le
caractere realiste d' une telle solution et sur sa capaci te a
satisfaire aux conditions d'une activite normale et prospere. 11
ne nous semble pas que le pool bancaire ait integre ce facteur
dans ses choix pui,sque le taux d' interet effectif applique a eu
un effet recessif sur l'activite de l'entreprise qui n'a jamais
pu atteindre le point mort.
- La consequence au niveau de l'entreprise a ete des pertes
de capital se rnanifestant dans la deterioration de la situation
nette
retracee
dans
les
tableaux
Ill,
VII
et
VIII~l
et
l'accumulation des impayes.
La repercussion immediate en est la
naissance ou le gonflement d'un portefeuille bancaire compromis.
De telles creances ont cette particularite qu'elles suscitent la
mefiance des banques les rendant peu favorables a l'octroi de
nouveaux credits. Elles aggravent ainsi une situation deja peu
enviable pour les PME et dont la principale repercussion risque
d'etre une politique de rationnement exacerbee. La restriction
du
credit
qu'elle
induit
explique
egalement
la
faible
remuneration et
le peu d'interet accorde a l'epargne locale.
L'~volution des taux d'interets crediteurs que retrace le tableau
11
-
Voir supra pp"253,263,265

270
IV du
Chapi tre
11 12
en
es t
un
temoignage.
Le
risque
maj eur
qu'encourt
l'economie
est
une
fuite
du
circuit
par
la
constitution d'une epargne oisive par les menages. Mais comme il
n'y a pas eu d'enrichissement net a partir de la monnaie creee
et
injectee
dans
le
circuit,
il
n'y
aura
donc
pas
de
flux
suffisants dans le sens entreprises-banques. Les augmentations
de capital ne suffisent pas non plus a assurer le remboursement
de la dette. Les banques font des anticipations pessimistes et
ne
veulent
plus
accroitre
le
credit
a l'entreprise.
Les
techniques
financieres
mises
en
oeuvre
telles
que
le
coup
d'accordeon suivi de la consolidation des dettes a court terme
n'ont pas permis de satisfaire a la contrainte monetaire. Elles
ont certes reussi a ameliorer la structure physique du bilan mais
elles
ont
garde
un caractere purement
comptable
en
agissant
uniquement sur cet aspect physique. Par contre, elles n'offrent
aucune solution reelles
au probleme de
l' equilibre
financier
recherche par l'entreprise.
La societe assiste ainsi progressivement a la deterioration
de son activite et au durcissement des conditions bancaires qui
lui sont appliquees. Les dirigeants de la societe, a l'instar des
banquiers font aussi a leur tour des anticipations pessimistes.
La contribution de la societe a l'effort financier decide et qui
s' est tradui te dans des
augmentations
successi ves
du capital
social n'a pas reussi a desserrer la contrainte des conditions
rigoureuses
du
financement
bancaire.
Au
lieu
de
financer
la
production,
les augmentations de capital ont ete partiellement
affectees au paiement d'une partie des impayes. L'entrepreneur
anticipe des lors,
une rigidite croissante de la position des
banques.
j
2.1.1. 4
-
La Deterioration de
la
Situation
Financiere
.
le
- - - -
- -
Paradoxe de la remuneration du Capital Industriel
L'entrepreneur sait que sa capacite de remboursement ne lui
permet pas de satisfaire aux nouvelleSecheances plus importantes
que les precedentes. Le principal ayant plus que double,
le
12 - Voi~ sup~a p.131

- 271 -
nouveau taux d'interet est sensiblement proche du taux nominal
moyen initial, parallelement sa situation financiere a continue
it
se deteriorer.
L' entreprise redoutant dans
cette evolution
contradictoire
1 'ertfermement
dans
le
cercle
vicieux
de
l'endettement et la perte irreversible de son capital reagit dans
le sens d' une autoremuneration de ses efforts de
financement
propre.
On
assiste
des
lors
au
developement
d'un
phenomene
inhabituel, it un veritable paradoxe : la tendance it privilegier
la remun eration des fonds propres et la recuperation du capital
industriel.
En
effet,
V.
LEVY-GARBOUA
et
B.
WEYMULLER13
font
la
distinction entre deux sortes de capitaux : le capital industriel
ou l'autofinancement"directement investi et le capital bancaire,
celui que prete la banque it une entreprise14 • lIs leur associent
deux formes de remunerations
le profi t
pour les res sources
propres
et
les
frais
financiers
pour
les
credi ts.
1 Is
caracterisent les interets par leur stabilite et par la cession
d' anteriori te
dont
ils
font
l' obj et.
Pour
ces
auteurs,
les
interets
sont
payes
en
priorite
avant
le
profit
de
1 'entrepreneur.
L' observation
des
fai ts
dans
la
societe Milky-Wau
nous
conduit pourtant it des conclusions differentes.
En effet, face au durcissement du comportement du banquier
et it l'escalade du taux debiteur,
l'entreprise en desespoir de
cause, organise progressivement son insolvabilite,
cherchant it
minimiser le delai de recuperation du capital propre. On assiste
it
une
forme
de
recuperation pa-rticuliere
qui
se
realise
au
travers
des
postes
de
charges
dont
1 'importance
tend
it
s'accroitre anormalement au regard de la situation financiere
generale.
Les
charges
concernees
sont
fondamentalement
les
13 - v. Levy-GARBOUA et B. WEYMULLER, Macro-economie contemporaine, Economica
2e edition, Paris 1981, P. 74.
14
IDEM.

- 272 -
salaires
et
toutes
les
charges
qui
y
sont
liees.
Cette
remuneration est inhabituelle et se manifeste dans 1 'augmentation
ou
le
maintien
d'un
train
de
vie
sans
rapport
avec
les
possibilites reelles de l'entreprise et les resultats degages.
La deterioration continuelle des resultats s'explique donc a la
fois par le poids eleve des frais financiers et egalement par
cette
forme
de
"remuneration des
fonds
propres"
par
charges
salariales interposees.
Cette forme de recuperation est facilitee par le caractere
familial des PME et le mode d'appropriation du capital dans ces
entreprises,
la repartition des
"profits" s'effectue aisement
entre les parties prenantes au capital toutes intervenant dans
la
vie
de
l' entreprise
ou
beneficiant
directement
ou
indirectement de la repartition des "profits". Ce comportement
paradoxal observe en.matiere de gestion financiere debouche sur
l' accroissement du risque du banquier au
fur
et a mesure du
durcissement de son comportement de preteur-rentier.
La rigidite des structures du systeme bancaire ne semble
avoir
contribue ni
a l' amelioration des capaci tes des PME a
s'autogerer, ni a la preservation de la liquidite bancaire. Elle
semble par contre avoir ete a l' origine du paradoxe dans la
hierarchisation des
capitaux et de leur systeme de remuneration.
Ces carences constatees dans la gestion de l' entreprise Milky-Way
ont une incidence negative sur les resultats par un accroissement
injustifie
des
charges.
Elles
sont
de
ce
fait
un
facteur
important des difficultes financieres de cette PME.
Toutefois
l'accumulation des pertes observees d'une annee a l'autre n'est
pas uniquement causee par l'importance des frais financiers et
ses implications sur le comportement de 1 'entrepreneur. Elle nous
semble egalement liee a d'autres composantes financieres parmi
lesquelles le cout des fonds propres.
Theoriquement, si "l'autofinancement
n'est pas vital pour

- 273 -
l' Economie
Capi taliste 1115,
il
procure
a I ' entreprise
des
ressources qui ont pour effet de reduire la charge financiere des
capitaux destines a l'investissement et a la production. 11 est
aussi
une
traduction d' une
accumulation
reel le
au ni veau de
l'entreprise. Les
res sources propres comportent des couts qui
sur
le
plan
theorique
sont
lies
a la
remuneration
des
investisseurs et au systeme d'imposition des revenus du capital
qui dans l'observation empirique de Milky-Way sont difficiles a
evaluer parce que noyees dans un
flux d' autoremuneration.
Ce
comportement
est
peut-etre
une
justification
des
efforts
necessaires a la constitution des fonds propres.
Ainsi, l' evolution actuelle devra nous permettre d' apprecier
l'effort de participation de l'entreprise au financement de son
acti vi te, la signification de cet effort. Nous comprendrons mieux
son comportement deviant. Elle nous servira aussi de base a la
determination de l'actif net a partir duquel, nous ferons une
estimation de
la
valeur
de
cette
uni te
et
de
ses
capaci tes
d'auto-determination et d'independance.
La
creation
de
la
societe
anonyme
Milky-Way
est
donc
l' ini tiati ve
de
j eunes
cadres
camerounais
parmi
lesquels
un
expert comptable et un ingenieur polytechnicien. Leur formation
theorique ainsi que l'experience qu'ils ont pu acquerir dans leur
cheminement au sein de grandes entreprises nationales a la vie
desquelles
ils
ont
participe
semblent
etre
les
atouts
dans
l'exercice de leur prochaine activite industrielle. L'importance
du
principe
de
l'equilibre
financier
ne
saurait
donc
leur
echapper. D'ailleurs, les augmentations successives que connait
le capital social semblent participer de cette preoccupation.
(Voir tableau IX).
L'entreprise se cree avec un capital de 220 millions. Tres
vite celui-ci connait une progression qui d'ailleurs va etre
soutenue au fur et a mesure du temps. Son trend semble suivre
15
F.
Poulon,
les ecrits de J.M.
Keynes la paix carthaginoise,
Collection des travaux du seminaire Decta Ill,
discussion consecutive a l'expose.
Annee 1982-1983 Tome IV p.

47.

- 274-
l' evolution
des
besoins
sous
la
contrainte
des
possibi li tes
financieres des
actionnaires,
composes en majorite de prives
camerounais.
L'actionnariat se heurte, dans la mouvance d'une conjoncture
difficile a des augmentations de capital, contributions qui ne
sauraient etre indefiniment extensibles. Pourtant,
l'on denote
la volonte certaine des actionnaires de conforter la place des
fonds propres dans les res sources permanentes. Pendant ce temps,
la
repartititon
du
capital
reste
a l'avantage
des
prives
nationaux pour conserver a l' entreprise son caractere de PME
nationale.
(tableau IX) .
La premiere augmentation intervient en 1982
elle fai t
passer le capital de 220 millions a 350 millions et a pour effet
de faire passer de 17 % a 24,5 % la proportion des capitaux
propres dans les capitaux permanents. Destines a l'amelioration
de
la
structure
du
bilan,
ils
contribuent
tout
aut ant
a
l'acquisition des equipements de production. Ce ratio conservera
une forme ascendante dans l'ensemble ; 38,8 % en 1983, 40,6 % en
1984, 43,4 % en 1985 et 46,3 % en 1986.

275
Tableau
IX
&'iOLliTIaR ,DU
CAPTIAL *
81 C8pital
220 000 000 F
· Prlves natlonaux
80 \\
_".
elrangers
20 \\
82 Capital
350 000 000 F
· prlves natlonaux
80 \\
.11.
etrangers
20 \\
83 CBpital
500 000 000 F
· prlves natlonaux
76,8 '\\
.11.
etrangers
23,2 'l;
M CBpltal
569 000 000 f
· prives nationaux
75 '\\
~I;-
etrangers
2~ 't
85 CBpital
569 000 000 F
• prlves natlonaux
75 'l;
~lI_
etrangers
25 'I;
86 Cupital
604 000 000 F
prlves natlonaux
70,3 \\
_"_
etrangers
29,7 \\
x Coup d'accordeon
604 a 453 Ms de 453
a 903 Ms.
87 & 88 Capital
903 000 000 F
. Prlves natlonaux
85 \\
.11.
etrangers
15 '\\
89 C8pital
1 065 100 000 F
prlves natlonaux
57 '\\
_11-
etrangers
~ \\
. S.N.I
34 \\
* Nous avons voulu reprendre ici le tableau I de la page
246
avec un peu plus de details.

- 276-
Ce ratio connai tra ensui te un flechissement a partir de
1986/1987 avec la mise en place du credit de consolidation comme
on peut le voir avec le tableau X.
Ce
ratio
a
donc
une
portee
limitee
dans
le
cas
que
nous
analysons.
En effet,
les variations de la composante emprunt a long
et moyen terme des capitaux permanents peuvent avoir plusieurs
significations. Leur augmentation n'est pas forcement synonyme
d'apport d'argent frais, de meme que leur diminution ne signifie
nullement qu'il y a eu des remboursements d'emprunts. Dans ce cas
precis leur evolution a la baisse s'accompagne d'une augmentation
des dettes a court terme du fait des impayes et de l'e~zigibilite
de
la
partie
echue.
Cette
variation
n' est manifestement
pas
synonyme de remboursement effectif de credits. Ce qui se passe
dans l'entreprise Milky-Way de 1984 a 1986 et qui se renforce a
partir de 1987 en est une confirmation.
Cette evolution a la baisse des dettes a long et moyen terme
enregistree de 1983/1984 a 1985/1986 resulte donc uniquement du
passage au bas du bilan, de la partie echue ou exigible dans un
delai d'un an.
Il s'en suit un alourdissement inevitable de la
charge
financiere
du
fai t
du
comportement
de
rentier
de
la
Banque, deja decrit. Cette meme analyse reste valable pour des
augmentations de ce poste. Celles-ci ne doivent pas toujours etre
interpretees comme un accroissement du volume des financements
ou une amelioration de la situation financiere. D'ailleurs, elles
ont davantage resulte de la capitalisation des interets, de leur
incorporation a l'encours bancaire dans le but de la preservation
de la marge des banques du pool de financement.
En effet,
en
1986/1987, les banques decident de la consolidation des impayes
sur les credits d'investissements les portant a 2 333 millions
de F CFA avec bien entendu un impact nul sur la tresorerie de
cette PME. Puis, au fur et a mesure du temps,
les interets non
regles vont etre capitalises et incorpores a ce nouveau montant
de la dette.
L'incidence de cette operation sur les cOtlts de
l'entreprise est previsible.

PLAN D'AHORTlSSEMENT
DES CREDITS CONSOLIDES
Tableau
XI
(Credits exigibles et echeances a tomber des credits d'investissement)
DATE DES AMORTlSSEMENTS
MONTAlIT TOTAL A REMBOURSER (1)
AMORTlSSEMDITS SEMESTRIELS DD PRmCIPAL
31.12.86
2 233
50
30.06.87
2 183
50
31.12.87
2 133
50
30.06.88
2 073
60
31.12.88
2 013
70
30.06.89
1 943
70
31.12.89
1 873
60
30.06.90
1813
60
31.12.90
1 753
80
30.06.91
1 673
80
31.12.91
1 593
100
r--.
r--.
30.05.92
1 493
100
N
31.12.92
1 393
125
30.06.93
1 268
125
31.12.93
1 143
150
30.06.94
993
150
31.12.94
843
175
30.06.95
568
175
31.12.95
493
180
30.06.96
313
163
31.12.96
150
150
- Dun~e : 10 ans
- Taux d'interet : 8,21 % l'an
(1) Ces montants s'entendent apres affectation des 100 millions provenant de l'augmentatioD de capital et cornptabilisatioD separee
du premier abandon de 150 millions. Par consequent, en cas de Don respect integral du protocole, les montants ci-dessus sont a majorer de
150 millions de franc CFA.
30urce : Extrait du protocole de consolidation etabli entre
le pool bancaire et la societe Milky-Way.

-L/'d-
Cette analyse ouvre sur une approche plus globale de la
structure
financiere
de
l'entreprise
en
meme
temps
qu'elle
attenue l'importance du ratio d'autonomie financiere.
Le poids
des
fonds
propres
dans
les
res sources
a
long
terme
de
l'entreprise s'est quelquefois situee au voisinage de 50 %, ce
chiffre ne traduisant qu'un faible delai de rernboursement des
dettes
a moyen terme et une
indifference
par
rapport
aux
problemes particuliers de l'Entreprise. Une forte proportion des
fonds propres en d'autres circonstances, essentiellement lorsque
l'entreprise
presente
une
structure
du
bilan
equilibree,
s'inscrirait mieux dans une logique d'autonomie financiere et de
reduction des couts financiers.
Dans
notre
exemple,
le
ni veau
des
capi tame
propres
ne
traduit surement pas cette independance. Les resultats obtenus
par l'entreprise n'y ont pas contribue. La valeur de l'entreprise
s'est amelioree tres lentement a la faveur de l'accroissement des
charges
liees
a
la
dette
ainsi
que
des
aut res
charges
d'exploitation. L'evolution de l'actif net montre bien cet etat
de
lethargie
dont
les
augmentations
successives
de
capital
n'arrivent pas a sortir l'entreprise. Positif au depart, il
se
chiffre it 487,5 millions de francs CFA en 1983,
(28) millions en
1986.
11 remonte en 1987 s'etablissant it 624 millions.
Cette
ascension
est
ponctuelle
et
consecutive
au
coup
d' accordeon
auquel l'entreprise procede en 1986. Cette technique financiere
bien que controversee it cause de son caractere partiel a pour
merite d'assainir,
tout au moins ponctuellement,
une situation
financiere compromise. Elle consiste en une reduction du capital
absorbee par les pertes dans un premier temps et dans un deuxieme
temps en un apport d'argent frais sous forme d'augmentation de
capital. Dans le cadre du redressement financier de Milky-Way par
la reduction des couts,
elle,
n'aura qu'un impact limite. Les
dettes qui sont a l'origine de cette situation ne seront pas
eteintes mais plut6t aggravees dans la mesure Oll la capacite de
rernboursement de la dette et l'environnement de l'entreprise sont
ignores.
On le voit bien a travers l'evolution de la situation nette
; eh 1988 elle est d'un montant de 282 millions; en 1989 de 406

- 279 -
millions et en 1990 de 154 millions. Les seules augmentations du
capital res tent une mesure incomplete et d'une potee limitee sur
la valeur de l'entreprise, sur ses couts et sur ses possibilites
d'independance.
Des
mesures
reelles
ont
pourtant
ete
adoptees
par
les
autorites
economiques.
Elles
ont
consist~
~
la
protection
tarifaire ou ~ la limitation des importations.
Seulement,
ces
mesures n'ont pas toujours ete suivies ~ temps par une action
coordonnee de tous les autres acteurs de la vis de l'entreprise.
Une
synchronisat·ion
de
cette
action
gouvernementale
et
d' un
financement mieux adapte du fonds de roulement aurait sans doute
permis de relancer l'activite. Elle aurait ainsi pu contribuer
~ la realisation de meilleurs resultats plus aptes a assurer la
couverture des echeances des remboursements.
Sur
ce
point,
l'elargissement
de
la
fonction
d'intermediation dans les economies modernes 16 ,
tend a combiner
solutions reelles et solutions financieres dans leur intervention
dans le financement de l'economie.
Les institutions de credit
developpent ainsi de fa~on connexe des operations de conseil et
d'assistance en gestion qui permettent de preserver le capital
investi et de contribuer au developpement industriel. C'est tout
au moins ce que l'on observe a l'heure actuelle dans d'autres
economies.
Ces
nouvelles
fonctions
deja
experimentees
ailleurs
en
occident et meme dans d'autres economies africaines ne semblent
pas
encore
integrees
dans
la
pratique
bancaire
dans
notre
economie.
Les
solutions
souvent
sectaires
du
pool parce
que
uniquement fianncieres ou purement comptables telles que le coup
d'accordeon ou une consolidation des engagements n'ont pas reussi
a retablir l'equilibre financier de l'entreprise. Elles sont le
16
En France la loi bancaire du 24
Janvier 1984,
comporte
differents volets dont une plus grande implication des
etablissements

de
credits
dans
les
projets
finances
pour
facili ter
la
creation
et
le
developpemen t
des
entreprises.
On
lira a ce sujet, M.
De MOURGUES,
la
monnaie : Systeme financier et Theorie Monetaire op cit
p 193-194.

- 2S0-
reflet
de
cette
lente
assimilation
d'une
fonction
plus
dynamisante de l'intermediation.
Ainsi que nous venons de le voir,
les capitaux propres de
l'entreprise
ne
constituent
qu'une
partie
des
res sources
necessaires au financement de la production. Ceci explique que
la theorie economique
et singulierement l'analyse keynesienne,
propose une alternative a l'insuffisance de l'autofinancement.
La
fonction
de
financement
reconnue alors
aux
intermediaires
financiers 17 consiste a apporter les capi taux complementaires
requis par le biais du credit.
11 s'agit dans cette perspective d'un financement a duree
limitee ayant cette particularite qulil astreint l'entreprise au
remboursement des fonds re~us. Cette contrainte monetaire18 est
fondamentalement dynamique en tant qu'elle implique la creation
d'une
richesse
nette
suffisante.
Elle
suppose
de
ce
fait
l'existence
de
conditions
permissives
de
l'enrichissement
a
travers une activite .continue et
reguliere et la permanence de
l'investissement.
Au niveau de l'entreprise, la regularite de l'accumulation
s' analyse
a travers
la
"valeur
totale"lSl
de
l' entreprise
consideree comme la valeur du capital realisee a la fois a partir
des fonds propres et des ressources d'emprunt a long et moyen
termes.
Cette valeur est d'autant plus elevee que le recours a
17
Keynes,
a la suite de Quesnay et Marx
classe les agents economiques en trois
categories.
La caracteristique de sa
distinction est sa preoccupation fonctionnelle,
la fonction de financement etant assuree essentiellement

par lea intermediaires financiers.
18
Cette expression est empruntee a F. Poulon pour
traduire la place qu'occupe le remboursement
du credit dans le processus d'accumulation.
On
lira pour plus de details.
F.

Poulon,
la
Monnaie
dans
la
Theorie
de
l' equilibre
du
Circuit in Monnaie et
Finance,
les
cahiers
franyais
nO
238
oct-dec
1989
-
F.
Poulon,
Macro-economie Approfondie,
Edit
Cujas
: Paris 1982 p 340 et suivantes.
19
~
Ce concept est emprunte a F. AFTALION,
B.
DUBOIS et J.
MALKIN,
Theorie Financiere
de l'Entreprise,
PUF,
paris
1974.
cite
par F.
Poulon Economie Generale,
Dunod 1984 p 251.

- 281 -
des capitaux et rangers gene re un enrichissement eleve au moins
egal a celui
de la dette, au moment du remboursement. La valeur
totale est donc une fonction inverse des charges recurrentes des
credits. Dans le cas des PME camerounaises, celle-ci depend de
la qualite des structures du systeme bancaire et de leur aptitude
a
offrir
aux
emprunteurs
des
financements
appropries
a des
condi tions
pri vilegiees
de
delais
et
de
taux
d' interet.
Ces
conditions semblent determinantes sur la structure financiere et
son evolution. Elles le sont d'autant plus que les previsions que
fai t
l' entreprise
et
qui
reposent
sur
les mesures
actuelles
laissent apparaitre une aggravation de sa situation financiere.
(Tableau X) .
Des entretiens que nous avons
eus avec le Directeur General de
la Societe Milky-Way qui est en meme
temps le Secretaire General
du
Syndicat
des
Industriels
Camerounais,
(SYNDUSTRICAM)
il
ressort
que
l' acti vi te
reste
tres
en dec;::a
des previsions
du
tableau X

oossm !ffi.IY-WAY
Tableau X
PRE'illIcms DI EXPLOITATIml Ell MS F CFA
RUBRIQUES
88/89
89/90
90/91
91/92
92/93
VENTES
EN VALEUR
2.200 MS
2.700 MS
2.979 MS
33377 MS
3.607 MS
EN QUAlITITE
3 600 T
4 320 T
4 800 T
5400 T
5800 T
* PART MARCHE
(48 %)
(57,6 %)
(64 %)
(72 %)
(77 %)
RESULTAT NET
(363 MS)
(179 PS)
(52 PS)
(94 MS)
(178 PS)
CASH-fLOW
(153 MS)
(96 MS)
(158 MS)
(304 MS)
(388 MS)
POTIn' MORT
EN VALEUR
3.571 MS
3.640 MS
3.149 MS
3.080 MS
3.061
EN QUAlITITE
5 760 T
4 980 T
5099
T
4987 T
4956 T
VARIATION FR
285,98 MS
264,95
MS
379,91 MS
211,48 MS
4,27 MS
N
,
00
88/89
89/90
01
90/91
91/92
92/93
PREVISIONS
BESOINS EN r~TIERES IERES
1352 MS
1580 PS
1739 PS
1981 PS
2114 PS
* Marche du lait : 7500 T/an
"I<
Point mort - : 5240 'l' soit 65 '\\ marcbe
.':bJn:;e : EXtrait
du Projet de Restruct:uratim MIlKY - WAY

~283 -
La situation est encore plus difficile depuis la devaluation
du franc CFA,
les besoins en fonds de roulement ayant plus que
double.
La banque qui
finance
actuellement
l'exploitation,
le
Credit Agricole du Cameroun20 a certes ouvert quelques lignes de
credit. Mais son action reste tr~s prudente pour au moins deux
raisons
- D'abord du point de vue du montant des besoins en mati~res
premi~res et pi~ces de rechange, ces elements sont tous importes
et la devaluation a enormement rencheri leur valeur.
- Ensuite au regard des lourds engagements vis-a-vis du pool
bancaire
de la Milky-Way, que l'entreprise ne peut pas honorer.
L'attitude de cette banque s'explique bien dans la mesure
ou le protocole d'accord etabli en 1986 entre le pool bancaire
et la Milky-Way n'a jamais ete mis en application a cause de
l'evolution
negative
du
cash-flow
en
d'autres
termes,
de
l'incapacite de l'~ntreprise a rembourser sa dette. Bien plus,
le gel des r~glements a conduit a l'aggravation de la dette du
fait de nouveaux interets. Celle-ci se chiffre en Juin 1993 a la
somme de 4 768 millions de francs CFA, sans qu'il y ait eu des
credits supplementaires a cette PME. Le protocole de 1986 n'ayant
pas ete suivi,
les differentes rubriques constitutives de la
dette vont etre ajustees. Elles sont retracees dans le tableau
XII ci-dessous.
20
Le Credit Agricole du Cameroun est une banque
de crQation rQcente
(1989)
dont l'intervention
dans l'activite de la Milky-way est quelque peu
facilitee

par
le
fait
que
le
President
du
Conseil
d'Administration
(PCA)
de cette banque est en meme
temps PCA de la Societe Milky-Way.

- 284 -
Tableau XII - Engagements
( en millions F CFA ) de la Societe
Milky-Way
BIAO
PARlBAS
BeD
Total
. CMT
167,7
123,9
73, 6
365,2
. Credit
achet. F<;ais
395,6
102,0
387,2
.Credit
achet . Ital.
136,3
38,8
1 059,9
. Credits
irnpayes
532,7
172,0
239,9
944,6
Decouvert
313, 1
97,0
90,3
500,4
.Decouvert
consolide
711, °
-
-
711,0
.Agios
irnpayes sur
decouvert
1 186, 6
-
-
1 186,6
Total
3 443,0
780, 1
544,6
4 767,7
Source
Projet de restructuration etabli par la SRC,
Juin 93

- 235 -
C'est donc une creance sur la Milky-Way d'un montant de pres
de
5 milliards
de
francs
CFA que devra
gerer
la Societe de
Recouvrement des creances du Cameroun "SRC" a. laquelle le dossier
est transfere apres la mise en liquidation de la B1AOC, chef de
file du pool. L'action de cette institution, comme no us allons
le voir, sera determinante dans le denouement de cette affaire,
et de fa~on plus generale dans celui de toutes les entreprises
en difficultes dont elle gere desormais la dette.
Les
mesures
de
redressement
du
desequilibre
financier
decidees par lesbanques se sont averees inadequates. Parce que
parcellaires
et
incompletes
elles
n'ont
pas
pu
arreter
la
degradation financiere de la societe Milky-Way.
Des
investigations
dans
le
sens
de
possibilites
d'amelioration du role des banques dans le financement des PME
nous ont pourtant permis d'observer a. travers le capital risque21
des experiences differentes de comportement bancaire vis-a.-vis
des
PME.
Des
exemples
ont
ete
re tenus
sur d' autres
pays
et
semblent s'inscrire dans un cadre plus elargi et plus adapte de
la fonction d'intermediaire financier. 11 s'agit notamment de cas
revelant
une
plus
grande
implication
des
banques
dans
des
affaires qu'elles ont financees, un role sans doute que pourrait
jouer la SRC, pour le cas que nous etudions.
$3
Des
Perspectives
de
Solutions
Alternatives
au
Problerne des PME Carnerounaises
Des
perspectives
se dessinent
en effet
avec
la mise en
place,
a la faveur du programme d'ajustement structurel, d'une
nouvelle structure, la Societe de recouvrement des Creances du
Cameroun.
Creee
en
Aout
198922
dans
le
cadre
de
la
restructuration du systeme bancaire, la SRC est un etablissement
21
On peut lire a ce sujet J. BESSIS,
Capital Risque et Financement des
Entreprises Edit Economica,
Paris 1988 296 pp.
22
-
Decret nO
89/1283 du 18 Aoat 1989 portant
creation
de la Societe
de
Recouvrement des Creances du Cameroun.
Complete par le Decret nO
91/066
du 23 Janvier 1991.

- 286 -
financier a caractere industriel et commercial. Elle est chargee
de la liquidation a l'amiable des actifs et du passif de tout
etablissement
public
de
credit
qui
lui
est
confiee
par
le
Ministere des Finances.
Son activite est egalement etendue au
recouvrement
contre
remuneration
des
creances
douteuses,
litigieuses
ou
contentieuses
detenues
par
des
institutions
publiques
sur
demande
ou
apres
approbation
de
l' autori te
de
tutelle. Elle peut accessoirement effectuer toutes operations de
recouvrement qui lui sont confiees soit par d'autres entreprises
financieres ou non des secteurs para-public et prive.
Actuellement
son
acti vi te
porte
sur
le
recouvrement
de
l' ensemble des creances compromises ou preoccupantes des banques
restructurees. A ce titre elle detient un portefeuille compose
dans l'ensemble d'entreprises en difficultes, dont la Milky-Way.
L'interet de cette structure dans notre analyse se justifie en
tant qu'elle a un role determinant sur l'avenir de l'appareil
economique. Au-dela de son activite de recouvrement, sa position
actuelle
la
predispose
a
la
consti tution
en
son
sein
d' une
centrale des risques,
et meme d'une centra le des bilans,
sans
doute
pour
une
action
integree
plus
complete
et
plus
enrichissante sur un double plan micro et macro economique.
Le recours a la theorie des contrats 23 nous semble etre dans
ce cadre un support theorique a travers lequel peut etre lue et
analysee
l' importance particuliere de
cet organisme.
Dans
le
contexte precis qui
est celui de sa creation et son evolution,
c'est-a-dire d'un systeme bancaire que l'on voudrait retablir
dans
sa
credibilite,
la
fiabilite
de
l'information
est
un
facteur de reussite incontestable.
En effet, deux theories celle de l'agence et celle des couts
23
Cette theorie est principalement associee a des
auteurs tels que G.
A.AKERLOF
(1970)
K.
J.
Anow,
G.
DEBREU,
JJ LAFFONT.
Une application de cette
analyse aux marches financiers informels est
presentee par B.
BEKOLO-EBE,
Contrats Agences
et Tontines,
GEREA Working Paper Mars 1993.

i87 -
de
transaction24 se sont developpees
au sein de theorie des
contrats. Leur developpement est lie a l'insatisfaction ressentie
par
rapport
au
modele
de
base
des
auteurs
classiques
et
neoclassiques etabli dans le cadre de 1 'information parfaite et
de la concurrence generalisee. Le marche de concurrence pure et
parfaite
supposant
la
fluidite,
l'information
circulerait
gratuitement et de fa~on symetrique entre les agents economiques.
MAis
une
telle
approche
semble
bien
limi tee
pour
expliquer
utilement le comportement des agents economiques. 11 en est ainsi
du comportement paradoxal de l'entreprise debitrice ou de celui
du banquier preteur qui faute d'informations adequates n'ont pas
pu effectuer des choix optimaux dans leurs fonctions respectives.
La
theorie
des
contrats
apparait
donc
comme
une
remise
en
question de l'information parfaite par le simple jeu du marche.
Face a des si tuations d' absence d' information, d' information
insuffisante
ou
biaisee,
elle
vise
a corriger
l'asymetrie
informationnelle et devrait contribuer a la realisation de choix
optimaux en deduisant les risques d'alea-moral ("moral hazard")
et
d' anti -selection
(" adverse
selection")
C' est
donc
l'existence de cet "adverse selection" et du "moral hazard" qui
justifie l'importance de ces theories.
La distribution asymetrique de l'information generatrice de
ces risques revele de la meme maniere i'existence de cofits de
l'information que ces theories cherchent a minimiser.
L'acces a l'information
dans ce cas n'est pas automatique,
il ne s'accomode ni de gratuite ni de symetrie. Et, dans le cas
d'un
systeme
bancaire
en
restructuration
la
place
d'une
information
complete
n'est
plus
a
demontrer.
Une
bonne
connaissance
des
problemes
profonds
de
l'economie
et
des
entreprises, des resultats obtenus sur les differents secteurs,
les
differents mecanismes et instruments, de la composition
du
portefeuille des banques pourrai t
etre le point de depart de
24
Elles sont analysees essent~ellement par J.
J.
Arrow;
GROSMAN,
SANDFORD et STIGLITZ
(1980).
On l~ra a ce
sujet,
C. D'ASPREMONT et A1~i, Contrats et Marches,
EncyClopedie d'Economie,
Economica 1990.

-·288 -
plans d'actions coordonn~es et mieux maitris~es.
L'intervention de la SRC dans la restructuration du systeme
bancaire camerounais pourrait alors,
si son interet etait bien
perc;:u par les autori tes economiques camerounaises, comporter deux
volets.
- D'abord elle pourrait etre directe. Ceci suppose que ses
fonctions soient etendues a la rehabilitation des entreprises en
difficultes.
Une
telle
orientation
n~cessite
d'importantes
ressources humaineset financieres. Elle peut etre g~r~e a son
seul niveau ou alors n~cessiter le recours au refinancement de
la banque centrale.
Son
action
pourrait
et re
~galement
indirecte.
Elle
consisterait a renseigner les institutions de cr~dits sur les
secteurs et les entreprises a rehabiliter. Elle jouerait alors
un
role
d'Agence.
Cette orientation
a
pour
principal
centre
d'interet
la
cr~ation d'une
v~ritable source
d'informations
~conomiques et
financieres.
Nous
avons
d'alleurs,
dans
des
d~veloppements ant~rieurs d~plore l' absence d' ~tudes sectorielles
en
tant
que
canevas
indispensable
pour
un
processus
d'industrialisation
qu'on
veut
durable.
Cet
~tablissement
pourrait offrir a l~economie des renseignements importants sur
ses
secteurs
sinistr~s,
sur
la
nature
des
risques,
sur
les
actions engag~es et les r~sultats obtenus,
ayant
toujours
la
pr~occupation de couts
d'information minima.
Il informerait egalement sur les bons risques et les atouts
majeurs qui ont permis
a certaines entreprises de mieux r~sister
aux mouvements de la conjoncture ~conomique. 11 fonctionnerait
donc comme un coussin de
s~curit~ qui minimise les risques
d'echecs de nouvelles unites industrielles sur la base de mesures
r~elles et financieres idoines.
Dans notre exemple,
le probleme financier semble et re le
plus delicat. En effet,
le transfert du dossier Milky-Way a la

SRC se fait sur la base d'une dette de l'entreprise
fixee 25 a 4
768 millions de francs et dont les details sont donnes dans le
tableau XII ci-dessus.
Le
transfert
du
dossier
a la SRC offre a l' en treprise
l'avantage de la negociation des modalites de remboursement du
montant reclame. Les negociations s'engagent ainsi des Juin 1993
et l' entreprise propose a la SRC un plan d' amortissement qui
comporte trois points fondamentaux.
- Dans un premier temps,
la Societe Milky-Way demande que
la distinction soi t" fai te entre le principal et les inten':~ts.
- Dans un deuxieme temps,
elle
souhaite qu'un abandon de
creances 1ui soit consenti de maniere a ramener a 946
millions
le montant total a payer a la SRC pour solde de tout compte.
- Dans un troisieme temps enfin, les rernboursements devront
etre echelonnes sur 13 ans apres 5 ans
de differe, etant entendu
que les deux derniers points sont assortis d'une clause de retour
a meil1eure fortune.
Si
le dossier Milky-Way n' a pas
ete
accepte
sous
cette
forme,
il n'a pas non
plus conduit a une conclusion definitive
de cette affaire dans le rnontant a reclarner et sur la duree fixee
pour le reglement integral des impayes de l'entreprise. Une fois
de plus, on se retrouve en presence d'une rigidite des structures
et
des
cornporternents
qui
a
pour
consequence
de
paralyser
l'exploitation. Ceci est d'autant plus vrai que l'une des raisons
pour lesquelles le "Credit Agricole du Cameroun" reste prudent
est qu'un protocole de rernboursement entre la SRC et la Milky-Way
reste pour lui un element important d'appreciation de la nouvelle
capacite d'endettement.
Le
poids
des
charges
financieres
supportees
par
cette
entreprise a enormement alourdi le poids de ses engagements. En
attendant qu'une solution definitive a son probleme soit apportee
par la SRC chargee du recouvrernent de sa dette, son activite
25
Les recouvrements de la SRC se font par rapport
au rnontant transfere,
cet etahlissement financier
ne calculant pas d'inter~ts sur ~es sommes dues aux
banques en liquidation.

·290 -
marque le pas.
Toutefois, si les couts financiers de cette entreprise sont
une composante centrale de ses charges,
ils ne sauraient etre
consideres
cornrne
l' unique
charge
de
son
exploi ta tion.
Toute
activite
de
production
suppose
en
effet
un
certain
nornbre
d'autres charges. Nous avons voulu insister
sur celles qui nous
sernblent determinantes et incontournables et qui traduisent bien
les
caracteristiques
des
PME.
11
en
est
ainsi
des
charges
financieres
et
egalement
des
paiements
des
prestations
de
l'assistance technique.
Dans nos analyses precedentes des problemes de creation et
de developpement des PME,
nous avons cite en bonne place apres
les
problemes
de
financement
bancaire,
ceux
de
maitrise
technologique. NOus n'insisterons pas dans ce cas sur ce dernier
probleme qui se pose avec moins d'acuite que dans l'exemple qui
va suivre.
Nous voulons tout de meme en
souligner l'importance dans
la mesure OD la pression qu'elle exerce sur des couts deja eleves
a oblige l'entreprise a une solution alternative.
$ 4 - Le Ceut de la Cempetitivite des Preduits MILKY-WAY
L'interet reside des lors dans la maniere dont s'opere la
transition.
Les
couts
que
nous
qualifions
de
couts
de
la
competi ti vi te
revetent
deux
formes
d' abord
celle de
couts
indirects appeles cout de l'assistance technique puis une forme
plus directe appelee cout de la concurrence proprernent dite.
4.1
Les Ceuts de l'Assitance technique
Nous
avons
dej a
souligne
la
complexi te
de
la
decision
d'investissement
et
de
ses
determinants,
parmi
lesquels
les
facteurs
technologiques.
La
realisation
d'un
investissement
necessi te
la
prise
d' une
serie
d' engagements
risques
interconnectes et souvent irreversibles. L'etendue du marche, la
concurrence, le type de produi t, ses caracteristiques techniques,

_. 291 -
la technologie n~cessaire, doivent ~tre pris en compte26 •
l'entreprise Milky-Way rentre dans un secteur nouveau pour
l'industrie locale, un secteur encore inexplor~. La fabrication
de
son
produit
n~cessite
des
lors
le
d~ploiement
d'une
technologie
qu'elle
ne
possede
pas.
l'acquisition
de
cette
technologie
implique ainsi
des
couts
incontournables dont
le
poids sur la d~pense d'investissement est a la dimension de la
qualit~ des produits de la concurrence. Cette exigence de qualit~
explique l'~volution de l'assistance technique pr~sent~e dans le
tableau ci-dessous ..
Tableau IV
EVOLUTION ASSISTANCE TECHNIQUE
Groupe SIFA
.
Octobre 1980 soit 6 mois apres
cr~ation
Resiliation contrat SIFA
(choix mauvais process) ...
Octobre 1982
Groupe France-Lait/Silom ..
D~cembre 1982
R~siliation contrat
France-Lait/Silom
.
Mai 1987
Projet contrat avec SIPL
de Dakar
.
Juin 1988
Apres l'echec de la premiere exp~rience de partenariat caus~
par le choix d'un mauvais process,
l'entreprise passe un autre
contrat avec de nouveau;{ partenaires. La collaboration durera 5
ans
sans
problemes
techniques
maj eurs.
Malheureusement,
les
parties y mettront un terme en 1987
;
la production devant a
partir
de
cette
p~riode
~tre
assur~e
entierement
par
des
nationaux. Mais pourquoi I' entreprise en est-e11e arrivee a cette
rupture?
Nous
tenterons
d'en
comprendre
les
raisons.
Deja
nous
pouvons penser que les raisons seront surtout financieres.
26
J.
NELL,
Notes
sur
la
finance,
le
risque
et
la
depense
d'investissement in Keynes aujourd'hui
: Theories et
politiques
,
op cit P 278.

- 292 -
4.1.1
L'Objet
du Contrat
11 est passe entre la societe Milky-Way et son partenaire
technique bailleur du process un contrat d'assistance technique.
Ce contrat prevoi t ce qui sui e 7
1 - le partenaire s'engage a preter l'assistance technique
necessaire au fonctionnement de l'usine de lait concentre de la
societe MIlky-Way a Douala.
Pour ce il accepte de prendre en charge pendant six mois,
a dater de l'arrivee du technicien, l'outil tel qu'il a ete
con9u,
mais
en
ayant
fait
toutes
reserves
par
rapport
au
protocole d'accord du 27 Novembre 1982 sur la tenue dans le temps
du produit obtenu.
11 s'engage vis a vis des dirigeants de la societe Milky-Way
a entreprendre au bout d'une periode probatoire de six mois,
toutes modifications necessaires au bon fonctionnement de l' usine
dans des conditions d'exploitation correctes ;
2 -
ce partenaire s'engage a mettre a la disposition de
Milky-Way un directeur technique pour une duree de deux (2) ans
renouvelable, ainsi.qu'un technicien qualifie pour la fabrication
et le contr61e du lait concentre.
3 -
il est,
en outre,
prevu jusqu' a la fin du contrat
initial trois visites minimum annuelles d'un ingenieur.
4.1. 2
La Remuneration du Contrat
4 - Le paiement des prestations d'assistance technique se
fera sur les bases suivantes :
remboursement
pour
chaque
intervenant
de
la
charge
27
Les
points
enUI'llE!res
ci-dessous
sont
extra.its
du
contrat
d'assistance technique,
de formation,
de mise & disposition
de marque etabli en date du 15/12/19.82 a Paris entre Milky-Way
et son partenaire technique.
Nous avons dans le texte substituele terme pa.rtenaire

a la.
~
sociale de ce merne partenaire technique.

salariale totale
(c'est-a-dire au prorata du salaire annuel de
l'interesse ;
- s'y ajoutent, toutes les charges sociales, taxes et divers
estimes globalement et forfaitairement a 80 % du salaire percu
par le missionnaire
- versement d'une indernnite de FF 200,00 par jour et par
missionnaire ;
- remboursement des frais de logement et de voiture pour le
directeur technique et les techniciens, avec prise en charge d'un
voyage annuel en France.
5 - Le montant des sommes dues a ce titre devra etre paye
dans le mois suivant la fin
du trimestre civil ...
7 - le partenaire rnettra ses moyens marketing, commerciaux
et publiciatires ainsi que son experience en ce domaine,
a la
disposition de Milky-Way pour la diffusion et la penetration de
sa marque, pour l'interet cornrnun des
deux societes.
Cet
accord
de
mise
a
disposi tion
de
marque
n' est
pas
exclusif l' entreprise pourra disposer en particulier d' une marque
nationale pour le developpement de ses ventes locales ...
11
La
remuneration
pour
le
transfert
du
know-how
consistera en une redevance sur la totalite du chiffre d'affaires
hors taxe de la societe Milky-Way. Son taux est de 2 % des ventes
hors taxes.
11
importe
de
souligner
qu'il
s'agit
bien
lCl
d'une
remuneration dont l'assiette est le chiffre d'affaires realise.
Le contrat implique ainsi une forme de remuneration a deux volets
-
un premier volet qui comprend les salaires et charges
salariales a payer au personnel de l'assistance technique;
- un deuxieme ·volet qui s'appuie sur le chiffre d'affaires
realise,
l' ensemble
representant
une
ponction elevee
sur
les
ventes realisees par la societe Milky-way et non sur son resultat.

-29.1 -
l'importance des charges liees a ce contrat a enormement
pese sur la tresorerie de l'entreprise, sur son activite et ses
resultats,
contraingnant
l'entreprise
a rechercher d'autres
competences. Ainsi, en 1987, la direction technique a ete placee
sous
la
responsabilite
des
nationaux.
Et,
on
assiste
ces
dernieres annees avec l'appel a des partenaires etranger voisins,
a une forme de collaboration moins onereuse du fai t de la
proximi te geographique des contractan ts,
de la s imi 1i tude des
niveaux de vie, et de la faible difference dans les e;<periences.
Cette nouvelle forme d'assistance technique se developpe entre
les
entreprises ·operant
dans
le
meme
secteur
entre
pays
de
niveaux de developpement voisins. Elle consiste essentiellement
en l'echange des experiences et des connaissances acquises sur
le plan technique.
La societe Milky-Way a passe dans ce cadre, un contrat avec
la societe industrielle de produits laitiers de DAkar au Senegal,
en abrege "SIPL". Des missions et seminaires sont organises en
faveur des personnels charges de la production. 11 apprennent a
ces occasions a se familiariser aux equipements et aux problemes
que posent leur fonctionnement.
Ces contacts directs avec des
partenaires
plus
proches
par
la
similitude
des
difficultes
favorisent
la
comprehension
mutuelle
et
l'acquisition
de
connaissances a un faible cout.
11 serait toutefois interessant de s' arreter sur l' incidence
de cette nouvelle forme de cooperation technique sur la qualite
et la competitivite du produit fabrique.
4.2
Le Cout de la Concurrence
La
societe
Milky-Way
se
trouve
sur
le
marche
laitier
national, confrontee a la concurrence de la firme mulitnationale
NESTLE creee depuis
1893 avec la mise
en place des premiers
groupes industriels 28 • La nature de la
concurrence, ici est pour
29
La
multinationalisation
a
commence
a. la fin du 1ge siecle avec la
constitution des premiers empires miniers et petroliers suivis par
les groupes industriels dont NESTLE cree en 1993.
Voir a
ce sujet J.
G. MERIGOT et A.
LABOURDETTE,
Elements de Gestion
Strategique des Entreprises op cit p 314.

- 295 -
le moins caracterisee par le desequilibre entre
ces deux unites.
Ce desequilibre nous pouvons le situer a plusieurs niveaux : au
ni veau
de
la
poli tique
financiere,
a
celui
de
la
nature
de
l'activite puis du type d'organisation.
- D'abord au niveau de la politique financiere : celle-ci
est fondamentalement differente dans les deux entreprises. Ainsi,
NESTLE
a
conune
toute
FMN,
la mai trise des moyens
financiers
necessaires a son action29 • Ses moyens lui offrent la possiblite
de
reagir
rapidement
et
meme
d' anticiper
le
comportement
du
concurrent 30 • On ne peut pas en dire autant de Milky-way qui est
particulierement ·limi tee sur la plan financier.
Ensuite,
s.'agissant
de
la
nature
de
l'activite,
l'entreprise Milky-Way est une unite industrielle qui doit faire
face
aux
contraintes
de
toutes
sortes
qui
accompagnent
la
specialisation
dans
un
produit
unique.
A
contrario,
l'intervention de NESTLE sur le marche des biens de consonunation
courante
couvre
une
ganune
variee
de produi ts.
En outre,
son
activite en ce qui concerne le lait est circonscrite au niveau
de la distribution. Elle dispose donc de plus de latitude pour
l'organiser.
Enfin,
les
methodes
d'organisation
ont
ete
longuement
eprouvees au sein d'une entreprise qui existe depuis plus d'un
siecle. Ses moyens techniques se sont developpes, son systeme de
conununication
et
ses
reseaux
de
commercialisation
se
sont
perfectionnes et etoffes pour couvrir geographiquement tout le
marche camerounais. De meme,
la dimension et la diversite de la
production du
groupe
lui
permettent de mettre
en oeuvre des
moyens offensifs et defensifs pour contrecarrer la concurrence.
11 s'agit la de capacites d'organisation qui sont absentes dans
une PME AElles le sont d'autant plus que la societe Milky-Way est
maintenue artificiellement en vie. Ses couts de production sont
disproportionnes au regard de l'activite et ne laissent que peu
29
R. VERNON, les Entreprises MUltinationales, Edit tendances
Actuelles, Calmann-levy, 1973 preface de A. C. DECOUFLE.
30
-
E.
B. CBAMBERLIN et J. ROBINSoN admettent generalement
que
chaque
entreprise
doit
tenir
compte
de
ses
principaux
concurrents et de leurs reactions possibles.
Cites par R. VERNON,
IDEM.

- 196 -
de
place
a la mise en place de circuits de distribution
efficients.
NOus
l'avons dit,
l'organisation dans
la PME est
approximative et se fait au le jour le jour.
Ces entreprises se situent done a des niveaux differents de
maitrise de leurs couts qui traduisent egalement des differences
dans les objectifs. A l'une se posent encore des problemes de
survie pendant que l'autre
a des ambitions de puissance et de
reduction des incertitudes 31 de la concurrence.
Des analyses plus recentes de la concurrence des FMN mettent
un accent particul~er sur l' aspect
financier
des
entreprises
industrielles. Cet interet est mis en relief
par l'analyse de
J.
NELL.
Abordant
cette
question
sous
l'angle de
la depense
d'investissement
dans
des
unites
concurrentielles,
J.
NELLn
differencie
les
problemes
financiers
selon
qu'il
s'agit
de
grandes ou de peti tes entreprises.
11 met particulierement en
presence des petites entreprises de type familiales et des firmes
multinationales. Pour celui-ci les PME n'ont pas l'acces facile
a des sources de financement. A cote d'elles evoluent de grandes
entreprises modernes dont les conditions de fonctionnement sont
caracterisees par la maitrise et la disponibilite des circuits
financiers.
Le cas Milky-Way - NESTLE peut etre rapproche des deux types
d' entreprises decri ts par l' auteur,
NESTLE
jouant le role de
l'entreprise dominante.
Les problemes que pose cette forme de concurrence dans une
economie comme celle du Cameroun peuvent etre ramenes a deux
principaux points
-
l'exiguite de l'espace national et l'accroissement des
31
Rayrnond VERNON definir deux objectifs essentiels
et complementaires pour les FMN,
un objectif
de puissance et surtout un objectif de "mondial.isation"
de systemes de gestion d'ensembles compl.exes et
de procedures d'intervention.
On lira a ce sujet R. VERNON, les Entreprises Multinationales, Blit
tendances Actuelles,
Calmann-levy,
1973 p 147-149.
Une abondante litterature existe egalement sur lea objectifs
des
FMN.
On
ci te
generalemen t
les
analyses
de
J.
K.
Galbrai th
(1967),
P.
F.
DRUCKER
(1969)
K.
J.
COHEN
(1965).
32
J.
HELL,
notes
sur
la
finance,
le
Risque
et
la
Depense
d'Investiasement in Keynes Aujourd'hui
: Theories
Politiques,
op cit p
279.

- 2r;7-
effets de seuil ;
- le caractere imparfait de la concurrence et les rigidites
dues aux comportements sociaux.
Pour
chaque
type
de
problemes
nous
soulignerons
les
strategies
de
la concurrence
et
les
reactions
de
la
societe
MIlky-Way.
4.2.1
L'Exiguite du Marche
Elle pose le probl~me du choix de veritables strategies,
d' elargissement du marche
dont
l' une
des
composantes
est
la
composition du panier du consommateur. Cette donnee subjective
limite enormement l'action sur les quantites par l'accroissement
des effets de seuil. Manifestation des mutations du processus de
croissance de l'economie industrielle capitaliste, elle souligne
la
necessite
constante
de
l'adaptation
des
entreprises
aux
exigences du marche.
Celso Furtado explique en ces termes les
modifications
graduelles dans la concurrence industrielle
"la
fa<;on
tradi tionnelle
dont
l' entrepreneur
industriel
attaque, dans sa lutte pour elargir son champ d'action, consiste
a offrir sa marchandise a un prix inferieur a celui qui est
pratique sur le marche a un moment determine" ...
. . . "Dans la phase avancee du capitalisme, l' introduction de
nouveaux produits et la publicite deviendront les principales
formes d' attaque de l' entrepreneur,,33.
Le positionnement sur le marche ne depend plus seulement de
facteurs quantitatifs mais egalement de facteurs qualitatifs.
La presentation du produi t, l' innovation, l' organisation des
circuits
de
distribution
et
des
reseaux
d'information,
les
reactions aux sollicitations du marche apparaissent cornme des
armes modernes de performance de l'entrepreneur. Le groupe NESTLE
a su se montrer a la hauteur de cette evolution. Son meilleur
atout a ete la regularite du niveau de l'offre,
la qualite de
33
-
Ce1sofurtado,
Theorie du Developpement Economique,
P.U.F.,
Paris 1976, p
120-121.

-198 -
celle-ci et une action destabilisatrice par les prix comme nous
le verrons par la suite.
Pratiquement,
la
courbe du marche
du
lai t
concentre au
Cameroun degage une tendance ascendante et reguliere jusqu'en
1980, avant l'arrivee de Milky-Way sur le marche.
Ce mouvement connait un flechissement entre 1981 et 1983
puis une reprise en 1984 qui s'est poursuivie jusqu'en 1987.
L'inflexion de 1981 a 1983 est difficile a expliquer. Neanmoins,
nous pensons qu'elle pourrait etre due a une mauvaise saisie des
statistiques ou a
des importations introduites en contrebande.
Le tableau XI z ci-dessous retrace l'evolution chiffree des
importations
et
de
la
production
de
Milky-Way.
La
ligne
importations concerne des produits de marques differentes,
le
lait NESTLE etant predominant du fait de la notoriete du groupe
et de sa forte penetration du marche.
Nous n'avons pas pu avoir des statistiques pour les periodes
anterieures a 1975, mais l'introduction de NESTLE au Cameroun
remonte a bien avant cette date.
Tableau XI z :
EVOLUTION DU MARCHE DU LAIT CONCENTRE SUCRE AU
CAMEROUN
Annee
1975
76
77
78
7P
80
81
82
83
84
85
~.
1761,S
2039,9
3040,4
2645,6
3951,5
4074,8
2485,3
2533,3
2293,3
2034
2098,4
-
-
-
-
-
-
-
-
1009,1
2532,3
3203,2
Prod.
H.W
Total
1761,5
2039,9
3040,4
2645,6
3951,3
4074,8
2485,3
2533,3
3302,4
4566,3
5301,6
SOURCE : Statl.stl.ques de la chainbre ,d~ conunerce.
tl.re
du rapport d'audl.t specl.al de Milky-Way35.
Les possibilites du marche s'etablissent ainsi a environ
5 500 de lait en 1985 et sont estimees a environ 7 000 tonnes
en 1987.
Entre 1984 et 1987, la part de marche de Milky-Way s'est
accrue. D'abord l'entreprise, a beneficie d'une protection
35
-
Audit apecial Milky-Way
(1985)
op cit
p 12

- 299-
partielle du marche sur les deux modeles qu'elle fabriquait
alors, NESTLE conservant l'exclusivite sur un modele.
La tendance s'est renversee avec la crise et la
liberalisation.
Nous n'avons pas de statistiques plus recentes, mais il est
difficile de pens er ~ une extension plus importante du marche
~ cause de la situation de crise actuelle qui a entraine
depuis 1987 une forte baisse des revenus des consommateurs. En
effet, le niveau du revenu moyen
a ete fortement affecte par
les compressions massives du personnel et des licenciements
dus a une baisse drastique des activites et a de nombreuses
fermetures d'entreprises. La degradation persistante du PIB
depuis 1987 en est un indicateur. Le tableau XII z ci-dessous
presente cette tendance baissiere du PIB depuis l'installation
de la crise.
Tableau XII z
EVOLUTION DU PIB EN FRANCS COURANTS AU CAMEROUN
(en milliards de F. CFA)
Ann.
80
81
82
83
84
85
86
87
88
89
90
PIB
1356,2
1696,4
2172,8
2618,1
3195,0
3838,9
4139,1
4004,8
3740,1
3676,9
3597,8
Source : BEAC Etudes et Statl.stl.q ues
N° 182 mai 1991
Le niveau du revenu est important pour la comprehension du
comportement du consommateur a l'egard de certains types de
produits. Le lait, tout en ayant sur le plan nutritif une
grande valeur, appartient a la categorie des bien de
consommation de "type europeen". 11 rentre progressivement
dans les habitudes de consommation, mais ne peut pas toujours
etre considere comme un bien de premiere necessite. Sa demande
est fonction du pouvoir d'achat, et au fur et a mesure que
celui-ci baisse, elle tend a subi des modifications.
L'evolution du chiffre d'affaire de Milky-Way confirme notre
position.

Tableau XIII : EVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRE DE MILKY-WAY
(en millions de F CFA)
83/84
84/85
85/86
86/87
87/88
88/89
89/90
90/91
Ventes
2 166
2 834
3 582
4
284
3 383
2 495
2 307
1 471
en
tonnes
C.A
1 100
1 650
2 250
2 600
2 090
1 747
1 615
1 030
Source
Bllans de la soclete Mllk y -Wa y
Le marche global du lait s'est restreint avec l'intensite
de
la
crise
et
la
baisse
des
revenus
due
a.
la
baisse
des
activites et son corollaire de compressions et de licenciement
de personnels.
Cette si tuation du marche en periode de crise
revele une fois de plus les limites du systeme de financement des
PME
nationales.
L'evolution
des
mecanismes
et
des
produits
financiers ne lui a pas permis de procurer a. l'entreprise des
res sources a. la hauteur d'une bonne strategie d'attaque. Seule
une
action
percutante
et
des
reactions
qui
anticipent
le
comportement des menages aurait pu maintenir et renforcer la part
de marche de Milky-Way.
En
outre,
l'entreprise
n'a
jamais
pu
stabiliser
sa
production.
Celle-ci
f 1uctue
cons tamment
au
rythme
des
approvisionnements "en matieres premieres.
Elle a donc dans ce
sens contribue a. l'infidelisation du client.
Cette entreprise connait en effet de nombreuses ruptures de
stocks de matieres premieres pour deux raisons essentielles
-
d' abord ses
inputs proviennent en grande maj ori te des
importations. La mauvaise situation financiere de l'entreprise
occasionne
une
accumulation
des
impayes
vis-a.-vis
des
fournisseurs.
Ceux-ci
qui
ont
une
importante
creance
sur
la
societe exigent de plus en plus des paiements comptant que la
societe
ne
peut
pas
convenablement
assurer.
Elle
est
donc
contrainte a. des importations ponctuelles dont la consequence est
de rendre difficile la gestion des stocks.
Ce probleme semble surtout lie a. celui des choix en matiere
de politique d' industrialisation. Cette derniere s'appuie ici sur

- 301 -
les importations de matieres premleres suscitant des inquietudes
telles
que
celle
sur
1 r integration du
tissu
economique.
Les
industries
sont
souvent
construites
compte
non
tenu
des
dependances en amont et en aval. Et ici, les composantes du lait
sont importees en quasi-totalite, la production de lait de vache
du cheptel national etant insignifiante au regard des besoins
exprimes.
Malheureusement,
aucun interet n'a ete porte a cet aspect
de la question, aux gaspillages induits en energie, en salaire,
en oisi vete du capi.tal,
a la deterioration consecutive de la
situation financiere. L'importance des couts ne tient pas quIa
ces importations. Elle est egalement liee aux prix des quelques
matieres premieres fabriquees localement. C'est le cas du sucre
qui rentre pour une grande
part dans la composition du produit
fini. Son prix sur le marche national est plus eleve que sur le
marche international. Cette politique commerciale de penetration
des marches exterieurs par une action sur les prix defavorise les
entreprises locales.
Elle leur impose des couts de production
superieurs a ceux de leurs concurrents etrangers par le biais des
inputs locaux.
L'entreprise
M~lky-Way,
a
done
vu
sa
part
de
marche
s'amenuiser au fur et a me sure du temps. Les perturbations dans
le
rythme
d I approvisiannement
en
biens
de
consornma tion
intermediaires a consequemment entraine des arrets de production,
des canges techniques du personnel et une mauvaise maitrise des
couts reels. 11 reste a craindre dans cette situation confuse une
mauvaise tenue de la qualite meme du produit.
Or,
comme nous
allons
essayer
de
le montrer,
l' une
des
caracteristiques du
marche
laitier
au
Cameroun
est
l'influence
de
facteurs
qualitatifs sur le comportement du consommateur. Et, ce produit
s'adresse,
a la faveur de la crise,
a une clientele exigeante
dont la fidelisation n' est pas evidente.
Elle tient de fa<;on
determinante a la qualite du produit, a lleffet de snobisme et
a la solidite des circuits de commercialisation.

- 302-
4.2.2
La
Rigidi te
des
Comportemen ts
Sociaux
et
le
Caractere Imparfait de la concurrence
La vision moderne de la concurrence a amene a une rupture
avec l' approche neoclassique des situations concurrentielles. Une
economie concrete est marquee
par un systeme d' informations
imparfait. Les travaux de F. Von HAYEK35b sont d'un grand apport
dans ce domaine. V. Levy-GARBOUA et B. WEYMULLER traduisent en
ces termes la pensee de l'auteur
HIes consommateurs n'ont pas clairement conscience ex-ante
de leurs preferences et des biens offerts,
les entreprises ne
connaissent pas ex-ante la totalite des possibilites techniques
et economiques ouvertes pour leur production et c'est en fait au
cours du processus meme de la concurrence que ces informations
se
degagent
progressi vement H36.
Les
formes
de
la
concurrence
s' expriment
ainsi
selon des modali tes
sans
cesse renouvelees
toutes
tenant
compte
de
la
rigidite
du
comportement
du
consommateur, de son environnement socio-economique.
La concurrence entre NESTLE et Milky-Way n'echappe pas a
cette
logique.
Elle
reste
forte
et
se
definit
selon
les
strategies
mises
en
place
par
la
premlere
entreprise,
les
reactions de la deuxieme et les contre-reactions de l'entreprise
dominante .
. La politique du Dumping
Elle consiste en la pratique de prix de vente inferieurs
aux coQts de production. Elle nlest possible que si l'entreprise
dispose d'une bonne surface financiere.
Au debut de
l' operation,
la baisse des prix engagee par
l'entreprise dominante est suivie par la petite entreprise. La
degradation des prix se poursuit
jusqu'a
l'essoufflement de
l'unite la plus faible financierement.
35b -
F. Von HAYEK,
competition ao a disco very procedure, in
new studies in philosophy, politics and hiotory
of Ideao,
Londres 1978 cite par V.
Levy-GARBOUA et
B. WEYMULLER,
Macroeconomie contemporaine op cit p
80.
36
IDEM.

- 303 -
La position financiere de Milky-Way ne lui permet pas de
soutenir durablement cette
forme de concurrence. Sa reaction a
davantage porte sur la demande d'une intervention des autorites
economiques. La protection du marche obtenue entre 1984 et 1987
explique qu'elle ait pu ameliorer son chiffre d'affaires pendant
ce temps. Mais cette amelioration du chiffre d'affaires a ete
tout de suite contrecarree par les anticipations de la grande
concurrence. Celle-ci ales moyens d'accorder des facilites de
paiements
d I une
grande
souplesse
aux
importateurs,
leur
conservant leurs marges sur les produits NESTLE. L'impact de ces
projections
est
la
reticence
du
commer~ant
a
changer
de
fournisseur.
La marge confortable que lui garantissent les conditions de
NESTLE est superieure a celle qu'il obtiendrait en vendant les
produits
supermilk,
fabriques
par
MYLKY-WAY.
Ce
phenomene
renforce la contrebande et gene le processus concurrentiel. 11
repose neanmoins sur une grande force financiere et une capacite
de reaction face au;{ blocages strategiques et institutionnels.
Dans les economies contemporaines, la concurrence parfaite
est un my the, elle a evolue vers sa forme la plus subtile et meme
la plus imparfaite. pans les petites entreprises financietement
fragiles,
elle a engendre une multiplicite de coQts :
- des coQts indirects lies au transfert de la technologie,
en tant qu'il ameliore la qualite du produit
des
coQts
directs
qui
naissent
de
la
concurrence
proprement dite. lls se rapportent aux efforts deployes pour se
positionner sur un marche domine par des produits
d' importations
bien ancres dans les habitudes de consommation.
Le coQt de la
competi ti vi te resul te des efforts deployes par
l' entreprise pour
s'imposer sur le marche. Et,
comme les charges financieres,
il
permet de justifier et de valoriser les operations de credit.
La
societe
Milky-Way
nous
offre
un
exemple
de
PME
confrontee a une multitude de problemes ; problemes de gestion,
de maitrise technologique,
de financement de son activite.
11
s'agit la des difficultes majeures des PME telles que nous avons

- 304-
essaye de les cibler et de les
synthetiser dans notre premlere
partie. Dans le cas Milky-Way, ces trois problemes n'ont ni la
meme
intensite,
ni
le
meme
impact
sur
le
developpement
de
l'entreprise. Et,
le plus epineux dans cette unite nous semble
indubitablement le probleme financier.
celui-ci se revele sous
la
forme
d' un
f inancement
bancaire
quanti ta ti vement
et
qualitativement inadequat et dont les principales implications
sont
l'accroissement
continu
des
charges
recurrentes
et
un
desequilibre financier structurel aggrave par un
environnement
economique hostile. La deterioration irreversible de la situation
financiere qui s'en suit va etre peryue par 1 'entrepreneur comme
la consequence d'un comportement de rentier de son banquier. Les
anticipations
pessimistes
qu'il
fait
alors
sur
l'evolutioon
future
de
son
affaire
se
traduisent
dans
des
actes
de
"mismanagement"
inhabi tuels et une hemorragie financiere dont
cette PME n'a pas besoin. Le probleme de gestion qui s'en degage
alors apparait davantage comme une reaction ou une derivee de ces
difficultes financieres et 1 'apprehension d'une perte totale du
capital industriel de
la societe.
Les capacites et aptitudes
intellectuelles
des
dirigeants
de
l' entreprise permettant
de
penser
que
les
defaillances
en
matiere
de
gestion
sont
artificielles
et
auraient
en
d I autres
circonstances
pu
etre
evitees, de la meme maniere que les difficultes technologiques
ont ete regulierement corrigees.
Nous allons actuellement analyser deux aut res cas 00 ces
deux
problemes
se
posent
avec
plus
d' acui te
consti tuant
un
veritable obstable au developpement de la PME.

- 305 -
SECTION II
LES RISQUES DU PROBLEME TECHNOLOGIQUE DANS LES
PME : L'EXEMPLE DE L'ENTREPRISE "LE CAMEROUNAIS"
Nous avons, avec l'exemple precedent, souligne l'importance
de
la mai trise des
couts
financiers
en tant
qu' imperatif de
survie pour l'entreprise et singulierement pour les PME dont on
connait la faiblesse des res sources propres et la place du credit
dans la formation du capital. Mais, les causes de la stagnation
de l'investissement constatee dans ces unites ne sauraient etre
ramenees aux seuls problemes financiers.
D'autres facteurs non moins importants dont les facteurs
technologiques pesent d'un poids non negligeable sur l'evolution
de l'entreprise, et peuvent tout cornrne les facteurs financiers
influer
sur
la
gestion
de
l'endettement.
Notre
analyse
de
l'Imprimerie
rrle
camerounais"
porte
ainsi
sur
les
risques
technologiques et leur implication sur la gestion de cette PME.
En
effet,
s'il
n'existe
pas
d'accumulation
sans
investissement, l'impact de l'investissement sur celle-ci n'est
pas toujours evident et ne s'obtient pas de fayon automatique
cornrne nous le montrera l'exemple de l'Imprimerie le camerounais.
Car,
la
consti tution
de
stocks
de
capi tal
grace
a des flux
d'investissement ne suffit pas a garantir l'amelioration de la
production.
L'acquisition
de
nouveaux
equipements
doit
s' accompagner de la mise en oeuvre de toutes les
condi tions
necessaires
techniques
et
autres
qui
leur
assurent
un
fonctionnement
effectif
en
rapport
avec
les
besoins
de
l'economie. Et c'est cette exigence d'accumulation effective qUl
a
fai t
dire
que
rr ... la pire des
choses
que puisse
faire
un
capitaliste est sans doute de ne pas investir son capital ou meme
ayant achete des biens d'equipement de les laisser se deprecier
en toute oisivete n La decision d'investissement est etroitement
liee au cout d'opportunite et a des couts additionnels dont la
composante technologique est un des elements decisifs en dehors
duquel l'investissement est condamne a la sterilite.
37
F. Poulon, Economie Generale op cit.

- 306-
Le
facteur
technologique dans
1 I entreprise est donc une
valeur
effective.
Celle-ci
est
constituee
par
les
caracter istiques des equipements de production et par la capaci te
reelle, technique et financiere ales faire fonctionner de fa~on
optimale.
11
pose
donc
a I ' entrepr ise
un
certain
nombre
de
problemes dont celui du choix des equipements, celui du choix du
personnel technique, celui de la maitrise du couple qualite du
produit-couts technologiques.
Ces problemes sont d'autant plus
importants que l'on se
trouve dans un environnement concurrentiel double ainsi que nous
1 I avons
vu
precedenunent
de
marches
exigi.is
contr61es par des
produits d'importatfon competitifs.
En plus,
la concurrence a
tendance
a
s'accroitre
avec
le
phenomene
de
liberalisation
economique et la devaluation du franc CFA qui rencherissent la
production des PME dont nous avons dit qu'elles importent la
quasi-totalite de leurs inputs.
Nous nous proposons d I examiner ces di fferents problemes lies
a la dimension technologique de l'entreprise et la maniere dont
ceux-ci sont abordes.
Nous
nous
appuyerons
sur
1 I exemple
de
la
societe
"Le
Camerounais", unite de fabrication de cahiers scolaires et autres
fourni tures
en
papier.
Cette
entreprise
est
si tuee
dans
un
secteur ou la technoloqie est simple mais mal maitrisee
posant
a l'entreprise des problemes d'adaptation aux equipements
choisis,
ceux de fonctionnement a l'equilibre de
l'entreprise
et partant ceux de gestion de l'endettement.
Nous insisterons
donc sur les causes technologiques de ces difficultes. Nous en
apprecierons
la
profondeur
puis
la
pertinence
des
solutions
apportees. Nous nous appuyerons sur l'analyse theorique existant
sur la question,
nous releverons a cette occasion l'importance
du choix des equipements et ses implications sur la maitrise des
couts technologiques en tant que coefficient de proportionnalite
de
1 I efficience
de
ce
choix.
Mais
avant,
nous
presenterons
rapidement notre entreprise.

- 307-
$1
Presentation de la Societe "Le Camerounais"
L'1mprimerie
Le
Camerounais
est
l'oeuvre
d'un
libraire
camerounais proprietaire d'un commerce de livres et fournitures
scolaires qui decide de creer sa propre unite industrielle. Cette
nouvelle activite devra lui permettre de fabriquer lui-meme une
partie des
produi ts
finis
qu I il
corrunercialise
et
sans
doute
d'accroitre son profit. La question que l'on pourrait poser est
celle
de
savoir
si
1 I entrepreneur
a
bien
conscience
de
la
complexite de la tache.
Sur le plan theorique, cette transition entre la theorie de
la valeur et la theorie de la production ne se justifie que si
la
transformation
technique
ou
la
production
offre
plus
d'avantages
qu'une
simple
activite
corrunerciale3B
et
si
les
risques lies a ce passage sont bien per~us et susceptibles d'etre
minimises.
a
Objet de l'Entreprise
L'entrepreneur
decide
donc
d'acquerir
des
equipements
necessaires a la fabrication de cahiers, de feuilles de copies,
de blocs notes,
de rames de papiers et de divers autres articles
de papeterie. Mais les difficultes qui vont suivre traduisent
corrune une impreparatj.on a 1 I exercice d' une acti vi te industrielle,
une entree dans un domaine dont on ne possede aucune aptitude ni
technique, ni manageriale.
b
Forme de l'Entreprise et Structure du Capital
11 se cree malgre tout une entreprise individuelle qu'on
transforme un an plus tard, en mars 1980, en une societe anonyme
au capital de 58 millions de francs CFA. Ce capital est detenu
a 80 % par lui-meme et a 20 % par ses propres enfants. Corrune pour
38
Il
s 'agi t
la
d' un
pr incipe
fondamental
de
l' equilibre
de
l'entreprise et de la justification de l'activite de
production.
On lira a ce sujet J. R. HICKS, Valeur et Capital,
traduction fran~aise et C. MC Millian et C. Menage,
Dunod tirage de 1981 p 69.

~ 308-
la plupart
des PME, la patron en realite reste lui-meme le seul
proprietaire de cette affaire, etant entendu que tous ses enfants
sont alors a sa charge donc totalement dependants financierement.
11s ne servent dans leur participation au capital, que de prete-
nom. On le verra a la maniere dont les decisions seront prises
dans l'entreprise, la direction etant exclusivement assuree par
une seule et meme personne.
11 s'agit d'un promoteur, qui, bien qu'age de 48 ans se sent
encore plein de dynamisme et de determination. Son age pourtant,
situe autour de la cinquantaine devrait deja
faire penser au
probleme de la transmission de l'entreprise et aux conditions de
reussite de celle-cpg. Malgre tout,
le promoteur veut diriger
seul l' entreprise,
en assurer toute l' organisation au sens de
Merigot
et Labourdette40 • C'est-a-dire determiner la structure,
l'encadrement, les normes,
les procedures, en meme temps que les
fonctions essentielles de direction generale, administrative et
financiere.
Bien qu'etant reste tres eloigne de la sphere industrielle,
il compte bien s'appuyer, pour sa nouvelle entreprise, sur cette
experience passee acquise dans
le secteur du commerce et des
services. Le choix qu'il fait de centraliser toutes les decisions
strategiques et operationnelles41 , s'inscrit logiquement dans une
perception identique des activites industrielles et commerciales
etablissant une continuite entre
les unes et les autres. Pour
ce promoteur,
la passage du commerce a l'industrie ne pose pas
de probleme particulier d'autant plus qu'il possede a son actif
une affaire qu'il a su rentabiliser et grace a laquelle il peut
consti tuer son capital,
son apport personnel pour son proj et
industriel et pouvoir ainsi pretendre a un financement bancaire.
39
On peut lier a ce sujet le rapport DAUTRESME, 1982 puis
la
loi
du
8
Juillet
1984
sur
le
developpement
des
Initiatives
Economiques qui tend a faciliter les conditions de la transmission
des entreprises,
cites
par X. Greffe,
Po1itique Economique
op cit
p 463.
40
J. G. Merigot et A. Labourdette,
Elements de Gestion
strategiques de~ entreprises, Edit Cujas,
Paris 1980 354pp.
41
Ces termes sont empruntes a H. I. ANSOFF, Strategie
du developpement,
1989 pp 27-33. Edition revisee.

- 309-
Les
problemes
technologiques
qui
ne
tarderont
pas
a surgir
montrent bien le clivage entre ces deux activites.
c
Le Montage Financier
Pour rea1iser son nouveau projet,
i1 dispose donc de ce
capital
initial
grace
auquel
il
peut postuler
a des credits
bancaires. 11 adresse alors a la B.C.D. un dossier de demande de
credit a moyen terme pour la construction du batiment de l'usine
et l' acquisi tion des
equipements de production
11 voudrai t
installer son usine dans la
zone industrielle de Bonaberi ou il
a
acquis
un
terrain
de
plus
de
2
hectares.
Cette
locali te
denommee BEKOKO se situe a 15 km de la ville de Douala, capitale
economique du Cameroun. La banque saisie marque son accord pour
un premier credit sur 7 ans d'un montant de 113,8 millions de F
CFA soit a peu pres 70 % du cout initial du projet. Ce premier
credit va etre complete par deux autres d'un montant plus eleve
destine a boucler le financement du programme d'investissement.
Le montant total des credits accordes a l'entreprise s'eleve
a 321000000 francs CFA et est assure aux conditions suivantes :
- une premiere tranche d'un montant de 113 837 000 F CFA est
consentie pour une duree de 9 ans dont deux annees de franchise
de rernboursement.
Le taux d'interet prevu est de 12,50 % l'an,
L'amortissement
duo
credit
est
prevu
en
28
echeances
trimestrielles constantes en principal et
interets
* deux autres tranches de financement sont mises en place.
Leur montant est de 207 163 000 F CFA
Pour une duree de 7 ans dont 2 annees de differe d'amortissement.
Le taux d'interet prevu est de 13,50 % l'an, le credit devra
et re amorti en 20 echeances trimestrielles .
. Le premier credit est accorde a des conditions de taux
d'interet et de duree plus souples parce que
finance sur des
res sources BEAC a taux bonifie.
Le deuxieme credit est constitue d'un financement de la
Banque Africaine de Developpement et son montant est de 137 163
000 F CFA. 11 sera complete par un credit sur fonds propres de
la BCD. Ces deux credits seront assortis des memes conditions de

- 310 -
taux et de duree.
Mais d' une facon gemerale, les problemes de cette entreprise
ne sont pas fondamentalement lies au montant des financements ni
meme a la qualite de ceux-ci. Les difficultes de cette PME sont
a rechercher dans la maniere dont ses dirigeants apprehendent
l'activite
industrielle,
sur la maniere dont
ils obordent la
question technologique. On comprend mieux l' ampleur des problemes
inherents a cette question et ses implications sur la gestion de
l'entreprise.
d)
L'Environnement Industriel
La
societe
"Le
Camerounais"
s' instal le
dans
un
pays age
industriel ou fonctionne deja une autre imprimerie,
la Societe
Anonyme
de
Fabrication
de
Cahiers
appartenant
a
un
homme
d'affaires camerounais. 11 s'agit d'une unite creee depuis 1971,
ayant donc a son actif neuf annees d' experience,
deux usines
implantees dans les deux grandes metropoles du Cameroun, Yaounde
et Douala. Cette imprimerie fait partie d'un groupe d'entreprises
dont
la
gestion
est
assuree
par
une
assistance
en
gestion
etrangere
experimentee.
Elle
jouit
ainsi
d'une
situation
financiere equilibree et d'un marche bien penetre et bien connu
sur
lequel
elle
est
restee
longtemps
l'unique
entreprise
nationale. D'ailleurs l'usine de Douala, au moment ou arrive "Le
Camerounais" est en cours d'extension. Cette extension est une
revelation de l' et endue du marche de
l'imprimerie,
un marche
estime en 198342 a plus de 34 millions de cahiers representant en
valeur plus de 3 000 millions de francs CFA et encore couvert a
plus de 70 % par les importations. La production dans l'unite
existante est assuree par une assistance technique etrangere, La
matiere premiere utilisee etant totalement importee.
42
-
Cette information est faite a partir de statistiques
recueillies par le CAPME aupres du ministere de
l'education nationale. Voir tableau II.

- :H 1 -
TABLEAU I
SITUATION DU MARCHE DU CAHIER SCOLAIRE
Annee
Enseignement
Enseignement
Enseigne-
Total
Total
scolaire
primaire
secondaire
ment post
Littoral
National
primaire
1981/82
209 091
53 899
867
263 857
1 759 047
1982/83
211 560
59 730
1 001
272 291
1 815 267
1983/84
226 496
64 993
994
292 483
1 949 887
Toujours de
1 'Education Nationale,
nous
avons obtenu la
moyenne des cahiers utilises a l'ecole primaire et qui est de 15
cahiers/an par enfant, et
20 aces enseignements secondaires et
autres. Ce
qui nous amene a dire qu'en moyenne la demande des
cahiers est de l'orde de :
(15 + 20)
x 1 949 886 = 34 123 000 cahiers par an pour les
2
eleves de l'enseignement primaire et secondaire, si nous tenons
compte de
la
consommation des
cahiers
en dehors
des
ecoles,
colleges et lycees,
c'est-a-dire la maternelle,
l'enseignement
superieur et les autres consommateurs qui peuvent representer au
moins 25 % de la consommation totale.
La
SAFCA est
donc
la
principale
concurrente
locale
de
l'Imprimerie le Camerounais avec une capacite de production en
valeur
de
1
350
millions
francs
CFA par
an
pour
les
deux
implantations
de
Douala
et
de
Yaounde.
Cette
capaci te
reste
inferieure a celle de l'usine le Camerounais installee pour une
production annuelle" de 2 838 millions de francs CFA en periode
de croisiere.
D'autres petites unites fonctionnent dans le pays, avec une
faible capacite de production. Elles ne representent pas en tant
que tel un enjeu pour la societe le Camerounais. La situation
globale de la concurrence se presente de la maniere suivante :

- 312 -
Tableau II
SITUATION DE LA CONCURRENCE
RAISON SOCIALE
LIEU
CAPACITE
C.A. POTENTIEL
DI IMPLANTAT ION
INSTALLEE
(en F. CFA)
- SAFCA
YAOUNDE
5 000 kg/J
900 Millions
DOUALA
2 500 kg/J
450 Millions
- ETEME -
YAOUNDE
1 500 kg/J
280 Millions
Bobines
- MANUFACTURE
MOUNGO
DOUALA
1 750 kg/j
315 Millions
(Bonaberi)
-
Ste
Camerounaise de
manufacture de
PENJA
1 500 kg/J
280 Millions
papier
MANU - ~UEST
BAFANG
1 500 kg/J
280 Millions
- - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - -
13 750 kg/J
2 505 Millions
Source : Etude de falsablllte - soclete
Le Camerounals".
L' entreprise "Le Camerounais" va donc operer sur le meme
segment
a une echelle qu'elle prevoit plus importante en
substitution aux importations. Celles-ci representent, en effet,
une part importante du marche local et leur tendance croissante
temoigne de l'existence d'un marche florissant, dans un pays 00
la population est essentiellement
jeune et en age scolaire et
00 le taux de croissance est relativement eleve. Les importations
ont evolue de la mani~re suivante :

··313 -
TABLEAU III
SITUATION DES IMPORTATIONS
RUBR1QUE
ANNEES
QUANT1TE
VALEUR
DOUAN1ERE
(TONNES)
(1 000 ) F CFA
48.18.00
(Registres,
1979
499,7
368 720
cahiers,
1980
634,4
490 348
articles scolaires
1981
835,5
642 703
papiers cartons)
1982
1 100,3
841 941
1983
1 135,2
1 102 943
48.14.00
(Articles de
1979
368,6
145 698
correspondance)
1980
199, 6
135 594
1981
284,1
188 601
1982
404,4
262 329
1983
575,5
364 880
48.13.00
(Papiers pour
1979
87,7
125 237
duplicateur)
1980
184,5
184 429
1981
174,9
153 085
1982
266,8
233 522
1983
407,2
392 051
Source .
. Rapport CAPME Mars 1985.
L'implantation de l'usine de BEKOKO, le choix industriel du
promoteur,
semblent
avoir
ete
motives
par
un
objectif
de
consolidation de sa surface financiere.
L'integration en amont de l'activite initiale semble alors
etre
la
solution
indiquee.
La
creation
de
cette
unite
de
fabrication
des
produi ts
uniquement
commercialises
jusqu' ici
devait pouvoir generer une valeur ajoutee et par son effet de
synergie,
augmenter
la
marge
beneficiaire
de
l'affaire.
11
importe
alors
de
s'intererroger
sur
les
moyens
techniques,
financiers
et
surtout
humains
que
le
promoteur
deploie
pour
realiser son objectif de creation d'une veritable activite industrielle.

~314 -
c
L'equipement Technique de l'usine
Etaye
par
les
perspectives
d' un
marche
sur,
le
proj et
s'engage
dans
sa
phase
active.
Des
contacts
sont
pris
en
Allemagne
pour
l'acquisition
d'une
chaine
de
machines
d'imprimerie de la marque allemande,
Bielomatik. Le choix plus
ou moins conscient est porte sur un equipement dont on saura plus
tard qu'il est de seconde main ou de troisieme main.
11 s'agit d'un outil encore fonctionnel et d'une capacite
de production impressionnante, au moins deux fois egale a celle
de la Societe Anonyme de Fabrication de Cahiers. Le materiel est
imposant mais sa vetuste pose, des l'entree en exploitation de
l'usine, d'enormes problemes de fonctionnement,
de maintenance
et d'approvisionnement en pieces de rechanges.
Cette situation" laisse entrevoir de nornbreux problemes tels
que
des pannes
frequentes,
une
capacite oisive
et des
couts
subsequents qui risquent d'oberer la tresorerie de l'entreprise
et menacer
son existence meme.
Nous
voulons
ainsi
apprecier
l'importance de ces donnees techniques et technologiques sur les
objectifs de rentabilite
que l'entreprise cherche a atteindre.
$2
L'Importance du Choix des Equipements
:
l'Impasse
Technoloqique de l'Imprimerie "Le Camerounais"
Nous
avons
deja
souligne
le
role
de
l'investissement
productif
dans
l' entreprise
en
general
et
dans
la
PME
en
particulier,
en
tant
que
moyen
de
creation
du
produit.
L'incitation a investir de 1 'entrepreneur est donc justifiee par
des anticipations de profit qui lui-meme depend de l'efficacite
du capital, de son
coilt.
Le
cout
du
capi tal
consti tue
de
ce
fai tune
variable
essentielle
non
seulement
de
la
decision
d'investir
de
l'entrepreneur mais aussi du choix meme du type d'equipements
consti tuant
le
stock de capi tal
et permettant d' agir
sur la
capacite de production.
11
procede
egalement
de
l'importance
des
problemes
techniques et technologiques de l'entreprise en rapport avec les

- 315 -
capacit~s r~elles
de celle-ci A assurer son choix.-
Le choix des ~quipements fai t
ainsi appel A la prise en
compte de facteurs li~s A la mise en valeur du mat~riel choisi.
Les caract~ristiques des ~quipements et leur maitrise
c'est-a-
dire
les
capacit~s
techniques
du
personnel
affect~
au
fonctionnement
des
machines
d' une
part,
le
coo.t
du
capi tal
d'autre part apparaissent comme les principales composantes de
ce choix.
2.1
Le Choix des Equipements,
Les Caracteristiques des Equipements et le Cout
du capital
2.1.1
Les Caracteristiques des Equipements
11 s'agit de l!ensemble des ~l~ments li~s a
la nature de
l'outil de production et susceptible d'influer directement ou
indirectement sur l'offre par un double effet de capacit~ et de
revenu.
a
La Capacite des Equipements et leur Performances
:
Elles d~terminent le niveau de l'offre et son aptitude A
satisfaire aux besoins du marche en quantite et en qualite. Elles
ont une action directe sur le niveau de la production,
sur lz
dimension de l'entreprise et sa compatibilite avec la demande
effective. Elles permettent d'apprecier l'opportunit~ de l'achat
d'un equipement plus performant ou d'une combinaison capital-
travail plus adpatee A la dimension du marche. Ce probleme nous
le
retrouverons
dans
l' entreprise
"Le
Camerounais"
dont
le
surdimensionnement
de
l'usine
est
A l'origine
de
nombreux
gaspillages et de coo.ts de production eleves.
b
L'Age des Equipements
11
est determine par
la date de
fabrication.
Selon que
celle-ci est recente ou avancee, les equipements seront plus ou
moins
performants,
plus
ou
moins
coo.teux
a
l'achat
et
A
l'entretien.
La
comparaison
des
gains
resultant
d'un
achat

- 316 -
d' equipements vetustes et des couts d' entretiens
inherents a
l'age de ceux-ci d'une part et du cout d'achat d'un materiel neuf
donc posant moins de problemes d'entretien d'autre part permet
d'orienter le choix de l'entrepreneur.
Cet arbi trage n' est pas toujours effectue par les chefs
d'entreprises
et
l'exemple
de
cette
1mprimerie
en
est
une
illustration. La preference du promoteur pour un equipement de
seconde ou troisieme main pose a l'entreprise des problemes en
terme de regularite de fonctionnement des machines. Leur vetuste
est a l'origine des nombreux arrets de production de l'oisivete
du capital et de leur repercussion en terme de manque a gagner.
L'autre dimension de la vetuste du materiel de production
est l'obsolescence et ses consequences sur la competitivite du
produit.
La
nature
de
la
technologie
incorporee
dans
les
equipements et le rythme d'evolution de celle-ci sont a l'origine
des difficultes d'approvisionnement en pieces de rechange qui
elevent le cout de l'exploitation du materiel de production du
fait de l'indisponibilite de celles-ci. Tous ces problemes se
trouvent exacerbes lorsque le mateiel et les pieces de rechange
sont importes et que la devaluation en double le cout. C'est le
cas de l'usine de l'1mprimerie "le Camerounais", ou l'on observe
des delais d' approvisionnement excessi vement longs et une gestion
des stocks mal contr61ee.
Les difficultes d'exploitation d'equipements liees au choix
d'un type donne de technique s'accentuent lorsqu'il n'existe pas
de solutions alternatives pour l'entreprise. C'est le cas dans
les entreprises ou la dependance technologique est telle qu'elle
ne leur offre pas de possibilites de changement de technique dans
le sens de la realisation de leurs objectifs de production et de
rentabilite.
Le
choix
de
technique
est
donc
un
element
fondamental du processus de production dans l'entreprise dans la
mesure ou il determine sa continuite et son evolution.
Le
changement
de
technique
doi t
etre
compris
comrne une
modification
dans
le
choix
effectue
parmi
des
techniques
disponibles.
11
est
donc
bien
different
du
changement
de

-317 -
technique induit par une innovation ou par le progres technique.
La
technique
retenue
est
alors
consideree
comme
etant
la
meilleure par rapport
au profi t
escompte,
laissant entrevoir
ainsi que nous l'avons dit une alternative de techniques.
La realite dans les PME camerounaises et principalement dans
notre
exemple,
Oll
les
equipements
et
la
technologie
sont
importes, se presente differemment.
Le "choix" effectue en matieres de technique de production
ne
semble
pas
toujours
etre
le
resultat
d'une
etude
de
faisabilite
eprouvee
posant
comme
nous
allons
le
voir
des
problemes de croissance et de repartition lies a une meprise sur
les
caracteristiques
des
equipements
et
egalement
sur
des
concepts ambigus tels que celui du transfert de technologie.
En effet,
les conditions particulieres dans lesquelles va
etre negocie et conclu l'achat de l'usine de l'Imprimerie "le
Camerounais" no us amene a nous interroger sur l'importance que
les contractants ont accorde aux caracteristiques des equipements
et a ses impl ica tions quant ai' exploi tation de ceux-ci.
En
d' autres
termes,
ont-ils
pris
en
compte
les
variables
fondamentales du choix des equipements que sont
- la performance des machines,
la dimension de l'usine ?
- la vetuste des equipements ?
Ont-ils integre dans ce choix les contraintes financieres
et humaines de la mise en service et de l'exploitation continue
de l'Imprimerie, les capacites d'absorption, de rentabilisation
de l'activite ? Ces questions sont les premieres de la serie des
points sur lesquels portera notre analyse. Ces questions ne sont
pas innocentes dans la mesure Oll elles permettent egalement de
poser le probleme du cout de capital necessaire a la production
et de comprendre les difficultes financieres dans lesquelles les
PME
se
trouvent
plongees
du
fai t
de
leurs
problemes
technologiques.

- 318 -
2.1.2 - Le Cout du Capital
L'acquisition d'un type donne d'equipement et l'usage de
~ celui-ci implique necessairement des couts que lion peut classer
en deux categories :
a
D'abord Le cout d'opportunite du capital
ou selon 1 I expression anglaise,
"opportuni ty
cost";
il
traduit essentiellement le manque a gagner de l'entreprise lie
a un investissement peu judicieux alors que des occasions plus
interessantes auraient pu etre saisies et exploitees. Le cout est
theoriquement
estime comme etant consti tue par la difference
entre le taux de profit maximum et le taux de profit effectif,
lorsque lIon connait les meilleurs emplois possibles du capital
et les occasions possibles d'investissement.
Pratiquement, le cout d'opportunite est difficile a evaluer
et demeure imprecis.·Mais il revet une signification importante
dans l'appreciation des programmes d'investissement des PME, et
des determinants des choix en matiere d'equipement.
En
fait
les
PME
camerounaises
ne
disposent
des
moyens
financiers
ni
d Iune
logistique appropriee pour
rassembler et
exploiter
les
informations
necessaires
sur
les
equipements
disponibles dans une branche ou une activite donnee. Ce probleme
est quasiment
lie a celui de 1 Iabsence d I etudes sectorielles
aborde dans
notre premiere partie
en tant
qu Iobstacle a une
veritable organisation de l'activite industrielle. Les etudes de
faisabilite
de
projet
industriel
des
PME
menees
par
les
promoteurs eux-memes·ou par des organismes tels que le CAPME dont
nous avons souligne la precarite des structures et des moyens
financiers
qui
d'ailleurs
aujourd'hui
a
disparu,
nlont
pas
couvert
cette
dimension
des
projets
industriels.
L'indisponibilite des informations necessaires dont on ignore a
qui incombe la responsabilite de la collecte et du traitement,
est
la
principale
cause
du
caractere
sectaire
des
etudes
effectuees. L'utilisation meme du terme "choix" nous semble en
quelque
sorte
abusive
dans
la
mesure
Oll
il
n'y
a
pas
veritablement une decision circonstanciee. On pourra d'ailleurs
le constater dans le
cas de l'entreprise "Le Camerounais" Oll la

- 319-
premiere occasion d'achat est exploitee sans que le promoteur
puisse dire avec precision s'il s'agit d'un equipement de seconde
ou de troisieme main.
Dans
ce
cas,
le
coQt
d'opportunite
sera
encore
plus
imprecis, ce qui nous amene a appuyer davantage notre analyse sur
le coQt d'usage du capital.
b
Le Cout d'Usaqe du Capital
La
mise
en
service,
la
rotation
des
machines
dans
l'entreprise
occasionnent
un
coQt
supplementaire,
le
coQt
d'amortissement indispensable au renouvellement a l'identique du
stock au terme de son utilisation. En plus du coQt d'acces
au
capi tal
c' est-a-dire celui
gene re par
l' obtention du capi tal
destine
a
etre
investi,
l' entreprise
supporte
un
cout
d'amortissement.
La somme de ces deux couts est appelee cout
d'usage du capita1 43 • Theoriquement ces deux coQts, coQt d'acces
au capital et coQt d'amortissement sont les charges essentielles
qui
orientent
le
choix
des
investissements
et
celui
des
equipements a acquerir grace a l'investissement.
Le coQt d'usage peut donc etre determine
en fonction des
caracteristiques des equipements ; leur age, leur duree de vie,
leur valeur d'origine ...
Pourtant,
l' analyse empirique de l' evolution du stock de
capital dans les PME et plus particulierement dans le cas de
l'Imprimerie "Le Camerounais" ne permet pas toujours de dire que
le cout d'usage est integre dans les preoccupations quotidiennes
de l'entreprise.
43 -
On lira pour plus de details
: -D.
Jorgenson
Capital Theory and Investment Behaviour, The
American Economic Review,
1963.
On lira aussi
D.
Jengerson et C.
Siebert, Optimal Capital
Accumulation and Corporate Investment Behaviour,
Journal of Political Economy,
1968 Tous cites
par F.
Poulon, Economie Generale op cit p 261.
- On peut lire egalement P. CODSO, la gestion Financiere
de l'Entreprise , Dunod 7e Edition 1985, p 459.

-320 -
La forme, l'importance du cout sont-elles des realites que
l'entreprise peryoit clairement ?
Ces interrogations comme les precedentes sur les variables
du choix des equipements devront nous aider a eclairer notre
analyse sur l'interet et l'importance du facteur technologique
dans le
processus d'industrialisation par le biais des PME.
2.2
La Prise en Compte des Facteurs non Economiques
La presentation de la societe "Le Camerounais" nous a permis
de mettre en relief les conditions dans lesquelles cette unite
rentre
dans
le
secteur
industriel.
Nous
rappelerons
tres
brievement
ces
conditions
pour
souligner
les
problemes
particuliers qu'elles
posent et leur incidence sur l'evolution
de l'entreprise.
Nous
analyserons
ensui te
les
solutions
qui
y ont
ete
apportees. Nous essayerons alors d'en montrer les limites et de
mettre en evidence l'interet du probleme technologique dans la
creation et le developpement des PME camerounaises. L'exemple de
la societe "Le Camerounais" nous semble etre une illustration
des
conditions
particulieres
de
mise
en
place
des
PME
industrielles. Des explications non economiques et economiques
sont alors utiles a la comprehension du probleme.
Ainsi donc, l' 1mprimerie "Le Camerounais" est une experience
industrielle
qu'entreprend
de
faire
un
commeryant
presque
quinquagenaire.
Jusqu' cl ce moment
la celui-ci s' est consacre
uniquement
a son commerce, restant plut6t eloigne du milieu
industriel et de ses contraintes. La transition qu'il etablit
entre
ce
commerce
et
sa
future
activite
industrielle
est
l'importance des ressources qu'il a reussi a
se constituer et
le desir qu'il a de les investir dans une affaire encore plus
rentable.
11
s'agit
donc
d'une
initiative
de
creation
d'une
PME
industrielle prise assez tardi vement,
l' age de la retrai te au

Cameroun
etant
compris
entre
55
et
60
ans,
dans
un
secteur
inconnu pour le promoteur et qui de ce fait risque de poser de
multiples problemes. Ces problemes sont essentiellement de deux
ordres. Les premiers sont lies aux caracteristiques de cette PME
et
les
autres,
aux
exigences
d' une
untie
industrielle
bien
distincte de celles d'une simple activite cornrnerciale.
Bien que constituee sous la forme d'une societe anonyme, la
societe "Le Camerounais" se caracterise, a l' instar de toutes les
PME par une gestion autocratique du chef de l'entreprise. 11 veut
s' assurer du contr61e qu' il a de son affaire et se charge de
l'organisation de la gestion, de
la direction financiere, de la
direction
technique et de toutes les decisions essentielles. 11
ne nous semble pourtant pas evident que la complexite des taches
de la nouvelle activite ait ete siffisarnrnent bien per~ue et que
l'evolution future de l'entreprise ait ete prise en compte.
Cette
forme
d'organisation
de
l'activite
nous
amene
a
soul ever deux principaux problemes :
- celui de la pertinence d'une volonte
de contr6le exclusif
d' une
acti vi te
complexe
par
les
deten teurs
du
capi tal
particulierement
a
un
age
OD
il
faut
penser
deja
a
la
transmission et a la continuite de l'affaire i
- celui de la succession et de la maniere dont celle-ci va
etre faite dans cette
entreprise
constituee sous la for.me d'une
entite familiale,
corollaire du probleme precedent.
Ces deux premiers problemes sont d'une importance capitale
si
l' on veut comprendre l' ampleur que prendra
le principal
probleme,
celui
du
fonctionnement
de
l' entreprise
d' une
generation a l'autre.
2.2.1
Le Probleme du Controle de l'Entreprise ~les
Detenteurs du Capital
11 s'agit ici d'un probleme de gestion et d'organisation de
la gestion qui sera plus largement aborde dans la section III de
ce chapitre. Nous voulons toutefois l'evoquer dans cet exemple
pour en montrer l'impact sur le
deroulement de l'activite.
La
dissociation
du
pouvoir
et
de
la
propriete
est
particulierment ressentie dans
les grandes entreprises OD les

- 322 -
dirigeants ont toute liberte d'action et de decision dans le but
d'assurer
aux
actionnaireg une
remuneration
stable
ou
en
accroissement
regulier.
C' est
le
role
de
la
technostructure
soulignee par J.K Galbraith et que l'on retrouve dans les
analyses de Baran et Sweezy44.
Tel ne semble pas etre le cas dans les PME OD la
propriete
du
capi tal
implique
la
detention
du
pouvoir.
Les
PME
camerounaises
n'echappent
pas
a cette
logique.
Bien
plus,
l'exercice
des
fonctions
directoriales
s'y
acompagne
d'une
implication quotidienne ou mieux d'une concentration de toutes
les taches entre les
mains du/ou
des proprietaires du capital.
Dans les PME de type familial,
il est souvent interessant
d'etudier le type
de l'entreprise. Malheureusement,
il existe
peu d'etudes sur la dimension familiale des PME camerounaises,
la
plupart
des
travaux
sur
ce
suj et
portent
sur
les
PME
en
general.
Les statistiques americaines, font ressortir un pourcentage
eleve de PME de type familial environ 90 %. Les etudes sur les
PME au Canada et en Europe 45 indiquent que la majorite des PME
sont constituees sous la forme familiale. L'observation de la vie
de nos PME nous permet egalement de dire que la structure au
Cameroun est peu differente de ce qui est observe ailleurs. Une
recente enquete menee au Cameroun et plus particulierement dans
les villes de Douala 46 metropole economique du Cameroun et de
Bafoussam,
un
grand
cente
d'affaires
a l'Ouest permet des
44
On
~ira
a ce sujet ~a presentation fai te par
G.
ABRABAM-FROIS,
E~ements de Dynamique Economique op cit p 2-3.
45
Lire a ce sujet : G. HIRIGOYEN, Contribution a la connaissance
des
Comportements
Financiers
des
Moyennes
Entreprises
Industrielles
(MEI)
familiales,
These de Doctorat en Sciences
de Gestion,
Universite de Bordeux I,
1984
P.
HUGRON,
la Succession dans la PME,
in Bulkletin "PME Gestion",
recueil
des
textes,
Management de la PME BEC Montreal,
direction
c. Choquette et J. Brunelle, Edit BO-PRE Quebec 1985 p 227
et suivantes.
46
Cette enqu~te a ete menee conjointement par D. DISSAKE
de l'Ecole Superieure de Sciences Economiques de Douala et
P.
BUGRON
de
BEC
Montreal,
sur
le
theme
Profil
des
Entreprises
Familiales Camerounaises Rapport de Recherche de mars 1992,
Douala,
16 pp.

- 323-
constats interessants.
Cette enquete porte sur un
echantillon de 41 entreprises
dont 30 a Douala et 11 a Bafoussam appartenant a des familles et
gerees egalement par elles. Celle-ci revele que c'est dans la
deuxieme decennie apres les independances que se creent le plus
grand nombre d'entreprises familiales,
70 % de 1970 a 1990, la
plupart des entreprises ayant ete creees entre l'age de 30 et 50
ans. Les secteurs d'activites couverts sont essentie11ement :
- le commerce de gros et de detail
47,83 %
- les services et activites diverses
39,13 %
- 1es manufactures
13,04 %
Les resultats de cette enquete fournissent egalement des
informations utiles sur la direction des entreprises familiales.
L' enquete
abouti t
a la conclusion sui vante
95
% des
entreprises
familiales sont dirigees par le fondateur lui-meme.
On retrouve bien ici l'une des principales caracteristiques des
PME,
celle selon laquelle ces unites sont
generalement gerees
par le proprietaire du capital de fa~on quasi exclusive.
Pour les autres
entreprises, 5 % des cas, la direction est
assuree par les autres membres de la famille qui peuvent et re
l'epouse,
les enfants,
les freres,
cousins,
neveux et autres.
La conception de la famille dans le contexte etudie est
plutot
large
et
les
membres
de
la
famille
les
plus
actifs
dans
l'entreprise familiale ne sont que les descendants directs.
Ainsi, parmi les entreprises recensees seules 54 % d'entre
elles emploient les enfants du patron.
Et, dans l'Imprimerie "Le Camerounais", la realite n'est pas
bien differente.
Car,
si les descendants directs du patron ne
travaillent pas encore dans l' entreprise,
les cousins et amis
constituent la majorite du personnel. Ce caractere familial de
l'entreprise a certes des avantages dans la mesure 00 il permet
de creer des emplois et des revenus supplementaires au sein de
la
famille
et de
liberer d' autant
le
revenu du
chef de
la
famille-chef
d'entreprise.
L'aspect
creation
de
revenus
suppementaires
est
important
en
ce
sens
qu' il
a
une
action
reductrice sur les charges qui se grevent sur le revenu du chef
de l'entreprise. La tendance de ce dernier a priver l'entreprise
des res sources indispensables a son fonctionnement s'en trouve

reduite d'autant.
Toutefois la PME familiale ne presente pas que des aspects
positifs.
Les mernbres de la famille
impliques dans
la vie de
l'entreprise ne correspondent pas toujours aux competences dont
l'entreprise
a
veritablement
besoin.
L'activite
industrielle
s'accomode mal de tatonnement dans des fonctions Oll la maitrise
technique est requise. Et, les capacites techniques de maitrise
des equipements de l'usine n'ont pu etre apportees ni par le
promoteur lui-meme qui n'a aucune formation dans le domaine ni
par le personnel recrute localement.
Certes quelques dispositions ont ete prises pour faciliter
l'adaptation au materiel importe. Mais, la mise en stage dans les
usines Bielomatik et l'envoi sur place des techniciens charges
du montage
et
des
premiers
essais
jusqu I au
lancement
de
la
production ont vite montre leurs limites.
La duree des stages est courte et insuffisante pour apporter
au personnel technique l'experience necessaire pour faire face
aux pannes frequentes d'un equipement vetuste. 11 se pose a la
fois
dans
cette
PME
plusieurs
problemes
dont
celui
de
la
qualification de la main - d'oeuvre. Ce probleme considere par
les economistes du developpement dont M. Penoui1 47 ,
cornrne un des
obstacles a l'industrialisation dans les P.E.D, reste toujours
d'actualite.
11 revet dans le cas precis de la societe "Le Camerounais"
une forme particulierement complexe, resultat de la maniere dont
cette entreprise est nee.
En
effet
le
passage
de
l'entreprise
cornrnerciale
a
l' entreprise industrielle semble s' etre effectue brutalement sans
que les exigences de la nouvelle activite aient ete veritablement
mesurees et que les dispositions techniques prealables de tout
projet industriel d'envergure aient ete prises.
On a pu ainsi
47
-
M.
Penoui1,
Socio-Economie du sous-deve10ppernent,
Edit Oa110z,
Paris 1979, p 541-550.

- 325-
constater que
le recul suffisant a la mise en place et a la
formation du personnel technique n'a pas ete pris dans une phase
de preinvestissement.
Cette absence d'organisation,
ou mieux l'ignorance de la
necessite de l'etape de preinvestissement explique que la duree
des stages de formation ne soit pas suffisante a cause des delais
fixes pour l'entree en service de l'usine. De meme, le cout eleve
qu'aurait necessite une formation plus longue n'a pas ete pris
en compte dans l'evaluation du projet.
L'importance de cet aspect technique et ses implications au
ni veau des couts de
formation n' ont pas ete mesurees par les
dirigeants de cette PME. La consequence en est donc cette absence
de
main-d'oeuvre
qualifie
et
les
difficultes
a assurer
a
l'equipement en place un fonctionnement regulier et continu.
Cette
absence
de main-d' oeuvre
qualifiee
constatee
dans
l'exemple de l'Imprimerie "Le Camerounais" n'est pas un probleme
ponctuel. Elle est liee a
la maniere dont l'entreprise se cree
et aux limites que cette structure engendre. Elle n'est pas non
plus
un,
probleme
limite
au
seul
cas
de
la
societe
"Le
camerounais.
Elle
semble
etre
inherente
aux
economies
en
developpement,
un
probleme
structurel
d'inadequation
entre
l'emploi et la formation.
Cette penurie de personnel qualifie enregistree aussi bien
au niveau des
techniciens,
que des agents de maitrise et des
cadres a selon M. Penouil plusieurs
explications 48 •
Celle-ci a plusieurs causes dont :
- le faible taux de scolarisation dans un grand nombre de
pays
- l'inadaptation de l'appareil de formation essentiellement
ressentie dans le domaine de l'enseignement technique;
48
-
Marc Penoui1,
Socio-Economie du sous-deve1oppement
op cit, p 542.

- 326 -
- les effets negatifs de l'assistance technique 49 ressentis
au
niveau
de
la
division
assez
factice
des
fonctions
entre
nationaux et conseillers etrangers et des difficultes de la main-
d'oeuvre locale a acquerir l'experience necessaire.
Si
dans
leur
ensemble
ces
explications
peuvent
etre
verifiees,
la premiere d'entre elles,
celle relative au faible
taux de scolarisation est de moins en moins vraie et devrait etre
relativisee. A la faveur de la crise economique qui secoue les
economies sous-developpees on a pu observer une masse import ante
de chomeurs et de sans emplois recrutes parmi les diplomes de
l'enseignement superieur.
Le probleme de l'emploi des competences necessaires dans les
PME
nous
semble
plus
complexe
dans
ses
causes
a la fois
financieres et sociologiques. Ces entreprises ne recrutent pas
toujours au niveau requis soit pour des raisons financieres de
minimisation des couts, soit pour des raisons de maintien
de la
forme
familiale
de
l' entreprise ou encore dans
un souci de
preservation de l' autori te
du fondateur proprietaire du capi tal,
autori te que ne garanti t pas un recrutement de cadres ambi tiem.;.
Toutes
ces
preoccupations
economiques
ou
non
economiques
refletent les limites dans l'organisation de la gestion des PME
et
la
di fficul te
a percevoir et a assumer la complexi te de
l' activite
industrielle.
Elles
se situent dans
la
logique du
maintien de la forme familiale de ces unites meme si les moyens
deployes ne garantissent pas la transmission d'une generation a
l'autre d'une entreprise encore viable.
2.2.2
Le Problerne de la Transmission de l'Entreprise
La transmission des entreprises lorsqu'elle se realise dans
de
mauvaises
conditions,
se
dresse
en
obstacle
pour
l' investissement
et
l' emploi 50.
C' est
donc
ce
role
de
49
On lira eqalement a ce sujet une analyse ricardienne
plus qlobale du probleme
de la specialisation et du
respect des dotations
de facteurs,
Pierre Jacquemot
et Marc Raffinot, Accumulation et Developpement, Edit
l'Ba~ttan Paris 1985, p25-28.
50 - On lira a ce sujet, X. GREFFE, Politique Economique op cit. p.463

- 327 -
l'investissement
dans
lraccumulation
et
l'importance
du
phenomene
de
l'emploi
dans
les
PME
qui
mettent
en
evidence l'interet du probleme.
Precisement des difficultes pratiques accompagnent cette
transmission et dans un pays comrne la France le proprietaire doit
payer
d'importantes
taxes
sur
les
plus
values
alors
que
l'acheteur supporte des droits d'enregistrement eleves (+ de 16,6
%). Et, dans ce pays Oll 50 % des chefs de PME ont cinquante ans
et plus, le probleme est d'actualite. L'interet qui lui est alors
accorde se revele a travers les travaux menes sur le sujet c'est
le cas du rapport DAUTRESME 51 (1982) qui souligne les difficultes
des problemes de transmission des entreprises en France. De meme
une "loi sur le developpement des
ini tiati ves economiques ,,52 a
pour
obj ectif
d' encourager
la
reprise
des
entreprises.
El1e
s'inspire
a cet effet du
systeme
americain
de
"Leverage
Management buy out" qui consiste en la reprise des entreprises
par les salaries. Ainsi,
des cadres se constituent en holding
pour reprendre une entreprise que
decide de transmettre leur
employeur. Leur apport personnel peut etre limite,
ils peuvent
de
la meme maniere beneficier de credi ts aupres d' organismes
financiers a des conditions souples de remboursement en fonction
de la remontee des dividendes de la societe transmise. La fusion
s'opere au terme de la periode de remboursement. Des avantages
fiscaux sont aussi consentis a la holding ainsi constituee. De
nombreux amenagements sont ainsi mis en oeuvre pour la reussite
des transmissions d'entreprise en Europe, en Arnerique. En outre,
le
concept
de
transmission
est
large
et
obei t
a des normes
d'objectivite et de reussite et ne saurait donc etre reduit a de
seules considerations familiales, la competence et les aptitudes
reelles a bien gerer etant les principaux criteres de choix des
successeurs.
Dans le contexte precis des PME
camerounaises
dont nous
51
-
On lira a ce sujet, X. greffe , Politique Economique , op. cit. P 463
52
Il s'agit de la loi du B Juillet 1984 qui met
en place des mecanismes permettant de faciliter
la transmission des entreprises.

On lira egalement
X.
Greffe,
Idem.

avons
dej a
souligne
la
place
pri vilegiee
dans
le
processus
d'industrialisation,
l'on ne peut faire l'economie d'un examen
des
conditions
de
la
transmission.
Les
raisons
de
cette
preocccupation sont les memes que pour les economies avancees ;
les plus evidentes etant l' age avance des dirigeants des PME53 ,
l'importance a accorder a l'investissement et a son role dans la
creation
de la richesse,
la necesite de preserver des emplois.
Ces
deux
points
sont
d'autant
plus
preoccupants
que
l'economie est ravagee par une crise economique particulierement
marquee par les
fermetures
d'entreprises
et
la stagnation de
l' investissement
dont
l' un des
corollaires
est
la montee
du
chomage.
11 est donc primordial que la transmission des PME encore
en activite s'effectue dans le sens de la poursuite des activites
des entreprises et de l'emploi.
La preeminence de la forme
familiale dans la creation et
l'evolution des PME camerounaises pose sans doute des problemes
particuliers au moment ou celles-ci doivent passer d'un mernbre
de la famille a l'autre.
Le
phenomene
familial
dans
les
PME
et
les
difficultes
d'organisation et de gestion liees a ce cadre
de fonctionnement
ont
favorisent,
a
la
faveur
du
"pouvoir
financier"
que
le
proprietaire exerce sur les autres mernbres de la famille,
une
concentration de toutes les fonctions entre les mains d'une seule
personne. Et comrne dans notre exemple le detenteur du pouvoir de
decision n'a pas toujours les qualites requises pour en assumer
parfaitement
la
responsabilite
et
decider
objectivement
et
librement du moment de la releve, les conditions contraignantes
dans lesquelles l'entreprise doit etre transmise la predestine
deja a la faillite. Et l'entreprise etudiee ici a atteint un tel
stade de difficultes financieres et techniques qu'il faut mettre
en place une veritable structure de gestion.
53
-
L'enquete sur "le profil des PME familiales"
a pernds
d'etablir un pourcentage eleve
(70 %)
de dirigeants de PME ages de plus de 50 ans.

-329 -
Ce constat qui est fait dans un rapport d'audit 54 comrnande
par les creanciers de cette imprimerie va suggerer l'initiative
de la transmission.
Si les
conditions de transmission dans les PME familiales
ne
sont
pas
toujours
identiques
le
taux
de
reussi te
de
ces
operations
est
faible.
Et
c' est
egalement
la
conclusion
a
laquelle aboutissent les etudes sur le processus successoral dans
les PME familiales.
En Europe et au Canada, pour BECKHARI et DYER (1983)
trois
entreprises sur dix survivent a une seconde generation, la duree
de vie moyenne d'une PME familiale s'etablissant a 24 ans et
correspondant aux annees d'activite du fondateur.
Les travaux
effectues
par
HUGRON
sur
un
echantillon
de
35
entreprises
familiales du QUEBEC aboutissent aux resultats suivants : 20 %
des entreprises ont echoue
leur premiere succession,
45 % la
deuxieme et 75 % la troisieme.
Les etudes menees par MERIGOT et HIRIGOYEN (1987) en France
revelent
que
65
% de
dirigeants
declarent
etre
les
premiers
proprietaires de leur affaire, 10 % des depots de bilan sont dus
a une transmission realisee dans de mauvaises conditions. La
recente
enquete
menee
sur
ce
suj et
au
Cameroun
fourni t
les
donnees s.uivantes 95 % des PME familiales sont encore dirigees
par la premiere generation, leurs unites ayant ete mises en place
par des promoteurs ayant 30 et 50 ans.
5 % des entreprises de
l'echantillon sont actuellement dirigees par les enfants de la
deuxieme generation.
S'agissant des entreprises dirigees par les
fondateurs eux-
memes, l'enquete distingue ceux des dirigeants dont les enfants
sont encore mineurs ou en age scolaire de ceux qui par principe
s'abstiennent d'impliquer leurs propres enfants dans la gestion
de leur affaire.
Dans 85 % des PME concernees travaillent les
enfants et des mernbres de la famille autres que les enfants memes
du chef de l'entreprise. Cousin,
neveu,
descendant direct d'un
ami, frere, beau-frere et autres sont aussi consideres comme des
54
Diagnostic Financier de la societe "Le Camerounais"
Rapport du CAPME, mars 1985 69 pp.

- 330-
successeurs
potentiels
susceptibles
de
continuer
l'oeuvre
cornmencee.
Les
PME
camerounaises
disposent
ainsi
d' une
plus
grande marge de manoeuvre en matiere de succession que les aut res
PME
europeennes
ou
canadiennes
analysees.
Dans
54
% des
entreprises de
l' echantillon,
les dirigeants
travaillent avec
leurs enfants. La taille des familles est importante.
32 % des
fondateurs ont entre 1 et 5 enfants,
39 % 6 a 10 enfants, 22 %
11 a 20 enfants, 7 % plus de 20.
L' existence
de
la
polygamie
dans
la
societe
africaine
explique la taille des familles.
Cette taille pose precisement
un
probleme
de
choix
de
successeur
et
explique
aussi
la
resistance
a la transmission.
Dans
82
% des
entreprises
Oll
travaillent deux generations on a 1 a 2 successeurs.
Les enfants impliques dans la gestion sont pour certains
entres tot dans l' entreprise familiale.
Sur 33 entreprises de
l'echantillon on a pu obtenir les resultats suivants :
70
%
des
dirigeants
integrent
leurs
enfants
dans
l' entreprise avant
leur majori te et
seulement
30
% attendent
l'age de la majorite.
Dans
le
premier
cas,
l'importance
des
enfants
mineurs
s'explique par
le fait que ceux-ci poursuivent parallelement
leurs etudes. Nous avons vu que les secteurs d'activite les plus
exploites sont ceux du commerce,
des services et des activites
diverses
(86,96
%)
qui
n'exigent
pas
toujours
un
niveau
intellectuel eleve pour l'apprentissage du travail.
Une partie de ce personnel se maintient dans l'entreprise
a un niveau intellectuel bas.
53 % sur un echantillon de 30
entreprises ont des enfants
actifs ayant un niveau inferieur au BAC ;
47 % ont un niveau BAC plus enseignement superieur. On peut
donc constater que le pourcentage des enfants ayant une bonne
scolarite est relativement appreciable. Ces resultats confirment
l'evolution
de
la
realite
par
rapport
au
probleme
de
la
qualification de la main-d'oeuvre dans les economies, des P.E.D.

Qu'il s' agisse de la resistance a
la
transmission des
enteprises,
du desir de contr61e absolu du
fondateur
sur son
affaire,
l'explication de la faiblesse des competences locales
est peu justifiee. D'autres considerations nous senililent primer
dans la conception de la direction des PME. Pour les dirigeants
des
PME
en
effet
la
propriete
du
capital
est
synonyme
de
capacites superieures de gestion et de maitrise des fonctions de
l'entreprise.
Crest cette conception generale qui prevaut dans les PME
familiales
etudiees.
Et,
dans
l'ensernble
des
entreprises
recensees, 95 % sont dirigees soit totalement soit partiellement
par les mernbres de la famille,
seules 5 % sont dirigees par des
personnes externes n'ayant aucun lien de sang avec le fondateur.
Ces derniers cas de direction externe concernent des activites
complexes dont l'industrie. L'enquete montre sur ce point que les
cadres
externes
sont
affectes
en
priorite
a la
direction
cornrnerciale dans 33 % des cas, a la direction technique et a la
production dans 33 % des cas,
a l'administration dans 25 % des
cas, a la direction financiere dans 9 % des cas.
L'objectif de contr61e financier et de supervision generale
cree cornrne un blocage chez le proprietaire rendant douloureux et
delicat le processus successoral. L'observation empirique de la
reprise des PME permet de dire que la succession est souvent
l'initiative de tiers-creanciers. Le fondateur la considere cornrne
difficilement realisable et ne l'accepte pas cornrne une releve
necessaire
a la survie ou a la prosperi te de l' entreprise.
Precisement
dans
le
cas
de
l' Imprimerie
Le
Camerounais,
la
reprise de l'activite par le fils aine alors age de 25 ans a ete
exigee
par
les
creanciers
la
banque
et
les
fournisseurs
etrangers.
Elle est alors apparue cornrne la seule voie permettant de
relancer les activites et d'eviter le naufrage.
Dans le cadre de l'interet que nous portons au processus
succesoral a travers l'exemple de l'entreprise "Le Camerounais",
il importe de souligner la maniere dont les creanciers tentent
d'apporter des solutions d'equilibre au probleme de cette PME.

- 332-
11 nous semble que le comportement decrit ici et qui se traduit
dans
le
mode
de
regulation
que
proposent
la
banque
et
les
fournisseurs fait reference a la theorie de l'Agence 55 • En fait,
cette
theorie
se
rapporte
a la mise au point des contrats
bilateraux
entre
agents
economiques 56 •
Et
les
contrats
ainsi
conclus
devraient
aboutir
a
la
resolution de
problemes
de
coordination,
risque moral,
anti-selection, partage du risque,
pouvant survenir entre
les parties contractantes. Ainsi,
les
raisons qui sont a l'origine du nouvel "arrangement" entre les
creanciers et le debiteur s'integrent bien dans le cadre de cette
theorie de l'agence pour au moins deux raisons :
-
La premiere raison est que l' entreprise a effectue un
certain nombre de choix qui ne sont pas prevus dans la convention
initale passee avec la banque. D'ailleurs lesproblemes commencent
avec la concretisation de la structure de financement prevue et
arretee par les deux parties, la banque
et l'entreprise. Celle-
ci prevoit
au depart :
. des
fonds propres d'un montant de F CFA 107 021 000 soit
30 % du financement dont
- capi tal
.
50 000 000
- compte 'Courant
.
17 021 000
- apport en nature
(terrain)
. 40 000 000
des emprunts d'un montant de F eFA 251 000 000 soit 70 0-0
dont
- ligne BAD
.
113 837 000
- credit BCD sur ressources BEAC
.
137 163 000
soit des ressources d'un montant global de francs
CFA 358 021 000.
Tout
ce
capital
devrait
donc
permettre
de
couvrir
le
programme d'investissement comprenant les postes ci-dessous
55
Cette analyse qui apparalt comme une emanation
de la Theorie des Assurances developpee par
ARROW

(1971)
a ete formulee par ROSS 1973.
On lira a ce Bujet l'article de Eric BROUSSEAU,
les Theories des Contrats

: une revue in,
Revue
d'Economie Politique 103 Jan-Fev 1993 81 pp.
56
Ce systeme de coordination s'oppose aUK approches
analysant la coordination entre "roles" ou "fonctions"
relevee s dans certaines branches de la Theorie des Organisations.

- 333 -
- terrain...................................
40 000 000
- Viabilisation et batiment.................
70 000 000
- Equipements de production
, 187 327 000
- Autres mat~riels
17 000 000
- Frais de premier ~tablissement
16 650 000
- 1nt~rets intercalaires
la 500 000
- Fonds de roulement
:
16 544000
Total. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
358 021 000
Les
pr~visions
faites
n'ont
pas
pu
etre
r~alis~es
principalement au niveau de l'apport personnel, celui-ci s'~tant
limit~ a un apport effectif de 58 millions de francs CFA dans le
cadre du programme arrete.
Cette defaillance est due a deux causes.
D'abord elle est attribuable a une modification unilat~rale
de la r~partition des capitaux entre les diff~rentes utilisations
et aux perturba tions qui
s' en sui vent dans
le calendrier de
r~alisation de l'apport
personnel attendu du promoteur. Ensuite
elle
resul te
d' un
d~passement du
programme
d' investissement
initial, depassement qui a ~t~ d~cide par le promoteur sans que
la banque ait ~te consultee. 11 va essentiellement affecter le
poste batiment. Ainsi, au lieu d'une superficie batie de 2000 m2 ,
le client va engager des constructions sur une surface de 4000
m2 , deux fois plus grande par rapport aux pr~visions. Ce batiment
restera d' ailleurs
inachev~,
le
fonctionnement
de
l' usine
ne
necessitant pas l'utilisation d'une telle
surface.
Ces distorsions qui apparaissent dans les premleres phases
de la mise en route du projet sont revelatrices de la maniere
dont le promoteur apprehende sa nouvelle activite industrielle.
11
nous
semble
que
celui-
ci
reste
a la p~riph~rie des
veritables problemes que posent un projet industriel et ne saisit
pas l'importance de la pr~cision et dans la programmation des
op~rations a realiser.
-
En revanche et c' est
la deuxieme raison,
les choix de
l'entreprise ne garantissent pas le bon d~nouement de 1 'operation
de
credit.
Et,
ce
surdimensionnement
du
batiment
aura
pour
principal effet de fragiliser l'entreprise sur le plan financier.

- 334 -
D'ailleurs pour faire face a la hausse du cours du mark, au
montage des machines Bielomatik et au demarrage des activites,
l'entreprise s'est
a nouveau adressee a sa banque pour un credit
supplementaire de 70 millions de francs CFA. Elle aurait pourtant
pu
se
passer
de
cette
dette
si
les
dirigeants
avaient
une
meilleure
experience
dans
le
secteur.
D'ailleurs,
les
consequences des
tatonnements vont
se sentir des
l' entree en
production.
En effet,
quatorze mois
apres
le demarrage affectif des
activites,
l'entreprise a a peine atteint un niveau de chiffre
d' affaires
annuel
egal
a
5
% de
la
capaci te
de
production
installee. Ce chiffre est largement inferieur aux objectifs fixes
pour cet horizon et qui portaient sur une production equivalant
a 50 % de la capacite des machines devant permettre un chiffre
d'affaires
dix
fois
plus
important
que
celui
effectivement
realise.
L'action de 1 'entrepreneur met en peril aussi bien l'avenir
de l'lmprimerie que le remboursement des concours accordes par
les creanciers. Et c'est pour faire face a cette situation que
ces
derniers
reagissent
dans
le
sens,
sans
doute,
de
la
preservation
des
interets
des
parties.
11s
creent
donc
de
nouvelles
regles
de
fonctionnement
de
leurs
relations
qui
consistent aussi bien a designer le fils aine de l'entrepreneur
comme nouveau patron de l'entreprise qu'a commander un audit de
l'entreprise aupres du CAPME.
La situation est, en effet, si precaire que la banque exige
egalement un diagnostic financier et des propositions urgentes
pour
la
relance
de
l'activite.
On
comprend
alors
que
les
creanciers multiplient les actions et
s'entourent de nouvelles
garanties
assurant
sinon
un meilleur
service
de
la
dette du
moins, une minimisation des pertes en capital.
Le diagnostic financier demande est donc etabli par le CAPME
en 1985. Cette etude
dresse un bilan au 31/12/84, souligne les
interets qui entravent la bonne marche de l'entreprise
et fait
des propositions de solutions pour le redressement de cette PME.

'::"335 -
Le
bi lan
resume,
apres
qua torze
mois
d' e;{ploi ta tion
se
presente de la maniere suivante au 31/12/84.
Bilan au 31/12/84
(en millions de F CFA)
Actif
Passif
Immobilisations
367,37
Capital
.
58,00
Valeurs d'exploitations
40,83
Dettes ~ LMT
. 288,29
Valeurs realisables et
Dettes ~ CT
. 152,00
disponibles............
43,09
Resultat net
. -47,00
451,29
451,29
Ce bilan presente une structure desequilibree, et oblige ~
poser les problemes qui minent l'entreprise. A la base il y a
cette
dispersion
des
ressources
financieres
du
client
des
capitaux importants ont ete affectes ~ des realisations que l'on
a
pas
pu
integrer
dans
le
programme
des
investissements
concernant
l'Imprimerie.
En
outre
et
hormis
les
prob1emes
techniques de maitrise de l'equipement, l'entreprise evolue dans
une absence quasi-totale de procedures et d'organisation tant au
niveau
administratif,
comptable,
financier,
commercial
que
technique.
Cette
situation
de
pilotage
~
vue
explique
la
paralysie de l'entreprise et le niveau derisoire de la production
soit
106
millions
de
F CFA contre
des
previsions
de
1
419
millions de F CFA correspondant ~ la moitie des performances du
materiel de production.
Les solutions que propose le rapport du CAPME vi sent :
- ~ redresser la situation financiere par la constitution
d'un fonds de roulement egal ~ deux ou trois mois de stocks et
grace ~ la renegociation des credits antrieurs,
- ~ mettre en place une equipe technique apte ~ organisee
l'activite en fonctlon des competences requises ;
- ~ doter l'entreprise d'une equoipe technique encadree par
un technicien de Bielomatik ;
- ~ ouvrir le capital ~ de nouveaux actionnaires capables
de faire un apport d'argent frais.
Ces
conclusions
tirees
au
niveau
de
l'organisation
Si appuient
sur la performance des machines
et
l' etendue d I un

- J36-
marche
sans
cesse
croissant.
La
banque
et
le
principal
fournisseur de la matiere premiere, l'entreprise suedoise GOTHIA
PULP and Paper AB souscrivent aux propositions du rapport. MAis
deux ans apres,
les propositions faites n'ont toujours pas ete
suivies. La banque et le fournisseur dont les creances globales
s'elevent alors a plus de 1 000 millions de F CFA decident de
faire
appliquer
le
nouveau
programme
d'action
propose
a
l'entreprise.
C'est a ce niveau que se pose le probleme de la transmission
de l'entreprise a un manager competent et de la dissociation de
la propriete du capital du management. L'une des implications de
la theorie de la firme
developpee par Schumpeter (1942) Manne
(1966) et plus recemment Brenner (1 987a) est que la distinction
soit bien faite entre entrepreneur,
proprietaire du capital et
gestionnaire pour que la firme survive.
Celle-ci doit dans ce
sens
trouver
une
forme
de
remuneration
appropriee
a chaque
fonction speci fique 57
Dans le cas precis de l'entreprise Le Camerounais,
cette
transmission est surtout lue a travers la theorie de l'agence.
Cette lecture permet
d'eclairer sur les raisons de l'operation,
sur
sa
signification
en
tant
que
moyen
de
resorption
des
desequilibres constates,
sur son efficaci te
et sa capaci te a
s' eriger
en mecanisme
de
regulation des
rapports
creanciers-
debiteurs.
La preoccupation majeure de la transmission est ainsi la
rentabilisation
de
l'affaire
et
son
developpement
dans
la
perspecti ve d' un bon denouement des operations de credit.
Le
benefice des mecanismes mis
en oeuvre ne peut donc pas etre
restreint aux seuls membres de la famille,
il doit s'etendre a
l' ensemble
des
parties prenantes
au
contrat.
La
reprise
des
entreprises
constitue
de
ce
point
de
vue
une
occasion
de
revelation et d' expression de nouvelles competences, une occasion
57
On
peut
eqalement
lire
a
ce
sujet
G.
A.
Brenner
et
R.
Brenner,
Intrapreneurship,
le
nouveau
nom
d'un
vieux
phenomene,
Revue
internationale de gestion vol 13,
nO
3
-
sept 1988 p 19-23.
On lira eqalement Joseph Tibbetts et EDMUND DONOVAN,
les oreateurs
et
les
managers
in
HARVARD
l ' Expansion,
Groupe
expansion
nO
56
printernps 1990 p
99-103.

~ 337 -
d'innovations
et
d'essaimage
technologique,
un
contrat
de
performance.
Si l'on peut dire que la theorie de l'agence met en exergue
des
relations
courantes
dans
le
monde
economique
et
que
la
solution
de
la
transmission
se
substitue
dans
ce
cas
aux
mecanismes de repression que seraient la saisie, la vente du fait
de la realisation des garanties bancaires,
il serait illusoire
de pens er que la succession constitue une panacee aux problemes
de cette PME. Et, l'une des limites du cadre de reference choisi
la
theorie
de
l' agence
est
qu' il
pourrai t
occul ter
la
specificite du probleme de la succession dans les PME et plus
specialemnt dans l'entreprise que nous etudions. Car, il ne faut
pas perdre de vue que ce changement a la tete de l'entreprise
n'est
pas
une
initiative
de
l'entrepreneur 5B
et
qu'il
est
difficile de prevoir la maniere dont il gerera cette decision.
11 se pose de
ce
fai t
un probleme evident de
transi tion qui
d'ailleurs ne concerne pas uniquement l'aspect de la direction
des activites.
Un autre aspec~, peut etre mis en relief dans cette analyse,
celui relatif aux nouveaux risques pris par les creanciers. En
effet,
l' une
des
mesures
d' accompagnement
du
processsus
successoral engage est l'accroissement des concours financiers
a la societe pour la relance de l'exploitation. Ces concours
s' ajoutent ainsi aux engagements precedents, accroissent la dette
de l'entreprise et elevent le niveau du risque des preteurs.
L'une des questions que l'on se pose alors est de savoir
quelle sera l'efficacite des nouvelles regles de fonctionnement
de l'activite, leur capacite a reduire les risques pris par les
differentes
parties.
Les
condi tions
de
la
transmission
nous
semblent
dans
ce
sens
representer
un
element
decisif
de
l'evolution des rapports entreprise - banque. Et l'exemple de la
societe "Le Camerounais" l'illustre bien.
58 - Ce type de succession pose 1e prob1eme des conditions de
succes de 1'operation,
en 1'occurence 1a preparation
de 1a succession comme facteuir de reussite.
On peut 1ire a ce sujet :
- G.BIRIGOYEN Transmission des PME et Participation des
sa1aries,
in BANQUE N° 472, mai 1987.
-
P.
BUGRON,
La Succession dans 1a PME,
op cit,
P 228-230

-338 -
La
decision
prise
par
la
banque
et
le
fournisseur
de
matieres premieres d'ecarter le fondateur de la gestion a ete
acceptee a la condition que son propre fils lui succede a la tete
de l'entreprise. La designattion de son fils aine comme nouveau
patron tient compte de plusieurs facteurs objectifs et subjectifs
d'abord
celui-ci
a
toujours
ete
implique
dans
les
activites
de
la
societe.
Cette
implication obeit
a la forme
familiale de cette entreprise. Elle permet surtout de preparer
le fils aine a assumer des responsabilites dans l'entreprise et
a y remplacer le fondateur au moment de sa disparition.
11 importe de preciser que la succession n'est pas rejetee
en
tant
que
telle
mais
elle
n'est
envisagee
qu'en
cas
d'incapacite physique du proprietaire et essentiellement en cas
de deces. L'attachement du fondateur a l'affaire tient au fait
qu'il pense etre indispensable et irrempla~able a la tete de sa
societe.
D'ailleurs
la maniere dont
il integre son fils dans
l'entreprise, la formation qu'il lui fait suivre dans differentes
imprimeries
en
Europe
le
destine
davantage
aux
fonctions
techniques,
a la direction de la production. En outre, le cout
eleve de
la
formation va
limi ter
la duree de celle-ci
a une
periode de 18 mois.
Ces delais semblent insiffisants pour assurer une maitrise
totale
de
la
technique
de
production
et
les
bases
d'une
connaissance parfaite de l'outil installe. La formation acquise
dans
ces
conditions
reste
approximative
et
explique
les
difficultes futures de la reussite du passage de la gestion d'une
personne a l'autre.
-
ensui te,
la deuxieme raison qui
semble avoir
favorise
l'acceptation
de
+a
releve,
est
l'espoir
de
continuer
par
personne interposee a diriger l'entreprise. Cet
espoir semble
permis en consideration de l'autorite paternelle que le fondateur
compte conserver sur son enfant et de son autorite financiere,
le fils ne possedant que 4 % du capital social.
Cette donnee subjective et non economique va influer sur le

- 339 -
changement decide au niveau de la direction de la societe. La
transi tion va
se derouler dans
des
condi tions particulieres,
generatrices
de
conflits
susceptibles
de
perturber
le
bon
deroulement des operations. Une double pression va etre exercee
sur le nouveau dirigeant emanant d'une part des initiateurs de
cette mutation et d'autre part du proprietaire du capital qui a
de l'ascendant sur son fils.
C'est donc dans ce climat de travail que se mettra en place
une nouvelle equipe et que devra redemarrer la production. Les
premiers mois sont difficiles et consistent en la creation de
veritables structures de travail :
- les taches sont redistribuees, une prime de rendement est
instituee
un
contrat d' assistance
technique
est
passe
avec
les
constructeurs des machines Bielomatik
- des negociations sont engagees avec les fournisseurs de
matieres
premieres
et
la
banque
pour
l'etablissement
de
moratoires.
La
produciton
est
relancee
progressivement,
en
6 mois
l'entreprise a pu realiser un chiffre d'affaires de 110 millions,
superieur
a
celui
des
14
premiers
mois
d'activites.
Malheureusement l'entreprise connait deja de graves difficultes
financieres.
Les dettes vis-a.-vis
du
fournisseur
rendent ce
dernier reticent a.
accorder de nouvelles dettes en dehors d'un
aval bancaire. En meme temps les autorites de la banque refusent
de supporter toutes seules la charge du redressement financier
de l'Imprimerie, d'autant plus que l'ouverture du capital n'a pas
pu etre concretisee.
Ces difficultes rencontrees dans le redressement financier
de la societe vont avoir des repercussions sur la relance des
acti vi tes
mettant
particul ierement
en
exergue
les
problemes
techniques et
technologiques de l'entreprise.
2.3 -
Le Facteur technologique et ses Implications
L'interet de ce facteur ne nous semble pas toujours avoir
ete per9u dans la mise en oeuvre des projets industriels dans les
PME camerounaises. Et, ainsi que nous le montre l'Imprimerie "Le

-j40 -
Camerounais",
cette dimension de la vie et du developpement de
l'activite industrielle faute d'avoir ete bien prise en compte
peut paralyser totalement le processus d'industrialisation.
L'exemple qui nous est offert ici est celui d'une PME dont
le promoteur s'engage dans la creation d'une unite industrielle
avant
d'avoir
evalue
ses
possibilites
techniques
et
les
structures necessaires a l'organisation du travail et a la mise
en service de son usine.On peut alors craindre les implications
des
turbulences
technologiques
sur
certaines
positions
strategiques 59 tant au plan des produits qu'a celui du processus.
Ainsi,
la these d' une relation etroi te entre la nature de la
production et la structure de l'entreprise est d'actualite dans
cet exemple.
Les defenseurs 60 de cette analyse montrent en effet, que des
liens etroits existent entre la complexite de la technique et
l'organisation du travail qui s'en suit. Marx pose le probleme
en terme de "mode de production".
11 precise que les rapports
sociaux dependent etroi tement des forces producti ves, consti tuees
par l'ensemble de l'appareil technique d'une societe.
Et pour
Marx,
ce
sont
ces
forces
productives
qui
determineront
les
relations entre les classes sociales.
D' autres
auteurs dont Marc
Penouil
reviennent
sur cette
relation pour montrer que le facteur technologique est un facteur
determinant du changement socio-economique. L'auteur ecrit que
"la technologie utilisee
implique
generalement une
certaine
59 - Le poids croissant de la technologie dans la strategie de l'entreprise est
souligne par de nombreux auteurs dont A.
CB. MARTINET.
On peut lire sur ce sujet
:
- A.
CB. MARTINET,
Strategie,
Edit. Vuibert,
Paris 1983,
PP 39,55-56 &
115-116.
- R.N. FOSTER, La Prevision de 1 'Evolution Technologique dans la Strategie de
l'Entreprise,
in Problemes Economiques, N°1784,
Juil 1982.
- B.
SAPORTA,
Strategies pour la PME, Edit. Montchrestien,
Paris 1986,
P 158-164.
60 - Le merite de la decouverte d'une relation entre la nature de la production
et la structure de l'entreprise revient •
J.
WOODWARD.
On l i r a . ce sujet,
J.WOODWARD Industrial Organisation: Theory and
Practise,
Oxford University Press,
1965 cite par P.
BARANGER et Alii,
Gestion, Edit. Vuibert,
Paris 1985,
P 44.

-141
organisation du travail et, partant, de la la societe a technique
tres evoluee et a dans des groupes a technologie rudimentaire"61.
L'organisation de toute societe doit tenir compte des exigences
de resultats qui decoulent des moyens deployes et des besoins
exprimes par ses differents agents.
De la meme maniere les moyens engages dans un processus de
production doivent s'accompagner de structures correspondant a
leur importance et aux objectifs definis. L'observation du cas
que nous traitons revele de profondes contradictions au regard
du
montant
des
investissements
et
des
dispositions
prises
essentiellement
sur
le
plan
technique
pour
assurer
le
developpement de l'activite industrielle dans cette PME.
Les causes de cette situation sont de deux ordres
- Dabord tous les facteurs reels de reussite qui auraient
du etre pris en compte sernblent totalement inconnus.
-
Ensui te,
la
technologie
parce
qu' elle
est
un
element
endogene,
est
difficile
a assimiler quand elle vient de
l'exterieur.
Ce deuxieme aspect permet de mieux comprendre le
blocage observe.
En effet les caracteristiques des equipements ne sont pas
prises
en
compte, .ce qui
engendre pour
l' entreprise un cout
d'opportunite eleve et un manque a gagner important. Cet aspect
financier du probleme s'explique par les defaillances techniques
et le tatonnement technologique dans lequel evolue l'entreprise.
Ces lacunes graves se traduisent dans des arrets frequents de
production, des temps morts prolonges et un capital oisif
qui
fonctionne a peine a 10 % de sa capacite.
Le sous-emploi du facteur capital traduit une contradiction
entre les moyens mis en oeuvre par l'entreprise et les objectifs
fixes de telle
sorte que la capacite souhaitee n'a pas permis
de maximiser la valeur de la firme.
Cette situatiqn s'explique par le caractere endogene de la
technologie comrne celui de la formation du capital en general.
La
traduction
de
cette
endogeneite
nous
est
donnee
dans
la
celebre formule de Ragnar NURSKE,
"Capital is made at home". La
61
-
M.
Penouil,
Soeio-Eeonornie du sous-developpement op eit 128- 131

- 34?- -
technologie surgit de l'interieur et ne saurait etre tranferee.
Sa maitrise en depend,
sinon la technologie devient source de
dependance notarnment en ce qui concerne le fonctionnement des
machines, leur entretien, leur repartition, leur perfectionnement
et l'extension du capital existant.
La dependance technologique dans la societe "Le Camerounais"
est telle qu'elle a conduit cette PME a la disparition faute de
la
part
de
celle-ci
d'avoir
su
mesurer
le
degre
de
cette
dependance.
Les goulots d'etranglement que l'on observe dans ce domaine
au niveau des PME nous obligent a insister sur cet aspect du
developpement industriel. S'ils y avaient Introduites sous forme
de
contrainte,
ceux-ci
auraient
suscite
l'exploration
des
differentes solutions possibles meme si celles-ci ecartaient de
l'optimum economique 62 recherche. On pourrait de ce point de vue
s'interroger sur les moyens humains a deployer
et meme sur la
pertinence d'un investissement dans une activite aleatoire qui
risquerait d'hypothequer le capipal deja constitue.
L'initiative
de
la
maximisation
du
profit
dans
ce
cas
participe-t-elle d' un reel
espri t
d I entreprise
au sens 00 le
defini t
Drucker 63 ?
les cri teres des choix economiques sont au
coeur
des
debats
de
poli tique
economique.
La
mai trise
technologique
est
une
composante
dont
on
ne
saurait
faire
l'economie dans un processus d'industrialisation,
fut-il appuye
sur les PME. Elle est la pierre d'angle d'une telle construction
quand on sait que la technologie surgit de l'interieur.
Elle
ne
se
transfere
pas
et
ne
saurait
s'accomoder
efficacement de tatonnements.
"Capi tal
is made
a t
home"
pour
62
J.
LESOURNE,
Technique Economique et Gestion Industrielle,
Dunod,
Paris 1971.
2eme edition pp 25-27.
On lira egalernent a ce sujet Xavier Greffe, Politique Economique, Ed,
Economica,

Paris 1987 pp 47-48 pour une extension de la
notion d'optimum de second rand au sens de Lancaster et Lipsay.
63
Peter Drucker,
les Entrepreneurs,
Edit Expansion Hachette,
Paris 1984.

- 343 -
reprendre la celebre formule de RAGNAR NURSKE 64 • C'est dans cette
meme mouvance que J.
R.
Hicks integre les
innovations et
les
inventions
comme
un
stimulant
economique
du
processus
d'accumulation 65 dans la theorie du cycle economique a laquelle
il aboutit.
Toutefois,
quelles
qu'importantes
qu'elles
soient,
les
seules donnees financieres et technologiques res tent des elements
d'un tout dans un projet industriel. Les qualites manageriales,
la dynamique de
la gestion sont un support complementaire et
imparable
qui
eclaire
les
dirigeants
d'entreprise
et
les
proprietaires sur l~ nature des risques, sur leur importance en
relation avec les capacites
financieres,
techniques,
humaines
disponibles.
Nous
allons
ainsi,
dans notre
section
Ill,
nous
pencher sur ce troisieme aspect
de
la vie des
PME qu' est
la
qualite de leur gestion.
64
On 1ira a ce sujet 1'ana1yse qu'en presente G. NGANGO,
1es
Investissements
d' origine
exterieure
en
Afrique
Noire
Francophone
: statut et incidence sur 1e deve1oppement,
Edit. presence Africaine,
1973 p 391 et suivantes.
65
J.
R.
Hicks, Valeur et Capita1,
Bordas traduction
franyaise 1981 p 1279 et suivantes.

- 344-
SECTION
III
LES
PROBLEMES
DE
GESTION
DES
PME
CAMEROUNAISES : L'EXEMPLE DE LA SOCIETE CONFITEX
L'analyse des determinants de la decision d'investissement
nous a permis jusqu'ici de mettre en lumiere l'importance des
facteurs financiers et technologiques dans l'evolution des PME
camerounaises. La maitrise de ces deux facteurs semble etre dans
cette approche une condition de la perpetuation de l'activite de
production.
Les
differentes
etapes
de
cette
maitrise
nous
apparaissent ainsi comme autant
de niveaux dans l'amelioration
des
conditions
de
production
et
partant,
des
resultats
de
l' entreprise.
Ce cheminement
est
generalement designe par
le
terme "gestion" et traduit tout le savoir-faire necessaire a la
realisation des objectifs de l'entreprise.
De
ce
point
de
vue,
la
gestion
semble
etre
une
autre
exigence
de
l'entreprise
indissocialble
des
deux
aspects
precedents, qui s'integre dans l'evolution de ceux-ci et dont on
ne saurait alors faire l'economie. C'est sans doute la prise en
compte de toute cette dimension de la gestion, de son imbrication
avec la situation financiere et technologique de l'entreprise qui
justifie l'accent particulier que nous voulons mettre sur les
problemes de gestion des PME camerounaises.
Nous avons choisi,
pour souligner l'acuite de ce probleme
dans les PME camerounaises, l'exemple de la societe CONF1TEX. 11
s'agit d'une PME du secteur moderne exer~ant dans le domaine du
textile et de la confection. Elle est dotee de moyens financiers
et technologiques satisfaisants mais elle connait parallelement
de nombreux problemes
d' organisation et de
fonctionnement
de
l'activite. La raison majeure de ces defaillances semble liee au
comportement deviant du chef de l'entreprise. En effet, celui-ci
bien qu'entoure de
conseils et de collaborateurs qualifies fait
totalement abstraction des dispositifs amenages par son equipe
technique dans le sens d'un veritable management mettant en peril
la vie de la societe.
L'analyse, a travers ce cas, du probleme de la gestion des

- 345 ~.
PME passe a notre avis par un certain nombre d'interrogations.
D' abord peut-on dans une PME se passer du "know-how" des
techniciens 66 ?
Ensuite,
l'esprit d'entreprise ne se revele-t-il pas dans
l'integration
a
son
action
des
veri tables
lois
de
la
competitivite dont l'un des vecteurs est selon G.
DEBRINAY la
"gestion de l'intelligence 67 ?
Nous
verrons
alors
avec
ce
cas
que
l' acti vi te
des
PME,
comme celle des autres entreprises, est tributaire de la qualite
de la gestion et quiil s'agit d'une contraine a laquelle aucune
entreprise,
fut-elle une PME ne peut echapper.
Nous essayerons donc de comprendre a travers cet exemple le
faible interet que les PME camerounaises accordent a la gestion,
la maniere dont celle-ci est apprehendee et ses implications sur
l'evolution de l'activite.
Nous
presenterons
d'abord
notre
entreprise
puis
les
problemes
de
cette
PME
dont
nous
pensons
qu'ils
sont
fondamentalement lies a une absence totale de gestion.
$1
Presentation de l'Entreprise
1.1
Creation et Capital Social
Creee le 2 Aout 1984 sous la forme d'une societe anonyme,
cette
PME
n'est
detenue
en
realite
que
par
une
personne,
actionnaire majoritaire et directeur general de la societe.
En effet,
le capi tal social qui est d' un montant de 100
66
J.
TIBBETTS et E.
DONOVAN,
les createurs et les Managers
in BARVARD,. l' Expansion,
revue trimes trielle, publiee par
le groupe Expansion,
Paris printemps 1990 nO
56 pp 93-104.
Les auteurs s'interrogent sur les coats salariaux acceptables
et
cozrpatibles
avec
les
objectifs
de
performance
et
de
cozrpetitivite.
67
On lira sur ce sujet G,
DEBRINAY,
les
nouvelles
lois de la cozrpetitivite in BARVARD,
l'Expansion,
op cit pp 66-77.

-346 -
millions de F CFA est reparti de la maniere suivante
- Societe SOCARCIN
45 %
- ISMAIL RABIH...........................
25 %
- Un prive camerounais
10 %
- Divers
20 %
100 %
La
societe
SOCARCIN
est
une
entreprise
commerciale
constituee sous la forme d'une SARL dont
Ismail Rabih est le
principal associe et gerant. De ce fait la majorite du capital
de la societe CONFITEX appartient en reali te a son Directeur
General. Et, bien qu'etant constituee sous la forme d'une societe
anonyme,
les
decisions
dans
cette
entreprise
seront
prises
uniquement par le detenteur de plus de 2/3 du capital social. Et,
ainsi que nous le verrons, cette unite sera geree par une seule
et meme personne exactement comme une entreprise individuelle.
1.2
Localisation
L'entreprise est situee a Bonaberi dans la zone industrielle
les bureaux et
l' usine sont construi ts sur une parcel le d' un
terrain de plus de"3 ha acquis par la societe. Le site a sans
doute
ete
choisi
pour
accueillir
plus
tard
d'autres
unites
industrielles.
1. 3
Objet
La societe a pour principal objet la fabrication de tissus
en matiere synthetique et subsidiairement en coton. La matiere
premiere utilisee est constituee de tissus ecrus importes d'Asie.
1.4
Les Equipements
Cette PME dispose d'un outil de production performant et en
parfait etat de marche finance a plus de 50 % par le promoteur
lui-meme, le complement, 210 millions ayant ete couvert par des
credits bancaires.
Ce materiel de production, d'un coQt global de 487 millions
servira a equiper l'usine. Ces realisations ont ete faites en
deux temps
-
les
principaux
equipements
consti tuant
l' essentiel
de

:. 347-
l'usine ont ete acquis pour une valeur globale de 404 millions
dont
150 millions de
F CFA accordes par la Banque SGBC.
Les
machines
installees
ont
ete
affectees
a trois sections de
production ;
- une section de
tissage qui est destinee a la fabrication
de tissus de bonneterie a partir de bobines de fil importe. Cette
section
sera
peu
exploitee
a cause
du
mauvais
et at
de
fonctionnement des machines et de ses consequences desastreuses
sur les charges d'exploitation et sur la qualite du produit. Par
contre
a cote d' elle fonctionne la section centrale de la
societe,
la
section
teinture.
De
loin
la
plus
active,
elle
represente le poumon de l'entreprise en apportant plus de 80 %
de l'ensemble de la production.
La teinture s'y fait
sur des
etoffes en matiere synthetique achetees a l'etat brut. L'interet
du
travail
reside
dans
la
fabrication
de
tissus
de
motifs
differents,
tissus a rayures, a carreaux ou
tissus de couleur
unie.
La
quali te
du
produi t
fini
est
fonction
du
choix
des
couleurs,
de leur combinaison et de la reussite de l'operation
de stabilisation des couleurs. Ce dernier critere d'appreciation
de la qualite est fondamental dans la mesure Oll il determine la
classification en produits ou de qualite moyenne ou superieure
- La societe CONFITEX s'est egalement dotee d'un troisieme
departement charge de la confection d'une partie du produit fini.
Cette derniere section de l'entreprise a pour objet de livrer sur
le marche,
a partir du tissu fabrique dans la section teinture
des tenues vestimentaires du genre pret a porter.
L'usine est donc conyue pour etre une unite integree allant
du tissage a la confection.
En outre, dans le deroulement de l'investissement on observe
comme un souci permanent d'amelioration de la qualite du produit.
Cette
analyse
decoule
des
etapes
successi ves
dans
l'installation des machines et leur perfectionnement.
- Une premiere tranche d' investissements d'un montant de 404
millions de F CFA est effectuee au debut de l'activite et elle
consiste en la mise en place des trois sections decrites plus
haut :

- 3-+8 -
1
Une sec t 'lon "T'lssage "
.
80 000 000 F CFA
21 metres a tisser
70 000 000
pieces de rechange..........
10 000 000
2
Une section "Teinture.................
209 000 000 F CFA
Machines et materiel de
production
.
183 000 000
. Pieces supplementaires
.
26 000 000
3
Une section "Confection................
115 000 000 F CFA
Machines. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
90 000 000
Installations et
amenagements
la 000 000
Climatisation materiel et
mobilier de bureau...........
5 000 000
. Materiel roulant
la 000 000
Ces equipements sont finances en grande partie par des fonds
propres et dans une moindre mesure par un credit a moyen terme
obtenu aupres de la Societe Generale des Banques au Cameroun.
- Une deuxieme tranche d'investissement est decidee pour
completer la chaine.existante. Elle consiste en l'installation
d'une unite de traitement des eaux qui assure a l'eau utilisee
dans la section du tissage une couleur neutre.
L'eau injectee
dans le circuit de fabrication doit etre incolore pour eviter des
perturbations dans la composition et la realisation des coloris
choisis.
Le
cout
total
de
ce nouvel
investissement
s'eleve a 83
millions de F CFA et comporte les postes ci-dessous
- les equipements ...................
41 000 000 F CFA
- les frais de montage ..............
21 000 000 F CFA
- le fonds de roulement .............
21 000 000 F CFA
Ces investissements complementaires sont finances a hauteur
de 60 millions par la BCD et pour 23 millions sur les res sources
propres
de
l' entreprise,
soi tune
proportion
des
ressources
propres de 28,75 % et de 71,25 % pour le credit.
Le montage financier global de cette entreprise compte une

- 349-
part importante d'autofinancement superieure a 50 % environ de
l'ensemble des res sources deployees.
Une
telle
structure
de
financement
devrai t
permettre
a
l'entreprise d'alleger ses charges financieres et garantir une
situation financiere equilibree.
En effet,
la justification theorique de l'autofinancement
presentee dans
notre premiere partie privilegie
entre autres
l'independance de l'entreprise et le faible niveau du cout des
capi taux.
Au-deLl de la controverse autour de cette forme de
financement,
la
so~iete
Confitex
beneficie
d'une
autonomie
financiere qui
lui evite des couts financiers eleves semblables
rencontes dans un des deux cas precedents.
Cette analyse theorique ne nous semble guere justifiee par
rapport a la si tua tion que connai t
la societe Conf i tex.
Elle
l'est d'autant moins que l'entreprise opere sur un marche OD la
concurrence est certes importante mais OD elle fournit un produit
different que le ratio qualite/prix
rend assez competitif.
En effet la concurrence sur ce marche est apre. Elle est
alimentee a la fois par la production
des entreprises locales
et
les
importations
de
toutes
sortes
qui
vont
des
articles
d'habillement de luxe a la
friperie.
Le produit
fabrique par
Confi tex presente un interE':~t particul ier. 11 s' adresse aussi bien
au consommateur a faible revenu qu'au consommateur moyen. Et, par
rapport
aux
importations
dans
la
meme
ganune
de
tissus,
son
produit a l'avantage d'etre fabrique sur place et donc pouvant
etre
adapte
a
la
demande
exprimee
par
la
clientele.
Cette
proximite du 68 client est un facteur de flexibilite vis-a-vis de
l'evolution du marche et un avantage majeur en faveur de cette
PME.
Malheureusement
ces
diffferents
avantages
lies
a
la
proximite de la clientele et a une structure de financement des
investissements plut6t equilibree n'evite a la societe Confitex
les difficultes de fonctionnement observees dans les exemples
precedents et qui se manifestent par une insuffisance de recettes
68
-
Le commerce de la friperie est reste longtemps informel
et
rneme clandes tin.
Il
a
ete
recemmen t
legalise
par
l' arrete
ministeriel
du
27
mars
1992
du
Ministere
du
Developpement
Industriel et Commercial du Cameroun.

-350-
et un poids excessif de charges.
11 importe alors de s'interroger sur les raisons de cette
evolution.
$ 2
La
Nature
et
les
Causes
des
Difficul tes
de
la
Societe Confitex
Nous
avons
vu
que
la
societe
Confi tex
s' installe
assez
aisement dans la zone industrielle de Bonaberi. Elle jouit d'une
structure
financiere
equilibree
au
moment
du
lancement
des
activites
et
d'un
equipement
de
production
en
bon
etat
de
fonctionnement. Sur le plan technique l'entreprise se dote d'une
equipe
technique
competente
qui
a
une
parfai te
mai trise
du
materiel de production.
Cette
entreprise
presente
un
reel
avantage
sur
le
plan
financier
et
technologique
par
rapport
aux
deux
exemples
precedents que
sont
la societe Milky-Way et
l' 1mprimerie "Le
Camerounais.
Ainsi donc,
en Juin-Juillet 1986, cest-a-dire deux annees
apres la creation de la societe,
la production est lancee. Les
premiers mois de
l'exploitation sont prometteurs. L'entreprise,
en effet,
realise un chiffre d' affaires mensuel moyen de 200
millions
de
F CFA pendant
les
dix
premiers
mois
de
l' annee
1986/1987.
Ce
chiffre
d'affaires
correspond
a
61,5
% des
previsions d'exploitation etablies par la Banque (BCD) au moment
de l'etude du projet d'installation de l'unite de traitement des
eaux en Juin 1986.

- 151 -
TABLEAU I -
TABLEAU PREVISIONNEL D'EXPLOITATION
Annee
C.A
Ben. Nets
Amortis.
Cash-flow
1986/1987
3 903
186
73
259
1987/1988
4 164
133
73
206
1988/1989
4 580
170
73
243
1989/1990
5 038
215
66
281
1990 et
5 542
245
66
311
suiv.
I]
Source
Note d'etude de falsa51Tlte de la BCD,
JUln 1~86.
Ce ni veau d' acti vi tes s' i 1 etai t maintenu, devrai t permettre
a.
la
societe
Confi tex
de
realiser
un
cash-flow
substantiel
couvrant
largement
les
engagements
du
client,
vis-a.-vis
des
banques et des fournisseurs de matieres premieres.
Mais
tres
vi te,
les
mouvements
sur
le
compte
du
client
connaissent une baisse drastique,
les recettes representant a.
peine le dixieme de celles realisees au debut des operations.
Cette
situation
engendre
de
grosses
difficultes
financieres
mettant
l' entreprise
dans
l' impossibili te
de
faire
face
aux
echeances de dettes" a. court et a. moyen terme. Les
raisons des
problemes
de cette PME sont mul tiples.
Nous
en soulignerons
particulierement trois :
- D'abord la difficile conjoncture economique dans laquelle
rentre le Cameroun des le deuxieme semestre de l'annee 1986 et
qui est marquee par une forte baisse des activites economiques.
-
Ensui te,
le marche de
l' habillement
est
sans cesse en
mutation et evolue au gre de la mode et de la conjoncture.
La maitrise de la technique de production et du materiel
ainsi que
la proximite de
l'entreprise de son marche lui ont
permis
d'attenuer
les
effets
de
la
conjoncture
et
des
fluctuations du mar-che.
Ainsi,
les deux premieres raisons ont
certes
contribue
a.
la deterioration du
chiffre d r affaires de
l'entreprise
mais
ne
sauraient
du
fait
des
possibilites
d'adaptation expliquer toutes seules le blocage de l'evolution
de l'activite.

·351 -
- Par contre la troisieme cause, celle qui semble etre la
plus ravageuse, est sans doute la qualite de la gestion du chef
de l'entreprise.
Ce proprietaire de la societe Confitex est un
promoteur de plusieurs petits projets industriels. 11 compte deja
une premiere experience dans une unite de fabrication de chiffons
industriels qu'il a cedee quelques annees plus tard pour mettre
en place
une
affaire plus
importante,
sa nouvelle
societe.
Manifestement son desir est de multiplier ce type d'experience
puisque un an plus tard, en fevrier 1985, il cree une autre PME,
la
Societe
de
Fabrication
de
Chaussures
de
Luxe,
en
abrege
CHAUSSLUX.
11
se
trouve
alors
a
la
tete
de
deux
unites
industrielles qui
devront fonctionner parallelement et sous sa
direction.
Le comportement que l'on observe dans cet exemple est celui
d'un
createurr
d'entreprises
qui
se
distingue par
de
faibles
competences en matiere de gestion.
Bien que l'analyse theorique
ne
s' accorde
pas
toujours
sur
la
frontiere
entre
les
deux
concepts de creation et de management.
Pourtant,
l'exemple de
l'entreprise
Confitex
revele
une
dimension
importante
des
problemes majeurs qui caracterisent une grande partie des PME
camerounaises,
le
probleme
de
la
gestion
qui
se
pose
aUK
entrepreneurs.

-353 -
TABLEAU IICeMPTE PREVISIONNEL D'EXPLOITATION DETAILLE
(en millions de F CFA)
AN!
AN2
AN3
AN 4
AN5
C.A
3 905
4 164
4
580
5 038
5 542
CHARGES
Mat. premieres
3 006
3 307
3 637
4 000
4 400
Frais de pers.
138
152
167
184
202
Frais div.
gest.
301
331
364
400
440
TOTAL CHARGES
3 445
3 790
4 168
4 584
5 042
Marge brute
458
374
412
454
500
ll'rais finan(l)
84
85
63
39
36
Amortissement(2)
73
73
73
66
66
TOTAL
157
158
136
105
102
Benef. bruts
301
216
276
349
398
Impots
(38,5 %)
115
83
106
134
153
Benef. nets
186
133
170
215
245
Amortissement
73
73
73
66
66
Cash-flow
259
206
243
281
311
(1)
Y comprls les fralS bancalres resultant des facllltes a court terme
(2)
y compris l'amortissement du materiel acquis.
Source: note d'etude de faisabilite de la societe CONFITEX.
Pour la litterature economique les avis sont partages sur
la
parente
des
concepts
de
creation
d'entreprise,
entrepreneurship et· gestion6!l.
Pour certains, ils sont difficilement dissociables. Tout en
essayant
de
demeler
ces
differents
phenomenes,
ils
leur
reconnaissent beaucoup d'interactions et de liens.
Innovation,
dynamisme dans la gestion,
crea ti vi te vont de pair.
C' est
la
substance de la vieille theorie de J. Schumpeter que P. Drucker
confirme quand il explique : "les entreprises d'aujourd'hui -et
particulierement les plus grandes d'entre elles- ne
pourront
69
- P. Drucker, les entrepreneurs
Expansion Bachette,
1984 p 194
- Il existe egalement une abandante litterature sur
les distinctions possibles sur ces concepts.
on se rapportera par exemple aux articles
:
J. N. Toulouse, Entrepreneurship et gestion
d'entreprise
- G. A. et R. Brenner, le Nouveau nom d'un vieux phenomene
- B.
B. Stevenson, Une perspective sur la Gestion
entrepreneuriale ;
- R. Chausse,
Innovation technologique dans les PME
gestes de gestionnaire ou d'entrepreneur.
in,Revue Internationale de Gestion, vol 13, nO 3
sept 1988

- 354-
tout simplement pas survivre dans cette epoque de mutation rapide
et
d'innovation
si
elles
n'acquierent
pas
une
veritable
competence d' entrepreneur"70.
I 1 tradui t
ainsi la di fficul te a
distinguer un
bon entrepreneur d'un bon gestionnaire.
Pour d'autres auteurs, ces phenomenes sont bien distincts.
L'entrepreneur c'est celui qui
detecte une opportunite dans le
marche
et
met
en
oeuvre
les
res sources
necessaires
pour
satisfaire un besoin per<;u.
Une
fois que cette initiative se
concretise,
le
gestionnaire
est
alors
charge
d'assurer
le
developpement normal des activites.
C'est ce point de vue que
soutient et developpe M. Cote. Pour l'auteur, "il est du domaine
du gestionnaire de diriger une organisation,
de developper sa
base de produits et de canaliser ses ressources dans les domaines
prometteurs"71.
Le champ d' action de chacun de ces agents est
bien circonscrit. Et si un leader et dirigeant d'entreprise peut
avoir le gout du risque et etre capable de saisir de bonnes
occasions d' investissement, tous les entrepreneurs ne reussissent
pas toujours cornrne bon manager.
Le defi est en effet grand et
l'exemple des PME camerounaises en est un
temoignage. Le cas le
plus
frappant
est
celui
de
la
confection
textile
que
nous
etudions. Il nous offre une situation particuliere d'une PME qui
dispose de nornbreux facteurs permissifs d'une evolution normale
dans laquelle interfere constarnrnent un comportement deviant du
proprietaire.
$ 3
Les Manifestations des Problemes de Gestion
de l'Entreprise
En plus des avantages que lui offre sa grande proximite du
consornrnateur, la Societe Confitex a pu mettre en place une equipe
technique qualifiee qui assure une utilisation maximale de la
capacite installee des equipements de production.
Elle dispose en outre de nornbreuses
facili tes aupres du
70
P. Drucker, Les Entrepreneurs,
op cit. p.
194.
71
-
M. Cote, le domaine des entrepreneurs et la gestion
des grandes entreprises de production,
in Revue Internationa1e de gestion op cit.


-355-
fournisseur
de
matieres
premieres
qui
est
deja
present dans
l' entreprise par le biais de l' equipe technique qu' elle y
a
detachee. L'ingeniosite de cette combinaison est un facteur qui
garanti t
au produi tune grande quali te et aux equipements un
rythme
de fonctionnement correspondant a la demande du marche.
Cependant, ces atouts n'ont pas pu etre longtemps exploites
a cause des ambitions de grand entrepreneur du fondateur.
Ces dernieres considerations qui ont inhibe une poursuite
normale de l'exploitation pourraient etre l'un des principaux
obstacles au decollage des PME.
3.1
Le Besoin de Reussite et le Clivage entre Creation
et Gestion d'Entreprise
Pourtant,
les
principales
structures
financieres
et
techniques
existaient
deja
dans
la
societe
Confitex
comme
fondation
de
l'edifice
industriel
de
cette
PME.
Mais
les
decisions
en
matiere
de
gestion
prises
par
le
chef
de
l'entreprise
ont
davantage
traduit
un
elan
d'expansion
et
d'essaimage que des actes de leader cherchant a concilier gestion
et creation.
Pourtant,
l'esprit de creativite participe d'un souci de
reussite. Cette notion a ete analysee par D-C. MC CLE11AND72 • Ces
etudes sont menees dans la perspective de recherches sur le role
de l' entrepreneur et sa contribution au developpement economique.
11
explique
qu'il
existe
une
relation
etroite
entre
le
comportement dynamique et createur et l'evolution sociale des
societes.
11
a
etabli
dans
le
cadre
de
son
etude
un
test
permettant
de
determiner
et
d'evaluer
ce
mobile
chez
un
individu73 • Ce besoin de reussite se manifeste dans l'efficacite
des structures creees,
la
gestion des
facteurs
disponibles,
l'adaptation des moyens cl la strategie.
11 existe egalement d'autres travaux,
ceux de A. Vincent et P.
MASSE qui ont inspire une metllode de mesure des variations de
72
On lira a ce sujet l'analyse succicte qu'en fait
M.
Penouil,
Socio-Economie du sous-developpement op cit p 309
73
Idem.

- 356·
productivite. Cette methode est connue sous le nom
de methode
du surplus et permet d'apprecier l'efficacite des structures de
gestion d'une unite de production.
Ce surplus de productivite
globale
est
alors
obtenu
en
faisant
la
difference
entre
la
variation du volume du produit fini
et celle des
inputs,
une
evolution positive du surplus des efforts d'amelioration de la
gestion.
A contrario,
une deterioration progressive du surplus est
causee dans l'entreprise CONFITEX par l'atonie de la gestion dans
la mesure ou les moyens mis en oeuvre ne correspondent pas a la
strategie74 •
En
effet,
la
creation
et
la
gestion
ont
un
caractere
dynamique et revolutionnaire que l'on ne retrouve pas ici. La
mobilisation des forces productives implique l'eveil de l'esprit
revolutionnaire des populations mues par des perspectives de gain
en
economie
de
marche.
Elles
supposent
a la fois l'esprit
d'entreprise,
l'organisation,
la
structure
des
firmes,
un
financement
adequat
et
la
prise
en
compte
des
aleas
de
la
conjoncture.
Ce
comportement
attendu
de
l'equipe
dirigeante
d'une
entreprise n'est pas toujours observe dans le cas de Confitex.
La
creation de
la societe CHAUSSLUX,
avant meme que
la
premiere ait pris son envoi le montre bien. Cette precipitation
dans l'agrandissement du groupe CONFITEX-CHAUSSLUX ne traduit en
rien une attitude de bon gestionnaire. Elle la reflete d'autant
moins que CHAUSSLUX est financeepar des recettes provenant de
Confitex.
Cette distraction d'une partie du chiffre d'affaires
expliquerait donc la chute brutale des recettes constatee apres
la premiere annee d'exploitation.
Cette pratique resulte d'une
confusion
couramment
observee,
consciente
ou
non,
entre
le
chiffre d'affaires et les benefices.
La confusion se manifeste au niveau d'un train de vie sans
rappqrt
avec
les
resultats
de
l'entreprise
parce
que
tout
simplement finance sur le flux des recettes. En l'absence de tout
71
J.
c. ME~~O~, et ~. ~O~IW~E
BJ.eIDl;)Dts de ~f!S~~9n ~~~ateg.iques des entreprises,
op c.it p 36-3~.
r

~ 357 -
bilan d' acti vi te la degradation de la si tua tion n' es t perceptible
que tardivernent lorsque l'entreprise n'arrive plus a financer le
renouvellernent des stocks de rnatieres premieres et la couverture
des charges courantes liees a l'exploitation. Ainsi a partir du
mois de Jui11et 1987 on a assiste a une deterioration du chiffre
d'affaires.
Les
de1ais
d'approvisionnement
et
1es
longues
procedures douanieres engendres par le comportement du banquier
et
le
rationnement
de
ses
concours
financiers
ont
encore
contribue au
ralentissement de
la production.
Les previsions
d'exploitation sont tres loin d'etre realisees tandis que les
engagements du client vis-a-vis de ces creanciers s'alourdissent.
Au 30 Juin 1988 la dette de Confitex s'etablit comme suit
SGBC
214775 966 F CFA
agios au 30/6/88 compris
BCD. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 304 375 582 F CFA.
La
dette
de
la
BCD d'un montant
de
304
375
582
F CFA
comprend :
- le credit d'investissement
.
60 000 000
- les interets·sur ce credit
.
30 317 448
- les credits de fonctionnement
. 211 799 467
- 1es commissions sur 1es importations
de matieres premieres arretees
au
30/6/88
.
2 258 667
soi t au total........................
304 375 582
Le montant de ces engagements globaux vis-a-vis des banques
est de
519
151
548
F CFA,
tandis
que
la det te
vis-a-vis du
fournisseur s'eleve a environ 300 millions de F CFA.
Ce bilan est lourd aussi bien pour l'entreprise que pour ses
creanciers et necessite un recul pour la
recherche de solutions
concertees.
3.2
La Resistance aux Mesures de Redressernent
de la societe CONFITEX
Celles-ci
vont
etre
proposees
par
les
differents

- 358-
intervenants dans l'activite de l'entreprise.
Des le debut de l'annee 1988 des reunions de concertation
sont organisees par les differents creanciers. L'importance de
la creance impose une action commune en vue du recouvrement des
sommes pretees a la societe.
Les mesures proposees sont les suivantes
- du point de vue de l'entreprise
. la societe consent a ceder 20 a 25 % de ses actions
a son partenaire technique, la'societe Hopewell Trading Company
basee a TAIWAN ;
l'entreprise
accepte
egalement
1 'offre
d'une
assistance
en
gestion
de
ce
meme
partenaire
technique
et
fournisseur de matieres premieres.
Cette equipe devra fournir requlierement aux banques 75 des
etats financiers simples tels
que des tableaux de res sources et
de depenses et des
comptes previsionnels d'exploitation. Elle
devra egalement systematiser la tenue de la comptabilite des
operations
de
l' entreprise
et
un
contact
permanent
avec
les
banques.
Du point de vue des banques et de la societe Hopewell
- Un pool bancaire a ete constitue pour l'adoption d'une
politique commune et l'etablissement d'un echeancier unique
Pour mieux contr61er l'evolution du chiffre d'affaires, les
banques conviennent de la domiciliation de toutes les recettes
de Confi tex dans un seul
compte.
Tous
les mouvements
sur ce
compte devront etre autorises par les banques et les sorties de
fonds devront se limiter a la couverture des charges essentielles
de fonctionnement et au rernboursement des dettes de l'entreprise.
Le bilan que l'on pe ut etablir a la suite de l'adoption de
ces mesures permet de dire que si celles-ci ont reussi a remonter
le
niveau
de
l'activite
;
elles
n'ont
pas
automatiquement
discipline le proprietaire et encore moins ameliore ses methodes
de gestion.
75
On retrouve ici le mode de regulation analyse
dans l'exemple precedent et qui fait reference
a la theorie de l'Agence. Voir supra p.
331 - 339

359 -
En effet,
l'arrivee de l'equipe de managers de la societe
Hopewell semble etre benefique a l'entreprise. Elle lui permet
de
reconstituer
le
circuit
d'approvisionnement
en
matieres
premieres et de reguler la gestion des stocks en fonction des
besoins du marche et du niveau des activites. 11 s'en suit une
diminution des
frais
generaux,
une meilleure distribution du
produit et un recouvrement suivi des recettes provenant de la
vente.
On
a
pu
constater
qu'il
n'existait
jusque
la
aucune
politique en matiere de vente et que le prix des produits etait
fixe en fonction des besoins en fonds qu'eprouvait le chef de
l'entreprise.
De
ce
fait,
les
recouvrements
n'etaient
pas
toujours regulierement programmes suivis a cause des modalites
de
paiement
que
negociaient
les
clients
de
l'entreprise
directement avec le patron compte non tenu
de la realite des
exigences de l'exploitation.
L' entree de cette nouvelle equipe de gestion dans cette
affaire
a
egalement
permis
de
diversifier
la
clientele
de
l' entreprise qui
avai t
tendance a se
reduire a
un
seul gros
client, creant une situation de monopsone.
Cette derniere
forme d' organisation du marche
revet des
avantages et presente egalement des inconvenients. Le princicpal
atout d'une telle politique est qu'elle evite a l'entreprise une
action commerciale couteuse. En revanche elle lui pose de la rnerne
maniere des problemes de faible marge dans la negociation des
prix de vente et des modalites de reglement des
achats effectues
par le client.
De toutes les manieres, la nouvelle structure de gestion a
opte
pour
une
clientele
diversifiee
et
une
presence
quasi
permanente sur le marche suivant l'evolution quotidienne de la
capacite d'absorption de celui-ci.
La production dans ce cas ne se fait pas de maniere continue
et les stocks de produits finis sont maintenus a leur minimum.
Cette situation a l'avantage certes de produire en fonction
de la demande et de mieux maitriser les frais d'exploitation,
mais en meme temps
elle
fai t
courir a
l' entreprise,
dans un
environnement de concurrence, les risques de perte d' opportuni tes
de ventes importantes.
Car si les stocks sont geres de telle

- 360-
sorte qu'ils soient relativement faibles,
l'entreprise ne peut
satisfaire a une commande importante qu'apres un certain delai.
Toutefois,
l' intervention de ces partenaires a permis de
relancer progressivement les ventes. A cause des difficultes de
la
conjoncture,
celles-ci
restent
tout
de
meme
faibles
par
rapport
a celles des premiers mois d' exploi tation. Elles se
situent a une moyenne mensuelle de 50 millions de F CFA.
Cette evolution positive a permis d'ajuster les previsions
de recouvrement des banques et du fournisseur.
L'ensemble des
dettes
ont
ete consolidees
et un echeancier
etabli
avec une
clause de flexibilite.
Cette
i~xtion
des
creanciers
dans
la
gestion
de
l'entreprise
permet
de
poser
les
bases
d'un
redressement
financier 76 • Mais en meme temps elle est per~ue par le fondateur
comme
une
exclusion
de
sa
propre
affaire.
Cette
perception
traduit en quelque sorte le phenomene de resistance decrit par
1GOR ANSOFF77 • 11 s'agit, en effet, d'un comportement de rejet ou
de refus d'adhesion face a un processus de changement strategique
mis en place dans l' entreprise.
Ces reactions que l' on
peut
observer chez certains dirigeants ont plusieurs causes et de
nombreuses
implications
analysees
en
terme de
couts
imprevus
susceptibles de retarder ou destabiliser tout le processus.
Dans le cas de la societe Confitex, le chef de l'entreprise
manifeste une attitude negative face aux mesures de redressement
proposees par les creanciers en raison de la frustration et de
la crainte qu'il ressent de voir diminuer son influence sur les
decisions,
son
contr61e
sur
les
ressourees,
son
prestige
personnel et sa reputation78 • On eomprend done mieux les nombreux
eonflits et les situations d'ineomprehension que l'on observera
76
On
peut egalement a ce niveau faire la
meme observation au sujet du role de la
banque faisant appel & la theorie de l'Agence
Cf.
supra p.
331 - 339
77
-
On se rapportera pour plus de details a IGOR ANSOFF,
Strategie du
Developpement de l'Entreprise,
Edit Organisation Paris 1989, pp 249-272.
78
IGOR ANSOFF,
Strategie du Developpement de l'Entreprise
op cit p 256.

- 361 -
dans la societe Confitex et qui ont pour principale consequence
de perturber durablement le rythme de l'activite. On a meme fait
le constat de l'apparition d'une gestion bicephale favorable a
cette forme de recuperation des
fonds investis par le promoteur
decrite dans le cas de la societe Milky-Way.
Le denouement de l'activite de l'entreprise Confitex pouvait
donc etre previsible. 1rreversiblement on a chemine vers un etat
de blocage. On a donc pu se remdre compte que le probleme de la
gestion dans les PME est une cause interne des difficultes de
l'industrialisation et nous fait poser a nouveau le probleme de
l'esprit d'entreprise dans les PME camerounaises.
L'analyse que nous avons menee dans la premiere partie de
notre travail
nous a permis de
souligner particulierement la
singularite
et
le
caractere
sommaire
de
leurs
methodes
d' organisation
et
de
gestion.
11
nous
est
alors
apparu
que
l'organisation est dominee par la centralisation du pouvoir de
decision
entre
les
mains
d' une
seule
et
meme
personne,
le
detenteur du capital.
Celui-ci assure ou cherche a assurer en
meme emps toutes les fonctions essentielles de l'entreprise. Le
fonctionnement de l~entreprise qui en decoule pose des lors des
problemes de competence, de compatibilite entre la direction de
l'entreprise et le pouvoir financier.
Cette difficile
compatibilite
entre
creation
et
gestion,
entre propriete du capital et competence reelle de manager est-
elle une equation a plusieurs inconnues ?
De toute evidence, l'objectif premier d'une entreprise qui
se cree est que celle-ci survive. Cet objectif doit ainsi et re
traduit
dans
les
moyens
et
la
strategie
mis
en
oeuvre.
La
creation
et
la
gestion
ont
un
caractere
dynamique
et
revolutionnaire et doivent constamment etre tournees vers une
perspective de reussite.
L' etude de nos trois cas de PME du secteur moderne nous
montre
que
les
moyens
deployes
par
les
chefs
d' entreprises
tranchent
souvent
avec
des
objectifs
de
perennisation
de
l'activite.

- 362 -
Dans le cas de Milky-Way l'importance des couts financiers
et la rigidite du comportement bancaire ont induit cornme on l'a
vu un comportement d' endettement pour le moins paradoxal.
La
conjugaison de ces deux comportements dont nous avons souligne
l' interaction
freine
le
developpement
de
l' acti vi te
de
l'entreprise.
Et,
pres de 15 ans apres la mise en service de
l'usine, cette derniere a a peine ete exploitee pour
60 % de sa
capacite.
Si dans ce premier exemple le facteur majeur de blocage de
l'activite a une nature monetaire et financiere dans le cas de
l' Imprimerie
"Le
Camerounais",
celui-ci
revet
un
caractere
technologique. La maniere dont le choix sectoriel est fait par
l' entreprise
est
en
effet
porteuse
des
germes
de
sa
propre
destruction.
Ainsi,
le
surdimensionnement
de
l'outil
de
production, sa vetuste et les problemes de gestion qu'ils posent
sont
le
resul tat d' une
entree hasardeuse dans
un champ pour
lequel on ne possede aucune competence et aucune formation.
Comrne dans le cas precedent l'equipement ne peut pas etre
exploite au maximum de sa capacite,
l'entreprise n'arrive donc
pas a s'assurer un fonctionnement autonome et autoentretenu. Le
naufrage est alors latent.
Dans ces deux cas les implications des problemes financiers
et technologiques sont une gestion irreguliere et mal maitrisee
de l'exploitation, les defaillances dans la gestion apparaissant
ainsi comrne une resultante d'autres types de difficultes. Mais
nous avons pu aussi mettre en relief une troisieme situation Oll
la cause des difficultes de l'entrepreneur est manageriale. Et
c'est cet aspect qu'illustre l'exemple de la societe CONFITEX.
Les derives en matiere de gestion sont telles qu'elles entrainent
l'entreprise dans un enlisement irreversible.
Dans les trois cas, on constate que les difficultes ont a
la fois des causes internes et externes. Mais quel que soit le
cas, les tentatives de redressement sont davantage l'initiative
des banques et autres creanciers que les PME elles-memes. Nous
avons alors pris appui sur la theorie de l'agence pour montrer
l'importance de ce mode de regulation mais aussi ses limites en
tant
que
solution
externeaux
problemes
de
ces
PME.

-363 -
L'incompletude
qu' il
tradui t
montre
bien
qu' aucune
solution
durable ne peut etre trouvee en dehors des PME elles-memes, ou
mieux en dehors de toutes les parties prenantes dans l'activite
de
l'entreprise.
Nous
ne
voulons
pas
remettre
en
cause
la
primaute des determinants financiers. Nous disons tout simplement
que
le
centre
d'impulsion
que
constitue
le
comportement
d'intermediation des banques ne peut pas remplacer le role que
les PME, notamment celle du secteur moderne ont a jouer dans leur
evolution.
Les experiences menees ailleurs dans le financement des PME
confirment cette approche,
les solutioons les plus recherchees
etant celles Oll les actions internes et externes peuvent etre
combinees.
L'experience menee au Nigeria consiste en la creation dans
les
banques
commerciales
d'un
fonds
de
financement
des
investissements. Celui-ci fonctionne comme une societe financiere
de prets participatifs. La banque est alors partie prenante dans
le
capi tal
et
se
sent
directement
concernee par
I' evolution
quotidienne de l'entreprise.
Ce
developpement
de
l'entreprise
est
d'autant
plus
preoccupant pour la banque que I 'importance du gain est fonction
du prix de cession de ses .participations.
La remuneration du
capital ne se fait plus sous forme de dividendes, on leur prefere
un reinvestissement des benefices tant qu'il permet une meilleure
affectation de ceux-ci. L'enrichissement net de l'entreprise qui
en decoule peut ainsi etre valorise pour maximiser le prix de
revente des participations.
Cette
forme
de
financement
s'apparente
au
"capital-
risque"79.
L'exemple
du
capital-risque
est
en
effet,
une
autre
dimension
de
la
fonction
des
intermediaires
financiers
79
On 1ira a ce sujet Xavier GREFFE, Po1itique Economique,
Economica,
Paris 1987, p 465.
On 1ira egalement Joel BESSIS, Capital-Risque et
Financement des Entreprises, Economica,
Paris 1988,
296 PP.

364
experimentee
aux Etats-Unis
a la fin des annees 50. 11 Y a
rencontre beaucoup de
succes particulierement dans des domaines
de
technologies
nouvelles.
Grace
aux
flux
de
capi tau;{
qu' il
engendrait,
il
a offert
aux
entreprises
des
possibilites de
financement qu'il ne leur aurait pas ete facile de se procurer
autrement. Et, plusieurs PME ont ete creees de cette maniere.
Ce type de financement semble particulierement convenir am:
PME dont on a
toujours
souligne
la
faiblesse
des
res sources
propres. 11 les libere en effet de la contrainte du paiement des
"dividendes" au moment 00 elles ont besoin de capitam: pour leur
e::pansion. Ce systeme de financement offre ainsi 1 I avantage, en
leur permettant de reinvestir les plus values
en capital,
de
creer
ou
d'accroitre
leurs
capacites
productives
dans
des
domaines 00
les banques classiques hesiteraient a s'engager.
En
France
les
pouvoirs
publics
ont
mis
en
oeuvre
des
formules allant dans le meme sens et regroupees sous l'appelation
"Societes de Capi tal- Risque" (SCR). Les act ions engagees dans ce
secteur, sont davantage liees au developpement des PME existantes
qu'a la creation de nouvelles unites 80 •
Ces experiences semblent concluantes au regard des resul tats
enregistres.
Aux
Etats-Unis
les
"small
Business
Investment
Companies", SB1C, specialisees dans cette fonction ont permis la
creation de
3 500
entreprises dont
1/6 est
aussi
cotee en
bourse81 •
Dans
d'autres
secteurs
et
sous
d'autres
formules
des
ei:periences
analogues
existent
au
sein
de
certaines
banques
cornrnerciales au Cameroun. Celles-ci sont surtout developpees dans
le domaine des credits sociaux. Des banques locales ont, a cet
effet
cree
un
fonds
de
solidari te
pour garantir
les
pr~ts
accordes
a
la
clientele.
Ce
fonds
fonctionne
a
partir d I un
prelevement effectue sur le montant de chaque credit consenti.
11 se situe entre 2 % et 5 % et garantit le remboursement des
enveloppes de credits prevues pour le financement de ce secteur.
S'il constitue une amputation sur le montant initial obtenu, il
80
-
XAVIER GREFFE,
Politique Economique op cit p 465.
81
Idem.

365
minimise
les
risques
lies
a
la
contrainte monetaire,
et
les
ruptures de l'activite de credit.
Evidemment une telle formule ne saurait etre transposee en
"l'etat",
du social aux operations de production. Mais elle a
l' avantage de representer un e;~emple d' inventi vi te. Elle est une
sorte de garantie aux flux de tresorerie mis ~ la disposition des
agents a deficit, et evite un financement incomplet ou mal adapte
lie ~ une absence de sOretes et dont l'une des consequences est
la mlse en chantier de projets tronques.
En effet, de tels projets representent
un grand risque a
la fois pour les investisseurs concernes et pour les bailleurs
de fonds. L'exemple de la Milky-Way le montre bien.
Le::;
experiences
Chl
funJs
Je
solidarite
et
du
risque" pourraient etre combinees et elargies au financement des
PME nationales. 11 s'agit ici d'un amenagement tenant compte des
besoins de financement des PME et du contexte deflationniste de
la creation monetaire. On conserve alors le double avantage d'un
financement substantiel par la reintegration des profits dans le
processus
de
production
et
de
la
minimisaton
des
risques
d'impayes
par
le
fonctionnement
d'un
systeme
de
garantie
mutuelle.
11 fa ut cependant dire que si ce mode de financement qu'est
le capital-risque s'est plus rapidement repandu dans les pays
anglophones,
il s'installe a peine en Afrique francophone,
mis
a part des pays tels que le Maroc et la Tunisie 00 l'on compte
deja une dizaine de societes de capital-risque en activite.
Dans la zone franc en particulier,
~ l'heure actuelle, on
compte tout juste quelques deux societes du capital-risque creees
au Senegal
et
au Tog0 82
qui
s' instal lent
sous
la
forme
de
societe regionales ou sous-regionales. Une troisieme est annoncee
et devra couvrir des 1995 les 14 pays de la zone. Mais avec des
participations prioritairement tournees vers les entreprises qui
82
On peut lire & ce sujet l'article de Sabine CESSOU,
zone franc,
le capital-risque, un outil pas une
recette in Jeune Afrique Economie N°
187 du 2 Janvier 1995,
p
36-37

- 366-
seront privatisees 83 ou restructurees, le probleme de la creation
des conditions de financement propres pour les PME ne semble pas
etre la preoccupation premiere de ces implantations.
Le probleme
de
la creation et du developpement des
PME
modernes ne semble donc pas encore avoir trouve une solution.
Mais il nous semble que la recherche de celle-ci pourrait Mutatis
Mutandis
s I inspirer des exemples de creation d' une
dynamique
propre comme ceux que l'on decouvrira avec les PME du secteur
informel.
83
Le terme privatisation est dQ a P. Drucker.
L'auteur l'utilise pour la premiere fois en 1969
dans son ouvrage intitule "The Age of Distontinuity"

pour traduire le retour au secteur prive de certaines
activites jusqu'ici confiees a l'Etat.
On lira a ce sujet P. Drucker, les Entrepreneurs,
Traduction fran9aise de P.

BOFFMANN, l'Expansion -
Bachette, Edit J.
C. LATTES,
1985 P 196.

CHAPITRE IV
LES CONDITIONS DE DEVELOPPEMENT
DES PME DU SECTEUR INFORMEL
:
ANALYSE DE TROIS CAS

- 368 -
INTRODUCTION
L' obj et
de
notre
etude
est
de
preciser
la
nature
des
relations entre le systeme bancaire et le financement des PME et
d'en analyser l'impact sur la gestion et le developpement de ces
unites de production. Nous avons jusqU'ici insiste sur le cas des
PME
du
secteur
moderne,
celles-1A
qui
souvent
s'adressent
directement aux banques pour financer leur activite.
11 existe Ac6te de ces entreprises un autre type de PME,
celles qui relevent du secteur informel,
dont l'importance dans
l'economie est souvent soulignee mais dont les rapports avec le
systeme bancaire ne semblent ni directs ni evidents.
Pourtant,
il est difficile d'affirmer peremptoirement qu'il n'existe aucune
forme de
relation entre les
PME informelles et
la creation de
monnale par les banques. Ce constat nous amene A rechercher dans
ce chapitre
IV,
la nature et le niveau de leurs relations,
la
maniere
dont
ces
relations
sont
gerees
et
integrees
dans
le
processus de dey~loppement 9u secteur informel.
En
effet,
les
etudes
anterieures
menees
sur
le
secteur
informel
reconnaissent
generalement
la
grande
diversite
et
l'heterogeneite
des
activites
qu'il
recouvre.
cependant,
la
plupart des analyses semblent faire
une approche globale de ces
activites ainsi que des problemes que rencontrent les
operateurs
de ce domaine particulier de l'economie. Cette globalisation ne
permet pas toujours de suivre et de saisir les transformations
qui
s'operent
a l'interieur du secteur ni la specificite des
problemes qu'on y rencontre.
Nous voulons dans cette etude preciser les contours de la
defini tion
que
nous
donnons
au
secteur
informel
et
l'interet
particulier qu'il revet pour
l'economie camerounaise.
Cet interet
nous le situons a deux niveaux :

- 369-
- celui de 1 'importance des emplois crees et du profil des
travailleurs
-
celui
du
mode
de
financement
et
de
l' organisation
de
l'activite.
11
s'en
degage
une
originalite
et
une
capacite
d'organisation et d'innovation inso~P90nnees.
a)
Par rapport au premier point il nous semble que,
compte
tenu de 1 'importance qu'on reconnait au secteur informel dans la
creation des
emplois
et des
revenus,
l'on ne puisse pas
faire
l'economie
d'un
examen
approfondi
des
particularites
de
l'economie informelle. On essayera d'en saisir la signification
et
de degager
les
perspectives
qu' elles offrent
dans
un
pays
comme
le Cameroun 00
l'accroissement du taux de ch6mage s'est
accelere ces dernieres annees a la faveur de la crise, notamment
dans la population des jeunes et des
dip16mes comme on le verra
plus loin.
On verra par exemple que les Ghoix sectoriels sont axes sur
des
cri teres
tel s
que
la
formation,
la
qual i f ica tion
et
la
maitrise
de
la
specialite ou de
la
technologie
envisagee.
En
comparaison
de
l ' approche
qui
en
est
fai te
dans
le
secteur
moderne,
et par rapport
au probleme endemique du ch6mage dans
cette economie,
l'entreprise informelle semble alors offrir une
plus grande possibilite de creation d'emplois. Compte tenu de la
nature
du
ch6mage
et
de
la
proportion
de
la
population
de
dipl6mes concernee,
nous degagerons
le profil des travailleurs
de ce secteur.
b)
Par rapport au deuxieme point,
on appreciera la maniere
dont
l'activite
est
financee.
On
montrera
surtout
que
le
comporternent d'endettement de l'entrepreneur de ce secteur est
revelateur
d'une
dynamique
propre
dans
la
relation
besoins
exprimes -
ressources adaptees.
Ainsi
,
d'une maniere generale
on mettra en exergue
les
mutations
qui
s' operent
progressi vement,
dans
I' economie
inforrnelle et qui s'effectuent dans le sens d'une organisation
et d'une
cohesion dont
le
degre
est
fonction
de
la nature de
l'activite, de sa complexite et de la precision qui caracterisent
le processus de production. Les efforts de
structuration qui y

- 370 -
sont deployes nous font meme dire que le terme informel utilise
pour qualifier les PME de cette partie de l'economie devrait etre
nuance.
Nous
avons
choisi,
pour
illustrer
notre
analyse
trois
exemples
de PME informelles camerounaises
- le Garage automobile Yundzo Andre ;
- l'entreprise de batiment Andong Joseph
- l'atelier de confection Angele-Bibiane.
Notre choix a porte sur ces entreprises operant dans des
secteurs importants de l'economie camerounaise pour les raisons
evoquees dans l'aspect methodologique de notre etude. Chacun de
ces cas est donc relatif a une activite precise et differente,
notre choix traduisant une volonte de diversification du cadre
de la reflexion.
Par contre ces uni tes sont toutes si tuees a
Douala, metropole economique du Cameroun. Cependant, nous avons
pense que la reduction a cette seule ville ne
porterait pas de
prejudice anotre souci de representativite des cas analyses. Ces
exemples
tels
qu I ils
se
presentent
dans
le
ni veau
de
leur
activite, dans la qualite des entrepreneurs et dans l'anciennete
de leur implantation nous sernblent pouvoir soulever et illustrer
les problemes essentiels lies au fonctionnement et aux mutations
observes dans la partie du secteur informel qui nous interesse.
Les
informations
que
nous apportons
proviennent de dem:
sources principales :
Une observation empirique de ces unites.
Les
differentes
interviews
accordees
par
les
entrepreneurs. Sur ce point il y a eu de nombreux echanges a leur
atelier, a leur garage ou dans leurs chantiers de construction.
Nous avons souvent
pris des notes et demande des
explications
supplementaires en cas de besoin.
Les informations reyues ont
souvent ete completees a partir des documents tenus par les uns
et
1es autres,
notanunent
par
l' atelier
de
confection Angele
Bibiane. 11 est important ne preciser que lorsque des documents
existent,
ceux-ci
sont
tenus
de
fayon
approxima ti ve
et
tres
souvent les informations d'ordre financier n'y figurent pas ou
sont codees et de ce fait difficilement accessib1es.

- 371 -
Nos informations ont ete regulierement comparees a celles
resultant d'autres interviews des chefs d'entreprise des memes
branches d' acti vi tes. Nous avons egalement exploi te des
enquetes
de terrain menees dans ce secteur1 • Elles ont confirme ou infirme
nos informations nous permettant de completer et affiner notre
analyse.
Notre etude se deroule a l'interieur de trois sections
Nous
allons
d' abord
definir
les
PME
informelles
puis
preciser la specificite du secteur informel camerounais. La place
de cette definition dans ce chapitre se justifie par la densite
des
informations
qu' elle contient,
leur
importance ainsi
que
l' interet des
problemes
qu' elle permet
de
poser
et
qui
sont
indispensables a la coherence de l'analyse. (Section I)
. Nous nous appuyerons ensuite sur des exemples precis pour
illustrer les particularites relevees. (Section 11)
Enfin,
compte
tenu
de
l'importance
du
probleme
du
financement,
nous
montrerons
comment
l' acti vi te
de
ces
entreprises est financee et partant,
celle des PME du secteur
tout entier. (Section Ill)
ASSE Marie,
les PME camerounaises,
un secteur
en developpement
: cas des ateliers de confection
a Douala, memoire de fin de cycle de l'Ecole Normale
Superieure d'Enseiqnement Technique,

Aoat 1992, Douala.
MESSINGA NGONO,
Etude des Structures et des possibilites de
developpement des PME : Cas des Menuiseries a Douala, Memoire de fin
de Cycle de 1 'Ecole NOl:Jn&le Superieure d'Enseignement Technique, Aoat
1992, Douala.
GEREA,
le FOGAPE et la promotion de l'emploi des
jeunes dip16mes,
Etude realisee
pour le compte
du FOGAPE sous la Direction de'-BEKOLO-EBE B.,
janvier 1988, Douala.

372 -
SECTION I
DEFINITIONS TRADITIONNELLES ET TENTATIVE DE
REDEFINITION2 DE LA PME INFORMELLE CAMEROUNAISE
--------....--------------------
$1 - Les definitions traditionnelles
De
nombreux
auteurs
ont
tente
de
definir
1'economie
informelle, les differentes defini tions variant generalement avec
les
centres
d'interets,
insistant
soit
sur
la
dimension
economique
et
sociale
de
ce
phenomene
soi t
sur
son
aspect
,
juridico-fiscal. ·L'une des remarques que suscitent les divers
angles d'apprehension de cette partie de l'economie est la grande
heterogeneite du secteur et la diversite de ses activites.
Par contre l'un des points qui ne transparait pas toujours de ces
definitions est l'evolution actuelle du secteur informel dans les
economies en developpement, dont celle du Cameroun.
1.1
L'Approche Economico-Sociale du Concept de Secteur
Informel
L'une des analyses rigoureuses sur le secteur informel a ete
realisee
par
le
BIT
qui
d'ailleurs
serait
a l'origine de
l'introduction du concept au niveau international en 1972. Ces
premieres
etudes
ont
ete
menees
dans
le
cadre
de
poli tiques
d'ernplois
aussi
bien
en
Afrique
avec
le
Kenya
et
la
Cote
d'Ivoire, qu'en Asie avec Calcutta3 •
a) Ainsi pour le BIT, ce secteur est constitue d'activites
derivees du secteur rnoderne, celles-ci etant "gerees" selon des
La definition du secteur informel a ete
evoquee
des l'introduction generale. Nous avons choisi de
la developper a ce niveau de maniere
a pouvoir
l'integrer directement ~ans le chapitre qui
est
cons acre a ce secteur et a souligner dans
toute
sa dimension son interet particulier.
- B.I.T., Emploi Revenu et Egalite : strategie pour
accroltre l'amploi productif au Kenya, BIT, Geneve 1975 ;
- EMHERIS, Strategie du Developpement de l'Emploi en Afrique
Une nouvelle approche, Revue Internationale du Travail,
septerri>re 15174 ;
- WEEKS, l'Extension de l'Emploi dans le secteur urbain non
structure des pays en voie de developpernant, BIT, Jan. 15175.
Ces auteurs sont cites par M.
PENOUIL, Socio-Econamie du
Sous -developpemen top. ci t. p48.
- On lira egalement A ce sUjet, H. LUBELL, Le Secteur Informel
dans les annees 80 et gO, Etudes du Centre de Developpement de
l'OCDB, OCDE, 1991.
I

- 373 -
modalites
traditionnelles
tres
eloignees
des
normes
d'une
entreprise organisee. La technologie y est souvent rudimentaire,
l'habilete
et
l'observation
etant
dominants
en
1 I absence
d' equipements
perfectionnes
et
d' une
formation
adequate.
11
s'agit donc d'activites faiblement capitalistiques Oll la gestion
est pratiquement inexistante. Parce que ces activites decoulent
de l'existence dans les economies concernees d'un secteur moderne
capitaliste,
elles presentent
une
deuxieme
caracteristique
elles
procurent
aux
individus
qui
les
exercent
un
revenu
monetaire.
Leur caractere informel tient au fait qu'elles empruntent
a la fois au secteur traditionnel dans leur mode d'organisation
et
au
secteur
moderne
dans
leur participation
a un systeme
d'economie monetaire.
L'imprecision du clivage de l'economie en ces deux secteurs
a necessite de pousser plus loin l'analyse,
faisant apparaitre
d'autres notions .
. Le BIT propose a cet effet une distinction entre secteur,
structure
et
secteur
non
structure.
Dans
l' etude
menee
sur
Abidjan,
7
cri teres
permettent
de
definir
le
secteur
non
structure assez voisin du secteur informel :
- la facilite d'acces aux activites en question
- le recours aux res sources locales
- les proprietes familiales des entreprises
- l'echelle restreinte des operations
- les techniques a forte intensite de main-d'oeuvre ;
les qualifications acquises en dehors du systeme
scolaire ;
les marches echappant a tout reglement.
Ces differents points sur lesquels s'appuie la distinction
entre
secteur
structure
et
secteur
non
structure
tendent
a
preciser la definition precedente. Mais cette caracterisation
semb+e encore insuffisante parce qu'elle presente un caractere
statique par rapport au cadre d'acquisition de la formation des
travailleurs
du
secteur
informel.
En
effet,
le
critere
de
qualifications
acquises
en
dehors
du
systeme
scolaire
est
imparfait pour qualifier ou apprecier ces activites. Ce critere

- 374 -
serait meme paradoxal dans la situation de crise actuelle compte
tenu
des
liens
qui
s'etablissent
quotidiennement
entre
les
secteurs
officiels
et
non
officiels
s' agissant
notamment
de
l'emergence de nouvelles activites productives. Leur creation et
leur developpement semblent plutot etroi tement lies a l' evolution
de l'economie capitaliste.
Et,
la crise qui
secoue a l'heure
actuelle
les
economies
africaines
en
general
et
l'economie
camerounaise en particulier se manifeste par la montee du ch6mage
et pose le cuisant probleme de la creation des emplois.
Le developpement des activites informelles apparait alors comme
une reaction spontane de la societe et des agents economiques
face aux difficultes de l'heure. Et, le ch6mage que l'on observe
dans une economie comme celle du Cameroun concerne aussi bien la
main-d'oeuvre qualifiee que la main-d'oeuvre non qualifiee ainsi
que nous le verrons par la suite.
b) D'autres definitions sont proposees sur ce concept. Celle
de P. Singer s'appuie sur un decoupage de l'economie en quatre
secteurs, l'un de ceux-ci correspondant pour une large part a la
production
du
secteur
informel.
11
distingue
ainsi
quatre
secteurs :
-
le secteur de subsistance
ici les produits fabriques
sont exclusi vement destines a la consommation des membres du
groupe. L'equilibre ne se realise pas par le marche mais depend
de l'evolution de la population et des surfaces exploitables. Les
echanges sont alors proches du Troc ;
-
le secteur autonome
il produit pour
le marche mais
fonctionne en marge du systeme capitalistique. La production s'y
effectue a petite echelle et evolue en fonction des besoins en
revenus monetaires. D'apres Singer, ces activites declinent sous
l'influence de l'economie moderne et en meme temps croissent avec
le developpement du secteur capitaliste.
L'auteur distingue deux autres secteurs
- le secteur du marche qui se caracterise par la recherche
d'une productivite elevee et la maximisation du profit a travers
la separation du capital et du travail. La division du travail
et la specialisation des taches y sont voisines de ce que l'on
rencontre dans les economies developpees ;
le
dernier
secteur
est
celui
des
activites

- 375 -
gouvernementales dont la croissance depend de la capaci te de
financement
degagee
sur
le
budget
de
l'Etat
et
des
choix
specifies dans le plan.
Le secteur autonome decrit par P. SINGER est celui-la qui
pourrait etre rapproche du secteur informel. Tout au moins,
sa
definition nous semble assez proche de la realite telle qu'elle
apparait a
1 'observation empirique des
P.M.E.
informelles
au
Cameroun. Toutefois,
le caractere autonome qu'il lui reconnait
devrait etre relativise etant donne que son evolution n'est pas
totalement independante de celle des autres secteurs. Il est fort
possible qu' il emprunte la main-d r oeuvre au secteur tradi tionnel,
ce mouvement de main-d'oeuvre etant l'une des explications de
l'exode rural. 11 recupere egalement la main-d'oeuvre provenant
du secteur du marche ou du secteur des activites gouvernementales
a la faveur des licenciements et des compressions de personnel,
de l' insuffisance de la creation des emplois-salaries ou des
difficultes de creation et de financement de PME modernes.
De la meme maniere et au-dela du probleme de l'emploi, les
matieres
premieres
utilisees
dans
ce
secteur
proviennent
en
partie des achats effectues aupres du secteur du marche,
les
agents du secteur informel ne pouvant pas recourir directement
a des importations. Nous y reviendrons.
c) . Une autre specification proche de celle de P. Singer est
apportee par M. Penouil, l'auteur parlant plutot d'activites de
transition.
Et,
Pour M.
Penoui1 4 ces activites jouent un role
important
dans
la
dynamique
sociale.
Elles
empruntent
aux
anciennes activites traditionnelles et aux activites modernes
assurant dans le temps le passage des unes aux autres.
L'interet
de
cette
defini tion
reside
davantage
dans
la
dynamique
sociale
qui
transparai t
dans
ces
acti vi tes
et
qui
accrolt leur impact sur l'ensemble de l'economie. Ainsi,
l'activite
informelle
resulte
des
contraintes
de
revenus
monetaires
qu'imposent
les
besoins
crees
par
un
contexte
economique capitaliste 00 les seules activites de subsistance ne
M.
~~~ou~~,
Socio Econo~e du so~s-deve1oppement,
Da110z 1918 p~.
4~-57.

- 37G -
suffisent
pas
pour
assurer
la
survie
des
populations.
Cette
exigence
pecuniaire
pousse
a une
forme
d'organisation
des
activites
souvent
inconnue
et
qui
pourtant
s'opere
sous
l'impulsion
d'une
generation
inventive
d'artisans
et
de
commer9ants se realisant dans une petite production marchande.
Nous
insisterons
sur
cet
aspect
dans
le
paragraphe
3
pour
souligner la dynamique propre du secteur informel et l'evolution
du concept.
Traditionnellement on classe dans ce secteur, les artisans,
les fournisseurs de services divers tels le garagiste, le vendeur
de cigarettes,
le cireur de chaussures,
le proprietaire d' un
peti t
vehicule
de
transport
des
produi ts
vi vriers,
le peti t
restaurateur du marche ou du quartier ... ,
tous effectuant les
petits travaux soit a temps complet soit a temps partiel. 11 est
utile
de
bien
distinquer
a ce niveau l' activi te informelle
qeneratrice d'un bien ou d'un
service reel du
chornaqe dequise
dont l'impact sur la production est quasi nul 5 de telle sorte
que sa suppression n'influe pas sur le deqre de satisfaction du
consommateur.
L'interet de cette precision, nous ne le situons
pas par rapport a la nature ou a la forme du bien. Une telle
discussion nous renverrait au vieux debat physiocratique sur le
"produi t
net"
de
l' agr icul ture et
la ster ili te des
acti vi tes
industrielles et commerciales.
La demarcation dans notre approche se fait plut6t en termes
de
creation
d'une
valeur
en
rapport
avec
l'utilite
et
la
satisfaction procurees au consommateur. Elle s' apprecie a travers
un ratio que l'on pourrait etablir a partir du temps de travail,
du revenu monetaire obtenu et de la satisfaction apportee par le
bien ou le service offert. Car, au-dela des problemes de mesure
quantitative
rigoureuse
de
sa
dimension,
l'importance
de
l'economie
informelle
peut
s'apprecier
par
rapport
a sa
-
Bernett 1973, SALAMA, 1973 presentent une approche
voisine en termes de marginalite et de travail improductif.
Cas auteurs sont cites par 1'.
HUOON, L' Economie non officielle :
mode de vie.et de survie dans les villes africa1nes in
B. Archambaul.t et X. Greffe op cit p. 205.

- 377 -
contribution dans la formation du PNB 6. Et, les analyses faites
par
les
economistes
dans
ce
sens montrent
que de
nombreuses
economies en tirent une large part de leur PNB grace aux revenus
que procurent les emplois ainsi crees. Selon les estimations du
BIT,
le secteur informel representait
en 1969 : 25 a 30 % de l'emploi urbain
37 a 39 % de l'emploi africain non agricole,
en
tenant compte des activites non agricoles
rurales
70 a 80 % de la population active en incluant les
activites agricoles de transition7 •
Dans le meme sens, une enquete menee sur le secteur informel
a Dakar au Senegal en 1988 revele les
resultats suivants :
Sur
30
000
uni.tes
identifiees on a pu denombrer
57
000
emplois crees, ceux des entrepreneurs compris.
Le recensement du secteur informel de Yaounde au Cameroun
effectue
par
l' equipe
du
BIT
en
1978
fourni t I e s
chi ffres
suivants
* 15 364 entreprises identifiees parmi lesquelles 2 596
entrepreneurs travaillant avec 146 associes,
176
travailleurs
familiaux payes, 549 employes remuneres et 3 342 apprentis, soit
au total 6 809 emplois dans 2 596 entreprises.
Dans ces deux cas
(Dakar et yaounde),
on a en moyenne 3
emplois pour chaque unite informelle.
Le revenu monetaire est difficile a evaluer ici. Dans le cas
du Cameroun on nous dit que la plupart des chefs d'entreprise de
l' echantillon perc;oi vent plus que
le SMIG,
84
% des
salaries
egalement.
Les manoeuvres sont moins bien payes et une grande
partie des apprentis versent une redevance d'apprentissage mais
sont par contre loges et nourris.
Les statistiques sur le secteur informel a Nairobi au Kenya
montrent
qu'en
1969
deja,
le
revenu
moyen
des
activites
de
-
On lie rapportera A l ' ana.l.Ylle de W. POMMEREHNE et B. I!'rey.
L'Bconomie lIouterraine : problemsll de mellure et R6l1ultat
quantitatifll, Revue d'Bconomie Politique nO 3-1984, p. 375-397.
-
On.se rapportera A l'analylle de W. POMMEREHNE et B. Frey,
l'H60nomie souterraine : prOblemes de mesure et R6l1ultatll
quantitatifll, Revue ~'Economie Politique nO 3-1984 p. 375-397

-378 -
transition etait d'environ 200$ par an et superieur au revenu par
tete du pays9.
Ces chiffres qui
sont
revelateurs de
l' importance de ce
secteur
dans
les
economies
en
developpement
confirment
la
necessite d'une approche particuliere qui renforce leur role au
se in des economies nationales.
Au-dela des aspects economiques et d'organisation sociale
que
revele
l' economie
informelle,
celle-ci
pose
un
probleme
juridico-fiscal
qu'il
convient
de
preciser
du
fait
de
ses
implications sur la quantification des operations qu'elle recele.
1.2
L'Approche Juridico-Fiscale
Une autre approche de
l' economie
informelle
souligne le
caractere non officiel
et
illegal
de
ses
activites.
C'est
a
l' interieur de ce cadre que Werner W. POMMEREHNE et Bruno S. Frey 9
tentent de
la definir.
Elle leur apparai t
comme une economie
"seconde"
ou
"parallele"lO
non
officielle
a
laquelle
ils
attribuent
de
nombreux
qualificatifs.
Elle
est
donc
essentiellement
submergee,
clandestine
ou
souterraine,
leur
analyse
portant
sur
le
secteur
non
officiel
dans
les
pays
industriels.
Pour
ces
auteurs,
trois
caracteristiques
essentielles expliquent la nature de ces activites.
D'abord,
ce
secteur
se
situe
a
la
frontiere
de
la
reglementation etatique et du systeme fiscal.
Cette situation
semble exercer un attrait particulier dans la mesure ou une part
croissante
de
la
population
y
travaille.
Son
evolution
est
consideree
comme
une
reaction
des
agents
economiques
a
la
surimposition des contribuables.
Ensui te
et
comme
corollaire
du
probleme
de
la
fiscalisation,
le
developpement
de
l'economie
informelle
8
H.
Penoui1,
Socio Economie du sous-deve1oppement,
op cit, p. 51.
-
Werner W. POMMEREHNK et Bruno S. Frey. l' Econom1e
souterraine : PrOblemes de m&sure et Resultats Quantitatifs
Revue d'Economie Politique n· 3 1984 p. 375-397
I. - Grossman, 1981 et GABOR, 1990 cites par Werner W. POHM&REHN& et
Bruno S. Frey. op c1.t. Cell lluteurs menent 1eur etude sur
l'&conomie 1.nformelle dans les pays socialistes ou celle-ci
en raison de lion volume pelle d'un poidll important lIur
l' &conomie et la qual1.f1.ent d' &conomie lIecond£! ou parallele.

- 379 -
contribue a la baisse des recettes fiscales.
-
Enfin,
la
dimension des
operations de
ce
secteur est
difficile a apprecier et cette situation constitue un blocage sur
le plan de l'orientation de la politique economique,
celle-ci
devant se faire sur des bases approximatives ou erronees.
La presentation du secteur informel faite par POMMEREHNE et
Frey recouvre
a
la
fois
des
acti vi tes
legales
et
illegales,
l'objectif etant une dissimulation des revenus d'une activite
clandestine
ou
souterraine.
Ainsi
l'economie
non
officielle
renverrait-elle au debat sur le frauduleux ou l'illegal et le
"legal non central".
La realite montre qu'il existe pour ces formes d'activites
de nombreuses variantes,
nationales ou regionales ou alors a
l'interieur d'un pays ou d'une region, des formes dominantes.
Aux Etats-Unis, les acti vi tes clandestines consistent en des
reseaux de trafic illegal de drogue et de services prohibes que
l' on
cherche
a maintenir a l' abri du contr61e des pouvoirs
pUblics. Ailleurs on leur connait d'autres formes. Ainsi, dans
des pays comme la France ou l'immigration clandestine est forte
le travail au noir alimente une grande partie du secteur non
officiel souterrain.
11 est alors considere comme une reaction de defense contre la
pression
fiscale
11,
mais
aussi
l' expression
d' un
souci
d'echapper a la connaissance des pouvoirs publics.
11 peut egalement se presenter d'une fa~on differente et c'est
le cas dans les pays de l'Est Oll il apparait essentiellement
comme une activite a temps partiel s'effectuant parallelement a
l'economie etatisee. 1'economie non officielle dans ces pays-la
est fondamentalement illegale dans la mesure Oll elle se realise
a
partir
de
la
piraterie
sur
les
matieres
premieres
des
entreprises
d'Etat
et
du
detournement
du
temps
de
travail
initialement
destine
a
la
production
officielle
12
Son
11
-
On lira pour plus de detail,
-
Edith Archambault, ~VIER Greffe, Les Economies
non Officielles, Editions la deco~verte, Paris 1984 pp 9-10.
On se rapportera 6galement A P. HUGON, !'Sconomie non
Officielle : modes de vie et de surv1e daDs les villes
africains in E. ~OLT et X. Greffe, Les Economies
non officielles op. cit. p. 187-209.
11
_
E. ~ambault. X. Greffe, op cit,

- 380-
importance est fonction decroissante du degre de repression et
orientee par la demande de biens de consornrnation diversifies et
des services personnels. Une autre particularite du cas des pays
de l'Est est le niveau de la remuneration du travail non officiel
qui se situe au dessus de celle pratiquee sur le marche officiel.
L' Economie
clandestine
ou
souterraine
se
presente
alors
comme
un mode
d' ajustement particulier
dans
les
economies
de
rnarche
ou
planifiees.
Cette
diversite
de
l'economie
non
officielle oblige a preciser le cadre dans lequel nous situons
notre etude des PME du secteur informel au Cameroun.
En fait,
il nous apparait qu'une distinction fondamentale
doi t
etre
fai tt entre
le
secteur
informel
en
Economie
sous-
developpee et l' economie clandestine submergee telle qu' elle nous
est presentee dans les economies avancees ou meme dans certains
pays africains 13.
Le critere distinctif essentiel nous semble
etre l'intentionnalite de l'economie clandestine d'echapper au
controle des Pouvoirs Publics et des autorites fiscales par une
dissimulation de l'ensemble ou d'une partie de ses revenus.
La situation se presente differernrnent dans les pays sous-
developpes.
Le secteur informel dans ces pays dont le Cameroun fait
partie
est
reconnu
par
les
Pouvoirs
Publics.
11
convient
toutefois
de
souligner
que
cette
tolerance
n'est
pas
une
particularite
des
economies
non
industrialisees
et
que
dans
certains
pays
de
l' Europe meridionale
tels
que
l' Espagne
et
l'Italie, ce secteur beneficie d'une tolerance sociale et d'une
certaine reconnaissance des pouvoirs publics.
Qu'il s'agisse des pays en developpement ou de ces derniers
exemples d'economies developpees 1 'emergence et le developpement
de l'economie informelle obeit davantage a des preoccupations
economiques et sociales de resorption du chomage et de creation
de "revenus monetaires de subsistance". Elle ne se preoccupe donc
.,
-
On peut lire sur l'Econamie souterraine l'artic1e
de M. Ben1ssad, l'Economie Informelle en Afrique, in
B. Archambault et X. Greffe, les Economies non officielles
op c1t.
.
L'auteur fait davantaqe Une pr6sentation des activit6s
clandestines en Afrique que celle de petites activit6s
productives. Nous voulons souliqner le risque de
confusion entre 6conomie cach6e et 6conomie informelle.

.. 3tH -
ni de contourner la legalite ni de se situer en marge du cadre
juridique existant.
Bien qu' elle n' ai t
pas conune
final i te de dissimuler ses
operations,
elle
pose
a la fois des problemes de mesure
quantitative de sa dimension et de fiscalisation en l'absence de
structures adequates.
En effet,
l' une des difficul tes que presente le secteur
informel est celle de sa quantification directe. Le probleme se
trouve
encore
accru
dans
les
economies
sous-developpees
et
particulierement· au Cameroun ou
l' ampleur
du
phenomene a la
faveur de la montee du ch6mage necessiterait le deploiement de
moyens
considerables
pour
un
recensement
exhaustif
des
differentes unites de ce secteur.
Car,
l' economie
informelle
regroupe ici une diversite de petits metiers et de micro unites
de production marchande de biens et de services varies dissemines
partout en zone urbaine essentiellement. Une estimation directe
passant par un recensement supposerait d'importantes ressources
humaines et materielles et une longue periode de travail.
Toutefois des methodes d'estimation ont ete proposees pour
ce secteur. Certaines e~udes s'attachent au chiffre d'affaires
realise,
d'autres
aux
depenses
pour
l'achat
des
biens
et
services.
Meme
si
elles
ne
parviennent
pas
a des resul tats
rigoureusement verifiables,
elles permettent tout de meme une
approximation de l'~nvergure et du poids du secteur informel a
travers les traces qu'il laisse dans l'economie.
POMMEREHNE et Frey 14 proposent une classification de ces
differentes approches suivant certains cri teres ; ils distinguent
ainsi quatre approches generales.
a)
Le secteur informel peut ainsi etre apprecie a partir
des traces qui apparaissent sous forme de divergences entre le
revenu et les depenses au macro et au micro-niveau. Lorsqu'il
"
- w. POMMEREHNB et 8. Frey, l'Econamie souterraine :
Problolme de mesure et resultats quantitati£s cp. cit.
On lira egalement ~ ce sUjet E. ARCHAMBAULf et X. Greffe,
Les Economies non officielles
&d1t. la D60ouverte, Paris 1984 pp 14-24.

··382 -
apparait un ecart entre le revenu et les depenses effectuees, on
decele l'existence de revenus caches. Ce residu s'apprecie comme
un indice de la grandeur de l'economie informelle.
Cette approche a permis d'estimer la taille de l'economie
non officielle dans plusieurs pays industrialises,
plac;ant la
France (23 %1,
la Belgique
(18 %1· en t§te par rapport au poids
du
secteur
non
officiel
dans
l' ensemble
de
l' Economie.
Elle
permet egalement d'etablir que pour la plupart de ces pays a
l'exception de la RFA et des Etats-unis, le poids est croissant.
b)
Quant a la deuxieme approche,
elle
s' appuie
sur les
traces
revelE~es par
la
verification
fiscale
et par d' aut res
methodes de contr61e.
Ses resultats sont obtenus a partir des
informations recueillies par les autorites
fiscales a travers
leur action de detection des revenus non declares. On reconnait
a cette methode l'avantage de faire ressortir les professions et
les categories de revenus pour lesquelles les declarations sont
minorees ou totalement omises.
Le recours a cette methode est plus ou moins utilise selon
les pays et l'un de ses inconvenients est que les personnes qui
ne font aucune declaration n'apparaissent pas sur le role. Et,
;
l'impact
de
la
verification
fiscale
est
lie
au
volume
des
declarations effectivement enregistrees.
En plus de ce controle fiscal le systeme de securite social
permet
de
detecter' les
omissions
et
les
dissimulations
de
declarations a partir des beneficiaires des prestations de la
Securite Sociale.
c)
Une
troisieme
approche
repose
sur
les
traces
qui
ressortent sur le marche du travail sous la forme d'un faible
taux officiel de participation active. La divergence entre les
taux officiels et la realite informe sur l'ampleur du phenomene.
d)
Une
derniere
approche
repose
sur
les
traces
qui
apparaissent dans la sphere monetaire.
Deux points de vue dominent dans cette methode
d'estimation.
- D'abord, il est admis que les transactions en especes sont

- JR3 -
moins visibles que les operations bancaires. De ce point de vue,
l'analyse s'appuie sur le ratio Monnaie en circulation/Depots a
vue. Elle s'effectue a partir des changements qui se produisent
dans ce domaine dans le rapport entre la monnaie en circulation
et les depots a vue detenus dans les etablissements bancaires.
L'importance de l'economie non officielle se traduit alors dans
l'accroissement relatif de la monnaie. Cette analyse fait ainsi
l'hypothese
d'une
vitesse
de
circulation
semblable
dans
l'economie officielle et l'economie non officielle.
Cette
methode
comporte
le
principal
inconvenient
qu'il
explique tout changement dans le ratio ci-dessus par la seule
influence de l'econornie informelle.
-
Une deuxieme analyse est
fondee sur l' hypothese d' une
relation invariable entre le total des fonds et l'ensemble des
activites
generatrices
de
revenus
monetaires.
Elle
part
de
l'hypothese que la totalite du PNB passe par des transactions
monetaires, la relation etant constante.
Le PNB du secteur non officiel s'obtient donc par deduction
de la part de PNB officiel du PNB global. Les resultats obtenus
par cette methode presentent peu de rigueur non seulement d'un
pays a un autre, d'une periode a l'autre mais meme a l'interieur
d'un meme pays quand on passe d'une periode a l'autre.
Il
ressort
ainsi
de
la
mul tiplici te
des
methodes
d'evaluation de l'economie non officielle que cette derniere est
difficile a quantifier directement. Elle a un caractere residuel
que l'on saisit plus aisement a travers ses manifestations parce
qu'elle se prete mal aux methodes analytiques conventionnelles
et a la saisie statistique. De meme, les resultats auxquels les
uns et les autres peuvent parvenir ne revetent pas une forme
rigoureuse. 11s resultent soit de sondages aupres d'echantillons
de la population concernee soit d'extrapolations.
Dans
les economies en developpement et surtout dans
les
economies
africaines
ceux
des
indices
qui
semblent
les plus
significatifs, permettant de saisir l'ampleur du secteur informel
sont reveles par la- si tuation sur le marche de l' emploi et par
la
difference
entre
les
revenus
officiels
et
les
depenses
effectuees.

- 384 -
Fondamentalement,le developpement de ce secteur dans les
economies
sous-developpees
participe
d' une
reaction
face
aux
limi tes
d' offre d' emplois
salaries.
C' est cette
approche que
privilegient les etudes menees par le BIT ainsi que nous l'avons
deja dit. Le secteur informel s'impose des lors cornrne une prise
en charge personnelle de la main-d'oeuvre inoccupee par elle-meme
a travers une forme particuliere d'insertion ou de reinsertion
dans le processus de production.
11 est non seulement une nouvelle
forme d' absorption de
l'excedent structurel de la force de travail mais aussi un type
particulier de production marchande et de creation de revenus
monetaires. Et,
l'economie informelle fait appel a ce niveau a
des facteurs traditionnels d'accumulation,
l'investissement et
de creation de
la valeur meme si
les moyens
et
les methodes
d'organisation ne sont pas conventionnels.
D'ailleurs, la realite telle que nous la decrirons dans les
developpements
qui
vont
sui vre
temoigne
d' une
evolution
par
rapport aux definitions precedentes du secteur informel. Qu'il
s'agisse du profil des travailleurs, de la nature des activites
et de leur structuration on peut observer une progressivite qui
prefigure une
grande capaci te
d' adapta tion et d' inventi te et
oblige
a s ' interroger
sur
l' effecti vi te
et
les
contours
du
qualificatif "informel".
$2
Specificite du secteur informel au Cameroun
L'interet du secteur informel decoule de son role croissant
dans l'economie contemporaine. 11 est particulierement ressenti
dans les Economies en Developpement ou il apparait cornrne un moyen
de resorption du chomage et de maintien de l'investissement dans
une situation de crise.
Le developpement du secteur informel dans les economies du
tiers monde semble donc etre un mode de regulation specifique de
ces economies.
Sur
le
plan
theorique,
son
existence
et
son
evolution
suscitent
de
nomb~euses
interrogations.
Elles
ravivent
en
particulier
la
controverse
sur
le
dualisme
economique.
Et,
l' appari tion
d' un
secteur
intermediaire
d' "acti vi tes
de
transi tion" qui a ses caracteristiques et sa dynamique propre

- 335 -
oblige a une reprecision des contours de la notion de dualisme.
En fait, cette notion est liee a celle de sous-developpement
et
tradui t
generalement
la
j uxtaposi tion
au
sein d' une meme
economie de deux formes de societes fonctionnant chacune selon
des
mecanismes
distincts.
C'est
donc
a travers une grande
complexite de clivages que le phenomene est souvent apprehende,
confirmant
la
difficulte
d'une
definition
rigoureuse.
Ces
clivages
sont
saisis
a des niveaux differents.
M.
Penouil
distingue sur ce sujet trois modalites du dualisme, le dualisme
sectoriel, spatial, international 15, aucune de ces formes ne lui
semblant
satisfaisante.
Nous
insisterons
sur
les
clivages
sector iel s
qui
interessent
davantage
notre
di scuss ion.
Cet te
modalite du dualisme consiste a classer les activites en fonction
de
leur
technologie,
de
leur
mode
de
gestion
et
de
leur
orientation vers le marche.
Ainsi,
l'introduction
de
la
technique
moderne
dans
la
societe
tradi tionnelle
mal
preparee
a la recevoir serai t a
l'origine du dualisme. Cette these est defendue par Hirschman et
Lewis puis reprise ensuite par les experts des nations unies pour
preciser
que
la
technologie
est
stagnante
dans
la
societe
traditionnelle.
Le
dualisme
serait
egalement
cause
par
l'impact
de
l'economie
capitaliste
sur
un
milieu
traditionnel
par
l'introduction de la monnaie et du marche par le biais de la
colonisation ou des
contrats corrunerciaux.
Cette approche
est
soutenue essentiellement par GANNAGE.
Les clivages sectoriels ainsi degages laissent entrevoir
l'existence de mecanismes de fonctionnernent inherents a chacune
des deux composantes de la societe dualiste. J. H. Boeke 16 dans
une presentation plus systematique du concept,
en reference a
l'economie
indonesienne,
souligne
les
principales
-
H.
Penouil, 5ooio Econamie du 50us-Developpement,
op cit p.
35
-
La systematisation de la theorle du dualisme est due
'" J.
H.
Boeke.
On lira'" ce sujet M.
Penouil, Socio-Economie du
Sous-D6velopp~nt.
op. oit. p. 35.

··386 .
caracteristiques des economies dualistes. Ainsi,
d'une maniere
generale
la societe precapi taliste se reconnai t
El un certain
nombre de comportements negatifs.
-
D' abord
l' absence
complete
du mobi le
de
recherche
du
profit
seule la speculation cree des revenus importants sans
travail par la seule exploitation de situations ponctuelles en
dehors de toute preoccupation de gestion.
11 n'existe donc ni organisation ni aptitudes El la gestion
et
a l'exercice des
fonctions
d'entrepreneur.
Ceci
permet
d'expliquer l'absence de reactions positives El la croissance du
revenu : la quantite. du travail et le goat du risque tendant a
diminuer avec l'accroissement du revenu.
- La societe traditionnelle se distingue egalement par une
absence d'utilisation systematique du capital en rapport avec un
certain
niveau
technologique.
Cette
forme
de
societe
se
definirait ainsi par des comportements fatalistes et resignes
vecteurs
de
nombreuses
lacunes
inexistantes
dans
la
societe
moderne occidentale.
Les comportements dans l'economie moderne sont totalement
differents. 11 en est de meme des conditions de fonctionnement
de l'appareil economique.
11
s'agit
plut6t
d'une
economie
diversifiee
ayant
des
besoins illimites telle qu'une croissance du revenu entralne une
croissance
de
la
dernande
induisant
celle
de
la
production.
L'appareil de production compte de grandes unites de production
relativement specialisees,
produisant pour un marche etendu et
agissant sur la croissance de la demande. Les adaptations et les
equilibres
se
realisent
par
l'intermediaire
des
circuits
monetaires.
Ces deux societes ont donc des principes opposes qui les
rendent non integrables. Le dualisme est une situation instable
et transi toire qui devra aboutir El une societe uni taire.
Les
perspectives sont celles d'une disparition El terme de la societe
pre-capitaliste par.absorption pur la societe moderne.
On pourrait El cette occasion souligner sur ce point precls
l'apport des theories rnarxistes du capitalisme imperialiste. On
pourrai t
en particulier relancer le debat autour de la these
marxiste leniniste sur la question de la survivance de la petite

- 387 .
unite
marchande
et
de
son
evolution
vers
une
absorption
progressive par le capital. Cet axe de reflexion avait deja ete
amplement explore par Rosa Luxembourg 17. L'auteur soutient que
l' echange
international
est une
necessi te
pour
la
survie du
capitalisme qui est ainsi condamne a l'imperialisme colonial et
a la recherche de debouches exterieurs a sa surproduction.
L'accUffiulation ou l'expansion de l'economie capitaliste sera it
alors inseparable de la destruction des formes precapitalistes
de production.
Pourtant,
l'observation des faits dans le cas particulier
des PME informelles au Cameroun laisse penser que la realite est
differente. Aussi bien du point de vue de la ligne de demarcation
entre secteur moderne formel et secteur informel que de celui de
la forme et de la structuration des activites informelles, on est
porte a croire que l'on n'evolue pas vers une disparition, tout
au moins dans un horizon proche,
des activites informelles. A
contrario, le secteur informel represente une forme inhabituelle
d'accumulation et de valorisation du capital et du travail dont
il serait interessant de comprendre la specificite.
En
reali te,
la
structuration
du
secteur
informel
telle
qu'elle nous est revelee dans les enquetes de terrain et l'etude
de
quelques
cas
de
PME
camerounaises
presente
une
reel le
evolution du phenomene par rapport aux differentes definitions
anterieures. La differeneiation se traduit partieulierement au
niveau
de
la
nature
des
aeti vi tes
et
a eelui du profil des
produeteurs et revele une dynamique propre de ces PME dans la
relation aux autres secteurs moderne et traditionnel.
2.1
Apports de l'Approehe Criteriologique
Nous
avons
vu
que
le
secteur
informel
est
defini
en
reference
a des
~riteres
modernes
de
classification
des
entreprises. Ces criteres nous les rappelons rapidement.
p
.
-
R. Luxembourg, Tho Accumulation of capital, 1913,
cite par Colso Furtado, thecrio du Oevoloppement Econamiquo,
pur,
20m edition, 1976 p. 212.

- 388 -
- le critere du capital
Les unites de production du secteur informel sont a faible
intensite capitalistique en comparaison des entreprises
modernes ;
- le critere du niveau de la technique
Les PME informelles apparaissent comme celles qui ont un
faible niveau technologique, l'equipement se reduisant a quelques
machines ou quelques outils
- le critere de l'emploi
l'offre d'emploi dans le secteur informel est illimitee au
niveau du revenu de subsistance contrairement a la situation qui
prevaut
dans
les
entreprises
capitalistes
a haut
niveau
technologique
peu
createur
d'emplois
Oll
l'on
applique
des
salaires institutionnels generalement superieurs au salaire de
subsistance.
- le critere de l'organisation et de la gestion
Les
differentes
definitions
de
l'economie
informelle
insistent sur les sources traditionnelles des methodes utilisees
en matiere d'organisation et de gestion. Celles-ci semblent alors
tres eloignees des normes d'une entreprise moderne organisee. Ce
cri tere
a
permis
de
souligner
l' heterogenei te
des
formes
de
production ainsi que leur diversite.
Le
secteur
informel
regroupe
ainsi
a partir de ces
differents cri teres de definition, une multiplicite de metiers
diversifies
relevant
de
tous
les
domaines
de
l'economie
nationale.
On y retrouve aussi bien :
- les petits metiers de l'agriculture, de l'elevage et de
la peche ;
- la petite production artisanale et industrielle
- le petit commerce;
- les metiers de services.
2.2
Les Limites de l'Approche Criteriologique
Certes, ces elements d'information semblent de prime abord
decrire certaines activites informelles. Toutefois,
il ne nous
semble pas que ces differents cri teres retenus soient suffisants
/

- ,89 -
pour souligner la particularite des unites dites informelles. Les
cri teres tels que ceux de la faiblesse des capitaux propres du
niveau technologique, de la structure de l'organisation et de la
gestion pourraient egalement servir a definir la PME moderne par
rapport a la grande entreprise capitaliste, toutes proportions
gardees.
De
la
meme
maniere,
le
critere
d'une
offre
d'emploi
illimi tee s' appuyant sans doute
sur une formation acquise en
dehors d'un cadre scolaire, celui egalement d'une absence totale
d'organisation et de preoccupations de gestion devraient etre
discutes au regard des mutations qui s'operent au se in du secteur
informel d'economies secouees par une crise profonde. Et, l'une
des grandes particularites du secteur a l'heure actuelle est liee
a
l'entree
dans
le
secteur
de
travailleurs
d'un
profil
inhabituel.
Au Cameroun par exemple,
l'analyse de la composition des
travailleurs
du
secteur
informel
fournit
des
elements
d'appreciation sur l'importance des mutations dans ce secteur.
Ainsi, a l'occasion du dernier recensement de la population
camerounaise,
le Ministere du Plan a publie les
informations
suivantes 18 sur la question de l'emploi.
- la population' active est estimee a 5 807 390 habitants en
1991
dont
970
200
salaries
parmi
lesquels
moins
de
200
000
fonctionnaires, contractuels et agents de l'Etat et plus de
770 200 salaries du secteur prive, 4 368 580 independants, aides
familiaux et apprentis.
Ces
chiffres
montrent
qu'une
grande
proportion
de
la
population active,
plus
de
80
% exerce
de petits metiers du
secteur
informel.
A
la
suite
de
cette
analyse
d'autres
statistiques pourraient nous permettre de montrer qu'environ
40 % de ces travailleurs independants ont pu acquerir un certain
niveau d'instruction ou de formation professionnelle appreciable
et
qu' au
fur
a mesure du temps y rentre une population de
diplomes. Partant de la population scolarisee de 1986/87 a
1990/91 , on se rend compte qu'il y a de nombreuses deperditions
..
-
Mini.tAre du Plan, 1987.
clt6 par Jeune Afr1que Kconomie, nO 159,
.eptembre 1992, p 114.

- ::190-
entre l' enseignement primaire et l' enseignement superieur,
le
taux de celles-ci etant de plus en plus croissant au fur et a
mesure que l'on evolue vers l'enseignement superieur. Le tableau
I ci-dessous retrace bien cette evolution.
TABLEAU I
LA POPULATION SCOLAIRE TOTALE PENDANT LE
VIe PLAN QUINQUENNAL 1986/1991
POPlJLATIONS
1986/97
1987/99
1999/89
1999/90
1990/91
En...
Prima1-
re et mat ..
1 919 210
1 909 715
2 006 831
2 107 130
2 210 304
Ins.
SQCond.
GOnera.1e ...
287 662
319 065
355 507
399 183
443 977
Bn... SQCond.
Teohnique ..
95 599
105 713
116 519
128 121
140 719
En... Supor ..
...!.!...!!!.
22 540
~
29 526
33 609
- -
Pop. SClo~a-
ri .....
Tota.1e (I) .
2 222 347
2 357 033
2 504 427
2 661 960
2 929 608
Pop. En...
Sup.
(Il) ..
19 897
22 540
25 570
29 526
33 609
DOpordi tion..
2 202 460
2 334 493
2 479 957
2 632 464
2 794 999
Tau>< dA <!Japer.
91,1 "
90,5 "
99,9 "
99,91 "
99,11 "
Souroe . G.B.R.B.A.
Une information principale se de gage de ce tableau : sur
1000
individus
qui
accedent
au
cycle
primaire,
environ
10
seulement, en moyenne parviendront aux etudes superieures. Cette
situation ne s'ameliorera que tres peu pendant le VIe Plan. Ce
phenomene est bien significatif de l' importance des deperditions,
de la forte selectivite de l'acces a l'enseignement superieur et
du caractere tres elitiste et censitaire du systeme educatif.
On constate en effet que sur 1 819 210 eleves inscrits dans
l'enseignement primaire et maternel en 1986/1987, seuls 319 065
et 105713 accederont en 1987/1988 respectivement a l'enseignement
secondaire general et technique. En d'autres termes, moins de 24%
des eleves
ins cri ts dans
le primaire en 1986/87 poursui vront
leurs etudes dans le cycle secondaire.
A l'interieur du cycle secondaire, il faut aussi relever le
l '
_
G£R&A, Le FOGAPB et J.a Promotion de 1. I ErtpJ.oi des
Jeunea dip~0m6a, sous ~a Direction de B. BBKOLO-BBB,.
Uude reuiaee pour ~e C«Ipte du l"OGAPB, Dcuua
Janvier 1999 p 29.

- 391 -
faible poids de l'enseignement technique 20 ,
TABLEAU II
CONFRONTATION ENTRE L'OFFRE ET LA DEMANDE
D'EMPLOI AU COURS DU VIe PLAN QUINQUENNAL
1986-1991
fiN 1987
fiN 1988
B':IN 1989
fiN 1990
fiN 1991
-------------
------------
------------
-------------
-----------
- Population
Tota1e
10 693 141
11 181 035
11 540 032
11 899 607
12 258 907
A - DB:NllND1I
D'BNPLO:I
-
Populat.
aativo (1)
3 675 440
3 816 798
3 920 672
4 024 547
4 128 426
B -
OI'FRE
D'BNPLO:I
- Dan" le
"QCteur
moderne(2)
557 400
593 750
632 700
674 200
718 600
- Dan" le
"QCteur tra-
cUtiollDel
(3)
2 738 500
2764 200
2 790 100
2 916 200
2 942 900
Tota1 ~loi
(2+3)
(4)
3 295 900
3 357 950
3 422 900
3 490 500
3 561 400
C - CHONlIGII (5)
379 500
458 800
497 800
534 000
567 000
(2)
-
le. ohiffre. relatif" a la population active et a la
popul.ation tota1e out eU. abteuu" de l ' etude de S:IM RBM%"
Ainsi, sur une population scolarisee de 2 222 347 individus
en 1986/87 seuls 19 887 accedent a l'enseignement superieur soit
un taux de deperdition de
91,1
%,
celui-ci est de
90,5 % en
1987/88 de 89,8 % en 1988/89, de 88,91 % en 1989/90 de 88,11 %
en 1990/91. Cette frange de la population se trouve ainsi livree
sur le marche de l'emploi et represente une grande proportion de
la population scolarisee,
a differents niveaux de formation.
Elle pe ut @tre utilisee en l'"etat" ou alors s'orienter vers des
centres
de
formation
professionnelle
ou
d'autres
cadres
d'apprentissage de petits metiers. Le niveau du chomage pour les
m@mes periodes est estime a 379 500 personnes en 1987 a 458 800
en 1988,
puis a 497 800 en 1989,
534 000 en 1990,
567 000 en
1991.
(vo i r Tab1eau I I) .
-
Ce COIIIIl9ntaire est eeiui qui. accOIlpaqtle le
tableau :I. :Il est eqalement extrait de cette
6tude du GKR&A.
11
_
GKREA, Le FOGAPB et la Promoti.on de l ' ~loi des Jeunes
Dipl&Dl!>ll, li:tude r6ali,,6e pour le cCClpte du 1'OGAP1i:, Dcuala,
Janvier 1999, p. 34.
U
_
SIM REMY
: Probl~ de l'mrploi. au Cameroun c\\ la veille
du VIe Plan in Ravue camerounai"e de Management,
nO 3 et 4, 1996, p. 206.

-392 -
Les deperditions que l'on estime en moyenne a 2 400 000
personnes scolarisees de 1986/87 a 1990/91 iraient donc alimenter
en grande partie la masse de la population active exer9ant des
petits metiers.
Cette analyse ouvre sur une autre dimension,
une nouvelle
"imago mundi"
du secteur informel par laquelle
la conception
classique
etroi te
du
secteur
est
depassee.
Elle
informe
de
l'entree
de
travailleurs
dans
ce
milieu
a des
niveaux
de
formation scolaire, universitaire et professionnelle de plus en
plus eleves.
Ce niveau de formation qui presage de l'amelioration de la
qualite de l'emploi reprecise l'importance
que nous accordons
a cette dimension de notre analyse. 11 constitue en m~me temps
un volet
insuffisamment explore qui pourrai t
~tre porteur de
nombreux espoirs dans la mesure ou la qualite du travailleur, ou
de
l' entrepreneur
est
une
force
23,
un
res sort
du
progres
economique
au
sens
de
Schumpeter.
L' inter~t
d' un
approfondissement de cette analyse pourrait ~tre mieux saisi a
travers
trois
caracteristiques
plus
dynamiques
du
secteur
informel. Celles-ci devront nous permettre de relever quelques
indices de la performance des unites informelles de production.
On
pourrait
donc
distinguer
ici
trois
principales
caracteristiques qui nous semblent plus. siqnificatives et plus
representatives 'de la particularite des PME infoDmelles.
11 s'agit de la specialisation des petites unites de production,
de la grande proxirnite de la clientele, du profil du travailleur.
2.3
La Specialisation des Petites Unites de Production
Les etudes sur le secteur informel presentent generalernent
la
grande
di versi te
des
acti vi tes
de
ce
secteur rnais
elles
n'insistent pas assez sur la grande specialisation qui s'opere
de
jour
en
jour· a
l'interieur
de
ces
activites.
Cette
caracteristique
apparai t
comme
un
aspect
evolutif
du
profil
u
_
Co terms eat eII'p%U11te a. Andre P1ettre.
L'auteur parle de la "dynamique des forces" pour montrer
que les facteurs 8ocJ.aux ne constituent pas que de
81J1ples cadres de l' activi t6 econanique, ils en sont l' essence.
On lira a ce su:)et Andr6 Piettre, pens6e Econanique et
Th60rie contemporaine,

s1x1~ Edition, Dalloz, 1973 p 441.

··393 -
actuel tel qu'il peut et re observe dans les PME informelles. Ces
unites ont de plus en plus tendance a se creer et a se developper
aut our de specialites techniques acquises non pas sur le tas mais
bien a l'interieur d'un cadre scolaire a differents niveaux de
formation allant de l'enseignement secondaire a l'enseignement
superieur.
11 s'agit de l'emergence d'un modele de PME qui se realise
dans une production marchande a petite echelle et qui trouve sa
justification dans un comportement rationnel et economique.
Analysant
les
determinants
de
l' investissement
dans
les
developpements
anterieurs
nous
avons
releve
l' importance
des
determinants
financiers,
technologiques
ainsi
que
le
role
strategique de la gestion dans la creation et la poursuite de
l'investissement puis du processus d'accumulation. Et dans notre
approche,
Ces
facteurs
fondamentaux
semblent
parfaitement
integres
dans
les
preoccupations
des
promoteurs
des
PME
informelles.
En
effet,
la
specialisation
obeit
a un souci de maitrise
technique des
operations
de
product ion
grace
a un ni veau de
formation
et
de
competence
qui
ecarte
ou
limite
le
risque
technique.
De
la meme maniere
l' echelle de production de
la
peti te
uni te
informelle
semble
prendre
en
compte
la
faible
dimension du marche,
dej a soul ignee dans le chapi tre I I I,
les
problemes de
gestion attaches
a l' importance de l' entreprise
ainsi
que
la
composante
financiere
et
les
difficultes
de
financement des PME.
La PME informelle semble ainsi reduire le risque financier,
le risque technologique, le risque de gestion. La prise en compte
de
ces differents
risques
releve d' un veri table comportement
d' entrepreneur. C' est egalement de cette maniere que l' apprehende
l'analyse
de
R.
Chaussee
dans
le
cadre
de
1 'innovation
technologique dans les PME 24. Celle-ci s'exprime veritablement
dans
la
capaci te
de
l' entrepri se
a real i ser les condi tions
permissives de son eclosion,
de sa materialisation et de son
I f
-
Raymond Chaus86e, Innovation technoloqique dans 188 PH& :
qeste de qeationnaire ou d'entrepreneur in Revue Internationale
de Gestion op cit. pp. 77-92.

- 394-
exploitation.
Cette specialisation que l'on peut observer dans la mise en
place
des
uni tE~s
informelles
de
production
de
biens
ou
de
services se manifeste egalement dans la maniere dont elles se
structurent a l'interieur d'une "filiere". La structuration se
revele a differents niveaux.
Elle
se
manifeste
d'abord
sur
le
plan
de
la
localisation
geographique des unites appartenant a la meme "filiere", ensuite
dans
la
prise
en
compte
de
l' interdependance
de
toutes
les
specialites concernees. On assiste ainsi soit a une localisation
precise
soit
a ·un regroupement spatial des competences et
specialites requises.
Le souci majeur est alors d'assurer une
production
integree
et
un
produi t
totalement
"fini".
Cette
organisation bien que peu apparente existe pourtant et c'est elle
qui confere au secteur sa dynamique propre. Elle repose sur une
souplesse
des
structures
et
un
comportement
entrepreneurial
inventif et innovateur puis se traduit dans l'acceptation de la
complementarite
qu'induit
la
specialisation
des
differentes
activites.
En
effet,
il
se
developpe
a l'interieur de chaque
regroupement d'activites une division du travail qui tient compte
de la particularite de chaque competence en tant que maillon de
la chaine. Elle est plus ou moins precise selon les domaines de
la production consideres.
La specification de quelques specialites peut sans doute
permettre une meilleure illustration. On peut ainsi se rendre
compte que dans les domaines de l'automobile et du batiment, elle
semble plus rigoureuse, alors qu'elle l'est beaucoup moins dans
celui de
la
confection.
Naus
resterons
dans
ces
domaines de
production pour les exemples que nous decrirons plus en detail
plus tard.
Ainsi
dans
la
reparation
automobile,
le
mecanicien,
technicien
des
pannes
mecaniques
se
distingue
bien
de
l'electricien charge de la reparation de tout ce qui a trait au
circuit electrique des vehicules automobiles. Et, c'est dans leur
domaine que chacun d'eux est le plus performant. Ils se realisent
moins bien dans les autres techniques.
La peinture automobile
dans
sa
subtilite
leur
echapperait.
Car,
elle
exige
de
la

- 395-
competence dans
la composi tion des couleurs demandees par la
clientele, dans la consistance a obtenir compte tenu du milieu
et des intemperies, dans l'application meme en une ou plusieurs
couches selon la nature de la peinture. 11 en va de meme de la
talerie qu'il faut refaire totalement ou partiellement selon le
degre
de
corrosion
de
la
tale.
Chacune
de
ces
specialites
evoquees est donc bien distincte des aut res et necessi te une
formation bien assimilee.
Selon le degre de technicite applicable a chaque activite, ce
type
de
distinction
s' imposera
avec
plus
ou moins
d' acui te.
Ainsi, dans le ba timent le plombier, le carreleur, l' electricien,
le charpentier, le ma90n, le menuisier etc, ont chacun une tache
specifique. Le cumul des fonctions est possible mais n'offre pas
de garantie quant a la perfection du travail.
Par contre, il est possible que la specialisation soi t moins
poussee dans certains domaines de la production. La confection
semble faire partie de cette categorie d'unites 00 lIon peut etre
competent sur presque toute la chaine. 11 n'existe alors que tres
peu de travaux qui soient sous traites a l'exterieur. La broderie
sur les tissus,
le plissage par exemple peuvent etre confies a
des ateliers specialises du secteur informel. On peut aussi le
faire dans les ateliers modernes mieux equipes, surtout lorsqu'il
s'agit de tissus delicats. 11 est utile de preciser que quelques
fois,
on
a
l'impression
qu'il
se
pose
plus
un
probleme
d' equipement
coQteux
que
celui
de
la
simple
mal trise
de
la
technique. 11 en est ainsi du plissage qui, effectue a l'aide de
machines
est plus precis,
pI us
regul ier et plus durable.
11
pourrait certes a la limite,
etre realise a la main mais il
necessiterait plus de temps pour des resultats approximatifs.
Les PME informelles ont donc pudans une organisation plus
ou
moins
explici te
creer
en tre
elles
et
pour
chaque
genre
d'activite une chain~ de production complete. Toutefois, l'un des
problemes,
auquel
elles
sont
souvent
confrontees
est
que
la
precision de l'outil egale difficilement celle de la machine.
A ce niveau egalement elles ont montre leur capacite de
reaction et d' adapt a tion.
Ainsi,
lorsque
leurs
ins tallations
s'averent
inefficaces
les
PME
informelles
sont
obligees
de

- 396-
s' adresser au secteur moderne dote d' equipements plus performants
susceptibles de rehausser la qualite du produit ou du service a
offrir sur
le marche.
Pour ces
unites,
la
specialisation se
presente cornrne
une
reponse a des objectifs de qualite et de
permanence de l'exploitation.
L'indispensable
complementarite
qu'elle
impose
implique
des
relations a l'interieur du secteur mais aussi a l'exterieur avec
le secteur moderne.
La sous traitance, les echanges de services et de conseils,
une
mise
en
cornrnun
de
plusieurs
competences
favorisent
la
realisation du meme produit ou du meme service. La diffusion et
le developpement de cette forme particuliere de production de
biens
et
services
ont
permis
avec
certains
regroupements
geographique l'emergence de veritables zones specialisees.
Dans
la
ville
de
Douala
au
Cameroun
on
a
pu
localiser
des
quartiers tels que leur seul nom peut s'identifier a un domaine
de production donne. On a l'exemple du "quartier Yabassi" pour
la reparation automobile,
le "marche Congo" pour la confection,
le "Carrefour-mac;:on" a Douala-nord par le batiment.
L' analyse
de
ce phenomene
est
tres
interessante
a plusieurs
egards.
D' abord
elle
montre
que
de
tels
regroupements
se
sont
toujours operes a proximite des sources d'approvisionnement en
matieres premieres. Le marche congo est repute pour le pagne et
pour toutes sortes de tissus fabriques localement ou importes.
Tout
aut our
de
lui
se
sont
installes
par
centaines
ou
par
milliers des tailleurs et couturiers. Le Camp Yabassi est quant
a lui un reservoir de pieces de rechange d'occasion de vehicules
de toutes marques et egalement de pieces d'origine importees du
Nigeria,
pays voisin,
ou d'occident.
Tous ces points de vente
d'inputs
ont
ete
des
poles
d'attraction
des
techniciens
entrepreneurs.
Parfois
aussi,
ils
se
sont
crees
avec
l'installation des ~echniciens, les uns appelant constarnrnent les
autres. Souvent meme, le sens de la causalite n'a pas ete facile
a etablir.
En
outre,
on
a
pu
constater
1 'emergence
de
valeurs
professionnelles a l'origine d'une production de qualite, d'une

-397 -
\\'marque" appreciee grace au travail en cornrnun certes, mais surtout
a la quali fication des uns et des autres
et au desir d' etre
competitif par rapport a d'autres "alliances".
Cet
aspect
des
PME
informelles
est
revelateur
d'une
structuration
explicite
et
d'une
volonte
de
maitrise
de
l' environnement
par
des
mecanismes
de
production
simples
et
flexibles. Cette flexibilite est d'ailleurs mieux soulignee par
cette deuxieme caracteristique des activites informelles qu'est
la grande proximite par rapport a la clientele et par rapport au
consornrnateur final.
2.4
La Proximite du Consommateur
L'analyse des PME du secteur moderne nous a deja permis de
souligner
cette
caracteristique.
Pourtant
dans
la
petite
production informelle cette proximite est encore plus forte et
determinante
quant
au mode
de
fonctionnement,
au
volume
des
activites, a leur permanence et au cycle des revenus.
La proximite du consornrnateur ici s'apprecie par rapport a
la
possibilite
reciproque
du
producteur
et
de
son
client
d'adapter la production en cout et en qualite aux besoins et aux
capacites de financement. Elle se concretise dans l'unicite des
solutions que l'entreprise propose par rapport aux exigences de
la demande et au niveau du revenu qui la rend solvable. C'est
cette particularite des PME informelles, nous semble-t-il, qui
fonde par la divisibilite de la production et la modulation des
couts
l' importance
croissante
du
secteur
dans
l' ensemble
de
l'economie. Elle assure dans un climat de concurrence apre et
selon le degre de competence du travailleur,
le rythme puis le
niveau des activites et correlativement le volume et le flux des
revenus. Le rythme d'accumulation est alors fonction du taux de
reinvestissement,
du
taux
de
profits
et
des
relations
qUl
s'etablissent avec le secteur moderne au niveau du financement
des activites car, bien que le financement direct soit courant
dans ce secteur il n I en est que la partie patente.
11 existe
d' autres
formes
de
financement
moins
evidentes
et non moins
determinantes auxquelles nous consacrerons notre section Ill.
La specialisation et la grande proximite de la clientele

- 39~ -
caracterisent les PME informelles et permettent de les distinguer
des
autres
types
de
PME
qui
sont
soumis
a
des
normes
de
production, de gestion et ne peuvent pas fonctionner si elles ne
s' assurent
pas
une autonomie
au ni veau de
la
realisation du
produit fini.
Les
activites
informelles
quant
a
elles
s'accommodent
parfaitement de cette dependance et de ce mode de fonctionnement.
Leur fiabilite et leur resistance a la forte poussee des entrees
dans le secteur en dependent. De plus, la specialisation que l'on
souligne ici est a relativiser dans la mesure Oll elle ne signifie
nullement une limitation stricte dans une seule tache Oll a un
seul domaine.
Le travailleur de la PME informelle,
bien qu'il
possede plus d'aptitudes dans un domaine donne a egalement comme
nous l'avons deja dit,
la possibilite de faire un peu de tout
pour
pallier
l'indisponibilite
des
travailleurs
dans
les
activites complementaires. Il est bien entendu conscient de ses
limi tes
et
dans
un
souci
de
precision
et
de
perfection,
il
choisira le niveau de collaboration qui est en conformite avec
ses objectifs. La prise en compte de sa dependance n'occulte pas
chez lui l'heterogeneite du secteur.
De ce fait,
si le niveau
d'echange de services est souvent important et meme insoupyonne
son intensite et sa permanence sont fonction de la qualite des
prestations
que
l'on
tend
a
identifier
ici
au
profil
des
producteurs.
2.5
Le Profil des Producteurs
Certains des points saillants de l'evolution actuelle des
PME informelles sont la jeunesse des promoteurs, puis le cadre
et la base de la formation.
De plus en plus la formation s'effectue dans des domaines
00 la precision est de regle et
les connaissances techniques
indispensables. L'impulsion dans ce secteur semble etre le fait
du travail independant, de la propriete laborieuse individuelle
et libre semblable a celle que Colin Cl ark a qualifie de Working

- 399 -
Property 2S.
L' auteur
redefini t
ainsi
le
ressort
du
progres
economique
en
insistant
sur
la
productivite
du
travail,
contrairement aux analyses marxistes qui soulignent davantage les
faits de production materielle s'appuyant sur un determinisme
technologique.
L' on
rej oint
sur
ce
point
la
these
de
l'entrepreneur
dynamique
de
Schumpeter
pour
laquelle
l'inventivite et l'innovation constituent des facteurs decisifs
du developpement de l'entreprise.
Le travail dans les PME informelles est donc la cle de voute
du secteur. 11 est necessaire de bien souligner que la force de
travail n'y est pas homogene mais fait apparaitre des differences
de profils selon qu'il s'agit d'un proprietaire technicien ou
d'un apprenti-ouvrier. Pour les techniciens, la formation est de
plus en plus acquise dans un milieu scolaire, dans des centres
de formation specialises ou quelques fois par apprentissage a
l'interieur ou en dehors des entreprises du secteur informel.
Toutefois, cette formation re~ue sur le tas dans des milieux de
travail est de moins en moins suffisante pour permettre a un
ouvrier de s'imposer en
tant
que createur d'entreprise.
Bien
entendu, cette situation est a relativiser dans des entreprises
ou dans des ateliers Oll la formation est consideree comme un
autre volet de la production donc generatrice de revenus.
D'une
maniere
generale
l'heterogeneisation
des
qualifications professionnelles qu'introduit la formation pose
le probleme de
la segmentation du marche du travail
dans
le
secteur informel. En effet l'importance qui est accordee ici a
la formation et aUK diplomes obtenus a conduit a une espece de
stratification
de
la
population
des
travailleurs
des
PME
informelles. L'ouvrier est generalernent utilise pour des petites
taches de preparation de l'ouvrage ou d'assemblage des pIeces,
le travail de fond etant execute par le proprietaire de l'atelier
detenteur du savoir
faire.
Cette distribution du travail
qui
repose sur la differenciation des competences professionnelles
la
_
Colin Clark, Property and Bconomio Progress, Catholic Soaial
Guild OXford, repr. Fr. The Tablet, 6 et 13-I-l~45-Rapp.
A. Sieg'frie<1, L'llqe du secretariat, Rev. de Paris, oat 1~S3.
cit6 par A. Piettre, Pensee Eoonomique et Th60ries
eontemporaines, s1xi~ Kdit., Dalloz, 1~73 pp 442-443.

- 400-
maintient
l'apprenti
a
la
peripherie
de
l'essentiel
de
la
profession. Elle le contraint a demeurer a l'etat d'ouvrier du
fait
de
la
concurrence
et des
imperatifs
de
performance que
celle-ci
indui t
et
qui
necessi tent
que
le
travai 1 soi t
dans
l' ensemble execute par des
specialistes.
Les
implications de
cette repartition du travail sont graves quant aux possibilites
reelles de negociation du contrat de travail.
La force de la
negociation
se
manifeste
dans
le
niveau
de
salaire,
les
conditions du travail, la nature des taches que peut obtenir le
travailleur. Il ne nous semble pas, s'agissant particulierement
des apprentis ouvriers, que ceux-ci disposent des moyens de faire
appliquer
leurs
conditions
d' embauche
au
sein
des
unites
de
production du secteur informel.
La faiblesse de leur position
dans les entreprises explique peut etre leur grande mobilite.
Nous ne nous etendrons pas sur les effets de la segmentation du
marche du travail,
ni sur l'homogeneite des segments.
Dans la
realite, ainsi que nous le verrons par la suite, la distinction
apprenti-ouvrier
puis
technicien-specialiste
n'est
pas
exhausti ve. Il existe une categorie intermediaire, l' ouvrier-chef
qui
dans
l' organisation interne de
l' entreprise peut se voir
deleguer un certain nombre de responsabilites. L'introduction du
phenomene de la segmentation avait surtout pour objet d'insister
sur la nature et 1 'importance de la formation dans les activites
informelles. Ainsi, contrairement a l'idee cornrnunement
adrnise26 ,
la
formation
de
base
en
milieu
scolaire
est
manifestement de rigueur dans le secteur informel bien qu'il soit
souvent necessaire de la parfaire avec la pratique sur le terrain
et l'experience professionnelle. Ces exigences se font de plus
en plus sentir dans differents domaines dont le batiment,
la
reparation automobile, les ateliers de couture sur lesquels nous
nous appuyerons pour etayer notre analyse.
En
outre,
la mai trise
technique
requise par
le
degre
de
technicite des activites dans lesquelles se risquent de plus en
plus l~s travailleurs independants revet plus d'un interet. Elle
••
-
On se reportera A ce sujet A M. P6nouil, Socio-Kconomie du
Sous-d6veloppement, op cit.
On lira llqalement K. Archambault et X.
Greffe,
Les Economies Informelles ap ci t.

- 401 -
leur
offre
l'occasion
d'exprimer
des
connaissances
et
d' exterioriser
des
competences
dans
des
domaines
jusque
la
reserves a la grande entreprise.
Ces
differents
aspects
de
la
formation
et
de
la
maitrise
technique
nous
amenent
a presenter une typologie des petits
producteurs du secteur informel.
En
effet
il
existe
differents
types
d'entrepreneurs-
proprietaires.
a)
L'entrepreneur a temps plein
- Celui qui travaille uniquement pour son unite et dont la
remuneration du travail effectue constitue la seule source de
revenus.
Dans
ce
cas,
la
mai trise
technique
est
essentiellement
exploitee pour la subsistance. 11 s'agit generalement de deflates
du secteur moderne ou de ceux qui n'y ont pas trouve un emploi.
b)
Le salarie mixte ou salarie-entrepreneur
-
Celui
qui
est salarie dans
le secteur moderne et qui
parallelement a cree une PME qui fonctionne a temps partiel aux
heures
libres
du
salarie.
11
est
salarie
et
travailleur
independant. 11 est.un salarie mixte.
c)
L'entrepreneur mixte
11
Y a
egalement
cel ui
qui
n I exerc;ant
pas
d I act i vi te
salariee
a 1 I exterieur reparti t son temps entre les travaux
domestiques et une production marchande. Cet te ca tegor ie regroupe
des personnes qui n'ont pas trouve d'emploi a l'exterieur et
essentiellement dans les grandes unites ou alors qui n'ont jamais
postule a un emploi salarie.
Dans ces deux derniers types,
il s' agi t
de
travailleurs
independants ou d'une maniere genera le d'entrepreneurs a temps
partiel pour lesquels les revenus tires de leur PME informelle
sont un appoint, un adjuvant pour les res sources du menage. Le
comportement, le rythme du travail dependant de besoins ponctuels
a satisfaire. Par contre l'atelier est davantage considere cornrne
le
lieu
d I expression des
valeurs
d I une
formation
acquise
et

- 402 -
maitrisee. Pour le salarie mixte, il apparait egalement comme le
cadre d'une mise en application ou d'une pleine exploitation de
sa
formation
technique
ou d' apti tudes
qu' il
juge
soi t
sous-
employees soit mal orientees dans le secteur moderne.
Cette
dimension
du
secteur
informel
consti tue
le
cadre dans
lequel nous voulons mener notre analyse. Elle n'est certes pas
la seule composante du secteur dont nous avons dit qu'il est fort
diversifie mais
sa
structuration et
son
interE~~t en tant que
nouvelle forme d'exploitation des res sources humaines meritent
probablement qu'on s'y arrete. Et,
ce probleme de l'adequation
emploi-formation considere comme une inertie dans le processus
de production des economies pauvres pourrait trouver ici un champ
a explorer. 11 nous permet en particulier de poser le probleme
du ch6mage des jeunes dip16mes au Cameroun.
2.6
L'Importance du Chomage au Cameroun
Ainsi, l'un des centres d'interet de cette analyse du profil
du travailleur se trouve bien dans une perspective de resolution
du probleme du ch6mage au Cameroun.
Le tableau III ci-apres illustre d'ailleurs le caractere
tout a fait
preoccupant du ch6mage dans cette economie qui voit
s'accroitre chaque annee la part des dip16mes dans la masse des
sans emplois.

- 403 -
TABLEAU III
: ESTIMATION ET EVOLUTION DU CaOMAGE DES JEUNES
DIPLOMES DURANT LE VIe PLAN
FIN 1987
FIN 1988
FIN 1989
FIN 1990
FIN 1991
a) Dip16mes
ENS. Sup.
(CAMEROUN)
3 028
3 668
4 006
4 307
5 068
b) Dip16mes
Ens. Sup.
800
800
800
800
800
(ETRANGER)
c) Main-
d'oeuvre
dip16mes
Ens.
Sup .......
3 828
4 368
4 806
5 107
5 868
d) Offre
annuelle
Secteur
public
(2 000)
(2 000)
(2 000)
(2 000)
(2 000)
e) Offre
annuelle
emploi
secteur
prive
(1 200)
(1 200)
(1 200)
(1 200 )
(1 200)
f) Balance
1 907
ch6meurs
628
1 168
1 606
2 668
g)ch6meurs
(debut
1 068
periode)
500
759
918
1 134
h)Ch6meurs
dip16mes
de lIEns.
2 524
Sup.
( I )
1 128
1 927
2 975
3 802
i) Ch6mage
497 800
total
( I I)
379 500
458 800
534 000
567 000
j ) I par
rapport a
5,00 %
11
(en %)
3,00 %
4,20 %
5,50 %
6,70 %
Source : GERXA,
Le FOGAPE et 1.& Promot~on de 1.'etrp1.o~ des jeunes
~p1.6mes op c~t p. 36
a) Les effectifs des dip16mes ont ete tires du document du
VIe Plan ;
b)
Celui-ci fait aussi une estimation globale
(de 1987 a
1991) des dip16mes en provenance de l'etranger.

c f.1.04 -
-
les
effectifs
annuels
de
la
population du
secteur
traditionnel dans la population active sont calcules a partir des
resultats
d'une
etude
sur
l'emploi
et
la
formation
professionnelle
faite par TABI,
GERN et MANDENG.
Cette etude
estime a 0,94 % l'evolution des effectifs des travailleurs du
secteur traditionnel, soit pour l'annee 1986, une population de
2 713 000.
11 faut a nouveau rappeler ici la prudence avec laquelle
doivent etre interpretees ces donnees, compte tenu des carences
sur le plan statistique deja evoquees.
C 'est donc sous reserve de ces limites quant aux donnees
qu'il
nous
faut
si tuer
le
ch6mage des
j eunes
dip16mes.
Nous
allons retenir l'hypothese minimale selon laquelle environ 2 %0
des ch6meurs possedent au moins un dip16me de
l' enseignement
superieur. Les donnees prises en compte sont regroupees dans le
tableau. Quelques precisions doivent etre apportees en ce qui
concerne les di fferen tes donnees pour mieux en comprendre la
signification. Elles seront faites ci-apres sur chaque ligne du
tableau.
2.6.1
- CHOMAGES DES JEUNES DIPLOMES PAR RAPPORT
AU CHOMAGE TOTAL
Le tableau ci-dessus permet d'estimer ce phenomene d'une
part et de montrer son evolution durant le VI Plan d'autre part.
Ces dip16mes sont estimes a 4 000. Faute de precisions, cet
effectif a ete egalement reparti sur les cinq annees du Plan. 11
s'agit certes d'une hypothese simplificatrice dont l'incidence
ne nous a cependant pas paru tres importante pour la qualite de
l'analyse.
c) Les chiffres representent pour chaque annee, le total de
a) et b) et donnent le chiffre total de dip16mes par annee.
d) et e)
- le VIe Plan fournit globalement les prevlslons
d' affre d' emplois dans
le
secteur public et dans
le secteur
prive. Celles-ci ont donc ete reprises ici, cependant ces donnees
ont ete aussi egalement reparties entre les differentes annees.
f) - Cette balance represente la difference entre le nombre

- 405 -
total des dipl6mes et l'offre total d'emplois prevus pour les
dipl6mes de l'enseignement superieur au cours de chacune des cinq
annees du VIe Plan.
g) - Partant de l'hypothese selon laquelle environ 2 %0 des
ch6meurs a la fin d'une periode donnee,
possedent au moins un
dipl6me de l'enseignement superieur.
Le nombre
de
ch6meurs dipl6mes
en debut
de periode est
obtenu en multipliant par 0,002 le nombre total de ch6meurs a la
fin de la periode precedente (ligne i).
Rapproche a la population totale de ch6meurs, le ch6mage des
dipl6mes peut paraitre marginal. Mais en realite,
il faut pour
en apprecier l'importance tenir compte et de I 'evolution d'une
annee sur l'autre,
et du volume d'investissements realises au
titre de cette formation.
S'agissant de l'evolution des effectifs, nous en avons deja
souligne
la
progression
rapide,
de
telle
sorte
qu' en
donnee
cumulee,
le
phenomeneira
s' aggravant.
Mais,
au-dela de
cet
aspect
quantitatif,
il
faut
considerer
le
volume
d'investissements realises. Ceux-ci au titre du VIe Plan et ce
au seul
titre des
infrastructures.
Or
il
faut
y aj outer les
depenses
en
bourses,
en
remuneration
des
formateurs
et
en
prestations diverses et recurrentes.
En plus des dipl6mes de l'enseignement general technique et
superieur,
il existe une categorie particuliere de dipl6mes.
Cette
categorie
souvent
negligee
est
constituee
de
jeunes
titulaires de dipl6mes professionnels non universitaires tels que
des
certificats
d'aptitudes
professionnelles,
des
brevets
professionnels et autres certificats de fin d'apprentissage tous
attestant d'une formation pratique, exploitable immediatement ou
presque.
La formation acquise dans ce cadre,
qui chevauche ou non
avec une formation scolaire de base interrompue volontairement
ou involontairement~ offre une possibilite de devenir productif
a breve echeance sur le marche du travail dans une specialite
industrielle ou technique.
Cette approche de la formation se situe dans une perspective
d'elargissement de la notion de dipl6mes ou de qualifications

- 406-
acquises en milieu scolaire. Elle est d'un grand interet pour
aut ant qu' elle permet de mieux apprecier l' importance du probleme
du ch6mage des dip16mes et les transformations que leur insertion
dans
le
circuit
productif
pourrait
induire
au
niveau
du
fonctionnement et de la structuration des PME informelles.
11
n' existe
pas
sur
ce
suj et
une
enquete,
sur
le
plan
national. Quelques travaux sont faits et portent essentiellement
sur les deux grandes metropoles Douala et Yaounde.
Une enquete de terrain realisee sur l'emploi souligne le
dynamisme de cette derniere categorie de dip16mes en matiere de
creation d'emplois 27. Ceux-ci ont ainsi pu creer ou contribuer
a la creation de micro unites de production dans leur champ de
specialite. Cette etude realisee en 1982 sur le secteur informel
de Yaounde revele une creation de 2 380 emplois par an.
Nous tenterons dans le cadre de la ville de Douala de presenter
quelques
monographies
sur
la
dynamique
propre
dusecteur
informel.
"
-
SIM Remy : Prob1... de l ' RDp101 au Cameroun ~ la
vei11e c1u VI Plan in Revue Camerounaise de Management
N° 3 et 4,
P86 P 201.

- 407 -
SECTION 11
ANALYSE DU SECTEUR 1NFORMEL CAMEROUNA1S
DES EXEMPLES DE DYNAM1QUE PROPRE
Si
la theorie economique permet d' expliquer sur le plan
macro-economique, l' evolution des agregats dont l' investissement,
la demande,
la production,
les revenus dans une perspective de
mise en oeuvre ou de prevision de politiques economiques, sur le
plan
micro-economique,
les
preoccupations
sont
differentes.
L'investissement
producti f
s' explique
davantage
par
des
anticipations de profit. Une telle analyse est pourtant loin de
faire
l'unanimite.
Ainsi,
pour
certains
auteurs
du
courant
dualiste
dont
J.
H.
BOEKE.
Ces
anticipations
seraient
completement absentes du comportement des agents economiques du
secteur traditionnel, telle que seule la speculation y cree des
revenus importants.
Certes, BOEKE dans son analyse du secteur traditionnel que
nous avons presentee plus ha ut ne se preoccupe guere de l'aspect
informel ou non des activites traditionnelles mais la description
qu'il en fait est telle qu'elle ~ous semble recouvrir ce que nous
qualifions d'activites informelles.
Cette approche dualiste nous semble constituer une cle de
lecture interessante de l'evolution des PME informelles.
Nous
essayerons
alors
sur
cette
base d' expliquer
les
raisons
qui
poussent a investir dans le secteur. Nous pourrons ainsi mieux
comprendre la
speci fici te des
acti vi tes
informelles
et
leurs
problemes particuliers. Nous regrouperons ces problemes autour
des trois principaux points suivants :
le
probleme
des
choix
sectoriels
et
les
conditions
d'entree dans le secteur. Nous pourrons a cette occasion soulever
et analyser les problemes que ces choix impliquent tels que celui
de la technologie et de la maitrise technique de l'activite, de
la formation de l'emploi, de l'adequation entre la formation et
l'emploi ;
les raisons de ces choix nous permettrons d'apprecier la
nature et la qualite de la production,
le volume des activites
et le cycle des revenus lies a l'entreprise informelle ;

~ 408-
- nous verrons alors que ces elements sont etroitement lies
a des facteurs tels que la fixation des prix et le niveau des
coo.ts de production,
la di visibili te de
la production et la
fidelisation
de
la clientele.
Nous
soulignerons
a cet effet
l'importance
de
la
localisation
aussi
bien
par
rapport
aux
sources d' approvisHmnement en matieres premieres que par rapport
au marche, a la clientele.
Ces differents points apparaissent cornrne des indicateurs sur
lesquels pourrait reposer une appreciation de la performance et
des
capacites
d'organisation
et
de
gestion
d'une
unite
de
production. Nous les aborderons a la lumiere de trois exemples
de PME
informelles que nous presenterons d'abord dans un premier
paragraphe. Nous analyserons ensuite leur fonctionnement ainsi
que leur mode de regulation,
ses avantages et ses faiblesses.
Nous verrons alors qu'il s'agit d'entreprises certes,
"gerees"
a leur maniere mais dans un souci permanent d' une acti vi te
reguliere et d'un revenu permanent.
Compte tenu de 1 'importance particuliere que nous accordons
aux problemes de financement dans cette mouvance,
nous ne les
aborderons
pas
dans
cette
section.
Nous
avons
voulu
leur
consacrer toute la section suivante pour bien souligner leur
place centrale.
$1
- La description des cas
La prevalence de la formation
Nos trois cas, cornrne on l'a dit, portent sur trois PME
- un garage automobile ;
- une unite de construction du batiment
- un atelier de couture.
Nous en ferons une presentation qui mette en relief le cadre
dans lequel la formation du travailleur se deroule, ainsi que ses
implications sur les questions de l'emploi et de l'adequation
formation-emploi. Nous donnerons a nos entreprises le nom de leur
fondateur.
1.1 -
Cas n° 1
: Le Garage Automobile Yundzo Andre
Du nom de son fondateur, le Garage Yundzo a ete cree en 1984
par
un
jeune
mecanicien
de
24
ans,
forme
dans
un
cadre

- 409-
particulier, celui d'un garage automobile en activite dirige par
un mecanicien professionnel.
Yundzo-Andre
se
specialisera en
travaux mecaniques, une specialisation qui est en grande partie
tributaire des competences et de la formation memes du formateur.
On peut deja a ce niveau souligner qu'il s'agit d'un technicien,
peut etre forme en dehors d'un cadre scolaire ou universitaire
mais qui par le biais d'un autre technicien experimente a pu
obtenir une formation pratique et immediatement exploitable.
La reparation automobile qui est donc cette activite pour
laquelle il a acquis des connaissances et une maitrise techniques
determinera le choix de sa principale activite et meme de son
metier en tant que producteur du secteur informel.
L'une des implications de son choix est qu'il peut avoir un
emploi dont il tirera l'essentiel de ses revenus,
le niveau de
ceux-ci
dependant
de
la
quali te
de
ses
prestations,
de
son
organisation, de son dynamisme personnel. Mais la formation et
la maitrise de la technique restent des elements decisifs.
1.1.1.
La Formation
Ainsi donc Yundzo Andre entre en apprentissage en 1977 dans
un garage automobile de Douala, apres des etudes primaires plus
ou moins fructueuses.
La formation dure 4 ans au terme desquels il obtient en 1981
un certificat de fin d'apprentissage.
Ce "dip16me" est delivre par le patron du garage qui lui-meme est
salarie-mecanicien affecte a la reparation des pannes mecaniques
de l'entreprise Renault a Douala. Ce patron d'une PME informelle
est
donc
lui-meme
un
personnel
d'une
grande
unite
moderne
concessionnaire des vehicules de marque Renaul t grand specialiste
local de l'entretien et de la reparation de ceux-ci.
Ce proprietaire de garage a reussi
a creer un cadre de
formation semblable a ce cadre theorique analyse plus haut comme
particulierement
createur
de
travailleurs
producteurs
immediatement ou a court terme.
Travaillant
lui-meme
dans
une
grande
entreprise,
ce
mecanicien
salarie
parvient
a
monter
une
PME
Oll
il
peut
travailler a ses moments libres et meme assurer une formation
continue
dans
sa
specialite.
11
appartient
a
ce
type
de
proprietaire
de
PME
que
nous
avons
qualifie
de
salarie-

- 410 -
entrepreneur, son activite annexe semblant se justifier par une
volonte de maximisation puis de capitalisation de competences
techniques et de connaissance dans un domaine bien precis et sans
doute d'amelioration du revenu. Ce comportement intrapreuneurial
traduit l'epanouissement au se in d'une entreprise d'un esprit de
creati vi te
et d' inventi vi te
qui
favorise
le developpement
de
celle-ci.
Le concept d'intrapreneuriat est generalement defini par
rapport a ceux d'entrepreneurship et de gestion d'entreprise 28.
Ce
comportement
se
manifeste
aussi
bien
a travers les
createurs que les salaries. Ces derniers generalement recrutes
parmi
le personnel
technique peuvent profi ter des
ressources
technologiques de leurs employeurs pour developper leurs propres
idees.
Les
effets
benefiques
du
comportement
d' intrapreneuriat
jouent
a l'interieur de l'entreprise contribuant ainsi a
l'amelioration de ses performances, au niveau de la qualite de
ses produits, a celui de la gestion ou a tout autre niveau.
La situation de notre salarie-entrepreneur s'inscrit sans
doute
dans
la
logique
d' une
exploitation
maximale
des
qualifications et des aptitudes professionnelles d'un mecanicien
praticien. Et, en meme temps que celles-ci lui permettent de se
maintenir
au
sein
de
son
entreprise
elle
lui
offrent
des
possibilites financieres et techniques de creation d'une unite
de
production
separee
au
sein
de
laquelle
se
poursuivra
l'exploitation et l'expression de ses capacites techniques.
11 nous semble ,que cette si tuation soi t l' un des supports a la
i
creation
des
PME
informelles
dans
l'economie
camerounaise.
L'exemple que nous presentons resulte du dynamisme d'un salarie-
intrapreneur,
bien
qu' ici
l' on
se
trouve
en
presence
d' une
variante
du
phenomene
d'intrapreneurship.
Son
developpement
s' appuie
sur
les
effets de
synergie du
secteur moderne dont
l' impact
se diffuse a l' exterieur.
Cette externali te
resul te
d'abord des possibilites de perfectionnement continu tels que les
stages de recyclages, les seminaires, les ateliers dont beneficie
I .
_
CB aUjet a 6t6 d6jA abord6 dana 1e chapitre pr6c6dant.
on pourra 1ire pour p1ua de d6tai1 J. M. Tou1ouae,
RntrepreneurDhip et Oeation d'Bntrepriae in Intrapreneurahip,
Rntrepreneursbip et Oestion d' Bntreprise, . Revue Internationale
de Oestion, vo1. 13, sept. 1988 pp 10-18.

- 411 -
le salarie de la grande entreprise. Et dans le cas particulier
de la construction et de la reparation automobile, ces mises a
jour sont imposees par le caractere evolutif de la technique dans
le domaine.
Ensui te,
un autre aspect de
la
relation avec le
secteur moderne est l'impact du revenu monetaire que permet le
statut de salarie et a partir duquel des investissements peuvent
etre envisages dans son champ de specialite mais en dehors de son
entreprise.
Ainsi,
les
moctali tes
de
l' intrapreneurship
dans
ce
cas
precis sont differentes des formes classiques habituelles. Ces
effets ne jouent pas seulement a l'interieur de l'entreprise ou
ils sont crees.
11s s'etendent bien au-dela et se manifestent
dans la creation de PME informelles de production de biens et de
services puis dans la production de travailleurs immediatement
operationnels.
Elle
prolonge
un
systeme
educatif
dont
l' importance
du taux de deperdi tion a ete dej a
soul ignee et
participe a ce titre a l'emergence de structures informelles de
formation.
Ce phenomene est d'un grand apport pour le secteur informel
dans la mesure ou il decouvre des rapports existants entre ce
meme secteur et le secteur moderne et qui permettent au premier
de tirer profit des avantages du deuxieme.
La formation apportee a Yundzo Andre se deroule dans une
structure
peu
classique,
differente
du
milieu
scolaire
ou
universitaire, ou meme de centres de formation traditionnels.
Cette
structure
informelle
nous
revele
egalement
une
dimension sociale,
celle d'une convivialite dans les rapports
entre formateur et apprenti qui temoigne d'un double souci de
parfaire la formation dispensee et d'appuyer l'integration dans
la vie active.
Ainsi,
aide par son tuteur,
Yundzo sera recrute a Renault
Douala comme mecanicien stagiaire. Son entree a Renault se fait
d'une faeon plus o~ moins formelle, puisqu'il ne beneficie pas
veritablement
d'un
statut d'employe.
11 pereoit
en guise de
salaire un fixe des tine a couvrir ses frais de deplacement et
d'alimentation et en contrepartie il est affecte a la "section
moteur" de l'entreprise.
Sa
presence
dans
cette
grande
structure
se
justifie

- 412 -
davantage
par
cet
environnement
technique
qui
lui
permet
d'ameliorer sa connaissance du metier. La masse des travaux yest
plus
importante
puis
la
qualite
et
la
precision
y
sont
de
rigueur.
Apres cette periode complementaire de perfectionnement d' une
duree de trois ans,
Yundzo decide de s'installer a son propre
compte. 11 lui faudra quelques mois pour qu'il trouve un espace
approprie
et
sur tout
des
res sources
necessaires
a
son
installation. Nous verrons que le probleme de l'installation est
secondaire au regard de celui de la formation.
1.1.2
La Nature des Installations
Les installations varient en fonction du genre d'activite.
Mais de fa90n generale elles res tent assez modestes.
Dans le cas du garage Yundzo, le paiement de quelques mois
de loyers d'avance donne le droit a l'entrepreneur de construire
une
baraque
en
materiaux
provisoires
qui
lui
tiendra
lieu
d'atelier.
De
meme
son
equipement
se
reduit
a quelques outils de
production tels que des tournevis, et diverses cles constitutives
d' une trousse de mecanicien.
Le cout de
l' installation reste
relativement bas, d'autant plus que l'entreprise n'a pas besoin
de supporter des
frais de premier etablissement tels que les
frais d'acte et d'inscription au registre de commerce.
Nous ne disposons pas de donnees chiffrees sur le niveau des
couts d'installation des entrepreneurs du secteur informel. Nous
les estimons neanmoins a peu de choses,
a une somme comprise
entre 50 000 et 250 000 francs CFA. Ils ne sont pas tres loin de
ceux fournis
par l'etude rapportee par F. BELISLE sur le secteur
informel
en
Amerique
Latine
29
Selon
celle-ci,
le
capital
initial d'une PME du secteur est compris entre 0 et 250 dollars
US soit en francs CFA entre 0 et 1 000 000 environ.
Ces chiffres que nous donnons a titre indicatif sont tres
I t
_
r. BKLlSLE, The urban informal. "ector in Latin
1lIn9rica, A "ynth6"i" of recent lORe "upported Re"earch cit6
par R. ARBLLANO, Y. aASSK, G. VERNA, Le Monde de l'Kntrepri"e
lnformelle, in Actua1it6 Scientifique, l'Ksprit d'Kntrepri"e
Aspect" Manaqeriaux daD" le Monde I!'rancophone, Journ6e"
Scientifique" du Re"eau Th6matique de Recherche "Kntrepreneuriat"
de l'URKI!' (univer"it6 de" Rll"eaux d'Kxpre,,"ion Franc;:ai"e)
OT7AWA, 19-20 "eptembre 1991, Direction B.
PONSON et
J-L. SCRAAN, Rdit John Libbey Burotext, Pari", 1993 pp 201-215.

- 413 -
faibles
si
on
les
compare
a ceux des bilans d' ouverture de
l'activite des PME modernes. lIs nous conforte donc dans l'idee
que le demarrage des activites informelles n'est pas conditionne
par l'acquisition d'un materiel d'exploitation sophistique ou
meme par la construction d'un local particulier. Par contre, au
fur
et
a mesure du temps lorsque le rythme et le ni veau de
l'exploitation le justifient des investissements plus importants
peuvent etre progressivement realises. Certes,
ceux-ci res tent
insignifiants par
rapport
a ceux des PME modernes mais pour
l'entrepreneur de la PME informelle ils sont considerables du
fait de l'effort fihancier qu'ils exigent de lui.
lIs le sont
d'autant plus que l'obtention des res sources necessaires n'est
pas toujours aisee tandis que la depense s'impose comme un moyen
de satisfaire aux besoins du marche et d'assurer la continuite
puis le developpement de l'exploitation.
Yundzo
Andre
ne
fera
pas
exception,
comme
beaucoup
de
travailleurs independants il demarre avec un capital tres modeste
voisin des indications donnees ci-dessus.
Cette facilite d'entree en service des unites informelles
meritent d'etre soulignees. Elles representent un avantage dans
la mesure Oll elles peuvent constituer dans les PME modernes des
obstacles lies aux delais, aux lourdeurs administratives ou a des
charges que ces entreprises n'ont pas toujours pu prevoir.
1.2
L'Entreprise de Bitiment Andong Joseph
L'entreprise est creee en 1985 par un jeune camerounais
technicien en batiment alors age de 25 ans. Son cheminement est
assez proche de celui qu'a suivi le mecanicien Yundzo Andre sur
le plan scolaire,
et sur celui de l'apprentissage d'un metier
dans un cadre informel. Mais a la difference de celui-ci. Andong
Joseph passera egalement par un systeme classique de formation
professionnelle qui facilite l'acces a une activite productrice
apres une plus courte periode d'apprentissage.
La
speciali te
qu' il
acquiert
ainsi
est
celle de ma<;on-
charpentier, son champ d'action dans le batiment se limitant au
gros
oeuvre.
Comme
dans
le
cas
precedent,
son
travail
de
technicien du batiment constitue sa principale sinon sa seule
source de revenus.
Le rythme de l'activite qui s'en suit sera

- 414 ~
donc generalement fonction de l'importance de ses besoins.
1. 2.1
La formation
Elle se deroule,
apres son certificat d'Etudes Primaires,
d'abord dans un college d'enseignement technique de la ville de
Yaounde. 1nscrit dans la section batiment, il n'obtiendra pas son
certificat d'aptitudes professionnelles,
(C.A.P.),
dip16me qui
sanctionne la fin des etudes dans cet etablissement scolaire.
Toutefois apres,
cette periode de
formation
qui
aura dure
3
annees, il veut completer ses connaissances dans une entreprise
de batiment. 11 effectue donc un apprentissage dans differents
chantiers de construction diriges par un membre de sa famille qui
l'y integre pendant deux ans comme ouvrier-apprenti.
Ce cadre mixte de formation presente un double avantage ;
celui
d' un
enseignement moderne
articule
sur
un ensemble
de
connaissances a la fois theoriques et pratiques, celui egalement
d'un apprentissage destine, dans le cadre plus ou moins formel
d'une entreprise de construction du batiment,
a renforcer le
niveau des experiences pratiques.
Au terme d' une periode de formation et d' apprentissage d' une
duree
totale de
5 ans Andong Joseph peut desormais creer sa
propre unite.
1.2.2
La Nature des Installations
Les
moyens
financiers
mis
en
oeuvre
a cet effet sont
pratiquement insignifiants a peine egaux a 50 000 francs CFA. Son
installation en tant que technicien du batiment va etre sommaire.
11 n'a besoin que de petits outils de base et ses contacts et
rencontres avec les clients se passent a son domicile ou a celui
de ses clients.
L'autofinancement et l'aide de parents et amis constituent
les formes courantes de financement. Les couts sont minimises de
telle sorte qu'ils influent le moins negativement possible sur
l'exploitation courante et sur niveau du revenu.

- 415 -
1.3.
L'Atelier de Confection Anqele-Bibiane
L'entreprise est cree en 1982 par une Jeune couturiere de
19
ans.
Elle
a
ete
formee
dans
un
college
d'enseignement
technique de Douala. Cet etablissement scolaire forme des jeunes
filles
en arts
menagers puericul ture,
couture.
La
speciali te
choisie
par
Angele-Bibiane
est
la
couture.
Les
etudes
bien
suivies lui permettent d'etre operationnelle des la fin de sa
formation.
Mais
la decision d I investir dans
la creation d I un
atelier de couture n'est pas prise immediatement, tout au moins
dans le sens d'une activite remuneree.
Au
depart,
la
production
est
surtout
destinee
a
l'autoconsommation. Ce comportement s'explique en partie par la
situation de famille de cette jeune couturiere qui est mariee a
un
cadre
d I une
entreprise
d I assurances.
Ce
n I est
que
progressivement qu'elle s'oriente vers la commercialisation de
ses
produits.
Les
revenus
que
lui
apporte
son
activite
constitueront plus un appoint que l'essentiel des res sources du
menage. Elle fait partie du troisieme type de producteurs appele
entrepreneur mixte.
$ 2
Analyse Comparative de l'Activite dans les trois
Entreprises
La comparaison de ces
trois cas nous permet de mettre en
evidence une fois de plus l'importance de la formation dans la
creation des PME informelles.
2.1
Observation Empirique
Lorsque
cette
formation
est
acquise dans
des
structures
adequates, specialement con9ues pour une formation technique, le
technicien est productif
immediatement
a
la
fin
de
la duree
normale
prevue.
Celle-ci
s I allonge
lorsque
le
cycle
doi t
se
derouler a
I I interieur d I une
entreprise.
Qu I il
s' agisse d I un
cadre informel comme celui que creent les salaries-entrepreneurs
ou de celui que peuvent offrir les grandes entreprises, tous deux
etant plus prepares a consommer qu'a produire des travailleurs.
Nous expliquons ainsi ces delais plus longs compris entre

-416 -
7
et
5
ans
necessaires
a la formation des deux premiers
techniciens. Dans l'autre cas, la duree moyenne est de 4 ans et
donc plus courte dans une ecole de formation technique ou un
centre
d'apprentissage
specialise.
Bien
qu'il
s'agisse
de
specialites differentes, il apparait que le temps d'acquisition
d'une
formation
pratique
est
plus
court
a l'interieur de
structures con9ues et creees a cet effet. Et, l'exemple n° 3 nous
con forte
dans
cette
position.
Mais
pour
toutes
les
trois
entreprises,
des
que
les
connaissances
acquises
semblent
satisfaisantes la decision de s'installer a son propre compte est
immediatement prise et concretisee peu de temps apres.
Ainsi, le domaine des competences et une bonne maitrise au
travail semblent etre la condition sine qua non de l'entree dans
le secteur.
Le choix sectoriel s'effectue donc au moment ou l'on
se
fixe
sur
le
type
de
formation
professionnelle
ou
d'apprentissage a suivre.
Il
faut
dire que
la plage des
choix n' est pas toujours
extensible
de
telle
sorte qu'il
peut davantage
s'agir d'une
opportunite que d'un choix veritable.
L'exemple du mecanicien
Yundzo Andre en est une illustration. Sa specialisation dans le
domaine mecanique,
c'est a dire dans tous les travaux relatifs
au moteur,
meme
si
elle
decoule
d' un
choix
delibere,
reste
largement tributaire des qualifications du formateur lui-meme.
C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles la formation
se deroule dans le champ de la specialite de celui-ci.Elle aurait
donc tres
bien
pu
se
faire
dans
un
autre
champ
dont
l'electricite,
la tolerie ou la peinture si telles etaient les
specialites
du
responsable
de
la
formation.
D'une
maniere
generale,
la duree moyenne d'une bonne formation technique se
situe
autour
de
5
ans,
celle
qui
devrait
permettre
d'etre
hautement performant et competitif aussi bien comme travailleur
independant que comme salarie dans le secteur moderne. Nous avons
pour ameliorer nos analyses exploi te
les enquetes de terrain
menees sur le secteur informel. Naus avons fait appel a l'enquete

- ..H7-
GEREA30 sur l'emploi des jeunes dip16mes. Nous avons egalement eu
recours aux resultats de celles sur les menuiseries a Douala 31
et sur des ateliers de confections dans la meme ville 32 •
Il importe de souligner que ces enquetes meme lorsqu'elles
n'aboutissent
pas
aux
memes
conclusions
que
notre
propre
observation fournissent un ordre de grandeur. Elles donnent des
indications chiffrees dans un secteur OU i l en existe tres peu,
posant ainsi des bases d'une analyse plus approfondie.
2.2
Presentation des Enquetes
L'enquete sur les menuiseries porte sur un echantillon de
50 ateliers de menuiserie. Elle a pour objectif de souligner le
caractere informel de la majorite des PME dans le domaine de la
menuiserie et de mettre en relief leur probleme d'organisation
et de developpement. Elle est faite sous forme de questionnaire
et selon la methode de l'entretien direct,
les reponses etant
consignees immediatement par l'enqueteur. Ce qui nous permet de
penser que les resultats sont assez fiables.
Les uni tes
concernees sont dispersees
autour d' une
zone
d' environ
10
km.
Si tuees
dans
des
quartiers populeux,
elles
offrent souvent un produit d'une qualite moyenne differente de
celle qu'on attendrait d'une entreprise du secteur moderne. Le
degre de competitivite de leurs produits devrait etre determine
en fonction de criteres autres que celui de la qualite.
- L'enquete sur les ateliers de confection s'effectue sur
un echantillon de
50
PME.
Elle vise
a cerner les problemes
specifiques
au
secteur
de
la
confection
et
a degager les
30
GBREA, le FOGAPB et la promotion de l'emp10i
des jeunes dip16mes, Btude realisee pour le
compte du FOGAPB sous la direction de BBKOLO-BBB B.,
Janvier 1988, Doua1a.

31
MBSSINGA NGONO, Btude des structures et des
possibi1ites de deve10ppement des PMB
: Cas
des menuiseries • Doua1a, Memoire de fin de
cycle de l'Bco1e Norma1e Superieure d'Bnseignement
Technique, Aodt 1992, Doua1a.
32
ASSB Marie, les PMB camerounaises, un secteur
en deve10ppement
: cas des Ateliers de confection
• Doua1a, memoire de fin de cycle de l'Bco1e Norma1e
Superieure d'Enseignement Technique, Aodt 1992, Doua1a.


perspectives
qui
s' offrent
El.
ces
unites
dans
le
sens
d' une
meilleure organisation et d'une activite plus rentable.
Les
methodes
d'investigation
sont
proches
de
celles
utilisees dans I' enquete sur les menuiseries.
Ici I' etude est
faite sur des entreprises plus regroupees geographiquement, mais
nos
conclusions
sur
la
fiabili te,
la
representati vi te
et
la
nature du produit restent valables.
Nous
exploi terons
uniquement
les
chiffres
de
ces
trois
enquetes, ils permettront d'affiner nos conclusions.
2.3
Analyse des Resultats des Enquetes
L'analyse de la decision d'investissement El. la lumiere de
la description de nos trois cas nous a permis de considerer la
formation cornme un facteur determinant du choix sectoriel et
d'investissement
dans
le
secteur
informel.
La
duree moyenne
indispensable pour une formation operatoire varie donc ainsi que
nous l'avons montre autour de 5 ans. Celle-ci peut donc etre soit
moins longue soit moins courte selon qu'elle se passe dans un
cadre specialise sur le plan pedagogique
ou non.
Les
re suI tats
des
enquetes
sur
les
menuiseries
et
les
ateliers de confection nous fournissent les donnees suivantes :
a)- S'agissant du choix sectoriel celui-ci est etroitement
lie non seulement El. I' amour du metier donc El. la maitrise de
celui-ci mais egalement El. l'exercice d'un emploi correspondant
El. sa formation.
Les
tableaux
IV
El.
VIII
sont
relatifs
aux
ateliers
de
confection tandis que les tableaux IX El. XIV se rapportent aux
menuiseries.

- 419 -
tableau n° IV
- La Duree de la formation
Reponses
Effectifs
Pourcentage
o - 1 an
10
20
1 - 2 ans
14
28
2 - 3 ans
18
36
plus de 3 ans
8
16
TOTAL
50
100
Source
: ASSE Mar~e,
Les
PME camerouna~ses,
un secteur en
developpement. Cas des ateliers de confection a Douala.
p 41.
Tableau N° V
Le montage du projet
Reponses
Effectifs
Pourcentage
11 y a eu de projet
formel
82
- Par moi-meme
41
-
- Par un bureau
-
d'etude privee
-
,
-
- Par une agence
-
etatique
-
16
-
Par un ami ou
8
une relation
-
-
- Par un expert
2
I
independant
1
- Autres
TOTAL
50
100
Source
: ASSE Marie,
Les
PME camerounaises,
un secteur en
developpement. Cas des ateliers de confection a Douala.
p 41.

"420 -
TABLEAU N° VI
Les rnotivations
Les motivations
Effectif
Pourcentage
- Amour du metier
17
34
- Chomage
6
12
- Manque
d'encadrement
6
12
-
Imitation
5
10
- Acces facile
5
10
- Par hasard
5
8
- Conseil
-
Don (qualite
nature lIe)
2
4
TOTAL
50
100
Source
IDEM
Tableau N° VII
La formation professionnelle
Reponses
Effectifs
Pourcentage
I
Oui
49
98
Non
1
2
TOTAL
50
100
Tableau N° VIII
Le lieu de la formation professionnelle
Reponses
Effectifs
Pourcentage
- pas de
-
-
formation
18
- Ecole de
9
formation
56
28
- Apprentissage
2
1
- Sur le tas
24
12
-
Stage
-
- Autres (a
-
preciser)
TOTAL
50
100
Source
ASSE Marie,
les PME Camerounaises, un secteur en
developpement : Ces des ateliers de confection a Douala.

- 421 -
SECTION 2 : ANALYSE DES RESULTATS DE L'ENQUETE
Au
terme
de
cet te
enquete,
l' enqueteur
a
regroupe
les
reponses obtenues selon les tableaux ci-dessous
2.1
PRESENTATION DES RESULTATS
2.1.1
- PROJET
Tableau IX
ACTIVITE PRINCIPALE DE L'ENTREPRISE
ACTIVITE PRINCIPALE
VOlES
%
Ameublernent
40
80
Biitirnent
5
10
Ameublernent et biitirnent
5
10
TOTAL
50
100
·Source : MESSINGA NGONO, ·Etude des Structures et <;1es I?OSSlbllltes de
,
Developpement des PME . Cas des Menulserles a Douala.
* Tableau X
ACTIVITES SECONDAIRES
ACTIVITE SECONDAIRE
VOlES
%
Ameublernent
2
4
Biitirnent
12
24
Sans activite
secondaire
36
72
TOTAL
50
100
* Tableau XI
MOBILE D'INTERESSEMENT AU SECTEUR D'ACTIVITE
ELEMENTS
VOlES
%
Amour du metier
23
46
Rentabilite du secteur
21
42
Amour du metier et
rentabilite du secteur
6
12
TOTAL
50
100
Source
MESSINGA NGONO, Etude des Structures et des possibilites de
Developpement des PME : Cas des Menuiseries a Douala.

- 422·
* Tableau XII
FORMATION PARTICULIERE PREALABLE
REPONSES
VOlES
%
- OUI
50
100
- NON
00
00
TOTAL
50
100
* Tableau XIII
LIEU DE FORMATION
ELEMENTS
VOlES
%
O. Pas de formation
00
00
l. Ecole de formation
12
24
2. Apprentissage
34
68
3. Sur le tas
03
06
4. Stage
01
02
5. Autre
00
00
TOTAL
50
100
Source : IDEM
Tableau XIV : DUREE DE LA FORMATION
DUREE EN ANNEES
EFFECTIFS
%
[0 , 1 [
3
6
[1 , 2 [
17
34
[2 , 3 [
17
34
[3 , 4 [
8
16
[4 et plus[
2
4
Abstention
3
6
TOTAL
50
100
Source
:
MESSINGA
NGONO,
Etude
des
Structures
et
des
Possibilites
de
Developpement des PME : Cas des Menuiseries a Douala.
Ces chiffres conco~dent quant a la place principale qu'occupe
la formation dans l'entree dans un secteur donne. Par contre la
duree moyenne de la formation pour les deux enquetes se situe
entre 2 et 3 ans pour la majorite des entreprises interrogees.
Selon ces etudes, la formation est essentiellement acquise
par apprentissage. Ainsi,
dans la confection 56 % ont effectue
des apprentissages et seulement 18 % sont passees par une ecole
de formation. Pour la menuiserie,
68 % sont dans le premier cas
et
24
% ont
eu
une
formation
complete
dans
une
ecole
d'enseignement technique.
La formation re9ue dans chaque cas a permis immediatement
d' etre productif.
Dans
le domaine de
la confection
82
% des

- 423-
couturiers declarent n'avoir pas eu besoin d'un projet formel et
pres de 58 % n'ont pas eu besoin d'une enseigne portant leur nom
commercial. 11 en est de meme dans le cas des menuiseries Oll
96 % affirment n'avoir pas attendu un montage
formel de leur
projet.
Ces enquetes ne precisent pas les delais qui separent la fin
de la formation de la creation de l'entreprise. Mais l'absence
d'etudes
formelles
ou
de
services
exterieurs
dans
ce
sens
laissent croire que l'installation a dO suivre souvent la fin de
la formation ou une periode pendant laquelle les "diplomes" n' ont
pas pu trouver un emploi salarie.
En
effet
le
chomage
semble
expliquer
egalement,
apres
l'amour du metier, la creation d'une PME informelle compte tenu
des
facili tes
relatives
de
l' entree
dans
ce
secteur.
(voir
tableau VI)
12 % des ateliers de couture doivent leur creation
aux difficultes d'insertion dans la vie active comme salarie ou
fonctionnaire.
Le secteur informel se pose au regard de la primaute de la
maitrise
professionnelle,
comme
une
solution
au
probleme
de
l'inadequation entre la formation et l'emploi. Ce probleme semble
en effet endemique dans les pays sous-developpes,
sur tout dans
les emplois salaries du secteur moderne. Les beneficiaires des
formations sont peu satisfaits de leur emploi. C'est egalement
la conclusion a laquelle aboutit l'etude realisee par le Groupe
d'Etudes et de Recherches en Economie Appliquee, GEREA, du Centre
Uni vers i taire de Douala 33.
Une enquete menee dans cette etude a permis d'etablir que
42
% des
j eunes
employes dans
le secteur moderne meme a des
niveaux
de
cadre
trouvent
leur
formation
inadaptee
a leur
emploi 34 .Seuls 16,9 % affirment qu'elle est tres adaptee.
Pour
les autres, leur perception de 1 'adequation formation-emploi est
moins
tranchee
ils
trouvent
la
si tuation
acceptable.
Ces
chiffres
traduisent,
en
gros,
un
degre
inquietant
>J
_
GERKA, Le FOGAPE et la Praootion de l ' Errploi des Jeunes
Dipl0m6s, Etude r6alis6e pour le compte du FOGAPE sous
la Direction de BEKOLO-EBE B., Janvier 1988, Douala.
" - IDEM p. 63

- 424-
d'insatisfaction par rapport au travail exerce et un gaspillage
et une sous utilisation des competences. Cette situation qui peut
avoir des causes diverses peut egalement avoir des consequences
desastreuses,
semblables
a
celles
deja
soulignees
dans
le
chapitre III sur le fonctionnement des PME modernes.
La gravite du probleme est encore accrue quand on doit tenir
compte du cout eleve de la formation,
surtout a un niveau de
cadre aussi bien pour l'entreprise, les pouvoirs publics que pour
toute la collectivite.
Ce cout s'apprecie par rapport au volume des investissements
realises. Les chiffres fournis par les plans quinquennaux font
ressortir des depenses en infrastructures de 96 milliards de F
CFA pour le Ve Plan et 173,6 milliards pour le VIe Plan.
Ces
montants representent une moyenne annuelle au titre des seules
infrastructures de formation universitaire egale a 5 % environ
du
budget
national
de
l' annee
1991-1992.
Aces
chiffres
il
faudrait
ajouter
egalement
les
charges
relatives
a
la
remuneration des enseignants, au paiement des bourses et toutes
les autres prestations recurrentes.
Toutes ces donnees renforcent la pertinence de l'interet
accorde a la formation dans les PME informelles.
Cet interet est ressenti aussi bien au niveau des createurs
et
proprietaires
de
ces
PME
qu' a
celui
du
personnel
qu' ils
emploient. Et, les statistiques fournies sur la base des cri teres
du recrutement dans les ateliers de confection le confirment.~
formation
qui
vient
en
premier
rang
en
determine
82
% des
recrutements avant d'autres cri teres tels que l'age
(80 %),
la
recommandation,
(80 %),
1 'experience (72 %).
Par
contre
elle
se
si tue
au
meme
ni veau
que
l' origine
ethnique.
L'enquete
n'est
pas
explicite
sur
le
facteur
predominant mais 1 'observation empirique nous laisse penser qu'a
formation egale, l' origine ethnique est un element supplementaire
d'appreciation
des
candidats
a
un
emploi.
Mais
l'on
peut
egalement constater au regard des chiffres de l'enquete qu'il
n'existe pas veritablement de politique commune en matiere de
recrutement,
chaque
entreprise
fixant
ses
priorites
et
ses
besoins. Mais quelle que soit la conclusion a laquelle l'on peut

- 425-
aboutir,
la
formation
demeure
une
composante
pri vilegiee
du
systeme.
Et,
Dans la mesure Oll elle aboutit a la maltrise technique du
travail,
elle est le point de depart d'une activite saine et
florissante. 11 est difficile dans ce cas de souscrire a la these
dualiste
d'une
absence
d'anticipation
de
profit
dans
les
activites informelles. D'ailleurs par rapport au critere de la
mal trise
technologique,
les perspectives de profi t
sont plus
realisables
ici
que
dans
les
PME
modernes
Oll
l'aspect
technologique
a
ete
biaise.
C' est
ce
que
nous
a
montre
en
particulier
l'exemple
de
1'lmprimerie
"Le
Camerounais"
ou
d'autres criteres ont prevalu dans la decision de s'engager dans
I' industrie.
Le
facteur
preponderant
a
plutot
ete
les
possibilites de financement bancaires appreciees par rapport au
montant du credit ou aux taux bonifies consentis aux PME. Les
facilites de financement bancaires ont d'autant plus constitue
un
attrait
qu'il
etait
prevu
parallelement
des
structures
etatiques specialisees dans le montage des etudes de faisabilite.
Le
conseil
en
matiere
de
gestion
la
garantie
des
credits
bancaires
et
d'autres
formes
d'appui
offerts
a
des
prix
relativement bas ont davantage compte pour les PME modernes. De
meme,
plus
que
la
mai trise
technique
des
equipements
et
du
procede
de
fabrication,
I' environnement
insti tutionnel
a
constitue
une
raison
supplementaire
de
l'attrait.
Pour
les
activites industrielles. Ainsi, en creant des avantages fiscaux
a
travers
le
code "des
investissements,
les
pouvoirs
publics
amenagent aux PME du secteur moderne des conditions avantageuses
de fonctionnement en reduisant leurs couts de production. Les
avantages financiers ont ete pour elles la principale incitation
a
I' entree
dans
le
secteur.
Mais
les
differentes
facili tes
apparentes qu'elles laissaient entrevoir n'ont pas comporte que
des avantages,
de telle sorte que leur mise a profi t
n' a pas
toujours ete evidente.
La comparaison de ces deux formes d'activites montre que
l'incitation a investir dans le secteur informel repose sur des
bases
differentes.
Elle
est
principalement
fonction
des
competences qu'un promoteur possede dans son domaine d'activite.
L'entrepreneur
de" ce
secteur
beneficie
ainsi
d'un
atout
technologique dont nous avons deja souligne de fa~on generale

- 426-
l' importance en termes de gains en cout,
en temps de travai 1
effectif,
en
productivite,
en
qualite
du
produi t,
en
disponibilite de l'offre.
Mais ce seul determinant technologique est-il suffisant pour
justifier la decision d'investir dans une activite productive?
Quel est la nature de l'investissement dans ce secteur ? Quels
sont les problemes que souleve ce monisme technologique ?
La reponse a ces questions nous permettra d'apprecier le
rythme de l'investissement dans le secteur informel au Cameroun.
$ 3 - Les Facteurs Dete~nants de l'Investissement dans le
Secteur Informel
L' analyse
des
PME
du
secteur moderne
nous
a
permis
de
montrer les dangers que peut engendrer une absence de prise en
compte des variables technologiques,
financieres et de gestion
pour l' exploi tation d' une entreprise. Parallelement, les exemples
de PME informelles presentees dans les developpements anterieurs
nous revelent que le facteur technologique y est le principal
ressort de l'investissement
et de l'accumulation.
Actuellement, nous essayons de degager a travers le mode de
fonctionnement de ces activites les implications d'un cadre aussi
reducteur de la decision d'investissement.
Nous
ramenerons
a deux niveaux les problemes auxquels
peuvent
etre
confrontes
les
petits
producteurs
dans
leurs
operations de production et les solutions generalement proposees
ou apportees.
- Au niveau du fonctionnement de chacune des PME,
les cas
traites
permettront
d'illustrer
les
problemes
lies
a
la
determination du niveau des activites,
a la qualite du produit
et au cycle des revenus. Nous verrons a ce niveau leur degre de
creativite et de performance et celui de leur dependance par

- 427-
rapport
aux
autres
unites
situees
dans
le
meme
domaine
d'activite.
- Ensuite,
au niveau de ces relations de production, nous
verrons les differents problemes lies a la structuration et a
l' organisation qu' implique une complementari te entre di verses
unites. Cette complementarite resulterait de la specialisation
introdui te dans
la production.
Son intensi te est
fonction du
degre d'integration et de cohesion entre les unites,
celle-ci
pouvant
s'averer
necessaire
a la
realisation
de
produits
competitifs puis a la fidelisation de la clientele.
Nous releverons a cette occasion que ce type de relations
des PME informelles entre elles existe peu ou pas du tout au
niveau des PME modernes.
En outre, il serait interessant de rechercher les relations
que
les
PME
informelles,
pourraient
etablir
avec
d'autres
secteurs
de
l'econornie
nationale
et
la
rnaniere
dont
les
differents niveaux de dependance peuvent etre geres.
3.1
Le Mode de Fonctionnement des PME info~elles
Ainsi donc, la competence technique et la maitrise pratique
des operations de production constituent le principal motif de
l'investissement et du profit dans les activites informelles.
Pourtant
les
resultats
des
enquetes
sernblent
dire
que
les
preoccupations de rentabili te apparaissent conune secondaires pour
les entrepreneurs.
Dans le domaine de la menuiserie, la rentabilite est evoquee
conune une motivation essentielle pour 42 % des cas. Dans celui
de
la
confection,
elle
n'est
pas
mentionnee
conune
une
preoccupation pour les producteurs. 11 serait alors interessant
de savoir conunent on peut envisager un investissement productif
en dehors d'une anticipation de profit.
Nous nous interrogerons donc principalement sur la place du

- 428-
profit dans l'activite informelle. Nous essayerons de comprendre
la maniere dont les prix sont fixes, leur incidence sur le niveau
de l' acti vi te et le cycle des revenus,
leur rela tion avec la
qualite du produit.
3.1.1
-
Le Probleme de la Dete~nation des Prix dans le
Secteur Informel
Les PME informelles sont des petites unites de production
marchande,
c' est· a dire qu' elles produisent des biens et des
sevices destines a ~tre commercialises. A quel prix ces unites
offrent elles leur produit ? Quels sont les elements determinants
de ce prix ?
La reponse a ces interrogations nous permettrra d'expliquer
le
principe
de
la
dete~nation
des
prix
et
de
preciser
le
comportement de l'entrepreneur de la PME informelle par rapport
a cette grille de lecture.
L'observation de nos trois exemples d'entreprises nous a
conduit a une remarque importante. Elle nous revele que les prix
des biens et services de ces PME informelles varient dans le
temps et en fonction des besoins de liquidites de l'entrepreneur.
Les
facteurs determinants du prix de
leur production varient
alors se Ion qu'on se trouve en courte ou en longue periode.
Ainsi une forte pression des besoins exprimes a l'occasion
d' evenements heureux ou malheureux influence enormement le ni veau
des prix.
Selon les entrepreneurs qu' il
s' agisse de Bibiane-
Angele,
de YUNDZO Andre ou de ANDONG Joseph,
ils sont souvent
amenes a reduire leurs prix parfois jusqu'a 50 % pour pouvoir
reunir
les
moyens
financiers
necessaires
au
financement
des
depenses individuelles ou familiales.
lIs ajoutent egalement a
cet egard que l' un des elements qui permettent de moduler le
pourcentage de baisse ou de hausse du prix est le niveau de la
demande ou mieux le comportement du consommateur. Plus la demande
est forte plus ils peuvent jouer a la hausse, l'elimination par
le prix d'une partie de la demande n'hypothequant pas les chances

" 429-
de realisation de leur budget.
Evidemrnent,
il s'agit ici d'une analyse de courte periode
ou l'entreprise sous la pression de problemes de tresorerie est
pressee de vendre sa production pour pouvoir faire face a
ses
engagements. Le comportement du consomrnateur influe donc sur le
prix de courte periode de ces unites de production.
Evidemrnent, cette approche du prix en courte periode ne peut
pas etre etendue a la longue periode,
l'entreprise ne pouvant
survivre si elle ne couvre pas ses couts de production. En longue
periode le niveau des prix sera davantage fonction du cout de
production et des objectifs de profit de l'entrepreneur 35 •
Les interviews nous ont revelE~ que si la couverture des
couts de production est un imperatif dans le long temps, le taux
du profit attendu peut varier comrne dans le cas du prix en courte
periode.
Et,
la
place
secondaire
devolue
a la rentabilit dans
l'activite informelle est due au caractere de subsistance reconnu
aux revenus tires de ce secteur. Cependant, il est important de
preciser que cette conception du revenu doit etre nuancee. Car,
si ce revenu n' est pas
toujours
tres
eleve,
il
semble assez
appreciable. Ce constat qui ressort de l'etude de nos trois cas
est confirme par les enquetes du BIT sur le secteur informel a
Yaounde au Cameroun36 • Cette enquete porte sur un echantillon de
15 364 entreprises informelles dans les secteurs de la menuiserie
et la metallurgie, de la reparation electrique et mecanique ainsi
que
la
petite
ingenierie,
de
l'habillement.
Elle
vise
le
recensement du secteur et a ete effectuee au courant de l'annee
1978.
Elle
a
permis
d' etablir
que
le
revenu moyen
des
chefs
35
Cette distinction entre courte periode et longue periode dans la
determination des prix dans les PME informelles s'apparentent a celle de
l'analyse classique avec Alfred MARSHALL. On lira a ce sujet A. PIETTRE,
Pensee Economique et Theorie Contemporaine,
Dalloz 6eme edition, 1973,
P
95-96.
36
- BAROLD LUBBLL, le secteur infor.mel dans les annees 80 et 90,
Ktudes du centre de Developpemen,t de l'OCDE, op cit, p.
35.

- 43IJ-
d'entreprise de l'echantillon depasse de beaucoup le SMIG pour
la majorite des cas. Quelques exceptions ont tout de meme ete
enregistrees.
8
% des
patrons
dans
la
menuiserie
et
la
metallurgie puis dans la reparation electrique et mecanique et
16 % dans
l'habillement n'atteignent pas
le
SMIG.
Quant aux
salaries 84 % gagnent plus que le SMIG. L'enquete precise que les
manoeuvres sont moins bien payes tandis que les apprentis paient
une redevance d'apprentissage mais en contre partie sont loges
et
nourris.
Les
revenus
du
secteur
informel
semblent
d' une
maniere generale acceptables et pour beaucoup de ces PME ils sont
consideres comme tel.
Cette caracteristique des revenus,
nous
semble-t-il,
est significative du comportement du travailleur
independant et l'amene a le moduler en fonction de ses besoins.
Et,
de
fa<;on
globale nos
PME
informelles
n' ignorent pas
les
exigences de gestion elementaire d' une acti vi te productive. Leurs
prix sont comme dans le cas classique, determines en fonction des
couts de production au-dela de la complexite de la notion du cout
de production.
Dans la realite et a l'observation empirique le cout de la
production dans les activites informelles est heteroclite.
11
comprend aussi bien le cout du capital, celui du temps et plus
particulierement celui du travail qui sera le facteur cle du
developpement
de
l' acti vi te.
C' est
donc
sur
ce
dernier
que
l'entrepreneur agira le plus, surtout en courte periode.
a)
-
Le Niveau des Investissements
L'investissement
comprend
principalement
l'ensemble
des
equipements affectes a la production. Nous n'aborderons pas ici
l'aspect cout de ce capital, nous y reviendrons dans la section
III consacree au probleme du financement des PME informelles.
Le probleme de l'investissement est fondamental ici dans la
mesure ou il explique le niveau du capital physique dont les
machines et le petit equipement acquis par l'entreprise.
Les
investissements dans ce domaine sont generalement sommaires et
se reduisent a quelques outils de production dont l'amortissement
semble negligeable.
Les
resultats
des
enquetes
de
terrain
confirment
la

- 431 -
.',
faiblesse du niveau d'equipement dans les PME informelles. Ainsi
dans le cas des ateliers de confection 78 % d'entre eux n'ont pas
d'equipement, possedant tout au plus une machine a coudre. Seuls
22
% declarent
etre
equipes,
c' est
a dire qu' ils peuvent a
l' interieur
de
leur
uni te
effectuer
l' ensemble
des
travaux
necessaires a la fabrication du produit fini. De la meme maniere,
il
n'existe
pas
de
politique
d'investissement
dans
ces
entreprises,
tout
au moins
a court terme. Ainsi 44 % disent
n'envisager aucun investissement ni dans l'immediat ni dans le
temps.
22 % pensent pouvoir investir dans l'achat de machines
dans un delai de 2 ans,
28 % sont incapables de se prononcer
utilement sur la question. Les reponses regroupees dans les deux
tableaux
sui vants . sont
revela trices
d' un
faible
ni veau
d'accumulation dans le secteur et meme de l'incertitude quant a
la permanence du revenu. Ces elements sont assez significatifs
et nous permettront d'expliquer l'importance de la fixation des
prix pour la survie des exploitations et le role central du cout
du travail.
Ces conclusions sont quasiment les memes dans le cas de la
menuiserie. 42 % des menuiseries interrogees declarent que leur
niveau d'equipement est faible et generalement inferieur a un
million de francs CFA.
4 % ont investi entre deux millions et
quatre millions de F CFA,
10 % a partir de cinq millions. 44 %
n' ont pas pu repondre a cette question.
Le ni veau du capital
physique y est donc negligeable de telle sorte que les charges
d'amortissement peuvent etre negligees dans la determination du
prix de revient.
Par contre l' un des elements
fondamentaux de ce prix de
revient est le cout des consommations intermediaires,
c'est a
dire
les
matieres
premleres
puis
toutes
les
fourni tures
et
prestations diverses necessaires a la production.
La pratique
~ourante dans les unites etudiees consiste a laisser a la charge
-du
consommateur
l' acquisi tion
de
ces
differents
elements,
ce
~ocede permettant aux producteurs de contourner le probleme du
~financement des. travaux par des emprunts. Bien que cette
hypothese ne soit pas toujours realiste, nous admettrons dans un
premier temps que le probleme du cout des capitaux etrangers est

-432 -
resolu. Le cout du travail que nous ramenons a celui de la main-
d'oeuvre et egalement le cout du temps et de la propriete du
capital restent les points sur lesquels se joue le destin de ces
entreprises.
Dans
le
cas
des
entreprises
de batiment,
les
interviews
obtenues
chiffrent
a environ 30 % la remuneration brute de
l'entrepreneur par rapport au cout de l'ensemble des materiaux.
Cet ordre
de valeur est
egalement
celui
en vigueur dans
les
menuiseries
et
les
garages
automobiles.
Par
contre
pour
les
confections, cesproportions ne sont pas toujours respectees. La
remuneration est plus substantielle lorsque le prix de la matiere
premiere est eleve.Dans le cas contraire,
c'est la complexite
du modele choisi et le temps moyen necessaire pour le realiser
qui determinent le prix de la "fa<;on".
Dans l'ensemble, cette remuneration brute de 1 'entrepreneur
represente la valeur ajoutee de la PME informelle.
Elle
est
fonction
a la fois du cout global des materiaux et de la
complexite de la tache. Elle doit etre comprise dans son sens le
plus
large,
car
elle
sert
a couvrir toutes les depenses de
renouvellement de la force
de
travail
et du
capital physique
indispensable a la poursuite de 1 'exploitation.
On y inclut ainsi
- les salaires des ouvriers temporaires generalement payes
a la tache
- les salaires des employes permanents regles en principe
mensuellement ;
- le renouvellement des equipements et du petit outillage
de production ;
toutes
les
depenses
liees
aux
besoins
exprimes
par
1 'entrepreneur
- la marge nette ou encore le surplus degage par l'activite
et qui en fai t
est un residu,
celui-ci
l' entrepreneur pourra
l'affecter a l'accroissement de sa capacite de production.
On peut donc regrouper en trois principales composantes,
les
elements
consti tutifs
du prix de
la production dans
les
PME
informelles.

~ 433··
On aura donc
- les inputs
- le cout de la main-d'oeuvre
- la marge nette de l'entrepreneur.
Nous
avons
volontairement
neglige
les
charges
d'amortissement, etant donne la modicite des investissements en
equipements productifs
constamment
soulignee dans
ce
travail.
Nous avons egalement insiste sut l'interet a distinguer le prix
en courte periode de celui de la longue periode.
b)
La Formalisation du Prix
A terme donc,
les determination des prix tient compte des
cri teres objectifs dont le cout de la production. Toutefois, la
composante strategique de ce cout de production, celle qui est
la moins rigide semble et re le cout de la main-d'oeuvre. Nous
pouvons deja a ce stade formaliser le prix en longue periode d'un
bien ou d'un service offert sur le marche.Nous reprecisons que
ce prix P est different de celui que definit l'entrepreneur a
court terme, le prix P'. P une fonction que l'on peut ecrire sous
la forme: P = f(a,In,Cm,~e)
a est un facteur residuel, representant le degre de
technicite applique a la production et lie a la complexite de la
tache.
In est le cout des inputs necessaires a la production. Son
niveau est fixe en dehors de l'entreprise par les
fournisseurs ; il est une variable exogene .
.
Cm est le cout de la main-d'oeuvre.
Nous avons dit qu'il
comprend l'ensemble des depenses de renouvellement de la force
de travail; le salaire des ouvriers permanents et temporaires.
11 est une variable endogene a partir de laquelle l'entreprise
peut moduler son cout de production .
.
Cm est donc la fonction la plus importante du modele et
peut s'ecrire
Cm = f (Wp, Wt)
Oll
Wp est le salaire des ouvriers permanents
;
Wt est le salaire des ouvriers temporaires
Le cout de la main-d'oeuvre dans le secteur est donc donne

- 434-
par la somrne de ces deux elements tels que
Cm = Wp+Wt
Ce
qui
permet
d'ecrire
sous
forme
de
fonction
la
remuneration de l'entreprise Re
Re = Wp+Wt+1te
Ces differentes composantes de Re n'ont pas le meme poids
dans cette fonction.
L'importance de chacun d'eux est plus vivement ressentie a
court terme, surtout lorsque l' entrepreneur depend totalement des
res sources
que
lui
procure
son
activite.
C'est
le
cas
de
l'entrepreneur a ,temps plein, pour lequel son atelier, ou son
chantier constitue son unique source de revenu.
Le
prix
est
determine
dans
ces
cas
en
fonction
du
comportement du consomrnateur,
de
l' urgence de la demande,
du
niveau de ses revenus et du besoin pressant de fonds que ressent
le producteur
P' = f(Io, Re)
Seulement, en courte periode le prix applique
P' n'oscille
plus autour de ce que A. Smith appelait le prix naturel ou ideal.
11 peut meme s'en eloigner veritablement, le seul objectif etant
de couvrir dans l'immediat un besoin precis dont l'echeance ne
peut plus attendre. P' tendant a se confondre au seul 1te tel
que
P' = f(1te)
1te
est
alors
au
moins
egal
au ,montant
des
besoins
a
satisfaire a tres court terme par l'entrepreneur.
Cette nouvelle'formulation du prix permet de constater que
wp
et Wt ont disparu,
tout au moins sous la forme monetaire.
L'explication de cette disparition est qu'il existe un systeme
de compensation en vigueur dans
les
entrepr ises
informelles.
Celui-ci consiste a autoriser une auto-remuneration des ouvriers.
lls peuvent alors effectuer a l'interieur de l'atelier de petits
travaux distincts de ceux que leur confie le patron. lls peuvent
donc
les
facturer
eux-memes
et
en
encaisser
directement
le
produit.
Cette
pratique permet
de
pallier
l' insuffisance OU
l'absence du salaire.
Ce
comportement
de
l'entrepreneur
du
secteur
informel
renvoie a un certain nombre de travaux theoriques tels que ceux
relatifs aux prix differentiels de J. Maurice Clark.
J.M. Clark a voulu souligner dans cette notion le role essentiel

- 435 -
des
couts
constants
dans
la
poli tique
des
prix
des
grandes
entreprises.
Ces
unites
pouvaient
donc
appliquer
pour
leur
produit les prix "normaux" ceux qui tiennent compte a la fois des
couts fixes et des couts variables. Mais a partir d'un certain
niveau de production lorsque les frais constants sont couverts
l'entreprise peut pratiquer des prix differentiels et vendre a
des
prix
redui ts.
Ces
amenagements
sont
importants
dans
la
periode de recession actuelle 00 la loi du prix unique cesse
d'etre appliquee.
c)
L ' Importance
du
Prix
dans
l' Acti vi te
des
PME
Informelles
Le
cadre
actuel
de
l' evolution des
PME
informelles
est
particulierement recessi f
et necessi te beaucoup d' inventi vi te
pour resister a la crise. Car,
les entreprises informelles ne
peuvent pas agir sur l'ensemble des elements constitutifs du cout
de
production,
leur
champ
d' action
portant
surtout
sur
les
charges variables qui sont ici le cout de la main-d'oeuvre et
subsidiairement celui des consommations intermediaires que tend
a accroitre la devaluation du franc CFA.
Ainsi, une fois assuree la charge de l'achat des materiaux
de
production,
la
marge
beneficiaire
peut
etre
amenagee
en
fonction de la conjoncture. Les prix appliques n'obeissent plus
ni au prix normal,
ni a la loi du prix unique. 1ls deviennent
soit flexibles a la baisse dans un souci de liquidite immediate
ou de fidelisation de la clientele, soit alors discriminatoires
en fonction du revenu du consommateur et des possibili tes de
negociation des parties. Sur ce dernier point J. Marchal pense
que 1 'importance des reserves financieres donne de l'avantage au
mieux pourvu qui peut par ce biais user l'adversaire par le temps
et lui imposer son prix 37
Cette
facilite
d'adaptation
du
producteur
de
la
PME
informelle semble repondre a ce schema theorique dans la mesure
00 sa situation financiere est soit un motif de resistance ou un
n
_
On lira ~ ce sUjet A. Piettre, Pensee Economique et
Th60ries Conteuporaines, op cit p 272.

- 436 -
motif de flexibilite face a la demande du marche.
La souplesse des prix dans le secteur est une traduction de
celle des
structures egalement et dont nous avons deja parle.
Cette flexibilite des comportements permet a chaque entrepreneur
de detenir un monopole de son produit meme a
l'interieur d'un
meme champ de specialite.
Les elements constitutifs de ce "monopole" sont en premier lieu
le
prix
mais
aussi
la
quali te
du
produi t,
la
precision
du
service,
la
disponibilite
du
travailleur,
les
delais
de
realisation
du
travail,
les
facili tes
de
paiement
offertes.
Parallelement et dans un environnement economique liberal, comme
celui
que
vivent
nos
PME,
les
entreprises
subissent
la
concurrence des autres producteurs du meme secteur ou du secteur
moderne. Cette concurrence s'exerce par des produits analogues
ou substituts, inferieurs ou superieurs.
11 s'etablit entre les unites de production une forme de
competitivite
appuyee
d'abord
sur
le
prix
des
produits mais
egalement sur les autres aspects de la dynamique personnelle de
l'entrepreneur. Un aspect particulierement interessant de cette
personnalisation du produit est la possibilite de divisibilite
des biens ou des services dans le secteur.
En
effet,
le
producteur
dispose
d'une
capacite
d'adaptabilite des biens qui n'est pas toujours possible dans le
secteur
moderne
ou
la
production
est
industrielle.
Dans
le
secteur informel le produit peut etre fractionne et offert dans
la quantite demandee en fonction du niveau du revenu. Dans le
domaine des services egalement,
le produit peut etre ramene au
niveau des couts que peut supporter le consommateur. Les exemples
les plus frappants sont ceux que l'on observe dans le domaine de
la reparation automobile. La flexibilite du prix porte autant sur
l'achat des fournitures et pieces de rechange que sur la main-
d'oeuvre.
Ainsi selon le ni veau de revenus
les pieces de re change
d'occasion,
de
deuxieme
ou
de
troisieme
main
peuvent
etre
proposees au client. 11 est fait egalement une distinction entre

- 437
les pleces d'origine fabriquees par le constructeur ou les pieces
de re change d'imitation considerees cornrne des produits neufs de
qualite inferieure. Les prix de ces pieces selon les cas peuvent
augmenter ou reduire le cout total de la reparation.
l I s ' agi t
encore
a ce ni veau d' une personnalisation du
produit qui est mise en valeur par le niveau de maitrise de la
specialite
dans
laquelle exerce
le
travailleur.
La prise
en
compte
du
degre
de
competence
de
l' entrepreneur
et
de
ses
capaci tes
d' adaptation des
consornrnations
intermediaires
a la
fabrication d' un produi t
de quali te valorise son acti vi te et
confere a son produit une propriete que l'on ne reconnait pas aux
produits industriels. 11 s'agit de la divisibilite des biens et
services
du
secteut
informel.
Cette
divisibilite
doit
etre
comprise cornrne un fractionnement dans le temps de la consornrnation
d'un bien ou d'un service en fonction du revenu disponible. 11
importe,
a ce ni veau de souligner les implications du choix
d' utiliser,
dans
l' exemple
de
la
reparation
automobile,
des
pieces de re change de deuxieme ou troisieme main. Certes, a court
terme on a l'impression de minimiser le cout de la reparation,
mais a terme, les gains en terme de cout ne sont pas evidents.
periodiquement on est amene a renouveler les depenses pour la
meme
panne.
Par
contre,
ce
pro cede
presente
l'avantage
de
permettre pour un niveau de revenu faible,
de beneficier d'un
service utile et urgent.
La divisibilite du produit devrait etre egalement comprise
cornrne cette individualisation de la production en fonction du
niveau du revenu mais ou le travail technique et la competence
plus que le capital valorisent le produit.
C'est ce que l'on
observe dans le domaine du batiment ou l'entrepreneur adapte a
chaque pouvoir d'achat un produit specifique ou substitut mais
qui n'altere en rien l'utilite du produit. Cette meme approche
peut etre mise en valeur dans le domaine de la confection ou la
qualite du travail est tout aussi appreciable que la nature de
la matiere premiere et des fournitures consornrnees.
La flexibilite·des couts et la divisibilite de la production
conferent
ainsi
a la determination des prix un caractere

- 438 -
strategique dans le developpement du secteur informel. Le prix
apparalt ainsi comme un element fondamental de la dynamique de
ces
unites.
Son
impact
est
accru
par
le
degre
de
mal trise
technique qui est moins un element du cout de production qu'un
facteur
de
valorisation de
la
faiblesse
du
capi tal.
Car,
la
facturation du travail
se fai t
moins en fonction de son prix
normal qu'en fonction du besoin pressant de fonds d'une activite
de subsistance. Et,
ainsi que nous l' avons di t,
les motifs de
resistance de l'entrepreneur du secteur sont en grande partie
lies a son aisance financiere.
Le facteur strategique du secteur est le prix et partant la
qualite du produit. Le ratio qualite-prix qui en decoule est un
facteur de competitivite qui determine le niveau de l'activite
et le cycle des revenus.
Le degre de competitivite des produits du secteur informel
par rapport au secteur moderne est difficile a determiner. De
meme qu'il est difficile de dire que les produits offerts par ce
secteur sont uniquement des produits inferieurs ou des substituts
de ceux des entreprises modernes.
Les enquetes precitees nous permettent toutefois de dire que
la clientele du secteur
informel
est davantage consti tuee de
menages.
92 % des clients de ce secteur appartiennent a cette
categorie d'agents economiques. Mais ces enquetes ne sont pas
explicites sur les raisons de cette situation. 11 est difficile
de dire que la raison en est la qualite du produit. Les problemes
de
financement
peuvent
expliquer
cet
et at
des
choses,
le
caractere informel et ses implications au niveau de la publicite
et
de
la
connaissance
des
possibilites
du
secteur
peuvent
egalement etre un element d'explication. Nous reviendrons sur cet
aspect dans l'analyse des problemes de financement.
L'essentiel de la clientele du secteur informel dont nous
avons dit qu'elle est constituee des menages a une implication
directe sur l'activite, le niveau de celle-ci suivant l'evolution
des revenus de ces agents economiques.
L'enquete sur +es menuiseries a Douala revele qu'en matiere
de prix ou de modalite de reglement, il n'existe pas de politique

··439 -
generale. Les problemes sont traites au cas par cas.
Le
tableau XV recapi tula tif du mode de
reglement des ventes
l' illustre
bien.
Ainsi
sur
50
entreprises
interrogees
80
%
declarent effectuer des ventes au comptant 86 % acceptent des
paiements etales dans
le
temps,
4 % font
du credit et
82
%
accordent des reductions sur les prix a payer.
Tableau XV : Mode de reglement des ventes des produits
Mode de Reglement
Voies/SO
%
- Paiement cOlr1'tant
40
80
- PaiQmQnt 6chQ1onn6
43
86
- Cr6dit
2
4
- Reduotion de pr!.
41
92
Souroo : NBSSINGA NGONO, II:tu<!a <!all StructurQII et <!as pess
s
de DOve1oppement de" PNB : ca" d .." menui"..ri..s a Douala.
L'importance
de
l'activite
et
sa
permanence
sont
donc
influencees
par
la
politique
des
prix.
Ces
considerations
permettent de comprendre la pratique discriminatoire des prix
comme
une
necessite
du
comportement
du
producteur.
Cette
modulation
du
prix
doi t
etre
comprise
comme
un
facteur
de
maintien du niveau de production voulu et de garantie d'un cycle
permanent de revenus.
Mais 1 I inconvenient maj eur ou alors le revers d I une approche
qui tend a privilegier le niveau de l'activite est souvent une
accumulation du travail au niveau des ateliers. Et,
le cout en
terme de temps et les risques de retard dans la production sont
des elements que l'on omet d'evaluer et d'inclure dans le prix
que supporte le consommateur. L'on peut donc pens er que si le
prix
est
flexible
et
adaptable
au
revenu,
il
comporte
une
composante
supplementaire
en
terme
de
delais
dans
la
file
d'attente
qui
tend
a privilegier
les
commandes
les
mieux
remunerees en montant et en conditions de reglement. Certes, la
rigueur dans 1 I appreciation de la rentabilite n'est pas toujours
evidente mais cette hierarchisation des commandes en fonction de
la valeur qu I elles representent pour 1 I entrepreneur est un indice
qui
permet
de
dire
que
la
rentabili te
n I est
pas
totalement
absente des motifs d' investissement et d' exploi tation des uni tes

- 440-
informelles.
11
en
est
de meme
des
mutations
que
l' on peut
observer
au
ni veau
de
l' organisation.
L' inten~t d' une
telle
evolution reside dans le degre de cohesion qu'elle realise dans
le decoupage des taches qu'impose la specialisation.
3.2 - La Structuration et 1'Organisation des
Unites Infor.me11es
Les mutations que connait le secteur informel se manifestent
particuli~rement dans
la
mani~re
dont
se
structurent
et
s' organisent
les
entreprises.
Les
exemples observes
sont une
illustration du fai t
et de la necessi te d' une integration de
speciali tes di fferentes
et d' un degre de cohesion des uni tes
devant assurer la realisation du produit fini.
Le critere de l'organisation qui prevaut dans la distinction des
activites du secteur capitaliste moderne et du secteur informel
meriterait a ce niveau d'etre bien specifie.
3.2.1
- Fondernents Theoriques
Au niveau de l'entreprise,
l'organisation consiste en la
formalisation des differents rapports indispensables au sein de
l'entreprise. De nornbreuses analyses existent sur les structures
de l'entreprise. Au depart celles-ci etaient davantage orientees
vers
la decouverte. de
solutions generales.
Mais au
fur et a
mesure du temps,
cette demarche ayant revele un interet limite
s'est inversee. On est passe a une deuxi~me etape caracterisee
par
le passage de
l' explication des
simili tudes
a celle des
differences.
Des auteurs tels que Chandler,
Lorsch,
Laurence 38
sont a l' origine de cette nouvelle demarche traduisant ainsi
l'influence du milieu sur la structure. Ces auteurs ont cherche
a montrer que l'organisation est fonction des preoccupations et
-
J.
R. CHANDLKR - Strat6qies et structures de
l'entreprise. Edition d'organisation,
Paris 1972 543 p.
-
P. R. Laurenoe, J. W. Lorsch - adapter les structures de
l'entreprise : int6qration ou diff6renciation. Editions
d'organisation, Paris 1973, 224 p.
Cit6s par J. G. Merigot et A. Labourdette, lU6ments de
aestion Strat6qique des Bntreprises, op cit p 153.

- 441 -
du contexte economique, de l'environnement. D'autres auteurs dont
Ansoff 39 sont alles plus loin insistant sur l'interaction entre
la strategie et la structure,
l'une influen~ant l'autre. Ainsi
les choix dans la dimension des structures, leur centralisation
ou.leur decentralisation, dans la distribution des taches et leur
imbrication sont des aspects sensibles de l'evolution en matiere
de structure dans les entreprises.
Sur le plan des faits, sur tout dans les grandes entreprises
il existe differentes formes d'organisation
les
structures
par
fonction
(recherche,
fabrication,
vente, publicite). Elles permettent a l'entreprise de beneficier
des
avantages
de
la
specialisation.
En
meme
temps
elles
presentent
de
nombreux
inconvenients
dont
la
lourdeur
administra ti ve du processus de decisions,
les
di fficul tes de
decentralisation,
la
tendance
des
chefs
de
departement
a
privilegier
uniquement
les
moyens
necessaires
au
bon
fonctionnement de leur departement. La grande difficulte de la
structure par fonction est que l'entreprise n'est plus toujours
consideree comme un systeme global.
- les structures par divisions
Elles
presentent
deux
caracteristiques,
celle
de
la
separation
entre
la
direction
generale
et
les
divisions
fonctionnelles et celle de la demi-autonomie des divisions.
11
existe plusieurs approches de la structure par divisions mais
leur principal souci est de pouvoir s'adapter aux variations de
l'environnement de l'entreprise,
par l'autonomie accordee aux
responsables.
- les structures matricielles
L'autorite est ici repartie entre des services fonctionnels
et des departements responsables chacun d'un produit.
11
s'agit
de
structures
proches
de
groupe
de
travail
dont
l'interet est la possibilite de reaction immediate aux exigences
.. - Ansoff (H.I). La structure de l'entrepr1se aujourd'hu1
et dema1n. Rnse1gnement et Gest10n nO 9, octobre 1974,
pp 13-36 c1t6 par J: G. Her1got et A. Labourdette,
Rl6ments de Gest10n Strat6g1que des Bntrepr1ses, op c1t p 153.

- 442 -
du moment.
Ces differentes structures sont les formes d'organisation
que l'on rencontre souvent dans les entreprises et surtout dans
les
grandes
unites
modernes.
Elles
presentent
pour
chacune
d'elles des avantages et des inconvenients mais la tendance est
a privilegier
les
formes
qui
s'adaptent
facilement
aux
fluctuations de l'economie.
Pour les PME informelles, les techniques d'organisation ne
sont pas toujours rigoureuses et ne peuvent peut-etre pas et re
classees dans l'une des structures decrites ci-dessus. Pourtant
il est difficile de dire que ces unites evoluent en marge de
toute
forme
d' organisation.
Nos
trois
exemples
de
PME
nous
permettent de montrer que ces entreprises se preoccupent comrne
dans le cas des PME du secteur moderne de l'evolution de leur
environnement.
L'observation
empirique
de
la
mise
en
place
et
du
fonctionnement de ces unites nous permet de nous appuyer sur
quelques
cri teres
pour
soutenir
notre
argumentation.
Nous
retiendrons
ici
le
critere
de
la
localisation,
celui
de
la
complementarite
des
specialites,
celui
du
regroupement
geographique
par
"corps
de
metiers"
ou
aupres
des
sources
d'approvisionnement en inputs.
3.2.2
Le Critere de la Localisation
11 est en general un element determinant dans l'etude des
projets
d'investissement
dans
la
mesure
Oll
il
influe
essentiellement
sur
les
couts
de
production
et
la poli tique
comrnerciale de
l' entreprise.
Dans
les proj ets
industriels
la
localisation est fixee de telle sorte que l'entreprise minimise
le prix de revient du bien produit.
Cette contrainte de la minimisation des couts de production
est constamrnent integree dans le choix du lieu de l'implantation
de
l'atelier
ou
de
l'unite
de
production
des
entreprises
etudiees.
A la difference des entreprises
industrielles,
les
imrnobilisations y sbnt presqu'inexistantes ou reduites a peu de

- tt43 -
choses.
De
meme
le
personnel
employe
se
limite
a quelques
ouvriers permanents ou temporaires. L'une des caracteristiques
qui resultent de cette structure legere est la facile mobilite
des facteurs de production dans ce secteur. La localisation des
unites peut donc etre facilement modifiee par rapport aux points
d'approvisionnement
en
matieres
premieres,
aux
points
de
concentration
de
la
clientele
cible
a
la
proximite
des
competences et specialites complementaires.
C'est ainsi qu'on a pu rel~ver le comportement suivant pour
nos trois PME :
- Bibiane Angele pour fixer et conserver sa clientele n'a
pas pu rejoindre son epoux affecte dans une autre ville, Yaounde
situee a 265 Km de Douala Oll se trouve actuellement son atelier
de confection.
- ANDONG Joseph, qui n'a pas de bureau re~oit sa clientele
a domicile. 11 a eu pour des raisons financieres a changer de
logement mais sans s'eloigner du quartier et du domicile connus
par ses clients. 11 est donc plus aise de le retrouver. 11 suffit
de
se
renseigner
aupres
de
ses
anciens
voisins
a qui il a
soigneusement indique son nouveau logement.
- Quant a YUNDZO Andre, il a ete agree, de fa~on informelle
bien sQr, par un etablissement financier de la place. 11 n'est
etabli
aucun
contrat
formel,
mais
ce
mecanicien
assure
l'entretien et la reparation des pannes mecaniques des vehicules
de cette entreprise, ceux du personnel, des amis et membres de
famille. 11 effectue les reparations generalement dans le parking
de l'entreprise situe en plein centre des affaires. 11 peut donc
facilement
faire
appel
aux
autres
techniciens
en
cas
de
necessite.
La localisation dans le secteur ne semble donc pas et re le
fait du hasard. Elle serait meme guidee par des preoccupations
economiques et strategiques. Ainsi la proximite des points de
commercialisation des matieres premieres permet de nouer des
contacts
avec
des
fournisseurs,
d' etablir
des
relations
permanentes
qui
favorisent
des
rapports
de
confiance
et
des

- 444 -
operations de credit fournisseurs.
L'absence des stocks de matieres premleres peut en partie
s'expliquer par cette proximite des fournisseurs en permettant
un approvisionnement rapide. Les resultats des interviews et des
enquetes
sur
le ni veau des
stocks permet
de
confirmer cette
analyse. Aucune de nos trois
PME ne constitue des stocks. De
meme a partir des enquetes on a pu voir que pour les ateliers de
couture
74
% des
tailleurs
et
couturiers disent
ne posseder
aucune fourni ture en stock,
seuls 26 % disent avoir reussi a
constituer des stocks
- pour les ·menuiseries,
80 % des menuisiers fonctionnent
sans stock de matieres premieres. Ces difficultes de constitution
de stocks d'inputs vont influer sur l'organisation des unites.
Le choix de la localisation va donc etre fonction des facilites
d'approvisionnement·
en
matieres
premieres
qu'offrent
les
fournisseurs
environnants
de
telle
sorte
que
les
frais
de
deplacement soient minimises.
Ce critere commun a nos trois de PME informelles explique
en meme temps la concentration des techniciens de differentes
specialites autour des sources d'approvisionnement. Ce phenomene
a pu etre observe dans le domaine de la reparation automobile ou
toliers, mecaniciens, electriciens se sont regroupes autour des
points de vente de pieces de rechange. 11 a pu se constituer a
la faveur de cette forme d'organisation de veritables poles de
vente de
pieces
detachees
et
de
reparation de
vehicules.
Le
phenomene
s'est
amplifie
par
un
mouvement
en
sens
inverse
d'entree dans le secteur de nouvelles unites informelles de vente
de pieces detachees neuves ou d'occasion.
Ce regroupement geographique d' uni tes dans di fferents champs
de specialites est souvent mu par la volonte d'assurer facilement
une sorte de collaboration informelle. 11 importe toutefois de
souligner que si la concentration geographique est un element
exploite dans l'echange des specialites, le principal facteur de
la complementarite est la maitrise technique de la specialite de
chaque entrepreneur.

- 445 -
3.2.2
La COmplementarite des Specialites
L'une des principales mutations observee dans le secteur
informel est cette tendance a la specialisation. Si dans certains
domaines de l'activite economique la complementarite qu'induit
cette specialisation se realise plus aisement dans la proximite
geographique des producteurs, celle-ci repose essentiellement sur
le critere de la qualite des prestations' deja realisees.
En effet, la concentration geographique n'est pas toujours
possible. Dans un souci de minimisation des couts de production,
de
nombreuses
unites
informelles
n' ont
pas
une
implantation
distincte de leur principale habitation. Ainsi,
dans deux cas
pour Bibiane Angele
et pour ANDONG Joseph,
le
domici le
fait
office de bureau ou d' atelier.
L' atelier de couture est comme
nous l'avons deja dit dans une piece de la maison d'habitation.
11 en est de meme
aussi
et surtout pour notre
entreprise de
construction,
l' entrepreneur
en
batiment
n' eprouvant
pas
veritablement
le
besoin
d'avoir
des
locaux
particuliers.
Evidemment une telle situation ne comporte pas que des avantages
en terme d'allegement des charges d'exploitation. Elle pose, a
cause des demenagements, un probleme de publicite et de contact
qui pourrait limiter d'une part l'importance de la clientele et
d'autre
part
les
possibilites
d'echange
de
services
entre
entrepreneurs. 11 s'agit la d'un aspect important du probleme de
la publicite des PME informelles. Nous avons deja vu a partir des
enquetes de terrain.que de nombreuses unites de production de ce
secteur
ne
possedent
pas
d'enseigne
portant
leur
nom
et
permettant de les faire connaitre. Les reseaux d'information sur
la nature des activites et la qualite des produits offerts sont
informels. A ce niveau la tradition orale reste fortement ancree
dans les habi tudes et son impact determine les relations qui
s' etablissent entre consommateurs et producteurs ou a l' interieur
de chaque categorie d'agents economiques.
Le ni veau des
echanges de prestations
entre
speciali tes
distinctes depend des lors des relations de travail qu'ont pu
etablir entre eux les differents entrepreneurs.
Le
fonctionne~ent
est
simple.
Les
unites
sont
toutes

- 146-
autonomes et le recours aux specialites complementaires pour les
travaux confies aux unes et aux autres se fait ponctuellement.
Ces
interventions
s' ef fectuent
sous
la
forme
de
prestations
remunerees,
sous la responsabilite de l'entreprise principale,
celle ~ laquelle le travail a ete attribue. 11 s'instaure ainsi
des habitudes de collaboration entre des PME exer~ant
dans le
meme domaine.
En realite, il n'existe pas de mutuelles connues ou d'autres
formes d'organisations formelles dans les differents "corps de
metiers". Les interviews avec les chefs de nos PME de meme que
les enquetes montrent que les unites tiennent ~ conserver leur
autonomie.
Dans les deux domaines concernes par les enquetes,
aucune
organisation
formelle
n' a
encore
ete
creee.
Quelques
personnes souhaiteraient qu'il y en ait une. Et c'est le cas dans
la confection ou 34 % des tailleurs et couturieres interroges
sont favorables ~ une idee de mutuelle. Mais dans la majorite des
cas,
les entrepreneurs sont defavorables ou indifferents ~ une
telle structuration des entreprises. Ainsi,
dans le domaine de
la confection 66 % des operateurs se sont prononces contre ou se
sont
abstenus
de
donner
une
reponse.
Dans
le
domaine
de
la
menuiserie,
la preference pour des unites autonomes est encore
plus manifeste. Et, tous nos trois chefs d'entreprises consultes
ont repondu negativement pour toute fonme de m~tuelle.
Parallelement
a la specialisation des unites et a la
complemen tari te
qu' elle
impose,
les
entrepreneurs
du
secteur
infonmel
continuent
de manifester beaucoup d' interet pour
le
maintien
et
le
developpement
d'unites
de
production
independantes. Les rapports de collaboration sont ponctuels et
appuyes
pour
l'essentiel
sur
des
exigences
de
qualite
et
d'efficacite qui assurent au "groupe" des produits competitifs.
Mais ceux-ci ne doivent en aucune fa~on aliener l'autonomie des
unites existantes.
Pourtant, on aurait pu imaginer, dans la perspective d'une
maximisation
de
la
synergie
de
groupe,
une
structuration
differente au plus formelle. Une telle organisation viserait ~
rnieux coordonner et rentabiliser un travail con~u en specialites
distinctes mais cornplernentaires et integrees.

- 447 -
A contrario,
il se developpe dans le secteur informel, un
phenomene tout a fait different et a premiere vue paradoxal Oll
autonomie et complementarite sont recherchees et protegees.
Les
raisons
de
cette
organisation
de
l'activite
nous
semblent multiples. On pourrait en premier lieu citer le cadre
informel dans lequel se creent et se developpent les differentes
unites.
Un
tel
environnement
est
susceptible
de
poser
des
problemes d'arbitrage en cas de conflits pour des regroupements
d'interets economiques. L'une des difficultes liees a ce contexte
est la definition d'un cadre juridique qui tienne compte
de la
specificite du milieu.
Le risque pourrait etre celui de la creation d'une situation
encore plus compliquee pour un systeme de production generalement
con9U en dehors des tracasseries juridiques. Les implications
seraient considerables sur tous
les plans.
Economiquement,
on
deboucherai t
sur des pertes de temps,
sur l' accroissement des
couts et sur la baisse de la rentabilite.
Les entrepreneurs ont ainsi prefere face aces risques des
unites totalement independantes.
En plus de ces considerations juridico-sociales nous pensons
qu'il
existe
des
raisons
purement
economiques
en
faveur
de
l'autonomie des PME informelles. 11 s'agit de la nature du revenu
et
de
la
qualite
de
la
formation
en
tant
que
ressort
de
l'activite.
Ainsi,
le
revenu
genere
par
le
secteur
informel
etant
principalement
un
revenu
de
subsistance,
l' entrepreneur
veut
moduler son exploitation en fonction du niveau de ses besoins
prioritaires.
11
recherche
pour
cela
un
cadre
Oll
il
puisse
librement fixer ses prix, le niveau de sa production et le rythme
de celle-ci.
De la meme maniere,
la qualite de son produit est assuree
grace
a ses
propres
qualifications,
a
celles
des
unites
complementaires et a la nature des inter-relations uniquement
basees sur la performance et la competence.
L'organisation du travail et les echanges des prestations
ont
ete
assis
sur
ces
bases
d'un
travail
independant
et
efficient. Lorsqu'il s'agit de travaux necessitant le concours
de plusieurs specialites,
la gestion des commandes est assuree

- 448-
par un seul des entrepreneurs. 11 en est donc adjudicataire et
responsable a ce titre de leur bonne execution. 11 coordonne le
travail,
fixe
le prix,
contr61e
la qualite et
les
couts.
Il
decide de l'intervention des fonctions necessaires a l'obtention
d'un produit fini competitif,
sous la contrainte du niveau du
pouvoir d'achat du consommateur.
Sur
ces
differents
points
ce
mode
de
fonctionnement
se
rapproche de celui de l'organisation autour des marches et qui
est l'un des aspects des structures par division. Celles-ci sont
caracterisees
par
une
separation
nette
entre
la
direction
generale
et
les
divisions
operationnelles
d'une
part
et
l'autonomie de celles-ci d'autre part.
Cette independance est
bien
celle
que
l'on
observe
entre
les
differentes
unites
informelles distinguees par leur specialite. Certes, il n'existe
pas de
direction generale
commune,
ces
PME n' evoluant pas a
l' interieur d' une meme
entreprise et consti tuant
chacune une
uni te distincte.
Par contre,
la direction des travaux par les
adjudicataires
peut
ponctuellement
etre
consideree
comme
un
pilotage general de l'ensemble des divisions.
De la meme maniere, le rapprochement que nous faisons avec
l'organisation autour des marches se justifie dans l'orientation
vers le marche ou des produits separes mais complementaires dans
nos
exemples
sont
proposes
ensemble
aux
acquereurs.
L'interessement des producteurs aux differentes operations et les
efforts conjugues des unites concernees permettent une synergie
de
groupe
susceptible
d'accroitre
le
chiffre
d'affaires
de
l'ensemble du systeme et d'assurer un cycle permanent de revenus
et une marge beneficiaire plus substantielle.
Cette
organisation
comporte
donc
les
avantages
de
la
decentralisation des operations techniques et d'une plus grande
maitrise du travail dans chaque specialite. La totale autonomie
des unites pose cependant un certain nombre de problemes dont
ceux de la difficile maitrise de l'ensemble des couts,
de la
disponibilite des autres divisions et des delais necessaires a
la production.

- 449-
En
effet,
chacune
des
unites
negocie
directement
et
individuellement ses propres travaux, con~oit de fa~on totalement
independante le rythme d'execution de ceux-ci et le niveau des
prix applicables pour chaque cas. Il n'existe pas en realite de
pol.itique
commune
ni
en
matiere
de
prix
ni
de
niveau
de
production, chaque unite tenant a conserver son autonomie. Ces
manifestations
d' independance
n' enlevent
rien
aux meri tes
du
besoin d'echanges et de complementarite du secteur informel dans
son evolution actuelle.
L'une des principales motivations des
formules actuellement observees est la recherche de l'€fficacite
et le retablissement de la competitivite dans un secteur Oll la
concurrence est grandissante.
Il est toutefois utile de relativiser la dimension de la
specialisation ainsi que son impact dans le secteur informel. En
l'absence d'equipements suffisants et adequats l'impact de la
specialisation demeure limite.
De
meme,
les
problemes
soulignes
ci-dessus
et
lies
a
l'autonomie des unites obligent souvent les techniciens a une
certaine
polyvalence.
Ce
dernier
comportement
vise
essentiellement a minimiser les couts de gestion et de production
et a satisfaire aux delais de production fixes par 1 'entrepreneur
ou le consommateur.
Ces velleites de polyvalence ont le principal inconvenient
de poser aux PME un probleme de competitivite sur le plan de la
qualite des produits.
De plus, le ratio qualite-prix est difficile a apprecier par
rapport
a la
production
du
secteur
moderne
en
l'absence
d' elements
de
comparaison
communs.
Si
bien
qu' il
n' est
pas
toujours facile de dire si les biens et services produits dans
le secteur informel sont des produits substituts concurrents,
complementaires ou inferieurs de ceux de l'autre secteur.
A contrario, le constat que l'on a pu faire est que dans les
entreprises
du
secteur
informel
a cause du
faible
niveau
d1investissement, le capital physique, les coQts de gestion sont

- 450 -
constarnment minimises. 11s n'ont donc pas constitue cette source
de problemes paralysants analyses dans le cas des PME modernes.
11 semble ainsi que les PME informelles aient pu mai triser deu;{
des principaux determinants de la decision d'investissement. La
valeur fondamentale sur laquelle s'est construit le secteur est
la formation technique et la maitrise professionnelle qu'elle
induit. Elle a permis d'eviter les ecueils technologiques qui ont
conduit de nombreuses PME modernes a la faillite.
De la meme maniere,
elle a fait du travail le facteur de
production essentiel, le facteur capital n'occupant qu'une place
secondaire. De ce point de vue,
elle a permis de minimiser les
problemes de
financement des
equipements de production et de
contourner
ceux
de
la
gestion
des
couts
financiers
et
technologiques. Certes, ces PME ne connaissent que tres peu de
problemes de financement des irnmobilisations, du fait du faible
niveau
de
celles-ci
surtout
durant
les
premieres
annees
de
l'activite.
Elles doivent neanmoins
faire
face
a des besoins
d'exploitation
et
au
fur
et
a mesure
du
temps
a des
investissements de remplacement ou de capacite.
Nous allons actuellement nous pencher sur les problemes lies
au financement de l'exploitation et du developpement des PME du
secteur informel.

- 451 -
SECTION III
LA SPECIFICITE DU PROBLEME DU FINANCEMENT
DES PME INFORMELLES
Ainsi donc, les PME informelles dans leur evolution actuelle
apparaissent comme un cadre de valorisation de la formation et
de
realisation
professionnelle.
La
primaute
de
cet
aspect
technique ou technologique a tendance a occulter les problemes
de
financement
de
cette
partie
de
l'economie.
Une
telle
occultation,
nous
semble-t-il,
serait
prejudiciable
a
l'epanouissement total de ces activites.
L'importance du probleme du financement pour les PME est
donc
telle
qu' elle
ne
pourrai t
etre
eludee.
On
le
pourrai t
d' autant moins
qu' ici
les entreprises du secteur informel
se
trouvent confrontees a un double probleme.
D'abord comme toutes les PME leurs res sources propres sont
insuffisantes pour couvrir leurs besoins de financement.
Ensuite,
a la difference des PME modernes,
elles semblent
totalement exclues du financement bancaire,
la raison souvent
evoquee pour expliquer cette exclusion etant le cadre informel
de leur creation et de leur evolution.
11 s'agit donc pour ces unites, de rechercher en dehors du
systeme
bancaire
et
meme
du
systeme
financier
officiel
les
capitaux necessaires au financement de leurs activites.
En
effet,
l' absence
de
poli tique
genera le
ou
d' actions
rigoureuses
et
coordonnees
au Cameroun
en
faveur
du
secteur
informel pourrait expliquer qu'a l'heure actuelle,
il n'existe
presque pas de structures officielles de financement, d'appui ou
de
promotion
d'initiatives
de
production
ou
d'emplois
independants. Les organismes crees et les mesures prises dans le
cadre de la promotion et du developpement des PME ne concernent
veritablement que les entreprises modernes.
Toutefois dans le cadre du plan d'ajustement structurel il
a
ete
cree
un
Fonds
National
de
l'Emploi
(F.N.E)
dont
nous
rappelons qu'il a entre autres missions d'aider a la promotion
de l'emploi par la creation de micro-entreprises et d'emplois
independants
grace
a
un
appui
technique
et
financier
aux

- 452 -
entrepreneurs. Les actions de cet organisme, qui est de creation
recente puisque ne en avril 1990, se trouvent encore a leur phase
experimentale. Plusieurs petits projets dans differentes
branches
; peche arti sanale,
avicul ture,
reparation de pneus,
cantines scolaires, cordonnerie et matelasserie etc ont ete deja
enregistres
et
certains
d'entre
eux
selectionnes
pour
et re
finances.
L' evaluation de l' impact du
FNE dans
la promotion et le
developpement des PME n'est donc pas encore possible.
Dans cettesection nous
essayerons
d' analyser le mode de
financement des PME informelles
:
- pour cela,
nous nous interrogerons a la lumiere de nos
trois exemples sur l'existence de possibilites particulieres de
financement.
- Nous analyserons ensuite les mecanismes de ce financement,
leurs
caracteristiques
propres
et
leurs
implications.
Nous
verrons alors quelles relations s'etablissent entre ces derniers
et le systeme conventionnel.
Nous
en
apprecierons
enfin
l'impact
sur
le
niveau
de
l'activite dans le secteur, sur les possibilites d'organisation
interne
et
externe
puis
de
developpement
de
ces
unites
de
production. Nous ferons chaque fois reference a des concepts deja
analyses ou a des points debattus dans le cadre des PME modernes.
Nous
nous
appuyerons
essentiellement
sur
les
concepts
d'evaluation de l'e~treprise, de structure du capital et de cout
du capital pour comprendre les problemes de couts des res sources
et de cout d'opportunite que pourraient avoir a resoudre les PME
informelles.
$ 1
La Nature des Ressources des PME Informelles
Les PME informelles se sont constituees comme un cadre de
valorisation du facteur travail. Cette valorisation risquerait
cependant d'etre mitigee si le probleme du financement n'etait
pas
suffisamment
pris
en
compte
et
integre
dans
les
preoccupations quotidiennes de l'entreprise. L'une des questions
a laquelle nous voulons repondre dans les developpements qui vont

- 453 -
sui vre est de savoir comment se
financent
les entreprises du
secteur
informel.
En
d' autres
termes,
dans
un
environnement
financier
officiel
hostile,
quelles
sont
les
possibilites
particulieres
de
financement
de
l'activite
economique
dite
informelle ? 1ci comme dans l'autre secteur de l'economie deja
decrit, on distingue deux types de res sources : les ressources
internes,
celles
creees
par
l'entreprise
elle-meme
et
les
res sources
externes,
celles
qui
re suI tent
des
emprunts
contractes.
1.1
Le Financement interne des PME informelles
Les ressources prises en compte dans ce type de financement
se ramenent a la mise initiale de l'entrepreneur, proprietaire
de
l'affaire,
a
laquelle
s'ajoute
au
fur
et
a
mesure
de
l'activite,
la
marge
nette
qui
reste
a
la
disposition
de
l'entreprise pour etre reinvestie. Les trois exemples que nous
avons retenus pour illustrer notre analyse nous montrent que ce
capital initial reste assez faible dans la majorite des cas.
11
est
affecte
d' une
maniere
generale
a
la
couverture
des
depenses necessaires a la mise en service de l'entreprise. Le
niveau
du
capital
initial
determine
donc
celui
des
investissements au demarrage, celui du fonds de roulement en tant
que marge de securite pour l'exploitation de l'entreprise.
Ce
fonds
de
roulement
sert
a
financer
les
premleres
charges
locatives,
les premiers stocks de matieres et fournitures etc.
Notre
typologie des entrepreneurs du secteur informel nous a
permis
de
faire
la
distinction
entre
plusieurs
types
de
producteurs.
Nous
avons
notamment
distingue
ceux
des
entrepreneurs dont l'activite constitue la seule source de revenu
de ceux qui n'y voient qu'un complement au revenu du menage. 11
est
utile
de
tenir
compte
de
cette
differenciation
pour
comprendre que le stock de capital peut tout de meme varier d'une
PME informelle a une autre, d'une activite a une autre et meme
a l'interieur de la meme activite. Paradoxalement, les unites les
"mieux
equipees"
des
le
depart
de
l'activite
ne
sont
pas
forcement celles dont les seuls espoirs de creation d'un revenu
reposent
sur
leur
unite
de
production.
Les
exemples
d'investissements plus importants se recrutent davantage dans

- 454 -
l'autre groupe, du fait de possibilites financieres plus grandes
qu'offre l'existence d'un premier revenu dans le menage. C'est
tout au moins ce que nous revele la comparaison de nos trois cas.
Le niveau des investissements dans l'atelier de couture Bibiane
est au moins egal a cinq fois celui qu'ont pu realiser le Garage
Yundzo et l' entreprise de batiment Andong. Cette couturiere grace
a un capital initial plus important a pu acquerir deux machines
a coudre electriques, une surfileuse, une table a repasser, un
fer a repasser a vapeur tous a l'etat neuf. Elle a pu egalement

s'equiper d'une vitrine pour l'exposition et la conservation de
ses ouvrages et modeles. Les ressources dans ce cas se sont sans
doute formees a partir des economies du couple realisees sur le
salaire de l'epoux. Le montant total reserve a l'installation de
l'atelier a ete estime par l'entrepreneur a plus de 600 000 F
CFA.
Evidemment
ce chiffre
est
au-dessus
de
la
moyenne
des
depenses initiales d'equipement des PME informelles. Certaines
d'entre elles ne peuvent compter pour s'installer que sur l'aide
d'amis et de parents ou pour ceux qui ont pu trouver un emploi
salarie, sur l'epargne qu'ils peuvent constituer. Cette derniere
solution a l'inconvenient d'allonger les delais de creation de
sa propre entreprise au terme d'une periode de formation ayant
permis l'acquisition de connaissances pratiques et techniques.
On pourrait noter qu'il s'agit ici d'un inconvenient majeur de
l'autofinancement dans
la
realisation
de
l'investissement.
11
confirme la these selon laquelle les fonds propres ont un cout
40.
D' ai lleurs,
le probleme se pose a nouveau pour ces PME au
sujet de leur rythme de reinvestissement, celui-ci depend de la
part du profit qu'elles peuvent reellement reinjecter dans le
circuit de production. 11 se pose aussi pour la marge de securite
qu'elles
peuvent
veritablement
s'assurer.
Et,
toujours
par
rapport
a
la
distinction
entre
les
differents
types
d'entrepreneurs,
l'entreprise Bibiane peut avec plus d'aisance
accroitre
le
niveau
et
la
qualite
de
ces
equipements
en
reinvestissant un taux plus eleve de saomarge nette. Les aut res
entrepreneurs le peuvent moins.
11s le peuvent d'autant moins qu'ils tirent de leur activite
••
-
On lira sur le co6t des fonds propres l'ariticle de
M. A!bouy, structure financiere et co6t du capital in
Encycloplldie de Gos tion, Ed1 t Economica,
Direction p. Joffre'et Y. S1mon Paris, 1ge9 pp 2755-2773.

- 455 -
l'essentiel de leurs revenus. La marge qu ' ils degagent alors et
affectent a l'accroissement du stock du capital dependra de leur
aptitude a satisfaire leurs besoins personnels de subsistance.
Dans le cas du Garage Yundzo et de l'entreprise Andong, on a pas
pu demontrer l'existence d ' un fonds de roulement.
Leur taux de
reinvestissement aura alors tendance a etre plus faible, toutes
choses egales par ailleurs.
Globalement, le financement interne dans les PME informelles
presente de nombreuses
limites dont la plus preponderante est
l'inadequation des
ressources,
dans
leur montant et dans leur
terme, au cycle de production des entreprises. 11 n ' echappe donc
pas
aux
reproches
habituels
adresses
a
l'endroit
de
l' autofinancement. Celui-ci semble bien insuffisant, surtout dans
les cas que nous etudions, pour repondre aux besoins financiers
exprimes.
1.2
Les
Possibili tes
Particulieres
de
Financement
Externes des PME 1nformelles
A cause de l'insuffisance de leurs res sources propres les
PME
informelles
vont
tent er
de
creer
et
de
developper
des
mecanismes et instruments propres leur permettant de faire face
aux contraintes de leur acti vi te.
Nous devons
si tuer dans ce
cadre l' ensemble des relations que nos entreprises ont cherche
a tisser avec les fournisseurs,
les
clients
et
les
autres
producteurs du secteur informel ou non.
1. 2.1
Le Credit Fournisseur
La situation strategique des entrepreneurs a proximite des
sources d ' approvisionnement en matieres premieres contribue,nous
l ' avons
di t,
a facil iter la creation de relations d 1 affaires
entre fournisseurs et producteurs. Les entreprises peuvent ainsi
se
faire
ouvrir
des
fiches
aupres
des
vendeurs
de matieres
premieres et fournitures. Ce mecanisme leur permet de beneficier
de delais de paiement pour les achats qu ' ils effectuent dans le
cadre
de
leur
activite
de
production.
L' importance de ces
facilites de paiement est difficile a evaluer en l' a bsence de

456.-
statistiques dans ce domaine. Mais, un certain nombre de mesures
de contr61e et de limitation de risques de non paiement sont
prises par les
fournisseurs
tendant a reduire l' impact de ce
systeme de credit.
11 s'agit essentiellement du non cumul des
factures. Ainsi de nouveaux achat a credit sont subordonnes au
reglement des
factures
anterieures.
La marge de manoeuvre du
producteur est donc assez faible dans la mesure Oll le paiement
de ses fournisseurs s'effectue lorsqu'il encaisse lui-meme sur
ses propres factures.
Dans nos exemples de PME informelle,
le
montant des credits fournisseurs excede rarement la somme de
50 000 F CFA.
Ce montant correspond en moyenne 'au prix d'une
tonne de ciment dans
le batiment,
de 10 m de tissus dans la
confection,
d'une
ou
de
deux
pleces
de
rechange
dans
la
reparation automobile. Cette restriction au niveau du montant des
credits a des implications sur les delais consentis. Plus ceux-ci
seront ecourtes plus aise sera l'octroi de nouvelles facilites.
Nous voulons tout de meme preciser que sur ce point nos exemples
ne.
rendent
pas
suffisamment
compte
de
la
reali te
des
comportements dans le secteur. En effet, l'importance des credits
que peuvent obtenir les PME varie en fonction de l'activite et
aussi de la qualite des relations qui ont pu s'etablir entre
producteurs et fournisseurs.
Tres souvent meme,
le volume des
financements s'ameliore au fur et a mesure du temps lorsqu'il ne
se produi t
pas d' incidents maj eurs dans
le remboursement des
concours precedents.
Toutefois,
cette
forme
de
financement
reste
assez
restrictive dans les possibilites qU'elle offre aux producteurs.
Elle a tendance a privileqier le travail a la commande, celui-ci
ayant l'avantaqe de reposer sur un calendrier de rernboursement
et d'execution des travaux que devront respecter les parties.
C' est donc par rapport aux dates de paiement prevues
que
le
fournisseur sollicite determine a son tour en fonction du niveau
de
ses
stocks
et
de
sa
tresorerie
le
volume
des
credi ts
a
consentir.
Dans beaucoup
de
cas,
les
negociations
se
deroulent
en
presence du client de
la
PME.
Des
informations
seront alors
fournies
sur ses sources de
revenus,
sur son acti vi te etc ...
Permettant
au
fournisseur
d' apprecier
ses
capaci tes
de

- 4')7 -
remboursement.
Des garanties sont souvent requises et dans ce
sens le
fournisseur
peut exiger un cheque port ant
la date a
laquelle le reglement sera effectue. Le champ d'action du credit-
fournisseur nous semble ainsi assez restreint. Si bien que les
entreprises
cherchent
souvent
a
contourner
la
difficul te
en
elargissant le reseau de leurs approvisionnements a de nouveaux
fournisseurs.
Mais cette solution n'est pas infinie parce que
dans le secteur informel il existe, cornrne nous le verrons par la
suite, des circuits d'informations inter-activites qui ont entre
autres objectifs de minimiser ce genre de risques.
Le credit
fournisseur dans- les PME informelles camerounaises semble etre
davantage une source de financement pour les problemes ponctuels
des entreprises. Elle ne pourrait donc pas soutenir une activite
reguliere et continue obligeant ainsi a rechercher ailleurs des
ressources permanentes et plus adaptees.
1. 2. 2
Les Avances-Clients
11 s'agit
la d'une
autre
forme
de
financement
a credit
utilisee par les PME informelles.
Par rapport a la precedente
elle semble offrir des possibilites plus grandes. Elle consiste
a imposer la charge des achats des inputs rentrant dans chaque
cornrnande
au
client
lui-meme.
L'ensemble
des
consornrnations
intermediaires dont les materiaux de constructions,
les pieces
de rechange des vehicules, les fournitures diverses sont finances
ou
doi vent
l' etre
a
100
% ou
quelques
fois
moins
par
les
consornrnateurs
eux-memes.
Ces
depenses
en
matieres
premieres
representent tres souvent le poste le plus important du budget
de nos
entrepreneurs, le reste
se reduisant a leur remuneration
propre.
Dans
la
majorite
des
activites
analysees,
cette
remuneration brute est carnrnunement fixee a un tiers a peine du
cout des inputs. Ceux-ci sant d'ailleurs consideres cornrne la base
de la facturation du service au cornrne l'element central de la
determination du prix du produit.
Leur importance dans le cout de la production ne limite pas
a ce seul element l'effort financier impose par les PME a leurs
clients. Cet effort est souvent etendu a la remuneration au moins
partielle de l'entrepreneur avant la fin du contrat. C'est tout
au mains ce qui ressart de natre observation empirique. 11

- 458 -
represente donc en comparaison de toutes les formes precedentes
de financement externe et interne la source de financement la
plus interessante et la plus courante.
Elle
rent re
ainsi
pour
une
large
part
dans
les
moyens
de
financement de nos trois PME.
Les
avances
clients,
cornrne
les
autres
ressources
deja
inventoriees
ne
sont
pas
assorties
du
paiement
d'un
taux
d'interet nominal. Sans doute dans la realite,
peut-on montrer
que toute res source comporte un cout. Et, dans le cas des avances
consenties par les clients, ce cout peut etre determine a partir
des delais de mise a disposition des fonds, de la regularite des
decaissements par rapport au calendrier etabli qui,
s'il n'est
pas
respecte bouscule et perturbe l' ensemble du programme de
production.
Il
s' analyse
donc
a
ce
ti tre
en
terme
de
cout
d'opportunite,
de duree du cycle de production de l'entreprise
dans un objectif de maximisation du profit de l'entrepreneur. En
outre, plus que les autres ressources, elles procurent des moyens
financiers plus proches des besoins a satisfaire et oblige a une
discipline rigoureuse au sein de l'entreprise. Nous reviendrons
sur ce point. Toutefois, l'un des handicaps de cette methode de
financement est qu'elle reste plus ou moins directement attachee
au revenu du client, a ses variations, au rythme de son paiement.
L'un des risques a craindre est l'incidence du temps de collecte
des fonds sur la realisation de la depense aussi bien pour la
production concernee que pour toutes celles du portefeuille de
l' entrepreneur.
Ce
temps
est
par
exemple
celui
de
la
disponibilite des credits bancaires qui tiennent compte de la
capaci te d' endettement donc du revenu,
il est aussi celui de
l'obtention des emprunts aupres des parents et amis et celui de
la mobilisation de l'epargne propre du client. Ces deux dernieres
composantes ont ainsi des accointances avec le revenu de l'agent
economique concerne. Leur prise en compte souleve ici un double
probleme celui du cout des transactions et celui de l'alea moral
41.Les couts de transaction s'apprecient par rapport a la charge
-
Les notions de coUts de transaction et d'alea moral sont
au coeur de la theorie des contrats et de celle d'aqence
dlweJ.opplles par de nOlllbreux auteurs dent Crossman et
Hart (1983)
; Green et LAFFONT (1979). On lira A ce sujet la
recension qu'en font Claude d'luIpremont et Al.1, Contrats et
Marches in Encyclopedie Bconomique, Ed1 t Bconomica X. Greffe,

r.l-59 -
supplementaire qu'induisent pour
l'entreprise les differentes
demarches devant aboutir a l'obtention de credits. Cette charge
n' est pas
touj ours
facile
a apprecier parce que n' etant pas
uniquement financiere. Elle pe ut prendre la forme des garanties
exigees, des interventions necessaires, de la dette morale d'un
appui financier d'amis ou de membres de la famille.
Certains de
ces couts sont meme supportes par l'entrepreneur quelle que soit
l'issue des negociations.
Le deuxieme risque qui peut etre souligne ici et qui touche
davantage le preteur,
est celui de l'alea moral.
L'alea moral
intervient
ici
lorsque
les
emprunts
contractes
ne
sont
pas
rembourses a temps ou ne le sont pas du tout. Le risque s'accroit
avec les difficultes economiques actuelles dans la mesure Oll les
entrepreneurs pourraient s' abri ter derriere des faux-fuyants tels
que le decalage dans la perception de leur revenu. 11s pourraient
de la meme maniere invoquer les retards dans le paiement des
salaires
de
leurs
clients,
meme
lorsque
ces
retards
ne
les
affectent
pas,
pour
justifier
leur
defaillance.
Les
mois
difficiles
ou
les
nombreux
mois
d' arrieres
de
salaires
que
connait la fonction publique et beaucoup d'entreprises publiques
ou
privees
sont
autant
d'arguments
pour
se
derober
a ses
engagements
ou
retarder
autant
que
possible
le
moment
du
desengagement.
Toutes ces quatre sources de financement des PME informelles
peuvent etre considerees comme des methodes de finance directe
par opposition a la finance indirecte qui fait intervenir des
intermediaires financiers.
Les res sources propres sont quasi-
insignifiantes, le credit fournisseur est contraignant par le non
cumul de facteurs qu'il impose tandis que les avances clients
semblent etre une solution mais dont l'impact est limite par les
risques de delais longs qui les accompagnent.
La finance directe dans les PME informelles presente ainsi de
nombreuses carences qui ne facilitent pas la couverture du gap
J. Mairesse, J. L. Re~ffers 6d1tours, Par~s 1990, pp 717-751
On lira eqalement A ce sujet P.
RAIMBOURG, Asymlltr~e
d'informa~on,
Thearie de l'agence et gestion de l'entroprise,
in Rncycl~e de ges~on, direction P. Joffre et
Y. Simon, Rdit Rconamica, Paris 1989 pp 181-192.

entre les
flux physiques
et
les
flux
de
liquidites.
Elle ne
suffit donc pas pour assurer une activite reguliere et un revenu
permanent de maniere a maximiser le profit du producteur.
1. 2.3
Le Recours a la Tontine Financiere
Les difficultes a couvrir a temps leurs besoins financiers
par
la
seule
finance
directe
a
necessi te
l' organisation des
entrepreneurs du secteur informel aut our de tontines financieres.
Les mecanismes de fonctionnement de ce type de tontines ont ete
deja analyses dans notre chapitre 11. Nous rappelons que ces
tontines se decouvrent aujourd'hui comme de veritables marches
financiers Oll circule et est distribuee
la
liquidite creee a
l'initiative des participants a la tontine mais aussi celle creee
par
les
banques
qui
interviennent dans
le
systeme
comme des
preteurs ultimes. L'interet de ce type de financement est qu'il
a
de
multiples
implications
sur
l' organisation
et
le
fonctionnement des PME informelles.
La tontine financiere est
ainsi l'un des facteurs du mouvement observe dans
le sens du
regroupement financier des unites de production. Ce regroupement
se realise de plus en plus a l'interieur de chaque activite en
permettant une organisation interne et externe qui accroit la
capacite de financement et de gestion de chacune des entreprises
parties prenantes au systeme.Nous verrons dans les paragraphes
suivants comment cette organisation contribue a la minimisation
du coQt du financement de ces PME.
Les interviews' avec nos trois techniciens nous ont permis
de nous
rendre
compte
de
la place de
ces
ton tines
dans
leur
activite42 •
Celles-ci
financent
environ
50
%
de
leurs
investissements
et
de
leur
exploitation.
Sur
ce
point
du
financement par la tontine, les resultats de l'enquete realisee
sur le financement des entreprises des Bamilekes de Douala 43
42
-
Nous y reviendrons dans la suite de l'analyse.
U
_
G. A. BRENNER, R.
FOUDA,
J. M.
TOULOUSE Le F.1nancement de"
entrepr.1"es des Bam.1~6Itas de Doua1a .1n Actua1.1ta Sc.1ent.1f.1que,
~ 'Espr.1t d' Bntrepr.1se Aspects Manager.1aux dan" ~e Mende
Francophone, Journ6es Sc.1entif.1ques du Mseau de ~'UREF,
Ottawa 1~-20 "eptembre l~~l, D.1rect.1on B. PONSON,
J. L.
SCHAAN, pp 257-269.

- 461 -
semblent aller dans le meme sens que notre propre observation.
Cette
enquete
porte
exclusivement
sur
des
entrepreneurs
originaires de l'Ouest du Cameroun et installes a Douala dans le
cadre de leur activite productive. Le choix de cette population
est justifie par le dynamisme inconteste de ses elements. Cette
etude
estime
a 40
% les
habitants
de
la
ville
de
Douala
appartenant a ce groupe ethnique. La tontine est fortement ancree
dans la pratique d'epargne et de credit chez ces populations.
L'enquete est menee durant le premier semestre de l'annee 1989.
Les resultats auxquels l'enquete a abouti sur le point precis de
la place de la tontine dans le financement de ces entreprises
sont les suivants :
42 % n'ont pas recours a la tontine;
40 % empruntent a la tontine entre 0 et 30 % de leurs
res sources ;
18 % y empruntent entre 30 et 100 % de leurs ressources.
L'enquete a egalement permis d'etablir que plus on a recours
a la tontine moins on emprunte a la banque et inversement.
Cette
enquete
porte
sur
un
echantillon
de
90
entrepreneurs
installes a Douala dont 73 % ont un niveau de scolarite au moins
egal au niveau secondaire. Mais l'enquete ne distingue pas les
entrepreneurs du secteur informel de ceux du secteur moderne.
Toutefois l'observation selon laquelle le recours a la tontine
evolue en sens inverse du recours a la banque nous permet de
penser que des entrepreneurs du secteur informel font partie de
l'echantillon. Ce qui nous permet egalement de repondre a l'une
des
interrogations
de
I' enquete
sur
la
signification
de
la
tendance
de
ces
deux
sources
de
financement
a s'exclure
mutuellement dans la structure de financement des entreprises.
En effet la fermeture de l'acces des PME informelles aux credits
bancaires pourrait etre l'une des explications a ce phenomene
observe. Ces entreprises ne pouvant pas beneficier des concours
bancaires se refugient aupres des tontines essayant d'yobtenir
l'essentiel de leurs financements. Ce comportement participe d'un
effort de desserrement de la contrainte financiere de ces unites
de production, la tontine representant donc a ce titre une source
incontournable
de
financement
dont
nous
allons
analyser
les
mecanismes et les implications.

- 462-
$ 2
Mecanismes et Caracteristiques Propres du
Financement des PME Infonmelles
La
fermeture
de
certaines
sources
de
financement,
en
l'occurrence la non eligibilite des PME informelles aux concours
bancaires constitue deja une limite "naturelle" aux choix d'une
structure
donnee
du
capi tal.
Elle
fixe
dej a
de
ce
fai tune
contrainte
aux
di fferentes
possibili tes
de
real isation d' une
structure
optimale
du
capi tal
et
par
voie
de
consequence
a
l'investissement dans les PME informelles.
Des lors celles-ci
doi vent
rechercher
ailleurs
des
res sources
adaptees
a
leurs
besoins.
Nous verrons alors sur ce point les
implications en
termes de cout et d'efforts d'organisation interne et externe.
2.1
Les Limites de la Finance Directe
Nous
avons vu· que
l' un des modes
de
financement
auquel
l'entreprise a recours dans le cadre de la finance directe est
le
prefinancement
des
travaux
par
les
beneficiaires
des
prestations. Certes, il s'agit d'une forme de financement directe
que
l' on
retrouve meme
dans
les
entreprises modernes.
Cette
formule est meme frequemment utilisee dans les cas de marches
publics ou prives. Mais le role que ces res sources y jouent n'est
pas le meme que dans les PME informelles. Dans un cas elles sont
un adjuvant aux credits bancaires ou a d'autres financements et
sont generalement limitees a une avance de demarrage de 30 % en
moyenne. Dans l'autre cas elles tendent a devenir la res source
principale. C'est tout au moins ce que nous revele l'observation
des trois entreprises que nous etudions.
Or, ces entreprises n'ont pas que des soucis de financement
des commandes si bien que l'un des problemes majeurs que pose ce
mode de financement pour les PME informelles est qu'il ne couvre
pas
1 'ensemble
de
leurs
besoins
d'exploitation
en
liant
l'activite
aux
seules
possibilites
de
financement
de
la
clientele. Et, ces possibilites financieres sont limitees non pas
par la volonte d'endettement des agents economiques mais pour le
montant du revenu disponible, par les variations de celui-ci et
par les facilites de credits que les menages peuvent obtenir

- 463-
aupres des banques. Dans la mesure ou la capacite d'endettement
de ces agents economiques aupres du systeme bancaire depend elle-
meme
de
leur
revenu,
ce
dernier
determine
par
consequent
l'ensemble
des
moyens
de
financement
de
l'exploitation
des
entreprises.
Cette
source
de
financement
semble
plut6t
contraignante aussi bien dans les montants qu'elle offre que dans
le temps necessaire pour la mise a disposition des fonds. Les
res sources qu'elle permet de degager ont donc un cout en termes
de delais mais aussi de capacite de financement des besoins reels
exprimes dans le cadre de la finance directe.
En
fai t,
le seul
financement
des
commandes
ne
peut pas
assurer aux entreprises une activite reguliere.
Sans doute,
la production sur commande semble-t-elle plus
accommodante
parce
que
permettant
d' attenuer
les
be so ins
de
financement.
Mais,
elle ne
saurai t
etre
la
seule
forinule
de
production, le seul.mode de fonctionnement. Ces entreprises ont
aussi besoin de constituer des stocks de produits finis pour
pouvoir faire face immediatement a la demande sur le marche. Si
le probleme ne se pose pas pour certaines PME telles que celles
du batiment ou les garages automobiles, on ne peut pas en dire
autant
pour
d' autres
dont
les
menuiseries,
les
ateliers
de
couture etc ... Bon nombre de ces unites sont meme parfois amenees
a gerer un certain niveau de stocks de maniere a s'assurer une
activite
plus
reguliere.
Du
point
de
vue
de
la
production,
l'entreprise dispose
ainsi
d'une
gamme
variee
de produits
a
proposer au choix des clients faisant par la meme occasion une
sorte de publicite de
ses
produits
et de
la
qualite
de
son
travail. Du point de vue de la consommation l'entreprise peut par
ce biais creer des besoins et donc des occasions de rentrees de
tresorerie sous forme de recettes.
La technique du prefinancement .ne peut manifestement pas
repondre a cette derniere preoccupation des entrepreneurs du
secteur informel. L'une des raisons de ses faiblesses est qu'elle
n'a pas pu declencher des mecanismes favorables a une creation
monetaire plus active et a une distribution de credits qui tienne
compte
des
besoins
de
financement
des
entreprises
exprimes
indirectement par leurs clients.

- 464 -
En effet, comme on l'a dit les relations qui se creent avec
le systeme bancaire sont essentiellement indirectes. L'une des
consequences en est que les concours accordes dans ce cadre aux
menages,
clients des PME,
ne tiennent pas compte des besoins
formules par les entreprises, les possibilites de credits etant
plut6t
fonction
de
la
capacite
d'endettement
des
menages
concer~es. De ce point de vue,
la participation des PME a la
creation monetaire demeure peu satisfaisante, celle-ci s' appuyant
non sur le volume de l'activite des unites de production mais sur
des variables exogenes difficiles a contr6ler surtout dans un
contexte de crise economique. Ce mode de participation des PME
informelles
camerounaises a la creation monetaire nous donne
l'occasion
de
restituer
dans
son
cadre
theorique
cette
distribution des credits dont elles sont beneficiaires en dernier
ressort.
En effet nous avons montre dans
le chapi tre
I I
que
I' offre de monnaie
au Cameroun s' inscri t
dans
la
logique du
multiplicateur
de
credit.
Ici,
les
conditions
d'offre
sont
privilegiees
par
rapport
a celles de la demande. Ainsi, la
demande de credits bancaires n'est satisfaite que dans la limite
de la capacite d'offre de credits et de creation de monnaie par
les banques de second rang.
Cette capacite est elle-meme fonction de la situation de
leur liquidite et de leur comportement de marge bancaire. A cause
donc de cette contrainte de liquidite des banques,
les clients
et par ricochet les entreprises concernees seront plus ou moins
rationnes
sur
le
marche
du
credit,
rationnement
qui
va
s'exacerber avec la crise de liquidite de certaines des banques
encore en activite ou meme par l'extreme prudence dans l'octroi
de nouveaux credits.
La nature des relations avec le systeme bancaire n'est donc
pas favorable a la realisation d'un schema de financement apte
a assurer des ressources suffisantes en qualite et en quantite.
C'est donc mues par les limites de ce type de res sources et dans
une
perspective
de
minimisation
du
cout
du
capital
et
de
desserrement de la contrainte financiere que les PME informelles
camerounaises prospecteront d'autres sources de financement. La
veritable alternative ici reste les circuits informels d'epargne

- 465··
et de credit dont les tontines sont une composante essentielle.
L'organisation
interne
et
externe
qu'impose
ce
systeme
de
financement permettra de justifier la place que nous lui faisons
dans
la
recherche
des
possibili tes
de
reduction
du
cout
du
capital dans les PME informelles.
NQus verrons alors comment les res sources y sont mobilisees
et distribuees entre les PME. Nous insisterons a cette occasion
sur l'effet de synergie du groupe que constitue la tontine sur
l' acti vi te de production des tontiniers. Nous analyserons ensui te
l'impact de ce mode de financement sur l'organisation interne des
PME informelles. Nous apprecierons enfin l'action conjuguee des
structures externes et internes alors creees sur la reduction des
couts de gestion et du capital et partant, sur l'amelioration de
la valeur de l'entreprise.
2.2
Tontines Financieres et Gestion des Activites
Informelles
Analysant la PME, nous avons montre que celle-ci etait une
entreprise a l'echelle humaine dont la structure se definissait
generalement a l'interieur de la famille.
Cette dimension que
s'est imposee la PME a eu pour principale consequence de limiter
les possibilites de financement direct de la production aux seuls
moyens financiers de l'individu ou de la famille. Or, l'une des
caracteristiques de ces res sources individuelles ou familiales
est que celles-ci sont faibles et insuffisantes en comparaison
des besoins d'une activite productive.
Pour les PME du secteur informel, cette carence de financements
propres n'a pas pu etre palliee par des ressources monetaires ou
financieres du systeme financier officiel dont nous avons dit
qu'il
s'est
purement
et
simplement
ferme
a ce secteur de
l'economie. La precarite financiere qui en decoule est pour ces
entreprises un probleme preoccupant dont la solution, a l'heure
actuelle
est
a rechercher en dehors des circui ts financiers
conventionnels. De ce point de vue, l'evolution des tontines dans
le sens d'une fonction d'intermediation financiere en fait un
element central du pays age financier des PME du secteur informel.
Nous avons dans notre chapitre 11 fait la distinction entre deux

- 466-
types
de
tontines,
les
tontines mutual i stes
et
les
tontines
financieres. Originellement,
la tontine a ete consideree cornrne
un lieu d'entraide et de solidarite, favorisant alors la creation
puis
l'habitude
d'un
comportement
d'epargne
collective.
Aujourd'hui,
si
cette
habitude
s'est
enracinee
parmi
les
populations
et
toutes
les
categories
de
revenu,
le
centre
d'interet
de
cette
contrainte
d' epargne
s' est
manifestement
deplace.
Et,
au
motif
social
et
mutualiste
se
substituent
des
preoccupations financieres en tant que determinants des decisions
des tontiniers. Cette evolution semble en grande partie liee aux
carences que revele le systeme financier officiel se traduisant
par
l'incapacite
a suivre l'appareil
economique
dans
les
mutations profondes
que
lui
impose un contexte de
cri se .
La
tontine financiere apparait alors cornrne un effort d'adaptation
a un besoin crucial de financement dans les parties de l'economie
ou
les
structures
modernes
de
financement
sont
absentes
ou
defaillantes. La tontine est ainsi sollicitee pour remplir une
double fonction financiere .
. Dans un premier temps elle est un lieu de mobilisation et
de distribution de
res sources monetaires et
financieres.
Ces
ressources se constituent a partir de la monnaie creee par le
systeme bancaire. La liquidite bancaire y arrive alors de fa~on
indirecte par le biais d'agents economiques faisant
jouer aux
banques le role de preteur en dernier res sort 44. Ce mecanisme de
drainage de la monnaie vers la tontine est enclenche a l'occasion
d'un decouvert ou d'une autre facilite en tresorerie qui permet
a un tontinier de couvrir sa quote part dans sa tontine. 11 peut
s'agir aussi d'un cheque depose par un tontinier pour garantir
le remboursement du lot qui
lui a ete attribue.
Les tontines
participent alors de cette maniere a la creation monetaire. Mais,
une autre part des
res sources de
la tontine est generee par
l'epargne des agents economiques qui affectent une partie de leur
revenu
a l'accroissement des moyens de financement de la
.. - OD 1.ira pour p1.U8 de d6tai1.8 8ur ce m8canilllll9 1.'artic1.e
de B. BUOLO BBB, Le 8Y8tillme de8 tontine8 : Liquidit6,
Interm6diatioD, Comportem&nt d'eparqne, Revue d'Zeonomie
Po1.itique N° 4, 1989 pp 616-638.

·467 -
collectivite a laquelle ils appartiennent. La tontine assure donc
a ce stade un role d~"intermediaire pour ajuster les excedents et
les deficits de financement dans le sens d'une optimalisation des
choix des agents economiques. Ceux-ci selon les besoins qu'ils
expriment et les arbitrages qu'i1s font choisissent alors de se
posi tionner
a un moment donne comme credi teur net ou comme
debiteur net du systeme. L'on a donc pu a ce niveau apprecier la
qualite et la pertinence des mecanismes de financement crees par
les tontines financieres pour exercer pleinement leur fonction
d'intermediation.
11
faut
rappeler
que
dans
les
tontines
financieres
l' attribution
du
credit,
ne
suit
pas
un ordre
chronologique
preetabli. Seul le niveau des encheres permet de departager les
emprunteurs
potentiels,
chacun
exprimant
a
travers
sa
participation
aux
encheres
l'importance
de
ses
besoins
de
financement.
Evidemment,
tous
les
encherisseurs
n'ont
pas
toujours
comme
objectif d'acquerir
le
lot
du
jour.
On
a
pu
observer une categorie de tontiniers qui montent les encheres
uniquement
dans
l'espoir
d'ameliorer
le
rendement
de
leur
placement.
Nous
reviendrons
sur
l'implication
de
leur
comportement specula ti f surtout pour souligner la speci fici te des
mecanismes de fonctionnement de la tontine et leur aptitude a
desserrer les contraintes du milieu.
L'importance
de
l'intermediation
se
traduit
donc
a
differents
ni veaux.
Elle
apparai t
dans
le
montant
des
financements,
dans le cout du capital de maniere a assurer une
meilleure adequation des res sources en qualite et en quantite aux
besoins precis qu' expriment
les tontiniers en general et les
entrepreneurs
des
PME
de
chaque
branche
professionnelle
en
particulier.
En effet,
la duree du cycle dans les tontines est etudiee
en
fonction
de
la
nature
des
financements
que
celles-ci
voudraient offrir a leurs membres. Le cycle peut donc s'allonger
bien
au-dela
de
l'annee
pour
tenir
compte
des
besoins
d'investissement a moyen et long terme. La duree du cycle est
determinee
soi t
par
le
nombre
de
participants
soi t
par
la
periodicite des rencontres soit encore par la conjugaison de ces

- 468·
deux variables. On peut donc selon les cas observer des cycles
de
5
ans
et
plus
pour
des
tontines
regroupant
des
hommes
d'affaires et des dirigeants et proprietaires d'entreprises. Une
etude
de
cas
sur
les
tontines
camerounaises
a
porte
sur
l'operation de deux exemples de tontines dont la tontine MEKI
M'OYEM45 • Celle-ci regroupe en son sein cinquante membres to us
chefs d' entreprises ou hommes
d' affaires,
la periodici te des
rencontres etant le mois. La duree theorique d'un cycle est donc
de cinquante mois fixant a peu pres a cette duree le terme des
credits octroyes aux premiers beneficiaires. La tontine etudiee
ici se veut representative de l'ensemble des tontines observees
dans trois des dix provinces du Cameroun.
Cette enquete a couvert quatre villes, Yaounde, Akonolinga,
Douala, Bafoussam et une vingtaine de villages appartenant to us
a ces provinces. L'objectif vise par l'enquete etait entre autres
d'apprecier la capacite des tontines a repondre aux attentes de
leurs participants et l'importance des fonds qui y circulent. Le
choix porte sur deux tontines seulement n'a pas ete justifie et
pose
nous
semble-t - i 1 des
problemes
de
representa ti vi te.
En
outre, la tontine est peu prolixe sur son fonctionnement mais sur
ce point les informations 6btenues pourraient etre considerees
comme fiables,
les enqueteurs ayant ete admis a assister a la
tenue d'assemblees.
D'autre part, l'enquete sur la tontine MEKI M'OYEM n'informe
ni sur la localisation ni sur les secteurs d'activite ou branches
professionnelles
auxquels
appartiennent
les
entrepreneurs
et
hommes d'affaires de la tontine observee. Elle ne dit pas non
plus s'il s'agit d'un groupe homogene ou non quant a ses revenus,
a ses activites et projets. Elle a cependant permis de confirmer
l'existence d'un cycle long dequatre ans et plus, une duree dont
des observateurs peu avertis n'avaient pas conscience.
En plus
de
la duree
du
cycle,
la
tontine
a
pour autre
-
B. BiKOLO-&B&, R. BlLONGO, Comportements des gains et structure
des taux d'inter3t dans les tontines: etude de quelques cas in
Actualite Scientifique, l ' Entrepreneuriat en Afrique II'rancophone :
CUlture, lI'inancement et DOveloppement, Journees Scientifiques
du res eau th6ma.tique de recherche "I!'inancement de l ' entrepreneuriat
et mobilisation de l' ~arqne", de Casablanca 16-17 fevrier 19B9.
Direction G. Henault, R. M. Rabet Paris 1990, pp 107-113.

- 469 -
vocation
d'offrir
un
montant
de
ressources
confortable
par
rapport a la nature des activites. Le nornbre des participants et
les periodes choisies doivent alors contribuer a la formation et
a la collecte des fonds requis. Dans l'exemple de la tontine Meki
M'Oyem,
les versements sont mensuels et d'un montant de 50 000
francs CFA. Le gros lot s'etablit de ce fait a 2 500 000 francs.
Cette sornrne est done assez importante au regard de celle que
pourrai t
demander un entrepreneur d' une PME,
surtout dans le
cadre
d'une
premiere
installation.
Ainsi,
par
rapport
aux
exemples
que
nous
etudions,
celui
de
l'atelier
de
couture
Bibiane, du Garage Yundzo, de l'entreprise de batiment Andong,
ce montant est une sornrne appreciable. Nous avons pu verifier que
chacun
de
ces
entrepreneurs
est
mernbre
d' une
tontine.
Nous
n'avons malheureusement pas pu effectuer des
enquetes
sur le
fonctionnement de leurs tontines respectives. Les informations
que nous avons recueillies nous ont ete fournies par ces trois
chefs d'entreprises eux-memes. Nous avons pu nous rendre compte
que
Andong
Joseph. et
Yundzo Andre
sont
mernbres
de
tontines
rassernblant des techniciens de branches d'activites diverses.
Aucun d' eux n' appartient a une tontine consti tuee d' entrepreneurs
d'une seule branche d'activite. Chacune de leur tontine regroupe
une trentaine de mernbres et le montant des financements excede
rarement la sornrne de 500 000 francs CFA, tandis que le terme des
credits est de trente mois au plus.
Des
differents
entretiens
que
nous
avons
eus
avec
les
proprietaires de PME,
il ressort globalement que la tontine a
permis de contribuer au moins au maintien de l'activite. C'est
ainsi que notre mecanicien grace a sa tontine a pu acquerir un
vehicule d'occasion pour remplacer son ancienne voiture dont les
pannes
con tinuelles
cornrnen<;aient
a peser enormement sur son
budget. Ainsi a cause des charges d'entretien trop lourdes que
cette derniere lui imposait et qu'il arrivait de moins en moins
a couvrir, il a dD. la revendre a la modique sornrne de 200 000
francs CFA. Mais cet apport personnel etait insuffisant pour lui
permettre de
trouver
un
vehicule
en bon
eta t
de
marche.
Ne
pouvant pas beneficier d'un credit bancaire, il a dD. s'endetter
aupres de sa tontine.
11 obtient done un montant de
500 000
francs qui porte a 700 000 francs CFA son enveloppe globale. 11

- 470 -
peut done
sur
le marche du vehicule d' occasion s' offrir une
voiture Peugeot 305 de plus de 8 ans qu'il remet tres vite en
etat de fonctionnement alors qu'il peut disposer d'un delai de
28 mois pour rembourser son credit.
Cet investissement peut paraitre insignifiant. Mais, pour
ce
mecanicien
un
vehicule
est
un
instrument
de
travail
indispensable surtout pour des interventions urgentes quelle que
soi t
la localisation du client.
Il lui permet de se deplacer
rapidement,
a tout moment pour se rendre au domicile de ses
clients
et
au
lieu ou
la
panne
est
survenue.
Et,
lorsqu' un
vehicule ne peut pas
etre deplace
autrement,
sa
voi ture
lui
permet de le tracter a moindre cout. On peut done penser qu'un
tel investissement pour une PME peut enormement contribuer au
developpement de
ses
acti vi tes.
Et dans
le cas
Yundzo Andre
aucune des formes de financement precedentes n'aurait pu dans un
delai de deux mois lui assurer un concours de ce montant sur une
duree qui lui laisse le temps de reconstituer sa tresorerie.
Les relations·entre le cycle de la tontine d'une part et
celui
de
l' investissement
et
de
la
production
d' autre
part
semblent egalement satisfaisantes dans le cas de l'entreprise
Andong Joseph. Les conditions de financement dans sa tontine sont
proches
de
celles
du
cas
Yundzo
Andre.
Seulement
notre
entrepreneur du batiment hesite a s'engager actuellement a cause
des
difficultes
que
connait
actuellement
le
batiment
et
l' immobilier
et
qui
ont
freine
les
investissements
dans
ce
secteur.
Celui-ci
apparait
effectivement
comme
l'un
des
plus
sinistres
depuis
le
debut
de
la
crise
economique
et
les
programmes de construction de logements sociaux de la Societe
Immobiliere
du
Cameroun,
la
SIC.
Cette
societe
a
produit
plusieurs milliers de logements dans plusieurs grandes metropoles
du
pays
et
offert
aux
populations
la
possibili te
d' acceder
immediatement a la propriete immobiliere ou a la location simple.
En outre la mise en liquidation des banques et la creation de la
Societe
de
Recouvrement
des
Creances
du
Cameroun,
SRC
est
favorable a la realisation des hypotheques garantissant certaines
creances.
Il
existe
egalement
par
ce
biais
des
occasions

- 471 -
d'acquisition de logements et immeubles deja batis.
Ces deux premiers cas nous fournissent des exemples de cycle
de tontine d'environ 30 mois pour un montant de credit permettant
des
realisations
importantes
pour
assurer
la
regularite
de
l'exploitation.
Le dernier cas, celui de la tontine denommee Les "Biches du
MBAM" et dont fait partie Bibiane Angele nous semble encore plus
interessant. 11 s'agit d'une tontine de femmes assez heterogene
quant a la qualite de ses membres. On y retrouve aussi bien des
chefs d'entreprises de differentes branches d'activites que des
salariees
du
secteur
public
et
prive.
Elle
est
nee
d'une
association ethnique rassemblant des dames originaires du MBAM
ou mariees a des personnes appartenant a ce departement de la
Province du Centre.
Cette tontine est au moins quatre fois plus grande que les
deux premieres et comprend plus de cent membres. Les sommes qui
y sont mobilisees peuvent atteindre la somme de 10 millions de
francs
CFA
pour
le
gros
lot.
Celui-ci
peut
egalement
etre
fractionne en peti ts lots.
La duree du cycle,
compte tenu du
nombre
des
membres
excede
cinq
ans.
Elle
offre
donc
des
conditions de delais et de montant plus importantes que dans les
exemples precedents, permettant aux participants d'obtenir des
res sources pour leur exploitation et pour des investissements
dans d'autres projets comme l'acquisition d'un logement. Bibiane
Angele a pu ainsi renouveler une partie de ces equipements puis
contribuer
pour
une
large
part
au
financement
de
la
fete
organisee a l'occasion de son mariage religieux et au reglement
de l'apport personnel exige pour l'achat d'un logement SIC. Le
terme
du
credit
est
tel
qu'il
s'accommode
aisement
d'un
investissement
dans
I' immobilier
creant
des
condi tions
d' une
activite plus sereine exercee dans sa propre maison.
L' analyse de ces trois cas nous a permis d' apprecier la
capacite
de
la
tontine
a
ajuster
son
cycle
a
celui
de
l'investissement de maniere a assurer au tontinier des res sources
adequates tout au moins dans leur montant et dans leur terme.

- 472 -
Mais il ne s'agit pas la des seules preoccupations des agents
economiques qui s'interessent
au cout du capital a emprunter
surtout lorsque ceux-ci sont des entrepreneurs et qu'ils font des
arbitrages
entre
le
rendement
d'un
placement
et
le
profit
escompte d' un
investissement producti f.
On est ainsi
amene a
analyser
un deuxieme aspect
de
la
fonction
financiere
de
la
tontine
a travers laquelle celle-ci intervient en tant que
regulateur des tensions liees a la repression financiere dans les
economies
en
developpement
46
L' importance
du
role
du
taux
d'interet dans la resorption de ces tensions a ete deja soulignee
dans notre chapitre 11 a l'occasion du debat sur la repression
financiere telle que decrite par Mc. K1NNON et G. Shaw.
Dans le cas de la tontine comme dans celui du systeme financier
officiel analyse dans ce chapitre,
la prise en compte du niveau
du taux d'interet est incontournable.
S'agissant precisement de la tontine financiere, les agents
economiques font des anticipations de gains et des analyses en
terme de cout d'opportunite qui determinent leur comportement de
creancier net ou d'emprunteurs net. 11s sont donc conscients du
niveau des taux debiteurs et crediteurs des res sources mobilise~s
a l'interieur de la tontine.
2.2.1
L'Importance du cout du capital
Le cout du capital est donc un element de leur decision de
realisation du financement de leur choix. En effet,
le recours
a des ressources externes ne saurait etre fortuit etant donne
qu'il est subordonne a des exigences qui se traduisent dans des
conditions
d'acces
non
identiques
et
meme
parfois
discriminatoires ; condition de taux, de circuits
d ' in forma t ion ...
Le taux d'interet represente en effet une forme de barriere
a
l'acces
au
financement
externe.
Les
analyses
sur
les
-
Une contribution importante au dAbat sur la repression
financiere et le rOle de la tontine dans la resolution des
probl8mes qu' elle souleve a ete apportee par C. &BOUE,
Les Kffets Macro economiques de la Repression financiere
<Sans les PKD op ci t .

- 473 -
determinants
des
taux
d' interE~ts avec
des
auteurs
tels
que
Fisher, Wicksell, Keynes, Mc Kinnon, Shaw montrent que les agents
economiques
peuvent
a
l' interieur
de
marches
ou de
systemes
financiers operer des choix qui modifient la "profitabilite" des
investissements. On pe ut egalement relever dans cette mouvance
l'apport de la theorie des fonds pretables de D. Robertson et B.
OHL1N
ainsi
que
toutes
les
analyses
qui
ont
permis
de
l'ameliorer 47 • L'apport de cette theorie s'inscrit dans une vue
plus
large
du
role
de
la
monnaie
et
de
l'interet
dans
le
financement de l'economie,
faisant jouer un role plus actif au
taux d'interet. L'interet cesse d'etre une variable
indirecte
comme dans le cas Keynesien. 11 est etroitement lie aux besoins
de fonds pour les investissements, c'est a dire a la demande plus
ou moins forte de credits.
Ces differentes analyses du role du taux d'interet dans le
financement de l' economie nous permettent d' appuyer les cr i tiques
adressees a la these de Modigliani-Miller. Elles confirment le
point de vue selon lequel le cout du capital est un facteur cle
dans le choix d'une structure financiere.
11 s'agit la d'une realite qui est quotidiennement observee
dans l'organisation des tontines et la recherche de solution a
tous les problemes qui tendent a augmenter le cout des ressources
qui y sont mobilisees. Nous avons deja evoque l'existence d'une
classe de tontiniers qui speculent a la hausse des encheres pour
accroitre leur gain financier. L'incidence de ce comportement de
rentier
est
qu'il
tend
a
aggraver
la
charge
financiere
a
supporter par
les
beneficiaires
de
l' ensemble
ou partie
des
cotisations. C'est donc pour decourager de telles initiatives que
les tontines mettent en place un systeme dissuasif de penalites
a l'encontre des speculations. Le taux d'interet qu'accepte alors
de payer l' emprunteur,
qui dans notre analyse est sur tout un
proprietaire d' une . PME informelle,
est donc moins expose aux
influences
d'encheres
agressives
de
simples
tontiniers
speculateurs.
n
_
On lira ;l ce sujet GURLEY et Sha.w, La. Monna.J.e da.ns une theorie
des a.ctifs financiers op cit.
On peut se reporter ~a1.......nt aux ana1ys".. de A. Cha!.neau.
Meca.n1sroes et Politique Mon6taire P UFo ge &d1t.
Paris 1994 pp 236-295.

··474 -
Les conclusions des etudes de cas relatives au comportement
de gains et a la structure des taux d'interets dans les tontines
camerounaises nous fournissent des enseignements impressionnants
sur le niveau des taux d'interet.
Le
taux debi teur maximum est de
3, 042
% pour
l' une des
tontines et de 8,59 % pour l'autre. Quant aux taux crediteurs les
plus eleves,
ils sont de 6,58 % et 7,87 % respectivement.
La
comparaison
des
taux
debi teurs
avec
ceux
pratiques
par
les
banques et qui sont de 16 % en moyenne permet de degager un net
avantage de 7 points et plus pour les agents a deficits ayant
recours a la tontine. Quant aux taux crediteurs ils sont voisins
de
celui
de
7,5
% qui
remunere
l'epargne
dans
le
systeme
bancaire.
Le mode de fonctionnement des tontines,
leur proximite et
leur
grande
sensibili te
aux
actions
et
reactions
des
agents
economiques
leur ont permis
de
s' adapter continuellement aux
exigences
de
l'activite
economique.
Cette
enorme
capacite
d'adaptation
est
revelatrice
d'une
grande
souplesse
des
structures. d' un
systeme
specialement
con<;u
et
cree
pour
le
contexte precis des economies ou il se developpe.
Et,
aujourd'hui,
le role de la tontine financiere s'etend
bien au dela de ses fonctions financieres d'intermediation et de
regulation des tensions financieres de ses adherents. En effet,
on ne saurait faire l'economie de la dimension encore recente
qu'elle est en train de developper et qui en fait une agence
d'informations
economiques
et
strategiques.
Cette
troisieme
fonction
nous
apparait
comme
une
nouvelle
technique
d' optimisation
des
choix
des
agents
economiques
et
de
minimisation de leurs couts de gestion.
2.2.2
La Gestion du Risque dans la Tontine Financiere
Sur le plan de l' analyse,
l' une des voies ouvertes a la
minimisation du cout du capital se trouve dans les etudes de
coalition et de formation des alliances. C'est ainsi que la prise
en compte des strategies des agents a ete engagee par les travaux
de Von Neumann et Morgenstern. Cette approche en terme de systeme
et
d'organisation
permet
de
mieux
analyser
les
faits
de
communication.

- 475 -
D'autres
auteurs
conune
J.
Stiglitz,
A.
Kraus,
R.
Litzenberger
et
J.
Van
Horne
ont
prolonge
cette
remise
en
question de l'information parfaite des agents economiques. lls
se sont appesantis sur l'existence de couts de transaction et des
situations de rationnement de capital sur le marche, preuve d'une
distribution asymetrique de
l' information49 •
Le cri tere de
la
flexibilite
evoque
par
Modigliani-Miller
pour
justifier
la
prudence des entreprises par rapport a l' endettement ne nous
semble pas verifie dans ce cas.
D'ailleurs, ·il
l'est
encore moins
si
l'on se
refere
au
comportement
des
tontiniers
entrepreneurs
pour
lesquels
la
permanence de l'activite et celle du revenu qu'elle implique sont
des composantes importantes de leur choix.
Ceux-ci s'obligent
constanunent a la recherche de capitaux correspondant a tout point
de vue a leurs besoins reels. Dans cette perspective, ils se sont
forges
des possibili tes
partic~lieres de
financement
qui ont
permis de mettre e~ evidence le role privilegie de la tontine
dont le champ d'action couvre plus d'un domaine de la production
dans les PME informelles dont nous analysons les problemes de
financement. L'un des mecanismes pour accroitre l'efficacite de
la tontine a ete le regroupement de techniciens et producteurs
d'un meme secteur professionnel.
La
tontine
financiere
dans
sa
formule
avec
encheres
a
privilegie le gain financier conune critere d'attribution du lot
du jour s'analysant comme un veritable marche des capitaux Oll
s'effectuent emprunts ou placements selon les anticipations des
participants a la tontine.
La quali te de
l'information s' est
ainsi averee primordiale pour le choix d'un comportement optimal
permettant
de
decider
de
l'opportunite
de
telle
ou
telle
operation. Cette nouvelle orientation de la tontine a ete propice
a une structuration de plus en plus rigoureuse et a une
organisation
de
plus
en
plus
formalisee
qui
garantisse
la
fluidi te
et
la
quali te
de
1 ' information a l'interieur de la
tontine.
C'est
aussi
dans
ce
meme
souci
que
l'on
a
tolere
-
On lira. pour plus da dllta.1ls G. HIRIOOYEN et
J. P. JOIlARD, I!'inaneement da l'Kntreprise op eit.

- 476 -
l'agrandissement de la tontine par le recrutement de nouveaux
membres essentiellement ceux dont la position dans la sphere des
decisions
permet
prioritairement
l'acces
a des informations
determinantes pour des decisions economiques.
Cette ouverture
basee
sur
les
enj eux
economiques
est
bien evidemment
restee
prudente et a toujours repose sur la methode du parrainage pour
limiter les risques d'alea moral.
La
tontine
se
trouve
donc
au
centre
d'un
systeme
d'informations
economiques
et
financiere
apte
a fideliser a
rassurer et a minimiser le risque financier de ses membres. Une
gestion
efficiente
suppose
de
ce
fait
une
selection
et
une
distribution d'informations strategiques qui reduisent les couts
de transaction49 •
En effet, la forte penetration de la pratique de la tontine
parmi toutes les categories sociales et branches professionnelles
facilite
l' acces
a des sources d' informations economiques et
relatives aux opportunites d'investissement ou d'adjudication de
marches publics et prives.
Elles peuvent aussi porter sur les
modalites de paiement consenties sur ces marches, aux eventuels
antecedents avec les operateurs du secteur, a la sante financiere
des
employeurs
de
certains
clients.
Ces
differents
elements
permettent une selection de la clientele et la constitution d'un
portefeuille
d'operations
saines
et
interessantes.
Ce
role
d'agence que la tontine est amenee a jouer en fait une veritable
centra le d'informations dont les principaux beneficiaires sont
ses membres.
Cette asymetrie de l'information qui s'effectue a la faveur
de certains agents a deficit sur les marches financiers ne rend
pas compte des conclusions de l'analyse de Modigliani-Miller. Car
jusqu'ici la regularite de l'activite, la permanence du revenu,
puis le developpement de l'entreprise sont positivement correles
avec
la
minimisation
du
cout
du
capi tal.
Le
recours
cl
des
ressources
adequates
et
a des
informations
economiques
et
financieres bon marche favorise par une organisation rigoureuse
.. - Une premiere application de la theorie d'agence et de
la theorie des coQts de transaction A la tontine financiere
est due A B. BBKOLO-EBB. On lira A ce sUjet son article
intitule Contrats, Aqence et Tontines, GEREA,
Working Paper. mars 1993 23 pp

- 477-
et propre en est le support.
La tontine se revele sur ce plan
cornrne un systeme de reduction du cout du capital dans les PME
informelles.
Toutefois,
il
est
difficile
de
penser
que
ce
mode
de
fonctionnement des tontines financieres garantit automatiquement
la realisation de comportements optimaux.
A ce propos,
l'observation de l'evolution des encheres a
l'interieur de ces tontines a permis de deceler des fluctuations
importantes au courant d'un cycle.
11 a ainsi ete observe des
periodes durant
lesquelles
les encheres
sont plus elevees et
revelatrices de besoins pressants de fonds exprimes a la fois par
un grand nornbre de tontiniers. En meme temps on a pu faire le
constat de l'existence de periodes d'accalmies Oll les demandes
formulees sont negligeables,
maintenant les encheres a niveau
relativement bas par rapport a l'ensernble du cycle. L'analyse de
la structure du taux des encheres et partant des taux d'interets
correspondants dans "les
tontines ELF et MEKI M'OYEM confirme
cette variation des taux debiteurs. La structure de ces taux est
presentee dans les tableaux XVI et XVII suivants. L'evolution des
encheres dans ces deux tontines ELF et MEKI M'OYEM montre qu'a
partir d'un certain nornbre
de periodes les encheres baissent
puis tendent a se stabiliser au niveau le plus bas formant une
espece de "trappe au placement interne".
Pendant ce temps une
grande part de l'epargne collectee est maintenue dans la tontine
sous forme de placements internes.
Dans la tontine ELF ce phenomene s'observe a partir de la
onzieme
periode
Oll
le
montant
des
encheres
a
une
tendance
baissiere.
Dans l'autre tontine,
cette tendance est amorcee a
partir de la vingt troisieme periode. Elle s'inverse a la vingt
huitieme periode pour s'installer irreversiblement aux trente
unieme et
trente deuxiemes periodes.
Nous avons
explique ces
fluctuations intermediaires, celles de la periode 23 a la periode
27 puis de la periode 28 a la periode 30 par des anticipations
de
hausse
des
encheres
puis
de
baisse
pour
les
periodes
respectives concernees. Cette distribution dans le temps du taux
des encheres n'a pas encore fait l'objet d'une analyse formelle

- 478 -
et rigoureuse.
Cependant,
notre propre analyse nous a permis
d'essayer d'apporter quelques explications de ce mouvement des
taux d' inten~t.
Nous avons dej a di t
que l' affectation des
lots dans les
tontines financi~res se fait sur la base des ench~res ou mieux
du
taux
d'interet
qu'acceptent
de
payer
les
tontiniers
encherisseurs.
Nous
avons
egalement
evoque
un
certain
comportement speculatif qui peut avoir pour consequence d'elever
le ni veau de ce taux d' interet.
On peut ainsi penser que le
niveau
atteint
·par
le
taux
d'interet
lors
des
periodes
anterieures a eu pour consequence, si ce taux a ete juge eleve,
d'attenuer l'ardeur des encherisseurs ceux-ci anticipant des taux
de plus en plus eleves. Les anticipations de taux eleves donc de
profit faible peuvent conduire a eliminer de la course une grande
partie des demandeurs de capitaux qui de ce fait revisent a la
baisse leur programme d'investissement et de developpement de
l'activite.
On peut de la meme mani~re imaginer d'autres explications
a ce phenom~ne. 11 est ainsi possible qu'apr~s un certain nombre
de periodes, au fur et a mesure que l'on se rapproche de la fin
d'un cycle qu'il ne soit plus interessant d'emprunter. C'est le
cas lorsque le delai de recuperation des fonds a investir s'av~re
plus long que celui qui reste a courir avant la fin du cycle.
L'arbitrage peut donc s'effectuer notamment entre d'une part le
gain moyen des placements des tontiniers du groupe et le profit
que peut generer une operation d'investissement ou le rendement
d'un placement en dehors de la tontine d'autre part. Le tontinier
peut
alors
anticiper
un
gain
moyen
attendu
de
la
tontine
superieur
au
rendement
ou
a la
rentabilite
des
operations
effectuees
a l'exterieur
de
la
tontine
ou
la
qualite
de
l' information n' est ni
acquise ni mal trisable,
tout au moins
autant que dans la tontine.
On peut donc penser que cette repartition dans le temps des
deficits
et
des
excedents
de
financement
a
au
moins
une
explication. De meme que, la structure financi~re ne saurait etre
independante du cout du capital et de la valeur de l'entreprise.
Toutes ces variables nous semblent plutot etroitement liees les

- 479 -
unes aux autres et egalement aux esperances de profits ou de
rendements futurs.
Cette
analyse
nous
permet
de
poser
ici
le
probleme
de
l'importance du choix de la periode d'investissement en rapport
avec la nature meme de cet investissement. Ainsi,
lorsque les
encheres baissent les tontiniers peuvent envisager des activites
annexes qui ouvrent sur des possibilites de diversification ou
de placements plus rentables a l'interieur des circuits informels
ou
en
dehors
de
ceux-ci
pouvant
etablir
des
relations
plus
directes de l'informel vers le formel. Nous rappelons que sur ce
point,
nous avons jusqu'ici souligne l'existence de relations
encore mal definies entre le systeme des tontines et le systeme
bancaire a l'occasion de l'analyse des problemes de financement
des PME modernes. Nous n'avons alors pu etablir que des relations
indirectes.
Dans le mode de financement des PME informelles, on pourrait
imaginer des relatio~s plus directes telles que des anticipations
de maximisation des gains conduisent a effectuer des placements
directs aupres du systeme financier officiel. La comparaison des
taux d'interet crediteurs dans les deux systemes a la lumiere de
l' exemple
de
la
tontine
ELF
laisse
entrevoir
quelques
possibilites
de
marge
nette
en
faveur
de
tels
placements
bancaires. 11 s'agit bien sur ici d'un aspect que nous ne voulons
pas exagere pour la simple raison que dans l'autre exemple de
tontine c' est la situation inverse qui prevaut.
Nous voulons
toutefois
attirer
l'attention
sur
l'existence
d'autres
affectations rentables des ressources de la tontine. Et, dans la
tontine ELF,
le taux d'interet crediteur a ete estime a 6,58 %
tandis que le loyer de l'argent dans les banques est fixe
a 7,5 %. 11 apparait ici une difference d'environ un point qui
accroit meme modestement le gain lie a un tel placement.
Mais
la
relation
la
plus
connue
est
celle
d' un
reseau
etablissant des liens indirects et les mouvements de fonds ayant
tendance a s'effectuer de la banque vers la tontine.
De maniere empirique, on a pu etablir que le prefinancement
des avances consenties a des menages tontiniers renvoient aux

- 180 -
mecanismes mis en oeuvre, Ceteris Paribus, dans les concours que
la
Banque
Centrale
octroie
aux
banques
de
second
rang.
Ces
dernieres peuvent alors jouer vis a vis des tontines le role que
joue la Banque Primaire a leur egard. Les tontines dans cette
optique apparaissent comme des "banques de troisieme rang".
L'interet des circuits informels de financement par rapport
a l' acti vi te des banques est encore mieux per<;u au fur et a
mesure d'une structuration plus rigoureuse de ceux-ci et d'une
formalisation
plus
nette
de
leur
organisation.
C'est
ce
que
revelent des enquetes recentes sur les tontines
(GEREA,
1989,
1990). Les regroupements de travailleurs ou d'operateurs d'une
meme
branche
professionnelle
sont
propices
a la creation de
structures de concertations. Celles-ci semblent avoir servi de
point d'appui pour la constitution de ressources suffisantes et
d'un cadre adequat a des institutions financieres viables et a
la dimension des ambitions des tontiniers. On a pu ainsi assister
a l'officialisation de certains groupes dont les plus importants
a l'heure actuelle se sont crees dans le domaine bancaire et
celui des assurances. On peut citer a ce sujet l'exemple de la
Caisse Commune d'Epargne et d'lnvestissement,
dont nous avons
analyse les mecanismes de fonctionnement dans le chapitre 11.
Cette
structure
bancaire
officielle
nee
de
l'experience
tontiniere
peut
des
lors
fonctionner
comme
une
banque
et
participer
plus
largement
au
financement
de
l'economie
en
s'interessant
a des agents economiques autres que les seuls
tontiniers.
Une autre experience plus recente que celle de la CCEl a
donne
naissance
a une
nouvelle
compagnie
d'assurances
au
Cameroun. Cette insti tution financiere denommee Garantie Mutuelle
des Cadres, "GMC"50,' est une emanation de la vOlonte d'elargir a
des
proportions
plus
utiles
et
plus
satisfaisantes
pour
ses
membres,
la gestion d'une epargne collective.
Le fonds d'etablissement de la GMC s'eleve a un montant de 150
millions de francs CFA et s'est constitue grace a l'epargne de
50 - La "GMC" est une soci~te d'assurances a forme mutuelle a cotisations fixes. 211e est une
entreprise privee regie par l'ordonnance 95/003 du 31/08/1985. Son sieg& social est a Douala.

- 481 -
ses societaires qu' elle a voulu recruter au depart parrni les
cadres des entreprises du secteur public et prive. La qualite des
adherents s'est diversifiee aujourd'hui, s'etendant a toutes les
categories
sociales
et
de
revenus.
Les
res sources
ainsi
constituees
peuvent
alors
etre
mobilisees
en
faveur
de
la
clientele
grace
a divers produits et mecanismes
tels
que
l' assurance automobile, la caisse secours hospi talisation, caisse
secours
deces
couvrant
le
souscripteur,
son
conjoint,
ses
ascendants
et
descendants
et
donnant
lieu
a une indemnite
"funerai lles".
Les
di fferentes
caisses
mi ses
en
place
sont
particulierementinteressantes dans des champs que les contrats
d' assurances
habi tuels
ne
couvrent
pas
ou
couvrent
pour
des
montants de primes plus eleves.
L'un des avantages de ce developpement vers des structures
officielles est que celui -ci s' opere dans le sens d' une plus
grande
satisfaction
des
besoins
ressentis
et
formules.
Les
instruments
deployes
le
sont
essentiellement
dans
cette
perspecti ve.
Ils
le
sont
d' aut ant
mieux
que
les
prestations
offertes beneficient en priorite aux createurs des differents
mecanismes,
actionnaires
ou
autre
partie
prenante
aces
ensembles.
Cette evolution actuelle des circuits financiers paralleles
ouvre la voie a une perception plus large de leur champ d'action
et de leur poids dans le financement de l'economie en general et
des activites informelles en particulier.
Leur aspect le plus
interessant
est
la
dynamique
qu'ils
imposent
aux
agents
economiques
dans
le
sens
d'une
concertation
et
d'une
organisation plus rigoureuse de leur participation.
Jusqu' ici
nous
avons
insiste
sur
l'organisation
externe
qu'ils
ont
favorisee ou quelques fois
imposee. Actuellement nous voulons
mettre
l'accent
sur
l'organisation
interne
necessaire
a
l' optimisation de
l'impact des
tontines
sur
le
ni veau et
la
regularite de l'activite des PME informelles.

$3
Organisation Interne et Gestion des
Ressources des PME Informelles
La determination de la nature des res sources affectees
au financement des PME informelles ainsi que l'analyse du mode
de financement de ces entreprises nous ont permis de decouvrir
l'existence d'une structuration de plus en plus rigoureuse du
secteur informel.
De ce point de vue,
l' exemple precis de la
dynamique imprimee par le systeme des tontines met en valeur les
regroupements
d'interets
financiers
des
entrepreneurs
de
ce
secteur, expression de l'importance que ces derniers accordent
au probleme de financement. 11 traduit en meme temps leur effort
d' organisation dont l' obj ecti f maj eur est de creer ou d' ameliorer
les conditions de ce financement puis celles de la production
pour les agents economiques engages dans le processus. Jusqu'ici
nos analyses ont concerne les mecanismes crees a l'exterieur de
l'entreprise visant a assainir son environnement economique et
financier.
11 importe actuellement de se pencher sur la nature
des mecanismes internes de gestion qu'implique la participation
a
ce
cadre
de
fonctionnement,
leur
coherence
avec
cet
environnement et leur incidence sur le coQt du capital et plus
globalement sur les coQts de gestion.
3.1.
Mecanismes Internes de la Gestion des
PME Informelles
Ces mecanismes comprennent l'ensemble des mesures destinees
a organiser la production. Nous verrons alors dans quel sens se
realise cette organisation ainsi que son aptitude a assurer a la
production un rythme regulier compatible avec les besoins et les
exigences de la clientele d'une part puis avec la quantite et la
qualite des res sources disponibles d'autre part.
Ces
mecanismes
s'entendent
egalement
des
differentes
techniques deployees pour optirniser la gestion des relations de
travail et de pouvoir entre patron et employes. 11s devront done
nous permettre d'apprecier la maniere dont se fait l'evaluation
du travail de chacun,
l' affectation des uns et des autres aux
differents
postes,
la pertinence ou
la non pertinence de
la
delegation des pouvoirs.

- 483 -
3.1.1
L'Orqanisation de la Production et la
Hierarchisation des Besoins
L' opinion
courante
sur
les
PME
informelles
est
que
ces
entreprises n'ont aucune methode de travail, aucun planning dans
l' execution
de
leurs
operations.
Cependant,
les
cas
etudies
montrent plutot que ces unites font tout de meme une evaluation
de leurs besoins d'exploitation et d'investissement,
puis une
hierarchisation de ceux-ci en fonction d'un certain nombre de
cri teres propres.
Ces
cri teres
peuvent
etre
d'ordre
financier
ils
se
rapportent alors au montant du financement requis et a toutes les
charges
recurrentes.
L'interet
de
ce
critere
pour
les
PME
informelles
est
illustre
par
la
multitude
de
sources
de
financement dont la tontine. Nous avons vu que plus de 50 % des
besoins
de
ces
entreprises
sont
couverts
grace
aux
credi ts
distribues par les tontines qui leur semblent le mieux repondre,
a leurs attentes.
Toujours par rapport a ce critere financier, les entreprises
etablissent
leurs
priorites
de
production
en
fonction
des
possibilites
de
paiements
immediats
de
leur
clients
pouvant
contribuer a
l' amelioration de
leur
tresorerie.
11s tiennent
compte de la meme maniere de la marge nette liee a chacune des
operations. Les operations les plus rentables en terme de marge
elevee et de tresorerie confortable seront preferees et classees
prioritairement
par
rapport
a l'ensemble
du
programme
de
production. Ce mode d'organisation de la production est tel que
les clients des PME informelles s'efforcent de regler au comptant
ou a tres court terme toute production qui presente un caractere
urgent.
- Pour l'atelier de confection Bibiane Angele, les periodes
de
fetes
notamment
religieuses,
la
fete
de Noel,
la
fete de
paques,
l' assomption
etc.
sont
des
occasions
de
celebration
d'evenements heureux : premiere communion,
confirmations ... et
aussi
des
periodes
de
grandes
activites
pour
ce
chef
d'entreprise. Elle hierarchise l'execution des commandes aces
occasions
en
fonction
du
montant
et
du
mode
de
reglement,

- 484 -
privilegiant les paiements au comptant et d'avance.
- Pour les deux autres entreprises dont le fonctionnement
ne
depend
pas
vraiment
du
calendrier
des
fetes,
leurs
proprietaires declarent privilegier tout autant les travaux dont
le
reglement
est
sur,
les
commandes
payees
El
l' avance
etant
prioritairement executees.
11
est
utile
de
souligner
El
ce
stade
de
l'analyse
l'importance que ces entreprises du secteur informel accordent
au niveau de leur tresorerie et El la marge nette que peut generer
leur activite. Si El court terme comme nous l'avons montre, elle
est pri vilegiee pour resoudre des problemes ponctuels et urgents,
El terme elle participe de la realisation d'investissements de
renouvellement ou de capacite. Ces entreprises comme toutes les
autres font en effet des previsions et une planification de leurs
investissements. On a pu voir que dans la premiere phase, celle
de l' entree en production,
le ni veau de leurs investissements
etait
relativement
faible.
Ce
principe
qui
semble
general
s'explique par le fait que dans ces unites le niveau du stock de
capital doit se justifier par celui de la production et par voie
de consequence par la capacite d'absorption du marche. La courbe
des
investissements
doi t
s' ajuster
a celle de la demande de
maniere a reduire au minimum le temps d'oisivete du capital.
Cette
planification
des
investissements
en
fonction
de
l'activite n'est pas independante des moyens de financement de
l'entreprise et des previsions de leur evolution. Les res sources
ne
semblent
pas
etre
affectees
de
maniere
anarchique
aux
differents postes de depenses, l' entreprise faisant la difference
entre les capitaux longs et les capitaux courts. Les occasions
d'investissements
souvent
observees
sont
en
grande
partie
facilitees par le recours au credit de la tontine ou realisees
sur le profit net de l'entrepreneur. Les autres operations liees
El l'exploitation courantes font davantage appel aux capitaux El
court
terme
que
sont
les
credits
fournisseurs,
les
avances
clients et quelques fois les emprunts aupres de parents et amis
s'ils sont consentis pour une duree courte.
Ces entreprises, meme si elles n'etablissent pas de bilan

- 48:' -
selon la forme classique ne temoignent pas dans leur comportement
financier et de gestion d'une totale ignorance du probleme de
l'equilibre structurel du bilan.
D'autres donnees nous semblent egalement compter dans la
hierarchisation des besoins au se in des entreprises informelles.
11 en est ainsi des cri teres techniques. Ceux-ci font appel a la
nature des equipements et outils disponibles ou a acquerir, au
temps
de
travail
a consacrer a la production concernee par
rapport
au
programme
global
de
production
a respecter,
aux
fournitures et autres consommations intermediaires a rechercher.
Ce critere tient·egalement compte du nombre et de la qualite des
techniciens et ouvriers a affecter aux differents stades de la
production.
L'ensemble de ces facteurs
techniques et financiers sont
integres dans l'analyse que le technicien de la PME informelle
fait pour s'assurer une activite continue.
Dans nos
trois cas de
PME du secteur informel,
on a pu
observer pour chacun des cas une masse importante des travaux a
effectuer aussi bien dans le cadre de commandes que de stocks a
constituer. Les portefeuilles de travaux les plus significatifs
ont ete reperes dans le domaine de la confection et dans celui
de la construction et du batiment. Le volume global des travaux
peut etre estime a plusieurs centaines de milliers de francs et
a plus de 20 millions de francs respectivement pour l'atelier de
couture
et pour
le batiment.
Le calendrier des
travaux dans
chaque cas est fonction des conditions de reglement de chaque
cl ient d' abord et des autres cons idera tions subs idiairement. Car,
s' agissant en particulier du cri tere
technique de nombreuses
mesures peuvent etre rapidement prises pour pallier les carences
de
l'entreprise.
Celle-ci
peut
par
exemple,
lorsqu'elle
ne
dispose pas de l'ensemble des competences ou equipements requis,
faire jouer la complementarite developpee dans chaque branche
professionnelle.
Elle
peut
aussi
emprunter
ou
louer
les
equipements
et outils manquants
dans
son atelier ou meme en
programmer l'acquisition en se finan~ant dans sa tontine.
La
grande
proximi te
du
producteur
par
rapport
au
consommateur
fait
intervenir
en
plus
de
ces
deux
premiers

- 486 -
criteres, d'autres types de considerations ayant des implications
economiques immediates ou non.
Dans
l' exemple
des
ateliers
de
couture
par
exemple,
la
confection d'une robe de mariee est toujours un grand evenement.
De ce fait des commandes portant sur ce genre d'article peuvent
etre executees en priorite meme si le paiement ne peut pas et re
effectue integralement au comptant. Leur realisation a souvent
une
visee
publici taire
qui
permet
de
mettre
en
exergue
les
qualites professionnelles du technicien. La depense immediate que
supporte l'entreprise et qu'elle ne peut pas recuperer a breve
echeance s'analyse davantage comme un investissement en terme de
publicite.
Dans
d'autres
champs
de
specialites
tel
que
le
batiment certains ouvrages dont les c16tures de villas et autres
constructions
sont
privilegies
par
notre
technicien
s'ils
permettent de faire remarquer facilement ses competences de chef
d'entreprise.
Ce
mode
de
publicite
est
celui
auquel
ces
entreprises ont le plus recours pour bien s'etablir dans leur
branche et accroitre leur part de marche.
Dans
les
PME
informelles,
le
technicien proprietaire ne
travaille pas toujo~rs seul.
Certaines entreprises ont besoin
d'un certain niveau de personnel pour satisfaire a la demande qui
leur est adressee.
3.1. 2
Organisation de la Production et Relations de
Pouvoir avec les Employes
La
gestion
des
relations
de
travail
dans
les
PME
informelles est fondarnentale pour la creation et le maintien d'un
cadre de travail favorable au developpement de l'entreprise. Nous
avons
vu
que
dans
les
PME
informelles,
le
personnel
est
generalement
recrute parmi
les membres
de
la
famille
ou des
personnes proches du chef d'entreprise. Parallelement nous avons
pu
montrer. que
le
travail
et
surtout
sa
qualite
sont
les
pr incipaux
facteurs
de
valor isa tion
des
PME
informelles.
La
conciliation de ces deux aspects de l'emploi dans ces entreprises
n'est pas facile et necessite de la part du proprietaire une
gestion attentive de son personnel.
Certaines PME ont tente de contourner ce probleme de gestion

- 487 -
permanente du personnel en recrutant periodiquement, lorsque cela
est necessaire, des ouvriers temporaires. Si cette pratique est
applicable dans
des
periodes
de
faible
acti vi te
et dans des
entreprises comme celles du batiment,
elle n I est pas toujours
realiste et ne saurait etre generalisee a toutes les activites.
Dans les garages automobiles et les ateliers de couture que nous
avons
observes,
la presence
permanente
d' un
ou de
plusieurs
ouvriers
est
indispensable.
Ceux-ci
sont
affectes
soi t
a
la
livraison soit a la realisation d'une partie du travail. L'aspect
que
nous
voulons
souligner
ici
est
la
necessite
pour
1 'entrepreneur de·deleguer des pouvoirs a un ou deux ouvriers de
son
atelier
ou
de
son
entreprise.
Car,
si
certaines
taches
requierent
obligatoirement
l'intervention
du
technicien,
certaines aut res peuvent etre devolues aux ouvriers ayant des
qualifications pour les realiser.
Ainsi, parmi les postes preC1S reserves au proprietaire de
l'entreprise,
on peut citer en particulier la negociation des
marches,
la
recherche
des
financements,
la
direction
de
la
production,
le
contr61e
du
travail,
l'execution
des
taches
delicates necessitant une bonne maitrise technique. 11 s'agit la,
nous semble-t-il,
de quelques points sensibles qui determinent
le niveau de l'activite et meme sa perennite. Cependant, en cas
d'absence
du
proprietaire,
il
est
tout
de
meme
utile
que
l'entreprise continue a fonctionner. C'est dans ce cadre qu'est
donc con~ue une delegation de responsabilites.
Dans les cas observes,
l' evaluation du travail de chaque
ouvrier a souvent permis de designer l'ouvrier le plus competent
comme adjoint du patron. Bien que cette designation ne soit pas
formalisee elle est portee a la connaissance de l'ensemble du
personnel. L'employe ainsi promu peut donc remplacer son patron
en cas d'absence dans certaines des fonctions techniques. 11 peut
prendre des initiatlves dans le domaine de la production, dans
la
fixation
du
prix ou
sa
negociation.
Les
employes
sur ce
dernier point s'averent parfois plus efficaces que le chef de
l'entreprise.
Leur comportement peut s'expliquer alors par le
fait que le paiement des salaires ne peut etre assure que grace
aux
recettes
realisees.
Et,
le
modele
defini
precedemment

- -+88 -
illustre bien ce point de vue. Ce modele nous a montre qu'a court
terme, l'entrepreneur pouvait dans sa determination du prix faire
abstraction des salaires a payer a son personnel, l'astreignant
a I ' autoremuneration.
Les
employes
qui
anticipent
cette
eventualite se sentent contraints de negocier un niveau des prix
qui leur garantisse leur salaire mensuel.
Toutefois,
si certaines fonctions peuvent etre facilement
deleguees
d'autres
le
sont
moins
et
parfois
le
chef
de
l'entreprise est amene a une co-delegation ou a la conception de
documents permettant de limiter les risques de vol ou de mauvaise
gestion. La fonction la plus concernee ici est celle qui a trait
aux finances, c'est-a-dire a 1 'engagement et a la realisation des
depenses, a la perception des recettes. On trouve ainsi dans de
nombreuses
PME
informelles
certains
documents
tenus
meme
.sommairement mais qui permettent d' enregistrer les commandes, les
modalites de reglement, les dates prevues pour la livraison, les
dates
de
paiement.
Certains
entrepreneurs
demandent
a
leurs
clients d'exiger l'etablissement de reyus pour tout reglement en
especes.
L' exemple
le
pI us
frappant
dans
la
tenue
de
documents
exploitables est celui de l'entreprise Atelier de Couture Bibiane
qui compte parmi son personnel une de ses nieces et deux autres
employees qui elles n'ont pas de lien de parente ni de rapport
particulier avec cette couturiere. Cette derniere tient un grand
registre dans lequel elle note les mesures de ces clients et en
face de chaque nom, elle porte le montant a reclamer et la date
prevue de reglement.
La perception des reglements ne peut etre
effectuer que par elle-meme ou si elle est absente, par sa niece.
En cas d'absence de ces deux personnes elle conseille aux clients
de
lui
laisser
un
mot
pour
qu'elle
puisse
proceder
personnellement
au
recouvrement
de
ses
creances
a
la
date
indiquee. Cette pratique semble la plus courante dans les PME
infprmelles 00 la fonction de
recouvrement
ne
peut
pas
etre
c6'riiiee
an' import~ quel employe
souvent
la
qualification
technique
n' est
pas
suffisante,
cette
fonction
restant
l'exclusivite du patron. 11 s'agit la d'une mesure de controle
liee a la natute sommaire des documents tenus par l'entreprise.

- 489-
Ainsi, les factures et re~us de A. YUNDZO et ANDONG sont souvent
rediges sur des feuilles volantes sans double n'en facilitant pas
le contr6le. Ces entreprises ne tiennent pas d'archives de telle
sorte que,
meme quand des re~us sont etablis sur des carnets
con~us a cet effet, lps souches sont jetees des epuisement des
carnets. Le contr61e dans ces cas n'est pas non plus aise.
Les
rapports
de
pouvoirs
entre
le
personnel
et
le
proprietaire
dans
ces
PME
informelles
semblent
donc,
contrairement a ce qui est communement admis, clairement etablis.
Et,
les
delE~gations de pouvoirs lorsqu' elles sont consenties
restent bien circonscrites a des domaines precis, a des taches
bien definies de maniere a ne menacer ni le fonctionnement ni le
developpement de l'entreprise.
D'une maniere generale, la main mise du patron est ressentie
a tous les niveaux de responsabilite de l'entreprise.
3.2
Incidence de l'Orqanisation de la Production sur les
Couts de l'Entreprise
La
forte
presence
de
I' entrepreneur
au
coeur
de
toute
I' acti vi te influe sur la vie de I' entreprise.
Son impact est
particulierement ressenti sur la production quant a son niveau
et a sa qualite puis sur tous les couts inherents a l'activite.
En
effet,
dans
les
PME
informelles
comme
dans
les
entreprises du secteur moderne,
la production de tout bien ou
service se fait a un cout donne.
On
peut
signaler
au
passage
que
dans
les
entreprises
modernes,
la
determination
des
couts,
fai t
appel
a
la
comptabilite
analytique
en
tant
qu'ensemble
de
techniques
d' affectation
et
d' imputation
des
charges
aux
produi ts
puis
d'incorporation de celles-ci aux couts 51 • L'un des problemes qui
se posent a ce niveau sur le plan de I' analyse est celui de
I' unanimi te
sur
les
charges
incorporables
et
celles
qui
ne
devraient pas l'etre. Dans les entreprises du secteur moderne ces
u
_
On Be rapportera ~ ce Bujet ~ l'article de
J. Marqerin et J. Trahand, Coilt, in 2ncyclopedie de
qeBtion op oit pp 567-599.

- 490-
consid~rations
sont
importantes
pour
l'uniformisation
des
m~thodes de calcul de couts et de contr6le de la gestion. Mais,
dans un contexte particulier tel que celui des PME informelles
l'approche du probleme des couts se fait diff~remment. En effet,
la comptabilit~ est inexistante ici et l'analyse des couts est
men~e davantage de maniere
globale.
Le ni veau des couts peut
ainsi
etre
appreCle
en
termes
de
performance
du
centre
de
responsabilit~s, d'efficacit~ des moyens techniques, humains et
financiers
dont se dote l' entreprise,
de
comp~titi vi t~ et de
d~veloppement de l' acti vi t~. Nous insisterons donc principalement
sur les implications de ce mode de gestion
sur l'ensemble des
couts de gestion de l'entreprise.
En
effet,
analysant
le
mode
de
financement
des
PME
informelles nous avons vu que ces entreprises avaient recours
aussi bien a leurs fonds propres qu'a des res sources d'emprunt
pour se financer. Chacune de ces ressources ayant un cout, l'une
de nos pr~occupations est de savoir comment dans l'organisation
de
la
production
et
l'affectation
des
res sources
les
PME
informelles ont pu faire face au cout de leur capital. Evidemment
le poids de ces diff~rentes res sources n'est pas le meme dans la
structure de financement de l'entreprise. Et, l'on a pu d~ja se
rendre compte que les fonds propres n'y occupent qu'une place
assez faible par rapport a la proportion des dettes.
L'analyse en termes de cout des fonds propres dans l'univers
du secteur informel ou la fiscali t~ est quasiment absente se
ramene a celle des d~lais n~cessaires pour la formation de ces
res sources . Dans les differents exemples etudies, ces delais nous
ont
semble
assez
courts.
Les
techniciens
ont
souvent
pu
s'installer un an environ apres leur formation. L'un des facteurs
de r~duction de ces d~lais a ~t~ l'approche assez particuliere
de
la
production
dans
ce
secteur
ou
l' ~l~ment formation
et
qualification
professionnelle
occupe
une
place
de
choix.
La
production a donc pu etre lanc~e avec des investissements meme
modestes. Cette primaut~ du facteur travail d~ja mentionn~e doit
etre
rappel~e
ici
en
tant
qu'un
des
elements
agissant
indirectement sur la minimisation du cout des fonds propres. Car,
l'organisation de la production s'est operee autour des avantages

- 491 -
acquis par
l' entrepreneur
telle
que
la
competence
technique,
permettant ainsi une entree en production rapide.
Les
PME
informelles
peuvent
par
ce
biais
minimiser
le
capital initial et par la reduire les delais de mise en service
de leur unite de production.
Mais
cornrne
nous
l'avons
dit,
les
ressources
les
plus
importantes dans ces PME sont externes et proviennent pour la
plupart des tontines. Celles-ci participent en effet pour plus
de la moitie au financement des PME informelles. L'exemple qui
nous a ete donne par les tontines ELF et MEKI M'OYEM nous fournit
des
informations
sur
la
distinction
a
faire
sur
les
taux
d'interets debiteurs appliques par les tontines. Ces differents
taux sont repris dans les tableaux XVI et XVII ainsi que les
graphiques I et 11. Ainsi,
si les taux apparents ont fait dire
que les tontines pratiquaient des taux aires,
les taux annuels
correspondants sernblent plut6t avantageux pour les entreprises
en comparaison des taux bancaires. Les taux varient entre -7,879
% l'an pour le taux le plus bas et 8,596 % l'an pour le taux le
plus eleve.
Pendant ce temps, les taux bancaires se situent en moyenne
autour de 16 % l'an. L'avantage du financement par les tontines
par rapport au taux d'interet annuel est donc sur cette base
incontestable. Si en plus l'on tient compte du terme des credits
qui peut aller au-dela de cinq ans,
s' harmonisant cornrne nous
l'avons montre avec le delai de recuperation du capital investi,
on peut conclure a une incidence positive du mode de financement
et de production des PME informelles sur la minimisation du cout
du capital.

Tableau L Structure des taux dans la tontine ELF.
- 492-
Encheres
Panicipant
Taux apparent
Taux effectif
Taux annuel
Solde final
payees
I
187
19,47917
3,300779
2,6320 I
I
-
31,68748
2
152
15,83333
-
0,3450537
- 0,2761603
3,312515
3
193
20,10417
3,925779
3,12841
-
37,68748
4
174
18,125
1,946613
1,55437
-
18,68749
5
186
19,375
3,196613
2,549148
-
30,68749
6
163
16,97917
0,8007793
0,640118\\
- 7,687482
7
150
15,625
-
0,5533867
-
0,4429281
5,312513
8
184
19,16667
2,988279
2,283542
-
28,68748
9
154
16,04167
-
0,1367207
-
0,1093984
1,312518
10
185
19,27083
3,0924477
-
2,466357
-
29,6875
11
157
16,35417
0,1757793
0,1405478
- 1,687482
12
150
15,625
-
0,5533867
-
0,4429281
-
5,312513
13
135
14,0625
-' 2,115887
-
1,696348
20,31251
14
125
13,02083
-
3,157554
-
2,534145
-
30,31252
J 5
100
10,41667
-
5,76172
-
4,636574
-
55,31251
16
90
9,375
-
6,803387
-
5,480796
-
65,31251
Tableau 1I. Structure des taux dans la tontine Meki M'Oyem.
Encheres
Participant
Tuux appurent
Tuux effectif
Tuux unnucl
Solde final
payees
I
231
9,24
-
20,21281
-
6,395382
505,3202
2
I "5
44,6
15;14719
4,21449
-
378,6798
3
1 200
48
.', 18,54719
5,105782
-
463,6799
4
I 195
47,8
'-
18.3471 ')
5.053807
-
458,6798
5
I 320
52,8
23,34719
6,333983
-
583,6798
6
\\ 300
52
22.54719
6.131625
-
563,6799
7
1 385
55,4
25,9472
6,985152
-
648,6799
8
1 380
55,2
25,7472
6,935406
-
643.6799
9
1 510
60,4
30,9472
8,211148
-
773,6799
10
1 500
60
30,5479
8,114338
-
763,6799
11
1000
40
10,5479
2,97830 I
-
263,6799
12
1 500
60
30.54719
8,1 14338
-
763,6799
13
I 550
62
32,5472
8,596432
-
813,6799
14
1 450
58
28,5479
7,626879
-
713,6799
15
1410
56.4
26,9472
7,233072
-
673,6799
16
870
34,8
5,347193,
1,53638\\
-
133,6798
17
I 150
46
16,54719
4,583633
-
413,6799
18
I 145
45,8
i6,34719
4,531074
-
408,6798
19
I 195
47,8
18;34719
5,053807
-
458,6798
20
925
37
7,547194
2,152372
-
188,6798
21
930
37,2
7,747195
2,20803
-
193,6799
22
I 450
58
28,54719
7,626879
-
713,6799
23
850
34
4,547194
1,310015
-
1\\3,6798
24
830
33,2
3,747\\94
1,082516
-
93,67986
25
875
35
5,547 \\94
1,5926
-
138,6798
26
850
34
4,547194
1,310015
-
113,6798
27
940
37,6
8,147192
2,318859
-
203,6798
28
I 005
40,2
10,74719
3,032828
-
268,6799
29
1 045
41,8
12,34719
3,466225
-
308,6798
30
1 055
42,2
12,74719
3,573B59
-
318,6799
31
130
5,2
-
24,25281
-
7.808191
606,3202
32
200
8
-
21.45281
-
6,823534
536,320 I
33
200
8
-
21,45281
-
6,823534
536,320 I
34
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
35
125
5
-
24,45281
-
7,B79502
611,3201
36
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
37
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
38
125
5
-
24,45281
-
7.879502
611,3201
39
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
40
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
41
125
5
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-
7,879502
611,3201
42
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
43
\\25
5
-
24,45281
.:.... 7.879502
611,3201
44
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
45
125
5
-
24,45281
-
7.B79502
611,3201
46
125
5
-
24,4528\\
-
7,879502
611,3201
47
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
48
125
5
-
24,45281
-
7.879502
611,3201
49
125
5
-
24,45281
-,- 7,879502
611,3201
50
125
5
-
24,45281
-
7,879502
611,3201
SOURCE
B.
BEKOLO-EBE,
R.
BILONGO, COMPORTEMENTS DES GAINS
ET STRUCTURES DES TAUX D'INTERETS DANS LES TONTINES,
nn
r.ir.

- 493 -
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t
)\\.)
-.I
CL
D
U
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"
,
0
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1
Q
r+
en
U
0
(JJ
(1)
C
..., X
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~(l
CD
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- t
r+
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C
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r -
I
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c;)
rn
, ,
,-+
,',......
..L_
"• •J
"'''.
- - ---_._---
GRAPHIQUE
2
CAS DE LA TONTINE MEKI M'OYEM

- 495-
Le cout du capital est certes important dans la composition
des couts que gene re une activite productive mais il n'en est
qu'un aspect. D'autres types de couts existent, qui peuvent etre
evidents
ou
"caches"52,
et
qui
influent
directement
ou
indirectement sur les objectifs de rentabilite de l'entreprise.
11 s'agit dans cette optique des couts de personnel, des couts
de transactions des couts de performance etc que nous regroupons
sous l'appellation de couts de gestion.
3.2.1
Formalisation des coats de Gestion des
PME Informelles
Les PME informelles evoluent dans une structure interne 00
la gestion est pour une grande part assuree par le detenteur du
capital.
Du
fait
de
sa
qualification
professionnelle
et
de
sa
mal trise
technique,
ce
dernier a
le
contr61e de
la
fonction
technique. 11 detient en meme temps,
en tant que proprietaire,
le pouvoir financier.
Ainsi,
le pouvoir technique au sein de
l'entreprise puis le pouvoir financier et le pouvoir de decision
sont concentres entre les mains de l'entrepreneur.
Celui-ci
se
trouve
alors
au
centre
des
decisions
et
des
responsabilites
sur
l'orientation
de
l'activite
et
le
developpement de l'entreprise. Cette position dominante dans les
operations de production et la prise des decisions semble avoir
permis
de
reduire
enormement
les
couts
de
gestion
de
la
production, les ramenant au seul cout du travail.
Nous
avons
dans
les
sections
precedentes montre
que
la
determination des prix se faisait a partir de criteres objectifs
de couts de la production. Le modele qui a ete construit a cet
effet a permis de faire ressortir deux composantes fondamentales
du prix dont la remuneration brute de l'entrepreneur appelee Re.
Re = W +
+
p
Wt
1t e
Cette remuneration de l' entrepreneur, principal gestionnaire
comprend a la fois le cout du travail et la remuneration de la
.2
_
On ~lle coQts each6s, 1'enchalnement des coQts resu1tant
d'un fait soc.1aJ..
-
On peut l i r e . ce sujet, R. Danziger, Bilan
Soc.1al in Encyclop6d1e de Gestion op cit p 243-256.
-
On lira 6qalement H. SAVA 11, Coilts caches et analyse
8ocio-econom1que des organisations, in Encyc1op6d1e de Gestion, op cit_

- 496-
propriete du capital.
~ se decompose donc en Ct+ne
ou : Ct est le cout du travail, et s'ecrit
C
=
+
t
Wp
Wt
et ne'
la marge nette de 1 'entrepreneur, son profit.
La
prise
en
compte
de
C
parmi
les
couts
de
gestion
t
s'explique aussi par le fait que l'entrepreneur pe ut deleguer
provisoirement
ou
durablement
le
pouvoir
de
gestion
a
son
personnel.
Quant
a
ne'·
il
est
explici tement
la
remuneration
de
la
propriete
du
capital.
Cependant,
en
tant
que
technicien
participant activement aux differentes phases de la production
et
en
tant
que
gestionnaire
prenant
des
responsabili tes
et
engageant
la
vie
de
l'entreprise,
1 'entrepreneur
devrait
beneficier d'un salaire a ce double titre. Mais cet aspect a ete
neglige dans la mesure Oll il y a fusion entre le gestionnaire,
le
technicien,
le
propr ietaire
du
capital,
la
detent ion
du
capital apparaissant comme l'aspect dominant dans les criteres
de remuneration propre de l'entrepreneur.
Le mode d'organisation a la base de la production dans les
PME informelles nous semble favorable a une meilleure maitrise
des couts de gestion,
l'entrepreneur cherchant ales contr61er
au niveau le plus bas.
A court terme,
lorsque le prix est uniquement fonction de
ne'
les couts de gestion peuvent etre consideres comme nuls. A
terme,
ceux-ci
se
ramenent
aux
salaires
et
aut res
charges
salariales des employes temporaires et permanents. Les couts de
gestion que nous appelerons C
sont donc egaux a C
de telle
g
t
sorte que :
C
= W
+ W
g
p
t
Nous ne disposons pas de donnees chiffrees sur le niveau des
salaires dans les entreprises informelles au Cameroun. Mais, par
rapport aux cas que nous etudions, les salaires dans le secteur
informel sont payes sur la base des rentrees effectives et de la
marge brute de l'employeur. lis ne semblent donc pas de nature
a compromettre l'activite. En outre, la souplesse des structures
est telle que les couts de gestion sont facilement compressibles
jusqu'au niveau souhaite. Cette compression peut se realiser a

··497 -
travers des baisses de salaires, des licenciements, des conges
techniques
et
aut res
techniques
susceptibles
de
retablir
l'equilibre.
L'analyse du mode financement des entreprises informelles
a permis une fois de plus de souligner le role particulier que
joue le systeme des tontines dans le financement de l'economie
camerounaise
en
general
et
de
son
secteur
informel
en
particulier. Cette dynamique de la tontine semble liee a la mise
en
oeuvre
de
mecanismes
adaptes
a un contexte Oll 1 'un des
principaux determinants de l'investissement est la qualification
professionnelle et la competence technique de l'entrepreneur. La
tontine a donc ete sollicitee pour constituer le cadre financier
capable
d' aider
a la valorisation des acquis techniques ou
technologiques des entrepreneur de ce secteur. Ce cadre se veut
celui de la mobilisation de res sources monetaires et financieres
en
vue
de
l'ajustement
des
excedents
et
des
deficits
de
financements, de la minimisation du cout du capital, puis de la
resolution
du
probleme de
la
repression
financiere
dans
les
economies
en
developpement.
Cette
fonction
financiere
de
la
tontine s'est doublee d'une nouvelle fonction de production et
de gestion d'informations economiques et strategiques favorables
a la realisation de choix optimaux pour les agents economiques
parties prenantes du systeme.
Les
principales
implications
de
cette
double
fonction
sont
l'assainissement de l'environnement economique et financier dans
les
branches
professionnelles
puis
la
necessite
d'une
organisation interne de chaque unite permettant aux uns et aux
autres de beneficier de la synergie du groupe.
La financialisation de la tontine puis la diversification
et l'elargissement de ses fonctions semblent etre le levier de
l'impulsion donnee aux activites de production dans le secteur
informel.
Cependant,
il est difficile d'affirmer que le systeme des
tontines ne comporte que des avantages par rapport a sa fonction
d'intermediaire
financier
et
a son action en faveur de la
creation et du developpement des PME. Et sur ce point l'un de ses
problemes majeurs est celui du recouvrement des credits consentis

- 498 -
aux adherents ou aux non adherents et les risques de perte de
capital y afferents. En effet, si la tontine tente de se premunir
a travers differentes mesures preventives contre le risque
financier,
elle
peut
probablement
le
limiter
mais
pas
le
supprimer
totalement.
Ce
probleme
nous
semble
d' aut ant
plus
preoccupant que la principale garantie du systeme est la caution
mutuelle des tontiniers,
de telle sorte que la defaillance de
plusieurs
personnes
a
la
fois
peut
ebranler
l'ensemble
du
systeme.
Et,
dans
le
cas
des
PME
informelles
la
menace
de
la
defaillance des· tontiniers
ne peut
pas
etre ecartee dans
la
mesure Oll il s'agit d'entreprises dont l'une des difficultes est
leur precarite financiere que n'aident pas a pallier la situation
de crise actuelle et la rigidite des mecanismes de financement
des banques considerees ici comme preteur en dernier ressort.
Le systeme des tontines connait donc aussi des problemes et
comme tout systeme de credit son risque premier est celui du non
remboursement des sommes pretees.
Le secteur informel dans
son ensemble apparai t
comme la
revelation d'une
force
jusque la ignoree.
Les
trois
exemples
illustratifs de cette force met tent essentiellement en valeur
deux aspects determinants de la vie et du developpement de ces
entreprises.
a)
lIs font ressortir la specificite et l'importpnce des
activites du secteur. Celles-ci sont marquees par le profil du
producteur,
sa formation et la maitrise technique de son champ
de
specialite,
la
possibilite
d'insertion
dans
le
secteur
productif des jeunes dip16mes.
b)
lIs conduisent egalement a insister sur la qualite des
res sources qui, pour la plupart, sont des capitaux empruntes dans
les tontines. Et, ma.lgre l' informali te de ces
circui ts d' epargne
et de credits, ceux-ci sont a l'origine d'une organisation de la
gestion de l'endettement que lIon rencontre difficilement
dans
les PME modernes.
L'evolution que lIon observe aujourd'hui par rapport aces

- 499 -
deux aspects du secteur
informel
se
resume
a des efforts de
structuration. Ceux-ci visent moins le passage systematique de
l'informel au formel que le renforcement de la place qu'occupent
les activites de ce secteur dans l'economie.

CONCLUSION GENERALE

- 501 -
CONCLUSION GENERALE
Le but de cette recherche etait d'etudier le comportement
d'endettement
des
PME
camerounaises
face
au
comportement
d'intermediation des banques.
Nous avons cherche a mettre en lumiere tout a la fois les
specificites des deux grands types de PME que sont les PME du
Secteur
Moderne
puis
celles
du
Secteur
Informel
et
leurs
disparites que traduisent les differences de comportement face
au probleme de l'endettement.
I
LES RESULTATS OBTENUS
L'analyse des PME camerounaises montre que le mode de formation
du capital dans ces unites de production les predestine .. ' a une
grande vulnerabilite financiere.
En effet,
le caractere individuel ou familial des PME explique
pour une grande part la faiblesse de leurs fonds propres. Et, la
precarite financiere sous-jacente a cet aspect de la creation des
PME
oblige
a s'interesser
au
probleme
du
financement
de
l'activite.
Des
lors,
les
conditions
dans
lesquelles
elles
accedent au credit determinent profondement leur comportement.
Precisement,
les
differences
entre
PME
modernes
et
PME
informelles
proviennent
essentiellement
de
leur
mode
de
fonctionnement, du mode de resolution du probleme du financement
de leur production.
A
LE COMPORTEMENT D'ENDETTEMENT DANS LES PME MODERNES
L'eligibilite
au
credit
bancaire
de
ces
PME
a
fait
du
financement le determinant majeur de la decision d' investissement
dans
ces
entreprises.
L'une
des
justifications
du
recours
a
l'emprunt est le principe du levier financier de l'endettement.

- 502 -
Celui-ci
exprime
les
conditions
dans
lesquelles
la dette
de
l'entreprise accroit le rendement moyen des res sources propres,
le rendant superieur au taux de rendement moyen du capital. Cet
effet s'exerce ainsi sur la rentabilite des capitaux propres et
est generalement oppose a l'effet de dilution de l'augmentation
du capital. 11 explique alors l'interet de l'endettement pour les
PME camerounaises.
Ce volet de l'analyse nous a conduit a insister sur les
difficultes a se financer aupres du systeme bancaire. Nous avons
pu mettre l'accent sur l'absence ou l'insuffisance des credits
a long et moyen terme plus adaptes aux besoins d'investissement
des PME, sur l'importance des garanties exigees qui ne sont pas
a la portee de celles-ci, sur le cout du credit bancaire qui
annihile les effets positifs escomptes. L'un des exemples choisis
pour illustrer les limites du credit bancaire,
et des reformes
du systeme financier, l' incompletude des mesures d' accompagnement
d'ordre fiscal et institutionnel situees en amont et en aval du
financement bancaire est celui de la societe Milky-Way.
Les conditions de montant,
de terme,
et de taux d'interet
qui entourent l'offre de la monnaie de credit a la societe Milky-
Way ne permettent pas a celle-ci de jouer pleinement son role de
levier
financier.
Ces
conditions
tres
souvent
defavorables
s'integrent du reste tres bien dans le contexte deflationniste
de la creation monetaire qui prevaut dans cette economie. Elles
s'expliquent aussi par le fait que le systeme bancaire local n'a
pas
ete
a l'origine
con~u
pour
financer
une
economie
de
production. Et, les re formes monetaires et financieres engagees
depuis plusieurs annees et dont
l' une des
importantes est la
devaluation
res tent
tres
peu
efficaces
pour
relancer
definitivement l'appareil de production. Leur mise en oeuvre ne
s'est
pas traduite par des mutations decisives pouvant affecter
l'evolution de la ma~se des credits puis induire une modification
de sa structure dans
le sens de l' insertion des PME dans le
processus de production. Bien
plus, on a pu se rendre compte que

- 503 -
la rigidite du systeme bancaire provoque des derives financieres
que
nous
qual i f ions
de
paradoxe
de
recuperation
du
capital
industriel.
On peut
a.
ce
niveau
degager
les
differentes
phases
de
l'evolution de la dette de Milky-Way. D'abord de 1980 a. 1986, la
dette de cette PME passe de un milliard de francs CFA environ a.
2 333 millions a. la suite de la consolidation des concours a.
cette
entreprise
et
du
reamenagement
de
son
echeancier
de
remboursement. Les interets representent alors une large part du
montant total des engagements. Puis de 2 333 millions de F CFA
en 1986, elle passe a. 4 768 millions en 1993. Pour cette fois
egalement des interets ont ete a. nouveau calcules sur le montant
des credits consolides, le taux d'interet applique etant de plus
de 12,5 % l'an. Les interets sont capitalises a. chaque periode
portant ainsi la dette au niveau qu'elle atteint a. chaque etape.
Le plan de redressement propose par l'entreprise et qui est
guide par le souci de detendre les relations avec les creanciers
est
encore
depuis
plus
de
deux
ans
a.
l' etude
astreignant
l'activite a. l'etat vegetatif.
On aboutit a. la conclusion selon, laquelle les conditions rigides
du financement bancaire accroissent le volume des engagements des
entreprises par un effet cumulatif de charges financieres. Et,
de ce fait
elles reduisent la capaci te d' endettement des PME
c' est-a.-dire
la possibili te d' acceder
a. de
nouveaux concours
d'une maniere plus avantageuse.
Ce double effet cumulatif de
charges
et
restrictif
du
credit
a
pour
resultat
imrnediat
d'hypothequer la reproduction du capital.
Aces limites du financement externe viennent s'ajouter les
faiblesses
propres
des
PME
liees
d' abord
a.
la maniere
dont
s'operent les choix sectoriels puis a. celle dont est aborde le
probleme de la gestion de l'activite.
Ainsi
par
rapport
aux
choix
sectoriels,
la
nature
des
investissements finances est telle que les effets multiplicateurs

- 504-
ne jouent pas en faveur de l'economie locale, contribuant tres
peu a l'emergence d'unites de production integrees.
C'est le phenomene que decrivent C. FURTADO et C. BENETT1
a travers leur analyse de la particularite de l'investissement
en pays
sous-developpes.
C'est
cet te
meme
preoccupat ion
que
traduit le concept d'''1nvestissement de Transit" analyse par B.
BEKOLO-EBE.
Cet
aspect
de
ces
differentes
approches
du
financement de l'investissement en economie sous-developpee nous
conduit a dire que l'investissement dans ces cas n'exerce pas
d'effets d'entrainement sur la creation d'un tissu industriel
dynamique dont l'un des axes a voulu etre la promotion des PME
Ainsi, la nature de l'investissement dans les PME est telle
qu'elle pose a l'entrepreneur d'enormes problemes. L'exemple de
l' entrepr ise
"Le Camerounais"
temoigne de choix effectues en
dehors des competences techniques requises a cause notamment de
la
primaute
du
facteur
financier.
11
explique
mieux
les
faiblesses de l'investissement dans les PME modernes et qui se
traduisent ici par :
- le surdimensionnement de l'usine dont le corollaire est
l' oisi vete du capi ta.l, le faible taux d' util isation des capaci tes
installees,
l'exigulte du marche ;
la mauvaise
quali te
des
equipements
et
leur
age
en
comparaison du cout du capital et de son efficacite marginale ;
- le probleme du cout du transfert de la technologie, de la
localisation des matieres premieres et des pieces de rechange que
la devaluation rencherit ;
-
le probleme de la faible competitivite des produits de
cette
PME
et
du
cout
eleve
de
creation
des
emplois
qui
en
resulte.
Les nombreux tatonnements technologiques observes dans cette
entreprise
et
l' impreparation
du
processus
de
transmission
engage
rendent
inefficaces
les
differentes
mesures
mises
en
oeuvre et analysees a la lumiere de la theorie de l'Agence.

- 505 -
Le probleme technologique est ici un facteur d'aggravation
d' une
situation
financiere mal mai trisee
et
une menace a la
perennite
de
l'entreprise.
Et,
comme
on
peut
le
constater
aujourd'hui,
l'entreprise "Le Camerounais"
a ~te saisie par le
Tresor Public et vendue aux encheres publiques dans le cadre du
recouvrement
des
arri~res d'imp6ts.
Au-dela
des
problemes
d'incoordination que souleve l'action isolee des services des
imp6ts, ce cas montre bien l' importance des
couts technologiques
et des charges recurrentes ainsi que leur impact sur la gestion
de l'endettement.
Par rapport precisement a la question de la gestion dans les
PME, on a
pu
faire
le
constat
d'une
organisation
et
d'une
gestion
sommaires
inherentes
a
la
propr i~te
indi viduelle
du
capital. Si cette forme d'appropriation du capital ne pose pas
de probleme
en soi,
elle traduit par contre une volonte de
contr61e absolue et exclusive de toute l'activite par le seul
proprietaire.
L'exemple
de
la
societe
Confitex
illustre
bien
ce
comportement. La concentration des taches qui l'accompagne exige
des aptitudes a assumer simultanement toutes les fonctions de
l'entreprise. Et, l~ chef de l'entreprise concernee ne semble pas
les posseder. Bien au contraire,
l'ensemble des dispositifs mis
en place sont contrecarres par un comportement laxiste, preuve
d' une absence de culture d' entreprise et vecteur de rapports
conflictuels entre les banques de cette PME. Au plus fort des
tensions
en
1992/1993,
la
Societe
G~nerale de
Banques
au
Cameroun,
la SGBC a procede a la realisation de la
garantie
hypotheca ire
prise
dans
cette
affaire.
Comme
dans
le
cas
precedent l' entreprise n' a pas pu resister aux problemes internes
et externes lies a son mode de fonctionnement.
L'ensemble de ces proplemes majeurs qu'illustrent nos trois
exemples souligne la gravite de chacune des situations analysees,
la pertinence des decisions prises ou alors leurs insuffisances.
Mais d'upe fa90n g~nerale, on peut se rendre compte que, au-

- ~06 -
dela
des
difficultes
liees
au
financement
de
l'activite,
l'evolution des PME modernes denote de tres faibles
facultes
d'adaptation de l'organisation aux exigences des strategies et
objectifs determines. La pratique, dans les exemples traites est
marquee par des rigidites structurelles souvent deplorables qui
participent de la fixation sur des preoccupations simplistes dont
le contr6le de l'activite et la recuperation des fonds propres.
L'entreprise
stagne
alors
ne
definissant
aucune
forme
d'organisation, aucun schema de developpement ni de croissance.
La structure ne s'adapte pas a la strategie contrairement a ce
qu'en dit A.D. Chandlerl s'agissant essentiellement des grandes
'entreprises.
De meme en comparaison des PME informelles, il apparait que
si
les
problemes
de
financement,
de
choix
sectoriels
et
de
gestion sont communs a 1 'ensemble des PME, leur gravite n'est pas
la meme dans tous les cas. La distinction que nous faisons entre
PME du secteur Moderne et PME du secteur informel nous permet
d'ailleurs de mesurer l'etendue des differences dans la maniere
dont les problemes sont abordes puis res~lus.
B
-
LE COMPORTEMENT D' ENDETTEMENT DANS LES PME INFORMELLES
Nous avons montre a travers l'analyse precedente que les
possibili tes d' acces aux res sources bancaires ont
fai t
de la
variable
financiere
le
principal
determinant
de
la
decision
d'investissement dans les PME modernes.
En ce qui concerne les PME du secteur informel, on peut voir
que
la
valeur
de
base
sur
laquelle
se
construisent
les
entreprises
est
la
formation
technique
et
la
mai trise
professionnelle qu'elle exige. Cette approche fait du travail,
de la qualite de celui-ci le facteur de production essentiel, le
1 - Chandler A. D. Stratbgies"et structures de l'entreprise.
Edit d'organiaation Paris l~72, 543 pp.
Lire bgalement ;lo ce sUjet :
H. I. ANSOrF, Stratbgie du
Dbveloppement de l'Entreprise,
les Edit d'orqanisation l~8~ 287 pp.

" )07 -
facteur capital se pla~ant au second rang. Cette hierarchisation
des
facteurs
de production pennet
de minimiser ainsi
que
le
montrent les ~rois cas etudies, le probleme de financement des
equipements de production et de contourner celui de la gestion
des couts financiers et technologiques.
Dans les exemples de l' atelier de Confection Bibiane-Angele,
du Garage Andre YUNDZO et de l'entreprise de construction Joseph
ANDONG,
l' acti vi te
demarre
avec
un
tres
faible
ni veau
d'immobilisations. Celles-ci s'accroissent au fur et a mesure que
le volume de la production et le niveau de la demande l'exigent.
Les
problemes
de
surdimensionnement
et
de
surcapacite
sont
marginalises.
lIs le sont d'autant plus que dans ce secteur le
capital est caracterise par sa grande mobilite.
Nos trois
chefs d' entreprises beneficient manifestement
d'un atout technologique grace a une double formation theorique
et pratique dont on peut relever l'importance en termes de gains
en
cout,
en
temps
de
travail
effectif,
en
productivite,
en
qualite du produit, en plasticite des structures de l'offre.
Toutefois
quelle
que
soit
l' importance des
determinants
technologiques, ilsne peuvent pas occulter le probleme reel du
financement
des
investissements
et
de
l'exploitation
des
entreprises analysees.
Ce probleme meri te meme une
attention
particuliere dans la mesure ou
les PME du secteur informel en
general
et
celles
qui
nous
concernent
en
particulier
sont
d'office exclues du credit bancaire. Cette exclusion complique
le handicap de la modicite des
fonds propres c'est-a-dire la
capaci te de ces entreprises a faire
face
a
leurs besoins de
financement. Elle temoigne aussi et surtout de la passivite du
systeme financier officiel et de son incapacite a s'adapter aux
realites et exigences des PME.
De ce point de" vue, nous avons souligne le role plus actif
des
reseaux
informels
d'epargne
et
de
credit
dans
la

- .)IJ8-
monetarisation
de
cette
partie
de
l'economie
et
dans
l' accroissement
des
possibili tes
de
financement
de
nos
entreprises. Dans chacun de nos exemples les realisations liees
au
developpement
de
l'entreprise
au
a
l'amelioration
des
condi tions
de
vie des
entrepreneurs
et
de
leur
famille
sont
favorisees
par
les
credits
obtenus
aupres
des
tontines.
Les
conditions qui y sont creees ainsi que le volume des ressources
qui y sont mobilisees resultent d'un effort d'harmonisation des
besoins et
des moyens.
Cette evolution vers
l' intermediation
directe s'est imposee a ces agents non financiers pour au moins
trois raisons
- Celle-ci
permet une meilleure allocation des res sources .
Elle
supprime
les
couts
implicites
et
explicites
de
l'intermediation bancaire ;
-
Elle
reduit
les
risques
d'impayes du
fait
d'une plus
grande implication des differentes parties prenantes que sont les
tontiniers dans la gestion des res sources pretees.
- Elle redonne a l'information dans les PME sa veritable
place.
La prise en compte par les PME informelles de l'importance
du choix des res sources et de celle des conditions de celles-ci
participe
de
l'interet
qu'elles
accordent
aux
problemes
de
gestion. Et, meme si l'organisation reste sommaire comme dans les
exemples de PME modernes analysees ci-dessus, nos PME informelles
sont conscientes que leur perennite depend de la qualite de leur
gestion. Le principe de la determination des prix a iong terme
l'illustre bien.
Si lIon veut dresser le bilan de l'activite de nos trois PME
du secteur informel au lendemain de la devaluation,
il pourrait
se presenter de la maniere suivante
Pour la confection textile Bibiane-Angele
Le
ni veau
des
investissements
lui
permet
d' assurer
une
activite reguliere faiblement perturbee par le rencherissement
du cout des equipements et matieres premieres. La raison majeure
ici
est
le
faible
niveau des
equipements
et
l' independance

- 509 -
relative
par
rapport
a l'evolution des
couts
des
matieres
premieres. Nous avons sur ce point releve que la participation
dans la production se ramene au service rendu, a la fayon qui est
facturee aux clients,
ceux-ci apportant souvent eux-memes les
intrants.
Pour les deux autres exemples,
la
situation semble moins
sereine.
Le
niveau
de
l'exploitation
s'est
plus
ou
moins
maintenu.
Leurs
activites
sont
en effet
plus
vulnerables
et
necessitent de la part des clients un niveau de depenses plus
eleve qui subit davantage le contre-coup de la devaluation du
franc CFA.
Ainsi
contrairement
aux
PME
modernes,
ces
entreprises
restent presentes sur le marche meme si leur production connait
un ralentissement.
On peut cependant malgre les clivages
soulignes entre PME
modernes et PME informelles reconnaitre que l'une des difficultes
commune a ces deux types d' entreprises est leur faiblesse en
capitaux propres.
On
peut
par
contre
affirmer
qu' en
comparaison
des
PME
modernes
la
force
des
PME
informelles,
reside
dans
leur
dynamique propre, celle qui les conduit aujourd'hui a des efforts
de specialisation et de structuration de leur cadre technique et
financier.
11
L'OR1G1NAL1TE DE L'ETUDE
Elle tient
-
En premier lieu aux
types d' entreprises etudiees dont
celles
du
secteur
informel
qui
jusqu'ici
semblaient
marginalisees.
En
second
lieu
a l'analyse de leurs comportements
d'endettement par rapport au financement bancaire.
- En troisieme
lieu a la demarche utilisee qui repose pour
l'essentiel
sur
l'exploitation
des
interviews
directes,
des

., ,'dO-
resultats d'enquetes,
des
documents comptables et financiers
recueillis aupres des entreprises, des banques et autres tiers
interesses a la vie de ces entreprises.
En
quatrieme
lieu
l' effort
de
theorisation
des
comportements decrits en prenant appui sur la theorie existant
sur le sujet.
Sans qu I il s' agisse veri tablement d' une innovation,
nous
apportons
notamment
dans
le
domaine
de
l'informel
une
confirmation de la place qu'il occupe, du volume important des
res sources qu'il-peut capter et mobiliser, de la dynamique qu'il
traduit.
S'agissant des PME modernes,
nous confirrnons leur faible
impact actuel sur l'activite economique du fait de leur quasi
marginalisation.
Cette originalite doit etre nuancee par les limites que pe ut
presenter notre
etude.
III
LES LIMITES DE L'ETUDE
Elles sont
liees a
la representativi te de
la population
consideree. Nous avons prefere une analyse de type monographique
mais n'avons pas pu aller au-dela de 6
exemples de PME. Leur
localisation dans la metropole economique par contre ne semble
en rien denaturer le sens des conclusions. Nous avons autant que
possible etale les etudes de la creation de l'entreprise a la
periode
apres
la devaluation
du
F CFA soi t
sur
une
periode
d'environ 10 a 15 ans.
D'une fa90n generale, les PME camerounaises surtout celles
du secteur officiel de l'economie sont fortement affectees par
la crise qui secoue l'ensemble de l'economie nationale. L'etape
la plus critique,
celle qui compromet le plus leur chance de
developpement, reste toutefois la
liberalisation de l'economie
camerounaise et la devaluation du F CFA.

· 511 -
Nous n'avons pas l'ambition de proposer aces entreprises
des recettes infaillibles. Mais nous pensons que le sauvetage des
PME ne peut se faire ni en dehors d'elles-mernes,
ni en dehors
d'un cadre economique et financier qu'elles devront egalement
entretenir. 11 convient de
proposer a ce niveau deux axes de
relexion.
En premier lieu, on pourrait mettre en valeur les arguments
generalement invoques pour appuyer l'interet de la strategie des
fili~res
et
des
strategies
d:integration
verticale
et
qui
reposent sur les'possibilites d'arnelioration de la position des
entreprises
et
plus
particulierernent
des
PME.
Les
avantages
s'observent alors aussi bien vis-a-vis des fournisseurs que des
unites concurrentes.
- Par rapport aux fournisseurs,
la PME qui fabrique elle-
meme sa matiere premiere ou qui peut l'obtenir localement est
plus autonome et maitrise mieux les couts de ses consommations
intermediaires puis ses delais d'approvisionnernent. On se trouve
ainsi en presence d'une strategie qui tend a reduire les couts
de
production.
Cette
qualite
rnanque
aux
PME
eamerounaises
etudiees.
Par
rapport
aux
unites
eoneurrentes,
le
defaut
de
fonctionnement a l'interieur d'une fili~re et en dehors d'une
activite integree cree de nombreuses ruptures de rythme dans la
production
des
differents
cas
analyses.
11
apparait
done
egalement
comme
un
facteur
d'aggravation
des
couts
et
de
reduction de
la competi ti vi te des
produi ts
de
ces
unites
de
production.
En
deuxi~me
lieu,
Nous
reprecisons
l'existence
d'une
correlation positive entre l'endettement et
l'autofinancement
c'est-a-dire la place primordiale qu'occupe le credit dans le
processus d'accurnulation.
11 importe qu'au centre de cette analyse se trouve le taux

- 512 -
d'int~r~t. On peut le voir ~
travers la formule suivante qui
represente le levier financier :
EB
= p + (p - i) 0 - a
CP
tel que
pour
p - i
> 0 c' est-a.-dire pour p > i,
l' effet de
levier
tradui t
l'impulsion que
l' endettement donne au
rythme
d'accumulation des capitaux propres d~signes a. travers le rapport
de
l'~pargne brute aux capitaux propres. La condition pour que
le levier joue pleinement est donc que le taux de profit p soit
?up~rieur au niveau du taux d'int~r~t 1.
Le taux d'int~r~t est, dans cette formule identifi~ au cout
des
capitaux
empruntes,
le
v~ritable
probleme
etant
la
determination de i.
La prise en
compte de la specifici te de
l'investissement dans les PME camerounaises en g~n~ral et dans
celles que nous ~tudions en particulier, nous oblige a. insister
sur la valeur donnee a. i.
Dans notre chapi tre r2 ,
nous avons
defini un taux d'int~r~t precis qui rend compte des conditions
reelles de credit aux PME. Ce taux d'interet, nous l'avons ecrit
i'
+ i",
OU
i'
est
l'element
explicite
et
i"
l'element
implicite. La premiere composante est celle qui est connue, celle
qui apparait dans le contrat de credit.
La deuxieme ne figure
nulle part mais
n'en est pas moins
importante.
Elle
traduit
l'impact des facteurs financiers,
technologiques et de gestion
sur le coQt de l'endettement qui s'~leve au fur et a. mesure du
durcissement des conditions particulieres de l'activit~.
La d~termination mini tieuse du taux d' interet s' impose alors
cornme une mesure de fiabilisation des ~tudes de faisabilite des
projets d'investissement des PME. Car, la meilleure garantie d'un
investissement demeure la rentabilite de celui-ci.
Nous
nous
efforcerons
dans
des
travaux
ul t~rieurs
d'approfondir ces axes de reflexion et d'elargir l'~chantillon
de notre analyse de maniere a. reduire les limites de la presente
etude.
2
-
Voir chapitre I
supra p. 97 -
99

- 513 -
ANNEXE
GUIDE DES ENTRETIENS
I
LA STRUCTURE DU CAPITAL
1°)
Comment s'est constitue le capital de la Societe?
2°)
- Vos enfants savent-ils qu'ils detiennent une part du
capital de votre entreprise ?
3°)
Quels sont les criteres d'attribution d'un
pourcentage du capital a chaque enfant?
Axe de reflexion : l'age,
la soumission, le
dynamisme,
le dip16me, vos projections ...
4°)
Avez-vous pense a ouvrir le capital a des personnes
aut res que votre famille et vos amis ?
11
LA
DIRECTION DE L'ENTREPRISE
1°)
Quelle est la structure de l'entreprise ?
2°)
Combien de directions compte-t-elle ?
3°)
Combien avez-vous de cadres exterieurs ?
4°)
A quelles directions les affectez-vous ?
5°)
Quelles sont les directions strategiques de
l'entreprise ?
6°)
De qui dependent-elles ?
7°)
A formation egale preferez-vous
recruter un
membre de votre famille ou une personne exterieure ?
8°)
Comment preparez-vous vos enfants a
assurer votre
releve ?
III
LA FONCTION FINANCIERE
1°)
Qui est le responsable financier de l'entreprise
2°)
Quelles sont ses attributions?
3°)
Quels sont les documents de base de la direction

- 514 -
financiere ?
4°)
Comment appreciez-vous l'efficacite de la fonction
financiere ?
Criteres d'appreciation
: le benefice realise,
le niveau de l'activite, l'equilibre du budget,
le choix des sources
de financement ...
5°)
Quelles sont vos principales res sources ?
Reponses proposees
: les fonds propres,
les
credits aupres des amis, le financement bancaire,
l'epargne tontiniere, les revenus paralleles.
6°)
Comment classez-vous vos creances ?
Facteurs suggeres
: la facilite d'acces au
credit, le volume du credit, le taux d'interet,
le
delai de mobilisation, la nature des garanties
exigees, le terme du credit.
IV
LA FONCTION DE PRODUCTION ET DE COMMERCIALISATION
1°)
Qui supervise cette fonction ?
2°)
Quels sont vos criteres de choix du responsable de
la production : la confiance,
la probite,
la
competence ?
3°)
Comment etes-vous rentre dans le secteur ?
4°)
Comment avez-vous choisi vos equipements : valeur,
performance, etendue du marche ?
5°)
Comment a ete assuree la formation de l'equipe de
production : formation sur le tas, stage,
seminaire ?
6°)
Faites-vous des tests de recrutement : directement
ou par le biais de centres specialises ?
7°)
Quels sont les problemes particuliers que pose la
fonctibn de production ?
8°)
Avez-vous un rytl~e de production regulier ?
Causes des perturbations
: la frequence des

- 515 -
pannes, la mauvaise connaissance des equipements,
le niveau du fonds de roulement, celui de la
demande, le rythme d'approvisionnement en matieres
premieres et consommations
intermediaires.
go)
Avez-vous un responsable des ventes~et quel est
son
role?
10°) -
Quels elements influencent le plus le niveau de
vos ventes ?
Reponses proposees
: le prix du produit,
la
specificite du produit, la proximite du
consommateur,
la publicite ...
V
LA GESTION
1°)
Avez-vous un tableau de bord : des previsions, des
objectifs
definis, des reperes ?
2°)
Votre famille intervient-elle dans la prise de
decisions? Quelle place y occupent vos amis et
vos
collaborateurs ?
3°)
A quel age vos enfants rentrent-ils dans
l'entreprise et pour quelles raisons ?
4°)
Avez-vous des conseils en gestion ?
5°)
Comment remunerez-vous les services exterieurs ?
6°)
Faites-vous du credit a vos clients? En obtenez-
vous de vos fournisseurs
?
7°)
Quelles relations entretenez-vous avec les autres
entreprises de votre branche d'activite ?
8°)
Pensez-vous a un regroupement de vos activites ou
a leur formalisation ?
go)
Quelles sont vos preoccupations majeures ?
Reponses proposees
:
la rentabilisation des fonds
propres, I' amelioration de vos conditions de vie,
l'education de vos enfants, la construction de
la maison familiale, le remboursement des credits
obtenus, votre image de marque, le developpement
de votre entreprise,
sa perennisation.

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534 -
TABLE DES MATIERES
PAGES
INTRODUCT I ON GENERALE
.
3
Interet de l' etude
.
7
Obj et de l' etude
.
9
Hypotheses et methodologie
.
12
Iere PARTIE
- L'ANALYSE DU PROCESSUS DE
DEVELOPPEMENT DES PME CAMEROU-
NAISES : L'Importance du Pro-
bleme du Financement...........
15
CHAPITRE 1-
L'ANALYSE DES PME CAMEROUNAISES :
Mode d'Organisation et Meca-
nismes de Fonctionnement... ....
19
Section I
La Definition et les Problemes
des PME Camerounaises..........
22
Paragraphe 1
Les Definitions Generales
de 1a PME......................
22
Paragraphe 2
Definition de la PME
Camerounaise. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
24
Paragraphe 3
Caracteristiques et Problemes
de la PME Camerounaise..........
27
Paragraphe 4
Typologie des PME...............
40
Section 11-
Le Probleme General du Finan-
cement des PME : l'Importance
des Ressources Externes...... ...
50
Paragraphe 1
L'Autofinancement...............
51
Paragraphe 2
Le Financement externe des PME :
Le Role de l'Effet de Levier
Financier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
65
Section III
La Specificite du Probleme de
l'Investissement dans les PME...
74
Paragraphe 1
Les differentes Formes
d'Investissement................
75
Paragraphe 2
Les Determinants de la
Decision d'Investissement.. .....
90

535
CHAPITRE 11
LE PROBLEME DE L'ADAPTATION
DES PME AUX CONDITIONS BAN-
CAIRES DE FINANCEMENT.....
100
section I
L'Appareil Conventionnel de
Financement et les Exigences
du Recours au Credit Bancaire...
105
Paragraphe 1
Le Role des Banques dans le
Financement de l'Investissement
des PME Camerounaises...........
106
Paragraphe 2
L'Importance Theorique du Niveau
du Taux d'Interet...............
133
Paragraphe 3
L'Apport des Lignes de Credits
Exterieurs dans le Financement
des PME Camerounaises...........
142
Paragraphe 4
L'Impact de la Devaluation du Franc
CFA sur le Financement des PME..
155
Paragraphe 5
Le Probleme du Recouvrement
des Credits Bancaires
a ux PME.........................
164
Section 11-
Les Mesures d'Accompagnement du
Financement Bancaire des PME....
171
Paragraphe 1
Les Mesures d'Ordre Fiscal......
173
Paragraphe 2
Les Mesures d'Ordre Institutionnel
180
Paragraphe 3
Analyse critique du Role Central
du FOGAPE dans l'Ensemble des
Mesures d'Accompagnement du
Financement des PME..............
193
Section III
Circuits Informels de Finan-
cement : Manifestation de
Complementarite ou de
Concurrence ?...................
196
Paragraphe 1
Tontines et Creation de la
Liquidite en Faveur des PME......
198
Paragraphe 2
Gestion du Risque et Fluidite
de l'Intermediation dans
la Tontine.......................
222
Paragraphe 3
La Nature des Liens Banque-Tontine
227

536
IIeme Partie
L'ANALYSE DE QUELQUES EXPERIENCES
DE PME CAMEROUNAISES DU SECTEUR MODERNE
ET DU SECTEUR INFORMEL...........
236
CHAPITRE III
LES DIFFICULTES DE DEVELOPPEMENT DES PME
INDUSTRIELLES : ETUDE DE TROIS ENTREPRISES
DU SECTEUR MODERNE
241
Section I
Les Problemes Financiers de la
PME Camerounaise ou la Contrainte
de la Monnaie de Credit :
l'Exemple de l'Entreprise
Milky-Way
.
245
Paragraphe 1
La Presentation de l'Entreprise ...
246
Paragraphe 2
Analyse des Implications de la
Monnaie de credit : le Cout
Financier et le Cout de la
Competi ti vi te
.
256
Paragraphe 3
Les Perspectives de Solutions
Alternatives au probleme des
PME camerounaises
.
285
Paragraphe 4
Le Cout de la Competitivite des
Produi ts Milky-Way
.
290
Section 11-
Les Risques du Probleme Technologique
dans les PME : l'Exemple de
l'Entreprise "Le Camerounais" . . . . .
305
Paragraphe 1
Presentation de la Societe
"Le Camerounais"
.
307
Paragraphe 2
L'Importance du Choix des
Equipements : l'Impasse
Technologique de l'Imprimerie
"Le Camerounais"
.
314
Section III
Les Problemes de Gestion des PME
Carnerounaises : l'Exemple de la
Societe CONFITEX
.
344
Paragraphe 1
Presentation de l'Entreprise
.
345
Paragraphe 2
La Nature et les Causes des
Difficultes de la Societe CONFITEX
350
Paragraphe 3
Les Manifestations des Problemes
de Gestion
.
354

537
CHAPITRE IV
LES CONDITIONS DE DEVELOPPEMENT
DES PME DU SECTEUR INFORMEL :
ANALYSE DE TROIS CAS
.
367
Section I
Definition Traditionnelle et
Tentative de Redefiniton
.
372
Paragraphe 1
Les Definitions
Traditionnelles.
372
Paragraphe 2
Specificite du Secteur Informel..
384
Section 11-
Analyse du Secteur Informel Camerounais
Des Exemples de Dynamique propre.
407
Paragraphe 1
La Description des cas : La preva~ence
de la Formation..................
408
Paragraphe 2
Analyse Comparative de l'Activite
dans les Trois Entreprises.......
415
Paragraphe 3
Les Facteurs Determinants de
l'Investissement
dans le
Secteur Informel.................
426
Section III
La Specificite du Probleme du
Financement des PME Informelles..
451
Paragraphe 1
La Nature des Ressources des PME
Informelles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
452
Paragraphe 2
Mecanismes et Caracteristiques
Propres du Financement des
PME Informelles..................
462
Paragraphe 3
Organisation Interne et Gestion
des Ressources des PME
Informelles
482
CONCLUSION GENERALE
500
ANNEXE-GUIDE DES ENTRETIENS..........
513
BIBLIOGRAPHIE
516