ECOLE DES HAUTES ETUDES EN SCIENCES SOCIALES (E.H.E.S.S)
••••PARIS----
Formation Doctorale
- Socio-économie du développement -
Poctorat nouveau régime
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CONSEIL AfR'C~\\~ENT sUPE~UeUI\\
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par
Francis Augustin Akindès
Directeur de thèse: Monsieur Jean Coussy
Jury :
Mrs' M. Augé : Directeur de recherche à l'E.H.E.S.S., Paris
J. Coussy : Maître de Conférence à l'E.H.E.S.S., Paris
1. Sachs: Directeur de recherche à l'E.H.E.S.S., Paris
R. Mahieu: Maître de Conférence à Paris 1
Juin 1990
REM E R CIE MEN T S
Toute
ma gratitude va au Professeur Jean COUSSY qui
a
bien voulu diriger cette thèse.
Cette
étude
s'inscrit dans le
cadre
des
programmes
d'activité de l'UR: MSA (Maîtrise de la Sécurité Alimentaire) de
l'ORSTOM
que
dirige
G.
COURADE i
qui je sais gré
de
m'avoir
accordé sa confiance,
l'encadrement scientifique ainsi quel'ap-
pui
matériel
et financier nécessaires i
la réalisation
de
ces
travaux.
Je tiens également i
exprimer ma sincère reconnaissance
i
MM.
Jean ROCH (CIRES-ORSTOM),
Jacqueline PELTRE-WURTZ)Moriba
TOURE
(lES),
Michel SCHIRAY (MSH-CIRED-CNRS),
Papa Samba
NDAW
(CIRES),
Daniel
Mianno
KADJA
(lES)
et
aux
Professeurs
G.
NIANGORAN BOVAH (lES),
F.
Nguessan KOUAKOU
(lES),
S.
CALABRE
(Fac.
de
Sciences
Economiques
de
Grenoble),
Alice
ODOUNFA
(Ministère du Plan.
Service des Statistiques) qui,
à un stade ou
i
un
autre,
ont
suivi
ce
travail
et
m'ont
apporté
leurs
suggestions.
Que Cl. VIDAL et M. Le PAPE, qui m'ont proposé ce sujet
et
apporté leurs critiques et conseils au cours de leurs
brèves
missions,
soient assurés de ma très profonde gratitude.
1
1
t
Enfin,
mes remerciements vont aux collègues et amis de
\\ ,
l'ORSTOM
Petit-Bassam,
particulièrement
à MM.
Ori
BOIZO,
P.
1
1
1
LIVENAIS, Abdou TOURE,
Ibo GUEHI, AFFOU Yapi, Ernest OTTE et à J.
iÎ
GOVOETCHAN qui a assuré la mise en forme de ce document.
1
1
!iii
1
A
Monsieur Marc AUGE ."
Président de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales
Paris
Aux
Familles AKINDES et SEZAN . . .
A
mon Epouse et à mon Fils ...
SOM MAI R E
INTRODUCTION
1 0
1°) De la problématique générale du secteur informel à sa
projetion dans les filières agro-alimentaires
11
2°) problématique et objectifs de l'étude
22
3 0) Techniques et méthodes d'approche
31
4°) Plan de llétude
37
Chapitre
l
- Dépendance
alimentaire,
mimétisme et urbanisation
en Côte-d'Ivoire
41
Section 1 - Dépendance
alimentaire et urbanisation
état
des lieux
42
Section 2 - Côte-d'Ivoire: "La ville plaide non coupable"
50
Section 3 - Secteur informel alimentaire et résistance
au mimétisme dans la dépendance
65
CONCLUS ION PARTIELLE
70
Chapitre
II - Croissance urbaine et développement de l'alimenta-
tion extérieure
71
Section 1 - Etapes de l'urbanisation et processus d'ivoiri-
sation de l'informel alimentaire
72
Section 2 - Structures de consommation et catégories d'ali-
ments vendus
84
Section 3 - Quelques contraintes à la création des unités de
production
102
Chapitre III - Production alimentaire et participation
communautaire
" . . . . . . . . . . . . . . . .
109
6
Section 1 - Caractéristiques socio-démographiques des micro-
négociants
110
Section 2 - Analyse des caractéristiques de la main-d'oeuvre
de l'informel alimentaire
119
Section 3 - Structures familiales immédiates des micro-
négociants
124
•
CONCLUSION PARTIELLE
134
Chapitre
IV -
Stratégies
d'investissement
et
rationalité
des
micro-négociants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 3 6
Section 1 - De la décision d'entreprendre à la
constitution
du capi tal
137
Section 2 - Evaluation et répartition du capital initiale-
ment investi
149
Section 3 -
Investissement économique et rationalité des
acteurs de l'informel alimentaire
157
CONCLUSION PARTIELLE . . . . . . . . . . . . . . . . . .,. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1~4
Chapitre
V - Circuits
et
pratiques
d'approvisionnement
dans
l'informel alimentaire
166
Section 1 -
Ravitaillement en produits intermédiaires
167
Section 2 - L'attiéké et le r i z : de l'approvisionnement à
la consommation
1 72
Section 3 -
Pratiques liées à l'approvisionnement auprès des
circui ts "informels"
182
CONCLUSION PARTIELLE
186
7
Chapitre
VI - Demande alimentaire informelle et stratégie des
.
... l
t·
pr1x a
a consomma 10n
. 188
Section 1 - Espace alimentaire et rapports offreurs-
consommateurs
189
Section 2 - Nature, mesure et prix des plats consommés . . . . 199
CONCLUSION PARTIELLE .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. 213 ,
Chapitre
VII - Rentabilité des opérations commerciales,
comportement de consommation et d'épargne dans le
secteur informel alimentaire
214
Section 1 - Appréciation du revenu net par catégorie de
restaurant
215
Section 2 - Analyse des données sur la consommation des
ménages d'acteurs
Section 3 - Les comportements d'épargne dans l'informel
alimentaire
241
CONCLUSION PARTIELLE
246
Chapitre VIII -
Importance socio-économique de l'informel alimen-
taire
".. .. .. .. .. .. .. .. ..
249
..
Section 1 -
Contribution
de l'informel alimentaire
a
l'économie urbaine
250
Section 2 - Place de l'informel alimentaire dans le système
alimentaire urbain
253
Section 3 - Conditions macro-économiques de survie de
l'informel alimentaire
261
CONCLUSION GENERALE
270
8
INTRODUCTION GENERALE
9
La
question
alimentaire fait depuis
quelques
années
dans les pays du Tiers-monde et plus particulièrement en
Afrique
sub-saharienne,
l'objet
d'une attention particulière de la part
des
organisations internationales et des instances de
décisions
politiques,
en
vue d'une meilleure maîtrise de
son
évolution.
Bien
qu'en Côte-d'Ivoire,
ne se posent pas de graves
problèmes
alimentaires
telle que la famine,
la problématique
alimentaire
~
n'est pas absente des politiques économiques.
Malgré cet intérêt
affiché
de
part et d'autre,
l'analyse du
système
alimentaire
présente
des disparités.
Par rapport aux études consacrées à la
production et à la distribution,
celles relatives à la consomma-
tion finale restent très marginales. Pourtant la croissance démo-
graphique,
couplée à la forte urbanisation,
compliquent ce pro-
blème de consommation alimentaire qui, devenu le noeud gordien de
la politique sociale des pays en développement,
mériterait
plus
de
suivi
afin que les évolutions et les modifications
qu'elles
peuvent
entraîner
puissent être maîtrisées surtout en
ces
pé-
riodes d'ajustement où l'alimentation est une corde sensible.
C'est dans ce cadre général des relations entre
crois-
sance
urbaine
et alimentation des populations que nous situons
notre
étude intitulée "Urbanisation et développement du
secteur
informel alimentaire en Côte-d'Ivoire: l'exemple d'Abidjan".
Notre objet d'étude appartenant à deux grandes familles
de questions actuelles (secteur informel et système alimentaire),
nous nous arrêtons à ce niveau pour situer,
à partir de considé-
,
rations
théoriques,
leurs
points d'articulation par rapport
a
notre problématique.
10
1°) De la problématique générale du secteur informel à sa
projection
dans les filières
agro-alimentaires.
a) Considérations générales sur le secteur informel
Le
concept "secteur informel" est à l'origine,
depuis
deux décennies,
d'une
abondante littérature sur
les
pratiques
sociales
et
le travail dans les villes
du
tiers-monde.
A
ce
..
titre,
il
a
fait
l'objet de débats épistémologiques
quant
a
l'adoption
même du concept pour caractériser l'économie
urbaine
marginale.
Comme le souligne Cl.
De Miras,
"La montée du thème
est
sans doute à rapprocher de l'évolution récente des
sociétés
urbaines du tiers-monde dans lesquelles la dégradation de
ltéco-
nomique
appelle
une extension massive des stratégies de
survie
des
milieux populaires et un recul du niveau de vie des
classes
moyennes" (1).
Cette
notion de secteur informel est strictement
liée
au
phénomène d'urbanisation accélérée et au
chômage.
Elle
est
apparue
au
début des années 70 avec le lancement
du
Programme
Mondial
de
l'Emploi
par
le Bureau
International
du
Travail
(B.I.T.) et la publication du rapport sur le Kenya qui mettait en
évidence
le fait que l'exode rural et la croissance urbaine
qui
en est une conséquence n'entraînaient pas automatiquement un taux
de
chômage élevé mais plutôt le développement de
petites
acti-
vités
qui
permettaient
aux
migrants ruraux
et
aux
citadins
n'ayant pu avoir accès aux emplois de vivre et de
survivre.
Les
(1) Claude De Miras, Le "secteur informel" : une notion forte ou
un concept mou? La fausse guestion.
Doc.
ronéo,
ORSTOM,
Quito, août 1988; p.
2.
11
travaux
de terrains et autres investigations qui se
succèderont
après ce fameux rapport sur le Kenya mettront évidemment l'accent
sur l'importance du secteur informel en termes d'emploi.
Sur la dénomination de cette frange d'économie
urbaine
des
pays en voie de développement,
plusieurs concepts s'affron-
tent dans le champ de la production littéraire relative au
déve-
loppement
"économie non officielle",
"économie
souterraine"
"parallèle",
"secteur
de subsistance",
"petite production mar-
chande",
"économie officieuse".
Bien que le
débat n'ait pas été
tranché,
l'usage du concept "secteur informel" tend à se généra-
liser pour la simple raison que les organisations internationales
aient
rapidement adopté cette appellation malgré la
dysharmonie
entre
cette dernière et la réalité (1).
Mais la persistance
de
l'usage
de
ce
concept depuis quelques années aura
balayé
son
lIinsuffisance analytique" et l'ambiguité même de son utilisation.
L'accoutumance qui en résulte lui confère ainsi toute sa
légiti-
mité.
A
en juger par sa place dans les discours politiques,
le
caractère
"opérationnel" de ce concept n'est plus à remettre
en
question.
Même dans le champ du descriptif,
il a acquis droit de
cité.
A titre d'exemple,
par rapport à la publication de
Vivre
et survivre dans les villes
africaines,
IEDES,
PUF 1922 et du nO
82
de
la Revue Tiers-Monde consacré aux
activités
économiques
'marginales,
la livraison du nO 114 de la même revue n'offre plus
le
moindre doûte sur l'usage généralisé de ce concept.
Si
dans
les
deux premières publications il y avait encore place pour
un
(1) F.
Akindès,
Réflexions
sur les concepts "informel" et "non
structuré in Secteur informel ou non structuré:
des
appel-
lations contestées,
Abordage nO 2,
Amira,
Paris déc.
1986;
p.
2.
12
débat,
le
principe de l'adoption du concept semble être
acquis
dans le dernier.
Comme le fait remarquer Cl.
De Miras (1), sous
des
titres
aussi divers que "Relations industrielles et
indus-
trialisation" (G.
C.. aire),
"La transnationalisation,
la crise du
développement et la fin du Tiers-Monde" (S. Latouche) "La déséta-
tisation
en
Afrique
sub-saharienne"
(P.
Jacquemot)
et
"En
Algérie, une "nouvelle" valeur,
l'auto-emploi" ?
(C. Bernard), la
référence à l'informel est constante, que ce soit pour:
- expliquer
sa place dans les relations
industrielles
(syndicalisation,
fragmentation du maché du travail,
participa-
tion ... ) (G. Caire), en précisant que la distinction entre formel
et
informel est "terminologiquement malheureuse sans doute"
(p.
238) ;
- affirmer que,
à propos de la transnationalisation du
réseau
de la croissance,
"une des formes de réaction
les
plus
flagrantes
est
l'économie informelle comprise ici
comme
auto-
organisation
pour
la réalisation d'objectifs de survie
( . . . . )"
(S. Latouche; p. 268);
- montrer comment le recul de l'intervention de
l'Etat
dans
les
nations
subsahariennes
se
traduira
en
ville
par
"l'informalisation
de
nombreuses
activités
économiques"
qui
"prendra
une ampleur grandissante avec la perte des emplois liés
...a l'Etat et surtout avec la perte des activités de production
nationale,
de
moins
en
moins
protégées
par
les
barrières
douanières et contingentaires et de moins en moins soutenues
par
le régime des subventions" (P. Jacquemot, p. 291);
(1) Cl. De Miras, Le "secteur informel" ... op. cit. p.S.
13
- envisager
comment
la petite
production
marchande,
dont
la libéralisation croissante restait en principe
contrôlée
par
l'Etat algérien,
risque d'osciller "entre la réglementation
et la clandestinéité" (p. 317).
L'auteur rappelle,
au
passage,
qu'en
général,
"ces
activités ont été intégri-es dans un
champ
d'investigation vaste (parfois aux contours flous),
le "secteur"
non structuré,
dont la petite production marchande est le coeur"
(C. Bernard, p. 296).
Si la dénomination des économies non réglementées
sem-
ble se cristaliser dans le concept "secteur informel",
son champ
définitionnel reste partagé entre trois théories économiques
- La théorie classique de la concurrence,
- La théorie structuraliste et dans une moindre
mesure
le keynésianisme .
. La
première
tendance, qui
a orienté
l'analyse
du
secteur informel à partir des définitions multi-critères et fonc-
tionnelles,
tire
sa
légitimité de la théorie classique
de
la
concurrence;
celle-ci
y a vérifié les
hypothèses
d'atomicité,
d'homogénéïté
et
de fluidité,
de transparence et de
mobilité.
Pour
ces auteurs,
le secteur informel est une
illustration
de
l'économie de marché "pure et parfaite", mais segmentée, c'est-à-
dire non connectée au marché formel.
La plus connue de ces défi-
nitions est celle proposée par le rapport du BIT sur le Kenya qui
comprend
sept critères
facilité d'entrée,
marchés de concur-
rence non réglementée,
utilisation de ressources
locales,
pro-
priété
familiale des entreprises,
petite échelle des activités,
technologies
adaptées à forte intensité
de
travail,
formation
acquise en dehors du système scolaire.
14
. La théorie structuraliste récupérera la faiblesse des
"classiques"
qui
réside
essentiellement dans la non
prise
en
compte des interrelations entre les secteurs (formel et informel)
que l'analyse semblait dissocier.
C'est plutôt le rôle joué
par
le
secteur informel périphérique par rapport au capitalisme
qui
commandera
l'élaboration de sa définition.
Le secteur
informel
est
alors défini comme un produit du sous-développement.
Il est
une
réserve
de main-d'oeuvre dans laquelle le
secteur
moderne
puise la force de travail nécessaire à sa
reproduction.
L'excé-
dent
de
main-d'oeuvre non utilisée permet alors
d'exercer
une
pression à la baisse sur le niveau des salaires .
. Les
keynésiens et les monétaristes,
quant à eux, ne
semblent
pas avoir élaboré d'analyse particulière du
phénomène.
Tout
ce
que
l'on peut dire en la matière est
que
le
secteur
informel
est
identifié par le planificateur comme
"les
sables
dans lesquels se perdent les effets du multiplicateur:
en
cela
il
n'émousse
pas l'efficacité des
mesures
interventionnistes,
mais il est la cause d'une mauvaise appréciation du niveau requis
des interventions de l'Etat" (1).
Le
problème
des définitions proposées par
les
trois
écoles
de
pensée est qu'elles ne font pas la distinction
entre
conception idéologique et caractéristiques objectives du
secteur
informel ce qui,
empiriquement les fait tourner en rond. Comment
peut-on
mesurer le phénomène à partir de ces multiples
critères
des classiques?
Où est la ligne de partage entre le "formel" et
l'informel"
que
les dépendantistes se proposent
d'articuler
?
(1) J.
Charmes,
Débat
actuel
sur le secteur
informel, Revue
Tiers-Monde t. XXVIII, nO 112, Oct.-Déc. 1987; p. 858.
15
Aussi
les
différences d'approche du phénomène en Afrique et
en
Amérique
Latine où le phénomène a été plus largement étudié
n'a
pas
aidé
à l'articulation de l'empirique au
théorique.
Si
en
..
Amérique
Latine
l'accent
est mis sur
le
menage,
en
Afrique
l'unité de production semble être privilégiée.
Mais au fur et à mesure que les travaux de
terrain
se
poursuivent
les tentatives de définition se bâtissent autour des
critères
tels que le non enregistrement administratif et le
non
enregistrement statistique.
Les définitions les moins contestées sont celles
selon
lesquelles
le
secteur informel urbain est "constitué par
l'en-
semble
des
activités non agricoles à ne pas
être
enregistrées
régulièrement
et
distinctement
par les
enquêtes
statistiques
classiques" (1).
L'artisanat
alimentaire
d'une
façon
générale
étant
partie
intégrante de ce secteur,
il est susceptible de se
voir
appliquer ces schémas d'analyses théoriques.
Il occupe également
une position particulière par rapport au système alimentaire dans
son
ensemble,
car
il
est
un
maillon
de
la
filière
agro-
alimentaire.
b) La part de l'''informel'' dans les filières agro alimentaires
Dans
une
intéressante
étude
sur
l'industrie
agro-
alimentaire analysée en terme de filière,
ph.
Hugon (2) faisait
ressortir
la
complexité du système
agro-alimentaire
des
pays
(1) J. Charmes, op. cit . . . . . p. 859.
(2) Ph. Hugon. L'industrie agro-alimentaire. Analyse en termes de
filières,
Revue Tiers-Monde t.
XXIX,
nO 115,
juillet-sept.
1988.
16
africains au sein duquel il distingue quatre principales filières
selon leur mode d'organisation,
de régulation et
leur
dimension
spatiale
...
- les filières a régulation domestique (locales)
- les filières à régulation marchande (régionales)
...
- les filières a régulation étatique (nationales)
...
- les filières a régulation capitaliste.
Ce
schéma théorique sera pratiquement appliqué par les
chercheurs
du groupe Altersial (ENSIA-CIRAD-GRET) à
leur
étude
sur
la problématique de la valorisation des céréales locales
où
il
était question de "mettre en évidence à quel niveau de chaque
filière
peuvent se situer les politiques de valorisation et
sur
quels facteurs elles doivent jouer" (1).
Que
ce soit au niveau de l'analyse théorique de
Hugon
que
dans
l'étude du groupe Altersial,
c'est dans
la
"filière
artisanale à régulation marchande" que le secteur informel
trou-
vera sa projection.
Celle-ci a été définie comme "l'ensemble des
...
activités
a
petite
échelle organisée selon des
relations
non
salariales,
où
les
techniques sont simples et
où
le
capital
avancé
est faible mais où i l y a circulation monétaire et jeu de
prix ...
[avec]
...
le produit alimentaire ...
[comme]
... mar-
chandise (2).
Cette filière,
plus communément appelée artisanat
alimentaire,
est monétisée et se caractérise par une division du
...
travail
ou
interviennent une multitude de
petits
producteurs,
(1) D. Sautier, M. Odèye avec coll. de N Bricas et M. Odeyé, Mil,
maïs, sorgho. Techniques et alimentations au Sahel, O.C.D.E.,
Altersial, CILSS, L'Harmattan/Pusaf, Paris 1989; p. 120.
(2) Ph. Hugon op. cit.; p. 679.
17
transformateurs,
transporteurs,
distributeurs qui travaillent à
l'acheminement des produits vivriers vers les espaces urbains.
Cette filière artisanale est aussi très diversifiée
et
regroupe
la production vivrière paysanne
- les activités de petite transformation
- la
fourniture
de
services liée
aux
activités
de
fabrication et de vente
les
activités
de
micro-commerce
dont
la
petite
restauration.
Cette
dernière forme d'artisanat,
projection même
du
secteur informel dans la filière agro-alimentaire,
est
partagée
entre la production, la transformation et la distribution,
ce qui
justifie
la
distinction
faite par le
groupe
Altersial
entre
artisanat de première transformation (décorticage,
petite trans-
formation
(exemple de l'attiéké),
monture) et celui de
seconde
transformation
à laquelle appartient le secteur informel alimen-
taire ou la petite restauration,
qui,
quel que soit le pays, se
développe
"sans la moindre mesure incitative
d'aucun
organisme
public,
sans
la moindre assistance technique d'aucun expert in-
ternational".
Il
s'est également "constitué comme la seule
fi-
lière capable de fournir au marché de façon durable et à un
prix
modéré,
des
produits élaborés" (1).
Dans le Sahel,
l'étude du
groupe
Altersial
montrera
sa place dans
la
valorisation
des
céréales
locaux.
Cette
même étude soulignait
qu'il
était
le
premier secteur à s'adapter à l'évolution des styles alimentaires
urbains sans pour autant provoquer des bouleversements.
Par ail-
(1) Ph. Hugon op. cit. p. 679.
18
leurs les travaux de l'IFPRI (Institut International de Recherche
sur
les Politiques Alimentaires) sur lesquels nous
reviendrons,
montre
à Ouagadougou l'importance des gargottes dans la
substi-
tution
des céréales locales par les céréales importés en alimen-
tation
extérieure
et
les risques que
courent
les
politiques
alimentaires
burkinabés en ne prenant pas en compte les
modèles
alimentaires que véhiculent ces gargotes (1).
En
Asie
du sud-est les études d'EPOC
(Equity
Policy
Center)
ont
fortement
mis en exergue
l'importance
de
cette
filière dans les systèmes alimentaires urbains.
En
Côte-d'Ivoire,
les résultats des Enquêtes
Budget-
Consommation
(EBC)
réalisées
en 1979 au cours
desquelles
les
aspects
de
la consommation alimentaire ont été
examinés
aussi
bien
au
niveau des ménages qu'en partie en
dehors
de
ceux-ci
(consommation extérieure) évaluaient à 23 % du budget alimentaire
à Abidjan, la part de l'alimentation hors domicile. A. Odounfa et
Requier
Desjardins notent aussi l'importance de ce type de
res-
tauration
fortement liée à l'intensité de l'urbanisation puisque
selon
les
mêmes résultats de l'EBC 79,
le
pourcentage
de
la
strate
"autre
ville"
est
de moitié inférieur à
celui
de
la
"strate Abidjan" où le phénomène est en net renforcement. "Il est
regrettable
- ajoutèrent-ils
- que pour l'instant il
soit
difficile
d'identifier les modifications du
modèle
alimentaire
que véhicule le développement de ce type d'alimentation.
On sait
en
effet
que
l'alimentation extérieure et
collective
est
un
(1) Cf.
: C. L. Delgado, A. Reardon, T. Tchiombiano, L'importance
des
céréales
non traditionnelles dans la
consommation
des
riches
à Ouagadougou in Economie Rurale nO
190,
mars-avril
1989.
19
vecteur
essentiel de la modification des habitudes alimentaires.
Mais si on peut l'admettre a priori pour la Côte-d'Ivoire
encore
faudrait-il cerner l'impact des formes spécifiques que prend dans
ce pays ce secteur d'activité.
Ceci devrait constituer un axe de
recherche
important
pour
l'étude
de
l'alimentation
ivoirienne" (1).
L'intérêt de ce mode alimentaire étant ainsi révélé par
l'E.B.C.79, la connaissance de ses structures reste incertaine.
Quelques efforts d'approche quantitative comme le recensement des
activités
urbaines
effectué
en 1976 et le
Plan
1981-85,
ont
essayé
de faire ressortir l'importance de ces
structures.
Mais
faute
de
critères objectifs de recensement
(2),
les
enquêtes
n'ont
donné,
à
notre avis,
que des
résultats
- quelque
peu
biaisés
- par
voie
d'estimation en ce qui
concerne
la
ville
d'Abidjan. Néanmoins l'intérêt de ces deux approches par approxi-
mation
a été de dégager l'importance quantitative de l'artisanat
alimentaire
55,6
% des activités non sédentaires
à
Abidjan
(Recensement
Chateau 1976) et 61,3 % des 350.000
emplois
(Plan
1981-85).
Toutes ces données semblent s'accorder sur l'importance
de
ce
mode d'alimentation que nous appelons,
dans le cadre
de
notre étude, secteur informel alimentaire.
(1) A. Odounfa et D. Requier Desjardins: L'évolution des modèles
alimentaires
en
Côte-d'Ivoire
in
Les cultures vivrières:
Elément stratégique du développement agricole ivoirien. Actes
du Séminaire, Tome 2, CIRES, Abidjan, 1983; p. 508.
(2) D. Requier Desjardins: Quelques éléments de réflexion sur la
nature et le rôle de l'artisanat alimentaire en Côte-d'Ivoire.
Université
d'Abidjan, doc. UNCI ronéo; pp. 3-4.
20
Nous
parlons de secteur informel alimentaire - ou res-
tauration
populaire
selon le sens commun - par
opposition
aux
restaurants
officiels intégrant aussi bien les
cantines
d'éta-
blissements publics que les restaurants de standing et les hôtels
soumis
à des obligations déclaratives fiscales et sociales
sous
le
contrôle du Ministère du Commerce.
Les seconds éliminent
de
leur clientèle une part importante de la population à cause de la
cherté
des
repas
et de la non correspondance entre
les
menus
présentés et les coutumes alimentaires locales.
La
restauration
populaire a le mérite de ne pas faire cette ségrégation et tend à
intégrer
dans
sa clientèle des individus issus
de
différentes
couches sociales visant différents objectifs:
quête d'une bonne
cuisine africaine, nécessité de manger hors de chez soi,
souci de
paraître avec des amis, rapport qualité-prix,
etc ...
Même,
lorsque
l'importance
quantitative de
ce
mode
alimentaire
est
relevée,
l'impact
de
l'environnement
macro-
économique
sur
son
évolution
de
~~
~gQQ
alimentaire
est
complètement ignorée ou sous-estimée. Même les débats actuels sur
la
problématique
agro-alimentaire
en période de
crise
semble
faire
une
impasse
sur ce secteur alors qu'il
est
un
vecteur
irremplaçable du système alimentaire.
La spécificité
de sa dynamique n'autorise
d'ailleurs
aucun usage de schémas explicatifs habituellement avancés à
pro-
pos de l'alimentation dans les villes du Tiers-monde.
Aussi, la complexité même de notre objet d'étude prove-
nant
du fait qu'il peut être abordé sous deux angles
différents
(l'offre
alimentaire ou la consommation
alimentaire),
voudrait
que nous explicitons l'orientation de notre développement.
21
Nous
précisons
d'ores
et déjà que notre
intérêt
se
porte
ici sur la structure de l'offre alimentaire informelle
et
les stratégies socio-économiques qui la sous-tendent.
Néanmoins,
certains
éléments concernant la consommation
alimentaire
pour-
raient intégrer cette analyse de l'offre.
Traitant
d'un sous-système alimentaire qui est,
elle-
même,
une catégorie du secteur informel,
nous nous situons dans
le
prolongement
de recherches qui ont été
conduites
en
Côte-
d'Ivoire,
tant sur la consommation alimentaire que sur le secteur
informel.
Mais,
au
lieu de partir des définitions
convention-
nelles, sources de polémiques et de vaines querelles sémantiques,
nous
dégagerons les caractéristiques objectives qui font la spé-
cificité du secteur informel alimentaire (I.A.).
Font
donc
partie
du
secteur
informel
alimentaire
(I.A.) toutes les activités se limitant essentiellement au micro-
commerce
des
produits vivriers bruts
d'origine
animale
et/ou
végétale
- importés
ou non - transformés en mets
immédiatement
comestibles
et non enregistrés dans les cadres classiques de
la
comptabilité nationale.
Puisque la meilleure définition que l'on puisse
donner
a
priori du secteur informel est essentiellement descriptive
et
typologique
(1),
la
classification
que nous ferons
dans
les
chapitres
à suivre complètera cette définition globale
et
nous
,
aidera
a
fixer
les grandes catégories qui entrent
dans
notre
analyse de l'informel alimentaire (I.A.).
(1)
(J.) Charmes: "Méthodes et résultats d'une meilleure évalua-
tion
des
ressources humaines dans le secteur non
structuré
d'une économie ~n voie de développement". Cahiers ORSTOM, Sc.
Hum., vol. XIX, nO 1; 1983, pp. 93-106.
22
1.
2°) Problématique et objectifs de l'étude
Les
études sur le secteur informel ont connu ces
der-
nières années un développement considérable aussi bien au
niveau
général
que
sur le cas particulier de
la
Côte-d'Ivoire.
Mais
l'actualité
du thème par rapport à la conjoncture économique (1)
mérite
qu'on s'y attarde.
Ceci pourrait justifier
quelque
peu
notre
intérêt pour la filière informelle alimentaire
qui,
pour
deux
raisons,
présente
de grands atouts par rapport aux
poli-
tiques économiques
1
- Du
point de vue de l'emploi:
dans
le
contexte
africain,
elle
constitue l'essentiel des petites activités mar-
chandes
urbaines au niveau des effectifs (2) et reste
le
prin-
cipal
domaine
d'intervention économique des femmes
considérées
comme "groupe vulnérable" dans les définitions des cibles
devant
bénéficier
de
politiques sociales en période
d'ajustement.
La
\\<..\\.",\\"..1 ~,
moindre, recherche
d'allègement de l'impact social
des
mesures
d'ajustement sur les femmes en milieu urbain doit
nécessairement
passer par la connaissance de cette filière.
2
- Du point de vue de l'alimentation
elle
détient
dans
toutes
les
capitales africaines le quasi-monopole
de
la
restauration hors domicile.
Aussi,
sa place dans l'alimentation
de
la pauvreté urbaine est-elle déterminante.
A
ce
titre,
sa
connaissance
doit être une donnée constante des politiques
ali-
mentaires
des
pays sub-sahariens.
D'ailleurs,
les travaux
de
(1) Banque Mondiale,
L'Afrique subsaharienne.
De la crise à une
croissance durable. Etude de prospective à long terme. Banque
Mondiale, Washington D.C. 1989; pp. 165-169.
(2) Ph. Hugon ... op. cit. p. 681.
23
l'IFPRI
(1)
à Ouagadougou montrent assez bien comment
la
fai-
blesse
des études en la matière pourrait présenter d'importantes
conséquences
pour la définition des politiques céréalières
dans
les pays du Sahel.
L'objectif de la présente étude est donc d'analyser les
facteurs socio-économiques de développement de l'informel alimen-
taire
et la dynamique des habitudes de consommation dont i l
est
porteur pour enfin le situer par rapport au rôle économique qu'on
voudrait
faire
jouer au secteur informel en général en ces
pé-
riodes de crise économique.
Par
rapport
à
cet objectif et à la
lumière
de
nos
résultats empiriques,
trois hypothèses seront examinées
1 - Depuis quelques années les économistes de l'alimen-
tation débattent des liaisons qu'il pourrait avoir entre
urbani-
sation
et le diptyque mimétisme alimentaire - dépendance alimen-
taire ..
Les
principales argumentations sont généralement
cons-
truites autour de la croissance des importations alimentaires qui
est
l'indice
de
la dépendance et
l'intégration
des
produits
importés dans les modèles de consommation alimentaire.
,
En
Côte-d'Ivoire,
quelques
auteurs,
a
partir
des
Enquêtes-Budget-Consommation,
ont
testé la thèse de l'urbanisa-
tion
comme facteur déterminant de la tendance au mimétisme
ali-
mentaire.
Bien que l'augmentation du poids des importations ali-
mentaires ait été constaté, les analyses - sous forme comparative
- des
modèles
ruraux et urbains de consommation et
l'étude
de
l'évolution des styles alimentaires ont infirmé dans le
contexte
abidjanais cette thèse du mimétisme alimentaire.
Pour ce qui est
de
l'alimentation extérieure,
l'administration de la preuve
du
24
non-mimétisme est que l'essentiel dans ce type d'alimentation est
constitué
de produits transformés issus de filières
artisanales
utilisant une technologie traditionnelle.
Nous
montrerons
dans notre développement que
si
les
conclusions de ces études,
renforcées par une histoire de l'ali-
mentation extérieure que nous présenterons,
reste une
antithèse
intéressante
de la théorie de Malassis et de Padilla relative
à
la question, elle mérite toutefois nuance compte tenu du fait que
l'informel alimentaire se développe de plus en plus sur les bases
de la politique alimentaire ivoirienne centrée sur l'importation.
Ces constats ressortant de l'analyse de la dynamique de l'alimen-
tation
extérieure
n'autorisent
donc guère un
parallèle
entre
maintien des habitudes alimentaires locales - dont i l est porteur
- et
indépendance alimentaire car la croissance de la
consomma-
tion
des produits importés tels que le riz et la viande par
son
biais met en évidence sa sensibilité au facteur prix relevant des
stratégies
agro-exportatrices
offensives
sur
les
marchés
mondiaux.
2
- Le caractère irremplaçable de
l'informel
alimen-
taire
dans
le système alimentaire urbain ne pouvant
plus
être
remis en cause, i l est donc nécessaire de comprendre les facteurs
de son développement qui s'articulent autour du prix de consomma-
tion appelant une analyse du calcul économique des acteurs.
n'une
façon générale,
l'observation des comportements
économiques
concrets
en Afrique réveille un vieux
débat
entre
"holistes"
et "individualistes" ouvert aussi bien dans le
champ
de la théorie économique entre néo-classiques orthodoxes et
mar-
'-..
--~_..---
25
ginalistes
que dans le champ de l'analyse sociologique avec d'un
, " , '
.. -,,-
côté Bourdieu et de l'autre R.
Boudon (individualisme méthodolo-
gique).
Le débat,
lui-même,
tourne autour de la notion de ratio-
nali té.
Mais au lieu d'un rejet dos à dos des deux tendances qui, (~..-<',
"" '........,)
..>-;
s'affrontent,
il
semble
que les
données
concrètes
appellent·
1
plutôt
un
dépassement des querelles idéologiques
sous-jacentes
pour
un rapprochement en vue d'une meilleure approche
des
pro-,
blèmes économiques.
Les travaux de Th. Veblen, de Ph. d'Iribarne
sur
les motivations à la consommation et de J.
Baudrillard pour
ne citer que quelques-uns, ont ouvert la voie dans ce sens.
Les pratiques économiques et les calculs qui les
sous-
tendent
dans
les
sociétés africaines sont à ce
titre
un
bon
terrain
d'observation comp~ tenu du fait que leur
développement
se fait dans un contexte d'hybridisme culturel avec juxtaposition
des cultures "communautaire" et "individualiste".
Si nous partons des principes même de l'analyse
micro-
économique
qui
intéresse au premier chef les décisions
indivi-
duelles,
nous
sommes en droit de privilégier dans ces
sociétés
africaines de plus en plus monétisées les trois postulats de base
de la théorie néo-classique
- les individus ont des
comporte-
ments rationnels;
- chaque individu recherche ce qui est utile à
son plaisir; - les choix sont avant tout des choix individuels.
Par
rapport au terrain africain,
la reconnaissance de
'l'influence de la société sur ces choix d'utilité introduite
par
Iles néo-marginalistes,
appelle la nécessité d'un input anthropo-
logique
pour déceler la hiérarchie des valeurs propres à
chaque
société.
Le but premier des théoriciens de la science économique
qui
est
de fonder l'élaboration des instruments conceptuels
et
26
d'analyse d'une science au champ parfaitement autonomisé du reste
de
la
réalité apparaît de moins en moins réaliste
face
à
ces
complexités.
Le "monoéconomisme" que dénonçaient G.
Myrdal,
F.
Perroux, Kalecki et avec eux Hirschmann et 1. Sachs semble ici ne
plus
faire
récette
et
appelle
une
nécessaire
"symbiose
disciplinaire".
R.
Mahieu aura donc raison, de tenter une théorisation
des
principes
économiques
propres aux sociétés
africaines
en
s'appuyant
sur
le
modèle des économies
subsahariennes
et
en
intégrant
les acquis anthropologiques.
Dans la perspective
des
théories
du
déséquilibre qui selon
lui,
"permet
de
styliser
l'instabilité
entre
les transferts étatiques et les
transferts
communautaires",
i l fera remarquer que "Le calcul économique
en
Afrique
repose
sur
un ordre lexicographique
entre
le
calcul
communautaire
sur les droits et les obligations d'une part et le
calcul
économique
individuel
de
type
utilitariste
d'autre
part" (1).
Il
souligne également la relation déséquilibrée
qui
---------~-_._•.. --~---._-,.-._--.- -"--.-- --_.~-----_.~-----
existe entre les droits et les obligations quand il note:
"Pra-
tiquement
droits et obligations sont de nature très
différente .
.----_..__._--------~
Les Cc~tions,sont matérialisées par des flux
effectifs.
Les
~-'------.
----. ,.)
( droitsJrestent potentiels comptabilisés dans la mémoire communau-
' - - - - _.-----
taire.
L'équilibre ne peut ainsi être strictement individuel
et
..
dépend
a
tout instant de la relation du ressortissant
avec
sa
communauté"
(2).
Sans
pour autant rejeter de
manière
absolue
(1) F.
R.
Mahieu,
Principes économiques et société africaine.
Doc.
ronéo,
Faculté
des sciences
économiques.
Université
d'Abidjan, 1989, p. 1.
(2) F.R. Mahieu,
idem. p. 8.
27
cette
"aventure théorique" de l'auteur qui présente
un
intérêt
certain
pour
l'analyse
des comportements économiques
dans
la
société globale en Afrique, nous sommes donc conduits à mettre en
doute l'hypothèse du déséquilibre entre droits et obligations par
rapport à certaines pratiques ur.baines.
Le déséquilibre entre la
matérialité des obligations et le caractère idéel des droits
tel
que
le présente Mahieu connaît une profonde
mutation.
Celle-ci
s'explique
par une stratégie des agents économiques urbains con-
sistant
à capitaliser leurs droits et parfois leurs
obligations
par
le
biais des petites activités marchandes afin
de
pouvoir
continuer
à faire face aux obligations communautaires et à
sup-
porter la baisse du pouvoir d'achat.
Nous
montrerons dans notre développement que la
capa-
cité qu'ont les acteurs de l'informel alimentaire à supporter
la
forte concurrence par la compression du coût de production tient,
entre autres,
aux stratégies de reconversion des droits et obli-
gations
contenus
dans les pressions communautaires en
capitaux
économiques.
Il
s'agit plutôt d'une reconversion des droits
(-
f
droit de demander un fonds de commerce aux aînés oblig~de donner
..
satisfaction
conformément
à la "procédure de
redistribution
a
l'africaine", - droit d'usage d'une partie de la concession fami-
liale comme local de production;
- droit de demande d'assistance
à un compatriote sous forme d'octroi de facilité d!approvisionne-
ment;
- droit
de
disposer du capital technique
disponible
au
niveau
familial)
et
de
certaines
obligations
communautaires
(transformation d'un hébergement ou d'un tutorat en droit d'usage
sous forme de main-d'oeuvre) en facteur de production.
28
Tout
comme
la
disponibilité
des
denrées
de
base
importées,
l'utilisation
de
ces
facteurs
de
production
que
constituent ces inputs communautaires pèsent fort lourdement dans
l'analyse
du
système de production et de la consommation à
bas
prix qu'offre l'informp.1 alimentaire.
3
- Marginalisé qu'il était,
le secteur informel a vu
s'accroître
son importance au fil de
l'application
progressive
des
mesures
d'ajustement des économies en
développement.
Dans
tous ces pays,
les nouvelles politiques économiques d'inspiration
néo-classique voudraient alors en faire la base de la "compatibi-
lisation"
des politiques d'ajustement et de
leurs
conséquences
sociales
en surestimant ses capacités de génération d'emplois et
_. ----. ------~--
de redistribution de revenus.
Dans
les pays latina-américains tels que la
Colombie,
le pérou et le Brésil,
face à l'impasse économique,
il apparaît
à
certains comme la solution "miracle" pour que les
effets
sur
l'emploi
et
les
politiques
d'ajustement
soient
socialement
supportables (1).
Sous
la houlette des institutions
internationales
ce
discours s'élargit à l'Afrique subsaharienne. L"ampleur du phéno-
mène
dans ces pays a fait muter les "politiques anti-artisanales
(1)
Cf.
J.
Jorge,
Urban
poverty,
labor markets and
regional
development
the
case of
Brazil,
mimeo,
University
of
Wisconsin, Madisson, Spring, 1986; p. 6.
H.
Soto,
El Otro sendero,
la revolucion informaI, Ed. Oveja
Negra,
1987.
Nous
pouvons.
également lire une critique
de
l'ouvrage
de
Hernando
de Soto dans "Les notes de lecture de Ignacy Sachs.
Un autre sentier in IFDA - Dossier nO 66,
July-August
1988,
pp. 55-56.
29
de
fait"
(1) en perspectives de mesure de soutien avec la
béné-
diction de la Banque Mondiale,
du PNUD et du BIT ... et ce, dans
l'esprit
de
soutien
du
pouvoir
d'achat
des
catégories
défavorisées.
En Côte-d'Ivoire,
le secteur informel est aussi identi-
fié
comme structure pouvant compenser les pertes d'emplois et de
revenus engendrées par l'ajustement déflationniste entamé
depuis
1980
à la suite du ralentissement de la croissance économique et
de
la détérioration des termes de l'échange en
1978-79.
Depuis
une
dizaine d'année i l est regardé comme un secteur vital
d'em-
ploi en lui-même car i l est de fait le secteur important dont
la
croissance
est la plus rapide.
Selon une récente publication de
la Banque Mondiale,
le Ministère du Travail ivoirien,
estime que
le secteur informel,
outre qu'il compte près de 20 % du total des
emplois et connaît le taux de croissance le plus élevé (8,5 % par
..
an)
de
toutes les composantes du PIB,
contribue à
celui-ci
a
hauteur d'entre 12 et 20 % d'où la nécessité de sa redynamisation
par la création de facilités bancaires pour couvrir ses besoins à
l'instar de la BNDA (Banque Nationale de Développement
Agricole)
pour les activités liées à l'agriculture (2).
(1) G.
Barthélémy,
Artisanat et développement,
Ed. Gret,
Paris,
1986,
p.
157
"Il s'agit d'actions qui,
même si
elles
ne
découlent pas d'une volonté affirmée d'éliminer
l'artisanat,
au
nom
du sens inéluctable de l'histoire économique
ou
du
libre jeu des forces de la concurrence,
font implicitement le
deuil
d'une
forme de production considérée
comme
une
structure
archaïque,
destinée à céder peu à peu la place
à
l'industrie,
symbole de modernité".
(2) Banque Mondiale.
Côte-d'Ivoire: document de travail sur les
ressources humaines. Banque Mondiale,
janv. 1989; p.
17 ..
30
b
A
défaut d'études plus globales et systématiques comme
dans
les pays latino-américains ou en Tunisie pouvant
permettre
un discours globalisant,
on pourrait néanmoins vérifier
l'hypo-
thèse
sur certaines activités parmi lesquelle l'informel alimen-
~~~ ~ taire qui, comme nous le mentionnions, concentre le plus d'em-
plois en milieu urbain.V(c \\ ''r' "
..
Initialement
stratégie
d'insertion
a
l'économie
urbaine ,),"'1" i~f~:im~r-,e:~t~~ntaire
est de plus en plus
identifié
comme branche du secteur pouvant encore générer des emplois. Nous
!
nous
attacherons
à montrer qu'étant donnée l'ouverture
de
son
marché qui échappe à toute réglementation, et du fait de l'afflux
de nouveaux candidats et de la forte concurrence qui en
découle,
l'informel alimentaire atteint son point de saturation.
On cons-
tatera
certes une croissance du volume de l'emploi mais la vente
d'aliments
est de moins en moins lucrative et se
caractérise
a
priori par une stagnation voire une décroissance des revenus.
30) Techniques et méthodes d'approche
a) Approche historique et opération de comptage
La
phase
de
terrain de nos travaux
a
effectivement
débuté
par une enquête anthropologique sur le
secteur
informel
alimentaire
afin
de cerner son évolution dans le
temps.
C'est
après cette étape que nous avons procédé à une opération
exhaus-
tive de recensement.
En
fait
de
structures
de
consommation
du
secteur
informel alimentaire,
nous avons distingué cinq types de restau-
rant
qui
se
complètent
et
se
font
concurrence
dans
leurs
pratiques commerciales.
31
- Les restaurants en établissement
- Les restaurants sur tables mobiles
- Les espaces-restaurants
- Les restaurants spontanés
- Les restaurants ambulants.
Pour apprécier l'importance quantitative de ce secteur,
nous avons tenté un recensement.
Ce comptage approximatif effec-
tué
entre
le 16 décembre 1986 et le 3D janvier 1987 nous a
été
suggéré
par la non-correspondance de notre conception
théorique
et
typologique
du secteur informel alimentaire et
l'esprit
du
recensement des activités urbaines effectué en 1976.
Dans ce recensement dit "Chateau" (1), seul l"'informel
le moins informel" avait suscité l'intérêt des statisticiens pour
d'éventuelles actions de promotion et d'assistance. Les activités
hors
des
marchés ou "dans la rue" n'ont pu
faire
l'objet
que
d'une simple estimation (2).
Pour
des raisons de transparence méthodologique,
nous
avons
différencié l'informel alimentaire des rues de
l'informel
alimentaire
établi sur les places du
marché.
Du
second,
nous
avons
totalement
fait abstraction puisqu'il fait
partie
d'une
autre sphère géo-commerciale : les marchés.
(1)
(J.P.) Chateau: Recensement général des activités en
milieu
urbain - 1976.
Ministère du Plan 1977,
vol. 1;
40
p.
+
3
annexes.
(2) Nous
trouvons
des critiques de ce recensement dans Marc
Le
Pape: "De l'indigène à l'informel" in Cahiers d'Etudes Afri-
caines,
Tome XXIII (1-2) nO 89-90,
1983;
pp. 189-197 et D.
Requier Desjardins:
Quelques éléments de réflexion sur
la
nature
et
le
rôle
de
l'artisanat
alimentaire
en
Côte-
d'Ivoire, doc. ronéo, Université d'Abidjan,
1985; pp. 3-4.
32
Un exposé plus détaillé de la méthodologie de l'enquête
anthropologique
et
du
recensement
précèdera
l'analyse
des
~
données dans le chapitre ~.
b) Dispositif d'enguête socio-économigue
C'est
au sein de la "population-mère",
approximative-
ment constituée à partir du recensement,
que nous avons ciblé la
population auprès de laquelle nous avons recueilli les données .
. Le choix de l'échantillon ...
Le
principe du choix raisonné a orienté cet
échantil-
lonnage.
Le
critère de représentativité statistique n'était pas
pour nous une priorité. Nous retenions systématiquement les chefs
d'unité de production-vente (UPV),
qui, dès la prise de contact,
manifestaient
le
désir de formuler des
réponses
complètes
et
cohérentes
aux questions que nous leur suggérerions.
Ce critère
d'éligibilité
reposant essentiellement sur la qualité
des
rap-
-._-
ports
avec
les
enquêtés ne préjugeait en rien du
contenu
des
----
réponses,
mais
était
une condition sine qua non
des
enquêtes
socio-économiques approfondies telles que nous les voulions.
Hormis
ce
premier
critère,
nous avons veillé
à
la
représentativ~~é qualitative et catégorielle lors de la constitu-
. .--------
tion
de
l'échantillon.
Les
cinq
catégories
composant
la
structure
de
l'informel alimentaire
étaient
représentées.
Le
tableau
nO 1 présente la répartition des 281 enquêtés
représen-
tant chacun une unité de production.
..
Le
recueil
des
informations
a
été
assure
par
questionnaire.
33
. Le questionnaire
Il
a
été
conçu
autour de
cinq
thèmes
centraux
à
savoir
Thème 1 - Renseignements d'ordre général sur les restaurateurs
éléments
de démographie humaine,
motivations des
ac-
teurs,
description de leur environnement familial.
La
rubrique
des
"questions spécifiques" que comporte
ce
thème
concentre une série de questions
valables
pour
certaines catégories de restaurant et non pour d'autre.
La question 1.14 (cf.: annexe P ~Ot ) qui est une "ques-
tion-rappel",
suggérera à l'enquêteur si les questions
qui
suivent
sont valables pour le type de
restaurant
devant
lequel il se trouve.
Les mentions
"A
remplir
pour
" l u i
servent d'indication.
Il
faudra donc
entendre par Sp,
restaurant spontané,
Er, espace-res-
taurant, par R et, restaurant en établissement, par tm,
restaurant
sur
table mobile et
par
amb,
restaurant
ambulant.
Toutes ces instructions sont contenues
dans
un "Guide d'enquête" que détenait"chaque enquêteur.
Thème 2 - De
l'esprit d'entreprise.
Création et gestion du sys-
tème de production : investissements initiaux, rentabi-
lité économique, comportement d'épargne, rationalité de
l'entrepreneur.
Thème 3 - Pratiques
commerciales
et climat
social
rapports
entre
offreurs
et
demandeurs
à
travers
certaines
pratiques sociales et commerciales notamment le crédit.
34
b
Tableau nO 1
Répartition
de la population enquêtée par type de
restaurant et par quartier
!
Restaurants en établissement
!
1
! Restau-
Espace
Restau-
Restau-
------------I--------------------------------! rant sur! restau-
rant
rant am-!
Corrmunes
Maquis
Kiosques !Res.Sénég. ! table
rant
spontané! bu1ant
d'Abidjan
!
! mobile
!
Abobo
4
2
2
4
4
2
3
Adjamé
4
3
1
3
8
4
3
Treichvil1e!
8
3
3
3
4
6
3
Cocody
!
2
3
2
5
13
5
2
Port-Bouët
5
3
1
6
7
4
2
Attécoubé
4
4
4
3
5
3
1
Marcory
5
1
1
7
9
4
2
Koumassi
3
2
2
9
13
4
2
Yopougon
5
3
2
9
9
8
3
Plateau
l
2
0
4
6
3
1
85
53
78
43
22
Thème 4 - structures de consommation des ménages.
Analyse de
la
..
répercussion
sociale de leurs activités économiques
a
travers quelques postes de consommation.
Thème 5 - Analyse du système d'approvisionnement: produits ache-
tés,
quantité,
lieu d'approvisionnement,
périodicité,
mode de paiement, moyen de stockage éventuel, problèmes
majeurs en matière d'approvisionnement.
Les
questions nécessitant des réponses sous forme énu-
mérative ont fait l'objet de fiches.
F.1.26 - Fiche
des
personnes travaillant avec
le
restau-
rateur
F.1.30 - Fiche
de
l'environnement
familial
du
micro-
négociant
35
F.2.3
- Fiche
des instruments utilisés par
les
restaura-
teurs
F.3.1
- Fiche des mets offerts
F.4.6
Fiche
des
prix
et
produits
consommés
dans
la
famille des restaurateurs
F.S.1
- Fiche d'approvisionnement des restaurateurs.
L'enquête
consistait à passer une seule fois auprès de
chaque
enquêté.
L'interview durait entre 1 H 30 et 2 H à
cause
des
intermittences
avec
des extrêmes allant d'une
heure
à
3
heures.
,
Même
choisis en fonction de la disponibilité à
repon-
dre,
les
enquêtés
n'ont
pas manqué
de
nous
poser
certains
problèmes
- ajournement des rendez-vous,
- refus de réponse à certaines questions, particulière-
ment celles touchant aux revenus,
- réponses fantaisistes.
Quatre facteurs expliquent,
à
notre avis, cette situation :
· le fait que
la population
abidjanaise
soit
sur-
enquêtée
· la
confusion de notre enquête avec une investiga-
tion policière malgré le long travail de mise en confiance
· l'inévitable longueur de notre questionnaire
le mythe qui
entoure les questions
de
revenu
en
Afrique.
Aussi,
avons-nous
appuyé
ce recueil
quantitatif
de
données
par
une approche biographique (récits ou
histoires
de
36
D
vie) et le suivi des acteurs;
ceci corrige quelque peu le carac-
tère partiel des biais de réponses recueillies grâce au question-
naire fermé.
Au terme de cette introduction générale,
il nous semble
opportun de préciser la manière dont nous comptons présenter
les
résultats de nos travaux.
4°)
Plan de l'étude
Cette présentation se fera en sept chapitres :
1
- Dépendance alimentaire, mimétisme et urbanisation
en Côte-d'Ivoire. La liaison mécanique faite entre croissance des
importations,
mimétisme
alimentaire et urbanisation relevant de
la
théorie
dépendantiste montre ses limites
dans
le
contexte
ivoirien
où la ville plaide non coupable.
Quand bien même
elle
reste
le
principal
bénéficiaire
des
politiques
alimentaires
nationales,
elle
garde
fortement
les
habitudes
alimentaires
traditionnelles
qui
constituent
ses
modèles
dominants.
L'originalité
de
l'informel
alimentaire dans
ce
système
est
d'avoir
contribué
au
maintien
de
ces
modèles
alimentaires
traditionnels
en se donnant ses propres moyens d'auto-régulation
~LI)
tout
en intégrant les données de base dont la disponibilité
est
assurée par le biais des importations.
2 - Croissance
urbaine et développement de
l'informel
alimentaire. L'état actuel du secteur informel alimentaire marque
un changement considérable par rapport aux structures artisanales
des années 30. La non-transparence de cette dynamique de l'infor-
mel alimentaire semble masquer à la fois tout l'effort de renver-
sement
des
habitudes alimentaires
imputable aux
femmes
ivoi-
37
riennes
et
le
paradoxe entre la
croissance
des
importations
alimentaires
et
l'absence
de mimétisme en
alimentation
exté-
rieure.
Mais si cette métamorphose est un constat majeur,
l'in-
terrogation
des acteurs nous montre les conditions le plus
sou-
vent difficiles dans lesquelles elle s'opère.
3 - Production
alimentaire et participation
communau-
taire.
Il
est
certes difficile de faire une distinction
entre
l'unité
de production et l'unité familiale des acteurs tant
les
deux s'imbriquent l'une dans l'autre.
Les réseaux communautaires
sont,
ici, capitalisés et utilisés comme force de production, ce
qui
justifiera
un
premier niveau de
reconversion
des
atouts
communautaires
relatifs
aux
droits
des
acteurs
en
capital
économique.
4 -
stratégies
d'investissement
et
rationalité
des
micro-négociants.
L'analyse de la décision d'entreprendre montre
la mutation de la nature même de l'informel alimentaire.
Initia-
lement stratégie économique d'intégration à la vie urbaine,
il se
révèle comme pratique économique de crise et mieux comme
initia-
tives populaires d'ajustement des revenus à la baisse du
pouvoir
d'achat.
Au regard des différents objectifs que les artisans
se
sont
fixés et de l'usage qu'ils font de leur revenu,
les résul-
tats économiques peuvent être différemment interprétés.
Cela
ne
semble
pas autoriser tout de suite une classification en
termes
de "reproduction simple" et "élargie",
classification qui n'a de
sens que pour le planificateur et non pour l'acteur.
Par rapport
aux
agents du secteur informel alimentaire,
il existe plusieurs
raisons
pratiques
que les statisticiens et
les
planificateurs
38
semblent
rapporter
uniquement
aux règles
de
maximisation
du
profit.
L'I.A.
se
révèlera
plus
que
tout
comme
une
économie
de
subsistance.
5 - Circuits
et
pratigues
d'approvisionnement
dans
l'informel alimentaire.
Tout
comme
dans
le
cas
de
la
main-d'oeuvre,
la
souplesse
des
structures d'approvisionnement qui est
un
autre
niveau
d'intervention de structures communautaires pourrait
en-
trer
en
ligne de compte dans l'explication
des
stratégies
de
,
production
a
bas
prix des artisans de
l'I.A ..
L'exercice
de
l'activité
favorise la création de
réseaux
d'approvisionnement
dans lesquels se meuvent les acteurs.
Toutefois il faut signaler
en
matière
de
ravitaillement la part
croissante
de
certains
produits importés qui justifie l'articulation de l'I.A. aux rela-
tions extérieures contractées par les pouvoirs publics.
6 -
Demande
alimentaire informelle et
stratégies
des
prix à la consommation.
L'artisan
du
secteur informel alimentaire
est
avant
tout un agent économique adaptant son comportement aux situations
du marché,
surtout aux comportements alimentaires des
consomma-
teurs. Tout se joue ici dans les prix - des plats vendus - qui se
forment sous l'influence à degré variable de plusieurs facteurs à
,
savoir
le
coût
des matières premières,
la
situation
geo-
spatiale des points de vente,
les motivations sociales des
con-
sommateurs et les niveaux de consommation de la clientèle.
Les
inputs communautaires et l'utilisation des denrées importées
39
sont déterminantes dans l'ajustement des coûts de production
aux
revenus des consommateurs dans un contexte de forte concurrence.
7 - Analyse
de la rentabilité des
opérations
commer-
ciales,
du
comportement
d'épargne et de consommation
dans
le
secteur informel alimentaire.
Au-delà de la raison pratique motivant le
comportement
,
commercial
de
chaque acteur,
une analyse des résultats
econo-
miques peut être faite sous l'angle des revenus.
Ceci
constitue
une
passerelle nécessaire qui nous permettra de mesurer l'impact
de l'I.A.
en tant qu'activité économique sur la vie sociale
des
acteurs. A cet effet, les comportements d'épargne et de consomma-
tion de ces derniers semblent aussi d'excellents indicateurs pour
montrer
que
l'informel alimentaire est une activité de
subsis-
tance
qui ne saurait longtemps supporter les effets de la
crise
économique.
8 -
Importance
socio-économique
de
l'informel
alimentaire.
L'importance
de
l'I.A.
peut être appréciée
tant
au
niveau de l'économie nationale (emploi - revenu - droits
fiscaux
perçus
par les municipalités - poids dans l'importation
alimen-
taire)
que
du système de sécurité alimentaire (marché des
pro-
duits vivriers locaux - nombre de points de vente - valeur nutri-
tionnelle des plats vendus).
Aussi une meilleure appréciation du
rôle socio-économique de la femme en milieu urbain pourrait
être
également tentée à travers cette étude.
40
!tri . t
Chapitre l
DEPENDANCE ALIMENTAIRE, MIMETISME ET URBANISATION
EN COTE-D'IVOIRE
La situation alimentaire en Côte-d'Ivoire semble intro-
duire une double relativité dans la thèse de la liaison mécanique
--------~--_. - --
entre dépendance alimentaire et urbanisation.
Plus que les nouveaux comportements alimentaires engen-
drés
par
l'urbanisation,
la richesse nationale et
surtout
la
f --.~ ---
,
volonte
des
pouvoirs
publics de tirer profit,
du
surplus
des
marchés
mondiaux
restent
déterminantes dans
l'explication
de
l'envolée
des
importations
alimentaires.
Nous
essaierons
de
montrer dans ce chapitre que ~e mimétisme alimentaire n'a pas été
la cause de la croissance des importations,
i l n'en constitue non
plus l'effet.
Néanmoins,
le proces~~s de maintien des habitudes
alimentaires traditionnelles qui a été jusqu'ici remarquable,
ne
résistera
guère au facteur prix des produits de grande consomma-
tion
lié
aux
guerres commerciales que se
livrent
les
grands
producteurs
mondiaux.
La conséquence ultime de cette
ouverture
sur
les marchés extérieurs est la substitution
progressive
des
denrées
importées aux denrées de base locales avec un coup porté
au coeur même des modèles alimentaires dominants tout au moins en
alimentation extérieure.
L'originalité de l'informel alimentaire abidjanais dans
--,1
ce contexte aura été de\\dlgérer la dépendance contractée ipar
les
pouvoirs
publics tout en poursuivant sa résistance au
mimétisme
alimentaire.
41
Section
I.
DEPENDANCE
ALIMENTAIRE ET URBANISATION
ETAT
DES
LIEUX
A - Cadre théorique sous-jacent aux débats
Bien que les questions sur l'origine du mal- développe-
ment ne soient plus tellement d'actualité,
l'analyse de certains
paramètres
des
crises actuelles oblige à un passage obligé
par
certaines théories qui ont été le creuset de formation de récents
schémas explicatifs. C'est le cas de la théorie de l'extraversion
économique;
celle-ci,
fortement reliée à la fameuse formule
de
A.G.
Frank sur "le développement du sous-développement", a donné
le
ton aux recherches de l'école structuraliste de la croissance
de
laquelle
naîtra
la -théorie
de
la
domination
et
de
la
dépendance.
Les
aspects de la dépendance économique que
souli-
gnaient le plus fréquemment les auteurs de ce groupe sont
- une forte pénétration du capital étranger;
- l'emploi de technologies étrangères avancées,
forte-
ment
capitalistiques,
dans
un secteur industriel
relativement
étroit;
- la spécialisation dans l'exportation de
marchandises
primaires
ou de produits d'industries fortement utilisatrices de
main-d'oeuvre;
- les
normes de consommation des
élites,
influencées
par celles des pays avancés;
- l'''échange inégal", en des sens variés (1).
(1) E. Hagen, Economie du développement, Ed. Economica, Paris
1982, p.
115.
42
Ces thèses ont trouvé un écho favorable dans les diffé-
rentes
résolutions adoptées par la Conférence des
Nations-Unies
sur le Commerce et le Développement depuis sa formation en
1964,
les
déclarations
du
Comité des 24 à l'intérieur de
la
Banque
Mondiale, et du Comité des 77 au sein de l'Assemblée Générale des
Nations
Unies,
ainsi
que nombre de
résolutions
adoptées
par
l'Assemblée Générale des Nations Unies.
On les retrouve dans les
écrits
de nombreux économistes de la croissance tels que Osvaldo
Sunkel,
Celso Furtado,
Arghiri
Emmanuel ...
pour ne citer que
quelques-uns.
Selon E.
Pisani qui a aussi adopté cette théorie,
"tout se passait comme si existait un modèle unique de développe-
ment,
applicable
au Nord comme au Sud,
théoriquement neutre
à
l'égard de tout système culturel.
Ce schéma a conduit à
classer
les diverses régions du monde en fonction de leur degré d'identi-
fication ...
[aux sociétés industrialisées].
Il a provoqué nombre
de jugements de valeurs discriminatoires:
le sentiment de supé-
riorité chez les uns,
mimétisme ou rejet chez les autres.
Ainsi
la
dépendance économique,
financière,
technique du Tiers Monde
plonge-t-elle ses racines alors dans cette dépendance
culturelle
décisive" (1).
Ainsi le mal développement alors compris comme
"l'imi-
tation
servile d'un modèle industriel nordique qui s'explique en
partie par sa propre force d'entrainement" aura été dénoncé
pour
sa "déraison du mimétisme" par plusieurs auteurs
(2).
(1)
E.
Pisani,
La main et l'outil,
Ed.
Robert Laffont,
Paris
1984, pp.
175-176.
(2) Cf.
R.
Lenoir,
Le Tiers-Monde peut se nourrir.
Rapport au
Club de Rome, Ed. Fayard, pp.
46-57.
A. Tévoédjrè, La pauvreté richesse des peuples, Ed. Ouvrières,
Paris 1978, p.
43.
43
Par
rapport aux carences des politiques agricoles et à
son
pendant,
la
croissance
des
importations
alimentaires,
l'application de cette théorie a été particulièrement fructueuse.
Il
a surtout été en toile de
fond dans le tirage de la
sonnette
d'alarme
en ce qui concerne l'épineux problème de la
dépendance
alimentaire
qui menace les économies du Sud.
Dans le rapport de
R.
Lenoir au Club de Rome,
on pouvait lire
"Le sol ne nourrit
plus
les hommes.
L'alimentation de plus d'un milliard
d'hommes
dépend
aujourd'hui de bateaux céréaliers qui sillonnent
les
0 -
céans.
L'importation
de produits alimentaires par habitant aug-
mente en moyenne de 5,5 % par an dans le Tiers-Monde.
En Afrique,
en
l'espace de dix ans -
de
1963 à
1972 -
les
importations
de
céréales sont passées de 1,6 à 4,2 millions de tonnes;
le mouve-
ment
n'a
fait que se poursuivre
elles se sont élevées
à
16
millions de tonnes en 1980.
Les importations d'aliments font 28 à
30 % de la consommation de
la e6te-d'Ivoire.
L'Algérie
consacre
environ
17
% de ses revenus pétroliers et le Nigéria 50
%
des
siens,
à
l'achat
d'aliments.
Selon la F.A.O.,
la
production
alimentaire a
fléchi de
10 % en Afrique durant la dernière décen-
nie.
En
Amérique
Latine de 1969 à
1978,
les
importations
de
céréales ont triplé,
passant de 5,5 à 17,3 millions de tonnes.
La
dépendance alimentaire de tous les pays
latino-américains,
sauf
trois
(Argentine,
Uruguay et Guyane)
s'est aggravée;
les importa-
tions
d'aliments représentent 21 % de la consommation au Brésil,
47
%
au Chi l i ,
34 % en Bolivie,
43 % en Equateur et 46
%
au
Pérou"
(1).
(1)
R.
Lenoir,
op.
cit.
. . . ,
pp.
60-61.
44
Le procès de l'urbanisation (1) a été déterminant
dans
cette critique de la dépendance du Sud parce qu'elle était consi-
dérée
comme
le
principal
vecteur
de
diffusion
des
modèles
importés. A. Touré a fait une critique du modèle d'occidentalisa-
tion
dont
elle
est porteuse dans
son
ouvrage,
"Civilisation
quotidienne
en Côte-d'Ivoire".
Suivant le même schéma un
autre
auteur parlera d'''urbanisation mimétique".
L'urbanisation a
été
encore remis sur la sellette dans l'analyse que font Dalia Maimon
et Ademar Romeiro de l'expérience brésilienne de croissance et de
modernisation.
Selon ces auteurs,
"l'expansion de "la société de
consommation" a été facilitée par l'urbanisation et la métropoli-
sation accélérée, qui ont beaucoup changé les concepts de qualité
de vie de la population brésilienne. En milieu urbain,
les effets
de démonstration ont permis l'intégration sociale par les compor-
tements de consommation ... " (2).
Projeté
dans le champ alimentaire,
cette thèse de
la
liaison
entre dépendance et urbanisation aura surtout été défen-
due par L. Malassis dans ses traités d'économie agro-alimentaire.
L'auteur part du principe selon lequel,
"Dans une société donné,
à un moment donné,
existent des forces sociales convergentes qui
(1) Nous adoptons ici la définition de M. Castells selon laquelle
"Le
terme
d'urbanisation
se
réfère
à
la
fois
à
la
constitution
de
formes spatiales spécifiques
des
sociétés
humaines,
caractérisées
par la concentration
significative
des
activités
et des populations sur un
espace
restreint,
ainsi
qu'à
l'existence
et
à
la
diffusion
d'un
système
culturel particulier,
la culture urbaine", La question urbai-
ne, Ed. F. Maspéro,
Paris 1972, p. 32.
(2 ) D.
Maimon
et
A.
Romeiro,
L'expérience
brésilienne
in
Histoire, culture, styles de développement.
Brésil
et
Inde
(sous la dir.
de) C.
Comeliau
et I. Sachs, Ed. L'Harmattan,
Paris 1988, p. 76.
45
conduisent à la formation d'un modèle de consommation alimentaire
(MCA) dominant ...
et aussi des forces divergentes qui conduisent
à
la
différenciation
du MCA" (1).
Si selon
les
analyses
de
Malassis, le MCA "agro-industriel" est dominant dans
la
société
industrielle,
le caractère transitionnel et le manque d'informa-
tions
nécessaires
à
une approche des MCA des pays en
voie
de
développement
ne permettent pas de dégager concrètement le
type
de MCA qui y est prépondérant. Toutefois, l'auteur décèle dans le
jeu
des
variables du changement social (élevation
du
taux
de
croissance démographique,
accélération de l'urbanisation, crois-
sance
des revenus par tête,
changement structurel des activités
économiques) la formation dans les villes,
creuset du changement
alimentaire, d'un modèle "dominant" aux traits encore mal définis
qu'il convient d'appeler MCA de transition.
L'effet de l'urbanisation dans l'évolution des MCA
est
ici
déterminant.
Il intervient "non seulement par le changement
radical des conditions de vie et le passage de l'économie d'auto-
consommation à l'économie alimentaire marchande,
mais par
d'au-
tres voies dont les concentrations urbaines constituent des lieux
privilégiés d'aboutissement:
effet de l'internationalisation de
l'économie
alimentaire,
lieux
d'applications privilégiées
des
politiques
alimentaires,
centres
de
brassages
sociaux
et
culturels, etc." (2). Ainsi défini comme lieu d'aboutissement des
filières
internationales,
la ville par l'ouverture qu'elle fait
aux
MCA
occidentaux,
est
réputée
accroître
la
dépendance
(1) L.
Malassis,
M. Padella, Economie agro-alimentaire,
tome 3,
Ed. Cujas, Paris 1986, p.
225.
(2) Malassis,
idem p.
319.
46
. . .
1
alimentaire.
En Afrique sub-saharienne, cette relation entre urbani-
sation
et
dépendance alimentaire fera l'objet de vives
contro-
verses. Plusieurs tendances s'affrontent quand il s'agit de déga-
ger
les différentes responsabilités dans l'envolée des
importa-
tions
alimentaires
généralement considérée comme indice
de
la
dépendance alimentaire.
B - Controverses sur le cas de l'Afrique sub-saharienne
L'Afrique
sub-saharienne est une zone de fort décalage
entre l'offre et la demande alimentaire locale. Selon les estima-
tions
de la F.A.O.,
la décennie 70 qui a vu éclore
les
grands
débats
sur l'alimentation se caractérise par un déséquilibre mis
en
évidence par les indicateurs d'urbanisation de production
et
d'importation alimentaire.
Alors que la population augmentait de
2,7
% et la population urbaine de(5,9 %)
la production vivrière
l,°..
locale
ne
progressait que de 1,5 %.
Dans le
~
meme
temps,
les
seules importations céréalières ont plus que triplé pour
attein-
dre
les
21 millions de tonnes en 1980 alors qu'elles
n'étaient
que de 6 millions en 1970.
A la lumière du tableau que
présente
l'évolution
des
statistiques
brutes relatives à
la population
notamment urbaine, à la production agricole commercialisée et aux
importations
de
produits alimentaires,
suivant
le
modèle
de
Malassis, la thèse de la liaison entre urbanisation et dépendance
semble fortement accréditée.
Cette
thèse de l'urbanisation comme élément
inducteur
de
la
dépendance
alimentaire et financière de
l'Afrique
sub-
saharienne,
mesurable par les flux en valeur et la croissance en
47
volume
des
importations agro-alimentaires, a été
partagée
par
plusieurs
institutions
internationales telles
que
l'OCDE,
la
Banque Mondiale et même la F.A.O.
(1);
celles-ci voient dans la
croissance
des importations de céréales et la chute des
produc-
tions
agricoles
locales,
les effets de l'urbanisation
et
des
nouveaux
comportements alimentaires qu'elle a
engendrés.
Cette
argumentation
a pris force de loi au regard de ce que
l'on
ob-
serve
actuellement
dans le Sahel où le phénomène de
dépendance
est
particulièrement inquiétant vu le paradoxe alimentaire
dans
lequel cette sous-région se trouve. Par exemple en 1989, le Sahel
par
sa
production disponible
localement
pour
l'alimentation,
pourrait
s'autosuffire.
Pourtant
il aurait
importé
1.115.000
tonnes
de riz et de blé parce que dans leur modèle de
consomma-
tion,
les
sahéliens
ont privilégié ces deux types
de
céréale
qu'ils ne produisent pas encore en quantité suffisante (2).
Ce lien qui semble de plus en plus établi entre urbani-
sation et dépendance alimentaire a été remis en question à partir
des
études économiques et statistiques du Centre d'Etude
et
de
Recherche
en
Economie du Développement (CERED)
qui
montreront
que la réalité est plus nuancée.
Cette
relativité
vient
du fait que,
face
aux
deux
variables
(population
et importation alimentaire) on
note
une
(1) Cf. FAO, La situation mondiale de l'alimentation et de l'a_
griculture, 1978, Rome 1979.
Bird,
Le développement accéléré en Afrique au sud du Sahara,
Washington 1981.
OCDE, Etude des tendances de lloffre et de la demande mondia-
le des principaux produits agricoles, Paris 1976.
(2) C.E.
Seye:
Sahel:
la nécessaire mais difficile promotion
des céréales locales in Le courrier nO 114,
mars-avril 1989,
p. 71.
48
j
j
j
-
répartition
des
pays de l'Afrique
subsaharienne
en
plusieurs
groupes
à l'intérieur desquels les corrélations entre les impor-
tations
agro-alimentaires et le volume de la population
urbaine
ne sont pas toujours établies.
Ainsi,
pour la plupart des Etats
composant cet espace géographique,
les relations entre les
deux
phénomènes
sont moins évidentes.
Le croisement des taux annuels
moyens
de
croissance du volume des importations totales
et
de
croissance
de
la population urbaine entre 1970 et
1980
aurait
montré
d'après
les
travaux
du CERED que
"pour
les
34
pays
d'Afrique
sub-saharienne de plus d'un demi-million de
citadins,
la corrélation est quasi nulle (R = 0,0467) du fait de
l'extrême
diversité
des situations.
La liaison n'est vérifiée,
selon les
auteurs,
que
pour
un nombre limité de pays parmi
lesquels
le
Nigéria,
le Sénégal et la Côte-d'Ivoire qui nous intéresse
ici.
Selon
ces études,
c'est le niveau du revenu national qui semble
jouer un rôle déterminant.
Les résultats macro-économiques
res-
sortant
des analyses économétriques "viennent largement infirmer
les
thèses tendant à relier mécaniquement la dépendance
alimen-
taire
à la croissance des villes.
Si l'urbanisation peut
être,
dans certains cas,
un facteur influençant le niveau des importa-
tions et/ou la production vivrière, d'autres variables, notamment
la richesse nationale, semblent de loin plus déterminantes" (1).
(1) O.Sudrie,
Dépendance alimentaire et urbanisation en
Afrique
sub-saharienne : une relation controversée in Revue Tiers-
Monde, tXXVI, nO 104, Oct.-déc. 1985; p. 877.
Cet article, duquel nous tirons les éléments de réfuta-
tion
de la thèse de la liaison mécanique entre
urbanisation
et
dépendance
alimentaire emprunte sa
problématique
à
la
recherche sur la question menée par l'auteur en collaboration
avec J.
Coussy,
Ph. Hugon au Centre d'Etude et de Recherche
en Economie du Développement (CERED).
49
Tout
comme
la richesse et toujours dans le même
con-
texte
subsaharien,
la pauvreté peut également
être
considérée
comme
facteur de dépendance alimentaire.
Les politiques alimen-
taires des pays sahéliens,
du Tchad et des pays de la
Corne
de
l'Afrique
sont à ce propos très éloquents.
Il faut aussi
faire
remarquer
la part des erreurs,
d'accidents ou des
catastrophes
dans cette envolée des importations alimentaires.
D'autres
études
notamment le rapport
Courade
(1),
sans
nier
l'influence
de
la richesse nationale,
semble de plus
en
plus
mettre
l'accent
sur
la volonté politique de tirer
profit
des
surplus enregistrés ces dernières années sur les marchés mondiaux
de céréales.
Nous verrons dans la section suivante la traduction
de tous ces paramètres dans l'évolution des importations
alimen-
taires en Côte-d'Ivoire.
Ces thèses n'ont en fait rien de contradictoire.
D'un
contexte économique à un autre,
les causes majeures de
la
dépendance
alimentaire
varient.
Elle peut soit résulter de
la
croissance d'une demande urbaine dans une situation de concentra-
J!,\\'
tion~de croissance de la population dans les villes,
soit
s'ex-
pliquer par la volonté des pouvoirs d'assurer tout simplement une
sécurité alimentaire,
de parer à des besoins d'urgence ou d'amé-
liorer
les
recettes
fiscales ou tout simplement
être
analysé
comme la conséquence économique du mimétisme culturel,
notamment
alimentf~\\-e.
Parfois l'explication de la croissance des importa-
'-~
tions
alimentaires
par l'une de ces raisons
n'annule
pas
les
autres, qui restent toutefois secondaires.
...
Dans
le
cas abidjanais par exemple,
on peut
lire
a
travers
l'envolée
des produits alimentaires importés la
crois-
50
sance
de la demande urbaine de produits adaptés au mode
de
vie
citadine. Cette demande d'importation a certes été exarcerbée par
les
pouvoirs
publics dont les mains sont de plus plus
visibles
)dans le choix de la dépendance alimentaire. La Côte-d'Ivoire fait
l par tie
des pays qui ont accepté le principe de l'ajustement
tout
1
en
poursuivant
une politique massive d'importation
alimentaire
destinée aux villes et aux planteurs. Les raisons de cette crois-
sance
sur
lesquelles nous reviendrons en
détail
peuvent
être
attribuées
à
une volonté de maximisation des recettes
fiscales
publiques via un taux de protections élevé mais insuffisant
pour
réduire les importations.
Section 2. COTE-D'IVOIRE
"LA VILLE PLAIDE NON COUPABLE"
La
Côte-d'Ivoire et l'un des pays d'Afrique
sub-saha-
rienne
où l'hypothèse de la relation entre urbanisation,
dépen-
dance et mimétisme alimentaire a été le plus discuté. Les données
..
de
sa croissance démographique que l'on corre le
généralement
a
l'évolution des importations alimentaires dans sa balance commer-
ciale
autorise un tel débat dont les conclusions tendent
plutôt
vers une confirmation de l'hypothèse d'une évolution des importa-
-
- ~- - -. - -
... ---------
tions
alimentaires
sans
mimétisme et vers
une
perception
de
l'enjeu alimentaire et du jeu des pouvoirs publics dans l'ajuste-
ment de l'offre à la demande alimentaire.
A - Croissance démographique, urbanisation et évolution des
importations alimentaires
Lors du recensement de 1975,
la Côte-d'Ivoire comptait
51
6.700.000 habitants. Les estimations relatives à la population en
1985-86
varient entre 9,4 et 10,8 millions.
D'après les estima-
tions actuelles de la Banque Mondiale,
la population s'élèverait
à 11.430.000 habitants en 1988 (1). Entre 1960 et 1980, la Côte-
d'Ivoire aurait avancé, du point de vue du nombre d'habitants, du
18e
au 12e rang parmi les 47 pays de l'Afrique au Sud du Sahara.
Les
estimations
de la croissance démographique au cours
de
la
dernière
décennie varient également,
allant de 3,4 à 4,4 % par
an.
Les
taux de croissance démographique enregistrés
dans
le passé permettent de tirer d'importantes conclusions concernant
l'augmentation future de la population. S'il a fallu 35 ans pour
que
la population ivoirienne double (entre 1920 et 1955),
il
a
'f
suffit;' de
20 ans pour qu'elle double de nouveau (entre
1955
et
1975)
et
selon les projections,
il ne faudra que 17
ans
pour
qu'elle
double une fois de plus (entre 1975 et
1991 ) .
Même
en
supposant
que l'immigration étrangère qui contribue à sa
crois-
sance à 1,3 % diminue, on estime que le pays comptera 17 millions
d'habitants d'ici l'an 2000, c'est à dire dans 10 ans seulement.
Les
différents mouvements qui affectent la répartition
de
la population se traduisent par des taux de croissance
démo-
graphique dissemblables entre régions. Par exemple, la population
d'Abidjan
semble s'être accrue en moyenne de 6,6 % par an
entre
1976 et 1985;
durant la même période,
celle des forêts occiden-
tales,
des
forêts
orientales et de la savane
n'ont
progressé
( 1 ) Il
serait
toujours possible de réviser les
estimations
et
projections
actuelles
dès que les résultats
définitifs
du
recensement
général
de
la
population
de
1988
seront
disponibles.
52
respectivement que de 4,9 %,
2,8 % et 1,3 %.
L'urbanisation
en Côte-d'Ivoire est surtout un
phéno-
mène affectant les zones forestières du sud où la population
est
concentrée dans les grandes villes.
Avec 45 %,
la Côte-d'Ivoire
enregistre
le
plus
fort taux d'urbanisation
de
l'Afrique
de
l'Ouest.
En 1975 sur 2,2 millions de citadins,
1,7 million soit
80
%
vivaient dans des centres urbains de la forêt,
y
compris
Abidjan et 36 % dans des villes autres qu'Abidjan mais
également
dans
la forêt.
Les tendances depuis 1975 en ce qui concerne les
caractéristiques de l'urbanisation ne pourront être connues
avec
précision qu'après le dépouillement du recensement de 1988.
Tou-
tefois
Abidjan est de loin non seulement la ville la plus impor-
tante
(elle
est plus de cinq fois plus peuplée que
Bouaké
qui
vient au deuxième rang) mais aussi celle qui se développe le plus
rapidement,
le taux d'accroissement annuel moyen de sa population
ayant
été
de l'ordre de 10 à 13 % pendant les
années
1960-70.
Selon
les
estimations de la Banque
Mondiale,
la
seule
ville
d'Abidjan
comptait plus de 1,8 million d'habitants en 1986 (soit
18,5
% de la population totale et plus de 40 % de la
population
urbaine)
(1).
On
estime en 1987,
qu'elle compte
environ
2,5
millions d'habitants soit deux fois et demie de plus qu'en
1975.
Ainsi
environ la moitié de la population urbaine du pays ou près
d'un quart de sa population totale habiterait à Abidjan.
Cette croissance urbaine est généralement corrélée avec
les
dépenses d'importations alimentaires en forte
croissance
à
~
i partir du milieu de la décennie 70. Le tableau ,1) retrace
(1) Banque Mondiale,
Côte-d'Ivoire: analyse du système de santé
et
financement
de
son
fonctionnement.
Banque
Mondiale,
Abidjan, Mars 1988, p.
5.
53
l'évolution
des importations de produits alimentaires
(produits
d'origine
animale
dont produits
laitiers,
produits
d'origine
végétale
dont
céréales et produits des industries
alimentaires
dont
sucres
et
sucreries) dans les
statistiques
du
commerce
extérieur à partir des déclarations en douanes des marchandises.
Tableau nO 2
Evolution des importations de produits alimentaires
par
rapport au total des importations
! Total des importat ions!
Importations des produits alimentaires
!
!
! Tonnage
1 Valeur
Tonnage
Progres-!
Valeur
! Progres-! Part dans!
!-----------!-----------!-----------! sion
!----------! sion
! les im-
!
mil1 iers
1 mi 11 iards
milliers
mi 11 iards!
ports
de tonnes ! de F.CFA
de tonnes
de F.CFA 1
%
!
!1975
3.126.843
241. 393
255.362
100
23.832
100
9,8
!1976
3.486.384
311.607
282.609
111
25.691
108
8,2
!1977
4.259.588
429.566
474.938
186
39.047
163
9,0
!1978 ! 4.627.414
522.502
482.032
189
41.621
174
7,9
!1979
5.095.579
528.850
563.258
221
51.607
216
9,7
!1980
4.980.410
631.899
674.238
264
72.998
306
11,5
!1981
4.697.515
653.321
823.655
323
101. 338
425
15,5
!1982
4.187.197
718.594
759.707
297
100.801
423
14,0
!1983
3.815.617
704.249
868.337
340
129.939
545
18,4
!1984
3.180.898
658.569
813.328
318
127.452
534
19,3
!1985
3.945.245
772.987
676.344
265
116.580
489
15,0
!1986
5.022.591
709.044
1
916.906
359
126.563
531
17,8
!1987
5.275.314
673.899
1. 106. 067
433
136.303
571
20,2
Source : Statistiques du commerce extérieur.
Recomposition faite par nous.
54
L'analyse
des
données du tableau
permet
de
dégager
trois phases de profil de croissance des valeurs.
- La
première phase (1975-1979) se caractérise par une
croissance
forte
et régulière par rapport a la tendance
de
la
première décennie de l'indépendance marquée plutôt par une
lente
progression en francs constants selon l'analyse de J. Roch (1) de
la
période considérée.
De 255.362 tonnes en 1975,
la
quantité
d'aliments
importés est passée à 563.258 tonnes en 1979 soit
un
taux de progression de 221 % en 4 ans.
En francs constants cette
,
croissance était de l'ordre de 216 % dans une fourchette de 24
a
52 milliards de francs CFA.
- La
deuxième phase (1980-1984) voit une
accélération
de la croissance des années précédentes. En début des années 1981
on
notait une brutale élévation du niveau des importations
avec
évolution
en dents de scie à l'intérieur de la séquence.
En fin
de
période le taux de progression de la quantité importée a
été
de
318 % tandis qu'il atteignait 534 % en
valeur.
Toujours
en
1984,
la part des produits alimentaires dans le total des impor-
tations
qui
n'était que de 9,8 % en valeur et 8,1 % en
tonnage
est
passée respectivement à 19,3 % et à 25,5 %.
Même
la
crise
économique sévère des années 1980 qui a contraint le gouvernement
,
ivoirien
a
s'engager dans un processus d'ajustement
structurel
n'a
pu
inverser cette tendance amorcée depuis le milieu
de
la
décennie 70.
- La
troisième
séquence
qui débute en 1985
a vu
le
niveau des importations s'effondrer brutalement pour
recommencer
(1) J. Roch, Le role des importations dans la
consommation
ali-
mentaire en Côte-d'Ivoire, ORSTOM, Abidjan 1987, p.
5.
55
sa
courbe
ascendante
l'année suivante.
En
1987,
en
tonnage
(1.106.067) comme en valeur (136.303 milliards de
F.CFA),
l'im-
,
portation
alimentaire
est a son niveau jamais atteint
dans
la
balance commerciale ivoirienne.
Comme le montrent ces données statistiques tant sur
la
croissance démographique que sur l'évolution des importations, la
croissance
des indicateurs qu'illustrent ces séries statistiques
peuvent suggérer une mise en corrélation des deux variables.
Généralement,
les indicateurs économiques pour
corro-
borer
le lien entre urbanisation et dépendance alimentaire
sont
les
statistiques brutes concernant les importations des produits
tels
que le riz et le blé (considérés comme symbole de
l'extra-
version
de
la consommation) souvent mises en
rapport
avec
la
production agricole commercialisée et la croissance de la popula-
tion
citadine.
Dans le contexte ivoirien,
l'importance de
ces
deux céréales stratégiques dans l'alimentation urbaine est varia-
ble.
Pour les besoins de l'analyse, nous nous pencherons surtout
sur
le
cas du riz car même si le pain - dont le blé sert
à
la
fabrication
est
un produit stratégique dans
l'alimentation
urbaine, i l reste marginal selon les données de E.B.C. 79. Il est
surtout consommé en alimentation extérieure et seulement
- selon
nos
enquêtes - dans une unité de production-vente (UPV) sur six;
ceci
confirme
d'ailleurs les propos
de
D.
Requier-Desjardins
selon
lesquels
il n'est pas à proprement parler un
produit
de
base de l'alimentation urbaine en Côte-d'Ivoire (1).
(1) D.
Requier
Desjardins.
L'alimentation en Afrique,
Ed.
Karthala - Pusaf, Paris 1989, p. 103.
56
A l'appui de la thèse de la dépendance et pour la suite
de notre développement, la lecture des statistiques d'importation
de blé dans la balance commerciale ne nous intéresse donc pas.
Outre la problématique de l'importation du
riz,
notre
intérêt
se portera également sur l'approvisionnement en protéïne
animale
et
plus précisément sur la viande bovine
que
la
trop
grande
importance accordée aux céréales a
masqué.
Pourtant
sa
place
reste déterminante dans la problématique de la
dépendance
et en alimentation extérieure.
1°) Evolution de la consommation du riz
La consommation du riz en Côte-d'Ivoire a vu la part de
son
importation
s'accroître au fur et à mesure
que
le
marché
mondial rizicole s'innonde (1).
Le tableau retraçant l'évolution
de
son
importation et de sa consommation nous
fait
distinguer
trois
phases
dans le processus d'inversion de la
structure
de
l'approvisionnement du pays malgré une croissance non négligeable
de la production intérieure (2).
- La
première
phase
part de 1960 à
1972.
En
cette
période,
la consommation de riz blanchi ou non était de
l'ordre
de 118.000 tonnes,
dont 83.000 tonnes fournies par la production
nationale (70 %) et 35.000 tonnes importées.
Malgré des fluctua-
tions
sensibles,
les importations ne représentaient en
moyenne
que 20 à 30 % de la consommation apparente.
1973-1976
plus brève,
cette période reflète
les
(1) Cf. dossier: Riz: un marché stratégique, La lettre de
Solagral, nO 86 Novembre 1989, pp. 7-17 ..
(2) R.
Hirsch,
La riziculture ivoirienne : diagnostic et condi-
tions préalables d'une relance, CCCE, Paris 1984, p. 7.
57
tensions
observées sur le marché mondial.
En effet le prix mon-
dial
du
riz,
multiplié par 4 entre 1971 et
1974,
incita
les
autorités
ivoiriennes
à importer massivement en
1973
pour
se
~
prémunir
contre
la hausse des cours prévu~pour 1974.
Pour
la
première
fois,
les importations dépassent 100.000 tonnes et
le
..
taux
d'autosuffisance
apparent
tombe
a
54
%•
Les
années
suivantes,
la hausse des prix intérieurs à la production et à la
consommation
d'une part freina sensiblement la consommation tout
en
provoquant un engorgement des capacités de stockage
(et
des
pertes non négligeables) et,
d'autre part, stimula la production
intérieure, ce double phénomène entraîna un arrêt quasi-total des
importations
en
1975 et en 1976 (respectivement 1.600 et
2.300
tonnes) .
\\
Cette autosuffisance apparente, qui fut alors présentée
comme
l'un
des résultats positifs de la politique menée par
la
SODERIZ,
peut
(et doit) cependant être interprêtée
de
manière
plus nuancée. Il n'y~ eu autosuffisance que parce que les consom-
:.L
mateurs
se
sont détournés massivement du riz,
dont le prix
de
détail
était passé de 50 à 125 F.CFA/kg (+ 150 % en deux ans
et
parce que les disponibilités intérieures (importations anticipées
plus production nationale) rendaient inutile tout recours à l'ex-
térieur.
Phénomène
lié à la fois aux prix et à une
conjoncture
exceptionnelle,
"l'équilibre"
entre
l'offre et la
demande
ne
devait pas durer.
- 1977-1987.
Cette dernière période qui couvre dix ans
vit
tout d'abord un retour à la normale.
Les surplus ayant
été
,~a:i
écoulés grâce, en partie, à une baisse du prix du détail ramené à
j
1
.~
100
F.CFA/kg dès mai 1975,
les importations étaient revenues
à
1
1
'~
!,
;"~'
1 "
• Ir
58
l',
1 {-"
,
fjJ
j 1
i
J
,
Tableau nO 3
L'influence des prix sur les importations et la
consommation de riz
IMPORTATIONS (1)
PRIX INTERIEURS (F.CFA/kilo)
A
!-------------------------------------!----------------------------------------! CONS()1-
N
! Valeurs
Quantit6s
Prix CAF à !
Prix de gros
Prix de détail
MATI ON
N
!(mi 11 iards
(milliers
l'import.
(F.CFA courants)!----------------------!
PAR
E
!
F.CFA)
de tonnes)
(F. CFA/kilo!
(2)
!
(F.CFA
!
(F.CFA
!
TETE
E
1
courants
constants
( kilos)
S
1986)
1970
2,0
78,7
26
49,6
(23,6)
50
208,6
45,5
1971
2,2
97,3
23
41
( 18)
50
203,7
54,3
1972
2,2
77,1
29
41
(12)
50
197,0
39,2
1973
8,6
147,9
58
63
( 5)
63
226,2
50,3
1974
8,2
73,0
113
116
(3)
125
358,4
42,0
1975
0,2
1,6
134
87
( -47)
106
274,7
33,7
1976
0,4
2,3
161
87
(-74)
100
238,0
30,2
1977
8,6
121,4
71
87
(16)
100
198,5
52,8
1978
9,3
125,7
74
87
( 13)
100
181,5
52,0
1979
13,6
197,6
69
87
( 18)
100
162,5
57,3
1980
24,1
252,7
95
87
(-8)
100
152,3
56,0
1981
35,1
335,3
105
100
(-5)
110
158,1
59,2
1982
34,3
356,7
96
118
(22)
130
170,1
60,7
1983
36,6
382,6
96
118
(22)
130
157,6
59,7
1984
34,2
320,1
107
147
(40)
160
182,0
59,5
1985
17,2
161,9
106
147
(41)
160
168,0
53,5
1986
27,9
351,4
77
147
(70)
160
160,0
56,7
1987
32,0
478,0
67
147
(80)·
160
160,0
58
• De cette marge il faut déduire une taxe de 20 F.CFA\\kil0.
Note: Les maxima sont soulignés
(1)
Données disponibles sur 11 mois seulement en 1986.
(2) Le
niveau du prélèvement effectué par l'Etat figure entre parenthèses.
Il est obtenu
par
la
différence entre prix de gros et prix à l'importation.
~ : Recomposition de J. Roch à partir des données des statistiques douanières, du Ministère du
développement rural et du Journal officiel.
Quelques corrections et les données de 1987 tirées des rapports de la 8anque Mondiale
ont
été apportées par nous.
59
leur
niveau d'avant la "crise" (35 à 37 , de la consommation
en
1977
et 1978) démontrant ainsi le caractère conjoncturel,
sinon
artificiel, du pseudo-équilibre des années 1975 et 1976. A partir
de
1979,
les
importations
croissent
brutalement
passant
de
197.566
tonnes à 382.625 tonnes en 1983 soit une progression
de
193 ,
en 4 ans.
Approchant les 400.000 tonnes en 1983 et plafon-
nant à 478.000 tonnes en 1987, les importations de riz qui repré-
sentaient en valeurs 3,7 ,
des importations totales en 1980
sont
passées à 4,7 ,
en 1987.
Des 37,5 ,
qu'elles représentaient dans
les importations alimentaires en 1980 elles sont passées à 43,2 %
en
1987,
ce qui semble traduire un accroissement des
consomma-
tions
individuelles
aussi
bien en milieu urbain
qu'en
milieu
rural. Les recentes évolutions montrent également l'influence des
prix bas pratiqués sur le plan mondial sur les importations et la
consommation.
Nous
observons
le même phénomène
au
niveau
de
l'approvisionnement en protéïne animale.
2°) Evolution de l'approvisionnement national en viande
Dans l'analyse de l'état de dépendance alimentaire dans
laquelle
la Côte-d'Ivoire se trouve,
un autre phénomène
remar-
quable qui,
nous le verrons,
aura un impact sur le développement
de
l'informel alimentaire,
est l'envolée des
importations
de
produits animaux;
cette croissance résulte du déséquilibre entre
les
trois sources d'approvisionnement national (-production
des
élevages
nationaux - importation d'animaux vivants à partir
des
pays
voisins -
importation de viande d'origine
extra-africaine)
en
viande
depuis ces trente dernières années.
La
trop
grande
attention portée aux céréales a occulté la croissante et progres-
60
sive dépendance vis à vis de l'extérieur pour l'approvisionnement
en
viande alors que dans la balance commerciale
ivoirienne,
la
valeur
des
produits animaux représente presque le double de
la
valeur des céréales.
Les importations de celles-ci
atteignaient
respectivement 33,
45 et 33 milliards F.CFA en 1980, 1982 et 1985
tandis
que,
pour les produits animaux,
le montant s'élève pour
les mêmes années à 58, 70 et 71 milliards F.CFA (1).
Bien avant l'indépendance et de 1960 à 1975, l'approvi-
sionnement
en viande de la Côte-d'Ivoire a été pour
l'essentiel
assuré
grice à l'importation d'animaux vivants en provenance des
pays sahéliens largement excédentaires en bovins. Mais les effets
conjugués de la sécheresse au Sahel qui a duré de 1969 à 1973
et
l'augmentation de la demande qui a fait passer le taux d'autosuf-
fisance
de 42 % en 1960 à 35,7 % en 1973 ont nécessité à
partir
de 1975, la mise en place d'une politique de production nationale
en vue de réduire la dépendance qui rendait aléatoire la sécurité
alimentaire des populations.
Cette
détermination
a
favorisé
des
records
de
production
qui
ont propulsé la Côte-d'Ivoire au 1er
rang
pour
l'accroissement
de
la
production
de
l'élevage
par
habitant
évaluée à 42 % en 10 ans (période 1975-1985 voir tableau nO 4).
(1) J. Roch,
... p. 11.
61
Tableau nO 4
Evolution
de la disponibilité nationale en viande
bovine
1 Consommation 1 Nbre de kilos! Production 1 Import
Import
1 nationale de 1 par habitant 1
1 en vif
en mort
1 viande T.E.C*!
!
1
1
!
1
1 1975 1
66.290
9,9
35,7
1
53,3
11 ,0
1
1
1
1 1980 !
102.200
12,5
38,2
1
49,7
12, 1
1
1
!
1 1984 1
96.690
10,8
41 ,6
!
44,8
13,6
1
1
1 1985 1
109.810
11 ,8
38,4
42,7
18,9
1
1
1 1986 1
119.640
12,5
36,4
33,0
30,6
1
1
1 1987 1
120.420
12, 1
37,1
28,9
34,0
1
1
1 1988 1
136.920
13,3
33,8
22,1
44,0
1
* T.E.C. : Tonne équivalent carcasse.
Source : C. Sapor,
p. 5.
Comme le fait remarquer C. Sapor,
"En dépit des efforts
consentis et des résultats remarquables obtenus,
[il faut]
noter
que du fait de la croissance démographique, de l'urbanisation, de
l'élevation
du
niveau
de
vie
et
de
l'augmentation
de
la
consommation qui en a résulté,
le taux d'autosuffisance n'a
pas
suivi
l'augmentation spectaculaire de la production"
(1).
Mais
entre
1975
et 1988 la politique de disponibilité protidique
va
provoquer
une radicale mutation du
système
d'approvisionnement
avec quatre caractéristiques majeures :
- croissance de la demande de consommation nationale;
(1) C.
Sapor,
Note
synthétique relative à la protection de
la
production
nationale
de viandes en Côte-d'Ivoire et
de
la
création d'un fonds de développement de l'élevage.
Ministère
de la production animale, Abidjan, 1989, p.
4.
62
- baisse - à partir de 1984 - de la part de
production
locale du fait de la croissance des viandes extra-africaines dans
la structure de l'approvisionnement
- effondrement des importations en vif
- augmentation
brutale à partir de 1985
des
importa-
tions
de viande extra-africaines du fait d'un excédent de viande
au niveau des pays de la CEE accompagnée de facteurs d'incitation
f
suffisamment puissants pour aguicher l'intérêt de la grande
masse
des consommateurs africains pour la viande congéleé (1).
Cette
situation qui perdure n'a guère
manqué
d'avoir
des incidences sur les habitudes de consommation. On constate par
exemple
que
la consommation moyenne de viande par habitant
qui
avait
commencé par chuter s'est accrue de 12 % depuis 1984
(2).
Cette
habitude
d'une plus grande consommation de viande
à
bas
prix
artificiellement acquise est fortement constatable en
ali-
mentation extérieure.
A
la
première lecture de toutes ces
données
statis-
tiques,
la
thèse des liaisons entre croissance urbaine et
évo-
lution
des importations alimentaires semble confirmée a
priori.
Mais
les récents travaux (3) sur le rôle des
importations
dans
l'approvisionnement
comme dans l'orientation et le niveau de
la
demande semblent déceler la main de l'Etat qui devient de plus en
(1) Voir à ce propos l'intéressant dossier de Solagral. "Les sur-
plus alimentaires et le partage nord-sud de la production a-
gricole, Paris 1988.
(2) C. Sapor,
idem., p.
7.
(3) Cf. G. Courade,
l Droy, D. Harre, avec
la
coll. de J. Roch,
D.
Nicklauss,
F. Akindès, Evaluation
des
habitudes
à
la
consommation
des
produits
alimentaires
en
Côte-d'Ivoire,
ORSTOM-MSA,
Paris 1988.
63
plus visible.
Maintenant,
i l faudra pouvoir évaluer la part de
responsabilité
de la demande urbaine et celle de la volonté
des
puissances
publiques consistant à tirer profit des surplus enre-
gistrés ces dernières années sur les marchés mondiaux dans
cette
envolée des importations.
Mais
si,
dans le contexte ivoirien i l y a une
réelle
dépendance
alimentaire,
contrairement aux schémas
généralement
appliqués,
la croissance des importations dont on devrait
logi-
quement
attendre une modification des modèles alimentaires"
n'a
pas fondamentalement changé les habitudes alimentaires urbaines.
B - Le paradoxe de la dépendance alimentaire sans mimétisme
L'évolution
de
l'analyse des modèles
alimentaires
a
renforcé
l'hypothèse
de la corrélation
entre
urbanisation
et
dépendance
alimentaire dans l'optique des théoriciens de la
dé-
pendance
qui conçoivent la formation d'une culture urbaine péri-
..
phérique
comme
production mimétique
interne
a
l'extraversion
économique. L'alimentation urbaine a toujours supporté ce modèle
..
d'analyse
fortement
contesté
dans
le
contexte
ivoirien
ou
plusieurs auteurs, grâce aux résultats des EBC 79, ont montré ses
limites.
Quelle
que soit la méthode utilisée pour analyser
les
modèles alimentaires,
le constat du non-mimétisme s'impose. L'ap-
plication
d'autres théories,
notamment celle de la
marchandise
alimentaire de R. Mahieu reposant sur l'approche socio-historique
de
l'accumulation primitive et privilégiant le
processus
d'ap-
parition
des
"aliments-services" pour la
consommation
alimen-
taire, ne permet guère de déboucher sur le mimétisme quant au cas
64
-
ivoirien (1).
Cette
hypothèse
de l'urbanisation
comme
facteur
de
modification des modèles alimentaires a connu un large développe-
ment
dans les travaux de D.
Requier-Desjardins (2)
qui,
aussi
bien
à travers la comparaison des modèles ruraux et des
modèles
urbains
de
consommation
qu'à travers une analyse
des
"styles
alimentaires"
urbains incluant l'alimentation extérieure,
en-a
testé la validité pour ensuite aboutir à son infirmation.
Par rapport à la consommation au sein des ménages, cinq
arguments
tirés de l'analyse de l'évolution des modèles
urbains
de
consommation supportent,
selon l'auteur,
la thèse du tradi-
tionnalisme alimentaire urbain :
1 - L'impossibilité d'identifier franchement les effets
de
valorisation des
symboles
d'occidentalisation
tels
que le riz et le pain chez les
consommateurs
au
pouvoir d'achat relativement plus élevé
(cadre
et employés des secteurs modernes)
2 - L'attachement des consommateurs urbains à des habi-
tudes
alimentaires "traditionnelles" d'où la
con-
clusion que l'origine socio-culturelle est un
fac-
teur
de
différenciation
plus important
que
les
variables "revenu" ou "catégories sociales".
3 - L'émergence de facteurs d'évolution qui
coexistent
avec d'autres,
plutôt susceptibles de favoriser
le
(1) R.
Mahieu,
"Marchandise alimentaire et système capitaliste,
in Economie 79, Perpignan 1979, pp. 155-208.
(2) D.
Requier-Desjardins,
L'alimentation
en
Afrique,
Ed.
Karhala-Pusaf, Paris 1989; pp. 91-105.
65
maintien
des
formes
de
sociabilité
alimentaire
héritées des zones rurales.
4 - La
prépondérance des moyens de cuisson
tradition-
nelle
qui
permettent encore
la
préparation
des
plats ruraux et
5 -
Des constats de substitutions qui n'ont rien à voir
avec
un
quelconque bouleversement
des
habitudes
alimentaires.
Pour ce qui est de l'alimentation
extérieure,
l'admi
nistration
de la preuve du non mimétisme selon l'auteur est
-I~"\\":
que ',1 ~L\\ "
dans
ce type d'alimentation,
l'essentiel est constitué par
des 1
produits
transformés issus de filières artisanales utilisant une \\
technologie "traditionnelle" (1).
Si
pour la réfutation de l'hypothèse du mimétisme,
la
,
,
démonstration
de Requier Desjardins a propos a
la
consommation
alimentaire
au
sein des ménages ne souffre d'aucune
faiblesse,
,
celle
relative
a
l'alimentation
extérieure
mérite
quelques
nuances sur lesquelles portera la dernière section.
Section III - SECTEUR INFORMEL ALIMENTAIRE ET RESISTANCE AU MIME-
TISME : LA NECESSITE DE RELATIVITE
A - Les limites de l'argumentation
Déplaçant
la problématique de la consommation
alimen-
taire
du
terrain de la ration ou de budget alimentaire pour
la
resituer
comme
"élément d'un ensemble de
pratiques
sociales",
Requier Desjardins en arrive à la ~onclusion que l'idée d'un lien
(1) D. Requier Desjardins, op. cit ... p. 103.
66
mécanique
entre urbanisation et extraversion des modèles alimen-
taires
en ville,
doive être quelque peu révisée" (1).
Des
ar-
guments
puisés de l'analyse des modèles de
consommation
intra-
domestiques
comme extra-domestiques pour soutenir ses propos
ne
manquent pas.
Pour l'auteur la part de l'alimentation extérieure
dans cette résistance au mimétisme tient au fait que l'essentiel,
dans
ce
type d'alimentation,
est constituée par
des
produits
transformés
issus des filières artisanales utilisant une techno-
logie
"traditionnelle".
Cette
thèse
développée
par
l'auteur
depuis
déjà
quelques années a eu un écho
favorable
dans
bien
d'autres
travaux
sur
l'alimentation,
notamment
ceux
d'Alice
Odounfa (2) et d'Alain Dubresson (3). Mais force est de remarquer
que
si
l'alimentation extérieure,
à l'analyse des
modèles
de
consommation qu'elle véhicule, n'est pas effectivement un vecteur
du mimétisme alimentaire,
l'argumentation de Requier Desjardins,
reprise
par les auteurs précités à l'appui de cette thèse,
pré-
sente
quelques
faiblesses
liées à notre avis
à
deux
raisons
majeures
- La
première
semble provenir du fait
que,
pour
sa
démonstration,
l'auteur reste trop attaché aux données de
l'EBC79
dont
beaucoup d'éléments ne correspondent pratiquement plus
au-
jourd'hui
aux réalités de la consommation alimentaire urbaine et
(1) D. Requier Desjardins, op. cit. p. 92.
(2) A.
Odounfa,
Caractéristiques de la consommation alimentaire
dans les villes de Côte-d'Ivoire à partir de l'Enquête Budget
Consommation 1979 : le cas d'Abidjan,
Direction
de
la
Statistique Abidja~ 1987.
(3) A.
Dubresson,
Urbanisation
et
consommation
alimentaire
citadine
en Côte-d'Ivoire,
Economie Rurale,
nO 190,
Mars-
Avril 1989, pp. 3-8.
67
rurale
de plus en plus influencées par les stratégies
d'ajuste-
ment
entre
offre
et demande alimentaire en
période
de
crise
économique aiguë et de remise en question du pouvoir d'achat
des
consommateurs.
- La
seconde tient au fait de ne s'être pas
interrogé
sur
les limites possible de la résistance au mimétisme dans
une
situation de croissance des importations.
On pourrait supposer en suivant Requier Desjardins dans\\
son raisonnement que si l'essentiel de ce type d'alimentation est
constitué de produits transformés issus de filières
artisanales,
l'informel alimentaire ne prend presque pas part à la destruction\\
finale de la quantité de produits alimentaires massivement impor-
tée
hormis
le pain qui est une dérivée du blé.
De là est
vite
franchi le pas de la proclamation d'une indépendance
alimentaire
qui est loin d'être le cas de l'alimentation hors domicile.
Ces remarques faites,
la poursuite de l'analyse du no~l
mimétisme dans l'informel alimentaire mérite une mise en
exergue \\
1
de l'originalité de ce secteur.
~J
B - L'originalité de la résistance au mimétisme dans la
dépendance
L'informel
alimentaire abidjanais présente la spécifi-
cité d'avoir généré une forme de standardisation introvertie
qui
fait
obstacle au mimétisme tout en ouvrant un espace de
substi-
tution fortement intégrateur de produits importés.
Abidjan n'étant homogène ni socialement, ni culturelle-
ment,
on devrait s'attendre à observer une forte différenciation
des
modèles
alimentaires qu'auraient historiquement
constitués
68
les
complexes ethniques et culturels.
Autrement dit,
la
forte
coexistence
des
ethnies et des nationalités à
Abidjan
devrait
s'accompagner
de coexistence de différents modèles de
consomma-
tion
alimentaire.
A
l'instar de la consommation en
ménage
et
comme l'a montré l'EBC 79,
on devrait retrouver en
alimentation
extérieure
les
prégnances
des
acquis
d'ordre
socio-culturel
orientant les consommateurs vers des tropismes:
les krou et les
mandé
du nord vers le riz et les akan vers les tubercules.
Mais
la
logique
de
la consommation en
alimentation
extérieure
ne
semble guère respecter ce principe.
L'hypothèse d'interprétation
du "modèle de consommation alimentaire dominant" dans le contexte
de l'alimentation extérieure à Abidjan est assez peu ordinaire et
reste très liée d'une part au processus de formation de
l'espace
social informel alimentaire lui-même et d'autre part à un certain
nombre
de variables de changement socio-politique sur lesquelles
nous reviendrons dans le chapitre suivant.
Le modèle alimentaire
dominant en alimentation extérieure semble être le produit
d'une
standardisation plutôt introvertie.
La standardisation introvertie,
contrairement à celle,
extravertie, qui se développe sous l'effet de l'internationalisa-
tion
des comportements alimentaires induite par la puissance des
industries agro-alimentaires, est la diffusion et la prédominance
d'un modèle alimentaire local sur les autres.
En ménage et à l'extérieur,
les consommateurs
urbains
se comportent différemment face à la nourriture.
Comparativement
..
à
ce
qui
a été observé dans les ménages
ou
l'origine
sccio-
culturelle constituait un facteur de différenciation,
l'informel
69
alimentaire
n'a
pas favorisé l'attachement des consommateurs
à
des
habitudes alimentaires propres à leur ethnie
d'origine.
La
culture gastronomique et culinaire akan semble peser de tout
son
poids dans la formation du modèle alimentaire dominant.
La stan-
dardisation
s'est progressivement faite autour du modèle alimen-
taire akan qui est dans l'état actuel de l'informel
alimentaire,
le modèle dominant.
L'anthropologie de l'alimentation extérieure
que
nous ferons dans le chapitre à suivre montrera comment s'est
historiquement constitué la spécificité du cas abidjanais.
Cette
standardisation
introvertie
qui
constitue
la
principale
barrière
au processus mimétique
souvent
interprêté
comme
facteur
d'accroissement de la
dépendance
alimentaire
a
pourtant
ouvert
une brèche aux produits importés,
et ce
à
la
faveur
des
stratégies d'ajustement des coûts de production
aux
revenus des consommateurs.
Cette ouverture de l'informel alimen-
taire
aux importations se l i t à travers le processus de
substi-
tution dans la composition des plats de base.
Ces
substitutions
dépassent le simple cadre des ingrédients tels que le piment,
la
tomate
et l'oignon qui ne sont en fait que des symboles d'évolu-
tion des modes de préparation à l'intérieur d'un cadre défini par
la
combinaison typique entre plat et sauce,
pour s'attaquer
au
coeur même de l'alimentation c'est-à-dire les denrées de base que
sont
le riz et la viande.
Le riz
bénéficiant
particulièrement
d'une
valeur symbolique dans l'analyse de l'extraversion alimen-
taire,
sa
croissance
en alimentation extérieure ne
peut
être
comprise
comme
une conséquence du mimétisme.
Ces
données
qui
feront l'objet du chapitre V montre plutôt que le secteur
infor-
mel alimentaire,
tout en maintenant fortement les habitudes ali-
70
-
mentaires
traditionnelles,
pourrait peser dans la croissance de
la
dépendance ivoirienne en matière d'alimentation par la
place
de
plus en plus grande qu'il accorde aux denrées de base
impor-
tées
tels que le riz et la viande dont les poids
respectifs
ne
sont
guère négligeables dans la balance commerciale.
On ne sau-
rait
donc
comprendre cette mutation progressive en
isolant
ce
phénomène
de substitution de la politique alimentaire
nationale
elle-même
dansant au rythme de la valse des tendances du
marché
mondial des produits alimentaires.
Sans bousculer la
résistance
au
mimétisme
alimentaire,
la force du marché
agro-alimentaire
aura infiltré les modèles alimentaires traditionnels.
CONCLUSION PARTIELLE
Si la dépendance de la Côte-d'Ivoire vis-à-vis de l'ex-
térieur
pour son approvisionnement des villes
est
établie,
la
croissance
des importations qui en est une conséquence influence
l'évolution des habitudes alimentaires extérieures mais pas
dans
le
sens d'un mimétisme sous forme d'adoption de modèles de
con-
sommation extérieurs.
L'impact est plutôt ressenti sous forme de
substitution.
Ceci nous amène à conclure que résistance au mimé-
tisme
n'est
pas synonyme d'indépendance
alimentaire.
Dans
le
chapitre
suivant,
nous analyserons concrètement le processus de
mise en place de la standardisation introvertie dont nous
parle-
rons
et la structure des styles alimentaires propres à l'alimen-
tation extérieure à Abidjan.
71
Chapitre II
CROISSANCE URBAINE ET DEVELOPPEMENT DE L'ALIMENTATION EXTERIEURE
L'histoire du secteur informel alimentaire ne peut être
séparée de celle de la croissance d'Abidjan. L'espace alimentaire
qui
s'est
ainsi constitué au fil du temps reste
partagé
entre
plusieurs modèles culturels. La part belle faite aux habitudes de
consommations
locales
est
le
résultat
d'un
long
processus
historique fait de luttes sociales, économiques et symboliques.
Aussi,
l'état actuel de cette structure alimentaire et
la
dynamique qui la caractérise doivent être appréciés au regard
de
toutes
les
difficultés que
rencontrent
les
acteurs
dans
l'exercice de leur métier.
_..
Section l
- ETAPES DE L'URBANISATION ET PROCESSUS
D'IVOIRISATION
DE L'INFORMEL ALIMENTAIRE
Comme toutes les capitales africaines,
Abidjan a connu
depuis
sa "création" une évolution significative qui s'est
tra-
duite
par
son extension géographique et sa croissance
démogra-
phique.
Cette
importance croissante de la métropole
ivoirienne
n'a
pas manqué de poser quelques problèmes,
notamment celui
de
l'alimentation.
La
Côte-d'Ivoire
a
changé trois fois de
capitale
Grand-Bassam en 1893,
Bingerville en 1900 et Abidjan à partir de
1934.
Bien
avant
de devenir la capitale
en
1934,
Abidjan
existait comme ville, concentrant environ 3 % de la population du
pays.
Mais,
ce n'est qu'entre 1930 et 1950 que la ville changea
d'échelle.
AI Etapes de la croissance d'Abidjan et nécessité d'une alimenta-
tion extérieure
Si
nous nous référons à la typologie spatio-temporelle
de
Philippe Haeringer,
on pourrait distinguer trois phases dans
la croissance de la ville d'Abidjan (1)
:
- L'espace initial ou ville coloniale (1930-1950);
- Le second périmètre ou ville portuaire (1950-1970);
- Le
nouveau
périmètre ou la troisième
extension
en
cours (1970-1990).
(1) Cf. Ph. Haeringer
Abidjan, pour y croire. Ed. ORSTOM, Paris
1984.
73
L'espace initial est celui du Plateau concentrant
tout
le dispositif administratif, commercial, résidentiel européens et
des
"deux villes noires"
(1) Adjamé et Treichville,
la première
séparée
du Plateau par la ceinture protectrice des
camps
mili-
taires
et la seconde par la lagune Ebrié.
Les 50 à 60.000
âmes
inégalement
réparties constituaient la réalité démographique
de
ces 3 sites de 600 hectares (2).
La mise en eau du canal reliant
la
lagune à l'océan et l'ouverture du port en 1950 donneront
un
nouvel élan au paysage économique abidjanais.
Les grands travaux
liés
à
la construction du port et à l'aménagement
de
l'espace
urbain,
le
développement
des activités
portuaires
(stockage,
manutention,
commerce de redistribution dans la ville et à l'ex-
térieur), l'effet cumulatif de la croissance sur les services, la
production
d'énergie et les premiers établissements
industriels
ont
largement contribué à créer un important marché de
travail,
vers lequel afflue de plus en plus une masse de ruraux, nationaux
et
étrangers
(3).
Cet afflux entraînera le
surpeuplement
des
cités africaines.
La solution de désengorgement sera la création
du
"second
périmètre"
matérialisé par 2 nouveaux
quartiers
Koumassi et Port Bouët.
Parallèlement, sur la rive continentale,
le plateau de Cocody élargissait les besoins résidentiels de haut
niveau socio-économique. Ce "second périmètre" a été le prolonge-
ment de l'espace initial saturé.
(1) G.
Balandier: Sociologie
des
"Brazzavilles
noires".
Ed.
Presse de la FNSP, Paris 1985.
(2) Ph. Antoine,
A. Dubresson,
A. Manou-Savina
Abidjan
"coté
cours". Ed. Karthala - ORSTOM, 1987, p. 116.
(3) Ph. Antoine, A. Dubresson, A. Manou-Savina ... idem. p. 21.
74
bz
En 20 années,
l'espace urbain aurait été multiplié par
20 tandis que la population décuplait pour s'élever autour de
70
à 800.000 habitants.
La "troisième extension",
amorcée 5 ans plus tôt
dans
le cas particulier d'Abobo,
date des années 70 et se caractérise
par la conjugaison
- des
financements de l'habitat et de l'équipement des
terrains urbains par les sociétés d'Etat,
- la
réalisation
d'un vaste réseau
routier
par
les
concours financiers internationaux et
- les stratégies d'aménagement des zones péri-urbaines.
Cette extension complète les structures
pré-existantes
(Plateau,
Treichville,
Adjamé,
Koumassi,
Port-Bouët,
Cocody,
Marcory)
par quelques autres et favorise la création de nouveaux
quartiers à savoir Abobo,
Yopougon,
Attiécoubé.
Le tableau ci-
dessous nous
montre
l'évolution de la population dans les trois
périmètres.
Tableau nO 5
Evolution
de
la population selon
les
trois
périmètres
!
1936!
1955
! % !
1963
! % !
1973
! % !
1978
1 % !
1984
! % !
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ 1_ _-
! Ville coloniale
17.000!
98.3001 82 ! 174.900! 67! 228.300! 29!
284.000! 22!
255.000! 16!
! Ville portuaire
-
1
21.200!17,5!
80.500! 31 ! 310.600! 39!
405.000! 32!
474.000! 29!
1 Nouveau périmètre !
-
!
6001 O,5!
6.000!
2! 250.000! 32!
580.000! 46!
910.000! 55!
1
-
_
1
TOTAL
17.000! 120.000! 100! 261.400!100! 788.900!100! 1.269.000!100! 1.693.000!
I
I
i !
1
1. BOO. OOO!
1
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Source: Ph. Antoine, A. Dubresson, A. Manou-Savina (1987), p. 124.
75
Cette
population évaluée à 1.800.000 habitants en 1984
s'élève aujourd'hui aux environs de 3.000.000 d'habitants avec un
taux de croissance de 10-11 % par an.
A cette expansion démographique et spatiale
correspond
une
croissance
des
besoins
socio-économiques,
notamment
alimentaires.
Cet
élargissement de l'espace vécu conjugué au
rythme
de vie urbain et à la faiblesse des moyens de transport,
enlève-
,
ront
aux
travailleurs
la possibilité de prendre leur
repas
a
domicile,
faisant ainsi de l'alimentation extra-domestique
une
nécessité
que viendront satisfaire les différentes structures de
l'artisanat alimentaire.
Mais avant de présenter les
structures
de production-vente du secteur informel alimentaire,
intéressons-
nous à son évolution dans le temps.
BI A coeur du processus de l'ivoirisation de l'informel alimentaire
Il
convient de préciser tout de suite que dans le
cas
abidjanais,
l'I.A.
existait bien avant le transfert de la capi-
tale, puisqu'il était la principale structure de restauration des
Africains
qui
travaillaient sur le chantier du
chemin
de
fer
(1904),
dans
les
factoreries
(1908) et
dans
l'administration
comme subalternes.
L'afflux
de nouveaux migrants attirés par
la
demande
de main-d'oeuvre et le manque de cantines d'établissement accroî-
tront
cette importance du réseau informel d'alimentation qui
ne
cesse
de
s'élargir.
Les enquêtes budget-consommation
de
1979
évaluaient
déjà à 37 % l'importance des plats consommés sur
les
lieux
de travail par rapport aux 22 % que représentent les repas
76
pris hors domicile à Abidjan.
Plus
qu'aux
caractéristiques
du
régime
alimentaire
extra-domestique, nous nous sommes intéressé au mode d'apparition
et
d'évolution
de cette pratique commerciale
née
des
besoins
croissants
de
l'alimentation de masse.
Si
la période d'apparition de
l'informel
alimentaire
est à peu près certaine,
les opinions de nos informateurs diver-
geaient quant à la paternité de l'activité.
Trois hypothèses ont
commandé
l'analyse
de
l'antériorité ethnique ou
nationale
de
l'informel alimentaire:
- la
première
attribue
aux
femmes
baoulé
et
appoloniennes, l'antériorité dans ce secteur;
,
- la
seconde hypothèse,
plus
vraisemblable,
tend
a
préciser que l'activité était l'apanage des immigrés sénégalais;
- la
troisième
hypothèse
pose
le
problème
de
l'antériorité
sous
forme de concurrence entre femmes baoulé
et
femmes dahoméennes (originaires de l'actuel Bénin).
Les
travaux sur les migrations urbaines observent
ef-
fectivement
un
déplacement par vagues des
femmes
baoulé
vers
Abidjan
depuis que la ville est devenue un pôle important
d'at-
traction économique.
D'ailleurs les recensements de 1955, dénom-
,
brant
chez les Baoulé 6.636 femmes pour 4.690 hommes présents
a
Abidjan, l'attestent.
La raison majeure de ces mouvements vers Abidjan
était
que
ce
dernier constituait pour elles,
"Un refuge
contre
les
contraintes traditionnelles (en particulier dans le cas des fian-
çailles
prépubertaires);
de ce milieu "neutre",
elles espèrent
77
ainsi obtenir leur indépendance économique en faisant le commerce
de vivriers,
de services domestiques (cuisine) et sexuels auprès
de
cette
population
constituée en
grande
partie
de
céliba-
taires" (1).
Certains
auteurs
(Mona et Pierre
Etienne,
1967)
situent
cette
migration
autour de 1950
alors
que
l'informel
alimentaire
est
apparu
cinq
décennies
avant.
Aussi,
J.P.
Chauveau, dans son analyse historique de l'effectif de population
et de la domination ethnique, insiste sur la précocité de l'exode
de
jeunes
filles
et de jeunes femmes vers
les
agglomérations
coloniales
et la Basse-Côte dans les années 1913-1915 selon
les
rapports d'archives (2).
Historiquement,
il est plus vraisemblable que les fem-
mes baoulé aient pris part à une activité déjà établie dont
"les
ficelles leur ont été données par des femmes dahoméennes",
selon
A...
M... , 68 ans, habitant Treichville depuis 1936. Cette thèse
sera
confortée par les avis quasiment unanimes de
trois
autres
informateurs (de 40,
33 et 32 années de citadinité) avec qui nous
avons eu des entretiens ouverts sur la question.
Conjointement aux entretiens et à la recherche documen-
taire,
nous
avons pensé que l'ordre d'apparition
chronologique
des
spécialités culinaires pourrait nous servir de repère histo-
rique.
Nous avons,
à cet effet,
eu avec nos
informateurs,
de
longs
entretiens sur leurs habitudes de consommation alimentaire
d'antan;
lesquelles habitudes tournaient essentiellement
autour
(1) P. Etienne, Les
baoulé
face
au fait urbain. OR8TOM - Petit
Bassam, Abidjan 1970, p. 4.
( 2 ) J.P.
Chauveau,
La
part
ba~le.
Effectif de population
et
domination
ethnique
une perspective
historique,
Cahiers
d'Etudes Africaines,
Tome XXVIII (1-2),
105-106, Paris 1987,
p.141.
78
des plats comme le riz-gras sénégalais,
le yassa,
le tiep-djen,
l'akassa-sauce légume et l'ablo-sauce graine. Parmi ces plats les
plus
populaires,
les 3 premiers relevaient de la logique
culi-
naire
sénégalaise
tandis
que
les
2
derniers
étaient
des
spécialités
togolo-dahoméennes. Les
plats
ivoiriens
n'étaient
presque pas représentés,
ce qui confirmerait l'absence des femmes
Baoulé
dans la restauration à ces premières heures de la
gesta-
tion
d'Abidjan.
La
prégnance
de
ces
spécialités
togolo-
dahoméennes
et
sénégalaises
nous
a
relancé
sur
la
piste
dahoméenne
que nous suggérait A.M ... ,
une de nos informatrices,
ancienne restauratrice.
A
Treichville
et
plus précisément dans
le
quartier
Appolo, nous avons rencontré deux autres anciennes restauratrices
des
années
25
dont les témoignages ont
éclairci
ce
problème
d'origine
de l'alimentation informelle à Abidjan.
De l'aveu
de
ces dernières,
les toutes premières structures informelles d'ali-
mentation extra-domestique étaient le fait de femmes
dahoméennes
et
togolaises qui servaient des plats de riz ou pâtes de maïs
sauce
autour des administrations et des factoreries comme celles
de
la CFCI (Compagnie Française de Côte-d'Ivoire) et de la
CFAO
(Compagnie Française de l'Afrique de l'Ouest) en 1904-1905.
Con-
traints
par la distance qui séparait leur domicile de leur
lieu
de travail,
ces fonctionnaires,
de surcroit célibataires pour la
plupart, s'alimentaient auprès des gargotières.
Restées
pendant
longtemps seules dans la pratique
de
cette activité,
les femmes dahoméennes et togolaises seront
re-
jointes
par
des restaurateurs sénégalais autour des années
30.
79
Ceux-ci, propriétaires des "restaurants-bars", avaient une longue
pratique
du
métier dans leur
pays
d'origine.
Les
structures
sénégalaises d'offre alimentaire installées surtout dans les deux
cités africaines (Adjamé,
Treichville) donnaient aux autochtones
l'occasion
de s'essayer au snobisme et d'imiter les manières
de
table
du "maître blanc",
symbole du modèle dominant.
Toutefois
cette forme de restauration gardait une importance marginale
par
rapport aux installations des femmes dahoméennes et togolaises.
Sociologiquement, cette hypothèse de la paternité daho-
togolaise
et sénégalaise de l'activité semble plus
convaincante
quand
on
se souvient qu'aux premiers appels
d'offre
d'emplois
lancés
en Côte-d'Ivoire,
les tout premiers africains non
ivoi-
riens
ayant
répondu
étaient en
priorité
les
Dahoméens,
les
Togolais et ensuite les Sénégalais, Guinéens etc.
,
Les
sénégalais migrant en célibataires,
ont
conserve
leurs
habitudes alimentaires pour le plus grand profit de
leurs
compatriotes restaurateurs. Les Dahoméens s'étaient déplacés avec
leurs femmes,
qui,
elles, s'adonnent traditionnellement au com-
merce d'aliments.
Les
influences nationales n'ont pas manqué
d'imprimer
leur marque culturelle à la gastronomie abidjanaise d'avant 1950.
Du côté sénégalais, on pouvait manger :
- du
tiep djen:
riz blanc - poisson préparé avec des
légumes
..
du yassa :
riz blanc accompagné de sauce préparée
a
l'oignon et au citron
du
Tangana
thé de kinkélibah ou nes~afé
au
lait
concentré servi souvent avec de la tartine de pain beurré,
petit
80
déjeuner typique dans les familles sénégalaises de classe moyenne
- du moni : bouillie de mil
- des
brochettes:
viande grillée avec
des
oignons,
servie en sandwich" dans du pain
- du couscous
aliment a base de mil consommé avec de
la sauce (tière) ou consommé avec du lait caillé (trachri)
du
acara
beignets de niébé (haricots) servis avec
de la sauce pimentée
des
beignets
boulettes de pâtes de farine de
blé
frites et saupoudrées de sucre
- des
pâtes
alimentaires
le
macaroni
et
les
spaghetti
pour ne citer que quelques-uns des repas servis.
Les
femmes dahoméennes et togolaises,
quant à
elles,
servaient
- du riz-sauce (tomate, légume, graine arachide)
- du
"akassa"
pâte acide de maïs
accompagnant
la
sauce au poisson ou à la viande
- du "ablo" : pâte de maïs légèrement salée et sucrée
- du "owo" pâte de maïs consommée avec de la sauce à la
viande ou au poisson.
Pour
confectionner ces menus étrangers,
on
utilisait
principalement
les
produits vivriers énumérés dans
le
tableau
suivant.
81
Tableau nO 6
Principaux
produits vivriers utilisés
dans
la
restauration populaire avant 1950
1
Produits
Produits agro-
1
Produits animaux
Végétaux
industriels
1
1 .viande de boeuf et
. Légumes
. tomate concentrée
1
..
1
1
.produits a base de
.
1
1
1
blé .
1
!
!
pâtes alimentaires
1 .de mouton
!
.mil
1
pain, couscous
1
!
1
1
!
.maïs
1 .riz
1
!
!
!
!
!
. beurre
!
On· comprend à la lecture de ce tableau,
quelle
place
occupaient
les
produits importés dans les modèles
alimentaires
"imposés"
par les restaurateurs sénégalais et les femmes togolo-
dahoméennes.
Cette situation d'antan,
caractérisée par le
monopole
des
allochtones
sur
l'informel alimentaire
évoluera
jusqu'en
1950,
date à laquelle les femmes du groupe culturel akan
- plus
précisément
les
appoloniennes et les baoulé
- descendront
par
petits
groupes
sur
Abidjan (Treichville) en
quête
de
refuge
contre
les contraintes du milieu rural et à la recherche d'indé-
pendance
économique.
Elles s'initieront aux
pratiques
commer-
ciales
informelles
(1) et,
favorisées par le rapatriement
des
Dahoméens
en 1958,
récupèreront presque totalement le
secteur,
faisant des restaurateurs sénégalais,
les survivants du
système
alimentaire extra-domestique d'avant l'Indépendance.
(1) Cl. Vidal: Portrait d'Abidjan avec dames in Cahiers Interna-
tionaux de sociologie, vol. LXIX,
1980, p. 307.
82
Si dans la première décennie de l'indépendance, l'ivoi-
risation
a été particulièrement négligée du haut et
ne
consti-
tuait
ni un objectif économique ni un enjeu politique,
elle
se
manifestera plutôt par le bas et cela, même avant l'indépendance.
A
la différence de celle qui s'organise politiquement dans l'ad-
ministration
publique en se ménageant le temps de se donner
une
relève
effective,
elle sera,
comme dans le cas
des
activités
informelles,
très spontanée.
L'histoire de l'alimentation exté-
rieure et à travers elle les contradictions internes aux rapports
entre
autochtones et étrangers expriment assez bien la récupéra-
tion d'un secteur économique et d'une identité alimentaire par le
bas.
A
cette récupération du secteur par les femmes autoch-
tones, correspond
un changement des habitudes à
la consommation
alimentaire
induit
par la revalorisation
du
modèle
culinaire
akan.
La
reconversion
de leur "infortune" en stratégie économique
de
quête d'autonomie aurait favorisé l'ivoirisation d'une filière du
système agro-alimentaire national qui ne souffrait d'aucune
con-
currence
et qui d'ailleurs constituait alors un enjeu
"méconnu"
des politiques agricoles et alimentaires.
On
peut constater même aujourd'hui que
l'ivoirisation
..
du
secteur informel alimentaire a fait une plus grande
place
a
des produits vivriers locaux comme
- le manioc
- l'igname
- la banane plantain
- les viandes de brousse et d'élevage
83
le poisson
- les légumes.
Ce changement des habitudes alimentaires constitue sans
aucun
doute
un facteur dynamisant pour la
production
vivrière
locale.
Tableau nO 7
Menu de la restauration populaire autochtone
Accompagnement
Riz, attiéké, placali,
foufou,
foutou
Sauces
Arachide, Djoungblé, Tomates, Aubergines
Grillades
poissons braisés, poulets braisés, brochettes
Ce
retour aux modèles alimentaires autochtones
induit
par l'ivoirisation du secteur informel ne doit,
pour autant, pas
entretenir l'illusion d'un recouvrement total des besoins alimen-
taires par la production vivrière locale. La réalité de l'alimen-
tation
extra-domestique et, à travers elle, la croissance de
la
consommation
de certains produits comme le riz et la
viande
de
boeuf
n'autorise
guère cette
parallèle.
Certaines
structures
d'alimentation
extérieure
restent les vecteurs de
consommation
des
produits agro-alimentaires comme le blé,
le
lait,
l'arome
maggi.
Nous
reviendrons
sur
cet
aspect
dans
les
chapitres
suivants.
On ne saurait comprendre la spécificité de la restaura-
tion
informelle
et la problématique de
l'identité
alimentaire
qu'elle
sous-tend sans faire référence à cette anthropologie
de
l'alimentation
extérieure
faite de luttes politique
et
symbo-
84
lique. La revalorisation des habitudes traditionnelles de consom-
mation
qui
en résulte est à mettre à l'actif des
femmes
ivoi-
riennes
qui ont ainsi spontanément renoué nécessité
alimentaire
et
exigence de la culture urbaine en tenant compte d'un
certain
nombre
de
comportements
d'où
la
hiérarchie
des
lieux
de
consommation.
Section 2
STRUCTURES
DE CONSOMMATION ET CATEGORIES
D'ALIMENTS
VENDUS
Loin de présenter un caractère absolu de neutralité, le
mode
alimentaire informel reflète,
à travers ses structures
de
consommation et le style alimentaire qu'il a engendré,
la diver-
sité des situations historiques et socio-économiques qui ont fait
de
lui
un champ autonome de consommation.
Au
plan
structurel
comment se présente donc ce champ ?
AI Structures de consommation de l'informel alimentaire
On
distingue
dans le cas abidjanais
cinq
sortes
de
restaurants
qui se complètent et se font concurrence dans
leurs
pratiques
commerciales.
Le lieu d'implantation et le procédé de
vente ont permis la classification suivante
2.1.
Les établissements-restaurants
il s'agit du style de
restaurant
dont
le
local a été conçu à cet
effet
et
portant
parfois une enseigne.
Ils regroupent aussi bien les "maquis", les
"restaurants-bars" que les "kiosques".
Comme nous le
précisions
dans
l'historique de l'informel alimentaire,
la préséance reve-
nait
aux "restaurants-bars" dont les tenanciers étaient pour
la
85
plupart des Sénégalais et Guinéens.
Mais, dans l'état actuel des
choses,
ce type de restauration,
relégué au second plan, semble
faire place aux "maquis".
Par "maquis",
il faut entendre un lieu
de restauration - autrefois à édifice sommaire et aujourd'hui
de
plus
en
plus modernisé - conçu pour répondre aux besoins
d'une
clientèle ponctuelle.
Nos investigations corroborent celle d'Abdou Touré
qui
situe
l'apparition des "maquis" autour des années 64-65 (1).
Sa
maternité
pourrait
être
attribuée à une
femme
ghanéenne
qui
aurait été la première à ouvrir à Treichville,
aux alentours
de
l'avenue 10, un restaurant à l'intérieur d'une cour. Mais ce sont
les
femmes baoulé et appoloniennes qui populariseront ce mode de
restaurant.
Le maquis - dans le langage populaire,
par analogie
au
sens étymologique,
est un refuge pour les
propriétaires
et
leurs
clients.
Les
premiers
échappent ainsi à
tout
contrôle
fiscal,
et les seconds au coût élevé de la vie abidjanaise (pos-
sibilité de consommer à bas prix).
Par
rapport aux restaurants-bars dont le menu
n'avait
hérité en
rien de la tradition alimentaire
locale,
les
maquis
pourraient
se définir comme une prise en charge - par les femmes
..
ivoiriennes
de
l'alimentation informelle
extra-domestique
a
partir de mets typiquement nationaux (tableau nO 4).
Ces deux premiers types de restaurants,
symboles de la
concurrence
entre les hommes immigrés et les femmes
autochtones
au sommet de la hiérarchie de l'informel alimentaire,
se
parta-
gent l'offre alimentaire du midi et du soir.
(1) A. Touré: Les petits métiers à Abidjan. L'imagination au se-
cours de la conjoncture. Ed. Karthala,
1985, p. 89.
86
Aux
maquis et aux restaurants-bars,
se
joignent
les
kiosques qui,
à la différence des deux premiers, se sont spécia-
lisés dans l'offre des plats consommables à la sauvette: café au
lait,
tartines, omelettes, pâtes alimentaires. Contrairement aux
maquis,
ce mode de consommation donne une plus grande
prépondé-
rance
aux
produits alimentaires industriels.
On pourrait
meme
avancer que les kiosques sont,
de toutes les structures du
sys-
tème
informel alimentaire,
le principal vecteur de consommation
des
produits de l'industrie agro-alimentaire comme le lait
con-
centré,
le café,
le cacao en boîte, le pain et les pâtes alimen-
taires.
Ce type d'offre alimentaire fait des kiosques les parte-
naires privilégiés de l'industrie agro-alimentaire locale (1).
La fréquence d'apparition de ces différentes catégories
de restaurant est variable d'un quartier à un autre.
Le
tableau
nO 5 nous en donne une vue générale.
Ce
tableau met en exergue la
prépondérance
numérique
(70,5
%)
des
maquis
sur
les 2
autres
types
de
restaurant
(restaurants-bars:
11,3 %,
kiosques: 16,7 %) et le changement
des
habitudes
alimentaires renforcé par la
multiplication
des
premiers, offrant
essentiellement
des mets ivoiriens. D'appari-
tion relativement récente (1974), les kiosques dont la croissance
est
moins
rapide
que
celle
des
maquis,
surclassent
les
,
restaurants-bars.
Si
le
relatif
sucees
des
kiosques
peut
s'expliquer
par l'offre de plats consommés rapidement,
l'impact
des restaurants-bars reste très limité.
D'ailleurs,
ils ne doi-
(1) D. Requiers - Desjardins: "Industrie agro-alimentaire et mo-
des de consommation. Eléments d'analyse à partir du cas de la
Côte-d'Ivoire".
Economie
et
Humanisme nO 296,
juillet-août
1987; p.
33.
87
vent leur survie qu'à l'introduction de quelques plats
ivoiriens
dans
leur
menu,
ce qui suppose une adaptation de l'offre à
la
situation
actuelle
de
la Demande dominée
par
un
retour
aux
habitudes de consommation locale.
Tableau nO 8
Répartition
des établissements restaurants
sur
la ville d'Abidjan
Maquis
Resto-bars
Kiosques
Total
Communes
nb
%
nb
%
nb
%
nb
%
Port-Bouët
124
9,7
10
0,7
22
1 ,7
156
12,1
Koumassi
89
6,9
7
0,5
18
1 ,4
114
8,8
Marcory
120
9,3
19
1,4
12
0,9
151
11,6
Treichville
132
10,3
62
4,8
57
4,4
251
19,5
Plateau
4
0,3
3
0,2
7
0,5
Cocody
12
0,9
3
0,2
6
0,4
21
1,5
Adjamé
105
8,2
11
0,8
28
2, 1
144
11 , 1
Yopougon
116
9,0
12
0,9
32
2,5
160
12,4
Abobo
122
9,5
15
1 , 1
21
1,6
158
12,2
Attiécoubé
83
6,4
12
0,9
20
1 ,5
115
9,81
1
TOTAL
907
70,5
151
11 ,3
219
16,7
1 .277
1
2.2.
Les
restaurants
sur
tables
mobiles.
Ce
sont
les
restaurants
qui n'ont pas besoin d'un local de production-vente.
Cette restauration se pratique le long des artères de circulation
et ne nécessite généralement qu'une table,
des bancs et quelques
ustensiles de préparation.
Ils
sont
aussi
objets de
concurrence
entre
hommes
immigrés
et femmes autochtones.
Les hommes se sont
spécialisés
dans l'offre de brochettes de viande grillée et dans la vente
du
"café
complet".
Les
femmes exercent leur talent
culinaire
en
métier;
dans ce type de restaurant, elles servent des mets comme
l'attiéké-poisson,
l'alloko (bananes frites),
l'igname frit,
les
88
sauces (arachides,
djoungblé, gombo, aubergine,
tomate) accompa-
gnées de riz,
attiéké, placali, foufou (pâte de manioc, d'igname
ou de banane plantain).
Toutes
catégories
confondues,
nous
avons
dénombré
12.186
unités de vente sur tables mobiles se répartissant inéga-
lement sur les 10 quartiers.
Tableau nO 9
Répartition des unités de vente sur table mobiles
------- -------
56
12
849
498
------- ------- ,
1 PLATEAU
!
H
4
0
8
1
13 1
1
! F
230
281
21
4
536 !
1-------------1---- ------- ------- -------1------- --------1
1 COCODY
1 H
12
0
14 1
0
26 1
1
1 F
182
278
183 1
1
644 1
1------------- 1---- -------,------- -------1-------1--------1
1 ADJAME
H
27
7
12 1
0
46 1
1
F
704
432
191
1
2
1.329 1
1-------------
------- ------- -------1------- --------1
1 YOPOUGON
H
21
3
19 1
1
44 1
1
F
70S
378 1
199'
4
1 .286 1
1-------------
------- -------,------- ------- --------1
1 ABOBO
H
32
8
35
0
75 1
1
F
1
761
672
212
3
1.648 !
1------------- ----1------- ------- ------- -------1--------1
1 ATTIECOUBE
H
24
7
25
0
1
56 1
1
F
512
1
351
163
5
1
1.031
1
1------------------1-------1------- ------- -------1--------1
1
TOTAL
1 5.953 1 4.180
2.001
52
1 12.186 1
1
!
-------------------------------
89
Les
activités des restaurants sur tables
mobiles
va-
rient en fonction des différents moments de la journée,
quel que
soit
le quartier.
La matinée et la mi-journée semblent être les
moments
d'intense
activité.
A ces moments de la journée,
res-
pectivement
48,8 % et 34,3 %
des unités de vente offrent
leurs
services; ceci est quantitativement significatif par rapport à la
proportion
des unités de vente qui ne fonctionnent que
le
soir
(16,4
%).
Les offres alimentaires sur tables mobiles,
tout
au
long
de la journée sont quasi inexistantess (0,4
%).
L'élément
nouveau
dans
ce
type de restauration y est introduit
par
les
"boat-people"
(réfugiés
viet-namiens) qui,
depuis
les
années
1970, demandent de plus en plus asile en Côte-d'Ivoire. Avec eux,
apparaît
un
mode de restauration rapide dont le menu
est
fait
essentiellement
de nems,
beignets aux crevettes,
de
mets
asiatiques
consommables à la sauvette.
La commune
du
Plateau,
compte
tenu de l'affluence qu'elle connaît aux heures ouvrables,
reste le lieu privilégié de telles pratiques commerciales.
2.3.
Les espaces-restaurants. Il s'agit de superficies amé-
nagées
ou occupées spontanément par des micro-négociants dans un
but de répondre à un besoin alimentaire massif.
Ils se présentent
sous
forme
de cantine improvisée aux
abords
des
écoles,
des
services
administratifs,
des
hôpitaux ...
bref,
des
services
publics.
Ils sont constitués d'un ensemble de vendeurs sur tables
mobiles.
Parfois même à des heures de pointe, les vendeurs ambu-
lants
s'y
arrêtent pour proposer aussi leurs produits,
ce
qui
fait
la grande hétérogénéité des plats servis sur
les
espaces-
restaurants.
90
...
Leur répartition spatiale se présente comme suit
Tableau nO 10
Répartition des espaces-restaurants sur la ville
d'Abidjan
1
RESTAURANT
RESTAURANT
Total
1
Communes
SERVICE PUBLIC
DISTRACTION
1
1 Port-Bouët
33
3
36
1 Koumassi
21
1
22
1 Marcory
19
1
20
1 Treichville
37
2
39
1 Plateau
18
0
18
1 Cocody
13
2
15
1 Adjamé
16
3
19
! Yopougon
22
3
25
Abobo
16
1
17
AttiéC"oubé
12
2
14
TOTAL
207
18
225
On distingue ici deux types d'espaces-restaurants:
a) les espaces-restaurants à existence conditionnée par
la
proximité
d'un service public.
Ils fonctionnent
en
tenant
compte des heures d'ouverture du service dont ils assurent l'ali-
mentation;
d'une
façon
générale,
leurs activités cessent
aux
environs
de
17 H 30,
heure
de fermeture des
bureaux
et
des
écoles.
On
peut y manger toutes les combinaisons
possibles
de
sauces (arachides,
gombo,
aubergine, djoungblé, graine) et d'ac-
compagnement (riz,
foutou,
foufou,
placali).
b)
Les
espaces-restaurants aux
fonctions
essentiel-
lement distractives. Ces derniers ne fonctionnent généralement en
moyenne
qu'à
partir de 17 H.
Les grillades,
l'igname frit
et
l'alloko y sont les plats les plus servis.
91
Il faut préciser que chaque espace-restaurant concentre
en moyenne 15 unités de vente tenues à 90 % par les femmes.
2.4. Les restaurants spontanés: Ils sont constitués par des
attroupements de micro-négociants qui se créent à l'ouverture des
chantiers
ou
à l'occasion des festivités et
qui
disparaissent
avec
la
fin des travaux ou des
manifestations.
Ils
proposent
,
presque
les
mêmes plats cuisinés que les espaces-restaurants
a
existence conditionnée par la proximité d'un service
public.
Ce
dernier
est
cependant
permanent tandis que les
premiers
sont
mobiles.
Au
cours de nos opérations de comptage,
nous
n'avons
retenu que les restaurants spontanés agglutinés autour des grands
chantiers de construction. Nous avons délibérément omis le recen-
sement de ceux,
improvisés à l'occasion de festivités à cause de
leur
fluidité exceptionnelle qui ne nous garantit aucune
fiabi-
lité
des résultats.
Les données du recensement
nous
indiquent
donc
que les 10 quartiers se partagent en proportion inégale les
112 attroupements de micro-négociants répartis comme s u i t : Trei-
chville (9 %), Marcory (4 %), Koumassi (12 %), Port-Bouët (13 %),
Plateau (4 %),
Adjamé (11 %),
Yopougon (14 %),
Cocody (10
%),
Abobo (11 %),
Attiécoubé (10 %). De moindre importance numérique
que les espaces-restaurants,
chaque restaurant spontané regroupe
en moyenne B unités de vente tenues ici aussi pour la plupart par
des femmes.
2.5.
Les restaurants ambulants
Il s'agit d'un
commerce
d'aliments
qui se pratique ~ur un parcours indéterminé ou déter-
miné à l'avance par le micro-négociant.
Les produits
commercia-
lisés
sont
d'une
façon générale disposés dans
une
bassine
92
portée sur la tête - dont le poids est amorti par un coussinet.
Leur répartition par quartier serait une opération trop
hasardeuse
qui n'offrirait d'ailleurs aucune
fiabilité
puisque
les
vendeurs,
du
fait de leur grande
mobilité,
passent
très
,
facilement d'un quartier à un autre.
Néanmoins,
a part ceux qui
nous
ont
complètement
échappé
au
cours
de
nos
travaux
de
comptage,
nous avons dénombré sur les 10 quartiers,
5.213 unités
de
vente
ambulantes
confiées
dans
72,50
% des
cas
à
des
fillettes.
Les
mets offerts par ce type de restaurant se limitent
,
généralement aux beignets,
aux galettes,
à l'arachide bouillie,
aux oeufs bouillis, au dèguê (bouillie de mil), etc ... Les hommes
(3,49 % de la sous-population) que nous avons rencontrés
conser-
vent leur traditionnelle vente de viande grillée,
tandis que les
femmes
(24,01 %) vendent de l'attiéké et parfois les mêmes
pro-
duits que les fillettes.
L'offre alimentaire des ambulants cons-
titue
souvent une innovation dans le modèle de consommation dans
la mesure où elle est destinée à un mode de consommation
indivi-
duel
et rapide adapté
aux traditions alimentaires.
Cette forme
d'offre
est
même encore plus novatrice que la
restauration
en
établissement
où le style et le contenu des repas sont
beaucoup
plus proches des habitudes de consommation en ménage.
La
consommation
de plats européens
est
certainement
plus
forte à l'extérieur que dans les ménages mais ne
constitue
,
qu'une
variation
a
l'alimentation habituelle ou une
façon
de
manger
très
rapidement.
Le
développement
des
maquis,
des
restaurants sur table mobile et des espaces-restaurants proposant
93
une cuisine ivoirienne classique montre que si les
consommateurs
aiment
diversifier
leur
alimentation,
ils le font
d'abord
à
l'intérieur
des
modèles ivoiriens et restent
attachés
à
leur
propre modèle alimentaire.
BI D'une structure à une autre
les types d'aliments servis
Les
plats
vendus dans l'informel alimentaire
peuvent
être rangés en 4 grands types
- les
invariants
de
la
gastronomie
populaire
abidjanaise
- les ~odèles de consommation importés
- les survivances alimentaires
- les
éléments
d'une alimentation de
différenciation
socio-économique.
1.) Les invariants de la gastronomie populaire abidjanaise
Bien
que
les
Akan
ne
soient
plus
majoritaires
à
Abidjan,
les modèles de consommation en vigueur dans
l'informel
alimentaire
restent
marqués par leur empreinte
culturelle,
du
fait de leur antériorité dans ce secteur.
Contrairement à
la logique qui voudrait que l'origine
de
chaque individu détermine en général son régime
alimentaire,
l'informel alimentaire semble avoir standardisé les comportements
alimentaires extra-domestiques.
Les
plats
tels que
le
foutou
(plat à base de tubercules ou de féculents cuit à l'eau puis pilé
pour l'obtention d'une pâte consistante), le foufou (fait généra-
lement
de
banane plantain ou d'igname légèrement pilée avec
de
l'huile rouge.
La banane ou l'igname est souvent cuite
ensemble
1
94
1
1
1
avec
les' assaisonnements
devant servir à faire
la
sauce
qui
l'accompagne),
le
placali (plat obtenu en faisant cuire la pâte
dans
de l'eau tout en la malaxant de plus en plus fort à
l'aide
d'une
spatule
en bois),
l'attiéké (plat obtenu
à
partir
des
racines de manioc cuites à la vapeur),
le riz cuit à l'eau, sont
les
plus
communément consommés.
Ils s'accompagnent de
sauces,
elles-mêmes caractérisées par les produits de base,
généralement
des
légumes,
des
noix ou des graines dont elles
tirent
leurs
appellations
"sauce
aubergine",
"sauce
arachide",
"sauce
claire",
"sauce feuille",
"sauce gombo sec (djoungblé"),
"sauce
gombo",
"sauce graine".
Ces plats sont massivement consommés le matin et à midi
dans
les
espaces-restaurants à proximité des services
publics,
dans
les restaurants spontanés et dans les maquis offrant
leurs
services jusqu'à la mi-journée,
et le soir dans quelques
maquis
..
et
restaurants-bars.
L'alloko (plat de banane plantain frite
a
l'huile,
accompagné parfois de poisson et assaisonné avec un peu
de
piment et d'oignon
généralement servi par les restauratrices
sur
tables mobiles et dans les
espaces-restaurants
distractifs
comme
goûter), vient
compléter la liste de ces plats
que
nous
appelons
"les
invariants
de la gastronomie
populaire
abidja-
naise".
Ces "invariants" relèvent exclusivement du style alimen-
taire du groupe Akan. On constate à ce niveau une continuation en
ville
des
habitudes alimentaires d'un groupe gui a
imposé
son
modèle aux autres.
En témoigne le tableau du système alimentaire
ci-après.
95
Tableau nO 11
Typologie des systèmes alimentaires
1
Groupes 1 Localisation!
Type de
1
Principaux produits
1 ethniques!
territoriale! consommation
1
1
1
1
1
1
1 Nord
1 Féculents
1 Principal féculent
1
1 Nord-Est
1 - Céréales
1
igname
1
IVoltaïquesl
1
1 Principales céréales:!
1
1
1
1
ma~s
- riz
1
1
1
1
1
1
1 Sud-Ouest
1 Céréales
1 Céréale principale
1
1 Centre-Ouest!
- Féculents
1
riz
1
1 Ouest
1
1 Féculents principaux:
Iles Krou
1
1
1
-plantain au Centre
1
1
1
1
Ouest
1
1
-manioc à l'Ouest
1
!
1
!
Est
1 Féculents principaux:
!
!
-plantain - taro
Centre
Féculents
! igname-manioc
Sud
! plantain-taro-igname
Iles Akan
! à l'Est
1
! - igname au Centre
1
- plantain-manioc au
1
Sud
!
- principale céréale:
ma~s
1
Nord
Céréales
Principales céréales:
1
-riz, maïs
Iles Mandé
Nord-Ouest
mil et sorgho
1
Principal féculent
1
igname
1
Source
Consommations
alimentaires - Disponibilités en vivriers
et
problème
du
sous-secteur
des
vivriers
en
Côte-
d'Ivoire. Thomas EPONOU, tableau 2b.
On
comprend
dès lors ces
spécialisations
culinaires
ethniques
qui
font
que la préparation du
foutou
(de
manioc,
d'igname ou de banane plantain) revient souvent aux femmes baoulé
ou
agni (groupe Akan du Sud-Est) alors que celle du foufou et de
l'attiéké
reviendrait
plutôt aux femmes
appolo
et
adioukrou,
lagunaires
originaires
de pays réputés pour la qualité
de
ces
96
produits (1).
2.) Les modèles de consommation importés
Avec le développement de l'alimentation extérieure,
on
voit
s'accroître
l'importance
des
plats à
base
de
produits
alimentaires d'origine industrielle comme le spaghetti (plat fait
de
macaroni assaisonné de légumes,
de viande et
d'huile),
les
petits pois (plats à base de conserve de petits pois),
la salade
(plat
à
base de légumes crus à dominance de
laitues
(feuilles
européennes), auquel on peut ajouter viandes, poissons conservés,
oeuf ou huil~ selon les goûts,
l'omelette (plat fait d'oeufs et
d'une quantité d'huile,
auxquels s'ajoutent des
assaisonnements
comme le poivre industriel). Ce modèle d'alimentation est pris en
charge
surtout par les kiosques dont les tenanciers sont pour la
plupart des peulhs guinéens et des burkinabè.
Le
plat symbolisant le plus ce modèle de
consommation
est
le "café complet" (plat à base de café,
de chocolat
et
de
lait,
accompagné
de pain beurré),
préparé dans les kiosques
à
côté
des
autres
plats précités et par
les
restaurateurs
sur
tables
mobiles
connu sous le nom "aboki".
Ce plat qui est
une
"réinterprétation" (2) du petit déjeuner européen n'a pas
trouvé
dans
le contexte ivoirien un substitut.
Sa composition
moyenne
selon l'EBC 1979 est de :
(1 ) L. Bourgeois
: Evolution
et
dynamigue de l'utilisation de
l ' es pace
i nd u s t-r--;i-e-:;l;--'-~d-;-a-n-s--:;l;-;-'l.~x':"'1....e----"~d::-e........~P=-e7t-':i-:t~B::-a~s..::s..::a;.;;m~(~A~b~i.;:d~j....;;;a~n
Zones 3 et 4a).
Rapport
d'élève.
ORSTOM,
Petit
Bassam,
Abidjan 1983; p. 56.
(2) D. Requier Desjardins, 1987; op. cit., p. 33.
97
pain de blé
47 %
sucre raffiné
12 %
lait en boîte
26 %
lait frais
2 %
beurre margarine
4 %
café en grain ou moulu
1 %
café soluble
7 %
chocolat
1 %
Sa
consommation est liée de manière très significative
à
l'extension de la ville (cf.
carte nO 1 p.
qui ne permet
plus
de
prendre
le petit déjeuner à domicile
du
fait
de
la
longueur des distances à parcourir.
Il
ne
serait pas erroné de dire que,
de
toutes
les
structures de l'informel alimentaire, les kiosques et les restau-
rants sur table mobile tenus surtout par les hommes sont ceux qui
favorisent
l'intégration de produits industriels dans la confec-
tion
de
leurs plats.
Ils sont par
conséquent
les
principaux
vecteurs
extra-domestiques de consommation des produits de l'in-
dustrie agro-alimentaire comme le pain,
le lait,
le beurre,
le
café et le sucre.
3.) Les survivances alimentaires
L'ivoirisation
progressive
de l'informel
alimentaire
dans sa forme et dans son contenu a fait de certains plats et
de
certains
types de restaurants,
les survivants du système alimen-
taire.
Les cas typiques sont les restaurants-bars tenus par
des
Sénégalais et servant des plats comme le yassa,
le tiep'djen,
le
riz-gras
et le couscous.
La marginalité actuelle des structures
98
de
restauration sénégalaise (11 ,
seulement des
restaurants
en
établissement) préfigure le caractère secondaire du style alimen-
taire
sénégalais pourtant prépondérant dans les années 30.
Ceci
prouve
le dynamisme du processus ivoirien de revalorisation
des
habitudes alimentaires autochtones.
4.) L'alimentation de différenciation socio-économique
Le populaire est dans l'informel alimentaire, mais tout
l'informel alimentaire n'est pas populaire.
La pratique
alimen-
taire
pourrait favoriser l'édification de symboles de séparation
objective. Dans l'informel alimentaire cette création de l'''autre
des autres" se' fait à partir de ce que l'on mange,
comment on le
mange, et où on le mange.
Manger
en
sauce,
une viande de
brousse
dont
l'in-
terdiction de la chasse détermine le prix et manger du poisson ou
de
la viande de boeuf subventionnée n'ont pas la même significa-
tion socio-économique.
Tout le monde peut manger les midis
dans
un
maquis
par nécessité;
mais les maquis du soir marquent
les
différences
socio-économiques
puisqu'ici
les
extrêmes
des
dépenses alimentaires par personne vont de 800 F à 2.500 F autour
des
plats
comme
le
poulet braisé,
le poisson
braisé
et
le
..
kédjénou
(poulet
a
l'étuvée
fait
de
poulet
découpé
bien
..
..
assaisonné et cuit a la vapeur dans une marmite a col long,
bien
,
couverte) accompagnes de riz ou d'attiéké.
Au-delà de toutes ces distinctions on pourrait dire que
les
styles alimentaires observés
dans le secteur informel
ali-
mentaire,
contrairement aux thèses de mimétisme alimentaire (1),
(1) cf. L. Malassis, Economie agro alimentaire. Ed. Cujas; Paris
1977.
100
sont plutôt une confrontation culinaire intégrant aussi bien
des
modèles
occidentaux réinterprétés (café complet,
pâtes
alimen-
taires ... )
des
modèles
sous-régionaux
(riz
gras
sénégalais,
akassa,
sauce
légume ... ) que des modèles traditionnels
autoch-
tones
(sauce
aubergine,
djoungblé,
alloko ... ) avec une
très
large prédominance de ces derniers.
Il
conviendrait aussi de souligner par rapport à cette
alimentation informelle,
l'importance croissante de la consomma-
tion
du riz que ce soit au niveau des "invariants",
des
survi-
vances alimentaires que des aliments de différenciation sociale.
L'intégration historique du riz dans l'alimentation
de
base de la plupart des groupes ethniques (1) ne saurait expliquer
à
elle
toute
seule cette situation.
A
notre
avis,
l'''effet
prix" (2) conjugué à la politique ivoirienne d'importation du riz
bâtie
autour
d'un "dispositif très contraignant"
(3)
pourrait
constituer un premier niveau d'explication.
Ajoutées à ces
pre-
mi ères raisons,
la facilité d'approvisionnement et les commodités
de
préparation
(cuisson nécessitant moins
de
temps,
stockage
facile) font de cette céréale une privilégiée de
la consommation
de
masse.
Loin
devant l'attiéké - qui
est
un
accompagnement
(1) cf. J. P. Chauveau : "L'avenir d'une illusion. Histoire de la
production
et
des
politiques
vivrières en Côte-d'Ivoire".
Etudes rurales
nO
99-100. Juill-Déc. 1985; pp. 281-326.
(2) Y. Léon: "Les cultures vivrières et le problème
alimentaire
de
la Côte-d'Ivoire", Economie
rurale
nO 156, Juillet-Août
1983; p. 42.
(3) Nous pouvons lire une très intéressante analyse
de ce dispo-
sitif dans: J. Roch, Le rôle des importations
dans
la con-
sommation alimentaire en Côte-d'Ivoire. OR5TOM, Petit Bassam,
1987; 27 p.
101
local -, le rapport quantité consommable/prix qu'offre le riz est
très avantageux pour le consommateur (1).
Le
comportement du consommateur à l'égard de l'alimen-
tation
extérieure reste donc très proche de celui
qu'il
adopte
envers
la
consommation interne.
La restauration extérieure
ne
remet
nullement en cause les modèles
traditionnels.
L'informel
alimentaire
aura
su répondre à une demande
d'alimentation
peu
coûteuse,
liée aux conditions de vie urbaine et qui tend vers un
maintien des modèles.
On
peut
toutefois souligner l'aspect novateur
de
ce
mode de consommation par rapport au choix individuel de plat,
la
restauration rapide (kiosque,
vendeur de rue),
le changement des
manières
de
table
et le développement de
la
consommation
de
certains
plats.
Il
met à la portée du consommateur
des
plats
ivoiriens
qu'il
n'a
pas forcément l'habitude de
consommer
en
ménage. Le changement du style alimentaire dont il est porteur ne
passe
pas obligatoirement par l'adoption d'un modèle
occidental
si ce ne sont que des substitutions d'ingrédients.
La
restaura-
tion
extérieure,
tout
en offrant les plats hérités surtout
du
style
alimentaire akan,
favorise l'intégration de
plats
issus
d'autres pays de la sous-région.
Si
l'importance
socio-économique
de
toutes
ces
structures
est de moins en moins contestée leur mise en place ne
s'est
pas
faite sans heurts.
Nos enquêtes nous
en
ont
donné
quelques mesures.
(1) K. Nzoré : Transformation du
manioc en attiéké. Analyse éco-
nomigue en milieu traditionnel,
Mémoire de 3e cycle
agrono-
mique. Rabat 1985; p.
46.
102
Section 3
QUELQUES
CONTRAINTES ET OBSTACLES A LA CREATION
DES
UNITES DE PRODUCTION
Tout
comme dans le cas des autres activités du secteur
informel, l'exercice du commerce informel d'aliments ne va pas de
soi. Certains obstacles tels que
- la constitution du fonds de démarrage
- les contraintes municipales et
- la
difficulté de l'intégration constituent une
bar-
rière à l'entrée.
AI Les investissements initiaux
L'une des caractéristiques attribuées au petit commerce
africain
par
les
spécialistes est la faible mise de
fonds
de
départ que nécessite son initiation (Steel,
1980;
p.
291, Hugon
1980;
p. 240). Cette appréciation sous-estimant l'effort de pro-
duction des acteurs semble à notre avis souffrir d'un conformisme
intellectuel
récurrent
dans les études sur
le
secteur
infor-
mel (1)
et d'un excès de subjectivisme puisque dans la
réalité,
on
observe un écart réel entre les faits et les termes d'analyse
ci-dessus.
Dans
le cas qui nous intéresse à
savoir
l'informel
alimentaire,
l'interrogation
des acteurs est loin de
confirmer
cette
thèse d'une entrée massive,
favorisée par la faiblesse du
capital. Sur les 281 artisans interrogés au cours de nos enquêtes
socio-économiques 202, soit 71,88 % des enquêtés ont très longue-
(1) Au
fur
et à mesure que les études sur le
secteur
informel
évoluent,
cette
thèse se renforce de plus en plus et
finit
même
par polariser l'esprit scientifique qui,
comme le
dit
Bachelard, en vient un temps à apprécier mieux ce qui confir-
me son savoir que ce qui le contredit cf. Bachelard: La for-
mation de l'esprit scientifique. Ed. Vrin Paris 1980, p. 16.
103
ment évoqué le problème que leur posait la constitution des fonds
d'investissements initiaux.
B.
Lootvoet faisait le même constat
lorsqu'il essayait d'évaluer à partir de l'étude de quatre villes
de
l'intérieur,
la
"contribution de l'artisanat
et
du
petit
commerce à l'économie ivoirienne" (1).
D'ailleurs,
dans la hié-
rarchie
des
"problèmes
rencontrés",
recensés à partir
de
la
question
"Pour votre première installation,
quels
sont
les
problèmes que vous avez rencontrés" ?, la constitution des inves-
tissements
initiaux était le premier obstacle à l'entreprise
de
l'activité
quel
que soit le type de
restaurant.
Aussi
faible
..
qu'il
apparaisse au chercheur ou à l'expert,
qui a présentes
a
l'esprit les normes d'investissement des PME et PMI,
le fonds de
départ
- sur
lequel nous donnerons de plus amples détails
dans
l'analyse micro-économique - n'est pas facilement rassemblé.
Les
réponses de deux
acteurs,
la première,
tenancière de maquis et
le second,
restaurateur sur table mobile,
illustrent assez bienij
~
nos propos.
K.A.,
36 ans,
restauratrice baoulé: "Quand je suis venue à Abi-
djan,
j'ai travaillé pendant 3 ans.
J'étais bonne.
Je
gagnais
10.000 F par mois.
Dedans,
je dois envoyer 3.000 F à ma mère au
village
et moi-même vivre à Abidjan;
Dieu a fait et puis je
ne
paye pas maison.
J'étais chez un frère.
Mais depuis que je suis
venue à Abidjan,
depuis 3 ans,
j'ai voulu faire petit commerce.
C'est
petit
à petit comme ça que j'ai économisé
jusqu'à
avoir
7.000
F et puis j'ai commencé par vendre alloko.
Comme l'argent
d'alloko ne suffit pas bien bien,
j'ai économisé encore
jusqu'à
(1) B. Lootvoet :Contribution de l'artisanat et du petit commerce
à l'économie ivoirienne. Thèse de Doctorat, Clermont I; 1986,
pp . 151 - 152 .
104
22.000 F et puis après j'ai commencé par vendre du riz,
foutou et
sauce
dehors . . . . En
tout
cas,
pour
trouver
l'argent
de
commencement là, c'est dur ... ".
Comme
on
peut le constater dans
ces
propos,
K.A ... ,
s'est
constituée progressivement et difficilement son
fonds
de
démarrage.
Le résumé fait par Seydou N ••• ,
restaurateur guinéen,
de
sa situation financière au démarrage des activités,
est
non
moins
significatif :
"Quand j'ai débarqué à Abidjan,
mon
plus
..
grand
problème
était l'argent pour faire commerce et là
ou
je
vais
faire commerce.
Je voulais vendre viande grillée ...
Mais,
pour là où je. vais faire commerce,
c'est pas grave.
Mes
frères
vont me trouver place.
Mon problème,
c'est l'argent. J'ai vendu
pendant
un
an pour un autre frère avant de gagner un peu
d'ar-
gent,
c'est à dire 15.000 F pour commencer pour moi-même.
Il m'a
exploité jusqu'à ...
Mais je ne peux pas dire qu'il m'a exploité
aussi. Abidjan c'est comme ça ... ".
Dans tous les cas,
nos enquêtés exprimaient leurs dif-
..
ficultés
a
rassembler le capital de départ aussi
faible
qu'il
puisse paraître.
Mais
une
fois les capitaux de départ
rassemblés,
il
faut
affronter la dure épreuve de l'occupation de l'espace
géré
par les municipalités.
BI La lutte pour l'occupation de l'espace et la difficile
question de l'intégration
Moins que le capital initial et plus que
l'intégration
dans des réseaux commerciaux,
les tracasseries de la municipalité
105
restent
un frein sérieux à la première installation de certaines
structures de l'artisanat alimentaire (59,8 % de cas).
La
réaction
ambivalente
des
municipalités
face
au
secteur
informel
en
général et à
l'artisanat
alimentaire
en
particulier passe par deux phases
- la phase de répression et
- la phase de tolérance.
,
Conformément
a
l'arrêté nO 942 inter.acer du
13
mai
1961
réglementant l'exercice des professions ambulantes
sur
la
voie
publique,
les municipalités font intervenir
régulièrement
leurs
agents
pour décourager timidement toute pratique
commer-
ciale
illicite
aux
abords
des
rues.
Plus
que
les
autres
structures de restauration,
les restaurants sur tables
mobiles,
les
espaces-restaurants
et
les restaurants spontanés
ont
été
beaucoup
plus exposés à cette répression dès les premiers
jours
de leur installation.
Les assauts répétés des agents, quelques mois après, se
muent en tolérance.
Cette seconde phase commence par la
percep-
tion de taxes municipales qui, en fait sont illégitimes au regard
des lois en vigueur.
En
effet
selon l'article 2 de l'arrêté nO
942
inter
précité,
"L'autorisation
de vendre sur la voie
publique
donne
,
lieu
a
la
perception
d'un
droit fixe
au
profit
du
budget
municipal.
Toute personne désirant obtenir l'autorisation prévue
à l'article précédent, devra
,
a)
déposer
a
la mairip, une
demande
écrite
donnant
toutes
les
précisions
sur
l'exercice
et
la
nature
de
la
profession projetée;
106
b)
justifier de son identité et d'un domicile fixe;
c)
justifier
du paiement de l'impôt de l'exercice
en
cours".
Dans le cas de l'I.A.
aucun restaurateur de la popula-
tion des 281 enquêtés n'a satisfait à cette obligation.
Pourtant
ils payent tous des taxes au profit des municipalités.
On
cons-
tate
ici
la
manière ambivalente dont les Etats
africains
par
l'intermédiaire
des communes se "nourrissent" des activités
des
économies "non officielles" sous forme de perception d'impôts, de
taxes journalières,
hebdomadaires,
mensuelles ou annuelles (1).
c'est dans cette contradiction flagrante qu'évolue,
comme toutes
les autres activités de l'informel, l'informel alimentaire.
Entre autres difficultés,
le problème de l'intégration
est
un obstacle non moins important à l'entrée dans
le
secteur
informel alimentaire.
Cette difficulté est apparue à la création
d'entreprise chez 32,87 % de nos enquêtés.
Ce
problème
d'intégration,
propre
aux
espaces-
restaurants et aux restaurants spontanés, est dû essentiellement
à la forte cohésion sociale et aux conventions
sociales tacites
qui régissent ces aires de concurrence socialement
parcellisées.
Plus
que dans le cas des restaurants spontanés,
la difficulté à
se
faire
une
place sur un espace-restaurant
est
encore
plus
grande.
La
préférence de tel ou tel autre espace est
elle-même
dictée par la facilité qu'ont les acteurs à s'infiltrer dans
tel
ou
tel réseau commercial déjà dominé par des alliés
appartenant
au
même
groupe
ethnique ou à la même
région.
Qu'importe
la
(1) F. Akindès : Réflexions sur les concepts "informel"
et
"non
structuré". AMIRA. Abordage nO 2; Paris 1986, pp. 1-8.
107
distance
qui
sépare
le domicile de l'acteur
de
son
lieu
de
travail.
Les
cas
de
conflits qui nous ont
été
rapportés
ou
auxquels nous avons assisté, faisaient suite à une intrusion sans
aval
dans
des groupes de vendeurs anciennement
constitués.
Ce
fait
sociologique
semble caractériser
bon
nombre
d'activités
informelles.
G.
Salem
constatait
le même phénomène
lorsqu'il
étudiait les réseaux commerciaux des artisans colporteurs (1).
CONCLUSION PARTIELLE
.. .
La thèse du mimétisme alimentaire ne semble pas
resl.S-
ter à l'analyse des pratiques alimentaires informelles à Abidjan.
Le
caractère marginal des modèles alimentaires exogènes par rap-
port aux habitudes de consommation locale,
l'atteste.
Les habi-
tudes alimentaires étant au centre des processus par lesquels
un
groupe
humain
marque
son identité et l'altérité de
ceux
dont
cette identité le distingue,
on pourrait dire que le
développe-
ment de l'informel alimentaire est le lieu d'une lutte symbolique
pour la récupération d'une historicité.
Cette revalorisation
de
la
gastronomie autochtone en alimentation extérieure conjugue au
moins
deux dimensions différentes comme le notait
Fishler
dans
son
analyse de l'identification des aliments et de l'identité du
mangeur
(2).
La
première
est celle qui va
du
biologique
au
(1) G. Salem,
Les
réseaux
commerciaux des artisans colporteurs
sénégalais in
Vivre
et
survivre dans les villes africaines
( sous lad ire c t"':"i-o-n-=---:d=-e---:I::':--'-.-D=-=e-:"b-=-l...,é,...;;:....;e-:-t~P~h;...=. ;.;;.H~u.;;;;g...;;;o...;;;n'---'e-;;t:..;;;;.;a;;;..l:'-l.~· "7'"i7) ..;;;....;;;I-;;;E~D;..;:E~S~P~UF
Paris 1982; pp. 84-88.
(2) Cf.
C. Fischler, Alimentation, cuisine et identité: l'iden-
tification des aliments et l'identité du mangeur in
Identité
alimentaire et altérité culturelle.
Actes
du
colloque
de
Neuchâtel, 1984, p. 171.
108
culturel,
de la fonction nutritive à la fonction symbolique.
La
seconde est celle qui unit l'individuel au collectif,
le psycho-
logique au social.
Au-delà
de cette dimension culturelle,
l'étude de
la
dynamique de l'informel alimentaire ne pourrait se faire hors
du
contexte macro-économique actuel qui,
depuis quelques années, ne
cesse
de
l'influencer
profondement.
Sa croissance
rapide
et
l'étroite relation entre les politiques alimentaires et les choix
de production des acteurs en sont des indicateurs.
109
Chapitre III
PRODUCTION ALIMENTAIRE ET PARTICIPATION COMMUNAUTAIRE
Une des caractéristiques de III.
A. est cette symbiose
entretenue
entre l'unité de production et la structure communau-
taire des acteurs.
L'informel
alimentaire se distingue des autres petites
activités urbaines d'une part par le fait que l'unité de
produc-
tion
est enchassée dans l'unité domestique et reste
prisonnière
d'elle
et d'autre part par la prépondérance des revenus
qu'elle
apporte
dans
le
budget
des
~
menages
d'acteurs.
Mais
avant
d'aborder l'analyse du réseau de sociabilité dans lequel baignent
les acteurs et les questions théoriques sous-jacentes,
~
nous pre-
senterons le profil socio-démographique de ces derniers.
Section 1 - CARACTERISTIQUES SOCIO-DEMOGRAPHIQUES DES MICRO-NEGO-
CIANTS
AI Quelques données sur le profil socio-démographique des micro-
négociants
. Une population à majorité féminine
L'informel
alimentaire est essentiellement le
domaine
des
femmes.
Plus
qu'un métier appris,
c'est
un
prolongement
extérieur de leurs activités domestiques. Cette réalité trouve sa
confirmation
dans nos enquêtes socio-économiques qui évaluent
à
80,42 % la proportion des femmes présentes dans ce secteur contre
seulement 19,58 % d'hommes. Ces résultats peuvent être comparés à
ceux
des études effectuées dans d'autres pays de la
sous-région
ouest-africaine,
en
Indonésie
et
au
Bangladesh.
A
Ilé-Ifé
(Nigéria)
par
exemple,
les
femmes présentes dans
ce
secteur
constituent 94 % contre seulement 6 % d'hommes (Tola olu
Pearce,
1988).
A Ziguichor (Sénégal),
le
taux de participation féminine
à
cette
activité n'est pas des moindres
75 % (Posner
1983).
Comparativement à des observations faites en Afrique de
l'Ouest,
l'investissement
des
femmes
dans
ce
secteur
d'activité
en
Indonésie
et au Bangladesh,
est moins important puisqu'il
n'en
mobilise que 35 à 40 % seulement (Cohen 1984).
111
Tableau nO 12
Répartition des actifs par sexe
1
Femmes
1
Hommes
1
Total
1-----------1-----------1-----------1
1
1
%
1
1
%
1
1
%
1
1
1
1
1
1
1 Restaurant en êtablissementl ~1 33,451 2"3 1
8,181 ---,-,-=r 1 41,631
1
1
1
1
1
1
1
1
1 Restaurant ambulant
1
381 13,521 21
1
7,471
591 20,991
1
1
1
1
1
1
1
1
1 Espace~restaurant
1
321 11 , 381
1 1
0,351
331 11,74
1
1
1
1
1
1
1
1 Restaurant spontané
1
241
8,541
1 1
0,351
251
8,89
1
1
1
1
1
1
1
1 Restaurant sur table mobilel
381 13,521
9 1
3,201
471 16,72
1
1
1
1
1
1
1
1 2261 80,421 55 1 19,581 """""2"8'11100,0
La
sur-représentation féminine dans notre
échantillon
n'est
que le reflet de la situation au niveau de
la
population
des
acteurs
du secteur informel alimentaire.
A
travers
cette
prééminence des femmes,
transparait leur rôle socio-économique en
milieu
urbain,
longtemps
"
masque
par
les
statistiques
d'emplois (1).
relativement jeune
En outre,
cette population se caractérise par le poids
particulièrement
important
du
groupe des actifs de
21-30
ans
(28,46 %) et surtout de ceux de 31-40 ans (32,38 %), soit 60,84 %
en
fréquence cumulée.
Ces caractéristiques suivent de très près
celles constatées à Ifè où les femmes s'adonnant à cette activité
sont
dans la grande majorité âgées de plus de 21 ans.
La
sous-
représentation des actifs de moins de 21 ans (17,79 %) et de ceux
(1) Ph. Antoine,
A. Traoré - Pour une lisibilité du rôle des fem-
mes au travers des données
statistiques in : Femmes et poli-
tiques alimentaires. Actes
du
séminaire
OR5TOM-CIE,
Paris
1985; pp. 195-242.
112
de
+
de
40 ans dans notre
échantillon
s'explique,
pour
les
premiers, par la difficulté à rassembler le capital d'investisse-
ment
et,
pour
les seconds,
par l'effort qu'exige
l'activité,
effort auquel l'avancement
de l'âge ne permet plus de répondre.
Tableau nO 13
Répartition
des
actifs par âge et
suivant
le
type de restaurant
, Restaur.en IRestaur.sur 1 Espace
1 RestaurantlRestaurant 1
, étab11ssem. 'table mobi1e!restaurant 'spontané
! ambulant
!
Total
I------------!------------!-----------!-----------!-----------1-----------,
,
1
%!
, % !
, % !
!
%!
' % 1
,%
_ _ _ _ _ _ ' _ _1 -
_ , _ _ , _ , _ _ , _ , _ _ , _ ,_ _
10-20 ans'
2'
0,71! 11'
3,91
13!
4,62!
8!
2,84! 16!
5,69! 50 ! 17,79!
21-30 ansl
27!
9,60! 18'
6,40
17'
6,04!
6'
2,13! 12!
4,27! 80 ! 28,46!
31-40 ansl
32' 11,38! 22'
7,82! 14'
4,98! 12'
4,27! 11 1 3,91' 91 , 32,38!
41-50 ans'
8!
2,84! 11'
3,91 !
8 '
2,84!
6
2,13!
9 1 3,20! 42 ! 14,94'
51-60 ans'
7!
2,491
5'
1,77!
4'
1,42!
1 ,
O,35!
1!
0,35' 18 1 6,43!
-
' _ _ 1_ _1 -
, _ ,_ _ , _ , _ _ , _ , _ _,_!__
,
76' 27,04' 67 , 23,84 1 56 1 19,92' 33 , 11,74! 49 ! 17,43!281 '100,0 t
, - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
On
comprend,
au regard de la jeunesse de la majorité des actifs
toute
la
capacité
d'inventivité et d'adaptation
qui
fait
le
dynamisme de l'artisanat alimentaire.
d'origine nationale et ethnique diversifiée ...
L'analyse de l'origine nationale et ethnique des actifs
met
en
exergue les spécialisations
sexuelles
dans
l'informel
alimentaire. Les propos de Cl. Vidal selon lesquels "la restaura-
tion
populaire est le domaine quasi exclusif des immigrés et des
femmes" (1) semblent justifiés statistiquement par nos enquêtes.
(1) Cl. Vidal:
L'artisanat féminin et la restauration populaire
à
Abidjan,
in
Femmes et politiques alimentaires, op.
cit.
p. 550.
113
Tableau nO 14
Répartition des actifs par nationalité et sui-
vant le sexe
1 Ivoiriens
INon Ivoiriensl
1-------------1-------------1
1
1
%
%
1
1
1
1
1
1
1
1
55
1
Hommes
1
9 1
3,20
46
16,37 1
19,57
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1 226
1
Femmes
!
150 1 53,38
76 1 27,04 1
80,42
1
1
1
1
1 159
56,58
122 1 43,41
1
1
!
Comme nous le précisions,
sans être des concurrents,
les hommes
(19,577
%) p~rtagent ce secteur avec les femmes (80,42 %) qui le
dominent. La forte répugnance des hommes ivoiriens (3,20 %) vis à
vis de cette activité considérée généralement comme métier
fémi-
nin
et le rôle marginal des hommes étrangers (16,37 %) font
une
grande
place
aux femmes qui deviennent les principales
nourri-
cières
de la ville.
Le fait le plus significatif est
la
forte
présence
des
femmes
ivoiriennes qui représentent
plus
de
la
moitié de la population des actifs (53,38 %). Et comme le consta-
tait
L.
Bourgeois (1983),
le poids de certaines ethnies y
est
prépondérant
baoulé (25,02 %),
ethnies lagunaires (28,17 %),
agni (15,92 %), dioula (11, 31 %).
Du
côté
des étrangers,
tous les pays de la sous-région
ouest-
africaine sont représentés.
en majorité composée d'analphabètes ...
Le
seuil
jamais atteint par la
minorité
des
actifs
scolarisés
(24,5 %) est la classe de 3e.
Ce faible effectif
de
scolarisés
se recrute à 92,19 % dans la génération des actifs de
114
20-30 ans.
La grande majorité des actifs (75,08 %) est
analpha-
bète.
Dans
la minorité des actifs scolarisés,
les femmes
sont
sous-représentées (15,04 %) par rapport aux hommes (65,45 %).
Ce
fort
taux
d'analphabétisme
chez les femmes
les
prédispose
à
s'investir dans le commerce de détail,
seul moyen pour elle,
en
dehors
de
la
prostitution
et
des
services
domestiques,
de
s'insérer dans le tissu économique urbain.
Situation matrimoniale
L'analyse de l'état matrimonial de la population enquê-
tée
indique une très faible proportion de divorcés (1,06 %)
par
rapport
aux autres catégories à savoir celle des veufs (6,04 %),
des
célibataires sans enfant (16,37 %),
des
célibataires
avec
enfant
(27,75 %) et enfin la plus importante,
celle des
mariés
(48,75 %).
Dans
les
deux
catégories
dominantes
de
notre
échantillon,
celle
des
mariés et celle des
célibataires
avec
enfant,
la
présence féminine est écrasante avec
respectivement
89,78 % et 94,87 %.
Encore faudra-t-il distinguer dans le groupe
des femmes mariées celles qui appartiennent à une famille monoga-
mique ou polygamique. C'est à ce niveau que nos enquêtes nous ont
révélé que le mariage n'impliquait pas systématiquement, dans les
milieux
populaires urbains,
un partage des charges
familiales.
Les
familles
polygames
se
décomposent
en
sous-unités
dans
lesquelles
les
femmes sont les chefs de ménage
"par
substitu-
tion".
Sur les 42,70 % de femmes s'étant déclarées mariées,
39 %
vivaient cette situation.
En ajoutant ce fort taux de femmes-chefs de ménage "par
substitution"
à
celui des femmes célibataires qui ont la
charge
115
de
leurs enfants,
nous voyons donc ce que pourrait
constituer,
pour ces ménages,
le revenu tiré de l'artisanat alimentaire.
Il
faut
reconnaître avec J.
Bissiliat et M.
Fiéloux (1) que cette
situation
prend de plus en plus d'importance.
La
précarité
du
lien
conjugal
dans
les
grandes et même
les
petites
villes,
confirmée
par
la
fréquence des
divorces,
la
polygamie
avec
l'abandon
plus
ou
moins net de la première épouse
et
de
ses
enfants,
les réactions de rejet des femmes devant
l'absentéisme
du mari,
les effets de la crise économique,
sont autant de fac-
teurs
qui
concourent à augmenter le nombre de familles dont
le
chef est une femme;
à Naïrobi par exemple, 60 % des femmes vivent
cette situation.
BI Trajectoire migratoire et professionnelle des actifs
Sur
les
281
actifs
enquêtés
par
nous,
246
(soit
87,54 %) sont des migrants.
Ici,
"migrant" n'est pas synonyme de
"non-ivoirien".
Sont
considérés
comme migrants tous les
actifs
aussi
bien ivoiriens que non-ivoiriens,
qui se sont déplacés de
leur lieu de naissance vers Abidjan.
Les motifs de la
migration
sont très divers.
Ils sont aussi bien d'ordre économique que non
économique.
Chez
les ivoiriens,
72,7 % de ces déplacements ont eu
lieu entre 1979 et 1983.
En général, les caractéristiques de ces
déplacements
ne s'écartent guère de celles des migrations
afri-
caines
qui
prennent le plus souvent une allure
d'exode
rural.
Mais
ceci n'autorise pas tout de suite une analyse en termes
de
(1) J. Bissiliat, M. Fiéloux, Femmes du Tiers-Monde, Ed. Le Syco-
more, Paris 1983; p. 55.
116
relations
de cause à effets entre les mesures
agro-alimentaires
contenues dans les programmes d'ajustement structurel et les mou-
vements de population.
Tableau nO 15 : Motifs de la migration vers Abidjan
1
Ivoiriens
1 Non-Ivoiriens 1
1---------------1---------------1
1Hommes 1Femmes 1Hommes 1Femmes 1
1
1
1
1
Raisons >
economiques
1
5
301
401
61
.Chercher du travail
1
5
4
1
23
1
1
.Faire du commerce
!
17
!
1
1
.Chercher l'argent
7
17
4
.Apprentissage
2
1
1
Raisons non économiques
101
641
.Suivi du mari
23
19
1
.Suivi d'un parent
53
43
1
.Fuir les contraintes
du village
14
.Visite à la famille
1 1
2
5
131
40
70
136
110
Les
causes
de déplacement par
nationalité
n'inspire
aucun
commentaire.
C'est plutôt autour de la variable sexe
que
les
différences
sont observables.
A l'analyse du
tableau
ci-
dessus,
on
constate que la migration masculine,
chez les Ivoi-
riens comme chez les Non-ivoiriens,
est essentiellement
motivée
par des raisons économiques,
telles que la recherche d'un emploi
(30/45
cas)
et le souci d'entreprendre une activité
économique
(17/45 cas).
Certes,
les motifs économiques de migration ne sont
pas absents chez les femmes; mais ils n'apparaissent que dans une
proportion
très faible (33/201 cas).
A une lecture
au
premier
degré,
leurs raisons de déplacement sont plutôt non économiques.
117
Parmi
celles-ci,
on citera par ordre d'importance le suivi d'un
parent (96/201 cas),
le suivi du mari (42/201 cas), la fuite des
mariages précoces (14/201 cas),
et enfin la visite à la
famille
(13/201 cas).
Notons que, si, à partir de ces données, les migrations
de type économique sont évidentes chez les hommes, elles sont peu
perceptibles
chez
les femmes.
Le suivi du mari ou d'un
parent
étant
la raison la plus évoquée,
il est difficile d'y
lire
la
part
de
l'économique.
Une
recherche - au second
degré
- des
motivations des personnes suivies ayant révélé à 93 % un souci de
quête
d'emplo~ ou de revenu,
on se hasarderait à faire le
lien
entre
la crise économique et le phénomène migratoire qui
aurait
entraîné,
un
investissement
croissant
dans
l'informel
alimentaire.
Le
fort
taux de migration ainsi constaté
semble-t-il
traduire
une
réaction à la dégradation du revenu
agricole
par
tête
qui,
à
la
fin de la période 1978-1983,
a
baissé
de
5,36
% (1).
On pourrait émettre l'hypothèse que la crise écono-
mique a de plus en plus attiré une partie de la population active
du
secteur
primaire
vers
la
production
marchande
urbaine
informelle.
Le
processus de migration s'effectue selon différentes
modalités.
Nous avons essayé de l'analyser à partir de la
typo-
logie
des migrations que proposait M.
Peil (2).
Quatre des six
(1) SEDES,
Evolution et répartition des revenus en Côte-d'Ivoire
... op. cit ... p. 31.
(2) M. Peil, The
ghanaian
factory
worker : industrial
man
in
Africa. African studies series 5. Cambridge university press
1972.
118
types
de migration - par rapport au lieu de l'enquête
- distin-
gués par M. Peil, s'observent ici
la .migration directe (42,33 % de cas).
Elle implique
un
mouvement
du
lieu de départ
vers
Abidjan
sans
résidence
intermédiaire;
- la
migration
"direct
side".
Elle
concerne
des
individus
(22,17
% de cas) migrant du lieu de
départ
vers
un
autre endroit de même importance avant l'arrivée à Abidjan;
- la
migration "step".
Apparaissant dans 20,85
%
de
cas,
elle implique un mouvement graduel vers des centres urbains
d'importance croissante (exemple Korhogo, Bouaké, Abidjan);
- la
migration "step side" (14,65 %).
Il s'agit d'une
migration
successivement
du lieu de départ vers un
endroit
de
même
importance,
puis vers des villes
d'importance
croissante
avec comme point de chute, Abidjan.
Toutes
ces
migrations
sont
conditionnées
par
l'assurance
d'une insertion dans un réseau familial ou
ethnique
pré-établi.
Pour la plupart de nos enquêtés (74 %),
la vente d'ali-
..
ments
était la première activité économique exercée
a
Abidjan.
L'insertion
dans l'artisanat alimentaire apparaît ici comme
une
solution
d'intégration
au tissu économique
urbain.
L'exercice
d'une activité antérieure à la restauration n'est observable
que
chez
certains restaurateurs en établissement et précisement chez
les
tenancières de maquis qui en ont tiré leur premier fonds
de
démarrage. Ces activités sont diverses et vont de la prostitution
au
salariat
d'une
entreprise
en
passant
par
les
services
domestiques (boy, bonne).
119
Si
pour
les uns (42,13 %) l'activité de
restauration
est une solution définitive au problème d'emploi,
pour
d'autres
(17,61
%)
elle reste une activité transitoire.
Cette
dernière
conception
est
surtout
prédominante chez
les
exploitants
de
kiosques, les vendeurs sur tables mobiles et les ambulants.
Une
étude de l'artisanat alimentaire ne peut se
faire
sans
l'analyse
de la main-d'oeuvre qui constitue sa
principale
force. Notre intérêt se portera à ce niveau sur les caractéristi-
ques majeures de cette main-d'oeuvre.
Section 2 - ANALYSE DES CARACTERISTIQUES DE
LA MAIN-D'OEUVRE
DE
L'INFORMEL ALIMENTAIRE
L'I. A. est l'une des activités du secteur informel qui
puise
l'essentiel
de sa force de travail
dans
l'environnement
familial.
La
présentation de quelques grandes
caractéristiques
socio-démographiques
de
cette main-d'oeuvre nous
permettra
de
mieux
comprendre l'un des facteurs de production à moindre
coût
de ce secteur.
AI Identité socio-démographigue de la main-d'oeuvre
Au
total 928 personnes (hormis les chefs d'entreprise)
travaillent
dans
les
281
unités
de
vente
que
nous
avons
enquêtées; la moyenne
étant de 3,3 personnes par unité de vente.
Nous
essaierons
de comprendre comment se répartit
cette
main-
d'oeuvre
par
rapport à quelques variables telles que
le
sexe,
l'âge et le statut.
120
1°) Sexe
La
nature même de l'activité fait que l'artisanat ali-
mentaire
reste un monopole des femmes.
Tout comme chez les
ac-
teurs principaux,
la main-d'oeuvre de l'informel alimentaire est
essentiellement féminine (96,9 %). Cet indice nous éclaire sur la
capacité de reproduction sexuelle de l'informel alimentaire.
Tableau nO 16 : Répartition de la main-d'oeuvre par tranche
d'âge
Fréquence
Pourcentage !
!
- 10 ans
307
33,3
!
1 1 - 15 ans
179
19,2
!
16 - 20 ans
174
18,7
!
21
- 25 ans
108
11 ,6
!
26 -
30 ans
91
9,8
!
31 - 35 ans
69
7,4
928
100,0
La main-d'oeuvre employée est très jeune. La majorité soit 71,2 %,
a moins de 21 ans,
l'âge moyen étant de dix huit ans et demi.
3°) Statut socio-professionnel
Tableau nO 17
Répartition de la main-d'oeuvre par statut
Fréquence
! Pourcentage
!
Salariés
17
!
2,9
!
1
1
Aides familiaux
911
!
98,1
1
1
!
1
1
Apprentis
0
!
0,0
1
!
!
1
928
!
100,0
1
1
121
Ce
tableau nous montre la prépondérance des aides familiaux dans
le fonctionnement des unités de production de l ' I . A.
Ils consti-
tuent incontestablement la forte majorité de la main-d'oeuvre
de
cette
branche d'activité.
Les apprentis y sont inexistants con-
trairement aux autres activités du secteur informel.
Le salariat
(2,9 %) semble un phénomène marginal.
Nous avons également cons-
taté
une forte corrélation entre l'importance du
chiffre
d'af-
faires et la tendance à recruter des salariés. Les quelques rares
cas
d'embauche salariale se fondent sur des raisons plus
écono-
miques
et
utilitaires à savoir l'accroissement de la taille
de
l'entreprise
et
les exigences d'une clientèle de plus
en
plus
croissante.
La
prépondérance
des aides familiaux
dans
la
main-
d'oeuvre
de
l ' I .
A.
est une donnée essentielle
de
l'analyse
micro-économique. A ce titre, elle mérite que l'on s'y attarde.
Cette
première caractéristique qui
écarte
l'I.A.
de
l'entreprise
capitaliste-type annonce la complexité de l'analyse
micro-économique des unités de production.
Ceci rappelle
forte-
ment
les problèmes épistémologiques que posait Tchayanov dans sa
théorie
de
l'organisation de l'économie
paysanne
russe.
Tout
comme
les fermes russes qu'étudiait l'auteur durant
le
premier
quart du XXe siècle,
90 % des UPV n'engagent pas de travailleurs
et exploitent la main-d'oeuvre communautaire. Devant ces nouveaux
,
cas
de
figure,
les
concepts et doctrines classiques
et
neo-
classiques
communément
admis
en
matière
d'analyse
micro-
économique
pour
comprendre
le comportement
des
entrepreneurs
capitalistes et le fonctionnement d'entreprises commerciales dans
lesquelles la main-d'oeuvre travaille pour un salaire ont du
mal
122
à s'adapter.
Tchayanov le faisait bien remarquer quand il notait
à
propos
des
fermes "Le moyen le plus sûr
de
mal
comprendre
l'exploitation
familiale paysanne est de la considérer comme une
affaire commerciale,
autrement dit comme une entreprise de
type
capitaliste ... "
(1).
Cette réflexion s'applique à bon escient à
l'I.A.
Nous
pensons donc que toute tentative qui consisterait à
traiter
simplement les UPV selon les catégories théoriques
d'un
"système
unique",
d'une "économique universelle"
et
classique
semble
vouée à l'échec puisque l'homo économicus n'organise
pas
ici
sa production à partir de salariat mais plutôt avec la main-
d'oeuvre communautaire.
Les problèmes de psychologie
économique
et
commerciale
que
nous aborderons dans le
chapitre
appuiera
toute notre argumentation sur le caractère familial et subsistan-
tiel de l'économie informelle alimentaire.
BI Utilisation
des
aides
familiaux
et
implications
micro-
économiques
Contrairement
aux
autres
structures
du
secteur
informel,
l ' I .
A. ne forme pas d'apprentis. Dans leur stratégie
de création des ressources,
les tenanciers s'appuient plutôt sur
les aides familiaux qu'ils recrutent dans leurs réseaux communau-
taires.
La
structure de cette main-d'oeuvre familiale est
très
composite.
(1) A.
Tchayanov,
L'organisation
de l'économie
paysanne,
Ed.
Librairie Le Regard, Paris 1990, p.
246.
123
Tableau nO 18
structure
de la main-d'oeuvre
familiale
dans
l'informel alimentaire
1
Fréquence
Pourcentage 1
1
1
1
1
1
1 Aides-parents
1
425
46,8
1
1 Enfants des tenanciers
!
103
11 ,3
1
1 Enfants confiés
169
18,5
1
1 Enfants négociés
89
9,7
1
1 Enfants apparentés
125
13,7
1
1
1
911
100,0
1
1
La
structure
de cette main-d'oeuvre familiale
fait
apparaître
différents statuts par rapport à l'actif principal.
Les
aides-parents,
qui
constituent 46,8 %
de
cette
sous-population,
sont des personnes (cousins,
cousines,
frères,
soeurs) appartenant à la même génération que les tenanciers.
En dehors de ce sous-groupe d'aide-parents,
le reste de
la
main-d'oeuvre
est essentiellement infantile;
53,2 %
de
la
population
des personnes employées dans les unités enquêtées ont
moins de 16 ans. Cette sous-population se répartit comme suit
les
enfants du couple (11,3 %).
Ce sont les descendants
directs des tenanciers;
les enfants confiés (18,5 %).
Ce sont des enfants placés
aupres des tenanciers par un ami ou un voisin immédiat;
les enfants négociés (9,7 %).
Ce sont des enfants prati-
quement
"loués" par les parents géniteurs à une tierce
personne
(dans
notre cas,
le tenancier) en vue d'une exploitation
(dans
,
n'importe
quel
champ d'activité) contre récompenses
a
période
déterminée;
124
· les enfants apparentés (13,7 %).
Ce sont les enfants qui,
sans être les descendants directs du
tenancier, appartiennent
à
son réseau familial,
généralement très large en Afrique.
Il
faut
préciser que
cette
main-d'oeuvre
familiale
n'est pas rémunérée. Mais ceci n'autorise non plus une analyse en
terme
de
gratuité et d'exploitation comme l'ont
fait
certains
spécialistes
du secteur informel.
La rémunération n'est pas ici
en
espèces mais en nature.
Ce sont plutôt des échanges de
ser-
vices
contre prestations sociales,
puisqu'il ressortait de
nos
enquêtes
que près de 92 % des personnes employées
appartiennent
au ménage des tenanciers qui les ont à charge. Mieux,
une compta-
bilité
des
profits
matériels
et
symboliques
(1),
pourrait
permettre de dépasser les explications par les "généralités
eth-
nologisantes"
ne
se
limitant
qu'à l'évocation
du
réseau
de
parenté
des entrepreneurs.
Mais là n'est pas l'objet
de
notre
analyse.
A court terme,
l'intérêt de l'utilisation de ce type de
capital humain en matière d'analyse micro-économique est la mini-
misation
du
coût
de
production
qui,
conjuguée
à
d'autres
facteurs,
notamment l'effet concurrence,
autorise le bas prix à
la
consommation des plats dans le secteur informel
alimentaire.
Nous
voyons là une première échelle de capitalisation
des
rap-
ports sociaux qui se poursuivra aussi bien au niveau de la forma-
tion du capital d'investissement initial,
que de la constitution
de la clientèle.
Si
le
~
reseau
familial semble bien
être
un
élément
déterminant du dynamisme de 1'1.
A.,
il ne manque cependant pas
de
peser
sur la gestion du fait des
nombreuses
sollicitations
(1) cf. P. Bourdieu. Le sens pratique. Ed. du Minuit,
Paris 1984.
125
>
dont
font l'objet les tenanciers.
Nous pouvons en juger par
la
taille des ménages et le poids qu'elle pourrait représenter
dans
le
budget
de
consommation surtout chez les ménages à
un
seul
actif.
C'est à ce niveau qu'entre en effet la grande question du
calcul économique en Afrique tel que l'a formalisé R.
Mahieu
et
sur
laquelle
nous
reviendrons dans le
prochain
chapitre.
La
poursuite
de l'analyse par une étude des
structures
familiales
immédiates
des micro-négociants débroussaillerait le champ de la
réflexion sur le problème des réajustements par les revenus.
Section 3
STRUCTURE FAMILIALE IMMEDIATE DES MICRO NEGOCIANTS
Avant de présenter l'analyse des résultats,
qu'il nous
soit permis de faire deux observations
l'une de nature concep-
tuelle et l'autre de nature méthodologique.
Pour déterminer la structure familiale,
nous avons posé
les questions suivantes:
"Vivez-vous seul(e) chez vous"
?
Si
oui
l'enquêté
était
considéré comme ménage à
une
composante.
Sinon, il était convié à donner des informations sur son environ-
nement social immédiat pour le remplissage d'une fiche de rensei-
gnements
familiaux
comportant
le nom,
le
sexe,
le
lien
de
,
parenté,
l'activité,
le
revenu
et le motif
de
presence
des
personnes vivant avec lui.
A partir de ces données, nous considérons comme faisant
partie de sa famille toutes les personnes partageant le même toit
et vivant "derrière la même clé" (1) que lui.
(1) Cf. H. Joshi, M. Lubell et J. Mouly, Urbanisation et emploi à
Abidjan, BIT, Genève 15, 1976, p.
40.
126
De toutes ces demandes de renseignements,
les questions
sur
le
revenu
étaient
soit ignorées soit objet
de
refus
de
réponses
chez plus de 40 % des personnes interrogées.
Dans
ces
cas de refus,
nous nous contentions seulement de savoir si revenu
il
Y
avait;
après quoi nous demandions à
l'enquêté
d'évaluer
l'importance
(supérieure ou inférieure) de ces entrées par
rap-
port à son propre revenu mensuel moyen. Ce choix méthodologique a
atténué
les biais méthodologiques qui pouvaient entraver
l'éva-
luation du nombre d'actifs par
ménage.
Ainsi,
considérons-nous
comme actif "tout individu ayant une activité rémunérée" (1).
/
AI Proportion des chefs de ménage et taille du ménage
Dans 1'1.
A.,
la taille moyenne du ménage est de 5,09
personnes.
Elle est plus importante chez les Ivoiriens (6,2) que
chez
les non Ivoiriens (3,6).
Il faut signaler la
très
faible
proportion de ménages composés du seul actif enquêté (3,2 %).
La
structure.en est très composite,
puisque dans un même ménage, on
peut
enregistrer
la cohabitation de trois générations
(grands-
parents, parents et enfants). Les 1.431 membres composant les 281
ménages enquêtés se répartissent comme suit :
Actifs
281
19,6 %
Membres de la famille nucléaire des actifs ...
302
21 ,1
%
Membres du réseau familial élargi des actifs
. 501
35 %
Enfants confiés et négociés
258
18,02 %
Amis de la famille des actifs
89
6,2 %
(1) Cf. J.P. Lachaud, Contribution à l'étude du secteur
informel
en Côte-d'Ivoire: le
cas
du
secteur
de
l'habillement
à
Abidjan. Université de Bordeaux l, 1979; p.
226.
127
Il apparaît que tous les tenanciers ne tiennent pas
le
rôle
de
chef de ménage.
Néanmoins près de 55 % ont
ce
statut
(54,71
%).
Compte
tenu de la présence féminine écrasante
dans
l'I.A., nous voyons déjà quelle pourrait être l'importance socio-
économique
de cette activité à forte
dominance
féminine.
MaiE
dans certains ménages les sources de revenu sont diverses.
Pour une meilleure appréciation du rôle de l'I.A. pour-
voyeur de revenu, évaluons sa part dans le budget des ménages.
BI Actifs par ménage, origine des revenus et budget familial
Le rôle de l ' I . A. doit
aussi être compris par rapport
à la composition des revenus des ménages.
D'après Claude de Miras (1) dans les formations sociales périphé-
riques,
face
à la divergence entre prix et coût de la puissance
du
travail,
deux
voies possibles s'ouvrent
pour
un
éventuel
ajustement.
L'un,
du côté du prix de la puissance de travail et
l'autre
du côté du coût d'entretien,
ce qui correspond aux deux
mouvements suivants
(1) Cl.
de
Miras,
L'informel: de l'économie et du politique,
doc. ronéo, ORSTOM,
Quito 1990.
L'auteur
définit
la
puissance de travail
comme
"la
qualité virtuelle du travail humain de produire de la
valeur
d'usage
et de la valeur d'échange qui est autant à
l'oeuvre
dans le mode de production capitaliste,
réputé pur, que dans
les formations sociales périphériques" (p. 6).
Son
"prix" est "la contrepartie monétaire qu'il faut fournir
pour
mobiliser cette puissance de travail,
sur une
période
donnée. Le revenu direct perçu par cette puissance de travail
est
donc l'expression de son prix sur le marché
du
travail
considéré"
tandis
que
son
coût
d'entretien
est
la
contrepartie
monétaire
des moyens
d'existence
dont
cette
puissance de travail a besoin pour se reconstituer, au niveau
individuel et au niveau du groupe" p. 6.
128
familial
est
plus
restreint
et
peut
être
évalué
à
2,2
actifs/ménage.
Les
acteurs de l'I.A.
semblent tenir une
place
importante dans la constitution du revenu de ces ménages.
L'ana-
..
lyse
des combinaisons d'actifs par ménage pourrait nous aider
a
déterminer une autre fonction économique - celle de pourvoyeur de
..
revenu - de l'informel alimentaire,
à travers sa contribution
a
la formation du budget familial.
Le
tableau ci-après (sexe des acteurs/nombre d'actifs)
et
l'analyse
des combinaisons possibles
d'actifs
donnent
des
éléments d'appréciation de l'importance économique de l'I.A.
Tableau nO 19
Nombre d'actifs/ménage d'acteurs répartis selon
le sexe
2
3
4
actif
actifs
actifs
actifs
1
50,4 % !
15,04 %!
19,02 %!
15,48 %1
1
Femmes!
114
!
34
43
35
226 1
!80,28 %
72,35 %
78,18 %
1 94,59 %
55 !
50,53 %1
142
Plusieurs
combinaisons possibles d'actifs (1) assurent
ces
entrées de revenu.
A partir de nos travaux,
nous en
avons
-'.
dégagé les suivantes :
( 1 ) Nous empruntons ce modèle d'analyse à Cl.de Miras. Secteur de
subsistance, ménages et salariat : origine des revenus domes-
tiques dans un quartier spontané d'Abidjan.
ORSTOM
Abidjan,
juin 1984.
129
-
ménage à un seul homme actif (HA)
-
ménage à plusieurs hommes actifs (xHA)
- ménage à une seule femme active (FA)
- ménage à plusieurs femmes actives (xFA)
- ménage à une femme et un homme actifs (FA + HA)
..
'"
-
menage
à
plusieurs
femmes et
a
plusieurs
hommes
actifs (xFA + xHA)
-
ménage à plusieurs hommes et une femme actifs (xHA + FA)
- ménage à plusieurs femmes et un homme actifs (xFA + HA)
Le tableau ci-après donne la fréquence de chaque type
de combinaison d'actifs.
Tableau nO 20
Fréquence des combinaisons d'actifs
! HA
IxHA 1 FA ! xFA !FA + HA!xFA - xHA!xHA + FA!xFA + HA!
1
1
!
1
!
!
!
!
!
- - - - - - - -
! Hoorne
! 28
9 !
- ! - !
8
2
4
4
55 !
!
Fenme
!
-
- ! 114
30 !
23
7
25
27
226 !
1
!
1
!
- - - - - - - -
TOTAL
! 28
!
9 ! 114 !
30 !
31
9
29
31
!
!
!
1
- - - - - - - -
! Taille du !
1
! ménage par! 45
20 ! 641
113 !
94
112
213
200
! 1.435 !
! type
!
1°) Ménages à un seul homme actif
Ils
sont au nombre de 28 et représentent 50,90 % de la
population
des
ménages d'actifs masculins.
Chaque
actif
fait
vivre en moyenne 1,68 individus.
Ces ménages sont à 96,42 % non-
Ivoiriens:
guinéens,
maliens,
burkinabè. Les 2/3 de ces ménages
130
sont composés du seul opérateur de 1'1.
A. La quasi-totalité des
actifs
de
ce type de ménage sont des
restaurateurs
sur
table
mobile
vendeur de viande grillée, vendeur de "café complet".
2°) Ménages à plusieurs hommes actifs
Ce
sont
généralement
des
associations
d'actifs
de
différentes
branches
du secteur informel.
Ce
type
de
ménage
apparaît dans une très faible proportion (3,20 %) par rapport aux
autres.
A 100 % non ivoiriens,
ces associations masculines,
se
constituent à partir d'affinités ethniques, éloignement oblige.
3°) Ménages à une seule femme active
Elles
constituent
la
plus importante
proportion
de
notre échantillon:
114/281 soit 40,5 % de la population totale.
Ces
femmes sont pour la plupart "mariées" et vivent
des
situa-
tions
différentes
chef de ménage "par substitution" (40,2 %),
époux
décédé
ou
séparé (15,7 %),
époux au
chômage
(9,1
%).
Quelques-unes appartiennent à la catégorie des célibataires
avec
enfant
(31,2 %) et des célibataires sans enfant
(3,8 %).
C'est
d'ailleurs ce type de ménage qui concentre le plus de personnes à
charge
(641/1.438 soit 44,57 %).
Chaque actif a en moyenne
5,6
personnes
à charge.
Ces données révèlent entre autres
l'impor-
..
tante contribution financière des femmes au revenu des ménages
a
direction féminine.
4°) Ménages à plusieurs femmes actives
Ce
type
de
ménage comparativement au
précédent
est
moins
quantitativement important.
Mais,
il apparaît
dans
une
proportion
non négligeable (10,67 % par rapport à
l'échantillon
131
et 13,27 % par rapport à la population des femmes).
Il se compose
de soeurs, de cousines, d'amies et parfois même de femmes de deux
générations
différentes qui coordonnent leurs efforts financiers
pour faire face à la baisse constante du pouvoir d'achat.
5°) Ménages composés d'une femme et d'un homme actif
Ce
type
de
ménage se recrute dans la
catégorie
des
. ,
,
d'actifs
mar~es.
Il
concurrence la population
des
ménages
a
plusieurs
femmes
actives
puisqu'il représente 11,03
% de
la
population totale.
Ces 31 ménages comptent au total 94 individus
avec une taille moyenne de 3,02 individus.
6°)
Ménages composés de plusieurs femmes et de plusieurs
hommes
actifs
Dans
cette catégorie,
nous avons recensé seulement
2
ménages
d'actifs
hommes et 7 ménages d'actifs féminins.
Ces
9
ménages comptent au total 112 individus.
Leur taille moyenne est
de 12,4 individus. Ce type de ménage est le plus rare (3,20 %) de
notre
échantillon.
La largeur de sa taille est
essentiellement
dûe à la cohabitation de 3 générations
(grand'parents,
parents,
enfants) et à la sur-représentation des filles-mères, des hommes-
célibataires et de leur progéniture dans ces ménages.
7°)
Ménages
composés de plusieurs hommes actifs et d'une
femme
active
29
ménages ont été recensés dans cette
rubrique.
Ils
représentent 10,32 % de notre échantillon.
Ce sont
généralement
des
associations
d'actifs non-ivoiriens.
La femme est le
plus
souvent la conjointe d'un des associés.
Dans ce type de
ménage,
132
les
actifs opérant dans l'artisanat alimentaire sont surtout les
femmes (25/29 ménages).
8°)
Ménages composés de plusieurs femmes actives et
d'un
homme
actif
Dans
cette
rubrique
ont été enregistrés
31
ménages
représentant 11,03 % de la population totale.
Tout comme dans le
cas
précédent,
les actifs opérant dans
l'informel
alimentaire
sont surtout les femmes
(27/31).
Le seul homme présent dans
ces
ménages
était
un parent de l'une des
associées.
Nous
n'avons
enregistré aucun cas de présence d'époux.
Entre
autres
fonctions de l'I.A.,
son rôle de
pour-
voyeur
de revenu pourrait être évalué à travers sa
contribution
au budget de consommation des ménages.
A
partir
de
ces
éléments,
l'appréciation
de
l'importance
du
revenu tiré de l'I.A.
se fera par
rapport
au
budget familial nominal. Ceci reviendra à déterminer si ce revenu
est un revenu familial entier,
un revenu familial intégré ou
un
revenu d'appoint.
Par
revenu familial entier,
nous devons
entendre
un
budget
de
consommation constitué à 100 % à partir
du
commerce
informel d'aliments.
Le
revenu
intégré
serait,
quant
à
lui,
une
participation
monétaire sans laquelle le budget du ménage serait
amputé.
Par rapport au revenu intégré,
le revenu d'appoint
est
moins
indispensable et n'a qu'une influence mineure ou nulle sur
le budget du ménage.
133
Comme l'ont précisé la plupart des auteurs spécialisés,
l'analyse
du
budget familial des petits producteurs
n'est
pas
. ,
chose
a1see.
Dans
notre cas,
les principales causes de
cette
difficulté sont la réticence des personnes interrogées à
fournir
des
renseignements exacts et l'interprétation de ces données
le
plus
souvent volontairement biaisées ou
incomplètes.
Néanmoins
certaines informations se prêtent assez bien à l'analyse.
Pour ce qui concerne la détermination des ménages où le
revenu tiré de l'I.A. constitue la seule composante du budget,
il
n'existe
aucune
opacité.
La proportion des ménages a
un
seul
homme
actif
(9,96
%) et celle des ménages a
une
seule
femme
active
(40,56 %) apportent les éléments statistiques nécessaires
à la confirmation de l'hypothèse selon laquelle le revenu tiré de
l'I.A.
est
un
revenu familial entier dans la plupart
des
cas
(50,5
%).
Par
rapport à la détermination de
la
fréquence
du
revenu
familial
entier,
celle du revenu intégré et
du
revenu
d'appoint semblent un exercice complexe voire impossible.
Compte
tenu
du taux très élevé (61,2 %) de refus de réponses aux
ques-
tions
touchant au revenu du conjoint ou des associés,
l'enquête
n'a pas permis de déterminer d'une manière précise le budget
des
ménages à plusieurs actifs.
Il en résulte que l'on ne peut aisé-
ment
évaluer
quelle
est la part du revenu tiré
de
l'informel
alimentaire dans ces budgets familiaux.
Ce manque
d'information
n'a
pu
nous permettre de passer de l'a priori sur
les
revenus
d'appoint et les revenus intégrés à une analyse objective appuyée
de données statistiques.
En
nous intéressant un peu plus aux ménages à un
seul
actif
sur lesquels nous avons pu collecter des informations plus
134
précises,
nous nous rendons compte de l'importance de la
taille
des
ménages
qui est de 1,6 personne dans les ménages à un
seul
homme
actif
et de 5,6 personnes dans les ménages
à
une
seule
,
femme
active
soit
641 personnes à charge pour
114
ménages
a
direction
féminine.
C'est à niveau que l'on constate
l'ambiva-
lance du rôle du réseau familial dont l'accroissement des charges
sociales
ne manque pas d'avoir une répercussion négative sur les
résultats
économiques de la micro-entreprise.
Mais cette
façon
économiciste de lire les résultats économiques ne se
décentre-t-
elle
pas quelque peu par rapport aux diverses motivations socio-
économiques des acteurs?
Nous reviendrons sur cet aspect,
dans
le chapitre suivant.
Par ailleurs sur les 139 ménages à plus d'un actif,
67
seulement
se
composent d'un actif du secteur
moderne,
ce
qui
ramène
à
23,8 % la proportion des ménages drainant des
revenus
aussi bien du secteur informel que du secteur moderne. Si l'hypo-
thèse
de De Miras pouvait se justifier dans
d'autres
contextes
elle reste fort limitée par rapport à l'informel alimentaire.
On
a
beaucoup
plus à faire ici à une recherche de revenu
qu'à
un
ajustement de revenu.
CONCLUSION PARTIELLE
,
,
En
resume,
trois conclusions majeures
ressortent
de
notre analyse des stratégies commerciales dans l'I.A.
:
La
forte
participation
communautaire à
l'effort
de
production.
135
- l'imbrication de l'unité de production et de l'unité
domestique
et l'apparente contradiction de cette
symbiose
avec
les
intérêts
économiques
immédiats
de
l'entrepreneur.
- Ce
deuxième
point
mérite d'être nuancé au regard
des
motivations
socio-économiques
des
acteurs,
lesquelles peuvent aider à
une
meilleure compréhension des résultats économiques - et enfin
- L'infirmation de l'hypothèse de De Miras qui
conçoit
les
activités
informelles
comme
secondaires
et
les
revenus
qu'elles génèrent comme connexes.
Si
le deuxième paramètre du mouvement d'ajustement
de
De Miras n'intègre que faiblement les revenus tirés de l'informel
alimentaire qui sont plus un revenu entier qu'un revenu d'appoint
à
ceux tirés du secteur moderne,
le premier paramètre est
très
plausible
dans
l'analyse du dynamisme de l'I.A.
qui
contribue
tout
au
moins
en milieu urbain à abaisser
fortement
le
coût
d'entretien de la puissance du travail.
Cette contribution à l'abaissement du coût d'entretien passe
par
une
reconversion en capital économique de l'input
communautaire
que
nous avons déjà commencé par analyser avec la
main-d'oeuvre
et qui se poursuivra à travers l'analyse des stratégies de finan-
cement,
d'approvisionnement,
de constitution d'une clientèle et
du
profit
qu'il
tire de la disponibilité et des bas
prix
'des
denrées alimentaires.
136
Chapitre IV
STRATEGIES D'INVESTISSEMENT ET RATIONALITE DES MICRO-NEGOCIANTS
Ce
chapitre
nous permettra d'aborder les
motivations
qui
sous-tendent la décision d'initier une
activité
économique
ainsi
que
les
niveaux
d'investissement
observables
dans
l'I.A.
Notre analyse des stratégies d'investissement s'étendra à
celle
de
la
rationalité
sous-jacente
à
l'investissement
économique.
Ces trois paramètres nous aideront à mieux apprécier
les résultats d'exploitation des unités de production-vente.
Section 1 - DE LA DECISION D'ENTREPRENDRE A LA CONSTITUTION DU
CAPITAL
AI Les motivations à l'initiation d'une activité économigue
La
décision d'entreprendre n'est presque jamais
spon-
tanée
dans
le secteur informel en général et
dans
l'artisanat
alimentaire en particulier. Elle est le plus souvent l'aboutisse-
ment
d'un
ensemble de pressions socio-économiques parfois
con-
juguées.
Les
raisons
profondes sont en
général
difficilement
exprimées par les acteurs au premier passage d'une
enquête.
Au-
delà du souci d'indépendance économique généralement avancé,
les
histoires
de vie des acteurs nous ont permis de cerner les
rai-
sons
objectives à ces initiatives commerciales qui cachent
par-
fois
les possibilités de mesurer quelques effets de l'ajustement
déflationniste sur l'informel alimentaire. Elles se hiérarchisent
comme suit
· Manque de formation et nécessité de s'insérer
dans le tissu économique urbain
72 %
· Appartenance à une famille polygame et obligation
d'assumer un rôle de chef de ménage "par substi-
tution"
41,7 %
· Alternative à la compression du personnel
33,02%
· Activité secondaire pour améliorer les revenus
salariaux
27,3 %
Défi à un parent ou effet de "la crise dans le
système de solidarité"
4,9 %
138
1°) Le manque de formation
L'enquête
à passages répétés réalisée en 1978
par
la
Direction
de la statistique sur un échantillon représentatif
de
la
population,
donnait,
pour
ce qui concerne les
niveaux
de
formation,
les résultats suivants
Tableau nO 21
: Alphabétisation et scolarisation par sexe
%
Femmes
Hommes
Total
1. Milieu Rural
Analphabêtes
.
86,3
71 ,0
Primaire
.
13,5
27,2
Secondaire
.
0,2
1 ,8
2. Milieu Urbain (sauf Abidjan)
Analphabêtes
.
71 ,9
52,4
Primaire
.
22,9
31,6
Secondaire
.
5,0
15,3
Supérieur
.
0,2
0,7
3. Abidjan
Analphabêtes
.
56,7
38,9
47,4
Primaire
.
29,5
35,0
32,4
Secondaire
.
12,6
22,6
17,8
Supér i eur
.
1 ,2
3,5
2,4
..
Source
Direction
de
la
Statistique
- Enquête
a
passages
répétés -
1978.
Selon
ces
données statistiques,
les femmes
seraient
dans
leur
grande majorité analphabètes:
en effet 86,3
%
des
femmes,
en
milieu rural,
sont analphabêtesi
dans
les
villes
..
secondaires
la proportion
d'analphabètes
n'est
guere
moindre
(71,9 %)i dans la ville d'Abidjan, c'est 56,7 % d'entre elles qui
ne
savent
ni lire ni écrire.
Il faut aussi mentionner
que
le
niveau
de scolarisation est toujours moins élevé chez les femmes
139
,
.
que chez les hommes, quelle que soit la strate
considérée.
Comme
le remarque R.
Anderson,
à tous les niveaux
du
système
scolaire,
les
femmes sont non seulement moins bien représentées
dans l'ensemble mais l'écart entre elles et les hommes va souvent
du simple au double.
Ces différences dans le niveau
d'éducation
,
formelle
influencent
les
chances
d'accès
a
un
emploi
rémunéré (1).
L'inégalité
sexuelle devant la formation et l'emploi semble
ex-
pliquer
la
concentration des femmes
dans
certaines
activités
telles
que le commerce,
la restauration et les services
domes-
tiques. Nos enquêtes nous ont révélé que, dans le cas de l'infor-
mel alimentaire,
elle intervient à 72 % comme motif ultime de la
décision des acteurs à entreprendre.
Le choix de la vente d'ali-
ments
provient
du
fait que celle-ci n'exige
aucune
formation
particulière.
Pour
ces femmes comme pour les quelques hommes
immigrés analphabètes pour la plupart (75,08 %) - elle constitue,
en
matière
de stratégie d'insertion dans
le
tissu
économique
urbain, une alternative au manque de formation.
2°) L'appartenance à une famille polygame
Par
rapport
aux autres catégories sociales,
le
rôle
économique
de la femme est encore plus important dans le
milieu
populaire.
De
plus en plus s'impose à ces
femmes
l'obligation
d'assurer la direction de leur ménage par la recherche de revenus
et de ressources propres. Le facteur déterminant est ici l'insta-
(1) R.
Anderson,
Les politiques d'éducation et de formation des
femmes
en
Côte-d'Ivoire:
des principes aux
réalités,
in
Emploi
et
formation
des
femmes
en
Côte-d'Ivoire.
ONFP,
Abidjan 1985; p. 7.
140
bilité
du couple suite à un mariage consensuel (concubinage),
à
une union temporaire ou à une vie de polygame mal supportée. Mais
il
faut
noter
la prééminence de la polygamie
comme
la
toute
première cause de la croissance des ménages à direction féminine.
Devant
la
démission
de
l'époux ou du concubin à subvenir
aux
besoins de plusieurs femmes et de leur progéniture,
la
décision
d'entreprendre
une activité économique pourvoyeuse de revenu
de
subsistance est vite prise.
Adjoua,
34 ans, baoulé, raconte "Je
suis mariée depuis 5 ans ... Avant moi mon mari avait 4 femmes. Je
suis la cinquième femme.
Il continue toujours d'en prendre. Lui-
même est chauffeur de taxi ...
Chaque femme a au moins 3 enfants.
,
Il
donne
a
chacune
de
nous 8.000 F et dit
on
n'a
qu'à
se
débrouiller.
Parfois i l ne donne même rien;
le mois dernier par
exemple.
Avec ça,
j'ai compris que si je ne faisais pas un petit
commerce à côté, mes enfants et moi allons mourir de faim ... ".
Les conditions matrimoniales difficiles telles que
les
décrit
Adjoua
sont l'un des motifs les plus importants dans
la
décision d'investir.
41,7 % de nos enquêtés l'ont exprimé lors de
nos entretiens libres.
3°) Alternative à la compression du personnel
Comme le font remarquer G.
Duruflé et P. Bougerol, par
rapport aux deux décennies qui l'ont précédé,
la période d'appli-
cation
des
politiques
d'ajustement
(de 1980 à
ce
jour)
est
marquée par des ruptures de tendance de grande ampleur en
termes
de niveau d'activité,
de revenu,
de consommation voire d'inves-
tissement.
141
D'après
les
données de la centrale
des
bilans,
qui
regroupent
la
plupart
des entreprises du
secteur
moderne,
y
compris
les
entreprises publiques (mais
hors
administration),
l'emploi
dans le secteur moderne a baissé de plus de
30
%,
de
243.000 en 1979 à 165.000 en 1984 (1).
Sally, 28 ans dioula "J'étais secrétaire dans une auto-
école
de la place.
J'y ai travaillé pendant 4
ans.
Quand
les
affaires ont commencé par tourner mal,
on m'a licenciée en 1985.
On m'a payé mes droits.
Pour ne pas avoir à chercher encore trop
longtemps
et
compte tenu
du fait que mes droits
pouvaient
me
permettre de monter une affaire de maquis,
j'ai ouvert ce restau-
rant.
Mes
amies
me
l'ont vivement conseillé.
Avec ça
je
me
débrouille pour le moment ... ".
Ouédraogo C.,
37 ans bourkinabè "J'ai travaillé 10 ans
comme
boy du directeur de la SIEM.
A un moment il y avait
com-
pression
dans
l'entreprise.
Comme
mon
patron
retournait
en
France,
on
m'a compressé aussi.
Avec l'argent qu'on m'a donné,
j'ai commencé cette affaire de kiosque depuis 3 ans. Ca marche un
peu ... " .
Comme
nous le faisons remarquer,
la crise que connaît
l'économie
ivoirienne
depuis quelques années a eu
pour
ultime
,
consequence,
entre autres,
une massive compression du personnel
surtout dans le secteur privé.
La
contraction générale qui caractérise
les
périodes
d'ajustement
et de récession favorise l'identification des
par-
(1) G.
Duruflé, P. Bougerol, B. Lesluyes, J.C. Matin, M. Pescay,
Déséquilibres structurels et pro~rammes d'ajustement en Côte-
d'Ivoire,
Rapport de mission d'evaluation,
Ministère de
la
Coopération, Paris 1986, p. 81.
142
ties
du secteur informel encore capables de générer des revenus.
Dans le contexte ivoirien,
la restauration, en pleine expansion,
reste l'une des rares activités indexées.
Ceux qui perdent
donc
leur
emploi
dans
le secteur moderne se créent
ici
une
autre
source
de revenu,
étant donné que le ~arché du travail n'y
est
nullement
réglementé.
C'est ainsi que l'investissement dans
la
restauration est, pour bon nombre de licenciés, une alternative à
la
situation
sans lendemain dans laquelle ils se
retrouvaient.
Cette
raison
intervient
pour
33,02
%
dans
l'initiative
d'investissement.
4°) Activité secondaire pour améliorer les revenus salariaux
Les
effets des politiques d'ajustement se sont
égale-
ment
fait sentir sur le pouvoir d'achat
des
ménages.
Toujours
selon
le rapport SEDES,
déflaté par l'indice des prix à la con-
sommation africaine à Abidjan,
le revenu monétaire des ménages a
stagné de 1978 à 1980 puis baisse de 9 % entre 1980 et
1985,
ce
qui
a
entraîné une régression du revenu monétaire (réel)
moyen
par tête de 34 % entre 1978 et 1985. Le revenu non agricole moyen
est
beaucoup plus sévèrement touché par cette régression que
le
revenu agricole monétaire moyen. Tandis que celui-ci se maintient
jusqu'en 1981 puis baisse ensuite de 27 %,
le revenu non agricole
moyen
baisse
de 45 % entre 1978 et 1985.
Dans le
secteur
non
\\
agricole,
la répartition des poids de l'ajustement s'est
forte-
ment
ressentie puisque le pouvoir d'achat de la masse
salariale
du
secteur moderne a régressé de 27 % entre 1980 et 1984
tandis
\\
que
celui de la masse salariale de la fonction publique ne
pro-
gressait que de 7 %. Pour les deux masses salariales cumulées, la
143
régression
est de 14 %.
De 1980 à 1985,
le pouvoir d'achat
du
SMIG
a
baissé de 18 %.
Les salaires et glissement
catégoriels
dans
la fonction publique ont été bloqués depuis 1980
soit
une
baisse
de pouvoir d'achat de l'ordre de 25 %.
Pour les salariés
des
entreprises publiques dont les salaires ont été alignés
sur
ceux de la fonction publique,
la baisse du pouvoir d'achat a été
de plus de moitié.
Notons
aussi
que les salariés du secteur
urbain
ont
également
été particulièrement touchés par les mesures d'ajuste-
ment
concernant les tarifs publics qui visent à
rapprocher
ces
derniers des coûts réels:
loyers, eau, électricité,
transports.
Les
prix
des transports urbains (SOTRA) ont progressé de
50
%
entre 1980 et 1983.
L'Etat est ainsi revenu sur une politique de
subventions
indirectes aux salariés urbains
(transports,
loge-
ments,
électricité ... )
qui avait prévalu pendant l'ensemble des
années
70.
Aussi,
la consommation se ressent fortement de
ces
baisses du pouvoir d'achat. La consommation finale des ménages au
sens
de la comptabilité nationale baisse de 8 % en francs
cons-
tants entre 1980 et 1985,
soit une baisse de l'ordre de 30 %
de
la consommation finale par tête.
Devant la baisse du pouvoir d'achat,
la stagnation des
salaires déjà relativement bas et le coût croissant de la vie, la
recherche d'un revenu parallèle devient un impératif. L'investis-
sement dans le secteur informel est l'une des stratégies les plus
couramment
adoptées pour faire face à cette contrainte d'augmen-
tation du revenu.
L'informel alimentaire,
compte tenu du marché
potentiel qu'il constitue,
accueille de plus en plus cette caté-
gorie d'investisseur.
144
L'investissement
dans l'informel alimentaire
en
tant
qu'activité
secondaire
intervient pour 27,3 % dans les
motiva-
tions des acteurs.
5°) Défi à un parent ou effet de la "crise dans le système de so-
lidarité"
Si les réseaux sociaux (familial,
ethnique,
régional)
sont les plus importantes structures d'intégration,
des nouveaux
migrants
en milieu urbain,
il faut préciser qu'à
leur
niveau,
l'étau se resserre de plus en plus,
limitant ainsi la capacité de
les accueillir.
La solidarité africaine,
longtemps mythifiée par
les ethnologues urbains,
est de moips en moins fonctionnelle.
La
hausse constante du coût de la vie diminue son efficacité qui, au
fil du temps - nous semble-t-il - devient symbolique.
La solida-
rité
semble être en constante diminution par rapport à la crois-
sante sollicitation de ses structures.
Les disponibilités
d'ac-
cueil
des
nouveaux migrants s'amenuisent.
Le
déséquilibre
de
l'offre
et de la demande de solidarité devient source de conflit
social
se traduisant par un marchandage de l'hébergement
ou
un
refus absolu de prise en charge. Geneviève,
24 ans,
restauratrice
sur table mobile raconte "
Quand je suis venue du village,
je
suis
partie chez mon oncle à Marcory.
Les premiers jours,
tout
allait bien.
Un mois après,
il ne me donnait plus d'argent pour
déjeuner. Sa femme ne me supportait plus à la maison. On limitait
mes
repas.
Je
n'avais plus le droit de dormir au-delà
de
six
heures.
On me faisait faire tous les travaux domestiques ... Pour
montrer
à mon oncle et à sa femme que je pouvais me
débrouiller
pour
me
libérer financièrement,
j'ai commencé
par
vendre
de
145
l'alloco et du poisson ici ... ".
Baoulo,
Bété,
30 ans, restauratrice sur table mobile " ... C'est
ma
tante
qui est venue me chercher au village.
Je gardais
ses
enfants
quand elle allait au travail.
Elle ne me
payait
rien.
Mais
quand je lui demande un peu d'argent elle me demande si
je
ne
suis pas déjà contente d'être à Abidjan quand mes amies
sont
au
village.
Je ne pouvais plus supporter cette situation.
J'ai
demandé
15.000 F à deux autres oncles qui me l'ont
donné.
Avec
ça
j'ai
commencé ce petit commerce pour prouver à ma tante
que
bientôt, sans elle,
je pourrai vivre à Abidjan".
..
La
situation
qu'a vécu Baoulo n'est pas
identique
a
celle de Geneviève.
Mais les motivations de l'une et de
l'autre
se rejoignent. L'investissement dans l'informel alimentaire était
pour les deux femmes
un défi à un parent.
Bien qu'en proportion
très
faible
cette
raison apparaît dans 4,9 % de cas
chez
les
acteurs interrogés.
Il ressort de l'analyse des motivations à l'investisse-
ment
dans
l'informel
alimentaire que la crise
des
structures
économiques
formelles transmet ses effets à
l'informel
alimen-
..
taire
étant
donné l'ouverture de ce marché qui continue
a
ac-
cueillir de nouveaux candidats pour qui cette activité économique
est
une
alternative à la compression du personnel ou
un
moyen
d'ajuster
les revenus au coût de vie en croissance.
Ces données
illustrent
la mutation de la nature même de cette activité
qui,
initialement
stratégie d'intégration au milieu
urbain,
devient
progressivement lieu de recherche de revenu complémentaire.
Mais
si
les
forces de résistance
et
d'adaptation
s'avèrent
assez
146
larges,
il faudra souligner son incapacité à absorber continuel-
lement la main-d'oeuvre que lui transmet,
entre autres,
le sec-
teur
moderne.
Il semble qu'il est arrivé à une étape de satura-
tion où les nouvelles intégration produisent une stagnation voire
une haisse croissante du revenu.
Cet impact des récessions économiques sur le revenu est
une donnée constante de l'analyse micro-économique des
activités
non structurées. Nous le verrons plus concrètement dans l'analyse
de
la rentabilité des UPV de l'informel alimentaire qui,
malgré
la forte possibilité d'accueil de son marché, présente au fil des
années quelques signes d'épuisement.
Notons que ces différentes motivations à
l'investisse-
ment
économique interfèrent dans l'analyse de la rationalité des
acteurs
depuis leurs stratégies de constitution du capital
ini-
tial jusqu'à la gestion de leurs revenus.
BI stratégies de constitution du capital initial
Quels que soient les motifs d'investissement,
il
faut
constater
que l'importance du capital initial peut constituer en
soi
un obstacle considérable.
D'ailleurs,
au cours de nos
en-
quêtes
71,88
% des personnes interrogées
ont
très
longuement
évoqué
le
problème
qu'a constitué pour eux la
mise
de
fonds
initiale.
Nos résultats sur ce point semblent contredire ceux de
l'étude
réalisée
à Dakar et selon laquelle la
constitution
du
capital
de
départ n'était pas une barrière d'entrée
économique
dans l'informel alimentaire (1).
Face à la constitution du capi-
(1) N. Bricas et J. Muchnik : Technologies autochtones et artisa-
nat alimentaire urbain in Nourrir les villes op. cit. p. 306.
147
tal de démarrage les stratégies sont diverses. Mais il faut noter
qu'il
n'a
été
constaté
à
aucun
moment
l'intervention
de
structures financières établies. Le capital nécessaire au montage
d'une
unité de production-vente (UPV) ainsi que les
investisse-
ments
ultérieurs proviennent d'autres sources que
les
institu-
tions financières modernes,
telles que les banques et les autres
établissements de crédit. Il ressort de nos enquêtes que la phase
de
la
constitution
du capital de départ est
un
autre
niveau
d'intervention du réseau social des acteurs économiques.
L'envi-
ronnement
communautaire a joué un rôle capital dans la
création
de plus de 60 % des micro-entreprises soit sous forme de
. prêt/don d'un parent ou de parents réunis
. aide du conjoint.
L'épargne personnelle - par le truchement de tontines rotatives -
suite à une activité antérieure (service domestique,
gardiennage
etc ... )
et
les
droits perçus après
licenciement
restent
une
source
non négligeable du capital investi.
Moins importants que
les fonds provenant de l'entraide familiale,
ils interviennent à
près de 22 % dans la constitution du capital de démarrage.
Quelques
cas
(3,02 %) de mise en commun
de
capitaux
sous forme associative sont à signaler.
Bien qu'ils apparaissent
dans une très faible proportion,
les entreprises bénéficiant
de
ces apports d'associés se distinguent par leur taille et l'impor-
tance de leur chiffre d'affaires. On note d'ailleurs une corréla-
tion
positive et significative (plus de 0,10 pour cent) entre le
mode de constitution du capital initialement investi et la taille
des entreprises. Les unités de production-vente (UPV) opérant dès
le départ à un haut niveau de capitalisation sont,
le plus
sou-
148
vent,
celles
financées par les associations,
grâce à l'épargne
personnelle et avec les droits de licenciement perçus.
Les
·financements par des "amis",
beaucoup plus
rares
(0,92 'l,
viennent compléter les sources des UPV:
généralement
des maquis, les plus capitalistiques au départ. Ce type de finan-
cement concerne quelques maquis-restaurants,
concentrés pour
la
plupart en Zone 3 (Marcory); les capitaux initialement investis y
sont
le
plus souvent la récompense des liaisons plus
ou
moins
durables
entretenues
par les tenancières avec
des
expatriés,
pour
la plupart français.
Ces maquis-restaurants sont justement
ceux qui drainent le plus la clientèle européenne.
D'une manière générale,
les stratégies de constitution
de capital initial sont aussi diversifiées que le niveau même
de
capitalisation
des UPV.
Bien que l'entraide familiale,
par son
apport
en capital,
ne crée pas les UPV les
plus
capitalisées,
elle
est à l'origine de l'expression de l'artisanat alimentaire.
La création de plus de 60 % des UPV dépend d'elle.
Ajouté à leur
première fonction de pourvoyeuse de main-d'oeuvre, les structures
familiales
apparaissent comme un levier économique
sans
lequel
l'artisanat alimentaire ne saurait,
semble-t-il,
se développer.
La
reconversion
de
moyens
de
production
rares
(capital
et
travail)
fournis par les réseaux de parenté pourrait être mise à
l'actif
de
la
capacité
d'inventivité
des
femmes
dans
leur
stratégie
de
production voire d'insertion dans
les
structures
économiques
"hostiles"
des villes.
On
pourrait
même
pousser
l'analyse
en
s'intéressant de plus près à l'évaluation et à
la
répartition du capital initial.
149
Section 2 - EVALUATION ET REPARTITION DU CAPITAL INITIAL
L'une
des caractéristiques de l'artisanat
alimentaire
est
la variété des niveaux de capitalisation auxquels ressortis-
sent les différentes catégories de restaurants. D'une structure à
une autre, voire au sein d'une même structure,
le capital investi
reste
très
inégal ett détermine la
stratégie
commerciale
des
acteurs. Après une évaluation du capital de départ,
nous analyse-
rons ses modes de répartition.
AI Evaluation du capital de démarrage
Tableau nO 22
Evaluation du capital initial par type de res-
taurant (F.CFA)
Maquis
Restau~ant!
Kiosque
!Restau~.su~ 1
Espace
IRestau~ant !Restau~. ,
ba~
Itable mobile! ~estau~ant!
spontané! ambulant!
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ 1
!
!
!
1
%
%
%
%
!
%
%
% !
,
10.000 -
19.999 1 -
- 1 -
- ! - !
- ! 19
35,8 ! 33 ! 42,3 !
3 !
6,9
22
100!
,
,
20.000 -
49.999 !
-
- ! -
- 1 - !
- ! 27
50,9 ! 27
34,6 ! 31
72,09!
- !
!
,
sa.OOO -
99.999 !
-
- ! - !
- ! - !
-
7
13,2
18 ! 23,07!
9
20,9 1 -
,
! 100.000 - 199.999 ! 18
43,9! 11
61,11
6 ! 23,07!
-
- 1 - ! - 1 - ! -
,
1 200.000 - 499.999 ! la
24,4!
7
38,8! 14 ! 53,8
- !
- ! -
- ! -
!
-
,
1 saO.OOO - 999.999 1 11
26,81
- 1 -
6
23,07!
- r
- ! -
- 1 - ! -
,
,
'1000.000 -
+
2
4,81
-
-
- !
- ! - !
- 1 -
- ! -
1
-
!
!
!
!
! ,
! !
!
!
!
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
1 41 1 100,O! 18 1 100,0! 26 '100,0 ! 53 ! 100,0 ! 78 !100,O ! 43 1100,0 ! 22 1 100!
, - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
A la lecture du tableau ci-dessus, on remarque une très
..
forte tendance à la concentration des investissements initiaux
a
l'intérieur de chaque structure de restauration.
Dans la catégorie des restaurants en établissement,
il
n'existe aucun investissement inférieur à 100.000 F.
Ce type
de
structure
semble
demander
un
investissement
de
départ
plus
important.
150
Une
autre différence dans le niveau de
capitalisation
est
observable entre maquis,
kiosques et
restaurant-bars.
Les
deux
premières
structures
requièrent
un
investissement
plus
élevé,
respectivement en moyenne 358.536 F.CFA et 396.153 F.CFA.
Par rapport aux maquis et aux kiosques,
le capital injecté
dans
l'ouverture d'un restaurant-bar est plus faible,
avec une moyenne
de 227.777 F.CFA.
Si
la différence entre les maquis et les kiosques peut
être
expliquée par un fort coefficient de dispersion des
inves-
tissements au niveau des maquis,
celle,
entre les
maquis,
les
kiosques
et
les restaurants renvoie à l'ancienneté de ces
der-
niers et à la date d'achat de leur matériel. Les restaurants-bars
étant
d'installation plus ancienne,
la faiblesse du
niveau
de
financement
dépend
du coût de l'équipement de
ces
restaurants
qui,
rappelons-le,
ont
pour la plupart plus de 10 ans
d'exis-
tence.
Le
fait
que
ces structures restent les
survivants
du
système
informel alimentaire originel
(cf.
p.
30)
n'incitent
guère
leurs
propriétaires à un renouvellement du capital
tech-
nique. La valeur de l'équipement nécessaire sur le marché n'étant
pas
la
même
au moment de son
acquisition
que
ces
dernières
années, on comprend alors que le facteur temps pourrait entrer en
ligne
de compte dans l'appréciation actuelle du capital
investi
dans les restaurants-bars.
A titre d'exemple, retenons tout sim-
plement que le prix d'un réfrigérateur en 1975 est d'environ 35 %
inférieur à sa valeur actuelle sur le marché.
Si quelques différences significatives sont observables
dans
la valeur du capital initial des restaurants en
établisse-
151
ment,
un
nivellement
de
financement s'observe au
niveau
des
restaurants spontanés, des espaces-restaurants et des restaurants
sur table mobile. Le plafond de financement jamais atteint est de
100.000
F.CFA.
Chaque exploitant investit au démarrage
de
son
activité environ 60.000 F.CFA.
Aucun
restaurateur ambulant n'a déclaré plus de 15.000
F.CFA comme capital de départ. Nous pensons même, contrairement à
la
plupart des déclarations des restaurateurs ambulants
sur
le
capital
investi,
que la restauration ambulante,
compte tenu de
l'équipement
qu'elle
nécessite et des
plats
qu'elle
propose,
n'aurait même pas besoin de 10.000 F pour son fonctionnement. Les
déclarations
des intéressés étaient volontairement biaisées pour
sauver un point d'honneur. Nous avons plusieurs fois remarqué que
les enquêtés de cette catégorie particulièrement, éprouvaient une
,
gêne
a se prononcer sur le montant de capital initial.
Avec
un
minimum d'insistance,
ils finissaient par faire une
déclaration
au-dessus
de la barre de 10.000 F.CFA.
Peut-être
pensaient-ils
qu'il
n'était pas valorisant de démarrer un commerce avec
moins
de 10.000 F.CFA.
Par ailleurs,
on signalera une forte corrélation entre
le
mode de financement et le niveau capitalistique des unités de
production.
Les
capitaux émanant d'associations,
les
investisse-
ments parallèles de fonctionnaires et les droits de
licenciement
perçus
constituent
les principaux capitaux d'équipement
de
la
plupart
des unités de production ayant démarré avec une mise
de
fonds supérieure à 500.000 F.CFA. Les deux maquis dont le capital
de
départ excédait le million était financés par des
coopérants
152
français
et gérés par d'anciennes prostituées qui en étaient les
propriétaires.
Les unités dont l'investissement initial se situe
entre
100.000 F.CFA et 500.000 F.CFA sont,
à près de 60
%,
le
fruit
de l'épargne personnelle qui,
elle-même fait suite à
une
activité
antérieure.
Quant
aux
investissements
inférieurs
à
100.000 F.CFA,
ils sont, à plus de 70 %,
le fruit d'une entraide
familiale.
Comment se répartit le capital ainsi constitué?
B/ Modes de répartition des investissements initiaux
Le
mode
de répartition des
investissements
initiaux
varie
d'une catégorie de restaurant à une autre.
Dans tous
les
cas,
le capital investi se répartit entre les éléments composant
le capital technique fixe et le capital circulant.
La valeur du capital fixe se compose ici du coût d'amé-
nagement
d'un
local de production-vente (y compris
parfois
le
branchement
aux
réseaux de distribution d'eau et/ou
d'électri-
,
cité),
du coût d'acquisition des appareils électro-ménagers
ne-
cessaires et d'ustensiles.
Le capital circulant est,
quant à lui,
affecté à la (re)consti-
tution du stock et à l'achat de matières premières.
Dans
la réalité de l'informel alimentaire,
les postes
de
dépenses
ayant
trait à l'installation et
à
l'exercice
de
l'activité
ne
sont pas aussi
clairement
définis,
surtout
au
niveau
du capital technique fixe.
Dans la plupart des
UPV,
la
distinction entre équipements domestiques et capital technique de
l'entreprise
n'est pas chose aisée.
Nos enquêtes faisaient res-
153
sortir
que près de 65 % des UPV,
toutes structures
confondues,
partageaient
leur capital technique avec le ménage
des
exploi-
tants.
Ceci
n'a
pas manqué de nous poser un
problème
d'ordre
méthodologique.
Fallait-il au moment de l'évaluation du capital,
séparer
artificiellement équipement domestique et capital
tech-
nique
fixe de l'UPV ou considérer tout l'équipement comme patri-
moine
de l'entreprise?
Nous avons opté pour la solution de
la
comptabilité des biens d'équipement domestiques comme
patrimoine
de l'UPV à partir du moment où ils y sont utilisés. Nous gardons,
néanmoins
présent
à l'esprit que près de 60 % du capital
tech-
nique des UPV,
à l'exception des kiosques, appartiennent initia-
lement au ménage des acteurs.
Cette capacité à disposer de
l'é-
quipement
domestique
comme
capital technique de l'UPV
est
un
facteur
de
diminution
du
coût
d'installation.
Nous
pensons
,
qu'elle reste également un facteur déterminant,
dans le choix
a
investir
dans
l'informel alimentaire plutôt que dans une
autre
activité.
Ces
remarques faites,
nous analyserons maintenant
la
,
répartition
du
capital par poste de dépense
a
savoir
coût
d'acquisition
du
matériel technique,
coût de
l'équipement
du
local de production-vente,
importance du capital circulant.
. Le matériel technique
Le tableau nO 21 présente la fréquence de disponibilité
des
différents matériaux de production-vente dans chaque catégo-
rie de restaurant.
154
En effet,
l'équipement est variable d'une structure
à
une autre.
Si, au niveau des restaurants de rue (restaurants sur
tables mobiles,
restaurants spontanés et espace-restaurants), le
capital technique est presque constant et relativement limité, au
niveau des restaurants en établissement il reste très varié.
Les
maquis et les kiosques,
contraints par la concurrence,
les exi-
gences
du marché et la croissance de la demande,
modernisent de
plus en plus leur équipement. Une différence apparaît aussi entre
capital fixe des maquis et kiosques ouverts avant 1985 et
après.
La nouvelle tendance est à l'équipement en matériel de musique et
,
en
congélateur,
ce
qui alourdit la part du capital
affecté
a
l'équipement fixe.
En termes monétaires, l'estimation de l'investissement
moyen en matériel de production est de :
- 158.000
F.CFA pour les maquis,
les restaurants-bars
,
et
les
kiosques,
avec des extrêmes allant de 800.000
F.CFA
a
32.000 F.CFA.
-
7.200 F.CFA pour les restaurants sur tables
mobiles,
les
unités
des espace-restaurants et des restaurants
spontanés
avec des extrêmes allant de 35.000 F.CFA à 2.500 F.CFA.
-
1.500 F.CFA pour les restaurants ambulants.
. Le local de production
L'aménagement
d'un local de production-vente n'est pas
indispensable
pour toutes les structures de
l'informel
alimen-
taire
puisqu'ici les modes d'installation divergent.
Contraire-
ment aux maquis et aux restaurants-bars qui sont le plus
souvent
155
tout
ou
partie
d'une maison,
les kiosques
occupent
l'espace
public (trottoirs, abords des rues ... ).
Tableau nO 23
Fréquence
de
disponibilité
des
différents
matériaux de production-vente par
catégorie de
restaurant
Restau
MATERIAUX DE PRODUCTION-VENTE
Maquis
Resto- !Kiosques! sur table! Restau
Espace !Restau
bars !
mobile
spontané! restau !ambulant!
!Instruments de cuisson
!
Four artisanal
17/41
11/18 !
-
53/53
43/43
73/78
18/22
Rechaud ou four à gaz/électrique/
à pétrole
24/41
7/18
23/26
Marmites (aluminum et/ou poterie
26/41
13/18
26/53
21/43
14/78
Colporte + grillage
32/41
23/43
61/78
Poêle
26/26
1
!Instruments de services
1
!
Bassine d'étalage
41/41
18/18 1
1
37/53
19/43
66/78
22/22
Bols
14/41
16/18
23/43
61/78
Verres
29/41
16/18
26/26
Serviettes de table
27/41
11/18
26/26
Tasses à café
26/26
14/53
16/43
16/78
Plateaux de service
18/41
Plats de service
41/41
18/18
26/26
53/53
21/43
42/78
Fourchettes (couteaux/cuillères)
41/41
18/18 ! 26/26
53/53
36/43
63/78
Tables - bancs
15/41
7/18
53/53
39/43
78/78
Tables - chaises
26/61
11/18
26/26
Radio-cassette
21/41
13/18
22/26
Chaine Hifi et/ou poste téléviseur!
7/41
Réfrigérateur ou congélateur
!
29/41
16/18 ! 26/26
Si les kiosques,
bien que de dimension variable,
ont un
...
aspect
physique quasi standard,
les maquis,
quant
a
eux,
se
présentent sous différentes formes.
Ils peuvent être s o i t :
...
...
- des
établissements
spécialement
amenages
pour
la
restauration,
-
une cour intérieure et/ou extérieure d'une maison,
156
- une
baraque
construite
avec
des
matériaux
de
récupération,
- un salon familial mis en exploitation.
Il
faut remarquer que les établissements
spécialement
aménagés
pour
la restauration sont les plus rares et
ceux
qui
nécessitent le plus d'investissement.
En dehors des
restaurants
en établissement (maquis,
kiosques, restaurant-bars), les autres
structures
(restaurants sur tables mobiles,
espace-restaurants,
restaurants spontanés) - à l'exception de quelques rares
espace-
restaurants
- n'exigent pour investissement en local de
produc-
tion
que l'achat de quelques feuilles de tôle soutenues par
des
piquets, pour se protéger des intempéries.
En termes d'investissement en d'aménagement,
seuls les
kiosques
et
les restaurants-bars sont à 100
%
des
structures
spécialement aménagées.
Seulement
15/41 maquis,
12/53 restaurants sur
tables
mobiles,
26/78 unités d'espace-restaurants,
9/43 unités des res-
taurants spontanés ont été effectivement aménagés.
Il va de
soi
que
la restauration ambulante n'a besoin d'aucun
investissement
en local de production-vente puisqu'elle est itinérante.
L'investissement
en
local
de
production
peut
être
évalué à
- 153.000
F.CFA
en
moyenne
pour
les
maquis,
les
kiosques et les resto-bars et
- 17.000
F.CFA pour les restaurants sur table
mobile,
les unités des espaces-restaurants et les restaurants spontanés.
157
· Le capital circulant
Au
sens large,
le capital circulant est constitué des
liquidités
nécessaires à l'achat des biens
intermédiaires
des-
tinés
à être transformés en biens de consommation,
à la couver-
ture
des frais de transport,
des taxes municipales,
des
frais
d'électricité et à l'achat de combustibles (gaz, bois, charbon de
bois, pétrole).
La
disponibilité en capital circulant de chaque
unité
de
production
dépend
en fait de
son
échelle
de
production.
Dégager
un
ordre
de grandeur à partir des moyennes
serait
un
exercice
qui entrainerait,
nous en sommes conscient,
un
biais
d'interprétation
dans l'analyse.
L'important est de savoir
que
les
artisans disposent d'une somme d'argent équivalant à un
peu
plus d'1/5ème du capital investi comme capital circulant.
Compte tenu de toutes ces stratégies,
comment
peut-on
comprendre la rationalité des acteurs?
Section 3 -
INVESTISSEMENT ECONOMIQUE ET RATIONALITE DES ARTISANS
DE L'INFORMEL ALIMENTAIRE
A/ Les présupposés d'un topique d'approche
Il
pourrait paraître superflu qu'à ce stade
de
notre
analyse
nous nous arrêtions encore sur les questions de rationa-
lité
des
acteurs,
tant
discutées
dans
les
études
sur
les
multiples
occupations artisanales et parfois sur
d'autres
ter-
rains
en
milieu rural.
Dans leur étude sur les éleveurs
afri-
cains,
E. Landais,
Ph.
Lhoste et P. Milleville s'interrogeaient
158
sur des problèmes méthodologiques similaires quand ils notaient
"L'efficacité économique d'un choix peut être appréciée de diffé-
rents points de vue et à différentes échelles.
Il est
cependant
une
règle
d'or:
tout système dépendant de décisions
humaines
doit d'abord être analysé dans sa logique interne.
C'est à
dire
que
l'efficacité
économique d'un choix devra toujours être
ap-
préciée
dans
les
termes
des
objectifs
poursuivis
par
son
auteur ...
L'hypothèse
selon
laquelle
tous
les
objectifs
poursuivis
par
les producteurs peuvent être
traduits
sous
la
forme
de
la maximisation d'une fonction économique
simple
(le
revenu dans la plupart des cas) n'emporte pas toujours la convic-
tion"
(1).
Ces remarques faites sur le terrain de la zootechnie
et des systèmes d'élevage sont valables pour l'analyse de l'effi-
cacité
économique des choix de production dans l'artisanat
ali-
mentaire
bien
que
les deux domaines,
à part
le
fait
qu'ils
relèvent de l'économique,
ne se confondent ni dans leur forme ni
dans leur contenu. L'évidence qu'on ne peut affirmer ni l'unicité
des
comportements ni la généralisation de la logique
économique
classique
semble autoriser cette démarche.
S'il y a
intérêt
à
dissocier
les
comportements
économiques,
c'est
surtout
pour
éclairer
la
pratique.
Il est donc indispensable de
sortir
de
l'impasse
où l'on s'enferme en considérant les petites activités
urbaines
comme
un
secteur
monolithique
à
structure
simple
approche qui occulte la diversité des logiques en présence.
Nous
( 1 ) Landais
(E.), Lhoste (Ph.), Minvielle (P.), Points de vue sur
la
zootechnie et les systèmes d'élevage tropicaux in Système
de production agricole en Afrique tropicale,
Cahiers
ORSTOM
sc. hum. vol. 23, nO 3-4 1987; p. 432.
159
pensons
comme C.
Maldonado (1) qu'il faut au contraire
adopter
des
méthodes qualitatives aptes à révéler les mécanismes
diffé-
renciateurs
des catégories sociales et rechercher de
proche
en
proche,
derrière
les phénomènes et les situations
observables,
les
éléments des diverses logiques.
Dans cette optique,
notre
intérêt
pour
l'analyse
de
la
rationalité
des
acteurs
de
l'artisanat alimentaire tient à deux raisons essentielles.
1. L'I.A. est l'une des branches du secteur informel où
les
niveaux
capitalistiques
sont
des
plus
variés.
A
ces
différences dans la stratégie d'investissement, correspondent des
contraintes d'échelle de production, un amalgame de logiques dans
..
un
même
ensemble et une diversité des pôles d'analyse
quant
a
l'objectif
que se fixe chacun en initiant l'activité économique.
Si le comportement des micro-négociants obéit au schéma classique
moyen-fin,
il n'est pas évident que les fins poursuivies soient,
toujours en dernière instance,
de nature strictement économique.
Le comportement de certains acteurs obéit à une logique qui, tout
en
restant
"économique"
(choix raisonnés
sous
contrainte
de
rareté ...
et d'incertitude) est déterminée en grande partie par
des
facteurs
généralement
négligés
par
l'analyse
économique
classique.
2.
L'analyse
de la rationalité des acteurs,
dans son
acceptation la plus large, . nous conduit à échapper à la
concep-
tion
trop
restrictive des "enjeux de politique économique"
(2)
(1) C. Maldonado Petits producteurs urbains d'Afrique francophone,
BIT, Genève 1987, pp. 58-59.
(2) B. Lootvoët. L'artisanat et le petit commerce dans l'économie
ivoirienne, op. cit., p. 209.
160
qui finit généralement par réduire les études sur l'informel à sa
seule
capacité ou non d'accumulation,
dans un but de
récupéra-
tion. Même si cette dernière présente des intérêts certains, elle
éloigne
quelque
peu
l'analyse de la
réalité
sociale
de
ces
pratiques économiques.
Partant
du principe que la "structure des
situations"
(cf.
pp.A~~-A~1) dans laquelle se trouve chaque acteur explique
les
objectifs
qu'il
se fixe,
il faudra
donc
déterminer
les
"échelles
de
raisons
pratiques"
en
jeu
dans
le
champ
de
l'informel alimentaire.
Cette approche supposait, de notre part,
un
effort méthodologique de décentration et de distanciation qui
n'a
été possible que grâce à une enquête d'opinion
généralement
absente
des travaux sur les petits producteurs
urbains.
Encore
une
fois,
il ne s'agissait pas de voir seulement si les
condi-
tions d'une accumulation (-constitution d'une épargne dégagée
du
résultat d'exploitation - utilisation de cette épargne sous forme
d'investissement économique, brut ou net) sont réunies ou non, ou
si l'unité fonctionne en reproduction simple (résultat brut d'ex-
ploitation
de l'uPV = revenu du ménage) ou élargie (1).
Au-delà
des résultats des entreprises sur lesquels nous
reviendrons,
ce
sont plutôt les choix individuels qui retiennent notre attention.
Au cours des récits de vie,
nous avons insisté sur les objectifs
consciemment poursuivis par les acteurs, l'existence ou non d'une
épargne,
les
projets réalisés ou à réaliser à partir
de
cette
épargne
- quand elle existe -.
Il s'agissait de déterminer
les
niveaux de surplus net quotidien, hebdomadaire ou mensuel et leur
(1)
Cl.
de Miras:
De l'accumulation du capital dans le secteur
informel.
Cahiers ORSTOM.
Série Sciences Humaines, vol. 23,
nO 1, 1 987, pp. 7 0 - 71 .
161
affectation.
Il
nous
est donc apparu que les
rationalités
de
comportement
ne
se définissent pas seulement
par
rapport
aux
seules
variables
ressortant directement à l'économique
- ainsi
que
le
voudraient les théoriciens orthodoxes - mais
aussi
par
rapport à d'autres facteurs (social et symbolique).
BI Les pôles d'intérêt d'une pratique commerciale informelle
Partant
du principe boudonien (1)
qu'aucun
phénomène
social
n'est
interprétable
à moins d'être ramené
en
dernière
analyse
aux choix et calculs des individus supposés dotés
d'une
rationalité "limitée" mais suffisante, l'enquête nous a permis de
déceler une forte corrélation entre les comportements économiques
des acteurs et les objectifs qu'ils se sont assignés.
Par "effets d'agrégation et de composition", il résulte
des
stratégies
individuelles une
configuration
spécifique
de
comportements.
L'analyse
du
discours
des
acteurs
sur
"leur
,
économie
politique spontanée non savante,
celle qui se forme
a
l'usage
des
urgences
de la pratique" (2)
révèle
trois
pôles
d'intérêt
de
la
pratique commerciale informelle
d'aliments
deux,
d'ordre non-économique et un troisième,
ayant l'accumula-
tion du capital pour objectif.
(1) R. Boudon : La place du désordre. Ed. PUF, Paris 1985; p. 63.
(2) M.
Le
Pape,
Cl.
Vidal,
Raisons pratiques africaines,
in
Cahiers Internationaux de sociologie;
vol.
LXXIII,
1982,
p.
305.
162
* Investissement économique et ambitions non-économiques
Dans un article paru dans les cahiers internationaux de
sociologie,
M.
Le
Pape se posait cette question
pertinente
à
propos des "multiples occupations artisanales abidjanaises". "Les
activités
de
production
ou de commerce sont-elles à
coup
sûr
intrinséquement
et purement économiques ?" (1).
Nos
recherches
auprès des artisans de l'informel alimentaire peuvent apporter en
partie réponse à cette question,
à savoir que c'est plutôt
dans
les
contraintes
de
subsistance des ménages que
se
trouve
le
fondement
de
l'exercice
de ces activités.
Plus de
75
%
des
personnes
interrogées
ont
exprimé ce
motif
comme
principale
raison de leur investissement dans le secteur.
Si les conditions
de fonctionnement de cette catégorie d'acteurs restent liées à la
notion
de subsistance,
on comprend alors que l'unité économique
végète puisque le "surplus" dégagé est presque totalement investi
dans
le
champ social pour la satisfaction
des
besoins
socio-
économiques
essentiels et l'entretien du réseau familial.
L'es-
sentiel
est que l'unité économique joue son rôle de
pourvoyeuse
de revenu familial.
Il s'agit ici de "choix" entre des "valeurs"
qui
s'opposeraient dans l'abstrait.
Tout se passe comme si
les
exploitants
se
soumettaient
à la nécessité
de
maintenir
des
rapports sociaux de parenté qui leur assurent
protection,
réci-
procité,
coopération et continuité culturelle, malgré les trans-
formations
indirectes
par
le
développement
d'une
économie
marchande (2).
(1) M. Le pape, Cl. Vidal, Raisons pratiques africaines, op. cit.
p.
297.
(1) M.
Godelier,
L'idéal et le matériel.
Ed. Fayard Paris 1984
p.
63.
163
- .
Dans la même catégorie, ce que certains spécialistes du
secteur
informel
qualifieraient
de
"mode
de
reproduction
simple" (1) serait en fait entre autres une économie d'accumula
tion de symboles.
L'exercice d'une activité économique est, pour
certains,
un
moyen de prouver que la migration et le séjour
en
métropole abidjanaise n'a pas été un échec. Tout le "surplus" est
ici
investi
dans l'achat de biens de prestige comme les
pagnes
wax et les bijoux chez les femmes,
le combiné radio-cassette, la
mobylette
ou le vélo et quelques tee-shirt flanqués de
portrait
de stars chez les immigrés vendeurs de café et de viande grillée.
L'objectif est atteint quand le maximum de symboles est accumulé.
Contrairement à la logique commerciale qui voudrait que,
sous la
pression
de
la concurrence pure et parfaite les UPV
les
moinx
compétitives
disparaissent,
cette psychologie commerciale
très
forte dans le milieu informel alimentaire explique l'étalement de
ce
secteur sous forme d'UPV de petite taille et par
conséquent,
l'exacerbation de la concurrence
* Investissement économique et accumulation du capital
Le principe micro-économique qui voudrait que lorsqu'un
acteur
économique crée sa propre unité de
production,
i l
soit
avant
tout motivé par le maximum de revenu qu'il espère en tirer
n'est
pas absent du champ de l'informel alimentaire.
Mais
elle
est une logique économique réalisée par très peu
d'acteurs.
Sur
les
281
personnes
interrogées,
41
soit
14,59
%
semblaient
présenter les comportements sous-jacents à cette logique d'entre-
preneur moderne:
tenue d'un cahier comptable,
réinvestissement
(1) Cl. de Miras: De l'accumulation du capital ... op. cit., pp.
50-51 .
164
de
capitaux après ouverture de l'UPV en vue d'accroitre la capa-
cité de production,
constitution de stock,
recrutement de sala-
riés.
Pour
ce type d'acteurs,
aucune confusion possible
n'est
faite entre revenu du ménage et capital circulant dont la
crois-
sance suit toute variation de la valeur ajoutée.
Ce type d'acteur ne se recrute que parmi les tenanciers
de maquis et de kiosque.
Ayant un niveau scolaire supérieur
aux
cours
moyens,
la plupart avaient été victimes d'une compression
du personnel.
Cette nécessité de se garantir un revenu
régulier
pourrait
expliquer
le
fait qu'ils aient
pu
soustraire
leurs
activités à l'influence du réseau familial.
Chez cette catégorie
d'exploitants,
l'investissement
dans le social et le symbolique
ne sont pas absents de la répartition du revenu; mais ils restent
isolés des capitaux de fonctionnement de l'UPV.
Si ce type d'en-
treprise semble celle qui intéresserait les pouvoirs publics pour
d'éventuelles
politiques de développement du
secteur
informel,
elles
ne sont pas forcément celles qui font la dynamique même de
l'informel alimentaire.
CONCLUSION PARTIELLE
Par
rapport
aux
autres
branches
du
secteur
non
structuré,
l'I.A.
se distingue par la diversité des
situations
qu'il
présente
au
point de vue du niveau
capitalistiques
des
unités de production. Avec les autres activités informelles,
i l a
en
commun le fait qu'il n'ait jusque là aucun rapport
avec
les
circuits financiers modernes.
165
L'autofinancement
reste la règle même si,
de plus
en
plus,
les
tenanciers opérant à une échelle de
production
plus
grande.
Ceux
qui,
considérés dans le milieu des
restaurateurs
informels comme modèle de réussite sociale,
expriment de plus en
plus
le
besoin de s'adresser aux banques en vue d'accroitre
la
taille de leur entreprise et partant, leur productivité.
Néanmoins l'arbre ne doit nullement cacher la forêt.
L'I.A.
est
loin d'être une économie d'accumulation du capital mais plutôt un
revenu
de
subsistance et son développement est
la
conséquence
d'un
besoin croissant de moyens de subsistance en milieu urbain.
Toute politique de développement à son endroit doit tenir
compte
de cet aspect socio-économique.
La
forte concurrence résultant de l'entrée massive
de
nouveaux
candidats
conditionnés par un faible souci
d'économie
d'échelle,
freine
considérablement les possibilités
de
repro-
duction
élargie de ce secteur.
Bien que nous nous trouvons dans
une situation de concurrence pure et parfaite,
la diversité
des
motivations
économiques et des conditions de production
favori-
sent également une diversification des enjeux économiques.
L'analyse des résultats d'exploitation,
des
comporte-
ments
d'épargne et de consommation des acteurs nous permettra de
caractériser
la
dimension
de
subsistance
de
cette
activité
économique.
Entre
temps nous intéresserons-nous au mécanisme de
formation des prix des plats vendus,
en relation avec la demande
alimentaire.
166
Chapitre V
CIRCUITS ET PRATIQUES D'APPROVISIONNEMENT
DANS L'INFORMEL ALIMENTAIRE
Le
succès
des
artisans de l'I.A.
pourrait
être
en
partie expliqué par l'adaptation de leur comportement
économique
au
circuit
traditionnel
de ravitaillement
dont
la
souplesse
justifie
ici
l'efficacité.
Aussi,
une articulation entre
les
besoins de consommation à bas prix et les pressions de production
à
coût modéré semblent orienter les stratégies
d'approvisionne-
ment vers certains produits d'importation.
Section l
RAVITAILLEMENT EN PRODUITS INTERMEDIAIRES
L'informel
alimentaire
est un
important
vecteur
de
consommation des produits vivriers aussi bien locaux qu'importés.
La
diversité de ses structures et la variété des possiblités
de
consommation
qu'il offre font de lui un maillon important de
la
chaine
de production-consommation alimentaire.
Au cours de
nos
enquêtes,
nous avons essayé de mesurer l'importance quantitative
de chaque produit en matière d'approvisionnement.
Mais,
faute de
précisions de la part de nos enquêtés, certains produits n'ont pu
,
se
prêter
a
la quantification.
Dans ces cas
nous
axons
nos
recueils d'informations sur les circuits de ravitaillement.
AI Produits bruts
Le ravitaillement en produits végétaux concerne
essen-
tiellement la banane plantain, l'igname,
l'arachide, etc ... D'une
,
façon
générale,
les
restaurateurs
vont
a
la
rencontre
des
structures privées traditionnelles de commercialisation.
Ce sont
généralement ces dernières qui assurent la collecte et la distri-
bution
des
produits (banane
plantain,
manioc,
igname,
taro,
etc ... )
à prix non réglémentés.
L'abondance de l'offre
atténue
ici
l'état de libéralisation du marché puisque c'est un
circuit
hors de la sphère d'intervention de l'Etat pour ce qui est de
la
fixation
des prix et de la distribution.
Ce circuit informel de
ravitaillement
constitue
donc la principale
source
d'approvi-
sionnement
de l'artisanat alimentaire.
Toutes les
transactions
commerciales s'effectuent entre les grossistes urbains
- consti-
tuant
le point de départ de la chaîne de distribution en
milieu
168
urbain
- et
leurs
clients parmi lesquels on compte
aussi
les
tenanciers de maquis. Ces grossistes s'installent à proximité des
marchés
de gros (à l'exception de Port-Bouët et
Cocody,
toutes
les communes d'Abidjan ont leur marché de gros. Leur installation
n'est conditionnée que par le
paiement régulier d'une taxe
com-
munale
et
l'inscription au registre du commerce.
Du
grossiste
urbain au consommateur urbain il n'y a qu'un intermédiaire
le
détaillant.
Mais
l'approvisionnement de l'informel
alimentaire
auprès de ce dernier ne présente guère d'intérêt pour les restau-
rateurs puisqu'entre le grossiste et les détaillants les rapports
de prix peuvent aller de 1 à 4. Non seulement l'approvisionnement
direct
auprès des grossistes garantit la fraîcheur des produits,
mais
il atténue l'effet d'élasticité des prix - sur lequel
nous
reviendrons
- sur
le
marché de l'informel alimentaire
par
la
marge
intéressante
qu'il offre par
rapport
au
ravitaillement
auprès des détaillants.
Pour
les
denrées
périssables comme
le
n'drowa,
la
tomate,
le piment, une préférence est accordée par les restaura-
teurs
au
marché
du soir.
Il est en effet connu
que
sur
les
marchés, les prix varient selon les heures avec une tendance à la
baisse en fin de journée,
surtout pour les produits précités. La
plupart
des
restaurateurs
savent
transformer
en
avantage
commercial
cette crainte de perdre des produits faute de
moyens
de conservation, en le rachetant à bas prix.
Pour
ce
qui est des produits animaux,
la
viande
de
boeuf et le poisson semblent les plus commercialisés et les
plus
consommés
en
alimentation
extérieure
devant
les
ovins,
les
169
volailles
et
le porc.
Cette prépondérance de la demande de
de
viande de boeuf relève du progrès de la congélation et de l'équi-
pement de la Côte-d'Ivoire en chaîne de froid,
ce qui a favorisé
l'achat
à des prix de "braderie" le
surplus des
marchés
exté-
rieurs (Argentine et surtout aujourd'hui,
viandes d'intervention
de la CEE).
Aussi,
avantage est tiré des pays sahéliens fronta-
liers,
pour
la
viande
sur
pied,
qui
assurent
aussi
la
,
disponibilité
de
cette protéine sur le marché
ivoirien
ou
la
production locale ne représente que 40 % de la consommation.
A
côté
de la viande de boeuf,
le
poisson
constitue
l'une
des protéines animales les plus consommées en alimentation
extérieure.
Il se présente sous différentes formes : fumé,
frais
(moins
cher
au kilogramme par rapport au
poisson
fumé),
sec.
Importé sous forme congelée, son prix à la consommation est moins
onéreux
que le poisson de lagune qui reste dans l'informel
ali-
mentaire
une denrée de "luxe" au même titre que le
gibier
dont
l'interdiction de la chasse explique la rareté,
et par suite son
prix élevé à la consommation.
Les
places
du
marché,
les
alentours
des
chambres
froides
et le débarcadaire constituent les principaux
lieux
de
ravitaillement des acteurs de l'informel aliementaire.
Les quan-
tités de poisson,
de viande de boeuf,
de gibier et de volailles
approvisionnées
par
UPV intégrant les protéines
animales
dans
leur plat peuvent être évaluées respectivement à :
170
Tableau nO 24
Quantité de protéine animale par UPV
Unité : kg
Maquis
Restau. !
UPV
!
fo()V
Restau.! Restau. 1
1Kiosques'
_
bar
! Restau.! Espace
table
!ambu1ant 1
1
1
!spontané! restau.
mobile 1
1
1
lMatin/midil
Soir
!
1
1
,
,
_ _ _ _ _ _ !
l
,
_
1
,
Viande de boeuf!
6
' 1 0
4
8,5
5
!
7
2
5,5
1
1
Poisson
1
13
5
5
11,5 1
12
9
1
1
Gibier
1
3
2
1
Vo'ailles
2
12
5
7
7
BI Produits élaborés
Le
ravitaillement
en produits
agro-alimentaires
est
surtout
le
fait des structures de restauration gérées
par
les
hommes, c'est-à-dire les kiosques spécialisés dans la préparation
de
plats européens rapides et consommables à
la
sauvette.
Les
produits faisant l'objet d'un
ravitaillement régulier sont:
le
lait
en. boîte,
le beurre,
l'huile,
le sucre,
les légumes
en
boîte, le Nescafé, les pâtes alimentaires. Il faut aussi signaler
depuis
quelques
années la consommation de plus en plus
généra-
lisée de l'"arôme Maggi" et de l'huile de palme industrielle dans
l'informel alimentaire.
Nous n'avons rencontré aucun cas d'approvisionnement de
ces produits auprès de grossistes. Les principaux partenaires des
artisans
de
l'informel alimentaire sont ici
les
épiceries
de
quartiers. Dans la stratégie d'approvisionnement, quelques préfé-
rences
s'observent pour le lait en boîte,
le 'beurre et l'huile.
171
Ces
préférences
sont essentiellement liées
aux
avantages
que
peuvent
tirer les micro-négociants en achetant les produtis
les
moins chers de la gamme.
C'est ainsi que le lait concentré sucré
BB (465 g)
(produit hollandais) qui coûte 350 F.CFA au détail est
plus
servi
par les restaurateurs sur table mobile
que le
lait
"Nestlé" ou "carnation" consommés surtout en ménage. Il en est de
même pour le beurre margarine,
solor et l'huile Dinor offrent un
meilleur
avantage
aux producteurs du point de vue
du
prix
du
produit.
Nous le verrons,
le choix de la qualité de riz répondra
également à la même logique. Cette préférence pour certains types
de produits ont fini par entraîner une standardisation en matière
de ravitaillement.
On
observe très nettement un glissement de
l'approvi-
sionnement
vers
les intrants de moindre qualité et
de
moindre
prix
qui
seuls peuvent permettre de
supporter
une
production
alimentaire destinée généralement aux économiquement faibles.
Si
par
exemple
Novalim-Capral (1) ne souffre d'aucune
concurrence
auprès
de l'informel alimentaire avec son "arôme Maggi"
et
son
nescafé
en
boîte,
elles perdent par contre le marché
du
lait
concentré
sucré.
Blohorn (2) et Cosmivoire (3),
du fait de
la
protection
du marché local et de la désaffection croissante
des
consommateurs
urbains pour les huiles de fabrication artisanale,
restent les principaux fournisseurs en huile alimentaire. Il faut
aussi relever le cas de l'industrie sucrière ivoirienne dont
une
(1) Appartenant au groupe Nestlé.
(2) Appartenant au groupe Unilever.
(3) Entreprise privée créée par des hommes d'affaires ivoiriens.
172
partie
non
négligeable de la production est consommée par
deux
des
structures
(restaurants sur table mobile
et
kiosques)
de
l'artisanat alimentaire.
Section 2 - L'ATTIEKE ET LE RIZ
DE
L'APPROVISIONNEMENT A
LA
CONSOMMATION
AI L'approvisionnement en attiéké
Comme
dans
le cas des autres
produits
végétaux,
il
existe
un
marché de l'attiéké avec des différences - dues i
la
diversité des techniques de production et au label - qui tiennent
i
la qualité même du produit.
Au niveau de la production
comme
des circuits de ravitaillement d'Abidjan,
le monopole en
appar-
tient i
trois ethnies i
savoir: - les Adioukrou (1),
producteurs
traditionnels,
les
Ebrié,
spécialisés dans la production et la
commercialisation
de l'''abodjama'' et les
Akyé,
derniers
venus
dans cette activité artisanale. On note quelques "francs-tireurs"
comme les femmes burkinabè qui,
après un séjour dans une zone de
production
s'adonnent
aussi i
la transformation du manioc
sous
forme d'attiéké.
Nous n'avons constaté dans aucune structure
de
restauration informelle
une tentative
de transformation directe
du manioc en attiéké.
Le ravitaillement se fait
quotidiennement
sur
les gros points de vente d'attiéké qui
sont
- le
grand
marché
et
le
débarcadère
de
Treichville,
le
grand
marché
d'Adjamé, le "village"
ébrié d' Adjamé, le grand marché d' Abobo où
il
coûte
le moins cher et,
dans une moindre
mesure,
certains
(1) Ethnie
lagunaire
du
groupe
Akan,
spécialisée
dans
la
fabrication de l'attiéké.
173
marchés secondaires (1).
A lui seul,
le secteur artisanal four-
nissait chaque jour 70 tonnes d'attiéké frais à Abidjan.
Nous
avons évalué à 7 kg/j/UPV,
la
quantité
moyenne
d'attiéké
vendue
par les maquis du midi et les UPV des
espace-
restaurants servant des plats à base d'attiéké.
Mais comme nous le précisions,
en alimentation
domes-
tique comme extérieure,
l'attiéké rencontre
une très forte con-
currence
de la part du riz pour plusieurs raisons:
- irrégula-
rités
dans l'approvisionnement sur le marché,
- difficultés
de
conservation,
- rapport
quantité/prix plus économique
pour
le
riz.
B/ L'approvisionnement
en céréales et la question de la
consom-
mation du riz dans l'informel alimentaire
Tel que défini en Côte-d'Ivoire,
le secteur vivrier se
compose de deux grands groupes de produits : les céréales (paddy,
maïs,
mil,
sorgho
et
fonio) et
les
tubercules
féculents
(igname, manioc, banane plantain, taro).
Suivant
le modèle alimentaire ivoirien et par rapport à
tous les autres céréales,
le riz est le plat d'accompagnement le
plus
consommé en milieu urbain.
Déjà
en
1979,
l'EBC relevait cette
importance
(cf.
tableau
nO
23) de la consommation du riz par sa
présence
dans
plusieurs types de plats en alimentation extérieure à Abidjan.
(1) A.
Gnammon,
Production et commercialisation de l'attiéké
contribution
à
l'étude du
ravitaillement
d'Abidjan,
IGT,
Abidjan 1984, p. 37.
174
Une
distinction
reste à faire entre les types de
riz
consommé
puisque sur le marché,
plusieurs qualités de riz
sont
disponibles. Nous avons :
- le
riz artisanal échappant au contrôle de la
Caisse
de
Péréquation
(1) et ne faisant pas objet de subvention
à
la
consommation
puisque produit hors normes (prix moyen de vente au
détail 250 F);
- le
riz importé dit de luxe dont le taux
de
brisure
est
inférieur
à
4 % et pour lequel la
Caisse
de
Péréquation
accorde
des autorisations d'importation à des personnes
morales
ou physiques qui en font la demande expresse. Sous cette qualité,
nous
rangeons
le riz "japonica"
variété de
grains
ronds
facile à cuisiner et produit surtout en Chine, le riz "indien" de
Tableau nO 25
Types de plats les plus consommés en alimentation
extérieure à Abidjan en 1979
Repas extérieurs
Tonnes
Consommations
Tonnes
individuelles
Attiéké
4. 140
Attiéké
4.046
Café complet
4.104
Beignets divers
2.579
Riz en sauce
3.384
Alloco
2.113
Riz au gras
2.917
Café complet
1 .737
Riz cuit à l'eau
2.705
Riz en sauce
1 .141
Foutou banane
2.369
Foutou en sauce
731
Foutou en sauce
2.018
Riz cuit à l'eau
697
Source
Direction de la Statistique, Table de composition
des plats et des produits, EBC79 Abidjan.
(1) La
Caisse Générale de Péréquation des Prix des
Produits
de
Grande
Consommation
CGPPGC) est un établissement
public
à
caractère industriel et commercial,
placé sous la tutelle du
Ministère du Commerce.
175
grains médium longs et restant séparés après cuisson,
le basmati
au
grain petit et savonneux cultivé et exporté par la
Birmanie,
l'Inde et le Pakistan,
le riz américain Uncle's Ben.
- le
riz importé pour "consommation de masse" dont
le
taux
de
brisure se situe entre 4 et 35 % et dont le prix
à
la
consommation
est
le
même
que celui du
riz
traité
dans
les
rizeries
locales soit 160 F.CFA/kilo grâce aux mécanismes de
la
péréquation.
L'évolution
de la consommation du riz en
alimentation
extérieure
n'est en faveur ni du riz importé de "luxe" ni du riz
artisanal.
La
concurrence
se
situe plutôt au
niveau
du
riz
importé
pour "consommation de masse" et du riz traité
dans
les
rizeries
locales,
compte tenu de la politique nationale du
riz
qui
tend à maintenir le prix à la consommation au niveau le plus
bas
possible
dans le cadre du soutien du
pouvoir
d'achat
des
consommateurs.
Mais,
selon les résultats de nos enquêtes, par rapport
à
la consommation du riz traité dans les
rizeries
locales,
la
consommation du riz importé pour "consommation de masse" présente
des
avantages
aussi
bien pour les consommateurs que
pour
les
restaurateurs.
Les
premiers apprécient son parfum et sa qualité
dûe à son traitement à la production.
Les seconds, dépendant des
choix alimentaires des premiers,
donnent leur préférence au
riz
importé
qui - au regard des prix des autres qualités
de riz
et
de ceux des féculents et tubercules,
reste encore abordable.
Un
calcul
comparatif établi par le Ministère
du
Développement
Rural nous donne la mesure de cette évolution
le prix de détail
du riz industriel exprimé en francs constants de 1986 a
diminué,
176
passant de 208,6 F.CFA le kilo en 1970 à 160 F.CFA en 1986, alors
qu'à
l'inverse,
le
prix des féculents passe de 129,3 F.CFA
le
kilo
à 174 F.CFA.
Le riz qui était presque deux fois plus
cher
que les féculents en 1970 est meilleur marché en fin de
période.
Ce basculement provient essentiellement des avantages accordés au
riz importé et usiné sur place grâce à l'intervention de l'Etat.
Cet
avantage de consommation de riz importé qui semble
considérablement
influencer
les
choix
de
production
et
les
tendances
à la consommation hors domicile
de
céréales,
dépend
d'options
inhérentes à la politique alimentaire sous-jacente aux
programmes d'ajustement de l'économie ivoirienne.
Comme l'a fait remarquer J.
Coussy, si en Afrique sub-
saharienne,
les
problèmes
agro-alimentaires n'ont pas
été
la
cause
essentielle
de
l'adoption
des
programmes
d'ajustement
structurel,
ceux-ci
ont été explicitement construits autour
de
projets de restructuration de l'agro-alimentaire (1).
Les politiques agro-alimentaires sont donc devenues par
ce
biais une des cibles essentielles des PAS et de leurs
compo-
santes
principales à savoir - le rééquilibrage macro-économique,
- la
vérité
des prix et - la désétatisation.
"La
réfonte
des
politiques agro-alimentaires" qui en résulte va jusqu'à la remise
en cause de certaines options caractéristiques des périodes anté-
rieures.
Parmi ces mesures on pourrait citer celles qui, généra-
lement appliquées,
ont un impact sur l'alimentation des
popula-
tions
- l'abandon des politiques d'approvisionnement
alimen-
(1) J. Coussy, Les politiques agro-alimentaires dans les program-
mes d'ajustement structurel d'Afrique sub-saharienne,
EHESS,
doc. ronéo, Paris 1989.
177
taire à bon marché,
-
la rénonciation de principe aux politiques
d'autosuffisance
alimentaire,
-
l'abandon
des
politiques
de
substitution
aux importations.
Contrairement au refus
d'objec-
tiver
les
spécificités
des différents pays
conduisant
à
Uile
..
"approche
universalisante"
et
comparee aux
politiques
macro-
économiques habituellement adoptées,
l'agro-alimentaire, dans le
contexte ivoirien, semble avoir fait l'objet d'une stratégie plus
différenciée
et
individualisée.
En
fonction
d'intérêts
"croisés" (1),
une
sélection
a été opérée
parmi
les
mesures
proposées,
ce qui s'est traduit par un changement dans les poli-
tiques
de subvention à l'alimentation,
la politique de garantie
de bas prix à la consommation financée dans la phase
d'expansion
économique
devenant sujette à caution en période de
restriction
budgétaire.
Ainsi,
sous la pression des "finances publiques" et du
FMI
et suivant l'optique néo-libérale de la BIRD,
la
politique
d'auto-suffisance
alimentaire fondant les
politiques
rizicoles
des années 1970, seront abandonnées au profit de l'approvisionne-
ment
alimentaire à bon marché;
ceci explique la croissance
des
dépenses
d'importation
alimentaire
à partir du
milieu
de
la
décennie 1970-1980, leur niveau élevé (à l'échelle des ressources
de la Côte-d'Ivoire) en fin de période et leur stabilité à partir
de 1982 aux environs de 130-140 milliards de F.CFA.
Cette impor-
tation
concerne essentiellement cinq produits ou groupes de pro-
duits:
deux céréales,
le riz et le blé et trois produits
ani-
(1) Nous
aborderons
plus
en détail la
question
des
intérêts
"croisés" dans la section 2 du chapitre en cours.
178
maux, la viande, le lait et le poisson (1).
Le
phénomène
le plus remarquable
est
l'envolée
des
quantités
de
riz importées depuis 1976 et celles
massives
des
produits
animaux
(viande et poisson congelés).
En
raison
des
capacités
de
production
rizicole des pays
d'Asie
du
Sud-Est
surtout
et celle de production de viande et lait de la
CEE,
de
l'océanie,
de l'Amérique du Sud et des Etats Unis d'Amérique,
il
était
illusoire de continuer à envisager la résorption des
pro-
blèmes
de sécurité alimentaire sous l'angle de
l'autosuffisance
alimentaire,
compte
tenu
notamment des exigences de
la
crise
économique. Il s'agissait d'abord et avant tout de profiter de la
vente des surplus de ces pays à des prix de "braderie".
La politique de vérité des prix n'est pas systématique-
ment recherchée. La politique macro-économique réduisant déjà les
revenus
privés,
pour ne pas provoquer des crises
sociales,
il
fallait
continuer
à abaisser les prix de consommation des
pro-
duits
alimentaires de première nécesité tout en contractant
les
dépenses de subvention.
Au-delà du souci des pouvoirs publics du
soutien du pouvoir d'achat en baisse des consommateurs,
on pour-
rait signaler le soutien de la production locale financé à partir
des péréquations positives.
Ce choix en faveur des importations ne manquera pas
de
bouleverser non seulement la physionomie du marché mais aussi les
habitudes
de consommation.
La dynamique de l'artisanat
alimen-
taire a été également éprouvée par cette option. La preuve en est
(1) La
liste des produits qui apparaissent dans la
nomenclature
des statistiques douanières est longue. Mais pour la plupart,
soit
ils n'y figurent que pour des valeurs minimes ou
insi-
gnifiantes,
soit ils ne participent pas au modèle de consom-
mation standard des ivoiriens.
179
le
renversement
des
tendances
de consommation.
Au
niveau
de
l'informel
alimentaire,
ce
retournement
de
situation
se
traduit
par
une expansion de
la
consommation,
-
de
préférence
-
du
riz
importé pour
"consommat ion de
masse"
dans
près
de 60 % des
structures commercial isant du
riz
préparé.
La
quantité
vendue quotidiennement
dans
les espaces-restaurants
et
les maquis
a été évaluée par
nous à environ
12,8 kg/UPV.
D'une
façon
générale,
pour
la seu le vi Ile
d'Abidjan,
nous avons estimé à
17.010 tonnes
la consommation annuelle de
riz
en
al imentation extérieure
informelle.
La part
du
riz
importé
s'élève
à
envi ron
10.746 tonnes
soit
63 % de
la
consommation
ex té rie ure
i n for me Ile.
Ce n ive a u an nue 1 t 0 t a 1
de
con somma t ion
ex t é rie ure
r e pré sen t e
3
% dei a con somma t ion
t 0 t ale
a n nue Ile
ivoirienne de
riz
en
1985 pour
la seule ville d'Abidjan.
Disons
que cet
avantage de consommation au moindre coût
offert
à
la population est
la conséquence de
la pol itique
d'im-
po r ta t ion
a 1 i me n t air e mis e en pla cep a r i e s pou v 0 i r s pub 1 i c s e n
vue
de
tirer
profit des disponibilités en
riz
sur
le
marché
international.
J.
Roch
(1)
nous en explique
le
fonctionnement
plus en détai 1
-
L'Etat,
par
le biais de
la caisse
de
Péréquation,
fixe un prix unique à
la consommation,
quelle que soit
l'origine
du produit.
Il
garantit
le prix
d'achat
(unique
également
sur
tout
le territoire)
aux producteurs qui
veulent
bien
vendre
aux
riz e rie sie pa d d Y qu' e Ile s
t r ans for me n t
en
riz
b 1a nc .
(1) Cf.
J. Roch .••. op. cit. p.
17.
180
-
Il
subventionne
les
rizeries
quel
que soit
leur
coût
de
production,
dans
les
bornes
définies qui
sont
le prix
d'achat
garanti
au
producteur
et
le
prix
de
vente
aux
grossistes
également
fixé
par
l'Etat.
Il
est
le
seul
importateur
de
riz
et calcule
chaque
année
les
besoins
d'importation
à
partir
des
prévisions
de
consorrmat i on
et
de niveau
de
1a product ion
(1).
A
travers
un prix
suffisarrment
bas
à
l'importation,
l'Etat,
grâce au
contrôle des
variables à
tous
les
niveaux
(prix-
quantité),
se
procure
les
ressources
financières
dont
i l
a
(1)
Le
système
fonctionnait
bien
jusqu'à
la
baisse
inexpliquée
des
recettes
de
la Caisse de Péréquation
en
1987.
En effet,
la
Caisse
aurait
dû disposer
en
1987 de
32
mi 1 1 iards
de
F . CFA,
a 10 r s qu' e Ile a
sig n a 1é un
r ev e nu
de 9,8 mil 1 i a rd s de
f r a n c s CFA.
Lad i f f é r e n cee n t r e
, e
r ev e n u qu' e Ile a u rai t
d û
percevoir
et
ses
dépenses était
donc d'environ 20
mi 1 1 iards
de F.CFA en
1987. Confronté à une absence de
justification de
cette
faiblesse
des
recettes,
la Banque Mondiale
fortement
i mp 1 i q u é e
dan s
1a pol i t i que der e d r e s seme n t
d e i ' é con om i e
i v 0 i rie n n e
mo r i bon de,
qua 1 i fia &.t d' i nef fic ace
1age s t ion de
la
Caisse
et
proposait
une
réforme de
fond
en
comble
du
système d'importation
de
riz
et
de blé.
Selon
les
recorrmanda-
tions
de
la BIRD,
la Caisse devrait
instituer
un
système
donnant
à
l'entrepreneur
le plus offrant
le droit
d'importer
du
riz
pour
le
revendre au prix
fixé.
Pourrait
alors
soumet-
tre une offre,
tout
commerçant
qui
serait
en mesure de démon-
trer
sa capacité
financière et
technique d'importer
des
cé-
réales
de
la qualité et
dans
les quantités
spécifiées.
Les
b es 0 i n s
d ' i mp 0 r ta t ion
se rai en t
ré par t i sen
lot s ,
et
pou r
chaque
lot,
les commerçants qualifiés
soumettraient
des of-
fres
indiquant
uniquement combien
ils paieraient
au Gouverne-
ment
le droit
dl importer
les céréales
pour
les
revendre
au
p r i x
f i x é par
1u i.
Le
go uv e r n eme nt
t i r e rai t
a 10 r s
ses
r e cet -
tes
des paiements
versés
par
les corrmerçants.
Au cas
où
le
prix
fixé par
le gouvernement
serait
inférieur
au
prix
d'é-
quivalence
à
l'importation,
la même procédure pourrait
être
appliquée;
la seule différence serait
que
les offres
indique-
raient
le paiement
que devraient
verser
le
Gouvernement
au
lieu du droit
qui
devrait
lui
être versé.
Il
s'agit donc
pour
la
Banque
Mondiale d'éliminer
par
le nouveau dispositif
le
monopde
bureaucratique de
la Caisse de Péréquation
tout
en
conservant
les
avantages
fiscaux
1 iés à
l'importation al imen-
taire
par
le privatisation des
transactions
cf.
Banque
Mondiale,
Côte-d' Ivoi r e
:
La mobil i s a t ion des
ressources
i n -
ternes en vue d'une croissance stable vol.
Il
op.
ciL
p.
96.
181
besoin. Cette politique favorable au riz s'est traduite,
à partir
de 1977, par un accroissement des importations et de la consomma-
tion du riz en alimentation extérieure.
A
cette croissance de la consommation du
riz
importé
sont
donc liés des intérêts politiques et de finances publiques.
Le
contrôle du marché du riz profite aux
consommateurs
urbains
comme aux pouvoirs publics pour lesquls l'autosuffisance complète
en riz local entraînerait,
dans le contexte actuel,
des charges
financières
insupportables (coût de maintenance des aménagements
charges d'exploitation etc ... ).
Encore faudrait-il voir derrière
les pouvoirs publics,
les "profits de monopole" des détenteurs de
quotas d'importation, qui,
tout comme dans les cas camerounais et
nigérian, bénéficient du parapluie politique (1).
Ajouté aux cas de la viande de boeuf et du poisson dont
la
politique d'importation semble respecter les mêmes principes,
nous
voyons comment dans sa
stratégie
nourricière,
l'informel
alimentaire
s'appuie
fortement
sur des
relations
extérieures
contractées
par
les pouvoirs publics implicitement
surtout
en
faveur de la pauvreté urbaine.
Cette
tendance
à
vouloir
alléger
l'impact
des
récessions économiques sur la pauvreté urbaine par l'entretien de
l'importation
des
produits
de
grande
consommation,
pourrait
s'expliquer par deux raisons
- Dans
les villes,
les pauvres achètent en général la
majorité
des aliments qu'ils consomment tandis que
la
pauvreté
(1) J. Coussy, Coûts et conflits d'une politique d'autosuffisance
alimentaire en période d'urbanisation rapide,
in Nourrir les
villes ... op. cit., p.
374.
182
rurale,
par
sa stratégie d'auto-consommation,
dépend moins
du
marché
pour son approvisionnement.
La chute du pouvoir
d'achat
pourrait
engendrer
des risques alimentaires si la politique
de
vérité
des prix était systématiquement
appliquée.
Le
deuxième
moteur
de
la stratégie alimentaire ivoirienne
pro-urbaine
est
beaucoup plus d'essence politique.
- Les
agitations
sociales
par
crainte
d'insécurité
alimentaire
que
l'histoire a enregistrées ces dernières
années
sont
le
plus souvent parties des
villes.
Ayant
toujours
dit
préférer "l'injustice au désordre", le Chef de l'Etat ivoirien ne
voudrait
pas
voir se reproduire en Côte-d'Ivoire
la
situation
observée par exemple en Tunisie ou au Ghana. Raison pour laquelle
un
soutien
de pouvoir d'achat des "nouveaux pauvres" ainsi
que
des victimes de la "pauvreté structurelle" devient un
instrument
irremplaçable de la politique paix sociale.
Toute
analyse
des
avantages comparatifs
en
matière
d'importation
de
riz,
de viande et à la limite du
poisson
en
Côte-d'Ivoire
doit tenir compte,
entre autres,
de ce fil
con-
ducteur du souci quasi permanent de disponibilité alimentaire
et
de
maintien
du prix à la consommation à un niveau le
plus
bas
possible.
Les
disponibilités en produits alimentaires
et
leur
faible
coût ne sont pas les seules garanties d'une offre alimen-
taire à coût modéré.
La faiblesse de l'investissement initial et
les
fluctuations du revenu des acteurs ont favorisé un
ensemble
de
pratiques
liées à l'approvisionnement des
produits
entrant
dans
la
confection des plats.
Les liens de solidarité
tribale
renaissent
ici à travers des institutions économiques
comme
le
183
crédit et les coopératives d'approvisionnement.
Section 3· - PRATIQUES
LIEES
A
L'APPROVISIONNEMENT
AUPRES
DES
CIRCUITS "INFORMELS"
AI Le crédit
Le
crédit
semble occuper une place fondamentale
dans
les
stratégies
de
ravitaillement
des
acteurs
de
l'informel
alimentaire.
Plus de 55 % des micro-négociants trouvent dans le
crédit
un
instrument sans lequel ils ne
pourraient
s'approvi-
sionner
et
assurer une
production
alimentaire
régulière.
Le
tableau nO 24 fait observer la fréquence de la pratique du crédit
par
structure de production,
au moins pour l'un des
principaux
produits vendus.
.
Tableau nO 26
Fréquence de la pratique du crédit
!Maquis
Restau- Kiosque Restau
Espace !Restau !Restau
1
bar
table
restau !spon-
!ambu-
!
mobile
!tané
!lant
1
%
%
%
%
% 1
% !
%
-
Oui 134
1 1
18
33
61
131
1 5
1193
Non 1 7
7
8
20
17
112
! 17
1 88
1
A
la
lecture de ce tableau on constate que
193
soit
68,6
% des UPV enquêtées,
font appel au crédit au moins pour un
produit.
Le "crédit-comptant" est la forme la plus pratiquée. Il
..
consiste
en
une acceptation par le fournisseur de
n'être
paye
après
que son client ait procédé à l'écoulement du
stock
anté-
rieur.
Cette
pratique,
favorisée
par la personnalisation
des
rapports, n'entre en vigueur qu'après une mise à l'épreuve de six
184
mois
de
relations
régulières
avec
le
A
meme
fournisseur.
Toutes structures confondues,
l'achat à crédit est plus fréquent
pour les produits végétaux.
Le tableau suivant nous en donne
la
mesure.
Tableau nO 27
Fréquence
d'approvisionnement à crédit par
type
de produit
! Maquis 1 Restau-! Kiosque! Restau
Espace 1 Restau 1 Restau 1
!
1 bar
1
! table
restau !spontané! ambu1antl
!Produits
! mobile
!
1
1
1
!
!Oui!
27
6
26
47
16
122
1 Végétaux !---!--------!--------I--------(--------I--------I--------!--------!
!
!Non!
7
5 !
18
!
7
(
5
!
14
!
15
!
71
!Oui!
3
8
15
26
Animaux
I---l--------I--------I--------(--------!--------!--------I--------!
!Non!
24
11
18
1
25
5
1
46
1
31
1 188
_ _ _ _ 1
1
_
lOuil
9
2
2
1
5
18
! Agro-in- I---I--------!--------(--------!--------!--------I--------1--------1
! dustriel INon!
18
1
9
1
18
33
5
56
1
31
'175
Cette
situation peut s'expliquer par le fait
que
les
produits
végétaux sont plus difficilement stockables.
Les four-
nisseurs
ont plus intérêt à les vendre à crédit qu'à
subir
les
pertes
que
peuvent
entraîner leur détérioration par
suite
de
mévente. Il faut cependant noter que le paiement différé est plus
facilement
octroyé aux partenaires de la même origine
ethnique,
même si quelques d'irrégularités interviennent dans le respect du
contrat.
La forte relation existant entre l'origine ethnique des
fournisseurs
et
des tenanciers nous autorise
à
parler
plutôt
d'une
tribalisation
du
circuit
informel
d'approvisionnement,
185
surtout en ce qui concerne les produits végétaux. Tous les atouts
sociaux sont ici reconvertis en capital commercial pour supporter
la forte concurrence qui,
nous le verrons, ne manque d'avoir une
incidence sur les prix de consommation finale des repas.
Aussi,
un nouveau modèle d'approvisionnement est-il en
train
de prendre forme dans l'I.A.
Il s'agit du
ravitaillement
,
groupe.
BI Les associations de ravitaillement ou l'amorce d'un processus
du self-reliance
D'une façon générale,
le ravitaillement dans l'informel
alimentaire se fait individuellement. Mais nous avons pu observer
quelques
sept
cas de ravitaillement groupé qui nous
paraissent
tout
à fait novateurs.
Chaque association d'achat se compose en
moyenne
de
6
propriétaires
d'UPV
qui
décident
d'organiser
ensemble leurs stratégies de ravitaillement.
Damayé,
35 ans ...
tenancière
de maquis s'en explique:
"
Avant cette associa-
tion, nous avons déjà essayé une qui n'a pas marché. C'était moi-
même qui l'avait organisée.
J'avais contacté quelques maquis
de
mon
quartier.
En tout,
nous étions au nombre de 8.
Mais cette
association
n'a pas duré plus de 2 mois parce que des
problèmes
de
jalousie ont dispersé ses membres.
Puisque
l'affaire
était
intéressante,
j'ai
pensé
qu'il ne fallait pas laisser
tomber.
J'ai
jugé
bon qu'on se comprendrait plus entre femmes
de
A
meme
ethnie (baoulé) parce que,
avant,
nous n'étions pas de la
A
meme
ethnie ...
C'est ce que j'ai ~ait.
Aujourd'hui l'association a 7
mois et ça marche bien.
Beaucoup d'autres maquis font maintenant
186
comme nous ... ".
Effectivement comme l'explique Damayé, le principe même
de
la
coopérative
d'approvisionnement se fonde sur
des
liens
ethniques.
Les six autres coopératives rencontrées toujours dans
le secteur de Treichville,
ont toutes moins de 18 mois d'âge
et
sont organisées sur les mêmes bases ethniques.
Comment fonctionnent donc ces coopératives?
D'avance,
chaque
chef d'UPV détermine ses besoins,
généralement
hebdoma-
daires,
en protéine animale (viande de boeuf, viande de brousse,
poisson,
volailles), en produits agro-industriels (huile alimen-
taire,
boîtes
de
conserve
etc .. ) et
en
denrées
périssables
(aubergine, graîne,
tomate, piment, attiéké, etc ... ). Pour chaque
produit ou groupe de produits,
un contrat de livraison est passé
avec
un fournisseur qui livre à période déterminée et
régulière
les produits demandés à des prix fixés d'avance. Pour les denrées
périssables, nous avons relevé quelques cas de "monopole" consis-
tant
à
exiger des fournisseurs la totalité de
leurs
produits.
Parmi
ces
fournisseurs,
figurent nombre
d'agriculteurs
péri-
urbains.
Cette
stratégie d'approvisionnement,
que nous mettons
au compte d'un processus de "self-reliance",
comporte des
avan-
tages certains pour les deux partenaires:
- Pour le fournisseur
en
denrées périssables par exemple,
elle réduit les risques
de
non-écoulement
des produits le plus souvent dû à une
saturation
du
marché.
- Les tenanciers de restaurants se protègent quant à
eux,
contre
les
variations saisonnières,
les
crises
et
les
tensions et, par voie de conséquence, contre les fluctuations des
prix qui en résultent.
187
CONCLUSION PARTIELLE
Au
terme de cette analyse du système
d'approvisionne-
ment
de
l'informel
alimentaire,
deux
conclusions
majeures
s'imposent.
- L'efficacité
du système traditionnel de commerciali-
sation
qui n'est qu'un autre niveau de
participation
communau-
taire à l'effort de production informelle alimentaire.
- La place de l'I.A. dans la consommation de la produc-
tion
vivrière locale et surtout le de la croissance des importa-
tions dans l'alimentation des villes.
n'une
façon générale,
on constate que les acteurs
de
l'informel
alimentaire,
dans leur stratégie de production à bas
prix,
ont
su
adapter leur comportement économique
aux
moyens
limités dont ils disposent.
Ils ont trouvé dans le circuit "infé-
rieur"
(circuit traditionnel) de ravitaillement
un
partenariat
adapté
aux
contraintes du milieu informel.
Au regard des
pra-
tiques sociales et de la dépendance de l'informel alimentaire vis
à
vis
du système traditionnel
de
commercialisation,
nous
ne
pouvons
conclure
avec certains auteurs qu'à l'efficacité de
ce
dernier,
tout
au
moins
dans
le
cas
du
ravitaillement
des
structures d'alimentation extérieure.
L'informel
alimentaire reste donc un maillon non moins
important
de
la chaîne de production-consommation
en
produits
vivriers locaux.
Le cas de l'attiéké consommé à plus de 50 %
en
alimentation extérieure, en est un bon exemple. Mais ceci ne doit
pas
masquer
la
question du contenu en
importation
des
plats
offerts.
188
La
dynamique de l'informel alimentaire et sa
capacité
de production à moindre coût s'appuie fortement sur la surproduc-
tion
de
certaines données sur
le
marché
international.
Nous
l'avons constaté avec la viande de boeuf,
et le riz qui comptent
d'ailleurs parmi les produits les plus consommées en alimentation
extérieure.
Compte
tenu de cette évolution de la
consommation,
nous
disons
que
si l'informel alimentaire est
un
vecteur
de
maintien
des
habitudes alimentaires autochtones,
il n'est
pas
forcément créateur d'indépendance alimentaire, puisque le contenu
en importation de son menu semble en constante croissance.
189
Chapitre VI
DEMANDE ALIMENTAIRE INFORMELLE ET STRATEGIES DES PRIX
Les
pratiques
de consommation dans le champ
informel
alimentaire ne sont pas socialement neutres.
Au-delà de ses deux
grandes
fonctions - utilitaires et distractives -
le champ
de
l'alimentation extérieure reste très structuré.
Le choix de
tel
ou
tel espace semble déterminé par le pouvoir d'achat de
chaque
consommateur.
Les
acteurs de l'informel alimentaire ont su adapter leurs stra-
tégies
aux besoins et aux conditions socio-économiques
de
leur
clientèle sous la pression de la concurrence. Les espaces alimen-
taires,
le
crédit
aux consommateurs et les
prix
généralement
modérés
des
repas en sont une preuve.
Ajoutés à
la
faiblesse
relative
du
~
capital initial et au recours a
une
main-d'oeuvre
essentiellement familiale, deux éléments, à savoir principalement
le
crédit ainsi que la modicité du prix des repas,
restent
les
armes maîtresses du dynamisme de l'artisanat alimentaire.
Section l
- ESPACE
ALIMENTAIRE
ET
RAPPORTS
TENANCIERS-CONSOM-
MATEURS
En
dehors des catégories qui
la
composent,
l'espace
alimentaire peut être
considéré par rapport à ses deux fonctions
essentielles :
-
fonction utilitaire,
-
fonction distractive.
Ces
deux fonctions enlèvent à l'alimentation
extérieure
infor-
melle
la neutralité sociale que pourrait lui conférer son carac-
tère populaire.
A/ Espace alimentaire et comportements de consommation
On peut considérer que l'alimentation extérieure a deux
grandes
fonctions
une
fonction utilitaire et
une
fonction
distractive.
Toutes deux n'ont pas la même dynamique et n'influ-
encent pas de la même manière l'expansion de la consommation hors
domicile. Ces fonctions se retrouvent dans les motivations qu'ont
exprimé
les
personnes
enquêtées
dans
les
divers
lieux
de
restauration.
1 - L'alimentation à fonction utilitaire
L'extension spatiale d'Abidjan et le changement de mode
de vie qu'elle a généré constitue un des grands moteurs du
déve-
loppement
de la consommation alimentaire hors domicile.
L'éloi-
gnement du lieu du travail par rapport au domicile et la présence
liée
aux contraintes professionnelles sont la première raison de
la fréquentation des maquis et des restaurants.
Plus des 2/3 des
191
consommateurs interrogés déclarent s'alimenter à l'extérieur pour
cette raison, au moins une fois,
voire 2 à 3 fois par semaine et,
pour un peu plus de 35 %,
tous les jours.
Bien
que
notre typologie de l'offre alimentaire
hors
domicile
ne corresponde guère à celle qui a commandé
l'EBC
79,
nous
pouvons apprécier à partir des résultats de cette dernière,
l'importance de l'alimentation sur les lieux de travail.
Tableau nO 28
Importance
des
lieux
de
consommation
dans
la
consommation hors domicile
Unité en %Valeur totale consommation extérieure par strate
Strate
Tablier
Bar ou
Restau-
Parti-
Au
Autre
Total!
maquis
rant
cu lier
travail
1ieu
! Abidjan
"," 3,21 10,71
1,87
36,50
36,60
100,O!
!
!
1 Autres villes
8,62
5,44
lB,64
16,97
31,91
lB,42
100,O!
1 Milieu ru ra 1
1,28
0,35
2,00
21,97
52,18
22,22
100,O!
1
Source
A. Odounfa, p.
34.
Particulièrement à Abidjan,
la consommation alimentaire
sur les lieux de travail est évaluée à 36,50 % par rapport
à
la
consommation
totale
hors
domicile.
Ceci
montre
assez
bien
l'importance de ce mode alimentaire.
Aussi,
le champ social de consommateurs
est très com-
posite.
La
clientèle la plus nombreuse et la plus
assidue
est
constituée d'ouvriers, de manoeuvres, d'élèves, d'employés quali-
fiés ou non,
de fonctionnaires.
Les cadres, quoique
plus rares,
font
partie aussi de cette clientèle.
Ce type de restauration a
192
plus
souvent
lieu à midi,
où la préférence
est
accordée
aux
maquis ou aux restaurants-bars. Mais la restauration extérieure à
fonction
utilitaire
ne se limite pas qu'aux maquis
et
restau-
rants.
Habitant très loin du lieu de travail et partant très tôt
de leur domicile, beaucoup de personnes, à la descente des trans-
ports en commun, se dirigent vers les kiosques et les restaurants
sur tables mobiles pour y prendre leur petit déjeuner,
générale-
ment
le
"café complet".
La nécessité de s'alimenter au
dehors
croit
également
avec
l'évolution du célibat
urbain.
Le
coût
modéré de la restauration informelle fait préférer aux
personnes
seules ou éloignées,
ce mode d'alimentation à la consommation au
domicile (1).
2 - La restauration de détente
La
restauration de détente,
qui n'offre ses
services
que dans l'après-midi et le soir, semble plus sélective que celle
dite utilitaire.
Elle conserve néanmoins un marché important et,
à
Abidjan,
la
plupart des consommateurs
interrogés
déclarent
venir
y
passer quelques moments de loisir en compagnie
d'amis.
Favorisant
plutôt
une alimentation en
groupe,
celle-ci
s'est
surtout développée pendant les années 70,
lors de l'essor écono-
mique grâce à l'élévation du pouvoir d'achat.
Malgré
qu'avec l'informel alimentaire,
nous nous
si-
tuons
d'emblée dans le champ de la consommation,
l'analyse
des
pratiques alimentaires semble offrir des différences
objectives
dans le rapport à la nourriture.
(1) cf.
M.
Odeye, N. Bricas. A propos de l'évolution des styles
alimentaires
à
Dakar in Nourrir les villes, Ed. L'Harmattan
1986; p.
191.
193
Dans
l'informel alimentaire,
il n'est pas possible de
dégager
des indicateurs pour construire une
hiérarchie
sociale
des
consommations à cause de la standardisation du
menu;
c'est
plutôt
dans
les pratiques alimentaires et dans le rapport à
la
nourriture
que
les marques de
distinction
et
d'appartenance
sociale
s'édifient,
mettant
ainsi en exergue
les
différences
d'origine
socio-professionnelle
(cadre/ouvriers
etc ... )
des
consommateurs.
Si
l'informel alimentaire est en général connoté comme
structure
de restauration des "économiquement faibles",
il faut
néanmoins
préciser
que tout l'informel
alimentaire
n'est
pas
populaire.
Les
lieux communs sur le nivellement social des con-
sommations alimentaires ne résistent pas à l'analyse des données.
L'espace
social
alimentaire,
au fil du temps,
est
devenu
un
ensemble organisé,
un système de positions sociales dans
lequel
se manifestent des pratiques de différences.
Les
pratiques alimentaires,
dans cet
espace
social,
semblent
autoriser une hiérarchie des consommations ou une
ana-
lyse bipolaire :
- d'un côté la nourriture revendiquée dans sa vérité de
substance
nutritive
avec tout ce qu'elle implique
de
calories
incorporées et
- de l'autre, la priorité aux formes.
Le
rapport à la nourriture dans l'informel alimentaire
a
progressivement évolué et peut se comprendre par
rapport
aux
deux
pôles
précités correspondant à deux types
qualitativement
opposés de comportement alimentaire
- la consomamtion vulgaire
194
et - la consommation distinguée.
Le champ de la consommation vulgaire est par excellence
le
maquis
traditionnel tel que le décrit le sociologue
Kouakou
Nguessan François :
"
Local de fortune édifié plus ou
moins
sommairement grâce à des cartons d'emballage, de la tôle ondulée,
des rebus de planche et des chevrons de dernière qualité" (1). Il
est
également
le
lieu d'échanges informels,
le
lieu
où
tel
habitué
lancera
son
appel pour un logement économique
ou
tel
autre
fera une demande d'emploi verbale pour un "frère" venu
du
village,
le lieu où les derniers événements politiques et
spor-
tifs
sont chaleureusement discutés entre clients se
rencontrant
pour
la première fois.
Ici le franc-parler rime avec le "franc-
manger"
qui caractérise le milieu populaire.
Les
moindres
ma-
nières de table sont foulées aux pieds.
La soumission au goût de
nécessité
et
l'impossibilité de manger ailleurs
inclinent
les
fréquentateurs de cet espace alimentaire à une esthétique pragma-
tique et fonctionnaliste. L'espace alimentaire lui-même porte les
marques (décor austère et manquant parfois d'hygiène,
vétusté de
la vaisselle, tables nues,
noircies et brûlées par les mégots de
cigarette des consommateurs ... ) de la précarité.
Le choix de ces
lieux de restauration par certaines catégories de consommateurs -
généralement
les ouvriers,
les chauffeurs de taxi,
les élèves,
les employés de bureau, les manoeuvres - peut s'expliquer par les
restrictions imposées par la faiblesse des revenus.
(1) F.
Kouakou
Nguessan,
Les maquis d'Abidjan.
Nourritures du
terroir
et fraternité citadine,
ou la conscience de
classe
autour d'un foutou d'igname in Cahiers ORSTOM, série Sc. Hum.
vol. XIX, nO 4,
1983; p. 545.
195
Il
La
rencontre du souci de constitution d'une
clientèle
plus solvable chez les restaurateurs et d'un besoin de distancia-
tion
chez certains consommateurs ont progressivement favorisé au
sein
de
l'informel
alimentaire un autre
type
de
sous-espace
alimentaire où les formes dans l'alimentation priment sur le goût
de nécessité.
L'obligation de manger hors domicile (à midi) pour
certains
consommateurs
aux
revenus et
capital
culturel
plus
élevés
ou
de
conditions socio-économiques
plus
élevées
(les
cadres),
le
désir
d'échanger avec un ami autour d'un
plat
de
kédjénou
dans
un "cadre serein" comme l'envie d'échapper
à
la
routine alimentaire familiale ont progressivement entraîné l'amé-
lioration
du
cadre de certaines unités de
production-vente
et
l'émergence d'autres.
Dans ces nouveaux espaces,
le cadre rudi-
mentaire,
l'esthétique pragmatique des maquis traditionnels fait
place au souci de "manger dans les formes (1).
Le souci de
dis-
tanciation
par
rapport
à la manière populaire
de
traiter
la
nourriture
est constant chez cette catégorie
de
consommateurs.
Ici,
on dit être incommodé par le bruit,
la lenteur du service,
le
manque d'hygiène des maquis traditionnels,
la haute tonalité
de la musique. On pourrait dire, avec Bourdieu, que tout ce souci
des formes et ce parti de stylisation qui caractérisent ce
sous-
espace de consommation distinguée,
tend à déplacer l'accent de la
substance et la fonction vers la forme et la manière (2).
Contrairement
aux théories qui présentent les cultures
dominées
comme
un résidu de la
culture
dominante,
l'informel
(1) P.
Bourdieu,
La
distinction critique sociale du
jugement,
Editions de Minuit, Paris 1979, p. 218.
(2) P. Bourdieu, idem, p. 219.
196
alimentaire offre les contre-arguments d'une imitation maladroite
ou attardée du goût alimentaire dominant. Originellement, il sort
des
entrailles du mode alimentaire populaire né des
contraintes
liées
aux
limitations du revenu.
Ce
courant
alimentaire
est
tellement
fort
dans
le contexte abidjanais
qu'il
a
infléchi
l'''intolérance
esthétique" de la classe dominante qui a fini par
en
récupérer
une
partie pour en faire
un
espace
alimentaire
culturellement
hybride plus conforme à ses besoins de
consomma-
tion.
Cette conformité aux aspirations alimentaires vient
du
fait
que
les pratiques alimentaires informelles ainsi
"récupé-
rées"
par la classe dominante font la synthèse entre
les
habi-
tudes
alimentaires
(menu africain) et les codes et normes
(ma-
nières
de table) qu'imposent aux membres de cette
classe
leurs
"titres
de noblesse culturelle".
Puisque les goûts alimentaires
semblent ici modelés par les différences de pouvoir
d'achat,
on
comprend
dès lors que la subordination de la fonction à la forme
ou la mise entre parenthèse des fins pratiques de
l'alimentation
a un prix à payer.
Cette
économie
des
pratiques
alimentaires
pourrait
constituer un facteur explicatif des différences de prix observa-
bles
pour
un même produit dans deux
structures
identiques
de
l'informel alimentaire.
BI Pratiques du crédit et rapports à la clientèle
Quelle
que
soit la structure,
la pratique du
crédit
semble
être une institution commerciale regissant
les
rapports
197
•
consommateurs-restaurateurs.
Il
semblerait même que
l'informel
alimentaire en lui-même ne saurait exister sans elle.
72,5 % des
micro-négociants ont exprimé, au cours de nos enquêtes, la néces-
sité
de
faire crédit à leurs clients malgré
les
conflits
que
peuvent
entraîner
les irrégularités dans le
remboursement.
On
pourrait résumer leurs propos sur la question par cette formule :
"sans crédit,
pas de commerce d'aliments". La pratique du crédit
est si généralisée que les micro-négociants qui, dès les premiers
jours ont voulu y échapper,
ont été "contraints" de s'y
rallier
ensuite pour conserver leur clientèle.
En
quoi consiste donc cette pratique?
Faute de revenu
régulier et surtout à cause de la fluctuation du pouvoir d'achat,
nombreux sont les consommateurs qui n'arrivent pas à payer
comp-
..
tant
les
repas
pris au dehors.
La pratique consiste
alors
a
différer
le paiement des consommations quotidiennes à la fin
du
mois en cours.
Dans
l'I.A.
environ 35 % des plats sont vendus à cré-
dit. Le contrat tacite de consommation à crédit est passé au bout
de trois mois environ de régularité du client.
Il n'existe aucun
autre
moyen de contrainte pour assurer le remboursement que
les
pressions personnelles,
le rapport de confiance et
l'engagement
de
la réputation du client qui,
avec le temps peut passer de la
fidéli té
à la "trahison"
(1).
En l'absence de toute
contrainte
institutionnelle,
la
stratégie des micro-négociants consiste
à
renforcer
l'obligation
morale
inscrite
dans
le
rapport
de
confiance, soit en rappelant souvent au client agréé l'honneur du
(1) M.
Le Pape, Cl. Vidal, Espace abidjanais. Sociographie de la
mobilité in L'Espace géographique, nO 3, 1986; p. 194.
198
bénéfice
d'un crédit,
soit en l'intéressant aux difficultés
de
gestion
de
l'entreprise liées à ce "temps de
crise
économique
généralisée",
soit
en
poussant les rapports de sociabilité
le
plus loin possible dans l'intimité des clients
visite à
domi-
cile,
participation
aux événements heureux et malheureux de
la
vie du client.
En règle générale,
dans les maquis du midi,
le montant
du
crédit acceptable est fonction de la durée de fidélité
et/ou
du statut socio-professionnel du client.
Plus le grade du client
est élevé dans la hiérarchie administrative de son service,
plus
les
possibilités de crédit sont larges.
Il n'est cependant
pas
rare, comme le souligne Cl. Vidal et M. Le Pape, d'entendre de la
part
des micro-négociants des déclarations sur certains
clients
qui n'ont pas respecté les "clauses" du contrat.
"Cette façon de
prendre d'autres habitués à témoin rappelle l'obligation de payer
et
que toutes les contreprestations fournies par le client
sous
la
forme symbolique de témoignage de "respect",
de "politesse",
de "galanterie",
de "gentillesse" apparaissent rétrospectivement
comme purement cyniques, perdant toute valeur, quand l'obligation
de
payer
n'est pas remplie - ce n'est pas un
discrédit
de
la
personne
que visent ces discours mais à obtenir un remboursement
et si possible à rétablir les formes de la bonne foi qui
permet-
tent de garder la fidélité"
(1).
La
comptabilité
des
créances
dans
le
contexte
abidjanais
présentent
des similitudes avec ce qu'avait
observé
Made Bandé Diouf dans son étude sur la restauration dans la
zone
(1) Cl. vidal, M. Le Pape, op. cit., p. 154.
199
•
industrielle
de Dakar (1).
Elles vont des carnets de.note (dans
lequel
chaque
consommateur mentionne son nom,
la
date
et
le
nombre
de
plats consommés),
jusqu'à la "confiance aveugle"
en
passant par la "comptabilité sur mur (tirait - sur les murs de la
...
gargotte
- correspondant
à
chaque
repas
quotidien
non
paye
comptant).
La
personnalisation
des
rapports
commerciaux
entre
consommateurs et vendeurs - par le biais du crédit - présente des
intérêts
certains
pour
les
deux
parties.
Au-delà
de
la
possibilité
de
se nourrir quotidiennement sans être
obligé
de
débourser à chaque repas,
les premiers réussissent quelquefois à
obtenir un dépassement de la mesure normale,
comme une sorte
de
prime à la fidélité. Les seconds tirent avantage de la stabilisa-
tion
de
quelques clients qui,
dans le contexte de
concurrence
intense caractérisant l'artisanat alimentaire, constitue un avan-
tage non négligeable.
Tout comme la pratique du crédit, la modi-
cité des prix des repas constitue un atout de l'artisanat alimen-
taire.
Mais avant d'aborder les facteurs conditionnant la forma-
tion de ces prix,
nous nous intéresserons à la nature des
plats
offerts.
(1) M.B.
Diouf,
Les
restauratrices de la zone industrielle
de
Dakar ou la guerre de~ marmites.
Cahiers d'Etudes Africaines
1 981 -1 982 ,
XXI,
1 - 2. p.
239.
200
Section 2
NATURE, MESURE ET PRIX DES PLATS CONSOMMES
AI Nature des plats consommés en alimentation extérieure
Tableau nO 29
Importance des plats extérieurs par strate
unité en % vaeur totale
Nom du plat
Abidjan
Autres villes
Milieu rurall
1
1
Plat de riz
21,24
26,27
9,09
!
!
Plat de maïs
1 ,39
2,21
7,00
Plat de mil
1 ,2O
0,12
0,67
Pâtes alimentaires
3,43
3,82
0,33
Pâtes de manioc
10,67
12,71
10,60
dont attiéké
8,69
5,77
1 , 49
Pâtes d'igname
4,81
10,42
37,17
Pâtes de tarot
0,53
0,83
1,94
1
1
Pâtes de plantain
9,88
11 , 1 °
9,86
!
1
Pâtes de légumes
1,65
1,09
0,32
!
!
Viandes poissons
6,34
3,33
1,12
!
Café-lait
18,55
7,48
0,24
Sauces
13,97
19,22
20,18
Divers
6,37
1 ,32
0,59
Total %
100,00
100,00
100,00
Valeur
20.094
8.340
33.400
Source
EBC 79 nO 1 .
201
- .
Si nous nous référons aux résultats ci-dessus,
et plus
particulièrement
à
ce qu'ils nous donnent
comme
éléments
sur
l'importance
par
strate des plats consommés à
l'extérieur,
on
constate
que les plats les plus consommés à
Abidjan
sont,
par
ordre d'importance décroissante:
les plats de riz (21,24 %), le
"café
complet"
(18,55 %),
les sauces (13,97 %),
les plats
de
banane plantain (9,88 %),
l'attiéké (8,69 %) et enfin les
gril-
lades de poisson et de viande (6,34 %).
Un
comptage
des
plats
consommés
par
jour
et
par
structure
d'alimentation
nous
montre la diversité
des
possi-
bilités
qu'offre l'artisanat alimentaire et la
répartition
des
plats servis.
. Les plats à base de riz
De
toutes
les céréales,
le riz semble être
la
plus
consommée
en alimentation extérieure.
Il entre dans la prépara-
tion de cinq plats très appréciés par les consommateurs, à savoir
le riz cuit à l'eau,
le yassa,
le tiep'djen,
le riz gras et la
,
bouillie
de
riz.
Il est plus consomme sous la forme
cuite
et
représente
en moyenne 46,34 % du nombre de plats servis par
les
maquis du midi devant l'attiéké,
le foutou de banane et d'igname
(respectivement 25,36 %,
19,02 % et 9,26 %). Cette importance du
riz
relève du fait que son mode de préparation n'exige
pas
une
rupture
brutale
avec les habitudes alimentaires
spécifiquement
ivoiriennes (accompagnement du produit de base par la sauce).
. Les plats à base de banane plantain
L'exploitation
de la banane plantain
par
l'artisanat
alimentaire reste aussi diversifiée que celle du riz. En accompa-
202
gnement,
elle
est
présentée dans les restaurants du midi
sous
forme
de foufou et de foutou.
Les restaurants ambulants et
sur
table
mobile
la servent cuite à l'eau ou
braisée.
C'est
sous
forme
d'alloko (plat de banane plantain découpée en petits
mor-
ceaux
et
frite à l'huile,
parfois accompagné
de
poisson,
de
brochettes ou d'oeufs et assaisonné avec du piment) que la banane
plantain
est
la
plus
consommée.
Elle
constitue
le
goûter
principal de la population abidjanaise.
La banane plantain, selon l'EBC 79, fait partie des produits qui,
à
l'examen des chiffres de consommation par tête,
sont le
plus
consommé
tant
en milieu urbain qu'en
milieu
rural.
Etant
un
produit
très
intégré dans les habitudes alimentaires
en
Côte-
d'Ivoire,
sa consommation garde toute sa force en milieu urbain,
aussi bien en alimentation domestique qu'extérieure.
. Les plats à base de maïs
Le maïs est peu consommé en alimentation extérieure. Il
n'entre
que
dans la confection de deux
plats:
la pâte et
le
maïs en épis grillé ou cuit. Il ne doit sa présence qu'à quelques
restauratrices
sur
tables mobiles (maïs grillé)
et
aux
rares
maquis
bénino-togolais
qui conservent la pâte (owo
ou
akoumè)
dans leur menu pour le bonheur de leurs compatriotes. Une moyenne
quotidienne d'environ 12 plats de pâte de maïs est servie par ces
derniers
maquis
contre
environ
30 plats de riz
et
15
plats
d'attiéké.
. Les plats à base de mil
Encore plus rare que le maïs, le mil qui est un aliment
203
de
base des populations du nord-ouest n'intervient que
dans
la
préparation d'un seul plat,
la bouillie de mil,
servie essentiel-
lement par les restauratrices sur table mobile et les ambulants.
· Les plats à base de céréales importées
Ce
sont
essentiellement
le couscous de
blé
et
les
spaghettis et de petits pois.
Ils sont consommés en alimentation
extérieure dans les kiosques. La rapidité de leur préparation est
bien adaptée aux conditions de vie urbaine et leur
disponibilité
est plus grande en ville.
Quelques restaurateurs du midi l'intè-
grent dans leur menu. Mais il faut préciser que leur consommation
reste
marginale par rapport à celle du riz et de l'attiéké.
Ils
constituent, dans les structures qui les commercialisent environ,
respectivement 7 % et 9 % du nombre de plats servis.
· Les plats à base de manioc
L'attiéké
et
l'attoukpou sont les
formes
dominantes
sous
lesquelles le manioc transformé se consomme en alimentation
extérieure à Abidjan.
L'attiéké est présent dans presque
toutes
les structures informelles d'offre alimentaire.
L'EBC 79 signale
l'essentiel de sa consommation en alimentation extérieure. Seule,
la
restauration
ambulante
ne
se prête pas à la
vente
de
ce
produit.
En consommation extra domestique,
i l constitue le prin-
cipal concurrent du riz sans toutefois atteindre le niveau
élevé
de consommation de ce dernier.
· Les plats à base d'igname
L'igname
est
diversement présentée d'une structure
à
une
autre.
Les
restaurateurs sur table
l'offrent
braisée
ou
204
frite.
Les
maquis du midi la présentent en foutou ou en ragoût.
Elle est moins consommée que le foutou de banane, l'attiéké et le
riz et ne représente dans les maquis du midi que 9,25 % des plats
consommés.
. Plats à base de pomme de terre
La
pomme
de terre est présente en
alimentation
hors
domicile sous forme frite et de ragoût. Frite, elle est consommée
dans
les
maquis "distingués" de la soirée ainsi
que
dans
les
kiosques.
Le
ragoût de pomme de terre est,
quant à lui,
servi
dans
les restaurants-bars et les
espaces-restaurants.
Mais
la
clientèle
limitée
de la pomme de terre et son
extériorité
par
rapport aux habitudes alimentaires locales,
rend
sa consommation
marginale.
Dans
les
restaurants en établissement par
exemple,
elle est le plat d'accompagnement le moins consommé.
. Les sauces
Une
grande
variété de sauces accompagnent
les
plats
tels que le riz, les foutous,
les foufous. Les plus consommées en
alimentation extérieure sont au nombre de cinq
sauce arachide,
sauce aubergine,
sauce graine,
sauce gombo et sauce
claire.
A
l'exception de la sauce claire et du kédjénou,
elles tirent leur
appellation
du
nom de leur produit de
base,
généralement
des
légumes,
des noix ou des graines. Ainsi on dit "sauce aubergine"
pour
une sauce dont les légumes dominantes sont des
aubergines,
"sauce
graine" pour une sauce à base d'huile de palme.
Dans ces
sauces,
on note une prédominance de viande d'élevage et de pois-
son de mer.
205
L'importance
de
la viande de boeuf est
ici
notoire.
Bien qu'étant un produit de luxe,
sa sur-consommation s'explique
par le fait qu'elle est meilleur marché que les ovins, caprins ou
volailles
qui demeurent des aliments réservés aux jours de
fête
ou aux "extra" en restauration extérieure.
La
production nationale de viande de boeuf
ayant
peu
augmentée
depuis 1979 comme l'indique l'EBC,
la croissance
des
importations
reflète
donc celle de la
consommation,
notamment
extérieure.
La même remarque peut s'appliquer à la
consommation
de
poisson de mer en raison de son prix sensiblement plus faible
que celui de la viande.
Le gibier,
très consommé en milieu rural,
reste ici une
..
viande
très rare dont la consommation,
minoritaire
a
Abidjan,
justifie
un
supplénent depuis en alimentation
extérieure.
Par
ailleurs,
les
citadins ne peuvent guère y compter en raison
de
l'insuffisance de l'offre et de sa chereté.
. Autres plats
Entre autres spécialités de l'artisanat alimentaire, on
pourrait
citer
le "petit pois" (plat à base
de
conserves
des
légumes
de petits pois,
caractérisé par une forte proportion de
viande -
19-23 %),
la salade,
l'omelette,
le "café complet", les
macaronis,
le tout accompagné de pain.
Les kiosques gardent
le
monopole de ce type de consommation.
Les
viandes
grillées
(brochettes)
sont
aussi
une
spécialité de l'informel alimentaire,
offertes surtout dans
les
espaces-restaurants et les restaurants ambulants.
Parlant des plats consommés en alimentation extérieure,
206
on
doit
signaler
une forte émulation entre
l'industrie
agro-
alimentaire
locale
s'orientant de plus en plus vers
le
marché
intérieur et le secteur artisanal,
très dynamique. La régulation
est
ici
faite par les consommateurs qui exigent du
premier
la
"conformité du goût" et la similit1lde avec les produits
auxquels
l'a
habitué le second.
A titre d'exemple on peut
citer,
entre
autres,
la
sauce
graine
de
Blohorn-Unilever,
et
l'attiéké
"industriel"
dont
les
procédés
de
fabrication
industrielle
n'ont
pas
encore
donné
de
résultats
concluants
au
plan
économique (1).
Quant à l'offre de l'informel alimentaire, la stratégie
des
prix
semble
présenter
quelques
uniformités
malgré
la
diversité des situations.
B/ stratégies des prix à la consommation
Au-delà
des questions de concordance entre l'offre
et
les habitudes alimentaires,
la raison majeure qui fait
préférer
l'informel alimentaire aux autres modes de restauration (cantine,
alimentation
à domicile ... ) est la possibilité de consommation à
prix modéré et parfois à paiement différé.
La présentation d'une
moyenne
des prix des plats les plus consommés dans
les
restau-
rants
en
établissement
nous
en
donnera
quelques
éléments
d'appréciation.
(1)
G.
Courade
et
alii,
Evaluation
des
habitudes
à
la
consommation
des
produits
alimentaires
en
côte-d'Ivo~
vol. 1. Synthèse,
résumé,
recommandation, ORSTOM-MSA Paris,
1988, p. XII.
(2) R.
Kouassi,
L'industrie
alimentaire.
L'igname
vaincue.
"Bonfoutou"
(conserve)
présenté
à
la
presse
Fraternité-
Matin/vendredi 13 Janvier 1989, p. 6.
207
•
Tableau nO 30
Prix
moyens des plats consommés dans les
maquis,
kiosques et restaurants-bars
Plats
Prix moyens
Maguis
· plat de riz/foufou/foutou/placali -
sauce -
viande
de boeuf
.
300 F
· plat de riz/foufou/foutou/placali - sauce -
viande
de brousse
.
500 F
· plat de riz/foufou/foutou/placali -
sauce -
poisson
frais
.
350 F
.
b ' "
· p01SS0n
ra1se
.
600 F
· kédjénou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.900 F
Kiosgues
·
"Thé au lipton"
.
75 F
·
"Café no .
1 r "
.
50 F
· "Café complet"
.
125 F
· "Café complet -
pain beurré"
.
150 F
· 1 plat d'omelette
250 F
(possibilité de consommation d'un demi plat à moitié prix)
·
1 plat de spaghettis
300 F
(possibilité de consommation d'un demi plat à moitié prix)
· 1 plat de viande -
peti ts pois
500 F
(possibilité de consommation d'un demi-plat à moitié prix)
· 1 plat de petit pois au foie de boeuf
500 F
(possibilité de consommation d'un demi plat à moitié prix)
Restaurants-bars
· Tiep'djen
.
350 F
· Yassa
.
350 F
· Couscous-viande/poisson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
400 F
· plats ivoiriens
(sauces + accompagnement)
.
300 F
208
Ces prix sont soumis aux lois d'un marché concurrentiel
sur
lequel
la
grande majorité
des
micro-négociants
n'exerce
aucune influence.
Même les fluctuations du prix des denrées alimentaires,
qui
devraient
pormalement se répercuter sur le coût de
produc-
tion,
influencent difficilement les prix des repas.
Une enquête
réalisée
par le CIRES sur les prix des vivriers à
Abidjan
nous
montre
qu'entre
le 4 et le 27 avril 1984,
le prix moyen de
la
banane
plantain
est passé de 105,2 F.CFA/kg à
229,2
F.CFA/kg,
soit
une
augmentation de 118 %,
et cela
plusieurs
fois
dans
l'année.
Pourtant
le
prix
du foutou n'a pas été révisé
à
la
hausse
dans les autres maquis en 1984.
Une autre étude sur
les
prix de détail de six
produits vivriers sur trois marchés relève
aussi
en
1985 ces fortes fluctuations quotidiennes
et
saison-
ni ères
(1).
Malgré cela,
pour
diverses raisons,
les prix
de
consommation
des
plats
sont
fortement
maintenus
par
les
mécanismes du marché informel alimentaire. C'est surtout la forte
densité
des points de vente qui contraint les offreurs à réduire
le prix de vente au minimum,
à la "limite du tenable" en dessous
de
laquelle,
sauf
rares
exceptions,
ils
ne
pourront
plus
descendre. Ces prix très compétitifs relèvent d'une logique d'ac-
ceptation
de marges bénéficiaires très
faibles,
corrolaire
du
souci
de
subsistance conditionnant la
rationalité
commerciale
d'un
bon nombre d'acteurs.
Précisons que cette barre "limite du
tenable"
reste supportable grâce à la flexibilité
des
circuits
(1) Marie-Célestine
Anani,
Les
prix
de vente
au
détail
des
principaux
vivriers
à Abidjan en 1985.
Rapport
de
stage.
CIRES, 1986, p. 3.
209
d'approvisionnement et surtout au recrutement d'une main-d'oeuvre
à
bon
marché et à la disponibilité à bon prix des
produits
de
grande consommatin importés.
La part de l'informel alimentaire dans l'ajustement
du
coût d'entretien de la puissance du travail au niveau général des
revenus
est
ici
évidente au regard de
l'évolution
du
niveau
général de consommation,
fortement affecté depuis quelques années
par l'inflation en milieu urbain.
Rappelons
la
stagnation
des revenus
monétaires
des
ménages de 1978 à 1980 et sa baisse de 9 % enregistrée entre 1980
et 1985.
Notons également l'impact de ces chutes de revenus
sur
la consommation. Le rapport Duruflé faisant déjà remarquer que la
consommation finale des ménages au sens de la comptabilité natio-
nale aurait baissé de 8 % en francs constants entre 1980 et 1985,
ce
qui
ramène
à l'ordre de 30 % la baisse de
la
consommation
finale par tête.
L'inflation
en milieu urbain résultant essentiellement
de la hausse des prix des produits alimentaires pèse encore
plus
lourd sur ces revenus déjà stagnant (1). Cette évolution est plus
marquée
pour la consommation de type africain que pour celle
de
(1) Selon
les travaux effectués par des chercheurs du CIRES,
la
hausse
des
p:ix
des produits
alimentaires
africains
ces
dernières
annees
s'expliquent
par
le
changement
de
la
provenance des grands produits tels que la banane plantain et
le
manioc et la hausse du coût de transport et de
collecte.
Les centres urbains sont, du fait du déplacement de la boucle
de
cacao,
de plus en plus approvisionnés par un commerce de
longue distance,
avec comme pôles principaux,
Divo, Gagnoa,
Soubré soit en moyenne 330 km contre 164 km pour la région du
sud-est.
La distance à parcourir pour approvisionner Abidjan
a donc pratiquement doublé.
Le Sud-est n'a certes pas
cessé
de
ravitailler Abidjan mais le fait dans une moindre
mesure
cf. Tano Kouadio,
Approvisionnement d'Abidjan en banane plan-
tain et structure des prix du circuit longue distance, CIRES,
doc. ronéo, Abidjan 1984.
210
type
européen.
Selon le rapport de la Banque Centrale des Etats
de
l'Afrique
de l'Ouest entre 1986 et 1988,
elle
se
présente
comme suit
Tableau nO 31
Evolution
des
indices de
prix
de
consommation
générale et alimentaire entre 1986 et 1988
1
Indice général
Il
Indice alimentationl
---------------------11--------------------1
87/86
!
88/87 (*)11
87/86
1 88/87 (*)1
_ _ _ _ _ 1
1
1
Consommation type
1
1
africain (1)
+ 6,9
+ 8,6
+11,9
1
+ 15,9
1
1
!
Consommation type
1
!
africain (2)
+ 5,2
+ 7,3(3)
+ 6,6
!
+ 19,7
!
!
Consommation type
européen
.
+ 2,1
+ 2,7(4)
+ 2,0
+
3,5
Source
Bulletin de l'Afrique Noire, nO 1442 du 23 février 1989
Le glissement de la consommation surtout vers les
pro-
duits
de moindre prix qui s'en suit re-valorisent la
production
alimentaire informelle qui,
par les pressions multiples,
répon-
...
dent
a
cette
demande
alimentaire
au
pouvoir
d'achat
en
déliquescence.
Néanmoins,
une grande prudence doit être observée dans
l'analyse des prix des repas.
Il peut arriver que,
A
pour un meme
repas,
les prix varient d'un quartier à un autre, d'une unité de
(1) Chef de famille: ouvrier ou employé qualifié.
(2) Chef
de
famille,
cadre,
chef d'entreprise
ou
profession
libérale.
(*) Moyenne
du
premier
semestre 1988 par
rapport
au
premier
semestre 1987.
211
production-vente
à
une autre,
voire d'un client à un autre
au
niveau d'une même UPV, contrairement à ce que pense Lootvoët (1).
Nous
reviendrons sur cet aspect dans l'analyse des
facteurs
de
formation des prix de vente.
Si
nous
ne
partageons pas l'avis de
Lootvoët
selon
lequel "Dans la restauration ... ,
la clientèle a une connaissance
précise des prix pratiqués et [que] ceux-ci ne fluctuent pas d'un
établissement à un autre,
d'un client à un autre",
nous
sommes
plutôt
d'accord que "Les artisans négocient leurs prix de
vente
sous deux contraintes qui ne leur échappent pas:
leurs coûts de
production
et
l'offre qui s'exprime sur le
marché"
(2).
Nous
ajouterons
à ces "deux contraintes" l'objectif
socio-économique
qu'ils
se
sont
consciemment
fixé.
Nous
pensons
donc,
avec
Lootvoët,
que même s ' i l arrive qu'un artisan produise et vende à
perte,
on ne peut en inférer qu'il est irrationnel.
Cette déci-
sion n'est prise qu'en cas de force majeure (impérieuse nécessité
de
trouver un peu d'argent pour nourrir sa famille par
exemple)
et
l'acteur
a parfaitement conscience que le prix de vente
est
inférieur au prix de revient.
.
...
Aussi,
quelles que soient les variations
sal.sonnl.eres
que connaissent les prix des matières premières,
les prix restent
régis par le jeu de la concurrence,
chaque vendeur craignant une
perte de clientèle en relevant ses prix.
Les artisans compensent
- partiellement - les variations à la baisse du bénéfice consécu-
tive
à l'élévation du coût des matières premières par un ajuste-
ment de la qualité des denrées et/ou un changement des unités
de
(1) B. Lootvoët, op. cit ... p.
251.
(2) B. Lootvoët,
Idem .. p.
254 ..
212
mesure
pour un même prix ce
qui compense légèrement le manque à
gagner.
Pour
le même prix,
on peut être amené à constater
une
diminution prudente du volume habituellement servi.
Mais le fait
que
la plupart des régimes alimentaires africains mettent
avant
tout
l'accent sur la quantité consommée (1) rend
très
délicate
cette opération d'ajustement.
La modicité du prix à la consommation,
dans l'informel
alimentaire,
est un outil concurrentiel essentiel.
Il détermine
aussi bien les stratégies d'offre que les motivations sociales de
la consommation.
Si,
dans la plupart des cas,
le marché concurrrentiel
fait la loi des prix,
quelques marges de liberté sont exploitées
par certains acteurs.
Les variations des prix pour un même
pro-
duit
en sont une preuve.
Mais comme nous le
précisions,
aucun
,
micro-négociant
n'échappe
a
la fixation du prix
de
vente
en
fonction
du
coût de production.
C'est au-delà de
cette
règle
universelle qu'entrent en jeu les différents facteurs
condition-
nant
les
stratégies
des prix.
Nous tenterons une
analyse
de
celles-ci à partir de l'exemple des maquis.
Trois facteurs,
à notre avis, expliquent cette variation
des prix pratiqués .
. Le niveau d'investissement
Comme nous le mentionnions dans le chapitre sur
l'éva-
luation
du
capital de démarrage,
les niveaux
d'investissement
(1) Cl.
Savary,
Les
aspects
culturels
de
l'alimentation
en
Afrique, nourriture et culture en Afrique de l'Ouest. Genève-
Afrique, nO , p. 100.
213
•
dans
l'informel alimentaire restent très variables.
Les straté-
gies de prix des plats semblent dépendre du niveau capitalistique
des
UPV.
Ceci explique les différences de prix entre
deux
UPV
pour
un même repas.
Pour un investissement supérieur à
500.000
F.CFA, les prix sont supérieurs à près de 45 % des prix générale-
ment
pratiqués.
Par
exemple
un plat de riz-sauce
arachide
poisson,
qui
coûte généralement 350 F monte jusqu'à
500
F.CFA
dans les maquis dont l'investissement excède 500.000 F.CFA. Quel-
ques acteurs expliquent ce choix de niveau d'investissement et de
stratégie
des
prix
élevés comme une façon de
sélectionner
la
clientèle pour ne réserver l'accès du maquis qu'aux consommateurs
les plus solvables,
c'est-à-dire à ceux dont le pouvoir
d'achat
est plus élevé.
• Les denrées intermédiaires rares
Les
denrées
ayant servi à la confection
de
certains
plats
peuvent influencer le prix de ces plats.
Les exemples des
viandes de gibier,
de certains poissons considérés comme
nobles
(méroux,
vérégates)
sont
éloquents à ce
propos.
Leur
rareté
détermine
le prix élevé.
Ceci explique les différences de
prix
,
entre
un
repas
à la viande de boeuf et un autre
a
la
viande
d'agouti .
. La situation géographique des UPV
La situation géographique des UPV intervient aussi dans
la formation des prix des repas.
Plus le niveau socio-économique
du
quartier est élevé
et plus le prix des repas montera.
D'une
. ,
façon
générale,
les maquis sis dans les quartiers
a1ses
comme
214
Cocody,
Riviera
n'offrent pas leurs repas au même prix que ceux
des quartiers populaires comme Koumassi,
Marcory ou Treichville.
Cette différence peut s'expliquer d'une part, par les différences
de
pouvoir d'achat selon les quartiers
et,
d'autre
part,
par
l'incorporation des frais de transport dans le coût de production
(par exemple, 94,2 % des restaurateurs du Plateau proviennent des
,
communes
périphériques.
Leur
acces
au lieu de travail
et
le
transport
du
matériel
de production ou
parfois
des
produits
préparés nécessitent la location d'un moyen de transport.
CONCLUSION PARTIELLE
Le
prix des repas semble être le principal
instrument
économique
autour duquel s'articulent toutes les
stratégies
de
production-vente des acteurs de l'informel alimentaire. Autour de
lui
donc,
s'organisent toutes les pratiques de
différenciation
sociale
hors
domicile en matière de
consommation
alimentaire.
Tous
les
atouts
communautaires sont reconvertis
ici
par
les
acteurs pour son abaissement, structure du marché oblige. Mais on
pourrait toujours se demander,
toute proportion gardée et compte
tenu
de
la situation du marché de l'alimentation informelle
si
l'acceptation d'un maigre bénéfice,
justifiant ces bas prix
pra-
tiqués dans la plupart des UPV, ne constitue pas à long terme une
grave limitation pour l'expansion des entreprises.
215
Chapitre VII
RENTABILITE DES OPERATIONS COMMERCIALES, COMPORTEMENTS DE
CONSOMMATION ET D'EPARGNE DANS L'INFORMEL ALIMENTAIRE
Ce
chapitre analyse essentiellement les
répercussions
sociales
des
activités
économiques sur les ménages
des
chefs
d'UPV.
Il s'agira d'abord d'apprécier les revenus tirés de l'in-
formel
alimentaire pour ensuite voir leur utilisation
dans
les
ménages.
Les
niveaux de revenu et de vie des
ménages
montrent
les limites de l'I.A. à subvenir aux besoins des ménages. On peut
comprendre
ceci comme l'impact de la concurrence dûe
essentiel-
lement à l'entrée de nouveaux candidats dans ce secteur. A partir
donc
du cas de lII.A.,
les capacités du secteur informel à com-
penser les effets de la contraction économique à Abidjan semblent
fortement interrogées.
Section l
- APPRECIATION DU REVENU NET PAR CATEGORIE DE RESTAURANT
Comme
le
font remarquer la plupart des
analystes
de
l'informel, l'appréciation du revenu des petits producteurs n'est
pas
chose aisée à cause des difficultés d'obtention et
d'inter-
..
prétation des données.
La réticence des personnes interrogées
a
fournir
des
renseignements qui pourraient se retourner un
jour
contre elles et la fluctuation des chiffres d'affaires expliquent
ces
limites.
Cette
opération
nécessite
donc
une
extrême
délicatesse.
AI Méthodes d'évalùation directe et indirecte des revenus
La stratégie adoptée a été inspirée de la
méthodologie
..
de
J.P.
Lachaud relative aux travaux sur le secteur informel
a
..
Abidjan
et
a
Yaoundé (1) •
Mais la spécificité
de
l'informel
alimentaire nous imposait une adaptation de cette méthode.
En
effet,
deux méthodes différentes ont été utilisées
dans
l'évaluation
du chiffre d'affaires
des
UPV.
Mais
avant
celles-ci
l'adaptation du langage au niveau de compréhension des
enquêtés
était la première précaution méthodologique pour
s'as-
surer de l'uniformité de ce qu'on attendait d'eux et de ce qu'ils
apportaient comme informations.
Il était demandé aux chefs d'UPV
combien ils gagnaient lorsqu'ils estimaient avoir "beaucoup", "un
peu" ou "pas du tout" vendu. De ce fait, nous disposions de trois
( 1 ) J.P.
Lachaud,
Recherches
méthodologiques
sur
le
secteur
informel à Abidjan et à Yaoundé in Vivre et survivre dans les
villes
africaines.
Sous
la direction de J.
Deblé
et
Ph.
Hugon. Ed. PUF,
1982; pp.
240-255.
217
niveaux d'évaluation du revenu brut. Ces trois niveaux correspon
daient,
dans notre grille d'analyse,
au revenu brut maximum (Rb
max), au revenu brut moyen (Rb moy) et au revenu brut minimum (Rb
min).
puisque
la fourniture des renseignements sur les
revenus
exige un effort de mémoire de la part des personnes
interrogées,
nous
les
laissions déterminer la
périodicité
(jour,
semaine,
mois)
qui
semblait
le mieux leur convenir
pour
évaluer
leur
production et leur revenu.
Sur ce point,
le questionnaire était
donc
satisfaisant.
Dans
51,2 % des cas,
c'est la semaine
qui
était
choisie comme période de référence.
Dans les deux
autres
cas (jour,
mois) nous demandions à nos enquêteurs de ramener les
calculs sur une base hedomadaire,
le revenu mensuel étant obtenu
par un simple calcul
Rb mens = 4 (Rb max + Rb min + Rb moy).
3
La
deuxième méthode consistait à choisir
dans
chaque
catégorie de restaurants,
trois
Upv-types que nous suivions
de
près
pendant
trois
semaines.
Notre objectif était
de
suivre
l'évolution
des
recettes qui,
comparées aux
déclarations
des
chefs d'UPV,
devaient nous permettre de contrôler les risques de
sous
ou sur-évaluation des chiffres d'affaire.
Sur les
21
UPV
dont nous avons directement suivi l'évolution comptable,
2 seule-
ment
avaient
sur-évalué leur revenu brut.
Nous avons
constaté
plus de cas (15) de sous-évaluation dont le taux peut être estimé
à environ 5 %.
Pour nous prémunir contre les biais liés à
cette
sous-évaluation
du revenu,
nous avons recalculé le revenu
brut
mensuel en tenant compte du taux de sous-évaluation constaté
Rb mens'
= 4 (Rb max + Rb min - Rb moy) + 5 % (Rb men).
3
218
c'est
après l'obtention du chiffre d'affaires de l'uPV
que
nous avons procédé au calcul du revenu net ou
résultat
net
d'exploitation,
à savoir le chiffre d'affaires moins le coût des
matières premières et les charges d'exploitation.
Le
chapitre sur les charges des UPV intègre essentiel-
lement
la
fiscalité,
le
salariat
et
les
frais
connexes
d'exploitation.
1 - La fiscalité
Elle
est
constituée
par les taxes de
place
et
les
petites
patentes recouvrées par les services
municipaux.
Aucun
des chefs d'UPV n'y échappe même si parfois des arrangements avec
les
agents
percepteurs sont possibles au grand dam des
budgets
municipaux.
La
nature et le montant de ces taxes varient selon les
catégories de restaurants. Les restaurants sur table mobile s'ac-
quittent généralement d'une taxe de place journalière qui,
elle-
même,
varie d'une commune à une autre. Elle oscille entre 200 et
400
F.CFA/jour
soit
6.000 F
à
12.000
F/mois.
Les
espaces-
restaurants,
les
restaurants spontanés et les kiosques
payent,
quant à eux,
une taxe proportionnelle à la surface occupée,
qui
est
en
moyenne de 300 F/m2/jour.
Précisons que ces
taux
sont
variables
car chaque commune les fixe en fonction de son
niveau
socio-économique.
Les
maquis et les restaurants-bars payent aux
mairies une taxe forfaitaire annuelle moyenne de 23.000 F.
2 - Les salaires
Dans l'analyse des caractéristiques de la main-d'oeuvre
nous avons observé la marginalité du salariat (2,9 %) par rapport
219
à
l'emploi
des aides familiaux dont le poids
dans
le
secteur
informel alimentaire est important.
Quelques
5
UPV (3 maquis et 2
restaurants-bars)
em-
ploient les 17 salariés que nous avons recensés. Ces rares cas de
salariat
sont
le
fait
des
unités
économiques
les
plus
capitalisées
et
ayant le niveau de production plus
élevé.
Ces
recrutements de salariés,
fondés surtout sur des raisons
utili-
taires
(- accroissement de la taille de l'entreprise
- exigence
d'une
clientèle
croissante),
absorbent environ 12 % du
revenu
brut des UPV concernés.
3 - Les charges connexes
Elles
intègrent
les
charges
locatives,
les
frais
d'électricité
(surtout pour les maquis,
les
kiosques,
et
les
restaurants-bars),
les
combustibles (gaz,
charbon,
bois),
le
transport des personnes et des marchandises.
Suivant leur niveau
d'équipement des UPV,
ces éléments entrent diversement dans
les
charges d'exploitation.
Dans 73 % de cas, les restaurateurs en établissement ne
supportent aucune charge locative,
car ce sont généralement
des
locaux appartenant à la famille qui sont mis en exploitation.
Ce
non
paiement de loyer contribue ainsi à la minimisation du
coût
de
production et,
par conséquent,
à l'élévation du revenu
de
l'artisan.
On
peut estimer,
en moyenne,
l'ensemble des
charges
,
d'exploitation
a
environ 25 % du revenu brut
des
maquis,
des
kiosques et des restaurants-bars, 20 % du revenu brut des UPV des
espaces-restaurants
et 15 % du revenu brut des
restaurants
sur
220
table mobile et des restaurants spontanés.
Les restaurants ambu-
lants
n'ont
presque pas de charges connexes sinon les
quelques
rares paiements de taxes municipales journalières, quand ils sont
surpris autour des places des marchés.
Disons que,
toutes déductions faites du chiffre
d'af-
faires,
le
revenu
net obtenu est la rémunération
imputée
des
chefs
d'UPV.
Il
est
difficile
de
dégager
un
bénéfice
net
comptable,
calculé sous forme de différence entre le bénéfice et
la
rémunération imputée des chefs d'UPV car la gestion comptable
semble ne guère s'y prêter.
BI Résultats d'exploitation
Pour une meilleure analyse de la distribution du
chif-
fre d'affaires au sein de notre échantillon,
il est nécessaire de
répartir les données par catégorie de restaurant. Cette opération
est mise en évidence par le tableau suivant.
Tableau n'
32
Distribution des chiffres d'affaires mensuels par
catégorie de restaurants
!Resto sur! Espace
!Restau-
! Restau-
Kaquis
Rest~-
Kiosque 1 table
' restau- !spcntané !ambulant
bar
! mobile
! rant
!
!
' 1
,
-----------------~_._-------_._-------- --------- ---------'--------- --------- ---------
51].000 -
j'l.999
32
d
21
10U0i) - 199,999
16
?û
24
200.000 - 299.999
8
11
10
39
7
300.000 - !99.999
10
4
14
500.C00 - 600.000
17
35
18
51
7~
21
Xen F.CH
438.570
266.665
J3i.!99
118.084
2uU83
152.563
14.999
221
l\\otons
que,
sur
la population des
281
chefs
d'UPV
interrogés,
seulement
266 ont donné des informations sur
leurs
chiffres d'affaires,
soit un taux de refus de réponse de 6 %.
En
ce
qui
concerne
le
revenu brut
proprement
dit,
le
tableau
croisant les classes de chiffres d'affaires et les catégories
de
restaurant met en relief un étirement de la distribution vers les
deux
extrêmes.
La dispersion des chiffres d'affaires offre
une
parallèle
avec celle du capital investi.
Le potentiel du revenu
brut
semblant dépendre étroitement du niveau
capitalistique
de
l'UP\\'.
Tableau n
33
Croisement
niveau
d'investissement/chiffres
d'affaires
!Niveau d'investissement
Chiffres d'affaires
!
(N.1. )
(C. A. )
!Naquis
99.999 <NI ~ 1.000.000
199.999 < CA ~ 600.000!
!
!Restaurant bar!
99.999 <NI ~
499.999
99.999 < CA ~ 499.999!
!Kiosques
99.999 <NI ~
499.999
99.999 < CA ~ 499.999!
!
!Resto sur
!table mobile
10.000 <NI ~
99.999
50.000 < CA ~ 299.999!
!Espace
!restaurant
10.000 <NI ~
99.999
50.000 < CA ~ 499.999!
!Restaurant
!spontané
10.000 <NI ~
99.999
50.000 < CA ~ 299.999!
!Restaurant
!ambulant
10.000 <NI ~
19.999
50.000 < CA ~
99.999!
Le
chiffre d'affaires augmente à mesure que le capital
investi s'accroit.
On comprend alors que les UPV les plus capita-
lisées
comme les maquis,
les restaurants-bars et
les
kiosques
222
concentrent plus de richesse que les autres catégories de restau-
rant à niveau d'investissement plus modeste.
Tout comme dans le cas de l'investissement,
on constate
une
forte
tendance à
la concentration du chiffre
d'affaires
à
l'intérieur de chaque structure de restaurant.
La répartition des effectifs
dans
le tableau n
révèle
aussi
une
parallèle entre les niveaux de revenu et de
chiffres
d'affaires.
Tableau n
34
Croisement
chiffres
d'affaires/revenu
net
mensuel
:< 1.000 F.CFA
:0
30
50
70
90 !! 10 !120 !150 ! 110
2DO!
,
Rn œ
~
~
~
~
~
1 ~
~
e~!
P-
p.
P.
P.
P.
R ! F.
! R ! R ! ?
• !
! (
! (
! (
! (
! " ! 1
,~, ft..
:0
30
50
iO
90 !110 !130 !15 a ! 11 Û !200
--------------- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ----
50000-99999
36
15
- !
- ! - ! - ! . !
:CC1j']û'I~9999
46
li
!
-
- ! - ! - ! - ! - ! - !
~';')00rj-299m ! -
- ! - ! ! 1 22
1 ?
l,
12
- ! - !
~ I~' ;~. 1) I~ 0-4399~ 3
. ! 12
13
5'j 0~::j 0-SIj ':1(1(:0
- ! - ! - ! - ! - !
! 9! 82 ! 32 ! 22 ! 34 ! J2 ! 24 ! 16 ! 12!
2!
1!
La
dispersion
du croisement CA/Rn m est
assez
large
pour l'ensemble de la population enquêtée
les classes extrêmes
qui
ont
été retenues sont S 50.000 CA ~ 600.000 F.CFA
pour
le
chiffre d'affaires et 0
< Rn m> 200.000 F.CFA pour le revenu
net
mensuel.
223
Le
revenu mensuel moyen dans chaque classe de
chiffre
d'affaires est de
50.000 -
99.999
Rn m = 25.367 F.CFA
100.000 - 199.999
Rn m = 28.333 F.CFA
200.000 - 299.999
Rn m = 99.487 F.CFA
300.000 - 499.999
Rn m = 114.857 F.CFA
500.000 -
600.000
Rn m = 135.882 F.CFA.
La
répartition du reven~ net mensuel par catégorie
de
restaurant présente encore plus d'intérêt pour notre analyse.
Tableau n
35
Contingence simple
catégories de restaurant/
revenu net mensuel
x !.OOO t.CFA
R~'/e nu !le~
10
30
50
7'j
90 ! 110 !130 !! 5Û !l ; Q !2') r)
ruer.suel
~
! ~
! ~
e~
R
R
R
R
R
R
R
R
R 1 R
Sa~égGrie
i,
! (
! (
! (
! l,
! (
(
! (
! (
! "
de re s: 'J
:0
3'j
50
70
90 !!: û !130 !15ü ! 170 !EO
,
1
1
------------------ ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ---- ----
~a1'Jis
- ! - ! -
10
14
1
Resta1.rar.t-bar
- ! - ! -
- !
2
- !
- ! -
Kics1ue
- ! - ! -
- ! . ! -
Resto sur table
mobile
2
26
- ! - ! . ! - ! -
Espace-restauran:!
30 !13
14
. ! - ! . ! .
!
Kes:c spontané
10
- ! - ! - ! - ! -
Eestc a~bu~ant
16
- ! - ! - ! . ~ - ! - ! .
! 9! 92 !32
! 22 ! 34 ! 32 ! 24 ! 16 ! 12!
2! l !
1
Les
unités
générant les revenus les plus élevés
sont
les maquis,
les restaurants
et les kiosques (50.000 F.CFA ~
Rn
224
mens < 150.000 F.CFAI. Quelques cas de dépassement de ces limites
ont
été observés au niveau de sept maquis et de six restaurants-
bars.
Les
revenus
les plus élevés (170.000 F.CFA ~ Rn
mens
~
200.000 F.CFA) ont été constatées chez les tenanciers de maquis.
Un des paramètres les plus significatifs de cette
ana-
lyse est la forte proportion (près de 45 %) de chefs d'UPV qui ne
parviennent
pas
à
s'assurer un gain mensuel
égal
au
salaire
minimal garanti
(SMIG)
ivoirien qui,
par rapport au coGt élevé de
la
vie
à Abidjan,
est déjà faible.
Méme en nous élevant
dans
l'échelle
des revenus,
très peu d'acteurs du
secteur
informel
alimentaire
(32,2
%
seulement) excèdent la
barre
des
90.000
F.CFA.
L'examen des données sur le rapport entre revenu net
et
niveau d'investissement montre que les gains des chefs
d'UPV
les
moins capitalisées sont inférieurs au S~IG mensuel
qui
est
environ de 33.000 F.CFA.
L'hypothèse du caractère subsistance de
l'activité
semble vérifiée.
Le petit commerce des mets préparés
est,
dans la majorité des cas,
une activité de survie qui,
loin
de permettre une accumulation du capital couvre parfois
pénible-
ment
les
besoins minima vitaux de la famille.
Les données
sur
l'épargne et la consommation des ménages nous le confirmeront.
Section 2 - ANALYSE DES DONNEES SUR LA CO~SOMMATION
DES MENAGES
D'ACTEURS
Après
l'évaluation
du revenu tiré de la vente
d'ali-
ments,
nous nous proposons d'apprécier,
l'impact de
l'activité
sur
l'environnement
social des chefs d'UPV et "l'emprise de
ces
225
derniers sur leur propre avenir.
Pour ce faire,
l'analyse de la
consommation
des
ménages des acteurs et celle de
leur
épargne
semblent être de bons indicateurs socio-économiques.
Mais
avant d'aborder le premier
niveau,
c'est-à-dire
l'analyse
des données sur la consommation,
quelques
précisions
méthodologiques s'imposent.
AI Préliminaires méthodologiques
Pour
l'étude des niveaux de consommation,
nous
avons
essentiellement
axé
notre
analyse sur la
sous-population
des
ménages
pour lesquels le revenu tiré de l'artisanat
alimentaire
constitue
la seule composante du budget familial
(50,5
%).
Ce
choix méthodologique s'explique par la complète disponibilité des
données
statistiques
dans
notre enquête
socio-économique
sur
cette sous-population.
L'analyse
du
degré
d'intégration du revenu
tiré
de
l'artisanat alimentaire dans les budgets familiaux aurait pu être
d'un grand intérêt si nous avions pu disposer de données
fiables
sur la structure des budgets composites.
Nous le signalions plus
haut,
le
taux très élevé de refus de réponses aux questions
de
revenu du conjoint ou des associés,
comprises généralement comme
ingérence
dans
la vie privée,
ne nous permettait
guère
cette
évaluation.
Nous
pensons
néanmoins que
la
représentativité
des
ménages
à un seul actif dont le revenu net correspond au
budget
entier
des ménages,
autorise une analyse valable
des comporte-
ments de consommation.
226
Constituée de 142 chefs d'UPV,
cette sous-population se
répartit,
par rapport à l'échelle des revenus,
comme suit
Tableau n°
36
Répartition de la sous-population à un seul
actif
dans l'échelle des revenus
x 1.000 F.CFA
Revenu
10
30
50
iO
90
!110
!130
!150
!lïO !200
~
~
~
~
~
~
~
~
~
et
R
R
R
R
R
! R
! R
R
R
+
<
<
<
<
<
<
!
<
<
<
Sexe
30
50
iO
90
!110
!130
!150
!liO !200
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Femmes
4
17
13
23
21
14
13
6
2
1
Hommes
3
14
6
2
1
2
TOTAL
ï
31
19
25
22
14
13
8
2
1
Une des variables explicatives des attitudes de consom-
mation
serait la variation de la taille des ménages.
Il
s'agit
d'un
aspect qu'il faille examiner de près car les fortes
diffé-
rences
de
taille
peuvent
biaiser
l'analyse
des
niveaux
de
consommation.
Nous avons également tenté un regroupement des
ménages
d'après
le rapport entre le revenu net et la taille des ménages.
Il est évident que plus nombreux sont les individus composant
un
ménage, moins important est le revenu par tête.
227
Tableau n
37
Croisement taille des ménages/revenu net dans les
ménages à un seul actif
x 1000 F.CFA
10
30
50
70
90
!110
!130
!lS0
!lïO
!200
$
$
$
$
$
$
$
~
~
et
R
R
R
R
R
R
R
R
R
+
<
<
<
<
<
<
<
<
<
30
SO
70
90
!110
!130
!lS0
!lïO
!200
1 membre
ï
8
1
3
19
2 -
3
20
6
7
5
5
1
1
45
4 -
6
3
! 12
15
13
8
7
5
1
1
65
7 - 10
4
1
5
2
1
13
TOTAL
7
31
! 19
25
22
14
13
8
2
1
A la lecture de ce tableau croisé,
on constate
1.
que
les
budgets
plus
élevés
supportent
nombre
d'individus plus élevé.
2.
En meme temps que le revenu s'accroit,
la taille du
ménage
augmente,
ce qui correspond au schéma observé
dans
les
enquêtes
budget-consommation,
en
Afrique
comme
en
Amérique
Latine.
L'augmentation
des sollicitations communautaires au fur
et
à
mesure
de l'accroissement du revenu est
ici
une
donnée
capitale.
B/ Structure des dépenses de consommation des ménages
Nous
nous proposons ici d'analyser la structure et
la
nature
des dépenses suivant les données recueillies lors de
nos
enquêtes socio-économiques.
228
1-) Structure des dépenses des ménages
Notre
étude
situera ici dans quelles
proportions
le
budget
est
affecté
aux fonctions de consommation
suivantes
alimentation,
logement,
éducation,
transfert d'argent,
habille-
ment,
soins de santé,
loisirs.
Le raisonnement se fonde essen-
tiellement ici sur le revenu moyen.
Le
tableau
suivant
donne la
structure
générale
du
budget des ménages.
Tableau n
38
Structure générale des dépenses des ménages
F.CFA
~Postes de consommation
Dépense mensuelle
% du budget
par ménage et par
familial
mois en F.CFA
- Alimentation
32.850
38,6
-
Logement
8.240
21,4
-
Education
12.780
15,3
-
Transfert d'argent
(épargne -
don)
10.120
11 ,8
- Hab illement
5.402
6,3
-
Santé
3.799
4,4
-
Loisirs
1.879
2,2
TOTAL X
85.070
100,0
Il ressort de ce tableau que le revenu moyen se
répar-
t i t
de façon inégale entre les postes de consommation
ci-dessus
cités.
229
Le poste de l'alimentation se distingue nettement des autres avec
une
dépense moyenne de 32.850 F.CFA sur un total de 85.070 F.CFA
soit un coefficient budgétaire de 38,6 %.
Les dépenses de
loge-
ment
arrivent en seconde position avec une dépense mensuelle
de
18.240 F.CFA par ménage soit un coefficient budgétaire de 21,4 %.
~ous
pouvons
avancer
ici l'hypothèse d'une
surévaluation
des
loyers
dfie
aux déclarations de dépenses fictives
de
personnes
logées
gratuitement par un parent ou un ami.
Il faut
néanmoins
remarquer que l'alimentation et et logement,
à eux seuls,
consti-
tuent près de 3/5 du budget des ménages.
Les
autres postes de consommation représentent 40 %
du
budget,
répartis
par
ordre
d'importance
décroissante
comme
suit
éducation 15,3 %,
transfert d'argent
Il,8 %,
habillement 6,3 %,
santé 4,4 %,
loisirs 2,2 %.
Notons que l'épargne qui n'est
pas
une dépense,
mais que nous classons dans la rubrique "transferts"
d'argent
par commodité,
représente environ 25 % du budget de ce
.poste.
* Nature et structure des dépenses d'alimentation
Comme le montrait le tableau n
32,
comparativement aux
autres,
l'alimentation est le poste qui absorbe le plus le budget
des
ménages.
Ceci
pourrait s'expliquer prioritairement par
la
dislocation du groupe de commensalité qui,
du fait des distances,
ne
peut
se
retrouver pour le traditionnel
rythme
des
trois
repas.
Selon
les
résultats de nos
enquêtes,
le
rythme
d'un
repas/jour en famille semble le plus fréquent,
ayant été constaté
dans
67,8
%
des ménages.
Seul le repas du soir
est
pris
en
famille.
Les
dépenses d'alimentation extérieure liées aux
deux
230
précédents repas,
pris hors domicile,
viennent considérablement
gonfler la part du budget affectée à l'alimentation.
De
même,
le
manque d'équipement de conservation
des
denrées périssables (3,2 % seulement des ménages à un seul
actif
dispose
d'au
moins un refrigérateur) explique la
fréquentation
régulière
du
marché
(tous les jours 44,2 %,
tous les
2
jours
47,2 %).
Les
ménages échappent donc difficilement aux
fluctua-
tions
des
prix
des
denrées
alimentaires
sur
les
marchés,
lesquelles
ont
forcément des incidences souvent
négatives
sur
leur budgétisation déjà aléatoire.
Les
habitudes de consommation alimentaire sont,
comme
dans bien d'autres catégories
socio-professionnelles,
fortement
liées à l'origine ethnique,
au revenu et à
la taille des ménages
(cf.
EBC79 n"
1). Ces trois variables restent discriminantes dans
la consommation des aliments de base (tubercules,
féculents).
La
variable
ethnique
est
celle qui détermine le
plus
les
choix
alimentaires.
La
consommation
des
plats
principaux
semble
respecter les spécificités alimentaires
ethniques ou
régionales
des
commensaux,
sauf dans le cas du riz dont le prix moins oné-
reux
convient aux ménages de taille élevée et donc à bas
revenu
par tête.
Le tableau 39 donne la structure détaillée des dépenses
d'alimentation selon les grands groupes de produits pour les
142
ménages de chefs d'UPV composant notre sous-population.
231
Tableau n
39
Dépenses d'alimentation selon les grands groupes
de
produits
!Groupes de produits
Dépense par
% de la
Coefficient!
!
d'alimentation
ménage
dépense
budgétaire
!
alimentaire!
général %
!Céréales
6.900
21,0
8,1
!
!Légumineuses et condiments
1.000
3,0
1 ,3
!
!
!Légumes
938
2,8
1 ,2
!
!Fruits et noix
1.102
3,3
1,2
!
!Viandes et volailles
5.010
15,2
5,8
!Poissons
2.300
1,5
2,7
!
!Produits laitiers et
!
oeufs
700
2,1
0,8
!Sucre et produits sucrés
1.200
3,6
1,4
!Huiles et corps gras
2.000
6,0
2,4
!
!Boissons et repas à
l'extérieur 10.200
31,0
12,0
!
!Combustibles
1.500
4.5
1 ,7
32.850
100,0
Selon les données du tableau,
une part très importante
du
budget alimentaire est réservée aux produits alimentaires
de
première nécessité et à
base calorique
céréales 21 %,
huile et
sucre 9,6 %.
A eux seuls,
les produits céréaliers accaparent près
d'un
cinquième de ce budget.
Les produits riches
en
protéines
animales (volailles,
oeufs,
lait,
poisson,
viande)
représentent
24,8 % soit près du 1/4 de ce budget.
Dans ce groupe,
les viandes
et
volailles constituent à elles seules près de 2/3 des dépenses
en protéine animale.
232
Les consommations extérieures,
boissons comprises,
et les
com-
bustibles (charbon de bois,
bois,
pétrole,
gaz) absorbent 35,5 %
des dépenses alimentaires totales.
Une
part
de
9,1 % des dépenses alimentaires est
affectée
aux
légumineuses,
condiments,
légume
et fruits,
ce
qui
est
une
faible allocation,
par rapport aux autres rubriques.
* Nature et structure des dépenses de logement
Le
logement est,
après l'alimentation,
le
poste
de
dépense
le
plus important des ménages.
Sa part dans le
budget
s'élèvant à 21,4 %.
Connaissant la cherté du logement à Abidjan,
on
comprend aisément les limites du choix qu'impose
cette
fai-
blesse
du budget affecté au logement,
comme en témoigne la mau-
vaise qualité des logements occupés.
Par rapport à
la typologie de l'habitat établie par Ph.
Antoine,
A.
Dubresson et A.
Manou-Savina,
les 142 chefs d'UPV se
répartissent de la façon suivante
Tableau n
40
Répartition des ménages à un seul actif dans les
structures de l'habitat
0r~anlsa~iGn
Opérations
Habitat
Habitat
Habitat
Habitat
! spatiale de
! groupées
tradition-! évolutii
Centre
spontané
! l' habitat
nel
!
urbain
illégal
,--------------,
.
.
Hiérarchie
. __
éccnollique ! Nb
!
%
! Nb
!
~
! Nb
!
% ! Nb
! % ! Nb ! %!
1
Economique
11
11,9
- !
! 6.3
Û.1
- ! - ! 27
Très économique
6,3
fi. J
42 ! 29 .5
- ! -
- ! - ! 60
!
Sommaire
3.5
a7 ! 19 .0
- ! -
23 !16.1! 55
!
26! 18,2!
14! 9.8
1& !54.8!
I! O,1!
2J !16,1!
1
233
En
considérant la structure de l'habitat sous
l'angle
de
la
"hiérarchie économique",
telle qu'établie par
l'enquête
BCEOM-BNETD,
à partir de la qualité des matériaux utilisés
pour
la
construction
et les divers équipements du logement,
18,9
%
seulement des chefs d'UPV disposent du minimum
d'infrastructures
convenables
(meubles,
matériel
électro-ménager tout
au
moins
sommaire,
adduction
d'eau et d'électricité) et une surface suf-
fisante
pour
le ménage.
Les types "très économique"
et
"som-
.
"
malre
,
qui
se distinguent très difficilement sur
le
terrain,
accueillent
respectivement
42,1
%
et 38,6 %
de
notre
sous-
population.
Le "très économique" recouvre des lotissements dotés
d'un équipement succinct qui se dégrade très vite,
tandis que le
"sommaire"
regroupe des constructions en dur
sans
pratiquement
aucun
équipement
et
des constructions en
planches,
voire
en
matériau de récupération.
Au
plan
"organisation spatiale de
l'habitat",
notre
sous-population se répartit comme suit
-
opérations
groupées,
18,2
%;
logements en
bandes
réalisés tantôt par des promoteurs privés mais,
le plus
souvent
par
des
sociétés publiques comme la SIHCI
(Société
Immobilière
d'Habitation de Côte-d'Ivoire),
la SICOGI
(Société Ivoirienne de
Construction
et
de
Gestion de
l'Immobilier)
et
la
SOGEFIHA
(Société Ivoirienne de Gestion et de Financement de l'Habitat).
-
Habitat traditionnel,
9,8 %,
construit sur le modèle
de la résidence ébrié
(1).
(1)
Ph.
Antoine,
A.
Dubresson,
A.
Manou-Savina, Abidjan "côté
cours" j
op.
cit.,
p.
129.
234
- Habitat
évolutif,
54,8
%.
I l
constitue
la
plus
ancienne forme d'habitat moderne adoptée par les
Abidjanais.
I l
peut
évoluer
progressivement par la construction successive
de
nouveaux
bâtiments au sein de la cour,
ou par
la
construction
d'étages
sur les toitures en terrasses existantes.
Cette
forme
d'habitat,
sise généralement
sur des parcelles de 40m x 40m,
est
aussi caractérisée par une densification progressive.
- Habitat
de centre urbain,
0,7 %.
I l est
constitué
essentiellement par l'habitat collectif vertical,
dont la dispo-
sition
s'inspire
des réalisations des sociétés immobilières
de
standing.
Le seul chef d'VPV qui occupe ce type de maison est une
ancienne
secrétaire
de direction reconvertie
dans
l'artisanat
alimentaire après avoir été "compressée".
La maison a été acquise
à
l'époque de son premier emploi.
- Habitat
spontané
illégal,
16,1
%.
Ce
sont
des
maisons situées hors des lotissements officiels.
La manière dont les logements sont occupés est ici très
var i ée.
Un seul enquêté aval t
des '1 t i t res de propr iété" a t tes tant
qu'il
était le propriétaire de son logement.
La location et
la
sous-location impliquant un versement de loyer mensuel étaient la
forme
d'occupation
la plus fréquente
(63,6 %1.
Le
logement
à
titre
gratuit
par
la famille est aussi
de
pratique
courante
(11,5 X).
Cette prévalence de la location et de la sous-location
chez
les
micro-négociants est corroborée par les
résultats
de
l'EBC79
selon
laquelle les maisons en
location
représentaient
81 % du parc du logement d'Abidjan en 1978 et 79 % en 1979.
Le
tableau
suivant donne la structure
détaillée
des
dépenses de logement.
235
Tableau n
41
Structure des dépenses d'habitation
Dépenses par !% de la dépense!
% du budget
ménage
!d'habitation
! familial
!
! Loyers et charges
9.268
50,8
10,8
!
!Energie et eau
5.103
27,9
5,9
!
!Réparation du logt.
1.208
6,6
1,4
!
! ~1eubles et accessoires
2.661
14,5
3,1
18.240
100,0
21,4
Ce tableau fait
ressortir,
en premier lieu,
que près de
51 % du budget affecté par les ménages au logement sont
réservés
au
loyer et aux charges connexes.
Viennent ensuite les dépenses
d'énergie et d'eau le plus souvent achetée au coin de la rue
(cf.
J.
Saint-Vil 1983).
Les dépenses pour l'acquisition de meubles et
d'accessoires représentent 14,5 %.
La part du budget réservée
a
la réparation reste très
faible et n'atteint qu'à peine les 7 %.
Il faut noter l'effort locatif des ménages
(rapport du
montant
des
loyers et charges versées au revenu qui
s'élève
à
10,9 %.
Ce taux indique bien l'importance que les ménages accor-
dent au logement en y consacrant une part non négligeable de leur
revenu.
* Nature et structure des dépenses d'éducation
L'éducation reste un poste de dépense essentiel
aussi
bien dans l'analyse des comportements de consommation
des
chefs
d'UPV que dans l'explication de la reproduction de l'arti-
sanat alimentaire.
236
t
!
Les
dépenses en éducation viennent en troisième
posi-
tian,
après celles d'alimentation et de logement dont les niveaux
représentent
pour
cette couche sociale,
l'extrême
limite
des
possibilités.
La part affectée à l'éducation,
qui représente déjà
un
effort financier très important,
reste néanmoins très insuf-
fisante dans le contexte ivoirien,
compte tenu surtout du nombre
d'enfants d'âge scolaire par ménage.
En
effet,
dans les 142 ménages enquêtés,
nous
avons
recensé
272 enfants d'âge scolaire (6 ans et plus),
enfants
du
couple et enfants confiés confondus.
102 d'entre eux
seulement,
soit
37,5
%,
sont effectivement scolariés.
Le niveau
maximum
atteint étant la classe de seconde pour un garçon de 19
ans.
La
proportion d'enfants non scolariés, dûe au manque de moyens
(91 %
des
cas)
reste considérable (32,3 % des enfants).
Le manque
de
moyens si souvent évoqué par les enquêtés,
explique l'orientation
de
bon
nombre d'enfants
(50 sur 272)
vers
l'apprentissage
(18,3 % des enfants).
Notons aussi un taux d'analphabétisme très élevé chez les filles,
qui constituent 62 % de la population de notre échantillon.
Ceci
explique
le mécanisme de reproduction de l'informel
alimentaire
sur
ses
propres bases,
puisque la fille est ici appelée
à
la
relève de sa mère.
Selon les données recueillies auprès des enquêtés
dont
les
enfants
sont scolarisés ou en apprentissage,
les
dépenses
d'éducation se distribuent comme s u i t :
237
Tableau n
42
Structure des dépenses d'éducation
Dépense
% de la dé-
% du budget
mensuelle
pense en édu-!
familial
par ménage
cation
!Frais de scolarité et!
!et d'apprentissage
!
6.185
48,3
7,3
!
!Déplacements liés à
!l'éducation
3.209
25, 1
3,7
!
!Fournitures,outillage!
1.928
15,2
2,2
!
!
~Habillement
1.458
Il,4
1,7
12.780
100,0
Les
dépenses d'éducation représentent environ 15 %
du
budget
des ménages.
Les frais de scolarité
et
d'apprentissage
absorbent
près de 50 % de ce budget.
Viennent ensuite par ordre
décroissant
:
les frais de déplacement
(25,1 %l,
les fournitures
et l'outillage
(15,2 %) et l'habillement (Il
Il,4 %.
* Nature et structure des transferts d'argent
Les
transferts
d'argent
apparaissent
en
quatrième
position
dans
le
budget des ménages
avec
un
pourcentage
de
11,8 %.
Entrent
dans cette rubrique les envois d'argent au vil-
lage,
les
aides et les dons aux membres de la famille
élargie,
les
participations financières aux cérémonies
funéraires.
Pour
des
raisons
de commodité d'analyse,
nous avons
intégré
à
la
rubrique
transfert d'argent,
l'épargne des ménages bien qu'elle
ne soit pas une dépense en tant que telle.
Notons que
l'épargne
(ll Précisons
qu'en
Câte-d'Ivoire,
il
existe
une
obligation
d'uniforme scolaire aux niveaux primaire et secondaire.
238
représente environ 25 % du budget affecté à rubrique transfert de
revenu.
Il
est important de souligner que ces transferts
sous
forme d'argent,
de produits agro-alimentaires
(sucre,
lait,
pâtes
surtout),
de savon et de vêtements ne sont pas économiquement et
socialement
stériles.
Ils permettent de garder le lien avec
le
village
et de manifester son appartenance sociale au monde de la
"civilité citadine".
En retour,
les "cadeaux",
les produits vi-
vriers et l'aide familiale
reçue constituent des contre-dons qui,
dans le contexte social qui est le leur,
permet un ajustement du
revenu fluctuant et en chute constante.
Près de 80 % des ménages
entretiennent
ces
"flux
intra-familiaux".
L'envoi
de
main-
d'oeuvre
familiale du village est surtout la partie
visible
de
l'iceberg.
On pourrait même dire que ce comportement des ménages,
qui
consiste à accueillir de plus en plus de nouveaux membres et
à faire bénéficier l'UPV en contrepartie de l'effort productif de
la famille élargie,
fait partie des stratégies de partage du coût
croissant de vie engendré par la crise économique.
Ces relations
villes/campagnes à travers les échanges intra-familiaux de
biens
et
services
jugés rares de part et d'autre sont
des
pratiques
fréquentes dans les villes d'Afrique et d'Amérique Latine.
Les
faits montrent également,
pour le Sénégal
(1) et
les
pays
d'Amérique Latine
(2),
qu'en période de difficultés économiques,
(1) M.
Odéyé,
Les relations ville/campagne intra familiales.
Le
cas de Dakar in Nourrir les villes en Afrique sub-saharienne,
op.
ciL ..
pp.
256-274.
(2) Safilios-Rothoschild,
The
role of the family:
a neglected
aspect of poverty in World Bank Staff Working Paper
n'
403,
Washington D.C.,
Banque Mondiale 1984.
239
la stratégie de survie passe,
aussi et surtout,
par une capitali-
sation des ressources sociales familiales
(1).
* Nature et structure des dépenses d'habillement
L'habillement
qui
occupe la cinquième place
dans
la
hiérarchie
des
dépenses,
compte pour 6,3 % dans le
budget
des
ménages.
Sa position ordinale pourrait faire penser à une margi-
nalité de la consommation de vêtement,
ce qui serait une
erreur
d'appréciation.
Par rapport aux soins de santé,
l'importance de
la
part qui lui est accordée est sociologiquement significative.
Il
Y
a lieu de se référer à
la psychologie du
migrant
et
aux
valeurs sociales afférentes pour comprendre ici
la fonction de la
consommation
d'effets
vestimentaires.
De me me le fait
que
la
majorité
des
acteurs de l'informel alimentaire soit des
femmes
est un facteur explicatif de l'importance des dépenses d'habille-
ment
dans
le
budget des ménages.
La
consommation
de
tissus
imprimés
(pagnes wax,
fanci),
la représentation sociale et
la
symbolique liées à cette consommation,
très significatives
chez
les femmes,
éclairent sur la nature même de ces dépenses,
qui se
répartissent comme suit
:
(1) C.A.
Giovanni,
L'ajustement
au
niveau
des
ménages
possibilités
et
limitation des
stratégies
de
survie,
in
L'ajustement
à
visage
humain.
Protéeer
les
groupes
vulnérables
et favoriser la croissance,
UNICEF -
Economica,
1987,
pp.
111-128.
240
Tableau ne
43
Structure des dépenses d'habillement
(1)
Nature de produit
!Dépenses mensuel-
% de la dépense
!les par ménage
d'habillement
!
(en F.CFA)
!Tissus d'habillement
(pagnes)
2.010
37,2
!
!
!Frais de couture
1.215
22,4
!Chaussures
950
17,5
!Produits cosmétiques
809
14,9
!Autres
418
7,7
5.402
* Nature et structure des dépenses de santé
Le
tableau
suivant donne le détail
des
dépenses
de
santé pour l'ensemble des 142 ménages de chefs d'UPV.
Tableau n°
44
Structure des dépenses de soins de santé
Dépense
% de la
% du budget
mensuelle
dépense
familial
par ménage
de santé
(en F.CFA)
!Soins médicaux "formels"
1.200
,
,
31,5
1,4
!Soins médicaux "informels" 2.069
,
54,6
2,4
!Produits d'hygiène
530
13,9
0,6
3.799
4,4
(1) Nous
parlons ici d'habillement au sens large puisqu'il a une
rubrique "produits cosmétiques" liée à la parure.
241
Notons
que 4,4 % seulement du revenu des ménages
sont
affectés à la santé. On pourrait croire,
au regard de ce pourcen-
tage,
que
l'affectation
de revenu y est moindre parce
que
la
couverture
médicale est prise en charge par l'Etat ou les
assu-
rances. Mais cette part limitée dans le budget reflète assez bien
l'état de santé de cette population qui,
bien qu'habitant en zone
urbaine
bien
équipée en structures médicales,
souffre de
maux
primaires.
A
la
question de savoir quelles sont
les
maladies
auxquelles sont sujets les membres de la famille,
les cinq mala-
dies
les
plus citées sont
le paludisme
(100 %)
la
diarrhée
(83,5 %),
la toux (63,5 %),
le kwashiorkor (43,2 %),
et la tuber-
culose (33 %).
Le taux de fréquentation des centres de santé est très faible
et
constitue
~énéralement la dernière étape d'un itinéraire
théra-
peutique
qui
commence le plus souvent par le traitement par
la
pharmacopée et les consultations d'un guérisseur.
Les crises
de
paludisme
répétées
parce
que mal soignées
(croissance
de
la
résistance
des
falciparium
en
zone
d'endémie),
généralement
interprétées par les malades comme malédictions,
sont le premier
motif
de
consultations
"informelles"
(1),
qui
justifient
la
structure des dépenses ci-dessus (tableau n'
40).
* Nature des dépenses de loisir
Le
loisir,
dans
le ménage des acteurs de
l'informel
alimentaire,
est un besoin socio-économique marginal.
Ceci n'est
(1) Nous parlons de soins médicaux "informels" par opposition aux
"formels"
pour désigner les consultations de guérisseurs
et
de
thérapeutes
non
agréés par le
Ministère
de
la
Santé
Publique et de la Population.
242
guère étonnant au vu de la difficulté à couvrir les consommations
de
première nécessité comme l'alimentation,
le logement
et
la
santé.
Sa
part dans le budget familial
(2,2 %) est un indice de
cette marginalité.
Priorité est donnée aux "loisirs du
dedans"
par rapport aux "loisirs du dehors".
Le "temps à soi" devient du
"temps chez soi".
Les principaux moyens de détente sont la télé-
vision et le poste de radio.
Les "loisirs du dehors",
tels que la
fréquentation
des
salles de spectacle et de
cinéma,
sont
des
pratiques rares (2,1 %).
Les visites dominicales à des parents et
les
manifestations des associations ethniques occupent également
une place de choix dans l'affectation du "temps libre".
La "culture du pauvre" prend ici des contours très définissables.
Comme
le constatait aussi R.
Hoggart (1) dans son étude sur
le
style de vie des classes populaires en Angleterre,
une
cons tel-
lation
d'attitudes
et
de
comportements
commandés
par
la
conscience
confuse du destin objectif et subjectif d'une
commu-
nauté
soumise aux limitations de moyens est ici très
prononcée.
Les
manifestations concrètes en sont le caractère local et
com-
munautaire des divertissements.
Section 3 -
LES COMPORTEMENTS D'EPARGNE DANS L'INFORMEL ALIMENTAIRE
Le
deuxième
niveau de l'étude
des
comportements
de
consommation
des acteurs est l'analyse de
la
fonction-épargne.
Celle-ci
est
aussi un indicateur du niveau de
satisfaction
du
sujet
économique,
de sa capacité de calcul économique,
de
son
(1) R.
Hoggart,
La
culture du pauvre,
Les Editions de minuit,
Paris 1970; p.
44.
243
potentiel
d'emprise
sur
l'avenir
qui,
lui-même,
dépend
de
l'ampleur
des
risques
de la
vie
quotidienne,
des
habitudes
sociales et du niveau de vie.
Cette
estimation se fera essentiellement à travers une
analyse des mécanismes,
des rythmes,
des stratégies et des types
de dépenses financés par l'épargne.
AI Evaluation de l'importance et de la capacité d'épargne
Du fait de la faiblesse générale du niveau de
vie,
la
mise en réserve d'une partie du revenu est rarement réalisée,
la
consommation
primaire
étant
déjà
difficilement
couverte.
La
faible capacité d'épargne des acteurs en est l'indice.
L'épargne
n'est effective que chez 34 chefs d'UPV,
soit 24 % de
la
sous-population.
Les comportements d'épargne les plus
régu-
liers
des
ménages pour lesquels le revenu
tiré
de
l'informel
alimentaire
constitue
l'unique
composante du
budget
familial
s'observent
surtout dans la population des exploitants ayant
un
revenu
supérieur à
110.000 F.CFA 168 %).
Précisons
qu'à
cette
sous-population d'épargnants appartiennent surtout les tenanciers
de maquis,
de restaurants-bars et de kiosques.
Les efforts four-
nis par les chefs d'UPV les moins aisés sont non moins importants
mais
dispersés.
Ainsi,
la
forte relation existant
entre
les
revenus
les
plus élevés et la capacité d'épargne occulte
celle
qui
pourrait exister entre le niveau de l'investissement
et
la
capacité
d'épargne puisque,
comme nous le soulignions,
les af-
faires
qui génèrent les revenus les plus élevés sont
constitués
par les UPV les plus capitalistiques.
244
L'effort
d'épargne
est plus important chez les
chefs
d'VPV les moins aisés.
Il atteint 25 % en moyenne chez ceux dont
le revenu est inférieur à
110.000 F.CFA et 15 % chez ceux dont le
revenu est supérieur ou égal à
110.000 F.CFA.
Cette propension à
épargner chez les acteurs parmi les moins aisés,
peut s'expliquer
par l'insécurité permanente due aux fluctuations de leur revenu.
Chez les acteurs dont le revenu est
inférieur à
110.000
F.CFA,
l'épargne n'est pas seulement la partie du revenu qui n'a
pas été consommée.
Elle est le fruit de certaines privations qui
vont
jusqu'à la privation d'aliments et au renoncement au
soins
élémentaire en matière de santé.
L'épargne y apparaît comme
une
obligation
pour
satisfaire certaines exigences
communautaires,
telles que l'appel à cotisation à la suite d'une mort subite.
La
crainte
d'être
mis
au
ban
de
la
famille
en
pareilles
circonstances
reste un puissant motif d'épargne,
meme quand
le
revenu
couvre difficilement les besoins vitaux du
ménage.
D'où
l'intérêt
de
la vente à crédit qui constitue un
moyen
d'auto-
contrainte à l'épargne.
BI Comportements d'épargne et destinations économiques des flux
Les
pratiques
d'épargne
monétaire
dans
le
secteur
informel
alimentaire sont nettement différenciées.
La
base
de
cette différenciation se trouve essentiellement dans la stratifi-
cation
économique
qui
hiérarchise les UPV.
Cette
variété
de
comportement
d'épargne
dans
l'informel
alimentaire
semble
rencontrer une réponse aussi diversifiée des réseaux de collecte.
Les
différentes
institutions
informelles
auxquelles
245
s'adressent
la
majorité
des
épargnants
du
secteur
informel
alimentaire peuvent être classées en trois catégories
(1)
-
les banques mobiles
-
les associations d'épargne de longue durée
-
les tontines.
1 -
Les "banques mobiles"
Ce
sont en général des "courtiers de ménages
fortunés
et puissants",
qui développent une activité de collecte pour leur
propre compte.
Les dépôts sont de fréquence variable,
allant du
dépôt
journalier
d'une
somme modique à un dépôt
mensuel
plus
important.
Préférence semble être accordée aux dépôts journaliers
(10 sur 34),
les sommes versées variant de 500 F à 2.000
F.CFA.
Deux cas seulement de dépôt mensuel ont été enregistrés,
l'un de
10.000 F.CFA et l'autre de 15.000 F.CFA.
2
-
Les associations d'épargne de longue durée
Il
s'agit d'une formule d'épargne rotative
o~
chaque
épargnant
fournit
généraleent une somme constante et
prédeter-
minée
à
date fixe.
Les sommes collectées sont
confiées
à
un
trésorier,
jusqu'à
échéance de la période d'épargne.
A
terme,
toute
l'épargne
collectée au cours de l'année est
restituée
à
l'ensemble
des participants qui décident chacun de son
utilisa-
tion.
Cette
formule
d'épargne
est
moins
fréquente
que
la
première.
Seulement
4 chefs d'UPV la pratiquaient.
Les dépôts,
généralement mensuels,
sont ici en moyenne de 10.000 F.CFA.
(1)
Nous tenons cette description des structures d'épargne de
C.
Y.
Eboué,
Epargne informelle et développement économique en
Afrique in Mondes en développement,
Tome 16,
1988,
n'
62-63;
pp.
35-64.
246
3 -
Les tontines
Elles
représentent la formule d'épargne la plus
popu-
laire dans l'artisanat alimentaire.
"Ce sont des associations qui
fonctionnent
suivant le principe du jeu à somme nulle en théorie
des
jeux:
dans le cas de deux joueurs en
présence,
l'un
des
joueurs gagne ce que perd l'autre joueur;
la somme algébrique des
gains est nulle.
Chaque épargnant assimilable à un joueur, dépose
une
mise à une date fixe.
Le total des mises est inclus dans un
fonds commun attribué à un des bénéficiaires, ceci déterminant le
gain du joueur qui reçoit le fonds.
A la fin d'un cycle de gains
dont la durée dépend du nombre de joueurs, chacun de ces derniers
a
reçu des autres participants autant qu'il a versé de
mises
à
l'occasion
des
tours
successifs de collecte.
Le gain net
est
donc nul en termes nominaux".
50 % des épargnants de notre sous-
population
adhèrent
à cette forme de dépôt dont le
montant
se
situe
dans une fourchette plus large (entre 200 F.CFA et
10.000
F.CFA).
Notons que,
sur les 34 chefs d'UPV qui épargnent,
trois
seulement
font
leur dépôt auprès des banques.
Dans
la
grande
majorité des cas,
l'épargne dans l'informel alimentaire reproduit
la structure de l'épargne dans les économies non structurées (1),
en
général,
et
dans les milieux ruraux
africains,
en
parti-
culier (2).
Cette épargne revêt un caractère informel au sens où
les
institutions officielles ne jouent qu'un rôle marginal quant
à son drainage.
(1) C. M.
Eboué,
. . . op.
ciL
p.
39.
(2) C.
Arditi et J.M.
Young,
L'épargne en milieu rural ivoirien,
in Comprendre l'économie africaine,
Ed.
L'Harmattan,
Paris
1985, p.
205.
247
Les
destinations de cette épargne varient en
fonction
du
temps
mis pour sa constitution.
Les épargnes de
courte
ou
moyenne
durée
(3 à 7 mois)
sont rarement
réinvesties
dans
la
production.
Près
de 85 % de l'épargne de l'année antérieure ont
servi
au
financement de cérémonies familiales et à
l'achat
de
biens de consommation.
Les
épargnes de longue durée
(8 mois et au-delà)
ont,
quant à elles,
trois destinations essentielles et hiérarchisées:
la
première est le financement de la scolarité des
enfants,
la
seconde
est
celui
du
logement.
Le
financement
à
des
fins
d'augmentation du capital de production ne vient qu'en
troisième
position dans l'utilisation de l'épargne de longue durée.
CONCLUSION PARTIELLE
Deux conclusions majeures ressortent de ce chapitre
:
1
- Aussi bien qu'elle contribue fortement à
l'effort
de production des UPV,
la communauté,
de par ses sollicitations
croissantes,
pèse
lourdement sur le budget
des
acteurs.
Nous
avons
montré qu'en même temps que les revenus s'accroissent,
on
note une augmentation des obligations
communautaires.
L'épargne
difficilement réalisée passe presque entièrement dans leur satis-
faction.
D'ailleurs
le
fait que le poste "transfert
d'argent"
passe
dans l'ordre des dépenses avant l'habillement et la
santé
sont à cet effet très révélateur.
2
-
Comme
le
notent les auteurs
du
rapport
SEDES,
"informel"
ne signifie guère indéfiniment extensible",
on
peut
affirmer
a priori qu'il y a dans l'état actuel des
choses,
une
stagnation
voire
une décroissance des revenus consécutive à
la
248
croissance
du
volume
de l'emploi dénotant
une
saturation
de
l'I.A.
Le faible niveau de rémunération des activités,
le niveau
de
vie
et
la faible capacité d'épargne des
acteurs
sont
les
principaux indicateurs de cette tendance à
la saturation.
La
difficulté
de
couverture
des
besoins
socio-
économiques primaires et le manque d'emprise sur l'avenir renfor-
cent
notre hypothèse selon laquelle l'informel alimentaire
est,
dans son état actuel,
une économie de subsistance.
Il
est fort remarquable que,
malgré le dynamisme
caractérisant
cette
activité,
les ressources qu'il génère ne compensent qu'en
partie les effets du déclin économique.
Il ne peut apporter
une
aide
permanente
face à la baisse constante des revenus
et
des
conditions
de vie,
surtout qu'il a des rendements décroissants.
La
forte
possibilité d'accueil du marché
informel
alimentaire
cache mal sa sensibilité aux faibles performances économiques des
UPV
qui pourraient s'expliquer par l'effet
concurrence.
Si
on
peut être sûr du fait que les revenus des acteurs subissent ainsi
indirectement
les
effets de la contraction de l'emploi dans
le
secteur "moderne",
on ne peut qu'émettre,
à défaut d'éléments de
comparaison aux années antérieures,
l'hypothèse de l'effondrement
du
revenu dans l'informel alimentaire et ce,
dans
la
mouvance
générale
de la chute du revenu consécutive
aux politiques
d'a-
justement,
évaluée
dans
le
secteur informel à -8,4 %
par
an
alors
que
cette baisse n'était que de -0,9 % dans le transport,
-3,9 % dans le commerce moderne et 5,9 % dans les banques (1).
Il
(1) SEDES,
Evolution et répartition des revenus en Côte-d'Ivoire.
Travaux de planification.
Sedes,
Paris 1984.
249
faut
donc évaluer à leur juste valeur,
les limites de l'effica-
cité
de ce mécanisme de survie par la production alimentaire
et
voir
dans quelle mesure une politique de soutien peut
améliorer
son efficacité tout en sauvegardant son caractère informel,
seul
moyen d'assurer sa pérennité.
250
Chapitre VIII
IMPORTANCE SOCIO-ECONOMIQUE DE LI INFORMEL ALIMENTAIRE
L'importance
socio-économique
du
secteur
informel
al imentaire pourrait
se mesurer
par
rapport
â
-
sa contribution
â
l'économie nationale
-
sa
place
dans
le système al imentaire et
son
apport
nutritionnel
â
la population urbaine.
Section 1 - ca~TRIBUTION
DE L' INFORMEL ALIMENTAIRE A
L'ECONOMIE
URBAINE
Lac 0 n tri but ion dei 1 i n for me 1 a 1 ime nt air e à
l 'économ i e
nationale peut être appréciée sous deux angles
- du point de vue de
l'emploi
et du revenu
- du
point
de vue de
l' insertion des
femmes
dans
le
tissu économique urbain.
AI Du point de vue de l'emploi et du revenu
Selon
les résultats de notre recensement,
l ' 1 •A • mo b i -
1 i se,
en
janvier 1987,
environ 75.230 actifs
(chefs d'UPV
et
main-d'oeuvre
confondus) soit 4,4 % de la population abidjanaise
estimée à 1.724.177 habitants en octobre 1985 (1).
Sous
réserve
de
vérification,
on avancera
l'hypothèse selon
laquelle
l'I.A.
est
la branche du secteur non structuré qui
offre
le plus
d'em-
plois,
voire
absorbe
le plus de
main-d'oeuvre excédentaire
du
secteur
formel.
A preuve,
sur
les 281 chefs d'UPV
interrogés,
l ' i n ve s t i s seme n t
dan s i ' i n for me 1 a 1 ime n t air e é t ait pou r 33, 02
%
une alternative à
la compression du personnel,
ultime conséquence
des
mesures
de
programme d'ajustement que
connaît
l' économi e
ivoirienne et qui
vise à restructurer
le secteur parapublic
afin
"d'accroitre son efficacité et sa rentabilité".
Entre
autres
fonctions de
l' 1.A.,
son rôle de
pour-
voyeur
de
revenu a été évalué à travers sa contribution
à
la
( 1) Min j s t ère dei' Eco nom i e e t des Fin a nces ,
La Cô t e - d ' 1v0 ire en
chiffres,
éditions 86-87,
Ed.
Inter Afrique Presse,
1988,
p.
23.
252
l
formation
du budget
de consommation des
ménages
concernés.
Si
nous
n'avons pu estimer
son
niveau de participation aux
budgets
intégrés
(budget
fami 1 ial
composé de
plusieurs
apports),
les
don née s deI' en q u ê t e no u son t
mo n t ré que
1e
r ev e n u dei' 1 • A •
est
le seul
revenu
familial
dans
la majorité des
cas
(50,5 %).
L'in-
for me 1 a 1 i me n t air e con s t i tue a i n s i l a s eu 1e sou r c e der ev e n u pou r
50,4 % des ménages à une seule
femme active et
50,9 % des ménages
àunseul
homme actif.
Par
rapport
au budget
familial,
l'impor-
tance de
la
taille des ménages à un
seul
actif est
surtout consi-
dérable chez
les
femmes.
Elle est
en moyenne de
1,6 personne dans
les
ménages à un
seul
actif masculin mais
de 5,6 personnes
dans
les ménages à une seule
femme active,
soit 614 personnes à charge
dans
les
114/226 ménages à une seule
femme active et à direction
féminine.
Notons
à
ce niveau
l'ambivalence du
rôle
du
réseau
fami 1 ial
dont
l 'accroi ssement
des charges
sociales
ne
manque
d'avoir
une
répercussion
négative sur
les
résultats
des
micro-
entreprises pour
lesquelles
il
représente
la principale
force
de
travai 1.
D'une
manière
générale,
l'analyse du
revenu
et
des
comportements
de consommation des ménages montrent assez claire-
me nt que
l' i n for me 1 a 1 i me nt air e est
es sen t i e 1 1eme nt
une
a ct i vit é
de
survie et
que
l'accumulation du capital
n'y est qu'un
phéno-
mène marginal.
Les politiques de protection des catégories
vulné-
rables
et
les mesures
de compensation
des programmes
d'ajuste-
ment,
devraient donc viser
le soutien des
secteurs comne
l ' in-
formel
al imentai re,
qui,
dans
un
sens,
reste une soupape
de
sécurité pour
l'économie,
compte
tenu de
sa place dans
la
redis-
tribut ion des
revenus.
253
BI Du point de vue de l'insertion des femmes dans le tissu écono-
Œ!J...gue urbain
Depuis
quelques années,
le
travai 1 des
femmes
dans
le
processus
de développement
fait
'objet
d'une attention particu-
1 i ère.
Il
s'agit
surtout
de
lever
le
"voile statistique" qui,
en
se
foc a 1 i san t
uni q u eme n t
sur
le travail
salarié
ou
sur
les
cultures de
rapports
(1). masque
l ' importance des activités
fémi-
nines
Dans
ce sens,
puisque
les économies
afr icaines
sont
à
v 0 c a t ion a g r i col e,
l ' é t u de dei a par tic i pat ion
f ém i n i ne a u x a c t i -
vités
de
production
s'est
résolument
tournée
vers
1e
mi 1 ieu
rural.
Le
travai 1 féminin en mi 1 ieu urbain connaît
de ce
fait
une
double occultation,
accrue par
la
tendance des
statistiques offi-
ciel les à se concentrer
sur
le secteur
dit moderne.
Nos
travaux
sur
l'informel
alimentaire pourraient contribuer
à corriger cette
sous-évaluation dans
le contexte abidjanais.
Disons
d'une
façon
générale qu'en Afrique,
l'inégal ité
sexuelle devant
la
format ion et
l'emploi
expl ique
la prédi lect ion
des
femme s
pou r
ce r t a i ne sac t i vit é s é con om i que ste fie s
que
1e
commerce de déta if,
la
restauration et
les services
domestiques.
Les
enquêtes
nous
ont
révélé
que
le
manque
de
formation
intervient
pour
72 % comme
le principal
motif
de
la décision
de
s'investir
dans
, i n for me 1 a 1 i me n t air e
qui
constitue,
surtout
pour
les
femmes,
'un
des
rares circuits d'intégration au
tissu
économique urbain.
Cette
réalité
trouve sa confirmation dans
nos
enquêtes
qui
évaluent
à
80,42
%
la
proportion
des
femmes
( 1 )
Ph.
Antoine,
A.
Traoré,
Pour
une
lisibi lité du
rôle
des
femmes
au
travers
des données
stat i st iques op.
ci t.,
p.
195.
254
présentes
dans ce
secteur
contre seulement
19,58 % d'hommes.
L'étude
réalisée
à Ziguinchor
par
J i l l
Posner
(1)
fait
ressortir
les
mêmes
rapports
de
sexe à
travers
la
très
large
domination des
femmes
(plus
de
75 % des
vendeurs
sont
des
femmes)
dans
cette partie du
secteur
non
structuré
(vente
de
nourriture
préparée) •
L ' i n ve s t i s seme n t
dan S i ' 1 • A •
qui
ne
né ces s i te
au c une
formation
particulière,
n'est
qu'un
prolongement
extérieur
des
activités domestiques,
reconverties
en
activité économique.
Comme
1e
nota i t
Ph.
Hugon
dans
son
ana 1 yse
des
f i l i ères
artisanales
à
régulation marchande,
même
si,
dans
l'ensemble,
ces
activités
à
faible
productivité
sont
peu
rémunératrices,
elles
procurent
aux
femmes
un
revenu
indépendant
ou
un
complément
de
revenu
familial
(2).
Section 2
-
PLACE
DE
L'INFORMEL ALIMENTAIRE
DANS
LE
SYSTEME
ALIMENTAIRE URBAIN
AI
L'informel
alimentaire dans
la chaîne
de
production-consom-
ma t ion a 1 i me nt air e
Avec
1 e
r env ers eme n t
des
hab i t u des
a 1 i me n t air e s
0 p é r é
par
1 es
femme s
a kan,
une plu s
g r and e
pla cee s t
f ait eau x
pro d u i t s
vivriers
locaux
dans
les modèles d'al imentation
des
structures
i n for me Ile s •
De s pro d u i t s comme
1 e
ma n i 0 cet
1 a
ban a n e
pla n ta i n
(1)
J.
Posner,
Le
commerce d'al iments
vendus
dans
les
rues
au
~éné~, op. cit.,
p.
21.
(2)
Ph.
Hugon,
L'industrie agro-al imentaire.
Analyse en
termes
de
1ilière~, op. cit •.• , p. 681.
255
connaissent
un
niveau
de consommation de plus en plus
important
en al imentation extér ieure.
Il
a été évalué par
exemple à plus de
50 %,
la consommation en
al imentation extérieure,
de
la produc-
tion
nationale d'attiéké.
Ce changement
des
habitudes de consom-
mation
al imentaire extra-domestique constitue
sans
doute un
fac-
teur
de croissance de
la
production
vivrière
locale.
Aussi,
l'I.A.
par
le biais
des
structures
comme
les
kiosques
et
les
restaurants
sur
tables mobile s
(" Ab 0 k k i " )
reste
u n
par t en air e
p r i vil é g i é d e i ' i n dus tri e
a g r 0 -. a 1 i me n t air e .
La
consommation
de
4 principaux produits
industriels à
savoir
le
pain,
le sucre,
le
lait
en boîte et
le café
incorporé au
petit
dé jeu ne r
(" caf é c omp 1et")
emp r u n té au mo d è 1e eu r 0 p é e n
lia t tes te.
BI Contribution
de
l'informel
alimentaire
à
la sécurité alimen-
taire en milieu
urbain
Selon
l'UNRISD,
on
entend par
sécurité
al imentaire
'existence
d'approvisionnements
garantis et
une distribution de
den rée s a i i me nt air e s su f fis a nt e sen qua nt i té ete n qua 1 i té
pou r
satisfaire
aux
besoins
nutritionnels de
toutes
la
population.
Pour
offrir
une
réelle
sécurité,
le système national
doit
donc
être capable d'offrir
à
la population une quantité suffisante
de
denrées
alimentaires
-
produites
dans
le pays ou
importées
satisfaire
une demande en
expansion et
les besoins
fondamentaux
en nourriture,
être
fiable afin de
réduire au minimum
les
varia-
tions
saisonnières et
cycliques
de disponibilités
alimentaires,
être doté d'une autonomie et
d'un pouvoir
de décision aussi
large
que
possible pour
réduire
sa vulnérabilité aux
fluctuations
des
marchés
internationaux et
enfin être équitable,
c'est
à dire
au
256
moins
assurer
à
tous
les groupes sociaux un accès
sûr
à
une
alimentation
suffisante.
C'est
à ce niveau que
l'I.A.
intervient
en
tant
qu'entité autonome et complémentaire du
système
al imen-
taire.
La disponibi 1 ité al imentaire n'entraînant
pas automatique-
ment
un accès à
l'al imentation,
l ' i n for me 1 a 1 i me nt air e a p par a Î t
comme
facteur
d'adaptation du goût,
aux
revenus
et
aux
con-
t rai n tes a 1 i me n t air e s pro pre s à
1a ville.
A dé f a u t
des t r u c t ure s
alimentaires
extérieures
formelles en nombre
suffisant,
il
est
l ' é 1éme nt
d u s 0 u s - s ys t ème a 1 i me nt air e qui
facilite
au
niveau
extra-domest ique
l'accès à
l'al imentat ion
tout
en
tenant
compte
de
l'aspect
socio-culturel
et
économique des habitudes
al imen-
taires.
En
1986,
aucune des
85 petites et moyennes entreprises
( PME)
a f f i l i é e s à
J' Uni 0 n Pat r 0 n ale de Cô t e - d ' 1v 0 ire
( UPAC 1 ) ,
ne
disposait
de cantine.
Sur
les quelques
15 cantines d'Abidjan,
à
part
les deux plus
importantes qui
appartiennent
au
secteur
de
l'industrie
minière et
pétrol ière,
les autres
relèvent
de quel-
ques services administratifs
avec un
taux de
fréquentation
d'en-
viron
10 % seulement.
On
ne saurait
appréhender
la consommation
a 1 i me n t air e
u r bai n e
e n
i 9 no r a n t
l' 1 •A •
tan t
sap 1ace
dan s i e
système est
importante.
Tout
informel
qu'il
est,
son efficacité a
infléchi
nombre de
tentatives
formelles de distribution
al imen-
ta ire.
En
1977 ,
une soc i été
"1 v 0 ire Re s tau"
a v ait c réé
uns e r -
vice
ambulant
de
restauration pour
vendre des
repas
empaquetés.
Au bout
de quelques mois,
elle a dû
interrompre ses activités car
elle
n'a pas obtenu
le succès
escompté devant
la
forte
concur-
r en c e dei' i n for me 1 a 1 i men t air e .
L ' exp é rie n c e
fut
r en 0 u ve 1é e par
une
autre société de
restauration collective,
la
SIPTOUR,
qui
257
n'aura
eu
en
tout
et
pour
tout
qu'une année de vie,
malgré
la
confiance et
les encouragements
des banques
de
la
place,
notam-
ment
1e
" C réd i t
de Cô t e - d ' 1v 0 ire" •
L ' exp r e s s ion cul min a n t e
de
cette concurrence entre
restauration
formelle et
informelle a été
cette
plainte
de
la
Fédération
Nationale
des
hôtel iers-
restaurateurs
contre
les maquis;
laquelle plainte
f i t
l'objet
d'une
réunion
tenue
le 3
jui Ilet
1980 sous
"égide de
l'Of f i ce
National
du
Tourisme.
Les
doléances de
la
Fédération
étaient
1 i bel 1é es
en ces
ter me s
"L' exp loi ta t ion des é t ab 1 i s seme n t s
con -
cernés ...
(les maquis
notamment)
cause un préjudice certain
tant
aux
professionnels de
"hôtellerie qu'à
l'Etat.
La
Fédération
( ... )
ne demande pas
la
fermeture systématique des établ issements
mais
souhaite
qu'une
solution adéquate soit
trouvée
à
cette
situation"
(1).
Les consultations qui
se sont
succédées à propos
de cette demande de
réglementation
se sont
soldées par
un constat
d'impuissance
devant
la
taille,
la diversité et
l'efficacité du
ph é n omè n e
i n for me 1 a 1 i me n t air e .
Comme
le notait CI.
Vidal,
" I l s u f f i t
d 1 i ma gin e r
une
interdiction
effective
de
ces
métiers
non
patentés
pour
comprendre
la
nécessité
vitale
de
leurs
réseaux
dont
les
ramifications
sont
comme
les
terminaisons du
tissu nourricier
de
la v i l l e :
pas
(ou
presque pas)
de cantines d'écoles,
d'usines et
de
bureaux,
rien
d'autre
non plus pour
les
artisans
et
les
comme r ç a n t s qui
ne qui t t e n t
pas
l' a tel i e r,
l ' é c hop p e , l a pla c e du
ma r c hé,
n i
pou r
ce u x qui
col po rte nt.
Comme n t
t 0 u t e cet tep 0 p u 1a-
tion
contrainte
à manger
dehors pourrait-elle
se
procurer
le
(1)
in
Procès-verbal
de
réunion
relative à
la prolifération
des
"maquis" et
des hôtels
sans autorisation.
258
repas bon marché dont
elle a besoin?"
(1).
Une enquête partielle
auprès
des
travailleurs
de
trois
unités
industrielles et
de deux
services publ ics montre que,
plus
de 70 % des ~ersonnes enquêtées
prennent
au
moins
un
de
leurs
trois
repas
quotidiens
â
l'extérieur.
A
en
juger
par
la diversité de
ses
structures,
la
fréquence de points
de
vente dans
toutes
les communes et
Je
taux
de
fréquentation,
on
peut
affirmer
sans
risque de
se
tromper
qu'i 1
est
un
vecteur
irremplaçable de consommat ion
tout
au moins
dans
le
contexte abidjanais où
la croissance
démographique
et
spatiale,
conjuguées
à
l'insuffisance des moyens de
transport,
ordonnent
un nouveau
rythme
de vie.
Bien qu'il
ait
proliféré
indépendamment
de
toute action
des
pouvoirs publics ou
des organisations
internationales,
son
d y n am i sme est
1 i é
à
1 a
pol i t i que a 1 i me nt air e
i v 0 i rie n ne,
tout
au
moins pour
le
ravitaillement
en
riz et en viande de
boeuf,
pro-
duits
les plus consommés
en
al imentation extérieure.
A ce
titre,
ce
maillon
du
système
alimentaire
ne
devrait
plus
rester
longtemps en dehors des préoccupations des pouvoirs publics,
car
toutes
variations
cycliques
auxquelles peuvent être
soumis
les
prix de ces produits
inf luenceront considérablement
non seulement
les
comptes extérieurs
et
budgétaires du pays mais
mettra aussi
en
pé r i 1
la sécurité alimentaire de
la population
-
surtout
à
risques alimentaires
-
urbaine croissante.
( 1) CI.
Vi da l,
L' art i san a t
f ém i n i net
1are st au rat ion pop u 1air e à
Ab i d jan,
0 p.
c i t • ••
pp.
55 4 - 55 5 .
259
Un
autre
aspect
de
"importance
de
l ' 1 .A.
dans
le
dis po s i t i f
des écu r i t é a 1 i me n t air e est
sac a p a c i t é à me t t r e à
1a
portée
des consommateurs
urbains une variété de plats de
di ffé-
rentes compositions
nutritionnelles.
Selon
les
relevés
sur
l'a-
I imentation
englobant
aussi
bien
les aspects
socio-économiques
(- uti 1 isation
des produits
-
proportion
selon
les
types de pré-
paration
-
caractéristiques des
habitudes alimentaires)
que
les
a s p e c t s
nu tri t ion ne 1s
(q u a 1 i t é des a 1 i me n t set
r e pas
con sommé s ,
composition
en
divers nutriments
tels
que
les
calories,
les
protides,
les
glucides
et
les
lipides)
et
suivant
l'offre
de
con somma t ion dus e c t e u r i n for me 1 a 1 i me n t air e 0 n peu t
dis tin gue r
1 -
Les plats
riches
en calories et
en
glucides
comme
l' a t t i é k é,
l' i g n ame br ais é e,
1e
fou t 0 u d 1 i g n ame,
l ' i g n ame à
l 'e au,
1a ban an e br ais é e , l e t 0 h de ma ï s , l e d è g u è , l a b 0 u i I i i e
der i z,
1e t 0 h de ma n i 0 c
2 - Les plats
riches
en protides
comme
1es
sa u ces ete n par tic u 1 i e r I a
sa u c e a r a chi de,
1a
s au c e
gombo,
le gombo sec,
les plats à base de
riz,
de maïs,
de mi 1.
3 -
Les plats
riches
en
fer
Ce sont
surtout
les
sauces
gombo et
gombo sec,
la sauce graine et
1e t 0 h de mil.
4 -
Les plats
riches en calcium
Ce
son t
t 0 ut e s i e s sa u ces,
ma i s p a r tic u 1 i è r eme nt
1es
sa u ces
gombo,
gombo
sec et
dans
une moindre mesure
les plats à base de
manioc,
d' igname et
de plantain.
Par
rapport
à
certains nutriments
il
faut
noter
la
pauvreté
de certains plats consommés en al imentation extérieure.
Il
s'agit de
260
1 -
des plats pauvres en calories
Ce sont
la pâte de manioc,
la
sauce aubergine,
le plantain à
l'e au,
1a
ban a ne b rai sée,
1eth 0
de ma ï s,la b 0 u i
1 i e
de mil,
1a
b 0 u i I i i e der i z e t
1e
t 0 h de ma n i 0 c •
2 - des plats riches en calories et
faibles
en glucides
Ce
sont
toutes
les
sauces,
sauf
la sauce aubergine qui
est
par tic u 1 i è r eme n t
f a i b 1e en cal 0 rie s •
Ce r t a i ne s a s soc i a t ion s de pla t s sol ide s
(p 1a t
d e r i z
cuit
à
l'eau,
les
foutou
d'igname,
de banane et
de manioc,
les
toh
de
maïs,
de
manioc et
de mi 1)
et de
sauces
offertes
en
al imentation
extérieure comportent
une valeur
nutritionnelle non
négl igeable.
Nous
pouvons citer
a)
les associations
les plus
riches
en calories
Ce
sont
les associations
de
foutou
-
sauce
graine,
foutou
igname
-
sauce
gombo,
riz-sauce arachide ou
riz-sauce
graine,
riz - sa u ceg omb 0
sec,
t 0 h de mil - s au ceg omb 0
sec;
b)
Les associations
les plus
riches en
protéines
Ce sont
les associations de
riz-sauce,
de toh
de maTs-sauce gombo
sec et
toh de mi 1- sauce gombo sec;
c)
Les associations
les plus
riches
en
glucides et
en
ca 1 c i um
Ce son t
t 0 us
1es
fou t 0 us - sa u ces
d)
Les associations
riches
en
fer.
Ce sont
le
riz-sauce gombo
sec,
les
toh-sauce gombo sec.
A
t i t r e
d' i 1 1us t rat ion,
con s i dé r 0 n s i ' a 1 i me nt a t ion
quotidienne-type des personnes
vivant
seules et
prenant
générale-
ment
leurs
trois
repas à
l'extérieur.
De toutes
les combinaisons
261
possibles,
la plus fréquente chez cette catégorie de consommateur
est
la suivante:
- " caf é c omp 1et",
1e ma tin
un plat
de
riz
cuit à
l'eau
accompagné
de
sauce
arachide (*),
le midi
- un plat d'alloco au poisson,
le soir.
En
faisant
éclater
ces
plats
selon
la
table
de
composition
nutritionnel le
des produits élaborée
conjointement
par
la F.A.O.
et
l'Equipe de conception de
,'ESC 79,
nous avons
les teneurs suivants en valeur nutritionnelle.
Tableau n° 45
Table
de
composition nutritionnelle
d'un
menu
type
Unités : grammes
Prix ! Poids! Calo- Lipides! Glu-
!Pro- !Cal-
Fer
,
moyen!
des ! ries
cides !tides!ciums
! plats!
!
!
!
!
Café complet
! )
!
!
!)150 F!
125 !
315
8,3
56,1
Il,8 ! 11 ,6
1,3
pain sandwich
! )
!
100 !
336
14,1
47,9
!
2
1,1
!
!
!
!
Sauce arachide
! )
!
150 !
305
25,9
11,1
29,7! 52,8
3,4
+
!)300 F!
!
!
,
riz cuit à l'eau!)
175 !
646
2,8
138,07! 12,4!
0,5
2,2
!
!
!
!
!
Alloco
! )
!
125 !
211
10,5
30,5 !
2,5!
2,8
1,7
,
+
!)125 F!
!
!
poisson frit
! )
!
100 !
351
33,8
1
! 11 ,4! 44,02! 0,6
575 F
2.254
189,9
284,6
67,8 113,7
10,3
(*) Nous signalons que, pour cette évaluation,
le choix du type de
sauce a été arbitraire.
262
On
constate alors qu'avec 575 F.CFA,
le
consornrnateur
couvre
ses besoins caloriques
journal iers estimés par
la
F.A.O.
en moyenne à 2.118 g/j
pour
les Africains de
l'Ouest.
No ton sen fin que,
de van t
1e s
e f f e t s d ire c t s
(b ais s e des
salai res et
de
l'emploi)
des pol i tiques macro et méso-économiques
1 iées
aux
programmes
d'ajustement,
la
modification
de
la
disponibilité et
du prix des principales denrées alimentaires
des
ménages à bas
revenus,
le déficit
budgétaire croissant,
le désen-
gag eme nt
pro gr es s i f
des
pou v 0 i r s
pub 1 i cs,
1 a
réd u ct ion
des
dépenses
publ iques
et
l ' impossibi 1 ité structurelle à
contrôler
tous
les paramètres de
la distribution alimentaire,
on
ne
peut
que plaider
pour
une politique de soutien
aux
initiatives
volon-
ta ris tes a u x que Ile sap par t i en t
1 e
sec t eu r
i n for me 1 a 1 i me nt air e •
Section 3 - CONDITIONS MACRO-ECONOMIQUES DE SURVIE DE L' INFORMEL
ALIMENTAIRE
Par
ces
p é rio des de con j 0 n c t ure é con om i que
d i f fic i 1e ,
l'I.A.
peut
à
juste
titre être comptée au nombre des
initiatives
volontaristes dont
la
survie est
plus que nécessaire en
raison
de
sa place dans
le
système socio-économique.
Ma i s
c ornrne
no us
1e
pré c i s ion s ,
s a d y n am i que
dép end
fortement
du
potentiel
agricole
ivoirien en
ce
qui
concerne
l'a pp r 0 vis i Q n n eme n t
en pro du i t s v i v rie r set dei a pol i t i que d' i m-
portation
al imentaire qui
lui
assure un
ravitai Ilement
régul ier
en
viande,
poisson et
riz,
produits pour
lesquels
le
système
a 9 r 0 - a 1 i me n t air e n a t ion ale n reg i s t r e und é fic i t
con s i dé rab 1 e .
263
La survie de ce secteur
reste donc très
1 iée à
l'évolu-
tion
de
ces deux marchés
(national et
international) dont
nous
examinerons
la
tendance
par
rapport
aux
principales
denrées
consommées en al imentation extérieure.
AI L'état du potentiel de production vivrière nationale
Selon
1es b i 1ans des dis po nib i 1 i t ès a 1 i me nt air e s
fou r -
nies par
la production nationale.
établis à partir des
résultats
d e i 'E BC 79 e t des s t a t i s t i que s a g r i col es.
1a con j 0 nc t ure dei a
production vivrière était bonne en 1988.
l i a même été relevé une
situation
d'excédent par
rapport à
la consommation sauf pour
le
riz et
l'arachide.
Le rapport Courade aboutit aux mêmes
conclu-
sions
quand
il
signale
la couverture globale de
la demande
al i-
mentaire sauf - toujours - pour
le riz
(1).
D'une façon générale.
la relative abondance en vivrier
semble avoir été maintenue.
L'accent pourrait être particulière-
ment
mis
sur
les féculents
tels que
le manioc.
l'igname et
la
banane plantain qui
sont.
après
le riz,
les trois produits
les
plu s con sommé sen a 1 ime n t a t ion ex t é rie ure.
Le
manioc
les
prévisions établies à
partir
du
recensement
agricole
de
1975 faisaient état
d'un
déficit
de
10.000
tonnes
en 1985 et en prévoyait un de 100.000
tonnes
en
1990;
le manioc semble cependant bénéficier d'une élasticité
de
production
assez
grande
puisque
l'excédent a
été
de
280.000
tonnes en 1985.
Cette progression de
la production entre 1982 et
1985 s'explique par
la souplesse et
la facilité des conditions de
(1) Cf. G. Courade. op. cit .• Tome 2. p. 42.
264
cul tu r e
qui
p e r me t te n t
une
ré p 0 n se
ra p ide a u x
sol 1 ici ta t ion s
de
la
demande
(demande
abidjanaise
et
notarrrnent
de
la
filière
attiéké).
-
L' i g n ame et
1a ban a n e pla nt a i n pré sen te nt
une
s i tua-
tion
presque
similaire
dans
les
zones
de
forêt
où
elles
sont
produites.
L'excédent
de
la production est
en baisse
sensible,
celui
de
l'igname accusant
une
régression
de 83 % entre
1982
et
1983.
De sin c e r t i t u des p ès en t
sur
1a pro duc t ion,
sur t 0 u t
dan sie s
vieilles
régions
de plantation,
car
l'igname et
la banane
sont
plantées en avant-culture du café et
du cacao:
or
les
tensions
f 0 nc i ère s
réd u i sen t a c tue 1 1eme n t
1 1 0 uv e r t ure
d e n 0 uv e Ile s
plantations.
L a c u 1tu r e ban a n i ère s' est
dé 10 cal i sée
dan s i ' Ou est,
région
de
plantation plus
récente,
avec pour
conséquence
une
au gme n ta t ion
des
co Û t s de c orrrne r c i a 1 i sa t ion,
car
1a d j st an c e
entre
les
centres
de consorrrnation
(Abidjan et
sa
région
et
le
Sud-Est) est
agrandie.
La cu 1tu re d' igname a corrrnencé à se déve 1oppe r
en Fo rêt
Ouest
avec notarrrnent
l'installation
des migrants Baoulé,
mais
il
ne
semble
pas que
la production d'igname pour
la vente
se
soit
réellement mise en place dans cette
région.
Par contre,
dans
la
z 0 n e
No rd - Est,
en
s a van e , l a r en orrrné e dei a var i été
d ' i g n ame ,
l'inexistence
des
productions d'exportation et
l'existence
d'un
marché
incitateur
ont
permis
aux producteurs de
faire de
l'igname
une
réelle culture de
rente.
Il
semble donc,
corrrne
le note
le Rapport Courade,
qu'un
soutien
des
productions
d' igname et
de banane destinées
à
la
con s orrrna t ion
dei a pop u 1a t ion u r bai ne de v ras e
t rad u ire
par
u n
265
passage à une mono-culture stabi 1 isée.
En matière d'approvisionnement du vivrier,
même si
les
tensions qui
apparaissent depuis une dizaine d'année engendre une
certaine
réduction des excédents,
une situation de pénurie
est
peu
imaginable.
La restauration extérieure ne risque donc pas de
subir
le coup d'une rupture de disponibilité. La seule inquiétude
se situe cependant au niveau du prix des produits sur
le marché.
Généralement
cultivés dans une perspective
d'autocon-
sommation
dans
le cadre des systèmes d'économie de
plantation,
se u 1sie s ex c é den t s son t comme r c i a 1 i s é s. Etc 1 est sur t 0 u t
1e co û t
de commercial isation qui
réflète
le prix sur
le marché.
Il
faudra
alors
veiller
à
"harmonisation et au
maintien
des
circuits
traditionnels
de distribution afin de 1 imiter
les
trop
grandes
variations
de prix et
les goulots d'étranglements constatés dans
l'approvisionnement.
BI Les potentialités du marché international en riz, en viande et
en poisson
Beaucoup plus que du marché nat i ona l,
l' I.A.
dépend du
marché
international
pour son approvisionnement en
produits
de
grande
consommation
tels
que
la viande bovine,
le riz
et
le
poisson.
Les
raisons de cette dépendance sont en partie
le défi-
cit
de
la production
ivoirienne de ces denrées et
la
politique
d'importation alimentaire qui
l'a suivi.
Selon
le Rapport économique et financier de
1987,
la
production
animale
nationale n'avait toujours
pas
franchi
le
seui 1 de 50 % de
la consommation nationale. A 48 % comme en 1983,
266
le
taux
de couverture n'a gagné qu'un seul
point par
rapport
à
1984.
Les
besoins
de
viande bovine en
1985 n'étaient assurés qu'à
26
%
(soit
un gain de
trois points par
rapport
à
1984)
mais
restaient
en dessous du
taux de couverture de
1983.
La production halieutique,
quant
à elle,
a passé pour
la
première
fois
-
toujours
selon
le même Rapport
-
la barre
de
100.000
tonnes
en
1985
(90.227 T en
1983,
83.691
T
en
1984,
102.204
T
en
1985),
ce qui
a permis d'assurer
58,7
%
de
la
consommation nationale.
La
couverture
des besoins en
riz
n'est
assurée
qu'à
40 % par
la production nationale.
L'autosuffisance
pour
ces
trois denrées étant
loin
d'être
at-
teinte,
l'importatiion comblait
le déficit.
Pour que
l'Etat pour-
suive
sa
régulation
par
les prix dont
bénéficient également
les
consommations
et
les
acteurs de
l'I.A.,
il
faut
que
la
con-
joncture
reste
bonne
sur
le marché
international
( 1 )
où
les
tendances à
la disponibilité de ces produits
sont
variables d'une
année à une autre
(2).
(1)
Les
pouvoirs
publics ont
une
telle conscience de
la
situa-
tion;
ceci
expl ique depuis
le
1er
janvier
1988,
l'extension
du
champ d'application de
l'exonération de
la TVA
aux
pro-
duits
tels que
les animaux vivants,
les produits alimentaires
n a t ure 1 s
(v i v rie r s,
riz,
ban a ne,
i g name . • .)
f e s
v i and e s f r a j -
ches et congelées,
les abats comestibles,
les poissons
séchés
et/ou
congelés,
les produits de pêche,
les
farines
de
cé-
réales
et
céréales,
le
lait
sous
toutes
les
formes,
les
a 1 i me n t s
de
b é t ail
e t
des a n i ma u x de bas sec 0 ur,
1e
suc r e
sous
toutes
ses
formes.
( 2)
Pou r i ' é val u a t ion dei a pro duc t ion mo n dia 1e der i z,
de v i and e
e t
de po i s son,
no usa von ses sen t i e 1 1eme n tex plo i t é l es don-
nées
du
"Rapport
sur
les cycles et
les
Orientations
des
Produits et
des Echanges",
sous
la direction de Ph.
Chalmin
et
J.L. Gombeaud,
Ed.
Economica,
Paris
1988 et
1989.
267
Pour
le
riz,
un plafonnement
de
la production mondiale
en
1986-1987 à
471
mi Il ions
de
tonnes,
niveau pratiquement
iden-
tique à celui
de
la précédente saison et
supérieur de 60 mi Il ions
de tonnes à celui
du
début
de
la décennie,
a
fait
place,
en
1987-
1988 à un
recu 1 à 457 mi I i i ons de
tonnes
(-3 %).
La
réco 1te
1987-
1988 a été
la plus
faible depuis celle de
1983-1984,
notamment en
raison
d'une
diminution à
142,3 mi Ilions
d'hectares
résultant
parfois
de
la
sechéresse ou
de
la
superficie
ensemencée.
La
diminution
de
la
récolte
1987-1988 a eu
deux conséquences:
une
diminution des
stocks mondiaux qui
s'élevaient précédemment
entre
51
et
55 mi Il ions de
tonnes
et qui
sont
tombées à
39 mi Il ions
de
ton n e s
( bas -e
riz
u sin é)
e t
une h a u s s e des
p r i x à par t i r
d'a 0 û t
1987 qui
s'est
largement
prolongée
sur
1988.
La nouvelle
récolte
1988-1989 devrait
atteindre
le niveau
record
de 479,4 mi Ilions de
tonnes
(base paddy),
soit
une augmentation de 3,9 % par
rapport
à
la précédente.
Une
légère diminution de
la production chinoise et
cel le du Bangladesh
sera plus que compensée par
une
forte
poussée
de
la
récolte
indienne
(13 mi Il ions
de
tonnes)
et par
des
ac-
croissements plus modestes prévus en Birmanie,
en
Indonésie,
au
Pakistan,
aux Philippines et
en Thaïlande.
En
ce qui
concerne
fa viande bovine,
une baisse de
la
product ion de
l'ordre de
1,5 % a été constatée en
1987.
Les
deux
pays
qui
ravitaillent
surtout
le
marché
ivoirien
à
savoir
l'Argentine et
la CEE ont
vu
leur
production baisser
respective-
me n t
de 4 % e t
de
- 0 ,5 %.
1 1 f au tau s s i s i g n ale r i a
g r a v e épi dé -
mie
de
f i è v r e
a p t h t eus e
qui
a
f r a p p é
1a
mo i t i é
d u t r 0 u p eau
argentin et
a forcé
la production
a un
recul.
En
1988,
le
rythme
de croissance de
la productio.n mondiale ralenti,
prolongeant
une
268
tendance déjà sensible
l'année précédente. La situation du marché
s'est
caractérisée
par
une diminution globale
de
l'offre
de
viande de boeuf et de veaux,
face à une demande qui
s'est
pour-
tant maintenue voire raffermie. Cette perturbation pourrait s'ex-
pl iquer
par
la hausse des pr ix des fourrages et
al iments
pour
animaux
qui
ont grevé
les coûts de production.
Un peu
partout
dan s i e mo nde,
l' heu r e est à 1are con s t i tut ion des che pte 1s e t
donc à la production de viande
baisse des abattages des vaches
(-0,6 %)
et maintien de génisses sur
les exploitations (+ 10
%).
Pour
la première fois,
en 1989, on s'attend à une réduction de
la
production de viande bovine dans tous
les pays de
l'OCDE .
.Si
quelques "zones de turbulence" s'observent pour
la
production
de
riz et de viande bovine,
le volume des
captures
mondiales de poisson d'espèces courantes (séché,
salé,
surgelé)
reste satisfaisant et se révèle d'ai 1 leurs de plus en plus
dyna-
mique et ce, pour plusieurs raisons:
-
l'intérêt de ces produits pour
résoudre
les problèmes
nutrionnels dans des
régions sous-alimentées;
-
les
considérations diététiques favorisent
la consom-
mation de protéines à teneur modérée en matières grasses;
-
le développement de nouveaux types de demande concer-
nant
les
crustacés
et
d'autres
produits
de
diffusion
plus
récente.
Sollicités
donc de façon pressante par ces
différents
types de demande,
les échanges
internationaux se portent bien et
représentent plus du tiers des captures mondiales,
soit un total
de
35
mi Ilions
de tonnes.
Aucune perspective
négative
n'est
269
envisagée
quant à
la capacité d'approvisionnement du marché
in-
ter na t ion al.
La
Cô t e - d ' 1v 0 ire qui
n' as sur e a c tue 1 1eme n t
qu' en -
viron
35 % de sa consommation en poisson pourra
toujours
tirer
profit
de cette abondance pour
le bonheur
surtout
des
consomma-
teurs
urbains et
des
acteurs du
secteur
informel
al imentai re.
CONCLUSla~ PARTIELLE
La mise en
évidence de
l'importance socio-économique de
l ' I.A.
ne
doit
cependant
pas
faire
sous-estimer
les
risques
d' i n f e ct ion mi cr 0 b i en ne et
par a s i ta ire con s t a tés en
a 1 i me nt a t ion
extérieure.
Quelques
cas
d'intoxication alimentaire
collective
dûes
à
la consommation du dèguè ont été signalés à Koumassi
en
1984.
En
1985,
six cas
d'épidémie d'origine al imentaire ont
été
déclarés à
la CNPS
(Caisse Nationale de Prévoyance Sociale).
Cette
défaillance
de
l'offre
alimentaire
informelle
peut être attribuée à
l'ignorance des
règles
d'hygiène
lors de
la
préparation,
de
la conservation et
de
la manipulation des denrées
ou des a 1 i me n t s •
Les ma 1ad i es con t r a c té e sen
a 1 i me n t a t ion
ex t é -
rieure peuvent
être
regroupées comme
suit:
- Maladies
causées
par
la présence de bactéries
dans
1e s a i i me n t s
( f i è v r e
t y Pho Î de,
i n f e c t ion
s t r é p toc 0 cci que,
sai mo n e 1 los e) ;
- Maladies causées
par
la présence de
toxines
secrétées
par
certaines
bactéries
( bot u 1 i sme ,
i nt 0 x i ca t ion s
staphylococciques) .
- Maladies
causées
par
la présence de parasites
comme
dans
les cas d'infection par
la viande
(ténia,
trichine)
ou
les
270
1é g ume s ma'
as e p t i s é s
(am i b es,
a sc a ris) ;
- Maladies
causées
par
les
champignons,
par
la
soui liure des
ustensi les
servant
à
la préparation;
- Ma 1ad i es
cau sée spa r i a
sou i 1 1ure par
d' au t r e s
v e c -
teurs
de bactéries pathogènes
(mouches,
cafards).
Compte
tenu de
son
importance dans
le dispositif
al j-
me n t air e
u r b a j n ,
i 1 est
u r 9 en t
de me t t r e en pla ce une pol i t i que
d'encadrement et
de contrôle de
l'artisanat
al imentaire.
Précisons
que
la pol itique
d'encadrement
dont
nous
parlons
n'est
pas
synonyme de pol itique de
redynamisation
de
l ' i n for me 1 a 1 j me n t air e qui,
e Ile,
ne peu t
sec 0 n ce v 0 i r e n de h0 r s
des pol i t i que sai i me n t air e s d' une
f a ç 0 n gé n é rai e et des pla n s
de
révalorisation
des activités
informelles
auxquelles
travaillent
actuellement
les pouvoirs
publics.
A un humble niveau,
quelques
suggestions pourraient
se
faire quant à
l'hygiène alimentaire.
Si
nous
devons
les appeler
politique,
la définition
de
celle-ci
devra,
à notre avis,
rassembler
des partenaires
locaux
tels que:
-
l' Institut
d'Hygiène
(lancement
d'une campagne
de
sensibi-
1 i sa t ion
sur
1a nu tri t ion et
l ' h Yg i è n e a 1 i me n t air e ) ;
1es
ma i -
ries
des différentes communes
(définition d'une politique
d'oc-
cupation
de
l'espace et
aménagement
des
zones
de
vente
d'al i-
me n t s ) ;
-
1e
Min i s t ère deI a Co n dit ion F ém i n i ne et
1e Min i s t ère
de
l'Information
(organisation
de
la campagne
et
vulgarisation
des
r è g 1es d' h Yg i è n e a 1 j me nt air e ) .
271
CONCLUSION GENERALE
Notre
étude
sur
le secteur
informel
alimentaire
s'est
d'abord
donné
une base statistique à partir
d'un
comptage
des
unités
de production-vente.
Le
recueil
des
informations
socio-
économiques
a été assuré par
questionnaire auprès d'un échanti I-
Ion c omp 0 sée s sen t i e 1 1eme n t
de che f s d' uni tés de pro duc t ion,
qui,
dès
la prise de contact,
manifestaient
le désir de
donner
des
réponses
complètes et cohérentes à nos questions.
Si
le critère
de
représentativité
statistique
n'était
pas
pour
nous
une
priorité,
la
représentativité qualitative et
catégorielle était
s tri c t eme n t
0 b s e r v é e
10 r s dei a con s t i tut ion
d e i ' é cha n t i 1 Ion.
Nos conclusions peuvent
s'organiser autour de
trois axes:
-
liaisons
entre urbanisation,
dépendance alimentaire
et dynamique de
l' I.A.
-
con dit ion s
d ' éme r g e n c e e t
s t ru c t ure
a ct u e Ile
de
l'I.A.
-
élucidation
des
facteurs déterminants du
développe-
me n t
dei' 1 . A •
-
i mp 0 r tan c e s 0 cio - é con om i que
d e i ' 1 • A •
273
L'émergence
et
l'évolution de
l'informel
alimentaire
restent étroitement
1 iées à
la croissance urbaine.
COl1llle
toutes
1es
cap i ta 1es
a f r i ca i ne s ,
Ab i d jan a con n u de p u i s s a " c réa t ion"
une
évolution qui
s'est
traduite par
son extension
géographique
et
sa croissance démographique.
A cet
accroissement
démographique
et
spatial,
correspond
une
croissance
des
besoins
socio-
économiques.
Celle de
l'alimentaiton sera encore plus
remarquable
car
l'élargissement
de
l'espace vécu,
conjugué au
rythme de
vie
urbain
et à
la
faiblesse des moyens de
transport,
enlèvent
aux
t r a v aille urs
1a
po s s i b i 1 i t é
de pre n d rel e s
r e pas
à
dom ici 1e •
L'alimentation
hors domicile devient une nécessité que
satisfera
l ' I.A.
initialement pris
en charge par
les
individus de certaines
catégories
sociales contraints
-
dans
leur
stratégie de survie
-
à
l'auto-emploi
par
les modèles
de développement
en
vigueur
dans
les pays
africains.
L'analyse historique du phénomène,
à partir
des
travaux
sur
les migrations
vers Abidjan et
sur
l'ordre d'apparition chro-
nologique
des
spécialités culinaires
nous
a
révélé
l'important
phénomène
du
renversement
des
hab i tudes alimenta ires condu i t
par
1es
f el1llle s
i v 0 i rie n ne s •
L'évolution de cette activité a connu quelques
influences
nat ionales qui
n'ont
pas manqué
d'affecter
les modèles
al imen-
taires.
L'al imentation
extra-domestique
était au
départ
une
a c t i vit éd' i l1lll i gré s .
1 1 r e s sor t
den 0 sen q u ê tes que
1es p r em i ers
restaurateurs
informels ayant
essaimé Abidjan
jusqu'aux années
30
étaient
des Sénégalais
et
des Ddahoméennes
(originaires de
l'ac-
tue 1 Bé n in) .
274
Ces
influences nationales n'ont pas manqué
d' imprimer
1eu r
ma r que
cul t ure Ile
au
mo d è 1e
a 1 i me nt air e
e n v i gue u r
à
Abidjan.
Cette situation d'antan,
caractérisée par
le
monopole
des
allochtones,
évoluera
jusqu'en
1950;
à
la
faveur
du
rapa-
triement
des
Dahoméens en
1958,
les
Ivoiriennes
récupéreront
presque
totalement
le
secteur,
faisant
des
restaurateurs
sénégalais
les survivants du
système alimentaire extra-domestique
d'avant
l'Indépendance.
A cette
récupération du secteur
par
les
femmes
autochtones,
correspond
un
renversement
des
habitudes
a 1 i me n ta ire s i n du i t
par
1are val 0 ris a t ion du mo d è 1e a 1 i me nt air e
a kan qui ma r que
jus qu'à ce
j 0 u r l ' a 1 i me n ta t ion ex té rie ure.
Dans
les structures de
l'informel
alimentaire,
nous
avons
distingué cinq
types de
restaurant
qui
se complètent
et
se
font
concurrence.
Le
recensement
des
plats et produits
offerts
à
la
clientèle,
quant à
lui, met
en
relief
l'éventail
des possibilités
de con somma t ion;
i 1 mo n t r e é gal eme n t
1api ace
f ait eau x pro du i t s
vivriers
locaux comme
le manioc,
la banane plantain,
les
légumes,
les viandes de brousse et
d'élevage dans
la préparation des
mets
les
plus consommés et
le
rôle dominant
des
structures
telles que
les
maquis
et
les espaces-restaurants
dans
le
maintien
des
habitudes
locales de consommation.
L'a n a 1ys e
no u s a
ré v é 1é que
1es mo d è 1es
a 1 i me n t air e s
observés
dans
le secteur
informel,
contrai rement
aux
thèses
de
mimé t i sme ,
son t
plu tôt
une con f r 0 n ta t ion
cul i na ire
i nt é gr an t
aussi
bien des modèles occidentaux
réinterprétés
("café complet",
275
pâtes
al imentai res •.•. ),
des modèles
sous-régionaux
(r iz
gras,
akassa,
sauce
légume .•. )
que des modèles
traditionnels
autoch-
tones
(sauce
aubergine,
djoungbé,
alloko,
kédjénou etc ... )
avec
une
large prédominance de ces derniers.
Néanmoins,
ce
retour
aux modèles autochtones qu'a en-
t r a Î né
l ' i v 0 i ris a t ion
d e i ' i n for me 1 a 1 i me n t air e ne
do i t
pas
pour
autant
entretenir
l' illusion d'une couverture
des
besoins
extra-domestiques par
la production nationale.
Si
l' I.A.
est
un
vecteur
de maintien des habitudes al imentaires
autochtones,
il
n'est
pas
forcément
créateur
d'indépendance alimentaire
puisque
le
contenu
en
importation
des
menus
semble
en
constante
croissance.
Ce
maintien des
habitudes autochtones dans
l'alimentation
hors
domici le
semble
s'appuyer
sur
des
apports extérieurs.
La crois-
sance
de
la consommation du
riz
importé
- que
les
consommateurs
urbains
préfèrent
de plus en plus
au
riz
local
et
aux
produits
comme
l' a t t i é k é
( pou r
son
r a p po r t
qua n t i t é / qua 1 i t é / p r i x )
-
con -
juguée
à
celle
du poisson de
la
viande dont
la
Côte-d'Ivoire
n'assure
que
40 % de
la consommation,
en est
une
preuve.
La
plupart
des maquis et
des UPV des espaces-restaurants
enquêtés
qui
préparent
du
riz
se
ravitaillent
essentiellement
par
l'im-
portation.
De même
la
viande bovine est,
de
loin,
la
protéine
animale
la plus consommée.
Nous
pensons que cette croissance des
consommations
de
riz
et
de viande
importés
-
conséquence
d'une
articulation entre préférence des consommateurs
et
intérêts
éco-
nom i que s
des
a rt i san s ,
rel è ve d' une
i n f 1u en c e deI a
pol i t i que
a 1 i me n t air e con j 0 net ure Ile na t ion ale sur
1es
hab i t u des de con s om-
ma t ion .
Le
Il dis po s i t i f Il
mis
en pla cep a r i e s
pou v 0 i r s
pub 1 i c s
276
1
1
1
pou r
tir e r
pro f i t
dei a
sur pro duc t ion sur
1e ma r c hé
i n ter na t ion a 1
explique
assez
bien cette
infiltration de produits
importés dans
1
les
habitudes
locales
de con sorrrna t ion.
Si
la conjoncture
reste
i ne han 9 é e sur
1e ma r c hé
i n ter na t ion a f ,
cet tep 0 1 i t i que
a 1 i me n -
1
taire
pratiquée par
les pouvoirs publics
présente à coup
sûr des
1
a van t age s au s s i
b i en pou r i a pop u 1a t ion que pou r i e go u ver n eme nt.
Il
faut
néanmoins craindre tout
retournement
de
situation
qui,
compte
tenu de
la
tendance à
la sur-consorrrnation du
riz
importé
par
exemple
au
détriment
du
riz
local,
de
l'attiéké et
de
la
banane
plantain,
risque de présenter des
inconvénients pour
les
consorrrnateurs
du point
de vue de
la
sécurité alimentaire.
Un
des axes de notre
réflexion était
l'explication des
facteurs
du déve loppement
de
l ' I.A.
Les
résultats
de nos enquêtes ont montré qu'au
delà des
questions
de concordance entre
l'offre et
les habitudes
al imen-
taires
locales,
la
raison majeure qui
fait
préférer
l ' I.A.
aux
autres
modes
de
restauration
(cantines,
al imentation
à
domi-
cile ••• )
est
la possibilité de consorrrnation à coût
modéré
et,
parfois,
à paiement
différé.
Les
bas prix
à
la con sorrrna t ion dans
l'I.A.
sont
les
effets
d'un mécanisme de marché.
C'est
surtout
la
forte
densité
des
points de vente qui
contraint
les offreurs à réduire
le prix
de
vente
au
minimum,
à
la
1 imite du
tenable
en
dessous
de
laquelle,
sauf
rares exceptions,
ils ne pourront plus descendre.
Ce
niveau
attractif
des prix
peut
s'expliquer
par
quatre
facteurs
principaux à savoir:
-
l'acceptation d'un maigre
revenu
-
la
reconversion
des
rapports
corrrnunautaires
en
capital
277
économique
- et -
l'appui
sur
les
importat ions à bas pr ix en
ce
qui
concerne
le riz,
la viande de boeuf et
le poisson.
1 - La
logique d'acceptation d'un maigre revenu
Pour éclairer
les pratiques économiques,
l'analyse des
motivations par dissociation des comportements économiques nous a
révélé
l'importance quantitative des acteurs qui
se sont
investis
dans
l'I.A.
par
manque
de formation
(72%) et
par
obligation
d'assumer
le
rôle
de chef de ménage
"par
substitution"
pour
raison
d'appartenance
à
une
famille
polygame
(41,7
%).
La
"structure
des situations" dans
lesquelles se trouvent
ces
ac-
teurs
détermine
leurs stratégies de production et surtout
leurs
ob j e c tif s
é con om i que s
qui
sel imit en t à 1a s a t i s f a c t ion de
b e -
sOi n s
é 1éme nt air e s e t s ymb 0 1 i que s .
L ' es sen t i e 1 est
que
l' UPV
fournisse
le
revenu nécessaire à
la
satisfaction
des
besoins
primaires, à
l'entretien du
réseau familial
ou à
l'achat de biens
de
prestige
(pagne wax (1) et bijoux pour
les
femmes,
combiné
radio-cassette et mobylette pour
les hommes),
signes d'une migra-
tion et d'un séjour en métropole abidjanaise
réussis.
Rappelons
que 87,54 %
des acteurs de
III .A.
sont des migrants. Dans cette
optique,
et compte tenu des pressions du marché,
la rationalité
liée
à
l'optimisation du profit,
constatée seulement chez quel-
ques acteurs (14,59 %),
fait place à une
logique générale
d'ac-
ceptation d'un maigre revenu,
logique à
laquel le s'adapte tout un
comportement commercial.
(1) Les pagnes wax sont des tissus
imprimés d'origine hollandaise
et anglaise.
278
2 - La
participation communautaire à
l'effort productif des UPV
L'un des atouts économiques de l'I.A. est
la participa-
tion
communautaire à
l'effort productif à plusieurs niveaux (fi-
nancement
local de production, main-d'oeuvre, approvisionnement).
Nos
travaux
font apparaître clairement
l'importance
des
aides
fami 1 iaux
dans
la stratégie de production des UPV.
Sur
les
928
personnes (hormis
les chefs d'UPV) composant
la main-d'oeuvre des
281
UPV
que
nous avons
enquêtées,
la
population
des
aides
communautaires compte pour 98,1 %,
le salariat,
très marginal,
ne représentant que
2,9 %.
Les
UPV
fonctionnent
essentiellement
grâce
aux
descendants
directs des tenanciers (11,3 %),
aux enfants placés auprès d'eux
par un ami ou un voisin (18,5 %),
aux enfants du cercle parental
du tenancier (13,7 %) et aux aides-parents (46,8 %), généralement
des cousins,
cousines,
frères et soeurs appartenant à
la lignée
fami 1iale.
La
non-rémunération de cette main-d'oeuvre fami 1 iale
contribue
à
la réduction du coût de production et,
par voie
de
conséquence, à
la modicité des prix des
plats consommés.
Le
succès
de
l'I.A.
peut aussi
s'expliquer
par
la
souplesse du réseau d'approvisionnement en matières premières. La
" tri bal i sa t ion"
des air e s d' a ppro vis ion neme n t et
1a
pers 0 nna 1 i -
sation des rapports commerciaux après environ
six mois de
fidé-
1 ité
envers
le fournisseur,
faci 1 itent
les
transactions
sous
forme
de "crédi t-comptant" consistant en un paiement différé des
a cha t s .
Ce c i
pré sen t e p 0 url e s de ux
par t e nair e s
é con om i que s ,
surtout
pour
l'artisan de
l'informel
alimentaire.,
un
avantage
économique certain en ce sens qu'i t peut
à
tout
instant s'appro-
279
vis ion ne r
e t
f air e son c orrrne r c e d' a 1 i me n t s
san s
dis po nib i 1 i t é
financiére
immédiate.
Ces
atouts
sociaux
sont
reconvertis par les
acteurs
en capital
corrrnerciai
en
vue de supporter
les effets
de
la
forte concurrence
dont
,'impact
sur
le maintien des prix
des
repas est considérable.
3 - L'appui
du
secteur
sur
les
relations extérieures
La
politique d'importations alimentaires
locales de
la
Cô t e - d 1 1v 0 ire a f a v 0 ris é
1a " sur - con s orrrna t ion" der i z ,
de v jan d e
de boeuf et
de poisson
subventionnés par
les pays producteurs.
De
toutes
les céréales et
protéines animales,
le
fait
que ces
trois
groupes
de produits
soient
les plus consommés,
parce que
moins
chers,
reste
la preuve de
l'appui
de
"I.A.
sur
les
relat ions
extérieures même si
cela est
au second degré.
En fin ,
l ' i mp 0 r tan ces 0 cio - é con om i que d e i ' 1 . A •
s ' est
révélée
à
travers
sa
fonction
de vecteur
d'insertion
des
ferrrnes
dans
le tissu économique urbain
(voire national),
d'adaptation du
goût aux revenus et
aux contraintes alimentaires
nées du mode
de
vie urbain de pourvoyeur
d'emplois et
de
revenus.
No u s a von spa r a i Ile urs mo n t r é que s i s a
cap ac i t é
de
création
d'emploi
était
grande;
le
revenu qu' i 1
génère
subit
depuis
un certain
temps
les effets
de
la crise économique qui
se
t rad u i t
par
sac roi s san cee n ta i , 1e .
Tou t
pol i t i que
é con om i que
qui
voudrait
agir
sur
la pauvreté doit
notarrment
tenir
compte
de
ces
nouvel les données des petites activités qui
de moins en moins
offre
des
revenus
décents.
La croissance dans
les
villes
afri-
caines
de
ce
secteur
ne doit
guère entretenir
l ' i Ilusion
d'en
faire
un moyen de compensation
des effets de contractions écono-
280
miques
que
connaissent
la plupart
des pays
de
l'Afrique
sub-
saharienne.
Notre
étude,
conduite sur
e années,
a été
l ' oc-
casion
d'art iculer
l'approc e
théorique
et
les
recherches
empiriques
sur
les
petites unités de production
et
de
vente
d'aliments.
Nous
rangeons cette modeste contribution
dans
les
réflexions
encore
lacunaires et contradictoires
sur
le
secteur
informel
et dans
les
recherches
sur
le système de sécurité
al j-
me nt air e des ville s a f r i ca i ne s •
La démarche scientifique dont
se réclame ce
travai 1 est
encore
trop
jeune pour
permettre une vue
synopt ique de tous
les
ç.
~It..."';'~
éléments du
thème.
Ou e l ' 0 n pu 1 S ses 0 ~f f r ~ \\. cet t e f a j b 1es sel i é e
à
notre
fraîche
intégration
e
champ
de
la
recherche
scientifique.
Ou'il
nous
soit permis,
ici,
de past i cher Ov i de
:
"T~
~
t(c~L.
-
~ indu 1gent,
cherJ
l-eB+etJr ll ,
si
le contenu
de
cette
~
réflexion
ne
répond pas entièrement à
~ attente, car nous
~
somme s
sûr
den e pou v 0 i r @ s a t i s f air e entièrement eu égard
au
fait
que notre observation peut être déficiente par endroits
et
notre analyse superficielle et/ou
tardive sur
tel
ou
tel
point.
Nous espérons néanmoins que cette contribution
répondra
"\\·i"~ ~~ t~
à
certaines curiosités et que
la
lecture critique de ce
travail
nous
condu i ra
à
l ' amé 1 i orat i on de nos méthodes
d' approct;(' des
phénomènes.
281
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une relation controversée
in
Revue Tiers Monde,
T.
XXVI,
n°
104, Oct-déc.
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Librairie Le Regard,
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TEVOEDJRE (A.)
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259
TI-ORNER ( D. )
Une
théorie
néo-popul iste
de
l'économie
paysanne.
L'Ecole
de A.V.
Cajanov,
Préface
au
1 ivre d'A. Tchayanov, L'organisation de l'économie
paysanne. Ed. Librairie, Le Regard 1990.
TI NKER (1.)
Lé gal i s e ria ven t e amb u 1a nt e den 0 u r rit ure
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Le
Co u r rie r n0
1 10 ,
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1988;
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TOLA Olu Pearce,
OLUFBMI O.
Kujore and V.
TINA Agboh-Bankole
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des
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ab i d jan ais
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1979 .
Ville
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C i t ad i nit é s duT i ers -Mo nde.
1986,
doc.
r 0 néo 16 p.
300
LISTE
DES
TABLEAUX
Page
1. Répartition
de
la population enquêtée par
type de
restau-
r an t
et
pa r
qua r t je r
••••••••••.•.••••••••••.••••......
35
2.
Evolution des
importations
de produits
alimentaires
par
rapport
au
total
des
importations
•• •.•••••••..• .••••..
54
3.
Influence des prix
sur
les
importations et
la consommation
du
riz
59
4.
Evolution de
la
disponibilité nationale en
viande bovine
62
5.
Evolution de
la population abidjanaise selon
les
trois
p é r i mè t r es" " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " . " " " • "
7 5
6.
Principaux produits
vivriers
utilisés dans
la
restaura-
tion populaire avant
1950
82
7. Menu de
la
restauration
populaire autochtone
84
8. Répartition des établ issements
restaurants
sur
la
vi 1 le
d'Abidjan
. . . • . . . • . • . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
88
9. Répartition
des unités
de vente
sur
tables mobiles....
89
la. Répartition des espaces-restaurants sur
la vi Ile d'Abidjan 91
11.
Typologie des
systèmes al imentaires
96
12. Répart i t ion des act i fs par sexe........................
112
13. Répartition des actifs par âge et
suivant
le
type de
res-
taurant
113
14.
Répartition des
actifs par
nationalité et
suivant
le
sexe
114
15. Motifs de
la migration
vers Abidjan
1 1 7
16. Répartition de
la main-d'oeuvre par
tranche d'âge
. . . . . .
121
17. Répartition de
la main-d'oeuvre par
statut
. . • . . . • . . • . . •
121
18.
Structure de
la main-d'oeuvre
fami 1 iale dans
l'informel
a 1 i me n t air e
• . • • . • • • . . • • . • . . . . • . . . • . • . . . . . . . . . • . . . . . . • . •
124
19. Nombre d'actifs/ménage d'acteurs répartis
selon
le sexe
129
20. Fréquence des combinaisons d'actifs
• . • . . . . . . • . . • • . • . • . •
130
21. Alphabétisation et scolarisation par
sexe
139
22.
Evaluation du capital
initial
par
type de
restaurant
•..
150
302
,
1
Page
1
23.
Fréquence de disponibi 1i té des différents matériaux de
production-vente/catégorie de restaurant
•••.•....•.•.••
156
24. Quantité de protéTne animale par UPV
171
25.
Types de plats
les plus consorrrnés en al imentation exté-
rie ure à Ab i d jan en 19 79 .......................•..••••
175
26.
Fréquence de
la pratique du crédit •......••.•.•.•.....
184
27.
Fréquence d'approvisionnement à crédit par type de
p r o d u i t . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
185
28.
Importance des
lieux de consorrrnation dans
la consorrrnation
t 0 t ale ho r s dom ici 1e ••..•.......•...•.•••••••••.••••••
192
29.
Importance des plats extérieurs par strate .••..•......
201
30.
Prix moyens des plats consorrrnés dans
les maquis,
kiosques
et restaurants-bars...................................
208
31. Evolution des
indices de prix de consorrrnation générale
et al imentaire entre 1986 et 1988
211
321. Distribution des chiffres d'affaires mensuels par
ca t égo rie de res t au ran t
. . . • . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . .
221
33. Cr 0 i seme n t
n ive a u d 1 i nve s t i s seme nt / chi f f r e s d'a f fa; r es.
222
34. Croisement chiffres d'affaires/revenu net mensuel.....
223
35. Contingence simple:
catégorie de restaurant/revenu net
me n sue 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . .
224
36.
Répartition de
la sous-population à un seul actif dans
l'échelle des revenus.................................
227
37. Croisement tai Ile des ménages/revenu net dans
les ménages
à un
seul
actif
228
38.
Structure générale des dépenses des ménages ......•...•
229
39.
Dépenses d'al imentation selon les grands groupes de
produits . • . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . • . . .
232
40. Répartition des ménages à un seul
actif dans
les structures
de
l'habitat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . • . .
233
41.
Structure des dépenses d'habitation............ ..•....
236
42.
Structure des dépenses d'éducation ..
238
303
Page
43. Structure des dépenses d'habi 1 lement
.
241
44. Structure des dépenses de soins de santé •..••.•••.....
241
45. Table de composition nutritionnel le d'un menu type ....
262
304
QUESTIONNAIRE
Enquête
Secteur informel alimentaire à Abidjan
N° de l'enquêteur / __/ __/
N° du restaurant / __/ __/ __/ Adresse
Lieu d'enquête
/_/_/
Date /_/_/_/_/_/_/
Thème 1
Renseignement d'ordre général sur les restaurateurs
Ne rien
écrire ici
1.1. Sexe
Masculin / _/1
Féminin /_/2
/_/
1.2. Age
/_/:;1/ ans
/_/_/
1. 3. Nationalité ou ethnie .•• ': :. '.'. ~ ;-..... / _/_/
/_/_/
1.4. Avez-vous été à l'école? oui /~/1
non /_/2
NSP/_/3
/_/
1.5. Si oui, jusqu'en quelle classe?
/_/
Primaire /_/1 Secondaire 1er niveau /_/2 Secondaire 2e
niveau /_/3
/_/
1.6. Si non, pourquoi?
/ /
Refus des parents / /1 refus refus personnel /_/2
/:/
manque de moyens financiers / /
manque de structures d'éducation dans mon village /_/4
Autre / _/5:
Préciser •...•..•...•.....•.........•.....
1.7. Situation matrimoniale
/_/
Célibataire avec enfant / /1 Marié(e) avec enfant / /3
Veuf(ve) avec enfant / /4-Célibataire sans enfant /-/2
Marié(e) sans enfant /-/4 Veuf(ve) sans enfant / /6-
Divorcé(e) avec enfant-/_/7 Divorcé(e) sans enfant /_/8
1.8. (Exclusivement pour les femmes). Votre mari a-t-il une
autre épouse que vous ?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1.9. Depuis quand êtes-vous à Abidjan? /_/_/ ans
/_/_/
1.10. Quelles sont les raisons de votre arrivée à Abidjan?
/_/_/
Né(e) à Abidjan / /1 Raison de santé / /2
Raison scolaire /-/3 Pour chercher du travail / /4
Apprentissage / /5 Visite à la famille / /6 Suivi du
mari / /7 Fuir les contraintes du villagë / /8 Suivi d'1
parent-/ /9
-
1
Autre /_710
Préciser
!
1
1.11. Depuis quand exercez-vous cette activité? /_/_/ ans
1
/_/_/
1.12. Exercez-vous parallèlement une autre activité?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1
1
1. 13. Si oui, laquelle ?
/ _/ 1
/_/
1
D'oÙ vous est-il venu l'idée de monter ce petit commerce?
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • ••
1
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • . • • • • • • • • • • • • ••
1
• •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• '.
1
1
306
Ne rien
écrire ici
Questions spécifiques
1. 14. Type d'établissement : .•.••.•••............••...... /_/
/ _/
1.15. (A remplir pour les sp, E.R., R.et, tm). Est-ce qu'il
est difficile d'avoir une place ici?
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1.16. (A remplir pour les amb ..• ,). Comment choisissez-vous
vos itinéraires?
/_/
.en fonction de la situation géographique de la clientèle
habituelle / /1
.au hasard / /2
.en fonction des
1
lieux publics / /3
.autre / /4
1
Préciser
-: .•...•.....• -:
1
1.17. (A remplir pour les Sp., E.R., R. ét., tm). Est-ce qu'il
y a des démarches particulières à faire pour avoir une
place ici ?
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
/_/
Si oui, lesquelles ? •..••.............................
1.18. (A remplir pour les Sp., E.R., R. ét., tm). Pour occuper
ce lieu de vente les premiers jours, avez-vous rencontré
des problèmes?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
Si oui lesquels ................•......................
1.19. (A remplir pour les Sp., E.R., R. ét., tm). Vous est-il
déjà arrivé une fois de changer de place pour une autre?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1.20. Si oui, pourquoi?
/_/
Problèmes avec les V01S1ns /_/1
.fin de chantier /_/2
.Ne vendait pas bien / /3
.L'endroit ne portait pas
chance /_/4
.Autre /=/5
Préci ser ...................•
1.21. (A remplir pour les Sp.,). A la fin de chantier, que
ferez-vous ?
/ _/
.Changer de chantier / /1
.Retourner au village /_/2
.Changer d'activité / Î3
.M'établir sur un lieu de ventel
fixe /_/4
.NSP /_/5- .Autre /_/6
Préciser
.
1.22. (A remplir pour toutes les catégories). Généralement à
1
peu près à quelle heure quittez-vous la maison pour allerl
vendre et à quelle heure y retournez-vous ? Heure départ 1
de la maison / / / h
1
/_/_/
- -
1
1.23. (A remplir pour toutes les catégories). Généralement à
1
peu près à quelle heure quittez-vous la maison pour allerl
vendre et à quelle heure y retournez-vous ? Heure de
1
retour à la maison / / / h
1
/_/_/
- -
1
307
Ne rien
écrire ici
1.24. (A remplir pour ~es Sp., E.R., R. ét .. , tm). Pourquoi
avez-vous préféré ce lieu de vente et non un autre?
/_/
.C'est près de ma maison / /1
.Par hasard / /2
.On vend beaucoup ici / /3- .A cause de la facilité
d'intégration / /4
.SUr conseil d'une tierce
personne /_/5
~Autre /_/6
. Préciser
.
1.25. (A remplir pour toutes les catégories). Est-ce qu'il y a
des gens qui travaillent avec vous? Oui / /1
Non /_/2
NSP /_/3
-
/_/
1.26. (Voir fiche 1.26).
1.27. (A remplir pour les Sp., E.R., R. ét., tm). Est-ce que
vous avez loué cette place? Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
/_/
1.28. Si oui montant de la location (à évaluer en mois)
/_/_/_/_/_/_/_/
/_/_/_/~/_/_/_/
1
1
Fin des questions spécifiques
1
1
1.29. Vivez~vous seul(e) chez vous ? OUi /_/1
Non /_/2
1
NSP /_/3
1
/_/
(Si non, remplir la fiche de renseignements familiaux)
1
Fiche 1.30
1
1
Thème 2 : De l'esprit d'entreprise: création et gestion de production
2.1.
Où avez-vous trouvé l'argent nécessaire pour débuter
cette activité?
/_/
.Aide familiale / /1
.Aide du conjoint / /2
.Prêt / /3
.Association / /4- .Tontine / /5
.Capital tiré d'une-
autre activit~ /_/6
.Autre 7_/7
.Préciser
.
2.2.
A peu près avec combien avez-vous démarré ce petit
commerce /_/_/_/_/_/_/_/_/
/_/_/_/_/_/_/_/
2.3.
(Voir fiche 2.3.)
2.4
Quelle(s) combustion(s) utilisez-vous pour la préparation
des aliments ?
1
/_/_/
.Charbon de bois / /1
.Gaz / /2
.Bois /_/3
1
.Electricité /_/4 -.Pétrole /=/5
1
1
2.5
Que représente pour vous l'exercice autonome d'une acti-
vité économique en milieu urbain ?
/_/
.Moyen de subvenir à mes besoins / /1
.Obligation de faire quelque chosp.-pour ma liberté vis à
vis de qui que ce soit / /2
.Pour survivre / /3
.Moyen d'un propre épanouissement / /4
.Autre-/ /5
.Préciser
~
~
.
308
1 Ne rien
1 écrire ici
2.6.
Combisn gagnez-vous quand vous vendez ?
1/_/_/_/_/_/_/_/
beaucoup
un peu
pas du tout
1
jour
. . . . . .. . . ..
.. .. .. .. .. .. .. .. ..
..
..
1
semaine
.. .. .. .. .. .. .. .. ..
.. .. .. .. .. .. .. .. ..
..
..
1
mois
.. .. .. .. .. .. .. .. ..
.. .. .. .. .. .. .. .. ..
..
.
1
(Laisser l'enquêté choisir sa périodicité, évaluer les
1
recettes en ramenant la périodicité à la semaine).
1
Recette maximum
/ / / / / / / /
!
Recette moyenne
/-/-/-/-/-/-/-/
1
Recette minimum
/=/=/=/=/=/=/=/
1
Recette hebdomadaire approximée
/_/_/_/_/_/_/_/
1
1
2.7.
Mettez-vous de l'argent de côté comme économie?
1
/_/
OUi / /1
Non / /2
NSP / /3
1
(Si non, passez à la ~estion 2.10 et suite)
!
Si oui quels sont vos projets sur cette économie? ..... 1
1
1
1
1
2.8.
Combien à peu près, mettez-vous de côté ?
1/_/_/_/_/_/_/_/
jour
/ / / / / / / /
1
semaine
/-/-/-/-/-/-/-/
1
mois
/-/-/-/-/-/-/-/
1
(Laisser l'enquêté choisir sa-~rIodicité et ramener
1
l'épargne sur une base mensuelle. Calcul à effectuer par 1
l'enquêteur de retour à la maison).
1
Epargne/mais
/_/_/_/_/_/_/_/
1
1
2.9.
Où faites-vous garder cet argent ?
1
/_/
.Banque / /1
.Tontine / /2
.Poste /_/
1
.Thésaurisation / /4
.E~voi au village /_/5
.Chez un
1
pa~e~t ici à Abidjan /_/6 .Autre /_/7
!
. PreC1ser ....•...................................•..... 1
1
Qu'avez-vous déjà réalisé à partir de vos économies
1
antérieures ?
1
/_/_/
1
.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ....
1
1
2.10. Payez-vous des taxes municipales?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1
1
2.11. Par quelle périodicité?
1
/_/
.jour / /1
.semaine / /
.mois /_/3
.autre /_/4
1
. Préciser
-: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 1
1
2.12. Montant de la taxe /_/_/_/_/
!
/_/_/_/_/
1
Thème 3 : Pratiques commerciales et climat social
1
1
3.1.
(Voir fiche 3.1.)
1
309
Ne rien
écrire ici
3.2.
(A remplir pour les restaurateurs vendant des plats combinés)
Quelle est la combinaison la plus chère ?
1
/_/_/_/_/
Nom •.•••....•..•.. Prix
/_/_/_/_/
1
1
3.3.
(A remplir pour les restaurateurs vendant des plats combinés)
Quelle est la combinaison la moins chère ?
1
/_/_/_/_/
Nom
Prix
/_/_/_/_/
1
1
3.4.
Est-ce que vous faites crédit à vos clients?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1
Pourquoi ? ................•........•.............•..•.
1
(Si non, passez à la question 3.8. et suite)
1
1
3.5.
Faites-vous crédit à tous vos clients?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1
Pourquoi ?
.
1
1
3.6.
Qui sont ceux qui achètent à crédit chez vous? ...•...
1
/_/_/
1
1
3.7.
Comment faits-vous pour retenir les noms de ceux qui vous 1
doivent ?
1
/_/_/
.Pointage dans un carnet personnel / /1 .pointage sur
1
mur / /2
.pointage dans un carnet de bon du client / /3!
.taux fixe à la fin du mois / /4
.mémorisation des
-
1
cr~~ts /_/5 .autre /_/6
-
PreC1ser
. 1
1
3.8.
Quels problèmes rencontrez-vous généralement avec les
1
clients?
1
/_/_/
.Plainte pour hygiène /_/1
.problème de mesure du plat/ /2
.satisfaction gastronomique /_/3
.paiement des crédits/=/4
.problème de places assises /_/5
.autre /_/6
1
. Préciser
. 1
1
Thème 4 : Structure de consommation des ménages
1
Al imenta tion
4.1.
Combien de fois mange-t-on par jour chez vous? /_/ fois
/_/
4.2.
Quelle périodicité choisissez-vous (ou votre femme) pour
aller au marché ?
/_/
.tous les jours / /1
.tous les 2 jours / /2
.tous les 3 jours-/ /3
.tous les 4 jours /-/4
.tous les 5 jours /-/5
.tous les 6 jours /-/6
.tous les 7 jours /-/7
.tous les 8 jours /=/8
.Indéterminé / /9
-
4.3.
Combien dépensez-vous comme argent quand vous allez (ou
votre femme) au marché? /_/_/_/_/_/ F.CFA
4.4.
Citez-nous les deux plats que vous mangez le plus les
jours ordinaires
/_/_/
/
/_/_/
310
Ne rien
écrire ici
4.5.
Citez-nous les deux plats que vous mangez le plus les
jours de fête
/_/_/
/ •........••••• /_/_/
/_/_/_/_/
4.7.
Quelle(s) combustions utilisez-vous pour préparer vos
repas à domicile ?
/_/_/
.charbon de bois / /1
.gaz / /2
.bois /_/3
.électricité /_/4 -
.pétroÏe /_/5
4.8.
Combien vous coûte cette combustion?
/_/_/_/_/_/
par jour
/
/
par semaine~ /
/_/_/_/_/_/
par mois
/
/
Refaire le calcul sur une base mensuelle /_/_/_/_/_/_/
4.9.
Combien dépensez-vous par mois pour l'alimentation?
/_/_/_/_/_/_/
4.10. Etes-vous tout(e) seul(e) à faire face aux dépenses
d'alimentation?
/_/
Oui / /1
Non /_/2
NSP /_/3
(Si oui passer à la question 4.12. Si non, répondre aux
questions 4.10 et 4.12 avant de passer aux questions
suivantes: 4.13 et suite).
4.11. Dites-nous ceux qui y participent
.Conjoint(e) / /1 .Les parents qui habitent la maison/ /2
. Autre / _/3
~Préciser ......•..................•.... ~ ..
4.12. A combien évaluez-vous leur participation mensuelle?
/_,_/_/_/_/_/
/_/_/_/_/_/_/ F.CFA
Logement
4.13. Où habitez-vous? (commune)
/_/_/
/_/_,
4.14. Statut du logement
/_/
.Propriété privée / /1
.Location /_/2
.Location-vente / /3
.Maison familiale
/_/4
.Ha~i~e auprès d'Un parent ou ami /_/5
.Autre /_/6
. PreC1ser ....................................••........
4.15. Genre d'habitat
/_/
.Cour individuelle /_/1
.Habitat en bande /_/2
.Cour commune /_/3
.Baraques /_/4
4.16. De combien de pièces disposez-vous?
.
!
1
4.17. Vos toilettes (W.C. ) sont-elles :
1
/_/
.collectives /_/1
. individuelles /_/2
. naturelles /_/3 1
1
4.18. Votre salle de bain est-elle :
!
/_/
.collective /_/1
. indi viduelle /_/2
. naturelle /_/3
1
!
4.19. Enumérez les frais généraux mensuels de logement
!/_/_/_/_/_/_/
3 Il
1 Ne rien
1 écrire ici
Nature des frais
coût
1
Location
1
Electricité
1
Eau
1
Dépenses diverses
1
1
Total
/_/_/_/_/_/_/
1
1
4.20. Etes-vous tout(e) seul(e) à faire face aux dépenses de
1
logement ?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
1
(Si oui, passer à la question 4.23. Si non, répondre aux 1
questions 4.21
1
1
4.21. Dites-nous ceux qui y participent?
1
/_/
.conjoint(e) / /1
.les parents ou ami qui habitent la
1
maison /_/2
~autre /_/3
: Préciser .....••.•..•.••... 1
1
4.22. A combien évaluez-vous leur participation mensuelle? ... 1/_/_/_/_/_/_/
Santé
1
1
4.23. Lorsque vous ou quelqu'un de votre famille est malade,
1
comment est-ce qu'il se soigne?
1
/_/_/
.hôpital / /1
.guérisseur / /2
.auto-médication / /3 1
.pharmaco~e /_/4
.autre /_/5-: Préciser ......•.... ~ .. 1
1
4.24. Connaissez-vous la nivaquine ?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
1
1
4.25. Si oui, à quoi sert-elle ?
1
/_/
connaît /_/1
ne connaît pas /_/2
1
1
4.26. A peu près combien dépensez-vous par mois, pour les frais!
de santé ?
1/_/_/_/_/_/_/
.maximum / / / / / / /
.dépense moyenne /_/_/_/_/_/_/ 1
.minimum /:/:/:/:/:/:/
1
1
4.27. Etes-vous tout(e) seul(e) à faire face aux dépenses de
santé?
/_/
Oui / /1
Non / /2
NSP / /3
(Si oui, passer à la-question 4~30. Si non, répondre aux
questions 4.28 et 4.29 avant de passer aux questions
suivantes: 4.30 et suite).
4.28. Dites-nous ceux qui y participent?
/_/
.conjoint(e) / /1
.les parents ou ami qui habitent la
maison /_/2
.autre /_/3 : Préciser
1
1
4.29. A combien évaluez-vous leur participation mensuelle?
1
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ! / _/ _/_/_/_/_/
1
1
312
Ne rien
écrire ici
4.30. Fiche de santé de l'environnement du restaurateur.
De toutes ces maladies, dites-nous celles dont souffrent fréquemment les
membre de votre famille vivant dans la même maison que vous.
N° 1
Nom français
Nom en dioula
1 Nom en baoulé 1 OUi 1
1
1
1 Non 2
1
1
1
1 1 paludisme
djèkouadjio
1 adjué
1 / /
2 1 fièvre jaune (ictère)
djèkouadjio oulé 1 adjé n'go
1 /-/
3 1 toux
s 9
s 9
1 tang
1 /-/
4 1 tuberculose
s 9
s 9 gbè
1 tang
houfouè 1 /:/
5 1 maladie sexuellement
1
1
transmisible
chopis
1 chopis
1 / /
6
diarrhée
conobori
1 nzôdjiè
1 /-/
7
kwashiorkor
kouachioc
1 kouachioc
1 /-/
8
gale
soniya
1 assien
! /=/
9
lèpre
kuna
1 cocobé
1 / /
10
rougeole
gnon 'ni
1 ngblikissi
1 /=/
11
Bruline
adjenina
1 wayara
1 /_/
Education
4.31. Avez-vous à votre charge des enfants de plus de 3 ans 1
Oui / /1
Non / /2
NSP / /3
(Si non, passez à la ~estion
-
4.32. Combien d'enfants du couple?
/_/_/
4.33. Combien d'enfants confiés
4.34. Combien vont effectivement à l'école de tous ces enfants
de plus de 3 ans /_/_/
/_/_/
4.35. Combien vous coûte à peu près leur scolarité par an 1
/_/_/_/_/_/_/_/
Déplacement
Frais de scolarité
Habillement scolaire
Fourniture scolaire
TOTAL
/ / / / / / / /
1
(Evaluer chaque chapitre aveë Ïes enQu~t~s en fonction dul
nombre d'enfants qui fréquentent. Calculer ensuite la
1
dépense totale en matière de scolarité.
4.36. Combien apprennent effectivement un métier 1
/_/_/
1
4.37. Combien vous coûte à peu près leur apprentissage par an 11/_/_/_/_/_/_/_/
Déplacement
1
Frais d'apprentissage
Equipement
313
Ne rien
écrire ici
Divers
.
(Evaluer chaque chapitre et calculer la dépense totale)
4.38. Total des frais d'éducation /_/_/_/_/_/_/_/
/_/_/_/_/_/_/_/
(coût de la scolarité + coût d'apprentissage si des
cas pareils se présentent).
4.39. Avez-vous à votre charge des enfants qui ont plus de
6 ans et qui ne vont pas à l'école, ni n'apprennent un
métier?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
(Si on, passer à la question 4.44.)
4.40. Combien?
/_/_/
/_/_/
4.41. Pourquoi ne vont-ils pas à l'école ou n'apprennent-ils
pas un métier?
/_/
.refus des parents / /1
.refus des enfants /_/2
.manque d'argent
/-/3
.manque de structure
d'accueil/_/4
.autre /_/5
• Préciser ......•.......... 1
1
4.42. Etes-vous tout(e) seul(e) à faire face aux frais de
scolarité et/ou d'apprentissage?
1
/_/
Oui / /1
Non / /2
NSP / /3
1
(Si oui, passer à la ~estion 4.44~ Si non, répondre à laI
4.43 avant de passer aux questions suivantes 4.44 et
1
suite) .
1
4.43. Ditez-nous ceux qui y participent?
1
/_/
.Conjoint(e) /_/1
.Des parents à Abidjan /_/2
1
.Des parents dans une autre ville / /3
.Des parents au
1
village /_/4
.Autre /_/5
.Préciser ........•.......... 1
Loisirs
4.44. Quand vous ne travaillez pas, quelles sont vos distrac-
tions ?
/_/_/
.Télévision / /1
.Visites aux parents et amis /_/2
.Ecouter la radio /_/3
.Danse /_/4
.Autre /_/5
. Préciser
.
4.45. Appartenez-vous à des associations?
/_/
Oui / /1
Non / /2
NSP / /3
Si oui lesëiuelles ? . ~
~
.
.
.
.
" " ... " " "
" . " " " .. " " ... " " " . " "
" " . " ... " " " " . " " " " . " " .... " " " .
Autres: TranSports d'argent
4.46. Est-ce que vous envoyez de l'argent au village?
/_/
Oui /_/1
Non / /2
NSP / /3
(Si non, passez à la question 4.48
314
Ne rien
écrire ici
4.47. A quelle occasion?
/_/_/
.Pour des cérémonies / /1
.Pour assurer des charges
familiales / /2
.Pour-Ies fêtes / /3
.Pour les cotisa-
tions au vilÏage /_/
.Autre /_/5
· Préciser
.
4.48. Qu'est-ce que vous recevez du village?
/_/
.des produits vivriers /_/1
.de l'argent /_/2
.autre /_/
· Préciser
.
4.49. Est-ce que vous aidez (avec l'argent) d'autres personnes
ici à Abidjan?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
4.50. A peu près à combien pouvez-vous évaluer les aides?
/_/_/_/_/_/_/_/
· par semaine
. par mois ..........•..
· par an ...•..•..........
(remettre l'évaluation sur une base aensuelle)
Montant des aides par mois /_/_/_/_/_/_/
4.51. Pensez-vous que les aides dérangent l'évolution de votre
commerce?
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
f
(Si non, passer à la question 4.52 et suite)
1
1
4.52. Comment les aides dérangent-elles l'évolution de votre
1
commerce?
1
/_/
.Elles font régresser mes affaires / /1
1
.Mon commerce n'évolue pas / /2
-
1
.Créent des problèmes dans ma gestion /_/3
1
. Autre / _/4
. Préciser
1
1
4.53. Pensez-vous que la demande d'aide est plus forte mainte- 1
nant qu'au début de vos activités commerciales?
1
/_/
Oui /_/1
Non /_/2
NSP /_/3
f
(Si non, passer à la question 4.55 et suite).
4.54. A quoi cet accroissement de la demande d'aide est-il dû
selon vous?
/_/
.Appauvrissement des gens au village
/ /1
.L'ancienneté de l'artisan à Abidjan
/-/2
.Arrivée de nouveaux parents en ville /=/3
.Problèmes familiaux croissants
/ /4
.Autre
/_/5
.Préciser
~
.
Thème 4 : Analyse du système d'approvisionnement
4.55. (Voir fiche)
4.56. Quels sont les problèmes majeurs que vous rencontrez en
matière d'approvisionnement?
/_/
315
Ne rien
écrire ici
.Variation des prix /_/1
.Problèmes de stockage /_/2
.Problèmes de transport /_/3
.Forte demande du même
produit /_/4
.Autre /_/5
.Préciser .••••.•.•.••••.••
Faites-nous quelques propositions utiles à l'amélioration de
vos conditions de travail.
Observations
316
GLOSSAIRE DES PLATS ET PRODUITS CITES
• Ablo
Plat d'origine bénino-togolaise.
L'ablo est
une pâte
de
maïs
légèrement
salée et
sucrée
qui
se
mange
accompagnée
d'une sauce ou avec
la viande
et/ou
le
poisson
gri 1 lé ou
frit.
· Ac a r a P I a t
don t
l ' 0 r i gin e sep e r den t r e l e Ghan a , l e T0 go,
le
Bénin et
le Nigéria.
Il
est
fait
de beignets
de
niébé
(haricot)
et
se
mange
avec
de
la
sauce
pimentée.
· Agouti
Petit
mammifère rongeur
dont
la viande est
très'
ap-
préciée par
les consommateurs abidjanais.
• Akassa
Plat
d'origine bénino-togolaise.
L'akassa
est
une
pâte de
farine
de maTs acide qui
se mange accompagnée
d'une sauce ou avec
la viande et/ou
le poisson grillé
ou
f r i t .
· Alloco
Plat
ivoirien
fait
de
banane
plantain
frite
à
l'hui le.
Il
peut être accompagné de poisson et/ou de
viande
gr il lé assaisonné avec du piment.
1 r est con-
sommé
généralement
en al imentation extérieure
comme
go Û ter
e t
à
dom ici 1e
comme
des s e r t
0 u
pla t
de
résistance.
• Beignets
On obtient
divers
types de beignet en
fonction des
pro d u i t s
de bas eut i 1 i s é s .
On a don cie b e i g net
de
317
.,--- - -----
maïs,
de mi l,
de blé, de manioc,
de banane plantain
ou de banane douce.
· Les brochettes
Viande gr i liée avec de
l'oignon,
servie
en
sandwich
dans
du pain ou pouvant être consommée
au
bout de bâtonnet.
• Le "café complet"
se retrouve
lors des repas à domici le
mais
surtout en consommation extérieure.
C'est un plat
à
base
de
café et de
lait accompagné de
pain
beurré
auquel
on peut ajouter d'autres produits tels que
le
poisson,
l'arachide. C'est en quelque sorte une réin-
terprétation du petit déjeuner continental.
• Le foutou
:
Ce nom est attribué à tout plat à base de
tuber-
cule
ou de féculents cuits à
l'eau puis pilé jusqu'à
l'obtention d'une pâte consistante.
On distingue
le
foutou d'igname,
de manioc,
de banane ou de tarot.
La
détermination
du
nom
du plat dépend
alors
de
la
tubercule ou du féculent qui a servi à sa confection.
· Le Kédjénou:
C'est un plat-type de
l'alimentation extérieure
abidjanaise.
Il
est
fait
de poulet
découpé,
bien
assaisonné
et
cuit à
la vapeur dans une
marmite
à
long col,
bien couverte. Ce plat se compose aussi
de
pâ t e de toma te,
de p i me n t
f rai s ,
d ' 0 i g non ,
d'a il.
d'hui le
de
palme.
Il
se retrouve dans
toutes
les
r é g ion s dei a Cô t e - d ' 1v0 ire .
· Le Moni. est une boui Il ie de mi 1 d'or igine sénégalaise.
· Le foufou,
est
un
plat fait à partir d'un mélage de
banane
plantain
légèrement pi lé et mélangé à
l 'hui le rouge.
318
• Les
sauces:
Elles accomnagnent
les plats de
résistance
tels
que
le
riz,
le
foutou et
le
foufou.
Elles
sont carac-
térisées
par
les produits de base,
généralement des
légumes,
des noix ou des graines qui
ont
servi
à
leur
préparation
et
dont
elles portent
le
nom.
On
dira
"sauce
aubergine"
pour
une sauce dont
les
légumes
dominantes sont
des aubergines et
"sauce graine" pour
une sauce à dominance de
jus de noix de palme.
·
Le tiep-djen
est
un plat
dont
les
trois
principaux
consti-
tuants
sont
le
riz,
le poisson
frais
et
l'huile
d'arachide
avec
une
dizaine
d'autres
ingrédients
complémentaires.
Fruit d'un métissage dont
la pater-
nité
remonte
aux équipages qui,
du
XVIe
au
XIXe
siècle,
fréquentaient
la côte du Sénégal,
et en par-
ticulier
les ports de St
Louis.
Rufisque et Gorée où
on
trouvait
côte
à
côte
africains,
hollandais,
portugais et
français,
Je tiep-djen doit
sa diffusion
En
CÔ t e - d' 1v 0 ire
a u x
t r a v aille urs
m i g r an t s
sénégalais.
·
Le Wo,
est
une pâte de
farine de maïs à consistance
molle,
consommable
de préférence à chaud.
Il
est
surtout
servi
par
les
restauratr ices béninoises.
Il
est' géné-
ralement
accompagné
d'une sauce au poisson ou
à
la
viande.
• Le yassa.
Plat
d'origine sénégalaise
fait
essentiellement
de
riz blanc
avec comme accompagnement
la sauce préparée
à
l'oignon et au citron.
319
PLA N
D E T A I
L L E
Page
1NTRODLCT 1()\\J GENERALE .•...•••.••.......•..•••....•.••.•.••
10
1.
De la problématique générale du secteur
informel à sa
projection dans
les filières agro-alimentaires
11
a) Considérations générales sur
le secteur
informel
1 1
" " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " "
/
b) La par t dei 1 Il i n for me 1Il dan sie s fil i ère s a g r 0 -
l' 1 •
a
16 \\:
1 i me n t air es" " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " " "
2. Problématique et objectifs de
l'étude
23
3. Techniques et méthodes d'approche . . . . . . . . . . . . . . • . .
31
a) Approche historique et opération de comptage.
31
b) Dispositif d'enquête socio-économique
.
33
4.
Plan de
l'étude
.
37
Chapitre
DEPENDANCE ALIMENTAIRE, MIMETISME ET URBANI-
SATION EN COTE-D'IVOIRE
41
Section 1
Dé pen dan c e a 1i me n t air e et u r ban i sa t ion
:
état des
1 ieux . • . . . . . . . . . . . . . • . • . • . . . . . . .
42
A - Cadre théorique sous-jacent aux débats
. . . . . .
42
B - Controverses sur
le cas de
l'Afrique sub-
saharienne . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . . . . . . . . .
47
Sec t ion 2 : Cô t e - d ' 1v0 ire,
Il La
ville pla ide non cou p a b 1e" 5 1
A - Croissance démographique, urbanisation et évolu-
tion des
importations alimentaires . . . . . . . . . .
51
B - Le paradoxe de
la dépendance sans mimétisme.
64
----- - .
321
Page
Section 3
Informel alimentaire et résistance au
mimétisme:
la nécessité de relativité
66
A - Les 1 imi tes de
l 'argumentat ion..............
66
B - L'original ité de
la résistance au mimétisme
dans 1a dépendance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . •
68
CO\\JCLUS IO\\J PART 1ELLE . • . . . . . . • . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
71
Chapitre Il
CROISSANCE URBAINE ET DEVELOPPEMENT DE L'ALIMEN-
TAT 1ON EXTER 1EURE
72
Section 1
ETAPES DE L'URBANISATIO\\J ET PROCESSUS
DI IVOIRISATION DE LI INFORMEL ALIMENTAIRE
73
A - Etapes de la croissance d'Abidjan et nécessité
d'une al imentation extérieure
73
B - Au co e ur du pro ces sus d' i v0 i ris a t ion de
l ' i n for me 1 a 1i me n t air e
76
Section 2
STRUCTURES DE CO\\JSOvfv1ATIO\\J ET CATEGORIES
D'AL 1MENTS VENDUS
.
85
A - Structures de consommation de l'artisanat
a
85
1 i me n t air e
"""""""""""""""""""""""""""""""""
B - D'une structure à une autre,
les types
dia 1 ime n t s se r vis
.
94 ' /
Section 3
QUELQUES CONTRAINTES A LA CREATIO\\J DES UNITES
DE PRODUCT ION. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
103
A - Les
investissements initiaux .... .... ... .....
103
322
Page
B -
La
lutte pour
l'occupation de
l'espace et
la
difficile question de
l'intégration
•••••••••
105
CONCLUSI()\\J PARTIELLE.......................................
108
Chapitre
III
PRODUCTION ALIMENTAIRE ET PARTICIPATION
COv1\\t1UNAUTA 1RE
••.•••.•..••••••.••••••.••••••
1 10
Section
1
CARACTERISTIQUES SOCIO-DEMOGRAPHIQUES DES
MI CRO-NEGOC 1ANTS
.••.•••.•.•••.•••••..•..•
111
A - Données
sur
le prof il
socio-démographique des
mi cro-négoc i ants
. • . . . • . . • . • . • • • . • • . • . . • . • • . •
111
B - Trajectoire migratoire et
professionnel
des
actifs
116
Section 2
ANALYSE DES CARACTERISTIQUES DE LA MAIN-
D'OEUVRE DE L'INFORMEL ALIMENTAIRE
•••••••
120
A
-
Identité socio-démographique de
la main-
d'oeuvre
.. .. .. ... .. ... ... ... .... . .. .. .... . .
120
B - Uti 1 isation des aides
familiaux et
impl ications
socio-économiques..........................
123
Section 3
STRUCTURES FANIILIALES
IMMEDIATES DES MICRO-
l\\IEGOC 1ANTS
• . . . • . . • . . • . . . . • • . • • . . . • • . • . • • .
1 26
A -
Pro p 0 r t ion des che f s de mé n age e t
t aille des
menages
127
B - Actifs par ménage,
origine des
revenus
et
budget
f am i 1 i a l . • • . . . • . . • . . . • . . . . • . . • • . • • . • • . . . . . . .
128
323
Page
CONCLUSIQ\\I PARTIELLE......................................
135
Chapitre IV : STRATEGIES D'INVESTISSEMENT ET RATIONALITE DES
MICRO - NE.GOC 1ANTS
137
Section
1 : DE LA DECISION D'ENTREPRENDRE A LA CONSTITU-
T 1Q\\I DU CAP 1TAL
138
A - Les motivations à
l'initiation d'une activité
é con om i Que
.
138
B - Stratégies de constitution du capital
investi
147
Section 2
EVALUATION ET REPARTITION DU CAPITAL INITIA-
LEMENT 1NV EST 1
.
150
A - Evaluation du capital de démarrage
.
150
B - Modes de répartition des
investissements
initiaux
153
Section 3
INVESTISSEMENT ECONOMIQUE ET RATIONALITE DES
ACTEURS DE L'INFORMEL ALIMENTAIRE
.
158
A - Les présupposés d'une topique d'approche
.
158
B - Les pô 1es d 1 i n t é r ê t d 1 une pra t iQue comme r c i ale
i n for me Ile
.
162
CONCLUSION PARTIELLE
, 165
Chapitre
V : CIRCUITS ET PRATIQUES D'APPROVISIONNEMENT DANS
L' 1NFORMEL AL 1MENTA 1RE
167
Section 1: Ravitaillement en produits
intermédiaires
168
A
Produits végétaux et animaux
168
B - Produits agro-al imentai res
171
324
Page
Section 2
L'attiéké et
le riz:
de l'approvisionnement à
à
1a conSOrTYTla t ion
. . . . . . • • • • • . . . . . . . • • . . . .
173
A - L'approvisionnement en attiéké
173
B - L'approvi'sionnement en céréales et
la question
de consommation du
riz dans
l'informel
a 1 i me n t air e
174
Section 3
Pratiques
1 iées
à
l'approvisionnement auprès
des c i r cui t s "i n for me 1s "
184
A
Le c réd i t
.
184
B - Les associat ions de ravi tai Ilement ou
l'amorce
d'un processus de self-rel iance
.
186
CQ\\JCLUS ION PART 1ELLE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • . . . . . . . . . . . . . . . .
188
Chapitre
VI
DEMANDE ALIMENTAIRE INFORMELLE ET STRATEGIE
DES PRIX A LA CONSOMMATION
190
Section
Espace
al imentai re
et rapports' offreurs-
con somma t eu r s
19 1
A - Espace
al imentaire
et comportements de
consommation
191
B - Pratiques du crédit à
la consommation et
rapports
à
la cl ientèle
197
Section 2 : Nature, mesure et prix des plats consommés
201
A - Nature des plats consommés en al imentation
extérieure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
201
B - S t rat é g i e s des p r i x à
1 a
con s omm a t ion . . . . . . .
207
325
Page
CONCLUSIQ\\! PARTIELLE......................................
215
Ch api t r e VII
RENTABILITE DES OPERATIONS COMMERCIALES,
COMPORTE-
MENT DE CONSOv1MA.T 1Q\\! ET D'EPARGNE DANS LE SECTEUR
1NFORMEL AL 1MENTA 1RE
.•.••..•••••••..•••••••
216
Sect ion
Appréciation du
revenu net
par catégorie de
r e s t a u r a n t . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
217
A - Méthodes
d'évaluation des
revenus
•.••••• ••••
217
B -
Ré sul t a t s 0 b t en us. . • . • • • • • • • . . • . • • • . • • • • • • • •
22 1
Section 2
Analyse des
données
sur
la consommation
des
mé n age s d' a c t eu r s
••••.•••••••••••••••••••
225
A -
Prél iminaires méthodologiques
••.•..••• •••••
226
B -
Structure des dépenses de consommation des
me nage s . . . . . . . . . . . . . , . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
228
Section 3
Les comportements d'épargne dans
Il informel
alimentaire
243
A -
Evaluation de
l'importance et
de
la capacité
d ' é p a r g n e . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
244
B - Comportements d'épargne et destinations
é con om i que s des
f 1u x
.•........••••••.••.••••
245
CQ\\JCLUS ION PART 1ELLE
. . . . • . . • • • . . . . . . . . . . . . • • • • • . . . . . . • • . • •
. 248
Chapitre VIII
IMPORTANCE SOCIO-ECONOMIQUE DE LI INFORMEL
AL 1MENTAl RE
•••.......•.•..••••••••..••••••
251
326
..
Page
Section
Contribution du
secteur
informel
alimentaire
â
l'économie urbaine
•••••••••••• ••••••••
252
A - Du point
de vue de
l'emploi
et du
revenu
•••
252
B - Du point
de vue de
l'insertion des
femmes
dans
1e
t i s sué con om i que u r bai n
••••••.•.•...••••
2 5 4
Sec t ion 2
Place de
l'informel
alimentaire dans
le
s y s t ème a J i me nt air e u r bai n
255
A -
L' i n for mir a 1 i me n t air e dan s 1a cha i ne de
pro duc t ion - con somma t ion a 1 i me n ta ire
••.•••.
255
B - Contribution de
l'informel
alimentaire â
la
sécur i té al imentai re en mi 1 ieu
urbain.....
256
Sec t ion 3
Conditions macro-économiques de
survie de
" i nformel
alimenta ire
............... ... .
263
A -
L'état
de
la production vivrière nationale
264
B -
Les potentialités du marché
international
en
riz,
en
viande et en poisson
•••••••••• ••••
266
CONCLUSION PARTIELLE
.......... .... ...... . .. .. ..... . .. . .. ..
270
CONCLUS ION GENERALE
.••••••••••••..••••••.•••••••••••••••••
272
REFERENCES BIBL 1OORAPH 1aUES
••••..•.••.••.•••••••••••.••••••
28Q;
50i
LISTE DES TABLEAUX .••••••..•...•••••••••.• "•••••••••••••••••
300 1..
OUEST 1ONNA 1RE
..... . . .... . . .... .. ..... ..... ............ ..... 306
GLOSSAIRE DES PLATS ET PRODUITS CITES
.•••.••••••••••••••.••
317
PLAN DETAILLE
.... .......... . ... ..................... .. .. ... 323
327