UNIVERSITE DE MONTREAL
L'EXODE RURAL DES JEUNES ADULTES EN COTE D'IVOIRE:
ELEMENTS D'EXPLICATION ET HYPOTHESES D'ACTION
EN EDUCATION DES ADULTES
rC~O~N=S"'-e-Ji."""'~A~-F==R~iê~A~-f~=ET=rïï=A""'Î.-G-A-CH-.EJ
i POUR l'ENSE8GNEMi:NT SUPERiEUR
! C. A. M. E. î.o.-. OUAÇ~OUGOU.
1 Arrivée
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Enregistré sous n~ -n' .. : ~. ~ •••• :
1
PAR
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NICOLAS GUIEHOA YOUHO
SECTION D'ANDRAGOGIE
FACULTE DES SCIENCES DE L'EDUCATION
THESE PRESENTEE A LA FACULTE DES ETUDES
EN VUE DE L'OBTENTION DU
GRADE DE PHILOSOPHIAE DOCTOR (PH.D.)
JANVIER 1984
,-,

i i i
Table des matières
Table des matières
························
i ii à vi i
Liste des taBleaux .................................................................................
viii à x
Sorrnlla i re ........................................................................................................
xi ~ xv
Introduction ................................................................................................
1. La
2
2. Le problème de recherche
6
Première partie ~ Les fondements
9
Chapitre premier - La situation historique contemporaine
de 11 exode rural dans le Ti ers ~1onde
.
10
Chapitre II - Le positionnement du problème
dans son cadre i voi ri en
.
24
Chapitre III - La recension des écrits
.
29
1. Les modèl es .............•.............'
'
33
2. Critique de ces différents modèles
.
35
3. Les travaux de recherche
.
39

UNIVUSITt O( "'ONTR(.i,t
iv
Chapitre IV - Le cadre de recherche
.
53
1. L' hypothèse
.
55
2. La description des variables .,
.
57
2.1 La variable dépendante
.
57
2.~ Les variables indépendantes
.
57
Chapitre V - Les éléments de méthodologie
66
1. Les questionnaires
.
63
2. Le pré-test à l'Institut Natlonal de la Jeunesse
et des Sports
.
70
2. l Le cadre de travai l
.
70
2.2 L'organisation du pré-test
.
71
3. La cueillette des données sur le terrain .,
.
74
3.1 La couverture administrative
74
3.2 Les entrevues à Abidjan
,
75
3.2.1 La préparation
.
75
3.2.2 La conduite des entrevues
.
77
3.2.3 Les difficultés rencontrées .,
.
78
3.3 Les entrevues à l'intérieur du pays
.
79
3.3.1 La préparation de la collecte des données
.
79
3.3.2 La conduite des entrevues
.
80
4. Le traitement des données
.
84
4.1 Les données recueillies au niveau des variables
indépendantes individuelles
.
84
4.2 L'information recueillie au niveau des
variables indépendantes structurelles
.
36

UNIVERSIT( DE \\10~TR(Al
v
Deuxième partie - L'étude des résultats
.
88
Chapitre VI - L'analyse des données
.
92
1. La présentation générale des résultats
.
93
1.1 Le contexte des résultats
93
1.2 La présentation des lieux de l'enquête
.
94
1. ~ . 1 La vi 11 e d'Ab i dj an
.
94
1.2.2 Les villages du pays rural de Gagnoa
.
100
1.3 La description de l'échantillon
.
105
1.3.1 Selon l'âge et le 1ieu de résidence
.
107
1.3.2 Selon l'âge, le sexe et le lieu
de rés i dence
.
108
1.3.3 Selon l'âge, le lieu de résidence et
l'occupation professionnelle
.
109
1.3.4 La répartition selon l'âge, le sexe,
la scolarité et le lieu de résidence
.
110
1.3.5 La répartition selon l'âge, le sexe,
la scolarité et l'occupation
.
113
2. La classification des données recueillies à Abidjan ....
116
3. La classification des données recueillies
en milieu rural
.
174
3.1 Les données du système culturel et du fait
urbain et rural
.
176
3.2 Les données du système scolaire
.
238
3.3 Les données de la structure socio-économique
261
4. La synthèse des données
.
309
4.1 Le groupe des causes
.
310
4.1.1 Répugnance au trava il de 1a terre
.
310

UNlliERSIH DE MONT~!Al
vi
4.1.2 Forte rareté d'emplois salariés
à 1a campagne
.
311
4.1.3 Refus de la vie sociale
du milieu villageois
.
311
4.1.4 Effets de la scolarisation
.
312
4.1.5 Effets conjugués des mass-média et de
l'attrait du modernisme urbain
.
313
4.1.6 Relations de famille élargie
.
313
4.1.7 Désir d'ascension sociale
.
313
4.2 Le groupe des raisons de ceux qui n'ont pas envie
de quitter 1e vi 11 age
.
314
4.2.1 L'amour du travail de la terre
.
314
4.2.2 Réalisme personnel
.
314
4.2.3 Manque d'opportunité: Echec scolaire
.
315
4.2.4 Résignation
~
.
315
4.3 Les problèmes rencontrés en ville
et leurs différentes solutions
.
315
4.3.1 Problèmes rencontrés ...•.................•..
315
4.3.1.1 Problèmes d'ordre matériel
.
315
4.3.1.2 Problèmes d'ordre socio-professionnel
.
315
4.3.1.3 Problèmes d'ordre psychosociologique ...••.
315
4.3.1.4 Problème de santé:
maladie .••.••..•..•...
316
316
4.3.. 2 Solutions adoptées dans la résolution
possible de ces problèmes ......•.•...•.... ~.
316
4.3.3 Solutions souhaitées .....••....•.....•......
317
4.4 Les modifications de la campagne souhaitées ....•..
317
4.4.1 L'aspect économique ...........•.............
317
4.4.2 L'aspect socio-professionnel
.
319
4.4.3 L'aspect socio-culturel ....•..•.............
319
4.5 Les services souhaitées en f.aveur
des jeunes adultes en mil ieu urbnin ..•............
320
4.5.1 Services publics d'information
pour jeunes adultes
.
320
4.5.2 Services techniques de formation
.
320
4.5.3 Services des sports et loisirs
.
321
4.5.4 Développement de services socio-éducatifs
.
321
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-
·· __ ···-
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U~l\\'IIlSIT! Df MO~TIl[Al
vii
5. Analyse des causes
321
5.1 Les différents faisceaux de causes
3"?
t:.~
5. l . l Le désir d'ascension sociale
322
5. l .2 Les effets de la scolarisation
.
325
5. l .3 Les effets conjugués des mass-médfa et
de l'attrait du modernisme urbain
.
330
5.1. 4 Refus de la vie sociale
du milieu vi11ageois
.
335
5.1.5 Répugnance au travail de la terre
et forte rareté d'emplois salariés
il. l a campagne
.
340
5.1.6 Les relations de famille élargie
.
342
5.2 Les niveaux d'interpénétration
des différentes causes
.
346
5.2. l La dimension socio-économique
.
348
5.2.2 La dimension socio-culturelle
.
348
5.2.3 La dimension psycho-sociologique
348
6. La définition des besoins
350
6.1 L'élévation du niveau matériel de vie
352
6.2 L'élargissement de l 'horizon culturel
355
6.3 Les moyens d' acti on
.
358
Chapitre VII - Discus.sion des résultats
.
365
Conclusion
.
373
Annexes
.
397
Remerci ements ...............•......•........................
421
Références bibliographiques
.
422·

vi i i
Liste des tableaux
Tableau
1:
Répartition selon l'âge et le lieu de résidence
107
Tableau
2:
Répartition selon l'âge, le sexe et le lieu de résidence 108
Tableau
3:
Répartition selon l'âge, le lieu de résidence et
l'occupation professionnelle
109
Tableau
4:
Répartition selon l'âge, le sexe, la scolarité et
le lieu de résidence
110
Tableau
5:
Répartition selon l'âge, le lieu de résidence, le sexe,
la scolarité et 1 'occupation professionnelle
113
Tableau
6:
Répartition selon le temps de présence en ville
et le sexe
118
Tableau
7:
Répartition selon le temps de présence en ville
et le sexe
120
Tableau
8:
Typologie des raisons du choix d'Abidjan
121
Tableau
9:
Typologie des aspects de 1limage d'Abidjan
126
Tableau la:
Typologie des raisons du départ des interviewés
de leurs villages pour Abidjan
131
Tableau 11:
Typologie des raisons du départ des amis des interviewés 138
Tableau 12:
Typologie des problèmes rencontrés par les interviewés
à Abidjan
141
Tab1eau 13:
Typologie des problèmes rencontrés par leurs amis
142
Tableau 14:
Typologie des solutions adoptées par les interviewés
et leurs amis
148
Tableau 15:
Typologie des solutions souhaitées
150
Tableau 16:
Typologie des services éducatifs souhaités en ville
155
Tableau 17:
Typologie des aspects de la nouvelle vision
de la campagne
162
Tableau 18:
Typologie des conditions de retour à la terre
167
Tableau 19:
Typologie des distractions
178

U",IV!~SIT[ D!"O", T~f ~l
',-~-.:~ .......-::. ...... ~.-..::.~.'--"o.J._.:'_'''':'':':'''':':1.:.=-~,:,--~,,!_:-'';''-.LlI~~_~~~~~-=-~~_
..:t.JI.'''=..&~'~._'.""'-?"G""'·.··
ix
Tableau 20:
Typologie des distractions préférées
179
Tableau 21:
Typologie des émissions qui intrressent les
téléspectateurs
184
Tableau 22:
Typologie des émissions préférées de la radio
190
Tableau 23:
Typologie des parties intéressantes de Fraternité Matin
198
Tableau 24:
Typologie des sujets préférés dans T.D.
200
Tableau 25:
Typologie descriptive de l'image de la ville
205
Tableau 26:
Typologie des raisons de ceux qui n'ont pas l'intention
de rester au village
212
Tableau 27:
Typologie des raisons de ceux qui veulent rester
au village
217
Tableau 28:
Typologie des raisons du choix des différentes villes
220
Tableau 29:
Typologie des causes du départ des jeunes
vers les villes
222
Tableau 30:
Typologie des propositions
231
Tableau 31:
Typologie des raisons de la fréquentation scolaire
240
Tableau 32:
Typologie des raisons de la scolarisation d'un enfant
241
Tableau 33:
Typologie des objectifs de l'école
248
Tableau 34:
Typologie des arguments favorables au maintien
à la campagne
254
Tableau 35:
Typologie des arguments favorables au départ
pour la ville
256
Tableau 36:
Typologie des raisons du désintérêt du travail
de l a terre
263
Tableau 37:
Typologie des raisons de l'intérêt du travail
de la terre
267
Tableau 38:
Typologie des causes de l linsuffisance du revenu
du travail de la terre
272
Tableau 39:
Typologie des causes de l'insuffisance du revenu
du travail de la terre
274

UNIVERSITE Dl \\10'Ha[~l
xi
Sommaire
L'exode rural dans sa conception générale contemporaine
peut être situé historiquement dans le courant de la révolution in-
dustrielle inaugurée au 1ge siècle par l'Europe Occidentale à partir
de l'Angleterre.
Ses causes générales (mais aussi ses conséquences),
s'inscrivaient alors dans le contexte d'une expansion économique où
les industries nécessitaient une main-d'oeuvre abondante.
Ce qui draina
une grande partie des populations rurales de la plupart des régions de
cette partie de l'Europe vers les villes à grande concentration indus-
trielle et transforma le paysage urbain de ces régions.
Cette extraordinaire expansion économique a eu pour conséquence
immédiate, entre autres, la recherche de nouveaux débouchés et de nou-
veaux marchés hors de l'Europe pour le développement de ce capitalisme
naissant.
La satisfaction des besoins de ce capitalisme a entraîné
l'occupation et le pillage systématique des sociétés d'Asie et d'Afrique.
Cette action politico-militaire a alors orienté l'évolution
de ces sociétés sur le plan économique, politique, social et culturel
dans l'intérêt bien compris de l'Europe Occidentale.
Et l'exode rural
que vivent actuellement les pays d'Afrique s'inscrit dans le cadre de
cette nouvelle évolution en terme de changement social global.

UN!VE~SI Tt DE MO'>1 R( ~l
xii
Dans le cas particulier de la Côte d'Ivoire où l'exode rural
des jeunes adultes est devenu un phénomène social qui préoccupe les
pouvoirs nationaux depuis plus d'une décennie, plusieurs questions se
posent à propos de ce phénomène.
Pourquoi les jeunes adultes partent-ils
vers les villes?
Pourquoi quittent-ils les campagnes?
Pourquoi le font-ils
de plus en plus?
En posant le postulat que des causes relevant des structures
de l'organisation sociale de notre pays sont p~rmi d'autres causes respon-
sables de l'exode des jeunes adultes ruraux vers les villes, la présente
étude répond à la question suivantè en en faisant son problème de recherche:
"QUELLES SONT LES CAUSES RELEVANT DES STRUCTURES DE L'ORGANISATION SOCIALE
DE NOTRE PAYS QUI DETERMINENT LES JEUNES ADULTES, A L'EXCEPTION DE CEUX
QUI VONT AL' ECOLE, A QUITTER LES ZmJES RURALES POUR LES VILLES?"
A partir de ce problème de recherche, l'objectif principal que'
vise cette étude que nous avons voulue exploratoire, présente deux points
principaux:
<-
identifier les causes de l'exode des jeunes adultes ruraux, causes
relevant des structures de l'organisation sociale de notre pays
appréhender et définir les besoins d'aide et d'apprentissage de ces
jeunes adultes dans 1e cadre d'une intervention andragogique.
Pour atteindre cet objectif, la présente étude vérifie l 'hypo-
thèse générale que voi ci:
"Il y a une rel ati on entre l'exode rura l
des jeunes adultes de notre pays et 1es structures de l'organisation

xii i
sociale de ce pays".
L'expression "structures de l'organisation sociale"
recouvre la structure socio-économique, le système culturel en liaison
avec le fait urbain et rural et la situation de l'enseignement en Côte
d'Ivoire.
La vérification de cette hypothèse s'est effectuée auprès d'un
échantillon de commodité composé de quarante et une (41) personnes dont
dix neuf (19) de la ville, (a ABIDJAN) et vingt deux (22) de la campagne
(région de GAGNOA) auxquelles nous avons soumis une série de questions
relatives à nos variables de recherche et en fonction de leurs lieux de ré-
sidence rurale ou urbaine.
La conduite d'entrevues semi-structurées nous
a permis de recueillir un certain nombre d'~noncés pour chaque lieu de
résidence
des interviewés.
La méthodologie utilis~e a été animée par l'esprit d'une analyse
de contenu des informations recueillies.
Ce qui nous a amené à rassembler
les énoncés synonymes afin de constituer des items.
Ceux-ci ont été
regroupés en sous-catégories lesquelles à leur tour ont été ranqées sous
.
-
différentes catégories.
Celles-ci ont été soumises à un jury en vue de la
vérification de la pertinence du classement des énoncés en sous-catégories
selon les différentes catégories et en vue de l'approbation du classement
obtenu.
Ce qui a ordonné les informations en tableaux présentant les
différentes classifications par question, par variable et par lieu
de résidence.

l'NIVl,SIIE Dl .\\H)NTRlAl
x~
Les résultats auxquels a conduit cette méthodologie ont été
répartis en cinq groupes:
les causes
les problèmes rencontrés en ville, les solutions adoptées et les
les solutions souhaitées
les services souhaités pour ceux qui arrivent en ville
les caractéristiques de la campagne que les jeunes adultes n'au-
raient pas quittée
les raisons de ceux qui n'ont pas envie de quitter leurs villages.
L'originalité de notre recherche point avec cette première étape de la
classification.
Et c'est dans l'analyse des causes qu'elle s'exprime
le mieux.
Cette analyse inscrit ces causes dans trois dimensions de
l'exode rural qui sont:
socio-économique, socio-culturelle et psycho-
sociologique.
Elle répartit également ces causes en les présentant sous
leurs aspects objectif et subjectif à l'intérieur de chacune de ces di-
mensions.
L'aspect objectif des causes dévoile le côté explicatif du
phénomène alors que l'aspect subjectif conduit ~ sa compréhension.
L'analyse des différentes causes nous a permis également
de déceler deux types de besoins exprimés par les jeunes adultes dans
leurs aspirations au progr~s.
Il s'agit d'une part de l'élévation de leur niveau de vie par
l'amélioration de leurs conditions d'existence et d'autre part de

xv
l'élargissement de leur horizon culturel à travers une formation à
la mesure de leurs intérêts et tenant compte de leurs besoins exprimés.

Introduction

1.
Justification du choix du sujet
En Côte d'Ivoire, comme partout ailleurs en Afrique, l'existence
de l'exode rural des jeunes adultes vers les villes est un fait évident.
En ce sens que, et comme te l, il recouvre l'as pect d'un phénomène connu de
la plupart des individus à quelque niveau social qu'ils se situent.
Tant
pour les jeunes adultes qui le vivent que pour les hommes politiques et les
planificateurs nationaux qui essaient de trouver des solutions aux problè-
mes posés par cet exode, l'exode rural des jeunes adultes constitue un
problème majeur et prioritaire.
On constate souvent que ce problème est
d'abord evoqué par les hommes politiques et les planificateurs et que par
la suite, des recherches sont entreprises sur le sujet, souvent suite à une
commandite d'organismes ou de l'Etat.
Dans notre pays, l'évidence a com-
mencé a se faire jour depuis au moins quinze ans.
Les discours officiels en
Côte d'Ivoire ont banalisé le phénomène sans pour autant qu'il cesse d'être
une préoccupation nationale si l'on se réfère au message et au témoignage
qui transparaissent à travers ces discours.
Nous avons précisément choisi
de faire porter notre recherche de doctorat (Ph.D.) sur ce sujet.
L'on
pourrait peut-être nous demander pourquoi avoir choisi un tel sujet, alors
que tous en parlent et que le problème est évident?
Certaines études sectorielles (Roussel, 1968; Christopher, 1976)
ont déjà abordé le sujet.
Ces deux études, quoique intéressantes en tant

U,,"'HRS'TI DE ~H)"'TR(~l
3
que sources d'orientation en vue d'autres recherches, ne nous paraissent
pas complètes.
Et ce, à cause de l'orientation économique prononcée que
le dernier a privilégiée, alors que le premier nous présente des résultats
à portée démographique.
Ces deux études nous renseignent, croyons-nous,
i nsuffi samment sur l es causes du phénomène de l'exode rural des jeunes
adultes en Côte d'Ivoire.
C'est pourquoi nous avons décidé de faire porter
notre recherche doctorale sur ce sujet.
Nous entendons, en effet, aller
au-delà de ces études puisque nous situons notre recherche à deux niveaux:
d'abord au niveau de la connaissance, en l'occurrence l 'andragogie, et au
niveau de la pratique, c'est-à-dire, celle qui se reflète à travers notre
profession d'Inspecteur de la jeunesse et des sports.
Du côté de l' andragogi e, nous voulons aborder l'exode des jeunes
adultes ruraux en Côte d'Ivoire, hors des sentiers battus, du sens commun,
pour aller au-delà de l'évidence quotidienne et de la vulgarité jourrialière
dans lesquelles ce phénomène est tenu, afin de le situer, tel qu'il est.
Du côté professionnel, nous voulons restituer, au champ de notre
pratique, un phénomène qui lui échappe par manque d'attitude critique
de notre part dans la gestion du quotidien qui nous limite et nous cloi-
sonne;
nous empêchant ainsi de faire des prévisions pour la solution des
problèmes relatifs au phénomène de l'exode rural.
Ainsi, du point de vue
professionnel, notre choix pour ce sujet, trouve-t-il sa justification
dans nos fonctions.
Dans ce cadre, l'une de nos particularités réside
dans les rapports quasi-privilégiés que nous entretenons avec les jeunes
adultes, qu'ils soient ruraux ou urbains, travailleurs ou sans emploi,
scolarisés ou non, etc ... Ceux-ci, dans leur ensemble, constituent le public

"_~______~_=-~L
.PHi:::.! C-.'-
-.J t:.
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----~-_.
,"
1
PHASE
3
- ~
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-
-
1
1

4
concerné par l'exercice de nos fonctions. Par exemple, création et anima-
tion d'associations de jeunes adultes, organisation de rencontres entre
jeunes adultes, formation de jeunes adultes, etc ...
Toute cette gamme
d'activités déjà menées renforce notre motivation.
En plus, si nos fonctions nous conduisent à l'appréciation des
besoins des jeunes adultes dans leurs comportements sociaux et si ceux-ci
corroborent les raisons de l'existence de notre profession, le choix de
ce sujet nous semble en partie justifié parce qu'il est d'un intérêt
certain pour nous.
Mais à l'énoncé de tels arguments, l'on pourrait nous rétorquer
que nos fonctions ne coiffent pas le monopole des occupations, des préoc-
cupations et des rapports avec les jeunes adultes.
Soit.
D'autres fonc-
tionnaires comme nous ou d'autres professionnels sont engagés dans le même
champ d'activités.
Certes.
l''''ais dans l'appareil administratif de l'Etat
ivoirien, la responsabilité sociale et morale nous échoit.
De toute maniè-
re, notre choix ne serait pas suffisamment cohérent s'il ne s'appuyait pas
sur des motivations d'ordre personnel.
En effet, la particularité qui singularise aussi ce choix c'est
la persistance avec laquelle la quotidienneté nous rappelle nos origines
paysannes.
Et, à travers notre position sociale, due en fait à nos fonc-
tions. nous avons jugé bon de nous arrêter un instant pour réfléchir en
jetant un coup d'oeil en arrière, c'est-à-dire vers nos origines.

5
Nos contacts quotidiens avec des jeunes adultes ruraux, soit
ceux qui ont déjà immigré en ville, soit ceux qui, à la campagne, sont
tentés par la ville, soit ceux qui désirent rester à la campagne, nous
rappellent étrangement des situations, des questionnements, des insécurités
et des décisions que nous avons déjà vécus nous-mêmes.
Mais le temps et
notre situation sociale actuelle concourent à un certain oubli.
Proche et lointain à la fois de la situation vécue par ces
jeunes, nous sommes, en même temps attentif à leur problème et désireux de
les comprendre.
Mais nous entendons tenter de dépasser nos sentiments
personnels, nos valeurs, nos croyances et nos opinions pour aborder l'étude
de la situation des jeunes adultes dans le sillage de l'exode rural, en
faisant appel à une problématique qui se veut objective et rationnelle.
La Côte d'Ivoire est un pays dit à vocation agricole.
Et le
monde rural qui fonde son économie peut donc la défaire facilement.
De ce
point de vue, ce monde rural est le tétrapode de l'édifice social ivoirien
avec pour base, les jeunes adultes.
Dans ces conditions, l'importance du
milieu rural nia pas d'égal, ou du moins elle n'a d'égal que les jeunes
adultes qu'il recèle et nourrit en son sein.
Or, il se trouve justement que ces jeunes adultes quittent en
grand nombre ce milieu pour les villes.
Ce phénomène pose plusieurs ques-
tions.
Pourquoi les jeunes adultes partent-ils pour la ville?
Pourquoi
quittent-ils la campagne?
Pourquoi et pour quoi?
Autant de questions
auxquelles nous voulons trouver des éléments de réponses.

6
2.
Le problème de recherche
Dans la ligne de ces questions, et en posant le postulat que des
causes relevant des structures de l'organisation sociale sont parmi d'au-
tres causes responsables de l'exode des jeunes adultes ruraux, la présente
étude veut répondre â la question suivante en en faisant son problème de
recherche:
QUELLES SONT LES CAUSES RELEVANT DES STRUCTURES DE L'ORGANISATION
SOCIALE DE NOTRE PAYS QUI DETERMINENT LES JEUNES ADULTES RURAUX, A L'EXCEP-
TION DE CEUX QUI VONT A L'ECOLE, A QUITTER LES ZONES RURALES POUR LES
VILLES?
L'objectif principal que se propose d'atteindre la présente
recherche comporte les points suivants:
Identifier les causes de l'exode rural des jeunes adultes rele-
vant des structures de l'organisation sociale de notre pays.
Ces
causes d'ordre structurel seront celles qui relèvent de la struc-
ture socio-économique, du syst~me culturel et du fait urbain et
rural, et enfin celles relatives â l'éducation formalisée par
l'enseignement de l'école.
-
Appréhender et définir les besoins d'aide et d'apprentissage des
jeunes adultes ruraux dans le cadre d'une intervention andra-
gogique.
La recherche de ces causes d'ordre structurel de l'exode des
jeunes adultes rura~x de notre pays, implique de notre part une étude
exploratoire.

r'--
"'II SIld
_
..... fa ..
-
1
7
L'utilité d'une telle recherche réside dans le fait que, à notre
connaissance, aucune investigation empirique et systématique des causes de
l'exode des jeunes adultes ruraux de notre pays n'a encore été réalisée
jusqu'à maintenant par un chercheur ivoirien.
Et qui plus est, dans le
cadre d'une thèse de Ph.D. en Sciences de l'Education.
Nous croyons donc qu'une étude de ce genre pourrait être d'une
certaine utilité pour la recherche au niveau universitaire d'une part.
Et
d'autre part, le fait d'avoir des éléments de réponses aux questions que
pose ce problème de recherche peut nous permettre d'esquisser des proposi-
tions constructives dans le cadre d'une politique cohérente à l'intention
des jeunes adultes de notre pays.
Car comme le dit Samir Amin (1972,
p. 62), toute analyse scientifique d'un phénomène social comporte en fili-
grane des propositions implicites d'action.
Ce qui dans l'ensemble nous
permettrait encore de disposer d'éléments de référence théorique quant ~
l'approche du phénomène, signe de notre contribution à l'élargissement et
à l'affermissement de nos bases dans notre domaine de pratique profession-
nell e qui est l' éducati on des adultes.
L'intérêt de cette étude est donc à la fois d'ordre théorique
et pratique.
Théorique, parce que l'étude nous fournira des éléments de com-
préhension du phénomène;
pratique parce qu'elle constituera un guide
pratique dans notre action quotidienne d'intervention andragogique.

8
La justification du choix du sujet esquissée et le problème de
recherche posé, pour atteindre l'objectif principal de cette recherche, et
après avoir situé son utilité et son intérêt, le travail que ces différents
points introduisent, comporte deux grandes parties.
La première est relative aux fondements théoriques qui sous-
tendent cette recherche.
Elle est constituée de cinq chapitres.
Un premier chapitre définit le contexte historique de l'exode rural dans
le "Tiers Monde", tandis qu'un deuxième le replace dans son contexte
ivoirien.
Le troisième chapitre qui s'intéresse à la littérature pertinen-
te sur le sujet introduit le cadre théorique de cette recherche qui cons-
titue notre quatrième chapitre.
Enfin un cinquième chapitre qui
termine
cette première partie renferme les éléments de méthodologie utilisés pour
l'obtention de nos résultats.
La deuxième partie, quant à elle, ne comporte que deux chapitres.
L'un, le sixième de notre travail, est consacré à llétude des résultats.
L'autre, le septième et le dernier sert à la discussion de ces résultats
afin de déterminer l'apport particulier de cette recherche.
Une conclusion en terme de résumé met fin à ce travail.

PREMIERE PARTIE
Les fondements théoriques
...'!

Chapitre premier
La situation historique contemporaine de l'exode rural dans le "Tiers Monde"

v"\\\\rW~IH Ol 'I()'-lRi ·\\l
......
__
~ " " " " , _
-=~_~
~c.
= _ . ~ , " " " " ,
Pour donner une structure logique à notre démarche de recherche,
il nous semble important de situer tout d'abord le sujet choisi dans le
contexte historique qui le caractérise et qui, aussi, fait de la Côte
d'Ivoire un pays dit en voie de développement comme la plupart des pays
africains que l'on classe dans un groupe nommé par le pseudonyme pudique
de "Tiers Monde".
A notre avis, il semble que l'analyse et la compréhension du
phénomène de l'exode rural des je~nes adultes de notre pays vers les
villes, ne peuvent être possibles sans leur mise en rapport avec des
données générales relatives à l 'histoire contemporaine et au changement
social de cette période.
Il faut souligner en passant que ce changement social n'est pas
un attribut particulier à la Côte d'Ivoire.
C'est un fait mondial mais
qu'il nous faudra considérer dans son contexte africain, ensemble auquel
appartient la Côte d1lvoire.
Et cela, nous voudrions le faire, sans la
moindre prétention d'historien, en ayant recours à l'analyse globale qu'en
ont faite le professeur Ki-Zerbo et d'autres chercheurs de la tradition
orale tel Hampate-Ba.
La notion de changement social fait référence à un phénomène
historique dans une société donnée à un stade donné de son évolution (Guy
Rocher, 1968).
En cela, il procède d'une transformation des structures de
cette société.
Par cette action, il marque d'une empreinte indélébile, le

,
......"""",,
........
LJ"'VfRSlff Dl '10"TR[·\\l
=_
_ ~ _ . - . . - - = . ~ ~ ~ _ '
~~_-=..-_~_
~
"~==-=-<~'ca""
12
cours de l'histoire.
Autrement et simplement dit, cela signifie que sans
cette transformation, la société ne serait pas comme elle est et telle que
l'on peut l a connaître à l' instant.
Ell e serai t toute autre.
Dans cette optique, nous pouvons proposer la définition de Guy
Rocher (1968, p. 22) selon laquelle le changement social est toute trans-
formation observable dans le temps qui affecte d'une manière qui ne soit
pas que provisoire ou éphémère, la structure ou le fonctionnement de l 'or-
ganisation sociale d'une collectivité donnée et modifie le cours de son
histoire.
A la lumière de cette définition, le changement social est bel
et bien le changement de nature d'une société avec ce que cela comporte de
conséquences de tout ordre pour la collectivité affectée.
A la considérer comme telle, la notion de changement social peut
paraître vague.
Mais dans le contexte africain qui nous intéresse, elle
s'inscrit dans une perspective dynamique très profonde qui la replace dans
ses dimensions historiques contemporaines où l'on peut identifier et mesu-
rer ses causes et ses effets.
L'exode rural des jeunes adultes en Afrique
l
est un effet important du changement social;
et à son tour il est suscep-
.~
tible de provoquer un tel changement.
Bien que l'exode rural existe sur d'autres continents telles
l'Europe et l'Amérique, en Afrique, pour le comprendre, il faut le situer
dans les causes historiques particulières du changement social qui s'est
'~
(
produit dans les pays du "Tiers Monde".
Pour l'Afrique en particulier, ce
;~
,~

U .... IV[~SI Tf DE '\\0" IRE \\l
14
des territoires et des populations colonisées pour l'enrichissement et la
stabilité des métropoles des pays colonisateurs.
Les premiers moyens de base servant cette méthode nouvelle
étaient, d'une part l'appropriation effective du sol, source matérielle la
plus importante pour un africain et la plus riche pour chaque pays;
et
d'autre part, la levée d'impôts permanents sur les populations de chaque
territoire occupé.
Selon Ki-Zerbo (1978), ce regain d'intérêt remarquable pour
l'Afrique s'explique par plusieurs faits socio-politiques qui se produisent
e
en Europe Occidentale durant cette période du 1g
siècle.
A cet effet, il faut rappeler que la mutation structurelle que
subit l'Europe de cette époque est marquée par la révolution industrielle.
Celle-ci, caractérisée surtout par l'invention des machines à vapeur et
des métiers à tisser, bouleverse l'ordre des moyens de production sur ce
continent.
L'apparition de ces nouveaux moyens crée alors des nouveaux
besoins.
Face à cette situation il fallait, de la part de l'Europe, donner
un nouveau rôle à l'Afrique dans la satisfaction de ces besoins nouveaux
de l'industrie européenne en mutation.
La nécessité commandait donc d'ouvrir en Afrique des plantations
de produits tropicaux (café, cacao, coton) (et particulièrement le café et
le cacao pour la Côte d'Ivoire), ouvrir des mines (or, diamant, manganèse,
uranium) pour la Guinée, le Congo, etc ... et de contrôler au mieux ces

15
sources de production.
Et parallèlement à cela,ouvrir ainsi des débouchés
assez vastes et des marchés assez étendus pour la consommation de la pro-
duction industrielle "made in Europe".
L'acquisition de ces "marchés -
débouchés" permettait ainsi d'écouler les produits de cette industrie en
plein essor. mais aussi de contribuer au ravitaillement d'un capitalisme
naissant. gourmand et avide de matières premières exotiques acquises à vil
prix.
Il fallait ainsi trouver ces matières premières en dehors de l'Euro-
pe.
Soit qu'elles y fassent défaut ou soit que leur extraction ou leur
production s'y révèlent plus coOteuses.
Recherche donc de matières premiè-
res exotiques. mais aussi recherche de "marchés - débouchés", telles étaient
quelques-unes des causes fondamentales d'ordre économique qui présidèrent à
la conquête et à l'occupation des pays "d'outre mer" et qui firent d'eux,
des sources d'approvisionnement permanent.
Mais ces causes ont aussi leurs
aspects politiques et administratifs complémentaires.
A travers ces actes commerciaux, il fallait aussi s'assurer la
propriété effective de ces débouchés et de ces matières premières que rece-
laient les sols de ces territoires nouvellement occupés.
Alors, à coup de
décrets et d'ordonnances, territoires après territoires, les pays coloni-
sateurs, en même temps qu'ils légalisaient leur présence dans les territoi-
res occupés d'Afrique, rendaient juridique cette occupation de fait.
Chaque pays se protégeait ainsi des éventuels nouveaux venus et d'autres
concurrents.
La consécration du partage de l'Afrique vit alors le jour sur
la table de la conférence de Berlin en 1885.
La Côte d'Ivoire devint une
colonie en bonne et due forme en 1893.
Afin d'imposer par la force, leur
hégémonie et de s'assurer le contrôle stratégique des territoires occupés,

16
les militaires n'ont pas souvent hésité a faire usage de leurs armes a
feu, face a des peuples désarmés défendant dans l'honneur le sort de
leur dignité d'hommes.
A cet égard, comme le dit Ki-Zerbo, le rôle des militaires n'a
pas été qu'une simple exploration ou qu'un humble acte de pacification.
Ce fut une pacification en terme de guerre d'occupation en certains en-
droits de l'Afrique de l'Ouest que rendirent visibles certains mouvements
de résistance animés par des personnalités comme Samory au Nord et au
Nord Ouest de la Côte d'Ivoire.
D'autre part, à la base de ce mouvement expansionniste européen,
il faut ajouter le fait que des impératifs de plus en plus sévères pesaient
sur les économies nationales de certains pays comme la France qui venait de
perdre la guerre contre la Prusse (1870).
En même temps qu'elle perdait
la guerre, la France voyait se concrétiser malgré elle et sur son dos,
l'unité allemande et dans le même temps elle perdait aussi l'Alsace et la
Lorraine, deux régions houillères vitales dont elle avait besoin en cette
période de rénovation technique et économique dans la voie de la révolution
industrielle.
Dans cette ruée vers 1es territoi res loi nta i ns "d'outre mer", les
hommes d'Eglise ne furent pas absents.
Si bien que Ki-Zerbo parlera des
3M (Marchands, Missionnaires, Militaires).
Les missionnaires, soldats de
la II mission universelle de l'Eglise" se donnèrent le mandat de "sortir les
indigènes de l'obscurantisme du péché et de l'ignorance pour les amener à
1a Lumi ère par l a foi et 1 'Ecriture ll •
En un mot, il fa 11 ait l es rendre

17
"rationnels" c'est-à-dire les "humaniser" en les "christianisant" et en
leur apportant les "bonnes choses de la vie" (ct l'occidentale) grâce à
l'éducation, et l'enseignement par l'école que soutenaient le catéchisme,
la bible et les abécédaires des langues européennes.
A travers cette analyse succincte et globale, il convient de
noter que dans leur ensemble, les causes de l'expansion européenne ont un
fondement économique sur lequel s'appuient les autres causes.
Dans cette
opt5que l'on peut soutenir sans grand risque d'erreur, que les facteurs
culturels n'ont été que les supports idéologiques nécessaires à la bonne
marche de l'exploitation économique et de l'occupation militaire.
Car ct
notre avis, le colonialisme quelqu'il soit n'a jamais été synonyme d'huma-
ni sme nid e cha r it é .
Car lié col e, sou t i en cult ure let i dé 0 log i que par
excellence, était destinée à former soit des "commis" pour les comptoirs
commerciaux, où ils passaient les écritures comptables, soit des traduc-
teurs ou des interprètes des militaires et des missionnaires.
Et le caté-
chisme quant à lui, servait plutôt à endormir la conscience des autochtones
sur la réalité de leur situation temporaire d'occupés tout en leur pro-
mettant le ciel.
Aussi, l'administration coloniale française, dans toutes ses
activités, travaillait-elle essentiellement ct la pénétration de l'intérieur
des territoires de l'Ouest africain afin de se procurer facilement des
biens nécessaires ct son expansion et son développement économique.
Et la
prétendue "pacification" d'au-deH des côtes atlantiques de l'Ouest afri-
cain en direction des territoires de l'intérieur n'était autre chose qu'un

L:."I\\'fRSIH Of 'IO"fR[ \\l
V ~ ~
18
moyen insidieux pour procéder au recrutement forcé des autochtones.
Ceux-
ci étaient alors réquisitionnés et forcés à l'émigration pour la mise en
valeur des plantations de la basse côte atlantique.
On pourrait même se
poser la question actuelle de savoir si l'exode rural de l'intérieur vers
les basses côtes atlantiques d'Afrique de l'Ouest n'est pas un processus
continu né de la colonisation.
Les autochtones étaient aussi réquisitionnés pour tracer les
routes et construire les voies ferrées nécessaires à la pénétration des
colonisateurs.
Ces moyens de transport étaient aussi nécessaires à la
collecte de l'impôt per capita, au pillage systématique des trésors écono-
miques et culturels aux seules fins d'enrichir les coffres-forts et les
musées des capitales des pays colonisateurs.
Les musées de Paris et de
Londres, de nos jours, ont plus de visiteurs africains que n'en ont ceux
d'Abidjan et d'Accra.
Le but inavoué de la colonisation européenne était donc une mise
en valeur systématique et un pillage sans frein des territoires occupés
qui lièrent à jamais ces territoires aux pays colonisateurs pour lesquels
ils ne sont que des vaches à lait en passe de devenir des zestes de citron
pressés.
Et c'est une raison toute profonde d'actualité pour laquelle
l'indépendance économique des pays africains ne sera pas pour demain alors
que l'indépendance politique a été précipitée à la faveur des événements
de la deuxième guerre mondiale et des conséquences politiques qui en
découlèrent pour la plupart des principaux pays colonisateurs (France et
Angleterre).

19
Du point de vue historique et à la lumière de ce qui précède,
nous pouvons donc conclure que l'exode rural des jeunes adultes en Afrique
de l'Ouest et particulièrement en Côte d'Ivoire, se situe dans le cadre
global du changement social qui a commencé dans cette région d'Afrique et
dans ce pays depuis l'avènement de l'expansion colonialiste européenne et
de l'occupation française.
Tout cela a donc provoqué, au sein de cette
région, une crise de structure due à la conjugaison des forces en présence;
d'un côté les forces d'occupation et de l'autre des sociétés non encore
remises des saignées de la traite négrière.
Cette crise, nous la considé-
rons propre aux pays du "Tiers Monde" parce qu'elle a sa réalité propre
avec ce que cela comporte de manifestations sociales profondes pour
chaque pays ou chaque société donnée.
Mais aussi à cette crise s'est imposée une seconde crise qui,
elle, est mondiale.
Car depuis deux décennies, il est devenu évident que
l'équilibre du monde est rompu.
Cette dernière relève, elle, de l'accélé-
ration de l'histoire.
Dans ses manifestations, elle touche à la fois et
les pays du "Tiers Monde" et les pays industrialisés.
Dans son processus,
elle affecte toutes les sociétés du monde et les menace dans leurs fonde-
ments sociaux, économiques et culturels.
Mais en considérant ce second
aspect du problème relatif au changement social, une remarque d'ensemble
s'impose à propos de la notion même de crise.
A la prendre de prime abord, la notion de crise peut paraître
ambigu~ et impropre à l'esprit dans la mesure 00 la crise suggère à notre
sens, une perturbation provisoire d'un système qui pourrait reprendre un

20
jour son équilibre antérieur.
Or il n'en est pas ainsi dans le change-
ment social.
Le changement que subit le monde contemporain nous met en face
d'une situation irréversible.
Par exemple l'on imagine mal comment les
pays occidentaux pourraient revenir à leur situation des années 1950 avec
tout ce que cela comporte de mutations et de réformes sociales.
Ou alors
comme s'il était possible de se replacer dans les années 1960, soit deux
décennies en arrière, époque durant laquelle la plupart des états franco-
phones d'Afrique de l'Ouest virent "briller le;d..~ de leurs indépen-
Ls~\\CA!NE ~r,i;~
dances politiques" comme le dit si bien l'a(lJièu:p--Amadot9'J~ourouma. C'est
I~ /
~(\\,~
donc à une idée d'équilibre recouvrable qJi fa-itA \\?ertser l~~\\notion de crise.
\\ul~~
De ce point de vue, elle est donc porteuself\\«.ptimisme/à..è~urt et moyen
~~/"~'<~
terme.
Mais, à long terme, le monde entier~:~~Gation irré-
versible et subit une transformation continue dont le dynamisme
réside dans l'équilibre résultant des crises internes successives et
permanentes.
Mais quant aux pays du "Tiers Monde", cette crise est-elle une
crise de salut ou une voie en cul de sac?
Dans l'ensemble, si un nouvel
équilibre général venait à être établi à la faveur d'un ordre nouveau, ce
serait un équilibre issu d'une situation "sui generis".
Il serait donc
différent de celui des dernières années, sur lequel pourtant il prend
forme et consistance.
Car dans ses manifestations planétaires, cette crise due à l'ac-
célération de l'histoire, touche à tous les niveaux de la réalité sociale

U-';'VfRS'TE Of "O"IR[ \\l
21
humaine avec des accents et des attributs particuliers selon les sociétés.
Examiner les différents niveaux de manifestation de cette crise reviendrait
à faire la couverture de toutes les activités humaines dans ce qu'elles
ont de critique.
Ce qui n'est pas notre intention et est loin de notre
prétention.
Par contre et d'une manière générale, nous pouvons nous pen-
cher sur le cas de l'éducation.
Si nous prenons l'éducation en tant que
moyen de socialisation et dans ce qu'elle a de formel, il semble de plus
en plus évident que les moyens de cette socialisation se multiplient et se
diversifient au fil du temps.
Ainsi, cette éducation échappe-t-elle de
plus en plus aux parents et devient le fait de l'école et des mass-média.
C'est ainsi qu'avec la presse parlée, écrite, audiovisuelle, officielle et
"underground" nous nous situons dans le cadre général de l'éducation dite
parallèle.
Dans cette dimension et à ce stade particulier, l'école ne
fournit plus qu'une infime partie de la formation de l'individu.
Parallè-
lement donc à l'information donnée par l'enseignement de l'école d'une
manière formelle, se développe avec une rapidité extrême, une forme d'édu-
cation véhiculée par les mass média.
De ce fait l'enseignement est de
moins en moins perçu comme nécessairement suffisant dans le processus
d'information et de formation des individus.
Du coup, ceux qui dispensent
cet enseignement formalisé subissent en même temps une remise en cause.
Si ce ntest par eux-mêmes, professeurs et instituteurs sont souvent sujets
à contestation de la part de leurs élèves et étudiants.
Pour ces ensei-
gnants, il s'impose avec acuité un nécessaire recyclage, une formation
continue.
Et justement l'éducation des adultes, dans le cadre de l'éduca-
tion permanente, se révèle être l'ultime recours dans le processus de
l'obsolescence continue et permanente du savoir acquis.

U~IVERSIT( DE "'O'oTRI"l
22
Dans ce sens, au niveau de la connaissance et des apprentissages,
il n'y a plus d'acquis qui ne soit dynamisé.
L'éducation dans son ensem-
ble se fait désormais par ajouts réguliers;
et l'individu dans une pers-
pective socio-andragogique de formation, est lui-même responsable de
l'identification de ses objectifs d'apprentissage et de l'organisation et
de la conduite de ses activités éducatives.
Dans ce processus continu d'appropriation du savoir, chaque
individu, en tant qu'adulte, est responsable de ses apprentissages.
Cette conception de l'éducation des adultes s'inscrit dans le
contexte des recommandations du rapport Faure (1974) et de l'Education en
devenir de l'Unesco (1975) et s'adresse effectivement à des adultes sachant
lire et écrire.
Mais quelle serait la portée d'une telle recommandation dans un
pays du "Tiers Monde" comme la Côte d'Ivoire où selon Zacharia (1978,
p. 76) 71,6% des jeunes âgés de plus de 6 ans ne savent pas lire et écrire?
Il semble que vu ces chiffres, on ne puisse pas prendre en considération
l'esprit fonctionnaliste avec lequel le rapport Faure considère l'Education
des adultes dans le cadre de l'Education Permanente.
Car pour nous, l'édu-
cation des adultes n'a sa place dans l'éducation permanente que si, en
Côte d'Ivoire elle inscrit dans ses programmes et au premier rang l'alpha-
bétisation dans le sens du changement social.
Analyse générale d'une crise mondiale.
Certes.
Mais c'est dans
ce contexte global du changement social mené simultanément par une crise

UNIVERSITE DE '>\\ONTREAl
23
d'acculturation et une crise due à l'accélération de 1 'histoire dans les
pays occupés d'hier et appelés maintenant par le pseudonyme pudique de
pays du "Tiers Monde" comme la Côte d'Ivoire, qu'il faut situer le problème
de l'exode rural des jeunes adultes pour en avoir une réelle compréhension
et en dégager une signification objective.
C'est pourquoi, dans le cadre de cette recherche, nous voulons
ici, maintenant poser ce sujet dans ses attributs ivoiriens afin d'en
dégager plus tard les causes.

Chapitre II
Le positionnement du problème dans son cadre ivoirien

De plus en plus dans notre pays et ce, depuis bientôt quinze ans,
le départ des jeunes adultes ruraux vers les villes est devenu une préoc-
cupation nationale.
Si bien que, déjà, le 31 décembre 1969, le Chef de
l'Etat soulignait la nécessité d'accorder une place de choix aux problèmes
du monde rural qui regroupe 75% de la population du pays et dont les jeunes
sont en proie à l'exode rural.
Pour la première fois et d'une manière
officielle. le Chef de l'Etat situait le phénomène dans son contexte ivoi-
rien en ces termes "les industries nouvelles devraient contribuer pour une
part à rendre moins aigu le douloureux problème du chômage et du sous-
emploi.
C'est à court terme cependant que des mesures ont été déjà prises,
qui visent, comme pour le logement à apporter un début de solution aux
difficultés les plus dramatiques;
mais il revient à un gouvernement res-
ponsable de s'attaquer aux causes du mal, plus encore qu'à ses conséquences;
et les maux profonds, nous les connaissons:
c'est l'exode rural et c'est
l'insuffisante formation professionnelle.
Ne nous faisons pas d'illusions
excessives;
nous ne freinerons cet exode et donc le chômage urbain
qu'autant que nous saurons consacrer en priorité des moyens importants et
nouveaux à des actions répétées d'animation, de promotion et d'aménagement
dans les zones rurales susceptibles de retenir les jeunes dans les campagnes
et d'améliorer leurs conditions de vie (in Felix Houphouet Boigny, Antholo-
gie des discours, 1946-1978.
CEDA, 1979, T. II- p. 985).

26
Pour le Chef de l'Etat ivoirien, l'exode rural des jeunes adultes
serait donc dO a un manque d'animation du milieu rural, d'une absence de
promotion dans les zones rurales non aménagées qui ne fournissent pas les
meilleures chances de promotion sociale et ne constituent donc pas des
cadres appropriés pour l'amél ioration des conditions de vie de ceux qui y
vivent et notamment les jeunes adultes.
En plus de cette analyse du Chef de l'Etat, en 1980, le Congrès
du parti démocratique de Côte d'Ivoire (le PDCI) parti unique au pouvoir
dans notre pays, avait entre autres thèmes, celui de l'aide a la paysanne-
rie.
Et la résolution relative a ce thème qui fut adoptée par le Congrès
fut:
l'installation des jeunes ruraux sur les terres avec l'aide de l'Etat.
Le but de cette opération étant justement de freiner leur exode vers les
villes.
Implicitement, les pouvoirs politiques reconnaissaient par la-même
que l'exode des jeunes adultes ruraux était dO à un manque d'encadrement
par l'Etat de ces jeunes adultes ruraux.
Ce qui en fait rejoint les affir-
mations que le Chef de l'Etat avait déja fait valoir en 1969.
En plus des déclarations politiques faisant état du phénomène et
des propositions de mesures a prendre pour le maîtriser, quelques études
ont tenté de le cerner, chacune a sa manière, mais toutes dans sa dimension
ivoirienne.
C'est ainsi que Louis Roussel (1968 T1970) fait état des résultats
d'une enquête qulil a réalisée en Côte d'Ivoire en 1968 sous le couvert du
Bureau International du Travail (BIT) et sur recommandation du gouvernement
ivoirien.
Dans ses résultats publiés en 1970, il signale que 33% des

.
·
-
hommes et 20% des femmes de 15 à 29 ans avaient quitté leur village pour la
ville.
Ceux qui avaient terminé leurs études primaires étaient plus portés
à migrer que les autres.
Il établit en conclusion une corrélation positive
entre le niveau d'instruction et la probabilité de sortir du milieu rural
en Côte d'Ivoire.
En plus de cette étude qui fait état de l'existence du phénomène
de l'exode rural des jeunes adultes dans notre pays, il faut mentionner
celle de G. Christopher (1976) qui dans un article publié dans les cahiers
du Cires, estime que parmi les facteurs qui expliquent l'exode rural des
jeunes adultes en Côte d'Ivoire, il, y a l'influence du système éducatif sur
les qualifications et les valeurs urbaines et le taux élevé de succès obte-
nus à partir de ce système de scolarisation, des décisions gouvernementales
en matière d'investissement et la structure anarchique du salaire minimum
qui oriente le facteur travail vers les activités urbaines.
Il y a donc
pour G. Christopher, des causes d'ordre éducatif et des causes d'ordre
économique qui expliqueraient l'exode des jeunes adultes ruraux de Côte
d'Ivoire vers les villes de ce pays.
En dehors de ces études, aucune autre source traitant de ce sujet
dans le cadre ivoirien ne nous est encore disponible.
Néanmoins d'autres chercheurs dans d'autres pays d'Afrique se
sont aussi penchés sur l'étude du phénomène.
C'est ainsi que dans une étude
faite au Ghana (1969), John Caldwell conclut que les causes de l'exode rural
des jeunes adultes dans ce pays sont autant liées ~ des facteurs économiques
qu'à des facteurs non économiques parmi lesquels l'école.

28
Par contre Simmons et Diaz (1978), dans une revue générale de la
littérature sur les causes de la migration en Afrique et Adepoju (1979) au
Nigeria, mettent l'accent sur les causes fondamentalement économiques du
phénomène.
C'est aussi en partie le point de vue de Gugler (1978) qui
conclut à la prédominance des causes économiques dans le phénomène de la
migration des jeunes adultes ruraux en Afrique de l'Ouest.
A première vue, il semble que l'exode rural est dû à plusieurs
causes qui sont à la fois économiques, sociales, éducatives et culturelles.
Dans cette optique et dans le cas particulier de la Côte d'Ivoire, l'on
pourrait se demander, à la lumière de ce qui pr~cède, si les structures de
l'organisation sociale de notre pays ne peuvent pas être déterminantes dans
l'exode des jeunes adultes ruraux vers les villes.
Ou en d'autres termes,
on pourrait se demander si la structure socio-économique ne joue pas un
rôle dans le départ de ces jeunes adultes ruraux vers les villes, ou si le
système culturel et les valeurs urbaines ne favorisent pas cette migration.
Ou si enfin, le système d'enseignement en cours dans notre pays ne prépare
pas simplement à une vie à la ville.
Une telle problématique pourrait
guider notre démarche de recherche.

Chapi tre III
La recension des écrits

Dans cette partie, notre tâche consistera à mettre en forme les
considérations théoriques qui, dans la recherche des causes, mettent en
rapport l'exode ru ra l des jeunes adultes et l es di fférents concepts défi ni s
dans l'objectif de notre recherche et ce, à travers les différents pays du
Tiers Monde, d'Afrique de l'Ouest et de la Côte d'Ivoire en particulier.
Il faut tout d'abord préciser que le concept d'exode rural renvoie
à celui de migration, d'émigration rurales dont il est synonyme.
Le concept de structure économique peut être défini comme l'en-
semble des facteurs économiques qui entrent en relation avec l'exode rural
des jeunes adultes.
Il s'agit donc de la notion de travail, de celle
d'emploi, et de celle de revenu.
Le concept de système culturel quant à
lui, englobe tout ce qui a trait à l'information véhiculée par les mass
média tels la radio, la télévision, les journaux et qui façonne une nouvel-
le manière de penser et d'agir développant ainsi une sous-culture urbaine
avec ses valeurs, ses croyances.
Cette sous-culture urbaine se développe
particulièrement dans les grandes villes comme Abidjan à partir desquelles
elle se diffuse à l'intérieur des zones rurales.
Le concept de système scolaire quant à lui renvoie à l'éducation
formalisée par l'enseignement de l'école avec le but de l'école et le nom-
bre de scolarisés en fonction de ce but et aussi les programmes proposés.

31
Généralement le concept système scolaire s'emploie souvent en lieu et place
de système éducatif et de système d'enseignement.
Notre champ de la recension des écrits sera donc orienté vers les
études qui ont plus ou moins abordé ces concepts dans la recherche des
causes de l'exode rural des jeunes adultes.
La question centrale que nous
nous sommes posée pour commencer cette recension des écrits était de savoir
quell es étai ent l es études qui, cherchant à connaître l es causes de l'exode
rural ont eu lieu dans le Tiers Monde, en Afrique de l'Ouest et en Côte
d'Ivoire durant les quinze dernières années.
Dans cet axe, plusieurs ~tudes de type exploratoire ont été
entreprises en vue de déterminer les facteurs de causalité de l'exode des
jeunes adultes ruraux dans différents pays.
Ces études ont été conduites
dans plusieurs disciplines académiques.
Quoique toutes n'aient pas eu pour
objectif principal la recherche des causes du phénomène, chacune, et à des
degrés divers a traité l'exode rural sous un angle qui lui est particulier.
Par exemple, les démographes, à travers leurs études descriptives ont
essayé de mesurer la migration dans sa formulation statistique.
C'est le
cas de K.C. Zachariah (1978) avec ses travaux sur la migration en Côte
d'Ivoire qui visaient une analyse statistique des mouvements de la popula-
tion à travers le pays.
Quant aux économistes et aux géographes, ils situent leur analyse
au niveau des caractéristiques des lieux de départ et d'arrivée, et les
circonstances du déplacement de la population.
Ils ont généralement mis
l'accent sur les données spatiales de la migration et ses motivations

U~ IV[ R<l r( Ol 'If)" IRf \\l
32
purement économiques.
Ce type d'analyse se retrouve dans les études de
1. Masser (1975) faites en Ouganda, et en partie chez G. Christopher (1976)
dans son article publié dans les cahiers du Cires de l'Université d'Abidjan.
A ces études qui présentent un aspect partiel de la migration, les
sociologues et les psychosociologues ont tenté de déceler les motivations
non économiques de la migration dans le cadre général de la société où le
mouvement migratoire se produit. C'est dans cette voie que se dirigent aus-
si en partie les études de G. Christopher (1976), de Samir Maamary (1974)
aux U.S.A., de Samir Amin (1974) dans les migrations en Afrique de l'Ouest.
Quant aux anthropologues comme Jean Marie Gibbal (1974), ils ont
plutôt mis l'accent dans leurs études sur la manière dont la société d'ori-
gine perçoit la migration et sur la façon dont se fait l'intégration des
nouveaux venus dans les villes ~ travers les différentes communautés d'ac-
cueil.
Son étude sur la Côte d'Ivoire (1974) montre les différentes rela-
tions entre la communauté d'origine des migrants et la communauté d'accueil
en ville où les nouveaux venus sont intégrés dans une structure qui rappel-
le la communauté villageoise d'origine.
L'ampleur des études sur la migra-
tion démontre ainsi l'importance sociale que recouvre le phénomène par le
fait qu'il touche à tous les aspects de la vie de l 'homme dans la société
concernée.
Dans cette recension des écrits, le fil conducteur sera tenu, du
côté "causes" principalement, par les études qui ont été menées dans les
pays du Tiers Monde particulièrement, en Afrique de l'Ouest et singulière-
ment en Côte d'Ivoire.
Toutefois, il n'est pas exclu que certaines re-

33
cherches de référence qui peuvent se révéler pertinentes quand bien même
elles auraient eu lieu en dehors des zones indiquées ci-dessus, soient
consultées.
Dans le temps, cette recension sera limitée aux écrits qui ont eu
lieu durant les quinze dernières années.
Ils pourront avoir été écrits en
français, en anglais et en espagnol.
Nous présenterons d'abord les modèles théoriques qui ont été
développés pour la recherche des causes de la migration rurale et ensuite
les études qui ont eu lieu.
1.
Les modèles
La plupart des modèles développés dans les différentes études ont
été repris et résumés par 1. Masser (1974).
Selon Masser (p. 7), on peut
identifier quatre (4) groupes de modèles:
Les modèles en terme de système
Les modèles économiques
Les modèles d' interaction spatiale
Les modèles séquentiels
Le premier groupe de modèles développés par Akin L. Mabogunje
considère la migration comme prise entre deux niveaux de contrôle d'un
système.
D'une part il distingue les éléments du système qui contrôlent le
flux migratoire des campagnes vers les villes et d'autre part les éléments
du système qui influencent la transformation socio-économique des migrants

..
."1
34
i
!
les faisant passer d'un statut de paysan à celui de citadins.
Selon
l'auteur, l'étendue et la direction du mouvement à l'intérieur du système
est en rapport avec un environnement dynamique qui implique un développement
économique, technologique et social avec la diminution de l'isolement des
zones rura l es au fur et à mesure qu 1 e11 es sont intégrées dans l' économi e
nationale et aussi cet environnement influence les aspirations des habitants
des zones rurales.
Ainsi, le contrôle rural affecte la dimension et la composition
du flux de la migration à travers les institutions sociales et économiques
telles la structure de la famille et la force de l'économie rurale.
Par contre le contrôle urbain du système opère à travers l'emploi
et le logement non seulement pour influencer le taux des immigrants mais
aussi celui de ceux qui retournent au village.
Le second groupe de modèles dits économiques est caractérisé
par Todaro et Rempel.
Fondamentalement économique, ce modèle met les deux
secteurs de l'économie (rurale et urbaine) dans une perspective spatiale
qui tient compte des différents niveaux de revenus dans les diff~-
rentes régions.
Selon Todaro, la décision de migrer de la part d'un rural, est
fonction de deux variables:
l'écart de revenus entre la ville et la campa-
gne et la probabilité d'avoir un emploi en ville.
Le troisième groupe de modèles proposés par Masser est celui
d'interaction spatiale.
Ce modèle repose sur trois hypothèses de base:

UNIYEllSlT1 Dl MO.'iTIlIAl
3S
L'hypothèse de la gravitation postule que le mouvement d'une ré-
gion à une autre est fonction de la population des régions impli-
quées et est en relation avec la distance entre ces régions.
L'hypothèse des facteurs "pus h et pull " stipule que la migration
est une réponse à l'attraction de la région la plus favorisée
sur la région la moins favorisée.
L'hypothèse des coûts et bénéfices considère la migration comme
un investissement personnel qui est relié a la productivité po-
tentielle des différents niveaux des ressources humaines.
Le quatrième groupe de modèles est le modèle séquentiel propo-
sé par Ridell et Harvey.
Ce modèle'étudie la migration comme un processus a
long terme de redistribution de la population à travers lequel les migrants
sont intégrés. étape par étape dans le secteur moderne de l'économie.
Les
jeunes adultes auraient tendance. dans une première étape. a quitter le
village pour une petite ville. et par la suite. ils quitteraient celle-ci
pour une ville plus grande encore. celle-ci étant plus favorisée sur le
plan économique.
2.
Critiaue de ces différents modèles
Le premier groupe de modèles de caractère anthropologique semble
mettre l'accent sur les individus aux dépens des groupes.
Or la migration
et par conséquent l'exode rural suppose un mouvement de masse.
Ce qui n'est
pas spécifié dans l'approche de ce modèle.
Le modèle suppose aussi un
système global à travers lequel les zones rurales viendraient a disparaître
avec l'urbanisation de l'économie dont les secteurs modernes envahissent
les zones rurales.

U"IVERSIT! DE 'IO"TR[ \\l
36
Le second modèle quant ~ lui pèche par économisme.
En effet, il
semble vouloir expliquer le phénomène migratoire à partir seulement de deux
causes qui sont l'écart de revenu entre la ville et la campagne et la pro-
babilité d'avoir un emploi en ville. Ainsi sans ces deux variables économi-
ques, il n'y aurait jamais migration. En plus, la variable probabilité d'em-
ploi ne recouvre rien qui soit défini en termes opérationnels pour savoir
ce qu'elle signifie au moins dans le contexte précis du modèle de Todaro.
Il faut aussi signaler que le migrant ne peut pas toujours être
déterminé à quitter sa campagne uniquement pour des raisons d'ordre écono-
mique.
Des paysans pauvres peuvent ne pas émigrer comme le cas des Sassari
du Sénégal (Samir Amin, 1974, p. 30) alors que d'autres beaucoup plus riches
émigrent à grande échelle, tel le cas des Sérères du Sénégal (Samir Amin,
1974, p. 30).
D'autres exemples pourraient aussi contredire ce modèle.
A
partir de cette constatation, nous pouvons dire que ce modèle que propose
Todaro est incomplet.
Les variables économiques sont peut-être une condi-
tion nécessaire à l'émigration.
Mais elles ne peuvent pas suffire à elles
seules à déterminer un individu ou un groupe d'individus à migrer.
En ce qui concerne le groupe de modèles d'interaction spatiale,
une première remarque nous conduit à préciser que, contrairement à ce que
ces modèles proposent ou suggèrent, la migration n'est pas un simple dépla-
cement spatial d'individus ou de groupes d'individus.
Et on ne saurait l'y
réduire en terme d'interaction entre deux régions données.
En ce sens, la
première hypothèse fondée sur la notion de distance nous semble boiteuse.
Car la distance ne peut accélérer ni ralentir la migration.
Elle ne peut

U~IV[RSIH Dl "'O~TR( \\L
37
donc pas être prise comme une cause.
De nos jours, avec le développement
des moyens de transport, la distance jouera de plus en plus difficilement.
Ce serait réduire aussi la décision à migrer à un simple coup de tête dû au
fait qu'une ville soit proche du lieu d'habitation d'un rural.
Que la migration se fasse à courte ou à longue distance, elle
obéit à d'autres critères que celui de la distance.
La seconde hypothèse
réduit les facteurs "push et pull" à des éléments figés sans corrélation
entre eux.
Elle supposerait que les facteurs agissent les uns après les
autres.
Or il y a une interaction simultanée dans l'action conjuguée de
ces facteurs qui en plus s'inscrivent dans un ensemble.
L'hypothèse des coûts et bénéfices ne rend pas du tout compte de
la réalité complexe de la migration.
Elle rationalise la décision à migrer
privilégiant par là-même "l'homo oeconomicus" ignorant ainsi des facteurs
aussi importants que l'éducation et l'âge.
En ce qui concerne le modèle séquentiel, sa faiblesse réside
d'abord dans sa prétendue redistribution de la population et son inévitable
intégration dans l'économie moderne.
Dans ce cas. on ne peut plus parler
de migration. d'émigration mais simplement d'urbanisation de la population.
Et même la diminution de l'isolement de façon progressive ne rend pas du
tout compte des causes de la migration.
Ce modèle qui étudie la migration par étapes successives est
insuffisant dans la mesure où il tente vainement de suivre l'itinéraire du
migrant.
Utilisé dans l'étude de la mobilité professionnelle. il aurait

38
une portée certaine.
Mais en aucun cas, il ne peut nous fournir une étude
intéressante quant à la recherche des causes de la migration.
L'utiliser
dans ce cadre ne nous donnerait que des causes de seconde importance re-
liées directement aux comportements individuels, après que ces individus
aient déjà migré au moins une seule fois.
Pour nous, il y a migration
quand et quand seulement un individu ou un groupe d'individus quitte son
lieu d'origine pour aller ailleurs, et dès le seul instant où il le quitte.
Les étapes qu'il peut faire de ville en ville ne font qu'ajouter à son
histoire de migrant d'autres raisons aux causes premières.
Et ce sont
celles-ci qui nous intéressent.
Les modèles dans leur ensemble nous semblent incomplets.
Le modèle de type systémique ne nous situe pas sur les possibles relations
entre les niveaux de contrôle urbain et rural.
Quant au modèle écono-
mique, il néglige en grande partie les facteurs non économiques dont il
ne mentionne pas l'existence, s'il ne les réduit pas purement à des
calculs de rationalité économique comme le modèle d'interaction spatiale.
Le modèle de type séquentiel, quant à lui, ne nous renseigne en aucun
cas sur les causes de la migration de celui dont il recense les diffé-
rentes étapes.
Tous ces modèles, quoique intéressants, ne permettent pas une
compréhension effective du phénomène à partir de ces causes - chaque
groupe de modèles ne considérant qu'un facteur impliqué.
C'est donc en
partie qu'ils peuvent nous aider dans la recherche des causes de l'exode
des jeunes adultes ruraux de Côte d'Ivoire.

39
Mais essayons de voir dans quelle mesure les recherches effec-
tuées à la base de ces modèles et d'autres réflexions peuvent nous situer
sur les causes du phénomène en infirmant ou en confirmant certains présup-
posés des modèles.
3.
Les travaux de recherche
- Les causes d'ordre économique
Un grand nombre d'études effectuées dans les pays du "Tiers
Monde" et particulièrement en Afrique concluent en général que les causes
d'ordre économique sont les plus déterminantes dans la migration des jeunes
adultes ruraux vers les villes.
Ca l dwe 11 (1969), dans une étude faite au Ghana et ayant pour
titre:
African Rural Urban migration (The movement ta Ghana's towns)
arrive à cette constatation.
Dans une enquête à deux volets conduite aussi
bien à la campagne qU'à la ville, il a pris le foyer comme unité d'obser-
vation.
Les absents des villages qu'il retrouve en ville lui ont permis
d'obtenir une estimation de la migration.
Dans les résultats de recherche,
à la question de savoir pourquoi beaucoup de gens vont à la ville, les rai-
sons d'ordre économique à savoir:
avoir du travail salarié, gagner beau-
coup d'argent, se procurer des biens matériels ont été évoquées par 88% des
répondants de la campagne contre 82% de ceux de la ville (p. 89).
Aussi, pour Caldwell, le facteur le plus important qui crée un
courant migratoire de la campagne vers la ville est le contraste d'occupa-

40
tion entre la ville et le village.
Dans ce dernier, la plupart des gens
sont des cultivateurs alors que dans la première ils ne le sont pas, et
presque tous les travailleurs de la ville sont payés en argent liquide
alors que les cultivateurs ne le sont pas (p. 59).
Une grande partie des résultats de cette enquête confirme la
thèse de la rationalité économique en ce sens que 60 à 75% des ruraux et
des citadins ont avancé comme raison principale de leur migr.ation le besoin
d' avoi r du trava il sa l ari é et de l'argent, en même temps que ceux qui sont
restés au village et ceux qui veulent y rester avaient aussi comme raison
principale la possession d'une ferme ou d'un lopin de terre (p. 102).
Dans cette étude, nous pouvons aus s i rema rquer que l 1 hypothèse
des facteurs "pull" de l a vi 11 e et des facteurs "pus h" de l a campagne a
été largement vérifiée.
Ce même accent mis sur les facteurs "pull et push" ressortit dans
les travaux de John Connell et son équipe.
Dans une étude intitulée
"Migration from rural areas" réalisée dans 47 villages en Inde en 1976, ils
concluent que le taux de la migration d'un village semble être influencé
par cinq caractéristiques de l'économie villageoise:
la disponibilité de
la terre, le cycle des saisons agricoles, la structure des occupations
villageoises, la situation du village par rapport ~ la ville et surtout le
niveau de vie (p. 202).
Une mauvaise distribution de la terre, une mauvai-
se saison, une diversification déséquilibrée du travail à l'intérieur de la
terre accentuent le taux de migration.
Ce taux est à son tour accentué
selon le bas niveau de vie au village.

41
L'accroissement du taux de migration est aussi fonction de l'in-
satisfaction des paysans de leurs conditions de travail.
Heijnen (1968,
p. 88) note dans son étude en Tanzanie que ce que veulent les migrants en
premier lieu, c'est un travail bien payé.
Pour eux, travailler signifie
avoir un salaire régulier, sûr, assez élevé, qui de leur avis ne peut être
atteint en milieu rural.
Pour Heijnen donc, l'accroissement du flot des migrants est prin-
cipalement dû à l'insatisfaction des gens dans les zones rurales en face
de leurs revenus qu'ils comparent aux salaires relativement élevés des gens
des milieux urbains.
Dans ce cas présent, le paysan établit une relation
entre la zone rurale et la zone urbaine.
Ce qui fait dire à Joseph Gugler
(1978, p. 51-52), dans une recherche théorique basée sur une revue de la
littérature sur l'urbanisation en Afrique de l'Ouest, que la cause prédo-
minante de la migration rurale vers les villes est d'ordre économique.
Etant donné les besoins d'argent liquide, la décision du paysan d'aller
chercher du travail salarié peut être analysée en terme d'une comparaison
entre ses possibilités économiques telles qu'il les perçoit dans son milieu
rural et dans un emploi en ville.
C'est dire que le paysan soupèse et
évalue les possibilités économiques dans les deux milieux dans sa prise de
décision de migrer.
Cette inégalité des possibilités de travail salarié entre la
campagne et la ville comme cause de migration est aussi constatée en Amé-
rique Latine par Mario Rabirosa (1971, p. 63).
Il situe, lui, la racine
du courant migratoire qui se développe en Amérique Latine, dans l'inégalité

42
croissante entre les grands centres urbains, les métropoles d'une part et
le reste des villes et les zones rurales des pays d'autre part.
Et parti-
culièrement, il la situe dans la concentration croissante des activités éco-
nomiques qui ont cours dans ces nations, dans les premiers, et qui font dé-
faut dans les seconds. Cette inégalité fait référence à la perspective d'in-
teraction spatiale entre la ville et la campagne où la migration en vue de
l'obtention d'un emploi corrobore l 'hypothèse de 1. Masser (1975), qui
constate en Ouganda (1975, p. 80) que les mouvements généraux de travail se
dirigent des régions où les salaires sont bas vers les régions où ils sont
élevés.
Le migrant serait donc déterminé par une maximisation de ses
revenus futurs.
Ce sur quoi Michael Todaro (1971) met l'accent dans la
recherche des causes de la migration en Afrique Tropicale.
Il soutient que
les facteurs économiques sont les seuls qui provoquent la décision de
migrer.
Il s'agit selon lui, de l'existence de grands écarts entre les
salaires payés aux travailleurs urbains et ceux que reçoivent les ruraux.
A niveau de qualification égale, selon l'auteur, les travailleurs urbains
ont des salaires supérieurs à ceux de la campagne.
Ce qui pour lui est un
facteur déterminant dans la décision d'émigrer.
A cela s'ajoute aussi le
degré de probabilité qu'a un migrant de trouver un emploi en ville.
Il dit
notamment (p. 429) que si l'on ne tient pas compte de la variable de pro-
babilité il est extrêmement difficile d'expliquer comment la migration
peut se poursuivre et souvent s'accélérer malgré l'existence d'un chômage
urbain déjà appréciable et de plus en plus étendu.
Pour lui, les gens
émigrent en fonction des possibilités d'emploi qu'ils envisagent en ville.

U",IVfRSI T[ Of MO"TR[·\\L
43
[lest en somme d'après lui, la combinaison et l'interaction de
ces deux variables - la disparité de revenu effectif entre la ville et la
campagne et la probabilité d'obtenir un emploi urbain qui déterminent le
rythme et l'ampleur de l'exode rural en Afrique Tropicale où il prend
souvent l'allure d'une fuite devant la pauvreté des villages (Franque-
ville, 1971, p. 173).
Ces idées de Todaro ont été en partie reprises par G. Christopher
(1976) dans son étude sur les causes de la migration de la campagne à la
ville en Côte d'Ivoire.
Pour lui, les jeunes ruraux quittent la campagne
pour la ville parce qu'-ils ne peuvent pas se faire de l'argent en tant que
travailleurs agricoles (p. 58) compte tenu de la législation du salaire
minimum qui, à catégories égales, favorise celui qui travaille en ville
dans le secteur moderne.
Ainsi les jeunes adultes qui sont instruits dans
une certaine mesure et qui peuvent lire et écrire le français sont ceux
qui, selon la plus grande probabilité, migreront.
Ils sont attirés par les
plus hauts salaires que l'on peut obtenir dans le secteur moderne ou dans
les emplois publics (p. 62).
En considérant ces facteurs économiques comme causes fondamenta-
les de la migration, certains auteurs y glissent une note nuancée.
Ainsi,
Michel cité par Gugler (1978) introduit une transition vers les facteurs
non-économiques de la migration.
Car pour lui, bien qu'il reconnaisse
l'importance des facteurs économiques, il suggère toutefois qu'il faut
faire une différence entre les conditions nécessaires et les conditions
suffisantes de la migration (p. 55).
Pour lui, les facteurs économiques

U"'\\'ERS'H DE .'IO"TRE·\\l
44
apparaissent comme une condition nécessaire, mais ils ne peuvent pas en eux-
mêmes être une condition suffisante de la migration.
En d'autres termes,
si les besoins économiques de la migration rurale ne sont pas présents, il
est improbable qu'elle se produise, mais si les conditions économiques sont
présentes, la migration peut ne pas arriver jusqu'à ce qu'un événement dans
la vie personnelle de l'individu précipite les choses et déclenche sa
décision d'aller à la ville.
En conclusion sur les facteurs économiques, cela signifie que ces
derniers ne peuvent pas à eux seuls expliquer les causes de la migration
rurale.
C'est pourquoi d'autres auteurs proposent de tenir compte des
facteurs culturels et psychosociologiques.
- Les facteurs liés à la culture et au fait urbain
Dans l'ensemble des écrits recensés, il apparaît clairement que
les études ayant mis l'accent, d'une manière systématique, sur les causes
d'ordre culturel de la migration n'existent pratiquement pas.
A la diffé-
rence des causes économiques qui ont donné lieu à des théories et des mo-
dèles, il n'yen a pas dans le cas des causes d'ordre culturel.
Causes
explicatives du phénomène, elles sont regroupées au sein de l'ensemble dit
non-économique.
Toutefois certains chercheurs tel Caldwell (1969) ont essayé de
les fair-e ressortir.
Ainsi dans son étude réalisée au Ghana ci-dessus ré-
férencée, les répondants ont avoué quitter le village ou vouloir le quitter
parce qu'il y manquait des distractions tels les discothèques, les cinémas,

U"i!V[RSlrl D[ ~IO"irR[\\l
45
les bars, etc ... (p. 102).
A cela ils ont aussi ajouté le poids de la
tradition qui se manifeste à travers le conflit des générations.
Ces
conflits créent un malaise dans le village soumis à une gérontocratie in-
supportable pour les jeunes adultes.
Pour ces derniers, le chemin de la
liberté et de l'émancipation passe par la migration vers les villes où le
contrôle social est moins rigoureux, où l'on se perd dans l'anonymat et où
d'autres valeurs sociales ont cours.
La migration est donc, selon Gug1er
(1978, p. 52) un recours facile pour certains individus dont la position
dans la communauté rurale est devenue difficile et insoutenable (par exem-
ple du fait qu'il est accusé de meurtre ou d'adultère).
Car, poursuit-il,
autrefois, il était envoyé dans un autre village.
Aujourd'hui par contre,
la ville lui offre un refuge tout prêt.
Balandier in Samir Amin (1974) souligne aussi qu'au niveau de
l'individu, certaines motivations commandées par un désir d'ascension so-
ciale qu'il ne peut réussir en milieu rural sont souvent causes de migra-
tion.
Dans le contexte africain, souligne Jean Pitié (1979, p. 111), il
faut tenir pour cause de la migration la transformation des structures
sociales traditionnelles consécutives des phénomènes dits de "détribalisa-
tion" eux-mêmes dûs au fait global de l'acculturation provoquée par le
contact de la civilisation de l'occident et des cultures orales tradition-
nelles africaines.
Avec ce que cela comporte d'effritement du pouvoir des
chefs coutumiers, des structures familiales enfin d'un relâchement des
relations sociales qui ne permettent plus un contrôle efficace sur les
jeunes adultes du clan ou du lignage.
La migration dans ce contexte est
parfois facilitée par la présence de parents déjà installés en ville comme

46
le remarque Caldwell (1969) au Ghana.
Ce qui donne lieu à ce qu'on appelle
la migration en chaîne où la migration elle-même devient une cause de
migration.
Ces facteurs que l'on pourra i t cl asser dans le groupe des fac-
teurs de répulsion de la campagne s'ajoutent à ceux d'attraction de la
ville.
Ceux-ci sont nés du fait urbain et des sous-cultures urbaines qui
sont diffusées par les mass média en direction du monde rural.
En gros, le
style de vie urbain avec ce que cela comporte comme loisirs et plaisirs
peut avoir une influence déterminante sur la décision du jeune adulte a
quitter la campagne pour la ville, note Simmons (1978, p. 74).
Aussi dans
l'étude de Caldwell (1969), les facteurs d'attraction urbaine que citaient
les répondants comprenaient aussi bien le fait même d'être citadin, avec ce
que cela comporte de considération sociale, que les loisirs en ville.
Car
pour les jeunes adultes:
"It is a way of winning respect and increasing
one's prestige amongst one's own people" (p. 89);
ce à quoi ils ajoutent
le désir de profiter des facilités et des services que fournit la ville.
Les causes dues au fait culturel et au style de vie urbain, quoi-
que pouvant être multiples n'ont pas jusqu'à maintenant été l'objet d'at-
tention suivie dans l'appréciation du phénomène de la migration.
Ce qui a
fait écrire a Mangalam in P. Shaw (1975, p. 16) que, s'il est important de
considérer les éléments socio-démographiques et socio-économiques qui
répondent aux ques t i ons te 11 es:
"Qui sont l es mi grants et pourquoi il s
migrent?";
il est aussi important de considérer l'influence des composan-
tes du système culturel, de la personnalité et aussi les composantes du

U~IVfRSIH Df ·\\jO>,;TR[\\l
47
système social avec les pressions que ce système exerce dans le cadre de
la migration.
Dans les pages qui suivent, nous allons parcourir les études
qui ont mis l'accent sur un aspect culturel particulier, à savoir le systè-
me de socialisation par l '~ducation à travers ses composantes scolaires.
- Les facteurs d'ordre éducatif de la migration
Il s'agit ici de faire le point sur les écrits qui prennent en
considération l'éducation formalisée en tant que facteur de causalité de
la migration rurale.
Des chercheurs comme Caldwell (1969), Heijnen (1968)
et G. Christopher (1976) nous en donnent une idée.
Ils ont établi une
relation significative entre l'école et le niveau d'instruction d'une part
et la migration d'autre part.
Caldwell (1969) pose la relation en ces termes (p. 60-61).
Cer-
tainement, dans la migration, la plus importante question à prendre en con-
sidération est le rôle de l'éducation, spécialement, l'école formelle.
Il
souligne que la décision de la grande majorité des jeunes adultes parmi ceux
qui projettent d'aller ~ la ville n'est pas un simple produit de leur jeu-
nesse car selon lui, l'école en elle-même oriente les jeunes vers la vie ur-
baine et notamment vers les emplois urbains. Caldwell rapporte également que
son répondant projetait d'aller à la ville "because he had been to school"
ou qu'il avait décidé de rester au village "because he had not been to
school". C'est la même constatation qui découle des études de John Connell
(1976, p. 205). En examinant les niveaux scolaires des migrants, son équipe
conclut que la grande majorité des migrants sont illettrés. Mais bien qu'il

Ur>IHRSIH Of "'O"TR(·\\l
48
en soit ainsi, la scolarisation des ruraux accroît la plupart du temps la
propension des gens à migrer. Car dit-il, l'éducation en elle-même conduit
les élèves insatisfaits hors du village. Aussi, toujours selon lui, même si
tous ceux qui vont à la ville ne sont pas lettrés, les 3/4 de ceux qui
savent lire et écrire ne restent pas à la campagne.
Il établit donc une
corrélation positive entre l'école et une propension croissante à la migra-
tion.
Celle-ci reflète l'usage des qualifications dues à l'éducation comme
moyen de sélection pour les emplois urbains et le haut niveau de revenus
que ces emplois offrent par rapport aux revenus ruraux.
S'il en est ainsi,
conclut-il, un accroissement du taux de scolarisation implique un accrois-
sement de la migration.
L'éducation dans cet ordre peut donc être considérée comme une
cause significative de la migration.
D'autres études effectuées en Afrique, telle celle de Heijnen
(Tanzanie, 1968) aboutissent presqu'aux mêmes résultats.
Son projet centré
sur le rôle et les effets de l'école primaire dans une société moderne
africaine l'a amené à un jugement pessimiste sur l'école.
Pour lui (p. 94),
l'éducation que les jeunes ont reçue leur a fait du tort;
puisque dans
leur manière de penser non encore mûre, ils croient que ce qu'ils savent
est assez pour leur permettre un emploi à la ville.
Aussi, n'ayant pas la
volonté de travailler aux champs, ils vont à la ville où ils créent un
énorme problème de chômage.
L'école est donc blâmée parce qu'elle contri-
bue à créer la situation.
L'auteur explique aussi l'influence de l'école
dans la migration par la perception que la société a de l'éducation et de

UNIVERSITE DE "10'iTRE·\\l
49
l'école.
A ce propos, il écrit (p. 91) que la faible estime pour l'agri-
culture résulte du type d'éducation donnée par l'école.
En vérité, pour
la plupart des parents, l'école était et est encore la seule voie pour
assurer une vie en dehors de l'agriculture, pour leurs enfants d'échapper
à l'économie des "3 hectares et une houe".
En fait, conclut l'auteur par
une note inspirée de Hunter (1967), l'éducation n'est pas la cause du
problème, mais le rend visible.
Ici donc, le but de l'éducation tel qu'il est perçu par la socié-
té explique en partie la migration des jeunes vers les villes.
Louis Roussel (1970, p. 266), quant a lui, considère l'école
comme cause principale de la migration à partir des études qu'il a faites
en Côte d'Ivoire.
Il trouve une corrélation positive entre le niveau
d'instruction et la probabilité de sortir du milieu rural.
Il explique
que dans la société ivoirienne, compte tenu des caractéristiques socio-
économiques propres aux milieux urbains et ruraux, en raison également du
modèle d'enseignement, une liaison étroite existe entre le niveau d'ins-
truction et la propension à quitter le village.
Les résultats de ses tra-
vaux ont démontré que plus de 60% du groupe d'!ge de 15 à 29 ans titulaires
du certificat d'études primaires avaient quitté le milieu rural en 1968.
Aussi pour l'ensemble des groupes d'!ge étudiés 1/10 parmi les analphabètes
quittent le village alors que pour les titulaires du certificat d'études
primaires, la proportion est six fois plus forte.
Pour lui, l'école est
en fait l'instrument le plus déterminant dans le transfert massif des
jeunes générations des campagnes vers les villes.
Il est secondé dans ses

50
conclusions par G. Christopher (1976, p. 45) pour qui le rôle que le sys-
tème éducatif ivoirien joue dans l'accélération de l'exode rural est impor-
tant.
Il concerne principalement les valeurs culturelles et les qualifica-
tions à orientation urbaine inhérente au système ivoirien d'éducation où
l'accent est mis, dans une langue étrangère, sur les qualifications intel-
lectuelles et théoriques qui n'ont aucune signification pour une large
proportion d'étudiants.
C'est dire aussi avec Mohamed Diawara (1973, p. 4)
que la vie paysanne est absente de l 'horizon scolaire, ce qui introduit
une coupure culturelle avec le monde traditionnel.
Cette inadaptation de
l'enseignement au monde rural conduit donc à une migration vers la ville
par ceux qui l'ont subi.
De ce qui précède, il semble évident que l'école joue un rôle
d'importance dans la décision du jeune à quitter la campagne pour la ville.
Si nous prenons nos trois groupes de causes de la migration
telles que perçues par les différents auteurs, une typologie peut en être
déduite.
Les causes d'ordre économique seraient donc:
l'obtention d'un travail salarié à la ville
le désir de gagner de l'argent
le désir de se procurer des biens matériels
la différence des occupations en ville et à la campagne
le manque de terre ou sa mauvaise distribution
le mauvais cycle des saisons agricoles
le bas niveau de vie dû à la pauvreté du village

UNIVERSIH DE "IONTRLIl
51
l'insatisfaction des conditions de travail en milieu rural
l'inégalité des possibilités de travail salarié entre la campagne
et la ville
l'inégalité des revenus entre la ville et la campagne
le grand écart entre les salaires payés à la ville et ceux
payés A la campagne.
Les causes d'ordre culturel de la migration rurale seraient aussi:
l'absence de distractions et de loisirs à la campagne
le style de vie urbain
la perception de la vie en milieu urbain
l'influence des mass média
la transformation des structures sociales traditionnelles
le conflit des générations
l'effritement du pouvoir des chefs coutumiers
le relâchement du contrôle social sur les jeunes
le désir d'ascension sociale
la présence de parents en ville.
Les causes d'ordre scolaire seraient donc, elles, dues:
a la perception de l'école par la société
a l'instruction comme moyen de promotion sociale
au taux élevé de la scolarisation
~ l 'orientation urbaine des programmes scolaires
au contenu théorique de la formation
~ l'accent sur les qualifications intellectuelles
A la négligence des valeurs rurales au profit des valeurs urbaines
A l'absence du monde traditionnel de l 'horizon scolaire.

UNIVERSIH DE o,10"TRf,\\l
52
En résumé, de cette recension des écrits, il se dégage une re-
marque d'ensemble.
Le nombre d'études sur chaque groupe de causes est en
proportion égale à l'accent qui a été mis sur chacun de ces groupes.
Il
en résulte que les causes d'ordre économique prennent le pas par rapport à
l'ensemble des autres types de causes.
Certains auteurs en ont fait
les causes uniques et fondamentales de la migration.
C'est le cas de
Todaro dont l'approche est alors partielle.
D'autres par contre ont recon-
nu et suggéré une interdépendance des causes économiques et des causes non
économiques.
Cette approche a été celle adoptée par Caldwell et Gugler.
En ce qui nous concerne, à la vue de cet ensemble théorique, nous pouvons
dire que nous avons assez d'éléments à notre disposition pouvant nous
permettre d'esquisser un canevas de recherche.
Ce canevas tiendra compte non seulement des modèles et des hypo-
thèses ci-dessus discutés, mais suggérera une approche particulière.
Cette
approche que nous voulons systémique tentera une compréhension du phénomène
de l'exode rural dans ses attributs africains en général et ivoiriens en
particulier.
Ainsi, elle prendra en compte les différents facteurs struc-
turels dans leurs relations réciproques afin de les inscrire dans l'organi-
sation sociale qui les imprègne de ses attributs particuliers en fonction
de son histoire propre.

UNIV[RSIH D[ .\\\\O',aRl.\\l
Chapitre IV
Le cadre de recherche

UNIVlRSIH Dl "O"TRl \\l
L'exode des jeunes adultes ruraux de notre pays vers les villes
est devenu, par son évidence même, une préoccupation nationale.
Témoins,
les déclarations des responsables ivoiriens.
Pour nous il s'agit ici de
savoir le pourquoi de cette situation.
C'est pourquoi la présente étude
se propose de trouver des éléments de réponses au problème de recherche
qu'il nous plaft de rappeler ici.
Quelles sont les causes relevant des
structures de l'organisation sociale de notre pays qui déterminent les
jeunes adultes ruraux, à l'exception de ceux qui vont à l'école, à quitter
les zones rurales pour les villes?
Pl us i eurs études ont tenté de cerner l es causes de l 1 exode rural
à travers le monde, en Afrique et en Côte d'Ivoire.
Des chercheurs comme
Todaro (1971) en ont donné une explication économique.
Certains comme
Roussel (1970) concluent au facteur école comme cause explicative de l'exo-
de rural.
D'autres tels que Caldwell (1969), Gugler (1978), bien que lui
reconnaissant une explication d'ordre économique, proposent de tenir compte
des facteurs non économiques dans l'analyse de l'exode rural.
Pour mener à bien leurs travaux, des chercheurs ont mis au point
certains modêles théoriques.
Il s'agit, rappelons-le, des modêles en terme
de systême proposé par Mabonguje, du modêle économique défendu par Todaro,
du modèle d'interaction spatiale soutenu par Masser et celui dit du proces-
sus migratoire suggéré par Ridell.

55
Le cadre théorique que propose alors la présente étude s'inspire
de l'analyse des écrits et de la discussion des modèles opérée précédem-
ment.
Mais à la différence de ces derniers qui nous semblent partiels et
incomplets parce qu'ils envisagent le phénomène de la migration sous un
angle statique qui ignore sinon totalement, du moins en partie, l'existence
d'autres facteurs explicatifs, notre étude se propose d'adopter une appro-
che systémique dans l'analyse des causes du phénomène.
Cette approche
situera les causes de l'exode rural dans un système de facteurs structurels
qui entretiennent des relations entre eux.
Elle fournira ainsi une compréhension globale du phénomène à
travers les attributs particuliers de ce système de facteurs, laissant par
la même occasion une porte ouverte pour d'autres recherches sur la migra-
tion en Afrique.
1.
L'hypothèse
A partir de ces considérations, la présente étude se charge de
vérifier l 'hypothèse que voici:
"Il y a une relation entre l'exode rural des jeunes adultes de
notre pays et les structures de l'organisation sociale de ce pays".
L'expression "structures de l'organisation sociale" recouvre la
structure socio-économique, le système culturel en liaison avec le fait
urbain et rural et la situation de l'enseignement en Côte d'Ivoire.

UNIVERSITf D( .\\10.'nl((,,\\l
f-'""""""""----"...-----~------
......UTl....._.""'Qi=""""""""--......-.......5Jd--e...-.----.... ..
.;;...,..;..;,;;.;.;..;;,.;..~.;.;.;;.;.;.;.;.,_"""l
1
56
De cette hypothèse générale, nous pouvons tirer trois hypothèses
spécifiques que nous formulons comme il suit:
10
Il y a une relation entre l'exode rural des jeunes adultes et la
structure socio-économique de notre pays.
Par structure socio-économique,
nous entendons l'ensemble constitué par les éléments suivants et les rap-
ports que ces éléments entretiennent dans le cadre de l'exode rural.
Il
s'agit notamment:
de l'appréciation du travail de la terre et de l'emploi salarié
dans leurs relations réciproques;
de la situation de l'emploi en milieu rural et en milieu urbain
et la relation que cette situation développe;
de l'appréciation des revenus en milieu rural et en milieu urbain
quant ~ leur suffisance ou
insuffisance.
20
Il y a une relation entre l'exode rural des jeunes adultes d'une
part, le système culturel en cours dans notre pays et le fait urbain et
rural d'autre part.
Par système culturel, nous entendons l'ensemble cons-
titué par les éléments de la culture moderne promus par les distractions,
les loisirs, les médias avec en première le couple radio-télédiffusion.
Quant au fait urbain, il est défini par la sous-culture urbaine qui
sécrète un style de vie et la perception que les gens en ont.
Le fait
rural est ici défini par l'ensemble des éléments culturels qui structurent
l 'horizon social traditionnel du monde paysan.
30
Il y a une relation entre l'exode rural des jeunes adultes et
l'éducation formal isée par l'enseignement de l'école.

57
Cette express i on recouvre général ement ce que l'on appe 11 e le
système scolaire avec ses différents attributs:
but de l'école, taux de
scolarisés et programme d'enseignement.
Cette hypothèse générale et ses hypothèses spécifiques seront
vérifiées en prenant en compte deux groupes de variables que nous classe-
rons en variables dépendantes et en variables indépendantes.
A la suite de cette vérification nous essayerons d'établir une
typologie des causes de l'exode rural à partir des raisons qui nous seront
fournies par ceux-là mêmes qui vivent l'exode rural.
Ceci nous conduira
alors à établir aussi une typologie des besoins d'aide et d'apprentissage
de ces jeunes adultes face aux problèmes de l'exode rural.
2.
La description des variables
2.1
La variable dépendante
La propension à aller à la ville ou à rester à la campagne
constitue notre variable dépendante.
On la trouve sous le terme général
de migration, d'émigration ou d'exode rural.
Elle a aussi pour synonyme
départ à la ville.
C'est elle qui sera expliquée par les variables indépendantes.
2.2
Les variables indépendantes
Elles peuvent être groupées en deux catégories:
les variables
indépendantes individuelles et les variables indépendantes de type
structurel.

Les variables individuelles seront:
le sexe, l'âge, le niveau
de scolarisation et l'occupation professionnelle.
Les variables indépendantes de type structurel sont:
- le systême culturel et le fait urbain et rural
- le systême scolaire ou l'éducation formalisée
- la structure socio-économique
- la ville et le village
a)
Les variables indépendantes individuelles
. Le sexe
Comme l'on pourrait sien douter, cette variable aura deux catégo-
ries:
masculin
- féminin
. L'âge
C'est une de~ variables principales sur laquelle repose la struc-
ture explicative de la variable dépendante.
Elle nous renseignera sur la
tranche d'âge la plus touchée par le phénomêne migratoire.
La limite inférieure d'âge sera de 16 ans alors que la limite
supérieure se situe â 35 ans
(cf. p. 63).
A cause de l'imprécision relative de cette variable que lion
pourrait rencontrer dans les milieux où se déroule la recherche, nous
avons préféré subdiviser cette variable en classes.
Ainsi aurons-nous

59
deux classes d'âge:
16-25 ans
26-35 ans
. Le niveau de scolarisation
L'on cherche à savoir son effet sur la ou le jeune adulte dans
sa décision à quitter ou non la campagne.
Un niveau élevé de scolarisation
est-il nécessairement ou non cause de migration?
Pour pouvoir contrôler
cette variable et si possible établir ou non une relation avec l'exode
rural, le niveau de scolarisation sera résumé en nombre d'années passées
dans une institution de formation, quelle qu'elle soit et dont la durée de
formation peut être prise en consi~ération.
Ainsi, aurons-nous quatre niveaux de scolarité des interviewés:
1/
0 année ou analphabète
2/
3-7· ans
31
8-10 ans
4/
11-18 ans
. L'occupation professionnelle
L'intérêt de cette variable réside dans la définition qu'elle
peut nous donner du statut soci al du répondant.
Car 1a fonction ou 1 'occu-
pation peut favoriser ou non le départ à la ville ou même inciter leur
retour au village.
Pour en savoir davantage sur elle, nous la mesurerons
à partir de la disponibilité de revenu.
LIon trouvera alors des interviewés
avec revenu: AR, et des interviewés sans revenu: SR.

60
b)
Les variables indépendantes structurelles
. Le système culturel et le fait urbain et rural
L'analyse de cette variable nous permettra de situer la tendance
de l'influence que pourraient avoir ou non les mass média dominées par la
radio, la télévision et la presse écrite, à travers leurs programmes à
orientation urbaine.
Elle nous révélera aussi l'impact possible ou non
effectif des loisirs modernes tels le cinéma, les discothèques, les plai-
sirs urbains en général sur le comportement décisionnel des jeunes adultes
dans le processus de la migration.
En même temps, cette variable pourra
nous indiquer la limite d'interaction' entre la culture moderne de type
occidental etles éléments culturels traditionnels quant à la détermination
des jeunes adultes à émigrer ou à rester à la campagne.
L'élément culturel
moderne sera spécifié dans sa conception urbaine dans la mesure où de plus
en plus les villes développent en elles leurs propres sous-cultures qui
sécrètent un style de vie propre aux citadins, ce qui les différencie du
reste du pays.
Par rapport à cette sous-culture urbaine, il se développe
une perception répandue à la campagne et qui peut à un moment donné être
déterminant dans la décision à la quitter de la part du jeune adulte.
Car
la ville est perçue en général comme le lieu des "bonnes choses de la vie".
Il nous faudra donc connaître ce que représente une ville à l'esprit d'un
jeune rural et ce que cette ville a de particulier à ses yeux si tant est
qu'elle devient attrayante pour lui.

U",IVERSITE OE'IO"TR(·\\l
61
. Le système scolaire
A travers les principaux éléments de l'éducation formalisée par
l'enseignement de l'école, il s'agira de voir si l'école est ou n'est pas
un facteur explicatif de l'exode rural.
Cette variable sera alors contrô-
lée à travers ce que nous désignons sous le terme global de situation de
l'enseignement en Côte d'Ivoire.
Les éléments de cette situation peuvent
être repérés à partir de la perception qu'ont les jeunes adultes de l'école,
c'est-à-dire son but réel pour eux, en fonction duquel il pourra être pos-
sible de déterminer le taux de scolarisation.
Car le but tel qu'il est
perçu peut provoquer ou non un engouement pour une scolarisation massive
qui, à un moment donné, peut avoir une relation avec l'exode rural.
Le
dernier élément à prendre en considération c'est le contenu des programmes
d'enseignement.
Il s'agira à ce niveau de voir si le contenu des program-
mes peut influencer un jeune adulte pour son départ à la ville, ou pour
l'amener à rester à la campagne.
Il est, dans cette optique, possible
qu'un programme axé sur le milieu rural aura moins d'impact sur la décision
du jeune à quitter la campagne.
Par contre un programme à travers lequel
transparaissent les valeurs urbaines peut être considéré comme susceptible
de motiver le jeune adulte à quitter la campagne pour la ville.
L'orienta-
tion du contenu des programmes scolaires pourra donc nous situer quant à
une corrélation positive ou négative entre l'école et l'exode rural .
. La structure socio-économique
Pour mener à bien l'étude de cette variable, il nous faudra la
mesurer en fonction du travail de la terre et de l'emploi salarié dans un

62
premier temps.
Savoir comment les jeunes ruraux apprécient le travail de
la terre et le travail salarié, pourrait être un indicateur dans la migra-
tion.
En ce sens que,un rapport entre les deux modes de travail peut être
ou non un facteur qui pourrait agir sur la décision du jeune adulte.
En
plus de l'appréciation du travail rural et de l'emploi urbain, il nous fau-
dra insister sur la disponibilité ou la non disponibilité des emplois sala-
riés en milieu rural en relation avec le milieu urbain.
La situation de
l'emploi dans les deux zones peut nous conduire à une relation indicative
de la migration, dans un sens ou dans l'autre à travers cette relation.
Il en sera de même de l'appréciation des revenus en milieu rural quant à
leur suffisance ou leur insuffifance par rapport à ceux du milieu urbain.
L'ensemble des relations que ces trois éléments entretiennent
entre eux d'une part et avec l'exode rural d'autre part nous fournira
ainsi une analyse complète de la structure économique et de son impact
positif ou négatif sur les jeunes adultes ruraux.
On saura alors si c'est
la situation économique de la campagne qui pousse les jeunes adultes à
aller vers les villes ou si ce sont les villes par la présence en leur sein
de facteurs économiques attrayants qui déterminent les jeunes adultes ou
encore si ce sont les deux milieux qui agissent en même temps sur les jeu-
nes adultes et qui les poussent à la migration .
. La variable zone urbaine
Elle sera représentée par la ville d'Abidjan, la capitale du
pays.
Il s'agira ici de savoir si elle influence les jeunes adultes ruraux
et comment elle le fait.
En tant que variable qui détermine le lieu

=
U~IVrRSlTr Of'lO."TRf·\\1
,
.'PP&Uic
. 5
.
1
63
1
d' arri vée des jeunes adul tes dans 1e processus de 1 1 exode rural, 1a zone
urbaine est avec l'âge et la zone rurale, une des variables sur laquelle
sera bâtie la structure explicative de la migration .
. La variable zone rurale
Son importance n'est pas à démontrer.
Elle sera composée de
villages.
Ceux-ci, cadres témoins de la migration, seront situés dans la
région de Gagnoa dans le centre Ouest du pays.
L'étude de cette variable
nous situera sur le contenu de relations entre l'exode rural et les diffé-
rents villages retenus, entre ces villages et les centres urbains environ-
nants.
Et si ces relations sont établies, comment elles s'expliquent et
pour quoi elles s'expliquent ainsi.
Les différentes variables que nous venons de décrire ont été
souvent mises en rapport avec les jeunes adultes.
Mais comment définis-
sons-nous "le jeune adulte"?
Oans le contexte de notre recherche, nous le définissons comme
toute personne de sexe masculin ou féminin, âgée de 16 ans au moins et
qui nia pas encore dépassé l'âge de 35 ans.
Nous nous référons pour cette
définition au décret no 72 du droit des associations, pris par le Ministère
de la Jeunesse, de l'Education Populaire et des Sports de notre pays.
Ce
jeune adulte dont nous parlerons dans cette étude est celui qui n'est plus
dans une institution de formation reconnue par l'Etat ivoirien.
C'est ce jeune adulte qui donnera son appréciation personnelle sur
l'exode rural tel qu'il le vit.
Et à partir des éléments de cette appré-

UNIVERSITE DE \\IQ.NTR(.\\l
ciation de ce phénomène, nous établirons quant à nous une typologie
des raisons qui non seulement expliquent l'exode rural mais aussi tradui-
sent les attitudes et les besoins d'aide et d'apprentissage de ces jeunes
adul tes dans le contexte de l'exode rura l .
Le cadre théorique dela présente étude tiendra donc son origina-
lité non seulement dans l'approche systémique qu'elle propose pour la re-
cherche des causes de l'exode rural, mais aussi et surtout dans l'appréhen-
sion et la définition des besoins d'aide et d'apprentissage du jeune adulte
tels que celui-ci les révèle à travers les raisons évoquées pour son départ
à la ville.
Pour satisfaire aux fondements théoriques de cette recherche,
nous constituerons un échantillon formé uniquement de sujets répondant à
la définition du jeune adulte précitée.
A ces sujets nous soumettons deux
types de questionnaires contenant deux sortes de questions:
un groupe de
questions fermées et un groupe de questions ouvertes.
Cette population
regroupera une quarantaine de sujets (hommes et femmes) dans la tranche
d'âge de 16 à 35 ans.
Nous les prendrons pour moitié à la campagne et pour moitié
à la ville.
Pour les sujets des villes, les quartiers d'Abidjan abriteront
cette partie de notre échantillon.
Les critères de choix de cette ville sont simples:
Abidjan,
capitale du pays se situe dans la zone sud du pays qui est relativement

65
plus riche que le reste du pays.
Elle constitue la principale ville du
pays du
point de vue démographique et économique.
Connaître l'influence
possible de cette ville sur les jeunes adultes ruraux ajoute une note
particulière à la recherche des causes de la migration.
Pour les sujets de la zone rurale, certains villages du pays
rural de Gagnoa, dans le Centre Ouest du pays seront les lieux de résidence
de cette portée de notre échantillon de commodité.
Pour arriver à satisfaire au cadre théorique de cette recherche,
nous devons adopter une méthode pour la collecte des données et de leur
tra itement.

lJ"IVERSITE DE \\IO"TRE·\\l
Chapitre V
Les éléments de méthodologie

UNIVERSITE DE MONTRE·\\l
L'objectif principal que vise cette recherche, il convient de le
rappeler, présente deux aspects importants.
Il s'agit d'une part, d'iden-
tifier les causes d'ordre structurel de l'exode des jeunes adultes ruraux
de Côte d'Ivoire vers les villes de ce pays.
Et d'autre part d'appréhender
et de définir à travers l'analyse de ces causes, les besoins d'aide et
d'apprentissage de ces jeunes adultes dans le cadre d'une intervention
andragogique.
Pour satisfaire à cet objectif à l'aide de résultats concrets,
nous avons adopté un ensemble de techniques et de procédés et nous avons
aussi entrepris certaines démarches pour la collecte des données relatives
à cet effet.
Cet ensemble d'actions qui ont guidé le long processus de la
prise de l'information et l'organisation des résultats de cette recherche.
nous le désignons sous le terme général de méthode dont les éléments
constituent la présente partie.
L'ensemble de ces éléments se définit principalement par l'éta-
blissement de deux types de questionnaires, l'un pour la ville, l'autre
pour la campagne.
Ce sont ces questionnaires qui ont servi pour le pré-
test à l'Institut National de la Jeunesse et des Sports, et pour la prise
des informations sur le terrain (en ville comme à la campagne selon
l es cas).

68
Cet ensemble se définit également par l'organisation et le
traitement de ces informations disparates recueillies sur le terrain aux
fins d'analyse.
1.
Les questionnaires
En fonction de nos différentes variables et des lieux de re-
cherche, nous avons élaboré deux types de questionnaires.
L'un destiné
aux sujets de la ville, l'autre destiné aux sujets de la campagne.
Au niveau des variables indépendantes individuelles, ces deux
types de questionnaires présentent les mêmes questions qui interrogent les
sujets sur leur âge, leur sexe, leur scolarité, leur religion, l'ethnie
à laquelle ils appartiennent et leur occupation professionnelle ainsi que
leur état civil.
Par contre, au niveau des variables indépendantes structurelles,
chaque type de questionnaire présente ses caractéristiques propres.
C'est ainsi, que pour la ville, nous avons un questionnaire qui
présente un schéma unique de quatorze (14) questions.
Celles-ci, évoquent,
dans leur mesure de l'exode rural, le temps de présence en ville des
interviewés, les motivations qui ont guidé le choix d'Abidjan comme ville
d'immigration et les raisons qui les y ont poussés.
Elles cherchent
également à cerner les problèmes rencontrés par les nouveaux arrivés et
les solutions adoptées ~ l'occasion, mais aussi les solutions souhaitées.
Elles interrogent aussi les interviewés sur les conditions possibles de
leur retour à la campagne.

U~'IVERSIH DE "10~TRL\\l
69
Quant au questionnaire de la campagne, il est bâti autour de
trois thèmes centraux qui constituent nos variables structurelles.
La variable système culturel et fait urbain et rural.
Elle est
mesurée à l'aide de vingt trois (23) questions.
Celles-ci se dirigent
selon trois axes de recherche:
le phénomène culturel moderne dans ses
rapports avec la migration des jeunes ruraux;
l'influence possible ou
non des mass média (presse parlée, écrite, audiovisuelle) en milieu rural;
la perception de la vie urbaine en milieu rural.
La variable système scolaire.
Elle est mesurée a l'aide de
sept (7) questions centrées principalement sur le but de l'école, ses
objectifs et ses programmes qui dans l'ensemble peuvent déterminer ou non
la migration d'un jeune adulte.
La structure socio-économique quant à elle, fait l'objet de
quatorze (14) questions.
Les différents éléments que contrôlent ces ques-
tions à travers les jeunes adultes ruraux sont l'appréciation du travail
de la terre et du travail salarié, le revenu de l'un ou de l'autre dans
leur proportion, les causes de la non existence d'emplois salariés à la
campagne, les conditions économiques nécessaires au maintien des jeunes
adultes ruraux dans leurs villages.
Ces instruments que sont nos questionnaires ont d1abord été
testés à l'Institut National
de la Jeunesse et des Sports à Abidjan pour
être utilisés sur le terrain proprement dit.

U~IVE~SIH DE \\10';TR[·\\l
70
2.
Le pré-test a l'Institut National de la Jeunesse et des Sports
2.1
Le cadre de trava il
Le cadre de cette pré-expérimentation, l 'INJS, est un établisse-
ment d'enseignement supérieur.
Il rel~ve du Ministêre de la Jeunesse, de
l'Education Populaire et des Sports de Côte d'Ivoire.
Dans sa vocation, cet Institut est destiné a la conception et a
l'exécution de la politique de formation des cadres et animateurs de la
jeunesse, de l'éducation populaire et des sports au sein du département
ministériel qui en assure la tutelle.
Dans cette optique, il forme:
les maîtres adjoints et les maîtres d'éducation permanente et
d'éducation physique et sportive
les conseillers d'éducation permanente et d'éducation physique
et sportive
les professeurs d'éducation permanente et d'éducation physique
et sportive
les inspecteurs de la jeunesse, de l'éducation populaire et des
sports.
Cet établissement pourvoit aussi a la formation continue de ces
différents agents de l'Etat et ceux ~ui lui sont confiés par des organis-
mes agrées par l'Etat.
Le choix de l 'INJS comme cadre de notre pré-test se justifie a
notre avis par le fait qu'il est le seul centre de formation d'éducateurs

71
d'adultes en Côte d'Ivoire et une institution du ministère auquel nous
appartenons.
En plus, nous avons été guidé par un préjugé favorable en
matière de coopération, dans la réalisation de notre première expérimenta-
tion, aussi bien au niveau des étudiants qu'~ celui des professeurs.
Ce pré-test a donc pu être réalisé grâce ~ l'amabilité et au
concours d'un professeur d'éducation permanente qui nous a cédé ses heures
de cours et une classe d'étudiants.
2.2
L'organisation du pré-test
Cette pré-expérimentation qui a eu lieu le 7 janvier 1983, a
visé un double but.
D'un côté, tester la compréhension générale et la pertinence du
contenu de nos instruments que sont les questions.
De l tautre, nous familiariser au maniement de ces différentes
questions aussi bien dans leur présentation que dans leur traduction afin
d'en acquérir la maîtrise.
Par commodité, nous avons choisi dix (10) étudiants de première
année de IIMaîtrise d'Education Permanente ll •
Leur âge varie entre 16 et 27
ans.
Ils ont été répartis à parts égales entre les deux sexes:
cinq (5)
filles et cinq (5) garçons.
La classe elle-même comptait trente (30)
étudiants.
Ils ont été constitués en deux groupes de cinq individus
chacun.
Un groupe simulait les sujets de la ville, l'autre représentait
ceux de la campagne.

U.",I\\'lR5IH Dr\\lO.",TRl.\\l
.._ ......._ _• =
_
..
• •
!
T
72
Personnellement, l'auteur s'est occupé des représentants de la
campagne alors que son collaborateur, en l'occurrence, le professeur d'édu-
cation permanente, prenait en charge ceux qui simulaient les éléments de
la ville.
Compte tenu du temps assez court dont nous disposions (quatre
heures:
de 14h à 18h) nous avons travaillé de la façon suivante.
Dans chaque groupe que chacun de nous avait, trois personnes sur
cinq ont été effectivement interrogées.
Deux garçons et une fille pour le
groupe "campagne", deux filles et un garçon pour le groupe "ville".
Soit
un total de six (6) individus dont trois (3) filles et trois (3) garçons
sur les dix (10) choisis.
Les quatre autres restant ont rempli seuls leurs questionnai-
l'es comme nous le leur avions demandé.
Les résultats de ce pré-test nous ont amené aux constatations
qui suivent:
Le questionnaire de la "campagne" beaucoup plus long que celui
de la "ville" a exigé plus d'informations de la part des étudiants et plus
d'explications de notre part.
Ce qui démontre qu'au niveau même de ces
étudiants dont le niveau de scolarité est équivalent à celui du baccalau-
réat de l'enseignement secondaire soit 13 à 14 années de scolarité,
il existait une difficulté de compréhension.
1
~--

l'''IVERSIT( DE ,>\\O:-;TRf ·\\l
73
Dans le cadre des réponses aux questions par les deux groupes,
il s'est avéré que les étudiants ont été plus bavards pour répondre aux
questions qui ne les concernaient pas directement que pour celles qui leur
exigeaient un avis ou une position individuelle définie.
Pour certaines questions qui voulaient des réponses précises,
les étudiants faisaient plutôt des commentaires au lieu de donner des
réponses brèves et concises.
Les questionnaires que nous avons donné a remplir par les étu-
diants sans notre intervention, l'ont été toutes a moitié, étant donné le
manque de complément d'informations de la part de l'équipe que le professeur
et nous, formions à l'occasion.
En conclusion, le pré-test nous a permis de juger de la compré-
hension de nos questions et de la pertinence de leur contenu.
Cette com-
préhension et ce contenu n'ont pas été des attributs de facto dans le
cadre de ces questions.
Ce qui est contraire à ce que nous pensions au départ, convaincu
que nous étions de la simplicité, à notre avis, apparente et de la clarté
de ces différentes questions.
Cette pré-expérimentation nous a amené a nous rendre compte du
fait que, l'information demandée aux répondants, si nous la voulions préci-
se et sans ambiguYté, obligeait non seulement a expliquer la question
posée, mais encore a la traduire littéralement.
Par la aussi nous dévelop-

lJ.'.;IVERSIH Dl .\\tO'.;TR[·\\L
74
pions une certaine habitude de travail tout en acquérant une habileté à
manipuler nos questionnaires.
Fort des leçons mais aussi des échecs de ce pré-test, nous avons
alors organisé d'une manière systématique, la collecte de l'information
sur le terrain.
3.
La cueillette des données sur le terrain
3.1
La couverture administrative
Pour nous éviter d'éventuels ennuis d'ordre administratif et
politique dans le cadre de notre recherche, et aussi pour notre sécurité
personnelle durant cette collecte de l'information sur les lieux d'enquête,
nous avons sollicité une couverture administrative auprès de notre minis-
tère de tutelle (Ministère de la Jeunesse, de l'Education Populaire et des
Sports).
Nous l'avons obtenue sans difficulté de la part de monsieur le
directeur des affaires administratives et financières de ce Ministère.
Cette couverture administrative a consisté en un ordre de mission
qui a été établi en notre faveur.
Cet ordre signalait d'une part, notre
appartenance au département ministériel qui en était l'émetteur et d'autre
part nous autorisait à faire notre recherche doctorale dans le cadre de
son programme de formation.
Couvert par cette immunité administrative circonstantielle, nous
avons alors commencé l'organisation et la collecte de nos données.
D'abord
à Abidjan, ensuite à l'intérieur du pays dans la région de Gagnoa.

L:"I\\'lRSITI Dl \\10"TRl·\\l
75
3.2
Les entrevues à Abidjan
3.2.1
.la-'pcé2.?caliQ.n
Pour mener à terme ces entrevues et en réussir la conduite telle
que nous le souhaitions, nous nous sommes fait aider par deux jeunes per-
sonnes.
Une fille et un jeune homme, tous les deux âgés respectivement de
28 ans et de 26 ans.
La jeune fille qui est titulaire d'une maîtrise en
droit de l'Université Nationale de Côte d'Ivoire, est sans emploi.
Quant
au jeune homme, il se destine à l'enseignement primaire après avoir obtenu
un baccalauréat d'enseignement secondaire des lycés et collèges.
Le choix de ces deux personnes nous a été dicté par le sérieux
que nous leur connaissions, depuis longtemps et surtout par la disponibilité
dont elles ont fait preuve à notre endroit.
Et c'est bénévolement qu'elles
nous ont prêté leurs services durant cette enquête en milieu urbain.
Afin de les familiariser au travail qui les attendait, nous les
avons initiées au processus des entrevues pendant deux journées.
Durant
ces deux moments de rencontre que nous avons eus avec elles, le programme
de travail a porté sur les points suivants:
10
Information générale sur le but et le cadre de notre recherche.
20
Etude et discussion du questionnaire de la ville en vue de sa
compréhension effective.
0
3
Mise au point de consignes d'administration du questionnaire, ré-
sumé comme i 1 SUl t ? 1": ntenti on de chacun de ces jeunes adul tes.

76
- Se présenter comne jeune adulte intéressé par les problêmes
d'autres jeunes adultes comme lui.
- Expliquer sa présence dans le cadre d'une "étude" universitaire
et non d'une "enquête" afin de ne pas éveiller une méfiance
quelconque aussi bien de la part des personnes à interviewer,
que de .celle de leur entourage.
- Prendre un temps de quinze à vingt minutes avant l'interview
pour discuter de généralité avec le candidat ou le groupe s'il
y a lieu, avant de présenter le questionnaire.
- Garantir l'anonymat des réponses sur la base d'une morale pro-
fessionnelle qui guide cette recherche afin de mettre en
confiance chaque interviewé.
- Prendre le maximum de temps qu'il faut (jusqu'à 4 heures) pour
conduire une entrevue en expliquant au maximum les questions
qui le nécessitent.
- Ecrire lisiblement chaque idée-réponse par ligne sous chaque
question.
- Remplir un questionnaire par personne et par entrevue.
40
Remise d'une photocopie de notre ordre de mission et de notre
carte professionnelle à chacun des deux collaborateurs.
A la fin des deux séances de préparation, nous avons laissé A
chacun le soin de prendre trois (3) ou quatre (4) questionnaires, à titre
de test sur le terrain.

UNIVERSITE DE "O"<TR[·\\l
77
Nous nous sommes séparés pour nous retrouver deux jours après,
au domicile de l'auteur pour faire le point des essais.
Cette mise au
point n'a pas révélé de difficultés particulières.
A l'examen, les questionnaires ont été correctement remplis.
Ce
qui a été source de satisfaction pour nous par rapport aux consignes que
nous avions données.
Ces questionnaires d'essai et ceux du pré-test ne figurent pas
parmi les questionnaires remplis et qui ont donné lieu aux informations
présentées dans le cadre des résultats de cette recherche.
3.2.2
La conduite des entrevues
La prise de l'information à Abidjan a duré quatre semaines.
Elle s'est déroulée du jeudi 13 janvier 1983 au mercredi 9 février de la
même année.
Le choix des interviewés s'est fait par commodité.
Et étant
donné que l'agglomération d'Abidjan est divisée en dix (10) communes,
l'équipe de travail s'est imposé la discipline de conduire au moins quatre
entrevues par commune et dans au moins huit (8) des dix (10) communes.
Le guide d'entretien contient quatorze (14) questions, l'admi-
nistration de ces questions s'est faite au moyen d'interviews semi-structu-
rées avec prise systématique de notes sous les questions au fur et à
mesure que les interviewés ont répondu a chaque question.
Compte tenu du fait que nous habitions tous les trois dans des
communes différentes, nous nous retrouvions tous les trois (3) jours au
domicile de l'auteur pour faire à chaque fois le bilan des entrevues de

U"-'IVERSIT( DE "O'IR[·\\l
78
l'équipe.
Durant ces rencontres, certaines entrevues jugées incomplètes
ou mal conduites ont vu leurs questionnaires détruits.
A la fin de la période que nous nous sommes fixée, soit les qua-
tre semaines. l'équipe a réalisé vingt et un (21) entrevues jugées com-
plètes.
Autrement dit. nous avons retenu vingt et une (21) personnes comme
échantillon de commodité à entrevues complètes.
Il faut préciser que pour
ces personnes retenues. aucun rappel aux répondants n'a été fait.
3.2.3 Les difficultés rencontrées
Elles ont été principalement dues à la non coopération des per-
sonnes que nous avons rencontrées ainsi qu'à leur indisponibilité.
Nous
avons essuyé beaucoup de refus systématique de la part de certains jeunes
adultes à se soumettre à nos questions.
La plupart des raisons invoquées
pour justifier leur refus. relèvent de plusieurs ordres de faits.
Certains
invoquent des motifs politiques à l'instar de celui qui a dit à un membre
de l'équipe:
"je voudrais la paix, car je n'ai aucune envie d'avoir des
problèmes avec les autorités politiques et administratives de ce pays".
D'autres. par contre, se sont débarrassés de nous en ces termes:
"je n'aime pas les enquêtes" ou bien "je niai pas le temps".
Un autre genre de difficulté s'est situé dans l'abandon d'entre-
vue en cours.
L' i ntervi ewé vous lance alors, amer:
"Je ne peux pl us
continuer.
Je suis fatigué des questions".
Une entrevue est ainsi annulée
et un guide d'entretien détruit.
Une journée de perdue en plus.

79
Dans les entrevues conduites à terme, certains interviewés nous
ont signalé leur manque d'idées en réponse à certaines questions dans
lesquelles nous leur demandions cinq points (idées ou raisons).
La condui-
te des entrevues en ville suite aux différentes difficultés signalées
ci-dessus a été moins facile que la conduite de celles que nous avons menées
à la campagne.
3.3
Les entrevues à l' i ntéri eur du pays
Dans la collecte de nos données, nous avons bénéficié de la
collaboration d'un agent du Ministère de la Jeunesse de l'Education Popu-
laire et des Sports en service à la direction régionale de ce ministère
qui a son siège au chef lieu de la province qui est la ville de Gagnoa.
Avec cet agent, nous avons adopté la même procédure d'initiation
aux entrevues comme avec nos collaborateurs d'Abidjan.
Toute fois, il
faut souligner que la longue expérience professionnelle de cet agent qui
est un éducateur d'adulte, nous a beaucoup favorisé l'organisation de la
collecte de nos données dans ce pays rural de Gagnoa.
Non seulement il était rompu aux techniques d'enquête, mais
aussi il connaissait assez bien le milieu dans lequel nous avons travaillé.
Il nous a ainsi permis de faire le choix des villages d'enquête sur la
carte géographique de la région, en fonction de nos critères de base.
Ces
villages devaient tous être situés au delà de 15 km de la ville de Gagnoa

U.... 'VFRSITf DE MO .... TR[ \\L
80
et en dehors des grands axes routiers qui sillonnent la région.
Nous avons
retenu onze (11) villages pour mener notre enquête.
3.3.2
La conduite des entrevues
Elle s'est effectuée du mardi 15 février 1983 au samedi 12 mars
1983.
Soit environ quatre semaines comme dans le cas de celle de la
ville.
Etant donné que pour la circonstance nous disposions d'un véhi-
cule de fortune, nous nous sommes établis à Gagnoa ville.
Et cela, même
si nous faisions de 40 à 100 km de pistes par jour.
Notre résidence en
ville s'explique d'abord par un désir de respecter les moments de travail
de notre collaborateur en dehors des jours qu'il nous a consacrés, mais
aussi par notre volonté d'éviter de nous faire des hôtes imposés dans les
villages d'enquête si nous devions y passer la nuit.
Ainsi, nous y allions
trois jours par semaine soit les mardi, vendredi et samedi.
Mardi, dans cette région comme dans d'autres, est un jour ordi-
naire de travail.
Et dans cette période de culture du riz où les travaux de
préparation des champs battent leur plein, nous voudrions simplement nous
faire une idée des jeunes adultes présents dans les villages ce jour là.
Si non, nous nous seri ons contentés du vendredi, jour du "grand marché" où la
plupart des villages sont animés parce que les habitants "font" leur
marché.
Samedi aussi a été retenu comme jour d'enquête compte tenu du
fait que, précédant le dimanche "jour du petit marché" il est le jour
durant lequel les jeunes adultes organisent leurs activités de distraction.

L:"IVfRSJT( Dl \\\\O"TRl·\\l
_~~~~"-",,--.~.~~_.- ~-=_~,.,......,,..,.=-_..-.._=~~....P.nt"'.;,c:;;a~~'-"'O
81
Soit les préparatifs des soirées dansantes de ce jour, soit ceux des ren-
contres de football des dimanches après-midi.
Avec notre guide d'entretien qui comportait cinquante et une (51)
questions dont sept (7) des variables individuelles et quarante quatre (44)
pour les variables structurelles, le contact des interviewés s'est effec-
tué à partir d'un choix de commodité.
Au total, nous avons réalisé vingt deux (22) entrevues complètes
dans les onze (11) villages retenus.
Voici, en abrégé, la descr,iption d'une journée de travail dans
un vill age.
A notre arrivée dans un des villages retenus sur notre carte de
travail, nous demandons à être conduits chez le chef de village.
S'il s'a-
vère qu'il est absent, c'est sur le chef du comité villageois du PDCI
(Parti démocratique de Côte d'Ivoire, parti unique du pays) que porte notre
sollicitude.
A défaut de ces deux personnes et le cas échéant, nous cherchons
à rencontrer le responsable des jeunes du village.
Dans sept (7) villages sur onze (11) nous avons été reçus par
les chefs de villages eux-mêmes.
Dans les quatre (4) autres cas, ce sont
les présidents des comités du parti qui nous ont reçus.
Dans l'ensemble,
et suivant en cela la coutume de la région, notre accueil s'ouvre par une
procédure de satisfaction aux règles de bienséance.
Cette petite cérémonie

U"IVERSIT[ Of MO~';TR[\\l
82
inclut la présentation d'un service de breuvage (eau, bière, vin de palme,
etc ... ) la présentation des nouvelles par nos hôtes et la requête des
nôtres.
Quand nos hôtes et nous, avons satisfait aux règles de bienséan-
ce, l'auteur expose alors l'objet de la visite de l'équipe et le cadre
dans lequel s'inscrit notre travail.
Cela est immédiatement suivi par une
présentation sommaire de l'auteur et de son collaborateur ainsi que de
notre accompagnateur.
Après toute cette cérémonie, notre hôte principal, soit le chef
de village ou le président du comité du parti
nous confie alors à un
autre, avec lequel nous organisons notre séjour dans le village.
Celui-ci, sur notre demande, fait venir cinq ou dix jeunes
adultes, filles et garçons.
Après un bref entretien à bâtons rompus avec
ce groupe de jeunes adultes, nous prenons avec nous deux volontaires qui
nous servent d'interviewés.
Les entrevues sont conduites séparément.
Chacun de nous deux
ayant son candidat, loin de l'autre à deux ou trois maisons plus loin.
Certains jeunes adultes qui le désirent, assistent à l'entretien mais
aucun d'entre eux n'y participe activement.
Nous terminons les entrevues
après trois ou quatre heures selon les cas.
Après, l'équipe et le groupe
de jeunes adultes se retrouvent au domicile de l'organisateur de la
réception.

UNIV[RSITE D[ '-IO"TR[ ·\\L
83
Ce moment est celui durant lequel nous répondons à notre tour,
aux questions qui fusent de tous les côtés de la part des membres du
groupe.
Ces questions sont centrées essentiellement sur la finalité de
notre étude, l'attente de résultats concrets, le jour du prochain passa-
ge, etc ...
Lorsque nous "demandons la route" le responsable de l'organisa-
tion nous conduits chez l 'hôte principal afin de lui dire au revoir et le
remercier de l'accueil.
Ainsi, arrivés dans un village aux environs de
lüh du matin, nous en repartions vers 4h de l'après-midi.
En remarque, nous soulignons que les entrevues dans ces villages
ont été conduites dans d'excellentes conditions.
Une journée de travail
pour notre équipe a été une occasion d'échange d'idées et d'apprentissage
enrichissante.
Particulièrement nous avons été marqués par l'accueil très franc
empreint de l 'hospitalité quotidienne qui caractérise le peuple de cette
région.
Nous ne savons pas si l'approche que nous avons utilisée pour
pénétrer ce milieu qui nous était inconnu a été la bonne.
Nous nous
demandons aussi s'il y avait d'autres moyens pour faciliter au mieux notre
travail de chercheurs.
En tout cas pour nous, une journée de travail de recherche dans
une ville est une expérience, nous l'avons vécue à Abidjan.
Par contre,
une heure de séjour dans un village est tout un apprentissage.
Et l'expé-

84
rience et l'apprentissage qui caractérisent toute recherche exigent de la
part du chercheur une qualité fondamentale:
la transparence qui signifie
aussi ouverture d'esprit, adaptabilité et vigilance sur le terrain de
recherche.
Durant cette collecte des données, aussi bien à Abidjan que dans
les villages, les interviews ont été essentiellement conduites en français.
Pour ceux qui parlaient très peu le français, cas des analphabètes, nous
avons eu recours, selon les cas, ~ un scolarisé pour nous se~vir d'inter-
médiaire et de traducteur.
4.
Le traitement des données
Afin de nous permettre une analyse judicieuse des données re-
cueillies sur le terrain, nous avons adopté une procédure de travail pour
rendre ces données plus claires et donc plus accessibles à la compréhension.
Cette information globale que constituent ces données du terrain a donc
été ordonnée autour des différentes variables indépendantes de recherche.
4.1
Les données recueillies au niveau des variables
indépendantes individuelles
Pour chaque groupe de questionnaires remplis, ceux de la ville
et ceux de la campagne, nous avons établi un tableau récapitulatif des
informations sur chaque groupe d'interviewés.
Chaque tableau présente deux entrées. En ligne, sur un plan hori-
zontal et par le haut, la liste des interviewés numérotés de 51 ... à 521

85
pour les interviewés de la ville, de Cl ... à C22 pour les interviewés de
la campagne.
Et en colonne, en vertical de haut en bas, nous avons inscrit
les différentes variables l'une après l'autre:
sexe, âge, scolarité, re-
ligion, ethnie, état civil et occupation professionnelle.
Si bien que, prenant par exemple l'interviewé 13 de la campagne,
en suivant la colonne dans laquelle il est inscrit, nous lisons toutes les
informations le concernant dans le cadre de chaque variable.
Ces deux types de tableaux terminés, nous les avons regroupés
dans un seul tableau général récapitulant toutes les informations des qua-
rante-trois (43) interviewés.
De ce tableau général nous avons extrait cinq (5) petits tableaux
pertinents donnant les informations sur les quarante-trois (43) interviewés
de la manière suivante:
Tableau
Répartition selon l'âge et le lieu de résidence.
Tableau 2 Répartition selon l'âge, le sexe et le lieu de résidence.
Tableau 3 Répartition selon l'âge, l'occupation professionnelle et le lieu
de résidence.
Tableau 4 Répartition selon l'âge, le sexe, la scolarité et le lieu de
résidence.
Tableau 5 Répartition selon l'âge, le sexe, la scolarité, l'occupation
professionnelle et le lieu de résidence.
L'information recueillie au niveau des variables indépendantes
structurelles n'a pas été organisée de la même manière.

86
4.2
L'information recueillie au niveau variables
indépendantes structurelles
Nous l'avons organisée en commençant par les questionnaires de
la ville pour terminer par ceux de la campagne.
Et le traitement des don-
nées a suivi les opérations suivantes.
a)
Pour chaque idée énoncée que nous avons transcrite sous chaque
question durant la collecte des données, nous avons établi une
fiche numérotée portant l'identification de l'interviewé.
Nous
avons ainsi établi des fiches par question et par variable de
recherche pour les deux types de questionnaires.
b)
Dans chaque cas, les fiches sur lesquelles ont été inscrites des
idées semblables, c'est-à-dire, présentant le même sens ont été
regroupées.
c)
Ces idées semblables réduites après analyse de contenu nous ont
amené à la constitution d'items.
d)
Les items ayant des caractéristiques communes ont ensuite été
regroupés pour un second niveau d'analyse.
e)
Réduits à leur tour, ces items ont donné naissance aux sous-
catégories.
f)
Les sous-catégories ainsi constituées ont été rassemblées en
fonction de leurs significations communes.
g)
A partir de ces sous-catégories, nous avons déterminé des catégo-
ries générales explicatives regroupant des sous-catégories.
h)
Nous avons alors soumis notre classement à un jury en vue de la
vérification de la pertinence du classement des énoncés en sous-

U"I\\'[RSITE Dl '10.\\:Hf ·\\l
87
catégories selon les différentes catégories et en vue de l'ap-
probation du classement obtenu.
Ce jury était constitué d'un étudiant en Andragogie, notamment en
année de Maîtrise professionnelle, d'abord pour son expérience
pratique en éducation des adultes, ensuite par la connaissance
relative qu'il a de notre thème de recherche et du milieu de
l'enquête;
et aussi d'un linguiste titulaire d'une maîtrise de
recherche dans cette discipline.
Nous avons suggéré à ces deux jurés de se prononcer sur le fond
et sur la forme de notre classement.
Et au besoin, de nous pro-
poser, soit une réformulat~on de notre classement, soit un nouvel
ordre de classement.
Ayant travaillé séparément avec chacun des
membres du jury, la synthèse de leurs remarques et suggestions
nous a permis de faire un classement définitif de ces données.
i)
Cette classification définitive a ordonné les résultats en ta-
bleaux pour chaque question ~ l'intérieur de chaque variable.
Chaque tableau présente:
- les différentes catégories d'énoncés avec le nombre des inter-
viewés qui les ont proposées;
- les différentes sous-catégories;
les différents énoncés avec le nombre des répondants qui s'y
rattachent.
L'analyse de ces tableaux constitue l'étude des résultats.
Dans
le cas de chaque variable, cette analyse est introduite par une présenta-
tion générale descriptive des questions qui concourent aux données de cette
variable.

DEUXIEME PARTIE
L'ETUDE DES RESULTATS

L'hypothèse que vérifient les présents résultats, si nous la
reprenons, se présente de la façon suivante:
"Il y a une relation entre
l'exode rural des jeunes adultes de notre pays et les structures de l'or-
ganisation sociale de ce pays.
L'expression, "structures de l'organisation sociale" recouvre la
structure socio-économique du pays, le système culturel en liaison avec le
fait urbain et rural et le système ~colaire.
De cette hypothèse générale,
découlent trois hypothèses spécifiques qui sont les suivantes:
Premièrement, il y a une relation entre l'exode rural des jeunes
adultes et la structure socio-économique de notre pays.
Deuxièmement, il y -a une relation entre l'exode rural des jeunes
adultes d'une part, le système culturel et le fait urbain et
rural d'autre part.
Troisièmement, il y a une relation entre l'exode rural des jeunes
adultes et l'éducation formalisée par l'enseignement de l'école.
Pour vérifier cette hypothèse générale à travers ces hypothèses
spécifiques, nous avons pris en compte deux groupes de variables.
Une
variable dépendante qui se définit ici comme la propension à aller en ville
ou à rester ~ la campagne.
Dans le cadre de cette vérification, nous la
trouverons sous les termes synonymes de migration, émigration, immigration,
départ en ville, exode rural.

90
Le deuxième groupe est constitué par des variables indp.pendantes
qui sont de deux types.
Les variables indépendantes individuelles qui sont:
le sexe,
l'âge, le niveau de scolarité, la religion, l'ethnie, l'état civil et l'oc-
cupation professionnelle.
Les variables indépendantes structurelles se définissent par
le système culturel et le fait urbain et rural
le système scolaire ou l'éducation formalisée
la structure socio-économique
les lieux de résidence rural ou urbain.
La vérification de cette hypothèse de recherche en fonction de
ces différentes variables a été faite auprès d'un échantillon de commodité
composé de quarante-trois (43) personnes, garçons et filles dont vingt-et-
un (21) en milieu urbain et vingt-deux (22) en milieu rural.
Ces quarante-trois (43) individus répondent effectivement à notre
définition du jeune adulte qui est, du sexe masculin ou du sexe féminin,
dans une tranche d'âge de 16 à 35 ans.
Dans cette partie sur les résul-
tats, nous allons dans un premier temps nous attacher à situer ceux-ci
d'une manière générale.
C'est-à-dire déterminer leur limite et leur portée
d'une part, et d'autre part présenter notre échantillon, c'est-à-dire le
placer dans son espace géographique et le décrire à travers les variables
individuelles afin de déterminer ses caractéristiques propres.

91
Puis, dans un deuxième temps, nous présenterons les résultats
relatifs à notre hypothèse générale de recherche, à savoir la relation
entre l'exode des jeunes adultes ruraux et les structures de l'organisation
sociale de notre pays.
Nous conclurons enfin cette présentation des résultats avec
l'analyse des causes de l'exode rural et la définition des besoins d'aide
et d'apprentissage identifiés au niveau de ces causes.

UNIVERSITl DE MD·'TR(·\\l
Chapitre VI
L'analyse des données

1.
La présentation générale des résultats
1.1
Le contexte des résultats
Les résultats qui font l'objet de 1a présente parti e, s' i nscri-
vent dans un contexte global auquel ils sont intimement liés et à partir
duquel ils devront être envisagés.
Ce contexte évoque principalement les difficultés que nous avons
rencontrées pour mener cette recherche a terme et atteindre l'objectif
proposé dans le projet de recherche.
Ces difficultés qui ont été d'ordre matériel et surtout financier
nous ont contraint à restreindre notre terrain d1enquête et par conséquent
de réduire le volume de notre échantillon projeté.
Alors que nous nous
proposion~ d1interroger quatre-vingt (80) individus dans quatre (4) régions
dont deux (2) urbaines et deux (2) rurales, nous n1avons pu réaliser que
quarante-trois (43) interviews dans deux (2) régions différentes (une
urbaine et une rurale):
Abidjan et le pays rural de Gagnoa.
De ces faits, notre étude est donc limitée sur le plan géographi-
que et l'échantillon peu étendu.
Les résultats que nous présentons ne sont pas représentatifs pour
l'ens.emble des jeunes adultes, aussi bien au niveau dlAbidjan, de celui de
la région du centre ouest qu1à celui de toute la Côte dllvoire.

V,,"'IVERSIH DE "'OSTR[ ·\\l
94
En plus, dans la mesure où notre échantillon a été composé par
commodité, une extrapolation des résultats de cette recherche sur une
grande échelle n'est pas possible.
La généralisation de ces résultats qui
se veut aussi relative slinscrit dans ce contexte limité.
Cependant ces résultats découlent d'une recherche exploratoire,
et les typologies définies constituent, croyons-nous, une hypothèse valable
pour la compréhension du phénomène analysé.
Il faudra alors dans une
autre recherche, vérifier la pertinence de ces typologies dans le but
d'établir une théorie explicative du fait de l'exode rural des jeunes adul-
tes vers les villes, en milieu ivoirien en particulier et africain en
général.
1.2
La présentation des lieux de llenquête
Avant de décrire notre échantillon dans le cadre des variables
individuelles, il convient de présenter sommairement les lieux de résidence
des éléments constitutifs de cet échantillon.
Ce qui nous amènera d1abord
à parcourir la ville d'Abidjan à travers ses quartiers et ensuite à nous
rendre dans le pays rural dont la ville de Gagnoa est la capitale.
1.2.1
!:.a_v.:!.Jle_d~A!?.iQ.J~..n
Située dans la partie sud-est de la Côte d'Ivoire, Abidjan est
une ville du littoral atlantique qui borde notre pays.
Son site est composé principalement de trois éléments qui s'éche-
lonnent du sud au nord sur environ trente kilomètres (30 km).
Il s'agit
du cordon littoral, de l'île de Petit Bassam et les plateaux continentaux
en avance sur la lagune.

UNIVlRSIT[ Dl MO"TRl \\l
95
Avec l'accroissement de sa population, la ville a fait éclater
les structures urbaines de la période coloniale.
Ainsi avec un taux de
croissance annuelle supérieur à 10% (4 à 5% d'accroissement naturel et
11 à 12% d'apport extérieur).
Abidjan qui ne comptait que 48.000 habitants
en 1948, a-t-elle vu sa population passer à 125.000 habitants en 1955.
Estimée à 350.000 habitants en 1965, la population d'Abidjan était de
921.682 habitants au recensement national de 1975, soit dix (10) ans après.
Et en 1979-80, d'après le recensement des deux grandes villes du pays,
Bouaké et Abidjan, celle-ci avait une population de 1.422.436 habitants ..
Ce qui représente 17,36% de la population totale du pays estimée en 1980 à
8.189.549 habitants.
Soit aussi 45;7% de la population totale urbaine du
pays estimée à 3.106.467 habitants durant cette même période.
D'après ces mêmes sources d'information, 57% de la population
d'Abidjan a moins de 20 ans contre 50% pour l'ensemble du pays.
Cette croissance rapide de la population d'Abidjan a donné nais-
sance à de nouvelles zones de peuplement au-delà de l'ancienne ceinture
urbaine constituée par le Plateau au centre, Treichville au sud et Adjamé
au nord.
Ce développement rapide que connaît cette ville a eu pour consé-
quences son découpage administratif en 1980.
Ce qui a érigé le "gran d
Abidjan" en dix (10) communes qui sont:
Abobo, Adjamé, Attiécoubé, Cocody,
Koumassi, Marcory, Plateau, Port-Bouet, Treichville, Yopougon.
La commune la plus dense est celle d'Abobo avec 241.000 habitants.
Elle est aussi peuplée que la deuxième ville du pays, qui est Bouaké avec
269.941 habitants.

96
Si la division communale nous donne une vue d'ensemble de
l'organisation territoriale d'Abidjan pour la maîtrise de son espace, elle
ne rend pas du tout compte de l'occupation sociale de cet
espace urbain.
En fait il faut situer et apprp.hender Abidjan selon trois fonctions que
révèlent trois zones d'occupation qui sont:
la zone portuaire et indus-
trielle, le centre administratif et financier, les quartiers résidentiels.
La zone portuaire et industrielle s'étend principalement aux
environs du canal de Vridi au sud et occupe quelques secteurs de Koumassi
au sud-est et de Yopougon au nord.
Le centre administratif et financier est caractérisé par le
Plateau.
C'est le principal centre commercial du pays.
C'est le siège
des grandes banques et des compagnies commerciales.
Le Plateau symbolise
aussi le centre des décisions politiques et administratives du pays.
C'est
le siège du Parlement, de la Présidence de la République et du Gouvernement.
Il est également le quartier chic dlAbidjan, qui domine les
autres proches ou lointains par la beauté de ses immeubles à plusieurs
étages, ses immenses buildings. ses nombreuses tours rivalisant de hauteur
et dont les fenêtres aux vitres teintées reflètent à longueur de journée
les rayons lumineux d'un ardent soleil de décembre et éblouissent l'obser-
vateur anonyme sous cette canicule de saison sèche.
La troisième zone qui définit l lespace urbain d'Abidjan est
constituée par les quartiers résidentiels.
On peut en distinguer trois
types.

97
Les quartiers riches et aisés clairsemés de maisons individuelles.
C'est l'ensemble constitué de villas somptueuses, bordées de piscines de
toutes dimensions et de jardins privés au qazon soigneusement entretenu.
Le confort de ces demeures déteint en partie sur l'état des larges rues et
la propreté de la voirie.
Ce type de haut standing fait de Cocody-les-
deux Plateaux et Marcory Résidentiel, les quartiers de luxe habités des
nouvelles formations sociales riches du pays.
Quant aux quartiers "d'habitation à loyer modéré" et à apparte-
ments exiqus, ils ont pour locataires les dits "économiquement faibles".
Ces HLM en bandes ou en duplex, style caractéristique d'une architecture
sans inspiration ni imagination, constituent les toits dominants des cités
dortoirs comme Yopougon, Port-Bouet, Koumassi, Abobobo, Attiécoubé.
Dans ces quartiers populeux, l 'herbe s'est substituée au gazon.
Les ordures ménaqères disputent les parcelles de terrains vaques aux
bandes d'adolescents en quête d'aire de jeux.
L'insalubrité due à la
défaillance chronique des services d'assainissement évoque la misère et
côtoie l'insécurité de jour comme de nuit.
Ces quartiers à eux seuls
regroupent la moitié de la population d'Abidjan;
moitié composée d'agents
moyens des secteurs privés et publics. des petits employés, en somme toute
la basse main-d'oeuvre et les assistés sociaux du fonds de solidarité
nationale.
A ces deux premiers types de quartiers, s'ajoutent ceux tradi-
tionnels autour desquels s'est développée l'agglomération du "qrand
Abidjan".
Il s'agit d'Adjamé et de Treichville.

98
L'habitat concessionnaire à cour commune et à enclos domine
dans ces quartiers à la fois lieux d'habitation et centres principaux du
petit commerce de détail.
Ils sont les foyers les plus actifs de cette ville d'Abidjan où
grouille un monde-tout-temps qui les anime dans une atmosphère de fête
villageoise interminable.
Ils décrivent ainsi l'aspect traditionnel de
cette ville et expriment la sensibilité africaine de cette cité moderne
qu'est Abidjan.
Dans chacune des communes, nous avons réalisé deux interviews.
A l'exception du Plateau où nous en avons conduit trois.
Cette présentation sommaire de la ville d'Abidjan ne serait pas
complète sans cette carte synoptique qui nous donne une idée du site, de
la situation et de l'occupation de son espace.

COTE A' IVOIRE
a
E
S
REGION DE
COMMUNES D'ABIDJAN
ABOBO

99
CARTE D' AB IDJAN

UNIVERSITE DE •..\\ONTR[~l
AGO.L1
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100
1.2.2
!:..e~ .'{il1~g~s_d~ 2..aJ:'.s_r~~T~l_d~ ~a~nQ.a
La ville qui donne son nom a cette région est située a 300 km
au nord-ouest d'Abidjan, dans le sud de la grande région géographique
connue sous le terme de Centre-Ouest de Côte d'Ivoire.
C'est une région de forêt qui se caractérise sur le plan clima-
tique par quatre saisons dont deux pluvieuses et deux sèches.
La grande saison des pluies qui s'étend de la mi-avril à la mi-
juillet est suivie par une petite saison sèche qui débute à la mi-juillet
pour s'arrêter à la mi-septembre.
Celle-ci à son tour, cède la place à
une petite saison des pluies qui va jusqu'à la mi-novembre pour alterner
avec la grande saison sèche qui s'étend de cette mi-novembre à la mi-avril.
Ce climat à saisons alternées est un climat chaud et humide
caractérisé par un maximum de pluie en juin avec 200 mm dans cette région
et un maximum de température de 25 à 27 0C entre février et mars.
Sur le plan économique, cette région repose essentiellement sur
l'agriculture.
L'agriculture de subsistance est basée sur le riz pluvial, la
banane plantain et dans une certaine mesure le manioc.
La production
annuelle de riz dans cette région est estimée à 30.000 t par an.
Les principales cultures d'exportation qui dominent dans cette
agriculture sont le café l2000t par an et le cacao 22000t.

101
L'exploitation forestière du bois y est intensive avec la présen-
ce des Sciéries Jacob dans la localité d'Oumé et de la Compaqnie Indus-
trielle du Bois à Gagnoa.
Du point de vue ethnique, la région est principalement occupée
par les Bêté du groupe linguistique Krou qui s'étend sur l'Ouest et le
sud-ouest de la Côte d'Ivoire.
Ce groupe ethnique Qui s'étend sur les
trois Quarts (3/4) de la superficie de cette région, partage celle-ci avec
le Gagou du groupe Dan.
En plus de ces principaux groupes ethniques, la région est aussi
habitée par d'autres groupes ethniques ivoiriens mais allogènes de cette
région tels les Akan ainsi que certains ressortissants des pays voisins
tels les Maliens, les Volta'ques et les Guinéens.
L'habitat de type traditionnel est constitué de maisons rectan-
gulaires en terre battue ou "banco" et couvertes de toit en feuilles de
raphia ou "papo".
Ce type d'habitat cède de plus en plus la place à un
type de maisons en briques de ciment ou "maisons en dur" couvertes de
tôles en aluminium galvanisées.
Ce type est connu sous le terme d'habitat
moderne.
Les villages que nous avons couverts pour la constitution de
notre échantillon sont habités par des Bété, à l'exception d'un seul,
appartenant à des Gagou du groupe Dan.
Le choix de ces villages a été fait en fonction de deux critères
liés principalement à la distance et à la situation géographique par rap-
JU .. ,SJAilM-

- au
102
port au chef lieu de la région qui est la ville de Gagnoa.
Ils sont tous
situés au-delà de 15 km au départ de Gagnoa.
Puis. à l'exception d'un
seul, ils sont en dehors des grands axes routiers qui desservent cette
région et qui sont:
l'axe Gagnoa-Abidjan;
l laxe Gagnoa-Daloa;
llaxe
Gagnoa-San Pedro.
Ces villages, au nombre de onze (11), font partie de cinq (5)
cantons dont quatre (4) relèvent de la sous-préfecture centrale de Gagnoa
et un de la sous-préfecture de Ouragahio qui est une unité administrative
du département préfectoral de Gagnoa.
La répartition de ces onze (11) villages à l'intérieur de ces
cinq (5) cantons est la suivante.
Dans le sud-ouest de la région, dans le canton Paco10, nous avons
travaillé dans cinq villages qui sont:
Digbetrognoa,
Dougroupa1egnoa. Mabouo, Ba1uépa1egnoa et Zokrobouo.
Dans l'extrême sud-ouest, dans le canton Zikobouo, nous avons
travaillé dans le village de Sérihio.
Dans le sud, dans le canton Zébré, un vi11aqe a été retenu:
Obodroupa.
Dans le canton Gnébie au centre, nous avons travaillé dans le
village de Lokobia.
Dans le nord-est de la région, dans le canton Badi, les deux
vi 11 ages de Djédjéd i gbépa, Magbéhi gouépa _ Gadoukou ont été nos
centres d'enquête.
Il faut signaler que les villages de ce
canton relèvent de la sous-préfecture de Ouragahio qui s'insère
dans la préfecture de Gagnoa.

103
A ces dix villages, nous avons ajouté le village Gagou, qui est
Laouda, situé à l'est de Gaonoa.
Dans chacun de ces villages, nous avons enregistré deux entrevues
complètes.
Ce qui nous donne les vingt-deux (22) membres de notre échan-
t i 11 on rura l .

104
CARTE DE LA REGION DE GAGNOA

UNIVERSITt DE ·~ONTREAl
N
VERS SI NfRJ\\
j
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1
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\\
0
1
"'"-.,
VERS GUEYO _')
S
Villages d'enquête
1. MAGBEHIGOUEPA
7. SERIHIO
2. DJEDJEDIGBEPA
8. BALUEPALEGNOA
3. LAOUDA
9. DOUGROUPALEGNOA
4. LOKOBIA
10. DIGBETROGNOA
5. ZOKROBOUO
11. OBODROUPA
6. MABOUO

105
1.3
La description de l'échantillon
Notre échantillon composé de quarante-trois (43) éléments a été
décrit ~ partir des variables individuelles et en fonction de leur rési-
dence rurale et urbaine.
Pour cette description, certaines variables qui,
à notre avis, ne présentaient pas de signification pertinente ont été
écartées.
Et puis, pour rendre plus opérationnelles celles que nous avons
retenues certaines modification mineures leur ont été imprimées.
Les
variables que nous avons écartées sont "le groupe ethnique", la "religion"
et "l'état civil".
La variable "ethnie" a été écartée compte tenu du fait que
l'échantillon, dans sa partie rurale est constitué en majorité de Bété.
Sur les vingt-deux (22) interviewés, seulement deux sont des Gagou.
Ce
qui ne peut donc pas permettre une relation dans le cadre d'une comparaison
de données.
Il en est de même de la variable religion.
Son analyse ne nous
fournissait pas une interprétation pertinente étant donné que dans cette
région rurale, le christianisme et l'animisme se superposent en tant que
pratiques religieuses.
Ces pratiques ne sont donc pas différenciées.
La signification de cette variable aurait eu plus de poids s'il s'agissait
de prendre cette région sous son aspect chrétien pour la mettre en rapport
avec une autre région d'une autre obédience religieuse, comme par exemple
le Nord du pays à majorité musulmane.
Dans le cadre de notre étude, cette
variable nous paraît donc négligeable.

U,"IVERSIH DE "O .... TR(.\\l
106
I~ous pouvons auss i négl i ger la vari ab le "état ci vi 1" à cause de
son ambiguHé pour l'ensemble de l'échantillon.
Alors que, à la campagne,
les interviewés se définissent comme mariés par le seul fait qu'ils vivent
avec une femme sous le même toit, ce qui est une norme de la coutume, les
jeunes adultes de la ville font une nette différence entre leurs copines,
leurs amies et leurs épouses légitimes alors que, effectivement ils vivent
sous le même toit et ont parfois même des enfants.
Ce décalage de com-
portement nous a échappé dans la définition de cette variable.
Nous
aurions dû introduire dans cette variable:
"marié selon la coutume ou
marié selon la loi".
Compte tenu de cette défaillance initiale de notre
part, nous ne pouvons pas retenir cette variable "état civil" pour l'étude
de nos données.
Les quarante-trois (43) interviewés qui répondent à notre
défi.nition du jeune adulte, présentent les caractéristiques suivantes à
partir des différentes variables individuelles retenues et de leur lieu
de résidence.

U.'rVf~5IT[ Dt ,\\10,,\\;TRL\\l
=--
Iod·l
lllb4lL44dSdl:
. . . . . -
c
.......~ ~ ~ ~ . ~ ~ - - - . .
aaav.....
i
107
Tableau
Répartition selon l'âge et le lieu de résidence
~ 16 - 25 ans 26 - 35 ans TOTAL
ORIGINE
VILLE
13
8
21
CAMPAGNE
18
4
22
,
TOTAL
31
12
43
J
. D'après le tableau ci-dessus, notre échantillon se présente de
la façon suivante.
Nous avons interrogé trente et une (31) personnes ayant
entre 16 et 25 ans dont treize (13) résident en ville et dix-huit (18)
à la campagne.
Pour ceux qui ont entre 26 et 35 ans, et qui sont douze (12),
huit (8) résident en ville et quatre (4) à la campagne.
Pour la tranche d'âge de 16 à 25 ans, l'échantillon comporte plus
de jeunes adultes ruraux (18/31) que de jeunes adultes urbains (13/31).
Alors que parmi les 26-35 ans,
l'échantillon comporte plus de jeunes adu1-
tes urbains (8/12) que de jeunes adultes ruraux (4/12).

l)."'IV!RSIH DE \\H)"'!;;:t·~l
l
'''-:~4
108
1.3.2
~elo~ l'.~.s~,_l~ ~e~e_e!.le_lle~~e_rfsld~n~e
(cf. tableau 2)
Tableau 2
Répartition selon l'âge, le sexe et le lieu de résidence
~ -._-16 - 25 ans
26 - 35 ans
ORIGIN
.
TOTAL
r~ascul i n
Féminin
Masculin
Féminin
VILLE
5
8
3
5
21
CAMPAGNE
8
la
4
a
22
TOTAL
13
18
7
5
43
Parmi ceux qui ont entre 16 et 25 ans et qui vivent en ville,
nous trouvons cinq (5) jeunes gens et huit (8) jeunes filles.
Dans cette
même tranche d'âge, ceux qui résident à la campagne se répartissent entre
huit (8) personnes du sexe masculin et dix (la) du sexe féminin.
Quant à ceux qui sont de la tranche d'âge supérieure (26/35) et
qui résident en ville, soit au nombre de huit (8), ils se divisent en deux
groupes; llun composé de trois (3) jeunes gens et l'autre de cinq (5) jeu-
nes filles.
Alors qu'à la campagne les interviews de cette tranche d'âge
sont au nombre de quatre (4) et sont tous du sexe masculin.

U,",'IVfRSIH Df -';O"TR(·\\l
109
La caractéristique principale de ce tableau est que nous avons
interrogé plus de filles de la tranche d'âge (16/25) qui résident à la
campagne (10/18) que de garçons de ce même lieu de résidence (8/18).
Alors
que par ailleurs, aucune fille ne figure dans la tranche d'âge de 26 à
35 ans.
1.3.3
~elo~ l'!g~,_l~ li~u_d~ !:.é~i~e~c~ ~t_l~o~c~p~tlo~
~r~f~s~i~n~ell~ (cf. tableau 3)
Tableau 3
Répartition selon l'âge, le lieu de résidence
et l'occupation professionnelle
AGE
16 - 25 ~ns
26 - 35 ans
TOTAL
~ Avec revenu Sans revenu Avec revenu Sans revenu
ORIGINE
VILLE
8
5
6
2
21
CAMPAGNE
3
15
2
2
22
TOTAL
11
20
8
4
43
Parmi ceux qui résident en ville qui sont de la tranche d'âge
16/25 ans, cinq (5) sont sans travail contre huit (8) qui bénéficient d'une
source de revenu.
Par contre à la campagne, pour ce même groupe d'âge,
nous avons quinze (15) qui sont sans revenu pour seulement trois (3).

110
qui ont une occupation professionnelle leur procurant un revenu.
Il n'en
est pas de même de la tranche d'âge de 26/35 ans dont les résidents
urbains avec revenu sont au nombre de six (6) contre deux (2) sans revenu.
A la campagne, dans cette même tranche d'âge, deux (2) ont un revenu et
deux (2) n'en ont pas.
De ce tableau, il se dégage un point saillant. Il s'exprime par
le grand nombre de jeunes adultes de 16 ~ 25 ans qui sont sans revenu en
milieu rural, (15 sur 18) contre (5 sur 13) en milieu urbain.
Pour les
deux résidences, vingt (20) des trente-et-un (31) interviewés de cette
tranche d'âge sont donc sans revenu.
1.3.4
,=-a_r~p~.r!i!i~_s~lQ.n_l~â9.e.!-le_s~x~,_l~~cQ.l~rlt~
~t_l ~ li ~u_d~ .cé~i~e~c~ (cf. tableau 4)
Tableau 4
Répartition selon l'âge, le sexe, la scolarité
et le lieu de résidence
AGE
16 - 25 ans
26 - 35 ans
GRAND TOTAL
ORIGINE
VILLE
To- CAMPAGNE To
VILLE
To- CAMPAGNE To-
tal
tal
tal
tal
SEXE
M
F
M
F
M
F
M
F
Scol arité
11 - 18 ans
l
l
2
l
0
l
2
3
5
0
0
0
8
8 - 10 ans
l
3
4
?
0
2
0
l
l
0
0
0
7
3 -
7 ans
3
2
5
5
9
14
l
1
2
4
0
4
25
Non seol.
00 - 00
0
2
?
'-
0
1
l
0
0
0
0
0
0
3
S/TOTAL
5-8
8-10
3 - 5
4 - 0
TOTAL
13
18
8
4
43

111
Au premier niveau qui est celui de la classe d'~ge de ceux qui
ont entre 16 et 25 ans, et parmi les citadins, deux (2) ont une scolarité
comprise entre 11 et 18 années, dont une (1) fille et un (1) garçon ayant
accompli onze (11) années de scolarité, quatre (4) ont une scolarité allant
de 8 à 10 ans.
Parmi eux, un (1) garçon et trois (3) filles, cinq (5)
jeunes adultes dont trois (3) garçons et deux (2) filles ont une scolarité
accomplie d'une durée allant de 3 à 7 ans.
Deux (2) personnes, analphabètes
du sexe féminin sont aussi inscrites dans cette première tranche d'~ge.
Dans cette même tranche d'~ge, les résidents de la campagne
présentent les niveaux de scolarité suivants:
Un (1) jeune adulte du sexe
mascul in a "fréquenté" l' éco le pendant une durée de onze (11) ans.
Deux (2.1 autr~s du même sexe l'ont fait pendant une période allant de 8 à
10 ans.
Le gros du lot, soit quatorze sur dix-huit (14/18) a fréquenté
l'école durant une période allant de 3 à 7 ans.
Soit à l'intérieur du
cycle primaire seulement.
Parmi deux-ci, l'on retrouve neuf (9) filles
et cinq (5) garçons.
Un seul cas d'analphabète figure parmi notre échan-
tillon.
C'est une personne du sexe masculin.
Pour cette tranche d'~ge de 16 à 25 ans, une remarque porte sur
e
e
le nombre élevé de jeunes adultes du niveau de la 3 à la 7
année, soit
la dernière année du primaire.
Il s'agit en fait de ceux que l'école a
rejetés après 3 ou 7 ans, avec ou sans le certificat d'études primaires.
Et dans notre échantillon, les filles sont les plus touchées par ce rejet.

11 2
Dans le cadre de la tranche d'âge des 26 et 35 ans, nous notons,
parmi ceux qui habitent la ville:
cinq (5) répondants dont la durée de
scolarité se situe entre 11 et 18 ans.
Et deux (2) garçons et trois (3)
filles constituent ce nombre.
Une (1) fille a une scolarité dont la durée
est comprise entre 8 et 10 ans, deux (2) personnes, une (1) fille et un
,1
(1) garçon ont été scolarisés se~lement durant 3 à 7 ans.
li
Par contre parmi ceux de la campagne, le tableau inscrit seule-
ment quatre (4) personnes du sexe masculin qui ont une scolarité allant de
3 à 7 ans.
La caractéristique générale de cette tranche d'âge c'est que
nous n'avons pas interrogé d'analphabète aussi bien du côté masculin que
du côté féminin.

113
l .3.5
~a_r~p~.r!i!iQ.n_s~lQ.n_l~â9..e-!-le_s~x~,_l~ ~cQ.l~rlt~,
li~u_d~ !:.é~i~e!:!.c~ ~t_l~ofc~P~tio!:!. (cf. tableau 5)
Tableau 5
Répartition selon l'âge, le lieu de résidence, le sexe,
la scolarité et l'occupation professionnelle
AR = avec revenu
SR = sans revenu
AGE
16 - 25 ans
26 - 35 ans
GRAND TOTAL
ORIGINE
VILLE
CAMPAGNE
VILLE
CAMPAGNE
SEXE
M
F
M
F
M
F
M
F
OC. PROF.
AR SR AR SR AR SR AR SR AR SR AR SR AR SR AR SR
Scolarité
11/18 ans
a l a l a l a a l l 2 l a a a a
8
8/10 ans
l
a 2 l a ?'- a a a a l a a a a a
7
3/7 ans
3 a 2 a l
4
l
8
l
a l a ?'- 2 a a
25
1
00 00 an
a a a 2 a a l a a a a a a a a a
3
SjTOTAL
4+1
4 +4
1+7
2+8
2 + l
4+1
2 +2
0+0
43
13
18
8
4
TOTAL
31
12
43

U"IVERSIH OE "o"rR(\\l
114
a)
En cons i dérant dl abord le prellli er groupe dl âge (16/25 ans), l' échan-
tillon présente les caractéristiques suivantes.
Du côté des résidents urbains du sexe masculin, quatre (4) individus ont
une occupation qui leur procure un revenu.
Parmi ces quatre (4), un (1)
a une scolarité comprise entre 8 et 10 ans et trois (3) ont bénéficié d'une
scolarité de 3 à 7 ans.
Par contre un (1) individu avec une scolarité comprise entre
11 et 18 ans est sans emploi donc sans revenu.
Dans ce même lieu de
résidence urbaine, nous avons interviewé quatre (4) jeunes filles ayant
une occupation dont deux (2) ayant, une scolarité allant de 8 à 10 ans et
deux (2) n'ayant fait l'école que durant une période de 3 à 7 ans.
Dans
ce même cadre, au contraire, quatre (4) autres filles sont sans emploi;
et parmi elles une (1) a une scolarité d'environ de 11 à 18 ans, une (1)
en a de 8 à 10 ans et deux sont analphabètes.
Si nous nous reportons sur ceux de cette première tranche qui
sont d'origine rurale et qui sont aussi du sexe masculin, un (1) seul avec
un niveau de scolarité allant de 3 à 7 ans possède une occupation.
Par
contre, sept (7), sont sans revenu avec des niveaux de scolarité diffé-
rents.
Un (1) dont la scolarité se situe entre 11 et 18 ans de scolarité.
Deux (2) ont entre 8 et 10 ans de scolarité.
Quatre (4) ont été à l'école
durant une période incluse entre 3 et 7 ans.
Parmi ces mêmes résidents ruraux, les éléments du sexe féminin
présentent les caractéristiques suivantes:
deux (2) jeunes filles dont une
analphabète et une scolarisée de 3 à 7 ans ont une occupation avec revenu.

11 5
Huit (8) sont sans occupation et leurs niveaux de scolarité se situent
entre 3 et 7 ans.
La tendance générale de cette tranche d'âge, c'est le nombre
élevé des "sans revenu" avec un niveau de scolarité du primaire (3 à 7 ans)
qui se situe à l a campagne 12/18 du total des "sans revenu" de cette
tranche d'âge de 16 et 25 ans.
b)
Considérons maintenant la deuxième tranche de 26/35 ans.
Du côté
masculin et de ceux qui résident en ville, nous obtenons les informations
suivantes:
(deux (2) jeunes adultes exercent un emploi salarié dont un (1)
a une scolarité comprise entre 11 et 18 ans et l'autre avec une scolarité
d'une période de 3 à 7 ans.
Un (1) est sans emploi avec une longue scola-
rité comprise entre 11 et 18 ans.
Par ailleurs, les interviews du sexe féminin démontrent les
points suivants:
Quatre (4) exercent un emploi salarié, dont deux (2)
filles ayant un niveau de scolarité étalé entre 11 et 18 ans, une (1) avec
un de 8 à 10 ans et une (1) avec un niveau de 3 à 7 ans de scolarité.
Une (1) fille par contre avec un niveau de scolarité situé entre 11 et 18
ans est sans emploi.
Prenant en compte ceux de la campagne, nous constatons que
quatre (4) jeunes adultes du sexe masculin que nous avons interrogés se
répartissent de la façon suivante:
deux (2) sont "sans revenu" et deux (2)
"avec revenu".
Tous les quatre (4) ont une scolarité allant de 3 à 7 ans
selon les cas.

116
Il faut signaler que dans cette tranche d'âge, notre échantillon
ne comporte aucun analphabète ni en ville, ni à la campagne.
La description de cet échantillon à partir de ces variables
individuelles nous permet d'envisager l'analyse des données des variables
structurelles.
2.
Classification des données recueillies à Abidjan
Comme nous l'avons vu dans le chapitre sur la méthode, pour
obtenir les données classées ci-dessous, nous avons utilisé un question-
naire bâti autour de quatorze questions que nous avons soumises à vingt-et-
un (21) jeunes adultes à travers les différentes communes ci-dessus men-
tionnées dans la présentation de la ville d'Abidjan.
Notre première question a trait à la durée de présence à Abidjan
de chaque interviewé.
Comme nous avons travaillé sur un échantillon de
commodité, cette question nous a permis d'avoir des informations distinc-
tes des immigrants et de ceux qui sont nés en ville.
Ainsi sur les
vingt-et-un (21) interviewés qui composent notre échantillon urbain, deux
(2) sont nés en ville.
Les informations, qui font l'objet d'analyse ci-après à partir
des tableaux, ne concernent que les dix-neuf immigrants.
Une seconde question porte sur le choix d'Abidjan plutôt qu'une
autre ville comme lieu d'immigration.
Cette question est complétée par la
troisième qui vise à connaître l'image que le jeune adulte se faisait de
cette ville avant son arrivée.

117
A partir de ces trois premières questions, nous rentrons ainsi
dans le vif du sujet avec la quatrième question.
Avec celle-ci, nous
cherchons à savoir les raisons qui ont motivé le départ de l'interviewé de
son village natal pour Abidjan.
Et s'il connaissait des amis qui ont
quitté aussi leurs villages, quelles pouvaient être les raisons de leur
départ.
Nous complétions ainsi cette question.
Par les questions sept et dix, nous demandons à l'interviewé si
lui et ses amis ont rencontré des problèmes à leur arrivée à Abidjan.
Et
dans l'affirmative, comment ils s'y sont pris pour les résoudre.
Pour cela
ils ont répondu aux questions huit et onze.
Mais auparavant et pour
marquer son avis, à lui, il devait nous faire savoir comment il aurait
voulu être aidé pour résoudre les problèmes rencontrés.
Connaissant les raisons de son départ du village et les
problèmes que lui et ses amis ont rencontrés, nous avons demandé a
l'interviewé de nous proposer des services d'ordre éducatif qui seraient
destinés a ceux qui arrivent en ville comme lui.
Il a répondu alors a
la question douze.
La question treize ramène l'idée de la campagne puisqu'elle
demande à l'interviewé de décrire la campagne de son désir qu'il n'aurait
pas pu quitter.
Et comme cette campagne est idéale (parce qu'elle n'existe
pas) la question quatorze a pour but de nous faire connaître le point de
vue de l'interviewé sur un éventuel retour à la campagne réelle et actuel-
le et les conditions que cela implique de sa part.

U,"'<IV[RSITf D[ "O:-;TR[~L
118
Les éléments de réponse à ces quatorze questions, obtenus de
dix-neuf (19) jeunes adultes, constituent l'ensemble des données que nous
présentons ci-après.
Nous le faisons pour chaque question à partir d'un
tableau qui donne les classifications obtenues.
Nous ferons ensuite une
synthèse des éléments de réponses ainsi obtenus.
La première question a trait à la durée en ville.
Nous présen-
tons ci-dessous un tableau récapitulatif des données de cette question.
Tableau 6:
Répartition selon le temps de présence en ville et le sexe
Temps
Nombre de personnes et 01/0
Identification et sexe
de présence
M
F
2 à
6 mois
3
15 . 78~~
510
517,519
3 à
8 ans
6
31 .57%
55, 58, 59
513, 514, 520
10 à 13 ans
4
21.05%
54, 56, 51
518
15 à 17 ans
4
21 .05%
52
53, 516, 521
20 à 23 ans
2
10.52%
57. 512
TOTAL
19
8
11
5 - sujet de la ville

U"'IVfRSIT[ DE "O';TR[ \\L
119
La durée en ville des dix-neuf (19) immigrants se présente de la
façon suivante.
Trois (3) interviewés (deux (2) filles et un (1) garçon) déclarent avoir
entre deux (2) et six (6) mois de présence à Abidjan.
Ce qui représente
15.78% de notre échantillon.
Six (6) interviewés (trois (3) filles et trois (3) garçons) auraient entre
trois (3) et huit (8) années de présence en ville. Ils représentent ainsi
31.5n du total.
Quatre (4) dont trois (3) garçons et une (1) fille y seraient depuis une
période de temps estimée entre dix (10) et treize (13) ans.
Leur nombre
représente 21. 055~ de l 1 échant i 11 on.
Quatre (4), (trois (3) fi lles et un (1) garçon), seraient venus ~ Abidjan
depuis une période variant entre quinze (15) et dix-sept (17) ans.
Ils
représentent éga l ement 21 ,05;~.
Deux (2) interviewés (deux (2) filles), 10.52% du total des immigrants ont
déclaré avoir respectivement vingt (20) et vingt-trois (23) ans de
présence à Abidjan.

U"'VER5ITE DE "O"TRt-\\l
120
Un tableau plus restreint présenterait la forme suivante;
en
fonction du temps de présence centré autour de trois (3) périodes.
Tableau 7:
Répartition selon le temps de présence en ville et le sexe
Temps
Nombre de personnes et %
Identification et sexe
de présence
M"
F
Moins d'un an
510, 55,
517,519,
à 7 ans
8
42. l 0%
58, 59
513, 514
8 à 15 ans
54, 56,
520, 518
6
31.57~~
5l , 52
16 ans et plus
57,512, 53
5
. 26.31 %
0
516, 521
Total
19
99.98%
8
11
En remarque, nous pouvons dire que les interviewés dont le temps
de présence est récent, soit de 0 ~ 7 ans, sont plus nombreux (8) que ceux
qui sont en ville il y a au moins 16 ans (5) - En plus leur nombre se
répartit également entre les deux sexes (4 hommes et 4 femmes) alors que
les 5 de la période de 16 ans et plus sont tous du sexe féminin.
A la question deux, destinée à faire ressortir les raisons du
choix d'Abidjan plutôt qu'une autre ville, les interviewés ont formulé
cinquante (50) énoncés ou raisons.
Après analyse de contenu, ces cinquante énoncés ont été regrou-
pés sous treize
(13) items.
Une nouvelle analyse a réduit ce nombre ~
onze (11) qui constituent nos sous-catégories.
Les sous-catégories ont été reclassées sous quatre (4) catégo-
ries.
Ce qui nous donne la typologie suivante.

U:-;!\\'lRSlTf Of .\\\\O:-TRfAI
l 21
Tableau 8:
Typologie des raisons du choix d'Abidjan
A. Promotion et gain personnel.
21 énoncés
13 interviewés
1. Travail
a) Trava il
8 énoncés
8 répondants
b) Apprentissage d'un métier
2 énoncés
2 répondants
2. Etudes
7 énoncés
7 répondants
3. Argent
2 énoncés
2 répondants
4. Mariage
2 énoncés
2 répondants
B. Famille
17 énoncés
14 interviewés
1. Parents
a) Frère et soeur
12 énoncés
10 répondants
b) Mari
énoncé
4 répondants
2. Tuteur
4 énoncés
4 répondants
C. Caractéristiques de la ville d'Abidjan.
12 énoncés
8 interviewés
l. Ville plaisante
5 énoncés
5 répondants
2. Capita le
4 énoncés
4 répondants
3. Vi 11 e atti rante
2 énoncés
2 répondants
4. Ville qui offre beaucoup
de distractions
énoncé
1 répondant
D. Echec scolaire
l énoncé
répondant
D'après l'information recueillie et que présente le tableau
ci-dessus, si un jeune adulte choisit d'aller à Abidjan, trois grandes
catégories de raisons l 'y poussent.

122
Il s'agit d'abord des raisons relatives à un désir de promotion
sociale et de gain personnel, des relations de famille qui le lient à
Abidjan et enfin, des caractéristiques mêmes de la ville d'Abidjan.
A ces trois grandes catégories de raisons, s'ajoute une raison
due à l'échec scolaire qu'a subi le jeune adulte à la campagne.
Nous explicitons ces grandes catégories de raisons.
Dans sa décision de quitter le village pour la ville, le candidat
à la migration choisit de préférence une ville, où il aura l'occasion
de trouver quelqu'un de sa famille qui l'accueillera certainement.
Ici la
notion de famille regroupe aussi bien les parents proches comme le frère
ou 1a soeur que ceux qui sont éloi gnés tell e tuteur ou 1 1 onc 1e.
La
présence d'un parent en ville, ou la possibilité de rencontrer un membre
de la famille du village est donc un motif de sélection de la ville de
destination.
Les répondants ont donc choisi Abidjan plutôt qu'une autre
ville parce qu'ils étaient certains d'y rencontrer un parent ou qu'ils
savaient qu'un parent y résidait.
A ces relations de famille qui dictent le choix d'Abidjan, s'a-
joutent les caractéristiques mêmes de la ville d'Abidjan.
La ville
d'Abidjan a un attribut particulier.
C'est celui d'être la capitale de la
Côte d'Ivoire.
Pour cette raison, elle est attirante pour les jeunes
adultes de la campagne qui la considèrent comme la ville par excellence.
Parce qu'elle leur plaît ou parce que chacun l'aime dans la mesure où
chacun s'y sent bien dans sa peau, Abidjan est aussi choisie comme lieu

U'-IVERSI TE Dl "0" r Rf ·\\l
123
d'immigration parce qu'elle offre beaucoup de distractions jugées inté-
ressantes par les jeunes adultes.
Abidjan doit son choix aussi à l'influence qu'elle exerce sur
l'ensemble du territoire national pour lequel elle est un point de repère.
Les jeunes adultes choisissent donc d'immigrer à Abidjan à cause aussi de
ses caractéristiques physiques qui s'imposent à leurs yeux.
Les interviewés ont choisi d'immigrer à Abidjan pour des raisons
liées soit aux relations familiales soit aux caractéristiques de la ville
d'Abidjan.
Mais d'après la recension des données que nous avons au
tableau ci-dessus, ils l'ont fait surtout pour des raisons personnelles
qui relèvent de leur propre volonté.
Et cette volonté est manifestée par
un désir de promotion sociale qui les anime.
Témoin de cette recherche de
promotion sociale, le grand nombre de raisons invoquées dans cette catégo-
rie.
Celle-ci compte vingt-et-un (21) énoncés sur un total de cinquante (50)
que comptent les quatre catégories réunies.
C'est dire aussi qu'au moins
chacun des interviewés a avancé une raison entrant dans cette catégorie.
Ces raisons qui la définissent sont celles relatives à la re-
cherche du travail et à l'apprentissage d'un métier, celles aussi relati-
ves à la poursuite des études, comme celles relatives à la recherche de
l'argent et enfin celles invoquées dans le cadre de la recherche d'un
partenaire conjugal.
C'est le désir d'y trouver un travail salarié avec, en appendice,
l 'apprenti~sage d'un métier qui favoriserait l'acquisition de cet emploi

124
suite à une qualification conséquente.
Cette sous-catégorie tire son
importance du fait qu'elle regroupe dix (10) des vingt-et-une (21)
raisons invoquées ct cet effet par plus de la moitié des interviewés.
Parce qu'ils pensent y trouver plus facilement du travail sala-
rié, les jeunes ruraux préfèrent donc Abidjan aux autres villes du pays.
Cette sous-catégorie de raisons relatives à la recherche de
travail salarié et ct l'apprentissage d'un métier est suivie dans ce désir
de promotion sociale par la poursuite éventuelle des études scolaires que
les jeunes espèrent continuer à Abidjan.
Aussi, compte tenu de l'âge des répondants, il n'est pas surpre-
nant qu'ils expriment, comme raisons d'immigration à Abidjan, leur désir
de trouver une femme à marier, dans le cas des jeunes gens ou qu'ils
cultivent l'espoir de rencontrer un homme de leur choix dans le cas des
jeunes filles.
Le choix d'Abidjan, capitale qui plaît et qui attire au détri-
ment d'autres villes du pays est donc guidé par deux grandes catégories
de raisons.
La plus importante qui pèse de son poids dans cette décision
à migrer est celle qui a trait au désir de promotion sociale.
Les raisons invoquées, nous l'avons déjà vu, regroupent vingt-et-
une (21) des cinquante (50) que renferment les quatre (4) catégories et
l'ont été par treize (13) interviewés sur les dix-neuf (19) de l'échan-

125
tillon.
Mais particulièrement cette catégorie tire son importance des
énoncés relatifs à la recherche du travail salarié et à l'apprentissage
d'un métier qui sont au nombre de dix (la) sur un total de vingt-et-un (21)
énoncés.
Cette sous-catégorie de raisons est suivie dans l'importance
numérique par celle qui couvre les raisons liées à la poursuite des études.
La seconde catégorie du point de vue numérique est celle qui
renferme des raisons liées à la présence de la famille en ville.
Elle
regroupe seize (16) énoncés émis par quatorze (14) interviewés.
Et la
sous-catégorie dominante qui donne toute sa force à cette catégorie est
celle où l'on retrouve les raisons du choix d'Abidjan du fait des parents
qui y résident déjà.
Dix (la) répondants sur quinze (15) recensés dans la
série déclarent avoir choisi Abidjan parce qu'ils
y ont, soit leur frère,
soit leur soeur ou leur cousin.
L'étude de cette question nous révèle donc deux (2) raisons
principales dans le choix d'Abidjan comme lieu d'immigration.
Les répondants de notre échantillon quittent leur village pour
Abidjan animés par un désir de promotion sociale.
Mais aussi, ils choi-
sissent d'aller à Abidjan parce qu'ils ont la conviction qu'ils y trouve-
ront sur place un membre de la famille qui les y a précédés dans cette
migration en chaîne.
Pour caractériser davantage la ville d'Abidjan quant à l'influen-
ce qu'elle exerce sur le jeune adulte rural ou l'impact qu'elle peut avoir

UNIVERSI TE DE '10:-lTR( ~l
126
dans la décision à migrer que prend celui-ci, nous avons cherché à savoir
quelle image les interviewés avaient de cette ville avant d'y arriver.
Cette question a ainsi pour but de nous situer sur les éléments détermi-
nants de la fonction onirique que joue cette ville dans l'esprit des jeunes
ruraux et ce qu'elle représente en fait quand les jeunes ruraux y arrivent
comme nous le verrons à la question sept.
Répondant à cette troisiême question, les interviewés ont
invoqué trente huit caractéristiques ~ propos de cette ville.
Aprês une
analyse de contenu de ces attributs énoncés il en est ressorti dix-neuf
items.
Procédant à une nouvelle analyse de ces items, ceux-ci ont vu leur
nombre réduit à dix-sept.
Ce qui constitue l'ensemble de nos sous-catégo-
ries d'énoncés à cette question.
Ces dix-sept sous-catégories ont ensuite
été classées sous quatre grands ensembles que nous appelons les catégo-
ries.
Celles-ci constituent la typologie que présente le tableau suivant.
Tableau 9:
Typologie des aspects de l'image d'Abidjan
A. Qualités de la ville
16 énoncés
11 interviewés
1. Beauté
a) Belle vi 11 e
6 énoncés
5 répondants
b) Vill e splendide
2 énoncés
2 répondants
c) V"il le luxueuse
énoncé
répondant
2. Grandeur
2 énoncés
?
f_
répondants
3. Différence
3 énoncés
3 répondants
4. Propreté
énoncé
répondant
5. Accueil
énoncé
répondant

127
B. Promotion sociale et gain personnel.
9 énoncés
7 interviewés
1. Lieu de travail
4 énoncés
4 répondants
2. Lieu de réussite
2 énoncés
2 répondants
3. Centre de distraction
2 énoncés
2 répondants
4. Centre de culture
énoncé
répondant
C. Réputation.
8 énoncés
6 interviewés
1. Par la télévision
2 énoncés
"')
L.
répondants
2. Centre d'évolution
énoncé
répondant
3. Capitale
énoncé
répondant
4. Abidjan égale civilisation
énoncé
répondant
5. Les gens en parlent
énoncé
répondant
6. Tout y est
énoncé
répondant
o. Caractéristiques de l'aménagement. 5 énoncés 4 interviewés
1. Ville entièrement illuminée
?
énoncés
2 répondants
?
Maisons garnies de vitres
énoncé
répondant
3. Ville sans arbre
énoncé
répondant
4. Ville où l'on ne peut se retrouver
énoncé
répondant
Selon les interviewés, Abidjan reflétait dans leur esprit l'image
d'une ville ayant plusieurs qualités.
Cette catégorie descriptive de la
ville la présente comme une belle ville, une grande ville.
C'est aussi
une ville propre, qui marque la différence par rapport aux autres villes
et qui est accueillante.
Une des principales qualités d'Abidjan, c'est sa beauté.
Abidjan,
d'après les interviewés est une belle cité.
Cette qualité est invoquée par

128
huit (8) des quinze (15) répondants qui ont qualifié l'image qu'ils avaient
d'Abidjan avant d'y arriver.
Cette beauté se conjugue avec le luxe dont
est parée Abidjan et la splendeur qu'elle répand dans l'esprit des jeunes
adultes ruraux.
Abidjan, selon les répondants, était considérée comme la plus
belle ville du pays parce qu'ils l'imaginaient splendide et luxueuse.
En
cela, elle était une ville différente des autres villes qu'ils ont
connues.
Elle était donc un monde à part et marquait ainsi la différence
par la grandeur de ses rues et l'étendue de son territoire, dont la propre-
té était à leur esprit extraordinaire.
Pour les répondants, Abidjan proje-
tait l'image d'une ville ouverte et donc accueillante.
Un autre attribut qu'Abidjan ajoute à ses qualités, ce sont les
caractéristiques de son aménagement.
Abidjan, dans sa grandeur reflète la
taille de ses grands immeubles, la forme de ses maisons aux fenêtres gar-
nies de vitres.
Abidjan projette aussi l'aspect d'une ville dépourvue
d'arbres et d'arbustes et dont les rues et les ruelles sont éclairées la
nuit.
Dans cette structuration de son espace. Abidjan ajoute aux caracté-
ristiques de son aménagement, l'immensité de son étendue.
Car, dans l'es-
prit de certains des répondants. Abidjan représentait une ville dans la-
quelle on ne pouvait pas se retrouver.
Tous ces attributs évoquent dans leur ensemble, l'image d'une
ville qui jouit d'une grande réputation.
Et celle-ci, d'après les répon-
dants, est faite par les mass média et en particulier, la télévision qui
en projette des images à la campagne.
Capitale du pays. Abidjan développe

129
la réputation d'être le centre d'évolution par excellence qu'imaginent les
jeunes adultes ruraux.
Ceux-ci n'établissent-ils pas souvent qu'Abidjan
égale civilisation?
0
Abidjan, dont tout le monde parle, aux yeux des répondants, se
révèle être le lieu où tout peut se trouver.
C'est pourquoi, dans l'esprit
de certains interviewés, cette ville évoque le lieu où la promotion sociale
et le gain personnel sont possibles.
Dans cette catégorie, Abidjan évoque d'abord le lieu où l'on peut
trouver du travail salarié. ·Et ce, beaucoup plus facilement qu'ailleurs
comme le croient les répondants.
Ceci développe en conséquence l'image
d'une ville comme un endroit où la réussite est sOre et où l'on peut donc
facilement gagner sa vie.
Cette image va de paire avec celle qui veut
qu'Abidjan soit le lieu où les jeunes adultes pensent pouvoir se distraire.
Ils s'imaginent que dans cette ville, il y a beaucoup de moyens de dis-
tractions et que la ville dispose de loisirs qu'ils jugent intéressants.
Abidjan centre de distractions supposées intéressantes, mais aussi Abidjan
lieu rêvé de culture avec ce que cela comporte d'information que l'on peut
avoir sur différents sujets.
La promotion sociale et la réussite â travers le travail et la
culture, ajoutée aux caractéristiques physiques telles les qualités et la
forme de son aménagement que répandent aussi les mass média du fait de sa
réputation, sont autant d'aspects de l 'image de la ville d'Abidjan.
Cette
image développée dans tous ces aspects par les jeunes ruraux détermine
en partie leur décision a immigrer dans cette ville.

130
Des quatre catégories qui regroupent les différents aspects de
l'image d'Abidjan telle qu'elle était perçue par les jeunes adultes avant
d'y arriver, deux méritent notre attention.
Il s'agit en premier lieu de
la catégorie relative aux qualités de la ville et celle qui la décrit
comme un lieu de promotion sociale et de gain personnel en second lieu.
La première tient son importance du fait qu'elle regroupe seize
(16) des trente huit (38) énoncés à la question et que ces énoncés pro-
viennent de onze (11) interviewés parmi les dix-neuf (19) que comporte
l'échantillon.
Elle tient aussi sa définition du fait de la sous-catégorie
"beauté" qui, avec neuf (9) énoncés émis par huit (8) répondants, donne un
sens à la fonction onirique de la ville d'Abidjan.
Avec sa beauté, sa
grandeur et la différence qu'elle établit entre elle et les autres villes
du pays, l'image d'Abidjan que les jeunes adultes avaient avant d'y immi-
grer est celle d'une ville dont les qualités supposées ont une influence
sur les jeunes adultes ruraux.
Mais ces qualités imaginées ne suffisent pas à elles seules à
rendre compte de l'image d'Abidjan.
Il y a aussi le fait que la ville
d'Abidjan se révèle à l'esprit des jeunes adultes ruraux, comme l'endroit
rêvé de promotion sociale et de gain personnel.
Cette promotion qu'ils ne
peuvent pas avoir à la campagne, les jeunes adultes pensent pouvoir l'ob-
tenir en ville par le biais du travail salarié, base, selon eux, de la
réussite sociale.
Cette catégorie avec neuf (9) énoncés de la part de
sept (7) interviewés constitue le deuxième aspect important de l'image
qu'avaient les jeunes adultes avant de venir ~ Abidjan.

131
Les catégories "réputation" et "caractéristiques de l'aménage-
ment de l a vi 11 e" peuvent Si intégrer faci l ement dans l' une ou l'autre de
ces deux catégories fondamentales.
Après avoir demandé aux interviewés de nous décrire Abidjan telle
qu'ils l'imaginaient avant d'y arriver,nous avons cherché avec la quatriè-
me question les causes du départ de leurs villages pour Abidjan.
En réponse à cette question, les interviewés ont avancé quarante-
deux (42) raisons.
Après analyse de ces différentes raisons, nous avons
dégagé dix-huit (18) items.
Explicités avec plus de clarté, ces items ont
été répartis sous neuf (9) sous-catégories qui elles-mêmes se regroupent en
cinq (5) grandes catégories de raisons que nous présentons ci-dessous de
façon décroissante eu égard au nombre d'énoncés que chacune d'elles ren-
ferme.
Tableau 10:
Typologie des raisons du départ des interviewés de leurs
villages pour Abidjan
A. Désir d'ascension sociale.
16 énoncés
16 interviewés
l. Promotion sociale et gain individuel
a) Tra va il
5 énoncés
5 répondants
b) Etudes
4 énoncés
4 répondants
c) Apprentissage d'un métier
2 énoncés
2 répondants
d) r~ariage
énoncé
répondant
e) Aventure
énoncé
répondant
2. Amélioration de l' i ma ge de soi
a) Education
2 énoncés
2 répondants
b) Santé
énoncé
répondant

132
B. Relation de famille.
10 énoncés
5 interviewés
1. Parenté en vi 11 e
a) Parent
4 énoncés
4 répondants
b) Mari
énoncé
répondante
2. Encouragement de la famille
3 énoncés
3 répondants
3. Manque de soutien familial au vi 11 age
2 énoncés
2 répondants
C. Dédain de la vie en milieu rural.
8 énoncés
6 interviewés
1. Contraintes du milieu rural
a) Vie du village déplaisante
4 énoncés
4 répondants
b) Travaux champêtres contraignants
2 énoncés
2 répondants
c) Conf1 it de générations
énoncé
répondant
d) Conflit de valeurs
énoncé
répondant
D. Attrait de la vie urbaine.
5 énoncés
6 interviewés
1. Idéalisation de la vie d'Abidjan
3 énoncés
?
répondants
2. Renommée d'Abidjan
? énoncés
2 répondants
E. Difficultés de scolarisation en milieu rural.
3 énoncés
3 interviewés
Nous commençons l'analyse de ce tableau par la présentation de
la catégorie dénommée par nous "désir d'ascension sociale".
Cette catégo-
rie renferme tous les éléments qui rendent compte des aspirations et de la
volonté personnelle du jeune adulte rural de sortir de son milieu villa-
geois en quête d'un statut social différent de celui qu'il a au village.
Il chercherait ainsi une promotion sociale à travers un travail
salarié mais aussi par l'apprentissage d'un métier rentable.
Cette

133
ascension sociale se définit aussi bien pour le jeune adulte, par la re-
cherche d'une partenaire conjugal de son choix que par la poursuite des
études scolaires en milieu urbain.
Il s'agit également dans ce désir d'ascension sociale d'améliorer
l'image de soi par le biais d'une bonne éducation et des soins de santé.
D'après les interviewés, l'un des éléments indispensables à la
promotion et au gain personnel c'est un travail salarié.
L'espoir de
trouver du travail salarié amènerait donc le jeune adulte à quitter son
village pour la ville.
Mais comme généralement la plupart de ces jeunes
adultes ruraux n'ont aucune formation ni spécialisation, certains cherchent
d'abord à apprendre un métier.
Pour les filles, parfois, certains métiers
sont nommément spécifiés.
Il s'agit de la couture et de la dactylographie.
Si pour certains jeunes adultes, la recherche d'un emploi salarié
est primordiale, pour d'autres c'est le long terme de la promotion qui les
intéresse le plus.
Ainsi veulent-ils s'assurer d'une formation générale
plus poussée afin d'augmenter leur chance d'obtenir plus facilement, un
emploi d'un niveau élevé.
C'èst dans cette optique que la plupart d'entre
eux viendraient en ville pour poursuivre des études.
Par contre, d'autres qui voudraient fonder un foyer mais qui ne
rencontrent pas de partenaire conjugal dans leurs villages, viendraient
aussi à Abidjan, cultivant un long espoir de rencontrer leur âme-soeur.
le partenaire de leur choix.

U~IVERSIT[ DE \\10';[RE \\l
134
La promotion personnelle étant un enjeu certain, d'autres cou-
rent le risque de la réaliser à tout prix.
C'est pourquoi d'autres jeunes
adultes iraient à Abidjan par aventure, avec ce que cela comporte de joie
et de frustration, pour jouer leur carte et tenter leur chance sur la
scène de la vie urbaine d'Abidjan.
Enfin, dans ce désir d'ascension sociale qui anime les jeunes
adultes ruraux, la promotion ne va pas sans une certaine amélioration de
l 'image de soi.
L'acquisition d'une bonne éducation, différente de celle
de ceux qui sont au village contribuerait, d'après les répondants, ~ cette
transformation.
Y contribuerait aussi, d'une certaine manière, le bénéfice
des soins médicaux jugés plus satisfaisants à Abidjan qu'au village.
Cette première catégorie de raisons que nous venons d'évoquer,
est renforcée, chez les jeunes adultes ruraux, par un franc dédain de la
vie en milieu rural.
Pour eux, cette vie comporterait de nombreuses con-
traintes qu'ils ne peuvent pas supporter.
Selon les répondants, ces dif-
ficultés se manifestent d'abord au niveau même de la vie du village.
Cette
vie est caractérisée par l'ennui parce que les camarades et les amis n'y
sont plus.
Il n'y a donc plus d'ambiance, cette ambiance que nourrissaient
les copains qui sont pour la plupart partis en ville.
Dans cette situa-
tion, certains jeunes adultes affirment franchement que, vu leur jeune âge,
le village n'est pas fait pour eux.
Ils ne peuvent donc y rester.
A cela,
d'autres ajoutent certaines raisons.
Pour eux, ils seraient partis de
leurs villages pour éviter les travaux champêtres qu'ils trouvent pénibles
et répugnants.

~i
135
Les contraintes de la vie en milieu villageois, présentent pour
certains jeunes adultes d'autres aspects négatifs.
Car, semblent dire
certains, au village, leur réussite sociale est bloquée du fait que les
vieux s'opposeraient à leur promotion.
C'est là une autre difficulté que
traduit ce que nous connaissons généralement sous le terme de conflit des
générations.
Celui-ci est parfois renforcé par le conflit des valeurs
qui ont cours en milieu rural.
Tel par exemple le fait de la non scolari-
sation des filles.
Ce qui amènerait certaines à refuser de se soumettre
à la volonté parentale et à abandonner le village pour la ville, de leur
propre gré.
A ces raisons purement individuelles qui constituent ces deux
premières catégories, s'ajoutent d'autres qui relèvent, elles, des rela-
tions de famille dans le cadre de cette migration.
Elles sont donc exté-
rieures aux jeunes adultes ruraux en tant qu'individus.
Pour cette catégorie, il s'agit en premier lieu de l'émigration
effectuée du fait de la présence d'un parent déjà en ville, ce qui favori-
serait l'arrivée du jeune adulte dans cette ville.
C'est ce que nous avons appelé la migration en chaîne, où un
premier attire un second qui attire un troisième, ainsi de suite, et la
chaîne continue.
Le jeune adulte irait donc dans une ville où quelqu'un
de sa famille l 'y précède.
Ainsi espère-t-il entrer dans cette structure
urbaine moderne en utilisant les relations traditionnelles villageoises.
Ces relations de famille peuvent prendre aussi une autre forme dans la
mesure où la famille, ou du moins certains membres de la famille voient

136
dans l'émigration de leurs parents les plus jeunes, un intérêt bénéfique
pour l'ensemble de la famille.
Certains jeunes adultes viendraient donc
en ville pour cette raison.
Témoin la déclaration de cet interviewé qui
i 11 us tre bi en notre propos:
"1 e vi eux m'a envoyé à l'aventure pour prépa-
rer l'avenir".
Ou bien alors un membre de la famille déjà en ville invite
un plus jeune que lui à quitter le village dans l'espoir de le faire
échapper aux difficiles conditions du monde rural.
C'est ainsi que l'on
peut entendre dire:
"mon grand frère a promis de faire quelque chose pour
moi" (en vill e) .
A côté de ces relations de famille que nous qualifierons de
positives dans un sens pour le jeune adulte, d'autres difficultés que
vivent les jeunes adultes en milieu rural les poussent à émigrer.
Ainsi le manque total de soutien familial obligerait souvent
certains jeunes adultes à quitter leur village.
N'ayant plus de parent
proche ni de tuteur au village, la ville, et en l'occurrence Abidjan, sem-
ble être le lieu privilégié pour tisser si possible d'autres formes
de relations.
Par ailleurs, d'autres jeunes adultes seraient aussi partis de
leur village par suite des difficultés de scolarisation rencontrées en
milieu rural et, notamment, le manque d'établissement secondaire.
Certains
interviewés déclarent donc être venus à Abidjan dans l'espoir de trouver
une école à "fréquenter" si les conditions le permettent.

u ... ,vrRSIT[ or "o ... rR[ \\l
137
Mais par cette raison, ne subissent-ils pas simplement l'attrait
de la ville d'Abidjan à travers la réputation dont elle jouit?
D'après
ces jeunes adultes, le fait que l'on parle d'Abidjan les inciterait à
venir voir ce qui s'y passe.
Cette réputation est aussi le fait des mass
média comme le souligne ce répondant:
"j'entends Abidjan dans les postes
(de radio) et je suis venu pour voir".
Cette réputation se maintient au
niveau de l'idéalisation des conditions de vie en ville que se font les
jeunes adultes en milieu rural.
Car certains pensent que tout ce qu'ils
espèrent, s'obtient à Abidjan.
Ou tout simplement ils seraient portés à
croire qu'à Abidjan, ils n'auront pas de problèmes.
D'autres renchérissent
et comparent même Abidjan à un endroit où l'on gagne beaucoup d'argent
pour un moindre effort.
Car pour eux, en ville, et particulièrement à
Abidjan, le travail est moindre qu'à la campagne et selon eux, plus facile
et plus rentable.
La réputation dont jouit Abidjan dans ces conditions serait donc
un des éléments favorisant l'émigration.
Comme le tableau nous la présente, la première catégorie de
raisons importantes est celle du désir d'ascension sociale.
Elle comporte
à elle seule seize (16) des quarante-deux (42) raisons issues de la ques-
tion.
En plus, ces raisons ont été for~ulées par seize (16) des dix-neuf
(19) interviewés.
Dans cette catégorie, une sous-catégorie se révèle être
l'élément fondamental.
Celui-ci traduit la recherche de promotion et de
gain personnel.
Les facteurs qui favoriseraient cette promotion et l'ac-
quisition de ce gain sont principalement le travail salarié et l'appren-
tissage d'un métier.

138
Il faut ajouter à ceux-ci la poursuite d'études, moyen privilé-
gié d'une ascension sociale que cherchent les jeunes adultes qui quittent
leurs villages.
Cette principale catégorie de raisons qui seraient à l'origine
de l'immigration en ville est suivie et renforcée par les relations de
famille et principalement la présence de parents en ville.
En plus de ces deux grandes séries de raisons, une troisième,
quant à elle, liée aux contraintes du milieu rural serait un facteur
d'émigration des jeunes adultes ruraux.
Définie par la monotonie du
village, l'âpreté des travaux champêtres, elle conduit les jeunes à un
réel dédain a l'égard de la vie en milieu rural.
Et au bout du compte,
la réputation d'Abidjan est un alibi pour quitter ce milieu.
Avec la question précédente, nous avons cherché à savoir les
causes personnelles qui ont amené les interviewés à Abidjan.
Par les questions qui suivent (5 et 6) nous avons demandé aux
interviewés s'ils connaissaient des jeunes gens, qui sont venus en ville
comme eux et de nous dire les raisons de leur venue à Abidjan.
Seize (16) sur les dix-neuf (19) connaissent des amis qui sont
venus en ville.
Voici les réponses qu'ils ont données à leur endroit.
Tableau 11:
Typologie des raisons du départ des amis des interviewés
A. Réussite et gain personnel.
37 énoncés
14 interviewés
1. Promotion sociale
a) Travail salarié
11 énoncés
10 répondants
b) Etre bonne de maison
2 énoncés
2 répondants

U"<IVERSIT( DE "'O"TRE \\l
139
c) Commerce
énoncé
répondant
d) Armée
énoncé
répondant
e) Apprendre un métier
énoncé
répondant
f) Réuss ite
énoncé
répondant
:2 • Etudes
11 énoncés
9 répondants
3. Mariage
5 énoncés
5 répondants
4. Argent
2 énoncés
2 répondants
5. Santé
2 énoncés
?
répondants
B. Attrait de la ville.
6 énoncés
4 interviewés
.,
l. Satisfaction de soi
?
énoncés
L
répondants
2. Limitation des amis
2 énoncés
2 répondants
3. Débauche
énoncé
répondant
4. Badauds
énoncé
répondant
C. Répugnance à la vie du village.
5 énoncés
4 interviewés
1. DégoQt du travail manuel
5 énoncés
4 répondants
D. Relations de famille
1. Parenté en ville
2 énoncés
2 répondants
2. Absence de soutien au village
énoncé
répondant
Comme nous le voyons avec le tableau ci-dessus, les seize (16)
interviewés ont avancé cinquante et une (51) raisons expliquant d'après
eux la venue de leurs amis en ville.
Ces raisons constituent après anal y-
se, dix-sept (17) items.
Ces derniers ont été regroupés sous douze (12)
sous-catégories classées en quatre (4) catégories.

U~IV[RSIT( O[ "ü",rR[.\\L
l~ù
La catégorie dominante est celle qui a trait à la réussite et au
gain personnel.
Elle est soutenue par quatorze (14) des dix-neuf (19)
interviewés et regroupe trente-sept (37) des cinquante-et-un (51)
énoncés.
Elle est suivie de loin par la catégorie "attrait de la ville",
avec seulement six (6) énoncés de quatre (4) interviewés.
Le développement de ces catégories renvoie à celui que nous avons
fait précédemment à la question quatre.
Et cela d'une manière générale.
Toutefois nous pouvons mentionner l'apparition de cinq (5) nouveaux énoncés
dans l'ensemble des réponses.
Il s'agit:
du désir de faire du commerce à Abidjan
de l'espoir d'être bonnes de maison dans le cas des filles
de l'ambition d'embrasser le métier des armes dans le cas
des garçons.
Il s'agit aussi de ceux qui, attirés par la ville, y seraient venus dans
le but de se promener comme badauds simplement, ou de se livrer à la
débauche.
Il faut souligner que les interviewés étaient beaucoup plus
volubiles pour expliquer la venue er ville de leurs amis, que lorsqu'ils
évoquaient les raisons ayant motivé leur propre migration.
A preuve, ils
ont signalé ci nquante-deux (52) ra i sons contre quarante-et-un (41) dans
leur propre cas.
Et parmi les cinq (5) énoncés que nous avons considérés
comme nouveaux dans leurs éléments de réponse, trois (3) ont un caractère
plutôt péjoratif.
Soit:
"bonne de maison", "badauds" et "débauche".

UNI\\'f~SIH Df ·"0:- r~f ~l
141
Cherchant maintenant à savoir si certains des répondants avaient
rencontré des problèmes à leur arrivée à Abidjan, nous leur avons posé une
question à cet effet.
A cette question qui est la septième de notre série
sur la ville, onze (11) des dix-neuf (19) interviewés ont déclaré avoir
rencontré des problèmes de différentes sortes.
Vingt-six (26) énoncés
ont été recensés à cette question.
L'analyse de leur signification nous
a amené a les réduire à treize (13) items reportés en huit (8) sous-catégo-
ries.
Celles-ci à leur tour, analysées dans leur contenu, nous ont donné
les quatre (4) carégories que présente le tableau qui suit.
Tableau 12:
Typologie des problèmes rencontrés par les interviewés
à Abidjan
A. Problèmes d'ordre psycho-sociologique.
11 énoncés
6 interviewés
l. Acclimatation
a) Adaptation
4 énoncés
4 répondants
b) Dépaysement
2 énoncés
2 répondants
c) Intégration
énoncé
répondant
2. Nostalgie
2 énoncés
2 répondants
3. Relations sociales
a) Mésentente avec tutrice
énoncé
répondante
b) Problème de soutien sûr
énoncé
répondant
B. Problèmes d'ordre matériel élémentaire.
8 énoncés
5 interviewés
l. Argent
5 énoncés
5 répondants
,.,
L .
Logement
?
- énoncés
2 répondants
3. Satisfaction de besoin
énoncé
répondant

U"'\\lRS'H Ol "O";TR[~l
14:2
C. Problème d'ordre socio-professionnel.
5 énoncés
5 interviewés
1. Travail
a) Emploi
3 énoncés
3 répondants
b) Apprentissage d'un métier
2 énoncés
répondant
c) Placement
énoncé
répondant
O. Problème de santé.
énoncé
l i nterv i ewé
Afin de pouvoir faire une analyse d'ensemble des problèmes que
les interviewés et leurs amis ont rencontrés dès leur arrivée en ville,
nous nous permettons de présenter ci-après le tableau relatif aux problè-
mes des amis que les interviewés ont évoqués en réponse à la question
dix (10).
Trente-trois (33) énoncés ont été enregistrés.
Quinze (15)
items en ont découlé que nous avons rassemblés en douze (12) catégories.
L'ensemble constitue quatre (4) catégories de problèmes qu'ont rencontrés
les amis de seize (16) interviewés.
Ceci donne la typologie suivante.
Tableau 13:
Typologie des problèmes rencontrés par leurs amis
A. Problème d'ordre matériel.
13 énoncés
7 interviewés
l. Logement
6 énoncés
6 répondants
2. Argent
3 énoncés
3 répondants
3. Habi 11 ement
2 énoncés
2 répondants
4. Nourri ture
énoncé
répondant
5. Transport
énoncé
répondant

t;I"VrRSIH DE \\H)'.rR[ \\l
143
B. Problème dlordre socio-professionnel.
9 énoncés
8 interviewés
1. Trava il
a) Manque d'emploi
5 énoncés
5 répondants
b) Absence de qualification
énoncé
répondant
2. Etudes:
difficulté de scolarisation
3 énoncés
3 répondants
C. Problème d'ordre psycho-sociologique.
9 énoncés
7 interviewés
l . Rel âchement des liens de famill e
a) r~anque de soutien paternel
4 énoncés
3 répondants
b) r~anque de tuteur
énoncé
répondant
2. Acclimatation
a) Adaptation
énoncé
répondant
b) Intégration
énoncé
répondant
3. Prison
énoncé
répondant
4. Chagrin d'amour
énoncé
répondant
O. Problème de santé:
2 interviewés
2 énoncés
? répondants
En comparant les deux tableaux, nous constatons que les amis des
répondants ont rencontré les mêmes problèmes que ces derniers.
A la seule
différence près que certains répondants niant connu ni la prison, ni le cha-
grin d'amour qulils attribuent à leurs amis. Ces détails nous autorisent
toutefois à traiter ces deux questions à la lumière dlun seul cadre dlana-
lyse. Nous commençons par les problèmes dlordre matériel élémentaire. Cette
catégorie fait référence à l lensemble des besoins les plus immédiats que
nlauraient pas pu satisfaire les répondants et leurs amis dans la quotidien-
neté de leurs premiers moments en ville. Ces problèmes ont ainsi trait à la

144
satisfaction de besoins primaires.
Il s'agit en premier lieu, des pro-
blèmes d'argent.
La plupart des jeunes adultes qui arrivent pour la pre-
mière fois en ville où tout s'achète, sont très vite en butte à des diffi-
cultés d'ordre financier.
D'après eux, sans argent, beaucoup de problèmes
restent sans issue.
A ce problème d'argent s'ajoute, selon les répon-
dants, celui de logement.
Si certains sont accueillis et hébergés sans
grande peine, d'autres au contraire ont de la difficulté à se loger.
Parmi
ces derniers, il y en a qui ont quitté leur village dans l'espoir de ren-
contrer quelqu'un du village ou une connaissance.
Mais en attendant que
la solidarité familiale et villageoise joue son rôle de soutien, un pro-
blème de toit sûr se pose sans cesse à ces nouveaux venus.
En plus de ces
deux principaux genres de problèmes considérés par eux plus aigus, les
répondants avouent rencontrer d'autres problèmes ayant trait à la nourri-
ture i nsuffi sante.
Ils y ajoutent auss i ceux de l' habi 11 ement dont ils
auraient grand besoin et d'une manière générale, l'insatisfaction des
différents besoins mineurs dont ils déclarent souffrir.
A ces problèmes d'ordre matériel, une autre catégorie, qui en est
peut-être la source, ajoute son effet négatif.
C'est celle qui regroupe
les problèmes d'ordre socio-professionnel.
Ceux-ci sont dans leur ensemble
dominés par la recherche de travail.
La recherche du travail salarié aui
serait un des problèmes majeurs des nouveaux citadins revêt différentes
formes.
Cela peut être l'emploi salarié immédiat, comme l'apprentissage
d'un métier en vue d'une qualification qui fait défaut au jeune adulte
suite à son bas niveau de scolarisation ou à son analphabétisme.

145
Trouver un emploi salarié, être "placé" dans une entreprise,
apprendre un métier seraient donc les principaux problèmes d'ordre socio-
professionnel que vivent les jeunes adultes ruraux qui prennent pour la
première fois la mesure de la vie urbaine.
Mais ce qui les rend plus
aigus, selon les interviewés, ce seraient les problèmes d'ordre psycho-
sociologiques qui se greffent sur ces premiers.
Cette catégorie de problèmes se définit principalement à travers
l'acclimatation que les jeunes adultes n'arrivent pas à réaliser.
Il
s'agit des problèmes liés à l'adaptation au nouvel environnement que cons-
titue une grande ville comme Abidjan.
Il en résulte alors un malaise qui
se traduit par un sentiment de dépaysement.
Dans ce contexte, le jeune
adulte se sent loin de chez lui, loin de son milieu connu qu'est son
village.
Cela est d'autant plus ressenti qu'il ne lui est pas facile de
s'intégrer, aussi rapidement qu'il le souhaiterait, dans le cadre urbain.
La nostalgie s'empare de ces nouveaux venus dans un monde qu'ils
ne connaissent pas et qui, malgré tout ce qu'ils en attendent de bénéfique,
les fait penser à leur milieu d'origine.
Ce milieu qui sans conteste est
celui qui leur ressemble le plus, même slil ne répond pas à leurs aspira-
tions à la modernité.
Pour certains d'entre eux, ces problèmes d'acclimation sont le
plus souvent aggravés par le relâchement des liens sociaux.
Les uns sont
sans support des parents en ville;
les autres sont en conflit avec leurs
tuteurs.
Ce refroidissement des rapports sociaux de la famille en milieu

146
urbain redéfinit à sa manière un nouvel ordre de relations sociales que
découvrent.avec tristesse et regret, les nouveaux citadins.
1
Comme autres problèmes d'ordre psycho-sociologique, certains des
interviewés ont déclaré que leurs amis ont été rongés par un chagrin
d'amour.
Croyaient-ils avoir rencontré leur compagnon idéal de vie?
Leur
espoir déçu, ils pleurent et ruminent leur chagrin.
Pleurent peut-être
aussi, ceux qui, non habitués au milieu urbain et en proie à des difficul-
tés se sont rendus coupables d'actes répréhensibles qui les ont entraînés
derrière les barreaux d'une prison et dont parlent leurs amis.
Autant de problèmes auxquels il faut ajouter la détérioration de
la santé qu'auraient connu certains des interviewés et leurs amis à leur
arrivée à Abidjan.
Trois principaux ordres de problèmes auraient donc af:~cté
l'ensemble des répondants et leurs amis.
Matériels, psycho-sociologiques
et socio-professionnels, ces différents types de problèmes ont été inéga-
lement vécus par les répondants.
D'après les énoncés, les problèmes matériels ont beaucoup plus
affecté les jeunes adultes dès leur arrivée en ville.
Ces problèmes maté-
riels recouvrent à eux seuls vingt-et-un (21) énoncés parmi le total des
cinquante-neuf (59) que constituent les réponses.
A l'intérieur de cette catégorie de problèmes matériels, deux
sous-catégories ayant chacune huit (8) énoncés dominent l'ensemble.
Il
s'agit de la sous-catégorie qui évoque les besoins d'argent et de celle du
logement.

Dans un environnement urbain où tout s'achète avec de l'argent
et où aussi les dimensions des habitations sont à l'image des moyens dont
disposent les locataires, il n'est pas étonnant que les répondants évoquent
en premier lieu des problèmes relatifs au logement et aux moyens financiers.
Du point de vue de l'importance en nombre d'énoncés et d'inter-
vie\\vés, seize (16) énoncés faits par neuf (9) interviewés pour l'ensemble
des deux questions se rapportent à ces problèmes.
Les problèmes d'ordre psycho-sociologique viennent en seconde
place.
Dans cette catégorie, les problèmes liés à l'insertion des jeunes
adultes en milieu urbain ont été les plus évoqués.
Des six (6) sous-
catégories qui constituent cet ensemble, celle que nous avons dénommée
"acclimatation" comprend à elle seule sept (7) énoncés.
Elle est suivie
par la sous-catégorie des énoncés liés au relâchement des liens familiaux
constatés par les nouveaux en milieu urbain.
Six (6) répondants l 'ont
souligné dans sept (7) énoncés.
Enfin, la dernière des grandes catégories qui structurent les
éléments de réponses à ces deux questions est celle qui regroupe les énon-
cés des problèmes d'ordre socio-professionnel.
Dix (10) des dix-neuf (19)
interviewés ont déclaré avoir été touchés par ces problèmes, comme l'on
pouvait s'y attendre, la sous-catégorie "travail" regroupe douze (12)
énoncés émis par onze (11) répondants pour une catégorie qui en possède
quinze (15).
La recherche du travail serait donc l'un des points les plus
préoccupants dans cette catégorie de problèmes socio-professionnels.

148
Ces différents types de problèmes, matériels, socio-profession-
nels, psycho-sociologiques et de santé, qu'ont évoqués les interviewés
décrivent les différents aspects de la situation que vivent les jeunes
adultes ruraux qui émigrent en ville.
Mais comment se sont-ils pris pour
répondre à ces problèmes?
C'est ce que nous avons cherché à connaître
par les questions huit (8) et onze (11) qui vont suivre.
Les questions 8 et 11 nous font connaître le mode de résolution
adopté par les jeunes adultes et leurs amis face aux problèmes rencontrés
en ville.
La question 9 quant à elle évoque un autre mode de solution
souhaitée par les jeunes adultes eux-mêmes, indépendamment de celui qu'ils
ont évoqué.
Nous présentons ici dans un tableau à deux parties, d'abord les
solutions adoptées, et ensuite les solutions souhaitées.
En réponse à ces questions, cinquante-six (56) idées ont été
énoncées.
Une analyse de contenu nous a conduit à réduire leur nombre à
vingt-trois (23) items.
Une reprise de ces items nous a permis de les
classer en douze (12) sous-catégories.
Finalement, celles-ci ont été
regroupées sous quatre (4) types de solutions ou catégories.
Tableau 14:
Typologie des solutions adoptées par les interviewés
et leurs amis
A. Aide morale et matérielle d'autrui.
25 énoncés
12 interviewés
1. Les amis
a) Aide morale et financière
des amis
11 énoncés
9 répondants
b) Aide des connaissances
5 énoncés
4 répondants

U"'IVERSrn DE "O"'TR(·\\L
149
2 . La famille
a) Les parents
8 énoncés
8 répondants
b) Le tuteur
énoncé
répondant
B. Actions personnelles positives.
15 énoncés
9 interviewés
l. Obtention de source de revenu
a) Travail
4 énoncés
4 répondants
b) Apprentissage d'un métier
énoncé
répondant
c) Commerce
énoncé
répondant
d) Inscription au foyer de la femme
énoncé
répondante
e) Obtention d'une bourse
3 énoncés
3 répondants
2. Changement d'attitude et de comportement
a) La bonne conduite
énoncé
répondant
b) Résignation
énoncé
répondant
c) Habitude
énoncé
répondant
d) Adaptation
énoncé
répondant
e) Conversion religieuse
énoncé
répondant
C. Actes de désespoir comme solution de rechange
13 énoncés
7 interviewés
l. Acte de délinquance
.,
a) Débauche
2 énoncés
c.. répondants
b) Vol
énoncé
répondant
2. Retour au vill age
3 énoncés
3 répondants
3. Voyage à l'étranger
3 énoncés
3 répondants
4. Mariage
2 énoncés
2 répondants
5. Mariage précoce
1 énoncé
répondant
;1
1

UNIVE~SIH DE .\\I0,;r~l~l
150
o. Statu quo. 3 énoncés 3 interviewés
1. Aucune solution
2 énoncés
2 répondants
2. Attente avec espoir
énoncé
répondant
Face à ces solutions que leurs amis et eux ont adoptées, les
interviewés auraient souhaité un autre type de solutions fondé sur une
aide accrue ou sur des actions personnelles favorisées.
C'est ce que
présente le tableau suivant qui comporte:
onze (11) énoncés, cinq (5)
items équivalant à cinq (5) sous-catégories et deux (2) catégories.
Tableau 15:
Typologie des solutions souhaitées
A. Aide d'autrui accrue.
8 énoncés
5 interviewés
1. Service d'aide aux jeunes adultes
de la part de l'Etat
5 énoncés
5 répondants
2. Les amis
2 énoncés
2 répondants
3. Les parents
énoncé
l répondant
B. Actions personnelles encouragées.
3 énoncés
2 interview~s
1. Travail
3 énoncés
2 répondants
2. Engagement personnel
énoncé
·1 répondant
La catégorie "aide morale et matérielle d'autrui" renferme toutes
les ressources qu'auraient utilisées les répondants dans la résolution de
leurs problèmes.
Soulignons d'abord la famille.
Celle-ci correspond d'une manière
générale à l'ensemble désigné sous le vocable de parents, à savoir le
frère, la soeur, l'oncle et le cousin.
Nous avons aussi inclus dans la
famille, le tuteur.
Dans leur réponse, les interviewés mentionnent l'aide

UNIVERSITE 01 MONTREAL
151
d'un frère qui a trouvé du travail à un jeune adulte, le soutien moral du
tuteur ou l'aide matérielle de l'oncle.
En plus de la famille, les jeunes adultes ont aussi recours à
leurs amis, anciens ou nouveaux.
Ainsi pour certains, le fait de se
trouver de nouveaux amis ou d'entretenir des contacts avec d'autres les
a-t-il aidés à résoudre quelques-uns de leurs problèmes.
Dans leur période
de difficultés, les plus chanceux parmi eux ont déclaré avoir bénéficié
d'une aide financière de certains de leurs amis.
En plus des amis qui les
ont aidés, d'autres interviewés affirment avoir eu recours à certaines de
leurs connaissances.
Les connaissances sont ici définies par les personnes
d'un rang social élevé avec lesquelles les jeunes adultes ont pu entretenir
des relations.
C'est le cas d'un interviewé qui avoue que les connaissan-
ces l'ont beaucoup aidé à résoudre ses problèmes en lui trouvant un travail
en ville.
Mais si l'aide d'autrui (famille et amis) a été un apport appré-
ciable pour les répondants, certains jeunes adultes ont dO entreprendre de
leur chef, des initiatives personnelles qui se sont avérées bénéfiques
pour eux.
Quelques-uns ont obtenu un emploi salarié.
D'autres se sont
fait violence en changeant d'attitude et en modifiant même leur comporte-
ment.
Ainsi en est-il de cet interviewé qui est fier de dire:
"ma bonne
conduite a fait que quelqu'un m'a trouvé du travail".
Il y en a aussi pour qui la so1ution à leurs problèmes est
passée par une attitude de résignation face aux difficultés de la vie
urbaine, c'est-à-dire en acceptant la solution la plus immédiate sans
autre forme de réaction.
En somme i1s se sont fait une raison.

152
Ou bien alors avec le temps, l'habitude et l'adaptation aidant, certains
ont trouvé leurs problèmes moins aigus.
Ce qui, en quelque sorte, consti-
tue pour eux une forme de solution.
Pour une personne, la solution a été
de se convertir à une religion.
Mais tous les répondants n'ont pas choisi la voie de l'inaction.
Certains, en plus de chercher du travail, se sont établis à leur propre
compte en ouvrant un petit commerce.
D'autres aussi se sont mis à appren-
dre un métier, afin d'être armés pour le marché du travail en milieu ur-
bain.
Pour les filles, certaines se sont inscrites dans "les foyers de la
femme" afin d'y apprendre un métier qui pourrait leur ouvrir la porte d'un
emploi salarié ou celle d'un atelier personnel de couture.
Comme nous pouvons le constater, les voies et moyens utilisés
par les répondants pour résoudre leurs problèmes sont fort divers.
Par-
tant de l'aide d'autrui à l'initiative personnelle qui ont revêtu plusieurs
formes, les interviewés et leurs amis ont tenté de trouver des solutions
possibles à leurs problèmes.
Par là, ils ont fait preuve de lutte et
d'entêtement pour vaincre ces difficultés.
Par contre, d'autres n'ont pas jugé bon d'adopter de telles voies
et moyens.
En revanche ils ont posé des actes de désespoir ou adopté des
solutions de rechange, face à ces problèmes.
C'est le cas par exemple de ceux qui, pensant qu'Abidjan ne
leur était plus favorable, ont préféré aller tenter leur chance ailleurs.
hors de la Côte d'Ivoire.
Certains sont donc partis à l'étranger, et

UNIVERSITE Dl \\10NTRC\\l
153
notamment en France.
D'autres, peut-être par réalisme ou par pur déses-
poir ont dû retourner au village.
Est-ce là un repli stratégique ou une
solution tragique?
Pour quelques filles qui n'ont pas l'intention de
retourner de si tôt au village, le mariage, et parfois un mariage précoce
a été une issue à leurs problèmes.
Comme conséquences de ces multiples difficultés, les amis de
certains répondants ont dû poser des actes de délinquance.
Les uns se
seraient mis à voler d'autres se seraient livrés à la débauche.
Dans cet ensemble hétéroclite de jeunes adultes, certains affir-
ment que leurs problèmes n'ont pas encore trouvé de solution mais ils gar-
dent l'espoir d'une issue favorable.
A l'analyse générale du tableau, les interviewés et leurs amis
ont beaucoup eu recours à l'aide morale et matérielle d'autrui dans la
résolution de leurs problèmes.
En effet douze (12) interviewés sur dix-
neuf (19) affirment qu'eux-mêmes ou leurs amis ont eu recours à cette
aide.
Ils l'ont énoncé en vingt-Cinq (25) idées.
Et dans cette aide reçue
d'autrui, les amis des uns et des autres y ont contribué pour beaucoup.
Dans cette sous-catégorie, neuf (9) répondants ont émis onze (11) énoncés
à cet égard.
Dans cette catégorie d'aide reçue d'autrui,
la sous-catégorie
qui fait référence aux parents vient en seconde place avec huit (8) énon-
cés faits par huit (8) répondants.
Dans cet ordre, les connaissances
viennent en troisième position.
L'on peut donc en déduire que l'aide des

_ '__
-""
"""'
"""
~
~
_
'
-
"
'
=
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UNIVlRSITl
~ ~ "
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' ; " ."ON
_ " "
TRl·\\l
" " " " ' " " " " ' i
154
amis a été un facteur déterminant dans la résolution des problèmes de ces
jeunes adultes.
Cette première catégorie de solution est suivie, en importance
par celle qui concerne les actions personnelles posées par les jeunes
adultes eux-mêmes.
Neuf (9) interviewés affirment avoir résolu eux-mêmes
leurs problèmes.
Ces actions ont consisté en majorité a l'obtention d'une
source de revenu.
La troisième catégorie et la dernière qui mérite d'être signalée,
c'est celle des solutions de rechange comme palliatifs a ces différents
problèmes.
Dans cette série, aux ~ctes de délinquance (trois (3) énoncés
à ce sujet) suivent le retour au village ou le départ a l'étranger.
Ou
simplement le mariage, pour couper court a tout, dans le cas des filles.
Sept (7) interviewés ont évoqué ces actes en treize (13) énoncés.
D'autres formes d'aide souhaitée n'ont pas été différentes de
celles qu'ont avancées les répondants. Pour certains, ils auraient souhai-
té voir accrue l laide des parents et des amis.
Pour d'autres, l'Etat
devrait mettre sur pied un service d'aide aux jeunes adultes.
Par contre, quelques interviewés (3) ne voulaient d'aucune sorte
d'aide qu'ils considèrent comme une espèce de pauvreté assistée.
Ils
auraient souhaité que des emplois soient créés;
ce qui les rendrait
autonomes dans la mesure où cela exigerait une implication personnelle
de leur part.

155
A ces jeunes adultes, confrontés à différents problèmes dès
leur arrivée en ville, nous avons demandé quels services éducatifs ils
auraient souhaité voir mis en place afin de pallier à leurs problèmes.
En réponse à cette question, quarante-et-une (41) idées nous
ont été suggérées par les répondants.
Celles-ci analysées dans leur
contenu ont été réduites à vingt-trois (23) items formant onze (11) sous-
catégories.
Ces onze (11) sous-catégories constituent, après analyse,
quatre (4) catégories de services proposés par les jeunes adultes.
Voici
la typologie de ces services dans le tableau suivant.
Tableau 16: Typologie des services éducatifs souhaités en ville
A. Services techniques de formation.
15 énoncés
11 interviewés
1. Centre de formation professionnelle
5 énoncés
4 répondants
2. Centre d'apprentissage de métier
4 énoncés
3 répondants
3. Services d'orientation professionnelle
3 énoncés
3 répondants
4. Etablissements de formation
a) Musique
énoncé
l répondant
b) Théâtre
énoncé
répondant
c) Coll ège
énoncé
répondant
B. Services socio-éducatifs.
11 énoncés
8 interviewés
l. Education populaire
a) Education morale
2 énoncés
répondant
b) Education civique et civile
énoncé
répondant
c) Centre de scoutisme
énoncé
répondant
d) Education politique
énoncé
l répondant
e) Alphabétisation
énoncé
répondant
•&.k..!21s."z:s...., _.IM

UNIVERSITE DE MüNTR[·\\l
156
2. Réception
a) Hébergement
3 énoncés
3 répondants
b) Accueil
2 énoncés
2 répondants
119 énoncés
5 interviewés
C. Services de sports et de loisirs.
l. Sports
a) Terrain de jeux (stade)
3 énoncés
2 répondants
b) Football
2 énoncés
2 répondants
c) Arts martiaux
énoncé
répondant
2. Loisirs
a) Cinéma (salle)
2 énoncés
2 répondants
b) Jardins publics
énoncé
répondant
c) Coin d'amusement
énoncé
répondant
d) Centre culturel
énoncé
répondant
o. Services publics d'information pour jeunes adultes
4 énoncés
4 interviewés
1. Services d'information
2 énoncés
? répondants
2. Séminaire d'information
énoncé
répondant
3. Commission nationale d'information
sur les problèmes de la ville
énoncé
l répondant
Les services publics d'information que les jeunes adultes
souhaiteraient voir mis en place, sont ceux qui pourraient les renseigner
sur le monde contemporain d'une manière générale et sur la vie urbaine en
particulier.
Il s'agit, dans cette catégorie, de l'ensemble constitué de
halls ou de centres d'information.

157
Ces unités seraient équipées de revues à caractère éducatif et de
matériel audio-visuel. L'action de ces centres pourrait être complétée par
des services d'information destinés aux jeunes adultes et spécialement à
ceux qui arrivent en ville. Les répondants souhaiteraient aussi voir mettre
en place une commission nationale d'information qui se chargerait spécia-
lement de renseigner les nouveaux arrivants sur les problèmes de la vie en
milieu urbain, milieu qu'ils découvrent pour la première fois.
L'utilité de ces services d'information pourrait s'avérer
payante dans la mesure 00 ils déboucheraient sur la mise sur pied d'un
certain nombre de services techniques de formation pour jeunes adultes.
Cette catégorie de services souhaités répondrait ainsi à un but
utilitaire en favorisant l'acquisition d'une occupation professionnelle
adaptée au contexte social et au niveau scolaire des jeunes adultes.
Il
s'agit en particulier des centres de formation professionnelle et des
services d'orientation professionnelle.
Les services d'orientation profes-
sionnelle s'adresseraient aux jeunes adultes qui ont déjà été scolarisés
afin de leur permettre de faire un choix approprié dans tel ou tel secteur
de l'enseignement technique;
non seulement en fonction des besoins du
milieu mais en fonction des capacités propres de ces jeunes adultes et
aussi de leur goût.
Cette formation pourrait être dispensée dans des ins-
titutions techniques que les jeunes adultes voudraient voir se multiplier
à travers le pays.
Ces centres qui seraient d'un niveau de formation à
la base du certificat d'études primaires pour les scolarisés, auraient le
statut de centres d'enseignement intégré dans le cas des filles et prépa-
reraient celles-ci à un emploi immédiat.

UNIVERSITf DE ·\\\\ü"IR[·\\l
158
Pour ceux, parmi l es répondants, qui ont le goût de l'art, la
multiplication des écoles de formation musicale et de théâtre reçoit leur
adhésion.
Une autre catégori e de servi-ces proposés par l es répondants
regroupe les activités de sports de des loisirs.
A un âge où le sport et
les loisirs occupent la moitié de leur temps libre, les jeunes adultes
souhaiteraient la mise en place dans les différents quartiers de la ville
d'Abidjan, des terrains de sports accessibles.
Leur préférence va toute-
fois aux terrains de football, pratique sportive qui a de nombreux adeptes
parmi ces jeunes gens.
Enfin dans cette catégorie de sports et de loisirs,
certains répondants, peut-être pour se défouler ou diminuer leur agressi-
vité, souhaiteraient la construction de salle de sport de combat et
d'arts martiaux.
Au sport que certains voudraient pratiquer pour, au besoin, se
préparer à des compétitions de haut niveau, d'autres interviewés y asso-
cieraient volontiers d'autres formes de loisirs.
C'est pourquoi, ils
souhaiteraient la construction et l'équipement de centres culturels plus
fonctionnels où ils pourraient se distraire durant leurs temps libres.
Comme ils souhaiteraient aussi l'aménagement d'espaces verts ou de jardins
publics qui font défaut à Abidjan.
Il en serait de même des salles de
cinéma public où seraient projetés des films à dominante éducative et
auxquels les jeunes adultes auraient accès à la mesure de leurs moyens.
Une catégorie de services suggérés par les répondants relèvent
du secteur socio-éducatif.
On y trouverait une unité de réception

U'IIVERSIT[ DE MO'.;TR[,\\l
159
chargée de l'accueil et de 1'hébergement des jeunes nécessiteux et en
particulier les jeunes adultes ruraux qui arrivent pour leur premier séjour
en ville.
L'existence de cette unité amortirait~en quelque sorte, le choc
que ressent tout nouveau venu dans un endroit qui lui est étranger, en
l'occurrence la grande ville d'Abidjan.
En marge de l'accueil et de 1'hébergement, l'on pourrait dévelop-
per, selon les interviewés, des actions d'éducation populaire touchant
plusieurs aspects.
Parmi ceux-ci, l'éducation civique et civile.
L'édu-
cation civile aurait pour but de développer chez ceux à qui elle s'adres-
serait des notions générales de la "chose publique", son utilité et son
utilisation.
Mettant ainsi en pratique 1 'honnêteté et le respect vis-à-vis
des services de gestion de la chose publique, l'éducation civile contri-
buerait au développement du sens de l'Etat.
Quant à l'éducation civique, elle axerait son action sur les
droits des citoyens et leurs devoirs en tant que membres d'une société
civile définie par l'état, la nation et la patrie.
Ces deux secteurs de l'éducation iraient de pair avec l'éducation
morale à partir de conseils et des enseignements qui "amènent à la bonne
vie" comme dit un des interviewés.
Certains répondants suggèrent aussi la multiplication dans les
quartiers des centres d'alphabétisation de base pour ceux qui ne savent
ni lire ni écrire, et qu'ils appellent d'une manière pudique "les illettrés".
La création aussi des sections de scoutisme qui formeraient au courage et à

L'NIVfR5IH Of '~OSTR(·\\l
160
l'abnégation dans le cadre du développement de la personnalité, font partie
des suggestions recueillies des répondants.
Parmi les répondants, il y en a qui souhaiteraient participer à
la gestion de leur cité et même du pays.
Dans ce sens ils suggèrent la
création d'un centre d'animation du PDCI:
(Parti démocratique de Côte
d'Ivoire) parti unique au pouvoir au pays.
Pour eux, leur participation à la vie du Parti et donc de la
politique du pays passe par des centres de formation et d'animation qui
initieraient à l'idéologie du P.D.C.I.
Selon les répondants, les services éducatifs'ci-dessus mentionnés
dans les différents secteurs de l'activité sociale du pays et de la ville
d'Abidjan, permettraient de résoudre en partie les difficiles problèmes que
rencontrent ceux qui arrivent de la campagne.
D'après le tableau des énoncés qui a fait l'objet de la précé-
dente analyse, il ressort que les interviewés souhaitent en premier lieu
la mise en place et le développement de services techniques de formation.
Cette catégorie regroupe quinze (15) énoncés sur un ensemble de quarante-
et-un (41) pour toute la question.
Et elle est proposée par onze (11)
interviewés sur dix-neuf (19).
Dans cette catégorie, la création de centres de formation profes-
sionnelle évoqués en cinq (5) énoncés par quatre (4) répondants ainsi que
le développement des centres d'apprentissage souhaité par trois (3) répon-
dants sous quatre (4) énoncés constituent les points principaux de cette
catégorie de services.

UNIVERSITl DE .\\\\o,,<rRE·\\l
161
Elle est suivie par celle qui regroupe les suggestions allant
dans la définition des services socio-éducatifs.
Avec pour principales
sous-catégori es la récepti on et l' éducati on popul ai re des jeunes adultes,
elle est composée de onze (11) énoncés émis par huit (8) interviewés.
Parmi ces onze (11) énoncés six (6) vont à l'éducation populaire suggérée
par cinq (5) répondants.
Ce même nombre de répondants a retenu autant
d'énoncés proposant la mise en place d'un service d'accueil et d'héber-
gement.
Dans cet ordre de priorité, les services de sports et loisirs
partagent le deuxième rang en énoncés avec le secteur socio-éducatif.
Mais la force des services socio-éducatifs réside dans le fait
qu'ils ont été proposés par huit (8) interviewés alors que le sport et les
loisirs ne l'ont été que par cinq (5).
Ce sont donc là les trois principales séries de services propo-
sés par les interviewés et qui ont retenu notre attention.
Les jeunes adultes qui ont quitté la campagne pour la ville
auraient pu ne pas la quitter.
Il se pourrait donc qu'ils y soient restés
si elle était tout autre.
C'est pourquoi nous leur avons posé la question
à savoir selon eux, qu'est-ce qu'il aurait fallu changer dans cette
campagne pour qu'ils y restent?
Ou, autrement dit, comment ils auraient
voulu la voir pour ne pas la quitter?
A cette question, nous avons recueilli vingt-sept (27) avis
concernant la nouvelle vision de cette campagne.
Ces avis ou énoncés ont

162
fait l'objet d'une analyse de contenu.
Il en est alors sorti quatorze (14)
items.
Une analyse d'un autre niveau a réduit ce nombre à cinq (5).
Ce
qui constitue nos cinq (5) sous-catégories coiffées par deux (2) grandes
catégories.
Tableau 17:
Typologie des aspects de la nouvelle vision de la campagne
A. Modernisation de la campagne.
17 énoncés
13 interviewés
1. Transformation sociale du milieu rural
a) Reconstruction des villages
2 énoncés
?
'.-
répondants
b) Equipement en eau et électricité
2 énoncé
2 répondants
c) Equipement sanitaire
2 énoncés
2 répondants
d) Equipement de formation
3 énoncés
2 répondants
e) Pension de retraite paysanne
énoncé
répondant
2. Transformation culturelle
a) Loisirs et cinéma
3 énoncés
3 répondants
b) Structures modernes de distractions
2 énoncés
2 répondants
c) Contact avec la ville
énoncé
répondant
3. Disparition des sorciers
énoncé
répondant
B. Transformation économique de la campagne.
10 énoncés
9 interviewés
1. Restructuration économique
a) Création de sources de revenu
4 énoncés
3 répondants
b) Décentralisation économique
énoncé
répondant
c) Financement des jeunes paysans
énoncé
répondant
2. Transformation de l'agriculture
a) Modernisation de~ méthodes
2 énoncés
2 répondants
b) Réforme du système foncier
2 énoncés
2 répondants

U:->IVERSIT( OE MONTRE,\\l
163
Selon les interviewés, ce qui pourrait les retenir a la campa-
gne, c'est la modernisation de celle-ci.
Cette catégorie se définit par
la transformation sociale du milieu rural, son changement socio-culturel
et la disparition des sorciers des villages.
Sur le plan social, cette transformation devrait s'opérer,
d'après les répondants, avec la reconstruction des villages.
Car pour
eux, il faudrait un minimum de modernisme a la campagne.
Ce qui signifie,
a leur avis, mettre certaines choses de la ville dans les villages. Cela
nécessite donc la mise en place d'un nouveau style d'habitat dans les
villages où les maisons, en dur, seraient équipées en eau courante et
électricité.
Cette transformation du milieu rural se ferait également avec la
mise en place d'une structure sanitaire qui doterait les villages ainsi
reconstruits sinon d'hôpitaux, du moins de centres de santé fonctionnels.
Les interviewés souhaiteraient aussi y voir cette transformation
s'accompagner d'une augmentation des équipements de formation comme les
centres d'apprentissage accessibles aux jeunes adultes ruraux.
Aussi, par leur travail, ils espèrent pouvoir passer de meilleurs moments
durant leurs vieux jours.
C'est pourquoi les interviewés estiment qu'il
serait mieux que soit instauré un système de pension de retraite pour les
paysans comme cela se fait pour les travailleurs des villes.
Du point de vue culturel, la transformation s'opérerait avec la
mise en place d'un ensemble de moyens de distractions susceptibles d'in-

UNIVERSITE DE MONTR[Al
164
téresser les jeunes adultes et de les inciter a rester au village.
Cela
signifie, d'après les répondants, qu'il faudrait leur donner les possibi-
lités d'avoir des activités aussi variées qu'en ville afin de ne pas
être "livré a soi-même".
Ce qui en somme leur offrirait des distractions
comme le cinéma et "tout ce qui peut amuser la-bas" (a la campagne).
Sur un autre plan, certains auraient aimé voir une campagne qui
abandonnerait ses pratiques jugées néfastes.
Comme par exemple, la sor-
cellerie redoutée par les jeunes adultes.
Si l'on en croit les répon-
dants, certains aimeraient bien rester a la campagne "si les sorciers ne
fatiguaient pas au village".
La vision moderniste de la campagne sur le plan social et cultu-
rel serait aussi complétée par la transformation de la vie économique.
Par transformation économique, nous entendons, selon les répondants, une
mutation profonde de l'agriculture et une restructuration rigoureuse des
facteurs économiques.
Une agriculture transformée serait donc celle qui verrait ses
méthodes techniques changer pour une meilleure rentabilité.
Cette agri-
culture passerait ainsi d'un "état archafque" stationnaire a des méthodes
techniques plus élaborées et plus efficientes.
Ce serait alors une agri-
culture beaucoup plus développée qu'elle ne l 'est maintenant et qui occu-
perait davantage et utilement les jeunes ruraux.
Mais cette modernisation,
pour être effective irait de pair avec une réforme du système foncier.
Celle-ci ferait en sorte que les jeunes adultes puissent trouver une terre
a cultiver dans la mesure 00 elle induirait une garantie des terres et
une répartition sûre et équitable de celles-ci.

165
Une transformation de l'agriculture serait un facteur de main-
tien des jeunes ~ la campagne.
Mais selon les interviewés, ces jeunes
ruraux y resteraient davantage si parallèlement était menée une restruc-
turation économique.
Celle-ci donnerait pour résultats positifs aux yeux
des jeunes adultes ruraux, la possibilité "de pouvoir trouver le minimum
vital comme à la ville".
C'est dire que cette restructuration suppose la
création de sources de revenus avec l'ouverture de "chantiers de travail".
Ou aussi avec la présence à la campagne d'unités de production, c'est-à-
dire "avoir des petites sociétés au village pour y travailler et se dé-
brouiller".
Mais aussi, à grande échelle, la création d'usines Pou rv9yeu-
ses d'emploi.
Ainsi, sur le plan de l'aménagement du territoire, abouti-
rait-on, d'après les répondants, à une espèce de décentralisation économi-
que.
Car elle aurait alors introduit certaines industries de transforma-
tion de biens courants dans les localités dotées d'unités administratives
élémentaires comme les sous-préfectures.
Enfin, une restructuration économique créerait des sources de
financei'12nt pour les jeunes agriculteurs par l'octroi de crédits d'instal-
lation et de soutien qui leur font défaut.
Une campagne transformée avec ce que cela comporte de changement
social, culturel et économique, serait une campagne qui, de l'avis des
répondants, pourrait retenir ceux-ci dans les villages.
La nouvelle vision de la campagne, telle que les r é p o n d a n t s i
aimeraient la voir, présente deux grands aspects.
Ceux-ci constituent les
deux catégories d'énoncés qui les évoquent.
La première catégorie qui

166
insiste sur la transformation sociale et culturelle regroupe le plus grand
nombre d'énoncés.
Soit dix-sept (17) émis par treize (13) interviewés.
Et dans cette catégorie où nous trouvons trois (3) sous-catégories, celle
relative aux transformations sociales est la plus dominante puisqu'elle
comporte dix (la) des dix-sept (17) énoncés de la catégorie.
Elle est
suivie en cela par la sous-catégorie des transformations culturelles qui
n'en comporte que six (6).
Au niveau maintenant des transformations économiques de la
campagne souhaitées par neuf (9) interviewés en dix (la) énoncés, domine
la sous-catégorie de la restructuration économique.
Avec six (6) énoncés,
elle précède celle de la transformation de l'agriculture qui n'en compte
que quatre (4).
Ces deux grandes catégories d'énoncés qui constituent les diffé-
rents aspects de la nouvelle vision de la campagne telle que les jeunes
adultes auraient voulu la voir pour ne pas la quitter, ces catégories nous
situent, chacune à sa manière, quant à quelques-uns des facteurs de la
migration des jeunes ruraux vers la ville.
Avec la question 14 que nous étudions ici, il s'agit de connaî-
tre le point de vue des répondants sur les effets d'une résolution issue
e
du 7 Congrès National du POCT et prise en octobre 1980.
Cette résolu-
tion, dans ses grandes lignes a trait au retour à la terre des jeunes
adultes sans emploi en ville.
Ce retour serait alors organisé par l'Etat.
Nous avons donc cherché à savoir, dans le cas où certains de nos inter-
viewés devraient retourner à la terre, à quelles conditions le feraient-

UNIVI RSITI 01 .'>'ONTRL\\[
167
ils?
En réponse à cette question quanrante-et-une (41) conditions ont été
formulées.
Ces conditions restructurées en vingt-et-un (21) items ont pu
être classées en treize (13) sous-catégories.
Après analyse, celles-ci
ont été regroupées sous cinq (5) grandes catégories de conditions.
Tableau 18:
Typologie des conditions de retour à la terre
A. Conditions économiques et financières.
20 énoncés
14 interviewés
1. Fonds d'aide à l'installation des jeunes adultes
a) Fonds d'installation
8 énoncés
7 répondants
b) Aide des parents
?
'--
énoncés
"
L
répondants
2. Disponibilité de sources de revenus
a) Trouver une terre à cultiver
énoncé
répondant
b) Création d'emploi
énoncé
répondant
c) Ouverture d'une boutique au vi 11 age
l énoncé
répondant
3. Amélioration des structures
a) Création de nouvelles structures de
commercialisation de produits
agricoles
l énoncé
répondant
b) Amélioration des pistes villageoises
énoncé
répondant
4. Disponibilité sur place du
minimum vital
l énoncé
l répondant
B. Conditions socio-professionnelles.
8 énoncés
7 interviewés
1. Mise en place d'une structure d'encadrement du paysan
a) Education des jeunes paysans
l énoncé
l répondant
b) Encadrement technique des jeunes
,1
paysans
énoncé
répondant
c) Centre de représentation du ministère
de l' agri cu lture
l énoncé
répondant
2. Modernisation du milieu rural
...,
L
énoncés
2 répondants

UNIVERSITE DE .\\IONTR[·\\l
168
3. Existence de rapport avec la terre
a) Avoir l'amour de la terre
2 énoncés
2 répondants
b) Avoir le courage de retourner
à la terre
énoncé
l répondant
C. Difficultés de la vie en ville.
5 énoncés
3 interviewés
D. Existence de structures de distractions à la campagne
4 énoncés
2 interviewés
l. Terrains de sports
2 énoncés
2 répondants
2. Cinéma
énoncé
répondant
3. Autres loi sirs
énoncé
répondant
E. Changement de statut économique en ville.
4 énoncés
...
L
interviewés
l. Chômage
' l
L
énoncés
2 répondants
')
.... Retraite
2 énoncés
2 répondants
D'aprês le tableau ci-dessus, nous remarquons que, lorsque les
répondants envisagent un retour à la terre, ils posent en premier lieu, la
satisfaction de certaines conditions économiques et financiêres à la campa-
gne.
Cette catégorie de conditions renferme les éléments socio-économiques
susceptibles de rendre la vie en milieu rural attrayante.
Ce sont dans ce
contexte, la mise en place d'un fonds d'aide à l'installation de ces
jeunes adultes, la disponibilité de sources de revenu, l'amélioration des
structures économiques et la disponibilité sur place du minimum vital.
Le fonds d'aide à l'installation serait d'aprês les interviewés,
une enveloppe financiêre destinée à encourager les jeunes adultes en leur
octroyant des crédits de démarrage agricole.
En plus, selon eux, ce fonds

169
devrait être assorti de matériel nécessaire à la mise en valeur de leurs
portions de terre.
Ce fond qui serait une institution nationale créée à
cet effet par l'Etat, pourrait réellement intéresser ces jeunes adultes au
travail de la terre, donc les inciter à repartir à la campagne.
Par contre l'aide exigée de la part des parents semble plus
précise.
Comme en témoigne le propos de cet interviewé qui pense que "si
mon frère me donne de l'argent pour payer les manoeuvres" il pourrait
retourner au village.
En somme, de l'argent et du matériel agricole semblent être les
éléments constitutifs du fonds d'aide qui inciterait les jeunes adultes
au retour à la terre.
Une autre condition d'ordre économique qu'ont évoquées les inter-
viewés est la disponibilité d'une terre à cultiver.
Pour les uns, inté-
ressés par le commerce, la création d'une boutique au village les y condui-
rait.
Les autres voudraient par contre voir se créer des emplois en milieu
rural.
Autant de sources de revenu dont la disponibilité se pose en terme
de conditions parce qu'elles permettraient à ces jeunes adultes ruraux de
disposer du minimum vital au village.
Ce qui en fait n'irait pas non plus
sans une amélioration des structures en milieu rural.
Cette amélioration
toucherait les circuits de commercialisation des produits agricoles.
Ceux-ci qui devraient être plus fonctionnels que ceux déjà existants
devraient être liés à l'amélioration des pistes villageoises pour une
évacuation plus rapide et moins coûteuse des produits agricoles.
Dispo-
nibilité de sources de revenu, mise en place d'un fonds national d'aide

170
aux jeunes agriculteurs, avec à la base une amélioration des structures,
autant de conditions d'ordre économique et financières qui définissent
notre première catégorie de conditions qui, satisfaites, pourraient inci-
ter les jeunes a un retour à la campagne.
Une autre catégorie de conditions, celles-ci d'ordre socio-
professionnel ressort des réponses des interviewés.
Cette catégorie se
définit par la mise en place d'une structure d'encadrement des paysans,
par la modernisation du milieu rural et par l'existence d'un rapport
possible entre les jeunes adultes et la terre.
La structure d'encadrement consisterait en la mise en place d'un
système éducatif destiné aux jeunes adultes ruraux afin de développer
chez ces derniers des habiletés susceptibles de faire améliorer leur
production et de rendre rentable leur travail.
Cela exige, d'après les
répondants, un encadrement technique qui conduise ces jeunes à "apprendre
à travailler avec des engins motorisés" du type des tracteurs agricoles.
Cet encadrement technique devrait être i 'oeuvre d'une représen-
tation du ministère de l'agriculture auprès des villageois et dont les
éléments coopéreraient en harmonie avec les jeunes agriculteurs.
Ainsi s'acheminerait-on, dans ce cadre, vers une modernisation
de la campagne comme aimeraient la voir certains des répondants.
Car l'on
aurait en partie au village ce qu'il y a en ville, comme ils le disent.
Mais d'autres interviewés
pensent que ces premières
conditions ne sauraient suffire.
C'est pour cela qu'ils

UN/V[RSI TE D[ \\1û-.TR(,\\l
171
croient qu'elles devraient s'accompagner d'un engagement des individus
vis-a-vis du travail de la terre.
Pour ces interviewés il devrait tout au
moins exister un certain rapport positif entre le travail de la terre et
les adultes eux-mêmes.
Ce qui signifie, qu'il faudrait non seulement'avoir
l'amour de la terre, mais encore avoir le courage et la volonté de retour-
ner à la campagne et cultiver cette terre.
Cette condition tire son im-
portance du fait que, parmi les interviewés, il y en a qui ne veulent
même pas, ne serait-ce que pour un seul instant, envisager un quelconque
retour à la terre.
Témoin la déclaration de ce répondant qui avoue claire-
ment:
"moi je n'aime pas cultiver.
Alors, je ne retournerai jamais au
village".
Aussi, parmi les répondants, ceux qui exercent déjà un emploi
à Abidjan, avancent un autre genre d'arguments qui introduisent d'autres
données.
Celles-ci constituent une catégorie liée à un changement de
statut qui les affecterait.
Et de ce fait les amènerait au village.
Il
s'agit principalement de la perte de leur emploi.
Ce qui conduit l'un
d'entre eux à dire "si je perds mon emploi ou si je chôme" alors il retour-
nerait au village, à la terre. Il s'agit aussi de la retraite que certains
répondants attendraient pour retourner au village.
Ce qui, d'ailleurs
introduit une autre dimension du problème dans son aspect de non retour
proche de la part des interviewés.
Par contre, il y en a parmi les répondants qui ne posent pas de
façon catégorique certaines conditions à leur retour à la campagne.
Ils
lient plutôt ce retour aux possibles difficultés de la vie urbaine
d'Abidjan qu'ils pourraient rencontrer.
Pour certains comme celui-ci,

172
"clest aussi si tout ce que je fais ne me réussit pas", ou comme cet autre
"si je suis dans une situation pas correcte".
Quant à d'autres, plus difficiles à convaincre, ils pensent que
la condition qui les ferait retourner éventuellement à la terre c'est une
preuve certaine qui les ferait admettre que la vie à la campagne ou le
retour au travail de la terre valent mieux que le fait d'être à Abidjan,
même s'ils y sont sans travail.
La dernière catégorie des conditions relève des distractions.
Pour les répondants, la création de complexes sportifs et des lieux de
jeux à la campagne pourrait favoriser leur retour.
Ou encore, l'exis-
tence de salles de cinéma ou le développement d'autres formes de loisirs
intéressants, qui leur ouvriraient des "possibilités de sorties" rentrent
dans cette catégorie.
Cet ensemble de facteurs, les uns relevant de la ville et les
autres de la campagne, forme un tout conditionnel d'un éventuel retour des
jeunes adultes en milieu rural.
Les considérer ensemble donnerait une
meilleure idée de ce que pensent ces jeunes adultes de la résolution du
Congrès du POCI d'octobre 1980.
La balle, dans ces conditions, si l'on
peut s'exprimer ainsi est dans le camp du Congrès.
Pourra-t-elle rebondir
en direction des jeunes adultes?
Cette question est liée ~ toutes ces
conditions.
Si nous considérons nos cinq (5) catégories de réponses ~ cette
question, une constatation s'impose.
Clest le grand nombre d'énoncés que
regroupe la catégorie évoquant les conditions économiques et financières.

U'ilv,RSlTf Dl MO·'.; [Rf ·\\L
173
Ces conditions qui la définissent ont été énoncées en vingt (20) idées
par quatorze (14) interviewés.
Ce qui est important compte tenu du nombre total des énoncés que
comporte l'ensemble des cinq (5) catégories soit au total quarante-et-un
(41).
Dans cette catégorie, une sous-catégorie se distingue du lot avec
quatorze (14) des vingt (20) énoncés.
C'est celle qui évoque la mise en
place d'un fonds d'aide â l'installation des jeunes.
Elle devance en cela
la sous-catégorie:
disponibilité de source de revenus qui ne compte que
quatre (4) énoncés.
La seconde catégorie de conditions qui mérite qu'on s'y attarde,
regroupe huit (8) énoncés.
Venant donc loin derrière la première, elle
rassemble des éléments d'ordre socio-professionnel.
Ceux-ci sont dominés
par la définition d'une structure d'encadrement du paysan qui compte
trois (3) énoncés.
C'est une proposition de sept (7) des dix-neuf (19)
interviewés.
Les difficultés de la vie en milieu rural avec cinq (5) énoncés,
l'existence de distractions en milieu rural et le changement de statut
économique envisagé par les répondants, n'apportent pas une note particu-
lière au tableau.
Seulement, ne renforcent-elles que les conditions éco-
nomique~ et professionnelles que posent les interviewés.
La classification des données de la ville a révélé cinq (5)
points centraux qui sont:
l'image descriptive de la ville d'Abidjan qui a été â la base de
son choix comme ville d'immigration;

U!'<IVERSIT( DE MONTRE·\\l
174
les raisons générales de la migration des jeunes adultes et de
leurs amis;
les problèmes qu'ils ont rencontrés et les solutions adoptées
ou celles qu'ils souhaitent;
les services susceptibles de rendre moins difficile le premier
séjour en ville des nouveaux venus de la campagne;
les caractéristiques de la campagne qu'ils n'auraient pas
quittée.
Les différentes catégories d'énoncés auxquelles cette classifi-
cation a donné lieu, situent les premiers éléments de cette recherche
exploratoire sous son angle urbain.
Ainsi, de ce fait, nous disposons
d'un premier ensemble d'éléments d'appréciation du phénomène de l'exode
rural par quelques-uns de ceux qui le vivent comme réalité.
Mais qu'en est-il de ceux qui sont encore à la campagne?
C'est
ce à quoi la classification des données recueillies en milieu rural veut
répondre par les catégories qui suivent à travers les tableaux qui les
renferment.
3.
La classification des données recueillies en milieu rural
Le questionnaire destiné aux jeunes adultes de la zone rurale
de notre étude, a été bâti autour de trois thèmes centraux qui constituent
nos trois grandes variables structurelles.
Il s'agit du système culturel
et du fait urbain et rural en premier lieu, en deuxième lieu du système
scolaire et enfin de la variable structure économique.

175
Pour plus de clarté dans la cueillette de l'information et afin
d'avoir assez d'éléments de réponses, nous avons établi au niveau de chaque
variable une série de questions.
A travers les questions ayant trait au système culturel et au
fait urbain et rural, nous avons cherché à cerner l'impact de cette varia-
ble sur la décision d'un jeune adulte à quitter la campagne pour une desti-
nation urbaine.
De même pour les questions inscrites au compte de la
variable scolaire nous avons cherché à savoir à quel niveau de responsabi-
lité, si tel était le cas, nous pouvions situer l'institution scolaire
dans la décision d'un jeune adulte à émigrer.
Enfin, avec les interroga-
tions du cadre de la variable structure économique, nous avons cherché à
appréhender l'aspect socio-économique de la migration d'un jeune adulte et
le poids que cela représente dans sa décision à quitter la campagne pour
s'établir en ville.
Dans les pages qui suivent nous rendons compte, à travers les
tableaux et les définitions, des informations recueillies dans le cadre de
ces différentes variables suite aux questions qui en ont découlé et que
nous avons soumises à vingt-deux (22) jeunes adultes.
Ceux-ci, âgés de
16 à 35 ans constituent le volet rural de notre échantillon dont il a déjà
été question dans les chapitres précédents.
Nous commencerons donc ce compte rendu des données par celles
relatives au système culturel et au fait urbain et rural, en passant par
celles du système scolaire pour terminer avec la variable structure socio-
économique.

UNIVERSITE DE MONTREAL
176
3.1
Les données du système culturel et du fait urbain et rural
Son impact dans la migration des jeunes ruraux a été mesuré à
travers vingt-trois (23) questions que nous avons administrées aux vingt-
deux (22) jeunes gens et jeunes filles qui constituent notre échantillon
rural.
Nos deux premières questions ont eu pour but principal de faire
l'inventaire des distractions des interviewés et de nous situer sur leur
préférence.
Avec la troisième, nous nous sommes informés sur la présence ou
non d'un appareil de télévision dans le village.
Et dans l'affirmative
quel était le degré ou la fréquence d'écoute et les émissions préférées.
La quatrième et la cinquième question complétaient ainsi l'interrogation
de la troisième.
Comme nous avons procédé pour la télévision, il en fut
de même pour la radio avec les questions six, sept et huit de cette
variable.
Nous intéressant au domaine de la presse écrite, nous avons
demandé aux interviewés s'ils lisaient ou non le quotidien Fraternité Matin
(quotidien unique national) ou Ivoire Dimanche (hebdomadaire à dominante
sportive).
Et dans le cas d'une réponse positive, quelles étaient les par-
ties préférées au cours de cette lecture.
Nous l'avons su en posant la
série des questions neuf (9) à quatorze (14).
Abordant le cadre du phénomène urbain, nous avons demandé a
chacun des jeunes adultes interviewés de nous dire le nom de la ville à

UNIVERSIH DE MO,"TRE,\\l
177
laquelle il pensait au moment même de l'interview et dans le même temps de
nous di re aussi ce que le mot Il vil l e" évoquait dans son espri t.
Nous
posions ainsi les questions quinze (15) et seize (16).
Quant aux questions
dix-sept (17) et dix-huit (18), elles nous ont situé sur le nombre général
(beaucoup ou pas beaucoup) des jeunes adultes du village de l 1interviewé
qui sont partis pour la ville et dans quelle ville précisément.
Face à ce départ qu'eux-mêmes avaient constaté, nous avons
demandé, par la question dix-neuf (19), aux répondants de juger si, oui ou
non, ceux qui étaient partis avaient eu raison de le faire.
Revenant aux
interviewés eux-mêmes, nous leur avons demandé si, oui ou non, ils reste-
raient eux-mêmes à la campagne (question vingt (20).
Et dans la négative,
de nous dire dans quelle ville ils iraient.
Ils ont répondu pour cela à la
question vingt-et-un (21).
Ils devaient aussi nous situer, sur un plan
général, les causes du départ des jeunes adultes des campagnes vers les
villes, en répondant à la question vingt-deux (22).
Enfin, nous leur avons
demandé ce qu'ils souhaiteraient que l'Etat ou le gouvernement fasse pour
que ces jeunes adultes de leur âge restent à la campagne.
C'est l'objet
de la vingt-troisième (23) question qui termine cette première série d'in-
terrogations.
Alors que la première question nous situe sur les distractions
des jeunes adultes ruraux d1une manière générale, la seconde introduit une
i~ée de préférence dans ces distractions.
A la première question, nous avons recensé quarante-sept (47)
énoncés.
Une analyse de contenu nous a permis de réduire ce nombre à

UNIVERSIT( Ol .'10NTR(.All
178
quinze (15) items.
Ceux-ci constituent nos quinze (15) sous-catégories de
distractions que nous avons réunies sous cinq (5) catégories.
Tableau 19:
Typologie des distractions
A. Sports.
18 énoncés
14 i ntervi ewés
1. Football
14 énoncés
14 répondants
2. Vo11eyba11
2 énoncés
2 répondants
3. Basketball
énoncé
répondant
4. Karaté
énoncé
répondant
B. Danse et musique.
14 énoncés
11 interviewés
1. Musique
6 énoncés
6 répondants
2. Soirée dansante
3 énoncés
3 répondants
3. Zêzê
2 énoncés
2 répondants
4. A11 oukou
2 énoncés
? répondants
5. Autre folklore
énoncé
répondant
C. Jeux divers.
7 énoncés
7 interviewés
1. Ludo
4 énoncés
4 répondants
2. Awalé
énoncé
répondant
3. Bille
énoncé
répondant
4. Damier
énoncé
répondant
D. Lecture.
2 énoncés
2 interviewés
E. Rencontre de jeunes.
l énoncé
l interviewé
Il faut souligner qu'en réponse à cette première question, six
(6) interviewés ont déclaré ne pas avoir de distractions principales.
Par
ailleurs, afin de mieux faire notre analyse des réponses à cette question,

UNIVERSITE DE ,~'O:"lrR[Al
179
nous présentons aussi le tableau des distractions préférées qui résume les
réponses à la question deux (2).
A ce propos, vingt-neuf (29) énoncés ont
été recueillis.
Ils constituent, après analyse, treize (13) items qui sont
de fait nos sous-catégories.
Celles-ci à leur tour forment quatre (4)
catégories de distractions préférées.
Tableau 20:
Typologie des distractions préférées
A. Sports.
16 énoncés
12 interviel'Jés
l. Football
13 énoncés
13 répondants
2. Bas ketba 11
énoncé
répondant
3. Karaté
énoncé
répondant
4. Autre sport
énoncé
répondant
B. Musique et danse.
7 énoncés
7 interviewés
l. Musique
')
L
énoncés
2 répondants
2. Zêzê
2 énoncés
2 répondants
3. Alloukou
énoncé
répondant
4. Folklore
énoncé
répondant
5. Autre danse
énoncé
répondant
C. Les jeux.
6 énoncés
4 interviewés
l. Ludo
')
2 répondants
'-
énoncés
2. Awalé
énoncé
répondant
3. Damier
énoncé
répondant
D. Lecture.
2 énoncés
2 interviewés

Ui'iIVI RS,l( DE MOi'iTRL\\1
---------........,·--·
r
-----------------~....;..;;.....;..;.;......;;;.-.;...~-""I j
180
1
A l'analyse, les deux tableaux présentent très peu de différence.
Les distractions principales constatées sont en majorité les plus préférées.
On pourrait en déduire que leur nombre réduit conduit à une telle situation.
Dans cet ensemble, la catégorie "sports" regroupe à la fois les disciplines
sportives qui sont les principales distractions des jeunes adultes et celles
qu'ils préfèrent le plus.
Cette catégorie comprend les sports collectifs
tel le football, le basketball, le volleyball et une pratique sportive de
combat:
le karaté.
Dans cette catégorie qui rassemble dix-huit (18) énon-
cés sur quarante-sept (47) dans le cadre des distractions principales et
seize (l6) dans les distractions préférées, le football est la sous-catégo-
rie dominante avec respectivement quatorze (14) et treize (l3) énoncés dans
les deux cas.
Un fait certain est qu'en Côte d'Ivoire, le football est le sport
le plus répandu et le plus pratiqué par les jeunes adultes.
Ainsi en tant
que sport spectacle et sport de compétition, le football suscite une grande
adhésion de la part des jeunes adultes des villages et des villes, hommes
et fermnes.
La passion que nourrissent certains jeunes adultes dans le cadre
de cette pratique sportive peut favoriser la migration.
En ce sens que
certains des répondants, dans les questions que nous analysons dans les
prochaines pages, nous ont avoué vouloir aller en ville afin de jouer dans
une grande équipe de football qui opère en division nationale.
Revenant à l'analyse de notre première catégorie, pouvons-nous
nous permettre de remarquer que la pratique du football se révèle être le

181
seul moyen de distraction dont disposent les jeunes adultes ruraux inter-
viewés?
En cela ne s'explique-t-il pas par le nombre élevé d'énoncés qui
vont à cette pratique sportive?
En conclusion à cette catégorie, pouvons-nous dire que, dans le
domaine du sport en milieu rural, les interviewés n'ont pour seule distrac-
tion que le football?
La seconde catégorie de distractions qu'évoquent les répondants
regroupe les éléments ayant trait à la musique et à la danse.
Si le terme
de musique, dans sa généralité, constitue une sous-catégorie au même titre
que celui de danse, les répondants ont spécifié deux distractions qui
entrent dans cette catégorie en tant que sous-catégorie.
Il s'agit du
zêzê et de l'alloukou.
Le ""zêzê" est un ensemble de danses et de chansons qui tire ses
origines de la tradition artistique de cette région de Gagnoa.
Composé de
chanteurs, de tapeurs de tambours et de danseurs, le "zêzê" est une danse
qu'affectionnent pa'rticulièrement les jeunes adultes surtout les jeunes
filles et qui attire souvent beaucoup de monde.
Le "zêzê" de création récente, discute la popularité à l'alloukou.
Totalement différente du premier, l "'alloukou" est à la base organisée par
les jeunes garçons.
Mais cette musique qui tire ses chants et ses pas de
danses de la tradition attire cependant autant les filles qui en consti-
tuent d'ailleurs lesg:rand-es animatrices, que les plus vieux des villages.
Alors que dans le" zêzê" l es chansons sont l 'oeuvre des fi 11 es, dans
"l'alloukou", elles sont assurées par les garçons.

U~IVfRSIH Of ·\\\\ONTRL\\l
18~
Ces deux danses seraient les distractions préférées des répon-
dants auxquelles s'ajoutent d'autres genres musicaux relevant aussi de ce
qu'ils appellent le folklore.
En plus de la chanson et de la danse, les interviewés occupent
aussi leur temps à une catégorie de distraction que nous avons appelée
celle des jeux divers.
Cette catégorie regroupe différents types de jeux comme le ludo,
l'awalé, le damier et le jeu des billes.
Dans ce groupe, le ludo a le plus
de pratiquants.
Jeu de hasard d'origine anglophone, le ludo se joue a la base
d'un dé et le décompte des points se fait dans un cadre carré de quatre
zones qui se partagent ce cadre. Plus connu dans le milieu des jeunes adul-
tes sous le nom de "six ll à cause du plus grand chiffre que comporte le
dé dont on se sert, le ludo peut se jouer avec ou sans mise de gain.
Les
répondants ont aussi mentionné la pratique du jeu de damier comme distrac-
tion.
Alors que le 1I1 udo ll et le IIdamier" sont des distractions de type
moderne, étrangères à la tradition villageoise, l'awalé, lui est un jeu
traditionnel de la région.
D'après les répondants, ce jeu revêt plusieurs
formes.
Et pour ceux qui savent le jouer, il demanderait beaucoup d'ef-
forts soutenus, d'attention et de précision de calcul.
En somme il s'agit
d'un jeu de quarante-huit (48) grains ou pions que les deux adversaires se
partagent à égalité au départ.
Chacun dispose ces vingt-quatre (24) grains
dans quatre petites cavités en raison de six (6) par carré.
Le système
du jeu consiste, à travers différentes règles, à prendre le plus de grains
à l'adversaire, soit les trois quarts pour qu'il soit vaincu.

1J,'.. IVERSIH DE MONTR(,\\l
183
Au titre des distractions, certains des répondants auraient la
lecture comme distraction et même distraction préférée pour d'autres.
Le parcours des tableaux des distractions des interviewés en
milieu rural, qu'elles soient principales ou préférées, nous amène à une
évidence.
C'est leur petit nombre et leur manque notoire de variété.
Seulement deux catégories définissent ces distractions:
le sport et la
musique.
Le sport, avec dix-huit (18) énoncés occupe quatorze (14)
interviewés et est préféré par treize (13).
Le football définit essen-
tiellement cette catégorie.
La catégorie musique et danse avec quatorze (14) énoncés est
préférée par sept (7) interviewés.
Dans ses distractions, le "zêzê" et
l"'alloukou" sont les deux principales sous-catégories.
Ce fait n'entraîne-t-il pas une certaine monotonie de la vie au
village et en ce sens ne favorise-t-il pas l'émigration vers les villes?
Les questions trois, quatre et cinq étudient l'impact du médium
culturel moderne qu'est la télévision.
Nous nous sommes d'abord assuré de
la présence d'un appareil de télévision dans le village, de la fréquence de
ceux qui l'écoutent et de ce qui les intéresse durant ces moments d'écoute.
En somme, huit (8) villages sur onze (11) possédaient des appa-
reils de télévision.
Subsidiairement, lorsque nous avons cherché à con-
naître les propriétaires de ces appareils, il s'est avéré que presque la
totalité appartient aux groupes scolaires des villages.
En fait ce sont

UNIVEHSIH DE ."O:-;TRE~l
184
des appareils qui ont servi, il Y a de cela, trois années, de support
pédagogique ~ l'école primaire dans le cadre de la télévision éducative.
Ces appareils que continuent de faire fonctionner les enseignants remplis-
sent un rôle de distraction étant donné que la télévision éducative en tant
que support d'enseignement est maintenant supprimée en Côte d'Ivoire.
Ainsi sur les vingt-deux (22) interviewés, seulement dix (10)
regardent la télévision.
Et parmi eux, six (6) le font rarement, deux (2)
le font de temps en temps et deux (2) le font régulièrement chaque jour.
Pour ceux des répondants qui s'intéressent à la télévision, nous
avons recensé vingt-neuf (29) énoncés.
Après une analyse de contenu, leur
nombre a été réduit à douze (12) items qui constituent nos sous-catégories.
Celles-ci se répartissent entre cinq (5) catégories d'émissions qui inté-
ressent les répondants.
Tableau 21:
Typologie des émissions qui intéressent les téléspectateurs
A. Détente et loisirs.
11 énoncés
8 interviewés
l. Cinéma
7 énoncés
7 répondants
2. Musique
2 énoncés
2 répondants
3. Théâtre
énoncé
répondant
4. Ce soir au vi 11 age
énoncé
répondant
B. Education populaire.
7 énoncés
6 interviewés
l. Comment ça va?
4 énoncés
4 répondants
2. Télé pour tous
3 énoncés
3 répondants
C. Information.
5 énoncés
5 interviewés
l. Journal télévisé
4 énoncés
4 répondants
2. Grand débat
énoncé
répondant

PT
S
185
D. Sports - Football.
3 énoncés
3 interviewés
E. Emission pour enfants.
3 énoncés
interviewé
l. IIS pec treman"
énoncé
répondant
'1
répondant
L

"Candie"
énoncé
3. "Tarzan"
énoncé
répondant
La catégorie d'émissions de détente et de loisirs regroupe les
éléments de distractions et de divertissement qui se définissent a travers
le cinéma, la musique, le théâtre et "Ce soir au village" que présente la
télévision ivoirienne:
Dans le cadre du cinéma, les films proviennent d'horizon divers.
Ce sont, soit des westerns italiens ou de Hollywood, soit des films corsés
de drames sentimentaux de type franco-britannique. Sur cet écran que domi-
nent ces séries de distribution universelle, quelques courts métrages de
débutants africains ou ivoiriens pataugent dans un décor teinté de tradi-
tion et de modernisme.
En plus du cinéma, le public d'écoute, ici les interviewés,
s'intéresse aux émissions musicales.
Celles-ci qui ont lieu en général
le samedi soir, présentent les artistes aussi bien de Côte d'Ivoire que
d'Afrique et d'ailleurs.
Les pièces de théâtre font aussi partie des
émissions qui attirent le jeune adulte.
Ces pièces que projette l'écran de la télévision ivoirienne sont,
soit des pièces "made in France" de la série "au théâtre ce soir", soit
des pièces réalisées par des comédiens ivoiriens.
Une autre émission de

U,"IVERSITE DE MO"TRf \\l
186
détente qui entre dans cette catégorie, est "Ce soir au village".
Clest
une émission dont les organisateurs, par le biais d'acteurs qui font de
l'improvisation, essaient de faire revivre certaines scènes de la vie
rurale de Côte d'Ivoire.
Une autre catégorie intéressante pour les répondants, est relati-
ve a l'éducation populaire.
Dans cette série, deux types d'émissions
définissent la catégorie.
Il s'agit de "Comment ça va?" qui est une émis-
sion satirique de la société ivoirienne.
Elle vise en cela a combattre les
fléaux qui sévissent dans notre pays et dont souffrent la plupart des so-
ciétés actuelles.
Ces fléaux que dénonce cette émission ont pour nom:
l'absentéisme dans les services publics de l'Etat, la corruption des agents
de l'Etat, le népotisme des dirigeants, la prostitution des mineurs, la
drogue, etc ...
Cette émission vise également à apporter sa contribution au
développement du civisme, de la loyauté, du nationalisme chez le citoyen
ivoirien.
La portée éducative de cette émission, qui d'ailleurs gagnerait
a être mieux structurée dans son ensemble, n'est pas négligeable. Il en est
de même de la seconde émission de cette catégorie qui est "Télé pour tous".
'C'est une émission destinée en principe aux jeunes adultes du monde rural.
Ainsi a travers les documentaires que diffuse la télévision,
cette émission vise a sensibiliser les jeunes adultes au bien-fondé du
travail manuel et des métiers techniques.
Dans d'autres documentaires,
l'émission sensibilise le monde rural à un problème donné.
Par exemple
dans le cas de l'eau.
Comment la traiter avant de la boire?
comment évi-
ter les maladies qu'entraînent les eaux usées?
etc ...
autant de

UNIVERSITf DE MONTRL\\l
187
questions qu'explicite cette émission.
Elle en fait autant pour l'amélio-
ration de l'habitat rural, l'apprentissage de l'élevage, etc ...
Si cette
émission "Télé pour tous" possédait des unités mobiles régulières qui lui
permettaient d'atteindre les villages reculés, par la projection de ses
films et documentaires, son action éducative aurait une portée très béné-
fique pour le monde rural.
La troisième catégorie d'émissions qui intéressent les répondants,
c'est l'information en tant que nouvelle.
Il s'agit des bulletins du jour-
nal télévisé qui ont lieu trois fois par jour.
C'est le cas aussi du
"Grand débat".
Cette émission est animée par un invité de la télévision,
qui informe le public sur un sujet ou un problème donné relevant de sa
compétence.
Les vedettes de cette émission sont généralement les membres
du gouvernement et les hauts fonctionnaires de l'administration de l'Etat
ou des organismes internationaux.
D'autres catégories d'émissions attirent aussi les répondants
vers la télévision.
C'est le cas des émissions dites sportives.
C'est
aussi celui des émissions pour enfants.
Cette dernière catégorie comprend
les séries américano-japonaises qui déferlent sur les pays du "Tiers-
Monde".
Nous pouvons en citer qui prétendent combattre la pollution,
comme Spectreman, ou comme Candie, la petite fille modèle préférée.
Nous
pouvons aussi mentionner la série télévisée qui met en vedette Tarzan, roi
de la jungle.
Si nous considérons d'un point de vue critique l'ensemble de ces
catégories d'émissions qui intéressent les jeunes adultes ruraux, il se

UNIVERSI T[ DE '\\O,'aRE \\L
188
dégage une constatation.
Les programmes qui composent la majorité de ces
émissions ont une orientation urbaine.
Elles ne sont d'aucune utilité
pour les jeunes ruraux.
Et à l'exception de "Télé pour tous", aucune ne
propose vraiment un cadre éducatif en faveur du monde rural.
Et pourtant,
toutes ces émissions intéressent les répondants ruraux.
L'on est donc
porté à croire qu'elles ne contribuent sûrement pas beaucoup au maintien
des jeunes adultes en milieu rural.
Cela peut se vérifier aussi par le poids que représente chaque
catégorie d'émissions.
La première catégorie qui attire le plus de public, concerne la
détente et les loisirs.
Elle regroupe à elle seule onze (11) des vingt-
neuf (29) énoncés de la question et intéresse huit (8) téléspectateurs sur
onze (11).
Et à l'intérieur de cette catégorie, la sous-catégorie "Cinéma"
a été mentionnée sept (7) fois contre seulement deux pour la sous-catégo-
rie musique.
La seconde catégorie qui mérite d'être soulignée, regroupe quel-
ques données d'éducation populaire.
Ses deux sous-catégories se partagent
presque également le nombre d'énoncés.
Quatre (4) énoncés pour "Comment
ça va" et trois (3) énoncés pour "Télé pour tous".
Soit au total sept des
vingt-neuf (29) énoncés.
C'est l'émission favorite de six (6) personnes
sur onze (11).
La troisième en importance, est la catégorie de l'information.
Avec cinq (5) énoncés dont le journal télévisé qui en regroupe quatre (4)

U:"IV~~~IH Of .\\\\O'lTR(·\\l
r~.=-----------_k'------""""--"'--'_··--~""'-"l
1
189
1
et le grand débat un (1) seul, cette catégorie s'ajoute aux deux premières
pour donner un aperçu d'ensemble de cette émission qui intéresse cinq (5)
des onze (11) téléspectateurs.
A partir de l'analyse du tableau des données et le poids de
chacune de ces catégories, nous pouvons, sans grand risque de nous trom-
per, dire que la présence dans un village, d'un appareil de télévision
qui diffuse des émissions ouvertement urbaines peut contribuer au déracine-
ment culturel des jeunes adultes ruraux et donc à leur émigration.
L'impact de la radio en milieu rural a été mesuré à travers les
questions 6, 7et 8.
Nous avons d'abord cherché à savoir si parmi les
interviewés, il y en avait qui écoutaient la radio, ensuite leur fréquence
1 d'écoute et enfin les émissions préférées durant leur temps d'écoute.
Sur les vingt-deux (22) répondants, quinze (15) avouent écouter
la radio.
Et leur fréquence d'écoute s'établit ainsi:
six (6) répondants écoutent la radio chaque jour,
quatre (4) le font de temps en temps,
cinq (5) le font rarement.
Les émissions que préfèrent ces quinze (15) auditeurs ont été
évoquées à travers quarante (40) énoncés.
Une analyse de contenu de ces
données nous a permis de limiter ce nombre à seize (16) items qui tradui-
sent également nos sous-catégories au nombre de seize (16).
Ces sous-caté-
gories après analyse ont été constituées en sept (7) catégories.
C'est
cette typologie que présente le tableau suivant.

UNIVERSITE DE MO.'HREAl
l 98
Tableau 22:
Typologie des émissions préférées de la radio
A. Variétés musicales.
11 énoncés
10 interviewés
1. Musique
10 énoncés
10 répondants
2. Folklore
l énoncé
l répondant
B. Informations.
10 énoncés
9 interviewés
1. Journal parlé
7 énoncés
7 répondants
2. Avis et communiqués
2 énoncés
2 répondants
3. Actualité
énoncé
répondant
C. Sports.
9 énoncés
9 interviewés
1. Tout sport
8 énoncés
8 répondants
2. Diffusion de match de football
énoncé
répondant
D. Education populaire.
5 énoncés
3 interviewés
1. Terre au Soleil
2 énoncés
2 répondants
2. Coupe Nationale du Progrès
énoncé
répondant
3. Antenne aux jeunes
énoncé
répondant
4. Avec vous madame
énoncé
répondant
E. Animation.
2 énoncés
2 interviewés
1. Courrier des auditeurs
énoncé
répondant
2. Djamo Djamo
énoncé
répondant
F. Emissions culturelles.
2 ~noncés
interviewé
1. Théâtre radiophonique
énoncé
répondant
2. Emission littéraire
énoncé
répondant
G. Pour mettre ma montre à l'heure.
énoncé
l interviewé

191
La catégorie "variétés musicales" renferme tous les éléments
relatifs à la production musicale nationale et internationale.
Par musique nationale~ nous entendons les compositions faites par
des artistes nationaux.
Cette musique s'inspire des données de la diver-
sité culturelle du pays en rapport avec la langue et les rythmes propres a
chaque sous-groupe culturel ou ethnique.
Elle est aussi l'oeuvre d'artistes
qui interprètent ou composent dans une langue autre que celles des commu-
nautés nationales du pays.
C'est le cas de ceux qui utilisent le français
ou dans une certaine mesure l'anglais.
Par musique internationale nous définissons tous les genres
musicaux que diffuse la radio nationale et qui relèvent des compositions
d'artistes non nationaux c'est-a-dire africains ou non africains.
A côté de ce type de musique moderniste~ il y a la diffusion
d'un autre type que les répondants désignent sous le terme de folklore.
Ce terme de folklore renvoie ici a celui de tradition avec ce que cela
signifie de particularité, de singularité de vie culturelle, ou d'âme cul-
turelle pour un peuple.
Dans ce cadre, le folklore ou la musique folklori-
que n'est pas une musique dégradée comme on le prétend souvent.
Mais plu-
tôt, elle est une production musicale issue du terroir national et appar-
tenant aux différehtes sous-cultures.
A travers la langue et les instruments conçus et réalisés par ce
peuple, cette musique exprime la sensibilité profonde de ce peuple eu égard
a ses "patterns" culturels.
C'est ainsi qu'elle exprime entre autres réa-
lités, les réalités sociales que vit ce peuple ou un groupe d'invividus.

UNIVERSITE DE "ONTR[,\\L
192
Et justement dans ce contexte, nous avons découvert dans les
variétés musicales de notre région d'étude, une chanson qui évoque la réa-
lité de notre étude:
l'exode.
C'est pourquoi nous nous permettons de
reproduire les paroles de cette chanson surtout qu'elle est l'oeuvre d'un
jeune adulte qui a émigré de la région pour aller à Abidjan.
Il évoque son
émigration et celle de ses amis par le titre:
La route ne prévient pas.
Nous sommes venus nous vendre
La route ne prévient pas
Je suis venu me vendre
Le refrain
La route ne prévient pas
Je suis venu périr ici
J'ai quitté ma mère
J'ai quitté mon père (bis)
Jlai quitté les miens
Et je suis venu à Abidjan
Pour chercher du travail
II
Le travail d'Abidjan
Le travail d' ici
Si tu veux l'avoir, cher ami
Arme-toi de tous les moyens
Il n'y a pas de place pour dormir
Ni de quoi manger
Ni de quoi se vêtir (bi s )
La vie d'Abidjan rend soucieux
Elle transforme les gens en bandits
Elle les rend capricieux
Elle les rend voleurs

UNIVERSIH DE MO,''fRE·\\L
193
Nous sommes venus nous vendre
La route ne prévient pas
Je suis venu me vendre
La route ne prévient pas
Nous sommes venus périr ici
Faute de pouvoir la chanter, nous avons seulement traduit cette
chanson qui résume bien les problèmes que vivent les jeunes adultes immi-
grants.
A ces jeunes adultes ruraux qui écoutent la radio, pour les émis-
sions de variétés musicales ce message, dans toute sa signification, leur
semble destiné.
Une autre catégorie d'émissions que soulignent les répondants,
clest l'information.
Entendue ici dans son sens premier de nouvelles,
l'information en tant que catégorie d'émissions renferme les éléments sui-
vants:
le journal parlé et les avis et communiqués.
Le journal parlé avec ses trois grandes éditions donnent les
nouvelles nationales et internationales qui intéressent les répondants.
Ces nouvelles sont complétées par ce que les répondants appellent les ac-
tualités.
Celles-ci constituent généralement les faits saillants qui mar-
quent le pays d'une manière particulière et que les mass média couvrent
avec un accent inusité.
La rubrique nationale des avis et communiqués, est constituée de
faire-part, d'invitations, d'annonces, de messages de recherche, de rensei-
gnements, etc ... portés à la connaissance d'un public cible désigné à cet
effet.

UNIVERSITE DE ,~ONIRE,\\l
194
Le sport constitue aussi une catégorie d'émission que préfèrent
les interviewés. Quand ceux-ci parlent d'émissions sportives, ils entendent
par là, la diffusion sur les ondes de la radio, des manifestations sporti-
ves qui ont lieu dans le pays ou ai 11 eurs et l'annonce des résul tats que
ces pratiques occasionnent.
La radio-diffusion des rencontres de football
est l'une des émissions préférées.
Dans cet ensemble d'émissions, d'autres relèvent du domaine de
l'éducation populaire.
Car ces émissions sont destinées à un public très
divers et traitent des différents sujets ct caractère éducatif.
Parmi ces
émissions, les interviewés rangent "La Terre au Soleil".
C'est un élément
d'une institution appelée la Coupe Nationale du Progrès.
Comme son nom
l'indique, cette institution décerne des récompenses aux meilleurs exploi-
tants agricoles du pays, chaque année.
Son objectif est de montrer l'in-
térêt du travail de la terre.
Mais singulièrement elle vise à motiver les
jeunes ruraux à s'intéresser au travail agricole.
Dans le cadre de cette
institution, c'est "La Terre au Soleil" qui est l'émission quotidienne qui
entretient les auditeurs sur les résultats agricoles obtenus dans les diffé-
rentes régions rurales du pays.
Elle donne aussi des informations sur les
nouvelles méthodes d'exploitation agricole, comme elle décrit aussi une
technique culturelle nouvelle.
Cette émission peut aussi être animée par un paysan qui fait
état des problèmes posés au niveau de son exploitation.
1
"La Terre au Soleil" réalise aussi des reportages radiodiffusés
sur une activité particulière du domaine agricole qui a lieu dans une

U~IVERSIH DE MONTREAL
195
région du pays.
En fait, "La Terre au Soleil" est la seule émission qui
donne la parole aux paysans, ou, à travers laquelle, les paysans peuvent
s'exprimer sur leurs difficultés en milieu rural.
Dans le cadre de cette même catégorie d'éducation populaire, les
auditeurs s'intéressent à une émission d'éducation féminine.
Il s'agit de
"Avec vous Madame".
Cette émi ss i on donne aux femmes des él éments d' i nfor-,
mation sur différents sujets et différents problèmes qu'elles peuvent ren-
contrer dans leur vie quotidienne de ménagères, de mères de famille ou de
travailleuses salariées.
La plupart de ces sujets sont centrés sur les
conseils prénataux, sur les soins dès bébés, mais aussi sur l'établissement
de budgets familiaux.
Quant à l"'Antenne aux jeunes", elle est une émission radiopho-
nique qui tente d'aborder avec des jeunes intervenants les différents pro-
blèmes de l'univers de la jeunesse.
Des interviews, des reportages sur les
jeunes ou les activités des jeunes constituent l'essentiel de cette émis-
sion.
Parmi auss i les émi ss i ons préférées, l es répondants citent cer-
taines qui ont pour objet l'animation.
Parmi celles-ci, il yale "courrier
des auditeurs".
A travers cette émission, les auditeurs adressent à l'ani-
mateur des correspondances relatives à différents sujets, ou problèmes qui
leur tiennent à coeur et qu'ils souhaiteraient faire partager à d'autres
auditeurs.
Par contre l'émission "Djamo Djamo", qui entre dans cette ca-
tégorie d'animation, diffuse à partir du lieu de leur travail, les commen-
taires ou les informations relatives aux métiers qu'exercent les inter-

UNIVERSITE Dl MONTR[Al
196
venants qui sont interviewés.
Elle est destinée à faire connaître certai-
nes professions ou certains corps de métiers.
La littérature et l'art constituent aussi une catégorie d'émis-
sion que certains des interviewés préfêrent.
Elle est constituée par les
émissions littéraires et le théâtre radiophonique.
Une personne toutefois
déclare écouter la radio pour mettre sa montre à l'heure.
D'aprês le tableau, la catégorie d'émissions qui intéressent le
plus les auditeurs, ce sont les variétés musicales.
Sur quarante (40)
énoncés, cette catégorie en compte douze (12).
En plus, le nombre de per-
sonnes interviewées qui ont mention~é ce type d'émission est de neuf (9)
sur un total de quinze (15) qui écoutent la radio.
Et dans cette catégorie,
les variétés musicales de type moderne sont de loin les plus préférées.
Dix (10) énoncés sur onze (11) les évoquent.
Cette première catégorie d'émissions ne précède que d'un énoncé
les émissions sportives.
Celles-ci intéressent également beaucoup d'audi-
teurs.
Neuf (9) interviewés sur quinze (15) auditeurs préfèrent les émis-
sions sportives.
Il en est de même des informations.
Cette catégorie qui
regroupe dix (10) énoncés émis par neuf (9) interviewés est dominée par la
sous-catégorie "journal parlé" qui compte à elle seule sept (7) énoncés.
Ce sont donc là les trois principales catégories d'émissions qui
déterminent en grande partie la structure du tableau des réponses.
On
pourrait toutefois leur adjoindre une quatrième catégorie qui, avec cinq (5)
énoncés est préférée par trois (3) auditeurs interviewés.
C'est la catégo-

UNIVERSITE DE MONTR(AL
197
rie éducation populaire avec son émission de la Coupe Nationale du Progrès
qui est la Terre au Soleil.
Dans leur ensemble, il faut souligner que les émissions de la
radio dont font état ici les interviewés sont des émissions qui n'ont
aucune attache fondamentale avec le milieu rural, et qui de ce fait n'évo-
quent qu'en partie la réalité vivante de ce milieu.
A caractère principalement urbain, ces émissions, en tant que
données culturelles, reproduisent certainement les modèles de la culture
du milieu urbain.
Dans ce sens l'on est porté à croire que la non valorisation des
données du milieu rural qui ne ferait pas de la radio et dans une certaine
mesure de la télévision, deux médias communautaires agissant dans les deux
sens (urbain-rural et rural-urbain) peut être un facteur de migration en
direction du milieu urbain.
Pour situer l'influence de la presse écrite en milieu rural et en
premier lieu "Fraternité Matin" nous avons demandé aux interviewés s'ils
lisaient ce journal et si oui, à quelle fréquence et qu'elles étaient leurs
parties préférées.
Sur vingt-deux (22) interviewés, seulement dix (10) ont déclaré
lire "Fraternité Matin".
Et parmi ces dix (10), deux (2) le font chaque
jour, trois (3) le lisent de temps en temps et cinq (5) le feuillettent
rarement.

UNI\\'E~SIH OE ,\\\\O,'<TREAl
198
Les sujets préférés de ceux qui le lisent ont été évoqués en
vingt (20) énoncés.
L'analyse de contenu de ces énoncés nous a permis de
les réduire à huit (8) items qui constituent huit (8) sous-catégories.
Ces items, après analyse ont été regroupés en cinq (5) catégories de sujets
que préfèrent les lecteurs.
Tableau 23:
Typologie des parties intéressantes de Fraternité Matin
A. Pages sportives.
7 énoncés
7 interviewés
B. Divertissements.
6 énoncés
6 interviewés
1. "Jeux des huit erreurs"
3 énoncés
3 répondants
2. Faits divers
3 énoncés
2 répondants
3. Horoscope
énoncés
répondant
C. Politique nationale et internationale.
4 énoncés
4 interviewés
D. Information nationale.
2 énoncés
2 interviewés
1. Avis et communiqués
énoncé
répondant
2. Nouvelles du pays
énoncé
répondant
E. Rubrique scientifique et technique.'
énoncé
l interviewé
Quand les interviewés déclarent lire "Fraternité Matin, ils le
font de préférence pour les nouvelles sportives.
Celles-ci donnent en
effet des informations ayant trait aux événements sportifs, avec en primeur
les résultats de la veille ou les programmes de fin de semaine.
Dans leur
lecture des pages sportives, les répondants ne précisent pas de quel sport
il s'agit, quand bien même l'on pourrait supposer que le football occupe
une place prépondérante dans notre pays.

199
En plus des pages sportives, les interviewés lisent "Fraternité
Matin" pour se distraire.
Dans cette catégorie de divertissement, ce sont
"les jeux des huit (8) erreurs" qui les intéressent le plus.
Cette sous-
catégorie avec celle des "faits divers" auxquelles il faut ajouter l'horos-
cope du jour, constituent l'essentiel de ce qui est lu à titre de diver-
ti ssement.
Par contre, certains répondants, intéressés par la politique
nationale ou internationale préfèrent les pages qui traitent les sujets de
ce domaine.
Aussi, à titre d'information complémentaire, certains répon-
dants préfèrent lire les avis et communiqués et les nouvelles régionales
du pays.
Enfin, un répondant consulte de préférence les pages qui abordent
les sujets d'ordre scientifique et technique.
Dans l'ensemble, les répondants lisent "Fraternité Matin" pour
ce qui a trait au sport et aux divertissements.
Les pages sportives sont
préférés par sept (7) interviewés sur les dix (10) qui lisent ce journal.
De même les pages de divertissement tels les "jeux des huit (8) erreurs"
sont préférées par six (6) de ces dix (10) interviewés.
A l'observation de ces énoncés et du nombre d'interviewés qui les
ont émis à l'intérieur de chacune des catégories, il ressort que les pages
présentant des sujets de distraction sont les plus lues.
L'intérêt que portent ces jeunes ruraux au côté sports et loisirs
des pages de "Fraternité Matin" peut-il être un indice significatif dans

UNIVERSI TE DE .\\IONTREAl
200
l'appréciation de l'influence de ce journal dans la migration de ces
jeunes ruraux?
Dans le même cadre de la presse écrite, nous avons interrogé les
jeunes adultes quant à la lecture d'une revue hebdomadaire appelée "Ivoire
Dimanche" plus connu sous le sigle LO. Sur les vingt-deux (22) interviewés
dix (la) déclarent lire 1.0. comme dans le cas de Fraternité Matin.
De
ces dix (10) lecteurs, deux (2) le font chaque semaine, donc régulière-
ment, un (1) le lit une fois par mois et sept (7) le lisent rarement.
Les sujets préférés des lecteurs d'I.D. constituent vingt-et-un
(21) énoncés.
Une analyse de contenu de ces énoncés nous a amené à ne
retenir que dix (10) items.
Ces items constituent en même temps nos dix
(10) sous-catégories.
Après une seconde analyse, ces sous-catégories ont
été regroupées en cinq (5) grandes catégories d'information que présente
le tableau ci-dessous.
Tableau 24:' Typologie des. sujets préférés dans 1.0.
A. Courrier des jeunes.
7 énoncés
6 interviewés
1. Dialogue avec Catherine
6 énoncés
6 répondants
2. Trait d'union
énoncé
répondant
B. Divertissement.
4 énoncés
4 interviewés
1. Zézé
3 énoncés
3 répondants
2. Jeux divers
énoncé
répondant
C. Sports.
5 énoncés
5 interviewés

lJI':IVERSIT[ DE .\\tONTRL\\l
201
D. Information.
3 énoncés
2 interviewés
l. Nouvelles du pays
énoncé
répondant
2. Lettre d'I.D.
énoncé
répondant
3. Top secret
énoncé
répondant
E. Point de vue.
2 énoncés
2 interviewés
l. Courrier des lecteurs
énoncé
répondant
')
énoncé
répondant
L .
Dei l dans la rue
Le "courrier des jeunes".
Cette catégorie est constituée par la
correspondance des lecteurs de l 'hebdomadaire.
Certains des lecteurs qui
voudraient s'informer sur d'anciens amis qu'ils aimeraient revoir, ou qui
voudraient avoir de nouveaux correspondants pour échange d'information ou
autre chose, utilisent la rubrique "trait d'union" qui est une sous-catégo-
rie de "courrier des jeunes".
Cette catégorie fleurit également avec la
correspondance que reçoit l 'hebdomadaire avec la sous-catégorie "Dialogue
avec Catherine".
En proie à différents problèmes sentimentaux, certains
lecteurs voudraient être aidés par "Catherine" dans la résolution de ces
problèmes.
Et c'est ce que fait "Catherine" en proposant des voies et
moyens.
Parmi les lecteurs d'I.D., certains préfèrent les articles de
sports.
Parmi ceux-ci la prédominance revient aux articles de football.
Il faut d'ailleurs faire remarquer qu'à l'origine, l 'hebdomadaire Ivoire
Dimanche s'était donné pour but d'être un journal sportif.
Ce qui n'est
plus tellement le cas maintenant, puisque le sport n'est plus le seul
sujet que traite cette revue.

202
D'autres interviewés, quant à eux, trouvent leur plaisir à lire
I.D. à travers les pages de divertissement.
Cette catégorie se définit ici
comme l'ensemble des sujets qui permettent aux lecteurs de passer leur
temps.
Il s'agit de la bande dessinée "Zézé".
"Zézé" est le personnage
central de cette bande dessinée qui traite avec un accent très humoristique
de différents sujets de la réalité sociale du pays.
Les jeux de devinette
et de mémoire constituent la deuxième sous-catégorie d'éléments de diver-
ti ssement.
Les pages informatives sont aussi parmi celles que préfèrent les
lecteurs dII.D.
En tant que catégorie, l'information comprend la rubrique
"Top secret".
Cette page qui se veut révélatrice des confidences, donne
des spots d'information concernant différents sujets et en particulier,
ceux de sports.
Dans cette catégorie d'information, les pages relatives aux
nouvelles du pays peuvent y être classées.
Comme peut aussi l'être la
"lettre d'LD." que certains préfèrent lire.
Cette partie est en fait
"l'éditorial du journal" qui reprend dans leurs grands traits, les faits
saillants traités cette semaine-là par le journal.
Enfin, "le courrier des lecteurs ll et III 'oeil dans la rue"
constituent notre dernière catégorie appelée II po int de vue.
Dans le
second cas, c'est l'équipe de rédaction, qui relève les points saillants
qu'elle juge intéressants.
En somme, ce sont de brèves informations sur
des sujets d'actualité.

203
Comme nous pouvons le constater, sept (7) énoncés relèvent de la
catégorie "Courrier des jeunes", catégorie qui est préférée par six (6)
lecteurs sur dix (10).
Cette catégorie d'informations est donc la plus
importante.
En elle, une sous-catégorie se singularise:
c'est celle qui
établit le dialogue entre "Catherine" et les lecteurs d'LD.
A elle seule,
elle renferme six (6) des sept (7) énoncés de la catégorie principale.
Cette première catégorie est suivie, par ordre d'importance par
celle des pages sportives en faveur desquelles cinq (5) interviewés se sont
prononcés en énonçant cinq (5) items.
La catégorie divertissement quant à elle occupe le troisième
rang dans ce tableau.
Avec quatre (4) énoncés, c'est la sous-catégorie de
la bande dessinée "Zézé" qui lui donne son importance et sa signification;
puisque, cette sous-catégorie a trois (3) énoncés.
En plus, ces trois (3)
énoncés émanent de trois (3) personnes différentes.
Comme nous l'avons vu avec les répondants par rapport à "Frater-
nité Matin", avec Ivoire Dimanche, la préférence va aux pages qui évoquent
l'univers des jeunes.
Et en particulier ce sont les pages de sports et de
loisirs qui ont le plus de lecteurs.
En partant du postulat que Fraternité Matin et Ivoire Dimanche
sont les deux seuls journaux d'information nationale du pays, nous pouvons
nous poser une question double qui est la suivante.
Etant donné que la grande majorité des pages d'Ivoire Dimanche
évoquent des distractions à éléments culturels urbains;
compte tenu du

UNIVERSI Tf DE MO~TR[ \\l
204
fait aussi que Fraternité Matin propose très rarement des informations
culturelles en provenance du milieu rural, ceux parmi les lecteurs qui
préfèrent ces pages à dominante culturelle urbaine, à l'image des auditeurs
de la radio et des télespectateurs de la télévision, ces jeunes adultes ne
peuvent-ils pas être tentés d'aller en ville pour jouir de ces éléments
culturels que diffusent ces médias d'information?
La presse parlée audio-
visuelle et écrite ne favorise-t-elle pas ainsi l'émigration rurale?
Avec la question 15, nous introduisons l'aspect urbain de l'en-
trevue.
Nous cherchons par le biais de cette question à évaluer l'impact
du fait urbain sur les jeunes adultes ruraux.
Ainsi avons-nous demandé aux
interviewés de nous dire le nom de la ville à laquelle ils pensaient au
moment précis de l'entrevue.
En réponse,
Treize (13) ont cité le nom de la ville d'Abidjan
Trois (3) ont cité Bouaké
Deux (2) ont indiqué Gagnoa
Deux (2) ont avancé le nom de Yamoussoukro
Un (1) celui de Daloa
Un (1) n'avait pas d'idée précise sur aucune ville.
Ensuite, nous leur avons demandé de nous dire ce que le mot ville
représentait dans leur esprit.
L'image descriptive de la ville a donné
lieu à cinquante-neuf (59) énoncés.
Uhe analyse de contenu de ces repré-
sentations mentales nous a permis de découvrir trente (30) items.
Une
seconde analyse a réduit ce nombre à vingt-trois (23).
Ce qui constitue
l'ensemble de nos sous-catégories.
Celles-ci à leur tour ont été regroupées
sous sept (7) catégories.
Ce qui nous donne la typologie générale suivante.

UNIVERSITE DE ·\\tO~TREAl
205
Tableau 25:
Typologie descriptive de l'image de la ville
A. Centre de culture et de loisirs.
17 énoncés
12 interviewés
1. Distractions
a) Lieu de distractions
6 énoncés
6 répondants
b) Plaisirs
2 énoncés
2 répondants
2. Culture
a) Lieu d'échange culturel
énoncé
répondant
b) Centre de culture
énoncé
répondant
c) Lieu d'information
2 énoncés
répondant
d) Lieu qui permet d'évoluer
2 énoncés
2 répondants
e) Lieu d'habillement moderne
énoncé
répondant
3. Sports
a) Activités sportives
énoncé
répondant
b) Football
énoncé
l répondant
B. Lieu de promotion sociale et de gains personnels.
15 énoncés
11 i ntervi ewés
1. Lieu de travail
7 énoncés
6 répondants
2. Lieu de formation et d'apprentissage
de métier
2 énoncés
2 répondants
3. Lieu de recherche de mari
2 énoncés
2 répondants
4. Terre promise
2 énoncés
2 répondants
5. Lieu d'aide
énoncé
répondant
6. Lieu de repos où on ne peut pas
se fatiguer
énoncé
l répondant
C. Carrefour.
8 énoncés
5 interviewés
1. Lieu de rencontre
5 énoncés
4 répondants
2. Tissage d'amitié
3 énoncés
3 répondants

UNIVERSIH DE 'Io,",rRE \\l
~06
D. Services publics et privés.
7 énoncés
4 interviewés
1. Administration publique
a) Sous-préfecture
2 énoncés
2 répondants
b) Mairie
énoncé
répondant
2. Maternité
énoncé
répondante
3. Services commerciaux
3 énoncés
2 répondants
E. Beauté et modernisme.
6 énoncés
4 interviewés
1. Là où il y a les belles maisons
2 énoncés
2 répondants
2. Là où il y a les immeubles
2 énoncés
2 répondants
3. Là où il y a les rues bitumées
énoncé
répondant
4. Là où il y a l'électricité
énoncé
répondant
F. Animation.
5 énoncés
2 interviewés
1. Là où il y a llanimation
2 énoncés
répondant
2. Beaucoup de mouvement
énoncé
répondant
3. Beaucoup de voitures
énoncé
répondant
4. Forte densité de population
énoncé
répondant
G. Là où il y a la mer.
énoncé
l interviewé
D'après certains répondants, le mot ville évoque dans leur esprit
un lieu de culture et de loisirs.
Lieu de culture ou centre de culture comme ils la dénomment, la
ville incarne pour les jeunes adultes ruraux, la culture dite moderne.
Pour eux, un trait de cette catégorie, c'est l 'habillement moderne avec ce
qulil comporte de modes et de styles variés.

UNI"IR51T1 Dl ,I.\\ONTR{Al
207
Mais aussi, la ville est un lieu où l'information "circule'! car
l'on y est informé sur différents sujets.
En tant que telle, la ville re-
présente pour un jeune adulte de la campagne "un lieu qui permet d'évoluer".
C'est-à-dire, d1après leur point de vue, de passer d'une culture dite tra-
ditionnelle à une autre dite moderne.
Ce passage se caractérise par des
changements qui introduisent à l'adoption de nouvelles manières de penser,
d'être et d'agir qui caractérisent un citadin dans les grands traits.
Pour d'autres interviewés, la ville est par excellence le lieu du
divertissement.
En un mot, la ville de leur point de vue, rassemble toutes
sortes d'activités de distractions où chacun peut trouver satisfaction et
plaisirs.
Particulièrement, les sports et en tête, le football, consti-
tuent les grandes distractions que mentionnent les répondants.
Lieu de culture et de loisirs, mais aussi lieu de promotion
sociale et de gain personnel.
Telle est la deuxième catégorie d'images
qu'évoque le mot ville, à l'esprit des jeunes adultes ruraux.
Cette catégorie se définit par le travail salarié.
Pour les uns,
la ville, c'est le lieu de travail, c'est la où les gens "boulottent".
Pour les autres, c'est donc l lendroit rêvé "où l'on peut trouver du travail
facilement". En plus du travail, la ville présente aussi d'autres possibi-
lités de promotion. Car, selon les répondants, c'est la où il y a les mé-
tiers, où donc l'on peut en apprendre un. C'est aussi l'endroit où l'on
peut être facilement aidé par quelqu'un de bonne volonté si l'on est en
difficulté. La ville présente aussi l'image de la place 00 certains
jeunes adultes peuvent chercher un partenaire conjugal. Pour tout cela,

UNIVfRSIT( Of MO,"' IRf \\l
208
la ville est pour beaucoup la "terre promise".
C'est le lieu de repos où
l'on ne travaille pas beaucoup, où donc "l 'on ne se fatigue pas".
Dans
cette catégorie, les différents aspects de la ville sont pleins d'idéalisme
et tout y semble possible.
Ce qui introduit une nouvelle catégorie d'ima-
ges qui font de la ville, un carrefour de tout.
Dans l'esprit des interviewés, la ville est un lieu de rencontre
de tout.
Pour eux, la ville, c'est là où tout est représenté, où tous les
contacts humains sont favorisés.
C'est pourquoi ils estiment que l'on peut
y tisser beaucoup de liens d'amitié lien vivant avec des camarades et en se
faisant beaucoup de copains".
La ville, terre de relations humaines pour
celui qui veut en vivre, mais aussi centre de services.
Ici la notion de services regroupe aussi bien les activités du
secteur privé que celles du secteur public. Dans cette catégorie, c'est la
fonction administrative de la ville que les répondants évoquent.
Ils y
associent le terme de sous-préfecture qui est l'unité locale qui représente
les structures de l'Etat et celui de la mairie qui gère la vie sociale et
politique des habitants de la ville.
Cette fonction administrative est
complétée par le socio-sanitaire.
Car pour le répondant, la ville est là
où il y a la maternité.
Les répondants attribuent aussi à la ville, une fonction commer-
ciale.
Selon certains, la ville se définit par les services commerciaux
qu'elle développe à travers ses magasins et ses marchés.

l''''l\\r~Slr! or \\Io"'r~[-\\l
209
L1image qu'évoque la ville à l'esprit des jeunes adultes ruraux,
est donc celle d'un tissu social presque complet qui ne peut pas être
présenté sans les matériaux qui la composent.
C'est pourquoi certains
interviewés la caractérisent aussi par ce qu'elle a de frappant, c'est-à-
dire de beau et de moderne dans l'aménagement de son espace.
Selon eux,
la ville, ce sont des immeubles, ce sont de belles maisons, des rues bitu-
mées éclairées à l'électricit~.
La ville pour eux, c'est tout cela qu'ani-
me une forte densité de population.
Mais c'est aussi la multitude de voi-
tures qui ajoutent leur note au mouvement humain faisant ainsi de la ville
un monde en mouvement continu.
En cela elle serait comparable à un océan
immense et toujours en mouvance auquel un répondant associe l'image de la
ville.
Pour lui, la ville "clest là où il y a la mer".
Autant dlimages de la ville, autant d'énoncés, mais aussi et
surtout autant de représentations mentales des jeunes adultes ruraux
qui évoque le mot ville.
La première est celle qui fait de la ville, un centre de culture
et de loisirs.
Cette catégorie qui regroupe dix-sept (17) énoncés sur
les cinquante-neuf (59) et est proposée par douze (12) interviewés sur les
vingt-deux (22), est la plus importante de l'ensemble du tableau de
classification.
Deux (2) sous-catégories la singularisent.
Il s'agit d'abord,
des distractions avec huit (8) énoncés et de la culture avec sept (7)
énoncés.

210
La deuxième catégorie qui pèse aussi de son poids dans ce tableau
est celle de la ville définie comme lieu de promotion sociale et de gain
personnel.
Constituée de quinze (15) énoncés, elle est proposée par onze
(11) interviewés.
A l'intérieur de cette catégorie, la sous-partie qui
évoque la ville comme lieu de travail est la seule dominante car elle
renferme six (6) des quinze (15) énoncés, le reste étant partagé entre les
cinq (5) autres sous-catégories.
Dans l'esprit de la majorité des interviewés, la ville représente
non seulement un endroit de distractions et de culture, mais aussi celui
où l'on peut avoir un travail salarié.
Il est donc hors de doute que la
perception de la ville, telle que la conçoivent les jeunes adultes ruraux,
joue un rôle déterminant dans la migration de ces derniers.
Pour nous donner une idée du départ en ville des jeunes adultes,
nous avons demandé aux interviewés, d'abord s'il y avait beaucoup de jeunes
de leurs villages qui étaient partis pour la ville.
Ensuite pour quelle
ville et enfin quel jugement ils pouvaient porter sur l'attitude de ceux
qui sont partis en ville.
A la première question, tous les vingt-deux (22) répondants ont
affirmé que plusieurs de leurs amis étaient allés à la ville.
Les villes de destination mentionnées sont les suivantes,
(nous les présentons par ordre décroissant des mentions):

U:":I\\'lR"iITl Dl .\\1\\}S r"'(-\\l
211
l.
Abidjan
22 interviewés l'ont mentionnée
'1
L.
Gagnoa
12 interviewés
3.
Bouaké
9 interviewés
4.
Daloa
6 interviewés
5.
San Pedro
3 interviewés
6.
Korhogo
3 interviewés
7.
Yamoussoukro
3 interviewés
8.
Oumé et Man
2 interviewés chacune
la.
Sassandra, Issia, Divo
interviewé
chacune
13.
France (sic)
interviewé
Comme l'on peut 1e remarquer, dans l' énumérati on du lieu de des-
tination, Abidjan vient en tête avec 22 mentions faites par 22 interviewés.
Elle devance de la "points" la ville de Gagnoa qui est le chef-lieu du
pays rural où nous avons fait notre enquête.
Ensuite en troisième lieu vient Bouaké, avec 12 mentions qui est
pourtant la deuxième ville la plus importante du pays après Abidjan.
Bouaké est évidemment suivie par Daloa qui est la troisième grande ville
du pays avec 6 mentions.
A la vue de ce classement, il n'est pas superflu d' indiquer
qu'Abidjan à elle seule peut expliquer le mouvement migratoire des jeunes
adultes ruraux sur beaucoup de points.
Nous y reviendrons pour montrer
comment et pourquoi.

U"I\\iERIIH DE "O"TR(~l
212
Jugeant l'acte de ceux qui sont parti s en vi 11 e, les 18 des 22
répondants ont trouvé que ceux qui ont quitté le village ont eu raison de
le faire.
Par contre, deux (2) pensent le contraire et 2 sont sans opinion.
Avec la question 20, nous avons cherché à savoir si certains des
interviewés resteraient ou non à la campagne.
En réponse,
14 ont avoué qu'ils ne resteraient pas au village
7 ont déclaré qu'ils y resteraient
ne s'est pas prononcé.
Dans une première partie, nous analyserons les raisons de ceux
qui n'ont pas l'intention de rester au village.
A cet égard, trente-quatre
(34) raisons ont été invoquées.
Après une analyse de contenu, nous avons
pu dénombrer dix-neuf (19) items.
Un second niveau d'analyse a réduit ce
nombre à douze (12).
Ce qui constitue nos sous-catégories.
Celles-ci ont
été à leur tour classées en quatre (4) catégories.
C'est cet ensemble que
présente le tableau suivant.
Tableau 26:
Typologie des raisons de ceux qui n'ont pas l'intention
de rester au village
A. Promotion sociale et gain personnel.
19 énoncés
12 i ntervi ewés
l. Apprentissage d'un métier
a) Apprendre un métier
3 énoncés
3 répondants
b) Apprendre la coi ffure et
la couture
énoncé
répondant
c) Jouer au football
2 énoncés
répondant
d) Apprendre la dactylographie
énoncé
répondant
e) Aller au foyer de la fel11l1e
énoncé
répondant
2. Poursuite des études
4 énoncés
4 répondants

U"I\\'IRSIfI 01 "()'rR[~1
213
3. Recherche de travail salarié
3 énoncés
3 répondants
4. Recherche de moyens financiers
2 énoncés
répondant
5. Facilité de mariage
2 énoncés
2 répondants
B. Difficulté de la vie en milieu rural.
12 énonc~s
7 interviewés
l. Travaux champêtres difficiles
et cassants
4 énoncés
4 répondants
2. Conflit de générations
a) Mésentente avec les parents
2 énoncés
2 répondants
b) 1'1ésentente entre les jeunes et
les vieux
2 énoncés
l répondant
3. Répugnance à la vie du village
a) Je ne peux pas rester seul
au village
énoncé
l répondant
b) Je n'ai pas l'esprit de rester
au vi 11 age
énonc~
répondant
c) Je ne suis pas à l'aise ici
énoncé
répondant
4. Pauvreté des parents
énoncé
répondant
C. Satisfaction d'ambitions personnelles.
3 énoncés
2 interviewés
l. Pour évoluer
2 énoncés
répondant
2. Je veux être connu
énoncé
répondant
D. Décision du grand frère.
énoncé
l interviewé
Quand certains de nos interviewés déclarent qu'ils ne resteront
pas à la campagne, ils avancent des raisons liées à un d~sir de promotion
sociale et de gain en ville.

214
Cette catégorie de réponses rassemble des éléments comme l'ap-
prentissage d'un métier en vue d'une qualification professionnelle.
Au
niveau des filles ces métiers sont clairement nommés.
Elles désignent la
dactylographie, la coiffure et la couture.
Ainsi, certains jeunes adultes ne veulent pas rester au village
parce que, disent-ils, ils veulent "aller se débrouiller un petit métier
en ville".
Mais d'autres aussi sont animés par le désir d'aller chercher
un travail salarié, un emploi.
Cet emploi qui leur procurerait de l'argent
pour leurs différents besoins.
Par ailleurs, d'autres jeunes adultes, qui ne veulent pas rester
à la campagne, nourrissent un espoir d'aller ~ la ville dans le but de se
trouver un partenaire conjugal et fonder un foyer.
Certains par contre,
tels les garçons, conscients de leurs qualités athlétiques et sportives,
pensent aller à la ville pour apprendre à mieux jouer au football.
Ils
pourraient ainsi monnayer leurs talents et assurer leur avenir.
Ce n'est
certainement pas ce que pensent ceux qui, trouvant leur niveau scolaire
insuffisant vont quitter leurs villages, pour, semble-t-il, aller poursui-
vre des études en ville, c'est-à-dire "reprendre les bancs, continuer les
cours" comme ils le disent.
Une autre catégorie de raisons pour lesquelles certains répon-
dants quitteront leurs villages est celle relative aux difficultés de la
vie en milieu rural.
Ces difficultés, d'après les interviewés sont de
différents ordres.
Certains relèvent des travaux champêtres, lesquels de
l'avis des répondants semblent difficiles et cassants.
D'autres relèvent

215
d'un réel dégoOt de la vie sociale du village.
Ils avancent comme celui-
ci, "je ne peux pas rester seul au village".
Ou comme celui-l'; qui dit
"je n'ai pas l'esprit de rester au village".
Il yen a qui affichent
franchement leur mépris de la vie du village.
Tel ce dernier qui proclame:
"je ne suis pas à l'aise ici", (au village).
Cette répugnance à la vie du village est par ailleurs attisée par
les tensions entre les jeunes adultes et leurs aînés.
C'est ce que nous
avons appelé le conflit des générations.
Et ce conflit est d'autant plus
manifeste qu'il s'ajoute à l'incompréhension qui règne entre les parents
et leurs enfants.
C'est ce que l'un de ces derniers résume quand il dit
qu'il y a "mésentente entre nous et les vieux" au sujet de différents
problèmes.
Ou encore lorsqu'un autre, d'un air désabusé et plaintif, vous
lance:
"au village, les vieux te gardent dent pour rien", ce qui signifie:
les vieux sont contre toi sans motif.
Toutefois, il Y a d'autres répondants qui, soucieux de la situa-
tion de pauvreté dans laquelle se trouvent leurs parents, veulent aller
"se débrouiller en ville" pour leur venir en aide.
Ils introduisent ainsi
une catégorie de raisons de ceux qui ne veulent pas rester à la campagne
dans le but de réaliser des ambitions personnelles.
En partant en ville,
ils espèrent sortir de l'anonymat dans lequel la vie du village les tient.
Ils auront alors, s~lon leur propre terme, acquis un niveau d'évolution
qu'ils souhaitent.
Certains répondants sont souvent encouragés par la famille.
C'est le cas de cet interviewé que son grand frère a décidé d'envoyer en

216
ville.
Certains ne veulent donc pas rester au village parce que les
parents sont favorables à leur départ en ville.
En résumé, il ressort que les raisons de ceux qui ne veulent pas
rester au village tiennent à deux niveaux.
Le désir d'ascension sociale
et la volonté d'échapper aux difficultés du travail des champs dans le
cadre général des difficultés de la vie du village.
A l'analyse, il siest dégagé deux grandes catégories de raisons
avancées par ceux des interviewés qui nlont pas l 'intention de rester à
la campagne.
Lapremiêre catégorie dominante est celle de la promotion socia-
le et du gain personnel.
Elle est constituée de dix-neuf (19) énoncés
évoqués par douze (12) des quatorze (14) qui nlont pas l'intention de
rester au village.
Deux sous-parties donnent de la force à cette catégo-
rie.
Il Si agit du désir "d ' apprendre un métier" avec huit (8) énoncés et
de celui de la recherche dl un travail salarié avec quatre (4) énoncés.
La seconde catégorie qui retient notre attention est celle qui
renferme les raisons relatives aux difficultés de la vie en milieu rural.
Avec un total de onze (11) énoncés imputables à sept (7) interviewés, elle
est dominée par deux niveaux de raisons principales.
D'une part les dif-
ficultés du travail et le conflit des générations qui ont chacun été men-
tionnés quatre (4) fois.
A elles seules, ces deux sous-catégories regrou-
pent huit (8) des onze (11) énoncés de la catégorie.

UNIVERSITE DE "O.';[R(~l
217
Ces deux facteurs que constituent ces deux grandes catégories,
commanderaient donc les décisions de ceux qui n'ont pas l'intention de
rester ~ la campagne.
Quant aux sept (7) interviewés qui n'ont pas l'intention d'aller
à la ville, ils ont avancé quinze (15) raisons à ce propos.
Une analyse
de ces raisons nous a donné neuf (9) items.
Ces items repris ~ leur tour
et analysés, nous ont permis de constituer six (6) sous-catégories que
nous avons enfin rangées sous trois (3) catégories.
Tableau 27:
Typologie des raisons de ceux qui veulent rester au village
A. Préparation d'avenir.
7 énoncés
4 interviewés
1. Pour soi
a) Assurer mon avenir en faisant
quelques réalisations
énoncé
l répondant
b) Produire pour l'autosuffisance
alimentaire
3 énoncés
3 répondants
c) Economiser
énoncé
répondant
2. Pour la famille
a) Planter pour l'avenir
de mes enfants
énoncé
répondant
b) Aider le vieux
énoncé
répondant
B. Réalisme personnel.
6 énoncés
4 interviewés
1. Manque de qualification
et d'instruction
3 énoncés
3 répondants
2. Manque de situation en ville
3 énoncés
3 répondants

218
C. Amour du travail de la terre.
2 énoncés
2 interviewés
1. Travailler la terre
énoncé
répondant
2. L'homme dépend de la terre
énoncé
répondant
De l'avis de certains interviewés, c'est à la campagne qu'ils
peuvent préparer leur avenir et celui de leur famille.
C'est pourquoi, ils
pensent rester au village et n'envisagent donc pas d'aller en ville.
Pour eux-mêmes, ils pensent faire des réalisations qui leur
permettront de vivre de vieux jours heureux.
Parmi eux aussi d'autres ont
décidé de rester au village pour produire dans un cadre d'autosuffisance
alimentaire.
Ce qui par ailleurs pourrait leur dégager un surplus commer-
cialisable.
Ils pourraient ainsi se faire de l'argent et au besoin faire
des économies.
Par là-même, ils contribueraient à asseoir l'avenir de
leurs enfants tout en aidant aussi leurs vieux parents.
Pour une autre catégorie de jeunes adultes, rester à la campagne
relève d'un réalisme certain face à la vie urbaine.
S'ils décident de ne
pas quitter le village, c'est pour des raisons objectives.
Pour eux, le
manque de qualification professionnelle est un handicap sérieux qui se
dresse devant eux.
A cela, s'ajoute le fait que certains d'entre eux manquent tota-
lement d'instruction.
Ce qu'avoue d'ailleurs sans détour un interviewé:
IIje ne suis pas instruit".
Ce manque de qualification dû probablement au
manque d'instruction fait dire à certains qu'ils n'ont rien à faire en
ville.
Ou bien alors, prévoyant les difficultés de la vie urbaine qui

219
peuvent survenir, faute de situation stable, d'autres plus réalistes se
résignent à rester au village pour cultiver la terre.
Comme le fait aussi
cet interviewé parce que d'après lui "1 1 homme dépend de la terre".
Des trois catégories de raisons qui retiennent certains inter-
viewés à la campagne, celle qui a trait à la préparation de l 'avenir des
répondants et de celui de leur famille a le plus grand nombre d'énoncés.
Elle en compte sept (7) sur quinze (15) émis par quatre (4)
des sept (7) interviewés.
Parmi ces sept (7) énoncés, cinq (5)
se rapportent à l'avenir personnel des interviewés.
La seconde catégorie qui attire notre attention dans cette ana-
lyse évoque les raisons de qualification des interviewés et du manque de
situation en ville.
Ces deux sous-parties qui se partagent ct égalité les
six (6) énoncés de la catégorie sont le fait de quatre (4) interviewés.
Quoique faible du point de vue des énoncés par rapport ct la première caté-
gorie, elle jouit toutefois du même nombre d'interviewés que celle-là.
Pour certains jeunes adultes, par réalisme ou par amour du
travail de la terre, leur avenir et celui de leur famille peuvent être
bien préparés ct la campagne.
Et clest ce qui les y maintient.
Dans l 'hypothèse où certains jeunes adultes désireraient partir
à la ville, nous leur avons demandé de nous situer sur le choix de leur
destination éventuelle et de nous donner aussi les raisons de leur choix.

220
Pour l'ensemble des répondants:
Sept (7) iraient à Abidjan s'ils devaient le faire
Six (6) iraient à Gagnoa
Deux (2) iraient à Bouak~
Un (1 ) irait à Yamoussoukro
Un (1 ) irait à Dimbokro
Un (1 ) irait à Daloa
Un (1 ) à Ono
Un (1 ) à Soubr~
Deux (2) ne se sont pas prononcés.
Le choix de ces différentes villes est guidé par plusieurs
raisons.
Celles-ci ont été exprimées en trente (30) énoncés.
Une analyse
de contenu de ces énoncés nous a permis de les réduire à seize (16) items
qui constituent seize (16) sous-catégories de raisons.
Nous avons regroupé
celles-ci sous six (6) catégories.
Ces catégories sont complétées et
renforcées par celles constituées avec les réponses à la question 22 où
les répondants reprennent certaines idées de la question 21.
Nous ferons
alors une analyse de synthèse des catégories des deux questions.
Tableau 28:
Typologie des raisons du choix des différentes vi 11 es
A. Promotion et gain personnel.
15 énoncés
10 interviewés
l. Recherche de travail
6 énoncés
5 répondants
2. Apprentissage d'un métier
3 énoncés
3 répondants
3. Recherche de mari
2 énoncés
2 répondants
4. Recherche d'argent
2 énoncés
2 répondants
5. Etudes
énoncé
répondant
6. Pratique sportive
énoncé
répondant

221
B. Présence de parents en ville.
6 énoncés
6 interviewés
1. Mes frères y sont
4 énoncés
4 répondants
2. Mes parents y sont
2 énoncés
2 répondants
C. Sentiment pour la ville.
4 énoncés
3 interviewés
l. Parce que je l'aime
énoncé
répondant
2. Bas niveau de criminalité
énoncé
répondant
3. Ville de l' i ntéri eur
énoncé
répondant
4. Refuge
énoncé
répondant
D. Distance:
proximité.
2 énoncés
2 interviewés
1. Vi 11 e proche
énoncé
répondant
2. Pas loin de chez moi
énoncé
répondant
E. Difficulté des travaux champêtres.
2 énoncés
2 interviewés
F. M'installer à la terre à mon propre compte.
énoncé
l interviewé
Par la question 22 nous avons demandé aux interviewés de nous
dire les causes du départ des jeunes gens des campagnes vers les villes.
En réponse, ils nous ont indiqué soixante-cinq (65) motifs.
Après analyse ces motifs ont pu être classés sous vingt-neuf (29) items.
Une autre analyse a permis de réduire ce nombre à vingt-quatre (24).
Ce
qui donne les vingt-quatre (24) sous-catégories du tableau qui ont finale-
ment été regroupées sous huit (8) principales catégories.

222
Tableau 29:
Typologie des causes du départ des jeunes vers les villes
A. Promotion et gain personnel.
24 énoncés
16 interviewés
1. Recherche de meilleures conditions de vie
a) Recherche de travail salarié
7 énoncés
7 répondants
b) Meilleure vie
5 énoncés
5 répondants
c) Apprentissage d'un métier
4 énoncés
4 répondants
2. Recherche d'un partenaire congugal
6 énoncés
6 répondants
3. Recherche d'information
2 énoncés
2 répondants
B. Répulsion de la vie du milieu rural.
15 énoncés
11 interviewés
1. Difficultés des travaux champêtres
8 énoncés
8 répondants
2. Absence d'élément de distraction
a) Manque de loisirs
2 énoncés
2 répondants
b) Sports non développés
énoncé
répondant
3. Fuite du village
a) Fuir le village parce qu'il
est ennuyant
1 énoncé
l répondant
b) D'autres ne veulent pas
sentir le village
énoncé
répondant
4. Manque d'information
énoncé
répondant
5. Fuite de la sorcellerie des vieux
énoncé
répondant
C. Conflit de générations.
10 énoncés
10 interviewés
1. Incompréhension des parents
3 énoncés
3 répondants
2. Mésentente avec les parents
2 énoncés
2 répondants
3. Refus d'aider les parents
2 énoncés
2 répondants
4. Refus d'aider les enfants
2 énoncés
2 répondants
5. Manque de contact entre
vieux et jeunes
l énoncé
l répondant

L'NI\\'f,<;IT! tH "ONT~[Al
223
D. Attrait de la vie urbaine.
6 énoncés
4 interviewés
1. Distractions de la ville
2 énoncés
répondant
2. Imitation et mode
2 énoncés
2 répondants
3. Ambiance de la ville
énoncé
répondant
4. Désir de connaître la ville
énoncé
répondant
E. Système scolaire.
4 énoncés
3 interviewés
1. Le niveau scolaire acquis
2 énoncés
2 répondants
e
2. Admis à l'entrée en 6
énoncé
répondant
3. A cause de leur diplôme
énoncé
répondant
F. Parenté en ville.
3 énoncés
3 interviewés
G. Manque de soutien au village.
2 énoncés
l interviewé
1. Pas d'héritage
énoncé
répondant
2. Pas de parents proches
énoncé
répondant
H. Relations de famille.
2 énoncés
2 interviewés
1. Demande des parents
l énoncé
répondant
2. Trouver de quoi à donner
b
à leurs parents
l énoncé
répondant
Le texte qui suit reprend en son compte à la fois les données de
la question 21 relative aux raisons du choix des villes lors d'un éventuel
départ de la campagne et celles de la question 22 qui présente d'une
manière générale les raisons du départ des jeunes adultes vers la ville.
Nous ferons dans un premier temps, une étude d'ensemble des ta-
bleaux, et dans un second temps nous dégagerons
trois (3)

224
catégories qui se sont singularisées à la fois au niveau de la question 21
et à celui de la question 22 afin d'en montrer l'importance respective eu
égard au nombre de personnes qui les représentent.
Dans une première approche, les motifs du départ des villages
qu'invoquent les répondants en fonction du choix des villes et d'une maniè-
re générale relèvent d'un désir de promotion sociale et de gain personnel.
Cette catégorie est définie par la recherche de meilleures condi-
tions de vie, la recherche d'un partenaire conjugal et le besoin dlinfor-
mati on.
Les meilleures conditions de vie, d'après les répondants, passent
par l'obtention d'un travail salarié.
Car selon eux, "ceux qui sont en
ville ont de quoi à faire".
Alors que ceux qui sont à la campagne "ne font
rien, parce qulil manque du travail au village".
Ils choisissent donc
d'aller en ville dans "l'espoir de travailler un jour".
Au manque de travail au village, s'ajoute d'après les inter-
viewés, celui des métiers.
C'est pourquoi certains jeunes adultes quittent
aussi les villages pour la ville afin "d'apprendre un petit métier", qui,
au bout du compte conduirait à l'obtention d'un emploi salarié, gage d'une
meilleure condition de vie.
Cette condition, aux yeux des jeunes adultes,
repose sur l'obtention d'une situation qu'ils espèrent avoir en ville.
Car, en effet, d'après eux, il n'y a pas de vraie situation au village.
Celle-ci est donc un élément du mieux-être qui les attire vers les villes
pour "y chercher leur place et être bien".
Dans ce sens, ils comparent

U:-'I\\fRSITE Ul 'IO"TR[ Il
225
généralement la ville à la "terre promise", vers laquelle ils tendent les
bras, le coeur plein d'espoir.
Espoir de se trouver du travail, de se former dans un métier,
mais aussi espoir de se trouver un partenaire conjugal de leur choix.
Il
faut souligner que dans le cas de la recherche du partenaire conjugal, il
Y a une réelle accusation que nous relevons dans les réponses des inter-
viewés et qui va ~ l 'encontre des filles.
Les garçons affirment ne pas
avoir de femmes ~ marier au village parce que les filles refusent de se
marier aux villageois.
Et cela se confirme dans les réponses des filles
quand elles déclarent vouloir aller en ville parce qu'il n'y a pas de mari
au village.
Ainsi être en ville, résoudrait le problème des unes et des
autres dans ce cas.
Pour d'autres interviewés, leur départ en ville est lié à la
recherche d'information qui leur fait défaut au village.
Car, estime l'un
d'eux, lion est bien informé ll en ville.
Dans cette recherche de promotion, chaque interviewé définit ses
priorités;
et celui-là ne vérifie-t-il pas ainsi l'adage qui dit que c'est
l'information qui fait la différence entre choisir sa vie et la subir?
Une autre catégorie de raisons qu'invoquent les répondants est
relative à la répulsion qu'exerce la vie du milieu rural et qui la rend
répugnante aux yeux des jeunes adultes.
Les répondants définissent cette catégorie à travers les diffi-
cultés du travail manuel.
Pour eux, le village fatigue à cause des

226
travaux champêtres qu'ils n'aiment guère.
Ces difficultés relatives au
travail manuel sont doublées par l'incapacité même des jeunes adultes à
"tenir la matchette pour travailler la terre" comme le fait remarquer
un répondant.
Quant a d'autres, ils pensent fuir le village parce qu'il est
ennuyeux.
Cet ennui est dû d'après eux, à l'absence de distractions car
les sports ne sont pas développés à la campagne et les loisirs sont inexis-
tants.
Ces aspects négatifs de la campagne, qu'ils déplorent, font que
certains des jeunes adultes "ne veulent pas sentir le village" et pour
d'autres surtout "à cause de la sorcellerie des vieux".
Ce démarquage
systématique des jeunes vis-à-vis des valeurs et des pratiques des vieux
aboutit a ce que l'on connaît généralement sous le terme de conflit de
générations.
Cette catégorie regroupe les éléments de raisons qui opposent les
plus jeunes aux aînés au niveau de différents domaines de la vie sociale.
Ce conflit se manifeste par ce que les répondants appellent la
mésentente entre eux et leurs parents, marquée au coin de l'incompréhension
de leurs problèmes.
Ce qui crée au demeurant un relâchement de relations
entre les membres d'une même famille.
Et cette situation de faiblesse se
prolonge par une rupture des liens familiaux et un refroidissement des
rapports de parenté.
Si bien que, d'après les répondants, certains jeunes
adultes quittent le village pour la ville parce qu'ils ne veu1ent pas
aider les parents.
Ou bien aussi, ils le font parce que les parents ne
s'occupent pas d'eux comme ils le devraient.

U"l\\fR>ITI 01 '10"rR(U
227
L'ampleur du conflit des générations est souvent rendue manifeste
à cause aussi de l'attrait de la ville qui tient lieu de refuge des jeunes
adultes ruraux qui quittent leurs parents.
Cet attrait. selon les répondants. s'exerce sur les jeunes adul-
tes ruraux dans leur désir d'imiter ceux qui viennent de la ville et qui
sont bien habillés.
Ce qui conduit certains jeunes adultes ruraux à vou-
loir être à la mode comme tout le monde le fait en ville.
Aussi. selon
les interviewés, un autre motif de départ des jeunes adultes, réside dans
l'ambiance de la ville qui transparaît à travers les médias audiovisuels
telles la télévision et la radio.
Celles-ci, nous ne le soulignerons pas
assez, par la diffusion culturelle des modèles urbains dont elles envahis-
sent la campagne. cultivent chez les jeunes ruraux. un désir de connaître
telle ou telle ville proche ou lointaine dont ils ont entendu parler ou
qu'ils ont visitée une fois.
Ainsi, voir de près la ville et apprécier ce
qu'elle a d'attrayant ajoutent une note de plus dans la décision de
quitter la campagne:
Cette décision qui par ailleurs est, de l'avis des répondants,
très fortement aiguisée chez d'autres jeunes adultes du fait qu'ils ont été
à l'école, savent lire et écrire et ont obtenu un diplôme.
D'après les informations des interviewés, certains jeunes adultes
décident d'aller à la ville "à cause de leur niveau scolaire".
Pour ces
jeunes adultes donc, il n'est pas convenable de rester au village quand on
a déjà fréquenté l'école.
Et. qui plus est, quand on a un diplôme, quel
qu'il soit.

228
Le facteur école joue donc un rôle dans la désaffection des
jeunes vis-~-vis du milieu rural.
Il le joue encore dans la poursuite
d'études que les répondants avancent comme motif de départ pour la ville.
Quand bien même cela ne serait pas un rejet systématique de la campagne,
il n'en demeure pas moins qu'il est assez difficile de situer la marge de
séparation entre un désir réel, avoué, de quitter le village et celui
d'aller poursuivre des études en ville.
Cela est d'autant plus délicat
que, à un moment donné, ceux qui n'ont pu trouver un établissement d'ensei-
gnement et ceux qui vivent dans l'espoir de trouver du travail se confon-
dent dans une même situation.
Dans l'appréciation du départ des jeunes adultes ruraux vers les
villes, certains répondants soulignent des raisons liées à la famille.
C'est d'abord la présence d'un parent en ville.
Le parent compris dans un
sens global de frère, ou de soeur, de cousin ou de cousine, d'oncle ou de
tante.
C'est aussi la présence d'un tuteur qui entre dans le sens large
de famille.
Selon les répondants, l'on choisit souvent d'aller dans une
ville, parce que l'on y a généralement un membre de la famille.
Et nous
l'avons remarqué avec les raisons du choix de la ville de destination
, '
, '
éventuelle à la question 21.
Tous les 22 répondants ont avoué avoir au
1
moins un membre de leur famille dans les villes qu'ils ont désignées.
Toutefois, l'on peut décider d'aller ~ la ville pour des raisons
de famille autres que la présence en ville d'un membre de cette facille.
C'est le cas, selon les répondants, de certains d'entre eux qui manquent de
soutien familial au village.
C'est aussi l'absence d'héritage qui fait

229
défaut à d'autres.
Tel le cas de cet interviewé qui déclare:
"il n'y a
pas d'héritage".
Et cette situation est d'autant plus difficile au niveau
de l 'héritage que dans cette région de Gagnoa, le système de succession se
fait en ligne collatérale.
Si bien que les fils ne peuvent pas souvent
hériter de leur père défunt.
C'est le frère de ce dernier et donc l'oncle
du fils qui hérite du défunt.
Dans ces relations de famille, où certains jeunes adultes sont
conduits à l'émigration parce qu'ils n'ont pas de soutien il y a un
aspect positif à la faveur des jeunes adultes.
Selon les répondants, cer-
tains parents encouragent vivement un des leurs à partir à la ville afin
d'échapper à la dure réalité de la vie rurale.
D'autres jeunes gens le
font aussi par amour pour leurs parents.
Car, selon les interviewés, cer-
tains partent en ville afin de trouver de quoi à donner à leurs parents
restés au village.
Ceux-ci étant dans la majorité des cas, des personnes
pauvres et âgées.
Dans l'ensemble, les causes du départ des jeunes adultes ruraux
telles qu'elles ont été esquissées par les répondants, sont de différents
types et agissent à plusieurs niveaux.
Il y a d'une part les causes rele-
vant de la campagne et d'autre part celles qui sont imputables à la ville,
comme il y en a aussi qui sont propres aux jeunes adultes eux-mêmes.
Une
chose est certaine, toutefois, c'est qu'elles s'inscrivent dans un système
social global et qu'elles conjuguent le même phénomène qu'est l'exode rural.
A l'analyse, il ressort que de toutes les catégories de causes
dont ont fait état les interviewés en réponse aux deux questions réunies

230
21 et 22, quatre (4) grandes catégories se distinguent.
Il y a en premier
lieu, le désir de promotion sociale et de gain personnel.
21 des 22 inter-
viewés ont avancé au moins une raison relevant de cette catégorie.
Etant
donné que nous n'avons retenu qu'un seul interviewé pour les deux questions
réunies pour chaque catégorie, l'importance de cette catégorie est donc
considérable.
Dans ce contexte, l'on peut donc affirmer que les causes
liées au désir de promotion sociale et de gain personnel déterminent en
grande partie le départ des jeunes adultes vers les villes.
La seconde catégorie qui pèse de son poids dans cette classifica-
tion, regroupe les raisons liées à la répulsion du milieu rural.
Les deux questions mises ensemble, les éléments de cette catégo-
rie ont été proposés par onze (11) des vingt-deux (22) interviewés.
Les
raisons relevant de cette catégorie s'inscrivent donc parmi les principales
causes du départ des jeunes adultes telles que l'ont souligné les inter-
viewés.
<t
La troisième catégorie de raisons en importance est celle du
conflit des générations évoqué par dix (10) des vingt-deux (22) interviewés.
En dernier lieu, nous pouvons mentionner que, d'après les inter-
viewés, la présence de parenté en ville figure parmi les principales causes
du départ des jeunes adultes ruraux vers les villes.
Cette catégorie est
constituée à la base de données qu'ont proposées sept (7) des vingt-deux
(22) interviewés.

231
Selon les interviewés, nous pouvons donc expliquer en partie
l'exode rural par ces quatre (4) principales catégories de causes.
Pour terminer notre série de questions relatives au système
culturel et au fait urbain et rural, nous avons demandé aux interviewés de
nous dire ce que l'Etat ou le gouvernement devrait faire pour que les jeu-
nes gens comme eux restent à la campagne.
En réponse, soixante-et-une (61) idées ont été énoncées.
Une
analyse de contenu nous a permis de découvrir vingt-cinq (25) items.
Une
seconde analyse a réduit ces items au nombre de vingt-et-un (21), donnant
ainsi naissance à vingt-et-une (21) sous-catégories.
Ces dernières ont été
regroupées sous huit (8) catégories de propositions.
Tableau 30:
Typologie des propositions
A. Mise en place de moyens de distractions en milieu rural.
21 énoncés
14 interviewés
1. Equipement de loisirs
a) Création de centres de loisirs
12 énoncés
11 répondants
b) Création de centres culturels
4 énoncés
4 répondants
2. Création de terrains de sports
5 énoncés
5 répondants
B. Définition d'une politique économique de rétention des jeunes
à la terre.
10 énoncés
7 interviewés
1. Politique de sensibilisation pour amener
les jeunes à rester à la terre
5 énoncés
5 répondants
2. Moyens d'invitationdes jeunes au
travail de la terre
a) Subventionner ceux qui ont le désir
de rester à la terre
2 énoncés
2 répondants

232
b) Faciliter les crédits
d'installation
l énoncé
l répondant
c) Installation des jeunes en
faisant des plates-formes
l énoncé
l répondant
d) L'Etat devrait occuper les jeunes
par des activités comme l'élevage
l énoncé
l répondant
C. Développement des services commerciaux ~ la campagne.
S énoncés
7 interviewés
l. Ouverture de marchés villageois
5 énoncés
5 répondants
2. Construction de magasins
2 énoncés
2 répondants
3. Construction de buvettes et de bars
énoncé
répondant
O. Equipement sanitaire et social a la campagne.
6 énoncés
6 interviewés
l. Construction de centre de santé
3 énoncés
3 répondants
2. Construction de dispensaire
2 énoncés
2 répondants
3. Construction de maternité
énoncé
l répondant
'1
1
i'
E. Mise en place d'une structure de revenu satisfaisant en milieu rural.
5 énoncés
4 interviewés
l. Implantation des sociétés
pourvoyeuses d'emplois salariés
4 énoncés
4 répondants
2. Augmentation des prix des
produits agricoles
énoncé
l répondant
F. Modernisation des villages.
4 énoncés
3 interviewés
l. Construction de maisons en dur
2 énoncés
l répondant
2. Mettre tout ce qui est en ville
au village
énoncé
l répondant
3. Création de point d'eau
énoncé
répondant

233
G. Equipement administratif de la campagne.
4 énoncés
3 interviewés
1. Une sous-préfecture dans chaque
grand village
2 énoncés
2 répondants
2. Une mairie dans chaque village
énoncé
répondant
3. Création d'un poste de secours
dans les villages-centres
énoncé
1 répondant
H. Mise en place d'une structure de formation et d'éducation.
3 énoncés
3 interviewés
1. Construction de collèges dans
1es vi 11 ages ~ centres
énoncé
1 répondant
2. Mettre une auto-école
dans le village
l énoncé
1 répondant
3. stages de perfectionnement
permanent aux agriculteurs
énoncé
1 répondant
D'après certains interviewés, la mise en place d'une structure
de distractions pourrait retenir les jeunes adultes a la campagne.
Cette
catégorie, se définit par un ensemble d'équipement de loisirs comprenant
la création de centres de loisirs et de centres culturels et des terrains
de sports.
Selon les répondants, ces centres de loisirs devraient être équi-
pés de plusieurs unités de divertissement semblables a celles qui existent
en ville.
C'est dans ce sens qu'ils souhaitent que l'Etat leur donne les
moyens de "voir ce qui se passe en ville".
Certains voudraient aussi voir
se créer à la campagne des centres culturels pourvus en appareils de télé-
vision, de radio et d'autres moyens d'information.
Ces équipements de

U:-<I\\IRSIT[ Dl 'lO"TR(~l
234
loisirs ne seraient pas fonctionnels, s'ils n'étaient pas intégrés dans un
ensemble comprenant des terrains de sports.
Par ailleurs, certains répondants souhaitent de la part de l'état
la définition claire d'une politique économique en milieu rural en faveur
des jeunes.
Ce qui, les occupant utilement, les retiendrait aussi ~ la
campagne.
Celle-ci devrait s'articuler sur deux axes ou occuper deux
niveaux d'intervention.
D'abord une action de sensibilisation pour amener les jeunes
adultes a s'intéresser à leur milieu rural.
Cela suppose, d'après les ré-
pondants la mise en place et l'adoption de stratégies visant A inciter les
jeunes adultes au travail de la terre.
Mais l'incitation à elle seule ne
suffirait pas si elle n'est pas accompagnée de moyens concrets.
C'est
pourquoi, selon les interviewés, l'Etat devra subventionner ceux qui ont le
désir de rester A la terre.
Ou bien aussi, leur faciliter les crédits
d'installation.
Pour d'autres répondants, la motivation des jeunes adultes serait
encore plus grande s'ils pouvaient disposer de plates-formes de terrains
préparées par l'Etat à leur intention.
Enfin, dans cette optique de
politique économique, d'autres jeunes adultes voudraient être encouragés
par différents moyens, appuyés de subventions de l'Etat, afin d'entrepren-
dre l'élevage de la volaille.
En plus de définir une politique de rétention des jeunes adultes
à la terre, certains répondants souhaitent que l'Etat mette en place une

235
structure de revenu satisfaisant en milieu rural.
Cela implique à leur
avis, l'implantation de sociétés ou d'entreprises pourvoyeuses d'emplois
salariés, et l'augmentation des prix des produits agricoles.
Ce qui dans
l'ensemble améliorerait le niveau de vie des jeunes adultes en milieu
rural.
L'amélioration des revenus devrait aller de pair avec le déve-
loppement de services commerciaux.
Cette catégorie se définit, d'après les
répondants par la construction de marchés villageois, l'ouverture de maga-
sins et de boutiques ainsi que celle de buvettes et de bars.
Ainsi, s'a-
chemine-t-on vers la modernisation des villages que souhaitent les répon-
dants.
Ces villages, les répondants les voudraient en dur, c'est-à-dire
des maisons en brique de ciment et couvertes de tôles, et qui en plus,
possèdent des points d'eau potable.
En somme, pour les répondants, la
modernisation signifie "mettre tout ce qui est en ville au village".
Comme
par exemple, les équipements sanitaires et sociaux qu'ils souhaitent en
milieu rural.
Cet ensemble se définit par la construction de centres de
santé, des dispensaires, mais aussi des maternités dans les villages.
La modernisation signifie aussi pour les jeunes adultes, l'orga-
nisation de la vie administrative en milieu rural.
Ce qui voudrait dire,
l'érection de certains gros villages en sous-préfectures et en mairies.
Et pour assurer la sécurité dans ces unités locales administratives, les
répondants souhaitent que soient ouverts des postes de secours de la
gendarmerie dans ces nouvelles unités.

236
Une autre catégorie d'éléments pouvant retenir les jeunes en
milieu rural, c'est, d'après les interviewés, un développement des struc-
tures de formation et d'éducation de base.
Pour certains, il s'agit de
construire des collèges plus pr~s des jeunes ruraux afin d'éviter que
ceux-ci aillent loin de leurs parents et de leurs localités.
Pour d'autres,
intéressés par le transport, l'ouverture de certaines auto-écoles dans les
villages serait la bienvenue.
Pour ceux qui sont intéressés par la trans-
formation de l'agriculture, l'organisation de stages de formation perma-
nente en faveur des jeunes paysans est une des actions de formation
souhaitées.
Pour les interviewés, une politique globale qui tiendrait compte
de ces propositions constitue un moyen efficace pour la rétention des
jeunes adultes à la campagne.
Parmi ces propositions toutefois, quatre (4) catégories retien-
nent notre attention.
La première qui s'avère ici la plus souhaitée évo-
que les éléments de distractions susceptibles de retenir les jeunes ~ la
campagne. En regroupant vingt-et-un (21) des soixante-et-un (61) énoncés
qui forment les réponses ~ la question, elle est le souhait de quatorze (14)
interviewés sur un total de vingt-deux (22).
C'est dire qu'elle exprime ~
elle seule la moitié des souhaits des interviewés.
D'où son poids non
négligeable qu'elle détient dans cet ensemble.
Elle est suivie, dans cette
mesure par la catégorie d'éléments de politique économique en faveur des
jeunes ruraux.
Quoiqu'elle ne poss~de que dix (10) énoncés, elle est
constituée à partir d'idées de sept (7) interviewés, soit presque un tiers

U"IVfRSITl Dl \\\\0"' TR( ~l
237
de l'échantillon.
Ce qui pour cela, lui confère un poids non négligeable
dans l'ensemble des catégories.
La troisième catégorie, quant ct elle, vise à l'instauration de
services commerciaux dans le milieu rural.
Souhaitée par sept (7) inter-
viewés, ils l'ont exprimée à travers huit (8) énoncés.
En valeur relati-
ve, elle jouit de la même importance que la catégorie précédente, compte
tenu du nombre de ses interviewés.
En dernier lieu, l'équipement sanitaire et social proposé par
six (6) interviewés ct la base de six (6) énoncés, constitue la quatrième
des catégories essentielles des propositions des répondants.
Celle-ci met
l'accent sur la création de centres de santé dans les villages.
Un centre
de santé, constitue à notre avis, une structure élémentaire sanitaire de
base qui dispenserait les soins primaires.
Située dans un village moyen,
elle serait relayée par un dispensaire et une maternité dans un village_
centre.
Ces quatre catégories de propositions constituent ainsi l'essen-
tiel des réponses ou des souhaits formulés par les interviewés auprès de
l'Etat.
En conclusion, l'étude de cettè variable système culturel fait
urbain et rural, nous a permis de retenir un certain nombre de points
saillants.
En milieu rural, en plus de leur petit nombre, les distractions
des jeunes adultes ruraux sont très peu variées.

U';IVfR51r! Of '\\O,;rRr~l
238
Les mass média, à orientation essentiellement urbaine laissent
peu de place dans leurs programmes et dans leurs pages à l'expression des
réalités du monde rural.
Dans le cadre d'une éventuelle émigration, les jeunes adultes
ruraux optent pour Abidjan comme leur premier choix de destination.
Et parmi les causes évoquées de l'exode rural, le désir d'ascen-
sion sociale, la parenté en ville, la répulsion de la vie en milieu rural
et le conflit des générations constituent les principales causes évoquées
par les interviewés.
Et d'après eux, ce qui pouvait les retenir à la cam-
pagne, c'est principalement la mise en place d'une structure de distrac-
tions et la définition d'une politique économique cohérente adaptée à leurs

besoins.
: i
3.2
Les données du système scolaire
Les données touchant le système scolaire ont été recueillies à
'1
partir de sept (7) questions soumises aux vingt-deux (22) interviewés.
'11
Pour mesurer cette variable, nous avons en premier lieu demandé
aux interviewés de nous dire pourquoi, d'après eux, les parents favorisent
la fréquentation scolaire de leurs enfants.
En plus de cette question qui
évoque le but de l'école, nous avons demandé aux interviewés d'estimer,
chacun dans son village, le nombre d'enfants scolarisés.
Y en avait-il
beaucoup ou pas assez?
Nous leur avons aussi demandé ce que, de leur avis,
l'école apprend aux enfants qui la "fréquentent" et quel est le milieu
pour lequel elle les prépare.

239
Personnalisant la question, nous avons demandé à chaque inter-
viewé de nous dire les raisons pour lesquelles il mettrait son enfant à
l'école, s'il en avait un.
Enfin, pour terminer avec les questions relatives à cette varia-
ble, nous avons cherché à savoir si les interviewés croyaient que les
jeunes resteraient à la campagne dans l 'hypothèse où l'école les préparait
dans ce sens.
Les interviewés ont justifié leurs réponses dans chaque cas.
Lors du dépouillement, nous nous sommes rendu compte que les ré-
ponses apportées à la question:
"Pourquoi les parents mettent-ils leurs
enfants à l'école" et à celle qui demandait:
"s i vous aviez un enfant, le
metteriez-vous à l 'école", étaient sensiblement les mêmes.
Nous en avons donc fait des éléments d'un seul tableau d'analyse
comme cela a été le cas aux questions 21 et 22 de la variable système cul-
turel fait urbain et rural.
La question 2 n'a pas nécessité de tableau puisque les 22 répon-
dants ont tous affirmé que beaucoup d'enfants de leurs villages étaient
scolarisés.
Ce qui a exclu aussi de poser la question 3.
A la question 5, seulement six (6) répondants pensent que l'école
prépare les enfants à rester en ville.
Par contre seize (16) croient que
l'école les prépare à rester aussi bien en ville qu'à la campagne.
Nous présentons ci-après quatre (4) tableaux issus respective-
ment des questions l et 6, de la question 4 et de la question 7.
Elles

U~IVIRSIT[ Dl '10~rR!~l
240
sont relatives au but de l'école, aux programmes de l'école et de son rôle
positif ou négatif, avoué ou non avoué dans le processus de l'exode rural.
A la question, "pourquoi les parents favorisent la fréquentation
scolaire", soixante-treize (73) raisons ont été invoquées. Une analyse de
contenu de ces réponses nous a permis de les réduire à dix-neuf (19) items.
Une seconde analyse a restreint ce nombre à dix-huit (18) ce qui nous donne
des sous-catégories.
Celles-ci à leur tour ont été regroupées sous sept
(7) catégori es.
Tableau 31:
Typologie des raisons de la fréquentation scolaire
A. Promotion sociale de l'enfant.
31 énoncés
20 interviewés
1. Changement de statut social
a) Travailler en ville
6 énoncés
6 répondants
b) Vivre en ville
5 énoncés
4 répondants
2. Réussite individuelle de l'enfant
7 énoncés
6 répondants
3. Ascension sociale
5 énoncés
5 répondants
4. Préparation d'avenir
3 énoncés
3 répondants
5. Autonomie
3 énoncés
3 répondants
6. Acquisition de responsabilité
2 énoncés
2 répondants
B. Investissement familial.
20 énoncés
14 interviewés
1. Aide potentielle
10 énoncés
8 répondants
2. Support familial potentiel
4 énoncés
4 répondants
3. Construction d'une maison
aux parents
3 énoncés
3 répondants
4. Sources de revenus monétaires
3 énoncés
3 répondants

241
C. Education et formation.
17 énoncés
12 interviewés
1. Instruction
12 énoncés
11 répondants
2. Education
3 énoncés
3 répondants
3. Culture
2 énoncés
2 répondants
D. Raisons historiques.
2 énoncés
interviewé
1. Colonisation
énoncé
2. Travaux forcés
énoncé
E. Devoir paternel.
1 énoncé
1 interviewé
Pour que les parents ne soient pas accusés quand les enfants volent.
F. Civisme:
être utile à 1 l état.
1 énoncé
interviewé
G. Pour bien se porter.
énoncé
1 interviewé
Nous avons demandé aux interviewés s'ils mettraient un jour leurs
enfants ~ l'école.
Les vingt-deux (22) ont tous répondu oui ~ la question.
Ils ont justifié leur réponse en énonçant soixante-cinq (65) idées.
Celles-ci analysées dans leur contenu ont donnée lieu ~ vingt-et-un (21)
items.
Une analyse d'un autre niveau a réduit ce nombre ~ douze (12), ce
qui constitue nos douze (12) sous-catégories.
Celles-ci ont été ensuite
regroupées sous cinq (5) catégories qui forment l'ossature du tableau
sui vant.
Tableau 32:
Typologie des raisons de la scolarisation d1un enfant
A. Autonomie de l'enfant.
17 énoncés
14 interviewés
1. Dans sa vie privée
a) Se suffire
4 énoncés
4 répondants

242
b) Se marier
énoncé
répondant
c) Supporter sa famille
2 énoncés
2 répondants
2. Dans ses relations avec autrui
a) Pour faciliter ses tâches
4 énoncés
4 répondants
b) Favoriser les contacts
énoncé
répondant
3. Assurance pour la vie
a) Préparation d'avenir
4 énoncés
4 répondants
b) Pour qu'il ne soit pas
un jour voleur
l énoncé
l répondant
B. Promotion sociale de l'enfant.
14 énoncés
11 interviewés
1. Changement de statut social
a) Avoir à travailler en ville
4 énoncés
4 répondants
b) Pour qu'il ne reste pas
au village
2 énoncés
2 répondants
c) Pour qu'il devienne quelqu'un
plus que moi
2 énoncés
répondant
d) Pour ne pas planter le café
énoncé
répondant
e) Je n'aimerais pas que mon enfant
reste à la terre comme moi
énoncé
répondant
2. Réussite personnelle
4 énoncés
4 répondants
C. Investissement.
15 énoncés
10 interviewés
1. Pour sa famille
a) Soutien familial
11 énoncés
10 répondants
b) Source d'argent
3 énoncés
2 répondants
2. Pour son pays
énoncé
répondant

243
D. Education et formation.
14 énoncés
12 interviewés
1. Instruction
7 énoncés
7 répondants
2. Formation de base
4 énoncés
3 répondants
3. Education
3 énoncés
3 répondants
E. Honneur fami 1i al.
3 énoncés
3 interviewés
1. Honneur de la famille
en cas de succès
2 énoncés
2 répondants
2. Prise de responsabilité des parents
1 énoncé
répondant
L1 ana1yse qui suit est élaborée à partir des deux tableaux.
issus des questions 1 et 6.
La scolarisation, d'après les informations, est perçue par cer-
tains parents comme un moyen de mobilité sociale qui, par conséquent, con-
fère une promotion sociale.
Cette catégorie fait d1abord référence à la
notion de statut socio-économique ou socio-professionne1.
D1après les
interviewés, un parent scolarise son enfant dans le but de lui faire chan-
ger de statut social.
C'est-à-dire lui donner les moyens de passer d'une
strate sociale inférieure à une strate supérieure.
Dans cette optique, pour un parent, scolariser un enfant, ctest
mettre celui-ci sur la voie de la promotion sociale, comme dit un inter-
viewé, II pour qu'il devienne quelqu'un plus que moi ll •
Et aussi, considérant le fait que le travail de la terre ne con-
fère pas un statut social honorable, il voudrait que son enfant en soit
épargné par le biais de la scolarisation.

U"'\\[R~IT! O[ \\1()"IR(~l
244
C'est le désir de cet interviewé lorsqu'il dit "je n'aimerais pas
que mon enfant reste a la terre comme moi".
C'est dire, d'aprês les ré-
pondants que les parents scolarisent leurs enfants, "pour qu'ils vivent en
ville et qu'ils puissent y travailler".
L'interviewé, lui, mettra son enfant à l'école "pour ne pas
planter le café, pour qu'il ne reste pas au village".
Dans ce "village" où
la promotion sociale semble nulle, scolariser un enfant, c'est lui donner
un moyen de réussite personnelle à travers un emploi en ville et "une
bonne place".
Pour un parent de la campagne, il n'y a donc pas de réussite en
dehors de l'école et de la ville.
Dans ce sens, l'école est donc comprise
comme une assurance pour la vie d'un enfant.
Car d'aprês certains inter-
viewés, scolariser un enfant en milieu rural, c'est lui "pr éparer un ave-
nir".
Un avenir certain, gage d'ascension sociale.
Mais aussi, c'est lui
conférer les habiletés d'être autonome dans sa vie sociale et dans sa vie
privée.
Un interviewé scolarisera son enfant afin que celui-ci lise suffi-
se à lui-même, qu'il puisse se marier et supporter sa famille".
Cela aussi
l'aiderait dans ses rapports avec autrui parce que l'instruction qu'il aura
acquise pourra lui "favoriser ses tâches et les contacts avec autrui".
Ce
qui de l'avis des interviewés, développerait le sens de l'autonomie, mais
aussi celui de la responsabilité.
Ainsi, à en croire les avis des répondants, l'un des buts prin-
cipaux de l'école, c'est de soustraire l'enfant aux dures réalités de la
campagne où l'horizon social est nul, donc sans grand avenir, pour 1'orien-

245
ter vers la ville, lieu où la promotion sociale est possible.
Dans ces
conditions et dans ce lieu, l'enfant pourra "devenir grand type", c'est-~­
dire une personnalité reconnue, une autorité politique.
Ce qui est un suc-
cès politique.
Ce qui est un succès pour la famille tout entière.
('est pourquoi, la scolarisation d'un enfant en milieu rural
peut être comparée ~ un investissement pour la famille.
Ainsi, selon cer-
tains interviewés. un enfant scolarisé représente "une aide potentielle
pour la famille".
Et en cas du succès. c'est lui le "support de la famil-
le".
Cela signifie non seulement qu'il apportera de l'aide aux parents,
généralement pauvres, mais aussi qu'il veillera ~ la réussite de ses frères
et cousins.
C'est pourquoi, la scolarisation est perçue comme une source de
revenu monétaire.
Car selon d'autres interviewés, l'enfant pourra un jour
"ramener de l'argent dans la fami.lle".
Ce qui en quelque sorte n'est autre
chose que "rembourser ce qu'on a dépensé sur lui" comme le souligne ce
répondant.
Scolariser un enfant, c'est aux dires des répondants, opérer un
"investissement" productif à court ou à moyen terme comme le dirait aussi
un financier.
Par contre, pour d'autres interviewés. les parents scolarisent
leurs enfants pour que ceux-ci soient éduqués et formés.
L'éducation ou la
formation en tant que catégorie, est entendue ici dans son sens général de
culture de type moderne.
Mais ce qui ressort souvent de la part des répon-
dants, clest le terme d'instruction.
Pour les interviewés de cette caté-

246
gorie, les parents scolarisent leurs enfants "pour qu'ils soient instruits"
ou simplement dit "pour qu'ils connaissent papier".
L'un des buts de la
scolarisation serait donc l'instruction et l'éducation des enfants.
L'éco-
le donnerait donc à l'enfant, l'éducation de base et la culture moderne.
Certains des interviewés situent le but de la scolarisation dans
l 'histoire du pays.
Pour ces derniers, si les parents scolarisent leurs
enfants c'est parce que, autrefois, "ils ont été malmenés par les colons".
Et que maintenant "les enfants doivent travailler pour faire oublier
les travaux forcés".
L'école est donc dévoilée ici dans sa réalité de fait
colonial importé et imposé à des peuples sans école, mais non sans culture.
La réalité de l'école, pour d'autres, réside dans le fait qu'elle
prépare les enfants à être utiles ~ l'Etat et à la société.
('est pour-
quoi, certains parents mettent leurs enfants à l'école, non seulement par
devoir paternel, mais aussi par obligation morale face à une éventuelle
délinquance du non scolarisé.
Ils le font aussi par obligation
civique
face aux valeurs sociales qui déterminent la vie communautaire.
Car, la
fréquentation scolaire obligatoire est une des normes permettant de con-
crétiser la valeur "l'école pour tous" ou "la scolarisation à 100%" annon-
cée dans les années 1960.
Vu sous cet aspect positif et quasi salvateur pour les jeunes
adultes en milieu rural, le but de la scolarisation des enfants ne peut
que conduire les parents A avoir une foi aveugle dans les vertus de l'école.
0'00 le grand nombre d'enfants scolarisés que les interviewés ont mention-
nés dans leurs villages.

U"I\\'fRSlTf [Jf "0'' fR[ ~l
247
Les deux tableaux de classification réunis, et de l'avis des in-
terviewés de chaque catégorie, nous pouvons retenir deux catégories de
raisons définissant le but de la scolarisation des enfants.
Il s'agit de la catégorie des raisons qui lient la scolarisation
à la promotion sociale de l'enfant, et de celle des raisons qui définissent
la scolarisation comme un "investissement familial".
La promotion sociale en tant que catégorie, est définie par des
éléments de réponses de vingt (20) interviewés.
Etant donné que nous
n'avons pris qu'une seule personne dans les deux questions, pour chaque
catégorie, il va sans dire que cet ensemble de raisons est fondamental
dans la scolarisation des enfants en milieu rural.
Avec en tête les motifs
relatifs au changement de statut social aussi bien sur le plan économique
que sur le plan professionnel, cette catégorie présente le caractère utili-
1
,1
taire de l'école.
Ce qui est un fait déterminant en milieu rural dans le
cadre de la mobilité sociale.
La deuxième catégorie qui pèse de son poids dans l'ensemble des
catégories de raisons, définit la scolarisation comme un investissement
pour la famille.
Elle est proposée par dix-sept (17) des vingt-deux (22)
interviewés.
L'aide potentielle que représente l'enfant scolarisé, la
source de revenu monétaire qu'il devient en cas de succès dans sa vie,
décrivent assez bien l'aspect investissement financier que représente un
enfant scolarisé tel que le voient les répondants.
Ici l'enfant est donc
perçu comme celui par qui arrive la promotion sociale de toute une famille.
,
Pour les parents, la scolarisation d'un enfant est donc en quelque sorte

248
un "placement financier" qui est susceptible de rapporter un quelconque
bénéfice.
Face A cette attitude, l'instruction, ou le fait de "connaître
papier" et par conséquent 1 lécole est perçue dans ce milieu rural, comme
l'un des plus importants facteurs de mobilité sociale ascendante, donc de
promoti on soci ale.
Et cette promoti on, de l' avi s des répondants, on ne
peut la réaliser qu'en ville.
Il n'est donc pas superflu de considérer le
départ pour la ville de certains jeunes ruraux, de quelque niveau scolaire
qu'ils soient comme une suite logique à cette perception de la scolarisa-
tion en mil ieu rural.
A la question de savoir ce que l lécole apprend aux enfants qui
la "fréquentent". quarante-six (46) énoncés ont été formulés.
A partir
d'une analyse de contenu, ces énoncés ont été réduits à dix-huit (18)
items qui ont donné lieu à quinze (15) sous-catégories.
Ces dernières ont
été rangées sous quatre (4) catégories.
Tableau 33:
Typologie des objectifs de l'école
A. Formation et information de l'enfant.
19 énoncés
14 interviewés
l. L'école apprend l'instruction
8 énoncés
8 répondants
2. Préparation A la vie
4 énoncés
4 répondants
3. Information généra le
a) L1école apprend à connaître
beaucoup de choses
1 énoncé
1 répondant
b) L'école apprend la curiosité
aux enfants
l énoncé
1 répondant
c) L'école apprend le passé
aux enfants
l énoncé
l répondant

249
4. Format; on de base
a) Savoir parler français
2 énoncés
2 répondants
b) Savoir lire et écrire
énoncé
répondant
5. L'école donne le diplôme
énoncé
répondant
B. Le savoir être.
16 énoncés
13 interviewés
8 énoncés
8 répondants
l. L'éducation
2. La culture et la civil isation
3 énoncés
3 répondants
4 énoncés
4 répondants
3. Le savoir vivre
4. La morale
énoncé
répondant
C. Le façonnement de la personnalité.
7 énoncés
6 interviewés
l. L'école rend intelligent
6 énoncés
6 répondants
2. L'école est un "coin de
développement ll
l énoncé
l répondant
o. Le savoir faire. 4 énoncés 4 interviewés
l. Le savoir faire des choses
énoncé
répondant
2. L'école apprend à travailler
énoncé
répondant
3. L'école apprend des métiers
énoncé
répondant
4. L'école apprend à cultiver la terre
l énoncé
répondant
A l'analyse de certaines réponses des interviewés, l'école pro-
cède à la formation et à l'information de l'enfant.
Cette catégorie ren-
ferme les éléments qui ont trait à l'ordre informationnel, c'est-à-dire,
la transmission de certaines connaissances théoriques.
Ce que nous con-
naissons sous le terme de l'éducation de base.
L'élément principal que
confère ce processus a été défini comme étant l'instruction que l'enfant

U"'V!~SIH Dl \\tO'.rRHI
250
acquiert à l'école.
L'instruction considérée comme acquisition de connais-
sances à travers un système d'enseignement et des méthodes d'apprentissage.
Cette acquisition, est sanctionnée, selon les répondants par un diplôme
déterminant le degré auquel est parvenu le scolarisé.
L'école, comme dit
l'un d'entre eux, "donne le diplôme" qui constitue un indice de compétence
quelconque.
Ainsi, pour certains des répondants, l'école prépare les
enfants à la vie future.
Pour d'autres, elle "donne" même la vie.
En ce
sens, l'école dispense une information nécessaire à la vie de l'individu
dans son environnement, car pour eux, elle apprend à l'enfant à "connaître
beaucoup de choses".
Elle développe ainsi chez llenfant l'esprit de curiosité, et
même l'initie au passé en lui fournissant des informations relatives à
l 'histoire du monde et du pays.
En plus de cette formation générale, l'école développe chez les
enfants, le savoir être.
Cette catégorie se définit par l'éducation en
tant que civilité sociale.
D'après certains interviewés, l'école apprend
l'éducation aux enfants, c'est-à-dire un ensemble de manières d'être dans
un groupe social donné.
Nous pourrions dire dans ce contexte avec les
répondants que l'école polit les enfants en les dressant afin qu'ils
adoptent les normes sociales en vigueur.
Sont aussi synonymes de normes
sociales, les règles de la morale que l'école apprend aux enfants.
L'école, dans cette perspective, et telle que la conçoivent les
interviewés, peut être définie comme un lieu d'apprentissage de savoir

U"'\\'IRS1H Dl "() .... TR[~l
251
vivre et de savoir être.
Ce qui lui assigne aussi un râle de véhicule de
culture et de creuset de civilisations.
Non seulement l'école apprend à l'enfant à être socialement,
mais aussi elle lui apprend à vivre son individualité.
Et dans ce cadre,
l'école développe chez l'enfant les aptitudes intellectuelles.
Ainsi,
selon les répondants, l'école "rend intelligent".
En somme l'école façonne
la personnalité de base de l'enfant.
Par le jeu des raisonnements qu'elle
organise autour des différentes matières d'enseignement, l'école développe
des aptitudes et des habiletés que les interviewés qualifient d'intelli-
gence.
Ces habiletés que l'on peut aussi associer à l'intelligence pra-
tique, définissent ce que les interviewés appellent le "savoir faire des
choses".
Pour eux, l'école développe le savoir faire chez l'enfant.
Car,
comme dit l'un d'entre eux, "l'école apprend à travailler, l'école apprend
des métiers".
Mais aussi "l'école apprend à cultiver la terre".
A en croire
l'ensemble des interviewés, pour les uns, l'école forme, c'est-à-dire, ins-
truit.
Pour les autres, elle éduque, c'est-à-dire adapte l'enfant au mi-
lieu social environnant.
Pour certains aussi, l'école façonne la personna-
lité de l'enfant, en le dotant d'un savoir être et d'un savoir faire.
Autant dire ici que l'école remplit presque sans faille les râles éducatifs
traditionnellement dévolus à la famïl.le,à la société et à l'état.
De toutes les catégories que nous venons d'analyser, deux pré-
sentent un attrait particulier.
La plus importante avec dix-neuf (19)
énoncés qui intéressent quatorze (14) interviewés, est celle qui définit

252
le rôle de l'école dans le cadre de la formation et de l'information de
l'individu.
A travers elle, la sous-catégorie "instruction" donne du
poids à cette catégorie.
Avec huit (8) énoncés sur dix-neuf (19) de la
catégorie, l'instruction en tant que facteur de différenciatjon sociale
est d'après les interviewés, l 'undes principaux objectifs de l'école.
Toujours dans cette même catégorie, l'instruction est suivie par
la sous-catégorie "préparation à la vie" rôle que les interviewés attri-
buent aussi à l'école.
La seconde catégorie qui se dégage de cet ensemble, est celle du
rôle éducateur de l'école à travers le savoir être.
Le savoir être, est
retenu comme objectif de l'école par treize (13) interviewés à travers
seize (16) énoncés.
Dans cette catégorie qui véhicule des éléments nor-
matifs, l'éducation en tant que valeur sociale est la plus forte sous-
catégorie avec huit (8) énoncés.
Elle définit presque seule la catégorie.
L'on pourrait même dire, l'éducation entendue ici comme valeur sociale
inclut la culture et la civilisation, ainsi que la morale.
Si nous reprenons les deux catégories, l'on peut affirmer que
l'instruction est à la formation, ce que l'éducation est au savoir être.
Principalement, l'école éduque et instruit selon les interviewés.
Si tel
est le cas, on peut se poser la question:
pour quel milieu l'école forme-
t-elle et éduque-t-elle les enfants qui la "fréquentent"?
S'il peut être tenu pour réel que ce milieu est la ville, une
brêche est ouverte qui fait de l'école un facteur de la migration des
jeunes adultes ruraux vers les villes.

U"I\\'ERSIr! l)f \\I0"rRf~l
253
A la question 5 qui demande si l'école prépare les enfants a
rester au village ou à la ville, 6 des 22 interviewés ont répondu que
l'école prépare à rester en ville.
Par contre, 16 de ces interviewés
ont affirmé que l'école prépare à rester et à la ville et au village.
Pour en savoir davantage sur l'impact des programmes scolarisés
sur la décision des jeunes à quitter la campagne, nous avons posé la ques-
tion suivante:
pensez-vous que, si l'école préparait surtout les enfants
à vivre à la campagne, les jeunes qui ont quitté l'école pourraient rester
au village?
Huit (8) des interviewés pensent qu'ils resteraient à la campagne.
Onze (11) pensent qu'ils iraient en ville.
Trois (3) ne savent pas.
Nous présentons dans un premier tableau, les raisons de ceux qui
pensent que les jeunes resteraient à la campagne.
Puis dans un second,
nous ferons état des points de vue de ceux qui pensent qu'ils partiraient
à la ville.
L'analyse de chacun de ces tableaux se fera en deux parties
successives.
Les huit (8) qui croient que les jeunes resteraient à la campa-
gne ont formulé dix (la) énoncés.
Après analyse ils ont été réduits à
sept (7) items qui ont donné lieu a cinq (5) sous-catégories rangées sous
trois (3) catégories.

UNIVERSIH DE ·"O:-iTR[Al
254
Tableau 34:
Typologie des arguments favorables au maintien ~ la campagne
A. Evidences d'une formation appropriée au milieu rural.
6 énoncés
4 interviewés
1. Préparés ~ rester au village
3 énoncés
3 répondants
2. Initiation auprès des parents
a) Pour apprendre avec les parents
énoncé
répondant
b) Pour faire ce que font les parents 2 énoncés
répondant
8. Epanouissement de l'individu en milieu rural.
3 énoncés
3 interviewés
1. Epanouissement individuel
a) Tout ce qui manque au village
devrait y être
l énoncé
l répondant
b) Produire pour participer au
développement du pays
énoncé
répondant
2. Assurer l'avenir en travaillant
la terre
l énoncé
répondant
C. Responsabilité de l'école.
l énoncé
l interviewé
1. C'est l'école qui a gâté les enfants.
Si l'école leur avait appris
à rester, ils resteraient.
Le premier groupe d'interviewés qui pensent que les jeunes gens
resteraient à la campagne si l'école les y avait préparés, fonde son ar-
gumentation sur trois (3) catégories de raisons.
Pour certains d'entre eux, une formation appropriée aux réalités
socio-économiques de la campagne est nécessaire dans le cadre du maintien
des jeunes adultes à la campagne.
Car selon ces répondants, les jeunes
seraient "préparés ~ rester au village".
Ce qui signifie, en d'autres
termes, que l'école et le milieu rural seraient dans un contexte de rela-

UNIVERSIT{ DE "O"TRf~l
255
tions d'interdépendance et d'interférence réciproques.
Dans ce cadre les
jeunes adultes resteraient sans aucun doute dans leur village, une fois
qu'ils auraient quitté l'école.
Parce que, pensent les interviewés "ce
que l'école leur a appris pourrait les inciter à rester au village lt •
L'é-
cole dispenserait ainsi une formation appropriée au monde paysan.
Certes.
Mais aussi et surtout une formation à travers laquelle transparaîtraient
les acquis traditionnels des paysans eux-mêmes.
C'est dire que les élèves
auraient pour seconds maîtres leurs parents et pour champs d'expérience
pratique, le milieu villageois.
Comme le soulignent certains répondants,
ces élèves seraient initiés auprès de leurs parents.
Dans ce sens, ils
seraient alors habitués à "faire ce que font les parents", puisqu'ils
auraient pris le temps et les soins nécessaires "d'apprendre avec eux"
et aussi par eux.
L'acquisition de ces connaissances en milieu rural permettrait
plus de possibilités de choix à ceux qui quitteraient l'école, parce que,
d'apr~s les répondants, ils pourraient s'épanouir en milieu rural, en pré-
parant leur avenir par un travail de la terre.
En conclusion, d'après un interviewé, si les jeunes gens qui
décrochent de l'école en milieu rural vont à la ville, c'est parce que
l'école les y pousse.
Pour lui, la responsabilité de l'école est grande
dans ce départ.
Car d'après lui, "c'est l'école qui a gâté les enfants.
Si l'école leur avait appris à rester, ils resteraient".
C'est dire en somme, de l'avis des répondants, que l'école n'a
donc pas jusque-là proposé un programme d'enseignement en liaison avec le

U,,"IVERSIII DE \\\\O-.;rRE4[
256
milieu rural.
Il semble que celui qu'elle propose soit plus adapté au
milieu urbain qu'au milieu rural.
C'est pourquoi, semblent dire les in-
terviewés, les jeunes vont plus à la ville parce que celle-ci répond mieux
aux objectifs de l'école.
C'est d'ailleurs l'argumentation que soutiennent dans une cer-
taine mesure les onze (11) interviewés qui pensent que même si l'école
préparait les enfants à rester à la campagne, ceux qui l'ont quittée
iraient tout de même en ville.
Leurs raisons ont été formulées en vingt-quatre (24) énoncés.
Une analyse de contenu de ces énoncés nous a donné dix-neuf (19) items.
Un second niveau d'analyse a réduit ce nombre à dix-sept (17),
Ce qui
constitue nos sous-catégories regroupées en huit (8) catégories.
Tableau 35:
Typologie des arguments favorables au départ pour la ville
A. Difficulté de la vie en milieu rural.
7 énoncés
5 interviewés
1. Conditions de travail difficiles
3 énoncés
2 répondants
2. Conditions de vie
a) Les élèves se sentent gênés
au village
énoncé
répondant
b) Difficultés au village
énoncé
répondant
3. Relations sociales difficiles
a) Difficultés avec les parents
énoncé
répondant
b) Manque de femmes
énoncé
répondant
B. Valorisation urbaine des acquis de l'école.
6 énoncés
4 interviewés
1. "Pour mettre en pratique ce qu'ils
ont appris"
2 énoncés
l répondant

257
2. "Parce qu'ils ont déjà leur niveau"
énoncé
l répondant
3. "On connaît papier pour aller
en ville"
l énoncé
l répondant
4. "Quand on connaît le papier, on ne
peut pas rester au village"
l énoncé
l répondant
5. "D'autres pourraient se débrouiller
pour aller en ville"
l énoncé
l répondant
c. Recherche de sources de revenu.
3 énoncés
3 interviewés
l. Manque d'emploi salarié au vill age
énoncé
l répondant
2. "Ils ont la facilité de travailler
dans les sociétés en ville"
énoncé
l répondant
3. "Ils peuvent chercher un petit
métier en ville"
l énoncé
l répondant
D. Absence de distractions au village.
3 énoncés
3 interviewés
1. Manque de distractions au vi11age
2 énoncés
2 répondants
2. Manque d'activités pour jeunes
au village
l énoncé
l répondant
E. Espoir d'avoir de meilleures conditions de vie.
2 énoncés
2 interviewés
l. Facil ité de fonder un foyer
en ville
énoncé
répondant
2. Fatigue moindre en vi 11 e
énoncé
répondant
F. Paresse des jeunes adultes eux-mêmes.
2 énoncés
2 interviewés
G. Présence de parent en ville.
l énoncé
l interviewé

UNlVERSI TE Of "'0" IRE Al
258
Une catégorie de raisons avancées par certains des répondants du
groupe des onze (11). réside. d'aprês les répondants dans les difficultés
de la vie en milieu rural.
Cette catégorie de raisons a déjà fait l'objet
d'analyse ~ la question 22 de la variable huit (8) précédemment étudiée.
Nous pouvons toutefois les rappeler.
Il s'agit principalement
des conditions de travail manuel difficile qui rebutent les anciens élêves,
qui de l'avis des répondants ont été rendus "paresseux" par l'école.
Il
stagit aussi des conditions de la vie que mênent les jeunes adultes du villa-
ge.
D'après certains répondants. "les élêves se sentent gênés au village",
où ils rencontrent d'énormes "difficultés" de tout genre.
Les relations
sociales font que les anciens élêves ne veulent pas rester au village.
Ces relations, aux dires des répondants. sont rendues difficiles. compte
tenu des mauvais rapports que les jeunes adultes entretiennent avec leurs
parents qui ne comprennent pas leurs problêmes et à cause du manque de
femmes dans les villages.
A cette catégorie de raisons d'ordre général. s'ajoute une autre,
qui, elle, relêve du fait même de la scolarisation.
D'aprês les répon-
dants, les jeunes gens quitteraient les villages aprês l'abandon de l'éco-
le, dans le but de valoriser en ville les maigres acquis de l'école.
Comme dit l'un d'entre eux tl pour mettre en pratique ce qu'ils ont appris".
C"est pourquoi, estiment certains interviewés, ils pourraient toujours
"se débrouiller pour aller en ville" quelles que soient les circonstances.
Car selon leur propre expression tl on connaît papier pour aller en ville".
Autrement dit "quand on connaît papier, on ne peut pas rester au village".

259
Et d'ailleurs certains n'affirment-ils pas que "les élèves (ou anciens
élèves) se sentent beaucoup gênés au village?"
D'autres aussi, dans ce
contexte général ne peuvent pas rester au village "parce qu'ils ont déjà
leur niveau".
Ici, le niveau scolaire quelque soit ce qu'il représente en
réalité, est un critère suffisant pour qu'un scolarisé prétende chercher
du travail en ville.
Cette valorisation des acquis de l'école s'inscrit
en droite ligne dans la recherche de source de revenu.
Cette recherche de source de revenu, soulignons-le, vise non
seulement l'obtention d'un emploi salarié, mais aussi, l'apprentissage
d'un mHier.
Car selon d'autres interviewés, les gens pensent "qu'ils
auront la facilité de travailler dans des sociétés en ville" avec leur
niveau scolaire, pour lequel, semble-t-il, il "n'y a pas d'emploi au vil-
l age" .
En ce sens, il s cultivent un réel espoi rd' avoi r de mei 11 eures
conditions de vie en ville.
En ville où "la fatigue est moindre" et où la
possibilité de "fonder un foyer" est beaucoup plus grande qu'à la campagne.
Une autre catégorie de raisons réside dans l'absence de distrac-
tions au village.
D'après les répondants, l'absence de loisirs, et le
manque d'activités pour les jeunes, pourraient entraîner les jeunes vers
la ville même si l'école leur proposait un programme d'enseignement adapté
au milieu rural.
A cela s'ajoute aussi le fait que, la plupart des jeunes
gens ont déjà des parents en ville.
Ce qui en quelque sorte augmente
leurs chances de les rejoindre.
Trois catégories de raisons dominent
les arguments que nous venons d'analyser.

260
Il Y a d'abord les difficultés de la vie en milieu rural.
C'est
elle qui est la première catégorie qui contient plus d'énoncés.
Avec
six (6) énoncés sur vingt-quatre (24) elle a été proposée par cinq (5)
interviewés parmi les onze (11).
Son importance est soulignée par les difficiles conditions du
travail manuel que redoutent le plus les jeunes adultes qui ont déjà été
scolarisés.
A cette sous-catégorie, s'ajoutent la vie sociale du village
et les relations qu'elle développe entre les jeunes adultes et les autres
membres de la communauté.
Ces jeunes adultes ne semblent pas bien appré-
cier leur rôle et leur statut.
La seconde catégorie que nous relevons, regroupe les raisons de
la valorisation des acquis de l'école.
Elle contient cinq (5) énoncés qui
soulignent ce phénomène.
Et quatre (4) interviewés sur onze (11) Y font
référence.
Cette catégorie rend significative la dichotomie entre d'une
part le milieu rural et les programmes d'enseignement, et d'autre part,
entre les aspirations des jeunes scolarisés et les réalités socio-écono-
miques de la campagne.
Enfin la recherche de source de revenu, en tant que catégorie
de raisons avec trois (3) énoncés de trois (3) interviewés, est la troi-
sième importante de ce tableau.
L'école préparait pour un emploi en ville,
lequel emploi n'est pas disponible à la campagne.
La mise en relation des trois (3) catégories ci-dessus avec
celles du tableau des réponses du groupe des huit (8) qui pensent qu'un

261
programme adapté retiendrait les jeunes adultes à la campagne, soulève
deux questions.
La première:
est-ce qu'un programme d'enseignement adapté au
milieu rural qui ne s'accompagne pas d'une restructuration globale de ce
milieu peut vraiment retenir les jeunes qui ont quitté l'école?
La deuxième:
est-ce que l'on peut parler réellement d'une
responsabilit~ de 1'~cole dans la migration de ceux qui sont déjà scolari-
sés sans tenir compte du rôle qu'elle joue dans ces conditions?
3.3
Les données de la structure socio-économique
Elles nous renseignent sur les facteurs de causalité d'ordre
socio-économique qui entrent dans l'appréciation de l'exode des jeunes
adultes ruraux vers les villes.
La mesure de cette variable a été effec-
tuée à l'aide de quatorze (14) questions que nous avons soumises aux vingt-
deux (22) interviewés.
Nous nous sommes d'abord penché sur la notion de travail en
milieu rural en cherchant à savoir si les jeunes adultes s'y intéressent.
Si la rentabilité ou non de ce travail a un rapport avec le départ ou non
des jeunes vers les villes.
Les cinq (5) premières questions ont couvert
ce premier élément d'appréciation qu'est le travail manuel en milieu rural.
Nous avons ensuite demandé aux interviewés de nous dire si l'exis-
tence de travail salarié pouvait amener les jeunes adultes à rester au
village.
Et de nous dire aussi, à quoi, d'après eux, l'on pouvait attri-

262
buer l'insuffisance d'emplois salariés à la campagne.
Aussi de nous dire
dans ce même cadre, ce qu'ils savent du niveau des salaires aussi bien en
ville qu'à la campagne.
Et si, selon eux, les salaires sont plus bas à la
campagne qu'en ville, à quoi pouvaient-ils attribuer cette inégalit~.
Les questions 6 à 9 interrogeaient sur cette réalité.
Avec les questions dix (10) et onze (11) nous avons demandé aux
interviewés de nous dire si, d'une part une égalité de salaire entre la
ville et la campagne peut retenir les jeunes dans les villages, et
d'autre part quel serait leur choix à salaire égal entre un travail en
ville et un travail à la campagne.
Quant à la question douze (12) elle vise à nous faire connaître
le point de vue des interviewés sur les causes du départ des jeunes adultes
ruraux vers les villes.
Et en ce qui les concerne individuellement de nous
dire s'ils devaient ou non quitter leur village et de justifier leur ré-
ponse.
Nous y sommes parvenus avec la question 13.
Enfin, nous avons demandé aux intervenants de nous faire des
suggestions relatives à ce qui devrait être fait par l'Etat afin que les
jeunes adultes comme eux puissent rester à la campagne.
Les éléments de
réponses à ces quatorze (14) questions constituent l'essentiel des tableaux
analys~s dans les pages qui suivent.
A la première question, dix-neuf (19) sur vingt-deux (22) inter-
viewés ont répondu qu'il y avait du travail au village.
Par contre, trois
(3) nous ont affirmé le contraire.
Mais à la question qui a cherch~ à

U"IVE~SIH DE "O'iT~E·U
263
savoir si les jeunes adultes s'intéressaient au travail de la terre. sept
(7) interviewés pensent que les jeunes ne s'y intéressent pas, alors que
quinze (15) pensent le contraire.
Dans un premier tableau nous présentons les éléments de réponses
des sept (7) qui ont répondu par la négative.
Nous analyserons les résul-
tats de ce tableau.
Dans un second tableau. figurent les réponses de ceux qui avouent
que les jeunes adultes ruraux s'intéressent au travail de la terre.
Ce
tableau fera aussi l'objet d'une analyse.
10
Le premier groupe de réponses est constitué de quinze (15) énon-
cés.
Après analyse ces énoncés ont été réduits ~ quatorze (14) items.
Ces items ont été ~ leur tour réduits ~ dix (la).
Ce qui constitue les
dix (la) sous-catégories du tableau. qui après analyse ont été regroupées
sous cinq (5) catégories.
Tableau 36:
Typologie des raisons du désintérêt du travail de la terre
A. Dévalorisation de l'individu.
6 énoncés
3 interviewés
l. Perte de considération sociale
a) Pas considéré comme ceux
de la ville
1 énoncé
1 répondant
b) "Tes amis te considèrent comme
leur enfant"
1 énoncé
répondant
c) Mariage au village impossible
énoncé
répondant
d) Etre ~ la mode
énoncé
1 répondant

UNIVI RSITI DI \\lO'lTRI ~l
264
2. Déchéance physique
a) Ta main se gâte
énoncé
répondant
b) Ça fatigue l'homme
énoncé
répondant
B. Scolarisation.
3 énoncés
3 interviewés
l. L'école nous a rendues paresseuses
l énoncé
l répondant
2. Il est allé a l'~cole pour travailler
en vi 11 e
énoncé
répondant
3. Pour avoir du travail en ville
énoncé
répondant
C. Manque d'initiation de base.
3 énoncés
3 interviewés
1. Pas habitués
2 énoncés
2 répondants
2. Pas initiés à la terre
énoncé
répondant
O. Difficultés du travail de la terre.
2 énoncés
2 interviewés
1. Travaux champêtres difficiles
énoncé
répondant
2. Incapacité de travailler la terre
énoncé
répondant
E. Trop jeune: "Mon moment n'est pas encore arrivé".
l énoncé
interviewé
Parmi ceux qui ne s'intéressent pas au travail de la terre, il y
en a qui justifient leur attitude par le fait que d'après eux, le travail
de la terre dévalorise l'individu sur le plan social et sur le plan
physiologique.
Du point de vue social, ils pensent que "si tu fais le travail
de la terre, tu nies pas considéré comme ceux de la ville ll •
C'est pourquoi
le travail manuel ne les intéresse guère.
En outre, ils estiment que

UNIVIRSITl Of "ONTRIA.l
265
cette déconsidération sociale vient de la part de leurs amis qui eux,
sont en ville et qui les considèrent comme étant encore des enfants.
C'est donc cette attitude paternaliste favorisant la déconsidération
sociale qui détourne certains jeunes adultes du travail de la terre.
En plus de ce mépris dans lequel leurs amis les tiennent, ces répondants
estiment qu'ils ne jouissent d'aucune possibilité de mariage en étant
au village et en faisant un travail manuel.
C'est pourquoi, pour
gagner de la considération aux yeux de leurs amis, certains décident
d'aller à la ville "pour être à la mode" comme tout le monde et tenter
la chance de trouver une fille à marier, étant donné que celles-ci
préfèrent les citadins aux ruraux.
Pour d'autres répondants, ne pas s'intéresser au travail de la
terre, c'est se prémunir d'un vieillissement prématuré en s'épargnant une
somme considérable de fatigue physique.
Puisque, pense l'un d'entre eux,
le travail de la terre "ça fatigue l 'homme et ta main se gâte".
La dé-
chéance physiologique ajoute à la perte de considération sociale pour ex-
pliquer ce que nous avons appelé la dévalorisation de l'individu, cause de
la fuite du travail manuel par les jeunes adultes.
A ce premier facteur lié à l'individu, une autre catégorie de
raisons expliquent le désintérêt des jeunes adultes vis-à-vis du travail
manuel.
C'est l'effet de la scolarisation.
Pour certains des interviewés, ce désintérêt provient du fait
que l'école a rendu les jeunes gens paresseux dans le cadre du travail
manuel.
D'autres vont plus loin, et affirment que le jeune adulte ne

UNIVUSIT! DI .... ONTR!Al
266
s'intéresse pas au travail de la terre parce qu"'il est allé à l'école
pour travailler en ville".
Pour ceux-là, l'école ne destine donc pas à un
travail manuel.
Ce qui, en d'autres mots, signifie que, aller à l'école,
c'est au départ prendre une voie différente de celle qui conduit au champ
ou à la plantation familiale.
Il n'y ont donc aucun intérêt.
Et cela à
leurs yeux se justifie par le fait qu'ils se considèrent comme des inhabi-
tués du travail manuel et des non initiés au travail de la terre.
Mais,
même s'ils y étaient habitués, l'intérêt grandirait-il pour autant?
Rien
n'est moins sûr, car à en croire certains des répondants, les difficultés
des travaux champêtres et leur propre incapacité de travailler manuelle-
ment, ajoutées au trop jeune âge de certains jeunes adultes constituent
des facteurs de désintérêt face au travail de la terre.
Pour ce premier groupe d'interviewés, le travail de la terre
n'est donc pas intéressant du fait qu'il dévalorise l'individu du point de
vue physique et social.
Il ne l'est pas non plus parce que l'école y a
contribué pour beaucoup en prenant trop tôt les enfants et en cultivant
chez ces derniers le dégoût de l'effort physique et donc du travail
manuel.
Ces deux catégories de raisons jouissent de la même importance
étant donné que chacune d'elles est constituée d'éléments de réponse de
trois (3) interviewés par catégorie.
Soit pour l'ensemble trois (3) inter-
viewés sur sept (7) au niveau de chaque catégorie.
Le pourquoi du désin-
térêt du travail de la terre que nous venons d'analyser peut être considéré
comme un facteur explicatif du départ des jeunes adultes ruraux vers la
vi 11 e.

U~IV[R5IH D[\\10~rR(Al
267
20
Les quinze (15) qui pensent que les jeunes s'int~ressent au
travail de la terre, 1'ont exprim~ en quarante (40) ~nonc~s.
Une analyse
de contenu a permis de r~duire ce nombre a vingt-deux (22) items.
Un se-
cond niveau d'analyse a class~ ces items en dix-sept (17) sous-cat~gories
que nous avons regroup~e~ sous sept (7) cat~gories.
Tableau 37:
Typologie des raisons de 1 'int~rêt du travail de la terre
A. Possibilit~ d'acquisition de biens matériels.
18 énoncés
12 interviewés
l. Acquisition de biens matériels
a) Argent
6 énoncés
5 répondants
b) Nourriture
4 énoncés
4 r~pondants
c) Habi 11 ement
2 énoncés
répondant
d) Maison
1 ~noncé
1 répondant
2. Autosuffisance matéri e11 e
5 énoncés
5 r~pondants
B. Désir de se réaliser en milieu rural.
6 énoncés
4 interviewés
1. Epanouissement personnel
a) Pour une question de sécurité
énoncé
répondant
b) Pour se faciliter la vie
énoncé
répondant
c) Vivre comme ceux de la ville
énoncé
répondant
2. Valorisation de soi
a) IIPour se faire valoir auprès
des copains de la vi11e ll
1 énoncé
répondant
b) Faire des réalisations
énoncé
répondant
3. Avoir une femme A marier
énoncé
répondant

UNIVERSITE DE "IONTREAl
268
c. Rentabilité du travail de la terre.
5 énoncés
4 interviewés
1. Travail de la terre rentable
4 énoncés
3 répondants
2. Terre moteur de la vie
énoncé
répondant
D. Relations de famille.
4 énoncés
4 interviewés
1. Pour supporter ses enfants
2 énoncés
2 répondants
2. Aider les parents
énoncé
répondant
3. liA cause des maris qui travaillent
la terre
l répondant
Il
l énoncé
E. Incertitude de la vie urbaine.
3 énoncés
3 interviewés
l. Parce que la vie de la ville
est dure
énoncé
répondant
2. Manque d'emploi en ville
énoncé
répondant
3. Rien A faire en vi 11 e
énoncé
répondant
F. Résignation.
2 énoncés
2 interviewés
1. Elles niant rien d'autre A faire
ici au village
l énoncé
l répondant
2. Puisqu'ils sont déjà restés
au village
G. Echec scolaire.
l énoncé
l interviewé
H. Non marié.
l énoncé
l interviewé
D'après les entrevues, certains pensent que si les jeunes adultes
s'intéressent au travail de la terre, c'est ~ cause de la grande possibili-
té qu'on y a d'acquérir assez de biens matériels, signes d'une véritable

U"'\\ fRSIT! Of 'IO~ [Rf ~l
269
autonomie.
Les biens matériels qui définissent cette catégorie sont
l'argent, la nourriture, une maison, des habits.
Au niveau de la nourriture, les interviewés pensent que l'on
peut s'autosuffire en produisant pour soi.
Notamment "en semant du riz",
l'on peut satisfaire les besoins immédiats et en dégager un surplus com-
mercialisable.
Ce qui de leur avis offre de grandes possibilités de se
faire de l'argent et construire une maison individuelle.
En plus, esti-
ment les répondants, la vente des produits peut permettre à certains
d'entre eux de s'habiller convenablement et d'habiller aussi leurs femmes
et leurs enfants.
Ils peuvent en outre dégager un surplus monétaire en
terme d'épargne.
L'acquisition de biens matériels à travers le travail de la terre
est aussi guidée par un désir de se réaliser pleinement en milieu rural.
Ils le croient d'autant plus que, de leur avis, le travail de la terre
peut permettre un plein épanouissement de leur personnalité.
Car selon
eux, ils peuvent y trouver leur "sécurité", "se faciliter la vie" et "vivre
comme ceux de la ville".
En ce sens, ils ne seront pas loin d'une considé-
ration sociale parce que, à travers leurs différentes réalisations, ils
se seront mis en valeur auprès de leurs "copains de la ville".
Ce qui en
somme leur offre des opportunités pour avoir une femme à marier.
C'est donc dire par ailleurs que, si les jeunes adultes s'inté-
ressent au travail de la terre, c'est du fait de la rentabilité de celui-
ci.
Certains pensent que la terre est "le moteur de la vie".
C'est pour-
quoi l'intérêt qu'il y porte est grand, surtout si, parmi eux il y en a

UN'\\[~SIT[ D[ \\\\O"T~[~l
270
pour qui. rester à la terre est le seul moyen de pouvoir s'occuper de
leur fami 11 e.
Ainsi. d'autres jeunes adultes restent-ils au village ~ cause
de leurs vieux parents qu'ils désirent aider.
Ou pour certaines filles à
cause des maris qui travaillent la terre.
Comme le cas aussi de celui-ci
qui s'intéresse au travail de la terre afin de "supporter ses enfants".
D'autres jeunes adultes auraient pu aller en ville comme beau-
coup de leurs amis.
Certes.
Mais ne sachant pas ce qui les attend dans
ce milieu inconnu. ils préfèrent le travail manuel aux difficultés et aux
incertitudes de la ville.
En un mot. ils savent qu1ils n'ont "r ien à faire
en ville".
Parce que. selon eux. "1 a vie de la ville est dure" et surtout
quand lIon "manque d'emploi.
Ce qui pour finir. conduit certains jeunes
adultes ~ une espèce de résignation à s'intéresser au travail manuel.
Pour les uns. ils n'ont pas d'autres choix "pu isqu'ils sont déjà
restés au village".
Pour les autres. telles les filles. puisqu'" ell es
n'ont rien d'autre ~ faire au village ll • elles s'intéressent tout de même
au travail manuel.
Enfin. l'échec scolaire oblige certains à rester au village et ~
s'intéresser au travail manuel.
Comme d'autres telles les filles. le
font par manque de maris qui puissent les amener en ville.
LI intérêt montré par l es jeunes adultes à l'égard du travail
manuel revêt donc plusieurs formes.
Il dérive soit de la volonté person-

UN,VfRSIT( Of ·,-\\ONuf4l
271
nelle des uns, soit du fait que d'autres y sont conduits par des circons-
tances non souhaitées.
A l'analyse, deux catégories d'arguments méritent que lion
s 'y at ta rd e .
La première catégorie, la plus importante en énoncés et en in-
terviewés, est celle qui souligne l'intérêt par rapport ~ l'acquisition
des biens matériels que procure le travail de la terre.
Cette catégorie
qui regroupe dix-huit (18) énoncés est soutenue par douze (12) interviewés
sur quinze (15).
La sous-catégorie qui pèse de son poids dans cette catégorie et
qui lui donne signification se compose des biens matériels tel l'argent,
la nourriture, l 'habillement et la maison personnelle que l'on peut avoir
par le travail de la terre.
La deuxième catégorie, proposée par seulement quatre (4) inter-
viewés en six (6) énoncés révèle le désir des jeunes adultes de se réali-
ser, de s'épanouir en milieu rural.
La valorisation de soi ~ travers un
ensemble d'objectifs atteints, est un indice d'un épanouissement personnel.
Pour toutes les réponses recensées à la question, aussi bien au
premier tableau qulau second, l lintérêt qu'accordent les jeunes adultes au
travail de la terre est certain. Il reste néanmoins sOr que la majorité qui
se dégage du deuxième tableau ne peut pas faire oublier le fait que cer-
tains jeunes adultes affichent un dégoOt complet vis-à-vis de ce travail
manuel comme nous l lavons vu au précédent tableau.

U"I\\l~SITl DI "O"'T~I~l
272
Par la question trois (3) nous avons demandé aux interviewés de
nous dire si oui ou non, le travail de la terre procure un revenu suffisant.
En réponse, douze (12) répondants le trouvent suffisant;
deux
(2) ne peuvent pas donner une appréciation.
Huit (8) au contraire trouvent insuffisant le revenu de travail
de la terre.
Ceux-ci ont évoqué les raisons de cette insuffisance en ré-
pondant à la question quatre (4).
A cette occasion ils ont évoqué seize (16) idées.
Une analyse
de contenu a permis de réduire ce nombre à onze (11) items qui constituent
nos sous-catégories que nous avons classées sous quatre (4) catégories.
Tableau 38:
Typologie des causes de l'insuffisance du revenu du travail
de la terre
A. Difficultés naturelles.
7 énoncés
5 interviewés
1. Les conditions climatiques
4 énoncés
4 répondants
2. L'état de la terre
énoncé
répondant
3. Vieillesse des plantations
2 énoncés
2 répondants
B. Mauvaises structures économiques. 4 énoncés
3 interviewés
1. Prix de vente des produits
agricoles dérisoires
2 énoncés
répondant
2. Cherté des produits chimiques
énoncé
répondant
3. Manque de moyens
énoncé
répondant
c. Responsabilité individuelle des paysans. 3 énoncés 3 interviewés
1. Mesure du travail de chacun
énoncé
répondant
2. Paresse des planteurs
énoncé
répondant
3. Plantations mal entretenues
énoncé
répondant

U"I\\'fRSIH Dl "O"TRI"l
273
o. Annualité du revenu. 2 énoncés l interviewé
1. "L'argent finit quand l'année
est finie"
énoncé
l répondant
2. "Parce qu'il faut attendre une
année pour avoir de l'argent"
l énoncé
l répondant
Avant d'expliciter les éléments de réponse à ce tableau, nous pré-
sentons à titre comparatif les réponses aux questions huit (8) et neuf (9)
de cette même variable, ce qui nous permettra une explicitation commune
pour les deux groupes de questions.
A la question de savoir si les salaires étaient moins élevés à
la campagne qu1à la ville, sept (7) répondants ont avoué ne rien en savoir.
Trois (3) pensent que les salaires sont égaux, quatre (4) pensent que les
salaires de la campagne sont plus élevés que ceux de la ville.
Par contre,
huit (8) répondants estiment que les salaires sont moins élevés à la cam-
pagne qU'à la ville.
Quand nous avons dépouillé les raisons avancées par ces huit (8)
répondants, nous avons été frappé par deux observations.
La première est que sept (7) des huit (8) répondants à la ques-
tion quatre (4) se retrouvent parmi les huit (8) de la question neuf (9).
La deuxième observation est que les mêmes éléments de réponses se
retrouvent dans les deux cas.
Nous concluons donc que le terme de "sa l aire" employé à la ques-
tion huit (8) a été confondu avec celui de "revenu" utilisé à la question
trois (3).

U~I\\'IRSIT( OE "'O~IR["l
274
Clest pourquoi, retenant le terme de revenu dans les deux cas et
pour la circonstance, nous présentons le tableau de classification des ré-
pons es ct la question neuf (9) et procédons ensuite ct l 'explication en te-
nant compte des apports du deuxième tableau.
Ainsi, en réponse à cette question neuf (9) des interviewés ont
avancé vingt-quatre (24) raisons.
Après analyse de ces différentes idées,
nous avons dégagé de ce lot quinze (15) items que nous avons constitué en
sous-catégories.
Celles-ci reprises par la suite, ont été regroupées sous
cinq (5) catégories de raisons.
Tableau 39:
Typologie des causes de 1 'insuffisance du revenu du travail
de la terre
A. Mauvaises structures économiques.
9 énoncés
6 interviewés
1. Prix de vente de produits
agricoles dérisoires
4 énoncés
3 répondants
2. Beaucoup de dépenses pour
peu d'argent
3 énoncés
3 répondants
3. Beaucoup de travail pour
peu d'argent
2 énoncés
2 répondants
B. Responsabilité sociale partagée.
5 énoncés
4 interviewés
1. Manque de courage de la part
du paysan
2 énoncés
2 répondants
2. Planteurs paresseux
énoncé
répondant
3. Pas de sociétés privées
énoncé
répondant
4. LIEtat ne sloccupe pas du problème
des paysans
l énoncé
1 répondant

UNIVER~IT[ DE \\10.-";TRE"l
275
C. Annualité du gain en milieu rural.
4 énoncés
3 interviewés
1. Absence de salaire mensuel
comme en ville
2 énoncés
2 répondants
2. "Ici on gagne par an"
énoncé
répondant
2. "Parce qu 1 il faut attendre
la traite"
énoncé
l répondant
D. Conditions de travail difficiles.
3 énoncés
3 répondants
1. Climat défavorable
2 énoncés
2 répondants
2. Travail difficile
énoncé
répondant
E. Faibles dépenses.
3 énoncés
l.interviewé
1. La vie du village est moins chère
énoncé
répondant
2. Les gens se déplacent à pied
énoncé
répondant
3. "Pas de marché pour trouver des
marchandises à grand prix"
l énoncé
l répondant
L'insuffisance du revenu en milieu rural ou le bas niveau de
revenu du travail de la terre dépend de plusieurs phénomènes.
D'après les répondants, il faut considérer d'une manière générale
les difficultés d'ordre naturel.
Au premier plan de celles-ci, les inter-
viewés citent le climat de la région qui est capricieux et irrégulier et
,
donc défavorable aux cultures, et particulièrement aux cultures d'exploi-
tation comme le cacao et le café.
Pour certains d'entre eux, les deux
principales saisons qui caractérisent le climat de cette région, une
grande saison sèche et une grande saison des pluies, sont marquées de plus
en plus par l'inconstance.
La grande saison des pluies qui généralement

UN 1VI R51 TI DI \\'\\0'0 TR ("l
276
débute au mois de mars de chaque année arrive en fin avril et début mai.
Ainsi quand elle a lieu, ce n1est donc pas au bon moment.
Ce qui par
conséquent fait se prolonger, dans le même temps, la grande saison sëche
de décembre A mai.
Avec cette irrégularité, le climat n'est donc pas
favorable à de bonnes récoltes susceptibles de rapporter un revenu élevé.
Dans cette même catégorie des difficultés naturelles, d'autres interviewés
signalent le mauvais état de certaines terres qui ne supportent pas pendant
longtemps les cultures pérennes du genre café ou cacao.
Il Y en a aussi pour qui l 'insuffisance du revenu en milieu
rural est attribuable à la vétusté des plantations de ces cultures péren-
nes.
Enfin dans cette catégorie, il faut ajouter A cet ordre de dif-
ficultés celles inhérentes au travail manuel.
Difficile et cassant selon
les répondants, il ne permet pas une augmentation de la productivité,
source d'un haut revenu.
Ses méthodes étant essentiellement artisanales
avec l'homme comme capital principal, ce travail ne peut être à la base
d'un bon rendement.
Ce qui par voie de conséquence ne peut ouvrir sur un
revenu satisfaisant.
Une autre catégorie de raisons qui de l 'avis des répondants sont
à la base de l'insuffisance du revenu en mili~u rural, est relative aux
mauvaises structures économiques qui prévalent à la campagne.
Les répondants de cette catégorie estiment que "le prix de vente
des produits agricoles est dérisoire".
Ils font ainsi une comparaison eu

UNIV!RSIT! Dl MO:'>TR("l
277
égard a la "cherté des produits chimiques" que les paysans achètent. A ce
niveau de comparaison, et toute proportion gardée, un kilogramme de pesti-
cides ou un gallon d'herbicide vaut le triple du prix d'un kilogramme de
café ou de cacao.
Face a cette situation, certains répondants, tirent deux conclu-
sions majeures.
D'abord, ils pensent qu'il y a "beaucoup de dépenses pour
le peu de moyens" dont disposent les paysans.
Ensuite, ils terminent par le constat amer du "peu d'argent"
qu'ils gagnent par rapport a la somme considérable d'efforts qu'ils (les
paysans) engloutissent dans le travail de la terre.
Cela introduit une autre catégorie d'information qui est l'an-
nualité de revenu en milieu rural.
Comme dit un répondant "il n'y a pas
de salaire mensuel comme en ville".
Ainsi, trouvent-ils le revenu insuf-
fisant du fait que d'une récolte a une autre, il faut attendre une année.
C'est ce que résume cet interviewé qui dit: "Ici, on gagne par an".
Ou
comme un autre qui renchérit en ces termes "il faut attendre la traite
pour avoir de l'argent".
Le moment de la traite pour les paysans de
cette région, va de la mi-décembre a la mi-janvier.
Aussi, pour
mettre un accent particulier sur la précarité et l'insuffisance de ce
revenu de la traite, un répondant conclut:
"l'argent finit quand l'année
est finie".
La logique de cette affirmation est simple:
les paysans n'ont
de l'argent qu'a cette période qui cofncide avec le mois de décembre.
Et
l'évidence veut que décembre soit la fin de l'année.
C'est dire que pour

U.'1IVIRSIH QI \\lü:-;TRI4l
278
onze (11) mois de travail, ils espèrent un petit revenu qui ne peut couvrir
qu1un seul mois.
Il semble que pour certains répondants, la responsabilité soit
partagée entre l'Etat et les paysans.
Pour les uns, "l'Etat ne s'occupe pas du problème des paysans".
Ils estiment par lA que ceux-ci "sont nég1 igés dans les bureaux de la
capitale".
L'Etat a le dos large, certainement.
Mais pour d'autres répondants, l'insuffisance du revenu en
milieu rural est le résultat d'une responsabilité partagée entre l'Etat et
les paysans.
Pour ceux-là, il faut tenir compte de la "mesure du travail
de chacun" pour apprécier le revenu dont il dispose.
Car, pensent-ils,
certains paysans "manquent de courage et d'autres sont paresseux".
Si
bien que, dans la majorité des cas, "leurs plantations étant mal entrete-
nues" elles produisent moins.
En résumé, nous pouvons dire, pour les deux questions (quatre
(4) et huit (8) que les interviewés ont insisté sur deux catégories de
causes à l·origine de l'insuffisance du revenu en milieu rural.
Il s'agit d'abord des difficultés naturelles dues aux condi-
tions climatiques, à l'état des terres qu·occupent les plantations et A la
vieillesse de celles-ci.
En repérant les mêmes interviewés pour les deux
questions, il ressort que sept (7) sur huit (8) attribuent l'insuffisance

UNIVUSITl DI '10NTRIAI
279
du revenu aux conditions naturelles.
Cette catégorie s'avère donc la plus
importante dans les deux tableaux réunis.
Il s'agit ensuite des mauvaises structures économiques, comme
base de l'insuffisance du revenu en milieu rural.
Celles-ci définies par
la cherté des produits chimiques et le prix de vente dérisoire des pro-
duits agricoles, ce qui occasionne beaucoup de dépenses pour peu de moyens,
constituent la seconde catégorie de raisons la plus importante.
Elle est
proposée par six (6) des huit (8) interviewés.
Pour cette catégorie,
l'insistance des répondants porte plutôt sur le prix de vente dérisoire
des produits agricoles en tant que sous-catégorie.
Les huit (8) répondants à la question quatre (4) qui ont affirmé
que le travail de la terre ne procure pas un revenu satisfaisant, ont été
rejoints pour répondre à la question cinq (5).
Nous leur avons demandé
de nous dire, d'après eux, si les jeunes adultes du village resteraient à
la campagne si le travail de la terre procurait un revenu satisfaisant.
En réponse, un (1) interviewé croit que même si le travail de la
terre procurait un revenu satisfaisant, les jeunes gens iraient tout de
même en ville.
Les raisons qu'il avance, sont la paresse des jeunes adul-
tes en tant que telle et les conditions difficiles dans lesquelles s'exer-
ce le travail de la terre.
Par contre, sept (7) pensent que les jeunes adultes resteraient
à la campagne si le revenu de leur travail était satisfaisant.
Leurs
réponses ont été formulées en dix-neuf (19) énoncés.
L'analyse de ces

U"'~{RSlTf Of "O"rRf~L
280
donn~es nous a conduit ~ constituer onze (11) items.
Une seconde analyse
a réduit ce nombre ~ cinq (5), ce qui constitue nos sous-catégories regrou-
pées en deux catégories.
Tableau 40:
Typologie des arguments de ceux qu'un revenu suffisant
maintiendrait ~ la campagne
A. Satisfaction matérielle.
11 ~nonc~s
5 interview~s
1. Gain financier
7 énoncés
4 répondants
2. Aisance mat~rie11e
a) IIParce que je peux satisfaire
mes besoins personnels ll
~noncé
répondant
b) IIJe vi vra i comme il faut"
énonc~
répondant
c) IIJ'achèterai ce que je veux ll
énonc~
r~pondant
d) Facilit~ de s'habiller
énonc~
répondant
B. Promotion personnelle.
8 énonc~s
5 interview~s
l. Trava iller pour faire des
r~alisations
2 ~nonc~s
"
... répondants
2. Facilit~ de mariage
2 ~nonc~s
?
r~pondants
3. Satisfaction de soi
a) Je serai à la mode
~nonc~
répondant
b) Etre comme ceux de la vi 11e
~nonc~
répondant
c) La jeunesse cherche à se suffire
~nonc~
répondant
d) Se distraire quand elle veut
~nonc~
répondant
Les ~léments de r~ponse à cette question que résume le tableau
ci-dessus reprennent en résum~ les argumentations des quinze (15) inter-
venants à la question deux (2).
Celle-ci, rappelons-le est relative à
l 'int~rêt des jeunes vis-à-vis du travail de la terre.
Ces quinze (15)
intervenants ~taient favorables au travail de la terre.

UNI\\,[RSITf Df "()"H(~l
281
Afin de nous éviter des répétitions inutiles, nous ne commentons
donc pas ce tableau ci-dessus.
La question que nous étudions maintenant met en rapport l 'exis-
tence d'emplois salariés à la campagne et le fait que les jeunes adultes
restent à la campagne.
Les vingt-deux (22) interviewés ont tous affirmé que les jeunes
gens des villages resteraient à la campagne s'il y avait des emplois sala-
riés comme en ville.
A ce propos, ils ont énoncé cinquante-neuf (59)
idées.
Une analyse de contenu de ces énoncés nous a permis de les circons-
crire à vingt-six (26) items.
Une reprise de ceux-ci au niveau d1une se-
conde analyse a réduit ce nombre
à dix-sept (17) pour nous donner ainsi
nos sous-catégories.
Finalement avec ces sous-catégories, six. (6) caté-
gories ont été constituées.
Tableau 41:
Typologie des raisons pour lesquelles un travail salarié
retiendrait les jeunes adultes à la campagne
A. Bas niveau du coût de la vie à la campagne.
17 énoncés
10 interviewés
l. Dépenses allégées
8 énoncés
8 répondants
2. Gratuité des biens de consommation courante
a) Pas d'eau à payer
2 énoncés
2 répondants
b) Pas de nourriture à payer
l énoncé
l répondant
3. Gratuité du logement
3 énoncés
3 répondants
4. Inexistence de services publics payants
a) Pas d'électricité à payer
?
'-
énoncés
2 répondants
b) Pas de transport à payer
l énoncé
l répondant

UNIVfRSlT1 Of MONTllIAl
282
B. Promotion personnelle.
12 énoncés
7 interviewés
l. Affirmation de soi
a) Travailler plus. pour faire
des réalisations
2 énoncés
2 répondants
b) Faire des investissements
énoncé
l répondant
c) Travailler pour être utile
énoncé
répondan~
d) Faire du commerce
énoncé
l répondant
2. Epanouissement individuel
a) Facilité de mariage
2 énoncés
?
répondants
b) Je peux m1habiller comme ceux
de la ville
2 énoncés
?
répondants
-
c) Etre ~ la mode
énoncé
répondant
d) Je peux facilement faire
mes achats en ville
l énoncé
l répondant
e) Etre mieux vue parmi
mes camarades
l énoncé
l répondant
C. Cadre de vie mei 11 eur.
10 énoncés
8 interviewés
l. On vit aisément
3 énoncés
3 répondants
')
..... On est comme en vi 11 e
3 énoncés
2 répondants
3. On est libre
énoncé
l répondant
4. On est en sécurité
énoncé
l répondant
5. Pas d1emmerdement
énoncé
l répondant
6. On se nourrit bien
l énoncé
l répondant
o. Identi té de gain avec la vi 11 e. 7 énoncés 6 interviewés
1. Même paie que ceux de la ville
6 énoncés
5 répondants

UNIVER51T1 Of "IO~TRI ~l
283
2. Gain mensuel mieux que chez
le planteur
l ~nonc~
l r~pondant
E. Disponibilit~ du travail au village.
7 énonc~s
6 interview~s
1. Travail salarié dans le village
6 ~noncés
5 r~pondants
2. Même travail qu'en ville
~nonc~
répondant
F. Epargne favoris~e.
6 ~nonc~s
6 interview~s
Cherchant à préciser notre mesure des relations entre le travail
salari~ et l lexode rural des jeunes adultes, comme nous l 'avons cormnenc~
avec la question six (6), nous avons demand~ aussi aux interview~s de
nous dire:
si une ~galit~ de salaire entre la ville et la campagne re-
tiendrait les jeunes gens à la campagne, (question 10) et quel serait
eux-mêmes leur choix individuel, ~ revenu égal entre un emploi en ville et
un travail ~ la campagne (question 11).
Les r~ponses aux deux questions reprennent en partie celles d~j~
donn~es a la question
six (6).
C'est pourquoi nous reproduisons d'abord
ces éléments de réponse avant d'en faire une analyse ~ la base de ceux de
la question six (6).
En réponse à la question dix (10):
Deux (2) interviewés pensent que si les salaires de la campagne étaient é-
gaux a ceux de la ville, les jeunes gens ne resteraient pas a la campagne.
Ils justifient leurs points de vue par le fait que, d'après eux, il n'y a
pas de loisirs en milieu rural.

U ... IVlRSIT! Dl '10 .. TRI .. l
284
Quatre (4) interviewés niant pas d'opinions puisqu'ils n'en savent rien.
Seize (16) interviewés estiment que les jeunes adultes resteraient à la
campagne s'ils y trouvaient des salaires égaux ~ ceux de la ville.
Ils ont exposé leur point de vue en quarante-trois (43) énoncés.
L'étude
de ceux-ci nous a permis de les réduire ~ dix-huit (18) items qui ont
constitué onze (11) sous-catégories, lesquelles ont été regroupées sous
cinq (5) catégories.
Tableau 42:
Typologie des arguments relatifs ~ l'égalité des salaires
entre la ville et la campagne et le maintien à la campagne
A. Meilleures conditions de vie.
14 énoncés
8 interviewés
l. Facilité d'accès aux biens matériels
a) Habill ement
4 énoncés
4 répondants
b) Nourriture non achetée
3 énoncés
3 répondants
c) Pas d'eau ~ payer
énoncé
répondant
d) Pas de logement ~ payer
énoncé
répondant
2. Cadre de vie amélioré
a) On vit mieux
énoncé
répondant
b) On a la sécurité
énoncé
répondant
c) Etre ~ la mode
énoncé
répondant
d) Vivre comme ceux de la ville
énoncé
répondant
B. Epargne favorisée.
11 énoncés
9 interviewés
l. Dépenses rédui tes
6 énoncés
6 répondants
2. Economie possible
5 énoncés
5 répondants
C. Identité de gain avec la ville.
8 énoncés
8 interviewés
l. Ce serait le même salaire qu1en vi 11 e 7 énoncés
7 répondants
2. Parce que mon argent me suffirait
énoncé
répondant

UNIVlRSITE Dl "O"TRf"l
285
O. Promotion personnelle.
7 énoncés
5 interviewés
1. Valorisation de soi
6 énoncés
5 répondants
2. Facilité de mariage
énoncé
répondant
E. Aide à la famille.
3 énoncés
2 interviewés
1. On peut aider les parents
l énoncé
l répondant
2. Pour vivre près de ma famille
avec mon argent
énoncé
répondant
3. Sauver l 'honneur de la famille
énoncé
répondant
Les réponses à la question onze (11):
Sur les vingt-deux (22) interviewés, deux (2) choisiraient un
emploi en ville, même si le revenu est le même avec un travail à la
campagne.
Ils ont évoqué trois ordres de raisons en six (6) énoncés, dont
deux par catégorie de raisons.
A - Les caractéristiques de llemploi en ville.
Ils en trouvent deux (2).
Ils pensent que l'emploi en ville est moins pénible qu'un travail
à la campagne, même si le revenu est le même.
Ils pensent aussi que le gain en tant que tel n'est pas le même
compte tenu du fait qu'il s'entoure d'autres avantages.
B - La présence de distractions en ville.
Pour eux, le fait qu'il yait
beaucoup de distractions en ville les ferait opter pour un emploi
en ville.
En plus, ils estiment qu'il y a beaucoup de jours de repos
en ville.

UNIVERSITE DE "'O~TRE"l
286
C - L'absence de distractions au village.
L'absence d'animation au village
et la non existence d'activit~s pour jeunes adultes sont les deux (2)
~l~ments qui font que ces deux interview~s n'opteraient pas pour un
travail au village.
En dehors de ces deux r~pondants, les vingt (20) autres avancent
des raisons qui reprennent, comme nous l 'avons d~j~ dit, les él~ments de
réponses ~ la question six (6) et ~ la question dix (la).
Nous les reproduisons sur tableau ~ leur tour à titre comparatif.
Ce tableau regroupe cinquante-sept (57) ~nonc~s.
16 items reconduits
sous forme de seize (16) sous-cat~gories, et huit (8) catégories.
Tableau 43:
Reprise des tableaux 41 et 42
A. R~duction des d~penses en gén~ral.
12 énonc~s
11 interviewés
B. Amour du travail en milieu rural.
11 ~nonc~s
7 interview~s
1. Engagement personnel
7 énonc~s
4 r~pondants
2. Satisfaction de soi et
~panouissement personnel
4 énonc~s
4 répondants
C. R~duction des coOts des biens de première nécessité.
la énonc~s
6 interviewés
l. Pas de logement à payer
6 énoncés
6 répondants
2. Pas d'eau ~ payer
2 énoncés
2 répondants
3. Pas d'électricité ~ payer
énoncé
1 répondant
4. Pas de nourriture ~ payer
énoncé
répondant
O. Epargne favorisée.
9 énoncés
9 interviewés

UNIVf~SIH Of "O"TRf~l
287
E. Meilleures conditions de vie
6 énoncés
5 interviewés
1. Vivre ~ la mode
3 énoncés
3 répondants
2. Liberté de gestion financière
2 énoncés
répondant
3. Travail moindre
énoncé
répondant
F. Satisfaction au niveau du revenu.
5 énoncés
5 interviewés
1. Même salaire qu'en ville
5 énoncés
5 répondants
G. Mei 11 eur cadre de vie.
3 énoncés
2 interviewés
l. Sécurité
énoncé
répondant
2. Stabilité
énoncé
répondant
3. Préparation d'avenir au vi 11 age
énoncé
répondant
H. Relation de famille: aide à la famille.
2 énoncés
1 répondant
Des trois tableaux que nous venons de présenter, il se dégage
un fonds commun que nous explicitons ~ l'instant.
Ce qui retiendrait les jeunes adultes à rester ~ la campagne,
s'il y avait des revenus comme en ville, clest, d'après les répondants aux
trois (3) questions, le bas niveau du coût de la vie en milieu rural.
Selon eux, cela se définit par la faiblesse des dépenses générales par
rapport à la ville.
Car, corrane pense l'un d'entre eux, "au village on dépense moins
qu'en ville".
Ils resteraient donc à travailler ~ la campagne "pour ne
pas beaucoup dépenser".
L'allègement des dépenses générales est l'un des
premiers signes du bas niveau du coût de la vie que constatent ces
répondants.

UNIVERSITE DE "o·"rR{~l
288
Mais d'une manière spécifique, certains interviewés affirment,
que contrairement à la ville, certains biens de consommation sont gratui-
tement accessibles à chacun.
Par exemple IIl a nourriture se prend au
champll.
Tel aussi le cas de l'eau II qu i est disponible dans la naturell.
Ils ne seraient non plus tenus de IIpayer l'électricité ll comme cela se fait
en ville.
A cela, d'autres répondants ajoutent l'absence de loyer mensuel
dans la mesure où ils peuvent se construire leur propre maison d'habi-
tation.
En somme, l'inexistence de services publics payants, tel le
transport IIparce que les gens marchent à pied pour aller au travail ll con-
tribuerait économiquement à réduire les dépenses.
Clest pourquoi, esti-
ment certains répondants, il est possible de IIfaire des économies ll et de
jouir dans l'ensemble d'un cadre de vie amélioré avec cette épargne.
Dans
ces conditions, le travailleur lise sentira comme en ville ll .
Et du point
de vue vestimentaire, il pourra II s 'habiller comme il veut ll et vivre ainsi
a; sément.
Car, pour certa i ns, dans ce cadre, il s seront II sans emmerde-
ments ll .
Puisque, après tout, lIils se nourrissent bien et sont l ibres ll .
C'est dire aussi qulà la campagne, ils se sentent lien sécurité ll .
Dans cette situation de meilleures conditions de vie, croient
certains interviewés, le travailleur a beaucoup de possibilités de promo-
tion personnelle à la base d'un épanouissement individuel.
Ce qui se tra-
duirait par une affirmation de la personnalité de certains.
Car ceux-ci
pourraient faire des réalisatfons économiques leur conférant un rang social
reconnu dans le milieu villageois.
Ce qui est un signe de distinction.

U,,",VERSITI DE "'O~TR("L
289
Aussi, lorsque certains interviewés pensent vouloir rester à la
campagne, c'est qu'ils considèrent que, étant donné la disponibilité du
travail au village et l'identité du revenu avec le milieu urbain, ils
veulent faire beaucoup d'actions en faveur de leur famille.
"En restant
auprès de leur famille avec leur argent" d'autres "pourraient aider leurs
parents, préparer 1 'avenir de leurs enfants" et contribuer ainsi à "sauver
11 honneur de la fami 11 e" .
En somme, en gagnant lI un salaire mensuel Il, ce qui est "mieux
qu1un planteur ll d'après certains répondants, les possibilités de rester a
la campagne se trouvent ainsi accrues.
Des trois tableaux dont nous venons de faire un survol rapide,
trois (3) grandes catégories d'idées ou de raisons militant en faveur
d'un maintien éventuel des jeunes adultes en milieu rural peuvent être
dégagées.
D'abord, l'ensemble des interviewés aux trois (3) questions
insistent sur le bas niveau du coût de la vie en milieu rural.
Notamment
ils soulignent l'allègement des dépenses d'ordre général et la gratuité
des biens de consommation courante, telles la nourriture, l leau, etc ...
Ensuite, ils croient fortement qu'ils peuvent jouir d'un cadre
de vie meilleur en restant travailler A la campagne.
Cadre défini par
une certaine aisance et une sécurité.
Enfin, conséquence bénéfique de cette situation, certains inter-
viewés espèrent acquérir une promotion individuelle, signe d'une réussite

290
sociale.
Ce qui, au bout du compte n'est autre chose que l'un des objec-
tifs majeurs visés dans le cadre d'un départ en ville.
Slil n'y a pas de travail salarié a la campagne, comme le souli-
gnent les répondants aux questions précédentes, à quoi peut-on attribuer
cette insuffisance?
C'est ce que nous avons cherché a savoir avec la
question (7).
A cette question treize (13) interviewés ont répondu ne pas
savoir la cause de l'insuffisance de l'emploi salarié a la campagne.
Par contre, neuf (9) ont pu donner des raisons qui de leur avis justi-
fiaient cette insuffisance.
Ces raisons ont été exprimées en vingt-et-un (21) énoncés.
Une
analyse de contenu de ces énoncés nous a permis de les réduire à onze (11)
items.
Ces items a leur tour ont été organisés en sept (7) sous-catégo-
ries regroupées en trois (3) carégories.
Cet ensemble est présenté par
le tableau suivant:
Tableau 44:
Typologie des causes du manque de travail salarié
à la·campagne
A. Manque d'infrastructure pourvoyeuse d'emploi.
16 énoncés
6 interviewés
1. Sous-équipement industriel de la région
a) Pas d'usines
3 énoncés
3 répondants
b) Pas dlunités de production
3 énoncés
3 répondants
c) Pas de boutiques
énoncé
répondant
2. Sous-développement de la région
a) Statut de villages
4 énoncés
4 répondants
b) Etat des villages
4 énoncés
2 répondants
c1 Pas assez d'hommes
énoncé
répondant

UNI\\'ERSlTf DE ~IO"Hf~l
291
B. Division sociale du travail au détriment du monde paysan.
4 énoncés
2 interviewés
1. L'Etat ne s'intéresse pas
aux paysans
l énoncé
l répondant
2. Le paysan est négligé en ville
dans les bureaux
énoncé
répondant
3. Pas de possibilité d'évolution
énoncé
répondant -
4. Occupés par le travail de la terre
parce qu'il faut des bras
pour la terre
l énoncé
l répondant
c. Manque de leader dans la région.
énoncé
l interviewé
1. Parce qu'on n'a pas quelqu'un
qui construit des usines.
Selon les interviewés, l'insuffisance d'emplois salariés dans la
région est due à deux principaux facteurs.
Il s'agit du manque total
d'infrastructure socio-économique pourvoyeuse d'emplois salariés et de
la division sociale nationale du travail qui relègue les paysans à la
seule production agricole rudimentaire.
A ces deux catégories de causes,
ils ajoutent l'absence de leader politique délégué auprès du gouvernement
pour défendre les intérêts des paysans de la région.
Quand nous parlons, à l'instar des interviewés, de manque d'in-
frastructure économique, nous entendons en premier lieu le sous-équipement
industriel dont souffre la région.
Le constat de cette carence est fait par certains jeunes adultes
qui déplorent l'inexistence d'unités industrielles où ils pourraient

U",vfRSITl Of -"0" TRI ~l
292
trouver un emploi.
Ils croient donc que le manque d'emplois salariés a
la campagne est dû au fait qu'il n'y a II pas d'usines pour faire travailler
les jeunesll • Ce qu'ils disent dans leurs propres termes: lice qui peut pro-
curer du travail, on n'en trouve pas ll • Il ressort de ces arguments une évi-
dence: la région n'est pas du tout avancée sur le plan du développement
économique.
Mais ce sous-équipement industriel n'est-il pas cause ou
conséquence du sous-développement général dans lequel vit la région?
S'il n'y a pas d'emplois salariés, selon les répondants, c'est
parce que dans cette région, il n'y a que des villages.
Pour eux, le
statut de village où il n'y a pas assez d'hommes, ne permet pas l'implan-
tation d'une quelconque entreprise industrielle.
Il aurait donc fallu
que ces villages soient aussi développés que les unités administratives
locales comme les sous-préfectures.
C'est ce qui pourrait, de leur avis,
ouvrir des possibilités de création d'emplois.
Mais avec l'état de pau-
vreté structurelle des villages, tels qu'ils sont, il n'est pas sûr que
la région offre quelque possibilité de création d'emplois dans l'immé-
diat.
En plus de ce manque d'infrastructure socio-économique dans la
région, les répondants estiment que l'inexistence d'emplois salariés dans
la région relève de la division sociale nationale du travail imposée par
l'Etat.
Cette nouvelle dimension du problème fait référence à la négli-
gence générale dans laquelle l'Etat semble tenir le milieu rural.
Pour
certains interviewés III 'Etat ne s'intéresse pas aux paysans".
Ils pensent
que l'Etat réduit le monde rural au seul rôle traditionnel de grenier du
monde urbain.
Clest pourquoi, estiment certains, Ille paysan est négligé

U"'I"I~51f( 01 "'0,"T~{"l
293
en ville dans les bureaux", dans le processus national du développement
socio-économique.
Ce qui, selon eux, ne présente "pas de possibilité
d'évolution" pour le paysan.
Car même si "il faut des bras pour la terre"
certains répondants croient que la division sociale du travail dans laquel-
le les paysans sont défavorisés est un handicap sérieux dans la mise en
place de sources de revenus autres que celle du travail de la terre.
D'autres déplorent aussi le manque de leader national issu de la région
pour la défense de leurs intérêts.
L'absence de représentant dans l'appareil politique décisionnel
du pays est un fait que soulignent 'd'autres interviewés pour justifier le
manque d'emplois salariés dans la région.
Cest ce que traduit cet interviewé, lorsqu'il dit:
lion n'a pas
quelqu'un qui construit des usines".
Cette remarque révèle un aspect très
important dans la répartition géographique des postes politiques au sein
du gouvernement de notre pays. Sans trop de détails, notons en passant que
dans notre pays où coexistent une soixantaine d'ethnies, la paix sociale
est entretenue par différents moyens.
Ainsi pour conserver l'équilibre
socio-politique national, les pouvoirs publics tiennent compte de la géo-
politique nationale pour l'attribution des portefeuilles ministériels.
Ce qui aboutit à une répartition plus ou moins équitable des postes gou-
vernementaux entre les grands groupes ethniques du pays.
Sans préjuger de
leur représentativité, il faut souligner que, tacitement, le pouvoir
central, en nommant de tels individus par ethnie, encourage les uns et les
autres à II s 'occuperli de leurs régions respectives.
La présence d'un

UNIVIRSIH Dl "ONTR{~l
294
IIfils ll influent de telle région dans tel ministère est une voie possible
de développement d'une telle région.
C'est à cette bénédiction inavouée des instances supérieures du
pays que celui-ci doit en partie la paix sociale.
L'inexistence d'emplois salariés à la campagne ressort donc de
plusieurs facteurs qui eux-mêmes obéissent à des considérations d'ordre
économique, politique et social.
Mais dans cet ensemble complexe, les
facteurs relevant de l'infrastructure économique constitueront la catégorie
la plus importante.
Avec seize (16) énoncés cette catégorie est évoquée
par six (6) interviewés sur neuf (9).
Et dans cette catégorie, la sous-
catégorie IIsous-développement" général de la région définit en priorité
la catégorie.
S'appuyant sur le sous-équipement industriel qui en est le fonde-
ment conditionnel, le sous-développement de la région est le facteur dé-
terminant dans l'inexistence d'emplois salariés qu'évoquent les inter-
viewés.
La division sociale du travail entre la campagne et la ville,
quant à elle, apporte une note d'appréciation du niveau national de
développement dans lequel s'inscrit chaque région en tant qu'entité
globale.
Pour nous situer davantage sur les rapports entre le travail de
la terre et l'exode rural, dans ce cadre de la variable structure écono-
mique, nous avons demandé aux interviewés de nous dire ce qui, pour eux,
fait que les jeunes gens des villages quittent le travail de la terre pour
aller à la ville.

U~IV[RSIT! O( .~\\ONTR(Al
295
En réponse, cinquante-huit (58) idées ont été énoncées.
Une ana-
lyse de contenu de cet ensemble nous a amené A circonscrire les idées au
niveau de vingt-et-un (21) items.
Un nouveau tamisage de ces items a
réduit ce nombre A quatorze (14), ce qui en somme constitue nos sous-
catégories.
Pour être plus concis, nous avons rangé ces sous-catégories
en trois (3) grandes catégories.
Il faut rappeler ici, que les énoncés que nous présenterons ~
l'instant ont déjA été formulés, sous une forme ou une autre, en réponse A
différentes questions de cette variable.
Telle la question deux (2) en ce
qui concerne le volet de ceux qui ne s'intéressent pas au travail de la
terre.
Il en est de même de quelques éléments de réponses A la question
quatre (4) en ce qui concerne ceux pour qui le travail de la terre ne
procure pas un revenu satisfaisant;
comme aussi le cas des deux (2)
interviewés de la question onze (11) qui opteraient pour un emploi en
ville ~ salaire égal.
Nous présentons donc ce tableau et l'analysons
sous forme de reprise générale.
Tableau 45:
Typologie des caùses générales de l'exode rural
A. Répugnance au travail de la terre.
23 énoncés
14 interviewés
l. Difficultés du travail manuel
8 énoncés
8 répondants
2. Paresse des jeunes gens
7 énoncés
6 répondants
3. Dédain du tra va il manuel
4 énoncés
4 répondants
4. Déchéance physique de l'individu
2 énoncés
répondant
5. Manque d'initiation au travail
de la terre
2 énoncés
2 répondants

U"IVIRSIH 01 "O"TRI4.l
~96
B. Raisons d'ordre socio-culturel.
21 énoncés
13 interviewés
1. Recherche de partenaires conjugaux
a) Recherche de mari
4 énoncés
4 répondants
b) Recherche de femme
5 énoncés
3 répondants
2. Conflit de générations
a) Mésentente avec les parents
3 énoncés
3 répondants
b) Le jeune veut comprendre la vie
énoncé
répondant
3. Imitation d'autrui
4 énoncés
4 répondants
4. Raisons d'ordre scolaire
a) A cause du niveau acquis
à l'école
énoncé
répondant
b) Pour s'instruire
énoncé
répondant
5. Absence de distractions au village
l énoncé
répondant
6. Attrait de la ville
énoncé
l répondant
C. Raisons d'ordre économique.
14 énoncés
9 interviewés
1. Insuffisance du revenu en milieu rural
a) Annualité du revenu
3 énoncés
2 répondants
b) Mensualité du revenu
en milieu urbain
2 énoncés
2 répondants
c) Insuffisance du revenu
en milieu rural
2 énoncés
2 répondants
d) Le champ ne produit pas
toujours bien
l énoncé
l répondant
e) Le travail champêtre
ne rapporte rien
l énoncé
l répondant

297
2. Recherche de travail salarié
en ville
4 énoncés
4 répondants
3. Recherche d'argent en ville
énoncé
répondant
D'après les réponses des interviewés, trois (3) catégories de
raisons font que les jeunes gens quittent le travail de la terre pour aller
en ville.
Il y a des raisons d'ordre économique, des raisons socio-cul-
turelles et des raisons relevant du travail de la terre.
En tant que catégorie, la répugnance au travail de la terre
qu'affichent les jeunes adultes, se définit par les difficultés inhérentes
aux travaux champêtres.
Selon certains des répondants de cette catégorie,
la difficulté principale réside dans l'exécution des travaux manuels en
général.
Au rang de ceux-ci, ils mentionnent le nettoyage des planta-
tions de café ou de cacao, le désherba~e des rizières, etc ... , activités
que ces jeunes trouvent pénibles.
Pour d'autres interviewés, si les jeunes adultes vont en ville,
clest parce qu'ils sont paresseux.
Car, disent-ils, certains dlentre eux
II ne
peuvent pas tenir la machette ll
parce qu'ils manquent de courage.
Quant aux filles, continuent d'autres répondants, plus paresseuses que les
garçons, elles quittent la campagne parce qu'elles "aiment la vie facile".
C'est pourquoi, elles partent aussi en ville pour échapper aux travaux
agricoles qui occupent les femmes des villages.
En cela, elles donnent
raison à d'autres jeunes adultes qui tiennent en horreur l'exécution dlune
quelconque tâche agricole.
Car, pour eux, ces travaux agricoles font
"vite vieillir" et occasionnent souvent un"blocage des reins'.'
La crainte
-

UNJVIRS,T( Dl "'ONTR{~l
298
de cette déchéance physique prématurée s'ajoute au fait que certains
jeunes gens eux-mêmes "comprennent mal le travail de la terre" pour la
simple raison que beaucoup d'entre eux n'y sont pas initiés ni habitués.
Tout cela contribue à les renforcer dans leur persistance du refus des
travaux agricoles.
A cette première catégorie de raisons, d'autres interviewés
ajoutent une autre, à dimension socio-culturelle.
Elle relève de la
situation sociale et culturelle qui prévaut en milieu rural.
Le départ de ce milieu s'explique pour certains répondants par
le manque de partenaires conjugaux.
La situation à ce niveau revêt deux
aspects.
Pour ce qui concerne les filles, elles vont à la recherche du
mari de leur goût qu'elles ne trouvent pas parmi les jeunes ruraux.
Quant
aux garçons, ils croient que le seul endroit oD ils peuvent avoir une
femme, c'est bien la ville.
Car d'après eux "les filles de maintenant
affluent vers les villes parce qu'elles veulent y vivre".
Ces deux aspects
du problème traduisent une seule préoccupation.
D'abord au niveau des garçons.
Ceux-ci n'ayant aucune ressource
et n'étant pas en mesure de subvenir à leurs propres besoins, il ne leur
est pa~ possible de trouver quoi que ce soit pour l'offrir à une éventuel-
le fiancée, à plus forte raison, entretenir une femme.
Leur départ à la
ville, semble-t-il~est donc doublement motivé par une recherche de moyens,
soutenue par un désir d'avoir une femme avec les moyens obtenus.
Ils
répondent ainsi, et par ricochet, au besoin exprimé par les filles qui est

UNIVE~SITl DE "ONT~IAl
299
celui de se choisir un mari ayant une situation sûre et avec lequel elles
pourront préparer un avenir commun.
Dans ce même cadre socio-culturel, certains répondants soulignent
l'existence de conflit de générations comme base de leur départ en ville.
Ce phénomène a été déjà souligné dans les variables précédentes.
Rappelons toutefois que les jeunes adultes, en proie à une
nouvelle vision du monde propre à leur âge, trouvent de plus en plus cadu-
ques les valeurs qui définissaient l 'horizon social de leurs parents et de
leurs aînés et les normes qui garantissaient les relations sociales d'un
groupe donné.
Face à cette IIdéviance ll constatée par les parents, ceux-ci
adoptent des comportements défensifs.
Les comportements des uns et les
agissements des autres conduisent au relâchement des liens de famille et
à la mise en péril du pouvoir des aînés.
La non reconnaissance du contrat
social traditionnel par les jeunes adultes, cause de ce conflit latent des
générations, traduit en partie le départ de certains jeunes adultes qui
se dégagent ainsi de la tutelle familiale.
Espérant mieux vivre en ville,
anonymes et libres de toute obligation sociale contraignante, la ville
semble leur offrir le refuge le plus certain.
Et compte tenu aussi du
fait que la ville par elle-même exerce une influence sur les jeunes
adultes ruraux. à travers ce qu'elle a de moderne, de beau et de dis-
trayantJen somme à travers tout ce qui fait son charme et son attrait, le
départ de la campagne pour ces jeunes adultes s'en trouve favorisé.
Selon certains parmi eux, ils vont à la ville pour acquérir "les
nouvelles et Donnes manières de vivre ll qu'elle incarne à leurs yeux et

UNIVERSITE DI ~IONrRt"l
300
que louent quotidiennement les mass média, ou Que se piquent de posséder
ceux Qui y ont séjourné ne serait-ce que l'espace d'un trimestre.
Les
effets de démonstration de ceux-la qui veulent paraître plus qu'ils ne le
sont ~ travers leur habillement et le désir de les imiter qui anime ceux
restés au village, conduisent les derniers ~ vouloir aller ~ la ville
II pour être ~
la mode comme les copains".
Il arrive aussi que certains qui ont déja été scolarisés et ont
acquis un Quelconque diplôme ou veulent en avoir d'autres avancent comme
motif de leur départ de la campagne. le désir de reprendre des études.
Dans son fondement, cette catégorie de raisons d'ordre socio-
culturel est soutenue par des raisons relevant d'une catégorie économique.
Dans cette dimension, il s'agit de l'insuffisance du revenu en milieu
rural comparé a celui du milieu urbain.
Selon les répondants de cette
catégorie. Ille travail champêtre ne rapporte rien" en terme de revenu
monétaire.
Cette insuffisance selon eux est ~ l'origine des longues pé-
riodes que mettent les plantations ~ produire.
Ils prennent en indicatif
le café, comme dit celui-ci:
"le café, ça fait quatre ans, ça dure".
Et en plus, estiment certains. les plantations ne donnent pas toujours
bien et il faut "attendre une année " pour avoir un revenu quelconque.
Cette annualité d'un revenu de plus en plus insuffisant. exacerbe une
volonté d'aller ~ la ville où. comparativement. "1' on gagne par mois".
Et la principale source qui intéresse en premier lieu les jeunes adultes
ruraux c'est un emploi salarié qu'ils espèrent trouver immédiatement.
Moins fatigante et a revenu régulier, cette source de revenu qu'est le

301
travail salarié se cherche en même temps que l'apprentissage d'un métier
débouchant sur un emploi salarié à partir d'une qualification acquise.
C'est donc pour ceux qui ne possèdent aucune formation adéquate, une al-
ternative qui les mène vers la ville.
Comme nous pouvons le constater, la typologie des raisons suite
A cette question (12) couvre trois (3) grandes dimensions.
Ici, les
répondants ont privilégié les raisons relevant de l'attitude des jeunes
adultes face au travail manuel.
Cette catégorie que nous avons définie comme une répugnance au
travail de la terre de la part des 'jeunes adultes, regroupe vingt-trois
(23) des cinquante-huit (58) énoncés à la question.
En plus, son importance vient du fait qu'elle est le premier
choix de quatorze (14) des vingt-deux (22) répondants.
Trois sous-catégories la structurent dans cette position de
première catégorie.
Il s'agit des difficultés inhérentes au travail de la
terre mentionnées en huit (8) énoncés par huit (8) répondants, la paresse
des jeunes adultes face au travail manuel, sous-catégorie qui regroupe
sept (7) énoncés de six (6) répondants et enfin le dédain affiché des
jeunes adultes vis-à-vis de ce travail qui se manifeste à travers quatre
(4) énoncés de quatre (4) répondants.
En second lieu, nous pouvons souligner la catégorie de raisons
d'ordre socio-culturel qui invoquent les interviewés.
Cette deuxième caté-
gorie avec vingt-et-un (21) énoncés de treize (13) interviewés se distin-

UNIVERSITE DE '>IONTRE .. l
302
gue particulièrement par la recherche de partenaires conjugaux.
Cette
sous-catêgorie regroupe neuf (9) des vingt-et-un (21) énoncés de sept (7)
répondants.
Celle-ci est suivie dans cet ensemble par le dêsir d'imita-
tion d'autrui, qui est une autre sous-catégorie de cette dimension socio-
culturelle.
Cette dimension est soutenue et renforcée par la troisième
catégorie de raisons, qui, elle, est d'ordre économique et avantage
l'insuffisance du revenu en milieu rural comme sous-catégorie de raisons
prêsidant au dêpart des jeunes adultes ruraux vers les villes.
Les réponses a cette question 12 reprennent a leur manière les
raisons que certains interviewés ont invoquées à d'autres questions.
Toutefois, les considêrations que nous venons de faire ne réduisent en
rien la portée des prêcédentes analyses.
Elles ne peuvent que les com-
plêter dans le cadre d'une apprêciation globale du rapport entre les
jeunes adultes ruraux et le travail manuel dans le cadre de l'exode rural.
S'adressant individuellement aux interviewés, la question 13 a
cherchê à savoir si oui ou non ils avaient envie de quitter le village
pour la ville.
Les rêpondants se sont répartis en trois (3) groupes:
Deux (2) rêpondants n'ont pas encore de position définie.
Six (6) nlont pas envie de quitter leur village.
Quatorze (14) nlont pas envie de rester au village.
A l'êtude des justifications a leur rêponse, les six (6) qui
nlont pas envie de quitter le village, évoquent les mêmes raisons que

UNIVERSITE OE _'10NTa/A.l
303
ceux qui ont déclaré s'intéresser au travail de la terre a la question 2
de cette même variable (10).
Quant aux quatorze (14) qui ont envie d'aller a la ville, ils
reprennent les mêmes arguments que nous avons recueillis aux questions
2 a 4 de cette même variable (10).
L'explicitation de ces deux groupes de raisons renvoie au dé-
veloppement que nous avons élaboré dans le cadre des questions citées en
remarque.
Toutefois, nous présentons les tableaux de classification de
ces éléments de réponses a cette question (13).
Tableau des raisons de ceux qui n'ont pas envie de quitter le
village.
Les interviewés ont énoncé quatorze (14) idées.
Celles-ci
après analyse de contenu ont été réduites a dix (10) items qui constituent
dix (10) sous-catégories rangées sous trois (3) catégories.
Tableau 46:
Typologie des raisons de ceux qui nlont pas envie de guitter
le village
A. Amour du travail de la terre.
7 énoncés
4 interviewés
l. Faire des réalisations à partir
du travail agricole
4 énoncés
4 répondants
2. Pour cultiver
énoncé
répondant
3. Travailler plus
énoncé
répondant
4. J'aime le travail de la terre
énoncé
répondant
B. Réalisme personnel.
4 énoncés
3 interviewés
1. Je niai rien a faire en ville
1 énoncé
1 répondant
2. Je ne suis pas qualifié
1 énoncé
répondant

U~IYE RSI Tf DE \\-1 0>; TR ( A.l
304
3. Je ne sais rien faire en ville
énoncé
répondant
4. Trop de problèmes en ville
énoncé
répondant
C. Raisons de famille.
3 énoncés
3 interviewés
1. Aider mes parents
2 énoncés
2 répondants
2. Assurer l'avenir de mes enfants
1 énoncé
répondant
Tableau des raisons de ceux qui niant pas envie de rester au
village.
Au niveau de ces quatorze (14) répondants, nous avons recensé
trente-huit (38) énoncés réduits après analyse ~ vingt-deux (22) items
constitués en douze (12) sous-catégories.
Celles-ci ~ leur tour ont été
rangées sous quatre (4) catégories de raisons.
Tableau 47:
Typologie des raisons de ceux qui n'ont pas envie de rester
au vill age
A. Recherche de promotion sociale.
17 énoncés
9 interviewés
1. Recherche de gain
a) Travail
3 énoncés
3 répondants
b) Apprentissage d'un métier
2 énoncés
1 répondant
c) Argent
3 énoncés
répondant
2. Quête de bien-être personnel
a) Chercher ma vie
1 énoncé
répondant
b) Pour être en paix en ville
1 énoncé
1 répondant
c) En ville on ne se fatigue pas
1 énoncé
1 répondant
d) Faire ma jeunesse en ville
1 énoncé
1 répondant
3. Recherche de partenaires conjugaux
a) Recherche de mari
2 énoncés
2 répondants
b) Recherche de femme
2 énoncés
2 répondants

U~IHRSIH 0{ "10:-; IR("l
305
4. Poursuite des études
1 énoncé
1 répondant
B. Répulsion de la vie sociale du village.
10 énoncés
7 interviewés
1. Conflit de générations
a) Mésentente avec les parents
2 énoncés
2 répondants
b) Négligence des parents
2 énoncés
répondant
2. Monotonie de la vie du village
2 énoncés
2 répondants
3. Absence d'évolution au village
2 énoncés
2 répondants
4. Vieillesse prématurée au village
énoncé
répondant
5. Présence de la sorcellerie au village
énoncé
répondant
C. Répugnance au travail en milieu' rural.
8 énoncés
7 interviewés
l. Mauvaises conditions du travail de la terre
a) Difficultés du travail manuel
2 énoncés
2 répondants
b) Manque d'aide aux paysans
2 énoncés
2 répondants
2. Refus du travail agricole
4 énoncés
3 répondants
D. Désir d'apporter de l'aide à la famille.
3 énoncés
2 interviewés
1. Aide à la famille
a) Pour expédier de l'argent
à mes parents
l énoncé
l répondant
b) Pour que mes parents
soient contents de moi
énoncé
répondant
c) Pour nourrir ma famille
énoncé
répondant
La dernière question de cette série sur la variable structure
socio-économique demande aux interviewés de dire ce que l'Etat devrait
faire pour retenir les jeunes ruraux à la campagne.

U"IVERSIH DE "ü"TRf~l
306
Pour l'ensemble, nous avons recensé soixante-trois (63) sugges-
tions.
Une analyse de contenu de ces id~es sugg~rées nous a permis de les
réduire ~ vingt-cinq (25) items.
A un second niveau d'analyse, ces items
ont donné lieu ~ quatorze (14) sous-cat~gories que nous avons finalement
rangées sous quatre (4) catégories.
Comme précédemment, nous ne faisons que présenter le tableau de
ces réponses.
Car en fait elles reprennent les données de la question 23
de la variable huit (8) de la campagne.
Ce qui nous évite ainsi des
redites inutiles.
Tableau 48:
Typologie des suggestions à l'Etat
A. Mise en place d'équipement de sports et loisirs.
19 énoncés
12 interviewés
1. Création de centres de loisirs
11 énoncés
11 répondants
2. Création de terrains de sports
5 énoncés
5 répondants
3. Création de foyers de jeunes
3 énoncés
3 répondants
B. Mise en place d'une infrastructure économique adéquate en milieu
rural.
18 énoncés
14 interviewés
1. Création d'unités pourvoyeuses d'emplois
a) Des usines
4 énoncés
4 répondants
b) Des sociétés
3 énoncés
2 répondants
2. Développement d'une infrastructure commerciale
a) Construction de marché
4 énoncés
4 répondants
b) Centre de commerce
2 énoncés
2 répondants
3. Création de sources de revenu
a) Travail salarié
?
énoncés
2 répondants
=

307
b) Emploi
l énoncé
l répondant
c) Mettre des métiers dans
les vill ages
l énoncé
l répondant
4. Diminution des prix des produits
chimiques
l énoncé
l répondant
C. Définition d'une politique de maintien des jeunes ~ la terre.
16 énoncés
11 interviewés
1. Aide ~ l'installation des jeunes
5 énoncés
5 répondants
2. Création de structures de formation
a) Ecoles techniques
2 énoncés
2 répondants
b) Ecoles de formation rurale
énoncé
répondant
c) Encadrement des conseillers
énoncé
répondant
3. Création de structure de travail
a) Les groupements à vocation
coopérative (GVC)
énoncé
répondant
b) Plates-formes villageoises
énoncé
répondant
c) Blocs culturaux
énoncé
répondant
4. Octroi de subvention aux jeunes
paysans
2 énoncés
,., répondants
5. Faciliter l'accès au crédit
2 énoncés
2 répondants
D. Equipement sanitaire et social de la campagne.
10 énoncés
8 interviewés
1. Création d'unités sanitaires
a) Centres de santé
5 énoncés
5 répondants
b) Dispensaire
2 énoncés
2 répondants
c) Maternité
énoncé
répondant

UNIVERSI H DE '10"" TREAL
308
2. Création de point d'eau
dans les villages
énoncé
répondant
3. Electrification des villages
énoncé
répondant
Comme le tableau 11 indique, les trois grandes catégories qui
dominent ont trait au développement des sports et loisirs, à la mise en
place d'une infrastructure économique, et à la définition dlune politique
de maintien des jeunes adultes en milieu rural.
Des trois, celle qui mérite notre attention est celle qui évo-
que les suggestions de mise en place d'une infrastructure économique.
Quoiqu'elle ne regroupe que dix-huit (18) énoncés contre dix-neuf (19)
pour la première, elle est proposée par quatorze (14) des vingt-deux (22)
interviewés contre douze (12) pour la première.
Et dans cette catégorie,
nous pouvons relever que l'accent des répondants est mis sur la création
d'unités pourvoyeuses d'emploi salarié, source de revenu qui attire les
jeunes adultes ruraux
vers les villes comme nous l'avons déj~ soutenu
dans l'étude de cette variable.
Dans le cadre de l'étude de cette variable, il ressort, d'après
les interviewés que l'insuffisance du revenu en milieu rural est l'une
des causes principales d'ordre économique qui pousse les jeunes adultes
ruraux vers les villes.
Cette insuffisance du revenu est due, selon eux,
à la quasi inexistence d'emplois salariés à la campagne et le bas prix
auquel sont achetés les produits agricoles.

U:'<IV!R5ITf D!"O"'TR(~l
309
La répugnance au travail de la terre, l'absence de distraction
au village et le conflit des générations sont des causes d'ordre secondai-
re qui auraient eu moins d'effets si la principale n'était pas dominante.
La preuve, quinze (15) des vingt~deux (22) interviewés ont
déclaré s'intéresser au travail de la terre.
Vingt (20) sur les vingt-
deux (22) opteraient, ~ salaire égal, pour un emploi ~ la campagne.
Et
enfin, les vingt-deux (22) interviewés estiment que les jeunes gens des
villages resteraient ~ la campagne s'il y avait des emplois salariés.
Ce que, en fin de compte renforcent les propositions faites en réponse ~
la question quatorze (14), dominées par la définition d'une politique de
maintien des jeunes ~ la terre fondée sur la mise en place d'une infra~
structure économique en milieu rural.
4.
Synthèse des données
Toutes les données que nous venons de présenter, aussi bien
celles de la ville que celles de la campagne, peuvent être classées en
cinq (5) grands groupes;
chacun de ces groupes faisant référence A un
centre d'intérêt qui le différencie des autres.
C'est ainsi que nous avons:
le groupe des données relatives aux causes;
les raisons de ceux qui ne veulent pas quitter la campagne;
les problèmes rencontrés en ville et les solutions adoptées
par ceux qui les ont vécus;

UI'oIVIRSITl DE ·"O~TR1"'l
310
la nouvelle vision de la campagne des interviewés;
le groupe des services souhaités pour ceux qui arrivent en ville.
Cette classification qui est un résumé de toutes les données de
nos entrevues par centre d'intérêt ne prend en compte ni les questions de
chaque variable étudiée, ni les répondants ~ chacune des questions de ces
variables.
Elle ne tient pas non plus compte du nombre des interviewés
par chaque catégorie de données à travers chaque question.
Elle reprend
et regroupe les catégories convergeant vers un même centre d'intérêt et
de signification
4.1
Le groupe des causes
Les causes de l'exode rural, telles que nous les avons recen-
sées ~ partir des données recueillies se regroupent en sept (7) faisceaux
qui peuvent nous permettre de comprendre ce phénomène.
Chaque faisceau
renferme un certain nombre de sous-catégories et de catégories d'énoncés
telles que nous les avons définies à travers nos précédentes explications.
4.1. l
~éQu.9..n~n~e_a~ !.r~v~il s!.e_l~ !.e.!::.r~
A. Dévalorisation d~ l'individu sur le plan physique et social.
1. Perte de considération sociale aux yeux de ceux de la ville.
2. Déchéance physique entraînant un vieillissement prématuré.
B. Difficultés du travail manuel.
1. Travaux champêtres pénibles.
2. Manque d'aide aux paysans.

UNIVfRSITf DE ~IONTREAl
311
C. Revenu du travail insuffisant.
1. Difficultés naturelles:
climat. état des terres. état des pl~ntations.
2. Mauvaises structures:
bas prix des produits agricoles mais cherté des produits chimiques.
o. Manque d'initiation de base pour les jeunes scolarisés.
A. Manque d'infrastructures économiques pourvoyeuses d'emplois salariés.
1. Inexistence d'équipement industriel A la campagne.
2. Sous-développement chronique de la campagne.
3. Négligence du milieu rural de la part de l'Etat.
B. Accentuation croissante de la division sociale nationale du travail
au détriment du monde paysan.
A. Conflit des générations et des valeurs.
1. Mésentente entre parents et enfants.
2. Refus de l'autorité parentale.
B. Persistances de certaines structures sociales traditionnelles.
1. Présence des sorciers.
2. Permanence de l'héritage horizontal au détriment de la succession
en ligne verticale.

312
c. Relachement des structures familiales traditionnelles.
D. Monotonie de la vie au village.
1. Absence d'horizon social en terme d'évolution.
2. Inexistence de distractions et de loisirs.
3. Manque de jeunes gens et jeunes filles pour les uns et les autres.
E. Pauvreté croissante du milieu villageois.
4.1.4
Effets de la scolarisation
A. Surestimation idéologique du rôle et des objectifs de l'école dans la
réussite sociale de chaque individu.
1. Façonnement précoce de la personnalité du jeune à travers les
structures scolaires.
2. Substitution croissante de l'éducation scolaire à l'éducation du
milieu familial.
B. Inadaptation des programmes scolaires au milieu social global
villageois.
C. Valorisation urbaine des acquis de l'école.
D. Echec scolaire.

313
4.1.5
fffe!.s_cQ.niu.9-u~s_d~s_m~s~~é9_i~ ~t_d~ l'~t!.r~i!.
du modernisme urbain
A. Image de la ville perçue comme terre promise.
1. Idéalisation de la vie en milieu urbain.
2. La ville considérée comme unique lieu de culture et de civilisation.
3. Caractéristiques modernes de la ville.
4. Loisirs et distractions de la ville.
B. Influence des mass média.
1. Diffusion des modèles culturels urbains en direction du monde rural:
musique. danse et mode.
2. Distribution des programmes d'information à orientation urbaine.
A. Présence de parents et d'amis en ville.
B. Influence des parents de la campagne.
4.1.7
Désir d'ascension sociale
A. Promotion sociale.
1. Réussite sociale
2. Changement de statut social et amélioration de l'image de soi.
3. Recherche de partenaire conjugal.
4. Besoin d'épanouissement individuel.

U.'I,VERSIII Dl '1ü.'ITR(Al
314
B. Recherche de gain et de meilleures conditions de vie.
1. Recherche de travail salarié.
2. Besoin de formation et d'apprentissage d'un métier.
3. Recherche de sources de revenu.
4.2
~oupe des raisons de ceux gui n'ont pas envie
de guitter le village
Quatre grandes séri es de ra; sons défi ni ssent l 1 env; e de ceux
parmi les jeunes ruraux qui veulent rester à la campagne.
Ce sont notamment:
4.2.1
L'amour du travail de la terre
A. Terre solution d'avenir.
B. Désir de se réaliser pleinement en milieu rural à travers des réalisa-
tions économiques et sociales.
C. Foi en la rentabilité du travail de la terre qui peut procurer des
biens matériels, gage de meilleures conditions de vie.
A. Défaut de qualification et d'instruction nécessaires pour une vie
en ville.
B. Incertitudes de la vie en ville.

315
4.2.3
Manque d'oEPortunité:
Echec scolaire
- - - - -
- - - - - - - - - - - ~ -
4.2.4
Rési~nation
-
-
-
- -
4.3
Les problèmes rencontrés en ville et leurs différentes solutions
Quatre genres de problèmes ont affecté ceux qui arrivaient pour
leur première fois en ville.
4.3.1.1
Problèmes d'ordre matériel
A. Argent:
pour satisfaction etes besoins immédiats .
. B. Logement.
c. Transport.
D. Habi 11 ement.
E. Nourriture.
A. Manque de sources de revenu:
travail salarié
B. Défaut de formation et de qualification:
apprentissage d'un métier.
A. Insertion sociale en ville:
acclimatation, dépaysement, adaptation,
i ntégrati on.

316
B. Relâchement de liens sociaux:
absence de soutien, abandon familial,
manque de tuteur et tutrice.
C. Nostalgie.
o. Chagrin d'amour.
E. Prison.
4.3.1.4
Problème de santé:
maladie
Face à ces différents problèmes des solutions ont été adoptées
ou envisagées.
4.3.2
.~..olu.!.i2..n~ ~d2..p!.é~s_d~n~ la_r~s2..1~tio~ ~o~sible
ie_c~s y!:.o~l ~m~s
A. Aide matérielle et morale d'autrui.
1. La famille:
frères, cousins, oncles, tantes.
2. Les amis et les connaissances.
B. Actions personnelles.
1. Obtention d'une source de revenus:
emploi. apprentissage d'un
métier. bourse de formation.
C. Solutions de rechange.
1. Arrêt d'étude.
2. Voyage à l'étranger.
3. Retour au village.

317
4. Mariage.
5. Mariage précoce.
6. Actes de délinquance:
vol, débauche.
O. Espoir malgré statu quo.
4.3.3
Solutions souhaitées
A. Accroissement de l'aide d'autrui.
1. Parents et amis.
2. Etat, par création de services d'aide.
B. Augmentation des possibilités d'actions personnelles.
1. Création d'emploi.
2. Implication et responsabilisation des jeunes adultes.
4.4
Les modifications de la campagne souhaitées
La nouvelle vision de la campagne telle que les jeunes adultes
de la ville et des villages aimeraient la voir.
Ses caractéristiques ont
été définies au niveau de trois types d'aspects.
A. Transformation de l'agriculture.
1. Modernisation des méthodes et techniques agricoles.
2. Réforme du système foncier facilitant l'accès des jeunes à la terre.

318
B. Définition d'une politique globale cohérente de rétention et d'instal-
lation des jeunes adultes à la terre.
1. Méthode de sensibilisation soutenue par les mass média.
C. Mise en place de moyens d'incitation au travail de la terre.
1. Création d'un fonds national d'aide et d'installation des jeunes
sur les terres.
2. Subvention à ceux qui ont le désir de retourner à la terre.
3. Faciliter l'accès des jeunes au crédits d'installation.
4. Développement des structures communautaires de travail:
groupements
à vocation coopérative (G.V.C.), "blocs culturaux, plates-formes
villageoises".
D. Mise en place d'une structure dynamique de revenu satisfaisante.
1. Implantation d'unités pourvoyeuses d'emplois salariés par décentra-
lisation économique au profit du milieu rural.
2. Augmentation du prix des produits agricoles en fonction du coût
réel de la vie.
3. Diminution du prix des produits chimiques.
E. Amélioration des structures.
1. Création de structures adéquates du commerce des produits agricoles.
2. Amélioration des pistes villageoises.
3. Rendre disponible le minimum vital.

319
A. Mise en place d'un système d'éducation et de formation intégrée
tenant aussi compte des réalités du milieu rural.
1. Elaboration de programmes scolaires en rapport avec l'écosystème
ru ra l .
2. Création de centres techniques en milieu rural.
3. Encadrement technique des jeunes paysans par des conseillers
d'animation rurale.
4. Multiplication des centres de représentation du ministère de l'agri-
culture et de celui de l'élevage.
5. Stages permanents de recyclage aux jeunes adultes agriculteurs.
6. Instauration d'une pension de retraite pour les paysans.
A. Transformation du milieu rural.
1. Reconstruction des villages adoptant un habitat de type moderne.
2. Equipement en eau potable et en électricité.
B. Equipement sanitaire.
1. Construction de centres de santé dans les villages.
2. Construction de dispensaires ruraux.
3. Construction de maternités.
C. Equipement de sports et loisirs.
1. Mise en place d'éléments de distraction:
sports, loisirs, cinéma.
,ew,C.,_,_-_

320
2. Création de foyers équipés animés par les jeunes adultes.
O. Transformation des mentalités:
disparition des sorciers.
4.5
Les services souhaités en faveur des jeunes adultes
en milieu urbain
Pour faciliter leur insertion sociale en milieux urbains, les
jeunes adultes proposent quatre formes de services.
A. Mise en place d'un service d'information ~ l'intention des nouveaux
citadins.
B. Organisation de séminaires d'information.
C. Création d'une commission nationale d'information sur les problèmes
en milieu urbain.
A. Centres de formation professionnelle a un premier niveau.
B. Services de formation professionnelle a un second niveau.
C. Centre technique d'apprentissage de métier a un troisième niveau.
O. Etablissement de formation aux beaux-arts.

UNIV! ~Sl TI Of "0." r~f ~l
321
A. Terrain de jeux et des sports collectifs dans les quartiers populaires.
B. Centre de loisirs et de distraction:
cinéma, centre culturel.
C. Aménagement d'espaces verts et de jardins publics.
A. Services de réception pour nouveaux arrivés:
accueil et hébergement.
B. Education populaire.
l. Education civile et civique
2. Education morale.
3. Education politique.
4. Centre de scoutisme.
5. Centres d'alphabétisation.
5. Analyse des causes
Dans cette section, nous reprenons les différents faisceaux de
causes recensées en synthèse générale.
Nous étudions ces faisceaux par
ordre d'importance en tenant compte du nombre d'interviewés qui s'y
réfèrent.
Pour chacun de ces faisceaux nous dressons un tableau descrip-
tif des interviewés en fonction de leur sexe, leur âge, leur niveau de
scolarité, leur revenu et leur lieu de résidence.
Nous commentons ce

322
tableau et faisons suivre ce commentaire par une analyse qui situe l'exode
rural des jeunes adultes dans la signification de chaque faisceau.
5.1
Les différents faisceaux de causes
5.1.1
Le désir d'ascension sociale
C'est l'un des plus importants faisceaux de causes par le nombre
d'interviewés qui s'y rapportent.
La totalité des quarante-et-un (41)
interviewés ont déclaré être venus en ville ou ne pas avoir envie de rester
à la campagne pour des causes liées à un désir d'ascension sociale.
Ce
faisceau des causes éclaire l'exode rural à partir de deux foyers.
Ceux-
ci ont été définis. en terme de catégories comme IIl a promotion sociale et
, l
la recherche de gain et de meilleures conditions de vie en ville.
La promotion sociale telle que nous la définissons inclut la
réussite sociale qui s'accompagne d'un changement de statut et d'une
amélioration de l'image de soi.
Elle inclut également la recherche de
partenaire conjugal et le besoin de loisirs, de distractions pour un épa-
nouissement personnel.
La recherche de gain et de meilleures conditions de vie passe
par le travail salarié, les moyens financiers, la formation et l'appren-
tissage d'un métier.
En fonction des variables individuelles indépendantes retenues,
les quarante-et-un (41) interviewés se répartissent de la façon suivante.

323
Tableau 49:
Répartition des interviewés selon "le désir d'ascension
sociale"
Vi 11 e
19
Campagne 22
Total
F
11
10
21
Sexe
19
22
41
M
8
12
20
16.25
12
18
30
Age
19
22
41
26.. 35
7
4
11
AR
15
5
20
Revenu
19
22
4·1
SR
4
17
21
11 .18
5
1
6
8.10
5
'"l
L
7
41
Scolarité
19
22
3.7
7
18
25
0.0
2
l
3
Ce tableau reprend dans son ensemble, les caractéristiques gé-
nérales de tout l'échantillon composé des quarante-et-un (41) interviewés,
dont dix-neuf (19) de la ville et vingt-deux (22) de la campagne.
Il est presque en équilibre au niveau du sexe.
Vingt-et-un (21)
personnes sont du sexe féminin contre vingt (20) du sexe masculin.
La
tranche d'âge la plus représentée est celle des 15 ~ 25 ans, avec trente

U,'i1HRSI Tl Of "'0" IRf"l
324
(30) individus contre onze (11) pour les "26-35 ans".
Ceux qui ont un
revenu et ceux qui n'ont rien se partagent presque équitablement l'échan-
tillon.
Vingt-et-un (21) sont sans revenu et vingt (20) en ont un.
Le niveau de scolarité de plus de là moitié des interviewés se
situe entre 3 et 7 ans.
Il concerne par exemple vingt-cinq (25) des
quarante-et-un (41) interviewés.
Aussi à la ville comme à la campagne, le désir d'ascension so-
ciale qui anime les jeunes adultes, fait référence à deux paramètres qui
incarnent à leurs yeux le monde moderne et confèrent la promotion sociale.
Il y a d'une part, l'argent et d'autre part le diplôme.
L'argent par le biais de tout ce qu'il procure est la passerelle
du monde rural au monde urbain.
Et à cet égard, les interviewés l'ont
exprimé, le monde rural est un monde de pauvres;
et le monde urbain, un
monde de riches.
Et de l'argent on ne manque plus l'occasion de dire
qu'il est la clé de tout.
Il confère prestige et respect.
Ainsi, ce qui
était dû à l'âge et à la sagesse dans les sociétés traditionnelles, l'est
maintenant par le seul fait de la richesse économique.
Et à la puissance
due au nombre important des' membres d'un lignage et des liens qui les
unissaient, l largent s'est substitué comme seul recours possible.
Il en est de même de son corrolaire, le diplôme.
En avoir un,
c'est déjà un gage d'une réussite certaine.
Et de quelque niveau qu'il
soit, chaque jeune adulte espère que le diplôme lui procurera du travail.

,1
UNIVf~SIT{ Of "ONT~{"l
325
Mais compte tenu de la forte rareté d'emplois salariés à la
campagne, ce diplôme n'est donc pas convertible à la campagne.
Il ne
l'est qu'en ville.
Aller donc en ville, c'est pour la plupart de ces
jeunes adultes, pouvoir devenir "quelqu'un".
Y être "commis" ou planton,
mais y être tout de même.
Et même si ce n'est pour rien de précis
au départ, y être tout au moins avec l'espoir d'avoir quelque chose
un jour.
Ainsi, pour ces jeunes adultes, rester au village, c'est subir
une certaine frustration à divers degrés.
D'abord il leur est impossible
de s' habi 11 er correctement, "d'être à 1a mode" comme 1eurs camarades de
la ville.
A cela s'ajoute l'absence de loisirs que certains connaissent
déjA soit par l'école, soit par les voyages, soit par les mass média.
Tout ce qui pour eux constitue des éléments de meilleures conditions de
vie.
Ensuite ayant un certain niveau d'éducation scolaire, aucun horizon
social ne s'ouvre devant eux à la campagne.
Le désir d'ascension sociale
qu'on espère réaliser en ville, est à l'image de cette frustration res-
sentie A la campagne.
5.1.2
Les effets de la scolarisation
L'un des faisceaux de causes qui retient l'attention de la tota-
lité de l'échantillon, ce sont les effets de la scolarisation comme causes
explicatives de l'exode rural.
Les quarante-et-un (41) interviewés qui
s'y réfèrent ont été décrits au tableau précédent relatif au désir d'as-
cension sociale.
Une reprise serait donc de trop.

U"'\\IRSITE DI "O"'TR!~L
326
Toutefois, rappelons que les effets de la scolarisation résultent
essentiellement de la surestimation idéologique du rôle et des objectifs
de l'école dans le développement national et de la réussite de chaque
individu scolarisé.
D'une part, l'école a été perçue comme le levier principal du
développement économique et social du pays par les dirigeants nationaux.
D'autre part, chaque individu a vu en l'école, la voie royale
qui mène au sommet de l'édifice social de la richesse et du pouvoir.
Si bien que l'éducation scolaire a été graduellement substituée à l'édu-
cation générale qui jusque là était assumée par d'autres institutions
comme la famille ou le lignage.
Cette surestimation de l'école s'est
traduite par l'adoption du principe de la scolarisation à 100%.
A tel
point que très tôt, les enfants sont pris en charge par l'école dans le
cadre de leur éducation.
Les effets de cette scolarisation dans le cadre de l'exode rural
se traduisent aussi par l'inadaptation des programmes scolaires au milieu
socio-culturel ambiant empreint d'éléments d'une tradition récente et
vivace.
Ils se traduisent également par le désir exprimé de la valorisa-
tion en milieu urbain des acquis de cette école, suite à un diplôme quel-
conque ou même d'un échec scolaire.
Mais d'une manière concrète, comment peut-on situer l'exode des
jeunes adultes dans ces effets du système scolaire?

U"I"{RSITE DE "O'.;rR[~l
327
L'exode rural est une expression de la remise en cause de la
finalité du système scolaire jusque là considéré comme facteur d'accélé-
ration du développement économique et social du pays.
C'est ce qui ressort des déclarations de l'ancien ministre du
plan de notre pays que rapporte Pierre Erny p. 17, en ces termes:
"Les carences du système éducatif actuel sont évidentes:
la vie paysanne
est absente de l 'horizon scolaire, les fallacieux jugements de valeur com-
paratifs sur les "manuels ll et les lIintellectuels ll ne sont pas combattus;
la coupure culturelle avec le monde traditionnel est aggravée par l'aspect
abstrait et formel des connaissances et des techniques 00 l'on enferme
l'accès au monde moderne, alors qu'une relation expérimentale avec le
milieu et la vie sociale doit toujours être maintenue ... ".
Faisant suite à cette déclaration, celle du Président de la Ré-
publique renchérit en ces termes:
IINotre système d'enseignement est d'un poids trop lourd pour les résultats
qu'il remporte et s'est développé plus souvent en marge de la croissance
économique qu'il n'y a contribué.
N'ayant pas jusqu'ici de liaisons
suffisantes entre la fonction de production et de formation, il répond mal
aux besoins d'un pays en développement comme le nôtre ll •
P. Erny, p. 19.
Nous référant aux déclarations des responsables ivoiriens que
nous venons de citer, il s'ensuit que, dans leur généralité, les program-
mes scolaires sont axés sur les valeurs culturelles et les qualifications
à orientation urbaine:
1I1 a vie paysanne est absente de l'horizon scolai-
re ll •
Cette orientation des programmes renforce encore le phénomène de

V"IVfRSllf ()( \\lo'rR[~l
328
centration qu'exerce la ville sur la campagne.
On ne peut donc pas s'é-
tonner que les programmes encouragent inévitablement l'exode des jeunes
adultes ruraux vers les villes.
Car la formation théorique et intellec-
tuelle (abstraite) domine la formation pratique dans les domaines liés aux
exigences du milieu paysan.
Les programmes ne préparent donc pas à un
emploi immédiat, pas même urbain a plus forte raison rural.
En tout état
de cause, le niveau scolaire atteint par le scolarisé n'est pas mesurable
en milieu rural.
Le diplôme, non plus, n'est pas "monneyable" à la campa-
gne.
Dans cette situation de recherche de débouché, la ville, qui déjà
transparaissait dans les programmes d'enseignement, s'offre alors comme
la seule issue possible.
Mais en attendant, étrangère dans un milieu où elle s'exerce,
l'école produit des étrangers.
Et comme tout étranger, ces jeunes scola-
risés sont forcément "mal dans leur peau", en milieu rural.
Ce que con-
firme un interviewé quand il dit "les élèves se sentent gênés au village".
C'est pourquoi, dès que l'occasion de présente, ils émigrent en
vi 11 e.
Comme résultat d'ensemble, nous pouvons conclure, à l'instar des
responsables. que les structures du système d'enseignement jouent un rôle
important dans le processus de l'exode des jeunes adultes ruraux.
Sur le plan culturel, le modèle occidental auquel l'école se
réfère est celui de "1 'honnête homme, de l 'homme à la tête bien faite."
Sous ce modèle. non seulement l'enseignement donne de faux espoirs aux
jeunes ruraux. mais encore il les déracine du milieu qui est le leur.

329
En les déculturant pour l es acculturer, l 1 écol e prépare l es enfants à un
monde d'ailleurs, ce monde qui se berce dans le miroir déformant des pro-
grammes scolaires;
ce monde qui se reflète à travers l'institution sco-
laire, mais que celle-ci ne peut transporter avec elle en milieu rural.
Et puis, avec les échecs ou abandons scolaires, l'école démobili-
se ainsi un certain nombre de jeunes qui deviennent alors des forces perdues
pour la campagne "parce qu'ils ne sont pas capables de tenir la machette".
Au niveau de la ville, la perte est la même. L'école préparait initiale-
ment à un emploi en ville.
Mais la plupart de ceux qui abandonnent l'école
et les diplômés ne sont pas qualifi€s
pour occuper un emploi.
En effet,
certains affirment qu'ils viennent en ville "pour apprendre un métier".
Il va sans dire que nous nous trouvons devant des jeunes qui,
d'une part sont mobilisés par l'école et par là-même démobilisés pour un
travail manuel à la campagne, et qui, d1autre part ne sont pas formés suf-
fisamment pour exercer un emploi quelconque, qu'ils ont d'ailleurs du mal
à trouver en ville.
De ce point de vue, l'école crée des besoins auxquels
elle ne répond pas, et continue, par la grâce du mythe de tout ce qu'elle
incarne, à alimenter l'exode rural qui semble être l'un de ses produits
manifestes.
Mais bien qu'il puisse être ainsi, certaines questions nous
viennent à l'esprit.
Il est reproché à l'école de n'être pas adaptée au milieu socio-
culturel ivoirien:
le pouvait-elle vraiment dans la mesure où elle a été
reproduite à l'image d'un système éducatif hérité de la colonisation et

U"I\\'fRSIT! Of \\I0'TRf~l
330
qui, de ce fait, étant anachronique, ne répond pas aux conditions socio-
historiques et socio-cu1ture11es du milieu ivoirien en général?
L'on reproche aussi a l'école de n'avoir pas contribué a la
croissance économique du pays, de n'avoir pas intégré la formation a la
production.
Est-ce vraiment la sa fonction première?
Point sensible d'une
structure, l'école ne rend-t-e11e pas visibles les failles de cette struc-
ture sociale dans laquelle elle s'inscrit et a partir de laquelle il fau-
drait apprécier ses résultats?
Et l'exode rural en est justement un.
5.1.3
he~ ,~.ff.e!.s_cQ.nJ.u~u~s_d~s_m~s~~é1.i~~t_d~ l'~t!.r~i!.
du modernisme urbain
Ces effets se situent à deux niveaux;
au niveau de la percep-
tion de la ville en milieu rural et de l'influence des mass média.
Ce faisceau de causes est le troisième en importance.
Il a été
évoqué par vingt-huit (28) interviewés sur les quarante-et-un (41) dont
seize (16) résident en ville et douze (12) a la campagne.
Le tableau ci-
après donne une représentation schématique de leurs caractéristiques.

UNIVER51T1 DE 'IO';fREA.l
331
Tableau 50:
Répartition des interviewés selon "les effets conjugués des
mass média et de l'attrait du modernisme urbain"
Variable
Vi 11 e
16
Total 12 campagne Total Total
F
11
6
17
Sexe
16
12
28
M
5
6
11
16.25
la
11
21
Age
16
12
28
26.35
6
1
7
AR
12
2
14
Revenu
16
12
28
SR
4
la
14
11_18
4
1
5
8 ..10
4
1
5
Scolarité
3.7
6
16
9
12
15
28
00
2
1
3
La caractéristique principale de ce tableau réside au niveau de
la variable sexe qui regroupe dix-sept (17) femmes et onze (11) hommes.
1)
Les dix-sept (17) personnes du sexe féminin représentent:
- 80.95% des femmes interrogées
- 41.46% du total de l'échantillon

U"I\\'lRSlT( Dl '10"TR[~l
332
Pa rm i elles,on ze (1 1) son t de l a vil les 0 i t :
- 100% des femmes interrogées en ville
- 52,38% du total du sexe féminin
- 26.82% du total de l'échantillon
et six (6) vivent à la campagne, et elles représentent:
- 60% des femmes rurales interrogées
- 28.57% du total féminin de l'échantillon
- 14.63% du total de l'échantillon.
2)
Les onze (11) personnes du sexe masculin se présentent dans les
proportions suivantes:
- 55% du total masculin interrogé
- 26.82% du total de l'échantillon
Parmi ces onze (11), cinq (5) habitent la ville soit:
- 62.5% des hommes interrogés en ville
- 25% du total masculin
- 12.19% de l'ensemble de l'échantillon
Quant aux six (6) de la campagne, ils représentent:
- 60% des hommes interrogés en milieu rural
- 30% du total masculin
- 14.63% de l'échantillon
En conclusion, les effets conjugués des mass média et de l'at-
trait du modernisme urbain sont plus présents chez ceux qui sont déj~ en
ville que chez ceux qui sont encore à la campagne.
Ils affectent plus les
femmes que les hommes.
Et les femmes en milieu urbain en ont plus cons-
cience que celles du milieu rural.

333
L'analyse des effets des mass média et du modernisme de la ville,
renvoie à la diffusion des modèles culturels urbains et à la distribution
des programmes d'information par la presse écrite et plus particulièrement
par la presse parlée avec l'action complémentaire du couple radio-télévi-
sion qui émettent à partir des centres urbains.
Et pourtant le centre urbain en lui-même évoque déjà dans l'es-
prit des jeunes adultes ruraux un certain nombre d'images.
C'est ainsi que
la ville est considérée non seulement comme un lieu de culture et de
civilisation, mais encore et surtout comme "la terre promise", ou en un mot
le paradis rêvé.
En plus de ces images, cette perception qu'ont les jeunes
adultes de la ville est renforcée par les caractéristiques mêmes de la
ville et celles du modernisme qu'elle incarne.
L'attrait d'Abidjan, dans
ce cadre précis, a donc été déterminant au cours de cette étude.
Abidjan
a été décrite dans sa beauté et dans son modernisme.
Elle a été située
dans ses fonctions et dans ses rôles.
Abidjan la "capitale" Abidjan qui
"plaît" et qu'on "aime", la ville "différente" des autres villes.
Abidjan
que les vingt-deux (22) interviewés ruraux ont désignée comme première
ville de destination, et où chacun a au moins un parent ou un ami, autant
d'attributs qui nous invitent à nous arrêter un instant sur le cas
"Abidjan".
Abidjan est la capitale de la Côte d'Ivoire.
Même si cette posi-
tion ne justifie pas tous ces attributs, elle détermine en partie le choix
des interviewés.

334
Sur le plan politique, Abidjan est le centre des grandes déci-
sions administratives et politiques du pays.
Du point de vue économique, Abidjan regroupe les 3/4 des entre-
prises installées en Côte d'Ivoire.
Elle détient donc plus de possibilités
d'emplois.et donc de revenu, plus qu'aucune autre ville de la Côte d'Ivoi-
re.
En somme, elle regroupe toutes les activités qui font d'elle, non
seulement une capitale économique nationale, mais aussi une métropole
régionale en Afrique de l'Ouest.
Dans le domaine éducatif, Abidjan abrite la seule université du
pays et la grande partie des grandes écoles qui s'y rattachent.
Les éta-
blissements scolaires publics sont les mieux équipés en matériel et en
personnel de qualité.
Au niveau des distractions, la multiplicité des centres de
loisirs et les équipements sportifs donnent une dimension culturelle plus
fournie que le reste du pays.
Sur le plan médico-social, deux centres hospitaliers universi-
taires font l'espoir des malades ivoiriens.
Mis a part le centre de
Treichville, le centre hospitalier universitaire de Cocody n'a d'égal que
lui-même.
A lui seul il peut recevoir et traiter tous les malades des
hôpitaux des trois grandes villes de l'intérieur du pays réunis.
(Daloa,
Bouaké et Korhogo).
C'est dire, comme un interviewé, combien Abidjan est "un monde
à part" sur le plan national.
Ce n'est donc pas un hasard si elle exerce

U~I\\'(RSIH DI \\\\O~TR(~1
335
sur les jeunes adultes ruraux un puissant effet d'attraction.
C'est une
force qu'elle tient de sa position.
C'est pourquoi aussi, aller à Abid-
jan, y "chercher du trava-il pour y vivre comme les autres ll fait partie du
rêve quotidien de la plupart de certains jeunes adultes ruraux a l'image
des éléments de notre échantillon.
Même si, au bout du compte, d'énormes
difficultés y attendent certains.
Et que d'autres, sans formation, ni
qualification, et donc sans travail, tombent au rang des délinquants, en
adoptant comme solution de rechange a leur problème et pour noyer leurs
soucis, l'usage de la drogue et la pratique de la débauche.
Il ne serait
pas sans intérêt de savoir combien de jeunes adultes ruraux, qui, venus à
l'instar de certains de nos interviewés, au spectacle du mirage d'Abidjan,
étouffent quotidiennement sous le poids des problèmes rencontrés lors de
leur arrivée dans cette ville.
Cet ensemble de causes se manifeste à travers quatre (4) phéno-
mènes:
le conflit des générations et des valeurs, la persistance de
certaines structures sociales traditionnelles, le relâchement des structu-
res lignagères, la monotonie du village et la pauvreté croissance du milieu
villageois.
Le nombre d'interviewés qui attribuent l'exode rural à cet
ensemble de phénomènes est de vingt-cinq (25) et situe ce faisceau au
quatrième rang dans l'ensemble des faisceaux.
Ces vingt-cinq (25) inter-
viewés se répartissent en dix-neuf (19) ruraux et six (6) urbains.
Le tableau constitutif des interviewés par rapport à ce faisceau
de causes est le suivant.

U';I\\lRSITI OI'lO';TRf ~l
336
Tableau 51:
Répartition des interviewés selon "le refus de la vie sociale
du mil i eu vi 11 ageoi s Il
Variable
Ville 6
Total Campagne 19 Total Total
F
4
9
13
Sexe
6
19
25
M
'J
,.
la
12
16-25
5
15
20
Age
6
19
25
26-35
l
4
5
AR
4
5
9
Revenu
6
19
25
SR
2
14
16
11-18
l
l
2
8-10
2
?
Sco la rité
3-7
4
6
l 5
19
19
25
00
l
l
2
Ce tableau est marqué par le nombre élevé de jeunes
adultes ruraux qui refusent la vie sociale du milieu villageois.
En
effet, il regroupe quinze (15) des dix-huit (18) interviewés ruraux qui
ont entre 16 et 25 ans.
Ce qui représente:
83.33% des interviewés de cette tranche d'âge qui habitent la
campagne
- 50% des interviewés de cette tranche d'âge
- 36.58% de l'échantillon

U~I\\,[~SITl 01 "O"TRE"l
337
Pour l'ensemble de ces jeunes adultes, leur refus de la vie
sociale du milieu villageois est principalement fondé sur le conflit des
générations et des valeurs qui s'inscrit dans le cadre général de la muta-
tion du milieu rural sur les plans politique, économique et social.
Dans le domaine politique, la toute puissante gérontocratie qui
détenait le pouvoir au niveau des lignages voit celui-ci menacé dans ses
fondements.
Et d'une manière officielle cette remise en cause se traduit
par le doublement du chef traditionnel du village à l'aide d'un responsable
de la cellule locale du parti connu sous le terme du "Comité du parti ~f
Ce responsable, souvent très jeune, détient son pouvoir non plus
désormais de l'âge, de l'expérience, de la coutume mais de son apparte-
nance au parti et de la faveur de celui-ci.
Ce qui a souvent comme résultat, un conflit latent entre l'an-
cien chef qui détient son pouvoir de la communauté villageoise et le nou-
veau,responsable des intérêts du parti-état au niveau du village.
L'effet
,
de ce conflit de pouvoir se traduit par l'absence de contrôle politique au
niveau du village qui au fur et à mesure s'étend au niveau des familles.
Cet effritement du pouvoir traditionnel s'accompagne d'une certaine "libé-
ration" des générations montantes et un éclatement de la famille élargie.
A cette dislocation du niveau politique se superpose la muta-
tion économique du fait de l'introduction de certaines nouvelles valeurs
économiques occidentales.
C'est le cas de l'argent,avec le développement
des cultures d'exportation comme le café ou le cacao,qui est devenu signe

U:"I\\'(~SIT( Dl \\10:"T~( ~L
338
de richesse.
Alors que la société villageoise n'était riche que de rela-
tions sociales complexes, désormais, chacun de ses membres adopte la
notion de profit.
La richesse se définit désormais en terme d'argent.
Comme l'instruction l'est en terme de diplôme.
L'argent comme le diplôme
sont désormais les deux aspects fondamentaux d'une même réalité:
l'as-
cension sociale dont nous avons parlé ci-dessus.
En plus de ces nouvelles valeurs qui font l'urbanité, et qui
envahissent le milieu rural, il persiste dans celui-ci un certain nombre
de manifestations de la tradition que certains jeunes adultes ne suppor-
tent pas aisément.
Il s'agit de la présence des sorciers qu'ils dénoncent
comme étant à l'origine de leurs différents maux et de leurs insuccès.
Comme aussi, ils n'aiment pas les modes de succession dans la famille
élargie. Certains jeunes auraient souhaité hériter de leurs pères en cas
de décès.
Et surtout, dans la mesure où ce sont eux qui dans la majorité
des cas ont aidé leur père à mettre en place certaines plantations de café
et de cacao, ils trouvent normal qu'à la mort de leur père, ces plan-
tations leur reviennent.
Mais le système de succession et d'héritage
s'opère différemment.
Le frère succède au frère et non le fils à son
père.
Dans la société traditionnelle cela s'explique par le fait que
l'héritage d'une personne défunte ne se limite pas seulement aux biens
matériels que convoitent les jeunes adultes dans ce cas.
Cet héritage se
compose de plus d'autres choses que les biens matériels.
Il inclut la
responsabilité sociale au sein du lignage et de tout le village, avec ce
que cela comporte d'obligations et de droits.
Dans ce contexte, un héri-
tier est un responsable.
Socialement, il répond de la vie des membres de

339
la famille dont il est l'héritier dans toutes ses dimensions.
C'est
pourquoi, dans la société villageoise, où l'âge est une donnée fondamen-
tale dans la participation aux décisions politiques déterminantes, un
jeune adulte ne peut donc pas être responsable et par conséquent hériter
de son père immédiatement.
Ce phénomène qui arrange les "ainés" parce
qu'il les confirme dans leur position sociale rencontre un refus systéma-
tique de la part des "cadets" qui s'estiment lésés.
En conséquence, devant une situation bloquée que certains vi-
vent, les jeunes adultes choisissent d'aller ailleurs~de quitter le
village qui ne leur offre aucun horizon social.
Les uns après les autres,
ils partent alors pour la ville.
Ainsi joue la dynamique de l'émigration
rurale. Tant et si bien qu'elle signifie simplement que plus nombreux sont
ceux qui quittent le village, plus fragile est la détermination de ceux
qui restent.
Et surtout, slil est connu que ces jeunes adultes déplorent
dans ces villages
l'absence de distractions et une pauvreté croissante
du mi lieu rural.
En résumé, nous pouvons dire que les facteurs de causalité a la
base du refus des jeunes adultes de la vie sociale rurale en transforma-
tion sont multiples et variés.
Une idée principale, cependant se dégâge:
les systèmes de valeurs traditionnels qui définissaient le mode de vie de
leurs "aînés" ne correspondent plus à la vision du monde tel que celui-ci
est perçu par les jeunes adultes.
Et les cultures traditionnelles elles-
mêmes, soumises aux coups de boutoir du modernisme et plus ou moins
bafouées dans ce qu'elles ont d'intime, ne sont plus que l'ombre d'elles-

340
mêmes.
La campagne ne répondant plus à leurs besoins d'une part, et les
jeunes adultes eux-mêmes ne croyant plus aux systèmes de valeurs en cours
dans cette campagne, d'autre part, ils vont à la ville, à la recherche de
nouveaux horizons, substituts fonctionnels à ces valeurs.
s. 1.S ~é'p"u9.n~n.s..e_a~ !r~v~il s!.e_l~ !e.!:.r~ ~t
io.!:t~ .!:.a.!:e!é_d~e!!1.plols_s~l~rlé~ ~ la_c~m'p"a~n~
Ces deux ensembles de causes sont ici réunis du fait de la
logique de leurs significations complémentaires dans le cadre d'une même
réalité:
le travail.
La répugnance au travail de la terre à cause de la dévalorisa-
tion de l'individu qu'il entraîne, des difficultés qui s'y rattachent, du
faible revenu qu1il procure, oriente certains jeunes adultes ruraux vers
un emploi salarié qu'ils ne trouvent malheureusement pas à la campagne.
Et cela à cause du manque d'infrastructure économique qui pourrait en
créer mais aussi suite à une division nationale du travail sans cesse
accrue entre la campagne et la ville.
Le nombre d'interviewés qui mettent ce facteur travail en rapport
avec l'exode rural est estimé à vingt-quatre (24) dont vingt (20) de la
campagne et quatre (4) de la ville.
Ce nombre d'interviewés place ces
deux ensembles au cinquième rang dans l'appréciation que fait l'échantil-
lon.
Le tableau qui suit décrit ces interviewés.

U~IVERSIH DE "O~1RE"l
341
Tableau 52:
Répartition des interviev.Jés selon "la répugnance au travail
de la terre et la forte rareté d'emplois salariés à la
campagne"
Variable
Vi 11 e 4
Total Campagne 20 Total Total
F
3
8
11
Sexe
4
20
24
M
l
12
l 3
16-25
4
16
20
Age
4
20
24
26-35
4
4
1
AR
3
5
8
Revenu
4
20
24
SR
l
15
16
1
11-18
l
l
8-10
?
2
4
Scolarité
4
20
24
3-7
2
16
18
0-0
l
l
Comme le précédent tableau celui-ci est à majorité compo-
sé de ruraux:
vingt (20) contre seulement quatre (4) citadins.
Parmi ces
ruraux ont peut constater que seize (16) soit 88.88% sont de la tranche
dl âge des 16 et 26 ans;
15 soi t 88.23% sont dans le groupe des II sans
revenu" et 16, soit 88.88% sont du groupe de scolarisés ayant entre
3 et 7 ans de fréquentation scolaire.

342
La répugnance au travai1 de la terre que déve10ppent 1es inter-
viewés, à cause d'une part de la perte de considération socia1e qu'i1
entraîne d'après"eux, de 1a déchéance physique qu'i1 précipite, et d'autre
part du revenu insignifiant qu'i1 procure par an, traduit un état d'esprit
de la p1upart des jeunes ruraux face aux activités économiques rura1es
traditionne11es.
Ce11es-ci ne répondent p1us aux besoins économiques nés
d'un environnement nouveau~
Et 1a satisfaction de ces besoins passe
nécessairement, selon eux, par l'obtention d'une source de revenu p1us
importante que celle des travaux champêtres. C'est ainsi que, ~ cette répu-
gnance au travai1 de 1a terre, se s:uperpose ou se substitue une envie d'un
travail sa1arié p1us rentab1e. Mais comme dans 1a p1upart des cas, i1
n'existe pas en mi1ieu rura1 d'équipement industrie1, cause ou conséquence
d'un sous-déve1oppement économique, certains jeunes adu1tes échappent à cet
état de fait pour aller tenter 1eur chance en mi1ieu urbain où quelques-
uns ont déjà des parents et des amis.
Ce faisceau de raisons exp1ique 1 'exode rura1 à travers 1a
parenté en vi11e. 1a présence d'amis en mi1ieu urbain, 1 'encouragement des
parents du milieu rura1 et 1a volonté altruiste d'autres jeunes adu1tes
ruraux.
Vingt-quatre (24) interviewés y ont contribué, répartis en
quatorze (14) citadins et dix 00) ruraux.
Voir tab1eau 53.

U~r\\,[~51T1 Dl "O"TRr~L
343
Tableau 53:
Répartition des interviewés selon "les relations de
famille·élargie"
Variable
Vill e 14
Campagne 10 Total Total
F
8
5
13
Sexe
14
10
24
M
6
5
11
_.
16-25
7
9
16
Age
14
10
24
26-35
7
l
8
1
i
1
1
;
AR
11
2
13
1
1
Revenu
14
10
24
SR
3
8
11
11-18
5
a
5
8-10
3
l
4
Scolarité
14
10
24
3-7
5
8
13
00
l
l
2
A la différence des deux précédents. ce tableau présente une
relative homogénéité dans ses composantes rurales et urbaines.
Et aucune
variable ne laisse apparaître un grand écart entre la ville et la campa-
gne.
Il soulève néanmoins deux remarques.
Les "sans revenu" en milieu
rural au nombre de dix-sept (17) sont faiblement représentés.
Ils ne sont
que huit (8).
Il en est de même des scolarisés du primaire dont le nombre
est faible:
huit (8) sur dix-huit (18) qu'ils sont en milieu rural.

U"IVIRSITl 01 \\\\0 '<TRI ~l
344
A l'analyse, les relations de famille élargie jouent sur trois
plans dans le départ pour la ville d'un jeune adulte.
Nous l'avons déjà montré, la migration en chaîne continue se
développe par la présence d'un parent en ville (frère, cousin, oncle) ou
celle d'un ami.
Par ailleurs au niveau de la communauté villageoise, deux
genres d'attitudes peuvent être à la base de l'émigration.
Il s'agit d1un
côté l'encouragement positif qui, en quelque sorte,contribue à organiser
le départ du jeune vers la ville, et de l'autre côté, l'encouragement
"négatif" ou le découragement qui invite à quitter la campagne.
Ce der-
nier cas, est surtout dû au fait que pour certains villageois, un jeune
adulte qui a déjà été à l' écol e et qui ne se trouve pas en vi 11 e comme
ses amis, est traité de paresseux et d'incapable.
Cela est d'autant plus
prononcé que, dans une certaine mesure, sa scolarisation a été considérée
par eux comme un investissement.
Son insuccès scolaire invite alors ~
des critiques acerbes.
Ce qui au bout du compte peut inciter certains
jeunes adultes à ne pas rester au village.
Mais, il y est aussi des moments où d'autres jeunes adultes
conscients de la situation de pauvreté de leur parents, décident d'eux-
mêmes d'aller à la ville afin de pouvoir subvenir aux besoins de la
famille.
Une relecture de ces différents tableaux conduit à un certain
nombre de constatations que nous exprimons de la façon suivante.
A partir de deux questionnaires différents, administrés dans des
milieux naturels différents, nous avons recueilli des réponses identiques,

UNIVERSITI DE MONTRE "'l
345
expliquant l'exode rural par un désir d'ascension sociale qui anime les
jeunes adultes et par les effets que la scolarisation produit sur ces
jeunes adultes.
Chaque faisceau de causes a été constitué ~ 100% aussi
bien du côté des ruraux qu'à celui des citadins.
Quant au refus de la vie sociale du milieu villageois et la ré-
"'
pugnance au travail de la terre, comme d'ailleurs la rareté d'emplois
salariés à la campagne, ils forment des ensembles dans lesquels inter-
viennent 80% des interview~s ruraux contre 20% des citadins pour exp1i-
quer l'exode rural.
Cette tendance peut s'expliquer par le fait que ceux qui sont
déj~ en ville ne perçoivent plus le phénomène de la même façon que ceux
qui sont encore à la campagne.
Ou encore, 1'ayant vécu, il y a assez
longtemps, ils n'y pensent plus.
Les effets conjugués des mass média et du modernisme urbain,
ainsi que les relations de famille ~largie sont deux faisceaux dans 1es-
quels l'intervention des interviewés provient pour moiti~ de la campagne
et pour moiti~ de la ville.
On peut constater aussi
que la majorité des interviewés, tren-
te (30) sur quarante-et-un (41),se situe dans la tranche d'âge des 16 et
25 ans.
Et que, presque 61% de 1 '~chanti11on ont un niveau scolaire pri-
maire situé entre 3 et 7 ans.
Enfin, vingt-et-un (21) des quarante-et-un
(41) interviewés sont sans revenu, avec un fort taux en milieu rural:
17 sur 21 soit 80.95% des"sans revenu~'

UNI\\1RSITI Dl ."O·'IRI Al
346
Sous ces caractéristiques fondamentales, les interviewés de notre
échantillon nous ont amené à considérer tour à tour les différents fais-
ceaux à travers lesquels ils ont ~voqu~ les raisons de leur venue en ville
et de leur envie de quitter la campagne.
A notre avis, ces différentes raisons relèvent de trois dimen-
sions de l'exode rural:
une dimension socio-~conomique, une dimension
psycho-sociologique et une dimension socio-culturelle.
En outre, elles se
présentent sous deux aspects:
un aspect objectif et un aspect subjectif.
5.2
Les niveaux d'interpénétration des différentes causes
A l'intérieur de chacune des dimensions de l'exode rural que nous
venons de définir, les causes s'interpénètrent à partir de deux niveaux.
Il s'agit d'une part des causes que nous qualifions d'objectives et celles
que nous considérons comme subjectives.
Les causes du niveau objectif se caractérisent fondamentalement
par l'ensemble des facteurs de causalité qui sont extérieurs aux jeunes
adultes dans leur décision de migrer.
Il s'agit de ces facteurs qui, s'intégrant aux structures glo-
bales de la société ivoiri~nne et relevant de chacune des dimensions du
phénomène,agissent du dehors sur les jeunes adultes et les amènent à déci-
der de partir pour la ville.
Ce sont des facteurs non contrôlables direc-
tement par les jeunes adultes et face auxquels ils semblent de prime
abord impuissants.
Ces facteurs révèlent la structure sociale globale du

347
milieu et la pesanteur sociologique qui l'environne.
L'exode rural dans
ce contexte peut être alors défini comme un phénomène social complexe par
son extériorité par rapport aux jeunes adultes.
Toutefois, cette définition n'épuise pas le phénomène.
Les cau-
ses du niveau subjectif en montrent une autre face.
Ces causes. sont celles qui, d'une manière directe, particul~ri­
sent les interviewés en tant qu'individus ou groupe d'individus.
Et qui
de ce fait traduisent d'une manière spontanée leurs aspirations profondes.
Elles dérivent en quelque sorte de l'expression de leurs besoins indivi-
duels dans le processus de l'exode rural.
En face des données de la réa-
lité objective, ces jeunes adultes adoptent des comportements qui sont les
différentes manifestations de leur personnalité incluant à la fois leurs
raisons et leurs sentiments.
C'est pourquoi aussi, l'exode rural peut
être défini comme un fait psychologique à dominante sociale qui révèle des
attitudes et des opinions qu'affichent et soutiennent les jeunes adultes.
L'exode rural n'est donc pas seulement un fait social explicable
par les réalités objectives et observables de l'organisation sociale d'un
milieu donné mais aussi un déterminant social des conduites individuelles
des jeunes adultes intégrés en tant qu'éléments de l'organisation de ce
milieu.
La classification qui suit resitue les différents faisceaux des
causes dans les trois dimensions de l'exode rural.
Mais en même temps,
elle présente une image restaurée des causes sous le double aspect objec-
tif et subjectif de ces dimensions.

U:-;I\\f~SI n DE \\\\O:-;T~[ ~l
348
A. SOUS son aspect objectif, elle regroupe les faisceaux de causes
ayant trait à:
-
la forte rareté d'emploi salarié a la campagne due au manque d'infra-
structure économique et à la division sociale du travail.;
-
l 'insuffisance du revenu du travail de la terre.
B. Son aspect subjectif est caractérisé par la recherche de gain et de
meilleures conditions de vie en ville.
5.2.2
La dimension socio-culturelle
A. Sous son aspect objectif, elle se définit par les effets conjugués des
mass média et de l'attrait de la villé et aussi par les effets d'une
scolarisation surestimée dans ses finalités.
B. L'aspect subjectif est défini par la perception de la vie urbaine en
milieu rural et par la valorisation urbaine des acquis de l'école.
A. Sur le plan objectif, elle est caractérisée par:
- les difficultés du travail manuel;
- la persistance de certaines structures sociales traditionnelles;
- le relâchement des structures lignagères;
- les relations de famille élargie.

UNIVERSIT( Dl MONTRE ..1
349
B. Sur le plan subjectif, la dimension psycho-sociologique recouvre:
- la répugnance au travail de la terre dévalorisant;
le conflit des générations entraînant un dédain de la vie sociale
du milieu villageois;
le désir d'ascension sociale et de réussite personnelle à partir
d'une promotion sociale en ville.
Les différentes dimensions qui définissent le phénomène dans
toute sa réalité ne sont pas
en fait mesurables isolément comme elles ne
définissent pas séparément l'exode rural.
Elles l'inscrivent dans ~n système dont elles définissent les
structures.
Et ce qui informe radicalement (au sens de donner forme) ces
structures ce sont les causes qui en constituent les éléments et entre-
tiennent des rapports entre elles aux différents niveaux subjectif et
objectif.
En ce sens, il nous semble important d'affirmer que toute étude
du phénomène de l'exode rural, pour être complète, exige que l'on tienne
compte de ces deux niveaux d'imbrication des causes.
Les causes du niveau
objectif découvrent l'ordre explicatif du phénomène, alors que celles du
niveau subjectif introduisent à sa compréhension.
Les causes de l'exode rural des jeunes adultes que nous venons
d'analyser, traduisent dans une certaine mesure les besoins d'aide et
d'apprentissage des jeunes adultes ruraux.
Mais comment ces besoins se
définissent-ils?

UNIVIRSITI Dl MO~TR("l
350
6.
La définition des besoins
Les causes de l'exode rural que nous venons d'analyser sont
l'expression d'une aspiration fondamentale qui est celle du progrès écono-
mique et social.
Cette aspiration qui anime les interviewés se fonde sur un cer-
tain nombre d1éléments, matériels ou non qui évoquent leurs besoins.
Mais avant de situer les besoins des interviewés, il convient de
préciser la notion de besoin.
Le concept de besoin en tant que domaine du comportement et
objet de la psychologie soulève un certain nombre de considérations.
Parmi celles-ci, l'une consiste à savoir si le comportement est le résultat
d'un apprentissage et d'un conditionnement ou si les habitudes et la con-
duite résultent d'un processus inné que l Ion porte ou non génétiquement.
Pour Michel Richard, (1980, p. 16) qui ne veut pas entrer dans le débat,
l'apparition d'un besoin ne peut être possible qu'à la double condition:
d'être inné c'est-à-dire biologique, génétique et physiologique et aussi
d'être acquis c'est-à-dire social, économique, psychologique.
Pour Henri
Janne (1968, p. 35), le besoin est à la fois une tendance, un état et un
objet.
Il est d'abord tendance d'un être vivant, ou d'un groupe d'êtres
vivants à combler un manque par rapport à un niveau de réalisation objec-
tivement indispensable ou ressenti comme tel par l'individu ou le groupe
considéré.
Comme état, il est une sensation physique ou psychologique
qu'éprouve un être à un moment donné.
Et en tant qu'objet, le besoin

351
désigne ce qui manque et ce vers quoi l'être est tendu.
Quant à Claude
Dubar (1980, p. 194), citant Grevet P., il écrit:
le besoin quel qu'il
soit ne résulte pas d'une origine biologique interne à l'individu mais
de l'intériorisation d'exigences extérieures liées aux forces productives
et aux rapports de production.
Cette définition psycho-sociologique du besoin à laquelle nous
souscrivons, lui confêre trois niveaux de compréhension qui sont intime-
ment liés, que d'ailleurs Dubar appelle les "moments" du besoin.
Au niveau subjectif, le besoin est caractérisé par une motiva-
tion, une disposition, une action visant à une appropriation réelle ou
supposée.
Au niveau objectif, cette disposition correspond à un objet qui
va donner satisfaction à un manque.
C'est, en quelque sorte, la matiêre
de cette motivation.
Cet objet peut toutefois être immatériel ou
matériel.
Quant au troisiême niveau, il se caractérise par l'existence d'un
certain nombre de pratiques sociales qui relient l 'objet ~ cette disposi-
tion et qui sont les moyens.
Ainsi, l'objet du besoin et les moyens pour atteindre cet objet
qui sont des produits d'une culture, inscrivent le besoin dans les struc-
tures d'une organisation sociale donnée à un moment de 1 'histoire de
celle-ci.
Et ils n'ont-de sens que par rapport aux individus ou groupes
d'individus qui l'éprouvent et qui lui donnent u~e signification.

UNlVIR~1l1 Dl ~IONTRIAl
352
Dans 1e cadre de notre échanti 11 on, l'on peut alors se demander
à quels besoins les interviewés veulent répondre lorsqu'ils avouent ne
pas avoir envie de rester à la campagne?
Ou, en d'autres termes, quels
besoins les entraînent-ils dans leur migration vers la ville?
De l'ensemble des entrevues, il ressort que les interviewés sont
animés par une aspiration au progrès et à la réussite.
La réussite ici doit être comprise comme une valeur, un idéal,
un but, un objectif visé.
Par contre, le progrès dans le contexte de notre échantillon est
l'ensemble des valeurs que charriE la modernisation dans le cadre du
développement économique et social de notre pays.
Dans cet ensemble de valeurs, la plupart des interviewés ont
mis l'accent sur l '~lévation de leur niveau matériel de vie, et l'élar-
gissement de leur horizon culturel.
6.1
L'élévation du niveau matériel de vie
Pour les interviewés, celle-ci passe par l'exercice d'un tra-
vail qui procure un revenu satisfaisant.
C'est pourquoi, au niveau de la
campagne, ils proposent une transformation de l'agriculture appuyée sur
une réforme du système foncier pouvant leur faciliter l'accès à la terre.
Cette transformation de l'agriculture devrait s'accompagner de la défini-
tion, par l'Etat, d'une politique de rétention des jeunes adultes en mi-
lieu rural;
politique assortie de moyens adéquats à cet effet.

UNIVIRSIT! DI MQ,'<TRI"l
353
Ces moyens pourraient être des fonds d'installation, des subven-
tions, des facilités d'accès au crédit bancaire, des moyens de commerciali-
ser leurs produits dans des conditions satisfaisantes et ~ des prix avanta-
geux.
Ou tout autre moyen plus encourageant pouvant inciter certains
jeunes adultes qui le veulent à entreprendre des actions personnelles,
particulièrement dans le domaine agricole.
Ou, au mieux, implanter ~ la
campagne des unités industrielles créatrices de sources de revenu ou
d'emplois salariés.
Dans le contexte urbain, les moyens immédiats que l'on peut
offrir aux jeunes adultes, ce sont des emplois salariés correspondant ~
leur niveau de qualification et qui puissent leur permettre de s'occuper
utilement, de jouir des aménités de la vie urbaine en fonction d'un
revenu qu'ils jugeraient satisfaisant.
Mais ces emplois ne peuvent pro-
venir que de la mise en place par l'Etat ou par son encouragement, d'ac-
tivités à forte utilisation de main-d'oeuvre.
L'on pourrait aussi envi-
sager la formation à l'emploi à l'intérieur de certaines entreprises qui
bénéficieraient d'un certain nombre de facilités du genre d'une réduction
d'impôt et d'exemption de la taxe d'apprentissage.
Pour certains jeunes adultes ayant un bon niveau de formation
mais qui sont sans emploi, l'on pourrait créer à leur intention un fonds
destiné à les aider à s'établir à leur propre compte par la mise sur pied
de certaines petites et moyennes entreprises individuelles ou de parti-
cipation.

UNIVERSITI Ol !.10NTRI"L
354
L'élévation du niveau de vie passe également par une transfor-
mation sociale et culturelle de la campagne.
Celle-ci verrait la moderni-
sation de son habitat avec l'adduction d'eau, l'électrification des villa-
ges et l'équipement de ceux-ci en unités de soins de santé primaires.
Mais, en même temps, on devrait amener les jeunes adultes ruraux
à prendre en charge cette transformation en les responsabilisant.
Ce qui
introduit une restructuration des villages et de leur organisation.
Au niveau de chaque village, l'on devrait susciter des jeunes
"leaders" de la promotion et de l'amélioration du cadre villageois, au
niveau culturel, économique et social.
Issus du milieu villageois, ces
jeunes "leaders" en collaboration avec la chefferie traditionnelle prési-
deraient aux actions d'animation du village.
Au niveau d'un canton ou d'une zone rurale, il pourrait se
dégager une structure de coordination des actions entreprises au niveau de
chaque village par l'intermédiaire des "leaders".
Cette structure de
coordination amènerait ces jeunes adultes jouant ce rôle de leaders, à
définir pour la zone rurale. les actions prioritaires et intéressantes à
étendre sur l'ensemble de la zone.
Au ni veau des préfectures ou des sous -préfectures, 1es "1 eaders"
devraient constituer les interlocuteurs des administrateurs des affaires
de l'Etat. et être partie prenante dans les décisions visant ~ promouvoir
le milieu rural.

UNI\\'IR~1T1 Dl ,"1QNTR(Al
355
Dans le domaine des distractions, la mise en place et le déve-
loppement des services de sports et de loisirs variés, la multiplication
de services socio-éducatifs, et de loisirs en milieu urbain destinés aux
jeunes adultes ou dont l'utilisation est en rapport avec leurs modestes
moyens financiers, sous-tendent également en partie, les besoins de jeunes
adultes dans ce domaine.
En résumé, l'élévation du niveau matériel de vie par l'améliora-
tion des conditions de travail, la modernisation et l'amélioration des
moyens matériels d'existence aussi bien à la campagne qu'à la ville, défi-
nit la première voie d'accès au progrès pour les jeunes adultes.
Mais également, ces jeunes adultes aspirent à une autre dimension
du progrès qui consiste en l'élargissement de leur horizon culturel par la
satisfaction de leurs besoins d'apprentissage.
6.2
L'élargissement de l 'horizon culturel
A travers les réponses des interviewés, ce qui peut conduire à
l'élargissement de leur horizon culturel, et donc satisfaire leurs besoins
d'apprentissage, c'est un système de formation intégré aux réalités socia-
les, économiques et culturelles de leur milieu.
C'est-à-dire une formation
qui permette à chaque jeune adulte, en tant que membre d'un groupe, de
penser sa situation vécue, de s'ajuster aux conséquences de la modernisa-
tion sans perdre de vue les données de la tradition encore vivace.

UN1VIRSITl 01 MONTRIAl
356
A la différence d'un système d'ense~gnement dispensé par une
école "étrangère" à son milieu, l'apprentissage que suggèrent les jeunes
adultes s'inscrit dans des structures de formation intégrées à l'organi-
sation sociale du milieu.
Cela suppose, qu'aux méthodes pédagogiques
désuètes, inopérantes et qui ont atteint leurs limites inférieures et
qui, de surcroît, déracinent les jeunes sans les enraciner nulle part, à
ces méthodes, que l'on substitue d'autres démarches et d'autres stratégies
qui développent l'esprit critique, font appel à l'imagination et condui-
sent à l'innovation.
Un tel système de formation introduit à une socio-andragogie de
réconciliation.
Cette socio-andragogie de réconciliation en tant que science
appliquée serait l'étude des déterminants du processus de formation de
l'adulte en situation d'apprentissage.
Rejoignant dans ses objectifs
généraux la pédagogie des adultes de Pierre Besnard (1982) et celle de
Paulo Freire (1973), cette socio-andragogie vise les objectifs ci-après:
1.
Réconcilier le jeune adulte avec lui-même, c'est-à-dire l'amener à une
prise de conscience de soi, pour un accomplissement de soi et un épa-
nouissement de sa personnalité.
2.
Réconcilier le jeune adulte avec ses acquis, ses différentes expérien-
ces, c'est-à-dire, reconnaître ce qu'il sait, valoriser ce savoir pour
l'amener à découvrir le domaine de ses besoins d'apprentissage conti-
nu.

UNIVIRSITI Dl \\10NTR("l
357
3.
Elle vise a réconcilier également le jeune adulte avec son milieu
culturel traditionnel et les valeurs que celui-ci incarne.
Ce qui
signifie, prendre ce qu'il y a de vivant, c'est-à-dire, ce qui repré-
sente l'âme de la tradition culturelle de ce milieu pour l'intégrer
aux conditions du modernisme.
4.
Enfin, elle vise a réconcilier le jeune adulte avec son groupe social
originel, avec la société globale de ce groupe, c'est-à-dire, qu'elle
lui définit un rôle en tant que "sujet" de la transformation de cette
société globale.
Ainsi la socio-andragogi~de réconciliation en tant que science
appliquée, restaure une formation d'adultes sensibilisés à leur environne-
ment social, économique et culturel en mutation;
"conscientisés" et
ouverts aux problèmes généraux de cet environnement;
responsables de
l'orientation de la transformation de cet environnement en fonction de
leurs besoins spécifiques à travers un processus collectif d'apprentissa-
ge social et de transformation.
Le cadre institutionnel de cette intervention socio-andragogique
qu'ont défini les jeunes adultes interviewés, se compose de centres de
formation technique en milieu rural, de centres techniques d'apprentissage
de métier, de centres de formation professionnelle continue, d'établisse-
ments de formation aux beaux-arts, de centres d'éducation populaire et de
services publics d'information.

r-
.;.U;.;,;NI~\\'f;.;,;,R~;.;.,T;.;.f.;;.O.;,_.(
'IO"TRI,_Al
_ _
358
L'élévation du niveau matériel de vie, guidée par une socio-
andragogie de réconciliation définit le cadre des besoins des inter-
viewés pour leur participation au développement économique, social et cul-
turel.
Si tant est que "développer c'est, d'accord avec le sens étymolo-
gique du verbe, enlever les obstacles qui entravent ce mouvement et empê-
chent les hommes de déployer l'imagination sociale concrète, de se projeter
vers l'avenir, de devenir humain" (Ignacy Sachs in Diogène, no 112/1980,
p. 93).
Mais en même temps qu'ils définissent les besoins des jeunes
adultes, ces deux voies principales d'accès au progrès dans le cadre de ce
développement, révèlent également les objectifs généraux d'une nouvelle
politique en matière d'éducation des adultes.
Pour satisfaire à ces objectifs dans le cadre du Ministère de la
Jeunesse, de l'Education populaire et des Sports, chargé, dans l'appareil
de l'Etat, de l'éducation des adultes, il apparaît que l'on devrait envisa-
ger la recherche et la mise en place de nouveaux moyens d'action en termes
de ressources humaines et matérielles.
6.3
Les moyens d'action
La traduction des objectifs de cette nouvelle politique en ac-
tians concrètes positives, passe essentiellement par l'inauguration d'un
nouveau type d'agent d'éducation des adultes au sein du département minis-
tériel qui en assume la responsabilité.

UNI\\'ERSIH DE l.10NTREAl
359
,
Le terme "agent" pris dans le sens radical de celui qui agit
effectivement, répond ~ la définition de l'éducateur d'adultes qui, ~
quelque niveau qu'il se situe, dans le cadre d'une intervention andragogi-
que est sensibilisé aux problèmes de son milieu d'intervention, reste
ouvert à la révision de ces objectifs de départ en cas de difficultés, et
répond de la transformation de ce milieu.
Jusqu'à présent, les agents de l'Etat - en admettant qu'ils se
considèrent ainsi - chargés de l'éducation des adultes, dans les différents
corps et à travers la hiérarchie qui structure ces corps de profession,
n'ont pas été effectivement et effi~acement impliqués dans une éducation
des adultes de transformation sociale et économique.
A travers une politi-
que nébuleuse aux objectifs trop généraux pour être atteints, l'éducation
des adultes s'est essentiellement tenue aux actions sporadiques en matière
d'alphabétisation et d'enseignement ménager.
Et l'alphabétisation s'est
principalement déroulée cahin caha, d'une manière conventionnelle sans
programmation structurée et sans un minimum d'évaluation effective.
Ainsi, en attendant que soient formés des agents efficaces à
partir des programmes de socio-andragogie dont les principes généraux ont
été énoncés ci-dessus, l'urgence de l'action éducative oblige à un recycla-
ge de ces différents corps aux différents niveaux de leur intervention
respective.
L'action d'éducation des adultes dans ce cadre s'appuiera donc
sur les ressources humaines existantes et recyclées pour une nouvelle opti-
que éducative.

UNIVIK~1TI DI MONalAl
360
En soutenant le postulat que l'efficacité d'action de ces diffé-
rents agents dépend des conditions d'intégration de ceux-ci dans leur mi-
lieu d'intervention, les besoins spécifiques de chaque milieu exigeront
des actions spécifiques.
Dans le cadre d'un village, par exemple, l'on pourrait bâtir un
programme d'alphabétisation autour d'un besoin socio-économique exprimé
en terme de coopérative ou de la mise en place d'un bloc cultural, tout
cela soutenu par une animation socio-culturelle villageoise.
Par exemple aussi, dans le quartier d'une ville, l'on pourrait
amener les habitants de ce quartier à prendre en charge la vie de ce
quartier à partir des travaux d'assainissement, de la garde des enfants en
bas âge, de la surveillance de nuit, etc ...
Des actions de ce genre partiraient ainsi du village ou du quar-
tier pour atteindre une ville ou une zone rurale et s'étendre à la sous-
préfecture ou à une agglomération.
Mais c'est à ces différents niveaux
que se pose le problème des ressources humaines.
Au niveau le plus bas,
c'est-à-dire le village ou le quartier .de la ville, l'on pourrait disposer
d'un intervenant pour mille (1000) habitants.
Cet intervenant devrait
s'impliquer davantage dans la vie socio-économique et culturelle de cette
unité de base.
S'appuyant sur des animateurs de base, choisis au sens des
membres de l'unité, son rôle serait la conduite de l'exécution des pro-
grammes d'éducation des adultes en rapport avec les besoins de l'unité de
base.
Son rôle, en tant que personne ressource, serait de faciliter la

UN,VUSlT( O! MO:'o;TKI"L
361
conduite de chaque opération en rendant l'information disponible au niveau
des membres de l'unité villageoise.
Dans le cadre de cette action globale, ce rôle pourrait être
joué par l'équivalent du maître-adjoint ou du maître d'éducation permanen-
te.
Ce serait alors le maître d'éducation des adultes.
Au niveau d'une unité administrative plus vaste comme la sous-
préfecture ou d'un centre semi-urbain, l'on trouverait le conseiller d'é-
ducation des adultes qui superviserait les différents programmes établis
dans l'ensemble de la zone.
Dans ce contexte, il coordonnerait les ac-
tions des différents agents des unités villageoises.
C'est lui qui déter-
minerait en rapport avec les intervenants des unités de base, le programme
d'évaluation et le suivi des activités entreprises par les villageois.
Pour chaque sous-préfecture, ou chaque zone semi-urbaine, l'on devrait
pouvoir disposer d'au moins deux conseillers.
Au niveau des départements administratifs ou préfectures, l'on
devrait disposer pour chaque ville, d'un groupe d'intervention constitué
d'un inspecteur de la jeunesse et des sports et d'un professeur d'éducation
des adultes.
L'inspecteur définit la politique régionale en matière d'é-
ducation des adultes à partir des axes de la politique générale du Minis-
tère.
Il est assisté dans sa tâche par un professeur d'éducation des
adultes chargé du contrôle andragogique des conseillers et des maîtres
impliqués dans les différentes actions au niveau des différentes unités
d'intervention.

UNIWRSIT! Dl MON/RI "l
362
L'action de ce groupe sous la direction de l'inspecteur serait
d'orienter l'action régionale d'éducation et l'adaptation des objectifs
généraux au contexte économique social et culturel de la région en tenant
compte de l'évolution des besoins fondamentaux de cette région.
L'on de-
vrait prévoir une rencontre trimestrielle des inspecteurs des différentes
préfectures pour un échange d'information ou redéfinir sous certains as-
pects, d'autres objectifs spécifiques.
Chaque inspection constituerait
dans ce cadre l'organisme le plus élevé en matière d'intervention au ni-
veau des services extérieurs du Ministère.
En matière d'éducation des adultes, elle rendrait compte à une
direction de l'éducation des adultes qui serait créée au sein du Ministère
de la Jeunesse, de l'Education populaire et des Sports.
Cette direction
aurait une vocation d'administration et de recherche.
En tant que service administratif, son rôle principal serait de
planifier, gérer et coordonner les actions d'éducation des adultes entre-
prises à travers les différents départements du pays.
En tant que service
de recherche et en liaison avec l'Institut national
de la Jeunesse et des
Sports, elle développerait des outils d'apprentissage et des méthodes
d1apprentissage adaptés aux adultes dans leurs différents milieux;
elle
proposerait également des solutions aux différents problèmes qui se posent
dans le cadre de l'application de cette nouvelle politique d'éducation
des adultes.

UNIHRSITI DE "10"TRI"l
363
Mais la disponibilité des ressources humaines ne peut pas suffi-
re à elle seule pour soutenir une action éducative.
Elle se fonde sur des
moyens matériels pour mener cette politique.
Au sein du Ministère de la Jeunesse et des Spprts, il existe un
certain nombre de structures qu'animent les différents agents dont nous
avons parlé à l'instant.
C'est par exemple le cas des locaux, des véhicu-
les de services ou de fonction.
Il n'est pas certain que les maigres bud-
gets des inspections de la Jeunesse et des Sports et les moyens limités à
une fonctionnalité locale urbaine puissent contribuer à quelque chose de
positif dans le cadre de cette nouvelle politique.
L'on pourrait même aller jusqu'à suggérer la prise en charge
financière des activités d'éducation par les unités locales intéressées.
C'est une possibilité parmi tant d'autres envisageable à long terme.
Mais connaissant le niveau de relative pauvreté de la plupart
des paysans et des basses couches sociales urbaines auxquels ces actions
d'éducation s'adressent en priorité, des espoirs de financement sur cette
base risquent d'endormir plusieurs projets.
Nous estimons, par consé-
quent, que seul l'Etat peut financer ou faire financer
par des organismes
internationaux, cette politique d'éducation des adultes.
L'action-de l'Etat est primordiale en ce sens que toute politique
d'éducation est fille d'une option politique idéologique.
Dans ces con-
ditions, s'il existe une volonté politique manifeste de soutenir une
éducation active des adultes sur le plan national, la mise en place des

UN1\\1RS'T! DE 'IOSTRr "l
364
moyens matériels et surtout financiers ne serait qu'une simple procédure
administrative.
Cependant, même disposant des moyens d'action efficaces, le
Ministère de la Jeunesse de l'Education populaire et des Sports ne peut à
lui seul mener cette politique éducative à terme et déboucher sur des
résultats concrets.
Il en serait l'initiateur, certes.
Mais c'est d'une
co-opération ministérielle que dépend la réussite en terme de résultats
concrets.
Nous pensons, pour cela, à une coordination d'actions intégrées
principalement au niveau des Ministères de l'Agriculture, de l'Enseignement
technique, et de celui de l'Information.
Les deux premiers, pour fournir
les cadres pratiques d'insertion des adultes jeunes et moins jeunes dans
les circuits de production.
Quant au ministère de l'Information, il four-
nirait les supports socio-andragogiques par les mass média.
Aussi, ne serait pas exclu le concours de certains organismes,
parties prenantes en éducation des adultes et qui ont provoqué des résul-
tats qualitatifs en matière d'alphabétisation, de vulgarisation agri-
cole ou sanitaire et sociale sur le plan national.
Cet en~emble de conditions et la disponibilité des moyens
d'action qui les sous-tendent, constituent à notre avis, les fondements
essentiels d'une nouvelle politique d'éducation des adultes en Côte-
d' Ivoi re.

UNI\\'1RSIT! DI .'>10~TR("l
Chapitre VII
Discussion des résultats

U"'I\\'IRSITt DI 'IO:-;TRI .. l
Lors de la recension des écrits, nous avons dégagé trois ordres
d'explication du phénomène de l'exode rural.
Ainsi, d'après les recher-
ches, l'exode rural s'expliquerait par des causes économiques, des causes
culturelles et des causes liées au système scolaire.
Mais selon les au-
teurs. l'accent a été mis particulièrement sur l'un ou l'autre de cet
ordre de causes.
Prenons l'explication d'ordre économique.
Les auteurs qui ont
insisté sur l'ordre économique se regroupent autour des recherches de
Caldwell (1969) et de Todaro (1971).
D'après les résultats de l'étude que Caldwell a entreprise au
Ghana (1969, p. 89), les causes d'ordre économique ont été évoquées par
88% des répondants de la campagne et 82% de ceux de la ville.
Il conclut
alors que les causes économiques sont les plus déterminantes dans la mi-
gration des jeunes adultes ruraux vers les villes.
A la s~ite de Caldwell, plusieurs études ont été conduites en
Afrique et dans ledTiers Monde-en général, qui ont abouti aux mêmes
conclusions.
Elles ont été menées par des chercheurs comme Mario Rabirosa en
Amérique Latine (1971), Michael Todaro en Afrique tropicale (1971),
Franqueville en Afrique tropicale également (1971), 1. Masser en Ouganda

U'I'VIRSITI Dl 'IO'lTRI "1
(1975)"
John Connell en Inde (1976) et G. Christopher en Côte d'Ivoire
(1976).
La lecture de ces travaux de recherche montre que ces causes
d'ordre économique seraient:
l'obtention d'un travail salarié
le désir de gagner de l'argent
le désir de se procurer des biens matériels
le contraste d'occupation entre la ville et la campagne
le manque de terre ou sa mauvaise distribution
le mauvais cycle des saisons agricoles
le bas niveau de vie dû à la pauvreté du village
l'insatisfaction des conditions de travail en milieu rural
l'inégalité de revenu entre la ville et la campagne
l'inégalité des possibilités de travail salarié entre la campagne et la
vi 11 e
le grand écart entre le salaire payé à la campagne et celui payé à la
ville.
Notre étude confirme ces résultats auxquels ont abouti ces
différents auteurs.
Et en plus, non seulement nos résultats intègrent cette typolo-
gie des causes qui découle de leurs recherches, mais encore ils l'enrichis-
sent d'un apport d'éléments nouveaux.
Tels, le manque d'infrastructures
pourvoyeuses d'emploi salariés à la campagne (ce qui est plus qu'une
possibilité), l'accentuation croissante de la division sociale nationale
du travail entre la ville et la campagne, l'insuffisance du revenu en mi-
lieu rural et son annualité, les mauvaises structures économiques qui font

U~I\\'IR5ITl 01 ,\\OSTR(Al
368
que les produits agricoles voient leurs prix baisser alors que ceux des
produits chimiques ne cessent de grimper.
Aussi à la différence de chacun de ces auteurs qui semblaient
mêler ces différentes causes hors d'un ordre systématique, nous avons dé-
fini, en ce qui nous concerne, une typologie globalisante axée autour de
trois (3) thèmes centraux enfermant ces différents types de causes.
Ce
sont la forte rareté d'emploi salarié ~ la campagne, l'insuffisance du
revenu de la terre et la recherche de gain et de meilleures conditions de
vie en ville.
Sous cette forme, nos résultats vérifient l'hypothèse spé-
cifique selon laquelle il y a une relation entre l'exode rural et les
structures socio-économiques de notre pays.
Considérons maintenant les causes d'ordre culturel telles qu'el-
les ont été évoquées lors de la recension des écrits.
Mises en lumière
dans les travaux de Caldwell (1969) elles ont été soulignées par Mangalam
cité par Shaw (1975), par Balandier in Samir Amin (1974), par Simmons
(1978), par Joseph Gugler (1978) et enfin par Jean Pitié (1979).
D'après
ces auteurs. les causes d'ordre culturel de la migration des jeunes adultes
ruraux vers les villes seraient:
l'absence de distractions et de loisirs à la campagne
le style de vie urbain
la perception de la vie en milieu urbain
l'influence des mass média
la transformation des structures sociales traditionnelles
le conflit des générations

UN,VIRSIT! 01 '\\QI'iTRI"l
369
l'effritement du pouvoir des chefs coutumiers
le relâchement du contrôle social sur les jeunes
le désir d'ascension sociale
la présence de parents en ville.
Présentées comme telles, les mêmes causes se retrouvent dans les
résultats de notre étude.
Toutefois, celle-ci complète cet ensemble par
de nouvelles causes que sont:
la répugnance au travail de la terre, le
désir de réussite personnelle à partir d'une promotion sociale en ville, la
persistance de certaines structures sociales traditionnelles comme la sor-
cellerie et le système d'héritage en ligne collatérale, les relations de
famille élargie qui agissent sur le jeune adulte en milieu rural.
En même temps que ces résultats confirment ceux auxquels ont
abouti ces différents chercheurs, ils vérifient notre hypothèse spécifique
selon laquelle, l'exode rural est en relation avec le système culturel, le
fait urbain et rural de notre pays.
Cependant, l'analyse de contenu de ces différentes catégories de
causes qu'ont révélées nos résultats, nous a amené à constituer une typo-
logie qui les intègre dans ce que nous avons défini comme la dimension
psycho-sociologique de l'exode rural.
Cela s'explique par le fait que, en
dehors des causes liées au style de vie urbain, à l'influence des mass
média et à l'absence de distractions et de loisirs à la campagne, toutes
les autres catégories de causes relèvent d'attitudes et de comportements
liés aux structures internes d'une société traditionnelle en mutation.

370
Ce qui n'est pas le cas des mass média, du modernisme urbain et de l'école
qui relèvent d'une culture extérieure et de domination de cette société
traditionnelle.
Le dernier groupe d'auteurs situent le système éducatif scolaire
comme facteur de causalité de l'exode rural.
Les principaux chercheurs
qui y ont fait référence sont Heijnen dans une étude sur la Tanzanie
(1968), Roussel (1970) sur la Côte d'Ivoire, G. Christopher (1976) égale-
ment sur la Côte d'Ivoire.
Aux travaux de ces chercheurs il faut ajouter
les considérations théoriques de Caldwell (1969), de John Connell (1976),
développées dans leurs études ci-dessus mentionnées.
Selon les chercheurs,
les causes d'ordre scolaire de la migration seraient liées:
à la perception de l'école par la société
à l'instruction comme moyen de promotion sociale
au taux élevé de scolarisation
à l'orientation urbaine des programmes scolaires
au contenu théorique de la formation
à l'accent sur les qualifications intellectuelles
à la négligence des valeurs rurales au profit des valeurs urbaines
à l'absence du monde traditionnel de l 'horizon scolaire.
Ici, encore, les résultats de notre étude retiennent cette typo-
logie générale et ajoutent en plus d'autres causes explicatives d'ordre
scolaire qui sont:
. la substitution progressive de l'éducation scolaire à l'éduca-
ti on du mi lieu famil i al, le façonnement précoce de la personna lité de
l'enfant à travers l'école, la valorisation urbaine des acquis de l'école

UN,VERSITI DE MO~lR(Al
371
(tout cela découlant d'une surestimation idéologique du rôle et des ob-
jectifs de l'école) et enfin l'échec scolaire en milieu rural.
Par ces résultats, notre sous-hypothèse se trouve vérifiée, qui
pose qu'il y a une relation entre l'exode rural des jeunes adultes et
l'éducation formalisée par l'enseignement de l'école.
Néanmoins, l'analyse de contenu qui a suivi cette typologie nous
a permis de souligner l'appartenance culturelle commune de l'école, des
mass média et du modernisme urbain.
Par leurs triples effets renforcés,
ils participent de la diffusion d'un modèle culturel de type occidental
qui envahit la campagne dans une action d'acculturation des individus et
de déculturation de la société.
C'est pourquoi, allant au-delà d'une
vision séquentielle et sectorielle de leurs effets, nous suggérons une
typologie qui insère ces effets dans une dimension socio-culturelle de
l'exode rural.
Celle-ci couvre donc, d'une part, les effets conjugués
des mass média et de l'attrait du modernisme urbain, les effets d'une sco-
larisation surestimée dans ses finalités et d'autre part, la perception de
vie urbaine en milieu rural.
En conclusion, l'originalité de notre étude se situe au niveau
de trois points principaux que découvrent ces résultats.
En premier lieu, non seulement elle enrichit la gamme des causes
déjà évoquées par les recherches précédentes mais encore, elle propose des
catégories de causes qui peuvent être vérifiables a tout instant dans les
domaines de l'économique, du social et du culturel.

U""\\,!RSITI O! "IO~TRf"l
372
En second lieu, elle suggère, en lieu et place d'une classifica-
tion conventionnelle qui cloisonne les causes de l'exode rural au niveau
de ces différents domaines, une typologie qui prend comme substrat, la
dimension sociale de l'exode rural.
Ce substrat est alors mis en relation
avec l'économique, le culturel, et le psycho-sociologique dans l'interpré-
tation des causes de l'exode rural.
A travers ces relations, cette typolo-
gie inscrit les causes sous leurs aspects objectifs et subjectifs.
Enfin et en dernier lieu, notre étude aborde l'exode rural
comme une totalité sociale,.
Et en le considérant comme tel, elle débute
une approche systémique du phénomène.
Celle-ci a permis une analyse dy-
namique de l'exode rural.
En ce sens que, d'une part les différents or-
dres de causes n'ont pas été étudiés séparément les uns des autres et de
façon statique à l'image de recherches précédentes.
Elle les a étudiés
les uns par rapport aux autres et dans leur mouvement.
Et en découvrant
les différentes dimensions du phénomène, cette approche a mis l'accent sur
les relations à l'intérieur de ces dimensions;
et ce, en distinguant
l'aspect objectif et l'aspect subjectif de chaque catégorie de causes qui
s'interpénètrent à l'intérieur de chacune de ces dimensions;
et aussi en
soulignant les relations entre les dimensions elles-mêmes.
Ce qui vérifie
1'hypothèse générale qui inscrit l'exode rural dans le cadre global des
structures de l'organisation sociale de notre pays.
Et d'autre part, cette étude n'enferme pas l'exode rural dans sa
boîte classique sous la double serrure des causes et des conséquences.
Elle l'ouvre par contre sur l'analyse des besoins d'aide et d'apprentissa-
ge des jeunes adultes ruraux, besoins que dénotent ses causes mais qu'an-
nihilent ses conséquences néfastes.

U~I\\'!RSITI Of MO .... TRr .. l
Conclusion

U.'il\\'l ~~I TI 01 MO:-;T~["l
Résumé et conclusion générale
L'exode des jeunes adultes ruraux est une réalité historique que
e
l'on peut situer dans la deuxième moitié du XIX
siècle, période pendant
laquelle la révolution industrielle de l'occident a connu son apogée.
Durant cette période, l'exode rural s'expliquait fondamentalement dans ces
pays par le développement rapide d'une industrialisation dont les secteurs
en expansion exigeaient une main-d'oeuvre abondante.
L'industrialisation
précédait alors l'exode rural et celui-ci s'expliquait alors en partie
pa r ce 11 e- là.
Dans les pays du~Tiers Monde~ pauvres et sous-développés sur le
plan industriel, les causes du phénomène font appel à d'autres normes de
compréhension de nos jours.
C'est pourquoi, dans le cas de la Côte d'Ivoire, où il se pose
comme une réalité nationale, nous nous sommes posé cette question:
quelles sont les causes relevant des structures de l 'organisation sociale
de notre pays qui déterminent les jeunes adultes ruraux à quitter les
villages pour les villes de ce pays?
En posant ainsi notre problème de recherche, nous nous sommes
fixé un objectif principal comportant deux points:

U~I\\'IRSITl DE \\10~TRE"l
375
Le premier:
identifier les causes de l'exode rural des jeunes adultes vers
les villes, causes relevant des structures de l'organisation sociale de
notre pays.
Le second:
appréhender et définir les besoins d'aide et d'apprentissage
de ces jeunes adultes en vue d'une intervention andragogique.
Pour définir une base théorique à ce problème, nous avons fait
une recension des écrits relatifs au sujet, écrits qui ont eu lieu en Côte
d'Ivoire et dans le "Tiers Monde" en général durant ces dernières décennies.
En Côte d'Ivoire, nous avons pris connaissance de trois études
qui ont abordé le phénomène du point de vue économique (G. Christopher
1976) et démographique (Roussel 1968 et 1970, et Zachariah, 1978).
Notre recension des écrits s'est ensuite étendue sur d'autres
pays du "Tiers Monde" et de l'Afrique en particulier.
Certains chercheurs ont élaboré des modèles d'études du phéno-
mène de l'exode rural.
Ces modèles ont été résumés par 1. Masser dans son
étude sur l'Ouganda (1974).
Il en a retenu quatre.
Le modèle en terme de système développé par Akin L. Mabogunje
qui considère la migration comme prise entre deux niveaux de contrôle d'un
système qui prend en compte la ville et la campagne.
Le modèle économique soutenu par Michael Todaro qui stipule que
la décision de migrer de la part d'un rural est fonction de deux variables:
l'écart de revenu entre la ville et la campagne et la probabilité d'avoir
un emploi en ville.

U:-OI\\'IR~ITI DI '10:-oal"'l
376
Le modèle d'interaction spatiale développé par 1. Masser lui-
même et qui repose sur trois hypothèses:
celle de la gravitation, celle
des facteurs "push et pull" et celle des coûts et bénéfices.
Le modèle séquentiel proposé par Ridell et Harvey qui étudie la
migration comme un processus a long terme de redistribution de la popula-
tion qui ferait que les migrants partent de la campagne vers la petite
ville, de celle-ci à la moyenne et enfin à la métropole.
A la base de ces différents modèles, ou indépendamment, certains
travaux de recherche ont été menés qui ont abouti à une typologie des
causes de l'exode rural.
Elle recouvre trois domaines de causes:
les causes d'ordre économique qui se dégagent principalement de l'oeuvre
de Caldwell (1969)
les causes d'ordre culturel soulignées par les recherches de Gugler
(1978) et de Jean Pitié (1979)
les causes d'ordre scolaire mentionnées dans les travaux de Roussel
0968 et 1970) de Heijnen (1968) et de Christopher (1976).
Le cadre de recherche qui a guidé cette étude est inspiré de
cette recension des écrits.
Certes.
Cependant, quoique cet ensemble
d'écrits soit d'une valeur certaine, ceux-ci ne nous informent pas suffi-
samment sur l'ensemble des différents éléments qui entrent dans une étude
globale de l'exode rural.
Cette recension des écrits ne répond donc pas à
nos attentes principales.

UNIVIRSITI 01 \\I0NTR( ~l
377
Face à cette situation, nous avons pensé qu'il nous fallait
entreprendre une recherche qui puisse nous permettre d'avoir beaucoup plus
d'éléments dans l'appréciation globale de l'exode rural et qui débouche
sur un classement des causes différent de celui que les recherches précé-
dentes ont établi et respectueux des interrelations entre ces différentes
causes.
Devant ce fait, nous sommes arrivé à la conclusion qu'il nous
fallait entreprendre une recherche exploratoire auprès des jeunes gens et
jeunes filles des villes et des campagnes de Côte d'Ivoire qui vivent
l'exode rural ou qui sont près de le faire.
Ce qui nous permettrait d'une part d'enrichir la gamme des mo-
tifs explicatifs du phénomène et d'autre part d'arriver à des explications
qui respectent l'interpénétration des différentes causes.
Et aussi d'ar-
river à une typologie touchant les problèmes rencontrés par ceux qui arri-
vent en ville, les solutions qu'ils y ont apportées, les services que l'on
pourrait leur offrir, les caractéristiques que devrait avoir la campagne
si l'on veut favoriser le retour de ceux qui sont en ville et empêcher
l'exode de ceux qui sont au village.
Enfin, d'appréhender et définir les
besoins d'aide et d'apprentissage de ces jeunes adultes.
C'est suite à cette décision que nous avons établi notre hypo-
thèse générale de recherche en ces termes:
"Il y a une relation entre
l'exode rural des jeunes adultes en Côte d'Ivoire et les structures de
l'organisation sociale de ce pays".

UNIVERSITf DE 'iONTRI"t
378
L'expression "structures de l'organisation sociale" se définit
par la structure économique, le système culturel en liaison avec le fait
urbain et rural et par l'éducation formalisée par l'enseignement de l'éco-
le.
Elle a alors suscité trois hypothèses spécifiques qui mettent en re-
lation l'exode rural des jeunes adultes et ces trois composantes de l'or-
ganisation sociale.
Pour vérifier cette hypothèse générale à travers ces sous-hypo-
thèses nous avons pris en compte deux groupes de variables.
Une variable dépendante qui est l'exode rural et que l'on re-
trouve aussi sous le terme de migration.
Un groupe de variables indépendantes qui comprend deux séries.
L'une constituée par les variables indépendantes individuelles que sont
le sexe, l'âge, le niveau de scolarité et l'occupation socio-professionnel-
le.
L'autre constituée par les variables indépendantes structurelles qui
sont le système culturel, le système scolaire, la structure économique et
le lieu de résidence.
En fonction des différents éléments du cadre de recherche, nous
avons adopté une méthodologie qui nous a conduit à entreprendre plusieurs
opérations en vue de trouver des éléments de réponse à notre problème
de recherche.
C'est ainsi que nous avons bâti deux types de questionnaires.
L'un destiné à la ville et l'autre à la campagne.

379
Ces deux types de questionnaires ont d'abord été testés auprès
d'un groupe de dix (la) étudiants de l'Institut National de la Jeunesse
et des Sports d'Abidjan.
Sur le terrain, ces questionnaires ont été administrés ~ un
échantillon aléatoire de quarante-et-une (41) personnes des deux sexes,
sur la base d'interviews semi-structurées avec prise systématique de notes
au fur et à mesure que les interviewés répondent aux questions.
Cet
échantillon aléatoire se compose de dix-neuf (19) personnes du milieu
urbain représenté par la ville d'Abidjan et de vingt-deux (22) du milieu
rural, dans la région de Gagnoa.
Ces quarante-et-une (41) personnes dont
vingt (20) hommes et vingt-et-une (21) femmes sont dans une tranche d'âge
comprise entre 16 et 35 ans, tranche d'âge qui définit notre jeune adulte.
Les caractéristiques de cet échantillon, aléatoire et réduit
fixent les principales limites de cette recherche dont les résultats ne
sont pas généralisables.
Mais cependant cette recherche permet d'établir
des typologies au niveau de ces résultats, ce qui peut servir de base à
une compréhension du phénomène de l'exode rural.
Les questions administrées dans le cadre urbain avaient pour but
de nous fixer, en plus des informations sur les variables individuelles,
sur la durée du séjour en ville de l'interviewé, les raisons du choix
d'Abidjan plutôt qu'une autre ville et l'image qu'il en avait avant d'y
arriver.
Elles visaient également à nous faire connaître les raisons du
départ de la campagne des interviewés, ainsi que celles de leurs amis;

UNIVIRSITI QI "'ONTRI"l
380
les problèmes que leurs amis et eux ont rencontrés, les différentes solu-
tions qu'ils y ont apportées et les aides souhaitées.
Elles visaient aussi les services à suggérer pour ceux qui arri-
vent en ville, les caractéristiques de la campagne qu'ils n'auraient pas
quittée et les conditions d'un éventuel retour à la campagne.
Au total,
quatorze (14) questions composent le questionnaire de la ville.
A la différence du questionnaire de la ville, qui présente un
caractère unitaire, celui de la campagne a été centré sur les trois varia-
bles structurelles en plus des variables indépendantes individuelles.
Les questions relatives à la variable système culturel et fait
urbain et rural sont au nombre de vingt-trois (23).
Elles nous rensei-
gnaient sur l'impact de cette composante sur la décision du jeune à migrer.
Pour cela, elles avaient trait aux distractions des jeunes adultes en mi-
lieu rural, à la présence d'un appareil de télévision et de poste de radio,
les différentes émissions d'écoute et les fréquences d'écoute.
Elles ren-
seignaient également sur la lecture de Fraternité Matin (quotidien) et
Ivoire Dimanche (hebdomadaire) et leurs parties préférées.
Un autre groupe de questions avaient trait à la ville à laquelle
les interviewés pensaient à l'instant de l'entrevue, à la signification
de la notion de ville, à l'appréciation du nombre des jeunes adultes qui
sont partis en ville et dans quelle ville et s'ils ont eu raison de le
faire;
au lieu éventuel de destination des interviewés et enfin aux sug-
gestions pouvant retenir les jeunes adultes à la campagne.

UNIVERSITI DE '-IO~TRE "l
381
Les questions qui s'inscrivent dans le système scolaire visaient
à nous renseigner sur le but de la scolarisation,sur ce que l'école apprend
aux enfants, les milieux pour lesquels elle les prépare.
Egalement elles
cherchaient à connaître les raisons pour lesquelles un interviewé favori-
serait la fréquentation scolaire de son enfant.
Enfin une question inter-
rogeait les interviewés s'ils pensaient que les jeunes adultes resteraient
à la campagne au cas où l'école les y préparerait.
Au total sept (7) ques-
tions cernaient l'impact du système scolaire dans le processus de l'exode
rural.
La partie sur la structure économique a été étudiée à la base de
quatorze (14) questions.
Celles-ci interrogeaient principalement sur l'in-
térêt des jeunes adultes ruraux pour le travail de la terre, sur sa renta-
bilité;
comme elles l'ont fait aussi sur la possibilité de rétention des
jeunes à la campagne par un travail salarié, les raisons du manque d'em-
plois salariés à la campagne, le choix des jeunes adultes entre la ville
et la campagne dans le cas d'un salaire égal.
D'autres questions avaient
trait aux causes générales de l'exode rural, les intentions individuelles
des interviewés de rester ou non à la campagne, et les suggestions possi-
bles pou~ leur maintien à la campagne.
Dans l'ensemble, l'organisation de l'administration de ces ques-
tions a été émaillée d'un certain nombre de difficultés au niveau de la
prise de l'information en ville et dans l'obtention des moyens matériels.
La non disponibilité de ces derniers expliquent en partie la taille réduite
de notre population.
Pour le traitement de toute cette masse d'informa-

U"'I\\'I~SITl Dl "'O"'T~I"1
382
tions recueillies sur les lieux de l'enquête, nous avons suivi la procédu-
re suivante:
En ce qui concerne les données des variables individuelles, nous
avons établi un tableau récapitulatif qui reprend ces données d'après le
lieu de résidence des interviewés.
De ce tableau général nous avons ex-
trait cinq (5) tableaux réduits mettant les différentes variables les unes
en rapport avec les autres.
Quant aux données des variables structurelles, nous avons orga-
nisé une classification de leurs données.
Cela s'est effectué en établis-
sant des fiches d'idées énoncées, en regroupant les énoncés synonymes, en
dégageant des items à l'intérieur de ces énoncés pour constituer des sous-
catégories débouchant sur des catégories.
Ces différents classements ont
été soumis à un jury qui s'est prononcé sur le fonds et sur la forme de
cette classification.
Ce qui a rendu possible une classification définiti-
ve de ces catégories, sous-catégories et items et l'établissement de ta-
bleaux aux fins d'une analyse.
Cette méthodologie nous a permis d'obtenir cinq (5) groupes de
résultats à partir des données des variables structurelles.
Ces cinq (5)
groupes de résultats sont:
1.
Le groupe des causes.
2.
Les problèmes rencontrés par les jeunes adultes arrivés en ville, les
solutions adoptées pour les résoudre et les aides qu'ils auraient
souhaité avoir.
3.
Les services souhaités pour ceux qui arrivent en ville.

U"I\\'fRSIH Of "O"TRf~l
383
~
Ce que la campagne devrait être pour qu'ils y retournent ou ne
1a quittent pas.
5.
Les raisons de ceux qui n'ont pas envie de quitter la campagne.
Nous commencerons par résumer les raisons de ceux qui n'ont
pas
envie de quitter la campagne pour terminer par le groupe des causes.
1.
Les raisons de ceux qui n'ont pas envie de quitter la campagne. Ceux
qui ne veulent pas quitter la campagne avancent quatre séries de
raisons.
Ils le font par:
a)
Amour du travail de 1a terre.
Cet amour se défi nit:
par la terre comme solution d'avenir
par un désir de se réaliser pleinement en milieu rural à
travers des réalisations socio-économiques individuelles.
Cet amour se définit également par une foi en la rentabilité
du travail de la terre qui peut procurer des biens matériels,
gage de meilleures conditions de vie.
b)
Réalisme personnel.
Celui-ci est né du fait que ces jeunes
adultes manquent de qualifications nécessaires à un travail
urbain.
n'ont pas assez d'instruction indispensable pour une vie en
vi 11 e.
craignent en conséquence, les incertitudes de la ville dues
au manque d'emploi et aux conditions difficiles.
c)
Manque d'opportunité dû à un échec scolaire pour les uns, comme
les garçons et à une impossibilité d'avoir un mari citadin pour

U.'II\\'fRSIH Of .\\IO"TR[~l
384
les fil l es.
d)
Résignation pure et simple parce que d'autres n'y peuvent rien.
2.
Les caractéristiques de la campagne pour qu'ils y retournent ou ne la
quittent pas.
Elles revêtent trois aspects.
a)
L'aspect économique se caractérise par une:
Transformation de l'agriculture déterminée par:
une modernisation des méthodes et techniques agricoles
une réforme du système foncier facilitant l'accès des jeunes
à la terre.
Définition d'une politique économique globale cohérente de
retention et d'installation de jeunes à la terre assortie
de moyens adéquats.
Mise en place de moyens d'incitation au travail de la terre:
par la création d'un fonds national d'aide et d'instal-
lation des jeunes à la terre
par la mise en place d'une subvention à ceux qui ont le
désir de retourner à la terre
pour faciliter l'accès des jeunes au crédit d'installation
par le développement de structures communautaires de travail
du genre:
groupement à vocation coopérative, blocs cultu-
raux, plate-formes villageoises etc.
Mise en place d'une structure dynamique de revenu satisfaisant
avec:
l'implantation d'unités pourvoyeuses d'emplois salariés par
décentralisation économique au profit du milieu rural.

385
l'augmentation du prix des produits agricoles en fonction
du coût réel de la vie.
la diminution des prix des produits chimiques.
Amélioration des structures avec:
l'amélioration des pistes villageoises
la mise en place de ce qui peut rendre disponible le
mini~um vital à la campagne.
b)
L'aspect socio-professionnel est caractérisé par la mise en
place d'un système d'éducation et de formation intégré qui tient
compte des réalités du ~onde rural.
Ce système se définit par:
l'élaboration de programmes scolaires en rapport avec
l'écosystème rural
la création de centres techniques en milieu rural
l'encadrement technique des jeunes paysans par les conseillers
d'animation rurale
la multiplication des centres de représentation du ministère
de l'agriculture et de celui de l'élevage.
la tenue de stages permanents de recyclage des jeunes
agriculteurs
l'instauration d'une pension de retraite pour les paysans.
c)
L'aspect socio-culturel est défini par:
la transformation du milieu rural avec:
la reconstruction des villages à habitat de type moderne
par leur équipement en eau potable et en électricité.

386
l'équipement sanitaire du milieu rural avec:
la construction de centres de santé dans les villages
la construction de dispensaires ruraux
la construction de maternités
la mise en place d'équipement de sport et de loisirs avec:
le développement des activités de distraction comme le
sport, le cinéma ...
la création de foyers équipés mais ariimés par les jeunes
adultes eux-mêmes.
la transformation des mentalités en milieu rural avec la
disparition des sorciers.
3.
Les services souhaités pour ceux qui arrivent en ville.
Ils sont de quatre ordres:
a)
Les services publics d'information pour jeunes adultes
avec la mise en place d'un service d'information à l'inten-
tion des nouveaux citadins.
avec l'organisation de séminaires d'information
avec la création d'une commission nationale d'information
sur les problèmes en milieu urbain.
b)
Les services techniques de formation avec l'ouverture de:
Centres de formation professionnelle
Services de formation professionnelle
Centres techniques d'apprentissage de métier
Etablissements de formation aux beaux-arts

UNIVfRSITI 01 "O"TRI~l
387
c)
Les services de sports et de loisirs avec:
la mise en place de terrains de jeux et des sports collectifs
dans les quartiers populaires.
la création de centres de loisirs et de distraction:
salles
de cinéma et centres culturels accessibles aux plus démunis
l'aménagement d'espaces verts et de jardins publics
d)
Le développement de services socio-éducatifs comprenant:
des services de réception pour les nouveaux arrivés:
accueil
et hébergement temporaire
des services d'éducation populaire destinés:
à l'éducation civile et civique
à l'éducation morale
à l'éducation politique
et comprenant également:
des centres de scoutisme
des centres d'alphabétisation.
4.
Les problèmes rencontrés en ville. les solutions adoptées et l'aide
souha itée.
a)
Les problèmes rencontrés sont de Quatre genres:
les problèmes d'ordre matériel relatifs au manque d'argent.
de logement; de moyens de transport. pour s'habiller et de
se trouver de la nourriture
les problèmes d'ordre socio-professionnel dus au:
manque de sources de revenu. tel le travail salarié,
à l'absence de qualification et de formation comme

388
l'apprentissage d'un métier.
les problèmes d'ordre psychosociologique liés
à l'insertion sociale en milieu urbain:
acclimatation,
dépaysement, adaptation, intégration.
au relâchement des liens sociaux:
absence de soutien,
abandon familial, manque de tuteur et de tutrice.
à la nostalgie du milieu rural
à un chagrin d'amour vécu
à la prison que l'on a connue
les problèmes de santé:
différentes maladies.
b)
Les solutions adoptées pour la résolution de ces problèmes:
l'aide matérielle et morale d'autrui obtenue:
de la famille élargie: frères, soeurs, oncles, tantes, cousins
des amis et des connaissances.
les actions personnelles avec l'obtention d'une source de
revenu:
l'emploi; avec l'apprentissage d'un métier et
l'obtention d'une bourse de formation.
lAs solutions de rechange trouvées dans:
l'arrêt des études, le voyage à l'étranger, le retour
au village, le mariage, le mariage précoce, les actes de
délinquance:
vol et débauche
c)
Les solutions souhaitées:
L'accroissement de l'aide d'autrui par:
l'action des parents et des amis
l'action de l'Etat avec la création de services d'aide aux
jeunes adultes

U~I\\'ERSIH Of .\\'O"TR(~L
389
l'augmentation des possibilités d'actions personnelles par:
- la création d'emplois
l'implication et la responsabilisation des jeunes adultes
~ différents niveaux de leurs comp~tences.
5.
Le groupe des causes.
Il est constitué par sept faisceaux de causes qui renferment
les catégories, les sous-catégories et les items.
a)
la répugnance au travail de la terre définie par:
la dévalorisation de l'individu sur le plan physique et social
due:
- à la perte de considération sociale aux yeux de ceux de
la ville
- ~ la déchéance physique entraînant un vieillissement prématu-

les difficult~s du travail manuel dues
- aux travaux champêtres pénibles
- au manque d'aide aux paysans
l'insuffisance du revenu du travail de la terre, suite:
- aux difficultés naturelles:
climat, état des terres
et des plantations qui ont vieilli
- aux mauvaises structures: bas prix des produits agricoles
mais cherté des produits chimiques
- à l'annualité de ce revenu
le manque d'initiation de base pour les jeunes adultes
scolarisés.

390
b)
La forte rareté d'emplois salariés à la campagne définie:
par le manque d'infrastructures économiques pourvoyeuses
d'emploi salariés parce que:
inexistence d'équipement industriel à la campagne
sous-développement chronique de la campagne
négligence du milieu rural de la part de 11 Etat
par l'accentuation croissante de la division sociale
nationale du travail au détriment du monde paysan ce qui
cantonne ce dernier dans le domaine des produits agricoles
d'exportation.
c)
Le refus de la vie sociale du milieu villageois à cause:
du conflit des générations et des valeurs né:
de la mésentente entre les parents et leurs enfants
du refus de l'autorité parentale.
de la persistance de certaines structures sociales tradi-
tionnelles avec:
l'existence et la présence des sorciers au village
la permanence de l 'héritage collatéral au détriment de
l 'héritage vertical.
du relâchement des structures familiales traditionnelles
de la monotonie de la vie du village due:
,
à l'absence d'horizon social en terme d'évolution
à l'inexistence de distractions et de loisirs
au manque de jeunes gens et jeunes filles
de la pauvreté croissante du milieu villageois

UNI\\'!~SIH Dl "O"T~(Al
391
d)
Les effets de la scolarisation résultant:
de la surestimation idéologique du rôle et des objectifs
de l'école dans la réussite sociale de chaque individu
Ce qui favorise:
le façonnement précoce de la personnalité du jeune à
travers les structures scolaires.
la substitution progressive de l'éducation scolaire à
l'éducation du milieu familial.
de l'inadaptation des programmes scolaires au milieu socio-
culturel villageois.
de la valorisation urbaine des acquis de l'école.
de l'échec scolaire ressenti en milieu rural
e}
Les effets conjugués des mass média et de l'attrait du moder-
nisme urbain définis par:
l'image de la ville perçue comme terre promise à cause:
de l'idéalisation de la vie en milieu urbain
de la ville considérée comme lieu de culture et de civili-
sation
des caractéristiques physiques et du modernisme de la ville
des distractions et des loisirs de la ville.
l'influence des mass média à travers:
la diffusion des modèles culturels urbains en direction
du monde rural:
musique, danse et mode
la distribution des programmes d'information à orientation
urbaine

UNIVIRSIT( Dr Mo"'urAl
392
f)
Les relations de famille élargie définies par:
les relations en ville avec la présence de parents et amis
les relations particulières de famille ct la campagne avec:
l'encouragement des parents à l'émigration
le désir d'apporter de l'aide financière aux parents pauvres
g)
Le désir d'ascension sociale définie par:
la promotion sociale à la base:
d'une réussite sociale
d'un changement de statut social et d'une amélioration de
l'image de soi
de la recherche d'un partenaire conjugal
d'un besoin d'épanouissement individuel.
la recherche de gain et de meilleures conditions de vie à
partir:
d'une recherche de travail salarié
d'un besoin de formation et d'apprentissage d'un métier
d'une recherche de source de revenu
L'analyse de ces différents faisceaux de causes a révélé trois
dimensions d'étude de l'exode rural des jeunes adultes qui s'in-
terpénètrent sous leur double aspect subjectif et objectif.
Ces trois
dimensions sont:
socio-économique, socio-culturelle et psychosociolo-
gique qui intègrent ces différents faisceaux.
a)
la dimension socio-économique
sous son aspect objectif, elle regroupe les faisceaux de
causes qui inscrivent:

U~'\\'(RSIT[ D( MO~TR( 4l
393
la forte rareté d'emploi salarié a la campagne due au
manque d'infrastructure économique en milieu rural et ct
la division sociale nationale du travail en faveur de la
vi 11 e
l'insuffisance du revenu de la terre due aux difficultés
naturelles, aux mauvaises structures et à son caractère
annuel
Sous son aspect subjectif, la dimension socio-économique se
définit par la recherche de gain et de meilleures conditions
de vie en ville
b)
La dimension socio-culturelle reprend sous son aspect objectif,
les effets conjugués des mass-média et de l'attrait du modernisme
urbain et les effets d'une scolarisation surestimée dans ses fi-
nalités.
Alors que l'aspect subjectif est marqué par la percep-
tion de la vie urbaine en milieu rural et la valorisation urbai-
ne des acquis de l'école.
c)
La dimension psycho-sociologique regroupe, du côté objectif,
les difficultés du travail de la terre, la persistance de
certaines structures sociales traditionnelles, le relâchement des
structures lignagères, les relations de famille élargie.
Du côté subjectif, cette dimension recouvre:
la répugnance à
un travail de la terre dévalorisant, le conflit des générations,
le dédain de la vie sociale du village, le désir d'ascension
sociale et de réussite personnelle.

lJN'VIRSITl Dl '10~TRIAl
394
L'analyse de ces différents faisceaux de causes a également
permis d'identifier deux types de besoins des jeunes adultes.
Ces be-
soins qui s'inscrivent dans une perspective globale de progrès écono-
mique et social se définissent par une aide pour l'élévation du niveau
de vie des jeunes adultes ruraux et par un système d'apprentissage
pour l'élargissement de leur horizon culturel.
La satisfaction de ces besoins fonde ses principes d'action
sur une socio-andragogie de réconcialiation qui prend en compte les
besoins spécifiques des jeunes adultes dans leurs milieux respectifs.
Elle inscrit sa pratique dans la définition d'une nouvelle politique
d'éducation des adultes objective et cohérente, qui s'appuie sur des
moyens réalistes, est conduite par un nouveau type d'intervenants
opérationnels conscients de leurs actes individuels d'éducateurs d'adul-
tes et ayant foi en leurs actions collectives de transformation sociale.
Le caractère exploratoire de cette recherche et l'analyse
qualitative du phénomène à laquelle elle a abouti inscrivent ses résultats
dans une perspective dynamique inachevée.
La méthode d'approche globali-
sante que nous avons adoptée pour cerner le sujet nous a été dictée
par le fait que l'exode rural des jeunes adultes est une réalité sociale
ivoirienne avec laquelle il faut désormais cohabiter pour avoir longtemps
coexisté avec elle.
Et en tant que tel, pour déterminer ses causes réelles
et proposer des méthodes d'actions pour le ralentir et le freiner tout
au moins, une approche systèmique qui fait appel à une pluridisciplinarité
s'avère fondamentale.

U~IVERSlll DE ~O~lR(Al
395
En ce qui concerne cette étude, elle n'a pas la prétention
d'avoir trouvé tous les moyens et ouvert toutes les voies pour mettre un
terme à ce phénomène.
Seulement si, à partir de ses résultats, elle a
permis d'ébaucher des pistes de recherches quantitatives et qualitatives
plus osées, complémentaires les unes des autres, et susceptibles de four-
nir une meilleure compréhension de l'exode rural des jeunes adultes de
Côte d'Ivoire, son utilité sera certaine.
Non plus, dans le champ de l'éducation des adultes, domaine
essentiellement pratique, elle n'offre des recettes d'action toutes faites.
Par contre se contente-t-elle de proposer des éléments d'une plate-forme
pragmatique dans un domaine où tout est à restructurer.
En somme si quelques-uns des résultats de cette étude pou-
vaient déboucher sur des possibilités d'action en milieu rural, actions
durant lesquelles les jeunes adultes s'impliqueraient volontairement
compte tenu de leurs aspirations au progrès économique et social,
la problématique ivoirienne de l'éducation des adultes serait alors éta-
blie et l 'andragogie hissée au rang des sciences qui définissent le
devenir de la Côte d'Ivoire.
Et si simplement, ces pistes ébauchées pouvaient conduire
quelques personnes de bonne volonté à la rencontre de quelques jeunes
adultes dans les villes ou les villages, pour seulement les écouter et
les entendre parler de leurs situations vécues, ce serait une source de
satisfaction personnelle pour l'auteur.

U"',VIRSIH UI '>IO"'IRIAl
396
Enfin si cette étude pouvait susciter une réflexion dans l'ap-
pareil idéologique qui fournit le cadre structuro-fonctionnel de notre
métier d'éducateur, nous pourrions alors dire que nous sommes devenu homme,
parce que cette étude nous aura rendu responsable.
Homme responsable comme
l'entend Antoine de Saint Exupéry, lorsqu'il écrit dans Terre des hommes:
"être homme c'est précisément être responsable.
C'est connaître la
honte en face d'une misère qui ne semblait pas dépendre de soi.
C'est
être fier d'une victoire que les camarades ont remportée.
C'est sentir
en posant sa pierre que l'on contribue à bâtir le monde."

U~IVIRSITI DI MO~TR(Al
Annexes

UNIVERSITI Dl MONTREA.L
398
LES QUESTIONNAIRES
Entretien ville
(E.V.)
Ville:
ABIDJAN
Quartier
.
Interview No
.
Variable al
- Sexe (entourer le chiffre l ou 2
qui convient)
CODAGE
Masculin
l
Féminin
2
Reporter le chiffre entouré dans la case:
Variable 02
-Age
Quel est votre âge?
16-20
21-25
26-30
31-35
classe d'âge
Variable 03
- Scolarité
·1.
Avez-vous été a l'école?
oui
non
2. _ -
2.
Si oui, quelle est la dernière classe que vous avez
suivie?
la classe
le nombre d'années
en chiffre de a ~ x

UNIVfRSIH Of .\\I0."TRf41
399
Variables 04 - Religion
CODAGE
De quelle religion ête-vous?
l
- Catholique
2
- Protestant
3
- Musulman
4
- Religion syncrétique
5
- Animiste
6
- Autre (à préciser)
Mettre une croix dans la case correspondant au chiffre
et reporter le chiffre:
Variable 05 - Ethnie
A quel groupe ethnique appartenez-vous?
Mettre une croix dans la case correspondante et
reporter le chiffre dans la colonne de droite:
l
- Krou
2
- Akan
3
- Dan
4
- Senoufo
5
- Malinké
6
Autre à préciser
Variable 06 - L'Etat civil
1.
Quel est votre état civil
Mettre une croix dans la case correspondante et
reporter le chiffre dans la colonne de droite:
l
- Marié
2 - Célibataire
3 - Divorcé
4
- Veuf

UNl\\'l~SITl DI "O"TRI~l
400
CODAGE
2.
Avez-vous des enfants?
oui
non
,.,
'-
- - -
Mettre une croix dans la case correspondante
et reporter le chiffre dans la colonne:
3.
Si oui. combien en avez-vous?
1 - 3
A
- - -
4 - 5
B
- - -
5 & plus
C
- - -
Mettre une croix dans la case qui convient et
reporter la lettre correspondante dans la
colonne:
Variable 07 - Occupation professionnelle
Quelle est votre activité professionnelle?
1.
Aucune activité
2.
Manoeuvre
3.
Chauffeur
4.
Commis de bureau
5.
Commerçant
6.
Artisan
7.
Agri cul teur
8.
Autre (à préciser)
Entourer le numéro de l'activité et reporter le
chiffre dans la colonne de droite:

U"IVfR5ITf Of '.'O'<TR("l
401
Questions générales
CODAGE
1.
Depuis combien de temps êtes-vous ici en ville?
Chiffrer la durée en mois ou en année:
2.
Pourquoi avez-vous choisi cette ville plutôt qu'une
autre? (5 faisons)
3.
Quelle image aviez-vous de cette ville avant d'y
arriver? (5 idées)
4.
Quelles sont les raisons qui ont motivé votre départ
de votre village pour venir ici? (5 raisons)
5.
Connaissez-vous d'autres jeunes gens qui sont venus
comme vous ici en ville?
oui
non

UNln~SI TI Of .'10NT~("l
402
CODAGE
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite:
Si oui, poser la question 6
Si non, poser la question 7
6.
Quelles sont dans leur cas, d'après vous, les raisons
pour lesquelles ils sont venus ici en ville?
(au moins 5 raisons)
7.
Avez-vous rencontré des problèmes quand vous êtes arrivés
ici?
oui
non
2 _ _
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite:
Si oui, lesquels? (au moins 5)
Si non, passer à la question 10
8.
Comment vous êtes-vous pris pour résoudre ces problèmes?

UNlYIRSITI Ol MO"T~("l
403
CODAGE
9.
Comment auriez-vous voulu être aidés pour résoudre vos
problèmes?
10.
Vos amis, ont-ils eu (eux aussi) des problèmes?
oui
non
2---
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le chiffre
dans la colonne de droite:
Si oui, lesquels? (au moins 5)
11.
Comment se sont-ils pris pour les résoudre?
12.
Du point de vue éducatif, quel (s) service (s) pour
les jeunes gens comme vous, auriez-vous souhaité voir
créer pour vous qui arrivez ici en ville? (nommer au
moins 5)

U~I\\'!RSITI Of MONTR!"L
404
CODAGE
13.
Pour vous, qulest-ce qulil aurait fallu changer a la
campagne pour que vous y restiez?
ou, comment auriez-vous voulu voir la campagne pour ne pas
la quitter? (5 points à mentionner)
14.
De plus en plus, l Ion parle en Côte d'Ivoire de retour
à la terre des jeunes gens comme vous.
Vous, en ce qui vous
concerne, à quelles conditions retourneriez-vous à la campa-
gne si vous deviez le faire? (donner au moins 5 conditions)

U~I\\'(RSIH Of MONTR("l
405
Entretien Campagne
(E.C.)
Région:
GAGNOA
Village
.
Interview No
.
Variable 01 - Sexe (entourer le chiffre l ou 2 qui convient)
CODAGE
Masculin
1
Féminin
2
Reporter le chiffre entouré dans la case:
Variable 02 - Age
Quel est votre âge?
16-20
21-25
26-30
31-35
classe d'age
Variable 03 - Scolarité
1.
Avez-vous été à l'école?
oui
non
2 - -
2.
Si oui, quelle est la dernière classe que vous avez
suivie?
la classe
le nombre d'années
en chiffre 0 â X

UNIVERSITI 01 .'.10NTRIAl
406
Variable 04 - Religion
CODAGE
De quelle religion êtes-vous?
1
- Catholique
2 - Protestant
3 - Musulman
4
- Religion syncrétique - - -
5 - Animiste
6
- Autre ( préciser)
Mettre une croix dans la case correspondant au chiffre et
reporter le chiffre:
Variable 05 - Ethnie
A quel groupe ethnique appartenez-vous?
Mettre une croix dans la case correspondante et
reporter le chiffre dans la colonne de droite:
1
- Krou
2
- Akan
3
- Dan
4
- Senoufo
5
- Malinké
6
- Autre (à préciser)
Variable 06 - L'Etat civil
1 - Quel est votre état civil?
Mettre une croix dans la case correspondante
et reporter le chiffre dans la colonne de droite: - - -
- Marié
2
- Célibataire
3 - Divorcé
4
- Veuf

UNI"ERSITl DE MONTREAl
407
2
- Avez-vous des enfants?
oui
non
CODAGE
2,
_
Mettre une croix dans la case correspondante et
reporter le chiffre dans la colonne:
3 - Si oui, combien en avez-vous?
1 - 3
A
- - - -
4 - 5
_ _ _ _8
5& plus
_ _ _ _C
Mettre une croix dans la case qui convient et
reporter la lettre correspondante dans la colonne
Variable 07 - Occupation professionnelle
Quelle est votre activité professionnelle?
1.
Aucune activité
2.
Manoeuvre
3.
Chauffeur
4.
Commis de bureau
5.
Commerçant
6.
Artisan
7.
Agriculteur
8.
autre (à préciser)
Entourer le numéro de l'activité et reporter le chiffre
dans la colonne de droite:
Variable 08 - Système culturel, fait urbain et rural.
1.
Quelles sont vos principales distractions?
(Mentionner au moins 5)

UNIVIRSITI Dl MONTlI"l
408
2.
Parmi celles-là, quelles sont vos préférées?
CODAGE
(Mentionner 3)
3.
Y a-t-il un appareil de télévision ici au village?
oui
non
2
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre dans la colonne de droite:
Si non (2), passer à la question 6
4.
Si oui, regardez-vous la télévision?
- chaque jour?
2 - de temps en temps?
3 - rarement?
4 - jamai s?
(entourer la bonne réponse, et reporter le chiffre
dans la colonne de droite)
5.
Si vous regardez la T.V., quelles sont vos émissions
préférées? (Donner au moins 3)
6.
Ecoutez-vous la radio nationale?
oui
non
2
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre qui convient dans la colonne de droite:
si non (2), passer a la question 9

UNIVIRSIT( DI MONTRI"L
4Cl9
7.
Si vous écoutez la radio nationale, le faites vous
CODAGE
l - chaque jour?
2 - de temps en temps?
3 - rarement?
Entourer la bonne réponse et reporter le chiffre
correspondant dans la colonne de droite:
8.
Si vous écoutez la radio nationale, quelles sont
vos émissions préférées?
(Mentionner 3)
9.
Lisez-vous FRATERNITE MATIN?
oui
non
2 ---
10.
Si vous lisez F.M., le faites-vous?
l - chaque jour?
2 - de temps en temps?
3 - rarement?
Entourer la bonne réponse et reporter le chiffre dans la
colonne de droite:
11.
Si vous lisez F.M., quelles sont vos parties
préférées? (Mentionner 3)

410
12.
Lisez-vous IVOIRE DIMANCHE?
CODAGE
Oui
Non
2 _ _
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite:
Si non (2), passer à la question 15
13.
Si vous lisez ID., le faites- vous
- chaque semaine?
par mois?
3 - rarement?
14.
Si vous lisez ID., qu'est-ce qui vous plaît ou
qui vous intéresse le plus dedans? (Mentionner 3)
15.
Quelle est la ville de la Côte d'Ivoire à laquelle
vous pensez en ce moment?
16.
Quand on dit une ville, qu'est-ce que cela représente
pour vous? (Mentionner 5 idées)

UNIVERSITI OE MONTRIAl
411
17.
Y a-t-il des jeunes gens du village
CODAGE
qui sont partis pour la Ville?
oui
non
?
- - -
Entourer la bonne réponse par une croix dans la case et
reporter le chiffre qui convient dans la colonne de
droite:
Si non (2), passer à la question (20)
18.
Si oui, dans quelle ville?
19.
Pensez-vous que ceux qui ont quitté le village
ont eu raison de le faire?
l - oui
2 - non
3 - je ne sais pas
Entourer la bonne réponse et reporter le chiffre dans
la colonne de droite:
20.
Et vous-mêmes, resterez-vous à la campagne?
oui
non
2 - - -
Si oui, pourquoi? (au moins 5 raisons)

UNlV[RSITl D[ MO~TR["l
412
Si non, pourquoi?
CODAGE
21.
Si vous deviez quitter la campagne pour aller à
la ville, dans quelle ville iriez-vous et
pourquoi? ( au moins 5 raisons)
22.
Selon vous, quelles sont les causes du départ
des jeunes gens des campagnes vers les villes?
(au moins 5 raisons)
23.
Selon vous, qu'est-ce que l'Etat (le gouvernement)
devrait faire pour que les jeunes gens restent
à la campagne? ( au moins 5 raisons)

U'I'VfRSITI DE MO.'·;TR!"l
413
Variable 09 - Système scolaire
CODAGE
1.
Selon vous, pourquoi les parents favorisent-ils
la fréquentation scolaire de leurs enfants
(au moins 5 raisons)
2.
Pensez-vous, que dans votre village il ya
beaucoup d'enfants qui vont à l'école ou très
peu seulement vont à l'école?
3.
Si très peu d'enfants seulement vont à l'école
pouvez-vous dire à quoi cela est dû? (5 raisons)
4.
D'après vous, qu'est-ce que l'école apprend
aux enfants qui la fréquentent (5 points)

UNIVERSITI Dl \\10-.TR14l
D'après vous, est-ce que l'école prépare
CODAGE
surtout les enfants?
- à vivre en ville?
?
- à vivre à la campagne?
3 - à vivre en ville et au village?
4 - ne sais pas
Entourer le chiffre correspondant au choix:
6.
Si vous aviez un enfant, le mettriez-vous à l'école?
oui
non
'1
(-
- - -
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite:
a) si oui, dites pourquoi (5 raisons)
b) si non, dites pourquoi (5 raisons)
7.
Pensez-vous que, si l 'école préparait surtout les
enfants à vivre à la campagne, les jeunes gens qui
ont quitté l 'école pourraient rester au village?
oui
non
2

UNIVlRSITI Ol "O"TR[~l
415
Mettre une croix dans la bonne case et
CODAGE
reporter le chiffre correspondant dans la
colonne de droite:
Si oui, pourquoi (5 raisons)
Si non, dites pourquoi (5 raisons)
Variable 10 - Structure socio-économique
1.
Y a-t-il du travail ici au village?
oui
non
?
Mettre une croix dans la bonne case et reporter
le chiffre correspondant dans la colonne de droite:
2.
Est-ce que les jeunes gens du village s'intéres-
sent au travail de la terre?
oui
non
2
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite
Si oui, pourquoi? (5 raisons)

U~I\\'[ RSlTl DI "O"iTRI"L
416
CODAGE
Si non, pourquoi (5 ra i sons)
3.
Pensez-vous que le travail de la terre ici au
village rapporte un revenu?
1 - suffisant
? - pas suffisant
3 - ne sait pas
Entourer le chiffre correspondant au choix
Si pas suffisant, poser la question 4 et 5
4.
Si le travail de la terre ne procure pas un
revenu satisfaisant, d'après vous, à quoi
cela est-il dû? (donner 5 raisons)
5.
Si le travail de la terre procurait un revenu
satisfaisant, pensez-vous que les jeunes gens du
village resteraient ici?
oui
non
? ---
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre dans la colonne de droite:

UNIVIRSITI DI .'<O"'TR("l
417
Si oui, pourquon ( 5 raisons)
CODAGE
Si non, pourquoi (5 raisons)
6.
Pensez-vous que les jeunes·gens des villages
resteraient à la campagne s'il y avait des
emplois salariés comme en ville?
oui
non
?
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre correspondant dans la colonne de droite:
Si oui, pourquoi (5 raisons)
Si non, pourquoi (5 raisons)

UNI\\'fR5ITl Of MüNTRIAl
418
7.
Selon vous, a quoi peut-on attribuer
CODAGE
l'insuffisance d'emplois salariés à la
campagne? (5 raisons)
8.
Pensez-vous que, a la campagne, les salaires sont
l - plus élevés qu'en ville?
2 - moins élévés qu'en ville?
3
de même niveau qu'en ville?
4 - ne sais pas
Entourer le chiffre correspondant au choix
Si 2 est entouré, poser la question 9, sinon
passer à la question 10.
9.
Si les salaires sont moins élevés à la campagne
qu'à la ville, selon vous, à quoi cela est-il dû?
(5 raisons)
10.
Pensez-vous que si les salaires de la campagne
étaient égaux à ceux de la ville, les jeunes gens
resteraient au village?

UN/VI RSI TI Of .'10"TRf "l
419
Oui
Non
CODAGE
Mettre une croix dans la bonne case et reporter le
chiffre dans la colonne de droite:
Si oui pourquoi? (5 raisons)
Sinon pourquoi? (5 raisons)
11.
Si vous-même vous aviez la possibilité de choisir
à revenu égal entre un emploi en ville et un travail
au village, lequel des deux choisiriez-vous?
Justifiez votre choix (5 raisons)
12.
Selon vous, qu'est-ce qui pousse les jeunes gens
des villages à quitter le travail de la terre pour
aller à la ville? (au moins 5 raisons)

U:'-iIVlRSlTf Dl '-'O,'" TR[ Al
420
13.
Vous, avez-vous envie de quitter le
CODAGE
village pour la ville?
oui
non
?
- -
Mettre une croix dans la bonne case et reporter
le chiffre correspondant dans la colonne de droite:
Si non, pourquoi? (5 raisons)
Si oui, pourquoi? (5 raisons)
14.
D'après vous, qu'est-ce que l'Etat (le gouverne-
ment) devrait faire à la campagne pour que les
jeunes gens restent dans leurs villages
( au moins 5 raisons)

UNIVERSIT! DE MONTREAL
Remerciements
Nous voudrions remercier tous ceux qui, de près ou de loin et
d1une façon ou d'une autre, ont contribué à la concrétisation de cette re-
cherche.
Nous adressons nos remerciements aux responsables du Ministère
de la Jeunesse, de 1 'Education Populaire et des Sports de notre pays, pour
avoir autorisé notre mise en stage;· et notamment:
à Monsieur le Ministre Laurent DONA FOLOGO
au Directeur des Affaires Administratives et Financières,
Monsieur Pierre DAILLY.
Nos remerciements vont également aux personnels du département
d'Andragogie de l'Université de Montréal pour la disponibilité dont ils
ont fait preuve à notre égard.
Nous voudrions enfin exprimer ici notre reconnaissance:
au Directeur Général de l'Institut National de la Jeunesse et des Sports
d'Abidjan, Monsieur DIARRA LASSINA, pour l'attention particulière qu'il
~ portée a notre formation;
au Directeur du département d'Andragogie, Monsieur Claude TOUCHETTE,
notre directeur de thèse dont les conseils répétés et l 1 encouragement
sans relâche nous ont permis de mener a terme cette étude.

U~IVIRSITl DI"'O~TR("l
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