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UNIVERSITE
Paris - Sorbonne
Paris IV
(Antiquité tardive)
LE BONHEUR
DANS LE "DE BEATA VITA",
LA CORRESPONDANCE ET LES SERMONS
de
Saint Augustin
Thèse préparée pour:
LE DOCTORAT ES LETTRES
(arrêté du 5 juillet 1984)
Par:
Sous la direction du
Pierre SARR
Pro André MANDOUZE
Session de Décembre 1988
Tome l

"Omne enim impossibile
difficile est : sed non
omne difficile
impossibile est"
Augustin, ~. 85,2.
A
r A ~ 1 L LE. • •

\\
"Nihil est homini amicum
sine homine amico"
Augustin, Epist. 130,4.
AVANT-PROPOS
Reconstituer l'histoire de ce travail n'aurait d'autre utilit~ que de
nommer tous ceux qui m'ont aid~ à le r~alisép.Qu'il me suffise d'~vo­
quer les noms qui en symbolisent à mes yeux les ~tapes les plus mar-
quantes.
Ma profonde gratitude s'adresse à M. François-R~gis CHAUMARTIN et à
Melle Monique VINCENT qui, les premiers, m'ont int~ress~ à l'~tude ée
saint Augustin.
De même, je dis toute ma reconnaissance à M. André MANDOUZE qui, en
d~pit de ses lourdes responsabilit~s, a bien voulu guider ce travail
et a su se montrer présent chaque fois qu'il ~tait n~cessaire, sans
jamais se d~sintéresser de ma recherche.
Je tiens ~galement à remercier M. FREDOUILLE dont j'ai suivi les
séminaires avec un grand int~rêt, les responsables et tout le person-
nel de la Bibliothèque du Saulchoir qui m'ont offert des conditions
de travail exceptionnelles.
Parmi ceux qui m'ont apporté le r~confort de l'amitié, je tiens à
mentionner
Melle Daniela TAORMINA
M. Rémy DANG et son ~pouse
- et le groupe des étudiants sénégalais d'Athis-Mons.

SIGLES ET ABREVIATIONS
= Bibliothèque Augustinienne.
C.C.
= Corpus Christianorum, series latina.
Cf.
= Dans les notes, la référence au texte latin est directe
quand elle correspond exactement au texte français. Elle
est précédée de Cf. lorsque le texte français se borne à
résumer le texte latin. Nous mettons aussi Cf. lorsque
nous~nvoyons à un auteur qui n'est pas directement cité.
C.S.E.L.
= Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum.
D.A.G.R.
= Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines.
éd. bénéd. = édition bénédictine.
Epist.
= Epistula.
= Miscellanea Agostiniana - Testi e Studio Roma,1930-1931.
REAug.
= Revue des Etudes Augustiniennes.
RECAug.
= Recherches Augustiniennes.
R.E.L.
= Revue des Etudes Latines.
Serm.
= Sermon.
[ ]
= Indication de la date de la lettre ou du sermon cité.
( )
= Renvoi en note.

-
1 -
l N T R 0 0 U C T ION

- 2 -
~on ~tude porte sur le thème du bonheur dans une partie de l'oeuvre
de saint Augustin. Deux raisons à ce choix :
d'une part, dans la vie d'Augustin, l'importance de la quête du
bonheur
d'autre part, dans l'oeuvre d'Augustin, la possibilité d'~valuer
la permanence et, ~ventuellement, les variations de ce même thème.
LA QUETE DU BONHEUR DANS LA VIE D'AUGUSTIN
Dès sa jeunesse, Augustin a ~t~ fortement pénétré de ce désir de bon-
heur. Depuis de longues ann~es,oninsiste sur la n~cessité que la doctrine
d'Augustin soit étudiée à la lumière de sa vie, t'oeuvre étant insé-
parable de l'homme, chez lui plus que chez tout autre (1). Pour éclai-
rer l'étude de mon thème, il m'a donc paru nécessaire de donner un
aperçu de ce que fut pratiquement la quête du bonheur chez Augustin.
Sa recherche du bonheur fut rendue décisive par la lecture qu'il fit
de l'Hortensius de Cicéron à l'âge de dix-neuf ens (2). L'auteur y
exhorte à l'étude de la philosophie (3), en partant d'un fait reconnu
par tous, celui de l'universalit~ du désir de bonheur, comme Augustin
le rapporte lui-même dans le De Trinitate : "Cicéron, voulant dans
l'Hortensius, commencer son argumentation par une r~alité certaine à
propos de laquelle tout le monde fût d'accord dit
Nous voulons, en
tout cas, tous être heureux" (4). Dans l'Hortensius, Cicéron examine
successivement les différents biens auxquels les hommes aspirent :
la gloire, les richesses, les plaisirs. Puis, l'un après l'autre, il
les rejette comme ne pouvant pas procurer le bonheur à l'homme: la

-
3 -
gloire est limit~e ; l'abondance des richesses n'est pas indispensa-
ble ; les plaisirs altèrent la santé, d~forment les organes, causent
des pertes infamantes et engendrent la honte (5). Seule, la recherche
assidue de la sagesse et de la v~rité peut donner le bonheur à l'hom-
me (6). Ainsi Cicéron, en mettant la sagesse et la v~rit~ au-dessus
des richesses, des volupt~s et de tous les biens temporels, pr~sentait
la vie de l'esprit comme la seule digne de l'homme.
La lecture de l'Hortensius eut par conséquent pour effet immédiat de
détourner Augustin d'un idéal dont l'objet aurait ~té la possession
des biens temporels : "Vile devint pour moi soudain toute vaine espé-
rance; c'est l'immortalité de la sagesse que je convoitais dans un
bouillonnement de coeur incroyable" (7).
Pourtant, si Cicéron avait ~veillé chez Augustin le désir de la recher-
che du bonheur, il ne réussit pas à rassasier l'appétit qu'il avait
suscité. Augustin
se détacha rapidement de l'enseignement de l'Horten-
si us pour deux raisons essentielles :
~'abord, parce qu'il n'y trouvait pas la garantie de parvenir à la
sagesse et à la vérité qui contribueraient à lui procurer le bonheur;
ensuite, parce que, dans l'Hortensius, il ne trouvait pas le nom du
Christ
"Et une seule chose venait briser l'élan d'une telle flamme:
le nom du Christ n'était pas là" (B).
En se détachant de l'Hortensius, Augustin se tourna vers les Saintes
Ecritures: "Cela me fit décider d'appliquer mon esprit aux Saintes
Ecritures et de voir ce qu'elles étaient" (9). Mais ce premier contact
avec la Bible fut un échec pour Augustin. Car si, d'un côté, il espérait

-
4 -
parvenir au bonheur par l'intermédiaire du Christ, d'un autre c5té,
l'influence cicéronienne était encore trop présente dans son esprit
pour qu'il pOt s'en passer. Il lui ~anqua l'humilité nécessaire pour
saisir l'enseignement que renfermaient les Ecritures. Et, tout co~me
il s'était détaché de l'Hortensius, Augustin se détourna de la Bible,
espérant trouver sur sa route une doctrine qui pourrait l'édifier et
assouvir son aspiration au bonheur. Ce fut le manichéisme qui se pré-
senta à lui.
Cette doctrine semblait contenir les deux éléments essentiels par
lesquels Augustin pensait pouvoir trouver le bonheur : non seulement
le nom du Christ apparaissait au sein du système manichéen, mais en-
core les manichéens promettaient de lui dévoiler, par la seule force
de la raison, la vérité qui lui permettrait d'aboutir au bonheur.
Pourtant, au bout de neuf années, Augustin se sépara du manichéisme.
Il se rendit compte que ses "amis" étaient "plus habiles et abondants
à réfuter autrui que fermes et assurés à prouver leurs propres dires"
(10) •
Après sa rupture avec le manichéisme, Augustin conna!t une période de
découragement dans sa qu~te du bonheur. Ne sachant plus où se tourner,
il finit par se rallier un temps au scepticisme académique. Dans la
doctrine de cette école, il retrouve, en effet, la thèse cicéronienne
selon laquelle la simple recherche de la sagesse et de la vérité suffit
à procurer le bonheur. Toutefois, il ne se compla!t pas dans cette po-
sition. Son besoin de trouver, indissociable de la nature m~me du bon-
heur, lui rend cet agnosticisme encore plus pénible puisqu'il entend
aboutir dans sa recherche du bonheur.

- 5 -
Les plaintes découragées qU'il formule lorsqu'il croise sur une route
de ~ilan un mendiant ivre en sont une
preuve (11). En effet, cette
rencontre lui fit comprendre que le bonheur pouvait, le cas échéant,
être à portée de main : tandis que lui et ses amis, malgré leurs
efforts qui ne leur procurent que des douleurs, sont loin du bonheur,
ce mendiant1qui s'est contenté de quelques pièces de monnaie, y est
apparemment parvenu. A la joie et à la sécurité du mendiant, Augustin
oppose son anxiété et son inquiétude, signes-de son désarroi: "Ille
laetabatur, ego anxius eram ; securus ille, ego trepidus". Le soepti-
cisme d'Augustin est par conséquent loin d'être une abdication totale.
Ce qui lui manque, c'est quelqu'un qui, comme un "oracle divin", lui
montrerait la voie du bonheur: "Qui aurait pu m'enseigner m'aurait
trouvé parfaitement souple et docile" (12).
La rencontre avec l'~vêque de Milan Ambroise d'une part, et avec le
néo-platonisme d'autre part, met Augustin sur la voie d'accès au bon-
heur. En effet, avec Ambroise et le néo-platonisme, Augustin découvre
l'existence d'une divinité essentiellement spirituelle. Mais ce sera
seulement après la lecture des Epitres de saint Paul qu'il pourra
approfondir la notion de ce Dieu spirituel et qu'il découvrira le vé-
ritable bonheur.
Cette ardente quête du bonheu~ qui a été celle d'Augustin) explique
l'importance que ce thème occupe dans l'ensemble de sa production. En
effet, il n'est aucune de ses oeuvres, écrites ou orales, depuis celles
de sa jeunesse jusqu'à celles de sa vieillesse où le thème du bonheur
n'est abordé d'une façon ou d'une autre. Et c'est là la seconde raison
de mon choix.

- 6 -
DELIMITATION DU SUJET DANS L'OEUVRE D'AUGUSTIN
Il n'était pas possiblB, dans lBs limitBs dB CBttB étudB, d'aborder
l'BnsBmble de l'oBuvrB d'Augustin. D'où un choix qui devait pBrmBttrB
dB confrontBr aux indicBs caractéristiquBs dBs débuts d'unB quetB
l'ayant conduit à la "conversion" aVBC les aXBS dB la vie d'un pastBur
désormais familiarisé avec les chemins du bonhBur proposé par lB
ChristianismB.
J'ai donc choisi de traitBr mon sujet à travBrs lB OB bBata vita, la
CorrBspondancB et les Sermons. CBrtBs, la CorrBspondance Bt lBS Sermons
nB constituBnt pas des ouvragBs tout Bntiers centrés autour du thème du
bonheur comme l'est le OB beata vita. Ils présBntent cependant l'avan-
tage d'~trB, commB lB dialoguB de Cassiciacum, un moyen d'enseignBmBnt.
Celui-ci peut ~vBntuellement ne pas se présenter de la même manière
pour dBux raisons :
la premièrB Bst que les trois éléments de ma documBntation sont
dBstinés à dBS publics différents. LB De bBata vita met en scènB dBS
familiBrs d'Augustin qui partagBnt la meme viB que lui à Cassiciacum :
sa mère MoniquB, son frèrB Navigius, SBS deux élèvBs Licentius Bt
Trygetius, ses deux cousins Ru~eus Bt Lartidianus, son fils Adeodatus
(13). Dans la CorrBspondancB, les destinatairBs sont variés: SBS IBt-
trBs sont en effet adressées à des pBrsonnes issues de miliBux divers,
adeptes dB religions et de philosophies différentes. L'enseignemBnt
qu'il sera amené à donner sera en partie fonction des préoccupations
de chacun de ses correspondants et de ses propres convictions. Quant

- 7 -
aux Sermons, ils s'adressent particulièrement aux Chrétiens d'Afrique
et, pour cette raison, le message que transmettra Augustin sera déter-
miné par sa fonction de pasteur.
La seconde raison est l'écart de temps qui sépare les principaux
éléments de mon corpus. La discussion rapportée dans le De beata vita
eut lieu le 13 novembre 386, jour anniversaire de la naissance d'Au-
gustin (14) et elle prit fin deux jours après, le 15 novembre 386. Une
partie de la Correspondance est contemporaine du De beata vita. En
effet, les vingt premières lettres ont été
écrites entre 386 et 391,
avant qu'Augustin ne fût ordonné prêtre. Le reste de la Correspondance
a été écrit au temps de la vie ecclésiastique d'Augustin, c'est-à-dire
entre 391 et 430, date de sa mort. Les Sermons, dans leur ensemble,
s'échelonnent tout au long de la vie du pasteur. Les préoccupations
d'Augustin, prêtre puis évêque, ne sont plus les mêmes que celles du
nouveau converti et du laic.
QUESTIONS POSEES ET PLAN DE L'OUVRAGE
Compte tenu de cette disparité due à la diversité des interlocuteurs,
à l'écart du temps et aux changements intervenus dans la vie d'Augus-
tin, est-il possible ou non de déceler une unité dans la pensée de
notre auteur? Vu l'importance de la notion de bonheur dans sa vie et
dans son oeuvre, c'est là une question qui m'a paru mériter attention
et qui est très précisément l'objet de la présente étude. Pour y appor-
ter la réponse la plus adéquate possible, il m'a semblé qu'il fallait
partir du De beata vita, dégager les thèmes développés dans ce dialogue
et voir :

- 8 -
- ài Augustin les a traités de façon analogue dans la Correspon-
ce et las Sermons
- s'il a été amené à apportèr des variations à l'analyse de ces
thèmes
quelles
ont été la nature et la signification de ces variations.
Les thèmes développés dans le De beata vita me sont apparus à travers
les formules suivantes :
1 - "8eatos nos esse volumus" (De beata vita II (10), B.A. 4,
page 70, 1. 1).
2 - "Sed dicendum ••• tibi est ut beatus sit guisgu8, quid velle
debeat et guarum rerum oporteat habere desiderium" (De beata
vita II (10), B.A. 4, page 72, 1. 24-26).
:5
"Quid ergo sibi homo comparare debet ut beatus sit ?" (De
beata vita II (11), B.A. 4, page 74, 1. 4-5).
4 - "Deum ••• qui habet beatus est" (De beata vita II (11), B.A. 4,
page 76, 1. 39-40).
5 - "At nemo sapiens nisi beatus" (De beata vita II (14), B.A. 4,
page BD, 1. 8).
6 - "Si ad philosophiae portum de guo jam in beatae vitae regio-
nem solumgue proceditur ••• ratione institutus cursus et vo-
luntas ipsa perduceret, neseio utrum temere dixerim multo
minoris numeri homines ad eum perventuros fuisse" (De beata
vita 1 (1), B.A. 4, page 4B, 1. 1-5).
7
"Nam de beata vita quaesivimus inter nos nihilgue aliud video
guod magis Dei donum vocandum 9it" (De beata vita 1 (5), B.A. 4,
page 60, 1. 20-22).
Ces formules m'ont fourni le plan de mon étude que j'ai divisée en six
chapitres :

-
9 -
~a première formule est à la base de mon premier chapitre
le désir
de bonheur.
• La deuxième et la troisième formule, où la question posée est de sa-
voir quel est le bien qui peut rendre l'homme heureux,me permettent
d'étudier le rapport entre le bonheur et le souverain bien. J'exami-
nerai dans un premier temps le rapport entre le souverain bien et
les biens terrestres (chapitre 2), et dans un second temps le rapport
entre le souverain bien et Dieu (chapitre 3).
• Le bonheur étant présenté dans la quatrième formule comme la posses-
sion de Dieu, je consacrerai le chapitre quatrième à l'étude du
bonheur en Dieu.
• La cinquième formule/qui fait ressortir la relation entre la sagesse
et le bonheu~ me fournira le thème de mon cinquième chapitre
les
conditions d'accès au bonheur.
• L'examen des voies d'accès au bonheur, thème que j'ai tiré des deux
dernières formules, sera l'objet de mon dernier chapitre.
Les trois premiers chapitres seront une réponse à la première question
ils permettront de faire ressortir l'unité de la pensée d'Augustin à
travers le De beata vita, la Correspondance et les Sermons. Les trois
autres chapitres feront appara!tre les différences qui existent entre
ces trois "oeuvres".

-
1D -
REfERENCES A UN CORPUS DE BASE
Mon ~tude n~cessitait un choix de textes dans la Correspondance et les
Sermons. Car, ainsi qu'il a ~té dit plus haut, si le De beata vita est,
comme son titre l'indique, entièrement consacré au thème du bonheur,
il n'en est pas de même de la Correspondance et des Sermons dont la
diversité thématique est la principale caractéristique.
Le dossier ~pistolaire d'Augustin comprend un ensemble de 308 lettres
(15). J'espérais que la classification que Ecalle et Péronne ont faite
des lettres, dans leur préface au tome 4 de l'édition bénédictine -
pages 238 à 243 -, aurait facilit~ l'élaboration de mon corpus. Ils
ont, en effet, réparti les lettres en "Lettres théologiques, polémiques,
exégétiques, ecclésiales, morales, philosophiques et historiques".
Malheureusement, ils n'ont accord~ qu'une infime place au thème du
bonheur. En effet, dans l'ensemble de la Correspondance, ils ont relevé
seulement deux lettres se rapportant au thème du bonheur - les lettres
118 et 155 - qu'ils ont rangées dans la rubrique "théologie", sous le
titre: de la félicité de l'homme. Il m'a fallu par conséquent aller
au-delà de leur classification. Une lecture attentive de la Correspon-
dance m'a permis de rassembler les lettres qui me semblaient particu-
lièrement importantes pour ce qui est du problème du bonheur.
J'ai ainsi relevé les lettres 2, 3,4,10, 11, 15, 18, 26, 55, 56, 69,
101,102,103,104,118,127,130,140,155,203,220,231, 233, 234,
235 et 244.
Les Sermons, eux, forment un ensemble de 544 textes (16). Leur objet

- 11 -
principal m'a conduit à faire surtout référence aux Sermons 4, 11, 19,
29, 32, 53, 80, 84, 97, 127, 141, 150, 156, 158, 231, 236, 241, 254,
297, 301, 302, 306, 311, 346, 348, sermon Mai 12 et sermon Guelferb 12.
Cette liste de lettres et de
sermons ne prétend cependant nullement
être exhaustive. J'ai cité ceux qui m'ont paru les plus importants.
Pour la datation des lettres, j'ai utilisé comme ouvrages de base ~
Prosopographie de l'Afrique chrétienne (303-533), l, La prosopographie
chrétienne du Bas-Empire, Paris, 1982, d'André Mandouze ; l'ouvrage
d'Othmar PERLER, Les voyages de Saint Augustin, Paris, 1969 ; celui de
J. MARTINOALE, The prosopography of the Later Roman Empire,II,Cambridge,
1971, et l'index d'Al. Goldbacher qui figure au tome 58 du C.S.E.L.
J'utilise, pour le De beata vita, le texte latin et la traduction fran-
çaise établis par J. OOIGNON, Oeuvres de Saint Augustin, dialogues
philosophiques, De beata vita, B.A. 4/1, Paris, 1986.
Le texte latin des lettres est celui de Goldbacher aux tomes 34, 44 et
57 du C.S.E.L. La traduction dont je me suis inspiré est celle de Péronne
et Ecalle, Lettres de Saint Augustin, édition bénédictine, tomes 4, 5
et 6, Paris, 1873. Les renseignements que je donne sur les Correspondants
d'Augustin sont tirés de la prosopographie de l'Afrique chrétienne et de
l'ouvrage de J. Martindale précédemment cité. Je me suis reporté aussi
à d'autres o8uvr~s que je mentionne dans le tableau récapitulatif des
lettres et des Sermons (17).
Pour la datation des sermons, je me suis reporté à différents auteurs

- 12 -
que je cite en référence dans le tableau récapitulatif de mon.corpus.
Le texte latin est celui de l'édition bénédictine, tomes 15, 16, 17,
18 et 19, et de l'édition ~orin parue dans Miscellanea Agostiniana,
t. 1, Romae, 193D.
La traduction française à laquelle j'apporte occasionnellement quel-
ques modifications est celle de Péronne et Ecalle.

-
13 -
TABLEAUX SE RAPPORTANT AUX DETAILS HISTORIQUES,
CHRONOLOGIQUES ET PROSOPOGRAPHIQUES
DU CORPUS CONSIDERE
Afin d'alléger la présentation du corpus des 27 lettres et des 27
sermons retenus comme base essentielle de documentation, j'ai ras-
semblé dans un tableau succinct - qu'on trouvera ci-dessous - les
éléments permettant le cas échéant de situer :
- Pour les lettres
• les destinataires des lettres ;
• la fourchette chronologique la plus large dans laquelle
elles s'inscrivent;
• le sujet abordé ;
• les références prosopographiques éclairant les documents
avec la date proposée par chacun des auteurs cités.
- Pour les sermons
• l'intitulé de chaque sermon d'après le début et la fin
du texte latin ;
• le sujet du sermon considéré
• le lieu (quand il est connu)
• la fourchette chronologique la plus large dans laquelle
ils s'inscrivent (quand elle est connue) ;
• les références prosopographiques éclairant les documents
avec la date proposée par chacun des auteurs cités.

LETTRES
Lettre 2
Lettre 3
~e~tre 4
AUTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Zenobius
Nebridius
Nebridius 1
Ami d'Augustin, il
Ami d'Augustin; originaire d'Afrique,
(Cf. Lettre 3)
est le dédicataire
il rejoint Augustin lors de son séjour
du De Ordine.
à Milan pour partager avec lui une vie
et une recherche de la vérité, de la
sagesse et du bonheur. Il ne participe
pas aux "dialoguesIl de Cassiciacum,
mais il est tenu au courant des débats
....
~
par les lettras qu'Augustin lui envoie.
,
Resté à Carthage lors du séjour d'Au_
gustin à Thagaste, il continue à cor-
respondre avec lui. Il meurt Jeune,
probablement avant la pr3trise d'Au-
gustin (391)
FOURCHETTE
386/387.
Lettre écrite lors de la retraite à
Poetérieure aux So-
CHRONOLOGIQUE
Cassiciacum : 386/387. Elle est posté-
liloqyes et à la---
rieure aux SOliloques.
lettre 3 : 386/387.
SUJET
Augustin exprime à
Nebridius, dans une de ses lettres,
Augustin parle à
Zenobius son désir
considérait Augustin comme un homme
Nebridius de ses pro-
de reprendre avec
"presque heureux". Augustin lui parle
grès de solitaire
lui une discussion
du bonheur et de ses conditions.
dans la contemplation.
philosophique inter-
rompue. Illui adree-
se quelques mots
d'amitié.
REFERENCES
A. MANDOUZE,Op. Cit., A. MANOOUZE, Op. Cit., p. 775 & posté-
A. MANOOUZE, Op. Cit.,
PROSOPOGRAPHIQUES
p. 1237 : entre le 13 rieure aux Soliloques.
p. 775.
NOV. 386 et le 15 ~ Al. GOLOBACHER, Op. Cit., p. 12 1
Al. GOLOBACHER, ~
387.
postérieure aux Soliloques.
~, p. 12.
Marie de GONZAGUE, Un correspondant
Marie de GONZAGUE, ~
Al. GOLOBACHER,
- , - - - - -
de....5aint Augustin. 1 ~ebrid.ius.•_dan~_~,-g~~~9~~
...... __ .. ,
C.S.E.L., t. 58, p.
Augustinus Magister, l, Paris, 1954,
12 1 Automne 386/AVr.U p. 11 : postérieure aux SOliloquee.
387.

LETTRES
Lettre 10
Lettre 11
Lettre 15
AUTEUR
Augustin
Augustin
AlJgustin
DESTINATAIRE
Nebridius (cf. Lettre 3)
Nebridius (cf. Lattre
Romanianus 1
3).
Ami et bienfaiteur d'Augustin;
originaire de Thagasts ; des lI em bar-
ras d'affaires ll l'ayant amené à s~­
journer à Milan, il s'associe au
projet de vie commune proposé par
Augustin, devenu professeur à Milan.
Oblig~ de rentrer en Afrique, il ne
paut pas participer à la vie commu-
nautairs de Cassiciacum. Augustin
lui d~dia le Co~tra Academicos.
FOURCHETTE
Lettre ~crite lors du s~jour à
Lettre ~crite lors du sé- ~ ~crite avant la prêtrise 1
CHRONOLOGIQUE
Thagaste 1 388/390.
jour à ThagasteI388/390.
388/391.
....
(Il
SUJET
Rest~ à Carthage pendant qu'Au-
Augustin r~pond aux ques- Augustin lui annonce l'envoi d'un
gustin s~journe à Thagaste, Ne-
tions de Nebridius sur
nouvel ouvrage Ile De vera religione.
bridius regrette de ne pouvoir
l'Incarnation at laiese
Il se f~licite en même temps que Ro-
partager la m8me vie que lu~.
de cet~ ses questions
manianus ait pu retrouver une situa-
AUgustin r~pond aux plaintes
portant sur la physique.
tion de fortune plus favorable et
de son ami. Il lui parle de la
l'exhorte à ~lever son ame au-dessus
mort et de la n~cessit~ de vivra
des biens temporels.
à l'~cart du monde afin de pou-
voir s'adonner à la contemplatio~
REFERENCES
A•.l'IANOOUZE. Op. Cit., p. 775 :
A. l'IANDOUZE, Op. Cit.,
A. l'IANDOUZE, Op. Cit., pp. 994-997 1
PROSOPOGRA-
38D/390
p. 775 1 388/390
388/391.
PHIOUES
Al. GOLDBACHER. Op. Cit., p. 12:
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 12 1
388/390
p. 12 1
388/390,
IIAnteguam Augustinus presbyter factus
O. PERLER, Op. Cit., p. 432 1
O. PERLER, Op. Cit., p.
est ll 1 388/390.
388/390.
432 1 3881390.
O:-PERLER, Op. Cit., p. 432 : 390.

LETTRES
Lettro 18
Lettre 26
Lsttre 55
AuTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Caelestinus
Licentius
Januarius
Nous possédons très peu
Originaire de Thagaste, fils de Romania-
Il est qualifié par
de renseignements sur lui. nus; élève d'Augustin; il participe aux
Augustin de "dilectissi-
Demande à Augustin, dans
débats philosophiques da Cassiciacum où
mus filiys". Chrétien,
une lettre aujourd'hui
il se montre plus épris de poésie qua de
il pose à Augustin des
perdue, qu'il lui envoie
philosophie. Lorsque Auguetin retourne en
questionsd'ordre liturgi-
ses ouvrages contre les
Afrique, il demeure en Italie où ses pré-
que et sacramentel.
Manichéens.
occupations se font de plus en plus mon-
daines. C'est de là qu'il écrit à son an-
cien profeseeur un poème où il évoque le
souvenir de leur séjour è Cassiciacum,où
il lui demande d'intervenir pour lui au-
près de personnes influentes pour facili-
ter sa carrière et de lui envoysr ses li-
vres sur la musique.
-"
Dl
FOURCHETTE
Avant la pr~trise 1
Entre la prStrise et l'épiscopst 1
Pendant l'épiscopat 1
CHRONOLOGIQUE
389/391
391/395
400/411
SUJET
Augustin lui réclame sea
Augustin s'élève contre les valeurs est~ Réponse d'Augustin aux
livres contre lea Mani-
tiques de la rhétorique parenne considéœe
questions de Januarius.
chéens. La fin de la let-
comme un idéal en soi. Il convie son an-
tre est philosophiqua 1
cien élève à sa détacher du monde.
Augustin traite des aubs-
tances: le corps, l'âme
et Dieu.
REFERENCES
A. MANDOUZE, Op. Cit., p.
A. MANDOUZE, Op. Cit., pp. 640-643 :
A. MANDOUZE, Op. Cit.,pp.
PROSOPOGRA-
180 : lIavant le 6 avril 39111 391'/395
5B4-585a:Déc. 404/Juin 411
PHIQUES
Al. GOLD8ACHER, Op. Cit.,
J. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2, p. 682
J. MARTINDALE, Op. Cit.,t.
p. 12 1 389/390.
394/395
2, p. 5B4 a 400
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 13: 391/395
Al. GOLD8ACHER, Op. Cit.,
O. PERLER, Op. Cit., p. 436 l~i~vril/
p. 18 a 400
mi-l1ai 395
o. PERLER, Op. Cit., p.
C.I, BALMUS, La lettre de saint Augustin
444 a 401.
à licentius, in memorie Lui Vas1le Parue~
Bucarest, 1934, p. 21 1 vers 395.

LETTRES
Lettre 56
Lettre 69
Lettre 101
AUTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Celer :
Castorius 1
Memorius 1
Homme de haut rang: li~
Avec son frère Maximianus,
Ev3que Catholique et père
au donatisme.
il avait abandonn~ le schis- de Julien d'Eclane. Ami
me donatiste pour rallier
d'Augustin, il lui avait
l'église catholique.
demandé de lui envoyer ses
livres sur la musique.
FOURCHETTE
396/402
402
408/409
CHRONOLOGIQUE
->
-.J
SUJET
Invitation à l'~tuda des
Augustin le preese d'sccep-
Sur les arts lib~raux.
Saintes Lettres et au
ter de succ~der à son frère
retour à la vraie foi.
dans .la charge d'~vaque de
8agaI.
REFERENCES
A. MANDOUZE, Op. Cit., p.
A. MANDOUZE, Op. Cit., p.
Al. GOLD8ACHER, Op. Cit.,
PROSOPOGRA-
202 : probablement en 402
197 1 avant le 27 aoOt 402
p. 31 1 40a/409.
PHIQUES
J. MARTINDALE, Op. Cit.,
J. MARTINDALE, Op. Cit., t.
t. 2, p. 275 : 3967~02.
2, p. 270 : 402
O. PERLER, Op. Cit., p.
O. PERLER, Op. Cit., p. 4471
447 : 402.
402.

LETTRES
Lettre
102
Lettre 103
Lettre 104
AUTEUR
Augustin
Nectarius (cf. Lettre 104)
Augustin
DESTINATAIRE
Deogratias 1
Augustin 1
Nectarius
Pr3tre catholique. Il
La correepondance d'Auguatin et
Un des correspondants paIens d'Augustin.
transmet à Augustin six
de Nectarius comprend quatre
N~ à Calama, il est d~Jà vieux lorsqu'il
questions que lui avait
lettres. Deux lettres de Necta-
entreprend de correspondre'avec Augustin,
pos~es un peren et re-
rius (90 et 103) 1 deux d'Augus- sollicitant l'intervention de ca dernier
latives au Christianis-
tin (91 et 104).
pour que ce soit att~nu~a la punition qui
me et à la Bible.
menace sea concitoyene après leurs mani-
festations contre les Chr~tiens. Il rem-
plisaait sans doute la fonction de "d~fen­
seur de la Cit~", à l'~poque de sa corres-
pondance avec Augustin.
fOURCHETTE
405/412
408/410
408/410
CHRONOLOGIQUE
~
CD
SUJET
R~ponse d'Auguatin aux
R~ponse de Nactarius à la lettre R~ponse à la lettre 103. Après avoir re-
questions de Daogratias. 91 d'Augustin. Après avoir com-
proch~ à Nectarius d'avoir mal interpr~­
par~ Augustin à Cic~ron, Necta-
t~ sa première lettre (91), Augustin in-
rius r~pond aux propos d'Augus-
vite Nactariua à contribuer à la conver-
tin aur la cit~ c~leste, les
sion de ses concitoyens. Il d~veloppel
sanctions è appliquer aux paiBns. tout an le9 corrigeant, les propos de
Il lui d~crit ensuite les cons~­ Nectarius sur lee sanctions de l'église,
quences que ces sanctions pour-
le repentir, le Jugement divin, l'~gali­
raient avoir sur une cit~ comme
t~ des fautes. Il lui parle de la briève-
Calama.
t~ de la vie, du bonheur et das moyens de
l'atteindre.
REfERENCES
A. MANDOUZE, Op. Cit.,
A. MANDOUZE, Op. Cit., p. 776 1
A. MANDOUZE, Op. Cit., p. 776 : 408/409
PROSOPOGRA-
p. 292 1 entre f~v. 405
408/409
R. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2, p. 774 :
PHIQUES
et Juin 411
R. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2,
409/410
Al. GOLDBACHER,Op. Cit., p. 774 : 409/410
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 31 : 409/410
p. 31 1 406/412
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 311 O. PERLER, Op. Cit., p. 459 : Printemps
O. PERLER, Op. Cit., p.
409/410
409.
452 1 409.
O. PERLER, Op. Cit., p. 452 1
Mara 409.

LETTRES
Lettre 118
Lettre 127
Le'Ure 130
AUTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Dioscorus
Armentarius
Proba 1
Jeune ~tudiant grec, venu de Ro- Il a, de concert avec sa femma Mambre de l'aristocratie romaine,
me (o~ il a s~journ~) à Carthage Paulina, fait voeu ',de conti-
ella appartenait è la grande fa-
pour s'y perfectionner dans l'~­ nence. Augustin, mis au cou-
milla des Anicii. Son mari, Sex-
tude des "bellee lettres". Au
rant, lui ~crit ainsi qu'à sa
tus Petronius Probus fut consul ,
moment de retourner en Grèce,
femme.
en 311. Après la mort de calui-ci,
il envoie è Augustin une lettre
elle demeura veuve. Lors de la
portant une s~rie de ~uestions
prise de Rome par Alaric, elle se,
sur les dialogues de Cic~ron
r~fugia en Afrique avec sa belle
(lettre 117).
filla ~uliana et,sapetita~fille
O~m~triade. Elle avait ~crit à Au-
gustin pour lui poser des ques-
tions sur la prière.
...
FOURCHETTE
410/411
Pau après la prise de Roma 1
410/413
ID
CHRONOLOGIQUE
410
SUJET
R~ponse d'Augustin à la lettre
Lettre d'encouragsment. Augus- R~ponsa d'Augustin à Proba.Après
de Dioscorue. Après avoir mon-
tin exhorte Armentarius et sa
das recommandations sur les dis-
tr~ à son correspondant la va-
famme à pers~v~rer dans leur
positions qu'il faut apporter à
nit~ de ses ~tudes, Auguetin
voeu de continenca. Il leur
la prièra, Augustin parle de
entreprend de lui faire d~cou­
parle aussi de la brièvet~
l'objet de la prière: le bonheur.
vrir, à travers une critique
da la vie humaine.
des diff~rentes doctrines phi-
losophiques, en quoi consiste
le bonheur.
REFERENCES
A. MANDOUZE,Op. Cit., p. 279-
A. MANDOUZE, Op. Cit., p. 94:
R. MARTINDALE, Op. Cit., t. t,p •
PROSOPOGRAPHI-
281 1 410
••• 410 •••
732 • 411/413
QUES
J. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2,
J. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2, Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 36
p. 367 1 410
p. 150 : "The date was after
411/413
Al. GOLD8ACHER, Op. Cit.,pp.
AlU"
A.M. LA BONARDIERE, La lettre à
33-34 1 410
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p.
Proba, dans saint Augustin et la
O. PERLER,Op. Cit~~p.4541410/411
35 1 "Paulo post Romam ab Ala- Bible, Paris, 1986, pp. 181-188 :
L. WANKENNE, A propos de Di99-
rico extremo mense Augusto anm410!412.
corus correspondant de saint
410 Captam'i.
Augustin, dans Revue b~n~dicti-
nA.
.. n..,A.
__
4t:.'7 _... "e.
..
.Jo ... n

LETTRES
Lettre 140
Lettre 155
Lettre 203
AUTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Honoratus :
Macedonius
Largus
Ami d'Augustin et d~dicatai~
Vicaire d'Afrique entre ~13/~14, Proconsul d'Afrique entre 418/419.
ra du De utilitate credendi
il promulgua un ~dit contre les
Durant l'exercice de ses fonctions
(391/392). Non encore bapti-
donatistes. Il adressa à Augus-
ou peu sprès, il reçut d'Augustin
s~ en 411, il est assezavan-
tin deux lettres 1 l'une sur
une lettre de laquelle il ressort
c~ dans lB.oonnaissance de
l'intercession des ~v3ques en
qu'il avait subi quelqus adversit~.
la Bible, pour pouvoir poser
faveur des coupables (lettre
Il fsit partie des correspondants
des questions à Augustin sur
153), l'autre où il loue la me-
paIens d'Augustin.
lss deux Testaments.
sure qu'Augustin observe dans
ges intercessions en faveur des
coupables. Il y fait ~galement
allusion aux trois premiers li-
1
vres de la Cit~ de Dieu qu'il
N
dit avoir lus avsc attention
Cl
(lettre 154).
fOURCHETTE
411/412
413/414
418/419
•••
CHRDNDLDGI!lUE
SUJET
Augustin r~pond aux questions Augustin loue Macedonius des
·Lettre ds consolation, Augustin sn-
d'Honoratus et lui parle de
vertus dont il fait preuve
courage Largus et l'exhorte à tirer
la " graCe du nouveau testa-
dans l'exercice de ses fonctions une leçon de ses malheurs.
ment ."
et lui parle du bonhsur.
REfERENCES
A. MANDDUZE, Op. Cit.,p. 564: A. MANDDUZE, Op. Cit., pp. 556-
A. MANDDUZE, Op. Cit., pp. 626-627
CHRONDLDGI-
411/412.
661 : 413/414.
• •• 7 avril 419 •••
!lUES
Al. GDLDBACHER, Op. Cit.,pp.
J. MARTINDALE, Bp. Cit., t. 2,
J. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2, p.
37-38 1 411/412
p:•• 697 : 413/414
657 : "during or after hie office"
D. PERLER, Op. Cit., p. 45B : Al. GDLDBACHER, Op. Cit., p. 41: Al. GOLDBACHER, Op. Cit.,p. 52 1
411/412.
413/414
"in ipsa munerie administratione
D. PERLER, Op. Cit., p. 462 :
aut paulo post ••• "
413/414.

LETTRES
Lettre 220
Lettre 231
Lettre 233
AUTEUR
Augustin
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Bonifatius
Darius
Longinianus
Tribun militaire en service en Afri- Chr~tien connu seulement par Correspondant paien d'Augustin, in-
que. Il perdit la confianoe de l'im- une lettre adress~e à Augus- t~ress~ par les problàmes philoso-
p~ratrice Placidie et s'allia avec
tin (lettre 230) et deux
phiques et religieux. Il est à
les vandales pour se d~fendre contre lettres reçues de celui-ci
identifier avec Flavius Macrobius
les forces de l'Empire. Peu aVant la (Lettres 229 et 231). Il est Longinianus qui fut pr~fet du pr~­
mort de l'empereur Honorius (423),il qualifi~ paJ' Augustin de
toire d'Italie.
devint gouverneur d'Afriqu\\31 "domes- "dominus med.to inlustris et
ticorum et Africae comes". A la mort magnificentissimus". Il mani-·
de sa premi~re ~pouse, il se remaria feste du goOt pour les ou-
avec une arienne, ce qui l'~loigna
vrages d'Augustin. Sa pr~-
du Christianisme.
sen ce en Afrique est li~e à
une importante mission
officielle.
N
...
FOURCHETTE
Date incertaine. Ecrite pendant
427/429
428/430
CHRONOLOGIQUE
l'~piscopat d'Augustin.
SUJET
Augustin exhorte 80nifatius à reve-
Sur l'amour des louanges
Apràs avoir ~tabli la sup~riorité
nir à de meilleurs sentimsnts et à
contre le paganisme.
du Christianisme sur les autres
une vie plus exemplaire •.
doctrines, Augustin demande à Lon-
ginianus son sentiment sur le fa-
çon dont il convient d'adorer
Dieu, sur le Christ et sur les voies
d'accès au bonheur.
REFERENCES
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 57 :
A. MANDOUZE, Op. Cit., p.
J. MARTINDALE, Op. Cit., t. 2, p.
PROSOPOGRA-
427/429
264 : P~c. 428
1 Mai 429
687 : "After Augustine becama
bi-
PHIQUES
O. PERLER, Op. Cit., p. 474 : d~but
...
shop in 395."
de l'ann~e 428.
Al. GOLD8ACHER, Op. Cit.,p.
Al. GOLDBACHER, Op. Cit., p. 62 :
62 1 429/430.
"Id unum tamen de his Omnibus
E istulae
232-270
adfirmare
otest scri tas
esse Augustino episcopo facto, id est
post annum 395".

LETTRES
Lettre 234
Lettre 235
Lettre 244
AUTEUR
Longlnll!nus
Augustin
Augustin
DESTINATAIRE
Augustin
Longinianus (cf. lettre
Crisimus 1
233)
Correspondant chr~tien d'Au-
gustin. Fortement ~branl~ par
des revers mat~riels, il son-
ge au suicide.
FOURCHETTE
Date incertaine. Lettre
Date incertaine. Lettra
426/427.
CHRONOLOGIQUE
~crite pendant 11~piaoDpat
~crite pendant l'~piscopat
d'Augustin.
d'Augustin.
SUJET
R~ponsa de Longinianusà'la
R~ponse d'Augustin à la
Lettre de consolation. Augus-
N
N
lattra 233. En mama temps
lettre 234. Augustin se
tin invite Crisimus à repren-
qu'il loue Augustin, il hd
f~licite d'avoir pu enga-
dre courage et lui fait voir
dit les difficult~s qu'il
ger un dialogue avec Lon-
la vanit~ des biens temporels.
~prouva à parler du Chris-
ginianus. Il revient sur
tianisma at s'an remet à
les pr~cepte8 eXpos~s par
Augustin. Il y expose tou-
Longinianus dans la lettre
tefois les pr~ceptes da sa
234.
religion.
REFERENCES
PROSOPOGRA-
Cf. Lattre 233.
Cf. Lettre 233.
A. MANDOUZE, Op. Cit., p. 251.
PHIQUES

SERMONS
SermQn 4
5ermQn 11
5ermQn 19
INTITULE
Hesternae lectiQnes debitQres
DQminus Deus nQster, nQlens
Cantantes DQminum rQ avimus
nQS esse meminimus •• 1... temp-
aliguem nQetrum per~e ••1..
ut avertat faciem suam ••••
tatiQnes diabQli euperaveris.
finem nQn habebit.
nQn VQS decipit gui nQn fallit.
SUJET
Esau et JacQb (Gen. 27, 1-40)
Elie (3 RQis 17, 8-16)
CQmmentaire dee Psaumes 50 et
72.
LIEU
Carthage (basilica restituta)
FOURCHETTE
410-419.
411-412 7
D~cembre 419.
CHRONOLOGIQUE
REFERENCES
P. MONCEAUX, HistQire litt~raire A.M. LA BONNARDIERE, Livres
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
PROSOPOGRA-
de l'Afrigue Chr~tienne, VII,
hietQrigues, dans Biblia
512: 419
N
PHIQUES
Lol
saint Augustin et le dQnatisme,
Augustiniana, A.T., Parie,
A.M.LA BONNARDIERE, Le Cantigue
Paris, 1923, p. 285 : avant 420.
1960, po. 81.
des cantigues dans l'Qeuvre de
A. KUNZELMANN, Die ChrQnQIQgie
saint Augustin, REAug, l, Paris,
der sermQnes des hl. Augustinus,
1955, p. 232 : 419.
studi AgQstiniani, dans ~, 2,
C. LAMBDT, Op. Cit., p. 251 :
RQma, 1931, p. 512 : 22 janv.
419.
410/419.
D. PERLER, Les vQyages de saint
C. LAMBOT, Sancti AureliLAugus-
Auguetin, Paris, 1969, p. 470 :
tini sermQnes de vetere testa-
419.
mentQ, C.C.,
series letina, 41,
TurnhQut, 1961, p. 19 : 22 Janv.
410/419.

SERMONS
Sermon 29
Sermon 32
Sermon 53
INTITULE
et eoiritu dei
Deus et Dominus nos ter curans
Sollemnitate sanctae virgi-
• e' ••
et sanans •• 7••• Cujus est
nis, guae testimonium dixi~
Dominus Deus ipsius.
..7 •• guoniam ipsi Deum
videbunt.
SUJET
Commentaire du psaume 117,1.
David et Goliath seur le
Les b~atitudes (Mt 5, 3-12).
m~pris du monde.
LIEU
Carthage
Carthage
Carthage
FOURCHETIE
25 mai 418.
Septembre 403.
413.
CHRONOLOGIQUE
r->
~
REFERENCES
O. PERLER, Op. Cit., p. 466.
A. KUNZELI'1ANN, Op. Cit., p.
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
PROSOPOGRA-
512 1 fin peptembre 403.
512 s 21 Janvier 413.
PHIQUES
C. LAI'1BOT, Op. Cit., p. 397 l
A. 1'1. LA BONNARDIERE, 'Anima
fin septembre 403.
Justis sedens sapentiae '
dans l'oeuvre de saint Augus-
tin, dans Epektasis, Paris,
1972, p. 112, note 142; jan-
vier 413.
o. PERLER, Op. Cit., p. 460 s
22 1anvier 413.

SERMONS
Sermon BO
Sermon 84
Sermon 97
INTITULE
Dominus nos ter I.C. etiam in
Dixit Dominus Cuidam adules-
diacipulia sui a redarguit ••; ••
centi si vis venire ad vitam
et spera guod promiait.
..7.. cum Christo ragnabimus. • •
homo •
SUJET
La puissance de la prière
Le jeune homme riche
Le jour du jugement.
(Mt 17, 1B-20)
,
(Mt 19, 17) ; de la brièveté
de la vie.
LIEU
Carthage
FOURCHETIE
Vera 410.
411.
CHRONOLOGIQUE
REFERENCES
A. KUNZELMANN, Op. Cit.,
A.M. LA BONNARDIERE, Les
PROSOPOGRA-
p. 512.
commentaires simultan~de
PHIQUES
Mt 6, 12 et de I Jn 1,8 dans
l'oeuvre de saint Augustin,
REAug, l, Paris, 1955, p. 13S,
note 16.

SERMONS
Sermon 127
Sermon 141
Sermon 150
INTITULE
non de
cum sanctum
Advertit nobiscum caritas vestra,
re8ur-
audis-
cum legeretur •• / •• immunditiae
sint
Epicureorum, superbiae stoicorum.
SUJET
La r~surrection des morts et
"Je suis la voie, la v~rit~
Paul à Athènes (~, 17, 17-34):
la r~tribution.
et la vie" (Jn 14, 6).
sur le bonheur.
LIEU
Carthage.
FOURCHETTE
Entre 410/420.
413/414.
'"
CJ\\
CHRONOLOGIQUE
REFERENCES
A.M. LA BONNAROIERE, Les
A.M. LA BONNAROIERE, Le livre des
PROSOPOGRA-
douze petits prophèteS;-dans
Proverbes, dans Biblia Augustiniana,
PHIQUES
Biblia Augustiniana, Paris,
Paris, 1963, p. 203 1 413.
1963, p. 47 1 410/420.
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p. 513 :
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
413/414.
513 1 410/420.
O. PERLER, Op. Cit., p. 462 : ~té
413 7

SERMONS
Sermon 1S6
Sermon 1S8
Sermon 231
INTITULE
Verbi Dei altitudo exercet
Apostolum beatum audivimus
Resurrectio Domini nostri Iesu
studium. non denegat "/"
exhortantem et confirmantem
Christi ex more legitur his
Cohèredes autem Christi.
•• / •• si Deus pro nobis,
diebus •• 7•• gui mortuus est
guis contra nos 7
pro nobis.
SUJET
Les Epicuriens et les stoi-
La pr~destination qui Justi-
Apparition aux femmes et aux
ciens vivent selon la chair.
fie.
apôtres (Mt 16, 1-16).
LIEU
Carthage.
Hippone.
FOURCHETTE
418/419.
417/418.
Après 400.
CHRONOLOGIQUE
REFERENCES
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
A.M. LA 80NNARDIERE, 'Tu es
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
PROSOPOGRA-
S13 : 17 octobre 418.
Petrus'. la péricope M~
S14.
PHIQUES
O. PERLER, Op. Cit., p.
13-23 dans l'oeuvre de saint
4701
A.M. LA BONNARoIERE, Livres
Augustin, dans Irenikon, 34,
17 octobre 419.
historigues, dans Biblia Augus-
Paris, 1961, p. 462 : 417 7
tiniana ; A.T., Paris, 1960, p.
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
19 1 Mardi~s P~ques.
S13 : 418.
C. LAMBOT, Les sermons de saint
Augustin pour les fttes de p~­
gues, Revue bénédictine 79,
Paris, 1969, p. 1S2.

SERMONS
Sermon 236
Sermon 241
Sermon 254
INTITULE
Dominus noster I.C •• sicut
Propria est fides Christia-
Sic se habet, fratres mei: sic
a os tolus dicit
morbuus est
norum resurrectio mortuorum
se habet miseria •• 1.. sed
•••• Alleluia
laudate Domi- ..1.. in Crastinum praepara-
habeant caritatem infinitam.
num.
te.
SUJET
Les disciples d'Emmaüs.
Contre les gentils : la doc-
Le figuier st~rile.
trine platonicienne de la
migration de l'âme.
LIEU
Hippone.
Hippone.
Hippone.
N
(Xl
fOURCHETTE
CHRONOLOGIQUE Vers 410/412.
Temps pascal 405/410.
Temps pascal 412/416.
REfERENCES
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p. 514:
PROSOPOGRA-
514 : Mercredi apr~s pgques.
514 : 405/410.
412/416.
PHIQUES
S. POQUE: Augustin d'Hippo-
C. LAMBOT, Op. Cit., p. 151:
A.M. LA BONNARDIERE, "Tu es Pe-
~, Ssrmons pour la Pâgue,
après 409.
trus", la p~ricope Mt 16:13-23
~~es chr~tiennes, 116,
dans l'oeuvre de saint Augustin,
H.I. MARROU, en collaboration
Par~s, 1966, p. 91 : Lundi
dans Irenikon 34, Paris, 1961,
avsc A.M. LA BONNARDIERE, Le
da Pâquee.
p. 462 : 412/416.
dogme de la r~surrection des
corps et la théologie des va- O. PERLER, L'église principale et
leurs humaines selon l'ensei- les autres sanctuaires chrétiens
gnement de saint Augustin,
d'après les textes de ssint Augus-
REAug, 12, Paris, 1966, p.
~, REAU]' l, Paris, 1955, p.
116 : Mardi après Pâques,
339 : 412 416.
après 409.

"
SERMONS
Sermon 297
Sermon 301
S",rmon 302
INTITULE
Hodiernum nobis diem
Magnum spectaculum positum
Beati martyris Laurentit
festum fecit san uis
est ante oculos fidei nos-
dies sollemnis hodiernus
a oetolorum •••• ad
trae •• / •• verbum Domini
est "/"
non saevitia
sorum praemia pervenire
manet in aeternum.
timeatur.
mereamur.
SUJET
Saint Pierre et seint
Bonheur en cette vie, f~li-
Vie temporelle, vie ~ter-
Paul, emants de le
cité ~ternelle.
nelle.
v~riteble vie.
LIEU
-
-
Hippone.
fOURCHETTE
416/420.
Vers 417.
Vers 400.
CHRONOLOGIQUE
REfERENCES
A. KUNZELMANN, Op. Cit.,
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
A. KUNZELMANN, Op. Cit.,
PROSOPOGRAPHIQUES
p. S14.
514.
p. 514.

SERMONS
Sermon 306
Sermon 311
Sermon 346
INTITULE
Sicut audivimus et Can-
Recordamini nobiscum. dilec-
tando respondimus 1
tissimi fratres, dixisse
pretiosa est mors •• / ••
apostolum •• 7•• non possunt
imitari non formidemus.
niai ante sanentur.
SUJET
La vie vraiment heureuse,
Du bon usage des maux.
Le p~lerinage terrestre sous
c'est la vie ~ternelle.
le signe de la foi.
LIEU
Carthage.
Carthage.
CA
o
FOURCHETTE
13HRONOLOGIQUE
405/411.
401/405.
REFERENCES
PROSOPOGRAPHIQUES
A.M. LA BONNARDIERE, Le
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
Livre des Proverbes, --
514 : 401/405.
dans Biblia Augustinia-
O. PERLER, Les voyages de
O§, Paris, 1963, p. 203.
saint Augustin, Paris, 1969,
p. 405 : 405.

SERMONS
Sermon 348
Sermon Morin Mai 12
Sermon Morin Guelferb 12
INTITULE
Non dubito, dilectissimi
Vitam istam nostram, fratres
Resurrectio Domini I.C. for-
fratres, insitum eese cor-
carissimi, peregrinatione~
ma est christianae fidei
dibus vestris ••7•• vestrae
guandam •• 7•• hac aperle
•• j •• redde quod promisisti 7
fartasse eatietati parcere
Chrieto.
cogeret.
SUJET
La crainte de Dieu.
Le pélerinage de la 'vie.
La résurrection du Christ et
celle des fidèles.
->
LIEU
Hippone.
FOURCHETTE
425/430.
393/405.
A partir de 412 (Mardi après
CHRONOLOGIQUE
Pâques).
REFERENCES
A. KUNZELMANN, Op. Cit., p.
A.M. LA BONNARDIERE, 'Tu es
5. POQUE, Op. Cit., p. 94.
PROsOPOGRA-
515.
Petrus'. la péricope Mt 16,
PHIQUEs
13-23 dans l'oeuvre de saint
Augustin, dans Irenikon, 34,
Paris, 1961, p. 460: vers
405.

-
32 -
"Beatos nos esse volumus"
De beata vita II (10)
CHA PIT R E l
LE DESIR DE BONHEUR

- 33 -
Des considérations générales d'Augustin sur le bonheur se dégage, avons-
nous dit, un premier thème précis, celui du désir de bonheur. En effet,
Augustin décrit le bonheur comme une aspiration présente chez tous les
hommes. Cependant, il ne manque pas de faire remarquer que le bonheur
dépasse les volontés individuelles et que, malgré l'universalité de
l'aspiration au bonheur, il n'est pas donné à tout le monde de parvenir
au bonheur lui-marne.
LE DESIR UNIVERSEL DE BONHEUR
"Nous voulons 6tre heureux" (18). C'est par cette phrase héritée des
philosophes anciens (19) qu'Augustin commence avec ses amis la discus-
sion du De beata vitae De cette formule, il ressort non seulement que
l'aspiration au bonheur trouve son fondement dans la nature mame de
l'homm~ mais qu'elle est aussi le fait de tous les hommes.
Nous retrouvons ces deux aspects dans la Correspondance et dans les
Sermons. A Proba qui lui demande des directives sur la manière de prier
et sur l'objet de la prière, Augustin répond dans la lettre 130, écrite
entre 410 et 413 : "Demande le bonheur; en effet tous les hommes veu-
lent l'avoir" (20). Dans le Sermon 53 qu'il a prononcé à Carthage en
413, Augustin déclare qu'il n'est personne qui n'éprouve le désir d'a-
tre heureux (21). Dans le sermon 150 [413/414J, i l fait comprendre à
ses fidèles que "rechercher le bonheur, vouloir le bonheur, convoiter
le bonheur, le désirer, le poursuivre" est commun à tous les hommes
(22). Qu'Augustin présente le bonheur comme un désir, cela appara!t

-
34 -
à travers l'emploi des verbes. velle, nolle, appetere, concupiscere,
desiderare. Le caractère universel de ce désir est mis en évidence
par l'emploi de omnes et par la double négation nemo ••• nolit que nous
trouvons dans la citation du sermon 53.
Si dans le De beata vita, Augustin pose l'aspiration au bonheur comme
une affirmation de principe qui lui permet d'engager la discussion sur
le bonheur, dans la Correspondance et dans les Sermons, il reprend
cette idée et la développe par des exemples précis. L'appétit du bon-
heur est chez l'homme un désir aussi fondamental que la vie et la san-
té. En effet, autant les hommes se divisent sur le choix de leur profes-
sion, autant ils sont unanimes pour reconnaître qu'ils veulent la vie
st la santé. C'est ce qui ressort de ce passage du sermon 306 prononcé
à Carthage entre 405 et 411 : "Si on demande à quelqu'un: "veux-tu vi-
vre 7", l'entend-t-il de la même manière que si on lui demandait
"veux-tu être soldat 7". A cette question: "Veux-tu être soldat 7",
quelques-uns me répondraient : "Je le veux" et peut-être plusieurs me
répondraient: "Je ne le veux pas". En effet, c'est un sentiment naturel
et inné chez tous les hommes de vouloir vivre et de ne pas vouloir mou-
rir. De même, si je demandais : "veux-tu être en bonne santé 7", je
pense qu'il n'est personne qui répondrait: "Je ne veux pas". En effet,
personne ne veut souffrir ••• Voici que sur ces deux choses, la vie et
la santé, tous sont du même avis que moi. Mais sont-ils tous unanimes
sur le métier de marin 7 Ils sont tous d'accord sur la vie et la santé."
(23).
Pour ce qui est plus précisément du désir de bonheur, nous le retrouvons

- 3 5 -
chez les gens de bien et chez les méchants; car s'il est vrai que les
premiers choisissent de bien vivre pour être heureux, les seconds ne
trouvent d'autres justifications à leur mauvaise conduite que leur dé-
sir d'être heureux, comme Augustin le déclare dans la lettre 130
(410/413) et dans le sermon 150 (413/414J (24). Le brigand des grands
chemins, le fornicateur, le malfaiteur, le sacrilège, tous, par leurs
actions, tendent au bonheur (25). Nous retrouvons ce même désir de bon-
heur chez les savants et les ignorants, ainsi qu'Augustin le dit à
Macedonius dans la lettre 155 [413/41~ (26). Il est aussi commun aux
"philosophes" et aux chrétiens. En effet, l'unique raison de la philo-
sophie est de conduire au bonheur et les philosophes, à travers toutes
leurs études, leurs recherches, leurs discussions, leur genre de vie,
n'ont tendu qu'à ce but. De la même façon, si les fidèles d'Augustin
ont choisi de croire au Christ, s'ils sant devenus chrétiens, c'est
parce qu'ils espèrent aboutir de la sorte au bonheur (27).
C'est donc dire que l'aspiration au bonheur est à la base de toutes les
motivations et de toutes les actions des hommes. Quelles que soient nos
ambitions, quels que soient nos projets, quel que sait le genre de vie
que nous choisissons, nous tendons tous au seul et même but : être heu-
reux. Voilà ce que Augustin dit à ses fidèles dans le sermon 306 :
[405/411] : "Tout homme, quel qu'il sait, veut être heureux. Il n'est
personne qui ne désire être heureux et qui ne le désire par-dessus tout.
Je dirai plus: tout ce qu'an peut "désirer d'autre", c'est pour le
rapporter au "désir d'être heureux". Les hommes sant entraînés par des
passions diverses: l'un désire une chase et l'autre en veut une autre.

-
36 -
Il Y a dans le genre humain bien des conditions diff~rentes et, dans
cette multitude de conditions, chacun choisit et adopte celle qui lui
plaît. Mais quel que soit l'état de vie que l'on choisisse, il n'est
personne qui ne veuille être heureux. Le bonheur est donc le bien que
tous ambitionnent." (28).
Par conséquent, qu'il s'entretienne avec ses amis sur le bonheur comme
dans le De beata vita, qu'il écrive à ses correspondants ou qu'il s'a-
dresse à ses fidèles, Augustin a toujours mis en évidence l'universali-
té du désir de bonheur. Aussi lorsqu'il en a l~occàsion, il n'hésite
pas à attirer l'attention de ses interlocuteurs sur l'importance du bon-
heur. Ainsi dans la lettre 3 [386/387J. Nebridius considère Augustin
comme un homme heureux (29). Augustin essaie d'en rechercher la raison,
et voici l'explication qu'il trouve: Nebridius vient de lire les Dialo-
gues de Cassiciacum, a savoir le Contra
Academicos, le De beata vita
et le De ordine. Et, voulant manifester à Augustin son entière satis-
faction, Nebridius lui a attribué ce qu'il pensait pouvoir lui être le
plus agréable: le qualificatif d'heureux. Mais, poursuit Augustin, la
joie de Nebridius aurait été plus grande s'il avait lu les Solilogues.
Pourtant, il n'aurait pas pu trouver de qualificatif plus élevé à lui
donner que celui d'heureux. Et Augustin de conclure que Nebridius, tout
à sa joie, lui a décerné le qualificatif suprême et ne s'est rien réser-
vé pour une plus grande joie (3D). Ainsi "heureux" est ce qu'il y a de
plus doux que l'on puisse dire à quelqu'un et le bonheur l'état le plus
grand que l'homme puisse atteindre. De même, Augustin écrit à Dioscorus
dans la lettre 118 [410/4111 que la connaissance du bonheur est ce qui
mérite d'être recherchée avant toute chose (31).

UNITE DU DESIR.~NIVERSEL DE BONHEUR ET
DIVERSITE DES DESIRS DES HOMftES
Puisque le bonheur est une exigence de l'homme, c'est en particulier
par rapport à l'action de l'homme qu'il peut être d~terminé. Or, l'hom-
me agit en tant qu'homme par sa volonté libre. C'est donc par rapport
à cette volonté qu'il est heureux ou malheureux: "De même que c'est
dans sa propre volonté que l'homme de bien trouvera la mesure du bien
qu'il fait et qu'il y trouvera aussi la mesure de Bon bonheur, de même
c'est dans sa propre volonté que le méchant trouvera la mesure du mal
qu'il fait et qu'il y trouvera aussi la mesure de son malheur.
Puis-
que c'est par le mouvement de la volonté (qui est la mesure de toutes
les actions et de tous les mérites) que l'on est bon ou mauvais - bon
quand on veut le bien, mauvais quand on veut le mal -, c'est par le
mouvement même de la volonté qu'on est heureux ou malheureux." (32).
Partant de là, Augustin est amené à se demander si le bonheur doit
être déterminé au regard des volontés libres individuelles.
La réponse à cette question se trouve déjà exprimée dans le De beata
vita par la bouche de Monique à la fin d'une discussion plus générale
dont le schéma est le suivant
personne n'est heureux s'il n'a ce
qu'il veut; mais il ne suffit pas d'avoir ce que l'on veut pour être
heureux; en effet, vouloir le mal et l'obtenir est pour l'homme une
cause de malheur. Le fondement du bonheur réside donc dans la volonté
bonne qui consiste à vouloir ce qui est conforme au bien (33).
C'est aussi ce que Augustin fait remarquer à Proba dans la lettre 130

-~-
~10/413](34).En effet~c'est en insistant sur l'obligation que l'homme a
de choisir ce qui est convenable (decet) qu'Augustin explique à sa cor-
respondante - comme il le faisait d'ailleurs déjà constater à sa mère
Monique dans le De beata vita en s'appuyant sur le même texte de
l'Hortensius de Cicéron - que le bonheur ne consiste pas à vivre comme
on veut. En effet, choisir de mal vivre (neguiter vivere) est pour
l'homme plus une cause de malheur que de bonheur puisque l'homme est à
même d'accomplir ses mauvaises volontés. Aussi, la dépravation de la
volonté, qui consiste à vouloir ce qui ne convient pas (guod non decet)
et à rechercher ce qu'il ne faut pas (quod non oportet), cause plus de
mal que le fait de ne pas obtenir ce qu'on veut. L'indépendance complè-
te de la volonté n'est donc pas le meilleur principe de vie car l'homme
peut, dans sa quête du bonheur, agir d'une manière qui ne soit pas con-
forme à la raison. En mettant l'accent sur la dépravation de la volonté,
Augustin, à la suite de Cicéron, met en relief la responsabilité de
l'homme: lorsqu'il se détourne délibérément du bien, l'homme choisit
par le fait même de s'éloigner du bonheur. Inséré dans le contexte où
la lettre 130 a été écrite, la référence à Cicéron prend une valeur
particulière: il s'agit, pour Augustin, de mettre Proba en garde con-
tre le pélagianisme naissant et, à l'affirmation de la puissance de la
volonté humaine, il opposera la nécessité de la grâce. (35).
A cet argument.de la dépravation de la volonté, Augustin ajoute celui
de la diversité des besoins des hommes. En effet, si l'on voulait faire
dépendre le bonheur des désirs individuels, il serait impossible de
trouver un seul bien qui puisse satisfaire tout le monde. Ainsi, si

-
39 -
nous prenons le mariage comme exemple, nous constatons qu'il est des
hommes qui veulent se marier; d'autres ne veulent pas en faire l'ex-
périence ; d'autres encore, devenus veufs, préfèrent demeurer dans la
continence. Et pourtant.chacun, dans son genre de vie, s'estime heu-
reux et on ne peut pas dire que l'un de ces trois genres de vie, com-
paré aux deux autres, est en opposition avec la notion de convenable
(36) •
Cet argument de la diversité des désirs des hommes, Augustin l'utilise
aussi dans les Sermons. Si le bonheur est le sort que tous ambitionnent,
les hommes se divisent en fait sur les moyens de réaliser l'existence
de leurs rêves: "L'un dit: "Heureux oeux qui suivent la profession
des armes ll ; un autre soutient le contraire et dit: "Heureux les agri-
culteurs" ; un autre rejette cette opinion et dit : "Heureux ceux qui
brillent au barreau par leur éloquence, qui défendent les intérêts de
leurs concitoyens et dont la parole devient l'arbitre de la mort et de
la vie des hommes". liNon", répond un autre, "heureux bien plut5t ceux
qui jugent et qui ont l'autorité pour écouter les débats et prononcer
la sentence". IIVOUS vous trompez" dit un autre: "Heureux ceux qui
traversent les mers ; ils apprennent à connaître du pays et réalisent
des gains considérables". Vous voyez, mes très chers frères,que, dans
cette multitude de conditions différentes, il n'en est pas une seule
qui plaise à tous et cependant tous aiment et cherchent le bonheur."
(37) •
Ainsi pour Augustin, aussi bien dans le De beata vita que dans la
Correspondance et les Sermons, il est clair que le bonheur en soi est

- 40 -
tout autrs que la satisfaction de l'appétit subjectif du bonheur. Pour
que l'homme puisse vraiment "r~aliser" son d~sir de bonheur, il lui
faut trouver un bien qui soit certes en mesure de satisfaire son aspi-
ration naturelle au bonheur, mais aussi sur lequel tous puissent s'ac-
corder.
VOULOIR N'EST PAS POUVOIR: TOUS LES HOMMES VEULENT ETRE
HEUREUX "AIS TOUS N'Y PARVIENNENT PAS.
Bien que le désir de bonheur soit commun à tous les hommes, tous cepen.-
dant ne parviennent pas au bonheur ~éritable.
Cette constatation se trouvait d~jà présente dans le De beata vita par
l'affirmation que celui qui désire le mal ne peut pas être heureux, mê-
me s'il a ce qu'il veut (38).
Elle est également évoquée, mais de façon plus explicite, dans la
Correspondance et dans le9 Sermons. C'est ainsi que, dans la lettre 104
[408/410J, Augustin déclare à Nectarius qu'il entretient des conditions
du bonheur : "Sans doute nous voulons tous être heureux, c'est-à-dire
que nous y aspirons. Cependant, malgré notre volonté, nous ne pouvons
pas tous y arriver, c'est-à-dire que nous ne pouvons pas tous obtenir
ce que nous voulons." (39). Et, dans le sermon 306 [405/411], cherchant
à définir avec ses fi~èles ce qu'est le bonheur, Augustin en profite
pour leur dire que le bonheur n'est point le partage de tous les hom-
mes : "Qu'est-ce donc, mes frères, leur demande-t-il, ce bonheur que
tous désirent et que tous ne possèdent pas 7" (40).

- 41 -
Le fait qu'Augustin ait présenté le bonheur comme une réalité qui
transcende les visées individuelles pourrait expliquer cette discor-
dance entre le désir universel de bonheur et la réalisation effective
de ce bonheur. ~ais, dans le De beata vita, comme dans la Correspon-
dance et les Sermons, c'est à l'ignorance des hommes qu'Augustin im-
pute cette impossibilité à ce que tous les hommes parviennent au
bonheur.
Dans le De beata vita, cette ignorance provient du fait que les hommes
méconnaissent la véritable origine de leur aventure terrestre. En ef-
fet, si les hommes savaient d'où ils viennent, ils n'auraient pas du
mal à trouver là la source de leur bonheur : nEn effet, dit Augustin,
comme, dans ce monde, ou Dieu ou la nature ou la nécessité ou notre vo-
lonté ou la réunion de quelques-unes de ces causes ou de toutes ensem-
ble ••• nous ont jetés comme au hasard ça et là sur une sorte de mer
tumultueuse, combien peu seraient-ils à reconnaître la direction où il
faut tendre et la voie par où revenir, si un jour une temp~te, considé-
rée par les insensés comme adverse, ne les plaquait même contre leur
gré et en dépit de leurs efforts contraires, ignorants et errants, sur
la terre tant désirée !n (41).
Dans la Correspondance et dans les Sermons, cette ignorance vient de ce
que les hommes ne savent ni ce qui peut leur procurer le bonheur ni où
ils doivent le trouver. D'où dans le sermon Mai 12 ~93/405J, le cons-
tat d'Augustin: nIl n'est personne, si on lui demande s'il veut être
heureux qui ne réponde sans hésitation qu'il veut l'être. Tout homme
proclame qu'il veut être heureux. Mais comment parvenir au bonheur et

- 42 -
où il faut trouver ce bonheur, voilà ce que les hommes ignorent. C'est
pourquoi leur route est errante." (42). C'est aussi le même constat
que nous trouvons dans la lettre 155 [413/414J : Augustin, après avœr
indiqué à Macedonius par un commentaire du psaume 143 la source du
bonheur, conclut en disant : "Tu vois donc où il faut chercher ce que
tous, savants et ignorants, désirent, quoique beaucoup par orgueil et
par erreur ne savent ni où il faut le demander ni d'où il faut le re-
cevoir." (43).
L'errance est donc la conséquence qui résulte de cette ignorance des
hommes. Ce thème de l'errance se trouve dans les trois derniers textes
cités,à travers l'emploi du verbe errare à cSté
des verbes
nescire et ignorare. Ne sachant pas où trouver la source du bonheur
(l'idée de source est rendue par les adverbes unde et ubi) et ignorant
la voie qui mène au bonheur (l'idée de voie est exprimée par l'adverbe
qua), les hommes sont amenés à emprunter des chemins tortueux pour
essayer d'y arriver.
Par conséquent, malgré l'écart de temps qui existe entre
le De beata
vita, la plupart des Lettres et des Sermons qui nous intéressent, et
malgré la diversité de ses interlocuteurs, nous constatons qu'Augustin
n'a jamais changé de point de vue quant au désir de bonheur. Il a tou-
jours affirmé l'universalité de ce désir même si)sur ce point, il s'é-
tend plus dans la Correspondance et les Sermons que dans le De beata
vita. Il a aussi toujours fait remarquer que le bonheur ne dépend pas
des volontés individuelles. La première raison qu'il donne et que nous
retrouvons dans le dialogue de Cassiciacum et dans la Correspondance

-
~3 -
est la dépravation de la volonté par laquelle Augustin montre que l'hom-
me est responsable de son malheur. La seconde raison, commune à la Cor-
respondance et aux Sermons, est la diversité des visées des hommes. De
mAme, il a toujours reconnu que le bonheur n'est pas donné à tous les
hommes soit à cause de l'ignorance que ceux-ci ont de leur véritable
origine soit à cause de leur méconnaissance du véritable bien.
Nous ne pouvons donc atteindre le bonheur que si nous connaissons le
bien qui est la source du bonheur. Ce bien, Augustin, à la suite des
philosophes, l'appelle le "souverain bien" (summum bonum) qu'il définit
comme "La cause de la béatitude" : "Summum enim bonum est causa beati-
tudinis" (44). Le problème du bonheur revient ainsi à rechercher avant
tout en quoi consiste le souverain bien de l'homme. C'est à cela que
je consacre les deux chapitres suivants de mon étude, ainsi que jè·l'ai
annoncé dans mon introduction. Dans le éhapitre II, j'examinerai
com-
ment dans le De beata vita, la Correspondance et les Sermons, Augustin
fait voir que le souverain bien ne réside pas dans les biens terrestres.
Dans le chapitre III, nous verrons comment il établit le souverain bien
en Dieu.

- 44 -
DNulla res terrera te facit beatumD•
Augustin, serm. 231,4
DFelicitas mundi non est honor, sed onus D•
Augustin, serm., 301,10
CHA PIT R E l 1
SOUVERAIN BIEN ET BIENS TERRESTRES

-
45 -
C'est en montrant à ses amis de Cassiciacum ainsi qu'aux destinataires
des Lettres contemporaines du De beata vita la caducité des biens ter-
restres, à ses autres correspondants leur relativité,et à ses fidèles
les dangers que les biens terrestres représentent pour l'homme} qu'Au-
gustin fait comprendre aux uns et aux autres que le souverain bien ne
saurait résider dans les biens terrestres.
CADUCITE DES BIENS TERRESTRES
1 - De beata vita
-
- -
- -
- -
- -
- -
- -
- -
- -
-
Dans le De beata vita, Augustin insiste surtout sur la précarité des
biens terrestres. Ce caractère éphémère des biens terrestres, il le
fait appara!tre :
d'une part à travers l'opposition entre les propriétés qu'il confère
au bien béatifiant et celles qu'il donne aux biens terrestres;
d'autre part à travers la relation qu'il établit entre "malheur" et
"biens terrestres".
A la question qu'il pose à ses amis sur la nature du bien qui peut ren-
dre l'homme heureux, Augustin répond en disant que l'homme doit pouvoir
se procurer ce bien à tout moment, autrement di~que ce bien doit être
indépendant de la fortune et du hasard (45). De cette réponse d'Augus-
tin, i l se dégage que la condition essentielle que doit satisfaire le
bien suprême est la stabilité. Cette priorité accordée à la constance
du bien béatifiant appara!t à travers l'emploi de "manens" que renfor-
ce l'adverbe "semper" et q~'explicitent les deux négations l'nec subjec-
tum" et "nec pendulum".

- 46 -
A cette caractéristique du bien suprême qu'est la permanence, Augustin
oppose la caducité des biens terrestres : "Tout ce qui 9st caduc est
mortel, dit-il, nous ne pouvons pas nous le procurer quand nous vou-
lons et aussi longtemps que nous voulons." (46).
Les deux adjectifs "caducum" et "mortale" que nous trouvons dans ce
texte, traduisent la fragilité des biens terrestres et s'opposent à
·semper manens" qui caractérisait le bien béatifiant dans le texte pré-
cédent, tandis que l'expression "non potest a nobis guando volumus et
guamdiu volumus~ qui s'oppose à "guod cum vult habet; indique que
l'homme n'est pas maître des biens terrestres. En effet, il ne peut
pas les obtenir chaque fois qu'il les désire et peut les perdre contre
son gré. Aussi, si le bien béatifiant procure à l'homme la sécurité
indispensable au bonheur, les biens terrestres, eux, se distinguent
par leur inconstance et leur fragilité.
Ce caractère éphémère des biens terrestres est encore mis en valeur
par la relation qui existe entre le malheur et les biens terrestres.
Ce lien est mis en évidence par Augustin et par sa mère Monique.
Augustin, en premier, l'établit à partir du rapport entre la crainte,
la perte et le malheur (47) : la crainte, en effet, est synonyme de
malheur. Or, tout ce qui peut se perdre engendre la crainte. Vu leur
caractère éphémère, les biens terrestres sont amissibles
et de ce fait
engendrent la crainte et le malheur. L'homme qui place son bonheur dans
les biens terrestres est donc nécessairement malheureux. En effet, ai-
mer ce que l'on peut perdre, c'est vivre dans une crainte perpétuelle
incompatible avec le vrai bonheur. C'est la raison pour laquelle

- 47 -
Augustin rejette l'opinion de son ~lève Trygetius selon laquelle les
privilégiés du sort, qui possèdent des biens terrestres en abondance
et qui ne manquent de rien, peuvent être considér~s comme des gens
heureux. L'utilisation du thème de la crainte marque l'influence que
le stoïcisme a exercé sur la pensée d'Augustin (48). En effet, les
stoïciens rangeaient la crainte parmi les passions qui empêchaient leur
.~
-.
sage d'atteindre l'~rr~9'1~ (49). Et, dans las Tusculanes d'inspiration
surtout stoïcienne (50), Cicéron indique que l'homme beureux est celui
qui n'éprouve aucune crainte (51).
Monique, pour sa part, développe le rapport entre l'indigence et le
malheur: Celui qui est en proie au manque est malheureux. En revanche,
l'homme heureux connaît un état de plénitude. Cette satisfaction qu'il
ressent, les biens terrestres ne peuvent pas la lui procurer. En effet,
plus l'homme possède ces biens, plus il éprouve le besoin d'en acquérir
davantage. C'est pourquoi, les biens terrestres, même s'ils étaient
inamissible&,
ne sont pas en mesure de procurer à l'homme le bonheur
auquel il aspire en raison même de l'insatisfaction qu'ils lui lais-
sent
(52).~onique va m~me plus loin~En effet,à supposer que l'homme arri-
ve à mettre une limite à ses désirs, ainsi que le suggère Augustin,
qu'il use convenablement de ses biens terrestres et qu'il en retire le
plus de jouissance possible, son bonheur, dit Monique, ne lui viendrait
pas de ses biens mais de la modération de son âme (53). Tout comme le
thème de la crainte, celui de l'indigence est une référence à la philo-
sophie stoïcienne. En effet, l'affirmation que tout indigent est mal-
heureux peut illustrer l'assertion stoïcienne en vertu de laquelle~seul
le sage est riche"(Paradoxe 6).

-
48 -
Dans le De beata vita, la caractéristique principale du bien béatifiant
qU'Augustin fait ressortir est sa permanence. De celle-ci dépendent la
sécurité et la plénitude que procure à l'homme la possession du souve-
rain bien. A cette permanence du bien sùprême, il oppose la caducité
des biens terrestres d'où résultent l'insécurité et l'insatisfaction
que ressent tout homme attaché aux biens terrestres et qui l'empêchent
de parvenir au bonheur. Cette opposition radicale entre le souverain
bien et les biens terrestres est faite à travers l'utilisation d'une
thématique stoïcienne-qui, tout en marquant une dépendance d'Augustin
par rapport à cette philosophie, permet de mieux mettre en évidence le
caractère permanent du souverain bien et la caduoité des biens terres-
tres, thème dont se sert encore Augustin dans les lettres contemporai-
nes du De beata vita pour montrer que les biens terrestres ne peuvent
pas constituer le souverain bien.
2
Lettres contemporaines du"De beata vita"
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Dans les lettres contemporaines du De beata vita, l'analyse de la cadu-
cité des biens terrestres repose sur la divisibilité des corps. Cette
question de la divisibilité des corps était une de celles qui préoccu-
paient Augustin et qui l'empêchaient d'être vraiment l'homme heureux
que son ami Nebridius voulait reconnaître en lui (54). Augustin l'abor-
de dans la lettre 3 en référence à la question concernant les dimen-
sions du monde sensible : "Mais maintenant, écrit-il, comment puis-Je
être heureux, quelle sorte de bienheureux puis-je être, moi qui ignore
pourquoi le monde a de telles dimensions déterminées, alors que les
proportions des figures, par lesquelles il est, n'empêchent pas qu'il

-
49 -
soit plus grand, autant que l'on voudra 7" (55). le sens de la question
que pose Augustin est le suivant : le monde sensible est-il infini 7
l'opposition qu'il fait entre le nombre sensible et le monde intelligi-
ble lui permet de rejeter l'hypothèse que le monde serait infini:
alors que le nombre sensible, qui représente tout ce qui est corporel,
peut diminuer à l'infini mais ne peut pas croître à l'infini, le nombre
intelligible, qui représente tout ce qui est incorporel, peut croître à
l'infini mais ne peut pas diminuer à l'infini (56). En posant ainsi
cette opposition entre le nombre sensible et le nombre intelligible,
Augustin, comme le fait remarquer Pierre Hadot, se fait le continuateur
d'Aristote, des stoiciens et des néo-platoniciens (57) : en effet, à la
théorie des mondes infinis des pré-socratiques, Aristote opposait la
doctrine de l'infini sensible. les Stoiciens avaient repris cette doc-
trine aristotélicienne pour l'opposer à la théorie du monde infini
d'Epicure. Cette même doctrine sera reprise par les néo-platoniciens
e~à leur suite,par Augustin.
Cependant, il existe une différence de perspective qui sépare Augustin
de ses prédécesseurs. En effet, si chez ces derniers la doctrine répon-
dait à un problème de physique, chez Augustin, elle répond à un problè-
me de métaphysique : "Elle sert désormais, écrit Pierre Hadot, à oppo-
ser le mode d'existence propre au monde sensible au mode d'existence
propre au monde intelligible. Dans le développement d'Augustin, l'oppo-
sition entre quantité sensible et quantité intelligible semble n'~tre
destinée qu'à démontrer que le monde a des dimensions déterminées,
mais en fait cette opposition est, dans la lettre d'Augustin, moins un

-
50 -
instrument de la preuve que la fin de toute la d~monstration : en re-
connaissant les limites de la quantit~ sensible, on d~couvre l'infini
de la puissance de l'~me, la croissance à l'infini du nombre intelli-
gible"(5B).
Cette opposition entre "sensible" et "intelligible", qui a sans doute
une valeur ontologique g~nérale, trouve une de ces applications parti-
culières dans la recherche du bien béatifiant. Et si dans le texte de
la lettre 3, Augustin ne fait pas directement allusion au bien béati-
fiant, il n'en demeure pas moins que ce bien ne doit pas être recher-
ché dans les choses sensibles. En effet, ce qui fait qu'une chose "est",
c'est la permanence. L'existence du souverain bien obéit à ce m~De cri-
tère. Or, tout ce que nous percevons dans ce monde sensible se caracté-
rise par sa précarité: "Il est, je crois, bien entendu entre nous,
écrit Augustin à Zenobius dans la lettre 2, que ce que les ~ens peu-
vent atteindre ne saurait rester un seul moment dans le m~me état,
mais que tout cela passe et glisse sans durée permanente et, pour par-
ler comme les Latin~n'a point d'être." (59). A l'expression "eodem
modo manere" qui d~signe ce qui est le propre du souverain bien, s'op-
pose l'expression "labi
effluere et praesens hihil obtinere" qui dé-
signe la nature de tout ce qui appartient au monde sensible.
Les choses sensibles tendent donc nécessairement vers le non-être et
ne peuvent qu'entra!ner vers le néant celui qui s'attache à elles.
C'est pourquoi, écrit Augustin dans la lettre 3, "les philosophes ont
placé les richesses dans les choses intelligibles et l'indigence (eges-
tas) dans les choses sensibles" (60).

- 51 -
Les philosophes auxquels Augustin fait ici allusion sont les néo-
platoniciens et notamment Porphyre qui, dans l'une de ses 5ententiae,
,
,
lie d'une part l'état "d'indigence (~rroe'~) de l'~me" à la diminu-
tion propre à la quantité sensible, d'autre part l'état de "richesse
de l'~me" à la présence totale et transcendante de l'âme universelle
vers laquelle l'âme individuelle reste tournée (61). Ces mêmes philo-
sophes, parce qu'ils étaient conscients de la supériorité du monde
intelligible sur le monde sensibl~et parce qu'ils étaient persuadés
que l'amour pernicieux des biens temporels ne saurait procurer à l'hom-
me qu'un faux bonheur, enseignaient le détachement des biens terrestres
afin que, dans cette vie, l'âme puisse s'attacher à des biens immuables
et qui ne plaisent pas par une beauté passagère (62). Et si Augustin,
à leur suite, reconnaît une valeur aux biens temporels, c'est seulement
dans la mesure où celui qui les possède ne se laisse ni dominer ni
accaparer par eux et dans la mesure où ces biens nous aident à nous
procurer des biens meilleurs: "L'administration juste et charitable,
écrit-il à son bienfaiteur et ami Romanianus, accompagné de calme et
de paix, peut nous valoir la récompense des biens éternels si nous
possédons ces richesses sans qu'elles nous possèdent, si leur accrois-
sement n'embarrasse pas notre vie, si lorsque nous croyons les maîtri-
ser, elles ne nous enveloppent pas." (63). Mais puisque l'homme court
toujours le risque de se laisser accaparer par ces biens, il est pré-
férable pour lui de s'en détourner. Telle est la recommandation
qu'Augustin fait au même Romanianus : "Dégageons-nous, lui dit-il, du
souci des choses changeantes pour chercher des biens solides et cer-
tains
prenons notre vol plus haut que nos terrestres richesses.

- 5 2 -
C'est surtout pour échapper à l~abondance de son miel que l'abeille
a des ailes; il tue celle qui s'y enfonce." (64).
Ainsi, tout comme dans le De beata vita, c'est en faisant ressortir
le caractère éphémère des biens terrestres qu'Augustin, dans les let-
tres contemporaines du dialogue de Cassiciacum, montre que ces biens
ne constituent pas le souverain bien. Dans ces mêmes lettres, sa pen-
sée demeure encore profondément dépendante d~ la philosophie paienne
qui est son unique référence. La démarche qu'il suit dans les lettres
postérieures au De beata vita est touœ artxe puisque c'est sur la
relativité des biens terrestres qu'Augustin met l'accent.
RELATIVITE DES BIENS TERRESTRES
Dans les lettres postérieures au De beata vita, c'est surtout en oppo-
sant le caractère absolu du souverain bien à la relativité des biens
terrestres qu'Augustin fait voir à ses correspondants l'insuffisance
des biens terrestres à procurer le bonheur à l'homme.
En effet, le souverain bien, comme Augustin le déclare dans la lettre
118 [410/411], est le bien qui est aimé pour lui-même et auquel tous
les autres se rapportent : "Il n'y a de souverain bien, dit-il, que
celui auquel tous les autres se référent, car ce qui nous rend heureux
c'est la jouissance de la chose pour laquelle on veut toutes les au-
tres, c'est-à-dire celle que nous aimons pour elle-même et non pour
une autre. C'est pourquoi on appelle ce bien "bien suprême", "fin",
parce qu'on ne trouve rien au-delà. Là, en effet, nos désirs trouvent

- 53 -
leur achèvement, là nous jouissons de la sécurité, là réside la joie
très tranquille réservée à une pure et droite volonté." (65).
Partant de cette définition, Augustin examine l'un après l'autre les
biens par lesquels les hommes pensent pouvoir être heureux et arrivent
à la conclusion qu'aucun de ces biens n'est recherché pour lui-même.
Il est sans doute normal de rechercher les plaisirs parce que, ainsi
qu'Augustin l'écrit à Honoratus dans la lettre 140 [411/412J, c'est
par la vie des sens que commence toute vie humaine: l'enfant yest
jeté dès qu'il sort du sein maternel
il rejette autant qu'il le peut
tout ce qui peut y porter atteinte ; il ne recherche que les douceurs
et ne veut rien de plus, même si après, i l est de son devoir de repor-
ter ses désirs sur d'autres biens (66). Toutefois, ces plaisirs ne doi-
vent pas être recherchés pour eux-mêmes
car "une vie passée dans les
plaisirs de la terre est une mort plutôt qu'une vie", comme Augustin
le déclare à Celer dans la lettre 56 [396/402J (67). Pour éviter cette
mort, l'homme ne doit tirer des plaisirs que ce qui est nécessaire à
sa conservation. Tel est le conseil qu'Augustin donne à Proba dans la
lettre 130 [410/41~ : "Si les délices abondent, n'y placez pas votre
coeur ; ne vous enorgueillissez pas de ce qu'elles ne manquent pas à
votre vie, de ce que vous les avez selon vos souhaits et de ce qu'elles
découlent comme d'une source abondante de félicité terrestre. Méprisez-
les, elles sont inutiles en vous, et prenez-en seulement ce qui est
nécessaire à la conservation de votre santé." (68). Et lorsque saint
Paul, dont Augustin suit l'enseignement, recommande aux chrétiens de
ne pas laisser le souci de la chair s'accompagner de convoitises, il
montre par là que le souci de la chair n'est pas condamnable lorsqu'il

- 54 -
concerne ce qui est nécessaire à la santé du corps. Ce sont les Jouis-
sances superflues et les excès qui sont réprouvés.
Il est donc convenable (decens) de rechercher le nécessaire. N'ayant
rien apporté en ce monde, nous n'en emporterons rien. C'est pourquoi
nous devons nous contenter de quoi nous nourrir et de quoi nous vêtir.
C'est ce que saint Paul recommandait à son disciple Timothée (70).
C'est ca que souhaitait aussi l'auteur du Livre des Proverbes de peur
que, demandant plus, on ne tombe dans des désirs pernicieux et insensés
ou que, dans le besoin, on ne se révolte contre Dieu (71). Ce nécessai-
re n'est cependant pas recherché pour lui-même (propter se), mais pour
l'entretien suffisant de la personne humaine et pour la santé du corps.
Appelés que nous sommes à vivre avec d'autres hommes, nous devons veil-
ler à ce que notre attitude ne les choque pas (72).
La santé est donc un bien indispensable à l'homme. Aussi est-il conve-
nable (decens) de se la souhaiter à soi-même ainsi qu'à ses enfants, à
ses proches, à ses amis (73). Mais la santé elle-même n'est pas recher-
chée pour elle-même mais pour faire face aux nécessités de la vie (74).
En plus des désirs nécessaires ordonnés à la santé, il est d'autres
biens que l'homme désire obtenir comme les richesses, les honneurs,
l'amitié.
Il est en effet convenable de vouloir se procurer des richesses. Mais
celles-ci doivent êtra désirées non pas pour elles-mêmes, mais pour le
bien qu'on peut en tirer. D'où l'accord d'Augustin avec saint Paul
lorsqu'il exhorte les riches de ce monde à ne pas s'enorgueillir de

- 55 -
leurs richesses, à être charitables et bienfaisants, à donner de bon
coeur, à faire part de leurs biens aux pauvres (75). Ce n'est que de
cette façon que les richesses peuvent avoir leur raison d'être. Au-
trement, elles deviennent une source de tentation permanente pour l~omme.
En effet, elles sont la. racine de tous les maux et font naître dans
le coeur de l'homme des désirs innombrables et pernicieux selon les
paroles de l'Apôtre (76).
Pas plus que de rechercher les richesses sous les conditions que l'on
vient de voir, il n'est interdit de rechercher les louanges, les hon-
neurs et les dignités car "tous les hommes désirent être loués", selon
les mots mêmes d'Ennius qu'Augustin rapporte
dans la lettre 231
~AV
(428/430j. Augustin lui-même, citant les paroles du poète latin Perse,
reconnaît qu'il n'y est pas insensible: "Vous n'êtes donc pas insen-
sible à ces choses là ? Me dira quelqu'un. Bien au contraire
je ré-
ponds avec le poète que je ne suis pas assez stupide pour ne pas sen-
tir ces choses-là ou pour les sentir sans plaisir." (7B). Mais ces
louanges, ces honneurs et ces dignités ne doivent être désirés que
dans l'intérêt de ceux qui vivent sous notre dépendance et pour le
bien qu'ils peuvent permettre d'accomplir. En revanche, ajoute Augus-
tin, s'ils sont désirés pour eux-mêmes, par orgueil ou par un désir de
faste et de pompe superflue, par une vanité nuisible, on ne peut "dé-
cemment" les vouloir (79).
L'amitié aussi est indispensable dans cette vie "car dans toutes les
actions humaines, rien n'est amical pour l'hom~e sans un homme qui soit
un ami" (80). Nul sans doute n'a eu autant qu'Augustin le secret de

- 56 -
susciter des amitiés, d'en jouir et d'en révéler la force et la délica-
tesse. Et pourtant, cette amitié, si indispensable soit-elle, n'est pas
seulement recherchée pour elle-même, mais surtout pour les agréments
qu'elle nous apporte dans la prospérité et les consolations qu'elle
nous prodigue dans le malheur.
Par conséquent, parmi tous les biens par lesquels les hommes s'estiment
heureux, aucun ne se suffit à lui-même. C'est pourquoi, l'opinion de
ceux qui pensent que le bonheur consiste à avoir ce que l'on veut pour-
vu que cela soit "convenable" ne saurait ~tre retenue.
Se suffisant à lUi-même, le souverain bien est aussi seul en mesure de
rendre l'homme bon puisque "le bonheur de l'homme découle de la source
de sa bonté" (inde necesse est fiat homo beatus unde fit bonus) (81).
Aspirer au bonheur, c'est en effet vouloir devenir meilleur, c'est-à-
dire rechercher un bien qui élève et transforme. Cette recherche de la
perfection, les biens terrestres ne peuvent pas la procurer à l'homme.
En effet, l'homme ne devient pas bon par la possession des biens tempo-
rels. C'est plutôt lui qui les rend bons par l'usage qu'il en fait,
ainsi que Augustin le fait constater à Proba dans la lettre 130
[410/413J : "Ce n'est point par la possession de tels biens que les
hommes deviennent bons, mais ceUX-là) qui le sont devenus par une autre
voi~ changent en véritables biens ces fausses richesses par le bon
usage qu'ils en font. Ce n'est donc pas en elles que sont les vraies
consolations, mais plutôt là où est la véritable vie." (82).

-
57 -
Parce qu'ils ne se suffisent pas à eux-mêmes et parce qu'en soi ils
ne rendent pas l'homme bon, les biens terrestres sont donc incapables
de rendre l'homme heureux. Aussi, Augustin ne cesse pas d'exhorter
ses correspondants à se détacher des biens terrestres et à ne pas
leur accorder une trop grande importance. C'est ainsi qu'à Bonifatius,
il recommande dans la lettre 220 [427/429) de ne pas trop aimer les
biens terrestres, quelque grande que soit la part qu'il en a, d'en

user pour faire beaucoup de bien et jamais pour faire le mal, car seu~
les les bonnes actions demeurent (83). De même à Crisimus qui, après
avoir perdu ses biens, veut attenter à ses jours, il demand~ dans la
lettre 244 [426/427]) de ne pas se laisser aller à un acte aussi désespéré
afin de ne pas laisser à penser que ces biens avaient pour lui un prix
inestimable. Face à son "malheur", Crisimus doit songer qu'il est chré-
tien. Quand les richesses viennent, elles ne doivent pas enfler un
coeur d'homme et qui plus est, un coeur de chrétien. Elles ne doivent
pas non plus le briser si elles s'en vont (84).
Contrairement au De beata vita et aux lettres qui lui sont contempo-
raines où Augustin insistait sur la permQnence du souverain bien,c'est
en faisant prendre cODscience à ses correspondants du caractère absolu
du souverain bien et de la relativité des biens terrestres qu'il es-
saie, dans les lettres postérieures au De beata vita, de les acheminer
vers le bien béatifiant. Cette insistance qu'Augustin met sur la rela-
tivité des biens terrestres s'explique par le fait que la plupart de
ses correspondants appartiennent à la haute société et)pour catte rai-
son)possèdent da grands biens. Dans ces lettres, le philosophe s'efface

- sa -
devant le pasteur. Et si Augustin continue à s'inspirer des écrivains
profanes, c'est surtout les Ecritures Saintes, et plUs précisément les
Epîtres de saint Paul, qui lui servent de référence. Nous retrouvons
ce même souci du pasteur dans les sermons. Mais en présence de ses
fidèles, Augustin insiste moins sur la relativité des biens terrestres
que sur les dangers que ces biens peuvent représenter. Ce changement
de discours tient au fait que, contrairement aux destinataires des
lettres, les fidèles qui écoutent ses sermons sont pour la plupart des
gens peu fortunées. En leur faisant ainsi prendre conscience des dan-
gers des biens terrestres, Augustin veut empêcher qu'ils leur accordent
trop d'importance.
DANGERS DES BIENS TERRESTRES
C'est un mensonge, proclame Augustin dans le sermon 231
~près 400)
que de chercher le bonheur dans les biens terrestres, car rien sur la
terre ne peut rendre l'homme heureux
"Tu cours après l'or, parce que
tu penses que l'or te rendra heureux
mais non, l'or ne te rend pas
heureux. Pourquoi cherches-tu le mensonge ? Pourquoi cherches-tu un
rang élevé dans ce monde ? Parce que tu crois que les louanges des
hommes et les honneurs du monde te rendront heureux ; mais non, les
honneurs du monde ne te rendent pas heureux. Pourquoi cherches-tu le
mensonge ? Et je dirai la même chose de tout ce que tu cherches ici-bas,
de ce que tu cherches avec l'esprit du monde, en aimant la terre, en
t'attachant à la terre: tu ne le cherches que pour être heureux ;mais
rien sur la terre ne peut te donner le bonheur." (85). Croire donc que

- 59 -
les biens terrestres peuvent mener au bonheur est signe qu'on demeure
attaché au monde païen (saeculum) et qu'on n'a pas encore découvert
la vérité du Christianisme, c'est-à-dire qu'on est encore dans le
mensonge (mendacium). C'est pourquoi Augustin, pour élever ses fidè-
les à cette vérité, leur donne les raisons qui font que les biens
terrestres sont incapables de rendre l'homme heureux, et i l met l'ac-
cent sur les dangers qUe ces biens représentent pour l'homme.
En effet, les biens terrestres, ainsi qu'Augustin le fait apparaître
dans le sermon 301, loin d'~tre un "honneur" (honor) pour l'homme,
sont plutât un fardeau (~) qui l'éloignent du bonheur véritable
l'homme qui met son bonheur dans ce monde (felix homo secundum saecu-
lum) risque de voir la prospérité du siècle (felicitas mundi) corrom-
pre non son corps mais son âme (86). Et les biens terrestres sont bel
et bien une source de corruption pour l'homme car l'usage personnel
qu1il en fait est souvent mauvais: s'il désire se les procurer, c'est,
fait remarquer Augustin dans le sermon 32 [403J, pour les consumer
dans la débauche, dans les frivolités et dans des spectacles extrava-
gants (87). Ils contribuent aussi à fausser les relations interperson-
nelles : l'homme riche use de ses biens pour faire prévaloir sa puis-
sance sur les autres
i l opprime le pauvre, il recherche l'admiration
des autres (8B).
Ainsi, les biens terrestres font naître en l'homme l'orgueil. A peine
quelqu'un est-il plus riche que son voisin qu'aussitôt il le lui fait
sentir (89).

- 60 -
Source d'orgueil, les biens terrestres peuvent aussi faire naître en
l'homme la jalousie et le détourner de Dieu. En effet, dépourvu de
ces biens, l'homme peut porter envie à ceux qui les possèdent. De mê-
me, en voyant que ce sont les impies (gui non colunt Deum) qui profi-
tent de ces biens, il peut être amené à se dire que c'est en vain
qu'il adore Dieu (ideo putabis frustra te colere Deum) : à quoi lui
servirait en effet de rendre un culte à un dieu qui se montre plus
favorable à l'égard des impies que des hommes pieux? C'est pour met-
tre ses fidèles en garde contre ces deux tentations qu'Augustin les
exhorte, dans le sermon 19 [419J à mépriser les biens terrestres quand
bien même ils en posséderaient (90).
les biens terrestres font aussi perdre à l'homme sa liberté. En se
jetant à corps perdu dans le bonheur terrestre, l'homme perd sa digni-
té puisqu'il court toujours le danger d'être possédé par ses biens.
D'o~ l'avertissement qu'Augustin fait à chacun de ses fidèles: "Tu
veux posséder la terre, prends garde d'être possédé par elle." (91).
Accaparé
par ces biens, l'homme ne peut plus s'élever vers des biens
meilleurs. En effet, celui qui aspire au bonheur doit désirer posséder
un bien qui contribue à son développement spirituel. Ce bien doit donc
non pas détruire mais perfectionner. Or, les biens terrestres sont un
obstacle au progrès spirituel. Semblables à de la glue, ils retiennent
l'homme, font naître en lui des vices et l'empêchent d'être heureux.
C'est ce que l'évêque d'Hippone fait comprendre à ses fidèles dans le
sermon 311 ~01/405J où il les exhorte à savoir bien choisir les biens
qui doivent être l'objet de leur désir. Pour être judicieux, ce choix

- 61 -
doit être dicté par un amour lucide et clairvoyant: "Aimez et n'aimez
pas, leur dit-il; portez votre amour sur certains biens et ne les por-
tez pas sur d'autres. En effet, il est des biens dont l'amour conduit
au perfectionnement (ad profectum) et d'autres dont l'amour représente
un obstacle (impedimentum). N'aimez pas l'obstacle, si vous ne voulez
pas trouver votre tourment. Ce que vous aimez sur la terre est un obs-
tacle : c'est une glue pour les ailes spirituelles, c'est-à-dire pour
les vertus par lesquelles nous nous envolons ·vers Dieu." (92).
S'ils sont un obstacle pour l'homme, c'est surtout parce que tous ces
biens lui sont extérieurs (foris) et ne correspondent pas au désir de
bonheur qu'il ressent au fond de son être (intus). En effet, posséder
de grandes richesses, des habits somptueux, mener un grand train de
vie, avoir de nombreux serviteurs et une grande clientèle, être honoré
par les autres, tout cela est extérieur à notre moi profond. De tels
biens ne sauraient nous combler, et Augustin n'hésite pas à qualifier
de biens futiles et passagers ces avantages qui échoient aux méchants
aussi bien qu'aux bons (93).
Loin donc de nous procurer le bonheur, les biens terrestres sont, au
contraire, souvent la cause de nos malheurs. Combien en est-il, cons-
tate Augustin dans le sermon BD, à qui la pauvreté a été utile et les
richesses nuisibles ! Combien qui trouvaient la sécurité dans leur
via privée et qui n'ont trouvé que des embarras dans les hautes digni-
tés! (94). Ainsi les biens ter~estres, même s'il est légitime de vou-
loir se les procurer, n'en sont pas moins nuisibles. Et si Dieu parfois
refuse de nous les accorder, c'est toujours pour notre bien. En cela

- 62 -
il agit à notre égard comme un bon père de famille qui, malgré son
amour, refuse de faire monter son enfant sur un cheval ou de mettre
entre ses mains un objet tranchant de peur qu'il ne tombe ou ne se
blesse (95). Aussi, Augustin ne cesse pas d'appeler ses fidèles au
détachement des biens terrestres, en leur proposant l'exemple des
apôtres qui ont su dédaigner ces biens pour une meilleure cause (96).
Il met aussi devant leurs yeux l'exemple des figures bibliques en
opposant le sort de ceux qui mettent toute leur féficité dans le bon-
heur terrestre à celui de ceux qui attendent le bonheur d'une autre
source, tout en accordant sa préférence à ces derniers. C'est ainsi
que Goliat~ qui se glorifie de ses biens terrestres, est vaincu par
David (97) et que Esaü, qui met tout son espoir dans le bonheur terres-
tre, est soumis au joug de son frère Jacob (98).
La conclusion que nous pouvons tirer de cette analyse des biens terres-
~res est double
- D'abord, nous constatons qu'un changement de perspective s'opère
dans la façon dont Augustin, au cours de sa vie, aborde la question du
souverain bien et des biens terrestres
plus philosophique au début
où est mis en exergue la permanence du souverain bien en opposition à
la précarité des biens terrestres, sa pensée, dans les lettres posté-
rieures au De beata vita et dans les sermons)se fait de plus en plus
biblique. Son réalisme, qui porte en l'occurence sur la relativité des
biens terrestres et sur les dangers que ceux-ci peuvent représenter
pour l'homme, prend essentiellement sa source dans la méditation des
Epitres de saint Paul et plus généralement des Ecritures.

-
63 -
- D'un autre côté, il est à remarquer qu'Augustin n'appelle pas à un
renoncement aux biens terrestres qui irait jusqu'au mépris. Seulement,
s'il ne les exclut pas totalement, il situe les biens terrestres à
leur vraie place, et ceux-ci ne se confondent en aucun cas avec le
souverain bien qu'Augustin place en Dieu dans le De beata vita tout
comme dans la Correspondance et les Sermons.

- 64 -
"Summum bonum nostrum
Deus esse intelleqitur".
(Epist. 118, 16)
.C H API T R E
I I I
DIEU EN TANT QUE SOUVERAIN BIEN

-
65 -
Nous avons vu, dans le précédent chapitre, que les caractéristiques
essentielles qu'Augustin conférait au souverain bien étaient la per-
manence et l'"autonomie". C'est en montrant que Dieu est immuable,
qu'il se suffit à lui-même et qu'il est le principe de la vie qu'Au-
gustin le présente comme le souverain bien de l'homme.
DIEU EST LE SOUVERAIN BIEN PARCE QU'IL EST IMMUABLE
Augustin utilise cet argument de l'immuabilité de Dieu dans le De bea-
ta vita où, après avoir établi avec ses amis que le bien qui peut ren-
dre l'homme heureux doit être permanent et indépendant de la fortune,
il les conduit à reconnaître que Dieu seul répond à ces caractéristi-
ques puisque lui seul est éternel et immuable (Deus aeternus et semper
manens) et que celui qui possède Dieu est heureux (Deum igitur ••• ,qui
habet,beatus est) (99).
,
Mais c'est surtout dans la lettre 18, écrite entre 388 et 391, qu'Au-
gus tin expose la preuve par l'immuabilité (100). Dans cette lettre
qu'il écrit à Caelestinus et où il lui réclame ses écrits antimani-
chéens - il s'agit sans doute du De moribus Ecclesiae Catholicae et
du De qenesi contra Manichaeos -, Augustin entretient son correspondant
des trois substances que sont le corps, l'âme et Dieu, en donnant à
chacune d'elles les attributs qui lui sont propres.
Il commence par hiérarchiser ces
trois substances selon leur degré
de mutabilité :
- ee corps, substance matérielle, est soumis à la double mutabilité

-
66 -
spatiale et temporelle
"Est natura per locos et tempora mutabilis
ut corpus".
L'âme, substance immatérielle, ne cannait pas d'extension locale,
mais, comme le corps, elle est soumise aux variations de la durée
"Est natura per locos nullo modo sed tantum per tempora etiam ipsa
mutabilis ut anima".
Dieu, situé hors du temps et de l'espace, n'est sujet à aucune muta-
bilité : "Est natura quae nec per locos nec per tempora muta ri po-
test. hoc Deus est".
Le degré de mutabilité de ces trois substances fonde ainsi leur degré
d'excellence: Dieu, parce qu'il est immuable, est supérieur
à l'âme
qui elle-même est supérieure au corps.
Cette classification selon le degré de mutabilité permet d'établir:
- dans un premier temps, une répartition des trois substances en subs-
tances créées et en substance
créatrice. Le corps et l'âme, du fait
de leur mutabilité, appartiennent au monde des créatures qui est le
monde de la dispersion et de l'altérité: "Ouod quoquo modo muta bile
creatura dicitur". Dieu, par son immutabilité, est le créateur : "Ouod
immutabile creator (dicitur)".
- Dans un second temps, cette classification permet de procéder à une
hiérarchisation des trois substances en degré d'hêtre" grâce à l'adé-
quation qu'Augustin établit entre l"'être"
et la "permanence"
: "Omne
quod esse dicimus. in quantum manet dicamus" ; l'être parfait est celui
qui demeure toujours le même. A cette notion d'identité est liée celle
d'unité: "in quantum unum est". En effet, la tendance à l'être est
identique à la tendance vers l'unité: être, ç'est toujours être un

-
67 -
quelque chose doué d'unité. A cette notion d'unité elle-m~me est liée celle
de la beauté: "Omnis porro pulchritudinis forma unitatis sit", l'~tre
parfait étant la source d'où découle toute beauté
(101). Le corps à
cause de sa double mutabilité, spatiale et temporelle, occupe le rang
inférieur
dans la hiérarchie: "Quod infime et tamen est". L'~m~ qui
n'est soumise qu'à la mutabilité temporelle, occupe le rang intermé-
diaire : située au-dessus du corps "ma gis infimo", elle est inférieure
à Dieu "et minus summo" qui, immuable, est l'Etre par excellence "sum-
me est". Ainsi, chez Augustin, les deux termes "~tre" et "immuable"
sont rigoureusement synonymes : l'~tre étant proportionnel à l'immua-
bilité, chaque substance mérite le nom d'~tre pour autant qu'elle est
immuable, la substance qui jouit d'une parfaite immuabilité étant l'~-
tre parfait.
Cette hiérarchisation des trois substances en degré d'~tre détermine
leur degré de béatitude. Le corps, dernier des ~tres, ne peut être ni
heureux ni malheureux: "Infimum nec beatum potest esse nec miserum".
Ce n'est donc pas en lui que doit être recherché le souverain bien.
Quant à l'~me, placée entre le corps et Dieu, son bonheur dépend de
son orientation: elle est malheureuse si elle se penche vers le sensible
"Quod verum medium, vivit inclinatione ad infime misere". En effet, en
se tournant vers le corps, l'~me S8 disperse dans le multiple et se
détourne délibérément de celui pour qui elle est faite: créée à l'i-
mage da Dieu, ca n'est que dans la mesure où elle participe à Lui que
l'~me peut trouver le bonheur
"Conversione ad summe baate vivit",
puisque Dieu est la béatitude mima: "summum illud est ipsa beatitas".
Par conséquent, c'est en Dieu que réside le souverain bien de l'homme.

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Tel est donc le schéma essentiel qui ressort du texte capital de la
lettre 1B où Augustin situe le souverain bien en Dieu à partir de la
relation qu'il était entre les notions d'"immuabilité", d'"~tre" et
de bonheur. Dieu est l'Etre supr~me parce que lui seul est immuable
et en tant que tel, il est le souverain bien.
DIEU EST LE SOUVERAIN BIEN PARCE qU'IL SE SUFFIT A LUI-MEME
Le deuxième critère dont se sert Augustin pour établir le souverain
bien en Dieu est son "autonomie". Cet argument est développé dans la
lettre 118 [410/411J où, Augustin, examinant la question du bien suprê-
me en rapport avec les différentes doctrines philosophiques, déclare) à
la suite des philosophes, que le souverain bien ne peut ~tre placé que
dans le corps ou dans l'âme ou en Dieu: "Celui qui cherche comment
parvenir au bonheur ne cherche assurément rien d'autre si ce n'est la
fin du bien (finis boni), c'est-à-dire où est placé, non d'après une
opinion fausse et téméraire, mais d'après la vérité certaine et iné-
branlable, le souverain bien de l'homme; ce souverain bien, quel que
soit celui qui cherche où
il est établi, ne se trouve que dans le
corps ou dans l'âme ou en Dieu ou dans deux de ces trois substances
ou dans toutes à la fois."
(102).
Ce principe posé, Augustin montra que ni le corps ni l'âme ne peuvent
constituer le souverain bien puisque celui-ci, comme il a été dit
p.écédemment, se définit comme ce qui se suffit à lui-m~me. Or, ni le
corps ni l'âme ne se suffisent à eux-mêmes.

-
69 -
En effet, c'est de l'âme à laquelle il est uni que le corps reçoit sa
perfection. Puisque donc l'âme est meilleure que le corps, celui-ci
ne saurait être le souverain bien : "Donne-moi, écrit Augustin à Dios-
corus, quelqu'un qui verrait immédiatement que le corps n'est pas le
bien de l'âme, mais plutât que l'âme est le bien du corps; il ne sera
alors plus question de chercher si ce souverain bien ou une partie de
ce souverain bien serait dans le corps. En effet, il serait très stu-
pide de nier que l'âme est meilleure que la corps. De même, il serait
très stupide de nier que celui qui donne le bonheur ou une partie du
bonheur est meilleur que celui qui le reçoit • . Donc l'âme ne reçoit
pas du corps soit le souverain bien soit une partie du souverain bien".
(103).
De même que le corps, l'âme n'est pas à elle-même son propre bien et,
lorsqu'elle se prend comme tel, elle succombe à l'orgueil car elle pré-
tend jouir de sa propre excellence: "Donne-moi de même, écrit-il à
Discorus, quelqu'un qui verrait immédiatement que l'âme aussi elle-même
n'est pas heureuse par son propre bien lorsqu'elle est heureuse sinon
elle ne serait jamais malheureuse, et il ne sera plus question de
chercher si c'est dans l'âme que se trouve ce souverain bien et, pour
ainsi dire, le bien béatifiant ou une partie de ce bien béatifiant.
En effet, lorsque l'âme se réjouit d'elle-même comme de son propre
bien, elle est orgueilleuse."
(104).
N~tantni dans le corps ni dans l'âme, le souverain bien ne peut être
qu'en Dieu. Augustin se sépare ainsi des philosophes épicuriens et
stoïciens qui plaçaient le souverain bien ceux-là dans les plaisirs
du corps, ceux-ci dans l'excellence de l'âme.

-
70 -
DIEU EST LE SOUVERAIN BIEN PARCE QU'Il EST LE PRINCIPE DE LA VIE
Souverain bien parce qu'il est immuable et parce qu'il se suffit à
lui-même, Dieu l'est aussi parce qu'il est la source d'où découle tou-
te vie. C'est ce qui ressort du sermon 1S6 prononcé à Carthage entre
418 et 419. Dans ce sermon Augustin, ainsi qu'il l'a fait dans la let-
tre 18 et dans la lettre 118, établit le souverain bien par rapport
au corps, à l'âme et à Dieu (10S).
Ces trois substances se hiérarchisent selon leur degré de bonté. Augus-
tin reconnaît en effet la bonté du corps et de l'âme: tous deux sont
l'oeuvre de Dieu. Mais malgré leur bonté, ni le corps ni l'âme ne peu-
vent être considérés comme le souverain bien: placé au-dessous de l'â-
me et de Dieu, le corps représente un bien d'ordre inférieur (parvum
bonum). L'âme qui occupe le rang intermédiaire est un grand bien, sans
pour autant être le souverain bien (anima ergo magnum bonum, sed non
summum bonum). Situé au-dessus du corps et de l'âme, Dieu, en tant que
créateur, est le souverain bien.
Cette gradation des valeurs est coordonnée par une échelle des degrés
de vie. En effet, le souverain bien est ce qui confère la vie à chaque
degré de l'échelle. Le corps, qui n'a pas la vie en soi, participe, par
son union avec l'âme, à la vie de celle-ci. De même l'âme, bien que
supérieure au corps qu'elle anime, puisa, elle aussi, la vie dans un
principe qui lui est supérieur. Ce principe de vie ne paut être que
Dieu, son créateur. Pour na point mourir, l'âme a tout autant besoin
de Dieu que le corps a besoin d'ella pour se maintenir en vie. Et

- 71 -
puisque Dieu régit souverainement la partie la plus noble de notre être,
il possède par là-même aussi ce qui en nous se trouve subordonné à l'â-
me, à savoir notre corps. Devenue juste en vivant selon Dieu, l'âme
entraînera le corps dans sa propre béatitude. Encore faut-il qu'elle
choisisse délibérément de se tourner vers celui qui est san souverain
bien. Située entre le souverain bien et ce bien d'ardre inférieur qu'est
le corps, elle doit, d'une part, se détacher de ce qui ne peut que l'a-
baisser, d'autre part, ordonner sa vie a ce qui est meilleur qu'elle-
même. Il reste qu'elle a besoin d'être sans cesse secourue par l'être
même auquel elle se reconnaît fondamentalement liée. Appesantie par le
corps, imparfaite et fragile en elle-même, elle ne peut vivre selon
Dieu que par Dieu. Il ne suffit donc pas de vouloir dominer les pas-
sions extérieures et intérieures pour accéder au bonheur. Pas davantage
de se réfugier à l'intérieur de sai-même. Dieu seul peut nous guérir de
notre misère en nous délivrant de nous-mêmes.
En plaçant ainsi le souverain bien en Dieu, Augustin convie l'homme à
un dépassement de sai-même. En effet, la hiérarchie transcendante par
laquelle il nous élève sans cesse du corps à l'âme et de l'âme à Dieu
est la preuve manifeste que le bonheur est une réalité qui transcende
l'homme.
Par rapport à la problématique que j'ai posée dans l'introduction, à
savoir s'il était passible de déceler une unité dans le discours d'Au-
gustin sur le bonheur, ces trais premiers chapitres apportent une pre-
mière réponse. En effet, qu'il s'agisse de l'affirmation de l'univer-
salité du désir de bonheur et da l'identification du souverain bien,

- 72 -
la position d'Augustin a toujours été la même dans le De beata vita,
comme dans la Correspondance et les Sermons. Les différences vont
apparaître à propos du bonheur en Dieu, des conditions d'accès au
bonheur et des voies d'accès au bonheur, thèmes qui constituent les
trois autres chapitres de cette étude.

-
73 -
"Deum gui habet beatus est."
Augustin, De beata vita II, 11
"Vita itague non est nisi beata
et vita beata esse non potest
nisi aeterna."
Augustin, Serm. 84, 2
Blpsa enim est una vera et sola
beata vita ut contemplemur Oomi-
ni delectationem in aeternum."
Augustin, Epist. 130, 27.
CHA PIT R E l V
L E
BONHEUR
E N
DIE U

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Ce thème du bonheur en Dieu occupe sans aucun doute une place impor-
tante dans la réflexion d'Augustin relative au bonheur en général. En
tout cas, sur ce qui est de mon étude, le centre autour duquel s'ar-
ticulent les autres chapitres. En effet, l'analyse du "désir de bon-
heur" et la détermination de la nature du "souverain bien" achemi-
naient vers le "bonheur en Dieu" à partir duquel les thèmes des "con-
ditions d'accès au bonheur" et des "moyens d'accès au bonheur", qui
sont l'objet des deux chapitres suivants, trouvent leur origine. Mais,
le thème du "bonheur en Dieu" ne s'éclaire lui aussi que si l'on tient
compte des étapes décisives de la vie d'Augustin. Je déterminerai donc
quelle est la conception qu'Augustin se faisait de ce bonheur, d'abord
en tant que laic puis comme prêtre et évêque.
CONCEPTION DU "BONHEUR EN DIEU" DANS LE "DE BEATA VITA" ET DANS LES
LETTRES CONTEMPORAINES DU "DE BEATA VITA".
Dans le De beata vita, Augustin se sert de deux formules pour définir
le "bonheur en Dieu". La première se trouve en De beata vita II, 11 :
"Deum ••• gui habet beatus est" (106). La seconde est celle que nous
rencontrons en De beata vita IV, 35 : "IlIa est plena satietas animo-
ruro. haec est beata vita. pie perfecte cognoscere a guo inducaris in

veritatem. gua veritate perfruaris, per guid connectaris summo modo."
(107). Le bonheur est ainsi défini comme la p~ssession (habere) et la
connaissance (cognoscere) de Dieu. En quoi consistent cette posses~n
et cette connaissance ?

- 75 -
LA POSSESSION DE DIEU
---------------------
Un passage de la lettre 10 qu'Augustin écrit à son ami Nebridius entre
389 et 390 peut nous permettre de préciser la nature de cette posses-
sion. Dans cette lettre, Augustin parle de la pensée de la mort, pen-
sée familière à quelques-uns mais redoutée par le plus grand nombre,
et il poursuit: "Dieu a accordé à quelques personnes qU'il a voulu
qu'elles soient les timoniers des églises non seulement d'attendre ar-
demment la mort, mais encore de la désirer vivement et d'assumer sans
aucune angoisse leurs courses de pasteur. Mais, ni à ceux qui ont été
conduits à des charges de ce genre par l'amour des honneurs, ni en re-
tour à ceux qui, pendant qu'ils mènent une vie privée, aspirent à la
vie des affaires, je ne pense pas que, au milieu des bruits, des réu-
nions agitées et des allées et venues, il leur soit accordé ce grand
bien de se familiariser avec la mort comme nous le cherchons nous-mêmes.
En effet, la retraite permettrait aux uns et aux autres d'être déifiés
(deificari enim utrisaue in otio licebat)." (108).
Le verbe deificari nous suggère ici en quoi consiste la possession de
Dieu: c'est l'état de l'homme qui, totalement habité par Dieu, vit en
harmonie, en intimité avec Lui. La forme passive du verbe montre que
cet état est moins le fait de l'homme que de Dieu. Malgré l'opinion
de G. Folliet qui estime que "le terme deificari ne peut s'entendre
ici de l'élévation à l'ordre surnaturel par la grâce" (109), c'est bien
de cela qu'il s'agit. En effet, l'homme ne peut pas adhérer à la vie
divine si Dieu, le premier, ne l'appelle pas à lui. Ainsi, l'idéal de
vie auquel Augustin aspire est celui d'une vie contemplative. Le

-
76 -
compl~ment in otio, qui est adjoint au verbe deificari, indique les
conditions de la réalisation de cet id~al : on n'y parvient que si
l'on se tient à l'écart des affaires, loin du tumulte de la vie ordi-
naire afin de pouvoir vivre uniquement avec une âme délivrée de toutes
les passions: "L'otium, écrit A. Mandouze, est avant tout cette
disponibilité intérieure sans laquelle il n'est ni tranquillité de
l'âme, ni calme de l'esprit, deux choses pourtant indispensables à la
retraite en soi-même et au recueillement en Dieu." (110).
Participation de l'homme à la vie divine et présence totale de Dieu
en l'homme, tels sont les deux pôles qui définissent la possession de
Dieu, celle-ci devant aboutir à la Connaissance de Dieu.
LA CONNAISSANCE DE DIEU
------------------------
C'est en effet sur la Connaissance de Dieu qu'Augustin met l'accent
dans la seconde formule qu'il utilise pour d~finir le bonheur en De
beata vita IVI 35 : après avoir indiqué à ses interlocuteurs que seu-
le l'adhésion à la vie divine peut rendre l'homme heureux, Augustin
conclut : "Voilà donc la pleine satiété des âmes, c'est-à-dire le bon-
heur, connaître d'une manière pieuse et parfaite par qui on est intro-
duit dans la vérité, de quelle vérité on jouit, par quoi on est uni à
la mesure suprême." (111).
Cette priorité acccordée à la Connaissance de Dieu ressort de la struc-
ture grammaticale même du texte puisque c'est du verbe cognoscere que
dépendent les trois propositions interrogatives introduites par a guo,
~ et per guide Augustin réafFirmera d'ailleurs ce point de vue dans

- 77 -
la retractatio du De beata vita : "Dans ce livre, l'accord s'est fait
entre nous qui poursuivions ensemble cette recherche qu'il n'y a pas
de bonheur en dehors de la parfaite eonnaissance de Dieu." (112).
L'expression plena satie tas animorum
indique que cette connaissance
de Dieu est essentiellement le fait de l'âme. Ceci est d'ailleurs en
harmonie avec le début du De beata vita où Augustin promettait à ses
amis de leur offrir un banquet qui rassasierait plus leurs âmes que
leurs corps (113). Pour parvenir à cette connaissance de Dieu, l'homme
doit se retirer en lui-même puisque c'est uniquement dans les profon-
deurs de son âme, ainsi qu'Augustin l'écrit dans la lettre 10, que
l'homme parvient à entrer en contact avec Dieu
"Quisgue in mentibus
penetralibus adorat Deum." (114). Ceci suppose une disponibilité, une
ouverture intérieure de la part de l'homme. D'où l'emploi du verbe
inducere que nous trouvons dans le texte du De beata vita, précédemment
cité.
Cette connaissance de Dieu nous est aussi présentée avec ses corollai-
res. Le verbe perfrui indique que cette connaissance entraîne une
jouissance : c'est la pleine satisfaction de l'âme rendue à sa vraie
destinée et adhérant à son propre bien. En effet, cette connaissance
de Dieu répond à un désir naturel de l'âme qui trouve dans la jouissan-
ce l'aboutissement de sa volonté d'adhésion à la vie divine. Cette
jouissance doit donc être comprise à la fois sur le plan de la parti-
cipation ontologique de l'âme à Dieu, comme le fait remarquer Ragnar
Holte (115), et sur le plan affectif puisqu'elle exprime la joie que
l'âme tire de cette connaissance. Ce plaisir spirituel diffère c8pend~

- 78 -
de la délectation du sensible : alors que celle-ci disperse et désunit,
la jouissance de Dieu recueille et unifie.
D'où le second élément qui est lié à la Connaissance: l'union de l'â-
me avec Dieu. Cette union traduit un progrès dans l'approfondissement
des relations entre l'homme et Dieu par rapport à la connaissance et à
la jouissance. A la limite, l'homme peut rester extérieur à l'objet de
la connaissance au de la jouissance. L'union, elle, implique une inté-
riorité, une pénétration de la vie diuine en l'homme. Le verbe Connec-
tere qu'emploie Augustin est très expressif: il signifie "lier", "at-
tacher ensemble". Cette union avec Dieu trouve san expression la plus
complète dans l'extase qui est "l'union directe et immédiate de l'in-
telligence avec san objet, à l'exclusion des intermédiaires sensibles"
(115). C'est cette expérience de l'extase qu'Augustin décrit dans la
lettre 4 qu'il écrit à Nebridius (385/387J : "Quand, après avoir appelé
à man secours l'aide de Dieu, j'ai commencé à être élevé jusqu'à Dieu
lui-même et jusqu'aux choses qui sant vraiment vraies, quelquefois,
cette jouissance anticipée des réalités éternelles me remplit à tel
point que je m'étonne parfais d'avoir besoin de recourir au raisonne-
ment pour croire à la réalité des objets qui nous sont aussi présents
que chacun de nous est présent à lui-même." (117). Nous retrouvon~ à
travers ce texte, les éléments essentiels qui caractérisent l'expérience
mystique
le début de l'ascension vers Dieu (Coepera adtolli) sous
l'action de la grâce divine (deo in auxilium deprecato), l'instant d'é-
blouissement momentané ( ••• tanta non numguam rerum manentium praesump-
tione compleor) et la déception avec la chute inévitable, la retombée

- 79 -
dans le domaine du sensible et du temporel ( ••• ut mirer interdum illa
mihi oous esse ratiocinatione ut haec esse credam quae tanta insunt
praesentia quanta sibi guisque ipse fit praesens." (11B).
Ainsi, dans le De beata vita et dans les lettres qui lui sont contem-
poraines, le bonheur réside essentiellement dans la contemplation mys-
tique. Il est une possession de
Dieu qui aboutit à la connaissance de
Dieu qui, elle-même, entraîne la jouissance de Dieu et l'union avec
Dieu, union qui ne s'accomplit que par l'extase. Ceci signifie-t-il
que, pour Augustin, le bonheur est acquis dès ici-bas 7
BONHEUR TERRESTRE OU BONHEUR CELESTE 7
-------------------------
Tel qu'il ressort des textes que nous venons d'analyser, il semble que
le bonheur soit accessible dès cette vie. Certaines indications que
nous fournissent le De beata vita et les Retractationes vont aussi dans
ce sens. En effet, en dédiant le De beata vita à Manlius Theodorus
qu'il tenait pour un. homme déjà heureux - ce qui explique la demande
d'assistance qu'il lui adresse (119) -, Augustin semble souligner que
le bonheur peut être obtenu dès cette vie. Le fait aussi que, dans la
retractatio du De beata vita, il ait émis le reg~et d'avoir déclaré que
"dans le temps de cette vie, le bonheur habite la seule Ime du sage
dans quelque état que se trouve son corps" (120) est un autre signe
qu'il croyait alors à la possibilité du bonheur sur terre.
Mais lorsque, à la fin du De beata vita, Augustin déclare : "Cep~ndan~
aussi longtemps que nous cherchons, nous devons avouer que, ne nous
:

- 78 -
de la délectation du sensible : alors que celle-ci disperse et désunit,
la jouissance de Dieu recueille et unifie.
D'où le second élément qui est lié à la Connaissance: l'union de l'â-
me avec Dieu. Cette union traduit un progrès dans l'approfondissement
des relations entre l'homme et Dieu par rapport à la connaissance et à
la jouissance. A la limite, l'homme peut rester extérieur à l'objet de
la connaissance ou de la jouissance. L'union, elle, implique une inté-
riorité, une pénétration de la vie diuine en l'homme. Le verbe Connec-
~ qu'emploie Augustin est très expressif: il signifie "lier", "at-
tacher ensemble". Cette union avec Dieu trouve son expression la plus
complète dans l'extase qui est "l'union directe et immédiate de l'in-
telligence avec son objet, à l'exclusion des intermédiaires sensibles"
(116). C'est cette expérience de l'extase qu'Augustin décrit dans la
lettre 4 qu'il écrit à Nebridius (386/387J : "Quand, après avoir appelé
à mon secours l'aide de Dieu, j'ai commencé à être élevé jusqu'à Dieu
lui-même et jusqu'aux choses qui sont vraiment vraies, quelquefois,
cette jouissance anticipée des réalités éternelles me remplit à tel
point que je m'étonne parfois d'avoir besoin de recourir au raisonne-
ment pour croire à la réalité des objets qui nous sont aussi présents
que chacun de nous est présent à lui-même." (117). Nous retrouvon~ à
travers ce text~ les éléments essentiels qui caractérisent l'expérience
mystique
le début de l'ascension vers Dieu (Coepero adtolli) sous
l'action de la grâce divine (deo in auxilium deprecato), l'instant d'é-
blouissement momentané ( ••• tanta non numguam rerum manentium praesump-
tione compleor) et la déception avec la chute inévitable, la retombée

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dans le domaine du sensible et du temporel ( ••• ut mirer interdum illa
mihi opus esse ratiocinatione ut haec esse credam guae tanta insunt
praesentia guanta sibi guisgue ipse Fit praesens." (11B).
Ainsi, dans le De beata vita et dans les lettres qui lui sont contem-
poraines, le bonheur réside essentiellement dans la contemplation mys-
tique. Il est une possession de
Dieu qui aboutit à la connaissance de
Dieu qui, elle-même, entraîne la jouissance de Dieu et l'union avec
Dieu, union qui ne s'accomplit que par l'extase. Ceci signifie-t-il
que, pour Augustin, le bonheur est acquis dès ici-bas 7
BONHEUR TERRESTRE OU BONHEUR CELESTE 7
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Tel qu'il ressort des textes que nous venons d'analyser, il semble que
le bonheur soit accessible dès cette vie. Certaines indications que
nous fournissent le De beata vita et les Retractationes vont aussi dans
ce sens. En effet, en dédiant le De beata vita à Manlius Theodorus
qu'il tenait pour un. homme déjà heureux - ce qui explique la demande
d'assistance qu'il lui adresse (119) -, Augustin semble souligner que
le bonheur peut être obtenu dès cette vie. Le fait aussi que, dans la
retractatio du De beata vita, il ait émis le regret d'avoir déclaré que
"dans le temps de cette vie, le bonheur habite la seule âme du sage
dans quelque état que se trouve son corps" (120) est un autre signe
qu'il croyait alors à la possibilité du bonheur sur terre.
Mais lorsque, à la fin du De beata vita, Augustin déclare : "Cependan~
aussi longtemps que nous cherchons, nous devons avouer que, ne nous

- BD -
abreuvant pas encore à même la source, et pour me servir de ce mot,
à même la plénitude, nous n'avons pas encore atteint notre mesure, !t
c'est pourquoi, bien que Dieu déjà nous aide, nous ne sommes pas enco-
re sages et heureux" (121) , le bonheur se présente comme inaccessi-
ble ici-bas. Le fait aussi que, dans le passage de la lettre 4 que
nous avons cité plus haut, il ait parlé de "la jouissance anticipée
des choses éternelles" (rerum manentium praesumptione compleor) (122)
est une autre preuve qu'il concevait le bonheur comme seulement acces-
sible dans l'au-delà.
Cette double attitude d'Augustin, ses commentateurs s'accordent pour
la reconnaître. Certains mettent l'accent sur l'affirmation par Augus-
tin de la possibilité du bonheur sur terre. Un homme comme Gustave Bar-
dy pourrait être compté au nombre de ceux-là. En effet, dans son intro-
duction aux Retractationes, il soutient qu'Augustin, dans ses premiers
écrits, présentait le bonheur comme accessible dès cette vie : "Il est
remarquable,
écrit-il, que dans le De beata vita tout autant du reste
que dans le Contra Academicos où le problème du bonheur était déjà abor-
dé, et dans le De ordine, dans les Solilogues, dans le De guantitate
à~imae, aileurs encore, la béatitude soit présentée comme accessible
dès cette vie, et moyennant des conditions qui sont uniquement celles
de la sagesse humaine." (123). Toutefois, il émet des réserves puis-
qu'il déclare dans le même temps : "Il est vrai que saint Augustin n'a
jamais écrit que la béatitude pourrait être obtenue ici-bas ; mais il
s'est maintes fois exprimé comme s'il avait voulu le dire et nous au-
rions préféré trouver dans ses premiers ouvrages, les seuls qui soient
ici en question, des formules plus claires." (124).

-
81 -
D'autres, tout en reconnaissant qu'Augustin admettait la possibilité
du bonheur sur terre, considèrent cependant qu'il donne la primauté
au bonheur dans l'au-delà.
C'est la position qu'adopte Etienne Gil-
son: "La pensée d'Augustin, écrit-il, est arrêtée sur ce point dès
ses premières oeuvres : la béatitude parfaite n'est pas de ce monde.
Si donc il a rétracté plus tard certaines expressions équivoques, on
ne peut en conclure qu'il ait eu à changer d'avis quant au fend." (125).
C'est le même point de vue que défend Régis Jolivet : "Dans ses Retrac-
tationes, Augustin exprime son regret d'avoir dit dans le De beata vita
que l'âme puisse être heureuse ici-bas malgré les souffrances physiques
et les douleurs morales causées par l'injustice des hommes ••• En réa-
lité, le chrétien sait qu'ici-bas il ne peut y avoir de bonheur parfait
et que celui-ci est réservé à la vie future et à la parfaite possession
de Dieu." (126). C'est aussi l'avis d'Henri Iréné Marrou : "Dans quelle
mesure saint Augustin a-t-il toujours professé que la béatitude ne se
réaliserait qu'après la mort? L'idée est nettement exprimée dans la
conclusion du De beata vita." (127).
Si donc dans ses premières oeuvres, notamment dans le De beata vita et
dans les lettres qui lui sont contemporaines, Augustin semble admettre
les deux possibilités, sa pensée, dans les lettres postérie~res au ~
beata vita et dans les sermons, se fait plus précise parce qu'il affir-
me de façon péremptoire l'impossibilité du bonheur sur terre et parce
qu'il fait consister le bonheur dans la vision béatifique de Dieu dans
l'au-delà.

- 82 -
CONCEPTION DU BONHEUR EN DIEU DANS LES LETTRES POSTERIEURES AU DE
BEATA VITA ET DANS LES SERMONS.
Augustin ne cesse pas de répéter à ses correspondants qu'il n'est pas
donné à l'homme de jouir dès ici-bas du bonheur parfait. C'est ainsi
qu'à Januarius, il écrit entre 400 et 411 : "Rappelle-toi ce que je
t'ai déjà si souvent répété: nous ne devons pas dans cette vie préten-
dre au bonheur et à la délivrance de toute peine ; gardons-nous donc
de murmurer d'une bouche sacrilège contre Dieu dans les difficultés
comme s'il ne tenait pas sa promesse. Il a promis, il est vrai, ce qui
est nécessaire à cette vie, mais autres sont les consolations des mal-
heureux, autres les joies des bienheureux." (128). C'est aussi en des
termes similaires que, dans la lettre 69 écrite aux alentours de 402,
il s'adresse à Castorius alors qu'il le convie à suppléer son frère à
la charge épiscopale : "Nous savons qu'avec toi il n'est pas besoin de
beaucoup de paroles pour te faire voir la vanité des espérances de
l'homme, l'insatiabilité de ses désirs et l'incertitude de la vie.
Bannis donc de ton esprit tout ce qu'il avait pu concevoir de faux es-
poir de bonheur sur terre." (129).
De même, à ses fidèles, il fait comprendre que si le bonheur est une
bonne et grande chose, il a sa patrie qui lui est propre : "Res enim
bona et maqna est felicitas sed habet regionem suam." (130).

- 83 -
~ais Augustin ne se contente pas de ces déclarations générales. C'est
aussi par des exemples précis qu'il essaie de faire saisir cette véri-
té à ses interlocuteurs. Parmi ces exemples, nous trouvons entre autres
celui du chercheur d'or, le témoignage offert par la vie du Christ et
l'opposition entre la vie terrestre et la vie éternelle.
Le premier exemple se rencontre surtout dans les sermons. En cherchant
le bonheur sur terre, les fidèles d'Augustin ressemblent à un homme
qui s'évertuerait à chercher de l'or dans un endroit qui n'en contient
pas. Par sa prédicatiOQ, Augustin agit à leur égard comme le ferait au-
près d'eux quelqu'un qui les verrait retourner inutilement la terre à
la recherche du précieux métal. Oe.même que cet homme, convaincu que
la recherche de l'or est une bonne chose, essayerait de leur indiquer
l'endroit adéquat, de même Augustin, persuadé que le désir et la recher-
che du bonheur sont une bonne chose, s'efforce de les mettre sur le bon
chemin afin de leur éviter une quête superflue sur cette terre qui
n'est point le séjour du bonheur (131).
Augustin voit aussi dans la vie du Christ un autre exemple de l'impos-
sibilité du bonheur sur cette terre. Si le Christ avait trouvé le bon-
heur ici-bas, nous pourrions, nous aussi, espérer pouvoir être heureux
dès cette vie. Mais en prenant notre nature humaine, le Christ s'est
assujetti lui-même aux misères de notre vie : lui qui venait de la pa-
trie du bonheur, il a choisi une condition misérable ; aux richesses
et aux joies que la vie pouvait lui procurer, il a préféré la pauvreté
et les souffrances ; il a connu les pires injustices, il s'est offert

- 84 -
aux humiliations les plus basses et il a fini sa vie par la mort infa-
mante de la croix.
(132).
Mais c'est à travers l'opposition entre la vie terrestre et la vie
éternelle que l'impossibilité du bonheur sur terre apparaît le mieux.
De la vie humaine, Augustin relève en particulier les aspects néga-
tifs : les travaux que nous y supportons, les souffrances que nous y
endurons, les dangers auxquels nous y sommes exposés (133). Et, parmi.
les adjectifs dont il se sert pour qualifier cette vie, nous trouvons
entre autres : miserabilis (misérable ), aerumnosus (accablé de tour-
ments), laboriosus (laborieux), incertus (incertain).
Et pourtant, les hommes aiment cette vie présente quèlle qu'elle soit.
Malgré ses tr±stesses et ses misères, ils tremblent de la voir finir.
En effet, le bien le plus précieux auquel chacun s'accroche obstinément,
c'est la vie elle-même.: croyants et incroyants, tous essaient de la
prolonger le plus longtemps possible (134). Pour elle, les hommes sont
prêts à endurer les fatigues de tous genres : il n~st rien de plus
pénible pour l'homme que le travail. Et cependant, à quels travaux les
hommes ne s'adonnent-ils pas pour subvenir à leurs besoins?: "semer,
labourer, renouveler les plants, naviguer, moudre, cuire, tisser"
(135). Et de quelles précautions ne s'entourent-ils pas lorsqu'ils sen-
tent la mort approcher? Ils fuient, ils se cachent, ils s'assurent de
toutes les garanties possibles (136). Le malade est prêt à implorer, à
faire les promesses les plus onéreuses, à supporter toutes les souf-
frances pour recouvrer la santé (137). L'instinct de conservation est

- 85 -
est si enraciné en l'homme qu'il est prêt à sacrifier tout ce qu'il
possède pour demeurer en vie : non seulement le superflu qui contri-
bue à donner de l'agrément à la vie, mais même ce qui est nécessaire
pour la soutenir : "Combien en rencontrons-nous, constate Augustin
dans le sermon 302 ~ers 400], qui nous disent: 'que le fisc prenne
tout ce que je possède pourvu que je meure plus tard l' C'est pour con-
server cette vie que les hommes veulent posséder de quoi vivre, et
c'est pour conserver cette vie que les hommes sont disposés à donner
ce qui les fait vivre. Ce que tu réserves pour vivre, tu le donnes
pour sauver ta vie, au risque peut-être de mourir de faim. Et cependant
tu dis 'qu'on prenne tout ce que j'ai, que m'importe? Je consens à
mendier mon pain'~" (138).
Mais malgré leurs efforts, les hommes ne font que retarder leur mort
qui doit nécessairement arriver. Car de tous les évènements, heureux
ou malheureux qui jalonnent notre vie, seule la mort est certaine :
naître ou avorter, grandir ou non, être riche ou pauvre, malade ou
non ••• , à tout on peut dire "peut-~tre" sauf à la mort qui est inscri-
te en nous dès notre naissance, naissance qu'Augustin présente comme
une maladie dont on ne se relève pas (139). Oe quelque côté donc que
l'homme puisse se tourner, il rencontre la mort. Et, an voulant l'évi-
ter, il ressemble à un homme qui, pour échapper à un brigand ou à une
bête féroce, se précipite dans les eaux tumultueuses d'un fleuve (140).
Cette certitude de la mort nous laisse donc voir combien précaire est
notre passage sur terre. En effet, si longue qu'on puisse l'imaginer,
une existence qui doit un jour finir est nécessairement brève et,

- 66 -
comme le dit Augustin, "l'espace qui sépare la première enfance de
la vieillesse décr~pite est bien court" (a prima infantia usgue ad
decrepitam senectutem
brave spatium est.) (141). Catte brièvet~ de
la vie, le perpétuel ~coulement du temps contribue à nous en faire
encore plus prendre conscience : les générations succèdent aux géné-
rations, les siècles aux siècles, les années aux années. Les jours
eux-mêmes s'écoulent avec une rapidité effrayante :·a.ujourd'hui fait
disparaître hier et le jour de demain ne naîtra que pour chasser ce-
lui d'aujourd'hui (142). Précarité du temps qui s'écoule et qui s'en-
vole sans qu'on y prête attention!Et l'homme voudrait ne pas mourir alors
que le temps lui-même n'est pas éternel! Inséré dans la temporalité
et soumis par conséquent à la loi du devenir, l'homme n'en finit pas
de décliner. quel n'est donc pas l'aveuglement des hommes lorsqu'ils
fêtent leurs anniversaires ou celui de leurs enfants et qu'ils se sou-
haitent mutuellement de longues années! Dans leur égarement, ils ne
se rendent pas compte que l'accroissement, loin de multiplier leurs
années, les leur enlève : "0 homme avisé, ironise Augustin, ~i le
vin diminue dans ton outre, tu t'attristes et tu exultes quand s'écou-
le !e nombre de tes jours !" (143).
Plutôt donc que de penser vivre toujours, les hommes doivent vivre ici-
bas de manière à parvenir dans la vie véritable où ils seront sûrs de
trouver le bonheur.
Cette vie n'est autre que la vie éternelle où nous accéderons au
bonheur parfait :"Vita itague non est nisi beata et vita beata esse non
potest nisi aeterna." (144). Cette phrase fait apparaître la connexion

-
B7 -
étroite qu'il y a d'une part entre la vie et le bonheur, d'autre part
entre le bonheur et l'éternité. En effet, sans bonheur il n'y a pas
de vie : "Vita itaque non est nisi beata.". Mais il ne peut aussi y
avoir de bonheur sans éternité : "Vit a beata esse non potest nisi ae-
terna.". Par conséquent, la seule vie qui puisse assurer le bonheur
est la vie éternelle : "Tenemus certe non esse beatam vitam
nisi vi-
tam aeternam." (145).
En comparaison donc de la vie terrestre, la vie éternelle seule méri-
te le nom de vie : elle est la seule vie véritable sans laquelle il
n'est point de bonheur véritable : "Non ergo beata vita est nisi vera
vita nec vera vita est nisi aeterna vita." (146). Le lien qu'Augustin
établit entre "vérité" et "bonheur" indique que, pour lui, la découver-
te du vrai et l'accès au bonheur ne font qu'un
pour être heureux,
l'homme a besoin de certitude. Cette vérité ne se dévoilera à l'homme
que dans la vie éternelle ; la vie présente doit donc être la servante
de la vie à venir, libre de toute entrave et de tout soin inutile.
Dans cette vie où nous connaîtrons le bonheur dans sa plénitude, nous
ne trouverons rien de ce qui se rencontre ici-bas : nous n'aurons plus
de travaux pénibles à accomplir, de souffrances à endurer, de dangers
à craindre (147). Nous n'aurons plus à subvenir aux besoins de notre
corps, car nous ne serons plus soumis ni à la faim, ni à la soif, ni à
la nudité, ni à la maladie (148). Parce qu'il n'y aura plus de vices à
combattre, la pratique des vertus deviendra inutile : nous n'aurons
plus besoin de prudence pour distinguer le bien du mal, de force pour
supporter l'adversité, de tempérance pour réfréner nos mauvais penchants,

- BB -
de justice pour venir en aide aux indigents (149). Les oeuvres de mi-
séricorde elles-mêmes, qui étaient nécessaires sur terre, disparaî-
tront : il n'y aura plus d'affamés à nourrir, d'étrangers à accueil-
lir, de malades à visiter, de pauvres à vêtir, de morts à ensevelir
parce que la misère et la nécessité auront disparu (150). L'une des
caractéristiques du bonheur dans la vie éternelle sera ainsi l'aboli-
tian des oeuvres qu~ici-ba~ étaient excellentes.
Dans cette vie aussi, il n'y aura plus rien de muable et de passager :
à l'instabilité et au changement succèdera l'immutabilité; au tempo-
rel, l'éternel; à la corruption, l'incorruptibilité. Nous n'aurons
plus à craindre la mort parce qu'elle n'y aura plus de place. Nous
jouirons d'une santé et d'une vie sans fin.
~ais par-delà ces traits qui seront propres à chaque individu, il faut
aussi relever le caractère social de la vie éternelle. Pour Augustin
en effet, la béatitude céleste n'aura pas pour sujet uniquement les
personnes individuelles. Elle serauna béatitude communautaire, ainsi
que le fait remarquer Henri Iréné Marrou (151). En effet, ce sera de
concert avec l'ensemble des élus et avec les anges que, dans la vision
de Dieu, nous vivrons éternellement avec Dieu, en lui et de lui.
LE BONHEUR CELESTE : LA VISION DE DIEU
C'est en se référant à l Corinthiens 2, 9 qu'Augustin essaie de faire
saisir a ses fidèles et à ses correspondants le bien que Dieu réserve
aux élus. Ce bien, leur dit-il, "l'oeil ne l'a point vu, l'oreille ne

-
a9 -
l'a point entendu, le coeur de l'homme ne l'a point pressenti." (152).
La seule règle à suivre pour concevoir correctement ce bien est de re-
jeter toutes les pensées habituelles de notre esprit. En effet, ce bien
est si grand (tam magnum), si magnifique (tam praeclarum), si ineffable
(tam ineffabile) que si Dieu ne l'avait pas promis, il serait inimagina-
ble pour l'homme (153). Devant ce bien qui lui est promis, l'homme est
comparable à un enfant encore incapable d'user de ses membres à qui
l'on promet qu'un jour il sera en mesure d'en user et qui, considérant
sa faiblesse, ne veut pas croire à la promesse qui lui est faite (154).
Ce bien qu'Augustin présente de la sorte, c'est la vision de Dieu
"Nous verrons Dieu. Or cela sera si grand et ce sera une chose si gran-
de que rien ne peut lui ~tre comparé." (155).
Parvenir à cette vision est l'aspiration de tout homme. C'est elle qui
sous-tend toute notre volonté, toutes nos recherches, tous nos désirs :
"Nous voulons voir Dieu, nous cherchons à voir Dieu, nous désirons ar-
demment voir Dieu" (156), proclame Augustin. Nos prières n'ont de sens
que si elles se rapportent à cette vision puisque c'est vers elle que
doivent converger tous les biens que nous pouvons demander
"Quicon-
que, écrit Augustin à Proba, demande cette unique chose au Seigneur,
il la demande avec certitude et sûreté et il ne craint pas qu'elle lui
soit nuisible lorsqu'il l'aura reçue, cette chose sans laquelle ne lui
sert à rien tout ce qu'il aura reçu (en priant) comme il faut. En effe~
en lui-m~me, le seul vrai et l'unique bonheur est que nous contemplions
pour l'éternité la joie du S~igneur, devenus immortels de corps et d'es-
prit. C'est en vue de ce bonheur qu'on recherche et qu'on demande

- 90 -
convenablement tout le reste. Celui qui aura reçu ce bonheur aura tout
ce qu'il veut et, à ce moment, il ne pourra pas vouloir obtenir ce qui
ne conviendra pas. n (157).
Récompense suprême de l'homme, la vision sera donc l'aboutissement de
toutes ses actions : nTout ce que nous faisons, dit Augustin, tout ce
que nous nous efforçons de faire, tout ce que nous nous efforçons de
faire de façon louable, tout ce que nous désirons de façon irréprocha-
ble, lorsque tout cela aura abouti à la vision de Dieu, nous ne recher-
cherons pas davantage. En effet, que pourrait chercher celui à qui Dieu
est présent? Ou qu'est-ce qui pourrait contenter celui à qui Dieu ne
suffit pas ?n (158).
Pour montrer à quel point la vision de Dieu comblera l'homme, Augustin
ne manque pas d'établir la différence qui existe entre celui qui recher-
che le bonheur et celui qui y est parvenu : nLà, écrit Augustin dans la
lettre 130, est la fontaine de vie dont il faut maintenaQt avoir soif
dans la prière aussi longtemps que nous vivons dans l'espoir et que
nous ne voyons pas encore ce que nous espérons sous la protection des
ailes de Celui devant qui est tout notre désir, pour qu'un jour nous
nous enivrions de l'abondance des biens de sa maison et que nous nous
abreuvions au torrent de ses délices, puisqu'auprès de Lui est la sour-
ce de vie.; dans sa lumière nous verrons la lumière lorsque notre désir
sera rassasié de ses biens: nous n'aurons plus rien à chercher en gé-
missant ; nous nous réjouirons de ce que nous aurons obtenu." (159).
Au vu de ce texte, tant qu'il cherche le bonheur, l'homme est assoiffé
(sitire) ; il vit dans l'espoir (in spe) et le désir (desiderium) ;

-
91 -
sa recherche s'accompagne de g~missements (gemendo guaerere). En re-
vanche, l'homme qui est en possession (tenere)
du bonheur vit dans
la joie (gaudendo). Cette joie que ressent l'homme tient à plusieurs
facteurs.
En effet, la vision de Dieu,ainsi qu'il ressort du texte précédemment
cité, sera pour l'homme le commencement dôune autre vie. Par la vi-
sion, l'homme, comme l'écrit Raymond Duval, sera mis en présence de
Dieu: "L'idée augustinienne fondamentale est que la vision s'exerce
par rapport à une présence; voir Dieu équivaut à être près de." (160).
Par conséquent, voir Dieu signifie vivre avec Dieu puisqu'en Lui est
la source de la vie (fans vitae).
La vision de Dieu sera aussi, toujours d'après la lettre 130, 27, un
torrent de délices (torrens voluptatis) où l'homme trouvera l'apaise-
ment de sa faim (satiari) et de sa soif (enibriari), car Dieu sera à
jamais la nourriture et le breuvage de l'homme, ainsi qu'Augustin le
fait remarquer à ses fidèles : "Tout ce que tu cherchais ici-bas, tout
ce qui était ici-bas l'objet de ton estime, Dieu lui-même le sera pour
toi. Que voulais-tu ici-bas? Qu'aimais-tu? Manger et boire? Lui-mê-
me sera ta nourriture, lui-même sera ton breuvage." (161). Ce vocabu-
laire emprunté au registre alimentaire indique le lien vital qui unit
l'homme à Dieu. Vivant la vie même de Dieu, il est normal que l'homme
connaisse cet état de satiété complète et d'ivresse spirituelle.
Cette vision sera encore pour l'homme la révélation de la lumière divi-
ne dans sa plénitude: "In lumine ejus videbimus lumen". Cette clarté

-
92 -
sera telle que, illuminé par elle, l'homme deviendra "déiforme". En
effet, un des aspects fondamentaux de la vision sera que, par elle,
l'homme deviendra semblable à Dieu. Ce thème de la ressemblance était
déjà perceptible dans le De beata vita où Augustin parlait de "deifi-
cari" (162). Cette ressemblance de l'homme à Dieu, Augustin la fait
apparaître en commentant dans ses lettres et dans ses sermons ce pas-
sage de la première Epître de saint Jean: "Mes bien-aimés,.nous som-
mes les enfants de Dieu,mais ce que nous serons un jour ne nous paraît
pas encore. Nous savons que quand il apparaîtra, nous serons sembla-
bles à Lui parce que nous le verrons tel qu'il est." (163). La raison
profonde de cette ressemblance de l'homme à Dieu sera que, dans la vi-
sion céleste, l'homme découvrira Dieu dans sa nature propre. Et c'est
en se référant à la première Epître aux Corinthiens qu'Augustin rappelle
à ses correspondants et à ses fidèles cette réalité de la béatitude cé-
leste
"Nous ne voyons présentement Dieu qu'en énigme et comme dans un
miroir, mais alors, nous le verrons face à face." (164). En découvrant
ainsi Dieu dans sa nature propre, l'homme non seulement accédera à sa
véritable identité, mais parviendra aussi à la connaissance parfaite de
Dieu. Ainsi, la connaissance de Dieu) qui était mise en exergue dans le
De beata vita, (165) atteindra sa perfection dans la vision "face à face".
Connaissance parfaite de Dieu, la vision sera aussi amour de Dieu et
louange de Dieu : "Videbimus, amabimus, laudabimus", dit Augustin dans
le sermon 254. [412-416) (166). En effet, consentement de tout l'être à
Dieu, le bonheur des élus résidera dans la joie d'être, pour l'éternité,
en communion avec Dieu. C'est ce que Augustin exprimait dans la lettre
130 [410/413]lorsqu'il présentait le bonhéur comme la contemplation,

- 93 -
pour l'éternité, de la joie du Seigneur: wIpsa est una vera et sola
beata vita ut contemple mur delectationem Domini in aeternum." (167).
Cette joie de vivre en communion avec Dieu, les élus l'exprimeront par
la louange. Pour montrer la place prépondérante qu'occupera cette lou-
ange, Augustin
en fait l'unique activité des élus: "Solum negotium
laus Dei erit, actio nostra ibi alleluia erit." (168). Et, tout comme
la vision et l'amour, cette louange des élus ne conna!tra pas de fin:
"Ce que nous verrons ne s'affaiblira pas, ce que nous aimerons ne péri-
ra pas, ce que nous louerons ne cessera pas d'être l'objet de nos lou-
anges: tout sera éternel, tout sera sans fin." (169).
Une autre caractéristique de la vision sera que c'est l'homm~dans son
intégralité/qui en jouira. En effet, l'homme ne sera en possession de
ce bonheur qu'une fois devenu "immortel de corps et d'esprit", ainsi que
le disait Augustin à Proba dans la lettre 130 (170). Certes, le rôle
dévolu à l'âme demeure prépondérant: la vision de Dieu sera le fait de
l'âme qui seule est capable de comprendre ce dont elle jouit. Cependant,
le corps ne sera plus exclu du bonheur, puisque le bonheur de l'âme
rejaillira sur le corps qui parviendra ainsi à la plénitude de la santé
(171). Cette participation du corps au bonheur est un dépassement par
rapport au De beata vita puisque Augustin fait intervenir le dogme de
la résurrection des corps qui était absent du Dialogue de Cassiciacum.
Par rapport au De beata vita et aux lettres qui lui sont contemporaines,
nous notons un dépassement dans la façon dont Augustin conçoit le bon-
heur en Dieu dans les lettres postérieures au De beata vita et dans les

- 94 -
sermons. Dans le Dialogue de Cassiciacum et dans les premières Lettres,
le bonheur résidait essentiellement dans l'union mystique avec Dieu.
Mais cette union était encore incomplète puisqu'elle ne se réalisait
que de façon fugitive à travers l'extase. Dans les lettres postérieures
au De beata vita et dans les sermons, le bonheu~qui n'est plus réali-
sable ici-ba7 consiste surtout dans la vision face à face de Dieu.
Grâce à cette vision, l'homme parvient à une connaissance, à une jouis-
sance parfaites de Dieu et à une union totale avec Lui. De plus, ce
bonheur n'est plus seulement le fait de l'âme mais aussi du corps. Ce
changement de perspective que nous avons relevé pour ce qui est "du
bonheur en Dieu", nous le retrouvons dans les deux autres thèmes qui
constituent les deux derniers chapitres de notre étude : les conditions
d'accès et les voies d'accès au bonheur.

- 95 -
"Nemo sapiens nisi beatus."
Augustin, De beata vita II, 14.
"Beata vita merces est bonorum :
opus bonitas est, beatitudo mer-
ces est."
Augustin, 5erm. 150, 4.
CHAPITRE
v
:
LES CONDITIONS DrACCES AU BONHEUR

- 96 -
Tout comme le thème du "bonheur en Dieu", celui des "conditions d'ac-
cès au bonheur" est le reflet des deux périodes de la vie d'Augustin.
En effet, si dans le De beata vita et les lettres qui lui sont contem-
poraines, Augustin réserve le bonheur au sage (sapiens), dans les let-
tres de sa vie ecclésiastique et dans les sermons, il fait du bonheur
l'apanage des hommes bons (boni), c'est-à-dire de ceux qui se distin-
guent ici-bas par leur piété (pietas) et leur vie bonne (bona vita).
BONHEUR ET SAGESSE
SEUL LE SAGE EST HEUREUX
Certaines formules qu'Augustin utilise dans le De beata vita et dans
ses premières lettres permettent de dire qu'il réservait alors le bon-
heur au sage. En effet, deux phrases du De beata vita nous autorisent
à établir une synonymie entre "~tre heureux" et "~tre sage". La premiè-
re est celle que nous avons relevée dans notre introduction : "Nemo sa-
piens nisi beatus" (172). Nous trouvons la seconde phrase en De beata
vita II) 15 • Ce passage fait suite à la discussion sur les Académiciens
qu'Augustin refuse
de considérer comme heureux parce qu'ils soutien-
nent que la vérité est inacessible. Alors que Navigius et Trygetius se
rangent à l'avis d'Augustin, Licentius, ardent défenseur des Académi-
ciens, déclare attendre le retour d'Alypius avant de se prononcer.
Augustin lui répond en disant : "Je ne doute pas que, si Alypius était
présent, il ne se rende à mon brin de raisonnement. Il ne saurait en
effet avoir perdu le sens au point de penser qu'est heureux celui qui,
voulant de toute son ardeur avoir un si grand bien de l'âme ne l'a pas,

-
97 -
ou que ceux dont on parle ne veulent pas trouver la vérité ou que celui
qui
n'est pas heureux est sage (eum qui beatus non sit esse sapientam)."
De ces deux phrases : "Nemo sapiens nisi beatus" et "non enim tam
absurde sentire poterat ••• eum qui beatus non sit esse sapientem", il
ressort qu'être sage n'est rien d'autre qu'être heureux et être heureux
rien d'autre qu'être sage.
Deux autres formules de la même période nous sont fournies par la let-
tre 3 [386/387]. Au début de cette lettre, Augustin, comme nous l'avons
déjà mentionné au premier chapitre (174), s'étonne que son ami Nebri-
dius ait pu le considérer comme un homme heureux, vu que le bonheur
appartient uniquement au sage : "prope persuasisti mihi non quidem bea-
tum esse me - Nam id solius sapientis praedium -, sed certe quasi bea-
tum." (175). En utilisant le terme praedium qui appartient au vocabu-
laire juridique (175), Augustin fait du bonheur l'apanage du sage. L'ad-
jonction de l'adjectif solus vient renforcer cette idée de propriété
exclusive. Nous retrouvons cette même affirmation à la fin de la lettre
3. En effet, Augustin y oppose son attitude en face des biens de la
fortune à celle des sages; alors qu'il leur accorde encore de l'impor-
tance, les sages, eux, leur donnent peu de prix. Or, ils sont les seuls
qui méritent d'être appelés heureux: "Fortunae autem bona verissimi
sapientes quos solos beatos fas est vocari nec timeri voluerunt nec cu-
pi." (177). L'expression fas est appartient au vocabulaire religieux
et signifie ce qui est permis par la divinité, par opposition à nefas
est. Nous pouvons donc dire que, pour le jeune Augustin, le bonheur est
de droit divin réservé au sage, ce que corrobore l'emploi une fois de
plus de l'adjectif solus.

- 98 -
Mais
si Augustin accorde le bonheur au sage, il convient de préciser
ce qu'il entend par "être sage". A ce propos, nous trouvons dans le De
beata vita et dans les lettres qui lui sont contemporaines, deux ma-
nières de définir le sage: l'une qui procède par négation, l'autre
qui donne du sage un portrait positif.
LE SAGE SE DISTINGUE DE L'INDIGENT, DU LETTRE ET DU SAVANT
----------------------------------------------------------
Augustin distingue le sage de l'indigent, du lettré et du savant.
La première opposition apparaît à travers la formule que nous trouvons
en De beata vita IV)
33
: "Beatum esse nihil est aliud guam non egere,
hoc esse sapientem." (178). Une adéquation est ici établie entre "esse
beatum", "non egere" et "esse sapientem". Nous avons noté dans le deu-
xième chapitre qu'Augustin établissait, par l'intermédiaire de sa mère
Monique, un rapprochement entre le malheur et l'indigence (179). Pour
préciser la nature de l'indigence dont il est question ici, Augustin se
sert d'un exemple qu'il tient de Cicéron: celui de Sergius Orata. Ce
dernier était comblé de richesses, de luxe raffiné et de voluptés. Rien
de ce qui contribue au plaisir, au charme de la vie et à la perfection
de la santé ne lui faisait défaut ; il avait des domaines somptueux, des
amis agréables (180). Et pourtant, Sergius était malheureux. Par cet
exemple, Augustin montre que l'indigence ne consiste pas uniquement dans
le manque des biens terrestres. La véritable indigence est intérieure.
En effet, Orata était malheureux parce qu'il avait peur de perdre ses
biens, sentiment que n'éprouve pas le sage qui reste indifférent aux
biens de la fortune ainsi que le faisait ressortir le texte de la

-
99 -
lettre 3 [386/387J que nous avons précédemment cité (181). Nous avons
aussi montré dans le chapitre II, que pour Augustin, le bonheur était
incompatible avec la crainte (182). La crainte qu'éprouvait Orata était
donc le signe de son manque de sagesse : elle provenait de son incapa-
cité de discerner les faux biens des vrais biens, ce qui est la.·marque
même de la sottise. Celle-ci est donc la véritable indigence parce
qu'elle affecte l'âme: "Est ergo animi eoestas nihil aliud quam stul-
titia. n (183). Elle renferme en elle tous les vices, raison pour la-
quelle Augustin l'identifie à '~.eguitia" qu'il appelle nIa mère de tous
les vices". En effet, neguitia,qui est dite tirer sa racine de neguic-
guam)correspondrait sémantiquement à nihil et signifierait le fait de
ne rien valoir (184). Par cette identification des deux termes (stulti-
tia et neguitia), Augustin met en valeur l'idée du néant absolu que le
vice engendre en l'homme. Aussi, refuse-t-il de penser que le bonheur
puisse ~choir au sot : "quid, si etiam stultis beata vita contingit ?
Durum. quasi vero parva vel alia ulla miseria sit guam stultitia." (185).
Distinct du sot, le sage l'est aussi du lettré. On sait toute l'impor-
tance qu'avait priSe au temps d'Augustin la littérature écrite qui avait
relégué au second plan l'éloquence. Auprès de ses contemporains, Augus-
tin lui-même jouissait d'un grand renom à cause de son talent littérai-
re, comme l'a montré H.I. Marrou (186). Cependant, Augustin se garde
d'assimiler le sage au lettré. C'est ainsi que dans la lettre 3 [386/
387], il rejette l'idée que Nebridius ait pu le considérer comme un
homme sage à cause de ses modestes ouvrages : "An lectis illis libellis
etiam sapientem me ausus est credere ? Non usque adeo temeraria est

- 100 -
laetitia qestiens praesertim hominis cujus quanti ponderis conside-
ratio bene novirnus." (187)
Pas plus qu'il ne se confond avec l'homme de lettres, le sage ne l'e~
avec le savant. En effet, se demandant en quoi consiste le bonheur,
Augustin écrit, toujours dans la lettre 3 [386/387J : "Sed ubi est is-
ta beata vita ? Ubi ? Ubinam ? 0 si iosa esset repellere atomos Epicu-
ri
0 si ipsa esset scire nihil deorsu~ esse praeter mundum
0 si
ipsa esset nosse extrema sphaerae tardius rotari quam medium
Et alia
similia quae similiter novimus." (188). Pour mériter d'être appelé sa-
ge (et donc heureux), il ne suffit pas de remettre en question la théo-
rie atomiste d'Epicure par laquelle ce philosophe faisait provenir le
monde de la rencontre fortuite des atomes et sur laquelle reposait sa
doctrine du bonheur. Il ne suffit pas non plus de connaître la struc-
ture géocentrique de l'univers telle que se la représentaient la plu-
part des philosophes de l'Antiquité (189). Le bonheur consiste encore
moins à connaître le mécanisme de la rotation des sphères (190). Ces
considérations sur la physique permettent à Augustin de rejeter une
conception du bonheur dont le but immédiat se limiterait à connattre
la nature et à percer les mystères de la matière. Ce rejet de la con-
naissance scientifique apparaît plus nettement dans la lettre 11
[388/390J qu'Augustin écrit à Nebridius et où il passe sous silence
certaines de ses questions portant sur des problèmes de physique. De
telles recherchas, dit-il, n'ont pas de rapport avec le problème cen-
tral, celui du bonheur: "IlIa namgue guae de hoc mundo guaeruntur nec
satis ad beatam vitam obtinendam mihi videntur pertinere." (191). En

- 101 -
effet, si leur ~tude peut apporter de l'agr~ment, elle fait perdre du
temps pour des recherches plus importantes. Celles-ci doivent aboutir
à une conception du bonheur qui aurait Dieu pour objet et non une
connaissance du monde. C'est ce qu'exprime H.I. Marrou lorsqu'il ~crit :
"L'âme humaine, sa nature, ses besoins, Dieu qui explique l'une et com-
ble les autres; voilà tout ce qu'Augustin veut savoir." (192). Le sage
tel que le conçoit Augustin s'inscrit dans cetts optique.
En effet, dans le De beata vita, Augustin pr~sente le sage sous deux
aspects diff~rents
l'un où il insiste sur sa force morale, l'autre
où il met l'accent sur sa relation à Dieu.
LE SAGE SE SUffIT A LUI-~E~E
Le premier aspect, à savoir la force morale du sage, d~coule du portrait
qu'Augustin donne du sage en De beata vita IV1 25 • Il Y est prescrit,
en effet,que le sage prendra des biens mat~riels ce qui est à sa port~e
pour les n~cessit~s du corps et qu'il en usera honn3tement. Mais si ces
biens lui font d~faut, il ne se laissera pas abattre. De la m3me façon,
il ~cartera, dans la mesure du possible, les d~sagr~ments et les dou-
leurs qui menacent de le frapper; mais s'il ne peut pas les ~viter, il
les supportera sans se plaindre ni se troubler. En effet, le sage prati-
que la patience qui lui permet d'endurer tous les hasards et tous les
maux)sachant bien que les difficult~s de l'existence sont une loi de
la nature qu'il faut recevoir avec amour. Aien d'ext~rieur ne peut donc
nuire au sage : ni la pauvreté, ni la souffrance, ni la mort ne lui font

-
102 -
du tort puisqu'il se suffit à lui-même: "Non enim eis (sapientibus)
eget ipse animus, in guo posita est beata vita. Ipse enim perfectus
est ; nul lus autem perfectus aliguo eget." (193). A travers ce portrait,
Augustin rejoint la tradition des philosophes de l'Antiquit~. Pour la
maJorit~ de ceux-ci, le bonheur est li~ à la volont~ ; à cette force
int~rieure qu'est la vertu et provient du droit usage de la raison. Il
se rapproche notamment des stoiciens pour qui la pratique de la vertu
suffit à rendre l'homme heureux mais aussi des n~o-platoniciens qui
comptaient sur leurs propres forces pour parvenir à l'union mystique
avec Dieu.
Le second aspect)qui est la relation du sage à Dieu,d~rive de la formu-
le que nous trouvons en De beata vita I~ 33
: "Habet modum suum, id
est sapientiam, guisguis beatus est." (194). Cette formule fait appa-
raître une première ad~quationc: celle qui existe entre la notion de
mesure et le bonheur: "Habet modum suum ••• guisguis beatus est." La
mesure se d~finit comme l'observation de la limite à ne pas d~passer.
Cette notion de mesure est pr~sente dans plusieurs passages du De beata
vita. Il en est question à propos de la nature qui a assign~ au corps
une limite à ne pas d~passer dans l'ordre de la croissance (195). Nous
la retrouvons chez l'homme riche qui met une limite à ses désirs (196).
Elle r~apparaît au sujet de la mesure à observer dans la nourriture
(197) •
Cette mesure qui procure le bonheur à l'homme, Augustin l'assimile à la

- 103 -
sagesse. En effet, dans la formule que nous avons précédemment citée,
une adéquation est établie entre la mesure et la sagesse : "Habet modum
suum, id est sapientiam ••• n. Pour déterminer la nature de cette sages-
se, Augustin s'appuie sur deux textes scripturaires en De beata vita I~
34 • En effet, s'inspirant de l Corinthiens l, Z4 , Augustin assimile
la sagesse à la Sagesse de Die~, c'est-à-dire au Fils de Dieu (198).
Posséder la mesure, ou être heureux équivaut de ce fait à posséder le
Fils de Dieu qui lui-même est Dieu. Or, il a été montré plus haut que
l'homme heureux est celui qui possède Dieu (199). Par conséquent, le
sage est celui qui possède Dieu. Le second texte scripturaire auquel
se réfère Augustin est Jean XIV, 6 où le Christ déclare qu'il est la
Vérité. Ce verset johannique permet à Augustin d'identifier une nouvelle
fois la sagesse au Christ (200). Vérité engendrée par le Père qui est
la mesure suprême, le Christ est considéré comme le chemin qui mène au
bonheur : "Quisguis igitur ad summum modum per veritatem venerit beatus
est." (201). L'homme heureux (guisguis beatus est) est donc celui qui
se laisse mener par le Christ (per veritatem) vers le Père (ad summum
modum).
Comme nous
pouvons le constater, Augustin, aux premiers temps de sa
conversion, concilie l'enseignement des philosophes et celui du Chris-
tianisme. En effet, à l'instar des philosophes, Augustin présente le
sage; à qui est réservé le bonheu~comme celui qui se suffit à lui-même.
Mais pour le Chrétien qu'il est, cette conception paienne du sage ne
saurait suffire. Le bonheur véritable consistant dans la possession de
DieG, le sage est celui qui vit selon Dieu. C'est sur ce dernier aspect

-
104 -
qu'Augustin met l'accent dans les lettres postérieures au De beata vita
et dans les sermons où il fait du bonheur l'apanage des hommes bons, à
savoir ceux qui/ ici-bas/se seront distingués par leur pitié et leur vie
bonne.
BONHEUR ET BONTE
LE BONHEUR EST LA RECO"PENSE DES BONS
----------------------_..
Trois termes reviennent dans les sermons et dans les lettres de la pé-
riode ecclésiastique : praemium, merces et opus. En effet, dans ces let-
tres et sermons, Augustin présente le bonheur comme une rétribution
(praemium, merces). Il nécessite par le fait même un travail préalable
(opus). Par conséquent, si la perspective de la récompense enflamme le
coeur des hommes, elle doit en même temps éveiller en eux le désir de
la mériter : "Quel est, demande Augustin à ses fidèles, celui qui n'ac-
court lorsqu'on lui dit : "Tu sera heureux 1" Il faut que cet homme
écoute aussi volontiers lorsqu'on lui dit : " tu seras heureux" si tu
fais ceci. Il ne faut pas refuser le combat si on aime la récompense
et il faut que l'âme, enflammée,par la perspective de la récompense,
se porte avec ardeur au travail." (202). Seuls donc ceux qui n'auront
pas dédaigné d'accomplir les oeuvres que le bonheur requiert y auront
droit. Ceux-l~, aux yeux d'Augustin, sont ceux qui se seront signalés
ici-bas par leur "conté" •

- 105 -
En effet, Augustin fait du bonheur la récompense des "bons" : "Seata
vita merces est bonorum : opus bonitas est, beatitudo merces." (203).
L'acquisition du bonheur exige d'une part que l'homme ait une connais-
sance du bien béatifiant qui est Dieu, d'autre part qu'il s'oriente de
tout son être vers lui. Il y aurait en effet une contradiction de la
part de l'homme de découvrir la source du bonheur, de reconna!tre que
l'accès au bonheur passe par l'effort et de vouloir se l'octroyer sans
oeuvrer en conséquence pour la mériter. Aussi, c'est à juste titre
qu'Augustin interpelle l'homme pervers pour lui montrer que sa quête
du bonheur n'est que vaine impudence
"Tu ne vois donc pas que le bien
et le mal sont directe~ent opposés 7 Tu recherches le bien et tu fais
le mal. Tu cours en sens contraire. Quand comptes-tu arriver 7" (204).
La même apostrophe revient dans le sermon 306 [405/411] : "Pourquoi,
toi qui es
mauvais, cherches-tu le bien 7 Ta propre demande ne te mon-
tre-t-elle pas combien tu es malhonnête lorsque, toi qui es mauvais, tu
cherches le bien 7 Ne cherches-tu pas une chose qui t'est étrangère?
Si donc tu cherches le souverain bien, c'est-à-dire la vie, sois bon
toi-même pour parvenir au bien." (205). L'homme bon, tel que l'entend
Augustin est celui qui se distingue par sa piété et sa vie bonne.
SONTE ET PIETE
-----------
"Amando ilIum a guo est omne bonum, boni eritis" (206), dit Augustin
à ses fidèles. L'homme ~G~ se reconna!t d'abord par son amour envers
Dieu. Ici-bas, la première manifestation de cet amour est la piété.
En effet, Augustin fait du bonheur la récompense des hommes pieux

- 106 -
(praemium piorum) (207). C'est le salaire que recevront en retour, ceux
qui, durant leur vie terrestre, auront fait preuve d'une persévérante
piété: "Hic conetantissima pietas. ibi sempiterna felicitas" (20B).
Augustin définit la piété comme le vrai culte du vrai Dieu : "Vera pie-
tas, id est verax veri Dei cultus." (209). A travers cette définition,
nous voyons le cadre précis où Augustin confine sa pensée. A ses yeux,
il n'y a de vrai Dieu (verus Deus) que celui qu'enseigne la religion
cathoLique. Il ne peut par conséquent y avoir de vrai culte (verax cul-
~) que celui qui est rendu à ce m~me Dieu et accompli selon les pres-
criptions de la religion catholique. Par conséquent, nous pouvons affir-
mer qu'Augustin écarte de la vraie piété non seulement les paiens adora-
teurs de faux dieux, mais aussi tous ceux qui se réclament du Christia-
nisme et qui n'en respectent pas l'esprit: "Sous le terme d'impiété,
écrit André Mandouze, Augustin englobe les Manichéens, les paiens, les
Juifs, les hérétiques et les schismatiques." (210). Ainsi, seuls au-
raient part au bonheur ceux qui se font une juste conception de Dieu et
qui, à ce titre, lui rendent le culte qui lui est dû, ainsi qu'Augustin
le déclare lui-m~me dans la lettre 155 ~13/4141 : "Solus Deus veraci-
ter cultoribus suis post hanc vitam se largiturum esse promisit." (211).
Mais la piété, quoique nécessaire, n'est pas la seule obligation à la-
quelle est tenu l'homme de bien. A l'adoration de Dieu, il doit aussi
adjoindre une vie bonne.

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107 -
BONTE:.ET VIE BONNE
C'est à partir de leurs propres aspirations qu'Augustin fait prendre
conscience à ses interlocuteurs de la nécessité qu'ils ont de bien vi-
vre pour être heureux. Tous mauvais qu'ils sont, ils aiment à avoir de
bonnes choses : un bon cheval, une bonne terre, une bonne maison, une
bonne épouse, une bonne tunique et même une bonne chaussure (212). Au-
dessus de ces biens, ils placent leur propre vie qu'ils sont prêts à
conserver quitte même à se voir dépouiller de tous leurs autres biens.
La vie, en effet, a plus de prix que les biens matériels. Si donc, leur
dit Augustin, ils sont disposés à tout supporter pour préserver leur
vie, combien plus ils doivent accepter le prix que requiert la vie
éternelle et heureuse s'ils veulent en Jouir! Ce prix, c'est de mener
une vie bonne sur terre : nNous aimons donc la vie et nous ne doutons,
en aucune façon, que nous aimons la vie et nous ne pourrons nullement
nier que nous aimons la vie. Choisissons donc la vie si nous aimons la
vie. Que choisissons-nous ? La vie. Une vie bonne ici-bas pour commen-
cer, après cette vie bonne, la vie ~ternelle. Une vie bonne ici-bas
pour commencer sans qu'elle soit encore heureuse. Une vie bonne mainte-
nant, le bonheur lui est réservé après. La vie bonne est l'oeuvre, le
bonheur est la récompense. Mène
une vie bonne et tu recevras le bon-
heur (bona vita opus est, beata merces est. Age bonam et accipies bea-
~)n (213). La même exhortation revient au sermon Guelferb 12 [412J
nSi tu veux avoir une vie mauvaise, quel es~ celui qui te donnera la
vie éternelle et heureuse ? Mais si tu veux parvenir à la vie éternelle
et heureuse, aie une vie bonne ici-bas. La vie bonne, voilà l'oeuvre à

- 108 -
faire ; le bonheur, voilà la récompense. Mais, si tu refuses le travail,
par quelle audace cherches-tu la récompense 7" (214).
Vivre bien, c'est pratiquer les vertus qui permettent à l'homme de vi-
vre en accord avec soi-même, avec les autres et avec Dieu. C'est la pra-
tique de ces vertus qu'Augustin a en vue lorsque, dans la lettre 104
[408/410J, il concède à son correspondant paien Nectarius la possibili-
té de parvenir au bonheur par des voies et des sentiers divers : "Si
toutefois, lui écrit-il, tu as parlé de voies variées de telle sorte
que nous ne comprenions pas des voies opposées, mais de la même façon
que nous, nous parlons de préceptes variés qui cependant tous édifient
une vie bonne, les uns à partir de la chasteté, d'autres à partir de
la patience, d'autres à partir de la foi, d'autres à partir de la misé-
ricorde, et d'autres encore, non seulement cette patrie est ainsi re-
cherchée par des voies et des sentiers divers, mais elle est aussi
trouvée." (215).
Cette vie bonne, qui consiste dans la pratique des vertus, Augustin
l'insère dans une morale entièrement chrétienne. C'est en effet ce qui
ressort de la lettre 155 [413/414J. Au paragraphe 9 de cette lettre,
Augustin explique à son correspondant Macedonius que le bonheur ne ré-
side pas dans les "virtutes animi" des philosophes et que l'homme ne
peut pas mener une vie vertueuse ni être heureux sans le secours de
Dieu. Nous devons donc demander à Dieu et la vertu pour triompher des
maux de cette vie et la félicité éternelle dans l'autre: "Ac per hoc
a Domino nostro, a qUO facti sumus, et virtutem petamus, qua hujus vi-
tae mal a superemus, et beatam vitam qua post istam vitam in ejus aeternitate

-
109 -
perfruamur. ut in virtute. sicut Apostolus dicit. gui gloriatur in
Domina glorietur." (216).
~ais il ne suffit pas à l'homme de recevoir de Dieu les vertus et de
les orienter subjectivement vers Lui; il lui faut aussi viser par tou-
te sa conduite - exemple ou activit~s, encouragements ou menaces - à
ramener au culte de Dieu les autres hommes et à subordonner ainsi leur
bonheur temporel à leur bonheur ~ternel. Ce n'est qu'à cette condition
que les vertus deviennent de vraies vertus sous l'influence de la grâ-
ce qui les fait croître et les parachève pour la vie ~ternelle. Tel
est le langage qu'Augustin tient à ~acedonius au paragraphe 12 de la
lettre 155 [413/41~: "Si en effet, lui dit-il, comprenant à qui tu
dois les vertus que tu as reçues et lui en rendant grâces, tu les rap-
portes à son culte même dans l'exercice de tes fonctions, si, par l'exem-
ple de ta vie religieuse et par ton application à prodiguer des conseils
soit en donnant des encouragements, soit en pref~rant des menaces, tu
diriges et conduis les hommes qui sont soumis à ton pouvoir au culte
de Dieu et si, en cherchant à leur procurer une vie plus ais~e, tu n'as
d'autre but qu'à les rendre dignes de celui auprès de qui ils trouveront
le bonheur, alors ces vertus seront de vraies vertus et avec le secours
de celui qui te les a donn~es, elles croîtront et se perfectionneront
de façon à te conduire sans aucun doute à la vie v~ritablement heureuse
qui n'est autre que la vie ~ternelle." (217).
Au vu de ce texte, nous pouvons dire qu'il existe une différence entre
les premiers temps de la conversion d'Augustin et sa vie ecclésiastique.
En effet, si au d~but de sa conversion, Augustin, parce qu'il subissait

- 110 -
encore l'influence des philosophes. accordait une certaine place à la
morale paienne. il n'en est plus de même au temps de sa vie religieuse.
Certes. Augustin ne d~nie pas toute vertu aux paiens et il ne manque
pas. lorsque l'occasion se présente. de citer en exemple les vertus des
grands hommes paiens. C'est ainsi que. à Nectarius. qui redoute que ses
concitoyens ne soient priv~s de leurs biens à la suite de leurs outra-
ges
contre les Chr~tiens de Calama. il r~pond qu'il ne cherche pas à
les réduire à la charrue de Cincinnatus
Quintius ou au foyer de Fabri-
cius quoique. ajoute-t-il. cette pauvret~ ait valu à ces hommes le res-
pect de leurs concitoyens et les ait rendus plus aptes à gouverner leur
patrie (218). Mais quelles que grandes que soient les vertus des paiens.
elles ne peuvent pas ~tre consid~r~es comme de vraies vertus dans la
mèsure où elles n'aboutissent pas au culte du vrai Dieu (219). Ainsi.
de même qu'il réservait la vraie pi~t~ aux seuls chrétiens. de même
Augustin leur réserve la vie bonne et par conséquent le bonheur.
Si donc au lendemain.de sa conversion Augustin d~terminait l'homme heu-
reux à la lumière des th~ories des philosophes et de l'enseignement du
Christianisme. au temps de sa vie eccl~siastique. l'homme à qui est ré-
servé le bonheur n'est plus d~fini que par rapport à l'enseignement de
la religion. Nous retrouvons ce même processus lorsque Augustin aborde
la question des voies d'accès au bonheur.

- 111 -
"Nemo enim facit beatum
hominem nisi gui fecit hominem"
Augustin, Epist. 155, 2.
e H API T R E
V l
LES VOIES DrAeeES AU BONHEUR

- 112 -
S'il est vrai que tous les hommes aspirent au bonheur, ils se divisent
dès qu'il s'agit de savoir par quelle voie y parvenir (220). C'est
pourquoi, le souci d'Augustin a été de rechercher la voie adéquate qui
mène au bonheur. La réponse qu'il a donnée est, comme les deux thèmes
précédents, à l'image des différentes phases de sa vie. En effet si,
dans le De beata vita, il propose simultanément la philosophie, les
arts libéraux et l'aide de Dieu comme le9 voies d'accès au bonheur, la
critique qu'il porte ensuite durant sa vie religieuse à la culture pro-
fane, aux différentes écoles philosophiques et aux thèses conservatri-
ces de certains de ses correspondants païens adeptes du néo-platonisme
l'amène à ne plus considérer que l'aide divine comme la voie d'accès
au bonheur.
LES VOIES D'ACCES AU BONHEUR DANS LE "DE BEATA VITA" (221)
LA MEDIATION DE LA PHILOSOPHIE
= = = = = = = = = = = = = ===
L'une des voies que propose Augustin est la philosophie. Sa médiation
dans la marche vers le bonheur est nécessaire. En effet, Augustin a
présenté d'abord la philosophie comme le port d'où l'on s'avance vers
la région et la terre ferme du bonheur: "Philosophiee portus ••• a guo
jam in beatae vitae regionem solumgue proceditur." (222). L'itinéraire
qui mène au bonheur implique que les hommes pénètrent d'abord dans ce
port.

-
113 -
Aussi, Augustin ne manque pas, dans les Dialogues de Cassiciacum,
d'exhorter ses amis à se tourner comme lui vers la philosophie. C'est
l'invitation qu'il fait en particulier à Romanianus dans la dédicace
du Contra Academicos,(223). Il n'hésite pas, pour l'encourager, à lui
citer l'exemple de son propre fils Licentius
"Notre Licentius, lui
dit-il, partage ma vie avec une grande ardeur. Il s'est converti tout
entier à la philosophie et a renoncé aux séductions et aux plaisirs
de la jeunesse, si bien que je n'aurais aucun scrupule à le proposer
en exemple à son père. La philosophie, en effet, est telle que nul âge
ne se plaindra d'être exclu de son sein." (224). C'est aussi la même
exhortation qu'il fait à Zenobius à qui est dédié le De Ordine (225).
En présentant ainsi la philosophie COmme une des voies qui mènent au
bonheur, Augustin s'inscrit dans la ligne des philosophes anciens.
Pour ceux-ci en effet, le seul but de la philosophie est de conduire
au bonheur : "Omnis summa philosophiae ad beate vivendum refertur id-
gue unum expetentes homines, se ad hoc studium contuleruntD , dit Cicé-
ron dans le De finibus (226). La même affirmation revient au livre V
du De finibus : "Omnis auctoritas philosophiae consistit in beata vi-
ta comparanda
beate enim vivendi cupiditate incensi omnes sumus."
(227). Sénèque, pour sa part, déclare dans la lettre 90 à Lucilius :
"Ad beatum statum tendit (philosophia), illo ducit, illo vias aperit."
(228).
L'accès à la philosophie nécessite cependant une formation préalable
assurée par l'étude des arts libéraux.

- 114 -
LA ~EDIATIDN DES ARTS LIBERAUX
::::= = = = = = = = = == = = = == =
Dans le De beata vita, Augustin oppose les âmes des docti à celles des
imperiti. Alors que celles des premiers sont dites wplus pleines et
plus grandes w, celles des seconds, qui n'ont reçu aucune instruction,
sont considérées comme wà jeun et affamées w (229). De même, dans le De
ordine, Augustin déclare qu'il ne peut pas tenir pour heureux ceux qui
dédaignent l'étude des arts libéraux, quand bien même ils mèneraient
une vie vertueuse: wCeux qui, s'étant contentés de l'autorité, n'ont
fait que s'appliquer avec constance aux bonnes moeurs et aux pensées
droites, soit par dédain des disciplines libérales, soit par impossibi-
lité de s'y livrer, je ne sais comment je pourrais les dire heureux
aussi longtemps qu'ils vivent parmi les hommes. w (230).
Cette importance qu'Augustin accorde aux arts libéraux tient non seule-
ment au fait qu'ils permettent d'acquérir une wCulture générale w (231),
mais aussi à ce qu'ils sont un moyen d'exercice pour s'adonner à la
Contemplation. En effet, si celle-ci se révèle être impossible au du
moins difficile pour les ignorants, elle est toute naturelle aux esprits
cultivés: wSel on Augustin, écrit Ilsetraut Hadot, seul l'homme pleine-
ment cultivé (eruditus)
peut atteindre à la connaissance de Dieu et de
l'âme. Il veut dire par là que cette connaissance est impossible soit à
l'homme qui est encore l'esclave de ses passions, soit même à celui qui
s'est puri fié mais qui ne comprend pas les notions· philosophiques." (232).
C'est ~a raison pour laquelle Augustin incite les hommes intelligents
et studieux à parcourir le cycle des arts libéraux. Et,après avoir énu-
méré dans le De ordine tout ce qu'ils doivent apprendre (la grammaire,

- 115 -
la rhétorique, la dialectique, l'arithmétique, la géométrie, la musi-
que et l'astronomie), il ne manque pas de leur rappeler que l'étude
des disciplines libérales ne constitue pas un but en soi, mais qu'elle
doit être subordonnée à une fin qui est la contemplation des réalités
divines: "Si quelqu'un ne se laisse pas vaincre par ces images et s'il
rapporte à une unité déterminée, simple, uraie et certaine toutes les
choses qui sont déployées à travers toutes ces sciences d'une manièrg
ample et variée, méritant alors au plus haut point le nom de "cultivé",
il ne cherche plus désormais à la légère ces réalités divines qu'il ne
s'agit plus seulement de croire, mais de contempler, de comprendre et
de retenir." (233).
Cette place qu'Augustin accorde à ce moment-là aux arts libéraux dans
la quête du bonheur explique le soin qu'il prend d'assurer la formation
de ses deux élèves Trygetius et Licentius : s'il se livre avec eux aux
exercices de la dialectique et s'il n'hésite pas à les renvoyer à leurs
leçons, c'est parce qu'il veut les orienter vers la contemplation, ain-
si que l'écrit H.I. ~arrou : "Augustin cherche à modeler ces jeunes
esprits en fonction de son idéal philosophique
certes, il veut les
attirer à la recherche métaphysique, mais il faut d'abord qu'ils aient
achevé leurs études préparatoires, le cycle des sciences et en particu-
lier les études littéraires normales; c'est pour cela qu'Augustin leur
fait expliquer Virgile, qu'il tempère leur jeune enthousiasme et les
renvoie à leurs devoirs scolaires." (234).
Néanmoins, quelqu'important que soit le râle que la philosophie et les
études libérales jouent dans la quête du bonheur, elles ne suffisent

-
116 -
pas à mener l'homme au bonheur. Pour y parvenir, l'homme a aussi besoin
de l'aide divine. C'est là une conviction bien ancrée en Augustin dès
son séjour à Cassiciacum.
LA ~EDIATION DE LA GRACE
------------------------
Le bonheur est essentiellement un don de Dieu. C'est ce que Augustin
dit à Manlius Theodorus à qui il veut faire connaître la nouvelle
orientation de sa vie
"Pour que tu connaisses ce que Je fais et com-
ment je rallie à ce port (de la philosophie) mes amis, et pour que,
par ce moyen, tu saisisses plus pleinement mes sentiments, ne trouvant
pas d'autres signes qui me révèlent, j'ai pensé que je devais t'envoyer
par écrit et te dédicacer aommément l'exposé qui, parmi mes discussions,
a pris, à mon sens, la tournure la plus religieuse et mérite le plus
que tu lui donnes son titre. Cela convient parfaitement, car nous avons
discuté entre nous du bonheur et je ne vois rien d'autre qui mérite
plus le nom de don de Dieu (nam de beata vita guaesivimus inter nos
nihilgue aliud video guod magis Dei donum vocandum sit)." (235). Répon-
se divine aux efforts de l'homme, le bonheur ne peut pas être atteint
sans le secours de Dieu. Ce n'est donc pas l'aspiration naturelle de
l'homme au bonheur qui le conduit à Dieu, mais c'est Dieu qui, le pre-
mier, appelle l'homme à lui. La doctrine de la grâce est déjà présente
dès les premiers Dialogues de Cassiciacum.
Les voies qu'Augustin propose au lendemain de sa conversion correspon-
dent à la conception qu'il se fait du bonheur à cette époque. Il ne
cherche pas à rompre avec la tradition classique parce qu'il considère,

- 117 -
comme l'enseignent les philosophes, que la philosophie et les ~tudes
lib~rales peuvent être utiles à l'acquisition du bonheur. Mais, en tant
que chrétien, il place le bonheur en Dieu et, pour cette raison, il
estime que l'aide de Dieu est n~cessaire à l'homme. L'orientation tota-
lement religieuse que prend sa conception du bonheur une fois qu'il est
entr~ dans la vie ecclésiastique l'amène à prendre du recul par rapport
à la culture profane et aux différentes doctrines philosophiques et à
ne plus considérer que l'aide divine comme moyen d'accès au bonheur.
LA VOIE D'ACCES AU BONHEUR DANS LES LETTRES POSTERIEURES AU "DE BEATA
VITA" ET DANS LES SERMONS
CRITIQUE DE LA CULTURE PROFANE
---------------------
Nous venons de voir le rôle qu'Augustin assignait, à Cassiciacum, aux
études lib~rales dans la quête du bonheur. Or, la meilleure preuve de
la distance qU'il prendra plus tard par rapport à ces disciplines se
trouve dans la retractatio du De ordine où, à la fin de sa vie, il se
repent d'avoir accord~ trop d'importance à ces ~tudes car, dit-il,
"tant de saints les ont ignorées, et tels qui les possèdent ne sont pas
des saints" (236). Mais chronologiquement, plus probantes pour son évo-
lution sont trois lettres Jalonnant le cours de sa vie ecclésiastique.
La première de ces lettres est la lettre 26 qu'Augustin écrit à Licen-
tius entre 391 et 395. An~\\en élève d'Augustin, Licentius se distinguait
dans les Dialogues de Cassiciacum par son goût prononcé pour la poésie.

- 118 -
Demeuré en Italie après le retour d'Augustin en Afrique, il avait adres-
sé à san ancien professeur une lettre accompagnant un long poème de sa
composition (237), et dans lequel il lui exprimait san désir de pour-
suivre les études entreprises à Cassiciacum, études qui doivent le con-
duire à l'idéal lointain de la sagesse; il veut étudier les arts libé-
raux chez Varron et sollicite l'aide d'Augustin (238). Il est prêt de
même à lire tout ce que lui enverra san ancien maître, notamment san
De musica (239).
Dans sa réponse, ce n'est ni de Varron ni de san De musica qu'Augustin
entretient Licentius. Ce qui le préoccupe, c'est l'avenir spirituel de
Licentius : "Reçois en peu de mats, lui écrit-il, les agitations de mon
coeur au sujet de tan espérance éternelle, à savoir de quelle façon tu
pourrais t'ouvrir le chemin vers Dieu." (24D). Il commence par l'exhor-
ter à se détacher des biens temporels : "Les chaînes de ce monde, lui
dit-il, comportent une dureté certaine, une fausse douceur, une douleur
certaine, un plaisir incertain, un pénible travail, un repos troublé,
une chase pleine de misère, une espérance vide de bonheur." (241).
Mais il faut surtout que Licentius consente à consacrer toutes les far-
ces de son intelligence au service de Dieu : autant il met du soin à
soumettre ses vers aux lais de la métrique pour qu'ils soient parfaits,
autant il doit s'appliquer à mener une vie soumise aux lais de Dieu et
conforme à l'instruction qu'il a reçue (242). Ce n'est qu'à cette con-
dition qu'il pourra parvenir au bonheur auquel il aspire: "Tu attends,
lui écrit Augustin, que je t'ordonne d'être ban, d'être tranquille,
d'être heureux ••• Voici mes ordres: danne-toi
à moi, si tant est que
cela suffise ; donne-toi à man maître qui est notre maître à taus et

- 119 -
qui t'a donné ce talent." (243). En effet, Augustin ne voit que menson-
ge, péril mortel et tentation diabolique dans la tendresse que Licen-
tius ressent pour la poésie et les raffinements de l'intelligence:
"Le diable, lui dit-il, cherche à faire de toi sa parure. Si tu avais
trouvé un vase d'or, sur terre, tu en ferais un présent à l'église de
Dieu. Tu as reçu de Dieu une belle intelligence, cet or spirituel, et
voici que tu te fais l'échanson des passions et que tu t'offres toi-
même en breuvage à Satan." (244).
Dans cette lettr3 26, Augustin, comme l'indique 8almus, s'insurge con-
tre "l'art de dire, contre les valeurs esthétiques de la rhétorique
paienne considérée comme une fin en soi." (245). Ce qui lui importe,
c'est que toute intelligence, tout talent doit être mis au service de
l'idéal chrétien.
Comme on pouvait s'y attendre, nous retrouvons ce changement de pers-
pective dans la lettre 101 qu'Augustin adresse à l'évêque Memorius
entre 408 et 409. Augustin s'y présente non comme un professeur d'étu-
des profanes, mais comme un professeur d'Ecriture Sainte. Parlant de
Possidius, il déclare: "C'est par l'intermédiaire de notre ministère
qu'il a été nourri, non des sciences que les esclaves des diverses pas-
sions appellent libérales, mais du pain de la parole de notre seigneur,
autant qu'il a pu lui être distribué selon notre faiblesse." (246).
Par là, Augustin montre clairement que la seule science qu'il considère
comme libérale est celle que le Christ enseigne: "C'est Lui, écrit-il,
qui nous fait connaître ce qui est libéral (guid in se habeant liberale)
dans les sciences ainsi nommées par ceux qui n'ont pas été appelés à la

- 120 -
liberté (qui in libertatem vocati non sunt). Ces connaissances en effet
ne sont conformes à la liberté (habent congruum libertati) qu'autant
qu'elles le sont à la vérité (nisi guod congruum veritati)." (247).
Pour les anciens, l'étude des arts libéraux faisait partie de l'éduca-
tion de l'homme libre. Alors que l'esclave ou le serviteur s'occupait
des choses de la vie, l'homme libre, c'est-à-dire aussi bien libre par
sa naissance que libre de son temps, n'étant soumis ni au service d'un
ma!tre ni aux exigences d'un métier par la nécessité de gagner sa vie,
se consacrait aux activités supérieures, aux choses de l'esprit. En
substituant le terme libertas à liberalis, Augustin se présente comme le
défenseur de la vraie liberté. Celle-ci, qui exprime l'état de celui
qui est liberatus, ne se réalise que si elle s'accorde avec la vérité
qui, elle-même ne peut être atteinte que-dans le Christ puisque lui-même
s'est proclamé la Vérité. C'est donc dans le service du Christ que con-
siste la vraie liberté. Certes, Augustin ne Die pas que les paiens
aient pu, dans leurs écrits, exprimer certaines vérités. Mais, à la ma-
nière des Israëlites qui, fuyant l'Egypte et son idôlâtrie, emportèrent
avec eux des vases d'or et d'argent, des ornements et des vêtements
qu'ils avaient pris à leurs voisins paiens (Exode, 3, 22 et 12, 35-36),
Augustin récupère ces vérités paiennes pour les mettre au service de la
prédication de l'Evangile.
Augustin refuse donc aux auteurs paiens qui se situent en marge de la
doctrine chrétienne la vraie culture: "Que peut-on dire d'autre à ces
hommes qui, malgré leur iniquité et leur impiété, prétendent avoir reçu
une instruction libérale sinon ce que nous lisons dans lps Lettres vrai~
ment libérales : "Si le Fils vous affranchit, vous serez vraiment libres?
(Jean, 8, 36)" (248).

- 121 -
Ainsi se trouve arrachée à ses anciennes prétentions la littérature
profane, laquelle ne saurait convenir à une âme chrétienne. En effet,
Augustin reproche à cette culture d'être fondée sur une littérature
imprégnée de paganisme et, par son recours perpétuel à la mythologie,
inséparable du culte des idoles. Il blâme la vanité de cette culture
qui place au premier plan la recherche de la forme, l'élégance du lan-
gage, détournant ainsi les âmes des réalités de la moralité et de la
religion: aussi, dénonce-t-il.les "fables nombreuses et impies dont
les poètes remplissent leurs ouvrages ; les mensonges pompeux et soi-
gneusement ornés des orateurs ; les subtilités verbeuses des philoso-
phes" (249). Ainsi, parce que le Christ est absent de leurs discours,
les poètes, les orateurs, les philosophes paiens sont tous dans l'er-
reur et, par ce fait même, malheureux: "Gardons-nous, dit Augustin à
so~ correspondant, d'appeler arts libéraux les vanités, les folies,les
mensonges, les vaines niaiseries et l'erreur orgueilleuse de ces hommes
manifestement malheureux (homines scilicet infelices) qui n'ont pas
connu, par Jésus-Christ notre Seigneur, la grâce de Dieu qui seule peut
nous délivrer du corps de cette mort. Non, tous ces hommes-là ne l'ont
pas connue m3me dans ce qu'ils ont dit de vrai." (250).
C'est aussi le même discours qu'Augustin tient à Dioscorus dans la let-
tre qu'il lui écrit entre 410 et 411. Augustin se présente au jeune
étudiant grec comme quelqu'un dont le devoir est de réfréner et de ré-
primer sa passion pour la littérature profane et de le ramener à ses
propres préoccupations (251). Nous retrouvons tout au long de la lettre,
le même jugement sévère qu'Augustin porte aux études profanes. Il ~es

- 122 -
qualifie d'"étude infructueuse et importune" (studium infructuosum et
molestum) (252), de "faussetés anciennes et décrépites" (annosae et
decrepitae falsitates) (253), de "recherches vaines" (inepta guaesita)
(254). Dioscorus lui-même est qualifié de curiosus (255), c'est-à-dire
d'homme dont les recherches sont sans rapport avec sa destinée. En ef-
fet, les études auxquelles il s'adonne avec tant de passion sont inu-
tiles à l'acquisition du bonheur. Dioscorus doit donc pouvoir se pas-
ser de ces études et se consacrer à l'unique nécessaire: la recherche
et l'étude du bonheur. Pour l'encourager dans cette voie, Augustin lui
cite l'exemple de Thémistocle. Invité dans un festin à chanter en s'ac-
compagnant de la lyre, ce qui, chez les Grecs, était une des marques
d'une éducation parfaite et d'un homme cultivé (256), Thémistocle n'hé-
sita pas à avouer avec humilité son ignorance dans ce domaine. Mais, ce
faisant, il manifestait sa grandeur et sa supériorité sur les autres
convives parce qu'il estimait plus utile de consacrer son savoir à l'é-
dification d'un grand état. Eclairé par cet exemple, Dioscurus, à son
tour, doit âtre en mesure de subordonner l'accessoire (la culture pro-
fane) à l'essentiel (la connaissance du bonheur) : "A celui qui t'aura
interrogé sur les choses que tu me demandes, lui dit Augustin, réponds
que tu es trop sage et trop prudent pour les savoir. Si en effet Thémis-
tocle ne craignit pas de passer pour un homme peu cultivé parce que,
dans un festin, il avait refusé de chanter en s'accompagnant de la lyre
en déclarant qu'il ne savait pas faire ces choses-là, et comme on lui
demandait : "que sais-tu donc faire 7", il répondit : "faire une grande
république d'une petite", hésiterais-tu à dire que tu ignores ces cho-
ses, alors que, à celui qui t'aurait interrogé sur ce que tu connais,

- 123 -
tu pourrais répondre que tu sais comment l'homme pourrait être heureux
Snns ces choses 1" (257).
Ainsi qu'il apparaît à travers les trois lettres que nous venons de
parcourir, Augustin, tout au cours de sa vie ecclésiastique, a prôné
une culture directement subordonnée à l'idéal chrétien. La seule con-
naissance qu'il importe à l'homme de posséder est celle qui lui assu-
rera le bonheur véritable. Cette attitude négative qu'Augustin
mani-
feste à l'égard des études profanes, il l'a aussi par rapport aux
différentes doctrines philosophiques.
CRITIQUE DES DOCTRINES PHILOSOPHIQUES
-------------------------------------
Augustin utilise les termes de mensonge (mendacium), de folie (insania),
de vanité (vanitas), d'erreur (error), lorsqu'il parle des philosophes.
La raison est qu'il considère les différentes doctrines élaborées par
ces philosophes comme des fausses voies pour parvenir au bonheur : "Les
philosophes, dit-il dans le sermon 150 [413/414], se sont tracé des
sentiers d'erreur : les uns ont dit : 'c'est par là'
les autres ont
dit 'non, c'est par là'." (258). Aussi, pour mettre en garde ses fidè-
les et ses correspondants contre ces doctrines étrangères à la foi
chrétienne, il s'efforce de leur en montrer la perversité. Sa critique
est dirigée aussi bien contre l'épicurisme, le stoicisme, le platonisme
que contre les voies que proposent certains de ses correspondants paiens
adeptes du néo-platonisme.

- 124 -
CRITIQUE DE L'EPICURIS~E
= = = = = = = = = = == =
Comme tous les détracteurs de l'épicurisme, Augustin ne voit dans cette
doctrine qu'un hédonisme grossier, une apologie du dérèglement. Les Epi-
curiens, dit-il à ses fidèles dans les sermons 150 [413/414J et 156
[418/419}, ont placé le souverain bien dans l'élément matériel de l'ê-
tre humain, c'est-à-dire dans le corps, car ce qui compte pour eux,
c'est le plaisir et le plaisir des sens (259). Pour se procurer un tel
plaisir, ils n'hésitent pas à faire bon marché de la justice, car, à
leurs yeux, la seule raison que le sagea d'~tre juste, c'est de pouvoir
se procurer des plaisirs charnels ou de pouvoir les conserver (260).
Dans cette présentation de l'épicurisme, Augustin se soucie moins de
rendre compte de l'authentique doctrine d'Epicure que de mettre en re-
lief l'impureté des Epicuriens qu'il qualifie de porcs: "Non homines
sed porci." (261). En plaçant le bonheur dans le plaisir, les Epicuriens,
pour Augustin, réduisent l'homme au rang des animaux. Or, le prédicateur
qu'il est s'applique à mettre en lumière la dignité singulière de l'hom-
me qui, par son esprit, surpasse toutes les autres créatures. L'homme
ne saurait donc être heureux en bornant ses désirs à un ordre de jouis-
sance qui lui est commun avec les êtres dépourvus de raison; l'idéal
proprement humain dépasse le niveau d'une existence instinctive. Par
conséquent, l'épicurien" se trompe en disant que l'homme est heureux en
jouissant des plaisirs du corps : "Errat Epicureus : falsum est enim
esse hominem beatum cujus est in fructu voluptas carnis elus." (262).
De m3me qu'il rejette l'hédonisme épicurien, Augustin rejette aussi
l'attitude que les Epicuriens adoptent devant la souffrance. En effet,

- 125 -
les Epicuriens, ainsi que le rappelle Augustin dans le sermon 348
[425/430], soutenaient que l'homme pouvait être heureux dans les souf-
frances en se remémorant les plaisirs passés : "En effet, eux aussi se
vantent d'être les plus forts_ des hommes et disent qu'ils ne craignent
absolument rien, parce qu'ils pensent que Dieu ne s'occupe en rien des
choses humaines et parce qu'ils croient que, après cette vie, il n'yen
aura pas d'autre; et, si quelque malheur leur arrive en cette vie, ils
pensent en 3tre protégés parce que le plaisir du corps, lorsqu'ils ne
peuvent pas le ressentir dans leur propre corps, ils peuvent cependant
y penser et, trouvant du plaisir dans cette pensée, conserver le bonheur
du plaisir corporel malgré la violence de la douleur corporelle." (263).
Pour Augustin, la prétention de faire échec à la réalité par l'imagina-
tion appara!t comme une gageure ridicule. En effet, en cherchant à se
contenter de fausses et vaines images pour anéantir la douleur, l'homme
s'avilit à ses propres yeux. Les Epicuriens auront beau objecter que
c'est l'amour qui les pousse à fuir la crainte, ils n'en trouvent pas
pour autant gr~ce auprès d'Augustin. Car, s'il est vrai que l'amour ban-
nit toute crainte, l'amour, tel que le conçoivent le9 Epicuriens, n'y
parvient que d'une manière dégradante et dérisoire puisque c'est l'amour
de plaisirs ignobles et de vaines apparences (264).
~ais c'est surtout dans la lettre 155 [413/414J qu'Augustin réfute la
thèse selon laquelle l'homme est heureux, même dans le taureau de Pha-
laris (265). A l'appui de sa critique, Augustin rappelle à son corres-
pondant le passage du livre V des Tusculanes de Cicéron où il est dit
que le sage est toujours heureux, mais que, sous le coup de grands mau~

- 125 -
il peut se donner la mort : "Il y a chez Cicéron, comme tu le sais, à
la fin du cinquième livre des Iusculanes, un passage qui doit être con-
sidéré avec attention à cause de ce que je dis. En effet, comme il par-
lait de la cécité du corps et comme il affirmait que même aveugle, le
sage pouvait être heureux, il a dit beaucoup de choses dont le sage
pourrait jouir en les percevant par les oreilles; de même, s'il deve-
nait sourd, il a reporté aux yeux les choses qui procureraient du plai-
sir au sage; mais si le sage était privé de l'un et l'autre sens, et
s'il devenait aveugle et sourd, Cicéron n'a pas osé, à partir de là,
donner son avis et dire que le sage est heureux, mais il a ajouté encore
des douleurs corporelles très graves qui, si elles n'ôtent pas la vie au
sage, lui-même se tuerait et, libéré par cette vertu, parviendrait au
port de l'insensibilité." (255). Dans ce passage, Augustin résume le
long développement de Cicéron dans les Tusculanes pour mieux en faire
ressortir les éléments essentiels et mieux asseoir sa critique. En effet,
à partir de ce texte, Augustin fait voir la fragilité et l'incohérence
de cette théorie.
Elle est fragile, car la réalité de la souffrance apporte toujours un
démenti à la prétention de l'homme de vouloir vaincre la souffrance:
celle-ci peut atteindre un degré d'acuité devant laquelle l'homme est
obligé d'abdiquer: "Le sage s'incline donc devant les maux les plus
atroces et il succombe au point que, contraint par eux, il commet
sur
lui-même un homicide." (257). L'emploi des verbes "cedere", "succumbe-
re" et le sens passif de "cogatur" font voir la prédominance de la
souffrance sur l'endurance humaine. Assailli par les maux, le sage épi-
curien n'a d'autre recours que le suicide, acte que condamne Augustin à

- 127 -
cause de son caractère sacrilège et inhumain : il est sacrilège puisque,
en usant de sa vie comme il l'entend, l'homme se considère comme l'au-
teur de sa propre vie. Il est inhumain parce que celui qui s'ôte la vie
est capable de l'ôter à autrui.
La même théorie est de plus incohérente, car malgré sa prétention de
demeurer toujours heureux même au milieu des souffrances, le sage épicu-
rien est amené à abandonner ce bonheur dont il prétendait jouir en ce
monde. Cet ultime recours au suicide laisse par conséquent voir la vani-
té de ce bonheur : on ne peut pas considérer comme heureuse une vie
qu'on est obligé de quitter et de fuir. Raison pour laquelle Augustin
donne libre cours à son irDnie dans la suite de la lettre 155 : "Certai-
nement le sage est toujours heureux
certainement aucune force d'aucune
calamité ne peut lui ravir le bonheur placé en son pouvoir ! Voici que
dans la cécité et la surdité et les maux corporels les plus cruels, ou
il a perdu la vie heureuse ou, si même dans ces afflictions elle est en-
core heureuse, il arrive, d'après les discussions de ces très savants
hommes, qu'il y ait parfois une vie heureuse que le sage ne pourrait pas
supporter ou, ce qui est plus absurde, que le sage ne devrait pas suppor-
ter et qu'il fuirait, qu'il romprait, qu'il rejetterait et de laquelle
il se soustrairait par le fer ou encore par le poison ou par quelque
autre mort volontaire : c'est ainsi que selon les épicuriens et ceux
qui leur ressemblent en sottise, le sage arriverait au port de l'insen-
sibilité à8 façon à ne plus être du tout, ou bien trouverait un bonheur
qui consisterait à être délivré de cette vie heureuse comme d'une pes-
te !" (268).

- 128 -
Prétendre donc que l'homme peut être heureux même dans les souffrances
n'est que pure présomption: "0 nimium superba jactantia !n (269), s'ex-
clame Augustin. En effet, seul l'orgueil empêche le sage épicurien de
recourir à Dieu qui seul est en mesure de le délivrer des maux de cette
vie et de lui donner le véritable bonheur : "Si la vie heureuse est dans
les douleurs corporelles, pourquoi le sage ne demeure-t-il pas dans ces
douleurs pour jouir du bonheur ? Mais si elle est misérable, pourquoi,
je t'en conjure, à moins que l'orgueil ne l'en empêche, ne l'avoue-t-il
pas, pourquoi ne prie-t-il pas Dieu, ne supplie-t-il pas le Juste et le
Miséricordieux,qui a la puissance, ou de détourner les maux de cette vie,
ou de les alléger ou d'armer de courage pour qu'on les supporte ou d'en
délivrer totalement et, après ces maux, de donner la vie véritablement
heureuse où aucun mal ne saurait être admis et où le souverain bien ne
saurait être perdu ?ft (270).
Augustin ne manque pas non plus de critiquer le matérialisme qui sous-
tend l'éthique épicurienne. En plaçant le bonheur dans le plaisir, les
épicuriens, par le fait même, placent le corps au-dessus de l'!me : vouée
à la dissolution tout comme le corps, l'âme, disent-ils, ne tarde pas à
disparaître au moment de la mort. Telle une fumée, elle se dissipe avant
même que le cadavre n'entre en décomposition (271). Puisque donc notre
destinée s'achève avec la mort, il n'est pas question de mériter par nos
actions vertueuses quelque félicité éternelle. La crainte de la mort se
trouve ainsi bannie d'autant que les dieux ne s'occupent pas des affaires
humaines et des mortels que nous sommes. De telles affirmations, on s'en
doute, vont à l'en~~ntre des arguments qui sont à la base même de l'ensei-
gnement d'Augustin: l'immortalité de l'âme, l'existence du bonheur

- 129 -
supra-terrestre et l'intervention de la providence divine.
En mettant ainsi en relief l'impureté, l'orgueil et l'impiété des épi-
curiens, Augustin cherche à montrer à ses fidèles et à ses correspon-
dants que l'éthique épicurienne est aux antipodes du bonheur véritable,
ce qui justifie l'interdiction qu'il fait à ses fidèles dans le sermon
150 [413/414] :"Nolite esse epicurei." (272).
CRITIQUE DU STOICIS~E
===========
Au-dessus de l'épicurisme, Augustin place le stoïcisme. Nous avons rele-
vé dans les chapitres précédents l'influence que le stoïcisme a pu exer-
cer sur la pensée eudémoniste d'Augustin au lendemain de sa conversion,
grace à certains thèmes à résonnance stoïcienne qui étaient perceptibles
dans le De beata vita et dans les premières lettres, thèmes tels que l'impas-
sibilité du sage stoïcien, son indifférence aux biens de la fortune et
l'affirmation que la sage est toujours heureux. Durant sa vie religieuse,
Augustin continue à manifester une certaine sympathie pour la doctrine
du Portique, et le port~ait qu'il en dresse à son auditoire dans les ser-
~ 150 (413/414] et 156 [418/419] est plus fidèle que celui qu'il leur
a fait de l'épicurisme. Les Stoïciens, dit-il à ses auditeurs, ont placé
le bonheur de l'homme dans la vertu: "Quid dicitis 5toici, guae res fa-
cit vitam beatam ? Respondent, 'virtus animi'·
(273). En plaçant ainsi
le bonheur dans la vertu, les Stoïciens se sont fait
une meilleure opi-
nion de l'homme que les Epicuriens. En effet, comme Augustin lui-même le
reconnaît dans le sermon 15Q, toute vertu est digne d'éloge: que ce
soit la prudence qui permet de discerner le bien du mal, la justice qui

-
130 -
donne à chacun son dû, le courage qui permet de supporter les maux avec
la même ~galité d'âme, la tempérance qui réprime les mauvais désirs
(274). Les stoïciens peuvent donc se glorifier d'avoir placé si haut
la vertu : "~agna res, laudabilis res : lauda (virtutem). stoice. quan-
tum potest." (275).
~ais là où Augustin condamne les stoïciens, c'est lorsqu'ils se prennent
pour leurs propres maîtres, écartant de leur doctrine toute transcendan-
ce divine. C'est un fait que pour Zénon et son école, seul mérite le
nom de sage celui qui a atteint la perfection de l'âme. Son bonheur con-
siste dès lors à jouir de sa propre vertu. Etabli dans une parfaite autar-
cie, le sage stoïcien n'a pas besoin d'autre chose pour être heureux.
Indépendant des circonstances heureuses ou malheureuses qui peuvent lui
advenir, il puise au-dedans de lui-même, dans son courage, dans sa cons-
tance, dans sa maîtrise de soi-même, la force de dominer la vie.
Mais ce que n'ont pas compris les stoïciens, c'est que ce n'est pas la
vertu de l'âme qui les rend heureux, mais plutôt Dieu qui leur en a fait
don
"Non virtus animi tui te facit beatum. sed qui tibi virtutem dedit,
qui tibi velle inspiravit
et passe donavit." (276). Le stoïcien se trom-
pe donc lorsqu'il soutient que c'est la vertu qui lui procure le bonheur:
"Fallitur et Stoicus : falsum est enim et omnino mendosissimum, beatum
esse hominem cujus est in fructu virtus animae ejus." (277). En voulant
se faire les propres artisans de leur bonheur, les Stoïciens sont victi-
mes de leur propre orgueil puisqu'ils placent leur espoir en eux-mêmes:
"Stoicus in anima panens summum hominis bonum in re quidem meliore
ponit,
sed etiam in se spem posuit." (278).

- 1J1 -
Le principal reproche qu'Augustin fait aux Stoiciens est leur suffisan-
ce
ils ne se rendent pas compte de la faiblesse humaine et de la n~ces-
sit~ de la grâce. Pas plus que les Epicuriens, ils n'ont pas pu d~passer
le niveau purement humain dans leur id~al de perfection : pour eux, il
n'est de bonheur qu'en deça de la mort. Par cons~quent, tout autant que
l'épicurisme, le stoïcisme ne cadre pas avec la doctrine chr~tienne de
la destin~e humaine.
CRITIQUE DU PLATONIS~E
:=========::
Quoiqu'il reconnaisse la sup~riorit~ du Platonisme, plus pr~cis~ment du
néo-platonisme, sur l'~picurisme et le stoicisme, Augustin n'en relève pas
moins les insuffisances et les limites. La critique qu'il fait de cette
philosophie dans les lettres et les sermons de la p~riode eccl~siastique
apparaît à travers le soin qu'il prend d'une part de souligner l'impuis-
sance des Platoniciens à transmettre leur doctrine, d'autre part de con-
damner leur eschatologie.
Le premier point, à savoir l'impuissance des Platonicisns à transmettre
leur doctrine, est d~velopp~ dans la Isttrs 118 [410/411] où Augustin
commence par faire l'dloge du platonisme, ce qui montre la relative fi-
d~lit~ qu'il garde à l'~gard de cette philosophie
qui l'avait aid~ à se
lib~rer du mat~rialisme ~anichden. En effet, Augustin loue les Platoni-
ciens d'avoir dt~, parmi les philosophes spiritualistes appartenant à la
tradition aocienne, ceux qui ont le mieux compris que l'homme ne pouvait
trouver son bonheur qu'en Dieu et, pour cette raison, d'avoir combattu
le mat~rialisms ~picurien et stoicien : "Inter QOS autem qui fruendum

- 132 -
Oeo, a guo et nos et omnia racta sunt. unum atgue summum bonum nostrum
esse dicunt. apud illos eminuerunt Platon ici gui non inmerito ad offi-
cium suum pertinere arbitrati sunt. ~:oicis et Epicurei maxime et pro-
pe solis omnino resistere." (279). La prééminence des Platoniciens sur
les autres philosophes spiritualistes est mise en valeur par le verbe
eminere (se distinguer), tandis que la litote non inmerito rend la jus-
tesse de leur opposition à l'épicurisme et au stoïcisme. Ainsi, par rap-
port aux thèses erronées que soutenaient Epicuriens et Stoïciens, les
Platoniciens se révélaient âtre les détenteurs de la vérit~comme Augus-
tin le souligne à Oioscorus : "En ce qui touche, lui écrit-il, le souve-
rain bien de l'homme ••• tu trouveras assurément deux erreurs (duos er-
rores) se combattre: l'une plaçant le souverain bien dans le corps,
l'autre le faisant résider dans l'âme; tu trouveras d'autre part la
doctrine conforme à la vérité (rationem veritatis), par laquelle Dieu
est compris âtre notre souverain bien, résister aux deux premières, mais
sans enseigner la vérité avant de faire désapprendre le faux (non prius
docentem vera guam prava dedocentem)." (280).
Cette dernière phrase qui se présente sous la forme d'une antithèse (do-
centem/dedocentem) et d'un chiasme (docentem vera/prava dedocentem) fait
apparattre l'incapacité des Platoniciens à communiquer le bien-fondé de
leur doctrine. En effet, bien qu'ils aient découvert la source du bonheur,
les Platoniciens n'ont pas eu l'autorité nécessaire pour y acheminer les
hommes : "Ils n'ont pas pu, écrit Augustin, tenir le rôle rle la vérita-
ble raison (verae rationis) aussi racilement que les autres ont pu tenir
le rôle de l'erreur." (281). Catta impuissance tient au ra~t que, comme

- 133 -
les autres philosophes, les Platoniciens ont ignoré le Médiateur : "A
tous, dit Augustin, il a manqué l'exemple de l'humilité divine qui, au
temps qui convenait le mieux, a été lumineusement donné par notre 5ei-
gr.eur Jésus Christ." (282). Ainsi, si le Platonisme avait fait entre-
voir le but, il s'est révélé finalement inapte à mener les hommes au
bonheur puisqu'il ne donnait pas le moyen, la "voie" pour y accéder et
s'y fixer.
Cette inaptitude du platonisme à conduire l'homme au bonheur, Augustin
la fait encore ressortir à travers la critique qu'il fait de l'eschato-
logie platonicienne dans le sermon 241
405/410. Les Platoniciens,rap-
pelle-t-il à ses fidèles, réservent un sort différent aux âmes des hom-
mes mauvais et à celles des justes , alors que celles des premiers, en
punition de leurs souillures, réintègrent les corps, celles des seconds,
en récompense de leur vie pure, jouissent du bonheur au ciel en compagnie
des dieux : "Les âmes mauvaises, disent-ils, sortent des corps ; et par-
ce qu'elles sont impures, elles retournent immédiatement dans les corps.
Les âmes des sages et des justes sortent des corps, et parce qu'elles ont
mené une vie bonne, elles s'envolent au ciel." (283). Mais, selon ces mê-
mes philosophes, les âmes des sages et des justes ne jouissent du bonheur
que pour un temps. En effet, reprises par le désir de s'unir à des corps,
ces ~mes conDaîtront à nouveau les tourments de notre existence : "Mais,
disent-ils, après une longue période, lorsqu'elles ont complètement
oublié leurs anciennes misères, le désir de retourner dans les corps
les reprend et ce sera pour elles un plaisir d'y revenir
et de nouveau,
elles viennent souffrir les maux de cette vie, supporter les maux de :ette
vie, oublier Dieu, blasphémer Dieu, suivre l'attrait des plaisirs du corps,
lutter contre les passions de la chair." (284).

-
134 -
Augustin tourne en d~rison ce bonheur fictif et d~risoire. Il ironise
sur le sort de ces âmes qui, après avoir oubli~ leurs souffrances pas-
s~es et goût~ pendant un certain temps à la f~licit~ de Dieu, aspirent
à s'unir à nouveau à des corps parce que, en elles, se réveille le sou-
venir de la vie ant~rieure. Si ces philosophes ont ~té en mesure de
faire oublier aux âmes les maux de cette vie, pourquoi ne leur font-
ils
pas aussi oublier les plaisirs des sens, seul motif qui les pousse
à vouloir r~int~grer les corps ? : "Efface en elles tout souvenir, tu
parviendras peut-être à leur conserver la sagesse : ne laisse rien en
elles qui les rappelle-ici-bas." (285).
Il prend à t~moin les auteurs paiens eux-mêmes pour d~noncer l'inanité
de cette doctrine. En effet, Virgile, dit-il à ses fidèles, a d~savoué
cette croyance par le truchement de son h~ros En~e qui, lors de sa des-
cente aux Enfers, s'est apitoyé sur le sort réserv~ à ces âmes
(286).
Il fait voir les contradictions que renferment cette th~orie : soit les
âmes des justes admises dans la soci~t~ de Dieu n'ignorent pas qu'il
leur faudra un jour ou l'autre retrouver les misères de notre vie ter-
restre et, dans cette hypothèse, la connaissance qu'elles ont de leurs
souffrances futures est incompatible avec le bonheur dont elles sont
censées jouir (en effet, puisqu'il n'est point de bonheur réel sans s~­
curit~, leur pr~tendu bonheur se trouve irrém~diablement rongé par l'an-
goisse)
soit ces âmes ne savent absolument rien du sort qui les attend:
elles ont oublié toutes leurs connaissances ant~rieures et se croient
heureuses pour toujours et, dans ce cas, elles sont victimes d'une illu-
sion puisque leur bonheur est fond~ sur l'erreur_(287).

- 135 -
Il d~nonce enfin l'incoh~rence des philosophes platoniciens qui, tout
en faisant de la recherche du bonheur l'objectif fondamental de toute
leur philosophie, font consister le bonheur dans l'attente du malheur,
tandis que le malheur s'identifierait avec l'attente du bonheur (288).
Une doctrine qui soutient que l'espérance de jouir un jour du bonheur
nous rendrait plus heureux que la jouissance même de ce bonheur ne sau-
rait être une bonne voie d'accès au bonheur. C'est pourquoi, Augustin
exhorte ses fidèles à rejeter les th~ories ridicules et extravagantes
de ces philosophes et à s'en tenir à l'enseignement
des Saints. Ainsi,
par son caractère ft~sotériquen et par son eschatologie, le Platonisme,
tout autant que
lrEpicu~isme et le Stoïcisme, se r~vèle incapable de
mener l'homme au bonheur.
CRITIQUE DES THESES CONSERVATRICES DE SES CORRESPONDANTS
--------------------
De même qu'il s'~carte de la littérature profane et des doctrines phi-
losophiques, Augustin rejette aussi les voies qu'entendent suivre cer-
tains de ses correspondants paiens pour parvenir au bonheur.
La première de ces voies est celle que Nectarius évoque dans la Lettre
103 [408/410J. En effet, à Augustin qui, dans la Lettre 91 [408/410],
le convie à tourner ses regards vers la patrie céleste, Nectarius ré-
pond en montrant que la patrie terrestre a droit à notre amour puisque
ceux qui, ici-bas, auront bien servi leur cité, auront droit au bonheur

- 1J6 -
de la patrie céleste: " ••• Quoique, écrit-il, cette cité (céleste)
doive âtre désirée et aimée en tout premier lieu, je ne puis cepen-
dant juger qu'il faille
déserter la cause de cette cité où nous som-
mes nés, où nous avons été engendrés, elle qui, la première, a répan-
du sur nous la lumière du jour, nous a nourris, nous a éduqués, de
sorte que je dirai ce que des personnes très doctes rapportent au su-
jet des hommes de grand mérite, et qui s'applique tout particulièrement
à notre sujet : après la mort du corps, une demeure est préparée dans
le Ciel, de manière qu'une sorta de promotion à la patrie suprême est
assurée à ces hommes qui méritèrent bien de leur patrie par leurs con-
seils et par leurs oeuvres." (289). Nectarius fait ici allusion au vieil
idéal patriotique tel que Cicéron, s'inspirant des idées de Platon (290),
l'avait développé dans le Songe de Scipion
(291), texte qui était très
lu au Bas-Empire (292).
Dans sa réponse, Augustin,se référant aux vers 1J et 14 de la quatrième
Eglogue de Virgile, écrit à son correspondant : "Abandonnant tout retard,
il faut avoir recours à la grâce de Calui à qui l'on peut dire de façon
très véridiqua ce qu'a dit, en un poème flatteur à je ne sais quel illus-
tre personnage, celui qui a néanmoins reconnu qu'il le tenait d'un poème
cuméen considéré comme véridique :
"Sous ta conduite, si quelques traces de notre scélératesse
persistent encore, elles seront sans effet et les terres
seront délivrées de leur crainte perpétuelle."
En effet, sous la conduite de ce chef, tous les péchés ayant été pardon-
nés et remis, par cette voie on parvient à la céleste patrie, alors que
je la recommandais autant que je
le pus à ton amour, tu as aimé tout à

-
137 -
fait la possession." (293). Dans la quatrième Eglogue, Virgile attri-
buait le "Te duce" • C. Asinius Pollio dont le consulat, • ses yeux,
inaugurait le début du retour de l'âge d'or sur terre (294). En appli-
quant au Christ l'expression "Te duce" que Virgile décernait. Pollion,
Augustin fait une lecture chrétienne de Virgile. Il signifie ainsi •
son correspondant la fin du paganisme et lui montre que ce n'est qu'en
suivant le Christ qu'il peut parvenir au bonheur parce que, avec le
Christ, s'ouvrait une ère nouvelle : celle de la grSce du Christianisme
(295).
La seconde voie est celle que Longinianus expose dans la lettre 234 (de
date incertaine) : il s'agit du respect scrupuleux de la tradition an-
tique telle que l'enseignaient les religions. "ystères. En effet, sol-
licité par Augustin de formuler sa pensée sur le Christ en tant que uni-
que voie qui conduit au bonheur (296), Longinianus répond qu'on ne peut
arriver. Dieu, créateur "incompréhensible" de toutes choses, que par
une vie pure, par l'intimité aveC les dieux et par la pratique des rites
de purification tels que les Anciens les ont toujours enseignée :"La
meilleure voie vers Dieu est celle par laquelle se hâte d'aller vers
Dieu, par les efforts de son âme et de son esprit, l'homme de bien, pieux,
juste, pur, véridique dans ses paroles et dans ses actes, resté inébran-
lable malgré les changements des temps, défendu par une escorte des
dieux, avec la faveur des ~uissances de Dieu, c'est-.-dire rempli des
Vertus de l'Unique, de l'Universel, de l'Insaisissable, de l'Ineffable
et de l'Infatigable créateur - ces Vertus que, s'agissant des vôtres,
vous appelez anges, ou quelque autre être après Dieu, ou avec
Dieu ou

- 138 -
venant de Dieu -, c'est la voie, dis-je, par laquelle les êtres puri-
)
fiés gr~ce aux pieux préceptes et aux très chastes expiations des ri-
tes anciens et qui ont macéré ~me et chair dans les pratiques d'absti-
nence, activent leur course sans jamais la ralentir. ft (297).
Augustin, dans sa réponse, pose à Longinianus une série de questions
sur la valeur des rites de purification :
Quelle nécessité y-a~t-il pour un homme vertueux d'être purifié par
les cérémonies expiatoires 7
L'homme doit-il bien vivre pour mériter d'être purifié par les
cérémonies expiatoires, ou bien a-t-il besoin d'être d'abord
purifié par les cé~émonies expiatoires pour bien vivre 7
L'homme vertueux a-t-il besoin des cérémonies expiatoires pour
parvenir au bonheur qui nous vient de Dieu 7
- La pratique des cérémonies expiatoires est-elle une partie de
la vie vertueuse 7 (29B).
Ces questions, par lesquelles Augustin fait apparattre les contradic-
tions inhérentes à la doctrine que professe Longinianus, sont en fait
une manière pour Augustin de montrer à son correspondant l'inutilité
des rites de purification pour l'acquisition du bonheur.
En prenant ses distances par rapport aux études profanes et par rapport
aux différentes doctrines philosophiques, en rejetant le recours à l'i-
déal patriotique et à la religion traditionnelle des Mystères, Augustin
montre ainsi à ses correspondants et à ses fidèles que le paganisme
n'offre aucune voie adéquate pour accéder au bonheur. La seule voie
yu'il reconnaisse est celle de la grâce divine qui s'est manifestée
aux hommes dans la personne du Christ.

- 139 -
Que l'aide de Dieu soit nécessaire à l'homme et que le Christ soit la
voie qui conduit au bonheur, c'est ce que Augustin affirmait déjà au
lendemain de sa conversion dans le De beata vita (299). C'est cette
certitude qui l'a animé tout au long de sa vie religieuse et qu'il a
cherché à communiquer à ses correspondants et à ses fidèles en rejetant
toutes les voies que le paganisme offrait. En effet, si tous les sages
paiens ont échoué dans leur quête du bonheur c'est; aux yeux d'Augustin,
parce qu'ils ont voulu trouver le bonheur par eux-mêmes plutôt que de
le demander à celui qui seul est en mesure de le donner : "Peut-être,
écrit-il à Proba dans la lettre 130 (410/413J, me demanderas-tu en quoi
consiste le bonheur. C'est une question sur laquelle beaucoup de philoso-
phes ont usé leur esprit et leur temps. Mais ils ont pu d'autant moins
le trouver qu'ils ont moins rendu d'hommages et d'actions de grâces à
celui qui en est la source." (300). Ce sont aussi les mêmes propos qu'il
tient à Macedonius dans la lettre 155 [413/41~ où il montre que, tout
comme l'amitié, le bonheur est indissociable de la piété: "Les philoso-
phes, lui dit-il, ont beaucoup parlé à ce sujet. Mais on ne trouve pas
chez eux la vraie piété, c'est-à-dire le vrai culte du vrai Dieu d'où
il faut tirer les règles d'une vie bonne; la raison, autant que je com-
prends, est qu'ils ont voulu en quelque sorte se créer le bonheur et
qu'ils ont pensé pouvoir se le procurer plutôt que de le demander, alors
que Dieu seul peut le donner. En effet, nul ne peut
rendre l'homme heu-
reux si ce n'est celui qui a fait l'homme (nemo enim facit beatum homi-
nem nisi gui fecit hominem)." (301).

-
140 -
Lorsque donc l'homme prétend se suffire à lui-même, il se voit fermer
l'accès au bonheur. Il a besoin nécessairement de recevoir de Dieu, son
créateur, la lumière qui l'éclaire et guide ses pas vers la patrie du
bonheur. C'est précisément pour nous y conduire et pour nous détourner
des sentiers trompeurs tracés par les sages païens que le Christ est
venu jusqu'à nous: "La voie, dit Augustin dans le sermon 150 (413/414J,
a été cachée aux philosophes parce que Dieu résiste aux orgueilleux.
Elle nous serait aussi cachée si elle n'était pas venue jusqu'à nous.
Voilà pourquoi le Seigneur nous dit: 'Je suis la voie'. Voyageur pares-
seux, tu ne voulais pas aller trouver la voie, elle est venue te trou-
ver. Tu cherchais par où marcher, il te dit: 'Je suis la voie'." (302).
Il n'est donc qu'un moyen pour l'homme de parvenir au bonheur dont il
a soif, c'est de s'engager à la suite du Christ. Telle est l'exhortation
que fait Augustin à ses fidèles dans le sermon 141 (sermon non daté) :
"Le Fils de Dieu, qui est éternellement dans le Père, la vérité et la
vie, s'est fait homme pour devenir notre voie. Suivez la voie que nous
ouvre son humanité et vous parviendrez jusqu'à aieu. C'est par Lui que
vous allez, c'est vers Lui que vous vous dirigez. Ne cherchez pas d'au-
tre chemin que lui-même pour arriver jusqu'à Lui." (303). Nous n'obtien-
drons donc le bonheur que lorsque nous irons rejoindre Celui qui est
venu jusqu'à nous et que nous serons avec Celui qui est mort et ressus-
cité pour nous.

- 141 -
CONCLUSION
----------

-
142 -
Au terme de cette étude, il convient d'en rappeler l'objectif:
l'analyse du discours d'Augustin sur le bonheur à travers le De beata
~, la Correspondance et les Sermons, ceci afin de vérifier sa cohé-
rence et d'en saisir l'évolution éventuelle.
Ce choix était motivé en premier lieu par la particularité de chacune
des oeuvres considérées : le De beata vita offre les jalons de la ré-
flexion d'Augustin sur le bonheur. Les Lettres dévoilent l'homme Augus-
tin dans sa dimension de philosophe et de théologien. Elles font décou-
vrir le nouveau converti chez qui subsistent encore les traces de sa
formation philosophique. Elles montrent aussi l'homme d'Eglise soucieux
de rallier à sa cause des personnes de conditions et de cultures diffé-
rentes : des jeunes gens en quête de savoir, des païens enracinés dans
leurs valeurs ancestrales, des chrétiens qu'il convient d'éclairer ou
de ramener dans l'orthodoxie de la foi. Quant aux Sermons, ils mettent
en scène le pasteur transmettant le message chrétien à ses fidèles,
c'est-à-dire l'annonce d'un programme concret de vie chrétienne. La
seconde raison qui expliquait le choix de cette étude était d'ordre
chronologique. En effet, si le De beata vita et une partie des Lettres
se situent au lendemain de la conversion d'Augustin, les Sermons et la
majorité des Lettres s'étalent tout au long de sa vie ecclésiastique.
Compte tenu de ces deux facteurs, il était intéressant de voir si le
discours d'Augustin sur le bonheur se présente de façon homogène à
l'intérieur de mes trois sources de documentation. Pour répondre à cette
question, j'ai jugé que la meilleure mét~ode était de partir du De beata

-
143 -
vita, d'y relever les lignes maîtresses et de les confronter ensuite à
la Correspondance et aux Sermons.
~a recherche a abouti au constat suivant
si, sur certains des thèmes
retenus, il existe une unité de vue dans les trois oeuvres, sur d'autres
en revanche, certaines différences sont décelables entre la période
correspondant aux premiers temps de la conversion et celle de la vie
ecclésiastique d'Augustin.
Le premier point où l'unité de la pensée d'Augustin est manifeste est
celui du désir de bonheur. En effet, c'est au niveau de l'expérience
humaine qu'Augustin se place lorsqu'il entreprend de découvrir à ses
différents interlocuteurs le secret du bonheur : tous les hommes aspi-
rent au bonheur. Dans le De beata vita, il traduit ce fait d'expérience
par la vieille formule que lui ont transmise les philosophes : "Beatos
nos esse volumus". Il y revient dans la Correspondance et les Sermons
comme à une vérité de base.
Mais, s'il s'appuie d'une manière aussi constante sur l'instinct de bon-
heur inscrit en tout homme, c'est pour montrer aussitôt à ses interlocu-
teurs que l'objet de ce désir ne trouve pas son fondement dans la volon-
té arbitraire des hommes. Cette affirmation de la transcendance du bon-
heur sur les aspirations subjectives des hommes est présente dans le ~
beata vita, la Correspondance et les Sermons. Elle est d'abord mise en
évidence à travers l'opposition entre le bonheur, Qui est décrit comme
une valeur conforme au bien moral, et la dépravation volontaire des hom-
mes qui, en choisissant délibérément le mal, tourn~llt le dos au bonheur.

-
144 -
Cette opposition est commune au De beata vita et à la Correspondance.
Elle apparatt ensuite à travers l'insistance sur la diversité des be-
soins des hommes que nous trouvons affirmée dans la Correspondance et
les Sermons.
Cette transcendance du bonheur sur les visées individuelles est une des
raisons qu'Augustin avance dans le De beata vita pour montrer que) si
tous les hommes tendent ardemment au bonheur, peu nombreux sont ceux
qui, en réalité, peuvent s'estimer heureux. Cette impossibilité à ce
que tous les hommes puissent parvenir au bonheur découle aussi, dans
le De beata vita, de l'ignorance que les hommes ont de leur véritable
origine et, dans la Correspondance et les Sermons, de la méconnaissance
que les hommes ont de l'origine et de la source du bonheur.
Le problème du bonheur revient par conséquent à déterminer le bien qui
peut rendre l'homme heureux. Sur ce point également, on note une conver-
gence de vue entre le De beata vita, la Correspondance et les Sermons.
Pour désigner ce bien, Augustin a recours à l'expression consacrée de
la philosophie ancienne. Il le nomme le "souverain bien" puisqu'il s'a-
git d'un bien immuable qui mérite d'être recherché pour lui-même et qui
dépasse absolument tous les autres biens.
A partir de cette définition, Augustin, par des démarches différentes
et appropriées à ses différents interlocuteurs, montre, tout aussi bien
dans le De beata vita que dans la Correspondance et les Sermons)que le
souverain bien ne réside pas dans les biens terrestres.
La démarche qu'il utilise dans le De beata vita et les Lettres qui lui

- 145 -
sant contemporaines est beaucoup plus philosophique que dans le reste
de la Correspondance et dans les Sermons. En effet, dans le De beata
vita, Augustin écartp. les biens terrestres de la recherche du souverain
bien par l'apposition qu'il relève entre la caducité des biens terres-
tres et l'immutabilité du souvera~n bien, et par les rapprochements
qu'il établit entre d'une part le malheur et la crainte qu'engendrent
les biens terrestres, d'autre part l'indigence et le malheur.
Dans les Lettres postérieures au De beata vita
et dans les Sermons,
c'est plus en prédicateur et homme d'Eglise qu'Augustin fait vair à
ses correspondants et à ses fidèles que les biens terrestres ne peuvent
pas constituer le souverain bien. Sa démarche s'adapte cependant à la
situation sociale des uns et des autres : à ses correspondant, qui sant
en général des personnes aisées, il montre la relativité des biens ter-
restres ; en présence de ses fidèles, dont la plupart sant issus du pe-
tit peuple, il met l'accent sur les dangers de ces m~mes biens.
Pas plus qu'il ne peut être placé dans les biens terrestres, le souverain
bien ne peut l'~tre en l'homme. En effet, si le bien est à rechercher en
l'homme, il ne peut ~tre placé que dans le corps au dans l'âme. Or, dans
les Lettres contemporaines du De beata vita, les Lettres postérieures au
De beata vita et les Sermons, Augustin fait vair que ni le corps ni l'â-
me ne peuvent ~tre considérés comme le souverain bien. En écartant de la
sorte les biens terrestres, le corps et l'âme de la recherche du souve-
rain bien, Augustin, par le fait m~me, rejette un certain type de bonheur
. .
terrestre et appelle l'homme au dépassement de so~-meme : il proclame
l'indispensable ouverture de l'homme à un au-delà qui le transcende.

-
146 -
N'étant à rechercher ni dans les biens terrestres ni en l'homme, le sou-
verain bien ne peut l'~tre qu'en Dieu qui seul est en mesure de combler
le voeu radical de l'homme. C'est ce qu'Augustin montre dans le De beata
vita, la Correspondance, et les Sermons en définissant Dieu comme le
bien immuable, le bien qui se suffit à lui-même et auquel tous les autres
biens doivent se reporter, le bien qui est le principe de la vie.
La nature du souverain bien ainsi déterminée, il fallait examiner com-
ment Augustin conçoit le bonheur en Dieu, les conditions et les voies
d'accès au bonheur qu'il préconise. C'est sur ces trois thèmes que cer-
taines différences sont apparues entre mes trois sources de documentation.
En effet, dans le De beata vita et les Lettres qui lui sont contemporai-
nes, le bonheur consiste en une contemplation mystique de Dieu, c'est-à-
dire en une sorte de "toucher" de Dieu dans la mesure où l'homme parvient
à une vision intuitive de l'essence divine. Cette contemplation trouve
ici-bas sa réalisation la plus totale dans l'extase, état où l'homme
s'unit momentanément à Dieu. Dans cette présentation du bonheur, Augustin
se situe à la fois sur le terrain m~me des philosophes antiques et dans
le domaine de la foi.
En effet, Augustin est l'héritier de bien de philosophes de l'Antiquité.
Pour la majorité d'entre eux, le bonheur est synonyme de sagesse et est
>
conçu comme une connaissance de la vérité, des "~e~~L", principes fon-
da~lentaux selon Aristote, ou de l'RIdée" d'après Platon et ses disciples.
Il s'agit d,'uQe "vision intellectuelle" de la vérité, d'une contemplation
qui, pour Plotin dont Augustin subit plus directement l'influence, est

-
147 -
une union mystique avec l'"Etre" ou avec l'"Un".
A l'instar des philosophes, il recommande à l'homme de vivre à l'écart
du monde, de s'évader du sensible et de rentrer en lui-même afin de pou-
voir se recueillir en Dieu: c'est dans le moi profond que se révèlent la
solidité et la vérité de Dieu. Il s'agit donc d'un certain type d'expé-
rience intérieure pour trouver le transcendant.
A la suite des philosophes, il réserve le bonheur au seul sage qu'il
distingue de l'indigent, du lettré et du savant et qu'il définit comme
celui qui se suffit à lui-même : centré sur lui-même, ce sage refuse
tout secoùrs extérieur et à plus forte raison transcendant.
Comme les philosophes aussi, il estime que la philosophie et l'étude des
arts libéraux sont nécessaires pour accéder au bonhéur. Mais, loin d'ê-
tre un système, la philosophie, tout comme les arts libéraux qui sont
une préparation à la philosophie, se présentent chez lui comme une mar-
che vers Dieu.
Ces ressemblances avec la philosophie ancienne ne doivent pas cependant
masquer de profondes et irrémédiables différences entre Augustin et les
paiens. C'est aussi et surtout en chrétien qu'Augustin conçoit le bon-
heur. Dans cette optique, le sage à qui est réservé le bonheur n'est
plus défini comme celui qui se suffit à lui-même, mais comme quelqu'un
qui a besoin de l'aide divine, de la grâce, pour parvenir au bonheur.
En effet, l'ardent désir qui soulève l'homme vers Dieu, loin d'être une
sorte d'appétit possessif par lequel il tenterait de s'approprier le
monde divin, et pour ainsi dire,d'arracher à Dieu l'extase, s'exprime devant

-
148 -
tout dans une humble soumission à la volont~ divine. Ainsi, si pour
Augustin la vocation de l'homme ne peut s'accomplir ni sans l'homme
ni sans Dieu, il est tout aussi évident que les deux "acteurs" ne se
situent pas sur le même plan. Dieu est la source de tout : il fournit
à l'homme les mo~ens d'atteindre le bonheur et le lui donne. Ne pas
le reconnaître est faire montre d'orgueil.
Dans les Lettres postérieures au De beata vita et dans les Sermons,
le philosophe s'efface devant le pasteur. Ce n'est plus qu'en Chrétien
qu'Augustin perçoit le bonheur. Irréalisable ici-bas, le bonheur ne
pourra être atteint que dans la vie éternelle où il sera donn~ à l'hom-
me de voir Dieu face à face et où il pourra L'aimer et Le louer en plé-
nitude. Pour parvenir à ce bonheur, l'homme devra le mériter dès ici-bas
en menant une vie pieuse et bonne en conformité avec les prescriptions
de la religion, ne comptant pas sur ces propres forces mais sur la grâce
de Dieu et en se mettant à la suite du Christ.
Premier ouvrage d'Augustin consacré entièrement au thème du bonheur,
le De beata vita est en quelque sorte l'aboutissement de la recherche
personnelle du bonheur par Augustin, recherche qui l'a conduit de la
lecture de l'Hortensius de Gicéron à la conversion. Bien qu'il s'insère
encore dans la spéculation tél~que de l'Antiquité, ce dialogue offre
déjà les éléments essentiels qui fondent la doctrine augustinienne du
bonheur, a savoir la découverte de Dieu comme souverain bien, la Con-
naissance, la vision, la jouissance de Dieu et l'union avec lui. Tou-
tefois, la doctrine exposée dans le Ue beata vita n'est pas une doctrine

-
149 -
close et achevée. Elle se présente plutôt comme une doctrine ouverte,
dans la mesure où elle subit, au cours de la vie ecclésiastique d'Au-
gustin, une certaine évolution qui correspond aux préoccupations du
pasteur qu'il est devenu.

8 l 8 LlO G R A PHI E

- 151 -
AUTEURS ANCIENS
--------
l - Textes de saint Augustin
=======
= === =
1. Textes particulièrement ~tudi~s
De beata vita, B.A. 4,
Texte de l'~dition b~n~dictine, introduction,
traduction et notes de R. Jolivet, Paris, 1962.
De beata vita, B.A. 4,
Introduction, texte critique, traduction, notes
et tables de J. Doignon, Paris, 1986.
Epistulae,
Ed. AI.Goldbacher, C.S.E.L., t. 34, 44, 57 et SB, Vienne,
1895-1923.
Epistulae,
Texte de l'~dition b~n~dictine, traduction et notes de P~ron­
ne, Ecalle, Vincent, Charpentier, Barreau, Paris, 1873.
Sermones ad populum,
Texte de l'~dition b~n~dictine, traduction et
notes de P~ronne, Ecalle, Vincent, Charpentier,
Barreau, Paris, 1873.
Sancti Augustini sermones post Maurinos reperti, probatae dumtaxat aucto-
ritatis, nunc primum disquisiti in unum Collecti et Codicum fide instau-
rati studio ac diligentia D. Germani Morin,
Miscellanea Agostiniana, vol. 1, Romae, 1930.
Sancti Aurelii Augustini sermones de vetere testamento, Ed. Cyril Lambot,
C.C., series latina, 41, Turnhout, 1961.
2. Autres textes
Confessiones, B.A. 13,
Texte
de l'~dition de M. Skutella, introduction
et notes de A. Solignac, traduction de E. Trého-
rel et G. 8ouissou, Paris, 1962.

- 152 -
Contra Academicos, B.A. 4, Texte de l'édition bénédictine, introduction,
traduction et notes de R. Jolivet, Paris,
1962.
De ordine, B.A. 4,
Texte de l'édition bénédictine, introduction, tra-
duction et notes de R. Jolivet, Paris, 1962.
De Trinitate
II,
Livres VIII - XV, B.A. 16, Texte de l'édition béné-
dictine, traduction de P. Agaësse, notes en collabo-
ration avec J. ~oingt, Paris, 1955.
De utilitate credendi, B.A. B,
Texte de l'édition bénédictine, intro-
duction, traduction et notes de J. P~gon, Paris,
1951.
Retractationes, B.A. 12, Texte de l'édition bénédictine, introduction,
traduction et notes de Gustave Bardy, Paris, 1950.
II - Autres auteurs
- - - - - - - - - -
CIEERON,
De fini bus bonorum et malorum, t. 1-11, texte établi et tra-
duit par J. Martha, Paris, (Les Belles Lettres), 192B-1930.
De republica, t. II, texte établi et traduit par Esther
Bréguet, Paris, (Les Belles Lettres), 19BO.
Tusculanes, t. 1-11, texte établi par Georges Fohlen et tra-
duit par Jules Humbert, Paris, (Les Belles Lettres), 196B.
OIOGENE LAERCE, Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres,
t. 1, traduction, notices et notes de Robert Genaillei
Paris, (Les Belles Lettres), 1965.
HORACE,
Epitres, texte établi et traduit par François Villeneuve,
Paris, (Les Belles Lettres), 1967.

- 153 -
PERSE,
Satires, texte établi et traduit par A. Cartault, Paris,
(Les Belles Lettres), 1966.
PLATON,
Euthydème, texte établi et traduit par Louis Méridier,
Paris, (Les Belles Lettres), 1978.
Gorgias, texte établi et traduit par Alfred Croiset, avec
la collaboration de Louis Bodin, Paris, (Les Belles Lettre~),
1974.
Phédon,texte établi et traduit pa~ Paul Vicaire, Paris,
(Les Belles Lettres), 1983.
PLUTARQUE,~, Thémistocle, texte établi et traduit par Robert
Flacelière, Paris, (Les Belles Lettres), t. 2, 1961.
Histoires, texte établi, traduit et commenté par Paul
Pédech, Paris, (Les Belles Lettres), 1961.
PORPHYRE, Sententiae ad intelligibilia ducentes, éd. E. Lamberz,
Leipzig (Teubner), 1975.
SENEQUE,
De vita beata, édition, introduction et commentaire de
Pierre Grimal, Paris, 1969.
Lettres à Lucilius, texte établi par François Préchac et
traduit par Henri Noblot, Paris, (Les Belles Lettres),
1971.
VIRGILE,
Enéide, texte établi par Henri Goelzer et traduit par
André Bellessort, Paris, (Les Belles Lettres), 1970.

- 154 -
AUTEURS CONTE~PORAINS
-----------
1 - Etudes sur Augustin
============
1. Ouvrage~ d'ordre EE~~Ehique ou chrono_
logique
GOLD8ACHER (Al.),
Index, C.S.E.L., t. 58.
GONZAGUE (~arie deh Un correspondant de saint Augustin i Nebridius,
dans Augustinus ~agister 1, 1954, pages 93-99.
KUNZEL~ANN (A.),
Die chronologie der sermones des hl Augustinus,
studi Agostiniani, Miscellanea Agostiniana, 2,
Ro~a, 1931, pages 417-520.
l'IANDOUZE (A.),
Prosopographie de l'Afrique chrétienne (303-533),
(= La Prosopographie chrétienne du 8as-Empire,
voluma 1), Paris, 1982.
~ARTINDALE (J.) at MORRIS (J.), The Prosopography of the Later Roman
Empira, (395-527), t. 2, Cambridge, 1971.
1'I0NCEAUX (P.),
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Les Commentaires simultanés de Mt 6, 12 et
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'Tu es Petrus', la péricope Mt 16, 13-23
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= = = = = = = ===
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COURCELLE (P.), La postérité chrétienne du songe de Scipion, R.E.L.,
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T A BLE
0 E 5
MAT 1 E RES

PAGES
AVANT PROPOS
SIGLES ET ABREVIATIONS
INTRODUCTION •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
1-31
CHAPITRE l : LE DESIR DE BONHEUR ••••••••••••••••••••••••••••••••• 32-43
1. Le désir universel da bonheur ••••••••••••••••••••••••••••• 33-36
2. Unité du désir universel de bonheur et diversité des
désirs des hommes ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 37-40
3. Vouloir n'est pas pouvoir: tous les ho~mes veulent être
heureux, mais tous n'y parviennent pas •••••••••••••••••••• 40-43
4. Conclusion. Constance de la pensée d'Augustin dans le
De beata vita, la Correspondance et les Sermons •••••••••••
43
CHAPITRE II
BONHEUR ET SOUVERAIN BIEN : LE SOUVERAIN BIEN
N'EST PAS DANS LES BIENS TERRESTRES •••••••••••••••• 44-63
1. De beata vita et lettres contemporaines du De beata vita :
Caducit~ des biens terrestres ••••••••••••••••••••••••••••• 45-52
2. Lettres post~rieDre8 au De beata vita : Relativité des
biens terrestres •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 52-SB
3. Sermons: Dangers des biens terrestres •••••••••••••••••••• 58-62
4. Conclusion. Constance de la pensée d'Augustin dans le De
beata vita, la Correspondance et les Sermons •••••••••••••• 62-63
CHAPITRE III
BONHEUR ET SOUVERAIN BIEN : DIEU EN TANT aUE
SOUVERAIN BIEN •••••••••••••••••••••••••••••••••••• 64-72
1. Dieu est le souverain bien parce qu'il est immuable ••••••• 65-68
2. Dieu est le souverain bien parce qu'il se suffit à lui-
marne •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 68-69

PAGE
3. Dieu est le souverain bien parce qu'il est le principe
de là vis •••••••••..••••••••.•••••••••.••.••••••••••.•••
70-71
4. Conclusion. Constance de la pensée d'Augustin dans le
De beata vita, la Correspondance et les Sermons •••••••••
7~-72
CHAPITRE IV
BONHEUR EN DIEU ••.••.•••••••••••.•.••••••.•.•••••
73-94
"De beata vitali..........................................
74-81
1. La possession de Dieu •••.••••.•••••.••.•••••••••••..•.••
75-75
2. La connaissance de Dieu ••.•.•..••.••••..••••••••.•..••••
76-79
3. Bonheur terrestre au bonheur célesta ?
79-81
les Sermons .............................................. 82-94
1. Bonheur et vie présente: impassibilité du bonheur sur
terre •••.••••.••••••.•.•••..••...•••...•••.••.•••••.•.••
82-88
2. Bonheur céleste: la vision de Dieu •••••••••••••••••••••
88-93
au Da beata vita .........................................
93-94
----------------
CHAPITi1E V
LES CONDITIONS D'ACCES AU BONHEUR •••••••••••••••••
95-110
De beate vita ...............................................
96-104
1. Seul 19 sage est heureux ••••.••.••..•••.••..••.•••.•••• 9
95- 98
2. Le saga sa distingue du sot ,de l'indigent et du lettré ..
98-101
3. Le saga se suffit à lui-m9me .9 ................ , ••••••• " •• 101-1D2
4. Le saga vit salon D~eu ..... ,. ............ ,. ...............
102-"104

PAGE
II - Dans les le~tres postarieures au D~ beata vi~~ Bt_~~
les Sermons: BONHEUR ET BONTE •••••••••••••••••••••••••••• 104-110
1. Le bonheur et la racompense des bons ••••••••••••••••••••• 104-105
2. Banté et piété ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 105-106
3. Banté st vie banna ••..••••.••.•.•...•..••.••••••••.•••••• 107-110
vita .........................................................................................................
110
CHAPITRE VI
LES VOIES D'ACCE5 AU BONHEUR •••••••••••••••••••••• 111-140
l - Dans le "De beata vita" et les Lettres contemooraines
------------------------------_..._----
Elu"Oebeata vita" ................................................................................ 112-117
1. La madiation de la philosophie et des arts libéraux •••••• 112-110
2. La médiation de la grace ••••••••••••••••••••••••••••••••• 116-117
les Sermons ........................................................................................... 117-140
1. Critique de le littérature profane .............................................. 117-123
2. Critique des doctrines philosophiques ••••••••••••.•••••••
123
Critique de l'épicurisme •••••••••••••••••••• • •• •• ••• ·.·124-129
Critique du sto!cisme •...•....•...•........•..•...•.. ··129-131
Critique du p12tonisme ....................... .•.•.....•. ~ .. 131-135
3. ROljet OJ l'idéal patriotique et dOlS religions à rlystères •• 135-138
4. La gr3~3 da D'.BU
la C~~istJ vaie unique du bonhOlur •· •• ·139-140
CONCLU5!ON GENERALE ••••.•.•••.•••••...•.•••••.••••.••••••• · ••• ·.141-149
BI8LIOGR:·\\PiiIE •..••.••••...•..........•••.•..•••...•••.•••.•••.•• 150-1:09

NOTES DE L'INTRODUCTION
1 Cf.
P.
RElU.
la vision d'Ostie.
sa place dans la vie et
l'oeuvre de
saint Augustin,
Paris,
1938, page 109 : N
Il serait sans doute extrêmement
fructueux de montrer comment
la vie d'Augustin et notamment
les faits et
les sentiments qui précédent de peu ou suivent immédiatement sa conversion
pénètrent
toute
sa
doctrine.
d'interpréter
ainsi
à
la
lumière
des
Confessions ses grands traités dogmatiques."
2
Cf.
De
beata
vita
1
<4) •
:B......A..A..
page
54.
1.
5-9
"Ego
ab
usque
undevicesimo anno aetatis meae.
postquam in .schola rhetoris librum ilIum
Ciceronis.
qui
Hortensius
vocatur,
accepi,
tanto
amore
philosophiae
succensus su m,
ut
statim ad eam me
ferre
meditarer.·
Pour ce qui est de
l'influence
de
Cicéron sur
Augustin,
Voir JI.
TESTilD,
saint
Augustin et
Cicéron ; Cicéron dans la formation et dans l'oeuvre de saint Augustin,
1
et II, Paris, 1958.
3 Cf.
CICEROW.
Hortensius,
fragment
1.
5
<57)
. "
Cohortati sumus.
ut
maxime
potuimus,
ad
philosophia"!
sc.udiulll eo
tibro."
Texte
cité
pdr
1.
TESTARD, op. cît,l. yage 25.
1
• •
• 1

• •

- 2 -
4
De Trinitate llIl,
4 (7), B.A.16, page 282, 1. 26-30 : "Cicero qui,
cum
vellet
in
Hortensia dialogo
ab
aliqua
re
certa de
qua
nullus ambigeret
sumere
suae
disputationis
exordium,
'beati
certe',
inquit,
'oInnes
esse
volumus.' •
5
CL... JUchel
RUCH,
l' Hortensius
de Cicéron,
histoire
et
reconstitution.
Paris, 1958, chapitre III, les faux biens, pages 134 à 153.
6
Certains
textes
d'August in conf irment
que
Cicéron faisait
dépendre
le
bonheur de
la simple recherche de la sagesse et de la vérité : en Contra
Academicos
l,
3
(7),
B........l....!.
page
26,
1.
21-22
;
page
28,
1.
1-6,
i l
déclare
·Cicéron
a
pensé
que
celui
qui
cherche
la
vérité
peut
être
heureux, alors même qu'il ne pourrait réussir à le trouver ... Si donc d'une
part,
nous
devons
croire
que
le
sage
est
nécessairement
heureux et
si,
d'autre
part,
la
recherche
de
la
vérité
à
elle seule constitue dans
sa
perÏection l'office de la sagesse, comment hésiterions-nous à penser que le
bonheur de
la vie puisse résulter de la simple recherche de la vérité 7"
Cf. aussi Confessions VIII, 7 (17), B.A,11, page 42, 1. 26-31
page 44, 1.
Augustin y exprime s,cn incapacité
,
douze ans a;:>rès
la lecture de
~aortensius,
de
se
consacrer
uniquement
à
la
recherche
de
la
sagesse
suggérée par Cicéron.
. . . / ...

- 3 -
7 Contessions III,
4
(7),
B.A,13,
page 374, 1. 1<r12 :"Vilutt mihi repente
omnis
vana
spes et
immortali tatem sapientiae
concupiscebam aestu
cordis
incredibili. .,"
8 Coufessions III,
4
(8),
B.A,13,
page 376, 1. 6-7 : "Et hoc solum me in
tanta flagrantia refrangebat, quod momen Christi non erat ibi."
9 Coufessions III,
5
(9)
,
B,A,13,
page 376, 1.
14-15 :
"Itaque institui
animum intendire in scripturas sanctas et viderem quales essent,"
10 De utilitate Credeudi
1
(2),
B.A.8,
page 210,
1.
28-30
:
" ...
Ipsos
quoque animadvertebam plus in refellendis aliis disertos et copiosos esse,
quam in suis probandis firmos et certos manere ... "
11 Cf.
Confessions VI, 6 (9), B,A.13, page 536, 1. 15-29 : "Et ingemui et
locutus
sum
cum
amicis,
qui
mecum
erant,
multos
dol ores
insaniarum
nostrarum, quia omnibus talibus conatibus nostris, qua11bus tunc 1aborabam,
sub stimul1s cupiditatum tra:'ens infel1citatis meae sarcinam et trahendo
exaggerans nihil vellemus aliud nis1 ad securam laetitiam pervenire quo nos
mendiclJs ille jam praece::051sset numqud:Jl illuc fortasse venturos ... Et certe
ille laetabatur, ego anxius eram , sacurus ille, ego trepidus."
... / ...

- 4 -
12
De
utilitate
Credendi
VIII
(20).
~.
page
254.
1.
12-13
"Opportunissimum ergo me ac valde docilem tunc invenire posset, si fuisset
qui posset docere."
13 Cf.
De beata yita 1 (6) • .IL...l...!. page 62. 1. 5-16 : .. Erant autem... in
primis nostra
mater,
cujus meriti
credo esse omne,
quod vivo,
llavigius
frater
meus,
Trygetius
et
Licentius
cives
et
discipuli
mei
nec
Lartidianum et
Rusticum consobrinos
meos...
deesse
volu!...
Erat
etiam
nobiscum aetate minimum omnium... , Adeodatus filius meus."
14 CL... De beata yita
1 (6) • .IL...l...!. page 60. 1. 28
" Idi bus Novembri bus
mihi natalis dies erat."
15
Aux 270
lettres rassemblées
par les Mauristes
<dont
la plupart
sant
d'Augustin), il faut ajouter l~s huit lettres qui figurent dans les volumes
du C,S,E.L.
aux tomes 34,
44,
57 et 58 sous les sigles 92A,
171A.
173A.
184A,
185A. 202A.
250A et la lettre à Firmus contenue dans le ~ au tome
47, ainsi que les vingt-neuf lettres dècouv~rtes p~r Johannès Div!~k et qui
sont publiées dans le C,S.E.L"
tome 88, Vie~ne. 1981. On verra que, dans
mon Cor?us,
j'ai utilisé certaines lettr2; dont Augustin n'est pas l'auteur
~ais le destinataire.
. .. / ...

- 5 -
16 Je me suis reporté à
la liste dressée par Patrick VERBRAKEH,
Etudes
Critiques sur les sermons authentiques de saint Augustin Paris, 1969, pages
11-18.
11 voir tome 1, pages 14-31.
... / ...

- 6 -
NDTES DU CHAPITRE l
............
18 Voir introduction, page ~.
19 Cet axiome se trouve en particulier dans PLATON,
Euthydème 278e, Belles
~
" t J
"
" ' ; ' ,
lettres, page 154 "~E''' ~L 1T~vH5 J.."\\lewl1o~ QOVI'O,",LfJ'" (v liea..ttL,v'."
-
,
('Eu TI~~ t.tr.I"
signifie en propre "être bien:' "réussir", "être heureux·,
par opposition à
= agir bien). On le retrouve dans
l' Hortensius de Ciceron
(voir ~, note 4>.
La formule est reprise par
Sénéque au
début
de
son De yita beata
I, (Il
"Vi vere,
Gallio frater,
omnes beate vivunt".
20 Epist,
130
(9),
C.S.E.L.,
tome 44,
page 50,
1.
11-12
NOra beatam
vitam; hanc enim habere omnes homines volunt."
21 ~. 53 (1), éd. bénéd, t.16, page 383, 1. 7-8
"llemo quippe inveniri
potest, qui beatus esse nolit."
22 Cf.
Seo, 150 (4), éd.
bénéd.,
t.
17, page 407,
1. 20-22 :
"Nam vitam
beatam appetere,
vitam beatam velle, vitam beatam concupiscere, desiderare,
sectari, omnium hominum esse arbitrar."
... / ...

- 7 -
23 ~ 306 <4>, éd. bénéd., t.
19, page 3,
1. 22-39 : ·Si cui dicatur :
'Vis vi vere ?',
numquid sic audit quomodo si diceretur :
'vis militare ?'
In
illa
enim
interrogatione,
quod
est
'Vis
militare
?'
aliqui
mihi
dicerent
'vola'
et forte plures :
'Nolo'.
Si autem dicam :
'Vis vivere
? '
. , puto nemo est qui dicat : 'Halo' . Omnes enim natura habent insi tum
vi vere velle, mori nolle.
Item si dicam:
'Vis sanus esse ?', puto nemo est
qui
dicat
:
'Nolo'.
Nemo enim vult dolere ...
Ecce ad duo
ista consensit
mihi
omnium
sensus,
vitam
et
sanitatem.
Numquid
omnium
consensit
ad
navigationem ? Omnium ad vitam et sani tatem."
24 Cf. Epist.
130
<9>,
C.S.E.L.,
t.
44,
page 50,
1.
12-15
"Ham et qui
pessime et
perdite
vivunt,
nullo modo
ita viverent,
nisi
eo modo se
vel
esse beatos putarent.
Quid igitur aliud oportet orare nisi id quod cupiunt
et mali et boni. .. ?",
seDL...150 <4>, éd. bénéd., t
17, page 407,1. 26-28:
"Nam et
qui
bonus est,
ideo bonus est ut
beatus sit
;
et qui malus est,
malus non esset, ni si inde se beatum esse passe
speraret."
25 Cf. ~ 231 <4> éd. bénéd., t
18, page 197, 1. 39 ; page 19B, 1. 1-4 :
esse
vultis,
scia.
Da
mihi
hominem
latronem,
sce1eratum,
fornicatorem,
maleficum,
sacrilegum,
omnibus
vitiis
inquinatum,
omnibus
ilagitiis seu facinorib'ls obrutum,
qui non velit beate
vivere."
Augustin
se sert très souvent
d'un singulier générique lorsqu'il s'adresse à ses
fidèles,
ce qui lui permet d'interpeller chacun d'eux.
.. ./ ...

- 8 -
26 Cf. Hpist
155 (9), C.S.H.L., t.
44, page 439, 1. 9-10 : ·Cernis igitur
unde
petendum
si t
quod
omnes,
docti
indoctique,
desiderant".
Cette
conclusion suit un développement où Augustin,
par un commentaire du psaume
143,
11-15,
indique à
son correspondant où il doit chercher la source du
bonheur.
27 Cf.
Ss:DII.... 150 (4), éd. bénéd .. t. 17, page 407, 1. 10-17 : "Communiter
omnes
philosophi
studendo,
quaerendo,
disputando,
vivendo
appetiverunt
apprehendere vitam beatam.
Haec una fuit causa philosophandi. Sed puto quod
etiam hoc philosophi nobiscum commune habent. Si enim a vobis quaeram quare
in Christum credideritis,
quare Christiani facti
fueritis,
veraciter mihi
.,
omnis
homo
respondet
propter
vi tam beatam'.
Appeti tio
igi tur
beatae
vi tae philosophis Christianisque communis est".
28 &u:JL.. 306 (3), éd.
bénéd , t.
19, page 2, 1. 26-35 : "Omnis autem homo,
qualiscumque sit,
beatus vult esse.
Hoc nemo est qui non velit atque ita
velit ut prae caeteris velit ; imo quicumque vult caetera, propter hoc unum
velit.
Diversis cupiditatibus ho:nines rapiuntur,
et alius cupit hoc,
alius
illud.
Diversa
genera
sunt
vivendi
in
genere
humano
et,
in
multitudine
generum vivendi,
alius aliud eligit et capessit.
Nemo est tamen quocumque
genere vitae electo,
qui
non beatam vitam cupiat.
Beata erzo vita omnium
est co=unis possesio".
. .. / ...

- 9 -
29 Cf.
Epist.
3
(1),
C.S.E.L.,
t.
34,
page 5, 1. 2-4 : "Prope persuasisti
mihi non quidem beatum esse me ... sed certe quasi beatum... N
30 Cf. Epist.
3
(1),
C.S.E,L.,
t.
34, page 5, 1.
11-24
page 6,
1.
1-2 :
"Nonne verum est,
quod Hebridio placet) beatos nos esse? Hon utique.
Nam
stultos adhuc esse nec ipse audet negare. Quid, si etiam stultis beata vita
contingit ?
Durum !
Quasi vero parva vel alia ulla miseria sit quam ipsa
stultitia.
Unde
ergo
illi
visum
est
?
An
lectis
11lis
libellis
etiam
sapientem me
ausus
est
credere
?
Non usque
adeo
temeraria
est
laet i t ia
gest iens praesert im hominis,
cuj us quant i
ponderis considerat io si t.
bene
novimus.
Illud igitur est:
scripsit quod nabis putavit dulcissimum fore,
quia
et
11li
dulce
factum
est
quidquid
posuimus
in
11lis
litteris,
et
scripsit gaudens nec curavit quid committendum gaudenti calamo esset.Quid ?
Si Soliloquia legisset ? Laetaretur mul ta exundantius nec tamen reperiret
plus
aliquid,
quod
me
appellaret,
quam
beatum.
Cita
ergo
summum
nomen
effudit
in
me
nec
sibi aliquid reservavit
quod de
me
laetior adseveret.
Vide,
laetitia quid faciat
!".
Je reviendrai
sur certains passa~es de ce
texte dans les chapitres suivants.
31 cr..... E:?ist,
118
(13),
C.S.E,"!..,
t.
34,
page 677,
1.
20-22 :
"Non enim
ulla modo differenda est ista cogaitio
(beatae vitae)
aut
illa huic a te
praeserti~ jam in hac aetate vel discen~l ordiT~ praeferenda est",
... / ...

- 10 -
32
Epist.
102,
26,
C.S.R.L.,
t.
34,
page 567,
1.
15-22
"In voluntate
quippe
propria
metietur
bonus
homo
bona
facta
et
in
ea
metietur
ei
beatitudo,
itemque in voluntate propria metietur malus homo mala opera et
in ea metietur ei miseria,
quoniam,
ubi quisque bonus est,
cum bene vult,
ibi etiam malus,
cum male vul t.
Ac per hoc ibi etiam fit
ve1 beatus vel
miser,
hoc
est
in
ipso
suae
voluntatis
affectu,
quae
omnium
factorum
meri torumque mensura est".
33 Cf.
De beata vita
II
<l0>,
B.....A......!, page 70,
1.
3-7 :
"Videturne vobis,
inquam, beatus esse, qui quod vult non habet ? - Negaverunt.- Quid ? Omnis
qui quod vult habet beatus est? - Tum mater:
Si bona,
inquit,
velit et
habeat, beatus est, si autem mala velit, quamvis habeat, miser est !".
34 Cf. De beata yita II (10),~,
Epi st , 130 (10), C.S.E.L., t. 44,
page 70, 1. 8-12 , page 72, 1. 13-20
page 51, 1. 3-15 ;
" Ipsam, inquam, prorsus, mater, arcem
"Prius itaque adtende, utrum ad-
philosophiae tenuisti. Nam tibi procul
quiescendum sit eis, qui dicunt
dubio verba defuerunt, ut non sicut
eum beatum esse, qui secundum suam
Tullius te modo panderes, cujus de
vivit voluntatem. Secd absit ut hoc
hac sententia verba ista sunt. Nam in
verum eSS2 credamus. Quid, si enim
Hortpnsio, quem de laude ac defensione
nequiter velit vivere ? Nonne t3nto
philosophiae librum fecit ;
miseriar esse convincitur, quanto
faciliu3 mala voluntas ejus
impletur ?
. . . 1 . ..

- 11 -
'Ecce autem. ait, non philosophi
Xerito hanc sententiam etiam ipsi,
quidem, sed prompti tamen ad dis-
qui sine dei cultu philosophati
putandum omnes aiunt esse beatos
sunt, respuerunt. Nam quidam eorum
qui vivant ut ipsi velint. Falsum
vir eloquentissimus ait: 'Ecce
id quidem ; velle enim quod non
autem alii non philosophi quidem
deceat, id est ipsum miserrimum.
sed prompti tamen ad disputandum
Nec tam miserum est non adipisci
omnes aiunt esse beatos,qui vivunt,
quod velis quam adipisci velle quod
ut ipsi velint. Falsum id quidem.
non oporteat. Plus enim mali pravi-
Velle enim, quod non deceat, id est
tas voluntatis adfert quam fortuna
ipsum miserrimum nec tam miserum
cuiquam boni! ' .•
est non adipisci quod velis, quam
adipisci velle quod non oporteat'.
L'affirmation que
le
bonheur consiste dans l'indépendance de la Volonté
serait imputable à Hortensius qui représente ceux que Augustin désigne par
l'expression
-Ion
philosophi
quideD
sed
prgmpti
tamen
ad
disputandu~
hoDctnes·, Voir Xichel RUCH, op. cit"
page 129. A travers Cicéron, Augustin
reprend PLATON,
Gorgias 470 d-e Où Socrate s'oppose au sophiste Polos qui
soutient que les tyrans sont les plus puissants et les plus heureux des
hommes parce qu' ils peuvent
impunément sati 3faire toutes leurs passions,
Pour appuyer sa th'èse,
Po',os cite l'exemple d' Arc~"laos à qui S":3 crimes
ont donné
le trône
de
Macédoine.
<Cf.
Platon,
Gur:;.ia.;;.
470 d-e,
~s.
Lettres, t. 3, pages 1~2-143).
.. J ...

- 12 -
35 Je reviendrai sur ce thème de la grâce au chapitre 6.
36 CL.. Epist.
130 (11), C,S,E.L,.
tome H, page 52,
1.
5-9 : "Alius vult
conjugari,
alius
conjugio
viduatus
deinceps
continenter
eligit
vivere,
alius nullum concubitum nec in ipsis nuptiis experiri, Et si aliud hic alio
melius reperitur,
nullum tamen istorum possumus di cere indecenter aliquid
velle".
37 ~ 306
(3),
éd.
bénéd.,
t,
19,
page 3,
1.
1-11
:
"Alius dicit
'Beati qui militant'. Negat alius et dicit:
'Beati, sed qui agrumcolunt!'
Et
hoc
negat
alius
et
dicit
'Beati
qui
in
fora
populari
claritate
versantur causasque defendunt,
vitam mortemque hominum lingua moderantur,'
Et hoc alius negat et
dicit
:
'Beati,
sed qui
judicant,
qui
potestate:!ll
habent audiendi
et
discernendi. 1
Negat
hoc alius et
dici t
1 Beati
qui
navigant,
multas
regiones
discunt,
multa
colligunt
lucra
!'
Videtis,
carissimi,
in
omni
ista
multitudine
generum
vivendi
non
placere
unum
omnibus et tamen beata vita placet omnibus",
38 Voir ~ note 33.
... / ...

- 13 -
39
Epi st , 104 <12>, C.S.E,L"
t. 34, page 590, 1. 33 ; page 591, 1. 1-2 :
"Beati autem ollmes esse volumus,
hoc est appetimus,
nec tamen ollmes,
qui
volumus. possumus, hoc est, quod appetimus. adipiscimur",
40 ~ 306 (4), éd. bénéd., t. 19, page 3, 1. 20-21 : "Quid ergo, fratres
mei, quid est beata vi ta, quam volunt Ollmes, et non habent ollmes 7",
41 De beata yita 1 (1), B.A,l"
page 48,1. 8-11 ; page 50 1. 12-18 : "eum
enim in hune mundum si ve
Deus si ve
natura si ve
necessi tas si ve
voluntas
nostra sive conjuncta
horum aliqua sive simul
ollmia",
velut
in quoddam
procellosum
salum
nos
quasi
temere
passimque
projecerit,
quotusquisque
cognosceret.
quo
si bi
ni tendum esset
quave
redeundum,
nisi
al iquando et
invi tas
contraque
obti nentes
aliqua
tempestas,
quae
stul t is
videtur
adversa,
in optatissimam terram nescientes errantesque compingeret 7",
42 SeI:L..:Mai 12 (2). ll.....!...... t.
1, page 285, 1. 24 ; page 286, 1. 1-3 : "Remo
interrogatlL3,
utrum
beatus
esse
veUt,
cum aliqua
dubitatione
se
velle
res':JOndet.
Cmnis
homo
clamat
beatum se
velle
esse
sed
qua
eatur
ad
beatitudinern et ubi
inveniatur i11a beatitudo,
hoc nesciunt hornines.
Ideo
errant" .
.. . f ...

- 14 -
43 Epist, 155 (9), C,S.E.L"
t, 44, page 439, l, 9-11 :" Cernis igitur unde
petendum sit quod omnes, docti indoctique, desiderant, et multi errando ac
superbiendo, unde petatur et ubi accipiatur, ignorant",
44 SerDL 150 (6), éd. bénéd"
page 410, 1. 12.
... / .. ,

- 15 -
NDTES DU CHAPITRE II
f f f f , n
45 Cf. De beata yita II (11), ~, page 74, 1. 4-10 : • ... Quid ergo sibi
homo comparare debet,
ut beatus si t
? i nquam ;
forte enim etiam hoc isti
nostro convivio subministrabitur.
ne Licentii aviditas neglegatur ; nam id.
opinor,
ei
comparandum
est,
quod
cum
vult
habet.
Kanifestum
esse
dixerunt.
Id
ergo,
inquam,
semper
manens
nec
ex fortuna
pendulum nec
ullis subjectum casibus esse debet".
46 De beata yita II
<11>, a..J......!.
page 74, 1.
11-13 : "Nam quidquid mortale
et
caducum est,
non potest
a
nabis,
quando
volumus
et
quamdiu
volumus,
haberi· .
47 Cf.
De beata yita II
(11 >,
page 74,
1.
17 ;
page 76,
1.
18-22 : " Qui
timet,
inquam,
videturne tibi beatus esse? -
Non videtur,
inquit.
-Ergo
quod amat quisque si ami ttere potest,
potestne non t imere ? -
Non potest,
inqui t.
-
Amitti
autem possunt
illa fortuita.
Non igitur hoc qui amat et
possidet, potest ulla modo beatus esse".
(Augustin s' adresse à Trygetius>.
48.
Sur ce sujet,
voir
~rard VERBEKE, sai!1t Augustin et le stoïcislllf!,
dans Rec!ug,
t.
l, paris,
1958, pages 66-89 ; Charles BAGUETTE,~tQiç~
!lans la Îoolation de
sai!1t
AUlPlstin,
thèse de doctorat,
Louvain,
1963
;
Xichel SPA:.rrEUT.
le stoï ciSllIf! ~sa.Ï1lt August; n, Forre, F,Jturi, i Il onore X.
PELLEGRI~O, Toriuo, 1975, pages 869-914.
... 1 ...

- 16 -
49 Les stoïciens distinguaient quatre sortes de passions
- la Cupiditas ou libido (désir ou avidité effrénée),
- la laetitia (joie excessive),
- le metus (crainte).
- et l'aegritudo (chagrin).
Cf. CICEROI, Tusçulanes IV (8), éd. Belles Lettres,t. l, pageS6-7.
50 L'inspiration stoïcienne des Tusçulanes
a été soulignée par J. HUXBERT
dans son introduction aux Tusçulanes, éd. Belles Lettres, t.
l,pages 10-11:
Les sources.
51 Cf. CICEROI. Tusculanes V. 14 (41), éd. Belles Lettres, t. 2, page 126,
1.
24-26 :
"vol umus enim eum qui
beatus sît
t utum esse.
i nexpugnabilelll,
saeptum atque munitum non ut parvo metu praeditus sit. sed ut nullo",
52 Cf. De beata vita II (1U, lL...A....A. page 76, 1. 23-25 : " Etiamsi securus
sit,
inquit,
ea se
omn1a
non esse amissuruID,
tamen ta1ibus sati',ri
non
poteri t, Ergo et eo mi ~;er, quo se!llper est 1nd1g1J3" .
.. .f ...

-
17 -
53 Cf. De beata yita II <11>, ~, page 76, 1. 26-30 : "Quid, si, inquam,
his omnibus abundans rebus atque circumfluens cupiendi
modum si bi statuat
eisque contentus decenter jucundeque perfruatur,
nonne tibi videtur beatusl
- Non ergo,
inquit, 11lis rebus,
sed animi sui moderatione beatus est".
54 Voir tome l, page '36' et note 29.
55 Epist.
3
<2>, C.S.E.L., t. 34,
page 6,
1. 7-10 : "Nunc vero quomodo vel
qualiscumque beatus su m,
qui
nescio,
cur tantus mundus sit,
cum rationes
figurarum,
per
quas
est,
nihil
prohibeant
esse,
quanto
quis
voluerit,
ampliorem 7".
56 Cf.
~, 3 (2), C,S.E.L .. t. 34, page 6, 1. 11-21 : " ... Aut non mihi
diceretur,
immo non cogeremur confiteri corpora in infinitum secari,
ut a
certa
velut
basi
in
quantitatem
certam
certus
corpusculorum
numerus
surgeret 7 Quare
cum corpus nullum esse minimum sini tur,
quo pacto esse
sinamus amplissimum,
quo amplius esse non posset,
nisi
forte
illud,
quod
aliquando Alypio dixi occultissime,
habet magnam vim,
ut,
quoniam numerus
ille intellegibilis infinite crescit,
non tamen iniinite minuitur - nam non
eum licet
ultra
monadem resol vere
-
contra
sensibilis -
nam quid est
aliud sensibilis numerus nlsi corporeorum vel corporulll quantitas ? - Dlnui
quidem lnfinite, sed infinite crescere nequeat",
" .! .. ,

- 18 -
57 Cf.
Pierre HADOT : -.umerus IntellegIbIlIs Infinite crescit", Augustin,
Epistu1a 3.2, in Divinitas, 11, 1967, page 184.
58 Pierre HADOT, op. cit"
pages 184-185.
59 Epist, 2, C,S,E,L, t. 34, page 3, 1. 13 - 16 : "Bene inter nos convenit,
ut opinor, omnia, quae corporeus sensus adtingit, ne puncto quidem temporis
eodem modo manere passe, sed labi, effluere et praesens nihil obtinere,
id
est, ut latine loquar, non esse",
60 Epist.
3
(2),
C,S.E.L .. t. 34, page 6, 1. 21-22 : " .. ,Et idee fartasse
merito
philosophi
in
rebus
intellegibilibuS
divitias
ponunt,
in
sensi bi! i bus egestatem",
... / ...

- 19 -
62
Cf.
Epist.
2,
C,S.H,L., t.
34,
page 3,
1.
16-21 :
"Horum <OlDD.ia quae
corporeus
sensus
adtingit)
itaque
amorem
perniciasissimum
poenarumque
plenissimum vera et
divina philosophia monet
frenare atque sopire,
ut
se
toto animus,
etiam dum hoc corpus agit,
in ea,
quae
semper ejusdem modi
sunt neque peregrino pulchro placent, feratur atque aestuet".
63
Epist.
15
(2),
C,S.H,L.,
t.
34,
page
36,
1.
15-19
" ... Justa
et
officiosa et pro suo genere pacatiar atque tranquillior rerum temporalium
administratio recipiendorum aeternorum meritum gignit,
si
non teneat,
cum
tenetur,
non implicet.
cum mul ti pl icatur,
si non,
cum...
<texte al téré) ...
putatur. involvat".
64 ~. 15 (2), C.S,E,L., t. 34, page 36, 1. 21-24 : "Laxatis ergo curis
mutabilium rerum bona stabilia et cert). quaeramus,
supervolemus terrenis
opibus nostris.
Nam et in mellis copia non frustra pennas habet apicula ;
necat enim haerentem".
65 Epist.
118
(13).
C,S.E.L ..
t.
34,
page 678,
1.
11-16 :
·Sed summum id
dicitur quo cuncta referuntur ; eo enim fruendo quisque beatus est, propter
quod cetera
vult habere,
cum illud jam non propter aliud sed propter se
ipsum diligatur,
et' ideo finis ibi dicitur.
quia jam,
quo e:<currat e-':. quo
referatur,
non invenitur,
ibi requies appetendi,
ibi fruendi securitas, ibi
tranquillis3imum gaudium optimae voluntatis".
. . . / ...

- 20 -
66 Cf.
Epist.
140
(3),
C.S.E.L., t.
H,
page 156, 1. 24-26 ; page 157, 1.
1-7
:
"Est
quaedam vita
hominis
carnalibus sensibus
implicata,
gaudiis
carnali bus dedi ta,
carnalem fugi tans offensionem vol uptateJnque consectans.
Hujus vitae
felicitas
temporalis est,
ab hac
vita
incipere necessitatis
est,
in ea persistere
voluntatis.
In hac quippe ex utero matris infans
funditur,
hujus
offensiones,
quantum
potest,
refugit,
hujus
appetit
voluptates,
nihil amplius valet, Sed posteaquam venerit in aetatem, qua in
eo
rationis
usus
evigilet,
poterit
adjuta
divinitus
voluntate
eligere
al teram vi tam,
cuj us
in mente
gaudium est,
cuj us
interna atque
aeterna
felici tas·.
Augustin reprend ici une thèse qui servait de point d,: départ
aux philosophes anciens. Ainsi Aristippe, principal représentant de l'école
Cyrénaïque, disait que, dès l'enfance, la nature nous pousse à chercher le
plaisir et à éviter la douleur (C!. Diogène LAERCE, Vie des philosophes, t.
l,
Belles Lettres,
pages
134-135),
Les
épicuriens soutenaient
que
tout
animal, dès sa naissance, cherche le plaisir i
il en jouit comme d'un bien
suprême et il évite la douleur COIllllle le plus grand mal
(Cf.
CICEROI, De.
finibus I,
9
(30),
Belles Lettres,
pages 22-23),
Les stoïciens,
avec une
légère
nuance,
disaient
la
même
chose
puisqu'ils
déclaraient
que
tout
animal, dès sa naissance, s'attache à soi-même et se confie à soi-même pour
conserver son être et son état naturel et pour aimer ce qui contribue à
maintenir
cet
état
<C!,
CICERON,
Op.
Cft.
III,
V
<1ô),
Belles Lettres,
pages 16-11),
... / ...

- 21 -
67 Cf.
Epist,
56
(2),
C,S,E.L"
t.
34, page 214, 1.
16-20 : "Quam certum
est enim tibi vivere te, tam sit certum doctrina sa1utari istam vitam, quae
in de1iciis temporalibus agitur,
in comparatione vitae aeternae, quae nobis
per
Christum
atque
in
Christo
promi ttitur,
non
vitam sed
mortem
esse
deputandam" .
68
Epi st ,
130
(7),
C,S,E,L"
t,
44,
page
48,
1.
6-9
"Deliciae
si
adfluant,
ne adponas cor.
Non idee te magni pendas, quod non desunt,
quod
affati::n suppetunt,
quod
ve1ut
ex
fonte
largissimo
terrenae
felicitatis
fluunt.
Omnino
haec
in
te
despice
atque
contemne,
ne
in
his
quicquam
requiras praeter integram corporis va li tudinem."
69 ~, 130 (7), C,S.E.L"
t. 44, page 48, 1, 15-17, citant Romains, 13,
14 : "Iam et ipse Aposto1us : 'Carnis', inquit,
'providentiam ne feceritis
in
concupiscentiis',
quia
gerimus
curam
carnis
sed
ad
necessitatem
salutis".
70 Cf. li~lsi, 130 (12), C.S,E,L. t. 44, page ~3, 1, 3-11, citant l Timothée
§, 6-8 : " ... Sic Apostolus loquitur
'L,: autèm quaestus I!lagnus pietas cum
sufficientia
;
nihil
enim intulimus in hune mundum sed nec au ferre
hinc
aliquid possumus ; victum et tegumentum hdbentps his contenti sumus' "
.
... / ...

- 22 -
71 Cf.
~.130 (12), C.S,E,L., t. 44, page 54, 1. 1-6, citant Proverbes
30,
8-9
:
"Hanc
(sufficientiam)
optabat
et
pro hac
orabat
qui dicebat
:
• Di lI'itias
et
paupertatem
ne
dederis
mihi
const itue
au tem
mihi,
quae
necessaria
sunt,
sufficienter,
ut
ne satiatus mendax efficiar et dicam :
'quis me lI'idet 7' aut pauper factus furer et jurem nomem dei mei ,.
72 Cf. Epist.
130 (12), C,S,E.L.? t. 44, page 54, 1. 6-9 : "Vides certe et
istam
sufficientiam
non
appeti
propter
se
ipsam sed
propter
salutem
corporis
et
congruentem
habitum
personae
haminis,
quo
habitu
non
sit
inconll'eniens eis cum quibus honeste officioseque lI'ill'endum est".
73 Cf. Epist.
130 <1U, C,S.E.L.,
t.
44, page 52, 1. 9-16 : "Sic et optare
(decetl
filias
nuptiarum scilicet
fructum et
eis,
qui
suscepti
fuerint,
vitam ac salutem, quo voto plerumque occupatur etiam continentia lI'idualis i
nam etsi
spreto
canjugio
jam non
optant
etiam filios
procreare,
optant
tamen,
quos procreaverunt,
incolumes vivere.
Ab hac o=i cura immunis est
virginalis
integritas
habent
tamen
omnes
caros
et
caras,
quibus
non
indecenter optent etiam temporalem salutem".
, . , 1 . . ,

- 23 -
74 Cf. Bpist. 130 (7), C.S.B.L., t. 44, page 48, 1. 10-11 : "Haec <Corporis
valitudo) enim contemnenda non est propter necessarios usus vitae hujus".
75 Cf. Epist.
130 (2), C.S,E.L"
t.
44, page 42, 1. 5-11,citant ITi~hée
6,~
··Praecipe
divitibus
hujus
saeculi
non
superbe
sapere
neque
sperare in incerto divitiarum sed in Deo vivo,
qui praestat nobis omnia
abundanter ad fruendum ; divites sint in operibus bonis;
facile tribuant,
communicent,
thesaurizent
sibi
fundamentum
bonum
in
futurum,
ut
adprehendant veram vitam'''.
75 Cf. Epist. 130 <12>, C,S,E,L. t. 44, page 53, 1. 12-16,citant 1 Timothée
6,
9-10
"Nam qui
volunt
divites
fieri,
incidunt
in
temptationem et
laqueum
et
desideria
multa
stulta
et
noxia,
quae
mergunt
homines
in
interitum et perditionem.
Radix enim omnium malorum avaritia quam quida::n
appetentes a fide erraverunt et inseruerunt se doloribus mul tis" .
... / ...

- 24 -
77 Epist.
231
(2),
C.S.E.L.,
t.
57,
page 505,
1.
22-23,
citant Ennius:
• Ego
autem,
quod
ait
Enni us
• Omnes
mortales
sese
laudari
exoptant·,
partim
puto
adprobandum
partim
cavendum".
Augustin
utilise
cette
même
ci tation dans
le
De
trinitate
13,
3,
6
avec
une
légère
modification
:
"Illud
quod
vetus
poeta
dixit
Ennius
'Omnes
mortales
sese
laudarier
optant".
Ce
vers
est
classé
parmi
les
fragments
incertains
des
Annales
d'Ennius:
Cf.
Otto SKUTSCH,
The annals of Ouintus Ennius,
Oxford,
1985,
page 124.
78 Epist. 231 (2), C.S.E.L"
t. 57, page 505, 1. 1-3, citant ~,SatireI.
47
"Ergone,
ait quispiam,'
non te ista delectant 7'
Immo vero
'neque
enim mihi',
ut ait quidam,
'cornea fibra est'
ut haec non sentiam vel sine
delectatione sentiam".
(Cf. ~, Satires, Belles Lettres, page 18, 1. 2).
79 Cf.
Epist.
130
(12),
C.S,E.L.,
t.
44,
page 53,
1.
1-6
:

Placetne
igitur.
ut super salutem istam temporaleEl optent sibi ac suis honores et
potestates 7 Sane,
si,
ut per haec consulant eis,
qui vivunt sub eis,
non
propter haec ipsa sed propter aliud,
quod inde fit bonum,
decet ea velle.
Si
autem propter
inanem fastum elationis
pompamque
superfluam vel
etiam
noxiam vanitatis,
non decet".
. .. / ...

- 25 -
80 Epist.
130
(4).
C.S.E.L., t. 44, page 44, 1. 8-9 : "Ita in quibuslibet
rebus hUIDanis nihil est homini amicum sine homine amico".
81 Epist. 130 (3), C.S.E.L., t. 44, page 43, 1. 10-11.
82 Epist.
130 (3), C,S.E,L"
t. 44, page 43, 1. 8-10 : "Talibus bonis non
fi unt homines boni.
sed ali unde boni
fact i
bene utendo faci unt.
ut
ista
sint bona. Non sunt ergo in his vera solacia sed ibi potius ubi vera vita".
83 Epist.
220
(11),
C,S.E,L.
t.
57,
page 440,
1.
1-5
:
"Bona vero iUa
terrena noli diligere,
quanta libet tibi abundent.
Sic eis utere ut bona
multa ex illis,
nullum autem IDalum facias propter illa. Omnia quippe talia
peribunt
sed
bona
opera
non
pereunt,
etiam quae
de
bonis
pereuntibus
fiunt" .
84 Cf. Epist.
244
(1),
~~, t.
57,
page 580,
1.
1-15 :
"Rulllor ad me
detulit - Deus faciat ut non sit ! -, sic te anima pertu,batulll,
ut multum
mirer prudentiam tuam et chris~ianulll animum parum cogitare terrenarum r8,um
condicianem nulla modo aequare passe caelestibus,
ubi cc!r n,~strum et spes
nastra conlGcanda est.
... / ...

- 26 -
Vir cordate,
numquid aut totum bonum tuum in his rebus erat,
quas nunc
videris amittere, aut tam magnum bonum illic deputabas, ut eo subtracto sic
tenebrescat mens nimia tristitia, quasi lumen ejus non Deus sed terra sit ?
Audivi enim -
jam dixi
: Deus faciat
ut falsum audierim ! -,
quod tibi
etiam manus velles inferre,
quod melius non credo aut ascendisse in cor
tuum aut exisse de ore tuo _M.
85 ~
231
<4,),
éd.
bénéd.,
t.
18,
page 198,
1. 6-15 : "Quaeris aurum,
quia putas te de auro beatum futurum ; sed aurum te non facit beatum. Quare
quaeris mendacium ? Quare vis esse in isto saeculo sublimatus ? Quia honore
hominum et pompa saeculi putas te beatum futurum i sed pompa saeculi non te
facit beatum. Quare quaeris mendacium ? Et quidquid hic aliud quaeris. cum
saeculariter
quaeris,
cum
amando
terram
quaeris,
cum
lingendo
terram
quaeris, propterea quaeris ut sis beatus ; sed nulla res terrena te facit
beatum" .
86 Cf. ~ 301 (10). éd. bénéd, , t.
18, page 599, 1. 33-35 : "Felicitas
mundi non est honor,
sed anus.
Felix homo secu:ldljm saeG"Jlum periclitatur,
ne ipsa felicitate, non in corpore, sed in anima corrumpatur" .
.. . / ...

- 27 -
87 Cf. ~ 32 (19), éd. bénéd., t. 16, page 157, 1. 20-24 : "Etenim quare
ista quaerant homines,
quis non videt 7 Ut in luxuriis suis consumant,
et
in
nugis et
in
insanissimis
spectaculis,
a
Dea quaerunt
homines habere
ista".
Augustin
pense
ici
aux
évergètes
qui
offraient
des
spectacles
publics
pour
se
faire
une
popularité
et
pour
pouvoir avancer
dans
les
honneurs
:
Cf.
Claude LEPELLEY,
Les Cités de
l'Afrique romai ne au Bas-
Empire, t. l, La permanence d'Une civilisation municipale, pages 298-303.
88 Cf.
~ 32
(20),
éd.
bénéd.,
t.
16 page 157,
1.
25-30
:
"Da mihi
hominem de saeculo,
petat a Dea divi tias ; dentur,
et vide innumerabiles
consequi
laqueos
mortis
ejus.
Opprimit
inde
pauperem,
superbit
homo
mortalis super hominem parem sibi, quaerit honores ab hominibus vanos".
89 ~ 32 (25),
éd.
bénéd.,
t.
15,
page 151,
1.
8-10 :
"Rabet aliquid
alllplius qualll vicinus ; nonne dicit:
Quis mihi potest 7 aut vicinus iste
si mihi facerit injurialll, non illi ostendo 7".
90 Cf. Ser:n. 19 (4), éd. bélLé9....... t.
16, page 61. 1. 29-39 : "Diseite ergo,
caris~imi, eam (terrenam felicitatem) si habetis, contemnere. nec dicere in
cordibus vestris: 'Ego quia calo Deum, ideo bene est mihi' .
.. ./ ...

- 28 -
Videbis enim,
quo modo tibi putas bene, et illis qui non colunt Deum esse
bene
;
et movebuntur gressus tu!.
Aut enim habes illam,
colens Deum,
et
videbis quod habeat
talia non colens Deum ;
et
idee putabis frustra
te
colere Deum, quia et ille habet felicitatem qui non colit Deum; aut non
illam habes,
et multo amplius Deum accusabis, qui dat eam blasphematoribus
suis, et negat cultoribus suis,".
91 ~ 53
(2);
éd. bénéd., t. 16, page 384, 1. 1-2
"Jam vis possidere
terram, vide ne possidearis a terra".
92 SeDL.. 311
(4).
éd. bénéd .. t.
19,
page 22, 1. 29-35 : "Amate et no li te
amare
:
ad aliquid amate et ad aliquid amare nolite.
Est enim quod ad
profectum
ametur
et
est
quod
ad
impedimentum
ametur.
Holi te
amare
impedimentum
si
non
vis
invenire
tormentum
quod
amas
in
terra
impedimentum est
viscum
est
pennarum spiri talium,
hoc
est
virtutum,
qui bus volatur ad Deum".
93 Cf.
~ 311
(l.!).
éd.
béJl~. t.
19,
page 27,
1.
29-34
" Xoveris
rebus quae sun~ Ïoris a te, et perdis te.
. .. 1 ...

- 29 -
Tu intus es, ista foris adjacent ;
foris bona sunt, sed foris sunt.Aurum,
argentum,
omnis
pecunia,
vestis,
clientela,
familiae,
peeara ,
honores,
foris
sunt,
Si
ista
bona
infima,
bona
terrena,
bona
temporalia,
bona
transitoria non donarentur et malis,
magna crederentur a bonis.
Ergo Deus
qui dat malis ista bona te docet concupiscere me l i ara" ,
94 Cf.
~ 80
(7),
éd,
bénéd.,
t.
16,
page 572,
1.
18-19
:
"){ultis
profuit paupertas et nocuerunt divitiae
;
multis profuit privata vita et
nocuit altus honor",
95 Cf.
~ 80 (7), éd, bénéd., t.
16, page 572, 1. 26-33 : "Qualis est
enim apud te filius tuus nesciens res humanas,
talis es et tu apud Dominum
nesciens res divinas. Ecce ante te filius tu us tata die plorans ut des illi
cul trum,
id est gladium :
negas te dare,
non das,
contemnis flentem,
ne
plangas morientem. Plaret, affligat se, collidat se ut leves eum in equum ;
non facis quia non potest eum regere:
elidet et occidet ilIum. Cui negas
partem,
totum i11i serva:3.
Sed ut crescat,
et totum possideat secure,
non
das il11 modicum periculosum".
. . . f . ..

- 30 -
96 Cf. SeDL... 306 (11), éD, bénéd., t.
19, page 9, 1. 3-10 : " ... Ecce quod
Jlartyres
amaverunt,
ldeo
praesentla et
transitorla contempserunt.
Holite
mlrarl fortltudlnem,
amor viclt dolorem.
Xassae ergo candldae solemnitatem
candlda consclentla celebremus
et
vestlgla Xartyrum sectantes caputque
Xartyrum et nostrum lntuentes, sl ad tam magnum bonum venlre cancuplsclmus,
lter durum non tlmeamus".
97 ~ 32 (26), éd. bénéd., t.
16, page 161, 1. 4-13 : "Tumesclt
Galias
et ad certamen pravacat superbus ln lsta felicitate
: Quls mihl patest ?
Quls mihi
audet
?
Sed pracedit
David,
nudus armis belllcls,
armatus
lapidibus paucis
prasternet omnem superbiam, id est,
j ustus homo".
98 Cf.~ 4 (3), éd. bénéd. t. 15, page 617, 1. 1-7 : "Recardamini erga,
qui interfuistis hesterna die,
duos filias
Isaac,
Esau et Jacob,
quamodo
majori praepanitur minor : ut ad jacob pertineatis,
Esau non a:metis.
Erit
autem
Esau
qui
vult
carnaliter
vivere
vel
carnalia
in
futura
saeculo
sperare".
.. ./ ...

- 31 -
NOTES DU CHAPITRE III
99
De beata yita
II,
(11),
B....L.J.. page 76,1. 32-40 : -Ergo nullo modo
dubitamus,
si quis beatus esse statuit,
id eum sibi comparare debere,
quod
semper
manet
nec
ulla
saeviente
fortuna
eripi
potest.
Hoc,
inquit
Trygetius,
jam dudum consensimus.
-
Deus,
inquam,
vobis aeternus et semper
manens
videtur?
Hoc
quidem,
inquit
Licentius,
ita
certum
est
ut
interrogatione
non egeret,
ceterique omnes pia devotione
concinuerunt.
Deum igitur,
inquam,
qui habet,
beatus est".
L'analyse du bonheur en Dieu
sera l'objet du quatrième chapitre.
100 Cf.
Epist.
18 (2),
C.S.E,L.,
t. 34, page 45, 1. 10-24 : "Sane quoniam
te
novi,
accipe
hoc
quiddam
grande
et
breve.
Est
natura
per
locos
et
tempora
mutabilis,
ut
corpus,
et
est
natura
per
locos
nullo
modo,
sed
tantum per tempora etiam ipsa mutabilis,
ut anima,
et est natura quae nec
per locos nec per tempora mutari potest,
hoc Deus est.
Quod hic 'insinuavi
quoquo
modo
mutabile,
creatura
dicitur
quod
inmutabile, 'creator.
Cum
autem omne quod esse dicimus,
in quantum manet dicamus et in quantum unum
est,
omnis porro pulchritudinis forma
unitatis sit, vides profecto in ista
distributione
naturarum quid
summe
sit,
quid
infime
et
tamen sit,
quid
medie,
magis infima et minus summo,
sit.
Summu:!ll illud est ipsa beatitas ;
infimum
nec
beatum
potest
esse
nec
miserum
i
quod
vero
medium,
vivit
i ncl i natione ad i nfimum misere,
conv~rsione ad summum beate vi vi t" .
. ' ./ ...

- 32 -
101 A tra7ers l'adéquation qu'il établit entre la notion d'''être" et celles
d'immutabilité, d'unité et de beauté, Augustin reste fidèle à la tradition
plotinienne.
Sa théologie diffère cependant de celle de ces philosophes :
voir à
ce sujet
F.J.
THOnAllD,
Caractères platoniciens de l'ontologie
augustinienne,
Augustinus !agister,
I,
1954,
pages 317-327
;
E.
GILSON,
lotes sur l'Etre et le temps chez saint Augustin,
RecAug,
II, 1962, pages
205-223.
102 Epist. 118 {13>, C.S.E.L., t. 34, page 677, 1. 23-25 ; page 678,1. 1-7:
"Qui
enim quaerit,
qua
ad
beatam vitam perveniat,
nihi1
aliud profecto
quaerit,
nisi
ubi sit
finis boni,
hoc est ubi constitutum si~ non prava
opinione atque temeraria sed certa atque inconcussa veritate, summum hominis
bonum. Quod a quolibet ubi constituatur, non invenitur nisi aut in corpore
aut
in
anima
aut
in
Dea
aut
in
duobus
aliquibus
horum
aut
certe
in
OIuni bus.'
103
Ep!st.
118 <15>, C.S,R.L. t. 34, page 678, 1. 17-24 : "Da !gitur qui
ci ta videat
non corpus esse animi
bonum sed animum pot! us esse corporis
bonum i
recedetur jam ab inquirendo utrum su=um illud bonum vel aliqua
pars ejus sit in corpore.
Quod enim stultissime negatur melior est animus
corpore.
Item stul tissime llegatur meliorem esse eu m,
qui dat beatam vitam
vel partem aliquam beatae vitae,
quam eum qui accipit.
Non igitur accipit
animus a corpore vel SUIDIDUill bonum vel partem aliquam summi boni" .
.. . / ...

- 33 -
104
Epist.
118
<15>,
C,S,E,L,
t.
)4,
page 679,
1.
12-17
-Da item qui
cito videat animum quoque ipsum non suo bono beatum esse,
cum beatus est,
alioquin numquam esset miser; et recedetur a quaerendo utrum in animo sit
summum illud atque,
ut ita dixerim.
beatiiicum bonum vel aliqua pars ejus.
Nam cum se ipSo sibi quasi suo bono animus gaudet. superbus est".
105 ~ 156 (6), éd. bénéd., t. 17, page 471, 1. 26-40 ; page 472, 1.
1-
10 ; "Amina vero, ut dixi, creata a summo bono, non tamen summum bonum, sed
magnum bonum.
Item caro nec summum bonum nec magnum bonum, sed tamen parvum
bonum.
Anima ergo magnum bonum sed non summum bonum i
vivens inter summum
bonum et parvum bonum,
id est,
inter Deum et carnem.
inierior Deo,
carne
superior ; quare non vivit secundum summum bonum sed vivit secundum parvum
bonum ?
Hoc
planius
die! tur
quare
non vi vi t
secundum Deum sed vi vi t
secundum carnem ?
Debi trix enim est non carni ut secundum carnem vi vat.
Caro
debet
secundum ipsam vivere,
non
ipsa secundum carnem.
Ipsa vivat
secundum ipsam quae vivit de ipsa. Certe unaquaeque secundum hoc vivat unde
vivit,
Unde vivit caro tua? De anima tua.
Unde vivit anima tua? De Deo
tuo.
Unaquaeque haruJ!l secundum vitam suam vi vat,
Caro enim si ~]i non est
vita se'i anima carnis est
vi ta,
Anima si bi
non est
vi ta,
sed Deus est
animae vita",
... /" .

-
34 -
NDTES DU CHAPITRE IV
106 De beata yita II (11), B,A.4"
page 76, 1. 39-40.
107. De beata yita IY (35), B.A.4., page 126, 1. 15-18.
108 Epist.
10 (2), Ç.S.E.L., t. 34, page 23, 1. 23-27 ; page 24, 1. 1-5 :
• Dedi t
quidem deus
paueis
qui busdam,
quas
eeclesiarum gubernatares esse
valuit,
ut et illam (martem) non salum expectarent fartiter,
sed alaeriter
etiam desiderarent et harum abeundarum labares sine ulla angare susciperent.
sed
neque
his,
qui
ad
hujus
madi
administratianes
temporalis
honoris
amore raptantur,neque rursum his,
qui eum sunt privati,
negatiasam vitam
appetunt,
hoc
tantum
banum
eaneedi
arbi tror,
ut
inter
strepitus
inquietosque
eonventus
atque
discursus
eum
marte
familiaritatem,
quam
quaerimus,
faciant ; deifieari enim utrisque in otio lieebat",
109 G. FOLLIET
-Deiffcarf
Ln. ot;o",
!ugust':J., Epistula J, 2", RecAug.
2,
1962, page 226,
.. . f ...

- 35 -
110 A.
JlilDOUZE,
!taintAugustin.
L' aventure de la raison et de la grâce.
Paris. 1968. page 194.
111 Cf. note 107 pour le texte latin,
112
Retraetiones
II,
B. &.12,
page
282.
1.
23-25
" ... In
quo
libro
constitit
inter
nos,
qui
simul
quaerebamus,
non
esse
beatam vitam nisi
perfectam cognitionem Dei",
113 Cf. De beata yita II
(9). :a....A...A.. page 68.1.
1-4 : page 70.1. 5-9 :
"Quae cum ita sint,
arbitror die natali meo,
quoniam duo quaedam esse in
homine conveni t
inter nos,
id est corpus et animam,
non me prandium paulo
lat ius
corpori bus
nostris
sol um sed
animis
et iam exhi bere
debere.
Quod
autem
hoc
sit
prandium,
si
esuritis,
proferam.
Nam
si
vos
invitos
et
fast idientes al ~re conabor,
frustra
operam insumam magisque vota facienda
sunt,
ut tales epulas potius quam illas corporis desideretis",
I I I Epist.
10 (3), C.S.E.L"
t. 34, page 24, 1. 16.
. . , / .. ,

- 36 -
115 Cf.
Ragnar HaLTE.
Béatitude et sagesse.
saint Augustin et le problè_
de la fin de l'homme dans la philosophie ancienne,
Paris,
1962,
page 220 :
·Si le sens premier de ~ est semence, tout ce qui germe et relève de la
vie végétative, et si celui de ~ est récolter,
entrer en jouissance de
ce qui
a
poussé,
si
de
plus Augustin lui-même établit
un rapprochement
ontologique
de
~
avec
~...
le
sens
premier
de
~
doit
être
nécessairement très proche de la notion de participation ontologique".
116
Cf .
J . A.
BECKAERT ,
Bases
phil osOphi ques
de
l' ascèse
AUgust i ni enne ,
Augustinus lIagister, t 2, 1954, page 709.
117
Epist.
4
(2),
C.S.E.1.,
t.
34. page 10,
1. 20-24 •
1.
Cum Deo in
auxilium deprecato et in ipsum et in ea, quae verissime vera sunt, adtolli
coepero, tanta non numguam rerum manentium praesumptione compleor, ut mirer
interdum illa
mihi
opus esse
ratiocinatione,
ut
haec
esse credam,
quae
tanta insunt praesentia, quan":a sibi quisque ipse fit praesens" .
.. ./ ...

- 37 -
118 Cette
expérience
de
l'extase
chez
Augustin offre des
analogies avec
celle de Plotin qui,
COlllllle l'écrit Pierre HADOT,
"disait qu'au moment où,
reprenant conscience après ses extases,
il redescendait de l'intuition à la
réflexion,
i l
se
demandait
chaque
fois comment
i l
avait
pu
redescendre,
cOllllllent il avait pu reprendre conscience,
cOllllllent après avoir vécu l'unité
de l' espri t,
i l avait pu retrouver le dédoublement du moi conscient":
Cf.
Pierre HADOT,
Plotin ou
la siçlicité du
regard,
Paris,
1973,
page 36.
Cependant,
i l existe une différence fondamentale entre Plotin et Augustin.
En
effet,
si
le
premier
ne
comptait
que
sur
ses
propres
forces
pour
s'élever
jusqu'à
l'Un
<contemplation
philosophique).
Augustin
compte
surtout
sur
l'action
illuminatrice
de
la
grâce
divine
<contemplation
mystique)
: sur la mystique augustinienne,
voir André XilDOUZE.
où en est
la question
de la mystique augustinienne, dans Augustinus Xagister, t. 3,
1954. pages 103-163.
119 Cf.
De beata yita 1
(5).
B.J......i. page 60. 1. 7-13 : "Quare obsecro te
per virtutem tua:ill,
per hu:œani tatem,
per animarum inter se vinculum atque
cOllllllercium,
ut
dexteram
porrigas,
hoc
aut",,:n
est,
ut
me
ames
et
a
me
vicissim te
amari
credas carumque
haberi.
Quod si
impetr1vero,
ad iysall
~a;JI yita1!!. Cui t ~ i:l,;n h.;lerere yraesuw. parvo conatu faci llime accedam".
" , f " ,

- 38 -
120
Retractationes II, B.A.12, page 284 1. 2-4 : "Displicet autem illic ...
et quod tempore vitae hujus in solo anima sapientis dixi habitare beatam
vi tam, quamodoli bet se habeat corpus ej us".
121 De beata yita IV {35>, ~, page 126, 1. 11-15 : ·Sed tamen quamdiu
quaerimus,
nondum
ipso
fonte
atque,
ut
illo
verbo
utar,
plenitudine
saturati nandum ad nastrum modum nos pervenisse fateamur et ideo, quamvis
jam Dea adjuvante, nondum tamen sapientes ac beati sumus".
122 Voir Supra, note 111.
123
Gustave
BARDY,
Oeuvres
de
saint
Augustin,
Retractationes,
B,A.12,
Introduction, pages 158-159.
124 ldeD, pages 166-161
125 Etienne GILSOI,
Introduction à l'étude de saint Augustin, Paris, 1943,
page 6, note 1.
126
Régis
JOLIVET,
Oeuvres
de
saint
Augustin,
!e
beata
vita,
lL...!....!,
Introduc7.iau, page 218.
12'7 Henri
Iréué llRRnu,
:.2-(UJrl.~cin et la fin 'lSL-1a CUl ture antique,
Paris, 1983, Lé~t~iQa de 1958, page 174, not~ 6.
.. ./ ...

- 39 -
128 Epist.
55
(26),
C,S.E.L ..
t.
34,
page 198,
1.
12-17 :
"Quod memento
quam saepe commemarem,
neque jam nunc in ista vita nos beatos fieri debere
arbitremur et ab omnibus difficultatibus liberas ac sic in angustiis rerum
temporalium adversus Deum ore sacrilega murmuremus, quasi non exhibeat quod
promisi t.
Promisi t
qu idem etiam huic
vitae
necessaria
sed
alia
sunt
solatia miserorum, alia gaudia beatorum".
129 Epist. 69 (2), C.S.E.L., t. 34, page 245, 1. 16-19 : KHon diu tecum in
hoc agendum novimus,
quanta facilitate consideres spes inanium hominum et
insatiabiles cupiditates et incertam vitam.
Abice igitur ex anima quidquid
terrenae atque falsae felicitatis expectatione conceperat".
130 SeDL... 19 (4), éd.
bénéd.,
t.
16 page 60,
1.
40-41 ; vair aussi Ser;;a,
231
(5),
éd.
bénèd, ,
t.
18, page 198, 1.
16,
page 199,
1.
1-3 : "In hac
vita beatus esse non potes: nemo potest. Bonam rem quaeris, sed terra ista
non est regio ejus rei quam quaeris.
Quid quaeris ? Beatam vitam. Sed non
est hic",
,
... , ...

-
40 -
131 Cf.
SeDL.. 231
(5),
éd.
bénéd.,
t.
18,
page 199,
1.
3-10 :
.. Aurum si
quaereres
in
loco
ubi
non
est,
ille
qui
novi t
quia
non est
ibi,
nonne
diceret
tibi
'Quid
fodis,
quid
terram sollicitas
7
Fossam facis
quo
descendas,
non ubi
aliquid
invenias'.
Quid es responsurus admonenti
te 7
'Aurum quaero 7'
Et ille
'Non tibi dico nihil est quod quaeris,
sed non
est ubi quaeris',
Sic et tu quando dicis :
'Beatus esse vola'
: bonam rem
quaeris sed non est hic",
132 Cf. ~ 19 (4), éd. bénéd., t, 16, page 60, 1. 42-43 ; page 61, 1. 1-
7
:
"De
regione
felici tatis Christus veni t
et
hic eam nec
ipse
inveni t.
Irrisus est,
exprobatus est,
apprehensus est, flagellatus est,
vinctus est,
palmis
caesus
est,
affectus
contumelia
sputorum,
spinis
coronatus
est,
ligna
suspensus
ad
extremum,
Domini
exi tus
mortis,.,
Quid
hic
ergo,
serve, felici tatem requiris ubi et Domini exi tus mortis 7",
133 Cf.
SeDIl..... 297
(8),
éd.
bé:léd.
t,
18,
page 568,
1.
9-12 : "Certe "lita
ista
laboribus
plena
est,
aerumnis,
tentationibus,
miseriis,
doloribus,
tiJ:lori bus
plena est
ista
vi ta
certe
IMnifestum est,
q'lia
his
o=ibus
malis pIerra est",
... / ...

-
41 -
134 Cf. Epist. 140 (16), C.S.E.L., t. 44, page 166, 1. 24-26 ; page 167, 1.
1-4
:" In
i l lis
autem
veteris
testamenti
bonis
ad
veterem
hominem
pertinentibus praecipue concupiscitur vitae hujus productio temporalis,
ut
aliquanto diutius teneatur,
quia semper non potest.
Ideo mortis diem omnes
quidem
adfuturum
sciunt
et
eum
tamen
omnes
aut
paene
omnes
differe
conantur, etiam qui post mortem se beatius credunt esse victuros".
135 ~ 84 (1), éd. bénéd., t. 16, page 602, 1. 28-31 : "Amas ergo istam
vitam ubi tantum laboras, curris, satagis, anhelas et vix enumerantur quae
necessaria
sunt
in
misera
vi ta
seminare,
arare,
novellara,
navigare,
molere, coquere, texere",
136 Cf.
~ 127
(2),
éd,
bénéd.,
t.
17,
page 261,
1.
35-39 : "Quantum
homo laborat quando mors imminet : fugiendo,
latendo, quidquid habet dando
et
se
redimendo,
laborando,
cruciatus
molestiasque
sustinendo,
medicos
adhibendo et quidquid aliud homo potest 7",
137 Cf.
~ 84
(1),
é.s.l...-~Ji<i...., t.
16,
page 603,
1.
11-13 : "Aliquando
venit
aegritudo,
curritur,
adducuntur
medici,
solidi
et
numera
promittuntur" ,
... / .. ,


- 42 -
138 Sera. 302 (5), éd,
bénéd.,
t. 18, page 603, 1. 39, page 604, 1. 1-11 :
"Quam multos
invenimus
qui
dicant
'ToUat
fiscus
res
meas,
ut
serius
moriar' ...
Propter hanc vitam volunt habere homines unde vivant, et propter
hanc volunt dare unde vivant. Quod tibi servas unde vivas,
hoc das ut vivas
forte
fame
defecturus.
Et
tamen dicis
'ToUat,
quid
a
me
?
M:endicare
vola'·,
139 Cf. SerJb
97 (3), éd.
bénéd.,
t. 17, page 95, 1. 31-37, page 96, 1. 1-
12 :
• Caetera nostra et bona et mala incerta sunt
:
sola mors certa est.
Quid
est
quod
dico
?
Concept us
est
puer,
forte
nasci tur,
forte
aborsum
facit.
Ita
incertum
est
forte
crescit,
forte
non
crescit
forte
senescit,
forte
non
senescit
forte
di vès
erit,
forte
pauper
forte
honoratus,
forte
humil iatus
forte
habebit
fi lias,
forte
non
habebit
forte
ducet
uxorem,
forte
non
ducet
et
quidquid aliud
nominaveris
in
bonis.
Respice et ad mala
forte aegrotat,
forte non aegrotat
i
forte a
serpente percutitur.
forte non percutitur i
forte a bestia devoratur, forte
non devoratur.
Et
respice omnia mala,
ubique est
:
forte erit,
forte non
erit,
Humquid potes dicere
forte
mari tur,
forte
non mori tur ?
Quomodo
medici quando inspexerint valetudinem,
et mortiferam esse cognoverint,
hoc
pronuntiant
:
'Morltur,
inde
non evadit':
Ex quo nascltur homo,
dicenduill
est:
non evadit.
Quando natus est, aegrotare coepit.Quando mortuus fuerit.
finit quidem aegri tudinelll".
.. .f ...

- 43 -
140 Cf.
Epis!.
127
(2),
C,S.E.L.,
t.
44,
page 21,1.
1-4:
"Qui
tamen
periculo ejus (vitae) saepe turbati citius eam finiunt eo ipso, quo finire
formidant,
et mortem dum declinant,
accelerant,
veluti si quisquam fluvio
rapiendus inruat latronem bestiamve fugiendo".
141 ~ 301 (9), éd. bénéd. t. 18, page 600, 1. 20-21.
142 Cf.
SeDa.... 301 (9), éd. bénéd., t. 18, page 600,1. 11-12
"Hesternum
diem nemo revocat, hodiernus a crastino urgetur,
ut transeat".
143
~ 84
(2),
éd,
bénéd.,
t.
16,
page
603,
1.
20-21
"0
virum
prudentem
si
tibi
vinum minuatur
in utre,
tristaris
;
dies perdis et
gaudes !".
144 ~ 84 (2), éd. bénéd., t. 16, page 604, 1. 2-3 ; voir aussi Serm 306
(6),
éd. bénéd, , t. 19, page 6, 1. 3-4 : " ... IlIa vita sola est quae beata
nec beata esse pote3t nisi
fuerit aeterna".
; ~ 150 <lO), t.
17,
page
414, 1. 23-25 :
"Ergo vita quae hoc Ilomine digna est,
ut vi ta dicatur,
non
est nisi beata et beata nOD est Ilisi aeterna".
. .. / ...

- 44 -
145 ~ 306 {7l, éd. bénéd., t. 19, page 6, 1. 26.
146 ~ 346 (ll, éd. bénéd., t. 19, page 164, 1. 5-6.
147 Cf. ~ 297 (8), t.
18, page 568, 1.
16-19 : "Vera veritas promittit
vitam,
non
solum aeternam,
sed
etiam beatam ubi
nulla
molestia,
nullus
labor, nullus timor,
nullus dolor".
148 Cf.
Sea. 236 (3l, éd, bènéd., t. 18, page 220; 1. 10-11 : "Ibi non
erit fames,
non erit sitis,
non erit nuditas, non erit aegritudo ... ".
149 Cf.
Epist,
155 (12), C.S,E,L., t. 44, page 442, 1.
10-15 : ·".Ubi jam
nec
prudenter
discernant ur
a
bonis
mala,
quae
non
erunt,
nec
forti ter
tolerentur
adversa,
quia
non
ibi
edt
nisi
quod
amemus,
non etiam quod
toleremus,
nec
temperanter
libido
frenetur
ubi
nulla
ejus
incitamenta
sentiemus,
nec juste subveniatur ope indigentibus ubi inopem atque indiguum
non habebimus".
"
. / ...

- 45 -
150 Cf.
Serm.
11
(1),
éd,
bénéd.,
t.
16,
page 10,
1.
3-13
:
"llemo tibi
dicturus est post resurrectionem mortuorum in regno Dei:
'frange esurienti
panem
tuum'
quia
non
invenies
esurientem.
llemo
di ct urus
est
, Vesti
nudum'
ubi
omnium tunica
immortali tas eri t.
llemo dicturus est
:
1 suscipe
peregrinum'
ubi omnes in patria sua vivent.
Nam modo sumus inde peregrini.
llemo
dicet
, Visi ta
aegrum '
ubi
est
sani tas
sempi terna.
Nemo
dicet
'Sepeli
mortuum'
ubi
mors
moritur.
Ista
omnia
pietatis
officia
in
vita
aeterna necessaria non erunt ubi sola pax erit et laetitia sempiterna".
151 Cf. H.I. XARROU, Le do~ de la résurrection des corps et la théologie
des valeurs hU!!!llines selon l'enseigneœnt de sai:nt
Augusti:n.
J.œÂllZ.,
I I l,
1966,
page 133 :
"La vie de la cité bienheureuse est une vie de société:
rien de plus contraire à la conception augustinienne que d'imaginer chaque
Ame reliée en quelque sorte à
titre privé,
par fil
direct avec Dieu,
en
ignorant
les
autres
n' oublions
pas
que
nous
sommes
et
resteront
les
membres les uns des autres, pour former un même corps, celui du Christ dans
sa plénitude".
... / ...

- 46 -
152 Seu.... 127 (1), éd.
bénéd.,
t.
17, page 260,
1.
7-10 : -De hoc
enim
bono
dictum est
:
Quod
oculus
non vidit,
nec
auris audivit,
nec
in cor
hominis ascendit,
quae praeparavit Deus diligentibus se.
Voir aussi Bpist.
130 (17), C.S.B.L., t. 44, page 59, 1. 19 ; page 60, 1. 1-3 :" Tanta quippe
illud
<quod praeparat
dare
Deus)
quod valde
magnum est,
quod nec
oculus
vidit quia non est color,
nec auris audivit quia non est sonus, nec in cor
hominis ascendit quia cor hominis il1uc debet ascendere".
153
~ 127 (1), éd. bénéd., t. 17, page 260, 1. 11-13 : "Quia hoc bonum
tam
magnum,
tam
praeclarum,
tam
ineffabile,
non
i nveni t
hominem
percept ore m,
tenui t Deum promissorem".
154 Cf. Serm.
127 (1), éd, bénéd, , t.
17, page 260, 1. 14-26 : "Hunc enim
quod ei promissum est,
homo caecus corde non percipit nec ei potest ostendi
in praesenti,
quid ipse cui promittitur sit futurus.
Quia et infans natus
si
posset
verba
loquentis
intel1igere,
cum
ipse
loqui
non
posset,
nec
ambulare,
nec
aliquid
agere,
sed
sicut
eum
videmus
infirmum,
jacentem,
indigum apis alienae,
tantummodo intelligere posset eum qui sibi laqueretur
et diceret ei :
'Ecce SL.cut vides me ambulant~.'lI,
operantem,
laquentem, post
paucos
an nos
tal!s
eris' ,
attendens
se
et
illum,
quamvis
quod
promitteretur,
videret
i
tamen su~m c~~siderans infirmitate.'ll, non crederet,
et viti2ret tamen quod promi ttebatur" .
"
.! ...

- 47 -
155 &:u:lIl.... 127
(11),
éd,
bénéd.,
t.
17,
page 268,
1.
20-21
·Videbimus
Deum.
Hoc autem tantum erit,
et tanta res erit
ut,
in ejus comparatione,
nihil sit totum".
156 &:u:lIl.... 53
(6),
éd,
bénéd, ,
t.
16,
page 385,
1.
31-32
"Videre Deum
volumus, videre Deum quaerimus, videre Deum inardescimus".
157 Epist.
130
(27), e,S,E.L"
t. 44, page 71, 1. 10-18 : "Quisquis autem
unam illam petit a
Domino et
hanc requirit,
certus ac
securus pet! t
nec
timet ne forte obsit,
cum acceperit,
sine qua nihil prodest quidquid aliud,
sicut oportet,
acceperit.
Ipsa est
enim una vera et sola beata vita,
ut
contemplemur
Domini
delectationem
in
aeternum,
immortales
atque
incorruptibiles corpore et spiritu.
Propter hanc unam cetera requiruntur et
non indecenter petuntur.
Istam quisquis habuerit, omnia, quae vult, habebit
nec aliquid ibi velle quia nec habere poterit, quod non decebit",
158
senu...- 53 (6). '"'éd.....,--'bé=·~. t. 16, page 385, 1. 25-29
"Quidquid
agimus,
quidquid
bene
agi:nus ,
quidquià
ni ti:nur,
q'lidquid
laudabil i ter
aestuamus,
quidquid
inculpabili ter
desidera;nus,
ad
Dei
',isionem
cum
vene:it,
plus non requiremus.
Quid enim q'".'l.erat cui adest Deus 7 Aut quid
sufficiat ei cui non sufficit Deus 7".
.. ./ ...

- 48 -
159
Epist. 130 (27), Ç.S.E.L., t.
44, page 71, 1. 18-19 ; page 72, 1.1-6:
"Ibi est quippe fons vitae, quem sitire nunc oportet in oratione, quam diu
in spe vivimus et,
quod speramus,
nondum videmus,
in protectione alarum
ejus ante quem est omne desiderium nostrum, ut inebriemur ab ubertate domus
ejus et torrente voluptatis ejus potemur, quoniam apud eum est fons vitae i
in
lumine
ejus
videbimus
lumen,
quando
satiabitur
in
bonis
desiderium
nostrum et
nihil
eri t
ultra
quod
gemendo quaeramus,
sed
quod
gaudendo
teneamus" .
160
Rapond DUVAL,
La reconnaiS§9nce de la présence de Dieu chez saint
Augustin, thèse de doctorat, Le Sau1choir, 1967. page 53.
161 &mL.. 158 (9). éd.
bénéd"
t.
17, page 491, 1. 21-24 : "Quidquid hic
quaerebas,
quidquid
hic
pro
magno
habebas,
ipse
tibi
erit.
Quid
hic
volebas,
quid amabas ? Kanducare et bi bere ?
Ipse t i bi eri t
ci bus,
i pse
tibi erit pot us" ,
..
152 Voir to:me l, page -::r, et note 108,
.. . 1 ...

- 49 -
163 Cf. Rpist. 130. C.S.E.L •• t. 44. page 45, 1. 12-14, citant 1 Jean 3,2 :
" (Dilectissimi. filii Dei sumus et nondum apparuit quid simus). Scimus quia
cum apparuerit,
similes ei erimus quoniam videbimus eum sicuti est".
voir
aussi ~ 127 (5), t. 17, page 264, 1. 30-39.
164 Cf. Epist. 140 (62). C.S.R.L., t. 44, page 208, 1. 2-3. citant
1 Corinthiens 13,12 : "Videmus nunc per speculum in aenigmate ; tune autem
facie ad facie~'. Voir aussi ~ 53 (6), éd. bénéd., t.
16, page 386. 1.
19-21.
165
Voir tome l, page 1é et notes 111-112.
166 Cf. ~ 254 (8), éd. bénéd •• t. 18. page 312. 1. 27.
167 Voir ~. note 157.
168
Epist. 140 (63), C.S,E.L., t. 44, page 211. 1. 7.
169 Senk. 254
(B).
~~é.d...... t.
18,
page 312,
1.
28-29
:
"Nec
quod
videbimus deîiciet,
nec quod amabi~us peribit, nec quod laudabi~us tacebit;
sempi ternum totum eri t, si ne fi ne eri t" .
.. .1 ...

- 50 -
170 Voir ~, note 157.
171 Cf. Epist.
118 (14), C.S.E.L., t. 34, page 679, 1. 1-6 : "Tam potenti
enim natura Deus feci t animam,
ut ex ej us plenissima beati tudine quae in
fine
temporum sanctis promi tti tur,
redundet etiam in inferiorem naturam,
quod est corpus, non beatitudo quae fruentis et intellegentis est propria,
sed plenitudo sanitatis, id est incorruptionis vigor".
... { ...

- 51 -
NOTES OU CHAPITRE V
172
Voir tome 1, introduction, page 8.
173 De beata vita II (15), .~, page 82, 1. 4-5 ; page 84, 1. 6-9 : "Non
dubito,
inquam,
quin,
si
adesset
Alypius,
huic
ratiunculae cederet.
Non
enim tam absurde sentire poterat, ut aut beatus illi videretur, qui tantum
bonum animi,
quod ardentissime habere vellet,
non haberet aut illos nolle
invenire veritatem aut eum qui beatus non sit esse sapientem".
174 Voir tome 1, chapitre l, page 36 et note 29.
175 Voir ~
note 29.
176 Praedium désigne toute espèce de fonds de terre ou d'immeubles placés à
la charge de l'état ou appartenant à des particuliers.
Voir G.
HUXBERT
Praedium, dans D.A.G.R., t. 4, page 611.
177 Epist. 3 (5), C.S,E.L"
t. 34, page 9, 1. 5-7 .
.. . . 1 . ..

- 52 -
178 De beata yita IV (33). ~. page 122. 1. 4-5.
179 Voir Tome 1. chapitre II. page 4l
180 Cf.
De beata yita IV (26).
B....J......!.. page 106.
1.
6-14
:
.. Sed fi ngamus
aliquem tamen, qualem Tullius fuisse dicit Oratam <voir C1CEROI. De fiuibus
II.
22.70).
Quis
enim
facile
dicat
Oratam egestate
laborasse,
hominem
ditissimum, amoenissimum, deliciosissimum, cui neque ad voluptatem qUicquam
defui t
neque ad gratiam neque ad
bonam integramque
valetudinem ?
Nam et
praediis
quaestuosissimis
et
amicis
jucundissimis,
quantum
11 bui t,
abundavit ......
181 Vair tome 1 page IJ:;..
182 Voir to:me 1 page 46.
183 De beata vita Il (28), ~~, page 110, 1. 1.
. .. / ...

- 53 -
184 Cf.
De beata vita
II
(8),
~, page 68.
1.
26-29
:
.. Eteni m i psam
nequitiam matrem omnium vitiorum ex eo quod nequicquam sit,
id est ex eo
quod
nihil
sit) veteres
dictam
esse
voluerunt".
Augustin
tient
cette
étymologie de Cicéron.
Voir : Tusculanes III. 8. 18. Belles Lettres, t. 2,
page 12. 1. 24 ; page 13, 1. 1-3 : "Nequita ab eo (et si erit hoc fartasse
durius.
sed
temptemus
lusisse
putemur,
si
nihil
sit)~ ab
eo
quod
nequicquam est in tal i homine, ex quo idem nihilidic1 tur".
185 Epist. 3 (1). C.S.E,L .• t, 34. page 5. l, 13-15.
186 Voir R.I. XARROU. op, cit .• pages 95-96.
187 Epist. 3 (1). C.S.E.L., t, 34. page 5. l, 16-18,
188 Epist. 3 (2), C.S.E.L .• t, 34. page 6. 1. 3-7.
189 Cette structure géocentrique de l'univers est attestée dès Pythagore.
En plus de la sphère des astres fixes et celle de la terre placée au centre
de l'Uni vers,
il y avai t 1e:3 sept sphères des astres errants qui étaient,
dans l'ordre croissant de leur distance à la terre,
la sphère de la lune,
de Mercure,
de Vénus,
du Soleil,
de Mars,
de Jupiter et de Saturne.
Voir:
DUHEA, le systè~ du monde, t. 1, Paris, 1923.
. .. / ...

- 54 -
190 La défini tian que donne Augustin s'applique à la rotation des autres
planètes autour de la terre et qui découle de la structure géocentrique de
l'uni vers.
En effet,
toutes obéissent à une même loi
: elles se meuvent
autour de notre sphère de sorte que les plus proches de la terre font le
moindre traj et et mettent à contourner la terre un temps proportionnel à
l'espace parcouru.
191 Epist. 11 (2). C.S.E.L •• t. 34. page 26. 1. 5-6.
192 H.I. XARROU. op. Cit •• page 233.
193 De beata vita IV (25). ~4. page 104. 1. 6-8
194 De beata yita IV (33), ~. page 121, 1. 21-22.
195 Cf.
De beata yita II
(7).
!L....l....!, page ô4,
1.
29-31 : "Modum,
inquam,
suum
a
natura
constitutum
habent
OIDnia
corpora,
ultra
quam
mensuram
progredi nequeant".
... / ...

- 55 -
196.
Cf.
De
beata yita
II
(lU.
B.....A.......!.
page
76.
1.
26-29
:
"Quid.
si,
inquam,
his omnibus abundans rebus atque circumfluens cupiendi madum si bi
statuat eisque contentus decenter jucundeque perfruatur. nonne tibi videtur
beatus 7".
197 Cf.
De
beata yita II
<13>.
~,
page 78,
1.
5-6
:
•... Habent
in
epulis suis et animi quandam luxuriem,
si ultra madum in eas et veraciter
inruant- ita enim male quodam modo digerunt".
198 Cf.
De beata yita IV
(34).
~. page 124, 1.
1-4 :
"Quae est autem
dicenda
sapientia
nisi
quae
Dei
sapientia
est
7
Accepimus
autem etiam
auctoritate divina Dei filium nihil esse aliud quam Dei sapientia~'.
199 Voir tome 1, chapitre II. pages lit"'':)''
200 Cf.
De beata yita IV <34>. IL..A...A. page 124, 1. 6-8 : "Sed quid putatis
esse
sapientiam nisi
veri tatem ?
Etiam hoc
enim dictum est
1 E3 0
sum
veritas'A
<jean 14.3>.
. .. 1 . ..

- 56 -
201 De beata yita IV (34). IL..A...!.. page 124. 1. 18-20.
202 SeDL... 53
(1).
t.
16.
éd.
bénéd.,
page 383.
1.
13-17
:
"Quis
non
alacriter currat cum ei dicitur
'beatus eris 7'
Libenter audiat et cum
dicitur : 'si hoc feceris'. Non recusetur certamen si diligitur praemium et
accendatur animus ad alacritatem operis commendatione mercedis".
203 ~ 150 (4), éd. bénéd"
t. 17, page 408, 1. 4-5.
204 ~ 150 (4), éd. bénéd,. t. 17, page 408. 1. 9-11 : -ion vides quia
bonum
et
:malum
contraria
sunt
?
Bonum
quaeris
et
:malum
facis
7
In
contrarium curris. Quando pervenis 7".
205 ~ 306 (7). éd. bénéd, , t.
19, page 6,
1. 34-36 ; page 7.
1,
1-2 :
"Quid quaeris bonum :male ? Nonne ti bi respondet ipsa postulatio tua, quam
sis improbus, cum quaeris bonum :malus? Nonne rem quaeris alienam 7 Si ergo
summum bonum quaeris, hoc est vitam, bonus esta ut ad bonum pervenias M •
. . . 1 . ..

- 57 -
206 Senn. 29 (5), éd. bénéd., t. 16, page 134, 1. 11.
207 Epi st , 155 (4), C.S,E,L., t. 44, page 434, 1. 9.
208 Epist. 155 (4), C.S.E.L"
t. 44, page 434, 1. 17.
209 Epi st ,
155
(2),
C,S.E.L ..
t.
44,
page 431,
1.
7 :
Cette définition
revient à deux autres reprises dans cette même lettre.
Nous la retrouvons
en Epist.
155
(5),
page 435,
1.
15-16 où
la piété
est
assimilée à
la
sagesse. En effet, à Macedonius qui l'a appelé sage, Augustin répand que la
sagesse est
ici-bas le
vrai culte du
vrai
Dieu
"Haec
(sapientia)
est
autem in praesenti saeculo verus vert Dei cultus". La définition réapparaît
en Epist, 155 (17), page 447, 1. 5 : "Pietas, igitur, id est verus ver! Dei
cul tus, ad omnia prodest".
210 André XAlDOUZE, &aint Augustin et la religion ro~, dans RecAug., J,
1953 page 215.
211 ~~ 155 (4), ~~~, t. 44, page 435, 1. 10.
. .. / ...

- 58 -
212 Cf. ~ 29 (5), éd. bénéd., t. 16. page 133. 1. 39 j page 134. 1. 1-5
: "Quanta bona quaeris, homo male. Certe malus es. Die mihi quid vel1s nisi
bonum ? Equum quaeris nonnisi bonum i fundum quaeris nonnisi bonum ; domum
quaeris
nonnisi
bonam
uxorem quaeris
nonnisi
bonam
i
tunieam nonnisi
bonam i ealigam nonnisi bonam".
213 ~ 29'7
(8).
éd. bénéd..
t.
18.
page 56'7.
1.
28-35
"vi tam ergo
amamus
et
amare
nos
vitam
nullo
modo
dubitamus
neque
omnino
ne gare
poterimus amare
nos
vitam
.
Ergo
el1gamus
vitam si
amamus
vitam.
Quid
eligimus ? Vitam. Primo hic bonam,
post hanc, aeternam.
Primo hic bonam,
sed nondum beatam. Bona modo agatur, cui postea beata servatur.
Bona vita
opus est, beata merces est. Age bonam et accipies beatam."
214 ~ Guelferb 12 (3), ~, t. 1. page 483. 1. 13-1'7 : "Si malam vitam
vis habere, qualis est ille qui dabit et sempiternam et beatam? Sed si vis
pervenire ad sempiternam et beatam,
habeto temporalem bonam.
Bona erit in
opere.
beata erit in mercede.
Si autem recusas opus.
qua fronte mercedem
quaeris ?".
... / ...

- 59 -
215
Epist.
104
(12).
C. S. E. L..
t.
34,
page 591.
1.
6-11
:
"Si
vero
diversas
vias
ita
dixisti
ut
non
intellegamus
adversas,
sicut
dicimus
diversa
praecepta
quae
tamen
omnia
bonam
aedificent
vitam,
alia
de
castitate, alia de patientia, alia de fide, alia de misericordia, et si qua
sunt
caetera,
non solum appetitur viis et
tramitibus ita diversis illa
patria, verum etiam reperitur",
216 Epist. 155 (9). C.S.E.L,. t. 44. page 439. 1. 16-20.
217 Epist. 155 (12). Ç,S.E.L., t. 44. page 441, 1. 20 ; page 442. 1. 1-10:
"Si enim virtutes, quas accepisti,
a quo acceperis sentiens eique gratias
agens,
eas
ad
ipsius cultum etiam in tuis
istis saecularibus honoribus
conferas
tuaeque
potestati
subdi tas
homines
ad eum colendum et
exemplo
religiosae tuae vitae et ipso studio consulendi seu fovendo seu terrendo
erigas,
et
adducas
nihilque
aliud
in eo,
quod per
te
securius vivunt,
velis,
nisi ut hinc illum promereantur,
apud quem beate vivent,
et verae
illae virtutes erunt et illius opitulatione, cujus largitate donatae sunt,
i ta crescent et perficientur,
ut
te ad vitam vere beatam,
quae non nisi
ae~erna est, sine ulla dubitatione perducant .. ,"
.. , / ...

- 60 -
218 Cf. Epist.
104 {6>, C.S.E.L., t. 44, page 586, 1. 1-6 : "Sint honesti
cives tui,
probis moribus,
non superfluis facultatibus
non eos volumus
ad
aratrum
Quintii
et
ad
Fabricii
focum
per
nos
ulla
cohercitione
perduc1. Qua
paupertate
i11i
romanae
reipubl1cae
principes
non solum non
viluerunt ci vi bus suis,
sed ob eam fuerunt praecipue cari ores et patriae
gubernandis
opibus
aptiores".
Quintius
Cincinnatus
et
C.
Fabricius
Luscinus
font partie des exempla de la littérature latine.
Le premier fut
arraché
à
sa
charrue
pour
être
conduit
au
pouvoir
voir
Tite-Live,
Histoire romaine
III,
26,
Belles Lettres,
t.
3,
pages 41-42.
Quant
au
second,
envoyé
en
mission
auprès
du
roi
Pyrrhus,
au
lendemain
de
la
bataille d' Héraclée pour traiter du rachat des captifs romains,
il refusa,
malgré sa pauvreté, de prendre les présents que Pyrrhus voulait lui offrir.
Voir Plutarque, ~, Pyrrhus, 20, Belles Lettres, t. 6, page 53-54.
219 A ce sujet, voir J. Yang Tcn'Ang Tche , saint Augustin et les vertus des
païens, Paris, 1938.
... / ...

- 61 -
NDTES DU CHAPITRE VI
220 Cf.
~ 306 (3),
éd.
bénéd.,
t.
19,
page 2,
1.
34-36 :
-~ ergo
~ omnium est communis possessio.
Sed qua veniatur ad eam, qua tendatur,
quo itinere tento perveniatur, inde controversia est.-
221
Augustin ne fait
pas Ention des voies d'accès au bonheur dans les
lettres antérieures à la prêtrise. ~~is les voies qu'il propose dans le ~
Beata vita peuvent être considérées comme valables pour ces lettres dans la
mesure où elles ont été écrites à la même période, d'autant que les lettres
qui nous intéressent sont adressées à des personnes qui sont informées de
la vie qu' Augusti n mène à
Cassiciacum.
Nous nous référons cependant au
Contra AcadeJUcQS et au De ordine, dialogues contemporains du De beata yita
pour avoir plus d'éléments d'analyse.
222 De beata yita 1 (1), ~4, pages 48, 1. 1-2.
223 Cf.
Contra
Acade:micQS
II
(3),
B...-A.4,
pages 64·-66
:
Augustin dit
à
Romanianus,
qui
est
confronté
à
des difficultés
matérielles,
que
c'est
l'occasion pour lui de se convertir à la philosophie et il lui donne son
propre exemple.
... / ...

- 62 -
224 Contra
AcadeJlicos 1
<4>,
~4,
page 20,
1.
9-14
"In hac
mecum
studiosissime
vivit
noster
Licentius
ad
eam
totus
a
juvenilibus
illecebris voluptatibusque conversus est ita ut eum non temere patri audeam
imitandum proponere.
Philosophia est enim a cujus uberibus se nulla aetas
queretur excludi.-
225 Cf. De ordine II <4>, ~4, page 308.
226 CICERON, De finibus II, 27, 86, Belles Lettres, page 107, 1. 10-12.
227 CICEROI, De finibus V, 29, 86, Belles Lettres, page 162" 1. 6-8.
228 SEXEQUE, Lettres à Lucl11us. Lettre 90, 27, Belles Lettres, page 37.
229 Cf. De beata vita II
{8>, :a.....A.....4, page 66, 1. 14-20 : " Nonne,;inquam,
conceditis hominum doctissi~orum animas multo esse quam imperitorum quasi
in suo genere pleniores atque maj ores? - Manifestum eS:3e dixerunt. - Recte
igitur dicimus eorum anLllos,
qui nullis disciplinis eruditi sunt nihilqu2
bonarum artium haus",runt, jejunos et quasi famelicos e'3se" .
. . . 1 . ..

-
63 -
230
De
ordine
IX
(26).
.B......A.....4.
page
408.
1.
25-29
"Qui
autem
sola
auctori tate
contenti}
bonis
tantum
mari bus
rect isque
votis
constantes
dederint,
aut contemnentes aut non valentes disciplinis liberalibus atque
optimis
erudire,
beatos
esse
quidem,
cum
inter
homines
vivunt,
nescio
quomodo appellem".
231 Cf.
H. J. XARROU. op, cit,. page 300
Il Les
sciences libérales ont la
valeur de culture générale."
232
Jlsetraut HADOT.
Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique.
Paris. 1984. page 127.
233 De ordine XVI
(44) • .B......A.....4. page 436. 1. 1-7 : " ... Quibus si quisque non
cesseri t,
et omnia quae per tot disc1pli nas late varieque diffusa sunt ,a.q.
unam
quoddam
simplex,
verum
certu:mque
redegeri t.
erudi te
nomine
dignissimus,
non temere
jam quaerit
HIa divina,
non jam credend~- solum,
verum etiam contemplenda, intelligenda atque retinenda".
234
H.I. XARROU. op. clt~, page 301.
. .. / ...

- 64 -
235 De beata yita l
(6), :a.....A.......4, page 60, 1. 14-22 : "Quid autem agam quave
modo
ad
istum portum necessarios
meos congregem ut
cognoscas et
ex eo
animum meum - neque enim alia signa invenio, quibus me ostendam - plenius
intellegas,
disputationum
mearum
quod
mihi
videtur
religiosus
evasisse
atque
tuo
titulo
dignius
ad
te
scribendum
putavi
et
ipso
tuo
nomine
dedicandum.
Aptissime
sane
nam
de
beata
vita
quaesi vimus
inter
nos
nihilque aliud video, quod :magis Dei donum vocandum si t."
236 Retractationes 1 <3,2>, ~12, page 284, 1. 9-10 ; page 286, 1. 1-4 :
MVerum et in his libris displicet mihi ... et quod multum tribui liberalibus
disciplinis quas multi sancti multum nesciunt, quidem etiam qui sciunt eas
sancti non sunt. M
237
Le
poème
de
Licentius
est
cité
par
Augustin
dans
la
lettre
26,
C.S.E.L., t. 34.
238 Cf.
poème de Licentius, dans Epist. 26, C.S,E.L., t.
34, pages 89-90,
vers 1-32.
. .. / ...

- 65 -
239 Cf.
poéJDe de Licentius,
dans Epist.
26,
C. S. E. 1.,
t.
34,
page 94-95,
vers
145-151
" ... Interea
venient
quaecumque
futura
bonorum
/Scripta
salutiferi
sermonis
et
HIa
priorum
/ Aequ1paranda
favis,
reputans
quae
pectore
in alto
/Conceptum in lucem vomuisti
nectareum mel, /
Praesentem
ipsa mihi te reddent, si mihi morem/ Gesseris et libros, quibus in te lenta
recumbit/ Kusica, tradideris ; nam ferveo totus in illos.
240
Epi st
26
1
(1),
C. 5, E. L"
t. 34, page 84, 1. 8-10 : "Nunc paucis accipe
pectoris mei aestus de spe tua non transitoria, quod quodam modo via tibi
patescat in deum".
241 Epist.
26 (2), C.5,E.L.,
t. 34. page 85, 1. 1-5 : "Vincula vero hujus
mundi
asperitatem
habent
veram,
jucunditatem
falsam,
certum
dolorem,
incertam voluptatem,
durum laborem,
timidam quietem,
rem plenam miseriae,
spem beati tudinis inanem".
Cette exhortation qu' Augustin fait à Li cent iU:$,
'.
:1..
,_ ..... '
s'explique par le fait que ce dernier cherchait à faire carrière ~ans lés
honneurs. Voir Claude LEPELLEY, ~.~, pages 273-274.
• . "''1 .•.

- 66 -
242 Cf. Epist. 26 (4), C.S.E,L .. t. 34, page 86, 1. 1-9 ; "Si versus tuus
momentis
inordinatis
perversus
esset,
si
suis
legibus
non
staret,
si
mensuris
imparibus
aurem
auditoris
offenderet,
puderet
te
eerte
nec
differes nec desisteres,
donee ordinares,
eorrigeres,
statueres,
aequares
versum tuum discendo et agenda artem metricam aeerrimo studio et labore
quolibet.
Quid cum inordinatus ipse perverteris,
eum legibus Dei tui ipse
non stas neque in agenda vita honestis tuorum votis et huic ipsi eruditioni
tuae concinis, abjiciendum post tergum putas et neglegendum 7".
243 Epist.
26 (4), C.S.E.L .. t.
34,
page 87, 1.
4-11 ; "Expectas ut ego
jubeam sis bonus, sis quietus, sis beatus ... Ecce jussum meum ; da mihi te,
si hoc opus est tantum j da domino meo te, qui omnium nostrum dominus est,
qui tibi illud donavit ingenium".
244 Epist.
26
(6),
C. S. E. L.,
t.
34,
page 88,
1.
17-21 ;
"Ornari abs te
diabol us
quaeri t.
Si
calicem aureum invenisses
in terra,
donares ilIum
ecclesiae dei.
Accepisti a deo ingenium spiri tali t~r aureum et mip.istrfi.s..
. -.
; ' ;
':
",.
.:\\
inde libidinibus et in illo satanae propinas te ipsum !".
245 C.I. BA1~S, La lettre de saint Augustin à Licentius (Epist. 26>, dans
In me:moria Lui VasileParvan, Bucarest, 1934, page 23.
... / ...

- 67 -
246
Epist.
101
(1),
C. 5. E. L..
t.
34,
page 540,
1.
1-4
"Est enim per
nostrum
ministerium
non
litteris
illis,
quas
variarum
servi
libidinum
liberales vacant, sed dominico pane nutritus, quantus ei potuit per nostras
angustias dispensari".
241 Epist,
101
(2),
C.5.E.L ..
t.
34,
page 540,
1.
8-11 :
"Per eum namque
praestatur,
ut
ipsae
etiam,
quae
liberales
disciplinae
ab
eis,
qui
in
l i bertatem
vocati
non
sunt,
appellantur,
quid
in
se
habeant
li berale,
noscatur.
Neque
enim
habent
congruum
libertati,
nisi
quod
congruum
veritati ft.
248 Epist.
101
(2),
C. 5. E. L.,
t.
34,
page 540,
1. 5-8 :
"Quid enim aliud
dicendum est eis,
qui cum sint iniqui et impii,
li berali ter si bi videntur
erudi ti,
nisi
quod in l i tteris vere li berali bus legimus
• si
liberaverit, tune vere liberi eritis'
(Jean 8, 36>
249 Cf.
Epist.
101
(2),
C.S.E.L.......
t.
34,
page 540,
1.
13-16:
"Non ergo
i llae
irmumerabiles et
impiae fabulae,
qui bus vanorum plana sunt
carmina
poetarum,
ulla
modo
nostrae consonant li bertati,
non' oratorum inflata et
expolita mendacia, non d~nique ipsorum philosophorum garrulae argutiae" .
. . . 1 ...

- 68 -
250 Epist.
101 (2). C.S.E.L .• t. 34. page 541. 1. 3-7 : "Absit omnino,
ut
istorum vani tates et insaniae mendaces,
ventosae nugae ac superbus error
recte
11 berales 11 tterae
nominentur
hominum sci11cet
infeliciuD. qu i
dei
gratiam per Iesum Christum dominum nostrum,
qua sala liberamur de corpore
martis hujus, non cognoverunt nec in eis ipsis quae vera senserunt".
251 Cf. Epist. 118 (1), C,S.E.L .• t. 3.4. page 665. 1. 11-15 : "Ego te autem
vellem abripere de media delic10sarum inquisitionum tuarum et constipare
inter
curas
meas,
ut
vel
disceres
non
esse
inaniter
curiosus
vel
curiositatem tuam cibandam atque nutriendam imponere non auderes eis quorum
inter curas vel maxima cura est reprimere ac refrenare curiosos".
252 ~ 118
(2).
C.S.E,L.•
t. '34.
page 666.
1.
3-5 :
"Nam ub!
finem
constitueris totius hujus flagrantissimi studii tui et tibi infructuosi et
nabis molesti, epistula tua satis indicas".
253 Epist , 118 (7). C,S.E.L .• t. J4. page 672. 1. 1.
.....:
. ~""
254 Epist , 118 (9), C.S.E.L, t. J4. page 673, 1.14.
255 voir ~ note 251.
256 Cf.
Cicéron,
Tusculanes,
1.
2.
4,
Belles Lettres,
page 6,
1.
5-6
"Su:mJJJam eruditionem Graeci sitarn censebant in nervoru:ilI vocumque cantibus" .
. . . 1 . ..

- 69 -
257
Epist.
118 (13),
C.S.E.L.,
t.
44,
page 677,
1.
9-17 : MIlle autem,
quisquis
abs
te
quaesierit,
quae
tu
a
nabis
quaeris,
audiat,
quod
ea
doctius et prudentius nescias.
Si enim Themistocles non curavit,
quod est
habitus
indoctior,
cum canere
nervis
in
epulis
recusasset,
ubi
cum se
nescire illa dixisset eique dictum esset : 'Quid igitur nosti 7'respondit :
'Rem publicam ex parva magnam facere',
dubitandum tibi est dicere te ista
nescire, cum ei, qui rogarit, quid noveris, respondere possis nasse te, qua
modo
etiam sine
istis
homo
esse
possi t
beatus
7".
Sur
la référence
à
Thémistocle,
voir
aussi
Plutarque,
Vies.
Themstocle
II,
2,
4,
Belles
Lettres, t. 2, page 102 : ft ('Oth:t/
0f>rteov {'I -ra.i'"'S lJ.r:.u (u. etols \\.(..,t:
,
"
)
'do. b r f. L do. 15 ). C '( 0 ~ t Il ~ 1S &1d. rel l?.;l. ïs
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,
/
'
' "
X(le'6"d-6e~L Y".;z.).l:1 e10v o?~w f:fT I 6L;1LLO) 170)., IV ai t'-f'L(e~v
\\
?,
,
1
L<~I ~cf0J'oY rrJ..e.;l.).'J...Ç3WV tVdOj"Ov' K~I ,.q:~;l...\\I'JV ;i:rrreyl-
,
ba.69~l."
. '.~.".
258 ~ 150 (10), éd.
bénéd., t.
18, page 414, 1. 2'7-23 : "Instru'Xerunt
., . . ' . , ;,t. '
sibi v'ias erroris philosophi : alii dixerunt : 'hac', alii :';'~1ion hac, sed
hac'''.
... / ...

- 70 -
259
Cf.
~
150
(4),
éd.
bénéd.,
t.
18
page
409.
1.
12-18
• Interrogemus prius Epieureos,
quae res faeiat vitam beatam.
Respondent
'voluptas eorporis·...
Redeamus ad interrogandos.
Quid diei tis,
Epieurei,
quae res faeiat
beatam vitam? Respondent
:
"lI'oluptas eorporis" J!
j
SeDIla...
156
(7),
éd.
bénéd.,
t.
18.
page
472,
1.
15-20
Il Fuerunt
philosophi
saeeuli hujus,
alii putaverunt non esse beatitudinem nisi seeundum earnem
vivere,
et bonum hominis in voluptate eorporis posuerunt.
Isti philosophi
Epieurei dieti sunt,
ab Epieuro quodam auetore,
magistro sua,
et qui alii
similes eorum".
260 Cf.
EeDL... 348 (3), éd. bénéd., t. 19, page 171, 1. 30-31 : " ... Dicunt
enim propterea sapientem justum esse debere, ut vel aequirat, vel teneat ex
eorpore voluptatem".
261 SeI:Ja... 150 (6), éd. bénéd., t. 18. page 410. 1. 15. Cettei$'~pression est
'Y <ff.\\r;
.';'~'Y'
' , ' c " "
..
inspirée
d' HORACE,
Epitres
1
(4)
qui
parle
des
.. p.~urceau:t;}ait:, troupeaü:/?',
ll!:e~
'~~:hi:~';>;!%e'lf~';\\
d'Epieure". (
"El!icuri
de
poreus".)
Cf.
- ..:.;::;..;~
.' .
. ';
...: ,
:,".\\
Lettres, page 56. 1. 6).
. ,'~.
':',;"
262 Se.IJL..156 (7), éd. bénéd .. t.
18, page 473, 1. 6-'1.,:,
•.. 1 .•.

- 71 -
263 SeDa... 348
(3),
éd,
bénéd, ,
t.
19,
page 171,
1.
32-41
"Nam et hi
fortissimos
jactant,
et nihil omnino timere se dicunt quia nec quidquam
Deum res humanas curare arbitrantur,
et consumpta ista vita nullam postea
credunt futuram i et si quid eis adversitatis in hac ipsa contingit, eo se
munitos existimant quia corporis voluptatem, cum eam in ipso corpore tenere
non
possunt,
possunt
tamen
animo
cogitare,
et
ea
cogitatione
sese
oblectando,
corporalis
voluptatis
beatitudinem,
etiam contra
corporalis
doloris impetum custodire,l'
264 Cf. ~ 348 (3), éd. bénéd, t.
19, page 171, 1. 41 ; page 172, 1. 1-8:
..
NU.!IIquid non et apud istos dilectio foras mi tti t
timorem ? Sed dilecto
sordidissimae voluptatis, imo dilectio turpissimae vanitaris. Nam cum ipsam
voluptatem de membris corporis inruens dolor excluseri t,
per,falsam. ej us
imaginem in anima vani tans remanebi t.
Quae vani tas tantum. ama"t<ur,:ùt culri:,;.: ~
:;~;8:;·.,~~j··:;i~.;: ..' '. . .
.~
eam vanus homo totis viribus cordis amplecti tur,
etl)m,r~filoft'~'.:-••Y'it1~;'< ", ,"
mitigetur".
J:1;i~~ ... }>0'~:+'(' 1i';,·..
265
Cf.
155
SEL
e'4'~_d~' L 2-3 ;/w:Cum
Epist , ,
(2),
C. . , . ,
t.
44,
pag
.~)
~:/.
adseverant etiam in Phalaridis tauro beatum esse saPieIl~f,è;~i:<cogantur~iateri
~'"
'. , ,'.. ..
;! '
-~ t·\\'· "". :.... y~.':;,,: ..
vitam beatam al iquando e:3se fugiendam".
Phalaris : tyran ~·~)!gi-igente. Il
régna sur la cité entre 565 et 549 avant Jésus-Christ. Il e~tresté célèhre
par la lèg2~de de fèrosité sanguinaire qui s'est attachée à son nom dans
l' histGire.
... / ...

- 73 -
Cum enim de caecitate corporis ageret atque adfirmaret etiam caecum beatum
esse
posse
sapientem,
multa
dixit,quae
per
aures
percipiendo
gauderet,
itemque,
si surdus esset,
ea,
quibus oblectaretur, ad oculos transtulit i
si autem utroque sensu privaretur et caecus surdusque fieret, non est ausus
hinc
ferre
sententiam
eumque
beatum dicere,
sed
addidi t
etiam dolores
gravissimos corporis, qui eum si non interemerint,
ipse se interimat et ad
portum non sentiendi hac liberatus virtute perveniat n ,
26'7
Epist.
155
(3),
C, S, E, L"
t.
44,
page 433,
1.
3-6
:
"Cedit
igitur
sapiens immanissimis cladibus atque succumbit in tantum, ut eis cogatur et
in se ipsum homicidium perpetrareM •
268 Epist.
155
(3).
C. S, E, L,.
t.
44,
page 433.
1.
6-19
:
"Certe semper
beatus est, certe beatam vitam in sua potestate constit~tam nul,~;~ vi' potest
ullius calamitatis ami ttere. Ecce in caecitate et surdii~te eta~\\9%i,'~Î5i~9
:::::::::::bU:O 5
::::: be::: ::.5':,tb:::a:Uj:~ta:d.~j~~f'~·J~~~~<
disputationes,
ut si t
aliquando beata vita,
quam .l!l'akt~h5" ..:ta:r'fehoJi:possi.t
:~\\>t!i;~::;'1<," ~),;';r :.
i,.. . . . . . " ' . , .
vel,
quod
est
absurdius,
quam sapiens
ferre
non.
dep~at 'eamque t.if.g;l.,at,
,,",~'_-:t'~~?1'i', ;~ , ',:" _, .....;>\\ -.,".
abrumpat,
abiciat,
seseque
ab
ea
ferro
etiam seu .. ~~~ri,'6.ùïl~lié~~.aîla
··:"<P~".:m,.~;"· ~;i:Ç.
voluntaria morte subducat, ut in portu non sentienii vel nUnU5 omnino sit.
Quod Epicurei et si qui alii simili stultitia putaverunt, ~ei'i1éo beatus,
quoniam fuerit ab illa beata vita tamauam ab aliqua peste liberatus" .
.. . / ...

- 74 -
269 Epist. 155 (3), C.S.E.L., t. 44, page 433, 1. 19.
270 Epist.
155 (3), C.S.E.L., t. 44, page 433, 1. 19 ; page 434, 1. 1-8 :
·Si beata vita est in cruciatibus corporis, cur non in ea manet sapiens ut
fruatur 7 Si autem misera est,
quid,
obsecro te,
nisi typhus impedit,
ne
fateatur,
ne oret Deum,
ne justo et misericordi supplicet,
qui potens est
et
vitae
hujus
ma1a
vel
avertere
ve1
mitigare
vel
ad
ea
to1eranda
fortitudine armare vel ab eis omni modo liberare et, post haec, vere beatam
vitam
dare,
quo
nu11um
malum
admittatur
et
ubi
summum
bonum
numquam
amittatur 7".
271 Cf. ~ 150 (6), éd. béuéd, , t. 13, page 409, 1. 45 ; page 410, 1. 1-
10
:
"Nam Epicurei
et
de
corpore
et
de
anima hoc
idem senÙ\\l:!l't,
qpod " ;
5
:::::":0:r:::e:5::5::1v:"::a: :0::::1:5.::h::~e::~~:~;~~~:4~;k~;-~;,:~~:"
spiri tum manente
cadavere,
et
integris membrorum It~i:ià~~)J.:$~;:'Êiïiqualuili'+'.; '~~.:;
.' t';~.'·:;~':?\\~':j.t:"~:!;t>:·;:,, ,,",' :::~~l;} :.'~;.~~y;'{,
durantibus,
anima
max
ut
exierit,
ve1uti
fUllllJ~:.~#i,9: 'Af:ve~:t>'érat~
',.
' \\ )~:~':~~;\\\\i;';;:&fi; " } ' ,.;,;,
disso1vitur'.
Non
ergo
miremur
quod
summum bonum,<td·;,~st{beatitu.d,j;;hs
(':/.J;».... ;. ..~/~;:,;;.,?,
causam, in corpore posuerunt, quod se melius quam animaIa':'hé:ie-ïie'$'e't~iIt·, ..
";.i;..f~;~(:::;;;,;i;··,·'" ~~...;" ,
'.:;.
272 ~ 150 (7), éd. bé~~, t. 13, page 410, 1. 33.
. . . 1 . ..

- 75 -
273
~ 150 (5), éd. bénéd., t. 18, page 409, 1. 19-20 : Cf. aussi ~
156 (7),
éd.
bénéd.,
t.
18,
page 472, 1. 20-26 : "Exstiterunt autem alii
superbi,
quasi a carne se removentes,
et totam spem beati tudinis suae in
anima sua consti tuentes,
posuerunt summum bonum in virtute sua...
Tales
fuerunt philosophi qui Stoici nuncupati sunt".
274 Cf. ~ 150 (9), éd, bénéd"
page 412, 1. 1-5
"Est virtus animi res
laudabi1is,
prudentia
mala
et
bona
discernens,
justitia
sua
cuique
distribuens,
temperant ia
11 bidines
cohi bens,
fortitudo
molestias
aequanimiter sustinens".
275 ~ 150 (9), éd, bénéd., t, 18, page 412, l, 5-6,
276 ~ 150 (9), éd, bénéd., t, 18, page 412, 1. 6-8.: ",
. -\\tt:·;·
'of
277 ~ 156 (7), éd, bénéd"
t. 18, page 473, 1.
278 ~ 150 (8), éd, bénéd., t, 18, page 411, 1.
279 Epist. 118 (16), C.S.E.L., t, 3A, page 681, 1.
. . . 1 . ..

- 76 -
280 Bpist. 118 (16), C.S.B,L., t. 44, page 681, 1. 10-11 : -Quantum igitur
pertinet ad quaestionem de summo
hominis bono...
profecto reperies duos
errores
inter
se
adversa
fronte
conlidi,
unum consti tuentem in
corpore
alium consti tuentem in anima summum bonum,
rationem autem veri tatis,
qua
summum bonum
nostrum deus
esse
intellegi tur,
utrique
resistere
sed
non
prius docentem vera quam prava dedocentem".
281 Bpist.
118 (11), C. S. B. L., t.
44,
page 681, 1. 23-24 : "Sed non sicut
il11
errorum
suorum
ita
Platonici
verae
rationis
personam
implere
potuerunt".
282 Bpist,
118 (11), C.S.B.L., t. 44, page 681, 1. 24-25 ; page 682, 1.1 :
... / ...

- 77 -
284 ~ 241
(4),
éd.
bénéd.,
t.
18, page 240,
1. 11-23 : "Sed,
inquiunt,
post
longa tempora,
facta peni tus obli viane veterum miseriarum,
incipiunt
velle reverti
in corpora ; et delectabit eas venire,
et rursus veniunt ad
ista patienda,
ad ista toleranda,
ad obliviscendum Deum,
ad blasphemandum
Deum, ad sequendas corporis voluptates, ad pugnas contra libidines".
285 ~ 241
(4),
éd.
bénéd.,
t.18,
page 240,
1.
30-32
"Dele
totam
memoriam,
et
forte
residuam
facies
sapientiam
nihil
remaneat
quod
revocet" .
286 Cf. ~ 241 (5), éd. bénéd, , t.
18, page 241,
1. 5-6 ; 1. 9, citant
Virgile,
Eneide VI,
119-121,
"0 pater,
anne aliquas ad caelumm hinc
ire
putandum estl
Sublimes animas,
i terumque ad tarda ;evertii.·,èbrp9ra·.?,.... I··
'. . .
"7";"-;>;'" ·.~':f:';;;. '~',./' ..:;,{..,
Quae
lucis
miseris
tam dira
cupido
7"
<Cf.
Virg~Je~ .. Eneia:g;~I, '~"Bêi1",s
..
~ttres. ~g~
JQ~;~'~~;;:1~;1~i~!;
190-191),
.'
287 Cf. Serm. 241
(5). éd. bénéd.
t. 18. ~ge 241: 'f'::-~f~;\\,~'gè;~2:'~.~"
1-4
"Sciunt se
istae animae
in caelo,
passuras eS$~" 1··4Î";~.$~huju~'..vj'taé
" .':.'l.::·:", ',;';':",:.
miserias,
an nesciunt
?
Elige quod
volueris.
Si
sciun:t'~éi~~~Û'1't)~,esse
,... ~',.; :~~~ ~'~~~ ·~D~·~~~·:~.t;:"_::··-·~:;J~~l·~ ~)-}.
tantas miserias,
quomodo sunt
beatae,
miserias suasOibgt;eà:~~es 7' Quo.modo
sunt beatae,
ubi
sun.t sine securi tata 7 Sed video quid eli,t~§ j ':,dicturus
es: nesciunt.
. . . 1 . ..

- 78 -
Laudas ergo ibi hane ignorantiam,
quam me nunc habere non sinis, doeendo me
in
terra,
quod
me
neseiturum
dieis
in
eaelo. 'Neseiunt',
inquis.
Si
neseiunt,
et non se putant esse passuras,
errando sunt beatae.
Quod enim
passurae sunt,
putant se non passuras : quod falsum putare,
quid est aliud
quam errare
?
Erunt
ergo errore
feliees
;
erunt beatae,
non aeternitate,
sed falsitate".
288 Cf.
~ 241
(6),
éd,
bénéd, ,
t.
18,
page 242,
1.
11-20
:
"Deinde
audite aliud pejus,
aliud dolendum vel potius irridendum.
Hic sapiens,
hic
philosophe,
hoc est in terra,
(verbi gratia, Pythagoras, Plato, Porphyrius,
et
neseio
quis
alius
ipsorum,)
quare
philosopharis
?
Propter
vi tam,
inquit,
beatam.
Quando habebis istam vitam beatam ? eum hoc corpus,
inquit,
reliquero
in
terra.
Xodo
ergo
misera
vita
geritur,' sed spes est
beatae
vitae
ibi
beata
vita
geritur,
sed
spes est
miserae
vi;lt~~. Ergo, spes
~.," 1-r;
nostrae infelici tatis est felix, et feliei tatis infel:l,x""
;'~:f\\;:;::
" ..,'
:~:..:...."
..~ \\';.:
289 Epist.
103
(2),
C.S,E,L.,
t.
34,
page
eaelestis)
ergo
licet
principaliter appetend~ atqu~:J;dlUa6ÏÎ7~tt~~)I.;$Ù;;;:~""~~~Ù'~:,
. ,)i,::,~~",,:,;~i),:::::Y"" "fi.. . ,\\"
'.
illam non arbi tror
d<:serendam,
in
qua
na ti
et
ge:nJff."::~li:~~;' quaé, 'pr.i ma"
'.~'.
?~;: .:);ij~;:'~ ...... '. ~ ::i)if~~.i~:\\..
"••
1 .
nabis usum lueis huj us inÎudi t,
quae alui t,
quae edu6a*if,'~~~',ii;,;~i:10dad
..... ';, '- '!'~i;;tf;j::,;jJt<'~,:,: .:
causam
proprie
pertinet,
dicam,
de
qua
bene
merit';i$ *;{Tis 'dèlctifisimi
, '.~.
homine.o;
ferunt
past
obi tum eorporis
in
caelo
domicilium, \\pràê,parari, ut
promotio
quaedam
ad
supernam
praestetur
his
hominibus, • qui
bènè
de
j
/
geni tali bus urbi bus meruerunt,
et
hi
magis euro Deo habitent,
qui
salut'ID
dedisse aut cousiliis aut operibus patriae doceantur".
... / ...

- 79 -
290 Cf. Platon. Phédon 82a. Belles Lettres. t. 4 page 41, 1. 1-3
"
"
i
Sur le caractère platonicien du songe de
Scipion,
voir P.
BOYllCE,
Etudes sur le songe de Scipion.
Paris,
1936,
pages 139-146 : L'immortalité des hommes d'état.
291 Cf. De republica VI, 13, 13, Belles Lettres, pages 106-101 : "Tous ceux
qui
ont contribué au salut,
à
la prospérité,
à
l'accroissement de
leur
patrie
peuvent
compter
qu'ils
trouveront
dans
le
ciel
une
place
bien
;'
définie qui
leur est assignée,
pour qu 1 ils y jouissent.
da'h~,~!tlé,b.onheur•
_:'j:,~~f~';"
' . ' ,~,<'~-
.......
d'une vie éternelle",
~" ..
·r
.~
(-Omnibus qui patr!am couseryayer!nt. ad1uyerint.
~elQ definitum locum ub! beati aevo sempiterno
. .
.
' . '
:';~,.';',l:~:c':
292 Sur
le succès de ce texte
postérité chrétienne du songe de Scipion,
Claude LEPELLEY,
op.
cit .•
païenne du patriptisme 1l1Unicipal.
• •• ,1 • ..

- 80 -
293
Epist.
104
(11).
C, S. E. L..
t,
34.
page
590.
1.
9-18
:
"Praecisis
omnibus dilationibus ad illius gratiam confugiendum est, cui verissime dici
potest,
quod
carmine
adulatorio
nescio
cui
nobili
dixit,
qui
tamen
ex
Cumaeo.
tamquam ex prophetico carmine,
se
accepisse confessus est
:
'Te
duce,
si
qua
manent
sceleris
vestigia
nostri,
/inrita
perpetua
solvent
formidine
terras.
Hoc enim duce solutis omnibus dimissisque peccatis hac
via
ad
caelestem
patriam
pervenitur.
cujus
habitatione
cum
eam
tibi
amandam, quantum potui commendarem, admodum delectatus es. lI •
294 La quatrième Eglogue fut composée au
lendemain de la paix de Brindes
qui
mettait
momentanément fin au conflit qui
opposait Octave et Antoine.
Virgile voyait dans cette paix le début d'une ère nouveile,~el1edu, retour
.-
.
.
..,~~'''''~:':'/.' -;....
-
")-
de l'âge d'or, et il considérait Polion, qui était.1'un·;de~·;·/ârtisaI:ls·'de:>,la
. .
'~,.
:',."~:·:'iI:,.,
., ..";....;.}
"~
-"j
paix
survenue
entre
Octave
et
Antoine,
comme
lesy~ol~':~~~5~·~é~'t~}/th-ê
nouvelle.
Voir P, BOYXJCE. La religion de Virii~e.
132 j J, CARCOPIIO. Virgile et le mystère de la IVe
.,'
.
"
~
. ,~-."
..."
295 Cette récupération Chrétienne
de Virgile n'est
qui ne fait que reprendre une pratique établie bien avantb~:~":~!n~~ ci':Je
_." ..•:,~ .~;..~',:it\\'~\\·~·'.~~~.~~... ': .':~..~,
:,' ,,-'
l'a montre J. FONTAUE : Cf. Etudes sur la poésie latiJîè tltltliiye dl !u.~P,~ à
.
-
,,"
'.-;
Prudence.
Paris.
1980,
Voir
particulièrement
La'ôpnnrs1gn
du
Christianisll1e à
la culture anti'~ue
la lecture Chrétienne de~niyer2
bucolique de virgile, pages 214-240.
. , , / ., ,

- 81 -
Citant précisément,
à
la page 233,
le passage de
la lettre 104 qui
nous
intéresse,
l'auteur,' parlant d'Augustin,
écrit:
H
• • • Augustin
confirme ici
Lactance.
Il
invite à
une lecture allégorisée et
'christique'
de l'enfant
et du paradis de la quatrième Eglogue,
comparable à celle qu'il fait aussi
des péricopes messianiques du prophète Isaïe ...
Il autorise ainsi,
pour de
longs
siècles,
une
lec-tio
christiana
-
Sinon,
en style
monastique,
une
lectio diyina
- de l'oeuvre virgilienne H •
296 Cf.
Epist ,
233,
C. S. E. 1..
t.
57,
page 518,
1.
12-18 :
"Quaero etiam
quid de Christo sentias : quod enim eum non parvi pendas adverti, sed utrum
ea sola via,
quae ab illo demonstrata est, ad vitam beatam perveniri posse
existimes et aliqua ex causa non eam neglegas ire, seddiffapas an et aliam
vel alias ad tam opimam et prae o:mni bus appetendaii· pos~s~;t:l;l*em Y·i.~s:·~$se
arbi treris
et
aliquam earum j am te
ingredi
credas
opinor,
impudenter".
"
l,":"
297 Epist. 234 (2), C.S.E.L"
t.
57, page 520,·l-~··lb;~~.,.':.;·:~~'!~~,;Pt4j.~~·;·:De~m<';"\\.,
.. ,
,'!II.,
.. '
...~.,\\._~.,_~;.•... , ..:~
" , . ; - '
- ~_.,

melior,
qua vir bonus piis,
justis,
puris,
cast~s, Ver.i;~d~~1~6 fpP\\rtq~~:
"
/,4 '..
~ .•~....".;~. . 1:C~'" /
'. < ,
sine
ulla
temporum
mutatorum
captata
j actatione
prah~i{~~~t~t' deorÙ'1ll.
..
~.;.i :.';":~;i:~.; •.~'~~>~;.:....,...;"
,.:..•. :
comi tatu vallatus,
Dei
utique potestat i bus emeri tus,
id .es'if :ej us ·'~1?:~~.~"et
~1
uni versi
et
i neomprehensi bi lis
et
i nefÏaOi lis
i nfatig.abi li;'q,ue'6reatods
impletus
virtutibus,
quod,
ut
vestrum
est,
angelos
dicitfs,
vel
quid
alterum post
deum vel
eum deo
aut
a
d~o aut
in
deum,
intentione
animi
mentisque ire festinat.
. . . 1 . ..

- 82 -
Via
est,
inquam.
qua
purgati
antiquorum
5acrorum
pi i5
praeceptis
expiationibusque purissimis et abstemiis observationibus decocti anima et
corpore, constantes deproperant."
298 Cf. Epist. 235 {2>, C.S.E.L., t. 57, page 523, 1. 4-12 : " Vivatne homo
bene
ut
sacris
purgetur,
an
sacris
purgetur
ut
bene
vivat,
an
ipse
quantuscumque
bene
vivendi
in homine modus
nond\\jm si t
idoneus ad beatam
vi tam.
quae
ex
deo
capi tur,
nisi
accedant
adj umenta
sacrorum,
an
bene
vivendi
quaedam velut
portia sit
etiam sacra percipere,
ut
scllicet
non
aliud sit bene vivere aliud sacrate vivere, sed bene vivendi terminis etiam
sacrata
vita
claudatur
?
Horum
quattuor
quae
proposui
quid
potissimum
probes,
quaeso
te
li tteris
aperire
non
pigeat".
La
sui te
de
la
correspondance entre Augustin et Longinianus ne nous est~ ;pa~:iP~~ve'lîde
'-~~};"'f? '-,~.
.
}- •
y
...,.'iX\\~,;.':~~'~':"..yf;.i\\ .' .:
299 Voir to:me 1, chapitre 5, page 103
tome 1:,' chapitk.l)·~:~,pê'~~tl;lG::;r·..1, . ~'J'i
~l~,
~geOO:/.i?:t~it~1~!~t~~~ti~.
300
130
<10',
C,S,B..
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- 83 -
301
Epist.
155
{2>,
C. S. E. L.,
t.
44,
page
431,
1.
6-12
"De qua
re
(amicitia> etiam philosophi multa dixerunt i sed apud eos vera pietas,
id
est verax veri Dei cul tus unde omnia recte vivendi duci oportet officia,
non invenitur non ob aliud, quantum intellego, nisi quia beatam vitam ipsi
sibi quodam modo fabricare voluerunt potiusque patrandam quam impetrandam
putarunt, cum eis dator non sit nisi Deus. Beque enim facit beatum hominem
nisi qui fecit hominem".
302 ~ 150 {10>,
éd.
bénéd.,
t.
17,
page 414,
1.
29-34
"Latuit eos
(philosophas>
via,
quia
Deus
superbus
resistit.
Lateret
et
nos,
nisi
venisset ad nos.
Ideo Dominus
'Ego',
inquit,
'sum via'.
Piger viator,
via".
Bali quaerere qua ad ilIum venias, praeter ipsum".
.
·:r.
l
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