UNIVERSITÉ DE BORDEAUX II
Unités d'Enseignement et de Recherche des Sciences Médicales
Année 1980
Thèse nO 155
CONTRIBUTION A L'ETUDE DE LA
DEGENERESCENCE CARCINOMATEUSE
DES ANCIENS FOYERS OSTEOMYELITIQUES
le Vendredi 18 Avril 1980
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par Jean-Felix
AMOUGOU
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né le 10 Juillet 1949 à Ambam (Camero.
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EXAMINATEURS DE
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MM. J.L.HONTON,Professeur
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A.' LE RE~E~~~;, ~~;~~~ ::::::::::::::::::::::::.:::::::::: ~ Juges
J. SENEGAS, Agrégé
.
A. LETREUT, Docteur en Médecine
..
Amjcale Corporative des Etudiants en Médecine de Bordeaux
7&, COurl de la Somme· 31l8oo BOR.DEAUX· T4L : 92.77.08.

A mon Epouse,
Inlassable compagne d'un mari toujours absent, douce et tendre épouse
d'un guerrier toujours parti, ce travail est la confirmation de mon amour

perpétuel et la modeste manifestation d'une gratitude à un soutien et
à des encouragements sans relâche.
A mon Fils Orphée,
Toute mon affection. Que ce travail soit le témoignage de ma gratitude
vis-à-vis d'un fils vraiment très compréhensif et toujours très indulgent
vis-à-vis d'un mauvais père.
A ma Mère,
Trouve, dans ce modeste travail, le fruit de tes énormes sacrifices et le
témoignage d'une éternelle affection.
A mon Père,
Tu as su me faire apprécier ton métier,. daigne trouver ici le témoignage
de mon admiration et de toute mon affection.

A mon regretté Grand-Père,
J'apprécierai toujours l'amitié que tu m'as donnée avec l'amour du travail.
A ma Grand-Mère BA'ANA Catherine,
Toute mon affection à une très grande dame d'un courage exceptionnel.
A mon regretté Beau-Père,
L'admiration que j'ai pour toi me restera éternellement. Je regrette
seulement de n'avoir
pas su apprécier au bon moment l'amitié et le
courage d'un homme exceptionnel.
A ma Belle-Famille,
A tous mes Frères et Soeurs,
Si j'ai pu a"iver jusqu'ici, c'est parce que je me sentais soutenu et appuyé
par votre foi et vos encouragements. Trouvez dans ce modeste travail
la manifestation d'une gratitude inestimable et d'une confiance absolue.

A tous mes Amis,

A Maitre KUHN,
AlIOcat au barreau de Bordeaux,

Votre amitié et vos conseils m'ont toujours été d'un secours inestimable.
Au Révérend-Frère L. PARI: (Jean-Blaise),
C'est grâce à vous que j'ai pu faire quelque chose de ma vie. Vous faites
honneur à la Congrégation des Frères du Sacré-Coeur. Je me permets
ici de vous remercier en mon nom et au nom du CAMEROUN pour tout
ce que vous avez fait pour nous.

A mon Village OBANG Il,
Des souvenirs inoubliables.

A la Ville de BORDEAUX,
A la Ville de LIBOURNE,
A l'A.5. Libourne Handball,
J'ai trouvé dans votre cercle de vrais amis, des frères .. votre prévenance
restera à jamais gravée dans mon coeur.

Au Personnel Médical et Paramédical
de l'Hôpital Etienne Sabatié de LI BOU RNE,
J'ai
reçu auprès
de vous une amitié et
une formation que j'entends
honorer toute ma vie.
Aux «charmantes» Secrétaires
du 30 Chirurgie de l'Hôpitale Sabatié,
Votre aide m'a été très appréciable.
A Monsieur JULIAN,
Directeur de l'Hôpital Etienne Sabatié de LI BOU RNE.
A mes Maitres de l'Hôpital Etienne Sabatié de LIBOURNE.
A Monsieur P. CHENILLEAU,
Chef de Service de Chirurgie Générale au CHG de Libourne,
Vous avez guidé mes premiers pas en chirurgie .. daignez trouver ici la
modeste manifestation d'une très grande admiration et d'un profond
respect.

Monsieur le Médecin en Chef CATHALAN,
Commandant en second.
A Monsieur le Médecin Général LESTAGE,
Directeur de l'E.S.S.A.,
Mon passage dans l'Etablissement que vous dirigez m'a permis de faire
en vous la connaissance d'un très grand homme, d'un très grand médecin

et d'un très grand officier.

A NOS JUGES
Monsieur le Docteur A. LETREUT
Physiothérapeute à la Fondation Bergonié,
Vous
avez
constamment guidé ce modeste travail .. ma
gratitude et mon respect resteront sans limite.
Monsieur le Docteur J. SENEGAS,
Maitre de Conférences Agrégé de Chirurgie,
Anatomie et orgagénèse (option Orthopédie),
Chirurgien des Hôpitaux,
J'ai tout appris auprès de vous : la manière d'exercer notre
difficile métier et l'art de vivre avec les hommes.
Je tâcherai d 'honorer cet enseignement.
Monsieur le Docteur A. LE REBELLER,
Maitre de Conférences Agrégé de Chirurgie orthopédique,
traumatologie, chirurgie plastique et reconstructive,
Chirurgien des Hôpitaux,
Chef de Service,
Vous avez accepté de juger ce modeste travail.
Toute mon estime et mon plus profond respect.
Monsieur le Docteur CI. VITAL
Maitre de Conférences Agrégé d'Anatomie pathologique,
Biologiste des Hôpitaux,
Chef de Service,
Merci d'avoir accepté de juger ce modeste travail.
Toute mon estime et mon plus profond respect.

A NOTRE PRESIDENT DE THESE
Monsieur le Professeur J.L. HONTON
Professeur sans chaire d'orthopédie et traumatologie,
Chirurgie plastique et reconstructive,
Chirurgien des hôpitaux,
Chef de service,
Vous avez accepté de présider ma thèse.
Toute mon admiration et mon plus profond respect.

CONTRIBUTION A L'IËTUDE DE LA DIËGIËNIËRESCENCE
CARCINOMATEUSE DES ANCIENS FOYERS OSTIËOMYIËLlTIQUES
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PLAN
INTRODUCTION - HISTORIQUE
.
OBSERVATION
"
5
DISCUSSION ET COMMENTAIRE
"
9
HISTOIRE DE LA MALADIE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
9
1. Le lit d'ostéite correspond à la cause favorisante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
9
2. L'ostéite et sa longue suppuration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
9
3. Transformation maligne du foyer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
10
11- LE PROBLEME DIAGNOSTIC. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
11
1. La douleur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
11
2. La suppuration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
12
3. La déformation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ..
12
La confirmation diagnostic
IV-PROBLEMES EVOLUTIFS
19
CONCLUSION
21

INTRODUCTION
HISTORIQUE
Tous les auteurs s'accordent à laisser à HAWKINS (19), (1834), le mérite d'avoir
été le premier à s'intéresser aux dégénérescences cancroiaales des anciennes cica-
trices, des vieux ulcères, etc... Le sujet qui nous occupe a été largement traité par
les auteurs du monde entier, malgré un nombre relativement peu élevé de cas cités
(environ tois cents observations).
Monsieur le Docteur M. DEVARS, (11 ),dans son impressionnante thèse inaugu-
rale, en 1894 à Lyon, a fort bien cerné le sujet. 1/ a pratiquement été le premier
à réunir une iconographie complète sur les dégénérescences malignes des anciens
foyers ostéomyélitiques.
Dans son travail, il cite CORNIL (7)
et RANVIER (journal de l'Anatomie et
le Physiologie - 1866) ; ces deux auteurs avaient produit la première observation
française circonstanciée: «Ils ont pu suivre, sur un malade entré à l'Hôpital de
la Pitié pour une fracture de 1'humérus, une dégénérescence cancroiaale s'effectuer
sur un trajet fistuleux datant de longues années». DEVARS rapporte les propres
prpos de CORNIL et RANVIER et dit: «Nous n'avons trouvé nulle part un fait
comparable à celui-ci où le cancroiae se fut développé dans le trajet fistuleux et
aux dépens de bougeons charnus».
1
DEVARS fait sa thèse au moment où la polémique sur l'origine de l'épithé-
lioma primitif osseux des anciens foyers d'ostéomyélites chroniques était à son
J
summun.
1
En effet, pour CORNIL et RANVIER, le néoplasme malin prend naissance sur
les bourgeons charnus qui se sont développés sur les parois des fistules recouvertes
d'épithélium pavimenteux. Le squelette n'est envahi que tardivement.
Pour VIRCHOW
et WEBER, la tumeur prend naissance dans l'os ; mais pour
1
THI ERSCH, (42), il n'en était pas ainsi.
2

1870, c'est PUJO, (34), qui publie une observation dans sa thèse et affirme
l'origine osseuse primitive de la tumeur.
Pour NICOLADONI, (32) en 1881, (archives de Langenbecks), «l'origine de ces
tumeurs est à rapporter à un ou nlusieurs lambeaux de peau qui, décollés des
parties sous-jacentes, S8 seraient repliés par leur bord libre sur la surface bourgeo-
nnante des trajets fistuleux, s'y seraient réunis et se seraient ensuite séparés de la
peau avoisinante, soit à la suite d'une tentative opératoire, soit par un travail
d'ulcération» .
Comme au début du siècle, on est encore aujourd'hui «surpris» quand on
rencontre un épithélioma épidermoiae non métastatique au sein d'un foyer osseux
Et, à chaque fois, se pose le problème du diagnostic étiologique.
JOHNSON (15) et KEMPSON suilignent en 1965 toutes les difficultés de
diagnostic et de thérapeutique que l'on rencontre devant ce carcinome rare.
FLEMING, (36)etSEDLlI\\I, en reprenant ce qui avait été dit à travers la littéra-
ture mondiale jusqu'en 1963 ainsi que les cas propres à leur hôpital, ont noté
deux chose: d'une part, que la transformation carcinomateuse des anciens foyers
ostéomyélitiques est un phénomène peu fréquent, d'autre part, que, quoique
beaucoup d'auteurs aient écrit dessus, le fait que ce soit une complication fatale
relativement fréquente de l'affection, n'a pas été pris à sa juste valeur.
Plus près de nous encore, (1976), BURRI (6) et WILLENEGGER confirment
l'idée d'une sous-estimation du danger de la dégénérescence maligne des fistules
dans l'ostéomyélite chronique.
Ils confirment la chirurgie comme principal
moyen thérapeutique et précisent l'importance des trois premières années sur
le pronostic.
Pour DALMONTE (8)"
le pronostic des néoplasies sur ostéomyélite ne diffère
pas de celui des néoplasmes sur tissus normaux.
Les Chinois (46) , de l'école pékinoise se sont également penchés sur le pro-
blème.
L'HEU REUX (24) et BONEN FANT, en s'appuyant sur les travaux de SEDLI N
et FLEMING, ont pu réaliser un tour d'horizon assez complet sur ces carcinomes
épidermoiaes sur ostéomyélite chronique.
Aujourd'hui, il est admis que la présence d'un épithélioma épidermoiae primitif
de l'os ne s'explique que par la prolifération de cellules épithéliales préexistantes.
C'était déjà la pensée du Docteur AUCHË (3), (Thèse Bordeaux 1887), celle du
Docteur DEVARS (Lyon 1894) et, plus tard, celle du Professeur DEPAULIS (14),
(1961) .
3

L'observation d'un malade de la Fondation Bergonié (FB 784247), qui nous
a été confiée par le Docteur LETREUT et le Professeur SENEGAS, nous servira
de support dans notre contribution à l'étude de la dégénérescence épithél ioma-
teuse des anciens foyers d'ostéomyélite chronique aujourd'hui; la clinique, les
différents examens para-cliniques, les thérapeutiques que nous pouvons proposer
à ce néoplasme difficile à classer ainsi que son pronostic actuel.
4

OBSERVATION
Monsieur Paul E., est un maçon de 18 ans, qui en septembre 1951, se présente
à l'Hôpital de Dax, huit jours après un accident de travail. Il est fébrile (390 )
et présente un genou droit tumifié et chaud. La radiographie montre, alors,
une fracture du condyle interne.
Deux mois plus tard, l'aspect radiologique est celui d'une ostéomyélite de
l'extrémité inférieure du fémur droit ayant tendance à passer à la chronicité;
la diaphyse est pomelée, et il existe un aspect de périostite: petite réaction
périostée corticale ; ostéoporose discrète et irrégulière de l'os dans la région
métaphysaire.
L'immobilisation avait été maintenue alors qu'on instituait une antibiothé-
rapie faite de Streptomycine 30 g, (lg/j. X 30 j.) et Penicilline (500000 U/J.
X 30 J,).
Quatre mois plus tard, les radiographies montraient une grosse réaction
d'ostéite condensante de tout le tiers inférieur du fémur, des zones nécrotiques
dans la région centrale de l'os et, au-dessus des lésions, une importante décal-
cification.
Six ans après, les radiographies montraient un foyer d'ostéite en évolution
avec séquestres sur une vieille ostéomyélite chronique. A ce moment-là (1958),
il est pratiqué une trépanation avec évidement osseux, pansement à plat et une
antibiothérapie par voie générale faite à nouveau de Penicilline et de Strepto-
mycine à dose efficace.
Pendant quinze ans, il ne se passera rien de nouveau, mais le patient est
gêné pour marcher et doit utiliser des cannes anglaises. Il ressent quelques
douleurs «aux changements de temps».
Le 21 octobre 1978, Monsieur E., a 45 ans et, en raison de la mise en évidence
sur des clichés radiographiques d'un séquestre, il est opéré.
Le curetage osseux fait l'objet d'une analyse histologique qui conclut à un
processus carcinomateux épidermoiae, (Docteur GUI LLË). Le patient exploré
5

ne présente aucun autre foyer qui pourrait expliquer une éventuelle métastase.
Les lames relues è la Fondation Bergonié ayant fait état des mêmes conclusions
que le Docteur GUI LLt, le malades est convoqué è la Fondation pour une
exploration plus poussée.
Au cours de l'examen radiologique pratiqué è l'entrée, Monsieur E. présente
une très violente douleur au niveau du fémur droit et, sur les films, on voit une
mi nce
fistu le transversale signant une fractu re pathologique. Il est alors immé-
diatement adressé dans le service du Professeur SENEGAS, où il est plâtré.
Le problème de Monsieur E. est clair, mais difficile è résoudre. Le carcinome
épidermoide découvert sur les éléments du curetage osseux, peut être soit une
métastase d'un cancer épidermoide dont les origines peuvent être extrêmement
variées, soit une localisation en rapport avec l'ostéite fistulisée depuis vingt-cinq
ans è la peau.
Le traitement orthopédique tenté par le Professeur SENEGAS, durera un mois
mais ne montrera aucune amélioration ni dans la consolidation de la fracture, ni
dans le soulagement de la douleur.
L'observation clinique et radiologique pouvant orienter vers un carcinome
épidermoide primitif, il est décidé:
- de pratiquer une scintigraphie osseuse avec scintimétrie et un bilan squelet-
tique è la recherche d'autres images lytiques éventuelles,
• d'effectuer l'amputation qui s'impose; en effet, toute radiothérapie est
illusoire sur cette tumeur épidermoide largement surinfectée,
. de refaire le bilan è la Fondation Bergonié une fois le malade amputé.
Le bilan radiologique ne montre rien d'autre que cette image de fracture sur
un foyer d'ostéite chronique : gros cal fistuleux avec augmentation plus ou
moins importante du volume du cal; taches claires d'os raréfié; zones éburnées
plus denses.
La scintigraphie osseuse, réalisée dans le service du Professeus BLANQUET,
fait état d'une très nette hyperfixation du tiers inférieur du fémur droit qui va
en décroissant vers le haut jusqu'è la moitié de l'os, vers le bas jusqu'è "arti-
culation du genou où elle s'arrête. Au sein de cette plage, il existe des zones de
nécrose tumorale.
6
1

L'amputation est réalisée à l'union du tiers supérieur et du tiers moyen. Une
bonne partie de la pièce envoyée au laboratoire d'anatomie pathologie du Profes-
seur VITAL dit ceici : «Les coupes ont été réalisées au niveau moyen de la pièce
d'amputation. Elles intéressent un tissu musculaire ferme et une partie centrale
osseuse totalement nécrotique. Il existe au contact de la masse charnue muscu-
laire et de la «bouillie osseuse», un tissu tumoral blanchâtre au niveau duquel
ont été réalisées les coupes examinées. Celles-ci sont le siège d'une prolifération
tumorale maligne de type carcinomateux. La prolifération carcinomateuse est
faite de vastes nappes à différenciation épidermoide marquée et nombreux
nodules de kératinisation. Le chorion au niveau des coupes de section est de type
oedémateux, non infiltré d'éléments inflammatoires.
Conclusion: Carcinome épidermoide différencié et kératinisant (15 décembre
1978)).
1
L'amputation a été bien supportée sur le plan physique et moral ; le malade
!
qui était passé à la Tour de Gassies pour appareillage se sentait soulagé, marchait
i
avec des cannes anglaises et une prothèse plâtrée.
Une scintigraphie de contrôle en post-opératoire ne montre pas d'autre locali-
1
1
sation osseuse.
i
1
1
l
Ji
Quatre mois après l'amputation de cuisse, devant l'existence d'une adéno-
1
pathie inguinale droite fixée et douloureuse gênant la rééducation, la cyto-
1
1
ponction ganglionnaire est réalisée: «Métastase ganglionnaire de typer épider-
1
moide» .
L'équipe carcinologique propose:
1
1°. Une polychimiothérapie complète selon le protocole suivant: cycles de
4 jours suvis de 17 jours de repos et reprise au J 22 :
1
1
J1
VINCRISTII\\lE (VCR)
1 mg en IV directe (tubulure de
f!,
(Oncovin*)
perfusion).
J1 - J2 -J3
METHOTREXATE* (MTX)
lO mg/m2/j (15 mg en moyenne)
1
(ou Lédertrexate*)
f
1
et
!
(
BLEOMYCINE* (BLM)
lO mg/m2/j (15 mg en moyenne)
r1
J4
Cis PLATINUM (CDDP)
8ü mg/m2 en perfusion IV avec
hyperhydratation.
7
1

Fig. 1 : Foyer d'ostéomyélite
su r fémur droit - (de profil).
Fig.2 : Foyer d'ostéomyélite
sur fémur droit - (de face).

2°. Un curage ganglionnaire;
3°. Radiothérapie post~pératoire.
La chimiothérapie a permis une réduction de la masse tumorale inguinale de
50 %. La chirurgie, qui avait tenté un curage ganglionnaire pensant à une adéno-
pathie, a dû procéder à une désarticulation du moignon de cuisse, étant donné
que la masse tumorale inguinale s'est avérée être une métastase très infiltrante
des parties molles.
Monsieur E. a reçu au niveau de sa région
inguinocrurale droite 4 000 rads
en télécobalt et une surimpresiion de 1 000 rads en électrons.
Pendant la dernière hospitalisation de notre patient, il a présenté une ictère
rattachée à une hépatite virale avec TGO à 760 et TGP à 1040.
8

Fig.3 : Coupe de tissu carcinomateux - (faible grossissement).
Fig.4 : Coupe de tissu carcinomateux - (fort grossissement).

DISCUSSION ET COMMENTAIRE
1 - HISTOIRE DE LA MALADIE
Pour que la dégénérescence carcinomateuse se produise, il a fallu trois étapes:
1°. un lit d'ostéite;
2°. l'ostéite et sa longue suppuration;
3°. transformation mal Igne du foyer.
1. Le lit d'ostéite correspond à la cause favorisante:
Le patient a présenté, il y a environ vingt-cinq ans, un traumatisme qui a
entraîné une lésion osseuse qui peut être une fracture de n'importe quel type.
Il est possible aussi que la lésion parte des parties molles: folliculité, impétigo,
érosion cutanée, plaie infectée, panaris, furoncle ou arthrite septique. L'ostéo-
myélite atteint préférentiellement la métaphyse des os en croissance.
2. L'ostéite et sa longue suppuration:
L'ostéomyélite aigüe qui passera à la chronicité est due à une invasion de
l'organisme par le Staphylocoque doré qui se fixe électivement sur le squelette.
Les portes d'entrée sont surtout rhino-pharyngées et nasales.
Pour LAURENCE (23bis), (EMC APL 1 14015 A 10). quand l'ostéomyélite
«éclate», ce n'est pas l'effet d'une arrivée de germes microbiens. Ils étaient
développés là à l'état latent mais c'est leur développement sur une micro-
lésion préexistante et, peut-être favorisée par un traumatisme même léger, qui
va faire se déclencher les accidents aigus. Cette notion se retrouve fréquemment
en clinique et il n'est pas rare qu'une chute ou une entorse ait précédé l'éclosion
de la maladie.
9

Pour DUMOULIN (Thèse 1888), (EMC APL 1 14015 C la). cité par le
Professeur CASTAING de Tours, «l'inflammation de l'os n'a pas été précédée
par.le phénomène d'ostéomyélite aigüe».
3. Transformation maligne du foyer:
En réalité, il n'est pas facile de distinguer nosologiquement une ostéomyél ite
prolongée d'une ostéomyélite chronique d'emblée. Mais, c'est la suppuration
désespéremment prolongée, souvent fistulisée è la peau, qui sera, comme nous
le verrons plus tard, è l'origine de la cancérisation.
la

Il - LE PROBLEME DIAGNOSTIC
C'est la rareté du pnénomène où le carcinome épidermoiae se développe sur
une ostéomyélite chronique qui nous a décidé à présenter le cas de ce malade de
la Fondation Bergonié.
L'HEUREUX et BONENFANT, citant les travaux d'HARI\\JETT et ROBI-
CHON (1955), comptent une centaine d'observations, BROWN vingt-trois
nouveaux cas entre 1950 et 1966. Dans la littérature, on arrive à dénombrer
environ trois cents observations.
Tableau nO 1
Nombre de cas
Fréquence de trans-
Auteurs
d'ostéomyél ite
formation épithé-
chronique
liomateuse
BENEDICT
2400
0,5
%
SWART & HENDERSON
2396
0,208 %
Clinique MAYO
4000
0,23
%
Le diagnostic positif est, malheureusement, souvent posé trop tard car il est
très difficile de «capter» le moment de la transformation
épithéliomateuse.
1. La douleur:
C'est encore le signe fonctionnel le plus fréquemment rencontré chez ce
patient qu'on sait porteur d'une ostéomyélite chronique, habitué à souffrir et
profondément gêné dans sa vie quotidienne. Cette douleur prend une tournure
nouvelle; elle devient mordante, déchirante, insupportable; le malade réclame
l'amputation.
L'impotence fonctionnelle est désormais totale et le malade n'est à peu près
plus calmé que par des morphiniques.
11

2. La suppuration: dure depuis plus de vingt-cinq ans, mais, à ce moment-là,
le pus n'avait pas cet aspect mal lié et sanguinolent, ni cette odeur putride que le
malade et l'entourage qualifient d'insupportable.
3. La déformation du membre n'est pas tellement modifiée. En effet, l'ostéo-
myélite a passablement modifié l'allure du membre et la fracture spontanée qui
peut survenir, peut aussi bien s'être produite sur une ostéomyélite non cancérisée.
En somme, la clinique s'est sensiblement modifiée sur J'intensité de ces deux
principaux signes. On peut noter également un amaigrissement récent, une
asthénie plus importante et une légère recrudescence de la fièvre.
La radiologie standard du membre continue à montrer des lésions de l'otéo-
myélite chronique:
- une hyperostose diffuse au début régulière, estompée, à peine visible, le
plus souvent juxta-épiphysaire ;
- on peut aussi voir l'aspect d'une ombre très dense élargissant de chaque
côté les contours linéaires de l'os, qui entraîne un élargissement global de l'os
avec rétrecissement du canal médullaire;
• il existe d'autre part, au centre de l'os, des zones de destruction plus ou
moins importantes, plus ou moins bien limitées, parfois difficiles à voir à travers
la densification osseuse corticale.
Cette radiographie standard n'apporte pas d'élément nouveau. Cependant, le
Professeur DEPAULIS (BC 60872 - 61 - 62), a pu voir l'aspect suivant sur les
radiographies du patient dont il a publié l'observation: «.... Enorme réaction
périostique localisée à la partie inférieure du péroné; cette image osseuse est
floue, en «fumée», au point qu'on se demande s'il ne s'agit pas d'un ostéosar-
come».
L'artériographie du membre pourrait montrer l'association d'une hypervascu-
larisation entourant un «trou vasculaire».
Certains auteurs ont réalisé des fistulographies au Lipido/. Là encore, rien de
particulier sauf qu'on arrive à circonscrire le séquestre.
La scintigraphie apparaît comme étant un des examans les plus fiables dans
cette exploration. Elle est réalisée au pyrophosphate 99m Tc et concerne tout
le squelette. Elle peut montrer une hyperfixation de la radioactivité, témoin
12

d'une hyperactivité cellulaire faisant penser à un néoplasme, ou bien une hypofi-
xation en faveur d'une nécrose, ou encore la combinaison des deux qui est en
faveur d'une pousse néoplasique sur un foyer de nécrose.
Il faut noter ici l'absence de spécificité de cet examen: en effet, cette lésion
peut être bénigne ou maligne.
Les manifestations cliniques citées plus haut, mal aidées par une batterie
d'examens complémentaires tout à fait aspéficiques, nous condu isent naturelle-
ment vers l'ostéotomie exploratrice avec biopsie et examen anatomo-patholo-
gique : épithélioma spino-cellulaire mature et kératinisant.
Dès ce diagnostic posé et confirmé, il s'agit d'une part, d'être sûr que ce
carcinome n'est pas une métastase d'un néoplasme primitif d'une autre locali-
sation, d'autre part, de faire un bilan d'extension.
C'est ici qu'intervient la lymphographie. Elle est d'interprétation difficile.
Les adénopathies des territoires de drainage lymphatique, sont déjà inflamma-
toires à cause de l'ostéomyélite. " est très difficile, en fonction des clichés
obtenus, de faire la part de la réaction inflammatoire et de celle de l'extension
néoplasique.
La lymphographie est aussi décevante que les autres examens radiologiques.
Le germe découvert chez Monsieur E. était le Staphylocoque doré. C'est le
germe le plus fréquent (67 % pour WEISSENBERG), mais n'importe quel
germe à pyogène peut être mis en cause: le Streptocoque, 11 %, ou Staphylo-
coque et Streptocoque, 22 %. Le bacille de Koch est rarement mis en cause.
L'ostéite de notre patient a suppuré de 1951 à 1978, avec des fistulisations
intératives à la peau.
JOHNSON et KEMPSON, étudiant dix cas, ont montré une durée de suppu-
ration allant de dix à cinquante ans, ce qui place notre patient dans la moyenne
des durées de suppuration.
DEVARS rapporte le cas d'un jeune malade du service de son maître, le
Professeur PONCET, chez qui la transformation épithéliomateuse avait pris une
forme aigüe. «La lésion ostéolyélitique remontait à six mois et, après une
tranchée osseuse pratiquée pour l'ablation d'un gros séquestre, les bourgeons
profonds devinrent, quelques semaines après, cancroiaaux. Le jeune malade fut
emporté par cette néoplasie maligne qui s'étendit bientôt à tout le fémur».
13

Pour ce qui est de la localisation, il semble bien que le mal ait une localisation
préférentielle aux membres inférieurs. Cette préférence coïncide avec celle de la
maladie ostéomyélitique ainsi que la zone du corps humain la plus exposée aux
traumatismes. Monsieu E., a présenté une dégénérescence maligne d'un foyer
d'ostéomyélite du fémur. La plupart des auteurs mettent le fémur en deuxième
position des os atteints derrière le tibia. Nous reproduÎsons ici les statistiques de
l'HEU REUX et BONENFANT du Québec, très voisines de celles de SEDLI Net
FLEMING et de celles de DALMONTE.
LOCALISATION DES LESIONS DANS LA LITTERATURE ET DANS LES
SERIES ACTUELLES. Tableau nO 2
Local isation
Nombre de cas
Tibia
55
Fémur
21
Calcénéum
7
Extrémités supérieures
4
Pelvis
3
Pied
2
Extrémités inférieu res (non spécifiées)
2
Sacrum
2
Péroné
2
Epaule
1
Crâne
1
Sternum
1
Non indiqués
1
102
Parmi les signes de présomption diagnostique correspondant à peu près au
moment de la transformation maligne, la plupart des auteurs depuis DEVARS,
sont d'accord pour citer la douleur et l'écoulement putride et sanguinolent d'un
vieux foyer d'ostéomyélite.
Ce stade ne devrait être jamais atteint dans une ostéomyélite parcequ'il signi-
fierait à la fois un pronostic redoutable et une thérapeutique radicale.
14

1°. La confirmation
diagnostique est toujours histologique après un acte
chirurgical très souvent mineur puisqu'il s'agit d'un curetage osseux pour évacuer
un séquestre, suivi d'un drainage. Epithélioma spino-cellulaire mature et kératini-
sant avec globes cornés, c'est le diagnostic histologique que l'on peut trouver
compliquant les ostéomyélites chroniques (planche nO 3 et 4).
Mais SEDLIN et FLEMING font aussi état de transformation adénocarcino-
mateuse, de transformation carcinomateuse baso-cellulaire, de plasmocytome et
même une transformation sarcomateuse. Mais il ex iste des possi bi 1ités de coex is-
tence ostéosarcome-épithélioma épidermoiae du même os.
;(J. La thérapeutique envisagée chez notre patient était l'amputation qui visait
un double but: soulager la douleur et guérir le malade de son néoplasme.Comme
le soulignent SEDLIN et FLEMING qui ont fait une étude exhaustive de cette
pathologie, certains auteurs disent que le carcinome épidermoiae compliquant
l'ostéomyélite chronique est relativement bénin et que l'amputation est curative;
d'autres sont moins optimistes. Sur les cent-deux cas qui ont servi de base à leur
étude (ceux de SEDLI N et FLEMING et ceux cités dans la littérature (tableau
nO
3), vingt-deux ont présenté des métastases. Trois seulement des patients
ayant présenté des métastases ont survécu. Cette statistique éloquente semble
inciter à faire des thérapeutiques complémentaires.
P. En effet, notre patient a présenté une métastase inguinale droite seule-
ment deux mois après son amputation de cuisse au tiers supérieur.
III . LES POSSIBI LITES THERAPEUTIQUES
1. Les armes :
Au début du siècle, la chirurgie était tout ce qui existait comme thérapeutique.
De nos jours, à cette redoutable affection, nous pouvons opposer, en plus, une
radiothérapie et une chimiothérapie efficace comme nous le verrons plus tard.
2. La chirurgie:
Elle permet le diagnostic anatomo-pathologique par ostéotomie exploratrice
avec biopsie.
15

Tableau nO 3
i~ombre total de
Total de
Pou rcentage
Année
Auteurs
cas d'osmyélite
cancérisation
BENEDICT
2400
12
0,50
1931
HOBART et MI LLER
400
6
1,50
1939
MAC ANALLY et DOCKERTY
4000
9
0,23
1949
LOVELL et Associés
500
8
1,60
1957
Ol
Série de SEDLIN et FLEMING
1 744
10
0,57
1962
TOTAL
9044
45
0,50
~'~"""-"'~-~"I"'--~~~~~'l"!~~~*"~_,,,
,
~_

Elle suffit souvent à la guérison de l'affection, c'est du moins ce qu'en pensent
bon nombre d'auteurs.
Le Professeur DEPAU LIS a publié une observation dans laquelle il y a eu un
cas de guérison après simple exérèse sans curage gangl ionnaire. Il s'agit d'un de
ces cas heureux pris pratiquement au début de la transformation mal igne avant
que celle-ci n'ait envahi l'os sous-jacent et avant la constitution de métastases.
La chirurgie peut être conservatrice dans les lésions très localisées: il s'agit de
faire une mise à plat en passant au large de la lésion.
La chirurgie peut être une thérapeutique radicale: amputation ou désarticu-
lation avec ou sans curage ganglionnaire. Cette dernière méthode, quoique psy-
chologiquement traumatisante, apparaît plus carcinologique.
Actuellement, à la Fondation Bergonié, elle est de toute façon complétée
oulet préparée par la radiothérapie et la chimiothérapie, étant donné le carac-
tère infiltrant et hautement métastasiant de la tumeur.
3. La chimiothérapie:
Jusqu'à ces dernières années, elle s'est heurtée à des résistances complètes
dont les raisons tiennent à plusieurs mécanismes:
- la mauvaise irrigation du foyer de dégénérescence, malgré une bonne vascula-
risation habituelle de l'os: il ne faut pas oublier que le néoplasme «pousse» sur
un foyer de nécrose; c'est ce qui a amené les Chinois de l'école pékinoise à réa-
liser la perfusion sélective d'un foyer de dégénérescence maligne d'ostéomyélite
chronique. La participation de la circulation extra-corporelle venant ici accélerer
l'élimintation de l'antimitotique;
- la résistance personnelle des tumeurs malignes cutanées aux antimitotiques
courants, est une triste constatation que chacun sait depuis longtemps déjà.
Notre patient a bénéficié d'une polychimiothérapie complexe avec des pro-
duits récents tel que le Cis Platinum. Le protocole utilisé a été mis au point à la
Fondation Bergon ié.
Elle a permis une réduction de la masse inguinale métastatique de 50 %. Son
efficacité a été confirmée lors de la désarticulation qui a trouvé une fonte
tumorale.
17

La surveillance hématologique est de rigueur comme dans toute chimiothérapie,
étant donné l'agressivité des produits utilisés. Nous vous produisons, ci-dessous,
le tableau de surveillance utilisé è la Fondation Bergonié pour le protocole théra-
peutique sus-cité:
SURVEI LLANCE (avant chaque cycle) : en % de la dose calculée. Tableau nO 4
~ Granulocytes Plaquettes DTR-MTX CDDP VCR BLM
GB
G/l
G/l
>4
> 2,6
> 100
100 %
100 %
100% 100%
>3
>2
>
80
75%
100 %
100% 100 %
>2
> 1,3
>
50
50%
75%
100 % 100%
1
~2
~ 1,3
~
50
0%
0%
50% 100%
1
1
1
4. La radiothérapie:
i
1
Elle est beaucoup plus utilisée que la chimiothérapie et toujours en complé-
1
ment thérapeutique quand on fait appel è elle. En effet, il s'agit de neutral iser les
1
1
probables métastases des premiers relais ganglionnaires, après une chirurgie plus
!f
ou moins radicale.
f
Notre patient a bénéficié d'une radiothérapie inguinocrurale droite de 4 000
1
rads en télécobalt et une surimpression de 1 000 rads électrons.
!1
1
1
,
5. Conclusion:
!
Tous les auteurs sont d'accord pour reconnaiître à la chirurgie la priorité aux
deux autres moyens thérapeutiques. Mais les autres moyens peuvent aider à
1
améliorer un pronostic encore redoutable. Notre expérience dans l'utilisation des
[
moyens thérapeutiques sur cette affection rare est insuffisante pour pouvoir
i
donner des éléments de comparaison.
!
18

IV - PROBLEMES EVOLUTI fS
Pour ce qui est de l'évolution après combinaison des trois moyens thérapeuti-
ques, nous n'avons pas assez de recul. L'état de santé de Monsieu E. était satis-
faisant à sa sortie de la Fondation Bergonié.
SEDLIN et FLEMING ont dréssé le tableau suivant après l'étude de douze cas
de carcinome épidermoiae. Ce tableau a l'avantage de réunir pratiquement tous les
éléments concernant l'affection.
Dans ce tableau un seul patient a été irradié, il a présenté une extension osseuse
après J'intervention; il est décédé rapidement.
Parmi les huit malades amputés, trois ont présenté des métastases avec décès
rapide; et cinq ont guéri. Dans le cas nO 8, la lésion se situe au niveau du coude,
l'amputation est réalisée; mais quelques mois plus tard, il est apparu des adéno-
pathies cervicales, axilaires et mammaires externes. Le malade est décédé alors
qu'il était en cours de chimiothérapie et radiothérapie. Il semble que dans ce cas,
c'est la généralisation qui a emporté le malade.
Les métastases sont donc fréquentes dans les carcinomes épidermoiaes déve-
loppés sur les foyers d'ostéomyélite chronique. La chimiothérapie et la radio-
thérapie doivent être mises en route à titre préventif.
Ces même auteurs pensent que si les métastases ne sont pas apparues dans les
trois ans, on peut espérer un bon pronostic.
19

Tableau nO 5
NO Sexe et Age
Durée de
Localisation Circonstances Durée des
Traitement
Résultat
de
Année
l'ostéomyélite
de découvertes
derniers
cas
Année
de
~ymptôme
l'ostéomyélite
Mois
1
F,57
10
Pouce
Panaris
22
IAmputation
Mort de cause sans rapport 12 mOIs
après opération.
2
M,59
62
Calcanéum
Septicémie
2
IAmputation
Mort de cause sans rapport 5 mois
et demi après opération.
3
M,57
41
Calcanéum
Traumatisme
6
lt>.mputation
Métastases régionale dans les 20 mois;
hémipelvectomle
décès
rapide.
4
M,55
51
Tibia
Septicémie
12
IAmputation
Bien, san après opération.
5
M,51
41
Tibia
1ndéterminé
9
Irradiation
Métastase osseuse régionale, déces
N
o
rapide.
5
M,45
37
Tibia
Septicémie
6
[Amputation
Bien, 3 ans et demi après opération.
7
M,37
27
Tibia
Septécémie
0-11
Amputation
Métastase régionale dans les 15 Illois,
décès rapide
8
M,58
45
Coude
Traumatisme
24
lt>.mputation
Métastase généralisée dans les 6 mOIS,
décès rapide.
9
M,55
35
Tibia
\\
Traumatisme
18
Amputation
Bien 8 ans après opération.
10
M,54
41
Fémur
Traumatisme
5
Amputation
Bien 2 ans et demi après opération.
)
11
M,59
53
Tibia
Septicémie
48+
Amputation
Mor ( de cause SJns rapport. 18 mOIs
.' ,'i
après opérati\\jn.
<"
12
M,59
"
20
Tibia
1ndéterminé
6
Amputation
Bien 7 ans aplès opélatlon.

CONCLUSION
Depuis la fin du siècle, la transformation carcinomateuse de vieux foyers
d'ostéomyélite chronique est une énigme.
En effet, comment un carcinome neuro-ectodermique peut-il se développer en
première intention sur du tissu mésenchymateux ? Comment fallait-il classer cet
épithélioma spino-cellulaire développé au sein du tissu osseux, primitif ou secon-
daire ? Comment devait-on le traiter: comme une tumeur osseuse ou comme une
1
tumeur cutanée?
Un siècle après DEVARS, AUCHË, AWKI NS, etc., nous sommes encore réduits
aux hypothèses; cancérisation du trajet fistuleux, greffes de cellules épidermiques
sur bourgeons charnus et épithéliomisation secondaire.
1
!
En réalité, le problème diagnostic n'a son importance qu'à cause des fréquentes
1
métastases, des néoplasmes de la peau et des bronches au niveau des os. Autre-
t
ment, nous nous rangeons aux côtés de nos illustres anciens et maîtres pour consi-
1
dérer cet épithélioma développé sur ostéomyélite chronique, comme ne dérivant
i
pas de l'os mais d'un épithélioma pavimenteux pluristratifié plus ou mois kérati-
r
nisé.
t
Si l'on tient compte du fait qu'il n'existe pas de tumeur mère ailleurs que dans
f
f'
le foyer d'ostémyélite, nous somme en présence d'un carcinome primitif. Mais,
1
si nous considérons que ce carcinome se trouve dans un tissu d'origine mésen-
chymateux, comme le montre la réaction inflammatoire autour du foyer carcino-
1
mateux
à type de corps étranger à grandes cellules, alors c'est un épithélioma
secondaire. En effet, il a fallu, dans un premier temps, la présence de cellules
épithéliales cutanées dans le foyer d'ostéomyélite, soit par trajet de fistulisation,
1
soit par greffe de lambeaux cutanés, etc ... Ce n'est que secondairement que la
i
transformation mal igne se produ it.
1
Sur le plan thérapeutique, nous restons également sur les mêmes bases que nos
~
t
aînés et, actuellement, avec les écoles italiennes, canadiennes et américaines, nous
~.
pensons que la prévention est capitale dans cette pathologie. Traiter correctement
i
1
;
21

les fractures et les foyers d'ostéite et, aux moindres signes de cancérisation, explo-
rer à fond et traiter chirurgicalement de façon énergique: amputation ou désarti-
culation, étant donné le caractère infiltrant de la tumeur.
Maintenant, l'observation du Docteur LETREUT nous montre l'efficacité de
la chimiothérapie sur la métastase inguino-crurale qui est réduite de 50 % après
trois cycles de chimiothérapie.
Mais une réduction d'épaisseur d'une tumeur de 50 %, traduite en nombre de
cellules, ne correspond qu'à une descente en nombre de cellules de 2 Log (ex: si
une tumeur de 1 kg fait 1011 cellules, une diminution de 50 % nous fait passer à
0,5 kg, mais à 109 cellules), ce qui n'est pas terrible. Cette thérapeutique sera
donc un adjuvant important tout de même pour la stérilisation des métastases
éventuelles.
La radiothérapie sera utilisée pour stériliser les éventuelles métastases occultes:
la rareté de la tumeur ne nous donne pas assez de recul pour juger de l'efficacité
de cette thérapeutique en première intention.
La radiothérapie ne saurait être utilisée non plus en première intention pour
les raisons suivantes:
- il s'agit d'un foyer infecté;
• la faible sensibilité radiothérapeutique des tumeurs osseuses: en effet, mis
à part le sarcome giganto-cellulaire d'EWING, les Iymphones
de BURKITT et
ceux de PARKER et JACKSON (S = 80 %), les autres tumeurs osseuses sont
autour de 25 % de radiosensibilité.
La radiothérapie complétera donc elle aussi une amputation ou une désarticu-
lation avec curage ganglionnaire.
Nous n'avons pas assez de recul pour juger du pronostic. Monsieur E. est rentré
chez lui dans un état de santé satisfaisant et avec un bon moral. Cependant, si
nous reconsidérons le tableau que nous ont produ it SE D LI N et F LEM 1NG. nous
pouvons constater :
1°. que tous les malades ont été amputés;
:fJ. quatre ont fait des métastases avec décès rapide après l'amputation.
Ce qui permet d'affirmer la nécessité d'un complment thérapeutique, dont le
but est de stéréliser les éventuelles métastases après l'acte chirurgical.
22

Nous pensons ainsi réduire la poussée métastatique et améliorer un pronostic
difficile.
23

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therapy and surgery report of a cas. Chin. Med. J. Janv. 1976, 2, nO l, 42-46.
27

SERMENT
En présence des Maîtres de cette Ecole, de mes condisciples,
je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l'honneur et de la
probité dans l'exercice de la Médecine.
Je donnerai mes soins à l'indigent et n'exigerai jamais un
salaire au-dessus de mon travail. Admis dans l'intérieur des mai-
sons mes yeux ne verront pas ce qui s'y passe, ma langue taira
les secrets qui me seront confiés, et mon état ne servira pas
à corrompre les moeurs ni à favoriser le crime.
Reconnaissant envers mes Maîtres, je tiendrai leurs enfants
et ceux de mes confrères pour des frères, et s'ils devaient ap-
prendre la Médecine ou recourir à mes soins, je les instruirais
et les soignerais sans salaire ni engagement.
Si je remplis ce serment sans l'enfreindre, qu'il me soit don-
né de jouir heureusement de la vie et de ma profession, honoré
à jamais parmi les hommes. Si je le viole et que je me parjure,
puissè-je avoir un sort contraire.