.
. , - '
N° d'ordre
FACULTE DES LETrRES, ARTS ET SCIENCES HUMAINES
,
'"
INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT
ET TRANSFORMATIONS SOCIO-ECONOMIQUES
ET SANITAIRES AU BURKINA FASO
REGION DU·CENTRE·NORD
(PROVINCES DU BAM, DU NAMENTENGA
.ET DU SANMATENGA)
"
TOME 1
~ .
THESE DE DOCTORAT ÈS LETTRES Ei SCIENC('S . HUMAINES
OPTION : SOCIOLOGIE
Présentée par
Jean-Baptiste OUEDRAOGO
sous la direction de
Monsieur KOUAKOU ·N'GUESSAN François, Profésseur
......
,
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CONSEIL AFRICAIN Eii'~~i(l·
, POUR A.'fENS~D@NEMENT SUPERIEUR ii
.' C. ~',M. E. S. -
OUAGADOUGO, :
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Année Universitaire 19~5-1996

UNIVERSIT~
DE
COCODY-ASIDJA~
PER['H S -D t 1 f'1P RF1E R
Thèse de doctorat dtETAT
Présentée par : OUEDRAOGD J8an-Baptiste
THEME
: Interventions ds développement et transformation
Socio-Economique et Sanitaire au Burkina Faso
Region du Centre-Nord
(Provinces du EF\\f"i, du Namentenga et SANMENTENCA)
VU et approuvé
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Lettres
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Vu . et . permi s dt impr imei:
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P.bidjan, 18 J.l:f. ...~ r: -l'V"
Le
Le Président dB l'Université
de COCODY

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
AEERB
Association des Eglises Evangéliques Réformées du Bam
ADRK
Association pour le Développement de la Région de Kaya
APAD
Association
Euro-Africaine
pour
l'Anthropologie
du
changement Social et du Développement
ATV
Aménagement du Terroir Villageois
AVD
Association des Volontaires pour le Développement
AVV
Autorité de l'Aménagement des Vallées des Voltas
BDPA
Bureau pour le Développement de la Production agricole
BIT
Bureau International du Travail
CATWELL
Catholic Wellfare
CES/AGF
Conservation Eaux-Sols/Agro-Foresterie
l

CBEMO
Organisation Catholique Néerlandaise pour la Coopération
et le Développement
CCCE
Caisse Centrale de Coopération Economique
CEE
Communauté Economique Européenne
CERCI
Centre d'Expérimentation du Riz et des Cultures Irriguées
CESAO
Centre d'Etudes Economiques et Sociales de l'Afrique de
l'Ouest
CFA
Communauté Financière Africaine
CFDT
Compagnie Française de Textiles
CGCI
Centre de Gestion des Cités
CGP
Caisse Générale de Péréquation
CILSS
Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel
CNEA
Centre National d'Equipement Agricole
COOMAKO
Coopérative Maraîchère de Kongoussi
I I

CNSS
Caisse Nationale de la Sécurité Sociale
CRPA
Centre Régional de Promotion Agro-Pastorale
CRSVI
Conférence Régionale du Service Volontaire Internationale
DARA
Développement Agro-Foresterie par la Régénération de
l'Acacia
DESA
Direction de l'Education pour la Santé et l'Assainissement
DFN
Domaine Foncier National
DPPN
Direction de la Prévention des Pollutions et des Nuisances
DRS
Défense et Restauration des Sols
EPA
Etablissement Public à Caractère Administratif
EPIC
Etablissement Public à Caractère Industriel et Commercial
FASO-YAAR
Société
de
grande
distribution
de
produits
divers
(appellation en langue nationale Djula)
I I I

FED
Fonds Européen de Développement
FEER
Fonds de l'Eau et de l'Equipement Rural
FIDA
Fonds International pour le Développement Agricole
FIDES
Fonds
de
l'Investissement
pour
le
Développement
Economique et Social
GRAAP
Groupe de Recherche et d'Appui pour l'Auto-Promotion
Paysanne
LUCODEB
Lutte Contre la Désertification au Burkina
OFNACER
Office National des Céréales
ONBAH
Office National des Barrages et des Aménagements
Hydro-Agricoles
ONASENE
Office National des Services d'Entretien et de Nettoyage
ONEA
Office National de l'Eau et de l'Assainissement
ONG
Organisation Non Gouvernementale
ORD
Organisme Régional de Développement
IV

OMS
Organisation Mondiale de la Santé
PAFV
Programme d'Appui à la Foresterie Villageoise
PATECORE
Projet d'Aménagement des Terroirs et Conservation des
Ressources
PEDI
Projet de Développement Intégré
PDAV
Projet de Développement Aviculture Villageoise
PDSS
Projet de Développement des Services de Santé
PIS
Produit Intérieur Brut
PME
Petites et Moyennes Entreprises
PNS
Projet National Brut
PPIS
Plan de Parrainage International de Boulsa
PPIL
Plan de Parrainage International des Lacs
PPIK
Plan de Parrainage International de Kaya
v

SAED
Société Africaine d'Etudes et de Développement
SATEC
Société d'Aide Technique et de Coopération
SOCOGIB
Société de Construction et de Gestion Immobilière du
Burkina
SCOOBAM
Société Coopérative du Barn
SOFITEX
Société des Fibres Textiles
SIX S
Se Servir de la Saison Sèche en Savane et au Sahel
UCOBAM
Union des Coopératives Agricoles et Maraîchères du
Burkina
UNESCO
Organisation des Nations Unies pour l'Education, la
Science et la Culture
UNICEF
Fonds International des Nations
Unies de Secours
d'Urgence à l'Enfance
US/AID
Agence d'Aide des Etats-Unis
VI

REMERCIEMENTS
- A Monsieur le Professeur Kouakou N'GUESSAN François qui a bien voulu
accepter de diriger la préparation de la présente thèse. Sa rigueur dans l'approche
méthodologique des réalités sociologiques et sodo-économiques du monde rural
nous a permis d'affiner notre propre méthodologie de recherche dans l'analyse des
opérations de développement appliquées à la socièté rurale mossi du Burkina Faso.
Nous lui exprimons notre profonde gratitude et notre grande admiration.
- A Monsieur Alfred SCHWARTZ, Chercheur à l'ORSTOM dont les sages
conseils et les encouragements ont été d'un précieux concours tout au long de notre
travail.
- Aux collègues chercheurs du Centre National de la Recherche Scientifique
et Technologique et particulièrement à ceux de l'Institut de Recherche en Sciences
Sociales et Humaines (IRSSH) de Ouagadougou dont le soutien sous diverses
formes et le concours bienveillant en toutes circonstances, nous ont toujours
réconforté et aidé à poursuivre nos investigations de terrain pour mener à bien ce
travail de recherche. Qu'ils en soient tous et chacun remerciés. Puissent les efforts
inlassables que nous déployons en commun, contribuer, malgré les multiples
contraintes, à faire progresser la recherche scientifique au service du développement
du Burkina Faso.
VII

- Aux autorités politiques et administratives provinciales du Bam,
du
Namentenga et du Sanmatenga pour l'hospitalité et les facilités qui nous ont été
offertes sur le terrain.
- A Monsieur le Directeur de la DRPC de Kaya (Direction Régionale du Plan
et de la Coopération) et à Monsieur Moussa TRAORE pour l'aide à la documentation
et aux enquêtes de terrain.
- A Monsieur le Directeur du Centre Régional de Promotion Agro-Pastorale
(CRPA) du Centre-Nord pour ses divers conseils.
- A Monsieur Bernard CONTAMIN, Directeur du Centre ORSTOM de Petit
Bassam (Abidjan) et son personnel pour l'accueil enthousiaste et l'ambiance
sympathique, autant de conditions favorables qui nous ont permis de mener à bien
le travail de rédaction.
- A Mmes SAWADOGO Elisabeth et SAWADOGO Delwendé pour la mise en
forme de ce document.
VIII



1. INTRODUCTION
A la question de savoir pourquoi choisit-on de traiter un sujet aussi complexe
et évocateur de problèmes majeurs que celui des interventions de développement en
milieu rural mossi du Burkina, nous répondrons que nous voulons explorer un
domaine de recherche qui puisse être générateur d'une nouvelle science du
développement.
Si le développement constitue l'objet de préoccupation des hommes et des
sociétés, il ne revêt pas toujours la même signification pour tous. Parler de
développement, c'est en effet faire expressément appel au problème de sens.
Quelle conception de développement se forgent les populations rurales mossi
du Centre-Nord du Burkina?
Les opérations de développement qui s'y déroulent
respectent-elles ou au contraire altèrent-elles la vision propre de développement des
Mossi de la région étudiée? Quelles conséquences socio-économiques et sanitaires
peuvent-elles en résulter?
Le Docteur Quenum définit le développement comme suit:
"Le développement s'entend étymologiquement de l'acte d'enlever
l'enveloppe pour permettre à l'homme de s'épanouir. Il peut désigner aussi
l'ensemble des processus et mécanismes mis en
place par la société pour
permettre à chacun de ses membres d'accéder au maximum d'épanouissement
dont il est capable. 1/ s'agit d'un changement organisé dont l'objectif ultime est
le bien-être de tous les membres de la collectivité. 1/ s'agit d'un processus de
mise en valeur de la personnalité individuelle et collective. Plus globalement,
3

c'est un processus qui permet l'accroissement tant quantitatif que qualitatif de
tout système"'.
Ainsi le développement n'est pas la croissance économique, mais plutôt
l'amélioration du bien-être des individus et des collectivités. Il inclut le concept de
croissance, c'est-à-dire une variation dans le temps et l'espace d'une grandeur dans
le sens d'une augmentation, d'une amélioration vers le bien, d'une évolution et d'un
progrès.
Le développement peut être en effet défini par rapport à des critères de
croissance et d'organisation, comme le fait J.J. SERVAN-SCHREIBER2 ; une telle
définition du développement offre l'avantage de présenter quelques indications sur
les tendances de l'évolution d'une société. Mais l'évolution n'est pas linéaire et
univoque; elle comporte nécessairement des variantes en fonction de la société
considérée et notamment de sa culture.
Le développement peut aussi être défini par rapport à des critères culturels.
L'on prend de plus en plus conscience que le développement exige d'abord la pleine
possession de soi-même, de sa culture. C'est là une démarche qui concerne tout
l'homme et tous les hommes de la société qui doit se développer. La problématique
du développement doit se poser à partir du coeur de la réalité humaine, c'est-à-dire
du système de valeurs auquel adhère la société ; c'est
à partir de là que peut
l
Or COMLAN A. A. QUENUM : Extraits de cours et allocutions sur santé
et développement. OMS Bureau Régional de l'Afrique. Brazzaville 1983.
P.6
J. J. SERVAN-SCHREIBER : Le défi américain. Edition Denoël, Paris,
1967. P.38.
4

s'établir la voie de l'ouverture réelle au progrés par une participation effective et
responsable des populations qui en sont concernées.
La culture est ici entendue comme la série de réponses que les hommes d'un
groupe concret, plus ou moins large, ont construites à l'ensemble des problémes
qu'ils posent à tous les niveaux et dans tous les secteurs de leur vie personnelle et
de leur vie de groupe.
Il ya culture lorsque cet ensemble de réponses est reconnu comme approprié
par le groupe humain en question et tend à s'organiser en cohérence par rapport à
un système de valeurs; il existe bien entendu de constantes interactions entre tous
les «paliers»
(pour reprendre le terme de Gurvitch) du modèle socio-culturel ; de
plus, il est admis que ce modèle est animé par un dynamisme sous l'effet de
poussées internes de ses éléments propres et de poussées externes provenant des
messages des autres modèles culturels.
C'est donc dans des champs culturels dynamiques, mouvants et complexes
que se pose la problématique du développement. C'est pourquoi Roland COLIN
avançait déjà en 1968 : "... Ce n'est que dans la pleine possession de sa culture
qu'un
peuple peut se vouloir responsable de son
développement. Le
développement ne peut être défini concrètement pour un peuple que par ce
peuple, dans le langage de sa culture" 3.
Roland
COLIN
Signification
du
développement,
Revue
"Développement et Civilisations" N° 34, Paris 1968. p. 11.
5

Pour les Mossi du Centre-Nord, le développement consiste en la satisfaction
des besoins vitaux (santé, nourriture, logement et habillement) permettant le plein
épanouissement de l'homme; étant entendu que l'environnement physique, socio-
économique et politique peut le favoriser ou au contraire l'entraver.
Chez les Mossi en effet, le confort matériel et le moyen de l'acquérir, c'est-à-
dire le travail, se place en dessous du confort moral et des moyens d'y parvenir dans
l'échelle des valeurs. Ce qui procure le confort moral, c'est la fidélité à la coutume
qui se traduit d'abord par la fidélité aux ancêtres; les ancêtres se prolongent dans
leurs descendants et veillent au respect des coutumes pour assurer la vie et la paix
sociale. Modifier les coutumes peut être perçu comme une atteinte à la sagesse
léguée par les ancêtres, ce qui pourrait priver les vivants de leur bienveillance.
La fidélité à la coutume, source du confort moral, se traduit également par la
solidarité avec les membres de la famille élargie et du lignage. La solidarité répond
en quelque sorte à un besoin de sécurité et se traduit concrètement par des formes
d'entraide et de prestations diverses de service.
L'échelle de valeurs des Mossi et les comportements qui en découlent, leur
procurent un équilibre humain dont ils sont généralement satisfaits.
Nous voudrions précisément à travers la présente étude sur les interventions
de développement en milieu rural mossi du Centre-Nord du Burkina:
6

1)
appréhender les lignes de force qui caractérisent la pensée mossl
relative au développement, les moyens utilisés et les stratégies
déployées pour y parvenir;
2)
nous interroger sur les raisons profondes qui justifient la persistance de
la faim ainsi que la situation sanitaire presque stagnante en milieu rural
mossi du
Centre-Nord
malgré
les
nombreuses interventions de
développement qui s'y observent depuis quelques décennies.
3)
contribuer à l'amélioration des interventions de développement en
milieu rural par une meilleure connaissance et une prise en compte de
l'ensemble du contexte social et culturel mossi.
4)
ouvrir un débat en sociologie sur les aspects épistémologiques,
théoriques et méthodologiques du développement, car le propos de la
sociologie n'est-il pas de considérer l'ensemble des variables sociales
et
culturelles
qui
interviennent
dans
les
interactions
"développés/développeurs" ?
Ainsi que le faisait remarquer l'APAD : "L'anthropologie ou la sociologie
peut apporter une compréhension fine des dynamiques des sociétés locales,
des systèmes de décisions et de pouvoir qui régulent les rapports à
l'innovation et aux interventions extérieures, des réactions différentielles de ces
sociétés et de leurs composantes face aux opérations de développement... elle
peut proposer une évaluation des actions de développement du point de vue
7

des acteurs et groupes impliqués, et en particulier du point du vue des
destinataires"4.
Il est aujourd'hui admis en sociologie du développement rural, une prise en
compte de plus en plus grandissante des logiques des savoirs et savoir-faire des
populations par rapport aux objectifs et aux contraintes qui sont les leurs. Mais la
connaissance sociologique doit toujours se confronter à l'épreuve des actions de
développement sur le terrain. D'où l'intérêt scientifique d'un tel sujet qui vise à
montrer que la mise à l'épreuve des objets, méthodes et résultats de la sociologie
peut enrichir la recherche sociologique elle-même, au-delà du bilan qui peut être
dressé des actions de développement. Une telle démarche permet de concilier
logiques de connaissance et logiques d'action, compétences sociologiques et d'autres
compétences scientifiques et techniques déployées dans les interventions de
développement.
Il s'agit ici de chercher aussi à définir les conditions les meilleures pour une
participation plus efficace des sociologues aux opérations développement, tout en
marquant
la différence tant d'avec les études
sociologiques fondamentales
inutilisables par les développeurs, qu'avec les travaux de bureaux d'études et les
missions d'évaluation souvent menées sans aucune compétence sociologique.
4
APAD
(Association
Euro-Africaine
pour
l'Anthropologie
du
Changement social et du développement) Pour une anthropologie du
changement social et du développement (projet de charte d'une
association euro-africaine). Bulletin N° 2 Décembre 1991. Montpellier.
P.5.
8

" s'agit en somme de déterminer la place de la sociologie dans la préparation,
la gestion, le suivi et l'évaluation des opérations de développement. En effet, une
constatation est unanimement établie par les chercheurs, bureaux d'études, sociétés
d'interventions et de développement, organisations non gouvernementales etc. sur
la situation de stagnation de la productivité du secteur rural dans l'ensemble de
l'Afrique au sud du Sahara; cette situation est encore plus préoccupante en ce qui
concerne le Burkina Faso, pour les régions Nord et Centre-Nord aux conditions agro-
climatiques particulièrement défavorables; cette baisse continue de la productivité
observée depuis quelques décennies intervient dans un contexte de demande
économique,
sociale et politique toujours
plus forte
liée à une croissance
démographique rapide. Par exemple, dans le domaine de l'agriculture et de l'élevage,
principales activités des populations rurales mossi du Centre-Nord, les systémes de
production ne progressent que très lentement, couvrant à peine les besoins de ces
populations, en dépit des efforts réels et constants de la recherche agronomique en
vue de les améliorer ; pendant ce temps, le niveau de compétitivité face à la
concurrence
internationale ne fait que baisser d'année en année.
D'où de
nombreuses interventions de développement dans ces régions pour contribuer à la
promotion socio-économique et sanitaire des populations rurales.
" faut faire le point de l'ensemble de ces interventions de développement
surtout dans la région du Centre-Nord qui constitue le champ de notre étude, pour
en évaluer l'impact socio-économique et sanitaire et esquisser des perspectives
d'avenir.
9

"Qui n'a pas vécu cette induction progressive et vivante, démarche
fondamentale des sciences sociales, peut être un théoricien respectable,
mais ne saurait à lui seul, élaborer fa discipline du Développement.
Celle-ci est, en fait, d'autant plus scientifique, qu'elle procède par
approches successives dans une interprétation continue des détails
éclairés par une vue d'ensemble ; approches du global dont la
perception se précise et de l'élémentaire dont la connaissance s'élargit
progressivement.
Mais
les
approches
successives
peuvent
être
raccourcies et rendues plus sûres grâce à quelques théories explicatives
de portée générale".
(L. J. LEBRET: Dynamique concrète du Développement, pp 116 et 117).
1.1. Exposé de la problématique
Des interventions de développement se multiplient en milieu rural burkinabè
depuis la période coloniale à nos jours, dans l'objectif d'assurer la promotion socio-
économique et d'améliorer la qualité de vie des populations.
Ces interventions de développement sont financées par des bailleurs de fonds
extérieurs (aide multilatérale, bilatérale, organisations non gouvernementales) et
permettent au monde rural d'acquérir de nouvelles technologies (charrues, engrais,
irrigation, procédés culturaux, petit matériel pour la promotion de artisanat etc.) et de
bénéficier de l'assistance technique. De ce fait, les interventions de développement
deviennent le cadre d'expression et le support privilégié des stratégies et politiques
de développement.
10

La plupart des interventions vise l'accroissement de la production agricole, de
l'élevage ou de l'artisanat rural, et par conséquent l'amélioration des conditions
d'existence des population rurales. Les autres interventions visent des objectifs
intermédiaires telles que la protection et la restauration des sols, l'organisation des
paysans en groupements pré-coopératifs et coopératifs ou encore en groupements
d'intérêt économique.
Ainsi, les stratégies de développement des trois dernières décennies restent
marquées par les caractéristiques suivantes:
1.
La première décennie (1961-1970) se caractérise par une forte
assistance technique fondée sur la recherche ou le renforcement de
relations privilégiées avec les grandes Puissances Etrangères et
notamment avec l'ancienne puissance colonisatrice. Cette assistance
technique
devait
contribuer
à
travers
de
grands
projets
de
développement (Aménagement de la plaine rizicole de Louda à Kaya
au Sanmatenga, "Opération culture du coton" à
Kongoussi dans le
Bam ... ) à moderniser tous les secteurs de la vie nationale. Ces
premières expériences de développement se soldèrent par des échecs,
parce qu'elles ne prenaient pas en compte les initiatives paysannes
locales, c'est-à-dire les réalités du milieu socio-économique et culturel
du terrain; elles étaient dirigées par et au profit de l'extérieur.
2.
La seconde dècennie (1971-1980) connaît un changement dans la
conception de la politique de développement rural désormais axée sur
des projets de petite ou moyenne taille à l'exécution desquels la
11

participation des populations était fortement sollicitée. Les interventions
de développement rural de cette période n'enregistrèrent pas plus de
succès que celles de la décennie écoulée.
Enfin la dernière décennie (1981-1990) qui amorce une nouvelle conception
du développement rural fondée sur une approche globale et intégrée, quels que
soient les auteurs, combine les interventions de développement des deux décennies
précédentes. Désormais les "développeurs" portent l'accent sur des actions concrètes
de développement susceptibles d'être gérées par les populations locales, qui
répondent à leurs besoins réels, qui ne bouleversent pas leurs habitudes de vie et
qui protègent leur environnement.
Toute intervention de développement rural doit
en effet être adaptée au
contexte socio-culturel et au milieu écologique tout en visant l'amélioration de la
, qualité de vie des populations rurales concernéesJElle doit aussi être sous-tendue
par une approche globale, c'est-à-dire une démarche qui intègre tous les aspects et
secteurs de la vie individuelle et collective tout en suscitant les initiatives à la base
chez les paysans.
La nouvelle conception du développement rural de la dernière décennie a-t-elle
plus de chance de succès que les deux précédentes?
Si l'objectif général des interventions de développement rural consiste à
améliorer sensiblement les systèmes de production au double plan quantitatif et
qualitatif ainsi que les conditions de vie des populations concernées, celles-ci
devraient certes reposer sur les connaissances du milieu et les intérêts des
12

bénéficiaires, mais également s'insérer dans le cadre plus global de la politique
économique et sociale de l'Etat.
Cette politique de l'Etat est-elle toujours clairement définie pour permettre d'en
avoir une compréhension aussi large que possible?
Est-il possible de définir les compétences sociologiques dans le domaine du
développement rural en rapport avec la politique économique et sociale de l'Etat?
Quelle peut être la pertinence de la demande institutionnelle du développement
rural par rapport à l'offre sociologique dans le contexte socio-économique burkinabè
marqué par un afflux massif d'aides financières et techniques en progression
constante?
Qu'il nous soit permis d'avancer la thès6' selon laquelle la sociologie peut et
doit contribuer à la compréhension des politiques de développement et de l'aide au
développement au double plan théorique et pratique. Il convient donc de définir ici,
les compétences sociologiques dans le domaine du développement rural dans le but
d'améliorer les actions de développement en faveur des populations. En outre, la
sociologie peut fournir une connaissance transversale aux autres disciplines (comme
l'anthropologie, l'économie, l'agronomie etc.) qui interviennent dans les actions de
développement. La présente étude vise entre autres objectifs la précision des
conditions les plus efficaces pour une participation de la sociologie au processus de
développement, et l'évaluation de l'impact de l'assistance au développement rural en
milieu mossi du Centre-Nord du Burkina.
13

Toute
intervention
de développement qui
ne
reposerait pas sur
les
connaissances et les intérêts des populations concernées en vue d'améliorer leurs
systèmes de production et leurs conditions de vie peut-elle aboutir?
Toute intervention de développement qui ne s'appuyerait pas sur une stratégie
gouvernementale clairement définie peut-elle réussir?
Comme le rappellent Lusigi, Walter et Nekby : "En l'absence d'une stratégie
gouvernementale clairement définie, les projets en cours ont tendance à refléter
les conceptions des différents donateurs, et les actions qui en résultent sont
souvent confuses et contradictoires, inefficaces et discontinues, et viennent
plutôt retarder que renforcer les perspectives de construction d'une capacité
permanente de développement"5.
1.2.
Définition des concepts et critique de la littérature en sociologie du
développement rural
A. DEFINITION DES CONCEPTS
Des précisions sur quelques concepts fondamentaux s'imposent ICI pour
permettre une juste compréhension des thèses défendues.
5
LUSIGI, WALTER (J) et NEKBY (B.A) 1991 : "Dryland Management in
Sub. Sahara Africa: The Search for Sustainable Development Options"
AFTEN Working Paper, Division de l'Environnement. Département
technique africain. Banque Mondiale. Washington, 1991, P.59.
14

• Intervention de développement rural
Nous entendons par intervention de développement rural, un ensemble de
programmes et projets de développement initiés par l'Etat ou par toutes institutions
extérieures (les ONG par exemple) pour transformer qualitativement les sociétés
rurales .
• Opération de développement
L'opération de développement est ici entendue dans son acceptation la plus
large, c'est-à-dire, une série d'actions engagées sur le terrain dans le cadre d'une
intervention de développent.
• Développement
Ce concept est considéré ici au sens purement descriptif et non normatif. Il
englobe un ensemble d'opérations concrètes souvent impulsées de l'extérieur par
rapport
à ses
bénéficiaires.
Ce
concept a aussi
un
sens dynamique.
Le
développement en effet est un mouvement et non pas un état. Ce mouvement prend
forme de façon différente dans le temps et l'espace, en fonction des situations. Pour
Sémou Pathé GUEYE (Université St-Louis Sénégal), "le développement est un
processus multiforme et multifactoriel par lequel une société donnée avance
vers la réalisation de ce que les hommes qui y vivent ressentent comme les
conditions de leur bonheur, de leur liberté et de leur plein épanouissement en
tant qu'hommes. Cela implique sans doute un minimum de ressources
matérielles et humaines, mais aussi la mise en
place de mécanismes
15

(économiques, politiques, sociaux etc.) permettant de les mettre en valeur, de
les gérer le plus efficacement possible et d'en répartir équitablement les
avantages à l'échelle de toute la société,,6.
En effet le développement est une notion intégrale qui embrasse la totalité de
l'existence humaine en visant le progrès équilibré et harmonieux de ses différentes
sphères matérielle et spirituelle, naturelle et sociale, individuelle et collective. Il n'y
a donc de développement digne de ce nom que par l'homme et pour l'homme, et
c'est en fonction d'un tel concept de développement que les scientifiques, en
particulier les sociologues ont la responsabilité morale d'orienter leur activité. De plus,
toute perspective de développement qui fait fi des réalités culturelles d'un peuple,
c'est-à-dire des valeurs qui déterminent les mentalités et les comportements de ce
peuple, n'a pas beaucoup de chance de succès.
• Milieu rural
Le milieu rural par opposition au milieu urbain, désigne la campagne, c'est-à-
dire le lieu où sont exercées par les paysans, des activités agricoles d'élevage et
artisanales. La population burkinabè (dont les Mossi) est essentiellement rurale, car
plus de la moitié de cette population vit en campagne.
6
GUEYE Sémou Pathé: Science, culture et développement, Université, Recherche et
Développement na 3 Mars 1994. St-Louis, Sénégal p. 2-3.
16

.. Participation au développement rural
Il s'agit d'une prise de conscience des exigences du développement et d'une
adhésion par des actes concrets aux différentes opérations de développement
engagées en milieu rural. En somme, il s'agit d'une forme d'appropriation des
interventions de développement.
• Transformations socio-économiques
Il s'agit de l'ensemble des changements intervenus dans les activités socio-
économiques des populations rurales mossi, et des habitudes et comportements qui
en résultent. L'on y inclut les conceptions et représentations mobilisées par des
actions de développement et leurs variations selon les groupes sociaux concernés.
• Transformations sanitaires
L'expression
est
ici
entendue
comme
l'ensemble
des
attitudes
et
comportements relatifs aux pratiques sanitaires tant en ce qui concerne la médecine
traditionnelle que la médecine moderne.
• Conception de la santé en milieu rural mossi
Pour les Mossi, la santé n'est pas seulement l'absence de maladies; elle est
aussi et surtout un état d'équilibre entre l'individu et sa société, une situation de
rapports harmonieux entre l'individu et les membres vivants ou morts de sa famille
17

en particulier les ancêtres dont ils détiennent la vie. Les manifestations de la vie et
les perturbations qui en résultent sont perçues en milieu mossi comme l'oeuvre des
esprits "Kinkirsi" et "Zini"7. En effet, en milieu mossi la maladie n'est pas seulement
considérée comme un fait physiologique, mais aussi et surtout comme un fait social,
de sorte que, lorsqu'elle survient, ils s'interrogent sur les causes et conditions
sociales de son apparition. Les maladies signifient ou expriment des conflits au sein
de la société entière, ou dans les relations familiales, des mauvais sorts jetés par de
mauvais esprits, par des sorciers, le mécontentement des ancêtres, la transgression
d'un interdit social ou religieux etc. Leur comportement sanitaire est donc fonction de
leur conception de la santé et de la maladie et le recours aux fétiches et guérisseurs
traditionnels est toujours la règle malgré la présence des agents de santé dans le
village.
Le recours à la médecine traditionnelle d'abord, à la médecine moderne
ensuite lorsque la guérison n'est pas obtenue n'est pas seulement dicté par des
conceptions traditionnelles des causes de la maladie. Il l'est aussi par le fait du coût
trop élevé des prestations des services de santé pour la majorité des populations
rurales: "le traitement de ma maladie qui résulte d'une malédiction quoiqu'il
advienne, me coûte trop cher au dispensaire. Je m'en remets à la volonté de
Dieu". Ainsi s'exclamait un vieux chef de famille simplement atteint par la
bronchite dans un village du département de Bam".
7
Kinkirsi : sing. Kinkirga
esprits des ancêtres, lesquels peuvent être
bons ou mauvais.
Zini : expression invariable qui désigne le génie de brousse; il peut être
bon ou mauvais.
18

Aussi, lorsqu'on tombe malade, faut-il non seulement se soigner mais aussi
rechercher les causes de la maladie.
Sylvie FAINZANG estime que "cette nécessité de rechercher les causes de
la maladie répond à une double exigence, d'ordre intelligible et fonctionnel; il
s'agit de rendre l'événement maladie intelligible, de lui donner une raison d'être
et une cohérence par rapport au reste du monde, pour en définitive s'en rendre
maître"8. A travers cette recherche thérapeutique, sans doute que les populations
rurales mossi ne perçoivent pas la santé dans sa globalité, mais seulement sous
l'angle de ses perturbations physiques ou physiologiques couramment appelées
"maladies".
S'il est indéniable que les services de santé représentent l'un des efforts les
plus importants entrep~is par l'homme pour améliorer la qualité de la vie, une forte
proportion de la population rurale n'en bénéficie pas encore. En effet de nombreuses
populations rurales mossi dont ceux du Centre-Nord continuent de souffrir et de
mourir des mêmes maladies que leurs ancêtres.
En dépit du développement de la médecine moderne en milieu rural à travers
la multiplication des dispensaires et l'extension des soins de santé primaires, la
médecine traditionnelle y conserve bien sa place par le biais des guérisseurs encore
appelés "tradi-praticiens" et les "devins".
8
FAISANG (S.) : La "maison du Blanc" : La place du dispensaire dans
les stratégies thérapeutiques des Bisa du Burkina. Revue sciences
sociales et santé, vol. III, N° 3-4, Paris 1985 P. 108.
19

Sylvie
FAINZANG
précise
que
«les
guérisseurs
sont
concernés
essentiellement par les effets de la maladie; leur rôle est de s'attacher à les
éradiquer, les devins ayant qualité pour en découvrir l'origine9».
Ces deux formes de médecine traditionnelle et moderne, plutôt que de se
concurrencer, offrent un éventail de choix thérapeutiques aux Mossi qui les
combinent le plus souvent pour des raisons d'efficacité pratique.
Les interventions de développement consistant à aider les populations à
acquérir
de
nouvelles
connaissances
et
des
savoir-faire
indispensables
à
l'amélioration qualitative et quantitative de leurs productions et de leurs conditions de
vie, il s'agit ici d'analyser la problématique de changement de la société "moaga"
(mossi), en distinguant les transformations consécutives aux interventions de
développement, de celles qui se seraient produites sans ces interventions.
9
FAINZANG Sylvie dans op. cit. p. 118.
20

Mais l'amélioration de la production et des conditions de vie des populations
rurales ne passe-t-elle pas par la capacité des responsables du développement rural
à introduire des solutions proposées par la recherche et à promouvoir simultanément
des formes d'organisation et d'encadrement qui permettent une participation réelle
de ces populations à la gestion du développement ? Car évaluer l'impact des
interventions de développement sur les différents segments de la population et de
l'économie d'une région revient en fait à mener une nouvelle forme de réflexion et
d'approche des problèmes du monde rural en vue de favoriser un intérêt réel chez
les producteurs sur les actions de développement qui leur sont proposées.
Précisément entre autres intérêts de la présente étude, nous nous attèlerons
à approfondir la conception propre des Mossi relative au développement, à la santé,
à comprendre les logiques qui sous-tendent leurs attitudes et comportements face
à la médecine traditionnelle comme à la médecine moderne ainsi que face aux
opérations de développement.
Car comme le rappelle J. P. DOZON 1O , "les sciences humaines sont de
plus en plus sollicitées pour fournir aux développeurs le savoir qui leur
manque, ou plutôt des types de connaissances qui soient tels que leurs
objectifs pratiques puissent se moduler en fonction des réalités locales".
10
DOZON (J.P.) : L'anthropologie médicale : fabrication d'un nouveau
regard, "sciences sociales et santé" na 3-4 Sept. 1983, 37-40.
21

B.
CRITIQUE
DE
LA
LITTERATURE
EN
SOCIOLOGIE
DU
DEVELOPPEMENT RURAL
Il existe une abondante littérature sur les succès ou les échecs des
interventions de développement menées ici ou là en milieu rural ; toutefois, les
comportements et les réactions des populations rurales auxquelles sont destinées
ces interventions ne sont pas toujours ou suffisamment étudiés pour en souligner
l'importance.
Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN note que ces comportements et réactions
ne sont pas ceux auxquels les agents (ou opérateurs) de développement seraient en
droit de s'attendre ... Le problème, dit-il est moins dans ce décalage entre les attitudes
attendues ou souhaitées des «populations cibles»
et leurs attitudes <<réelles»
que dans les réactions des agents de développement à ce décalage::
Et l'auteur de s'interroger: "Comment s'y adaptent-ils (ou non), comment
en tiennent-ils compte (ou non), comment l'expliquent-ils (ou non)?"".
L'on peut partager les réponses que donne Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN
à ses propres interrogations, à savoir:
11
OLIVIER DE SARDAN (J.P.) : Sociétés et développement, Publication
des Universités Francophones UREF : "Sociétés, Développement et
Santé" Paris 1992. p. 30.
22

"les praticiens du développement se font des images erronées de
ce que sont les populations rurales" ;
"les paysans usent des services, opportunités et contraintes
qu'apportent les institutions de développement selon des normes
et critères qui ne sont pas ceux de ces institutions, et ils en usent
de façon cohérente".
Mais il est à regretter qu'il n'en dégage pas les mobiles essentiels ou tout au
moins les objectifs fondamentaux poursuivis par les populations rurales dans les
interventions de développement. Pour les Mossi par exemple, une intervention de
développement à travers laquelle ils n'obtiendraient pas la garantie d'assurer la
sécurité alimentaire à leurs familles ou qui ne procurerait pas suffisamment de
revenus monétaires en rapport avec l'effort physique fourni pourrait être contournée
ou détournée pour parvenir à cette fin. De même, une intervention de développement
qui provoquerait une rupture brutale avec les habitudes de vie sociale des
populations n'a pas beaucoup de chance d'y connaître un succès.
A ces difficultés de compréhension "développeurs/développés" sur les
interventions de développement, il convient d'ajouter celles relatives à la complexité
de la réalité sociale où les centres de décision sont multiples, et où les intérêts
divergent et s'opposent.
23

"La plupart des décisions opératoires dans le domaine économique ou
dans celui de la santé sont prises par des individus précis (qui sont loin d'être
les porte-parole d'un quelconque «intérêt collectif»), à d'autres niveaux que
celui du village et de la cornmunauté"12.
Quels sont en effet les obstacles internes et externes à une meilleure
productivité économique et à l'amélioration de l'état de santé des populations rurales
mossi du Centre-Nord?
Comment
opérer
des
changements
socio-politiques,
économiques
et
institutionnels pour surmonter de tels obstacles et favoriser une plus grande
participation des populations aux opérations de développement en milieu rural mossi
? Car, si la participation des populations à l'élaboration et à l'exécution des
programmesciet projets de développement reste un objectif fondamental, elle se
révèle difficile à atteindre.
Pourquoi les efforts vers la participation ont-ils paru échouer si souvent et les
réussites si rares dans les sociétés rurales?
12
OLIVIER DE SARDAN (J.P.) : Op. cit. p. 31.
24

1.3. Les objectifs visés par l'étude
1.3.1 Objectifs généraux
L'ambition contenue dans le thème de la présente étude est:
de comprendre pour l'expliquer, la manière dont les populations rurales
mossi du Centre-Nord du Burkina ont vécu ou vivent les actions de
développement exécutées à leur intention par les pouvoirs publics ou
par les organismes d'intervention ou d'assistance étrangère.
d'évaluer l'impact de l'ensemble des interventions de développement
rural sur les conditions de vie et de travail, ainsi que sur l'économie de
la région du Centre-Nord du Burkina pour estimer les améliorations
enregistrées, situer les principales entraves et dégager les pel spectives
d'avenir.
1.3.2. Les objectifs spécifiques
La présente étude vise également les objectifs spécifiques suivants:
favoriser la création de nouveaux rapports entre populations rurales et
techniciens;
analyser les régimes fonciers, l'utilisation de l'espace et des ressources
naturelles en portant la réflexion sur notamment:
25

les modes d'accès à la terre et les types d'appropriation suivant l'ethnie,
les castes et d'autres catégories socio-professionnelles ;
les droits fonciers familiaux suivant le statut familial;
les droits de gestion des cultures, les droits successoraux, les cessions
et prêts de terre;
la gestion collective des terres, les instances et procédures de gestion
et de règlements des litiges fonciers;
la gestion des terres par l'Etat;
les modes d'occupation et de mise en valeur des terres et leur
évolution;
l'utilisation des terres suivant le type, leur situation dans l'espace (terres
de pâturage, zones de cueillette, terres de bas-fonds ou terres irrigables
etc.) ;
les
méthodes
et
techniques
paysannes
d'aménagement
et de
production en milieu rural;
les ressources disponibles dans l'espace, leur gestion et leur utilisation;
26

les effets du mode de gestion et de l'utilisation de l'espace et des
ressources disponibles sur l'environnement.
1.3.3. Objectifs théorig ues
Il apparaît aujourd'hui qu'une meilleure compréhension de l'environnement
socio-culturel du développement constitue une des conditions essentielles pouvant
déboucher sur une politique de développement qui réponde aux besoins du monde
rural et implique sa participation. C'est dans ce contexte précis que sont placés les
objectifs essentiels suivants de la présente étude:
1)
Mettre au point une méthode d'analyse de l'impact socio-économique
et sanitaire des interventions de développement en milieu rural mossi.
L'application de cette méthode aux projets et programmes de développement
permettrait de :
a)
fournir des données socio-économiques et sanitaires aux
planificateurs, décideurs et responsables politiques.
b)
décrire l'influence de la réalisation des projets et programmes de
développement sur les conditions de vie des populations, sur
l'évolution démographique, sur la modification de leurs structures
sociales, sur le développement socio-économique de la région
du Centre-Nord (Provinces du Bam, du Namentenga et du
Sanmatenga) et de son environnement physique.
27

2)
Présenter la façon dont les populations rurales mossi du Centre-Nord
du
Burkina ont vécu ou vivent les projets et programmes de
développement exécutés à leur intention par divers développeurs et leur
conception relative au développement.
3)
Esquisser le type de société que contribuent à façonner de maniére
implicite ou explicite les diverses interventions de développement dans
la région à travers la détermination des modes d'organisations
paysannes dont la multiplication est symptomatique de la recomposition
sociale et de la restructuration de la société rurale mossi sur laquelle
repose la problématique du développement.
Toute intervention de développement est en effet un enjeu dans une lutte à la
fois économique, sociale et politique entre des stratégies de groupes sociaux qui
n'ont ni les mêmes intérêts ni les mêmes logiques. Dans un tel contexte, les
interventions de développement apparaissent comme des processus de négociation
entre les groupes stratégiques en présence, en l'occurrence le Gouvernement, les
Organismes de développement, les Organisations Non Gouvernementales, les
Experts Etrangers et les Paysans.
28

1.3.4. Objectifs pratiques
Au
cours
de
leur
déroulement
sur
le
terrain,
les
interventions
de
développement perdent plus ou moins leur homogénéité, et leur impact sur les
conditions socio-économiques et sanitaires des populations rurales reste sélectif et
limité. Eu égard à la divergence des intérêts et des logiques, est-il possible d'établir
des "règles du jeu" entre les différents intervenants de développement sur le
terrain afin d'en accroître l'efficacité?
La philosophie qui sous-tend les interventions de développement est bien celle
de la lutte contre la pauvreté dans son acceptation la plus large. Mais les moyens et
les formes d'action généralement déployés permettent-ils de parvenir à cette fin?
Il convient donc de rechercher à travers la diversité des projets
et
programmes de développement qui se succèdent à un rythme plus ou moins accéléré
en milieu rural mossi dans les provinces du Bam, du Namentenga et du Sanmatenga,
les logiques paysannes et leurs modifications en cours, ainsi que celles des différents
intervenants. Une telle démarche permet de repérer le décalage qui existe souvent
entre les intérêts et les logiques des interventions de développement et les "intérêts
et rationalités des paysans"13.
13
J. P.
01 i vier
de
SARDAN dans
"logiques
paysannes
et
proj et s
de
développement
rural,
"séminaire
international
sur
les
effets
socio-structurels
de
l'aide au développement en milieu rural de
l'Afrique
de Ouest,
Cotonou,
déc.
1986.
P.
12.
29

Toute intervention de développement se déroule dans un contexte écologique,
économique, institutionnel et politique, lequel influe à son tour sur les effets de cette
intervention. A ces effets, s'ajoutent ceux provoqués par des facteurs extérieurs tels
que des
projets concurrents,
des mesures administratives,
la
migration,
la
scolarisation et bien d'autres facteurs encore qui contribuent à façonner les
comportements des paysans et que ne saurait éluder toute analyse.
Car les interventions de développement ne sauraient se réduire aux seuls
aspects de l'accroissement et de la diversification de la production. Elles tendent
aussi et surtout vers une élevation du niveau de vie caractérisé par l'amélioration de
l'alimentation, de l'état sanitaire, de l'habitat, du niveau intellectuel et des autres
conditions de vie et de travail des populations rurales.
Des évaluations récentes de projets de développement en milieu ruraif>"du
Burkina, et plus précisément dans les régions du Nord et du Centre-Nord, financés
par des donateurs multilatéraux et bilatéraux ont révélé deux principales impasses:
les interventions de développement en milieu rural mossi n'ont pas
toujours une compréhension approfondie du système traditionnel de
production sur lequel elles tentent d'influer.
la négligence des effets socio-structurels à long terme de ces
interventions.
30

C'est pourquoi les interventions de développement doivent incorporer les
résultats d'études anthropologiques et socio-économiques de base qui permettent
l'appréciation des changements qualitatifs intervenus dans la distribution de la
puissance politique locale, la répartition des couches sociales, le système de
production, la division du travail etc.
1.4. Thèses avancées et hypothèses de travail
Deux thèses complémentaires sont souvent avancées pour présenter les
communautés rurales mossi qui luttent pour leur développement:
1)
la thèse selon laquelle les communautés rurales mossi sont des formes
d'organisations
traditionnelles
qUi
subissent
passivement
les
interventions de développement.
2)
la seconde thèse estime que les structures communautaires mossl
réagissent de façon globale et indifférenciée face aux interventions de
développement.
Ces deux thèses se fondent sur la fonction politique d'une image que se
forgent les différents acteurs du développement, laquelle image reflète bien la réalité
sociale vécue des
Mossi de la région étudiée: beaucoup d'interventions de
développement pour être parfaitement fonctionnelles prennent appui sur une
catégorie de population rurale considérée comme des acteurs sociaux dynamiques
susceptibles d'entraîner par effet de contagion, l'adhésion de l'ensemble d'une ou de
31

plusieurs autres communautés rurales. C'est cette dernière catégorie de population
qui bénéficie des bienfaits des interventions de développement; les autres, bien
moins ou pas du tout, en fonction du degré de subordination entre ces catégories de
populations.
Cette situation engendre au niveau du monde rural mossi, une double
différenciation sociale : la première différenciation qui semble interne au milieu
oppose les acteurs sociaux dynamiques, soit qu'ils sont riches, soit qu'ils sont
détenteurs du pouvoir politique ou administratif leur permettant d'exercer une
influence quelconque sur leur entourage immédiat ou sur le reste de la population
rurale.
La seconde différenciation, plutôt extérieure au milieu, résulte de l'opposition
commerçants et ou fonctionnaires aux paysans, les premiers faisant travailler les
seconds pour leur propre compte dans le cadre des interventions de développement. (
Comment rendre compte de cette réalité sociale complexe par rapport aux
interventions de développement?
Notre étude se fonde sur trois principales hypothèses de travail :
A.
Premièrement, toute intervention de développement rural comporte un
volet assistance technique et entraîne nécessairement dans son
exécution, des transformations économiques qui, à leur tour, ont des
effets socio-structurels (rapports entre les paysans et à l'intérieur des
unités de production) déstabilisants pour les
systèmes
sociaux
32

traditionnels et intégrants pour l'économie marchande dans les
communautés villageoises.
B.
Deuxiémement, les programmes et projets de développement rural sont
élaborés et exécutés avec des présupposés (technologie neutre et
universelle, conception égalitariste des sociétés rurales ... ) qui sont loin
de correspondre aux réalités socio-économiques de leurs zones
d'intervention, lesquelles zones sont celles d'un milieu structuré et géré
au profit de groupes sociaux dominants (chefs coutumiers, propriétaires
terriens, riches commerçants, fonctionnaires etc.). C'est pourquoi ils
bénéficient essentiellement à ces groupes dominants, tandis que les
conditions de vie de la grande majorité ne cessent de se dégrader.
C.
Troisièmement, l'auto-promotion paysanne exige une remise en cause
de l'idéologie habituelle de l'assistance technique et une participation
réelle et consciente des populations rurales aux choix technologiques
mais surtout à l'élaboration de leur projet de société à travers les
diverses formes d'intervention de développement rural.
Sans doute ces trois hypothèses se justifient-elles du moins partiellement, car
de leur conception aux modalités pratiques de leur exécution, les interventions de
développement en milieu rural donnent lieu à des conflits, à une sorte de concurrence
pour le contrôle des moyens de production entre les différents acteurs en présence
sur le terrain.
33

Des moyens de vivre aux raisons de vivre, des moyens de production au
pouvoir de décision, tel semble être le sens profond de ces affrontements. Alors
émergent de nouveaux acteurs, de nouvelles initiatives, de nouveaux enjeux qui
contraignent les organisations rurales existantes quasi exclusivement agricoles à
élargir leurs horizons et à diversifier leurs stratégies. Par exemple des familles
disposant d'une main-d'oeuvre agricole suffisante en répartissent désormais les
membres dans diverses activités économiques (commerce, culture irriguée, ... ) pour
conserver ou rechercher un pouvoir à la fois économique et social toujours plus
puissant qui leur permettrait de sauvegarder des avantages économiques et sociaux
acquis et négocier en position de force face aux autres acteurs.
1.5. Méthodologie
i'
La démarche méthodologique qui consiste à recenser, puis à analyser les
opérations de développement rural pour évaluer leur impact sur les populations et sur
l'économie d'une région peut-elle revêtir un caractère sociologique?
Il nous semble que le caractère sociologique de la méthode découle des
données de terrain recueillies. Ce caractère sociologique relève de plusieurs critères:
la
nature
sociale
du
problème
étudié
qui
est
celui
des
interventions de
développement en milieu rural, c'est-à-dire l'objet, les techniques utilisées pour saisir
cet objectif et que l'on pourrait qualifier de construction d'une démarche sociologique;
enfin les implications théoriques de l'étude et des activités considérées, c'est-à-dire
la formation des concepts.
34

De plus, une telle démarche porte sur des recherches et des pratiques qui ont
une finalité d'application sociale,
puisqu'elle porte sur des interventions de
développement, et offre la possibilité d'un certain recul sociologique comportant à la
fois une réflexion théorique sur l'objet et les pratiques de la sociologie, et également
sur des transformations induites dans les formations sociales, structurations sociales,
rapports de pouvoir, conscience sociale et politique, et même la définition de la place
des sociologues dans le champ développeurs - développés.
Mais existe-t-il vraiment une sociologie du développement disposant d'un statut
scientifique qui lui confère une singularité reconnue au sein des sciences sociales?
Il semble que les conditions pratiques de la participation sociologique aux
. il actions de développement connaissent quelques limites: en effet, la sociologie peut-
elle élaborer une théorie du développement social et déterminer avec précision
l'objet de sa réflexion?
Pour
Jacques
LOMBARD14 ,
"la
sociologie s'est réduite
dans
une
multiplicité de dépendances à l'égard d'autres disciplines, à n'être plus qu'une
sociologie d'intervention. Sociologie sans projet global d'explication et qui
apparaît plus souvent comme une technique ou un outil utilisé en fin de
parcours de l'expertise que comme une véritable analyse exhaustive de la
14
Jacques LOMBARD : La sociologie et le développement : Pluridisciplinarité ou
spécificité? in Revue Tiers-Monde, Tome XXIII- N° 90 Avril-Juin 1982, I.E.D.E.S.,
PUF, Paris 1982, P. 251 - 252.
35

réalité sociale et des processus de changements. La demande d'intervention
se limite alors à une alternative:
ou bien le sociologue participe à une enquête dite de "fiabilité"
d'un projet et intervient conjointement avec d'autres disciplines
avant que l'opération ne soit décidée; son rôle se réduit alors à
une enquête d'opinion sur les attitudes d'une population vis-à-vis
du projet et l'''expertise'' laisse de côté la plus grande part d'une
réalité sociale qui échappe au diagnostic;
ou bien il intervient pOLIr déterminer et mesurer les conséquences
d'une opération "technique" de développement, agricole, urbaine,
sanitaire ou éducative et son action sera conditionnée, limitée par
la question que lui posera l'économiste ou le technicien, qu'il soit
agronome;, urbaniste ou médecin. L'intervention a prosteriori
connaîtra toujours une double limite: celle de n'avoir à observer
qu'un aspect de la société ou des conséquences de l'opération, ou
bien si l'analyse de la réalité sociale est plus globale, celle de
devoir se conformer à l'examen d'une situation décidée par
d'autres, sans que le sociologue ait pu faire prévaloir au préalable,
après expérimentation, d'autres options possibles".
La sociologie du développement doit avoir un objet d'étude bien défini et ne
pas se contenter simplement "d'intervenir" en réponse à la demande d'autres
spécialistes appartenant à d'autres disciplines sur des questions précises. Car ce
faisant, le sociologue court le risque de se transformer en un technicien du sondage
36

ou en statisticien, s'interdisant du même coup l'élaboration de toute réflexion globale
et toute initiative d'investigation.
Il importe de vérifier la capacité des outils d'analyse actuels de la sociologie,
l'efficacité de ses concepts et théories, la pertinence de ses approches des réalités
de terrain, et notamment des actions de développement. Sans cet effort de travail
épistémologique en profondeur, toute tentative de saisie de la situation réelle de
développement dans le contexte socio-économique et culturel mossi demeura
superficielle et partielle. En effet, après tant de discours sur le développement et tant
d'interventions de développement sur le terrain dont on cherche à évaluer encore
l'impact sur les populations, il paraît à présent on ne peut plus opportun d'ouvrir de
nouveaux espaces d'interrogations à partir des contextes spécifiques non seulement
pour les besoins de la connaissance théorique, mais aussi pour les enjeux à la fois
politiques, économiques et sociaux auxquels ils donnent lieu. Car comme se le
demandait le Professeur Jean-Marc ELA15, "le salut économique de l'Af:!ique ne
peut-il lui venir que de l'imitation du modèle occidental comme le suggèrent
fortement le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale en lui
imposant des programmes d'ajustement structurel ?".
Mais alors si le développement peut être assimilé au salut économique conçu
et réalisé en Afrique,
par l'extérieur, quelques interrogations méritent d'être
soulevées:
15
ELA (Jean-Marc) : Démocratie, culture et développement, contextes et enjeux
sociologiques en Afrique d'aujourd'hui. Colloque de l'Association Internationale des
Sociologues de Langue Française. Cotonou, BENIN, 23-26 Janv. 1995.
37

quelles
idées,
quelles
images
sous-tend
la
problématique
du
développement aussi bien chez les développeurs que chez les
développés?
ces idées et images ont-elles valeur universelle?
"Sans vouloir expliquer la destruction des sociétés traditionnelles et leur
"retard" par le seul processus de déculturation, constatons les limites des
modèles imposés qui ont cru que le développement fonctionne comme une "loi
naturelle" dans un système où l'on ne résiste pas à la tentation de transporter
sans la moindre prudence des normes et des valeurs étrangères dans d'autres
espaces symboliques et humains. Si les pratiques du développement doivent
être replacées dans l'environnement socia.l et culturel où les acteurs opèrent
t·.'
en
fonction
d'autres
repères
symboliqués
en
renonçant
à
séparer
artificiellement les lois économiques des croyances, des savoirs et des
pratiques sociales qui caractérisent la subjectivité des acteurs, il faut alors se
poser cette question provocante: l'échec du développement n'est-il pas enfin
de compte, un signe de bonne santé ?"16.
Il semble qu'au risque de ne plus demeurer soi-même, il faille refuser un
certain développement, celui qui ne permet pas le plein épanouissement de l'homme
et de tous les hommes d'une même société. En cela, la résistance à l'économisme
par les populations rurales semble prouver que le capitalisme n'est pas synonyme
16
ELA (Jean-MARC) dans op. cit. p. 21.
38

de développement; en conséquence, le modèle de développement occidental ne
saurait être une panacée, parce qu'il fait fi des valeurs socio-culturelles des sociétés
auxquelles il s'applique.
C'est pourquoi Jean-Marc ELA estime que "saisir le jeu des acteurs et
l'impact du développement au coeur des luttes contre la pauvreté est un défi
à la sociologie qui veut comprendre comment se forment les dynamiques
sociales à partir des problèmes de développement local"17.
1.5.1. Méthodes d'analyse
La méthodologie déployée pour mener à bien l'étude consiste à dresser
l'inventaire des différents projets et programmes de développement réalisés ou en
cours de réalisation dans la région, à en préciser les objectifs et les méthodes
d'action, enfin à saisir la logique qui les sous-tend, afin de dégager l'ultime finalité
recherchée par ces interventions.
Eu égard à la diversité des projets, de leur taille, de leur étendue géographique
et de leur volume financier, le choix de l'échantillon d'étude a été fixé en fonction du
taux de couverture géographique des projets. Il a été procédé à la technique de
l'enquête à passages répétés sur un échantillon aréolaire représentatif de la
population de la zone d'étude. L'échantillon a été constitué grâce à la technique du
tirage au choix raisonné: dans chacune des trois Provinces, il a été procédé à un
tirage au sort d'un certain nombre de départements ayant bénéficié d'interventions
17
Jean-Marc ELA dans op. cit. p. 23.
39

de développement d'une durée égale ou supérieure à cinq ans depuis 1975 à nos
Jours.
A. METHODE HISTORIQUE
Notre intention ici n'est pas d'étudier les conditions d'émergence de la
sociologie du développement, le moment et les raisons qui ont donné naissance à
des travaux sociologiques particuliers regroupés sous ce vocable ou qui s'en
réclament. Mais il n'est pas vain de rappeler que c'est autour des années 1960
marquées
par
les
transformations
politiques
de
la
décolonisation
et
leurs
conséquences économiques et sociales que s'est émergée au sein des sciences
sociales, la sociologie du développement comme discipline autonome en quête de
statut épistémologique.
Nous voudrions' plutôt situer le contexte socio-historique des interventions de
développement rural dans cette région du Centre-Nord du Burkina et les raisons qui
les justifient afin de porter la réflexion sur les différents faits de développement qui
se sont succédés dans le temps pour en apprécier l'impact sur l'économie de la
région et les conditions de vie des populations.
Yves GOUSSAULT rappelait à ce sujet que "la sociologie du développement
étant loin encore de bénéficier d'une reconnaissance adéquate, scientifique et
institutionnelle, ceux qui la pratiquent sont en quête d'un regard impartial sur
leurs travaux et leur raison d'être. Conscients des acquis et potentialités de leur
discipline, comme
de sa
place
nécessaire dans
les sciences
sociales
d'aujourd'hui, ils ne veulent pas toutefois en cacher les aspects aléatoires
40

insuffisante détermination de son champ, de ses méthodes et de ses références
théoriques, «conjonctu ra lité»
de son intervention encore liée à la demande
occasionnelle et indécise, sous-estimation de ses applications souvent
considérées
comme
l'accompagnement
social
de
projets
technico-
économiques, manque de formation chez nombre de sociologues-praticiens etc.
; sans oublier la méfiance tacite qu'elle suscite de par son statut de science
critique ... "18.
Mais faut-il en conclure que la sociologie est une activité scientifique dérivée
et une science d'emprunt? La sociologie du développement, si elle doit exister, se
doit en effet de s'interroger sur son histoire et sur sa signification sociale. C'est
pourquoi Roger Bastide avançait en 1971 que "la sociologie du développement
mettra l'accent ... sur les changements économiques de la structure sociale et,
à travers eux, les changements des mentalités"19.
Il est vrai que le discours "sociologique" se devait de prouver sur le plan social,
l'efficacité et l'utilité au moins formelle des diverses opérations de développement et
ne plus apparaître comme un habillage théorique dans les études de factibilité, dans
les rapports d'évaluation et les bilans divers que les aides réalisent pour préparer ou
suivre des projets de développement. A travers l'analyse des interventions de
développement en milieu rural mossi du Burkina, nous voudrions précisément
présenter la sociologie du développement comme un point d'appui privilégié à une
analyse plus globale des interventions de développement, de leurs effets sur les
18
Yves GOUSSAULT : Où en est la sociologie du développement ? Revue Tiers-
Monde, Tome XXIII - N° 90 Avril - Juin 1982. I.E.D.E.S. Put. Paris 1982. p. 238.
19
R. BASTIDE: Anthropologie appliquée, Paris, Payot 1971.
41

acteurs sociaux et leurs stratégies ainsi que des changements sociaux qUI en
résultent. Car nous pensons à la suite de Georges GURVITCH que "la sociologie
du développement doit se proposer d'analyser les modalités et les conditions
du changement social résultant directement ou indirectement de l'initiative de
l'acteur social engagé dans un projet nouveau de société"20 .
Il est à souligner que la région du Centre-Nord constituée par les trois
Provinces du Bam, du Namentenga et du Sanmatenga, n'a pas toujours formé une
entité socio-politique homogène ni au plan traditionnel ni au plan administratif: une
bonne partie de la Province du Bam était rattachée à l'ex-cercle de Ouahigouya,
lequel cercle a appartenu à l'ex-Soudan Français (actuel Mali) entre 1933 et 1947,
lorsque l'ex-Haute-Volta fut répartie entre les ex-colonies françaises de la Côte-
d'Ivoire, du Niger et de l'ex-Soudan précisément. Si au plan ethnique, les Mossi qui
étaient majoritaires par rapport aux autres ethnies en présence (Peulh, Rimaïbé etc.)
s'imposaient à elles, l'on n'y observait guère de conflits sociaux graves qui puissent
affecter la paix sociale dans la région.
Toutefois, les velléités quant à la chefferie traditionnelle et les conflits relatifs
aux frontières entre villages ou entre champs de culture ont souvent opposé les
populations mossi, tandis que les Peulh éleveurs et les Mossi agriculteurs n'ont pas
toujours vécu en harmonie.
20
G. GURVITCH: La vocation actuelle de la sociologie, T1, 2e éd. Paris 1957, p. 89.
42

L'auto-suffisante alimentaire y était assurée malgré les outils techniques
agricoles rudimentaires utilisés (daba, houe) et l'irrégularité des pluies par ailleurs
inégalement réparties. Le mil et le maïs étaient produits en quantité suffisante pour
satisfaire aux besoins des populations.
La relative faiblesse démographique de la période considérée était sans doute
l'un des facteurs qui expliquent l'équilibre alimentaire ainsi obtenu; l'élevage y était
déjà très développé et des pistes à bétail avaient même été créées pour l'exportation
du bétail vers la Côte-d'Ivoire surtout. Les archives coloniales de l'ex-cercle de Kaya
indiquent que les exportations de bétail atteignaient 1.000 têtes par an dans les
années 1932 pour dépasser 18.000 têtes en 1944. C'était là l'une des principales
sources de revenus monétaires des populations rurales mossi.
L'environnement physique,' non encore dégradé ni par les hommes ni par les
;;
animaux fournissait suffisamment de ressources alimentaires aux populations.
Quant aux Provinces du Namentenga et du Sanmatenga, elles ne regorgent
pas non plus de ressources économiques particulières; l'agriculture et l'élevage sont
les principales activités des populations rurales. Mais l'artisanat est particulièrement
développé dans le Sanmatenga : l'artisanat du cuir, le tissage ont été encouragés par
les Colons français qui ont construit à Kaya en 1938 un Centre de Formation
Professionnelle de l'Artisanat.
43

Le commerce et notamment celui des peaux de bétail et du beurre de karité
vers le Niger, du bétail vers la Côte-d'Ivoire, du tissu vers l'ex-Soudan était florissant,
développé surtout par les "Yarcé"21 et les Mossi.
Ces derniers ramenaient du sel de l'ex-Soudan, de la kola de la Côte-d'Ivoire
et des produits divers, instituant ainsi des échanges commerciaux avec l'extérieur qui
s'intensifièrent au fil des années.
Il est à relever que si le commerce extérieur paraissait florissant dans la
région,
les échanges commerciaux inter-provinces demeuraient faibles
sinon
inexistants. Durant la période pré-coloniale, l'économie de la région pouvait être
qualifiée "d'économie de subsistance"22 malgré quelques échanges commerciaux
avec l'extérieur: la préoccupation majeure des producteurs était d'assurer la sécurité
alimentaire.
Puis, de véritables plans de développement économiques en faveur de la
région furent esquissés à partir de 1953 pour opérer un passage de l'économie de
subsistance à l'économie du marché à travers l'action du colonisateur. Ainsi dès
1953, onze barrages furent construits dans la région pour plus de vingt cinq (25)
millions de FCFA afin de promouvoir son développement socio-économique. Les plus
importants de ces barrages sont ceux de Sian, de Dem et de Louda. Quarante (40)
hectares de rizières en aval de Sian et 100 hectares en aval de Dem furent
21
Yarcé = population d'origine mandingue.
22
Nous
entendons
ici par économie
de
subsistance,
une
productivité
destinée
à
la
satisfaction des
besoins
immédiats.
44

aménagées durant cette même période, en même temps que se multipliaient les
points d'eau (creusement de puits et forages) pour l'abreuvement du bétail afin de
sédentariser les Peulh ; la mobilité constante des troupeaux des Peulh contribue en
effet à la dégradation de l'environnement.
Parmi les facteurs internes qui influent sur le développement socio-économique
et sanitaire de la région durant la période pré-coloniale à la colonisation, il convient
de citer ceux d'ordre socio-culturel dont la chefferie coutumière : la chefferie
traditionnelle pèse encore très lourdement dans les transformations socio-politiques
et économiques avec le IRizziam-Naba"23 dans le Bam, le "Boulsa-Naba" dans le
Namentenga et le "Boussouma-Naba" dans le Sanmatenga qui cherchent chacun en
ce qui le concerne à assurer l'essor économique de leurs royaumes, les uns en
collaborant plus ou moins ouvertement avec le colonisateur (Boussouma-Naba) les
autres opposant une résistance passive (Rizziam-Naba par exemple).
Mais l'émigration des jeunes gens vers les pays côtiers pour constituer de la
main-d'oeuvre demeure de loin le fait le plus significatif de la période coloniale dans
les trois Provinces.
Près d'un demi-siècle après cette politique de développement esquissée par
le colonisateur, la région semble revivre un éternel recommencement de son histoire
économique: les plans et programmes de développement se succèdent année après
23
Le Rizziam-Naba,
le Boulsa-Naba et
le Boussouma-Naba
sont
des
Princes
royaux
mossi
très
puissants
qui
jouissent
d'une
autonomie
politique
par
rapport
au
"Moro-Naba"
(Chef suprême des Mossi).
Ils administrent
en
effet
de
vastes
territoires
qui
composent
leurs
royaumes.
45

année, élaborés et exécutés à la fois et/ou par l'Etat, des Organisations Non
Gouvernementales, des Institutions Etrangères de développement etc. sans que ne
puisse être constatée une amélioration significative des conditions de vie et de travail
des populations rurales mossi. Certes les outils techniques de travail se sont quelque
peu perfectionnés, la daba ayant laissé place à la charrue à traction asine ou bovine,
les facilités d'obtention de crédits ou d'intrants agricoles se sont accrues, mais l'auto-
suffisance alimentaire demeure une préoccupation permanente des populations.
Des disparités provinciales peuvent être signalèes, donnant quelques
indications sur les mutations socio-économiques et sanitaires qui s'opèrent dans la
région de la période pré-coloniale à la période post-coloniale. Il existe très peu
d'informations relatives à la situation socio-économique et sanitaire des populations
rurales mossi durant la période pré-coloniale. Les déclarations des anciens soulignent
la bonne situation alimentaire et sanitaire des populations rurales de la période
considérée grâce à la diversité des céréales (gros mil, petit mil, maïs, riz ... ) et des
cultures de rente (coton "Budy" et "Allen")24 ainsi qu'à la médecine et pharmacopée
traditionnelles malgré l'ignorance de l'hygiène. Le coton Allen par exemple est un G.
Hirsutum, sélectionné en 1876 par un certain J.B. ALLEN.
La période coloniale n'a pas connu de progrès sensibles quant à la situation
économique et sanitaire, malgré les nombreux investissements réalisés à travers des
projets, plans et programmes de développement. La stagnation économique et
sanitaire de la région trouve une explication sociologique d'après le colonisateur: la
"hiérarchie Moaga" à la tête de laquelle se trouve le Moro-Naba, entouré de ses
24
Coton Budy
et coton Allen sont des variétés d'origine
américaine introduites en Afrique au 1ge siècle.
46

ministres, est formée de nombreux chefs ou "Naba" allant du chef de Province au
chef de case en passant par les nombreux intermédiaires ... Cette hiérarchie semble
a priori constituer une aide efficace pour l'exercice de l'administration et du
commandement mais cette aide est pius apparente que réelle pour deux raisons
principales:
1)
Par une spécialisation excessive ... , elle
entrave
l'exécution
et la
transmission des ordres ...
2)
Elle crée une multitude de petits chefs très jaloux de leurs prérogatives
et de leurs sinécures ... aiguillant le peu d'activité qui peut leur rester
vers des intrigues de chefferie.
Cette situation est à mon avis, l'explication la plus valable de la non réussite
dans le pays "moaga"25.
Si la hiérarchie mossi peut constituer une entrave à l'essor économique et à
l'amélioration de l'état de santé des populations rurales du Centre-Nord, elle n'en est
certainement pas la seule explication.· Le morcellement excessif de la région en
plusieurs entités administratives a aussi contribué pour beaucoup à freiner son
développement.
2S
Ainsi
écrivait
à
Kaya
le
21
décembre
1940,
F.
BüRDARIER,
Administrateur de 2e classe des colonies.
Archives coloniales du cercle de Kaya.
Colonie de la
Haute-Côte-d'Ivoire.
47

B. METHODE COMPARATIVE
Les trois Provinces de la région du Centre-Nord étaient auto-suffisantes au
plan alimentaire durant la période pré-coloniale et coloniale, malgré quelques années
de famine (1932 et 1936 notamment). Elles ont par la suite évolué différemment au
plan
administratif avec des conséquences plus ou
moins graves sur leur
développement socio-économique et sanitaire au cours de la période post-coloniale.
Si au plan du découpage administratif, les trois provinces ont constitué des entités
socio-politiques et administratives autonomes, elles forment aujourd'hui un ensemble
économique tantôt appelé Centre Agro-Pastoral du Centre-Nord tantôt Région
Economique du Centre-Nord.
De 1960 à 1974, l'Etat en tant que principal acteur du développement du pays
a énormément investi dans le monde rural du Centre-Nord grâce à'des financements
extérieurs ; il se devait en effet de porter son effort sur la création de conditions
favorables à la croissance économique et au bien-être social des populations de cette
région pauvre. Ainsi de grands projets de développement furent conçus et réalisés
avec plus
ou
moins de succès
grâce à
l'assistance technique
extérieure
(aménagement de l'aval du barrage de Lauda et celui de Tamasgo dans le
Sanmatenga pour la riziculture et la production maraîchère, aménagement de
plusieurs hectares autour du lac de Bam pour la culture du haricot vert, construction
de plusieurs barrages dans le Namentenga... ) ; les résultats furent dans leur
ensemble peu satisfaisants.
48

A partir de 1975, l'Etat ne s'érige plus en seul acteur du développement du
monde rural ; il accorde désormais une large place aux Organisations Non
Gouvernementales dont l'action continue sur le terrain, principalement axée sur des
projets de moyennes et petites dimensions, enregistre de meilleurs résultats. Mais
la participation effective des populations rurales tant sollicitée par les auteurs du
développement, reste encore l'oeuvre de personnages influents du milieu: les chefs
de terre, les commerçants et les fonctionnaires notamment.
Ces derniers s'approprient les actions de développement sur le terrain, que
celles-ci répondent aux aspirations du plus grand nombre ou aux leurs propres. Mais
alors est-il possible de concevoir et de réaliser des opérations de développement qui
répondent véritablement aux besoins réels des populations
rurales qui en
assureraient l'exécution?
Chaque Province du Centre-Nord semble aujourd'hui suivre sa vOie de
développement dans une perspective de complémentarité avec les autres Provinces.
Au Bam, en plus de l'agriculture et de l'élevage, la culture d'exportation du haricot
vert,
combinée
aux
cultures
maraîchères
offre
de
réelles
possibilités
de
développement socio-économique avec l'appui des ONG.
Il restera à lever une des principales contraintes au développement de la
Province : celle relative aux infrastructures routières et aux équipements socio-
collectifs et sanitaires.
49

La Province du Namentenga ne connaît pas de spécialisation dans ses
activités socio-économiques; mais elle cherche sans cesse à améliorer sa production
agricole et d'élevage en dépit des aléas climatiques et de la dégradation de
l'environnement physique, tout en oeuvrant pour la promotion sanitaire des
populations rurales avec le concours surtout des ONG.
Quant à la province du Sanmatenga, si l'agriculture et l'élevage y demeurent
les activités essentielles des populations rurales, le développement de plusieurs types
d'artisanat en particulier de celui du cuir, ouvre de nouvelles perspectives de
développement socio-économique. Le développement sanitaire connaît également,
grâce au soutien technique et financier des ONG, de progrès sensibles.
C. METHODE DIALECTIQUE
Les paysans mossi cherchent d'abord dans leur production agricole à atteindre
l'auto-suffisance et la sécurité alimentaires. C'est seulement lorsque cet objectif est
atteint qu'ils s'emploient à se procurer des revenus monétaires soit à travers la vente
de produits d'exportation ou même d'une partie des stocks de céréales initialement
destinés à la consommation familiale soit à travers des activités connexes comme
l'artisanat.
Les interventions de développement en milieu rural intègrent-elles toujours et
suffisamment cette stratégie paysanne de production?
50

Le système moderne de production a introduit dès la période coloniale de
profonds changements dans la société traditionnelle mossi : La grande famille (qui
regroupe plusieurs familles nucléaires) n'existe presque plus sous sa forme originelle
à la suite d'un éclatement répétitif qui influe à son tour sur le système de production.
La femme produit plus que l'homme mais ne bénéficie guère du fruit de son travail;
la situation socio-économique de la femme ne s'améliore donc pas comme celle de
l'homme malgré l'utilisation des outils techniques modernes de production et des
revenus monétaires qui en résultent.
L'influence sociale des anciens
et notables du village a considérablement
baissé laissant émerger une nouvelle forme d'influence, celle de riches paysans et
commerçants et/ou de fonctionnaires dont le rôle est désormais prépondérant dans
les interventions de développement.
Or ni ces changements sociaux, ni les logiques qui sous-tendent l'action des
paysans ne sont toujours pris en compte dans les interventions de développement
en milieu rural mossi. Dans de telles conditions, peut-on estimer que l'intégration des
paysans mossi à l'économie de marché au moyen d'une production d'exportation par
exemple a-t-elle réussie? Quelles sont les conséquences sociales, économiques et
culturelles d'une détention toujours croissante d'argent comptant pour les paysans
mossi dans un système de production de subsistance? Quel impact les religions
importées (l'islam et le christianisme) exercent-t-elles sur le système de production
mossi dans le cadre des interventions de développement rural?
51

Des réponses appropriées à l'ensemble de ces interrogations permettront sans
doute de comprendre à
la fois les rationalités qui guident les comportements des
paysans mossi et les stratégies qu'ils développent pour s'approprier les diverses
interventions de développement qui se réalisent en milieu rural mossi du Centre-Nord
du Burkina.
1.5.2. Techniques d'investigation
a) Documentation
Les techniques d'investigation de terrain ayant permis de conduire à bien la
présente étude ont d'abord consisté à exploiter la documentation existante : une
abondante littérature relative au développement rural en général et au développement
rural du Burkina Faso ,en particulier est disponible dans les services techniques des
différents ministères.
Par contre, il existe peu de documents sur les méthodes de suivi-évaluation
des plans, projets et programmes de développement rural débouchant sur des
orientations nouvelles dans l'approche des interventions de développement de façon
globale en vue d'en accroître l'efficacité sur le terrain. Les quelques rares évaluations
des interventions de développement rural qui ont eu lieu, ont davantage porté sur
l'accroissement de la productivité économique reposant par ailleurs sur des critères
si variables que les résultats qui en ont découlé revêtent un caractère scientifique
limité. C'est le cas par exemple du projet de l'Aménagement des Vallées des Voltas
(A.V.v.) ou de la Vallée du Kou.
52

Peu d'études sur les interventions de développement rural ont été réalisées
dans la région du Centre-Nord où se multiplient les opérations de développement.
D'où l'intérêt du présent travail qui, en dépit des insuffisances, offre un premier
aperçu général sur l'état de développement d'une région depuis trois (3) décennies.
b} Echantillonnage
Eu égard aux dimensions géographiques très vastes de notre champ d'étude
et du caractère complexe du sujet traité, il nous a paru nécessaire pour des raisons
d'efficacité méthodologique, d'en circonscrire les limites. Pour ce faire, il a fallu tiré
au sort un échantillon à la fois des interventions de développement rural et des
populations à enquêter, sur la base du dernier recensement officiel de la population
burkinabè en 1985 et de l'inventaire des plans, projets et programmes de
développement rural exécutés dans la région du Centre-Nord, établi en 1990.
c} Questionnaire
Un questionnaire fut élaboré pour être appliqué à l'échantillon retenu afin
d'apprécier:
le niveau de participation des populations à la conception, à l'exécution,
au suivi et à l'évaluation des interventions en milieu rural mossi.
53

la nature,
le lieu et le mode d'exécution des interventions de
développement rural quels qu'en soient les auteurs (Etat, Organismes
Extérieurs de Développement, Organisations non Gouvernementales
etc.) et les moyens humains, matériels et financiers utilisés.
le niveau de satisfaction des populations rurales par rapport au rythme
d'exécution des opérations de développement.
Les retombées concrétes des interventions de développement par
rapport à la situation socio-économique et sanitaire des populations
rurales mossi de la région étudiée.
L'enquête nous a permis de détecter et d'analyser à la fois les besoins des
populations
et
les
possibilités
de
les
satisfaire
par
les
interventions
de
développement, afin d'assurer à l'ensemble du monde rural mossi "une vie
"
montante,,26. D'où l'obligation de s'associer les paysans, en leur faisant comprendre
que l'objectif ultime du travail d'enquête mené auprès d'eux vise à les aider à mieux
percevoir et à résoudre les problémes dont dèpendent leur prospérité et leur
épanouissement. Car, il faut bien se mettre à l'abri du danger bien connu qui guette
le chercheur lorsque celui-ci se coupe du milieu concret qu'il étudie. Il risque de
décoller du réel et de se complaire dans une construction brillante, abstraite, qui reste
un modèle infidèle de la réalité qu'il prétend étudier.
26
L.J.
Lebret et H.C.
Desroche
: La méthode d'Economie
et Humanisme. Revue et Humanisme n012, mars-avril 1944
Paris 1944.
P.
7.
54

C'est pourquoi l'enquête a été complétée au plan qualitatif par des interviews
et des entretiens approfondis avec de petits groupes de paysans ou d'artisans,
membres
pour
la
plupart
de
groupements
villageois,
de
coopératives
ou
d'associations afin de mieux cerner les transformations socio-économiques et
sanitaires en cours en milieu rural mossi, les difficultés rencontrées et les
perspectives qui s'en dégagent.
55

Tableau 1 : Présentation de la population de la zone d'étude en 1985
Nombre de
Population résidente
Provinces
Départements
villages
Totale
Masculine Féminine
Bam
06
248
162.575
75.843
86.732
96.272
102.618
Namentenga
06
98
198.890
171.236
196.498
Sanmatenga
11
301
367.724
343.351
385.848
TOTAL
23
647
729.189
La région du Centre-Nord est relativement peu peuplée; les 23 départements
et 647 villages qui composent en effet cette région ne comptent que 729.189
habitants résidents avec une dominante féminine.
56

Ainsi huit départements furent tirés au sort couvrant une population d'un peu
plus de 20 000 habitants. Parmi cette population, un tirage au sort d'1/5 fut opéré,
soit à peu près 4 000 personnes à enquêter.
Deux enquêtes ont pu être réalisées en janvier-mai 1986 et février-juin 1990
auprès des populations pour appréhender à la fois l'état d'exécution des différents
projets de développement dans les 3 Provinces,
les principales contraintes
rencontrées et évaluer l'impact de ces projets sur l'évolution socio-économique et
sanitaire des populations concernées.
Le tirage au sort d'1/5 et seulement deux passages sur le terrain ont été dictés
par la taille relativement grande de la population à étudier et des contraintes
financières et de temps.
Toutefois la définition de l'échantillon a été opérée avec soin; c'est ainsi que
l'échantillon est d'abord stratifié pour distinguer trois groupes de population dont deux
groupes témoins:
1.
le groupe de population
n'ayant pas
bénéficié d'opérations de
développement avant 1975.
2.
le groupe de population ayant toujours bénéficié d'opérations de
développement de 1975 à nos jours.
57

3.
le
groupe
de
population
n'ayant
bénéficié
d'opérations
de
développement ni avant 1975 ni maintenant.
L'enquête a surtout visé les deux premiers groupes.
L'échantillon a aussi été aréolaire (les villages ou les quartiers représentent
des unités) tiré à deux degrés à partir des résultats du recensement général de la
population en 1985.
Le présent travail s'attache à caractériser les attitudes des populations rurales
(rejet, acceptation, formes diverses de détournement et d'appropriation) face aux
interventions de développement ainsi qu'à la recherche des logiques qui dictent ces
attitudes. Les transformations sociales en cours en milieu rural mossi peuvent-elles
.. s'expliquer par des stratégies défensives dans unE-perspective d'auto-conservation
ou au contraire les interventions extérieures y impriment-elles une certaine
dynamique transformatrice?
Qu'il nous soit permis d'accréditer la thèse selon laquelle les sociétés ont leurs
propres dynamiques, c'est-à-dire des modes spécifiques de transformation qui leur
sont inhérents. Ces modes de transformation varient d'une société à l'autre et d'une
période à l'autre suivant l'histoire de chaque société et peuvent être appréhendés à
travers la capacité d'une société considérée à intégrer des éléments nouveaux
provenant de l'extérieur.
58

5U OUE5T




co

2°E5T
15 0 N
BURKINA FASO
Carte
nOI
OUOALAN
CARTE ADMINISTRATIVE
Goram - Gorom
SOUM
o
1--
/ '
.Djibo
14°
.Dori
Q
SENO
(-'
'P
1
'1
SISSI LI
B E N
N
.Léo
G
H
A
ECHELLE
LEGENDE
a
50
100
200 km
m
Copi tale
1
1
1
1

Chef-lieu ,de province
Limite d'Etat
Limite de prov'Jnce
~ Zone d' étude
CARTOGRAPHIE
OU
CNRST -
Dess ÎnOleur Jean C.
KI
1
1
1
1

CHAPITRE 1
PRESENTATION DU BURKINA FASO
1. LE CADRE PHYSIQUE ET HUMAIN
1.1. Présentation générale du pays
Le Burkina Faso est un territoire enclavé à la frange sud de la zone
sahélienne. D'une superficie de 274.200 km 2 , c'est un pays doté de maigres
ressources d'énergie naturelle : ni charbon, ni pétrole, mais seulement quelques
aménagements hydrauliques (Kompièga, Bagré). Sa densité démographique est
relativement élevée, avec 29 h/km 2 .
Le Burkina Faso est borné à l'Ouest, par le Mali, à l'Est par le Niger, au Sud
par la Côte-d'Ivoire, le Ghana, le Togo et le Bénin.
Les frontières du Burkina Faso sont perméables en ce sens qu'elles sont sans
définition naturelle et ne laissent au pays aucun accès à la mer, distante de plusieurs
centaines de kilomètres, de même qu'il n'a pas accès à un segment navigable du
Fleuve Niger. Sa seule artère vitale est le chemin de fer Abidjan-Niger qui relie sa
capitale à la côte atlantique,
quoique ce chemin
de fer ait une vocation
transahélienne.
La faible productivité de son agriculture, autant vivrière que commerciale, la
faiblesse de son développement industriel et sa situation géographique expliquent en
partie le faible niveau de vie de sa population. Le Burkina Faso est aussi surpeuplé
par rapport à ses ressources et assiste à un important mouvement migratoire
60

temporaire pour l'essentiel vers les plantations et les villes côtières des pays voisins,
surtout de la Côte-d'Ivoire et du Ghana (plus de 400.000 personnes par année).
Les ressources
minières sont pratiquement inexploitées,
bien que
la
prospection ait permis la mise à jour de riches gisements de manganèse dans le
Nord-Est du pays.
1.2. Le relief
Le Burkina Faso est un pays piaf? L'altitude moyenne se situe entre 250 et
350 mètres et les altitudes extrêmes ne dépassent pas 750 mètres. La platitude
d'ensemble n'exclut pas une certaine variété dans le Sud et le Centre-Nord du pays.
Les trois quarts du pays sont couverts par une immense pénéplaine façonnée
dans le massif précambrien. On n'y voit qu'une succession de croupes molles et de
vallons évasés, avec quelques buttes et collines isolées, aux pentes raides, mais qui
ne s'élèvent que de quelques mètres. Les parties basses correspondent aux granits
et gneiss du socle, consolidés et usés par l'érosion.
Un massif gréseux occupe le Sud-Ouest du pays, dans sa région la plus
élevée et la plus accidentée; le Ténan-Kourou y culmine avec 749 mètres. La
couverture sédimentaire de grès primaire domine le socle environnant par des
falaises impressionnantes. De nombreuses vallées entaillent le rebord du plateau,
isolant de multiples promontoires et buttes.
27
PERON
(y)
(Sous la Direction de),
"Atlas de la Haute-
Volta,
Paris,
Edition J.A.
1975
;
48 p.
61

1.3. Sols et sous-sol
La moitié de la surface du pays est couverte de sols ferrugineux tropicaux peu
lessivés ou lessivés sur matériau sableux, sablo-argileux ou argilo-sableux. Ces sols
se caractérisent par une richesse en oxydes et hydroxydes de fer et de manganèse,
et par une épaisseur moyenne du profil de deux mètres. Ces sols sont pauvres avec
de faibles teneurs en calcium, potassium et phosphore. Les méthodes traditionnelles
de culture de ces sols, trop superficielles, ne tiennent pas compte de la dégradation
des propriétés physiques de la surface: mauvaise structure, compacité, cohésion
forte, susceptibilité à l'érosion ... La capacité de rétention en eau est moyenne à
bonne et des techniques mieux appropriées permettraient de mettre ces terres en
valeur par la culture du mil, du sorgho et de l'arachide.
Une grande étendue du centre et de l'est du pays est couverte de sols peu
évolués d'érosion sur matériau gmvillonnaire. Profondeur insuffisante du sol, réserve
en eau faible et pauvreté du matériau originel en éléments nutritifs principaux en font
des sols en grande partie inaptes à la mise en culture.
Le reste du pays est couvert, ici et là, de tâches de sols répartis en surfaces
de faible dimension, dont des sols bruns tropicaux sur matériau argileux, à l'est de
Gorum-Gorum, qui peuvent être cultivés en coton, sorgho, maïs, pomme de terre et
manioc, ainsi que des sols hydromorphes minéraux sur matériaux à texture variée,
près de l'ex-Volta Noire et du Sourou, où sont traditionnellement cultivés le sorgho
au Nord, et le riz au Sud.
62

1.4. Le climat
Le climat du Burkina Faso est essentiellement caractérisé par le volume des
précipitations. Il est commandé par la prédominance, soit d'un flux d'air sec du
Nord-Est à Est provenant des hautes pressions sahariennes, chaud le jour et frais la
nuit (harmattan), soit d'un flux d'air humide de Sud-Ouest à Sud provenant des
hautes pressions océaniques de l'hémisphère Sud (saison des pluies). Le front de
mousson oscille, au cours de l'année, entre la côte du Golfe de Guinée, de janvier,
et le parallèle 25° E, vers le mois d'août.
La situation gèographique du pays permet de le classer dans la zone de climat
dit "sou danien". On distingue:
Une saison sèche, s'étendant en moyenne de la mi-novembre à la mi-avril;
un premier régime transitoire, présentant des alternances de saison sèche et
d'incursion d'air humide de la mi-avril à la mi-juin; une saison des pluies, de la mi-juin
à la mi-septembre avec en général un maximum de précipitations en août; un second
régime transitoire, du même type que le premier, de la mi-septembre à la
mi-novembre.
63









15°
BURKINA FASO
Corte
n02
ISOHYETES 1931-1960/1987
14°
13°1
12
.·800
11°
LEGENDE
10
.-
.'." 1sohyète 1931 - 1960
~
Isohyète 1987
35
0
35
70
105 km

!
!
!
!
!
Source: Données
méte'orologiques
~ Zone d' élude
1/3 500000
64

Ce schéma doit être nuancé en fonction de la latitude ; il Y existe une
sous-zone méridionale, limitée par l'isohyète 1000 mm, caractérisée par des
précipitations s'étendant sur presque la moitié de l'année et une amplitude thermique
annuelle assez faible, une sous-zone centrale (entre les isohyètes 650 et 1.000 mm)
où les précipitations sont concentrées sur moins de six mois, et une sous-zone
septentrionale, dite "sahélienne", caractérisée par une saison de pluie courte, une
grande variabilité des précipitations et une sécheresse aggravée par l'importance de
l'évapotranspiration et les fortes amplitudes thermiques diurnes et annuelles.
Le commencement et la fin de la saison des pluies se distinguent de la pleine
saison par des grains de sable généralement plus violents, des coups de vents
pouvant atteindre 120 km/h, des pluies brèves, mais plus fortes. Le ruissellement qui
en résulte est un puissant facteur d'érosion, plus particulièrement sur les sols mis à
nu par les feux de brousse et certaines pratiques culturales traditionnelles.
Du point de vue agricole, on considère une saison humide qui comprend une période
pré-humide - celle des semis, une saison de pluies proprement dite, et une période
post-humide. La durée possible de la période des travaux agricoles, déterminée par
la durée de l'humidification du sol, est plus longue dans les régions du Sud et du
Sud-Ouest que dans le Nord.
1.5. Hydrographie
Quoique peu élevé et relativement peu arrosé le Burkina Faso jouit d'un
réseau hydrographique assez important, surtout dans sa partie méridionale. Les
cours d'eau se rattachent à trois bassins principaux : les bassins des fleuves
Mouhoun, Nakarnbé et Nazinon, de la Comoé et du Niger.
65

Le fleuve Mouhoun (ex. Volta-Noire) prend sa source sur le versant Nord de
la falaise de Banfora, où les précipitations dépassent 1.000 mm/an; il coule d'abord
vers le N.E, parallèlement au Niger et au Bani, puis s'infléchit brusquement vers le
Sud, avant de pénétrer au Ghana où il reçoit les eaux du Nakambé (ex. Volta
Blanche) et du Pendjari. Après avoir franchi le barrage d'Akosombo, il se jette dans
le Golfe de Guinée. Le Nakambé prend sa source à l'Est de Ouahigouya (600 à 700
mm/an), reçoit les émissaires des lacs de Bam, Dem et Sian, puis poursuit son cours
au Ghana, où il reçoit les eaux du Nazinon (Volta Rouge), pour enfin se jeter dans
le Mouhoun.
La Comoé prend sa source dans les falaises de Banfora, communique avec
des mares permanentes situées au pied de la falaise de Banfora, comme le Lac de
Tingréla, traverse du Nord au Sud la Côte-d'Ivoire pour enfin se jeter dans le Golfe
de Guinée.
Le bassin du Niger est constitué de petites rivières temporaires qui arrosent
l'Est et le Nord du pays; il s'agit de cours d'eau à faible débit, essentiellement des
chapelets de mares.
Les cours d'eau ont peu participé jusqu'ici au développement du Burkina Faso
en raison du caractère intermittent de l'écoulement (seul le Mouhoun ne tarit pas en
saison sèche) et de l'absence de techniques d'aménagement chez la plupart des
paysans. Une utilisation plus rationnelle des ressources en eau permettrait à peu de
frais un développement considérable de l'agriculture, sans recours aux grands
barrages, une fois les vallées assainies de l'onchocercose.
66

Le plan quinquennal de développement 1986-1990 décrit ainsi la situation de
l'hydraulique villageoise, pastorale, urbaine, industrielle et agricole:
- "Hydraulique villageoise et pastorale: 8.771 ouvrages (puits modernes
et forages) ayant un débit minimum de 10 m3/jour établis avant 1985,
8.200 puits et forages nouveaux à exécuter et 3.046 ouvrages à
réhabi 1iter.
- Hydraulique urbaine et industrielle: seulement 55 % de la population
sont approvisionnés par les 23 centres de distribution d'eau potable en
fonctionnement en 1985 ; d'où le projet de créer 28 autres centres d'ici
1990 ; mais l'insuffisance des ressources en eau dans tous les centres
sauf Bobo-Dioulasso et Banfora et le déficit financier chronique des
centres secondaires en raison du nombre insuffisant d'abonnés malgré
l'accroissement important des populations urbaines, limite la portée de
ce volet du Plan Quinquennal de Développement 1986-1990.
- Hydraulique agricole: seulement 8% du potentiel national aménagé en
maîtrise
totale
ou
partielle,
manque
d'entretien
des
ouvrages
hydrauliques existants, problèmes de non-paiement des redevances
hydro-agricoles, mauvaise organisation des exploitants, manque de suivi
des ouvrages et absence d'une évaluation des projets existants devant
servir de base à une politique cohérente dans ce sous-secteur. Dans le
cadre du plan 1986-1990, l'accent a été mis sur la réfection des ouvrages
existants,
la mise en valeur de leur aval et l'aménagement, en
67

"expérimentation nouvelle", de 5.000 ha à travers l'exploitation de grands
périmètres comme le Sourou, le Bagré et la plaine du Douna".
Le plan prévoit également que l'accent sera mis sur la petite et la
moyenne irrigation, avec responsabilisation des usagers par une prise
en charge progressive des ouvrages.
1.6. Flore et faune
La végétation est caractérisée par la prédominance de formations végétales
à couvert peu fermé (steppes, savanes et forêts claires). Les types de végétation se
répartissent suivant des bandes plus ou moins parallèles dont le caractère varie en
fonction des niveaux de pluviométrie. On observe également des variations locales
en fonction de la nature des sols et de la présence plus ou moins permanente
d'humidité. On reconnaît trois grands domaines:
- Le domaine sahélien: s'étend surtout au Nord où les précipitations annuelles
sont inférieures à 600 mm, avec une saison sèche d'une durée de huit à dix
mois. La formation végétale caractéristique est la steppe sahélienne arborée
ou arbustive. Les espèces les plus remarquables sont: le gommier (Acacia
senegaD. Acacia nilotica, Acacia Raddiana. Balanites aegvptiaca, Bauhinia
rufescens,
Boscia
angustifolia.
Commiphora
africana.
Combreteum
glutinosum. Maerua crassifolia, Pterocarpus licens et le jujubier (Ziriphus
mauritania) , auxquels s'ajoute le baobab, parfois répandu en peuplements
importants.
68

- Le domaine soudanais: le plus étendu, il couvre la zone entre les isohyètes
600 mm et 1.000 mm. La partie septentrionale fait transition avec le domaine
sahélien,
mais
se
distingue
par l'apparition
d'espèces
tels
le
karité
(Butyros-permum parkiJ) , le néré (Parkia biglobosa) et le caïlcédrat (Khaya
senegalensis). La végétation y apparaît plus dense et très hétérogène. Les
forêts claires contiennent une forte proportion d'arbres de taille petite ou
moyenne, dont les cimes sont plus ou moins jointives. Dans la savane, la
densité et la taille des végétaux ligneux, en rapport avec le degré de
dégradation, peuvent être boisées, arborées ou arbustives.
- Le domaine soudano-guinéen : Localisé dans le sud-ouest du pays, ce
domaine bénéficie de précipitations supérieures à 1.000 mm qui favorisent le
développement des espèces ligneuses dont la densité de peuplement, le
nombre de strates et la hauteur sont nettement plus importants que dans les
domaines précédents. Les formations les plus importantes sont les savanes
boisées et les forêts claires.
- Les formations anthropiques: La végétation ayant subi d'une manière très
marquée l'influence de l'homme, agriculteur ou éleveur, certaines formations
anttlropiques prennent une grande importance dans le paysage. Autour des
villages, on note la présence du cade, alors que le rânier est caractéristique
des paysages champêtres et que le karité et le néré ont été protégés lors des
défrichements culturaux en raison de leur intérêt économique; ils demeurent
les espèces dominantes des paysages cultivés, partout dans le pays, sauf
dans le domaine sahélien.
69

Tableau 2
Potentialités agro-sylvo-pastorales des régions économiques du Burkina Faso
Variables
Zone agro-
Superficie (Km:)
SUPEI<.FICIE AGI<.ICOLE
Superficie à
Vo pnr rappon Ji 1.
Superlicie à
Yo par rappol1 à 1,
autres (Km:)
% par rappon
climatique
vDcmion par
superficie
vocalion forèts
supcrl.icie
5upt:rl.icie
'.
Regions
Potentialites
Cuhivêe
cours (Km:)
(Km')
régionale
Pluvial
Irrigué
Tolal
% par rapport à
Pluvial
Irrigué
Total
Yo par rapport à l,
1
la superficie
pOlentialité
1. Boucle du ~louhoun
Soudanienne
33.106
9.352
315
9.667
29,2
2.910
9
2.919
30,2
18.000
54,4
3.000
9,0
2.J39
7,-1
2 CENTRE
22.558
7.398
106
7.504
33,3
4.067
9
4.076
54,3
Il.500
SI
2.150
9,5
I.JOJ
6.2
,
CE\\'TRE-EST
10.660
3,451
311
3.762
35,3
1.525
6
1.525
40,S
5.200
48,8
1.050
9,8
648
6,1
-1 CE\\'TRE-OUEST
23.039
7.010
96
7.106
30,8
2.465
5
2,465
34,7
11.000
47,7
2.800
12,2
1.133
9,3
'. CE\\'TRE-\\'ORD
20.985
6.627
43
6.670
31,8
2.920
7
2.920
43,8
10.000
47.6
2.100
10
1.1 [5
10.6
6. EST
49.993
14.772
70
14.842
29,7
1.742
6
1.742
11.7
27.620
55,2
5.100
10.-1
2." 1
4, ï
7. \\'ORD
16.]70
5.218
42
5.260
32,1
2.793
3
2.793
53,1
8.000
-18,9
1.700
10.-1
1.-110
8,0
8. OL'EST
Soudano·Guinéenn
43.172
18.801
383
19.184
44,4
3.104
73
3.104
16,2
9.300
21.5
Il.300
26.:
3.:;$8
i,q
9. S.-UiEL
Sahélienne
36.869
7.529
10
7.539
20,4
1.800
0
1.800
23,9
24.680
67,0
1.500
4,1
3.1 :-0
8,;
If; SL'D-OL'EST
Soudano-Guinéenn
17448
8.152
314
8,466
48,S
1835
3
1.83;
21,7
].700
21,:
-1.200
2-1,1
1.0S:
t'o.:
:
BL'RKrNA FASO
274.200
38.310
1.690
90.000
32,8
25.058
121
25.179
28
129.000
-17
35.000
\\ 2,8
20200
ï,-l
Source
DEP Ministère Agriculture et Elevage 1987
70

La faune compte 35 espèces de grands mammifères dont les populations sont réparties sur 39.000 km 2•
Ces populations ont considérablement diminué en raison du braconnage, de certaines pratiques agricoles et de
la divagation des animaux domestiques dans les parcs, des feux de brousse et de la dégradation de
l'environnement.
71

BURKINA FASO
Corte
nO 3
GRANDES ZONES DE VEGETATION
f2LJ Formotions claires ou herbeuses avec strate ligneuse houte claire
à Acocia rad diano et Balanites aegyptiaco
rn Formations herbeuses ou ligneuses houles claires ou complexes
à Bolanites
oegyptiaca.
~ Formotions ligneuses hautes cloires ou compleJ'.e
o Butyrospermum porodoxum.
~ Formations ligneuses houtes cloires à Parkia biglobosa
et Butyrospermum poradoxum.
W8 Formotions ligneuses hautes ou denses
à lsoberlinia doka
Limite de 10 zone d' étude
Echelle: 1/5 000 000
D'oprès
UNSO Mai 1983)
72

2. LES HOMMES
2.1. Population, aspect quantitatif statistique
2.1.1. Population totale
La population du Burkina Faso, en 1987, était estimée à 8.417.000 habitants.
La densité moyenne est de 29 habitants au km2, donnée peu significative puisque de vastes zones sont
entièrement vides, dans le Sud-Ouest, le Nord-Ouest et dans les vallées28. Ces zones demeurent inoccupées en
raison, dans le Nord-Ouest, de même qu'au Sud-Est de Fada N'Gourma, de la sécheresse et de ses
conséquences, et, dans les vallées, de la présence de certaines endémies (onchocercose). On observe les plus
fortes concentrations de la population en pays Mossi (plus de 70 h/km2). Les causes sont liées plus à des raisons
historiques qu'à des conditions naturelles favorables.
Par ailleurs, on estimait, en 1984, à 1.6 million le nombre de Burkinabè vivant à l'étranger, notamment
en Côte-d'Ivoire où ils sont embauchés dans les plantations du Sud et les chantiers forestiers. Cette émigration
ne présente que très rarement un caractère définitif, puisque 9 % seulement des ressortissants s'absentent cinq
ans et plus, mais les retours étaient habituellement compensés par d'autres départs.
Dans la classe d'âge de vingt à trente ans, on estime qu'un Burkinabè sur cinq doit trouver du travail
à l'étranger en raison de l'état actuel de développement économique de leur pays et du surpeuplement. Cet
exode massif de la main-d'oeuvre masculine et même féminine a de graves effets pour le pays car il détourne
les éléments dynamiques de l'innovation rurale. Par ailleurs, les salaires gagnés par ces migrants sont surtout
dépensés en cadeaux ou biens de consommation acquis à l'étranger et sont très rarement investis dans les
secteurs productifs de l'économie burkinabè (agriculture, artisanat).
2.1.2. Répartition par nationalité
La population du Burkina Faso est constituée d'une soixantaine d'ethnies d'importance numérique inégale
et qui n'occupent pas toujours des aires géographiques précises.
On compte également une quarantaine de centres semi-urbains dont la population oscillait, en 1986, entre
15.000 et 20.000 habitants. La population moyenne des villages se situe autour de 600 habitants.
28
Dans les vallées des Volta, de nombreuses découvertes
archéologiques témoignent d'un peuplement ancien.
73

Corte
n04
BURKINA FASO
PRINCIPAUX GROUPES
ETHNIQUES
1-
,
G'
"
'"
0 0
"' ...: -
°oooooe
(
~
°OOOQO/~
\\
0 0 0
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0
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_
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o
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....
L . 1
°_°00-
e 0 __
Nounourna
U N S
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_
-- ----
-.-.
- , -
Kassena
Dian ........ < ...................... < ........ ;~
iTURKA
G
H A N
A
KARABORO
L
:-~
Oorosie
Limite de la zone d' étude
o
25
50
75
100 Km
1
!
1
1
1
C 0
T
E
D'
1 VOl
R
E
_ _ _ _ _ _ _ _ 1
_
74
Source: CYR:>









15
BURKINA FASO
Corte
nO 5
DENSITE DE POPULATION

14
13
12


11°
LEGENDE
la
D
D
···
....
. . . . d>60 habl km2
Ik d < 40 hab/km 2
.. ..
O
. ·...
. . 40< d'< 60 habl km2
35
a
35
70
105 km
9
!
!
!
!
!
Zone d'étude
1/3 500000
Source: 1N S 0: récensement 1985
~
75
1
1
1
1

2.2. Analyse de la population active
Selon la Banque Mondiale, 48 % de la population burkinabè était, en 1985, en âge de travailler (15 à
64 ans). Le secteur agricole occupait 82 % de la population active en 1980, alors que 13 % étaient salariés dans
le secteur industriel et 5 % dans le secteur des services. Selon Europe Outre-mer, le nombre de salariés était,
en 1984, de 90.000 dont 23.000 dans le secteur public, ce qui inclut quelque 6.900 militaires, gendarmes et
membres des forces para-militaires.
2.3. Evolution quantitative de la population
Selon la Banque Mondiale, le taux annuel moyen de croissance de la population entre 1973 et 1982, fut
de 2,1%, soit le plus faible de la région du Sahel et nettement plus faible que la moyenne observée dans
l'ensemble des pays au sud du Sahara (2,8 %). Le taux moyen de croissance projeté entre 1980 et l'an 2000
est estimé à 2,4 %, à comparer avec 3,3 % pour l'Afrique au sud du Sahara, ce qui portera à 10 millions
d'habitants la population du Burkina Faso en l'an 2000.
2.4. Evolution qualitative
2.4.1. La santé
En 1985, le Burkina Faso comptait 265 médecins et 2.154 infirmiers et sages-femmes, soit un médecin
par environ 30.065 habitants. Il compte également 14 chirurgiens dentistes et 96 pharmaciens.
Les services de santé sont dispensés par 2 hôpitaux nationaux et 7 hôpitaux régionaux, totalisant 1.723
lits, 54 centres médicaux, 366 centres de santé et 154 dispensaires et 20 maternités isolés.
Le Burkina Faso a obtenu des résultats jugés remarquables avec sa campagne de "vaccination commando"
réalisée en novembre 1984. Une opération de vaccination élargie visant l'immunisation totale contre les 7
grandes maladies infantiles classiques est en cours chez les enfants âgés de moins de 15 ans. Des agents de santé
communautaire sont formés et le public est mobilisé pour créer un poste de santé primaire (PSP) dans chaque
village.
76

Pour améliorer la condition féminine, le gouvernement s'efforce de faire disparaître la pratique de
l'excision et de développer la planification familiale; les résultats se font cependant attendre, puisque seulement
1% des femmes en âge de procréer utilisent des méthodes contraceptives.
2.4.2. L'éducation
Les principales caractéristiques physiques, humaines et socio-économiques qui apparaissent à travers cette
présentation du Burkina Faso, en même temps qu'elles montrent la fragilité, les limites des ressources naturelles
et des potentialités économiques du pays, semblent le condamner irrémédiablement au sous-développement sans
aide internationale.
Quelles perspectives alors de développement attendre d'une région comme celle du Centre-Nord du
Burkina aussi vulnérable que pauvre économiquement à l'image du pays lui-même?
Le Burkina Faso présente un dossier très faible en éducation avec le plus faible taux de fréquentation
scolaire au niveau primaire de toute l'Afrique, soit 23,5 %, en 1985. Le taux de scolarisation était estimé, en
1985, à 4 % pour le niveau secondaire et à 1% pour le niveau supérieur.
A la rentrée de 1985, on comptait 390.414 élèves de niveau primaire, répartis dans 1.958 écoles, dont
424 nouvelles, avec un effectif de 6.570 enseignants. Le niveau secondaire général comprenait 57.240 élèves
dans 79 établissements, et 1.700 enseignants. Le secondaire tec1mique et professionnel comptait 5.104 élèves,
25 établissements et 321 enseignants, alors que la formation des maîtres était concentrée dans un établissement,
l'Ecole Nationale des Enseignants du Primaire de Loumbila.
En principe, l'enseignement primaire public est obligatoire et gratuit. Dans les faits, la fréquentation est
très faible. L'enseignement y était dispensé en langues nationales depuis 1978, mais, en 1985, le gouvernement
a décidé de revenir au français comme langue d'enseignement. Les programmes du secondaire sont alignés sur
les programmes français.
L'enseignement supérieur est dispensé par l'Université de Ouagadougou, qui compte des Facultés et
Instituts universitaires.
77

Tableau 3
Infrastructures sanitaires et scolaires des régions
Variables
Population 1989
Nombre de formalÎons
% par rapport total F.S
Ratio POPIFS
Nombre de classes
% par rapport au nombre
Population scolarisée 1989
Effectif moyen par classe
Ré~jons
sanitaires
lotRI
de classes
1 Houcle du \\lounoun
997.598
78
10,8
12.790
835
10,5
~7.111
50
2 Centre
1.756.711
140
19,4
12.548
1.898
23,9
1;~.319
71
3. Centre-Est
665.676
54
7,5
12,327
558
7,0
30.635
55
.4. Centre-~ord
844.795
76
10,5
11.l16
910
Il,5
53.589
59
5. CenlTe-OueSl
776.989
49
6,8
15.857
517
6,5
26.395
51
6. ESl
773.855
55
7,6
14.070
380
~,8
17.996
~7
ï. :--:ord
785035
74
10,2
10.609
907
11,5
48.887
5~
S Ouest
1006642
116
16,1
8.678
1.257
15,9
85.3904
68
9. Srlhel
536.525
33
4,6
16.258
225
1.8
10.051
4:-
1() Sud-Out~!
490.132
47
6,5
IO.'12~
443
5.6
IS.60:
4:
BIJRKI:-:A FASO
8.633.958
722
100
11958
7.339
100
472.979
60
Source
DEP Ministère de l'Enseignement de Base et de l'Alphabétisation de Masse
- DEP Ministère Santé et Action Sociale, 1990.
78

Tableau 4
Situation de la scolarisation au Burkina Faso
Variables
Provinces
Population
Population scolarisée
Taux brut de
scolarisable
scolarisation %
Régions
1. BOUCLE DU MOUHOUN
Kosso
66.101
11.1 10
16,81
Mouhoun
57.615
16.806
29,17
Sourou
57.194
19.195
33,56
TOTAL REGION 1
180.910
47.111
26,04
2. CENTRE
Bazèga
65.240
17.287
26,50
Ganzourgou
40.916
6.845
\\6,73
Kadiogo
99.428
80.246
80,71
Nouhouri
19.425
5.946
30,61
Oubritenga
60.763
18.065
29,73
Zoundwéogo
30.586
5.930
19,39
TOTAL REGION 2
316358
134319
42,46
3. CENTRE-EST
Boulgou
80.901
20.010
24,73
Kourienga
42.955
10.625
24,74
TOTAL REGION 3
123.856
30.635
24,73
4. CENTRE-NORD
Barn
33.830
8.713
25,76
Narnentenga
39.133
4.185
10,69
Sanmatenga
74.692
13.497
18,07
TOTAL REGION 4
147.655
26395
17,88
5. CENTRE-OUEST
Boulkierndé
75362
27.742
36,82
Sanguié
44.595
14361
32,20
Sissili
53.936
11.486
21,30
TOTAL REGION 5
6. EST
Gnagna
47.685
4.292
9,00
Gourma
61.598
9.329
15,\\ \\ 4
Tapoa
33.326
4375
13,13
TOTAL REGION 6
142.609
17.996
12,62
7. NORD
Passoré
47.838
12.736
26,62
Yatenga
114.639
36.151
31,53
TOTAL REGION 7
162.4 77
48.887
30,09
8. OUEST
Comoé
50.511
17.599
35,04
Houet
120.564
59.044
48,97
Kénédougou
28.093
8.651
30,79
TOTAL REGION 8
199.168
85394
42,88
9. SAHEL
Oudalan
20.297
1.858
9,15
Séno
44358
3.249
7,29
Soum
38.027
4.944
13.00
TOTAL REGION 9
102.682
10.051
29.44
10. SUD-OUEST
Bougouriba
40.581
10364
25.54
Poni
48334
8.238
17.04
TOTAL REGION 10
88.915
18.602
20.92
BURKINA FASO
1.638.523
472.979
28.86
Source
DEP Ministère de l'Enseignement de Base et de l'Alphabétisation de
Masse.
DEP = Direction des Etudes et de la Planification 1990.
79

CHAPITRE":
SITUATION DE DEVELOPPEMENT DU BURKINA ET
AIDE INTERNATIONALE : CARACTERISTIQUES
ESSENTIELLES
ET
ORIENTATIONS
ECONOMIQUES
3. LA SITUATION ECONOMIQUE
Avec un PNB par habitant de 140 $US en 1985, le Burkina Faso est l'un des
pays
les
plus
pauvres
d'Afrique.
Malgré
les
exigences
de
l'indépendance
économique, il ne peut progresser sans aide extérieure. La nature de son économie
ne lui offre pas un large éventail de possibilités de développement. On note toutefois
une conjoncture favorable pour les unités de production à partir du premier trimestre
de 1988.
Le secteur prioritaire est celui du développement rural: l'accent est donc mis
sur l'agriculture, qui occupe entre 85 % et 90 % de la population et représente
environ 45 % du PIB et 90 % des exportations. Le problème principal y est celui de
l'eau.
Après la sécheresse de 1984-1985, la campagne agricole 1985-1986 a donné
de bons résultats, avec 1.580.000 tonnes de céréales, mais certaines régions restent
toujours déficitaires et difficiles à ravitailler.
80

Outre l'agriculture, l'Etat occupe pratiquement toute la place dans les autres
secteurs de l'économie avec des projets de mise en valeur des ressources naturelles
du pays, le développement hydro-électrique et l'hydraulique villageoise ainsi que le
développement agricole de l'ensemble du territoire national.
Le secteur manufacturier n'occupe que 3 % de la population et les unités de
production connaissent depuis quelques années un essoufflement généralisé qui se
manifeste par une baisse de la production, l'arrêt de l'investissement, la réduction de
l'emploi et la fermeture d'un certain nombre d'unités industrielles.
3.1. Balance des paiements et dette extérieure
Le budget "révolutionnaire" de 1987 prévoyait des dépenses de près de 100
milliards F CFA qui dépassaient de 12 milliards F CFA les prévisions de revenus. Les
budgets des deux précédentes années étaient en équilibre avec 76,7 milliards F CFA,
en 1985, et 84 milliards F CFA en 1986.
La chute des cours mondiaux du coton qui constitue 50 % des exportations,
a provoqué un important déséquilibre de la balance des paiements en 1985, avec un
déficit de 12 milliards F CFA. Le déficit de la balance des paiements avait atteint 3,3
milliards F CFA en 1982, situation qui s'est améliorée en 1983 et 1984, grâce à
l'augmentation de l'aide extérieure et à un prêt d'ajustement structurel de 3,5 milliards
F CFA consenti par la France, et une aide algérienne de 2 milliards F CFA. A la fin
de 1985, la dette extérieure du Burkina Faso totalisait 539 millions $US, dont 496
millions $US de dette à long terme.
81

3.2. Structure et croissance de la production
Le produit intérieur brut totalisait 930 millions de $US en 1985 et il se
répartissait comme suit:
Le taux de croissance annuel du PIB, entre 1965 et 1985, fut de 2,5 %,
principalement attribuable à la croissance de l'agriculture, avec 2,7 %, suivi des
services, avec 2,4 % et 2,1 % pour l'industrie.
3.3. Le secteur agricole
Le Burkina Faso est avant tout un pays agricole. Le secteur de l'agriculture ne
fournit pas seulement des vivres à la population; il constitue aussi l'essentiel des
exportations.
Il était donc tout à fait logique que le secteur agricole reçoive une attention
prioritaire dans le plan quinquennal de développement populaire 1986-1990 élaboré
par le Gouvernement Burkinabè sous l'Administration SANKARA29 . Ce plan a reçu
l'aval des bailleurs de fonds du pays et des organismes internationaux qui, par l'aide
économique, appuient les efforts endogènes.
La production agricole est tournée vers les cultures vivrières qui occupent les
8/10 des superficies, soit à peu près 2,5 millions d'hectares. Cette production est
presque entièrement destinée à l'autoconsommation, caractérisée par une dominante
29
Burkina Faso Plan Quinquennal de Développement Populaire 1986-
1990, Ouagadougou: Gouvernement du Burkina Faso; 1986. 279 p.
82

céréalière (mil, sorgho, maïs, riz, fonio), quoique les oléagineux (arachide, sésame,
karité) occupent une place importante, mais variable selon les années.
On constate que les plantes tubercules (ignames, taros, patates), les haricots
et pois de terre (v6andzou) et les cultures maraîChères, d'introduction récente,
tendent à prendre une place plus importante dans le bilan des productions.
La population agricole burkinabè est estimée à 8,30 millions d'habitants,
constituée pour 51,3 % de femmes. Cette population comprend 49,1 % de moins de
15 ans. Elle exerce à plein temps l'agriculture et l'élevage qui demeurent ses
principales activités en saison des pluies. Mais en saison sèche, les activités menées
par la population active sont plus diversifiées pour y inclure le maraîchage, le
commerce, l'artisanat .... La population agricole burkinabè se caractérise également
par une prédominance des ménages de grande taille: 72,2 % des ménages ont une
taille supérieure à 6 personnes, contre 12,6 % ayant une taille inférieure à 4
personnes. La moyenne de convives par ménage se situe en général entre 6 et 14
parsonnes.
Les trois (3) provinces de la région du Centre-Nord se situent dans la moyenne
générale cOlTlme le montre les tableaux ci-dessous.
83

Tableau n° 5 : Ménages agricoles selon la taille du ménage dans les trois provinces
TAILLE DU MENAGE
PROVINCE
1 pers.
2-3
4-5
6-9
10-14
15-19 20 et + Total
BAM
0,5
4,7
12,2
26,2
30,3
11.4
14,7
100,0
NAMENTENGA
5,9
12,2
16,7
30.4
19,1
8,1
7,6
100,0
SANMATENGA
4,8
7.4
11,0
30,1
24,3
11,7
10,8
100,0
BUKINA
3,6
9,0
15,2
33,9
21,8
9,5
7,0
100,0
Source:
Rapport général de l'Enquête Nationale de Statistiques Agricoles
1993 (Ministère de l'Agriculture et des Ressources Animales)
Tableau n06 : Population agricole totale selon l'âge dans les trois Provinces
PROVINCE
TAILLE DU MENAGE
0-6 ans 7-14 ans 15-24 ans 25-54 ans 55 et +
ND
Total
BAM
24,7
25,0
17,2
24,5
8,6
00
100,0
NAMENTENGA
26,1
24,0
16.4
24,9
9,1
00
100,0
SANMATENGA
25,6
23,0
16,9
26.4
8,1
00
100,0
BURKINA
25,5
23,6
16,7
25,7
8,1
0,3
100,0
Source:
Rapport général de l'Enquête Nationale de Statistiques Agricoles
1993 (Ministère de l'Agriculture et des Ressources Animales)
84

Selon les données disponibles, la production de la campagne agricole 1993-
1994 est de 2.556.714 tonnes ; elle est supérieure à celle de la campagne
précédente de 79.514 tonnes soit 3,2 % (conf. Enquête Natioale de Statistiques
Agricoles ENSA 1993).
Cependant, la production céréalière demeure relativement faible dans les trois
provinces étudiées comme l'indique le tableau ci-dessous.
85

Tableau n° 7 :
Production céréalière, campagne 1993-1994, par type de culture
dans les trois provinces
TYPE DE CULTURE
PROVINCE
Mil
Sorgho
Maïs
Riz
Fonio
Total
BAM
6187
15500
1057
37
16
22797
NAMENTENGA
25187
38710
2919
376
0
67191
SANMATENGA
27486
65635
3353
399
0
96874
BURKINA
899197
1310431
270721
53809
22555
2556714
Source:
Rapport général de l'Enquête Nationale de Statistiques Agricoles
1993 (Ministère de l'Agriculture et des Ressources Animales)
Si la production céréalière connaît une légère augmentation, la production de
cultures de rente accuse en revanche une baisse sensible au niveau national et
particulièrement dans les trois provinces étudiées. Cette baisse de la production des
cultures de rente s'explique par-la conjugaison de plusieurs facteurs dont le déficit
pluviométrique, l'acquisition tardive des intrants agricoles etc.
Tableau n08 :
Production de cultures de rente, campagne 1993-1994, par type
de culture en tonne dans les trois provinces
PROVINCE
TYPE DE CULTURE
Coton
Arachide
Sésame
Soja
Total
BAM
375
1851
256
0
2482
NAMENTENGA
104
5299
599
0
6002
SANMATENGA
268
7279
623
0
8169
BURKINA
114764
206320
8253
4015
333352
Source:
Rapport général de l'Enquête Nationale de Statistiques Agricoles
1993 (Ministère de l'Agriculture et des Ressources Animales)
86

Photo n° 1
3 greniers pour réserve de mil non ba ttu appelés "Kongo", Mossi
87

Photo n° 2
3 types de greniers: premier plan le "kongo" en terre pour grosses réser-
ves, deuxième plan au fond à droite le "baoré" pour arachide et mil battu,
troisième plan à gauche le "kielorho" en paille, Mossi.
88

Photo n° 3
Greniers en terre "Baoré" recouverts de nattes en herbe "fogodogha" con-
tre les intempéries chez les mossi.
89

Photo n° 4
Quelques greniers servant de réserves f(lmiliales.
90

Photo n° 5
Champ de maïs mossi
91

Photo n° 6
La rizière d'une ferme pilote mossi
92

Photo n° 7
Aire de battage du riz. Paille de riz battu et sacs empilés. Mossi
93

Photo n° 8
Aire de battage du riz d'une ferme pilote mossi
94

Photo n° 9
Champ de coton avec quelques arbres (Faidherbia Albida).
95

Photo n° 10
Le coton; principale culture d'exploitation au Burkina Faso, occupe de
grandes superficies sur des terres riches en milieu mossi.
96

Les cultures de rente portent essentiellement sur le coton-graine, qui a connu
un redressement en raison de l'augmentation sensible des prix versés aux paysans
(62 F CFA à 90 F CFA/kg) et le karité. La production d'arachides stagne,
probablement pour la raison inverse puisque le prix n'a pas varié depuis 1982; cette
production est pratiquement auto-consommée.
Les
cultures
fruitières
et maraîchères
destinées
à
l'exportation
sont
essentiellement concentrées sur une production principale, les haricots verts.
Un projet de motorisation agricole conduit dans le cadre de la Société
Nationale des Fibres Textiles (SOFITEX) prévoit, dans une première phase
(1986-1990), la mise en place de 79 "chaînes motorisées", puis, dans une seconde
phase, de 250 autres "chaînes motorisées" pour promouvoir les haricots verts.
Selon l'analyse de la situation tirée du plan de développement 1986-1990,
"l'agriculture burkinabè est de type extensif peu performant et consommatrice
d'espace. La densité de la population dans le plateau central atteint un niveau
tel que l'espace vient à manquer: le paysan diminue la période de jachère, il
épuise les sols, détruisant ainsi son propre capital"30. Aussi pour une gestion
et une exploitation rationnelles du capital terre, l'Etat a promulgué une réorganisation
agraire et foncière en août 1984.
30
Plan
Quinquennal
de
Développement
Populaire
1986-1990.
Ouagadougou - Gouvernement du Burkina Faso, 1986.
p. 281
97

Photo n° 11
Désherbage du champ de coton du chef de village mossi.
98

Photo n° 12
Plaine labourée par tracteur et destinée à l'aménagement d'une rizière.
Mossi.
99

Photo n° 13
. Le développement rural passe aussi par la modernisation des outils de
. production: ici, le tracteur remplace la houe et la daba.
100

Photos nOS 14 et 15
Vieux moose confectionnant un chapeau à base d'herbes.
101

La .fourniture d'intrants et d'équipements agricoles modernes se fait par
l'intermédiaire de la SOFITEX et du Centre National d'Equipement Agricole (CNEA);
la commercialisation des céréales est faite par l'Office National des Céréales
(OFNACER) et la Caisse de Stabilisation des Prix et des Produits Agricoles (CSPPA).
Au plan de l'amélioration des techniques, le document mentionne que la
production de semences améilorées n'a jamais atteint 500 tonnes, alors que les
besoins sont évalués à 52.000 tonnes, et seulement 3 % des sols sont fertilisés selon
les normes en vigueur, la moyenne n'atteignant que 10 kg/ha. Enfin, les cultures
attelées, introduites depuis les années 50, ne sont pratiquées que par 8 à 9 % des
"exploitations agricoles". Le rapport note que le système de vulgarisation est, dans
son ensemble, coûteux et inefficace, alors que la recherche agronomique est
dif',persée à travers des institutions atomisées et inar,ticulées, et essentiellement
concentrées sur les productions végétales et céréalières.
Premier produit d'exportation jusqu'à 1975, l'élevage est maintenant au
troisième rang, après le coton et le karité. Après une évolution positive de la
croissance du cheptel, la sécheresse des années 1983-1984 a anéanti les résultats
obtenus. Les éleva'ges restent encore extensifs, transhumants et nomades, sauf pour
les petits ruminants (ovins et caprins) qui sont gardés près des villages pour
l'hivernage, à cause des cultures.
102

Photo n° 16
Transport de fourrage par chariot attelé mossi.
103

Tableau n° 9 : Les statistiques sur les effectifs du cheptel en 1993-1994 sont les
suivantes:
BOVINS
PROVINCES
TOTAL
Effectifs appartenant aux hommes Effectifs appartenant aux femmes
BAM
31 976
1 788
33765
NAMENTENGA
73 315
2457
75772
SANMATENGA
87 751
2 041
89792
Total
193 042
6286
199 329
Source:
Enquête Nationale de statistiques Agricoles 1993. Rapport
Général du
Ministère de l'Agriculture et des Ressources
Animales p. 59.
Les effectifs de bovins appartenant aux hommes représentent 94,7 % contre
5,3 % du total appartenant aux femmes dans le Bam. Ces effectifs se situent à un
niveau sensiblement égal au Namentenga où 96,8 % de bovins appartiennenent aux
hommes contre 3,2 % aux femmes, tandis qu'au Sanmatenga, les données sont de
97,7 % de bovins appartenant aux hommes contre 2,3 % aux femmes.
104

OVINS
PROVINCES
TOTAL
Effectifs appartenant aux hommes Effectifs appartenant aux femmes
BAM
74 102
12 849
86 951
NAMENTENGA
97760
29 031
126 792
SANMATENGA
157 878
53 577
211 454
Total
329 740
95457
425 197
J
Source:
Enquête Nationale de statistiques Agricoles 1993. Rapport
Général du
Ministère de l'Agriculture et des Ressources
Animales p. 60.
Traditionnellement, la société mossi permet à la femme de posséder
davantage d'ovins que de bovins, le nombre de femmes possédant en effet d'ovins
représente 14,8 % contre 85,2 % d'hommes dans le Bam. Ces chiffres sont quelque
peu similaires au Namentenga (22,9 % de femmes contre 77,1 % d'hommes) et au
Sanmatenga (25,3 % de femmes contre 74,7 d'hommes).
CAPRINS
PROVINCES
TOTAL
Effectifs appartenant aux hommes Effectifs appartenant aux femmes
BAM
96 115
28 339
124454
NAMENTENGA
124 682
41 754
166 436
SANMATENGA
180 797
70066
250 862
[Total
401 594
140 159
541 752
Source:
Enquête Nationale de statistiques Agricoles 1993. Rapport
Général du
Ministère de l'Agriculture et des Ressources
Animales p. 61.
105

Le pourcentage de femmes possédant de caprins est certes inférieur à celui
des hommes de façon générale (22,8 % de femmes contre 77,2 % d'hommes dans
le Bam, 25,1 % de femmes contre 74,9 % d'hommes dans le Namentenga et 27,9 %
de femmes contre 72,1 % d'hommes dans le Sanmatenga), mais connaît une nette
progression comparativement au taux de possession d'ovins ou de bovins pour les
deux sexes. Une telle situation pourrait s'expliquer entre autres par des raisons socio-
culturelles qui limitent les possibilités pour les femmes d'am masser d'immenses
fortunes au risque de nourrir des vélléités d'autonomie vis-à-vis des hommes. Il est
à souligner aussi qu'hommes comme femmes possèdent des quantités invariables
de volailles dont l'élevage est destiné aux besoins sociaux divers comme le
commerce, la consommation familiale, les rites et rituels divers.
D'autres animaux de traît comme les boeufs ou les ânes sont la propreté
exclusive des hommes qui s'en servent en toutes saisons pour divers travaux
domestiques et notamment agricoles.
Le milieu pastoral est cependant peu organisé en raison de la mobilité et de
la dispersion des éleveurs. Seulement une vingtaine de groupements d'éleveurs
existent sur l'ensemble du territoire. Règle générale, la population pastorale maîtrise
bien certains aspects de l'élevage, notamment la conduite du troupeau, et montre des
aptitudes à évoluer vers des systèmes plus performants. L'espace brut est disponible
de façon importante, notamment dans les régions du sud, mais doit être valorisé par
l'hydraulique pastorale.
106

La consommation per capita de produits d'origine animale (sans précision) est
estimée entre 7 et 8,5 kg/habitanUan par le plan de développement, ce qui indique
que le marché intérieur pourrait absorber une plus-grande part de la production
nationale. Les animaux commercialisés sont essentiellement exportés sur pied, donc
sans valorisation économique du produit.
L'augmentation de la production agricole est limitée par des contraintes
naturelles, technologiques et socio-économiques. Les contraintes naturelles tiennent
essentiellement à la baisse notoire des précipitations observées depuis quinze ans
et à l'inadéquation entre la répartition des populations et celle des sols disponibles.
Les contraintes technologiques sont liées au faible taux d'encadrement, à
l'absence d'un système approprié de formation, au coût et à la méfiance des paysans
à l'égard de l'usage d'intrants modernes. Enfin, les contraintes socio-économiques
sont liées aux faibles revenus des paysans, à la commercialisation défaillante et à
ce que le plan qualifie de "pesanteurs sociologiques".
Les objectifs de base recherchés par le plan de développement, en matière
d'agriculture, visent la poursuite de la recherche de l'autosuffisance et de la sécurité
alimentaires, une contribution décisive du secteur à l'amélioration de la balance des
paiements de même que l'amélioration des revenus et des niveaux de vie des
107

paysans et de leur famille et également la conservation des ressources en terre et
l'optimisation de l'emploi du capital foncier. Les moyens retenus sont:
- intensification des cultures pluviales,
- développement des cultures irriguées,
- intensification contrôlée des productions animales,
- diversification des cultures de rente,
- intégration agriculture-industrie,
- stabilité des approvisionnements.
Le plan de développement du Burkina Faso a pour objectif avoué de modifier
le mode de vie nomade des éleveurs. "Au titre de la sédentarisation, mentionne
le document, il s'agira de rompre avec l'agriculture itinérante et le nomadisme
pastoral incontrôlés. Les actions de production animale et végétale devront se
dérouler dans les zones qui leur seront affectées, soit séparément, soit en
association, selon les besoins de l'intensification et de préservation de la
fertilité des sols"31.
31
Plan
Quinquennal
de
Développement
Populaire
1986-1990.
Ouagadougou - Gouvernement du Burkina Faso, 1986.
p.288.
108

Le plan propose également d'accroître le niveau d'organisation de l'agriculture
par le passage progressif au stade de la coopérativation. Dans un but de recherche
appliquée et de formation technique des coopérateurs, le plan prévoit la création de
fermes pilotes "qui devront représenter des modèles transposables pour
l'aménagement physique des terroirs comme pour les systèmes de production
mis
en
oeuvre"32.
Déjà
existent dans beaucoup de villages,
des formes
d'organisations paysannes appelés "groupements villageois" qui se situent à mi-
chemin entre les formes traditionnelles et celles modernes d'organisation du monde
paysan.
"Les
groupements
villageois
sont
des
formes
pré-coopératives
d'organisation. Leur succès indique qu'il est possible d'accéder maintenant à
ce type supérieur de groupement que constitue la coopérative'l33, institution
décrite comme étant fondée sur la libre adhésion.,' le fonctionnement démocratique,
la solidarité véritable et la cohésion de ses membres.
Trois types de coopératives sont prévus, qui se différencient selon le degré
d'intégration des moyens de production:
32
Plan Quinquennal déjà cité p. 293
33
Plan Quinquennal déjà cité p. 297.
109

Tableau 10 : Types de coopératives agricoles
TYPE 1
TYPE Il
TYPE III
Exploitations
Exploitations
Exploitations
individuelles
individuelles
collectives
parcellaires
remembrées
Moyens de production
Moyens de production
Moyens de production
collectifs :
collectifs :
collectifs:
- équipement
- équipement
- équipement
- intrants agricoles
Travail organisé
Travail collectif
Travail collectif
Revenu individuel
Revenu individuel
Rémunération en
fonction du temps de
travail effectué
Activités collectives
Activités collectives
de production
de production
Source:
Premier Plan Quinquennal de développement populaire 1986-1990. Ouagadougou
: Gouvernement du Burkina Faso, 1986 ; 279 p.
110

Les coopératives agricoles de type 1 se rapportent aux exploitations
individuelles et se caractérisent par un mode de gestion reposant sur la famille. Le
chef de famille en est responsable.
Les coopératives agricoles de type III par contre se référent à des exploitations
collectives avec un système de gestion qui repose sur l'ensemble de la collectivité
constituant la coopérative, c'est-à-dire un mode de gestion de type "collectiviste".
Il
Commentaire sur les types Il et III
Le type Il est en quelque sorte une formule intermédiaire entre les deux autres.
Le document ajoute: "il est bien entendu que les collectivités locales pourront
se déterminer librement et démocratiquement vers le type de leur choix, bien
qU,e l'objectif à long terme serait, à la suite d'un travail d'animation politique et
idéologique, qu'elles évoluent vers le type 111"34 .
La stratégie de développement agricole du Burkina Faso s'appuie également
sur une meilleure intégration intra-sectorielle - intégration des productions animales
et végétales et intégration agro-foresterie - et intersectorielle, par l'intégration
agriculture-industrie afin de favoriser un développement plus harmonieux et plus
susceptible de faire bénéficier le pays du maximum de retombées économiques. Les
autres composantes de la politique agricole retenue par le plan de développement
concernent:
34
Plan Quinquennal déjà cité p. 280.
111

- une politique de prix, révisée chaque année, afin d'encourager la production
et de stabiliser les revenus des paysans;
- une politique de crédit agricole qui s'appuie sur les coopératives d'épargne
et de crédit existantes et qui encouragera la formation de nouvelles
coopératives;
- une politique de commercialisation qui visera à réguler le marché pour
garantir les approvisionnements aux régions déficitaires; à cette fin, le plan
encourage le développement de banques de céréales et la formation de
coopératives de services qui fourniront les intrants et achèteront les surplus
de céréales des paysans.
Les objectifs de croissFnce annuelle des productions céréalières ont été
estimés à 3,4 % par année, ceux des tubercules et légumineuses à 4 %, ceux des
cultures maraîchères et fruitières à 5 %, et enfin à 6 % pour le coton.
3.4. Les mines
En 1960, le bilan minier du pays se limitait à deux mines en exploitation: les
mines d'or de Poura et de Sebba. Quant aux activités de recherche, elles ne sont
qu'à leurs débuts.
112

En 1986, le bilan minier se résume à quelques gisements en exploitation, dont
les mines d'or de Poura et de Sebba, la mine d'antimoine de Mafoulou et la mine de
phosphate de Kodjari. Le pays compte quelques gisements qui ne sont pas encore
en exploitation en raison du manque de disponibilités financières et du peu d'intérêt
des bailleurs de fonds: les gisements exploitables de manganèse de Tambao et de
Kiéré, de calcaire à ciment de Tin-Hrassan, et d'or de Guiro, les gisements évalués
de nickel de Bouga, de bauxite de Wempapassido, de Kosso et de Fara, et les
gisements en voie d'évaluation, de cuivre aurifère de Cangaol, d'or de Kwademen et
de zinc de Perkoa.
3.5. L'énergie
Si on fait exception du bois de feu, l'autosuffisance du pays est pratiquement
très faible. La Société Nationale Burkinabè d'Electricité (SONABEL) est totalement'
dépendante des importations de produits pétroliers pour sa production d'énergie. Elle
gère actuellement les installations de quinzaine de villes.
Le pays tente de se tirer de sa situation de dépendance. Il a entrepris, en juin
1985, la réalisation du barrage de Pama, sur la Kompienga, à 300 km au Sud-Ouest
de la capitale. Le barrage dont la construction est achevée, alimente une centrale
électrique d'une puissance annuelle de 31,2 GWh, qui relie la capitale par une ligne
de 132 kV. Ce projet comporte un volet agricole grâce à l'irrigation d'un périmètre
maximal de 2.000 ha. La réalisation du barrage a des effets non négligeables au plan
de la lutte contre l'onchocercose qui existe à l'état endémique dans les vallées.
113

Un barrage hydra-électrique est construit sur le Nakambé (Volta-Blanche), à
Bagré, d'une productibilité de 32 GWh/an, permettant l'irrigation d'un périmètre
agricole de 5.000 ha en rizière et de 300 ha en zone maraîchère, et ayant nécessité
un investissement évalué à 37 milliards F CFA;
Un autre barrage est inscrit dans le plan de dèveloppement. C'est celui de
Koulbi Noumbiel sur le Mouhoun(ex-Volta-Noire), d'une capacité de 300 GWh/an ; ce
barrage pourrait permettre en outre l'irrigation de 10.000 ha de périmètres agricoles.
Les coûts de construction sont estimés à 47,3 milliards F CFA.
3.6. L'industrie
Le secteur industriel du Burkina Faso est relativemênt embryonnaire et ne
participe
que pour une faible
part,
12,6 % du
produit
intérieur brut.
Le
sous-équipement industriel découle en partie du manque de matières premières, de
l'étroitesse du marché intérieur et de sa situation de pays enclavé, qui engendrent
des coûts élevés de transport des matières premières et produits finis.
Ce secteur ne fournit du travail qu'à moins de 1% de la population active
(5.150 employés en
1982). L'activité industrielle est concentrée dans deux
sous-secteurs, l'agro-alimentaire et les textiles et sert essentiellement au marché
intérieur, ses exportations étant marginales, avec 2,8 % des exportations totales.
114

4. LES ORIENTATIONS ECONOMIQUES
Les orientations économiques sont contenues dans le premier "Plan
Quinquennal de développement populaire 1986-1990". On y prévoit des dépenses
d'investissements estimées à 630 milliards de F CFA, comportant 21 % de
financement interne, les 497,4 milliards de F CFA devant être fournis sous forme de
prêts et de subventions des partenaires économiques internationaux du pays. Ce plan
qui vise à réhabiliter et à moderniser l'appareil économique du pays s'articule autour
de sept points:
- s'appuyer sur les ressources nationales tant humaines que matérielles, pour
la construction économique du pays;
- accorder à l'agriculture une haute priorité et en faire le moteur du
développement économique;
- lutter contre la désertification et protéger l'écosystème afin de sauvegarder
le potentiel foncier, végétal, humain et animal du pays;
- valoriser le statut des femmes en tant qu'agents du développement;
- assurer une meilleure intégration des secteurs de l'activité économique du
pays afin de promouvoir un développement économique et social au profit du
plus grand nombre;
115

- amorcer un processus de recherche d'un équilibre spatial fondé à la fois sur
la spécialisation des régions selon les ressources identifiées et sur la
complémentarité des régions selon les ressources;
- promouvoir un cadre juridique opérationnel qui permette au secteur public
comme aux secteurs privé et mixte, à l'Etat comme aux collectivités locales,
aux grandes entreprises comme aux petites, d'intervenir de façon efficace et
complémentaire dans l'économie du pays35.
5. L'AIDE INTERNATIONALE DU BURKINA FASO
L'aide
internationale constitue
un
important
levier
de
développement
économique pour le Burkina Faso. En 1985, la part relative de l'aide représentait 18,4
% du produit national brut, soit 25 $US par haoitant, alors que le PNB per capita était
évalué à 140 $US. En comparaison, le budget de l'Etat représente 14,8% du PNB.
L'ensemble des décaissements de toutes sources totalisait, cette même année,
197 millions $US. Cette aide financière est orientée dans les infrastructures
essentielles au relèvement de l'économie dont les réseaux de transport, la production
de l'énergie, l'hydraulique agricole, les infrastructures scolaires et de santé, l'équilibre
alimentaire ainsi que la lutte contre la désertification.
35
Burkina Faso, Premier Plan Quinquennal de Développement Populaire
1986-1990. Rapport Général synthèse gouvernement du Burkina Faso
Ouaga. pp 131-134.
116

Tableau 11
Décaissement de l'aide publique au développement
(décaissements nets en $US)
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
84
110
159
198
213
217
213
184
189
197
Source:
Banque Mondiale, Rapport sur le développement dans le monde 1987.
Banque Mondiale Exford University Press, New-York, 285 p.
Le Burkina Faso reçoit l'aide internationale à travers deux canaux: l'aide
bilatérale et l'aide multilatérale. Au plan de l'aide bilatérale, les principaux pays
donateurs étaient en 1984 :
Etats-Unis
37,0 millions $US
France
35,3 millions $US
Pays-Bas
17,7 millions $US
Allemagne de l'Ouest
11,5 millions $US
Canada
7,4 millions $US
Pays membres de l'OPEP
12,1 millions $US.
117

5.1.
L'aide multilatérale totalisait en 1984,
54,3 millions de $US.
Elle fut acheminée par l'intermédiaire des organismes internationaux suivants:
- Fonds Monétaire International (FMI)
- Fonds Européen de Développement (FED)
- Banque Mondiale (BM)
- Banque Africaine de Développement (BAD)
- Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD)
- Office des Nations-Unies pour l'Enfance (UNICEF).
5.2.
L'aide multilatérale est également acheminée au Burkina Faso par
le biais d'un nombre élevé d'Organisations Non-Gouvernementales
(ONG)
qui
participent ainsi
au
redressement de
l'équilibre
socio-économique du pays.
Pour la période du Plan Quinquennal 1986-1990, le secteur agricole
(Agriculture, Elevage, Environnement, Eau et Aménagements hydro-agricoles)
bénéficie d'un financement prévisionnel de 290.283,48 milliards de F CFA sur une
enveloppe globale de 630.000 milliards de F CFA, soit 40,07% de l'enveloppe du
Plan. Cela traduit l'option faite par les Autorités de faire du secteur agricole la priorité
et le moteur dans la stratégie globale de développement économique et social du
pays.
118

La part du secteur hydraulique représente 51,93 % de l'enveloppe du secteur
agricole. Ainsi, avec une enveloppe de plus de 150 milliards de F CFA, soit près de
24 % du montant des investissements publics du Plan (1986-1990), ce secteur de par
son importance stratégique, occupe la première place dans l'allocation des
ressources. Le sous-secteur hydro-agricole reçoit 85,04 milliards de F CFA des 150
milliards alloués au secteur.
D'après les estimations des Nations Unies en 1986 environ 1.500 projets de
développement étaient en cours d'exécution au Burkina Faso. Ils sont financès par
une douzaine de bailleurs de fonds multilatéraux, entre 15 et 20 bilatéraux et une
demi-douzaine de banques de développement. A ceci il faut ajouter les projets
d'environ 150 ONG, ainsi qu'un grand nombre de micro-réalisations, dont le faible
volume financier et la ponctualité font, qu'ils échappent aisément aux statisticiens.
Le Burkina Faso exerce, notamment depuis la grande sécheresse au Sahel,
une attraction remarquable sur de multiples donateurs. Comme les conséquences de
la pluviométrie déficitaire n'y étaient pas plus désastreuses que dans les pays
voisins, la raison de cet engouement se trouve dans le fait, que jusqu'en 1983 les
gouvernements successifs accordaient aux bailleurs de fonds une liberté quasi
absolue à tous égards. Ceux-ci décidaient seuls de l'emplacement de leurs projets,
du domaine de l'intervention, des modes de financement. Ainsi, chaque organisme
obéissait à ses propres prédilections d'octroi d'aide, sans coordination aucune avec
d'autres donateurs; il se produisait des aberrations bien connues: l'affaiblissement
de la volonté d'auto-promotion par exemple n'est guère étonnant, si la participation
exigée des paysans est rémunérée ou payée en denrées alimentaires dans un
village, tandis qu'elle doit être fournie sans compensation dans un autre.
119

Or ce sont justement ces efforts d'auto-promotion qui sont considérés et
méritent un soutien particulier, ceci surtout depuis qu'un changement de l'idéologie
prédominante occidentale est intervenu, favorisant de petites actions autochtones
entreprises dans le but global d'améliorer les conditions de vie, au détriment des
projets préconçus et imposés par les organismes d'intervention. Mais - hélas - ces
micro-réalisations débutées par les villageois eux-mêmes n'existent pas en grand
nombre, de sorte que les donateurs se font concurrence. Situation favorable pour
quelques rares groupes qui se trouvent financés davantage, parce qu'ils jouissent
d'une certaine publicité grâce aux bons contacts internationaux de leur représentant
avec les agences d'aide (cas des groupements NAAM au Yatenga), d'occuper des
régions entières pour leurs interventions.
6. CARACTERISTIQUES DE L'AIDE AU DEVELOPPEMENT AU BURKINA FASO
6.1. Relation entre aide bilatérale et multilatérale
Des montants globaux des financements acquis (100 milliards F CFA en 1982,
141 et 108 milliards les années suivantes) les organismes multilatéraux fournissent
une partie de plus en plus importante (59 %, 54 %, 73 %) à l'aide au développement
au Burkina Faso. Les bilatéraux quant à eux ont un pourcentage décroissant de 41 %,
46 % et 27 % de 1982 à 1985.
6.2. Secteurs d'activités
Quant aux secteurs d'activités les différentes organisations semblent s'être
spécialisées chacune dans un secteur précis d'activités. Rares sont celles qui
agissent à la fois sur les quatre secteurs qui sont la production végétale, la
120

production animale, les actions d'appui et le développement intégré. Tandis que le
support à la production végétale, déjà réduit, a constamment baissé (seulement 12
milliards en 1984, dont rien pour les cultures pluviales), l'intérêt des donateurs s'est
orienté davantage vers le financement du développement intégré, qui absorbe en
1984 plus de la moitié des fonds bi et multilatéraux.
121

Tableau 12 :
Evolution du financement acquis par secteur d'intervention
(en % du total)
Source Année
ONG
1982
1983
1984
1983
Secteur d'activité
Production végétale
55
14
11
7
Production animale
7
7
9
1
Hydraulique
31
30
-
21
Actions d'appui
-
22
29
30
Org. Monde rural
7
-
-
-
Développement intégré
-
27
51
41
Total 100 %
122

Tableau 13 : Sources de financement de la période et leur volume d'intervention
FED
PAYS-BAS
FAC
PNUD
ONG
FONDS
OPEP
FAD
Bill
CCCE
BOAD
illAIB1RD
CNCA
CNSS
ALGERlE
TOTAL FONDS
KOWETlEN
EXTERIEURS
2 ï02,9
2 453,4
368,8
149,8
1 194,1
2 446,5
664
719
199,4
2 965
372
3 958.1
5 596,9
1 253,4
8,8
2 5052,1
Subyention
9315,5 soil 37,2 %
Sources
Bulletins d'informations sur les projets du Ministère de l'Agriculture et de l'Elevage DEP (1984-86),
Rapports AMVS et ONBAH 1979-87.
123

Tableau 14
Structure et programmation des financements du secteur du développement rural au cours du Plan Quinquennal de
Développement Populaire (en millions de F CFA)
Secteur
1
Coût rotaI
1
Coût Tanche PQ
1
Financement acquis
Financement à
Progmmmation
rechercher
National
Extérieur
IQS6
1987
1%8
\\<>sq
1"'Où
Agri cu 1tu re-el evage
187.100,20
125 043,39
'J25,85
77.955,73
44.893,20
16.571.74
24597.4
33.874,72
25710.03
13.-197,35
18.132,299
14.507,09
1.145,34
7.759,51
8.310,35
973,97
1 648,11
3 080.50
3.177,75
153-1,89
Environnement····
168.386,00
150.733
6.586,85
105.225,94
38.232,34
17096,94
38.243,57
33.869.48
32.418,27
28416,8
Eau AHA·····
·IlAGRE
37.517
(37517)
37517
-IR5
::. 62-1
9.860
1 1.355
10 Il) ..
.. Hydr Agr (- Uagré)
(47523)
7 ..130
1::: 1-19
12.-113
S 952
6.533
TOla] ~eCleur
(4)~1-:_,
383618,42
290.283,48
9.159,07
183.941,18
91.435,89
34643,65
64.489,08
70824,70
61316,85
54.449,04
" EAU ET AI1A
(5) ~ 314
43,89
51,93
71,91
57,2
41,81
49,35
59,30
47,82
52.87
52,19
TOTAL PQDp ......
630.000
113.4 73,81
148.4 Il,55
158.852.48
113.058,3
93.-1-15,55
Sources
Ministère de la Planification et du Développement Populaire. Direction de la Planification et du Développement-Service
de Développement Rural 1985
EOl';i~onnemen\\ comprend les secteurs faune, bois et forêts, pêche el pisciculture
.. ,.. :\\/ fA
'\\menagemcnt Hydra.Agricole
. Jl()DP . Plan Quinquennal de Developpement Populaire
124

Tableau 15 : Répartition annuelle des financements
1 1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
Subvention
9.315,5
174,3
1.293,9
2.101
-
94,3
85,5
392,8
3.342,5
249,8
1.581,4
100 %
1,8
13,9
22,5
-
0,9
0,8%
3,9
35,9
2,5
16,9
Prêt
15.736,6
-
258,7
4.172,8
669,4 2.334,5
905,2
1.520,4 1.740,6
1.681,9 2.423,1
%
-
2,6
26,6
4,4
14,8
5,7
9,7
11,1
10,7
15,4
Total investis.
Subvention + Prêt
25.052,1
174,3
1.552,6
6.273,8 699,4
2.428,8
990,7
1.913,2 5.085,1
1.931,7 4.004,5
Taux investis.
6,2 %
25 %
2,8%
9,7 %
3,9%
7,6%
20,3%
7,7%
15,9%
Annuel
0,6 %
Source: Ministère chargé du Budget Ouagadougou 1980.
,..
125

6.3. Contrepartie burkinabè
Entre 1978 et 1984 la contrepartie burkinabè, c'est-à-dire la part du budget
national dans le financement des actions de développement oscille entre 50 et 866
millions F CFA. En 1984, elle représente 2 % de l'aide fournie par les sources bi- et
multilatérales.
6.4. Subventions/prêts
La plus grande partie, soit 60 % des financements acquis en 1984 est fournie
sous forme de subventions, le reste sous forme de prêts. Sort de ce cadre la
production animale, qui est entièrement financée sous forme de subventions.
6.5. Fonctionnement, investissement, assistance technique
Sur le total des financements acquis en 1984 la plus grande partie, soit 57%,
est destinée aux investissements; puis viennent, en ordre décroissant les dépenses
de fonctionnement, c'est-à-dire les frais pour le personnel national, l'entretien,
réparation du matériel, carburant, etc. Puis celles imputables à l'assistance technique
c'est-à-dire les coûts des expatriés. Tandis que les multilatérales concentrent presque
exclusivement leurs fonds aux investissements (plus de 99% pour les banques), la
répartition des dépenses sur les trois rubriques est plus équilibrée pour l'aide
bilatérale. Notons encore, que c'est au PNUD que les dépenses pour les expatriés
sont les plus élevées (72% de ses fonds).
126

Ainsi que le faisait observer J.Y. MARCHAL: ... "qu'elles qu'elles soient, ces
aides décident de ce qu'il est bon de faire; mis à part quelques dons, elles doivent
apparaître "rentables" pour les pays prêteurs. Si le milieu naturel (climat sec, sols peu
fertiles,
absence de gisements miniers importants) n'est pas propice à un
développement économique rapide et relativement facile, l'aide est mesurée avec
parcimonie"39.
G.G. Intervention des ONG
Le trait le plus remarquable de l'aide fournie par les ONG est la prévalence de
l'aide alimentaire, qui absorbe en 1983, 64% du total des 6.911 milliards F CFA
dépensés par l'ensemble des organisations non-gouvernementales. Les Américains,
par l'intermédiaire de CATHWEL, contrôlent 96 % de ce marché. L'huile de soja, le
.;f"
lait en poudre etc. sont destinés à l'alimentation des enfants dans les écoles
primaires et au support nutritionnel pré-scolaire. Si on exclut l'aide alimentaire, qui
est d'ailleurs répartie assez régulièrement sur les CRPA, on trouve très peu de
différences de distribution de l'aide selon les secteurs d'activités entre les ONG et les
bi- et multilatérales. Par contre on constate des différences remarquables entre les
deux groupes de bailleurs de fonds en ce qui concerne la distribution régionale de
projets.
39 MARCHAL U.Y.), Brève histoire du développement économique de la Haute-
Volta dans Problèmes Economiques nO 184, DEC. 1982 ; P. 24.
127

CHAPITRE III . PRESENTATION
DE
LA
REGION
DU
CENTRE-NORD DU BURKINA FASO: UNE REGION
AUX LIMITES DE SES POSSIBILITES
Le cadre de la présente étude est celui des provinces du Bam, du
Namentenga et du Sanmatenga qui constituent à la fois un des douze (12) Centres
Régionaux de Production Agro-Pastorale (CRPA) et une des dix (10) Régions
Economiques (RE) que compte le Burkina Faso. C'est la région du Centre-Nord.
Depuis la période coloniale à nos jours, le pays a en effet fait l'objet de
multiples découpages (15 à 16 en 40 ans) à objectifs variés: tantôt ces découpages
visaient l'encadrement politique et administratif des populations, tantôt l'organisation
économique et culturelle du pays. Le découpage du territoire national en régions
économiques n'est cependant pas encore institutionnalisé par un texte juridique;
mais il offre un cadre propice de travail à l'administration publique et aux
Organisations non Gouvernementales (ONG) pour réaliser un développement
équilibré et harmonieux de l'espace national en tenant compte des potentialités
économiques de chaque région et de ses spécificités socio-culturelles.
128

Tableau 16 : Composition des dix régions économiques
Composantes
Capitales
Capitales
Nombre de
Provinces
provinciales
régionales
départements
Régions
1. Boucle du
Kossi
Nouna
Mouhoun
Mouhoun
Dédougou
Dédougou
41
Sourou
Tougan
Bazèga
Kombissiri
2. Centre
Ganzourgou
Zorgo
Kadiogo
Ouagadougou
Ouagadougou
41
Nouhouri

Oubritenga
Ziniaré
Zoundwéogo
Manga
3. Centre-Est
Boulgou
Tenkodogo
Tenkodogo
22
Kouritenga
Koupèla
4. Centre-Ouest
Boulkiemdé
Koudougou
Sanguié
Réo
Koudougou
35
Sissili
Léo
5. Centre-Nord
Bam
Kongoussi
Kaya
23
Namentenga
Boulsa
Sanmatenga
6. Est
Gnagna
Bogandé
Gourma
Fada
Fada N'Gourma
26
Tapoa
Diapaga
7. Nord
Passoré
Yako
Ouahigouya
28
Yatenga
Ouahigouya
8. Ouest
Comoé
Banfara
Houet
Bobo-Dioulasso
Bobo-Dioulasso
40
Kénédougou
Orodara
9. Sahel
Oudalan
Gorom-Gorom
Séno
Dari
Dori
20
Djibo
10. Sud-Ouest
Bougouriba
Diédougou
Gaoua
24
Poni
Gaoua
~ources :
Mlnlstere de la Planification et du Developpement Populaire.
Direction de la Planification et du Développement-Service de
Développement Rural 1985
129

7. LE MILIEU ET LES HOMMES
La région du Centre-Nord du Burkina Faso présente une homogénéité
physique et humaine: située dans une zone de transition entre le sahel et la zone
soudanienne, la région comprend les caractéristiques physiques suivantes:
7.1. Le milieu et le climat
La région du Centre-Nord est caractérisée par des formations herbeuses ou
ligneuses hautes, claires ou complexes à "Balanites degyptiaca et Combretum
micranthum". C'est une région de savane arbustive (Provinces du Bam et du
Sanmatenga) ou arborée (Province du Namentenga). Les arbres les plus rencontrés
sont le kapokier (Bombax costatum) , le baobab (Adansonia digitata) , le karité
(Butvrospermum
parkil) ,
le
Caïlcédrat
(Khava
senega/ensis) ,
le
tamarinier
(Tamarindus indica) , le néré (Parkia biglobosa) , le cade (Acacia albida). Quelques
autres espèces végétales, notamment les arbres épineux s'y rencontrent également.
La pluviométrie varie entre 600 et 800 mm, irrégulièrement répartie dans
l'espace et dans le temps.
Le Directeur de l'ex-ORO du Centre-Nord nous confiait en 1981 : "les
caractéristiques de la pluviométrie dans cette zone de transition sont surtout
l'irrégularité des pluies dans le temps et l'espace qui posent beaucoup de
problèmes aux paysans. Ni le début ni la fin de l'hivernage ne peuvent être
prévus.
130

Non seulement les précipitations sont irrégulières, mais encore elles sont
courtes et parfois si violentes qu'elles favorisent l'érosion des sols..40.
Quant aux sols, ils sont pour la plupart ou ferrugineux ou argilo-sableux ou
gravillonnaires ou encore constitués de latérite. Certains sols (provinces du Bam et
du Sanmatenga) résultent de formations granitiques ou gréseuses. Ils sont dans tous
les cas peu perméables, appauvris par le lessivage intense consécutif à l'action des
vents, de la pluie et des mauvaises pratiques culturales. Ces sols permettent des
rendements agricoles au mieux médiocres. En effet ces données de géographie
physique limitent la production agricole des paysans qui, en dépit des efforts
physiques constamment déployés et l'adoption de techniques culturales modernes
(charrues) ne parviennent pas toujours à franchir le seuil de la famine.
Le système hydrographique y est pauvre et se caractérise par l'absence
d'importants cours d'eau permanents: seul le "Nakambé" (ex-Volta Blanche) traverse
la région; mais alimenté seulement par les précipitations qui durent à peine quatre
mois, il se dessèche vers mars-avril.
• Climat
Le climat est de type soudano-sahélien et comprend quatre saisons:
41
Source ex-Organisme régional de développement du Centre- Nord Kaya.
131

- une saison sèche et fraîche (mi-novembre à mi-février) avec une
amplitude diurne forte et des vents dominants nord-est;
- une saison chaude et sèche (mi-février à mi-juin) marquée par une
forte température ; l'humidité relative s'accroît accompagnée de
quelques pluies assez espacées;
- une saison humide (mi-juin-mi-septembre) avec une élevation de
l'humidité et une baisse de l'amplitude diurne;
- une saison transitoire (mi-septembre-mi-novembre) qui connaît une
température élevée et une humidité relativement importante.
7.2. Les hommes
Les hommes constituent l'une des principales ressources de la région du
Centre-Nord: les plus fortes concentrations humaines s'observent en effet dans cette
région et dans celle du Centre, malgré la pauvreté des sols et le déficit
pluviométrique occasionnant de fréquentes famines.
132

7.2.1. Structures démographiques et mouvements de la population
En 1990, la région totalisait une population de 787.805 habitants, soit 8,7 %
de la population totale du pays, avec une densité de 38 h/Km2 , et donc supérieure
à la moyenne nationale estimée à 33 h/Km2 . Cette population est répartie sur une
superficie de 20.985 Km 2 , soit 7,7 % de la superficie de l'ensemble du pays.
La population de la région se compose de Mossi (majoritaires), de "Foulsé,
de Brangrsé", de Peulh et de Gourmantché (surtout dans les Provinces du Sam et
du Namentenga).
133

Tableau 17 : Situation de la population résidente au Centre-Nord
RECENSEMENT 1985
POPULATION RESIDENTE
1
Provinces
Nbre départ.
Nbre villages
Total
Hommes
Femmes
Superficie
Densité
Bam
06
248
162 575
75 843
86 732
4 017
40
Namentenga
06
98
198 890
96272
102 618
7 755
26
Sanmatenga
11
301
367 724
171 236
196488
9 213
40
Bam:
Taux de croissance
1,2 %
Emigrés
7.084
Namentenga :
Taux de croissance
1,4 %
Emigrés
8.744
Sanmentenga :
Taux de croissance
1,8 %
Emigrés
25.865
Source : 1NSD - Ouaga Recensement 1985
134

Tableau 18 : La structure démographique par province se présente comme suit:
Provinces
Superficie
Population
Densité
Taux
(km2)
(h/km2)
d'accroissement
Bam
4.017
172.566
43
1,2
Namentenga
7.555
213.208
27
1,4

Sanmatenga
9.213
402.032
44
1,8
Source: INSD - Ouaga Recensement 1985
135

7.2.2. Caractéristiques démographiques et mouvements de la population
• Croissance démographique
Le taux de croissance démographique pour la région est de 1,6 % par an.
La population de la région du Centre-Nord est relativement jeune: 1/5 de cette
population se situe dans la tranche d'âge de 20 à 35 ans.
Le taux brut de natalité est estimé à 49,8 0/00 alors que le taux brut de
mortalité est d'environ 15,5 0/00. Celui de mortalité juvénile est de 930/00 et le taux
de mortalité infantile de 134 0/00, ce qui témoigne d'importants efforts réalisés par
l'Etat et les ONG pour améliorer l'état sanitaire des populations de la région, portant
ainsi l'espérance de vie à liS ans environ.
7.3. Mouvements migratoires
Les mouvements migratoires constituent une des principales caractéristiques
de la population Burkinabè en particulier de la région du Centre-Nord en raison
précisément des conditions agro-climatiques défavorables, mais aussi du caractère
historique de l'émigration de cette population longtemps considérée comme la
principale source de main-d'oeuvre aux pays voisins.
136

Ces mouvements des populations peuvent être classés ainsi qu'il suit:
1) des migrations périodiques intra-provinciales
2) des migrations inter-provinciales
3) l'exode rural vers les grandes villes
4) les migrations hors du pays.
Ces formes de migrations connaissent un rythme plus ou moins accéléré et
élevé selon les années de bonne ou de mauvaise pluviométrie, et restent donc liées
à l'auto-suffisance et à la sécurité alimentaires. Ces mouvements des populations
entraînent des modincations sensibles du milieu qui se trouve menacé dans plusieurs
endroits des trois provinces étudiées. De nature individuelle ou collective, ces
migrations connaissent diverses causes familiales, économiques ou politiques. C'est
,;pourquoi elles peuvent être saisonnières ou prolongees voire définitives. Certaines
migrations sont provoquées par les pouvoirs publics qui en raison du surpeuplement
de la région au sol inculte et pauvre, et donc défavorable aux cultures, déplacent des
familles entières ou des villages entiers vers des terres plus fertiles et peu peuplées
du Sud du pays (Bobo-Dioulasso et Banfora).
137

Tableau 19
Caractéristiques démographiques des régions économiques
1
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Source: Tableau confectionné à partir des résultats du recensement général de la population 1985 ; INSD.
* Les taux d'accroissement régionaux et celui du pays sont des taux d'accroissement relatifs pondérés
138

Tableau 20 : Classification des régions selon la superficie et la taille de la population
Variables
Superficie
% superficie
Rang
Population
% du
Rang
Densité
Rang
Régions
(Km2)
du Burkina
1990 (hts)
Burkina
hts/Km2
Est
49.993
18,2
1
798.619
8,8
5
16
9
Ouest
43.172
15,7
2
1.153.391
12,7
2
27
8
Sahel
36.869
13,4
3
599.187
6,6
9
16
9
Boucle du Mouhoun
33.106
12,1
4
1.026.528
Il,3
3
31
6
Centre-Ouest
23.039
8,4
5
916.728
10,1
4
40
4
Centre
22.558
8,2
6
1.827.344
20,0
1
81
1
Centre-Nord
20.985
7,7
7
787.806
8,7
6
38
5
Sud-Ouest
17.448
6,4
8
498.954
5,5
10
29
7
..,
Nord
16.370
6
9
791.315
8,7
6
48
.:l
Centre-Est
10.660
3,9
10
684.119
7,6
8
64
2
BURKINA FASO
274.200
100
-
9.083.991
100
-
33
-
139

La répétition de la sécheresse qui entraîne une famine permanente oblige
également beaucoup de jeunes à migrer dans certaines régions plus favorables à
l'agriculture, généralement vers des périmètres irrigués aménagés par les pouvoirs
publics (plaines aménagées de Bazèga, Mogtédo, Vallée du Kou ... ).
Ces migrations comportent des avantages non négligeables au niveau des
zones de départ, car elles y réduisent la pression foncière, mais présentent aussi de
graves inconvénients dans les zones d'accueil où la consommation incontrôlée de
l'espace menace l'environnement dans son ensemble.
7.4.
Approche historique et anthropologique des Mossi de la région du
Centre-Nord
7.4.1. Organi~3ation socio-politique des Mossi
Chez les Mossi, l'organisation de la société repose sur les structures
lignagères avec la famille agnatique, comme unité sociale de base. Ils distinguent la
concession ou famille étendue, appelée "Yiri" (pluriel "Yiya") , de la famille nucléaire,
laquelle peut être monogamique ou polygamique désignée sous le terme de "laka"
(pluriel laksé"). La famille étendue regroupe plusieurs familles nucléaires, c'est-à-dire
l'ensemble des convives d'une famille conjugale, leurs parents et enfants mariés
partageant la même aire familiale.
140

Plusieurs familles étendues forment le quartier ("saka", pluriel "saksé") qui est
en réalité un ensemble de segments de lignages patrilinéaires. Enfin, un ensemble
de quartiers constituent le village "tenga" (pluriel "tensé") qui désigne également la
terre et dont l'importance est fonction à la fois de son effectif et du rôle socio-politique
qu'il joue à travers ses responsables politiques eUou religieux.
La famille mossi se présente comme "une communauté d'individus qui se
réclament d'un ancêtre commun, unis les uns aux autres par les liens de
parenté qui ne
sont pas
nécessairement
fondés sur
la consanguinité,
pratiquant le même culte, observant les mêmes interdits qu'il comporte; en
outre, tous les membres sont soumis à l'autorité d'un chef qui est à la fois
représentant du groupe et administrateur de son patrimoine commun"41 .
L'ensemble de la société est organisé en lignages patrilinéaires exogames
appelés "buudu" 42 et les membres du "buudu" sont appelés "bud-nèba".
Le "buudu" comprend les descendants du même "yaaba" (ancêtre éponyme)
de la lignée paternelle. D'oIJ l'importance que les Mossi accordent aux éléments de
la lignée paternelle. Par la connaissance des éléments composant sa lignée
paternelle, le "Moaga" (Mossi) sait à quel groupe de base il appartient, quelles
femmes lui sont interdites et quelles relations il doit entretenir avec tel ou tel individu
41 OUEDRAOGO N. Philippe, polygamie traditionnelle des Mossé (Haute-Volta)
et communauté ecclésiale: aspects juridiques et implications pastorales. Thèse
de Doctorat 3è cycle. Rome, novembre 1982 ; p. 32.
42 Buudu : lignage patrilinéaire.
141

mort ou vivant; par des chaînons de plus en plus éloignés, il se rattache à des
groupes d'extension de plus en plus vaste et de formation plus ancienne. Comme le
souligne M. IZARD, "La caractéristique fondamentale du "buudu" est la production
d'unités résidentielles qui sont autant d"'écarts" (nyêega") à partir d'une racine
("nyegré"). Entre les "écarts" d'un même "buudu", la distance sociale et
géographique peut être plus ou moins grande43 .
Toutefois, il convient de distinguer le "buudu" d'un chef ou d'un fils de chef des
autres "buudu". Chaque "buudu" a son doyen d'âge (buud kasma), son sanctuaire
familial ("kim dogo" = maison des ancêtres) où le buud kasma joue le rôle de prêtre.
Il exerce son autorité sur tous les membres du lignage ainsi que sur les individus ou
groupes sociaux qui en dépendent. De la " za ka" au "tenga" en passant par le
"saka" et le " y iri", un responsable à chaque échelon est désigné suivant le principe
de séniorité pour coordonner les activités domestiques, gérer la production
économique et assurer la protection des individus et de leurs biens placés sous son
autorité. Ainsi, la marque de séniorité ne s'observe pas seulement dans les relations
de père à fils ou d'aîné à cadet, mais également dans celles des générations qui sont
représentées sous la forme d'une échelle hiérarchique ainsi graduée: "la génération
des grands pères ("yaab-ramba"), celle des pères ("baramba") et celle des fils
("kamba"). Ce système de représentations crée entre les générations un modèle de
relations et de sentiments qui permettent de parler de "paternité collective" et de
"tutelle collective" des anciens sur les jeunes"············.
43
IZARD M. : Les archives orales d'un royaume africain : recherche sur la
formation du Yatenga, Paris, Université de Paris V, Thèse d'Etat 1980 ; p. 205.
ILBOUDO (J.) : "Croyances et pratiques religieuses traditionnelles des
Mossi, Paris-Ouagadougou CNRS-CVRS, p. 32.
142

Un tel système d'organisation familiale basé principalement sur la séniorité
impose un droit d'aînesse qui s'exerce à travers tous les actes de la vie quotidienne
et favorise le développement de relations sociales faites de dépendance et parfois
d'inégalités sociales pour ce qui touche en particulier le contrôle des rapports sociaux
et en premier lieu ceux qui se nouent autour des ancêtres, des femmes et de la terre.
" faut toutefois souligner que cette forme d'organisation hiérarchique
caractérisée par le monopole des aînés sur les cadets ne s'applique au sein de la
famille et de la société que dans des domaines bien précis comme l'attribution et la
gestion des terres et du cheptel, les échanges matrimoniaux, les dons et prestations
diverses ainsi que l'accomplissement des rites et rituels relatifs à la terre et aux
ancêtres. En revanche, toutes les transactions financières échappent à cette règle
; et c'est précisément cette exception à la règle qui confère à ceux qui ont un statut
social inférieur (cadets, célibataires, "nakombsé" etc.) de s'affranchir de la tutelle
des aînés pour accéder, grâce au pouvoir monétaire, aux femmes, aux animaux et
à la terre.
"Les fonctions de la reproduction sociale sont encore nettement
disjointes des fonctions économiques et socio-monétaires"45.
7.4.2. Appartenance socio-ethnique des populations mossi
De nombreux groupes ethniques se rencontrent aussi bien au Bam, au
Namentenga qu'au Sanmatenga dont les Mossi objet de nos recherches.
45 AUDOUIN (J.) : "L'évangélisation des Mossi par les Pères Blancs". Thèse de
Doctorat 3e cycle en histoire, 1982 ; 2 tomes, p 41.
143

Plusieurs critères parmi lesquels la ré~érence ethnique des ancêtres, les
caractères linguistiques, l'appartenance socio-religieuse et le statut socio-politique
permettent de classer les Mossi par groupes socio-ethniques.
a} Référence ethnique des ancêtres
Les Mossi qui peuplent les Provinces de la région du Centre-Nord se réfèrent
à des souches différentes quant aux ancêtres, mais tous se réclament du
sous-groupe ethnique mossi d'origine conquérante dont Naaba OUEDRAOGO est le
fondateur. L'histoire rapporte que l'ancêtre éponyme des Mossi était un chef
Dagomba qui régnait sur Gambaga (actuel Ghana) aux environs du 11 è siècle. Ce
chef du nom de Naaba NEDEGA eut une fille Yennega dont l'union avec un chasseur
malinké donna précisément naissance à OUEDRAOGO.
Plusieurs hypothèses sont avancées sur l'origine historique des Mossi:
- Une première hypothèse situe l'implantation des Mossi à partir du
Ghana actuel (c'est la thèse classique) d'où ils ont migré vers le nord
entre les Xlllè et XVlè siècles pour s'installer dans le bassin de la Volta
Blanche (aujourd'hui "Nakambé") qui constitue le territoire mossi
actuel.
- Une seconde hypothèse défendue par l'historien britannique Fage fait
une distinction dans l'histoire des Mossi entre l'origine orientale (Bornou
et Niger) plus ancienne (Xlllè siècle) marquée par une phase nomade
qui les conduit à la boucle du Niger, de l'origine méridionale (Dagomba
144

au ~ord du Ghana actuel) qui correspond à la phase étatique (XVlè
siècle) dans le bassin de la Volta)46.
S'il est plus difficile de reconstituer avec précision la formation historique des
Mossi, il semble en revanche plus aisé d'observer et d'analyser les fondements
socio-politiques de la société mossi, d'en comprendre l'évolution pour mieux
appréhender les problèmes de développement auxquels elle est confrontée à travers
les multiples opérations de développement qui y ont cours.
b) Référence linguistique
D'après Jean AUDOUIN, "les Mossi appartiennent au groupe de langues
dites "Voltaïques" ou "gur", réparties en trois sous-groupes: mossi, lobi-bobo
et sénoufo, le sous-groupe mossi étant lui-même composé des langues mooré,
gurma, tem et gurunde,,47.
Le maoré serait lui-même directement apparenté à la langue des Dagomba
(ethnie vivant au Ghana); laquelle langue serait proche de celle des Mamprusi, des
Nankana, Kusasé et Talensi (autres groupes ethniques du Ghana) et de celle des
Dagara (plus exactement du groupe birifo-dagara-wilé).
46 AUDOUIN (J.) : "L'évangélisation des Mossi par les Pères Blancs". Thèse de
Doctorat 3e cycle en histoire, 1982 ; 2 tomes, p 41.
47 AUDOUIN (J.) : "L'évangélisation des Mossi par les Pères Blancs". Thèse de
Doctorat 3e cycle en histoire, 1982 ; 2 tomes, p. 35
145

c) Appartenance socio-religieuse et statut socio-politigue
Les sous groupes ethniques mossi comprennent:
A. Les "Nanambsé" (singulier Nanambga ou Naba), les "Nabissi"
(singulier
Nabiga)
et
les
"Nakombsé"
(sing
Nakombga).
Les
"Nanambsé" sont des chefs politiques. Les "Nabissi" des princes.
Quant aux "Nakombsé", ils constituent la catégorie des "Nabissi"
étant été évincés du pouvoir en vertu de la règle de succession au
pouvoir chez les Mossi, laquelle place parmi les Nabissi les fils aînés
au centre et renvoient les fils cadets à la périphérie du pouvoir.
Le système de succession au pouvoir politique en milieu mossi s'opère de
deux manières:
1)
Par voie linéaire, de père en fils avec priorité accordée au fils aîné,
étant entendu que le système de parenté chez les Mossi repose sur la
descendance patrilinéaire et que la filiation est unilinéaire en ligne
masculine.
2)
Par voie non-linéaire ou collatérale, lorsque le chef défunt ne laisse
aucune progéniture ou alors celle-ci est si jeune qu'elle ne peut hériter
du pouvoir. Dans ce cas, l'un de ses frères lui succède, mais
conformément au principe du respect au droit d'aînesse.
146

La succession héréditaire qui se référe à la régie de primogéniture prend en
considération la dignité et les compétences réelles du candidat au "naam", en dépit
du soutien qu'il peut avoir auprès de la population du village (lorsqu'il s'agit de
briguer la chefferie du village) ou du royaume.
En principe les fonctions de "Naba" (chef politique) sont exercées à vie. Mais
il arrive que dans certains cas (rares, il est vrai) qu'il soit révoqué après être reconnu
indigne ou incapable d'exercer le "naam", la plupart des temps après une grave
infraction aux coutumes et traditions48 .
Dans tous les cas, on le fait disparaître afin d'éviter une quelconque
vengeance sur une partie des sujets, après que les "Kug-Zitba" = ministres de
"Naba" et le conseil des sages du village aient exprimé leur avis sur la conduite dudit
chef par rapport aux coutumes et traditions ("Dogemiki")49 d'o:2J:' le dicton mossi
"le roi règne, la coutume gouverne".
Chaque génération engendre des lignées de nakombsé qui furent marginalisés
par le pouvoir politique en raison de leur descendance de fils de chefs qui ne
devinrent jamais chefs.
48
"Naba" = chef politique (lorsqu'il s'agit d'un village) prince royal lorsqu'il s'agit
d'un royaume. L'expression "Naba" est alors remplacée par celle de "Dima".
49 "Dogemiki" littéralement signifie ce que l'on trouve en naissant "et que l'on
laisse en mourant" : il s'agit de l'ensemble des coutumes et traditions qui
régissent le fonctionnement de la société chez les Mossi et qui constituent
un héritage ancestral.
147

Ainsi deux catégories de "nakombsé" peuvent être distinguées:
1)
les "nakombsé" qui se reconnaissent dans le pouvoir politique
actuel C'naam") parce que le détenteur effectif en est l'un des
leurs,
2)
les "nakombsé" qui n'entretiennent plus de rapports directs
avec le pouvoir politique ("naam") parce que descendants de fils
de chefs qui en furent définitivement écartés.
Ethnologiquement, le terme même de "Nakombga" se compose de "na",
diminutif de "naam" pouvoir politique et du verbe "Kôngué" : manquer, louper. Le
"Nakombga" est donc celui qui a manqué le "naam" alors qu'il aurait pu en hériter.
"Les Mossi ont'un profond respect extérieur pour l'autorité. IIg' sont
d'ailleurs complètement entre les mains de leurs chefs ... C'est ce sentiment qui
a fait leur force et jamais ils n'ont été entamés par les pillards du nord ni par
leurs voisins qui ne songeaient même pas à les attaquer. Quand les Tabermas,
population de bandes esclavagistes qui venaient de la rive gauche du Niger et
qui firent le tour du Mossi sans y toucher, voulaient razzier quelque endroit, ils
commençaient par traiter avec "le Mogho-Naba" ("chef suprême des Mossi"),
lequel était largement rétribué quand la campagne avait été fructueuse.
Les Mossi ont conservé intacts les territoires qu'ils ont conquis et qu'ils
occupent depuis plusieurs siècles. L'esprit de soumission et de discipline qui
les anime les a même rendus redoutables et leur a permis, dans la lutte contre
148

les Songhaïs, non seulement de les repousser, mais d'aller faire le sac à
Tombouctou et de conquérir cette ville. Sur les frontières, quand un aventurier
voulait s'imposer, il commençait par copier le protocole mossi, le sentiment de
soumission et de respect à l'égard de l'autorité est pour ainsi dire inné chez les
La relative docilité des Mossi à leurs chefs politiques d'abord, au colonisateur
ensuite affecta leur organisation sociale et altéra à jamais le "naam".
Plutôt que de l'attaquer, le colonisateur a pris appui sur l'organisation sociale
traditionnelle des Mossi pour exercer son autorité sur l'ensemble du territoire mossi
par le biais de son administration.
Des chefs de village et des rois firent ainsi leur entrée dans l'administration
coloniale; leur désignation comme auxiliaires de l'administration coloniale n'obéit ni
,1
à la même logique que celle qui a prévalu à leur accession au "naam" ni ne repose
sur les mêmes critères. De mauvais "nanambsé" sont devenus de responsables
administratifs, à cause simplement de leur docilité et de leur loyauté au colonisateur.
Malgré la création d'un syndicat des chefs traditionnels de Haute-Volta
(ancienne appellation du Burkina Faso) en 1950, pour préserver le "Dogemiki" face
à la modernisation continue du pouvoir politique traditionnel, puis la constitution d'une
50
(Extrait du rapport annuel, archives de la Mission de Ouagadougou, rédigé
par THEVENOULD 1915, p. 29 et suivantes).
149

Assemblée Territoriale où les chefs coutumiers exerçaient une réelle influence, la
décadence de l'organisation politique des Mossi était devenue irréversible.
Certes, cette décadence s'explique aussi en partie par des causes internes au
système socio-politique lui-même, notamment la velléité d'autonomie de certains rois
vis-à-vis de celui de Ouagadougou, présenté comme le "Mogho-Naba" ; de
l'intention
sans
cesse
nourrie de
certains
chefs
de
village d'arracher
leur
indépendance à l'égard de leurs royaumes d'attache, des luttes d'influence
inter-villages et/ou inter-royaumes allaient conduire à un rythme plus ou moins rapide
à la faillite du système politique mossi. Qui plus est, "la descente des chefs mossi
dans l'arène politique pour y briguer les suffrages des citoyens ... désacralisait
à jamais leur pouvoir et leur fonction d'arbitres neutres et impartiaux"51.
L'exercice du "naam" était-il seulement compatible avec la conception
occidentale de démocratie?
L'une des caractéristiques principales des Mossi conquérants est qu'ils sont
de fait détenteurs du pouvoir politique exercé sur l'ensemble du territoire mossi. Ce
sont des "teng-nanambsé" (sin "teng-naba") = chefs de villages ou des princes
royaux régnant sur des principautés.
B.
Les "tengbiisi ou tengdemba" (singulier teng-biiga ou teng-nèda) =
gens de terre, qui regroupent les "Nioniosé" (singulier "Nionioga") =
chefs de terre et les "sikomsé" (singulier sikombga) = masques dont
51 Cf. AUDOUIN (J.) : op. cit. p. 48.
150

le pouvoir est essentiellement religieux. Les "tengbiisi se définissent
comme des Mossi autochtones.
D'après PAGEARD, "Basi serait le dernier ancêtre commun de tous les
"tengbiisi". A partir de lui, ils se divisèrent en deux grandes familles: celle des
"Nioniosé"
proprement
dits
(chefs
de
terre)
et
celle
des
"sikombsé"
(masques) ...52.
Ce sont eux qui assurent la distribution des terres aux autres
populations
mossi pour leurs besoins d'habitation et/ou de culture, et qui président les cultes
agraires. Il existe cependant des villages mossi au Bam, au Namentenga et au
Sanmatenga où la distinction entre pouvoir politique (naam) et le pouvoir religieux
(tengsobondo) n'est pas clairement établie .
.,;'
Des individus d'un sous-groupe ethnique quelconque arrivent à exercer
cumulativement les deux formes de pouvoir sans que cela ne soit perçu comme une
infraction à la coutume.
C.
Les "talsé" sont constitués par des individus d'origine historique et
ethnique diverse et pourraient correspondre à la catégorie "d'hommes
libres". Beaucoup d'entre eux sont d'anciens esclaves affranchis qui
pour avoir accepté de rester aux côtés des Mossi, bénéficient de la part
de ces derniers protection et aides diverses.
52
PAGEARD (R.), Recherches sur les Nioniosé p. 27.
151

En leur sein se retrouvent les "yumba", terminologie employée pour désigner
les griots, lesquels sont historiquement rattachés à la chefferie.
D.
Les "yem dado", (singulier yemdaogo = esclave et/ou prisonnier de
guerre) sont des esclaves et prisonniers de guerre des populations
autochtones conquises par les Mossi (Tengdemba, bangrsé etc... ).
D'autres groupes ethniques de moindre importance et de moindre profondeur
généalogique vivent parmi les Mossi auxquels ils se sont complètement assimilés.
Il s'agit des "Foulsé" (assez proches des "Nioniosé") et des "saa ba"
(forgerons) qui se considèrent comme des "tengbiisi" au même titre que les Mossi
autochtones.
7.5. Système de parenté chez les Mossi
Chez les Mossi, les groupes lignagers se distinguent les uns des autres par
un double critère : l'un d'ordre généalogique (un ancêtre commun à toutes les
lignées), l'autre d'ordre géographique et historique, une localisation nettement
précisée et située dans le temps grâce à la tradition orale.
152

"La connaissance de la lignée paternelle permet de préciser la double
orientation verticale qui marque la filiation réelle des Mossi actuels avec leurs
descendants historiques, et horizontale qui marque la fraternité réelle qui
caractérise les relations sociales"s3.
Par l'intermédiaire du père et de la mère, le "Moaga" (Mossi) se trouve inscrit
dans deux groupements de parenté (paternel et maternel) qui n'ont ni la même
signification ni la même importance. C'est au sein du premier que se déroule
généralement le cours de son existence (en effet c'est de ce premier groupement
qu'il reçoit son appartenance lignagère) alors qu'il n'entretient avec les parents du
second que des relations circonstancielles.
La parenté chez les Mossi peut se rèsumer en une forme déterminée de
relations sociales établies par la contraction du rnariage. Elle a pour fondement la
reconnaissance d'un réseau de relations sociales entre parents et enfants, mais
diffère fondamentalement des relations biologiques avec lesquelles elle coïncide
souvent.
Quant au mariage lui-même, il est "moins la constitution d'un couple que
l'alliance de deux lignages ; son but est leur survie, leur accroissement et
l'affermissement de leurs liens mutuels"s4.
53 OUEDRAOGO (J.B.), Pouvoir politique et sacré en milieu traditionnel mossi de
Léguéssé (Haute-Volta). Thèse de Doctorat 3e cycle en ethnologie. Université
Lyon Il, 1982 ; p. 45.
54 ORTIGUES (E.), Oedipe Africain Paris 1966, p. 24.
153

Il n'est pas une affaire individuelle, mais celle de tout le groupe social,
c'est-à-dire un acte social engageant une responsabilité collective.
C'est pourquoi en milieu mossi, la coutume autorise le doyen de lignage à
contracter des alliances matrimoniales avec d'autres lignages pour le compte du
"buudu". Il peut ainsi engager une jeune fille ou un jeune homme dans le mariage
avec ou sans leur consentement, en vertu de l'autorité paternelle qu'il exerce sur eux
et que lui reconnaît la société. Toutefois l'usage de l'autorité paternelle doit être en
conformité avec les normes coutumières.
Le mariage en tant qu'alliance n'est solide, stable et indissoluble au regard de
la société et des ancêtres que s'il obéit aux coutumes et traditions, puisqu'il survit
même aux conjoints.
Contrairement aux autres sociétés, la société mossi ne connaît pas le système
de dot dans les échanges matrimoniaux.
"Avec ou sans dot, l'alliance est toujours un engagement explicite entre
deux lignages dont le but consiste à conférer à l'union un caractère légitime et
stable. L'alliance encadre donc l'union conjugale et en protège du même coup
l'unité et l'indissolubilité"55.
55 OUEDRAOGO (N. Philippe), Polygamie traditionnelle des Mossé (Haute-Volta)
et communauté ecclésiale : aspects juridiques et implications pastorales,
thèse Doctorat 3e cycle en droit canonique. Rome 1982 : p. 25.
154

Il convient de noter toutefois le cas particulier de la Pougsiouré : pog diminutif
de paga (femme) et siouré : diminutif de sioubo =donner dans l'attente d'un motif à
retirer.
Le "Moaga" peut donner ses filles, celles de ses fréres ou proches parents
au Naba qui en distribue à ses frères, oncles, enfants, amis, "sogone" (pages) ou
"samand'kamba" (gardes du corps ou palefreniers) l'ayant servi fidèlement. La
première fille issue de telles unions est de plein droit "propriété" du naba. Elle est
appelée "fille de la pogsiouré" et a pour vocation de devenir pogsiouré à son tour.
S'il s'agit d'un garçon, le naba peut en faire un "sogoné" ou un "samand'biga" sans
que son père ne puisse objecter. Les "Sogoné" et les "Samand'kamba" sont donc
des enfants de la pogsiouré.
Lorsque le garçon (sogoné ou samand'biga) est l'aîné de sa famille ét s'il est
en âge de se marier au moment du décès de son père, le naba est tenu de le libérer
même si la durée de son service n'est pas encore expirée.
Le mariage mossi comporte aussi un aspect très important qui est la
procréation; mariage et procréation ne peuvent se concevoir l'un sans l'autre car
condition l'un de l'autre. Sans procréation en effet, le mariage reste incomplet et par
conséquent sans valeur pour la société. "Le mariage apparaît comme un devenir
social, un facteur de survie individuelle et collective et comme signe d'un
équilibre social et moral"56. En effet par la fécondité, la famille est éternisée en
56 OUEDRAOGO (J.B.), op. cit. p. 216.
155

ses descendants. Pour le "Moaga", avoir de nombreuse progéniture constitue le but
essentiel de l'existence et assure un certain prestige tout comme cela confére une
considération sociale. Enfin le mariage participe à la vie du monde invisible, en
particulier à celui des ancêtres desquels la vie est transmise à la société, d'où le
caractère sacré du mariage. Le mariage et la procréation sont une obligation à la fois
sociale et religieuse devant laquelle aucun "Moaga" ne saurait se dérober. Il est un
processus au cours duquel se renforce progressivement l'alliance qui unit deux
groupes sociaux par les échanges matrimoniaux. Il permet donc une extension des
réseaux d'alliances matrimoniales, cependant, son caractère exogamique lui
reconnaît des limites strictes. Si d'aventure ces limites sont franchies, des sacrifices
propriatoires doivent obligatoirement être offerts aux ancêtres afin qu'ils permettent
le maintien de l'union qui ne devrait pas avoir lieu.
A partir de ce moment, les conjoints ou l'un d'eux seulement portent des
bracelets magiques "kalembâncé" (singulier kalembanga57) pour prévenir les·f.·
sanctions religieuses dont ils sont passibles.
Comment alors le droit coutumier mossl
organise-t-il
le
mariage
et
réglemente-t-il la vie des individus.
7.6. Les formes de mariage chez les Mossi
Le droit coutumier mossi distingue diverses formes de mariage. La coutume
autorise tout homme marié ou célibataire à entreprendre des démarches pour
57
OUEDRAOGO (N. Philippe), op. cit. p. 32.
156

acquérir une jeune femme à son propre profit ou à celui d'un membre de son groupe
agnatique en vue du mariage. N. Philippe OUEDRAOGO souligne que le droit
coutumier mossi reconnaît une forme légitime et une forme illégitime du mariage.
"La forme légitime du mariage est basée sur le don qui confère à celui
qui en est bénéficiaire un droit irrévocable.
Le mariage illégitime chez les Mossi est celui qui ne respecte pas les
normes juridiques établies par la coutume"58.
Dans un cas comme dans l'autre, il n'y a la plupart du temps ni liberté de choix
du conjoint ou de la conjointe, ni consentement mutuel. Qui plus est, un écart d'âge
est souvent observé entre l'époux et l'épouse: si la moyenne d'âge de la jeune
épouse varie entre 17 et 19 ans, celle de l'époux atteint parfois 55 ans. La
conséquence qui en résulte, c'est le veuvage dés femmes, parfois avant l'âge de 30
ans. Les autres coutumes mossi confèrent à l'homme dont la femme ne donne pas
d'enfant d'en épouser une seconde. De ce fait une forme d'inégalité entre l'homme
et la femme apparaît et qui s'explique par le fait que la société accorde à l'homme
en tant que géniteur, le privilège d'un recours supplémentaire sans que l'inverse ne
puisse être autorisé.
De même, le mariage étant essentiellement une affaire d'alliance entre deux
lignages, les personnes d'un âge assez avancé sont d'ordinaire légalement
propriétaires de filles, de sorte que les jeunes gens se trouvent défavorisés par la
58 OUEDRAOGO (N. Philippe), op. cil. p. 35.
157

coutume. La plupart des jeunes en âge de se marier ne trouvent guère de femmes
disponibles.
"La concentration du pouvoir et des richesses entre les mains de la
gérontocratie et la chefferie explique la forte proportion de polygamie au
Burkina: 37,4% des ménages mossi sont polygames contre une moyenne de
30% des hommes adultes en Afrique"59.
L'absence de foyer personnel entraîne mécontentement et vagabondage chez
les célibataires qui émigrent vers les pays voisins ou pratiquent l'exode rural. L'état
de célibataire était, semble-t-il d'une durée égale ou supérieure à 30 ans par le
passé, car il fallait souvent attendre la mort du père ou du frère aîné pour hériter de
leurs épouses (si avant sa mort, le père n'avait réussi à trouver des épouses à tous
ses enfants) ; c'est là une des raisons qui incitent les jeunes à l'émigration. Car le
célibat prolongé est perçu par les Mossi comme un signe d'infirmité sociale et morale
; par conséquent le célibataire n'a pas beaucoup de considération sociale: un
célibataire fût-il de 80 ans est considéré comme un enfant, incapable d'assumer des
responsabilités au niveau de la société. De plus, si la procréation justifie le mariage
mossi, il faut souligner que la femme n'est pas recherchée en tant que partenaire
sexuelle, mais parce qu'elle permet au célibataire de mettre un terme à la
dépendance économique qui l'attache au chef de famille. Ce dernier en effet est
chargé de lui procurer la nourriture quotidienne en contre partie de son travail.
59 Pageard (R.), Le droit privé des Mossi p. 77.
158

Ceux qui ne parvenaient pas à obtenir une femme par héritage ou par don à
travers les alliances inter-lignagéres effectuent le mariage par rapt. C'est une forme
de mariage qui consiste pour le garçon à "voler" littéralement la fille souvent avec la
complicité de la mère de celle-ci pour entreprendre une migration la plupart du temps
saisonnière. Toutefois, cette forme de mariage ne crée jamais une situation de droit
tant qu'elle n'est pas corrigée par des pratiques coutumières qui pourraient la
légitimer. Car ni le temps ni la progéniture ne suffisent à légitimer une union
matrimoniale qui n'est pas reconnue par les lignages concernés.
En milieu rural mossi, l'individu est pratiquement absorbé par le groupe social
et la conformité au modèle de vie exigé par les ancêtres et imposé par la société est
synonyme d'identification sociale. Les allégeances dont il relève sont multiples et la
transition entre les générations s'opère difficilement, étouffant parfois les initiatives
individuelles
et
collectives
dans
l'invention
et
l'innovation,
base:'lôe
tout
développement. Or, dans une société, le plus fondamental n'est pas la relation
dominanUdominé ; le pouvoir comme le savoir jouent dans un système de relations
de base constitué par le sexe (hommes/femmes), la génération (parents/enfants,
aînés/cadets, pairs) et l'enracinement dans le terroir (étrangers/autochtones).
Par quel mécanisme peut-on parvenir à infléchir les structures sociales mossi
pour libérer l'esprit prométhéen en latence au niveau individuel et collectif chez les
populations rurales mossi pour leur ouvrir la voie du développement?
159

CHAPITRE IV:
LES
INTERVENTIONS
DE
DEVELOPPEMENT
DANS
LA
REGION
DU
CENTRE-NORD
CARACTERISTIQUES
ESSENTIELLES
Les caractéristiques essentielles des interventions qui influent sur l'essor
économique de la région du Centre-Nord sont nombreuses; quelques unes ont été
ici retenues, celles qui nous paraissaient les plus significatives:
- l'étendue géographique de l'intervention,
- les domaines de l'intervention à savoir:
* le domaine socio-économique:
- agriculture-Elevage
- Artisanat
* le domaine sanitaire
* le domaine de l'environnement
- le volume financier de l'intervention
- la durée de l'intervention
- la source de financement de l'intervention
- et l'organe d'exécution de l'intervention.
160

L'ensemble des caractéristiques des interventions a été analysé dans une
optique inter-relationnelle à partir des paramètres suivants:
- le mode d'exécution et de gestion des interventions de développement,
- le niveau de participation des populations
- l'impact des intervention sur les conditions de vie des populations
Un échantillon fut tiré au sort sur la base des paramètres ci-dessus cités,
permettant d'établir une typologie des intervention ci-après:
Type 1
- les interventions de développement couvrant les trois (3) Provinces et
axées sur le domaine socio-économique et/ou sanitaire s'étalant une
période égale ou supérieure à 10 ans.
Type 2
- les interventions de développement couvrant deux (2) Provinces
portant sur des activités socio-économiques
et/ou sanitaires et
s'étendant sur au moins 5 ans.
Type 3
- Les interventions de développement limitées à une Province orientées
vers les activités socio-économiques et/ou sanitaires d'une durée égale
ou supérieure à 5 ans.
Type 4
- Les interventions de développement couvrant au moins l'une des trois
(3) Provinces et axées sur la protection de l'environnement et
s'étendant sur 5 ans et plus.
161

INVENTAIRE DES INTERVENTIONS DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI DU
CENTRE-NORD PAR PROV'ÏNCE
162

BAM
163

Tableau 21 : Liste des Projets: Bam
Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d' exécut ion
d'intervention
annuel
nel
Reconstitution
Programme
Environnement
DPET
de la végétation
Barn 001
d'Appui à la
et Tourisme
Pays-Bas
Direction
1980
naturelle pour la
Bam
30.642.000
21
foresterie
Provinciale de
1993
responsabilisation
F CFA
villageoise
l'Environnement
des bénéficiaires
(PAFV)
et du Tourisme
pour une gestion
(DPET)
rationnelle des
ressources
naturelles
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à
Secteurs sociaux
Adm inistration
la Production
Bam 001
- Agriculture, Elevage
-
-
-
- Environnement
164

Code
Intitulé de
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Personnel
l'intervention
de tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
Association des
Promouvoir le
volontaires pour le
Communauté
développement des
Environ 2 à
3 agents
Sam 002
développement
-
internationale
- Privé
Indéterminée
populations rurales
Bam
3.000.000 F
permanents
(AYP)
en suscitant de leur
CFA/an
part des initiatives
dans les secteurs de
production
Code
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
Production
Production
- Agriculture
- Eau et Aménagement
Bam 002
- Elevage
hydro-agricole
-
-
- Environnement
165

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
nel
Programme
Ministère
Restaurer la
Sanmatenga
spécial
chargé de
Unité centrale
Production des
CES/AGF
l'Agriculture
de Programme
terres, lutte contre
Barn
60.200.000
10
Barn 003
dans plateau
et de l'Elevage
FIDA
(UCP)
1988
la désertification.
F CFA
central
Yatenga
"Phasel"
1994
Accroître la
Production agricole-
Passoré
Procurer des
revenus aux
femmes. Promotion
des femmes
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien
Secteurs sociaux
Adm in istriltion
à la Production
- Agriculture, Elevage
Bam 003
-
-
-
- Environnement
166

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Personn
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
el
Oct. 1989
Réalisation de 5
Aménagement
Plan et
Association
digues filtrantes et
13.700.000
Barn 004
des terroirs
Coopération
Europe-
AFVP
Oct. 1990
mise en place d'un
Barn
F CFA
2
Zone de Tikaré
échanges
Programme
d'aménagement des
Terroirs Villageois
Code
Activités principales par secteur
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Adm in istration
Production
- Agriculture,Elevage
- Eau et aménagement
- Education
hydro-agricole
-
Barn 004
- Environnement
- Actions sociales
- Artisanat
167

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
nel
Mise en place d'une
CES: TITAO,
Plan et
Janvier
démarche d'aménagement
Bam 005
Bourzenga, Rollo,
Coopération
Eau vive
AFVP
1989-1993
global et planifié de 30
Windigui
villages (Bam-Yatenga)
Barn
14.000.000
5
gestion-évaluation
F CFA
- Programmation
Code
Activités principales par secteur
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Adm in istration
Production
- Agriculture
- Eau et Aménagement
- Education
-
Bam 005
hydro-agricole
- Artisanat
168

Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organis
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
Code
l'intervention
tutelle
financement
me
d'interve
nel
d'exécu
ntion
tion
Rissiam
Réalisation en
Barn 006
Digues filtrantes
Barn 006
Fonds d'Aide et
AFVP
1986/87 et
investissements de 300
Barn
4.538.500
10
de Coopération
suivantes
digues filtrantes + mise en
F CFA
culture de zones
aménagées, aménagements
végétaux
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
Production
Production
Barn 006
- Environnement
- Eau et aménagement
-
-
hydro-agricole
169

Code
Intitulé de
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Persol1-
l'intervention
de tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
annuel
nel
Association des
-
Partenaires
Fédération des
1986
Développement
Barn
Barn 007
Eglises Evangéliques
étrangers
groupements
- indéterminée
Agro- Pastoral
Passoré
Reformées: AEERB
Nongtaaba
Diverses autres
Oubritenga
-
6
activités
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien
Secteurs sociaux
Administration
à la Production
Barn 007
- Agriculture, Elevage
-
-
-
170

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Personnel
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'interven-
annuel
tion
"SOS Sahel
Plan ct
Opérateurs
Améliorer les
Barn 008
international
Coopération
économ igues
"SOS Sahel
lndéterm inée
conditions de
4 à 5
:2
nationaux et
International"
vie des
- Barn
millions
permanents
internationaux
populations en
milieu rural
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
Production
Barn 008
- Agriculture, Elevage
- Eau et Aménagement
-
-
hydro-agricole
- Environnement
171

Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Personnel
Code
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'interven-
annuel
tion
Formation de
Plan et
Eau Vive
Formation des artisans
Barn 009
Puisatiers
Coopération
AFVP
Février 1988
puisatiers autonomes
Barn
1.500.000
3
Bourzenga,
années suivantes
dans chacun des deux
F CFA
Rollo
départements de
Bourzenga et Rollo
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de Soutien
Secteurs sociaux
Administration
Production
à la Production
Barn 009
- Artisanat
-
-
-
172

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
nel
Récupération des
Barn
PATECORE
Agriculture
République
Service
Avril 1988
sols soumis à la
Bam 010
"1 0 phase"
et Elevage
Fédérale
technique du
années suivantes
dégradation hydrique
Passoré
239.300.000
21
d'Allemagne
Projet (CRPA)
conservation et
F CFA
BMZ/GTZ
amélioration du
Oubritenga
potentiel des terres
;
cultivées et cultivables
Sanmatenga
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
Production
Production
Bam 010
- Agriculture,Elevage
- Eau et aménagement
hydro-agricole
-
-
- Environnement
,-Î 73

Code
Intitulé de
Ministère de tutelle
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Personnel
l'intervention
financement
d'exécution
d'interven-
annuel
tion
Association
Ministère chargé
Six "s"
Six "S"
Indéterm inée
Auto-promotion
Barn
3 à 5
Bam Dll
SIX"S"
de l'Agriculture et
Ouahigouya
paysanne
millions
8
de l'Elevage
Code
Activités principales par secteur
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
Production
Bam Dll
- Agriculture,Elevage
- Eau et aménagement
hydro-agricole
- Actions sociales
-
- Environnement
- Artisanat
174

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Personnel
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'interven
annuel
tion
Mise en
Environnement
Direction
- Assurer disponibilité en
valeur piscicole
et Tourisme
Provinciale de
Août 1988 et
protéines animales pour les
Bam
30.000.00
2
Barn 012
du lac Barn
Unicef
l'Environnement
années suivantes
populations (femmes et
a
(DPET) du Barn
enfants)
F CFA
- Créer des activités
génératrices de revenus
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de Soutien
Secteurs sociaux
Adm in istration
Production
à la Production
Barn 012
- Environnement
-
-
-
175

Code
Intitulé de
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
de tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
nel
- Mobiliser toutes les
Fonds de l'eau et
Ministère
- Banque mondiale
ressources en eau pour
Barn 013
de l'équipement
de l'eau
CRPA/CB
1974
développer l'Agriculture et
Barn
15.000.000
16
rural (FEER)
- Pays-Bas
- indéterminée
l'Elevage.
F CFA
- Former les paysans à
l'entretien des ouvrages en
eau réalisés.
- Meilleure utilisation par
les populations rurales des
potentialités hydrauliques.
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
Production
Barn 013
- Agriculture, Elevage
- Eau et aménagement
- Education
- Infrastructures,
hydro agricole
Equipements
- habitat, urbanisme
176

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Personnel
l' interventi on
tutelle
financement
d'exécution
d'interven-
tion
Plan de
ONG
Amélioration des
Barn 014
Parrainage
Plan et
Américaines
PPIL
-
conditions de vie
Barn
83.000.000
41
International du
coopération
des paysans dans la
F CFA
Lac (PPI.L)
province du Barn
par auto-promotion
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de Production
Secteurs de Soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
Production
- Agriculture, Elevage
- Eau et aménagement
- Education
- Infrastructures
Barn 014
hydro-agricole
- Environnement
- Santé
- Equipements
177

Quatorze (14) projets de développement recensés dans le Bam sont en cours d'exécution ou l'ont été
depuis 1974, avec un budget annuel moyen de plus de 380 millions de fCf A investi dans divers secteurs de
l'économie provinciale.
Cependant, les résultats concrets qui en ont été obtenus sont si insignifiants et parfois pratiquement
inexistants qu'ils appellent quelques interrogations:
Les maigres rendements que procurent les interventions de développement dans la province du
bam proviennement-ils d'une mauvaise gestion financière et technique de leurs responsables,
de mauvais choix stratégiques des domaines d'intervention ou des deux à la fois?
Les populations du Bam seraient-elles hostiles à toutes formes d'intervention impulsées de
l'extérieur et pour quelles raisons?
178

NAMENTENGA
179

Tableau 22 : Liste des projets: Namentenga
Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Person-nel
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
annuel
Nam 001
ADRK
Plan et
- Pays-Bas
ADRK
Début 1972
Auto
Namentenga
22.702.800
5
Coopération
- Allemagne
Durée
promotion
Sanmatenga
F.CFA
- Burkina
indéterminée
paysanne
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de soutien à
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
la production
Nam 00 1
- Agriculture
- Eau et
Aménagement
- Education
-
- Artisanat
hydro-agrico le
180

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Per-
l'interven-
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
sonnel
tion
Plan et
Début 1983
Développement
Nam 002
Ile de Paix
Coopération
Belgique
Ile de Paix
Durée
intégré de la
Namentenga
140.292.633
31
indéterminée
région du
F.CFA
Centre-Nord
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
production
- Agriculture, Elevage
- Education
Nam 002
- Eau et Aménâg;::ment
- Environnement
hydro-agrico le
- Santé
-
- Artisanat
- Actions sociales
- Habitat, urbanisme
181

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
nel
- USA
Assistance à
Namentenga
Plan de
Plan et
- Canada
Début 1978
l'enfance, contribution
Nam 003
Parrainage
coopération
- G.Bretagne
Direction
Durée
au développement
Sanmatenga
234.714.000 F
~')
J_
international
- Belgique
PPI.B
indéterminée
socio-économique et
CFA
(PPI.B)
- Japon
sanitaire de la région
Bam
- RFA
du Centre- Nord
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
Nam 003
- Agriculture, Elevage
- Eau et Aménagement
- Education
- Environnement
hydro-agricole
- Santé
-
- Actions sociales
182

Code
Intitulé de l'intervention
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel Person-
tutelle
financement d'exécution
d'intervention
nel
DARA (dévelop.agro
Début mai
Développement
7 provinces
forestier par la
Environnement
1989 durée
agro-forestier pour
dont le
15.000.000
Nam 004
régénération d'acacia.
et Tourisme
UNSO
DPET
indéterminée
la régénération de
Namentenga
F CFA
2
l'acacia albida et
autres essences
locales
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Adm in istration
production
à la production
- Environnement
-
-
-
Nam 004
183

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
annuel
nel
- FENU
1986 et
Amélioration des
Namentenga
Nam 005
BKF 84-001
Plan et
-PNUD
OPS
années suivantes
infrastructures
santé
Coopération
- UNICEF
Al
sanitaires et de
Barn
Environ 8
7
leur fonctionnement
Millions
dans CN-KAy A
Sanmatenga
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Administration
production
à la production
Nam 005
-
-
- Santé
-
184

Code
Intitulé de
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone d'intervention
Budget
Person-
l'intervention
de tutelle
financement
d'exécution
annuel
nel
PDSS (projet
Santé et
Prêt Banque
DPS et A.
Février
Construction et
de Dévelop.
Actions
Mondiale
Sociales
1987 durée
équipements des
19 provinces
Environ 13
Nam 006
des services
Sociales
Namentenga
indéterminée
Directions
dont le Namentenga
millions
11
de santé).
Provinciales de
Santé et de l'Action
Sociale
Code
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Administration
production
à la production
Nam 006
-
-
-Santé
185

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'interven-
nel
tion
PDA V (Projet
- Agriculture
Service
Programme Sanitaire
Développement
provinciale de
Début 1982
Zootechnique orienté
Nam 007
Agriculture
- Elevage
FAC
l'Elevage (SPE)
durée indéterminée
sur l'habitat et la
Namentenga
18 millions
13
Villageoise)
Elevage
gestion du troupeau,
environ
Namentenga
le renforcement de la
vulgar. l' inform ation
et la sensibilisation du
monde rural
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Administration
production
à la production
Nam 007
- Agriculture
-
-
-
- Elevage
186

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'intervention
annuel
nel
Campagne
- Agriculture
FED
Service
Début 1988
Eradiquer
Environ 4
Nam 008
Panafricain de
Elevage
Provincial de
Durée indéterminée
la peste bovine
Namentenga
millions
2
lutte contre la
l'Elevage (SPE)
Peste Bovine
du Namentenga
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de production
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Administration
à la production
Nam 008
- Agriculture, Elevage
-
-
-
187

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zone
Budget
Person-
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
d'interven-
annuel
nel
tion
Projet de
Agriculture
Construction de 4
Environ 20
Nam 009
développement
et Elevage
FENU
CRFA
1990
barrages, 2600ha"
Namentenga
millions
7
intégré
1993
sites anti-érosifs
40ha de bas-fonds, 45
ha cult maraîchères,
118 banques céréales,
octroi de crédit
agricole
Activités principales par secteur
Code
Secteurs de
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
production
production
- Agricu Iture,
- Eau et Aménagement
-
-
- Elevage
hydro-agricole
Nam 009
- Environnement
188

Le Namentenga totalise neuf (9) interventions de développement recensés depuis 1978, absorbant un budget annuel moyen
de plus de 412 millions de FCFA. Bien que son budget annuel moyen soit en légère hausse par rapport à la province du Barn, le
Namentenga se trouve dans une situation socio-économique et sanitaire encore plus dramatique: si les conditions agro-c1imatiques
défavorables peuvent justifier en partie cet état de fait, les véritables causes de ce "sous-développement" chronique sont à rechercher
ailleurs.
189

SANMATENGA
190

Tableau 23 : Liste des projets: Sanmatenga
Code
Intitulé de l'inter-
Ministère de tutelle
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d' inter-
Budget annuel
Person
vention
financement
d'exécution
vention
nel
ADRK
Aider les paysans à entreprendre des
SAN 001
(Association
Plan et de la
Pays-Bas
1969
initiatives locales pour asseoir l'auto-
Sanmatenga
51.905.300
40
Dével. Région
Coopération
Allemagne
ADRK
Indéterminée promotion économique et sanitaire par
F CFA
Kaya)
Burkina
la formation, l'assistance technique et
financière
191

Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la production
Secteurs sociaux
Administration
- Agriculture
- Eau et aménagements
Hydro-agricole
- Infrastructures
SAN 001
- Elevage
Education
- Commerce
- Equipements
- Artisanat
192

Code
Intitulé de l' in-
Min istère de tutelle
Origine du
Organisme d'exécution
Durée
Objectifs
Zones
Budget
Person-
tervention
financement
d'inter-
annuel
net
vention
Développer les
125.789.000
Programme
Environnement
Pays-Bas
Direction
1980
activités de
Sanma-
76
F CFA
SAN 002
d'appui à la
et Tourisme
Provinciale de
/1993
foresterie rurale
tenga
foresterie
l'Environnement
villageoise
et du Tourisme
- sensibilisation
- formation
- encadrement
- aménagement
- forêts classées
193

Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la production
Secteurs sociaux
Adm inistration
- Eau et aménagement
- Infrastructures
SAN 002
- Environnement
Hydro/agricole
- Education
- Equipements
- Energie
194

Code
Intitulé de J'in-tervention Ministère de tutelle
Origine du
Organisme
Duréc
Objccti fs
Zones d'inter-
Budget annuel
Personnel
financement
d' exécuti on
vention
Fonds de l'eau et
Ministère
- Banque
1974
- Sanmatenga
SAN 003
de J'Equipement
de l'eau
mondiale
CRPA
Indéterminée
-
18.000.000
-
Rural FEER/CRPA
- Namentenga
F CFA
- Pays-Bas
- Bam
Activités principales par scctcur
Secteurs de
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
production
- Eau et aménagement
- Education
- Infrastructures
SAN 003
- Agriculture
Hydra-agricole
- Habitat, urbanisme
- Equipements
195

Code
Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d'inter-
Budget annuel
Person-
l'intervention
tutelle
fi nancement
d'exécution
vention
nel
- Lutte contre
- Namentenga
Défense et
Plan et
ex FAM
CRPA
l'érosion
9.817.211
SAN 004
restauration des
coopération
1987-
- Sanmatenga
F CFA
II
sols DRS/CRPA
ONG
ex Ford
CN.Kaya
1997
- Formation des
paysans à
- Barn
Londres
l'utilisation
des tuyaux à cau
Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Adm in istration
production
- Eau et aménagement
- Education
-
SAN 004
- Agriculture
Hydra-agricole
196

Intitulé de
Ministère de
Origine du
Organisme
Zones d'inter-
Budget annuel
Person-
Code
l'intervention
tutelle
financement
d'exécution
Durée
Objectifs
vention
nel
Formation et suivi des
- Sanmatenga
16.483.000
SAN 005
BIT
- Agriculture
PNUD
unités économiques
F CFA
ACOPAM/CRPA
BIT
CRPA
1983-1991
(banques de céréales,
- Namentenga
2
- Elevage
(Norvège)
boutiques, moulins
pharmacies)
- Barn
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Administration
production
à la production
SAN 005
- Agriculture
-
-
197

Intitulé de l'intervention
Ministère de
Origine du
Organisme d'exécution
Objectifs
Zones d' inter-
Budget annuel
Person-
Code
tutelle
financement
Durée
vention
nel
Pro grammatio n et
Direction
Améliorer les conditions de
exécution du
Plan et
Régionale du
Juillet 82
vie des populations rurales
SAN 006
développement
Coopération
Pays-Bas
Plan et de la
indéter-
pour amélioration Production
Sanmatenga
879.313.636 F
162
intégré (PEDI)
Coopération
minée
agricole et pastorale, cau
CFA
potable, santé, action sociale
éducation, formation
Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
production
- Agriculture
- Eau et Aménagement
- Education
- Infrastructures
Hydro-agricole
SAN 006
- Industrie
- Santé
- Equipements
- Transports
- Actions sociales
- Communications
- Commerce
198

Code
Intitulé de l' inter-
M inistèrc de
Originc du
Organisme
Duréc
Objectifs
Zones d'inter-
Budget annuel Person-
vention
tutelle
financement
d'exécution
vention
nel
Programme Spécial
Restaurer la production
CES/AGF dans le
- Agriculture et
Unité
1988
des terres, lutte contre
- Sanmatenga
SAN 007
plateau central
Elevage
FIDA
centrale de
la désertification
- Bam
68.800.000 F
10
"phasel"
programme
1994
- Yatenga
CFA
Accroître la production
- Passoré
agricole-procurer des
revenus aux femmes
Promotion des femmes
Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à
Secteurs sociaux
Administration
la production
- Agriculturc, Elcvage
SAN 007
-
-
-
- Elevage
199

Code
Intitulé de l'interven-
Ministère de
Origine du
Organisme d'ex-
Durée
Objectifs
Zones d'in-
Budget
Person-
tion
tutelle
financement
écution
tervention
annuel
nel
Projet WS déve-
Plan et
Solidarité
Organisation
1985
Améliorer les conditions
SAN 008
loppement intégré
Coopération
mondiale WS
syndicale WS
de vie des populations
Sanmatenga
9.000.000 F
12
Belgique
1990
rurales notamment dans le
CFA
domaines de la Santé Hy-
drologie (forages et rete-
nues eau et agriculture)
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
à la production
- Education
SAN 008
- Agriculture
-
-
- Santé
200

Code
Intitulé de
Ministère de tutelle
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d' inter-
Budget annuel
Person-
l'intervention
financement
d'exécution
vention
nel
Plan de
Plan et
- Début 1989
Amélioration des
SAN 009
Parrainage
CoopérationlVIA
ONG
PPI.K
conditions de vie des
Sanmatenga
393.000.000
82
International
bureau de suivi des ONG
Américaine
- Durée
paysans dans la pro-
F CFA
Kaya (PPI.K)
indéterm inée
vince du sanmatenga
par auto promotion de
ces mêmes paysans
Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Ad 111 in istrat ion
à la production
- Education
SAN 009
- Agriculture
-
-
- Environnement
- Santé
- Informations, art,
cultures et sports
201

Code
Intitulé de
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d'inter-
Budget
Person-
l'intervention
de tutelle
financement
d'exécution
vention
annuel
nel
Centre des
Santé et
Etat belge
Réinsertion handicapés par
handicapés/
Action
75%
1984
mise en place d'activités de
SAN 010
ONG
Sociale
ONG 25%
ONG
production artisanale. Mise
Sanmatenga
10.400.000
51
1992
à disposition du public du
F CFA
service de rééducation par
Kinésithérapie
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de soutien
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
à la production
SAN 010
- Artisanat
-
- Education
-
- Santé
- Actions sociales
202

Code
Intitulé de l'in-
Ministère
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d'inter-
Budget annuel
Personnel
tervention
de tutelle
financement
d' exécu ti on
vention
BKF/OOI
Santé et
PNUD/FENU
Santé et
1985
Améliorer le niveau
Barn
Amélioration
action
Unicef/GYT
Action
1988
de santé par des
Sanmatenga
200.000.000
5
SAN aIl
infrastructure santé
sociale
Burkina Faso
Sociale
infrastructures
Namentenga
F CFA
et fonctionnement
adéquates de santé
Activités principales par secteur
Secteurs de
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Administration
production
production
- Education
- Infrastructures,
SAN 011
-
- Eau et aménagement
Equipements
Hydro-agricole
- Santé
"1....,
203

Code
Intitulé de l'in-
Ministère de
Origine du
Organisme
Durée
Objectifs
Zones d' inter-
Budget
Personnel
tervention
tutelle
financement
d'exécution
vention
annuel
Projet de
Ministère chargé
Rendre les producteurs des
sensibilisation et
de l'agriculture et
Services
1986
plaines irriguées pleinement
Sanmatenga
60.550.000
2
SAN 012
formation des
de l'élevage
Pays-Bas
d'appui aux
responsables de la gestion
(plateau mossi)
F CFA
paysans autour des
AHA/MACP
1991
des aménagements hydro-
barrages
agricoles
Activités principales par secteur
Secteurs de production
Secteurs de soutien à la
Secteurs sociaux
Adm inistration
production
SAN 012
- Agriculture, Elevage
- Eau et aménagement
-
-
Hydro-agricole
204

La province du Sanmatenga quant à elle, enregistre douze (12) interventions de développement exécutées de pu is
1974 ou en cours d'exécution, avec un budget annuel III oyen de plus de 1.847.000.000 de fCFA. Elle occupe
le second rang en nombre d'interventions derrière le balll, mais se place en tête en volume financier. Si sa
situation de développement paraît un peu meil/eure aux deux provinces sus-citées, (elle regorge en effet beaucoup
plus d'infrastructures diverses et d'équipements socio-collectifs), les réalisations concrètes demeurent en deçà
des attentes des populations en rapport avec les énormes sommes investies.
Faut-il alors conclure à l'incapacité des "développeurs" à faire progresser la région du Centre-Nord sur
la voie du développement socio-économique et sanitaire ou à l'impossibilité de transformer quai itativelllent une
région condamnée à jamais dans le "sous-développement".
205

Tableau

24
:
Budget
annuel
de
l'ensemble
des
interventions
de
développement rural dans les trois provinces
Frais de personnel
468 601 755
Matières, fournitures
284 666 122
1nvestissements
1 089 790 270
TOTAL
1 843 058 147
Source: Direction Régionale du Plan et de la coopération (DR PC) KAYA 1990
206

Tableau 25
Inventaire général des interventions de développement en milieu rural du Centre-Nord
In(itul~ de lïnler...ention
Etendue geograpbique
Organe d' execution
1
Domaines de l'intervention
1
Durée
1
Monlant annuel financement
Source financement
Plan de parrainage international de
Ilam
PPIK
1- Agriculture el Elevage-Eau et
1969
51 905 300
USA, CANADA, Grande-Bretagne,
Ka)'a (PPIK), DU Lac (PPIL) et de
Namentenga
PPIB
Aménagement hydre-agricole-
1
Indétemlinée
1
F CFA
Japon. Allemagne
Boulsa (PPlB)
Sanmatenga
PPIL
Anisanat
Projet BKF/84/00 1. Amélioration des
Namentenga
1Direction provinciale
200 000 000
PNUD-UNICEF Burkina
infrastructures de sante
Sanmalenga
de la santé
1 Education-Santé
1
1985-1993
1
F CF,\\
et de leur fonctionnemenl
Association pour le
Namentenga
- Agriculture ct Elevage
51 905 300
dc\\'t'lopp~nh·[\\t
Sanmatcnga
AI)RK
- Artisanat
1
1969-lndcterminée
1
l' CFA
Pays-Bas Allemagne
de la région de
- Commerce
Burkina
Kaya el dl:' ll0uls:l
- Education
(.-\\DRK)
Programme
Bam
Dircction provincialc
- Agriculture ct Elcvagc
125 789 000
d'Appui à la
Sanmatcnga
dc la sanle
- Environnement
1980-1983
F CFA
Pays-Bas
Foreslerie
villageoise (PAFV)
FOlld~ dl' 1T.:lu l't
Ibm
l'10ER
- Eau Cl Aménagement
18 000 000
dc l'Equipement
S:lIl Illil.lcnga
(f\\.linistcle de I"Eau)
- Ilydro-agricole
1974-lndélerrninée
l' CFA
Banque Mondiale
Rur,l (FEER)
Pays-Bas
Programmati0n el e:-;éculion du
Namcnlenga
1-
1 PEDI
Agriculture el Elcvage
D~\\"Cloprell1elll lnt~grc (PED1)
1
Sallmalenga
- Industrie-Transports
879313636
Pays-Bas
- Communications
1982-lndclcrmînéc
F CFA
- Commerce-Education-Santé
C0llSen:ati01l des Eau, ct des Sols!
-9847211 FCFA
~l;n;Slère
Agroforeslcrie du Plalea.u Central
l3am
1
de l'Agdculture el de
Agriculture et Elevage
1987-1993
(Sanmatenga)
FlDA
(CES/AGF)
1
Sanmentcnga
l'Elevage
1
-60 200 000 F CF A
(Namenlenga)
Associalion des Volontaires pour le
Barn
AVD
- Agriculture-Elevage
1973-lndétemlinée
8 000 000
AVD
Développement (A VD)
- Environnement
F CFA
1
Association des Eglises Evangéli-
Bam
AEERIl
- Agriculture-Elevage
1986-1ndétemlinée
Partenaires Etrangers
ques Réfonnees du Ba.m (AEERB)
~lise en \\'aleur piscicole du Lac Barn
Ilam
Ministère de l'Eau
- Environnemcnt
1
1988-1992
UNICEF
"n"'o .. t'I.
Source
Dircction Régionale du Plan ct de la Cooperation (DRPC) Kaya 1990.
207

Tableau n026 : Classification par type des interventions de développement
Imilule de l'imervention
Etendue géographique
Organe d'exécution
Domalnes de l'intervention
Duree
~1ontanl annuel financement
Source financemem
Associalion
• Agriculture el Elevage
1974
"Six S"
~Si:\\" 'Os"
Barn
"Six S"
- Environnement
Indélenninée
Ouahigouya
• Artisanat
P.·I TECORE
t>.linistère de l'Agriculture
· Agriculture-Elevage
239300000
Allemagne
Dam
el de l'élevage
- Environnement
1988-1993
f CfA
GTZ
Fomlation de puisatiers
Barn
- Anisanat
1988-1992
1 500 000
Eau Vive
Bourunga, Ralla
f CfA
SOS Sahel
- Agriculture et Elevage
17 000 000
Aide
ImemationJ.l
Dam
SOS Sahel International
- Environnement
1980-IndélemlÎnée
f CfA
Multilatérale
Ris.siam Digue:::
Dam
t>.linistère de l'Agriculture
• Agriculture et Ele'.'age
4 538 500
fAC
Fillr.HltCS
et de l'Elevage
- Environnement
1987-1992
f CfA
Amenagement de Tem,.)irs.
Bam
Associmion Française des
- Agriculture et Elevage
13 700 000
Association Europ~-
zone de Tibr~
Volonlaires du Progrès (AFVP)
- Environnement
1989-1992
f CfA
Echanges
.sal\\llIalell~a
Conservation des Eaux el des Sol~
- Agriculture et Elevage
14000000
ICI"/..Il~F)
l\\am
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- AltislIllllt
Il)IH·I'J'J:\\
F CFA
Eau Vive
Tilao, Bourzallga, Rollo, \\\\,indigui
- Education
- Agriculture et Elevage
Ile de Paix
Namenlenga
Ile de la Paix
- Environnement
140292633
Belgique
- Anisanat
199J-lndétennjnée
f CfA
Fonds hivés
- Education
Developpement Agro-foresterie par
Namel1lenga
Direction provinciale
1989-1993
15 000 000
USA -Canada-G ran de-B retagne
la Régeneration d'Acacia (DARA)
Environnement et Tourisme
- Environnement
f CfA
France-UNSO
Projet de Développement des
Direction provinciale
Prêr Banque
Services de Santé (PDSS)
Narncntenga
de la santé
- Santé
1987-lndéterminée
Mondiale
Campagne Panafricain de Lune
Namentenga
Ministère Agriculture
- Agriculture-Elevage
1988-1992
Fonds Européens de
contre la Peste Dovine
ct Elevage
Développement (FED)
Projet de Developpement
Namentenga
Ministère Agriculture
- Agriculture-Elevage
1982·1ndétenninée
Fondes d'Aide et de
Agriculture Villageoise (PPDQV)
et Elevage
Coopération (F AC)
Projel Sensibilisation et fonnation des
Sanmatenga
Minislere de l'Eau el
- AgriculLUre-Elevage
1986-1992
60 500 000
Pays-Bas
Paysans autour des Barrages
Agriculture et Elevage
f CfA
Centre des Handicapés (ONG)
Sanmatenga
Centre des handicapès
• Anisanat
BelgiqueJONG
· Education
1984-1994
10400000
• Santé
F CfA
.... ..,"r,.....
"
208

La classification des interventions de développement a été opérée suivant les
paramètres ci-dessus énumérés afin d'en permettre l'analyse en profondeur et de
comprendre les processus sociaux en cours dans la société mossi engendrés par ces
interventions:
Les stratégies et les logiques d'actions varient-elles suivant les types
d'interventions de développement et les groupes sociaux concernés?
Comment s'articulent dans les faits, les processus d'interactions entre
acteurs de développement en présence sur le terrain et quelles sont les
contraintes majeures rencontrées?
Quel
est
le
mode
de
gestion
des
conflits
qui
en
résultent
éventuellement, permettant de mettre en relief les processus locaux
d'innovation et ou d'emprunt qui participent de la dynamique sociale
dans son ensemble?
Une telle classification présente non seulement l'avantage de décrire l'histoire
de chaque type d'intervention, mais également l'intérêt d'estimer ses effets au plan
socio-économique et sanitaire sur les populations considèrées dans leurs différents
groupes sociaux.
209

Sur la base de l'inventaire des différentes interventions de développement, une
typologie a été dressée distinguant 4 types d'interventions en fonction des critères
définis dans l'introduction.
Tableau 27 : Typologie des interventions de développement
Type n° 1
Intitulé de l'intervention
Objectifs
Nombre
total
Amélioration des conditions de
Plan de parrainage
vie et de travail des
international de
populations à travers:
Kaya, Boulsa et du Lac
(PPIK, PPIB, PPIL)
- le développement des cultures irriguées
comme le riz et des cultures malaîchères
pour compenser le déficit céréalier en vue
d'atteindre l'auto-suffisance et la sécurité
monétaires aux paysans;
- promotion de l'artisanat en milieu rural
1
pour créer des emplois rémunérateurs.
210

Tableau 28 : (Typologie suite)
Type n° 2
Intitulé de l'intervention
Objectifs
Nombre
total
Projet BKF/84/001 :
- Amélioration de l'état de
Amélioration des
santé des populations
infrastructures de santé
rurales à travers la
et de leur fonctionnement
construction et l'équipement
des infrastructures de santé,
l'enseignement et l'obser-
vation de l'hygiène,
Association pour le
- Appui aux initiatives locales
Développement de la
des paysans dans le
4
région de Boulsa
domaine
et de Kaya (ADRK)
de l'agriculture et de
l'élevage
Fonds de l'Eau et de
l'Equipement Rural
- L'intégration des activités
(FEER)
forestières (plantations
d'arbres, pépinières villa-
geoises etc... ) pour une
meilleure protection de l'envi-
ronnement dans toutes les
activités socio-économiques.
Programmation et
Exécution du
Développement intégré
(PEDI)
211

Tableau 29 : (Typologie suite)
Intitulé de l'intervention
Objectifs
Nombre
total
Association des Volontiers pour
- Assurer l'auto-promotion
le Développement (AVD- Bam)
paysanne à travers la
formation des paysans aux
Association des Eglises
méthodes culturales
Evangéliques Réformées du
modernes notamment les
Bam (AEERB - Bam)
technologies modernes et
une gestion plus rationnelle
des infrastructures
Mise en valeur piscicole Lac
hydrauliques et sanitaires
Bam
mises à leur disposition.
Association "Six S"
PATECORE
Formation des Puisatiers de
13
Bourzanga et Rollo (Bam)
SOS Sahel International (Bam
Ile de Paix (Namentenga)
Projet de Développement des
de Santé (PDSS-Namentenga
Campagne Panafricaine de
Lutte contre la Peste Bovine
(Namentenga)
Projet Développement
Aviculture Villageoise
(PDAV- Namentenga)
Projet sensibilisation et Forma-
tion des Paysans autour des
Barrages (Sanmatenga)
Centre des Handicapés
(Sanmatenga)
212

Tableau 30 : (Typologie suite)
Intitulé de l'intervention
Objectifs
Nombre
total
Programme d'appui à la
- Reconstitution de la végétation
Foresterie Villageoise
naturelle à travers des reboisements
(Bam-Sanmatenga)
villageois, des plantations liées à
l'agriculture: haies vives, brises-vents
Conservation Eaux
etc... , tout en responsabilisant les
Sols/Agroforesterie du
bénéficiaires pour une gestion
Plateau Central (Bam-Sanmatenga)
rationnelle de ces ressources.
- Restauration de la productivité des
Rissiam Digues Filtrantes (Bam)
terres en vue de l'accroissement de la
production agricole.
. Aménagement de Terroirs zone
- Lutte contre la désertification
6
. Tikaré (Bam)
- Développement des activités
Conservation Eaux-Sols Titao-
rémunératrices des femmes en vue de
Bourzanga, Rollo, Windigui (Barn)
leur promotion socio-économique
Développement agro-foresterie
- La réalisation de ces objectifs passe
par la régénération d'acacia
par des actions simples : construction
(DARA - Namentenga).
de diguettes en terre, en pierres ou en
bandes d'herbes.
* aménagement des terroirs villageois
* construction de retenues d'eau
* vulgarisation de fosses fumières et
compostières.
213

8.
AGRICULTURE
ET
ELEVAGE
BASE
DE
DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE DE LA REGION DU CENTRE-NORD
L'agriculture et l'élevage constituent la base du développement économique
de la région; mais la coexistence du système foncier et agraire traditionnel et de
celui moderne pose des problèmes de son essor socio-économique.
Systèmes agraires et fonciers au Burkina Faso
les particularités du
régime coutumier mossi.
Les systèmes agraires et fonciers au Burkina Faso sont marqués par la
coexistence de deux régimes concurrents : le régime coutumier et le régime
"rég lementaire".
- Le régime coutumier est commun à l'ensemble de la population du
pays avec des variantes et particularités suivant les ethnies en
présence. il se caractérise par:
1)
un droit d'appropriation collectif investi dans le lignage ou
segment de lignage;
2)
un droit éminent sur la terre représenté par le chef de terre; en
tant que descendant du premier occupant de la terre, il est
l'intercesseur entre les hommes et les puissances surnaturelles
liées à la terre;
214

3)
des droits d'exploitation et d'usage individuels ou collectifs,
permanents ou temporaires.
Ces droits sont:
a)
permanents et transmissibles aux héritiers pour tout
membre du lignage ou segment de lignage détenteur du
droit d'appropriation collectif;
b)
provisoires et donc révocables pour tout bénéficiaire non
membre du lignage, la terre étant dans ce cas simplement
prêtée.
215

Corte
n06
BURKINA FASO
OUDALAN
LOCALISATION
DE
LA
ZONE
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___

Le régime foncier coutumier ne permet pas une appropriation individuelle des
terres. Il organise et tente de sauvegarder la propriété collective, familiale en général,
en principe inaliénable et imprescriptible.

Le régime "réglementaire"
Le régime foncier "réglementaire" est le système d'organisation des terres
introduit par le colonisateur et qui est opposé à la conception coutumière de la terre
et de son usage.
Le législateur colonial a introduit dans l'ex-Haute-Volta (Burkina Faso) comme
dans les autres colonies françaises, la propriété privée au sens romain du terme,
c'est-à-dire "le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus
absolue" ... (selon le code civil français), ce que ne permettaient guère les coutumes
foncières.
Plusieurs instruments juridiques furent utilisés pour parvenir à l'instauration de
ce nouveau régime "réglementaire",
1) Le titre foncier introduit par le décret du 24 juillet 1906 (repris par le
décret du 26 juillet 1932 toujours en vigueur jusqu'à une date récente),
qui a imposé en Afrique Occidentale Française (AOF) le régime
d'immatriculation des immeubles. Ce régime définit les droits réels
immobiliers négociables et monétisables et assure à leurs titulaires (au
moyen de la publicité) une garantie sans égale au détriment des droits
coutumiers qui les génèrent.
217

Ces droits réels immobiliers sont: le droit de propriété des biens immeubles,
l'usufruit des mêmes biens, les droits d'usage et d'habitation, l'emphytéose, le droit
de superficie, les servitudes et services fonciers, j'antichrèse, les privilèges et
hypothèques ainsi que les actions qui tendent à revendiquer ces mêmes droits réels.
Ces droits réels immobiliers dérivant du régime de l'immatriculation étaient les
seuls admis à titre de garantie pour les prêts bancaires et dans les transactions, alors
que les droits fonciers coutumiers ne pouvaient même pas faire l'objet d'un contrat
ècrit.
C'est dans ce contexte précis qu'il faut comprendre le peu d'intérêt accordé
au monde rural burkinabè (ex-voltaïque) par l'administration coloniale qui n'y a vu
qu'un réservoir de main-d'oeuvre au profit des colonies voisines (Côte-d'Ivoire
notamment).
2)
Le certificat administratif imposé par le décret du 08 octobre
1925 instituant dans l'AOF, la procédure de constatation des
droits fonciers indigènes individuels.
3)
Le livret foncier introduit par les décrets des 20 mai 1955 et 10
juillet 1956. Ce livret était délivré par les autorités administratives
après une procédure publique et contradictoire aux Voltaïques de
l'époque qui possédaient sur le sol une emprise évidente et
permanente matérialisée soit par des constructions soit par une
mise en valeur emportant droit de disposer. Le livret foncier
glissait donc la notion de propriété individuelle dans le système
foncier coutumier.
218

Outre cette réglementation du statut général des terres, le législateur colonial
avait organisé un statut particulier des biens immobiliers des personnes morales
publiques (Etat, collectivités territoriales secondaires, établissements publics) avec
la distinction entre Domaine Public et Domaine Privé.
Le domaine public est constitué d'un ensemble de biens naturels et de biens
créés par l'homme qui, par leur nature ou par leur destination ne peuvent être
propriété d'un particulier; par exemple les cours d'eau, les étangs, lacs, rivières,
leurs lits et dépendances, routes, ponts, ouvrages militaires, transports publics ...
Le domaine privé est composé des biens immobiliers que l'Etat gère comme
un particulier gérerait son patrimoine; il comporte la distinction entre domaine affecté
et domaine non affecté. Mais en droit comme dans les faits, l'Etat ne dispose que du
seul domaine non affecté.
Le droit colonial n'a pas réussi à supprimer le système coutumier et les deux
types de régimes fonciers ont co-existé depuis la période coloniale à l'indépendance
du pays en 1960. Quelques textes pris ponctuellement ont modifié ou complété
depuis cette date, la situation dualiste du système foncier et agraire.
Ainsi la loi n° 77/60/AN du 12 juillet 1960 portant réglementation des terres du
Domaine Privé de la République de Haute-Volta (Burkina Faso) en organisant
l'occupation et l'aliénation des terres au moyen de la concession faisait de l'Etat le
propriétaire potentiel de toutes les terres non encore immatriculées au moment de
son entrée en vigueur.
219

Puis fut promulguée la loi n° 29/63/AN du 29 juillet 1963 qUI autorise le
gouvernement à réserver pour l'Etat une part des terres
ayant fait l'objet
d'aménagements spéciaux et à déclarer comme biens de l'Etat les terres peu
peuplées ou éloignées des agglomérations. Cette loi constitue le seul cadre juridique
permettant d'entreprendre des aménagements ruraux à grande échelle.

Les particularités du régime coutumier mossi.
En raison de l'interaction entre structures économiques et socio-politiques
d'une part et entre celles-ci et les structures foncières d'autre part, le régime
coutumier mossi marqué par un système politique hiérarchisé et suffisamment
puissant en dépit de son caractère décentralisé, s'encrasse de tares féodales; il s'est
ainsi révélé comme un véritable obstacle à l'élaboration d'un programme d'occupation
rationnelle des terres rurales.
En effet dans les zones rurales, les inconvénients du régime coutumier mossi
sont entre autres:
1)
en matière de prêts de terres (qui est un système généralisé
au-delà des frontières du territoire mossi),
le bénéficiaire
contribue involontairement à la détérioration du sol et partant de
l'espace écologique. La nature de son droit lui interdit de planter
des
arbres
ou
d'entretenir
des
sites
anti-érosifs,
actes
matérialisant une occupation définitive du sol et qui sont par leur
nature contraires aux prêts.
220

2)
L'élevage qui constitue l'un des pôles du développement
économique de la région est fortement handicapé par le statut
coutumier de la terre : le morcellement excessif de la terre
génère et entretient le système de l'élevage extensif. Par
ailleurs, ce régime ne fonctionne pas sans heurt dans cette
région fortement peuplée (caractéristique essentielle de la région
des Mossi) ; il est en effet source de litiges incessants touchant
soit à la limite des champs de culture soit au droit de propriété
entre collectivités coutumières.
3)
Enfin le caractère archaïque des méthodes d'exploitation agricole
allié au morcellement excessif des terres dû au droit successoral
réduit l'agriculture dans une situation d'auto-subsistance.
Ce régime coutumier né dans une situation caractérisée par l'abondance des
terres et un très faible niveau technique ne peut guère s'adapter à un contexte
marqué par de rapides et profondes mutations à la fois sociales, politiques,
économiques et technologiques.
221

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Corte
n07
BURKINA FASO
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Source: C NRST
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C'est pourquoi les Autorités Politiques (4 août 1983 - 15 octobre 1987) de la
période révolutionnaire ont décidé de changer radicalement les rapports sociaux nés
du droit antérieur et d'améliorer qualitativement et quantitativement les conditions de
vie des populations rurales burkinabé à travers l'ordonnance n084-050-CNR/PRES
du 4 août 1984 portant Réorganisation Agraire et Fonciére au Burkina Faso. Cette
Ordonnance stipule à son article premier : "II est créé un Domaine Foncier
National (DFN) constitué par toutes les terres situées dans les limites du
territoire national et celles acquises par l'Etat et les Collectivités Publiques
Secondaires à l'Etranger".
Pour donner de la consistance au Domaine Foncier National, l'Ordonnance
précise à ses articles n02 à 4 :
Article 2 : Le domaine foncier national comprend:
a) "les terres précédemment définies ou classées comme domaine
public de l'Etat et des collectivités publiques secondaires;
b) les terres du domaine privé de l'Etat et des collectivités publiques
secondaires, affecté ou non, concédé ou non concédé;
c) les terres faisant l'objet de titre de propriété (titres fonciers) au nom
des personnes physiques ou morales de droit privé;
d) les terres détenues en vertu des coutumes;
223









Cor te
nO 8
BURKINA FASO
15
ZONES AG RO- ECOLOGIQUES
14
13
12
Il
LEGENDE
Zone sahelienne
1/3 500 000
2
Zone subsahelienne
35
a
35
70
105 km
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!
!
!
,
3
Zone Nord-soudanienne
4
Zone Sud-soudanienne

Limite des zones
agro- écologiques
Source: GUINKO s. ,1985
~ Zone d' étude
224
r
1
1
!
1

e) les terres appartenant à l'Etat et aux collectivités publiques
secondaires situées à l'étranger".
Article 3 : "Le Domaine Foncier National est de plein droit propriété
exclusive de l'Etat".
Article 4: "Les titres de propriété (titres fonciers) précédemment délivrés
à des particuliers (personnes physiques ou morales) sont annulés. Ils peuvent
être remplacés par des titres de jouissance".
Comment l'Etat peut-il dessaisir les populations rurales de leur droit foncier et
vouloir les organiser en pré-coopératives ou coopératives pour exploiter des terres
qu'il a aménagées; dans une stratégie d'auto-suffisance et de sécurité alimentaires?
L'aménagement des terres rurales est-il possible sans la participation des
paysans? Et la participation des paysans à l'aménagement et à la gestion des terres
rurales est-elle possible lorsque ceux-ci viennent d'être privés de leurs titres fonciers
que leur garantissait la coutume? Car l'ordonnance n085-404/CNR/PRES du 04 août
1985 portant application de la Réorganisation Agraire et Foncière au Burkina Faso
le souligne bien à ses articles 88 et 89 et plus loin articles 149, 150 et 151.
Article 88 : "Les terres de culture sont attribuées aux habitants du village
groupés ou non en associations ou coopératives en fonction de leur capacité
d'exploitation".
225

Article 89 : "L'attribution des terres de cultures est personnelle à
l'individu ou au groupement. En dehors du cas d'échange régulièrement
autorisé, aucune transaction n'est possible. L'attribution est prononcée pour
une durée indéterminée et confère à son titulaire un droit d'usage sur les terres
qui en font l'objet".
En ce qui concerne les terres rurales aménagées spécialement par l'Etat pour
rentabiliser davantélge l'agriculture cOlTlme les terres hydra-agricoles, les textes
précisent les conditions de leur exploitation.
Article 149 : "En dehors des cas de concession d'exploitation au profit
de personnes morales de droit privé, le droit à l'exploitation des terres
hydro-agricoles est réservé en priorité aux groupements, coopératives,
:.',
associations et fermes publiques".
Et l'article 150 de confirmer le droit exclusif de l'Etat sur les terres qu'il a
aménagées:
Article 150 : "Les exploitants des terres hydro-agricoles jouissent d'un
simple droit d'usage excluant toute forme de transaction sauf les cas autorisés
par les textes".
226









BURKINA FASO
15°
Carte
nO 9
SITUATION FORESTI ERE
14°
13°
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LEGENDE
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++++ +++++-+++++++
la
Provinces fortement déficitaires
++++++++k-+++++
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k;~
+ ++++++-:tl++++++
}Plo"'''' m"0010''''
Provinces
moyennement de'ficitaires
+ + + + ++ f.- + + + + T +
W
++++~++
I~~~I Provinces légèrement déficitaires
+
o Provinces à situation critique
35
a
35
70
105 km
!
!
!
1
!
gO
~ Zone d'étude
Source: GUINKO S.
1985
1/3 500 000
227
1
1
1
1
1

Il reste bien entendu que les exploitants des terres aménagées, notamment
de celles hydra-agricoles, restent soumis à un cabier de charge.
Article 151 : "La collectivité ou l'organe de gestion des ouvrages réalisés
pour l'exploitation des terres hydro-agricoles assume l'utilisation et l'entretien
de ces ouvrages directement ou par tout moyen juridique approprié et veille au
respect des clauses du cahier des charges. Elle adresse un rapport au moins
chaque année au Ministre chargé de l'Agriculture".
Toutefois, les terres rurales non aménagées, bien que soustraites à la gestion
coutumière des populations rurales ne donnent pas lieu à une taxe ou à une
redevance, conformément à la philosophie des us et coutumes mossi.
Article 632 : "L'occupation et l'exploitation des terres rurales non
. : .
aménagées dans le but de subvenir aux besoins de logement et de nourriture
de l'occupant et de sa famille ne donnent lieu à aucune taxe ou redevance. En
outre, l'exercice de ces mêmes droits n'est pas subordonné à l'obtention d'un
titre administratif sauf dans les cas suivants:
- règlement administratif d'un litige entre occupants de terres voisins
avec nécessité de délimitation des parcelles ;
- requête d'un occupant d'une terre du domaine foncier national.
Dans tous ces cas, les frais de délimitation et de délivrance des titres
d'occupation sont à la charge des requérants".
228

Carte nO 10
AMENAGEMENT DE ~ ESPACE RURAL

Ralla
auo go dougou
ECHELLE
o
25
50 km
Limite de province
Il
Chef lieu de province
Chef lieu de département
•o Village
Route bitumée
- Route non bitumée
o
Plaines amenagées
6
Plaine à etudier
if-
Barrage existant
B or rage en praje t
*
229

Quelques années après leur adoption officielle par les autorités politiques, les
textes de la Réorganisation Agraire et Foncière se heurtent aux us et coutumes
mossi dans leur application sur le terrain. Un bilan de l'application de la R.A.F. est
alors dressé en 1990 à travers la mise en oeuvre des projets de gestion des terroirs
villageois, ce qui a donné lieu à un Programme national de Gestion des Terroirs
Villageois (P.N.G.TV.).
Car si la R.A.F. définit les fondements juridiques, techniques, institutionnels et
organisationnels pour l'exploitation et la gestion adaptée de l'ensemble des
ressources de la terre par les communautés rurales organisées, elle n'en précise pas
les modalités pratiques d'application. D'où la nécessité d'élaborer un programme
national de gestion des terroirs villageois pour en assurer la mise en oeuvre sur le
terrain. Le P.NG.TV. répond à une double préoccupation:
Le développement socio-économique des populations rurales qui tirent
l'essentiel de leurs revenus de l'exploitation des ressources naturelles
(sols, eaux, forêts, faunes, pâturages ...).
Le maintien de l'équilibre écologique du milieu naturel.
L'approche à suivre pour exécuter ce programme national des terroirs
villageois est à la fois participative, multisectorielle et décentralisée au niveau du
village. Il s'agit de fournir aux communautés rurales, l'assistance, le cadre technique
et institutionnel nécessaires pour qu'elles prennent en charge la gestion des
ressources naturelles de leurs terroirs de même que leur développement socio-
économique.
230

Mais l'approche participative à la base déployée dans la gestion des terroirs
villageois intègre-t-elle les logiques et rationalités de tous les intervenants en milieu
rural aux intérêts parfois contradictoire pour espérer contribuer à la promotion socio-
économique du monde rural et à la préservation de l'environnement?
Si les migrants (agriculteurs ou éleveurs) sont d'emblée et de façon unanime
favorables à une telle démarche parce qu'elle leur facilite l'accès à la terre et aux
prises de décisions relatives à la gestion du capital foncier, en particulier les éleveurs,
les autochtones observent la méfiance et même manifestent par endroits une réaction
mitigée.
Des services techniques partenaires et des a.N.G. ont également adopté une
attitude de méfiance au sujet des projets de gestion des terroirs villageois qu'ils
jugent susceptibles de leur faire perdre certaines de leurs prérogatives sectorielles
et financières au lieu de leur fournir des moyens de travail et un appui administratif
et politique dans un cadre de concertation.
Peut-on seulement promouvoir le monde rural quels qu'en soient les auteurs
et les formes, sans lui garantir la sécurité foncière?
Il reste que les principales activités économiques exercées dans la région du
Centre-Nord sont l'agriculture et l'élevage:
L'agriculture est pratiquée par l'ensemble de la population des trois provinces.
Cette agriculture est dominée par les cultures vivrières où les systèmes de production
restent dans l'ensemble extensifs en raison de l'insuffisance de l'encadrement
231

technique et des moyens de production. Seules certaines cultures de rente comme
le coton, bénéficient d'un encadrement suivi et de moyens de production adéquats.
La production vivrière (sorgho, mil, maïs) couvre à peine en année normale,
les besoins alimentaires des populations. Pour la campagne agricole 1989-1990 par
exemple, la production vivrière nette était estimée à 115.755 tonnes, permettant de
couvrir 77% des besoins alimentaires exprimés.
L'élevage demeure un secteur important de l'économie du Centre-Nord, et
même du pays puisqu'il représente environ 10 % du PIS et plus de 30 % des
exportations officielles. Il revêt plusieurs formes dont les plus essentielles sont:
- l'élevage traditionnel transhumant ou nomade.
Cette forme est de loin la plus dominante et est pratiquée aussi bien au Bam,
au Sanmatenga qu'au Namentenga.
- l'élevage sédentaire qui tente une certaine intégration des activités d'élevage
à l'agriculture.
Pour l'année 1990, 627.000 ovins et 792.000 caprins avaient été recensés
dans la région du Centre-Nord qui occupe ainsi le second et le quatrième rang par
rapport aux autres régions économiques du pays.
232

8.1. Les autres activités économiques
Les activités industrielles sont très peu dèveloppées dans la région (quelques
petites unités industrielles comme la "Pierre à lécher pour bétail" au siège du eRPA
à Kaya, une unité de montage d'outils agricoles comme les charrues et les charrettes
à Kaya et Barsalogho peuvent être signalées).
L'artisanat représente un secteur très important de la vie socio-économique de
la région qui occupe le premier rang avec 19,72 % des artisans du pays exerçant la
profession d'artisan à titre d'activité principale ou secondaire. Le développement de
ce secteur reste limité par l'exiguïté du marché et dépend dans une large mesure de
la progression des activités liées au tourisme.
233

Tableau 31
Situation des activités artisanales par région (1985)
Variables
l'rovinccs
Activité primairc
Activité secondaire
Talai
Régions
Nombre
Nombre
Nombre
aflisans
(Yo
artisans
(%
artisans
{Yo
1. BOUCLE DU MOUHOUN
Kosso
2479
2,64
12.679
2,92
15.158
2,87
Mouhoun
5.189
5,52
9.665
2,22
14.854
2,81
Sourou
1.61 1
1,71
9.21 J
2,12
10822
2,05
TOTAL REGION 1
9279
9,87
31.555
7,26
40.834
7,73
2. CENTRE
Bazèga
550
0,59
7.302
1,68
7.852
1,49
GanZDurgou
307
0,33
17.644
4,06
17.951
3,40
Kadiogo
28.130
29,90
2.239
0,52
30,369
5,75
Nouhouri
259
0,28
588
0,14
847
0,16
Oubritenga
492
0,52
29 J 82
6,72
29.674
5,60
Zoundwéogo
182
0,19
6.259
1,44
6441
1,22
TOTAL REGION 2
29.920
31,81
63.214
14,56
93.134
17,62
3. CENTRE-EST
Boulgou
1.151
1,22
5.039
1,16
6.190
1,17
Kourienga
829
0,88
11.164
2,57
Il.993
2,27
TOTAL REGION 3
1.980
2,10
16.203
3,73
18.183
3,44
4. CENTRE-NORD
Barn
2.935
3,12
14.486
3,33
17.421
3,30
Namentenga
466
0,50
4.840
1,11
5,306
1,00
Sanmatenga
600
0,64
5.404
1,24
6.004
1,14
TOTAL REGION 4
4.001
4,26
24.730
5,68
28.731
5,44
5. CENTRE-OUEST
Boulkierndé
676
0,72
39.236
9,03
39.912
7,55
Sanguié
422
0,45
9.785
2,26
10.207
1,93
Sissili
1,372
1,46
52.748
12,14
54.120
10,24
TOTAL REGION 5
2.470
2,63
101.769
23,43
104.239
19,72
j
6. EST
Gnagna
1.047
1.11
21.076
4,85
22.123
4,19
Gourrna
1.622
1,72
6.761
l,56
8.383
l,59
Tapoa
803
0,85
9.376
2,16
10.179
1,93
TOTAL REGION 6
3472
3,68
37.213
8,57
40.685
7,71
7. NORD
Passoré
631
0,67
24.051
5.54
24.682
4,67
Yatenga
2.173
2,42
57.841
13.31
60.114
Il,37
TOTAL REGION 7
2.904
3,09
81.892
18.85
84.796
16,04
8 OUEST
Comoé
4075
4,33
3.955
0.91
8.030
1,52
Houct
16095
17, Il
9.019
2,08
25.114
4,75
Kénédougou
S03
0,85
4.514
1.04
5.317
1,01
TOTAL REGION 8
20.973
22,29
17.488
4.03
38.461
7,28
9 SAHEL
Olldalan
4.527
4,81
1.164
0.17
5.691
1,08
Séno
3.811
4,05
8.333
1.92
12.144
2,30
Sourn
8.561
9,10
12.911
2.97
21.472
4,06
TOTAL REGION 9
16.899
17.96
22408
5.16
39.307
7,44
10 SUD-OUEST
BOllgouriba
789
0.84
32.4 72
7.47
33.261
6.29
l'oni
1.384
1,47
5475
1,26
6.859
1,30
TOTAL REGION 10
2.173
2.31
37947
8.n
40.120
7,54
1
TOTAL BURKINA FASO
94.071
100.00
434419
100.00
528490
100,00
Source
Ministère de la Promotion Economique
Plan Directeur pour la Promotion de
l'Artisanat du Burkina Faso, mai 1990.
234

Photo n° 17
Aménagement de l'aval du barrage de Lauda (Sanmatenga) pour la rizi-
culture qui se développe rapidement.
235

Les maigres potentialités économiques et les conditions agro-c1imatiques peu
favorables sont les principales contraintes au développement économique de la région
du Centre-Nord. Il en résulte une forte pression humaine sur le milieu et les
ressources naturelles, aggravant la dégradation de l'environnement physique et
provoquant divers mouvements migratoires.
236

50
4 0
30
2 0
10
0 0
0
1
2 0
BURKINA FASO
15
Corte
nO Il
DISPONIBILITE EN TERRES AGRICOLES
14
13
12
11 0
1/3 500 000
35
a
35
70
I05km
!
!
!
!
!
LEGENDE
la
o
Terre encore disponible
rzJ Zone à foible disponibilité en terre
~ Forte pression foncière, dégrodotion climotique
9 0
~ Dé:grodototion climotique et surpôturoge
Source: Cellule Nationale du PNGTV
1',',·:,1· Zone d'élude
237









Carte
nOl2
BURKINA FASO
15
FLUX MIGRATOIRE ET TRANSHUMANCE
14
13
12
11°
LEGENDE
~ Zone d' ét ude
10
DIIIJ Forte migration
illID } Zone d'accueil
o
o Faible migration
o
Zone de départ
35
0
35
70
105 km
l
!
!
!
!
Homme
9

Source: Cellule Nalionale du PNGTV 1985
-. Bétail
1/3 500000
238

Depuis la période coloniale à nos jours l'Etat est le principal artisan du
développement au Burkina Faso et semble à présent connaître des limites en même
temps qu'il revèle ses faiblesses.
A travers des aides diverses et multiformes tant bilatérales que multilatérales,
de nombreuses opérations de développement ont été initiées un peu partout à travers
le pays. Les efforts de l'Etat ont été relayés par ceux des Organisations Non
Gouvernementales (ONG) qui multiplient les actions de développement dans les
régions particulièrement pauvres comme celle du Centre-Nord, en faveur surtout des
populations rurales.
Ainsi l'Etat et les ONG ont depuis toujours cherché les voies et moyens
d'accroître la production agricole, de maintenir et d'approfondir des liens structurels
avec la paysannerie. En 1965, la volonté de l'Etat de mieux coordonner les
interventions sur le secteur agricole a abouti
à
la
création
de structures
administratives dénommées Organismes Régionaux de Développement (ORO) au
nombre de onze (11) couvrant l'ensemble du territoire national. La mission principale
des ORO consistait à :
- former les cadres ruraux:
- vulgariser les nouvelles techniques agricoles nouvellement introduites
en milieu paysan;
- accroître la production agricole.
239

Des erreurs méthodologiques dans l'approche du monde paysan et d'autres
facteurs à la fois endogènes et exogènes ont conduit à l'échec de l'action des ORO,
aujourd'hui remplacés par des Centres Régionaux de Production agro-Pastorale
(CRPA). L'échec des ex-G.R.D. a entraîné des conséquences socio-économiques et
sanitaires particulièrement graves au niveau des paysans de la région qui y avaient
cependant fondé tout leur espoir.
Non seulement leur situation économique ne s'est guère améliorée, mais
encore leur état de santé ne cesse de se détériorer de façon continue. Précisément,
c'est le volet sanitaire de l'étude que nous voudrions à présent aborder.
Comment se présente la situation sanitaire dans la région du Centre-Nord?
Quelles infrastructures sanitaires y sont installées et quelles prestations de service
de santé y sont offertes?
240

8.2. Les activités socio-sanitaires
8.2.1. Inventaire des
infrastructures socio-sanitaires dans
le
Centre-Nord
Tableau 32 : Infrastructures socio-sanitaires de la province du BAM
Nature des Infrastructures
Nombre
Centres médicaux (CM)
2
Centres de santé et de Promotion Sociale
complets (dispensaire + maternité = CSPS)
5
Maternités simples
4
Centre social
1
Postes de Santé Primaire (PSP)
89
Centre de récupération et d'éducation
nutritionnelle (CREN)
1
Tableau 33 :
Personnel de santé travaillant dans les formations
sanitaires de la Province du BAM
Qualifications professionnelles
Effectif
Médecin
1
Infirmiers d'Etat
6
Infirmiers Brevetés Spécialistes
1
Infirmiers Brevetés
13
Sages femmes
3
Accoucheuses auxiliaires
13
Agents Itinérants
3
Pharmacien
1
Total
41
241

Tableau 34 : Infrastructures socio-sanitaires dans le Namentenga
Nature des Infrastructures
Nombre
Centres médicaux (CM)
2
Centres de santé et de Promotion Sociale (CSP)
5
Postes de Santé Primaire (PSP)
39
Tableau 35 :
Personnel de santé travaillant dans les formations
sanitaire de la Province du Namentenga
Qualifications professionnelles
Effectif
1
Médecin
Infirmiers d'Etat
2
Infirmiers Brevetés
9
Sages femmes
2
Accoucheuses auxiliaires
7
Agents Itinérants
2
Pharmacien
1
242

Tableau 36 :
Infrastructures
socio-sanitaires
de
la
province
du
Sanmatenga
Nature des Infrastructures
Nombre
Centre médical
1
Centres de santé et de promotion sociale
9
(CSP)
Dispensaires simples
6
Maternités simples
5
Postes de santé primaires (PSP)
67
Tableau 37 :
Personnel de santé travaillant dans les formations
sanitaires de la province
Qualification professionnelle
Effectif
Médecins
2
Infirmiers d'Etat
10
Sages femmes
3
Infirmiers Brevetés
16
Accoucheuses Auxiliaires
21
Agents Itinérants de Santé
7
Infirmiers Brevetés spécialisés
5
Assistant Assainissement
1
Agents spécialisés
2
Pharmacien
1
243

8.2.2. Les activités socio-sanitaires dans le Barn
Au Bam, les activités socio-sanitaires sont exercées essentiellement par 4
ONG.
1)
Le "Projet pour l'Egalité d'Accès des Femmes et des Jeunes Filles à
l'Education en ex-Haute-Volta", financé par l'UNESCO qui a démarré
ses activités dans le Bam en 1978 vise à promouvoir l'éducation des
femmes et des jeunes filles. Car "la situation des femmes et jeunes
filles mal éduquées entraîne comme conséquence la malnutrition,
une forte mortalité infantile, le manque d'hygiène responsable de
nombreuses maladies, qui constituent un frein au développement
économique et social" (selon un document du projet).
Les principales activités du projet étaient constituées par:
- la formation des femmes guides (animatrices villageoises) et accoucheuses
villageoises,
- l'alphabétisation fonctionnelle,
- l'économie familiale et l'éducation sanitaire,
- une technologie appropriée pour soulager le travail des femmes,
- des activités lucratives pour les femmes.
244

En 1978, le projet a été confié au Service de l'Education et de la Participation
de la Femme au Développement (SEPFED) qui reléve du Ministère chargé des
Affaires Sociales.
Une évaluation du projet en 1980 par Ellen TAYLOR a conclu que le projet
souffre d'une grande précipitation dans le démarrage de ses activités sans une
sensibilisation adéquate et suffisante préalable. Par ailleurs, l'afflux de dons en
espèces et en nature surtout (moulins, charrues ... ) a détruit les initiatives locales en
matière d'auto-promotion économique et sanitaire.
2)
Le "Programme Elargi de Vaccination (PEV) initié dans le Bam
en janvier 1984. 1/ s'agit d'un programme de Coopération sur le
0,
plan sanitaire entre le Ministère Burkinabè chargé de la santé et
trois ONG qui sont:
- "Stichting Redt de Kinderen"(SRK) chargé du financement;
- l'Association pour la Promotion de la Médecine Préventive (APMP) qui
apporte un appui technique;
- et l'Organisation des Volontaires des Pays-Bas (OVPB) qui accorde
également une assistance technique et est chargée de la gestion du
programme.
245

L'objectif du programme est de diminuer la mortalité infantile et juvénile par
une vaccination contre les sept (7) maladies suivantes:
- la rougeole
- la fièvre jaune,
- la tuberculose
- la diphtérie
- le tétanos
- la coqueluche
- et la poliomyélite
3)
Le Plan de Parrainage International des Lacs (PPI.L) est une ONG
américaine spécialisée dans les problèmes du développement avec un
accent particulier s.ur les activités des femmes. L'intervention de cette
ONG a débuté au Bam en 1982 et dans le domaine précis de la santé,
le PPIL forme des femmes et jeunes filles à la santé maternelle et
infantile à la protection de l'environnement et à la gestion des stocks
alimentaires au niveau des banques de céréales créées dans presque
tous les villages.
4)
Les "Six S" sont une ONG locale chargée de la promotion du monde
rural à travers une meilleure organisation des populations rurales (les
groupements villageois et les coopératives") et de l'amélioration de
l'état de santé de l'ensemble des communautés rurales. Cette ONG
intervient dans le domaine socio-sanitaire par la formation
de
groupements masculins et féminins dans les domaines ci-après:
246

- L'hygiène individuelle et collective,
- L'alimentation et à l'entretien des enfants,
- Le filtrage de l'eau,
- La construction de latrines etc...
8.2.3. Les activités socio-sanitaires dans le Namentenga
Programmation et Exécution de Développement Intégré (PEDI) dans le
domaine des activités socio-sanitaires organise des cliniques mobiles de soins de
Santé Maternelle et Infantile (SMI) dans les villages avec une fréquence d'une fois
par mois. Cette activité a été étendue depuis quelques années à la formation des
femmes et jeunes filles à l'hygiène de la santé individuelle et collective.
Le Projet Développement des Services de Santé (PDSS) dont l'objectif
consiste à promouvoir la santé communautaire à travers l'acquisition de nouveaux
équipements sanitaires et l'amélioration des services de santé.
Le Projet BKF/84/DD1 initié à partir de 1984 se fixe comme objectif d'améliorer
les infrastructures sanitaires existantes en vue de leur meilleur fonctionnement.
8.2.4. Les activités socio-sanitaires dans le Sanmatenga
Plusieurs ONG mènent des activités socio-sanitaires pour promouvoir la santé
individuelle et collective au Sanmatenga, en appui ou en complément à celles initiées
par l'Etat. Ainsi, une série d'actions relatives à l'amélioration de la santé des
populations rurales mossi se développent et s'intensifient sous l'impulsion des ONG.
247

Par exemple, le PEDI, ONG placée sous la tutelle du Ministère chargé du Plan,
apporte surtout un soutien technique et financier aux projets de développement
formulés par les services provinciaux du gouvernement, en particulier dans le
domaine de l'agriculture et de l'élevage; pour ce qui touche la santé, le PEDI apporte
un appui financier aux formations sanitaires pour une bonne exécution de leurs
activités.
Le PPIK a démarré ses activités en 1976 avec pour mission le développement
intégré de la région. Les activités de cette ONG touchent surtout le développement
rural (agriculture, hydraulique, santé, culture etc.). Dans le domaine socio-sanitaire,
le PPIK forme les femmes et jeunes filles organisées en groupements à l'éducation
sanitaire et à l'exercice d'activités lucratives (petit élevage, champ collectif, tissage,
foyers améliorés, jardinage etc.).
L'ADRK est une ONG qui s'occupe principalement de la mise en oeuvre des
Regroupements de Sections d'Epargne et de Crédit (RSEC) et des Sections
d'Epargne et de Crédit (SEC) pour faciliter les différentes activités qui contribuent à
l'autosuffisance
alimentaire
au
niveau
des
paysans
(banques
de céréales,
équipements de traction animale, engrais etc.). Dans le domaine socio-sanitaire,
l'ADRK contribue financièrement à la construction, à l'équipement de certaines
formations sanitaires (pharmacies villageoises, Centres de Santé et de Promotion
Sociale (CSPS) etc.).
248

O.N.G. ET DEVELOPPEMENT DANS LE CENTRE-
NORD
VERS UNE NOUVELLE FORME DE
COOPERATION INTERNATIONALE?
Les O.N.G. semblent se disputer dans le but de s'approprier l'espace rural
mossi dans le Centre-Nord au point d'en constituer un véritable enjeu socio-
économique et politique régional: leur nombre ne cesse de croître et leurs domaines
d'intervention se diversifier, ce qui leur accorde une importance institutionnelle
grandissante. Leurs stratégies et techniques d'action de proximité sur le terrain ont
fortement marqué leurs rapports aux populations locales et particulièrement les
couches sociales-cibles, façonnant de la sorte ou modifiant dans tous les cas, le
mode de représentations et des valeurs sociales, économiques et culturelles de la
société rurale mossi dans ses divers échanges avec le monde extérieur, notamment
avec l'occident. Précisément, c'est l'ensemble des changements consécutifs aux
interventions de développement en milieu rural mossi, ou plutôt leur impact que nous
voudrions ici appréhender. Car comme le fait remarquer Jean-Pierre Olivier de
Sardan "une véritable «évalu",tion»
d'une opération de développement ne·'
peut être simplement comptable ou technique. Elle exige au contraire une
analyse des modes d'usage de l'opération de développement par ses
destinataires, comme des modes de sa mise en oeuvre par ses opérateurs..6ü .
L'idée
est désormais
admise
par les
Mossi
du
Centre-Nord
: leur
"développement" se construit avec les ONG, à travers des micro-réalisations qui
contribuent à leur bien-être.
Faut-il
alors
conclure
avec
Jean-Pierre
Olivier
de
Sardan,
que
le
"développement est un "champ politique local" ?
60
Jean-Pierre Olivier de Sardan, APAD nO 6, Déc. 1993, Marseille, P. 12.
249

Pour Jean-Pierre Olivier de Sardan, le "développement, c'est d'abord une
réalité. 1\\ y a développement dès lors qu'il y a des développeurs (occidentaux
ou nationaux, institutionnels ou ONG), dès lors que des interventions
volontaires d'origine extérieures à un milieu - cible visent à transformer en
. partie ce milieu - cible, en général par l'introduction de technologies nouvelles
et/ou la transformation de certains comportements-économiques (et au moins
indirectement non économiques). Que le développement "marche" ou ne
"marche pas", qu'il soit positif ou négatif, intéressé ou désintéressé, il existe,
car existe tout un ensemble de pratiques sociales qui désigne ce mot"61.
Mais il Y a plus: "le développement fait intervenir de multiples acteurs
sociaux du côté des "groupes-cibles" comme du côté des institutions de
développement. Leurs statuts professionnels, leurs normes d'action, leurs
compétences,
leurs stratégies diffèrent considérablement.
Leurs enjeux
respectifs ne sont pas les mêmes. Le développement "sur le terrain", c'est la
résultante de ces multiples interactions, qu'aucun modèle économique en
laboratoire ne peut décrire a priori, mais dont la sociologie et l'ethnologie
peuvent tenter de découvrir les modalités in situ .... A cet égard, le
développement est bien un lieu d'affrontement "politique"62.
Certes les opérations de développement donnent toujours lieu à des
confrontations de stratégies sur le terrain entre plusieurs acteurs aux intérêts plus ou
moins compatibles, dans le but de s'en approprier. Mais quelles sont les références
sociales auxquelles renvoient toutes ces stratégies ? Les diverses réactions des
populations rurales face aux opérations de développement ne sont-elles pas une
traduction des inégalités sociales en milieu rural mossi ?
"L'usage, à propos des opportunités offertes par un projet, que font les
acteurs visibles comme les acteurs invisibles de leurs capacités respectives
(actives ou passives, d'action ou de nuisance, cachées ou publiques), c'est cela
même qui dessine une micro-politique du développement. Si l'on peut parler de
61 Jean-Pierre Olivier de Sardan APAD nO 6 Déc. 1993, Marseille p. 11.
62 Jean-Pierre Olivier de Sardan, APAD, nO 6 Déc. 1993, Marseille, p. 12.
250

"politique", c'est qu'il s'agit bien d'une confrontation et d'une lutte d'influence
entre l'ensemble des acteurs sociaux impliqués (du côté des opérateurs de
développement comme du côté des populations cibles), autour des avantages
et
inconvénients
relatifs
(directs
et
indirects)
que
toute
action
de
développement procure"53.
Les interventions de développement constituent donc un cadre d'expression
politique dont l'intérêt n'échappe ni aux développeurs ni aux développés. Peut-on en
conclure que les ONG qui multiplient les interventions de développement rural
puissent être considérées comme les vecteurs d'une nouvelle forme de coopération
ou d'aide à la coopération internationale?
Le contexte actuel de libéralisation économique tous azimuts semble offrir aux
ONG l'opportunité de se substituer,
du
moins en partie,
à l'aide publique
internationale souvent mal
utilisée par
les
Etats
bénéficiaires.
En
effet,
le
développement est aujourd'hui perçu "à la fois comme un marché et une arène. C'est
un marché où circulent des biens, des services, des carrières ... " s'agit d'y vendre
des projets, des slogans, des politiques, du hardware, du software ... Et comme on
l'a souligné, une arène où divers acteurs sociaux ont des enjeux de pouvoir,
d'influence, de prestige, de notoriété, de contrôle"54.
Les ONG, par leurs actions, sont en train d'opérer des modifications des
conceptions et théories économiques du développement et peut être contribuent-elles
ainsi à créer de nouveaux modèles de développement susceptibles de mieux
répondre aux besoins et attentes des populations locales; et les nombreux succès
significatifs qu'elles obtiennent dans divers domaines d'activités trouvent un écho
largement favorable
non
seulement
au
niveau
des
Institutions
Financières
Internationales (Banque Mondiale, Fonds Monétaire Internation), mais également
auprès des organismes internationaux de développement et des Etats, sans qu'on
ne puisse cependant avancer que les ONG cherchent à se substituer à la coopération
bi ou multilatérale d'aide au développement.
53 Jean-Pierre Olivier de Sardan, APAD nO 6 Déc. 1993, Marseille, 1993, p. 13.
54 Jean-Pierre Olivier de Sardan, APAD, nO 6 Déc. 1993, Marseille 1993, p. 15.
251

Tableau 38
Répartition des ONG par région (1990)
Variables
Provinces
ONG
ONG Intervenant
Siégant
Régions
1. BOUCLE DU MOUHOUN
Kosso
-
17
Mouhoun
-
22
Sourou
4
23
TOTAL REGION
4
67
2. CENTRE
Bazèga
1
33
Ganzourgou
-
18
Kadiogo
63
47
Nouhouri
-
18
Oubritenga
2
30
Zoundwéogo
1
10
TOTAL REGION
67
136
3. CENTRE-EST
Boulgou
3
27
Kourienga
2
J 7
TOTAL REGION
5
44
4. CENTRE-NORD
Bam
2
28
Namentenga
1
21
Sanmatenga
2
23
TOTAL REGION
5
72
5. CENTRE-OUEST
Boulkiemdé
4
33
Sanguié
1
26
Sissili
2
23
TOTAL REGION
7
82
6. EST
Gnagna
1
23
Gourma
2
26
Tapoa
-
17
TOTAL REGION
3
66
1
7. NORD
Passoré
1
26
Yatenga
6
42
TOTAL REGION
7
68
8. OUEST
Comoé
-
23
Houet
9
35
Kénédougou
-
15
TOTAL REGION
9
73
9. SAHEL
Oudalan
2
18
Séno
1
20
SOUIll
1
25
1
TOTAL REGION
4
63
10. SUD-OUEST
13ougouriba
-
22
Poni
1
19
TOTAL REGION
1
41
BURKINA FASO
112
-
Source
BSONG & SPONG ; inventaire des Organisations Non Gouvernementales
au Burkina Faso (ONG) Mai 1990.
252

Tableau 39 : Etat des dépenses budgétaires par région 1986
Dépenses
Dépenses budgétaires
% Dépenses
millions F CFA
totales
Régions
1. BOUCLE DU MOUHOUN
155
6,9
2. CENTRE
615
27,4
3. CENTRE-EST
98
4,4
4. CENTRE- NORD
186
8,3
5. CENTRE-OUEST
147
6,6
6. EST
85
3,8
7. NORD
198
8,9
8. OUEST
591
26,4
9. SAHEL
86
3,8
10. SUD-OUEST
75
3,4
TOTAL
2.236
100,00
Source: rapports de gestion des provinces, 1988.
Somme des budgets communaux et provinciaux.
253

Tableau 40 : Répartition des agents publics par région, 1988
Répartition des agents
% par rapport à
Régions
publics par région
l'effectif total
des agents
publics
1. BOUCLE DU MOUHOUN
2.059
6,4
2. CENTRE
15.190
47,4
3. CENTRE-EST
1.494
4,7
4. CENTRE- NORD
1.217
3,8
5. CENTRE-OUEST
2.066
6,4
6. EST
1.354
4,2
7. NORD
1.674
5,2
8. OUEST
4.887
15,3
9. SAHEL
758
2,4
10. SUD-OUEST
1.341
4,2
TOTAL
32.040
100
Source: CENATRIN, 1988.
254

Tableau 41 : Situation du réseau routier des régions, 1989
Dépenses
% Réseau
Superficie
Densité
Régions
budgétaires "
Burkina
(km 2 f'
desserte
millions F CFA
Faso
routière (1)
1. BOUCLE DU MOUHOUN
1.287
14,7
33.106
0,04
2. CENTRE
937
10,7
22.558
0,04
3. CENTRE-EST
422
4,8
10.660
0,04
4. CENTRE- NORD
262
3
20.985
0,01
5. CENTRE-OUEST
1.346
15,4
23.039
0,06
6. EST
906
10,4
49.993
0,02
7. NORD
757
8,7
16.370
0,05
8. OUEST
1.389
15,9
43.172
0,03
9. SAHEL
545
6,2
36.869
0,01
10. SUD-OUEST
888
10,2
17.448
0,05
TOTAL
8.739
100r
274.200
0,03
"
Source:
M. Equipement : étude de faisabilité du Volet Routes Projet Sectoriel
Transport; novembre 1989. 1GB: Carte routière du Burkina Faso.
Somme des budgets communaux et provinciaux.
Tout type confondu : routes bitumées (RB) ; routes en terre ordinaires (RTO)
pistes
améliorées type A (PA) ; piste améliorées type B (PB).
255

Tableau 42 : Répartition des entreprises58 par région, 1988
Dépenses
Nombre d'entreprises
% Nombre total
d'entreprises
Régions
1. BOUCLE DU MOUHOUN
12
0,8
2. CENTRE
1.139
77,9
3. CENTRE-EST
26
1,8
4. CENTRE- NORD
18
1,2
5. CENTRE-OUEST
45
3,1
6. EST
7
0,5
7. NORD
24
1,6
8. OUEST
178
12,2
9. SAHEL
6
0,4
10. SUD-OUEST
8
0,5
TOTAL
1.463
100
Source: INSO : Annuaire Statistique du Burkina Faso; 1988.
58
Tout type confondu (Entreprises industrielles, commerciales, agro-pastorales, artisanales ... )
256
!

Tableau 43 : Classification des régions69 selon le degré d'équipement.
Régions
Notes (N) obtenues sur 70
Degré d'équipement
1. BOUCLE DU MOUHOUN
N 40
Bien équipées
2. CENTRE
3. CENTRE-EST
4. CENTRE- NORD
Moyennement équipées
5. CENTRE-OUEST
30 N 40
6. EST
7. NORD
8. OUEST
9. SAHEL
N 30
Faiblement équipées
10. SUD-OUEST
8
69
Tout
type
confondu
(Entreprises
industrielles,
commerciales,
agro-pastorales,
artisanales ... )
257

La littérature consacrée au sujet et les expériences propres
de terrain ont permis de situer les avantages théoriques des
interventions de développement en milieu rural.
Quelle
méthodologie
d'approche
des
interventions
de
développ~mentpour améliorer à terme les conditions de vie et de
travail des populations rurales et accroître leur autonomie d'action
tout
en
préservant
leurs
traits
socio-culturels
et
leur
environnement?
258

CHAPITRE V: APPROCHE HISTORIQUE DES EXPERIENCES DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI DU
CENTRE-NORD: BILAN ET ENSEIGNEMENTS.
9. HISTOIRE ECONOMIQUE DE LA REGION DU CENTRE-NORD
La situation socio-économique de la région du Centre-Nord ne peut-être
comprise qu'à travers celle plus générale du pays. J.Y. MARCHAL la caractérise
ainsi:
"L'état de sous-développement que connaît le
Burkina
Faso (ex
Haute-Volta) s'explique dans une large mesure par sa dépendance vis-à-vis du
système d'économie libérale dans lequel il a été intégré depuis le début du
siècle"70 .

La période coloniale (1896-1960).
;Pour J.Y. MARCHAL,
la politique de développement engagée par le
colonisateur a échoué parce qu'elle était fondée sur une fausse théorie économique:
"Les colonisateurs ... ont fait l'association malencontreuse entre fortes
densités de peuplement et possibilités de développement, en se rattachant à
l'idée que la pression d'une population sur les ressources apprend à cette
population le travail intensif et lui apporte la stimulation pour innover, effectuer
des améliorations agricoles et augmenter ainsi la productivité"71.
70
MARCHAL (J.Y.), Brève histoire du développement économique de la Haute-Volta (Economie
et Humanisme) dans "Problèmes Economiques". La Documentation française n01804 du 30
décembre 1982 ; p. 23.
71
MARCHAL (J.Y.) op. cit. p. 24.
N.B: est chercheur à l'ORSTOM.
259

D'où la mobilisation des populations des régions du Centre et du Centre-Nord
sur la base du pouvoir politique traditionnel.
Mais si pour l'ensemble des populations rurales, en particulier pour celles de
l'Ouest et du Sud-Ouest du pays, l'effort de développement a été axé sur la culture
cotonnière sous l'instigation coloniale, celles du Centre-Nord devaient satisfaire aux
recrutements militaires pour les champs de bataille en France. Le principe colonial
du développement étant celui auto-centré, il revenait à chaque région de trouver les
ressources nécessaires à son fonctionnement à travers l'imposition fiscale réclamée
d'abord en nature (animaux, céréales ... ) ou en monnaie locale, les "cauris", puis en
monnaie française à partir de 1903.
L'imposition fiscale exigée aux paysans et dont le montant augmentait d'année
,c
en année, la succession de plusieurs année!; de sécheresse et de famine
contribuaient à les appauvrir davantage. La contre-partie économique escomptée par
l'administration coloniale après avoir mobilisé le pays mossi sur les cultures vivrières
et de rente et investi d'énormes capitaux dans les infrastructures de base (routes,
ponts, dispensaires) fut si faible que le pays tout entier fut déclaré colonie "non
viable". A tout le moins peut-il apporter de la main-d'oeuvre par ailleurs bon marché
pour favoriser le développement des autres colonies françaises de l'Afrique de
l'Ouest. C'est ce qui justifie le démantèlement en 1932 de l'ex Haute-Volta au
bénéfice du Niger, du Soudan (actuel Mali) et de la Côte-d'Ivoire (qui à elle seule
occupera 56 % du territoire dont le pays mossi). Le pays ne sera rétabli dans ses
limites territoriales actuelles et reconnu comme territoire autonome que le 4
septembre 1947.
260


1932-1947: "LE RESERVOIR DE MAIN-D'OEUVRE"
"A partir de 1932, la Haute-Volta (Burkina Faso d'aujourd'hui) peut être
considérée comme réservoir de main-d'oeuvre des colonies voisines, Soudan
(Mali) et surtout Côte-d'Ivoire ... 5 à 6.000 travailleurs partent chaque année vers
le Soudan, voire le Sénégal; 4 à 7.000 vers les chantiers ivoiriens... Beaucoup
de jeunes gens et des familles entières fuient le pays pour s'établir en Gold
Coast (Ghana) où l'administration britannique est moins sévère et où les
migrants peuvent trouver du travail dans des plantations de café et de cacao
tenues par des Africains... En 1940, plus de 9.000 travailleurs sont recrutés en
Haute-Côte-d'Ivoire en plus des 10.000 soldats enrôlés qui sont utilisés sur
place comme main-d'oeuvre locale. L'effectif s'élève à 15.000 travailleurs en
1941 et 3,6.300 en 1942... ,,72. Quelques années avant l'Indépendance du pays
(1960) comme pour remercier les "Voltaïques" (Burkinabé) de leur contribution à
l'essor économique des colonies voisines, l'administration coloniale décida d'y
promouvoir l'agriculture et l'élevage à travers la construction de plusieurs barrages,
la création de fermes-pilotes, le creusement de puits villageois et pastoraux,
l'introduction et la vulgarisation de la culture attelée, la lutte contre l'érosion et la
dégradation de l'environnement de façon générale. Comment sont conduites toutes
ces interventions sur le terrain? Quelle est la gestion des différentes phases qui en
constituent le déroulement jusqu'à l'évaluation de leur impact sur les différents
secteurs et domaines de la vie individuelle et collective des populations concernées?
72
MARCHAL (J.Y.), op. ciL p. 26.
261

Est-il
possible
de placer
l'ensemble
de
ces
interventions
dans
le
champ
épistémologique des sciences sociales et humaines par rapport à l'évolution de la
dynammique sociale et de ses répercussion sur le procès de production du savoir,
en particulier du savoir sociologique?
Malgré l'encadrement technique de l'agriculture et de l'élevage, en particulier
grâce aux équipements hydrauliques et aux nouvelles techniques culturales
(charrues), malgré la relative bonne pluviométrie observée depuis 1945, les
rendements agricoles demeurent médiocres. Le mouvement migratoire amorcé sous
la contrainte coloniale et devenu à présent libre se poursuit et s'intensifie.
"La Haute-Volta se vide lentement de sa force de travail et devient le pays
où il n'y a rien à vendre et rien à acheter"73.
9.1.
L'aide au développement après l'indépendance de 1960
quel
développement?
La situation économique catastrophique du pays conduit les sociétés
d'intervention basées sur place (Compagnie Française des Textiles: CFDT, Bureau
pour le Développement de la Production Agricole: BDPA, Société d'Aide Technique
et Commerciale: SATEC) à apporter une assistance technique plus accrue au monde
rural mais pour développer des cultures de rente (coton, arachide) et écouler des
produits d'exportation (engrais, charrues, ciment...).
73 MARCHAL (J.Y.), op. cit. p. 27.
262

Une fois encore, cette politique de développement engagée par les autorités
politiques de l'époque avec l'appui de l'assistance technique étrangére (française
notamment) ne connut guère de succès. Certes, l'émigration fut quelque peu ralentie,
mais, "l'importante action de développement fondée surtout sur la traction
attelée au service - une fois encore - des cultures commerciales (coton,
arachide) n'a pas permis de faire accéder les paysans à un niveau d'aisance
économique sensiblement plus élevé que celui des dernières années de la
colonisation ... " 74 .
Mais alors quelles perspectives socio-économiques pour le Burkina Faso à
travers la succession de régimes militaires qui tous proclament leur foi au monde
rural sur lequel, ils entendent fonder.le développement économique du pays grâce
v'
à une meilleure organisation et un meilleur encadrement technique des paysans pour
atteindre l'auto-suffisance et la sécurité alimentaires?
A cet égard le discours programme de Saye ZERBO, Président de la
République de 1980 à 1982 est très explicite:
74
REMY (G.), cité par MARCHAL (J.Y.) op. cit. p. 28.
263

" ... Le secteur rural peut et doit devenir le levier de notre développement,
le point de départ de notre décollage économique, car l'augmentation de la
production et de la productivité dans ce secteur devrait générer en amont et en
aval une chaîne d'unités de production, pépinières d'emplois ..." 75 .
Les Mossi de la région du Centre-Nord sont des cultivateurs sédentaires.
Comme dans bien de régions en Afrique sub-saharienne, le système agraire
développé originellement par ces populations reposait sur une grande consommation
de l'espace avec comme seul moyen véritablement efficace de régénérer les terres,
la jachère longue.
Or, l'accroissement sensible de la population a presque co'(ncidé avec un
élargissement des espaces cultivés, l'apparition d'une aire de cultures permanentes
autour des installations humaines, la disparition de la jachère sans que ne leur soient
substituées de nouvelles formes de régénération des sols.
Le territoire et les terroirs comme lieu des activités économiques des
populations sont soumis à des règles qui font partie de celles de l'organisation de ces
activités. L'appartenance au groupe est une condition première de l'accès à cet
espace et permet d'établir la base des relations entre espace et organisation sociale.
75
Carrefour africain n0713 publiant le discours Programme du Comité Militaire de Redressement
pour le Progrès National (CMRPN) dont le Président était Saye ZERBO à l'occasion du 1er Mai
1981.
N.B. Pour plus de détails sur les migrations volta'(ques, voire G. REMY: Enquête sur les
mouvements de population à partir du pays mossi (Haute-Volta) ORSTOM. Ministère du Travail
de la Haute-Volta (Convention FAC). Rapport de synthèse 2 voL, 1977.
264

Dès lors, les pouvoirs publics ou les Organisations Non Gouvernementales qui
interviennent sur le terrain à travers des plans de développement, devraient pour
réduire les disparités régionales, procéder à l'analyse des trois espaces ci-dessous:
- l'espace rural qui a une vocation agricole et/ou pastorale et qui
renferme ses potentialités mais comporte aussi ses limites et ses
contraintes;
- l'espace économique qui est celui où s'exercent les diverses activités
économiques;
- l'espace technico-administratif caractérisé d'une part par des objectifs
économiques et sociaux, d'autre part par l'organisation de la région en
entités administratives et techniques.
D'une façon générale, les opérations de développement rural ne prennent pas
en compte formellement l'espace physique en tant que tel, sauf dans des cas
particuliers où sa maîtrise est une nécessité première pour l'exécution de l'opération;
c'est le cas par exemple des aménagements hydro-agricoles et de certains projets
pastoraux. A l'exception de ces cas, l'espace n'est pas explicitement reconnu comme
un élément décisif ou contraignant dans la structure des opérations classiques de
développement. Rares aussi sont les opérations de développement qui au niveau de
leurs buts et objectifs préconisent la référence à l'espace physique comme élément
auquel doit être attachée une stratégie particulière avec des moyens correspondants
à mettre en oeuvre.
265

Or, la dynamique de l'occupation de l'espace reste liée à celle des systémes
socio-économiques et peut être infléchie ou renforcée par des opérations de
développement qui s'y déroulent.
La dégradation accélérée du couvert arbustif, sous l'effet conjugué d'une forte
charge de population (densité supérieure à 25 au km 2 ) et du bétail ainsi que par des
cycles de sécheresse n'a fait qu'accroître l'intensité du phénomène durant les
dernières décennies.
La croissance démographique est inégalement répartie et engendre des seuils
critiques d'exploitation dans les trois (3) Provinces du Bam, du Namentenga et du
Sanmatenga. C'est ainsi que le coefficient d'intensité culturale (terres cultivées/terres
agricoles) atteint 56 % dans le CRPA du Centre-Nord (qui englobe les trois (3)
Provinces). La sur-exploitation du même milieu entraîne la dégradation des sols
(perte
en
terre,
baisse
de
fertilité ... ),' compromettant
les
perspectives
de
développement agricole. Comment utiliser l'aide internationale reçue pour à la fois
conserver et mieux améliorer les ressources en terre et en eau et en accroître la
productivité pour améliorer l'existence des populations rurales?
L'aide au développement qui s'est institutionnalisée depuis les indépendances
constitue aujourd'hui un élément stratégique de régulation des relations entre les
pays développés et les pays en voie de développement. Elle revêt en tout cas une
importance capitale pour le Burkina
Faso et ses partenaires bilatéraux et
multilatéraux à en juger par le volume sans cesse en croissance depuis deux
décennies.
266

Mais comment expliquer le paradoxe de l'aide au développement en
croissance en volume et qui se diversifie par rapport à la dégradation de la situation
socio-économique et sanitaire des populations rurales burkinabé et mossi en
particulier?
L'aide au développement peut-elle constituer un élément déterminant, voire
indispensable pour sortir les populations rurales mossi du Centre-Nord de la situation
de l'impasse dans laquelle elles se trouvent plongées depuis trois décennies ou au
contraire apparaît-elle comme une nouvelle stratégie de domination des pays
développés sur le Burkina Faso?
D'une manière générale, les interventions de développement appliquées à la
région du Centre-Nord n'aident pas les populations à se développer. Ces populations
sont obligées d'exécuter des programmes et/ou projets de développement conçus en
dehors d'elles et qui ne résolvent pas le problème fondamental posé en milieu rural:
celui de leur survie.
9.2.
Les interventions de développement en milieu rural mossi du
Centre-Nord: domaines prioritaires et actions de développement
réalisées
Les domaines prioritaires des développeurs en milieu rural mossi du Centre-
Nord demeurent l'agriculture et l'élevage, et dans une certaine mesure la santé, qui
reçoit moins d'investissement.
267

Les
autres domaines comme
l'éducation,
les diverses
infrastructures,
l'administration constituent cependant des préoccupations majeures de l'ensemble
des intervenants sur le terrain.
La mesure d'une intervention de développement dans le temps et l'espace se
situe au niveau des bénéfices qu'elle engendre à long terme et qui continueront aprés
que l'aide et les acteurs extérieurs se soient retirés, c'est-à-dire après que les
bénéficiaires s'en soient approprié.
L'objectif des interventions de développement, c'est l'auto-promotion paysanne,
c'est-à-dire l'appropriation par les populations rurales de toutes les formes
d'interventions de développement déployées sur le terrain en leur faveur et ce dans
tous les domaines de la vie économique, sociale, culturelle et sanitaire.
Dans le domaine de l'agriculture, de l'éle·vage et de l'artisanat par exemple,
l'objectif des interventions de développement repose sur la satisfaction des besoins
fondamentaux des populations (nourriture, eau potable, habitat décent, réduction des
disparités, participation à la prise des décisions ... ).
Il en est de même dans le domaine de la santé où de nombreuses variables
sont susceptibles de déterminer le comportement sanitaire des populations rurales
mossi. Parmi ces variables, les plus essentielles sont les suivantes:
268

la situation socio-économique défavorable de l'ensemble de la région,
particulièrement dans la Province du Bam ;
l'ignorance des règles d'hygiène;
la qualité relativement bonne des prestations des services de santé
pour cause d'équipements sanitaires insuffisants et de manque de
personnel de santé;
les rapports populations/agents de santé;
le manque de moyens de transports, l'état des pistes et routes, la
distance des domiciles par rapport aux centres de santé, etc.
Dans l'ensemble, plusieurs domaines prioritaires en matière de développement
ont été identifiés par les populations que l'on peut différemment classer, suivant que
l'on s'adresse aux femmes ou aux hommes.
En ce qui concerne les femmes interviewées, les préoccupations majeures
restent axées sur:
• Leur situation socio-économique
"Nous travaillons beaucoup, mais nous ne gagnons pas grand chose; nous
n'avons pas d'argent, nous n'avons même pas de bonnes sauces" avouent-elles.
269

Il Leur situation socio-sanitaire
Tout en sollicitant plus de médicaments et de personnel de santé pour leur
village, les femmes mossi ne fréquentent les formations sanitaires qu'après avoir
décelé les causes des maladies qui les affectent ou frappent quelque membre de leur
famille. Ces causes peuvent être de mauvais sorts jetés par un ennemi à un membre
de la famille, la transgression d'une coutume ou d'un interdit, une offense grave à la
terre et aux ancêtres qu'elle abrite etc. Les causes des maladies sont plus
importantes que les maladies elles-mêmes et c'est pourquoi il convient de s'y
attaquer prioritairement.
Les hommes par contre insistent d'abord sur les possibilités d'une amélioration
sensible de leur état de santé par une disponibilité des médicaments essentiels.
Ensuite, ils demandent aux "développeurs"76 plus de moyens matériels et
financiers dans le domaine socio-économique pour en accroître la productivité et en
assurer la diversification.
Est-il alors possible dans un tel contexte d'engager une intervention de
développement rural en estimant ses chances de succès?
76 Par développeurs ici il faut entendre les institutions ou organismes de développement, toutes
natures confondues.
270

Comment s'assurer de la réussite d'une intervention de développement?
"L'analyse rétrospective d'interventions aux fortunes diverses semble
démontrer qu'il y a "réussite" lorsqu'existent une conjonction technique et une
conjonction sociale favorables et qu'elles se situent dans un environnement
économique porteur"77.
Les interventions de développement axées sur l'agriculture et l'élevage ainsi
que sur l'artisanat dans la région du Centre-Nord et le reste du Burkina Faso révèlent
de riches enseignements:
- Lorsque les interventions portent sur des cultures de rente comme le coton
ou sur des cultures irriguées et notamment le riz qui bénéficient d'un ensemble
d'infrastructures hydro-agricoles et d'équipements techniques modernes, d'un
encadrement technique adéquat;;jl se crée un environnement social sécurisant
~:
pour les paysans. Les spéculations de ces types se caractérisent par des prix
rémunérateurs pour les producteurs généralement organisés en coopératives
ou
en
groupements
villageois
et
qui
reçoivent
par
conséquent
un
approvisionnement en intrants en temps opportun, qUI accèdent assez
facilement au crédit agricole et qui disposent de circuits commerciaux
organisés et sûrs. La participation effective des populations rurales aux
interventions de développement reste déterminée par la rentabilité économique
qu'elles y découvrent et qui semble constituer à la fois un motif de sécurité à
leur niveau et donc un facteur de réussite.
77 Groupe de Travail Coopération Française
Les interventions en milieu rural et approche
méthodologique, janvier 1988 ; p. 10.
271

Il en est de même pour l'artisanat qui ne peut se développer que s'il existe un
marché réel, des circuits commerciaux organisés et sûrs et bien sûr une technologie
appropriée.
- Les interventions touchant les cultures pluviales par contre connaissent
moins de réussite:
La
production
agricole
de
ces
cultures
est
destinée
à
l'auto-consommation.
La motivation y est certes forte, mais les
rendements agricoles restent soumis aux aléas climatiques, et donc
variables suivant les années, généralement très faibles .
. Les cultures pluviales reçoivent peu d'investissement de la part des
bailleurs de fonds étrangers et ne bénéficient pas d'un encadrement
technique comme les cultures irriguées.
Il Y a donc moins de sécurité au niveau de ces cultures et cependant les
producteurs y restent profondément attachés. Par tradition?
Mais comment faire converger les intérêts des paysans d'une part, les
orientations des sources de financement et les objectifs de développement régional
définis par l'Etat d'autre part ?
272

Il semble que les interventions de développement ont toujours visé comme
objectif la maximisation du rendement par hectare (en ce qui concerne les
interventions de développement agricole) par l'utilisation des techniques agricoles les
plus modernes. A charge pour les paysans de les adopter pour y parvenir; il se pose
alors le problème d'adaptation de ces techniques aux habitudes de vie et à la culture
locales et surtout la façon dont le paysan y perçoit son intérêt.
Les paysans pour leur part recherchent avant tout une maximisation de leurs
revenus monétaires à travers une augmentation de la productivité par journée de
travail, la sécurité vivrière dans la sécurité foncière, le développement de réseaux de
relations sociales etc.
Quant à l'Etat, en raison de l'instabilité qui le caractérise d'une part et la
multiplication de projets de d9veloppement autonomes d'autre part, il ne parvient p~:s
à définir une politique globale et cohérente de développement, à en planifier le
contenu dans l'espace et le temps en tenant compte des potentialités économiques
et des spécificités culturelles régionales.
D'où les différences d'objectifs et d'intérêts qui entachent les interventions de
développement.
Le dialogue peut-il permettre à ces différents acteurs de développement de
trouver un compromis?
273

A la lumière des expériences de développement déjà vécues dans la région,
toute intervention en milieu rural doit partir des paysans pour aboutir à eux. C'est
avec eux que devraient se définir les objectifs de l'intervention, les moyens
(matériels, techniques, humains et financiers) à mettre en oeuvre, les modalités
pratiques d'exécution, de suivi et d'évaluation. Une telle démarche permet de
comprendre pour les prendre en compte, les objectifs économico-financiers et les
finalités sociales que les paysans décèlent dans les interventions de développement
et qui déterminent leurs stratégies de production. Dans le cas précis de la région du
Centre-Nord, la logique qui sous-tend les stratégies paysannes de production est
celle de survie à cause du caractère très fragile de l'environnement physique. D'une
manière générale,
les objectifs poursuivis par les paysans mossi dans les
interventions de développement en milieu rural sont de deux ordres:
1) les objectifs globaux de ménages
;
2) les objectifs individuels de chacun des membres du ménage.
En fonction des objectifs qu'ils se fixent, lesquels peuvent être différents d'un
ménage à l'autre ou même à l'intérieur d'un ménage, ouvrant parfois des conflits
sociaux divers, les paysans développent bien de stratégies pour parvenir à leurs fins
en fonction des contraintes rencontrées.
Lorsque la sécurité et l'auto-suffisance alimentaires sont garanties, le paysan
mossi recherche des revenus monétaires pouvant lui permettre de satisfaire ses
besoins sociaux qui sont entre autres: l'habillement, frais de scolarité et fournitures
scolaires, frais de santé et ceux liés aux cérémonies coutumières comme les
274

mariages et les funérailles. Certains paysans achètent des boeufs pour constituer des
troupeaux, ce qui représente une forme d'épargne traditionnelle. La recherche de
l'autosuffisance
alimentaire
n'entrave donc pas
le maintien
des
ressources
monétaires qui demeure l'un des objectifs fondamentaux de la stratégie paysanne de
production.
• Au niveau collectif
L'objectif premier à ce niveau demeure la recherche de revenus monétaires.
Cet objectif s'accompagne toujours de certains autres comme l'achat de moyens de
transport
(bicyclettes
et
cyclomoteurs ... ),
d'équipements
agricoles
(charrues,
charrettes... ) et d'autres biens divers comme les postes-radios, les montres etc...
Ces derniers biens sont destinés le plus souvent aux personnes faisant partie
de la main-d'oeuvre familiale pour les empêcher d'émigrer à l'étranger ou de
pratiquer l'exode rural.
Les attitudes des paysans mossi face aux interventions de développement sont
donc dictées par ces objectifs. Aussi une connaissance sociologique du milieu paysan
s'avère indispensable comme première approche permettant de s'introduire dans
l'intimité de la réalité sociale villageoise mossi et susceptible d'éveiller l'initiative, la
participation et l'auto-responsabilisation des populations rurales elles-mêmes.
Une telle connaissance du milieu sert de fondement à une possible
transformation des organisations paysannes traditionnelles souvent considérées
comme archaïques vers des organisations de type "moderne" initiées par l'Etat ou les
275

organismes extérieurs. Dans ce cas, c'est la fonction économique des organisations
paysannes qui est valorisée à des fins de production et de commercialisation. Dans
les organisations paysannes traditionnelles par contre, c'est la fonction sociale qui est
privilégiée, même si la fonction économique y joue un rôle important, notamment par
la dépendance des paysans mossi vis-à-vis du marché international à travers les
interventions de développement.
En tout état de cause, les interventions de développement, lorsqu'elles sont
surtout suscitées de l'extérieur, ne doivent pas tendre à annihiler les initiatives
locales, mais devraient plutôt viser à apporter un appui technique et scientifique aux
efforts des paysans pour améliorer et renforcer leur capacité à concevoir, réaliser,
gérer et évaluer des projets de développement. Une telle démarche prend en compte
les aspirations et les besoins fondamentaux des populations rurales au double plan
individuel et collectif et garde de réelles chances d'entraîner la participation de
l'ensemble de la communauté, gage du succès des interventions de développement.
Pour ce faire, il convient de reconnaître à leur juste valeur, les savoirs et
savoir-faire traditionnels des paysans mossi qui permettaient de résoudre bien de
problèmes de développement et de chercher comment les améliorer pour une plus
grande efficacité des actions de développement.
276

Il est cependant à souligner quelques particularités de la participation des
populations rurales mossi aux interventions de développement; lorsqu'il s'agit d'une
prise de décision, ce sont les personnages influents des villages, en l'occurrence les
anciens qui prennent la décision engageant ainsi toute la communauté. Ils se
concertent d'abord, arrêtent une proposition de décision (leur pouvoir étant avant tout
consultatif sauf en matière de traditions où ils détiennent le pouvoir de décision
effectif), laquelle est transmise au chef de village occupant le rang le plus élevé dans
la hiérarchie de la chefferie traditionnelle pour approbation afin d'en permettre
l'exécution.
Les autres membres de la communauté peuvent néanmoins exprimer librement
leur opinion ou avis sur les problèmes de développement qui leur sont soumis au
sein de leur classe d'âge ou de la structure correspondant à leur sexe (à l'exception
des femmes et des enfants) sans que ces avis ne retiennent outre mesure l'attention
des anciens ou du chef de 'Ii Ilage.
,
Bien souvent les acteurs de développement ne tiennent pas compte de cet
ensemble de situations spécifiques des populations rurales mossi, leur souci étant
d'y introduire un système d'organisation de prise de décision démocratique à travers
la procédure électorale, sans prendre en considération les contraintes qui s'y
rencontrent.
Ces contraintes sont :
1) des contraintes environnementales constituées par les conditions
agro-climatiques défavorables;
277

2) des contraintes technologiques liées aux outils agricoles et aux
méthodes
culturales
archaïques,
l'absence
de
moyens
de
communication et d'infrastructures routières permettant de toucher
rapidement les habitants d'un village donné;
3) des contraintes socio-économiques (pauvreté en ressources de la
région) et culturelles (notamment les multiples obligations sociales dont
les principales demeurent les funérailles célébrées durant une ou
plusieurs semaines suivant le statut social, les fonctions exercées par
le défunt...), les marchés des villages environnants dont la fréquentation
constitue l'un des moyens privilégiés pour cultiver, entretenir ou
renforcer les relations sociales... , les mariages à contracter qui sont des
formes d'extension de réseaux de relations sociales entre plusieurs
lignages etc. ;
4) des contraintes démographiques et politiques etc...
Les attitudes des acteurs du développement face aux populations rurales
mossi sont aussi une autre forme de contrainte: les intervenants (surtout s'ils sont
extérieurs) pensent très souvent que les moyens financiers et les paquets
technologiques qu'ils apportent aux paysans suffisent pour entraîner la paliicipation
de ces derniers aux projets de développement qu'ils initient.
Ils pensent surtout n'avoir rien à apprendre des paysans ni sur le plan de la
connaissance technique ni au niveau de leur système d'organisation socio-politique
ou du fonctionnement de leurs modèles culturels. Il s'en suit que le dialogue qu'ils
278

tentent de nouer entre eux et les paysans se réduit à une forme de communication
entre seuls intervenants; ces attitudes quelque peu négatives ne manquant pas
d'affecter la capacité d'écoute des paysans qui détournent les interventions de
développement de leurs objectifs initiaux ou développent des stratégies visant à se
les approprier. La principale défense des paysans étant celle de leur force de travail,
la rémunération du travail réalisé par jour constitue pour eux une des variables
stratégiques. Une intensification et/ou diversification de la production agricole qui ne
s'accompagnerait pas d'une amélioration de la rémunération moyenne ou à défaut
d'une baisse sensible de sa pénibilité ne saurait par exemple être adoptée.
Les paysans mossi ne répondent jamais négativement à une intervention de
développement de façon frontale (c'est un trait de leur culture) ; mais ils analysent
la pertinence de l'intervention en fonction de leurs propres intérêts et de leurs
moyens propres pour sa réalisation à leur bénéfice et à celui de leurs proches.
Les pratiques de développement au Burkina et en Afrique doivent en effet être
restituées dans un processus global dans lequel les interventions profitent surtout à
l'Etat et aux paysans aisés.
• Au niveau individuel
Au niveau individuel, l'objectif principal de l'ensemble des paysans mossi est
d'assurer à la famille, la sécurité et l'auto-suffisance alimentaires en céréales de
consommation de base (mil, sorgho, maïs). En année de bonne pluviométrie,
l'excédent de céréales n'est cependant pas vendu, mais stocké dans des greniers
pour faire face à d'éventuelles mauvaises récoltes.
279

Photo n° 18
Village mossi du Barn. L'auto-suffisance et la sécurité alimentaires
une
préoccupation des populations rurales mossi du centre-nord.
280

Photo n° 19
Village mossi du Namentenga : un environnement physique menacé avec
la préoccupation majeure de la sécurité alimentaire à travers les greniers.
281

L'échec des interventions de développement en milieu rural mossi comme du
reste au Burkina Faso et en Afrique de façon générale, autorise-t-il à épouser la
thèse· de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International (FMI) selon
laquelle l'issue libérale serait la solution aux problèmes de développement rural en
Afrique?
Pour ces Institutions Financières Internationales, "Ie fonctionnement étatique
des interventions en milieu rural a largement montré ses faiblesses: coût très
élevé, détournement, corruption, prévarication, népotisme, etc... Il faut donc
laisser jouer librement les mécanismes du marché et laisser agir dans les
campagnes africaines, une classe d'entrepreneurs qui est seule à même de
promouvoir le développement économique,,78.
Pour Jean-Loup Amselle, il ne semble pas exister un autre modèle de
développement rural en Afrique que celui fondé sur la promotion de ceux qui sont
déjà favorisés, c'est-à-dire les paysans aisés des communautés villageoises.
"En tout cas, nulle part jusqu'à ce jour, il n'a été possible de développer
~,
les campagnes sur la base des soit-disant traditions qui existeraient dans les
villages; l'échec des coopératives, des champs collectifs et des groupements
villageois dans de nombreux pays est là pour l'attester,,79.
Jean-Loup Amselle nuance cependant sa pensée en reconnaissant que ni la
privatisation ni la libéralisation ne sauraient à elles seules contribuer au progrès
économique des campagnes africaines. C'est un ensemble d'efforts conjugués de la
part de l'Etat, des aides bi- et multilatérales de développement, des Organisations
Non Gouvernementales et des entrepreneurs privés qui pourrait assurer un véritable
78 AMSELLE (J.L.), Le développement vu du village, Sociologia Ruralis, 1988, vol. XXVIII, 2/3 ;
p. 176.
79 AM SELLE (J.L.), op. cit. p. 180.
282

décollage économique des sociétés rurales africaines. Mais les bailleurs de fonds
extérieurs sont-ils vraiment intéressés par le développement économique des pays
africains?
"La crise qui affecte aujourd'hui de nombreux pays d'Afrique est en effet
globale: elle touche d'abord et avant tout les Etats et ne saurait donc être
résolue par des mesures incitatives visant un secteur particulier de leurs
économies. De là, le grand désarroi des développeurs qui sont confrontés au
replis frileux des grandes puissances, et en particulier des Etats-Unis sur
l'Afrique économiquement utile, ou de la France qui se crispe sur sa zone
d'influence politique traditionnelle"80. D'un point de vue historique, ce sont les
interventions de développement de type 1 et de type 2 qui furent d'abord initiées
dans la région (1969) pour d'une part accroître quantitativement et qualitativement
la production agricole et permettre aux populations rurales de s'affranchir de la
famine, et d'autre part stimuler les initiatives locales en m3tiére de diversification et
d'intensification des cultures vivrières, de l'élevage, de la lutte contre la dégradation
de l'environnement et enfin de l'artisanat rural. Deux (2) seules interventions de
développement (PPIK, PPIB et PPIL) et l'ADRK rapportent en moyenne à la région
du Centre-Nord près de cent millions (100.000.000 F CFA) de francs par an, soit en
vingt trois
années d'implantation,
environ
deux milliards
trois cent millions
(2.300.000.000 F CFA).
80
AMSELLE (J.L), op. cit. p. 181.
283

Puis suivent celles de type 3 et certaines autres de type 2 en nombre réduit.
Il s'agit en particulier de l'AVO, du FEER et les "Six S" respectivement présents dans
la région depuis 1973 pour le premier et 1974 pour les deux derniers acteurs; le coût
de leur action est évalué à plus de vingt six millions (26.000.000 fCFA) de francs par
an en moyenne (sans l'estimation de l'intervention des "Six S" non disponible)
totalisant ainsi depuis le début de leurs actions environ trois cent vingt huit millions
(328.000.000 fCFA) à laquelle somme il conviendrait d'ajouter le coût chiffré de
l'intervention des "Six S" dont nous ne possédons pas les données statistiques.
Toutes ces interventions de développement orientées vers l'agriculture et
l'élevage trouvent leur justification dans le contexte de famine et de sécheresse qui
caractérisent la région durant les années 1970 et suivantes.
Une décennie s'est écoulée, aucun bilan de l'impact de ces interventions sur
les populations rurales mossi n'a été dressé ni par leurs auteurs, ni par l'Etat
burkinabè. Cette situation a été favorisée par un contexte politique instable: des
coups d'Etat se succèdent aux coups d'Etat, des régimes militaires aux régimes
militaires, plaçant les problèmes de politique intérieure au premier rang des
préoccupations de l'Etat et abandonnant le sort des populations rurales entre les
mains de "bienfaiteurs" extérieurs.
Un bilan peut tout de même être présenté, celui établi par les populations
rurales mossi elles-mêmes. Ce bilan peut se résumer en une série d'interrogations:
- quelles sont les finalités politiques, économiques et sociales des
interventions de développement?
284

- sont-elles vraiment destinées aux populations rurales?
Si oui comment en tirer le maximum de profit?
Sinon pourquoi les interventions de développement interpellent-elles les'
populations rurales?
Et aux populations rurales mossi de développer et ruses et stratagèmes pour
trouver la meilleure stratégie face à chaque type d'intervention de développement.
A la faveur peut-être de la large marge de manoeuvre dont elles bénéficient
sur le terrain de la part de l'Etat, les interventions de développement dans cette partie
du Burkina Faso vont se multiplier à un rythme si accéléré et sans coordination
aucune qu'elles tendent plus ou moins à annihiler les actions des unes des autres.
D'où cette réflexion de Jean-Marc Ela81 :
"Peut-être les sociétés rurales constituent-elles le lien privilégié à partir
duquel l'on peut identifier les conflits et les contradictions majeures qui
surgissent au coeur des dynamismes historiques en cours dans les Etats où
les élites autochtones cherchent à organiser la vie sociale et politique au
bénéfice de leurs intérêts 7"
81
Jean-Marc Ela : "Quand l'Etat pénètre en brousse ... Les ripostes paysannes à la crise"
Karthala. Paris. P. 12.
285

9.3.
1986-1990: Esquisse
d'une
politique
de
planification
du développement rural au Burkina Faso.
L'année 1985-1986 aura marqué un tournant décisif dans l'histoire du
développement rural au Burkina Faso. Cette année-là fut élaboré et exécuté le
premier Plan Quinquennal de développement "populaire". Ce plan de développement
est ainsi appelé parce que sa conception a connu pour la première fois la
participation des populations rurales et traduit l'ensemble de leurs aspirations et
préoccupations. Paradoxalement à cette même période correspond une floraison
d'interventions de développement dont les principales sont les suivantes:
Il s'é\\git de :
1) sept interventions de type 3 (AEERB, mise en valeur piscicole du Lac Bam,
le PATECORE, la Formation des Puisatiers de Bourzanga et Rollo (Bam), PDSS,
Campagne Panafricaine de lutte contre la peste bovine (Namentenga), projet
sensibilisation et formation des paysans autour des barrages (Sanmatenga)) totalisant
un financement annuel de plus de trois cent cinq millions (305.000.000 F CFA) (sans
l'évaluation de l'AEERB, du projet mise valeur du Lac Bam, du PDSS, et du projet
Campagne Panafricaine de lutte contre la peste bovine dont on ne dispose pas de
statistiq ues).
286

L'évaluation financière de ces interventions de développement au profit de la
région du Centre-Nord est portée de 1986 à nos jours à un milliard huit cent trente
millions (1.830.000.000 F CFA) de francs82 .
2) Quatre (4) interventions de type 4 (CES/AGF (Bam-Sanmatenga),
Aménagement des Terroirs, Zone de Tikaré (Bam), Conservation Eaux-sols Titao,
Bourzanga, Rollo, Windigui (Bam) et DARA (Namentenga)) au financement annuel
estimé à environ cent treize millions (113.000.000 FCFA) de francs, soit un coût
global depuis le début de leurs actions porté à près de sept cent millions
(700.000.000 F CFA) de francs.
3) Enfin une (1) intervention de type 2 (Projet BKF/84/001 : Amélioration des
Infrastructures de santé et de leur fonctionnement) d'un coût annuel de deux cent
millions (200.000.000 F CFA), soit un montant total de 1985 à nos jours estimé à un
milliard quatre cent millions (1.400.000.000 F CFA) de francs.
Après la période d'instabilité politique des années 1980, marquée par des
préoccupations d'ordre politique, le développement du monde rural redevient la
préoccupation majeure des Autorités Politiques. C'est ce qui explique d'ailleurs
l'esquisse d'une politique de développement rural à travers un premier plan
quinquennal de développement populaire. Mais il ne suffit pas de concevoir des plans
de développement (même bons) ; il faut encore avoir les moyens nécessaires pour
les exécuter. L'Etat ne disposant pas de moyens suffisants (matériels et financiers
82
Cette estimation exclut les interventions ci-dessus ne disposant pas de statistiques.
287

surtout), fit appel à l'aide extérieure qui ne tarda pas à répondre positivement à
travers les nombreuses interventions observées depuis 1985 sur le terrain.
Mais contrairement à la première série, cette seconde série d'interventions de
développement, en plus du nombre plus élevé (18 contre 6) reste assez diversifiée:
les problèmes de l'environnement constituent leur centre d'intérêt; le développement
à la base, c'est-à-dire au niveau même du village reçoit une attention particulière de
la part des intervenants.
Mais là non plus aucun bilan n'est établi à ce jour ni par les auteurs des
interventions de développement, ni par l'Etat.
Mais
alors,
impossibilité
de
dresser
le
bilan
des
interventions
de
développement eu égard à leur complexité ? Difficultés d'ordre technique,
métllodologique ou politique, ou simplement impuissance avouée par les uns et par
les autres, ce qui serait synonyme d'abandon ou de désintéressement?
En tout cas l'évaluation financière peut être faite: de 1969 à 1992, environ six
milliards cinq cent cinquante huit millions (6.558.000.000 FCFA) de francs ont été
investis dans la région du Centre-Nord 83 . Ceci paraît énorme pour une seule région
lorsqu'on songe que le budget de l'Etat a évolué dans le même temps autour de 50
milliards à 100 milliards et qu'il existe neuf (9) régions identiques à celle du
Centre-Nord. Une seconde évaluation peut également être faite : l'impact des
83
Le chiffre de 6.558.000.000 est sous-estimé; certaines interventions de développement ne
disposent pas de statistiques permettant d'en faire une évaluation globale.
288

interventions de développement sur l'évolution des mentalités des populations rurales
mossi désormais plus attirées par les interventions tout en recherchant les voies et
moyens d'en tirer le maximum de rentabilité financière.
Cependant, les principales interrogations demeurent : deux décennies
d'interventions
de
développement
ont-elles
pu
améliorer
les
conditions
socio-économiques et sanitaires des populations rurales mossi de la région du
Centre-Nord du Burkina Faso?
Quelles sont les principales contraintes rencontrées ayant empêché d'atteindre
cet objectif?
L'inadaptation des interventions de développement, la non-réceptivité des
populations rurales mossi et pourquoi?
L'inadéquation des méthodes d'approche ou incompétence des techniciens sur
le terrain ou quelles autres contraintes?
Il est certes difficile de saisir l'impact des interventions de développement sur
le milieu dans lequel elles s'insèrent et sur les hommes qu'elles touchent; d'autant
plus la région du Centre-Nord à défaut de développer une culture d'exportation
comme le coton qui réussit bien mieux au sud et au Sud-Ouest du Burkina Faso leur
ouvrant facilement la voie à l'économie marchande, c'est par le biais de la vente de
la force brute de travail (sous forme de main-d'oeuvre occasionnelle ou spécialisée)
que les Mossi de la région y ont pénétré. A ce titre, les interventions constituent un
tremplin pour y accéder.
289

Comment se sont déroulées sur le terrain les interventions de développement
dans la région du Centre-Nord?
Comment les sciences sociales peuvent-elles en rendre compte en toute
objectivité ?
Comment en effet, l'anthropologue ou le sociologue peut-il rendre des réalités
sociales aussi complexes que sont les interventions de développement en milieu rural
qui regroupent des acteurs aux intérêts si divers (paysans, bailleurs de fonds, Etat,
ONG ... ) ? Et quel rôle les sciences sociales peuvent-elles ou doivent-elles jouer dans
les diverses interventions en tant que faits humains?
La réponse de J.P. OLIVIER de SARDAN est sans équivoque:
"Non seulement certaines institutions de développement auraient tout à
gagner des sciences sociales exerçant de plein droit leur rôle de recherche en
ce domaine (et ne se contentant pas d'être des sciences appliquées, réduites
à une fonction d'auxiliaire des praticiens) mais encore il en est de l'intérêt
même des recherches "pures" : on sait depuis longtemps que les différentes
réactions d'une société (ou de ses diverses composantes) à une intervention
"extérieure" constituent l'un des meilleurs indicateurs de la dynamique de ses
structures propres, un analyseur privilégié des comportements sociaux,,64.
64 OLIVIER De SARDAN (J.P.), Logiques paysannes et projets de développement rural.
Communication au séminaire international sur le thème "Les effets socio-structurels de l'aide
au développement en milieu
rural en Afrique de l'Ouest.
Cotonou,
8-12 décembre
1986 ; p. 2.
290

Il est sans doute légitime de rechercher à travers la diversité des interventions
de développement qui ne cessent de se multiplier en milieu rural mossi les logiques
qui les sous-tendent et les façons dont elles sont reçues et vécues par les
populations "bénéficiaires" car, c'est là la raison même d'être des sciences sociales
au double plan théorique et pratique.
"L'analyse des pratiques sociales effectives à l'oeuvre dans un projet de
développement
(par
exemple
méthode
d'encadrement
du
côté
des
développeurs, adoption sélective du côté des développés...) permet de mettre
l'accent sur le décalage (inévitable) entre les "intérêts" et les "rationalités" qui
régissent les opérations de développement et les "intérêts" et "rationalités" qui
règlent les réactions paysannes"85.
Comment apparaissent et surtout comment sont perçues par les populations
'c-
rurales mossi, les logiques des interventions de développement qui leur sont
proposées?
"La cohérence du projet tient généralement à un modèle productif issu
de la recherche agronomique, et se fonde en conséquence sur une rationalité
technique. Il s'agit chaque fois d'importer au sein de la paysannerie un modèle
de production intensif qui suppose, au-delà de ce qui se présente comme une
opération de vulgarisation et d'encadrement, une transformation profonde de
85 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 3.
291

la "culture technique" des paysans"86. Cependant la cohérence ou logique des
interventions de développement ne demeure jamais de leur conception à leur mise
en oeuvre.
"La cohérence interne du modèle technique, la congruence du projet avec
la politique économique nationale, et la conformité entre le projet tel qu'il est
mis en oeuvre sur le terrain et le projet tel qu'il se donne en ses objectifs et ses
méthodes, sont sérieusement menacées, avant même les réactions propres au
milieu, par le jeu de l'environnement politique et économique global et les
logiques institutionnelles"87.
Les paysans mossi gardent-ils, quant à eux les mêmes logiques face à la
diversité des interventions de développement, ou développent-ils conséquemment
des logiques différentes?
"Ni le rejet total ni l'adoption totale ne sont la règle. Le processus
88
habituel est celui de l'adoption sélective" .
Les logiques paysannes changent suivant les interventions, et même à
l'intérieur de la même intervention suivant les circonstances et les intérêts que les
paysans y perçoivent.
86 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 6.
87 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 7.
88 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 7.
292

Les logiques paysannes écartent d'emblée les risques inhérents à la logique
des interventions de développement (à caractère technique) et restent marquées par
un pragmatisme "démesuré" ..
Logiques des interventions de développement et logiques paysannes sont-elles
conciliables malgré leurs différences?
"Le "point de vue" des planificateurs et économistes nationaux, soucieux
d'accroître le PIS, de réduire la dépendance envers l'étranger, d'accroître les
rentrées en devises ... (selon les cas, les régions, les époques) ne peut en aucun
cas être celui du paysan chef d'exploitation ni celui du cadet ou de l'épouse qui
cherchent à assurer leur subsistance et leur reproduction (si possible élargie...).
Les critères qui règlent les calculs ou l'activité professionnelle de l'un ou de
l'autre sont sans commune mesure, comme les risques qu'ils prennent
respectivement"89. Et l'auteur d'ajouter: "Le chercheur en sciences sociales
qui se donne pour tâche d'élucider les logiques paysannes ou de les opposer
aux logiques des professionnels du développement n'en est pas pour autant
"au-dessus de la mêlée"; lui aussi s'insère dans les logiques qui influent sur
sa pratique scientifique, et les logiques des chercheurs ne sont ni celles des
développés ni celles des développeurs"90.
89 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 10.
90 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 10.
293

Précisément l'implication du chercheur en sciences sociales dans les
interventions de développement obéit-elle à une logique? Laquelle, étant entendu
que le chercheur lui-même est pris dans son propre champ d'observation, à savoir
son appartenance aux organismes de développement des pays occidentaux (bailleurs
de fonds) ou au gouvernement de son propre pays?
" ... faire appel aux sciences sociales signifie déjà que l'on cherche à
comprendre le réel autrement que par les seules rationalités techniques ou par
les logiques" moralo-métaphysiques" ou encore par la combinaison des deux";
... Ies problématiques du développement ne se résument-elles pas, le
plus
souvent
à
des
formules
du
type
"aide-économique",
"aide-technologique", c'est-à-dire à la combinaison d'une dimension rationnelle
- technique ("économie", "technique") toujours inspirée par un corps de
croyances laïques ou religieuses" ?91.
91 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cité, p. 15.
294

Le recours aux sciences sociales dans les interventions de développement est
une nécessité parce que celles-ci récusent les logiques aussi bien des développeurs
que des développés (en raison de leur caractère simpliste et partiel et donc
incomplet) qui n'intègrent pas suffisamment ou pas du tout les logiques sociales,
lesquelles logiques ne sont ni d'ordre économique ni d'ordre technologique.
"L'enjeu des sciences sociales, c'est de restituer leur complexité aux
phénomènes observés tout en proposant quelles pistes pour rendre compte de
cette complexité et permettre d'y lire un peu de sens"92.
92 OLIVIER De SARDAN (J.P.), op. cit. p. 16.
295

CHAPITRE VI . OBJET ET OBJECTIFS DES INTERVENTIONS DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI
10.
LES
INTERVENTIONS
DE
DEVELOPPEMENT
RURAL
QUELLES
FINALITES?
La notion de mise en valeur des régions est une vieille conception du
développement longtemps développée par la colonisation par l'introduction des
cultures d'exportation au niveau du monde rural dans les différentes ex-colonies
d'Afrique. Ainsi par exemple au Sénégal, c'est la culture de l'arachide qui a été
spécialisée dès le 19è siècle. En Côte-d'Ivoire, c'est le café et le cacao; au Burkina
Faso, c'est essentiellement le coton. Mais la politique agricole ainsi conçue intégrait
rarement les aspects environnementaux au plan socio-économique et écologique pas
plus d'ailleurs que la recherche scientifique à cette époque.
La recherche
agronomique s'est intéressé en effet à ces cultures d'exportation de façon exclusive:
ainsi l'IRCT (Institut de Recherche du Coton et des Textiles), l'IRHO (Institut de
Recherche des Huiles et Oléagineux) se sont respectivement consacrés au coton, à
l'arachide et au palmier à huile. Ces cultures d'exportation étaient pratiquées sur de
grandes surfaces exploitées par des sociétés coloniales, et également sur les champs
de culture propres des paysans sous la contrainte bien entendu afin de leur faire
gagner de l'argent destiné au paiement de l'impôt de capitation. L'agriculture
traditionnelle qui, au Burkina Faso était orientée vers les céréales (sorgho, mil, maïs)
ne présentait aucun intérêt pour le marché extérieur, mais uniquement pour les
besoins alimentaires des paysans.
296

Après les années d'indépendance (1960) de la plupart des pays de la région
Ouest-Africaine, la stratégie du développement des cultures d'exportation s'est
poursuIvie pour permettre aux nouveaux Etats d'obtenir des devises grâce aux
prélèvements fiscaux ou para-fiscaux opérés sur ces activités d'exportation.
Plus tard, s'inspirant des associations traditionnelles, les dirigeants africains
décidèrent de créer des coopératives pour promouvoir le développement rural: il
fallait organiser les paysans, structurer le monde rural pour entreprendre les actions
de développement avec l'espoir d'y réussir.
Ces coopératives décidées et créées sans consulter les paysans a fortiori les
faire participer avaient-elles des chances réelles de succès?
De
véritables
opérations
de
développement
rural
(semis
en
ligne,'
approvisionnement en intrants agricoles, utilisation de charrue et cultures attelées,
commercialisation des produits agricoles ... ) furent par la suite engagées en ce qui
concerne le Burkina Faso, mais placées sous l'égide de sociétés d'intervention, les
Organismes Régionaux de Développement (ORO) dont la mission principale
consistait justement à assurer le développement des onze (11) régions du pays 93.
Les ORO se sont par la suite transformés en CRPA à partir de 1986-1987.
93
Le découpage du pays en onze (11) ORO obéissant à une logique de
développement régional en tenant compte des conditions agro-c1imatiques et
écologiques ainsi que des potentialités économiques de chaque région.
297

Des bailleurs de fonds (Banque Mondiale, Caisse Centrale, Fonds Européen
de Développement etc.) financèrent ces opérations qui débutèrent par des études de
faisabilité sur le terrain (lesquelles études ne portaient guère sur les paysans, sur
leurs savoirs et savoir-faire). Lorsqu'elles deviendraient fonctionnelles, ces opérations
de développement passeraient progressivement sous la responsabilité des paysans
à travers leurs coopératives. Telle était du moins théoriquement, l'objectif ultime de
la création des CRPA.
Seulement était-il possible de maintenir le paysan dans une structure
d'encadrement (la coopérative, elle-même gérée par les CRPA) à la gestion de
laquelle il doit participer par la seule contribution de sa force physique et vouloir qu'il
s'en approprie par la suite?
Les CRPA créés donc pour conduire les opérations de développement rural
ont plus ou moins bien fonctionné (plutôt mal que bien) en s'appuyant non sur les
groupes sociaux en tant que tels (villages, quartiers... ) mais sur les individus (chefs
de famille ou d'exploitations agricoles) provoquant bon gré, mal gré, des effets sur
les structures sociales traditionnelles des Mossi, éléments ou moteur de la
dynamique. En effet, en milieu rural mossi, un chef d'exploitation regroupe sous son
autorité, outre ses descendants (latéraux et collatéraux) d'autres dépendants
(aides-familiaux, ouvriers agricoles ... ) qui constituent une réalité sociologique
sous-estimée.
298

Processus de réalisation d'une opération
(intervention)
de
développement rural
1
niveau scientifique.
Il
1
comprend les Instituts de
recherche chargés de concep-
tualiser les techniques à
vulgariser
2
niveau technique.
Il requiert
l'intervention des ingénieurs
agronomes et des techniciens
3
chefs de secteurs.
Ce niveau
sert de relais à l'interven-
tion technique
chefs de zones. Ce niveau
constitue le second relais
technique
5 ~ encadreurs. Ce niveau est
chargé de veiller à l'ap-
plication des techniques
par les paysans sur le
terrain
6
paysans,
réduits à de simples
exécutants de l'opération de
développement
299

Il convient de souligner la position de la femme en milieu rural et le rôle qu'elle
joue dans les interventions de développement. En tant qu'agent de production, la
femme participe à toutes les actions de développement sur le terrain au même titre
que l'homme. Cependant, elle ne bénéficie pas toujours des retombées des
interventions de développement. Par exemple, la vente de la production d'une
exploitation agricole est entièrement gérée par le chef de famille. Tout au plus
offre-t-il quelques pagnes aux femmes et autres vêtements aux enfants sous forme
de cadeaux, et garde pour lui seul le reste de l'argent qui lui permet éventuellement
de contracter une seconde ou une troisième épouse pour élargir le cercle de sa
main-d'oeuvre.
Bien que l'un des objectifs fondamentaux des interventions de développement
en milieu rural mossi soit de freiner l'exode rural, le système inégalitaire de la
répartition des revenus monétaires qui en découlent provoque le phénomène inverse:
.~
jeunes et femmes quittent les villages pour peupler les bidonvilles des centres
urbains.
Cette attitude traduit une fois encore la capacité de résistance du milieu rural
mossi non satisfait des formes de développement qui lui sont proposées par les
experts en développement (étrangers et nationaux) et également la capacité
d'adaptation à de nouvelles situations si les circonstances l'exigent.
L'Etat qui a toujours joué un rôle capital dans le processus de développement
en milieu rural doit-il et peut-il en fixer les règles du jeu ? En a-t-il seulement la
volonté, les moyens politiques, administratifs et techniques pour réglementer les
interventions de développement rural qui ne favorisent pas beaucoup les femmes?
300

"L'Etat a en effet intérêt à ce que la production augmente, tant la
production vivrière qui permettra de nourrir les populations urbaines, que la
production des cultures destinées à l'exportation qui permettent de remplir les
caisses du trésor.
Et de ce fait, des efforts importants sont consentis et il n'est plus guère
de région qui ne soit l'objet d'un projet de développement agricole "intégré",
c'est-à-dire se fixant pour objectifs à la fois de développement des cultures
d'exportation et des cultures vivrières et autant le développement social (santé,
éducation, approvisionnement en eau ...) qu'économique"94.
10.1. L'Etat, la négation du développement en milieu rural mossi ?
Le paradoxe qui peut s'observer dans l'attitude de l'Etat vis-à-vis des
populations rurales mossi soulève de légitimes interrogations:
- Comment l'Etat peut-il concevoir une politique de développement (à travers
diverses interventions) en faveur du monde rural, mettre en place des structures
d'encadrement des paysans pour en assurer l'exécution, et rester presque muet et
passif devant les échecs répétés déjà enregistrés?
Quelles
alternatives
l'Etat
propose-t-il
pour
amèliorer
la
situation
socio-économique et sanitaire des populations rurales mossi ?
94 G. BELLONCLE
"La question paysanne en Afrique Noire" Karthala, Paris
1982. P. 71.
301

- L'Etat acceptera-t-il dans le souci de promouvoir le monde rural, que les
paysans puissent constituer des organisations libres et autonomes capables
de se défendre et de s'opposer à ses propres directives?
Des organisations paysannes autonomes ne risquent-elles pas de constituer
un lourd poids politique au niveau local ou régional qui entraverait le fonctionnement
de l'administration et les services officiels de l'Etat?
Les
organisations
paysannes
comme
contre-pouvoir
politique
ne
compromettraient-elles pas l'Etat dans son existence propre?
Les enjeux sont d'importance et les hésitations de l'Etat sont à situer dans ce
contexte de dilemme dans lequel il se trouve placé. Il reste que la décentralisation
progressive et effective de l'administration en cours depuis quelques années fait
nourrir l'espoir de l'acquisition par les paysans d'une plus grande autonomie de
fonctionnement dans leurs organisations respectives, de plus de pouvoir de décision
par rapport aux paliers intermédiaires qui les relient à l'Etat et dont le nombre se
réduirait par ailleurs.
Une certaine prudence peut s'observer aussi bien du côté de l'Etat qui tente
de se désengager de plus en plus des organisations paysannes (sans toutefois
exclure la récupération) que de celui des paysans qui opposent des formes de
résistances passives aux interventions de développement qui ne les intègrent pas
complètement ou qui les encadrent trop à travers des structures trop rigides.
302

"Pour que les paysans produisent davantage, il faut que le marché de la
consommation suive, il faut des prix compétitifs, il faut les laisser se regrouper
et enfin, il faut les assister, leur apporter l'aide nécessaire en matière de
formation, de financement sans que cela se fasse à leur détriment et à
l'encontre de leur autonomie"95.
10.2. Une nouvelle forme d'intervention de développement en milieu
rural: les cultures irriguées
Depuis quelques années, les cultures irriguées timidement introduites, se
développent dans le Centre-Nord et le reste du pays non seulement comme
complément aux cultures céréalières (qui y sont chroniquement déficitaires) mais
laussi comme source essentielle de revenus monétaires en milieu rural mossi.
Certes, les cultures irriguées ne touchent pour l'instant que les villages
bénéficiant de périmètres aménagés, mais un vaste programme d'aménagements
hydro-agricoles est prévu dans le second plan quinquennal de développement
(1990-1994) élaboré par l'Etat.
Les périmètres aménagés dans la région du Centre-Nord se présentent ainsi
qu'il suit:
95 Loisy De (E.) : Les organisations paysannes au Sahel, série Conférences n01,
novembre 1988. Université Laval, p. 12.
303

Tableau 44 :
Typologie des périmètres irrigués dans le Centre-Nord 96 .
Mode de gestion
Périmètres à gestion
Périmètres sous-
autonome
encadrement des CRPA
Maîtrise d'eau
spéculation
SCOOBAM
Type 1
Louda
Type 2
Yalgo
Maîtrise totale
COOMAKO
d'eau et
Tamassogo
cultures
Total
2
3
96
Cette typologie a été établie suivant trois Critères qui sont les suivants:
- le mode de gestion
- le niveau de maîtrise d'eau
- les spéculations pratiquées sur le périmètre.
304

L'expérience des périmétres irrigués dans la région du Centre-Nord prouve
bien que le développement de l'irrigation comme forme d'intervention en milieu rural
assure la promotion socio-économique des populations rurales et contribue à-
accélérer la dynamique sociale grâce aux divers enjeux en cause et les différentes
stratégies qui se développent au niveau de chaque type d'intervention.
Les paysans mossi sont ainsi parvenus à se hisser à un rang plus élevé dans
la recherche d'un meilleur être social grâce à un pouvoir économico-financier que leur
procure l'exploitation des périmètres irrigués et dont ils se servent pour améliorer leur
bien-être matériel et celui de leur entourage.
L'interrogation qu'il se serait légitime de soulever ici est la suivante: quelles
autres alternatives s'offrent au paysan mossi si l'irrigation se révèle économiquement
peu ou pas du tout rentable?
Peu de possibilités en réalité dans le contexte socio-économique mossi actuel;
ou bien il s'adonne quand même aux cultures irriguées en dépit d'une exploitation
déficitaire ou il se résout à l'émigration.
Quelle solution préférera-t-il? Le choix est fonction surtout du contexte familial
et social plus ou moins propice à son maintien à proximité ou éloigné du cadre
familial et/ou social. Si pendant longtemps l'émigration a constitué la solution idéale,
la tendance aujourd'hui se dessine nettement vers une fixation plus ou moins
définitive sur les périmètres irrigués. Les problèmes socio-économico-financiers des
paysans mossi sont-ils pour autant réglés, du moins pour l'essentiel?
305

10.3. Caractéristiques des interventions de développement dans le
Centre-Nord
10.3.1.
Structures politiquesetadministrativesd'encadrement
et
interventions
de développement en milieu rural
mossi : l'impasse?
Au Burkina Faso la première structure d'encadrement des populations rurales
dans leur ensemble fut le Bureau pour le Développement de la Production Agricole
(BDPA)97. Il était notamment chargé de mettre sur pied des groupements villageois
pré-coopératifs appelés à évoluer en coopératives afin d'augmenter la production
vivrière et de développer les cultures de rente (coton, arachides ... ).
Par la suite, le BPPA fut remplacé par les ORO (Organismes Régionaux de
Développement) créés pour réaliser un passage progressif de pré.:·toopératives. C'est
ainsi que les Provinces du Bam, du Namentenga et du Sanmatenga constituent
l'ORO du Centre-Nord qui correspondait aussi à l'ex-département portant la même
dénomination. Les ORO seront eux-mêmes remplacés plus tard par les CRPA.
Nous prendrons ici deux exemples de périmètres irrigués effectivement
encadrés par des structures politiques et administratives pour répondre à cette
interrogation : Les structures politiques et administratives constituent-elles un
accélérateur ou au contraire une entrave aux interventions de développement en
milieu rural mossi ?
97 Le BDPA était une société d'Etat française.
306

Il s'agit des périmètres de Louda et de Tamassogo.
Les deux périmètres irrigués ci-dessus cités sont situés dans la Province du
Sanmatenga, sur des avals de barrages où les populations réputées être d'excellents
agriculteurs pratiquaient la riziculture, en réservant les plaines pour l'agriculture
traditionnelle.
En ce qui concerne l'agriculture traditionnelle, elle était destinée aux besoins
alimentaires des populations, et comprenait les principales céréales (sorgho, mil,
maïs). Malgré les énormes efforts déployés par ces paysans, ils ne parvenaient pas
à franchir le seuil de la famine en raison
des conditions écologiques et
agro-climatiques peu favorables d'une part, des pressions démographiques d'autre
part. Ils tentaient notamment de maintenir les qualités agronomiques des sols par la
pratique des techniques anti-érosives (utilisation de billons croisés, conservation des
tiges
de
mil dans
les
champs jusqu'à
l'hivernage
prochain,
des
fumures
organiques ... ).
Pour ce qui touche la riziculture, il s'agissait d'une riziculture de submersion
au départ (c'est-à-dire avant l'aménagement des deux périmètres), puisqu'il n'y
existait aucune maîtrise d'eau, et qui était par conséquent assujettie aux irrégularités
des pluies et des hauteurs d'eau d'inondation. Elle avait l'avantage d'offrir des
rendements plutôt acceptables sur des sols pauvres ne nécessitant ni jachère, ni
engrais ni rotation. Des variétés de riz (en particulier le riz "rustique") adaptées aux
onditions climatiques et au milieu y étaient cultivées.
307

Puis respectivement en 1966 et 1968, les autorités politiques de l'époque
décidèrent l'aménagement des avals des deux barrages des localités de Louda et de
Tamassogo pour développer la culture du riz.
L'objectif de l'aménagement consistait à rendre la riziculture moins dépendante
des pluies pour permettre une double culture par an par "submersion contrôlée", et
éventuellement d'autres cultures (comme les cultures maraîchères).
10.3.2.
Réactions
paysannes
face
à
l'aménagement
prudence au refus?
La première conséquence qui a résulté de l'opération de l'aménagement fut
une réduction immédiate et sensible des superficies exploitées. L'aménagement des
avals des deux barrages a permis de récupérer une bonne partie des terres
.J
traditionnelles réservées à la riziculture par "submersion contrôlée", ce qui n'a point
empêché les paysans mossi d'en poursuivre la pratique sur des portions de terres
plus réduites (0,5 ha en moyenne par chef de ménage en fonction du nombre de
convives dont ils ont la charge). Les paysans mossi préfèrent ainsi (par prudence ?)
s'en
tenir
à
leurs
habitudes
et
méthodes
culturales
qu'ils
ont
longtemps
expérimentées, plutôt que d'adopter un nouveau système de culture "moderne" dont
ils n'ont pas encore vu les résultats. En effet pour les paysans mossi, le
développement des cultures irriguées qui leur est proposé représente un nouveau
système complètement différent de leur système de cultures sous pluie ou inondées,
et dont ils ne maîtrisent pas toutes les techniques et le système de fonctionnement.
308

Ce système "de culture des Blancs" n'a guère été expérimenté par leurs ancêtres et
personne n'ose s'y lancer sans précautions préalables au risque de se placer au
travers des coutumes et traditions.
L'apparente inertie qu'opposent les paysans mossi à certaines interventions
de développement, en particulier aux périmètres irrigués relève plus de la prudence,
fondement de la sagesse mossi qu'un refus obstiné. Ils savent évaluer les difficultés
à affronter par rapport aux revenus monétaires qu'ils peuvent tirer de chaque type
d'intervention.
Il ne s'agit pas en effet d'imposer aux paysans mossi un système de
production qui implique un changement radical de leur univers existentiel de valeurs,
du type de société où ils perdraient leurs habitudes de vie sociale. Car ce qui
intéresse en premier lieu les paysans mossi, c'est de se nourrir et nourrir les leurs:'
c'est-à-dire assurer la subsistance de la famille à travers les cultures vivrières
traditionnelles. Tout le reste est lié à cette priorité dans les stratégies paysannes de
production.
Si l'adoption du système des cultures irriguées par les paysans mossi ne fut
pas immédiate, on ne saurait non plus parler véritablement d'échec, car le système
d'encadrement mis en place pour former les paysans (les coopératives placées sous
l'autorité des CRPA, sont chargées de la formation des paysans) se perfectionne au
fur et à mesure de la correction d'erreurs d'approche du milieu paysan ou de défauts
méthodologiques dans la diffusion des nouvelles technologies culturales.
309

"L'acceptation timide" de l'aménagement évolue vers un engouement de plus
en plus marqué de la part des paysans qui, s'apercevant des meilleurs rendements
rizicoles sur les périmètres irrigués s'y adonnent entièrement.
Les rendements sur les périmètres sont liés surtout au niveau d'encadrement
technique et de l'existence ou non de débouchés pour les produits cultivés.
L'augmentation de la population des deux localités concernées (environ 2,68 % par
an) et de celle de la consommation moyenne annuelle de riz par tête (de 4 kg en
1966 à 12,3 kg en 1986) sont également un autre facteur influant sur les rendements
sur les périmètres98 .
En conséquence, les superficies sous maîtrise de l'eau (qui pour ces cas
précis est totale) progressent au détriment des superficies de riziculture traditionnelle.
10.3.3. Commercialisation des produits agricoles
La commercialisation des produits agricoles et notamment des céréales
soulève de nombreuses interrogations à la fois d'ordre méthodologique et pratique.
A défaut de disposer de connaissances suffisantes sur la structure même de la
commercialisation et ensuite d'instruments d'appréciation du comportement des
agents économiques dans un environnement soumis aux aléas climatiques et aux
variations d'autres paramètres (fluctuation des prix sur les marchés extérieurs par
exemple), il est difficile de cerner avec précision à la fois tous les circuits
98
Les statistiques nationales révèlent que le Burkina Faso était auto-suffisant
en riz en 1961 avec 86 % pour ne tomber qu'à 31 % en 1986 et doit donc
importer une part importante de riz.
310

commerciaux et le volume des produits agricoles commercialisés; la question est
rendue encore plus compliquée que les données statistiques disponibles sont peu
fiables la plupart du temps parce qu'incomplètes ou imprécises.
La commercialisation des céréales s'étale sur l'année avec trois moments
distinctifs:
- le premier moment de commercialisation a lieu immédiatement après
les récoltes (en réalité une partie est souvent même vendue avant que
les récoltes ne parviennent à maturité) au mois de décembre ou de
janvier. Les prix des céréales sont généralement bas à cette période,
mais restent variables d'une campagne à l'autre suivant que la
pluviométrie a été bonne ou mauvaise;
- le second
moment peut être considéré comme une période
intermédiaire, et reste caractérisé par un relatif relèvement des prix des
céréales. Il se situe entre février et mai;
- le troisième moment est qualifié de "période de soudure" parce que
les greniers sont généralement vides durant ce laps de temps
Uuin-septembre, avec un point culminant en août) alors qu'il correspond
à une phase d'intenses travaux agricoles. C'est à cette période que les
prix des céréales sont les plus élevés.
311

Carte
nO 13
BURKINA FASO
Markayo ...
PRINCIPAUX MARCHES
Ga'am- Ga'am 1:::,..
""
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* Marché de consommation urbain
0
Marché
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... Marché rural (produ~tion- échange)
6.
Marché
internatio nal
T
Tra nsit
R
Rural
o
25
50
75
100 Km
,.
1
1
1
1
1
S-u Semi - urbain
C 0 T
E
-
D'
1 V 0
R E
u
Urbain
Source: OFNACER
étude CRED
interviews -1986
312

Le paysan mossi change de comportement suivant la fluctuation du marché
des céréales au cours de ces trois moments, et divers facteurs jusque-là peu étudiés,
l'incitent à vendre ses céréales à tel ou tel moment de l'année. D'une façon générale,
il reste animé par le souci de maximiser son revenu dans une stratégie de moindre
risque vivrier. Ainsi dans la région du Centre-Nord reconnue comme chroniquement
déficitaire en céréales,
les transactions commerciales de céréales sont trés
développées même si elles sont réduites à de petites quantités: les paysans mossi
qui n'ont aucune autre source de revenus monétaires que la vente des produits de
leurs
récoltes,
vendent
souvent
leurs
céréales
initialement
destinées
à la
consommation ou à la réserve de soudure, pour en racheter à un prix plus élevé par
la suite. Ce comportement apparemment illogique s'inscrit pourtant dans une
stratégie d'une rationalité tout autre. La période des récoltes étant une période
d'abondance sur le plan alimentaire, la recherche de revenus monétaire est
privilégiée dans la stratégie;'paysanne de production (même si c'est à perte queqes
récoltes sont vendues), aucun risque n'étant encouru au cours de ce premier moment
de commercialisation.
Les paysans mossi vendent leurs céréales moins en fonction de la situation
du marché que pour satisfaire à certaines obligations familiales et sociales: fêtes
coutumières
à
célébrer,
besoins
sociaux
divers
(bicyclette,
poste-radio,
habillement...), coût des soins de santé etc. D'autres variables peuvent atténuer la
vente des céréales au cours de ce premier moment de l'année (où les prix sont au
plus bas) : aide financière d'un membre de la famille ayant un travail salarié ou d'un
migrant ou vente d'une partie du cheptel. .. car à certains moments de l'année la
nécessité pour les paysans de disposer d'argent frais s'impose.
313

Dans tous les cas, la circulation et la distribution des céréales aussi bien dans
la région du Centre-Nord que dans les autres régions du pays s'opèrent en fonction
des différences et des variations spatiales et saisonnières des prix, des informations
que les commerçants peuvent en avoir, de l'état des routes, du coût du transport, de
l'accès au crédit et de biens d'autres facteurs encore.
Les consommateurs sont-ils pour autant approvisionnés en céréales à des prix
modérés après prélèvement des marges bénéficiaires et des coûts récurrents (coûts
de transport et taxes diverses) et par rapport au prix à la production?
Les prix officiels à la consommation sur les marchés exercent-ils un impact sur
les comportements des populations rurales de façon générale?
Une étude du CILSS en cours de réalisation et dont les résultats provisoires
viennent d'être publiés y répond par l'affirmative 99.
99
Cf. Approche macro-économique et mise en oeuvre d'un système d'information
au Burkina Faso. CILSS 1987/1988.
314

Tableau 45 :
Taux de consommation per capita (T.P.C.) = 170 kg
Région du Centre-Nord. Année 1984/1985
Population
Besoins
Disp. 85 (T) Déf./Ex (T)
Déf./Ex per
Provinces
déc. 1984
(T)
récolt.84
capita kg
1985
Bam
161.869
27.518
17.080
-10.438
-64
Namentenga
198.100
33.677
14.598
-19.079
-96
i
Sanmatenga
363.474
61.791
68.869
+ 7.078
+19
Source:
Institut National de la Statistique et de la Démographie
(INSD) 1986.
315

Couverture des besoins en céréales par la production dans les trois Provinces
du Bam, du Namentenga et du Sanmatenga (par habitant).
Tableau 46 :
Taux de consommation per capita = 170 kg (selon les
normes de la FAO). Année 1985/1986 - Région du
Centre-Nord
Population
Besoins
Disp. 86 (T) Déf./Ex (T)
Déf./Ex per
Provinces
déc. 1985
(T)
récolt.85
capita kg
1986
Bam
165.777
28.182
38.488
-10.306
-62
Namentenga
201.282
34.218
32.728
- 1.490
- 7
Sanl11ateng a
376.677
64.035
73.590
+ 9.555
+25
Source:
Institut National de la Statistique et de la Démographie
(INSD) 1986.
Une comparaison entre les deux campagnes agricoles 1984/1985 et 1986/1987
révèle une légère amélioration de la production céréalière dans le Bam. Le
Namentenga est resté déficitaire durant deux campagnes successives, tandis que le
Sanmatenga connaît un excédent céréalier durant la même période et même a
augmenté sa production d'une campagne agricole à l'autre, ce qui mérite d'être
souligné dans une région couramment déficitaire en céréales.
316

Corte
nOl4
SUR KINA FASO
DEFICITS ET EXCEDENTS PAR PROVINCES
1-
Campagne 1983/84 (kg /hab )
,
,/
"
G'
~
~
~
~
SIS SIL 1
- 31
E N I
N
G
H
A
N
A
~ Zone d'étude
o
25
50
75
100 Km
1
1
1
1
1
"
C 0 T
E
o 1
1
V O l
R
E
Source INSO (données
ORO)
317

Tableau 47 : Bilan céréalier de la région du Centre-Nord
Population en
Besoins (190
Productions
Pertes et
Production
Bilan
Degré de
Provinces
1990
Kg/an/personne)
(en tonnes)
semences
nette (en
céréalier
satisfaction
(en tonnes)*
tonnes)
des besoins
Bam
172.566
32.788
28.482
4.272
24.210
- 8.578
74
Namentenga
213.208
40.510
39.945
6.005
33.940
- 6.570
84
Sanmatenga
402.032
76.386
68.345
10.740
57.605
- 18.781
75
TOTAL
787.806
149.684
136.772
21.017
115.755
- 33.929
77
Source:
Tableau élaboré sur la base des données de la campagne 1989/1990
Ministère Agriculture et Elevage 1989 par Thomas YIL! (DAT)
(*) Pertes semences correspondent à 15 % de la production brute.
318

Carte
nO 15
BURKINA FASO
PRINCIPAUX FLUX OE
CEREALES
Gorom - Gorom.
1-
/
\\
G'
"
.~
li-
11
~
,
,
,
,
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,
1
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(
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1-
ENI N
Leo

G
H
A
N
A
----1~~ Grands centres urbains vers centres urbains régionaux
-------. Mouvements marchés ô J'interieur
~ Zone d'élude
C ÔTE
D'
1 V
0
R
E
o
25
50
75
100 Km
1
1
1
1
1
Source:
Etude
319

10.3.4.
Commercialisation
du
riz,
des
productions
maraîchères et fruitières
La commercialisation du riz, une des principales cultures pratiquées sur les
périmétres irrigués, est assurée par FASO YAAR qui achète le paddy sur les
périmètres, le transporte jusqu'à son centre d'usinage à Sisalia (Bobo-Dioulasso).
Une fois le riz usiné, il est mis en consommation et une grande partie est transportée
à Ouagadougou. Dans cette opération de commercialisation intervient la Caisse
Générale de Péréquation (CGP) qui subventionne la collecte et le transport du paddy.
La Caisse de Péréquation détient par ailleurs le monopole d'importation du riz.
Les prix d'achat au producteur et les facilités de commercialisation ont un
impact direct sur le développement de l'irrigation. La production du riz est encore
acceptable pour l'exploitant parce que le transport et la collecte sont subventionnés.
Cependant, avec le développement certain de l'irrigation et de la riziculture, cette
subvention deviendra trop importante et insupportable à la longue. " serait
souhaitable de penser à une politique de valorisation de la production rizicole aux
abords immédiats des périmètres par l'installation de petites unités régionales ou
situées à proximité des grands aménagements. En fait, il s'agira d'accélérer la mise
en oeuvre d'une orientation, hélas! encore timide, mais déjà perçue par la Caisse
Générale de Péréquation.
Il est par ailleurs indispensable que dès à présent, la structuration des prix soit
revue en prenant suffisamment en compte le travail de l'exploitant. La fixation des
prix doit opérer le choix entre payer le riz à son prix, donc l'auto-suffisance
alimentaire, et un prix plutôt proche du cours mondial de cette céréale, ce qui va
320

décourager la production nationale. En somme, l'auto-suffisance a un prix qu'il faut
payer.
Le mécanisme de fixation des prix des productions maraîchères et fruitières
est régi par la loi de l'offre et de la demande. Il en découle que les prix des produits
irrigués autre que le riz, sont fonction de la période de l'année et de l'éloignement
des marchés. Ainsi, les difficultés d'écoulement des produits maraîchers en période
d'abondance, dues à l'inévitable déphasage entre le moment de la récolte et celui de
la consommation, et le manque d'infrastructure de stockage, amènent les producteurs
à liquider leurs productions aux premiers demandeurs.
Du fait aussi de l'inorganisation du marché, les acheteurs (commerçants) qui
disposent d'une surface financière relativement plus importante que les cultivateurs,
arrivent à imposer leurs prix sur les marchés.
Le tableau ci-dessous indique des prix moyens au détail de 1982 à 1985, de
produit maraîchers. On constate la forte variation du prix du kilogramme de tomate
fraîche alors que les prix des facteurs de production, eux, ne cessent de monter.
321

Tableau 48: Evolution des prix de quelques produits agricoles
Produits
Unité
1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987
Riz
1 kg
63
63
63
66
66
72
85
85
85
Mil
1 kg
57
69
80
80
90
90
94
Sorgho blanc
1 kg
57
69
80
80
88
88
94
Sorgho rouge
1 kg
47
61
75
75
83
83
87
Maïs
1 kg
57
69
80
80
88
88
94
Sucre blanc
1 kg
240
260
260
300
300
300
335
en morceau
Sucre blanc
1 kg
220
240
240
285
285
285
310
granulé
Sucre blond
1 kg
215
250
250
295
295
295
325
en morceau
Sucre blond
1 kg
215
235
235
275
275
275
295
granulé
* pour le riz, il s'agit du prix du kg de paddy
Source:
Direction des Prix, Ministére du Commerce, de l'Industrie
et de l'Artisanat 1990
322

Tableau 49 : Revenus bruts des exploitants de quelques périmètres irrigués du Centre-Nord
Production
Charges
Périmètres
Rendement
Prix
Valeur
Facteurs
Services
Redevance
Charges
Revenu à
Surface
Revenu par
Kg/ha
F CFA/Kg
Production
Production
divers
totales
l'hectare
moyenne/ex
exploitant
ploitant
Type 1
SCOOBAM
600
175
1.050.000
57.600
-
300.000
357.600
692.400
0,25
173.100
(H.v.)
Type 2
YALGO
12.000
40
480.000
40.000
-
160.000
200.000
280.000
0,125
35.000
(oignon)
N.B. :
- Le revenu est net des charges d'exploitation. Il ne prend pas en compte la rémunération
- H.v. = Haricot vert
- Les périmètres de la SCOOBAM et de Yalgo sont alimentés par pompage.
Source:
Direction des Prix, Ministère du Commerce, de l'Industrie et de l'Artisanat 1990
323

Tableau 50 :
Prix moyens de vente au détail de quelques produits maraîchers au
marché de Ouagadougou
Il
Produits
1 Unité 1
1982 1 1983
1984
1
1985
1
-- .
Tomates fraîches
kg
135
190
162
105
Concentré de tomate
kg
581
571
752
1.000
Oignons
kg
158
169
150
217
Ail
kg
1.654
1.277
1.133
1.638
Choux pommes
kg
148
180
121
217
Feuilles d'oseille
kg
126
151
135
151
Aubergine locale
kg
103
110
110
105
Feuille de haricot
kg
199
228
168
230
Boulvaca*
kg
289
279
227
380
Kinebdo
kg
184
175
162
189
Gombo sec
kg
584
499
662
1.060
Gombo frais
kg
201
202
160
205
Piment rouge sec
kg
1.322
1.416
1.217
1.574
* Feuilles à sauce (appellation locale)
Source: Direction des Prix, Ministère du Commerce, de l'Industrie et de l'Artisanat 1990
S'agissant essentiellement des productions maraîchères, la valeur des
quantités commercialisées par l'UCOBAM a varié de 1980 à 1986 de 270,7 millions
de francs CFA à 979,6 millions de francs CFA, avec une pointe en 1985 de 1.147,3
millions de francs CFA due à la création de la société de transport Naganagani
(tableau nÛ 44).
324

En ce qui concerne les fruits, leur commercialisation est essentiellement
assurée par le Projet Fruitier.
Les interventions de développement dans la région du Centre-Nord :
modalités pratiques de déroulement et participation des populations
rurales mossi
Jusqu'ici les études sur les opérations de développement en milieu rural se
sont contenté d'en souligner les échecs tout en révélant les causes de celles-ci, puis
porté leur intérêt sur les logiques paysannes et les logiques des interventions souvent
confrontées aux logiques des Etats.
Peu de choses ont été dites sur les agences (ou institutions) locales
d'exécution des opérations de développement, en particulier sur les contrôles qu'elles
exercent sur les paysans dont ils assurent l'encadrement technique et scientifique.
Les rapports structures d'encadremenUpaysans renferment cependant des
objectifs multiples et parfois ambigus, plus ou moins explicites dont la convergence
ou la divergence déterminent d'abord le bon déroulement des opérations de
développement sur le terrain et ensuite leur succès. Nous limiterons volontairement
ici quelques interventions de développement en milieu rural mossi du Centre-Nord
(qui comportent également des structures d'encadrement) pour en vérifier la
pertinence au niveau des trois Provinces (Barn, Namentenga, Sanmatenga) et la
signification profonde.
325

Ces interventions sont celles des types n° 1 et 2.
- le CRPA du Centre-Nord
- l'ADRK
- le PPIK et
- le PEDI.
Les caractéristiques communes à ces quatre interventions sont qu'elles
encadrent toutes les populations rurales dans leur ensemble et en particulier les
producteurs sous des formes variées ; le CRPA est une structure étatique
d'encadrement des paysans pratiquant aussi bien les cultures irriguées (dans les
périmètres aménagés le plus souvent par l'Etat) que les cultures pluviales (sur des
terres qui leur appartiennent ou simplement prêtées) ; il met l'accent sur les aspects
techniques de la production (emploi d'engrais chimiques ou des fumures, utilisation
des outils agricoles plus modernes comme les charrues etc.).
Quels étaient les modes d'organisation et de fonctionnement des structures
d'encadrement que représentaient les CRPA ?
Quelles furent les méthodes d'approche du milieu paysan mossi utilisées par
les agents d'encadrement des CRPA ?
Quelles techniques étaient diffusées auprès des paysans mossi et quels
résultats enregistrés?
326

Quel type de formation était assuré aux paysans?
Les CRPA en tant que structures politico-administratives comprennent le
modèle suivant d'organisation:
- à la tête de chaque CRPA est placé un directeur, chargé de coordonner
toutes les actions de développement rural au niveau d'une région dont il doit assurer
l'essor économique. Il travaille en liaison étroite avec deux autres structures, l'une
scientifique (le Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique qui
regroupe les Instituts de Recherche chargés de conceptualiser les techniques à
vulgariser)
et
l'autre
technique
constituée
par
l'ensemble
des
ingénieurs
agronomiques dont l'intervention technique précisément est souvent sollicitée sur le
terrain.
- Le directeur du CRPA regroupe sous son autorité des chefs de secteurs; un
secteur correspond à une portion régionale englobant un ensemble de villages
suivant la taille et la localisation géographique. Le nombre de secteurs est fonction
de l'étendue géographique et de la taille de la population de la région. C'est la plus
grosse unité de la région. Les chefs de secteurs sont donc des représentants locaux
du directeur du CRPA.
Les secteurs eux-mêmes sont divisés en zones ; une zone est une unité
régionale intermédiaire entre le secteur et l'espace aménagé (qui représente la plus
petite unité régionale). Elle regroupe un nombre d'exploitants de périmètres variant
entre 100 et 300 personnes (ce chiffre varie suivant les zones, et les secteurs).
327

L'effectif des exploitants ne correspond pas forcément à celui d'un village ou
d'un ensemble de villages. Les chefs de zones sont les représentants des chefs de
secteurs sur les zones. Leur nombre varie en fonction de la taille de la zone et du
personnel technique disponible.
Les zones enfin comprennent un nombre plus ou moins élevé de parcelles
dirigées par des encadreurs. Une zone comprend au moins deux encadreurs. Ces
derniers sont de véritables techniciens ; ce sont eux qui forment les paysans à
l'adoption de nouvelles techniques culturales, qui les approvisionnent en intrants
agricoles, qui supervisent le stockage et la commercialisation de leur production
agricole par le biais de la coopérative. En somme ce sont eux qui sont chargés de
l'application de la politique du développement régional dont la responsabilité reléve
du directeur du CRPA.
Mais que d'intermédiaires entre le directeur du CRPA et les encadreurs?
Une structure politico-administrative si bureaucratique (si lourde) pouvait-elle
fonctionner efficacement?
Du niveau d'instruction des encadreurs.
Si généralement, les CRPA sont dirigés par des ingénieurs agronomes pour
des raisons d'efficacité des actions sur le terrain en raison de leur formation à la fois
scientifique et technique, ceux-ci confient la plupart du temps une bonne partie de la
mission qui leur est assignée aux chefs de secteurs. Ils ne se consacrent plus qu'à
une gestion administrative du CRPA, tâche dont ils s'acquittent d'ailleurs avec
beaucoup de difficultés100. Les chefs de secteurs sont pour la plupart d'un niveau
100
La gestion de plusieurs CRPA a été vivement critiquée par les TPR
(Tribunaux Populaires de la Révolution) entre 1985 et 1988 et
beaucoup de leurs responsables condamnés pour corruption et
détournements de fonds.
328

d'instruction ne dépassant pas la classe de troisième de l'enseignement général
(ceux de niveau Bac ambitionnent de devenir Directeur du CRPA). Ils proclament à
qui veut les entendre qu'ils sont les reprèsentants légitimes du Directeur du CRPA.
Au début de leur recrutement, (sur concours), ils recevaient une formation technique
d'une année à peine et étaient chargès de former à leur tour les chefs de zones dont
ils devaient contrôler l'action sur le terrain. Par la suite, après leur recrutement, ils
étaient immédiatement envoyés sur le terrain pour être formés en même temps que
ceux qu'ils devaient former.
Leur mission se réduit à donner des "ordres" aux chefs de zones auxquels ils
réclament régulièrement des rapports écrits pour les besoins de l'administration, en
particulier pour le rapport annuel d'activités que doit fournir chaque Directeur de
CRPA.
Les chefs de zones sont d'anciens écoliers qui n'ont pas pu (pour des raisons
diverses) poursuivre leurs études dans les cycles secondaire et supérieur et qui
manifestent de l'intérêt pour le monde rural. Beaucoup d'entre eux entretiennent des
relations privilégiées avec les chefs de secteurs ou ont des affinités avec le directeur
du CRPA lui-même. Ils servent de relais entre les techniciens de terrain (encadreurs)
et l'administration (chefs de secteurs et directeur).
Quant aux encadreurs qui sont pratiquement de même niveau que les chefs
de zones, ce sont de véritables techniciens agricoles qui à défaut de recevoir une
formation appropriée au moment de leur recrutement assurent leur auto-formation
technique sur le tas et dans le vif de l'action avec les paysans sur le terrain. Ils sont
proches des paysans, les écoutent, les connaissent mieux que quiconque; mais
329

l'absence ou l'insuffisance d'une formation technique appropriée freine l'efficacité de
leurs actions sur le terrain.
L'organisation des structures d'encadrement que sont les CRPA est telle que
lorsqu'un message part du directeur du CRPA, il parvient aux paysans complètement
"dilué" ou déformé et vice-versa; le manque de communication entre les différents
agents d'encadrement d'une part, le caractère plus administratif que technique de la
structure d'encadrement d'autre part sont les principales faiblesses de ce modèle
d'organisation quelque peu rigide.
Dotés d'énormes moyens financiers octroyés par des bailleurs de fonds
extérieurs au début de leur création, les CRPA ont adopté un modèle de
fonctionnement marqué par une forte hiérarchisation dans les rapports de travail: le
résultat de ce type de fonctionnement s'est traduit par, outre la lenteur et la lourdeur
(devenues classiques), un formidable gaspillage de ressources humaines, matérielles
et financières: la corruption, le népotisme, les détournements de fonds prenaient la
forme d'habitudes de vie sociale pour les agents qui y travaillaient.
Que
devenaient
les
paysans
mossl
dans
ce
système
politico-
techno-administratif ?
Les paysans étaient perçus par les agents d'encadrement comme des
producteurs; plus ils suivent et mettent en pratique les techniques culturales qui leur
étaient proposées (semis en ligne, utilisation d'engrais chimiques et organiques,
option pour la culture attelée ... ), plus ils obtiendront de meilleurs rendements
330

agricoles pour atteindre le double objectif que s'assigne chaque paysan mossi
sécurité et auto-suffisance alimentaires - revenus monétaires.
10.4. Les
méthodes
d'approche
du
milieu
paysan
mossi
par
les encadreurs du eRPA
Le faible niveau d'instruction des agents d'encadrement dans leur ensemble
à l'exception des premiers responsables, l'insuffisance de la formation qui leur est
offerte (en particulier une formation anthropologique ou sociologique de base serait
indispensable) ne peuvent que limiter la portée des méthodes d'approche du milieu
paysan par les encadreurs. Ceux-ci tentent plutôt de s'adapter aux pratiques locales
des paysans tout en apportant progressivement des corrections aux pratiques jugées
"déviantes" (non conformes à la réglementation du CRPA comme le non respect du
calendrier agricole sur un périmètre irrigué).
Les rapports directs encadreurs-paysans évoluent souvent vers une sorte de
clientélisme, les paysans recherchant les bonnes grâces des encadreurs et ces
derniers cherchant des alliés parmi les fidèles paysans qu'ils contrôleraient davantage
pour garantir le succès de leur carrière professionnelle. Ce clientélisme se traduit
concrètement par offres de dons en nature et en espèce de la part des paysans aux
encadreurs qui à leur tour accordent aux paysans des faveurs, comme l'octroi gratuit
ou la vente à moindre coût d'intrants agricoles.
331

Les approches du milieu paysan mossi se réalisaient aussi par l'intermédiaire
de la vulgarisation des techniques culturales (charrues, houe manga, charrettes ... ).
Les paysans étaient invités à s'organiser en groupements villageois ou en
coopératives pour bénéficier soit de crédits agricoles, soit du matériel agricole à
crédit. ..
Des réunions régulières se tenaient dans les villages par les encadreurs pour
expliquer aux paysans la philosophie des CRPA, leurs objectifs et leurs moyens, en
insistant sur les avantages
à
adhérer aux groupements villageois ou
aux
coopé ratives.
Des campagnes de sensibilisation des paysans étaient également entreprises
par la radio, principal moyen d'information en milieu rural.
Les résultats obtenus par les encadreurs auprès des paysans dans le cadre
de la formation technique sont-ils satisfaisants?
332

Il est tentant de répondre par l'affirmative si l'on tient compte de la formation
initiale des encadreurs eux-mêmes; mais en réalité, les résultats enregistrés sur le
terrain sont plus que mitigés, les paysans mossi ayant pénétré le système
d'encadrement pour mieux le comprendre et l'utiliser à leur profit. C'est ainsi par
exemple qu'ils se servent des groupements villageois et des coopératives pour
obtenir des crédits de la CNCA (Caisse Nationale de Crédit Agricole) qu'ils ne
remboursent jamais, qu'ils détournent de l'argent (constitué par les cotisations des
membres de la coopérative) au sein même des coopératives sans que des poursuites
judiciaires ne puissent être engagées à leur encontre (l'éthique mossi étant plutôt
tolérante à l'égard des individus coupables de vol). Il résulte d'une telle situation une
indiscipline caractérisée dans les rangs des exploitants agricoles, en particulier au
niveau des périmètres irrigués où le non respect du calendrier agricole, des tours
d'eau, le non paiemertt des redevances, la non participation aux activités du
groupement entraînent une rapide détérioration des infrastructures hydrauliques et
autres
équipements
socio-collectifs,
compromettant
gravement
la
rentabilité
économique des aménagements hydro-agricoles.
333

Tableau 51
Volume de crédits accordés par la CNCA101 en millions
de F CFA
Rubriques
Année
1983-1984
1984-1985
1985-1986
Crédit à l'économie
5.699
8.114
9.971
Crédit à l'agriculture
644
1.113
789
Pourcentage
11,30%
13,71%
7,91%
Source:
CILSS-CLUB DU SAHEL: Le développement des cultures irriguées.
Bilan critique - contraintes - propositions d'amélioration. Tome 1
(rapport principal) 1990.
101
La CNCA accorde deux sortes de crédit:
(1 )
Le crédit moyen terme destiné à l'équipement des exploitants des
périmètres irrigués;
(2)
le
crédit
court
terme
ou
crédit
de
campagne
destiné
à l'approvisionnement des exploitants en facteurs de production.
N.B. : Il existe d'autres institutions comme la SOFITEX (Société des Fibres et
Textiles) et des ONG comme l'ADRK qui accordent aussi des crédits
agricoles.
334

10.5. Le contenu de la formation assurée par les agents d'encadrement
aux populations rurales
Les thèmes contenus dans la formation sont principalement axés sur les droits
et devoirs des populations rurales sur leurs terres, sur les structures d'encadrement.
L'accent est particulièrement mis, en ce qui concerne les populations exploitant les
périmètres irrigués, sur les contraintes liées au système de l'agriculture irriguée, la
nécessité d'une bonne organisation et la mobilisation de tous les paysans-exploitants
autour du rôle des coopératives (formées ou à former) dans la vie des périmètres.
L'on remarquera que les thèmes de formation ne comportent pas de volets
anthropologiques ou sociologiques ou encore des volets sanitaires pourtant
indispensables à des paysans regroupés en coopératives pour travailler de façon
collective.
Les connaissances à faire acquérir aux paysans étaient entre autres:
- les techniques d'entretien et de maintenance des structures physiques
de l'irrigation et une gestion rationnelle de l'eau;
- les techniques agronomiques en attirant l'attention sur la nécessité
d'une stricte application des thèmes techniques et du respect du
calendrier agricole;
335

- un esprit d'organisation en mettant l'accent sur la discipline, le respect
des décisions collectives et de celles des agents d'encadrement ainsi
que sur la participation aux diverses activités du groupement;
- une formation économique. Les formateurs s'efforcent pour cela de
faire en sorte que les paysans possèdent une maîtrise des outils de
gestion de leur exploitation, aussi bien en amont (problèmes des
facteurs de production, des intrants, de crédits, de taux d'intérêt, etc.)
qu'en aval (problèmes de commercialisation, de débouchés ... )102.
Il est à signaler qu'une formation d'un niveau plus élevé est assurée aux
membres des bureaux des groupements villageois et des coopératives dont le but
consiste
à
en
faire
"des
animateurs
avertis
de
toutes
les
activités
socio-économiques d'un périmètre appelé à s'autogérer. Ainsi, l'accent est mis
sur les problèmes de gestion des hommes et des biens du périmètre. A ce titre,
ils apprennent à animer et diriger les discussions, à tenir la comptabilité du
groupement (ou de la coopérative) et à être les interlocuteurs représentant les
intérêts de leur périmètre auprès des sources d'approvisionnement des intrants
et des crédits d'une part, et des structures de commercialisation d'autre
102
CILSS-CLUB DU SAHEL, op. ciL p. 92.
103
CILSS-CLUB DU SAHEL, op. ciL p. 93.
336

En cas de besoin, certains membres de bureaux des groupements ou des
coopératives peuvent être envoyés en formation dans les CFJA (Centres de
Formation des Jeunes Agriculteurs) pour qu'ils reviennent former ensuite et à leur
tour les autres agriculteurs. D'ordinaire après une telle formation, ils se retrouvent
dans des Groupements de Jeunes Agriculteurs (GJA) pour rester des éléments
moteurs en milieu paysan.
En ce qui concerne le cas précis des agents d'encadrement, leur présence sur
le terrain constitue déjà un problème, indépendamment de la formation qu'ils sont
censés assurer aux paysans.
Les agents d'encadrement étant payés par l'Etat, au niveau de chaque village,
tous les paysans luttent pour obtenir qu'un des leurs devienne un jour encadreur pour
leur servir d'intermédiaire entre les différentes structures d'encadrement et
notamment leur faciliter l'accès rapide à l'administration pour la résolution de leurs
différents problèmes. Une concurrence entre les candidats potentiels aux postes
d'encadreurs contribue ainsi à entretenir parfois un climat social tendu au sein des
populations rurales mossi, peu propice au développement de la communauté.
Peut-être faut-il laisser l'initiative aux populations elles-mêmes de choisir leur
encadreur parmi les candidats les plus aptes à assurer ces fonctions et leur faire
endosser la responsabilité commune de la bonne marche des périmètres en leur
accordant des financements (comme le font la CNCA et d'autres ONG) et leur
assurer un encadrement technique. Les techniques d'encadrement adoptées par
certaines ONG comme l'ADRK peuvent-elles constituer une alternative en matière
d'approche et de formation du monde rural?
337

L'ADRK accorde en effet des crédits aux paysans. Ces crédits au départ sont
des prêts subventionnés octroyés aux paysans pour leur permettre de réaliser le
passage à la culture attelée.
L'ADRK apporte également un appui technique aux actions d'accompagnement
du développement (fourniture d'eau potable, approvisionnement en céréales, lutte
anti-érosive,
constructions d'écoles ou de maternités, aides diverses aux artisans
comme les forgerons etc... ).
Les populations de deux des trois Provinces (Namentenga et Sanmatenga)
sont unanimes à apprécier l'action de cette ONG dans les domaines qu'elle couvre
et qui contribue à leur mieux-être.
Le PPIK (au Sanmatenga) PPIL au Bam et PPIB au Namentenga) quant à lui,
encourage les initiatives locales des paysans aussi bien dans le domaine de
l'agriculture, de l'élevage que celui de l'artisanat.
Les interventions de cette ONG se traduisent par les facilités accordées aux
paysans d'acquérir au moindre coût, des outils techniques plus modernes adaptés
aux actions de développement qu'ils entreprennent.
338

Le PEDI s'efforce de mener des actions de développement intégrées
(Agriculture-Elevage-Artisanat-Environnement) par l'intermédiaire des structures
locales de développement auxquelles des financements assez substantiels sont
accordés (conf. les montants qui figurent sur la partie inventaire des interventions de
développement dans le Centre-Nord), comme le CRPA104 .
Il
convient
de
préciser
tout
d'abord
que
l'existence
des
structures
d'encadrement au sein des agences ou institutions locales d'exécution des opérations
de développement n'implique pas une adhésion obligatoire pour les paysans. A tout
le moins est-ce pour l'Etat et aussi pour les bailleurs de fonds, un moyen de
contribuer à la formation technique des paysans pour améliorer leur productivité et
atteindre des objectifs économiques préalablement fixés.
Ensuite, et c'est la seconde précision, les 3 ONG (ADRK, PPIK, PEDI) sont
placées sous la double responsabilité et de l'Etat (par l'intermédiaire du bureau de
suivi des ONG (BESONG) et des bailleurs de fonds) 105 qui en règle générale
provoquent la mise en place des systèmes d'encadrement dans le but de contrôler
les actions de développement aux niveaux régional et national. En définitive les
104
Il n'existe pas de statistiques fiables sur les actions des ONG dans la
région; ce qui permettrait une évaluation en profondeur de l'ensemble
des interventions.
105
Le CRPA étant comme souligné ci-dessus, une structure étatique, il n'a
été jugé utile de le mentionner à nouveau dans les systèmes
d'encadrement des paysans.
339

structures d'encadrement du monde rural restent sous la supervision des CRPA
(ex-ORO).
Une telle
démarche signifie-t-elle changement
dans
la
stratégie
d'encadrement des paysans ou tentative de combler les insuffisances des ex-ORO?
En tout cas le changement d'appellation des structures d'encadrement des
paysans quoique formel, traduit une préoccupation vieille de trois décennies: celle
du monde rural et de meilleur encadrement.
Cependant, l'Etat a pratiquement maintenu une forme d'encadrement d'inégale
valeur technique et financière des paysans suivant qu'ils sont issus d'une région
économiquement bien dotée ou dépourvue de toutes ressources économiques.
Ainsi par exemple une attention particulière a toujours été accordée aux
régions cotonnières (ex-ORO de la Volta Noire et des Hauts-Bassins) qui sont des
régions naturellement favorisées et faiblement peuplées, tandis que les régions du
plateau central (dont l'ex-ORO du Centre-Nord), du Nord (Yatenga) et du Sahel (Dari)
peu nanties par la nature et assez peuplées ne bénéficient que d'un faible
encadrement de la part de l'Etat.
lV1ais alors choix politique et économique délibéré de l'Etat dont les résultats
sont l'accentuation des déséquilibres régionaux ou abandon des régions pauvres à
leur triste sort ?
340

Certes, des réflexions ont déjà été menées au niveau national à l'occasion des
séminaires et colloques, sur la conception des mécanismes d'intervention en milieu
rural (en particulier en milieu mossi) par l'Etat dans le but de trouver une forme
d'arbitrage entre développement du monde rural et croissance économique sectorielle
et régionale. Mais de véritables mesures allant dans ce sens ne furent jamais prises
et celles prises ne furent jamais appliquées en raison de la complexité de la question
qui met en jeu des intérêts économiques et politiques si divers et susceptibles
d'entraver le fonctionnement des structures d'encadrement, de menacer la paix
sociale et de provoquer un désastre économique au niveau national.
Le système d'encadrement introduit par la Banque Mondiale depuis 1987 106
apportera-t-il un changement à cette situation?
Au-delà de la mission de développement régional confiée aux CRPA par l'Etat,
leur spécialisation les conduit à une conception monolithique de l'encadrement limitée
stricto-sensu à la production agricole. Une telle conception de l'encadrement amène
les CRPA à ne considérer souvent les paysans que comme de simples producteurs
et non comme des artisans du développement capables de diversifier leurs activités
économiques et de développer des stratégies spécifiques à travers des attitudes et
pratiques apparemment sans grande signification.
106
Le système d'encadrement de la Banque Mondiale introduit en milieu
paysan en 1987 est la méthode dite "training and visit" conçue en Asie
du Sud-Est (Thaïlande) et répandue ensuite dans d'autres pays. Au
Burkina
Faso, c'est
plus précisément
le
système
PC-PS
(Paysan-Contact et Paysan-Suivi) qui est en vigueur et qui consiste à
appliquer des thèmes techniques (labour, semis en ligne, utilisation
d'engrais et de produits chimiques) sur les exploitations des régions du
Sud et Sud-Ouest du pays. Par effet de démonstration, la diffusion des
changements techniques se fera auprès des autres paysans.
341

Les CRPA en tant que structures d'encadrement ont-ils leur logique propre
(laquelle ?) ou obéissent-elles à celle de l'Etat?
Toujours est-il que l'encadrement technique des CRPA offre des possibilités
de pratiques de pouvoir aux agents de terrain qui dépassent largement leurs
attributions officielles: par exemple l'exigence d'un pot-de-vin par un agent
d'encadrement à un paysan pour bénéficier d'une inscription sur la liste des
attributions de parcelle sur un périmètre irrigué paraît tout à fait conforme aux normes
des rapports qui régissent agents d'encadrement et paysans.
D'où cet exemple suffisamment illustratif cité par Jean-Philippe Colin
(ORSTOM) et Bruno Losch (CIRAD/DSA) : "Le poulet blancl1it le coton" (le "don" d'un
poulet à l'encadreur facilite le classement du coton en première qualité, relevant du
même coup son prix d'achat) 107.
Les insuffisances de l'encadrement ne sont pas seulement techniques; elles
sont aussi morales rendant difficile l'intégration des paysans mossi dans les circuits
économiques s'ils ne maîtrisent pas la procédure de contrôle de leur production et
ne reçoivent pas une formation appropriée qui les situent par rapport à leurs
responsabilités et à celles de leurs encadreurs.
107
Voir Colin (J.P.) et Losch (B.) dans "Touche pas à mon planteur" :
réflexions sur les "encadreurs" paysans à travers quelques exemples
ivoiriens, Les Presses du CNRS, 1987 ; p. 91.
342

C'est pourquoi Jean-Philippe Colin et Bruno Losch tirent la conclusion suivante
au sujet du modèle de développement rural en Côte-d'Ivoire, mais qui est, en réalité
valable partout en Afrique:
"Aujourd'hui,
à
la
lumière
des
constats
sur
trois
décennies
d'interventions en milieu
rural africain post-colonial, plusieurs objectifs
s'imposent à l'évidence pour l'action : les paysans doivent être reconnus
comme des partenaires avec qui il faut compter et négocier; les encadrements
doivent évoluer vers moins de contrôle et plus d'appui au producteur avec
comme tâches essentielles l'information, la formation et le conseil ; les
politiques agricoles (nous dirions les politiques économiques tout court)
doivent définir les règles du jeu entre tous les acteurs économiques et sociaux
du monde rural.. ... 108.
Cette relative dépendance des paysans (exploitants des périmètres aménagés
par l'Etat) vis-à-vis des structures d'encadrement savamment entretenue par ailleurs
par les encadreurs eux-mêmes, pousse ces derniers à entreprendre des initiatives
locales, indices des dynamiques sociales en cours chez les Mossi. Par exemple,
l'analyse du circuit commercial sur les périmètres aménagés s'effectue de deux
manières:
108
Colin (J.P.) et Losch (B.), op. cit. p. 99.
343

1) le circuit officiel qui passe par les coopératives (forme d'organisation de
paysans encadrés par une structure de l'Etat) mais qui satisfait de moins en
moins le paysan;
2) les circuits parallèles à base d'initiatives paysannes, afin de valoriser au
maximum l'investissement en travail d'une manière personnelle.
En ce qui concerne la commercialisation de la production agricole par la
coopérative (premier circuit), elle consiste à rassembler la production de chaque
paysan à la coopérative. Cette production est achetée d'une manière différée par le
CRPA, par le biais de la coopérative. Le CRPA se charge de la revente de la
production mais ne paye la coopérative que lorsqu'elle-même a écoulé la production
sur les marchés intérieurs. Le CRPA en définitive ne paye pas la récolte mais joue
le rôle d'intermédiaire entre la coopérative et les marchés. Au bout du circuit, il arrive
fréquemment que le paysan ne soit effectivement réglé que deux ou trois mois après
avoir livré sa production à la coopérative. Cette part ainsi vendue représente environ
50 à 55 % du montant total des ventes.
Pour le paysan, une telle opération correspond à un manque à gagner net,
puisque la période de "repos" entre deux campagnes agricoles ne peut être mise à
profit pour obtenir des revenus monétaires. Attiré et façonné par l'économie
monétaire, le paysan voit ses bénéfices différés et se trouve pris dans un circuit
commercial qu'il ne maîtrise pas. Face à cette pratique, les paysans réclament à la
coopérative un marché libre où le remboursement s'effectue immédiatement dès la
fourniture de leur récolte. Or la coopérative en tant que simple intermédiaire ne peut
344

supporter une telle charge financière. Ce problème de la commercialisation de la
production agricole est rendu encore plus complexe à la suite de la constatation des
différences de prix entre les prix d'achat de la coopérative et le prix de revente sur
les marchés.
Cette situation a naturellement conduit les paysans à se passer des
intermédiaires comme la coopérative pour vendre directement leur production sur les
marchés en vue d'obtenir de revenus monétaires immédiatement. Ces transactions
commerciales ont fini par créer des circuits commerciaux non officiels (deuxième
circuit) où la production écoulée représente environ 5 % de la production totale par
hectare récolté et au moins 15 % du montant total des ventes; chaque paysan garde
environ 20 à 30 % de sa production pour les besoins alimentaires de sa famille (y
compris des stocks prévisionnels pour les campagnes agricoles défectueuses), bien
qu'en réalité les Mossi consomment peu de riz, lui préférant le milou le sorgho.
En se soustrayant ainsi du cadre de la coopérative, le paysan parvient à
assurer presque la moitié de son bénéfice, ne plaçant dans le circuit officiel qu'un
quart environ de sa production.
La commercialisation du riz par les circuits parallèles comportent bien entendu
des avantages et des inconvénients. Le principal avantage est pour les paysans
mossi celui d'obtenir de l'argent frais pour subvenir à leurs besoins sociaux
immédiats; le principal inconvénient réside dans la situation de dépendance vis-à-vis
des commerçants dans laquelle ils se trouvent placés. D'où l'attitude ambiguë
qu'adoptent les paysans à l'égard des commerçants: "les commerçants sont des
voleurs (parce qu'ils achètent moins cher le riz par rapport à son prix normal, sachant
345

bien que les paysans sont dans un besoin pressant d'argent) ; mais ce sont aussi
des bienfaiteurs. C'est eux qui nous sauvent des situations difficiles" (déclarent
quelques paysans interrogés).
Toujours est-il que se développent au niveau des paysans mossi de nouvelles
stratégies de promotion sociale à partir des activités agricoles qui semble représenter
la seule chance de réussite. Dans cette perspective, les revenus agricoles finissent
par être considérés comme un salaire. Ce qui compte, c'est de produire, quitte à
acheter sa nourriture avec le produit de la vente du riz, du coton, des fruits et
légumes.
"
est
difficile
d'avoir des
données
statistiques
sur
les
transactions
commerciales qui s'effectuent entre paysans mossi et commerçants par les circuits
parallèles,
une forme
de discrétion
ayant toujours entouré
ces
opérations
commerciales.
Ainsi la rationalité des paysans est en corrélation avec les objectifs prioritaires
qu'ils s'assignent au niveau de chaque type d'intervention de développement. Ces
objectifs
sont presque
toujours
identiques dans
chacun
des
quatre
types
d'interventions (auto-suffisance et sécurité alimentaires, revenus monétaires, temps
de travail en général évalué par jour) ... et sont déterminés par les conditions
socio-économiques et culturelles dans lesquelles vivent ces paysans.
Les modalités pratiques des interventions de développement en milieu rural
mossi ne suivent pas un schéma précis tracé d'avance, en raison de la diversité de
ces interventions, des exigences des bailleurs de fonds et de l'Etat, et enfin des
346

prédispositions des populations à les accueillir ou à les rejeter. En tout état de cause,
la connaissance du milieu apparaît comme une condition préalable à toute action sur
le terrain car elle permet d'introduire le dialogue entre les différents acteurs de
développement en présence. Cette démarche permet de susciter au maximum
l'initiative, la participation et l'auto-responsabilisation des populations-cibles. C'est à
partir des données sur la connaissance du milieu que l'on déterminera si les
changements significatifs escomptés sur le plan socio-économique et sanitaire sont
possibles soit en s'appuyant sur des structures créées par l'Etat (CRPA-Coopératives
par exemple) ou par les ONG (ADRK, PPIK, PEDI) soit sur les structures
traditionnelles (comme les associations ou regroupements d'hommes eUou de
femmes) soit encore sur une combinaison des deux formes de structures.
La sensibilisation peut constituer une seconde étape dans le déroulement des
interventions de développement: la sensibilisation doit être un processus permanent
de réflexion-action qui vise la détermination, l'analyse et la compréhension des
problèmes par les populations-cibles. Ainsi, les interventions de développement en
milieu rural, lorsqu'elles sont surtout suscitées de l'extérieur, ne sauraient annihiler
les initiatives à la base, mais tendront plutôt à appuyer les efforts des paysans déjà
regroupés au sein de leurs organisations (traditionnelles ou modernes) pour les aider
à améliorer et à renforcer leur capacité à faire face à leur propre développement.
La troisième étape serait celle de la formation même des agents de terrain qui
devraient pouvoir adapter les mécanismes d'encadrement aux réalités sociologiques
et socio-économiques de la zone d'intervention.
347

!
Enfin, le nécessaire dialogue à instaurer entre les différents intervenants grâce
à un système d'information qui reste à développer, pourrait contribuer à plus de
compréhension quant aux objectifs et logiques des interventions et de ceux des
paysans en vue d'une plus grande efficacité des actions de développement.
.f
348

N° d'ordre
,
.
.
'. FACULTE DES LETTRES, ,ARTS ET SCIENCES HUMAINES
INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT'
ET TRANSFORMATIONSSOCIO·ECONOMIQUES ..' .
ET SANITAIRES AU BURKINA FASO'
REGION DU CENTRE-NORD
. (PROVJNCES DU SAM, DU NAMENTENGA .
.ET DU SANMATENGA).
TOME If
THESE DE DOCYORATÈS LETTRES lET SCIENCE,S! ,HUMAI~ES
.
l
'.
1
;
\\
, ;
l,
1
.
OPTION : SOCIO~OGIE
Présentée par :
Jean-Baptist'e OU ED'RA,OGO
SO!-f5 la direction de :
. Mo,nsi'eur KOUA~OU N'GUESSAN Fr,ançois, Professeur
-
. -,
Année Universitaire 1995·1996

349

CHAPITRE VII :
IMPACT SOCIO-ECONOMIQUE ET SANITAIRE
DES INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT
EN MILIEU RURAL MOSSI
11.
ANALYSE DES INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT DANS LEUR
GLOBALITE DANS LE CENTRE-NORD
11.1. Problèmes de méthodes
Les interventions de développement rural
représentent des situations
complexes et leur évaluation pose des problèmes méthodologiques. Suivant la nature
de
l'intervention
(encadrement
technique,
protection
de
l'environnement,
développement de la filière coton, des cultures irriguées ... ), du statut juridique de son
auteur (Etat, ONG, société de développement ... ), l'approche méthodologique peut
sensiblement varier. D'autres éléments extérieurs à l'intervention rentrent aussi en
ligne
de
compte
comme
les
aléas
climatiques,
la
politique
des
prix,
d'approvisionnement en inputs etc.
C'est peut être pour toutes ces raisons que les interventions de développement
rural (à l'exception de celles des CRPA) ne font pas l'objet d'une évaluation
systématique et régulière.
350

Comment évaluer une intervention de développement et par qui?
"Evaluer une
opération
de
développement revient à analyser
la
confrontation entre un projet et un milieu"109.
Mais qui est habilité à évaluer une opération de développement? Un expert
en développement, un chercheur (de quelle discipline ?) ou l'organisme ayant financé
l'opération?
Comment et avec quels instruments mesurer les effets des interventions de
développement sur les conditions d'existence, en particulier sur la situation socio-
économique et sanitaire des populations rurales?
Nous entendons ici par effets des interventions de développement leur
rentabilité économique, financière ou sociale, réelle ou supposée. En termes plus
simples, il s'agit de la profitabilité des interventions de développement, et la question
de la rentabilité revient à répondre à la question suivante: que gagnent les paysans,
l'Etat, les bailleurs de fonds ... dans les interventions de développement?
La rentabilité d'une intervention de développement peut être appréciée suivant
deux approches :
109
Mission d'évaluation réalisée par le service des évaluations, Ministère
des Relations Extérieures, Services Coopération et Développement,
conjointement par P. THENEVIN et J.M. YUNG.
351

Premièrement,
lorsqu'une
intervention
de
développement
est
entièrement subventionnée par l'aide internationale, c'est la méthode
classique d'évaluation économique qui est utilisée et qui privilégie le
point de vue du bailleur de fonds pour justifier son investissement. Le
point de vue de l'Etat pour qui le coût de l'investissement est nul, n'est
pas pour autant négligé. L'Etat doit en effet s'assurer de l'équilibre
financier du fonctionnement des réalisations physiques de l'intervention
à des niveaux de protection acceptables lorsque le coût de ces
réalisations est suffisamment élevé pour être supporté par les
populations, ou que le fonctionnement de celles-ci requiert une
formation technique spécialisée qu'il ne peut être confié qu'à des
experts techniques.
Deuxièmement, si en revanche l'intervention de développement est
financée par un prêt, sa rentabilité résulte d'un calcul entre son coût
global et son gain financier, lequel calcul intègre le service de la dette
contractée pour financer son investissement. Deux cas sont alors à
distinguer:
La coopération bilatérale: les prêts bilatéraux sont soumis à des
critères politiques, c'est-à-dire à dire négociations d'Etat à Etat.
La coopération multilatérale: pour certains bailleurs de fonds, les
conditions de prêts (taux, durée) sont fonction du type de projets
(productif, agricole ... ) et de la capacité de négociation de l'Etat,
de l'ONG ou de l'initiateur de l'intervention de développement.
352

Le recours répété aux sciences sociales après les nombreux échecs des
interventions de développement atteste que si l'évaluation ne doit pas être faite par
le chercheur, elle ne peut se faire sans son concours. Au-delà donc des problèmes
méthodologiques qu'elle pose, l'évaluation appelle une autre interrogation: l'utilité
pratique des sciences sociales dans les interventions de développement.
Sans vouloir nous introduire dans un débat académique qui a toujours
caractérisé les sciences sociales dans leur évolution, divisées en tenants d'une
recherche fondamentale et ceux d'une recherche appliquée, nous voudrions nous
efforcer de comprendre la logique propre qui sous-tend chaque type de recherche en
rapport avec le développement. Notre ambition bien modeste se situant à un niveau
où la recherche permet certes d'acquérir des connaissances mais en vue de l'action
afin de pouvoir rendre plus efficaces les interventions de développement.
J.P. OLIVIER DE SARDAN aime à rappeler les "dialogues de sourds"110
entre recherche fondamentale et recherche appliquée en sciences sociales et
opérateurs de développement, ou même au sein des sciences sociales entre
ethnologues - anthropologues, sociologues et les agro-économistes, qu'il considère
comme un "malentendu fondamental". Si la tradition anglo-saxonne en matière de
recherche en sciences sociales a réussi à dégager un consensus sur l'utilité pratique
ou l'efficacité opérationnelle que ces sciences peuvent apporter aux interventions de
développement en jouant le rôle de conseiller en développement, il n'en va pas de
même pour les spécialistes français en sciences sociales comme le souligne
A. SCHWARTZ:
110
Les expressions sont empruntées à OLIVIER DE SARDAN (J.P.).
353

"La pratique d'une sociologie engagée dans l'application ne fait pas
toujours l'unanimité dans la décennie 1980 du moins parmi les chercheurs
français qui continuent à s'interroger sur la fonction qui doit être celle des
sciences sociales dans la recherche liée au "développement" et à se partager
entre deux camps bien distincts: ceux qui acceptent que leur recherche serve
d'aide à la décision et conçoivent que leur fonction puisse être "d'intervention",
ceux qui refusent que leur recherche serve de "caution" à la décision et ne
conçoivent pas que leur fonction puisse être autre que de "connaissance"111.
Le souci d'efficacité méthodologique nous impose une description un peu trop
détaillée des réactions paysannes aux transformations socio-économiques et
culturelles provoquées par les interventions de développement en milieu rural mossi,
en estimant que si les interprétations que nous en faisons peuvent être remises en
cause, l'exposé des faits sociaux observés constitue incontestablement un apport à
la cconnaissance, susceptible (si cela est pris en compte) de contribuer au succès de
toute action de développement en milieu rural en général. Une telle démarche peut
sembler simpliste, mais est en tout cas indiquèe pour mieux cerner le phénomène du
développement comme l'a si bien souligné J. TRICART :
" ... La condition sine qua non du véritable développement, écrit J. Tricart,
est la mise au point d'approches adaptées cas par cas. Une telle approche
adaptée doit reposer à la fois sur la connaissance des spécificités du milieu et
111
SCHWARTZ (A.), Du Sassandra au Cavally : une anthropologie du
sous-développement. Thèse d'Etat. Université Paris V "René-Descartes"
- Sorbonne 1989, T. 1; p. 19.
354

sur
celle
des
groupes
sociaux
et
prendre
en
charge
leurs
relations
d ialectiq ues" 112.
11.2. Evaluation de l'impact des interventions de développement en
milieu rural mossi
Il
peut paraître
ambitieux de vouloir évaluer
l'impact d'un
ensemble
d'interventions de développement dans un milieu rural sans observations régulières
du début à la fin des actions engagées sur le terrain. Mais cette tâche est rendue
indispensable pour, à la fois, corriger certaines erreurs d'approches méthodologiques
du
milieu rural,
les insuffisances des connaissances
relatives aux différents
comportements des paysans face aux diverses interventions de développement afin
d'en accroître l'efficacité à travers des structures internes ou externes aux
interventions elles-mêmes. Cette démarche ne répond pas seulement aux exigences
des bailleurs de fonds dans le but de comparer les inputs et les outputs; elle éclaire
et justifie aussi les interventions de développement rural auxquelles elle tente de
donner un sens en rendant plus compréhensives les actions sur le terrain.
Après l'échec des plans (trop ambitieux) de développement des années des
indépendances (1960) et la réduction progressive de l'épargne nationale ainsi que
des crédits consacrés aux investissements dans les diffèrentes régions économiques
du Burkina, les bailleurs de fonds extérieurs se résolvent à assurer une plus grande
part des investissements dits "productifs" pour promouvoir le décollage économique
national à travers des plans régionaux de développement. En réalité, ces plans
112
TRICART (J.) cité par A. SCHWARTZ, op. cit. p. 654.
355

n'étaient rien d'autre qu'une liste de projets, un lieu de rencontre entre une demande
de l'Etat et une offre extérieure de financement. La Banque Mondiale et le Fonds
Monétaire International étant non seulement les principaux bailleurs de fonds, mais
également à l'origine de l'élaboration de ces plans de développement.
Il se pose alors la question de l'approche du développement par projet qui bien
souvent est déconnectée des contraintes macro-économiques. Il est vrai que des
débats se mènent toujours aujourd'hui autour du mode de calcul économique devant
servir à l'évaluation des projets de développement.
La Banque Mondiale par exemple calcule les taux de rentabilité en utilisant
comme référence les prix internationaux pour chaque produit. D'autres institutions et
spécialistes évaluent les projets en fonction de leur capacité à s'intégrer à l'économie
nationale113. Il faut ici souligner que l'existence de plusieurs bailleurs de fonds
entretenant des points de vue différents sur les politiques économiques construites
sur la base d'un ensemble de projets rend difficile la mise en oeuvre pratique de
celles-ci et par conséquent leur évaluation.
Car comme le souligne E. Morin:
"Les plus grands progrès des sciences contemporaines se sont effectués
en réintégrant l'observateur dans l'observation ... Tout concept renvoie non
113
CHERVEL (M.), LE GALL (M.) : Manuel évaluation économique des
projets. La méthode des effets. Ministère des Relations Extérieures.
Coopération et Développement. Paris 1989. P. 136.
356

seulement à l'objet conçu mais au sujet concepteur... Toute connaissance,
même la plus physique, subit une détermination sociologique"114.
Toutefois, il faut souligner que la tâche d'évaluation de l'impact des
interventions de développement en milieu rural mossi n'est guére aisée. Comment
en effet déterminer la part des changements intervenus dans l'écosystéme, les
domaines économique (systéme de production, techniques de cultures ... ) social
(différenciations sociales dues au statut social, à l'âge, au sexe... ) et culturel,
imputables aux interventions de développement des autres changements liés à
d'autres facteurs dans ce même milieu?
Pour le FIDA : "il sera possible, en considérant simplement le groupe visé,
d'en mesurer les effets et l'impact et de les distinguer de ceux qui sont
imputables aux projets"115.
Pour la Banque Mondiale "il est rarement de réaliser la tâche prioritaire de
l'évaluation qui ne vise pas seulement à quantifier les réalisations, mais évalue
la part du projet dans les attitudes et comportements des populations
paysannes"116.
114
MORIN (E.), La méthode. Tome 1, La nature de la nature, Seuil Paris
1958, P. 147.
115
FIDA : Directives opérationnelles en matière de surveillance et
d'évaluation du (Fonds International pour le Développement Agricole
FIDA), Rome, décembre 1979, p. 13.
116
Banque Mondiale : A Hand-book on monitoring and évaluation of
agriculture and rural development projects. Washington, World Bank
1981.
357

Sur la base de données de terrain recueillies,
lorsque celles-ci sont
suffisamment précises, il peut être possible d'évaluer en même tant que les aspects
macro-économiques, les diverses réactions paysannes, leurs comportements par
rapport aux orientations des multiples interventions de développement, et d'estimer
le degré de profit apporté dans le cadre de l'amélioration de leurs conditions de vie
de façon générale.
L'évaluation de l'impact des projets de développement vise un double objectif:
la justification et l'amélioration des actions de développement. Toutefois suivant le
statut et le rôle joué dans les interventions de développement, tous les acteurs
n'utilisent pas les mêmes stratégies pour atteindre ce double objectif:
- Certains bailleurs de fonds estiment par exemple inutile la connaissance
socio-anthropologique du milieu paysan, car celle-ci ne permet pas toujours une
prévision de l'ensemble des réactions paysannes par rapport aux interventions de
développement.
- Pour les praticiens du développement, la connaissance du milieu se révéle
aussI sans intérêt le plus souvent, le but des interventions de développement
consistant davantage à faire accepter par les paysans, les innovations technologiques
pour accroître leur production (but également recherché par l'Etat), alors que
- Pour les chercheurs, la connaissance du milieu paysan est une condition
préalable nécessaire à toute intervention de développement.
358

Cette divergence de stratégies dans l'approche des
interventions de
développement en milieu rural rend souvent difficile leur évaluation sur les plans
socio-économique et sanitaire en particulier le rôle des femmes dans les actions de
développement.
11.3. Femmes et développement rural
Il convient de souligner ici l'importante contribution des femmes à la réalisation
des projets et programmes de développement rural. Au Burkina et en particulier dans
la région du Centre-Nord, la contribution des femmes au développement économique,
notamment dans l'agriculture est grandement sous-estimée: elle se situe entre 14
et 40 % du taux d'activité réel. Les multiples activités économiques et productives
des femmes, effectuées de façon discontinue à temps partiel, saisonnière ou
simultanément avec d'autres tâches domestiques ne sont pas toujours considérées.
Cet état de fait a fini par accorder aux femmes un profil de sujet passif et par
conséquent n'a pas aidé à identifier les mécanismes positifs pour mettre en valeur
la contribution des femmes au développement.
D'une
manière
générale,
la
répartition
inégale
des
tâches
et
des
responsabilités
entre
hommes et femmes mossi
dans
les interventions de
développement conduit à ressentir différemment les effets de celles-ci: "Nos maris
produisent beaucoup plus sur les champs communs de la famille, reçoivent
assez d'argent, mais nous en donnent pas, de sorte que nous sommes obligées
de travailler dans nos champs individuels pendant nos rares moments libres
pour pouvoir nous occuper des enfants, en particulier sur le plan de la
359

nourriture, de l'habillement, de la santé et de la scolarisation ... " Ces
déclarations des femmes illustrent le fait que ce sont surtout les hommes qui
bénéficient des retombées positives des interventions de développement en milieu
rural
mossi. Ainsi, certains paysans engagés dans
la culture de certaines
spéculations comme le coton ou le riz sous l'encadrement technique du CRPA du
Centre-Nord et grâce au soutien financier de certaines ONG comme l'ADRK ou le
PPIK, ou encore de certains projets comme le PEDI, parviennent à obtenir un revenu
annuel moyen variant de 200.000 FCFA à 3.000.000 de FCFA. Ces revenus
monétaires leur permettent ainsi d'élever quelque peu le niveau de vie de leur famille
d'abord à travers la satisfaction des besoins vitaux élémentaires comme la nourriture,
l'amélioration des soins de santé et l'accès à la scolarisation, puis ensuite à travers
l'acquisition de certains biens de prestige comme la mobylette, des postes-radio etc.
Absorbées par les préoccupations socio-économiques, les femmes abordent
très peu les questions de santé au cours des entretiens que nous avons eus avec les
populations dans les villages. Cependant le sujet sur la santé une fois entamé dans
les discussions, elles sont les premières à réclamer paradoxalement des infirmiers
et des médicaments pour leurs villages.
L'impact sanitaire par contre est demeuré peu significatif pour l'ensemble de
la région du Centre-Nord. Là encore, les femmes sont les plus lésées dans la
redistributions des avantages sanitaires liés aux interventions de développement,
cependant que leur contribution à ce niveau précis demeure considérable. Des
progrès sensibles ont été certe réalisés au début des années 1960 (notamment par
la construction de nombreuses infrastructures sanitaires et l'arrivée d'un personnel
de santé expatrié pour la plupart, dont l'effectif était relativement important pour
360

procurer des soins de santé à l'ensemble de la population de la région) sur le plan
sanitaire dans le Centre-Nord du Burkina, aujourd'hui en régression sensible:
D'anciens
fléaux
comme
le
paludisme,
le
choléra,
la
tuberculose
réapparaissent, tandis que se développent plusieurs autres nouveaux, en particulier
le SIDA, les hépatites etc. qui risquent de faire disparaître des villages entiers dans
la région.
De même que les développeurs ont cru pendant longtemps que le transfert
technologique suffisait seul à impulser le développement économique des sociétés
en voie de développement par la modernisation des structures de production, de
même ils pensaient que l'introduction de la médecine "moderne" contribuerait à
améliorer sensiblement l'état de santé des populations de ces sociétés, négligeant
de ce fait, les aspects culturels de la santé.
Certes l'étude de la maladie et de la santé ne constitue qu'une préoccupation
récente de l'anthropologie et de la sociologie comme le rappelle volontiers Didier
FASSIN : ... !là l'exception de quelques travaux pionniers
de médecins
hygiénistes du XIXe siècle comme Villermé ou Bertillon, qui se sont intéressés
à l'impact des conditions de vie des catégories pauvres sur leur état de santé
(Surault 1979), et de quelques recherches d'ethnologues comme Rivers ou
Clements
qui,
au
début du
XXe siècle
ont étudié
les
interprétations
surnaturelles de la maladie dans les sociétés à l'époque appelées primitives
(Mtrani 1982), ce n'est qu'à partir des années cinquante pour la sociologie et
soixante pour l'anthropologie (et dans les deux cas avec une décennie de
retard en France), que l'intérêt pour la maladie et la santé se manifeste
361

vraiment, comme en témoignent la publication d'ouvrages nombreux sur ces
thèmes, la création de sections spécifiques dans les sociétés savantes et la
mise en place d'enseignements spécialisés dans les universités" 117
Il est vrai que les services de santé et les prestations de service les plus
diverses qui y sont offertes ont peu fait l'objet d'investigation sociologique ou
anthropologique, ne serait-ce que pour en apprécier la qualité et caractériser les
attitudes et comportements du personnel soignant. Un tel travail présenterait
l'avantage de poser un diagnostic sur les pratiques médicinales en cours par des
non-spécialistes en santé, avec une finalité ultime qui est la recherche de la
compréhension des mécanismes et stratégies que déploient aussi bien le personnel
soignant que les malades eux-mêmes dans les différents hôpitaux et dispensaires.
"La médecine des dispensaires, des hôpitaux, des programmes de
vaccination et de lutte contre les grandes endémies a peu fait l'objet de travaux
ethnologiques, surtout si l'on établit une comparaison avec la profusion de
livres et articles publiés sur les médecines traditionnelles. Pourtant, les
questions
qui
lui
sont
posées
aujourd'hui
mériteraient
l'intérêt
des
anthropologues
et
des
sociologues.
Animateurs
de
développement et
responsables de santé sont en effet confrontés à une question fondamentale:
la persistance et dans certains cas l'aggravation des inégalités devant l'accès
aux soins et la qualité des prestations. Certes, les inégalités face à la santé
(telles qu'elle s'expriment par exemple dans les statistiques de mortalité) font
appel à d'autres phénomènes explicatifs tels que les conditions économiques
117
Didier FASSIN : Maladies et médecins, dans "sociétés, développement
et santé" Universités Francophones UREF, Paris 1992 p.38
362

ou l'environnement physique, comme le montrent les études réunies par
Jacques Vallin et Alan Lopez (1985). Cependant, les services sanitaires eux-
mêmes participent de ces inégalités et les rendent encore plus insupportables" 118
Est-il seulement possible d'offrir des prestations de service de santé à tout
individu malade, indépendamment de ses conditions financières et humaines
restreintes dans les hôpitaux et dispensaires du Centre-Nord comme partout ailleurs
au Burkina et en Afrique? Didier FASSIN le souligne bien. "Parler d'inégalités, on
le voit, c'est opérer un changement de registre, c'est en quelque sorte passer
du sociologique au politique. En effet, ce que l'analyse scientifique met en
évidence, ce sont des différences dans l'accès aux soins ou la qualité des
prestations ... pouvoir être soigné dans de bonnes conditions est préférable au
contraire et on passe de la description des disparités à la révélation des
inégalités. On objectera peut être que ces questions sont en dehors du champ
des sciences sociales: en fait, elle ne le sont pas dès lors qu'on s'attache non
pas à dénoncer, mais à comprendre, c'est-à-dire à démontrer et analyser les
mécanismes
qui
conduisent
aux
diverses
formes
d'inégalité
ou
de
domination"119.
118
Didier FASSIEN : Maladies et Médecins, dans "sociétés, développement
et santé" sociétés francophones UREF, Paris 1992 p.46.
119
Didier FASSIN • Maladies et médecins, dans sociétés, développement, santé, sociétés
francophones, UREF, Paris 1992, pA?
363

Faut-il alors conclure que la santé, comme les interventions de développement
rural de façon générale, consitute un enjeu à la fois économique, social et politique?
A la suite de Didier FASSIN, nous répondrions par l'affirmative à une telle
interrogation: "La santé est un enjeu social et politique, les représentations de
la maladie traduisent la façon dont fonctionne la société avec ses conflits et
ses rapports de pouvoir, et les pratiques de la médecine se situent au coeur de
changements profonds dont les déterminations sont pour une large part
extérieures. Le travail de l'anthropologue et du sociologue est peut-être
aujourd'hui moins de faire ressurgir le passé (tâche de l'historien) que d'aider
à comprendre le présent, en posant le même regard sur les sociétés qu'elles
soient proches ou lointaines" 120. C'est ainsi que l'état de santé de la femme se
détériore sensiblement à certaines périodes de sa vie:
"La femme rurale subit une chute de poids de 1 à 3Kg pendant les
travaux agricoles, du fait de la surcharge de travail et aussi de la mauvaise
nutrition durant la période de soudure... Les femmes enceintes travaillent
jusqu'à leur accouchement, ce qui se traduit par un taux de mortalité maternelle
de l'ordre de 6%. Malheureusement, les programmes de formation de la femme
et de la jeune fille rurales contribuent souvent à les maintenir dans leur rôle
traditionnel de ménagères où le poids des multiples charges nuit à leur santé
et diminue leur rendement"121.
120
Didier FASSIN dans op. cit. p. 47.
121
Ahoua OUEDRAOGO, Directrice de la Promotion de la Famille.
Communication
au
séminaire
national
sur
la
problématique
de
364

Est-il possible à la femme burkinabè et mossi en particulier de modifier en sa
faveur la réalité socio-économique du village, génératrice de sa pauvreté et de sa
domination par l'homme à travers la production agricole pour atteindre l'auto-
suffisance et la sécurité alimentaires?
En milieu rural mossi, le travail domestique effectué par la femme pour le
compte de la famille n'est pas toujours pris en considération économiquement ni
socialement. Par conséquent, il n'est pas rémunéré bien qu'il soit possible d'en faire
une évaluation financière. C'est ce qui explique que la femme soit qualifiée d'inactive
dans les recensements statistiques ofFiciels. Cette caractérisation de la femme trouve
là l'expression la plus claire de la dévalorisation sociale qui accompagne le travail
domestique de la femme, sans compter qu'elle lui enlève tout pouvoir réel et la place
dans une position de subordination au sein de la société.
Lorsque la femme délégue une partie de ses responsabilités domestiques, le
travail domestique se transforme en service domestique salarié; il devient payable
en nature ou en espèce.
Dans le domaine de l'agriculture, l'encadrement et la formation techniques en
vue du développement agricole intégré ne s'adressent jusqu'à présent qu'aux
hommes. Les activités des C.R.P.A relatives à l'amélioration de l'agriculture et de
l'élevage ne sont menées qu'auprès des hommes.
C'est seulement dans le secteur artisanal et dans celui de la collecte et de la
transformation des produits agricoles que la femme parvient à créer une relative
autonomie économique. Mais là aussi, le bas niveau technologique, les difficultés
365

d'accès au crèdit sont autant de contraintes qui s'imposent aux femmes mossi du
Centre-Nord, réduisant ainsi de façon considérable le résultat de leurs efforts, surtout
lorsque la scolarisation, du fait de sa faiblesse, limite leur accès aux connaissances
aptes à améliorer leur existence.
Quelle peut être la contribution de la femme dans la production économique
de la famille en général, et dans la production agricole en particulier?
• Les femmes dans la production agricole
L'agriculture est actuellement la plus importante source de revenus monétaires
pour les femmes rurales du Centre-Nord : elles réalisent environ un tiers de la
production agricole familiale et y jouent par conséquent un rôle économique non
négligeable. Tout projet de développement rural qui entraîne une détérioration de la
situation générale des populations rurales touche d'abord et plus sévèrement les
femmes que les hommes du fait d'abord du statut social inférieur que leur attribue la
société. Ensuite, en raison de la division sexuelle du travail qui valorise le travail
fourni par l'homme au détriment de celui de la femme astreinte par ailleurs à de
multiples travaux domestiques en sus de sa participation agricole, et qui ne sont que
rarement comptabilisés économiquement. En revanche un projet qui améliore le sort
général des populations rurales avantage plus les hommes que les femmes pour les
mêmes raisons ci-dessus évoquées.
366

L'origine de ce déséquilibre des rôles économiques entre les hommes et les
femmes en milieu rural mossi semble provenir d'une sous-estimation du rôle
économique des femmes d'une part et du fait que ce sont toujours les hommes qui
représentent les ménages aux instances décisionnelles de la société mossi.
Cependant, dans la Province du Bam par exemple la production du haricot vert
qui permet de réaliser des surplus financiers, importants 122 se traduit par une
prédominance du travail féminin.
La culture du haricot vert adoptée depuis 1970 est pratiquée en contre saison.
Elle n'entre donc pas en concurrence avec la culture du milou de sorgho et permet
une double récolte par an ; la présence d'eau en abondance du lac de Bam (malgré
les déficits pluviométriques enregistrés depuis quelques années, le niveau du lac
reste relativement haut (3-4 m) grâce à l'importance de son bassin versant), et les
terres d'alluvions du bord du lac formées par l'apport de particules terreuses
transportées par les eaux constituent des sols de première qualité offrant des
conditions idéales pour la culture de cette légumineuse. De plus, il existe d'importants
débouchés vers l'extérieur.
122
Le rendement financier brut/ha pour le maïs est de l'ordre de 360 000
F CFA, ne couvrant même pas les charges d'irrigation qui s'élèvent à
400 000 F CFA/ha alors que ce coût de production/ha qui est le même
pour le haricot vert permet de dégager pour cette dernière culture des
surplus monétaires relativement importants puisque le rendement
financier brut/ha de cette production s'élève à 1 050 000 F CFA d'après
l'UCOBAM en 1983.
367

D'après une étude réalisée par Guylaine LAURENT, sur le haricot vert de
Kongoussi (SAM), les femmes sont en nombre plus important que les hommes
(58,6% de femmes pour 41,4 % d'hommes) quant à la main d'oeuvre travaillant sur
les périmètres. Des enquêtes réalisées sur une quinzaine de parcelles ont permis de
mettre en évidence l'âge et le sexe des personnes travaillant sur les périmètres
maraîchers en particulier sur le haricot vert (cf. figure ci-dessous).
Figure 1
Répartition de la main d'oeuvre travaillant sur les parcelles
maraîchères de haricots verts selon le sexe et l'âge.
368

Lorsqu'on interroge les femmes qui travaillent soit sur les champs de culture,
soit sur les périmètres irrigués, sur le partage avec leurs maris du revenu de la
production agricole après avoir dégagé les stocks alimentaires pour les besoins de
la famille, voilà ce qu'elles répondent: "C'est le chef de famille qui a droit sur la
production agricole du champ commun. Il en dispose comme il l'entend, pourvu qu'il
nous fasse manger à notre faim. Mais nous disposons, nous les femmes ainsi que
les enfants ayant atteint l'âge adulte, de champs individuels dont nous gérons aussi
la production en toute liberté. Ainsi, chacun est à la fois autonome et dépendant".
Ces propos des femmes résument bien la conception mossi de la participation
des populations rurales au processus de développement en même temps qu'ils
dégagent une signification particulière du concept même de développement: Le
développement concerne l'homme, tous les hommes de la communauté et ne vise
rien d'autre que l'épanouissement complet de tous et de chacun.
Les nombreuses sollicitations des femmes sur les champs de cultures, en
particulier sur les périmètres irrigués, auxquelles s'ajoutent les tâches domestiques,
contribuent sans nul doute à la promotion socio-économique de la famille et de la
société. Mais la répartition inégale des produits qui en résultent favorise-t-elle
l'épanouissement complet des femmes?
L'exemple des femmes qui cultivent le haricot vert aux abords du lac de Bam
à Kongoussi permet d'en douter.
369

"La participation des femmes est sollicitée dès les semis; elles sont
également présentes sur les périmètres pendant les travaux de buttage, sarclo-
binage et surtout elles sont particulièrement mises à contribution lors de la
cueillette des haricots. Lorsque l'on sait que cette opération réclame plus des
trois quarts de la totalité du temps qui doit être consacré à cette culture, on
peut véritablement apprécier le rôle effectif joué par la femme,,123.
En dépit de leur large contribution à la culture du haricot vert, dépassant de
loin celle des hommes, les femmes ne sont pas considérées comme des agents de
production. Seuls les hommes sont considérés comme producteurs et partenaires à
part entière par la coopérative des exploitants des périmètres irrigués.
Guylaine LAURENT rapporte que tous les coopérateurs interrogés affirment
qu'il ne saurait être question que les femmes exploitent une parcelle à titre personnel,
«parce qu'elles ne connaissent pas le travail de maraîchage qui requiert la force
physique et les compétences que seul l'homme est susceptible de posséder».
Si la culture du haricot vert a incontestablement contribué au développement
économique de la région, elle a aussi et surtout modifié profondément le statut socio-
économique des femmes : celles-ci, bien que travaillant plus qu'autrefois, ne
maîtrisent guère le fruit de leur labeur. "De plus en plus considérées comme une
123
LAURENT (G.) 1986 : L'impact des cultures maraîchères de haricot
autour du Lac de Bam sur le statut socio-économique des femmes.
LEDRA. ROUEN.
370

simple main-d'oeuvre complètement dépendante du mari, les femmes ont perdu
toute indépendance économique ; leur force de travail étant exploitée à
outrance, elles n'ont guère le temps de se consacrer à d'autres activités
pendant la saison sèche. Elles ne sont même pas autorisées à cultiver des
condiments sur quelques mètres carrés au sein des parcelles de haricots, de
sorte que même pour la cuisine, elles sont devenues le plus souvent tributaires
de l'argent que les hommes veulent bien leur laisser afin qu'elles achètent les
condiments .. 124 .
Quel est l'impact réel exercé par les interventions de développement sur
chacune des trois provinces de la région?
11.4. Analyse de l'impact des interventions de développement sur
chacune des trois provinces
A. Province du Barn
Dans la Province du Bam (qui est une région située à la lisière du sahel
burkinabè), les hauteurs pluviométriques moyennes annuelles ne dépassent guère
600 mm. La désertification s'y est fortement installée; les sols pauvres dans leur
ensemble sont peu favorables aux cultures. Les densités de population se situent à
environ 41 h/km2 . Les interventions de développement rencontrées dans cette
Province sont en majorité de type 1, grâce d'une part à l'aménagement des bas-fonds
favorables aux cultures pluviales qui font par ailleurs l'objet d'exploitation continue,
124 LAURENT (G.) dans op. cit. p. 7.
371

et d'autre part à l'aménagement du lac de Bam (lac pérenne) long de plus de 20 km
drainant les eaux d'un bassin versant d'environ 2.600 km 2 appartenant au Nakambé
(ex-Volta Blanche) ; ces aménagements permettent des activités agricoles et
notamment des cultures irriguées qui jouent un rôle économique essentiel pour la
Province. Une superficie de 313 ha a pu être dégagée au bénéfice de 1.714 paysans
regroupés dans deux coopératives: la SCOOBAM (Société des Coopératives de
Bam) et la COOMAKO (Coopérative Maraîchère de Kongoussi).
L'insuffisance des terres pluviales a conduit les paysans à organiser la gestion
des terres autour du lac de sorte que les exploitants en culture irriguée (riz et cultures
maraîchères) ne sont pas toujours les mêmes que ceux en culture pluviale.
L'élevage est cependant la vocation première de la région.
Les interventions de développement de type n01 axées sur les aménagements
hydro-agricoles en particulier (et accessoirement l'élevage et l'artisanat) ont permis
une relative élevation du niveau de vie des populations rurales par la garantie de la
sécurité alimentaire et de revenus monétaires.
Toutefois, les conditions socio-sanitaires de ces mêmes populations demeurent
précaires, car il n'existe dans la Province aucune intervention de développement dans
le domaine spécifique de la santé, et les autres interventions qui y ont cours
n'intègrent pas les volets sanitaires (ce qui constitue incontestablement une lacune).
Qui plus est, les conditions naturelles défavorables dans leur ensemble font de la
Province, un foyer d'émigration en direction soit des Provinces plus riches (Sud et
Sud-Ouest du pays en général) soit de l'étranger (Côte d'Ivoire - Ghana).
372

s. La Province du Namentenga
Dans la Province du Namentenga, les interventions de développement de type
n° 1 sont peu développées dans cette Province en raison du fait que la zone est
enclavée sur les plans des infrastructures routières et de communication ; cette
situation géographique de la Province ne lui permet pas d'avoir des échanges
économiques et culturels avec les autres régions du pays. La Province est traversée
elle aussi par un affluent du Niger (la Gnagna) qui draine les eaux d'un bassin
versant d'environ 2.400 km2 . Un barrage d'une capacité de stockage d'eau de 10,5
millions de m3 environ a été construit sur cet affluent, permettant de développer des
cultures irriguées peu commercialisées pour cause d'insuffisance d'infrastructures
routières. L'élevage est en régression sensible. L'aménagement de l'aval de ce
barrage
a
cependant
favorisé
une
relative
amélioration
des
conditions
socio-économiques des populations rurales par le biais de la culture du riz ou des
cultures maraîchères devenues des activités agricoles importantes. Leurs conditions
socio-sanitaires comparativement aux deux autres Provinces peuvent être qualifiées
d'acceptables, si l'on en juge par les infrastructures sanitaires qui y ont été recensées
et les interventions de développement dans le domaine spécifique de la santé qui s'y
déroulent.
Les autres types d'interventions de développement (types 2, 3 et 4) sont
inégalement réparties dans les trois Provinces (avec une plus grande concentration
au Bam et au Sanmatenga), les bailleurs de fonds choisissant généralement le lieu
et le domaine de leurs interventions avec l'accord des autorités politiques du pays.
373

c. La Province du Sanmatenga
La Province du Sanmatenga : dans cette Province, les interventions du type
n° 1 ont connu des résultats quasi-identifiques que dans la Province du Bam, à
l'exception du domaine socio-sanitaire qui y a connu un meilleur développement. Les
conditions
agro-climatiques
et écologiques
de
la
Province
sont
également
défavorables (hauteurs de pluies comprises entre 500 et 700 mm, précipitations
variant sensiblement d'une année à l'autre et mal réparties, sols latéritiques et
pauvres ... ). La Province est traversée par les bassins versants du Nakambé et du
Nazinon qui sont des fleuves qui tarissent assez rapidement laissant sur leur lit des
chapelets de mares qui ont donné lieu à la construction de barrages et de retenues
d'eau pour la satisfaction des besoins agro-pastoraux des populations rurales mossi.
Les avals et les pourtours de ces barrages font l'objet d'intenses activités agricoles
irriguées (comme par exemple aux alentours du barrage de Louda où 172 ha ont été
aménagés pour 676 chefs de ménages cultivant du riz). Ces activités agricoles
contribuent au
développement de la
Province dont ·Ies
populations rurales
connaissent une sensible amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
Mais la désertification déjà sensible s'y accentue. C'est pourquoi pour réduire
et faire reculer les effets du phénomène de désertification que l'Etat encourage, aidé
par des ONG, les populations rurales à reboiser, à édifier des sites anti-érosifs, à
aménager les bas-fonds ... par les interventions des types 2, 3 et 4 dont les premiers
résultats positifs commencent à être enregistrés.
374

Là encore, l'insuffisance des terres cultivables et la pénurie alimentaire
devenue quasi-généralisée expliquent sans doute que cette Province aussi soit le
point de départ d'un grand courant migratoire drainant des familles entières vers
l'Ouest et le Sud-Ouest du pays, et des jeunes vers les pays voisins à la recherche
d'un travail salarié.
L'élevage qui constitue traditionnellement une activité essentielle dans la
région et une forme d'épargne connaît un relatif ralentissement à cause des longues
années de sécheresse des années 1980 qui ont eu des effets dévastateurs sur le
cheptel.
Il faut souligner dans cette Province, la découverte de nombreux sites aurifères
ayant suscité un vif intérêt pour les populations rurales. Celles-ci trouvent dans
l'orpaillage une source de revenus inespérée. Un abandon progressif des activités
agricoles par les populations des villages situés à proximité des sites aurifères se
constate
au
fil
des
années.
L'artisanat
(comme
la
forge)
y
est
déjà
presqu'abandonné.
Lorsqu'on cherche à évaluer l'impact des interventions de développement sur
les conditions de vie et de travail des populations rurales mossi, il faut d'abord en
identifier les "cibles potentielles" et les "cibles réelles". De façon générale et
théorique, les interventions de développement touchent les populations rurales dans
leur ensemble. Mais des différenciations socio-ethniques (avec une partie des Mossi
pouvant accéder au pouvoir politique traditionnel, et une autre qui en est exclue),
socio-économiques et financières ainsi que d'autres formes de différenciation (accès
à l'instruction et à la fonction publique) placent les Mossi dans des situations diverses
face aux interventions de développement.
375

Les chefs de village, les riches commerçants et les fonctionnaires (considérés
comme les personnages influents en milieu traditionnel mossi), passent pour être les
interlocuteurs privilégiés des acteurs de développement sur le terrain. C'est avec eux
qu'il faut obligatoirement négocier les interventions et en obtenir l'accord nécessaire
à toute action sur le terrain. De fait, ils sont les "cibles réelles" des interventions de
développement. Ce sont eux qui décident de l'acceptabilité ou de refus des
interventions. Acteurs sociaux incontournables sur le terrain, ils exercent par
conséquent un pouvoir réel sur toutes actions de développement dont le succès
dépend largement de leur adhésion. C'est avec eux que doit se concevoir et se
réaliser le développement en milieu rural et se décider le devenir des sociétés
rurales.
- Les autres catégories de Mossi (les plus nombreux) que l'on pourrait qualifier
de "cibles potentielles" des interventions de développement, n'ont aucun pouvoir de
décision et alignent même leurs intérêts sur ceux de la première catégorie. Leur
participation se limite à leur contribution physique lors du déroulement de
l'intervention. Or les interventions de développement sont destinées prioritairement
à cette seconde catégorie de populations.
Est-il possible d'inverser cette tendance pour atteindre une meilleure portée
des interventions de développement et comment, puisque les "vraies cibles", les
bénéficiaires légitimes des interventions de développement en milieu rural mossi ne
sont touchés que par le biais de "négociants" eu égard au mode d'organisation et de
fonctionnement de leur système social?
376

11.5. Les contraintes majeures
a) Contraintes extérieures
Parmi les principales contraintes aux interventions de développement en milieu
rural mossi, il convient de souligner d'abord:
- les "attitudes négatives" de certains intervenants, indépendamment de
l'inefficacité du mécanisme mis en place. Certains organismes d'aide développent
une propension à se substituer aux populations-cibles ou aux institutions des pays
bénéficiaires de l'aide pour penser, planifier, gérer et évaluer les interventions de
développement qu'ils initient sur le terrain. Pour certains d'entre eux, les populations
rurales mossi sont incapables de penser leur propre développement, en raison de
leur très faible niveau d'instruction et de leur situation d'extrême pauvreté. Pour les
autres,
le gouvernement ne manifeste pas une réelle volonté d'assurer le
développement du milieu rural mossi (qui ne regorge pas de ressources économiques
significatives) et reste caractérisé par une administration bureaucratique et un
personnel techniquement peu qualifié à tous les niveaux. C'est pourquoi des
interventions de développement ayant suscité un réel enthousiasme au sein des
populations rurales mossi sont finalement perçues comme celles de leurs initiateurs
et non les leurs propres. La non-appropriation des actions de développement apparaît
plutôt comme la règle que l'exception dans un tel contexte.
- Ensuite, il peut être relevé une divergence de conception du développement
entre "développeurs" et "développés".
377

Le programme de certaines interventions de développement reste marqué par
une vision du développement présentée comme le résultat d'une série de transferts
technologiques et de connaissances, c'est-à-dire l'accumulation de plusieurs formes
d'innovations permettant à des populations de parfaire leurs savoir-faire et leurs
connaissances ainsi que la confiance en soi nécessaires pour façonner dans un sens
qui favorise le progrès, leur environnement (physique, social, économique, culturel
et politique) vers des objectifs de croissance et d'équité dans la distribution des
revenus et des libertés publiques. L'impatience de certains bailleurs de fonds de voir
débuter immédiatement des interventions de développement sur le terrain sans que
ne soient remplies au préalable certaines conditions (pour justifier a posteriori leur
influence et surtout leur efficacité) et la précipitation des agences (ou institutions)
locales d'exécution laissent souvent peu de chance de succès aux interventions qui
n'auront pas reçu l'adhésion indispensable des populations rurales concernées.
- Les interventions de développement trop rigides, inadaptées au rythme de
progression et à la capacité d'absorption des populations rurales sont également
sources d'échec.
- Les agences ou (institutions) d'exécution comportant un centre de décision
situé hors du milieu, portent préjudices à leurs interventions car elles limitent les
initiatives paysannes, ruinent la confiance en soi et empêchent les populations rurales
d'acquérir des savoir-faire et des aptitudes nécessaires pour analyser et résoudre
leurs problèmes de développement. Elles bloquent pour ainsi dire la transformation
des populations rurales en agents de leur propre développement par le fait qu'elles
retardent le partage des connaissances et d'informations.
378

b) Contraintes internes
Plusieurs causes d'échecs des interventions de développement en milieu rural
sont à rechercher au niveau des structures administratives locales et du manque de
communication ; l'approche bureaucratique souvent adoptée par les structures
administratives
locales,
écartent
les
populations-cibles
au
diagnostic
des
situations-problèmes qu'elles vivent. La conséquence directe qui découle d'une telle
approche, c'est le regroupement de ces populations dans le seul et unique objectif
de bénéficier et de l'argent et du matériel.
L'absence de communication constitue une autre forme de contrainte aux
interventions de développement en milieu rural. En effet, l'absence de dialogue
constructif entre les partenaires, l'administration, les services décentralisés des
ministères et les populations ne favorise pas la réflexion pour une prise de décision
commune relative à la conception, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des
interventions de développement.
Mais la plupart des échecs des interventions de développement proviennent
des populations rurales elles-mêmes pour plusieurs raisons parmi lesquelles:
- la méfiance face aux innovations et aux changements introduits de l'extérieur;
- les situations conflictuelles résultant du réaménagement des paliers de la vie
sociale (restructuration du milieu, du pouvoir, etc.) ;
379

- les problèmes de communication, de leadership, de luttes d'influence, de
prise de décision au sein et entre les organisations paysannes;
- les problèmes dus à l'absence d'un système de gestion et de contrôle
adéquat;
- l'absence ou l'insuffisance de formation et d'information à l'endroit des
populations rurales (mais aussi des agents d'exécution présents sur le terrain).
Parmi les contraintes majeures à maîtriser absolument pour garantir le succès
des interventions de développement en milieu rural mossi, nous privilégions volontiers
l'instauration de la communication et d'un dialogue constructif entre les différents
acteurs sur le terrain et à tous les niveaux. C'est là une approche qui permet aux
populations-cibles d'en connaître un peu plus sur les enjeux avant, pendant et après
les interventions et de lever précisément ensemble les obstacles qui s'y posent.
380

CHAPITRE VIII
EVOLUTION
DU
SYSTEME
SOCIO-
ECONOMIQUE ET SANITAIRE EN MILIEU
RURAL MOSSI ET CONSEQUENCES
12.
LE SYSTEME SOCIO-ECONOMIQUE MOSSI DE LA PERIODE PRE-
COLONIALE A NOS JOURS
Les systèmes de production qui caractérisent l'économie des sociétés mossi
de cette période sont assurés par des unités de taille variée correspondant à la
notion moderne de "famille étendue" ; l'unité de production est donc dirigée par le
chef de famille (qui est toujours le doyen d'âge parmi les convives d'une même aire
géographique) et au profit de toute
la famille.
La production
est destinée
prioritairement à la consommation familiale, à l'accomplissement de certaines
obligations sociales (funérailles, mariages essentiellement) et dans des cas extrêmes
peut être vendue pour procurer des revenus monétaires gérés exclusivement par le
chef de famille. Il existait en effet une monnaie à valeur universelle dans presque
toutes les sociétés traditionnelles ouest-africaines, le "cauri" qui avec l'or faisait l'objet
de transactions commerciales et jouait donc un rôle capital dans le développement
économique de ces sociétés. Plus tard le "cauri" comme monnaie d'échange
internationale sera remplacé par le franc français avec la colonisation française au
début du siècle.
381

Les systèmes socio-économiques mossi n'ont pas sensiblement varié depuis
la période coloniale à l'exception d'une fragmentation plus prononcée de la famille
étendue due en partie aux religions importées (l'islam et le christianisme) bien que
la religion traditionnelle chez les Mossi demeure vivace. L'effectif moyen par
concession (famille étendue) qui avant la colonisation variait entre 22 et 30
personnes chez les Mossi Nakombsé et 50 à 100 personnes chez les Nanambsé
(chefs de village ou chefs de terre) tombe à 8 ou 9 personnes aujourd'hui.
Or dans l'organisation sociale mossi, le rang qu'occupe un individu est fonction
de l'importance de l'effectif des convives placés sous sa responsabilité au niveau
familial. Plus la taille de la famille est grande, plus élevé est le rang social détenu par
son responsable ; c'est ce qui explique l'effectif particulièrement élevé des
concessions des chefs de village et/ou de terre. Toutefois l'effectif constitué au
niveau d'une famille ne correspond pas forcément à une unité de production dans le
système socio-économique mossi. Une même famille peut former suivant sa taille une
ou plusieurs unités de production (elle se scinde toujours en plusieurs unités lorsque
l'effectif dépasse une vingtaine de personnes) ayant à leur tête un chef de famille (qui
doit être marié et avoir des enfants). La taille de la famille ne confère pas seulement
un prestige social ; elle constitue aussi une puissance économique grâce à la
main-d'oeuvre que représente l'ensemble des convives appelés à travailler dans
l'exploitation économique du chef de famille.
La structure de la famille et celle de l'exploitation semblent donc constituer les
facteurs essentiels de la dynamique sociale en milieu rural mossi :
382

"Le problème de la structure de la zaka (famille) et de celle de
l'exploitation met en jeu tout le fonctionnement du système socio-économique
mossi et de sa reproduction. En fait, il semble que l'on puisse repérer une
double tendance au sein du système socio-économique mossi. En premier lieu,
il existe une tendance permanente à la scission de la zaka ; presqu'à chaque
fois qu'un homme de la zaka se marie, celui-ci quitte la zaka pour construire la
sienne propre et devenir chef d'exploitation et chef de zaka. Ces scissions
tendent à faire coïncider ces deux fonctions sur la même personne.
Mais, à cette tendance séparationniste, s'oppose une seconde tendance,
rassembleuse celle-là, qui a pour effet de garder ou de regrouper auprès de
certains chefs de zaka, généralement âgés et/ou occupant une certaine
situation prééminente au sein d'un patrilignage (chef de buudu par exemple)
certaines personnes de différents sexes et de différentes générations... "125.
Mais alors la limitation de la taille de l'exploitation (dont l'effectif ne correspond
pas à celui de la famille) par rapport à l'effectif global de la famille est-elle dictée par
une logique de rentabilité économique, ou rendue simplement raisonnable à cause
des techniques d'exploitations assez rudimentaires?
125
BOUTILLlER (J.L.), QUESNEL (A.) et VAUGELADE (J.), "Systèmes
socio-économiques mossi et migrations". Cahiers ORSTOM, Paris série
Sc. Hum., vol. XIV, n04 1977 ; p. 364.
383

"Comme pour la zaka, la taille de l'exploitation dépend principalement de
trois données concernant son chef: l'âge, la polygamie, le statut dans la
hiérarchie coutumière ; ces trois données étant d'ailleurs fortement inter-
dépendantes"126.
Par ailleurs, les échanges matrimoniaux en milieu traditionnel mossi s'effectue
entre les lignages où les chefs de famille sont chargés de la gestion des épouses.
En sa double qualité d'abord de doyen d'un lignage ou d'un segment de lignage,
ensuite de chef de famille, un homme peut entrer en possession d'une dizaine de
filles qui lui ont été "données" soit par des amis pour témoigner leur reconnaissance
à la suite d'un bienfait reçu, soit pour traduire les bonnes relations inter-lignagères
qui unissent plusieurs familles. D'ordinaire, il en "distribue" à ses enfants, en marie
d'autres, et donne certaines autres encore au chef du village pour bénéficier des
bonnes grâces de ce dernier. L'accumulation de plusieurs épouses se trouve ainsi
favorisée par certains statuts sociaux spéciaux comme ceux de doyen de lignage, de
chef du village ou de chef de terre.
"La chefferie de village permet à âge égal, de doubler son nombre
d'épouses. La chefferie de zaka de gagner à peine 1,5 %. La chefferie de simple
exploitation n'assure au contraire aucun privilège. Tous les autres individus
connaissent un retard par rapport à ce que leur âge pourrait leur laisser
escompter"127.
126
BOUTILLIER (J.L.), QUESNEL (A.) et VAUGELAGE (J.), op. cit. p. 364.
127
ANCEY (G.), 1975 : Milieux ruraux Mossi. Aspects économiques.
Ministère du Travail et de la Fonction Publique Ouagadougou, 215 p.
384

La composition et la structuration sociales se trouvent ainsi reproduites dans
la production économique; ceux qui y occupent un rang social élevé, disposent d'une
main-d'oeuvre plus ou moins abondante qu'ils utilisent volontiers en particulier dans
l'agriculture et l'élevage, principales activités économiques de la région mossi.
Ces activités économiques qui, grâce à une main-d'oeuvre abondante et
disponible pouvaient constituer un support dynamique au développement de la région
ont été sérieusement perturbées par les courants migratoires très puissants suivant
les années.
Le système socio-sanitaire n'a pas connu de changements significatifs depuis
bientôt trois décennies: les infrastructures sanitaires n'ont pas subi de modifications
en dépit de l'accroissement sensible des populations. Le personnel médical expatrié
a certes été remplacé par des nationaux, avec une légère augmentation en effectif
(au Sanmatenga et au Namentenga), mais le système de soins a baissé en efficacité
pour diverses raisons:
manque
de
médicaments
essentiels
dans
certaines
formations
sanitaires;
introduction dans le système de soins de la consultation payante et des
soins payants, ce qui entraîne comme conséquence l'éloignement des
populations rurales des formations sanitaires etc.
385

Il est aussi à souligner l'introduction dans le système socio-sanitaire du PEV
(Programme Elargie de Vaccination) qui permet de vacciner durant une même
période tous les enfants de 0 à 15 ans contre les principales maladies qui ravagent
les enfants de cette tranche d'âge. Dans la région du Centre-Nord, plusieurs milliers
d'enfants sont sauvés chaque année grâce au PEV.
Enfin, il faut souligner un regain d'intérêt de la médecine et de la pharmacopée
traditionnelle de la part surtout des populations rurales, en raison sans doute du coût
très élevé des soins de santé dans les formations sanitaires modernes.
12.1. Les migrations et leurs conséquences socio-économiques
Les migrations des Mossi de nature d'abord historique (puisque provoquées
par le colonisateur pour alimenter la main-d'oeuvre dans les plantations en
Côte-d'Ivoire et ailleurs dans les
pays voisins du
Burkina
Faso),
revêtent
concomitamment un caractère économique, la recherche de revenus monétaires et
un certain bien-être social devenant le but essentiel visé.
Comment évaluer l'impact socio-économique de ces migrations sur le devenir
de la société rurale mossi du Centre-Nord?
" ... au point de vue purement économique, si ce départ représente de la
force de travail en moins - un homme actif adulte - il est aussi une bouche (ou
plusieurs, s'il est accompagné de son épouse et de ses enfants) de moins à
386

nourrir mais surtout l'espoir d'une aide financière que le migrant enverra ou
rapportera .. 128 .
Le système socio-économique et culturel en milieu rural mossi est resté
longtemps marqué par une dépendance socio-économique des membres d'une
famille par rapport à son chef et à l'intérieur de la même famille des cadets par
rapport aux aînés, des jeunes par rapport aux anciennes générations au niveau de
l'ensemble de la société. C'est ce qui explique les vagues successives de migrations
plus ou moins longues (parfois définitives) des jeunes gens et jeunes filles soit vers
les centres urbains soit vers les pays voisins à la recherche de l'argent qui leur
permettrait de se libérer d'une telle tutelle. Ces migrations se justifient par ailleurs
dans la région du Centre-Nord où les terres cultivables devenaient de plus en plus
rares, tout comme les ressources naturelles sous la forte pression démographique
qui s'y observe.
C'est pourquoi à partir de 1973, des migrations agricoles
consécutives à la famine et à la sécheresse qui sévissaient la même année dans
cette région, se sont intensifiées, encouragées par l'Etat, vers le Sud et le Sud-Ouest
ou d'autres régions du pays où les terres plus fertiles et moins peuplées font l'objet
d'une véritable colonisation. Certaines de ces terres ont même été aménagées par
l'Etat pour accueillir des migrants à des fins d'exploitation collective, comme
l'aménagement de la vallée du Kou (Bobo-Dioulasso), occasionnant par là-même des
transformations
sociales,
économiques
et
écologiques.
Quels
sont
les
bouleversements provoqués par les interventions de développement en milieu rural
mossi et quelles perspectives s'y dessinent-elles?
128
BOUTILLIER (J.L.), QUESNEL (A.) et VAUGELADE (J.), op. cit. p. 366.
387

LALLEMAND s'exprime à ce sujet:
"Ils (les migrants) rentrent avec des sommes quatre à cinq fois
supérieures à celles que leurs pères et leurs frères aînés retirent de leurs
travaux annuels. Ainsi généralisée, la détention des gains les plus forts pour
la couche la moins importante de la population sur le plan social et familial
risquerait de provoquer quelques bouleversements et ce, d'autant plus, que
l'environnement reconnaît aux adolescents le droit de disposer de l'argent
qu'ils ont gagné. Alors, en tolérant les achats de biens de consommation,
l'entourage incite l'individu à se déposséder très vite de cette supériorité
économique acquise à l'étranger et le maintient à sa place dans la hiérarchie
lignagère et villageoise"129.
Si le point de vue de LALLEMAND a le mérite de souligner l'emprise
économique des chefs d'exploitation et de famille sur les jeunes enfants et insiste sur
les stratégies développées par ces derniers pour s'en libérer (à travers notamment
des migrations agricoles à l'intérieur du pays, l'exode rural, des migrations en
direction de l'étranger etc.) il ne précise pas la désorganisation de l'appareil productif
qui en découle et les solutions éventuelles à proposer.
129
N.B. Pour plus de détails sur les bouleversements operes par les
migrations, cf. LALLEMAND (S.) 1972 : Une famille Mossi, Paris.
388

Le caractère continu du phénomène migratoire qUI pnve la région de ses
éléments
les
plus
dynamiques
(les
jeunes)
susceptibles
d'amorcer
son
développement économique n'entraîne pas seulement un manque à gagner dans le
système mossi de production; il favorise une sorte de resserrement des éléments
restants de la famille nucléaire et une diminution assez prononcée des associations
d'entraides culturales et d'autres formes d'associations traditionnelles de jeunes.
La persistance du phénomène migratoire peut-elle à terme porter préjudice à
la cohésion sociale chez les Mossi?
"L'autorité familiale coutumière s'expose ainsi ou risque de se voir
déposséder de sa fonction sociale en laissant progressivement se rétrécir la
base économique sur laquelle elle s'appuyait à l'origine130.
Le pouvoir gérontrocratique (celui des aînés) qui autrefois avait une double
valeur sociale et économique, semble progressivement perdre cette dernière valeur
pour n'en conserver que la première; paradoxalement les jeunes (cadets) qui en
milieu traditionnel mossi ne disposaient d'aucun pouvoir, d'aucune sorte, acquièrent
grâce aux revenus monétaires rapportés de la migration, une sorte de pouvoir
économique sans valeur sociale ; ils ne peuvent en effet modifier aucune règle
sociale par une action concrète grâce au pouvoir que l'argent leur confère.
130
ANCEY (G.), Monnaie et structures d'exploitation en pays mossi
Haute-Volta. ORSTOM. Documents techniques n° 57. Paris 1983 ; p.
23.
389

Et à Gérard Ancey de s'interroger:
"Comment
les
anciens
détenteurs
du
pouvoir
social
coïncidant
initialement avec le réel pouvoir économique ont-ils pu se laisser en partie
dessaisir de ce dernier sans perdre par le fait même leur fonction sociale" 131 ?
Contrairement à la thèse de Gérard Ancey qui stipule que c'est parce que la
terre n'a jamais eu au Burkina Faso une valeur marchande, estimant que
"l'introduction de la monnaie a soudainement rentabilisé (dans ce pays)
davantage les activités de redistribution que de production, le commerce que
l'agriculture,,132, la terre au Burkina Faso et contrairement aux coutumes a bel et
bien eu une valeur marchande à certaines étapes de l'évolution historique de ce pays
(1974-1984). En milieu rural, les terres aménagées et notamment les parcelles
(comme on le verra plus loin) faisaient l'objet de transactions financières. Il en va de
même dans les centres urbains où les difficultés de lotissement et d'investissement
dans l'habitat avaient fini par provoquer des spéculations foncières et immobilières
(particulièrement à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso), entraînant une dégradation
rapide et sensible des conditions de vie et de travail des populations urbaines.
131
ANCEY (G.) op. cit. p. 24.
132
ANCEY (G.) idem., p. 24.
390

Nous pensons que le dysfonctionnement du système socio-politique mossi
provient (si dysfonctionnement il y a) d'une volonté de ré-équilibrage social: les
jeunes voulant plus de considération sociale s'évertuent à rechercher à consolider
leur pouvoir économique pour davantage peser sur le plan social (sans toutefois
prétendre à arracher de leurs aînés un quelconque pouvoir social), les vieux
consentant à concéder un peu plus d'indépendance économique aux jeunes pour se
libérer quelque peu de leurs lourdes charges familiales et sociales. Une sorte de
consensus semble donc se dégager entre Aînés (vieux) et Cadets Ueunes) sur cette
sorte de régulation sociale que constitue un pouvoir économique sans valeur sociale
et un pouvoir social sans base économique dont la stabilité est garantie par les
coutumes.
Sans remettre en cause la thèse de Gérard Ancey qui estime que "le système
productif (en milieu mossi) s'est bien entendu trouvé radicalement modifié par
la pénétration de l'économie marchande, mais celle-ci n'a pas eu pour effet de
monétiser le capital foncier des pays côtiers, aux riches plantations forestières.
De ce fait les différences économiques quantitatives entre Mossi ont été
gommées par la différence "qualitative" entre zones de savanes et zones
forestières. En conséquence bien que ne contrôlant plus qu'une partie de la
masse monétaire en circulation les détenteurs de la fonction sociale n'ont pas
été exposés à devoir défendre par une surenchère monétaire leurs prérogatives
foncières et le dysfonctionnement du système n'a pas eu d'écho en profondeur.
De ce point de vue les courants migratoires suractivant encore la rentabilisation
des zones forestières confortent plutôt qu'ils n'amoindrissent le pouvoir social
des autorités coutumières en repoussant toujours plus loin le jour où il
391

deviendra rentable d'investir dans l'agriculture locale et donc payant d'acquérir
des terres" 133 . Il serait cependant judicieux de s'interroger sur le peu d'écho du
dysfonctionnement socio-économique sur les prérogatives des aînés et d'interroger
la coutume elle-même et la société entière sur les causes et les conséquences de
ce dysfonctionnement.
Comme il peut être donné de constater, les scissions dans les lignages ou
segments de lignages qui favorisent le resserrement des membres d'une famille
nucléaire, provoquent simultanément l'effritement des exploitations agricoles dont
l'une des conséquences majeures est la désorganisation de la structure traditionnelle
de production fondée sur le travail en commun.
Les forces de production
s'affaiblissent à la suite de leur division à l'extrême et certaines méthodes anciennes
de protection de l'environnement qui nécessitaient une importante main-d'oeuvre
(sarclages) ne peuvent plus être utilisées occasionnant ainsi l'installation de la
sécheresse et de la désertification.
Au fur et à mesure que le système de production se détériore (et dont les
principales causes sont le manque de terres cultivables et les migrations), les forces
de production diminuent (par éclatements successifs des structures familiales).
Comment rendre compte de ce paradoxe en milieu rural mossi où les
populations augmentent pendant que les forces de production se réduisent de façon
continue?
- Les enseignements des transformations socio-économiques chez les Mossi:
133
ANCEY (G.) idem., p. 24.
392

• Adoption des variétés hâtives des céréales
L'un des principaux enseignements que les populations rurales mossi du
Centre-Nord tirent de l'évolution de leur ancien système de production est
incontestablement l'adoption des variétés hâtives de céréales (sorgho, mil, maïs). La
pluviométrie étant devenue plus courte et irrégulière dans l'espace et dans le temps,
seules les variétés adaptées à ces nouvelles conditions climatiques sur des sols de
plus en plus pauvres (par une agriculture excessivement consommatrice d'espace)
peuvent satisfaire
aux
besoins
alimentaires essentiels
dans
une économie
d'auto-subsistance.
"... Autrefois, les variétés hâtives étaient connues (...) mais elles étaient
peu
cultivées,
alors
qu'aujourd'hui
leur culture
revêt
une
importance
considérable" 134 .
• Uniformisation des soins apportés aux cultures
Le second enseignement à tirer de l'évolution du système socio-économique
traditionnel mossi est l'uniformisation des soins apportés à toutes les cultures dans
tous les champs.
134
IZARD
(M.)
1980,
Les
archives
orales
d'un
royaume
africain. Recherches
sur
la
formation
du
Yatenga.
Thèse d'Etat
ès- lettres et sciences humaines. Paris, Université René Descartes; p.
112.
393

Le système de production traditionnel distingue plusieurs types de champs de
cultures.
a) Le "Kamanga" (champ de maïs) autour des concessions qui reçoit
beaucoup de fumures organiques et de soins particuliers de l'ensemble des membres
d'une même concession. Le maïs y est semé dès les premières pluies et plusieurs
sarclages y sont effectués et le chef de concession veille personnellement au bon
entretien de ce champ. C'est là que réside l'espoir d'un complément vivrier au cours
de la période de soudure, c'est-à-dire entre l'épuisement des stocks de céréales et
les nouvelles récoltes.
Généralement les femmes y associent les cultures de gombo et d'oseilles qui
sont des plantes destinées à la préparation des sauces.
b) Le "Karaaga" (champ de mil des concessions) est un champ de milou de
sorgho à proximité des concessions qui reçoit les mêmes soins que le champ de
maïs ; il est permanent (c'est-à-dire qu'il n'est jamais laissé en jachère) car il
constitue (après le champ de maïs) la seconde mesure de sécurité prise par les chefs
de famille mossi. En raison des efforts intensifs de fumures organiques qu'il reçoit
d'une part et de la sélection des variétés de milou de sorgho les plus rapides
qu'opèrent les Mossi pour cultiver sur ce champ d'autre part, le "Karaaga" constitue
vraiment le dernier rempart de sécurité au plan alimentaire.
Là, sont associés volontiers au mil et au sorgho, le niébé, le sésame et au
besoin, à nouveau le gombo et l'oseille.
394

c) Le "puugo" (champ de brousse) est généralement d'étendue plus vaste que
les deux premières catégories de champ et est plus ou moins éloigné des
concessions. Il reçoit rarement de fumier mais bénéficie en revanche de la jachère.
Les cultures les plus couramment pratiquées sont: le petit mil, le milou le sorgho.
Le plus souvent les paysans procèdent par alternance à la pratique de ces
cultures, conscients qu'elles ne réclament pas au sol les mêmes éléments, ce qui
était une façon à eux, de protéger aussi l'environnement.
d) Les champs de riz ("mui") ou de coton ("Iamdo") dans les bas-fonds et sur
les sols argileux assez profonds où les variétés locales sont cultivées.
e) La quasi-totalité des familles mossi pour minimiser les risques de famine,
cultive des arachides et petits pois sur les sols secs, peu éloignés des concessions
et qui servent d'alimentation d'appoint à la famille durant la période de soudure ou
la saison sèche.
Ces cinq catégories de champ revêtent un caractère permanent et collectif.
Puis il Y a les champs individuels qui comprennent:
1. le "maanga" des femmes (champs de gombo pour les femmes) qui est une
sorte de jardin-potager;
395

2. "le kumbga" et/ou "le tomato" (champ de tomates) sert d'espace agricole
réservé aux légumes pour les chefs de famille ou les célibataires.
Les produits de ces deux types de champ peuvent ou être consommés par la
famille ou vendus par leurs propriétaires respectifs en vue d'obtenir des
revenus monétaires.
3. Le "beoolga" (champ prêté) est une portion de terre concédée aux femmes
et aux célibataires par le chef de concession pour subvenir à leurs besoins
personnels et réduire la dépendance économique qui les lie à ce dernier.
H ••• si le travail humain est si déterminant, tout chef d'unité de production
a intérêt à exercer un contrôle social sur un grand nombre de dépendants.
Cette main-d'oeuvre lui permet de cultiver un espace plus étendu et surtout de
remédier aux insuffisances plus ou moins graves en bras disponibles
(maladies, accidents). Ce désir de contrôle social n'empêche pas des formes
d'adaptation aux désirs d'autonomie des dépendants. A côté des champs
collectifs se trouvent des parcelles attribuées à des individus mais concédées
sur le patrimoine foncier contrôlé par le chef d'unité... C'est donc en usant de
manière plus ou moins autoritaire et habile de son privilège foncier qu'un chef
d'unité cherche à maintenir la cohésion d'ensemble de son groupe...Hm.
135
TALLET (B.), Une société rurale en mutation : les exploitations
agricoles en Haute-Volta, dans "Le Développement rural en questions,
Editions de l'ORSTOM, Paris 1984; p. 392.
396

Aujourd'hui ni les champs ni les cultures n'obéissent à la logique du système
de production traditionnel: sorgho, mil sont cultivés pêle-mêle dans des champs de
brousse comme dans des champs de case et tous les types de champs reçoivent
pratiquement les mêmes soins en particulier des fumures organiques. Par contre la
jachère s'observe de moins en moins dans les champs de brousse où elle ètait jadis
pratiquée.
La dégradation de l'environnement physique aurait-elle aiguisé la conscience
écologique des Mossi?
Sans doute en partie, mais des efforts énormes doivent encore être accomplis
par les paysans mossi pour une meilleure protection de l'environnement, surtout qu'ils
y tirent l'essentiel de leur subsistance.
12.2. L'introduction de l'irrigation dans le système de production: un
accélérateur des dynamiques sociales en cours chez les Mossi
D'une
manière
générale
et
indépendamment
des
interventions
de
développement dans les sociétés rurales mossi, toute société quelles que soient sa
taille et son étendue géograprlique se transforme constamment soit par innovations
internes, soit par les contacts extérieurs qu'elle entretient avec d'autres sociétés (ou
des deux à la fois) en fonction de sa dynamique propre.
397

Sans doute, les interventions de développement en milieu rural mossi ont-elles
servi d'accélérateur aux transformations diverses de cette société. Il est très difficile
à l'étape actuelle de nos investigations sur le terrain, de déterminer la nature des
transformations qu'aurait subies cette société ou d'en préciser le rythme d'évolution
sans interventions extérieures. Comment en effet distinguer les transformations
survenues par suite d'une intervention de développement de ce qui se serait produit
sans cette intervention au niveau d'une société?
De plus, la diversité des interventions de développement en milieu rural
autorise-t-elle la maîtrise de tels problèmes?
Les difficultés de saisir les transformations provoquées par les interventions
de développement en milieu rural mossi sont rendues d'autant plus grandes que la
pénétration de l'éçonomie marchande ne suit pas le même rythme dans tous les
secteurs de la vie de la société: économie, politique, culture, idéologie ...
• L'irrigation: une issue de secours pour les paysans mossi ?
C'est depuis 1960 que l'irrigation a été introduite au Burkina Faso avec comme
objectif, la production du riz pour réduire la dépendance du pays vis-à-vis de
l'extérieur en matière de céréales et compenser le déficit alimentaire chronique dans
certaines régions, particulièrement celles du Nord et du Centre-Nord. L'irrigation s'est
par la suite développée grâce à la réalisation des périmètres irrigués (aval de
barrages) et à l'aménagement des plaines à travers l'ensemble du territoire national.
398

D'après une étude réalisée sur le développement des cultures irriguées par
des experts Burkinabè en 1987 à la demande du Comité Permanent Inter-Etats de
Lutte Contre la Sécheresse au Sahel (CILSS), l'irrigation au Burkina Faso totalise une
superficie de 13.850 hectares ; ce chiffre ne prend pas en compte l'irrigation
informelle et ne représente que 8,6 % du potentiel national de terres irrigables estimé
à 160.000 hectares.
A titre de comparaison, l'agriculture pluviale occupe 2,2 millions d'hectares sur
un potentiel de 9 millions d'hectares représentant 33 % du territoire national.
Au cours de la dernière décennie, l'irrigation a pourtant faiblement progressé:
pour la maîtrise totale d'eau, les superficies sont passées de 1979 à 1986 de 7.296
ha à 8.715 ha, soit une progression d'environ 19 % sur la période. La maîtrise
partielle d'eau (bas-fonds simples et plaines hydromorphes) a connu une évolution
plus satisfaisante, les superficies étant passées de 2.875 ha à 5.135 ha soit une
progression d'environ 78,6 % pour la même période.
La dernière décennie a également été caractérisée par le développement de
l'irrigation informelle et privée grâce à une politique de développement des
ressources hydrauliques qui se traduit concrètement par la construction de barrages
et autres points d'eau à travers tout le pays. Cette forme d'irrigation revêt toujours un
caractère spontané et une petite taille (il s'agit généralement de jardins ou de petits
périmètres de 0,1 à 1 ha au maximum). De plus, elle n'est pas encadrée; elle trouve
son origine dans les initiatives villageoises avec le plus souvent l'appui des ONG, et
concerne certes le riz, mais principalement les produits maraîchers (oignons, choux,
399

salade, piment, asperge, pomme de terre ... ). Elle se rencontre surtout aux alentours
des centres urbains qui constituent un marché potentiel.
Les rendements obtenus par l'irrigation sont en général satisfaisants (4
tonnes/ha en moyenne pour le riz) ; toutefois une tendance à la baisse s'observe au
niveau de certains périmètres, liée à des problèmes surtout techniques (manque
d'entretien des infrastructures hydrauliques et des sols etc.).
En ce qui concerne l'irrigation informelle et privée, son non-encadrement
empêche de connaître avec précision les superficies qu'elle couvre. D'après un
rapport du Ministère chargé de l'Agriculture et de l'Elevage, en 1986, cette forme
d'irrigation totalisait une superficie de 1.627 ha dont 220 ha pour la Région du
Centre-Nord. Les CRPA dont les personnels sont peu étoffés ne peuvent guère
encadrer les exploitants de l'irrigation informelle et privée dont les superficies varient
par ailleurs suivant les années de bonne ou mauvaise pluviométrie. Les techniciens
du Ministère chargé de l'Agriculture et de l'Elevage estiment que les superficies
couvertes par l'irrigation non encadrée sont supérieures à 2.000 ha par saison.
Les productions agricoles sous l'irrigation ont connu une évolution satisfaisante
dans leur ensemble, grâce surtout à la recherche agronomique. Sur les 13.850 ha
irrigués, les cultures se répartissent dans les superficies suivantes:
riZ
8.810 ha
canne à sucre
3.900 ha
céréales (maïs, sorgho, blé)
570 ha
maraîchage
44 ha
fruits
130 ha.
400

En ce qui concerne les rendements, pour le riz, les rendements peuvent
atteindre 4 tonnes/ha en maîtrise totale d'eau, 1,2 à 2 tonnes/ha en maîtrise partielle
d'eau.
Pour les autres produits, les rendements moyens suivants sont enregistrés:
oignon
10 à 30 T/ha
pommes de terre
10 à 20 T/ha
maïs (grains)
2 à
4 T/ha
blé
45 T/ha
haricot vert
4 à
7 T/ha .
• Objectifs de l'irrigation
Les objectifs visés par l'irrigation au Burkina Faso sont entre autres:
- "assurer l'auto-suffisance pour certains produits alimentaires afin
d'éviter la sortie de devises et réduire la dépendance extérieure;
- procurer des revenus monétaires aux paysans et améliorer les
conditions de vie des populations rurales;
- freiner l'émigration vers les pays côtiers ainsi que l'exode rural vers les
villes par la mise en place dans les campagnes d'activités agricoles plus
sécurisantes et plus rémunératrices, au besoin à travers le transfert des
populations des régions pauvres et surpeuplées vers les plaines
aménagées;
401

- contribuer à la réduction du déficit alimentaire global" 136
Bien que les paysans mossi connaissent la pratique de la riziculture (par
submersion) dans les bas-fonds, c'est avec peu d'enthousiasme qu'ils ont accueilli
l'irrigation qui concentre ses activités presqu'exclusivement sur le riz. La principale
raison souvent avancée; le riz n'est pas un produit de consommation de base de ces
populations. En effet, le riz est occasionnellement consommé en milieu rural mossi
(fêtes coutumières, funérailles, mariages ... ). Sa culture ne peut donc intéresser que
peu les Mossi de loin préoccupés par le milou le sorgho, base de leur alimentation.
Il a fallu une longue et difficile campagne d'information et de sensibilisation des
CRPA auprès des populations rurales mossi pour vaincre leur méfiance afin de les
intéresser à l'irrigation.
Pour les populations rurales mossi en effet, l'intérêt de l'irrigation réside dans
le fait que la principale contrainte à l'amélioration qualitative et quantitative de la
production à savoir l'insuffisance et/ou la répartition inégale des pluies est levée. De
plus les rendements sont meilleurs à ceux obtenus en cultures sèches de façon
générale.
136
CILSS-CLUB du Sahel : Développement des cultures irriguées au
Burkina Faso. Bilan critique, contraintes, propositions d'amélioration.
Ouagadougou 1987 ; p. 31.
402

• Irrigation et stratégies paysannes mossi
L'intérêt de l'irrigation pour les paysans mossi se situe à un double niveau:
le niveau individuel et le niveau collectif.
1. Au niveau individuel d'abord, l'intérêt que le paysan accorde à l'irrigation
dépend de la taille de la parcelle qui lui est attribuée en fonction de sa situation
familiale : suivant le statut social (chef d'une famille nucléaire ou d'une famille
étendue, chef de lignage ou du village... ) chaque famille mobilise un effectif de
convives qui sont autant de "bouches à nourrir" mais également une main-d'oeuvre
disponible. D'où l'importance qu'il accorde à la superficie qui lui est affectée.
Le paysan attache aussi beaucoup d'importance au niveau de maîtrise d'eau
(totale ou partielle) permettant d'obtenir une à deux cultures par an (la double culture
par saison éliminant de fait les risques de famine oriente d'ordinaire le choix de
celui-ci).
Les possibilités de commercialisation des spéculations pratiquées sur la
parcelle irriguée, et bien entendu un prix d'achat des produits agricoles correspondant
à la valeur du travail investi, constituent un autre facteur déterminant dans la stratégie
paysanne face à l'irrigation. Tout un ensemble de facteurs (taille de la parcelle
accordée à chaque exploitant,
niveau de maîtrise de l'eau,
possibilités de
commercialisation des produits avec un prix rémunérateur) est à la base de la
stratégie paysanne mossi avec comme objectif primordial d'assurer à la famille la
sécurité et l'auto-suffisance alimentaires en
mil,
sorgho et maïs (base de
l'alimentation des populations rurales mossi).
403

Les opérations de distributions de parcelles irriguées dans les villages mossi
du Centre-Nord (Louda, Tamassogo, SCOOMAIV1 et COOMAKO) avant 1984 (date
de la réorganisation agraire et foncière au Burkina Faso) se faisaient par tirage au
sort pour l'ensemble des habitants d'un même village. Toutefois prenait-on toujours
le soin de réserver suffisamment de parcelles pour le chef du village et pour le chef
de terre dont l'accord préalable était indispensable avant toute intervention sur le
foncier.
Mais comment la logique du hasard peut-elle s'appliquer à des chefs de famille
dont le nombre de convives s'élève à plusieurs dizaines de personnes et dont la
logique propre les place prioritaires dans les opérations des parcelles?
La logique du hasard qui se solde par des gagnants et des perdants ne
crée-t-elle pas de nouvelles formes d'inégalités et d'injustice sociales en milieu rural
mossi, surtout pour ceux qui ont perdu leurs terrains de cultures à l'occasion des
opérations d'aménagements?
L'irrigation en milieu rural mossi a modifié de façon rapide et profonde les
relations sociales en brisant ce qui constituait le ciment qui consolidait la société dans
son ensemble, à savoir la solidarité. Toute prestation de service dans les périmètres
irrigués fait désormais objet de rémunération. C'est ainsi qu'apparaissent des
phénomènes sociaux nouveaux comme l'émergence d'une catégorie d'ouvriers
agricoles Qeunes et femmes) dans les périmètres, la création de petits marchés où
se ravitaillent en produits divers les exploitants agricoles. A l'exception des membres
d'une même famille travaillant collectivement sur une parcelle ou un ensemble de
parcelles sans recevoir de la part de leur chef une rémunération quelconque, toutes
404

les activités sur les périmètres sont rémunérées
sarclage, repiquage, récoltes,
battage du riz etc.
Les rapports sociaux deviennent des rapports marchands; l'argent semble
désormais réglementer la vie de la société au détriment des valeurs humaines
fondamentales comme le respect, l'honnêteté, la solidarité ...
2. Au niveau collectif, la stratégie adoptée par les paysans mossi est
déterminée par une certaine garantie alimentaire et économique qu'offre l'exploitation
des périmètres irrigués. Les paysans d'un village quelconque adopteront volontiers
l'irrigation si sont dégagées suffisamment de parcelles sinon pour tous, du moins
pour la majorité des habitants dudit village. Une évaluation rapide de l'exploitation de
l'ensemble des parcelles pour le village suivant les critères ci-dessus énumérés au
niveau individuel permet aux paysans de se prononcer collectivement pour ou contre
l'irrigation. Une des premières réactions collectives au niveau des paysans fut
l'engouement des populations rurales vers les parcelles dégagées par les différentes
opérations d'aménagement des zones rurales mossi en vue d'en bénéficier.
Les parcelles une fois acquises étaient aussitôt revendues ou prêtées ou
encore louées à des fonctionnaires ou à de riches commerçants par les mêmes
paysans qui préfèrent d'ailleurs y travailler bien souvent comme ouvriers agricoles et
conséquemment rémunérés. Cette situation est parfois rendue nécessaire car,
l'irrigation introduite en milieu rural visait entre autres objectifs la réduction sensible
de l'émigration; cependant des jeunes gens continuent à émigrer vers les centres
urbains et surtout vers les plantations de café et de cacao en Côte-d'Ivoire ou au
Ghana pour des raisons à la fois historiques, économiques et psychologiques que
405

culturelles. Franchir le "moogho" (territoire des Mossi) semble faire plus homme en
ce qu'il permet de découvrir d'autres "mondes", indépendamment des revenus
monétaires qui peuvent en résulter, et tout jeune "Moaga" (Mossi) est porté à prouver
sa virilité en ayant l'audace de s'élancer à l'aventure.
Ainsi privés de leur main-d'oeuvre familiale, certains chefs de famille placés
dans l'incapacité d'exploiter leurs parcelles ne trouvent pas autre solution que de les
vendre ou les louer.
Le plus souvent, ils préfèrent procéder à la location simple des parcelles pour
en rester propriétaires ; ils ne les vendent que lorsqu'ils ne peuvent pas faire
autrement.
L'aménagement ainsi réalisé semble l'être non pas au profit des paysans, mais
de celui des fonctionnaires et des commerçants,
les premiers ayant servi
d'intermédiaires aux seconds. Cette forme d'appropriation de l'irrigation par les
cadres de l'administration publique et des commerçants est parfois rendue possible
par le caractère assez lâche des structures d'encadrement des périmètres irrigués
: l'infiltration des fonctionnaires et commerçants s'opère à ce niveau, en particulier
des coopératives grâce à la complicité des agents d'encadrement. Le contrôle et la
gestion des autres activités sur les périmètres glissent par ce biais des mains des
encadreurs à celles des commerçants et fonctionnaires.
Une des explications possibles proviendrait du fait que les exploitations des
périmètres irrigués relèvent en fin de compte de deux sous-systèmes de production:
406

1. un sous-système maraîcher directement branchè sur l'èconomie marchande,
mais utilisant la main-d'oeuvre familiale à des périodes différentes de l'année
et sur des terres assez différencièes;
2. un sous-système céréalier ancré dans le cadre traditionnel tant du point de
vue technique de production que de l'organisation et de la finalité de cette
production.
Si une telle situation permet au paysan de jouer sur deux tableaux et
d'accroître ses ressources et ses acquis technologiques, elle n'est pas sans lui poser
des problèmes de gestion de la main-d'oeuvre familiale et du capital foncier; elle lui
pose également des problèmes de détermination des différents niveaux de production
nécessaire aux besoins de sa famille. Partagé entre la production céréalière et la
production maraîchère au moment où ces deux activités se chevauchent dans le
temps, celui-ci ne parvient pas toujours à les concilier, la recherche de la sécurité
vivrière privilégiant la production des céréales tandis que le besoin d'argent favorise
la production maraîchère.
407

Tableau 52
Système de production en milieu rural mossi
Système de production
Sous-système
Paysan mossi
Sous-système
céréalier
du Centre-Nord
maraîcher
Cadre de fonctionnement tradi-
Cadre de fonctionnement
tionnel
moderne
- auto-suffisance et sécurité
- Economie marchande
alimentaires
- Main-d'oeuvre familiale
- Main-d'oeuvre familiale
- Outils techniques de pro-
- Technologies modernes
duction archaïque
de production
· ~
"
408

12.3. Environnement physique et interventions de développement dans
le Centre-Nord
Cerner le problème de l'environnement en général c'est d'abord comprendre
pourquoi et comment il advient dans un contexte donné en tant que produit d'une
histoire des relations qu'entretiennent les systèmes sociaux avec leurs milieux. Cela
suppose une meilleure connaissance des dynamiques spatiales et temporelles de ces
milieux, des processus écologiques qui génèrent ces dynamiques, mais aussi des
systèmes sociaux dans la mesure où ils -participent aux perturbations référées et où
ils sont susceptibles d'en supporter à terme les conséquences.
Par exemple la connaissance des savoirs coutumiers mossi populaires et
spécialisés permet de mieux comprendre les types de liens que les Mossi ont tissés
avec leur milieu et les ressources donnant lieu à usage, la finalité de la recherche
étant de mettre à profit ces savoirs coutumiers pour la gestion viable de
l'environnement. Car les interactions entre dynamiques sociales et dynamiques
naturelles sont en évolution
rapide sous l'effet conjugué de la croissance
démographique, de l'évolution des modes de faire-valoir agricoles et de l'évolution
économique.
Le milieu physique du Centre-Nord apparaît bien désertique, rendant précaire
toute vie, si des mesures urgentes et énergiques ne sont pas prises par la
communauté internationale pour en modifier l'évolution et rendre possibles les
perspectives de développement.
,
"
~ -'
409

Les interventions de développement rural orientées dans le domaine précis de
la protection de l'environnement sont celles de type 3 et de type 4. Elles sont surtout
concentrées dans la Province du Bam. C'est là aussi où la dégradation de
l'environnement est particulièrement grave. Elles se caractérisent par la dispersion
des activités de terrain sans dispositif d'échange d'informations, de coordination et
d'évaluation. Peut être le SPONG et le BESONG parviendront-ils à canaliser les
actions de tous les intervenants dans ce secteur à travers une collaboration
inter-ONG,
et
entre
ONG
et
divers
projets
de
développement
relatifs
à
l'environnement conduits par les services publics.
Comment se présente l'environnement physique de la région du Centre-Nord
et quel a été l'impact des interventions de développement sur l'évolution du milieu
naturel? Un constat en tout cas peut être établi. Le désert avance rapidement et
inexorablement dans la région.
Analyse et évaluation du processus de dégradation du
milieu physique dans le Centre-Nord: un milieu fortement
gagné par la désertification
La désertification ici s'entend dans son acceptation la plus large : "La
désertification constitue l'un des aspects de la dégradation généralisée des
écosystèmes des zones arides et semi-arides qui ont été perturbés par une
410

exploitation accrue du potentiel biologique en vue de satisfaire les besoins des
populations plus nombreuses, aspirant au développement,,137.
Il faut cependant éviter de confondre les processus qui accompagnent la
désertification avec les modifications parfois profondes mais non permanentes du
paysage, et qui sont liées à des variations saisonnières. Dans le cas de la
dégradation des ressources, la baisse de productivité biologique du milieu peut
prendre un caractère irréversible et affecter de façon définitive l'aptitude des milieux
à entretenir la vie humaine.
La complexité des formes et des causes des phénomènes de dégradation font
que leurs effets ne sont pas toujours rapidement perceptibles. Cependant, une lente
déperdition du potentiel biologique accompagne ces phénomènes et débouche à
terme sur la désertification. Les trois provinces de la région du Centre-Nord sont
affectées à des degrés divers par différents processus de dégradation qui risquent
d'en compromettre le développement.
Certains auteurs comme POURSIN (1974) pensent que la désertification a une
origine essentiellement climatique. D'autres par contre (et ce sont les plus nombreux)
estiment que la pression humaine et animale croissante accentuée par des périodes
de sécheresse plus ou moins prolongées, est la principale cause du phénomène
désertique. En réalité les causes de la désertification sont multiples et dans le
Centre-Nord, on peut en distinguer quatre sortes:
137
Définition de la désertification donnée par la Conférence des Nations
Unies (Naïrobi, 1977).
411

la coupe abusive de bois pour la satisfaction des besoins domestiques
(bois de chauffe, construction, délimitation des champs, confection
d'enclos à bétail. .. ) ;
le défrichement pour l'extension des surfaces cultivées en vue de
l'augmentation de la production agricole (qui n'est généralement
obtenue que par l'intensification des cultures);
le surpâturage (ébranchage, étêtage sévère, piétement...);
les feux de brousse (accidentels ou provoqués pour favoriser la
repousse de l'herbe, destruction de parasites, la chasse... ).
Ces causes sont plus ou mOins entretenues et perpétuées par l'évolution
socio-économique du contexte international, à savoir le développement de l'économie
marchande. En effet la recherche de l'argent pousse les paysans à détruire
progressivement leur environnement physique par la vente de bois aux populations
urbaines, pour leurs divers besoins domestiques, et à ravitailler les animaux
domestiques des citadins en herbes fraîches ou sèches... ).
Le processus de dégradation débute donc par une diminution du couvert
végétal. Le sol moins protégé, est soumis suivant les saisons à l'action du vent et de
la pluie. Ainsi par exemple, pendant la longue saison sèche, les vents actifs mettent
en mouvement les particules les plus fines du sol faisant apparaître différentes
formes d'érosion éolienne (remobilisation des dunes, déflation, envahissement des
espaces destinés à différentes formes d'utilisation ... ). En saison des pluies, le
412

ruissellement augmente et différentes formes érosives s'installent (érosion en nappes,
ravines ... ). Ces phénomènes érosifs se manifestent par une perte en terre et une
baisse de fertilité en raison du transport sélectif des particules fines et du lessivage
des éléments nutritifs. Il en résulte une diminution de la capacité de rétention et une
baisse de la productivité, entraînant de nouveau la régression de la couverture
végétale. La désertification apparaît ainsi comme un processus marqué par des effets
en chaîne difficilement maîtrisables lorsque le processus est déclenché.
Les ultimes étapes de dégradation du milieu physique se manifestent par
l'apparition de glacis caillouteux, de dunes vives, d'affleurements de cuirasse, de
ravinements etc.
La dégradation du couvert végétal entraîne celle des ressources en eau (au
niveau notamment des retenues d'eau). Les ressources en eau qui dépendent
étroitement des conditions climatiques et de façon générale de l'environnement
connaissent depuis quelques décennies une diminution sensible: une baisse
continue des nappes phréatiques s'observe dans les trois Provinces du Centre-Nord,
et l'évaporation des eaux de surface augmente, aggravée il est vrai, par le manque
ou le mauvais entretien des infrastructures hydrauliques de façon générale (digue
cassée, déversoir endommagé, puits non curés etc.). 1/ en résulte une dégradation
des terres agricoles et des terres à pâturage (résultat d'une chaîne de conséquences)
qui menace l'existence des Mossi. L'accroissement global de l'occupation agricole y
est très important (50 à 100 % au Bam et au Sanmatenga) ; cependant que le
système des cultures (à l'exception du riz) n'évolue pas vers des formes intensives
d'utilisation de l'espace. Il a même tendance à se détériorer avec la diminution des
jachères, la pression démographique croissante qui accentue la consommation de
413

l'espace et l'utilisation de techniques agricoles adaptées à la culture extensive et
itinérante plutôt qu'à des cultures intensives et sédentaires.
L'extension des surfaces cultivées et la détérioration du système de culture ne
font qu'aggraver la dégradation des sols.
Les travaux de ROOSE et BIRO (1970), ROOSE et al. (1974, 1979) et plus
récemment ceux de NIGNAN et REEB (1982) précisent l'ampleur des pertes en terre.
ilLe coefficient de ruissellement peut atteindre 20 à 40 % sous cultures
traditionnelles ... mais peut atteindre 70 % en cas de feux de brousse,,13B.
La dégradation des terres agricoles touche aussi les périmètres irrigués. Dans
le périmètre irrigué de Louda par exemple, près de 20 % des terres irriguées sont
rendues inutilisables par engorgement à cause d'un drainage défectueux et une
mauvaise gestion de l'eau. De plus, l'on assiste à une diminution des rendements en
riz de l'ordre de 30 % depuis bientôt quinze ans, et à un abandon des terres
irrigables.
La répartition inégale des populations engendre aussi des seuils critiques
d'exploitation
de
certaines
terres.
Le
coefficient
d'intensité
culturale
(terres
cultivées/terres agricoles) atteint ainsi 54 % dans le CRPA du Centre-Nord (selon une
étude de la FAO sur les perspectives du développement agricole à long terme de
l'ex-Haute-Volta en 1978) et les divers besoins d'utilisation du bois augmentent
sensiblement.
138
ROOSE (J.E.) et BIROT (Y.) 1970 : Mesure d'érosion et du lessivage
oblique
et
vertical
sous
savane
arborée
du
plateau
mossi
(Gonsé-Haute-Volta)
1,
résultats
campagne 1968-1969.
Rapport
CTFT-ORSTOM, p. 148.
414

Tableau 53 :
Bilan énergétique (bois de chauffe) de la région du
Centre-Nord en 1983 (en millier de m3/an)
Provinces
PAT
PAU
CAB
Bilan brut
Bilan net
( •••••*.***)
(***********)
(************)
Bam
40
30
124
-84
-94
Namentenga
119
80
146
-27
-66
Sanmatenga
116
52
242
-126
-190
Source:
FAO/Banque Mondiale; rapport provisoire du PNGTV - Burkina
Faso, mars 1990, cité par Thomas Yili.
PAT = Annuelle Totale
PAU = Production Annuelle Utilisable
CAB = Consommation Annuelle de Bois
415

Le bois représente la principale source d'énergie du Burkina Faso (87,5 % du
bilan énergétique et plus de 95 % de la satisfaction des besoins énergétiques
domestiques). La consommation journalière est estimée par la Direction Provinciale
de l'Environnement du Sanmatenga à 1,91 kg. Il en va de même à peu de choses
près dans les deux autres provinces (Bam et Namentenga) contre 1,39 kg dans la
région du Sud-Ouest. Il faut donc préserver à tout prix le capital sur pied. Les
techniciens du Ministère chargé de l'Environnement estiment que la capacité normale
d'extraction du bois est fixée à environ 1,5 % du volume sur pied. Or le disponible
actuel se situe de l'ordre de 3,5 millions de m3 par an, d'où un déséquilibre de 1,3
millions de m3 par an environ entre l'offre et la demande, entraînant un épuisement
continu du patrimoine forestier si la situation actuelle devait encore se prolonger.
La désertification d'un territoire étant la résultante des effets d'un ensemble de
facteurs, une synthèse de la situation de dégradation du milieu physique a été établie
sous forme de tableau d'après les critères ci-après:
- le facteur climatique mesuré par la pluviométrie annuelle (ASECNA) ;
- la densité de la population;
- le taux d'occupation des sols;
- la densité des bovins et petits ruminants .
. "
416

Tableau 54 : Situation de la dégradation de l'environnement physique
Classe
Isohyètes
Densité de
Occupation de sols
Densité animale
population
1
P
1200 mm
0-5 h/km2
Faible occupation
5-8 bovins au km 2
13 %
5-10 p. rum.
2
1000
P 1200 mm
5-15 h/km2
-
5-8 bovins au km 2
10-20 p. rum.
3
800
P
100 mm
15-30 h/km2
Modéré à 13 à 25 %
5-8 bovins au km2
occupation
20-30 p. rum.
4
600
P
800 mm
30-50 h/km2
-
5-12 bovins au km2
10-20 p. rum.
5
400
P
600 mm
50-80 h/km2
-
12-14 bovins au km2
10-20 p. rum.
6
P 400 mm
80-120 km2
Très forte occupation 12-14 bovins au km 2
25 %
20-30 p. rum.
Source:
FAO/Banque Mondiale, rapport provIsoire du P.N.G.I .V. Burkina 1990, cite par
Thomas Yili.
417

L'on observe d'après le tableau ci-dessus que l'état de dégradation du milieu
physique est d'autant plus avancé que le climat est aride, que les densités de la
population et du cheptel sont élevées et que le pourcentage de terre mise en culture
est plus grand.
Pour ce qui touche les ressources en eau, les actions engagées par les
différents intervenants de développement rural en milieu mossi ont surtout consisté
à améliorer les conditions de vie de l'ensemble des populations rurales par la
satisfaction de leurs besoins en eau: plus de 1.000 puits et forages ont été créés
depuis 1975 et un nombre équivalent de puits ou de forages au bénéfice de la région
est en projet aussi bien pour l'alimentation humaine, animale que pour l'agriculture.
Dans le contexte de dégradation générale de l'environnement physique (perte
de fertilité des sols, diminution de la capacité de stockage de l'eau ...) où
l'alimentation hydrique est précaire et les rendements des cultures en baisse,
l'auto-suffisance alimentaire devient un objectif difficile à atteindre. C'est ce qui justifie
les interventions de développement rural dans ce domaine précis de l'environnement:
- le FEER qui est une intervention de type n02 contribue ainsi par ses
programmes de lutte anti-érosive et d'hydrauliques villageoises à la protection et à
la restauration des sols et de l'environnement. En effet la mission essentielle du
FEER consiste à :
- conserver et restaurer les sols
- développer l'hydraulique agricole et pastorale
- augmenter les rendements des cultures, c'est-à-dire accroître la
production agricole par l'intensification des cultures.
418

- stabiliser le système écologique et améliorer l'environnement. Près de 40.000
ha ont ainsi été aménagés par le FEER dans ses activités de lutte anti-érosive. Les
techniques consistent à construire des diguettes par des plantations d'herbacées ou
arbustives ou encore des diguettes en pierres pour freiner l'action de l'eau durant
l'hivernage et lui permettre de pénétrer plus en profondeur dans le sol. Ces
opérations qui ne nécessitent pas d'outils mécaniques ni n'entraîneraient des
problèmes de maintenance, rencontrent l'adhésion des populations rurales qui y
participent.
Par ailleurs, plusieurs retenues d'eau ont également été réalisées par le FEER
pour aider à conserver les eaux et le sol dans le Centre-Nord.
Plusieurs ONG interviennent dans le même domaine que le FEER. Il s'agit
notamment des interventions de type n03 ("PATECORE", l'Association "Six S" au
Bam, le "Projet Sensibilisation et Formation des Paysans autour des Barrages" au
Sanmatenga) et de type n04.
"Programme d'Appui à la Foresterie Villageoise", (Bam-Sanmatenga), du
"Projet
Conservation
Eaux-Sols/Agro-Foresterie
du
Plateau
Central",
(Bam-Sanmatenga), "Rissiall1-Digues Filtrantes", (Bam), "Aménagement de Terroirs
zone de Tikaré", (Bam), du "Projet Conservation Eaux-Sols Titao, Bourzanga, Rollo,
Windigui", (Bam), et du "Projet Développement Agro-Foresterie par la Régénération
d'Acacia" dans le (Namentenga).
,
~,
419

Il est à remarquer cependant que le succès de toutes ces opèrations de
restauration et de protection de l'environnement dépend en grande partie des
populations rurales qui doivent en assurer l'entretien: l'absence d'entretien des sites
anti-érosifs aménagés risque de provoquer de nouvelles formes d'érosion. L'on
évalue à 14 % des sites, soit 11 % de la superficie totale aménagée, les
aménagements en sites anti-érosifs en voie de dégradation ou en mauvais état.
D'une manière générale, l'environnement ne saurait être efficacement restauré
et protégé sans une politique de ce secteur clairement définie. Il existe déjà une
politique forestière en cours d'exécution et dont les aspects essentiels sont les
suivants:
- l'augmentation de la production de bois,
- la réduction de la consommation par l'utilisation de foyers améliorés,
- la sensibilisation et l'éducation des populations rurales sur des activités
comme:
· l'aménagement des formations naturelles et de forêts classées dans
le but de les conserver, les améliorer et les exploiter rationnellement;
· les reboisements industriels (autour des chefs-lieux de Provinces où
environ 500 ha d'arbres de diverses espèces ont été plantées) ;
· les reboisements villageois et familiaux;
420

· les foyers améliorés dont l'objectif principal est de réduire fortement
le niveau de consommation actuel de bois (d'au moins 20 à 50 %).
L'ensemble des opérations de développement relatives à l'environnement ont
connu beaucoup de succès à l'exception des plantations industrielles d'arbres.
L'échec de cette dernière opération s'explique par l'insuffisance des données
disponibles et des difficultés liées à l'entretien et aux conditions de suivi des
plantations d'arbres. A tout ceci, il faut souligner le coût de l'opération. On estime le
coût d'un hectare d'arbres plantés à entre 150 et 500.000 F.CFA (amortissement
compris). Ceci a conduit les responsables chargés du reboisement à développer
plutôt les programmes de reboisement villageois qui bénéficient de l'appui technique
des CRPA et dont le coût à l'hectare varie entre 200 et 300.000 FCFA. Ces
programmes présentent en plus l'avantage d'associer les populations rurales dès le
début des opérations de reboisement.
421

~,,,,,,, .~i4*~).~;" '.~;
Tableau 55 :
Evolution des ressources forestières: volume par classe d'utilisation potentielle par CRPA en milliers de m3
(chiffres arrondis)
. CRPA
Bois d'oeuvre
Potentiel bois
Bois de service
Bois de feu
Fruitier
TOTAL
d'oeuvre
Sahel
696
258
1.702
26.937
438
30.031
Est
1.254
4.750
3.101
58.944
6.301
74.350
Centre
250
1.190
970
12.840
4.490
19.740
Ce ntre-O uest
108
3.535
4.725
23.665
5.963
37.996
Centre-Est
323
328
359
7.818
1.657
10.485
Centre-Nord
-
-
308
4.696
250
5.254
Nord
-
14
46
2.189
92
2.341
Volta-Noire
161
644
2.093
16.828
7.247
26.973
Hauts-Bassins
1.895
2.643
7.374
21.152
9.211
42.275
Sud-Ouest
1.418
1.174
2.159
12.376
8.319
25.446
Comoé
4.726
7.958
5.517
51.853
4.402
74.456
TOTAL
10.831
22.494
28.354
239.298
48.370
349.347
Source: PNUO/FAO 1980.
422

Tableau 56 : Evaluation des ressources forestières et répartition des volumes estimés par CRPA (en m3 sur pied)
CRPA
Savane arborée
Savane arbustive
Fourrés
Total Forestier
Jachères
TOTAL
Sahel
-
25.109.627
4.921.527
30.031.153
5.674.420
35.705.573
Est
37.245.447
37.104.607
-
74.350.034
16.017.138
90.367.192
Centre
13.331.878
6.406.657
-
19.740.535
15.513.842
35.254.377
Centre-Ouest
31.911.960
6.084.140
-
37.996.100
17.524.805
55.520.905
Centre-Est
7.986.683
2.498.458
-
10.485.141
9.496.4 72
19.981.613
Centre-Nord
1.014.170
4.239.379
-
5.253.549
20.217.326
25.4 70.875
Nord
50.313
1.624.501
-
19.740.535
15.513.842
35.254.377
Volta-Noire
10.183.563
16.789.004
-
26.972.567
23.158.263
50.130.828
Hauts-Bassins
26.005.451
16.269.576
-
42.275.028
12.162.616
54.437.644
Sud-Ouest
10.662.438
14.784.066
-
25.446.504
12.414.391
37.860.895
Comoé
55.412.088
19.043.923
-
74.456.011
7.459.361
81.915.372
TOTAL
193.803.991
149.955.938
5.587.421
349.347.350
152.852.557
502.199.907
Source: PNUD/FAO 1980. Direction des Etudes et Programmations
423

Un autre programme d'activités portant sur l'environnement, "l'opération foyers
améliorés" fait également exception parmi l'ensemble des interventions sur le milieu
naturel n'ayant pas connu de succés. Cet échec relatif du programme "foyers
améliorés" trouve sa cause dans l'insuffisance de coordination des activités du
programme et surtout dans les difficultés technologiques liées aux foyers (une dizaine
de prototypes sont proposés aux populations rurales et urbaines) qui restent à
maîtriser.
Mais toutes les interventions sur l'environnement si elles permettent la
satisfaction des besoins énergétiques des populations, devront tendre vers la
stabilisation des systémes écologiques par une plus grande intégration de l'arbre
dans les systèmes de production agricoles et pastoraux. C'est là une exigence du
développement.
La dégradation de l'environnement entraîne des conséquences directes et
graves sur l'élevage qui occupe une place importante dans l'économie de la région
et même du pays. Et, eu égard à l'augmentation continue des effectifs et de
l'insuffisance de la production pastorale et fourragère, l'élevage devient un facteur de
dégradation du milieu naturel, d'autant que la région du Centre-Nord dont la vocation
est essentiellement pastorale et où s'exerce traditionnellement l'activité d'élevage est
très fragile du point de vue écologique. Aussi les interventions de développement
dans ce secteur doivent-elles davantage tendre vers la stabilisation des effectifs à un
niveau compatible avec les ressources pastorales disponibles et l'amélioration de la
productivité de ces
effectifs
par différentes
mesures
d'ordre zootechnique,
technico-économique et institutionnel. Actuellement, à l'exception de quelques projets
424

relatifs à l'hydraulique villageoise et pastorale ainsi qu'à la santé animale, il existe
dans le Centre-Nord peu d'interventions dans le domaine spécifique de l'amélioration
et du développement des ressources pastorales et fourragères qui assurent pourtant
plus de 95 % de l'alimentation du cheptel.
En tout état de cause, les interventions dans le domaine de l'hydraulique
pastorale et de la santé animale doivent pour être efficaces, s'intégrer à l'ensemble
du système de production qu'elles chercheront à améliorer tout en préservant le
potentiel de production du milieu.
C'est pourquoi, face à la gravité du processus de dégradation qUI a été
exacerbé
par les sécheresses successives de la
précédente décennie,
les
interventions de développement rural entreprises par l'Etat et les ONG dans le
domaine de l'environnement et dans ceux qui lui sont voisins, ne visent pas
seulement à en limiter l'extension, mais s'orientent également vers la satisfaction des
besoins prioritaires des populations en eau, produits alimentaires, combustible ...
Il faut cependant souligner que le rythme de réalisation de toutes les
interventions dans le domaine de l'environnement n'est pas à la mesure de l'ampleur
des besoins à satisfaire. C'est ainsi que pour faire face aux besoins en bois de
chauffe par exemple, il faudrait au moins quintupler le rythme actuel de production.
Pour atteindre l'auto-suffisance alimentaire au terme de la décennie en cours,
il faudra accroître la production céréalière au rythme de 7 % au moins par an.
425

Pour ce qui touche la production animale, les actions menées jusqu'ici portent
sur les aspects zootechniques et vétérinaires ce qui contribue à favoriser la
reconstitution du cheptel, sans pourtant résoudre les problèmes de l'aménagement
pastoral et de l'amélioration de la productivité de l'élevage. C'est pourquoi, certaines
interventions de développement tentent d'orienter leur actions sur l'artisanat en milieu
rural, pour contribuer à la promotion socio-économique de la région.
12.4. L'artisanat
L'artisanat est une activité en plein essor dans la région du Centre-Nord; mais
il ne fait pas l'objet d'une intervention de développement, du moins pour le moment,
ni de la part de l'Etat ni de la part des ONG à l'exception des "Six S" du Bam et du
Centre des Handicapés au Sanmatenga.
En milieu rural mossi l'artisanat est surtout perçu comme une activité
économique complémentaire à l'agriculture et exercé par des particuliers ou par des
groupes socio-ethniques qui se sont spécialisés dans la production de certains
articles artisanaux comme les "saàba" (forgerons) qui font de la forge et dont les
femmes sont d'ordinaire des potières.
Les interventions de développement rural qui englobent les activités artisanales
sont classées dans le type n03.
Dans la région du Centre-Nord, en plus des formes classiques d'artisanat
rencontrées et qui sont entre autres:
426

- l'artisanat alimentaire: dolo, fabrication du beurre de karité, de sombala etc.
- l'artisanat textile: filature, égrenage, teinture ... et autres artisanats: forge,
vannerie, poterie, tissage, bijouterie... , il faut citer:

l'artisanat du cuir qui se développe à un rythme rapide et contribue de
beaucoup à l'économie de la région. Si l'on considére que l'artisanat représente près
de
1/5
du
PIS
national
(ce
qui
paraît
relativement
faible
comme
taux
d'investissement) et que la majorité des artisans est concentrée dans la région du
Centre-Nord, l'on comprend l'importance à accorder à cette activité particulière et le
rôle qu'elle est appelée à jouer dans le développement socio-économique de la
région, voire du pays.
L'artisanat qui a longtemps été considéré comme une activité marginale par
rapport à l'économie marchande à cause de son caractère traditionnel et informel
(technologies archaïques, et production destinée avant tout à l'auto-consommation ... )
commence à connaître un regain d'intérêt aussi bien de la part des populations
rurales elles-mêmes et ensuite de la part du marché extérieur. Ainsi l'artisanat du cuir
n'est plus considéré comme une activité secondaire, mais comme une activité
principale en particulier dans la Province du Sanmatenga. Des villages entiers se sont
spécialisés dans l'artisanat du cuir (Dimassa, Silmiougou ...) devenu leur occupation
majeure, même pendant l'hivernage. En général, cette conversion d'agriculteurs en
artisans s'opère de deux manières:
427

- le chef de famille aidé de quelques-uns de ses enfants (les plus jeunes) se
consacrent au travail du cuir, depuis l'acquisition de la matière première, c'est-à-dire
les peaux au travail même du cuir: fabrication de divers produits artisanaux: sacs à
main pour hommes et dames, sacs d'écoliers, bottes ...
Le travail du cuir absorbe pratiquement le double du temps généralement
réservé aux travaux agricoles (15 heures/jour contre 8 heures/jour).
Le reste de la famille s'adonne exclusivement à l'agriculture pour garantir la
sécurité alimentaire à tous les convives. Les risques économiques sont ainsi réduits
au maximum car en année de mauvaise pluviométrie, ce sont les revenus monétaires
tirés de l'artisanat du cuir qui permettront de combler le déficit vivrier par l'achat de
céréales. En année de bonne pluviométrie, les réserves céréalières étant assurées
pour la famille, les gains en argent de l'artisanat du cuir permettent de satisfaire aux
besoins sociaux divers de la famille: habillement des femmes et des enfants, frais
scolaires et de santé, célébration de mariages, de baptêmes et de funérailles ...
Une étude sur la filière cuir dans la région de Kaya (CNRST-IRSSH) révèle
que le revenu mensuel moyen d'un artisan du cuir à Kaya se situe entre 35 et 85.000
F CFA. La variation du revenu monétaire est fonction de l'équipement technologique
des artisans, de la main-d'oeuvre disponible qu'ils emploient, des modalités de
ravitaillement en matière première (cuirs et peaux) qu'ils suivent et enfin de leurs
circuits commerciaux pour écouler leurs productions.
428

- La seconde voie par laquelle s'opère la conversion des agriculteurs mossi en
artisans est celle qui consiste à exercer simultanément par une même famille
l'agriculture et l'artisanat du cuir: l'ensemble des membres de la famille travaille à
mi-temps dans les champs de cultures et à l'atelier (à l'exception des femmes
généralement libérées en demi-journée pour leurs tâches domestiques de préparation
des repas et autres travaux ménagers).
Là aussi la durée de travail par jour est en moyenne de 14 à 15 heures.
De l'avis des Mossi qui pratiquent la double activité de l'agriculture et de
l'artisanat, les résultats sont moins satisfaisants, car c'est l'insuffisance de la
main-d'oeuvre qui recommande la mobilisation de l'ensemble de l'effectif familial sur
les deux activités à la fois.
L'on observera que la stratégie demeure cependant la même: la sécurité
alimentaire à assurer à travers la culture des céréales dans les champs et la
recherche d'argent frais pour la satisfaction des divers besoins familiaux et sociaux
dans l'artisanat. Actuellement, les artisans du cuir de la région du Centre-Nord
recherchent des débouchés sur les marchés européens à travers des intermédiaires
qui sont les commerçants des grands centres urbains. Mais leur faible niveau
d'instruction, leurs outils de travail très rudimentaires, leur faible capacité financière
et d'organisation sociale constituent les principales contraintes au développement de
leur activité. Mais surtout, estiment-ils l'étroitesse du marché intérieur et le peu
d'ouverture sur le marché extérieur sont de loin les obstacles majeurs au
développement de la filière cuir. Faute de pouvoir écouler leurs produits artisanaux,
429

les populations rurales mossi sont obligées d'en brader les pnx aux riches
commerçants des grandes villes comme Ouagadougou qui en assurent l'exportation.
Les populations rurales sont ainsi exploitées par ces commerçants qui jouent
le rôle d'agents économiques intermédiaires entre elles et le marché extérieur, en
achetant en gros et à bas prix les produits artisanaux qu'ils revendent à des prix bien
plus élevés sans en être les producteurs.
Sans doute les interventions de développement en milieu rural mossi
gagneraient à s'intéresser davantage à la filière cuir de la région du Centre-Nord qui
pourrait jouer un rôle économique essentiel dans le développement de l'ensemble de
la région tout en préservant les spécificités socio-culturelles.
Mais comment les interventions de développement peuvent-elles aider les
artisans ruraux du Centre-Nord à inscrire davantage la filière cuir en tant qu'activité
économique dans la mouvance actuelle de l'économie mondiale?
A tout le moins, l'Etat ou les ONG peuvent-ils établir avec ces artisans, une
stratégie opératoire d'auto-promotion globale et intégrée. Laquelle auto-promotion doit
être l'oeuvre même des artisans avec sans doute l'appui méthodologique,
technologique et/ou financière des différentes interventions de développement. Ainsi
les artisans ruraux pourront-ils transformer leur milieu socio-économique selon leurs
besoins mais aussi en fonction de leurs possibilités, à travers une plus grande
maîtrise du procès de production artisanale à leur profit.
430

La stratégie opérationnelle d'auto-promotion des artisans ruraux pour être
efficace, devra tenir compte de la logique ou rationalité paysanne qui privilégie les
activités agricoles pour des raisons de sécurité alimentaire avant toute autre activité
économique, aussi rémunératrice soit-elle.
Dans ces conditions, une intervention dans l'artisanat rural ne risque-t-elle pas
de rompre l'équilibre économique et social du monde rural mossi ?
Peut-être faut-il
envisager l'organisation
des
artisans
ruraux
et plus
particulièrement ceux de la filière cuir qui sont les plus dynamiques et aussi les plus
nombreux en pré-coopératives, puis en coopératives à l'image des "Groupements
Villageois et Coopératives" dans le domaine agricole pour mieux les encadrer
d'abord. Ensuite, il pourrait être possible grâce à une meilleure répartition des tâches
au sein de la nouvelle organisation de lever bien de contraintes comme celles
relatives à l'approvisionnement en matières premières aux technologies nouvelles et
de commercialisation de façon à assurer la rentabilité économique et financière de
cette branche d'activité artisanale.
L'expérience des organisations paysannes en groupements villageois, en
pré-coopératives ou coopératives connaîtra-t-elle plus de succès dans le domaine
artisanal que dans celui de l'agriculture?
Il est à relever l'une des différenciations socio-économiques assez importantes
consécutives aux interventions de développement en milieu
rural mossi du
Centre-Nord qu'est la spécialisation professionnelle qui se dessine assez nettement
au sein des populations; l'on observe l'apparition de plusieurs filiéres d'activités
431

économiques conduisant à la formation de catégories socio-professionnelles plus au
moins spécialisées, signe d'une dynamique sociale assez marquée. La particularité
de ces nouvelles filières d'activités économiques est notamment la tendance à la
transformation des villages en "bourgades".
Cette tendance à l"'urbanisation" des villages est-elle la finalité ou la
conséquence des interventions de développement?
Le
développement de
l'irrigation
(l'une des formes
d'interventions de
développement les plus récentes) dans la région du Centre-Nord s'accompagne de
celui de nouvelles activités économiques surtout autour des villages situés à
proximité des périmètres. Plusieurs facteurs expliquent l'apparition soudaine de ces
activités:
le grossissement de ces villages occasionné par les migrants agricoles
dont certains avec leurs familles entières;
le flux de population mobile constitué par des ouvriers agricoles
temporaires ou permanents.
Toutes ces populations gonflent ainsi certains villages et interpellent les
autorités administratives pour qu'y soient installés des infrastructures et équipements
socio-collectifs comme les écoles, les maternités et dispensaires, des marchés etc...
Parfois c'est sur initiatives propres des populations que sont réalisées toutes ces
infrastructures. Les besoins sociaux et économiques les plus divers de ces
populations augmentent, favorisant le développement des activités économiques
comme le commerce, la menuiserie, la maçonnerie et d'autres formes d'artisanat.
Des petits restaurants s'ouvrent pêle-mêle, des cabarets et des bars-dancing se
construisent et y drainent un gros monde (surtout les week-end) et même des salons
de coiffure (hommes et femmes) se dressent un peu partout dans les villages
riverains des barrages et ceux situés tout autour des périmétres aménagés de Louda
et Tamassogo (dans la Province du Sanmatenga) et de Kongoussi (dans la Province
du Bam).
432

Lieux d'échanges économiques intenses et de brassage humain, ces villages
se trouvent ainsi transformés en "villes" si les services administratifs venaient à s'y
implanter. Or du village à la ville, il n'y a qu'un pas, vite franchi au Burkina Faso
lorsqu'une agglomération atteint la taille de 700 habitants elle est érigée en village;
et si un ensemble de villages atteint à leur tour 10.000 habitants et comprennent un
certain nombre de services et d'équipements socio-collectifs et d'infrastructures
(routes, adduction d'eau, électricité ... ), cet ensemble est reconnu d'emblée comme
ville.
"... le lac et les aménagements hydro-agricoles réalisés sur les pourtours
de Kongoussi jouent un rôle économique essentiel pour la province (du Barn).
Les activités agricoles liées à la présence de ce plan d'eau sont à la base de
l'urbanisation de Kongoussi, et il n'est pas exagéré de dire que Kongoussi en
tant que ville doit son existence au lac de Bam"142.
Les espaces villageois deviennent ainsi des cadres appropriés où se
développent des mécanismes de création d'emplois et de revenus à travers la
diversification du tissu productif et l'amplification des circuits par la demande et
l'investissement. C'est l'une des principales conséquences du développement des
nouvelles activités économiques dans les zones aménagées, lesquelles activités sont
à l'origine de la stagnation ou de la croissance socio-économique régionale.
Le gonflement des populations de certains villages (provoqué essentiellement
par des migrations agricoles) qui s'accompagne du développement de nouvelles
activités économiques (en particulier de certaines filières propres aux centres urbains
comme les restaurants, les boutiques ... ) n'exprime pas seulement une vitalité
économique de la région du Centre-Nord; il traduit aussi une nouvelle forme de
structuration sociale qui pose le problème du contrôle social: les détenteurs du
pouvoir économique (des commerçants et fonctionnaires) apparaissent comme les
nouveaux personnages influents des villages devant les chefs de village et/ou de
terre qui conservent cependant le pouvoir social dont la force ou la puissance reste
142
CILSS-CLUB DU SAHEL, op. cit. p. 45.
433

limitée s'il ne s'accompagne pas d'un pouvoir économique. Par exemple, le chef du
village de Louda (Sanmatenga) qui est un fonctionnaire (gendarme) conserve intact
son prestige social que lui confère la chefferie traditionnelle; il a même amélioré son
image de marque au sein des populations villageoises grâce au pouvoir économique
qu'il détient de par son statut d'agent de l'Etat.
a
Appréciation par les populations rurales mossi des interventions
par type et selon le niveau de réalisation
Tableau 57 :
Niveau de réalisation des interventions de développement
en milieu rural
Niveau de réalisation par type d'intervention
Domaines d'interventions
Type 1
Type 2
Type 3
Type 4
Agriculture et Elevage
70 %
48 %
30 %
-
Environnement
5%
26 %
15 %
90 %
Artisanat
10 %
-
-
-
Education - Formation
15 %
13 %
55 %
10 %
Santé
-
9%
-
-
Infrastructures et
équipements socio-
-
4%
-
-
collectifs
Total 100 %
-
-
-
-
La plupart des interventions de développement en milieu rural mossi placent
l'agriculture et l'élevage au centre de leurs activités, même si chaque type
d'intervention de développement consacre l'essentiel de ses actions à un domaine
précis du développement: l'agriculture et l'élevage pour les interventions de types
na 1 et n0 2, l'éducation et la formation pour le type n0 3 et l'environnement pour enfin
le quatrième et dernier type d'intervention de développement.
'
...~~
..' "'-
434

L'environnement
et
l'éducation-formation
demeurent une
préoccupation
constante de l'ensemble des interventions de développement, en raison de la
dégradation trés poussée du milieu physique qui requiert une lutte conséquente pour
en restaurer les éléments naturels constitutifs par une sensibilisation et une
conscientisation permanentes (éducation-formation) des populations rurales dans leur
ensemble.
Les interventions de développement des types 3 et 4 qui sont de taille plus
réduite et dont l'étendue géographique ne dépasse généralement pas les limites
d'une Province (à l'exception du PAFV et de la CES/AGRO qui couvrent les
Provinces du Bam et du Sanmatenga à la fois) donnent entièrement satisfaction aux
populations rurales. Leurs petites dimensions ne requièrent que de technologies
simples facilement maîtrisables et accessibles à la plupart des paysans; les résultats
que les paysans en obtiennent sont plus immédiats et concrets; les risques sociaux
et économiques étant minimisés au niveau de ces types d'intervention expliquent
dans une large mesure le degré de satisfaction qu'ils donnent aux paysans.
435

Tableau 58 :
Appréciation des interventions de développement en
milieu rural par les populations mossi
Région
Niveau de
1ntervention
Pourcentage
Echantillon-
Centre-Nord
satisfaction
type 1 (PPI L,
nage
Provinces
PPIB,PPIK)
Bam
Très satisfaits
400
30,769 %
satisfaits
900
69,230 %
1.300
Insatisfaits
0
-
Sans réponse
0
61,231 %
S/TOTAL
(4 types de
1.300
100 %
1.300
réponse)
Namentaga
Très satisfaits
160
22,857 %
satisfaits
523
74,714 %
700
Insatisfaits
0
-
Sans réponse
17
2,429 %
S/TOTAL
(4 types de
700
100 %
700
réponse)
Sanmatenga
Très satisfaits
630
31,5 %
satisfaits
1.127
56,35 %
2.000
Insatisfaits
200
10 %
Sans réponse
43
2,15 %
S/TOTAL
(4 types de
2.000
100 %
2.000
réponse)
TOT. GEN.
(4 types de
4.000
100 %
4.000
réponse)
436

:~. ,~ -..,.
"'
Tableau 59 (suite) : Appréciation des interventions de développement en milieu rural par les populations mossi
Région
Type
Centre-Nord
d'intervention
Projet
n° 2
BKF/84-001
%
ADRK
%
FEER
%
PEDI
%
Echantillon
Niveau de
Provinces
satisfaction
Très satisfait
-
-
-
-
303
23,307
-
-
Satisfait
-
-
-
-
896
68,923
-
-
1.300
Bam
1n satisfait
-
-
-
-
72
5,538
-
-
Sans réponse
-
-
-
-
29
2,230
-
-
SfTotal
-
-
-
-
1.300
-
-
-
-
Très satisfait
241
34,428
302
43,142
-
250
35,714
Satisfait
420
60
398
56,857
-
450
64,285
700
Namentenga Insatisfait
27
3,857
-
-
-
-
-
Sans réponse
12
1,714
-
-
-
-
-
SfTotal
700
-
700
-
-
700
Très satisfait
800
40
902
45,1
519
25,95
727
36,35
Satisfait
912
45,6
1.068
53,4
1.435
71,75
1.273
63,65
2.000
Sanmatenga Insatisfait
197
9,85
-
-
40
2
-
-
Sans réponse
91
4,55
30
1,5
6
0,3
-
-
SlTotai
2.000
-
2.000
-
2.000
2.000
iTOTAL GENERAL
4.000
437

La plupart des populations interrogées affirment que les interventions de
développement rural engagées dans la région à leur bénéfice donnent satisfaction,
même si cette réponse doit être nuancée en fonction du type d'intervention et de la
Province considérée.
L'appréciation par les populations rurales mossi de toutes opérations de
développement demeure toujours positive avec cependant des réserves exprimées
dans un langage si subtil qu'on l'interpréterait négativement. Par exemple parmi les
interventions de type n01, le PPIK (pour le Sanmatenga) le PPIB (pour le
Namentenga) et le PPIL (pour le Bam) sont positivement appréciées de façon
unanime: sur 4.000 personnes interrogées, seules 200 sont insatisfaites de cette
forme d'intervention ; elles proviennent par ailleurs d'une même Province, le
Sanmatenga. Il en est de même pour les interventions de type n02 avec l'ADRK, le
FEER, le PEDI et le Projet BKF/84-001.
"Tout ce qui est fait dans nos campagnes, c'est pour nous aider, c'est
pour notre bien. Nous ne pouvons en avoir qu'une bonne appréciation,"
déclarent généralement les chefs de famille, seuls autorisés à s'exprimer dans les
entretiens de groupes.
438

Les interventions de développement de type 1 donnent satisfaction à plus de
80 % des populations des trois Provinces qu'elles touchent: le PP/L, le PPIB et le
PPIK (appellation d'une même ONG suivant la localité), est très actif sur le terrain.
D'après les autorités administratives locales, cette ONG a su apporter un nouveau
souffle économique à la région à travers l'appui technique et financier constant aux
populations rurales. Les conditions de vie des paysans se sont quelque peu
améliorées.
Mais conjoncture internationale oblige. L'ONG qui est en très grande partie
financée par les Etats-Unis voit ses ressources financières diminuer d'année en
année, la première Puissance Mondiale se désengageant peu à peu de certains
domaines comme celui de l'agriculture et de l'élevage pourtant prioritaire en Afrique
de façon générale.
En ce qui concerne les interventions de développement du type 2, elles sont
diversement accueillies par les populations rurales mossi. L'on remarquera d'abord
que le projet BKF/84-001
ne touche que deux Provinces (Namentenga et
Sanmatenga) où malgré son faible taux de réalisation, il donne satisfaction à une
large majorité des populations concernées.
L'ADRK couvre également deux des trois Provinces (Namentenga et
Sanmatenga) et son niveau de réalisation donne entièrement satisfaction (puisqu'on
ne relève aucun insatisfait) à ceux qui en sont bénéficiaires.
439

Quant au FEER dont l'action s'étend au Bam et au Sanmatenga, même si la
majorité des populations des deux Provinces manifestent leur satisfaction par rapport
aux résultats enregistrés par cette intervention de développement, il compte quelques
insatisfaits.
Les
raisons
généralement évoquées
pour justifier
le
sentiment
d'insatisfaction
des
populations
sont le manque de
suivi
des équipements
hydrauliques qui se détériorent rapidement, l'insuffisance des points d'eau par rapport
aux énormes besoins en eau des hommes et des animaux etc.
Le PEDI qui limite volontairement ses actions (pour des raisons d'efficacité)
aux Provinces du Namentenga et du Sanmatenga rencontre le plus large écho
favorable auprès des populations rurales mossi. Il est vrai que le PEDI est doté de
moyens financiers substantiels, mais dispose surtout d'un personnel compétent et
expérimenté, permettant de réaliser avec succès toutes les actions de développement
initiées sur le terrain.
440

CHAPITRE IX : SITUATION
ACTUELLE
DU
PROCESSUS
DE
DEVELOPPEMENT
SOCIO-ECONOMIQUE
ET
SANITAIRE DU CENTRE-NORD ET TENDANCES
13.
SITUATION DU PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT SOCIO-ECONOMIQUE
ET SANITAIRE
Les paysans mossi du Centre-Nord organisés en groupements villageois, en
pré-coopératives ou coopératives (pour les exploitants rizicoles essentiellement) ou
.tout simplement en associations de producteurs ont renforcé en quelques années leur
base matérielle de production, adopté des systèmes de gestion plus rationnels qu'ils
maîtrisent plus ou moins bien. Ils ont surtout amorcé l'accumulation d'une épargne
locale, ouvrant ainsi des perspectives d'investissements importants dans la région.
Avec l'appui de l'Etat et/ou des ONG, il leur faudra à présent harmoniser et renforcer
l'organisation et la gestion de leurs structures organisationnelles et de production
pour IJne meilleure productivité économique.
Déjà les problèmes d'approvisionnement en matériel, équipements divers,
biens de consommation ne constituent plus des obstacles majeurs dans le processus
de développement régional. Par exemple, un système d'approvisionnement en
moyens de production (grillage, charrette, charrue asine, petites motopompes, petit
matériel horticole ... ) est déjà monté à Kaya par l'ADRK, le PPIK (PPIS et PPIL) et
le PEDI.
441

Ces dernières ONG apportent par ailleurs un appui renforcè à des activités
susceptibles de dégager un surplus économique comme le maraîchage et les petits
périmètres irrigués de type familial. L'action des ONG à ce niveau vise à terme à
valoriser le potentiel économique que représentent les terres aménagées par une
intensification de la production, la transformation des produits agricoles et une
amélioration des systèmes et techniques de commercialisation.
C'est pourquoi ces ONG apportent également un appui technique aux actions
de conservation des eaux et du sol et à l'adaptation des systèmes de production aux
conditions créées par l'alternance de périodes de sécheresse et de saisons des
pluies.
Le secteur de l'èlevage et l'artisanat plus ou moins négligé jusqu'ici, bien qu'il
constitue la première richesse économique de la région fait l'objet d'études
approfondies pour définir les améliorations à y apporter pour qu'il puisse dégager un
surplus économique.
Les tendances d'évolution du processus de développement socio-économique
et sanitaire en cours dans le Centre-Nord sont marquées par les faits suivants:
- La participation des populations paysannes mossi aux différentes opérations
de développement en milieu rural reste dépendante des animateurs ruraux,
que ceux-ci soient des agents de l'Etat ou du secteur privé. C'est de ces
animateurs ruraux qu'elles attendent les moyens financiers et matériels ainsi
que la solution à leurs problèmes collectifs.
442
..'

- Les structures de parenté, en particulier les familles comme unités de
production restent la base de tout le dispositif des organisations paysannes.
C'est autour et à partir de ces structures que se dessinent les contours des
fonctions
nécessaires
à une amélioration de la production et de
la
consommation.
Toute une dynamique sociale du changement semble donc s'amorcer au
niveau des paysans moss; du Centre-Nord grâce aux diverses initiatives des
organisations paysannes avec l'appui plus ou moins efficace des services techniques
d'animation du monde rural.
De
plus,
depuis
quelques
années
déjà,
une
nouvelle
approche
du
développement rural se fait jour, au point d'en devenir une entrée incontournable des
stratégies du développement local au Burkina Faso: celle de "gestion des Terroirs".
Cette nouvelle approche du développement rural connaît un succès dans le Centre-
Nord du fait qu'elle répond de- façon globale, intégrée et "structurante" aux
incertitudes provoquées par le bilan désenchantée de 30 ans de développement qui
n'ont pas su mettre au point des solutions susceptibles de prendre en compte
l'accroissement de la pression foncière et d'éviter la dégradation du capital agro-
sylvo-pastoral qu'elle induit.
443

"L'approche «gestion des terroirs»
se présente donc comme une
alternative englobante des stratégies et démarches antérieures, des plus
sectorielles (reforestation, vulgarisation de thèmes d'intensification auprès de
paysans modèles ou pilotes, élevage, DRS-CES... ) aux plus globales ... "143.
L'objectif majeur de la «gestion des terroirs»
peut ainsi être résumé: les
communautés rurales (agricoles, agro-pastorales et pastorales) disposent de
ressources naturelles limitées par un accroissement démographique rapide, et
fragiles par la surexploitation dont elles sont l'objet, dans un contexte économique et
climatique
peu
favorable.
Ces
ressources
constituent
l'essentiel
du
capital
(patrimoine) dont elles disposent pour assurer leur survie et leur développement,
aujourd'hui comme dans cinquante ou cent ans.
D'oIJ l'intérêt et l'urgence d'identifier ces ressources, de les localiser, de les
délimiter pour modifier leur système d'exploitation et de valorisation en vue d'assurer
à la fois leur reproduction, leur régénération et leur protection et une réponse'
satisfaisante aux besoins des agriculteurs et des éleveurs.
C'est pourquoi Jacques BERTOME et Jacques MERCOIRET estiment que "la
démarche de planification du développement local et l'approche gestion de terroirs
sont complémentaires et indissociables, quel que soit l'objectif (sectoriel ou global)
du projet de développement envisagé.
143
BERTOME (Jacques),
MERCOIRET (Jacques)
: Planification du
développement local. Guide méthodologique suivi de trois études de
cas en Afrique de l'Ouest.
Ministère de la Coopération et du
Développement Paris, 1992 p. 147.
444

Par exemple
144
Démarche d'élaboration concertée d'un plan de
Définition dans un cadre clair d'un système renouvelé de "gestion
Projet ORS-CES
développement local par les populations
des ressources" et d'un schéma d'aménagement du terroir.
Reboisement-Elevage
concernées
Définition des actions spécifiques de ORS-CES, reboisement, etc.
en intégration aux autres secteurs d'activité
Démarche d'élaboration d'un plan de
Systéme de crédit nécessaire pour se donner les moyens prévus.
Projet de mise en place d'un
développement local, d'un système de gestion
système de crédit
des ressources naturelles et définition des
moyens nécessaires, dans ce cadre, pour
parvenir aux objectifs retenus.
Démarche de planification pour identifier les
Définition d'un système de gestion des ressources pour parvenir
Projet de gestion de terroir
transformations à opérer au niveau des
aux objectifs fixés dans le plan.
systèmes de production (pour éviter la
surexploitation des ressources) et les objectifs
Définition d'un schéma d'aménagement du terroir pour codifier et
de développement à atteindre.
contrôler la gestion des ressources naturelles.
Définition d'un plan global du développement
Définition d'un système de gestion des ressources naturelles qui
local qui identifie précisément l'importance de
permette de dégager un surplus destiné au financement de
Projet santé ou éducation
ces deux secteurs. Identification des moyens à
services nouveaux tout en assurant une reproduction des
dégager pour assurer la pérennité des solutions
ressources.
envisagées dans ces deux domaines.
Définition d'un système de santé ou d'éducation susceptible de
répondre aux besoins de la population pour réaliser ce
programme de développement.
144
conf. Jacques BERTOME et Jacques MERCOIRET : Planification et développement local. Guide méthodologique suivi
de trois études de cas en Afrique de l'Ouest. Ministére de la Coopération et du Développement Paris 1992. P 260.
445

L'intérêt d'une approche globale des interventions de développement en milieu
rural (planification du développement local et gestion des terroirs) réside dans le fait
qu'elle permet à une communauté de base, quels que soient les objectifs des
interventions, de se définir un cadre de référence structurant qui permettra par la
suite d'intégrer de façon cohérente et maîtrisée, toutes les autres initiatives qui
pourraient lui être proposées ou qu'elle entreprendra (Jacques BERTOME et Jacques
MERCOIRET 1992).
Plusieurs facteurs sont à l'origine de la rupture de l'équilibre par ailleurs
fragiles des systèmes de production traditionnels mossi dont les plus essentiels sont:
- l'augmentation de la population,
- l'accroissement et la diversification des besoins,
- la monétarisation des échanges et la recherche de revenus croissants,
- l'urbanisation et l'exode rural,
- les différentes politiques économiques élaborées par l'Etat ayant entraîné
d'importants flux migratoires,
- la sécheresse et la désertification.
446

Une telle situation
a conduit les paysans et éleveurs mossi
à une
surexploitation des ressources (les stratégies d'intensification des productions ayant
échoué dans la plupart des cas, au profit d'une extensification rendue possible par
la mécanisation). Il en résulte une multiplication et une aggravation des conflits entre
agriculteurs et éleveurs, entre villages, entre agriculteurs autochtones et migrants, les
ressources naturelles (rares et dégradées) étant devenues un enjeu décisif de survie.
De nouvelles activités économiques se créent et se développent comme un
complément ou souvent comme un palliatif à celles déjà existantes: maraîchage,
petit commerce, orpaillage ...
Face à l'évolution déséquilibrée des systèmes de production et pour freiner les
conséquences de la dégradation continue de l'environnement physique, les services
techniques de l'Etat et les agences de développement multiplient diverses stratégies
parmi lesquelles l'on peut citer:
- L'intensification des systèmes de production (produire plus sur une même
surface ou la même quantité sur une surface moindre) pour stopper le
processus d'extensification. Mais non seulement l'intensification requiert des
moyens matériels
et humains coûteux et donc peu accessibles aux
producteurs, mais encore ces moyens, lorsqu'ils sont trouvés, sont détournés
au profit d'une extension accrue des surfaces. Car les paysans ne disposent
pas toujours de réserves vivrières suffisantes qui les pousseraient vers une
intensification que les aléas climatiques rendent toujours incertaine.
447

- L'encouragement à l'émigration des populations vers des terres neuves, plus
fertiles sans négliger des actions de régénération-protection des ressources
naturelles comme les reboisements familiaux et villageois.
- L'application de mesures coercitives qui obligeraient les agriculteurs et les
éleveurs à respecter des normes d'exploitation et de protection des ressources
naturelles.
- Une ré-organisation des systèmes de production pour en accroître la
productivité au double plan quantitatif et qualitatif.
L'approche «gestion des terroirs villageois»
présente l'avantage d'être
globale et de ce point de vue apparaît comme une solution palliative à l'absence de
coordination des services techniques administratifs de l'Etat et des autres projets de
dèveloppement et des ONG intervenant dans le Centre-Nord. Mais en définitive cette
approche n'apparaît-elle pas comme une préoccupation interstitielle qui cherche à
occuper l'espace laissé libre par les actions des différents intervenants en matière de
développement rural?
Et puis, un environnement èconomique peu porteur comme celui du Centre-
Nord ne constitue pas lui-même un frein aux actions qu'entreprendrait la démarche
gestion des terroirs? Car ... ''l'indispensable intensification des systèmes de
culture et de production doit pouvoir prendre appui sur des marchés attractifs,
448

un
système
de
prix
incitatif,
un
système
de
crédit
favorable
aux
investissements .. 145.
Aussi s'avère-t-il nécessaire et urgent de susciter l'émergence d'organisations
paysannes libres et solides autour de plans de développement régionaux élaborés
en commun avec bien-entendu l'aide de partenaires extérieurs qui accepteront de se
solidariser avec ces "nouveaux professionnels"146 du développement local.
Une des nouvelles tendances de l'évolution du système socio-économique
mossi réside aussi dans la revendication à l'autonomie qui semble caractériser l'état
d'esprit des populations:
Les formes d'exploitation des terres rurales en milieu mossi (cultures pluviales
pour les besoins alimentaires et cultures irriguées pour la commercialisation à des
fins de revenus monétaires) ont provoqué des changements non seulement dans la
structuration sociale (comme cela a été développé dans les chapitres précédents)
mais aussi dans le système économique lui-même et partant dans la conception du
développement par les populations rurales mossi. En effet, l'éclatement des familles
étendues en de plus petites unités familiales et conséquemment des exploitations
familiales en des unités d'exploitation de plus ou plus réduites au fur et à mesure que
des éléments de la famille contractaient des mariages, ne répond pas seulement à
un besoin de promotion socio-économique individuelle de plus en plus prononcé
(conséquence du développement de l'économie monétaire, du passage de l'économie
145
BERTOME (J.) et MERCOIRET (J.) dans op. cit. p. 273.
146
"Nouveaux professionnels" : l'expression est de BERTOME (J.) et de
MERCOIRET (J.).
449

de subsistance à une économie de marché ... ) ; il obéit à une logique du
développement que se façonnent les populations rurales mossi, caractérisée par une
tendance à l'autonomie.
Bernard TALLET explique ainsi le développement des initiatives locales vers
l'autonomie par l'essor de la culture du coton et le développement de la culture
attelée:
"Aptes à répondre aux besoins monétaires des jeunes paysans, les
champs de coton ont été ouverts sous forme de champs personnels. En
obtenant ainsi des anciens l'autorisation de défricher, les plus jeunes ont pu
créer une nouvelle zone de champs permanents ou semi-permanents. C'était le
début du mouvement d'affirmation des initiatives individuelles... "147.
Quelle conception du développement donc chez les Mossi?
En posant cette interrogation, notre intention n'est pas de susciter un vieux
débat sur le développement basé sur une entreprise individuelle (Meistre 1977) ou
alors basé sur les communautés (Guy Belloncle 1982). En effet Meistre à la suite
d'autres auteurs soutient que le développement dans les sociétés d'Afrique passe par
la destruction des structures traditionnelles. Car le développement repose sur
l'entreprise individuelle rendue impossible dans les sociétés traditionnelles où le
contrôle social qui s'exerce sur les individus les empêche de développer des
initiatives privées.
147
TALLET (B.), op. cit. p. 400.
450

Dans les sociétés traditionnelles "l'emprise des valeurs et des coutumes est
encore suffisamment forte ... pour prévenir tout éclatement..." (p. 50) et où ...
"les participations, les solidarités et les loyautés... découragent l'action
novatrice,
font
considérer
comme
déviants
les
individus
qui
essaient
148
d'innover"
.
Guy Belloncle s'oppose à cette thèse et propose le développement par les
communautés grâce à une adaptation des structures sociales traditionnelles au
contexte moderne.
" ... grâce à ses structures traditionnelles égalitaires et notamment à ses
villages, l'Afrique Noire .... aurait la chance de mettre en oeuvre un type de
développement qui permettrait d'éviter les énormes gâchis humains auxquels
ont conduit dans le monde les modèles de développement libéraux"149. Selon
Belloncle, si les sociétés traditionnelles opposent une si forte résistance au
modèle de développement libéral "c'est parce qu'elles ne voient que trop bien
où un tel type de société qu'on leur propose les conduit, c'est-à-dire la création
d'inégalités économiques dont le résultat sera de briser leur cohésion sociale
et culturelle"150.
148
MEISTER (A.) 1977, La participation pour le développement. Paris, Les
Editions Ouvrières, pp. 50-52.
149
BELLONCLE (G.) 1982, L question paysanne en Afrique Noire, Paris
Karthala p. 21.
150
BELLONCLE (G.) 1982, op. cité., p. 21
451

La conception du développement en milieu rural mossi peut tout simplement
être comprise comme un bien-être social et économique à la fois individuel et
collectif. Autrefois le pouvoir social conférait en même temps un pouvoir économique,
de sorte que le développement était d'abord politique et social (à l'image de
l'organisation sociale mossi) avant d'être économique.
Les transformations socio-économiques subies par le milieu rural mossi en ont
modifié également la conception du développement entendu aujourd'hui comme un
bien-être d'abord économique, social et politique ensuite. Cette conception du
développement est-elle compatible avec le modèle socio-économique et l'organisation
socio-politique actuels des Mossi de la région du Centre-Nord?
Le système socio-économique en cours en milieu rural mossi, peut-il comme
se le demande Coquery-Vidrovitch, servir de base à un processus de développement
non
seulement
en
continuant
de
remplir
certaines
fonctions
traditionnelles
fondamentales (auto-régulation sociale: contrôle collectif des moyens de production,
auto-suffisance alimentaire... ), mais aussi en permettant la "modernisation" du monde
rural rendue inévitable par l'influence déterminante du capitalisme et la rupture
démographique 151 ?
151
Voir
COQUERY-VIDROVITCH
(1981),
Les
paysans
africains:
permanences et mutations. Lille, Presses Universitaires de Lille.
452

On peut en douter. D'autant plus que l'accaparement des petits périmètres
irrigués (0,5 à 5 ha) par des fonctionnaires et commerçants dans les zones
nouvellement aménagées, grâce aux facilités d'obtention de crédits dont ils
bénéficient auprès des institutions bancaires et de crédits de la place, les rend
maîtres de tout un patrimoine foncier. Il s'y développe des formes variées de
métayage. Beaucoup de jeunes gens (probablement des migrants) travaillent dans
les périmètres de ces commerçants et/ou fonctionnaires qui les hébergent et les
nourrissent sans rémunération. D'autres préfèrent y être embauchés (ils sont les plus
nombreux) comme ouvriers agricoles.
Cette situation fausse complètement le schéma économique tracé par les
interventions de développement en milieu rural mossi (en particulier l'irrigation) de
sorte qu'il faut tenter de mieux maîtriser, et au besoin repenser ces interventions en
fonction des mutations socio-politiques et économiques qui s'opèrent dans les
sociétés rurales mossi.
Mieux maîtriser ou repenser les interventions de développement en milieu rural
nécessite des moyens techniques, matériels et surtout financiers dont ne dispose pas
l'Etat burkinabè a fortiori la région du Centre-Nord.
L'essentiel du développement du Burkina Faso ne se réalise que grâce à l'aide
extérieure. Mais le contexte international actuel marqué par une crise économique
et financière profonde impose des restrictions à l'aide internationale, obligeant les
Etats comme celui Burkinabè à mieux coordonner les interventions de développement
453

rural esquissées çà et là à travers le pays. Cela est rendu d'autant plus nécessaire
que les sociétés d'intervention et les structures d'encadrement du monde rural ont
révélé leurs insuffisances à assurer une formation adéquate aux paysans.
La mise en place du Bureau de suivi des ONG (BSONG) et la Direction
Générale de la Planification (deux structures du Ministère chargé du Plan et de la
Coopération) traduit cette volonté de l'Etat de mieux maîtriser les interventions de
développement en milieu rural. Les ONG qui interviennent sur le territoire national
fournissent chaque année un rapport d'activités accompagné d'un rapport financier
au BSONG pour acheminement à la Direction Générale de la Planification. Cette
dernière direction en rapport avec le Ministère chargé de l'Agriculture et de l'Elevage
recueille les données de terrain relatives à toutes opérations menées par l'Etat, le
Privé ou tout autre acteur de développement.
Mais à ce jour, aucun bilan économique des opérations de développement en
milieu rural n'a été dressé par ces services étatiques, même pas au niveau d'une
région pour mesurer l'impact de la multitude d'interventions qui s'y déroulent sur les
conditions de vie des populations rurales et l'essor économique d'une région.
Toutefois, l'intérêt de plus en plus marqué de l'Etat aux actions de
développement qui se mènent sur le terrain en vue de les coordonner et de les
planifier dans l'espace et dans le temps, le mouvement de décentralisation
administrative en vue de mieux suivre toute entreprise de développement au niveau
local ou régional, l'autonomie de plus en plus large accordée aux organisations
paysannes sont autant d'indices d'une plus grande maîtrise des interventions de
développement en milieu rural qui déborde le cadre particulier des Mossi.
454

Afin d'évaluer le degré de maîtrise des interventions de développement en
milieu rural mossi par l'Etat, nous examinons l'opération de la riziculture engagée par
l'Etat lui-même à travers les aménagements hydro-agricoles dans le pays mossi et
l'ensemble du territoire national, ainsi que les actions de développement initiées par
quelques ONG en particulier par le PEDI, l'ADRK et le PPIK (qui en sont les plus
représentatives du point de vue implantation géographique et importance du volume
financier investi dans le développement rural).
Ensuite nous examinerons les réactions paysannes individuelles et collectives
(à travers leurs organisations) sur la volonté de j'Etat de maîtriser les interventions
de développement en milieu rural.
13.1. Vers une maîtrise des interventions de développement en milieu
rural mossi?
Le Burkina Faso peut-il maîtriser les multiples interventions de développement
qui se déroulent sur l'ensemble de son territoire en particulier dans les régions
défavorables comme celle du Centre-Nord?
L'on peut en douter, d'autant plus qu'une relative autonomie est accordée à
chaque intervention de développement qui agit sur le terrain sans concertation
souvent avec d'autres acteurs qui opérent également sur le même terrain.
Or comme le remarquait à juste titre un groupe de travail du Ministère Français
de la Coopération :
455

... "La juxtaposition de projets autonomes rend difficile une planification
du développement et la définition d'une politique agricole globale et cohérente
(échanges entre zones déficitaires et zones excédentaires en matière de vivrier,
crédit
agricole,
politique
des
prix,
etc.).
Le
problème
des
structures
d'intervention, faisant appel à des organismes autonomes ou s'appuyant sur
des services administratifs, est posé"152.
L'option de l'irrigation et des cultures irriguées par l'Etat burkinabè n'est pas
seulement l'expression d'une politique régionale ou nationale de développement rural;
elle est aussi celle plus large des pays du sahel regroupés au sein du Comité
Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse au Sahel (CILSS) dans le cadre de la
recherche de la sécurité et de l'auto-suffisance alimentaires pour les populations
sahéliennes.
Le Burkina Faso qui depuis 1966 avait déjà mis en place des structures
régionales de développement rural (CRPA), s'appuie à présent sur ces structures
pour développer les cultures irriguées auprès des- populations rurales.
Les attributions des CRPA sont:
- assurer l'encadrement technique des exploitants bénéficiaires de périmètres
irrigués;
152
Groupe de Travail Coopèration Française: "Les interventions en milieu
rural, principes et approche méthodologique (Document de travail).
Janvier 1988.
456

- gérer l'eau d'irrigation ;
- récupérer les redevances établies dans le cahier de charges dans chaque
type de périmètre;
- assurer la gestion comptable du périmètre;
- approvisionner les exploitants en intrants agricoles en temps opportun et en
quantité suffisante;
- accorder des crédits d'équipements agricoles et de campagne;
- assurer la commercialisation de la production agricole.
Les populations rurales sont appelées à constituer des Groupements Villageois
(GV) dont les attributions sont les suivantes:
- assurer l'entretien des infrastructures hydrauliques;
- respecter la convention d'exploitation du périmètre;
- récupérer la redevance d'amortissement fixée à 13.400 FCFA par hectare et
par culture pour compter de la 4ème année et la redevance d'entretien fixée
à 2.000 FCFA par hectare et par an dès la première année de culture.
457

De plus, des comités de gestion des périmètres irrigués sont créés à partir de
1973 composés de techniciens intervenant dans le développement rural, des autorités
administratives locales, des autorités coutumières dont la mission était de mettre en
place des coopératives et de procéder à la distribution des parcelles aux bénéficiaires
selon des critères préalablement définis.
Ces critères sont essentiellement les suivants:
- priorité aux paysans résidants des villages touchés par les aménagements;
- être chef de famille et disposer d'une main d'oeuvre capable d'exploiter la ou
les parcelle(s) accordée(s) ;
- adhérer à la coopérative.
458

Tableau 60 : Fonctions des structures d'encadrement des paysans
Fonctions
Encadrement Redevance
Eau
Comptable Entretien Distribution Approvisionne-
ment
CRPA
x
x
x
x
x
x
Coopérative
x
x
x
x
x
Groupement
x
x
x
villageois
Comité de
x
x
x
gestion
Autorités
Adminis-
tratives et
x
Coutumières
Source:
Rapport sur le développement des périmètres irrigués au Burkina Faso CILSS-Club du
Sahel. Ouagadougou, novembre 1987.
459

Des structures politiques, administratives et techniques multiplient avec les
structures villageoises des actions sur les périmètres à travers des fonctions variées:
Après
la production,
interviennent les problèmes de stockage et de
commercialisation, partiellement résolus par les structures mises en place par l'Etat.
Il est à signaler l'existence de l'Office National des Céréales (OFNACER) qui
en matière de conservation des grains (toutes natures confondues) possède une
capacité de stockage de 109.350 tonnes dont 79.350 tonnes de stockage de
stabilisation et 30.000 tonnes de stockage de sécurité (réparties à travers des
infrastructures dans toutes les provinces du pays).
Pour ce qui touche la commercialisation, le monopole est détenu par la Caisse
Générale de Péréquation (CGP) aidée dans les opérations de collecte et même de
commercialisation par FASO YAAR.
Le constat sur le terrain est le suivant : non seulement l'irrigation et les
cultures irriguées se développent, mais encore elles se diversifient grâce au soutien
de beaucoup d'ONG 153 aux efforts de l'Etat. Elles contribuent et de beaucoup à
['élevation du niveau de vie des populations rurales (par l'augmentation de leurs
revenus monétaires), au ralentissement des migrations et à la fixation des jeunes
153
Les ONG qui interviennent dans l'irrigation sont entre autres, les "6 S"
(se servir de la saison sèche en savane et au sahel), la Mission
Adventiste, le CESAO (Centre d'Etudes Economiques et Sociales de
l'Afrique de l'Ouest).
460

ruraux sur les périmètres irrigués. Des emplois sont ainsi créés directement ou
indirectement par l'irrigation en milieu rural mossi.
Au total, l'irrigation joue un rôle économique si important dans la stratégie
globale du développement national que l'Etat ne saurait manquer d'en assurer la
maîtrise. L'Etat maintient une présence effective et permanente à travers ses
représentants dans les comités de gestion des périmètres dans toutes les opérations
d'infrastructures
hydrauliques
et
d'aménagements
hydro-agricoles
(dont
il est l'initiateur principal) .
• Les ONG intervenant dans l'irrigation
Les ONG et certaines structures religieuses ont développé des interventions
de formes
variées
dans
le
domaine
de
l'irrigation
sous
forme
d'aide
au
développement rural. Ces interventions contrarient souvent celles de l'Etat et leur
efficacité s'en trouve considérablement réduite. Par exemple, certaines ONG
accordent à des groupements villageois des crédits divers avec des taux d'intérêts
inférieurs à ceux pratiqués par l'Etat.
Heureusement pour corriger les insuffisances constatées dans les interventions
des ONG, une structure fut créée en 1975 par les ONG elles-mêmes pour servir de
cadre de concertation et d'harmonisation de leurs actions de développement en
faveur
du
monde
rural.
Le
Secrétariat Permanent des
Organisations
Non
Gouvernementales (SPONG) qui a démarré ses activités avec 17 ONG, mais qui en
compte 52 de nos jours sur la centaine d'ONG installées sur l'ensemble du territoire
national.
461

Le BSONG créé un peu plus tard (1983) répond aussi à la nécessité de
coordonner toutes les opérations de développement pour les adapter à la politique
économique de l'Etat.
Les interventions des ONG revêtent une forme indirecte (en servant de
sources de financement ou plutôt de relais de sources de financement) ou directe
(création de points d'eau, réalisation d'un programme de formation, d'encadrement
ou d'animation par exemple). Les ONG participent aussi à la gestion des projets
(PEDI à Kaya) ou en assurent le contrôle (ADRK, PPIK à Boulsa, Kaya et
Kongoussi).
A titre indicatif, le concours financier des ONG (membres du SPONG) pour la
construction de barrages et l'aménagement de périmètres maraîchers s'élevait en
1985 à environ 845.588.985 FCFA dans 17 provinces du pays.
462

Tableau 61 : Interventions financières des ONG en 1985 (en F CFA)
Régions (provinces)
Montant global des
Montant global des
financements pour la
financements pour
construction de barrage
l'aménagement de
périmètres maraîchers
Yatenga
158.172.408
27.347.468
Bam
26.040.069
33.710.760
Kouritenga
119.056.083
-
Bulkiemdé
81.690.470
11.429.752
Sanmatenga
72.270.000
3.811.500
Mouhoun
23.152.000
3.259.764
Oudalan
15.662.000
-
Soum
-
17.359.275
Bougouriba
33.500.000
-
Boulgou
2.500.000
-
Sissili
-
2.846.274
Kadiogo
11.000.000
3.669.380
Sanguié
9.534.626
-
Oubritenga
833.000
5.030.068
Bazèga
6.500.000
-
Séno
168.000.000
723.748
Passoré
2.500.000
-
TOTAL
739.400.996
109.187.989
Source:
Rapport sur le développement des cultures irriguées au Burkina Faso
CILSS-Club du Sahel, Ouagadougou n° 1987 ; p. 108.
463

Dans le cadre du Plan Quinquennal 1986/1990, et pour la seule année 1987,
les ONG sont intervenues pour 14 milliards, dont 23 % dans le secteur hydraulique
(aménagement, construction de barrages, de puits, de forages). Pour la totalité du
Plan Quinquennal, leur contribution financière a atteint 35 milliards de FCFA.
D'une manière générale le financement de l'irrigation a connu une évolution
très lente. Ainsi jusqu'en 1984, les fonds investis n'ont varié qu'entre 0,6 et 7,6 % du
montant global de la période.
Selon un document de l'OCDE et du CILSS intitulé: "Aides extérieures et crise
financière dans les pays membres du CILSS, 1986", les aides engagées dans le
secteur de l'irrigation sont évaluées à 9.793 et 15.148 millions de dollars US
respectivement pour 1983 et 1984 soit environ en francs CFA 2,5 milliards (1983) et
3,8 milliards (1984). Les statistiques de l'étude sont nettement en deçà de celles
données de l'OCDEICILSS. Car il existe des difficultés réelles à collecter les
informations .
• Commercialisation des produits dérivés de l'irrigation
Les produits de l'irrigation connaissent une double destination:
1. ils sont destinés à la consommation des populations urbaines des villes les
plus proches et même de celles de Ouagadougou la capitale;
2. ils font également l'objet d'exportation vers l'Europe.
464

Car à l'exception du riz, les autres produits dérivés de l'irrigation ne sont pas
encore rentrés dans les habitudes alimentaires des populations rurales mossi.
Tableau 62 : Situation de la production (en tonnes)
Produits
1980
1981
1982
1983
1984
1985/86
1986/87
Banane
10
.216
360
352
340
290
243
Ananas
62
46
75
90
70
79
70
Papaye
39
101
165
150
182
240
311
Grenadille
1,5
4
17,5
13
8
5
4
Mangue
-
-
1,2
4
8
15
39
Lime/citron
-
16
20
60
215
400
382
Orange
-
0,06
110
150
190
273
229
Mandarine
-
-
-
-
-
-
-
Source:
Rapport sur le développement des cultures irriguées au Burkina Faso.
CILSS-Club du Sahel. Ouagadougou, 1987; p. 88.
465

L'exportation des fruits et légumes se heurte cependant à une contrainte
majeure difficilement maîtrisable par le Burkina Faso: celle de l'insuffisance et de
l'irrégularité du fret aérien (seule voie possible d'exportation des produits périssables
comme les fruits, en raison de la continentalité du pays).
L'une des solutions possibles aux problèmes d'écoulement des productions
maraîchères et fruitières serait peut-être l'élargissement du marché intérieur par une
incitation à la consommation des produits locaux. Il restera un autre problème non
moins important à résoudre, celui de la fixation des prix de ces mêmes produits de
façon à ce qu'ils puissent être suffisamment rémunérateurs pour les producteurs. Or
le mécanisme de fixation des prix des produits, quelle qu'en soit la nature est réglé
par la loi de l'offre et de la demande. Il en résulte que la fixation des prix des produits
irrigués (à l'exception du riz) demeure liée à la fois à la période de l'année
considérée et de l'éloignement des marchés. Par exemple les difficultés d'écoulement
des produits maraîchers augmentent en période d'abondance (décembre-mars) à
cause du décalage constaté entre la récolte et la consommation ainsi qu'à cause du
manque d'infrastructure de stockage, obligeant ainsi les producteurs à vendre au
rabais leurs productions aux premiers acheteurs (d'ordinaire les commerçants). Ces
derniers profitent d'ailleurs de l'inorganisation du marché des produits maraîchers et
fruitiers pour effectuer des achats en gros auprès des producteurs et imposer leur
prix au détail sur les marchés. Le résultat au bout de cette opération se traduit par
les gros bénéfices que réalisent les commerçants sur le dos des producteurs.
Ces dernières années, la commercialisation des productions maraîchères et
fruitières s'organise progressivement.
466

La commercialisation des productions maraîchères est assurée par l'Union des
Coopératives Agricoles et Maraîchères du Burkina Faso (UCOOBAM), celle des fruits
par un projet dénommé "Projet Fruitier".
A
titre
indicatif,
l'évolution
de
la
commercialisation
des
productions
maraîchères et fruitières a été la suivante entre 1980 et 1986 :
Tableau 63 :
Commercialisation
des
productions
maraÎcllères
et
fruitières (en millions de F CFA)
ANNEES
1980
1986
Productions maraîchères
et fruitières
270,7
979,6
Source:
Direction des prix, Ministère du Commerce, de l'Industrie
et de l'Artisanat 1987.
467

Tableau 64 : Exportations de fruits (en tonnes)
ANNEE
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
Q. (BONNES)
Mangues (Amélie)
6
20
240
523
540
800
885
1.200
750
Limes (Tahiti)
-
-
-
10
60
51
24
68
74
Papayes (Solo)
-
-
-
-
-
16
13
20
12
Source:
Rapport sur le développement des cultures irriguées au Burkina Faso, CILSS-Club du
Sahel, Ouagadougou novembre 1987, p. 104.
468

Tableau 65 : Evolution du prix du riz et autres denrées de première nécessité
PRODUITS
U
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
Riz*
1Kg
63
63
63
66
66
72
85
85
85
Mil
1Kg
57
69
80
80
90
90
94
Sorgho
1Kg
57
69
80
80
88
88
94
blanc
Sorgho
1Kg
57
61
75
75
83
83
87
rouge
Maïs
1Kg
57
69
80
80
88
88
94
Sucre blanc
1Kg
240
260
260
300
300
300
335
en morceau
Sucre blanc
1Kg
220
240
240
285
285
285
310
granulé
Sucre blond
1Kg
215
250
250
295
295
295
325
en morceau
Sucre blond
1Kg
215
235
235
275
275
275
295
granulé
* pour le riz, il s'agit du prix du kg de paddy
Source: Direction des Prix, Ministère du Commerce, de l'Industrie et de l'Artisanat 1988.
469

Tableau 66 : Commerce extérieur - balance des paiements (millions de FCFA)
Taux de
ANNEE
EXPORTATIONS
IMPORTATIONS
BALANCE
couverture
importation par
exportation en %
1970
5.056
13.701
- 8.645
36,9
1975
9.368
32.386
- 23.018
28,9
1978
9.600
51.075
-41.475
26,5
1979
16.240
63.916
- 47.676
25A
1980
19.071
75.614
- 56.543
25,2
1981
20.066
91.443
- 71.377
21,9
1982
18.109
113.708
- 95.599
15,9
1983
21.712
109.572
- 87.860
19,8
1984
34.872
111.269
- 76.397
31,3
Source: BCEAO-INSO 1985
470

" ne s'qgit pas seulement de produire pour le monde rural. Il faut encore
pouvoir écouler les productions agricoles. C'est pourquoi les coopératives visent,
comme objectif principal, l'achat de la production des adhérents et la distribution des
semences,
produits
et
matériels
nécessaires
à
la
culture,
mais
aussI
l'approvisionnement en produits et vivres de première nécessité. Mais la collecte des
produits et le ravitaillement des paysans par les coopératives imposent la mise en
place
d'Organismes
Etatiques ou
Para-Etatiques (OFNACER,
FASO
YAAR,
UCOOBAM, etc.) chargés d'acheminer, de rassembler, de vendre et d'exporter les
produits. Ainsi, par le biais des coopératives et de ces organismes, les paysans
peuvent acheter des biens d'équipement et de consommation, et parfois constituer
une épargne, et aussi vendre leurs produits agricoles.
Pour les régions bénéficiant de périmètres aménagés, la vente d'un ou de
plusieurs produits constitue la seule source d'argent frais pour les paysans. Une fois
les crédits de campagne remboursés à la coopérative, le pouvoir d'achat en
marchandises des paysans sera alors fonction de la somme qui leur reste. Du
sommet à la base, la commercialisation repose sur la pratique du crédit: le paysan,
démuni d'argent la plus grande partie de l'année, ne peut faire face aux dépenses de
la campagne agricole qu'en anticipant souvent sur les rentrées d'argent que lui
vaudra la prochaine récolte. Il contracte du crédit auprès de la coopérative. Les
coopératives à leur tour, pour faire face aux nombreuses sollicitations des paysans
en semences, en biens d'équipement, en matériel agricole, s'adressent aux banques
ou à toute autre institution financière, la vente de la production agricole de la
campagne considérée servant de garantie.
471

C'est pourquoi la commercialisation doit être basée sur le contrôle et la
régulation du marché afin d'assurer aux paysans des revenus monétaires qui
correspondent aux efforts physiques et financiers qu'ils ont investis dans les cultures
irriguées. Pour ce faire, l'Etat tente de veiller à une application
effective des prix
agricoles, par l'organisation et le contrôle des opérateurs économiques privés qui
livrent une concurrence déloyale aux paysans regroupés en coopératives 154.
Pour le moment, la vie économique en milieu rural mossi est caractérisée par
les marchés qui se tiennent tous les trois, cinq ou sept jours dans les villages selon
la taille et l'importance de leurs activités économiques. Dans les principaux villages,
le rythme des marchés est ponctué tous les trois jours; les marchés ne sont pas
seulement des lieux d'échanges divers ; ils représentent également des formes
variées de communication et d'extension des réseaux de relations sociales où les
villageois tout en commerçant, tissent et renforcent leurs rèlations amicales.
En définitive, la vie économique traditionnelle n'est pas séparable de la vie
sociale et politique. Ce sont les critères et les valeurs de celle-ci qui régissent
celle-là. Pour un Mossi, on peut dire que "son bien-être social et sa réussite
économique dépendent autant de son habileté à se servir de ce réseau
complexe de relations que de ses efforts dans le domaine économique
proprement dit,,155.
154
Cf. Rapport sur le développement des cultures irriguées au Burkina
Faso. CILSS-Club du Sahel. Ouagadougou, novembre 1987; p. 99.
155
HAMMOND, op. cit. p. 245.
472

L'Etat s'efforce de réguler le marché des céréales par le biais de l'OFNACER
(Office National des Céréales). Cet office dont la mission consiste à stabiliser les prix
dans l'espace et dans le temps (au moins durant une campagne agricole), fixe les
prix d'achat aux producteurs des différentes céréales. Ces prix d'achat doivent être
suffisamment rémunérateurs pour stimuler la production céréalière et dans le cadre
de la commercialisation (qui s'inscrit également dans la mission de !'OFNACER), les
prix de vente doivent viser à protéger les revenus des consommateurs. Pour ce faire,
l'OFNACER achète des céréales aussi bien auprés de commerçants agréés que des
banques de céréales ou de coopératives qu'il stocke et distribue dans les centres
urbains et les zones rurales déficitaires.
Il faut ici souligner que l'Etat n'est pas le seul acteur dans les opérations de
commercialisation à travers l'OFNACER. Des commerçants disposant de grandes
surfaces financières interviennent également dans la commercialisation, avec des
dispositifs différents de ceux de l'Etat (Informateurs, Collecteurs locaux ... ) qui
exercent une grande influence sur le comportement des producteurs. C'est ainsi par
exemple qu'en année de bonne pluviométrie, les grands commerçants (agréés)
achètent à très bas prix et massivement les céréales aux producteurs dans plusieurs
régions pour les revendre aux meilleurs prix fixés par l'OFNACER. Ils réalisent ainsi
de gros bénéfices au détriment des producteurs, sans pOLir autant enfreindre la
réglementation en vigueur en matière de commercialisation des céréales.
De plus, les achats opérés par l'OFNACER sont naturellement limités par les
moyens financiers mis à sa disposition par l'Etat, de sorte que les commerçants
ayant déjà stocké d'énormes quantités de céréales auprés des producteurs dans la
473

plupart des régions, en créent parfois des pénuries artificielles pour favoriser
l'apparition de marchés "noirs" où les prix des céréales sont bien-entendu relevés.
Ce faisant, l'OFNACER non seulement n'arrive pas à réaliser sa mission de garantie
des revenus des producteurs et des consommateurs, mais encore ne parvient pas
à acheter suffisamment de céréales à stocker pour l'approvisionnement des
populations urbaines et des populations rurales des zones déficitaires. Devant les
intérêts divergents du producteur qui entend obtenir le meilleur prix de ses céréales
et du consommateur qui cherche à s'en approprier à moindre coût, le commerçant
est en fin de compte l'acteur qui sort gagnant dans l'opération de commercialisation.
Comment se comporte le producteur face au marché des céréales ? La
stabilisation des prix des céréales par l'OFNACER concourt-elle à inciter le
producteur
à
la vente
et assure-t-elle la
garantie d'approvisionnement
au
consommateur à un prix "intéressant" ?
Quels peuvent être les effets de la spéculation céréalière des commerçants sur
les différents marchés?
Plusieurs paramètres interviennent dans le processus de commercialisation
rendant difficile l'analyse du comportement du producteur:
- Les importations de céréales effectuées aussi bien par des circuits publics
que privés y compris l'aide alimentaire, pour compenser le déficit dans les
zones où il en existe, lorsque la production nationale ne parvient pas à couvrir
tous les besoins en vivres des populations.
474

- Les exportations vers les pays VOISinS avec les inévitables marchés
clandestins que l'année pluviométrique ait été bonne ou mauvaise.
- La consommation dont le rythme et le volume varient d'une région à 'l'autre,
avec des préférences marquées pour telle ou telle céréale en fonction des
habitudes alimentaires et des spécificités socio-culturelles.
Les importations de céréales au Burkina Faso ne concernent que le blé et le
riz; les circuits d'importation, privés ou publics, sont bien connus.
L'importation de ces céréales par les circuits privés est soumise à l'obtention
d'une licence auprès de la Caisse Générale de Péréquation (CGP). Cependant la
réglementation des importations des céréales par la licence ne permet ni de
connaître avec précision les quantités, ni les périodes des transactions commerciales
ou les procédures utilisées.
En ce qui concerne les circuits publics, ils sont essentiellement le fait de la
CGP et de l'OFNACER.
A ces deux formes de circuits d'importation de céréales, il convient d'ajouter
l'aide alimentaire qui suit quant à elle, trois circuits différents:
- l'aide bilatérale qui s'opère avec l'OFNACER,
475

- l'aide gouvernementale distribuée à titre gracieux aux populations des zones
déficitaires, généralement à la suite d'une catastrophe naturelle,
- l'aide des ONG, également distribuée gratuitement.
" faut ici préciser que l'aide en céréales des ONG ne provient pas toujours
d'importation. Bien souvent, les céréales locales sont achetées par celles-ci puis
distribuées aux populations bénéficiaires des zones rurales déficitaires.
L'ensemble de ces aides n'est pas toujours coordonné ; et s'il faut en
reconnaître l'important rôle social (ces aides soulagent en effet les souffrances de
bien de populations rurales frappées par la famine), ces diverses aides perturbent le
marché céréalier aux conséquences plus ou moins graves suivant les régions et les
années.
Dans la région du Centre-Nord, l'aide alimentaire distribuée par les ONG
dépasse parfois le volume d'aide bilatérale et/ou gouvernementale et il n'est pas rare
de retrouver sur des marchés des céréales provenant de ces aides introduites par
des paysans soucieux de se procurer de revenus monétaires.
L'aide alimentaire gratuite est ainsi reversée dans les circuits commerciaux,
de telle sorte qu'il est difficile de maîtriser les transactions qui s'opèrent dans
l'ensemble du pays afin de pouvoir apprécier les comportements du producteur et du
consommateur, et par voie de conséquence sur le développement économique de
la région du Centre-Nord.
476

Le développement de la région du Centre-Nord tout comme celui plus
globalement du pays dépend largement de l'aide extérieure comme en attestent les
montants élevés affectés à l'aide au développement de l'ensemble du Burkina Faso
(28.298 milliards de FCFA engagés dans le seul domaine de l'irrigation par les
bailleurs de fonds extérieurs entre 1978 et 1987156 .
L'image de région pauvre que présente le centre-Nord pourrait être à la base
sinon de son abandon, du moins de son désintéressement par les pouvoirs publics,
laissant libre cours à de nouveaux partenaires au développement, les ONG, qui
s'empressent d'occuper un terrain laissé libre.
Mais alors, les ONG estiment que pour la mobilisation et l'utilisation de l'aide
qu'elles apportent aux populations locales, un contrôle direct et quasi-exclusif des
opérations de développement qu'elles réalisent sur le terrain est absolument
nécessaire. Ce contrôle s'opère le plus souvent par un personnel expatrié, quand
bien même il se fait à distance à l'occasion de "missions d'évaluation", de "tables
rondes" ou "concertations de bailleurs de fonds" et quand bien même il existerait
localement des moyens humains qualifiés.
Faut-il
en
conclure
avec N.
BOURENANE
(1992)
que
le
mode de
fonctionnement de l'aide, avec le poids sans cesse croissant des "experts" dans le
choix des actions à promouvoir, dans la fixation des crédits à y louer, dans la
définition et la normalisation des modalités de mise en place et de gestion des
156
Ces données statistiques ont été fournies par les Ministéres de l'Eau et
de l'Agriculture et de l'Elevage.
477

projets, dans leur conditionalité, témoignent de la défiance à l'égard des Etats et des
administrations publiques nationales et locales, quand bien même cela prend une
forme de "rationalisation" dans la gestion des ressources disponibles, par la mise en
oeuvre de programmes standard d'ajustement ... ?
"L'aide pourrait s'avérer être ce canal "informel" mais déterminant
qu'emprunteraient les agents dominants de l'économie internationale, les forces
locales et l'Etat pour renégocier l'espace (ainsi que les formes) sur lequel
s'exercerait leur souveraineté respective. Plus que par le passé, de par le type
d'orientations qu'elle va donner à l'investissement, les forces sociales qu'elle
va contribuer à promouvoir et celles qu'elle marginalisera, l'aide est essentielle
et incontournable,,157. L'aide étant ici entendue comme un ensemble de prêts ou
toute forme d'assistance matérielle, technique ou financière octroyés dans des
conditions meilleures à ce qu'offre le marché. C'est pourquoi en tant que pratique
sociale ayant son histoire, mettant en jeu des intérêts multiples, non toujours
convergents, le savoir qui est produit de l'aide reste tributaire de sa source, de son
orientation et de ses objectifs (BOURENANE N. 1992).
Des études récentes menées par le Conseil pour le Développement de la
Recherche Economique Sociale en Afrique (CODESRIA) en 1992 revèlent que l'aide
publique au développement, en ce qui concerne l'Afrique, finance de manière directe
ou indirecte pour plus de 60 % de son montant, l'économie émettrice. En définitive,
ces études concluent que le mode de financement et de fonctionnement de l'aide
produit les conditions de son propre renouvellement par ses effets sur le service de
157
1\\11. BOURENANE : Afrique et Développement Vol. XVII, N° 3, 1992, p.
13.
478

la dette. Il faut en effet se souvenir que l'aide a été au départ, une forme de
reconduction de l'appui apporté traditionnellement par la métropole à certains
secteurs de ses anciennes colonies.
Une telle situation favorise le renforcement des ONG, lesquelles ne sont pas
toujours, comme elles le prétendent, performantes sur le terrain et sont souvent en
conflit permanent avec l'Etat en quête de stabilité. D'où quelques interrogations qui
pourraient être soulevées:
L'aide au développement (sous ses différentes formes) telle qu'elle est
octoyée aux pays ou régions bénéficiaires détermine-t-elle ou au
contraire infléchit-elle les programmes et politiques de développement
économique engagés par les pouvoirs publics dans la région du centre-
Nord?
L'aide au développement alourdit-elle ou allège-t-elle la situation de
crise agricole, alimmentaire et sanitaire dans le centre-Nord?
Si l'on peut considérer que l'aide a réussi à atteindre ses objectifs de
développement dans le domaine de l'agriculture (encore qu'il faille relativiser cette
réussite), et notamment dans celui de l'irrigation, elle a aussi engendré de nouveaux
problèmes tels que l'endettement excessif des producteurs qui travaillent dans les
périmètres aménagés (Louda, Tamasgo, plaines aménagées du lac de Bam etc.) par
le biais d'acquisition de nouvelles technologies agricoles. L'aide a également
contribué à créer ou à accentuer des différenciations sociales par un système
479

d'exclusion de la majorité des populations par une minorité disposant de plus de
moyens matériels et financiers en milieu rural mossi. Mais il y a plus. L'aide a
favorisé la création des conditions de reconduction et de transformation des rapports
de dépendance coloniale, lorsqu'elle est analysée dans une perspective historique:
la souveraineté des Etats semble se diluer dans les conditionalités exigées par l'aide
dans le cadre des différents programmes d'ajustement structurel auxquels ils ont
souscrit; et la stabilité des Etats semble désormais liée à leur capacité de mobiliser
et de distribuer l'aide plutôt qu'à celle d'élaborer des politiques de développement
T
cohérentes et harmonieuses. Ainsi si l'aide au développement a joué dans le sens
de la promotion socio-économique et sanitaire ce n'est certainement pas au bénéfice
des destinataires supposés que sont les populations rurales dans leur ensemble,
mais bien davantage à celui d'une élite locale ou régionale et des donateurs eux-
mêmes.
Dans ce sens, "l'aide apparaît comme le prix de la stabilité internationale,
notamment des nouveaux blocs économiques, menacés par le déferlement potentiel
de populations en accroissement démographique élevé et en quête de survie, voire
d'amélioration de leur niveau de vie158. Faut-il alors renoncer à l'aide internationale
au développement sous ses formes actuelles?
"La reconduction de l'aide dans ses formes actuelles risque d'avoir des
résultats aussi contradictoires que par le passé, parce que l'on continue à faire
l'immpasse sur la nature des forces sociales susceptibles d'en tirer avantage
et d'en être victime, sur les stratégies locales de sortie de la crise déployées ici
158
l'J. BOURENANE op. cit. p. 33.
480

et là face à l'effritement des pouvoirs d'Etat et à leur perte de légitimité
croissante. Le développement et la multiplication des ONG ne semblent pas
pouvoir constituer du moins pour l'instant et dans la région du Centre-Nord, eu
égard à la nature de leurs activités et à leur statut, une alternative véritable aux
déficiences constatées par le passé dans la gestion de l'aide, notamment en
termes d'encadrement et de promotion des forces sociales locales de plus en
plus marquées par la jeunesse de leur composition humaine, en quête
d'emplois stables pour subvenir à leurs besoins fondamentaux et de plus en
plus d'espace de liberté".
D'où des interrogations?
Le développement d'un pays peut-il se construire de façon durable sur la base
d'aides extérieures?
En tout cas la capacité d'investissement aussi bien de l'Etat que des ONG
intervenant en milieu rural mossi du Centre-Nord est si faible pour permettre
d'entreprendre des initiatives tendant à revivifier l'agriculture et les activités rurales
non agricoles sans recours aux aides extérieures.
Mais des aides extérieures au développement pour combien de temps encore?
Les interventions de développement en milieu rural mossi en cherchant à
"moderniser" l'agriculture, introduisent également des transformations économiques,
sociales et culturelles plus profondes qu'elles n'apparaissent et qui sont les
prémisses d'une nouvelle "civilisation agraire à rationalité technique".
481

La modernisation de l'agriculture en milieu rural mossi par delà les objectifs
avoués de parvenir à l'auto-suffisance et à la sécurité alimentaires, vise davantage
un objectif marchand qui répond plus à des demandes extérieures qu'à des besoins
réels des populations rurales mossi. L'introduction des cultures de rente (coton,
arachide ... ), puis plus tard de l'irrigation avec la riziculture et les cultures maraîchères
et fruitières en constitue la preuve: pour les paysans mossi, c'est là une source de
revenus monétaires susceptibles de compenser éventuellement les déficits céréaliers
tout en permettant la satisfaction de divers besoins sociaux et économiques. Pour les
interventions de développement rural qui aident à la modernisation de l'agriculture,
il s'agit également de favoriser l'obtention par les paysans d'argent pour d'abord
payer l'impôt de capitation, et plus tard assurer leur développement. Le peu d'intérêt
accordé aux cultures pluviales, malgré les aléas climatiques est symptomatique de
l'option par les interventions de développement d'accélérer l'entrée des campagnes
mossi dans
le système économique international (à travers des échanges
économiques avec l'extérieur) et d'une manière générale, de placer le pays tout
entier dans une dépendance structurelle vis-à-vis de l'extérieur.
Mais "si la mutation rurale, ou encore le développement rural procède par
cette métamorphose qui améliore, sans rupture ni régression sociale, le cadre
et le genre de vie globale à partir d'eux-mêmes, en conférant une efficacité sans
cesse croissante aux hommes dans leurs efforts pour la maîtrise technique et
le contrôle de leur espace, la "modernisation" agricole peut-elle se confondre
avec la mutation rurale? ... Et l'inefficacité relative de ces civilisations agraires
justifie-t-elle une telle démarche, alors même que les règles du marché rendent
482

si aléatoires pour ces sociétés rurales les conditions d'accès à cette modernité
de référence"159 ?
Le développement rural n'exige pas seulement d'outils techniques et de
méthodes de production plus modernes. Il requiert aussi une nouvelle forme
d'organisation sociale (les coopératives par exemple) qui trouve de référent dans le
système social traditionnel, de telle sorte que c'est toute une mentalité, toute une
conception du monde et de la vie qu'il faut changer pour répondre aux normes de la
modernité et du développement.
Quelle peut être alors la signification du développement pour les paysans
mossi du Centre-Nord? Le développement rural concerne-t-il le village ou l'Etat?
"Si
c'est
le village
en
tant qu'entité
qui
mérite d'être
pris
en
considération, la question se limite-t-elle aux hommes perçus comme simples
acteurs économiques attendant des incitations de l'extérieur, ou concerne-t-elle
des communautés responsables de leurs espaces et capables de provoquer
elles-mêmes l'impulsion nécessaire vers le progrès"160 ?
159
GU-KONU (E. Y.), Le développement rural: que recouvrent les mots?
dans le développement rural en questions. Editions de l'ORSTOM Paris
1984 ; p. 489.
160
GU-KONU (E. Y.), op. cil. p. 488.
483

Le véritable développement ne peut être que celui promu de l'intérieur d'une
communauté villageoise parce que voulu et réalisé par ceux qui en sont bénéficiaires
suivant les moyens dont ils disposent. Il est donc endogène et auto-centré et revêt
une signification pour leurs auteurs, parce qu'il est ancré dans leur univers culturel.
Toutefois, le développement ainsi conçu au risque de sombrer dans l'autarcie,
doit être entretenu constamment, ce qui suppose des adaptations continues et
nécessairement l'ouverture à d'autres sociétés.
Le développement c'est d'abord le village non pas enfermé sur lui-même, mais
ouvert sur l'extérieur dont l'Etat.
"Et si, enfin le développement rural, c'est d'abord le développement de
l'Etat,
est-il
certain
que
l'enrichissement
de
ce
dernier se
répercute
automatiquement et positivement sur la campagne, le village et sur le
paysan"161 ?
Sans doute le développement, c'est aussi l'Etat sans que l'enrichissement de
ce dernier ne profite de façon directe ou indirecte au paysan. C'est précisément à ce
niveau que se situe toute la problématique du développement rural. Et l'expérience
des trois décennies d'interventions de développement en milieu rural mossi montre
que c'est l'extérieur qui s'est davantage enrichi que les paysans mossi ; certes,
quelques-uns d'entre eux ont vu leur niveau de vie augmenter d'une manière plus ou
moins sensible et rapide, cependant que la grande majorité des paysans voient leurs
161
GU-KONU (E. Y.), op. cit. p. 489.
484

conditions de vie se dégrader d'année en année, avec surtout l'apparition de
nouveaux besoins sociaux consécutifs à la modernisation de l'agriculture et qui ne
peuvent être que très difficilement satisfaits. Comme le souligne GU-KONU, en dépit
de la modernisation agricole, c'est l'agriculture traditionnelle qui nourrit l'essentiel des
populations rurales comme urbaines et procure des revenus monétaires aux paysans .
... "dans presque toutes les sociétés rurales, à la ville comme à la
campagne, ce sont les agricultures "traditionnelles" qui assurent encore la
subsistance de la quasi-totalité de la population ...,,162.
L'auteur en conclut à une prise en compte de "l'efficacité potentielle" de ces
agricultures "traditionnelles" dans une approche plus originale du développement
rural.
"Dans les conditions générales où opère la "modernisation" agricole, ces
systèmes de production, cette gamme variée des cultures locales, ces
méthodes d'organisation du travail, en un mot, ces genres de vie rurale ne
présentent-ils pas, par rapport à la mutation rurale, une efficacité potentielle
qu'ils pourraient libérer s'ils sont repris en compte dans une approche
différente du développement rural"163 ?
162
GU-KONU (E. Y.), op. cit. p. 491.
163
GU-KONU (E.Y.) op. ciL p. 492.
485

Seulement
les
valeurs
intrinsèques
des
organisations
paysannes
traditionnelles, la logique propre du pouvoir politique traditionnel qui guident les
comportements paysans peuvent-elles être conservées dans ce processus de
transformations socio-économiques, politiques et culturelles du milieu rural mossi ?
Déjà l'administration et le pouvoir politique moderne en pénétrant dans le système
social et politique traditionnel n'en ont pas seulement modifié le mode de
fonctionnement; ils ont aussi et surtout favorisé l'émergence de nouvelles forces
sociales (commerçants, fonctionnaires ... ) qui semblent désormais exercer le contrôle
social réel au détriment des forces sociales anciennes constituées par les chefs de
village, de terre et de lignages qui subissaient, il est vrai, depuis la fin de la période
coloniale, une résistance à peine voilée des jeunes gens en quête d'un pouvoir
économique plus fort (dans les périmètres irrigués à l'intérieur du pays, dans les
plantations de café ou de cacao à l'extérieur) pour se prémunir des pressions
sociales des anciens.
GU-KONU s'interrogeait à juste titre au sujet d'une population rurale, les
paysans watchi du Togo en face de la modernisation agricole en ces termes: "Dans
le contexte social où s'inscrivent les "opérations de modernisation" agricole,
quelle est la nature réelle des relations dominantes entre l'homme et la femme,
le jeune et le vieux, l'homme et la terre? Si ces relations paraissent souvent
encore "traditionnelles" dans leurs formes, quelle est la réalité de leurs
contenus et celle des finalités qui les animent? Quelle est la nature réelle des
rapports sociaux de production et au-delà, celle du mode de production
dominant"164 ?
164
GU-KONU (E. Y.), op. cit. p. 493.
486

Au moins peut-on avancer que le milieu rural mossi vit dans un nouveau
contexte social et économique caractérisé par de nouveaux besoins et de nouvelles
aspirations qui conditionnent ses attitudes réceptives ou répulsives vis-à-vis des
interventions de développement qui lui sont plus ou moins imposées. Ce nouveau
contexte place le paysan mossl en situation de dépendance à
l'égard des
commerçants
ou
fonctionnaires
avec
lesquels
il
réalise
des
pratiques
de
commercialisation
informelles ou
conclut des pactes tacites de coopération
économique et financière à travers des octrois de crédits et des échanges divers. Le
paysan mossi reste aussi dépendant de l'Etat qui conçoit ses plans et programmes
de développement rural à appliquer sur son milieu, et qu'il aménage à son gré en
collaboration avec ses sociétés de développement, ne sollicitant la participation de
ce dernier que lors de la réalisation des opérations de développement dont on veut
par ailleurs qu'il soit propriétaire.
Le paysan mossi est enfin dépendant de l'extérieur qui décide souvent du type
d'intervention de développement à réaliser sur son milieu, à son bénéfice, qui lui dicte
la méthodologie à suivre pour obtenir les meilleurs résultats ... C'est de l'extérieur dont
dépend en définitive sa survie.
Les interventions de développement en milieu rural mossi en tentant de
moderniser l'agriculture et de transformer les sociétés rurales mossi, ont davantage
accentué la dépendance des paysans mossi vis-à-vis de l'extérieur.
La politique de développement rural définie par l'Etat lui-même ne semble pas
s'écarter du
schéma
initial esquissé par le colonisateur,
trente ans
après
l'indépendance du Burkina Faso. Dans ces conditions, la modernisation de
487

l'agriculture et les transformations socio-économiques du milieu rural
mossi
préconisées par l'Etat ont-elles de réelles chances d'aboutir?
J.P. DOlON et G. PONTIE, retraçant l'histoire du développement des sociétés
africaines à la lumière des sciences sociales, de la période coloniale à nos jours en
soulignent trois moments forts qui permettent d'esquisser quelques perspectives:
1. le premier moment est marqué par les résistances opposées par les
sociétés
rurales africaines aux différentes innovations dans le domaine de
l'agriculture. Urie telle attitude des paysans africains qualifiée de "négative" parce que
ne s'inscrivant pas dans la conception unilinéaire du développement par la
colonisation a été stigmatisée par les sciences sociales, en particulier par les théories
évolutionnistes des anthropologues et sociologues du 1ge siècle.
Les discours politiques sur le développement après les indépendances (1960)
opposent les "comportements modernes capables d'innovation et d'esprit
d'entreprise (favorables au développement), aux comportements traditionnels·
plongés
dans
la
répétition
et
le
conformisme,,165
(préjudiciables
au
développement), en érigeant les spécificités socio-culturelles comme de véritables
obstacles à l'essor socio-économique dans des sociétés rurales.
165
DOZON (J.P.) et PONTIE (G.), Développement, sciences sociales et
logiques paysannes en Afrique Noire dans Paysans, Experts et
Chercheurs en Afrique Noire. Karthala, p. 68.
488

2. Le second moment caractérise une prise en considération dans la
conception et la réalisation des interventions de développement rural, des réalités
sociologiques, socio-économiques et culturelles de chaque milieu rural, comme une
dimension humaine essentielle dans le développement après l'échec d'une première
tentative de séries d'opérations de développement dans la plupart des sociétés
rurales africaines. C'est à ce moment que les spécialistes en sciences sociales furent
interpellés non pas seulement pour rechercher les causes des échecs des différentes
opérations de développement, mais aussi pour jouer le rôle de "conseiller" avant,
pendant et après l'exécution de toutes opérations de développement. Certes, les
sciences sociales elles-mêmes bien avant cette interpellation cherchaient à mieux
appréhender les sociétés rurales africaines (qualifiées tour à tour d'archaïques, de
primitives ou de traditionnelles) et d'en corriger l'image au fur et à mesure que se
perfectionnaient les outils d'analyse théorique et les approches méthodologiques. "les
sciences sociales ont ainsi donné des sociétés africaines une image à la fois
plus concrète et plus positive en montrant qu'elles étaient capables de
cohérence, de rationalité et de transformations internes. Ce faisant, les
nombreuses monographies ethniques et villageoises on diffusé leur savoir et
rencontré les interrogations des développeurs qui ont précisément trouvé en
lui la possibilité de remédier aux échecs, ou plutôt de conjuguer connaissances
et actions une meilleure efficacité"166.
166
DOZON (J.P.) et PONTIE (G.), op. cit. p. 70.
489

Si les développeurs ont eu le mérite de faire appel aux sciences sociales au
cours de ce second moment de l'évolution de la conception même des interventions
de développement en milieu rural africain pour accroître leurs propres connaissances
sur les sociétés rurales africaines en vue d'une meilleure efficacité de leurs actions,
ils ne sont cependant pas parvenus à en assurer la maîtrise sur le terrain à cause
des intérêts divergents des grandes puissances étrangères qui se cachent derriére
chaque type d'intervention de développement.
... "Les objectifs des projets de développement ... restent pris dans un
faisceau d'intérêts nationaux et internationaux, économiques, mais aussi
politiques qui dépassent largement le cadre des sociétés locales où ils sont
censés s'appliquer. Si bien que l'ordre de la connaissance est subordonné à
tout un ensemble d'enjeux qui échappent à son investigation, et les sciences
sociales ne participent, la plupart du temps, aux opérations de développement
qu'une fois les principales décisions prises, quand elles ne servent pas
simplement de caution ou de justification"167.
3. Enfin, un troisième moment se distingue par une attitude nouvelle des
développeurs qui, à la faveur des enseignements des échecs répétés des opérations
de développement en milieu rural, y conçoivent et réalisent des opérations de petite
ou moyenne taille n'exigeant pas une technologie sophistiquée et ne revêtant pas des
coûts trop élevés qui dépasseraient la capacité de gestion des paysans ni les
éloigneraient de leur contexte socio-économique et culturel. En effet, cette nouvelle
167
DOZON (J.P) POr'HIE (G.), op. cit. p. 70.
490

attitude
qui
est
en
réalité
une
nouvelle
conception
des
interventions
du
développement rural se propose, de sauvegarder l'équilibre familial et social et de
moderniser le système de production pour en accroître la rentabilité économique et
sociale sans opérer de rupture brutale entre le passage de ce système de production
et le système économique international dans lequel il est appelé à évoluer désormais
d'une manière plus accentuée.
"Au lieu de vouloir imposer des méthodes de rationalisation agricole,
même en recourant aux sciences sociales, il faut d'abord se mettre à l'écoute
des paysanneries africaines et tenter de satisfaire leurs véritables besoins"168.
Il reste à savoir si cette nouvelle conception du développement appliquée aux
sociétés rurales africaines, et qui a l'avantage d'intégrer dans son approche du milieu
paysan l'ensemble des réalités de terrain peut se prévaloir d'un modèle alternatif
susceptible de faire progresser les paysans africains sur la voie du développement.
Cette nouvelle conception du développement ne risque-t-elle pas de reproduire
à son
tour (ne serait-ce que pour se justifier) une image des sociétés rurales
africaines qui ne corresponde pas à la réalité?
Il appartient aux sciences sociales dont une des missions essentielles consiste
précisément à apporter un nouvel éclairage sur les enjeux qui se déroulent autour
des opérations de développement en milieu rural d'y apporter quelques éléments de
réponse.
168
DOZON (J.P.) et PONTIE (G.), op. cit. p. 71.
491

"Les sociétés rurales confrontées aux opérations de développement
constituent bien évidemment pour les sciences sociales un domaine de
recherche privilégié, y compris dans une optique fondamentaliste ... C'est dans
ces périodes de crises, de changements induits par la pression extérieure, de
nécessaire réadaptation à l'environnement que se dévoilent le plus nettement
les logiques sociales"169.
Mais de la sollicitation des sciences sociales aux recettes-miracles qu'elles
produiraient pour réussir les opérations de développement, il y a un pas, souvent vite
franchi par les développeurs.
GU-KONU insiste bien:
... "Ia question du développement rural est bien plus complexe qu'elle ne
paraît à travers les approches réductrices des "opérations" de développement.
Si ces approches fondent à juste titre leurs justifications sur l'urgence des
besoins, il devient de plus en plus évident que ces besoins ne peuvent plus
être formulés et leur urgence appréciée à partir des concepts imprécis et
souvent ambigus de "pauvreté paysanne, de revenu monétaire, d'auto-
suffisance alimentaire" ... ; ... la problématique du développement rural implique
donc toute une stratégie et des tactiques opératoires ... Mais les fondements
de cette stratégie ne peuvent pas être réduits à une chrématistique, ni au
niveau du paysan, ni au niveau de l'Etat; ils résident au contraire dans la
recherche d'un art de vivre; et cela suppose une remise en cause globale des
169
DOZON (J.P. et PONTIE (G.), op. cit. pp. 73-74.
492

structures et des rapports qui insèrent les sociétés rurales dans le marché
dominant, parce qu'il s'agit de structures et de rapports de dépendance
incompatibles avec la mutation rurale. C'est probablement faute de pouvoir
répondre à cette exigence que
les politiques de développement rural
observables dans les pays d'Afrique Noire ne parviennent pas à s'élever au
rang de stratégies de développement"170.
C'est peut-être là aussi où les sciences sociales peuvent révéler leur
intérêt
pratique en tant que mode particulier de connaissance portant sur les faits sociaux
et humains. Afin d'aider à une définition claire des politiques de développement rural,
les sciences sociales pourraient mieux faire comprendre les logiques qui sous-
tendent les réactions paysannes aux interventions de développement rural et celles
qui guident les développeurs dans un milieu rural ayant ses dynamiques propres et
qui évolue à un rythme plus ou moins rapide en fonction de l'influence de la pression
extérieure qui s'exerce sur lui.
Les sciences sociales pourraient également apporter un éclairage nouveau sur
certains phénomènes sociaux que J. P. OLIVIER DE SARDAN considère comme
restant en "friches" :
"Le fonctionnement réel des organisation administratives nationales et
leurs
modes de
régulation,
la culture professionnelle des agents de
développement
de
terrain
et
leurs
stratégies
locales,
l'analyse
des
représentations que se font les milieux-cibles, les divers échelons de la chaîne
170
GU-KONU Y. op. cit. p. 497.
493

des développeurs et inversement l'analyse des représentations que se font des
développeurs, les sociétés paysannes, la structure et l'ampleur des réseaux
"clientélistes", les modes de diffusion spontanée de l'innovation, le poids des
hégémonies politiques au niveau villageois ...,,171.
N'est-ce pas la raison épistémologique d'être des sciences sociales que
d'observer et d'interpréter les faits socio-humains comme ceux du développement?
Comme le fait remarquer J. P. OLIVIER DE SARDAN:
"L'enjeu des sciences sociales en la
matière, c'est de situer leur
complexité aux phénomènes observés tout en proposant quelques pistes pour
rendre compte de cette complexité et permettre d'y lire un peu de sens,,172.
/1 s'avère, suivant l'analyse de la situation économique de la reglon du
Centre-Nord et même de la situation économique nationale, que c'est le monde rural
qui constitue le secteur le plus important du PIS (45 %) et des exportations (90 %).
C'est donc sur ce monde que doit reposer lé développement régional ou national.
Comment susciter une contribution plus accrue du monde rural au développement,
lui qui a révélé ses immenses capacités de s'accommoder, d'assimiler, de rejeter ou
de ré-interpréter les actions de développement entreprises à son endroit depuis trois
décennies et dont le résultat se solde le plus souvent par un échec?
171
OLIVIER De SARDAN (J. P.), Sciences sociales, africanistes et faits de
développement
dans "Paysans, Experts et Chercheurs en Afrique
Noire". Karthala Paris 1985 ; pp. 28-43.
172
OLIVIER De SARDAN (J. P.), Logiques paysannes et projets de
développement rural. Communication au séminaire international sur les
"Effets socio-structurels de l'aide au développement en milieu rural en
Afrique de l'Ouest 8-12 Décembre 1986 ; 15 p.
494

Nous voudrions appréhender ici les diverses transformations socio-culturelles
qui résultent des différentes interventions de développement en milieu rural mossi;
ces interventions se déroulent en effet dans un contexte socio-politique et culturel
comportant ses caractéristiques propres, comme ses croyances et rituels, ses
représentations collectives, ses structures politiques, sociales et familiales etc.
qu'elles ne peuvent manquer de modifier au fil du temps. C'est ainsi que sur le plan
de l'agriculture, le développement des cultures de rente et l'introduction des cultures
irriguées affectent inéluctablement les structures familiales et sociales, tout comme
elles altérent l'autorité politique en fixant les limites et la portée.
De
nouvelles
habitudes
de
vie
sociale
apparaissent
aussi
avec
le
développement de nouvelles filières d'activités socio-économiques qui sans remettre
en cause les us et coutumes mossi n'en modifient pas moins la signification; parfois
même l'efficacité sociale de ces us et coutumes s'en trouve considérablement
réduite, ébranlant alors les bases de l'éducation.
Or "on sait depuis longtemps que les différentes réactions d'une société
(ou de ses diverses composantes) à une intervention extérieure" constituent
l'un des meilleurs indicateurs de la dynamique de ses structures propres, un
analyseur privilégié des comportements sociaux.. 173. L'évolution actuelle des
structures familiales et sociales, du système de production et du système politique
en milieu mossi traduit les différentes formes de transformations que subissent les
sociétés rurales mossi dans leur ensemble; et leur survie dépend largement de leur
capacité à apporter des réponses satisfaisantes aux problèmes posés par ces
transformations, eu égard à la diversité des interventions de développement qui s'y
effectuent et des domaines couverts.
173
OLIVIER De SARDAN (J.P.), "Logiques paysannes et projets de
développement rural". Communication au séminaire international sur les
Effets socio-structurels de l'Aide au Développement en Milieu Rural de
l'Afrique de l'Ouest p. 2.
495

13.2.
L'appropriation des interventions de développement rural
par les paysans mossi : un fait de culture?
La tendance à s'approprier les interventions de développement en milieu rural
est-elle l'apanage des Mossi ou représente-t-elle un phénomène général qui
caractérise le monde paysan?
Pour parvenir à une explication sociologique du phénomène d'appropriation
des interventions de développement, il est indiqué de jeter un regard rétrospectif sur
l'imbrication des structures de production et des structures politiques en milieu mossi.
L'économie rurale mossi a toujours été dominée par une organisation sociale fondée
sur des rapports de puissance: les chefs de village et/ou de terre ainsi que ceux des
familles étendues ont en effet toujours disposé des plus grandes superficies
cultivables et de la main-d'oeuvre la plus abondante grâce à leur rang social (statut
social). Ils détenaient par ce fait même le pouvoir économique dont ils se servaient
pour renforcer leur pouvoir politique et/ou social. Il serait peut-être prématuré (c'est
même prendre un risque social grave) pour un paysan mossi que de vouloir se
soustraire complètement aux obligations sociales et psycho-sociologiques inhérentes
au modèle socio-économique mossi pour se conformer aux exigences d'une gestion
économique rationnelle au niveau d'une exploitation sur un périmètre irrigué ou au
niveau de son salaire s'il s'agit d'un travailleur salarié.
L'autorité politique traditionnelle et le poids des coutumes et traditions
s'exercent encore d'une manière forte sur les comportements sociaux et sur le
système de production démontrant ainsi qu'en milieu rural mossi, le domaine
économique et le domaine politique sont inextricablement liés.
496

"Dans le cadre de l'économie de subsistance, l'aventure individuelle est
condamnée par la communauté qui a la charge de tous les individus: chaque
initiative doit être subordonnée à l'approbation du groupe, et une réussite
personnelle dans le domaine économique présenterait pour l'intéressé un
danger réel pouvant mener à son exclusion du groupe ou même à sa
suppression physique (par empoisonnement)"174.
le travail rémunéré en milieu rural confère certes un pouvoir économique et
un certain prestige social, mais il insinue aussi une catégorisation sociale. les
travailleurs recrutés par les interventions de développement sont jeunes pour la
plupart (la moyenne d'âge varie entre 18 et 54 ans dans les trois Provinces visitées)
et au-delà de l'appartenance à la classe d'âge, ils forment un groupe social
particulier,
celui des ruraux privilégiés qui apparaît comme le moteur des
transformations en cours en milieu rural.
Il faut cependant faire la distinction entre le travail salarié à travers les emplois
créés par les interventions de développement des prestations de service effectuées
dans le cadre des associations traditionnelles de culture. Dans le premier cas, il s'agit
bien d'une location de force de travail dont le prix varie suivant les fluctuations du
marché de l'emploi et de la disponibilité de la main-d'oeuvre. le travail prend une
valeur marchande, un prix à payer. Dans le second cas, et comme le note à juste
titre KOHlER.
"Le travail rémunéré s'inscrit dans le cadre des relations personnelles qui
lient entre eux des cultivateurs ayant conscience d'appartenir à une même
communauté. Quant les travailleurs rémunérés sont des proches parents du
chef d'exploitation qui les emploie (ce qui se produit fréquemment), le salaire
est considéré comme "un cadeau pour secourir et plaire" ; les relations qui
existent entre ceux-ci et celui-là ne sont nullement altérées par l'échange du
174
KOHlER
(J.M.)
: Activités
agricoles
et
transformations
socio-
économiques dans une région de l'Ouest du Mossi: Aspects généraux,
formes d'organisation du travail, système de production et régime
foncier. ORSTOM 1968 p. 108.
497

travail contre de l'argent, parce que cet échange est assimilé aux autres
échanges toujours personnalisés qui interviennent dans une communauté
vivant en économie de subsistance. Il en est à peu près de même quand les
travailleurs rémunérés ne sont pas parents de celui qui les emploie, ils sont
alors généralement amis ou voisins .. 175. Il convient de préciser que si dans
l'Ouest mossi le travail agricole n'est pas rémunéré en tant que tel, il n'en est pas de
même dans le nord mossi où il existe bien des ouvriers agricoles, généralement des
individus poussés par des nécessités alimentaires à quitter leur village d'origine pour
aller survivre ailleurs et pourquoi pas y faire fortune. De plus l'irrigation a favorisé
dans cette dernière partie du
Burkina
Faso, la constitution d'une véritable
main-d'oeuvre agricole à laquelle s'ajoutent les salariés issus des autres secteurs
d'activités socio-économiques comme l'artisanat, l'élevage etc. Par ailleurs, le désir
d'indépendance tout au moins économique aussi bien des célibataires que des
jeunes mariés mossi les place souvent dans une situation d'ouvriers agricoles même
si c'est toujours de façon temporaire. Déjà, la volonté d'indépendance se manifeste
chez la plupart des salariés du milieu rural et se traduit par un changement du lieu
de résidence qui s'accompagne souvent de nouvelles constructions plus modernes.
la liberté de résidence désormais reconnue à tout paysan va modifier
profondément la situation matrimoniale chez les Mossi. le principe de l'exogamie est
toujours respecté avec la même rigueur d'antan (les individus de même lignage ne
se marient guère car ils sont de même sang) et favorise ainsi des échanges
matrimoniaux inter-ethniques, phénomène peu fréquent en milieu rural mossi.
De plus, les effets induits par les divers types de formation dispensés par les
ONG et les structures d'encadrement de l'Etat deviennent de plus en plus
perceptibles. les mariages forcés sont en régression sensible, cependant que la
mentalité mossi reste peu perméable à la limitation des naissances: "si Dieu donne,
il faut prendre" dit-on là-bas.
175
KOHlER
(J.M.),
Activités
agricoles
et
transformations
socio-économiques dans une région de l'Ouest du Mossi : Aspects
généraux, formes d'organisation du travail, système de production et
régime foncier. ORSTOM Paris 1968 ; p. 81.
498

l'autorité politique traditionnelle s'est érodée progressivement avec le temps
entraînant une certaine désintégration sociale et économique à travers les
changements des motivations à la production, et par voie de conséquence des
changements également dans l'organisation des activités économiques et dans les
rapports sociaux. Cette dégradation de la situation économique et sociale est
imputable en partie à la colonisation: le colonisateur pour exercer son emprise sur
les sociétés villageoises, utilisait la coercition afin de parvenir à une plus grande
productivité agricole sans toutefois modifier pour l'essentiel la forme d'organisation
politique mossi, ce qui entraîne résistance et soumission à la fois de la part des chefs
politiques traditionnels mossi. Mais c'est surtout l'inféodation du pouvoir politique
traditionnel au pouvoir colonial en vue de se renforcer qui a surtout occasionné son
érosion: sans l'administration coloniale l'autorité politique demeurait dans certains
villages (Boussouma, Kaya, Boulsa ...) peu efficace. A cette situation il faut ajouter les
velléités d'autonomie revendiquée par certains chefs de village vis-à-vis des
principautés desquelles jls détiennent leur pouvoir176.
KüHlER souligne ainsi la dégradation du système socio-politique mossi :
"Par l'exercice de leur pouvoir de coercition, les chefs (mossi) avaient
dénaturé les liens qui les unissaient antérieurement à leurs sujets, mais pour
l'exercice de ce pouvoir, les chefs étaient entièrement dépendants de la
puissance de l'autorité coloniale extérieure à la société traditionnelle... Les
chefs avaient perdu beaucoup de leur autorité traditionnelle ... Cette chute de
l'autorité s'est répercutée aussitôt à tous les niveaux de la structure sociale; et
l'ordre et la cohésion sociale s'en sont trouvés gravement affectés"177.
176
Une principauté représente dans l'organisation socio-politique mossi un
ensemble de villages ayant à leur tête un prince royal, c'est-à-dire un
"Nabiga" = fils d'un "Naba"= chef; généralement il s'agit un élément de
la descendance directe d'un roi.
177
KOHlER (J.M.) op. cit. p. 98.
499

Comment s'opère l'appropriation des interventions de développement dans un
milieu rural caractérisé par un affaiblissement progressif de l'autorité politique
traditionnelle et une désorganisation du système de production et des structures
sociales?
Un examen minutieux des divers types d'interventions de développement
réalisés en milieu rural mossi montre que ceux qui en sont maîtres et possesseurs
(en particulier les interventions de type 1 et de type 3) sont les individus qui
échappent plus ou moins au contrôle social traditionnel, c'est-à-dire les fonctionnaires
et les commerçants. D'abord leur statut d'agents de l'Etat ou de commerçants les met
à l'abri des risques majeurs au plan de la sécurité alimentaire (ce qui constitue une
garantie économique et sociale non négligeable). Ensuite ils représentent une
soupape de sécurité pour les paysans auxquels ils accordent des crédits à faible taux
d'intérêt (surtout aux paysans exploitant des périmètres irrigués) lorsque ceux-ci ont
besoin d'argent frais pour leurs divers besoins sociaux entre deux campagnes
agricoles. De fait ils détiennent un pouvoir économique puissant qu'ils valorisent au
plan social au détriment des détenteurs originels du pouvoir social à savoir les chefs
de village eUou de terre et les doyens des lignages. Ce double privilège (économique
et social) lié au statut des fonctionnaires et commerçants les autorise à prendre plus
de risques que les paysans dans les interventions de développement.
C'est ce qui sans doute autorise KOHlER à affirmer avec raison:
.... "Leurs initiatives (celles des commerçants et des fonctionnaires)
contribuent à détruire les structures existantes en même temps qu'elles
constituent les voies d'avenir de cette société: leur esprit d'entreprise et les
moyens
techniques
et
financiers
qu'elles
mettent
en
oeuvre
sapent
l'égalitarisme
économique traditionnel
et valorisent
les
comportements
individuels inspirés par la recherche du profit et de la puissance"178 ...
178
KOHlER (J.M.) op. cit. p. 248.
500

On peut estimer que si au sein de la société rurale mossi ceux qui sont à
l'origine des dynamiques sociales sont ceux-là même qui échappent au poids de
l'autorité politique traditionnelle, on peut y voir un fait de culture, celui d'une inversion
de l'échelle des valeurs dans cette société où le pouvoir économique requiert de plus
en plus de puissance et dont dépendent les autres formes de pouvoir, notamment le
pouvoir politique et le pouvoir social. C'est aussi un fait de l'évolution des mentalités
dans un contexte socio-politique et économique mouvant exigeant des adaptations
continues. Le changement des mentalités peut s'observer par exemple à travers les
comportements des populations à l'égard de la terre et de ce qu'elle renferme tout
comme leurs rapports vis-à-vis du soleil considéré comme une divinité.

La
Réorganisation
Agraire
et
Foncière
de
1984
et
ses
conséquences sur le système et le mode de production en milieu
rural mossi.
Les Mossi étant essentiellement des agriculteurs sédentaires, leur univers
socio-culturel reste façonné d'une part par leurs rapports intimes avec la terre et
d'autre part avec le soleil. Cette détermination de l'univers socio-culturel mossi
s'explique ainsi par la double composition sociale qui caractérise ce peuple:
- les Mossi allochtones ou "Nakombsé" d'origine guerrière, détenteurs du
pouvoir politique traditionnel qu'ils assimilent volontiers à la puissance du
soleil;
- les Mossi autochtones ou "tengbiisi" ou encore "teng-demba", propriétaires
terriens et détenteurs du pouvoir religieux dont l'origine est précisément la
terre.
Les Mossi ont toujours entretenu des rapports de nature variée avec la terre;
c'est de la terre qu'ils tirent l'essentiel de leur subsistance, d'où les soins particuliers
qu'ils apportent à la terre à travers les fumures organiques, les sites anti-érosifs, la
jachère ... dans le but de la rendre davantage productrice de biens vivriers. Cependant
la terre n'est pas perçue uniquement à travers la fonction économique qu'elle remplit.
501

Dans la cosmogonie mossi, la terre représente aussi une puissance spirituelle
femelle et le symbole de toute fécondité ; elle remplit à ce titre une fonction
religieuse; c'est elle qui donne toute vie; c'est encore elle qui recueille toute vie, d'où
son caractère sacré. "Lieu de repos des ancêtres qui ont transmis la· vie et
demeure des génies "Kinkirsi" (esprits-génies) qui jouent un rôle primordial
dans la procréation, la terre constitue en quelque sorte la retraite où les forces
surnaturelles des existences passées sont recueillies et conservées actives, et
une réserve de principe vital pour chaque incarnation future. Dans le temps
présent, la terre produit les récoltes et assure la fécondité humaine pour la
survie du groupe... et l'homme est nécessairement en rapport avec cette terre,
car les liens qui l'unissent à elle sont essentiels et fondamentaux"179.
Parce que la terre est source universelle de vie, son accès, ne peut être
interdit à un individu qu'à la suite d'une faute grave (commettre l'inceste par exemple)
entraînant dans ce cas l'exclusion et de la famille, du lignage et de la société entière.
la terre est également objet de culte car elle représente le lieu où se déploient des
forces surnaturelles. Par exemple des autels sont dressés au niveau de la concession
de
chaque
doyen
de
lignage
("Kiim-doogo") 180
et
au
niveau
du
village
("tenkugri")181. sur lesquels des sacrifices sont régulièrement offerts aux ancêtres
et aux puissances qui les abritent, afin qu'ils protègent les individus et les groupes
contre tous malheurs, les comblent de bonheur, accordent la fécondité aux femmes,
la paix sociale ...
179
KOHlER (J.M.) op. cit. p. 208.
180
Kiim-doogo", pluriel "kiims-doogo" désigne à la fois les mânes des
ancêtres et l'autel sur lequel sont effectués les sacrifices à ces mânes.
181
"Tenkugri" pluriel "tenkuga" : autel dédié à la terre.
502

D'où l'usage fréquent de l'expression tempeelem 182 pour désigner selon
KüHlER
"la terre (tenga)
considérée comme
l'être
même de
la terre,
spatialement matérialisé par l'existence d'un territoire particulier; ce concept
recouvre donc à la fois une réalité ontologique et une réalité géographique
déterminée par une organisation politique"183. l'existence des deux catégories
(Mossi-Nakombsé et Mossi tengbiisi) de Mossi n'a pas créé de heurt à quelque
niveau que ce soit dans la région du Centre-Nord et même dans d'autres régions
mOSSI,
les
échanges
matrimoniaux
ayant
contribué
de
beaucoup
à
leur
interpénétration réciproque.
"L'alliance matrimoniale avec l'autochtone apparaît comme un substitut,
sur le plan social, de l'alliance sacrificielle avec la terre, sur le plan religieux:
celle-ci justifie les droits fonciers du premier occupant et fonde la chefferie de
terre, celle-là consacre l'installation de l'immigrant et légitime l'implantation de
la chefferie politique"184.
Chaque année est célébrée une fête de la terre (mai-juin) le "tengana" en
début d'hivernage pour demander auprès des ancêtres par l'intermédiaire de la terre,
de bonnes récoltes et une bonne santé. Chaque village a son "teng-soaba" (chef de
terre) qui en est en même temps le prêtre. Quoique souvent sollicité pour régler des
litiges au sujet de la terre, il est d'abord et avant tout investi d'un pouvoir religieux
pour servir d'intermédiaire entre les vivants et les morts que la terre a accueillis.
182
"Tempeelem" =blancheur, pureté de la terre pour traduire la sincérité,
la franchise, la loyauté ou l'honnêteté.
183
KüHlER (J.M.) op. cil. p. 209.
184
VERDIER (R.) 1963 "Chef de terre" et "Terre du lignage": contribution
à l'étude des systèmes de droit foncier négra-africain. Coll. Etudes de
Droit Africain et Malgache. Paris p. 337.
503

La terre remplit aussi une fonction juridique chez les Mossi: lorsque survient
un conflit social grave entre deux individus ou groupes de lignages, il est souvent fait
recours à la terre pour servir d'arbitre. C'est le "tensé"185 = les puissances de la
terre chargées d'en garder la "blancheur", la "virginité", c'est-à-dire en réalité pour
rétablir la vérité et la justice. Par exemple si deux individus s'accusent mutuellement
de vol ou de sorcellerie (ce qui est fréquent en milieu rural mossi) ou encore de
meurtre, ils s'en remettent à la justice des "tensé". Le "teng-soaba" en sa qualité
de prêtre de la terre s'adresse à la terre et aux ancêtres par des sacrifices pour
demander justice aux "tensé". Généralement le coupable est frappé avec ses
complices et sa descendance de maladies et de malheurs provoquant leur extinction
totaie.
"La terre est avec la foudre, un grand arbitre, et malgré la réprobation que
ce procédé inspire aux chefs, les "tensé" et les "tenkuga" sont quelquefois
invoqués pour établir la culpabilité ou l'innocence d'une personne. La mort du
suspect dans le délai fixé par l'accusateur est attribuée à la justice de la terre
et des ancêtres"186.
Une personne "tuée" par les "tensé" n'est pleurée par aucun membre de sa
famille
et
n'a
pas
droit
aux
funérailles.
Cette
seconde
mort
sociale
est
particulièrement redoutée des Mossi.
Toutes les fonctions (économique, religieuse et juridique) de la terre sont-elles
préservées par la Réorganisation Agraire et Foncière?
185
"Tensé" sing tenga = terre, désigne à la fois la terre, le village et enfin
l'ensemble des puissances chargées du contrôle social.
186
PAGEARD (R.) 1963, Recherches sur les Nioniossé. Etudes Voltaïques,
4, p. 51.
504

Quelles stratégies les propriétaires terriens développent-ils pour conserver des
prérogatives sur les terres (de leurs ancêtres) désormais patrimoine de l'Etat? Et
quelles incidences sur le statut de la terre et sur la productivité agricole provoque la
nouvelle réglementation foncière?
L'on observe que certaines croyances religieuses tout comme beaucoup de
pratiques coutumières (recours aux "tensé" pour réclamer justice, la célébration du
"tengana" ... ) s'estompent avec le temps et sous l'influence de plusieurs facteurs
internes et externes.
Parmi les causes internes, les migrations sous leurs diverses formes, la
recherche de revenus monétaires, la modernisation progressive des sociétés
elles-mêmes (la formation dans ses multiples aspects: alphabétisation, initiation à la
gestion et à la comptabilité ... ) contribuent à préciser la nature des rapports des Mossi
à la terre; celle-ci n'apparaît plus qu'à travers sa fonction économique et les hommes
entretiennent avec elle des rapports objectifs de production plus que des rapports
religieux.
Les facteurs externes sont constitués par la percée des religions importées
(islam et christianisme) et le passage rapide de l'économie de subsistance à
l'économie de marché qui accélèrent un processus de détérioration d'une situation
sociale et politique déjà rendue difficile par la colonisation.
Dans ce contexte, la Réorganisation Agraire et Foncière intervenue en août
1984 à la suite de l'inadéquation des rapports entre moyens de production et forces
productives (terre, capital et travail) est bien fondée; elle vise une redistribution des
terres pour instaurer plus de justice sociale, une meilleure efficacité économique pour
atteindre l'autosuffisance alimentaire à travers une réorganisation des structures de
production, une éducation du producteur et une valorisation des produits de
l'agriculture et de l'élevage. Elle se propose ainsi de changer radicalement les
rapports
sociaux
nés
du
droit
antérieur
et
d'améliorer
qualitativement
et
quantitativement les conditions de vie des populations rurales dans leur ensemble.
Mais
peut-on
transformer
profondément
le
monde
rural
par
un
ensemble
d'ordonnances
et
de
décrets,
c'est-à-dire
par
une
somme
de
décisions
bureaucratiques sans référence aux réalités de terrain et sans un long et patient
505

travail d'information et de sensibilisation des populations rurales appelées à conduire
ces transformations?
Les difficultés d'appliquer sur le terrain les textes de la Réorganisation Agraire
et Foncière laissent entrevoir que son impact sur le monde rural reste limité malgré
le caractère noble de ses objectifs. Toutefois, il convient de souligner une diminution
progressive du temps de travail consacré par les paysans aussi bien dans les
champs collectifs que dans les champs individuels sans raison objective apparente.
Peut-être faut-il y voir la résignation d'un peuple que la nature n'a pas du tout gâté!
• Temps de travail agricole
Les membres d'une même famille consacrent environ 20 % du temps de travail
agricole dans leurs champs individuels et 80 % du temps dans les champs communs
sans une répartition systématique des tâches en fonction de l'âge ou du sexe.
Chacun participe aux travaux des champs en fonction de ses forces. Ils produisent
des biens jugés nécessaires à leur subsistance (sauf quelques rares cas de bonnes
années pluviométriques ayant entraîné d'abondantes récoltes) la société exerçant un
contrôle plus ou moins permanent sur la production agricole de chaque famille pour
en assurer la régulation. La production agricole ne doit pas servir de tremplin à des
individus pour accéder à une meilleure situation économique qui leur ferait changer
de statut social. L'inégalité des statuts sociaux ne doit non plus créer des disparités
économiques. Par exemple, un "talga" (homme libre) doit réglementer sa production
agricole pour lui permettre de se hisser au-dessus des autres "talsé" (pluriel de
"talga") mais il ne pourrait par ce biais prétendre au statut de "Nakombga"
(descendant d'un chef de village).
Ce contrôle social s'exerce de moins en moins en raison de l'exhortation des
paysans par les services administratifs et techniques des CRPA à dépasser le seuil
de la subsistance dans le cadre de leur production agricole. De plus, l'acquisition de
matériel de culture plus moderne (la culture attelée) et l'organisation de crédit
agricole permettent d'accroître les possibilités des rendements agricoles des paysans,
de sorte que les inégalités économiques et sociales qui pouvaient être évitées par
le passé, deviennent inévitables. Les paysans les plus pauvres seront toujours
506

exploités par ceux qui sont riches par les moyens classiques qui sont l'argent et la
propriété privée des moyens modernes de production (charrues, charrettes etc.).
A titre indicatif, le prix de quelques moyens de production peut être relevé. Ces
moyens de production sont généralement vendus à crédit.
Matériel agricole vendu à crédit sur 2 ou 5 ans en 1980 :
Charrues
26.000 FCFAlI'unité
Charrettes
52.000 FCFAlI'unité
1 paire de boeufs
25 à 30.000 FCFA
• Les conditions d'octroi des crédits
Les conditions régissant le crédit à moyen terme (destiné à l'achat de matériel
de traction animale) sont les suivantes:
1. Les paysans qui désirent obtenir un crédit doivent s'associer à un
groupement de crédit;
2. Les membres doivent verser un droit d'inscription de 1.000 F CFA pour le
crédit à moyen terme et de 200 F CFA pour le crédit de campagne afin de
constituer un fonds de garantie d'emprunt;
3. Les crédits accordés pour l'achat de matériel agricole sont de 5 ans et
portent un intérêt de 8% sans possibilité de différé d'amortissement.
C'est l'ensemble des difficultés à gérer rationnellement le monde rural qui
conduit sans doute les pouvoirs publics burkinabé à prendre des textes juridiques sur
les différentes formes d'occupation et d'exploitation des terres rurales, aménagées
ou non aménagées ; mais ces textes n'auront de portée significative que si les
disparités régionales y sont prises en compte et si ces textes eux-mêmes sont sans
cesse adaptés au contexte socio-économique et politique en évolution constante.
507

Dans les relations entre sociétés humaines et écosystémes, le poids des
hommes c'est-à-dire leur charge numérique sur l'espace, constitue une donnée de
première importance. Le nombre des habitants vivant
à l'intérieur d'une étendue
donnée mesure assez bien l'action de la société sur le milieu. La relation est d'autant
plus précise dans la zone sahélienne du Centre-Nord du Burkina que l'on a affaire
à des systèmes de modeste productivité.
Les techniques manuelles largement prédominantes, au mieux le faible appoint
d'une force animale de rendement médiocre, font que le prélèvement par individu sur
le produit naturel varie de un à deux ou trois pour une même quantité de travail
dépensé. Cela semble aller de pair avec les économies rurales qui ont fonctionné très
longtemps, et encore aujourd'hui, en circuit presque fermé.
Une large part de la production économique (essentiellement agricole) sert à
nourrir l'ensemble de la société, dans un cadre d'échanges d'une dimension au plus
régionale.
Il est possible, à partir du nombre de population, de retrouver et de situer dans
le temps, l'évolution de la dégradation de l'environnement dans le Centre-Nord.
Le rapport entre une surface, généralement comptée en kilomètres carrés et
la population qui vit sur cette surface (et en vit dans le cas des sociétés d'agriculteurs
comme les Mossi), constitue la densité. Exprimées en habitants au kilomètre carré,
les densités de population offrent l'avantage inestimable de pouvoir faire des
comparaisons quantitatives entre espaces ou écosystèmes.
La densité de la population constitue donc un élément capital, le plus simple
et le plus synthétique à la fois parmi ceux qui permettent d'appréhender la nature des
relations entre un espace et un ensemble d'hommes solidaires dans l'utilisation de
cet espace. La densité de population représente en effet à chaque instant un fait
contraignant pour l'évolution du système de production et plus largement du système
social du ou des groupes humains considérés. De plus, il convient de mentionner le
rôle de l'innovation technique sur l'évolution de l'environnement. On peut par ailleurs
508

se demander lequel du progrès technique ou de l'expansion dèmographique joue le
rôle moteur dans le processus de transformation de l'environnement physique du
Centre-Nord ?
Pour BOSERUF (1965), c'est la dèmographie qui est motrice. Quand la charge
démographique dépasse les possibilités de production par unité de surface liées à
un certain état de l'agriculture, il est rare qu'un groupe humain ne découvre pas
dans son propre fonds culturel ou chez les peuples avec lesquels il se trouve en
contact, les connaissances techniques qui lui permettront de tirer davantage du sol
et de passer au stade supérieur. Ainsi, pour survivre, les Mossi du Centre-Nord ont
dû se montrer inventifs face à un milieu naturel peu favorable.
Il est possible aussi (et même probable) que le poids des habitudes
représentant une certaine force d'inertie retienne une population donnée qui s'attarde
ainsi à un stade technique devenu incapable de satisfaire durablement ses besoins
à travers une destruction continue de son environnement pour survivre.
L'accroissement démographique accéléré et la pression de plus en plus forte
des économies dominantes ont donné deux résultats essentiels au niveau de
l'écosystème dans le Centre-Nord :
- Faire croître les densités au-delà des capacités de production et de progrès
des systèmes existants en créant une énorme masse de migrants réels ou
potentiels.
- Susciter la consommation accélérée de l'espace.
Certaines réponses à ces problèmes visent à intensifier l'agriculture, d'autres
consistent à encadrer, organiser ou planifier l'occupation des terres vacantes à partir
des noyaux de surpeuplement. Cette deuxième voie s'est révélée décevante: la prise
en charge d'une migration peuplade revient cher et les migrants mossi se plient
difficilement aux contraintes jugées nécessaires, tant en ce qui concerne le partqge
du sol que les pratiques agronomiques; les échecs sont nombreux et l'encadrement
effectif ne touche au mieux qu'une fraction des paysans à la recherche de terres
neuves.
509

Or la colonisation des terres neuves n'a jamais réussi à elle seule à arrêter la
croissance démographique dans les aires de départ. En dehors de quelques succés
enregistrés au niveau de la riziculture dans les périmètres aménagés, les solutions
se font attendre.
Et si les paysans se montrent réceptifs à certaines innovations techniques, leur
pauvreté et la faible valeur en argent de leur production presque exclusivement
vivrière (à l'exception du riz et du coton) les placent dans une situation économique
difficile qui les prédisposent souvent à la destruction de leur environnement. C'est
pourquoi les déplacements des Mossi du Centre-Nord vers les "terres neuves" du
Sud et du Sud-Ouest, voire de l'étranger résultent entre autres d'une charge
démographique croissante et de besoins qui ne peuvent plus être satisfaits sur place.
Des immigrants de plus en plus nombreux sont attirés par les activités
économiques (commerce, artisanat, services et loisirs ...) qui se développent surtout
autour des périmètres irrigués de la région. D'où des problèmes d'accès aux
équipements
socio-collectifs
(écoles,
centres
de
santé
... ).
La
pression
démographique entraîne évidemment une forte densité de la population sur le milieu
déjà peuplé dont les ressources naturelles disponibles se font de plus en plus ra,res.
De plus, observe-t-on dans la région du Centre-Nord la poursuite de
l'agriculture pluviale en plus de la riziculture et qui ne semble pas répondre
seulement à des préoccupations de sécurité et d'habitudes alimentaires, effet de la
culture mossi. Le maintien de l'agriculture pluviale traduit aussi dans une certaine
mesure, la prise de conscience des erreurs des concepteurs du développement rural
qui n'y intègrent pas la stratégie paysanne de production, en particulier l'intérêt pour
le paysan de diversifier son système de production et les initiatives qu'il est à même
de prendre pour atteindre les objectifs d'auto-suffisance et de sécurité alimentaires
et secondairement de revenus monétaires.
"Mais si prise de conscience il y a, c'est une prise de conscience mal
assumée dans la mesure où cette agriculture pluviale ne fait l'objet d'attention
ni de la part de la coopérative ni de la direction du projet. Les conséquences
de cette attitude de neutralité de ces deux structures sont entre autres et même
du point de vue de la logique productiviste, la dispersion des efforts des
510

exploitants dont souffre la riziculture ..." 187 . Tandis que l'objectif de la riziculture
reste avant tout la recherche de revenus monétaires, celui de l'agriculture pluviale
consiste à assurer à la famille suffisamment de produits agricoles essentiellement des
céréales pour son auto-consommation. Le taux de consommation en céréales varie
bien-sûr en fonction de la taille de la famille et du niveau d'intervention du riz dans
la consommation familiale. Il est apparu au niveau des périmètres irrigués que
l'exploitant qui produisait uniquement du riZ ne parvenait pas non seulement à
honorer ses engagements à l'égard de la coopérative (à laquelle il est obligatoirement
adhéré, du moins au niveau des périmètres aménagés par l'Etat) en lui fournissant
les quantités de riz exigées à la fin de chaque campagne, mais encore ne parvenait
que difficilement à satisfaire les besoins alimentaires de sa famille en céréales. Ainsi
si la pratique de l'agriculture pluviale demeure interdite par les textes qui régissent
l'exploitation des périmètres irrigués, elle semble s'imposer aux exploitants des
périmètres irrigués comme "une nécessité vitale pour l'équilibre de l'unité de
production-consommation et surtout pour la vitalité de périmètre ... "188. Les
difficultés d'accès à la terre dans les périmètres aménagés d'une part, les difficultés
de commercialisation du riz pour l'achat de céréales nécessaires à l'alimentation de
la famille d'autre part, semblent être à l'origine du développement de l'agriculture
pluviale dans la région.
Mais alors la logique du développement rural par les périmètres irrigués oLiles
divergences d'intérêt entre producteurs, Etat et Organismes de financement
apparaissent de plus en plus au grand jour ne risque-t-elle pas de compromettre les
politiques de développement régional défendues à la fois par l'Etat lui-même et
surtout les Organisations non Gouvernementales?
Le désengagement progressif de l'Etat des opérations de développement rural,
en particulier au niveau des périmètres irrigués alors même que les charges des
exploitants se font de plus en plus lourdes pourrait hâter, s'il n'est pas suivi de
mesures d'accompagnement, l'échec de la politique de développement rural des
régions déjà amorcée et favorablement accueillie par les populations rurales.
187
PALE O. Frédéric, SANOU Issoufou, OUEDRAOGO Jean-Pierre: Inter-
relations entre Population-Santé et Développement (PSO). Rapport
socio-économique 1986. p. 80.
188
PALE O. Frédéric, SANOU Issoufou, OUEDRAOGO Jean-Pierre dans
op. cit p. 103.
511

Pour comprendre les transformations socio-économiques en milieu rural mossi,
notamment au niveau des activités agricoles, il est en effet indiqué de suivre
l'évolution du système de production tant du point de vue de son organisation que de
son fonctionnement et apprécier les rapports sociaux qui en résultent. Faut-il
cependant conclure avec Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN que "les opérations de
développement
sont
bien
souvent
«appropriées»
autrement
que
le
souhaiteraient leurs maîtres d'oeuvre, en ce sens que des groupes particuliers
dans les population-cibles s'en servent à leur profit (c'est-à-dire se les
approprient) pour accroître leurs privilèges ou simplement en acquérir"189.
Certes les lVIossi comme bien de peuples africains ont une conception de la
logique économique qui fonde la richesse sur la capitalisation des liens sociaux. Mais
une telle logique, si elle a permis aux institutions socio-culturelles se résister aux
vicissitudes de l'histoire peut-elle fonctionner aujourd'hui dans un contexte socio-
économique marqué par des rapports marchands?
Comme le souligne Claude RAYNAUT au sujet des Haoussa du Niger: " ... elle
(logique économique) entre désormais en contradiction avec une autre forme
de rationalité économique: celle de l'échange marchand. Les biens, le travail,
la terre deviennent des marchandises qui, grâce à la monnaie, peuvent être
transmises indépendamment de toute relation sociale ou institutionnelle entre
partenaires et sans créer entre eux de lien personnel - contrairement au don qui
«oblige»
celui qui le reçoit"190.
Il faut ici souligner que la façon de concevoir et d'entretenir les réseaux de
relations sociales, de définir et d'assumer les fonctions économiques et sociales
permet aux Mossi de gérer au mieux les inégalités économiques et sociales qui
naissent en leur sein et d'en limiter les effets déstabilisateurs.
189
OLIVIER (DE SARDAN) Jean-Pierre: sociétés et développement dans
"Sociétés, Développement et Santé" Universités Francophones 1992 p.
35-36.
190
RAYNAUT Claude : Inégalités économiques et solidarités sociales,
exemples Haoussa au Niger dans "Sociétés, Développement et Santé"
Universités Francophones 1992. p. 139.
512

Bien souvent, la situation de dénuement presque total dans laquelle se
trouvent placées les populations rurales mossi conduit certaines d'entre elles à
s'installer dans des habitations de fortune soit autour des périmétres aménagés soit
autour des centres urbains où elles s'adonnent à des activités du secteur informel,
essentiellement le petit commerce de marchandises diverses.
Les centres urbains constitueraient-ils une exutoire pour les sociétés rurales
mossi en crise? Les villes représentent-elles un environnement social et économique
vulnérable pour les immigrants mossi ?
En tout cas une telle situation traduit aussi tout un processus de changement
interne aux communautés rurales mossi elles-mêmes et à leur système de production
qui exclut ainsi de l'agriculture (principale activité économique de la région) une
frange assez importante de la population rurale (les jeunes gens et les jeunes filles
surtout). C'est pourquoi les interventions de développement ne sauraient oeuvrer
dans le sens des transformations sociales en milieu rural mossi en s'adressant aux
communautés paysannes considérées comme des entités homogènes et en leur
proposant des améliorations techniques qui dépassent souvent de loin leurs capacités
financières et leur aptitude technique et de surcroît sans référence à leur contexte
socio-culturel.
Toute stratégie de développement, sauf à prendre le risque de manquer son
but, devrait s'appuyer sur des choix techniques et économiques qui tiennent compte
du niveau technologique et de la capacité de la société considérée à opérer des
mutations socio-économiques et culturelles dans le sens de l'amélioration des
conditions de vie et de travail de ses membres. Or les aides au développement
tiennent peu ou pas du tout dans les choix techniques et économiques du niveau
technologique et surtout des capacités réelles des sociétés à intégrer dans leur
contexte socio-culturel
les nouvelles technologies et nouveaux modèles
de
développement qui leur sont proposés ou plutôt qui leur sont imposés.
Ainsi par exemple les conséquences de l'aide sont considérables pour les pays
ou régions bénéficiaires qui se trouvent souvent obligés d'importer des matériels à
des prix plus élevés ou de qualité inférieure. Parfois même, il en sont réduits à
.réaliser des projets dont la priorité
n'est pas toujours
évidente
pour
leur
513

développement afin d'éviter le "gel" des prêts souvent consentis. Dans la majorité des
cas, le pays ou la région en arrivent à concevoir leur programme de développement
en fonction des projets comportant une grande partie des dépenses locales.
La part des investissements que les
interventions de développement
consacrent au milieu rural mossi est destinée à ouvrir des voies de communication
pour drainer vers les villes les produits commercialisables et pour engendrer des
plus-values
dont
bénéficie
une
partie
de
la
population
(commerçants
et
fonctionnaires) déjà riche par rapport au reste des paysans.
Cependant les échanges économiques inter-régionaux dans l'ensemble du
pays demeurent faibles et inorganisés, empêchant le commerce de jouer un rôle
structurant au niveau régional. Sans doute, l'extraversion économique du Burkina est
un facteur limitatif de l'expansion commerciale régionale, mais une plus grande
maîtrise de la production et de la commercialisation ainsi que des circuits de
distribution en favoriserait le développement.
13.3.
Le milieu rural mossi : un environnement socio-humain en
pleine mutation
Les interventions de développement en milieu rural s'assignent toutes comme
objectif général l'élevation du niveau de vie individuel et collectif des paysans, sans
que ne soit préalablement défini le projet de société à construire. L'Etat lui-même ne
semble pas avoir un projet précis à proposer au monde rural. A preuve dans le
domaine de l'irrigation par exemple, l'Etat multiplie dans les zones rurales les
opérations d'aménagements hydro-agricoles, y investit d'énormes capitaux et incite
les paysans à se regrouper en coopérations pour les exploiter. Mais comment rendre
ces opérations véritablement rentables?
Les coopératives qui ne correspondent à aucune structure sociale traditionnelle
peuvent-elles gérer convenablement les périmètres irrigués aménagés à leur
intention? Faut-il s'engager sur la voie des fermes d'Etat dont on connaît les résultats
obtenus dans les pays (les pays de l'Est) où elles ont été initiées? Faut-il tenter les
exploitations de type familial?
514

Il n'est pas aisé d'y répondre; et les tentatives de transformations sociales de
1985 par le gouvernement révolutionnaire de Thomas SAN KARA aussi prometteuses
qu'elles fussent, demeurèrent supeliicielles et éphémères. Par exemple la décision
de supprimer l'impôt de capitation véritable fardeau pour les paysans et perçu
"comme le signe de la mise en dépendance de la paysannerie par un Etat
prévaricateur"191 était présentée comme un nouveau contrat socio-économique et
politique entre l'Etat et le monde rural.
"La suppression de l'impôt se voulait le symbole de nouvelles relations
entre l'Etat et le monde paysan, le premier ne cherchant plus d'abord à prélever
le surplus produit par le second"192.
Ce faisant, l'Etat a cherché à encourager les producteurs par un relèvement
des prix d'achat de leurs productions, bonne initiative en soi, mais, c'était sans
compter avec les lois du marché international dont personne ne maîtrise les principes
de fonctionnement. Le prix des produits agricoles exportés (haricots verts) sont fixés
à l'extérieur et se heurtent à la concurrence serrée d'autres produits d'autres pays.
Il en est de même pour les intrants agricoles (engrais principalement) dont les
paysans mossi bien que consommateurs n'en fixent pas les prix, lesquels fluctuent
suivant les années. Ces contraintes d'origine externe pèsent lourdement sur les prix
de revient des produits des paysans mossi et le résultat de l'initiative étatique se
traduit souvent par un passif que les paysans doivent de toutes façons éponger, ce
qui les place dans une situation de plus en plus difficile.
Bernard TALLET cite l'exemple des incitations 193 des paysans burkinabè par
l'Etat à l'accroissement de la production cotonnière et qui se heurtèrent à un double
obstacle: "hausse des intrants agricoles (engrais, produits phytosanitaires) et
191
TALLET (B.), op. cit. p. 42.
192
Cf. TALLET (B.), cit. p. 42
193
Par incitations ici il faut entendre des subventions apportées par l'Etat
aux producteurs de coton dans le but de les encourager à poursuivre
cette culture.
515

surproduction mondiale de coton entraînant une phase d'effondrement des
cours. La
sauvegarde des
intérêts des
producteurs s'avérait difficile à
assurer" !194.
En dépit de la Réorganisation Agraire et Foncière ayant comme objectif "la
gestion de l'espace rural dans l'optique d'une intégration de toutes les activités
du monde rural: agriculture, élevage, forêts, en tenant compte de la vocation
naturelle de chaque zone dans une stratégie d'autosuffisance alimentaire"195
et la volonté politique d'intégrer le monde paysan à la transformation révolutionnaire
de la société, cette transformation sociale ne se réalisera pas.
Les causes essentielles de cette tentative de se concilier le monde rural par
le
gouvernement révolutionnaire
sont à
rechercher vraisemblablement
dans
l'inadéquation entre un développement basé sur la collectivité (ou qui proclame son
fondement sur la collectivité) et la tendance à l'autonomie qui caractérise l'évolution
du monde rural dans son ensemble.
L'ambition des autorités politiques de l'époque de faire évoluer le monde rural
considéré comme un tout devant assurer son propre développement sans tenir
compte des déséquilibres régionaux de peuplement et des formes variées de
migrations qui y ont cours, c'est faire fi de la dynamique paysanne et des réalités
sociales et sociologiques de ce milieu. Le milieu rural est en effet très hétérogène et·
mû par des forces sociales eUou politiques antagoniques. Pour revenir à l'exemple
mossi, c'est une société comportant des inégalités sociales issues des inégalités
Iignagères et de la modernisation de l'agriculture (avec le développement de
l'irrigation) qui poussent les paysans à adopter des attitudes de plus en plus
individualistes. C'est cette dernière dimension anthropologique des sociétés rurales
qui a échappé à l'Etat sous Thomas SAN KARA, alors placé devant le dilemme
suivant:
194
TALLET (B.), op. cit. p. 42.
195
Cf. Réorganisation Agraire et Foncière du Burkina Faso, art. 21 et
suivants.
516

"Soutenir le mouvement de modernisation en laissant s'amplifier des
inéga.lités sociales que politiquement il réprouve; créer d'autres structures de
production au risque de briser la dynamique à l'oeuvre et de perturber
profondément le secteur agricole" 196.
Sans doute faut-il repenser les rapports Etat monde rural dans une perspective
plus large d'intégration des activités économiques qui s'y exercent en tenant compte
de toutes les dimensions économiques, sociales, politiques et culturelles de ce milieu
et du contexte international en pleine mutation.
L'Etat se donnera-t-il les moyens d'une telle entreprise?
Les mutations socio-économiques qui s'observent dans la société rurale mossi
contiennent peut-être un début de réponse à la question relative aux rapports
Etat-monde rural dans un contexte évolutif. Car ces mutations touchent d'abord la
famille, cellule de base de la production économique. En effet, en milieu rural mossi
la situation matrimoniale connaît une rapide évolution marquée par la jeunesse des
couples et donc une tendance à l'effritement de la famille. Les jeunes gens se
marient plus précocement pour obtenir leur indépendance économique et se
soustraire de la tutelle du chef de famille qui en est le plus souvent le chef
d'exploitation également. Ils préfèrent ainsi acquérir plus tôt le statut de chef de
famille qui leur confère une relative autonomie pour se lancer à la conquête d'un
pouvoir économique à travers les embauches qui s'opèrent dans les différentes
interventions de développement en milieu rural. La plupart des hommes mariés ont
certes entre 40 et 59 ans, mais la tranche d'âge des jeunes mariés progresse et
occupe le second rang (ceux-ci ont entre 20 et 39 ans) tandis que s'observe un
phénomène plutôt rare en milieu rural mossi, la progression des jeunes mariés ayant
moins de 20 ans.
196
TALLET (8.), op. cit. p. 49.
~---
~517

Tableau 67 : Répartition des hommes mariés selon l'âge
Provinces
<20 ans
20-39
40-59
60-79
80 ans
Totall
et +
Province
Bam
17
377
892
11
3
1.300
1
Namentenga
8
245
413
25
9
700
Sanmatenga
164
694
1.041
89
12
2.000
Total/tranche
189
1.316
2.346
125
24
-
d'âge
Total Général
4.000
518

Les monogames représentent environ 60 % de la population mâle contre 50%
il Y a une douzaine d'années (d'après les données statistiques de la DRPC de Kaya).
40 % des hommes sont polygames, mais ils dépassent rarement (quelques hommes
dans les tranches d'âge comprises entre 60 et 79 ans et 80 ans et plus) le nombre
de trois épouses chacun 197. Car si plusieurs épouses avec les enfants qu'elles sont
supposées avoir, représentaient il y a quelques années une main-d'oeuvre familiale
potentielle ou réelle, la dégradation des conditions agro-c1imatiques et écologiques
ont rendu les productions agricoles si aléatoires, qu'elles constituent aujourd'hui une
véritable charge difficilement supportable par les chefs de famille.
Il est à remarquer qu'aucun polygame n'a été signalé dans les tranches d'âge
inférieure à 20 ans et entre 20 et 29 ans, les conditions de vie rendues de plus en
plus difficiles en milieu rural par plusieurs facteurs dont la pluviométrie et la
dégradation de l'environnement en dissuadent les jeunes.
Le mariage précoce des jeunes contribuera-t-il à freiner l'exode rural et
l'émigration des Mossi vers l'extérieur du pays?
En tout cas les charges familiales qui sont désormais les leurs donnent à
penser qu'un terme pourrait être mis au phénomène de l'exode rural et de
l'émigration. Mais paradoxalement, le phénomène migratoire se poursuit (il se ralentit
197
Plusieurs hommes polygames des tranches d'âge comprises entre 60
et 79, puis 80 ans et plus ont souvent plus de 3 épouses parce qu'à cet
âge, ils ont acquis une importance sociale et héritent des épouses de
leur père ou frère décédé.
519

au Bam) 198 et même se renforce à certains endroits (Namentenga et Sanmatenga),
les interventions de développement ne touchant qu'une partie relativement faible des
populations rurales .
• Changements sociaux et indicateurs de niveau de vie
a) Scolarisation
Le niveau d'instruction d'une société est le meilleur indicateur qui permet de
mesurer son degré de développement. Au niveau de l'ensemble du Burkina Faso, le
taux de scolarisation reste très faible; en 1985, les statistiques étaient comme suit:
25,5 % pour le niveau primaire
4 % pour le niveau secondaire
1 % pour le supérieur.
Et comme on peut s'en douter, c'est le milieu rural, dont celui mossi qui est le
moins scolarisé.
L'éducation qui jusqu'ici a surtout été l'affaire de l'Etat devra être désormais
celle de tout le monde, des paysans d'abord, aidés par l'Etat et les ONG ensuite,
pour permettre que l'instruction touche le paysan le plus reculé de la région du
Centre-Nord.
198
Dans la province du Bam, la culture du haricot vert et les cultures
maraîchères dans les pourtours du lac de Bam ont fortement retenu les
jeunes dans les villages alors que ce sont généralement des candidats
à l'exode rural ou à l'émigration.
520

A la faveur de la démocratisation politique des sociétés civiles qui se réalise
un peu partout à travers le monde, il est peut-être permis d'espérer une
"libéralisation" plus poussée de l'éducation grâce à l'appui technique et financier de
la communauté internationale.
b) Situation nutritionnelle et alimentaire
La situation nutritionnelle et alimentaire dans la région du Centre-Nord s'est
considérablement améliorée depuis la dernière décennie grâce en particulier à
l'action du Ministère chargé de la santé, de certaines ONG le PPIK, les Six "S" ... et
de l'UNICEF. (Confiaient en 1989, les Directeurs Provinciaux du bam et du
Sanmatenga, sans toutefois présenter des statistiques). L'on peut en effet penser que
la vulgarisation de certaines recettes alimentaires comme la "bouillie enrichie" et des
bienfaits de l'allaitement maternel ont pu contribuer à un mieux-être des enfants tout
comme la consommation des fruits, des légumes verts et autres produits maraîchers
a compensé les carences en vitamines essentielles aussi bien des enfants que des
adultes et améliorer leur régime alimentaire. Mais sur ce point, la présente étude n'a
pas mené des investigations en profondeur (ce n'était guère l'objet précis de notre
étude). De plus il n'existe aucune donnée disponible au niveau de la région qui
permette de mieux apprécier la situation.
c) Habitat et milieu de vie
Les modifications apportées à l'habitat, et par voie de conséquence au
paysage villageois, sont sans doute les changements les plus perceptibles en milieu
rural mossi. Les nombreux emplois créés par les interventions de développement en
521

milieu rural tout en procurant des revenus monétaires aux paysans, contribuent à
diffuser de nouveaux modéles de comportements sociaux qui prennent leur origine
dans l'habitat.
La plupart des villages bénéficiant d'interventions de développement (en
particulier des aménagements hydro-agricoles) dans les Provinces du Bam et du
Sanmatenga (moins dans la Province du Namentenga, peut-être en raison de sa
situation plus enclavée ?) connaît un rythme de constructions quelque peu élevé
depuis bientôt dix (10) ans. Des cases rectangulaires tôlées remplacent les cases
rondes en toit de chaume ou de paille, les "seckos" qui tenaient lieu de murs sont
remplacés par de véritables murs en briques de terre. Le ciment entre dans les
matériaux de construction en milieu rural comme il l'est déjà en milieu urbain, bien
qu'il soit un produit importé. Ces nouveaux modèles de construction donnent aux
villages des aspects de villes (surtout par les nouveaux styles architecturaux199 qui
y sont introduits) où naissent et se diffusent des modèles de comportements sociaux
d'un type nouveau. La tendance à l'éclatement des familles étendues et des unités
d'exploitation agricole se poursuit et s'accentue, poussant les jeunes détenteurs d'un
pouvoir économique puissant à aller fixer ailleurs (parfois dans un autre village) leur
résidence (alors que les coutumes et traditions recommandent la résidence
patrilocale).
Alors désir absolu d'indépendance ou simple besoin de plus d'émancipation?
199
Les styles architecturaux dont il s'agit sont ceux inspirés de l'habitat
type arabe rapporté par les musulmans revenant du pèlerinage d'Arabie
Saoudite, ou
de type occidental avec les colonisateurs et les
missionnaires chrétiens.
522

Un fait notable dans les conséquences socio-culturelles des interventions de
développement en milieu rural: la valorisation de la notion de droit. En dépit des
innovations intervenues par ici ou par là, le droit moderne burkinabè qui reste
largement inspiré du droit occidental et notamment français, apparaît comme
l'instrument privilégié de régulation des rapports sociaux et économiques malgré
l'existence des coutumes qui assuraient traditionnellement cette fonction. C'est
pourquoi le professeur DAVID, bien que hostile au concept de droit coutumier en
reconnaît le fondement sociologique:
"Le droit" doit composer avec les données sociales et respecter dans
une certaine mesure les sentiments et manières de voir naturelles de la société,
sous peine de demeurer une oeuvre théorique et de perdre même le caractère
de droit, car il ne serait plus, en dépit de toute sa valeur morale, ce qui est juste
pour une société envisagée,,20o.
Le modèle de développement de type capitaliste ou libéral que les bailleurs de
fonds proposent aux sociétés rurales africaines reposerait-il sur la rationalité du droit
occidental? Ce modèle de développement est-il compatible avec la rationalité du
droit coutumier mossi, ou exige-t-il de nécessaires adaptations et lesquelles?
La réorganisation agraire et foncière opérée à travers l'ordonnance n° 84-050
du 4 août 1984 au Burkina Faso, se veut dans le contexte précis du droit comme
nouveau cadre juridique de définition des rapports Etat/monde rural et Paysans/terre
pour une nouvelle politique de développement.
200
DAVID (R.) 1962 : La refonte du code civil dans les Etats Africains,
Annales Africaines. Paris pp. 162-163.
523

Car "l'obstacle même à une action de développement se révèle être fort
souvent le "droit du développement", c'est-à-dire le système normatif qui devait
le réaliser. Ce qui est en jeu ici, c'est moins sa qualité importée que sa nature
originelle
et sa connivence avec
les systèmes
économique,
politique,
éducationnel. ....201 .
En milieu rural mossi, comme partout ailleurs en Afrique, c'est le village qui
constitue le champ d'application du droit à la terre (au sens juridique strict) et où le
développement est vécu de façon concrète comme activité économique engageant
les intérêts de l'ensemble des membres du village. C'est ce qui justifie dans tous les
cas la naissance dans les centres urbains de plusieurs associations dont le
fondement repose sur l'origine géographique de leurs membres: Association des
ressortissants du village de Louda, de Dem, d'Ademtenga ou de Bam etc. Mais
l'espace géographique restreint du village limite souvent la portée des interventions
de développement rural dont l'évaluation de l'impact sur les conditions de vie des
populations reste difficile à effectuer.
C'est pourquoi le premier niveau de déploiement des interventions de
développement rural que représente le village devra nécessairement s'articuler sur
un second niveau plus élargi, celui de la Province par exemple, puis de la Région
pour s'imbriquer avec le niveau national à travers une politique de développement qui
201
Groupe
de
recherches
matricielles,
Laboratoire
d'Anthropologie
Juridique, Université de Paris 1: La dimension juridique des méthodes
d'investigation en
milieu
rural
africain.
Colloque
"Evaluation du
développement rural et méthodes d'investigation" 10-12 janvier 1979,
Paris; pp.93-111.
524

en laisse cependant de telles possibilités. C'est peut-être l'une des raisons pour
lesquelles, les interventions de développement en milieu rural couvrent le plus
souvent plusieurs villages, voire plusieurs Provinces ou Régions.
C'est à ce niveau que pourrait s'engager un processus de développement
cumulatif
qui
tende
vers
l'intégration
des
différentes
activités
productives
(agriculture/élevage/artisanatlcommerce), qui rendent possibles des stratégies à
moins court terme (maintien de la fertilité, diversification des activités) et une
amélioration des conditions d'existence (habitat, santé, éducation, loisirs etc.). C'est
à ce niveau aussi que les intérêts souvent divergents des différents acteurs du
développement rural apparaissent et engendrent diverses stratégies à prendre en
compte dans toute approche du milieu paysan dans l'optique d'une transformation
qualitative et à plus ou moins long terme.
"II doit être cependant clair pour tout le monde que les interventions de
terrain en matière de développement rural seront efficaces seulement si elles
s'insèrent dans un cadre national et international sécurisant et motivant, aussi
bien du point de vue économique que politique et correspondent à la volonté
politique des autorités nationales... "202.
202
Groupe de travail coopération française ... op. cit. p. 57.
525

CHAPITRE X: PERSPECTIVES
DES
INTERVENTIONS
DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI
14. PERSPECTIVES DES INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT RURAL
En milieu rural mossi comme ailleurs, les interventions de développement
donnent lieu à une sorte de concurrence pour le contrôle des moyens de production
entre les différents acteurs en présence sur le terrain. Alors émergent de nouveaux
acteurs,
de
nouvelles
initiatives,
de
nouveaux enjeux
qui
contraignent les
organisations rurales existantes quasi exclusivement agricoles à élargir leurs horizons
et à diversifier leurs stratégies. Par exemple des familles disposant d'une
main-d'oeuvre agricole suffisante en répartissent désormais les membres dans
diverses activités économiques (commerce, cultures irriguées, ouvriers agricoles ... )
pour conserver ou rechercher un po~voir à la fois économique et social toujours plus
puissant qui leur permettrait de sauvegarder"des avantages économiques et sociaux
acquis et négocier en position de force face aux autres acteurs. Au sein de ces
familles se distinguent des paysans riches qui utilisent une main-d'oeuvre plus ou
moins abondante, d'énormes capitaux et un matériel agricole moderne. Ces paysans
"modernes" constituent une véritable "bourgeoisie agricole" qui profite de sa notoriété
pour
influencer
les
organisations
paysannes
et
s'ériger
en
interlocuteurs
incontournables à travers toutes les interventions de développement quelles qu'en
soient la nature ou l'origine (extérieure, de l'Etat ou d'ONG ... ).
526

Puis viennent les autres catégories de paysans:
- les paysans "prolétarisés", c'est-à-dire ceux qui se sont endettés pour se
moderniser au point d'être complètement dominés par les organisations
paysannes
et
notamment
les
coopératives.
Ils
sont
progressivement
dépossédés de leurs moyens de production ;
- les paysans pauvres ou paupérisés qui n'ont pas pris les risques de la
modernisation et de l'endettement. Ils sont peu à peu éliminés du système
moderne de production, car leurs productions réalisées dans des conditions
techniques difficiles ne leur procurent que des revenus dérisoires; d'ordinaire,
ils finissent par se faire embaucher comme ouvriers agricoles ou comme
manoeuvres pour réaliser tous travaux pour n'importe quel salaire;
- enfin les ouvriers agricoles doublement exploités comme paysans et comme
ouvriers.
Au-delà des conflits qui opposent souvent paysans et agents d'encadrement
ou experts de développement (d'ONG ou de projet) et maintenant connus, car
obéissant à des logiques (ou à des rationalités) bien différentes et défendant par
conséquent des intérêts divergents (sans être nécessairement opposés), il convient
de s'attarder un peu sur les affrontements entre groupes antagonistes de paysans
pour en comprendre les raisons.
527

Les conflits qui naissent et se développent entre paysans sont-ils spécifiques
aux classes agricoles divisées ou au contraire le prolongement en milieu agricole des
conflits de la société mossi en général?
Quelles pourraient être les perspectives des interventions de développement
dans un tel contexte?
Des réponses satisfaisantes à ces questions ne peuvent être apportées sans
un bref retour en arrière pour relever le cheminement du développement au niveau
du Burkina Faso dans son ensemble et en souligner les points forts.
Le développement au Burkina Faso comme en Afrique de façon générale est
jusqu'ici et pour l'essentiel l'oeuvre de l'Etat. C'est l'Etat qui conçoit sa politique de
développement et en fixe les modalités d'exécution après en avoir préalablement
défini les moyens. Entre autres moyens que se donne l'Etat, il faut citer les sociétés
de développement qui peuvent être créées par lui (le cas des CRPA) ou autorisées
par lui. Ce dernier cas comprend les ONG qui jouissent d'une autonomie totale.
Parmi les sociétés de développement du monde rural, il est à distinguer
suivant le statut juridique:
1. les sociétés d'économie mixte à gestion privée (donc plus souple) et à
autonomie financière comme l'Autorité des Aménagements des Vallées de la
Volta (AW) ;
528

2. les établissements publics à caractère administratif (exemple des CRPA) ;
3. les établissements publics à caractère industriel et commercial comme la
CGP, FASO YAAR... ;
4. les sociétés mixtes avec une forte participation extérieure: ces sociétés
étaient exclusivement étrangères au départ (SATEC, CFDT, BDPA) puis sont
devenues nationales après 1960 et ont changé de dénomination comme la
SOFITEX qui a remplacé la CFDT.
A l'inverse des trois précédentes, cette dernière catégorie de société assure
la maîtrise totale du produit agricole dont elle s'occupe de l'amont à l'aval, car
elle bénéficie toujours de l'assistance technique et de financements extérieurs.
Les autres sociétés de développement rural se contentent d'exercer des
fonctions d'encadrement (formation) des paysans dans le cadre d'une ou de
plusieurs
spéculations
rarement
elles
s'occupent
à
la
fois
de
l'approvisionnement, du crédit agricole, de la commercialisation ou de la
transformation.
5. Les ONG constituent le cinquième type d'organisme de développement
intervenant dans le monde rural. Elles sont entièrement autonomes à tous
points de vue (au moins pour celles qui agissent au Burkina Faso).
DIOUF, parlant des ONG qui travaillent au Sénégal distingue deux catégories
d'Ol\\lG (cette distinction est valable pour le Burkina Faso) :
529

"Celles
de
la
première
génération
étaient des
organisations
de
bienfaisance dont l'intervention purement caritative contrastait avec la pratique
des sociétés nationales et des services administratifs, ce qui ne manque pas
de créer des conflits lorsqu'elles intervenaient à l'intérieur des régions
affectées à ces derniers.
,
Elles pratiquaient la "politique du cadeau" inhibitive à la prise en charge
de leur développement par les populations et de toutes façons impossibles à
perpétuer. Leurs programmes étaient sectoriels et n'avaient un impact
important
ni
sur
la
croissance
globale
de
l'économie
ni
sur
le
développement"203.
Au Burkina Faso des exemples de ce type d'ONG sont la Caritas Burkinabé
spécialisée dans la distribution gratuite des vivres aux personnes déshéritées ou
sinistrées, le CATWELL, ONG américaine de distribution de produits alimentaires aux
enfants, et surtout aux enfants des établissements primaires et secondaires etc.
"La deuxième génération d'ONG.... vise d'autres objectifs... Leur dessein
(celui des ONG) inavoué est de se substituer aux sociétés nationales... Ces
ONG poursuivent en plus de la liquidation du secteur public et para-public en
milieu rural un but de libéralisation totale de l'économie par une privatisation
de tout l'appareil de promotion.
203
DIOUF (B.), Le rôle des sociétés de développement dans "Paysans,
Experts et chercheurs en Afrique
Noire" (Sciences sociales et
développement) Karthala 1985 ; p. 172.
530

Elles deviennent de fait, les chevaux de bataille de la volonté de
l'Administration Américaine d'exporter partout et quel que soit l'environnement
la «magie du privé»"204.
Cette seconde génération d'ONG en ce qui concerne le Burkina Faso, même
si elles ne cherchent pas délibérément à liquider le secteur public et para-public (il
serait utopique de le croire), elles tentent d'en démontrer l'inefficacité sur le terrain.
Par exemple le PPIK qui est une ONG basée aussi bien au Sanmatenga, au Bam
(PPIL) qu'au Namentenga (PPIB) multiplie les actions de formation et de vulgarisation
de nouvelles techniques agricoles qui, par effet de démonstration arrivent à mieux
convaincre les paysans au risque d'y supplanter les agents d'encadrement du CRPA.
Les interventions de développement en milieu rural mossi comme dans le reste
du Burkina Faso apparaissent comme l'apanage exclusif (en pratique) des sociétés
de développement mixtes et des ONG du fait d'une part de l'importance de leurs
sources de financement (bi et/ou multilatérales) et de la souplesse de leur mode de
gestion d'autre part. En effet les sociétés mixtes et les ONG disposent de moyens
financiers énormes qui leur permettent une large marge de manoeuvre sur le terrain
(achat d'équipements nécessaires à leurs actions sur le terrain ... ) d'autant plus
qu'elles gèrent de façon autonome leurs ressources financières. Elles trouvent
incompatibles les règles et procédures lentes, longues et lourdes de l'administration
publique avec la très grande souplesse et la célérité de leurs interventions sur le
terrain en vue d'obtenir des résultats immédiats et tangibles (cela sert de justification
auprès des sources de financement) pour justifier leur efficacité. Elles craignent aussi
204
DIOUF (B.), op. cit. p. 173.
531

et surtout que les financements obtenus dans le cadre de leurs interventions ne
servent à combler les déficits budgétaires de l'Etat ou ne soient détournés par des
agents publics corrompus.
En agissant sur le terrain et en gérant leurs ressources humaines et
financières sans contrôle ni vérification de la part de l'Etat, les sociétés mixtes et les
ONG ne visent pas seulement à réduire l'action des CRPA en tant que structures
administratives publiques chargées du développement rural; elles limitent aussi les
capacités réelles de l'Etat à concevoir et à réaliser une politique de développement
en faveur du monde rural.
Au début de leur création, toutes ces institutions de l'Etat remplissaient une
mission principale: la promotion des cultures d'exportations en l'occurrence le coton
pour les besoins de l'industrie de la Métropole. Elles recrutaient aussi de la
main-d'oeuvre (abondante et bon marché) au Burkina Faso pour les besoins d'autres
cultures d'exportations (café, cacao en Côte-d'Ivoire, arachide au Sénégal) pour
satisfaire à la consommation de la I\\/Iétropole, sans compter les hommes qui étaient
enrôlés de force dans l'armée française durant les deux guerres mondiales.
Le développement des cultures d'exportation au Burkina Faso, s'il a eu le
mérite de créer quelques emplois au niveau du monde rural, il a surtout créé ou
développé des relations de dépendance du pays vis-à-vis de la France. Les aides
diverses au développement octroyées plus tard au pays venaient renforcer cette
dépendance au point de provoquer un déséquilibre entre cultures d'exportations et
cultures vivrières suite à plusieurs années de sécheresse et de famine (à cause d'une
mauvaise pluviométrie) des années 1970 et suivantes.
532

C'est au cours de cette période que de nouveaux objectifs furent assignés aux
sociétés de développement et qui se résument en une diversification de la production
agricole avec la priorité accordée aux cultures vivrières. Ces nouveaux objectifs ne
seront pas atteints pour plusieurs raisons déjà avancées par B. DIOUF:
"La première réside dans le fait que la recherche agronomique n'avait
rien souvent à proposer en matière de matériel végétal à haut potentiel de
production, absorbée qu'elle était par l'amélioration des cultures d'exportation.
La deuxième raison est l'absence d'organisation par les pouvoirs publics,
à l'instar des produits d'exportation, de circuits de commercialisation des
produits vivriers. Cette deuxième raison restera longtemps le frein principal du
développement de ces cultures, puisque la recherche et les sociétés de
développement fourniront un effort important pendant la deuxième période pour
augmenter leur rendement"205.
Le déséquilibre entre cultures d'exportations et cultures vivrières n'a pas
seulement entraîné comme conséquences immédiates la famine et l'émigration d'une
partie importante de la population sur de nouvelles terres plus riches à l'intérieur du
pays ou à l'extérieur (pays voisins). Il a aussi conduit l'Etat à rechercher une plus
grande maîtrise des circuits de commercialisation des produits d'exportation et un
meilleur contrôle des produits vivriers pour assurer à l'ensemble de la population
205
DIOUF (B.), cf. op. dt. p. 177.
533

(rurale comme urbaine) l'autosuffisance alimentaire. C'est ainsi qu'au Burkina Faso
l'organisation de la collecte et de la commercialisation du coton furent confiées à la
SOFITEX qui contrôle d'amont en aval la filière coton : fourniture des intrants
(semences sélectionnées, engrais, insecticides ... ) sous forme d'avance aux paysans
remboursable (en principe) à la récolte - monopole de la collecte - engrenage et
entrepôts de stockage, puis la commercialisation. Selon la Direction Générale de la
SOFITEX, la société fonctionne plutôt bien puisqu'elle affiche de bons résultats
depuis 1985. Ce succès doit être analysé sous l'angle du caractère EPIC206 de la
société qui jouit d'une autonomie financière et connaît une gestion privée,
contrairement aux CRPA qui sont comme nous le verrons, des EPA2D7 .
L'Etat réserve aux CRPA la collecte et la commercialisation des autres produits
d'exportation (sésame, amandes de karité, plus tard des cultures maraîchères comme
les haricots verts et les fruits) ainsi que des cultures vivrières (mil, sorgho, maïs, et
par la suite des cultures irriguées et notamment le riz). Mais l'exiguïté de la marge
de manoeuvre des CRPA est telle qu'ils éprouvent d'énormes difficultés à accomplir
leur mission: leur caractère trop administratif d'abord les rend peu aptes à exercer
certaines fonctions comme la commercialisation. Ensuite, dotés de peu de moyens
financiers, ils ne peuvent collecter que de faibles quantités de produits d'exportation
et vivriers. Même en confiant peu après l'échec des CRPA, la même mission à
l'OFNACER, le résultat demeure le même, en dépit des multiples efforts déployés par
l'Etat pour améliorer la situation. Bernard TALLET le souligne bien lorsqu'il affirme
au sujet de l'OFNACER :
206
EPIC : Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial.
207
EPA : Etablissement Public à caractère Administratif.
534

"Cet organisme, déjà ancien, devait être revitalisé par une action à deux
niveaux complémentaires : à l'échelle nationale, par l'augmentation des
quantités achetées, la création de stocks régulateurs (approvisionnement des
villes, rééquilibrage inter-régional en cas de déficit) ; à l'échelle villageoise, par
la création de banques de céréales (stockage limité mais possibilité d'agir pour
freiner les variations des prix, en particulier lors de la soudure). Mais l'action
régulatrice de l'OFNACER s'est heurtée à des difficultés de trésorerie. Certains
engagements financiers
pris auprès des paysans n'ont pas été tenus
(non-enlèvement des récoltes, retard dans le paiement'')208.
Le double échec enregistré par les sociétés de développement rural tant au
niveau des cultures d'exportation que des cultures vivrières oblige l'Etat à réorienter
les objectifs à fixer à ces sociétés ainsi que les stratégies à utiliser pour y parvenir.
L'on parle désormais de développement rural intégré qui englobe les activités de
l'agriculture, de l'élevage et des activités économiques connexes comme l'artisanat
en mettant un accent particulier sur la protection de l'environnement. La nouvelle
stratégie utilisée par les sociétés de développement s'élargit pour couvrir l'animation
rurale, l'éducation en matière de santé, de coopérative. Le contenu de la formation
des paysans ne vise plus seulement l'accroissement de la production agricole mais
aussi l'amélioration des conditions de vie des populations rurales. D'où la nécessité
de leur participation aux interventions de développement de la conception à la
réalisation.
208
TALLET (8.), op. cit. p. 43.
535

L'expérience des interventions de développement en milieu rural mossi révèle
que celles-ci ont plus de chance de succès lorsqu'elles sont conduites par les ONG
que par les sociétés ou organismes étatiques. Mais les ONG seules peuvent-elles
assurer la promotion socio-économique du monde rural mossi ?
14.1.
La
question
du
désengagement
de
l'Etat
dans
les
interventions de développement rural
Pendant trente ans, la question du développement rural s'est présentée
comme un jeu entre ['Etat et les sociétés rurales où l'on est passé d'une situation où
l'Etat définit et organise le développement à une situation tout à fait opposé où il met
en place des stratégies de désengagement, à charge pour ces sociétés de se
développer elles-mêmes : en effet, un mouvement libéral d'origine urbaine semble
se dessiner à ['horizon
de
l'économie
rurale,
marqué par une forme
de
professionnalisation des producteurs et visant à leur assurer la maîtrise non
seulement de leurs productions, mais aussi de la transformation et de la
commercialisation. Ce mouvement tend à intégrer les paysans en tant qu'agents
économiques, à l'économie de marché en les intégrant d'abord à la ville et en faisant
de la société elle-même et non plus de l'Etat, le moteur du développement. Mais les
sociétés rurales en particulier la société rurale mossi possède-t-elles la capacité
technique et organisationnelle pour conduire ce mouvement à terme?
536

Comme le note à juste titre Yves CLOUET: "II n'est pas sûr dans ces
conditions, que les sociétés rurales locales acceptent d'emblée les propositions
inhérentes à l'économie libérale. Ces impulsions externes, qu'elles proviennent
de l'Etat ou de la société civile, provoquent en effet des réactions très variables
des acteurs locaux"209.
Précisément comment réagissent les paysans mossi du centre-Nord dans ce
mouvement de passage d'économie paysanne locale à une économie de marché
régionale, nationale et internationale, caractérisée par une intégration de plus en plus
forte de la campagne à la ville ? Quelles peuvent être les formes d'évolution
possibles de la société mossi consécutives à l'appropriation par les populations
urbaines fortunées de l'espace rural?
"Ils mettent en place des stratégies de résistance, de restructuration ou
de
renouvellement
en
fonction
de
leurs
capacités
d'analyse,
des
représentations qu'ils ont de leur milieu et des moyens qu'ils se forgent pour
maîtriser les défis qu'ils rencontrent. En ce sens, les projets qu'ils formulent
et mettent en oeuvre ne peuvent être que globaux. Ils concernent aussi bien
l'organisation
économique,
la
maîtrise
de
l'espace
que
la
régulation
209 CLOUET (Yvesl : Le développement agricole au Sahel, Tome Il, Recherches et Techniques, "Documents systèmes Agraires
n° 17", CIRAD, P. 273.
.
210 HOUEE (p.\\ cité par CLOUET Yves dans op. ci\\. p. 273.
537

Le désengagement de l'Etat de certaines fonctions officielles au niveau du
monde rural comme l'octroi de crédits ou l'organisation de la commercialisation offre
l'opportunité aux paysans de créer une véritable dynamique sociale qui peut être
porteuse : les paysans parviennent ainsi à s'organiser de façon autonome et
différente à la fois des coopératives étatiques et des groupements associés de
producteurs suscités le plus souvent par les ONG. Des organisations paysannes ainsi
nées mènent plusieurs activités à la fois économiques et sociales: du crédit à la
commercialisation, de l'alphabétisation à la santé et aux équipements socio-collectifs
(écoles, dispensaires, maternités, marchés etc.), ces organisations constituent une
des forces motrices du changement social en milieu rural mossi.
"Les organisations paysannes liées au mouvement associatif résultent,
quant à elles, d'une initiative locale et sont autonomes par rapport à l'Etat.
C'est au Sénégal et au Burkina Faso qu'elles sont les plus nombreuses et les
plus dynamiques et qu'elles revêtent la forme d'organisations paysannes
intervillageoises" (GENTIL et MERCOIRET, 1991).
Les ONG sont souvent présentées comme une alternative possible au
développement rural en Afrique. Cependant, l'identité énigmatique des ONG pose
déjà problème quant à leur capacité intrinsèque à promouvoir seules le monde rural
: "elles sont non gouvernementales comme si elles craignaient finalement de
dévoiler les objectifs qu'elles poursuivent"211.
211
DIDIERLAURENT (M.), Les ONG dans le développement rural: quelles
alternatives? dans "Paysans, Experts et chercheurs en Afrique Noire".
Sciences sociales et développement rural, Karthala 1985; p. 1986.
538

Les ONG peuvent-elles constituer néanmoins une alternative dans le
développement rural en général?
Il n'est pas vain de rappeler que la mission classique des ONG consiste à
favoriser l'accès des populations défavorisées par la nature au développement, en
soutenant leurs initiatives et en suscitant leur participation aux différentes opérations
(actions). Leurs méthodes d'action sur le terrain sont les prêts (et en cela, les ONG,
tout comme certains projets financés par l'extérieur comme l'ADRK, le PPIK se sont
littéralement substitués aux banques locales) et/ou les dons. La formule de
prédilection des ONG est celle du don lorsque leurs interventions comportent un volet
investissement, confiant aux organisations paysannes le soin d'assurer l'entretien et
le
renouvellement
(amortissement)
de
l'investissement
considéré
(lorsque
l'investissement en question concerne des infrastructures quelle qu'en soit la nature).
Il est souvent fait appel aussi à l'investissement humain souvent assimilé à la
participation des populations dans les interventions de développement. Cet
investissement humain est d'ordinaire mal appréhendé par les développeurs: lorsqu'il
est faible, l'on conclut au désintérêt des paysans par rapport à telle ou telle
intervention dont l'échec incombe dans tous les cas à ces derniers. Lorsqu'au
contraire il est massif, l'on y voit le signe d'une adhésion, d'une participation
populaire à l'intervention de développement dont le succès est d'ores et déjà assuré.
La réalité est que l'investissement humain participe de la stratégie paysanne de
production, laquelle est modifiable à loisir suivant les circonstances. Par exemple une
ONG qui entreprendrait de construire une banque de céréales dans un village
sollicitera probablement le concours des habitants de ce village à travers
l'investissement humain. L'opération de construction devant nécessairement se
dérouler en saison sèche ne pourra mobiliser tous les villageois; après avoir calculé
539

les risques, les avantages socio-économiques et financiers, les uns y répondront
favorablement tandis que les autres s'adonneront à d'autres activités économiques
(commerce, travaux agricoles sur les périmètres irrigués ou maraîchers ... ), bien que
l'opération de construction de la banque de céréales puisse être bénéfique à
l'ensemble du village.
L'investissement humain tant sollicité par les ONG au cours de leurs
interventions en milieu rural révèle aussi une autre stratégie : celle des ONG
elles-mêmes qui le valorise en journées de travail rémunérées et qu'elles présentent
comme forme de co-financement pour servir à la fois de caution et de justification
auprès de leurs sources de financement. Au-delà de l'enjeu stratégique qu'il
représente aussi bien pour les paysans que pour les ONG, l'investissement humain
en tant qu'effort concret de paliicipation à une intervention de développement mérite
d'être analysé plus en profondeur car il détermine souvent les dynamiques sociales
en cours en milieu rural mossi. C'est pourquoi la Conférence Régionale du Service
Volontaire
International
(CRSVI)
annonçait
déjà
en
septembre
1981
à
Bobo-Dioulasso:
"Une intervention étrangère cherche toujours à se justifier face aux
.,
donateurs, sur des éléments de rentabilité. Avec un certain activisme à la clé,
il faut réussir à tout prix"212.
212
CRSVI, Conférence de septembre 1981 Bobo-Dioulasso (Burkina Faso).
540

Faute de moyens financiers l'Etat cède son rôle d'acteur principal du
développement au profit des ONG dans les zones ou régions à rentabilité
économique faible ou nulle comme dans la région du Centre-Nord, dépourvue de
potentialités économiques. 1/ préfère ainsi investir dans des régions potentiellement
riches pour en promouvoir le développement (comme dans les régions du Sud et du
Sud-Ouest) accentuant par ce fait même les disparités inter-régionales. Précisément
ce sont les régions délaissées par l'Etat, parce que pauvres, qui constituent le terrain
de prédilection des ONG (avec le souci moral de corriger ces disparités pour plus de
justice sociale)

elles
développent leurs actions.
Si
les
interventions de
développement des
ONG en
milieu
rural
mossi sont dans
leur ensemble,
favorablement accueillies par les populations qui grâce aux dons et aides diverses
parviennent à trouver des emplois permanents ou temporaires, à élever quelque peu
leur niveau de vie par l'instruction qu'elles reçoivent, à acquérir des biens de
consommation etc., elles tissent des relations de tutelle souvent préjudiciables à
l'auto-promotion paysanne:
"Dans leurs relations avec les populations, les ONG visent à long terme
l'autonomie des groupes qu'elles aident. Mais à court terme, elles restent
habituées à exercer une tutelle sur ces mêmes groupes ; souvent, elles
conçoivent le projet, puis cherchent la participation des populations"213. Aussi
observe-t-on une évolution dans les interventions des ONG, en milieu rural mossi tout
au moins, marquée plus par un soutien technique et financier aux populations rurales
à travers leurs organisations paysannes, que par un engagement physique et direct
sur le terrain (à l'exception toutefois de l'ADRK et du PPIK dont la raison d'être
implique une présence permanente sur le terrain). Par ailleurs les ONG sortent
213
DIDIERLALIRENT (M.), op. cit. p. 198.
541

progressivement du cadre étroit des "micro-réalisations" dans lesquelles elles
s'étaient laissées enfermées pour étendre leurs actions à un niveau plus élargi
comme la région, le territoire national ou sous-régional, vOire international, en y
intégrant d'autres aspects jusque-là négligés comme le phénomène de l'urbanisation
ou celui de la dégradation de l'environnement...
Mais l'élargissement de l'aire des interventions de développement en milieu
rural mossi suffit-il à en garantir le succès sans une concertation préalable avec les
pouvoirs publics et les populations concernées pour en définir les objectifs prioritaires
et dégager les moyens nécessaires à leur réalisation?
14.2.
Vers une réorientation des interventions de développement
en milieu rural mossi.
Des CRPA aux ONG, la problématique des interventions de développement
en milieu rural mossi semble s'orienter vers une nouvelle direction : celle des
"projets", susceptibles d'être maîtrisés aussi bien par l'Etat que par les ONG.
Que faut-il entendre par projet?
D'après CI. Freud, un projet ... "désigne à la fois un financement, une
action et une organisation. Son but est d'amener ces pays (africains) à
l'économie mondiale. Ses objectifs sont d'accroître la productivité agricole ou
de diversifier l'économie"214.
214
FREUD (CI.),
Projets de coopération ou aide aux politiques de
développement dans "Paysans, Experts et chercheurs en Afrique Noire"
(Sciences sociales et développement). Karthala 1985; p. 201.
542

Les projets seraient-ils la voie royale qui conduit au développement?
L'histoire des pays développés montre bien que le développement ne s'est pas
réalisé dans les pays européens sur la base de projets, mais plutôt "à partir d'une
accumulation prélevée sur le développement de l'agriculture, dû au progrès des
techniques et à l'accroissement de la productivité, qui se sont étalés sur
plusieurs siècles"215. Les pays africains feraient-ils exception à cette règle?
Les projets semblent y constituer le moteur du développement, au point de
faire l'objet d'une sollicitation presque permanente auprès de la communauté
internationale tant par les Etats que par les ONG à travers la coopération bilatérale
ou multilatérale. La principale explication qui puisse être fournie à une telle situation
est que le développement y est volontariste: il est organisé, planifié, dirigé dans ses
phases essentielles (conception, exécution, évaluation s'il y a lieu) et ses aspects
fondamentaux (techniques, économiques et socio-culturels) par l'Etat ou les ONG.
L'Etat burkinabè qui ne dispose pas d'épargne nationale suffisante pour
entreprendre un investissement dans un secteur quelconque de l'économie s'en
remet aux financements extérieurs pour les projets de développement qu'il élabore
; ce faisant, il prive le développement d'une base nationale et place le pays dans une
dépendance structurelle vis-à-vis de l'extérieur.
Peut-on rèussir un développement dont le centre est fixé ailleurs?
215
FREUD (CI.), op. cit. p. 201.
543

L'on
comprend
dès lors la portée des slogans tels,
"développement
auto-centré", "auto-développement" ... , lancés comme des défis à relever par les pays
africains eux-mêmes et que soutiennent ironiquement les pays développés.
Il Y a bien plus. Lorsque les projets de développement sont soumis par les
Etats pour financement à l'extérieur, après une longue et lourde procédure
administrative pouvant durer cinq années et plus, l'accord est obtenu généralement
assorti de bien de conditions dont l'envoi le plus souvent d'une assistance technique
sur le terrain. 1/ faut souligner au passage que la procédure d'obtention de
financement à l'extérieur d'un projet soumis par une ONG est plus rapide et moins
lourde.
C'est l'assistance technique étrangère (quand bien-même il existerait de
techniciens nationaux compétents) qui va pratiquement diriger les projets en y
exerçant un contrôle strict (il faut bien en rendre compte aux sources de
financement)!
"Dans le projet, l'expatrié a tendance à occuper une position-clé. A
travers lui transite souvent l'argent venant d'Europe : à travers lui, sont
répertoriés les besoins et formulé un programme d'intervention. Quant aux
décisions, elles sont fréquemment prises par l'expatrié. Dans le meilleur des
cas, il Y a consultation de la population et participation à l'exécution du
programme, mais la population ne décide pas..., le village ne se développe pas
à partir de son propre dynamisme. Il est animé par un projet qui se réalise avec
un encadrement et des financements ... "216. Selon la taille des projets et surtout
216
Cf. Résultats de la CRSVI en septembre 1980 à Bobo-Dioulasso au
Burkina Faso.
544

la hauteur de leur financement, l'assistance technique dispose de crédits substantiels
de fonctionnement (logements, bureaux, et logistique nécessaire à la conduite des
projets comme les véhicules, le matériel mobilier... ). Les projets prennent également
en charge, au moins partiellement les compléments de salaire, les frais de carburant
et des pièces détachées, de l'encadrement national et toutes autres dépenses jugées
utiles à l'exécution des projets.
En définitive, les projets exécutés sur le terrain avec l'assistance technique
étrangère n'entraînent que de faibles retombées économiques pour le pays. Certes,
ils favorisent une formation technique d'agents locaux qui disposeront de l'ensemble
du matériel acquis au terme de l'exécution des projets. Ils participent aussi à la
création de nombreuses infrastructures économiques et sociales: pistes, puits ou
forages, écoles, dispensaires ou maternités ... qui ne semblent pas correspondre
toujours aux objectifs initiaux des projets.
De plus, les projets précipitent la désarticulation du tissu productif et social par
une déresponsabilisation des cadres nationaux qui y participent et par leur arrêt plus
ou moins prompt en même temps que les actions de développement qu'ils ont
initiées. Ces actions qui ne s'articulent pas en général dans une stratégie
d'ensemble, s'estompent d'autant plus rapidement que leur caractère sectoriel ne leur
donne guère une chance de survie.
De
même,
les
projets conçus
sans
rapport
avec
une
politique
de
développement ne sauraient connaître un succès, car ils ne pourraient créer les
conditions d'une accumulation favorisant un développement auto-entretenu.
545

Sans doute, doit-on s'orienter vers une redéfinition du rôle de l'aide au
développement dans les pays pauvres comme le Burkina Faso à travers les projets
ou les actions des ONG pour en espérer une plus grande efficacité économique. Cela
suppose aussi que soient ré-examinés les rapports Etat-monde rural, monde
rural-monde urbain dans le cadre d'une politique cohérente de développement et
dans un contexte socio-économique en évolution constante.
14.3.
Propositions pour une meilleure efficacité des interventions
de développement en milieu rural mossi
Le cri d'alarme que lançait en 1892 l'explorateur français Binger au sujet de
la région mossi de l'ex-Haute-Volta appelle toujours réflexion et exige surtout action:
"ce pays pourrait être riche, sa population est très dense... mais le Mossi (le
pays mossi) ne produit pas grand-chose.. ."217.
Cent ans après, ces propos se vérifient: L'auto-suffisance alimentaire qui est
l'objectif prioritaire de la politique économique du pays n'est toujours pas atteinte
malgré l'intensification et la diversification de la production agricole. Et la persistance
de l'émigration des populations rurales (surtout des jeunes) vers les pays voisins,
principalement vers la Côte-d'Ivoire, ne semble pas contribuer à améliorer la
situation.
217
BINGER, cité par MARCHAL (J.Y.), Brève histoire du développement
économique de la Haute-Volta, dans "Problèmes Economiques" n° 1804
du 30 décembre 1982, p. 29.
546

Quelles alternatives proposer pour accroître dans un tel contexte, la rentabilité
socio-économique des interventions de développement en milieu rural mossi ?
Les plans de développement élaborés et mis en oeuvre par l'Etat (Plan
Quinquennal de Développement Populaire 1986-1990) par exemple grâce aux
financements extérieurs semblent s'accommoder difficilement de la différenciation
sociale de plus en plus poussée des populations rurales mossi ou du détournement
des objectifs et des fonds des interventions de développement par des individus
placés à la tête de l'Etat et/ou des communautés villageoises. Au-delà de leur
caractère dirigiste, des lenteurs et lourdeurs administratives qu'entraîne leur mise en
oeuvre, les interventions de développement placées sous la houlette de l'Etat
soulèvent une grave interrogation: celle de leur pertinence au regard de leur coût très
élevé pour les bailleurs de fonds internationaux.
Les ONG peuvent-elles dans ces conditions, constituer une alternative de
développement durable en tant que forme nouvelle d'aide au développement (sans
toutefois remettre en cause la coopération bilatérale ou multilatérale) ?
Leurs approches du développement, moins volontaristes, suscitent au moins
de larges adhésions aux actions qu'elles engagent sur le terrain (généralement de
petite dimension et avec des technologies simples et appropriées) ; la participation
des populations rurales mossi aux opérations de développement ainsi initiées à leur
bénéfice représente une phase importante de l'évolution des interventions de
développement vers l'auto-promotion paysanne. De plus, la souplesse qui caractérise
le mode d'exécution et de gestion des interventions des ONG, et leur facilité à obtenir
des fonds auprès des sources extérieures de financement, semblent offrir plus
547

d'efficacité à leurs actions. Cependant qu'à ce niveau, les détournements non plus
ne sont pas à exclure, même s'ils prennent une forme beaucoup plus subtile. Car les
actions des ONG paraissent en réalité indissociables de celles de l'Etat auxquelles
elles servent la plupart du temps d'intermédiaires ou de sous-traitants.
Qu'elles soient initiées par l'Etat ou par les ONG, les interventions de
développement en milieu rural ne parviennent pas à assurer la promotion
socio-économique et sanitaire de l'ensemble des populations rurales mossi. Les
difficultés
d'adaptation
des
interventions
de
développement
au
contexte
socio-politique, économique et culturel du milieu rural mossi offre l'opportunité à des
experts en développement comme ceux de la Banque Mondiale et du FMI (Fonds
Monétaire International) de proposer une libéralisation et une privatisation à outrance
des économies rurales en général. En effet la Banque Mondiale ne s'embarrasse
guère des considérations moralisantes sur le développement des sociétés rurales.
Pour elle "le fonctionnement étatique des interventions en milieu rural a
largement montré ses faiblesses: coût très élevé, détournement, corruption,
prévarication, népotisme etc... Il faut donc laisser jouer librement les
mécanismes du marché et laisser agir, dans les campagnes africaines, une
classe d'entrepreneurs qui est seule à même de promouvoir le développement
économique. Le soutien aux petits entrepreneurs ruraux s'accompagne de
recommandations
visant
à
relever
le
prix-producteur,
à
favoriser
la
commercialisation privée des céréales, à limiter les impôts qui pèsent sur
l'agriculture et à développer les routes rurales" 218 •
218
AMSELLE (J.L.), Le développement vu du village, Revue Sociologia
Ruralis vol. XXIII, n° 2/3 1988; p. 180.
548

Mais le capitalisme libéral comme modèle de développement peut-il faire
progresser une région (celle du Centre-Nord du Burkina Faso par exemple), un pays
comme le Burkina Faso sur la voie du développement?
Sans doute la thèse d'Amselle selon laquelle il n'existe pas en Afrique un
modèle de développement autre que celui fondé sur la promotion de ceux qui sont
déjà favorisés, c'est-à-dire les couches supérieures des communautés villageoises
est très discutable. Car s'il est vrai que les tentatives de construction du
développement
rural
sur
les
associations et
autres
formes
d'organisations
traditionnelles n'ont pas' toujours connu de succès, ces associations et organisations
traditionnelles n'en demeurent pas moins une référence culturelle incontournable pour
toute entreprise en milieu rural mossi. Et puis, la privatisation et la libéralisation ne
sauraient non plus et dans tous les cas, constituer des panacées pour le
développement des sociétés rurales mossi,
En définitive, il n'existe pas de recettes déjà faites pour réussir les
interventions de développement en milieu rural mossi ; c'est au cas par cas que
chaque situation concrète doit être analysée dans le contexte socio-culturel et
économique de la société considérée, en rapport avec la nature et l'importance de
l'intervention de développement d'une part, avec les ressources économiques, les
caractéristiques socio-humaines et du milieu d'autre part. La prise en compte de
l'ensemble de ces facteurs à leur juste valeur est la seule garantie de succès de
toutes interventions de développement en milieu rural en général, et en milieu rural
mossi en particulier.
549

CONCLUSION
Par la présente étude, nous avons tenté de faire le point sur les interventions
de développement en cours en milieu rural mossi du Burkina Faso et d'analyser leur
impact socio-économique et sanitaire sur les conditions de vie et de travail des
populations.
A travers leur diversité tout comme à travers celle des domaines qu'elles
couvrent, les interventions de développement rural constituent un pôle important du
développement économique régional et national grâce aux flux des capitaux qu'elles
drainent par le biais de l'Etat, des sociétés mixtes et des ONG vers le monde rural
pour y promouvoir prioritairement l'agriculture et les activités économiques connexes
comme l'élevage et l'artisanat. Elles contribuent également à créer des emplois en
milieu rural pour essayer de stabiliser quelque peu sans parvenir à les enrayer, les
mouvements migratoires qui s'y développent depuis la période coloniale. Ces
migrations s'expliquent à la fois par des causes historiques (les populations burkinabè
ont toujours servi de main-d'oeuvre aux plantations des pays voisins), par les
conditions
agro-climatiques
et
écologiques
de
la
région
du
Centre-Nord
particulièrement défavorables, et par les lourdes contraintes sociales que les jeunes
supportent de plus en plus difficilement vis-à-vis des anciens.
Un essai de typologie nous a permis de constater une répartition inégale des
interventions de développement dans un milieu rural pourtant homogène au double
plan physique et humain. Cette inégale répartition des interventions s'explique
sociologiquement par la capacité à "négocier" des projets de développement rural (et
au besoin à en détourner au profit de leur région) de la part des personnages
550

influents, ressortissants des trois Provinces (Bam, Namentenga et Sanmatenga), à
savoir les hauts cadres de l'administration publique, les autorités coutumières et/ou
religieuses dont la notoriété est reconnue dans les sphères de l'Etat.
Si
les
interventions
de
développement
ont
par
ailleurs
permis
le
désenclavement de certaines parties de la région du Centre-Nord (Provinces du Bam
et du Namentenga) par la construction de routes et de pistes ... , elles ont aussi créé
ou accentué des disparités régionales concrétisées par la répartition inégale des
interventions
de
développement
à
partir
de
l'inégale
représentativité
des
ressortissants dans l'administration publique dont chaque Province se réclame, et de
l'importance du poids politique traditionnel de chacune des trois Provinces
respectives.
L'absence de statistiques fiables et le manque de rapports d'évaluation de
l'action des ONG en tant qu'interventions de développement rural, rendent difficile la
collecte des informations sur le terrain pour apprécier à sa juste valeur l'impact
socio-économique et sanitaire de l'ensemble des interventions en milieu rural mossi,
et confèrent par conséquent un caractère limité à notre travail.
Toutefois, les populations rurales enquêtées reconnaissent unanimement une
nette amélioration de leur situation socio-économique (travail à temps partiel ou à
plein
temps,
gain
de
revenus
monétaires
assez
substantiels,
sécurité
et
autosuffisance alimentaires assurées dans certaines parties de la région du Centre-
Nord ... ).
551

Par contre, leur situation sanitaire demeure précaire (dans l'ensemble des trois
Provinces) du fait de l'insuffisance des infrastructures sanitaires et du personnel de
santé. De plus il existe peu d'interventions dans le domaine précis de la santé au
niveau de la région (le Bam en est totalement dépourvu). L'on notera que des
interventions de petites dimensions relatives à la protection de l'environnement ont
permis la reconstitution partielle du milieu naturel grâce à des méthodes et
technologies simples: constructions de diguettes et de sites anti-érosifs, lutte contre
les feux de brousse, la coupe abusive du bois et la divagation des animaux (d'où
l'expression des trois luttes) ...
Ce type d'interventions est concentré surtout dans les Provinces du Bam et du
Sanmatenga où la dégradation de l'environnement est particulièrement sensible.
Au total, ce travail de recherche se veut avant tout comme une introduction
dans un domaine qui s'apparente à un "tabou"219 : si les grands projets de
développement financés par l'extérieur font l'objet d'une évaluation régulière (il faut
rendre des comptes aux bailleurs de fonds !) les moyens et petits projets le sont
moins ou pas du tout, en particulier ceux des ONG (même si celles-ci en rendent
compte à leurs sources de financement à titre de justification). En dehors de toute
considération moralisante, le "tabou" est appelé à la transparence (l'expression est
à la mode) tant du côté des initiateurs que de celui des bénéficiaires des
interventions de développement rural.
219
Les interventions de développement rural, parce qu'elles engloutissent
d'énormes sommes d'argent sont considérées comme une chasse
gardée par ceux qui en ont la responsabilité.
552

C'est aussi à ce prix que les interventions de développement en milieu rural
de façon générale connaîtront plus de succès.
" convient de souligner cependant ce fait: quelles que soient les mesures
prises pour développer le secteur de l'agriculture et les autres activités qui lui sont
rattachées, elles demeureront insuffisantes si elles ne sont pas étendues à tous les
autres secteurs de l'économie. Mais précisément peut-on préconiser des mesures
pour améliorer l'économie dans son ensemble, dans un contexte de crise politique,
économique et financière qui caractérise le monde d'aujourd'hui et particulièrement
les pays africains, tendant à y remettre en cause l'existence même de l'Etat?
J.L. Amselle pour sa part tire la conclusion de la crise internationale:
"
De là, le grand désarroi des développeurs qui sont confrontés au repli
frileux des grandes puissances, et en particulier des Etats-Unis sur l'Afrique
économiquement utile, ou de la France qui se crispe sur sa zone d'influence
politique traditionnelle'I22O.
Comme on dit vulgairement:
"A quelque chose malheur est bon" : la crise internationale persiste, les
développeurs se rétractent, laissant les pays africains face à eux-mêmes. C'est
peut-être aussi une manière de leur indiquer, du moins nous l'espérons, une voie de
développement, la leur propre.
220
AM SELLE (LI.L.) op. cit. p. 181.
553

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577

REVUES ET PERIODIQUES SUR LA METHODOLOGIE
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GENTIL (E.) : "Méthode d'évaluation des projets" (analyse du milieu rural avant,
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- "Le Suivi-évaluation dans les projets de développement rural, orientations
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IDA : Directives opérationnelles en matière de surveillance et d'évaluation. Paris
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REVUES ET PERIODIQUES SUR LE DEVELOPPEMENT RURAL
ANCEY (G.) : Niveaux de décision et fonctions: objectif en milieu rural africain,
AMIRA, Paris 1975.
578

AUGE (M.) : - L'anthropologie de la maladie, l'Homme, XXVI (97-98), Paris 1986, 81-
93 pp.
- Sous-développement et développement terrain d'étude et objet en Afrique
francophone, Africa, XVIII 3, Paris 1972.
- Du lieu à l'objet: thèmes et problèmes de la recherche sociologique en Afrique
noire, Cultures et développement, VIII - 2, Paris 1976.
BALANDIER (G.) : Structures sociales traditionnelles et changements économiques,
Cachiers d'Etudes Africaines, l, 1, Paris 1960.
BAYART (J.F.) : La problématique démocratique en Afrique noire. Politique africaine
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LOMBARD (J.) : La sociologie du développement: pluridisciplinarité ou spécificité?
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- L'agriculture nigérienne et la crise du Sahel, Politique Africaine n028 Karthala, Paris
1987.97-107 pp.
VAUGELADE (J.) : Migration
et distribution spatiale de la population rapport du
séminaire "Accroissement de la population et développement" 11-15 Avril 1983, Paris
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580

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REVUES ET PERIODIQUES SUR LA SOCIOLOGIE DE LA SANTE
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DOZON (J.P.) : L'anthropologie médicale: fabrication d'un nouveau regard. Sciences
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DOCUMENTS DIVERS
ANONYME
Rapport annuel. Ministère du Développement Rural. Ouagadougou
1981,75p.
ANONYME
:
Croissance
démographique
et
équilibre
écologique.
Cas
de
l'environnement. Séminaire national sur "l'accroissement de la population et
développement", 11-15 Avril 1983. Ministère du Travail, Direction des Etudes et
Projets, Ouagadougou 1983, 8 p.
581

ANONYME : Politique d'actions en matière de lutte contre la dèsertification en
république de Haute-Volta. Direction de l'Aménagement forestier et du reboisement.
Ouagadougou 1983, 5 p. + annexes.
ANONYME: Les aménagements hydro-agricoles. Campagne agricole 1981-1982.
Ministère du développement rural. Ouagadougou 1983, 94 p. + annexes.
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IDA : Directives opérationnelles en matière de surveillance et d'évaluation, Paris
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ORDONNANCE ND 84-050/CNR/PRES du 04 Août 1984 portant réorganisation agraire
et foncière au Burkina Faso.
DECRET
ND 85-404/CNR/PRES du
04 AoCJt
1985 portant
application de la
réorganisation agraire et foncière au Burkina Faso.
582

Rapport sur le recensement général de la population du Burkina. Ministére du Plan
et de la Coopération. INSD. Ouagadougou. 1985.
Rapport général, Synthèse du Gouvernement du Burkina Faso sur le Premier Plan
Quinquennal de Développement Populaire. Ouagadougou 1986.
Rapport sur l'inventaire des projets et ONG dans la région du Centre-Nord par
TRAORE Moussa (Direction Régionale du Plan et de la Coopération) Kaya 1990.
Rapport sur l'enquête démographique par le Ministère du Plan et des Travaux
Publics. Bulletin mensuel d'information statistique et économique. Carrefour africain
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Rapport sur le développement des cultures irriguées au Burkina Faso (2 Tomes)
CILSS et CLUB du SAHEL. Ouagadougou 1987.
583

LISTE DES TABLEAUX STATISTIQUES
Tableau N° 1
Présentation de la population de la zone d'étude en 1985
Tableau N° 2
Potentialités
agro-sylvo-pastorales
des
régions
économiques du Burkina Faso
Tableau N° 3
Infrastructures sanitaires et scolaires des régions
Tableau N° 4
Situation de la scolarisation au Burkina Faso
Tableau N° 5
Ménages agricoles selon la taille du ménage dans les
trois provinces
Tableau N° 6
Population agricole totale selon l'âge dans les trois
provinces
Tableau N° 7
Production céréalière campagne 1993-1994 par type de
culture en tonne dans les trois provinces
Tableau N° 8
Production de cultures de rente campagne 1993-1994 par
type de culture dans les trois provinces
Tableau N° 9
Statistiq ues sur les effectifs du cheptel en 1993-1994
584

Tableau N° 10
Types de coopératives agricoles
Tableau N° 11
Décaissement de l'aide publique
au développement
(décaissements nets en dollars US)
Tableau N° 12
Evolution du financement acquis par secteur d'intervention
(en % du total)
Tableau N° 13
Source de financement de la période et leur volume
d'intervention
Tableau N° 14
Structure et programmation des financements du secteur
du développement rural au cours du plan quinquennal de
développement populaire (en millions de FCFA)
Tableau N° 15
Répartition annuelle des financements
Tableau N° 16
Composition des dix régions économiques
Tableau N° 17
Situation de la population résidente du Centre-Nord
Tableau N° 18
Structure démographique par province
Tableau N° 19
Caractéristiques
démographiques
des
régions
économiques du Bam
585

Tableau N° 20
Classification des régions selon la superficie et la taille de
la population
Tableau N° 21
Liste des projets au Bam
Tableau N° 22
Liste des projets au Namentenga
Tableau N° 23
Liste des projets au Sanmatenga
Tableau N° 24
Budget annuel
de
l'ensemble des
interventions
de
développement rural dans les trois provinces
Tableau N° 25
Inventaire général des interventions de développement en
milieu rural du Centre-Nord
Tableau N° 26
Classification par type d'interventions de développement
Tableau N° 27
Typologie des interventions de développement (type 1)
Tableau N° 28
Typologie des interventions de développement (type 2)
Tableau N° 29
Typologie des interventions de développement (type 3)
Tableau N° 30
Typologie des interventions de développement (type 4)
586

Tableau N° 31
Situation des activités artisanales par région
Tableau N° 32
Infrastructures socio-sanitaires dans la province du Bam
Tableau N° 33
Personnel de santé travaillant dans
les formations
sanitaires de la province du Bam
Tableau N° 34
Infrastructures socio-sanitaires dans le Namentenga
Tableau N° 35
Personnel de santé travaillant dans les formations socio-
sanitaires de la province du Namentenga
Tableau N° 36
Infrastructures
socio-sanitaires
dans
la
province
du
Sanmatenga
Tableau N° 37
Personnel de santé travaillant dans les formations socio-
sanitaires de la province du Sanmatenga
Tableau N° 38
Répartition des ONG par région en 1990
Tableau N° 39
Etat des dépenses budgétaires par région en 1986
Tableau N° 40
Répartition des agents publics par région en 1988
587

Tableau N° 41
Situation du réseau routier des régions en 1989
Tableau N° 42
Répartition des entreprises····· par région, 1988
Tableau N° 43
Classification des régions
selon le degré d'équipement
Tableau N° 44
Typologie des périmètres irriguées dans le Centre-Nord
Tableau N° 45
Taux de consommation per capita (T.P.C.) = 170 kg
région du Centre-Nord. Année 1984/1985
Tableau N° 46
Taux de consommation per capita = 170 kg (selon les
norme de la FAO). Année 1985/1986. Région du Centre-
Nord.
Tableau N° 47
Bilan céréalier de la région du Centre-Nord
Tableau N° 48
Evolution des prix de quelques produits agricoles
Tableau N° 49
Revenus bruts des exploitants de quelques périmètres
irriguées du Centre-Nord
588

Tableau N° 50
Prix moyens de vente au détail de quelques
produits maraîchers au marché de Ouagadougou
Tableau N° 51
Volume de crédits accordés par la CNCA en million
de FCFA
Tableau N° 52
Système de production en milieu rural mossi
Tableau N° 53
Bilan énergétique (bois de chauffe) de la région du
Centre-Nord en 1983 (en milliers de m3/an)
Tableau N° 54
Situation de la dégradation de l'environnement
physique
Tableau N° 55
Evolution des ressources forestières: volume par
classe d'utilisation potentielle par CRPA en milliers
de m3
Tableau N° 56
Evaluation des ressources forestières et répartition
des volumes estimés par CRPA (en m3 sur pied)
Tableau N° 57
Niveau
de
réalisation
des
intervention
de
développement en milieu rural.
589

Tableau N° 58
Appréciation des interventions de développement en
milieu rural par les populations mossi
Tableau N° 59
Appréciation des interventions de développement en
milieu rural par les populations mossi
Tableau N° 60
Fonction des structures d'encadrement des paysans
Tableau N° 61
Interventions financières des ONG en 1985 (en FCFA)
Tableau N° 62
Situation de la production en tonnes
Tableau N° 63
Commercialisation
des
productions
maraîchères
et
fruitières (en millions de FCFA)
Tableau N° 64
Exportations de fruits en tonnes
Tableau N° 65
Evolution du prix du riz et autres denrées de première
nécessité
Tableau N° 66
Commerce extérieur - balance des paiements (en millions
de FCFA)
Tableau N° 67
Répartition des hommes mariés selon l'âge.
590

LISTE DES CARTES
1.
Carte administrative
2.
Carte ethnique
3.
Carte des isohyète
4.
Carte des zones de végétation
5.
Carte de la zone d'étude
6.
Carte de densité de la population
7.
Carte des CRPA
8.
Carte des zones agro-écologiques
9.
Carte de la situation forestière
10.
Carte de l'aménagement rural du Centre-Nord
11.
Carte de disponibilité en terres agricoles
591

12.
Carte de flux migratoires et transhumance
13.
Carte de marché des céréales
14.
Carte de déficit et excédents de céréales par Province
15.
Carte des principaux flux de céréales
592

LISTE DES PHOTOGRAPHIES
Greniers de mil non battu appelés "Kongo" chez
les Mossi
Greniers de grosses réserves de mil:
1. "Kongo"
2. "Baoré"
3. "Kielorho"
Greniers "baoré" recouverts de nattes en herbe
contre les intempéries
Greniers de mil pour consommation immédiate de
la famille
Photo N°5 :
Champ de maïs mossi
Photo N°6 :
Riziére d'une ferme pilote
Photo N°? :
Aire de battage de riz
Photo N°S:
Scène de battage de riz
Photo N°9 :
Champ de coton
Photo N°10 :
Développement de la culture du coton
Photo N°11 :
Désherbage champ coton
Photo N°12 :
Plaine labourée par tracteur
Photo N°13 :
Tracteur sur une rizière
Photos N°14 et 15:
Artisanat rural mossi : confection de chapeaux à
base d'herbes
Photos N°15 et 16 :
Essai de modernisation de l'élevage
593

ANNEXES
594

ANNEXE 1 :
Fiche d'identification des Projets
(Fiche générale)
595

MINISTERE DU PLAN
ET DE LA COOPERATION
SECRETARIAT GENERAL
DIRECTION REGIONALE DU PLAN
ET DE LA COOPERATION
- KAYA -
FICHE D'IDENTIFICATION DE PROJETS
1. NOM DU PROJET/ONG :
2. ADRESSE:
3. MINISTERE DE TUTELLE:
4. ORIGINE DU FINANCEMENT:
5. ORGANISME D'EXECUTION:
6. DATE DE DEMARRAGE:
DlIREE PREVllE
7. OBJECTIFS:
8. ACTIVITES PRINCIPALES PAR SECTEURS:
(Cocher les activités de l'année en cours ex: (x))
A. SECTEURS DE PRODUCTION:
( ) AGRICULTURE, ELEVAGE
( ) ENVIRONNEMENT
( ) MINES
( ) INDUSTRIES
( ) ARTISANAT
596

B. SECTEURS DE SOUTIEN A LA PRODUCTION:
( ) EAU ET AMENAGEMENT HYDRO AGRICOLE
( ) ENERGIE
( ) TRANSPORTS
( ) COMMUNICATIONS
( ) COMMERCE
( ) TOURISME, HOTELLERIE
C. SECTEURS SOCIAUX:
( ) EDUCATION, FORMATION
( ) SANTE
( ) ACTIONS SOCIALES
( ) HABITAT, URBANISME
( ) INFORMATION, ART et CULTURE, SPORTS et LOISIRS
. '
597

D. ADMINISTRATION:
( ) INFRASTRUCTURES, EQUIPEMENTS
9. ZONE D'INTERVENTION:
PROVINCE (à spécifier) :
_
DEPARTEMENTS (à spécifier) :
_
VILLAGES (nombre) : /
/
10. SERVICES TECHNIQUES COLLABORATEURS:
11. MOYENS DISPONIBLES:
A. PERSONNEL (porter les effectifs) :
NATIONAUX:
/ _ - - - - _ /
EXPATRIES:
/
/
TOTAL:
/
/
598

B. BUDGET ANNUEL (écrire les montants) :
FRAIS DE PERSONNEL:
/
./
MATIERES, FOURNITURES, ET FRAIS DIVERS:
/
/
INVESTISSEMENTS:
/
/
TOTAL:
/
/
12. DOCUMENTS DISPONIBLES:
13. OBSERVATIONS:
Fait à
le
19
- - - - - -
- - - - -
LE RESPONSABLE DU PROJET/ONG
599

ANNEXE 2 :
Fiche d'inventaire des domaines d'intervention
(Sylvo-ag ro-pastoral)
600

MINISTERE DE L'AGRICULTURE
MINISTERE DU PLAN
ET DE L'ELEVAGE
ET DE LA COOPERATION
SECRETARIAT GENERAL
SECRETARIAT GENERAL
CRPA CENTRE NORD
DRPC KAYA
FICHE D'INVENTAIRE DES DOMAINES D'INTERVENTION
(JUIN 1989)
Nom du Service, Programme, Projet ou ONG :
*
Cocher la première case SI vous intervenez dans le domaine d'activités
indiqué.
**
Cocher la deuxième case si l'intervention est accompagnée d'un programme
de crédits.
1. AGRICULTURE: CULTURES PLUVIALES
1.1. Vulgarisation des fosses fumières
( )* ( )**
et compostières
1.2. Vulgarisation des étables fumières
() ()
1.3. Distribution de l'engrais chimique
() ()
601

1.4. Protection des végétaux (pesticides)
() ()
1.5. Vulgarisation des semences améliorées
() ()
1.6. Promotion des charrettes
() ()
1.7. Vulgarisation de la culture attelée
() ()
1.8. Centre de formation pour la culture
() ()
attelée
2. AGRICULTURE : CULTURES IRRIGUEES
2.1. Aménagement des périmètres
() ()
2.2. Organisation des cultivateurs
() ()
2.3. Culture maraîchère
( )
2.4. Culture rizicole
( )
2.5. Provision en semences, engrais, grillage,
() ()
outils, pesticides
2.6. Crédit (moto-pompes)
() ()
602

2.7. Appui à la transformation et à la
() ()
commercialisation des produits
3. ELEVAGE
3.1. Alimentation du bétail
( )
3.1.1. Vulgarisation des cultures fourragères
( )
3.1.2. Fauchage/utilisation des résidus de récolte
( )
3.1.3. Ventilation des Sous-Produits
() ()
Agro-Industriels (SPAI)
3.1.4. Construction des magasins
( )
3.2. Santé animale
( )
3.2.1. Formation
( )
3.2.2. Campagnes de vaccination
( )
3.2.3. Campagnes de déparasitage
( )
3.2.4. Construction des parcs de vaccination
( )
603

3.2.5. Construction des points d'eau
( )
3.2.6. Création des pharmacies vétérinaires
( )
villageoises
3.3. Intensification de la Production animale
( )
3.3.1. Embouche ovine
() ()
3.3.2. Embouche bovine
() ()
3.3.3. Embouche porcine
() ()
3.3.4. Aviculture
() ()
3.3.5. Mise en enclos ,du bétail
() ()
3.3.6. Aménagement des zones pastorales
( )
3.4. Organisation des éleveurs
( )
3.4.1. Formation des groupements éleveurs
( )
604

4. DEVELOPPEMENT DE L'INDUSTRIE ET DE L'ARTISANAT
4.1. Appui à la transformation des produits agricoles
() ()
4.2. Appui à la production des équipements
() ()
agricoles et animales
4.3. Appui aux forgerons
() ()
5. DIVERSIFICATION DES CULTURES DE RENTE
5.1. Promotion des variétés améliorées
() ()
d'arachides (SOFIVAR), sésame et coton
6. APPUI A LA STABILITE DES APPROVISIONNEMENTS
6.1. Création et appui aux banques de céréales
() ()
6.2. Appui aux groupements villageois et
() ()
coopératives pour la prise en charge
d'opérations de commercialisation
605

7. ORGANISATION DU MONDE RURAL
7.1. Alphabétisation fonctionnelle
( )
7.2. Promotion de l'épargne-crédit
() ()
7.3. Appui à la formation des coopératives
( )
et pré-coopératives
7.4. Introduction des équipements comme
Moulin à céréales
() ()
Presse de karité
() ()
7.5. Création des centres de formation
( )
7.6. Appui aux activités commerciales
() ()
et artisanales des femmes
8. CONSERVATION D'EAU ET DES SOLS/AGROFORESTERIE
8.1. Construction des diguettes en terre
( )
8.2. Construction des diguettes en pierres
() ()
8.3. Construction des diguettes en bandes d'herbes ()
606

8.4. Construction des traitements de ravines
() ()
8.5. Construction des retenues d'eau
() ()
8.6. Végétalisation des diguettes et chutes
( )
8.7. Reboisement villageois
( )
8.8. Plantations liées à l'agriculture
( )
(haies vives, brises vents etc.)
8.9. Mise en place des pépinières villageoises
() ()
8.10. Aménagement des Terroirs villageois
() ()
9. RENFORCEMENT DES SERVICES TECHNIQUES PROVINCIAUX
9.1. Appui à l'encadrement du Service
( )
Provincial de l'Agriculture (SPAI)
Construction de logements
( )
Construction de bureaux
( )
Financement de moyens de transport
() ()
Formation des agents
( )
Financement des agents
( )
607

9.2. Appui à l'encadrement du Service
( )
Provincial de l'Elevage (SPE)
Construction de logements
( )
Construction de bureaux
( )
Financement de moyens de transport
() ()
Formation des agents
( )
Financement des agents
( )
9.3. Appui à la Direction du SPA
( )
9.4. Appui à la Direction du SPE
( )
9.5. Appui à la Direction du CRPA
( )
9.6. Appui à l'encadrement du Service
( )
Provincial de l'Environnement et du Tourisme (E&T)
Construction de logements
( )
Construction de bureaux
( )
Financement de moyens de transport
() ()
Formation des agents
( )
Financement des agents
( )
60S

9.7. Appui à la Direction de l'E & T
( )
9.8. Appui à l'encadrement du Service
( )
Provincial de l'Action Coopérative Paysanne
Construction de logements
( )
Construction de bureaux
( )
Financement de moyens de transport
() ()
Formation des agents
( )
Financement des agents
( )
9.9. Appui à la Direction
( )
9.10. Appui à l'ONPF
( )
10. APPROVISIONNEMENT EN EAU
10.1 Construction de forages
( )
10.2. Construction des puits
( )
10.3. Construction de barrages
( )
609

11. INFRASTRUCTURE ROUTIERE
11.1 Construction des pistes
( )
11.2. Réparation des pistes
( )
12. QUELQUES ELEMENTS DE L'APPROCHE D'INTERVENTION
12.1. Distribution de vivres lors des travaux communaux
( )
12.2. Rémunération des participants aux travaux
( )
communaux
12.3. Niveau de mécanisation des travaux anti-érosifs
charrettes
( )
camions
( )
équipe tractoriste
( )
12.4. Exécution des programmes à travers propres
( )
structures villageoises
12.5. Propres animateurs et animatrices
( )
12.6. Plantes pour reboisements sont vendues
( )
13. OBSERVATIONS
610

B U R KI N
A
F li.. S 0
ORD(b~Lu.NCE n084-0S0
jCNR!PRES POHT1.ï{f
R00RG.b.~'HS1irrON AGI:~il\\B 1';'11 FONCIERE 1.;]
BURKINi>. .B\\I.SO.
Patrie ou la Mort Nous Vaincrons
------------
,
CO~SEI1 NhTIONA1 DE 1Â REVOLUTION
PRESIDENCE
LE PRBSIDKNT DU COJ:iSbIL Nk..TIOlL:"L DE Lil. R}<~'{OLUI'ION
vu la Proclamation du 4 ~oût 1983 ;
VU l'Ordonnance n084-043/ChE du 0'2 août 1984 portant cha.ngement
d'appelation et symbole. de la Nation;
VU l'Ordonnance n083-001/CNR/PRES du 4 ~oftt 1983 port&nt création
du Conseil National de la Révolution ;
VU le Décret n085-021/CBR/PRES du 24 k..oût 1983 portant composition
du Conseil Hatiollal dè la Révolution;
VU le Décret n083-021jClffi/PRES du 24 àoftt 1963 portant composition
du Gouvernement
~
VU i-'Ordonnance nO 2·3-021 /CNR/PRES du 14 l~ovembre 1se 3 portant r~oi.'­
ganlsation de l'Administration Territorialo ;
VU la Loi n077/60/AE du 12-Juillet 1960 port:j,nt règlementation 8.':;8
terres du domaine privé de la Haute-Volta,
ense~ble ses modifi-
ca.tifs et acidi. ti:t~s ;
VU le Décret du 29 Septembre Î 928 portant règ::"~;c'8ntation du d.Oi:k.;.:'·~
public,
ensei:l~;l€ ses modificatifa et 8.ddi tifs ;
vtr le Décret du 26 Juill€>t
1932 portant réoTé>,nisation de la
propriété foncière en .àfrique Occ"identale ·:Française;
.
VU le décret du 20 l'J.ai 1955 port<::.nt réo::.'ganis~tion foncière et
domaniale en ~CF et sc~ décret dlap~licntiç.Yl ~u 10 juillet l55S ,
VU la Loi !1°29/63/jd'~ du :2ci Juillet 1963 autori".2.rJ.t le Gouvernem<m:;
à réserver pour l'Etat une part des terres faisant
l'objet
d 'aménage:nents s:p~ciaux ou des terres peu peUIJlées ouéloign288
d~s agglomérations
( - ) R D 0 li H E
-~-=-=-~-=-~-=-=-
P RE 1J.. l'i B TI 1 E
Le BURKINA FA.SO,
ainsi qu,: le SOUli[DG le Discours d'O:cle-r:tation PolitL:;uG,
~~ fait de la domination et de l'ex)loitation impérialistes demeure Ull pays agricoiG
:-:~:déré où le secteur primaire (Agric'Lü türe et Elevage not2.IJl;llent) occupe plus de 5'0;:0
::C\\;
1::-.. .Population sans pour 2.utant 2,SBc~l'er l' auto-suffisaHGe alimentaire du va.illant
'::.:,uple Burkinabè.
.
Cette si tua tion,
somme
toute paradüxr:.le,
se conjuD1e avec Cl 1 é;.utres f<,>,Ï ts
)Cur expliquer l'exode rural,
les migrations massives des
jaunes (i,,: nos cwa-pagnes
.·;'1:8
d'autres pays mais aussi et 311:::,tou t
vers les grands c",n-tres urb2.ins na tior18.ux,
:·!Ciérant ainsi' d,: nombreux problèmes SOC:Lé:W.X Jont les plus press2..ù"cs sont ce~ dl;
. j :_;8 m8n t ~
.,
dt:
Ces deux données économiques
et sociales si tuent saffisc1."E!lent l ' importL:!":~"
12>
terre dans notre pil.)'S surtout d<'puis
Iti;:.vèn(~',:ent du CfŒ et l':Ltistauration dl'
IL. D.P.

1

- 2 -
'..
Pour donner tout son sens et sa portée réG lle "',li principe r~voluti.onnair;"
"le Pouvoir et btout le Pouvoir au Peuple" et gc:.ra.ntir à notre peuple militant les
condi tions matérielles,. poli tiques et 'juridiques requises pour qU'il se réalise plei-
ntiment, le C.N.R. et son gouvernement, en traduisant las aspirations profondes des
classes et couches
fondamentales de la R~D.P., masses ouvrières et paysannes notalll.-
~ent, ont décidé d'~laborer un statut nouveau de la
terre et de pose~ le~ principes
directeurs. d'une
réorganisation du monde rural.
. E n effet les objectifs révolutionnair~de l'auto-siffisance alimentaire
et du logement pour tous, ne peuvent ~tre atteints qu'avec un système foncier et
agraire qui permette u~e occupation et une utilisation rationnelles des terres envi-
sagées comme des sole, c'est-à-dire sous l'angle de ~ pxcd~tivité etd~ la JUstice
soo4:a.le.
---.,
En raison de l'interaction entre structure socio-poli tiques d 'une part et
d'autre part structures fClncieres et agraires', ·le droit fonc.ier et 8.graire du BURKLliI.
F~SO était mar~ué du sceau bourgeois et féodal et donc utilisé contre l~~ ~~ses
laborieuses.
La lutte engagée le 4 Ao~t 1983 par notre Peuplemilitarit est une lutte
anti.impérialiste; c'est-à-dire unel;tte d'Indépendance Nationale, donc une lutte
d'indépendance écon?m.ique véritable.
v':.J:~e
.. C' est dae~'J&ètt.pnoèlQi;s:io1è:i.t::qu'il faUt si tuer et comprendre la présente réfor::l8
Fon~iere-et .\\grilira. 4uî .s.a pr()~~ ~ .;u-Q.!l1.Q.llll'~ir J' ~namie d~ nI:' tro p-o.:re à: pc:trt~r
de ses ressources propres et d'am€liorer
les conditions physiques de toutes les maBGG~
laborieuses.
La Patrie ou la Nort, Nous Vaincrons •
./.l,.R'.crcIi 1. - Il- ~t. ~ -\\1U.. Domai~ Foncier National (DFN) constitué pax.·-toutes les
terres situées dans les liIlli tes du t&rritoiro Jn1,'bit1~:ot celle3 acquises par l'Et.st
et les Collectivités Publiques -Sil~ree à l'Etranger,
.. .t·..·,
.,

- 3 -
TITRE l - DE LA CONSISTANCE DU D.F.N.
ARTICLE 2.- Le Domaine Foncier National comprend :
a)- les terres- précédeminent définies ou classées co<nme domaine
public de l '.Eta t -et des collectivi tés publiques secondaires ;
b)~ les ierres du domaine privé de l'Etat et des collectivités.-
publiques second~ires, affecté ou non affecté, ~oncéd~ ou non con~~d~
-
c)- les terres faisant l'objet de titres de propriété (titres
fonciers) au nom des personnes physiques ou morales de
droit privé;
d)- les terres détenues en vertu des coutUmes ;
e)- les terres appartenant à l'Etat et aux collectivités publi-
ques secondaires, situées à l'Etranger.
ARTICLE ,.- Le Domaine Foncier National est de plein droit propriété
excl~sive de l'Etat.
ARTICLE 4.- Les titres _de proprié~é Cu tres fonciers.) précédemment--déli.vrés--'
à des particuliers (personnes physiques ou morales) sont annulés.
-
Ils peuvent être remplacés par des titres de jouissance.
ARTICLE 5.- Les terres du D!F.N., à l'exception des terres situées à
l'Etranger et de celles qui pourraient être cédées dans le cadre de conven-
tion internationale reLative au tracé des frontières nationales avec les
pays voisins, sont inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.
TITRE II - DE L'AMENAGEMENT DU D.F.N.
ARTICLE 6.- Les Ministres chargés de l'Urbanisme et de l'Administration
Terri-toriale .devront, chacun en ce qui le concerne, procéder préalablement
à tout aménagement des villes et localités, à la détermination de leu~limitcs
administratives et à l'établissement d'un schéma directeur d'aménagement et
d'urbanisme.
.. ~'. ..
ARTICLE 7.- L'initiative des loti~sements des villes et localités appartient
\\
concurremment au Ministre chargé de l'Urbanisme et au Ministre de l'Adminis-
trationTerritoriale.
ARTICLE B.-
La procédure de lotissement comporte les phases suivantes
1°)_ A la demande de l'autorité compétente, le géomètre établit
l'état de lieuX de la zone à lotir accompagné obligatoirement d'un rapport
d'enquête.
.
2°)_ Sur la base de ces travaux, l'Urganiste élabore un avant-projet
de plan de lotissement qui est lEensuite soumis pour examen à une Commission
Techniquè dans laquelle sont représentés les autorités administratives loca~
les et le bureau C.D.R. de la ville ou localité.·
3°)_ Le plan d~finitif de lotissement est adopté par un arrêté con~
\\:
joint des Ministres chargés de l'Urbanisme et de l'Administration Territoriale •
.../ ...

- 4 -
ARTICLE 9. - Les l'Iinistres chargés de l' Agricul ture, de Il Elevage, des Eaux
et Forêts devront, préalablement à tout aménagement de l'espace rural, pro-
céder à la réalisation d'une converturepédologique systématique en vue d'é-
valuer les terres par zO,nes éccloglques.
ARTICLE 10.- L'aménagement du D.F.N. distingue deux catégories de zones:
les zenes arbaines destinées essentiellement à lià.abitation et aux: activités
connexes; les zones rurales dans lesquelles ,s'exercent les activités agrico-
les, forestières et pastorales.
TITRE III - DE LA GESTION DES TERRES DU D.F.N.
Chapitre l - Des principes de gestion des terres du ~.F.N.
ARTICLE 11.- Le Ministère chargé des Domaineset,par délégation, les collec-
ti vi tés publiques secondaires et les représentations diplom2. tiques et ,_consulai-
res burkinabè à l'Etranger, assurent la gestion du D.F.N.
ARTICLE 12.- Le Ministre chargé des Domaines procèdera à la mise en place du
cadastre dans les zones urbaines et rurales.
ARTICLE 13.- Certains biens immeubles du D.F.N. ,en raison de leur nature,. ,
de leur destination ou de leur affectation, bénéficient de.mesuresparliculiè-
res de gestion et de protection. C,e sont :
a)- les cours d'eau et leurs lits, les sources, et leurs dépendances,
les lacs, les étangs et leurs emprises dans leurslimi tés légales;
b)- les chemins de fer, les routes, les lignes et les postes télé-
graphiques ou télénhoniques, les voies de communication de toute nature avec
leurs' emprises et dépendances'
légales;
.
.
.
.
.
c)- les aérodromes, les aéropprts, les aérogares ainsi que lears·
dépendances avec leurs emprises et servitudes, telles que 'définies par les
règlements internationaux et lès textes nationaux ;
d)- les ouvrages exécutés dans un but d'utilité publique pour
l'utilisation des eaux et le transport de l'énergie;,
e)- les ouvrages de défense terrestre et aérienne de la Natioll
r}- les monuments publics, les halles, les marchés et les cimetières
délimités
'
g)-'les gites de minerais et ~e carrière;
h)- généralement, les biens de toute nature ayant vocation'à Vusage
direct du public.
ARTICLE 14.- Les biens immeubles énumérés à l'article 13 grèvent les fonds
,
riverains de servitudes d'utilité publique dont la nature et l'importance sont
déterminées d'après la destination assignée aux terrains-concernés.
,-'
ARTICLE 15.- Aucune indemnité n'est due aux propriétaires de constructi~ns et
d'aménagements divers en raison de ces servitudes sauf si le plein exercice de
ces servitudes nécessitait la destruction de bâtiements ou de plantations ap-'
partenant à des particuliers.
ARTICLE 16.- La Police, la conservation et l'utilisation des biens énumérés à
l' article' 13 sont règlementées par l' autorité ayant danss ee 'attri-bu:tions-le
service des t~rres en question

KITI N0 AN V - ?
2 oz,
jFP!AGRI.l.EL
p'~rta~t' création "d'èICentres Régionauz
FRONT
POPULAIRE
de Promotion Agrd-Pastorale CC.R.P.A.).
-~----~--~~-----
----~-_....'---
',: .,...... -, "l. .: .. : i [
.... _.-.-- _.- ...
1

LE PRESIDENT D'lI FRONT POPULAIRE,
" " ,
, "'CHEFDE'L~ETP~T, '
"
CHEF, DU GOUVERNEMENT,
,V "'-. S. ~-n,
._----_._~~.:.~;...
1
A01'~~-
vu la Proclamation ·du 04 AOUT 1983 ;
(
'
VU la Proclamation du 15 OCTOBRE 1987 ;"
..
VU la Zatu nO AN V-0001/FPdu 15 OCTOBRE 1987, porta0t
création du Front Populaire;
VU le, Ki ti nO AN V-0005/FP du 31 OCTOBRE 1981 " portant
compositton du Gouvernement Révolutionnaire du
Burkina Faso ; '
,
VU Ir Ordonnance' n084~058/CImj~RES',dL,i~~lJ~-'i()tJT"1984,
portant règl ementatlon" gétiêr8.1'è.~:_des·:'·Etablissemen ts
Publics dé l'Etat •,
,
~'
'
,
,
VU le Décret nO 84-304/CNR/PRES/MF/MCSEdU-"15 AOUT 1984,
portant statut général des Etablis,sements Publics à
caractère Industri~let~Commercial; ,
'iU le Kiti n° ANIV-J80Bis/CNR/AGRI du 25--MAI 1987,
:..portant dissolution des Organ:i,srnes Régionaux de
Développement. (O.R.]).);
, ' ,
" ,
VU le Kiti nO AN V-0173/FP/AGRI-EL du 06 AVRIL 1988,
':. ;
',portant organisation du Ministère de l'Agriculture
et. de l'Elevage ;", ':/:<.
' '_:,
SUR proposition du Min.istre de l "Àgri'cul t ure et de
, l'Bl~vage ;
,
LE Consei). des Ministres
séance du
02 "'MARS 1988 ;
- 0 -
":'0-
J;.;.;\\R~T;;;.,I;.;..C.:.;L;;;.,E~..:..1E~'R;.;,. -:;:1 est créé DOUZE (12) Etablissements Public:;; à
(aractère Industriel et Commercial dénommés "Centres
';'
légionaux de Promotion Agro-Pastoralell ,
en abrégé:
C.R.P.A.
A!~TICLE 2. - l,es DOUZE (12) Centres Rég~onaux de PromotiQJl..Agro-
Pastorale et leurs sièges sont ainsi définis :
-C.R.P.A. du CENTRE: Provinces d'Oubritenga,
Ganzourgou .et
Kadiogo Gvec pour siège OUAGADOUGOU ;
-C.R.P.A. du CENTRE-EST : Provinces du Boulgou et du Kouritengu
, avec pour siège KOUPELA ;
-Co R. P.A.
du CENTRE-OUEST : Provinces du Sanglli(~, de la Sissil:i. et
du Bulkiemdé avec pour siège KOUDOUGOU
-C.R.P.J\\. du CENTRE-NORD: Pl'ovinces du J3 ü m, <ln Nlimentenga et <:.tu
Sanmatenga avec pour siège KAYA ;

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1
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._ ~C.R~P.A~du CENTRE-SUD
Provinces du Bazèga, ~u ~Bhourigt
'. Zoundwéogoavec' pour siège MANGA ;
-C.R.P.A. de la COMOE
Province de la Comoé avec pour siège
BANFORA ;~ .
...{;.R.P.A. de 11EST
Provinces: de la Gnagna, de la Tapoa et du
Gourma ave? pour s~~ge FABA N'GOURMA ;
-C.R.P.A. des HAUTS-BASSINS : Provinces d~ Kén~dougou et du
Houët -2.ve-c pour siège BOBO-DIOULASSO ;
-C.R.P.n. du MOUHOUN : Provinces de la Kossi, du Sourou et du
MouhoUD avec pour siège DEDOUGOU ;
.
.
;'::O····_C.R·.P.J\\. du NORD: Provinces du Passoré et du Yatenga avec
'. pour siège OUAHIGOUYA ;
-C.R.P.A4 du SAHEL: Provinces du Sourn, de l'Oudalan et du Séno
!=lvec. pour siège DORI ;
~+ '-C.R.P:A. du SUD-OU~ST : Provinces du Poni et de 12 Bougouriba
.
.avec pour siège DIEBOUGOU.
ARTicLE 3. -:Le's Centrès Régionaux de PromotioYl;. Agro-Pas torale ont
pour objet :
-l'application à l'~chelon régional de la politique de
production agricole· (production végétale et animale) ;
-la conception et 11élaboratidn à l'échelon r~gional des
projets de programmes de développement:agricole ;
-de servir de cadre pour la concertation et l'harmoni-
sation des interventions des différents Organismes
Publics ou Privés en matière de développement agricole
dans les régions concernées.
ARTICLE 4.-Le CentxeRégional de Promotion Agro-Pastorale est
,ldrn inis tré par un Cons ei l
d' Adminis tra tian dont 12 COI"1-
position et le fonçtionnement sont fixés par les statuts
particuliers.
'
ARTICLE 5.~Les sta1uts particuliers des Centres Régionaux de
Promotion Agro-Pastorale sont approuvés par Kiti en
Conseil des Ministres.
, .
: ~ ",
... / ...'

J... / ..,
.....
j' '
- J -
/
,
ARTICLE 6,-Le Ministre de l'Agriculture et de l'Elevage et le
Secrétaire cl 1 Etat à 11 Slovdge sont ch8fg6s (le 11 '::J:'.~''':;'.~­
tion du présent Kiti qui sera publié au Journel Officie
du Faso.
.

LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS
OUAGADOUGOU, le 17
mai/1:9.86~(
\\
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Capitaine Blaise COlV1PAORE.-
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Le Secrétaire d'Etat à l'Elevage
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Amadou'GUIAO.-
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BURKlNA
FASO
'~~1I'
.
'. .~~;-"
--------
".
~ HINISTERE DE ~'AGRICUL1UR[ El
DE L1EL::VAGE
i
-
RAABD N° AN VI - 072
/FP/AGRI!EL/SG
Portant organisation type des Centres
.......
Régionaux de Promotion Agro-pastor81f~
<C.R.P.A.)
LE HINISTERE OC L'AGRICULTURE ET DE L'ELEVAGE
- Vu : la::proclamation du 4 Août 1~a3 ;
Vu
la proclamation du 15 Octobre 1987 ;
Vu
la Zatu N° OD1/FP du 15 Oclobre 1987 c~rtant création du Front Populaire
- Vu
le Kiti- N~ AN VI 0003/FP/PRES du 23 AùGt 1988 ;portant remaniem~nt du
Gouvernement Révolutionnaire du Burkin8 Faso ;
- Vu
le Kiti N° AN V 0084/FP/SGG/CH du 7.1 Janvier 1988 portEnt org2nisalio" lYPé'
des Départeraents Ministériels ;
- Vu
le Kiti N° AN V D173/FP/AGRI/EL du 6 Avril 1988 portant organisation du
Hinistère d
l'AgricuÜure et -de l 'Devage ;
- Vu
le Kiti N° AN V 0292/FP/AGRI!EL du 30 Juin 1988 pcrtant approbation des
Statuts Pariiculiers des Centres Régionaux de Promotion Agro-Pastorale (CRPA)
- Vu
le Kiti N° ANV 0262/FP/AGRI/EL du 6 Juin 1928 portant nom~ination d~s
.~.~-:. Directeurs des C.R.P.A.
'.:_:/.,",~
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'A N N 0 r~ C E
~·-::0~·
. ~1 ~~ :~ ~":f' .' - ,~~., :
'.::;1ITRE l ': DES .ORGANES
Article 1er. L'organisation type des Centres Région2ux de Promotion Agro-ppstofûle
<C.R.P.A.) est régie par les dispositions du présent Raabo el co~prend
les structures suivantes
Les Services du sièae
- Les Services Provinciaux
TITRE II : DES ATTRIBUTIONS DES DRGA~ES~
----------------------------------------
CHAPITRE J. ,OC .LA: D1RECHON
ArUcle 2. Les attributions de 18 Direction sont définies, d.:Jns:Je::t<iij:·t\\°;:~,~.'\\'
D2S i /rr/AGRf/EL du 30 Juin 19l3S portant d[)proDQtion des Staluls purlj-
culiers des Centres Régionaux de PromotiOi\\ Agro-Peslor~le (eRrA).
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<l\\rticle3.
la Direction comprend
,"::~~.
Un Secrétariot de Direction j
Une unité ce Contrôle Interne r.e Geslion (UCIG)
Article /.:..
Le Secrétariat de Direction est c~2rgé de :
La réception et la distribution du courrier nrrivéc et dép,Jrt
- Traitement du courrier j
- Audiences et autres relotions publiques.
~
.
Article 5.
L' Unit8 de Contrôle Interne de Gestion est chargée de :
Contrôle interne de gestion )
l'epplicetion de procédures régulières de gestion des ressources
financières et matérielles.
CHAPITRE II.
DES SER~!CES DU SIEGE.
Article 6 • Les Services du siège sont
- Le Service Administrntif et Financier (SAF) ;
- Le Service Approvisionnement et Crédit (SAC) ;
- Le Service des Etudes et Planification (SEP) s
- le Service de la Formation et de la Vulgarisation (SFV)
- Le Service de l'Aménagemênl de l'Espace Rural (SAER) ;
Par8qraphe 1. l.e Service Adr:linistratif et Financier (SAF).
Article 7 • Le Service Administratif et Financier est chargé de :
- La Qèstion rationnelle des ressources humain~s, financières et
r.'3tériel1es ;
- Suivi de 10 carrière administrative du personn9l.
Le Service Adr.linistrati f et Fin211cier en outrp. le Sec!:'étElr iet co~çHend
- Un bureau financier et compt2blc
- Un bure2u du personnel ;
- Un bureou du Parc AL:tomobil~.
P8rDJr2phe Il. Le S8rvicc App~cvisionn2~2nt et Crédit (SAC).
Article B.
Le Service Approvisionnémer.t et Crédit est chargé de :
- l I~pprovisionnemcnt p.n biens ct scrvic2s ;
-
l2 cOrTV:1crcinlisation dr:s p~ociuit5 L3Qricoles géné:rés PZl[ le" ucLivitÉ':c
ou ClIP!'. ;
- LB gestion <.!es crédits oet~oy~s aux p2)'sons.
Le Service Approvisionncm2nt ~l Crédil cOM~r8nd
- U~ bureau Brprovisionn2~2nt
- Url burC2U crédi t .
;~ ,co
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o.
... f ...

:11
..
f~r:icJ:: 5•. L~ S:::n'icc (Je:::: Etl;é::::: ct Pl.::.~Fi=~:ion c::!: r.;:;-::,~'; c:::. •
- l;-. plznific2tion d;:;: 1r ~r!)~uc;-_ion Véç:~t2lc,ct ,<:'lii-:2.1:)
.. le: Dsntrdis<:!tioi) C;:;C C:o;)r:éC':: I:::.!.2ti ver:: t ':':'J~.':; l;;:~ [1fOj8 i:S ~il
'"r"v(."'fltil..~ln
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l'(~ud~ ~t !2 GiS3:C~ fo~n~ ~~S ~ocum8nt3 6~ p~D~GtB r
!...~ ,::':!ll;~~t~f '10 t:-2ittr.r:;~t ::.t h, c;if'iu~ioïl (Le stctist.i~,u',:s
~nr~cnl~~
lo..O.
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....,
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1 •
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.:.- L iéVL1~dic>r: ~t ~~ suivi C'~S Dc'.:.ivités -::;u CP.Pf'..
•" - "..? "." ·.:·~i"~;· ":"i ~ ... ". '. - i .
lo Saîvicc dos ~tucis~ çt P12nific~~i~n comprend
.
.
d:::s étL'ci~s :;t projd!', ;
- Vil b~re<::u G~~'~tr~l'st~O"~~
_
...'10
.....
(J.\\.,..
_
.~-.J"
E~r~cnl~~
':..
_
...
.-"
- Un. b\\Jî::Œ_: H'ivi et évs1u<:tion
.-" !.}n bL!L~21J r~cC~~2r1tctiorl
. .
.

'
L'org~ni8~ticn, l'Dni~l~tio~ ct l~ forn~ti~~ d~s pro~~ct2l)rS i
.. Lo. form2tisn et le !'cc)'cl.?S)8 (.:;[: <::ç:s~~ts cJ 1 Cï1Cûür::::J:::~t :
- l~ psrticipGtisn t 12 CG~~3~ti~~ st ~ 1;E~pli2~tion dES G~t~~d~~ cr
vvlQerisation an ~2ti~~8 d'2griculturo ct d!é18v2CG ;
l:: r.~is:~ cr: D:]:.JV!"c: d'un pl.~~~:'2::'ï.':~·-. :.J.:- :rc·ch,;rc~,::-:~-L:.~'.":;lc.rJ~:;i':'1~~:
l'erpui ~u~ nc~ivité~ fér~i:li~2~~.
. . ' j
LI;)
:":J.I.~'''''.·.c·::-r._' :-n~r-o'::l"-l' D..../· ·';ll,...~T';S·":-1' r il •
~
'~I.:'I,.\\o"
•.• J.," __ .... c_
."

··lln b0r~au de r~ci~src:1~-d~vc~~pp2m2n~
- li~ burcEP Lv~iG·..~/i;~·L!C:! ~'L c~~:-r::.ticn ;
Uï1 ~~riDu pr2~~tio~ o:s 22tivit~: fé8iGir.~s.
(S,'I.Œ) .
.... . ALti.:l;;
'. '.
·ri.- .....
I I ~..;;'~~I<'\\'"'
c..~:I\\."o'•.
...,-r_
C.::,.;_..
...
I.h_', t....
rl,.,,-.
_ ... ·v
s~t,<; ,<'''..T_· .1."
.....
-é:-C'21';'S
t~~stre=tiG~~ r~~~21cE ~
i··;:.:c:·;inis.r~:8 D:rir:c.lu ;
Lr2~~~Gg~~o~t C;S3 b~z-fcn~s
ll~~én2ç8msn~ ci~3 zonCJ ~~2tor21~~.
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r-livC"é;u.,p.rovi:-,;S.d la ~:2liti(:~v~ C'l; C;-iP}\\ c::-: rt,tiè-r,: ::"Ç\\-:;dccltl.lf:';' (J
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~'J r3décc'~_\\'::-:Ç8 G~S Pro'/iil':=C C~ c:; !lo~'\\'===11:-.s 20:t:~~. c; l'Jnr:r0l''(;ï'':'ïit
L"Y'~;'"(. l'C'~~i...t dru::,: :lC-:;'.; C::.:; s::;:-v:c.~, ciu ~'ir'::cL~:,'r ~l: C.;i.,::-.f\\.
Arti,:, :!.,' '.':. C:~~G\\.~;:: ï:\\irect~u: j~1 eRPA :';5l:. c; 1?I"Ç8 Ge l' 2x r]cuti en 0\\.: p!'~~.;~;nt r\\~<::~c
c.;;.!i
~~r2 ~;-lr8~i~tr.:5) p~oli{] ~:t cO~:l''''::li(::~~ p~rto\\.!t DL' b~::··ci.n 2~,r2 ..
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Ouagadougou, le 14 Mars 1989
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Le SDcr6tnir~ d i Et2t
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- 5 -
CHAPITRE II - LES DIFFEIŒNTS TITRES Dr OCCUPA'rIOH DES TEj=,RES
DU D.F.N •
•• HTICLE 17 .-
Les services administratifs occupent les terres du D.F.N. par voie
~L'~ffectation, titre administratif qui leur confère un droit de jouissance.
Les autres personnes morales publi~ues et privées de droit burkinabè ou
illL:rnational et les personnes physiques bénéficient:
a) - ~oit d'un bail (contrat à dur~e déterminée ou ind6terminéB)
b) - soit d'un permis urbain d'habiter ou 'd'expkQ~~t (conférant ou
!)<~;ïéficiaire la propriété de ses réalisations et aménagements) i
c) .- soit d'autorisations administratives ordinaires ou spéci~les de
c2ractère strictement pBrsortnel et révocable, confèrant à des particuliers ouà des
Gollectivités le droit d'extraire des matériaux, d'établir des prises d'~au, d'exer-
cer des droi t·s de chasse, de pêche ou Cl.e coupe. de bois, ou d'établir un . commerce •
CHAPITRE III ~ LES COllilHTIONS D' ii..'rTRIBUTION z D'OCCUP.,:,TION Err:
.
D'EXPLOITATION DES TERRES DU D.F.N.
"~ItTICLE 18 : Les terrains urbains ou ruraux du D.F.N. sont attribués Èl. ce1.1-x qUi·
-en ont un réel besoin social, sans distinction de sexe ou de st2.tut ma trimonlal·,
~~ns l'ordre des priorités fixé par lesitextei.
Dans certains cas l'ocuupationdes terres du D.F.N. donne lieu a~paier.:ent
,·une redevance.
Tout bénéficiaire d'un titre de jouissance relatif à une terre du D.F.N.
~Gc tenue à son occupation et à son exploitation effective conforrné~ent à sa
des-
tina tion et à ses condi tionsspécifiques.
",-'~TICLE 19. Les terrains urbains du D.-F.H. réservés pp'r les plans d'aménagement
:l l' habi tation sont attribués par des commissions comprenant obligatoirement les
':mreaux C.D.R. compétents selon le principe d'un terrain· par personne ou. par ménage.
~,RTICLE 20. -
L'attribution des terrains ruraux est faite dans les mê~es coridlti~~s,
~vec la participation du bureau C.D.R. des villages.
'c~d'ICLE 21 :. - La gestion de l'espace rural se fera dans l'optiqued,'~.me intégration
·:;.s toutes les activités du monde rural
~ ag-ricul ture, élevage, forêts en tenant
cO!Jpte de la vocation naturelle de la zone dans une stratégie d'auto-suffisance
a.limentaire •
.<.c:2T'ICLE 22.-
Tout projets de développement économi~ue et social de caractère na tionaJ
ou local devra nécessairement comprendre un progra~~e forestier sous la forme de
oCli:~eFl.ent en bos~uets de rideaux-abris,. de plantations 9 d'espaces Verts ou de jar·dins
r<blicà.
.
0~~!CLE 23 ~-
Toute partie du territoire national pourra @tre class~e lorsque la
cjnGe~vation de la flore, de la faune, du sol, du sous-sol, des eaux, de l'atmos-
2i.'e
et en gén~ral d'un milieu naturel présente un intérêt spécial et qu'l.liTIlI)Orte
Je préserver ce milieu contre tout effet de dégradation et de le snustraire ~ tou~e
i~t~rvention artificielle susceptible d'en altérer i'aspect, la composition ou
l'o~aluation conformément aux dispositions du Code Forestier •
.../ ..

·! .
- 6 -
il.RTICLE 24.-
PolL-;~lli~ure intégration des activités du monde rural il sera
réservé dans chaque zone aménagée un espace pastoral dans les conditions prévues
par le.Code rural.
i~RTICLE 25 : Les masses rurales doivent être organlsees dans des structures démo-
cratiques pour l'occupation ct l'exploitation rationnelle de l'espace :tural.
TQute action de modernisation de l 'agriculture, de l'élevage ou de con-
servation des sols doit avoir cette stratégie collectiviste.
ARTICLE 26.-
Dans les zones aménagées par l'Etat ou sous sa responsabilité doivent
être appliqu,ées les formes d'occupation et d'exploitation collectives.
ilRTICLE 27.- L'équipement des groupements paysans en matériels et facteursd~ pro-·
duction sera essentiellement assuré par des vaisses populaires d~'épargnes et de
crédit auto~gérées.
iiRTICLE 28.-
Les· Mini.-stres chargés du Déveldppemertt rural et lë Secrétariat Général
National des C.D.R. veilleront à la mise en place 'decësstructures.
ARTICLE· 29.-:T9utefois cela n'exclut pas les formes d'occupation et d'expl~Itation
indiv1duél~es ou fam1liales.
~~RTICLE 30.- L'éducation" l'information et l'encadrement des masses paysannes doi-
ven:t~tré intégrés à leurs structures C.D.R.
ARTICLE 31.- Les échanges d'expériences et la formation des masses paysannep ae
feront da.ns le cà.dre de relations inter-villageoises, inter-départementales et.
inter-provincia~sous-formede meetings, de conférences-débats, de foires, d'al-
phabétisation de ~à..sses.
"
.
iŒTICLE 32._· La fixation des pr~x d'achat des produits de l'agriculture et de
l'élevage aux productéuxB et de vente aux consommateurs doit associer les organi-
sations démocratiques des agriculteurs et des éleveurs.
ARTICLE 33.- Les Ministres chargés du Commerce et du développement rural en colla-
boration avec le Secrétariat Général National des CDR, organiseront d'es structures·
d.e commercialisation des produits de l'élevage et de l'agriculture enprivillé.giant
les échanges inter-provinciaux en vue d'une organisation et d'une intégration du
marché national.
TITRE IV-LES DIFFERENTS DROITS REELS IMMOBILIERS
ET LEUR GARANT lE
Chapitre 1 - Les différents droits réels immobiliers
;I.RTICLE 34.- .La publicité n'est pas une condition de l'existence· ou de la validité
Je la propriété d'Etat dont la force probante et absolue résulte de la présenté
Ordonnance.
\\.RTICLE 35.-
Le droit de'propriété d'Etat sur les immeubles situés à l'Etranger
et les différents droits de jouissance reconnus aux collectivités publiques secon-
laires et aux partièu1iêrs sont des droits réels immobiliers, qui sont soumis à·
la. publicité foncière dans les conditions fixé80s par deeret •
. ·f ..

- 7 -
.. l'l'leLS 36. -
Les arai ts l'f,Els immobiliers Vl:S à ., 1 ::,J'~~icL-, 35 peuvent faire
l'objet de transaction~ dans les formes et ~onctition~ fix~es par les textes.
Chapitre II - De la garantie des droits r~als immobiliers
~.R'i'ICLE 37 .-Dans le but d.e proIllouvoir le COd,llerce et l' inc'ustrie~ certains
droits réels immobiliers dont la liste sera établie par d~cret~ seront soumis
obligatoirement à ia publicité fonci~re.
i.R~ICLE 38.-
L'Etat organise et garantit dir~oteDent la publicité de ces droits
réels immobiliers et autorise leurs transactions.
La responsabilit~ civile de l'~tat en mati~re de publicité fonciàrc
est couverte par un fonds d'assurance dont la création et le fonctionnement fero~t
l'objet d'un décret.
i..EtTICLE 39.-
La présente Ordonnance abroge toutes disposi tions antérieures oon-
traires notanillent celles de la Loi nO 77/60/~N du 12 Juillet 1960 et de la Loi
n"
29/63/k.11. du 24 J1üllet 1563, ensemble leur's i"0.odifiéatifs o'~ additifs.
l~HTICLE 40.-
Des décrets fixeront en tant que ae besoin les illodalités d'applio~­
tion de la présente Ordonnance qui sera publiée au Journal Officiel et exécutée
comme Loi de l'Etat.
OUAG~JOUGOU7 le 04 ~cnt 1984
Pour copie certifié conforme
Capi tpine Thomas Sj.liK.:'.Jlli /
-
affr:.ires
Finances

TABLE DES MATIERES
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
.
REMERCIEMENTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. VII
PREMIERE PARTIE
1
INTRODUCTION GENERALE
2
1. INTRODUCTION
3
1.1.
Exposé de la problématique
10
1.2.
Définition des concepts et critique de la littérature en
sociologie du développement rural
14
1.3.
Les objectifs visés par l'étude
"
25
1.3.1 Objectifs généraux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
25
1.3.2. Les objectifs spécifiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
25
1.3.3. Objectifs théoriques
27
1.3.4. Objectifs pratiques
29
1.4. Thèses avancées et hypothèses de travail
31
1.5. Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
34
1.5.1. Méthodes d'analyse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
39
1.5.2. Techniques d'investigation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
52
625

CHAPITRE 1: PRESENTATION DU BURKINA FASO
60
1. LE CADRE PHYSIQUE ET HUMAIN
60
1.1. Présentation générale du pays
60
1.2. Le relief
61
1.3. Sols et sous-sol
62
1.4. Le climat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
63
1.5. Hydrographie
65
1.6. Flore et faune
68
2. LES HOMMES
73
2.1. Population, aspect quantitatif statistique
73
2.1.1. Population totale
73
2.1.2. Répartition par nationalité
73
2.2. Analyse de la population active
76
2.3. Evolution quantitative de la population. . . . . . . . . . . . ..
76
2.4. Evolution qualitative
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
76
2.4.1. La santé
76
2.4.2. L'éducation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
77
626

CHAPITRE Il :
SITUATION DE DEVELOPPEMENT DU BURKINA ET
AIDE
INTERNATIONALE:
CARACTERISTIQUES
ESSENTIELLES ET ORIENTATIONS ECONOMIQUES ..
80
3. LA SITUATION ECONOMIQUE .' . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
80
3.1. Balance des paiements et dette extérieure
81
3.2. Structure et croissance de la production
82
3.3. Le secteur agricole . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
82
3.4. Les mines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
112
3.5. L'énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
113
3.6. L'industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
114
4. LES ORIENTATIONS ECONOMIQUES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
115
5. L'AIDE INTERNATIONALE DU BURKINA FASO
116
5.1.
L'aide multilatérale totalisait en 1984, 54,3 millions de
$US. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
118
5.2.
L'aide multilatérale est également acheminée au
Burkina Faso par le biais d'un nombre élevé
d'Organisations Non-Gouvernementales (ONG)
qui
participent
ainsi
au
redressement
de
l'équilibre socio-économique du pays. . . . . . . . . . . ..
118
627

6.
CARACTERISTIQUES
DE
L'AIDE
AU
DEVELOPPEMENT
AU
BURKINA FASO. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
120
6.1. Relation entre aide bilatérale et multilatérale
,
120
6.2. Secteurs d'activités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
120
6.3. Contrepartie burkinabè
,
126
6.4. Subventions/prêts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
126
6.5.
Fonctionnement,
investissement,
assistance
technique
"
126
6.6. Intervention des ONG
127
CHAPITRE III :
PRESENTATION DE LA REGION DU CENTRE-NORD DU
BURKINA FASO : UNE REGION AUX LIMITES DE SES
POSSIBILITES
128
7. LE MILIEU ET LES HOMMES
. . . . . . . . . . . . ..
130
7.1. Le milieu et le climat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
130
7.2. Les hommes
. . . . . . . . . ..
132
7.2.1. Structures démographiques et mouvements de
la population
133
7.2.2. Caractéristiques
démographiques
et
mouvements de la population
136
628

7.3.
Mouvements migratoires
136
7.4.
Approche historique et anthropologique des Mossi de la
région du Centre-Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
140
7.4.1. Organisation socio-politique des Mossi
140
7.4.2. Appartenance socio-ethnique des populations
mossi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
143
7.5. Système de parenté chez les Mossi
152
7.G. Les formes de mariage chez les Mossi . . . . . . . . . . . ..
156
CHAPITRE IV :
LES
INTERVENTIONS DE
DEVELOPPEMENT DANS
LA
REGION
DU
CENTRE-NORD
CARACTERISTIQUES
ESSENTIELLES
160
8.
AGRICULTURE ET ELEVAGE: BASE DE DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE DE LA REGION DU CENTRE-NORD
214
8.1. Les autres activités économiques . . . . . . . . . . . . . . . ..
233
8.2. Les activités socio-sanitaires
241
8.2.1. Inventaire des infrastructures socio-sanitaires
dans le Centre-Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
241
8.2.2. Les activités socio-sanitaires dans le Barn. . ..
244
629

8.2.3. Les
activités
socio-sanitaires
dans
le
Namentenga . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
247
8.2.4. Les
activités
socio-sanitaires
dans
le
Sanmatenga .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
247
CHAPITRE V:
APPROCHE HISTORIQUE DES
EXPERIENCES
DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI DU
CENTRE-NORD: BILAN ET ENSEIGNEMENTS. . . . . ..
259
9. HISTOIRE ECONOMIQUE DE LA REGION DU CENTRE-NORD ..
259
9.1.
L'aide au développement après l'indépendance de
1960 : quel développement? . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
262
9.2.
Les interventions de développement en milieu rural
mossi du Centre-Nord : domaines prioritaires et
actions de développement réalisées
267
9.3.
1986-1990: Esquisse d'une politique de planification
du développement rural au Burkina Faso.
286
630

CHAPITRE VI :
OB...IET ET OBJECTIFS DES INTERVENTIONS DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI
296
10.
LES
INTERVENTIONS
DE
DEVELOPPEMENT
RURAL
:
QUELLES FINALITES?
'
296
10.1. L'Etat,
la
négation du développement en milieu
rural mossi?
301
10.2. Une nouvelle forme d'intervention de développement
en milieu rural: les cultures irriguées
,
303
10.3. Caractéristiques des interventions de développement
dans le Centre-Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
306
10.3.1.
Structures politiques et administratives
d'encadrement et
interventions
de
développement en milieu rural mossi :
l'impasse? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
306
10.3.2.
Réactions
paysannes
face
à
l'aménagement: prudence au refus?
308
10.3.3.
Commercialisation
des
produits
agricoles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
310
10.3.4.
Commercialisation
du
riz,
des
productions maraîchères et fruitières . "
320
10.4. Les méthodes d'approche du milieu paysan mossi par
les encadreurs du CRPA
331
10.5. Le
contenu
de
la
formation
assurée
par
les
agents d'encadrement aux populations rurales . . . ..
335
631

DEUXIEME PARTIE
349
CHAPITRE VII :
IMPACT SOCIO-ECONOMIQUE ET SANITAIRE DES
INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT EN MILIEU
RU RAL MOSSI
350
11.
EVALUATION DES INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT EN
MILIEU RURAL MOSSI: LES PROBLEMES DE METHODE. ..
350
11.1. Problèmes de méthodes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
350
11.2. Evaluation
de
l'impact
des
interventions
de
développement en milieu rural mossi
355
11.3. Femmes et développement rural
359
11.4. Analyse
de
l'impact
des
interventions
de
développement sur chacune des trois provinces. . ..
371
11.5. Les contraintes majeures. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
377
CHAPITRE VIII:
EVOLUTION
DU
SYSTEME
SOCIO-ECONOMIQUE
ET
SANITAIRE
EN
MILIEU
RURAL
MOSSI
ET
CONSEQUENCES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
381
12.
LE SYSTEME SOCIO-ECONOMIQUE MOSSI DE LA PERIODE
PRE-COLONIALE A NOS JOURS
386
12.1. Les migrations et leurs conséquences
socio-économiques
.
386
632

12.2. L'introduction de l'irrigation dans le système de
production: un accélérateur des dynamiques sociales
en cours chez les Mossi
397
12.3. Environnement
physique
et
interventions
de
développement dans le Centre-Nord
409
12.4.
L'artisanat.................................
426
CHAPITRE IX :
SITUATION
ACTUELLE
DU
PROCESSUS
DE
DEVELOPPEMENT
SOCIO-ECONOMIQUE
ET
SANITAIRE DU CENTRE-NORD ET TENDANCES
441
13.
SITUATION DU PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT SOCIO-
ECONOMIQUE ET SANITAIRE
441
13.1. Vers
une
maîtrise
des
interventions
de
développement en milieu rural mossi? . . . . . . . . . ..
455
13.2. L'appropriation des interventions de développement
rural parJes paysans mossi : un fait de culture? ...
496
13.3. Le milieu rural mossi : un environnement socio-
humain en pleine mutation. .
.
514
633

CHAPITRE X:
PERSPECTIVES
DES
INTERVENTIONS
DE
DEVELOPPEMENT EN MILIEU RURAL MOSSI
526
14.
PERSPECTIVES DES INTERVENTIONS DE DEVELOPPEMENT
RURAL
526
14.1.
La question du désengagement de l'Etat dans
les interventions de développement rural. . . ..
536
14.2.
Vers une réorientation des interventions de
développement en milieu rural mossi.
542
14.3.
Propositions pour une meilleure efficacité des
interventions_de développement en milieu rural
mossi
546
CONCLUSION
550
BIBLIOGRAPHIE
554
LISTE DES TABLEAUX STATISTIQUES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
584
LISTE DES CARTES
591
ANNEXES
594
ORDONNANCE N°84-0S0/CNR/PRES Portant Réorganisation Agraire et
Foncière au Burkina Faso . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
611
KITI N° AN V - 223/FP/AGRI-EL Portant création de Centres Régionaux de
Promotion Agro-Pastorale (C.R.P.A.).
618
RAABO N° AN VI-072/FP/AGRI/ELlSG Portant organisation type des
Centres Régionaux de Promotion Agro-Pastorale (C.R.P.A.). . . . ..
621
634

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PERMIS D'IMPRIMER
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~Jr8:3eJlté2 par: OUCDR,0.,DGO Jf~an-83.pti:3t8
THEME
: Interventions da développement st transformation
Socio-Eccnomique 8t Sanitaire au Burkina Faso
Region du Centrs-Na-rd
(Provinces du BAM,
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