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LE SECTEUR INFORMEL DE PRODUCTION DE BIENS ET DE
DE SERVICES
MODERNES. UN EXEMPLE DE L'ARTICULATION
ENTRE LES STRUCTURES SOCIO-ECONOMIQUES TRADITIONELLES
ET LE MODE DE PROUCTION CAPITALISTE
THESE POUR LE NOUVEAU DOCTORAT
SOUTENU PAR:
Mr NlANG Abdoulaye
DATE:
MARS 1988
DIRECTEUR DE THESE
M.P.P. REY
DIRECTEUR DU DEPARTEMENT D'ANTROPOLOGIE
PARIS VIn


SIGNIFICATION DES ABREVIATION UTILISEES
BNDS : Banque National de Développement du Sénégal
PME
Petites et Moyennes Entreprise
SIM
Secteur Informel Moderne
SIP
Secteur Informel Paracapita1iste
SONEPI : Société National d'encadrement de Promotion Industriels
SOSEPRA: Société Sénégalaise pour la Promotion de l'Artisanat
SONAGA : Société Nationale d'Assistance et de Garantie
)

AVANT-PROPOS
Quand nous menions cette enquête dont nous vous livrons
ici les résultats ainsi que les réflexions théoriques faites
à leur propos ainsi qu'au sujet du vécu de notre expérience de
terrain, nous avions fait le choix méthodologique durant tout
le temps que durait l'enquête et l'exploitation de ses résultats
de nous abstenir de lire un quelconque ouvrage traitant de la
question du secteur informel qu; était notre objet d'étude et
cela dans le but de ne peut être influencé ni dans nos hypothè-
ses ni dans nos conclusions. Pour nous hypothèses et conclusions
devraient surgir de la réalité du terrain telle que nous la
percevions. Au contact de chaque partielle de la réalité, nous
échaffaudions des hypothèses explicatives ainsi que des conclusions
partielles. D'une partielle de la réalité à une autre, nos
hypothèses pouvaient être contradictoires de même que nos con-
clusions, mais les contradictions pour nous devaient pouvoir non
seulement s'expliquer mais aussi trouver leur médiation quelque
part dans un ou plusieurs éléments de la réalité qui restaient
à découvri r.
~J cours de cette enquête, nous avons rencontré beaucoup
de difficultés liées à la fois à l'insuffisance de nos moyens
et aux résistances que nous opposaient des fois ceux là que notre
enquête concernait
les chefs d'entreprise du secteur informel
Mais ces difficultés loin de nous décourager excitaient au contraire
notre volonté de réussir et notre envie de connaissance. Conna~tre
chaque chef d'entreprise et chercher toujours à savoir pourquoi
il oppose une résistance à notre rencontre ou à nos questions,
s' il en est ainsi et comment vaincre cette résistance
était une
préoccupation constante pour nous.
D'un individu à un autre,
·~otre comportement pouvait être très différent à cause des dif-
férences de personnalité, des préjugés et des attentes qu'il
pouvait avoir à notre égard

2
Malgré toute la volonté dont nous étions animés au cours
de cette enquête que nous avons mené seul le découragement aurait
r"1 _nous habiter et nous faire abandonner le travail que nous entrepe-
nions
SI
face aux difficultés
que nous rencontrions, nous n'avions
pas le soutien moral de notre épouse, de P.P. Rey notre Direc-
teur de thèse à qui par correspondance nous rendions compte
régulièrement de nos difficultés sur le terrain, de P. Belhomme,
Expert au BIT (Bureau International du Travail) à Dakar et
chef du projet dénommé
Sen/82/007
appui
Technique et Tech-
nologique aux chambres de Métiers" qui s'intéress~lt à notre
enquête et ava;t une grande expérience du milieu des artisans
qu'il aimait partager avec nous.
Nous dédions cette thèse à
- notre père qui de son vivant nous a beaucoup soutenu
dans nos études quand nous étions encore un lycéen.
Nous lui en serons reconnaissant en nous efforçant
quand ce sera notre tour de soutenir nos enfants
dans leurs études de ne jamais nous lasser. Merci papa
notre mère dont l'affection qu'elle nous portait et continue
toujours à nous porter constitue pour nous un trésor
irremplaçable.
- notre épouse bien aimée et nos enfants adorés sont les moments
de joie et de bonheur qu'ils
~ous procurent sur la vertu de nous
rendre les peines et la vie bien supportables !
- M. et Mme E. De Saint-Lauret et Mme Chevalier qui nous ont aidé
et soutenu avec sincérité et désintéressement durant tout le
temps qu'ont duré nos études en France. Nous leur disons merci

3
- P.P. Belhomme : expert au B.I.T. à Dakar qui s'est toujours
montré disponible à notre égard et a toujours consenti à
partager avec nous ses conna1ssances et expériences sur le
milieu des artisans.
- P.P. Rey: Notre directeur de thèse dont les grandes qualités
humaines, la profonde connaissance qu'il a des problèmes
africains et l'intelligence à la fois souple et pénétrante
ont été pour nous une source précieuse d'inspiration.

4
lERE PAI{TIE
IN~RODUCTION
SUR LA GENESE ET LE
MODE DE FONCTION DU SECTEUR
INFORMEL EN AFRIQUE

5
CHAPITRE l
LES CONDITIONS SOC la-ECONOMIQUES ET
CULTURELLES DE LA GENESE DU SECTEUR
INFORMEL

6
A - RENCONTRE DE SOCIO-CULTURES DIFFÉRENTES ET
==========================================
DIFFÉRENTES FORMES D'ARTICULATION
=================================
L'une des principales caractéristiques des pays
d'Afrique en voie de développement consiste le fait que ceux-
ci sont un terrain où se confrontent deux socio-cultures dif-
férentes
:
la socio-cu1ture traditionnelle et la socio-cu1ture
moderne heurtée
de l'ère coloniale.
Chacune de ces deux socio-cultures a sa logique et
sa cohérence propre et cherche à travers la confrontation à
se soumettre l'autre c'est-à-dire à l'utiliser comme moyen
dans la poursuite de ses fins propres.
Il en fut ainsi durant
du
l'ère coloniale du point de vue rapport entre l'administration
coloniale préoccupée de mieux asseoir son autorité afin de mieux
mettre en oeuvre les mécanismes juridiques, institutionnels,
organisationnels devant lui permettre d'opérer des ponctions
sur les ressources des pays conquis et les chefferies locales
que préoccupées de conserver leurprestiee
et leur autorité
sur leurs anciens sujets s'associèrent à toutes les entrepri-
ses d'instauration du nouvel ordre colonial qu'elles détournè-
rent souvent de leur but pour des fins personnelles.
J. SURET canal dans "l'Afrique Noire, l'ère colonia-
le de 1900 à 1945'ia beaucoup traité de ce problème.
Un autre
auteur sociologue et africaniste P.P.
REY s'est également
beaucoup penché sur ce problème du rapport entre l'autorité
coloniale et les chefs locaux traditionnels dans son livre
... / ...
(1)
CANAL J.S. L'Afrique Noire, l'ère coloniale
de 1900 à
1945 Ed.
Soc~ale [964

7
Alliance de classe''2. où i l démontre que le colonialisme a non
seulement instauré durant toute son ère un mode de production
nouveau (le mode de production coloniale) mais que surtout i l
a été la rencontre de deux classes à savoir les chefs tradi-
tionnels d'une part et la classe bourgeoise occidentale
d'autre
part que représentaient les administrateurs coloniaux et les
représentants des grandes maisons de commerce :
ces deux classes
avaient des intérêts convergents et complémentaires par le fait
de la domination qu'elles exerçaient sur les peuples africains
et l'extorsion organisé du surtravail de ces peuples dont elles
étaient les seuls bénéficiaires.
D'autres auteurs comme Claude MEILLASSOUS et G. BALLAN-
DIER tous deux anthropologues et africanistes, ont également
analysé les problèmes que posent la rencontre des deux socio-
cultures ainsi que leur soumission réciproque.
L'un, Claude
MEILLASSOUS dans "Femmes, Greniers et Capitaux"t démontre le
mécanisme du transfert du surtravail réalisé dans le monde
paysan suivant des méthodes quasi traditionnelles et grâce à
l'emploi uniquement de force de travail entièrement reproduite
à partir des ressoruces locales traditionnelle<vers
le sec-
teur moderne,
industriel pour servir de ressources à la réali-
sation de nouveaux modèles culturels contradictoires aux cou-
tumes du monde paysan qui paradoxalement vont se renforcer
grâce à l'emploi par les paysans de ressources produites par
leur travail à des fins de reproduction de leur système socio-
cultureL
... / ...
(2)
RE Y P. P.
A11 i a n c e
de
cl as se)
~'asparo 1976
(n ~EILLASSOUX
Fe~mes, ~reniers, canit3ux
Masparo 1975

8
G.
BALLANDIER lui axera
l'analyse dans une direc-
tion consistant à repérer des situations mutationnelles c'est-
à-dire des situations à l'état hybriques où les deux socio-cul-
tures s'articulent pour engendrer une situation nouvelle, une
réponse particuli~re face aux probl~mes nouveaux : dans "Sociolo-
gie des mutations"~il donne plusieurs exemples de cette situation
dont celuiqui montre
comment les problèmes posés par le chomage
des jeunes sont résolus grâce aux maintiens des normes de
solidarité.
De ces différentes études dont nous n'avons voulu
mentionne ici que les idées directrices pour des raisons bien
compréhensibles
tenant à l'impossibilité de rendre compte de tou-
tes leurs
richesses en quelques mots,
quelques conclusions
se dégagent :
-
La rencontre des deux socio-cultures traditionnelle
et moderne
se traduit dans une confrontation où chacun
à travers sa dynamique propre tend à se soumettre l'autre.
-
Cette confrontation constitue une situation de ren-
forcement et de confortation pour chaque socio-culture ou tout
au moins pour quelques uns de leurs éléments constitutifs
respectifs.
-
Cette rencontre peut générer une situation d'ar-
ticulation entre deux ou plusieurs éléments constitutifs de
ces deux socio-cultures donnant lieu à l'émergence de nouvel-
les solutions face aux problèmes engendrés par cette situation .
.. , / ...
(4) BALLANDIER G.
Sociologie des ~utations
Anthropos
1970.

9
B - LES DIFFËRENTS ESPACES
DE RENCONTRE ET DE
=========================================
CONFRONTATION ENTRE SOCIO-CULTURES DIFFËRENTES
==============================================
Pendant l'ère coloniale la rencontre entre les deux
socio-cultures était circonscrite dans des domaines qui pour
l'essentiel étaient d'abord:
a) l'administration et le secteur public qui pour
faire face à leur charge de contrôle, d'éducation, de production
de biens et de servicesàeux assignés se voyaient obliger de
recruter parmi la population autochtone les employés subalternes
dont ils avaient besoin pour assurer à la satisfaction leur
mission. Cette situation devait se traduire au niveau de ces
institutions par la pénétration des normes de la socio-culture
traditionnelle sous la forme de règles de conduites informelles
devant régir à la fois les
rapports entre les autochtones subal-
ternes d'une part face à l'autorité et d'autre part face à la
population locale. Face aux règles formelles c'est la conspira-
tion des normes de la socio-culture traditionnelle et des règles
informelles, l'autorité dans ces institutions étant d'abord
perçue par les autochtones qui y travaillent comme un système
de domination et le travail comme une simple occupation. Face
à la population locale à qui ces employés autochtones doivent
rendre des services sans discrimination, ni impartialité et
sans autre considération que l'obligation de s'acquitter de
leurs tâches,
tout un système de stratégie est dressé visant
à la fois à la différenciation qualitative des services à ren-
dre en fonction des critères de parenté, d'appartenance ethni-
quee etc .. et à l'utilisation de la fonction comme moyen d'ac-
croître leu~· prestige ou leur pouvoir sur leur entourage .
..'/ ...

10
b) L'armée avec ses recrutés
indigènes formant le
corps des
travailleurs à propos desquelles des légendes circu-
lent quant à leur indiscipline et aussi leur témérité et leur
courage au cours des deux dernières guerres mondiales. Ces con-
duites qui ne sont nullement en contradiction avec certains
faits décrits par des auteurs comme V. MONTEIL dans "Esquisse
Sénégalaise" qui s'est penché sur les comportements des guer-
riers africains vers la fin du 1ge siècle au cours des luttes
de résistance qu'ils menaient contre la pénétration coloniale
traduisent aussi des modèles de comportements de la socio-cul-
ture traditionnelle.
c) Les rapports entre l'administration coloniale et
les chefs locaux des régions pacifiées et qui se présentaient
sous la forme d'une alliance de classe.
d) Le domaine économique et particulièrement l'agri-
culture où tout le capital traditionnel (savoir-faire,
ressour-
ces humaines et matérielles etc)
a été canalisé et orienté à
des fins de production de nouvelles ressources à partir desquel-
les devront s'édifier
les nouvelles structures correspondant
à la socio-culture occidentale.
Cette première confrontation des deux socio-cultures
se déroulait donc dans des espaces bien déterminés qui étaient
soit les institutions ou organisations nouvellement mises en
place,
soit dans les limites où s'inscrivaient les rapports
de ces dernières avec les autorités locales traditionnelles
et où le travail paysan, les coutumes restaient inchangés ou
voire même, dans certaines circonstances se renforçaient .
. ./ ...

11
La préoccupation première de l'administration coloniale
mis à part les travaux d'infrastructures routières et ferrovières
devant servir à drainer vers les points d'embarcation les res-
sources agricoles (ou minières) à destination de l'Europe où
elles devaient être transformées, et les tâches d'organisation
administratives inévitables pour asseoir son autorité, n'était
point de changer les coutumes, les rapports sociaux et les normes
qui les soustendent mais au contraire, de les utiliser autant
que faire se peut pour conforter son autorité si tant est qu'ils
ne constituent pas une gène à ses orientations. Aussi, la con-
fronctation se déroulait-elle en marge de l'espace délimité
par la famille.
Les rapports socio-intra-ethnique, l'organisation
du travail domestique et artisanal etc .. , bref de tout l'espace
qui n'était pas un centre d'intérêt immédiat pour l'autorité
coloniale pour des raisons d'ordre stratégique.
C - ApPARITION DE NOUVEAUX ACTEURS SOCIAUX AVEC
===========================================
DE NOUVEAUX STATUS ET DE NOUVELLES ASPIRATIONS
==============================================
Si l'administration coloniale n'a pas cherché à impo-
ser des changements immédiats et brutaux au niveau de l'espace
où les rapports sociaux traditionnels opposent le plus de résis-
tance au changement, soit parce que les normes qui les sousten-
dent fondent le sens de la vie des populations locales. soit
parce qu'ils revêtent encore un caractère fonctionnel ou cons-
tituent un processus résolutoire face à des problèmes ne rentant
... 1. ..

12
pas dans le champs défini de la compétence des autorités admi-
nistratives,
cependant la dynamique de ses orientations petit
à petit, au cours des décennies finiront par influencer les
esprits, forger de nouvelles mentalités et produire de nouveaux
acteurs sociaux dont les conduites s'inspireront davantage des
normes de la nouvelle socio-culture d'origine occidentale que
des normes traditionnelles. Ces nouveaux acteurs se recruteront
parmi les cadre subalternes indifènes
des différentes institu-
tions déjà mises en place: fonction publique, armée, secteur
commercial tenu par les grandes maisons de commerce etc . . .
D'aucuns s'investiront dans la politique,
ils consti-
tueront l'élite politique locale qui, dès à partir de la fin
du premier quart du 1ge siècle tentera du haut de la tribune
de l'assemblée nationale française où elle siège en
tant que
députés, d'infléchir la politique coloniale dans le sens d'une
intégration plus poussée des populations des colonies. Cette
demande d'une plus grande assimilation
devra
aboutir à une
série de lois à la fois administratives et juridiques dont les
plus importantes étaient l'instauration des "communes de plein
exercice" dont les habitants se voyaient octroyer le statut
de citoyonneté française et la "loi cadre" qui devait établir
l'égalité des droits et devoirs entre fonctionnaires français
et autochtones.
Cette élite, nouveau acteur social, avec de nouveaux
habitus s'érigera en modèle pour les populations locales et
parmi celles-ci les membres locaux de la catégorie des employés
de la fonction publique, des maisons de commerce etc qui dès
lors,
chercheront à qui mieux-mieux à imiter leur style de vie,
chacun à sa mesure.
. .. / ...

13
c'est par cette catégorie d'emplyés salariés, acquis plus ou
moins aux normes de la nouvelle socio-culture que
la première brèche dans l'espace socio-culturel traditionnel
jusque là préservé de toute infiltration de la part des normes
nouvelles. Ainsi aux éléments matériels de la socio-culture
traditionnelle se substitueront petit à petit de nouveaux élé-
ments répondant aux normes de la nouvelle socio-culture. Ce
phénomène de substitution concernera l'habitat,
l'habillement,
la nourriture, les moyens de locomotion devenus tous bientôt
signe de destination, symbole d'une nouvelle manière d'être
conférant prestige, autorité car perçus comme signes extérieurs
d'un mieux être fondé sur la réussite,
la richesse. Ce mode
de perception des nouveaux symboles de la nouvelle socio-culture
favorisera l'émergence d'un nouvel ordre dans l'échelle des
valeurs, d'une nouvelle catégorisation des pratiques qui à leur
tour seront au principe du développement jusque là encore mar-
ginal de recherche de participation dans les nouvelels institu-
tions ou organisations qui participent de la nouvelle socio-
culture. Aussi l'école lieu où a été formée et façonnée l'élite
politique locale devient-elle symboliquement moins repoussante
pour les autochtones qui se mirent à la fréquenter plus massi-
vement
savoir lire et parler le français garantissant un
emploi salarié, des acquisitions matérielles nouvelles et un
surcroit de prestique q
Cette recherche d'une plus grande intégration dans
la nouvelle socio-culture par les populations autochtone concer-
nera d'abord principalement les catégories sociales qui naguère
dans la socio-culture,
traditionnelle étaient classées au bas
(4) BOUCHE D
l'enseignement dans les territoires français
de l'Afrique Océidentale de
1917 à
1929
Thèse à Paris 1.

14
de l'échelle sociale et assignées à des rôles de subordination
ne conférant ni prestige, ni autorité sociale : les captifs
de case à qui l'autorité coloniale avait rendu leur liberté
en les rachetant à leurs propriétaires,
les gens de métiers
catégorisés dans les castes dites inférieures tels :
les for-
gerons,
les coordonniers, les troubadours etc .•.
et aussi tous
les étrangers que le mouvement des populations lié à l'exode
aux migrations pour la recherche d'une plus grande sécurité
avaient amené dans les centres urbains qui se constituaient
et où l'autorité coloniale avait déjà instauré son autorité
et garantissait les liebrtés individuelles. Ainsi les écoles
des fils de chefs
-institutées dès le début de l'ère coloniale
dans les localités qui deviendront par la suite les "commune
de plein exercice
et qui avaient pour vocation conformément
à la stratégie de l'autorité coloniale d'instruire uniquement
les fils des chefs locaux afin de les préparer à une meilleure
coopération, durent-elles ouvrir leurs portes aux autres caté-
gories sociales, inaugurant ainsi l'avènement d'une autre stra-
tégie sur le plan de l'éducation scolaire:
des écoles primaires
techniques et secodnaires se multiplièrent au cours des années
par la suite. Parmi celles-ci, les plus célèbres furent l'école
Faidherbe,
l'Ecole Blanchot, l'Ecole Van Wolanoven où passèrent
beaucoup d'hommes politiques et dirigeants africains de la géné-
ration de L. S. SENGHOR
et A. BOIGNY (ex président de la Répu-
blique du Sénégal et
président actuel de la République de Côte
d'Ivoire)
et de celles de leurs ainés dont le plus connu est
Blaise DIAGNE,
fondateur du premier parti politique africain
et premier député africain à l'Assemblée française en 1924.,
... / ...
(5)
NESLEY J
The EmerRence of 8lack nolitic~
in Senep,al 1900-1920

15
La nouvelle socio-culture en élargissant son domaine
d'influence a favorisé comme nous l'avons dit,
l'émergence de
nouveaux signes de distinction parmi lesquels nous avions cité
l'habitat,
l'habillement. Mais,
à ces signes nous ajouterons
ceux immatériels et non moins destinctifs, parce que procurant
aussi du prestige comme l'instruction et l'engagement politique.
Mais étant donné que l'instruction se rentabilise dans l'exer-
cice effectif d'un emploi, et que la politique procure de multi-
ples avantages matériels aussi, et que les gains que l'un et
l'autre permettent de recevoir finissent par se convertir dans
des objets matériels qui sont les signes de la nouvelle distinc-
tion,
nous voudrions apporter une attention particulière aux
conséquences économiques de ses nouveaux signes matériels.
D - ApPARITION DE NOUVEAUX BESOINS ET INCAPACITÉ
============================================
DU SECTEUR MODERNE DE LES SATISFAIRES
=====================================
Nous avions dit qu'une brèche s'était ouverte dans
le champ jusque là fermé de la socio-culture traditionnelle,
à tout apport extérieur, grâce à l'apparition de nouveaux ac-
teurs sociaux autochtones issus de ce champ et participant à
la nouvelle socio-culture et dont ils se sont appropriés petit
à petit les normes, les modèles de comprotement qui finiront
par engendré un nouveau mode de consommation, de nouveaux be-
soins, de nouvelle demandes jusque là inconnues. Ces nouveaux
besoins, ces nouvelles demandes devaient être satisfaits grâce
à la production au niveau locale de biens et de services par
des autochtones qui se sont appropriés de certaines techniques
de production issues de la socio-culture moderne.
. .. / ...

16
La mise en oeuvre de ces nouvelles techniques engendrera le
développement de petits métiers non déclarés non soumis à la
réglementation technique et sociale régissant de tels types
d'activités dans le secteur moderne. Ces petits métiers vont
constituer un nouveau secteur d'activité où se produiront des
biens et des services de même nature que ceux que produiront
les unités
de production du secteur moderne et destinés à
remplir la même fonction socaile que ces derniers. Cependant
alors que les biens et services du secteurs modernes seront
destinés à la consommation des catégories sociales les plus
aisées participant à la nouvelle socio-culture, ceux corres-
pondants au secteur des petits métiers iront satisfaire la demande
de consommation de nouveaux signes de participation à la nouvelle
socio-culture moderne du reste de la population inspirant plus
ou moins aux modèles de la nouvelle socio-culture. Ce secteur
des petits métiers, utilisant des techniques non traditionnels
et produisant des biens et services modernes pour le compte
de ceux qui aspirent aux modèles de la nouvelles socio-culture
sans disposer de moyens suffisant leur permettant d'accéder
aux biens et services produits par les unités de production
du secteur moderne. constitue la première forme ce Qui pl"1ô tard
sera le secteur informel moderne : i l était à distinguer du
secteur informel traditionnel constitué de petits métiers tra-
ditionnels, utilisant des techniques traditionnelles et produi-
sant pour la même catégorie de personnes ou pour d'autre caté-
gories constituées par des gens de métiers.
Cependant le secteur lui aussi (le secteur informel
traditionnel) subira par quelques uns de ses métiers installés
dans les villes l'influence de la nouvelle socio-culture qui
finira par imposer aux producteurs l'emploi d'outils et
... / ...

17
de fabrication industrielle ce qui permet de produire des biens
correspondant mieux au
gout
des citadins. Quand c'est le cas
comme pour la cordonnerie traditionnelle installée en ville
(Dakar) nous parlerons de secteur informel moderne même si par
ailleurs quelques méthodes de travail encore utilisées restent
traditionnelles dans les métiers concernés.
Ainsi le secteur informel moderne principalement ins-
tallé dans les villes va-t-il avec l'accroissement de ces der-
nières et leur densification progressive jouer un rôle de plus en
nlus grand à travers l'échange des biens et services au coût peu
élevé bon marché qu'il offre à la majorité des populations ur-
baines
participer à la diffusion au niveau de cette population
des éléments matériels qui procèdent de la nouvelle socio-cul-
ture. Ces nouveaux éléments vont imposer de nouveaux comportements
à leurs
utilisateurs
qui vont prendre de nouvelles
habitudes qui à leur tour vont engendrer de nouvelles attitudes
avec des valeurs proches de celles de la nouvelle socio-culture.
Le secteur informel, par les techniques modernes qu'il utilise,
les biens et services modernes qu'il
produit et dont l'usage
engendre progressivement chez les usagers de nouvelles dispo-
sitions qui petit à petit vont participer à la transformation
de leurs valeurs sociales, constitue un cadre important de socia-
lisation des couches sociales les moins favorisées par rapport
aux modèles et valeurs de la nouvelle socio-culture. Par ce
fait,
i l est un cadre d'apprentissage des activités du secteur
moderne et de formation personnelle permettant de se préparer
à affronter les exigences de la vie moderne.
. .. 1...

18
E - TRANSFERT DE NOUVELLES TECHNOLOGIES ET APPARI-
=============================================
TION DU SECTEUR INFORMEL MODERNE
================================
Nous avions dit que le secteur informel moderne de
production de biens et de services utilisait des techniques
provenant de la nouvelle socio-culture.
Il y a eu transfert
de techniques,
transmission de sàvoir faire du secteur moderne
en direction du secteur informel. Ce transfert technique et
cette transmission de savoir-faire dont l'application exige
de nouvelles méthodes de travail et fait appel à de nouveaux
procédés de travail se sont faits principalement à travers
trois canaux que sont l'armée où les recrues autochtones
étaient tenus d'apprendre un métier, les entreprises tenues
par les métropolitains et où travaillaient comme ouvriers ou
apprentis des autochtones et enfin des services attachés à la
fonction publique et assigné à des tâches de production de
biens ou de services spécialisés ou encore de réalisation
d'infrastructures comme les services des Travaux Publics. Les
autochtones qui y travaillaient s'arrangeaient toujours pour
y amener, qui un jeune frère, qui un cousin ou un neveu etc ...
pour lui apprendre le métier (cette pratique était très cou-
rante et tolérée par les responsables de ces différentes unités).
C'est à la suite de cette transmission qui devait donner lieu
à une maîtrise plus ou moins grande du métier choisi et exercé
par les autochtones dans ces institutions que va se constituer
à partir de quelques uns d'entre eux obligés de cesser leur
activité soit parce qu'ils sont licenciés ou ont démissionné
ou soit parce que tout simplement ils ont terminé leur service
militaire ou leur apprentissage et sont restés pendant longtemps
... / ...

19
sans trouver un emploi salarié dans le secteur moderne, que
vont se constituer dans les centres urbains les premiers grou-
pes d'artisans autochtones spécialisés dans des métiers jusque
là tenus seulement par les métropolitains. Mais i l faut dire
que cette transmission ne s'est pas opérée dujour au lendemain
et qu'il aura fallu attendre pour certains métiers plusieurs
années avant de les voir s'exercer comme activités dans le sec-
teur informel parce que tout simplement les biens ou services
qu'elles pouvaient permettre de produire ne pouvaient pas encore
être l'objet d'une demande chez les autochtones qui n'avaient
pas encore de besoins y correspondant (l'exemple le plus perti-
nent est les services de réparation de véhicules qui n'ont
commencé à proliférer qu'à partir des années 60 où de plus en
plus d'autochtones commençaient à avoir des voitures particuliers).
Comme nous l'avons vu, i l y eut d'un côté une évolution
des besoins et des goûts de autochtones qui adhèraient de plus
en plus aux modèles de la nouvelle socio-culture et de l'autre
une évolution des activités informelles pouvant satisfaire aux
demandes exprimées par ces mêmes autochtones en matière de con-
sommation de biens ou services modernes. Cette convergence entre
l'évolution des activités du secteur informel et l'évolution
de la demande des biens et services qu'elles sont en mesure
de produire sera à la source du développement d'un nouveau mar-
ché important de biens et services produits au niveau local
par des autochtones et destinés aux autochtones. Les producteurs
de ce secteur informel
s'eq~ipent • des ateliers et de petities
entreprises de production ou de services se créent en nombre
de plus en plus important ici et là, gérés entièrement par des
autochtones anaphalbètes ou d'un niveau d'étude très bas .
. . ./ ...

20
L'objet de notre étude sera la particularité du sys-
tème d'organisation dans ces unités de production du secteur
informel qui associent un savoir-faire et des moyens de travail
provenant de la nouvelle socio-culture et des acteurs sociaux
(ceux qui y travaillent) dont le moins qu'on puisse en dire
est qu'ils sont porteurs de normes socia-culturelles tradi-
tionnelles qu'ils vont transposer au niveau des unités de pro-
duction de leur secteur d'activités pour servir de principes
structurants au niveau des rapports sociaux qui s'y déroulent,
dans l'espace de production.

21
CHAPITRE II
LES
STRUCTURES
ORGANISATIONNELLES
TRADITIONNELLES
====================================================

22
A - LA
FAMILLE
==:::::::::::::::::.:::::::::
Nous avons laissé entendre que dans les unités de
production du secteur informel de production de biens et de
services les normes de la socio-culture traditionnelle cons-
tituaient un principe strictuant de l'espace organisationnel.
Nous allons maintenant procéder à une analyse des structures
de la socio-culture traditionnelle et particulièrement de celles
là qui dans le domaine de l'économie traditionnelle jouent un
rôle organisateur tant dans le domaine de la production que
dans celui des rapports sociaux. ·Ce sont ces structures là en
fait qui seront transposées du domaine
secteur
agricole dans
le domaine couvert par les activités du secteur informel moderne
dont nous avions dit que les principaux dirigeants promoteurs
et tous ceux qui y travaillent étaient pour la plupart des anal-
phabètes et qu'en raison de leur origine et milieu sociaux,
subissaient l'emprise de la socio-culture traditionnelle.
Nous aborderons cette question par une étude de l'or-
ganisation socio-économique traditionnelle. Nous nous inspirerons
des études faites dans ce domaine par les institutions de recher-
ches en sciences humaines comme ORTOM -
IFAN ou encore par des
chercheurs comme P. PELLISSIER dont l'ouvrage le plus connu
et qui aborde le mieux le problème est les "paysans du Sénégal". él)
Des différentes études entreprises sur la question,
i l s'est avéré que l'agriculture était avant tout pendant
l'époque coloniale une agriculture de subsistance et qu'elle
était l'activité économique de la grande majorité des popula-
tions africaines en général et sénégalaises en particulier .
. ../ ...
(1) PELLISSIER
P.
Les paysans du Sénép,al
Pré~ence africaine 1976

23
A cette activité venaient s'ajouter
toutes les autres acti-
vités complémentaires et en l'occurence les activités artisa-
nales :
la forge,
le tissage, le travail du bois etc . . .
A ces métiers étaient assignés des groupes de gens constitués
en castes positionnées au bas de l'échelle sociale. Ces arti-
sans échangeaient le produit de leur travail contre des produits
confectionnés par d'autres gens de métiers. L'échange était
essentiellement limitée à ces produits pendant longtemps dans
les campagnes entre les différentes catégories professionnelles.
Mais s ' i l en était ainsi on peut alors se poser la question
de savoir qu'elle pouvait être en ce moment l'autonomie de l'or-
ganisation de ces unités de product~on artisanales traditionnel-
les par rapport à celle de l'espace familiale,
du lignage. Cette
question renvoie à une autre concernant les frontières des espaces
définis par les activités productrices artisanales et la famille
et les activités agricoles.
L'une des caractéristiques principales de la famille
africaine consiste dans son extrême étendue. Il s'agit d'une
famille large englobant souvent des dizaines de personnes,
plusieurs ménages de frères agnatiques ou germains avec leurs
ascendants et descendants peuplant un espace localisable par
ses limites physiques, son organisation et le champ des relations
de parenté qu'il couvre et dont les personnes concernées adoptent
des conduites se définissant à partir des normes et des centres
d'intérêts spécifiques du groupe d'appartenance parentale.
L'organisation familiale poursuit des objectifs que
nous voulons d'abord déterminer spécifiquement et qui sont
apparemment distincts des objectifs assignés à l'organisation
des activités productrices qui sont les activités de production
de biens de consommation ou de moyens de travail.
. .. / ...

24
Les objectifs premiers de l'organisation du lignage
sont d'assurer sa propre reproduction biologique et sa cohésion
sociale en tant que groupe de personnes reliées par des liens
de parenté déterminés assignant à chaque individu une place
déterminée dans un système de rôles définis à partir des liens
de sang, de l'âge et dus exe. Le premier objectif de reproduc-
tion doit permettre à la fois de pourvoir aux besoins de sécu-
rité,
de subsistance des membres du lignage et aussi de créer
à celui-ci les conditions nécessaires à sa reproduction biolo-
gique à travers le jeu des alliances matrimoniales avec d'autres
groupes humains extérieurs.
Quant à l'obejctif de cohésion interne du groupe
lignagier,
il est atteint grâce à l'observation par ses membres
des normes qui régissent les rapports sociaux au sein du grou-
pe dont les membres sont classés en catégories selon leur âge,
sexe et la nature des liens de parenté qui les lient les uns
aux autres. Chaque catégorie est positionné dans le système
selon son statut et les membres de chaque catégorie partagent
un certain nombre de droits et de devoirs spécifiques à l'égard
de lignage. De même chaque catégorie a des droits et des devoirs
vis-à-vis des autres et occupe une position hiérarchique dans
le système~ quant à ses membres, ils sont liés entre eux par
nombre de droits et de devoirs réciproques consignés dans des
normes de solidarité d'entre-aide, d'assistance mutuelle etc ..
qui s'actualisent dans des pratiques concrètes dont la forme
et le contenu sont déterminés dans chaque situation par la cou-
tume et dont le non respect entraîne des sanctions
(désaproba,
tion, exclusion etc ... ) comme c'est le cas quand les personnes
à qui rarement de droit, l'exercice de l'autorité en vertu de
... / ...

25
leur position dans le groupe lignagier ou dans une de ses caté-
gories,
en usent d'une manière contestable, non conforme aux
normes d'équités d'impartialité etc . . . .
B - LES STRUCTURES DU GROUPE FAMILIALES
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
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Cette division de groupe lignager en sous groupes
ou catégories dont les rapports réciproques et les rapports
qui les lient chacun à l'organisation sont régis par des nor-
mes pose la question du pouvoir (dans l'organisation familiale)
dont la fonction est de gérer ces rapports. Cette gestion vise
à assurer l'adhésion aux normes par la mise en place d'un sys-
tème d'éducation devant favoriser leur intériorisation et leur
application à travers des conduites et comportements conformes.
Or les espaces où les normes doivent s'appliquer sont
les espa-
ces concernés par les besoins de production des biens,
la repro-
duction biologique du lignage et celui de leurs rapports réci-
proques.
Au niveau de ces trois espaces la fonction du pouvoir
sera de gérer les différents procès de travail et de production,
d'assurer l'entretien de la force de travail des membres du grou-
pe,
la reproduction biologique de celui-ci et sa cohésion interne
par une pratique de gestion de ses tensions et conflits.
Le pouvoir se transmet par voie latérale c'est-à-dire
du frère le plus âgé au frère le moins âgé dans le groupe de
frère. Mais en dehors du critère d'âge dans le choix de ceux
qui doivent exercer le pouvoir i l y a aussi le critère d'effi-
... / ...

26
cacité que nous distinguerons du critère de compétence car
l'efficacité veut dire ici la possession de qualités person-
nelles que ni le système d'éducation ni l'apprentissage ne
permettent d'acquérir et qui adaptées à la fonction à laquel-
le la personne est assignée donnent au groupe plus d'assuran-
ce en réduisant ses angoisses devant l'incertitude. Nous sou-
lignerons aussi le critère de crédibilité qui se mesure par
le degré de conformité de la conduite, des comportements par
rapports aux normes et coutumes en vigueur,
car une position
de pouvoir ne confère de l'autorité à la personnequi
le dé-
tient que dans le cas ou celle-ci est elle-même respectueuse
des normes : ni la place ou la fonction,
ni les qualités per-
sonnelles recherchées par le groupe ne semblent à elles seules
suffire pour conférer de l'autorité aux personnes assignées
à des places de pouvoir,
car l'autorité est d'abord morale
c'est-à-dire qu'elle ne peut pas être efficacement exercée
par des personnes aux conduites déviantes.
Les personnes investies du pouvoir de gestion des
différentes espaces ne sont pas seulement choisies sur la base
de critères renvoyant à des qualités personnelles telles l'âge
le profil psychologique etc ... car ces qualités personnelles
sont réinterprétées par le groupe lignagnier selon ses croyan-
ces qui leur donnent une signification particulière en rapport
aux ancêtres. C'est le cas
par exemple de l'âge qui n'est pas
seulement une qualité personnelle et qui selon la cosmogonie
est aussi ce qui mesure la distance ontologique qui sépare
l'homme de ses ancêtres donc sa puissance, étant bien entendu
... / ...

27
que celle-ci varie
en sens inverse de la distance. Or la légi-
timité du pouvoir qui est exercé se fonde aussi sur cette puis-
sance que confère la proximité aux ancêtres et qu'il faut dis-
tinguer de l'efficacité 1
Toutes ces considérations incitent à penser
que le pouvoir dans l'organisation lignagnière
est un pouvoir
traditionnel avec comme fondement de sa légitimité le respect
des critères normatifs trditionnels du choix de leurs déposi-
taires et le
respect par ceux-ci des prérogatives attachées
à leur charge et dont aussi bien le contenu que les formes par
lesquels celles-ci s'expriment (concertation, dialogue,
règles
de politesse,
etc ... ) sont consignés dans des normes immuables.
La prégnance des normes attachées à l'exercice du
pouvoir et de l'autorité engendre chez les acteurs sociaux
impliqués dans les différentes relations de pouvoir une per-
ception particulière à l'égard de celui-ci qui a la faveur des
expériences vécues sur les pratiques de pouvoir engendre et
développe des attitudes et des caractéristiques psycho-socio-
culturelles déterminées qui constituent un ensemble de dispo-
sition qui fondent le rapport subjectif des acteurs sociaux
traditionnels au pouvoir.
C - DOMINATION DES ROLES ET STRUCTURES PARENTAUX
============================================
Les besoins de reproduction et de cohésion engendrent
des stratégies de reproduction et de maintien de l'ordre .
.../ ...
(1)
BALLANDIE~ G.
Antnropolo~ie politique
P.U.F. 1962

28
Les stratégies de reproduction concerneront les es-
paces couverts par les activités productives et par les échan-
ges entre le milieu familial et son environnement,
tandis que
les stratégies de cohésion et de maintien de l'ordre concer-
neront les espaces où se dérouleront les rapports sociaux (les
groupes de travail, les rapports domestiques,
les rapports
interménages etc ... ) et où aussi la répartition des ressources
est un enjeu. Tous ces espaces se trouvent partiellement in-
clus dans l'espace familial organisé pour l'autosubsistance.
De cette confusion des espaces de reproduction et de cohésion
avec l'espace familial et parental
résulte une confusion
entre les normes régissant les rapports dans les activités de
production et dé change avec l'extérieur ainsi que dans la ré-
partition des ressources avec les normes qui régissent les
rapports de parenté.
Il y a confusion entre l'organisation des
rapports de parenté et l'organisation des rapports dans l'es-
pace où se mènent particulièrement les activités de production,
de reproduction de la force de travail et des alliances, matri-
moniales nécessaires à la reproduction et la perennité du
lignage.
c'est ainsi que pour cette raison,
ce sont les person-
nes les plus âgées de sexe masculin constituant les groupes
des ainés dans le lignage qui ont la charge de l'organisation
des activités de production ou de représentation du groupe
familial à l'extérieur, de décider des modalités des transac-
tions et des échanges avec celui-ci et aussi de
répartition des
ressources entre les membres du groupe.
. .. / ...

29
Cette confusion engendre une dynamique organisationnel-
le particulière dont la finalité est la soumission de l'économie
aux impératifs du lignage en tant que groupe social et système
de parenté règlés par des normes et des valeurs qui se traduisent
par des pratiques particuliers repérables au niveau de tous
les domaines concernant la vie du lignage~ci nous nous intéresserons
en particulier
l'organisation de la production au niveau
du lignage.
D - RESPONSABILITÉ DES CHEFS DE LIGNAGE OU DE MÉNAGE
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Tout d'abord, nous dirons que le pouvoir économique
se trouve placé entre les mains du chef de lignage ou de ménage,
c'est-à-dire du personnage masculin le plus âgé du lignage ou
de ses segments. Les attributions de ce personnage sont la géran-
ce des terres, la gestion de l'exploitation de celles-ci, la
fixation et le respect du temps imparti
aux différents travaux,
la préparation et l'entretien des instruments et outils de tra-
vail, la prÉparation
des semences, la distribution des tâches,
la surveillance des travaux, l'entretien du groupe dont il doit
assurer la nourriture en période de soudure etc •.. Dans le cas
où le segment ou groupe lignagier est très étendu, l'ainé peut
déléguer une partie de son pouvoir à son fils ainé ou à son
frère ou demi-frère cadet qui devra s'occuper des problèmes
pratiques relatifs aux activités de production (division des
tâches, respect du calendrier, surveillance etc .... ) .
.../ ...

30
Cette délégation par l'ainé, d'une partie de ses
prérogatives relatives à un domaine d'activités placées sous
sa responsabilité lui donne la possibilité de s'investir
plus largement et plus intensement dans les domaines offrant
le plus de prestige telle la gestion des conflits ou la repré-
sentation du groupe à l'extérieur.
Le principal moyen dont dispose le chef de lignage
pour assumer ses obligations conformément à la tradition consis-
te dans un champ collectif dont il a gérance et dispose de la
production : une partie de celle-ci est réservée à la provision
tandis que le surplus est traqué ou échangé pour acquérir d'au-
tres biens (étoffes, bétail, etc ••. ) ou utiliser dans les dis-
penses de soin, payer des amendes, soutenir des procès, aider
des alliés dans le besoin.
Les dépenses engagées à partir des ressources tirées
du champ colelctif servent donc à assurer les besoins de repro-
duction du groupe (nourriture, outils de travail, santé, mariage
etc .•• ) essentiellement et à conserver son capital symbolique
(frais de procès, amende à payer pour préserver le groupe du
déshonneur).
E - FONCTION DES CHAMPS COLLECTIFS ET INDIVIDUELS
============================================
Le champ collectif est exploité en commun par tous
les membres valides du groupe c'est-à-dire par tous les chefs
de ménage et leurs enfants respectifs en âge de travailler,
chacun y consacrant une matinée de travail par jour, le reste
... / ...

31
de son temps étant utilisé pour travailler sur sa propre parcel-
le, découpée sur la propriété foncière commune et dont il gère
en toute autonomie les activités de production qui s'y déroulent.
Sur cette parcelle, le chef de ménage peut utiliser pendant
l'après-midi et en rotation avec les autres chef de ménage
l'équipement appartenant en commun ou groupe:
:le ménages, c' est-à-
dire les machines agricoles et autres outils de travail, les
animaux de trait etc ... tandis que les dépenses de mise en
valeur doivent être entièrement assurées par ses propres moyens
(semences, engrais fongicides etc ... ). Ainsi les moyens matériels
qui doivent être mis en oeuvre pour exploiter les parcelles
allouées aux différents chefs de ménage se divisent en deux
catégories: les moyens appartenant en commun à l'ensemble du
groupe et dont l'acquisition ainsi que la reproduction est assu-
rée grâce aux ressources tirées de l'exploitation en commun
du champ colelctif placé par le groupe lignagier snus la respon-
sabilité d'un chef et les moyens que chaque chef de ménage se
charge personnellement d'acquérir et qui lui appartiennent en
propre. Mais tandis que les
moyens appartenant en commun au
groupe ont une durée de vie relativement longue et ne disparais-
sent pas au cours d'un cycle de production, les moyens appartenant
en propre aux différents chefs de ménage ont une durée de vie
très courte, ou ne sont que de simples matières premières desti-
nées à disparaître au cours d'un cycle de production. Par ail-
leurs les différences entre ces deux catégories de moyens ren-
voient à une différence de valeurs : les moyens et équipement
appartenant en commun du groupe lignagier ont une valeur
d'échange plus élevée en raison de leur nature que les moyens
individuels destinés à la mise en valeur des parcelles indivi-
duelles. Cette différence de valeur (et de fonction) explique
... / ...

32
que les moyens à valeur élevée acquis grâce aux ressources
tirées à partir du champ commun soient aussi destinés à servir
à la mise en valeur des parcelles individuelles.
Les parcelles individuelles sont mises en valeur pour
produire une partie de la nourriture des ménages
(le petit déjeu-
ner,
plus un repas par jour pendant toute la saison sèche) pour
permettre de pourvoir aux dépenses d'habillement de leurs mem-
bres, de construction et d'amélioration de l'habitat ménager,
d'acquisition des équipements ménager et de soins médicaux ou
de procès quand les ressources du champ collectif allouées à
ces genres de besoins s'avèrent insuffisantes. Ainsi chaque
ménage assure une partie des dépenses
relative$ sa propre re-
production grâce à la mise en valeur de son champ propre rendue
possible par la combinaison et la mise en oeuvre d'équipements
collectifs appartenant à l'ensemble du groupe lignagier et
d'énergie humaine, de matières premières et de savoir-faire
qui lui sont propres. Le complément de ressources et de dépenses
nécessaires pour couvrir la totalité des besoins de reproduction
de l'ensemble de la communauté des ménages est quant à lui assu-
ré grâce aux ressources provenant du champs collectif dont la
mise en valeur requiert la combinaison et la mise en oeuvre
des moyens collectifs des énergies et du savoir-faire fournis
par les différentes ménages.
. .. / ...

34
Ces conflits qui naissent à propos de l'orientation
des ressources,
de leur répartition et de l'organisation de
l'emploi des équipements collectifs et qui opposent les dif-
férents membres des groupes lignagiers.
favorisent une remise
en cause de l'autorité du chef de lignage. En effet certains
des attributs attachés au rôle de l'ainé vis-à-vis de son
cadet. à savoir particulièrement veiller aux intérêts de celui-
ci. rentrent en contradiction avec ses propres désirs d'appro-
priation de la meilleure part dans la distribution des ressour-
ces ou de disposer le plus longtemps possible des équipements
collectifs au détriment des autres.
Ces conflits peuvent débou-
cher à une remise en cause des normes qui fondent les rôles
c'est le cas quand
le cadet renie ses devoirs vis-à-vis de
son ainé quand la conduite de celui-ci s'écarte des normes
prescrites par la tradition. Ces conflits et les remises en
cause des droits et des devoirs attachés aux rôles des uns et
des autres peut engendrer une grande instabilité dans le sys-
tème d'autorité qui s'explique par le fait que celle-ci est
d'abord et avant tout une autorité morale fondée sur le
respect des normes lesquelles régissent et structurent à la
fois et de la même manière les rapports privés et parentaux
d'une part. et les rapports qui se développent dans l'espace
des activités de production.
Ces conflits contribuent aussi à destructurer les
rapports de solidarité entre ménages qu'ils font évoluer vers
une plus grande autonomie et indépendance les uns vis-à-vis
des autres.
. .. / ...

35
En effet à cause de ces conflits le temps de travail effectué
sur la parcelle octroyée aux ménages prend le dessus de plus
en plus sur celui effectué sur le champ collectif et petit à
petit, progressivement les liens de solidarité et de coopéra-
tion se distendent jusqu'à l'éclatement du groupe et de son
espace organisé.
Nous avons vu que la légitimité du pouvoir avait sa
source en dehors de l'espace que couvre spécifiquement les ac-
tivités de production en raison du fait que les critères qui
la fondaient ainsi que l'autorité se référaient à des normes
dont le lieu d'émergence était l'espace des rapports socio-
parentaux. Les normes en question ne sont pas relayées par des
règles formelles organisationnelles dans l'espace de production
mais y pénètrent directement.
Nous avons pu constater également que les conflits
qui naissaient dans l'espace de production finissaient tou-
jours par une remise en cause de l'autorité morale des person-
nes assignées à des rôles de commandement et de décision par
la tradition et que cette remise en cause jouait un rôle des-
tructeur au niveau des rapports de parenté. Cette situation
qui découle de la confusion déjà signalée entre l'espace cou-
vert par les relations de parenté et l'espace des activités
de production, entre les acteurs de ces différents espaces et
les stratégies de ceux-ci confère une autre caractéristique
significative de l'espace des activités,
le langage dominant
dans l'espace des activités de production et par lequel se
manifeste la nature des relation de pouvoir et d'autorité,
... / ...

36
les stratégies productives etc ... est le langage du père sur
le fils, de l'ainé sur le cadet, du chef de lignage ou de mé-
nage sur la nécessité de la soumission des impératifs de la
production aux objectifs sociaux ou cérémoniaux du lignage ou
du ménage etc .. Le langage dans l'espace de production au niveau
des rapports sociaux et des stratégies se confond au langage
sur les rapports de parenté.
C-CONCLUSION
De cette analyse sur les différents espaces ou se
déroulent les pratiques au niveau du lignage et de leur confu-
sion nous pouvons tirer ces quelques conclusions.
- Il n'existe pas de frontières nettes entre l'espace
des rapports de parenté et l'espace organisé des
activités de production dans le lignage.
- Cette confusion des espaces entraine une confusion
des normes qui régissent les rapports de parenté
avec celles des rapports sociaux de production.
- La confusion des différents espaces et celle des
normes engendrent la confusion des rôles des acteurs
des différents espaces.
Cette confusion des rôles impose un type de pouvoir
et d'autorité dans l'espace de
production, calqué
sur celui des rapports de parenté et il en résulte
... / ...

37
que le langage dominant dans l'espace de production
dans le domaine des rapports sociaux est celui du
pouvoir et de l'autorité dans les relations paren-
tales.
Certaines des caractéristiques structurelles des
rapports qui structurent l'espace des rapports de parenté et
celui des activités de production dans la socio-culture tra-
ditionnelle vont être transférées dans les unités de production
du secteur informel moderne de production et de service, lequel
est né de la rencontre entre la socio-culture traditionnelle
et la socio-culture moderne héritée de l'ère coloniale. Cer-
tains de ces caractéristiques structurelles vont être des élé-
ments structurants de ces unités du secteur informel.
Il y aura
transposition et adaptation des structures des rapports de paren-
té et celles de l'espace des activités de production dans la
socio-culture traditionnelle au secteur informel où promoteur
et travailleurs se trouvant encore sous l'emprise dusystème
socio-culturel traditionnel se réfèrent à des valeurs et normes
communes.
Le secteur informel en tant qu'il est le résultat
d'une articulation entre des structures, éléments matériels
appartenant à deux systèmes de production différents présente
des caractéristiques qui le rapprochent des unités de
pro-
duction capitaliste correspondant dans le développement du mode
de production capitaliste à l'étape de la soumission formelle
du travail au capital.
. .. / ...

38
CHAPITRE III
CARACTERISTIQUES
DES
DEUX
FORMES
============~======================
DE
SOUMISSION
DU
TRAVAIL
AU
CAPITAL
=================;======================

39
A - LA SOUMISSION FORMELLE
======================
A la fin du 1ge siècle,
l'Afrique s'est ouverte défi-
nitivement au monde occidental qui était déjà engagé dans l'ère
de la révolution industrielle et avait mis en place dans le
domaine de la production des structures organisationnelles qui
allaient définitivement remplacer et faire oublier les struc-
tures féodales en oeuvre jusqu'alors dans les unités de produc-
tion à vocation capitaliste. Par rapport à cette question rela-
tive au rôle joué par les structures dites féodales dans le
premier développement du sytème capitaliste moderne et à leur
remplacement par la suite par des structures plus adaptées et
plus fonctionnelles dans les unités de production. K. MARX qui
a étudié la génèse et le développement du système capitaliste
parlera respectueusement à leur propos de soumission formelle
du travail au capital et de soumission réelle du trvail au capital. 1
A chacune de ces étapes correspond un mode particulier
de constitution de la plus-value et d'organisation de la pro-
duction.
Dans la soumission formelle les moyens de travail
étaient peu performants et leur rendement faible. L'équipe-
ment productif était hérité de l'ancien système de production
(le système féodal)
et comportait donc des limites quant à
sa capacité productive. Dans cette mesure toute augmentation
de la production et donc du profit impliquait une dépense accrue
de force de travail,
l'accroissement en valeur absolue des
... / ...

40
heures de travail et K. MARX parlera pour caractériser cette
forme d'exploitation de plus value absolue
Mais cette phase a d'autres caractéristiques dont les plus
significatives sont l'organisation du travail qui faisait appel
à la coopération simple (travail dans les nanufactures)
et au savoir-faire personnel ainsi qu'aux rapports de pouvoir
qui caractérisaient le système antérieur : le style de comman-
dement ainsi que les marques de l'autorité plongeaient encore
leurs racines dans l'ancien système. Mais le salariat en tant
que mode de rapports caractéristique du système capitaliste
avait déjà vu le jour dans les unités de production et avait
commence
à jouer au sein de celle-ci un rôle structurant quant
aux nouveaux rapports qui y émergeaient.
B - LA SOUMISSION RÉELLE
====================
Dans la soumission réelle le système capitaliste avait
imposé son modèle de développement et son modèle organisationnel.
Dans les unités de production les équipements productifs et les
méthodes de travail hérités de l'ancien système ont cédé la
place à la mécanisation de plus en plus poussée des techniques
de travail. C'est l'ère du machinisme instaurant une nouvelle
division du travail basée sur la parcellisation de plus en plus
poussée des tâches et dont la conséquence à court terme est
la perte de maîtrise du travailleur sur l'ensemble des processus
relatifs au procès de travail et au procès de production. Cette
phase est aussi celle de la plus-value relative rendue possible
grâce au perfectionnement des machines qui augmentaient le ren-
dement du travail.
...f ...

41
Nous pensons que le secteur informel, en raison de
son faible niveau de développement technique et économique
(les moyens de travail sont artisanaux, et les débouchés limi-
tées au niveau local) présente des caractéristiques technico-
socio-économique qui le rapproche des unités de production,
de la phase de soumission formelle du travail au capital. Dans
ce cas le secteur industriel moderne (forte intensité capitalis-
te, parcellisation des tâches, production à la série, larges
,
'
)0 Ul
l
. f
l
d
debouchees etc ...
co-existe avec
e secteur ln orme
mo
debouchees etc ...
co-existe avec
e secteur ln orme
erne
dans le même espace urbain constitue la phase de la soumission
réelle du travail au capital.
C - SIMILITUDES ET DIFFÉRENCES ENTRE LE SECTEUR
=======~===================================
INFORMEL ET LA SOUMISSION FORMELLE
==================================
Les unités de production de secteur informel moderne
de production et de service présentent quelques similitudes
avec les unités de production industrielles de la phase de
soumission formelle du travail au capital. Nous passerons en
revue les points de similitudes et les points de rupture entre
ces deux formes de développement.
Dans les deux cas, ceux qui travaillent dans les
unités de production sont des personnes issues de l'ancien sys-
tème chassées de leurs terres par les conditions économiques
draconienne que leur imposaient les propriétaires fonciers
(taux élevé de la rente foncière) ou les prix au producteur
... / ...

42
très bas qu'ils étaient obligés d'accepter pour leur produits
agricoles; dans tous les cas le départ forcé des paysans de
leurs terres a été le résultat d'une politique d'alliance taci-
te au niveau économique entre les classes possédantes de l'an-
cien système et la nouvelle classe émergeante des capitalistes
(pour l'Europe) ou entre la nouvelle classe politico-bureaucra-
tique dirigeante des nouveaux états africains, et le capitalisme
international. En plus pour l'Afrique et en particulier pour
le Sénégal, en raison de l'urbanisation croissante beaucoup
de travailleurs du secteur informel moderne de production
proviendrait des "rejetés" du système moderne (les jeunes gens
qui sont des cas d'échec scolaires ou les chômeurs de longue
date).
Ces travailleurs conservent encore des liens avec
l'ancien système qui se manifestent dans des caractéristiques
psycho-socio-culturelle particulières et dans une série de
rapports qu'ils continuent d'entretenir avec les structures
anciennes. Ces liens entretenus avec l'ancien systèmes avaient
ou ont pour finalité de compenser les rigueurs et vicissitude
de leurs nouvelles situations : constitution de structures
informelles de solidarité dans les lieux de travail, établis-
sement d'un jardin potager à proximité de~ lieux de travail
ou d'habitation pour suppléer aux besoins de reproduction de
la force de travail que les salaire gagnés dans les fabriques
ne couvrent pas totalement (en Europe) ou maintien des rapports
de solidarité avec les parents proches en milieu urbain ou
habitant à proximité des lieux de travail qui prendront en
charge certains besoins de reproduction ou la force de travail
tels le logement, une partie de la nourriture etc .... que les
... / ...

43
patrons des unités de prodution du secteur informel moderne
ne prennent pa§ncharge directement ou en compte dans leur mode
de rémunération de leurs apprentis (En Afrique).
Dans tous les cas les rapports sociaux au sein du
lieu de travail (rapports entre travailleurs et entre ceux-ci
et leurs patrons) étaient
ou sont fortement marqués par les
normes du passé : paternalisme, forte sociabilité.
En Europe la première phase de développement du sys-
tème de production capitaliste a été marquée par la combinaison
dans les unités de production de technique et de méthode de
travail relevant de l'ancien système et du salariat nouveau
mode de rapport par lequel les travailleurs de ces unités de
production dépossédés de leurs moyens de travail vendent aux
propriétaires de ces unités et moyens de production leur force
de travail contre de l'argent. Par contre dans le secteur infor-
mel moderne de production en Afrique comme nous l'avons déjà
signalé les équipements productifs sont une production du mode
capitaliste tandis que les rapports sociaux de production mar-
qués par le paternalisme, l'absence de salariat et la prise
en charge directe par le propriétaire des moyens de production
d'une partie des besoins de reproduction de la force de travail
des producteurs directs qu'il emploie, se refère aux normes
socio-culturelles traditionnelles et a de forte ressemblance
avec les rapports sociaux de production dans le lignage. En
effet dans le secteur informel outre que le patron prend direc-
tement en charge une partie des besoins de reproduction de la
force de travail des travailleurs donne la possibilité à chaque
adulte de disposer en accord avec lui des équipements productifs
pour produire à son compte propre.
... / ...

44
D - LES NORMES ORGANISATIONNELLES TRADITIONNELLES
=============================================
Ici dans les unités de production du secteur infor-
mel moderne la pénération des normes traditionnelles dans
l'espace de production concerne moins les méthodes de travail
qui en fait dans l'ensemble sont des méthodes modernes que les
rapports sociaux de production qui s'organisent en deux rationa-
lités
qui s'articulent et se combinent dans une hiérarchie
déterminée: d'une part il y a la rationalité qui est définie
à partir des objectifs propres du chef d'entreprise et d'au-
tre part celle définie par rapport aux objectifs propres des
travailleurs adultes qui ont le statut d'un
quasi patron.
Chacune de ces rationalités remplit une fonction dans le pro-
cessus de reproduction. Celle du chef d'entreprise a pour
fonction d'assurer la reproduction des structures matérielles,
la cordination des différentes activités qui concourent à la
réalisation des obejctifs définis, l'équilibre
entre le temps
de travail quiest dû
au chef d'entreprise et celui que s'ap-
proprient les travailleurs adultes, la régulation des rapports
entre les travailleurs. Celle des travaillerus adultes aura
pour fonction de produire des biens et services à titre per-
sonnel dont la vente leur permet d'assurer partiellement leurs
besoins de reproduction. Cette rationalité est subordonnée à
la première en ce sens que sa mise en oeuvre dépend des équi-
pements, du temps affecté à la réalisation des objectifs du
patron. Mais ce sont aussi deux rationalités qui se complètent
car c'est l'absence de salariat et de charges sociales que le
chef d'entreprise doit supporter qui donne au secteur informel
... / ...

45
moderne de production la capacité non seulement de survivre
mais aussi de se développer malgré les coûts économiques im-
portants qu'elles supportent (coûts des équipements et matières
premières importées qui, en raison du frêt, des taxes à l'im-
portation et des nombreux intermédiaires &rot en général deux
fois plus élevés qu'en France principal pays exportateur).
E - LES RAPPORTS DE SOUMISSION ENTRE LES STRUCTURES
===============================================
TRADITIONNELLES ET LES STRUCTURES CAPITALISTES
==============================================
Nous avons vu que tous les éléments constitutifs du
capital sont présents dans les unités de production du secteur
informel moderne sauf le salariat. En effet les moyens de
travail sont la propriété des promoteurs de ce secteur et les
producteurs directs qui travaillent dans les unités de ce sec-
teur sont comme les ouvriers du mode de production capitaliste
libres de toutes contraintes physiques ou politiques qui les
obligeraient à travailler pour le compte d'un autre sans exi-
ger un salaire : les travailleurs du secteur informel moderne
sont tout aussi libres que ceux du mode de production capita-
liste et comme ces derniers l'exploitation de leur force de
travail par les détenteurs des moyens de production produit
un surplus accumulable approprié par ces derniers.
Ces considérations structurelles en ce qui concerne
les unités de production du secteur informel moderne et leur
similitude frappante avec celle des unités de production du
... /'"

46
système capitaliste nous autorise à parler en terme de capital
à l'égard des rapports sociaux de production dans les unités
du secteur informel moderne de production. Mais contrairement
que dans le mode de production capitaliste où le capital se
soumet le travail pour lui faire produire un surplus accumula-
ble qui devra être réinvesti pour permettre au système capita-
liste de se reproduire en tant que rapports de production à
une échelle élargie, dans le secteur informel le surplus accu-
mulé est réinvesti pour aller conforter les rapports sociaux,
les normes du système traditionnel (investissement dans des
objets de prestige, polygamie, accroissement du nombre de
dépendants etc ... ).
Alors que dans le mode de nroductLûn ~apitaliste c'est le
capital qui se soumet le travail, en imposant au travail et
aux travailleurs sa logique ainsi qu'au surplus dégagé à par-
tir de l'exploitation de la force de travail de ce dernier,
dans le secteur informel moderne de production) ~'est en toute
apparence
le système traditionnel qui impose sa logique
et sa rationalité au capital en instaurant un rapport d'échange
particulier entre le détenteur des moyens de travail et le
travailleur et en donnant au surplus dégagé une orientation
particulière quant à son emploi .
Dans le secteur informel C est en toute apparence
le système traditionnel qui se soumet le capital. Nous jus-
tifierons cette apparence par le fait que l'articulation
entre les structures du capital et les rapports de production
... / ...

47
traditionnels dans les unités du secteur informel moderne de
production se fait non dans une perspective de reproduction
du mode de production capitaliste mais des rapports sociaux
traditionnels.
Cependant étant donné que les supports matériels par
lesquels cette reproduction du traditionnel s'actualise dans
le social sont pour une large part une production du mode capi-
taliste, il est évident quela reproduction du traditionnel,
de ses structures et rapports sociaux sera déterminée par la
reproduction du mode capitaliste lequel pour fonctionner et
se reproduire a besoin des apports du système socio-culturel
traditionnel et du secteur informel moderne de production
(utilisation par le mode capitaliste de force de travail prépa-
ré dans le système traditionnel ou dans le secteur informel).
Nous voyons bien qu'il existe de multiples rapports
réciproques entre le système socio-traditionnel, le mode pro-
ducteur capitaliste. Il y a trois niveaux dans leur articula-
tion. Le premier niveau est constitu~ar le secteur informel
qui constitue le niveau économique et le lieu où le système
traditionnel se soumet le capital. Quant au deuxième niveau
il recouvre la totalité des rapports possibles entre les deux
systèmes au niveau de la société globale (transfert de valeur
et de force de travail du système traditionnel au système ca-
pitaliste) : il est le lieu où le mode deoroduction capitaliste
-
-
se soumet le système traditionnel afin de créter les conditions
générales, sociales et économiques de sa propre reproduction .
. ../ ...

48
Le troisième niveau d'articulation est celui qu gère le rap-
port entre les deux premiers et dont la fonctione est d'assu-
rer politiquement le maintien des conditions de dépendance
réciproque, de soumission réciproque et de reproduction arti-
culée des deux systèmes sociaux de production ; ce troisième
niveau est représenté par l'Etat et ses institutions qui fixe
les orientations et les priorités de sa politique économique,
sociale et éducative dont les effets ou les conséquences déter-
minent les rapports entre les deux systèmes traditionnels et
capitalistes.

49
CHAPITRE IV
DEFINITION DU CHAMP D'ENQUETE ET D'ETUDE

50
A - DEFINITION 'DU CONCEPT DI~' SECTEUR INFORMEL
Secteur informel, secteur de subsistance, secteur non structuré
petites activités marchandes, ce sont là autant de
concepts employés pour désigner des activités urbaines marchan-
des de production de biens ou de source dans les villes du tiers
monde et dont le mode de fonctionnement obéit à des règles ou
normes étrangères au mode de production capitaliste.
Philippe RAGON définit le secteur informel comme l'en-
semble des "activités à petite échelle où le salariat ~ est très
limité, où le capital avancé est faible, mais où néanmoins il
y a circulation monétaire voire de biens et services onéreux". J.
Pour Georges NIRAN, le secteur non structuré regroupe
les activités où "une importante proportion d'adultes qui n'oc-
cupent pas des emplois recencés sont occupés à d'autres activités
qui fournissent de façon rentable des biens et des services à la
population urbaine: il s'agit de membres du secteur secteur non
structuré" qui "exercent un certain nombre de métiers et d'emplois
modernes divers, tout comme dans le secteur structuré, mais sans
être protégés de la concurrence et sans avoir accès préférentiel-
lement aux crédits et aux techniques avancées comme ce serait le
cas dans ce dernier secteur" 2.
Pour Chantal BERNARD, la petite production marchande
comprend "les petits moyens de production ou de service qui peu-
vent être exploités soit à titre individuel, soit à l'aide d'une
mal.n d'oeuvre restreinte" et "contribuant à apporter à la famille
le complément de ressources dont elle a besoin lorsque le revenu
principal est insuffisant" et "la micro industrie di:;posant d'un
capital faible ... placée en concurrence avec la grande industrie
(1) HUGON P.
: "Dualisme sectoriel ou soumission des formes
de production au capital"
Revue du T~=rs Monde Tome XXI n082 Avril-juin 80
(2) NIHAN G.
"Le. lecteur non structuré
signification;
G.
"Le. lecteur non structuré
aire d'expension du concept et application
expérimentale" idem p265

51
publique ou privée auquel le elle "ne peut résister .•• que grâce
à une organisation de la production adaptée" 3.
Pour Claude MIRAS, le secteur de subistance est
constitué par les activités dont "l'apprentissage est la clé de
voûte du fonctionnement" parce que assurant "la reproduction tech-
n1que en initiant aux ficelles
du métier de futurs artisans" 4.
Ces différentes caractérisations du secteur informel
mettent l'accent principalement sur les caractéristiques suivantes
la petite taille des unités et la faiblesse du capital investi;
le caractère marchande de la production, l'inexistence ou la quasi
inexistence du salariat, la production de b.:ens ou servicemoderne
en situation de concurrence avec ceux de la grande industrie ;
l'apprentissage et le travail gratuit des apprentis; l'appropria-
tion parle patron.
du surplus dégagé et son utilisation éventuelle
à des fins de consommation domestique. Chacune de ces caractérisa-
tions rend compte sans doute de la réalité du secteur informel qui
en fait est hétérogène du point de vue des activités marchandes qui
le compose, -ce qui permet selon la nature des activités que l'on étu-
die et la méthodologie utilisée de privilégier tel ou tel aspect
de cette réalité. Cependant, nous pensons qu'une définition plus
globale pourra être tenter à partir des réponses qui seront appor-
tées à ces trois questions fonadamentales : quelles sont les condi-
tions d'émergence du secteur informel? Quel est le
mode'spécifi-
que de fonctionnement du secteur informel ? Quel est le mode de
re~roduction du secteur informel ? A la première question, nous avons
déjà réponde ~&ns les pages précédentes dans notre introduction : le
secteur
informel est né de la rencontre entre une demande de biens
et services modernes par les autochtones et que ne peut satisfaire
le mode de production capitali.te installé dans les pays dominés
et une offre de biens et services co~respondants et aux caractéris-
tiques adaptées aux conditions économiques et socio-culturelles des
(3) BERNARD Ch
"Pe ti te production marchande en mi lieu
urbain à partir de quelques algériens"
Ibid pp.3ü7.3ü9
(4) DE MIRAS C : "Le secteur de subsi tance dans les branches
de production à Abidjan"
Ibid p.36ü

52
demandeurs et produits par des autochtones à partir de techniques
modernes et ou traditionnelles. Quant à la réponse concernant la
deuxième question (sur le fonctionnement), elle peut se résumer
ainsi: le fonctionnement des
unitésdu secteur informel requiert
la mobilisation et la combinaison de deux ressources qui sont les
moyens techniques employés et les rapports sociaux de production.
Or, si les techniques employées résultent d'un transfert à partir
du secteur dit moderne ou du mode production capitaliste, par con-
tre, les rapports sociaux de production résultent d'une transpo-
sition et d'une adaptation des rapports sociaux encore en vigueur
dans le mode production traditionnel. Pour répondre à la troisième
question, nous dirons que la reproduction du secteur informel est
directement conditionnée par le maintien et la reproduction dans
les modes de production traditionnelles et capitalistes des éléments
structurels dont l'emploi, les effets ou la transposition président
au fonctionnement des unités du secteur: il s'agit en l'occurence
des moyens techniques issus du mode de production capitaliste, des
jeunes
adolescents descolarisés et en quête d'une formation profes-
sionnelle que l'Etat ne peut leur donn~r faute de disposer de struc-
tures de formation professionnelle adaptées
de la solidarité fami-
liale permettant de
prendre en charge jusqu'au delà de l'âge de la
majorité les besoins de reproduction de la force de travail des
jeunes gens travaillant dans le secteur et qui sont sans salaire •..
la prégnance des nornes traditionnelles de reproduction de la force
du travaildans le système lignagifèJt a •.xquelles continuent à se ré-
férer les chefs d'entreprise du secteur informel ... etc.
Partant des différentes propositions de réponses apportées
aux trois questions fondamentales que nous nous sommes posées à
propos du secteur informel, nous proposons la définition suivante

53
Le secteur informel, c'est l'ensemble des activités
urbaines marchandes de'production de biens et de services modernes
employant des moyens techniques modernes et ou traditionnels
combinés à des rapports sociaux traditionnels et dont la reproduc-
tion est directement liée à celle de structures déterminées dans
les modes de production capitalistes et traditionnelles dont elles
constituent réciproquement une condition de leur reproduction.
Cette définition et les hypothèses q~i la coustendent
nous servirons de guide dans l'étude du secteur informel paracapi-
taliste et celle du secteur informel de subsistance qui constituent
deux catégories d'activités du secteur informel identifiables par
l'importance du capital engagé, le degré d'organisation, les possi-
bilités de dégagement de surplus etc ... Nous parlerons du secteur
informel paracapitaliste pour caractériser les activités de produc-
tion de biens ou de services se rapprochant par leur taille, le
volume du capital fixe investi, le niveau d'organisation de la pro-
duction, etc ... des PME du secteur moderne. Quand au concept du
secteur informel de subsistance, il sera employé pour désigner les
activités qui en raison de leur faible niveau de développement ne
permettent de dégager qu'un surplus faible directement investi dans
l'acquisition de biens de consommation de première nécessité.

54
CA~ACTERISATTnN
DES UNITES DE PRODUCTION
DU SECTEUR INFOR~EL PARACAPITALISIE fT
DE SUBSISTANCE
Le secteur informel moderne de production de biens
ou de service n'est pas un secteur homogène. Il ne l'est ni
par la nature et de la qualité des biens ou services produits,
ni par la taille des entreprises, ni par le degré d'adhésion
et de participation des promoteurs à la socio-culture tradition-
nelle ou moderne. Cependant malgré son caractère très hétérogène
le secteur informel moderne de production peut se laisser sub-
diviser en deux sous-groupes d'unités de production.
Le premier sous-groupe que nous appèlerons le secteur
. oaEacaoitaliste re~roune les unités de production du secteur informel
réunissanies caractéristiques suivantes les rapprochant des unités
du système capitaliste.
- Une cour
de plusieurs centaines de mètres carrés
entourée d'un mur avec à l'intérieur un hangar occupant environ
le tiers ou la moitié de la superficie et un bureau où le chef
d'entreprise reçoit ses clients. Le hangar qui est en tôle gal-
vanisée le plus souvent habrite les moyens de travail (machines,
outils manuel de gros calibre etc ..• ) installés sur une dalle
en ciment recouvrant partie ou totalité de la superficie du
sol. Ce hangar sert de lieu de travail et de production sur-
tout pendant la saison des pluies.
- Un équipement productif constitué de machines,
d'appareils électriques ou fonctionnant à gaz, d'outils spé-
cialisés etc dont la valeur monétaire dépasse au moins un
million de francs CFA.
. .. / ...

55
Certaines immobilisations en capital fixe productif avoisinent
même dans certains cas quinze millions de CFA. Dans certains
métiers comme la maçonnerie, il n'existe cependant pas de
machines que possède le chef d'entreprise: celui-ci continue
à travailler avec des outils.
- La qualité du travail est relativement plus soignées
que dans les autres unités de production du secteur informel
moderne en raison des outils spécialisés à ,"disposition , de
la présence des travailleurs plus qualifiés (pour les retenir
certains chefs d'entreprise acceptent même
de leur payer un
salaire non déclaré) et aussi des exigences de soin dans le
domaines de la finition du produit fabriqué qu'impose à ce
secteur sa cliente, qui se recrute dans les couches les plus
aisées de la société.
- Une capacité d'accumulation importante révélée par
le volume des commandes et les investissements ostentatoires
dans le domaine social dont se livrent les chefs d'entreprise
de ce secteur.
- Une organisation plus ou moins réussie du travail
de l'entreprise avec division bien nette de l'espace de travail
en deux zones, l'une réservée à la production et l'autre à l'ad-
ministration avec des fois présence d'un secrétaire et ou d'un
comptable. Il y a un effort réel d'organisation physique de
l'entreprise suivant le même modèle que les entreprises du mode
de production capitaliste.
- Une production en série même si c'est en nombre
limité.
. " / ...

56
Le deuxième sous-groupe que nous appelons le secteur
informel moderne
de
subsistance regroupe1es
regroupe
unités de pro-
duction du secteur informel répondant aux caractéristiques
suivantes :
- Le lieu de travail et de production est constitué
par un petit atelier dont la superficie peut varier entre dix
et vingt mètres carrés.
Il s'agit souvent d'un atelier de for-
tune confectionné avec des matériaux de récupération, dans
certains cas i l est en baraque loué. Dans tous les cas l'atelier
ne peut abriter en raison de sa superficie que des équipements
légers (machines à couche, une dynamo pour faire fonctionner
une meule, des tables de travail, un petit outillage etc ... ).
-
Un équipement léger de faible valeur marchande cons-
titué de moyens de travail de fabrication industrielle et de
moyens de travail de fabrication artisanale.
- La qualité du travail est médiocre dans beaucoup
de métiers pour des raisons liées soit à l'incompétence techni-
que du chef d'entreprise soit à l'insuffisance des outils à
disposition.
En plus ce secteur recrute sa clientèle dans les
couches sociales à revenus faibles,
et peu exigeantes sur la
qualité de la finition des produits présentés.
- Ce secteur connait une capacité d'accumulation très
faible car le profit susceptible d'être dégagé à partir de la
vente des produits est faible et est en quasi totalité utilisé
... / ...

57
à la satisfaction des besoins primaires. Les chefs d'entre-
prise de ce secteur ne font pas d'investissements ostentatoires
dans le domaine du social (ou très peu)
et n'ont
aucun signe
extérieur de richesse
(villa, voiture, etc . . . ).
- L'espace n'est pas différencié et subdivisé en
sous-espaces distincts ayant chacun sa fonction propre car le
même espace est utilisé aussi bien pour la production que pour
la réception des clients ou pour stocker les produits fabriqués.

58
IIème PARTIE
CONDITIONS DU DEROULEMENT DE
L'ENQUETE.METHODOLOGIE

59
CHAPITRE l
MOTIVATION
PREMIERE
ET
PREPARATIONS
INTELLECTUELLES

60
A - MOTIVATION
==========
Dans le quartier ou mes parents avaient élu domiGile
les grandes personnes avaient l'habitude d'envoyer les enfants
scolarisés dont elles avaient en charge l'éducation morale dans
les entreprises du secteur informel
quand ils étaient en pério-
de de congé scolaire dans le but de les empêcher de former des
bandes et de faire du vendalisme dans les quartiers environnants
ou encore de jouer ou de ~bagarrer dans les rues et de s'exposer
ainsi à des risques d'accidents. Chaque enfant était donc placé
dans une des ces entreprises
et étroitement surveillé par une
ou plusieurs des personnes adultes qui y travaillaient et avec
lesquelles leur~arents avaient des relations d'affinité. Pour
ce qui nous concerne (ainsi que mon grand frère) nos parents
nous envoyaient dans une entreprise de menuiserie située à une
centaine de mètres de notre domicile. Nous y allions tôt le
matin aussitôt après le départ de papa au travail ; à midi nous
rentrions à la maison pour déjeuner et dès 14H 00 nous devrions
retourner à lentreprise pour ne la quitter de nouveau qu'à 18H.
Pour nous occuper on nous faisait exécuter quelques menues tâches
tels ramasser les copeaux, les bouts de bois qui trainaient.
balayer les endroits sales du lieu de travail etc ...
Les adultes qui travaillaient dans cette entreprise se
plaignaient beaucoup souvent de leur sort et certains se plaisaient
même à nous dire comme pour nous mettre en garde "petit enfant,
i l faut bien travailler à l'école;
i l ne faut pas devenir comme
nous •.. nous n'avons pas d'avenir ..• nous travaillons ici depuis
plusieurs années et nous ne gagnons même pas un sous comme salaire" .
.../. ...

61
Plus tard quand je suis devenu adolsescent certains
des travailleurs de cette entreprise avaient monté leur propre
entreprise de menuiserie mais comme eux,
leurs travailleurs
continuaient àse plaindre des mêmes maux.
Je commençais à me poser des questions sur les condi-
tions de travail de ces travailleurs du secteur informel et à
prêter d'avantage attention à tout ce qu'ils disaient sur la
façon dont ils étaient traités
; de même je commençais à observer
plus attentivement la vie des chefs d'entreprise ou à écouter
d'une oreille attentive ce qui se racontait à propos de leur vie.
c'est ainsi que progressivement en mei est née la moti-
vation de poursuivre des recherches plus approfondies dans le
secteur informel. Mon D.E.A.
fut consacré à ce secteur et en par-
ticulier à son rapport avec la tradition et la modernité et à la
manière dont ce double rapport est géré dans les entreprises.
Pour faire ce D.E.A.,
je fus obligé d'aller au Sénégal
pour 15 jours afin d'y mener une enquête, espérant que les infor-
mations recueillies sur+rerrain me permettraient d'apporter des
réponses aux nombreuses questions que je me posais. Non seulement
beaucoup de questions étaient restées sans réponses
(les questions
concernant le statut social et le revenu des chefs d'entreprises)
mais des questions nouvelles étaient surgies et demeuraient elles
aussi sans réponses:
notre séjour limité au Sénégal joint aux
difficultés de transport et à la résistance des chefs d'entreprises
visités à Dakar à répondre à certaines de nos questions, nous
faisaient comprendre qu'il vaudrait mieux initier une 2éme enquête
ultérieurement, qui serait mieux préparée et se déroulant sur
une période plus longue.
... / ...

62
Cett~première enquête a beaucoup aiguisé notre faim
de connaissance en ce qui concerne l'objet de notre recherche.
La volonté de continuer cette recherche était née et nous avions
,
décidé de la mener non pas en privilégiant le travail de documen-
tation dans les bibliothèques mais celui de l'enquête sur le
terrain.
Cette motivation première, la volonté et ensuite la
décision qui en sont nées de faire plus et mieux en ce qui concerne
l'approfondissement des questions anciennes et nouvelles que nous
nous posions expliqueront la persévérance dont
nous avons dG faire
notred
. ,
d
~
preuve au cours d e
eux1eme enquete
preuve au cours
e
eux1eme
et sans laquelle tout eut
été impossible, en raison des difficultés matérielles et finan-
cières que nous €tions
oblig€s
d'affronter et qui fraient li€s
à
la faiblesse des moyens que nOus avions a.disnosition au moment
/
de l'enquête sans compter les résistances des enquêtes qu'il
fallait avant tout dans un effort de compréhension psychologique
appréhender pour pouvoir déterminer une stratégie de mise en
confiance
adapt€e.
B - PRÉPARATIONS
INTELLECTUELLES
=============================
Pour pouvoir tester la validité de certaines de nos
hypothèses de départ, nous avions besoin
avant de partir sur
le terrain, de les confronter à des données recueillies, par
d'autres chercheurs qui travaillaient sur le secteur informel.
P.P. REY notre directeur de Thèse et professeur d'Antrophologie
à PARIS VIII eut alors l'idée d'organiser des séminaires de
réflexions sur les problématiques du secteur informel dans les
... f ...

63
P.V.D. au G.R.E.T. qui réunissaient des étudiants de Doctorat et
des universitaires dotés d'une solide expérience de terrain. Ces
séminaires se sont déroulés sur une période de trois mois, de
juillet en août 83, au rythme d'un tous les quinze jours. Les
informations qui y furent échangées et portant sur les différents
niveaux de réalités du secteur informel (niveaux technique,
social, ceux concernant la production et l'organisation sociale
du travail etc .. ) nous ont permis d'affiner nos hypothèses de
travail,
d'élaborer de nouvelles pistes de réflexion et de nous
familiariser avec de nouveaux concepts ou tout simplement de
nous rendre compte des limites des concepts que nous utilisions
pour rendre compte de faits, phénomènes liés à la réalité du
secteur. De même au cours de ces séminaires il nous a été donné
de voir que le secteur informel était d'une grande hétérogénéité,
tant du point de vue de ses activités que de celui du niveau du
capital sociale des acteurs et des moyens techniques et profes-
sionnels utilisés. Dès lors il s'imposait à nous la nécessité de
faire un tri et une sélection parmi les activités du secteur
informel dont l'étude en rapport avec l'objet de notre recherche
permettrait d'éclairer nos hypethèses, de les confirmer ou in-
firmer. Mais à partir de quels critères choisir 1 Les critères
qui devraient nous permettre d'opérer ce tri devraient être
des indices annonçant une probabilité certaine de trouver dans
ces activités choisies les réponses aux questions que nous nous
posions. Ces critères devraient être construits mais pour cela
des études monographiques devraient au préalable être menées et
concernant les unités de production du secteur informel. La
comparaison des informations recueillies d'une unité à une autre
devrait nous permettre de mettre en évidence des caractéristiques
communes objectives et identifiables que partageront l'ensemble
des unités susceptibles de nous fournir des réponses aux ques-
tions que nous posions.
... / ..

64
CHAPITRE II
NOS
AMBITIONS
PREMIERES
DE
RECHERCHES ET
LES
==================================================
LIMITES
IMPOSEES
PAR
LES
CONDITIONS
DE
L'ENQUETE
=======================================================

65
A - Nos AMBITIONS DE RECHERCHE FACE AUX LIMITES DE
==============================================
=====:==========================:=============
NOS RESSOURCES
==============
En décembre 83 nous partions au Sénégal pour une durée
de 6 mois avec une somme de la 000 F représentant la moitié d'une
subvention qui nous était accordée par PARIS VIII grâce aux inter-
ventions de P.P. REY.
Notre enquête devrait concerner au préalable toutes
les régions du Sénégal afin de recueillir le maximum d'informa-
tions au
niveau de chaque localité sur les questions qui nous
préoccupaient, ce qui devrait nous permettre en comparant les
résultats obtenus d'expliquer certaines particularités qui
seraient constatées dans certaines régions et de construire un
modèle type d'organisation, de fonctionnement et de développement
de unités du secteur informel choisies pour notre recherche.
Malheureusement, cette grande ambition de départ fut vite rédui-
te à des limites plus étroites pour deux raisons
- La prem~ere raison était que les personnes que nous
connaissionspersonnellement~4uihabitaient
connaissionspersonnellement~4ui
dans les autres
régions (dont Diourbel, Kaolack et Ziguinchor) en dehors de
celles du Fleuve (Saint-Louis) et du Cap-Vert (DAKAR) et qui
étaient susceptibles denouÊccueillir chez elles et de nous
recommander aux chefs d'entreprises de leur connaissance.
ou
n'étaient plus à leur ancienne adresse, ou étaient revenues
habiter à Dakar. Certaines parmi elles que j'ai pu contacter
à DAKAR avaient eu l'amabilité de nous communiquer quelques
noms et adresses de chefs d'entreprise
exerçant dans les régions
... / ...

66
où elles étaient par contre elles ne pouvaient nous recommander
à aucune personne susceptible de nous héberger
3ur place durant
notre séjour, alors que nous étions même prêt à allouer une
somme de 20 F (1 000 FCFA) par jour
durant notre séjour à toute
personne qui nous offrirait l'hospitalité pourvu que nous puis-
sions bénéficier de bonnes conditions pour travailler.
- La 2ème raison était que, nos moyens financiers
étant très limités, nous ne pouvions pas nous permettre pour
notre séjour dans les régions où nous n'avions pas d'attache
d'aller loger à l'hôtel: d'après nos informations, il fallait
entre 150 F et 200 F par
~jour comme dépense à faire pour nous
assurer le stricte minimum (une chamble à l'hôtel et les trois
repas de la journée dans les gargotes) ce qui reviendrait à
4 500 F - 6 000 F de dépenses pour un mois de séjour dans une
région ; cette somme représente à peu près la moitié des moyens
financiers qui nous étaient alloués pour six mois.
L'absence de toute attache dans les localités de
l'intérieur du pays (Saint-Louis et Dakar non compris), les
moyens financiers limités dont nous disposions dûrent nous contraindre
à reconsidérer notre projet d'enquête de départ dont le champ
fut réduit à Saint-Louis et Dakar.
B - LA RÉDÉFINITION DE NOTRE CHAMP D'ÉTUDE
======================================
Le choix de ces deux villes n'a pas été fortuit:
Saint-Louis et Dakar nous offraient un triple avantages pour
la faisabilité de notre enquête et de nos recherches :
••• 1••.

67
- D'abord Saint-Louis et Dakar sont des villes où
nous avons des parents proches et où nous pouvons bénéficier
d'une structure d'accueil pour notre séjour sans nous trouver
dans la nécessité de faire des frais importants ce qui nous
permettrait avec l'économie que nous aurions fait~sur nos moyens
de pouvoir envisager s'il en était besoin pour les soins de
l'enquête et de la recherche, la possibilité de prolonger notre
séjour au Sénégal
sans avoir à trop nous inquiéter sur le plan
financier. Une recherche on sait quand
on la commence ; mais
une fois qu'on l'a commencée on doit se plier à ses exigences
or celles-ci peuvent être contraires à nos prévisions
en ce
qui
concerne leur nombre, nature, importance etc .• , ce qui veut
~ 1
dire que la progression programmée de la recherche peut toujours
être affectée et que en l'occurence sa progression réelle peut
i.
,
être retardée par des contingences diverses: c'est en prévision
: !
.,
d'une telle éventualité que nous avons voulu prendre nos pré-
cautions en faisant le choix de dépenser le moins possible.
Saint-Louis et Dakar offraient les conditions de la réalisation
d'un tel objectif méthodologique et stratégique.
b) Dans ces villes nous avions aussi beaucoup de rela-
tions que nous étions sûr de pouvoir mobiliser à tout moment
pour obtenir des adresses, recommandations, contacts pouvant
faciliter nos manoeuvres d'approche en direction des chefs d'en-
treprise du secteur informel. Pour pouvoir approcher ces chefs
d'entreprise et mener notre enquête auprès d'eux, il fallait
que nous soyions accepté d'eux d'abord ncn n~s en tant que
enquêteurs ou chercheurs mais en tant que personne ayant une
i~entité sociale repérable et reconnue selon leur propre système
de référence. Or ce système de référence veut que l'identité
... f • ..

68
personne inconnue, sa reconnaissance, son acceptation passe
par celle d'une personne connue et reconnue qui en a fait son
protégée. C'est cette identité première, extérieure à nous,
mais fonctionnelle que nous rech~rchions dans la mobilisation
et la mise en oeuvre de nos relations pour obtenir des contacts,
recommandations auprès des chefs d'entreprise: Saint-Louis
et Dakar étaient pour nous la villes les plus indiquées pour
obtenir avec facilité ce contact.
c) Saint-Louis et Dakar sont deux villes historiques
nées la première avec le début de la présence française au
Sénégal à la fin de la première moitié du 17e Siècle et la secon-
de avec le début de la colonisation française au Sénégal à la
fin
de la 2ème moitié du 1ge Siècle. Ces villes en raison
de leur statut (Capitale du Sénégal pour Saint-Louis et Capital
de l'A.O.F. pour Dakar jusqu'en 1960) étaient des centres écono-
miques et administrtifs où très vite ce développèrent le salariat,
des activités artisanales traditionnelles puis modernes produi-
sant pour le compte de la population urbaine autochtone. Ces
deux villes constituent des centres importants du secteur in-
formel de production de bien et services modernes en raison
de leur forte urbanisation (Dakar surtout).
Par ailleurs nous avions pensé par hypothèse que c'est
dans ces villes fortement marquées par le fait colonial, ouver-
tes tôt au mode de production capitaliste et connaissant un
secteur informel de production de biens et services modernes
développé que nous aurions le plus de chance de recueillir le
plus d'informations et de données pertinentes pour conforter
ou invalider nos hypothèse de recherche sur le secteur informel •
. ../ ...

69
,3
L'ENQUETE A SAINT LOUIS
-----------------------
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

70
CHAPITRE III
PRE - ENQUETE
MENEE
A SAINT-LOUIS
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

71
A - LES RAISONS DU DÉMARRAGE DE L'ENQUÊTE À SAINT-LoUIS
===================================================
Nous avions choisi Saint-Louis et Dakar comme terrain
de notre enquête parce que nous y avions de la famille, ~n
pied à terre et des relations pouvant faciliter nos contacts
avec les chefs d'entreprise du secteur informel, lequel y est
plus développé que partout ailleurs au Sénégal.
D'abord nous avons démarré notre enquête, nos recher-
ches à Saint-Louis. Pourquoi? Il Y a eu deux raisons majeures :
- D'abord Saint-Louis est une ville peu étendue où
l'on peut se déplacer d'un endroit à un autre à pied sans se
fatiguer beaucoup et en plus les moyens de transport public
y sont bon marché. Cette situation devrait nous permettre de
pouvoir visiter un
grand nombre d'entreprises du secteur informel
pendant notre période de séjour, et, par conséquent de recueillir
une masse d'informations importantes dont l'exploitation partiel-
le permettrait non seulement de jeter un éclairage nouveau sur
certains de nos hypothèses de recherche mais aussi de nous révé-
ler vite les points, domaines où un complément d'information
est nécessaire ainsi que les grands axes devant constituer la
charpente de nos recherches. Ce gain de temps nous permettrait
de faire une revisite des entreprises déjà concernées par notre
enquête. Ensuite, à Dakar, les grands axes de recherches déjà
élaboré pourraient nous servir pour notre enquête .
.../ ...

72
- La deuxième raison étant que nos parents habit~nt
à Saint-Louis et y ayant nous même un pied à terre nous pouvions
y bénéficier de bonnes conditions de travail sans avoir à devoir
faire des dépenses importantes lors de notre séjour, ce qui
nous permettrait de faire des économies en prévision de notre
séjour prochain à Dakar où en toute évidence nous aurons à comp-
ter d'avantage sur nous même.
B - IDENTIFICATION DES ENTREPRISES DU SECTEUR INFORMEL
==================================================
ET PRÉ-ENQUÊTE
==============
b.l - IDENTIFICATION DES ENTREPRISES DU SECTEUR INFO~~ŒL
D'abord nous avons procédé à la visite de la ville
afin de localiser quartier par quartier autant que faire se
peut les différentes entreprises qui s'y trouvent. Pour atteindre
;
notre objectif nnu~ avons arpente:
les grands artères de la
ville d'abord à Sor ensuite à l'île et à la pointe-Nord et noter
tous les repères aux abords des entreprises observées et qui
nous permettraient de les localiser facilement. Nous demandions
aussi aux passant qui habitaient à l'intérieur des quartier
visités de nous indiquer l'emplacement des entreprises qui se
trouvaient dans leur voisinage et qui ne nous étaient pas données
de pouvoir
observer directement. Ainsi par cette méthode nous
avions pu localiser 36 entreprises dont nous avions noté les
ad~esses, le type d'activité qui s'y déroulaient ainsi que les
noms des différents propriétaires.
...
,
... / ...
• 1
...
F

73
b. 2 - PRE E;~QUETE
0 -
0
Après ce premier travail de reconnaissance pratique
des entreprises à devoir visiter nous avons entrepris de mener
une pré-enquête dont les informations qui en seraient recueillies
devraient nous servir de base pour fixer les premières orienta-
tions méthodologiques de nos recherches.
Nou~ aVon~
'i
aVon~ mene cette première enquête en constituant
i~
!'1
un échantillon de 5 chefs d'entreprises appartenant à ces dif-
férents corps de métier: maçonnerie, menuiserie bois, menui-
serie métallique, mécanique auto -
confection. Ces chefs d'en-
treprise étaient des genR qui nous connaissions depuis de longue
date soit parce que pour certains nous étions des amis d'enfance
soit parre que pour d'autres, nous étions des voisins de quartier
et qu'il y avait une grande sociabilité entre nos familles res-
pectives. Cette pré-enquête s'est déroulée en deux temps:
Dans un premier temps nous avons établi un entretien
non directif avec chacun des chefs d'entreprise constituant
notre échantillon. La consigne qui était posé à tous était
"Vous êtes chef d'une entreprise,
parlez nous de votre trajec-
toire personnelle et professionnelle en commençant depuis la
période où vous étiez vous-même un apprenti". Les discours libres
tenus par les rhefR d'entrepri~e ~ur lpur vécu social et profes-
sionnel nous permettaient d'obtenir des informations sur leurs
situations sociales passées et présentes et les rapports de
correspondance entre celles-ci et leurs statuts successifs
dans leur profession ainsi que d'apprécier les changements in-
tervenus au niveau des rapports subjectifs qu'ils entretenaient
avec leurs propres situations sucessivement.
... / ...

74
Dans chacun de ces discours les différents thèmes
spontanément et successivement abordés concernent trois catégories
de faits: l'apprentissage du métier, le capital de départ qu'il
leur fallait constituer après la fin de leur apprentissage pour
pouvoir s'installer comme chef d'entreprise, le profit que les
conditions particulières d'exercice de leur professeur leur
permet d'obtenir ou d'escompter. Chacune de ces catégories de
discours pouvait se laisser décomposer en sous catégories telle
le traitement des apprentis, la progression dans la maîtrise
de la profession etc ..• pour l'apprentissage, ou encore l'aide
des parents, l'épargne personnelle etc ... pour la constitution
du capital de départ, ou encore les dépenses d'entretien des
apprentis, la concurrence dans le secteur pour les profits
l'analyse de contenu des différents discours recueillis nous
permettait de bâtir un guide pour nos prochaines interviews
par contre une première analyse sur les comportements des
personnes interviewées après observations faites laissait sup-
poser que d'une manière générale, elles aimaient parler
d'elles-mêmes et raconter leur histoire sociale et profession-
nelle surtout Si celle-ci comporte des évènements où ~lles se
sont impliquées
d'une façon particulièrement valorisante ou
encore de réalisations qu'on peut mettre sur le compte de
leur mérite personnel. Les évènements, faits parçus par eux
comme valorisants pour leurs personnes sont racontés ~vec une
grande intensité émotionnelle et chaque fois que c'était ainSi
nous étions invités à donner des jugements de valeur sur des
faits ou comportements racontés, à nous impliquer et à nous
positionner. Ces moments de l'entretien sont d'une importance
capitale pour deux raisons :
... / ~ .~

75
a) Une réponse devait être apportée à la demande d'im-
plication que le chef d'entreprise nous adressait et dans sa
nature sa forme et son contenu elle devait être une preuve suf-
fisante pour lui que non seulement nous le comprenions mais
partagions aussi ses sentiments sur son propre vécu, autrement
la méfiance à notre égard s'installait en lui en même temps
que des mécanismes de résistance se dressaient et petit à petit
alors le discours se vidait de toutes informations utiles. La
demande d'implication qui était quasi manifste pendant ces mo-
ments où le discours était fortement
chargé d'émotion
nous
permettait en acceptant les règles du jeu de l'implication (nos
réactions répondaient toujours aux attentes du chef d'entreprise)
de créer les conditions subjectives dH renouvellement de la
confiance que le chef d'entreprise plaçait en nous, et qui est
le moteur même de l'entretien.
b) Ces moments particuliers dans l'entretien nous
donnaient toujours l'occasion après avoir joué le jeu de l'impli-
cation passive, d'inviter le chef d'entreprise à aller plus au
fond des choses dans les faits ou évènements qu'il relataient
afin de nous permettre de mieux le comprendre et ainsi de mieux
faitre notres
ses sentiments,
ses jugements.
Les explications supplémentaires qui étaient données permettaient
souvent d'éclairer le sens d'autres faits ou événement antérieu-
rement relatés ou de dévoiler des informations qui seraient
volontairement tues.
Ces premiers enseignements quant à la manière dont
nous devrions nous comporter pour instaurer la confiance entre
le chef d'entreprise et nous au mOlnent de l'entretien et surtout
... / ...

76
le motiver à mettre à notre disposition toutes les informations
qu'il possède sur les sujets qu'il aborde dans son discours
nous servirons beaucoup ultérieurment.
Le deuxième temps de cette pré-enquête consistait à
visiter les entreprises des chefs d'entreprise retenus dans
rotre échantillon.
Ces visites devraient au préalable recevoir l'approbation de
ces derniers et s'effectuer toujours en leur présence en un
jour et un moment de la journée choisis par eux. Le temps de
visite était de 2 à 3 H 00 ~e qui était suffisant pour recueil-
lir toute information sur la vie de l'entreprise, les activités
qui s'y mènent,
l'organisation du travail etc ... Les informations
qu'il nous était donné de pouvoir recueillir au cours de ces
visites concernaient :
a) La localisation de l'entreprise et ses
caractéristiques topographiques:
l'adresse de l'entreprise,
superficie totale et parts de celles-ci qui sont réservées res-
pectueusement au traitement administratif des problèmes et aux
activités de production proprement dites,
la nature des cons-
tructions, leur fonction,
les caractéristiques des matériaux
utilisés etc ...
b) Le
mobilier et les moyens de travail : le
nombre de bureaux de travail, de chaises ou de fauteuils,
leurs
.
la
d

.
etat,xnature
es materlaux
etat,xnature
es
ayant servi à leur fabrication,
le nom-
bre de téléphones
installés,
les moyens de travail utilisés,
leur état, âge,
fonction,
valeur d'achat etc ...•
... / ...

77
c) Les activités de production :
les différents
biens et services que l'entreprise est susceptible de produire
et ceux qu'elle produit réellement,
les biens et services réguliè-
rement produits et ceux qui le sont moins,
les biens et services
en cours de production et ceux finis mais en attente d'être
livrés, leurs destinataires et les dépenses engagées etc . . . .
d) L'organisation sociale du travail:
l'âge,
l'ancienneté des apprentis,
les relations de parenté avec le
chef d'entreprise,
les différentes tâches qu'ils exécutaient
chacun au moment de la visite et leur degré de complexité,
les
avantages responsabilités et pouvoir octroyés par le chef d'en-
treprises à certains apprentis etc ...
Au cours de ces visites le chef d'entreprise mettait

d
"
l<i.s f
'
, '1 d'
,
a notre
ispos~t~on toutes 1n ormat~ons qu ~
etena~t
a notre
ispos~t~on toutes 1n ormat~ons qu ~
sur les
sujets questionnés.
Cependant nous constations une certaine
résistance chez ce dernier à nous répondre si nos questions
se
rapportaient aux conditions de travail des apprentis ou au
profit qu'il escomptait réaliser par la vente des produits finis
encore non livrés à leur dest~ires, ou en cours de fabrication.
Si par contre nos questioni.~apportaientaux meyens
de travail et à la clientèle notre chef d'entreprise devenait
très prodigue en informations : chaque moyen de travail avait
son histoire. celle des circonstances particulières où il a
été acquis et cette histoire était toujours intiment liée à
une part de l'histoire personnelle et professionnelle du chef
d'entreprise qui aimait la raconter pour se valoriser à nos
yeux, ql,ant a sa clientèle,
il aimait en parler volontier,
négativrnent tant elle était considérée comme l'une des causes
....
, .. /

78
principales de ses difficultés financières en raison du fait
qu'elle respectait très peu ss engagements de payement en cas
d'achat à crédit de ses produits.
C - CONCLUSION MËTHODOLOGIQUE SUR LE DËROULEMENT
============================================
DE LA PRE-ENQUÊTE
=================
Quelques conclusions méthodologiques se dégagent à
propos des constats faits au cours du déroulement de la pré-
enquête :
-
les visites des entreprises constituaient pour nous
des moments privilégiés de dialogues avec les chef d'entreprise
les entretiens pouvaient s'étayer sur des supports concrets,
matériels car chaque fait se déroulant dans l'entreprise ou
objet s'y trouvant pouvait être l'objet d'un questionnement
de notre part qui ~'ouvrait sur un entretien.
-
Dans le souci de ne pas heurter la susceptibilité
des chefs d'entreprise, d'entrée de jeu au cours de nos visites
nos questions devaient aussi lontemps que possible porter d'abord
non pas sur les rapports entre eux et les apprentis ou sur leurs
revenus mais sur les moyens de travail,
les différents procès
de travail en cours,
les difficultés de recouv~ement des dettes
contractés par les clients etc . . .
bref sur des choses qui ren-
dent compte de leur mérite ou de leurs difficultés.
... / ...

79
Ces considérations méthodologiques nous suggéraient
l'idée pour les enquêtes à venir rl'abord de commencer par la
visite des entreprises, là où nos questions avaient le plus
de chance d'accrocher nos interlocuteurs. étant donné leur carac-
tère concret et l'intérêt qu'elles pouvaient susciter chez ces
derniers.
~ Au cours des entretiens
ilon directifs nous devrions
accepter de nous impliquer en soutenant verbalement le chef
d'entreprise quand son discours le met dans un état émotionnel
particulier ~t qu'il nous demande de prendre partie et de donner
notre jugement sur les faits relatés.
:{,
~
~..~

80
CHAPITRE IV
TENUE
ET
DEROULEMENT
DE
L'ENQUETE
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
A SAINT - LOUIS
================

RI
Au cours de notre pré-enquête nous demandions aux
chefs d'entreprise visités de nous recommander auprès d'autres
chefs d'entreprise de leur connaissance,
exerçant dans la même
branche d'activité ou dans d'autres dans le but de compléter
notre première liste de chefs d'entreprise à visiter
que
nous avions dressée antérieurement en visitant les différents
quartiers de la ville.
Avec les parents et amis, nous aviosn fait
la même
demande. Dans tous les cas, nous nous efforcions pour toute
entreprise figurant sur notre première liste et présentant à
nos yeux un intérêt quelconque d'obtenir des recommandations
pour les visiter en priorité.
Si la pré-enquête s'est déroulée en deux phases, deux
temps:
d'abord entretiens aves les chefs d'entreprise et ensuite
les visites des entreprises avec relevé de tous les éléments s'y
trouvant, descriptions des activités etc ... par contre l'enquête
elle s'est déroulé en trois phases correspondant à trois temps
différents:
d'abord une première visite des entreprises avec
les chefs d'entreprise ensuite un entretien avec chacun d'eux
dans son bureau et ensuite une deuxième visite des entreprises
avec entretiens, relevé et description des éléments matériels
et faits ou activités s'y déroulant. Le découpage de l'enquête
en trois temps devrait nous permettre dès notre premier contact
avec les chefs d'entreprise de trouver entre eux et nous des
sujets de conversation sur des objets ou faits réels ayant un
certain intérêt pour eux (première visite de l'entreprise)
... / ...

82
par la médiation de ces sujets de conversation d'enclencher un
entretien sur des thèmes déjà choisis (deuxième temps de l'enquê-
te) et ensuite à la fin refaire une visite des entreprises au
cours de laquelle tout en continuant l'entretien nous observions
les lieux,
faisions des relevés et des descriptions.
A - PREMIÈRE PHASE
1ÈRE VISITE DES ENTREPRISES
============================================
a.l -
PRESENTATION: DECLINER SON IDENTITE SOCIALE
ET PROFESSIONNELLE
D'abord nous déclinions notre identité et celle de la
personne qui nous a recommandé.
Ensuite nous expliquions le
but de notre enquête en prenant toute fois soin de bien insister
sur deux choses:
d'abord notre indépendance vis-à-vis des ins-
titutions du pays et cela afin d'éviter d'être perçu comme un
enquêteur de l'Etat et ensuite l'intérêt que les résultats de
cette enquête pourraient susciter chez les O.N.G. ou autres
organismes internationaux d'aide.
Cett mise au point visait
deux choses; d'une part lever toute ambiguité sur la destination
possible de nos recherches et créer entre les chefs d'entreprise
et nous une relation de travail bâtie sur la confiance et d'autre
part susciter chez nos sujets enquêtés une motivation réelle
à coopérer avec nous. Après cette mise au point nous expliquions
aux chefs d'entreprise la démarche que nous avions choisie pour
mener notre enquête en prenant là aussi soin de bien insister
sur la nécessité pour la deuxième phase de nous entretenir seul
avec chacun d'eux dans un endroit isolé où nous ne serions pas
dérang~ tout le temps et pour la troisième phase d'avoir des
... / ...

83
entretiens individuels avec quelques apprentis que nous aurions
choisis et en dehors de leur présence. Ensuite nous don nions
la parole aux chefs d'entreprise pour qu'ils donnent leur avis,
fassent des remarques sur ce que nous
avons
dit, donnent leur
accord ou désaccord à propos de la tenue de l'enquête.
a.2 - MISE EN TRAIN
CREER LES CONDITIONS D'UNE
FAMILIARITE
Nous visitions les entreprises accompagné des chefs
d'entreprise et nous posions des questions d'abord sur les pro-
duits déjà fabriqués ou en cours de fabrication.
Nos questions
concernaient les outils et matériaux utilisés pour leur fabri-
cation, leur temps de fabrication,
leur coût, l'identité et
le nombre d'apprentis qui ont réellement participé au travail,
leuo destinatair~etc.
destinatair~etc .. Ensuite nous nous tournions vers les
moyens de travail pour poser des questions sur leur fonction,
la fréquence de leur utilisation, l'identité des apprentis qui
les réalisaient,
leur âge,
coût etc . . . Nous écoutions attentive-
ment toutes les réponses qui étaient apportées à nos questions
et aux besoins faisions des remarques valorisantes ou des cri-
tiques positives sur les produits du travail qui nous étaient
présentés.
Nous faisons remarquer que nous ne prenions pas de
notes au cours de cette première visite qui était destinée sim-
plement à prendre connaissance des pratiques professionnelles
et stratégiques qui se déroulaient dans les entreprises, des
produits qui s'y fabriquaient etc ... à avoir des interrogations
concrètes,
à nous familiariser avec les chefs d'entreprise
... / ...

84
et à trouver le moment stratégique au cours des conversations
pouvant permettre le passage naturel à la deuxième phase de
l'enquête c'est-à-dire l'entretien proprement d i t ; ce moment
stratégique est identifiable par la force de la charge affecti-
ve contenue dans les propos des chefs d'entreprise, l'intérêt
particulièrement grand qu'ils donnent à certains faits dont
ils parlent en abordantsDontanément l'un
des thèmes de notre
guide d'entretien.
B - DEUXIÈME PHASE
INTERVIEW NON DIRECTIVE ET
===========================================
QUESTIONNAIRE
=============
b.l - DEROULEMENT DE L'INTERVIEW
Le deuxième temps de l'enquête qui commençait avec
l'entretien (un guide comportant plusieurs thèmes à explorer
était construit et assorti de plusieurs questions fermées)
se
déroulait dans les bureaux des chefs d'entreprise. L'entretien
débutait toujours sur le thème de conversation qui au dernier
moment de la première phase de l'enquête était spontanément
abordé. Tous les thèmes de notre guide devraient être épuisés
et il n'y avait pas un ordre fixé dans la succession des thèmes
abordés. Le passage d'un thème à un autre devait se faire spon-
tanément sinon nous aidions à cela par des interrogations bien
orientées à propos de faits ou d'événements relatés et ayant
un intérêt évident pour nos interlocuteurs.
Si d'autres thèmes
ne figurant pas dans notre guide, sont abordés nous les prenions
en compte si toutefois nous estimions, étant donné la nature
... / ...

85
et l'importance des nouveaux problèmes abordés ils pouvaient
par leur approfondissement aider à une meilleure compréhension
d'un des rapports multiples qu.
entretiennent les chefs d'en-
treprise avec le secteur traditionnel et ou moderne et dont
l'importance structurante n'était pas auparavent perçue au
moment de la pré-enquête
;dans ce cas ces nouveaux thèmes
étaient ajoutés à notre guide pour servir de thème d'entretien
comme les autres.
Contrairement à la première phase de l'enquête où
aucune note n'était prise, au cours de la deuxième phase tous
les entretiens étaient soigneusement transcrits. Les chefs
d'entreprise étaient d'accord pour que nous transcrivions les
entretiens étant donné la confiance qu'ils nous accordaient
et la possibilité qu'ils e~~levoyaientà travers nous de faire
entendre leur cause auprès des institutions nationales ou in-
ternational~susceptiblesde s'intéresser aux problèmes que
pose le développement du secteur informel.
b.2 - DEROULEMENT DU QUESTIONNAIRE
Le questionnaire qui était adjoint à notre guide
comportait surtout des questions fermées destinées à recueil-
lir des informations précises soit sur les comportements réels
des chefs d'entreprise dans les domaines social, économique,
professionnel soit sur des données chiffrables pouvant donner
des indications sur le niveau de développement économique des
entreprises (chiffre d'affaire, volume de production etc ..• )
ou sur le degré plus ou moins grand d'adhésion des chefs d'en-
treprise au normes traditionnelles (nombre d'épouses, de dépen-
dants etc ... ).
... / ...

86
Ces questions étaient des questions
diEhotomiques
ou à choix multiples formulées d'une façon simple et claire
afin d'éviter toute ambiguité de sens et pour les rendre compré-
hensibles de tous dans le même sens. Nous avions fait plusieurs
exemplaires de ce même questionnaire que nous comptions distri-
buer aux chefs d'entreprise afin qu'ils puissent les remplir
quand ils en auraient le temps si au moment de notre passage
nous ne pouvions le leur administrer directement. Mais heureu-
sement la disponibilité dont faisaient montre les chefs d'entre-
prise à notre endroit au cours des entretiens était telle que
en aucun moment nous ne nous étions trouvé en situation de
devoir laisser un exmplaire de notre questionnaire à un chef
d'entreprise pour qu'il le remplisse seul. Pour que les chefs
d'entreprise puissent comprendre nos questions et y répondre
nous les formulions nous mêmes verbalement en français
(cer-
tains ne savaient pas bien lire le français mais pouvait le
comprendre) d'abord et en ouolof ensuite s ' i l en était besoin.
Comme pour le guide i l nous arrivait en cours d'enquê-
te d'ajouter de nouvelles qustions à notre questionnaire ; dans
ce cas nous revisitions toujours les chefs d'entreprise à qui
antérieurement nous n'avions pas soumis ces nouvelles questions
pour à leur tour les leur administrer.
Pour fermer cette deuxième phase de l'enquête nous
demandions toujours aux chefs d'entreprise (question ouverte)
de nous dire leurs souhaits de changement tant en ce qui con-
cerne les structures de leur entreprise, les conditions de la
production que pour ce qui concerne la branche du secteur
... / ...

87
informel concernée par leurs activités.
Les souhaits de change-
ment formulés par les chefs d'entreprise concernaient surtout
les moyens qui à leur avis n'étaient pas suffisamment performants
pour leur permettre de produire des biens et services modernes
qualitativement équivalents à ceux de même type produi~par
les entreprises du secteur moderne. La formulation de tels souhaits
constituait toujours pour nous le passage qui nous permettait
d'aborder la troisième phase de l'enquête qui consistait à la
revisite des entreprises assortie d'entretien avec les chefs
d'entreprise autour de questions concrètes concernant les moyens
de production
à disposition, les procès de production en cours
etc ... et de description des techniques employées.
C - TROISEME PHASE
2ÈME VISITE DES ENTREPRISES
ET APPROFONDISSEMENT DE CERTAINS THÈMES ET
==========================================
ENTRETIEN AVEC LES APPRENTIS
============================
Cette troisième phase de l'enquête consistait à repren-
dre certaines informations qui nous étaient données par les chefs
d'entreprise à propos de questions touchant les moyens de
pro-
duction,
les procès de production, etc . . . au cours de la première
phase de l'enquête et de les approfondir avec eux. Cette troisiè-
me phase de l'enquête se déroulait bien tant que nos questions
concernaient d'autres domaines que les rapports sociaux de produc-
tion ou ne concernaient ceux-ci que superficiellement : dans ce
cas les chefs d'entreprise ne manifestaient aucune gène ou résis-
tance pour répondre nos questions,
ce qui n'était pas le cas si
.:./ ...

88
par contre par nos questions nous cherchions à avoir les précisions
détaillées sur la particularité des rapports sociaux qui les lient
aux apprentis.
Il faut cependant faire
remarquer qu'au cours de
la deuxième phase d'enquête, pendant les entretiens, les chefs
d'entreprise abordaient spontanément et fréquemment la question
de leurs rapports
avec leurs anciens patrons quand ils étaient
de simples apprentis.
Le constat de cette différence d'attitude
nous avait conduit à modifier en partie notre démarche : nous ne
demandions plus aux chefs d'entreprise de nous définir la parti-
cularité de leurs rapports sociaux de production avec leurs ap-
prentis mais plutôt de comparer les carattéristiques de ceux-ci
avec ceux des anciens rapports qui s'étaient établis entre eux
quand ils étaient apprentis avec leurs anciens patrons. Les ré-
ponses que les chefs d'entreprise apportaient à notre nouvelle
formulation de question étaient très critiques en ce qui concer-
naient les comportements et les pratiques sociaux des apprentis
ce qui laissait entrevoir des difficultés possibles pour ces
chefs d'entreprise de transposer au niveau de leurs rapports
avec leurs apprentis les mêmes normes qui naguère structuraient
leurs rapports avec
leurs anciens patrons.
Ces critiques indiquaient qu'il y avait émergence
chez les apprentis de nouveaux comportements et pratiques à
vocation structurante de nouveaux rapports sociaux de produc-
tion et qui rentraient en conflit avec ceux que les chefs d'en-
treprise tendaient à s'imposer. Nous devions donc aussi interro-
ger les apprentis sur ce qu'il en était du vécu de leurs rapports
avec leurs patrons, de leurs conditions de travail : cet entre-
tien avec les apprentis devait se faire sans la présence des
chefs d'entreprise afin d'éviter que cell-ci n'influence le
contenu des informations qui seraient livré.
Cette mise à
... / ...

89
l'écart des chefs d'entreprise au moment des entretiens avec
les apprentis n'était évidemment pas toujours bien acceptée
par ceux-là. Certains des chefs d'entreprise cherchaient
à
contrôler
ces entretiens en voulant nous imposer des appren-
tis de leur choix sélectionnés parmi les plus jeunes, les moins
expérimentés et compétents. Les chefs d'entreprise justifiaient
le choix de ces apprentis par le fait que c'était ces derniers
qui étaient les moins occupés à la production et dont l'arrêt
de travail Cà cause des entretiens)
leur causerait le moins
de préjudice. Devant ces contraintes nous étions obligés, afin
que toutes les catégories d'appentis puissent être prises en
compte par notre enquête, d'attendre parfois la fermeture des
entreprises pour pouvoir continuer nos entretiens.
Il nous est
arrivé aussi de nous rendre au domicile de certains apprentis
pour pouvoir nous entretenir avec eux.

90
CHAPITRE V
LES
ENJEUX
DE
L'ENQUETE
==========================

91
A - LES RUMEURS FACILITATEURS
=========================
Si au départ l'aide de notre entourage nous était
nécessaire pour tisser nos premiers contacts avec les chefs
d'entreprise,
au bout de quelques deux semaines d'enquêtes
nous n'étions plus obligés pour nous faire accepter de ces
derniers de nous présenter à eux comme le recommandé de tel-
le ou telle personne de leur connaissance parce que beaucoup
de chefs d'entreprise avaient déjà entendu parler de nous
d'une façon flatteuse de leurs collègues que nous avions dé-
jà visités et souhaitaient ou cherchaient même à nous rencon-
trer. Cette bonne disposition de certains chefs d'entreprise
à notre égard se traduisait des fois quand nous les rencon-
trions par des marques de considérations un peu excessives
telles des invitations à diner.
Cette situation jouait certes
un rôle facilitateur en ce qui concernait le déroulement de
notre enquête mais elle était aussi la traduction stratégique
au niveau des chefs d'entreprise d'une volonté de séduction
dirigée envers nous tant nous représentions à leurs yeux, à
la faveur des rumeurs qui circulaient sur nous à propos de
nos possibilités d'interventions bien faisantes dans le sec-
teur informel, quelqu'un susceptible de par ses relations
d'intéresser l'Etat, les a.N.G. et autres organismes interna-
tionaux à leurs problèmes tels qu'ils les percevaient: manque
d'équipements performants.
D'ailleus au cours de notre enquête plusieur fois des chefs
d'entreprise ont cherché à nous arracher des promesses dans
ce sens mais nous n'avions jamais voulu faire des promesses
à qui que ce soit : nous nous contentions tout simplement de
... / ...

92
de dire que nous fairions
tout notre possible pour que les ré-
sultats de l'enquête parviennent à des décideurs ouverts à
leur
cause.
Cette situation où les chefs d'entreprise cherchaient
sans cesse à nous impliquer ne nous gênait pas outre mesure
car nous savions que c'était inévitable; nous nous y attendions
et nous savions en outre qu'elle pouvait jouer un rôle facilita-
teur pour notre enquête si nous savions bien la gérer et aussi
la tourner à notre avantage. Mais un jour au cours de nos visites
un chef d'entreprise nous dit que le président de la chambre
des métiers de la région du fleuve voulait nous voir d'urgence
car l'enquête que nous faisions n'avait pas été l'objet d'une
demande d'autorisation adresser au Gouverneur de la région du
fleuve et à la chambre des métiers. Comment la chambre des me-
tiers savait-elle que nous menions une enquête dans le milieu
des chefs d'entreprise du secteur informel? Telle était la
question que nous nous étions posée aprês avoir reçu cette infor-
mation. Plus tard de la bouche d'un autre chef d'entreprise
à qui nous rendions une deuxiême visite nous obtenions quelques
informations explicative sur la question qui nous préoccupait
un chef d'entreprise quenous avions déjà visité et qui avait
comme beaucoup d'autres cherché à nous arracher une promesse
de fourniture d'équipement était allé voir le président de la
chambre des métiers qu'il croyait être au courant de notre
enquête pour l'engager à user de son influence pour obtenir
auprès de nous une promesse,
allant dans le sens de ses atten-
tes. C'est ainsi que ce dernier qui ignorait jusqu'ici tout
de nous avait voulu nous rencontrer.
. .. 1...

93
Nous reviendrons un peu plus loin sur la question
de nos rapports avec les chambres de métiers et autres insti-
tutions (SOSEPRA, SONEPI)
dont la vocation c'est d'encadrer
les chefs d'entreprise du secteur informel de production et
de service.
B - DEMANDE D'INTERVENTION ET D'AIDE
======================~=========
Si pour nous enquêteur et chercheur ce qui nous inté-
ressait au moment de notre enquête c'était de recueillir le
maximum d'informations sur les principaux acteus sociaux du
secteur informel ainsi que sur leurs rapports tels qu'ils se
définissent dans le champs des pratiques socio-professionnels
et ceci afin de tester la validité de nos hypopthèses de re-
cherches sur la questions des rapports sociaux de productions
dans les entreprises du secteur informel, par contre ce qui
semblait préoccuper les sujets concernés par notre enquête
pendant que celle-ci se déroulait c'était ce que les résul-
tats de cette enquête pourrait à court ou moyen terme leur
apporter comme avantage,
en leur permettant par exemple de
coopérer avec des entreprises étrangères ou d'avoir de nouveaux
débouchés pour leurs produits ou encore en leur permettant par
voie de financement extérieur d'acquérir de nouveaux équipements
plus performants.
Cette préoccupation,
les chefs d'entreprise
l'exprimaient tantôt par une demande explicitement formulée
à notre intention et tantôt
à travers des sous-entendus qui
ne laissaient subsister aucune ambiguité quant à leur sens .
. . . / ...

94
L'enquête comportait pour eux un enjeu certain. Ce qui expli-
quait à la fois la facilité avec laquelle nous
nouions contact
avec eux (après le déclenchement de la rumeur nous concernant)
les manoeuvres de séduction entreprises envers nous (les invi-
tations à diner) ainsi que les pressions plitiques auxquelles
certains tentaien~~ecourir pour obtenir de nous des promesses
d'interventions futures en leur faveur.
C - CONCLUSION MÉTHODOLOGIQUE
L'analyse de nos rapports avec les chefs d'entreprise
qui étaient concernés par notre enquête jusqu'à son étape actuel-
le nous a donné à comprendre qu'une enquête ne laisse pas indif-
férent ceux sur qui elle s'applique et qui se posent des ques-
tions sur :
-
l'identité sociale de l'enquêteur,
-
ce pourquoi ce dernier cherche précisément les infor-
mations qu'il cherche,
-
l'appartenance institutionnelle de l'enquêteur et
la destination de ses recherches,
-
la stratégie et les moyens à utiliser pour découra-
ger l'enquêteur ou influencer les résultats de son
enquête ou encore son action,
-
le comportement de l'enquêteur au cours de l'enquête.
Ce sont les reponses qui seront données à ces questions
qui déterminerait les attitudes des personnes sur qui s'applique
... / ...

95
l'enquête face à la situation d'enquête ainsi que leurs compor-
tement vis-à-vis de l'enquêteur.
L'enquêteur devra à chaque
instant pouvoir identifier l'origine et la nature des résis-
tances que les personnes à enquêter opposent à son projet et
les vaincre s'il veut attendre son but.
Ces résistances peuvent
provenir de l'inquiétude que suscite le but de l'enquête tel
qu'il est subjectivement perçu par les personnes à enquêter
ou encore des attitudes ou comportements de l'enquêteur placé
en situation d'interaction avec les personnes à enquêter; elles
peuvent aussi tirer leur origine de la nature
même des questions
posées surtout de la manière dont celles-ci sont ~osées
des
fois aussi elles proviennent du peu d'intérêt que les personnes
concernées par l'enquête accordent à celles-ci ou à la personne
même de l'enquêteur.
Quoiqu'il en soit quelques soient la nature de ces résistances
et leurs formes de manifestation l'enquêteur devra toujours
s'efforcer de les vaincre par une stratégie appropriée relation-
nelle (accepter de s'impliquer, séduire,
rechercher la familiari-
té etc ... ) et informationnelle (les informations que l'enquêteur
donne sur ce qu'il est et fait doit viser à accroître le crédit
de confiance qui lui est accordé et développer une plus grande
synergie entre lui et les personnes à enquêter).

96
CHAPITRE VI
NOS
RAPPORTS
AVEC
LES
INSTITUTIONS
D'ENCADREMENT
=====================================================

97
A- LES RAISONS D'UNE MISE A DISTANCE
=================================
A cette étape de l'enquête nous avons déjà visité
une grande partie des entreprises relevées sur notre liste et
nous aurions encore continué dans notre progression si le sou-
hait du président de la chambre de métiers de nous rencontrer
ne se faisait pas de plus en plus pressant. Quand nous avions
rencontré celui-ci,
ce qui semblait surtout le préoccuper,
c'est que nous ayons entrepris une enquête dans le milieu arti-
sanal sans l'en aviser;
i l m'avait aussi fait part des rumeurs
qui circulaient sur nous et qui lui étaient parvenus et nous
avait demandé de lui apporter quelques précisions en la matière
à la fin de cet entretien i l m'avait remis quelques nom de chefs
d'entreprise à visiter mais que nous n'avions malheureusement
jamais pu rencontrer en raison du fait qu'ils étaient tous des
maçons travaillant à la fois dans plusieurs chantiers et de
surcroit polygames,
ce qui faisait qu'il était difficile pour
nous de les rencontrer malgré tout notre bonne volonté.
Si au départ nous avions fait le choix de mener notre
enquête sans y associer directement ou indirectement aucune
institution d'encadrement des chefs d'entreprise du secteur
informel c'était par les raisons suivantes:
-
d'abord nous voulions par nos propres ressources
mener seul l'enquête, nous confronter aux difficultés du terain
et les résoudre tout seul en mobilisant toutes nos capacités
ce qui aurait l'avantage à la fois
de nous donner l'occasion
de tester les limites de nos capacités et d'acquérir une expé-
rience plus féconde des réalités de terrain.
. .. / ...

9R
- Les institutions d'encadrement pouvaient être
l'objet d'une certaine désaffection de la part des chefs d'en-
treprise comme leurs actions pouvaient aussi être l'objet d'une
critique. Tout ceci pouvait conduire les chefs d'entreprise
à avoir une attitude de méfiance ou de rejet vis-àvis de tout
enquêteur ou chercheur dont l'action se référerait à ces ins-
titutions. C'était pour ne pas courir le risque de faire les
frais d'une telle situation possible que nous avions fait le
choix stratégique de mener notre enquête sans y associer les
institutions d'encadrement.
- La troisième raison était que nous pensions que
les contacts que nous pouvions avoir, ces institutions ne pou-
vaient réellement être bénéfiqu~ qu'à la condition que nous
ayons des demandes et des questions précises à leur adresse.
De ces demandes et questions pour nous devaient surgir
de ques-
tionnements nes à propos des informations recueillies sur le
terrain.
- La quatrième raison était que nous craignions que
ces institutions ne cherchent à nous associer à des projets
qui étaient les leurs avant même que nous ayons commencé notre
enquête ; cela aurait comme conséquence de beaucoup retarder
la progression de notre travail.
B - LA
SONEPI
==========
Ce sont ces raisons qui justifiaient notre attitude
de distanciation vis-à-vis de ces institutions tant que nous
... / ...

99
n'avions pas franchi personnellement un pas important dans nos
recherches qui devaient s'effectuer par voie d'enquête sur le
terrain directement auprès des chefs d'entreprise du secteur
informel. Quand le président de la chambre des métiers nous
convoquait, nous avions heureusement déjà atteint le seuil d'ac-
cumulation d'informations recueilli sur le terrain qui devait
nous permettre d'envisager dans un délai court d'une à deux
semaines de pouvoir rentrer en contact avec les institutions
d'encadrement.
Après notre rencontre avec le président de la chambre
de métiers nous avions pris contact avec le service artisanal
de la SONEPl qui encadrait six chefs d'entreprise installés
dans le domaine industriel.
Nous avions visité tous ces chefs
d'entreprise ainsi que leur entreprise respectives en procédant
de la même façon que précédemment c'est-à-dire en ayant un entre-
tien avec chaque chef d'entreprise et apprentis,
en faisant
le relevé de tous les éléments constitutifs des moyens de produc-
tion ainsi que la description des tâches en cours et des diffé-
rents rôles assumés par les uns et les autres dans le cadre
de l'organisation des rapports sociaux de production. Dans
l'ensemble ces chefs d'entreprise qui sont encadrés par le
service artisanal de la SONEPl nes~ifférencient pas des autres
chefs d'entreprise qui ne bénéficient pas de l'encadrement de
cette institution du point de vue de leurs comportements au
niveau économique ou social même s ' i l s ont reçu une formation
en matière de gestion comptable
(il faut noter que cette formation
est très sommaire en raison même du faible niveau d'instruction
des chefs d'entreprise). Cette absence de différence pouvait
aussi s'expliquer par le fait que la SONEPl n'intervient pas au
... / ..

100
niveau de l'organisation et de la gestion des rapports sociaux
dans les entreprises qu'elle encadre: elle se borne à organiser
des séminaires à l'intention des chefs d'entreprise en matière
de gestion comptable et à leur donner des conseils ou à leur
faire obtenir des crédits d'équipements auprès de certaines
institutions financières.
Notre contact avec cette institution nous a permis
d'en savoir un peu plus grâce aux documents qui nous ont été
donnés par ses responsables et les entretiens que nous avons
eus avec eux sur le fonctionnement de celle-ci ainsi que de
confronter certaines critiques
tenues à son propos par certains
chefs d'entreprise, aux déclarations de ces responsables, dans
les domaines concernés par ces critiques. Nos entretien avec
les responsables du service artisanal de la SONEPI étaient donc
centrés essentiellement sur des problèmes concrets auxquels
les chefs d'entreprise étaient confrontés mais dont ils n'étaient
pas satisfaits des solutions que la SONEPI leur apportait :
ces problèmes posés par le chefs d'entreprise concernaient les
difficultés d'accès au crédit et aux marchés publics.
C - LA
SOSEPRA
===========
,
i,
Après
notre visite du service artisanal de la SONEPI
Après
notre visite du service artisanal de la
et des entreprises qu'il encadrait, nous prenions contact avec
le
représentant régional de la SESEPRA afin de pouvoir effec-
tuer une enquête auprès des artisans installés dans le village
artisanal et don la fourniture en matières premières devrait
... / ...

1C
1 1
être théoriquement assurée par la SESEPRA : cette institution
est par ailleurs chargée de la gestion locative des ateliers
dont se compose le village artisanal. Là aussi nous avons pro-
cédé selon la même méthode déjà exposée tout au long de ce cha-
pitre. Mais comme la SOSEPRA encadrait aussi d'autres artisans
non installés dans le village artisanal (certain artisans ne
veulent pas s'installer au village artisanal en raison de
l'éloignement de celui-ci du centre de la ville) nous étions
obligé d'effectuer des visites auprès de ces derniers dont leurs
ateliers se trouvaient au centre de la ville.
D'autres petits artisans produisant des biens à
usage domestique ou agricole ont été aussi concerné par notre
enquête :
f:)\\lùeurs d' alluminium récupéré
produisant des mar-
mites, fourneaux, cuillères, forgerons fabriquant à partir
d'objets en fer récupérés des outils agricoles ou autres ou-
tils de travail destinés à d'autres artisans. De même avions
enquêté auprès des artisans tailleurs.
f
1

102
L'ENQUETE A DAKAR

u;;:p. ,
103
CHAPITRE VII
TENUE ET
DEROULEMENT
DE
L'ENQUETE
=====================================
A DAKAR
========

~".-....~.
~
104
A - PARTICIPATION À UN SÉMINAIRE ORGANISÉ PAR LA
============================================
SONEPI ET PRISE DE CONTACT AVEC LES CHEFS D'EN-
==============================~===============
PRISE
=====
Après Saint-Louis nous étions reparti à Dakar pour
y continuer notre enquête. Comme nous l'avions fait à Saint-
Louis, nous avions d'abord voulu intéresser les gens que nous
connaissions à notre enquête afin d'obtenir d'eux des recomman-
dations auprès des chefs d'entreprise qu'ils connaissaient, ce
qui faciliterait nos contacts avec ces derniers. C'est ainsi
que grâce à nos relations six chefs d'entreprise étaient visi-
tés à Castor, HLM et Liberté VI et Dieuppeul ; nous habitions
à Dieuppeul et nous pouvions nous rendre facilement dans les
autres quartiers cités à pied à tout moment, ce qui avait
l'avantage d'aumgenter nos chances de rencontrer les chefs
d'entreprise auprès de qui nous étions recommandé dans leurs
entreprises installées dans ces différents quartiers. Auprès
de ces chefs d'entreprise nous avions pu recueillir des noms
et adresses d'autres chefs d'entreprise mais malheureusement
ces derniers avaient leurs entreprises installées souvent très
loin du quartier o~ nous habitions et ou le fait qu'ils étaient
très souvent absents de leurs entreprises pourdes raisons liées
à des obligations sociales ou professionnelles, il nous était
très difficile de prendre contact avec eux malgré les rendez-
vous que nous leur fixions par lettre remise à leurs apprentis
en nous rendant à leurs entreprises: sur neuf chefs d'entre-
prise concernés seuls deux ont pu être réellement rencontrés
et nous avions perdu beaucoup de temps en cherchant à prendre
... / ...

105
contact avec les autres en vain. A cause de Ces difficultés
liées à la nature du terrain à Dakar, il nous était apparu
nécessaire à la suite d'une information qui nous était parvenue
et concernant la tenue d'un séminaire de formation et d'informa-
tions que devait organiser la SONEPI à l'intention des chefs
d'entreprise du secteur informel de prendre rapidement contact
avec cette institution qui d'ailleurs était prévenue de notre
visite prochaine depuis Saint-Louis par le canal de son service
artisanal basée dans cette ville vers la fin de notre séjour
dans celle-ci. Ce séminaire devait durer deux semaines et re-
groupait dix huit chefs d'entreprise de différents corps de
métiers (mécanique auto, tolerie, menuiserie bois et méttalique
maçonnerie etc ... ) tous installés dans la région du Cap-Vert.
Il y avait plusieurs intervenants, des chefs de service dans
différentes institutions publiques ou semi-publiques concernés
par le développement du secteur informel: la SOFISEDIT, orga-
nisme de financement, la Caisse de Sécurité Sociale, l'Institut
du travail. Chaque intervenant devait informer les chefs d'entre-
prise sur le rôle que son institution joue, les obligations
que la loi leur impose à l'égard de celle-ci ainsi que les sanc-
tions prévues en cas de manquement à ces obligations. De même
des conseils pratiques étaient donnés par chaque intervenant
aux chefs d'entreprise afin de leur permettre de gérer au mieux
leur entreprise et de pouvoir être en règle avec leurs obliga-
tions telles que cela est fixé par les institutions. Après
chaque intervention, chaque chef d'entreprise pouvait prendre
la parole soit pour poser des questions à l'intervenant soit
pour donner son avis sur des questions soulevées et qui sont
d'un intérêt particulier pour lui.
... / ...

\\06
J'ai mis à profit ce séminaire auquel j'étais invité
de participer comme ,observateur pour :
a) prendre contact avec les chefs d'entreprises. Ces
derniers à l'ouverture du séminaire étaient informés de l'enquê-
te que nous devions mener auprès d'eux par l'agent de la SONEPI
qui avait la responsabilité d'organiser ce séminaire. Durant
la période du séminaire nous avions pris contact successivement
avec chacun des chefs d'entreprise à qui nous avions à nouveau
personnellement expliquer les raisons de notre enquête ainsi
que la démarche que comptions suivre. Ces contacts multiples
nous avaient permis de nous familiariser avec les chefs d'en-
treprise. Trois jours avant la fin du séminaire, nous prenions
un rendez-vous avec chacun d'eux.
b) noter leur intervention sur tous les problèmes
soulevés et discutés par eux au cours de ce séminaire. A propos
de ces interventions, ce séminaire constituait pour nous un
moment privilégié de collecte d'informations sur la façon dont
les chefs d'entreprise appréhendaient leur propre situation
en tant que acteurs économiques et vivaient leur rapport avec
ces institutions de l'Etat. Ces interventions constituaient
un discours
collectif
qui était certes le discours du groupe
concret que constituaient les participants du séminaire mais
aussi le discours à travers la parole de ces derniers de tous
les chefs d'entreprise du secteur informel partageant la même
situation qu'eux. C'était un discours à la fois politique,
idéologique, économique et social qui avait valeur d'un projet,
leprojet collectif des chefs d'entreprise sur la restructura-
tion du secteur informel telle qu'ils la concevait .
.../ ...

107
c) repérer par rapport à chaque intervention des par-
ticipants, chefs d'entreprise, les thèmes centraux et organisa-
teurs de leur discours ainsi que les passages les plus marqués
de sensibilité. Ce repérage devait nous permettre au moment
de notre entretien avec les chefs d'entreprise au cours de
l'enquête proprement dite d'approfondir avec eux particulière-
ment ces différents thèmes.
d) prendre rendez-vous avec les différents chefs de
service invités à ce séminaire comme intervenants, afin de nous
entretenir avec eux sur des questions à propos desquelles nous
souhaiterions être plus éclairées.
B - VISITE DES CHEFS D'ENTREPRISE
=========================~===
Après ce séminaire nous avions repris notre enquête
auprès des chefs d'entreprise en procédant pour l'essentiel,
du point de vue de la démarche, comme à Saint-Louis. Cependant,
,
il faut dire que malgré les rendez-vous pris avec les chefs
t
d'entreprise au cours du séminaire et les promesses fermés que
j'avais reçues d'eux de respecter ces rendez-vous, nous avions
eu souvent beaucoup de mal
à. les rencontrer soit parce qu'ils
avaient oublié le rendez-vous et étaient absents de leur entre-
prise soit parce qu'ils étaient en déplacement ou encore soit
parce que quand nous devions passer les voir ils avaient des
obligations sociales ou professionnelles à l'extérieur. Nous
avions donc dû souvent faire des déplacements inutiles. Cepen-
dant au bout de près de trois mois, tous les chefs d'entreprise
qui étaient concernés par notre enquête avaient pu être visités .
... f • ..

lOS
Certains d'entre eux dont les entreprises étaient installés à
Reubeus (zone artisanale se trouvant entre le marché Sandaga,
le stade Iba Mar Diop et la prison civile) m'avait mis en con-
tact avec d'autres chefs d'entreprise installés dans le même
endroit à qui nous avions aussi rendu visite.
C - ENTRETIEN AVEC LES RESPONSABLES DE LA SONEPI
============================================
ET VISITE DE LA SODIDA
======================
Après avoir visité tous les chefs d'entreprise que
nous avions rencontrés au cours du séminaire ainsi que ceux
auprès de qui ces
derniers nous avez recommandé, nous avions
repris contact avec la SONEPI afin d'une part, recueillir l'avis
de ses agents chargés de l'encadrement des chefs d'entreprise
sur les griefs que ces derniers adressent à l'institution et
d'autre part, pour avoir l'autorisation de visiter les entre-
prises installées dans le domaine industriel de Dakar, la SODIDA.
Comme à Saint-Louis, ces critiques adressées par les
chefs d'entreprise visités sur la SONEPI avaient été confrontées
aux avis des reponsables de cette institution sur les questions
qui leur correspondaient. Quant aux unités industrielles de la
SODIDA, leur visite et les entretiens que nous avions eus avec
leurs responsables (les chefs d'entreprise) n'avaient fait que
confirmer les hypothèses que nous avions déjà dégagées à partir
de Saint-Louis en ce qui concerne la prégance et la persistance
de rapports sociaux traditionnels, lignagers
dans les entre-
prises encadrées par la SONEPI même si à Dakar plus qu'à
Saint-Louis certains éléments matériels. humains et organisa-
tionnels impliqués dans le procès de production présentent des
... / ...

109
caractéristiques nettement plus modernes et capitalistes (exis-
tence d'un secrétaire, d'un comptable et d'un chef d'équipe
salariés, un secrétariat administratif nettement séparé du li""
de production, un chef d'entreprise portant le titre de P.D.G.
et qui s'extrait complètement de la production etc •.. )
; absent,.
de salaire pour la quasi totalité des travailleurs, recrutés
dans le voisinage proche du chef d'entreprise qui prend en char·
ge personnellement une partie des frais de reproduction de leur
force de travail, production en série dans certains cas etc ...
D - VISITE DE LA ZONE ARTISANALE DE a.H.L.M.
=======================================
Après cette visite de la SODIDA nous avions entrepri c
de visiter la zone artisanale de HLM située à proximité de la
SODIDA entre l'avenue Bourguiba, HLM l et Bène Talli où sont
installés une dizaine de chefs d'entreprise appartenant à dif-
férents corps de métiers : mécanique auto, menuiserie bois,
menuiserie métallique, tolerie. Nous avions effectué la visite
de cette zone artisanale sans avoir reçu au préalable aucune
recommandation de la part d'un quelconque chef d'entreprise
ou d'une autre personne. Mais si cela a été possible c'était
parce que certains chefs d'entreprise de cette zone artisanale
étaient menacés de déguerpir soit parce qu'ils s'étaient insta'.;.
illégalement sur un domaine de l'Etat (chefs d'entreprise HLM :,
soit parce que le nouveau propriétaire du terrain où ils étaie~'
installés ne voulaient plus d'eux (chefs d'entreprise de Bène
Talli). Ils s'étaient organisés en associations afin d'obtenir
des autorités des terrains où ils pourraient s'installés léga-
lement. Tout ceci faisait que les chefs d'entreprise de cette
zone artisanale étaient tout disposés à parler de leur situa-
tion à n'importe qui dans le but sans doute de faire de la pub,:-
pub,:.
cité ou de sensibiliser les gens sur leur cas.
... / ...

110
Mais cette prédisposition à parler, liée à leur situation par-
ticulière pouvaient aussi être renforcée par une certaine per-
ception fantasmatique qu'ils avaient de notre statut d'enquê-
teur - chercheur qui pour eux devait aussi se traduire dans
un rôle de soutien à leur action et une prise en charge de la
dépense de leur projet auprès des autorités. Dans tous les cas,
le premier chef d'entreprise de cette zone artisanale qui nous
ont reçu avait voulu d'entrée en jeu, nous parler des préjudi-
ces qu'ils allaient subir en cas de déguerpissement et aussi
nous impliquer et nous faire prendre position par rapport à
leur situation après avoir souhaité que nous les soutenions
dans leur action. Il nous était demandé implicitement de négo-
cier
la possibilité de pouvoir poursuivre notre enquête dans
ce milieu contre une promesse d'action de soutien à leur cause
de notre part. Nous avions acquiessé à cette demande en promet-
tant de rendre compte de leur "histoire" à toutes autorités
que nous aurions à rencontrer et aussi à plaider pour leur
cause devant celle-ci. Après cette première rencontre, nous
avions été présenté successivement à tous les membres présents
des deux associations auprès de qui nous avions pris des rendez-
vous pour les rencontrer de nouveau dans le cadre de notre enquê-
te. Celle-ci s'était déroulée facilement et nous avions adopté
la même démarche méthodologique que pour ce qui concerne les
entreprises déjà visités à Saint-Louis et à Dakar.

·'
III
E - VISITE DE LA ZONE ARTISANALE DE KHAR YALLA
==========================================
Après cette première expérience d'enquête réussie
auprès des chefs d'entreprise concentrés dans un lieu donné
et sans qu'au préalable aucune recommandation de facilitation
ne nous ait été fournie par une personne extérieure à ce
milieu
nous étions déterminé à entreprendre la même tentative auprès
d'autres chefs d'entreprise installés dans d'autres zones arti-
sanales. C'est ainsi qu'ayant eu connaissance de l'existence
de la zone artisanale de Khar Yalla nous nous y étions rendu
sans recommandation et sans y connaître personne. D'abord nous
avions fait rapidement le tour de la zone qui comportait une
bonne vingtaine d'ateliers, de magasins et de gargottes occu-
pés par des menuisiers ébéniste, métalliques, des commerçants
vendeur de bois ou de tôles ou des restauratrices. Cette première
yinspection des lieux avait pour but d'identifier les entreprises
qui par leur taille, leur équipement et leurs activités pouvaient
être intéressées par notre enquête : seules les entreprises
de menuiserie bois et métallique travaillant avec un équipement
moderne étaient en fin de compte retenues. Ensuite pour notre
première investigation dans ce milieu nous avions choisi une
entreprise (menuiserie bois) où
en toute apparence le chef
était disponible (le chef d'entreprise était assis sur une chai-
se devant le seuil de son atelier et semblait prendre de l'air).
i-Après les Salamalech d'usage, nous avions décliné notre
identi-
té sociale et professionnelle : exposé les raisons de notre
enquête et insisté sur les retombées bénéfiques qui pourraient
s'en suivre en matière de financement de projets en vue d'une
amalioration des équipements ou de la formation professionnelle
des chefs d'entreprise du secteur informel. Une longue conversa-
tion s'en était suivie, centrée surtout, sur des questions
... / ...

·u
112
relatives à notre appartenance organisationnnelle aux possibilités
réelles qui nous étaient données en raison de cette appartenance
de faire financer des projets pour la promotion du secteur et
dans ce cas aux contreparties financières qui seraient demandées
aux chefs d'entreprise ainsi qu'au
délai au terme duquel ces
projets commenceraient à être exécutés. Autant de questions impor-
tantes pour ce chef d'entreprise mais auxquelles il nous était im-
possible d'apporter des réponses précises à ce moment précis de
notre enquête : nous nous contentons pour répondre à ces questions
de dire que nous userions de notre volonté ainsi que de nos rela-
tions pour que les demandes formulées par les chefs d'entreprise
en matière d'équipements ou autres soient entendues par les ins-
titutions d'encadrements nationaux (SONEPI, chambres de métiers,
organismes internationaux
de la place qui financent ou exécutent
des projets pour la promotion de l'artisanat et P.P.Rey initiateur
et responsable de ce projet d'enquête mais nous leur disons aussi
que pour qu'il y ait une quelconque chance d'en être ainsi
il
faudrait que nous puissions obtenir d'eux des informations fiables
objectives par leur situation personnelle, celle de leur entrepri-
se,etc •.. car ce serait à partir de ces informations après vérifi-
cation sur leur objectivité que toute décision d'intervention se-
rait prise. Cette mise au point, jointe au désir narcissique déjà
constatée antérieurement à Saint-Louis et à Dakar, des chefs d'en-
treprise de parler d'eux mêmes, de leur histoire et trajectoire
professionnelle ainsi qu'à l'illusion fantasmatique qu'ils pouvaient
se faire de notre rôle et de nos possibilités d'intervention de-
vaient nous permettre de balayer sinon en tout cas de réduire
toute résistance susceptible chez les chefs d'entreprise de la
zone artisanale de Grand-Yoff, de contrarier notre projet d'enquête
... / ...

....
"
113
dans ce milieu. En effet, après notre premier entretien avec
ce menuisier qui était notre premier interlocuteur, nous étions
présenté le même jour successivement à d'autres chefs d'entre-
prise par celui-ci:lors de ces présentations, c'était ce dernier
qui expliquait aux autres les raisons de notre enquête et nous
'h'intervenions que pour apporter des compléments d'informations
si cela était nécessaire. Tous étaient d'accord pour notre en-
quête et celle-ci devait commencer le lendemain dans la matinée,
elle s'était déroulée sur deux semaines avec un rythme irrégulier
souvent pour des raisons sociales ou professionnelles, les chefs
d'entreprise étaient absents de leur lieu de travail au moment
où devait se dérouler notre entretien avec eux selon le calen-
drier d'enquête que nous avons fixé en tout accord avec eux
et dans ce cas il fallait attendre ; ainsi des fois nous devions
nous attendre plusieurs heures avant de pouvoir démarrer l'entre-
tien, si celui-ci n'était pas tout simplement renvoyé à un autre
jour, Dans certains cas, si le chef d'entreprise, après son re-
tour ne se montrait pas disponible et prêt à nous recevoir faute
de disposer beaucoup de temps à nous consacrer, il faut aussi
dire qu'il nous arrivait nous même en nous rendant à un rendez-
vous d'enquête de différer la tenue de celle-ci si la situation
du moment au lieu de l'enquête nous laisse supposer que celle-ci
pourrait ne pas se dérouler dans de bonnes conditions en raison
de certaines contraintes particulières sociales ou professionnel-
les qui au moment de notre passage s'exerçaient sur les chefs
d'entreprise concernés: par exemple quand le chef d'entreprise
doit recevoir un ami, un parent, ou un client ou encore devait
s'absenter dans les minutes qui suivaient et voulait tout de
même par pure politësse nous recevoir avant • ce qui ne pourrait
se faire qu'au détriment de la durée de l'entretien. de l'abon-
dance et de la qualité des informations que celui-ci permetterait
... / ...

114
de recueillir. En effet, si le temps de l'enquête est vécu comme
un temps de contraintes par le chef d'entreprise, celui-ci aura
tout naturellement tendance à abréger l'entretien en adoptant
de
à l'endroit de l'enquêteur une attitude rejet consistant à ré-
pondre de façon laconique à ses consignes ou questions ou enco-
re en tenant un discours totalement incohérent sur les choses
qui manifestent un manque réel d'intérêt à l'égard de l'enquête.
Nous avions déjà fait dans le passé l'expérience d'une telle
attitude négative. En dehors de ces quelques remarques métho-
dologiques en ce qui concerne le repérage des situations où
la tenue de l'enquête doit être différée, celle-ci dans les
conditions normales s'était déroulée selon la même démarche
que précédemment décrite quand il s'agissait de mener notre
enquête à Saint-Louis.

• .,Q;&
\\ \\ 5
CHAPITRE VIII
LES
INSTITUTIONS
D'ENCADREMENT
==============~==~==============

116
A - VISITE DE LA CHAMBRE DE MÉTIERS DU CAP-VERT
===========================================
Après cette enquête auprès des chefs d'entreprise de
la zone artisanale de Grand-Yoff nous avions pris contact avec
la chambre de métiers de Dakar dans le but de rencontrer son
président afin d'obtenir des adresses de chefs d'entreprise
à voir et aussi des
documents concernant le fonctionnement de
cette institution. Le président, nous avions pu le rencontrer
une fois et il était déjà au courant de notre enquête par l'in-
termédiaire des chefs d'entreprise que nous avions rencontrés
à l'occasion du séminaire organisé par la SONEPI et dont la
plupart fait partie ou de l'assemblée générale de cette insti-
tution ou des différentes commissions de celle-ci (commission,
formation,
commission marché, commission finance etc . . . )
; la
plupart des noms et adresses de chefs d'entreprise que le pré-
sident nous avait donnés se trouvaient déjà dans la liste des
chefs d'entreprise déjà rencontrés et pour les questions con-
cernant le fonctionnement de la chambre de métiers,
i l nous
avait renvoyé à son secrétaire. Quand nous avions rencontré
celui-ci et lui expliqué ce que nous attendions de lui,
i l nous
remit quelques documents et nous parla des difficultés que ren-
contrait la chambre de métiers pour intéresser les chefs d'en-
treprise et les artisans de Dakar à sa vie, son fonctionnement
et son développement en raison des faibles moyens dont elle
disposait liés à la fois à son statut sur le plan institution-
nel et à la faiblesse de son budget, les chambres de métiers
ne peuvent ni financer des projets, ni obtenir des marchés
1
marchés
faibles et ne disposent chacune que d'un véhicule avec un quota
1
d'essence limité par jour à 5 litres, ce qui limite leur
... / ...

11 7
possibilité d'intervention auprès des chefs d'entreprise et
artisans du secteur informel qu'elles ont comme vocation d'en-
cadrer. Cette situation entrainait une double conséquence
qu'était que d'une part, la chambre de métiers de Dakar ne dis-
posant pas de moyens logistiques suffisants elle était très
peu en contact avec
le~chefs d'entreprise et artisans de Dakar
et d'autre part les chefs d'entreprise et artisans qui y avaient
adhèré avec l'espoir à court ou moyen terme d'y trouver une
solution à leur problème
(obtention de crédit bancaire, marché
public etc ... ) avaient été vite déçus, ce qui entrainait de
leur part une certaine désaffection progressive vis-à-vis de
cette institution. Au moment de notre enquête la chambre de
métiers de Dakar était préoccupée par ces problèmes et cherchent
à nouer des contacts avec des chambres de métiers françaises
ou d'autres organisations françaises (par exemple artisans sans
frontières) en vue d'obtenir de celles-ci une aide en équipe-
ments : machines, outils réformés mais en état de marche qui
seraient rétrocédés aux chefs d'entreprises de la place pour
améliorer leurs équipements ou des véhicules qui seraient mis
à la disposition de la chambre de métiers. En raison de cette
situation : où se trouvait les chambres de métiers du moment
de notre enquête, son secrétaire général après que nous l'ayons
informé des intentions qu~ animaient le centre "Tiers Monde",
de son Directeur P.P. REY ainsi que de toute l'équipe qui tra-
vaillait avec lui et dont leur ambition était d'initier et
d'impulser une autre forme de coopération franco-africaine qui
prendrait plus et mieux en compte les demandes des petits pro-
ducteurs autochtones des pays d'Afrique en ce qui concerne la
promotion technique de leurs activités (réorganisation du procès
de production, introductions d'équipements performants et aisé-
ment maitrisables, formations techniques etc ..• ) avait voulu
... / ...

1 18
de son propre initiative envoyer une lettre au professeur
P.P. REY pour l'intéresser personnellement aux problèmes de
la chambre et de l'ensemble des artisans de Dakar, mais nous
nous étions opposé à cette initiative car nous pensions que
le centre "Tiers Monde" qui venait à peine d'être mis sur pied
n'était pas encore en mesure de répondre positivement et immé-
diatement aux sollicitations en matière de fourniture d'équipe-
ment ou de formation professionnelle : la désullusion du secré-
taire général et de la chambre de métiers serait grande si le
centre "Tiers-Monde" ne pouvait répondre à leur attente et cela
ne manquerait sans doute pas de provoquer des hostilités à notre
égard. Cependant nous avions promis au secrétaire général de
rendre compte de sa demande à l'occasion de la rédaction de
notre rapport d'enquête au Directeur du Centre "Tier - Monde";
B - VISITE DU SERVICE DE LA COOPÉRATION
===================================
Un jour alors que nous nous trouvions à la chambre
de métiers de Daskar pour consulter des documents qui ne pou-
vaient nous être prêtés, son secrétaire général nous présenté
une dame qui était la présidente de la coopérative des femmes
teinturières de Dakar qui nous révéla l'existence du service
de la coopération chargé de l'encadrement et du suivi des coo-
pératives artisanales de Dakar, elle nous donna également
l'adresse de ce service où dès le lendemain nous nous rendions
pour rencontrer ses responsables. Après avoir mis au courant
ces derniers de l'objet de notre enquête, ils nous informèrent
de l'existence des différentes coopératives que leur service
... / ...

ll9
encadrait (coopérative de teinturières, coopérative laitière,
coopératives de sculteurs, coopérative desoroduits
halieutiques)
et nous promirent de mettre à notre disposition la voiture de
leur service pour nos visites concernant les coopératives :
nous avions choisi trois coopératives à visiter, une coopérative
laitière, la coopérative des teinturières, et la coopérative
de transformation des produits halieutique. Sauf pour la dernière
où nous avions pu nous rendre au lieu de travail des coopératives.
sur la plage de Yoff, nos visites aux coopératives avaient dû
se limiter aux visites de leurs présidents respectifs, ces der-
niers n'ayant pas
eu le temps nécessaire pour nous amener voir
les autres membres de leur coopérative. Au cours de ce premier
contact avec les coopératives nous nous étions plutôt intéressé
aux activités de production des producteurs, à l'organisation
de leurs rapports dans le travail qu'à la vie et au fonctionne-
ment de celle-ci en tant que organisation particulière
notre
démarche était donc pour l'essentiel restée la même et ~ consis-
té en entretiens avec les coopérateurs trouvés sur place en
visite des lieux de travail avec observation des techniques
utilisées etc •...
IY -
REFLEXIONS METHnnOLOGIOUES
Cette enquête sur le secteur informel s'est déroulé
sur une période de dix mois de janvier 1984 à octobre de la
même année. Pour une bonne exploitation des informations
recueillies au .cv.:n:s de cette première partie de notre enquête
qui comme nous l'avons vu a concerné aussi bien les activités
modernes que traditionnelles, de production de service et d'art,
du secteur informel alors
':lue notre
int"ention première dès Saint-
Louis était de la limiter aux entreprises de production et de
... f • ..

120
service du secteur informel moderne disposant d'un équipement
ayant un niveau d'organisation qui les apparentent aux PME du
secteur moderne et employant une main d'oeuvre non exclusivement
familiale, nous avions dû
en
raison de cette extension
du champ de notre enquête pour des raisons biens compréhensibles
motivées par notre avidité de connaissances du secteur informel
et notre désir survenu au cours de cette enquête de nous prépa-
rer à une autre enquête consacrée exclusivement sur les métiers
traditionnels, faire un tri parmi toutes les entreprises visitées
pour ne retenir que celles dont les caractéristiques correspondent
à celles du secteur informel moderne de production et de service
les procès techniques de travail dans ces entreprises, les biens
ou services qu'elles produisent ne doivent se trouver ni dans
le répertoire des techniques ni dans celui des produits de fabri-
cation traditionnelle. Après ce premier tri nous avions ensuite
sélectionné parmi les entreprises du secteur informel moderne
celles qui répondaient selon leur niveau d'équipement et d'or-
ganisation, le nombre de travailleurs (plus dix) et le taux
de dépendants parmi ceux-ci (au plus 50 %) aux caractéristiques
structurelles
des PME du secteur moderne.
Considérant que seule une réflexion approfondie et
globale sur le secteur informel moderne de production et de
service (toutes caractéristiques confondues) pouvait nous per-
mettre de saisir et d'appréhender les particularités propres
de la catégoril! des entreprises sélectionnées selon les critères
ci-dessus définis
nous avions au moment de l'exploitation des
informations recueillies considèré toutes les entreprises qui
étaient concernées par notre enquête dans le secteur informel
moderne qui en gros se divise en deux catégories : le secteur
informel "paracapitaliste" composé d'entreprises proches par
... / ...

121
certaines de leur caractéristique structurelle des PME du secteur
moderne et dont le mode de fonctionnement, l'organisation des rap-
ports sociaux de production etc ... constituent notre objet d'étu-
de ; et le secteur informel de subsistance composé d'entreprises
où le travail se fait exclusivement à la main à l'aide de petits
outillages, où l'espace est non différencié car n'existant pas de
séparation entre les espaces selon la nature des activités qui
s'y déroulent et où le chef d'entreprise à l'instar des autres
travailleurs,
(les apprentis : ils sont tous des adolescents con-
trairement au secteur "paracapitaliste" où certains ont atteint
ou dépassé l'âge de la majorité) est un producteur direct et où
le niveau d'activité ne permet que des gains modestes entre 35
et 50 000 F CFA. Les raisons de cette démarche étaient basées
sur les hypothèses suivantes
- le secteur paracapitaliste procède par développement du secteur
informel moderne de subsistance ce qui fait que si cette hypo-
thèse se vérifiait, certaines déclarations des chefs d'entre-
prise du premier secteur en ce qui concerne la genèse de leur
entreprise (constitution du capital de départ financier et tech-
nique surtout) pourraient trouver un cadre de vérification dans
les déclarations faites par les chefs d'entreprise du secteur
informel moderne de subsistance sur le même sujet.
les deux secteurs ont des caractéristiques communes en ce qui
concerne leur mode de fonctionnement, ce qui permettrait d'i-
dentifier, ce qui dans les structures des entreprises du sec-
teur informel moderne et dans les normes qui guident les acteurs
de ce secteur en ce qui concerne la façon de gérer leurs entre-
prises ne changent d'un stade de développement à un autre de
celle-ci.
... / ...

122
- certaines informations concernant le rapport entre les deux
secteurs (concurrence, sous traitance) sont données plus vo-
lontiers par les chefs d'entreprise de l'un ou l'autre sec-
teur selon l'intérêt plus ou moins grand qu'ils accordent
aux faits auxquels renvoient ces informations. Les informa-
tions recueillies dans le secteur de subsistance et concer-
nant des pratiques en cours dans le secteur paracapitaliste
sont retenues comme des hypothèses que nous chercherons à
vérifier dans le secteur paracapitaliste.
Pour progresser dans la réflexion et la connaissance
du secteur informel moderne en général et du secteur paracapi-
taliste en particulier, nous dégagions après chaque entretien,
après une relecture de celui-ci à tête reposée des hypothèses
concernant tous les domaines abordés à l'intérieur des thèmes
définis par notre guide. Ces hypothèses sont ensuite confron-
tés les unes aux autres pour une même entretien afin de tester
la cohérence interne du discours véhicules pour celui-ci.
Cependant les contradictions qui pouvaient être repérées à
propos d'un entretien donné entre plusieurs hypothèses ne nous
faisaient pas conclure à unblauf~ sur le discours tenu, immé-
diatement, car ces contradictions pouvaient tout simplement
révéler un "non-dit" une information manquante et non donnée
volontairement ou non par notre interlocuteur ou encore tout
simplement traduire une erreur d'interprétation de notre part
en ce qui concerne certain passage de l'entretien ou encore
résulter d'une insuffisance dans le laboratoire de nos hypo-
thèses. Dans tous les cas chaque fois qu'une contradiction
... f . ..

123
apparente persistait sans que nous puissions lui trouver une
médiation à partir même des éléments de l'entretien; Nous ef -
fections une revisite aupris de ID personne concernéE par
l'entretien en question pour trouver des explications complé-
mentaires. Il arrivait aussi que certaines contradictions con-
tenues dans un entretien traversent leurs explications dans
un autre entretien fait avec un autre chef d'entreprise, et
où certains thimes ont été abordés beaucoup plus en profon-
deur, mais même si cela ne nous empêchait pas de faire notre
revisite car nous pensions qu'une contradiction pouvait trouver
sa médiation non pas dans une seule explication, mais aussi
dans une pluralité d'explication s'articulant les unes aux
autres et se renforçant mutuellement. Cependant ce constat
qui était fait à propos des contradictionscont~nues dans un
entretien et de la possibilité de trouver leurs médiations dans
d'autres entretiens, nous suggérait l'idée par hypothise que
l'ensemble des entretiens pourrait être considéré comme un
discours collectif pour certains thimes et pour une catégorie
considérée de chefs d'entreprise (ceux du secteur de subsis-
tence ou ceux du secteur paracapitaliste).
En ce qui concerne le questionnaire, les réponses
données à certaines questions et portant sur des domaines
sociaux, économiques étaient confrontées aux informations
fournies par les personnes enquêtées et portant sur les mêmes
domaines abordés par celles-ci dans le guide d'entretien. De
même les observations directes faites sur la vie de l'entrepri-
se tant en ce qui concerne les relations sociales qui s'y
tissent et s'y développent que sur ce qui .concerne la produc-
tion, (l'état des moyens de travail, le nombre, la nature et
... / ...

124
la valeur des biens commandés en cours d'exécution etc ..• ) sont
confrontées aux éléments du discours tenu par les chefs d'entre-
prise ou les travailleurs et portant sur les mêmes sujets.
Nous ne se produirons pas tous les entretiens faits
et questionnaires administrés car cela prendrait trop de place
d'une part et qu'étant donné les nombreuses similitudes consta-
tées d'un discours à un autres sur les mêmes sujets nous pensions
qu'une telle façon de procéder aurait l'inconvénient de la répétition
des mêmes choses d'autres part, ce qui n'apporterait plus à
partir d'un certain nombre de lecture de ces entretiens aucun
élément vraiment nouveau,. Donc à cause de ces inconvénients que nous
voulons éviter seuls quelques entretiens dûment sélectionnés
en raison de la richesse, la profondeur et la clarté qu'ils
donnent sur les sujets traités seront présentés. Cependant.
en raison de notre option méthodologique de considérer l'ensem-
ble des discours comme un discours collectif, comme un puzzle
où chaque pièce de l'ensemble serait constitué par une portion
sélectionnée d'un discours individuel et dont l'objet, la na-
ture, la finalité s'inscrivent dans la même logique que ce qui
la précède soit en la renforçant soit en atténuant la vigueur
nous présenterons dans une deuxième partie le discours collec-
tif construit à partir des parties les plus signficatives des
différents entretiens. Cette instruction aurait l'avantage de
faire saisir au lecteur à travers une seule lecture de ce dis-
cours collectif ce que les acteurs sociaux du secteur informel
moderne paracapitaliste pensent de leurs situations et les
différents types de rapports qu'ils entretiennent avec leur
environnement socio-économique, traditionnel ou moderne .
.../ ...

125
Nous terminerons cette partie consacrée à la métho-
dologie en ce qui concerne cette première partie de notre
enquête en insistant de nouveau sur la nécessité pour l'enquê-
teur de réduire au minimum la distance psychologique qui le
sépare des personnes que son enquête concerne et qui l'évaluent
et le jugent selon une grille de perception souvent très diffé-
rente de la sienne: l'attitude des personnes à enquêter face
à l'enquête, à l'enquêteur dépendent énormément de la façon
dont ce dernier est perçu. Ce qui veut dire que aussi bien
l'authenticité que la richesse des informations données par
les personnes enquêtées dépendent beaucoup du crédit d'intention
que ces derniers accordent à l'enquêteur dès les premiers moments
de leurs interactions avec celui-ci. L'enquêteur devra donc
utiliser une stratégie d'approche adoptée au coutumes sociales
des personnes concernées par son enquête dans le domaine des
interactions sociales et telle qu'elle puisse donner de lui
une image répondant aux attentes de ses interlocuteurs compte
tenu de son statut réel, ses possibilités d'interventions affi-
chées, ses multiples appartenances organisationnelles etc ..•
bref de tout ce qui fonde la perception de son identité dans
le milieu humain et social d'enquête. L'enquêteur doit savoir
que les personnes qu'il enquête ne livrent les informations
qu'elles détiennent sur ce qui est l'objet de ses recherches
qu'en les négociant contre des promesses de changement de leur
situation à moins que par sa démarche stratégique d'approche
le chercheur ne suscite dans son milieu humain d'enquête de
l'intérêt pour son objet et de l'espoir quant aux perspectives
de changement souhaité.
... / ...

126
Au terme de cette première enquête au cours de laquel-
le nous avions été sans cesse confronté à une demande d'inter-
ventions de la part des acteurs sociaux du milieu où nous
menions notre enquête, nous en étions arrivé à nous poser des
questions sur ce que devrait être le rôle du chercheur en
sciences sociales opérant dans un n,ilieu humain qui le solli-
cite massivement pour un genre d'intervention pour lequel il
ne s'était pas préparé et qui ne rentrait pas dans ses objec-
tifs, mais auquel il est disposé subjectivement à répondre posi-
tivement. Le chercheur doit-il mobiliser toutes ses ressources
en vue de répondre aux attentes dé ceux qui le sollicitent pour
un genre d'intervention particulier ou au contraire doit-il
seulement s'en tenir à ses préocupations de départ et donc à
exclure de sa démarche toute action autre que celle initiale-
ment prévue et destinée à la quête de son objet? Nous étions
sans cesse confronté à un tel dilemme tout au long de notre
enquête. Nous étions toujours disposé subjectivement à entre-
prendre des actions dEns le sens souhaité, voulu par les per-
sonnes concernées par notre enquête tant que nous pensions que
cela pourrait tant soit peu contribuer à la promotion de leur
métier ; aussi prenions-nous toujours en compte les demandes
d'interventions qui nous étaient adressées et donnions aussi
toujours des conseils pour orienter les actions collectives
des groupes formels ou informels engagés à prendre en charge
collectivement leurs problèmes. Nous nous étions départi de
notre neutralité et notre rôle s'en était trouvé enrichi d'un
élément complémentaire: nous n'étions non plus seulement un
enquêteur, un chercheur poursuivant des objectifs de quête
d'une connaissance sur un objet préalablement délimité et
... / ...

127
défini par lui mais aussi une personne qui prend en compte ce
que la quête de la connaissance de l'objet laisse de côté,
c'est-à-dire les demandes que notre contact avec notre milieu
humain d'enquête fait surgir ou se réactualiser ~u ~é~n de celui-
ci parce que tout simplement l'intérêt que nous accordons aux
problèmes de ce milieu suscite de l'espoir quant aux possibilités
de leur trouver des solutions, espoir que renforce un certain
nombre de préjugés favorables que se faisaient les personnes
de ce milieu sur notre identité et sans lesquels sans doute
nous aurions rencontré de résistance pour pénétrer ce milieu
et en collecter des informations. L'enquêteur ou le chercheur
doit savoir que toute enquête dans un milieu humain dérange
quelque chose dans ce milieu, elle peut susciter l'espoir ou
la peur, la prise de conscience etc ... selon la nature des
consignes ou questions posées, l'identité (sociale, profession-
nelle, statutaire) et la personnalité de l'enquêteur telles
qu'elles sont perçues par les personnes qui sont enquêtées,
son attitude et ses comportements face qux interrogations de
celles-ci et dans ses rapports avec elles. C'est cette situation
particulière liée à la pratique d'enquête qui favorise l'émer-
gence ou l'actualisation de demandes personnelles ou collectives.
Nous serons confronté à cette même situation de demandes au
cours de notre deuxième enquête portant sur la communauté des
artisans. cordonniers de Tilène à Dakar. Une demande de créa-
tion de coopérative de production et de commercialisation nous
était adressée par cette communauté et nous y avions répondu
en aidant ses membres à s'organiser en fonction de cet objectif
économique.
... / ...
"'

i28
1
1
.r:
ENQUETE SUR LA COMMUNAUTE
DE CnpDONNIERS DE TILENE A DAKAR

\\29
CHAPITRE X
TENUE
ET
DEROULEMENT
DE
L'ENQUETE
DANS
LA
===============================================
COMMUNAUTE DES
ARTISANS
CORDONNIERS
======================================
DE
TI LENE
----------
----------

130
A - LES RAISONS DU CHOIX DE LA COMMUNAUTÉ
=====================================
Après notre enquête sur le secteur informel de produc-
tion de biens et services, nous voulions en entreprendre une
autre malgré que les moyens financiers que le Centre "Tiers-Mon-
de" nous avait doté avaient été épuisés. Il nous fallait donc
pour réaliser une deuxième enquête ne compter que sur nous-même,
c'est-à-dire sur notre volonté, notre capacité à choisir un mi-
lieu d'enquête à la fois original et proche de notre zone d'habi-
tation ou du lieu de travail de notre femme qui avait une voiture
et qui était toute disposée à nous en faire profiter.
Quand l'idée était née en nous d'entreprendre une deu-
xième enquête, nous avions le choix entre plusieurs études :
deux se rapportaient aux changements introduits dans l'organisa-
tion
et les moyens techniques de production dans le secteur
informel traditionnel de production grâce à l'adoption et l'assi-
milation par les producteurs de nouvelles techniques de travail
ou de production provenant du système capitaliste ; les champs
repérés pour ces deux études étant le secteur de la pêche arti-
sanale et la cordonnerie traditionnelle qui sont toutes des ac-
tivités traditionnelles fotement concurrencées par des entrepri-
ses de typE capitaliste (la société BATA produit des chaussures
les chaloupes de pêche) et qui pour s'adapter à l'évolution de
demande (cette évolution est à la fois quantitative et qualita-
tive) or.t dû s'ouvrir à de nouveaux facteurs de production dont
le moins qu'on puisse dire est que leur utilisation tout en
permettant d'accroltre la rentabilité du travail et l'an,éliora-
1
l'an,éliora-
!1
!
tion des produits (dans la cordonnerie, la colle industrielle
... / ...

131
utilisée rend les chaussures plus solides tandis que dans la
pêche les nouvelles méthodes de conservation des poisaons
ren-
dent celles-ci consommables plusieurs jours après 1.eur prise
en mer) laissait intact les rapports sociaux ; la troisième
étude qui faisait partie de notre gamme
de choix possibles
concernant l'introduction des normes et valeurs traditionnel-
les régissant les rapports sociaux dans les entreprises capita-
listes de la place et la manière dont à l'intérieur de ces
dernières celles-ci structuraient les rapports de travail, de
pouvoir, bref les pratiques socio-professionnelles dans tous
les domaines concernant la vie de l'entreprise, le but d'une
telle étude serait d'arriver à déterminer ce qui dans les pra-
tiques se déroulant au niveau de l'entreprise relevait des nor-
mes de la culture traditionnelle, quel serait l'impact de telles
pratiques informelles dans le fonctionnement des structures
de l'entreprise et comment à postériori ces pratiques pourraient
être rationalisées, adaptées aux objectifs de développement
de l'entreprise et érigées en modèle de management social
conforme à la vision du monde des acteurs et accepté par eux.
Toutes ces études posaient chacune un problème fon-
damental celui de la confrontation et de l'articulation entre
structures issues de socio-cultures différentes qui à travers
des acteurs porteurs de normes spécifiques et dont les pratiques
s'y reférent et des techniques porteuses de nouvelles normes
plus ou moins acceptées et introduites dans les pratiques se
disputent le champ des rapports socio-professionnels.
Nous avions choisi en fin de compte de mener nos
recherches dans la communauté des artisans cordonniers de
... / ...

132
Tilène non pas parce que cette étude avait plus d'intérêt à
nos yeux que les autres mais parce que tout simplement le quar-
tier de Tilène avait l'avantage d'être d'un accès plus faciles
pour nous, étant à proximité de lieu de travail de notre épouse
qui par conséquent pouvait m'y amener en voiture en allant au
travail et m'y chercher après le travail. Nos ressources finan-
cières s'amenuisant nous nous trouvions dans l'impossibilité
d'assurer nous-même nos dépenses de transport dans les trans-
ports publics. L'étude de la communauté des cordonniers de
Tilène offrait pour nous un autre avantage : nous pouvions
mener notre enquête sans être obligé au préalable de faire
des démarches administratives en vue d'obtenir une autorisation,
ce qui aurait été sans doute le cas si nous envisageons de mener
notre enquête auprès des entreprises capitalistes de la place
qui exigeraient pour des raisons de procédures bureaucratiques
que nous formulions des demandes adressées à leur direction
et ensuite attendions d'obtenir des réponses qui pourraient
tarder à venir, avant de démarrer notre enquête, ce qui serait
pour nous beaucoup de temps perdu. Ce choix que nous avons
fait de mener notre recherche sur la communauté des cordonniers
de Tilène ne voulait pas dire que nous
abandonnions définitive-
ment les aures projets de recherches sur la pêche artisanale
et les entreprises capitalistes : ces projets étaient seulement
mis en veilleuse en attendant des moments et des conditions
plus favorables à leur réalisation dont le financement pourrait
dans un avenir proche être pris en charge par le centre Tiers-
Monde qui a initié et financé l'enquête en cours sur le secteur
informel.
. .. / ...

133
B - PRÉSENTATION DU MILIEU HUMAIN
=============================
Après que notre choix de terrain d'enquête a été fait
nous nous sommes aussitôt engagé à commencer notre enquête au
sein de la communauté. Nous ne connaissions ni aucun artisan
de cette communauté ni aucune personne susceptible de nous
recommander à un membre de cette communauté et pour des raisons
déjà évoquées précédemment nous ne pouvions non plus rechercher
le parrainage pour cette enquête de la chambre de métiers de
~Qkar
ou de la SONEPI. Nous étions donc obligé comme cela a
été le cas pour les chefs d'entreprise de la zone artisanale
de Grand-Yoff de compter uniquement sur nos ressources person-
nelles à savoir notre expérience de terrain et notre intelligence
sociale des rapports humains pour nous tisser des contacts et
nous faire accepter dans la communauté.
La communauté des artisans cordonniers de Tilène pré-
sente plusieurs particularités dont chacune procède d'une divi-
sion au sein de la communauté : divisions sociale, économique
professionnelle, politique, régionale, religieuse. Certaines
de ces divisions pré-existaient à l'installation de la commu-
nauté à Dakar et procèdent soit des normes socio-culturelles
traditionnelles, soit de la différenciation du métier en plu-
i
sieurs spécialités différentes, soit des différences d'appar-
\\
tenance régionale créant des réseaux de solidarité regroupant
'
des personnes appartenant au même village ou à la même région
des personnes appartenant au même village ou à la même
il s'agit de division entre ainés et ou anciens maitres d'une
j:~
part et cadets et ou anciens apprentis d'autre part, entre
fabricants de babouches que l'on porte exclusivement avec des
habits traditionnels et fabricants de sandales ou chaussures
••. 1••.

134
fermées modernes que l'on porte avec des habits modernes, entre
originaires de la région de Diourbel et ceux de la région de
Thiès, entre adeptes du secte religieux mouride et ceux du
secte Tidjiane. D'autres divisions sont par contre apparues
au sein de la communauté progressivement au fur et à mesure
de la participation de ces membres à la socio-culture moderne,
ce sont les divisions politiques apparues au sein de la commu-
nauté depuis l'avènement du multipartisme au Sénégal et qui
distribuent les membre de la communauté principalement dans
trois parties politiques que sont le PS, le PDS et le RND, les
divisions économiques, avec d'un côté des artisans proprié-
taires de machineE à coudre à pédale qu'ils louent à d'autres
artisans et ou qui font travailler d'autres artisans (souvent
leurs propres enfants, ou leurs neveux et anciens apprentis)
à qui ils fournissent matières premières, paient le loyer de
la place dans l'atelier où ils sont installés et organisent
la commercialisation des bien produits et de l'autres des arti-
sans travaillant seuls sans apprentis produisant par petites
quantités qu'ils écoulent difficilement sur le marché. Les di-
visions entre ceux qui continuent à faire référence à la tradi-
tion dans leur conduite, leurs comportements du point de vue
de leurs rapports avec les autres membres de la communauté ou
avec les siens restés au villages et ceux qui au contraire par
suite d'une acculturation manifeste sont plus ou moins margina-
lisés. Malgré ces divisions qu'il nous a été donné de découvrir
progressivement au fur et à mesure quenous poursuivions notre
enquête, la communauté à prime abord se présentant à nous com-
me quelque chose de très soudé et structurée avec un seul chef
qui était son porte parole et seul habilité à parler en son
nom ou à autoriser une enquête en son sein.
• •. 1.••

135
L'existence d'une telle forme de structure du pouvoir ne nous
surprenait pas dans cette communauté qui était essentiellement
composée de ruraux appartenant à la caste traditionnelle des
cordonniers gens de métiers dont le savoir faire se transmet
de père en fils et dont les rapports sociaux qu'ils nouent au
cours du travail ne sont qu'une transposition adaptée des rap-
ports de parenté dans le lignage d'appartenance. Le chef de
la
communauté était investi des mêmes rôles que le chef de
lignage dans les domaines concernant la cohésion sociale de
la communauté, le rapport de celle-ci avec les institutions
statiques, les organisations non gouvernementales. Cette forme
d'organisation de la communauté nous était révélée dès notre
première contact avec celle-ci par le premier artisan avec qui
nous avons voulu avoir un entretien et qui pour opposer un refus
poli à notre demande de nous entretenir avec lui, comme aussi
pour nous mettre en garde nous dit : "nous les cordonniers de
Tilène nous sommes comme une grande famille, un grard "mbar"
(un atelier de travail), nous avons un "ndith" (un chef, comme
èans la famille ou dans le "mbar" c'est lui qui doit le premier
s'entretenir avec l'étranger .•• après seulement s'il en donne
l'autorisation nous aussi nous pourrons parler avec lui".
C - QUETE D'UNE AUTONOMIE D'ACTION
------------------------------
------------------------------
Nous voulions mener notre enquête dans la communauté
sous guide, sans intermédiaire, en toute indépendance sans que
personne n'ait à nous dire qu'il faut enquêter ou non ou que
les personnes concernées par notre enquête puissent moralement
être obligéeE, pour des raisons liéeE à la présence physique
... / ...

136
du chef de la communauté à nos colis, ou parce que tout simple-
ment nous aurions reçu de celui-ci l'autorisation de mener notre
enquête parmi elles, de s'entretenir avec nous sans vraiment
le désirer, ce qui inévitablement diminuerait le degré d'impli-
cation des informateurs ainsi que la masse des informations
qu'ils seraient susceptible de fournir ou encore de taire cer-
taines informations qu'ils seraient prêt à donner sur la commu-
nauté si le chef de celle-ci n'avait pas joué le rôle de modéra-
teur et de facilitateur pour la tenue de l'enquête.
Nous tenons à faire remarquer que cette démarche n'est
du tout contradictoire à notre démarche précédente à propos
du secteur informel paracapitaliste où nous n'avions pu mener
notre enquête que grâce à l'intervention de médiateur et de
facilitateur. Ces derniers, s'ils appartenaient à un corps de
métiers du secteur n'exerçaient cependant aucune influence mo-
rale sur les personnes du même corps ou des autres corps qui
non seulement gèrent leur entreprise en toute indépendance mais
aussi gè-rent leur vie sociale au mieux sans avoir besoin de
recourir à l'influence ou à l'autorité d'autres personnes
exerçant dans le secteur, dans ce cas le fait que nous soyons
recommandé par un chef d'entreprise à d'autres du meme corps
de métiers ne pouvait avoir aucune incidence restrictive au
niveau de l'implication de l'informateur ou de la densité de
l'information
fournie. Alors que dans le secteur paracapita-
liste les médiateurs dont nous nous sommes servis sont des mé-
diateur~ neutres sans effets psychologiques indéniabies sur
les personres à enquêter c'est-à-dire qu'ils n'influent pas
sur les attitudes de celles-ci face aux interrogations de l'en-
quête ; par contre dans la communauté des cordonniers, le média-
teur est à la fois de par son statut dans la communauté un
... / ...

137
médiateur impliqué parce qu'il a un pouvoir à défendre, une
autorité à conserver et un médiateur implicant car il négocie
sa bienveillance et les services qu'il reLd aux membres de la
communauté contre leur reconnaissance de son pouvoir, son auto-
rité ou encore tout simplement leur silence. Si donc dans la
communauté des cordonniers pour les raisons déjà évoquées et
tenant de context e psycho-sociologique nous avons exclu d'uti-
liser le chef de celle-ci comme médiateur pour faciliter la
tenue de notre enqcête, par contre nous n'excluions pas d'uti-
liser le rôle médiateur des autres membres de la communauté
si ceux-ci peuvent nous permettre d'entrer en contac avec d'autres
artisans de même classe d'âge.
D - CE QUE L'ENQUÊTE DÉRANGE
========================
Comme nous l'avions déjà dit, notre première tentati-
ve d'entretien avec un artisan de la communauté des cordonniers
de Tilène s'était soldée par un échec: l'artisan refusait de
répondre à nos questions parce que l'enquête quenous menions
dans la communauté n'avait pas reçu l'aval de leur "Ndieuth",
c'est-à-dire du chef de la communauté. La même tentative a été
répétée trois fois de suite successivement auprès de trois au-
tres artisans et sans résultat : on continait à nous opposer
le même refus et les mêmes arguments justificatifs. A la suite
de ces échecs répétés à nos tentatives de mener notre enquête,
en voulant nous passer de l'approbation, de la caution morale
ou encore du parrainage du chef de la communauté pour des raisons
liées à notre stratégie de collecte de l'information dans ce
milieu particulier de la communauté de cordonniers, nous dûmes
... / ...

13û
par la force des choses modifier notre démarche stratégique
et nous conformer aux conseils des artisans, c'est-à-dire
chercher à obtenir d'abord l'autorisation d'enquêter du chef
de la communauté. La modification de notre stratégie, si elle
nous obligeait, pour la faisabilité de notre enquête, de prendre
contact avec le chef de la communauté et ensuite d'obtenir son
autorisation d'enquêter, devait aussi nous permettre et de garder
notre autonomie d'action et aussi nous assurer le maximum de
garantie contre les risques d'influence personnelle du chef
de la communauté sur l'attitude des personnes à enquêter face
à l'enquête, ce qui devait nous obliger à envisager de négocier
avec le chef de la communauté les conditions du déroulement
de celle-ci. Deux garanties nous semblaient nécessaires avant
tout: d'abord pouvoir enquêter qui, nous voulons sans qu'un
choix de personnes ne puisse nous être imposé par qui que ce
soit et en l'occurence le chef de la communauté et ensuite pou-
voir nous entretenir avec les artisans sans la présence à leurs
colis au moment de l'entretien de celui-ci. Après avoir donc
défini la conduite que le chef de la communauté devait tenir
à l'égard de l'enquête, tout au cours du déroulement celle-ci
nous nous sommes rendu à son atelier afin de le rencontrer et
de nous entretenir avec lui sur les raisons de notre enquête
et les conditions générales dans lesquelles nous souhaiterions
qu'elle se déroule s'il accepte de la cautionner, mais malheu-
reusement ce jour là il était absent à son atelir : nous avons
cependant demander à ses fils qui travaillaient dans l'atelier
de lui rendre compte de notre passage et aussi de l'aviser que
le lendemain à dix heures nous repasserons le voir. Le lendemain,
à l'heure fixé du RV et jusqu'à treize heure de l'après-midi
le chef de la communauté n'était toujours pas à son atelier,
' " / ' ' '

139
alors que de l'avis de ses fils que nous avions retrouvés, il
était bien mis au courant de notre visite prochaine. Un second
RV donné et ensuite un troisième et un quatrième successivement
jour après jour mais en vain et sans quenous puissions savoir
les raisons qui l'empêchaient de nous rencontrer. Devant cette
situation nous sommes retourné voir les artisans qui insistaient
auprès de nous pour que nous obtenions d'abord la caution du
chef de la communauté avant d'accepter nos entretiens avec eux,
pour leur rendre compte de nos difficultés de rencontrer ce
dernier malgré toute notre bonne volonté. Deux d'entre eux,
apparemment très intéressés par notre enquête et peut être aussi
plus compatissants que les autres de notre situation, nous pro-
mirent de tout entreprendre de leur côté pour rencontrer le
chef de la communauté le soir même à son domicile et obtenir
de lui un R.V. pour nous dans un délai de deux jours: nous
nous convenions de nous revoir le lendemain dans l'après-midi
pour qu'ils nous rendent compte du résultat de leurs démarches
celles-ci furent concluante et la rencontre avec le chef de la
communauté devait avoir lieu le lendemain à l'heure du déjeuner
c'est-à-dire entre douze et treize heures. Mais au jour et à
l'heure convenus pour le R.V., le chef de la communauté n'était
pas là et nous sommes retourné en informer aux deux artisans
qui avaient aménagé ce R.V. : ils étaient fous de colère et
de leur bouche ne sortaient plus que des critiques contre le
chef de la communauté qui selon leurs dires se préoccupaient
depuis quelques temps d'avantage de Dolitique pour ses ambitions
et intérêts personnels que
~es affaires de la communauté (le
chef de la communauté militait semble-t-il depuis quelques
temps dans un comité PS de la Médina que dirigeait une presti-
gieuse dame député de ce parti). D'autres critiques étaient
... / ...

140
aussi adressées aux chefs de la communauté et qui attaquaient
particulièrement sa personne. Il y a eu dramatisation de la
situation : ceci devait nous permettre de penser par hypothèse
qui allait de nouveau, modifier notre stratégie que la commu-
nauté ne devait pas être aussi soudée autour de son chef comme
tout le laissait supposer au départ et qu'il pouvait exister
en son sein des contre-leaders ou des leaders potentiels con-
currents plus ou moins influents et bénéficiant d'un crédit
d'intention plus ou moins élevé dans la communauté et qui en
raison même de leur position de contre-leaders et du peu d'in-
fluence que le chef de la communauté exercerait sur eux, seraient
tout disposés à nous accorder un entretien sans exiger de nous
qu'au préalable nous ayons reçu une autorisation d'enquêter
de la part du chef de la communauté. Nous partions donc à la
recherche de ces contre-leaders tout en continuant à chercher,
à rencontrer le chef de la communauté. Notre hypothèse sur les
contre leaders s'était avérée opérante car à force de persévé-
rance et d'obstination malgré beaucoup de refus rencontrés ul-
térieurement de la part d'autres artisans de se soumettre à
notre enquête, nous avons fini par encontrer un artisan de tren-
te cinq ans qui présentant toutes les caractéristiques d'un
leader potentiel (ila vait un projet personnel ambitieux sur
la communauté, dépendant le principe de son autonomie, de pen-
ser et d'action et rejetant l'autorité du chef de la communauté
qu'il accusait à tort ou à raison de ne pas s'intéresser à la
promotion du métier de la cordonnerie) et qui non seulement
acceptait de se soumettre à notre enquête mais aussi s'engager
volontairement après que
nous l'ayons informé des difficultés
quenous avions rencontrées jusqu'à ce jour de trouver des arti-
1
sans coopératifs pour notre enquête, à nous présenter des amis
1
... / ...
1
...
1
, 1

141
artisans auprès de qui nous pourrons continuer notre enquête
onze artisans m'ont été ainsi successivement présentés sur une
période de quatre jours à raison de deux ou trois artisans par
jour. Notre enquête venait véritablement seulement de commencer
dans la communauté car tous les artisans qui nous étaient pré-
sentés avaient non seulement accepté de s'entretenir avec nous
mais aussi avaient tous respecté le calendrier de R.V. d'enquête
dressé d'un commun accord avec
eux et qui laissait une marge
d'une demi journée à une journée entre le moment de la prise
de R.V et la tenue de l'entretien: nous avons imposé cette
contrainte de délai pour éviter à la fois les risques d'oubli
et les risques de changements possibles d'attitude qui deve-
naient plus grands avec le temps de raison des influences con-
traires que pourrait subir l'artisan. Notre enquête avait démar-
ré et bien démarré, mais notre objectif était de pouvoir la
continuer en réduisant au minimum les difficultés de terrains
inhérents à la particularité stricturelle de la communauté,
d'élargir au maximum notre échantillon, le diversifier et non
pas nous limiter à un réseau d'artisans même si celui-ci de
recommandation en recommandation avait toutes les chances de
s'élargir.
E - CHANGEMENT DANS LES OBJECTIFS DE L'ENQUÊTE
==========================================
PRISE EN COMPTE DES PROJETS DE LA COMMUNAUTË
=============================================
Pour réaliser un tel objectif d'enquête nous devrions
- vaincre la résistance des artisans qui bien que
intéressés par notre enquête hésitent encore à répondre favo-
rablement à notre demande d'entretien par ce que tout simplement
... / ...

142
le chef de la communauté tardait à cautionner notre enquête.
Pour vaincre une telle résistance nous avions envisagé d'informer
tous les artisans qui acceptaient de nous rencontrer de l'histoire
de nos R.V. répétés et sans succès avec le chef de la communauté.
- trouver avec eux et a partir des contraintes repérées
au niveau de leur métier dans les domaines surtout économiques
et technologique, les éléments qui comme préoccupations pour-
raient s'articuler avec les objectifs de la recherche ce qui
aurait pour effet de changer la perception des artisans quant
à l'enquête qui serait perçue non plus comme quelque chose
poursuivant des buts extérieurs à leurs préoccupations et étran-
gers à leur projet collectif sur leur métier mais comme le moment
d'un processus dynamique d'échange réciproque pouvant aboutir
à des décisions qui satisfairaient leur souhait de changement.
Si dans le domaine technologique les objectifs de la recherche
étaient largement convergents avec les préoccupations des arti-
sans (désir d'outils et de matériels de travail moderne et per-
formants) par contre dans le domaine économique les préoccupa-
tions des artisans concernait principalement la baisse des prix
des matières rentrant dans la fabrication de leurs produits
(chaussures, sacs à main, ceintures etc ..• )
la vente de ces
matières constitue le monopole des commerçants
lybano-syriens
qui aux dires des artisans peuvent faire monter au cours d'une
même journée deux, trois fois les prix des produits qu'ils
vendent. I l nous fallait imaginer, trouver un moyen d'action
qui associe quant à sa finalité les objectifs de nos recherches
et les préoccupations des artisans sur le plan économique
nous avions conclu que le moyen d'action le plus adéquat, oppor-
tun et efficace dans l'immédiat, pour faire pression sur les
... / ...

143
institutions qui s'occupent du contrôle des prix afin de les
amener à exercer leur autorité auprès des commerçants pour

1 ' .
dont
reduire 1 arb1tra1rc
ils font preuve dans la fixation des
prix des matières dont se servent les artisans cordonniers
c'était une association regroupant quelques artisans, mais re-
présentative de la communauté et dont le but serait de sensibi-
liser t0utes les personnalités influentes qu'ils connaissent
dans leur entourage et qui soient susceptibles de les soutenir
dans leurs démarches pour obtenir fain de cause auprès du
"service des contrôles économiques", institution chargée prin-
cipalement au contrôle des prix auprès des commerçants. Cette
association devait aussi être un groupe de réflexion sur les
possibilités de sa transformation à moyen ou long terme en un
groupement d'intérêt économique dont l'objectif serait, par
des ressources propres dégagées par le groupe d'acheter en
quantité importante des matières de base (simile - cuir, colle
en boite) au prix du gros qui seraient destinées à la revente
au détail avec possibilité de crédit aux artisans de la commu-
nauté.
- améliorer notre image de marque au sein de la commu-
nauté de sorte à pouvoir jouir d'un large crédit d'intention
susceptible de pouvoir créer, un climat de confiance réciproque
entre les artisans et nous, pour arriver à cette fin nous pen-
sions que nous devrions aussi autant que peut se faire, inter-
venir, si l'on nous sollicite dans tous les
problèmes concernant
les membres de la communauté du point de vue de leur rapport
soit avec les autorités, soit avec les commerçants. C'est ainsi
que plusieurs fois nous avions été amené à accompagner des
artisans chez des commerçants lybano-syriens pour constater
... / ...

144
la véracité de leurs déclarations sur la fluctuation journa-
lière des prix que ces derniers provoquent arbitrairement ou
encore à jouer le rôle d'écrivain public, en rédigeant des
lettres, des demandes ou en remplissant des formulaires d'envoi
de mandat à leur demande. Grâce à ces petites actions d'inter-
vention petit à petit nOU~ devenions indispensaoles et pro~ressive­
ment le nombre d'artisans favorable à notre enquête s'accroissait.
F - LES CHANGEMENTS INTRODUITS PAR L'ENQUÊTE
========================================
Plusieurs semaines étaient passées depuis notre
premier contact avec la communauté et nous n'avions toujours
pas encore rencontré le chef de la communauté (cinq semaines),
selon des informations reçues de la part de certains artisans
ce dernier était en train de mener une enquête sur nous, auprès
de la chambre de métiers et de la SONEPI, pour savoir si confor-
mément à nos déclarations, nous nous étions bien présenté à
ces institutions et que notre enquête avait bien reçu l'autori-
sation du Ministère de l'Industrie et de l'Artisanat duquel
dépendent ces intitutions.
En fait d'après toujours les informations de même
source si le chef de la communauté ne s'est pas empresser de
nous rencontrer à la suite de notre première visite dans son
atelier,
c'était parce qu'il était méfiant de nous et nous
assimilait à un étudiant "révolutionnaire" menant des enquêtes
pour le compte de son parti ou encore à un étudiant enquêtant
sur leur métier pour le compte de la SONAGA, qui d'après tou-
jours les mêmes sources d'information aurait projeté de créer
... / ...

145
à l'intention des maitrisards (ex-étudiants titulaires de mai-
trise de droit et de sciences économique et qui sont en chomage)
des
unités
de productions artisanales en cordonnerie équipées
de machines modernes et produisant par la même catégorie de
clientèle que les artisans de la communauté. Dans tous les cas
à
ce moment de notre enquête. une rupture s'était produite
entre la façon dont le chef de la communauté
continuait à nous
percevoir et à considérer le sens de notre action et celle dont
désormais les artisans nous percevaient ainsi que le sens de
notre
action. Cette
rupture au niveau de la perception cogniti-
ve du sens de notre action entre le chef de la communauté et
les artisans allait s'approfondir jusqu'à entrainer ultérieurement
un divorce
le chef de la communauté refusant toujours de nous
rencontrer et conseillant aux artisans de faire de meme tant
qu'il n'aura pas auparavent reçu de la chambre de
métiers et
de la SONEPI l'affirmation que notre enquête a reçu l'autorisa-
tion de leur ministère de tutelle. tandis que le groupe d'arti-
sans déjà favorable à notre enquête et qui adhérait à l'idée
de la constitution d'un groupement d'intétêt économique au sein
de la communauté et devant regrouper la majorité des artisans
en son sein entreprenait de sensibiliser la communauté sur l'in-
térêt que revêtait pour elle notre enquête et le projet de cons-
titution d'un groupement. Cette opposition persistait jusqu'au
jour où le groupe d'artisans constitué qui avait la vocation
de se constituer en groupement d'intérêt économique résolut
sur les conseils des autorités du service de contrôle économi-
que qui avaient été auparavent consultées sur la conduite adop-
tée face au comportement des commerçants lybano-syriens. d'exi-
ger de ces derniers après chaque acte d'achat la délivrance
d'un ticket de caisse ou d'une facture indiquant les caracté-
... / ...

146
ristiques de la marchandise,
son prix et sa date de vente ;
ces tickets de caisse ou facture,
en tant qu'ils pouvaient
apporter la preuve de l'abus et de l'arbitraire des commer-
çants lybano-syriens dans la fixation des prix des marchan-
dises vendues aux artisans,
devaient par leur obtention per-
mettre d'engager une procédure de plainte contre les commer-
çants auprès du service de contrôle économique.
Quelques ar-
tisans devaient être chargés de procéder chacun à
tour de
rôle à des achats de même nature et de même quantité dans la
même journée (trois mètres de crêpe servant à la fabrication
des talons de chaussures)
auprès d'un des commerçants contre
lesquels i l y a l e plus de griefs dans la commuanuté.
C'est
le jour ou cette action concertée devait
être engagée que
le chef de la communauté est venu nous voir dans l'atelier où
nous nous trouvions pour attendre l'arrivée d'un de ses occu-
pants avec qui nous avions un RV d'entretien pour dit-il
"apporter son soutien moral à ce que nous entreprenions de
faire"
et s'expliquer sur les raisons de son attitude concer-
nant notre enquête
; à ce propos,
la seule chose nouvelle
qu'il apporte,par rapport à ce qui a été déjà connu de nous
grâce aux informations fournies par les artisans
(nous étions
considérés par le chef de la communauté comme un étudiant
révolutionnairesubversif ou encore comme un enquêteur travail-
lant pour le compte de la SONAGA)
était que d'après les ren-
seignements obtenus sur nous,
ous étions quelqu'un à qui "il
pouvait faire confiance", mais i l fournissait aucune indication
sur les sources de ses renseignements et se refusait de le fai-
re. Xais peu importait pour nous. Ce changement dans l'attitude
du chef de la communauté à notre égard et à l'égard des actions
... / ...

147
que le groupe des artisans menait, allait imposer à celui-ci
le devoir moral de rendre compte au chef de la communauté, de
tous ses projets, résolutions et aussi de prendre ses conseils
en toute chose avant de l'entreprendre. Il en fut aussi en tout
cas durant une période de trois semaines à peu près correspon-
dant à la période où vaille que vaille les membres du groupe
ainsi que d'autres artisans déjà gagnés à l'idée du regroupe-
ment et pensant que dores et déjà il fallait réagir contre
l'arbitraire et les abus des commerçants cherchaient à obtenir
des preuves formelles, pouvant témoigner de la véracité de leur
accusation contre les derniers. Durant ce laps de temps, il
y avait une apparence de synergie entre d'une part le chef de
la communauté et d'autre part le groupe d'artisans: le chef
de la communauté venait souvent aux nouvelles (un atelier ser-
vait de siège au groupe) et le groupe lui faisait toujours un
compte rendu détaillé sur les différents actes d'achat effec-
tués par ses membres. Malheureusement durant toute cette pério-
de aucun acte d'achat n'a pu être effectué avec délivrance par
le commerçant d'un ticket de caisse ou d'une facture:
les
commerçants refusaient de délivrer un ticket de caisse ou une
facture aux artisans, sauf s'ils achetaient en gros, pour au
moins une valeur de vingt cinq à trente mille francs CFA,
ce qui était hors de portée de la bourse des artisans.
G - DÉCISION DE CRÉATION D'UNE COOPÉRATIVE
======================================
Devant une telle situation, le groupe d'artisans se
concerta en réunion et entreprit d'adresser une lettre au ser-
vice du contrôle économique pour se plaindre du refus des
... / ...

14f
commerçants de leur délivrer des ticket de caisse et lui deman-
der d'user de son pouvoir de contrainte auprès de ces derniers
afin qu'ils obtiennent gain de cause, mais cette forme d'action
dût être provisoirement abandonnée car le groupe pensait que
pour que les préoccupations de la communauté puisse être prise
en compte sérieusement par les autorités il fallait que ces
préoccupations puissent être traduites en projet et objectifs
auxquels se reconnaitrait la majorité des artisans et que ceux-
ci se regroupent dans une organisation représentative de la
communauté légitime et reconnue légalement. Or comme la seule
forme d'organisation qui aux yeux des autorités avait un quel-
conque intérêt, était encouragée par elles et recevait leurs
soutiens, c'était dans le secteur de l'artisanat, les coopé-
ratives d'artisans, le groupe s'est engagé à effectuer rapide-
ment tous les changements organisationnels et toutes les
démarches administratives nécessaires en vue de sa transforma-
tion en groupement coopératif. Cette proposition pour dévenir
une décision à devoir exécuter par le groupe devait d'abord
au préalable être soumise à l'avis des autres membres de la
communauté et surtout recevoir leur approbation massive, pour
sonder l'opinion de la communauté sur cette perspective de
transformation du groupe en groupement coopérative et aussi
pour recueillir ses suggestions tout sur les objectifs à devoir
assigner à cette coopératives que sur les écueils à devoir
éviter au moment de sa création afin d'offrir à celle-ci le
maximum de garantie quant à sa survie, nous avons dû pendant
une période de quatre semaines, au cours de notre enquête qui
se continuait, interroger les artisans sur leurs avis à propos
, 1
des coopératives en général et de la coopérative en particulier
1
J
... 1...

149
qui était le projet du groupe dans la communauté, ceci devant
permettre grâce aux réponses recueillies de pouvoir dénombrer
les artisans favorables à ce projet, identifier ceux parmi eux
qui ont déjà en une expérience participative dans les coopéra-
tives ou dans d'autres organisations à but économiques (coopé-
ratives rurales, groupement d'intérêt économique ect), les
préjugés négatifs ou grieL int6rioris~s portant sur l'action
coopérative et qui motivent certaines résistances psychologi-
ques à la participation coopérative, les attentes motivantes
et susceptibles d'être traduites en objectifs pour la coopéra-
tive etc. Ces avis une fois recueillis étaient classés par
thèmes et chaque thème était ensuite approfondi et enrichi au
cours d'une enquête ultérieures sur les domaines abordés par
ces thèmes et effectuée auprès d'un échantillon d'artisans
choisis en raison de l'intérêt particulier et perçu de nous
au cours de l'enquête qu'ils portaient à plusieur de ces thèmes.
A la suite de cet approfondissement thème par thème nous avons
effectué un travail de mise en corrélation de ces différents
thèmes et de synthèses des idées-forcees qu'ils exprimaient,
ce qui devait nous permettre de mieux comprendre et connaître
les attentes des artisans en matière de coopérative de définir
une hiérarchisation des objectifs à atteindre ainsi que les
grandes lignes de ce que doit être le réglement intérieur.
Tout ceci étant fait en tenant évidemment compte à la fois
des contraintes internes (faiblesse des ressources financières)
et des contraintes externes (soumission aux commerçants) à la
communauté. Les résultats de ce travail préliminaire était
ensuite soumis à la critique des artisans avant d'être adopté
comme normes orientations pour l'action du groupe pré-coopératif •
.../ ...

150
La décision de créer une coopérative au sein de la
communauté était prise et les démarches administratives de
constitution engagées : une demande de constitution devait
être adressée au service de la coopération et signée par un
groupe de sept artisans initiateurs dont le chef de la commu-
nauté. Celui-ci, durant toute la phase préparatoire de consul-
tation des artisans sur leur avis quant à l'opportinuté de la
création de la coopérative semblait être favorable à l'idée
de la constitution d'une coopérative au sein de la communauté.
C'est pour cette raison qu'il a été proposé de faire partie
du groupe initiateur et il avait donné son accord. Cependant
sa participation aux démarches administratives en vue de la
constitution de la coopérative fut très brève, car très tôt,
dès la première réunion organisée entre le groupe initiateur
et les autorités administratives du service de la coopération
et à l'issue de laquelle une décision d'acceptation ou de re-
fus devait être prise par les autorités en ce qui concerne
la
demande du groupe initiateur, il manifesta sa désapprobation
à la grande surprise des autres membres de ce groupe quant à
l'idée de la constitution d'une coopérative dans la communauté
i
quand à la demande d'un des responsables présents du service
t
1
de la coopération, chaque membre du groupe devait à titre per-
sonnel s'impliquer verbalement. A cause de ce changement impré-
vu dans l'opinion du chef de la communauté la demande de cons-
1
titution de la coopérative a été provisoirement rejetée par
les autorités du service de la coopération qui exigeaient
l'unanimité de tout le groupe initiateur sur la question de
l'opportunité de la création de la coopérative et qui posaient
cette unanimité comme condition première et essentielle à sa-
tisfaire par le groupe initiateur avant que sa demande ne puisse
être prise sérieusement en considération.
..'/ ...

151
A l'occasion de cette réunion les raisons avancées
par le chef de la communauté pour expliquer son volte-face
était qu'il craignait que la création d'une coopérative au sein
de la communauté ne soit source de tension au sein de celle-ci
entre ceux qui sont favorables et ceux qui ne le sont pas. Cette
explication était irrecevable car d'après les avis recueillis
au sein de la communauté et concernant la question de l'opportu-
nité de la création de la coopérative les craintes des artisans
concernaient non pas l'émergence possible de tension ou de con-
flits entre partisans et non partisans de la coopérative mais
plutôt l'échec de l'action coopérative à cause d'une part du
manque de compétence et dynamisme des dirigeants qui seraient
choisis et d'autre part de l'absence possible de soutien de
l'action coopérative par les autorités gouvernementales. Nous
pensions que ce volte face était plutôt motivé chez le chef
de la communauté par une certaine crainte de perdre une part
de son autorité sur les artisans étant donné que l'action et
la participation coopératives impliquait de la part de chaque
nombre de devoir de respect de certains principes: l'élection
des responsables.
la collégialité
des décisions,
le droit
de regard et de critique
sur la façon dont sont gérées par
les responsables élus les affaires de la coopérative etc ...
Tous ces principe étaient évoqués et expliqués par
les responsables du service de la coopération lors de la réu-
nion.
Une deuxième réunion était convoquée une semaine plus
tard par le service de la coopération, et entre temps les mem-
bres du groupe initiateur y compris le chef de la communauté
devaient se réunir : à cette réunion du groupe initiateur, le
chef de la communauté par une décision unanime de tous les
.. '/ ...
l,

152
les autres membres fut exclu du groupe et remplacer par un
autre artisan,
de même classe d'âge (la cinquantaine d'âge)
et déjà acquis à l'idée de la constitution de la coopérative.
Le service de la coopération devait accepter la demande de cons-
titution de la coopérative présentée par le groupe initiateur
à l'occasion de la deuxième réunion que ses responsables ont
tenu avec celui-ci. Une assemblée générale regroupant tous les
membres potentiels de la coopérative devait se tenir dans un
délai de deux semaines au sein de la communauté en présence
des responsables du service de la coopération qui à cette occa-
sion devaient veiller au bon déroulement des élections des mem-
bres constitutifs du conseil d'administration de la coopérative
et de son bureau ainsi qu'à définir les rôles et responsabili-
tés qui s'attachent à chaque poste,
les droits et devoirs de
chaque membre,
les prérogatives des différentes instances
(Assemblée générale, Conseil d'administration, bureau etc •.. ).

153
CHAPITRE XI
QUESTIONNAIRES UTILISES DANS LES
DIFFERENTES ENQUETES ET SYNTHESE
DES OBSERVATIONS FAITES DANS LES
DIFFERENTES UNITES VISITEES

GUI D E
D ' E ~ T k ~ T l
~ N
Vous ~tes chef d'e~treprise, voulez-vous nous parler de
votre trajectoire sociale et protessionnelle depuis votre
adolescer,ce ?
-
Parlez-nous de votre origine sociale
- Parlez-nous des conditions dans lesquelles
s'est_
effectué votre apprentissage
-
si vous avez travaillé cans le secteur moderne,
parlez-nous alors de ce que vous y
faisiez
Parlez-nous de la façon dont vous avez pu constituer
vOLre capital de départ
-
Parlez-nous des aides que vous avez reçues au moment
de vous installer
-
Parlez-nous de la façon dont VOUL avez constitué votre
é qui pe'men t
-
Parlez-nous de votre clientèle
-
Parlez-nous de vos apprentis et de leur travail
-
Parlez-nous de la façon dont vous utilisez vos profits
-
Parlez-nous de l'aide que vous fournissez
à vo~re
famille

154
A-QUESTIONNAIRE
A
CHEFS D'ENTREPRISE DU SECTEUR INFORMEL PARACAPITALISTE
Questionnaire n°
Date
Ville
FICHE D'ENTREPRISE
Quartier
Type de local
Machine ou appareil existants
Date création
Métier exercé
Nombre de travailleurs présents
Rue ou
Avenue le plus proche
Questionnaire pour le chef d'entreprise
CHEP D'ENTREPRISE
A quelle classe êtes vous arrêtée au niveau de vos études ?
2
Quelle formation technique ou professionnelle avez vous reçue?
3
Ou avez vous fait votre formation ou votre apprentissage ?
4
Pendant combien de temps a duré votre formation ?
5
Avez vous une bourse ou un salaire pendant votre formation
ou votre apprentissage ?
6
Quelle fonction ou responsabilité assumez vous actuellement
dans l'entreprise?
7
Quand il y a un travail y participez vous ?
8
Existe-t-il des apprentis suffisamment qualifiés pour
diriger tout le travail à votre place?
9
Avez vous exercé une profession salariée avant de
vous installer ?
10
Qu'elle était votre profession et durant combien de temps
l'avez vous exercée?

155
II
Pour quels motifs avez vous cessé votre activité salariée?
12 Depuis cquand êtes vous installé dans ce quartier?
13 Le terrain sur lequel vous êtes installé vous appartient-il ?
14 Payez vous un loyer pour ce terrain ?
IS Les constructions qui sont sur le terrain
est ce vous qui les avez faites?
16 Avant de vous installer ici où exercez-vous?
17 Pourquoi avez vous quitté?
18 Combien de fois avez vous changé de quartier et pourquoi?
19 Dans quel quartier habitez vous?
20 Quel type de demeure avez vous ?
21 Avez vous un mobilier et un équipement ménager moderne ?
22 Payez vous un loyer là vous vous habitez ?
23 Combien de ma150n avez vous
et qui vous appartiennent ?
24 Quelles sont les caractéristiques de chaque maison?
2S Combien d'enfants avez vous?
26 Combien d'épouses avez vous?
27 Avez vous d'autres personnes en charge?
28 Combien sont elles?
29 Combien dépensez vous par mo~s pour nourr~r vos épouses, enfants
et autres personnes en charge ?
30 Avez vous une voiture personnelle?
31 Avez vous des voitures que vous utilisez dans le travail?
32 Quelle est votre religion?
33 A quelle entreprise religieuse appartenez-vous ?
34 Faites vous partie d'une association religieuse?
3S Cette appartenance vous occasionne-t-elle des dépenses et combien ?
36 Combien de fois êtes vous déjà allé à la Mecque ?
37 Appartenez vous à un syndicat ou une association professionnelle ?
Pourquoi ?
38 Applrtenez-vous à un parti politique? Lequel?

156
39
Quelle est l'origine de votre capital de départ au moment
de votre installation?
40
Quels étaient vos premiers outils et machines ?
41
Comment les avez vous acquis?
42
Etaient-t-ils neufs ou avaient-ils déjà servi ?
43
Si vous les avez acheté, qui vous les avaient vendu?
44
Les machines et appareils que vous possédez actuellement
quand les avez vous ?
45
Dans quelle circonstance les avez vous acquis? Quand?
46
Quelles machines ou appareils utilisez-vous ?
47
Lesquels utilisez-vous que rarement?
48
Quelles sont les fonctions de chaque machine ou appareils
que vous possédez ?
49
Combien vous a-t-il coûté chaque machine et appareil
50
Quand ils sont en panne, qui les répare ?
Si
Produisez vous à l'unité et sur commande ou en série?
52
Quels bien ou services produisez-vous ?
53
Lesquels produi~ez-vous souvent ?
54
Lesquels ne produisez vous que rarement ?
55
Combien de travailleurs avez vous ?
56
Combien d'entre eux ont ils une compétence confiancée ?
57
Ceux qui sont compétents quels genres de tâches
accomplissent-ils ?
58
Travaillez-vous avec eux? Quand et pourquoi ?
59
Dans quelles catégories sociales se recrutent ils vos clients ?
60
Quels sont les moyens que vous utilisez pour augmenter
le nombre de vos clients ?
61
Faites vous des crédits à vos clients
62
t~mandez vous un acompte à vos clients ?
63
Vos clients vous paient-ils toujours entièrement ?
64
Avez vous déjà eu recours à la justice pour vous faire payer ?
65
Quelles sont les matières que vous utilisez pour les biens
et les services les plus courants ?

157
66 Les
achetez-vous toujours neuves ?
67 A quels prix les achet~z-vous ?
68 Pour trois biens ou services que vous produisez souvent
détaillez vous les quantités de matières utilisées?
·69 A quels prix vendez vous les biens ou services à vos clients ?
70 Combien en produisez vous tous les trois mois ?
71 Durant ces trois derniers mOlS, quelles quantités de bien
ou services avez vous produit ?
72 Constituez vous un stock de matières premières?
73 Avez-vous un compte bancaire? OUI/NON
74 Versez vous de l'argent dans votre compte !
) 1
souvent
parfoi s .
rarement:
75 Combien versez vous souvent dans votre compte ?
moins de 25.000 CFA 1
entre 25 et 50.000C?A~entre 50 et 75.000CFA ~
7
entre 75 et 100.000CFA.
76 Actuellement si vous aviez Uél marché de S.OOO.OOOCFA
jusqu'à concurrence de combien pourriez vous le financer avec
votre propre argent ?
7.7 Inscrivez vous le montant de vos transactions financières
dans un livre comptable 1 toujours~ des fois~ rarement~
78 Les apprentis qui travaillent dans votre entreprise habitent-ils
dans le même quartier que vous ? dans le quartier où est installée
votre entreprise? àans d'autres quartiers proches?
79 Avant de recruter un apprenti, consultez vous son tutèur d'abord?
toujours, souvent, rarement, jamais
L'APPRENTI
1
Quel âge avez vous ?
2
A quelle classe êtes vous arrêté dans les études?
3
Depuis quand travaillez-vous dans cette entreprise ?
" 1

158
4
Avez-vous déjà travailler ailleurs ?
5
Quels étaient les différents métiers exércés ?
6
Pendant combien de temps l'avez vous exercé chacun?
7
Quelles étaient les raisons de vos départs successifs ?
8
Quelleé câches accomplissez vous souvent dans cette entreprise ?
9
Avant quelles étaient les tâches que vous accomplissiez?
10
Ce que vous savez faire qui vous l'a appris?
11
Ceux qui vous ont appris ce que vous savez faire travaillent-ils
dans l'entreprise?
12
Quels liens particuliers avez vous avec ces derniers ?
13
Faites vous partie d'une équipe de travail?
14
Sous la direction de qui travaillez vous?
15
s'il y a des choses que vous voulez saV01r dans le métier
à qui vous adressez-vous ?
16
Cette ou ces-personnes vous disent-elles toujours ce qu'elles
savent ? Pourquoi ?
17
Avec votre niveau de compétence actuelle à quel salaire
pensez vous avoir droir ?
18
Combien recevez vous comme "mandat" chaque lDois ?
19
Faites vous des travaux à titre personnel dans l'entreprise?
20
Quels sont vos clients ?
21
Quels biens ou services produisez-vous pour vos clients ?
22
Quels sont les différents travaux exécutés à titre personnel
durant ces trois derniers mois ?
23
Quel est le montant total de vos gains ?
24
En donnez-vous à votre patron ? Combien ?
25
Avant de vous livrer à un travail pour votre compte en demandez-vous
l'autorisation à votre patron?
26
Combien de jours travaillez vous dans la sema1ne ?

27
Combien d'heures travaillez vous par jour?
28
Si vous êtes blessé en cours de travail qui prend en charge
vos soins ?

159
29
Si vous tombez malade qui prend en charge vos frais de santé ?
30
Combien de fois êtes vous blessé au cours du travail ?
31
Combien de Hiis êtes vous tombé malade ?
32
Votre patron a-t-il pris chaque fois en charge vos frais
de soin ou de santé ?
33
Combien de repas prenez vous par Jour dans l'entreprise?
34
Qui paie ces repas ?
35
Qui vous achête vos habits ?
36
Votre patron vous paie-t-il des habits? -A quelle occaSlon ?
37
Combien de vois avez vous reçu de votre patron des habits
au cours de trois derniêres années ?
38
Quels genres d'habits est-ce?
39
Dans quel quartier habitez-vous?
40
Habitez vous chez un parent ?
41
Quels sont vos liens de parenté?
42
Payez-vous un loyer ? Combien ?
43
Combien de repas prenez vous par Jour à votre demicile ?
44
Qui paie ces repas ?
45
Contribuez vous financiêrement aux frais domestiques ? Combien
par mois ?
46
A combien s'élêvent vos dépenses pour vos besoins personnels
chaque mois ?
47
D'où proviennent vos revenus?
48
Quelle est la preofession du parent chez qui vous habitez ?
49
Quelle est la prefession de votre pêre ?
50
Quelle est la religion de votre pêre ?
']
Combien de dépenses a votre pêre ?
52
Combien d'enfants a votre pere ?

160
B- QUESTIONNAIRE
ARTISANS CORDONNIERS DU SECTEUR INFORMEL
DE SUBSISTANCE
Questionnaire nO
Date
Ville
FICHE D'ENTREPRISE
Quartier
Type de local
Machine ou appareils existants
Nombre d'artisans présents
Rue la plus proche
QUESTIONNAIRE
ARTISANS CORDONNIERS
Quel est votre âge?
2
Avez-vous été à l'école?
3
A quelle classe êtes-vous arrêté dans vos études ?
4
De quelle région êtes vous originaire?
5
Dans quel village ou ~uelle ville êtes vous né ?
6
Jusqu'à quel âge êtes vous resté dans votre village?
ou ville natale?
7
Où avez-vous fait l'apprentissage de votre métier?
8
Durant combien de temps avez-vous appris le métier ?
9
Celui qui vous a appris le métier est-il un apprenti à vous ?
10
Quels liens de parenté vous lient-ils ?
11
Depuis quand êtes vous à Dakar ?
12
,
Depuis quand êtes vous installé dans ce quartier ?
,
1
13
Combien de vois retournez-vous par année dans votre village
,\\(
ou ville d'origine?
14
Avez-vous déjà quitté le Sénégal et pour quelles ra~sons ?
15
Etes-vous marié ?
16
Combien d'épouses avez vous?

161
17 Combien d'enfants avez-vous?
18 Y-a-t-il d'autres personnes que vous avez en charge? Combien?
19 Envoyez vous régulièrement de l'argent
aux parents restés dans votre village ou ville natale?
20 Combien avez-vous envoyé chaque mois
durant les trois derniers mois ?
21 Dans quels quartiers habitez-vous à Dakar?
22 Habitez-vous dans une maison ou en location?
23 Habitez-vous avec d'autres artisans?
24 Combien payez-vous comme loyer ?
25 Etes-vous le responsable de cet atelier ?
26 Depuis quand êtes vous dans cet atelier ?
27 Qui vous a trouvé votre place ?
28 Combien payez vous
comme loyer mensuel ?
29 Avez-vous des liens de parenté avec d'autres occupants
de l'atelier?
30 Quels liens de parenté avez vous avec chacun d'eux?
31 Certains occupants de l'atelier sont-ils
originaires du même village ou de la même ville
que vous ?
32 Combien sont-ils ?
33 Travaillez-vous toujours avec vos propres outils ?
34 Echangez-vous vos outils ?
35 Pour fabriquer un produit, coopérez-vous avec d'autres
occupants de l'atlier ?
36 Quand y" I-til coopération entre vous?
37 Comment vous distr~buez-vous les tâches ?
38 Vous arrive-t-il et dans quelles circonstances de
coopérer avec d'autres artisans qui sont dans d'autres ateliers?
39 Quels sont les outils que vous utilisez ?
40 Quels sont les outils que vous achetez chez le commerçant ?
41 Quels sont les outils que d'autres artisans vous fabriquent ?
42 Quels sont les prix de vos différents outils ?
43 Quels sont les outils que vous utilisez le plus dans votre travail ?

162
Quels sont les outils que vous utilisez rarement ?
Quels produits fabriquez-vous ?
Quels sont les produits que vous fabriquez souvent ?
Quels sont vos clients ?
48 A combien vendez-vous vos produits ?
49 Produisez vous à l'unité ou en série?
50 Quelle quanti té de produits pouvez vous fabriquer
par
jour de travail ?
51
Combien d' heures travaillez-vous par jour ordinairement ?
52 Combien de jours travaillez-vous dans la sema~ne ?
53 A quelle époque de l'année travaillez-vous surtout beaucoup?
54 Aidez vous vos anciens apprentis
Quand ils veulent s'installer toujours? souvent? rarement?
J ama~s ?
55 Pour aider vos anc~ens apprentis à s'installer :
vous leur donner de l'argent ? du matériel de travail ?
une place dans un atelier ? autre réponse ?
56 Y a -t-il des condi tions pour que vous acceptiez
d'aider un ancien apprenti à s'installer?

163
<: QUESTIONNAIRE EN VUE DE LA CONSTITUTION D'UNE COOPERATIVE
Souhaitez-vous appartenir à une coopérative?
2
Avez-vous déjà été membre d'une coopérative?
3
Pensez-vous qu'une coopérative serait la bienvenue
dans votre communauté ?
4
Quels devr.ient-ils être les objectifs de cette coopérative ?
5
Y a-t-il des raisons pour lesquelles cette coopérative
pourra-t-elle ne pas marcher ?
6
Que doit-on faire pour que cette coopérative marche bien?
7
Quels avantages attendez-vous de cette coopérative ?
8
Quels traits de caractére doivent-ils avoir les dirigeants
de cette coopérative ?
9
Qui choisiriez vous comme dirigeants pour cette coopérative ?
\\e Ces personnes j)uent-elles
j)uent-el1es un rôle dans la communauté?
Il
Qu'ont-elles comme caractéristiques particulières?
12 Quel type de contributions êtes vous prêt à faire?
13 S'il s'agit d'une contribution financière à combien
s'élevera-t-elle
s'é1evera-t-el1e votre contribution?
14 Connaissez-vous des artisans qui accepteraient
d'être membres de cette coopérative?

164
D -
OBSEFVATIONS SUR LES DIFFERENTS CORPS DE ~ETIERS
ENQUETES
EOUIPEMENT
(PRODUCTION
ETC)
Les entreprises concernêes par notre e,~quite sont
êquipêes de machines et d'outils. Voici pour chaque corps de
mêtiers l'essentiel des êquipements retrouvês dans les diverses
entreprises et quelques observations caractêrisantes.
dl-Menuiserie - êbênisterie
scle à
ruban
sc le circulaire
machine à bois combinêe et opêration
tour à bois
perçonneuse
ponçeuse
mortaise en chaume
A ces appareils qui marchent à l'êlectricitê s'ajoute
le petit outillage constituê de rabots, scie, Ciseaux à bois,
marteaux, maillet. L'entreprise est installêe sur un terrain de
200 à 300 m2 et comporte un hangar de 50 à 100 m2 à l'intêrieur
duqeul sont installêes les machines. Tous les chefs d'entreprise
possèdent une voiture personnelle de tourisme et une camionnette
pour l'entreprise.
La production se fait à l'unitê et dêpend des commandes
des particuliers. Cependant tous possèdent soit à l'intêrieur de
l'entreprise, soit à l'intêrieur dé celle-(~i dans une des rues
passantes environnantes un magasin amênagê et servant de salle
d'exposition pour les meubles fabriquês et destinés à la vente
directe: les chefs d'entreprise par moment fabriquent en série
des meubles dont la production est entièrement financée sur des
fonds propres.

- ,
165
Les produits fabriqués concernent les lits, fauteuils
t canapés, armoires, tables, chaises, portes, fenêtres, placards
te ... Le travail est entièrement assuré par les apprentis.
D'une manière générale, ils s'approvisionnent en ~atières
remière (bois rouge, b.Jis blancs, contreplaqué) au fur et à
esure des commandes ; ils ne constituent un stock que quand ils
ht gagné un marché important public ou privé ou s'ils veulent
aire une production en série de quelques meubles destinés à
a vente ~irecte. '. Leur approvisionnement en bois se fait auprès
~s négociants en bois sénégalais ou expatriés. Quant à leur
lientèle, elle est essentiellement constituée par la moyenne
3urgeo1se commerçante, les cadres
du public et du privé dont
e pouvo1r d'achat leur permet d'accéder aux produits fabriqués
ans les entreprises et qU1 sont d'un coût relativement plus
ievé que ceux des produits de même type fabriqués dans des en-
repr1ses de taille plus petite. Le pr1x moyen d'une armoire en
lis rouge ayant quatre-portes et deux glaces est de 280,000 CFA
i.600 Frs) ; quand elle est fabriquée dans une entreprise de
tille plus petite ne disposant par exemple que d'une machine à
,is combinée son prix moyen durent 15ü.000F/3.000F).
,
Les chefs d'entreprise tiennent une comptabilité rudi-
nt aire dans un cahier d'écolier où sont notés à propos de
aque commande importante la quantité de matières achetées
1 prix ainsi que
les montants des avances nécessaires faites
r le client.
Tous établissent des factures à la demande du client :
lS
possèdent des imprimés de modèle de facture portant à l'en
e la raison sociale de l'entreprise et son adresse ainsi
un tampon.

166
Egalement tous ont un ou deux comptes .bancaires.
Quant à leur chiffre d'affaire, il varie entre 530.000 CF
(10.600.000 F) et 800.000 CF (16.0000F)
; ils exigent à
tous leurs clients le versement à la commande d'un acompte
de 50 %, le solde devant être payé à la fin des travaux,
et avant la livraison du produi t. La part de la matière dan.>
le prix de revient est variable ; elle est de 40 % à 60 %
S~üvdnt le type de produit (tab le à manger 10 % ; armolre
60 % par exemple).
d2 MENUISERIE METALLIQUE
Cisaille
poinçonneuse
rouleuse de
tâle
perceuse
€lectrique
poste soudure électrique
cintreuse
mèuleBse portative
perceuse électrique portative ou fixe
touret à meuler
forge et enclume
poste de soudure oxy- acétylène
A cet équipement
s'ajoute un outillage à maln souvent
anclen et assez usé.
Les entreprises sont installées sur des terrains de
superficies variables allant de 100 à 450 m2 et comportant un
hangard
dont la toiture a une charpente en bois ou en fer et
est couverte soit de zinc soit de fibre-ciment
la surface
couverte par le hangar peut varier de 50 à 150 m2 ; elle co~porte

167
aUSSl un bureau avec ou sans téléphone.
Tous possèdent une voiture qUl souvent est une ca-
mionnette servant aux transports des matières achetées ou des
produits à livrer.
La production se fait à l'unité exclusivement, en
fonction des commandes et consiste en la fabrication de char-
pente métallique, grilles, portes, fenêtres, persiennes en
fer, portails, fauteuils, chaises, tables en fer,
futs métal-
liques.
D'une manièr~ générale, leur approvisionnement en matières
premières se fait chez les commerçants sénégalais ou dans les
malsons de commerce tenues par des expatriés (Bernabé, Peyassac
etc ... ) et au fur et à mesure des commandes. Les matières pre-
mières les plus couramment employées sont les tôles de fer
noir. les tubes carrés, les fers carré, les cornières, les fers
plats et les profilés. La p3rt de la matière dans le prix de
revient va de 50 à 70 % selon le type de produit et l'origine
de la matière (matière de récupération ou acheté dans les ma-
gasins).
rIs ne constituent pas de stock de matières premières
sauf quand ils ont gagné un marché important.
Leur clientèle se recrute au nlveau de toutes les couches
sociales: cela s'explique par le développement de l'habitat
en dur dans les zones urbaines qui touche tous les milieux sociaux
et la mode qui consiste à utiliser à la place des anciennes
fenêtres à persiennes en bois des ~aco>que l'on protège par un
système de grill~ cu encore des portails en fer. Le prix d'une

168
grille de 2 X.2 m varie de 30.000 F à 70.000 CFA (600 à 1400 F )
et celui d'un portail de 2 X 1,5 m de 40.000 F à 90.000 CFA
(800 à 1800 F).
Les chefs d'entreprise tiennent une comptabilité rudi-
mentaire établissent
des factures et ont des comptes bancaires.
Leur chiffre d'affaire varie entre 400.000 et 600.000 CFA
par mo~s (8.000 et 12.0000 F) et exigent à leur client le versement
d'un acompte
de 50 à 70 % au moment de la commande; le solde
devant être règlé à la fin des travaux et avant la livraison du
proQuit.
d3-
MECANIQUE (réparation)
Il Y a en général peu de gros équipements. Ce q~e l'on
trouve le plus couramment dans les entreprises visitées sont :
compresseur d'air
générateur d'acétylène pour soudure oxy-acétylémique
perceuse électrique
palan et plusieurs cr~cs
ou 2 tables basses en métal
A cet équipement, s'ajoute un outillage à main souvent
très varié constitué de clés, marteaux, scie à métaux etc ...
Le terrain sur lequel s'installe l'entreprise varie
entre 100 et 300 m2 ; il comporte un bureau et un hangar de
20 à 50 m2 où les moteurs et pièces de voiture sont gardés en cas
de pluie. En raison de l'exiguité des lieux, les travaux de ré-
parations se font le plus souvent en dehors de l'entreprise sur
les
espaces libres, privés ou publics constituant son environnement
l

169
immédiat
trottoirs ou terrains vagues.
Tous les chefs d'entreprise possèdent chacun une voiture
personnelle de tourisme.
Les travaux de réparation concernent les voitures de
tourisme de fabrication française (Peugeot, Citroen), italienne
(Fiat) et japonaise (Honda).
Tous les chefs d'entreprise ont un stock de pièces dé-
tachées récupérées Sl_r des moteurs de voiture en réparation et
qu'ils revendent à des revendeurs depièces détachées ou utilisent
comme pièce de rechange quand il s'agit de changer une pièce
d'un moteur de véhicule d'un client. De plus en plus, les clients
préfèrent acheter eux mêmes leurs pièces de rechange nécessaires
directement chez le concessionnaire en raison du fait que les
pièces de remplacement qu'utilisent les chefs d'entreprise sont
en général de mauvais état "et qu'il
détourne l'argent que le
client lui a donné pour l'achat de pièces neuves à d'autres fins.
La clientèle de ces entreprises est essentiellement cons-
tituée de privés cependant quelques petites et moyennes entre-
prises leur confient aussi la réparation de leurs véhicules.
C'est le cas surtout quand le chef d'entreprise a des relations
personnelles avec un ou plusieurs membres du personnel de direc-
tion de ces petites ou moyennes entreprises et dont ils acceptent
de réparer plus ou moins gratuitement les voitures personnelles.
En général, ils ne veulent pas travailler avec les services publics
car ils paient avec plusieurs mois sinon années de retard.
En général, les chefs d'entreprise ne demandent pas un
acompte à leurs clients; cependant, ils exigent d'eux qu'ils paient
les pièces de rechange, les frais de main d'oeuvre doivent être

170
payés après la réparation.
Les chefs d'entreprise ne tiennent pas une comptabilité,
cependant ils établissement des factures à la demande du client.
Ils possèdent tous soit un compte bancaire, soit un compte de
chèques postaux ou un livret d'épargne.
Leur chiffre d'affaire est très variable
il var~e de
150.000 à 300.000 CFA (3 à 6.000 F).
Remarque : Les entreprises et leurs abords sont encom-
bré8~e voitures déjà réparées mais dont les propriétaires n'ont
pas les moyens de payer les pièces de rechange fournies par le
chef d'entreprise ainsi que les frais de main d'oeuvre. Certaines
voitures sont là depuis plus d'un an exposées aux intempéries
et surtout aux risque de vols: les chefs d'entreprise sont
obligés sou~ent d'engager un veilleur de nuit.
" ~ _ MACONNERIE
1 machine vibrante pour la production d'agg1os
200 à 300 agg1os1
jours
1 bétonnière électrique
des moules
des cisai lles
A cet équipement, s'ajoutent quelques outils à main
pinces, tenailles, marteau, fils à plomb, équerre, truelle ... etc.
Un chef d'entreprise possède une camionnette
les autres
louent des véhicules en cas de besoin pour le transport de leur
matériel
: des chefs d'entreprise ne possédant nas de vibreuses

l7l
ou de bétonnières peuvent auss~ louer leur serv~ce.
Les travaux se font sur les chantiers où souvent sont
gardés durant toute la durée des travaux les équipements. Entre
deux chantiers, le gros équipement est soit donné en location
soit entreposé dans un coin de la maison.
Les chefs d'entreprise construisent des maisons, entre-
pots, usines, réservoirs, piscines, ils fabriquent des agglos
auss~ en série destinés à la vente.
En cas de construction, c'est le client qui fLou.nit
en règle générale
tous les matériaux: fer, ciment, sable,
cailloux .•. etc. Le client engage toutes ces dépenses en fonc-
tion d'un devis
c~timatif présenté par le chef d'entreprise.
Les travaux se font sans que le client ne puisse exercer aucune
action de contrôle sur leur déroulement ou sur l'utilisation
des matériaux dont une bonne partie surtout le ciment et le fer
est substiliEé par le chef d'entreprise pour servir dans d'autre~
chantier50ù il doit engager des dépenses en matière de matériaux
de même nature.
Les matériaux sont achetés chez les commerçants et au
f~r et à mesure des commandes : le prix des différentes matières
sont :
Sable
1250 CFA le m3 (25 F)
Ciment
35.140 CFA (702,80F)
Cailloux
5625 CFA le m3 (112,50)
Pour fabriquer I~OO agglos par exemple, il faut :
2 t de ciment à 35 140 CFA/T
70.280 CFA (1405,6 F)
8 m3 de sable à 1250 CFA/m3
10.000 CFA (200 F)
8 m3 de cailloux à 5 625 CFAftL3
45.000 CFA (90r F)
2 m3 d'eau
300 CFA (6.00 F)
125.580 CFA (25MF6)

172
Le prix moyen de la matière à fabriquer un agglo est
de 89,7 CFA. La part de cette matière rentre pour environ 56 %
dans le prIX de vente d'un agglo qui est de 160 CFA (3F20)
Les frais de maIn d'oeuvre pour la construction d'une
maIson sélève entre 15 et 20 % du total estimatif des dépenses
que le client doit engager.
Les chefs d'entreprise tiennent tous une comptabilité
ils sont pour cela aidés par un apprenti instruit s'ils sont
analphabèt~ Ils r.'établissement pas de factures; ils possèdent
tous un compte bancaire et exigent que l~ client paie la totalité
SInon au moIns jusqu'à concurrence dp.8 2/3 des frais dt main
d'oeuvre avant la fin des travaux: si cette exigence n'est pas
remplie, le chantier est souvent arrêté.

'CMENUISER'fE
MENUISERIE
MECANIQUE
MPCON'JERIE
173
EBENISTERIE
METALLIQUE
AUTO
1
:NT
Scie à ruban
Cisaille
,compresseur
1
_ _
,compresseur
1
_
d'air
vibr~use électriqUE
SCle circulaire
poinçonneuse
generateur d'acé-
betonnière
machine à bois,
rouleuse de t
tylène
moules
combinée 7 opéra-
tôle
perceuse élec-
cisailles
tions
perceuse élec-
tri~ue
poulies
tour à bois
trique
palan, crlCS
madrier
(fabrication arti-
cintreuse
brouettes
sanale
meule porta-
persienneuse
tive
ponçeuse
perceuse élec-
mortaiseuse
trique
fixe ou porta-
tive
touret à meulet
poste de soudurE
oxy-acétylène
forge et enclume
- - - - + - - - - - - - - - + - - - - - - - - - - - - - - - - - - f - - - - - - - - - - - - - -
ISATION
hangar avec
hangar
inexistant
lhangar
toiture
en Zlnc
bureau
, ureau
ou fibre ciment
toiture
en Zlnc
bureau
,
ou fibre ciment
bureau
Camionnette
camionnette
voiture de
camionnette ou
~UES
voiture de
voiture de
tourisme
location de véhi-
tourisme
tourisme
cule ou de
charette.
ION
lits, bahuts
charpente
réparation
agglos
armoires, bi-
métallique
vente de pièces
maison, entrepots,
,
bliothèques,
grilles, por-
récupérées
us ines ...
chaises, fau-
tes, fenêtres
tolerie
réservoirs
teui Is, tab les
persienne en
piscines
canapés, portes,
fer, portai l
fenêtres, pla-
fautBui.ls,
cards.
chaises, ta-
bles,en fer,
fût métalli-
que.
----+----------+--------+---------J-~---~----__I'
Tableau
l
1
Tableau
1

........,.
MEN'ÙISERIE
MENUISEPIE
MECANIQUE
MACONNERIE
EBENISTERIE
11
1 ETALLIOUE
AUTO
WVIS IONNEMENT
1ATIERES
au fur et à
au fur et à
au fur et à
au fur et à
fIERES
mesure
mesure
mesure
mesure
des comman-
des comman-
des comman-
des commandes
des
des
des
pour les
stock rare
stock rare
constitution
constructeurs
de stocks de
constitution de
pièces récu-
stock de matières
pérées
pour les agglos
:NTELE
cadres su-
toutes cou-
taxi, entre-
toutes couches
périeurs
ches sociales
prises, cadres
sociales
du privé ou
de l'adminis-
de l'adminis-
tration ou du
tration
privé
'FRE
'FAIRE
530.000 CFA
400 -
150 -
800.000-1000000 CE
UEL
800.000 CFA
600.000 CFA
300.000 F
.ES
CTERISTIQUES
Absence de
Absence de
Absence de
Absence de
salariat
salariat
salariat
salariat
Le chef d'eB-
Le chef d'en-
Le chef d'en-
Le chef d'en-
treprise
treprise
treprise
treprise
n'est pas un
n'est pas un
participe à
n'est pas un
producteur
producteur
des tâches
producteur
direct
direct
délicates
direct.
"ableau
I B i s

175
E
INTERVIEWS DE CHEFS D'ENTREPRISE
DU SECTEUR INFORMEL PARACAPITALISTE
E.M.A.
tapissier garnisseur à Médina - DAKAR.
Age : 52 ans.
Ancienneté dans la profession : 26 ans.
Membre de la chambre de métiers de Dakar.
Adresse entreprise : Dakar - Médina.
Quand j'ai commencé mon apprentissage, je devais
avoir onze ou douze ans. Les quatre premières années de mon
apprentissage je les ai passées dans l'entreprise de Mr GENET
où travaillait un de mes oncles. Ensuite quand mon oncle a
pris sa retraite il m'a recommandé à un de ses amis qui ve-
nait de s'installer comme tapissier et auprès de qui je devais
poursuivre mon apprentissage pendant encore sept ans. Comme
mon patron m'appréciait beaucoup parce que je faisais tout ce
qu'il me demandait de faire,
il m'a trouvé du travail comme
ouvrier chez mon ancien patron français qui s'appelait CONTIVAL.
je suis·
resté pendant trois ans. C'est après mon licenciement
que j'ai installé mon propre atelier avec surtout l'argent
qu'on m'a payé comme indemnité de licenciement. Mon atelier
se trouvait à la rue Clémenceau où je suis resté quatre ans.
Ensuite je suis allé a la rue Dial DIOP où je suis reste
quinze ans. Je suis là où je suis actuellement depuis sept ans.
Actuellement dans mon entreprise j'ai un compagnon
très qualifié à qui je paie vingt cinq mille francs par mois
il n'est pas déclaré mais je lui donnerai un certificat de tra-
vail s'il veut me quitter. Les compagnons, il faut savoir les
motiver sinon ils ne restent pas longtemps. Il y en a un qui
... / ...

176
est resté avec moi tellement longtampes que c'est moi-même
qui lui ai cherché une femme.
Après j~ luis ai trouvé du tra-
vail à la Société SMD. J'ai formé beaucoup d'apprentis depuis
que je suis dans le métier;
ils sont plus de trente et j ' a i
pu trouvé du travail salarié à cinq d'entre eux.
Pour prendre un apprenti il faut qu'il soit amene
par son père ou son oncle, mais pas par sa mère car les mères
n'ont pas d'autorité sur leurs enfants. Je ne prends pas de
garçons de vingt ans car l'apprentissage dure neuf ans dans
mon entreprise. Quand l'apprenti est trop âgé et s ' i l a des
parents qui le poussent contre vous il peut engager contre
vous une poursuite judiciaire sous prétexte que vous le faites
travailler comme un ouvrier sans lui payer un salaire. J'ai
eu ce genre de problème avec un compagnon âgé de 27 ans qui
a été soutenu par un Syndicat
(la CNTS) et j'ai dû payer des
dommages -
intérêts de près dehuit cent mille francs.CFA~
Quand un apprenti m'est amené,
je dis toujours à son
père que je ne paierai pas à son fils un salaire. Cela je le
dis toujours très clairement. Mais pour motiver mes apprentis
je1eur donne chacun un peu d'argent chaque mois:
les uns,
les
plus jeunes ont entre 500 F et l
000 F,
les plus grands ont
5 000 F et les compagnons qui travaillent bien peuvent avoir
jusqu'à 25 000 F. En plus de cet argent que je leur donne, je
les nourris aussi à midi, leur donne tous les jours de quoi
faire leur thé après le repas de midi, assure leur frais de
santé et leur donne de quoi payer leur transport.
Chaque mois,
... / ...
i

177
je dépense plus de 300 000 F pour l'entretien de ma famille
et de mes apprentis. Actuellement j'ai quatre épouses et trois
maisons qui m'appartiennent. Les deux maisons sont habités par
mes quatre épouses et leurs enfants et la troisième est donnée
en location. En tout j'ai 25 enfants, j'ai aussi des neveux
qui habitent avec moi.
En 1969, il Y avait des chefs d'entreprise qui recru-
taient à laisser des apprentis quand ils avaient un marché,
ils les exploitaient durement pendant le temps des travaux pour
ensuite les laisser tomber sans même leur payer un salaire.
Si on motivait bien nos apprentis, ils n'auraient pas besoin
de nous quitter en interrompant leur formation. Il y a aussi
des Lybano-Syriens commerçants qui ouvrent une entreprise dans
leur arrière boutique où ils font travailler de jeunes appren-
tis plus ou moins qualifiés moyennant un salaire non déclaré,
il y a des chefs d'entreprise qui se plaignent des Lybanais
mais je crois qu'ils sont plus fautifs que les Lybanais. Les
Lybanais sont fautifs car quand on est un commerçant, on doit
le rester au lieu de chercher à exercer la profession d'arti-
san mais les artisns sont aussi fautifs, ils ne motivent pas
suffisamment leurs apprentis, qui les quittent dès qsu'ils
connaissent un peu leurs métiers et rencontrent un Lybanais.
En tout cas moi, je n'ai pas peur de la concurrence des Lyba-
nais car j'ai des apprentis qui connaissent bien leurs métiers
et j'ai les outils et machines qu'il me faut pour fabriquer
des meubles de qualités. Moi, ce que je conteste surtout c'est
le fait que le Gouvernement continue à permettre des importa-
tions de meubles.
... / ...

178
Il ne devrait pas être permis à des Sociétés ou aux particuliers
de vendre ou d'acheter des meubles étrangers. Il existe ici au
Sénégal des artisans très compétents capables de fabriquer
n'importe quels meubles .. Si les artisans avaient des équipe-
ments plus performants et si le Gouvernement les aidait pour
assurer une bonne formation aux apprentis alors ils pourraient mleux
contribuer au developpement économique du pays. Le Gouverne
't
accorde des subventions aux écoles privées, les artisans
vraient aussi bénéficier de telles subventions Darce qu'ils fo,-
ment eux-aussi des jeunes. D'ailleurs les apprentis que nous
formons seraient des voyoux, des délinquants si nous n'étions
pas là. Quand leurs parents nous les confient, nous leur don-
nons un métier, les éduquons, Is nourrissons.
Le Gouvernement pourrait aussi beaucoup nous aider
s'il nous donnait davantages de marchés et nous payer à temps.
Malheureusement, c'est des petits marchés qu'il nous donne et
pour toucher notre argent, il nous faut faire les couloirs du
Ministère des Finances pendant plusieurs mois et il faut tou-
jours graisser la patte à certains fonctionnaires pour qu'ils
activent la procédure de paiement. Il y a deux ans, j'avais
gagné un marché de 40 armoires commandées par le Ministère des
Finances où j'avais de bonnes relations. Quand on m'a payé,
j'ai utilisé une partie de l'argent pour acheter de nouveaux
outils et je suis aussi allé à la Mecque pour un second péle-
rinage. Je n'ai pas beaucoup d'argent mais je remercie quand
même Dieu car mon travail marche malgré que l'on continue à
... / ...

17 U
17
importer des meubles et malgré qu'il existe une forte concur-
rence dans le secteur.
Il y a beaucoup d'artisans qui ne sont
pas compétents et qui ouvrent des ateliers. Leur travail est
de médiocre qualité mais ils ne vendent pas cher.
Ils nous
portent préjudice même s'ils sont des Sénégalais comme nous.
A cause d'eux, on dit que les artisans ne savent pas faire un
travail soigné mais ce n'est pas vrai. Regardez ici dans mon
salon d'exposition,
il y a des chambres à coucher, des tables
à manger, des armoires à glaces etc ... Tous ces meubles sont
fabriqués ici
l'armoire je la vends à 325 000 F,
la chambre
à coucher à 450 000 F et la la table à manger à 210 OOOF.
Tous ces meubles sont copiés sur des modèles que nous envoie
les chambres de métiers de France auxquelles notre chambre de
métiers est jumelée. Si nous avions les mêmes types de bois
que la France, ces meubles seraient encore plus jolis. Il
faut que le Gouvernement interdise aux apprentis qui n'ont pas
encore achevé leur formation d'ouvrir un atelier.
Seuls de-
vraient pourvoir ouvrir un atelier les apprentis titulaire
d'un certificat de travail portant la mention 3e catégorie.
Mon chef d'atelier que j ' a i formé depuis 8 ans,
i l est encore
de 4e catégorie. Si dans 2 ans i l me réclame un certificat de
3e catégorie je le lui donnerai
~'il veut ouvrir son propre
atelier. Je l'aiderai aussi en lui donnant de l'argent ou des
outils pour bien démarrer ou en lui permettant de venir exécu-
ter certains de ses travaux dans mon atelier. C'est un apprenti
qui est bien
i l est respectueux,
soigné dans son travail,
honnête, i l ne vole pas, ne ment pas et je le considère comme
mon enfant.
. .. / .. ·

180
Je peux dire que presque tout mon matériel de travail
est acheté en occasion soit auprès d'autres chefs d'entreprise
soit auprEs d'entreprises françaises qui voulaient se débarras-
ser de leurs vieux matériels. Certains matériels c'est moi qui
les ai fabriqués, comme par exemple la tour que je possède ac-
tuellement qui a été fabriquée entièrement par moi avec du ma-
tériel de récupération. Si je devais acheter une tour, cela
m'aurait couter dans 125 OOOF environ. Ma tour ne m'a coûté
que 50 - 55 000 F, le chassis je l'ai acheter chez un baol-baol
(un originaire du Baol, un ancien royaume du Sénégal) qui vend
de la ferraille récupérée, le dynamo m'a été vendu par quel-
qu'un qui possédaient un moulin à mil etc ...
Je possède aussi un compresseur avec pistolet pour
faire de la peinture ainsi qu'une ceintreuse à levier qui sont
achetés auprès d'un Français qui avait une entreprise qui est
fermée depuis 10 ans mais ce sont de bons matériels qui mar-
chent bien toujours. C'est moi qui ai fabriqué toutes les ta-
bles-bancs de l'Ecole privée Grand Jean et cette ceintreuse
m'avait beaucoup servi. J'ai aussi une raboteuse achetée au-
près d'un Cap-Verdien qui avait une petite entreprise de
menuiserie. Elle est vieille mais elle marche toujours. C'est
seulement la lame que je change de temps à temps. J'ai aussi
une scieuse à bois que m'a vendue un Français, un poste de
soudure que j'ai achetée neuve, 2 machines à coudre pour cou-
dre des toiles et qui marchent au courant. Ces machines étaient
achetées neuves et elles ont plus de 12 ans avec moi. J'ai deux
apprentis bien formés qui travaillent avec ces machines. J'ai
aussi deux étaux que j'ai montés moi-même sur une table métal-
... / ...

181
lique achetée en occasion : ça me sert pour couper des cornières,
pour les sommiers de mes lits.
Je préfère acheter mon équiDem~ut moi-mime que de pas-
ser par la SONEPI qui ensuite nous surveille, nous contrôle
et décide de ce qu'il faut faire de l'argent que vous gagnez.
En plus elle ne vous cherche même pas des marchés mais tous
les mois il faut lui payer ses traites pour les machines. Si
la SONEPI veut nous aider, elle doit nous donner des marchés.
Si nous avons des marchés, nous avons de l'argent et si nous
avons de l'argent, nous pouvons acheter toutes les machines
que nous voulons. Aujourd'hui on dévalorise beaucoup le travail
de l'artisanat dans notre pays mais si beaucoup de gens comme
vous y croyaient et nous aidaient alors nous pourrons encore
mieux aider notre pays. Si moi qui n'ai mime pas mon certificat
d'Etudes primaires,
je sais fabriquer mes outils et mime des
machines alors je crois les ingénieurs de ce pays doivent pou-
voir faire plus. Ils doivent pouvoir fabriquer les outils et
les machines dont l'artisanat a besoin mais il faut qu'ils le
veuillent. Au Lycée Technique de Saint-Louis, il y a des pro-
fesseur en mécanique qui fabriquent des scieuses et des rabo-
teuses pour les
artisans. Le Gouvernement devait aider des
gens comme ça. On aurait alors même plus besoin
d'importer
nos outils ou nos machines.
Notre développement dépend aussi de notre clientèle.
Il y a beaucoup de clients qui ne payent pas jusqu'au bout
leur commande. Quand vous leur réclamez votre argent alors ils
vou s disent qu'ils n'ont plus d'argent parce qu'ils viennent
... 1•.••

182
de tout dépenser pour un baptème, des funérailles ou pour
faire soigner leurs femmes ou enfants malades. Je demande
maintenant à tous mes clients de me payer avant de commencer
les travaux la moitiéde la valeur de la marchandise comman-
dée. Pour le reliquat,
je leur demande de s'engager auprès du
caissier de leur service qui fera alors un prélèvement sur
leur salaire.
Je réclame aussi à certains de mes clients leur
fiche de paie quand je n'ai pas beaucoup de confiance.
Aujourd'hui, je suis devenu âgé et tout ce que je
souhaite c'est qu'un de mes enfants puisse prendre la relève.
J'ai plus de vingt enfants mais il n'y a que deux qui s'inté-
resse à mon travail, mais ils sont encore trop jeunes et sont
des apprentis. J'ai des amis qui quand ils sont morts leur
entreprise a été fermée et tout leur matériel vendu, parce
qu'aucun de leurs enfants n'était un vrai artisan.
Et ensuite
il y a toujours les femmes qui demandent qu'on vende les ma-
tériels pour pouvoir avoir leur part. Les enfants aussi pour-
raient ne pas bien s'entendre même s'ils étaient des artisans
parce que tout simplement ils ne sont pas de même mère.

-
183
P.A.G. - Menuisier métallique
Age :
42 ans
Ancienneté dans le métier:
12 ans.
Adresse entreprise: Rufisque.
J'ai 42 ans, une femme et une bonne dizaine de per-
sonnes en charge qui habitent chez moi. Certains sont des
adolscents d'autres sont des adultes. J'habite à Rufisque ou
j ' a i mon entreprise. Je me rend au travail à pied. Je suis mu-
sulman et j'appartiens à la confrérie mouride mais mon frère
est de la confrérie tijiane. Je suis membre d'un dahira que
j'aide beaucoup financièrement. J'ai fait des études secon-
daires jusqu'en 3ème. Après j'ai arrêté pour m'inscrire à la
Faculté de droit pour faire 2 année de Capacité. Après mes 2
années de Capacité je me suis inscrit au centre de Bopp pour
prendre des cours en électricité, mécanique, de construction
métallique, de gestion et de comptabilité. Après mes 2 ans à
Bopp,
j ' a i fait un stage au domaine industriel de Thiès dans
une entreprise de construction métallique. Le travail m'avait
beaucoup plu et c'est comme ça que j'ai pris l'initiative
après mon retour à Rufisque de seconder mon frère dans son en-
treprise de menuiserie métallique. Mon père était en ce moment
vieux et malade et c'était les apprentis qui souvent dirigeaient
l'entreprise. Mais comme mes études n'étaient pas encore termi-
née je ne pouvais pas aussitôt commencer à travailler avc mon
père. Après mon stage dans le domaine industriel de Thiès, le
centre m'a envoyé faire un autre stage à l'usine de Lam-Lam
... / ...

184
(traitement de phosphate), la-bas j'était employé comme élec-
tricien. Après de nouveau. je suis parti pour un stage à la
Centrale Thermique du Cap-des-Biches. Ensuite j'ai demandé un
autre stage à FORCE qui est un centre où on forme des chefs
d'entreprise. A FORCE, j'ai obtenu un diplâme de technicien
qui me donne le niveau d'un agent de maîtrise. C'est la suite
de tous ces stages successifs dont la durée totale fait 8 mois
que je me suis fixé.
J'ai alors commencé à travailler avec mon père. J'ai
travaillé avec lui de 1976 à 1980. année à laquelle il a cessé
toute activité : il était devenu très malade. Quand je travail-
lais avec mon père c'est moi qui m'occupais de tout ce qui est
administration. je surveillais aussi les travaux dans l'atelier.
h
h ·
d
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allais à la ban<lJJe. t
.
.
h
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c erc halS
es marc es et
. c"es
mOl qUl c erc als
c erc alS
es marc es et
. c"es
mOl qUl c erc
les matières premières et distribuais toutes les tâches dans
l'entreprise.
Maintenant j'ai un apprenti qui est bien formé qui
me seconde. il joue le râle de chef d'atelier et il est très
compétent en matière de traçage. Ensuite ce sont les autres
apprentis qui font la coupe. Après avec le chef d'atelier,
nous assemblons les différentes pièces. Nous sommes aidés
dans ce cas par tous les autres apprentis. Comme ça chacun
d'entre eux pourra svoir ce quenous faisons et pourquoi nous
le faisons. Quand on leur demande de couper des pièces nous
leur disons comme est ce qu'ils doivent procéder pour ne pas
se blesser ou gâter le matériel ou les outils. Quand il y a
beaucoup de travail, les tâches les plus compliquées nous les
... f ...

lR5
confions aux apprentis les plus qualifiés qui seront aidés des
autres apprentis. Je reçois en formation beaucoup d'enfants.
En général, ils ont entre 12 et 15 ans, certains sont motivés,
intelligents et travailleurs par contre d'autres nous causent
beaucoup de problèmes à cause de leur indisicipline et de leurs
incessantes querelles avec les autres apprentis ou même avec
des gens de la rue. Ces apprentis nous ne les acceptons que
malgré nous car ils ne nous sont d'aucune utilité.
Si nous con-
tinuons à les garder c'est uniquement parce que nous connais-
sons leurs parents et que nous sommes conscients que si nous
les refusons ils deviendront des voyoux dans la rue. Peut être
qu'avec le temps ils deviendront plus conscients. Je n'accepte
jamais un jeune comme apprenti quand i l vient seul me voir ;
i l faut toujours que le parent vienne me voir lui-même accom-
pagné de son enfant.
Il me faut aussi connaître les parents
ou des gens qui les connaissent bien pour accepter de prendre
leurs enfants comme apprenti.
CAOMI (Centre de Rééducation des
Enfants) m'envoie aussi des enfants que je forme.
Normalement
CAOMI devrait me subventionner mais i l ne le fait pas,
j'ai
fait déjà plusieur démarches mais en vain.
En 1980, j'étais selectionné par la SONEPI qui avait
promis de me donner de nouveaux équipements : tine ~eule
ébar-
beuse (195 000 CJVI un poste de soudure
(210 OOffFf un poste sta-
tistique à courant (380 OOOr.~ pour souder tous les métaux, un
poste de soudure oxy-acétylinique. Le hangar que vous voyez
là devait aussi subir une extension (1 500 008F~ et je devais
aussi disposer d'un stock de matières premières (tôle,
tube,
C
etc d'une valeur de 1 433 90o
Yf. Jusqu'à présent il n'y a
encore rien de fait dans tout ça.
Si j'avais suffisamment de
... / ...

186
marchés importants, je pourrais moi-même acheter tous ces équi-
pements mais les marchés administratifs sont difficile à obte-
nir : notre demande de soumission doit passer par différentes
commissions et en plus il faut être en règle avec les institu-
tions c'est-à-dire déclarer ses employés, payer leur cotisa-
tion à la sécurité sociale, payer ses cotisations patronnales
etc ... !a fait beaucoup de charges que beaucoup de chefs
d'entrerpise ne peuvent pas supporter. Et puis même si on est
en règle, on n'est pas assuré de gagner le marché. Il y a des
marchés que l'on passe de gré à gré: ce sont des marché d'une
CFA
faible enveloppe financière (300 - 500 000
par exemple), que
peut vous confier un chef de service. Mais même ces marchés
qui se passent de gré à gré, il n'y a pas beaucoup.
Souvent on donne des marchés aussi à des gens qui ne sont pas
des chefs d'entreprises et qui viennent nous voir pour nous
sous-traiter les travaux. Dans ce cas on ne gagne pas grand
chose. Il exite aussi des courtiers qui viennent nous propo-
ser leur aide ou leur collaboration pour gagner un marché. Après
il faut leur donner une commission c'est-à-dire une somme d'ar-
gent égale au 1/10 de l'enveloppe financière du marché.
Quand on a aussi de bonnei relation~dans les services on peut
aussi facilement gagner des marchés si l'on a assez d'argent
pour graisser la patte à tout le monde. Moi je préfère surtout
travailler avec des particuliers ou des sociétés privées comme
BATA, SOCOCIM, SAPEM qui sont des sociétés installée, à Rufisque.
Quand ces sociétés me font des commandes, elles me font une
avance, pour pouvoir démarrer les travaux. Ensuite dès que je
finis le travail, elles me paient. Avec les marchés des services
... / ...

187
publics vous n'avez d'avance et ensuite
on vous exige une
caution bancaire qui peut équivaloir à 50 % de montant du
marché. Et puis vous n'êtes jamais payé aussi après la fin des
travaux. Souvent il faut attendre plus d'une année avant d'être
payé. Je peux donner un exemple:
en
1979, j'avais gagné un
marché d'un montant de 460 OOOCf~our la réfection d'une Ecole.
CFA
J'ai obtenu une avance de 80 000
avec beaucoup de difficul-
té. Mais ces 80 000 CF'b' étaient pas suffisants pour l'achat
des matières premières et il m'a fallu pour pouvoir commencer
les travaux d' aj outer 200 OOcF FA
OOcF
encore, pour compléter l'achat
des matières. Quand j'ai fini le travail, je l'ai livré mais
jusqu'à ce jour je ne suis pas encore payé;
payé: j'entends dire que
c'est celui qui devait me payer qui
a empoché tout l'argent.
J'ai pris un avocat qui lui a fait une mise en demeure.
Comme équipements, je dispose d'un poste de soudure
de fabrication française, une perceuse électrique portative,
une ébarbeuse électrique portative et une autre qui est un
modèle plus grand. J'ai une grande cisaille qui marche bien,
une plieuse pour tôle, 3 étaux, une forge pour chauffer et
battre le fer et une table métallique ronde qui me sert de
cintreuse et que j'ai fabriqué moi-même. La plieuse elle a
été fabriquée par un ami de mon père qui était un technicien.
Si j'avais beaucoup plus d'équipement, et davantage
de marchés, j'aurais pu employés un nombre d'apprentis plus
importantS. Actuellement j'ai 17 apprentis. rousne savent pas
travailler, certains me gatent même mes appareils et mes outils.
La plupart prennent leur repas de midi dans l'atelier même (ils
sont au nombre de 11). En plus, aux plus âgés, je donne des
"mandats".

iEF D'ENTREPRISE: propriétaire
Définition des tâches, rôles et
~~ moyens de travail
Définition des tâches, rôles
et responsabilîtés
Chef d'entreprise
Relation avec les client~
Recherche de marches conception des
.~
1
J
Contrôle des tâches
1
tâches
,
\\

Entretien du matériel et sa
~a repro-
1
\\
duction.
,
,
1
\\
Règlement des
de~ conflit~
~
1
Conception des produits
f
,
\\
,~~
Distribution des "mandats"
1
,
\\
Compagnons
)MPAGNONS
:JMPAGNONS :
/
/
1
\\
,
Exécution des tâches complexes
Jprentis
pprentis compétents
\\
• '
1
'\\
1
des
de~ équipes de travail
t ayant la direction
,
les équipes de
.
\\.
Formation des jeunes apprentis

\\.
~
v
~
Distribution des tâches aux petits
'avail
-avail
apprentis.
1
~ 1 1
v
1 1'---':="'~-r
Contrôles et surveillances
~urveillances des
.l~1 1
l -,
l
travaux qu'exécutent les petit~
petits appren·
,,'
appren-
.1
\\
J
tis
,
\\
Exécution de travaux à titre personnel
J
"
per~onnel
l
"\\
autorémunération.
~
1
\\
l
"
~
1
\\
Apprentis
1
'\\
,
,
\\
\\
Constitution de petites équipes de
~
j
\\'\\
travail
PPRENTIS
lt.
{t
"
Obéissance et soumis~ion aux apprentis
{t
\\
-4t
-4Î
] pl us c?mpétent~
e~ pl us âgés
Entretlen des equlpements
Ramassage des outils
1- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Nettoya ge de l'a te 1i er
Courses à l'intention des grands
apprentis
Les rapports sociaux de production sont très fort~nent
fortenent influencés
influencé~
par les rapports de parenté (entre le chef d'entreprise et ses
~e~
apprentis) les rapports entre classes d'âges différents dans le
(X)
00
(X)
00
milieu des apprentis;
apprenti~. Les normes dans le système de production lignagière.

189
IIIè PARTIE
LE SECTEUR INFORMEL
PARACAPITALISTE

190
"QUELQUES ELEMENTS DE REFLEXION SUR LES RESULTATS
DE L'EXPLOITATION PARTIELLE D'UNE ENQUETE
REALISEE SUR LES SECTEURS INFORMEL
ET PARA-CAPITALISE DE PRODUCTION
DANS LES VILLES DU SENEGAL"

191
CHAPITRE l
INTRODUCTION

191 Bis
Le mode d'orientation des ressources dégagées à
partir de surtravail produit dan sun système de production
déterminé constitue une indication importante sur le degré
et les limites d'appartenance des détenteurs des moyens de
travail du système de production ou des différents mode de
production qui s'articulent et se combinent dans la formation
sociale;
il est ce qui révèle un projet d'abord au niveau
personnel et ensuite au niveau du groupe. Les moyens techni-
que,
social et économique que le projet met en oeuvre pour
dégager les ressources nécessaires à la réalisation de ses
objectifs indiquent le degré de dépendance objective du sys-
tème considéré aux modes de production en combinaison. Pour
le secteur informel paracapitaliste, ces moyens sont issus des
différents modes de production de la formation sociale et com-
binés de façon spécifique pour produire des structures nouvel-
les formant un ensemble d'éléments intégrés et pouvant fonc-
tionner de façon autonome par rapport aux autres modes de la
formation sociale. Cette autonomie crée les conditions d'émer-
gence de pratiques nouvelles dont les plus conformes aux exi-
gences du système vont se renforcer et devenir des pratiques
structurantes créatrices de structures de renforcement de
l'autonomie et d'ouvertures au mode dominant et aux autres.
Mais en s'ouvrant au mode dominant qui ici est le mode capita-
liste qui nous intéresse particulièrement,
le secteur informel
paracapitaliste subit l'influence de ses normes
(normes du
système capitaliste)
qui s'imposent à lui aux travers:
... / ...

192
1. - de sa technologie dont la mise en oeuvre impose
aux utilisateurs le respect de certains normes de sécurité,
d'unprocès de travail déterminés et aux chefs d'entreprise un
comportement économique de rentabilisationd es équipements.
2. - des changements qu'il introduit au niveau des
caractéristiques psycho-culturels des participants du secteur
c'est-à-dire principalement des chefs d'entreprise, des employés
et des consommateurs des produits du système ou du secteur.
Ces changements psycho-culturels affecteront les domaines sui-
vants :
Chez le chef d'entreprise le domaine qui sera
particulièrement affecté sera celui de la question de son rap-
port aux problèmes relatifs à la rentabilisation de ses inves-
tissements. La vitesse de changement est d'autant plus grande
que les contraintes économiques institutionnelles qui s'imposent
sur le chef d'entreprise sont plus contraignantes. Dès lors le
critère de fixation de prix lors des négociations avec les ache-
teurs ne devient plus la subsjectivité, mais l'estimation objec-
tive du prix de revient du produit autant que faire se peut :
il y a glissement du comportement du chef d'entreprise du stade
de singularisation et de personnalisation de ses rapports aux
clients au stade de généralisation des critères de détermination
de son comportement économique.
- Chez les employés du secteur, les changements
psycho-culturels les plus importants introduits par le mode
dominant concerneront le niveau des motivations quant à la
... / ...

193
question du travail et celle de la défense des droits liés à
l'exercice de professions salariées. Le mode de gestion domes-
tique pour le chef d'entreprise de la question de la reproduc-
tion de la force de travail de ses employés devient dès lors
de la part de ceux-ci un objet de contestation fréquente
: dans
les unités la revendication du droit au salaire semble surtout
être le fait des citadins scolarisés et bien informés à propos
des dispositions légales concernant leur statut soit en tant
qu'apprentis soit en tant qu'employés.
Cette contestation à
propos des normes du passé quant à la question de la reproduc-
tion de la force du travail traduit bien l'influence des normes
du mode capitaliste sur le comportement des producteurs directs
du secteur. Le lieu privilégié de la contestation des normes
du passé sur les méthodes de gestion de la reproduction de la
force du travail semble être l'espace professionnel des rap-
ports de production, et la catégorie de producteurs directs
les plus concernés semble être celle remplissant les critères
suivants que sont: "être né en ville et scolarisé". Mais l'es-
prit de contestation semble être d'autant plus aigu chez les
suejts interrogés que ceux-ci sont plus anciens dans le métier
et plus âgés.
-
Chez le consommateur le domaine comportemen-
tal le plus affecté par sa participation au mode de production
capitaliste concerne celui relatif aux critères de choix des
biens d'usage accessibles sur le marché:
les consommateurs
deviennent plus exigeants en ce qui concerne la quantité du
travail ou du service qui leur sont proposés par les chefs
d'entreprise du secteur informel paracapitliste qui sous
... / ...

--
194
risque de perdre leur clientèle devenue plus exigeante se
voient obliger de donner à leurs produits un label de qualité
en conformité avec l'évolution du goût de leurs clients. Ainsi
les producteurs se mettent-ils à imiter les normes de fabrica-
tion qui ont déjà fait leur preuves sous d'autres cieux et à
l'intérieur d'autres systèmes de production en l'occurence ceux
du monde capitaliste.
A - LE SECTEUR PARA-CAPITALISTE ET SES CARACTËRIS-
=============================================
TIQUES
======
Les unités du secteur informel subissent donc comme
nous venons de le constater des transformations. D'abord il
s'agit de transformations au niveau des mentalités et compor-
tements en ce qui concerne les participants du secteur dont
les actions et pratiques concernent les domaines d'activités
situés en amont de laproduction (les chefs d'entreprises) le
domaine des pratiques professionnelles (les employés) et
celui de la consommation. Ensuite ces actions et pratiques
conçues en réponses aux exigences pratiques et formelles du
nouvel environnement socio-économique des participants, de-
viennent en raison de la fréquence et du rôle fonctionnel
qu'elles remplissent quant à la bonne marche générale de
l'unité, des pratiques et actions structurantes, génératrices
de structures nouvelles se détachant pour partie ou totalité
des structures traditionnelles et qui évoluent vers le modè-
le occidental. Dans les domaines concernant les structures de
'''/'' .

195
décisions, les pratiques et rapports professionnels nous pou-
vons assister à toutes les
progressions structurelles allant
de l'informel au formel,
de la confusion indifférencière des
tâches et rôles et de la personnalisation de ceux-ci à un
découpage plus réglementé des tâches de Direction et de pro-
duction.
Toutes ces structures nouvelles secrétées par les
unités pour répondre aux contraintes économiques et socio-
culturelles que leurs environnements leur imposent, consti-
tuent en tant que pratiques régulières dont le procès obéit
à des normes indéterminées et s'inscrit dans le cadre de
rapports également déterminés,
le lieu privilégié de produc-
tion autonome des éléments de renforcement de l'autonomie du
système de production que constituent le secteur para-capita-
liste qui est de tous les systèmes nés de l'articulation des
modes traditionnel et capitaliste le plus avancé économique-
ment et techniquement.
Ces éléments de renforcement sont des pratiques
structurées s'opérant dans le secteur para-capitaliste, mais
qui procèdent au niveau matériel et celui de leur conception,
des m~es traditionnel et capitaliste et dont la production
est elle-même génératrice de structures nouvelles dans le
domaine de la pratique professionnelle (accroissement du
savoir faire,
spécialisation) et des pratiques de renforce-
ment de la coopération interne entre les différents corps de
métiers du secteur.
... / ...

·.....
196
a) LES ELEMENTS DE RENFORCEMENT DE L'AUTONOMIE DU
SECTEUR PARA-CAPITALISTE
Ces éléments de renforcement du secteur se divisent
en 3 (trois) catégories selon le domaine où s'exerce leur in-
fluence sur le procès de reproduction d'ensemble du secteur.
Nous distinguons
:
- Les éléments de renforcement technico-écono-
mique qui agissent particulièrement dans les domaines concernant
la production au niveau local des outils : les moyens de travail
devant servir à la production de biens d'usage dans le secteur,
la division particulière du travail dans un métier donné,
la
coopération entre métiers,
le choix de technologies appropriées.
-
Les éléments de renforcement politico-straté-
giqsues qui agissent dans le domaine professionnel ou inter-
professionnel sous forme de regroupement réunissant les parti-
cipants du secteur. Nous pouvons citer les syndicats, coopéra-
tives ou amicales qui sont en même temps autant de lieux d'où
les informations à caractère économique et social sur le secteur
sont élaborées quand elles sont destinées aux pouvoirs publics
ou critiquées et amendées en ce qui concerne leur orientation,
si elles sont destinées aux opérateurs économiques du secteur.
Ces regroupements qu'ils soient organisés ou non constituent
donc aussi des lieux où émerge et se forge et se renforce la
conscience, au niveau des acteurs et participants directs du
secteur de la spécificité de celui-ci et la nécessité de la
défense. Ce sont donc des lieux d'élaboration idéologique et
... / ...

197
de productions de projets globaux et collectifs pour l'ensem-
ble du secteur.
Ils contribuent au travers de sprojets et
normes d'orientation qu'ils produisent dans l'intérêt général
du secteur au développement des mécanismes de renforcement de
l'autonomie de celui-ci.
- Les éléments de renforcement socio-culturels
qui concernent le domaine de la conservatione t
de la transmis-
sion du savoir faire productif, approprié et maitrisé par les
autochtones et celui des contraintes économiques et des motiva-
tions socio-culturelles qui au niveau du consommateur agissent
au niveau de sa décision d'acheter et d'utiliser les produits
du secteur. Les éléments de renforcement socio-culturel se
divisent en deux grandes catégories selon leur domaine d'action.
C'est ainsi que nous pouvons distinguer les éléments concernant
le savoir-faire, son degré d'adaptabilité par rapport à son
nouveau environnement socio-technique ; son mode d'organisation
et de transmission de ceux concernant les motivations d'acqui-
sition, d'appropriation et d'usage des éléments du secteur et
qui tirent leur'origine de l'appartenance à une sub-culture
déterminée ou à une catégorie socio-économique donnée.
b) LES ELEMENTS DE RENFORCEMENT SONT EN MEME TEMPS
DES LIEUX D'ARTICULATION
Les éléments de ce renforcement qu'ils s'agis-
sent de ceux concernant le savoir-faire et son mode d'organisa-
tion et de transmission, ou de ceux concernant les motivations
... / ...

198
socio-culturelles constituent les éléments par lesquels les
deux modes s' articulent au secteur et contribuent à sa repro-
duction : dans certaines branches du secteur le savoir appro-
prié correspond à des procès de travail et de fabrication du
mode capitaliste tandis que dans d'autres il correspond au
procès du mode traditionnel ; de même dans le domaine des moti-
vations socio-culturelles tantôt c'est les motivations à fina-
lité traditionnelle (acquisition de prestige sociale par l'ac-
quisition d'un bien) qui orientent la décision d'acheter ou
de s'approprier les produits du secteur, et tantôt c'est les
contraintes socio-économiques qui jouent ce rôle (les produits
du secteur sont à la portée des bourses de la quasi totalité
des catégories socio-économiques).
c)
CONCLUSION
Pour récapituler nous dirons que le système para-
capitalise est un système articulé aux deux modes capitalis-
te et traditionnel d'où i l tire les éléments matériels et
--
structurels qu'il recombine de façon spécifique
(selon les
contraintes et finalités)
pour répondre aux exigences de sa
reproductionet du maintien de son autonomie aux deux modes •
.../ ...

199
B - LE SECTEUR PARA-CAPITALISTE
L'ÉTAPE LA PLUS
=============================================
AVANCÉE DU PROCESSUS D'ARTICULATION ENTRE MODE
==============================================
TRADITIONNEL ET MODE CAPITALISTE
================================
Le secteur para-capitaliste est à distinguer du sec-
teur informel et des P.M.E.
(Petites et Moyennes Entreprises)
i l est ce qui constitue le tampon entre ces deux catégories
d'unités de production en raison de la nature hétérogène de
ses structures et finalités qui peuvent tout aussi bien appar-
tenir à l'un ou à l'autre mode ou encore être une production
spécifique du secteur.
Il se sépare du secteur informel moderne
d'auto-subsistance au moins par trois caractéristiques:
1. -
Des machines outils adaptées aux conditions
de production du secteur se substituent aux outils de produc-
tion locale ou importés
(ou tout au moins co-existent avec eux
dans le même espèce de production) à propos des tâches qui na-
guère étaient exécutées manuellement.
Il y a un accroissement
des valeurs immobilisées en matière d'équipement productif
traduisant une extension du marché, un essor économique et une
certaine volonté d'organisation.
2. -
L'émergence de structures nouvelles qui
sur le plan de l'organisation interne se traduisant par la
tenue (cartes encore timide dans certains cas) d'un cahier
comptable où est consigné le mouvement des transactions écono-
mico-financières avec les clients privés et les institutions,
la délimitation d'un espace plus ou moins structuré pour le
traitement administratif es rapports aux institutions, et sépa-
ré de l'espace de production, l'apparition encore timide des
méthodes de gestion par délégationdu pouvoir.
... / ...

200
3. -
Une capacité d'accumulation plus accrue
se traduisant par un changement au niveau du choix d'orien-
tation des ressources dégagées à partir du travail. Les
préoccupations des opérateurs n'ont plus pour objet la satis-
faction de besoins primaires comme c'est le cas dans le secteur
informel moderne d'auto-subsistance qui dans une large mesure
n'est qu'une traduction, version citadine de l'économie tradi-
tionnelle de subsistance :
les préoccupations des opérateurs
se manifestent dans le domaine de
l'ostentation sociale et de
l'investissement immobilier traduisant ainsi un transfert de
valeur du domaine économique au domaine social. Dans ce dépla-
cement des centres d'intérêt des opérateurs économiques quand
ils passent du secteur informel moderne d'auto-subsistance au
secteur para-capitaliste la finalité recherchée semble être
l'acquisition d'un plus grand prestige social et la sécurité
matérielle à moyen ou long terme assise sur une entrée régu-
lière de rentes. Cela constitue certes une limite réelle au
développement économique du secteur, mais paradoxalement il
est aussi ce qui permet au secteur de se reproduire
: la
recherche de prestige à travers une consommationostentatoire
ou la recherche de la sécurité matérielle par le bénéfice
d'une rente constituent en effet de puissantes motivations so-
ciales chez les opérateurs pour leur maintien dans le secteur.
L'ostentation et la rente après avoir été un moteur dans la
constitution du secteur deviennent à un certain stade de déve-
loppement de celui-ci un frein à son avancement et au passage
rapide des opérateurs du secteur para-capitaliste à celui des
P.E.M. A un tel stade de développement des unités du secteur
para-capitaliste seuls une formation et un encadrement technique
... / ...

20l
fonctionnel des opérateurs permettent une maitrise plus grande
des opérations technico-économiques du mode capitaliste peut
apporter un changement qualitatif dans leurs comportements éco-
nomiques quant à la quetion de l'orientation des ressources
dégagées à partir du secteur. En effet l'une des caractéristi-
ques du secteur et de ses promoteurs quand ils arrivent à un
stade avancé de développement économique c'est le divorce entre
le niveau supposé dei$moyens existants la capacité objective
du capital financier et économique et la capacité intellectuel-
le, technique et stratégique d'emploi et de combinaison judi-
cieux de ces moyens. Les moyens existent mais la culture de
leur emploi judicieux fait défaut, ce qui veut dire autrement
que les limites du développement du
secteur informel para-capi-
taliste résident plus dans l'absence denouveaux
modèles de
motivation économique et de capacité de combinaison nouvelle
des moyens existant que dans le niveau objectif d'accumulation.
D'ailleurs, une autre caractéristique des unité économiquement
les plus avancées du secteur para-capitaliste réside dans la
sous-utilisation chronique et structurelle de ses moyens maté-
riels et objectifs acquis à la suite de plusieurs annees d'accu-
mulation : cette sous-utilisation du matériel productif en par-
tie par l'emploi des moyens productifs pour des tâches sous
traités avec d'autres producteurs du secteur ne disposant pas
de machines ou des compétences requises pour l'exêcution des
dites tâches.
a) SES FINALITES ET LEUR RATIONALITE
Le secteur para-capitaliste est un secteur qui de
par la nature et la valeur de>,moyens matériels productifs
...
J
/ ...

202
immobilisés se détache du mode traditionnel et du secteur infor-
mel moderne d'auto-subsistance mais qui s'y rattache par la
finalité du système d'orientation de ses ressources:
ce qui
est recherché par l'opérateur dont le pouvoir qu'il exerce sur
son environnement est mince pour ne pas dire nul et ceci en
raisondes
limites que son système psycho-socio-culturel impose
à son action, c'est d'abord et avant tout la sécurité matériel-
le de sa personne et de sa famille,
ce qui se traduit par un
comportement de refus de s'engager dans un système dont ils
ne maitrisen~as les règles du jeu, donc de non prise de risque
avec le mode capitaliste. Aussi, le profit que le secteur in-
for~el para-capitaliste arrive à dégager est-il épargné sous
forme de dépenses de sur-investissement en matériel productif
(qui peut être revendu) ou investi dans l'immobilier pour
produire des rentes ou encore dépensé ostentoirement au sein
du groupe des parents, alliés et proches, ce qui par delà le
prestige social qu'il procure constitue une garantie de mobi-
lisation et de soutien du groupe en cas
de déboire ou de ren-
versement dans la situation sociale de l'opérateur (condition
de l'origine social et risque). Il y a notablement un manque
de développement de l'esprit de risque dans le secteur: ceci
est dû notamment d'une part, comme déjà signalé, à l'incapaci-
té psycho-culturelle des opérateurs d'exercer une quelconque
action de maitrise sur leur environnement que constitue le mode
capitaliste surtout au niveau économique et financier,
ce qui
engendre chez eux une réaction de refus de s'engager plus pro-
fondément dans les circuits capitalistes et d'autre part aussi
... / ...

203
aux limites du projet social des opérateurs qui détournent les
ressources dégagées dans le secteur du domaine économique au
domaine social pour étendre leur prestige et renforcer leur
position dans un but promotionnel.
b) LES LIMITES OBEJCTIVES SOC ID-CULTURELLES ET LES
LIMITATIONS SUBJECTIVES A SON DEVELOPPEMENT
Le manque d'esprit de risque semble être lié à plu-
sieurs facteurs :
1. - l'absence d'un modèle économique suffisa-
ment clair, partagé par la majorité de sopérateurs et mobili-
sateur autour de projets partiels de développement autocentré.
2. - l'absence d'une d'une forte motivation
d'engagement économique chez les opérateurs que certaines carac-
téristiques psycho-socio-culturelles liées à leur appartenance
au système social traditionnele t leur origine sociale limitent
dans leur comportement face aux problèmes d'investissement éco-
nomique : l'absence de culture générale chez les opérateurs
limite leur capacité d'appréhender les informations économi-
ques et par conséquent leur capacité d'action dans le système
capitaliste tout comme leur origine sociale modeste et le
désir de promotion statutaire les poussent à investir dans le
social. La perception par les opérateurs de l'incapacité du
monde traditionnel à rendre compte du mode moderne et surtout
... / ...

204
de fournir les éléments de sa maitrise inhibe l'esprit d'en-
treprise et tue chez les promoteurs du secteur para-capitalis-
te. Cette situation limite la possibilité d'éclosion de nou-
velles motivations d'engagement et cela d'autant plus que le
capital social dont disposent les promoteurs ne peut jouer
encore son rôle d'assurance et de garantie contre la déchéance
à la suite d'un échec. On rencontre cette motivation et cet
esprit de risque chez les promoteurs qui disposent de relations
importantes maitrisables à tout moment dans les institutions
financières de la place ou dans les ministères.
3. - La situation socio-familiale des oépra-
teurs que leur origine sociale modeste et le rôle de soutien
d'une famille large et nombreuse dont ils sont investies par
les siens les rendent ipso-facto très prudents par rapport à
toutes questions économiques requièrent de leur part un enga-
gement, constitue lui aussi un frein au développement de
l'esprit de risque que semble particulièrement favoriser les
modes de vie basée sur l'individualisme. Ici tout risqsue pris
par le promoteur engage non seulement sa fortune mais hypothè-
que aussi tout le devenir social des siens et dépendants.
4. - L'incapacité technique, financière et po-
litique dans laquelle souvent, se trouvent le spromoteurs de
gérer avec efficacité leurs relations économiques avec leurs
environnements du mode capitaliste constitue un facteur sup-
plémentaire chez ces derniers de non engagement et non prise
de risques dans des opérations économiques de plus ou moins
grande envergure.
... / ...

205
C) LES FREINS AU DEVELOPPEMENT FONT CHANGER LES ENJEUX
ET LA NATURE DES COMPETITIONS ENTRE PROMOTEURS
A son stade le plus avancé le secteur para-capitaliste
secrète les éléments qui vont constituer le frein à son dévelop-
pement, à son passage au stade des P.M.E. A un tel stade de
développement la compétition entre opérateurs économiques dans
le secteur para-capitaliste se joue dans le domaine de l'inno-
vation professionnelle et dans celui de l'ostentation sociale.
Il y a déplacement de la compétition du domaine économique vers
des domaines périphériques de la créativité et de l'ostentation
pour que la compétition puisse se jouer dans le domaine économi-
que au niveau du secteur para-capitaliste quand celui-ci atteint
son stade de développement le plus avancé
il faudrait qu'une
révolution s'opère au sein des structures socio-mentales des
opérateurs et dans les structures qui les relient au système
capitaliste, sinon comme c'est le cas encore cette compétition
va se déplacer dans d'autres champs où elle aura à se déployer
avec d'autre enjeux plus sociaux et idéologiques qu'économiques.
Quand la compétition se déroule dans le domaine de la créativi-
té ou celui de l'ostentation ce qui est visé c'est un gain de
popularité ou de prestige aux travers de l'exercice de la
profession ou du mode de consommation des ressources. Cela
évidemment peut avoir des incidences sur le plan économique
à moyen ou long terme en ce sens que la réputation de faire
un travail soigné précis apporte d'avantage de clients et per-
met un gonflement en tant qu'elle permet la reproduction et
le développement des rapports sociaux qui vont opérer au sein
du secteur informel para-capitaliste comme facteur permettant
la sous-valorisation de
la force de travail.
. .. / ...
,
1
1
1
j

206
c'est ainsi qu'à leur stade de développement le plus
avancé les unités du secteur recrutent la majorité de leurs
clientèles privées dans les couches sociales les plus aisées,
solvables certes mais aussi plus exigeantes que les autres en
ce qui concerne la qualité du travail et du service demandés
et instaurent en leur sein le système de travail semi-indépen-
dant. Ainsi en se pliant aux exigences normatives de sa nouvel-
le clientèle la fraction la plus développée au secteur (besoins
de nouveautés, de bonnes fonctions etc) se rapproche-t-elle
tout en conservant une certaine autonomie dans la conception
de ses moyens et produits de travail, et dans le fonctionnement
de ses rapports sociaux des normes et méthodes du système moder-
ne capitaliste auquel il reste greffé.
d) COCNLUSION
Du mode traditionnel d'auto-subsistance au secteur
informel moderne d'auto-subsistance et de celui-ci au secteur
para-capitaliste le procès d'articulation du mode tradition-
nel et du mode capitaliste semble passer par deux grandes
étapes qui sont :
- celle où c'est le mode traditionnel qui impo-
se sa logique aus système d'articulation en tant qu'il consti-
tue la référence à partir de laquelle les unités du système
organisent leurs rapports sociaux de production et le mode de
rapport marchand qu'elels entretiennent avec leurenvironnement
nous sommes dans le secteur informel,
... / ...

207
- celle où les normes, méthodes et règles, du
système capitaliste se disputent la structuration de l'espace
organisationnel interne des unités avec le mode traditionnel
sans arriver à imposer leur logique mais où le mode de rapport
des unités avec leurs environnement économique se trouve entiè-
rement soumis à la logique du système capitaliste : nous avons
affaire vec le secteur para-capitaliste dont l'évolution vers
les P.M.E. est entrvée par le mode d'orientation et d'affecta-
tion des ressources dégagées à partir de l'exploitation du
travail et un défaut d'organisation au niveau interne.

208
CHAPITRE II
ENQUETE
SUR LE SECTEUR
PARA-CAPITALISTE
======================~===========~========
ET ANALYSE DES RESULTATS
========================

209
Une soixantaine d'unités de production ont été visi-
tées, réparties entre deux régions tests, la région du Fleuve
et la région du Cap-Vert. Ces unités appartiennent soit à
l'artisanat traditionnel (le procès et les produits de tra-
vail sont traditionnels) soit à l'artisanat moderne (les
procès et produits de travail appartiennent au mode capita-
liste) et peuvent être classées selon la nature du procès et
des moyens de travail mis en oeuvre, la nature et la visée de
l'organisation interne des rapports de production, la nature
et l'intensité des rapports entretenus avec l'environnement
externe, en 3
(trois) grandes catégories :
- les unités du secteur ou mode traditoonnel
- les unités du secteur informel moderne d'auto-
subsistance
- les unités du secteur para-capitaliste.
A - LES RAISONS DU CHOIX DU SECTEUR PARA-CAPITALISTE
================================================
L'analyse qui va suivre concernera particulièrement
la 3ème catégorie d'unités. Elle aura pour objet d'identifier
les caractéristiques objectives des unités considérées en ce
qui concerne le domaine du mode de transmission du savoir-
faire, le domaine de la production et des rapports de produc-
tion, celui de leurs rapports avec leus environnements écono-
miques et socio-culturels. Le choix du secteur para-capitaliste
s'explique par le fait qu'il est le lieu où le mode d'articula-
tion entre les deux modes est le plus élaboré: c'est là où
... / ...

210
la rationalité du système d'orientation tant interne qu'exter-
ne se révèle le plus être un mode de combinaison entre moyens
et finalités appartenant à deux mondes différents établissant
entre eux des rapports de soumission réciproque.
Notre choix sur ce secteur, s'est trouvé également
guidé par le fait que ses unités remplissent toutes des fonc-
tions sociales, les mêmes que les unités du secteur moderne
capitaliste et qu'elles cherchent au travers de la mise en
oeuvre des ressources propres au secteur, d'acquérir par
rapport aux modes capitalistes une certaine autonomie dans
leur fonctionnement et leur mode de développement.
B - LE SECTEUR MODERNE
LIEU D'ACQUISITION DU
===~======================================
SAVOIR-FAIRE TECHNIQUE UTILISE
DANS LE SECTEUR
===============================================
PARA-CAPITALISTE
- - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - - - -
Sur 30 (trente) unités visitées
du secteur para-
capitaliste et concernant différents corps de métiers (cordon-
neries, menuiseries métalliques, menuiseries bâtiments et
ébénisteries, maçonneries etc), voici les résultats recueillis
à propos du mode de distribution statique de certaines données .
.../ ...

21 1
a) LES LIEUX DE TRANSMISSION DU SAVOIR-FAIRE TECHNIQUE
MODERNE: LES P.M.E. DU SECTEUR MODERNE ET LES
UNITES ARTISANALES DU SECTEUR PARA-CAPITALISTE
Sur 30 (trente) unités promues et gérées par des
autochtones une seule comporte un patron dont l'apprentissage
du métier qu'il exerce s'est effectué dans un institut de
formation professionnel (C.E.F.A. - BOPP). Pour le reste l'ap-
prentissage du métier a été fait auprès d'autres artisans
autochtones déjà installés ou encore dans des P.M.E. apparte-
nant à des expatriés ou encore dans des institutions attachées
à la Fonction Publique. Les maîtres artisans, promoteurs les
plus cités par nos enquêtés comme étant à la fois des modèles
sur le plan de la maîtrise professionnelle et ou de la condui-
te des affaires ont pour noms GASSAMA, FAYE DAI RA , MBAYE NDOYE
etc. Parmi les établissements ayant appartenu à des expatriés
et qui ont servi de lieux d'apprentissage aux sujets enquêtés,
les plus connues par les Sénégalais et qui ont été cités par
nos sujets sont les établissements LACOMBE, LA GENERALE MOTOR,
LA CITEC etc ... Quand aux Institutions attachées à la Fonction
Publique, les plus citées comme lieux d'apparentissage à la
maîtrise des métiers sont les P.T.T., T.P., Génies Militaires.
Sur les 30 (trente) patrons enquêtés, 14 (quatorze)
seulement en réalité ont effectué leur apprentissage dans des
unités de production ou ateliers appartenant à des autochtones.
Les 16 (seize) autres étaient réparties principalement quand
ils apprenaient leur métier entre les Entreprises détenues par
les expatriés et les Institutions attachées à la Fonction
Publique.
... / ...

212
Si nous considérons la Fonction Publique et les
Etablissements ou Entreprises détenus par les expatriés comme
procédant du secteur moderne et du mode capitaliste, nous
pouvons dire que l'essentiel du savoir-faire professionnel
mis en oeuvre dans les unités visitées appartenant aux autoch-
tones y sont transmis à partir du mode capitaliste : il y a
transfert d'un certain mode de savoir du secteur moderne au
secteur para-capitaliste. Mais le transfert du savoir-faire
ne s'accompagne pas toujours d'un transfert technologique con-
séquent pour leur mise en oeuvre et leur traduction en partique
professionnelle selon les normes du secteur mdoerne. le déphasa-
ge entre le niveau du savoir-faire transmis et celui des moyens
à disposition se traduit dans l'espace professionnel par des
partiques stratégiques adaptatives de résolutions des problèmes
qui se posent au cours des procès de travail : on fait changer
de fonction des outils, d'autres sont modifiés et on en invente
même. Ce déphasage entre savoir-faire et moyens matériels tech-
nologiques nécessaires pour leur mise en oeuvre est une des
conséquences de la difficulté que connaissent les promoteurs
de secteur para-capitaliste d'accéder aux crédits bancaires
d'investissements.
b) LE TEMPS D'APPRENTISSAGE DANS LES P.M.E ET DANS S.P.C.
Nos sujets enquêtés peuvent se répartir en deux lots
selon qu'ils ont effectué leur apprentissage dans le secteur
moderne ou dans les ateliers du secteur para-capitalise .
. . ./ ...

213
Si maintenant nous évaluons les temps d'apprentissage effec-
tués par nos enquêtes nous obtenons les résultats suivants :
-
Parmi les 14 (quatorze) enquêtés ayant effectués
leur apprentissage dans le secteur para-capitaliste, 4 (quatre)
ont fait 3 à 6 ans d'apprentissage et 10 (dix) ont fait 7 à
9 ans d'apprentissage.
- Parmi les 16 (seize) enquêtés ayant effectués leur
apprentissage, dans le secteur moderne
10 (dix) ont fait 3
à 6 ans d'apprentissage et 4 ont fait 7 à 9 ans d'apprentissage.
Ces résultats ne doivent pas surprendre si l'on sait
que les secteur moderne a à sa disposition tous les moyens
humains matériels et organisationnels pour permettre à ses
apprentis la maîtrise rapide d'un savoir-faire professionnel.
Ce n'est pas le cas dans le secteur para-capitaliste
où le temps d'apprentissage est souvent deux fois plus long
sans que pour autant cela ne garantisse un bon résultat sur
le plan de la formation professionnelle.
Un autre facteur
explicatif de la différence du temps d'apprentissage entre
les deux secteurs est la différence de la nature du procès de
production qui dans le secteur mdoerne est continu, ce qui
permet aux apprentis de ce secteur de trouver toujours à
s'occuper pour leur formation, mais qui dans le secteur
para-capitaliste est très chaotique en raison de l'irrégularité
... / ...

214
générale des commandes en particulier et dont la fréquence et
le volume déterminent le système de la production.
Nos sujets enquêtés dont le temps d'apprentissage
a duré 7 à 9 ans dans le secteur moderne ont expliqué leur
situation par le fait de l'embauche (par le patron) dont ils
ont pu bénéficier dès la troisième ou quatrième année de for-
mation, comme ouvrier de non qualifié.
C - LE SECTEUR MODERNE EST LE LIEU OU SE CONSTITUE
==============================================
LE CAPITAL DE DÉPART DES PROMOTEURS DU S.P.C.
============================================
a) LES MAITRES ARTISANS DU S.P.C. SONT D'ANCIENS
OUVRIERS DES P.M.E.
Après son apprentissage, la grande majorité de nos
sujets enquêtés déclare avoir travaillé pendant plusieurs
années dans le secteur moderne avant desen~er à s'installer
à son compte. Parmi nos 30 (trente) enquêtés:
- 9 (neuf) ont travaillé de 1 à 4 ans dans le secteur
moderne comme ouvirers avant d'installer leur propre atelier
comme maîtres d'artisans.
- 4 (quatre) ont travaillé entre 5 et 8 ans comme
ouvriers dans les Grandes Maisons du secteur moderne .
.../ ...

215
-
12 (douze) ont travaillé pendant une période d'au
moins 10 (dix) ans dans le secteur moderne comme ouvriers
avant de pouvoir ouvrir leur atelier.
-
5 (cinq) seulement ne se sont pas trouvés dans la
nécessité de travailler comme ouvriers avant de s'installer:
un parent proche était déjà installé dans le secteur para-capi-
taliste et ils ont pu hériter en partie ou en tout de son
capi ta!.
En cherchant un emploi salarié dans le secteur mo-
derne, à la suite de leur formation à un métier nos enquêtés
poursuivaient deux objectifs socio-culturels qui sont d'une
part se marier, et pour se faire constituer la dot nécessaire
à donner aux futures beaux-parents, à la sueur de leur front
et d'autre part soutenir économiquement leurs parents dont
les conditions de vie sont souvent des plus médiocres (la
plupart de nos enquêtés sont d'extraction très mdoestes, comme
nous le verrons plus loin).
b) L'EMPLOI SALARIE DANS LE SECTEUR MODERNE PERMET
D'ACCROITRE LA COMPETENCE PROFESSIONNELLE DES
FUTURS PROMOTEURS DU S.P.C.
L'emploi salarié dans le secteur moderne et la pos-
sibilité d'y changer plusieurs fois d'employeurs et de cadres
de travail sont l'occasion pour nos enquêtés d'un recyclage
.. •1...

216
professionnel permanent. En effet, dans une même branche le
changement d'employeurs, de lieux et de cadres de travail
équivaut chez nos enquêtés à un changement de méthdoes de tra-
vail ou à la possibilité d'une spécialisation à une tâche ou
ensemble de tâches déterminées. En tout cas il ressort de notre
enquête que 12 (douze) sur 30 (trente),
(12/30), des enquêtés
ont changé au moins deux fois d'employeurs et de cadres de
travail avant de sinstaller à leur compte. On retrouve d'ail-
leurs le même pourcentage de changement en ce qui concrne le
lieu de formation si l'on considère la période d'apprentissage
des enquêtés:
11 (onze) sur 30 (trente),
(11/3», des enquê-
tés ont changé deux fois au moins de lieu d'apprentissage et
de maîtres artisans ou de patrons au cours de leur formation,
ce qui porte à 15 (quinze) sur 30 (trente), (15/30), le pour-
centage du
nombre d'enquêtés ayant au moins trois fois changé
de lieux et de cadres de travail au cours de sa trajectoire
professionnelle et pendant toute la période d'avant leur ins-
tallation comme Maîtres Artisans. Les nécessités de l'appren-
tissage et du travail salarié dans le secteur moderne entraî-
nent une plus grande mobilité géographique chez nos enquêtés
dont d'aucuns ont déclaré avoir changé plus d'une fois de
régions ou devoir même émigrer pour des raisons de travail ou
liées à leur formation. Certains de nos enquêtés sont origi-
naires des campagnes qu'ils ont dû quitter pour les grandes
villes pour y apprendre un métier et de même plusieurs de nos
enquêtés ont eu dans le cadre de leur travail à séjourner pen-
dant une durée plus ou moins longue dans les pays limitrophes
comme la Mauritanie, le Mali et la Guinée.
... / ...

217
Il ressort de l'enquête effectuée que le temps de
passage dans le secteur moderne comme salariés est plus long
chez les suejts dont la formation professionnelle antérieure
est assurée dans les Entreprises du secteur moderne que chez
ceux dont la formation est faite dans le secteur para-capita-
liste : près des 3/4 des enquêtés qui ont travaillé 10 (dix)
ans ou plus dans le secteur moderne avant de s'installer ont
fait leur apprentissage dans les Entreprises (ou dans la Fonc-
tion Publique) du secteur moderne. En effet, la similitude des
méthodes de travail d'une Entreprise à une autre du secteur
moderne jointe à l'habitude du travail d'équipe qui est la
norme dans le secteur moderne, constituent autant de facili-
tations pour ceux qui ont reçu leur formation dans le secteur
moderne pour s'adapter aux conditions de travail salarié de
leur branche d'activités dans le même secteur. Cela n'est pas
le cas pour les salariés du secteur moderne qui ont reçu leur
formation dans le secteur para-capitaliste et dont les lacunes
les exposent plus aux vicissitudes du marché de l'emploi: ils
sont plus rapidement débauchés et restent plus longtemps au
chômage que leurs homologues formés dans le secteur moderne,
ce qui fait naître chez eux plus rapidement que chez les autres
l'idée et la motivation de s'installer à leur propre compte.
c) LA CONDITION DE SALARIE EST UNE INCITATION AU
CHANGEMENT DE STATUT SOCIAL: L'ANCIEN OUVRIER
DEVIENT MAITRE ARTISAN
L'idée de s'installer à leur propre compte n'émerge
et ne s'affirme dans la conscience de nos enquêtés qu'à la
... / ...

218
suite de maintes déceptions, désillusions ou déboires subis
et enregistrés soit sur le plan professionnel, soit sur le
marché du travail. Au départ, quand ils cherchaient à s'em-
ployer comme salariés dans le secteur privé nos sujets dans
la majorité des cas ne nourrissaient au préalable aucune
ambition allant dans le sens d'une installation postérieure
en qualité de Maîtres Artisans ou d'Entrepreneurs dans le
secteur économique. Il n'existe pas plus chez nos enquêtés
au départ une volonté stratégique de constitution d'un capi-
tal épargne pouvant servir de capital économique en cas
d'installation. La décision de changer de statut économique,
donc de quitter la condition de salaires pour celle de Maîtres
Artisans ou d'Entrepreneurs n'intervient chez nos sujets que
quand ils sont placés dans des situations où leur condition
économique actuelle peut se coupler contradictoirement à une
condition probable à venir plus dégradante: l'importance de
la valeur des droits perçus à la suite d'un licenciement éco-
nomique, un emploi que l'on trouve à la suite d'un long chô-
mage, ce sont là les situations qui souvent ont été à la
base de la naissance de la motivation et de la volonté chez
nos sujets de devenir des Maîtres Artisans en ouvrant un
atelier dans le but d'être moins tributaire pour leurs gains
des caprices du marché du travail dans l'avenir.
... / ...
!
1
l•1

219
d) LES DIFFERENT',S VOIES ET MOYENS DE CONSTITUTION
DU CAPITAL DE DEPART A PARTIR D'ACTIVIT2S SALARIEES
DU SECTEUR MODERNE
Quatre cinquième (4/5) de nos sujets enquêtés ont
constitué l'essentiel de leur capital de départ avec leur avoir
personnel, celui-ci étant constitué soit par la voie de l'épar-
gne, soit grâce à la perception des droits à la suite d'un
licenciement (1/3 des enquêtés se trouvent dans ce cas). La
première voie est plus longue et plus contraignante que la
deuxième qui, elle peut être considérée comme la voie royale
par excellence dans ce domaine si l'on tient compte des con-
traintes et conditions socio-économiques de nos sujets (dif-
ficulté d'épargner vu la faiblesse de leur pouvoir d'achat)
et les obstacles que dressent d'une manière générale les Ban-
ques devant toute démarche de crédit émanant des nationaux,
surtout s'ils sont de conditions modeste comme nos sujets au
départ.
Considérons ces deux voies
- la voie de l'apargne consiste en l'utilisation
d'une partie du gain salarial, pour les sujets ayant travail-
lé dans le secteur moderne dans des dépenses d'investissement
en matériels de production. Il s'agit en fait d'outils manuels
achetés et accumulés progressivement au fil des années mais
qui occasionnellement peuvent servir à la production de biens
... / ...

W\\
-+
220
d'usage dont la commande est adressée aux sujets qui d'ailleurs
ne s'installent définitivement comme Maître Artisan en ouvrant
leur atelier qu'après s'être constitué une clientèle solide
dans leur entourage. Plusieurs mois ou années peuvent s'écouler
entre le projet de s'installer comme Maître Artisan et sa réa-
lisation concrète. Si en raison de la situation socio-économique
de la famille de nos enquêtés l'emploi salarié dans le secteur
moderne et la possibilité d'épargne que cela procure constituent
une condition majeure à propos de l'acquisition du capital éco-
nomique et productif de départ pour s'installer comme Maître-
,
Artisans, pournos sujets, i l n'est pas moins vrai aussi que
ce qui les concerne,
tous plus ou moins, alors qu'ils n'étaient
que de simples apprentis, ont nourri l'illusion avec plus ou
moins d'intensité de pouvoir s'installer comme Maître-Artisans
à la fin de leur apprentissage, et ont pour ce faire dans le
courant même de leur formation chercher à acquérir du matériel
productif :
le matériel acquis peut être du matériel subtilisé
dans les lieux de formation ou dns certains cas acheté en occa-
sion à partir de gains occasionnels ou dans les magasins (quin-
caillerie) de la place.
- Les droits perçus en cas de licenciement éco-
nomique constituent s'ils sont investis en équipement produc-
tif en vue d'une installation une autre voie d'insertion, dans
le secteur économique comme
maîtres-art isans. C'est la voie
d'accumulation la plus courte en ce sens qu'il est possible
. . . l . . .

221
par cette voie moyennant un certain niveau de revenu (acquis
grâce aux droits perçus) d'acquérir en un temps record tout
le matériel indispensable pour démarrer une activité de pro-
duction marchande dans la branche de son choix. Cette voie
comporte cependant un inconvénient qui consiste surtout dans
l'impréparation dans laquelle se trouvent les nouveaux acteurs
d'assumer convenablement leurs nouveaux rôles de maîtres-arti-
sans et d'opérateurs économiques. Ici la transition est brutale
entre l'ancien statut de salarié soumis aux réglements et normes
du capital et le nouveau statut d'artisans indépendant devant
être tour à tour producteurs direct, chef d'ateliers, concep-
teurs, commerçants etc ..
D'autres voies restent ouvertes: celle du crédit
bancaire et celle de l'acquisiton en guise d'héritage du
capital de production de proches parents déjà installés dans
le secteur para-capitaliste. Ces deux voies ont toutes les
chances de se développer à l'avenir parce que d'une part
beaucoup de maitres-artisans parmi ceux qui sont solidement
installés travaillent avec leurs fils dont certains nous ont
déclaré avoir la vocation du métier qu'ils exercent et que
d'autre part le processus de sénégalisation des Banques et
d'assouplissement en cours des conditions d'octroi de crédit
à l'intention des promoteurs portent à croire que dans l'ave-
nir le recours au crédit bancaire constituera une voie pré-
pondérante dans la cosntitution de Petites Affaires .
.. . / ...

222
e) LA CONSTITUTION DU CAPITAL DE DEPART MOBILISE AUSSI
TOUTES LES RESSOURCES DE COMMUNAUTE D'APPARTENANCE
DES FUTURS PROMOTEURS DU S.P.C.
Le capital de départ constitué à partir de revenus
propres (épargne ou perception de droit acquis en tant que
salarié) est souvent complété par l'apport monétaire d'une
personne proche avec ou sans obligation de retour : 1/3 de
nos enquêtés ont été aidés au moment de leur installation par
des proches ; ce qui leur a permis de compléter leur outilla-
ge, de se faire confectionner un hangar et ou de clôturer leur
terrain d'installation. Ceux qui ont déclaré être aidés finan-
cièrement par leurs proches au moment de leur installation se
recrutent en totalité parmi ceux qui ont emprunté la voie de
l'épargne et de l'accumulation progressive des moyens produc-
tifs. Mais l'aide qu'octroient les proches peut se présenter
autrement que par un apport financier
complémentaire néces-
saire pour l'acquisition d'une partie du matériel de production
ou pour l'aménagement de l'espace de production (hangar et clô-
ture). En effet, l'aide qu'octroient les proches à ceux qui
s'installent nouvellement dans le secteur para-capitaliste peut
se présenter aussi sous la forme d'une aide en nature: les
terrains ou les moyens de travail. Dans beaucoup de cas, les
terrains sont prêtés à ceux qui démarrent nouvellement (sinon
ils occupent sans autre forme de procès les terrains encore
inoccupés appartenant à l'état dans les quartiers résidentiels) .
.../ ....

223
De même, des personnes anciennement installées peuvent donner
à des proches nouvellement installés du matériel de travail
sous forme de dons, ou vendus à des prix modiques avec des
facilités de payement.
Ainsi, l'installation dans le secteur para-capita-
liste devient au départ l'affaire de toute la famille ou voire
même de l'entourage pour une très grande partie des intéressés,
car même ceux quiont constitué leur capital de départ à partir
d'autres sources de revenus que l'épargne reçoivent l'aide des
proches sous forme de matériels de travail acquis à bas prix
ou de terrains prêtés etc. L'apport en capital de la famille
ou de l'entourage peut donc être un facteur décisif dans le
procès d'installation des nouveaux promoteurs du secteur para-
capitaliste.

224
D - LE SECTEUR PARA-CAPITALISTE : CONSTITUTION DES
==============================================
UNITEs ET CONTRADITIONS INTERNES
================================
a) LES UNITES DU S.P.C. ACCUSENT UNE GRANDE INSTABI-
LITE GEOGRAPHIQUE
Beaucoup de nos sujets nous ont déclaré avoir
déménagé plusieurs fois entre la date où la première fois ils
ont ouvert un atelier et celle de notre passage. Sur les 30
(trente)
sujets touchés par notre enquête, 18 (dix huit) nous
ont déclaré avoir déménagé au moins une fois des lieux de
production :
- 5/30 ont dû occuper successivement au moins
trois endroits différents.
- 13/30 ont eu à s'installer deux fois succes-
sivement en des endroits différents.
10/30 ont déclaré n'avoir jamais encore quitté
les lieux où ils se sont déjà installés.
Le nombre de déménagement semble plus important
chez les sujets dont l'ancienneté dans le secteur para-capita-
liste est la plus grande. Les sujets qui ont le plus déménagé
se sont installés dans le secteur entre les années quarante
et soixante et ont en moyenne trente ans de métier tandis que
... /" .

....
225
ceux qui n'ont eu que deux changements de lieux n'ont qu'une
ancienneté de quinz - vingt ans et que la plupart de ceux qui
n'ont jamais déménagé sont des installés récents.
Les causes de déménagement les plus citées par nos
sujets sont :
- le retrait par leurs propriétaires des terrains
prêtés.
- l'obligation de déguerpir des terrains occupés
illégalement et appartenant au Domaine National: l'obligation
de déguerpir est notifié quand des projets concernant les
espaces occupés engagent l'état.
- l'exiguité des lieux quand les biens productifs
immobilisés ont du mal objectivement à se contenir dans les
anciennes limites de l'espace de production: il s'agit là d'un
cas de déménagement pour cause économique qui le plus souvent
annonce et précède un changement au niveau des structures pro-
ductives (accroissement de la production et du capital produc-
tif (accroissement de la production et duc apital productif).
La perspective de déménagement (pour des raisons
extra-économiques) est vécue d'une manière générale par nos
enquêtés comme une situation traumatisante. En fait le déména-
gement est le plus souvent synonymes de cessation forcée
pendant une période plus ou moins longue et après l'acte de
... f ...

226
transfert des moyens de production, des activités de production,
ce qui entraîne une diminution des recettes et revenus ; il est
aussi l'occasion souvent de dépenses supplémentaires de remise
en état de fonctionnement de l'ensemble de l'appareil productif
transféré. La situation de déménagement est donc à la fois une
situation de paralysie des activités de production et une occa-
sion de dépense improductive mais obligatoire dont le moins
qu'on puisse en dire est qu'elle est un facteur de déséquilibre
du budget des intéressés. Certains sujets qui ont eu à affron-
ter cette situation nous ont déclaré avoir eu chaque fois à
la suite d'un déménagement, tout à recommencer: les dépenses
de réinstallation, la quête d'une nouvelle clientèle etc ...
Seuls ceux qui se sont installés sur leur propre ter-
rain ou dans des domaines réservés aux artisans (zone artisanale
à côté du Domaine Industriel de DAKAR) sont véritablement à
l'abri de ces tractations à long terme.
b) LES UNITES DU SPC SE REPARTISSENT DANS L'ESPACE
URBAIN EN DES ENDROITS DETERMINES
Les unités du secteur para-capitaliste sont des
unités dispersées localisables en des endroits disticts et de
caractéristiques différentes. On les rencontre aussi bien au
coeur des quartiers résidentiels, qu'aux alentours des marchés
et des rues ou dans des zones réservées spécialement aux acti-
vités de production artisanale.
... / ...



227
Le mode d'installation semble être guidé par trois
critères
- D'abord la nécessité de trouver un terrain
où installer ses moyens de travail, ce qui est une condition
nécessaire pour le démarrage des activités de production.
oblige souvent les promoteurs du secteur para-capitaliste aux
moyens financiers réduits à accepter des offres de terrains
dont ni la localisation géographique, ni la superficie, ni la
situation physique des lieux etc ne constituent des facteurs
favorables en cas de pluies entrainant un ralentissement des
activités. installation en des endroits où déjà la densité
d'unités de production de même branche est déjà très élevée
ou au contraire fixation en des endroits isolés, installation
sur un espace réduit qui impose ses limites aux activités etc.
Le promoteur en raison de sa situation socio-économique n'a
pas toujours le choix du lieu où il s'installe et s'installe
donc là où il peut, pourvu qu'il puisse travailler, c'est-à-
dire mettre ne oeuvre ses propres moyens.
- Les endroits de prédilection d'installation
des promoteurs semblent être les rues passantes, les abords
des marchés et des grands artères. Utilisant très peu les
moyens publicitaires modernes à disposition (la radio, les
enseignes publicitaires) pour se faire connaître et faire
connaître leur travail, les promoteurs du secteur para-capi-
taliste jouent leur connaissance par le public en cherchant
à s'installer en des endroits fréquentés ou ils annoncent
... / ...

228
leur présence et leur travail par une stratégie de conquête
publicitaire de l'espace environnant: une partie du travail
s'effectue sur les trottoirs devant les portes des ateliers
ou entreprises où également seront exposés les produits finis.
L'accroissement de sa clientèle a d'autant plus de chance de
se faire rapidement que les promoteurs est installé dans un
endroit plus fréquenté. Le problème que posent la concurrence
et la rivalité entre unités concentrées
Concentrées
d'une même branche se
résoud en partie par la constitution autour de chaque promoteur
d'un réseau propre de relations de plus en plus large et qui
deviennent potentiellement à long terme une clientèle stable.
Pour ce faire les promoteurs élaborent et déploient une véri-
tabe stratégie de promotion de leurs produits orientée vers
la recherche de la satisfaction (des fois à perte pour le pro-
moteur) des clients les plus disposés de par leur situation,
leur fréquentation à en amener d'autres (le promoteur fait un
prix d'ami, accorde des facilités de paiement et établit d'au-
tres rapports que des rapports d'affaires avec ses clients).
- La recherche d'une plus grande sécurité et
stabilité au niveau de l'occupation de l'espace constitue un
facteur qui pousse certains promoteurs à s'installer en des
endroits réservés aux limites géographiques bien définies et
bien connus dupublic des consommateurs. Il s'agit en l'occu-
rence des zones artisanales (Reubeus, HLM à côté du DOmaine
Industriel de DAKAR) ou des espaces qui traditionnellement ont
... / ...

229
toujours accueillis les petites activités de production mar-
chande sans pour autant être des zones officiellement réservées.
* Ainsi le mode d'occupation de l'espace urbain
par les unités du secteur para-capitaliste est déterminé par
la situation sociale des promoteurs (les plus faibles sociale-
ment seront les moins privilégiés au départ) et les motivations
économiques de promotion (possibilité de constitution d'une
clientèle accrue) et de stabilité au niveau de l'occupation
(évitement des déménagements et des désavantages et inconvé-
nients économiques que cela occasionne).
c) LES UNITES DU S.P.C. S'EQUIPENT AU DEPART EN
MATERIELS PRODUCTIF,SAYANT DEJA SERVI DANS DES P.M.E.
OU DANS LE S.P.C. ET ACHETES EN OCCASION
Pour s'installer comme maître artisan, le promoteur
du secteur para-capitaliste dispose au départ (en général)
de peu de moyens financiers, ce qui l'oblige à recouvrir soit
à une stratégie d'achat bien adaptée à la faiblesse de ses
moyens et qui consiste à acheter du matériel d'occasion (à bas
prix) déjà amorti depuis longtemps, mais encore fonctionnel
et utilisable pour encore bien longtemps, soit à une stratégie
d'autoproduction (à une échelle limitée) de ses propres moyens
(matériels de récupération, connaissances techniques de proches
etc) dont il a besoin.
... / ...

.. ,.
230
Parmi ceux qui ont eu au moment de leur démarrage
à constituer par leurs propres moyens leurs équipements pro-
ductifs (25/30) 13 (treize) (soit 13/25) ont déclaré avoir
acheté la totalité de leurs outils en occasion à des parti-
culiers ou chez des brocanteurs, contre 9 (neuf) (9/25) qui
eux ont constitué l'essentiel de leurs outils de départ par
voie d'achat dans les magasins. De même 14 sur les 25 (14/25)
sujets considérés ont déclaré avoir acquis leurs premières ma-
chines outils par voie d'achat en occasion auprès d'autres
maîtres artisans en difficulté ou auprès d'entreprises du sec-
teurmoderne
qui ont voulu se débarrasser de leurs vieux maté-
riels (Général Africaine, Marine Française, Air-France, Amel
Afrique etc) alors que neuf seulement sur les 25 ont acheté
neuves leurs premières machines outils. De même sur les 25
sujets concernés 14 ont déclaré détenir aussi du matériel
(outils ou machines outils) de production fabriqué par les
artisans locaux des autres branches d'activités ou voir même
dans certains cas par les intéressés eux-mêmes.
Au moment de l'enquête nous avons pu constater que
beaucoup parmi les maîtres artisans les plus anciens et les
plus équipés dirigeaient leurs activités de production en
combinant du matériel acheté en occasion (souvent d'origine
j
1
et de marque française) avec du matériel neuf (d'origine et
i
de marque Italienne ou Allemande). Cette combinaison du nou-
veau et de l'ancien semble répondre à une certaine rationa-
lité de développement dont le but stratégique est :
1
... / ...

231
accroître la marge de profit (la valeur du matériel d'occasion
transmise au produit final est faible mais celu-ci sera vendu
au prix du marché que détermine la valeur du capital constant
exprimé en matériel neuf) et assurer aux unités du secteur une
certaine autonomie par rapport aux Institutions Financières
et aux Grandes Maisons de commerce du secteur moderne.
d) GAGNER DES MARCHES DU SECTEUR PUBLIC OU PRIVE
CONSTITUE UN OBJECTIF ECONOMIQUE MAJEUR DU S.P.C.
L'installation dans le secteur para-capitalis-
te s'achève objectivement après la constitution et la mise en
oeuvre à des fins de productions, dans un espace déterminé,
des biens d'équipement acquis par l'artisan. Mais subjective-
ment le procès d'installation ne semble s'achever chez l'ar-
tisan qu'au moment où au terme de multiples démarches et
contacts auprès des autorités administratives de l'Etat et
des Entreprises privées obtient enfin la possibilité de sou-
missionner un marché d'Etat (si petit soit-il) ou de sous
traiter partie ou totalité des marchés gagnés par des Entre-
prises du secteur moderne capitaliste. Cette étape est pour
les promoteurs du secteur para-capitaliste l'étape de confir-
mation dans leurs branches c'est-à-dire de reconnaissance
par le secteur moderne de leur utilité économique en tant que
partenaires économiques.
... / ...

232
Cette étape constitue pour toutes les unités du sec-
teur para-capitaliste un objectif stratégique à atteindre à
moyen ou long terme, et devant mobiliser pour se faire des res-
sources souvent importantes sur les plans humain et financier,
les promoteurs aspirant à ce type de promotion devront investir
beaucoup de leur temps en démarches et contacts auprès des
décideurs du secteur moderne et aussi beaucoup de leur argent
en-dessous de table, cadeaux etc.
Pouvoir travailler avec les Entreprises du secteur
capitaliste ou avec les services de l'Etat ne constitue pas
seulement pour les promoteurs du secteur para-capitaliste une
source de prestige ou de fierté c'est également aussi synony-
me de possibilité de réalisation de profit pouvant se chiffrer
à des centaines de milliers de francs dans certains cas.
Sur les 30 (trente) unités visitées et dont chacune
a au moins 10 ans d'âge trois seulement n'ont jamais eu à
travailler pour le compte de l'Etat, ou secteur privé. Donc
neuf-dixième soit 27/30 des promoteurs visités ont eu chacun
au moins une fois à coopérer pour l'exécution d'un travail
déterminé avec le secteur moderne. Pour l'Etat et les Sociétés
Mixtes c'est les Travaux Publiques, les Inspections des Ecoles
et le Préfectures la SAED, la SONEES, la SAR, la SENELEC, etc.
pour le secteur privé et autres institutions, on peut citer
la SOTIBA, BATA, SAIH, PNUD, etc sans compter les entreprises
générales de taille moyenne gérées par des autochtones et qui
sous-traitent une partie de leur travail avec le secteur para-
capitaliste.
... / ...

233
Mais malgré que tous les promoteurs du secteur para-
capitaliste ambitionnent de gagner des marchés d'Etat, tous
cependant s'accordent à dire que l'Etat est "un mauvais
payeur" et que souvent ils sont obligés d'attendre plus d'un
an pour pouvoir encaisser leur dû et que ce faisant ils sont
pénélisés auprès des Banques car devant supporter des intérêts
de plus en plus lourds après le délai de remboursement des
crédits contractés pour la circonstance. Certains promoteurs
nous ont déclaré avoir à devoir payer à leurs Banques à propos
d'intérêt et d'agios l'équivalent du crédit qu'ils ont contrac-
té pour financer les travaux afférents à un marché d'Etat gagné.
D'autres nous ont déclaré avoir perdu des titres fonciers hypo-
théqués auprès des Banques faut de n'aoir pu payer les crédits
contractés (intérêts et agios compris) auprès des Institutions
bancaires et cela pour la raison simple que l'Etat leur devait
des millions de francs qu'ils n'arrivaient pas à recouvrir à
temps dans leurs intérêts. Les difficultés de recouvrement peu-
vent être plus ou moins contournées ou atténuées selon l'influ-
ence des relations dont les promoteurs impliqués disposent au
niveau des Services Publics et surtout du Ministère des Finances
ou auprès des personnalités politiques. Quoi qu'il en soit,
les craintes qui naissent à propos des difficultés que rencon-
trent les promoteurs pour recouvrer auprès de l'Etat leurs dus
les poussent à s'orienter maintenant de plus en plus vers le
secteur privé pour traiter des marchés. celui-ci ayant la répu-
tation contrairment à l'Etat d'être bon payeur qui sait régler
ses créances à temps. De même nous avons pu constater que bon
... / ...

234
nombre de promoteurs parmi ceux qui sont les plus avancés éco-
nomiquement et techniquement (avec un chiffre d'affaires com-
pris entre 5 et 10 Millions de francs) réchignent plus ou moins
de travailler en sous traitance avec les entreprises de taille
moyenne que gèrent les nationaux dans le secteur moderne. En
effet, ces entreprises qui donnent en sous traitance les marchés
d'Etat qu'elles gagnent sont aussi étiquetées comme des mauvais
payeurs avec en plus la réputation d'être de "vraies sangsues"
pour le secteur para-capitaliste dont elles payent mal le
travail.
e) LE RAPPORT DE COOPERATION ECONOMIQUE ENTRE S.P.C.
ET LE SECTEUR MODERNE INDUCTEUR DE CHANGEMENT DANS
LE S.P.C.
Les rapports de coopération que le secteur para-capi-
taliste est obligé d'avoir avec le secteur mdoerne et capitalis-
te l'obligent à se conformer à certaines règles qui sur le plan
professionnel se traduisent par un supplément de précision dans
la conception et la fabrication dut ravail demandé et de quali-
té dans la finition de celui-ci, et sur le plan de la conduite
de la production apr plus de rigueur dans l'organisation du
travail afin de mieux respecter les délais de livraison. En
fait, c'est par le biais de cette coopération avec le secteur
para-capitaliste que le secteur moderne en tant que pourvoyeur
de marché à celui-ci arrive à lui imposer ses normes. Cette
... / ...

- .
235
imposition concerne les domaines organisationnels des unités.
les plus impliqués par la coopération de celles avec le sec-
teur moderne. Ces domaines pour l'essentiel s divisent en
deux catégories distinctes qui sont le domaine concernant
les questions techniques relatives à la conception des tâches
et à l'organisation de la production et le domaine politico-
administratif concernant le respect de la réglementation en
vigueur. en matière de conditions à remplir pour pouvoir sou-
missionner un marché et à laquelle tous les partenaires de
l'Etat doivent se conformer et qui doit se traduire par un
respect plus rigoureux du point de vue des unités, du système
salarial et du système d'imposition les concernant. C'est ain-
si que le secteur privé et l'Etat imposent tour à tour au sec-
teur para-capitaliste leurs normes techniques, politiques et
sociales. Mais à l'heure actuelle la situation du secteur
para-capitaliste impose à ses unités qui sont confrontées à
de lourdes contraintes technico-économiques (accroissement du
rendement du travail, écoulement des produits, etc) difficile-
ment manoeuvrables d'élaborer des stratégies de fonctionnement
ou de développement consistant à combiner des moyens et des
finalités appartenant à la fois aux systèmes moderne et tra-
ditionnel. Il s'agit d'une stratégie de combinaison de sytèmes
différents et non d'alignement à un système et qui se traduit
au niveau des normes et de structures organisationnelles par
une articulation d'éléments d'origines socio-culturelles dif-
férentes. L'originabilité du système para-capitaliste consiste
en cette combinaison et surtout en sa capacité à la gérer .
. . . 1. ..

236
E - LE SECTEUR PARA-CAPITALISTE: ASPECT SOCIAL ET
==============================================
QUELQUES CARACTÉRISTIQUES PSYCHO-SOCIO-CULTUREL-
===============================================
LES DES PROMOTEURS
==================
Sur le plan social et culturel et du point de vue
de ses participants le secteur para-capitaliste comporte
quelques caractéristiques qu'il serait intéressant d'étudier,
car pouvant avoir quelques relations de cause à effet avec son
état de développement. L'ensemble de ces caractéristiques et
leurs implications réciproques peuvent nous permettre de dres-
ser l'ébauche du profil psycho-sociologiques des promoteurs
du système para-capitaliste et celle aussi de ses autres parti-
cipants que sont les travailleurs du secteur. Cette étude per-
mettrait d'avoir des indications sur les comportements des
intéressés face à des problèmes relatifs aux questions de fonc-
tionnement et de développement.
a) LA SITUATION MATRIMONIALE DOMINANTE CHEZ LES
PROMOTEURS DU S.P.C. EST LA POLYGAMIE
Au moment où nous faisions l'enquête tous nos
sujets étaient mariés, sauf un qui avait trente ans d'âge et
qui était empêché de prendre une femme pour des raisons de
famille.
... / ...

237
Voici les proportions des suejts mariés selon leur
nombre d'épouses :
- sujets mariés à 1 femme
7
"
"
à 2 femmes
7
"
à 2 femmes
"
"
à 3 femmes
10
"
"
à 4 femmes
5
Au total nous avons sur 29 sujecs mariés 22 qui sont
polygames, ce qui représente un peu plus de 3/4 de la popula-
tion des sujets marj4s. Ce taux de polygamie représente-t-il
1
un fait du hasard? Nous ne le pensons pas, car nous retrouve-
rons un taux aussi important de polygamie dans la population
des pères des employés interrogés du secteur para-capitaliste.
Ce qui voudrait dire que la polygamie est un trait de culture
et un fait social dont les manifestationE peuvent être plus
ou moins atténuées chez les individus mâles d'une certaine
population (les musulmans en particuliers) selon leur appar-
tenance sociale, en terme de classe et leur degré d'ouverture
et de receptivité par rapport aux idées modernes dans les do-
maines concernant la vie domestique.
Tous nos sujets sont musulmans, ont trente ans d'âge
au moins et travaillent comme artisans pour leur propre compte
depuis déjà au moins 10 ans.
Sur les 22 polygames nous avons
constaté que les 15 qui ont 3 ou 4 femmes se recrutent en ma-
jorité dans le lot des Maîtres artisans les plus anciennement
installés et aussi dont les affaires continuent à prospérer
ou en tout cas ont prospéré jusqu'à une date récente
(pour
notre évaluation nous avons dû des fois faire confiance tout
... / ...

238
simplement aux délcarations de nos sujets et à nos observations
propres si d'autres formes de vérifications comptables sont
inexistants).
Ceux qui ont une seule femme se recrutent essentiel-
lement dans la catégorie des maîtres artisans dont les affaires
marchent peut,
tous ont souhaité avoir les moyens dans l'avenir
pour avoir d'autres femmes.
Ceux qui ont 2 épouses se recrutent
en majorité parmi ceux de la tranche d'âge de 40 à 45 et dont
les affaires semblent marcher très bien.
Dans ce milieu parti-
culier des artisans et petits entrepreneurs la norme de l'enga-
gement matrimoniale semble être la polygamie et le nombre
d'épouses à disposition doit augmenter avec le statut économi-
que des sujets intéressés. Le nombre d'épouses à charge,
leurs
conditions de vie tout cela doit refléter et
traduire dans le
milieu des artisans la place des sujets,
leur situation dans
le monde des affaires économiques concernant particulièrement
leur secteur d'activité.
C'est signe d'aisance, de distinction
et de prestige que d'avoir plusieurs épouses à entretenir et
si surtout de par leur prestance tout laisse
penser qu'elles
sont bien entretenue tout au moins sur le plan matériel.
Avoir plusieurs femmes bien entretenues est un signe de réus-
site sociale mais c'est un signe qui coûte cher.
. .'/ ...

239
D) LA TAILLE DE L'ENSEMBLE DU GROUPE DES DEPENDANTS
VARIE EN FONCTION DE LA POSITION ECONOMIQUE DU
PROMOTEUR DANS LE S.P.C.
La polygamie
(devenue marque de réussite et de
distinction) coûte. Elle ne coûte pas seulement la charge
d'entretien des co-épouses et de leur descendance respective
car dans le système traditionnel le mariage n'est pas une
relation qui implique seulement deux individus,
il concerne
deux clans familiaux et,
l'époux autant qu'il doit soutien
à sa propre famille il doit aussi soutien à la famille de son
épouse. La polygamie coûte la charge d'entretien des co-épouses,
de leur descendance respective et de leurs proches. A cela il
faut évidemment ajouter toutes les dépenses improductives rela-
tives à l'entretien de proches paretns et de dépendants des
époux concernés.
Voici les résultats de l'enquête concernant
la répartition des artisans ou entrepreneurs selon le nombre
de personnes physiques à charge :
Nombre de personnes à charge
Nombre d'Artisans
o - 5
1
6 - 8
3
9 - 11
o
12 - 14
2
15 - 17
4
18 - 20
2
21 - 23
7
24 - 26
5
27 - 35
6
... / ...

240
D'après notre enquête 26 sur les 30 sujets
concernés ont à leur charge de 12 à 35 personnes ou plus. Le
nombre de per~onnes à charge semble varier aussi en fonction
de l'origine sociale de nos
sujets et aussi du niveau de leurs
affaires:
les sujets d'origine sociale modeste et qui ont pu
arriver à se tailler une bonne place dans le système économi-
que ont en général à leur charge plu~ de parents dépendants
que les autres sujets de même origine sociale mais dont les
affaires ne sont pas florissantes.
Le nombre de personnes
en charge varie d'une manière générale en plus ou moins chez
un même sujet selon que ses affaires progressent ou baissent
de niveau.
Tout comme le nombre d'épouses à disposition,
le
nombre de personnes en charge
(des proches et dépendants)
sont
pour l'artisan ou l'entrepreneur un signe qui révèle et mani-
feste le niveau de ses activités. Mais en plus de cela et
aussi d'après l'avis de certains de nos sujets sur la ques-
tion il est une manifestation de
l'esprit de solidarité du
sujet vis-à-vis des siens de son groupe et aussi la marque
de son adhésion aux valeurs africaines d'entreaide,
et de
générosité.
Il est ce qui révèle la position et la situation
économique de l'artisan et fonde son prestige, à travers le
mécanisme de la distribution ostentatoire. Ceci montre que
le social est à l'oeuvre dans toutes les préoccupations à ca-
ractère économique des artisans du secteur para-capitaliste
1
para-capitaliste
r
et qu'il constitue à travers les projets concernant son domai-
f
ne particulier et dont la réalisation est source de plus de
ll
prestige, unf acteur de motivation à entreprendre:
l'inves-
tis~ement, le profit, le développement, l'expansion etc .
.../ ...

p

241
toutes ces catégories économiques ne semblent avoir de sens
que s'ils sont à intégrées à un projet social, et réinter-
prétées à travers lui.
c) LA QUETE DE PROMOTION SOCIALE EST UNE MOTIVATION
A L'INVESTISSEMENT DANS LE S.P.C. CHEZ LES PROMO-
TEURS DE CE SECTEUR
En reconsidérant notre 0chantillonnage et en
r0partissant nos sujets selon leurs lieux d'habitation,
la
nature de celle-ci et d'autres caract~ristiques révélatrices
du niveau de leur standing de vie,
nous aV(lnS obtenu ce
résultats
-
17
(dix sept)
habitent dans des maisons en
dur moderne, disposent d'un confort moderne
(Télévision, Réfri-
gérateurs,
meubles en vogue etc) et d'une voiture personnelle.
-
5 (cinq) ont des maisons de rapport qu'ils
donnent en location et disposent comme dans le premier lot de
tout le confort moderne domestique et d'une voiture personnelle.
-
5 (cinq)
habitent dans des maisons en dur
moderne avec tout le confort intérieur adapté mais ne disposent
pas de véhicule personnel.
-
3 (trois)
habitent encore chez leurs parents
ou sont en location.
. .. / ...

...
'W
242
Dans l'ensemble 27
(vingt sept) de nos sujets ont
un standing de vie supérieure ou au moins égal à celui du
fonctionnaire cadre supérieur. La recherche d'un mieux être
social semble faire partie des préoccupations de beaucoup de
nos sujets. Leurs nouvelles conditions sociales est en rupture
totale par rapport à leurpassé,
à leur origine sociale et l'on
peut considérer leur nouveau statut social et économique comme
une véritable promotion sociale. La grande majorité de nos
sujets sont d'extraction modeste et sont ou originaires des
campagnes ou sortis de familles citadines ouvrières. Cette pro-
motion sociale parce qu'elle s'étaye sur un investissement des
ressources dégagées à partir du surtravail, dans le domaine
social constitue un facteur d'orientation et de c~nalisation
du surplus ou du profit à des finalités extra-économiques. Il
y a déplacement de la compétition du champ économique au champ
social ou tout est à faire et où tout ce qui se fait apporte
ipso-facto un surcroit de prestige, contrairement aux investis-
sements économiques qui ne portent leurs fruits qu'à long terme
et qui n'impliquent que le promoteur dans son individualité.
Mais à un stade avancé de développement de son unité et après
avoir réussi sa promotion sociale (avoir une maison moderne
avec un confort adapté, avoir le nombre de femme que l'on
souhaite, remplir son devoir de solidarité avec le groupe etc)
le promoteur du secteur para-capitaliste va tenter de retourner
à l'économie mais dans un domaine qui soit un point sécant et
la traduction de trois types de préoccupations :
... / ...

......
243
1) préoccupations économiques se traduisant par
un placement garantissant un gain régulier et substanciel
2)
préoccupations sociales qui se traduit par
une action de maintien ou de renforcement du prestige déjà
acquis.
3) préoccupations culturelles qui se traduisent
négativement par des limites d'ordre psycho-socio-culturelles
et qui enferment les promoteurs dans les domaines d'activités
dont ils peuvent maitriser la gestion avec facilité.
Le retour à l'économique concernera donc les domaines
d'activités dont la gestion ne réclame aux promoteurs aucune
compétence particulière supplémentaire,
et ou tout investisse-
ment à la fois procure ipso-facto et prestige et un gain
régulier. Ce domaine d'activité c'est l'investissement dans
le domaine de l'immobilier, qui attire les sujets du secteur
para-capitaliste les mieux placés du point de vue économique
dans leur domaine d'activité. L'immobilier est le domaine
d'activité et le lieu d'investissement qui médie et articule
le mieux aux yeux des promoteurs les plus avancés économique-
ment du secteur para-capitaliste,
l'économique,
le social et
le culturel. Mais en même temps i l est aussi le point d'abou-
tissement de l'engagement économique des promoteurs du secteur
para-capitaliste, dont le goût du risque et l'esprit d'entre-
prise s'atténuent, tant la volonté d'entreprendre est inhibée
par la perspective du gain régulier et substanciel que procure
'"/'''

244
la location immobilière. Le secteur économique productif est
désinvesti plus ou moins (le maître artisan conserve toujours
son atelier mais n'investit pas pour son développement).
Ce
désinvestissement va trouver les éléments de son renforcement
à la fois dans les limites objectives de l'horizon culturelles
de spromoteurs et dan les limitations subjectives à caractère
sociale (le promoteur est à la fois chef d'une famille nombreu-
se, soutien de famille et entretient des dépendants, ce qui
moralement le pousse à prendre le moins de risque possible pour
ne pas exposer tout le groupe à la déchéance) qu'engendrent
les considérations morales qui naissent à propos de certains
engagements que
leur impose leur appartenance socio-culturel-
le. Donc nous pouvons dire que le goût du risque et la volonté
d'entreprendre ne sont particulièrement en éveil chez les pro-
moteurs du secteurpara-capitaliste que pendant la période où
ils édifient les éléments matériels de leur promotion sociale
et où le niveau de leurs activités est encore à la mesure de
leur capacité à les gérer économiquement, intellectuellement
et humainement.
Le passage à un stade supérieur de développe-
ment du secteur semble devoir s'accompagner sur le plan humain
et technique d'action de formation et sur le plan structurel
d'opérations de restructuration de l'espace de production in-
terne et de l'espace concernant les rapports avec l'Etat et
les Institutions Bancaires.
. .. / ...

245
d) LE SOCIAL ET LE CULTUREL D'UNE PART ET L'ECONOMI~~U~
D'AUTRE PART ENTRETIENNENT UNE RELATION CIRCULAIRE
DIALECTIQUE
Nous avons essayé de classer nos suejts selon leurs
lieux d'habitation.
Sur les 30 (trente) sujets dont nous avons
visité les lieux de travail seuls 2 nous ont déclaré habiter
en maison personnelle dans les SrCAP. Pour tout le reste les
lieux d'habitation se situent dans les quartiers résidentiels
traditionnels de la Médina et de la banlieue dakaroise. Nous
n'avons pas pu vérifier si cela était le résultat d'un choix
ou tout simplement des difficultés particulières rencontrées
auprès de la SICAP pour se faire loger. Quoiqu'il en soit la
localisation de leurs lieux de résidence en des endroits habi-
tés particulièrement par les catégories sociales de modestes
revenus et dont le comportement culturel se refère sans ambi-
guité au traditionnel, permet de déterminer leur environnement
socio-culturel et partant la nature des relations qu'ils en-
tretiennent avec lui compte tenu de leur situation de privi-
lègiés : plusieurs des sujets interrogés ont déclaré quequo-
tidiennement ils sont solicités par des gens de leur entourage
qui viennent leur réclamer aides et soutiens financiers à pro-
pos de problèmes sociaux embarassants les concrnant
(funérail-
les, baptèmes, maladies, nourritures etc) et que aussi bien
leur maison que leurs lieux de travail sont investi journaliè-
rement par les demandeurs d'aides. Leurs maisons et lieux de
travail deviennent un foyer de redistribution d'une partir des
profits réalisés au cours des activités de production précédentes .
.. '/ ...

246
Cette redistribution si elle contribue indéniablement à soula-
ger quelques peines qui frappent leur entourage n'en constitue
pas moins en tant qu'elle est vécue comme la manifestation
d'une marque de bonté et de générosité par celui-ci qui de ce
fait leur confie la formation de leurs enfants, un élément de
renforcement des conditions idéologiques et culturelles de
l'exploitation des apprentis et aides dans les ateliers
la
bonne réputation de bonté et de générosité des promoteurs sem-
ble toujours peser plus lourd sur la balance aux yeux de leur
entourage que les conditions d'exploitation de la force de
tra-
vail qu'ils mettent en oeuvre dans les ateliers pour se soumet-
tre le travail des apprentis.
Ainsi on peut dire que plus le
promoteur soigne son image de marque au travers d'action de
partage et de solidarité avec son entourage et mieux i l peut
disposer d'une main d'oeuvre à bon marctlé en la personne et
au travail des gens qu'on lui confie pour leur formation.
Ici
le social (action de solidarité) et l'économique (l'exploita-
tion des apprentis) s'articulent et se renforcent mutuellement
grâce à la médiation de l'idéologie (éléments de valorisation
de l'image de marque).
Il s'agit là en tout cas d'un système
qui marche bien tant que promoteurs, unités de production et
employés sont dans le même espace et baignent dans le même
environnement socio-culturel. D'ailleurs comme nous le verrons
plus loin la quasi-totalité des apprentis et aides sont recru-
tés soit dans les quartiers où résident les promoteurs soit
dans les quartiers où sont installés leurs unités de production .
.../ ...

-- -."..
247
~) LA FAIBLESSE DU NIVEAU D'INSTRUCTION DES PROMOTEURS
UNE LIMITE OBJECTIVE A LA MAITRISE DU DEVELOPPEMENT
DU S.P.C.
Lessujets
visités comportent d'autres caractè-
ristiques communes concernant leur niveau d'instruction. Sur
30 sujets visités seuls
3 ont dépassé le niveau du Certificat
d'Etudes Primaires (niveau secondaire 1er cycle).
Voici comment les sujets se répartissent suivant leur
niveau d'études
-
Analphabètes
12
-
Niveau 3ème Primaire
4
-
Niveau Certificat
11
-
Niveau Secondaire
3
Si nous considérons que ceux qui ont arrêté leurs
études à la classe de 3ème primaire ne savent plus ni lire
ni écrire et que pour cette raison nous pouvons les assimiler
aux analphabètes de notre échantillon. qui pour toute opéra-
tion comptable et tout contrat écrit se déchargent sur un
secrétaire (occasionnel ou à poste fixe)
ou un apprenti ins-
truit. notre tableau se modifie et nous avons :
-
analphabètes et assimilés
16
-
niveau C.E.P.
et Secondaire:
14
... / ...

248
Le nombre de ceux qui ne save
ni lire, ni écrire
dépasse un peu la moitié de notre échantillon : la plupart
ont la cinquantaine d'âge et sont originaires de l'intérieur
du pays.
Le niveau d'instruction est d'une manière générale
faible dans le milieu des promoteurs du secteur para-capita-
liste.
Il en est de même d'aillerus du niveau de culture
générale qui end ehors de quelques connaissances coraniques
acquises du fait de l'islam ou de quelques faits de politiques
intérieures connus grâce à la radio (ou télévision)
et ou
l'appartenance à des appareils politiques ou syndicaux est
nulle dans tous les autres domaines (économique, culturel,
scientifique etc . . . ).
Cette faiblesse du niveau d'instruction et celui de
la culture générale constitue un handicap objectif majeur pour
le développement des unités de production dus ecteur para-capi-
taliste. En effet,
la vie et le développement dus ecteur para-
capitaliste étant dans une très large mesure subordonné ou
développement du secteur moderne,
i l faudrait pour que les chefs
d'entreprise puissent profiter des progrès et de la croissance
de celui-ci et de maitrise dans tous les domaines où le secteur
para-capitaliste se connecte et s'articule avec le système mo-
derne. Notamment pour ce faire les promoteurs du secteur para-
capitaliste devraient pouvoir élargir leur champ de connaissan-
ces techniques
et technologiques et économiques afin de pouvoir
à ces trois nécessités :
... J ...

- -"..,
249
- nécessité de posséder une maîtrise de plus en plus
élevée et étendue sur le plan technique et technologique, des
procès de travail et de production visant la satisfaction à
la fois des besoins du secteur moderne et ceux du consommateur
en général. Deux domaines seront donc concernés par cette maî-
trise qui sont le domaine des techniques et technologie moder-
nes et celui des techniques et des technologie traditionnelles.
Le but ultime recherché par cette double maîtrise étant évidem-
ment une combinaison plus rationnelle pour des fins de dévelop-
pement plus adaptées, sur le plan technologique et économique
des éléments et ressources naturels, humains,
techniques et
technologiques à disposition.
-
Nécessité de développer une action de maîtrise
économique plus grande en direction du secteur moderne grâce
à des actions de restructuration du secteur para-capitaliste
et de ses rapports avec les institutions afin d'accroître sa
crédibilité économique et sa capacité à négocier vis-à-vis du
secteur moderne
(séminaires et stages concernant l'assainisse-
ment du secteur para-capitaliste), les meilleurs formes de
rapports avec les institutions de crédit et les fournisseurs
etc . . . . .
-
Nécessité d'élaborer et de développer pour le sys-
tème para-capitaliste un modèle culturel de référence qui
puisse guider, orienter les actions des promoteurs : actions
économiques (dans quels domaines investir et quels objectifs
atteindres ?) actions sociales
(type de politique sociale à
... / ...

250
utiliser avec le personnel et l'environnement humain), actions
politiques (les intérêts des groupes défendus et les moyens
utilisés pour ce faire etc . . . . ).
Pou~ le moment la faiblesse du niveau d'instruction
constatée constitue un facteu~ qui handicape le développement
du secteur para-capitaliste (niveau des connaissances techni-
ques,
technologiques et économiques) et qui en même temps
renforce certaines ca~actéristiques psycho-culturelles parti-
culières chez les promoteurs et qui se traduisent par des com-
portements à caractère social qui rompent
avec les normes de
comportements individualistes du système capitaliste.
f)
L'APPARTENANCE A L'ISL~ ~T AUX CONFRERIES: UNE
OCCASION D'INVESTIR OSTENTOIREMENT DANS LE PRESTIGE
Tous nos sujets sont de religion musulmane et
appartiennent principalement aux deux grandes
confréries
dans lesquelles ils se répartissent à part presque égale
nombre d'artisans appartenant à la confrérie Tidiane
14
11
Il
11
Il
"
Mouride
16
1
Il faut cependant préciser qu'à Saint-Louis où s'est
déroulée la première partie de notre enquête la majorité des
1
sujets visités et interrogés ont déclaré appartenir à la con-
frérie Tidiane (sur I l sujets, 9 sont Tidianes, et 3 Mourides)
... / ...

251
contrairement à la région du Cap-Vert où c'est l'inverse qui
se passe (sur 19 sujets,
14 sont Mourides et 5 Tidianes). Ce
déséquilibre apparent dans la répartition des adhérents des
deux grandes confréries selon les régions s'explique par la
différence économique des régions considérées dont l'attrait
qu'elles exercent sur les ruraux est différentiel: à Saint-
Louis beaucoup de nos sujets sont de souche Saint-Louisienne
depuis au moins une génération et en plus Saint-Louis est par
tradition une ville tidiane ce qui explique la forte majorité
d'artisans tidianes dans cette ville, par contre Dakar attirant
plus de ruraux (provenance du bassin arachidier qui est le
bastion du mouridisme) et offrant plus de débouchés pour les
petits métiers, abrite dans le secteur para-capitaliste beau-
coup de Mourides.
Si l'appartenance à l'Islam implique chez le Musul-
man un certain nombre d'obligations religieuses à respecter,
de même l'appartenance à une confrérie religieuse implique
chez l'adhérent un certain nombre de devoirs à observer. En
tant que musulmans 6 des sujets interrogés,
représentant 1/5
de notre échantillon ont déclaré aovir été au moins une fois
à la Mecque (5 ont été deux fois ou plus à la Mecque). Ceux
qui portent le titre d'El
Hadj se recrutent dans la couche
des chefs d'entreprise dont les affaires marchent le mieux et
qui disposent déjà de toutes les signes de distinction qui
caractérisent la couche supérieure des promoteurs du secteur
para-capitaliste : une ou plusieurs voitures personnelles à
... / ...

252
disposition,
immeuble en location, maison moderne avec tout
le confort moderne, plusieurs parents et dépendants à charge.
plusieurs épouses, etc ... ). Le titre de El Hadj est un signe
de distinction qui procure du prestige à ceux qui le portent.
Dans le milieu des artisans il ne semble avoir la capac~té
de remplir ce rôle social qu'au cas où le voyage aux lieux
saints de la Mecque a été accompli plus d'une fois. Le nombre
de pélerinages effectués manifeste à la fois le degré de foi
en Dieu,
le niveau des affaires,
l'orientation suivie dans la
recherche de prestige social etc . . .
L'appartenance à une confrérie implique quant à elle
comme devoirs à accomplir le versement régulier de cotisations,
le versement de "assaka" (cadeau) aux guides religieux,
le
soutien moral et matériel à l'organisation des manifestations
religieuses de lQ ~onfrérie. Si la valeur des cotisations
reste identique pour tous les adhérents en principe il faut
dire que dans les faits la matérialisation du devoir à accom-
plir reste en valeur dépendante de la situation de l'adhérent
et de sa position dans la confrérie. Beaucoup d'artisans tidia-
nes ou mourides nous ont déclaré qu'ils versent en guise de
cotisation le double ou le triple de ce qui est réclamé en va-
leur dans leur "dahira". Mais l'appartenance à une confrérie
peut aussi être pour l'artisan une source insoupçonnée d'avan-
tages matériels de toutes sortes si celui-ci sait mettre en
marche les mécanismes de solidarité en son sein : facilité de
prêt auprès des Banques, facilité de crédit auprès des four-
nisseurs de même confrérie, facilité de prêts auprès des gros
commerçants de la place de même confrérie etc ...• ·
•.. 1.•.

253
g) L'ADHESION AU PARTI POLITIQUE DOMINANT:
UNE
STRATEGIE DE PROMOTION ECONOMIQUE POUR LES PROMO-
TEURS DU S.P.C.
Nous avons considéré nos sujets selon leur
appartenance politique ou syndicale. Tous les artisans visités
ont déclaré détenir leur carte professionnelle d'artisan par
la Chambre Régionale des Métiers de leur région et qu'ils
payaient régulièrement leur cotisation à la Chambre où ils
sont affiliés. A DAKAR, certains artisans appartiennent à des
syndicats professionnelles tels
: le Syndicat des Menuisiers
ou le Syndicat des Garagistes qui sont plus actuellement des
Organisations en constitution que des syndicats déjà bien
installés. La majorité des artisans ne semblent pas disposé
à se syndiquer parce que n'ayant pas confiance selon leurs
dires en l'efficacité des syndicats pour règler leurs problè-
mes, ou tout simplement en l'honnêteté et l'esprit de sacrifi-
ce affichés des dirigeants en général. Par contre tous nos
sujets sont unanimes pour déclarer que l'adhésion au Parti Poli-
tique dominant et un bon soutien politique permettent d'obtenir
un résultat rapide et satisfaisant à propos de tout problème,
qu'il soit d'ordre privé ou professionnel. Cependant,
seul un
petit nombre d'artisans a accepté de donner son identité poli-
tique en déclarant être membre du Parti Socialiste qui est le
parti dominant :
ils appartiennent socialement et économique-
ment à la couche supérieure des maîtres artisans du secteur
para-capitaliste.
. .. / ...

254
F - LE SECTEUR PARA-CAPITALISTE
SES TRAVAILLEURS,
==============================================
===========================================~==
LEURS CONDITIONS SOCIALES ET LE MODE DE REPRO-
=============================================
TIaN DE LEUR FORCE DE TRAVAIL
=============================
Le secteur para-capitaliste draine vers lui et dans
ses unités de production
beaucoup de jeune gens, citadins et
ruraux appartenant aux couches sociales les plus modestes
des travailleurs des villes et des campagnes.
Nous avons
cherché à interroger directement ces jeunes gens qui travail-
lent comme producteurs directs dans le secteur para-capitaliste.
Une centaine de jeunes travailleurs répartis entre 15 unités
aux trois principales branches d'activités du secteur para-
capitaliste que sont la menuiserie ébéniste,
la menuiserie
métallique et la mécanique auto, nous ont livré sur eux-mêmes
un certain nombre de renseignements, concernant leur niveau
scolaire,
leur origine sociale, leurs conditions sociales de
vie et de travail, leurs aspirations etc ... Cette enquête a
concerné deux villes, SAINT-LOUIS et DAKAR et a donné les
résultats suivants que nous allons vous livrer.
... / ...

255
a) LE S.P.C. : UNE ECOLE D'APPRENTISSAGE ET DE FORMA-
TION A UN METIER POUR LES RECALES DU SYSTEME SCOLAIRE
ET LA JEUNESSE RURALE VICTIME DES POLITIQUES AGRICOLES
Tout d'abord nous avons réparti notre centaine
de sujets (cent trente deux exactement) en 3 groupes selon,
la profession de leurs pères :
(
Professions des Pères
Nombre de Travailleurs
)
( - - - - - - - - - - - - - - - ' - - - - - - - - - - - )
( - Pères Cultivateurs
25
)
( - Pères Artisans-Commerçants ..
54
)
( - Pères Employés des Secteurs
)
(
Public et Privé
53
)
( - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - )
Les travailleurs dont les pères sont cultivateurs
représentent près de 1/5 du nombre des sujets interrogés.
Ils se répartissent en deux grands groupes : il y a l e grou-
pe de ceux qui sont apparentés aux maîtres artisans dont nous
avions dit que la plupart était originaires des campagnes et
le groupe de ceux que seule la difficulté de trouver un tra-
vail salarié dans le secteur moderne ont poussé à aller appren-
dre un métier dans le secteur para-capitaliste auprès des maî-
tres artisans, auprès de qui d'ailleurs souvent ils ont été
recommandés par des proches qui sont amis ou parents à ceux-ci .
.../ ...

256
Les travailleurs du secteur para-capitaliste qui viennent des
campagnes retournent périodiquement aux champs chaque année
à l'approche de la saison des pluies tant qu'ils espèrent pou-
voir par le travail de la terre aider les siens restés aux
campagnes et aussi en même temps se faire un peu d'argent.
Certains m'ont déclaré avoir décidé de ne plus retourner dans
les campagnes pour cultiver tant que la sécheresse qui sévit
dans le pays depuis déjà plus de deux ans durera. Dans les cen-
tres urbains, ces travailleurs du secteur para-capitaliste lo-
gent soit chez les maîtres artisans quand ils ont des liens
de parenté avec ces derniers soit chez les tuteurs qui sont
les correspondants de la famille en ville. Dans tous les cas,
jusqu'à la fin de leur formation auprès des maîtres artisans
ils sont logés et nourris gratuitement par les maîtres arti-
sans ou par les tuteurs établis depuis déjà longtemps en ville
et qui travaillent dans le secteur moderne surtout.
Quand aux jeunes gens dont les pères sont des employés
du secteur moderne, ils sont pour la plupart originaires des
villes où leurs parents sont installés définitivement depuis
au moins deux générations.
Ils habitent chez leurs parents
dans les quartiers résidentiels de la Médina, de Grand-Dakar,
de Grand Yoff ou dans les banlieux dakaroises de Thiaroye,
Pikine.
La grande majorité de ces jeunes gens ont été à l'école
primaire et sont des cas d'échec scolaire,
contrairement à
leurs collègues originaires des campagnes qui sont la plupart
analphabètes aussi bien d'ailleurs en langue Française qu'en
... f ...

257
langue Arabe. Durant tout le temps que dure leur formation dans
le secteur para-capitaliste,
l'essentiel de leurs besoins so-
ciaux et physiologiques de reproduction (nourritures,
logement,
habillement, etc ... ) sont pris en charge par les parents et
les maîtres artisans.
Le temps de formation pour cette catégorie de jeunes
est de 6 ans en moyenne, ce qui est relativement court comparé
à celui des jeunes originaires des campagnes qui peuvent rester
apprentis pendant plus de 10 ans.
En tout cas,
c'est parmi les
jeunes gens originaires des campagnes, analphabètes et de pères
cultivateurs que l'on recrutent les apprentis les plus vieux
en
âge et les plus anciens en temps de formation dans les uni-
tés visitées.
Les travailleurs dont les pères sont commerçants ou
artisans sont aussi pour la plus part originaires des villes
où ils habitent dans les quartiers populaires. Leurs besoins
en nourritures,
logement et habillement sont assurés pour
l'essentiel en commun par leurs parents et les maîtres artisans
qui sont chargés d'assurer leur formation.
Ils ont été pour la
plus part à l'école primaire et se considèrent comme apprentis
finis au bout de 6 ans de formation en moyenne, durée au terme
de laquelle ils quittent les maîtres artisans qui les ont for-
més si ces derniers ne peuvent les embaucher. Dans ce cas ils
cherchent alors un emploi salarié dans les entreprises du sec-
teur moderne ou dans le secteur para-capitaliste auprès d'au-
tres maîtres artisans ou encore ils chercheront à s'installer
à leur compte personnel. Il s'agit là d'une trajectoire qu'em-
pruntent tous les apprentis finis en général.
... / ...

....
·
258
b) LE MODE D'EXPLOITATION ET DE RENUMERATION DE LA
FORCE DE TRAVAIL DES TRAVAILLEURS DE SPC :
Au terme de leur période de formation réelle (6 ans
pour les citadins scolarisés et plus pour les originaires des
campagnes) beaucoup des apprentis finis n'arrivent pas à trou-
ver un travail salarié ou à s'installer à leur compte propre.
Ceux qui sont dans ce cas se trouvent souvent contraints au
bout de quelques semaines au moins de recherchees vaines de
travail salarié ou d'échec dans leur tentetive de s'installer
comme travailleurs libres, de retourner auprès des anciens
maîtres qui les emploieront sans aucune garantie de salaire.
Dans ce cas leurs gains proviendront de sources :
- Les "mandats" que distibuent les patrons à leurs employés
les plus méritants et dont le montant est toujours fixé
arbitrairement
: trois critères entrent en jeu dans déter-
mination arbitraire du montant des mandats attribués à leurs
employés par les maîtres artisans qui sont : la compétence
professionnelle,
l'âge et la situation matrimoniale des em -
ployés et la nature et l'intensité des liens personnels qui
lient les maîtres artisans à ceux-ci.
les gains obtenus à partir de travail effectué pour le compte
d'un tiers à titre personnel et qui peut être fait dans l'a-
telier du maitre artisan dont les moyens de travail pourront
être utilisés gratuitement. Ce mode de gain est aujourd'hui
renté dans les moeurs dans le secteur para-capitaliste. Nous
l'avons rencontré dans toutes les branches d'activité.
... / ...

Le salariat,
tel qu'il existe comme mode de rénumé-
ration et de reproduction de la force de travail dans le sec-
teur moderne n'existe souvent qu'à titre exceptionnel dans le
secteur para-capitaliste pour répondre à des
besoins de cir-
constance dont la satisfaction entièrement dépendant du sec-
teur moderne,
est soumise entre autre à la condition de sala-
risation formelle des employés (établissement de contrat de
travail, de fiche de salaire et déclaration à l'lPRES,
paie-
ment de cotisation sociale, etc ... ).
Il est rarement durable
car son existence cesse dans beaucoup de cas avec la fin de
la période où promoteur-maitre artisan devait fournir les
preuves de son alignement aux normes de gestion que le sec-
teur moderne lui proposait de respecter, ce qui était la ou
l'une des conditions de la satisfaction possible d'un cer-
tain nombre de ses besoins de développement par les Institu-
tions du secteur moderne (les Institutions de l'Etat et leurs
marchés, les Organismes d'Encadrement et de Financement
SONEPI,
SOFISEDIT, etc ... ). Cette forme
formelle de salariat
existe très peu dans le secteur para-capitaliste où i l est
remplacé par un autre type de contrat comportant les carac-
téristiques suivantes
Il est verbal et se négocie entre les deux parties jusqu'à
sa conclusion dans l'arbitraire le plus total du jeu des
rapports de force en présence. Cette négociation ne se ré-
fère
formellement pas aux règles de sauvegarde des inté-
rêts des ouvriers consignées dans les textes concernant la
légistion du travail au Sénégal. D'ailleurs ce Code du
... / ...

.... ...
-
21;0
Travail est souvent ignoré par les deux parties et le con-
trat se négocie et de conclue sans qu'aucune trace formelle
écrite concernant l'engagement réciproque et ses termes ne
soit consigné dans des documents.
-
Ses clauses sont toujours en marge des réglements formelles
en matière de législation du travail.
Il est arbitraire et
est donc peu à
l'abri des remises en cause par l'un ou l'au-
tre partis
(renégociation des conditions de travail et du
mode de rénumération de celui-ci)
dans le domaine professionnel.
Son objet qui est le "salaire" est payé mais cela ne s'accom-
pagne pas comme dans le secteur moderne de l'établissement
de fiches de paie? Nous avons rencontré ce type de contrat
dans les unités qui étaient les plus avncées économiquement
et qui travaillaient beaucoup avec les Entreprises Privées
de la Place.
Ce qui est recherché à travers ce système c'est
du côté des promoteurs, l'évitement ou la minimisation des
charges salariales et la réduction de la fréquence des aban-
dons de poste pour raison d'insatisfection professionnelle
comme c'est souvent le cas là où le mode rénumération domi-
nant est le "mandat".
Il s'agit d'un système intermédiaire entre le salariat
tel qu'il est pratiqué dans le secteur moderne et le "mandat".
Avec le système salarial du secteur moderne il à en commun le
fait que la rénumération de la force de travail n'est pas sou-
mise à une variation ni dans son taux, ni dans ses modalités
selon le libre arbitre du maitre artisan à une phase ultérieure
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... / ...
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...
261
de la négociation du contrat d'emploi: ce qui tient lieu de
salaire est payé régulièrement à période déterminée selon les
clauses du contrat et au taux auquel i l a été fixé lors de la
négociation.
Il se rapproche du "mandat" dont le montant varie
en fonction du niveau de la production et du volume des comman-
des et aussi du libre arbitre du maitre artisan et qui n'est
l'objet d'aucune négociation entre les deux partis par le fait
qu'il n'est pas un salaire déclaré et donc n'assure aucune ga-
rantie en matière de droits attachés à l'exercice de professions
salariées.
Dans les unités ou nous avons rencontré le mode de
rénumération par "mandat" et le mode de rénumération contrac-
tuel,
nous avons pu constater que le premier s'appliquait par-
ticulièrement à ceux qui avaient le statut d'aide ou d'apprenti
dans les unités visitées et que le second s'appliquait plutôt à
des travailleurs adultes ayant achevé depuis longtemps leur for-
mation effectuée dans d'autres unités et qui sont chefs et sou-
tiens de familles.
~ous avons au cours de notre enquête interrogé direc-
tement les promoteurs du secteur para-capitaliste à propos du
montant des mandats et "salaires" qu'ils octroient à leurs em-
ployés en guise de rénumération de leur force de travail.
Voici les informations que nous avons pu recueillir
auprès de
trente maitres artisans interrogés
(il s'agit des mêmes)
... / ...

262
-
Pour les apprentis le montant du mandat se situe dans la four-
chette l 000 F CFA -
5 000 F CFA (Mille -
Cinq milles francs)
par mois : le mandat peut être payé hebdomadairement ou à la
fin de chaque mois.
Pour les aides le montant du "mandat" varie entre 6 000 F CFA -
15 000 F CFA ( Six mille -
Quinze mille francs)
par mois
: le
niveau dépend de la compétence, de l'âge et de l'ancienneté
dans l'atelier, et de la nature et l'intensité des liens per-
sonnels qui lient l'apprenti au maitre artisan
- Pour ceux qui ont le statut de "salariés",
les salaires
varient de 15 000 F CFA à 45 000 F CFA (Quinze mille - Quarante
cinq mille francs)
selon la catégorie de l'ouvrier. Les maitres
artisans nous ont déclaré ne pouvoir être en mesure de payer que
des employés de catégories de rang inférieur à 6, pour des raisons
de trésorerie. Dans tous les cas nous avons pu vérifier que le
salaire réel payé est toujours inférieur à celui qui doit corres-
pondre réglementairement à la catégorie de l'ouvrier et à sa bran-
che d'activité sans compter que l'ouvrier est souvent employé à
une catégorie inférieure à cella notifiées sur son certificat de
travail.
. .. / ...

263
c) LE SPC : UTILISATION DU MODE DOMESTIQUE DE REPRO-
DUCTION DE LA FORCE DE TRAVAIL
L'employé est d'une manière générale sous-payé moné-
tairement dans le système para-capitaliste. Mais celui-ci combi-
ne du point de vue des détenteurs de moyens de travail deux
modes de reproduction de la force de travail qui installe
l'un un rapport marchand entre le maitre artisan et son emplo-
yé et l'autre entre celui-là et celui-ci un rapport de type do-
mestique où une partie de la reproduction de la force de travail
de l'employé est directement par le maitre artisan qui fournit
en nature,
le déjeuner de midi, assure les frais de santé,
don-
ne de quoi acheter des habits à
l'approche des grandes fêtes
religieuses de la Tabaski et de la Karité et
paie les frais
de transport quotidien
du lieu de travail à la maison et inver-
sement. Nous avons interrogé les maitres artisans sur la question
de la prise en charge directe par leurs soins d'une partie des
dépenses de reproduction de la force de travail de leurs emplo-
yés. Nous avons obtenu les résultats suivants :
-
Déjeuners de midi :
20 maitres artisans
(sur 30)
assurent à leurs employés le déjeuner de midi contre 10 qui
eux rn:envoient leurs employés à leurs familles pour le dé-
j euner de mid i.
-
Habillement :
tous les maitres artisans ont acceptés
le principe de supporter directement les dépenses en matières
d'habillement de leurs employés à l'approche des grandes fêtes
religieuses.
. .. / ...

264
- Transport:
Il maitres artisans supportent quoti-
diennement
les dépenses de transport de leurs employés quand
ceux-ci habitent
loin du lieu de travail.
Les 21 autres mai-
tres artisans qui ne font
pas de dépenses dans ce sens justi-
fient
leur comportement par la proximité du lieu de travail
des lieux d'habitation de leurs employés.
-
Santé
: Tous les maitres artisans acceptent
le prin-
cipe de la prise en charge directe des frais de santé des emplo-
yes en cas de maladie contractée sur le lieu de travail,
ou
d'accidents survenus en cours d'exercice de la profession. Cer-
ains acceptent même d'aider et de soutenir financièrement les
parents de leurs employés si ceux-ci
tomhaient malades pour
d'autres raisons.
d)
LE SPC TRANSFERE AUX TRAVAILLEUKS ET A LEUK FAMILLE
UNE PARTIE DES CHARGES D'ENTRETIEN ET DE REPRODUC-
TION DE LA FORCE DE TRAVAIL :
Du point de vue des détenteurs des moyens de travail,
le système para-capitaliste combine deux modes de reproduction
de la force de
travail:
le salariat en tant que rapport d'échan-
ge de la force de
travail et de son équivalent monétaire, et
le mode domestique de reproduction de la force de travail ins-
taurant entre le maitre artisan et ses employés un rapport de
type paternaliste. Mais si nous condidérüns le système du point
de vue des employés,
celui-ci apparait comme une combinaison
de trois modes de reproduction déjà mentionnés,
l'employé
... / ...

265
s'implique à titre privé dans un autre rapport de production
et un autre mode de reproduction de la force de travail qui
consiste dans l'utilisation à
titre privé et à des fins de
production des moyens de travail à disposition des maitres
artisans. Dans ce cas,
l'employé contribue de par son initia-
tive propre et son travail personnel à constituer une partie
des éléments qui entrent dans la reproduction de sa force de
travail.
Il s'agit du système d'autorénumération partielle
de la force de travail dont nous avions déjà parlé. Mais tout
cela ne semble pas suffire pour permettre la reproduction to-
tale de la force de travail des travailleurs du secteur para-
capitaliste, car dans bien des cas l'intervention familiale
est nécessaire pour que les employés (ou tout au moins beau-
coup d'entre eux) puissent satisfaire des besoins primordiaux
comme celui de se loger ou de se nourrir comme vont nous le
montrer les résultats qui vont suivre à propos d'une enquête
concernant 60 (soixante)
sujets adultes (plus de 21 ans)
em-
ployés dans le secteur portant
sur leur degré d'autonomie
vis à vis de leurs parents en matière de production de leur
force de travail :
17 sujets habitent dans la maison paternelle et y
prennent au moins un repas par jour
-
14 habitent et dinent chez le frère ou le cousin
qui travaille dans le secteur moderne
- 6 habitent et dinent chez l'oncle
-
2 habitent et mangent chez la tante
-
5 habitent et mangent chez le grand-père ou la
grand-mère
... / ...

266
-14 habitent en location et payent une partie de
leur nourriture
-
2 ont leur maison propre
Au total,
44 (quarante quatre)
sur les 60 (soixante)
sujets adultes employés dans le secteur para-capitaliste et
interrogés ont une partie de leurs besoins de reproduction qui
est assurée par la famille laquelle tire partie ou totalité
de ses moyens financiers du secteur moderne où travaillent ou
ont travaillé un ou plusieurs de ses membres. Ainsi, donc la
solidarité familiale en tant qu'élément culturel qui procède
du système traditionnel, constitue un dispositif important
dans tout le processus de reproduction de la force de travail
des travailleurs du secteur para-capitaliste. La famille joue
un râle important dans la reproduction de la force de travail
des travailleurs du système para-capitaliste car elle est le
lieu où se condensent et se gèrent en tout moment les contra-
dictions au plan social des systèmes moderne et capitaliste,
traditionnel et prar-capitaliste : en faisant jouer les méca-
nismes de la solidarité familiale à propos de l'orientation
et la répartition des ressources tirées du système moderne,
elle participe à la reproduction à titre gratuit et sans con-
tre partie des charges supportées, d'abord de la force des
travailleurs des unités para-capitalistes et ensuite du sys-
tème para-capitaliste dans son ensemble. Le système vit et
réalise ses objectifs économiques et sociaux de développement
et d'accumulation d'éléments de prestige grâce à la pratique
de la sous valorisation de la force de travail qui y a cours
... f . ..

.....
·
267
et qui lui permet de pouvoir dégager à moyen ou long terme la
masse de profit nécessaire à la réalisation de ses objectifs
et cela en faisant supporter aux familles des travailleurs
une partie des charges de reproduction de leur force de tra-
vail, ce qui diminue d'autant les charges sociales de repro-
duction (de la force de travail) que le secteur aurait dù
supporter directement. Mais par delà la famille qui est un
noeud d'articulation et un lien de gestion au plan social
des contradictions des 3 trois) systèmes
(moderne,
para-ca-
pitaliste et traditionnel) ce qui lui permet de remplir le
rôle économique de constitution des conditions de dégagement
de profit toujours plus élevé dans le secteur para-capitalis-
te,
ce qui fait vivre et se reproduire celui-ci,
ce qui per-
met à la famille de remplir son rôle économique,
c'est tout
le revenu monétaire dont elle dispose et qu'elle tire du
~~~t~~~ ~8~~~r.~. C'est en dernière analyse les revenus moné-
taires turés du secteur moderne qui permettent la reproduction
de la force de travail des travailleurs du secteur para-capita-
liste.
. .. / ...

268
G - LES SECTEURS MODERNE ET TRADITIONNEL
=~==================================
REPRODUCTION DES CADRES SOCIAUX DE LA
=====================================
REPRODUCTION DU S,P.C.
======================
a)
L'ECOLE ET LA REPRODUCTION DU S.P.C.
L'apprentissage à un métier dans le secteur para-
capitaliste constitue pour beaucoup de jeunes gens d'extrac-
tion modeste des campagnes et des villes,
la seconde étape
importante de leur vie après l'école.
Sur 132 (cent trente
deux)
travailleurs du secteur para-cpitaliste que nous avions
interrogés seuls 37
(trente sept) n'ont jamais été à l'école,
ce qui correspond à un peu moins du quart du nombre de nos
sujets. Parmi les 95
(quatre vingt quinze) sujets qui restent
et qui ont fait l'école,
70 (soixante dix) ont terminé le
cycle primaire,
9
(neuf) ont entamé le cycle secondaire dans
des établissements scolaires privés et le reste c'est à dire
16(seize)
se sont arrêtés à mi-chemin dans leur cycle primai-
re. Ces chiffres nous montrent que le secteur para-capitaliste
est considéré comme une voie de secours dsns la quête de la
promotion sociale après l'école. Cela est valable même pour les
fils d'artisans et de commerçants dont les 3/5
ont été à l'é-
cole jusqu'aux niveaux Certificat d'Etudes Primaires et 6ème,
Sème secondaire (32 sujets sur 54). Chez les enfants d'emplo-
yés du secteur sur 53 sujets, 42 représentant plus de 4/5 de
l'effectif ont été jusqu'aux niveaux Certificat d'Etudes
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270
L'âge d'entrée en apprentissage semble déterminé
d'une part par la durée du cycle primaire et d'autre part la
situation économique des parents des adolescents concernés
qui peuvent par leur action de soutien ou parce qu'ils ont
besoin du soutien économique de leurs enfants retarder de
plusieurs années l'âge d'entrée de ceux-ci en apprentissage
ce retard
peut être dû à une scolarité au delà du C.E.P ou
de l'âge correspondant (13ans) dans les Etablissements d'En-
seignements Privés, par les parents quand ils sont en mesure
de supporter les charges de scolarité et qu'ils nourissent
encore des espoirs de réussite scolaire pour leurs enfants,
i l peut aussi être dû à la nécessité et à l'obligation morale
dans lesquelles se trouvent certains jeunes adolescents des
campagnes surtout de taire et de sacrifier pendant plusieurs
années durant,
afin de pouvoir continuer à soutenir économi-
quement leurs parents par leur travail dans les champs,
leurs
aspirations et besoins en matières de formation et apprentis-
sage à la maîtrise d'autres métiers et activitées non agricoles.
b) LE CHOMAGE DANS LE SECTEUR MODERNE ET LES LIMITES
DU SALARIAT DANS LE S.P.C.
: UNE CONDITION DE RE-
PRODUCTION DU S.P.C.
Nous avons essayé de classer nos sujets selon,
au mo-
ment de l'enquête, le temps de formation déjà effectué dans les
unités visitées et aussi selon d'une part leur niveau scolaire
et d'autre part leurs lieux de naissance
(Dakar ou campagne) .
. ../ ...

.,..-.-..,.,
271
Pour le niveau scolaire ne seront intéressés que ceux qui ont
le niveau de C.E.P.
et les analphabètes.
Pour le lieu de nais-
sance ne seront intéressés que les sujets nés à Dakar et dans
les campagnes.
-
Sur 71 sujets ayant le niveau de C.E.P., 62 au mo-
ment de l'enquête avaient moins de 6 ans d'ancienneté dans leur
métier, quatre exerçaient depuis 7 à 8 ans leurs métiers et
quatre travaillaient depuis au moins 9 ans.
-
Sur 37 sujets analphabètes,
25 au moment de l'enquê-
te avaient moins de 6 ans d'ancienneté dans leur métier, 4 exer-
çaient leur métier depuis 7 à 8 ans et 8 travaillaient depuis
au moins 9 ans.
-
Sur 46 sujets qui sont nés à Dakar, 35 au moment de
l'enquête avaient moins de 6 ans d'ancienneté, 4 avaient déjà
travaillé depuis 7 à 8 ans et 7 avaient au moins 9 ans d'an-
cienneté.
-
Sur 32 sujets nés dans les campagnes 24 au moment
de l'enquête avaient moins de 6 ans d'ancienneté dans leur me-
tier et dans les unités visitées et 8 avaient entre 7 et 8 ans
d'ancienneté.
Nous n'avons pas rencontré de sujets dont l'ancien-
neté dans les unités visitées dépassent 9 ans mais nous avons
par contre rencontré beaucoup de sujets qui totalisent chacun
une dizaine d'années d'ancienneté non pas dans l'unité visitée
mais dans plusieurs unités en cumulant les nombres d'années
effectuées dans chacune d'elle.
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. .. / ...
...

272
* La mise en rapport de toutes ces données chif-
frées permet de tirer un certain nombre de conclusions :
-
Quelque soit le niveau scolaire ou le
lieu de naissance le jeune adolescent manifeste concrètement
la volonté de quitter son ancien
maître au bout de 6 ans
d'apprentissage ce qui se traduit par une baisse sensible dans
les unités visitées du nombre des apprentis ou aides disposant
de plus de 6 ans d'ancienneté. Mais ce phénomène s'explique
aussi par l'action des maîtres artisans qui cherchent toujours
à se débarrasser de leurs apprentis quand ceux atteignent l'âge
adulte et qu'ils ne leur sont liés par aucun lien de parenté:
plusieurs maîtres artisans ont été traduits devant la justice
par d'anciens apprentis qui estimaient avoir le droit de dis-
poser d'un salaire pendant
les nombres d'années supplémen-
taires travaillées au delà de la période de réelle de formation.
IL faut voir dans l'émergence de telles revendications chez
les apprentis et aides du secteur para-capitalistes l'influen-
ce du secteur moderne et de ses normes dans leurs comportements
d'après certains maîtres artisans ce sont les syndicats qui
montent les apprentis contre eux dans l'espoir de pouvoir en-
caisser à leur profit une partie des droits qui leur seront
verses au cas où ils auraient gain de cause devant la justice.
-
Ceux qui ont plus de 7 ans d'ancienneté
dans une même unité de production sont dans la plupart des cas
des proches parents pour les maîtres artisans ou des personnes
... / ...

-~
--..,
273
ayant su tisser avec ces derniers des liens particuliers faits
de confiance et d'obligations morales réciproques.
Ils sont
les hommes de confiance des maîtres artisans et c'est parmi
eux que ces derniers recrutent une partie de leurs "salariés".
c)
L'ABAISSEMENT DE L'AGE DE RECRUTEMENT DES TRAVAIL-
LEURS : UNE POLITIQUE DE REPRODUCTIO~ A MOINDRE
COUT DU S.P.C.
Nous
avons aussi classé nos sujets selon leur
âge au moment de l'enquête.
SUr les 132 sujets interrogés ceux
qui avaient entre 16 et 18 ans d'âge étaient au nombre de 31.
Ceux qui avaient un âge compris entre 19 et 21 étaient eu nom-
bre de 44 tandis que ceux qui avaient plus de 21 ans étaient
de 40.
Ces données chiffrées semblent entrées en contradiction
avec celles recueillies à propos de la détermination de l'âge
d'entrée de nos sujets en apprentissage (71 sujets interrogés
sur les 127 que constituaient un groupe sont entrés en appren-
tissage entre 13 et 15 ans), alors qu'au moment de l'enquête
seuls 17 avaient moins de 16 ans d'âge.
Il semble y avoir un
vieillissement au sommet sans que cela ne s'accompagne d'un
rajeunissement à la base en ce qui concrne la population des
unités visitées. Ce phénomène s'explique par un double f a i t :
d'abord les unités visitées avaient quasiment arrêté de recru-
ter de nouveaux jeunes apparentis depuis quelques années en
raison du fait que les départs et abandons de poste étaient
devenus moins fréquents
(il devient de plus en plus difficile
... / ....

274
de trouver un emploi salarié dans le secteur moderne et les
"mandats, salaires" et autres gains tirés des bricoles que les
apprentis et aides effectuent pour eux-mêmes incitent ceux-ci
à rester jusqu'à la fin de leur apprentissage) et que la néces-
sité se posait donc de moins en moins pour les unités de procé-
der annuellement à de nouveaux recrutements massifs. ensuite
au fil des années les plus jeunes d'il y a 6,
7 ans et qui
avaient entre 13 et 15 ans d'âge avaient grandi et c'est eux
qui constituent au moment de notre enquête la population de
nos sujets âgés de plus de 19 ans ce qui représente 91 sujets
sur les 132 concernés par l'enquête. Mais le ralentissement
du rythme des recrutements et la réduction aussi de leur volume
annuel pour les unités visitées ne signifient aucunement pas
que l'ensemble du secteur para-capitaliste ne procède à des
recrutements massifs d'apprentis qu'à des périodes déterminées
communes pour toutes les unités du secteur, car chaque unité
à
a son propre cycle de renouvellement de sa population travail-
leuse correspondant à une période de 6 ans en moyenne mais dont
les dates du début et de la fin diffèrent d'une unité à une
autre, ce qui veut dire que si au moment de notre enquête plu-
sieurs unités avaient déjà dans un passé récent renouveler mas-
sivement la population de leurs apprentis on aurait eu un résul-
tat sensiblement différent surtout pour ce qui concrne le nombre
de sujets de moins de 15 ans d'âge recencés,
(dans le cas le
plus extenr on aurait eu un gonflement démesuré du nombre des
plus jeunes et une réduction très sensible du nombre de person-
nes âgées de plus de 19 ans). Mais le recrutement massif cyclique
des apprentis auquel procèdent les unités et qui correspond à un
... / ...

275
coût moindre de formation s'accompagne d'un autre phénomène
concernant l'ensemble du secteur et qui en réduit la portée
et le volume:
i l s'agit de la multiplication démesurée et
in-
controlable des unités du secteur para-capitaliste dont l'un
des effets consiste dans l'accroissement de sa capacité d'ab-
sortion et de recrutement en main d'oeuvre, ce qui du coup
contribue à diminuer pour chaque unité du secteur le volume
d'augmentation périodique de ses recrues si ce n'est
tout
simplement leur nombre.
* Au bout de plusieurs annees de travail dans
une unité,
les travailleurs les plus igés et les plus anciens
quittent leur maître artisan si celui-ci ne peut les embaucher
comme des ouvriers salariés.
Ils chercheront soit à se faire
embaucher dans le secteur moderne soit à s'installer comme
maîtres artisans dans le secteur para-capitaliste : dans la
réalité l'installation dans le secteur para-capitalise comme
maître artisan est toujours précédé dans la plupart des cas
par une période où l'aspirant a occupé un emploi salarié dans
le secteur moderne. Cependant les difficultés de trouver un
emploi salarié dans le secteur moderne incitent les apprentis
finis à chercher souvent plutôt à s'installer à leur compte
avec comme seul capital au départ leur savoir-faire, quelques
outils, un hangar installé sur un terrain prêter et leurs
reseaux de relations. Quant à la main d'oeuvre dont ils auront
besoin elle leur sera fournie par l'exode rural et par les
nombreuses exclusions auxquelles porcèdent les écoles primaires
à la fin de chaque année scolaire (la 000 èlèves sont exclus
chaque année des écoles primaires selon la "chambre de métiers"
de DAKAR).
... / ...

270
c'est l'incapacité structurelle du secteur moderne dans son
ensemble à prendre en charge la satisfaction des nouveaux be-
soins qu'il crée dans le domaine de la formation, de l'enseigne-
ment et de l'emploi qui crée les conditions objectives de l'émer-
gence, du fonctionnement et de la reproduction des structures
du secteur para-capitaliste. Ces mécanismes de reproduction
seront renforcés dans leur action par un certain nombre de fac-
teurs qui sont l'incapacité du secteur moderne à couvrir par
sa seule production,
la totalité des besoins matériels de l'en-
semble de la population et
la faiblesse du pouvoir d'achat de
celle-ci qui l'oblige à se tourner vers le secteur para-capita-
liste qui lui produit à moindre coGt et cala grice au maintien
tant à l'intérieur des unités que dans leur environnement de
structures traditionnelles qui remplissent à moindre coût la
fonction de reproduction de la force de travail des travailleurs
du S.P.C.
(exemples:
le syst~me d'autorémunération et la soli-
darité familiale).
d) LA FORME ACTUELLE DE LA FAMILLE TRADITIONNELLE
UN CADRE ACTIF DELA REPRODUCTION DU S. P. C.
En faisant
jouer les mécanismes de la solidarité
familiale l'apprenti, l'aide ou le "salarié" du secteur para-
capitaliste peut faire supporter à sa famille une partie des
coûts de reproduction de sa force de travail. Ce faisant la
famille traditionnelle contribue à travers le maintien de ses
structures à la reproduction du secteur para-capitaliste .
• . . 1. ..

277
Mais cette contribution exerce ses effets en aval du procès
de production.
Il en est différemment de l'effet de la taille
des familles qui sont gonflées démesurément à cause de l'insti-
tution de la polygamie et qui lui agit en amont du procès de
production en créant au niveau des familles concernées les condi-
tions qui vont favoriser l'échec scolaire de leurs enfants et
qui vont ensuite contribuer à les précipiter dans le secteur
para-capitaliste. La famille traditionnelle dans sa nature et
sa forme actuelle joue ce double rôle dans les mécanismes de
la reproduction des structures socio-économiques du secteur
para-capitaliste
: le rôle de pourvoyeur de force de travail
et qui agit en amont du procès de production et celui de repro-
duction avec ses moyens propres de cette force de travail que
le secteur para-capitaliste utilise sans la rémunérer à sa juste
valeur et dont l'action se manifeste en aval du procès de produc-
tion.
Le dernier rôle que joue la famille dans les mécanismes de
reproduction du secteur para-capitaliste, l'enquête nous révèle
objectivement à travers des données chiffrées que nous avons pu
recueillir en ce qui concerne la taille des familles de nos
sujets,
le nombre d'épouses et d'enfants que leur père a en
charge etc.
Sur 101
(cent un) sujets qui ont voulu répondre
à nos questions voici comment ils se répartissent selon le nom-
bre d'épouses de leur père:
-
une épouse
: seuls 27 sujets sur les 101 que compte
notre population ont un père qui a épousé une seule femme.
-
Deux épouses
: 42 sujets (sur 101 sujets) ont un
père qui a épousé deux femmes.
. .. / ...

27R
-
3 épouses
20 sujets ont un père qui a trois
épouses.
- 4 ou 5 épouses
9 sujets ont un pere qui a épou-
sé 4 ou 5 femmes.
Il ressort de ces données objectives que plus de 2/3
de nos sujets ont un père polygame qui en tant que chef de fa-
mille devra supporter le coût d'entretien et de prise en char-
ge des besoins d'une famille nombreuse pouvant compter dans
bien des cas une dizaine de personnes. Mais si l'on sait que
tous ces chefs de famille exercent des professions qui les
situent au bas de l'échelle sociale comme de précédentes enquê-
tés concernant la situation professionnelle des pères des jeunes
travailleurs du secteur para-capitaliste nous l'ont montré,
alors on peut comprendre aisément les nombreux handicaps de
toutes sortes que rencontrent les jeunes gens issus de telles
familles sur le plan de leurs études
: ils sont prédisposés
par la condition et le mode de vie familiale à connaître une
situation d'échec scolaire dès leur jeune âge et donc à aller
grossir le rang des jeunes délinquants urbains ou quand cela
va mieux celui des travailleurs des secteurs informel moderne
d'auto-subsistance et para-capitaliste. L'hypothèse que la situa-
tion et le mode de vie des familles jouent un rôle déterminant
dans la détermination et l'accélération du processus qui mène
les jeunes adolescents de l'école à l'atelier du maître arti-
sans peut trouver dans les données chiffrées qui vont suivre
les éléments de leur confrontation
... / ...

-
279
-
seuls 29 sujets sur les 101 que compte la population
que nous avons pu interroger ont un père dont la descendance
totale compte moins de 8 personnes.
-
32 sujets font partie d'une descendance dont le
nombre de personnes est compris entre 8 et 11.
-
21 sujets ont un père dont le nombre d'enfants total
est compris entre 12 et 16.
-
14 sujets font partie d'une descendance dont le
nombre de personnes est supérieur à 15 (pour le cas qui nous
concerne le nombre varie de 16 à 26).
En conclusion plus de 2/3 de nos sujets
(72 personnes)
appartiennent à une famille dont le nombre d'enfants est au
moins égal à sept ce qui déjà est supérieur à la moyenne de
6 (six)
enfants par couple
(moyenne officielle locale).
Plus
de 1/3 des sujets ont au moins chacun 16 frères ou soeurs
(demi-frères et demi-soeurs)
dont partie ou totalité est encore
à la charge du chef de famille ou de parents proches à celui-ci.
C'est la taille démesurée des familles auxquelles appartiennent
nos sujets,
jointe aux modestes revenus des chefs de famille
qui doivent prendre en charge les besoins d'une importante partie
des charges familiales qui crée en amont du procès de production
les conditions structurelles
(l'augmentation des cas d'échecs
scolaires)
de la reproduction du secteur para-capitaliste .
. . ./ ...

280
H - CON C LUS
0 N
===================
Le secteur para-capitaliste, en tant qu'il est la
dernière étape du processus articulation,
transformation, qui
résulte de la dynamique de contact et de la mise en combinaison
par des acteurs déterminés, d'éléments structurels appartenant
à des modes de production différents, à des fin de production,
constitue sur le plan social et économique une réponse à la
contradiction des formations sociales ou le capitalisme péri-
phérique constitue le mode de production dominant.
Il s'agit
d'un système autonome dans la définition du mode de gestion
de ses affaires sociales et économiques et de ses finalités
mais qui dans le domaine de l'acquisition des forces produc-
tives matérielles et du savoir-faire technique se trouve qua-
si entièrement soumis au secteur moderne,
au mode capitaliste.
La rupture de cette dépendance et le passage du secteur à un
stade supérieur de développement passe par le développement
de la capacité du secteur à prendre en charge ses propres be-
soins en matière d'équipement en moyens de travail à travers
la mise en oeuvre de rapport de coopération entre unités et
branches existantes dont il faudra aider le développement par
l'organisation de séminaires et de stages de formation à l'in-
tention de leurs travailleurs.
*
*
*
*

................
281
IVème PARTIE
LE SECTEUR INFOR~ŒL DE SUBS l STANCE
EX : LA COMMUNA~TE DES CORDONNIERS
DE TILENf A DAKAR

282
RESULTATS
PARTIELS
D'UNE
RECHERCHE
SUR
LE
SECTEUR
INFORMEL
CAS
DE
LA
COMMUfJAUTE
DES
ART l SAi~S
CORDOIJfl 1ERS
1
DU
QUART 1ER
1
TI LEiHŒ
D A K A R
-
- - -
---------

ZRJ
PRE L
M
N AIR E
=======================
=========:=============
Une enquête antérieure effectuée sur le secteur para-
capitaliste et portant sur les comportements socio-économiques
de trente (30)
entrepreneurs sénégalais répartis dans différents
corps de métiers avait permis d'arriver à cette conclusion ma-
jeure que voici et qui manifeste l'asservissement de l'économi-
que au social et au culture:
"l'investissement, le profit,
le
développement,
l'expansion,
le risque etc ... toutes ces caté-
gories économiques ne semblent avoir de sens que s~ elles sont
intégrées à un projet social et réinterorétées à travers lui."
Les chefs d'entreprise pensent les problèmes de l'en-
treprise avec les mêmes concepts utilisés dans la gestion do-
mestique familiale et dans les relations interpersonnelles.
La famille en tant que organisation sociale, le système norma-
tif des relations interpersonnelles constituent deux systèmes
de références dont les normes sont un principe structurant pour
l'entreprise et l'ensemble des comportements qui s'y développent.
Ces normes traditionnelles se combinent à d'autres, nées
de
l'environnement socio-économique moderne ce qui donne
un système d'articulations de normes d'origines socio-culturel-
les différentes que le chef d'entreprise doit gérer •
.../ ...

284
Ce système d'articulation comporte des avantages indé-
niables
(sous valorisation de force de travail)
rendus possibles
grâce à l'utilisation de machines
outils
qui augmentent la
productivité du travail et l'extension des marchés. Mais le
bénéfice tiré de ce système, au lieu d'être investi pour permet-
tre la reproduction à une échelle élargie des activités de pro-
duction va aller s'engloutir dans le social ou le culturel tra-
ditionnels dont il va renforcer les mécanismes de reploduction.
La formation des Chefs d'entreprises pour être opératoire
à moyen terme ou long terme doit prendre en compte aussi la
dimension psycho-socio-culturel
des intéressés,
car c'est en
interrogeant cette dimension là qu'on peut trouver des réponses
à ces grandes questions:
la motivation,
le risque d'investir?
RAPPEL DES STRUCTURES DU SECTEUR INFORMEL
=========================================
CARACTERISTIQUES GENERALES DU SECTEUR INFORMEL ET FORMES DE
DEPENDANCES AU CAPITAL COMMERCIAL
a) Cette présente étude concerne le secteur informel
et dans celui-ci l'activité particulière de production de
chaussures en simili cuir dont s'adonnent les gens de métier
de la caste professionnelle traditionnelle des oudés.
b) Dans notre précédente étude suscitée, nous avions
défini le secteur informel moderne
-de
subsistance
comme
étant "la version citadine de l'économie d'auto-subsistance"
... / ...

285
et comme une étape particulière du proces d'articulation entre
le mode traditionnel et le mode capitaliste.
A cette étape
c'est le mode traditionnel qui impose sa
logique au système d'articulation en tant qu'il constitue la
référence à partir de laquelle les unités du système organi-
sent leurs rapports sociaux de production et le mode rapport
marchand qu'elles entretiennent avec leur environnemen~
cl Quand il s'agit du secteur informel de production
de biens ou de services, les activités marchandes qu'il recou-
vre présentent les caractéristiques communes suivantes :
- Le capital investi est faible et les promoteurs de telles
activités sont des gens de condition modeste.
-
Il s'agit de petites activités individuelles ou n'employant
qu'un nombre restreint de personnes.
L'organisation des rapports sociaux dans le cadre de la pro-
duction est régie par les normes traditionnelles.
Le prix de vente des biens et services produits se détermine
non en fonction du coût de production mais plutôt en fonction
de la subjectivité et la nature des rapports personnels en-
tretenus entre les personnes symbolisant respectivement
l'offre et la demande.
. .. / ...
i1
1
1
t
•,J

286
-
Il s'agit d'activités dont ni le fonctionnement ni le déve-
loppement ne sont l'objet d'une réglementation juridique.
Les biens et services produits par le secteur s'adressent
à des catégories sociales déterminées caractérisées par la
faiblesse de leurs revenus monétaires.
Les gains tirés à partir de ces activités sont principalement
dépensés en vue de la reproduction domestique; c'est-à-dire
l'entretien de la force de travail et de la famille.
d) A ces caractéristiques communes peuvent s'ajouter
d'autres qui diffèrent selon la nature de l'activité considé-
rée. C'est ainsi que certaines activités font usage de méthodes
traditionnelles dans le domaine de la production alors que
d'autres emploient des méthodes appartenant originellement à
des formations sociales occidentales
: nous pouvons citer deux
exemples pour illustrer cette différence au nvieau des méthodes
et de la nature des moyens et que sont le tissage traditionnel
et la confection. D'ailleurs à
l'intérieur d'une même classe
d'activités remplissant la mêmefonction et ayant le même objet
on peut retrouver en situation de concurrence les deux méthodes
traditionnelles et étrangères ou modernes
: exemple de la cor-
donnerie traditionnelle de fabrication de sandales en cuire
et de la petite cordonnerie de fabrication de chaussures fermées
en cuire.
D'autres caractéristiques de différenciation tiennent
au degré de dépendance des activités considérées par rapport
au capital commercial.
... / ...

-
287
c'est ainsi que nous pouvons distinguer quatre cas
de figure en ce qui concerne le degré de dépendance possible
des activités du secteur par rapport au capital commercial :
1. -
Les activités et unités corespondantes font appel
à des circuits d'approvisionnement en matières premières ou
d'écoulement des produits finis se situant en dehors de la sphè-
re de maitrise du capital commercial.
C'est le cas des activités
de transformations des produits de récupération dont la collecte
est organisée par les producteurs eux-mêmes ou par d'autres
gens de métier du secteur informel ;
les produits transformés
suivent pour leur écoulement un circuit que contrôlent soit
les producteurs directs soit les commerçants de petite enver-
gure (exemple,
la fabrication artisanale de marmites en al lu-
minium fondu à Reubeus à Dakar). Dans ce cas de figure où le
producteur traite avec des partenaires de mêmes conditions so-
ciales que lui et s'approvisionne en matières premières hors
du circuit "normal", on peut parler d'autonomie des activités
par rapport au Capital commercial.
2. -
Les activités et unités correspondantes utilisent
en quantité importante de la matière première ou des produits
semi-finis de production industrielle dont elles s'approvision-
nent à partir d'un circuit commercial contrôlé
par de gros
commerçants qui imposent le prix de leur choix.
Mais entre le producteur direct et le consommateur
direct il n'existe aucun intermédiaire. Dans ce cas-ci la dépen-
dance par rapport au capital commercial est seulement partielle
et se situe en amontdu procès de reproduction (ce cas de figure
... / ...

288
comporte une variante ou c'est le consommateur qui apporte la
matière première).
3. -
Les activités et les unités correspondantes se
trouvent entièrement soumises au capital commercial. Les deux
étapes extrêmes de leurs procès de reproduction, à savoir l'ap-
provisionnement en matières premières et l'écoulement des pro-
duits finis se trouvent placées sous le contrôle du capital
commercial qui impose aussibien le prix auquel il vend la
matière première que celui auquel i l achète le produit fini.
Dans ce cas de figure-ci,
les principaux clients des
producteurs ce sont les commerçants ayant déjà pignon sur roue.
Leur situation et leur position leur permettent de bénéficier
d'une rente de wonopole.
Cette situation de dépendance est
celle qui est la plus totale pour les producteurs.
4. -
Les activités et les unités correspondantes sont
mises en oeuvre par des acteurs non professionnels détenteurs
d'un capital d'origine commerciale ou en provenance d'activi-
tés salariales, qui emploient des producteurs indépendants et
organisent l'ensemble du procès de reproduction. Dans ce cas
de figure c'est le détenteur de capitaux et non le producteur
direct et indépendant qui détermine le volume et la nature des
matières premières à travailler,
la conception
du produit,
le volume et le délai de production etc . . . .
. .. / ...

289
Cette forme de dépendance qui dépossède le producteur
de son pouvoir à gérer les problèmes qui naissent dans le do-
maine de la production et qui le réduit à un système d'opéra-
tions plus ou moins complexes à faire reproduire par un système
de rémunération, est une forme de soumission formelle du travail
au capital.
L'emploi domestique,
à Dakar, des tisserands Ndiago
illustre bien cette forme de dépendance et de soumission
du
travail au capital qui est en fait du salariat déguisé
:
la
complexité de l'outil de travail,
le mode de transmission du
savoir à l'intérieur d'une même ethnie,
la non existence d'ou-
tils alternatifs et substitutif modernes,
la non apparition
de nouveaux acteurs socio-professionnels (dans le métier à
tisser) prêts à se prolétariser,
constituent des éléments qui
surdéterminent la situation actuelle des tisserands NDiago et
contribuent à maintenir leurmétier dans le stade actuel où se
trouve son évolution.
. .. / ...

290
CHAPITRE
l
INTRODUCTION
GENE~ALE
SUR LA COMMUNAUTE

291
A - CARACTÉRISATION ET SITUATION PARTICULIÈRE D'UN
=============~================================
MÉTIER DU SECTEUR INFORMEL
LA CORDONNERIE ET LA
=================================================
COMMUNAUTÉ DES ARTISANS CORDONNIERS DU QUARTIER
===============================================
TILÈNE
DAKAR
- - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - -
a)
Si nous nous sommes bien étendus sur les différentes
formes de rapports
qu'entretiennent les activités du secteur
informel avec
le capital commercial, c'est d'abord pour pouvoir
rendre compte de la différenciation qui s'opère dans le secteur
informel, entre branches et à l'intérieur d'une meme branche
entre unités et qui passe par le degré d'ouverture et de dépen-
dance de l'activité au capital commercial et ensuite pour mieux
situer dans ce tissu de situations économiques hétérogènes que
constituent les activités du secteur informel (elles sont
d'utilité sociale différente,
ont des marchés de tailles diffé-
rentes,
sont plus ou moins ouvertes au secteur moderne et accep-
tent plus ou moins l'innovation technique)
la place qu'occupent
l'activité et les hommes qui intéressent particulièrement notre
recherche.
b) La situation de l'activité des producteurs et les
unités de production concernées par nos recherches pourrait
se définir à partir de trois critères :
... / ...

292
1. - La nature de l'activité et des moyens uti-
lisés (activité d'origine traditionnelle ou moderne? Moyens
de production artisanaux ou industrielles ?).
Nous avons affaire ici à un métier originellement tra-
ditionnel mais qui pour s'adapter à l'évolution a dû s'ouvrir
à des apports structurels plus fonctionnels provenant du monde
moderne.
Cela donne une situation matérielle hybride qui fait
que le procès de travail peut se décomposer en éléments appar-
tenant soit au monde traditionnel soit au monde moderne.
2. - Le degré de dépendance par rapport au capi-
tal commercial et celui d'ouverture par rapport au monde moder-
ne. Ici la dépendance par rapport au capital commercial est
presque totale puisquel'artisan s'approvisionne en matières
premières chez le commerçant, à qui il vend également son pro-
duit, et qui impose dans tous les cas son prix.
Il s'agit cependant d'un métier qui dispose d'un
large marché potentiel non exploité puisque la faiblesse de
ses coûts de production rend ses produits très accessible au
1 •
niveau prix, aux catégories sociales des campagnes et des
villes de revenu modeste.
En plus, une amélioration de la qualité et de la'pro-
ductivité du travail permettrait dans l'avenir
d'envisager
... / ...

-
293
d'exporter des produits en direction des pays africains limi-
trophes dépourvus de structures de production de ce genre et
dont on sait que c'est DAKAR qui est leur principale source
d'approvisionnement en chaussures simili cuir artisanales.
3. - Les caractéristiques psycho-sacia-culturel-
les des producteurs : le repérage de ces caractéristiques peut
se faire en interrogeant les appartenances organisationnelles
des producteur; la nature et l'intensité des rapports que
ceux-ci entretiennent avec les différents éléments de leur
environnement organisationnel (famille, village, école, asso-
ciations religieuses, amicales etc ..• ).
Ici nous avons affaire à des gens de métier d'origine
rurale qui maintiennent encore avec la campagne des liens vi-
vaces et dont le système socio-mentale, en transformation,
participe à la fois du monde traditionnel et rural et du mon-
de moderne.
c) L'activité de production de sandales en simili
cuir est une activité nouvelle apparue avec l'urbanisation,
le développement de l'exode rurale. La communauté des arti-
sans cordonniers du quartier de Tilène est composée d'environ
300 artisans répartis dans environ 40 ateliers auxquels il
faut ajouter les artisans menuisiers, forgerons, cordonniers
etc ... évalués à environ une centaine.
. .. 1• ..

....
294
Elle est le résultat de la transformation et de l'adap-
tation à l'évolution du goût des consommateurs citadins et aux
conditions des nouvelles contraintes socia-économiques qui
s'imposent aux producteurs.
Cette tranformation du métier s'est accompagnée d'une
transformation des producteurs que leur long commerce avec le
monde moderne durant quatre ou cinq décennies a donné à voir
à leur conscience la grande contradiction endémique qui existe
entre d'un côté la valeur sociale de leurs produits et l'im-
portance du marché qu'ils desservent (il existe des débouchés
réels dans les pays étrangers limitrophes) et de l'autre la
quasi nullité des avantages matériels, qu'ils tirent de l'exer-
cice de leur profession, sous forme de profit. celui-ci étant
partagé entre le fournisseur de matériels et le commerçant qui
leur achète le produit fini pour le revendre aux consommateurs.
Cette prise de conscience qui est déjà une prédisposi-
tion au changement s'est manifestée au sein de la communauté
des Oudés de Tilène par la formulation explicite d'une demande
quils nous ont adressé. au cours de l'enquête que je menais
auprès d'eux, et portant sur des conseils de facilitation et
d'orientation de l'action de création d'un groupement coopéra-
tif qui puisse rÉunir
plus facilement les conditions maté-
rielles et subjectives de la promotion du métier et de ses
hommes.
Cette demande qui nous a été adressée au cours de nos
recherches et à laquelle nous avons voulu répondre positivement
... / ...

295
a fait changer à celles-ci de finalité : désormais
ma démarche devrait s'inscrire dans le cadre d'une recherche
action et non plus dans celui de simple quête de connaissan-
ces sociologiques sur son objet.
Pour que ce travail puisse se faire dans de bonnes
conditions, une équipe de régulation d'au moins deux person-
nes (un psycho-sociologue et une autre personne d'une autre
formation et ayant l'expérience des relations humaines) était
nécessaire pour qu'à
travers des échanges et des rapports de
complémentarité entretenus puissent être évités ou tout au
moins réduits en minimum des risques de phagocitage que coure
tout intervenant qui agit seul dans un milieu humain,
de la
part de celui-ci.
La disponibilité du Conseiller technique principal
du Service de l'Artisanat (du Ministère du Développement In-
dustriel et de l'Artisanat) et l'intérêt attentionné qu'il
portait aux recherches et à l'action que nous développions
dans la communauté des Oudés, ont dès le début créé un ter-
rain favorable à un échange fructueux d'expériences, entre
celui-ci et nous fonctionnant comme une structure de régula-
tion.
... / ...

296
B - LA CONFRONTATION ENTRE LE TRADITIONNEL ET LE
=~==========================================
MODERNE DANS LE SECTEUR INFORMEL
================================
a) CARACTERISTIQUES DES STRUCTURES ORGANISATIONNEL-
LES - TRADITIONNELLES
Quand un système économique subit l'enprise de
son environnement culturel, celui-ci l'enferme dans ses lirni-
tes normatives et l'empêche de devenir un lieu autonome de
production et d'élaboration de nouvelles normes d'où se réfè-
rent de nouvelles pratiques et qui réorientent l'action orga-
nisée vers d'autres choix de structures et d'objectifs.
Dans ce cas le système économique se trouve placé sous
la dépendance du système culturel dont i l est un de S5 multiples
expressions et surtout le moyen spécifique qui lui permet de
gérer le conflit possible entre les raIes sociaux et les raIes
technico-économiques fonctionnels.
Le conflit des rôle se résoud par la création, grâce
à la médiation de la culture, d'une loi normative de corres-
pondance entre la hiérarchie des statuts et rôles sociaux et
celle des statuts et rôles technico-économiques fonctionnels.
Par le trichement de la culture dont les normes et
valeurs deviennent les références communes qui structurent
toutes les interactions sociales et suivant le même code,
... / ...

297
la rneme loi de correspondance,
nous assistons donc à une fusion
entre le social et l'économique et aux systèmes qui leur cor-
respondent.
Il n'existe pas de frontières nette entre ce qui est
du domaine de
l'économique et ce qui est du domaine du social
et les stratégies qui se décident dans celui-ci, quoique leur
finalité sociale puisse être indiscutable, ne sont pas exemp-
tes toujours de visées à caractère économique et inversement.
Nous avons affaire ici au mode traditionnel de rela-
tions entre l'économie, le social et le culturel.
h) CARACTERISTIQUES DES STRUCTURES ORGANISATIONNELLES
MODERNES
A l'opposé de ce mode traditionnel de relations
entre les
instances économiques et sociales qui comme nous
l'avons vu est bâti sur le principe de la fusion et celui de
la dépendance à un code culturel commun, nous avons dans le
monde moderne le mode de relations bâties sur le principe de
la séparation et de l'autonomie des instances et qui fonde les
conditions qui créent aux unités de production du système éco-
nomiques les possibilités d'être des lieux de production auto-
nomes de nouvelles normes innovatrices traduisant ses objectifs
propres et se reférant à son code propre.
... / ...

298
Ici les normes
de l'environnement socio-culturel
sont redéfinies et réinterprétées suivant les objectifs, la
finalité et le code propres du système économique qui,
lui
aussi à travers les pratiques et les normes nouvelles qui
émergent de son champ, produit et propose de nouveaux modè-
les culturels ainsi que de nouveaux acteurs sociaux dont les
projets et les actions entrent en compétition avec ceux de
son environnement socio-culturel.
Celui-ci ne peut pénétrer dans le système économique
et dans les organisations qui le représentent que sous la for-
me de structures informelles qu'y transposent ses normes et
qui y poursuivent des objectifs ~inscrivant sous un autre
registre
que celui de la rationnalité de l'organisation du
système.
c) COMBINAISON ENTRE LES STRUCTURES TRADITIONNELLES
ET LES STRUCTURES MODERNES DANS LE SECTEUR INFORMEL -
ET LIMITES
Entre le monde où les système se fusionnent
(le
monde traditionnel)
et celui où les systèmes sont séparés,
fonctionnent et Se reproduisent de façon autonome,
il y a l e
monde où les éléments structurels des modes traditionnels et
modernes se confrontent et s'articulent pour produire des
situations hydrides, mutationnelles à structures organisa-
tionnelles instables et réversibles plus ou moins proches
... /'"

299
dans leur nature, leur mode d'angencernent et les finalités
qu'elles poursuivent, soit du monde traditionnel soit du mon-
de moderne. C'est le monde du secteur informel de subsistance
tance et celui du secteur paracapitaliste : le premier présente
une grande proximité structurelle avec le monde trditionnel
tandis que le second est plus proche de par ses structures au
secteur moderne.
Le secteur informel ,de subsistance
(nous laisse-
rons de côté le secteur paracapitaliste qui a déjà fait l'objet
d'une étude antérieure), en raison de sa proximité structurel-
le avec le monde traditionnel et aussi de son ouverture avec
le monde moderne qui l'environne constitue un premier champ
d'apprentissage à la confrontation avec celui-ci et de maitri-
se de ses lois marchandes les plus élémentaires pour une bonne
partie des gens des villes d'origine rurale.
Il s'agit d'un passage où les caractéristiques psycho-
socio-culturelles édifiées à partir du monde traditionnel et
qui fondent l'identité de ces gens vont à travers de nouveaux
échanges sociaux tester les limites de leurs influences sur
leur nouvel environnemnt et avoir comme résultat un remaniement
plus ou moins profond des caractéristiques qui fondaient l'iden-
tité ancienne et la production d'une nouvelle identité plus
adaptée à leur environnement.
Le secteur informel est donc aussi un lien où le système
socio mental des acteurs qui y participent subit des remaniements
dans les structures psychiques qui le fondent. Ce changement
... / ...

300
dans le système sacia-mental des participants du secteur infor-
mel est surdéterminé par plusieurs facteurs dont trois nous
semblent importants
:
1. -
La nature et l'intensité du rapport qui
fonde spécifiquement l'identification du participant au monde
traditionnel et qui se traduit par l'influence plus ou moins
grande que son adhésion à
telles valeurs ou normes du monde
traditionnel exerce sur lui
: valeurs religieuses,
familiales,
morales etc . . . qui fixent
le bien
ou le mal et disent ce qu'il
faut
faire ou ne pas faire.
Ces valeurs parce qu'elles motivent l'action et lui
donnent un sens peuvent selon la manière dont le participant
a assimilé leurs premières confrontations avec la réalité du
monde moderne être ou non un frein au processus de maturation
dans le système socio-mental.
2. -
La nature de l'activité, sa fonction sociale
ainsi que ses possibilités réelles ou potentielles de déve-
loppement constituent aussi des conditions qui dès le départ
prédisposent ou non le participant à s'enfermer dans la rou-
tine de la profession ou à circonscrire son comportement,
ses
actes dans les limites définies par la vision traditionnelle
de son métier.
c'est ainsi que,
alors que la broderie traditionnelle
... / ...

301
ainsi que le bijouterie et la "coiffure'! traditionnelles S'~-
se
quipent et 'modernisent,
la cordonnerie traditionnelle,
elle,
végète encore et ceci non pas en raison de l'exiguité de son
marché qui en fait est bien énorme puisque la Société BATA
de production de chaussures ne couvre que 15 % de la demande
locale, mais surtout à cause de la concurrence anarchique qui
régne dans le métier (on peut débuter dans le métier avec un
capital de départ extrêmement réduit quelques centaines de
francs) et dont la conséquence la plus immédiate et la plus
évidente est dans le fait de faire baisser les prix des pro-
duits à un niveau tel qu'il devient quasi-impossible d'escomp-
ter un profit accumulable.
Dans des cas de cette espèce le métier est investi
négativement par ceux qui l'exercent : ils cherchent à l'aban-
donner à la moindre occasion pour devenir par exemple des
"banabanas", c'est-à-dire de petit commerçant ou tout simplement
ils en font un gagne-pain.
3. - La force plus ou moins grande de l'influence
qu'exerce le monde moderne sur les participants et qui se
traduit par des aspirations nouvelles plus ou moins fortes
et l'adhésion à des modèles qui procèdent de la socio-cultu-
relIe moderne.
Cette influence peut-être guidée, orientée dans un
sens dynamique et novateur si des institutions spécialisées
prennent en charge la réorganisation de la branche ou du
... / ...

302
secteur, son encadrement technique et la formation socio-
professionnelle des participants.
Aussi le développement des activités du secteur in-
formel dépend du renforcement par des institutions spéciali-
sées d'encadrement de la capacité de ses participants à gé-
rer l'ensemble des contradictions liées spécifiquement à la
profession et aux influences qu'exercent sur celle-ci et aux
hommes la double influence des déterminations socio-culturel-
les du monde traditionnel et du monde moderne.
C - LES VOIES DU CHANGEMENT
=~=====================
a) LES DOMAINES CONCERNES PAR LE CHANGEMENT DANS
LE METIER DE LA CORDONNERIE
En se transplantant de la campagne à la ville, la
cordonnerie traditionnelle a subi quelques transformations
pour s'adapter d'une part à son nouvel environnement techno-
logique et d'autre part aux besoins et exigences de son nou-
vel environnement humain. Cette transformation va dans trois
sens :
1. - Elle a consisté dans la spécialité des artisans
à la fabrication d'un type de produits donnés, les sandales
et babouches. Dans les campagnes le cordonnier traditionnel
est polyvalent et fabrique aussi bien des chaussures,
... / ...

303
gris-gris, que des selles et harnais,
selon les besoins de
sa clientèle, ce qui lui donne une maitrise totale de l'en-
semble des procès de travail différenciés de son métier.
Dans les villes et surtout à Dakar, certains besoins
que satisfaisait naguère la cordonnerie traditionnelle se sont
progressivement effacés (exemple:
selles, harnais)
pour céder
la place à de nouveaux besoins stables et qui correspondent
à une demande en constante progression que peut satisfaire en
partie la cordonnerie traditionnelle sous condition de s'adap-
ter aux exigences des nouveaux consommateurs.
Pour pouvoir répondre à cette nouvelle demande, il
fallait que la cordonnerie traditionnelle puisse produire d'a-
vantage et fournir des produits de qualité acceptable pour cel-
le-ci dont les critères de choix d'achat sont de plus en plus
influencés par les normes esthétiques et de productions indus-
trielles du monde moderne.
La spécialisation d'une partie des artisans cordonniers
installés dans les villes et surtout à Dakar était la réponse
donnée à ces nouvelles contraintes qui s'imposaient sur le
métier.
2. -Elle a consisté en l'innovation dans la conception
et la qualité finales des produits en ce sens que la fabrica-
tion de ceux-ci devait faire appel de plus en plus aux ressour-
ces de l'esprit créatif des producteurs.
... ( ...

Cette mobilisation des ressources de l'esprit créatif
dans un sens de promotion des produits fabriqués pouvait désor-
mais se faire grâce aux restrictions que la spécialisation a
apportées dans les tiches, ce qui permettait à l'artisan pro-
ducteur de pouvoir mieux se consacrer à des activités de
réflexion créative,
de conception et de perfectionnement de
la qualité de ses produits.
Mais ces nouvelles dispositions devaient trouver les
conditions de leur renforcement dans des contraintes nouvelles
qui s'imposaient sur le métier et qui sont nées d'une part de
la concurrence interne entre producteurs de la même communauté
et d'autre part de la concurrence externe entre d'un côté les
artisans et de l'autre la société BATA.
Par le fait de cette double concurrence à laquelle
tout artisan devait faire face,
produire toujours mieux et
s'adapter toujours mieux au goût du consommateur étaient deve-
nus le critère principal de différenciation professionnelle
entre artisans du même métier et la condition de survie écono-
mique de tout artisan cordonnier qui produit pour le marché.
La manifestation de cette créativité, qui répondait
à des préoccupations d'ordre économique, a emprunté principa-
lement trois voies:
l'imitation ou la copie de modèles de
chaussures de production industrielle,
l'adaptation de ceux-ci
au goût local par voie de modification des formes extérieures
et la création autonome de modèles nouveaux grice à la seule
mobilisation des ressources de l'imagination créative •
.../ ...

3(\\5
Ces
trois voies existent de façon concurrente, mais
la première et la deuxième sont les plus utilisées jüsqu'à ce
jour.
3. -
Elle a consistÉ en des modifications struc-
turelles dans le proc~s de travail: certains outils. qlli na-
guere dans la corJoIlllerie traditionnelle occupaient une grande
place dans le proc~s de travail, deviellnent de moins en moins
fonctionnels,
d'autres sont rn~me carr~ment abandonn0s,
tandis
que en même temps le métier s'enrichit de nouveaux apports
tecr.nologiqucs.
l~e m~me proc~s de changement s'observe en cc qui con-
cerne l'utilisation des mati~res qui ctlangent de ~ature. de
qualité etc ...
En somme clest l'ensemble des moye:1S de produc-
tion qui est concerné par le changement.
Dans les tableaux l
et II nous avons établi la liste
de tous les
objets
qui,
darls la cordonnerie trditionnelle,
ont été concerné spar le changement et corrélativement celle
des nouveaux moyens qui les ont remplacés.
l.es objets qui ne figurent pas dans ce tableau sont
ceux que le changement n'a pas concerné
(ex.
planche servant
de table de travail ou planchette servant d'aiguisoir)
ou qui
sont des éléments technologiques nouveaux jouant instrumentale-
ment une fonction complémentaire par rapport à des objets tra-
citionnels (ex.
la lime par rapport à la planchette - aiguisoir
ou "classull
"classu )
ou encore remplissant des fonctions nouvelles
(ex. cambure, tampon éponge etc .•. ).
... / ...

306
b) LA RATIDNNALITE DU CHANGEMENT
Quelques remarques s'imposent à propos de la
rationalité de ce changement qui est en oeuvre dans le procès
de travail.
1. -
Les moyens de production abandonnés sont
ceux que,
dans le cadre du proc~s de travail traditionnel,
l'artisan cordonnier devait
lui-même fabriquer,
ce qui devait
allonger le temps de production des biens d'usage et mobiliser
de sa part une énergie supplémentaire correspondant à un sur-
croit de charge de travail ou, encore ceux fabriqués par
d1autres artisans traditionnels mais dont ni les caractéristi-
ques ni la quantité produite ne répondaient plus aux nouvelles
exigences du métier que son nouvel environnement a fait
subir
quelques changements.
Les moyens de production abandonnés sont donc ceux
dont le temps de production que lui consacrait l'artisan cor-
donnier constituait un manque réel à gagner en ce qui concerne
le temps du procès réel de fabrication des produits d'usage,
ou ceux dont la production par d'autres artisans traditionnels
ne donnait plus satisfaction au métier de la cordonnerie ni
par sa quantité, ni par sa qualité (ex. les formes produites
par les sculpteurs sur bois etc .... ).
L'abandon de certains moyens de production tradition-
nelle et leur remplacement par des moyens de production indus-
trielle, correspondaient à un besoin de développement pour le
métier.
. . '/ ...

307
En effet l'artisan cordonnier,
qui n'est plus obligé
de confectionner lui-même une partie de ses moyens de produc-
tion, pourra désormais consacrer une plus grande partie de son
temps au procès réel de fabrication de ses produits, ce qui
augmente la productivité de son travail.
En outre la rupture de la dépendance du métier de la
cordonnerie par rapport au travail d'autres artisans dont le
produit ne remplissait plus les nouveaux critère~ d'accepta-
bilité exig{s par la transformation de lacordonnerie et la
possibilit~ qui était désormais offerte à celle-ci de pc)uvoir
acquérir immédiatement sur le marché moderne et en quantité
suffisante
les moyens dont elle avait besoin pour prodllJre en
meilleure qllalit~, constituaient aussi une conditic)n ~Ullpl~­
mentaire favorable à l'augmentation de la production:
]a
production de l'artisan cordonnier n'était plus soumise aux
aléas de la production d'autres artisans des autres corps de
métiers et en plus elle avait la possibilité d'offrir une gam-
me de choix plus large de produits aux consommateurs.
2. -
Les moyens de production faisant l'objet
d'un emploi ou d'une utilisation plus limitée (ex. planchette
fusiforme à manche,
aléne,
cuir etc . . . . ) sont ceux dont la
mise en oeuvre correspond à des activités de production four-
nissant des biens d'usage dont
la consommation s'est restrein-
te, soit parce que celle-ci ne concerne plus qu'une catégorie
limitée de personnes soit parce que la valeur d'échange des
produits devient hors de portée de la bourse de la grande ma-
jorité des gens (ex.
les babouches en cuir).
. . '/ ...

308
Dans ce cas la production artisanale des moyens de
travail et matières premières nécessaires à la fabrication
de tels produits régresse:
c'est le cas dans une certaine
mesure de la production du cuir traditionnel qui entre dans
la fabrication de certaines babouches,
de l'alène, du cire
etc . . . .
3.
- Les moyens de
production qui remplissent
une fonction nouvelle ou complémentaire sont ceux qui r~sul­
tent de l'apport technologique du monde moderne et dont l'uti-
lisation conf~re au produit final une qualité ou une val.eur
esthétique jugé supérieure par les consommateurs à celles des
produits de m~me type fabriqués à 'laide des seuls moyens
trditionneJs.
Du point de vue de l'artisan cordonnier, 1.'ernploi ou
l'utilisation de tels moyens comportent un
avantage économi-
pconomi-
que réel en ce sens qu'en augmentant ainsi la crédibilité de
ses produits,
il acquiert une client~le plus large, ce qui
peut accroître à moyen ou long terme ses gains.
Beaucoup de ces moyens nouveaux sont employés comme
matières premières
(carton ciré ou "lese ll
"lese l ,
éponge etc ... ) ou
accessoires (carnbure, boucles, articles d'ornementation etc ... )
et confèrent au produit final une forme ou des caractéristiques
qualitatives apparentes.
4. -
Les moyens de production qui n'ont pas été
cocnernés par le changement et que l'on peut considérer comme
.. '/ ...

309
étant le noyau technologique
le plus stable du métier de la
cordonnerie traditionnelle constituent les objets qui marquent
l'identité culturelle de celle-ci et qui renforcent la pré-
gnance du conformisme professionnel qui caractérise les gens
de ce métier.
Ce noyau technologique,
qui est le coe\\tr du métier
concentre en lui toutes les forces de résistance contre le
changement.
En effet,
ce noyau représente tout url système de
perceptions du mondé,
de croyance,
de considérations socio-
économiques constituant la référence à partir de laquelle se
définit le double rapport de
l'artisan à son métier et son
environnement.
Le maintien de ce noyau qui appartient â une autre
aire technologique,
fonde aussi,
du côté du consommateur en
contact avec le monde moderne tout un système de préjugés et
de considérations négatives sur le métier et ses produits,
qui sont sous-valorisés.
Mais i l existe d'autres raisons y
cette fois-ci éco-
nomiques, qui,
du côté de l'artisan cordonnier,
renforcent sa
résistance à faire transformer le noyau technologique stable
qui fonde Il identité culturelle de son métier ou en substituer
un autre plus performant.
Ces raisons économiques consistent essentiellement
dans le fait que les éléments matériels et structurels qui
constituent ce noyau sont d'un coût de production ou ont une
... / ...
1

310
valeur marchande faible,
ce qui garantitune entrée dans le
métier facile à tout artisan qui veut s'installer: du fait
donc du maintien de ce noyau, le capital de départ à investir
pour s'installer dans le métier est dérisoire et est à la portée
de n'importe quel artisan débutant.
Ceci pourrait contribuer à augmenter la marge bénéfi-
ciaire des artisans si le coût des autres moyens entrant dus
la fabrication des produits était relativement faible et si
ceux-ci pouvaient se vendre à un prix fort au marché.
~ais ces deux conditions économiques de valorisation
du produit ne sont pas réunies à l'heure actuelle, car l'arti-
san n'a aucun contrale ni sur le prix de ses moyens de produc-
tion ni sur celui de ses propres produits qui sont
tous fixés
par les commerçants.
Cependant la situation économique de l'artisan cor-
donnier pourrait mieux s'améliorer si la productivité de son
travail pouvait augmenter de façon substantielle et si corre-
lativement une amélioration notable était apportée dans la
qualité et finition du produit qui pourrait ainsi bénéficier
de préjugés plus favorables au niveau des consommateurs, ce
qui contribuerait à sa promotion.
Dans ce cas i l faudrait que le noyau technologique
qui enferme la profession dans ses limites productives actuel-
les puisse être transformé ou voire même remplacé par d'autres
structures matérielles nouvelles.
... / ...

311
Il existe donc une contradiction entre le maintien
du noyau technologique qui fonde l'appartenance du métier à
un système socio-culturel déterminé (celui du monde tradition-
nel) et les avantages économiques que cela comporte (l'investis-
sement du capital pour s'installer dans le métier est faible)
d'une part et les perspectives de promotion réelle du produit
artisanal et par conséquent de gains plus importants,
en cas
de changement réel dans les structures matérielles de ce noyau
d'autre part.
Le dénouement positif de cette contradiction pourrait
beaucoup dépendre de l'action de soutien et d'encadrement des
institutions chargées de
la promotion du travail artisanal.
D - CHANGEMENT ET INTÉGRATION ÉCONOMIQUE DANS LE
============================================
t10NDE MODERNE
=============
a) LA VOIE DE LA SUBSTITUTION SELECTIVE
OUVERTLRE
ET DEPENDANCE
Dans les villes,
les critères qui fondent le
choix d'achat des consommateurs en ce qui conCerne certains
produits courants artisanaux,
ont évolué en raison du fait que
les caractéristiques que recherchent les demandeurs de tels
produits se rapprochent de plus en plus de celles des modèles
de même type conçus et réalisés conformément aux normes de
production industrielles.
. .. / ...

312
L'influence du monde moderne a donc induit des chan-
gements chez les consommateurs des produits artisanaux dans
le domaine concernant les critères normatifs à aprtir desquels
se fondent leur décision d'achat et le choix des produits à
acquérir.
Il fallait donc que le travail artisanal s'améliore
en qualité pour répondre de façon satisfaisante aux attentes
et exigences normatives des consommateurs urbains de ces
produits et dont la faiblesse
du pouvoir d'achat rend diffi-
cile leur accès à certains produits industriels,
ce qui
les
prédispose à acheter et
consommer des produits Jucaux artisa-
naux.
Mais le travail artisanal, habit\\l~ jusqu'ici â pro-
duire pour une clientèle très limitée,
devait à la suite de
son implantation dans les villes et l'accroisse~ent de celles-
ci faire face au nouVeau problème surgi de l'accroissement de
la demAnde en produits artisanaux.
Pour ce faire,
il fallait au travail artisanal,
soit
modifier ses structures de production en empruntant la voie
qui consiste à s'équiper de nouveaux outils qui augmenteraient
de façon nettement appréciable la productivité du travail, soit
tout en maintenant le noyau technologique traùitionnel du mé-
tier concerné, opérer une substitution sélective de certains
moyens de productions traditionnels par d'autres de fabrication
industrielle : dans ce cas ce sont les moyens traditionnels
dont l'emploi requerrait au préalable de la part de l'artisan
la mise en oeuvre à l'échelle individuelle (ou du groupe
... / ...
..

313
d'appartenance)
de tout un dispositif de préparation (exemple
le cuir de fabrication traditionnelle et les autres outils
fabriqués lui même par l'artisan)
qui seront abandonnés et
remplacés par d'autres.
Dans le cas du travail artisanal qui nous concerne
ici,
c'est la méthode de substitution sélective qui consiste
à remplacer certains moyens de production traditionnels par
d'autres de fabrication industrielle et tout prêts à l'empllJi
qui a été adopté par les artisns comme solution en vue d'aug-
menter la productivité de leur travail.
Ce choix de solution que l'on peut COllsidérer comme
provisoire semble déterminé
par deux factellrs que sont d 1
d une
part
la faible capacité d'investissement des artisans,
ce qui
les prédispose à n'envisager que des changements se situant
à la marge du noyau technologique traditionnel dont la transfor-
mation doit mobiliser des capitaux importants que les artisans
n'ont pas â disposition,
et d'autre part l'attachement plus
ou moins affectif qui lie les artisns au métier de leurs p~res
qu'ils voudraient laisser intact (il s'agit d'un désir plutôt
inconscient)
quoiqu'une telle perspective soit économiquement
non viable pour le métier.
La méthode de substitution sélective, en permettant
à l'artisan cordonnier producteur de pouvoir consacrer désor-
de
mais plus de temps aux tâches~fabrication, a contribué à déve-
lopper sa capacité de production individuelle, ce qui se traduit
à l'échelle de la communauté des artisans par une augmentation
du volumte total de la production artisanale, ce qui a permis
de satisfaire la demande urbaine en augmentation constante •
.../
. ...

314
Mais cetle méthode devait
rester insatisfaisante si
elle ne devait consister qu'à solutionner le problème né de
l'écart constaté entre l'évolution quantitative de la deman-
de et le volume global de la production artisanale ; car elle
devrait aussi,
par une sélection judicieuse de la nature et
aussi de la qualité des llluyens substitutifs. apporter des
car~ctéristiqucs nouvelles aux produits, pour être définiti-
vement adoptée.
Or sur le march~ moderne les seuls produits industriels
susceptihles d'être employés cumme des moyens substitutifs et
dont
l'utilisation satisfait la double cDndition de fair~ aug-
menter la productivité du travail
(indirectement)
et de donner
~ux produits des caractéristiques nouvelles satisfaisantes pOUT
les consommateurs sont les simili-cuirs présentant une vaste
gamme de coloris différents ct les crêpes et caoutchouc de co-
loris et dl~paissellr vari~s : les chaussur~s sont entiêreme~t
fabriquées à partir de ces matières dont les commerçants ont
le monopole de la vente.
U DEPENDANCE DU METIER AU CAPITAL COMMERCIAL POUR
L'APPROVISIONNEMENT EN MATIERES PREMIERES
En adoptant 12 méthode de substitutiun sélecti-
ve qui est un compromis entre le conformisme professIonnel
qui enferme le métier dans la rOlltine
traditionnelle et le
changement par remplacement du noyau tec~nologiquc par ùes
structures nouvelles de production,
le métier de la cordun-
nerie crée les conditions de sa subordination au capital
commercial dont i l est devenu très dépendant .
.../ ...

315
Celui-ci dispose du monopole de vente de la totalité
des matières premières dont a besoin la cordonnerie pour pro-
duire et aussi du monopole d'achat des produits de celle-ci
(ou presque).
D'abord considérons ld dépendance du métier par rapport
aux commerçants qui détiennent
l~ monopole de vente des matières
premières et en lloccurence les matières synthétiques
lvinyl,
crêpe,
caoutchouc). Le monopole de la vente se trouve entre
les mains de quelques gros commerçants installés dans l'avenue
Blaise Diange et aux environs dt::: celle-ci.
Certains font de l'import -
export et constituent le
groupe auprès duquel les autres commerçants de moindre enver-
gure s'approvisionnent.
Ce commerce de matières premières
synthétiques échappe totalement au contrôle des artisans pro-
ducteurs dont
la faiblesse économique et l'état d'isolement
dans lequel chacun se trouve les prédisposent à être les vic-
times toutes désignées du capital commercial dont les repré-
sentants dans le domaine qui nous concerne ont une entière
liberté d'agir quand il s'agit de fixer les prix de vente des
matières premières
:
ceux-ci peuvent augmenter de 20 à 30 %
du jour au lendemain (c'est le cas pour les simili-cuir,
crê-
'.
pes,
caoutchouc, colles etc ... ) sans que cette augmentation
'.
arbitraire et spéculative ne puisse être répercutée par les
producteurs sur les prix de vente de leurs produits qui eux
accusent une grande stabilité) celle-ci étant imposée par les
marchands qui contrôlent le circuit de distribution des pro-
duits.
. .. / ...

316
Une telle situation a pour consquence immédiate la
réduction de la marge bénéficiaire des artisans cordonniers
ce qui limite leur capacité d'accumulation et d'investisse-
ment innovateur ce qui est un facteur de renforcement du
conformisme professionnel traditionnel.
L'asséjutissement du métier de la cordonnerie par
le capital cou@ercial se fait donc à travers le contrôle
qu'exerce celui-ci sur les moyens de production dont a
besoin celle-là et ne consiste donc pas encore en une tenta-
tive d'appropriation et de réorganisation des procès de tra-
vail et de production du métier: i l reste à l'écart de ces
procès et se contente de prélever une rente de monopole com-
mercial sur les moyens de production.
c) DEPENDANCE DU METIER AU CAPITAL COMMERCIAL DE
DISTRIBUTION
Si le commerce des moyens de production est
contrôlé quasi totalement par les moyens d'approvisionnement
comme nous venons de le constater plus haut par contre le cir-
cuit de distribution du produit artisanal se trouve lui quasi
totalement entre les mains des commerçants sênégalaisau niveau
national et de quelques commerçants affricains des pays limi-
trophes du Sénégal (Mali, Guinée, Mauritanie etc ••. ). Les
commerçants sénégalais sont installés surtout dans les princi-
paux marchés de la capital où ils contrôlent un ou plusieurs
points de vente: c'est le cas des marchés de Sandaga, Tilène,
Fass, Gueule Tapée, NGélew l et II, Grand Yoff, Khar Yalla,
Pikine.
. .. / ...

317
Sauf pendant les périodes correspondant à la veille
des grandes f~tes nationales qui sont la Tabaski, la Karité
et le nouvel an où la consommation locale de chaussures de
fabrication artisanale est en nette accroissement et où les
commerçants sont tenus de renouveler leur stock de marchandi-
ses et de détenir une large gamme de variétés de modèles, ce
qu'ils ne peuvent se procurer qu'en al.lant visiter les ate-
liers des artisns cordonniers, ce sont ceux-ci qui sont
obligés pour écouler leurs produits auprès des commerçants de
se rendre dans les marchés de la capital.
Ce faisant pendant donc neuf mois au moins de
l'année les artisans cordonniers sont tour à tour producteurs,
et commerçants ambulants de chaussures. C'est en l'occurence
pendant ces périodes que les prix auxquels les commerçants
achètent les chaussures de fabrication artisanale sont les
plus bas : les prix peuvent baisser de 20 % ou plus.
Pendant la période des fêtes,
la demande en chaussu-
res haussant et la concurrence entre commerçants étant parti-
culièrement vive, ce sont ces derniers qui se déplacent pour
aller chercher la marchandise auprès des petits producteurs
artisanaux de chaussures : dans ce cas les prix qui sont of-
ferts aux producteurs peuvent augmenter mais cette augmenta-
tion est vite compensée par celle des prix de vente des
moyens de production qui pendant ces périodes accusent une
certaine hausse.
... / ...
~!

318
d) INTENSIFICATION DE LA CONCURRENCE INTERNE
Pendant les périodes de l'année ne correspondant
pas aux grandes fêtes nationales,
la production de chaussures
artisanales baisse et la concurrence entre producteurs artisa-
naux devients très aigue.
Dans ce cas beaucoup d'artisns faute de ne pouvoir
écouler leurs produits ou encore à force de vendre à perte se
retirent provisoirement du métier et parmi ceux qui y restent
seuls ceux qui ont une compétence professionnelle réelle re-
connue par des marchands de chaussures bien établis peuvent
escompter tirer encore un maigre bénéfice de leur travail.
Certains commerçants réputés auprès de leur clientè-
le d'être des vendeurs de marchandises de bonne qualité s'ap-
provisionnent en chaussures auprès des meilleurs artisans.
Les conséquences dlune
d'une telle situation au niveau
économique (arrêt de la production) et social (grossissement
des marginaux urbains) sont plus ou moins atténuées par trois
faits :
1. - Des commerçants africains provenant des
pays limitrophes viennent acheter de temps à temps quelques
dizaines de paires de chaussures directements aux artisans.
2. - Quand il devient difficile aux artisans de
faire écouler leurs produits dans la capitale certains vont
dans les région y séjourner pendant quelques jours afin d'y
... / ...

319
écouler leurs produits auprès des commerçants
dans ce cas
ils s'installent chez un parent ou un ami.
3. - Des marchands ambulants de petite enver-
gure procèdent journellement à des achats de l à 5 paires de
chaussures auprès des producteurs, qu'ils vont revendre dans
les quartiers de la Médina, les SICAP etc ....
el CONCLUSION
L'ouverture au monde moderne du métier de la cor-
donnerie traditionnelle s'accompagne de changements qui se ma-
nifestent dans deux
directions principales
: cl' abord il y a
un accroissement de la productivité du travail et une améliora-
tion de la qualité du produit de celui-ci et ensuite correlati-
vement une dépendance plus accentuée dl.! métier <lU capital com-
mercial qui contrôle l'accès des petits producteurs aux moyens
ùe production et le circuit de distribution et de commerciali-
sation des produits artisanaux.
Une telle situation a pour conséquence la réduction
de la marge bénéficiaire des petits producteurs. Ceux-ci pour
y remédier cherchent à s'organiser, se regrouper en une orga-
nisation professionnelle afin d'inciter les institutions à
faire exercer un contrôle plus rigoureux sur les prix des
moyens de productions et les soutenir dans leur volonté de
s'équiper en matériels plus modernes et d'assainir la pro-
fession.
• .. 1.••

320
E - CHANGEMENT ET QUETE D'UN NOUVEAU STATUT INSTI-
~============================================
TUTIONNEL
=========
Face à la multiplicité des contraintes technico-
économiques nouvelles auxquelles le métier de la cordonnerie
se tcouve confronté en raison de son intégration au monde
moderne et surtout de son insertioll dan~ le marché capitalis-
te, les petits producteurs, conscients de leur incapacité a
lever, chacun au nvieau individuel. ces contraintes,
tentent
de se regrouper au sein d'une association à vocation syndi-
cale qui défenùrait auprès des institutions auxquelles
dépend 11 art isanat les intérêts spécifiques de la profession
(octroi È la profession d'un domaine ou site ou les produc-
teurs pourraient s'installer; contrôle plus systématique et
plusrigoureux des prix des moyens de production, particpation
à des foires et autreo expositions etc ... ).
Celle-ci en raison de la nature spécifique de son
objet (production de chaussures en matières synthétiques) et
la particularité de ses problèmes, contraintes et contradic-
tions, se pose comme une activité de production différente
de la maroquinerie dont elle est tyès proche par ses moyens
de travail et qui est une activité de production d'objets
d'art en cuir de reptiles surtout (porte-feuilles, sacs à
main etc ...• ).
De même la profession par le biais de son syndicat
cherche à éviter toutes formes de confusion qui pourrait
être faite entre ses intérêts spécifiques et ceux des autres
... ! ...

321
corps de métiers classés par la tradition dans la catégorie
des métiers de castes (exemples : la cordonnerie, la bijou-
terie).
Sur le plan social, l'un des objectifs majeurs de la
profession et ultérieurement de son syndicat en cours de cons-
titution,
c1est sa reconnaissance par les institutions comme
un corps de métier autonome et différent des autres. Sur le
plan professionnel et économique, la revendication majeure
c'est l'obtention auprès des autorités compétentes d'un sou-
tien matériel et financier (obtentionde crédit bancaire,
équipements)
et d'un encadrement (obtention d'un site,
for-
mation professionnelle) susceptibilité de faire progresser
le métier.
F - CHANGEMENT ET EFFETS D'ENTRAÎNEMENT
===================================
a) La communauté des artisans cordonniers de la Médi-
na se trouve installée dans un espace urbain dont les limites
correspondent approximativement aux frontières de quatre
grands marchés de la capitale : les marchés Sandaga
Tilène,
J
Fass, Gueule Tapée.
Cet espace urbain est traversé par une grande artère
commerçante (Avenue Blaise Diagne) bordée de boutiques et ma-
gasins dont certains constituent les principaux lieux d'appro-
visionnement en moyens de production des artisans cordonniers .
. . ./ ...

322
Des deux bouts de cette artère se trouvent d'un côté les
marchés Sandaga et de l'autre le marché Tilène qui consti-
tuent l'un et l'autre deux grands centres de vente de produits
du travail de la cordonnerie.
De mg me cet espace urbain comporte dans les quartiers
que sont Reubeus et Tilène des unités de production artisanale
o~ de petits producteurs fabriquent des outils et autres maté-
riaux à l'intention des cordonniers:
c'est la cas des forge-
rons de Reubeus qui fabriquent des marteaux, emporte pièces,
pieds en fer etc ...
des sculteurs sur bois installés au bout
de la rue ]]
du côté du stade lba Mar Diop et qui fabriquent
des planches ou lrall uwa " et des planchettes "dassu" Ou "Kepen-
de", des menuisiers de la rue 15 x
18 qui fabriquent des ta-
lons en bois ou "coquettes".
b) On dénote aussi dans ce même espace urbain qui
constitue l'environnement immédiat des artisans cordonniers
la présence de quelques ateliers de réparation de machines à
coudre dont llun est équipé d'un tour permettant d'adapter des
pièces de rechange,
conçues pour un modèle de machine à coudre
donnée, au fonctionnement du modèle utilisé par les artisans
de la place.
La présence de la communauté de cordonniers dans cet
espace urbain que nous venons de définir a donc induit tout
un ensemble d'activités de production différentes qui grâce
à la coopération qu'elles maintiennent avec le métier de la
cordonnerie permettent le fonctionnement et la reproduction
de celui-ci en tant que corps de métier.
... / ...

313
Ces liens de coopération établis entre les autres
corps de métier et la cordonnerie comporte des avantages
économiques réels pour celle-ci car cette coopération s'éta-
blit entre producteurs de même condition, même niveau de dé-
veloppement,
ce qui ne permet à aucun groupe de producteurs
de pouvoir s'imposer sur les autres ou d'imposer ses prix.
Il s'en suit dans une telle situation de rapports de
forces équilibrées,
une stabilité dasn les prix des biens et
services échangés dont les coût de production sont bas en rai-
son des faibles moyens utilisés ainsi que les valeurs d'échan-
ge qui n'incluent que de petites parts de bénéfices étant don-
né que toutes ces activités sont des activités de subsistance.
Cette coopération de la cordonnerie avec les autres corps de
métiers lui permet donc de pouvoir minimiser ses coûts
(voir
tableau)( IX et)\\,l
c)
L'espace urbain dans lequel s'est installée la
communauté des cordonniers n'est pas seulement un espace de
coopération et d'intégration économique entre petits produc-
teurs de corps de métier différents à activités complémentai-
res ou un espace d'échanges commerciales car elle est aussi
un lieu où se développent de petites activités marchandes dont
la fonction directe est de permettre la reproduction à moindre
coût de la force de
travail des cordonniers
(et d'autres arti-
sans).
C'est ainsi qu'à côté des ateliers des cordonniers se
sont
installés des gargotiers qui préparent des repas pour
ceux-ci dont la plupart ont laissé leurs femmes et enfants
dans les campagnes,
des tailleurs qui confectionnent les vê-
tements dont
ils ont besoin.
. .. / ...

324
De même des marchands ambulants de café, bouillie,
beignets, maniocs grillés visitent quotidiennement les ate-
liers de cordonnerie, qui le matin, qui en fin d'après-midi
pour proposer leurs petites marchandises aux artisans qui les
achètent pour leurs petits déjeuners ou leurs goûter.
De même
deux ou trois fois par semaine des lavandières visitent les
ateliers pour proposer leurs services aux artisans dont les
habits dûment
lavés
et repassés leur sont retournés.
La grande majorité de ces artisans habitent à la
Médina où ils louent et partagent en commun des chambres.
c) Nous avons réalisé une enquête sociologique et
psycho-sociologique sur cette communauté d'artisans cordon-
niers dont
les résultats seront
lvirés dans les pages sui-
vantes.
Cette enquête s'est déroulée dans un champ spécial
circonscrit entre l'Avenue Blaise Diagne, la Rue 22,
la Rue
19 et la Rue ]1. Elle a concerné 23 ateliers regroupant 80
artisans correspondant respectivement à la moiti~ (1/2) des
ateliers et au tiers
(1/3 ) des artisans install~s à l'inté-
rieur des frontières que nous venons de définir et où se
trouvent concentrés pr~s des detlx tiers (2/3) de l'ensemble
des ateliers de cordonnerie que compte la Médina .
.../ ...

325
l'H.'PlTRF
I l
ENQUETE
REALISEE
DANS
LA
COMMUNAUTE
DES
============================================
ARTISANS
CORDOIJlHERS
DE
TILEljE
=================================

326
A - PRÉSENTATION DES CONDITIONS DE L/ENQUÊTE
=======================================~
Les résultats de cette enquête concernent 80 artisans
répartis dans 23 ateliers installés dans la portion de l'espa-
ce urbain de la Médina où la concentration des artisans cordon-
niers est la plus forte. L'enquête s'est déroulée du 23/18/84
au 27/11/84,
ce qui correspond au moment de l'année où les ac-
tivités de production sont à un niveau bas.
Les artisans qui s'étaient rendus dans les campaglles,
notamment les plus jeunes, pour aider leurs familles aux tra-
vaux des champs n'étaient pas encore tous revenus et les fêtes
de Noël et du Nouvel an à la veille desquelles i l y a toujours
un regain d'activités étaient encore bien loin.
En plus, cette période a correspondu aux moments de
deux grandes fêtes religieuses locales
:
le magal et le gamou
pendant lesquelles, durant deux semaines les ateliers se vi-
dent de presque tous leurs occupants qui retournent dans leurs
régions d'origine,
Diourbel, Thiès, Kaolack pour la célérabra-
tian de ces fêtes.
,
1
Ces considérations n'enlèvent rien à l'objectivité.
de l'enquête et à la fiabilité de ses résultats. Car ne sont
particulièrement concernés par les travaux des champs pendant
la période du déroulement de l'enquête que les apprentis et
aides non encore installés dans le métiers et dépendant socia-
lement des maîtres et qui ne sont que très secondairement con-
cernés par non recherches en tant que personnes sociales .
.../ ...

327
Enfin,
pour contourner le problème que pose l'absen-
téisme pendant les périodes de fêtes religieuses
(garnou et
magal), nous avonS dG
dû repasser plusieurs fois dans les m~rnes
mêmes
ateliers afin d'établir des contacts plus élargie avec leurs
occupants au fur et à mesure de leur retour.
Ln tout cas,
pour diverses raisons liées à nûs inves-
tigations sur les probl~mes qui traversent la profession et
les communautés.
66 visites ont été effectuées dans les ate-
liers du début à la fin de l'enquête.
B - LE RAJEUNISSEMENT DE LA COMMUNAUTE
FACTEURS
=============================================
ET CONDITIONS ENDOGÈNES
=======================
a)
Nous avonS réparti
les quatre vingt (80)
sujets
que constitue notre échantillon selon leur âge, afin de déter-
miner statistiquement leur distribution en fonction de ce cri-
tère qui constitue dans tout groupe humain familial ou non
familial en Afrique un élément structurant des rapports sociaux,
auquel est attachée une valeur sociale et qui sert de référence
à la distribution des rôles et des places.
Sj dans les groupes et organisations humains qui pro-
cèdent directement du monde traditionnel,
le critère d'âge se
révèle manifestement comme la norme structurante des rapports
sociaux (il existe dans ce cas d'autres normes structurantes
comme par exemple les liens de parenté),
par contre, dans les
... / ...

328
groupes organisés du monde moderne où la détermination formel-
le des rapports sociaux se fonde à partir de critères, normes
fonctionnels et opératoires, les structures sociales qui s'or-
ganisent à partir de critère d'âge ou d'autres critères tradi-
tionnels, quoique agissante à tous les niveaux de l'organisa-
tion ne peuvent exister qu'à
qu 1 à titre informel.
b) Dans la communauté des cordonniers de Tilène, nous
avons affaire avec des acteurs sociaux qui sont des serni-ur-
bains dont les caractéristiques psycho-sacia-culturels sont
encore tr~s largement déterminées narle mode d'éducation tra-
ditionnelle.
Aussidans ce milieu, le système des classes d'âge qui
établit des rapports d'autorité, de soumission et d'obligations
réciproques entre personnes d'âges différents dès que celles-ci
se trouvent placés dans une situation d'interaction sociale
quelconque, rnérite-t-il une considération particulière.
Nous avons donc distribué nos sujets dans des classes
correspondantes au regroupement de plusieurs tranches d'âges
successives espacées d'un an
l'écart entre deux tranches
extrèmes qui définissent une classe est de 5 ans.
c) Dans le tableau Xl , nous pouvons constater que
85 % de nos sujets ont entre 18 et 43 ans, tandis que le nom-
bre de ceux dont l'âge est compris entre 54 et 70 ans ne re-
présente que 8,75 % de l'ensemble.
. .. / ...

329
Ce mode de répartition de nos sujets selon leur âge
dénote un processus de rajeunissement qui est en oeuvre dans
la communauté et qui est le résultat de la combinaison de plu-
sieurs facteurs que sont la nature du procès de travail,
l'ori-
gine social et la condition sacia-économique de départ des sujets,
le mode de reproduction sur le plan social et humain de la pro-
fession. En effet :
1.
-
La principale source d'énergie utilisée
dans le courant du procès de travail c'est l'énergie humaine
qui réclame une dépense de force physique constante dont l'ef-
ficacité opératoire est souvent liéè à des gestes et postures
physiquement éprouvants pourl'artisan.
lIen résul t e
qu 1 à un âge avancé, correspondan t
à
une diminution de sa force physiql1e, l'artisan devient moins
efficace et voit la productivité de son travail diminuée)
alors qu'en même temps sa capacité de résistance physique
baisse: dans ce cas l'artisan abandonne le métier en ville
et s'en va retourner auprès des siens dans son village d'ori-
gine.
Si nous considérons ausi le procès de reproduction
du métier,
celui-ci comporte, dans sa phase finale de mise en
.;
,
circulation et de commercialisation du produit final par le
i
,
1
producteur direct,
des contraintes qui imposent à celui-ci
des déplacements hebdomadaires d'un marché à un autre ou
d'une région à une autre pour écouler sa marchandise. Ce qui
est une condition
quene peut remplir avec succès qu'un arti-
san jeune.
. .• 1...

Aussi la nature du procès de travail et les condi-
tions de reproduction du métier constituent des facteurs de
sélection en oeuvre au sein de la communauté qui évacuent du
champ de la production les gens dont la force et la résistance
physique sont entamées par l'âge:
c'est ce qui explique le
faible taux d'artisans de plus de 48 ans d'âge dans notre échan-
tillon.
2. - Les conditions de vie de plus en plus dif-
ficile des ruraux (baisse du pouvoir d'achat,
baisse de la pro-
duction arachidière pour des raisons de dégradation climatique)
constituent des facteurs qui poussent ceux-ci à délaisser les
campagnes pour les villes o~ ils viennent pour la plupart oc-
cuper des emplois non salariés dans le secteur informel.
Cette
exode qui concerne de plus en plus les jeunes, se temrine dans
les villes, pour ceux appartenant à des castes de métiers, à
une installation à court ou moyen terme dans la branche d'ac-
tivité du secteur informel correspondant à leur formation de
base ou de celle de leur caste d'appartenance.
c'est ainsi que les jeunes ruraux appartenant à la
caste professionnelle des cordonniers vont à leur arrivée à
Dakar grossir le rang des cordonniers de la communauté de
Tilène.
Cette incorporation massive des jeunes dans la com-
munauté est d'autant plus facilitée que l'installation dans
le métier ne réclame au départ qu'un très faible capital
... / ...

(comme nous le verronS plus
loin) et une formation supplémen-
taire dont la durée moyenne n'excède pas 4 ans.
3.
-
Les mécanismes de reproduction social de
la profession qui est une profession de caste~ font appel mas-
sivement au travail et à l'intégration des jeunes dans le mé-
tier dont le mode de fonctionnement à l'échelle des unités qui
le composent reproduit les structures des unités de production
agricole domestique qui regroupent un chef de famille ou de
ménage et plusieurs de ses dépendants souvent ses jeunes en-
fants et neveux. Le statut social du métier (un métier de
caste) et le mode de fonctionnement social de ses unités qui
reproduisent les structures de fonctionnement des unités agri-
coles domestiques expliquent en partie la prédominance au sein
de la communauté des jeunes et des personnes qui sont entre
deux âges.
EN CONCLUSION
Le rajeunissement de la communauté résulte de l'ac-
tion convergente de facteurs d'ordre professionnel liés à la
nature du procès de travail dans le métier et qui sont donc
J
internes à la profession et de facteurs socio-économiques
J
liés â l'origine sociale de ses membres et qui son donc ex-
terne au métier.
... / ...

332
C - LE RAJEUNISSEMENT DE LA COMMUNAUTE
FACTEURS ET
~===============================================
CONDITIONS EXOGÈNES
===================
Le rajeunissement de
la communauté sIest accompagné
de l'abaissement de l'âge d'arrivée à Dakar de ses nouveaux
membres.
En effet, SUT les dix huit sujets qui, au moment de
notre enquête avaient un âge compris entre 39 et 70 ans, ceux
dont l'âge dlarriv~e à Dakar ~tait au moins égal ~ 22 ans re-
présentent un effectif de 12 personnes soit 15 % des 80 arti-
sans enquêtés,
tandis que ceux dont l'âge est compris entre
18 et 33 ans et qui sont arrivés à Dakar à un âge inférieur
ou égal à lB ans représentent un effectif de 37 personnes soit
46,25 % de l'effectif total.
Ce phénomène s'explique
(voir tableau nO XI.)
1. - n'une part par le fait que les jeunes gens
d'un âge égal ou inférieur à 18 ans qui arrivent à Dakar pour
y travailler dans le métier ont des parents déjà installés
dans la profession et qu'ils viennent retrouver à Dakar pour
leur formation.
Dans ce cas, ces derniers les prennent en charge du-
rant tout le temps que dure leur formation professionnelle,
c'est-à-dire non seulement leur apprennent le métier mais aus-
si assurent leur nourriture et payent leur loyer.
... / ...

333
Donc ces jeunes gens dès leur arrivée à Dakar sont
bien encadrés par leur famille qui assurent progressivement
leur insertion dans la communauté et leur intégration dans
leur nouveau milieu urbain.
Aussi pour ces jeunes adolescents,
l'assurance de
retrouver dans la capitale une communauté d'accueil et un ca-
dre sacia-professionnel pouvant jouer le rôle de substitut du
cadre familial et villageois les prédisposent-ils à vouloir
entreprendre très tôt le voyage qui les mène à la capitale,
celui-ci n'étant plus vécu ni par eux, ni par les proches res-
tés au village comme une aventure.
Ce sont les préjugés négatifs qui étaient attachés
à ce voyage perçu comme une aventure dans un milieu peu connu
à savoir Dakar qui explique le fait que cela soit parmi les
artisans les plus âgés de la communauté et qui sont arrivés
à Dakar dans les années 40 et 50 que lion rencontre la propor-
tion la plus élevée de sujets dont l'âge d'arrivée dans la ca-
pitale était supérieur à 22 ans (ou au moins égal)
: 20 artisans
de notre effectif total sont arrivés à Dakar quand ils avaient
un âge supérieur ou égal à 22 ans et parmi ceux-ci 12 se recru-
tent dans le lot de ceuX qui sont âgés aujourd'hui entre 39 et
)
70 ans; ce nombre s'élève à 16 si nous considérons l'ensemble
des artisans âgés d'au moins 34 ans au moment de notre enquête.
Ce qui porte à penser que c'est vraissemblablement vers le dé-
but des années 70 que le renversement concernant l'abaissement
de l'âge d 1
d arrivée à Dakar des nouveaux artisans a commencé
à devenir un fait social puisque sur les 46 artisans de notre
... / ...

334
~chantillon (80 artisans) qui au moment de notre enqu~te ont
moins de 34 ans, seuls 4 SOIlt entrés dans le métier à 22 ans
à
ou't/un âge supérieur,
ce qui représente moins de l/lOème du
sous groupe des moins de 34 ans,
alors que près de la 1(2
de ceux qui ont cet âge (16(34) ou un âge supérieur sont arri-
vés à Dakar à un âge égal DU supérieur à 22 ans.
D'autre part,
par la dégradation de plus en plus ac-
centuée des conditions de vie dans les campagnes qui obligent
les ruraux à abandonner l'agriculture pour des activités ur-
baines plus lucratives:
l'exode massive ùes jeunes adolescents
appartenant à la caste professessionnelle des cordonniers a
commencé comme nous venons de le voir à aprtir des années 70
qui correspondent selon les déclarations de nos informateurs
3 des périodes de grandes expansions économiques pour le mé-
tier marquées par l'action de gros commerçants tels que
El Hadji SARR, THIAM Toucouleur (pour ne citer que ceux là)
qui faisaient des commandes de plusieurs nilliers de paires
de chaussures par an qu'ils exportaient vers les pays limi-
trophes et la Côte d'Ivoire.
Devant un tel élargissement des débouchés pour leurs
produits et la perspective de gains plus importants pour leur
travail, les artisans déjà installés ont fait appel
qui à
leurs fils et neveux, qui â leurs frères et cousins pour les
aider dans leur travail, à augmenter leur production •
. .. ( ...

335
D'aucun de ces jeunes arrivants s'installeront à leur
compte personnel dans le métier après avoir travaillé comme
apprentis ou aides pendant plusieurs années (quatre ans ou plus)
aux côtés de leur père, oncle, frère et cousin. Mais à peine
installé
et devenu
"patron. 0', le jeune artisan pour lui aussi
profiter des bienfaits de l'expansion se met-il à recruter parmi
les proches de jeunes apprentis et ainsi de suite, ce qui con-
tribue à augmenter le nombre d'artisans de moins de 39 ans
d'âge qui à eux seuls constituent 73,75 % de l'effectif total
de notre échantillon.
U - LE RAJEUNISSEMENT DE LA COMMUNAUTË ET LE CONTROLE
=================================================
DE LA PROFESSION PAR LES ANCIENS
================================
Pour s'installer dans le métier et devenir un "patronll
travaillant à son compte personnel, l'apprenti fini doit pou-
voir :
Disposer d'une " pl ace " ùans un atelier et être
en mesure de la payer mensuellement (le loyer d'une place de
travail dans un atelier varie généralement entre 2 000 et
4 000 FCFA). Sur les 80 sujets que constituent notre échantil-
lon, 70 ont déclaré (soit 87,5 %) que c'est leurs anciens maî-
tres qui les ont aidé à trouver leur première place de travail
dans un atelier à la fin de leur formation.
, • , f •••

336
Cette " p l ace "
peut se. trouver dans l'atelier où l'an-
cien apprenti a fait
sa formation auprès de son ancien maître
ou dans un autre atelier où celui-ci a de solides relations.
L'accès aux places vacantes dans les ateliers à la suite des
départs de leurs anciens occupants est rendu difficile à cause
de l'accroissement du nombre de postulants qui chaque année
excède celui des places libres
(beaucoup de jeunes artisans
ont déclaré avoir attendu pendant un ou deux ans avant que
leurs anciens maîtres ne puissent leur trouver une !lplace ll
!lplace ).
c'est également l'ancien maître qui le plus souvent
paie le premier mois de loyer de la " pl ace " qu'il a cherché
pour son ancien apprenti. Mais ces deux formes de soutien que
donne l'ancien maître à son apprenti fini et qui constituent
une norme dans la communauté ne sont réellement effectués qu1à
la seule condition que l'ex-apprenti durant la durée de sa for-
mation se soit montré soumis à son maître et entreprenant dans
toutes les tâches concernant la production sinon celui-ci est
en droit de lui refuser son soutien au moment de son installa-
tion : 7 artisans parmi les 10 qui ont déclaré n'avoir pas été
aidés par leur ancien maître pour trouver une "place" ont ex-
pliqué la conduite de celui-ci comme étant la manifestation
d'une sanction concernant une désobéissance en l'occurence,
,y
celle d'interrompre leur formation de façon unilatérale contre
1
l'avis même de leur maître,
(à savoir qu'un apprenti a quitté
1
définitivement son maître sans le prévenir).
... / ...

337
2. - Disposer des outils de base nécessaires à
l'exercice de la profession c'est-à-dire au moins d'une planche
et d'un couteau qui sont des outils individuels et dont les
temps d'emploi au cours d'un procès de fabrication sont les
plus élevés (100 % pour la planche qui est utilisée en permanen-
ce et 80 % pour le couteau ~)
Quant aux autres outils tels que emporte - pièces,
marteaux etc ...
l'artisan peut ne pas en posséder personnelle-
ment car i l peut les avoir à disposition dans l'atelier où i l
a sa "place", puisque de tels outils ne sont pas d'un emploi
permanent au cours d'un procès de production et que les cycles
de fabrication d'un artisan à un autre ne coïncident pas dans
le temps étant donné que chacun dirige son travail en toute
indépendance : dans ce cas les outils non utilisés directement
par leurs propriétaires sont mis à la disposition des autres
artisans qui n'en possèdent pas mais qui ponctuellement peuvent
en avoir besoin pour effectuer des tâches de fabrication. Donc
les seuls outils que l'artisan doit absolument posséder au mo-
ment de son installation sont les outils de base dont le prix
de revient varie entre 2 200 ÇFA et 5.500 ÇFA (Voir tableauxlV· a
VI)
L'artisan qui s'installe peut lui-même acheter ses
premiers outils de base
ce qui est le cas surtout si vers la
J
ce qui est le cas surtout si vers
J
fin de sa période d'apprentissage l'apprenti en accord ou non
avec son maître
acquiert une semi autonomie et consacre une
J
acquiert une semi autonomie et consacre
J
partie de son temps dans l'atelier pour produire et vendre
pour son propre compte
ce qui lui donne les moyens de se
J
ce qui lui donne les moyens de
J
constituer progressivement un petit capital qu'il pourra
... / ...

338
mettre à profit au moment de son installation. Ces premiers
outils de base peuvent aussi être offerts personnellement par
Ile
·maître à son apprenti ayant fini son temps d'apprentissa-
ge si celui-ci lui a donné une entière satisfaction durant son
son apprentissage
: 52 artisans sur les 80
que compte notre
échantillon soit 65 % ont reçu leurs premiers outils de base
de leur ancien maître contre 25 soit 31,25 % qui les ont acquis,
par voie d'achat à titre personnel
(la parmi ces derniers n'ont
pas
été soutenus par leurs anciens maîtres pour avoir une pla-
ce de travail dans un atelier).
3. - Disposer à titre personnel d'une quantité suffi-
sante de matières premières
(simili-cuir,
crèpe,
colle etc . . . )
pouvant lui permettre de produire quelques dizaines de paires
de chaussures et de recommencer un autre cycle de production
après le vente de celles-ci.
L'équivalent en argent de ces ma-
tières premières peut être fourni par le maître à son ex-appren-
t i sous la forme d'un crédit
(sans intérêt) remboursable à court
terme.
Cependant d'autres sources de financement existent
pour l'apprenti f i n i :
c'est soit l'utilisation de l'épargne
qu'il a pu constiter pendant les dernièers périodes de sa for-
mation en devenant semi indépendant soit les contributions,
sous forme de prêts des proches ou amis.
Il ressort de notre enquête que la totalité des arti-
sans qui ont reçu de leurs anciens maitres leurs premiers outils
de base au moment de leur installation ont bénéficié également
... / ...

339
de la part de ces derniers, d'un soutien financier leur permet-
tant d'acquérir partiellement ou en totalité les matières pre-
mières nécessaires à la production de 20 à 50 paires de chaus-
sures.
Sur ce lot de 52 artisans déjà installés, 34 ont reçu
un don monétaire satisfaisant et 18 ont reçu un pr~t dont
l'insuffisance les a amenés à solliciter une contribution fi-
nancière du côté des proches et amis.
Si nous nous réformons aux tableauxiX et X
concernant le
coût indicatif en matières premières nécessaires à la fabrica-
tion d'une paire de sandale simple pour darne,
l'apprenti fini
qui s'installe à son compte personnel doit disposer pour pou-
voir produire 10 paires de sandales, d'une somme d'argent de
4443 F CFA pour l'achat de ses mati~res premi~res (ou de
8886 F CFA pour la production de 20 paires).
4.
-
En conclusion pour nous résumer l'apprenti
fini qui veut s'installer comme artisan indépendant et travail-
ler à son compte personnel devra faire face à des dépenses
d'installation et de production dont la valeur, variable, se
situe dans la fourchette 13 086 F CFA -18,386 CFA si au départ il envisag
de produire 20 paires de sandales simples pour dame. L'apprenti
fini,
dans certains cas peut n'avoir même à engager personnel-
lement aucune dépense si au départ ses frais d'installation
et de production sontpris en charge enti~rement par l'ancien
maître:
c'est le cas de 34 artisans, représentant 42,5 % de
notre échantillon, qui au moment de leur installation n'ont
... / ...

payé ni le premier loyer de leur "place", ni leurs premiers
outils de base, ni non plus la quantité de matières premières
leur permettant de démarrer leur premier cycle de production
en tant qu'artisans indépendants.
E - LES NORMES DE L'ORGANISATION SOCIO-PROFESSION-
=========~===================================
NELLE' DE LA COMMUNAUTÉ
=======================
En trouvant une " p l ace ll dans un atelier et en s'y ins-
tallant comme 11 pa tron'I l'apprenti fini devenu maintenant artisan
s'affranchit relativement de la tutelle morale de son ex-maître
et rompt plus ou moins le lien de dépendance sociale qui le
liait jusqu'à pLésent à celui-ci.
Mais l'atelier n'étant pas seulement un espace de pro-
duction mais aussi un lieu où se développait une certaine for-
me d'action collective (structures relationnelles, de coopéra-
tion, de pouvoir etc .... ) l'artisan pour s'insérer dans son
nouveau milieu professionnel et htrrnain devra en accepter et
respecter les normes et règles.
,
,
i
Les caractéristiques communes des ateliers au niveau
de l'organisation de leur espace socio-professionnel peuvent
se référer à partir des considérations et faits suivants :
... / ...
t\\.

341
a) LES NORMES DE L'OCCUPATION DE L'ESPACE
RENFORCEMENT
DE L'ESPRIT DE COOPERATION
Dans la portion de l'espace urbain où notre en-
qu~te s'est d~roul~e les ateliers sont distrjhll~s de façon i
occuper dans toutes les rues où ils se sont installés le même
côté du trottoir:
c'est ainsi par exemple que dans la rue JI
sur 12 ateliers que compte celle-ci,
ils se trouvent situés
dans une même rangée et du même côté de la rue ; ce mode de
distribution se reproduit aussi hien pour les rue 13,
15 et 19.
Ce made d'occupation de l'espace en tant qu'il rappro-
che les ateliers situés dans une même rue constitue une condi-
tion du renforcement des liens de solidarité instrumentale qui
se développent entre artisans installés dallS des ateliers dif-
férents et qui se manifestent à propos surtout d'échange de
moyens de travail (formes, pieds en fer) qui circulent d'un
atelier à un autre et celà librement, ce qui permet aux arti-
sans ne disposant pas personnellement de ces outils rares de
pouvoir néanmoins continuer à produire. Cette forme de solida-
rité peut être particulièrement très intense entre ateliers
très proches disposant de moyens complémentaires.
Ce mode d'occupation des rues n'est donc pas tout à
fait dû au hasard car il est sous-tendu par la logique de la
solidarité instrumentale qui résulte de la prise de conscience
des artisans de la faiblesse des moyens dont ils disposent et
aus~i de la nécessité de se regruuper afin de pouvoir mettre
en commun, pour un usage collectif, les outils à fonctions
complémentaires, à disposition dans le groupe.
... / .. ·

342
b) L'AUTONOMIE DES PROCES DE PRODUCTION INDIVIDUELS
RENFORCEMENT DE L'ESPRIT INDIVIDUALISTE
Les ateliers sont des regroupements de plusieurs
artisans indépendants ayant reçu tous une formation équivalen-
te, travaillant avec les mêmes moyens et les mêmes procédés,
mais dirigeant chacun de façon autonome leur propre proèès de
production c'est-à-dire conçoit en toute indépendance son pro-
duit, fixe le volume de sa production, choisit ses matières,
détermine la durée de son cycle de production, dirige son pro-
cès de fabrication et élabore sa stratégie de vente.
Chaque procès de production autonome est donc le ré-
sultat de l'élaboration à l'échelle d'un artisan d'une rationa-
lité organisatrice particulière de la production qui tient
compte de la spécificitf des contraintes qui s'imposent à lui.
Ces contraintes, surtout celles qui sont d'ordre social sont
personnalisées et vécues des fois avec une grande intensité
affective, créant des situations dl engagement volontaires et
d'implications de l'artisan dans les actions extra-économiques
ce qui exige de sa part pour ce faire, qu'il soit le seul
responsable de sa petite entreprise et décide seul de la ra-
tionalité à appliquer~
C'est le caractère particularisé et personnalisé de
ces contraintes sociales qui s'imposent au niveau de chaque
artisan et qui entrent en contradiction avec le domaine éco-
nomIque qui explique le caractère non moins particularisé et
personnalisé
de chaque production individuelle, constitue un compro-
mis entre les exigences contradictoires d'un côté des contraintes

343
sociales (comportements à devoir respecter à l'égard des grou-
pes d'appartenance et des problèmes qui les traversent) et de
l'autre des contraintes économiques.
Ce compromis en tant qu'il accorde une importance exa-
gérée aux contraintes sociales et aux rapports particuliers
affectifs que l'artisan entretient avec elles,
constitue un
renforcement de l'individualisme chez l'artisan.
c) LES REGROUPEMENTS DANS LES ATELIERS
: UNE STRATEGIE
COMMUNAUTAIRE DE REDUCTION DES CHARGES LOCATIVES
INDIVIDUELLES
Chaque atelier regroupe plusieurs artisans occu-
pant chacun une "place ll
"place l
(un espace de l m2
m
environ découpé sur
le sol de l'atelier est qui constitue l'aire exclusive de tra-
vail de l'artisan) dont ils payent un loyer mensuel.
Sur les 23 ateliers concernés par notre enquête, 16
contenaient un nombre de places compris entre 8 et 10 tandis
que seulement 7 contenaient un nombre de places compris entre
2 et 5 (c'est le cas quand l'atelier est petit et le loyer
mensuel faible).
Ce sont les loyers mensuels que paye chaque artisan
pour sa " p l acell, qui collectés et rassemblés constituent le
loyer mensuel à payer pour l'atelier: celui-ci varie entre
la et 30 000 F CFA selon l'état de l'atelier et sa localisa-
tion (ceux situés à la rue Il et qui sont construits en dur
... / ...

344
ont une valeur locative plus élevée que les autres). Quant à
la valeur locative des places, elle varie en fonction du loyer
de l'atelier et du nombre d'artisan que celui-ci peut contenir
55 artisans, soit 68,75 Îo de notre échantillon, occupent une
place dont la valeur locative se situe entre 2 000 F et 3 000 F
CFA, contre 20 représentant 25 % de l'effectif total et payant
pour leur place un loyer compris entre 3 200 F et 4 200 F CFA
et 5, soit 7,25 % payant jusqu'à concurrence de 5 000 F CFA.
Ce rassemblement de plusieurs artisans dans un même
atelier dont ils prennent en charge en commun la valeur loca-
tive correspond de leurpart â Ulle stratégie de réduction de
leurs coûts de production.
en même temps qu'il rend compte de
leur incapacité, chacun à l'échelle individuelle de faire face
seul sans s'associer à d'autres d'un ensemble de dépenses fixes
inhérentes à l'activité de production
d) LES REGROUPEMENTS DANS LES ATELIERS : UNE STRATEGIE
COMMUNAUTAIRE DE REDUCTION DES INEGALITES DES CON-
DITIONS DE TRAVAIL
Le regroupement de plusieurs artisns dans un même
atelier n'a pas seulement pour fonction de permettre la réduc-
tion des coûts de production à l'échelle individuelle car il
obéit aussi à une autre logique qui est celle de créer les
conditions organisationnelles de la gestion de l'inégalité
entre les membres de la communauté dans la détention des moyens
de travail, surtout ceux là caractérisés par leur coût élevé
et leur rareté sur le marché (par exemple les formes, les pieds
en fer etc ... ).
. .. 1...

345
En effet, si les matières premières acquises par l'ar-
tisan par voie d'achat constituent sa propriété exclusive et
ne doivent être utilisées que par lui au cours de ses procès
de production, par contre l'ensemble de ses outils, en dehors
de ceux qui constituent ses outils de bases et qui sont d'un
emploi individuel permanent au cours de chaque procès de pro-
duction peuvent être d'un emploi commun, mis à la disposition
du groupe dont chaque membre peut les utiliser à tour de rôle
dans ses procès et cycles individuels de production.
Cette mise en commun des moyens de travail concerne
principalement ceux dont l'emploi au cours des procès et cycles
de production individuels n'est pas continu et i l est rendu
possible grâce à la diversité des procès de fabrication (ceux-
ci suivant les modèles de produits à fabriquer ne réclament
ni les mêmes types, ni le même nombre d'outils) et la non-
simultanéité pour la production d'un même modèle des cycles
individuels de production.
Cette forme de coopération spontanée par la mise en
commun à des fins d'usage collectif des moyens individuels à
fonction complémentaires, a pour effet d'homogénéiser au sein
du groupe les conditions de travail, d'égaliser les chances
quant à l'accès au gain. Mais il est aussi le moyen par lequel
le groupe exerce son emprise sur ses membres et forge les con-
ditions psychosociologiques de sa cohésion interne et de son
unité: l'insertion de l'artisan dans un groupe constitue une
source d'avantages matériels pour lui dont le retrait lui ren-
drait impossible l'exercice de la profession à titre individuel,
... / ...

346
d'où pour prévenir tout risque de rejet par le groupe, l'adop-
tion de sa part d'une attitude de soumission face aux normes
de celui-ci et de la communauté.
e) LES REGROUPEMENTS DANS LES ATELIERS
: UNE CONDI-
TION
DE REPRODUCTION DES RAPPORTS DE DEPENDANCES
ET HIERARCHIQUES TRADITIONNELLES
Le regroupement de plusieurs artisans dans un
même ateleir de travail n'est pas seulement une source d'avan-
tages matériels pour les participants car i l est
aussi une re-
production des structures relationnelles familiales et/ou vil-
lageoises :
les artisans qui sc regroupent appartiennent soit
au même lignage ou à des lignages alliés soit au même village
ou ont eu le même maître au cours de leur apprentissage, ce
qui dès le départ les prédispose et les pousse à entretenir
entre eux des rapports d'obligations réciproques basés sur le
code des rapports de système de parenté et celui du système
de rapports entre classes d'âges.
L1atelier, ni dans la composition de ses participants,
ni dans la structure des relations qui lient entre eux ceux-
ci, n'opère donc une rupture avec le système familial ou vil-
lageois, ce qui contribue à renforcer les liens de solidarité,
créer un climat de confiance mutuelle et de sécurité au sein
du groupe et accroître le degré d'attachement affectif qui lie
chaque membre au groupe.
... / ...

347
Voici dans trois ateliers pris au hasard la nature des
liens entre les membres des groupes.
- Dans l'atelier l
qui est composé de 5 artisans A,
B,
C,
D,
E, appartenant au même village, nous avons
A est l'ancien maItre de B
A est l'oncle de C
B est l'ancien maître de D
B est le demi-frère de E.
-Dans l'atelier II qui est composé de
10 artisans dont
6 ont été directement concernés par notre enquête et que llOUS
appelerons A, B, C, D, E, F nous avons :
A est l'ancien martre et l'oncle de B
D est l'ancien maître et frère de C
B est l'ancien maitre et beau fr~re de E
F est l'ancien maître et frère de D.
A, B, C, D, E,
F sont du même village ou villages voisins.
- Dans
l'atelier III composé de 8 artisans dont
5 ont
été directement concernés par notre enquête A
B
C, D, E, nous
J
BJ C, D, E,
J
J
avons :
A est le grand frère de C
A est l'ancien maître de E
A est un cousin germain de B
B est le grand frère de D
A,
C, et E sont nés dans des villages voisins.
... 1...
1

34R
f)
LES FIGURES ~'AUTORITES DANS LA COMMUNAUTE
Dans le groupe d'artisans que constitue l'atelier,
l'autorité est détenue par quatre types de personnages que sont
l -
les figures paternelles symbloisées par ceux qui
tiennent lieu de p~res ou d'oncles et dont l'autorit~ qu'ils
exercent dans le groupe s'appuie sur les normes de la tradition
régissant le domaine des rappl)rts (droits et devoirs réciproques)
entre les catégories socialees que sont les ascendants et les
descendants d'une m~rne lignée.
Les figures paternelles peuvent avoir des liens réels
de parenté avec ceux sur qui leur autorité s'exerce ou tout
simplement être des personnes auxquelles on assigne ce rôle en
rai.son de leur age,
de la place qu'elles occupent dans la hi~­
rarchie des classes d'âges.
Ces figures paternelles exercent leur autorité surtout
sur le plan moral ; elles sont considérées comme des guides et
un modèle de conduites pour le groupe : elles sont consultées
par les autres memehres du groupe à titre privé pour des affai-
res sociales et leurs avis positifs ou négatifs sur des projets
devant engager llensemble du groupe peuvent soit faciliter énor-
mémént leur aboutissement soit en être un obstacle.
Il faut dire aussi que leur influence s'exerce même
jusqu'en dehors des groupes où elles se trouvent concrêtement
insérées, car elles se concertent entre elles sur tous les
... / ...
1
j
j

349
problèmes sociaux et professionnels concernant la communauté
et le métier et fixent les normes qui orientent les conduites
et les actions à mener dans toutes les situations qui interpel-
lent l'ensemble de la collectivité (c'est le cas pour toute
intervention des autorités institutionnelles dans la communauté).
2. - Les ainés qui occupent le second rang dans la
hiérarchie des classes d'âges et qui sont des gens entre deux
âges. Ils remplacent les figureo paternelles là où celles-ci
Jl'existent pas ct
ils exercent une autorité réelle sur les plus
jeunes dans les groupes où ils sont.
Comme les figures paternelles, leur autorité est avant
tout morale mais celle-ci n'est reconnue et acceptée par ceux
sur qui elle s'exerce qu'à la seule condition que leur conduite
ct comportement à l'égard de ces derniers et dans des situations
les concernant soient d'aide, de soutien, de conseils etc •..
Cette attitude positive de soutien que doivent pren-
dre les ainés à l'égard des plus jeunes se traduit par des pra-
t14ues qui visent à faciliter l'accès
l'Accès de ces derniers à des
"places" au moment de leur installation, promouvoir la qualité
de leur travail (mise à leur dispositions de certains outils,
conseils professionnels etc .... ).
3. - Les maîtres qui ont eu à instruire professionnel-
lement un ou plusieurs artisans avec qui ils se retrouvent dans
le même groupe d'atelier et sur lesquels ils ont un certain
ascendant. Ici, l'ex-apprenti est lié à son ex-maître par des
i
... / ...
!j.;
J

350
liens personnels, ~t il lui doit gratitlJde. respect et soutien
qu'il doit lui manifester à toutes les occasions en devenant
son obligé.
La figure d'autorité que représente l'ex-maître exerce
son influence à travers .Le pouvoir jJerso~lncl et psycho logique
que celui-ci a sur ses ex-apprentis
; ce pouvoir qui a un objet
certes plus limité (il s'exerce exclusivement sur les ex-appre~­
tis)
que celui que détiennent les figures
paternelles ou les
aînés n'a pas cependant besoin pour être recunnu et accepté que
les conduites de détenteurs â l'égard de leurs obligés soient
de soutien ou s'inspire du code de rapports tradItionnels père
fils.
Par ailleurs,
il
faut aussi dire qu'en raiSOIl de l'ell-
trée de plus en plus :nassive de jeunes adolescents dans le mé-
tier depuis
les années 60 et
70,
le décalage d'âge entre ex-
maître et son ancient apprenti s'est beaucoup amenuisé,
passant
de ll~cart d'âges séparant deux g~nérations (celles du père et
de son fils)
à celui séparant deux classes d'âges successives
(celles d'un ainé et de son cadet)
ou trèsproches
:
sur SL artl-
sans auprès de qui nous avons pu déterminer la nature de leurs
liens de parenté avec leurs ex-maîtres,
33 ont appris le métier
auprès de grands frères contre
L8 qui ont été eux form~s par l~
père ou l'oncle,
(sur ces 51 artisans, seuls 5 ont plus de 40
ans d'ages)
ce qui veut dire que l'autorité qu1exerce le p~re
ou If ainé et dont le fonde:nent est traditionnel se cumule et
se renforce avec cell~ que détient l'ex-maître.
... / ...

351
4. - Le responsable de l'atelier qui commande l'accès
aux "places" dont il détermine seul le loyer et a le monopole
de la gestion de leur distribution. Il est le seul intermédiaire
légitimement reconnu par le groupe de travail entre celui-ci et
Je propriétaire de l'atelier ou tout personnage extérieur à la
communauté (sauf les commerçants).
Son pouvoir et son autorité sur le groupe se fondent
sur le double fait que d'abord c'est lui qui a négocié seul
avec le propriétaire de l'atelier, engagé sa responsabilité et
organisé la collecte des parts qui doivent constituer la cau-
tion de garantie dont le dépôt auprès du propriétaire lui donne
le droit d'entrer en possession de l'atelier.
Ensuite, c'est lui qui a la prérogative de sélectionner
les artisans qui vont constituer le groupe de travail, de gérer
ultérieurement la redistribution des places devenues vacantes
en raison du départ de leurs occupants ainsi que de décider de
l'exclusion du groupe de ses membres qui en gênent la cohésion.
Il s'agit plutôt ici d'un pouvoir de contrôle et non
d'un pouvoir idéologique comme c'est le cas en ce qui concerne
le pouvoir qu'incarnent les figurent d'autorité traditionnelle
!
(père, oncle> ainé) ou les ex-maîtres, et s'applique sur un
groupe précis et s'appui'e sur des règles précises qui définis-
sent le système de rôles à jouer de son détenteur.
Le responsable d'un.
telier peut aussi à la fois être
l'ex-maître d'un ou de plusieurs membres de son atelier et une
figure d'autorité traditionnelle, en tant qu'il est investi du
... / ...

352
rôle de père ou d'ainé par le groupe (dans certains cas il est
un père réel travaillant avec ses fils ou un ainé réel travail-
lant avec ses petits frères)
: dans ce cas il cumule le pouvoir
traditionnel, le pouvoir personnel et le pouvoir organisationnel
(celui qu 1
qu il
1
exerce en tant Que responsable de l'atelier) qulil
exerce en
étant le guide moral de son groupe, le donneur de
sens aux choses et celui Qui sanctionne les déviations par rap-
ports aux règles et normes de conduite du groupe.
Le responsable de l'atelier ne se distingue pas seule-
ment par la précision de ses attributs formels car son exerci-
ce s'accompagne de signes extérieurs.
Parmi ces signes deux se manifestent avec une certai-
ne régularité: d'abord tous les responsables d'atelier occu-
pent une l'place"
qui strat~giquement leur permet d'exercer un
contrôle visuel sur ce qui se passe aussi bien à l'int~rieur de
l'atelier que dans l'ext~rieur environnant (elle est proche de
l'entrée de l'atelier), ensuite certains d'entre eux disposent
d'une vraie table de travail à la place des planches tradition-
nels et presque tous aussi ont un ou plusieurs apprentis.
Voici maintenant comment selon leur âge
les respon-
J
les
J
sables d'atelier se répartissent: sur 23 responsables 6 ont
50 ans d'âge au moins, 4 on un âge compris entre 40 et 49 ans
et 13 ont moins de 40 ans d'âge. ce qui veut dire que le pou-
voir dans la communauté se concentre aujourd'hui de plus en
plus entre les mains des plus jeunes et surtout des ain~s auprès
de qui se recrute aussi la majorité des ex-maîtres.
... / ...

353
f - LES DIVISIONS RÉGIONALES FACTEURS DE COHÉSION ET
================================================
DE Dl SSOCIATlON
===============
Les artisans cordonniers de Tilène sont dans leur écra-
sante majorité des gens d'origine rurale.
La communauté se divi-
se en trois grands groupes selon l'appartenaIlce r~gionale de ses
membres
: sur les 80 artisans qui constituent notre échantillon
39 sont de la région de Diourbel, 24 de la région de Thiès, 14
de la région de Kaolack et 3 sont né à Dakar
; ce qui représen-
te respectivement 48,75 % - 30 % - 17,50 % et 3,75 % de l'ensem-
ble (ceux qui sont nés à Dakar ont respectivement 23, 2/1 et 30
ans d'âge).
Cette division se reflète dans la composition des ate-
liers où d'une manière générale ceux qui se regroupent appar-
tiennent pour la grande majorit~ au rn~rne village ou d~partement
ou en tout cas à la même région.
En règle générale c'est l'appartenance villageoise ou
régionale du responsable de l'atelier et celle de ses différen-
tes alliances qui déterminent pour une grande part les propor-
tions dans lesquelles se distribuent les membres du groupe selon
leur appartenance régionale.
c'est ainsi qu'un responsable d'origine Diourbéloise
recrutera pour constituer son atelier une majorité de Diourbé-
lis si ce n'est que des gens appartenant seulement à la même
région que lui ; ce sera pareil pour le responsable Thièsois ou
Kaolackois.
... /'"

354
En effet,
i l ressort de notre enquête que sur les 23
responsables d'atelier que compte notre échantillon:
- 14 sont Diourhélois et dirigent des ateliers regrou-
pant 49 artisans et dont le nombre total de diourbélois est 38
(il Y a 39 artisans diourbélois dans notre échantillon).
-
8 sont Thièsois et dirigent des ateliers regroupant
26 artisans et dont le nombre total de thièsois est 23 (il exis-
te 24 artisans thièsois dans notre échantillon).
-
l e s t Kaolackois et dirige 5 artisans kaolackois,
les
9 autres artisans kaolackois de notre échantillon étant disper-
sés dans 4 ateliers que dirigent des responsables diourbélois.
Il ressort de ces résultats que le brassage au niveau
relationnel entre les
trois grands groupes régionaux que consti-
tue la communauté des artisans cordonniers de Tilène est très
faible.
Quand cette division à partir de l'appartenance régionale
recoupe et recouvre une division professionnelle basée sur la
spécialisation et une division politique générée par une diffé-
rence d'appartenance politique, la communauté peut connaître une
situation de conflit latent opposant des groupes et générateur
de tension en son sein: c'est ainsi que les artisans originaires
de Mékhé qui est un département de la région de Thiès et qui sont
spécailisés dans la fabrication de babouches sont en situation
de conflit latent avec les diourbêlois qui eux fabriquent plutôt
des sandales et semi-babouches et ont une coloration politique
autre.
. .. / ...

355
G - LES CONTRAIrHES SOCIO-ÉCONOI1IQUES ET CONSÉQUENCES
==~===============~==============================
a) LA BAISSE DE L'ATTRAIT DU METIER
L1attrait qu'exerce le métier de la cordonnerie ar-
tisanale sur les gens de métier de la caste professionnel des
cordonniers semble réel à prerni~re vue, car il ressort de notre
enquête réalisée sur 80 artisans cordonniers que 48 profession-
nels,
soit 60 % n'ont jamais exercé d'autres métiers que celui
de la cordonnerie contre 8 soit 10 % et 24 soit 30 % qui res-
pectivement
ont eu à exercer au cuurs de leur trajectoire des
activités commerciales et d'autres métiers tels celui de chauf-
feurs,
tailleurs,
forgerons etc ...
Sur l'ensemble des 32 artisans qui ont eu à exercer
d'autres métiers que la cordonnerie,
seuls 5 ont plus de 34 ans
d'~ge et parmi ceux-ci 2 seulement ont plus de 50 ans d'ige.
Ce qui veut dire que c'est particulièrement au niveau des plus
jeunes que la tentation de changer de m~tier est la plus forte.
Cependant les difficultés qu'ils rencontrent souvent sur leur
chemin et qui sont liées à la faiblesse de leurs moyens ou à
d'autres limites psychosocio-culturels leur font abandonner
vite toute tentative et alors ils retournent à leur ancien mé-
tier
;
c'est le cas de tous les artisans qui ont eu à exercer
des activités commerciales et c'est le cas également de la ma-
jorité des autres artisans qui ont eu à exercer des activités
autres que la cordonnerie et le commerce.
... / ...

356
Pour la plupart de ces jeunes artisans la cordonnerie
est soit tout simplement un tremplin, un moyen pour constituer
un capital leur permettant de se lancer dans des activités de
commerce soit une voie de garage quand tous les efforts pour
réaliser une mobilité professionnelle ont été vains.
bl L'EMIGRATION
Si devenir commerçant est une aspiration recherchée
par la grande majorité des artisans, pouvoir un jour aller tra-
vailler en Côte d'Ivoire constitue aussi une autre chose qu'ils
souhaitent tous.
En effet. la Côte d'Ivoire constitue le principal pays
africain voisin du Sénégal où les artisans cordonniers sénéga-
lais se sont massivement installés depuis le début des années
60, y monopolisant la quasi totalité de la production artisa-
nale de chaussures, de même elle constitue la plaque tournante
à partir de laquelle des artisans sénégalais se dispersent dans
les autres pays voisins tels le Cameroun, le Centre Afrique, Le
Gabon, le Congo, constituant dans ces pays un pôle actif de pro-
duction ou de distribution de chaussures artisanales.
La Côte d'Ivoire est donc synonyme de possibilité de
gains substantiels et de promotion sociale pour les artisans
cordonniers de Tilène : sur les 80 artisans que compte notre
échantillon 25 ont séjourné pendant l ou plusieurs années en
... / ...

357
Côte d'Ivoire, représentant 31,25 % de l'ensemble (le nombre
d'année de séjour le plus élevé enregistré est 14 ans) et parmi
ceux-ci les moins de 40 ans sont au nombre de 20 ce qui veut
dire que l'exode vers l'étranger concerne plus particulièrement
les jeunes et adultes valides de la communauté.
Le premier voyage vers la Côte d'Ivoire est souvent
entrepris au cours des 3 -
4 années postérieures à la fin de
l'apprentissage et correspondant à la période où l'artisan qui
est encore célibataire a le moins de charges sociales,
ce qui
lui permet de faire de l'épargne et de prendre en charge finan-
cièrement partie ou totalité de ses frais de voyage (un parent
déjà installé en Côte d'Ivoire peut aussi les lui envoyé), celui-
ci pouvant être renouvelé à la suite d'un retour temporaire au
Sénégal après plusieurs mois ou ~nnées de séjour à l'étranger.
Sur les 25 artisans qui ont eu a séjourner en Côte
d'Ivoire pour des raisons de travail,
10 c'est-à-dire presque
la moitié y sont retournés au moins une fois.
... / ...

358
H - CONTRAINTES SOCIO-ËCONOMIQUES ET CHARGES SOCIALES
=========================~=======================
a) LA SITUATION MATRIMONIALE
UN INDICATEUR DU NIVEAU
D'ACTIVITE
L'artisan après s'être installé à une "place", à
la suite de son apprentissage,
a pour préoccupation majeure de
se marier.
Ceci est surtout valable pour ceux qui sont arrivés
à Dakar à l'âge adolescent et qui correspondent dans notre échan-
tillon au groupe des artisans de moins de 39 ans d'âge. La grande
majorité de ceux qui ont plus que cet âge se sont déjà marié au
village avant de le quitter à l'âge adulte (parmi ce groupe de
18 artisans âgés de plus de 39 ans,
L2 sont arrivés à Dakar
quand ils avaient 22 ans dlâge au moins et étaient déjà mariés,
contre 55 âgés de moins de 40 ans et arrivés à Dakar entre 7 ans
et 20 ans d'âge en situation de célibataire).
En répartissant les 80 artisans qui constituent notre
échantillon selon leur situation matrimoniale et le nombre
d'épouses qu'ils ont au moment de notre enquête, nous avons 21
célibataires, 34 monogames, 17 bigames, 5 mariés à 3 femmes et
3 mariés à 4 femmes, soit représentant respectivement 26,25 %J
42,50 %, 21,25 %, 6,25 % et 3,75 % de l'effectif de notre échan-
tillon.
Cependant nous cons taons que dans le groupe des arti-
sans mariés ·constitué de 59 sujets, près de la moitié, soit
25 artisans, est polygame et que tous ceux qui ont plus d'une
... 1...

359
épouse ont au moins 34 ans d'âge (sauf un artisan qui a 30 ans
et 2 épouses) alors que dans le sous-groupe des monogames cons-
titué de 34 artisans seuls 8 sujets soit, moins de 1/4 de l'ef-
fectif sont âgés de 34 ans ou plus (l'âge maximum enregistrée
est 39 ans).
Ces chiffres indiquent que chez l'artisan le nombre
d'épouses à disposition et à charge augmente avec l'âge: sur
8 artisans qui ont 3 ou 4 épouses, 6 ont entre 50 et 70 ans
d'âge et 2 ont 47 - 48 ans d'âge.
Le nombre d'épouses à disposition et à charge qui
varie avec l'age constitué l'une des traductions les plus mani-
festes et explicites de la position qu'occupe l'artisan dans
l'échelle de prestige de la communauté,
car il est le signe so-
cial qui révèle le degré de maturité,
sérieux et le niveau de
promotion social de l'artisan: sur les 25 artisans polygames
qui constituent notre échantillon de 80 sujets, 14 représentent
un peu plus de la moitié, sont des responsables d'atelier, ceux-
ci étant au nombre de 23, en tout. Le prestige que confère l'âge
doit trouver les éléments de son renforcement social dans la po-
lygamie et le fait de diriger un atelier.
h) LA FREQUENCE DU NOMBRE DE RETOURS AU VILLAGE
INDICATEUR DU NIVEAU D'ACTIVITE
Les artisans cordonniers de la communauté qui sont
presque tous d'origine rurale (sur les 80 artisans de notre
échantillon seuls 3 sont nés à Dakar) restent en contact perma-
nent avec le reste de leur famille résidant dans les campagnes
•1
... / ...

31S0
où ils se rendent fréquemment
: sur 59 artisans marIés un nombre
de 57, représentant 71,5 % de notre échantillon se rend une fois
par mois au moins dans leur village d'origine, un nombre de 39
soit 48,5 % de l'ensemble s'y rend au moins deux fois par mois
quant aux célibataires dont le nombre total est 21, un nombre
de 5 soit 6,25 % se rend une fois par mois au moins à la campa-
gne et un nombre de 16 soit 20 % s'y rend deux fois au moins par
an à l'occasion surtout des fêtes de karité à la fin du mois de
ramadan et de Tabaski.
Ces visites périodiques que les artisans effectuent dans
leurs villages d'origine sont l'occasion pour eux de se retremper
dans l'ambiance chaleureuse de la famille et aussi de procéder
à un partage d'une partie de leurs e~illS Hvec les siens dont
une bonne partie n'arrive â survivre pllysiquement que grâce â
cet apport supplémentaire de ressourC0s qui
leur vient des arti-
sans,
(ces derniers quand ils ne peuvent se rendre personnelle-
ment au village envoient argent ou deurées Je
ùe tout ordre par
l'intermédiaire des collègues de même village qui partent).
Il ressort de certaines déclarations qui ont pu être
recueillies au cours de notre enquête et concernant le montant
des dépenses effectuées par les artisans pour entretenir les
leurs,restés aux villages que celles-ci varient mensuellement
entre 10 000 et 40 000 F selon la taille des familles et le
niveau de gain des artisans:
d'après notre enquête le nombre
de personnes à cahrge par artisan varie de 5 à 12 personnes •
.../ ...

36]
Ces charges familiales et autres dépenses
ostentatoires
res obligatoires sur le plan social (dépenses à l'occasion de
baptèmes, funérailles, cérémonies de circoncision, mariages,
fêtes religieuses etc .... ) auxquelles l'artisan doit faire face,
quelque soit le niveau de
son gain et souvent avec urgence,
cons-
tituent un manque à gagner en ce qui concene le poste des dép en-
se~ productives, donc un obstacle const~nt pour une production
continue.
Ceci est drautant plus vrai q~e tous les artisans sont
d'extraction modeste et sont obligés de prendre en cahrge non
seulement partie ou tota1ité des dépenses d'entretien de leurs
familles respectives mais aussi les autres dépenses ostentatoi-
res des leurs.
VOici à ce propos comment se répartissent les 80 arti-
s~ns de notre échantillon selon la professiJn de leurs pères :
52 artisans soit 65 % de notre échantillon sont issus de pères
cordonniers dont la grande majorité ont arrêté le travail pour
des raisons de vieillesse, 10 soit 12,50 % de l'effectif total,
sont de pères cultivateurs,
9 soit 11,25 Îc de l'ensemble,
saut
de pères forgerons,
6 soit 7,50 % sont issus de pères commer-
çants (il s'agit en l'occurence de petits commercants de cam-
pagne) et 3 soit 3,75 % ont des ascendants qui sont de petits
tailleurs.
c'est à l'artisan valide qu'il appartient de prendre
en charge les dépenses,
que les maigres gains du père ou de
... / ...

362
l'oncle
(s'ils sont toujours en activité) ne peuvent plus cou-
vrir,
soit les activités de ceux-ci ont beaucoup baissé en rai-
son de l'âge ou soit encore parce que la taille de la famille
s'est beaucoup accrue.
cl DEVELOPPEMENT D'UNE STRATEGIE COMMUNAUTAIRE DE RE-
DUCTION
DU COUT DE REPRODUCTION DE LA FORCE DE
TRAVAIL
Devant la faiblesse des bén~fices qu ' ils réalisent
au terme de chaque cycle de production
et la lourdeur contra-
dictoire des charges et dépenses sociales,
qu'ils doivent sans
cesse supporter,
les artisans adoptent pour résoudre cette con-
tradiction une stratégie qui consiste a comprimer au maximum
toutes les dépenses qui résultent des charges locatives tant en
ce qui concerne les ateliers de travail
(regroupement de plusieurs
artisans pour faire baisser les loyers des "places'!) que les lieux
d'habitations quand ils sont en location.
Dans notre échantillon de 80 artisns,
64 parmi ceux-ci
soit 80 % habitent en location et payent un loyer mensuel com-
pris entre 1 SOO'Pftet
SOO"Aet S 000
CFA. Dans ce groupe de locataires
38 soit 47,50 % de notre échantillon,
payent par mois un loyer
dont la valeur est inf~rieure à 3 SOO F contr e 26 soit 32,SO %
qui eux payent un loyer mensuel compris entre 3 SOO'F~et S 000 (fA
Ceux qui ne payent pas un loyer mensuel représentent
dans notre échantillon un nombre de 16 artisans soit 20 %
8 parmi ceux-ci ont élu domicile dans leur atelier (10 %) où
... 1...

363
ils font office de gardien de nuit et les 8 autres ont, soit une
maison à Dakar, soit
habitent chez des parents.
Cette stratégie se comprend dans la mesure où les
loyers (ceux des "places" d'abord et ensuite ceux des lieux
d'habitation) constituent pour les artisans les seules contrdin-
tes manoeuvrables sur lesquelles ils puissent exercer une action
de maîtrise pouvant donner un effet immédiat, en se regroupant
par petits nombres et en associant leurs ressources communes,
sans que celà ne leur coûte beaucoup d'effort,
tout se faisant
de façon quasi spontanée : les propriétaires des ateleirs ou des
lieux d'habitation n'imposent aucune norme de cohabitation aux
artisans locataires.
Il faut constater qu'une telle stratégie qui consiste
à mettre en commun les ressources du groupe et à unir les ef-
forts de ses membres vers un même but de réduction des coûts
et charges individuels fait défaut en matière d'approvisionne-
ment, de constitution d'équipements productifs collectifs ou
encore de commercialisations
des produits. Dans tous ces domai-
nes c'est le règne de l'individualisme et l'artisan doit faire
face seul aux contraintes que lui impose le capital commercial
quand bien même que celui-ci serait imposé à l'ensemble de la
communauté.
Dans ces domaines qui concernent directement les pro-
cès de production et de reproduction et où l'artisan et l'ensem-
ble de la communauté se trouvent face au capital commercial qui
... / ...

364
cherche à imposer ses règles et normes, seule une action concer-
tée et organisée qui prendraient en compte les intérêts de la
communauté serait la condition nécessaire qui rendrait plus ou
moins manoeuvrables, par les artisans, les contraintes que leur
impose le capital commercial (spéculation sur les prix de matiè-
res premières surtout).
Mais une telle action organisée coûte en moyens et ef-
forts d'organistion et son effet ne peut être escomptable qu'à
moyen ou long terme ce qui génère au niveau de l'artisan ou moins
trois types de contradiction :
1) Les moyens plus ou moins importants qu'il doit enga-
ger pour contribuer à l'effort d'organisation et qui doivent
être prélevés sur ses gains constituent un manque à gagner pour
les Dostesde dépenses productives en même temps qu'ils réduisent
sa capacité à répondre aux urgences des dépenses sociales que
lui imposent sa situation de soutien de famille et son adhésion
aux normes socio-culturelles de dépenses ostentatoires.
2) L'obligation de respecter, en tant que membre d'une
organisation, les règles de celles-ci et surtout celles cocner-
nant les présences aux réunions ou l'exécution des tâches visant
un but organisationnel est souvent perçue par l'artisan comme
un facteur de réductionde son temps de travail productif ou
: 1
H
d'empêchement de participation à des manifestations sociales,
\\f'
•h,
cérémonies etc ...
... / ...

365
3) Les satisfactions attendues d'une telle action or-
ganisée peuvent tarder à venir et ce retard dans la satisfac-
tion des attentes rentre souvent en contradiction avec le désir
urgent qui caractérise l'artisan placé sous contraintes (socio-
économiques) d'obtenir une rentabilité immédiate des opérations
ou actions qu'il engage.
Cette contradiction, tant qu'elle n'est pas résolue,
renforce chez Il artisan l'idée que son engagement dans une ac-
tion organisée et commune ne peut être que source de désavanta-
ges et d'inconvénients (moyes, efforts et temps engagés au ni-
veau individuel restent sans compensations) et celà constitue
un facteur qui renforce l'individualisme.
Si la formation d'une action organisée est chose diffi-
cile dans le milieu des artisans cordonniers de Tilène, par
contre, ce milieu est un foyer de sécrétion de forme de regruu-
pements spontanés à caractère informel visant des buts résolu-
toires dans des domaines de contraintes maitrisables.
En effet, les artisans se regroupent non seulement pour
former des ateliers mais aussi pour sc loger : dans notre échan-
tillon de 80 artisans parmi les 64 qui habitent en location 54
soit 67,50 % de l'ensemble de notre effectif vivent en cohabita-
tion en partageant à 2, 3, 4, 5 les demeures louées. Voici com-
ment ils se répartissent dans les demeures qu'ils occupent: 24
artisans soit 30 % partagent leur demeure aveC un autre artisan,
16 soit 20 % cohabitent avec deux autres, 10 soit 12,50 % coha-
bitent aVec trois autres artisans et 4 soit 5 % partagent leur
... / ...

366
demeure avec quatre autres artisans ; ceux qui habitent seuls
sont au nombre de 10 soit 12,50 % et correspondent à des hommes
mariés polygames qui font venir à tour de rôle pour un séjour
plus ou moins long à Dakar leurs épouses.
Il ressort par ailleurs de notre enquête que sur les
80 artisns constitutifs de notre échantillon, 69 soit 86,25 %
habitent non loin de leurs lieux de trvail, dans les quartiers
de Médina ou de FasE
contre
Il soit 13,75 % qui eux habitent
dans la banlieue dakaroise à Grand-Yoff, Thiaroye, Pikine, Dia-
maguène.
En habitant ainsi à proximité de leurs lieux de travail
où ils peuvent se rendre à pied. les artisans recherchent indu-
bitablement à éviter de supporter des charges de transport pour
leurs déplacements et de dépendre dans l'organisation de leur
travail des contraintes de temps qu'imposent les heures de cir-
culation et d'arrêt des moyens de transports en commun ou pu-
blics : les artisans peuvent travailler jusqu'à des heures très
avancées de la nuit pendant les périodes de l'année où le travail
marche bien.
l
LES CONTRADICTIONS DANS LA COMMUNAUTE
=~===================================
Les artisans cordonniers de Tilène constituent une
communauté qui est traversée par de multiples contradictions
de tous ordres.
,
.•. 1...
,~
1...

367
Ces contradictions s'expriment dans les domaines social, socio-
professionnel, économico-professionnel, économique, politique
et socio-écunomique. Certaines s'expriment de façon manifeste
et d'autres, plus ou moins refoulées s'expriment dans le domai-
ne mental au niveau intra-psychique et individuel créant des
complexes psycholoques, un mal de vivre dans le groupe dunt
l'un des dénouements les plus heureux c'est le départ vers
l'étranger: la Côte d'Ivoire.
Ces contradictions sont :
1. Les contradictions dans le domaine social opposent
d'une part, les figures d'autorité entre elles (les figures
paternelles, les ainés, les maîtres et les responsables d'ate-
liers) et d'autre part celles-ci et l'ensemble du reste de la
communauté.
Elles s'expriment dans le domaine spécifique de
l'idéologie et de la morale, et l'enjeu des protagonistes
est la recherche d'un sens à leurs actions:
confrontation
entre les normes et valeurs du passé qui orientaient l'action
d'une manière générale et celles nées du contact avec le mon-
de moderne et qui proposent un autre système d'action, un au-
tre modèle d'orientation.
2. Les contradictions socio-professionnelles qui oppo-
sent les responsables d'ateleirs et les groupes d'artisns qu'ils
dirigent, ou encore les maîtres et les apprentis non finis qu'ils
forment.
... / ...

368
Elles s'expriment dans le cadre spécifique des rapports
professionnels et leurs enjeux c'est le contrôle ou la promo-
tions : faire respecter dans le groupe de travail les règles et
normes de coopération, assurer sa cohésion interne, préparer
l'entrée des apprentis finis dans le métier etc ... Leur maîtrise
et canalisation, c'est ce qui crée les conditions sociales et
professionnelles de la reproduction du métier et de la communauté.
3. Les contradictions économico-professionnelles oppo-
sent en particulier deux catégories d'artisans: celles des
artisans compétents et ayant une grande maitrise du travail (ils
sont souvent très créatifs) et celles des artisans tatillons et
qui se contentent d'imiter les modèles créés par ceux de la pre-
mière catégorie.
Ces contradictions, qui ont pour support la compétence
professionnelle, s'expriment par la baisse de la qualité du
travail d'abord, par celle des prix des produits d'une manière
générale ensuite, puisque ceux qui fabriquent de sproduits de
qualité inférieure sont obligés pour écouler leurs marchandises
auprès des commerçants, de vendre moins chers que les autres
artisans dont le travail est de meilleur qualité, ce qui fait
les prix.
Ces contradictions ont un double enjeu qui est d'une
part soigner l'image de marque du travail artisanal et d'autre
part préserver, en faveur du groupe des professionnels compé-
tents, les conditions économiques d'un gain plus
substantiel~
."/ ...
,
1
~~ft..:1
, •.....
~.
1
l'
,,

369
4. Les contradictions politiques opposent, d'une part
les leaders de la communauté qui représentent celle-ci auprès
des institutions et des autorités qui sollicitent l'action, ou
la coopération des groupes qu'ils dirigent et d'autre part,
l'ensemble des membres de ces derniers.
Elles s'expriment sous la forme de contestations et de
critiques visant principalement le degré d'engagement et d'im-
plication des leaders dans la recherche de solution concernant
les besoins de la communauté ou des groupes.
Ces contradictions deviennent particulièrement aigues
quand les promesses faites par les leaders aux groupes qui les
investissent de leur confiance et portant sur la satisfaction
de besoins collectifs exprimés tardent à se réaliser ou encore
quand les comportements et actions des leaders sont perçus
comme étant quelque chose qui manifeste uniquement leurs ambi-
tions personnelles.
Le groupe des leaders est lui-même déchiré par des
contradictions politiques; celles-ci .s'étayent particulière-
ment sur les contradictions qui naissent des différences ré-
gionales ou des situations économiques et s'expriment à travers
des prises de positions contradictoires par rapport à des pro-
blèmes concernant les rapports de la communauté à la Chambre de
métiers ou encore à la définition des besoins de celle-ci et
des moyens à proposer aux institutions pour leur satisfaction.
Les contradictions politiques dans le groupe des lea-
ders s'expriment donc au niveau des prises de décisions qui
orientent stratégiquement l'action de la communauté ou de ses
... / ...

370
fractions et qui engagent celles-ci vis-à-vis des institutions
dont la collaboration à l'heure actuelle s'avère nécessaire à
propos de toute démarche résolutoire des problèmes collectifs
se posant à l'ensemble de la communauté.
Ces contradictions politiques qui, pour s'exprimer se
sont étayées sur des contradictions régionales, auront un effet
de renforcement sur celles-ci au fur et à mesure de leur déve-
loppement ; c'est ainsi que dans la communauté étudiée deux
groupes régionaux (ceux de Mékhé et de Diourbel) s'affrontent
au niveau politique et se situent à des positions toujours con-
tradictoires par rapports à toutes questions devant les engager
auprès de la Chambre de Métiers.
5. Les contradictions économiques, quand elles sont
internes à la communauté ont pour support objectif la diffé-
rence de situations économiques entre les membres de celles-ci.
Cette différence au nvieau des situations et positions
économiques a souvent une origine sociale, en ce sens qu'elle
est souvent commandée par le nombre de descendants de sexe mas-
culin adolescents et valides dont la soumission du travail par
l'artisan père, peut être une source importante de gain pour
lui : dans ce cas ces adolescents sont maintenus par le père
dans une situation de dépendance sociale et professionnelle
dont la durée excède de loin celle qui est la norme pour l'ap-
prentissage du métier.
Ainsi ceux qui ont une situation économique relative-
ment confortable sOIlt-ils les figures d'autorité polygames et
surtout parmicelles-ci, les figures paternelles ?
... / ...

371
c'est dans cette catégorie d'artisans que se recrutent
aussi les leaders de la communauté, étant donné que le rôle de
leader ship implique de la part de ceux qui le jouent la possi-
bilité de s'extraire de laproduction, ce qui seul peut fonder
les conditions matérielles cllun
d1un investissement à titre indivi-
duel ans des actions de prise en charge des démarches résolu-
toires concernant des problèmes collectifs.
Cette différence entre les artisans dans leurs situa-
tions économiques
se révèle donc à travers la différence de
temps qui ils consacrent chacun individuellement et directement
à la production en tant que producteur direct. Cette différen-
ce dans les situations économiques, se reflète aussi au niveau
social, et à propos de l'action collective par une participa-
tion, plus ou moins intenses en temps et en fréquence, à des
actions communes telles des réunions. Ce sont ceux dont la situa-
tion économique est relativement satisfaisante, qui le plus sou-
vent acceptent de consacrer une partie de leur temps à des
réunions sur des problèmes touchant la communauté.
Les contradictions économiques externes, quant à elles,
opposent la communauté à ses principaux partenaires économiques
à savoir, les commerçants de matières premières et les marchands
de chaussures artisanales qui détiennent le monopole de la ven-
te de ces produits. Ces contradictions qui ont pour enjeu le
profit, se révèlent au niveau de la communauté par des prises
de positions collectives générales et très critiques à l'égard
d'une part des commerçants et d'autre part des institutions
chargées du contrôle des prix.
... / ...

372
Ces contradictions et les prises de position collec-
tives qu'elles suscitent constituent un facteur important de
prise de conscience, de la nécessité pour certains membre de
se regrouper et de s'unir en vue de constituer un groupe de pres-
sion dont l'action serait susceptible à court ou moyen terme de
faire apporter un peu plus d'ordre dans la fixation des prix de
vente des matières premières surtout.
6. Les contradictions sacia-économiques se génèrent à
partir de la disproportion entre, d'une part, les charges socia-
les et autres dépenses ostentatoires que doit supporter llarti-
san obligatoirement, en raison de son appartenance à la socio-
culture traditionnelle et de son adhésion plus ou moins affecti-
ve aux normes de celle-ci et, d'autre part, la faiblesse de ses
gains qui résulte du faible niveau de développement de son mé-
tier et d'autres contraintes économiques que lui impose son
environnement économique et qui réduisent sa capacité d'accu-
mulatione
Ces contradictions, bien qu'elles soient communes à
tous les membres de la communauté, sont cependant vécues indi-
viduellement et les solutions qu'on leur apporte sont toujours
singulières et individuelles: l'individuation de ces contra-
dictions socio-économiques renforce l'individualisme de l'arti-
san et altère la motivation à l'unité qui émerge de la prise de
conscience des contradictions communes qui opposent, au niveau
économique, l'ensemble de la communauté au capital commercial
d'une manière générale.
... / ...

373
EN CONCLUSION
Toutes ces contradictions se manifestent dans la com-
munauté et ses membres, et se révèlent dans des comportements
déterminés. Cependant, leur enchevêtrement et articulations
réciproques, de même que la multiplicité des figures d'autori-
té et de domaines où les pouvoirs que celles-ci incarnent et
gèrent. les font se déplacer d'un domaine à un autre (par exem-
ple du domaine social au domaine économique ou politique), ce
qui fait que chaque domaine de la réalité devient souvent un
point de condensation d'ulle pluralité de contradictjons de na-
ture différente qui peuvent à propos d'un problème donné rele-
vant d'un domaine spécifique de contradictions s'exprimer toutes.
Une telle situation rend évidemment difficile toute
forme de concertation et de négociation au sein de la commu-
nauté, à props de la définition de normes communes d'orienta-
tion de l'action.
Dans une action organisée une telle situation permet
aux acteurs sociaux de pouvoir, chacun selon la place qu'il
occupe dans la structure de l'organisation
de jouer tour à
tour le rôle de plusieurs personnages ; il Y a une fusion, un
mixage entre les rôles et attributs organisationnels d'une
part et les rôles et attributs détenus par les acteus dans les
espaces extra-organisationnels, tels celui des rapports politi-
ques ou celui des rapports sociaux.
... /'"

374
Une bonne connaissance de toutes ces contradictions,
de leurs possibilités de déplacement et de condensation, ainsi
que les attributs sociaux des personnages appelés à les gérer
et aussi de la manière dont elles se traduisent au niveau des
actions organisées constitue une condition nécessaire pour me-
ner à bien toutes formes d'intervention au sein de cette commu-
nauté et visant un changelnent devant s'opérer à travers une
prise en charge organisée par la communauté, de ses propres
problèmes.
J - LES CONTRADICTIONS
UN OBSTACLE À L'ACTION OR-
=~=~=====~============~=========~=============
GANISÉE MAIS UN FACTEUR DE RENFORCEMENT DE LA
=============================================
SOLIDARITÉ INTRA-GROUPE
=======================
a) CONSIDERATION GENERALE
La multiplicité des contradictions en oeuvre dans
la communauté, la pluralité des figures d'autorité, des formes
de pouvoirs et de leurs domaines d'intervention très changeants,
les oppositions réciproques entre groupes ou entre personnes qui
naissent de l'interaction sociale, si tout celà peut constituer
des facteurs ou des conditions qui empêchent ou rendent diffi-
cile l'émergence de formes d'organisations de type moderne dans
la communauté, il ne constitue cependant pas paradoxalement, un
handicap, à la naissance et au développement de formes de soli-
darité spontanée ou d'entre-aide dirigées vers la résoLution de
."/'.'
!

375
problèmes qui naissent du manque de moyens, ou du déséquilibre
entre les niveaux des moyens de travail détenus à titre privé
ou encore à propos de problèmes extra-professionnels à caractè-
re social et privé.
Ces formes de solidarité se rapportent au choix sélec-
tif des membres constitutifs des groupements d'ateliers et des
groupements de cohabitation,
aux moyens de travail et mnti~l'es
premières,
ù la commercialisation des pToduits du
travail et
aux év?nements sociaux cevant mobiliser partie ou
totalité de
la communauté et concernant directement un de ses membres.
c~~ formes de solidarité se IllaIllfestent aussi bien â
l'int~[ieur des groupes restreints que sont les groupements
d'atpliers et les groupements de cohabitation,
par exemple,
qu'entre plusieurs groupes de la communauté.
Quand elles s'expriment elles doivent donner lieu ;1
une action réciproque compensatrice de même nature ou de natu-
re différente,
immédiate ou différée dans le temps,
ou au con-
traire n'exiger ni tacitement,
ni explicitement aucun~ récipro-
cité matérielle.
Elles ont toutes pour fonction explicite,
la satisfac-
tion de besoins liés d'une mani~re générale à J.a promotion des
melrbres de la communauté.
Ces besoins,
que les formes de soli-
darité spontanée doivent satisfaire,
peuvent être individuels
ou collectifs et s'orienter à partir de probl~mes li~s au pro-
cès de production. ou à la vie sociale des membres de la com-
munauté.
. .. 1...
1

376
Cette fonction, qui est explicitement recherchée par
les membres de la communauté,
sert,
cependant, à satisfaire
d'autres besoins implicites et plus personnels de pouvoir,
car
les manifestations de solidarité, qu'elles exigent une récipro-
cité matérielle ou non, en tant qu'elles visent à réparer un d&-
séquilibre dans la répartition des moyens et des ressources
entre les membres de la cnmmunauté,
engendrent entre celui qui
donne et celui qui reçoit, des relations personnelles faites
d'obligations morales o~ celui q\\Jl reçoit devient l'obligé de
celui qui donne
;
l'assym~rTie d 1
d une
telle relation peut rester
fig§t dans le temps si les actellrs qui y sont
impliqués occupent
des situations et positions différentes dans les groupements
d'atelier ou dans la communauté, c'est-à-dire quand celui qui
reçoit n'est pas en mesure de restituer dans un acte de r~ci­
procité,
ce qu'il a reçu ou erlcore quand l'acte r~ciproque de
restitutinn ne peut être en mesure de satisfaire qu'un besoin
se situant hiérarchiquement en-dessous de celui qu'il devrait
en droit pouvoir satisfaire chez le destinateur.
L'acte de solidarité peut être un acte de pouvoir si
l'acte r~ciproque et compensateur qui, ordinairement, l'accom-
pagne fait défaut ou s ' i l mobilise des ressources et satisfait
des besoins présentant une assymétrie réelle avec ceux mobili-
sés et satisfaits par l'acte primordial.
Donc, la solidarité qui est en oeuvre dans la
communauté,
quoiqu'elle vise manifestement à réduire l'in~ga­
lité,
dans la r~partition des ressources et moyens entre ses
membres,
n'en constitue pas moins implicitement une condition
... / ...

377
qui génère des conduites de soumission particulières,
le plus
souvent voilées,
de certains membres à l'~gard d'autre et qui
viennent renforcer certaines dispositions psychologiques nées
de
l'interaction inter-statutaires entre membres de classes
d'âge différentes ou encore entre responsable et non responsa-
ble etc .
.hl
.
ADAPTATION DES fORtlES TRADITIONNELLES DE SOLIDARITE
AUX CONTRAB:r::, SOOO-PROFESSIONNELLES DE LA COMMU-
NAUTE
La solidarité,
telle qu'elle se traduit au sein de la
cornrnunaut~ et entre l~s m~mbres de celles-ci, se ref~re aux mo-
d~les traditionnels d'entre-aide. Mais dans ses différentes
formes et orientations, elle refl~te trois types de contraintes
1. Les contraintes du nlilieu urbain qui imposent
un clloix d'orientation et de forme ~ l'entre-aide,
lequel s'ex-
prime particuli~rement dans ce contexte de contraintes dans des
regroupements : regroupements de plusieurs artisans pour occu-
per en commun un atelier de travail ou un logis dans le but de
réduire au niveau individuel les coûts locatifs
2. Les contraintes professionnelles et technico-
économiques qui naissent de II inégalité dans la détention des
moyens matériels de travail, des ressources limitées,
eu égard
aux coûts élevés des matières premi~res et à la faiblesse des
profits réalisables et qui imposent
irnposellt une forme de solidarité ba-
sée en particulier sur l'échange et la circulation des moyens
... / ...

37(i
de travail individuels qui seront mis à la dispo~ition des
groupes d'appartenance
(groupements ù'atelier)
ou de toute ]a
communauté.
3. Les contraintes psvc~().::-~ocio-professionnellesqui
psvc~().::-~ocio-professionnelles
S~ manifestent dans la forte aspiration qu'a l'artisan d'âtre
un "patron" et aussi dans l'illusion qu'il
entretient avec lui-
même d'être un sujet social particul ier, confroLtc" à des problè-
mes socio-professionnels et économiques non moir~ ~ilrticuliQrs
et irréductibles à ceux des autres.
Ces contraintes provoqllent dans les dOTIl3ines ou 1 1
1 i1-
1u5ion de la "particularité tl
"particularité
et cellE' d'être un "pdtron" peuvent
fncilement trouver les conditions de leur confort~tion et du ren-
_
d~$
. .
Loreement ~iSposltl0ns psychologiques qui lE'ur correspondent,
une baisse dans l'intensité des manifestations spontanée de
solidarité.
Cette même balsse,
baisse,
se manifeste égalen'enr
égalen'ent dans les do-
maines où l'action dc solidarité ne concerne ni directement, ni
indircctement les procès de travail ou de productjon.
c) RENFORCEMENT DE LA SOLIDARITE INTRA-GROUPE
Ces manifestations d'entre-aide ou èe solidarité,
bien que se déroulantdans l'ensemble de la commllnnllté, manifes-
tent cependant globalement des degrés d'intensité différents,
Gclon qu'elles se déroulent à l'intérieur des groupes sociaux
... 1...

379
affinitaires
(tels les groupements d'ateliers,
les groupements
régionaux etc . . . )
ou au contraire concernant des groupes pré-
sentant des caractéristiques identitaires différents
:
dans le
premier cas elles sont intenses tandis que dans le second,
elles
sont plus ou moins faibles.
K - LES RATIONALITES DES DIFFERENTES FORMES DE
==========================================
SOLIDARITE
Ces manifestations de solidarité, parce qu'elles sont
spontanées et
se déroulent dans un cadre non réglementé peuvent
sembler à prime abord dépourvues de tcute rationalité.
Mais il n'en est rien,
parce qu'elles visent des buts
(les buts visent à faciliter la production, l'écoulement des
produits,
ou encore à alléger le poids des charges sociales que
supportent à des moments déterminés les membres de la communau-
té), s'adaptent au cadre de l'environnement sacio-économique de
la communauté, ainsi qu'aux caractéristiques psycho-socio-
individuelles de ceux-ci et met en oeuvre des combinaisons de
moyens plus ou moins appropriés pour atteindre ces buts
ainsi
que des formes d'organisation qui tout
en étant informel-
les n'en sont pas moins efficaces, quand il s'agit de solution-
ner certains problèmes.
Au cours de notre enquête, nous avons cherché à établir
une liste des diffétentes formes de manifestations de solidarité
observées et de leurs fonctions correspondantes dans les diffé-
... / ...

380
rents domaines de la vie de la communauté.
Nous avons repéré
quatre types de formes de manifestations que nous allons dési-
gner par ces formules:
l
--> T,
T --; 1,
l
--> l et T --> T.
1.
l
--> T : Cette forme de solidarité se manifeste
quand un membre
l
d'un groupe ou de la communauté T met à la
disposition des autres membres de ceux-ci une partie de ses
moyens ou ressources propres à des fins d'usage collectif pour
réparer un déséquilibre né de Jlinégalil~ au sein du groupe
d'appartenance dans la détention des moyens individuels de
travail ou autres ressources ou encore quand un membre
du groll-
pe engage ses ressources ou sa responsabjlit~ vis à vis d'un
tiers extérieur en vue
de l'obtention d'lJn avantage collectif
Les exemples concrets illustrant 1.e premier cas de
figure sont quand les membres d'un groupe c~dent aux apprentis
leurs matériels de travail,
ceux qui poss~dent des moyens de
travail rares
(pieds en fer,
formes)
mettenl ceux-ci à la dis-
position de tout le monde, y compris les membres des autres
groupements d'atelier; ou encore quand un artisan qui vient de
créer un modèle bien prisé par les consommateurs met à la dispo-
sition de son groupe les gabarits utilisés etc ...
Quand au deuxième cas de figure vuici quelques exem-
ples qui
l'illustrent:
l'artisan qui a reçu une grosse comman-
de de chaussures par un commerçant partage la commande entre les
membres de son groupe, c'est l'artisan
qui a le plus de moyens
qui paie la caution de garantie et engage seul sa responsabili-
té morales quand i l s'agit de louer un atelier de travail,
un
... / ...

381
artisan qui a un apprenti laisse utiliser les services de celui-
ci par les autres artisans,
un artisan peut se charger à l'occa-
sion de ses dépJacements à l'intérieur des régions d'écouler les
produits de ses autres collègues etc ...
Ce qui permet, matériellement et structurelJeme~t l'e-
xistence d'une telle forme de sulidarité,
c'est,
d'un~ pdrt) l~
non synctlronisme des cycles de production individuels, chaque
artisan étcnt autonome dans l'organisation de son procès ùe
production et ct/autre part,
le sous emploi ou le surplus de mo-
yens détenus â titre individuels et qui sont liés aux niveaux
d'activité et aux sirations économiques différents des membres
du groupe:
dans ce cas les moyens de travail,
ressources,
cir-
culent des I!JlL\\cf'~1! (lll zones à faibles activités vers les ll p l a _
cesTI ou ZOTIQS Ù grandes activités ou encore des artisans il for-
te posit lOll économique et disposant d'un slIrpl us d'out ils ou
des outils rares vers les artisans à faibles situation économique.
Cette forme de solidarité per~et de gérer la contradic-
tion entre l'inégalité dans la détention et l'emploi effectif
des moyens de travail individuels, d'une part et
l'inégalité
dans les niveaux d'activité et le non synchronisme des cycles de
production d'autre part.
Cette solidarité se met en marche,
surtout quand elle
permet de procurer,
pouvoir et prestige à l
dans le groupe ou
encüre quand l
peut espérer une réciprocité immédiate ou diffé-
rée dans le même domaine ou dans un autre.
... ; ...

382
Sur 33 cas de formes
de manifestation de solidarité
répertoriées au cours de notre enquête Il formes sont du type
l
--) T :
10 cas concernant
la production ou l'écoulement
con-
tre 1 cas qui concerne l'acquisition de locaux devant
servir
d'atelier de travail pour le groupe.
2.
T --)
l
: Cette forme de solidarité se manifeste
quand un membre d'un groupe,
placé dans une s1tl13t10n de besoin
sollicite l'aide ou le soutien matériel ou fjllaJ1Cier des autres
Inembres.
Voici quelques exemples concrets de C~ types de 5011-
dari té
l'apprenti d'un artisan peut utiliser pour les besoins
cIe son apprentissage les moyens détenus par
les autres artisans
ou encore
:
a) un artisan ou un apprenti sans logis peut p,-lsser ses nuits
dans l'atelier de son groupe,
1))
des membres du groupe peuvent pr~ter leurs restes de mati~res
premières ou de l'argent à un autre membre ou lui payer le
loyer de sa "place" quand celui-ci se trouve en difficulté,
c)
des membres du groupe peuvent effectuer des tâches de fabri-
cation pour le compte d'un autre artisan ayant reçu une com-
mande mais qui est empêché pour des raisons personnelles et
sociales de l'exécuter.
d) le groupe soutient financièrement chacun de ses membres quand
1
celui-ci doit faire face à des dépenses sociales (baptême,
funérailles,
etc . . . ),
... / ...

383
e) un apprenti fini,
pour s'installer à son compte propre est
aidé par son ex-maitre et aussi par les membres de l'atelier
où i l a fait son apprentissage.
Ce qui permet l'existance de ce type de solidatité
c'est la contradiction
entre, d'une part,
l'urgence et la fré-
quence des obligations sociales à satisfaire, les besoins de
reproduction de la force de travail ct d'autre part, la faibles-
se des gains.
Les gains r~alisés au terme J'un cycle de production
individuel peuvent ~tre insuffisants pour faire face à la fois
aux dépenses de reproduction de la fl'f("e de travail, dllX ctlar-
ges familiales et autres dépenses non prévues mais tout aussi
obligatoires (dépenses à l'occasion des baptêmes ou funérailles
concernant un parent proche ou un ami,
ou encore sotien finan-
cier apporté à un parent).
Cette forme de solidarité peut se manifester
parce
que au même moment les artisans d'un même groupe n'ont ni les
mêmes oblligations sociales ni le même volume de dépenses à sup-
porter , ce qui permet un transfert des ressources de là où elles
sont disponibles vers ce qui est les plus nfcessaire.
Ce type de solidarité vise Sllrtout à gérer la contra-
diction entre l'économique et le social. Les dépenses sociales
augmentent plus vite que les gains ce qui diminue la part de ce
qui peut êtreaffecté à la reproduction, le manque à gagner étant
compensé par des apports complémentaires de ressources ou de mo-
yens mobilisés grâce à l'action de solidarité.
.. '/ ...

384
Par ailleurs,
il faut dire que cette forme de solida-
rité tant qu'elle permet de gérer la contradiction entre l'éco-
nomique et le social constitue une condition de la reproduction
des normes de celui-ci. Sur 33 formes de manifestation de soli-
darité 12 sont du type T --> l
; 9 cas intéressent la production
ou l'écoulement
;
l cas intéresse le payement des Ilplaces" et
2 cas concernent le social.
11 faut
préciser que T-) l
n'est pas forcément la réci-
proque de l~~T
car le transfert ou le déplacement des ressour-
ces et moyens concernés par l'action de solidarité n'implique
absolument pas les mêmes acteurs dans les premier
et deuxième
acte s; même si celà était le
cas
l'action de retour, compensa-
teur pourrait engager des moyens et ressources non équivalents
et satisfaire des besoins non similaires à ce à quoi elle veut
répondre.
En effet un même artisan peut mettre à Id disposition
du groupe une partie de ses moyens
(1 --> T) et en même temps
faire partie d'un sous-ensemble du groupe qui vient en aide à
un autre artisan se trouvant dans le hesoin (T --) 1)
; de mê-
me si l
est un membre du groupe T et veut dans une action de
réciprocité répondre à l'action de I~ les moyens et ressources
qu'il engage ne sont pas forcément équivalents à ceux engagés
par l'et les concernant.
Pour toutes ces raisons on peut dire qne l --> T et
T --) l
sont dans une relation de réciprocité assymétrique et
que ce qui est visé par ces types de solidarité est l'équilibre
général du groupe.
. .. 1...

385
Le plus important semble ~tre non pas ce que l'on
donne et à qui on le donne mais être disposé à et pouvoir
donner afin que l'ensemble du groupe se trouve à l'abri du
besoin et se sente sécurisé.
Ces considérations nrexcluent pas dans les moti-
vations
la présence d'autres préoccupations d'ordre personnel
telles que ce]les du pouvoir ou tout simplement le détour-
nement à titre individue] des ressources du groupe.
3. T -~
T : Ce type de solidarité apparaît quand
dans un groupe il s'agit de résoudre un problème concret,
ponctuel devant mobiliser des ressources plus Ou mâ~ns
importantes qu'a\\lCUn membre du groupe n'est à mgme de fournir
individuellement et consistant à créer ou à acquérir
des
infrastructures devant améliorer l,es conditions gênêrales de
travail ou encorc~ quand il s'agit de satisfaire en commun ]ps
conditions psychulo~iques ou sociales de la reproduction de la
force da travail.
Les exemples qui illustrent le mleux ce cas de
figure sont :cs dépenses financi~res qu'engage l'ensemble du
groupe pour
la rêfection d'un atelier vétuste pour se faire installer
un compteur électrice autonome (il existe des cas où c'est
plusieurs groupes qui engagent en commun des dépenses d'ins-
tallation pour un compteur en commun),
pour tout simplement pOUVOlr partager un même logis ou les
mêmes repas.

'186
Dans de telles formes J'actions où le groupe s'engage
vis à vis d'un tiers extérieur p;l[ rapport auquel il engage sa
responsabilité)
un responsable est désigné parmi le groupe pour
gérer la relation de celui-ci aVèC l'extérieur ct organiser l'ac-
tion de solidarité.
Ce type de solidarité llui est le plus souvent orgallisé
parmi tous,
permet de gérer la cl 1
l l1tradiction
entres les conrr;:dn-
tes qui srimpusent fortement
e.t l'ollectivement à l'ensemble du
groupe et concernant les condit j \\111S de travail et de reproduc-
tion de la force èe travail dUUllL' part et l'impossibilité pour
des raisons économjques de mettre en oeuvre des moyens résol11-
toires à l'~chelle inèividuel1e pour résoudre ces contraintes.
StIr les 33 cas de fornl~s de solidarit~ observées dnns
la communauté seuls 5 correSpOndl.!llt au type T --) T
;
J ca ...::: ('Oll-
cernent
l'améliirtion df'S conditions de travail;
l
cas conc~r­
ne la productiion (acquisition (10 moyens de travail à partir de
ressources communes) et l
cas concerne la reproduction de la for-
ce de travail soit le social
(repas commun).
4.
l
--) l
: Cette forme de solidarité,
qui est la plus
élective concerne deux personne~ liées par des relations particu-
lières d'obligations réciproques à la fois morales et matérielles
ct qui se nouent dAns le champ (le la profession ou celui du social.
En outre, cette forme de solidarité est la plus codifiée
et la moins soumise 2.UX variatiuns des caractéristiques ries sujets
concernés.
Ellf' se manifeste,
qU2nd le maître aide son a?prenti
fini à s'installer en lui fournissant un capital de départ,
une
II p l ace ll
ou encore,
quand au cours de son apprentissage l'apprenti
est logé et nourri par le maitre.
. .. / ...

387
Parce qu'elle vise surtout,
à installer de nouveaux
artisans dans le métier, et la communauté,
cette forme de soli-
darité permet particuli~rement de gérer les contradictions socio-
économiques inhérentes au mécanismes de reproduction sociale de
la communauté et de la profession.
Sur les 33 cas de formes de solidarités observées 5 cas
,
sont du type l --) l
: 2 cas concernent la production et 3 cas
concernent le social.
L - CHANGEMEI~T. ORGANISATIONS r10DERNES ET UTILISATION
DES RATIONALITES DES STRUCTURES DE SOLIDARITE
=============================================
Si nOllS considérons tout ce qui a rapport aux "places",
et l'amélioration des conditions de travail,
comme faisant partié
de la rubrique de la production,
les formes de manifestation de
solidarité se distribuent finalement ainsi selon les domaines
ou elles agissent:
27/33 dans le domaine de la production et
de l'écoulement
(soit 22/33 pour la production à proprement
parler 3/33 pour l'approvisionnement et 2/33 pour l'écoulement)
et 6/33 dans le domaine social.
Les formes de manifestation de solidarité sont donc
plus massivement présentes et aussi plus intenses dans le
domaine de la production à proprement parler que dans celui
du social et celui de l'écoulement.
... / ...

388
Une intervention au sein de la communauté dont le
but est d'organiser celle-ci,
en vue de lui doter de disposi-
tifs organisationnels,
devant
faciliter la réalisation d'ob-
jectifs communs, doit tenir compte de ces conduites de base,
qUl
membres face aux questions concernant leurs
2aractêrisent ses
apports aux moyens de travail et rnatiêres premi~res ~ l'lisage
de ceux,
à l'6coulement etc . . . .
De même toute intervention organisante au sein de la
communauté doit tenir compte de la contradiction entre d'une
part les besoins exprirn~s par ses membres, et le rappllrt sub-
jectif, affectif et id601ogjque qUE ceux-ci eTltreriennellt
avec
ceux-là et cl' autre part,
l'objectivité
et
l'urgence de
ces besoins et aussi la capacité de la communauté à les tradui-
re en objectifs organisationnels et à prendre en charge ceux-ci.
Par ailleurs,
l'intervention organisante, qui dans
tous les cas dérange toujours son objet,
doit cependant viser
à déranger le moins possible au début du processus de son dé-
roulement les structures informelles,
et conduites existantes
elle doit plut8t chercher à les rationaliser, à les recentrer
et à les uti liser au maximum de leurs capacités f-onctionnelles
et pour cela,
elle doit arriver à dévoiler toutes les motiva-
tions sous jacentes implicites et latentes qui constituent les
ressorts des conduites observées.
... ( ...

389
Pour rendre compte de ces considérations, nOliS pensons
que la relation l
---> T et la relation
T ---) T,
pourraient
être utilisées de la manière suivante dans la communauté
:
l
---) T qui exprime manifestement une relation de solidarité,
exprime aussi implicitement,
de façon latente un rapport d~
pouvoir
(celui de l
sur T)
en même
temps aussi qu 1 i l est
$(\\UTCe
de prestige et bes()in de reconnaissance
; elle peut aussi ;lcrnlet-
tre à l
d'organiser son rapport à T.
T ---) T qui est la manifestation de solidarité la plus sym~­
trique
et aussi la plus organisée parce que mobilisant des res-
sources communes en vue dt:' solutionner des
problèmes commu~s
et collectifs et quj
demandt:' pour se manifester un organis,~ll~llr
peut en se couplant ~vec
1
> T donner une forme d'orgaIli-
sation tenant à la fois compte du désir de prestige,
et de
reconnaissance de ses membres et aussi de la volonté du gruupe
de rester ensemble et de coopérer en vue de la réalisation d'un
objectif commun.
Dans cette forme drorganisation tous les membres de
T géreront en rotation pendant une période déterminée par le
groupe et en conformité avec des normes et des règles fixées
par celui-ci,
la relation T -
T.
Cette forme d'organisatio~
préliminaire aura fonctionnellement
l'avantage d'être une con-
dition d'homogéinisation au sein du groupe des expériences de
gestion sans compter qu'elle peut être un facteur puissant
générateur d'une motivation morale et psychologique à bien
faire et à se conformer aux normes et règles organisationnelles .
.../ ...

390
Il s'agit de canaliser l'esprit de rivalité,
le désir
de pouvoir et de prestige vers des actions positives,
la réali-
sation d'objectifs organisationnels.
A l'issue de chaquepériode de gestion,
le groupe doit
tenir lIDe réunion de critique et d'~valuation et procéder à la
définition de nouve3UX objectifs partiels à atteindre.
Le noyau dirigeant de l'organisation qui devrajt êtr~
constitué ultériellremellt dll terme du cycle de rotation devrait
~tre omposé de membres cJloisis majoritairement par le groupe ell
fonction de crit~res objectifs concernant principalement J'~va­
luation de leurs actioDS pendant leur ]lériode gestion.
Vne telle forme d'organisation serait un appTentiss;J-
ge à l'action organisée
(dans le sens moderne et rationnel du
terme) en tant qu'elle est une combinaison,
une articulatioIl
rationalisée entre les conduites traditionnelles et des objec-
tifs et méthodes organisationnels modernes
:
elle est une voie
de
transition dont l'int~rêt serait qu'elle permet de modifier
progressivement les ocnduites et comportements
traditionnels
tout en les utilisant au mieux transitoirement pour l'intérêt
de l'organisation.
Nous pensons que cette forme d'organisation peut
s'appliquer à tous domaines
(production,
écoulement etc . . . )
et qu'il n'existe pas un ordre de priorité absolue d'applica-
tion en ce qui concerne les différents domaines. C'est seule-
ment en tenant compte de nombre de considérations au préalable
... / ...

391
que l'on peut prendre une d~cision concernant l'ordre chronolo-
gique et fonctionnel d'application;
nature des demandes mani-
festes et charges subjectives qui leur sont attachées, nature
et importance des ressources à dispositions,
résultats escomptés,
conséquences à court et moyen terme etc . . . .

392
C')I_~rrTTl'r
lIT
RECUEIL
DE
DISCOURS
COLLECTIFS
A PROPOS
==========~=================================
DE
L' ORGiil1 i SA TI Ol~
DE
LA
COMMUrlAUTE
======================================
EI~
COOPERA TI VE
===============

'3(13
La coopérative qui semble le type d'organisation le
plus approprié pour résoudre les problèmes de développement
auxquels le métier de la cordonnerie et la communauté des C01--
donniers se trouvent confrontés,
a soulevé à l'évocation de
son nom, des réactions multiples chez les artisans.
Certaines de ces réactions verbales sont rositjv~~
et ce sont alors soit des réactions d'acceptabilité ou ~V(lC.l
tian des avantagés d'une
telle organisation,
ou soit des) l ,11.'-
tions posant les difficultés à devoir surmonter pour sa mis"
ollr
pied, ou des conditions à respecter,
d'autres réactions Sl>nt nv-
gatives et sont, soit des rejets, soit des ~vocations conC2rndilt
ses inconvéniellts.
A - REACTIONS POSrTIVES
=========~===~=====
1 - ACCEPTABILITE -
AVANTAGE
HAvee une coopérative,
nous pourrons peut êtrl:;
avoir la chance d'être regroupés dans un village artisanal ... H
...
,
"Une coopérative nous aiderait à avoir des maga-
sins ou points de vente pour nos chaussures".
!lUne coopérative est un irc:ér.êl
pour nous car
les organismes internationaux n'aident que des regroupements
d'artisans".
. .. / ...

393 Bis
"La coopérative peut nous aider à avoir de meilleurs
outils de travail et aussi de meilleures colles ... IT
...

HAvee la coopérative nous pourrons exporter nos mar-
chandises vers les autres pays cl' Afrique . . . . Il.
IlUne coopérative nous permettrait de produire mieux
et plus, parce que nous pourrions nous regrouper, avoir des
machines et répartir les tâches comme chez BATAil.
HUne coopérative pourrait nous aider à faire réglemen-
er les prix des matières premières que nous vendent les commer-
çants ainsi que l'importation des chaussures ~trangères qlli
concurn:::'TIcent beaucoup nos produits!1.
2.
CONDITION AVANT ACCEPTATION OU
CONSTITUTllli',
11 11
faut que les intéressés (les artisans) ::;02
consultent d'abord à lintêrieur des ateliers avant de donner une
.
"
reponse commune
reponse
.
lINous devons d'abord recueillir les avis de nos
frères ou grands-frères avant de venir à la coopérative".
UNous devons d 1
d abord consulter Mr M.D. qui est
un Conseiller pour la communauté avant de parler cl 1 adhésion.";
... / ...

394
"Si moi, en tant que artisan cordonnier,
je voulais
regrouper la communauté en coopérative,
cela ne marcherai t
pas.
Tout le monde serait contre. Mais si par contre l'initiat]' v
vient de vous, ça peut rnarcher . . . . II
.

!1L'injtiative doit venir des autorités sino11 un ;',-T-
drait beaucoup (l~ temps et d
;
d ' argent 5 faire des démarch~~
' argent 5 faire
des
" ,
peut être n'aboutiraient à aucun résultat
satisfaisant".
"Nous ne voulons pas être utiJ isés par des hommt'
politiques; c'pst pour cela que nous avons peur avec
les
r "pe-
ratives".
l'~OUS nt' voulons pas qu'on nous dise des hjstulrt~
en nous parlant d'aides qui,
souvent ne viennent jamais ...
On a
fait ça à de~ coopératives ... ".
"Nous les artisans cordonniers nous sommes très dlVj-
sés et si nous ne nous entendons pas il sera difficj.le de ,reer
une coopérativell.
tlCréer une
coopérative,
c'est difficile si cela (oit
regrouper plusietlrs ateliers parce que les artisans ne s'el1ten-
dent pas beaucoupll.
"Pour créer une coopérative,
il faudrait un leader qui
soit accepté par tout le monde et qui accepterait aussi de Con-
sacrer son temps à ça".
."/ ' ..

395
3. DIFFICULTES PERCUES POUR LE BON FONCTIONNEMENT D'UNE
COOPERATIVE
llLes réunions à faire ne donnent aucun résultat maté-
riel immédiat et ça nous empêche de nous consacrer à nos Activi-
tés".
irLes artisans sont méfiants . . .
et ils veulent
toujours
avoir un gai.n immédiat et pour ça ils répondent
,
.
Il
répondent peu au
peu
r~lJn10nS
.
"Nous sormnes divisés et TI' avons pas les mêmes
int0rêts
à défendre ... Ce sera donc difficile qu'une coopérative regr()u-
pant tout le monde puisse fonctionner
normalement".
"Certains peuvent rester une semaine sa.ns travailJer
car ils ont
de l'argent et peuvent s'occuper d'autres choses
par contre pour d'autres,
celà n'est pas possible et ils TI t'
pourront pas toujours assister aux r0unions ou faire des démar-
ches pour la coopérative ll
coopérative l •
"Les gens laisseront difficilement leur travail pour
des raisons d'intérêt général",
ilLe fonctionnement d'une coopérative serait difficile
parce que chacun voudrait vendre ses propres produits" .
.. '/ ...

396
B - RËACTlüNS NËGATIVES
===================
1. INCONVENIENTS PERCUS D'UNE COOPERATIVE
HAvee une coopérative'
: l
y aurait des cotisations
à faire et d';llitres dépenses encore ... Ce serait di.fiicile à sup-
porter p,--!U'c' que nous gagnons
très modestement notre vieIl,
"Les artisans refusent
les coopératives a cause
des charges ~ supporter'l.
Ill. e ::; réunions ne nous donnent rien mais p3Y con-
tTe e11125 J1\\)\\\\S empêchent de
travailler ou cl' aller vendre ...
elles I1;JUS l'''lpêchpnt de gagner de l'argent ll
l'argent l •
REJET
HUne coopérative, cela ne nous intéresse pas car
nous savons ce que c ' e s t : nous avons été chassés des campagnes
par les coopératives quand il y avait
l'ONCAD II
l'ONCAD •
IINous ne voulons pas d'une coopérative parce que
nous savons qù'elle ne nous serait d'aucun avantage C3r nous ne
sommes que de pauvres gens sans appuis politiques . . . . !!.

397
CHAPT1 RL
l \\'

T/\\!J,\\
il !~! L/\\I
L ,:\\ 1
J9R
39B
OUTILS ACTUELS DU CORDONNIER TRADITIONNEL
(
- - -
-
-
- - - )
(
)
(OL"IlLS
(OCTILS
DESCRIPTION 1
/ CAR':I.CTEf\\l:)l'Hl'L'-:
CARACTERlSl1l'L'I';
i:"i.\\c'Ilm.
1'O\\C1ION
OI~lGT\\'[
ol"e","
PRODUCTlO:~
PRODUCTlOr; / FOUR.NISSEur.:
FOURNISSEUR
: PRI:{/COUT
PRIX/COUT
: DUREE DE VIE
)
(-----------------:----------------------------------:-------------------
(-----------------:-------------------------------
._---------------
:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
-----------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
(
)
~
\\ Planche ou
dimension variable en bois
JUllIe
léJtJle Je trùva:
LrclV-:l.
TLJ':ail
lC.lv,lil artisanêll
artisan"d
Bûcheron
Bùcheron (sculDteur sur
15 00
- 3 000 F
3 - 5 ans
)
( " a ll uwa "
1t sump
sumç ll ou nizoblanc
l o
local
c a l :
bois)
:
:
)
(
: elle est posée à même le sol
:
:
:
:
:
)
(-----------------:----------------------------------0-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(-----------------:----------------------------------:-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
;
)
)
( Planche à man-
en bois sump
Aiguisoir,
frot-
frc,t-
travai
trav,lj l1 arti3;mal
arti;:;,mal : BGd.eron
Bûcr.eron
200 -
600 F
3 -
5 ans
)
che ou 'ldassu"
'ldassu ll
en forme de gourdin
t02:l1l.'TIt
teJnl.'nt du;
dcr. objet.<;
objet.s
l,le,'))
l,)('.:l]
(sculpteu:
(sculpteuc sur bois)
)
tLn:chants
trnr:cJlants aVec
avec
:
)
lit:
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"L~:1\\)1('
in
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)
-----------------:--------------------
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------------------0---------------------------0------------------ 0-----------------)
-----------)
(
)
( PLOlTIchette
Planchette fu-
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Couteau
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prr,paratiun par
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Commerçant
Commel-çant
700 - 800 F ou
\\
(
couteau de cuisine au
ou cran
racl.d~(:
raCld~(~ du Cl·'.)l,-
cnn,-
1
l 50U
500 - 2 500 F
2 -
j3 mois
(
dlarrêt
d'arrêt
pondu
pon du cuir
pour le tll08"
"108 f1
:
)
)
(-----------------:----------------------------------;-------------------,-------------------:----------------------------;-------------------:-----------------)
(-----------------:----------------------------------:-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
;
)
(
Aler:e
Aler,e ou
Ou
en fer - 5
mm de diam-itre
diamètre
I.J~rc;age
per(,:at.;<" des
travail artiS<i-
artis,1-
Forgeron
200 - 300 F
5 - 6 ans
)
(
" r é/bu ll
ra bu11
llextrémité
l'extrémité nO:-1
nO:1 pointue (',st
(';ot
trClu,s
trous ctilns
dons
le
n,11
!laI local
:
)
)
(
bouclée
..... 1.11
l"1.1i rl-
)
(
lor.g. =~ une dizaine de cm
:
)
(-----------------:----------------------------------,-------------------,-------------------;----------------------------:-------------------0-----------------)
(-----------------:----------------------------------:-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
Narteau
!'larteau
en fer
pn~ss(-'
presse'
apr.2s
après
travail ar:isa-
forgeron
1 000 ~- 2 000 F
:
+ 10 ans
)
(
:
tête
tete carrée ou arr(lnùi~
arror,lIie
c.oll.:J.ge
coll.Jge des
n;ll
1):11 local
: )
)
(
dimension variable
pièc~s
picces
)
(-----------------;----------------------------------;-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------;-----------------)
(-----------------:----------------------------------:-------------------:-------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
Cire
en boule: une cinquélfllaine
cinqud!llaine
peur fac.iliter
faciliter
tTDvail
rravail local
paysans aviculteurs
300 - 500 F
F :
l
l
a
an
n
)
(
de grammes
le perçage des
artisanal
: )
)
(
trous dans le
)
(
(
c
u
i
Cili r
r
:
:
)
(-----------------,----------------------------------,-------------------,-------------------0----------------------------o-------------------o-----------------j
(-----------------:---------------------------------- ,------------------- -------------------:----------------------------:-------------------:-----------------)
(
Pinceau
un ti~e
t1.ge avec Ln bout
!J(Jut ,ltet~iLl"
lllét:,fL,"
's'Tvanc
Sl'rValiC ;1~1 ~'L;1Iêl
,:'calel-
n',lvail
l·rdv~il ~nLisd-
dl-Lisd-
artisan
art.i:san cordonnier
cordonnieT
a
0
l mois
)
(
ficelé à une extn"mi
02xtTl"mi r,'
L.l
Ll culle
c'Jlle sur L~'
].,
:ldl
"dl
lllCl1
ille.lI
l.u.t-même
lui~rr,ëme
)
(
cu. r
l"u~r
'u
,lU
:Jllt"n
:Hltn'
)
(
111.'11 i:' l'V
)
)
(-----------------:----------------------------------"---------------
------------------------------------------------------------------- 0-----------------)
-------------'----------------------------:-------------------:-----------------)
Forme en bois
en bois "sump"
" sump ll
mise en
0n
forme de
LLdVd-.i l
lri.lv.1il
ctrtisa-
cHtisa-
B:::i.chercn
B:J.chercn
l
000 F
+
5 ans
)
taillé
la chaussure
ctlauSSUr<2
ne' l
niil local
~Dcal
(sculpteur ~ur
sur bois)
)
- - - - - - - - ' - - - - - - - - - - - ' - - - - - - - - - ' ' - - - - - - )
~-------'-----------'---------'-----)

TABLEAl' 1T
Il
,99
>99
MATIERES PREMIERES ACTUELLES AU CORDONNIER TRADITIONNEL
c
( - - - - - - - - - , - - - - - - - - - - - - - - - : - - - - - - - . , - - - - - - - - - - - ; - - - - - - - - - - - - - : - - - - - - - . , - - - - - - - - )
)
( ACCESSOIRES OU
DESCRIPTION 1 CARACTERISTIQUES
FO;-.JCTION
FO;-.JCT IlY,
OI{1GIl~E
OJ<1l;HiE
PRODUCTEUR/FOURNISSEUR
PRIX
DUREE DE VIE
)
( '!ATlERES
'!ATIERES PRE-
)
( MIERES
)
(-----------------,----------------------------------
(-----------------,---------------------
-------
--------------------,-------------------,----------------------------,-------------------
-------------
,-----------------)
-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
(
)
(
Cuir
pe3u
peau de boeuf,
cll~:vrê
cl1~:vrê <":'l1
l'U
p\\lur la
1:1
FdbrLu,-
fc.JbcLl:a-
~-fa\\'ilj 1
~-f<n'ill-l drll::;.-l-
dYLic;:'1-
Artisfln
Artis~1n ,_'urdonnier
cordonnier
900 F lE'
)
(
mout.on
mouton
tann"'t"
tat1n~;t:'
L Ll'Tl
LLl'TI
cil'
l l l '
]' l'iilpe i -
J'cmpci-
'l:i1
l "l:l,1
'l:i11,'l,1
ll11 -I1IL'111(
111i-llli:'III.::
dU
"u ITIduYeSf]llC."
lTIélUYt>S!1uc"
coupon
)
(
(
g
l
1
l
"
gl1l".
.
SE:ll.'(' 11
,;èTlIL'll (è
e Ull
)
(
\\dl(\\11
): ciIc'll
~)U
l'li
LH1:i'~'1-'_.~:
i.,-·m:i '~T'.'.~:
)
(-----------------,-------------------------------
- - -
--------------- -------------------- -----------------------------,-------------------,-----------------)
--------------------,----------------------------:-------------------,-----------------)
(
)
(Nerfs de
dl'
boeuf
il est sécb~'
séch~ et C~'dllit
rt'rluit
pr',
r'i
.1;T011L
I-i~.I;TL'llL .,>CCr','dlll
,;("YV<-lill
,Td\\',1il
1:LJ\\'.1ii
artÎ:-i;l-
arti~il-
arri::;,'11
;l1-tiSdIl
cordonnier
coye](}nnicr
0 F
)
(
l:ilament
J'i lament
Je'
t'LI
i Ll
l!C
de Ç~'l1t.:lI-
C~\\UlLT-
!ldi
!Li]
l"c]]
h'cal
lui-même
lui-mê.llle
)
(
p
(
-
p
)
(-----------------,----------------------------------
(-----------------:---------------------------------- ---------------------------------------
----------------- ._---------------
---------------------------,-------------------,-----------------)
----------------------------:-------------------:----- ------------)
(
)
(
C(llle
Colle
Compùsition
:
Composition:
Ljrine
ldrine d~
dl.::
l.Jl,-
L,l,
'11:'-l
':"1 L-I s" ,j(~~. pic'-
,--rJ.\\'cül
;ll~Lo;a-
artisan cvrdonl1icr
500 -
600 F
6 mois
)
IS " ,je.':;. pl"-
'..rJ.\\'cül ;inisa-
artl.san Cùrdonlüe::r
500 -
600 F
6 mois
(
ùu de münioc
manioc -+-
--t-
l'au""
cau"" vina}t,rc
vinaigre:
ClOS
ClOS de ('1!11-
nli.r
'"];-11
'1,"1]
10c:i1
l<)<;:jl
luj~même
luj,-même
(pour 1 Kg de
)
(
et on chauffe.
f a
farine»
r i n e » )
(
gomme arabique
:
)
(
(
-'-
,
))

TABLEAlO
[J r
400
CHANGEMEIlT
CHANC:EMENT TNTRI1])\\'TT
TNTRI11Jl'TT DANS
D,\\NS LES nl'TILS
''l'TILS
DE LA CORDONNERIE TRADITlI1NNELLF
TRADITInNNELLF
)
(
OUTILS OU ~~TIERES
MATIERES PREMIERES ANCIENS
:
EMPLOI
ACTUEL
: OUTILS OU ~TIERES
MATIERES SUBSTITUTIFS
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
(
Planchette fusiforme â
à manche ou
: Uniquement dans la fabrication
:
Papier de verre
)
(
"kepende"
: de b a b
babouches o u c h e s :
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
(
Alène ou "rabu"
: Uniquement dans la fabrication
:
Emporte-pièce
)
(
: des babouches
:
Hachine à coudre
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
(
Cire
:
Uniquement dans la fabrication
;
)
(
:
des b a b
babouches o u c h e s :
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
( Cuir
:
Surtout dans la fabrication
:
Simile -
cuir, crêpe,
caout-
)
(
de babouches
:
chouc
choue plein
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
( Nerfs de boeuf
:
Emploi abandonné
:
Fil de coton ou de soie
)
(
:
:
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
(Colle
à base de farine
:
Emploi abandonné
:
Colle forte de fabrication
)
(
:
:
industrielle
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
( Pinceau artisanal
:
Emploi abandonné
:
Pinceau ou brosse de fabrica-
)
(
:
:
tion industrielle
)
(------------------------------------------:-----------------------------------:----------------------------------)
(
Forme
:
Emploi abandonné
:
Forme de fabrication indus-
)
(
:
:
trielle
t r i e l l e
)
(
:
:
)

TABLEAU
TARLEA\\J IV
TV
401
OUTILS ET MOYl::NS
MOYENS DE TRAVAIL DES CORDONNIERS DE TlLENE
TILENE
(
,
- - - -
)
(
)
( OUTILS !MOYENS
OUTILS/MOYENS
DESCRIPTION/CARACTERISTIQUES
FONCTION
ORiGiNE
PRODUCTION/FOURNISSEUR,
PRODUCTION/FOURNISSEUR
PRIX
DUREE DE VIE
)
( DE TRAVAIL
,
)
(-----------------,----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
(-----------------,----------------------------------,-----------------
-----------------,----------------------------,-------------------:-----------------)
\\( Planche ou
Dimensions variables
fable
Table de [ra-
Travail artisa-
arcisa-
bGcheron - sculpteur
1
l 500 F - 3 OOOF:
OOOF
3 - 5 ans
)
(
l1 a ll
l l uwa
en bois "5
"S ump " ou mirobJanc
vail
nal local
ou "laobé"
"laobél!
:
)
)
(
elle est posée à même
memE'
le sol
:
:
)
(-----------------,----------------------------------,------------------- ,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
,-------------------,----------------------------,-------------------:-----------------)
( Planchette à
ai,guisoir -
travail
trav~il artisa-
bGcherons
bûcherons (Scllipteur
(sc1llpteur
200 -
600F
6DOF
3 - 5 ans
)
(manche ou
DU
~l"c)lt~jn('\\~t
~l"c~'t,~",;nc\\~t ,k"
,k:,
'"j:
" , j :
:,'~:dl
sur
huis)
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T1dassu"
T1dassul'
Lj.-I'
i;j'-i:-'
Lrl,:\\-
Lc' :1-
)
(
'~'~I.1:~!
,~ll.1:~!-'; cnl'L
,JV,'L
J'..
~I'..
))
(
. ,~,. ~ ",
!.
l' i :
)
(---------------~-:-----------------------
(-----------------,--------------------------- -
-------------
-------.---------------------------
---------
-------------------- ,-------------------,-----------------)
--------------------:-----------------)
(
Planchette lU-
en lluis
louis
"sump"
tL'J""j 1-
tL-J""il"
l'II
~ql
1
1 LlI/:llL
Ll\\,:HL
lrt:1ScJ-
:.lrtjscJ-
lluc]li..::roll
LJuCIlC'rùll \\SCU1I'tI2UI
(Scul1'teur
4UU
F
2. - 3 ans
)
(
siforme d
à
pointue il une extr~mit~
extT-~m1t':'
1 i::; Ci ,~', i. 1-
11,1;
is:"~'i.l-
1\\,1;
: l'Cd]
:"CdJ
sur hois)
.
)
(
manche
)
)
)
(
"képendé"
)
(-----------------,----------------------------------
(-----------------,-------------------------------- - ------------------
------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
--------------------,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
(
Pied en fer
hauteur variable
Importéltion
ImportF.ltion
Commerçant
15 000 F
)
(
socle en fer ou ,-~Il
,-~ll bois
Appui
travail artisa-
artis;)-
mécaniciens - sùudeur
: Indéterminée
)
(
(
llal
Il~Jl
loc.11
loc,1] :i
000 F
F
))
(
part: i r
iJ<Jnir de
dl'
piL'L'--s
pil.'L'_:S
(
\\.le
Jo ré:cupération
récuperation
(
de V0~licules
V~llicules
(---.-------------:-------------------------------~--;-------------------:--------------'----:--------------
--------------:-------------------:----------------0
.•
(-----------------:----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,-------------------:-----------------,
(
Forme
en bois
mise en forme
:
)
(
tailles et formes variables
de chaussure
importation
commerçants
1 200 F/paire
indéterminée)
(-----------------,----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
(-----------------:----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
(
Marteaux
en fer
presse après
travail artisa-
forgerons
)
(
tête carrée ou arrondie
collage des
naI
nal lücal
local
l 000 F - 2 000 F
F :
indéterminée
)
(
dimensions variables
m a
matériaux t t ' > r i a u x :
: )
)
(
fixation des
)
(
ri ve t etc...
tete. . .
)
(-----------------,----------------------------------,------------------- ,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
,------------------- ,----------------------------,-------------------,-----------------)
( Paire de c i - e n acier
découpage de
"
)
( seaux ou
longueurs vdriabh~s
pi0:ces
pièces de cal-ton
Imp(n-cdtion
1111[JClrcdtion
commerçants
indéterminée
)
( ciseau de coupe
servant de
)
(
(
è i t ' m c 1 l 0
,.;t'mcl1iO'
))
(-----------------,---------------------------------
(-----------------,-----------------
--------------------
----------------------------------
,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
-----------------,----------------------------,-------------------:-----------------)
- -
.. -1 _..
- / - . -

TABLEAU V
402
OUTILS ET MO,ENS
MOYENS DE TRAVAIL DES CORDONNHRS
CORDÜNNl~RS
DE TILENE
( - - - - - - - - , - - - - - - - - - - - - - , - - - - - - - - - - - : - - - - - - - : - - - - - - - - - - ; - - - - - - - - - , - - - - - - .
(OUTILS
DESCRIPTIO,/CARACTERISIIQUES
FONCTiON
ORIGINE
PRODUClEUR/FOURNISSEU,
?RIX/COUI
DUREE DE VIE
)
(----------.--.-._,----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,--------_._--------,-----------------)
(
Pince un~ver-
en acier
lwntage de l'em-
im~uL·tation
commen'ant~
indéterminée
)
(
selle
peigne sur 1,]
)
(
semelle
:
:
)
(--------------_._,-_.----._-----------------_._-----,-------------------,-------------------,------._--------------------,-------------------:-----------------)
(
Lime "lime Ca-
f'n élc~er
-::iguisage par
importation
commerçants
l
300 - l
500 F
3 - 6 mois
)
(
nada ll ou "lime
dimensions favor<:Jbles
frcH.tl:'llll2IIL
de::;
:
)
(
cl'üisée fr
instrtlments
:
)
(
truncliants
:
)
(-----------------,----------------------------------,-------------------,
-----------
--------------------------:-------------------,-----------------)
(
COuteau
en acier
(],:coupage dE' Id
_lilp(l/"uti on
commerç<:mts
:
700 - 800 F ou
)
(
"satu"
"108"
couteau de cuisj Ill' L'-.! L_Cd:.
,)] ll'
p1,1-'-: il i ','l'
: l
500 - 2 500 F
2 -
"3 mois
)
(
11608" "45"
d'arret
Cl"~'pV etc...
:
pour le 0I10,~'1
)
(-----------------,--------------------------------- ,-------------------,
-----------------,---------------------------,-------------------,-----------------)
(
Bresse cu
en soie
o'c·nJd'lL
.:d-iLT
,i:11),»)~:j\\.L(_,rl
C"!11nll.'l-t,:anLs
2.50 F - 40U F
3 -
6 mois
)
(
pinceau
dimensions variable~
]i. Ct)ile s~r iH
.
)
tl.'i le, crêp',:
',~.
)
-----------------,----------------------------------,-------------------,---------------,----------------------------,-------------------:-----------------)
Emporte-pièce
en fEr
faire des fentes
tr:!vail
tLlVail artisa-
forgeron
300
600 F
E - 8 muis
)
ou "pax.oirl!
ftpox.oir"
bouts carre,
carn',
,r
(lLj
(iLi
Il'Ile!
tunc-l,
.~'lJ
.~, q
ripe;
cl <H':
t'rou::;
l '\\1
Sllr
s:~1.11-
nal 1ücal
lucal
commerçants
700 ~ l 200 F
:
indéterminée
)
dimellsions
dimènsion~
du
lIu büllt
bl,\\l1t '.ari.:,f-1<:'o
var i.;ü l <:',
,,JJ :;L'fnC:'J
::vrm~j le
li.'
pour
)Jour
.mpvl-rdtÎcJl)
)
en acier
i;,j
:',}} rv
rl' passee]
pélssee J es
)
~d:ljlT,,"'S
:
)
-----------------,----------------------------------,------------------_._------ -----------,----------------------------,------------------- ,-----------------)
Alène ou
en fer
pcrt,:2ge ue trous
uav<:lil artis.:J-
forgETl'ns
2:)0 ~ 300 F
indéterminée)
Ilrabu"
llextrémit~ non pointu!;'
dilns le cuir ot.;
lwl lucal
)
est bouclée
la semelle
)
-----------------,----------------------------------,-------------------:-------------------:----------------------------,-------------------,-----------------)
(
Aiguille ou
en fer (fil de fer cie L mm
passage de la-
triwall artisw
artisan c0n10111üer
25 -
50 F
indéterminée
)
(
" puso "
diamètre)
niÈ"n:s dans léS
nal local
lui ~lJlêlJle
: )
(
longueur d lune quinzai.ne de
fentes fdites
:
)
(
centimètres
sur les pièces
)
(
:
ue t o i l e : :
)
(-----------------,--------------------_._-----------,------------------- ,------------------- ,-_._------------------------,-------------------:-----------------)
{
Nzrque décu-
en fer
d"'coratiü:l SUl
tl".lv,li 1 ;jrtisa~
forgeron
200 -
300 F
indétérminée)
(
rstive ou
tige ~er munie de Lrui~ ~ointe~:
la selnelle dp~
nol local
-
)
(
11buyodo"
à une extrémité
sandales
:
)
(-----------------,----------------------------------,-------------------,-------------------,----------------------------,-------------------,-----------------)
... /"
/
.
...

TABLEAU VI (sur le
tab 1 è.1.U
tab1cau
\\1)
\\')
403
(
)
(
C~seau
Ciseau plat
fer
fendage par
tr::1vail
travail artisa-
forgeron
500 - 600 F
)
(
ou "fidiul!
"fidiu"
forme rectangulaire
endroit de piè-
na]
nal
local
)
(
manié d'une tête à une
ces de toile :
)
(\\
extrémité
passage de la-
indéterminée
)
(
nières de cou-
)
(
leurs différen-
)
(
tes eot.re
entre les
)
1
(
fcntl'Oi
fcntl'o;
)
\\
-------------
(-------------
----------------------------------------------------- ---------------------------------------------------------------------,-----------------)
------------------------------------------------------------------------ -------------------------------------------------,-----------------)
((
~lachine
~1achine à cou-
machine à pédale ancien
-:uuture
~CJl_lturc d<2s
des
r~rarr.eur
r~parteur de machines
30 DaO-GO
000-60 000 F
)
(
dre Tldouble
P'I
"double
modèle (machine
(machinp d'Uccdsi~nl
d'JL:Cd;.;i,_'!-')
i1i('~c"_-;
;Ji,:"c"_'s
f'.'ri'LJI'·
f,_,jî'UiJ"
'ï" '
i .)! ~
.)::
;,
~ ,~,)udr,~·
c()udr~
jndéterminée
ind0termin6e
)
(
singet- ll
singer"
l '02r.llwi.~nl',
'02r.lp,'i~n,-', "Il:
,)l:
'-.:l)lnllh-'Tl;ants
cl)tnnh-'n,~lilts
)
)
(
(
,~'
,'("
ia
J'!
:;t'illE';l~
;';Pl1le: 1,
~'l
l't
)
(
-~:\\'.~
.,'.-;
J, III
dl l L"
i
r ....',
,'rt..'
)
-
0
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - : - - - - - - - - - - - - - - - - -
_ _
:
~j
(--------
(-------------
----------------------------:-------------------:---~- -----------~j

TABLEAU VTT (sur le tableau
tab leau V)
404
( - - - - - - , - - - - - - - - - - - - - - c - -
(
)
(
Tampon
en fer
["C\\lI-odLC
l'C'Jlroduc (Lon
t _OTl
l~il~i]tl
tLlV:lil
arti~a­
art].s~l~
:nenuisier
menuisier méld=-liqu~,
mélallique)
l
000 ..
F
indÉterminée
indéterminée
)
(
,j'un
J'un p.om
liom de:
d,..::
na]
na)
local
J(\\cal
soudeur
)
((
],__ '11"11 i ss\\;:'U[
J,.HllTiss\\;:,Ul
lil-
l'il:
)
(
U [_
Li!,
110111.'>
l1U1I1S
1:-";11-
ir~\\ll-
)
(
(
-.'~_j,c;
~clj,,; ou italiel~
i:a1icll
)
(-----------------,----------------------------
(----------------_._-----------------------------
-- ----- ----------------,-------------------:-----------------)
,
-------------------- ,-------------------:-----------------)
(
Atp1
Atel ier
jer
l'n
~n b.oulL;ue
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~Il J1l1-
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i':',:lrt~1
i,;"rt
rs
~l-rs je
di.."
L,~
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propriétaire
prl'lHiét3ire niest
n'es:
)
(
toit
telit en fibrociment
\\~"d-i:1,!
\\'!\\",l"i ni!
DdS
nds un <;r~isan
<lrrisan
: -:0
10 000-35 000 F
: indéterminée
)
,
.
l
)
\\
dillll2n:;iul1
clilnensiul1 vdr.idlJ1,·
var);\\blc' ~'r
~'l
::'tll)l'I--
Slllll'l--
.11';
' l , ' \\ '1I~- h,
(
fiçie
fi2i~ cornp.isc
Cllm[lrise entre
erltre ':J
~ Il)''
Il';' "'L
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~~
; l
\\1
j l':;
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' 0 " ,
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l
)
(
"2.0
2.0 m2
l -;
mZ
[~ Ss
)
)
( - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

TABLEAU VIII
405
ACCESSOIRS ET NATIERES
HATIERES PREMIERES
PREHIERES UTILISES PAR LES CORDONNIERS DE TlLENE
TILENE
(
- - -
)
(
)
( MAIIERES PREMIERES
DESCRIPTION 1 CARACTERISTIQUES
FONCTlO\\
FONCTIO~
ORIGINE
PRODUCTEUR 1
j
FOURNISSEUR
PRIX
)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(--------------------:-------------------------------------------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(
Simili cuir ou
revers en toile ou mati l;r'~
mat1(:;r,.; qui.
qui,
Rccouvreloent
RccoUVrelJ)el~t
Lmpurt3tiull
Impcjrt:'ltLUll
Commerçants
Commer(,.'3Ilts
l
500 - 1
l
800 F/m
)
(
!ItoU
!Itoil e l! "toile
prend bien la c()l1e
colle
(ies pi.&ces
n,;&ci:'s dt'
)
(
tex ll
tex
lttaile
"toile akai lt
akai"
revers en matièr~"
matière rlustlclw'
pl:.Jstiqul'
cartull
L-;lrt~)ll dt~'CC;\\lrH'>
d,"cc~\\lr("
)
)
(
"n
c'n
.s,~mL'lh
.s,~mL'lll
)
(--------------------:-----------------------------------
(--------------------:--------------------- ------
:------------
----------
------:------------------:------------------------------:---------------------------)
---------------------:------------------------------:---------------------------)
\\
(
Crêpe
Ct-épe
pièces ,Jt'
Uf2
l:i:nc~:lSil)ns
L:i.I'c:lsiuns \\'LJri.~1 !l
vLJri.tb), '
ir'L,';:vrC'nK'I\\~
i-C'l'\\_';:vr('nKIl~ (!t.'
<1",
!IOlpl.lrlatll111
11!lj!url:ltll111
C")IOInerçants
L.jJflllK·rçants
PF'ce
Pil!ce de O,S
OJ~ xx 20 xx
)
)
(
les num<21-u-"
numéru::i [)ol"l::és
l'Ol"l:02S
ilh~i(J;ll"l"ll
illc;L'i,I('lll
J~\\
l~l :i".'ii],'·ll(
"c,:)'-ll(
,'1'
u,005
0,005 m:J
==
)
(
111"paissCllr
111:'paL,scllr dl'
\\k
Id
Id pi,'c\\'
pi;'Cl
L
'L
l-~·'
l-~', l'"
p,'
,lu
<lu 1.11"]1
1,1"'11
J
')
}O()
h)(J -
J SOU
500 F
)
l
nU
n"
5 à
5 mn.
mm l1'èpais.sL'llr
d'èpais3L'llr
)
(--------------------,------------------------------------------------------,------------------:------------------------------,---------------------------)
(--------------------:-----------------------------------
--------------------------- ---------------------------------------:---------------------------)
f.(
Caoutchouc plein
plus résistant que la cr(~rt'
crÈ:pt'-
t-ecouvrem",lli:
t-ecouvn'mt'-Il,'~ dl
lil
Impc,nal:iol1
ImportiltL"ll
COl11èrçants
Comerçants
piecè
pii;>ce de l
X 1,25 m
)
(
la semelle cc
;.'(
:..
4 000 F
)
(
ûU
du talon
)
(--------------------:-----------------------------------,-------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(
Cuir
toile ordinaire
doublure
Importation
Commerçants
1 200 F/m
)
(
Toile
épaisseur: :..
4 mm
doublure
Jmportation
lmportLltion
Commerçants
1000
l 000 F/m
)
(
Eponge
)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------,------------------:------------------------------,---------------------------)
(--------------------:-----------------------------------:------------------- :------------------:------------------------------:---------------------------
(
Colle
Boites de gnmJeur
grandeur diLFérC'ntc'
di[f~r('nte
collage
L'ollage des
1
l kg colle:
colle
: 1 100 F
)
(
pi_È~ccs l,-,rm,'liit
[ormi.llit
Imp('rt<ltion
lmport;ltü'n
Commerçant",
Commerr"ant::;
0,7
850
~:io F
)
l
(
i'cmpeigne,
i'cmpeignt'. l,--'s
l,-'s
0,5
600 F
)
1
lanières,
la
1<..1
)
semelle,
le ta-
)
(
lon
Ion
:
)
)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------,------------------:------------------------------:---------------------------)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(
Cambrure
en acier
faire épousèr
épouser à
<~
Importation
Commerçants
25 F/paire
)
(
la semelle la
)
(
forme de la
)
(
courbure du jlied
pied
)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------:------------------:------------------------------ ,---------------------------)
(--------------------:-----------------------------------:-------------------:------------------:------------------------------:---------------------------)
(
Talon en bois ou
en bois
amélioratiull
<..lméliorati'il1
tLavail
t.ravail
lucal
:-!L'nui:iièr
~lcnuisier-
75 F - 150 F/paire
)
(
"coquette" ou
hauteur varLlblt.'
vi1J:1<..lult.'
'.hj
du
lalun
Lalun
Irtisdndl
,lrti~dluj
)
l
(
matière pld:otique
pldstigue
clllpurlaLiuiI
:lllpL-TLaLiun
)
(------------ --- ---- -: ---- ---------- -- - ---- - - ---
(--------------------:------------------------- -- - -
----
- - - - - - - - - - -- - - -
---------
- - - - - -- --- ---- - - - - -:
--------------- -- -- -- - -- --- -- -- -
--------------- ---- -- --- - ---, ---------------------------)
-----------:---------------------------)
(
C[lrtlln
Cartl'll
ri,"Cl:'S
pi,"<";c,'s
,1e
(il':ni'ilsi,111
di:nl'ilsi<lll
'11-i~II,;
'lli~II,;
' . t i i i s , l i i,·'
,.(ili~,lli,"
il:lj,,,,-t.ït
il:lj'",-t;ltiL'l
,'mpll'\\"'S
"mpl,,\\'(',>,
d'IIII"
d',III'
lI:;jrH'
'1.';jrH'
d"
dl'
pi(\\cl'
pi,"cv de'
l,55
1,55 x 1 m2
m
)
(
~'pdisseur
t:'pdlsseur dl'
de
l
mm envit'ull
envir')1l
COlllnie
COlllnle
:-;emv)
seml"J 1<'
Il'
JabricatiDll
Jabrio..:atic'll de
dt:' vi11isf'
valise
==
2')0
250 F lIes
(les pièces
)
(
(objet r~cup":T'~)
r~cupCr,~)
sont des chutes)
)
(--------------------:-------------------------------
--------------------
------------------ -------------------,------------------------------:---------------------------)
------------------:------------------------------:---------------------------)
(
Carton cir(
cirC
utili~;jLtllll
utili:~:ILi,}ll
Lmpurt3tiUll
lJ~rurtatLOll
CUJ1linL"t''':Llnt~
CUllllllL:l-<;<..lnts
pièces de 1,4 x 1,15::
)
(
ou "lése"
"lése l '
C\\lmme
c\\)mme
seml'Jl,'
seml'Jli.'
500 F
)
(
)

TABLEAU IX
;'.Oh
CIWl ,:<DICiI'!'i,' Dl F,\\lmll:XllUh D'L'NI. SANDALE purI{ H()M~!E
TYP!';
:)U:l
b,\\!5ULiU-IL
(
ACCESSOIRES OU
MESURES/QUANTITE
PRIX
QCANTITE
QUANTITE DE PRUDUITS
PRODUITS
COUI
PRIX DE
NBRE DE PAIRES
)
( MATIERES PREMIE-
J)' ACHAT
D'ACHAT
FAJJ!UQUES
fAHKIQULS NATURE
NATUKE
UN 1TAIRE
UNITAIRE
VENTE
FABRIQUES/JOUR
)
(
res
;
; ;
:
:
:
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(
Simili cuir
:
l,50 x 1 m2
m
:
1 800 F:
6 paires de semi
:
300 F
:
:
seul
)
(
ou Toile Tex
:
: :
babouches
:
:
:
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-._---------------)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
( Toile de doublure:
longueur 1 m
:
1
l 200 F:
F:
6 paires
:
200 F
:
:
3 paires
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(
Eponge
:
épaisseur
4 mIT.:
1 000 f :
6 paires
pail'ès
:
166 J 70
166,70 F
:
:
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(Caoutchouc
(
Caoutchouc
:
1,25 x 1 m2
m
.,
4 000 F
F :
20 paires de semel-:
semel-
200 F
F
:
: avec apprentis
)
(
p l
pleirr e i n :
: :
les
:
:
:
)
(
Crèpe
:
1/4 de plece
:
1 000 F:
F
10 paires de talon
:
100
lOO F
F
:
:
5 paires
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(
Colle l!Appolo
'!Appolo
l":
Boite de
Je
1 kg
k,\\",
1 OUU
1000 r :
(;
6 p<:-dr'-':--i
pa-ir'-':--i
Je
de
semi
:
183,40 fF
:
:
)
(
(
:
babouches
b~bt)tjctl~S
: :
)
(------------------:------------------:----------:----------------------;-----------:-------------:-----------------)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(
Couture des
:
:
:
;
)
(
dessus et
2~)
)') F
r
:
lL paire
:
2.5 F
F
:
:
)
(
semelles
:
:
:
)
(
:
:
:
)
)
Coût unitaire indicatif
1175,10F
1 175,10 F
1300 -
1 400 F

-
l
t
.•....
·}K''~~
TABLEAU X
407
, )
407
.~
COUT INDICATIF DE FABRICATION D'UNE SANDALE POUR DAME - HOMME
TYPE : SANDALE SIMPLE
(
:
: :
:
:
:
)
( ACCESSOIRES OU
:
MESURES/QUANTIE:
MESURES/QUANTIE
PRIX
: QUANTITE DE PRODUITS:
PRODUITS
COUT
:
PRIX DE
: NBRE DE PAIRES
)
( MATIERES PREMIE- :
: D'ACHAT
: FABRIQUES - NATURE
: UNITAIRE:
UNITAIRE
VENTE
: FABRIQUES/JOUR
)
FABRIQUES/JOUR)
(
R
RES E S :
: :
: : :
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
( Simili-cuir ou
:
l,50 X 1 m2
m'
::
18 000 F : 15 paires de sanda-
:
120 F
:
:
Seul:
S e u l : )
( "Toile Tex ll
Tex
:
;
:
:
les simples
.simples
;
:
:
)
~:
,.
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:
)
( Crèpe nO 5
: 1,20
1, 20 x 0,80 m2
m
:
3 500 F : 25 paires de semelles:
140 F
:
:
6 paires
)
"'.
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------;-----------------)
(
Colle "Appolo 1":
Boite de 1 kg
:
1 100 F : 10 paires de sanda-
:
110
lia F
:
: Avec apprenti: )
(
:
: :
les simples
:
:
:
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:
)
(
Carton ciré ou
: 1,42 x
x l , 15
1,15 m2
m
:
500 F : 35 paires de semelles:
14,30 F
:
: la paires
)
(
" l é
Illésé" s é " :
: :
: : :
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
( Insigne de déco- :
2
:
50 F:
F
1 paire de sandales;
sandales
50 F
:
:
)
( r a t
ration i o n :
: :
simple
:
:
:
)
( T a m
Tampon
p o n :
:
10 F:
F
1 paire de semelles:
semelles
la F
:
:
)
(------------------:------------------:----------:----------------------:-----------:-------------:-----------------)
(
TOTAL COUT UNITAIRE INDICATIF
: 444,30 F
: 600 - 700 F :
)
(
:
:
:
)
~-

TABLEAU XI
408
REPARTITION DES MEMBRES SELON LEUR AGE
)
AGE
NOMBRE D'ARTISANS
)
----------------------:----------------------:------------------:------------------)
18 ans
3
3 , 75 %
)
----------------------:----------------------:------------------:------------------)
19 - 23 ans
14
17,5
%
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
24 - 28 ans
14
17,5
%
7J, 75 %
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
29-33ans
15
18,75%
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
34 - 38 ans
16
20
%
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
39 - 43 ans
6
7,5
%
8f, 25 %
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
44 - 48 ans
2
2,5
%
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
49 - 53 ans
3
3,75 %
)
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
54 - 58 ans
5
6,25 %
)
-----------------------:----------------------:-------------------:------------------)
59-63ans
1
1,25%
8 , 7 5 % )
-----------------------:----------------------:------------------:------------------)
70 ans
1
1,25%
)
- - - ' - - - - - - - - - - )

409
VEME PARTIE
INTERVENTION DANS
LES COOPERATIVES

410
APPROCHE METHODOLOGIQUE POUR LA
CREATION DE COOPERATIVE~URBAINESARTISANALE)

411
CHAPITRE l - OBJET DE L'INTERVENTION
Après la mise sur pied de la coopérative des artisans
cordonniers de Talence, le Bureau Régional de l'O.I.T. de DAKAR
nous confia dans l'air de ses projets en cours de réalisation
dans le secteur de l'artisanat et qui consistait à apporter par
l'entremise des chambres de métiers un appui technique et
technologique aux artisans (projet sen/B2/00l dont le directeur
est P. Belhomme) la double mission d'aider à l'identification
des facteurs de résistance au changement dans ce secteur et
d'organiser les artisans urbains de production et de service en
coopératives. Notre zone d'action concernait les villes et la
population concernée par notre action étaient les artisans de pro-
duction et de service proches des chambres de métiers régionales
c'est à dire l'ensemble des artisans de production et de service
titulaires de leur carte professionnelle d'artisan. Certains de
ces artisans dans certaines régions étaient déjà organisées en
coopérative mais quiau bout de quelques mois d'euphorie de leur
membre alimentéé
par un vague espoir suscités par des promesses
non moins vagues des autorités administratives des régions d'implan-
Lation de trouver à ces coopératives des marchés ou une source
de financement pour leur équipement, étaient tombées en léthargie
du point de vue de leur fonctionnement. D'autres artisans qui
peuvent être organisés ou non en amicale ou association d'entraide
quelconque, n'avaient jamais encore fait l'expérience d'une parti-
cipation coopérative~ous ces artisans qu'ils aient été organisés
en coopératives OUnon pensaient qu'il fallait aider à la mise sur
pied de nouvelles coopératives ou faire faire réorganiser les
coopératives déjà existantes que les ressources d'une coopérative
devaient provenir d'une aide offerte de l'extérieur et que son

développement dépendait des interventions de l'Etat:
l'Etat
devait intervenir auprès des banques dela place afin que des
facilités de crédit soient accordées aux coopératives, de même
qu'il devait intervenir auprès des chefs de service administra-
tifs et des commissions régionales d'attribution des marchés pu-
blics afin que des marchés puissent être confiés aux coopératives
sans qu'elles n'aient besoin de satisfaire aux mêmes critères
que les entreprises privées qui soumissionnent à ces marchés.
Cette mission qui nous était confiée avait comme
finalité la mise en oeuvre d'un processus à la fois collectif
et dynamique pouvant à moyen terme générer chez les artisans
désirant s'organiser en coopérative la prise de conscience de
la nécessité de prendre en charge eux mêmes le développement de
leur coopérative. Pour arriver à cette fin, il fallait rompre
avec
la tradition qui jusque naguère voulait que les coopératives
qu'elles soient urbaines ou ruraless~ient
le produit d'une
volonté politique, c'est à dire créées à l'initiative de l'Etat
ou de personnalités locales poursuivant des buts manifestes ou
occultes étrangères aux préoccupations de promotions sociales
ou économiques de~coopérateurs.
Cette mission a été accomplie sur deux ans. Deux ans durant
lesquelles nous avons accompli beaucoup de déplacements à partir
de DAKAR en direction
des ch.fs lieux de différentes régions du
SENEGAL : KAOLOCK, THIES, DIOURBEL, TAMBACOUNDA, ZIGUINCHOR, LO~GA.

413
CHAPITRE II - DEMARCHE METHODOLOGIQUE
Nous avons utilisé une méthodologie qui se décompose
en cinq
étages succeSSlves étalées dans le temps dont chacune
a un contenu et un objectif spécifique. Nous désignerons chaque
étape par l'objectif, qu'elle
vise. Les différentes étapes sont
successivement :
- Etape 1 qui vise à la connaissance des hommes, de leurs con-
ditions matérielles de travail. Cet objectif de connaissance
est à la fois sociologique, psychologique, psychosociologique,
sociale, économique.
Etape 2 qui vise à la constitution dans le milieu humain
d'intervention dlun groupe de personnes préalablement sélec-
tionnées en fonction de critères déterminés
et qui vont jouer
le rôle d'initiateurs dans l'acte postérieur de la création de
la coopérative.
- Etape 3 qui vise à l'élargissement progressif des groupes de
base, le groupe dt initiateurs
d'initiateurs dont chaque membre est assigné
à un rôle précis qui doit faire l'expérience de la vie asso-
ciacive
et surtout apprendre à bien gérer l'action collective
du groupe élargie.
Etape 4 qui est l'étape du consensus au niveau
des normes
d'orientation de l'action collective
doit déboucher sur l'acte
colJectif et volontaire de constitution de la coopérative.
Chaque étape, en fonction de son objectif, requiert
l'utilisation d'une ou de plusieurs démarches, matho do logiques
particulières

414
AI PRISE DE CONTACT ET IDENTIFICATION DES ACTEURS
Au cours de la première étape, nous avons utiliser
à la fois la méthode d'enquête sociologique par questionnaire
qui devait nOliS permettre de collecter des informations
quan-
tifiables sur la situation sociale, professionnelle, économique,
et financière de chaque artisan ainsi que sur les contraintes
générales et spécifiques au corps de
métiers de
l'artisan et
ou de sa région et la méthode d'enquête
qualitative par voie
d'entretien non directif et qui visait a une connaissance plus
profonde de la personnalité sociale de chaque artisan ainsi que
de ses motivations
atteintes, craintes en rapport avec llaction
coopérati ve.
Après ce premIer travail de collecte d'informations,
les données recueillies sont classées pour chaque domaine d'in-
vestigation en plusieurs niveaux à l'intérieur desquels seront
distribuées les artisans. Cette classification
est utile pour
l'appréciation
des contraintes, capacités, limites sacio-éco-
nomiques, culturelles pour chaque artisan. De même, les entretiens
non directifs seront analysés et les différents thèmes abordés
et susceptibles de fournir des indications sur les valeurs que
les artisans attribuent aux différentes questions
liées à l'action
coopérative feront l'objet d'un classement et confrontés ensuite
aux principes de base qui doivent régir la vie et l'action coopé-
rative. Les thèmes conformes à ces principes seront retenus pour
faire l'objet ultérieurement d'une réflexion plus approndie au
sein du~~~e d'initiateurs qui sera consS~~érieurernent.
Quant aux thèmes qui ne seront pas retenus, leur r~jet.1fera aussi
l'objet d'une explication. A la fin de cette première étape, grâce
à une meilleure connaissance de notre milieu humain d'intervention
et des ressorts psychologiques de ses membres, nous élaborerons
des propositions qui constitueront l'ébauche du futur règlement
intérieur de la coopérative.

415
BI APPROFONDISSEMENT DES DIFFERENTS PROFILS PSYCHOLOGIQUES
ET CONSTITUTION D'UN GROUPE D'INITIATEURS:
La deuxième étape sur le plan méthodologie consiste
après avoir repéré au cours de la première étape un certain
nombre d'artisans présentant des caractéristiques psycho socio
culturelles en adéquation au p~ofil ies personnages suscepti-
bles de pouvoir jouer avec efficacité un rôle organisateur dans
le processus de constitution de la coopérative d'approfondir
avec eux par une série d'entretiensles thèmes retenus ainsi que
les principes de base de la coopérative. Ensuite, nous faisons
convoquer une réunion à l'intention des artisans que nous avons
sélectionnés. Le but de cette réunion crest la constitution d'un
groupe collectivement et volontairement engagé à s'investir dans
l'acte de constitution de la coopérative. I l s'agit d'un groupe
avec son programme de travail
collectivement défini ; sensibi~
1isatiun des artisans à l'action coopérative, s'enquérir auprès
dU'service de la coopérative des démarches administratives ~ devoir
effectuer en vue de la constitution de la coopérative, réfléchir
ensemble à l'occasion de réunions périodiques sur les objectifs à
proposer pour la coopérative. Durant cette étape qui peut aller
de trois à six mois nous n'intervenons que très peu dans la vie
du groupe où chaque membre
non seulement doit faire l'expérience
de la vie de groupe mais aussi apprendre à gérer en conformité
avec les principes coopératifs ses rapports avec les autres. Nos
rapports avec le groupe se limitent à des conseils à l'occasion
de comptes rendus qu 1
qu i1 nous fait occasionnellement sur sa situa-
tion.

416
cl ELARGISSEMENT PROGRESSIF DU GROUPE D'INITIATEURS DE BASE
ET MISE SUR PIED DES PRE~IERES STRUCTURES COOPERATIVES :
A la troisième étape, le groupe s1élargit . De nou-
veaux artisans gagnés aux principes coopératifs viennent gonfler
le groupe de base volontairement. Quand le nombre d'aspirants
à la coopération atteint le nombre de 25 (vingt cinq), une as-
semblée générale est convoquée par le groupe d'initiateurs
(la méthode de porte à porte semble la plus indiquée dans le
milieu des artisans) avec comme o~dres du jour: définition
et discussion des principes coopératifs, définition et discu-
sion des objectifs à assigner à la coopérative, fixation des parts
sociales et mise sur pied des diverses structures du groupe
précoopératif. L'organisation du groupement précoopératif aura
ceci de particulier par rapport à celle du groupement coopé-
ratif : des commissions assignées à des~tâches précises de
préparation seront constituées et tous les artisans ne faisant
pas parti du conseil d'administration ou n'assumant pas le rôle
de commissaire aux comptes seront répartis dans ces différentes
commissions avec des rôles précis à jouer et ceci afin de leur
donner eux aussi la possibilité de faire l'expérience du tra-
vail en groupe. Toutes ces structures doivent se" réunir pério-
diquement. suivant un calendrier fixé d'un commun accord
par
ses membres. De même~ un calendrier est fixé pour les assemblées
plénières devant regrouper toutes les structures de la coopé-
rative et dont la raison d'être est de coordonner sous la di-
rection du conseil d'administration les activités des différentes
commissions ainsi que de prendre au besoin
de nouvelles ini-
tiatives pour assurer le bon fonctionnement des structures. Au
cours de cette troisième étape, nous assistons à toutes les as-
semblées plénières au cours desquelles nous assumons le rôle
d'animateur pour assurer la progression du groupe, rappeler les

417
objectifs, assurer la discipline, encourager la participation
de tous, aider à trouver des compromis etc ... Notre conduite se
voulant non directive, nous nous
efforçions toujours de donner
Un sens à nos interventions ; celles-ci devaient viser un but
explicitement exprimé et conforme
à la fois aux principes
coopératifs et aux exigences de progression, de cohésion, de
discipline, de respect mutuel, etc ...
DI RECHERCHE DE COHESION ET DEMANDE DE RECONNAISSANCE
La quatrième étape qui est l'étape la plus décisive
commence à partir du moment où les objectifs qui étaient assi-
gnés aux différentes structures de la coopérative sont atteints
tous ou sinon en tout cas réalisés dans leur grande majorité
constitution au capital social, discussion sur les objectifs de
production de la coopérative, discussion sur les recommandations
du règlement intérieur, recherche d'un local pour abriter le
siège social de la coopérative, sensibilisation des autorités
locales (le gouverneur de la région, les chefs des différents
services administratifs) pour obtenir des faveurs, des facili-
tés. Au cours de cette étape, les propositions du règlement
intérieur sont rediscutées en assemblée plénière point par point
après plusieurs mois de réflexion et discussion autour de ces
mêmes points d'abord à l'intérieur du groupe de base des 1nl-
tiateurs, ensuite dans les différentes commissions; les pro-
positions de règlements qui n'étaient que des normes
seront
traduits en règle structurant dans chaque domaine de la vie
coopérative les pratiques de ces membres. Cette traduction des
normes
propositions en règles devra tenir compte de plusieurs
contraintes :
1 - Il Y a d'abord les contraintes normictives qu'imposent les
principes coopératifs : démocratie, solidarité, engagement
et implication de tous, cohésion.

418
2 - Il Y a les contraintes qu'imposent les objectifs et stra-
tégies économiques : la nature et le volume de ce qui doit
être produit, l~s caractéristiques de la clientèle visée,
le choix entre simple fonctionnement de l'unité de production
existante (reproduction simple) ou développement (reproduc-
tion à une échelle progressivement élargie).
3 - Il Y a les contraintes qu'imposent les outils de travail:
leur bonne utilisation technique,
leur entretien, le mode
d'organisation du travail et de la production etc .•.
4 - Il Y a les contraintes qu'imposent les exigences de la vie
professionnelle des membres de la coopérative ou encore
leurs besoins exprimés de promotion sociale et profession-
nelle au niveau individuel.
Au cours de cette quatrième étape, notre présence dans
les réunions de discussion pour l'élaboration du règlement in-
térieur consistera principalement à examiner avec les artisans
présents si les propositions de règles faites tiennent ou non
compte de ces différentes contraintes déjà rejetées, identifiées
ou au besoin aider à de meilleure formulation dans l'expression
des règles, ou encore quand i l y a confrontation de point de vue
différent donner notre avis sur la question et si possible trouver
un compromis qui rendent à la fois compte des deux points de vue
(des fois les confrontations ne sont que l1expression d'une in-
compréhension, sinon de préjugés
négatifs) si tous les deux
comportent des éléments acceptables. Comme pour la troisième
étape, notre rôle au cours des réunions qui seront tenues au
cours de la quatrième étape sera celui d'un animateur soucieux

419
d'aider le groupe des coopérateurs à trouver un concensus autour
des différents points de règlement intérieur qu'il a la charge
d'élaborer collectivement. Ce règlement intérieur ne sera défi-
nitivement adopté qu'après que nous l'ayons mis dans une forme
acceptable, rendu aisément compréhensible ses différentes dis-
positions, éliminé les ambiguités de sens, assuré la cohérence
interne de ses différentes dispositions et ensuite soumis à
l'approbation collective des membres de la coopérative en assem-
blée plénière au cours de laquelle il sera encore possible aux
membres présents de faire des amendements ou de nouvelles propo-
sitions.
Au terme de cette étape, le conseil d'administration
fait engager auprès du service régional de la coopération la
procédure d'enregistrement et d'agrément de la coopérative. Cel-
le-ci commence par l'intruduction d'une demande de constitution
de coopérative auprès du service régional de la coopération ;
elle dBvra être signée par sept membres du groupe d'initiateurs
et
accompa?,née de la liste de tous les membres potentiels de la
future coopérative.
Enfin, cette quatrième étape sera consacrée à une as-
semblée plénière réunissant les membres de toutes les structures
du groupement précoopératif et dont l'ordre du jour sera de
dresser le bilan social du groupement ainsi que d'apprécier et
d'évaluer dtune
façon
critique les résultats des actions de
chacun des membres du conseil d'administration et des responsables
des différentes commissions. Chaque membre pourra s'exprimer li-
brement pour donner son appréciation non pas seulement sur ce
qui a été fait mais aUSSI sur les comportements individuels des
uns et des autres tels qu'ils sont perçus en référence à ce qu'ils
devraient être selon les normes et principes coopératifs qUI

420
devraient régir les rapports entre coopérateurs ainsi que les
conduites à adopter dans les actions à en~reprendre pour les
affaires de la coopérative. Cet~e assemblée, sur la base de ces
appréciations faites sur le degré de conformité des conduites
et des résultats des actions engagées et placées sous la res~
ponsabilité de certains membres avec les principes coopératifs
et objectifs assignés à la coopérative et à ses différentes
structures devra choisir parmi ses membres ceux qu'elles jugent
les plus aptes pour assumer les différents rôles de présidents,
secrétaires, trésoriers et dans le conseil d'administration qui
sera constitué lors de la tenue prochaine de l'assemblée géné-
rale constitutive de la coopérative en présence des agents de
service de la coopération et dont la date a déjà été fixée d'un
commun accord entre le conseil d'administration provisoire du
groupement précoopératif et les agents de service de la coopé-
ration.
El TENUE D'UNE ASSEMBLEE GONSTITUTIVE ET ELECTION DE NOUVEAUX
DIRIGEANTS SUR LA BASE DE CRITERES SELECTIFS :
La cinquième étape s'ouvre avec la tenue de l'assem-
blée constitutive au cours de laquelle l'assistance confirme
devant les agents du service de la coopération présents son
adHésion volontaire aux principes coopératifs rappelés par
ceux-ci et aux différentes dispositions du règlement intérieur
dont il sera fait lecture par ces mêmes agents. Ensuite, les
membres qui vont constituer le conseil d 1
d adrninistration et qui ont
été choisis pour
leur esprit coopératif, leur dynamisme recon~
nu seront proposés à l'assemblée et élus pour occuper les diffé-
rents postes du conseil d'administration s'il n'y a Das de contre

421
proposition, émanant de cette assemblée. Après cette assemblée
constitutive, la coopérative devra attendre d'obtenir
son agré-
ment d'abord régional délivré par le gouverneur de la région et
qui fonde sa reconnaissance à l'échelle_locale et ensuite natio~
nale délivré par le Ministère du Développement rural
auquel le
service de la coopération dépend et qui lui donne droit de pré-
tendre aux divers avantages prévus juridiquement pour les coopé-
ratives
Le délai entre la tenue de l'assemblée consti-
tuvie et l'obtention par la coopérative de son agrément régional
et ministériel peut atteindre de six à ~ouze mois, temps que la
coopérative met à profit pour chercher activement un local qui
sera son siège social et qui devta aussi abriter l'équipement
autour duquel s'organisera le travail coopératif. Dans certains
cas ce local est construit par les coopérateurs eux mêmes qui
prennent en charge une partie des dépenses et se relaient à tour
de rôle le week end sur le chantier pour effectuer l'ensemble
des travaux qui ne réclament pas une compétence. technique parti-
culière: dans ce cas de figure,
le BIT apporte son assistance
financi~re et technique en prenant en charge la fourniture d'une
partie des matériaux nécessaires et en aidant à la conception
et la réalisation techniques du local
. Dans le cas où les
coopérateurs s'engagent par contre à chercher
leur local, la
formule qui
est utilisée consiste d'abord à repérer
dans la
ville un ou plusieurs bâtiments administratifs, non occupés plus
ou moins vétustes, et ensuite d'adresser une demande d'occupation
provisoire au gouverneur: si la demande est acceptée, la coopé-
rative procéde à un aménagement des lieux pour les rendre fonc-
tionnels en prenant en charge une partie des dépenses, celles en
l'occurence concernant la rémunération de la main d'oeuvre SI les
membres de la coopérative ne peuvent pas srengager à faire un effort
collectif d'investissement humain.

422
Au cours de cette cinquième étape et en général aus-
siôt après l'assemblée constitutive, la coopérative dépose son
capital social à la BNDS seule banque habilitée à recevoir les
comptes coopératifs. En principe, cette banque doit accorder
des crédits aux coupératives, d'un montant égal à dix fois la
valeur nominale du capital social déposé mais dans les faits,
non seulement cette banque n'accord pas de crédit aux coopé-
ratives mais bloque leurs comptes ce qui place les coopératives
dans des situations financières difficiles, telles que souvent
elles finissent par tomber en léthargie faute d'activités. Pour
éviter cette situation qui est le lot de toutes les coopératives
artisanales urbaines, nous conseillionsaux coopératives dont
nous aVlons en charge la création d'ouvrir au niveau de la BNJS
deux comptes distincts au lieu d'un seul comme il était coutume
de le faire : un compte capital social constitué avec les parts
individuelles de mille francs entièrement libérées (mille francs
constituent la part minimale légale autorisée pour les coopéra-
tives) et un compte fond de roulement constitué par des parts
individuelles de cinq à dix fois plus élevées que celles du capital
social et qui fonctionnant comme un compte courant permettra à
la coopérative de pouvoir financer le démarrage de ses activités.
Un capital fond de roulement de cinq cent mille francs CFA au
minimum
cest ce qu~ en général nous demandions aux coopératives
t
cest ce qu~ en général nous demandions aux
t
en voie de création de constituer progressivement mois par mois
dès le début de la deuxième étape, chaque artisans s'engageant à
devenir membre de la future coopérative s'acquittant de sa part
par versement progressif à un compte ouvert en son nom dans le
livret de la coopérative de petites sommes d'argent jusqu'à at-
teindre le montant de sa part. En général, cette cinquième étape
n'est commencée qu'après que le capital fond de roulement de cinq
cent mIlLe francs CFA est atteint ou est en voie de l'être. Pour
atteindre cet objectif de cinq cents mille francs, il est arrivé
aussi que des coopératives parallèlement au versement de parts

423
sociales qu'elle demande à ses membres d'effectuer, organiae mani-
festations culturelles en mobilisant des ressources provenant des
cotisations demandées à ses membres à titre exceptionnel
exceptîonnel et dont
les bénéfices seront versés dans la caisse de la coopérative~
Cette cinquième étape est aussi souvent l'occasion pour
la coopérative de reprendre contact avec les ch~fs administratifs
de la ville qui
au cours de la troisième étape précédente avaient
été saisis par les artisans à propos de leur intention de crééer une
coopérative et de leur souhait que celle-ci puisse bénéficier de leur
faveur en ce qui concerne l'attribution des marches qui se passent de
gré à gré (ce sont des marches de faible enveloppe financière concer-
nant des travaux d'entretien de réfection etc ... que chaque chef
de service peut donner au chef d'entreprise de son choix).
FI CONCLUSION
Dans le processus de création et d'organisation des
coopératives, trois points nous semblent d'une importance capitale
en raison de leur portée pédagogique: ce sont l'identification des
besoins des futurs coopérateurs au moment de la première étape,
l'identification des leaders devant constituer d'abord le groupe de
base et ensuite ceux qui vont composer le conseil d'administration
au cours de la cinquième étape, le rôle de l'animateur au cours des
différentes étapes qui aide à fixer les grandes axes d'orientation
normative de l'action coopérative et dont la conduite en tant qu'il
est un personnage central mais extérieur et investi d'un certain
pouvoir dans le processus de creation et d'organisation fait référence
et enfin l1 a ide extérieure apportée
qui aussi bien dans sa nature,
quantité que dans ses modalités, doit faire l'objet d'une négociation
au cours de laquelle l'organisme qui aide (ici le BIT) devra tenir
compte dans la détermination des conditions de son action aussi bien
des efforts fournis par les futurs coopérateurs dans le sens des objec-
tifs qu'ils se sont fixes au cours des~différentes étapes que de la ca-
pacité du groupement à assurer sa propre cohésion interne.

424
CHAPITRE III - QUELQUES CONSIDERATIONS METHODOLOGIQUES SUR LE MODE
D'IDENTIFICATION DES DIRIGEANTS:
AI CONDUITE DES ENTRETIENS NON DIRECTIFS
Nous ne reviendrons pas sur ce qui a été déjà dit sur
la méthode utilisée pour l'identification des besoins des futurs coo-
pérateurs et des objectifs à assigner à la coopérative. Nous parle-
rons donc ici surtout de la méthode utilisée pour l'identification des
personnes susceptibles en raison de certaines caractéristiques psycho-
socioculturelles de jouer le rôle de leaders dans le processus de
création de la coopérative.
La méthode que nous avons utilisée est celle de l'entre-
tien non directif qui consiste à énoncer sa consigne et à inviter
la personne qu'on veut interviewerà disserter librement et aussi
longtemps qu'elle le souhaite sur la question posée. Dans ce type d'pn-
tretien c'est la personne interviewpp qui structure son propre dis-
cours librement, spontanément selon en référence à son vécu, son ex-
périence personnelle ce qui dans la question posée la questionne
personnellement ; elle projetera dans son discours ses valeurs (cons-
cientes ou inconscientes), ses normes, ses affects ou angoisses ... Pt~
qui déterminent son rapport à la question et aux différents thèmes sou-
levés et abordés spontanément par elle. Au cours de cet entretien, nous
nous bornerons à transcrire le plus fidèlement possible le discours
de la personne interviewée, à faire des relances (reformulation de ce
qui est dit et renvoi pour demander des précisions ou un approfondis-
semtn) tout en adop~ant une attitude de compréhension (celle-ci doit
être d'après nous impe~cable pour l'interviewer sous peine de brisAr
l'élan de sympathie de la personne interviewée).
L'intêrêt de l'entretien non directif par rapport aux
autres méthodes d'enquête (entretien guidé et surtout entretien direc-
tif par questionnaire) c'est qu'elle permet d'enquêter sur la profondeur

425
de la personnalité ou la personne interviewée et sur ce qui dans
cette personnalité (les éléments du vécu de l'expérience personnelle
qui la fondent) détermine le rapport de la personne à la question
posée et aux différents questionnements personnels auxquels celle-ci
renvoie sur le comment du vécu de ces rapports ainsi que sur les
attitudes personnelles. En outre,
les informations données à travers
le mode dtentretien surtout en ce qui concerne les jugements faits
sur les choses sont beaucoup plus argumentés et plus riches de sens
dans l'entretien non directif, la possibilité d'une implication est
la plus forte sur la personnel interviewée qui dispose de beaucoup
de liberté dans la teneur de son discours.
L'analyse de ces différents entretiens permet d'iden-
tifier différents thèmes s'exprimant sur le même projet avec une cer-
taine régularité de sens que, à travers les jugements formulés sur
les choses et les personnes indique une adhésion ou non à des normes
des conduites des faits.
Notre consIgne était !l pour qu'une association ou une
coopérative d'artisans marche bien qu'elles sont les conditions que
doivent réunir ses dirigeants selon vous" ?
BI ANALYSE DES ENTRETIENS
a) CARACTERISTIQUES PSYCHOSOCIOCULTURELLES DES DIRIGEANTS
Etre du même corps (ou de la même section) de métiers que les
autres membres
- avoir une compétence confirmée et reconnue dans son métier
- âtre membre d1une des structures ou instances de la chambre
des Métiers
- avoir reçu une formation générale satisfaisante
savoir lire
et -écrire aisément le français ou l'arabe.

426
- pouvoir se dégager du travail sans porter préjudice à ses pro-
pres affaires.
- savoir établir de bonnes relations sociales avec tous les mem-
bres : être sociable.
- rechercher toujours ~'intérêt collectif et être disposé et en
mesure de rendre des services.
avoir dirigé une organisation syndicale ou toute autre association
- être de la même localité que la majorité des membres
- avoir un ~apital et un crédit social élevés
- savoir être impartial
tolérant et pondéré
t
- avoir un esprit pratique
et être un homme actif
-
aVOlr de bonnes qualités morales et être un modèle de référence
et d'identification dans l'action coopérative
- avoir le verbe facile et être très perseatit
Ces différentes propositions peuvent se laisser enfermer dans quatre
catégories de critères :
1 - Critère de proximité :
- appartenance au même corps de métiers
- appartenance à la même chambre de métiers
- appartenance à la même localité
- appartenance au même milieu social (être connu)
2 - Critère de compétence et de disponibilité:
- avoir un niveau d'étudegenerale satisfaisant
- avoir une bonne competence professionnelle
- avoir une compétence en matière coopérative ou syn-
dicale
- avoir des connaissances ou expériences en matière de
gestion
- avoir un esprit pratique et savoir prendre des déci-
cisions et les appliquer.
- pouvoir se dégager du travail

427
3 - Critère de sociabilité et de crédibilité sociale :
- avoir de bonnes relations (ou pouvoir en établir)
avee tous les membres
- être impartial et tolérant
- savoir oeuvrer pour l'intérêt collectif
- être digposé à rendre des services personnels
4 - Critère de puissance
- être un modèle dl identification
- être persuasif
- avoir beaucoup de relations chez les chefs de services
locaux et savoir les utiliser
b) LE POUVOIR : PERCEPTION ET MODE D'EXERCICE
L'ensemble de ces caractéristiques ou dispositions doivent
permettre de conférer au dirigeant de la coopérative trois types de
pouvolr :
- Un pouvoir de contrôle sur les affaires de la coopérative qUl se
traduit par une capacité d'élaborer pour le groupe une stratégie,
d'organiser les structures de la coopérative) de regeler son
fonctionnement
2 - Un pouvoir psychologique et idéologique sur ses membres pouvant
se traduire par une capatité à influencer les conduites,les
conduitestles compor-
tements des autres membres à imposer au groupe des normes de condui-
te dans le domaine des rapports interpersonnels ou dans celui des af-
faires de la coopérative.
3 - Un pouvoir de pnomotion qui permet de favoriser la réussite des
projets individuels et ceux du groupe par un soutien actif à l'en-
droit de ceux-ci se traduit par une capacité d'utiliser ses relations
au niveau de l'élite administrative locale pour favoriser la recon-
naissance de la coopérative comme un partenaire économique crédi-
ble et la prise en compte par les autorités locales des besoins

428
exprimés par les coopérateurs ainsi que par la capacité d'ap-
porter des solutions satisfaisantes aux problèmes individuels
des membres (instauration d'une Rlus grande solidarité instru-
mentale entre membres, services personnels rendus, conseils ju-
dicieux, etc .•. )
L'ensemble de ces trois types de pouvoir et leurs articu-
lation réciproques constituent ce que nous appelerons le pouvoir d'or-
ganisation. Celui-ci doit avoir une visée synergique, c'est à dire
qu'il doit, à travers la médiation des normes communes de référence
partagées par tous les responsables, les leaders, dirigeants d'une
part et les autres membres d'autre part, accroître les jeux communs
et les crédits d'intention de ceux-ci envers ceux-là.
Cette tension commune au niveau de l'action collective
coopérative peut être beaucoup renforcée grâce aux actions de promo-
tion menées par les responsables en faveur des membres.
c'est cette tension synergique collective basée sur une
communauté de normes partagées et acceptées de tous,
renforcée par
les actions de promotion déployées par les membres qui occupent des
fonctions de pouvoir et orientées vers la satisfaction des besoins
collectifs et individuels, qui permet au poùvoir de contrôle de s'exer-
cer pleinement parce que reconnu et subjectivement légitimé
co11ec-
collec-
tivement4
Dans l'action collective coopérative, il faut le dire,
le pouvoir de contrôle tel que décrit plus haut, ne tira sa reconnais-
sance et sa légitimité ni de sa fonction (la gestion des affaires de
la coopérative) ni d'un quelconque système de règle fixant les droits
et devoirs des uns· et des autres dans leurs rapports réciproques au-
tour des affaires de la coopérative mais plutôt et surtout de la qua-
lité des relations humaines et des conditions de promotion tant collec-
tive qu'individuelle- générées et favorisées par 11 action de ceux choisis

429
et élus ~our gérer le pouvoir de contr8le (les décisions qui émanent
de ce pouvoir même si elles visent l'intérêt collectif ne sont suivies
et surtout appliquées correctement par les membres que s'ils sont sa-
tisfaits des actions de promotions des dirigeants et de la qualité des
relations qui la lient à ces derniers).
Pour pouvo~r maîtriser et exercer ce pouvoir de contrôle
organisateur dans le domaine des affaires de la coopérative, les diri-
geants doivent au préalable et à un niveau strictement personnel réunir
un certain nombre de critères et caractéristiques.
1 - Avoir de multiples liens
d'appartenaucecommune avec les autres
membres:par exemple habiter dans la même localité. exercer la même
profession,appartenir aux mêmes institutions ou associations etc ...
2 - Occuper une position supérieure dans les domaines d'appartenance
commune professionnelle ou organistionnelle, c'est à dire être d'une
compétence professionnelle reconnue, occuper une place de prestige
dans les institutions ou associations de même appartenance
comme
par exemple être membre d'une des instances dirigeantes de la chambre
de métiers ou d'autres associations ou organisations.
3 - Réunir des caractéristiques psychosocioculturelles particulières
en adéquation avec la fonction de contrôle, c'est à dire disposer
d'une expérience culturelle en matière d'organisation et être en
mesure intellectuellement de gérer et d'utiliser cette expérience,
au profit de la coopérative, avoir une expérience coopérative, syn-
dicale ou associative d'un niveau élevé; avoir une expérience ou une
formation en matière de gestion, avoir une formation générale satis-
faisante, etc ...
4 - Avoir un vaste capital social, en avoir la rnaitrise et être psy-
chologiquement disposé à utiliser ses innombrables rouages pour
soutenir les tensions
intimes
individuelles et ou collectives et
leur faire atteindre leurs objectifs que ceux-ci concernent strictement
le domaine de la coopérative ou celui des projets individuels.

430
La .faisabilité d'une telle démarche requiert de la part
des responsables qu'ils aient des liens d'appartenance ou de proximité
avec d'autres milieux différents de ceux qu'ils partagent communément
avec les autres membres : les dirigeants doivent avoir des relations
socialeg·susceptibles d'être utilisees opportunément pour la promotion
de la cooperation et de ses objectifs, ce qui n'est possible
que si
une certaine distance sociale les sépare des autres membres. Une autre
distance doit séparer les dirigeants de la coopérative des autres mem-
bres : c'est la distance culturelle née du décalage entre les niveaux
de formation et d'expériences en matière de vie organisationnelle ac-
cumulée par les dirigeants d'une part, et le reste des membres d'autre
part.
La distance sociale et la distance culturelle constituent
ensemble et dans leur articulation réciproque l'espace stratégique ob-
jectif des dirigeants de la coopérative, c'est à dire l'ensemble des
moyens humains, intellectuels,Politiques et sociaux à leur disposition
pour orienter leurs décisions et créér les conditions favorables à leur
réussite.
c) DIMENSION PSYCHIQUE DE L'ACTION D'ENGAGEMENT DES DIRIGEANTS
Au cours des entretiens, certl1ns artisans désignaient nom-
mément des personnes de leur connaissance, appartenant au même corps de
métiers qu'eux qu'ils considéraient comme susceptibles en raison des
qualités particulières qui leur étaient,prêtées d'être des dirigeants
efficaces. L'analyse desrentretiens effectués auprès de ces personnes
désignées comme des leaders potentiels pour la coopérative en voie de
création a permis ce constat suivant :
Ces leaders potentiels ont an désir élevé de toute puis-
sance
ils ont âéjà un projet tout fait
Bur la
coopérative qu'ils

431
posent comme une structure susceptible de par son développement de
permettre aux artisans de rivaliser sur le plan de la production avec
les sociétés d~ secteur moderne à l'égard desquelles ils manifestent
un sentiment ambigu fait d'agressivité (dirigée contre la concurrence
qu'elles livrent aux artisans) et d'admiration (les sociétés sont
prises comme modèle). Tout se passe comme si les leaders potentiels
se défendent contre un sentiment de Petitesse
devant leur environnement
écrasant (faiblesse des moyens à disposition chez les artisans, con-
currence du secteur moderne, etc .•. ) en développant un désir agressif
de toute puissance qu'ils projettent sur la coopérative et à laquelle
ils Si identifient. Cette opération de projection et d'identification
a un double effet: elle permet d'une part au niveau personnel la ré-
duction de l'angoisse née du sentiment de petitesse et d'autre part la
canalisation de l'agressivité naguère refoulée et qui est une consé-
quence de ce sentiment de petitesse mal acceptée, vers des actions de
réalisation d'un objectif (la création et le développement de la coo-
pérative) susceptible dro par son effet spychologique de générer à la
place du sentiment de
petitesse un sentiment plus valorisant au niveau
personnel. Nous pensons que l'accomplissement du désir de toute puis-
sance chez les leaders potentiels passe par la médiation de l'engage-.
ment dans l'action coopérative.
Le àésir de toute puissance constitue de ce fait une dimen-
sion fondamentale dans le système de motivation qui est à la base de
l'engagement actif du leader potentiel dans l'action coopérative. A côté
de cette dimension psychique fondamentale, il existe d'autres dimen-
sions tels le désir de sécurité le désir de promotion etc ... que peut
satisfaire aussi l'engagement coopératif.
L'espace stratégique objectif constitué par les distances
sociales et culturelles telles que déjà définies et le désir de toute
puissance qui fonde l'engagement dans l'action coopérative forment
, •• ...:...~'"._ •••• c

432
ensemble les conditions de la capactié d'action du responsable ou
leader potentiel de la coopérative.
Le désir et la volonté de pUIssance fondent la motivation
de l'engagement coopératif comme nous l'avons déjà souligné. Cet en-
gagement doit cependant se traduire dans la pratique coopérative par
un pouvoir de contrôle qui doit s'exercer tant sur les affaires de
la coopérative que sur les conduites et comportements humains. Mais le
pouvoir de contrôle en tant qu'il slexerce sur I 1homme
l'homme pour atteindre
son but doit s'étayer sur le pouvoir de promotion lequel au travers des
résultats positifs enregistrés pour le compte de la coopérative, de
la satisfaction des attentes individuelles et collectives, aura un
effet de renforcement sur le plan spychologique, au niveau de la vo-
lonté de toute puissance que fonde la motivation de l'engagement du
dirigeant.
CIUPITRE IV - ROLE DE L'INTERVENANT
AY ASSURER LA PROGRESSION DU GROUPE ET TRANSFERER SES CONNAISSANCES
Ces dirigeants potentiels une fois identifiés (ils doivent
présenter les caractéristiques de toute puissance et celles qui selon
la vision des artisans peuvent seules fonder leur reconnaissance et
leur légitimité)
au cours de la première et deuxième étape sont or-
ganisés en groupe restreint avec chacun un rôle centré sur une tâche
preparatoire
préparatoire de l'organisation coopérative. Ces tâches doivent être
l'objet d'une proposition et d'une définition aussi précise que pas
sible par le groupe. Un
autre objectif de ce groupe d'initiateurs
dont il faut le dire certains de ses membres ne se connaissaient pas
ou avaient des conflits interpersonnels sur un fond de divergence
politico-idéologique (appartenance à des tendances antagonistes dans
la chambre de métiers) était d'arriver à instaurer un climat de con-
fiance mutuelle en son sein, à dissiper les préjugés négatifs des uns

433
sur les autres etc ... bref à instaurer de nouvelles grilles de per-
ception cognitive des membres les uns vis à vis des autres et pro-
gressivement a faire émerger de nouvelles normes de conduites qUl
seront une référence pour tous dans le domaine des interactions
sociales. Ce qui est visé ici c'est la cohésion du groupe, cohésion
au niveau des attitudes de ses membres et de leur jugement sur les
faits et les personnes. En ce qui concerne les jugements, ils de-
vraient se faire sur la base de critères objectifs acceptés de tous
ne pourront être jugés que des faits et des résultats en rapport au
condition d1exécution des tâches, des objectifs et des normes unani-
mement acceptées.
De même, dans le fonctionnement de ce groupe d'initia-
teurs
l'attention sera particulièrement portée au mode dl expression
t
des différentes personnalités et leur impact immédiat sur les membres
du groupe en ce qui concerne le changement ou non d'opinions,
datti-
tude,de conduite ou d'affectivité ce qui permet dl identifier les mem-
bres ayant un pouvoir psychologique élevé sur le groupe et dont les
valeurs, même personnelles, auraient toutes les chances si elles étaient
transposées dans le groupe de devenir des éléments structurants déter-
minants. Ces membres influents à pouvair psychologique élevé sont par-
ticulièrement surveillés dans leur progression en ce qui concerne leur ac-
ceptation volontaire et leur conviction des principes coopératits. Tout
ce qu'ils disent en cours de réunion est important pour nous et est l'ob-
jet 01 un aUDrofondissement
l
l
.
~
of
1 -
0
~
of
1
0
..
se on
es pr1n~lpes cooperat1 s et
a ne-
cessité de cohésion et d'unité dans le groupe
normes
auxquelles ils
sont particulièrement invités à tenir compte dans leur conduite dans
le groupe.
A partir de la première ou deuxième étape et progressivement
jusqu'à la cinquièwe étape, les membres du groupe d'initiateurs ainsi
que les autres nouveaux membres également tormés aux principes coopé-
ratifs devront tester à la-lumière de la réalité les limites des critères

434
et caractéristiques à partir desquels au moment de l'enquête devaient
correspondre le profil des dirigeants pouvant jouir d'une reconnais-
sance sociale et être acceptés comme tels par les autres artisans. Ces
critères et caractéristiques sont revus, réanalysés et leurs limites
identifiées, ensuite ils sont complètés par de nouveaux nés de l'ex-
périence des conduites et del'action collective. Les futurs dirigeants
de la coopérative au moment de l'assemblée constitutive seront choisis
sur la base de l'ensemble des critères et caractéristiques
3nciens et
nouveaux et présentant assez de pertinence par rapport aux différents
rôles auxquels ils seront appelés à jouer au sein de la coopérative
et dont l'exercice est déjà expérimenté au cours des étapes précéden-
tes. En effet, ces différentes étapes fonctionnent aussi comme des mo-
mentsde jeu de rôle: les membres du groupe d'initiateurs d'abord et
ensuite d 1
d autres membres assumaient des rôles attachés .à des rcspon-
bilités coopératives au cours des différentes étapes précédant celle
de la tenue de l'assemblée constitutive.
La finalité de cette demarche progressive est sur le plan
pédagogique le transfert de nos connaissances et expérience en ce qui
concerne le fonctionnement et l1évolution des groupes aux membres du
groupe des initiateurs et ensuite leur .appropriatio~ar ceux ci qui
progressivement acquéront la capacité de diagnostiquer les causes de
disfonctionnement et d'assurer la progression du groupe vers ses ob-
jectifs : ce groupe apprendra à médiatiser les contradictions
qui
traversent la coopérative (d'origine internes ou
externes) et à les
gérer afin de maintenir l'unité et la cohésion de celle-ci et d'as-
surer la réussite de ses objectifs. Ce groupe d'initiateur jouera le
rôle de groupe de transfert et de relahqui progressivement arrivera
à une autonomie dans la production de ses décisions de normes de fonc-
tionnement et stratégie de développement. Parallèlement prQgressive-
ment nous nous effaçons : conduite son directive, précense.absence
dans les réunions et autres activités (nous n'intervenons qu'en début
et à la fin) : absence physique dans les réunions et autres activités
(nous n'intervenons que pour tirer avec le groupe quand tout est
terminé des leçons sur la base des informations fourniés par lui).

435
BI LA MANIERE B'ETRE ET DE FAIRE DE L'INTERVENANT
L'animateur ou toute personne
appelée à jouer ce rôle
doit dans un souci d'efficacité pour son action et selon notre ex-
périence des groupes coopératives avoir à l'esprit ces orientations
normativespour ses
conduites et ses actions~
a}
- Faire preuve dune disponibilité à l'égard de tous: l'animateur
doit savoir qufà tout moment, s'il loge à proximité des demeures des
membres de la coopérative, ces derniers peuvent venir le solliciter
durant ses moments de repos soit pour recueillir d'abord son avis
sur des p~opositions à faire en assemblée, soit petiT l'informer dtun
quelconque différend ou conflit à caractère substanciel ou affectif
l'opposant à un ou plusieurs membres ou encore pour tout simplement
rendre compte des résultats d'une démarche qui vient de se conclure
d'une façon satisfaisante ou qui rencontre des obstacles. Enfin tout
peut être un prétexte aux membres du groupe d 1
d initiateurs ou de la
coopérative pour rendre visite ~ l'animateur qui dans tous les cas doit
se montrer disponible d'un abord facile et hospitalier vis à vis du
visiteur
qui
doit être considéré comme son hôte et traité comme tel
selon l'hospitalité du milieu. Toute infraction à ses normes risquera
d 1
d exposer l'animateur à un sentiment de rejet collectif vis à vis des
membres de la coopérative. Ces visites, même si elles peuvent des fois
être source de dérangement et l'occasion de dépenses imprévues et for-
cées pour l1 animateur,(les règles de l'hospitalité veulent que l'ac-
cueil de l'hôte soit agrémenté du thé à la sénégalaise ou de boissons
servies en son honneur) n'en constituent pas moins un moment privilégié
d'échange avec le visiteur en ce qui concerne les affaires de la coo-
pérative où certaines choses cachées jusqu'à ce jour par le groupe pour
soigner son image de marque devant l'animateur
sont dévoilées permettant
du coup à celui-ci de trouver la réponse à des questions qu'il se po-
sait sur le pourquoi et le comment de l'évolution de certains faits:
tension, conflits, hostilités masqu~es etc .•• Ces révélations peuvent

436
permettre à l'animateur après un travail dlanaly~e et de mise en
correspondance avec d'autres faits connus de lui non seulement de
mieux comprendre le groupe et les contradictions qu~ le traversent
mais surtout de mieux agir sur elles en les prévenant sous la forme
de proposition de règle pour le règlement intérieur ou encore d'en
parler au cours des réunions spécialement consacré à des débats sur
les causes générales de dis fonctionnement des coopératives_
b) - Avoir une.capacité de compréhension amphatique
: cette dispo-
sition attitudinale faite d'écoute et d'attention positive doit
permettre d'arriver à une compréhension profonde de la personnalité
de 'lintérlocuteur qui se dévoile progressivement à travers son dis-
cours où les situations évoquées manifestent la nature de ses rap-
ports avec les évènements vécus à travers les mots et l'affectivité
qui les traverse. Ce mode de compréhension ne vise pas seulement à
saisir le sens explicite des mots du discours de l'autre mais leur
sens implicite caché leur sens connotatif qui se dévoile dans le
geste, le ton, l'affectivité qui accompagnent les mots qUl ne sont
plus seulement des mots qui informent sur les faits et les situations
vécues mais
qui ;llforme aussi sur la personnalité de celui 'qui les
manipule et surJson rapport subjectif aux faits et évènements vécus
et relatés : le mode de compréhension est aussi globalisant car il
doit
saisir
à travers Ce qui est ponctuellement dit et qui ait un
sens ce qu'il médiatise dans ce qui est déjà dit, ee qui le traverse
comme sens déjà dévoilé et dont il rend compte d'une façon synthé-
tique. L'animateur doit avoir présent à l'esprit non seulement ce
qui vient d'être dit mais aussi tout ce qui a été dit antérieure-
ment et qui ait un sens car c'est ce qui lui permet à chaque mornent de
pouvoir se mettre dans la peau de l 1
l autre et sentir comme lui les
choses. S'il y a une ambiguité de sens, ce n'est pas à l'animateur
de trancher en faisant un choix qui ne peut être qu'arbitraire parmi
la pluralité de Sens possiblesau contraire i l doit inviLer son inter-
locuteur à opérer lui-même personnellement Ce cboix en lui proposant

437
plusieurs interprétations possibles de sens. Cette attitude de
compréhension emphatique l'animateur doit l'avoir aussi bien quand
il passe ses entretiens que quand il est en réunion avec les mem-
bres de la coopérative à cette nuance près qu'alors que dans les
entretiens i l doit prendre partie, accepter de s'impliquer pour que
la parole se libère (voir chapitre sur enquête dans le secteur in-
formel) dans les réunions, il doit s'abstenir de s'impliquer au con-
traire car là toute implication peut être perçue comme partisanne
tant les tensions rapports de pouvoirs, conflits sont massivement
présents dans les réunions : leur caractère et leurs enjeux des
fois
voilesdoivent inciter l'animateur à la prudence dont l'inter-
vention et
l'implication
peuvent toujours peser lourd<
sur la ba-
lance d'un côté ou de l'autre avec des conséquences imprévisibles
les protagonistes et le groupe des fois bluffent avec l'animateur
pour les uns mieux le faire tomber dans le piège de l'implication
(soutien partisan) et pour les autres sauvegarder face à lui.
l'imape
cl' un groupe uni et sans problème interne.
c) - Ne viser dans ses interventions sous quelque forme que ce soit
et dans tous les domaines de la vie de groupe ou de la coopérative
que l'intérêt collectif. Dans _les groupes coopératifs, tous les coo-
pérateurs n'adhérent pas au groupe pour les mêmes raisons ou motifs.Ceux
ci sont
divers et des fois contradictoires dans leur visée qUI
peut~être de nature individualiste ou collectiviste. Si les visées
collectivistes sont à prendre en compte et à soutenir par contre les
visées individualistes doivent être l'objet ct1une attention parti-
culière de la part de l'animateur qui doit en chercher les motivations
cachées et les motifs avant de prendre une quelconque décision de les
décourager ou non. Cette précaution nous semble nécessaire en raison
du fait que les motivations ou motifs individualistes outre qu'ils
générent souvent chez celui qUl
les a des dispositions particulières
à agir
ce qui favorise le dynamisme, peuvent si 1 1 0n sait canaliser
t
ce qui favorise le dynamisme, peuvent si 1 1 0n sait
t
et la volonté, et le désir qu'ils sous tendent et les orienter vers des

438
buts précis, là où l'intérêt collectif peut rejoindre l'intérêt
individuel, être mis au service de l'intérêt collectif du groupe.
C'est ainsi que la volonté de toute puissance qui motive l'enga-
gement de certains artisans présentant les caractéristiques de diri-
geants potentiels est mis~n service du groupe, il en est de même
toujours en ce qui concerne l'engagement coopératif quand celui-ci
est dicté par des motifs individualistes et matérialistes uniquement
fixés sur la perspective de l'utilisation de l'équipement qui sera
mis à la disposition de la coopérative. Ces
motivations et motifs
de nature individualiste peuvent par le dynamisme qui caractérise celui qui
les porte motiver la volonté de hâter l'organisation de la coopé-
rative et surtout la réalisation des objectifs qui constituent le
préléminaire indispensable sans lequel ni l'assemblée constitutive
ne peut se tenir, ni l'aide extérieure financière ou en équipement
productif ne peut être octroyée. En ce qui concerne la constitution
du capital social ou du capital de roulement, dans certains groupes
coopératifs, des membres ont proposé de mettre à la disposition de
la coopérative leur épargne personnelle ou de faire intervenir leurs
relations aupLès des commerçants de la place afin que ces derniers
prêtent au groupe coopératif la somme d'argent dont il a besoirr pour
laconstitution immédiate de son capital dont le dépôt à la banque
sous réserve que d'autres conditions aient été déjà réalisées par
la coopérative, permet déjà
celle-ci de démarrer ses activités
de production ou de service plus tôt.
d) - Eviter de faire des promesses en matière d'aide~ En effet,
toute promesse dans ce sens peut avoir comme effet de conforter la
tendance qui existe déjà chez les artisans d'attendre de l'Etat
ou des organismes extérieurs la solution de leur problème (il s'agit
d'une vieille habitude entretenue et renforcée par l'Etat mais
qui s'origine dans la perception traditionnelle du pouvoir et de
son rapport avec ceux qu'il gouverne par les masses rurales).

439
Dans cette mesure, la volonté collective de déployer
un effort collectif et concerté pour se tirer d'affaire en comptant
d'abord sur ses propres moyens et en organisant ses ressources pro-
pres, risquera de faire défaut, ce qui ne pourrait que retarder dans
le groupe coopératif l'émergence d'une conscience coopérative: les
groupes coopératifs qui or.t posé le plus de problèmes dans leur or-
ganisation étaient justement ceux là où dès le départ, ses membres
posaient l'aide extérieure comme étant une nécessité au développement
de leur groupement. Pour ces cas, cette attitude s'expliquait par les
facteurs historiques, traditionnelles et politiques déjà cités mais
dont l'impact était renforcé par des fa~teurs tels l'individualisme
le- familiarisme (l'artisan en raison des contraintes normatives so-
ciales préfaire investir dans le social plus tôt que dans une entre-
prise collective même si celle-ci s'avère rentable) ou encore Ifin-
fluence négative d'un certain nombre de projets ayant pris en charge
la réalisation entière des besoins exprimés par des groupes sociaux
sans leur demander aucune contrepartie ni financière ni en effort
ni avant, ni après la réalisation du projet. Dans les cas où l1 aide
est une possibilité réelle et qu'elle constitue un apport financier
ou en équipement important dont la mise à disposition à la coopérative
dans un délai limité permet à celle-ci de démarrrer plutôt ses acti-
vités de production ou de service, nous pensons qu'il faut toujours
après en avoir informé les membres de la coopérative en réunion,
négocier avec eux les modalités de son étalement progressif dans
le temps étant bien entendu que celles-ci pour nous devront tenir
compte dans la réalité du niveau d'effort fourni par les coopérateurs
et des résultats obtenus il ce propos auxquels la progressivité de
l'aide devra être adaptée: la quantité, le volume de ce qui ponc-
tuellement et partiellement est donné, octroyé au titre de l'aide
doit venir récompenser un effort collectif réalisé en lui per-
mettant d'atteindre un objectif transitoire; elle est d'un
soutien qui motive à entreprise de nouveaux efforts pour progres-
ser encore davantage. Celle aide ne doit pas être perçue par les

440
cooperateurs comme quelque chose qui bon gré, malgré leur sera
octroyée par l'organisme d'aide qui se préoccupe de leurs pro-
blèmes, de la promotion de leurs métiers par ce que cette aide
relève d'une décision politique tant en ce qui concerne sa nature,
son volume que sa destination autrement cela pourrait là aussi
retarder dans la coopérative l'émergence d'une conscience et d'une
volonté orientée vers la prise en charge de leur problème. Dans
tous les cas, l'organisme d'aide doit avoir une marge de manoeuvre
politique suffisante
devant lui permettre s'il le juge nécessaire
de faire bénéficier l'aide (financière ou en équipement) à d'autres
groupements plus méritoires qu'ils soient extérieurs ou non à la
région.
e)
suivre le et se servir sans cesse du génie propre des artisans,
de leur expérience dans tous les domaines de l'organisation coopé-
rative. Le fait d'accepter des propositions venant des artisans c'est
les reconnaître comme des personnes capables d'avoir des idées fécondes
et de rendre compte d'une façon rationnelle de l'expérience de
leJlr vécu. En tout cas, c'est ainsi que les artisans coopérateurs
se perçoivent et l'attitude de l'animateur face à leurs expériences est
rapportées toujours à cette image qu'ils ont d'eux marne. Si cette image
d'eux même est valorisée par l'animateur par une prise en compte de
leurs expériences on assiste à une véritable compétition chez les
coopérateurs dans le domaine de la production des idées qui est en-
couragée. si cette situation est entretenue par l'animateur alors
les coopérateurs acquièrent de plus en plus une confiance plus grande
en eux même ainsi qu'à l'animateur ce qui constitue une condition
favorable 2 une progression rapide de la coopérative vers Bes objectifs.
C'est ainsi qu'au niveau de chaque coopérative nous avons élaboré
le règlement intérieur en tenant compte largement des suggestions et
propositions de ceux sur qui (les coopérteurs) il devra s'appliquer
notre rôle constant à recueillir les propositions et suggestions et
à donner à l'ensemble une cohérence interne.
De même, c'est ainsi que certaines coopératives

441
à la demande de coopérateurs assortie de propositions concrètes
structurantes comportent dans leur organisation des dispositifs
structurels spécifiques dont l'existence ne se justifie que par
rapport à l'originalité d'une demande particulière: organisation
d'une tontine à l'intérieur d'une cooperative pour drainer l'épar-
gne des coopérateurs vers des utilisations productives ou encore
installation à l'intérieur d'une cooperative d'une structure com-
posée de personnes sélectionnées par les coopérations en raison
de leurs qualités IDQrales reconnues de tous (impartialité de ju-
gement, pondération etc ... ) et assignées au rôle de gestion des
conflits à l'intérieur de la coopérative.
f) -
Diffuser dans chaque coopérative toutes informations utiles
relative aux expériences r.oopératives
r.oopératîves qU1 se déroulent ailleurs.
Ceci permet de décloisonner les ~xpériences
qui grâce à llinfor-
mation
qui en est faite peut se diffuser dans les autres coopé-
ratives. Ainsi il y aura possibilité d'une appropriRtion mutuelle
suivie d'une adaptation des différentes expériences coopératives.
De même chaque coopêrative pourra prendre connaissance de l'exis-
tence des autres et de leurs objectifs respectifs ce qui créerait
les conditions d 1
d une coopération inter-coopérative d'abord à l'êr.he1-
l'ér.he1-
le régionale (il arrive que plusieurs coopératives à buts complé-
mentaires soient en même temps suivies dans une même ville) et en-
suite à l'échelle interrégionale ou nationale.
Cette information concerne aussi les causes de conflits
ou de dis fonctionnement dans les différentes coopératives : elle
est suivie de réflexion sur les dispositifs règlementaires à éla-
borer et à appliquer pour les prévenir.
Les informations que l'animateur doit donner quelque soient
leurs objets doivent être llvrée sau cours d'une assemblée réunissant

442
la totalité sinon en tout cas la majorité des coopérateurs. Dans
tous les cas, l'animateur ne doit livrer aucune information à un
coopérateur pris résolument même si ce dernier fait partie des mem-
bres du bureau ou du conseil d'administration
de la coopérative
car le fait de donner la primeur d'une information qui doit concer-
ner l'ensemble des coopérateurs à l'un ~'entre eux modifie souvent
chez les autres coopérateurs la percept~on qu'ils ont de l'anima-
teur : très vite, on prête à celui-ci des intentions et des prati-
ques de favoritisme dont la conséquence estla baisse du crédit d'in-
tention dont bénéficiait l'animateur dans le groupe ce qui ne peut
que constituer un obstacle à son action. Mais cela entraîne aussi
souvent une autre conséquence tout aus~i préjudiciable pour la pro-
gression de la coopérative et qui se manifeste soit par la formation
de clans dirigés contre celui qui est considéré comme un favori soit
par un laxisme inhabituel tel que l'ensemble des tâches à exécuter
souffre de retard. C'est surtout le cas quand la personne considérée
comme étant le favori de l'animateur occupe un poste de responsa-
bilité dans la coopérative. C'est là une forme de résistance qui
manifeste l'opposition des coopérateurs contre tout favoritisme ou
Hservice-camarade" comme ils l'appellent eux mêmes mais qui en même
temps aussi constitue une mise en garde
car la poursuite de cette
pratique (service camarade) aurait comme conséquence ultérieure la
démission des membres.
g) - Faire prendre conscience au groupe des initiateurs et aux diri-
geants de la nécessité de se constituer en modèle de conduite pour
le reste des membres de la coopérative. La conduite du dirigeant est
l'objet d'une attention particulière de la part des coopérateurs qui
y râasissent et y réfèrent leur propre ·conduite. Cette identification
au dirigeant des coopérateurs ne veut pas dire toujours que ces der-
niers approuvent la pratique, la conduite de celui-ci car l'esprit
de conformisme peut y pousser comme d'ailleurs aussi la volonté de
nuire . Le motif ou la raison de cette ~dentification ne dépendent
souvent que de la nature des rapports subjectifs qui lient le coopérateur

443
au dirigeant et de l'enjeu que constitue au niveau personnel pour le
coopérateur
cooperateur le but visé dans sa conduite par le dirigeant. Si l'iden-
tification par 6.sprit de conformisme procède surtout par imitation,
le coopérateur agissant ou cherchant à agir dans le même sens que le
dirigeant sans trop se poser de question et cela même si l'action ou la
conduite du dirigeant sont critiquables du point de vue des principes
coopératifs par Contre,
l'identification avec volonté de nuire dévoile
une situation de rapports conflictuels entre le coopérateur et le di-
rigeant et se manifeste telle une imitation, mais il s'agit toujours
de l'imitation d'une action, d'une conduite criticable selon les pr1n-
cipes coopératifs: ici souvent la coopérateur
coonérateur sait que ce qu'il
imite dans la conduite du dirigeant est condamnable mais il prétextera
pour se justifier qu'il
n'a fait que suivre l'exempl~ de celui-ci
alors qu'en fait réellement à travers son pseudo conformisme il pour-
suit d'autres objectifs: jeter le discrédit sur le dirigeant en mettant
en exergue ses erreurs, sa mauvaise conduite et
1amauvaise influence
que celle ci peut exercer sur celle des autres. L'identification par
volonté de nuire dans les cas où elle ne peut pas s'appliquer peut aussi
se transformer en une contre-identification ici le coopérateur cherchera
toujours à avoir une conduite conforme aux principes coopératifs et sur-
tout à être mieux jugé que le dirigeant dont il stigmatira les lacunes
et les erreurs tout en essayant de par son action, ses initiatives pro-
pres de les compenser ; il est aux aguets des insuffisances du dirigeant
et est toujours prêt à prendre le contrepied de ses décisions à proposer
des solutions différentes dont il cherchera même si elles sont refusées
par le groupe à en tester la validité et la pertinence dans une pratique
isolée
ce genre de conduite est surtout le fait des leaders potentiels
et concurrents dont l'animateur doit savoir diriger leur dynamise, leur
esprit d'initiative et de rivalité vers la réalisation d'objectifs com-
plémentaires à ceux que poursuit le dirigeant, en lui confiant des res-
ponsabilités dans un domaine qui complète celui
du dirigeant . Le diri-
geant doit être un modèle de conduite surtout dans les domaines suivants

444
1 - Le versement des parts sociales pour la constitution du capital
de la cooperative; le fait qu'il verse sa part sociale le premier
augmente le crédit d'intention que les coopérateurs lui accordent et
qui
,s'·BIJ'lpresseront de
lui emboîter le pas, suivre son exemple.
2 - Les assemblées générales et autres réunions dont l'absence est
vite remarquée et interprétée comme une marque de désintérêt vis à
vis des affaires de la coopérative quO i l fait pas ser au second plan
par rapport à des propres préoccupations relatives à ses intêrê.ts
personnels. si les absences du dirigeant aux réunions se répétent,
il Y a toujours un risque qu'à moyen terme les autres coopérateurs
manifestent un absentéisme de réaction dans les réunions qu'ils
justifienten rapport aux contraintes de leurs activités profession-
nelles : le temps passe dans les réunions en dehors de leur atelier
est vécu subjectivement comme une perte de temps dans leur procès de
production ou comme un manque à gagner. Il s'agit là plus d'une jus-
tifieation idéologique destinée à rendre compte de leur opposition
au comportement absentéiste du dirigeant qu'à un désintérêt réel aux
réunions ou d'un manque de temps lié à des contraintes professionnel-
les puisque dans dans chaque atelier il y atoujours un ou plusieurs
compagnons compétents qui assument le rôle du patron en cas d'absence
dé celui-ci.
Dans des situations de ce genre, l'animateur devra rencontrer le diri-
geant absentéiste pour s'enquérir des raisons ou motifs de ses absen-
ces aux réunions et ensuite faire convoquer une assemblée générale qui
devra se tenir dans un délai de quinze jours où le dirigeant en ques-
tion devra venir s'expliquer: en cas d'absence, il sera remplacé par
un autre membre élu.
3 -
Les démarches à mener en vue de la réconnaissance sociale et juri-
dique de la coopérative~ Dans ce domaine, il doit se montrer
entrepre-
nant et actif. Il doit rendre compte au niveau de sa structure des
!..

445
résultats ou des obstacles que soulèvent sa démarche et dont les
autres membres des autres structures devront être informés pour pou-
voir faire des propositions de solution ou tout au moins apporter
leur contribution dans la recherche de solutions.
Chaque demarche est l'occasion pour le dirigeant de tester
les limites des possibilités que lui offrent son capital social et son
capital culturel mais aussi de faire la preuve à travers les résultats
obtenus les obstacles rencontrés et la façon dont il les a surmontés
de faire la preuve de sa capacité à faire progresser la coopérative
vers ses objectifs. C'est le jugement rendu sur cette capacité qui
fonde le crédit du dirigeant et la légitimité de son pouvoir surtout
idêologique sur les autres coopérateurs qui, par voie d'identification,
le prendront comme une figure modèle. Dans ce cas, toute rivalisation
contre un tel dirigeant est vite réprimée à moins qu'elle ne donne
lieu à des actions aide allant dans le même senS que celle du dirigeant
et tout aussi valorisante pour la coopérative.
Ici le rôle de l'animateur consiste à valoriser toute action
méritoire à créer un esprit
d'émulation
au sein des coopérateurs et
à veiller à ce que les postes de responsabilités ou les rôles conférant
du prestige et perçus comme tels par les coopérateurs ne soient occupés
que par des personnes méritantes qui ont donne la preuve de leur capacité
à faire progresser la coopérative vers ses objeçtifs.
4 - Les travaux quand il s'agit pour les coopérateurs de faire de l'in-
vestissement humain en vue de la construction de l'atelier ou du local
qui
devra abriter les équipements de la coopérative; ici le dirigeant
doittoujour~ être sur le chantier quand c'est son tour de participer
dans une équipe de travail ou encore pour soutenir, encourager les autres
coopérateurs quand c'est leur tour de participation. En général, la pré-
sence ici du dirigeant sur le_chantier a un effet d'accélération sur le
travail en cours si lui même est reconnu par les autres coopérateurs
comme un homme actif et travailleur.

446
La simple présence physique de l'animateur sur le chantier
a aussi un effet d'activation sur les procès de travail en cours, cha-
cun voulant se surpasser pour donner une bonne impression de lui-même
à l'animateur. L'animateur devra faire prendre conscience au dirigeant
non seulement qu'il doit soigner son image de marque par un effort sou-
tenu dans le travail quand il se trouve inséré dans une équipe de tra-
vail, mais aussi autant que faire se peut être présent sur le chantier
pour relever le moral soutenir encourager les équipes de travail.
h - Mener toute démarche utile auprès des autorités de la place en
COm-
pagnie
des membres de la coopérative (les dirigeants surtout ou les
membres du groupe d'initiateurs) qui au préalable se concerteront avec
l'animateur pour fixer en accord avec lui les objectifs des démarches
à entrepréndre, la façon dont il faut s'y prendre ainsi que les personnes
à contacter et les bonnes relations qu'il faut mettre èn'jeu pour faci-
liter la réussite de ces démarches
ici le capital des relations que
chaque coopérateur gérait, est mis à la disposition de la coopérative
pour qu'elle l'exploite à des fins utiles. Il y a transfert des rela-
tions utiles que possédaient les coopérateurs chacun
individuellement
t
à la coopérative qui doit en faire un capital à gérer. L'animateur de-
vra aussi participer à ce transfert en nouant des contacts utiles, au-
près des différents services susceptibles de jouer ultérieurement un
rôle positif dans le développement de la coopérative (le service de la
coopération, la BNBS, la gouvernante etc ••. ) et qu'il pourra mettre à
la disposition de ]a coopérative au moment opportun.
c'est grâce à ce transfert de relations utiles à la coopérative
et sa bonne gestion par celle ci qu'au niveau de certaines régions les
coopératives que nous encadrions telles la coopérative des artisans coor-
donniers à Dakar, la coopérative des artisans menuisiers de
Tamba
la coopérative des mécaniciens de Kaclock pour ne citer que celles là
ont pu obtenir des autoritês régionales des facilités administratives
lesdélais d'exécution de certains travaux ou de certaines décisions
importantes nécessaires au démarrage rapide dès activités production ou de

447
service des coopératives : branchement de courant d Kaolack et à
Tambacounda par la SENELEC de vingt quatre à quara~te huit heures
après la demande alors qu'ordinairement, il faut attendre un minimum
de deux semaines avant d'être satisfait: a Dakar, la demande :atro-
duite par la coopérative des cordonniers auprès du Ministère de l'In-
dustrie et de l'artisanat et pour bénéficier d'un équipement plus
performant est étudiée et a obtenu un accord favorable avant même que
la totalité des membres de coopérative ne soit inscrite à la chambre
de métiers comme il est coutume.
L'animateur ne doit pas se limiter à transférer ses con
connaissances sur la vie associative ou ses expériences personnelles
dans ce domaine ou encore la façon dont les coopératives ont résolu
leurs problèmes en ce qui concerne leur fonctnonnement et leur dé-
veloppement il doit aussi creer les conditions nécessaires pour que
chaque coopérative puisse s'approprier de tout son capital social
utile ainsi que du capital social utile de chacun des membres par
l'organisation d'une mise en commun collectif au profit de la coopé-
rative et de ses objectifs des diffé:entes relations utiles de ses
membres, chaque fois que la situation l'exige c'est à dire quand la
coopérative se trouve confrontée à des problèmes dont le dénouement
dépend de la bienveillance des autorités locales.
1 - Veillez à ce que tous les engagements pris par lui même ou par
l'organisme qui l'emploie vis à vis de la coopérative soient respecter
ainsi que les échéances fixées pour l'exéeution de toutes les décisions
dont les coopérateurs sont informés. En effet, l'animateur ne devient
crédible et vraiment digne de confiance auprès des coopérateurs que quand
vis à vis de l'organisme qui l'emploie il prend la défense des intérêts
des besoins réalistes exprimés des coopér'àceurs et que l'organisme s'é-
tait engagé de satisfaire dans un délai déterminé. Autant l'animateur
auprès des coopératives doit rappeler à celle ci leur devoir et engagement
vis à vis de l'organisme qui l'emploie, autant aussi vis à vis de
celui-ci et doit jouer le rÔle de mémoire pour les engagements faits vis

448
à vis des coopératives. Le respect pour l'organisme de ses engage~
ments vis à vis d'une coopérative conditionne souvent au sein de
celle ci l'émergence d'une volonté collective orientée vers la réa-
lisation de ses objectifs définis en collaboration avec l'anLmateur
tandis que le non respect de ses engagements par l'organisme est
source de découragement dans la coopérative et de désinvest~ssement
dans la poursuite de ses objectifs~ l'animateur doit convaincre l'or~
ganisme qui l'emploie que les coopératives réagissent positivement
ou négativement à ses actions vis à vis d'elles et qu'il doit sans
cesse ~aire un effort pour satisfaire convenablement et dans un délai
raisonnable leurs attentes si celles ci
ont fait l'objet d'une pro-
messe de satisfaction de sa part.
J - Elaborer en collaboration avec les membres de la coopérative le
règlement intérieur qui doit fixer les droits et les devoirs de chaque
coopérateur vis à vis de la coopérative et vis à V1S des autres mem~·
bres. Deux objectifs sont visés à travers cette collaboration
d'une
part c'est amener les membres à s'investir intellectuellement et psy-
chologiquement dans l'élaboration de ce règlement intérieur ce qu~ au-
rait pour effet de favoriser l'émergence de rapport de type sèntimental
entre les coopérateurs et ce règlement qui aurait ainsi plus de chance
d'être accepté et respecté de tous et d'autre part c'est favoriser un
échange réciproque entre coopérateurs autour des possibilités perçues
selon leurs expériences et leurs connaissances du milieu des artisans?
de détournement du règlement par ceux ci·ce qui permettrait de les
prévenir en dressant des garde-fou.
Dans les réunions, l'animateur doit avoir une conduite non
directive s'appuyant sur ces quelques principes et cela quelque soient
les décisions qui doivent être prises et les domaines qui les concer~
nent:
Dans les prises de décisions, il ne doit jamais se comporter
comme une personne
autocratique. Au contraire, son rôle devra se limiter
à aider le groupe à identifier les différentes contraintes internes et

449
externes qui s'imposent à la coopérative et dont il devra tenir
compte afin de pouvoir élaborer des décisions réalistes. Pour ar-
river à cette fin, l'animateur doit pouvoir mettre à la disposi-
tion du groupe les informations dont il a besoin pour éclairer le
problème à traiter donner les différentes alternatives possibles en
indiquant les avantages et inconvénients que présentent chacune
d'elles ainsi que les processus operateurs
opérateurs à mettre en oeuvre pour
leur réalisation ; il doit au niveau des discussions clarifier les
opinions
confusément perçues afin de permettre une meilleure com-
munication entre les membres du groupe qui ainsi pourra progresser
plus rapidement sans tension -inutile 'lui naîtraitde fausse inter-
prétation par les uns sur ce qui est dit par les autres, vers l'éla-
boration de ses décisions qui aurait plus de chance de recueillir le
consensus de tout le groupe ; il doit pour aider le groupe à mieux
progresser formuler chaque fois que cela est nécessaire des conclu-
sions intermédiaires et pertinentes pour permettre au groupe de sa-
voir où ia~en est dans sa progression et plus tard sur la base de
ces conclusions prendre la décision la plus judicieuse.
Quant aux attitudes de l'animateur VLS à vis des membres
du groupe pris individuellement et ce ce qui se vit objectivement
dans le groupe, elles doivent consister à favcriser des réactions po-
sitives et à décourager toute réaction négative dans le groupe.
Les réactions positives sont favorisées par l'animateur
s'il encourage et aide les membres les plus timides à s'exprimer
valorise-
les uns et les autres en c.larifiant leur propos pour les
rendre plus intelligibles tout en s'efforçant d'y trouver toujours
de bonnes idées susceptibles d'aider à la progression du groupe ou
encore s'il cherche à diminuer les tensions en détendant l'atmosphère
par des blagues ou par le rappel de certains principes moraux tradi-
tionnels ou coopératifs partagés et acceptes de tous ou encore mani-
fester une attention positive faite de compréhension et d'écoute vis
à vis des membres. Les réactions négatives à décourager à ne pas favo-
riser sont celles qui favorisent les désaccord, les tensions ou '__ .ant:a-
gonis~es soit parce qu'elles aident à leur émergence, soit parce qu'elles
favorisent leur développement. Ici l'animateur doit éviter de s'i~li­
quer.

450
ANNEXES
SUR LE SECTEUR INFORMEL
PARACAPITALISTE ET LES COOPERATIVES
, ' , -'", '~

451
LES
CONDITIONS
SOCIO-CULTURELLES
ET
ECONOMIQUES
===================================================
DE
LA SOUMISSION
DU
TRAVAIL
DES
APPRENTIS
===============================================

452
A. LA fORMATION PROFESSIONNELLE
============================
Les unités paracapitalistes du secteur informel de produc-
tion de biens ou de services constituent un ~ieu d'exploitation.
de
la force de travail des apprentis. Trois faits le montrent :
- Les chefs d'entreprise de ce secteur ne sont pas des
producteurs directs. Leur rôle se limite le plus souvent, en amont
du procès de production et de travail à la recherche de marché et à
donner des consignes opératoires pour la bonne exécution de certaines
tâches jugées difficiles ; en aval du procès de production et de
travail, leur rôle consiste à encaisser les payements correspondants
aux cOITmandes exécutées et d'en contrôler la bonne finition.
- Les chefs d'entreprise possèdent des signes de distinc-
tion sociale valorisants: des véhicules personnels, villa ou appar-
tement de grands standing, des titres prestigieuses qui sont le
résultat cl' un investissement ostentatoire:, dans le social. Ces signes
de distinctions qui sont la manifestation extérieure d'une promotion
sociale réelle impliquent des gains substanciels et réguliers.
- Les apprentis qui sont les producteurs directs ne sont
pas rémunérés. Une partie importante des éléments rentrant dans la
reproduction de leur force de travail est prise en charge par leur
famille.
Ces faits qui résultent de notre enquête et qui nous per-
mettent de poser l'hypothèse de l'exploitation de la force de travail
des apprentis producteurs directs par les chefs d'entreprise appellent
deux questions fondamentales :
- Suivant quel mécanisme se fait-elle cett exploitation ?
- Quelles sont les conditions générales qui permettent le
fonctionnement et la reproduction à ce mécanisme ?
... / ...

453
Pour répondre à la première question il faut tout d'abord
faire remarquer que l'apprenti producteur direct était au départ
vierge de toute connaissance Ou savoir-faire technico-professionnel.
Ce savoir-faire qui lui permettra d'acquérir une certaine compétence
dans son métier et donc d'être productif lui est enseigné progressi-
vement. Cet enseignement qui est plutôt pratique au niveau de l'entre-
prise s'étale sur plusieurs années. Son contenu qui n'est pas program-
mé dépend entièrement des tâches à exécuter et devant concourir à la
réalisation des biens ou services commandés par le client. Dans ce
sens, l'étendue et la durée de la formation dépendent objectivement
de la diversité et de la régularités des commandes
si le chef d1en-
treprise ou celui qui dirige les travaux au cours des différents
procès de travail
transmet pour chaque opération entièrement ses
connaissances pratiques sans faire de retention. Cependant dans le
domaine de la formation dans les ateliers la réalité est bien autre
car le chef d'entreprise ne transmet qu 1
qu une partie de se~ connaissan-
ces se réservant l'exclusivité et le monopole des connaissances dont
l'application pratique est la plus payante ou permet de produire des
biens ou service de qualité supérieure. Cette rétention volontaire
dans le domaine de la connaissance est la stratégie qu'utilise le
chef d'entreprise pour contraindre son apprenti à rester le plus
longtemps possible avec lui. Celui-ci n'aura donc qu'une maîtrise
partielle des différents procès de travail et ne pourra donc effec-
tuer avec maitrise qu'un certain nombre d'opérations et de tâches
dé'terminées aussi longtemps que le chef cl' entreprise ne voudra pas
consentir à lui enseigner toutes les ficelles des métier . Les opé-
rations et tâches dont l'apprenti a la maitrise deviennent l'essentiel
de son travail qu'il l'exécute seul, ou aidé par un ou plusieurs
apprentis plus jeunes placés sous sa surveillance. Dès lors le temps
de travail effectif du chef d'entreprise dans l'atelier diminue pro-
gressivement alors que simultanément celui de l'apprenti augmente
dans les mêmes proportions
ce qui créé les conditions favorables
pourle chef d'entreprise de s'extraire du travail totalement ou
partiellement. De ce fait) la valeur marchande des biens ou services
produits dans l'atelier inclut une part de plus en plus importante
de la valeur représentant l'équivalent de la rémunération de la force
de travail de l'apprenti. Or cette valeur dans le produit final qui
... / ...

454
devrait être destinée à la reproduction de la force de travail de
l'apprenti est approprié par le chef drentreprise au titre de la
rémunération de la formation qu'il donne à celui-ci.
Si le chef d'entreprise s'approprie personnellement la
valeur qui devrait être destinée à rémunérer la force de travail de
son apprenti pour rémunérer le temps de travail qu'il consacre per-
sonnellement à la formation de celui-ci, nous devons pour éclairer
le mécanisme de l'exploitation (de l'apprenti par son maître) nous
interroger sur la
validité d'une telle appropriation.
Pour que la formation puisse être considérée comme du
travail méritant une rémunération, il faudrait qu'elle puisse mobili-
ser des moyens matériels conçus spécialement et spécifiquement des-
tinés à cette fonction et qu'elle se déroule dans un temps spécifique.
Or dans l'atelier la formation se fait sur le tas au cours des diffé-
rents procès de travail qui mobilisent et combinent des moyens desti-
nés à produire des biens ou service marchands et son temps se confond
à celui du travail productif. Or le temps de travail productif n'est
en rien influencé par les impératifs de la formation car celle-ci
n'impose pas son rythme au travail
c'est le contraire qui se passe
l'apprenti en formation assiste au travail, observe les différentes
opérations et y participe en obéissant aux consignes et directives
opératoires du chef d'entreprise,
et ne pourra arriver à un degré
satisfaisant de compréhension des opérations auxquelles il participe
qu'cn les répétant indéfiniment au cours de plusieurs procès de
travail successifs identiques. Ce délai peut cependantpetre raccour-
cie si l'apprenti en formation s'adresse à un autre apprenti plus
anciens et plus expérimentés qui accepte de lui donner les explica-
tions nécessaires aux questions qu ' il se pose.
' il se
Les conditions dans lesquelles se déroule la formation
des apprentis dans les ateliers montrent que celle-ci ne coute rien
au chef d ' entreprise. La formation ne lui coûte ni en dépense de
' entreprise. La formation ne lui coûte ni en dépense
matériel, ou d'autres moyens, ni en temps supplémentaire de travail~
... / ...

455
Par contre elle coûte à l'apprenti ~n temps de travail productif
en tant qu'il participe à toutes les étapes des différents procès
de travail se déroulant dans le cadre de la production.
Dans ces conditions la valeur marchande du produit final
ne doit en toute logique
inclure que les parties suivantes : la
partie transférée dans le produit final de la valeur des moyens de
travail, la valeur des matières utilisées. la rémunération de la
force de travail du chef d'entreprise et celle de la force de tra-
vail de l'apprenti et enfin le profit réalisé.
La valeur dont s'approprie le chef dfentreprise au titre
de la rémunération de la formation supposée qu'il dispense à l'ap-
prenti ntest rien d'autre que cette partie de la valeur qui dans
les conditions normales de salariat devrait être versée à l'apprenti
producteur direct afin de lui fournir les conditions matérielles de
la reproduction à sa force de travail. Or comme le temps de travail
du chef d 1
d entreprise diminue progressivement ail fur et à mesure que
grandissent l'expérience et la compétence professionnelle de l'appren-
ti, il existe un moment à partir duquel où le seul travail vivant
contenu dans le produit fini est celui dépensé par l'apprenti qui
devient le seul producteur direct.
A l'issue de sa troisième année d'apprentissage pratiqué
dans un atelier produisant de~ biens ou des services diversifiés
et selon une régularité élevée, l'apprenti ayant un niveau d'ins-
truction équivalent à celui de la fin du cycle primaire est en me-
sure dravoir une maitrise satisfaisante de tous les procès de
travail et si son temps d'apprentissage se prolonge au delà de cette
période c'est qu'il est contraint de s'assujetir au chef d'entrepri-
se qui gardant jalousement certains secrets du métier (connaissance
ou technique) ne les livre que par compte goutte, très parcimonieuse-
ment de façon étalée dans le temps à son apprenti et à la seule con-
dition que ce dernier se laisse soumettre totalement à sa volonté,
c'est-à-dire accepte de travailler pour lui sans recevoir n~exiger
une contre-partie monétaire remunératrice de sa force de travail •
. . ./ ...

456
Il s'agit là d'une forme d'exploitation qui pour être possible et
concrètement réalisable doit mettre face à face un détenteur de
connaissances disposant d'un pouvoir discrétionnaire dans la trans-
mission de sa connaissance et un producteur direct en quête réelle
d'un complément ou supplément de connaissances valorisantes et valo-
riissables sur la marche du travail. Ce face à face doit se dérouler
dans le champ structuré de rapports
SDCl.aUX et
économiques déterminés
où le détenteur de connaissances se confond avec la personne du
détenteur des moyens de travail ou de production qui décide des con-
ditions du travail et celles de la production et où l'apprenti~ pro-
ducteur direct, travaille et produit des biens et services marchands
en dépensant une force de travail dont l'essentiel des éléments de
sa reproduction est fourni
par sa famille, son lignage.
cette forme d'exploitation qui se fonde dans la justifica-
tion idéologique de la formation proportionnelle peut dans sa rigueur
sl att énuer si le chef d'entreprise montre des dispositions paterna-
listes à l'endroit de son apprenti et ou accepte de donner à celui-ci
une marge limitée d'autonomie dans le champ de la production pour
qu'il travaille et produise à titre personnel des biens et services
marchands de nature déterminée a Dans ce cas le chef d'entreprise
convertit une partie de la valeur du travail de l'apprenti appropriée
monétairement par lui en biens consommables qu'il lui donne pour
contribuer partiellement à la reproduction de sa force de travail
et si cette contribution ne suffit pas
eu égard à l'ampleur des
charges personnelles et familiales de l'apprenti il lui laisse la
possibilité de trouVer des éléments de compensation matérielle dans
un travail personnel si celui-ci n'a pas pour but de produire des
biens ou des services qui concurrencent directement ceux produits
dans l'atelier pour le compte du chef d'entreprise. Généralement
l'apprenti à qui le chef d'entreprise a donné la possibilité de
faire du travail personnel en marge du travail qu'il lui fournit
est quelqu'un qui a déjà acquis une grande compétence et expérience
professionnelle et qui jouit de la confiance de son chef .
.../ ...

457
Le mode spécifique par lequel le chef d'entreprise se
soumet le travail de son apprenti comporte les étapes suivantes
- appropriation totale de la valeur monétaire du travail
de l'apprenti productif par le chef d'entreprise qui prolonge arti-
ficiellement la durée de l'apprentissage,
- conversion d'une partie de la valeur monétaire du travail
de l'apprenti productif en biens consommables devant contribuer à la
reproduction partielle de sa force de travail
cette conversion est
effectuée directement par le chef d'entreprise,
- attribution à l'apprenti d'une autonomie limitée dans le
champ de la production lui permettant de travailler et de produire
à titre personnel en se servant des moyens de travail à
disposition
dans l'atelier.
B. LES EFFETS DE TRANSPOSITION DES STRUCTURES LIGNAGIERES
======================================================
Cemode de soumission constitue une transport ion du mode
de soumission lignagière du travail agricole par le chef de lignage
dans l'atelier.
En effet, dans le système lignagier c'est le sus-
travail fourni par le cadet producteur direct qui approprié par le
chef de lignage et converti en biens de prestige fonde le pouvoir
matériel de celui-ci : la reproduction de la force de travail du
cadet est dans ce cas assurée directement par le chef de lignage.
De même dans le système 1ignagier africain,
le cadet devenu chef
de menage se voit attribué par le chef de lignage d'une portion
de terre découpée sur le patrimoine foncier commun pour être cultivée
à part et dont le produit de la récolte doit servir comme complément
dans la reconstitution de sa force de travail étant bien entendu
que cette reconstitution reste toujours partiellement assurée par
le chef de lignage par conversion d'une partie de la valeur du tra-
vail par le cadet sur le champ commun du lignage en bien de consom-
mation.
... / ...
l

458
Des différences subsistent cependant entre le mode de
soumission lignagière du travail et le mode de soumission du travail
des apprenti dans les ateliers artisanaux. Ces différences concernent
le
statut
des chefs, le statut des producteurs directs, la nature
et la finalité du surtravail approprié :
- dans le système lignagier traditionnel le chef de lignage
a pourattribut de gérer simplement les biens du patrimoine commun
lignagier selon les règles définies par la coutume tandis que le
chef d'entreprise a la propriété de ses moyens de travail ou de
production etproduit pour vendre sur le marché et faire des profits~
- dans le système lignagier traditionnel, le cadet produc-
teur direct (ou le chef de menage) et le chef de lignage appartien-
nant au même lignage sontliês par des liens de sang, de parenté
constituant un système structuré de rapports sociaux hiérarchisés
qui fondent la place de chacun dans le système de production selon
son âge, son sexe, sa situation matrimoniale et sa position généa-
logique dans la lignage. Par contre le chef d'entreprise et son
apprenti ne sont pas toujours liés par des liens de parenté ; tout
au plus habitent-ils dans la même localité ou les parents de l'ap-
prenti connaissent-ils le chef d'entreprise, ses parents ou ses
amis. Dans ce cas cè qui confère au chef d'entreprise son pouvoir
c'est sa propriété des moyens de travail ou de production qu'il
détient,
- dans le système lignagier traditionnel le surtravail
du cadet extorqué par le chef de lignage se présente sous forme
de biens en nature tandis que le sur travail de l'apprenti qui est
approprié par le chef d'entreprise se présente sous une forme moné-
taire en tant qu'il représente une partie de la valeur du produit
destiné à être échangé sur le marché contre de l'argent. La valeur
monétaire de ce surtravail est accumulée à des fins de reproduction
du système d'exploitation (création de nouvelles petites entreprises)
et ou réinvesti dans le social en biens de prestige qui vont confor-
ter la position sociale du chef d'entreprise.
. .. ! ...

459
Le mode de soumission du travail de l'apprenti dans les
atelier artisanaux et le mode d 1
d accumulation qui y a cours combi-
nent ainsi dans leurs modalités des mécanismes qui se refèrent à
la fois au mode production lignagière (mécanisme de l'extorsion
du surtravail et de la reproduction de la force de travail) et au
mode de production marchande (accumulation sous forme de numéraire
du surtravail). Il s'agit d'une combinaison d'un modèle de produc-
tion marchande et d'un modèle de soumission lignagièrc du travail.
Nous caractériserons ~ette combinaison comme une soumission ligna-
gière du travail dans un conteEtede production de valeur marchande.
Le mode de soumission du travail de l'apprenti dont nous
venons de faire l'analyse comporte des fois une variante caractéri-
sée essentiellement par l'introduction de numéraire parmi les moyens
dotés à celui-ci pour la reproduction de sa force de travail: l'ap-
prenti, en plus qu'il est nourri par le chef d'entreprise (celui-ci
donne surtout le déjeuner de midi), reçoit de ce dernier une pécule
dont le montant varie en fonction du gain réalisé par le chef d'en-
treprise sur la vente des produits dont il a participé à la fabrica-
tion
de son ancienneté dans le,
profession et de sa compétence
et de la nature des liens particuliers qui le lient du chef d'entre-
prise. Cependant on ne peut pas parler de salaire en ce qui concerne
le montant du numéraire versé à l'apprenti, car il vient toujours
en complément d'autres moyens de natures différentes et participant
pour une part essentielle à la reconstitution de sa force de travail
(nourriture de midi, habillement, travail personnel etc ... ).
Cette variante manifeste l'influence du mode de production capitalis-
te sur le mode de soumission lignagière du travail dans les ateliers
étudiés
l'introduction du numéraire parmi les éléments de la repro-
duction de la force de travail est une des revendications essentiel-
les de l'apprenti professionnellement compétent qui conscient de
son rôle central de ntSflucteur direct s'assimile comme un ouvrier
même slil aspire lui aussi à devenir chef d 1
d entreprise dans un futur
plus ou moins lointain.
... / ...

460
C. LES POUVOIRS DE CONTRAINTE DU CHEF D'ENTREPRISE
==~=========================~=====~============
Le système d'exploitation de la force de travail dans
les unités de production du secteur paracapitaliste, pour se maintenir
dans le temps et se reproduire implique qu 1 un
qu'un certain nombre de condi-
tions (idéologiques, sociales, économique et politique) soient remplies
au niveau interne comme au niveau externe
.1 - POUVOIR DE SOUMISSION
Le pouvoir de soumission le plus important que possède le
chef d'entreprise sur son apprenti c'est celui, en tant qu'il est
le propriétaire des moyens de travail et ou de production de comman-
der l'accès et l'utilisation des moyens de travail nécessaires à la
formation de l'apprenti, de faire prolonger plus que c'est nécessaire
le temps d'apprentissage de celui-ci et de limiter ses connaissances
et sa compétence à un niveau suffisamment bas pOUf lui permettre
d'avoir une bonne maitrise du métier. Ce pouvoir de soumission, le
chef d'entreprise l'utilise toujours plus ou moins pour se soumettre
le travail de l'apprenti qui désirant faire un bon apprentissage
(ne pas être exclu de l'atelier, ne pas être marginalisé dans la
distribution des tâches etc ••• ) s'obligent à accepter les conditions
d'exploitation qui lui sont imposées.
Ce pouvoir de soumission est régulièrement utilisé par le chef d'en-
treprise, aussi lontemps que son apprenti n'aura pas atteint une
maîtrise élevée du métier lui conférant lui aussi un pouvoir qu'il
peu'tutilisé
con'lme un contre pouvoir contre son chef
: par exemple
abstentéisme volontaire de l r
l apprenti au moment où le chef d'en-
treprise a reçu beaucoup de commandes à exécuter manifestant ainsi
tacitement sa désaprobation contre sa condition .
. 2 - POUVOIR DE PROMOTION
Quand le pouvoir de soumission dont dispose le chef d'en-
treprise devient inefficace parce que ne pouvant plus obliger psy-
chologiquement et moralement l'apprenti à se soumettre auX conditions
... / ...
....,

461
d'exploitation qui lui sont imposées alors il se transforme en pouvoir
de promotion consistant à accorder à l1apprenti
l'apprenti des avantages:
l'ap-
prenti reçoit plus régulièrement des "mandats" d'un moutant plus
important. Ce pouvoir de promotion s'exerce sur un fond de paterna-
lisme renforcé en ce sens que les nouveaux avantges octroyés par le
chef d'entreprise à son apprenti sont présentés à celui non pas
comme quelque chose dont il a droit en raison de sa compétence et
de sa participation réelle dans les procès de travail et de produc-
tion mais comme un privilège qu'on lui accorde pour recompenser sa
patience, sa bonne tenue, son esprit de soumission durant sa période
antérieure d'apprentissage. Ce paternalisme. dans certains cas peut
s'exprimer par
l'octroi pac le chef d'entreprise à son apprenti de
la possibilité de faire un travail autonome à l'intérieur de l'en-
treprise : c'est le cas quand le chef d'entreprise dispose d'une
clientèle large et produit des biens et services de nature variée
et d'importance inégale du point de vue de leur valeur monétaire.
Cette possibilité pour l'apprenti d'exercer un travail autonome
devant se dérouler dans un temps différent de celui de la production
pour le chef d'entreprise lui donne le sentiment d'être un petit
patron non pas seulement parce qu'il organise tout seul son travail
produit et vend pourson propre compte mais aussi parce qu'il peut
se constituer une clientèle composée de personne de son entourage
ou clients du chef d'entreprise si les service~ qu'ils sollicitent
ou les biens qu'ils commandent appartiennent aux catégories de biens
et services dont la production peut être librement assurée par lui
avec l'accord du chef. Ce sentiment chez l'apprenti de devenir un
petit patron peut beaucoup se renforcer si d'autres apprentis plus
jeunes et moins compétents que lui travaillent sous ses ordres.
L'exercice du pouvoir de promotion par le chef d'entreprise~
s'il permet à l'apprenti d'améliorer sa condition sociale et d'occuper
une position plus valorisante dans l'atelier accroit aussi en même
temps la dépendance de l'apprenti à son chef; celui-ci pouvant
interdire à celui-là à n'importe quel moment l'utilisation de ses
moyens de travail à des fins de production de service ou biens mar-
chands. Le pouvoir de promotion se transforme ainsi en pouvoir de
contrainte pour obliger l'apprenti à se soumettre à sa condition
d'exploiter.
... / ..

462
Si pendant les premières années de la formation profes-
sionnelle de l'apprenti, le chef d'entreprise pour créer les condi-
tions de la soumission du travail de celui utilisait principalement
son pouvoir de contrôle à l'accès aux moyens de formation
par contre,
pendant la période postérieure à l'acquisition par l'apprenti d'une
bonne maîtri~e de son métier, la production des conditions de soumis-
sion de son travail par le chef d'entreprise passe par l'utilisation
par celui-ci de son pouvoir d'interdire à son apprenti l'accès aux
moyens de travail pour une production indépendante.
D - LE RÔLE DES STRUCTURES FAMILIALES
==~====~===~=====================
La famille de l'apprenti en tant qu'elle participe à la
reproduction de la face de celui-ci en prenant en charge certains
de 58 besoins (se loger. manger etc ... ) contribue à la production
des conditions de la reproduction du mode de soumission du travail
de l'apprenti par le chef d'entreprise. En effet, pour que le chef
d'entreprise puisse exploiter son apprenti dans les conditions que
nous avons déjà définies il faudrait que celui-ci soit dans des
conditions physiques et matérielles assez satisfaisantes pour lui
permettre d'apprendre un
métier, de travailler et de produire sans
qu'une contre-partie salariale soit nécessaire pour une reconstitu-
tion continuelle de sa force de travail. C'est la famille élargie
ou étendue avec son réseau int~rne de solidarité qui fournit à
llapprenti les moyens de reconstituer continuellement la force de
travail qu'il dépense en travaillant pour le compte et au profit
du chef d'entreprise sans recevoir de rénumération. Si la famille
de l'apprenti accepte de faire ce sacrifice c'est pour préserver
celui-ci du risque d'être exclu par son chef à la suite de contes-
tation à propos du sal~ire et pour ensuite tomber dans l'oisiveté
et aller grossir le rang des délinquants urbains. ce qui jetterait
le dé honneur dans la famille. Entre l'oisiveté (mère de toutes les
vices) probable que connaîtrait l'apprenti en cas d'exlusion et
..
..
'/'

463
le maintien actif de celui-ci dans sa condition d'apprenti exploité,
les parents de l'apprenti ont choisi le second terme et par-
tagent ainsi la production des conditions de la reproduction de
la soumission du travail dans les unités du secteur informel
paracapitaliste. Ainsi c'est le maintien de la famille dans ses
structures anciennes traditionnelles et ses pratiques de so-
lidarité qui permettent aussi le maintien dans sa forme actuelle
du rapport du chef d' entreprise/ apprent L
E - L'EFFET DE LA FAIBLESSE DU POUVOIR D'ACHAT DES
CONSOMMATEURS
La faiblesse du pouvoir d'achat des consommateurs des
biens et services produits par le secteur informel paracapitaliste
constitue tout autant que l'inflation des prix des matières premières
des contraintes extérieures auxquelles le chef d'enLLeprisene peut
exercer aucune maîtrise.
Ces contraintes entraînent une contradic-
tion économique fondamentale que le chef d'entreprise doit pouvoir
continuellement gérer à son profit pour pouvoir survivre: d'une
part répercuter le prix des matières utilisées sur le produit final
et d'autre part vendre le produit à un prix suffis~ent bas pour
le rendre accessible aux consommateurs. Pour gérer cette contradic-
tion le chef d'entreprise agit sur deux facteurs internes qu'il
peut maîtriser à savoir le coût de l'amortissement des moyens de
travail dont il est le propriétaire d'une part et celui de ce qui
devrait être la reproduction de la force du travail de l'apprenti
d'autre part; le premier ne sera pas pris en compte dans le prix
du produit final (ou très partiellement en tout cas) et quand au
second il est tout simplement comprimé jusqu'au minimum et approprié
totâ1ement ou partiellement par le chef d'entreprise et tenant à la
fois lieu de profit et d'amortissement pour ses moyens de travail.
Ce qui favorise une telle forme de gestion du coût de la reproduc-
tion de la force de travail de l'apprenti par le chef d'entreprise
c'est bien la situation sacio-économique des consommateurs largement
déterminée par les contradictions spécifiques du mode capitaliste
dominant : sous valorisation de la force de travail des employés
du secteur moderne et création de nouveaux besoins aspirants mais

d'un coût hors de portée des consommateurs s'il est déterminé
suivant le mécanisme capitaliste de fixation des prix, d'où
l'émergence et le développement du secteur informel qui offre
une autre alternative que rend possible sa capacité à utiliser
à des
fins
économiques les ressources de la tradition.
F - L'EcOLE ET LES DÉPERDITIONS SCOLAIRES
==~====~=============================
Un autre élément important qui participe à la production
des conditions de reproduction
du système d'exploitation dans le
secteur informel paracapitaliste c'est
l'école publique primaire
qui chaque année déverse dans la rue des ,milliers
de jeunes pré-
adolescents ou adolescents jugés inaptes à poursuivre des études
et qu'aucune structure de formation professionnel moderne et
adaptée n'accueille. C'est parmi ces jeunes gens que le secteur
informel paracapitaliste recrute ses apprentis, ses travailleurs
dont le nombre par unité de production dans les ateliers visités
varie de 12 à 27. Il est évident que dans ces conditions et en
raison de l'irrégularité que connaissent ces unités dans leurs
activités de production qu'il y a une sous-valorisation de la
force de travail des apprentis producteurs. Un système de barèmes
de rémunération existe pour les apprentis avec un taux variable
selon l'ancienneté; il est élaboré par le Ministère de la Fonc-
tion Publique
de l'Emploi et du Travail et à force de loi, mais
il n'est jamais appliqué par les chefs d'entreprise qui évoquent
comme motif de leur refus leur incapacité économique et financière
à supporter des charges salariales pour une ou plusieurs dizaines
d'apprentis qu'ils forment. D'aucuns revendiquent même de la part
de l'Etat que des subventions leur soient accordées au même titre
que les institutions scolaires privées en raison de la contribu-
tion qu'ils apportent à l'état en matière d'éducation et de
formation en ce qui concerne la jeunesse.
... / ...

465
Toute politique de contrôle repressif dans l'application
du système de rémunération des apprentis ne pourrait aboutir à
court Ou moyen terme qu'à un refus massif de la part des chefs
d'entreprise de recruter des apprentis avec comme conséquence
immédiate l'augmentation du nombre de jeunes délinquants marginaux
urbains.
Ainsi le rejet massif chaque année des écoles primaires
publiques de jeunes adolescents d'extraction modeste, l'absence
de structure moderne de formation professionnelle adaptées au
cas de ces jeunes, le laxisme de l'Etat dans l'application des
règles de rémunération en ce qui concerne le personnel du secteur
informel paracapitaliste sont là autant de facteurs qui ne peuvent que
contribuer au développement et au renforcement des mécanismes de
soumission du travail dans le secteur informel.

466
ANNEXE
I I
LE
MODE
DE
RECRUTEMENT
DES
APPRENTIS
=========================================

467
A - NÉGOCIATION PARENT-CHEF D'ENTREPRISE
====================================
Le recrutement d'un apprenti quel que soit son âge,
son niveau d'instruction ou sa compétence intervient à la suite
d'une négociation sur les conditions de l'apprentissage menée
entre le patron et le parent de l'apprenti (ou son tuteur.) Au
cours de cet entretien qui dans un premier temps se fait à l'in-
su du futur l'apprenti, le patron définit le type de comportement
qu'il attend de ce dernier ainsi que les conditions dans lesquel-
les vont se dérouler son apprentissage et les sanctions envisa-
gées pour chaque déviation aux normes. A la suite de ce premier
entretien et s ' i l y a accord entre le patron et le parent du
futur apprenti, un deuxième entretien s'organise avec cette
fois-ci la présence de celui-ci : le parent ou le tuteur du pos-
tulant énumère à l'intention de ce dernier les traits de carac-
tères, les comportements que son futur patron attend de lui et
le conseille à suivre les directives de celui-ci ; si aucune
objection n'est fait par le futur apprenti alors celui-ci peut
commencer son apprentissage le jour même ou un autre jour qui
sera fixé à cet effet. Au jour choisi pour commencer son appren-
tissage, l'apprenti est présenté par son patron tour à tour, à
tous les autres apprentis déjà engagés ensuite il lui donne
ses premières instructions concernant les précautions à prendre
et les interdits à respecter pour éviter des accidents ou des
conflits pouvant déboucher sur des querelles avec les autres
apprentis et sur les premières tâches auxquelles il sera assign~
durant la première étape de son apprentissage.
. .. ! ...
/- .•'ii;:
.•
•..
'ii;:

468
B - LES CRITÈRES DE PRÈFÈRENCE DES CHEFS D'ENTREPRISE
=================================================
Les chefs d'entreprise préfèrent recruter leurs apprentis
parmi les jeunes gens du quartier où se trouve leur entreprise ou
celui de leur lieu d'habitation; il existe plusieurs raisons à
cela qui sont essentiellement d'ordre économique et social.
1 - RAISONS ECONOMIQUES
La proximité de la demeure de l'apprenti de celle du
chef d'entreprise ou du lieu d'installation de l'entreprise de
celui-ci a pour conséquence la réduction de certaines charges
qui pèsent sur le chef d'entreprise en Itoccurence les dépenses
pour le déjeuner de midi des apprentis et celles relatives à
leur transport de
la maison à l'atelier et inversement; dans
le cas où l'apprenti habite à proximité de l'atelier, le chef
d'entreprise le renvoie chez lui où il prendra le déjeuner de
midi auprès des siens, de même il sera obligé de faire le trajet
de chez lui à l'atelier et inversement à pied; si par contre sa
demeure se trouve à côté de celle du chef d'entreprise et si
celui-ci habite lui-même loin de son atelier alors dans ce cas
le chef d'entreprise le prend avec lui dans sa voiture le matin
pour l'amener au travail et le soir pour le ramener à la maison.
Cette stratégie de recrutement, si elle permet au chef d'entrepri-
se de réaliser des économies supplémentaires grâce à une réduction
de ses charges sociales constitue aussi souvent une source de
,
tension entre lui et les parents de l'apprenti qui conidèrent
i
conidèrent
:l
que c'est un devoir impératif pour le chef d'entreprise, dans
1
dans
tous les cas de prendre en charge les dépenses de nourriture de
ses apprentis pour le déjeuner de midi. Ces tensions peuvent
déboucher à la longue sur des conflits ouverts impliquant l'arbi-
trage de l'inspection du travail et du tribunal du travail où
... / ...

469
l'apprenti et son parent soulèveront non pas le problème de la
nourriture de midi qui était à l'origine de la tension qui a
donné naissance au conflit mais tout simplement celui de la rému-
nération de la force de travail de l'apprenti et de non respect
par le chef d'entreprise de l'ensemble des droits que la loi sur
l'apprentissage donne aux apprentis (rémunération, affiliation
à la caisse de sécurité sociale etc .•• ).
2 - RAISONS SOCIALES
Les tension et conflits qui naissent entre les parents
de l'apprenti et le chef d'entreprise à propos de la rémunération
de la force de travail de l'apprenti ou de la prise en charge
de la nourriture de ce dernier par le chef d'entreprise sont le
plus souvent inexistant ou en tout cas très atténués si le chef
d'entreprise et le parent de l'apprenti se connaissent depuis
de longues dates et ont établi entre eux des liens solides d'ami-
tié ou s'ils sont apparentés. Ici la qualité des liens personnels
est un facteur de réduction des tensions et des conflits car elle
permet d'instaurer une confiance réciproque entre le chef d'entre-
prise et le parent de l'apprenti. Pour cette raison et afin de
réduire au minimum les 'contestations qui ne manqueraient de
naitre à propos de sa gestion
de ses rapports sociaux de produc-
tion avec les apprentis de la part des parents de ces derniers,
le chef d'entreprise aura tendance à recruter ses apprentis parmi
ses proches, c'est-à-dire les enfants de ses amis ou de ses pa-
rents habitant dans le même quartier que lui de celui où est
implanté son atelier a Cette tendance a cependant d'autres avanta-
ges pour le chef d'entreprise car elle lui permet grâce à la
complicité du parent ou tuteur de l'apprenti de mieux exercer
un contrôle sur ce dernier au niveau du travail; le chef d'en-
treprise rend compte au parent de l'apprenti du degré d'assuidité
... / ...

470
de celui-ci dans le travail, de l'état ou progression de sa forma-
tion etc ... çe qui permet au parant de l'apprenti chaque fois
que c'est nécessaire d'exercer une pression sur ce dernier.
CONCLUSION
Les conditions qui président au recrutement et à la
sélection des apprentis obéissent à deux rationnalistes. L'une
est d'ordre économique et s'organise autour de considérations
de proximité physique: l'apprenti doit :labiter dans la même
localité que le chef d'entreprise ou dans les environs immédiats
du lieu où se trouve l'entreprise. L'autre est d'ordre social
et s'organise autour de considérations sociales: les liens de
parenté, d'amitié et de voisinage déterminent pour beaucoup
le choix du chef d'entreprise quand il s'agit de recruter de
nouveaux apprentis. La première vise à une réduction des charges,
qui traditionnellement le chef d'entreprise a le devoir è'assumer
(frais de transport et nourriture de midi) vis-à-vis de ses ap-
prentis. Tandis que la deuxième vise à une emprise morale, psy-
chologique plus grande du chef d'entreprise sur ses apprentis
vis à vis de qui il jouera le rôle de tuteur, d'éducateur, de
formation dont l'effet à moyen terme consiste dans le renforce~
ment des rapports de domination et d'exploitation.
(j
!

471
A'1~EXE III
L'APPRENTISSAGE
: SES
DIFFERENTES
ETAPES
==~===========~===========~===================
ET CARACTERISTIQUES
===================

472
A - PREMIËRE ÉTAPE DE L'APPRENTISSAGE
L'ÉDUCATION
================================================
MORALE DE L'APPRENTI
====================
La formation des apprentis dans le secteur informel
paracapitaliste se fait sur le tas et n'obéit à aucun programme
formel établi. Cependant si l'on observe les pratiques qu'ils
entretiennent d'une part avec le chef d'entreprise et d'autre
part entre eux selon
leur ancienneté et niveau de compétence
acquise on peut déceler une certaine logique dans le mode forma-
tion en ce qui concerne la succession dans le temps de ses dif-
rentes étapes : quatre étapes peuvent être observées :
La première étape commence à partir du jour où l'apprenti arrive
dans l'atelier amené par son tuteur et se
termine quand après
une mise à l'épreuve de sa conduite, de son caractère et des
capacités) durant plusieurs mois,
i l est définitivement accep-
té dans le groupe de travail. Durant cette première étape qui
est un véritable test de la personnalité de l'apprenti celui-ci
est assigné à des tâches qui sont en marge du procès de travail
et du procès de production :
* il exécute des commission : achat de matières ou de
petits matériels dans les magasins environnants et
qu'il est chargé de transporter jusque dans l'atelier
en les portant à la main,
sur la tête.
* Il s'occupe de la propreté de l'atelier: il est
chargé de balayer, nettoyer les différents locaux
et endroits de l'atelier
tous les jours du moins
chaque fois que les lieux sont jugés malpropres par
le chef d'entreprise.
... / ...

473
* Il s'occupe de l'entretien et du ramassage du petit
outillage dispersé dans l'aire de production et qu'il
doit ranger à sa place quand le travail est fini.
* Il assiste à llexécution des travauX confiés à des
apprentis plus expérimentés que lui et doit les aider
dans leurs tâches en lui apportant les outils ll'inatières
demandés ou encore en les aidant à monter ou à descendre
OU
à maintenir les objets suivant une certaine position.
* Il apporte le repas de midi qu'il va chercher à la
maison de son patron ou dans une des gargottes du
coin et joue le rôle de coursier pour tous les appren-
tis plus âgés et plus anciens que lui dans l'atelier
qui peuvent l1envoyer chercher cigarettes, colas etc ..
chez le commerçant ou bana-bana du coin.
Durant cette étape tout chez l'apprenti est observé;
il est l'objet d'une attention particuliè~e de la part du patron
et des autres apprentis plus anciens que lui. Ces conduites et
comportements à chaque situation seront analysés) interprétés
et l'on cherchera à repérer des indices, des faits qui indiquent
ces tendances suivantes :
Tendance au vol
Tendance provocatrice et belliquance
Tendance à l'absentéisme
Tendance au mensonge.
Ces quatre
tendances si elles sont détectées chez
l'apprenti sont critiquées par tout le groupe qui cherchera par
tous les moyens à les reprimer (conseils personnels, mise en
quarantaine, pression 6ur les parents etc ... ) L'aprenti sera exclu
... / ...

474
de l'atelier si les manifestations de ces tendances deviennent
fréquentes. La finalité de cette première étape de l'apprentissage
semble donc être l'éducation morale de l'apprenti qui doit accep-
ter les normes éthiques de son nouveau groupe d'appartenance et
s'y conformer dans sa conduite sous peine d'être exclua De même,
sous peine d'être marginalisé ultérieurement dans le travail, le
groupe exige de lui qu'il développe des qualités personnelles qui
eu égard aux conditions de formation (formation sur le tas où la
volonté et l'initiative personnelle sont indispensable à tout
progression) sont nécessaires pour une acquisition rapide des
premières bases techniques et de savair faire du métier : la
capacité d'une telle acquisiton offre au chef d'entreprise la
possibilité d'une exploitation plus rapide de la force de travail
de l'apprenti et aux autres apprentis la possibilité de voir se
diminuer leur charge physique de travail. Ces qualités personnelles
que le nouveau apprenti doit développer sont la capacité à fixer
se
son attention sur ce qui.,. fait devant lui dans le cadre du travail,
la capacité à utiliser sa mémoire à se rappeler les différentes
étapes des procès de travail auxquels il assiste et à savoir
identifier les différents matériaux et outils utilisés, la capacité
à faire usage avec dextérité de ses mains: c'est le développement
de ces capacités qui permet de passer à la deuxième étape en ce
qui concerne l'apprentissage.
B - DEUXIÈME ÉTAPE DE L'APPRENTISSAGE
EXÉCUTION DE
========================================~=~=====
TÂCHES SIMPLES - CONNAISSANCE DES OUTILS ET MATERIAUX
=======================~=============================
La deuxième étape consiste en la confirmation des acquis
de la première étape et surtout au renforcement des dispositions
personnelles qui chez l'apprenti sont conformes aux e;;::igences
... / ...

475
des conditions dans lesquelles se déroulent l'apprentissage et
l'exercice de la profession. L'apprenti est plus systématiquement
mis à l'épreuve au travers de l'exercice de petites tâches qu'on
lui confie: il est plus sévèrement surveillé, d'avantage conseillé
et i l est fortement reprimandé en cas d'erreurs ou de fautes.
Au cours de cette deuxième étape les tâches qui lui sont
confiées peuvent au cours des différents procès de travail être
très diverses mais elles ont en commun le fait que les erreurs
commises au cours de leur exécution sont facilement réparables
et aisées à rectifier. En général ces tâches consistent en des
opérations se situant au début du procès de travail et dont l'exé-
cution fait appel très peu aux facultés de réflexion. Ces tâches
permettent à l'apprenti d'avoir une certaine expérience pratique
de la nature et des caractéristiques physiques spécifiques aux
différents matériaux et outils de travail ainsi qu'à connaître
les postures, les précautions qU'il
qu'il faut prendre et les outils
qu'il faut utiliser pour réaliser des tâches simples qu'on lui
confie et qui sont selon les corps de métiers :
Menuiserie bois: sciage, polissage, masticage,
Menuiserie métallique: sciage, coupage, redessage
des barres de fer
Mécanique auto : démontage et remontage des roues,
des phares.
Durant cette étape de l'apprentissage le jeune apprenti
se place sous la tutelle morale et professionnelle d'un autre
apprenti plus âgé, plus ancien et plus compétent que lui qu'il
choisit personnellement. Ce dernier le protège et l'associe
plus atroitement à tout travail qui lui est confié et l'aide
.. '/ ...

476
personnellement à mieux maitriser les ficelles du métier. Cette
situation permet au jeune apprenti, dans le courant de la duxième
étape de sa formation de pouvoir observer des pratiques complexes
et
ensuite d'apprendre progressivement à exercer des tâches requer-
rant d'avantage d'attention et sollicitant d'avantage les facultés
cognitives.
C - TROISIÈME ÉTAPES
EXÉCUTION DE TÂCHES ET D'OPÉRATIONS
========================================~=~=~=========
COMPLEXES
=========
A la troisième étape l'apprenti pratique de façon plus
systématique les tâches complexes auxquelles il était plus ou
moins initié au cours de la deuxième étape. Mais cette troisième
étape est aussi caractérisée chez llapprenti par une curiosité
réelle sur les secrets de mon métier et une quête non moins
réelle de réponses satisfaisantes aux questions techniques et
pratiques qu'il se pose et qu'il pose aux apprentis plus anciens
et plus compétents que lui se trouvant dans l'atelier. L'objectif
de cette troisième étape chez l'apprenti, c'est d'arriver à iden-
tifier chacune des parties d'un ensemble ou d'un système à connaî-
tre la fonction,
le rôle que chacune d'elle assure et d'arriver
à la façonner, détecter ses défauts et procéder aux réparations
qui conviennent. Cette apprentissage doit permettre à l'apprenti
d'arriver à une connaissance plus approfondie et plus globale de
son objet de travail et aussi à une plus grande précisions dans
l'exécution de ses tâches et à une meilleure connaissance des
techniques appropriées pour chacune d'elle.
Cette étape est aussi le moment d'une grande tension
entre 11apprenti et son patron et ou les autres apprentis plus
anciens et plus proches de ce dernier : ceux-ci chercheron à
... / ...
,.

477
l'éloigner de l'atelier chaque fois qu'il s'agira d'exécuter des
tâches ou des opérations complexes dont la maîtrise par l'apprenti
lui permettrait de réclamer des privilèges auxquels il ne peut
pas encore prétendre vu son niveau de compétence.
En raison de cette tension et de ce qui en constitue l'enjeu,
il peut arriver que l'apprenti se résout à quitter définitivement
l'atelier pour aller chercher un autre patron dans l'espoir que
celui-ci serait plus disposé à son égard et il répétera la même
démarche aussi longtemps qu'il n'aura pas rencontrer le patron
qui reponde à ses attentes. Dans d'autres cas il ira chercher
dans d'autres ateliers des apprentis plus compétents que lui
pour lui donner le complément de formations qui lui fait défaut
ceux-ci alors l'associent comme aide à l'exécution des tâches,
ou travaux qu'ils sont souvent amenés à faire à domicile ou en
tout cas en dehors de leurs ateliers et à l'insu de leurs patrons
respectifs et cela dans le but de se faire un peu d'argent afin
de pouvoir satisfaire quelques uns de leurs besoins personnels.
En raison des obstacles que le patron et d'autres
apprentis ayant déjà accédé à un niveau de connaissances élevée
dans le métier dressent devant l'apprenti en quête d'une plus
grande compétence la durée de la troisième étape dans le processus
de l'apprentissage est plus grande que celle des étapes précédentes
et peut durer plusieurs années (de 2 à 4 ans). Le durée de cette
étape est un véritable enjeu
:
- Pour le patron plus cette étape dure, mieux et plus
longtemps il pourra assigner l'apprenti à des travaux productifs
sans lui acorder aucun privilège compensatoire étant donné que
pour le patron, à cette étape de l'apprentissage, l'apprenti par
son travail doit lui permettre de compenser tout l'effort fourni
... / ...

478
sur lui pour lui apprendre le métier, ce qui comme nous l'avons
déjà démontré dansles lignes précédentes lui donne le droit
de s'approprier ce qui devrait constituer le salaire de l'apprenti
et de faire prolonger durant des année cette situation.
- Pour l'apprenti cette étape doit durer le moins long-
temps possible et être le plus dense possible en matière de
nouvelles expériences professionnelles ce qui lui permettrait
le cas échéant d'acquérir un certain pouvoir sur son patron et
d'exiger en compensation du travail qu'il fait et dont la valeur
est reconnue des privilèges : des "rnan
"
dats ll
dats
plus substancielles
et la possibilité pendant l'étape ultérieure de pouvoir dans
l1 ate lier même s'adonner à quelques petits travaux pour son
compte personnel: i l faut dire que c'est au cours de cette
troisième étape que le plus souvent l'âge de l'apprenti se rappro-
che de celui de la majorité (21 ans)
; il commence alors à aspirer
à la possession de nouveaux biens, à avoir d'autres besoins nou-
Veaux et aussi à être pour sa famille une charge de plus en plus
lourde. A cet âge l'apprenti qui est souvent de famille modeste
prend conscience de la charge qu'il constitue pour sa famille
et de la nécessité de la soulager par un apport financier ou du
moins de pouvoir satisfaire lui-même une partie de ses besoins
à savoir surtut pouvoir acheter son petit déjeuner le matin et
de temps en temps des habits pour lui-même, ses effets de toilette,
son billet de cinéma etc . . . L'apprenti vit une grande frustration
s'il ne peut satisfaire ces besoins.
- Pour les apprentis plus anciens et plus compétents
qui bénéficient déjà des privilèges que le patron accorde à
qui i l veut en raison de son pouvoir discrétionnaire, cette étape
de la formation de l'apprenti outre qu'elle leur permet de pou-
voir décharger sur celui-ci une partie de leurs tâches en
... / ...

479
l'occurence celles qui sont les moins complexes, est perçue comme
l'antichambre qui permettrait à l'apprenti ultérieurement de deve-
nir non seulement un concurrent pour eux dans la production de
biens et services à titre personnel dont ils ont le privilège
mais aussi de partager avec eux les mandats que le patron leur
distribue à l'occasion des gains obtenus à la suite de l'exécution
de tâches ou de travaux présentant une grande complexité. Donc
pour cette catégorie d'apprentis privilégiés plus longtemps dure
la troisième étape de la formation de l'apprenti plus longtemps
ils pourront conserver et développer les privilèges et avantages
auxquels leur statut (confère par leur compétence reconnue) leur
permet de prétendre.
D - QUATRIÈME ÉTAPE DE L'APPRENTISSAGE: APPRENTISSAGE
===~===================================~==========
DU RÔLE DE PATRON
=================
La quatrième et dernière étape de la formation intervient
à partir du moment où l'apprenti a été jugé compétent et bien expé-
rimenté par son patron qui accepte de lui accorder des privilèges
et avantages sur le plan économique et financier
l'apprenti
jouit d'une semi autonomie dans son travail et à le privilège
de pouvoir travailler à titre personnel de temps à temps dans
~
.-
l'atelier et ensuite i l reçoit des mandats plus substanciels
que les autres apprentis de rang inférieur pour tout travail qu'il
fait pour le patron. Cette quatrième étape comporte deux caractéris-
tiques essentielles sur le plan de la formation :
- Cette étape est le moment où l'apprenti qui a déjà
atteint un niveau élevé dans le domaine de la maitrise profession-
nelle en ce qui concerne toutes les tâches se situant en aval du
travail de conception commence à s'initier à la maitrise de celui-ci
... / ...

480
il s'initiera à la technique des mesures, à faire des croquis ou
plans pour représenter à l'échelle les mesures des différentes
parties de son objet, à s'intéresser d'avantage aux propriétés
des matériaux. Les travaux qu'il fait, sur commande à titre
personnel dans l'atelier ou à domicile permettent selon leur
degré de complexité et leur fréquence de multiplier ses initiatives
personnelles et d'élargir plus ou moins rapidement le champs de
ses expériences dans le domaine du travail de conception. Cepen-
dant malgré ses initiatives et expériences personnelles, l'apprenti
ne va tarder à se heurter à des obstacles qui procèdent des limites
mêmes de sa formation scolaire : savoir prendre des mesures dessi-
j
ner à l'échelle, faire des opérations de calcul nécessitent que
l'apprenti possède un niveau scolaire avoisant celui de fin
d'études primaires, ce qui n'est pas toujours le cas. C1est le
niveau scolaire reçu qui dans la dernière étape de l'apprentissage
déterminera les chances futures de l'apprenti de devenir Ou non
à son tour un chef d'entreprise aux affaires qui marchent parce
que pouvant espérer disposer d'une large clientèle appréciant
la précision et la qualité de son travail.
- Cette étape de l'apprentissage est aussi le mOment
où l'apprenti arrive à l'age adulte (ou presque) et faisant
partie des plus anciens devra tester sa capacité à gérer des
groupes d'hommes liés par des rapports de travail (les équipes
de travail qu'il dirige dans l'entreprise) et à établir des
stratégies lui permettant non seulement de mieux vendre les
biens et services qu'il produit à titre personnel mais aussi
et surtout de récupérer ses gains auprès de ses clients : durant
cette étape l'apprenti fait l'apprentissage de l'exercice de
son future rôle de chef d'entreprise.
... / ...

481
Au terme de cette dernière étape dont la durée variable
est fonction des capacités personnelles de l'apprenti (niveau
1
scolaire, capacité au commandement)de l'intensité et de la qualité
de ses rapports avec d'autres apprentis de même niveau avec les-
quels il échange des informations concernant les nouveautés et
innovations dans le métiers, l'apprenti envisage soit de s'ins-
taller définitivement à son compte personnel après avoir accumulé
par voie d'achat ou par d'autres voies des outils de travail soit
d'aller travailler dans le secteur moderne comme salarié.
lE CONCLUSION
Ces différentes étapes de l'apprentissage telles que
c'est défini;
n'ont pas de frontière tranchée les unes par rapport
aux autres; elles s'entrepénètrent et chacune d'elle prépare
l'étape suivante par un processus de familiarisation de l'apprenti
aux tâches méthodes et moyens de travail qui caractériseront
l'étape suivante. Par ailleurs chaque étape est aussi un moment
particulier dans le processus de socialisation et d'intégration
de l'apprenti dans son milieu car à chaque étape correspondent
chez l'apprenti des comportements typiques et des rapports déter-
minés d'une part avec le patron et d'autre part avec les autres
membres du groupe.

482
ANNEXE IV
DIVISION
DU
TRAVAIL
ET
DIFFERENCIATION
=~========================================
SELON
LES
STATUTS
===================
......

483
A - LES FINALITÉS DE LA DIVISION DU TRAVAIL
=======================================
La division du travail dans l'atelier n'obéit pas aux
mêmes règles de parcellisation des tâches dans les grandes entre-
prises capitalistes où le travailleur exécute indéfiniment une
série de tâches déterminées et n'a aucune possibilité de s'initier
à la maitrise des autres tâches concernant à la réalisation du
produit final.
Dans les entreprises du secteur informel paracapitaliste
l' apprenti oul~ravailleur s'associe à toutes le tâches, opérations
successives des différents procès de travail
i l doit progressi-
vement, étape par étape connaltre et arriver à maîtriser tous les
procès partiels ; pour cela il observe les pratiques des autres
apprentis plus compétents que lui, imite ceux-ci et répète leurs
pratiques jusqu'à une maîtrise totale des différents procès par-
tiels. L'organisation du travail est ainsi déterminée par le
mode d'apprentissage dont la finalité c'est de produire, non pas
des travailleurs spécailisés à une ou plusieurs tâches bien
limités mais des artisans capables d'avoir une maitrise complète
de tous les procès, de travail concourant à la production dlun
bien ou service déterminé. C'est sur la base de cet impératif
que les apprentis sont organisés en équipes de travail caracté-
risée chacune par un niveau de connaissance, de savoir-faire et
de compétence déterminés sur un ou plusieurs domaines dans le
métier, avec possibilité pour chaque apprenti de passer d'une
équipe à une autre au fur et à mesure que dans le temps ses
capacités professionnelles se développent. C'est à ces équipes
de travail bien différenciés selon leur niveau de savoir faire
que sont assignées les différentes tâches en fonction de leur
degré de complexité, et du niveau de compétence qu'il requiert
.•. 1.•.
~.;;'I'J".,•.
~.;;'I'J"., -.-.." ..

484
d'avoir pour leur exécution~ Chaque équipe est dirigée dans son
travail par un de ses membres et en l'occurence celui qui est le
plus compétent et le plus entreprenant du groupe ou dans certains
cas par un autre membre d'une autre équipe de niveau supérieur.
C'est au cours de ces procès différenciés et des
fois simultané-
ment menés par les différentes équipes constituées que se fait
progressivement l'apprentissage du métier dont les modalités de
transfert du savoir faire qU'il
qu'il implique consistent pour les uns
les moins compétents à observer et à imiter
ce que font les
autres, les plus compétents et pour ces derniers à expliquer cha-
que opération qu'ils font, à contr31er les exercices d'imitation
des moins compétents et à rectifier leurs erreurs au cours d'au-
tres procès ultérieurs où l'initiative leur sera laissée.
Ce mode d'organisation du travail en fonction des ~ratifs
de l'apprentissage remplit une double fonction du côté du chef
d'entreprise: une fonction politique et une fonction de production.
Fonction politique
Cette mode d'organisation du travail que nous avons dé-
crite
plus haut permet au chef d'entreprise
qui organise les
équipes et distribue les tâches (dans beaucoup de cas, il délé-
gue le pouvoir à un des bras droits) de contrôler les passages
des apprentis d 1
d une équipe à autres, donc de faire jouer son
pouvoir de contrainte ou de promotion de freiner ou au contraire
d'accélérer à son gré la promotion de tel
ou tel apprenti sui-
vant que celui-ci se montre insoumis ou'plutôt
conciliant.
Ponction de production
Ce mode d'organisation du travail en équipes avec
possibilité pour les membres de chaque équipe de passer à une
équipe de rang supérieur successivement dans le temps jusqu'à
... / ...
.'~

485
une maîtrise totale de tous les procès de travail permet au chef
d'entreprise de pouvoir disposer à tout moment d'apprentis capa-
bles d'accomplir les tâches les plus diverses, des plus simples
aux plus complexes ce qui n'aurait pas pu être le cas si chaque
apprenti était spécialisé à une seule tâche:
dans le cas d'une
spécialisation si un apprenti venait à s'absenter, la production
sien trouverait bloquée, arrêtée or l'absentéisme et les
départs
volontaires sont des faits courants dans le milieu des apprentis,
explicable œn partie par leur condition de travailleurs libres
mais non salariés.
B - DIFFÉRENCIATION SELON LES STATUTS
================================
Les apprentis sont hiérarchisés et les critères qui
président à cette hiérarchisation sont multiples et ,diverses :
certains comme le niveau de compétence et l'ancienneté dans le
métier se référent à la profession tandis que d'autres comme
l'âge et la parenté avec le chef d'entreprise se refèrent aux
normes de la tradition.
Ces critères sont combinés les uns aux
autres pour définir le statut de chaque apprenti c'est-à-dire
le type de rapports particuliers à la fois sociaux et profes-
sionnels qu'il doit entretenir d'une part aVec le chef d'entre-
prise et d'autre part avec les autres apprentis de même rang
ou de rang supérieur.
1 - STATUT SELON LE NIVEAU DE COMPETENCE
Au niveau de chaque équipe c'est l'apprenti le plus
expérimenté et le plus compétent sur le plan professionnel qui
a la responsabilité de la direction des travaux ; il distribue
les tâches, coordonne et contrôle leur exécution pour une opération
élicate. C'est lui qui prend l'avis du chef d'entreprise ou des
... / ...

·486
autres apprentis de rang supérieurs, de même c'est lui qui est
responsable de l'outillage avec lequel son équipe travaille.
·ar LE STATUT SELON L'ANCIENNETE
L'apprenti qui a la plus longue ancienneté dans la
profession jouit d'une grande autorité morale et a beaucoup
d'influence sur le groupe car ilest
le personnage par lequel
se transmet aux autres membres du groupes moins anciens dans
·le métier et dans l'entreprise, la tradition du groupe, c ' est-
â-dire les habitudes collectives déjà constituées et fonctionnant
comme des normes définissant dans
chaque situation ce qu'il faut
faire ou ne pas faire
: i l existe des normes instituées par le
chef d'entreprise et qu'il faut
transmettre et des normes générées
par les apprentis eux-mêmes
et qui doivent dicter leur conduites
communes quand un membre du groupe par exemple travaille pour
son compte
sans y être autorisé par le patron ou encore quand
discrètement il subtilise de soutils qu'il emporte chez lui
pour faire un travail à domicile et au quel cas, il doit parta-
ger son gain avec tout le groupe dont la complicité lui a permis
de réaliser ce gain. L1
L apprenti le plus anciens est celui aussi
qui souvent connait le mieux le caractère et les habitudes du
patron et pour cette raison les autres apprentis sollicitent
souvent son avis sur la conduite à tenir chaque fois qu'il
se trouve dans une situation de confrontation avec le patron.
Pour toutes ces raisons évoquées l'apprenti le plus ancien exer-
ce sur les autres un pouvoir idéologique,
·3 - LE STATUT SELON L'AGE
L'apprenti le plus âgé joit d'un grand respect de
la part des apprentis plus jeunes ; ceux-ci lui rendent de petits
services (en lui cherchant ses cigarettes à la boutiques, en lui
... / ...

487
apportant de l'eau à boire etce •• ) aussi bien à l'intérieur
de l'entreprise qu'à l'extérieur: c'est vers lui que les plus
faibles se réfugient en cas de bagarres avec les collègues plus âgés
en outre i l doit aider pécunièrement les jeunes apprentis s'il
en a les moyens en leur redistribuant une partie de ses gains
comme c'est le cas quand ces derniers veulent aller au cinéma
et n'ont pas de quoi payer leurs billets.
L'autorité de l'apprenti le plus âgé sur le reste du
groupe n'est accepté par celui-ci que si elle est doublée d'une
volonté manifeste de la part de l'apprenti de faire usage de
cette autorité ainsi que des moyens et capacités à disposition
pour conforter la cohésion du groupe, aider les uns et protéger
les autres. Pour le patron il doit être un modèle de bonne con-
duite pour les apprentis plus jeunes et doit régler les diffé-
rends qui existent entre eux à son insu ou lors de ses absences
fréquentes de l'atelier .
.4 - LE STATUT SELON LA PARENTE AVEC LE CHEF D'ENTRE-
PRISE
L'apprenti qui a des liens de parenté avec le chef
d'entreprise bénéficie souvent d'une grande confiance de la
part de ce dernier en même temps qu l
qu il est craint des autres
apprentis. Ces derniers autant que faire se peut le tiennent
à l'écart des travaux auxquels ils sl a donnent en cachette aussi
à l'intérieur de l'entreprise qu'à l'extérieur de celle-ci pour
se faire de l'argent. S'il a une compétence élevée dans le mé-
tier, il joue alors le rôle de chef d'atelier et le patron lui
délègue une partie de son pouvoir et en particulier celui de
gestion interne du travail.
... / ....

488
:5
- LE SATATUT SELON LE NIVEAU D'ETUDE
De plu~ en plus le niveau d'étude devient un critère
de hiérarchisation. Ce phénomène est lié au fait que de plus
en plus souvent des entreprises du secteur moderne adressent
des commandes aux chefs d'entreprises du secteur informel para-
capitaliste et exigent au départ, avant exécution qurun devis
leur ont présenté ainsi qu'unefacture après livraison de la
commande. Pour que cette exigence soit satisfaite le chef d'en-
treprise doit, soit savoir lire et écrire, soit employer une
secrétaire ou soit encore utiliser à cette fin un apprenti
sachant lire et écrire. Si le chef d'entreprise n'est pas ins-
truit mais qu'il a
a disposition un apprenti iristruit, alors il
préférera utiliser celui-ci pour l'établissement de ses devis
et factures plutôt que d 1
d employer une secrétaire. De même c'est
à l'apprenti le plus instruit que le patron s'adresse le plus
souvent pour enseigner les consignes d'utilisation qu'accompa-
gnent les machines à ceux qui sont désignéa pour les utiliser
si ceux-ci n'ont pas une expérience pratique de l'utilisation
de ces dernières. C'est également à l'apprenti le plus instruit
que s'adressent les autres apprentis pour qulil leur rédige
leuœlettres ou les départagent au cours de discussions portant
sur des sujets relatifs à des questions de techniques: c'est
le cas surtout quand l'apprenti instruit prend des cours du
soir de perfectionnement ou a suivi des stages techniques dans
des centres spécialisés. En raison de toutes ces sollicitations
dont il est l'objet aussi bien de la part de son patton que de
ses collègues, l'apprenti instruit joue à la fois le rôle de
secrétaire particulier vis-à-vis du patron et de conseiller
vis-à-vis de ses collègues en ce qui concerne les problèmes
relatifs à la profession et dont il possède une certaine con-
naissance.
• •• 1.••
1

489
Cette hiérarchisation des apprentis selon les critères
ci-dessus définis n'est pas quelque chose de formel, cependant
elle se donne à voir par l'observation des rôles et des rapports
sociaux professionnels qui sont très différenciés et les privi-
lèges, responsabilités ou considérations que le patron ou les
autres apprentis donnent à tel ou tel autre apprenti réunissant
tels ou tels caractéristiques.
En raison de la diversité des critères de hiérarchisa-
tion, i l faut aussi dire qu'il existe des cas où un ou plusieurs
apprentis jouent à la fois plusieurs rôles : par exemple les
rôles que lui confèrent à la fois sa compétence, son âge (s'il
est
le plus âgé
du groupe)
son ancienneté etc . . . . .

490
ANNEXE l'
MECANISME DE
PRODUCTIONN
DU SURPLUS
========~=============================
DANS
LES ENTREPRISES
======================

491
A - MODE D'APPROPRIATION DU SALAIRE DE L'APPRENTI
==========================~==================
PAR LE CHEF D'ENTREPRISE
========================
Malgré les contraintes d'ordre économique qui s'exercent
sur le secteur informel paracapitaliste et par rapport auxquelles
le chef d'entreprise des unités que nous étudions ne puisse exer-
cer aucune action de mafrise (les contraintes non-manoeuvrables
concernent le prix des équipements, des matières premières qui en
raison de l'inflation augmente sans cesse et celui auquel i l vend
ses produits et qui doit tenir compte de la faibles~e du pouvoir
d'achat de la clientèle urbaine), celui-ci arrive tout de même à
faire dégager un surplus positif accumulable en faisant jouer le
double mécanisme de sous-valorisation de la force de travail et
de ses moyens de travail.
Les chefs d'entreprise du secteur paracapitaliste produi-
sent et vendent des biens et services à des prix très inférieurs
à leur valeur réelle. Nous savons que la valeur d'un produit mar-
chand destiné à être échangé contre de l'argent sur le marché se
décompose en quatre parties qui sont la valeur de l'amortissement
des moyens de travail CA), la valeur des matières premières emplo-
yées pour la fabrication
du produit (M), les salaires versés aux
employés dont le travail a permis la production du produit CS) et
la plus-value escomptée par le propriétaire des moyens de travail
CP) et que le prix auquel le produit est vendu et qui dépend de
l'offre et de la demande doit au moins être égal à son coût de
production c'est-à-dire à la somme des dépenses réellement engagées
ou transférées dans le produit au cours de son procès de fabrica-
tion pour permettre une reproduction simple des rapports de produc-
tion. Or le coût de production d'un produit dans le secteur infor-
mel paracapitaliste n'inclut qu'une part de ce qui devrait être
... / ...

492
le salaire de l'employé c'est-à-dire ici l'apprenti qui est emplo-
yé comme tel; l'autre part étant pris en charge par l'apprenti
lui-même et sa famille. Dans ce cas le coût de production d'un pro-
duit fourni par le secteur informel paracapitaliste devient égal à
A + M + S' (S'est la valeur monétaire de ce qui est donné à l'ap-
prenti par son patron et qui comprend à la fois son IImandatll
dat
et
son déjeuner de midi etc .•• et qui lui permet partiellement de re-
produire sa force de travail) avec s'IS tendant vers zéro (0) ainsi
que S' qui doit être comprimé au maximum par le chef d'entreprise
qui a tendance à lui substituer P c'est-à-dire le profit qu'il es-
père réaliser. En raison de ces différentes tendances dans le com-
portement économique du chef d'entreprise du secteur informel para-
capitaliste, le profit devient p': P + (5 - S') avec (S - S') qui
est égal à la différence entre ce qui devrait être le salaire de
l'apprenti et l'équivalent monétaire des dépenses engagées par le
le chef d'entreprise pour assurer partiellement la reproduction
de la force de travail
de l'apprenti. Dans les cas où c'est
voi-
sin de zéro (0) P passé à P' tel que p'> P ce qui donne la possi-
bilité au chef d'entreprise tout en réduisant p' non seulement
d'espérer obtenir un profit encore substanciel, mais aussi au
besoin de réduire son prix de vente sans que cela ne puisse lui
porter aucun préjudice. Si Px est Je prix auquel le chef d'entre-
1
prise a vendu réellement son produit et si Po est le profit tiré
1
après réduction de p' nous avons Px: A + M + S'(::o) + Po tel
que P'>Po>P.
B - ApPROPRIATION PAR LE CHEF D'ENTREPRISE DE LA VALEUR
===================================================
DE L'AMORTISSEMENT DES MOYENS DE TRAVAIL
====~===================================
Le chef d'entreprise peut aussi, s'il est placé dans la
nécessité de vendre son produit à un prix plus bas que celui
pratiqué par ses concurrents, envisager de faire abstraction de A
..• 1•••

493
dans la détermination de son prix de vente: d'ailleurs les
moyens de travail qui sont la propriété du chef d'entreprise
sont acquis dans des conditions et circonstances qui ne lui
permettent pas toujours de prendre conscience de la nécessité
de faire transférer sur le produit la valeur de son matériel
afin d'assurer son renouvellement à moyen ou long terme.
-
le chef d'entreprise acquiert ses moyens de travail
en l'achetant au comptant avec l'argent qui lui est attribué
en guise d'indemnité en cas de licenciement abusif ou économi-
que quand il était un ouvrier salarié du secteur moderne. Dans
ce cas il n'est contraint à aucun remboursement, ni à aucune
obligation de verser des traites à qui que ce soit et est libre
de ne pas transférer sur le produit fabriqué la valeur des moyens
de travail qui ont rendu possible cette fabrication si ce qui
importe pour lui c'est de vendre le moins cher possible (la
concurrence l'y oblige des fois) et d'avoir des gains immédiats
afin de pouvoir faire face à des dépenses sociales liées à sa
situation de soutien famille. L'habitude de la recherche de
gain immédiat s'installe petit à petit ainsi que l'illusion que
les moyens de travail ne sont que de simple valeur d'usage dont
il ne faut se préoccuper du renouvellement que quand ils sont
complètement hors d'usage. Dans ce cas les moyens financiers de
ce renouvellement non programmé proviennent le plus souvent de
profit réalisé à l'occasion d'une grande opération, tel un marché
public ou provenant d~une entreprise privée dont l'exécution est
confiée au chef d'entreprise en question.
Cette habitude d'assimiler les moyens de travail à
une simple valeur d'usage est renforcée par une certaine dispo-
sition mentale acquise par le chef d'entreprise quand il était
un ouvrier dans le secteur moderne et qui CJncerne son rapport

494
au moyen de travail de son ex-patron : en tant que ouvrier employé
à un poste défini et assigné à un ensemble de tâches précises
et limitées les moyens de travail n'étaient perçus que comme
de simples instruments, outils opératoires destinés tout simple-
ment à faciliter le travail et non comme une marchandise particu-
lière devant à travers l'emploi que l'ouvrier en fait restituer
sa valeur qui doit être incorporée dans le produit. Ce qui pouvait
préoccuper l'ouvrier dans ces conditions ce ne pouvait être
essentiellement que les problèmes qui naissaient à propos de son
emploi et de la rémunération de sa force de travail. Quand l'ouvrier
deviendra chef d'entreprise dans le secteur informel paracapitaliste,
i l transposera au niveau de la gestion financière de ses outils
de travail les mêmes dispositions mentales acquises
en ce qui
concerne ces derniers quand il était un simple ouvrier. Cette
transposition sera facilitée par l'absence d'informations et
de formation en direction du chef d'entreprise suscloptible s de
l'éclairer judicieusement et de transformer son attitude sur les
questions relatives au moyens de travail.
Pour les motifs et raisons déjà évoqués le chef d'entre-
prise du secteur informel aura tendance à établir le prix de
vente de son produit, en faisant abstraction de la valeur de A
le prix devient Px = M + 5' ~o) + Po. Po sera approprié par le
chef d'entreprise et servira aux dépenses domestiques ou de
prestige ou quand cela Va mieux sera investi dans l'immobilier
le réinvestissement
Po dans les moyens de travail est dicté
plus par des contraintes fortuites qu'il faut lever urgemment
telle une machine qui devient hors d'usage parce que usée à
l'extrême ou des commandes importantes venant d'un tiers et dont
l'exécution implique des opérations requerrant l'emploi de nouveaux
outils ou machines que par une stratégie de développement .
.../ ...

495
C - ApPROPRIATION PAR LE CHEF D'ENTREPRISE DE LA
===================================~=========
VALEUR AFFECTÉE AUX MATIÈRES PREMIÈRES
======================================
Le chef d'entreprise peut aussi arriver à faire des
profits en faisant supporter à l'un de ses clients, en plus
des dépenses de matières premières nécessaires pour la fabrica-
tion du produit qu'il a commandé, d'autres dépenses de matières
premières concernant la fabrication d'un autre produit commandé
par un autre client dont ce qu'il payera pour la facture des
matières qui rentrent dans le produit qu'il a commandé sera
approprié par le chef d'entreprise comme profit supplémentaire.
En effet supposons que Ml
soit le prix des matières strictement
nécessaires pour la fabrication
du produit commandé par le premier
clien l et ML
celui des matières strictement nécessaires pour
produire le bien commandé par le deuxième client Il et M le
total des dépenses de matières que le chef d'entreprise fait
supporter à l, alors le total des sommes reçues par le chef
d'entreprise de la part de ses deux clients et devant prétendre-
ment servir entièrement à l'achat des matières strictement né-
cessaires à la production des deux produits commandés par (1)
et (II) est T ~ Ml + 2M2 au lieu de T = Ml + M2.
Dans ce cas si POL et Po2 sont les profits escomptés par le
chef d'entreprise sur la vente des deux produits commandés le
profit total réellement réalisé devient
PoT = M2 +Pol + Po2
au lieu de PoT ~ Pol + Po2.
Il faut noter que le chef d'entreprise ne fait supporter
les dépenses d'achat de M2 à son client (1) que si deux conditions
sont réunies:
la première condition est qu'il faut que le client
(l)soit perçu comme un personnage devant être en mesure objecti-
vement de payer la somme T (il doit être d'un statut social
élevé), la deuxième condition supplémentaire qui elle, motive
... / ...

496
toute la pratique que nous venons de décrire est qu'il faut
que le chef d'entreprise soit placé dans une situation de manque
financière qu'il doit combler avec urgence sous peine de tenir
son image de marque et de perdre une partie de sa clientèle
comme c'est le cas quand i l a utilisé à d'autres fins
(ce qui
arrive souvent) l'argent qui lui était remis par le client (11)
pour acheter des matières devant rentrer dans la fabrication
du produit dont la commande est antérieure à celle du client (1).
Ces trois pratiques stratégiques de maximisation de
son profit le chef d'entreprise peut les utiliser tour à tour
selon le client avec qui il a affaire (le client n'est jamais
une personne anonyme et sa relation avec le chef d'entreprise
est toujours chargée d'affectivité dont la nature et l'intensité
influent toujours sur la détermination du prix de produit commandé),
les contraintes économiques et financières qui pèsent sur lui
au moment de la commande ou qui sont prévisible à court terme
et son niveau de formation en ce qui concerne le domaine de
la gestion économique.

497
ANNEXE VI
LA CLIENTELE ET LES MARCHES
DU SECTEUR INFORMEL fARACAPITALISTE

498
A - LA CLIENTELE PRIVEE
La clientèle du secteur Paracapitaliste, se recrute en
règle générale parmi les gens des couches sociales les plus 'aisées
dans l'administration ou le privé. Cela s'explique par le fait que
les produits du secteur paracapitaliste en raison du niveau élevé
de leur qualité sont d'un prix relativement élevés.
Cependant, cette clientèle pose un oroblème pour le sec-
teur : la plupart des chefs d'entreprise de ce secteur se plaignent
du fait que l~urs clients sont de mauvais payeurs
Ce qui est sur-
tout reproché à cette clientèle, c'est d'abord le fait de ne jamais
respecter les échéances de paiement qu'elle a fixées d'un commun
accord avec le chef d'entreprise et ensuite souvent de ne pas honorer
entièrement ses créances.
Il existe plusieurs facteurs pouvant ex-
pliquer cette situation:
- Le cadre supérieur de l'administration (surtout) et du
privé vit en général au dessus de ses moyens. Non seulement
il a en charge une famille nombreuse (le nombre moyen
d'enfants par ménage est de 6) mais aussi beaucoup de
dépendants (frères et soeurs en bas âge ou majeurs mais
en chômage sans compter les oncles, tantes ou autres
parents éloignés et qui se trouvent dans le besoin), mais
en plus, il lui faut acquérir tous les biens matériels
susceptibles de
valoriser sur le plan social et qui
soient en adéquation avec son statut : une voiture, une
villa de moyen ou grand standing, mobiliers et appareils
ména§ers . Or,
tous ces biens en général éoûtent deux
fois plus cher au Sénégal qu'en Europe alors que les
salaires pour le même statut professionnel au niveau
de la fonction publique. Ceux des Sénégalais sont de
deux à trois fois plus petits que ceux de leurs homo-
logues français par exemple. Les cadres s'en sortent
en s'endettant auprès des banques (la BHS, la Sonabanque
ex SONAGA), d'abord qui prélèvent directement des traites

499
mensuelles d'un montant déterminé sur leur salaire
et ensuite auprès des chefs d'entreprises du secteur
paracoptaliste et des comme~;ants. Or, ces derniers
ne peuvent pas faire toujours des prélèvements directs
sur les salaires de leurs clients, ce qui donne à ceux-
ci toute 1attitude de ne pas honorer leurs dettes selon
les termes fixés. D'ailleurs, quand bien même ils le
voudraient, ils ne le pourraient en raison des nombreuses
autres classes financières auxquelles ils doivent faire
face et qui cons-t-ituent des contraintes
contraîntes à règler en
priorité.
- Le cadre devient le client d'un chef d'entreprise par-
ce qu'il a été recommandé à ce dernier par une connais-
sance qui elle même est soit apparentéei! ce1ui-
ci
soit est son ami depuis de longue date. Cette si-
tuation est préjudiciable au chef d'entreprise en raison
du fait qu'il se sentira moralement obligé de prendre
en compte dans son rapport avec son client
du fait
que
ce dernier est -l'ami de son ami" et qu'il doit établir
2JeC
lui de "bon rapport". Souvent dans ce cas, le chef
d'entrprise se montre très conciliant vis à vis de son
client qui souvent finit par abuser de sa confiance sans
qu 1
qu il ne puisse
user· à son égard par voie judiciaire
des mesures repressives. Rares sont les chets d'entreprises
du secteur paracapita1iste qui engagent des poursuites
j~diciaires à l'égard de leurs clients débiteurs qui re-
fusent de payer leurs dettes
outre la raison
raïson qui vient
d'être évoquée il existe une autre raison énoncée souvent
par le chef d'entreprise est qui est que les poursuites judi-
ciaires coûtent chères en argent et sont une source de
perte de temps pour lui et de retard dans les travaux
engagés.

500
- Même si le ·client n'est pas un"e personne recommandée
au chef d'entreprise, celui~ci souvent dans son souci
de fair-'play et·aussi dans le but de s'attacher dé.fini~
tivement le client· est toujours pr@t à lui faire beau-
coup dé concession: le chef d'entreprise adopte une
st~atégie de souplesse et de non fermeté dans ses re~
lat ions avec ses clients parce que aussi pense~t-il
"si le client est content de toi, il reviendra toujours
et il peut aussi apporter d'autres clients •. ~ etc
puis 'il vaut mieux perdre un peu d'argent avec un client
que de perdre toute la clientèle qu'il pourrait apporter •.. "
(propos recueillis au cours d'une interview et qui il~
lustre bien la nature de la relation du chef d'entre~
prise avec ses clients).
Nous avons d'un ceté un client d'un statut professionnel
élevé avec des charges familiales élevées et des besoins person~
nels couteux formant un ensemble de contraintes sociales et éco-
nomiques que son salaire ne peut permettre de résoudre et de llau~
tre un chef d'entreprise conciliant et dont la conduite
est dictée
apparemment par des considérations sociales dont souvent le client
ne tient pas compte parce que n'y adhérant plus.

501
B- LES MARCHES PUBLrCS
Normalement, ne peuvent soumissionner les marchés
dt l'Etat que les chefs d'entreprise ayant un numéro d' insc:d;p~
tion au registre du commerçe ou au registre des métiers et qui
sont en règle avec les contributions diversés, la caisse de
sécurité sociale, l'IPRES (cotisation pour la retraite), les
taxes et cotisations patronales en ce qui concerne les presta~
tions familiales. Ces contributions diverses constituent 20 %
du montant des marchés auquel peuvent s'ajouter les arrièrés
de ces diverses contributions si le chef d'entreprise sans les
avoir payées a cependant omis de faire périodiquement au plus
tard le 25 de chaque mois une déclaration néant portant sur
l'absence de commandes ou de marchés si son entreprise n'a pas
connu durant cette période une activité économique importante
pouvant lui permettre de s'acquitter de ses contributions, Une
attestation est fournie au chef d'entrprise par les différents
services administratifs concernés par le paiement des diverses
contributions et ce n'est qu'àprès avoir obtenu toutes ces at~
testations que le chef d'entreprise pourra faire sa soumission
Il faut préciser par ailleurs qu'en dehors de ces
conditions le chef d'entreprise doit fournir un cautionnement
provisoire dont le montant est fixé dans le dossier qui lui-même
doit être acheté.
Certaines entreprises sont agréées et bénéficient dans
ce cas selon l'article 79 du décret 82690 de 1a dispense du
cautionnement provisoire. Ces entreprises font l'objet d'un
classement suivant leur capacité d'exécution des travaux de
:

502
CATEGORIE DE L'ENTREPRISE
CAPACITE D'EXECUTION
A
25.000.000 CFA
(2.500.000 FF)
B
90.000.000 CFA
( 1. 800. 000 FF)
C
100.000.000
CFA
(2.000.000 FF)
Si tous les chefs d'entreprise déclarent être en
mesure financièrement et techniquement d'exécuter des travaux
de la catégorie A, aucun cependant n'a obtenu un agrément à
cause de la règlementation qui veut que toute demande de classe-
ment dans les différentes catégories A , B, C sont accompagnée
de la fourniture de diverses attestations apportant la peuve
que le chef d'entreprise est en règle avec les institutions.
Il s'agit de :
- attestation de la caisse de sécurité sociale
2 - attestation de l'AGROM
3 - attestation du Trésor
4 - attestation des contributions diverses
5 - attestation de l'inspection du travail
6 - attestation de l'IPRES
Il existe cependant deux dispositions juridiques
permettant aux petits chefs d'entreprise d'accéder aux marchés
de l'Etat dont le montant est inférieur à 10.000.00 CFA (200.000 F)
- tout marché d'un montant inférieur à 3.000.000 CFA
(60.000 Ff) peut être passé de gré à gré entre un
chef de service et un chef d'entreprise de son choix
qualifie pour exécuter les travaux. Pour obtenir de tels
marchés, les chefs d'entreprise du secteur paracapitalis-
tes soudQient les chefs de service pour obtenir leurs

503
faveurs, ou leur distribuent des commissions (10 à
20 % du montant du marché) ou encore leur propose de
travailler gratuitement pour eux (réparation gratùite
de véhicule, travaux de réfection gratuite, etc ... )
- des marchés d'un montant inférieur à 5.000.000
CFA
(IOO.OOO
Pl') peuvent être donnés aux chefs d'entre-
prise encadrés par la SONEPI et qui disposent des
fonds et de la compétence nécessaires pour exécuter
les travaux (depuis la circulaire primatoriale de
1976).
Pour des marchés plus importants, le chef d'entre-
prise, s'il ne peut ~tre en règle avec les institutions, ce
qui est souvent le cas alors achètent les différentes attes-
tations dont la possession lui permet de faire une soumission
auprès des agents ·de l'Etat qu'ils soudoient.
.• d_

504
ANNEXE VII
LES MECANISMES DE REPRODUCTION
DU SECTEUR INFORMEL PARACAPITALISTE
ET SES DIFFERENTES FORMES D'ARTICULATION
AVEC LE MODE CAPITALISTE

505
Le secteur informel moderne en général et le secteur in-
formel paracapitaliste entretiennent avec le mode de production
capitaliste des rapports réciproques de renforcement mutuel de
leur structure)respectiv~ Sila genèse et le développement du
secteur informel moderne ne peut se comprendre et s'expliquer
qu'en référence au mode de production capitaliste et aux limites
de SOn développement dans les pays dominés. Le mode de production
capitaliste lui non plus ne peut être saisi et compris dans ses
mécanismes de reproduction dans les PdYS dominés que par rapport
aux liens particuliers qu'il entretient
avec le secteur informel
moderne.
L'existence du secteur informel moderne est condition-
née sur le plan technique par la production à partir du mode de
production capitaliste de moyens et de savoir faire technique ap-
propriées et appropriables par les acteurs sociaux du secteur in-
formel qui les mettent en oeuvre pour produire des biens et des
services pour satisfaire de nouveaux besoins modernes nés chez
les consommateurs autochtones du fait de leur urbanisation et
de leur participation à la nouvelle socia-culture qui s'est déve-
loppée à partir du mode de production capitaliste.
Ces besoins modernes que le secteur informel satisfait
par sa production auprès des consommateurs autochtones;les
unités
de production capitaliste ne pourraient le faire qu'en vendant
à perte si elles devaient produire et vendre des biens et ser-
vices deemême type -et au -même prix que le secteur informel mo-
derne. En effet, la sousvalorisation de la force de travail des
travailleurs dans les unités
de production capitaliste des
pays dominés impose des limites au pouvoir d'achat des travail-
leurs de ces unités. Ceux ci ne pourraient satisfaire par leur
salaire la totalité des besoins rentrant dans la reproduction
de leur force de travail qu'à la condition qu'une partie de ces
besoins soit satisfaite par des biens et service substitutifs
par rapport ~ ceux de production industrielle et produits en

506
dehors du mode de production capitaliste et de ses normes.
Cette production en marge du système capitaliste de biens
et services subtitutifs peu onéreux et destinés aux con-
sommateurs autochtones empêche une prise de conscience
rapide chez les travailleurs des unités de production ca-
pitalistes qui consomment les biens et services du secteur
informel de la sous-valorisation par le mode de production
capitaliste de leur force de travail. Cette absence de
prise de conscience va contribuer au renforcement des mé-
canismes de reproduction des conditions de sous valorisa-
tion de la face de travail dans le mode de production
capitaliste.
si l'existence du secteur informel est une con-
dition de la sous valorisation de la force de travail dans
les unités de productions capitalistes donc aussi de la
reproduction de ce mode de production, l'existence de ce
dernier constitue lui aussi réciproquement une condition
de la sous-valorisation de la force de travail dans les
unités de production du secteur informel moderne où l'ab-
sence de salariat qui constitue une de ses caractéristi-
ques fondamentales ne s'ecplique qua par le fait que la
reproduction de la force de travail des travailleurs de ce
secteur est assurée en partie par leurs familles grâce au
revenu "qu'un ou plusieurs de leurs membres tirent du sec-
teur
moderne capitaliste où ils travaillent COmme
comme sala-
riés : c'est le salariat dans le secteur moderne capita-
liste et la persistance des rapports de solidarité à l'in-
térieur de la famille où se redistribue rt: les gains moné-
taires en provenance du secteur moderne (ce qui permet
à ses membres adultes sous revenu de disposer de moyens
monétaires permettant l'acquisition de certains biens)
qui permettent au secteur informel moderne de jouer son

507
rôle dans la sous valorisation de la force de travail dans
le mode de production capitaliste et ainsi de maintenir
à l'extérieur de lui même dans le mode de production capi-
taliste les conditions structurelles de sa propre repro-
duction.

508
SCHEI'A l
SCHEMA DU MODE DE REPRODUCTION DE LA
FORCE DE TRAVAIL DANS LES UNITES
DE PRODUCTION DU SECTEUR
INFORMEL
FAMILLE DE L'APPRENTI
,
1,- -- --
PRODUIT FABRIQUE PAR L'APPRENTI
...
.. ~O
POUR SON COMPTE PERSONNEL
.........
,~
~"...
,S...
'~
"
V
... f~
... ..."t;,.
'~
" ,
~
" 4 ~
.FORCE DE)
DEl _ _
MATIERESI
MATIERES
.
MACHINES
1
APPRENTIS --- il! TRAVAIL
- -
PREMIERES - -
- -
- -
OUTILS l,, -
- -
- -
- -
_. -
- -
- CHEF D'ENTREPRISE
1
t-
1
+-1l
1
"1,1
1
1
La matière première est fournie
1
1

,

1
1
1
par le client s'il s'agit d'un compagnon
CLIENT
1
s1non
sinon elle provient des restes des maté-
1
1
1
riaux utilisés pour la production s'il
,

-------
s'agit des apprentis plus petits.
- .. _-- .. _-_
_----~---
.... _~---
s'agit des apprentis plus petits.
"Mandat" -déjeuner de midi-vêteMents-soin
midi-vêtements-soin de santé"
La clientèle de l'apprenti doit être
différente de celle de son patron.
L'apprenti doit remettre une partie de
son gain à son patron
dans certain cas
pour oayer le coura~t utilisé.

LA FAMILLE TRADITIONNELLE
,
1
J
,~
lction de la force de travail
lction de la force de
,ailleurs du S. LP.
, ,

,
,
. " ~/ "
ion de biens et serVIces.
"0

,
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ion de biens et serVIces.
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:echnique et matières
~res
A
1
UNITES DE PRODUCTION DU MODE
DEPRODUCTIDN CAPITALISTE

L'Etat participe aussi à la reproduction du
secteur informel moderne d'abord par l'absence ou
l'insuffisance des structures modernes de formation tech-
nique pouvant accueillir les nombreux jeunes gens exclus
des écoles primaires toutes les années (lO.OOO par ans
selon l'Union des Chambres de métiers de DAKAR) et ensuite
par l'absence de contrôle dans l'application par les
chefs d'entreprise du secteur informel moderne des lois sur
la législation du travail.
SCHEMA SUR LE ROLE DE L'ETAT
DANS LA REPRODUCTION DU SECTEUR INFORMEL
INSUFFISANCE D'ECOLES
NON CONTROLE DE
D~
- - -DE FORMATIONTEëHNIQUE
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L'APPLICATION DES
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1
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LOIS SUR LA LEGISLATION
1
1
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DU TRAVAIL
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1
1
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SECTEUR INFORMEL
ETAT
MODERNE
H
H
H

JnfUR"EL
J nfuR"EL ET LEUR IMPACT IDEOlOGIQUE SUR LES APPRENTIS'-ÙSCONSOMMATEURS
APPRENTIS ;-ÙS-CONSOMMATEURS ET L'ETAT
L' ETAT
ROLE
FONCTIONS ~SSUREES ~ L'INTERIEUR
FONCTION AU NIVEAU DE
EFFETS IDEOLOGIQUES DES
DE L'ENTREPRISE
SOCIETE
SOC 1ETE
DIFFERENTES FONCTIONS
DANS LE MECANISME DE
REPRODUCTION DE S.I.P.
EDUCATEUR
Assurer l'éducation morale des
Preserver
Préserver à une certaine
Devoir de soumission et
apprentis.
apprenti s.
catégorie de la jeunesse
de respect vis à vis
au risque de tomber dans
du chef d'entreprise
la délinquance
pour l'apprenti.
FORMATEUR
Assurer une formation profes-
Assurer aux jeunes ado-
Devoir de reconnaissance
sionnelle aux apprentis.
lescents exclus des
vis à vis du chef d'en-
écoles publiques une
treprise et obligation
formation profession-
morale de travailler âà
nelle.
ne 11 e.
titre gratuit pour lui
tant qu'on est apprenti.
CHEF
D'ENTREPRISE
Organiser la production de biens
Produire des biens et
Arcessibilité
Accessibilité des cou-
services modernes pour
èhes
ches moyennes aux biens
les courhes
couches sociales
aux biens et services
qui ne peuvent pas accé-
modernes et reconnais-
der aux produits indus-
sance de l'utilité so-
triels.
ciale du S.I.P.
.CHEF
:CHEF DE FAMILLE
FAMI LLE
Assurer directement
la reproduc-
Produire des biens et
Permettre la reproduction
"'.
tion de la force de travail
traval1 des
services modernes à
à moindre coût du mode de
apprentis (nourriture, habille-
moindre coût grâce à
production capitaliste et
ment etc ••• )
l'absence de salariat.
reconnaissance de l'utili-
té économique du SIP.
Permettre à certains apprentis de
Permettre la sous valo-
~ssurez
Assurez la reproduction du
faire un travail pour leur compte
risation de la force de
SIP : la possibil
possibl1 Hé pour
personnel en utilisant
utl1isant les moyens
travail dans le mode
l'apprenti de travailler
traval1ler
li;
de travail à disposition dans
de production capitaliste
pour son propre compte
avec l'illusion de de-
L1:
venir un petit patron
freiné la contestation
··''t.;I'e·'o'':')"~''''''>'

512
ANNEXE V~ : COOPERATIVES
INTERVENTION POUR LA CREATION DE COOPERATIVES :
Au début de notre première intervention réussie en ce qui concerne
la mise sur pied et l'organisation de la coopérative des artisans coordonniers
de Tilène, le B.I.I. avec qui nous étions en contact pour nos recherches
nous confia la mission d'organiser des coopératives artisanales sur toute
l'étendue du Sénégal et en particul ier dans les régions que sont Dakar,
Diourdel, Kaolack, Ziaguinchor et Tambocounda.
1 - DAKAR :
- -
-
Il s'agit de la coopérative des artisans cordonniers de Tilène dont
nous devons continuer a assurer le suivi et amener les membres â
s'inscrire auprès de la Chambre des Métiers du Cap Vert.
qui est une substitution dépendante du Ministère de l'Industrie et de
l'Artisanat et par laquelle passent tous les projets concernant la
promotion des artisans du Cap Vert qu'elle a vocation d'encadrer.
D'abord la artisans furent inscrits pour obtenir leur carte profes-
sionnelle, le reste devrait régulariser leur situation dans un délai
de 6 mois.
Cette coopérative a reçu un financement de 5.000.000 CFA (100.000 FF)
lui permettant de séquiper en machines: 2 riveteuses et 3 machines â
coudre le cuir.
2 - nlOURDEL
Dans cette reglon, il fallait installer une coopérative de produc-
ti on et d'a pprov i s i onnement reg rou pa nt
n des menu i s i ers ébéni s te s •
La particularité de cette région est qu'elle ne comportait qu'un
seul menuisier ébéniste équipé en machines et installé dans la
capitale. Cet artisan équipé pratiquait des prix exhorbitants â
l'égard des autres artisans du même corps pour les travaux 1 façon
qu'ils lui adressaient. En plus cet artisan équipé qui était l'ancien
président de la Chambre des Métiers de Diourdel voulait mettre la
main sur un atelier équipé de machines-outils financé par le F.E.D.
(18.000.000 CFA) et qui était destiné â l'ensemble des artisans de la
région. Les artisans de cette région voulaient s'organiser en coopé-
rative pour exploiter en commun l'atelier F.E.D. Des structures furent
créées, un règlement intérieur fut établi et les démarches nécessaires
furent faites pour l'enregistrement de la coopérative au service de
la coopération et l'obtention de 50n agrément. Un capital social de
500.000 CFA a été constitué par voie de cotisation par les membres.
Cette coopérative devait faire des prestations de service (façonnage
du bois) approvisionnait les artisans en bois en vendant moins cher
que les commerçants) faire des crédits â ses membres. Cette coopéra-
tive au bout de 7 mois d'activités de production (une seule machine
la combinée .1 7 opération était mise en activité, les trois autres
n'étaient pas util isées : une personneuse, une scie â ruban, un tour)
réalisait un chiffre d'affaire de près de 200.000 CFA et comprenait
une quarantaine de membres. Elle avait le soutien du nouveau président
de la Chambre de Métiers de Diourdel qui était en même temps le pré-
••
pré-
sident de l'Union de toutes les chambres de Métiers du Sénégal.

513
3 - KAOLACK
Il s'agissait de remettre en marche une coopérative de mécaniciens
auto qui existait depuis déjà deux ans mals ne marchait plus à cause
de problèmes Internes nés de conflits entre quelques membres à propos
de la disparition d'un fond (300.000 CF) destiné à couvrir les frais
de réparation de quelques véhicules de service du Ministère de l'A_
griculture. Ce ministère avait confié la réparation de ses véhicules
à la coopérative et lui avait fait une avance. Cette coopérative re-
groupait 30 membres et avait installé son siège social dans un quar-
tier situé à la périphérie de la ville: ce siège social consistait
en un atelier oû était installé son président. La coopérative avait
un capital de 180.000 CFA.
Pour réorganiser cette coopérative, il fallait résoudre ses problèmes
internes, lui donner un autre siège social, lui procurer des équipe-
ments rentables et l'aider à obtenir des marchés. Selon ces orienta-
tions de nouvelles structures furent mises en place en mettant aux
postes de responsabil ités des membres unaniment choisis pal' tous, un
local plus spacieux (un hangar de 300 m2) a été trouvé pour abriter
le siège social de la coopérative. Ce local qui a été prêté à la
coopérative par un homme d'affaire de la place a été aménagé par les
coopérateurs qui y ont installé un bureau et le courant). Le B.I.T.
s'est engagé à fournir des équipements pour un montant de 5.000.000
CFA et qui devait permettre à la coopérative de procéder sur place
à toutes les réparations de véhicules (jusqu'à ce jour certains au-
tomobilistes et partout les camionneurs préféraient pour certaines
réparations délicates s'adresser â des garagistes de Oakar qui se
trouvent à 200 km de Kaolack) et le gouverneur de la région, la
Chambre des Métiers ainsi que le service de la coopération se sont
engagés à donner tous les véhicules de leur service à réparer à
la coopérative. Cette coopérative a reçu l'ensemble des équipement~
qui lui étaient de~tinés et déjà la chambre de métler~ lui avait
confié la réparation de troi~ de ses véhicules pour un montant total
dse 70.000 CFA et les activités de prestations de services (location
d'outils) commençaient à porter leurs fruit~. Un nouveau règlement
intérieur devait se faire pour tenir compte de tous ces changements.
!~ - II GUINCHOR
A Ziguinchor, il s'agissait d'installer une coopérative d'approvi-
sionnement et de crédit devant regrouper les artisans du bâtiment
c'est à dire aussi bien les menuisiers ébénistes, les menuisiers
métalliques que les tacherons du bâtiment. Le nombre de membres au
départ était 35, et le capital social 200.000 CFA. Ce capital devait
être augmenté par voie de cotisation et en organisant des manifes-
tations culturelles dont les bénéfices résultants devraient être
versés à la caisse de la coopérative. Comme la coopérative de
Diourdel, cette coopérative devrait permettre à ses membres de
s'approvisionner à moindre prix en matériaux de travail que la
coopérative devait acheter au prix du gros à Dakar. Des contribu-
tions financières de 50.000 CFA par membres étalent prévues éga-
l ement pour approvl s ionner 1a
1
ca 1sse
1
de crédit. Le rëgl ement 1nté-
1
rieur était conçu pour permettre le bon fonctionnement de toutes
ces activités. Jusqu'à la fin de l'année 86, cette coopérative n'avait
pas réellement commencé à fonctionner faute de moyens financiers

514
suffisants pour acheter des matériaux de base à commercialiser. La
caisse de crédit non plus n'était bien fournie (environ 100.000 CFA).
Une demande de subvention était introduite auprès du B.I.T. et la pro-
cédure suivait son cours.
- TAMBACOUNDA
T
Une coopérative de menuisiers ébénistes devait être montée dans
cette région qui ne comportait aucun artisan menuisier ébéniste
équipé en machine. Cette coopérative devait recevoir du B.I.T.
une machine combinée à 7 opérations, et pour cela elle devait
avoir un atelier aménagé, équipé en compteur électrique et cons-
titué un capital social devant lui pennettre comme la coopérative
des menuisiers de Diourdel de faire face à des dépenses de fonction-
nement : achat de bois destiné â être ,'evendu aux membres à des prix
inférieurs que ceux pratiqués par les commerçants de la place. Un
capital social de 500.000 CFA fut constitué par les coopÉrateu1's
(36 membres). L'atelier destiné à abriter la machine fut constr~it
par les artisans eux mêmes (un local de 30 m2 en dur) qui non seule-
ment ont financé l'achat des matériaux nécessaires pour la construc-
tion mais travaillé sur le chantier tous les Week end pendant un an,
sous la direction d'un tacheron payé par eux mêmes.
Cette coopérative a démarre ses activités au mil ieu de l'année 86 et
pendant les trois premiers mois elle réalisait un chiffre d'affaire
qui avoisinait 200.000 CFA/mois constitué seulement par les recettes
qui provenaient de prestations de services (travaux de façonnage)
les autres activitÉS inscrites dans le progremme de dÉveloppement
telles que ventes de bois â ses membres fabrication et ventes de
pièces préfabriquÉes étaient remises à plus tard.
6 - LOUGA
-
Il s'agit d'une coopérative regroupant des cordonniers tanneUt'S
(lB membres). L'objectif était d'installer une petite entreprise
semi artisanale de tannage dans cette région afin d'améliorer
la qualité du travail des tanneurs traditionnels. Pour cela, de
nouveaux outils et de nouvelles méthodes de travail furent intro-
duites (foulon, produits chimiques) et des artisans formés à la
ma1trise de ces nouvelles techniques. L'atelier de tannage un bâ-
timent de 100 m2 ainsi que l'ensemble des outils de travail ont été
fourni par le B.I.T. Cette coopérative produit aujourd'hui des cuirs
de meilleures qualités qu'elle vend aux artisans de Dakar et de
Thiès.
Il existe encore d'autres coopératives à l'état de gestation faute
de moyens financiers et matériels pour démarrer leurs activités. C'est le cas
des coopératives de tanneurs, bijoutiers à Kaolack, ou encore des coopÉratives
de menuisiers, tailleurs, femmes couturières à Louga.
".:

515
REMARQUE
Les coopératives doivent être multipliées, diversifiées dans leurs
buts et mieux soutenues au niveau financier et matériel.
L'ouverture de centres de formation professionnelle et technique
à l'intention des artisans devrait permettre aux artisans de mieux
se perfectionner et de mieux maîtriser les nouvelles techniques de
travail et de production. Ainsi mieux formés ces artisans auraient
plus de chance de se voir confier par les entreprises du secteur
moderne, des travaux dans le cadre d'un rapport de sous-traitance.
De même, cette formation destinée aux artisans du secteur informel
devrait leur permettre de fabriquer des outils ou machines-outils
pouvant être enployés dans la production de biens dans ce secteur:
certains artisans menuisiers fabriquent leurs propres scieo circu-
laires électriques, certains forgerons fabriquent des pie ces de
voiture (fonte et coulage de l'alluminium) ainsi que de· artisans
tourneurs •• etc. Tous ces petits métiers mériteraient d'être soutenus
et leurs techniques de travail amél iorées. Le développement de ces
petits métiers et leur capacité à occuper une masse importante de
travailleurs dépendra beaucoup de la qualité de leurs p,'oduits.
Plus cette qualité est grande et proche de celle des produits de
même type de l'industrie moderne, plus ces petits métiers verront
leur clientêle urbaine grossir et plus vite seront créées 1.5 con-
ditions de leur développement.
1

"10
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Direction de l'artisanat
Rapport d'évaluation des actions de la SONEPI
Dakar - Mars 85
Direction de la statistique
Enquête sur les structures de l'exploitation
artisanale en milieu urbain 1973-1975 Vol 1

AVANT-PROPOS.....................................................................
1 - 3
lERE PARTIE : INTRODUCTION SUR LE GENESE ET LE MODE DE
FONCTIONNEMENT DU SECTEUR INFORMEL EN AFRIqUE....
4
CHAPITRE 1
LES CONDITIONS SOCIO-ECONOMIQUES ET CULTURE DE LA
GENESE DU SECTEUR INFORMEL •••••••••••••••••••••••
5
Al Rencontre de socio-cultures diff~rentes
et de diff~rentes formes d'articulation ••••••••••••
6 - 8
Bl Les diff~rents espaces de rencontre et de
confrontation entre socio-cultures différentes •••••
9 - 11
C) Apparition de nouveaux acteurs sociaux avec de
nouveaux statuts et de nouvelles aspirations •••••••
Il - 15
Dl Apparition de nouveaux besoins et incapacit~ du
secteur moderne de les satisfaire .••••••••••••••••.
15 - 17
El Transfert de nouvelles technologies et apparition
du secteur informel moderne ••••••••••••••••••••••..
18 - 20
CHAPITRE II : LES STRUCTURES ORGANISATIONNELLES TRADITIONNELLES
21
A) La faml1le
.
22 - 25
Bl Les structures du groupe familial ••••••••••••••••••
25 - 27
Cl Domination des rôles et structures parentaux •••••••
27 - 29
Dl Responsabilité des chefs de lignage ou de ménage •••
29 - 30
El Fonction des champs collectifs et individuels ••••••
30 - 32
Fl Conflits n~s des formes d'organisation tradition-
nelle ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
33 - 36
G) Conclusion ••••••••••••••••••••••••••.••••••••••••••
36 - 37
CHAPITRE 11I : CARACTERISTIQUES DES DEUX FORMES DE SOUMISSION
DE TRAYAIL AU CAPITAL...........................
38
A) La soumission formelle •••••••••••••••••••••••••••••
39 - 40
B) La soumission r~elle ••••••••••••••••••••.••••••••••
40 - 41
cl Similitudes et diff~rences entre le secteur
informel et la soumission formelle •••••••••••••••••
41 - 43
Dl Les normes organisationnelles traditionnelles ••••••
44 - 45
El Les rapports de soumission entre les structures
traditionnelles et les structures capitalistes •••••
45 - 48
,~

519
CHAPITRE IV
DEFINITITION DU CHAMP D'ETUDE ••••••••••••••••••••
49
Al Définition du concept de secteur informel ••••••••••
50 - 53
Bl Caractérisation des unités de production du
secteur informel paracapitaliste et de subsistance.
54 - 57
2EME PARTIE
CONDITIONS DU DEROULEMENT DE L'ENQUETE ET
METHODOLOGI E. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
58
CHAPITRE 1 : MOTIVATIO_rt.p'R.E..MJERE ET PREPARATION INTELLECTUE..L1.E••
INTELLECTUE..L1.E
59
A) Motivation .•••..••...•................ >., •••••••••••
60 - 62
Bl Préparations intellectuelles •••••••.•••••••••••.••.
li? - 1i1
r,~~PITRE II
NOS AMBITIONS PREMIERES DE RECHERCHeS ET LES
LIMITES IMPOSEES PAR LES cO-N1JTŒ@Ü~~X_ENQUETE.
64
Al Nos ambitions de recherches face aux l imites de nos
f'ec;c;ources ••••••••••••••••••••••••••...• " . , ••••••••
65 - 66
Bl La l'edéfinition de notre champ d'étude
.
66 - 68
L'enquête à Saint-Louis ••••..••••••.•.•••••••••••••
69
CHAPITRE III
: PRE-ENQUETE MENEE A SAINT LOUiS
.
---
70
---
Al Les raisons de dêmarrage de l'enquête à St Louis •••
71-72
B) Identifi cation des entreprises du secteur infonnel
et pre-enquête
.
72
'1 - Identification des entreprises du secteur
infonnel
.
72
2 - Pre-enquête...........
" .
73
1
• • • • • • • • • • • • • • • • • •
1
• • • • • • • • • • • • • • • • •
,2.1 - Premier temps
",
.
73 - 76
.2.2 - Deux ième temps
.
76 - 78
cl Conclusion méthodologique sur le déroulement de la
pre-enquête
~
711 - 79
v
~ • ,
711 -
v

,

520
CHAPITRE IV - TENUE ET DEROULEMENT DE L'ENQUETE A SAINT LOUIS ••
80
Al Premiêre phase: 1êre visite des entreprises ••••.••
82
Al
Presentation: decliner son identite sociale
et professionnelle
.
82 - 83
A2 ; Mise en train: creer les conditions d'une
familiarit~•••••••••••••••••••••••••••••.
familiarit~
•••••
83 - 84
B) De~xième phase: Interview directif du question-
na 1 re.
84
10 • • • • • • • • • • • •
lOlO
..
10 • • • • • • • • • • • •
lOlO
BI : Déroulement de l'interview ..•••...••••.••.....
84 - 85
B2 : Deroulement du questio'Hldi,·e
'
.
85 - 87
cl Troisième phase: 2ème visite des entreprises
et approfondissement de certains thèmes et entretien
avec les apprentis
lOlO
• • • • • • • • • • •
lOlO
• • • •
lOlO
• •
87 - 89
lOlO
• • • • • • • • • • •
lOlO
• • • •
lOlO
• •
87 -
CHAPITRE V : LES ENJEUX DE L'ENqUETE ••••... , ..•••••••••••••••••
90
Al Les rumeurs facilitateurs .••........ , .••••.••••••••
91 - 93
Bl Demande d'intervention et d'aide ••.....
91 - 94
cl Conclusion méthodologique .•.....••••••••••.••••••••
94 - 95
CHAPITRE VI : NOS RAPPORTS AVEC LES IN~TJJ~TIONS ••••••..•••••••
96
Al Les raisons d'une mise à distance ••.•. ,.
97 - 98
B) La SONEPI ••••.••.••
qR - 1.00
lOlO
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
-
qR -
lOlO
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
-
C) La SOSEPRA
100 - 101
lOlO.
lOlO
lOlO
lOlO
.
100 -
lOlO.
lOlO
lOlO
lOlO
.
L'enquête à DAKAR •••••.•. , J ••••••••••••••••••••••••••
102
,
J
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
CHAPITRE VII: TENUE ET DEROULEMENT DE L'ENQUETE A DAKAR •••••••
103
Al Participation à un seminaire organisé par la SONEPI
et prise de contact avec les chefs d'entreprise •••••
104 - 107
B) Visite des chefs d'entreprise •••..•...•.•••••••••••
107 - 108
Cl Entretien avec les responsables de la SONEPI et
visite de la SODIDA ••..•••.••.••••••••••••.•...•••.
108 - 109
Dl Visite de la zone artisanale de O.H.L.M .••••.••••••
109 - 110
El Visite de la zone artisanale de Khar-Yalla •••••••••
111 - 114

521
CHAPITRE VIII: LES INSTITUTIONS D'ENCADREMENT. ••••••..... ,.,
115
A) Visite de la Chambre de métiers du cap vert ••••••
116 - 118
B) Visite du service de la cooperation
..
118 - 119
CHAPITRE_..I1..-:
..
REFLEXIONS METHODOLOGIqUES..•...•••.•.••..•.....
METHODOLOGIqUES
1.1.9 - 127
Enquête sur la communaute des cordonniers de Tiline
âDdkdr ••••••• ~ •••••••••••••••••••••••••••••••••••••
128
CHAP)TRE~! : TENUE ET DEROULSl1sN.LDE L'ENQUETE OANS LA
COMMUNAUTE DES ARTI~~~~_~Q~~ONNIERS
DE TILINE •.•
129
A) Les raisons du choix de la communauté
.
130 - 132
B) Présentation du mil ieu hu'nain ••••••••••••••••••••
133 - 135
C) Quête d'une autonomie d'action
.
135 - 137
0) Ce que l'enquête dét'ange ••.... , ,
,
,
>
..
137 - 141
,
,
>
..
137 -
E) Changement dans les objectifs de l'enquête:
prise en cmopte des projets de la communauté ••.••
141 - 144
F) Les changements introduits pa,' l'enquête .........
144 - 147
G) Décision de création d'une coopérative •••.••••.••
147 - 152
CHAPITRE XI
QUESTIONNAIRES UTILISES DANS LES OIFFERS~~~~
ENQUETE~_~T SYNTHESE "ES OBSERVATIONS FAlls~
DANS LES DIFFERENTES.J.NJTES VISITES............
1~1
AI Questionnaire chefs d'entrep,'ise du secteur
paracapitaliste et apprentis ••••••••.•••••....••.
154 - 159
BI Questionnaire
artisans-cordonniers •••••••••••••
160
162
cl Questionnaire
constitution d'une coopérative...
163
D) Observation sur les différents corps de métiers
enquêtes: équipement, production, clientèle,
chiffre d'affaire, etc ...
dl menuiserie-ébénisterie ..••..•.••••••••••••.•.•
164 - 166
d2 menuiserie métallique •.•.. ~ ...•••••••••••••.••
166 - 168
d3 mécanique (réparation) •.•.•••.••...••••.••.•.•
168 - 170
d4 maçonnerie
.
170 - 172
d5 tableaux •••••••••••..••.•••..•••••••••••••.•. ,
\\73 - 174
E) Interviews des chefs d'entreprise du secteur
informel paracapitaliste •••••....•.••••••.•••••••
175
1er entretien: tapissier garnisseur •••••••••••••••.
175 - 182
2ême entretien: menuisier métallique •••••••••••••••
183 - 1B7
Schéma explicatif du procès de production selon
les entretiens
,
.
188

522
3EME PARTIE: LE SECTEUR INFORMEL PARACAPITALISTE............
IRq
Quelques êl~nents de rêflexions sur les rêsultats
de l'exploitation partielle d'une enquête réalisée
sur le secteur informel pal'acapitaliste de pl'oduc-
tion dans les villes du Sênégal.
CHAP IT~__
IT~ t
__
: 1NTROOUCTION •..• ,
.
191
A) Le secteur paracapitaliste et ses caracteris-
tiques ••.•... ~,
,., ...••....•.....•••..••.••••••
194
a - Les éléments de renforcement de l'autonomie
du secteur paracapitaliste ••.. , 0'
, . > .
> • • • •
'
~ - I.es él éments de renfol'cement sont en même temps
des 1ieux ct' articul ation .....
197 - 198
'"lOlO
• • •
lOlO
• • •
'"
• • • • • • •
197 -
'"lOlO
• • •
lOlO
• • •
'"
• • • • • • •
c - conclusion
,
.
BI Le secteur paracapitaliste : l'étape la plus
avancée du processus d'articulation entre mode
traditionnel et mode capital iste
.
199
a - ses finalitês et leur ratiundlité
.
701
- ?(l'3
b - Les limites objectives soeio-culturelles
et les limitations subjectives â son déve-
loppement •........•.•.•........ "'
,' ....•.••
203 - 204
c - les freins au développement font changer
les enjeux et Id nature des compêtitions entre
promoteurs .. '" .. '"
70S - 206
'"lOlO • •
'" • • • • • • •
,
• • •
'"lOlO
'"lOlO
• • • • • •
70S -
'"lOlO • •
'" • • • • • • •
,
• • •
'"lOlO
'"lOlO
• • • • • •
ct - conclusion
'"
,' !, .••••••••
206 - 207
lOlO.
206 -
lOlO.
CHAPITRE Il - ENQUETE SUR LE SE..CTE.U.'LI.N.F.DRMEL ET_ANALYSE
DES RESULTATS .•••.•.....••...•......••.••••.•.
208
Al Les raisons du choix du secteur paracapitaliste.
209 - 210
B) Le secteur moderne: lieu d'acquisition du
savoir-faire technique utilisê dans le secteur
paracapitaliste ••••.•.•••••••.••... , ....••••••••
210
a - les lieux de translnission du savoir-fahe
technique moderne: les P.M.E. au secteur
moderne et les unités artisanales du secteur
paracapitaliste •••••••.••••••••••••••••••••..
71,1 - 212
b - Le temps d'apprentissage dans les P.M.E. et
dans le S.P.C ..•..•... ~, ...•.•••.••••..•••..••
212 - 214

523
C) Le secteur moderne est le lieu où se constitue
le capital de départ des promoteurs du S.P.C •••••
212 - 214
a - Les ma1tr'es dl'tisans du S.P.C. sont d'anciens
ouvriers des P.M.E .•..•.•.. ,
"., .. , ..
214
b - L'emploi salarié dans le secteur moderne permet
d'accr01tre la compétence professionnelle des
futurs promoteurs du S.P.C •••••••••.••.•••••••••
215 - 217
c - La conditiun des sala~iés est une incitation au
changement de statut social: l'ancien ouvriet'
devient maître artisan ••••••••••••..•....•..•.•.
217 - 218
d - Les différentes voies et moyens de constitution
du capital de départ 1 partir d'a~tivités <d-
lariées du secteur moderne •••••... ,
, ..•••••••
219 - 221
e - La constitutiun du capital de dépat,t mobil ise
auss i toutes 1 es ressources de 1a CO'll'nunauté
d' 3ppartenance des futurs promote'l"'; d'J S.P.C ...
222 - 223
0) Le secteur paracapitaliste : constitution des
llnités et contradictiuns internes
.
224
a - Les unités du S.P.C. accusent une grande
instabilité géographique •••••••..
??<1
_
)2~
•••••••..
D - Les unités du S.P.C. se répartissent dans
l'espace urbain en des end~.)its déterminés .......
226 - 229
c - Les unités du S.P.C. s'équipent 1-j d:;i'~,'-t '?n ma-
tériels productifs ayant déjà servi dans les PME
ou dans le S.P.C. et achetés en occasion ••••..•. ,
d - Gagner des marchés du secteur public ou privé
constitue un objectif économique majeur- d,1 S.P.~.
),' - 234
e - Le rapport de coopération économique entre S.P.C.
et le secteur moderne inducteur de changanent
dans le S.P.C •••••••••••••.•... ;
?14 - 235

524
E) Le secteur paracapitaliste : aspect social et
quelques caractéristiques psycho-socio-cultu-
rel1es des promoteurs ••••••...•.•••••••..•••••••
236
a - La situation matrimoniale dominante chez les
promoteurs du S.P.C. est la polygamie ••••••••••
236 - 238
b - La taille de l'ensemble du groupe des dépendants
varie la fonction de la position économique
du promoteur dans le S.P.C •••••.•.••.••••••••.•
239 - 241
c - La quête de promotion sociale est une motivation
â l'investissement dans le S.P.C. chez les pro-
moteurs de ce secteur .••.••••••••••••••.•••••••
241 - 244
d - Le social et le culturel d'une part et l'écono-
mique d'autre part retiennent une relation cir-
culaire dialectique .•.••.••••••••••.••...••••••
245 - 246
e - La faiblesse au niveau d'instruction des promo-
teurs : une limite objective â la maîtrise du
développement du S.P.C
..
247 - 250
f - L'appartenance â l'Islam et aux confréries: une
occasion d'investir ostentatoirement dan~ le
prestige
..
250 - 253
g - L'adhésion au parti politique dominant: une
stratégie de promotion économi que pour les
promoteurs du S.P.C................. ..... ... ...
253
F) Le secteur paracapitaliste : ses travailleurs
leurs conditions sociales et le mode de repro-
duction de leur force de travail...
254
a - Le S.P.C. une école d'apprentissage et de
formation â un métier pour les recalés du sys-
tème scolaire et la jeunesse rurale victime
des politiques agricoles ••.••••••••••••••••••••
255 - 257
b - Le mode d'exploitation et de rémunération de la
force de travail des travailleurs du S.P.C •••••
258 - 262
c - Le S.P.C. : utilisation du mode domestique de
reproduction de la force du travaiL
.
263 - 264
d - Le S.P.C. transfère aux travailleurs et â leur
famille une partie de charges d'entretien et
reproduction de la force de travail •••••••••••••
264 - 267

525
G) Les secteurs modernes ..et traditionnels: repro-
duction des cadres sociaux de la reproduction
du S.P.C
.
268
a - L'école et la reproduction du S.P.C ••..•••.•.•.
268 - 270
b - Le chômage dans le secteur moderne et les
limites du salariat dans le S.P.C. : une con-
dition de reproduction du S.P.C ••••••••••••••••
270 - 273
c - L'abaissement de l'âge de recrutement des tra-
vailleurs : une politique de reproduction â
moindre coût du S.P.C .....••...........•.•.•.•.
273 - 276
d - La force actuelle de la famille traditionnelle
un cadre actif de la reproduction du S.P.C •.•••
276 - 279
H) Conclusion
..
280
4EME PARTIE
LE SECTEUR INFORMEL DE SUBSISTANCE
EX : LA COMMUNAUTE DES CORDONNIERS DE TILENE-
DAKAR....................................... .•
281
Résultats partiels d'une recherche sur le secteur
informel. Cas de la communauté des artisans
cordonniers de Tilène â Dakar.
PRELIMINAIRE - RAPPEL ••.••.....••.•.•.•.••...••...•
283
289
CHAPITRE 1
INTRODUCTION GENERALE SUR LA COMMUNAUTE DES
CORDONNIERS
..
290
A) Caractère et situation particulière d'un métier
du secteur informel: la cordonnerie et la com-
munauté des artisans cordonniers de Tilêne •.••••
291 - 295
B) La confrontation entre le traditionnel et
le moderne dans le secteur informel •••••••••••••
296
a - Caractéristiques des structures organisation-
nelles traditionnelles •.•..•••••.•••••.••••••••
296 - 297
b - caractéristiques des structures organisation-
nelles modernes
.
297 - 298
c - Combinaison entre les structures traditionnel-
les et les structures modernes dans le secteur
infonnel et 1 imites
imîtes
..
298 - 302

526
C) Les voies du changement........................
302
a - Les domaines concernés par le changement dans
le m€tier
de la cordonnerie .•.•.•••.•••.••••••
302 - 305
b - La rational ité du changement
.
306 - 311
D) Changement et intégration économique dans le
monde moderne •••••••••
311
10.10
10
• • • • • • • • • • • • • • • • • •
10
• •
10.10
10
• • • • • • • • • • • • • • • • • •
10

a - La voie de la substitution sélective:
ouverture et dependance ••.•••......••...••••••
311 - 314
b - Dépendance du métier au capital commercial
pour l'approvisionnement en matières pt'emières
314 - 316
c - Dépendance du métier au capital commercial
de distribution
316 - 317
lOlO
• • • • • • • • •
316 -
lOlO
• • • • • • • • •
d - Intensification de la concurrence interne .....
318 - 319
e - Conclusion .•.•...•.•.....•..... lOlO.... .••••••••
319
E) Changement et quête d'un nouveau statuL
institutionnel
.
320 • 321
F) Changement et effets d'entrainelnent.
..
321 - 324
CHAPITRE II
ENQUETE REALISEE DANS LA COMMUNAUTE DES
ARTISANS CORDONNIERS DE TILENE. RESULTATS ••••
325
A) Présentation des conditions de l'enquête •••••••
326 - 327
~) Le rajeunissement de la communauté:
facteurs et conditions endogènes •••.•••••••••.•
327 - 331
C) Le rajeunissement de la communauté: facteurs
et conditions exogènes ••.••••••••••.•••••••••••
332 - 335
D} Le rajeunissement de la communauté et le
contrôle de la profession pa,' les anciens ••••••
335 - 340
E} Les normes de l'organisation socio-profession-
nelles de la communauté
..
340
a - Les normes de l'occupation de l'espace:
renforcement de l'esprit de coopération •••••••
341
b - L'autonomie des procès de production indivi-
duels: renforcement de l'esprit individua-
lis te
342 - 343
lOlO
• • lOlO
• • • •
lOlO. '"
'"

'"

'" '"
'"

'"
'"
• • • •
342 -
lOlO
• • lOlO
• • • •
lOlO. '"
'"

'"

'" '"
'"

'"
'"
• • • •

c - Les regroupements dans les ateliers:
une stratégie communautaire de réduction
des inégalités des conditions de travail .••••
344 - 346
e - Les regroupements dans les ateliers:
une condition de reproduction des rapports
de dépendances et hiérarchiques tradition-
nelles
.
346 - 347
f - Les figures d'autorités dans la communauté •••
348 - 352
F) Les divisions régionales facteur, de cohésion
et de dissociation •••.•.••....••...•.••.••••••
353 - 354
G) Les contraintes socio-économiques et consé-
quences
..
355
a - La baisse de l'attrait du métier
.
355 - 356
b - L lémigration
..
356 - 357
Hl Contraintes socio-économiques et charges so-
ciales
.
358
a - La situation matrimoniale: un indicateur
du niveau d'activité ••.••.••.•....•..•.••••••
358 - 359
b - La fréquence du nombre de retours au village:
un indicateur du niveau d'activité •••.•••••••
359 - 362
c - Développement d'une stratégie communautaire
de réduction du coût de reproduction de la
force de travail •••••••.••.••.•..••••.•••••••
362 - 366
Il Les contradictions dans la communauté •••••••••
366
1 - Les contradictions dans le domaine social .•..
367
- Les contradictions dans le domaine social .•..
2 . Les contradictions socio-professionnelles ••••
367
3 - Les contradi cti on économico-professionnelles.
368
4 - Les contradictions pol itiques .................
369
- Les contradictions pol itiques .................
5 - Les contradictions économiques •••••••••••••••
370 - 372
- Les contradictions économiques•••••••••••••••
6 . Les contradictions socio-economiques .••••••••
372
Conclusion
,.
,.
..
373 - 374

528
J) Les contradictions: un obstacle â l'action
organisée mais un facteur de renforcement de la
solidarite intra-graoupe •••••••••..••••.••••..•
374
a - Considération générale .••.••••••.••••••..•••.•
374 - 377
b - Adaptation des formes traditionnelles de
solidarité aux contraintes socio-profession-
nelles de la communauté.......................
377
1 - Les contraintes du milieu urbain............
377
2 - ~es co~traintes professionnelles et technico-
economlques •.•••••.•••.•••••••••••.•.•..••••
377
3 - Les contraintes psycho socio-professionnelles
378
c - Renforcement de la solidarité intra-groupe ••••
378 - 379
K) Les nationalités des différentes formes de
solidarité....
379
1 - Solidarité de type 1--- r ...............................
380 - 382
2 - Sol idarité de type
- Sol idarité de
T--- 1 .........................
382 - 385
3 - Sol idarité de type T--- T...........................
38S - 386
4 - Sol idarité de type 1--- r............................
386 - 387
L) Changement. organisations modernes et utili-
sation des rationalités des structures de soli-
dari tÉ
..
387 - 391
CHAPITRE III - RECUEIL DE DISCOURS COLLECTIFS A PROPOS DE
L'ORGANISATION DE LA COMMUNAUTE EN COOPERATIVE
392
A) Les réactions positives ••••••••••.••••••••...••
392
1 - Acceptabil ité - avantage perçu ••••••••••••••
392
2 - Conditions avant acceptation ••••••••••••••••
393 - 394
3 - Difficultés perçues pour le bon fonctionne-
ment d'une coopérative ••••••••.••••••..•.•.•
395
B) Les réactions négatives........................
396
l - Inconvénients perçus d'une coopérative......
396
2 - Rejet .•............. ,.,. .•. ,. ...•..•• ,. ••.•... ,.,.
396

529
CHAPITRE IV : TABLEAUS RECAPITULATIFS ••••••••••••••••••
397
Tableau 1 : Outils actuels du cordonnier
traditionnel
..
398
Tableau 2
Matières Premières actuelles
du cordonnier traditionnel .......
399
Tableau 3
Changements introduits dans les
outils de la cordonnerie tradition~
nelle
.
400
Tableau 4, 5, 6, 7 : Outils et moyens de
travail des cordonniers de Tilène.
401 - 404
Tableau 8 : Accessoires et matières premières
utilisées par les cordonniers de
Til~ne •••••••••••••••••••••••••••
405
Tableau 9
Coût indicatif de fabrication d'une
sandale pour homme...............
406
Tableau 10 : Coût indicatif de fabrication d'une
sandale pour dame et homme.........
407
Tableau Il
Répartition des membres de la com-
munauté selon leur âge ••••••••••••
408
SEME PARTIE: INTERVENTION DANS LES COOPERATIVES ••••••••
409
Approche méthodologique pour la création de
coopératives urbaines artisanales
..
410
CHAPITRE 1 : OBJET DE L'INTERVENTION
..
411 - 412
CHAPITRE II : DEMARCHE METHODOLOGIqUE •••••••••••••••••••
413
Al Prise de contact et identification des acteurs
414
B) Approfondissement des différents profils
psychologiques et constitution d'un groupe
dl initiateurs .............................•.
415
Cl Elargissement progressif du groupe d'initia-
teurs de base et mise sur pied des premières
structures coopératives •••••••••••••••••••••
416 - 417
Dl Recherche de cohésion et demande de recon-
nalssance •••••••••.•••••••••••••••••••••••••
417 - 420

530
E) Tenue d'une assemblée constitutive et élec-
tion de nouveaux dirigeants sur la base
de critères sélectifs •••..••••••••••••••••..
420 - 423
F) Conclusion ••.....•••••••......•••.••..•....•
423
CHAPITRE III
CONSIDERATIONS METHODOLOGIQUES SUR LE
MODE D'IDENTIFICATION DES DIRIGEANTS •••••
424
A) Conduite des entretiens non directifs •••••••
424 - 425
B) Analyse des entretiens •.•••••••••••••••••...
425
a - Caractéristiques psychosocio-cu1ture11es
des di rigeants
.
425
1 - Critlre de proximité ••••••••••••••••••••
426
2 - Critlre de compétence et de disponibilité
426
3 - Critlre de sociabilité et de crédi-
bilité sociale ••••••••••••••••••••••••••
427
4 - Critère de puissance ••.•••••••••••••••••
427
b - Le pouvoir: perception et mode d'exercice.
427 - 43L1
c - Dimension psychique de l'action d'engagement
des dirigeants
.
430 - 432
CHAPITRE IV
LE ROLE DE L'INTERVENANT.
..
432
A) Assurer la progression du groupe et transfé-
rer ses connaissances .•..•••••••.•...••..•.•
432 - 434
B) La manière d'ètre et de faire de l' interve-
nant ••••..••• ~ •.•...•...•..•..••••••••••••..
435 - 449
----'- ANNEXES sur le secteur informel paracapita1 iste .........
450
ANNEXE 1 : Les conditions socio-culture11es et économiques
de la soumission du travail des apprentis ••••
451
A) La formation professionnelle ••••••••••••••••
452 - 457
B) Les effets de transposition des structures
li gnag ières •............................•...
457 - 459
C) Les pouvoirs de contrainte du chef d'en-
treprise
.
460
1
Le pouvoir de soumission ••••••••••••••••
460
2 - Le pouvoir de promotion •••••••••••••••••
460 - 462

531
Dl Le rôle des structures familiales ••••••••••••
462 - 463
E) L'effet de la faiblesse du pouvoir d'achat
des consommateurs
.
463 - 464
F) L'école et les déperditions scolaires
.
464 - 465
ANNEXE II : Le mode de recrutement des apprentis •••••••••
466
A) Négociation entre parent et chef d'entreprise
467
Bl Les crit~res de préférence des chefs d'en.
t re pris e
,
468
1
..
1
1 - Les raisons économiques •.•••••••••.•.•••••
468 - 469
2 ~ Les raisons sociales •••....•..•.•••...•••.
469
Conclusion ........•........... > •• ,"
" ' . . . . . . . .
470
ANNEXE III
L'apprentissage: ses différentes étapes
et caractéristiques.........................
471
A) Premi~re étape de l'apprentissage: l'éducation
morale de l'apprenti ..••. ,"
. J" ••••••••••
472 - 474
Bl Deuxi~me étape de l'apprentissage: exécution
de tâches simples. Connaissance des outils et
matériaux
.
474 - 476
cl Troisi~me étape de l'apprentissage: exécution
de tâches et d'opérations complexes
..
476 - 479
Dl Quatri~me étape de l'apprentissage: apprentis-
sdge du rôle de patron •.••.•.•••••..•.....••••
479 - 481
E) Conclusion ••.•..•.
481
ANNEXE IV : Division du travail et différenciation selon
f.
les statuts
..
f./ -
/
1
A) Les finalités de la division du travai1. ......
483 - 485
1
Bl Différenciation selon les statuts.............
485
1 - Le statut selon le niveau de compétence •••
485 - 486
- Le statut selon le niveau de compétence •••
2 - Le statut selon llancienneté •••.••.•.•••••
486
- Le statut selon llancienneté•••.••.•.•••••
3 - Le statut selon 11 âge .......................
486 • 487
- Le statut selon 11 âge.......................
4 - Le statut selon la parente avec le chef
- Le statut selon la parente avec le
d'entreprise .•.•.••.••••••••••••••••••.••..
4117
s - l~ statut selon le niveau d·étude •••••••••
488 - 489

INEXE V
Les m~canismes de reproduction du surplus
dans les entreprises ••• ~., .. , "~"""""",,,
490
Al Mode d'appropriation du salaire de l'apprenti
par le chef d'entreprise •••••••••...•.•........•
491 - 492
Bl Appropriation par le chef d'entreprise de la
valeur de l'amortissement des moyens de travail.
492 - 494
cl Appopriation par le chef d'entreprise de la
valeur affectée aux matières premières ••••••••••
495 - 496
'INEXE VI
La clientèle et les marchés du secteur
informel paracapitaliste ..•.....••••••.•.•.•••••
497
Al La clientèle privée ... ,.
,
.
"
498 - 500
Bl Les march~s publics ...........•......... ~}.,.
'181 - 503
~NEXE VII: Les mécanismes de reproduction du secteur
informel paracapitaliste et ses différentes
formes d'articulation avec le mode capita-
liste
o • • • • • • •
'104 - 511
~NEXE VIII
Les coopêratives ••••......... >'" ,.,.,_ 1
512 - 515
IBLIOGRAPHIE - OOCUMENTS •••••••.•••.•••.••••••••.•..••..•.•
516 - 517
\\BLE DES MA.TIERES
" .. ,. ,
..
'i18 - 532
;.".'
,