UNIVERSITE
bE
REIMS
CHAMPAGNE
ARDENNE
U.F.R.
DES
LETTRES
ET
SCIENCES
HUMAINES
DEPARTEMENT
D'HISTOIRE
THE
S
E
pour
l ' o b t e n t i o n
du
diplÔme
de
Doctorat
Nouveau
régime
(Arrêté
du
05-07-84)
(HISTOIRE
ANCIENNE)
* * * * * * * * * * * * * * * * * * *
** ESCLAVES ET ESCLAVAGE A TRAVERS *
*
L'OEUVRE
DE
CICERON
*
*
*
* (Esclaves et affranchis à la fin *
*
de
la
République
Romaine)
**
*
*
* * * * * * * * * * * * * * * * * * *
Présentée
e t
soutenue
publiquement
p a r :
Monsieur
Hugues
Mouckaga
.
Sous
la
d i r e c t i o n
de
.
Monsieur
Jean-Pierre
Martin
Professeur
d ' H i s t o i r e
Roma~ne ~
Paris
IV
:+:
:+:
:t:
:+:
:+:
Reifl)s,
198.4-1988
«L' obj et
propre
de
l t histoi re
est
premièrement
de
connaî tre
les
discours
véritables,
dans
leur
teneur
réelle,
secondement
de
se
demander
pour
quelle
cause
a
échoué
ou
réussi
ce
qui
a
été
dit
ou
ce
qui
a
été
fait,
puisque
la
narration
brute
des
événements
est
quelque
chose
de
séduisant,
ma.is d'inutile,
et
que
le
commerce
de
l'histoire
ne devient
fructueux que si
l'on y
joint
l'étude des causes.
Car
les
cas
analogues
transposés
dans
le
temps
présent
procurent
des données et des anticipations qui
permettent de
prévoir
l'avenir
et
tantôt
de
prendre
des
précautions,
tantôt
en se
réglant
sur
le
passé,
de
faire
face aux suites
avec
plus
d'assurance
mais
si
l'on
néglige
les
discours
véritables
et
leurs
causes
et
qu'on
y
substitue
des
argumentations
mensongères
et
des
amplifications
oratoires,
on supprime l'objet de
l'histoire»
Polybe,
Hist.,
XII,
25 b,
1-4
=::-...:::==============
Les cités antiques COIllllle
toute société
humaine,
présentaient
des rangs,
des
distinctions et
des
inégalités.
Si
à
Athènes
i l
y
avait
d'un
côté
les
Eupatrides
et
de
l'autre
les
Thêtes,
à
Sparte
les
Egaux
et
les
Inférieurs,
à
Rome
en
dehors
des
patriciens
et
des
plébéiens,
un
clivage
existait
entre
les
libres
et
les
non-libres.
Etaient
libres
les
détenteurs de tous
les droits -
politiques et civiques -
et
non-libres,
ceux qui en étaient dépourvus.
Pour
notre
Mémoire
de
Maî trise
à
l'Uni versi té
du
Gabon,
une
quest i on
nous
brû lai t
les
lèvres
pourquoi
à
Athènes,
à
Sparte
et
à
Rome,
durant
l'époque
classique,
l'esclavage
fut-il
érigé
au
rang
d'institution
?
En
fait,
au-delà
de
cette
question,
nous
voulions
nous
intéresser
de
plus
près
aux
pri ncipales
révol tes
servi les
dont
les
pl us
brû lantes
furent
celles
des
hi lotes
de
Messénie,
et
de
Spartacus.
Et
nous
arrivâmes
à
la
conclusion
selon
laquelle
l'esprit,
la
hantise
de
l'insurrection
qui
gagna
les
esclaves,
s'ins-
crivait
dans
toute
logique
qui
veut
que
tout
individu,
tout
peuple
assujetti
par
un
autre
plus
fort
que
lui,
n'aspire
qu'à
une
seule
chose
se
libérer
un
jour
du
joug
de
son
oppresseur,
et recouvrer sa pleine liberté.
En
arrivant
à
l'Université
de
Reims
et
ce,
pour
la
préparation
d'une
thèse
d' Histoire
ancienne,
nous
n'avions
toujours
pas
la
conviction
d'avoir
étanché
notre
soif
originelle.
C' pst
pourquoi,
en
accord
avec
Monsieur
J. P.
Martin,
notre
directeur
de
recherches,
nous
décidâmes
de
poursuivre
dans
la
même
voie,
mais
cette
fois
en
nous
apesantissant sur Cicéron.
Ce
n'est
pas une sinécure,
car de
toute
l'époque
classique
romaine,
le
vainqueur
des
Catilinaires
fut
sans
conteste
l'un
des
plus
féconds
en
écriture.
Ceci
étant,
nous
n'avons
pas
la
prétention
de
faire
une
apologie
ou
un
procès
de
Cicéron.
Nous
ne
chercherons
d'c.bord
qu'à
répondre
à
des
questions
précises,
contenues dans notre
problématique.
Nous
ne
saurions
terliii ner,
sans
adresser
nos
remerciements
les
plus
vifs
à
Monsieur
J.P.
Martin,
pour
n'avoir
jamais
cessé
de
nous
faire
bénéficier
de
sa
vaste
science
du
monde
romain
et
de
son
humanisme
profond
qui
ont
éclairé
nos
recherches
et
permis
à
cette
étude
de
se
réaliser.
C'est
grâce
à
sa
vigi lante
5011 ici tude
que
nous
avons
tenté
de
résoudre
les
difficultés
inhérentes
à
ce
travail.
Nous
sommes
donc
heureux
de
lui
renouveler
l'hommage
de
notre
profonde et respectueuse gratitude.
Ces
remerciements
vont
également
à
l'endroit
de
Mademoiselle
N.
Moine,
pour
ses
conseils,
ses
sugge'3tions
et
ses
critiques très enrichissants.
Aucun
mot
ne
saurai t
exprimer
toute
la
grati tude
que
nous
devons
à
Madame
Ch.
Lecoz,
secrétafre
au
département
d'Histoire,
à
tous
les
moniteurs
de
la
bibliothèque
Hincmar,
à
tout
le
personnel
des
bibliothèques universitaire
et
muni-
cipale,
pour
la
chaleur dont
i l s
nous
ont
fait
bénéficier au
long de
l'élaboration de
notre thèse.
Kent i on f-,péciale
à
nos
maîtres de
l'Uni '>'ersi té
du
Gabon -
1.
Patinon,
Meteghe
N' nah,
Pambo
Loueya,
Sekene
Hody
Cissoko,
Hughes
Dechangy,
et
surtout
L.
Digombe
et
Alike
Tschinyoka,
pour avoir guidé
nos premiers pas dans
la recherche.
Enfin
last
but
not
least
nous
remercions
Mme
H.
Pasqualini
pour
la
rapidité
avec
laquelle
elle
a
dacty-
lographié
ce
texte,
minimisant
ainsi,
la
lecture
parfois
difficile du
latin.
INTRODUCTION
-
6
-
1.-
PROBLEMATIQUE
Rien n'est
termin~, ni les profonds bouleversements des
soci~t~s et des civilisations, ni le d~ferlement de la violence col-
lective,
ni
l'action des forces
répressives et destructrices
(1).
Bien au contraire,
la complexité et la
gravit~ du phénomène servile,
n'ont
jamais cessé de faire
partie du quotidien,
à l'intérieur de
nos soc i été s.
Cha q 'J e
j 0 ur,
l ' ho mmes e
dép ers 0 n n a 1 i se,
p e rd
gr a due 1 -
lement
une partie de ses valeurs et se trouve
dans
les
fers,
pour
reprendre
l'expression de J.J.Rousseau.
Si officiellement,
l'esclavage fut aboli
à
la fois
dans
les colonies françaises
et dans celles des
Etats américains en 1848
et en 1863,
i l n'en demeure pas moins vrai,
qu'il
garde
encore une
vivacité certaine.
Sous une forme ou sous une autre,
à
visage décou-
vert GÙ non,
i l n'hésite pas
à envelopper l'homme qu'il atteint et
à se saisir même du tr~fonds de son être. De ce point de vue, il ap-
paraît toujours comme un problème intéressant à
étudier et à
aborder
dans toutes ses dimensions.
De toute
façon,
si
l'on
s'appuie sur les
propos de
J.Schmidt,
l'esclavage,
n'incite-t~il pas à faire référen-
ce aux
tortures,
aux dos
zébr~s et sanguinolents, aux pauvres hères,
aux visages tirés par la fatigue et ruisselants de sueur,
traînant
de
lourds chariots,
extrayant les pierres des carrières,
tournant la
meule qui broie le blé
sous les coups répétés des maîtres sadiques ?
(2 ).
En dehors de
l'époque moderne
et contemporaine,
l'Antiquité
a elle aussi connu cette forme d'exploitation de l'homme
par l'homme.
Rome principalement,
pendant des dizaines de générations,
y a
été
tellement
empêtrée,
que
les chercheurs
intéressés par ce pan de son
histoire sociale,
n'ont
pas hésité
~ la traiter d'esclavagiste (3).
Au-delà de
cette constation,
la plupart d'entre
eux,
à la suite des
Juristes romains,
ont
souvent admis deux
raisons principales de
l'as-
servissement
:
la raison
exogène et la
raison endogènes
selon
les
propres termes de
A.
oaubigney
(4),
limitant ainsi
la servitude à la
stricte domination physique d'un homme
sur un autre.
Bien
entendu,
à
la fin
de
la République,
les guerres
furent
principalement à
l ' o r i -
gine de
la montée du
nombre des esclaves à Rome,
le droit civil,
con-
tribuant
très peu à ce gonflement.
Mais doit-on considérer ces rai-
sons comme
exclusives? N'existe t - i l
pas d'autres
sources de réduc-
tion
en esclavage? Grosso modo,
qu'est-ce
que l'esclavage? Qu'en
est-il du
point de vue de Cicéron? Sa conception vis-à-vis de ce
problème,
brûlant à l'intérieur de
la société romaine,
cadre t-elle
avec celle de ses contemporains ou
s'en éloigne t-elle
?
C'est essen-
tiellement à cette question,
que nous allons tenter de
répondre
tout
au long de notre
travail.
Contemporain de
la fin
de
la République,
Cic~ron a vécu la déchirure des institutions. Il nous la rapporte
d'ailleurs dans cette
lettre à
Atticus en 61
av.
J-C,
d'où
teinte
cependant,
un brin d'optimisme:
IlJe
veux
te
rassurer sur la Répu-
blique
:
elle a
reçu
une
cruelle blessure,
mais
le mal
ne
triomphe
pas aussi allègrement,
que les méchants
l'ont
esp~ré, Oui, ils
avaient fait
ce calcul:
puisque la
religion,
la morale,
l'honnêteté
... / ...
-
7 -
des
jugements,
l'autorité du
sénat étaient à terre,
la corruption
et 12 licence victorieuse vengeraient
hautement sur les gens de bien,
les cuisants souvenirs qu'avaient
laissés aux méchants
la sévérité
de mon consulat"
(5).
Des propos du même 'genre figurent
d'ailleurs
dans cette lettre-ci,
suivis d'un désenchantement
le plus n e t :
"La
République mon cher Pomponius,
a
perdu pour nous non seulement ce
qui en était la substance et
le sang,
mais même cette couleur et cet-
te forme qu'elle avait autrefois.
Plus de régime politique qui plai-
se,
en qui
je puisse me sentir heureux"
(6) ••
Cicéron est donc
un observatoire sûr.
Certes,
i l
n'a connu
que par ouI-dire la période ayant précédé
le début de
ses activités
dans la vie publique et marquée par l'imposante présence des Gracques,
de Marius,
de Sylla ..•
Mais i l en parle tout de même,
parfois avec
fougue,
surtout pour dénoncer
les exactions et les abus de
toutes na-
tures.
Est-ce par souci de
laisser à
la postérité une
source d'infor-
mations importante? Laissons-le
y répondre
dans cette récrimination
à l'endroit de Marc Antoine:
"Que
je te
plains si
tu
comprends et
plus encore si tu ne comprends pas que l'histoire enregistrera,
que
la postérité n'oubliera pas que
les consuls furent
chassés d'Italie,
et avec eux Cn.
Pompéius,
qui
fut
l'honneur et le flambeau
de l'Em-
pire romain,
tous les consulaires à qui leur santé permit de s'asso-
cier à ce désastre et à cette fuite,
les prétèurs,
les anciens pré-
teurs,
les tribuns de
la plèbe,
la plus grande partie du Sénat,
tou-
te la
jeune génération,
en un mot,
la République fut
expulsée et
proscrite de ses foyers"
(7).
Doter les générations à venir d'éléments d'appréciation sur
l'histoire
de sa société afin de
leur permettre de
la mieux connaî-
tre et partant de la mieux
juger,
tel
est entre autres,
l'objectif
recherché par l'Arpinate.
Procédant ainsi,
i l emboîte d'ailleurs le
pas à
Tite-Live,
même si celui-ci s'apesantit davantage sur la nécés-
sité d'un
récit des faits contemporains:
" •.•
La grande majorité de
lecteurs gouteront peu,
et des évènements qui vinrent
immédiatement
après,
et auront hâte d'arriver
à ces derniers temps où après une
longue supériorité,
la puissance romaine
se détruit elle-même"
(8)
La seconde raison
de notre
choix
pour Cicéron,
est le ca-
ractère éclectique de
l'auteur:
un homme de
lettres,
doublé d'un
politique.
Cette dualité
r e j a i l l i t pleinement,
chaque fois
que Cicé-
ron prend l'occasion de traiter tel
ou tel sujet.
Le
cas de l'escla-
vage,
en apporte la preuve formelle.
Alors que dans le De
Legibus
Cicéron reconnaît l'unicité
de
la race humaine
(9)
et
par voie de
conséquence
le caractère
injustifié de l'esclavage,
dans la corres-
pondance,
i l conseille à son frère
d'adopter une attitude
plutôt
sévère à l'égard de ces mêmes esclaves
(10).
Certains savants,
tels que
J. Carcopino, ont reproché à
Cicéron le fait
de n'avoir pas pu établir une
symbiose dans ses idées
et dans ses théories,
de s'être montré ondoyant et donc difficile à
situer,
le
traitant ainsi de
doctrinaire de cabinet
(11) .
.../ ...
- g -
Convient-il de nous lancer à notre
tour dans ce procès d'intention?
Le souci d'objectivité que
nous impose le métier d'historien
ne nous
le permet pas.
De plus,
sans vouloir nous aligner sur le poinnt de vue
de G.
Baissier,
nous dirons avec
lui qu'
"il n'y a
de gens parfaits
que dans les romans.
Le bien et le mal
sont tellement mêlés ensemble
dans notre nature,
qu'on
les rencontre
rarement
l'un sans l'autre
n
(12).
C'est pourquoi,
i l serait malaisé de
s'aligner sur tel ou
tel écrit,
surtout quand
celui~ci est servi par une plume militante.
Aussi,
posons-nous comme postulat à notre recherche:
l'appartenance
de Cicéron au monde des humains,
avec
ses vulnérabilités e t s è s con-
tingences.
Un humain particulier cependant,
puis qu'ayant été doté non
seulement de la capacité d'allier la culture et la vie politique de
son temps,
mais aussi d'une ouverture d'esprit rarement
égalée, comme
le
justifie sa parfaite maîtrise des historiens grecs tels que Hérodo-
te et Thucydide
(13), Agatocle et Dinan (14) ou encore Polybe (15).
Cette carrure de grand consommateur de
la culture grecque
(16) n'a-
vait-elle pas poussé quintus à voir en son frère un homo platonicus
(17) ? C'est donc au premier abord,
de cet intellectuel que nous nous
inspirerons,
en prêtant une oreille attentive à ses documents,
en les
laissant nous parler et se montrer
tels qu'ils
sont
(18).
Même si
l'histoire est une
science humaine
et comme toutes
les sciences humai-
nes un
"fleuve vivant",
un
domaine mouvant o~ les irrésistibles forces 1
subconscient
ne peuvent facilement
juguler la part de subjectivité
inhérente à la nature humaine,
l'impérieuse nécessité de
ranger Cicé-
ron
à la place qui est la sienne, nous paraît opportune.
C'est cons-
cient des dangers de ce métier
d'historien,
que Salluste souligne:
" C'est une
t5che des plus ardues que celle de l'historien:
d'abord
son récit doit être à la hauteur des faits,
ensuite,
s ' i l lui arrive
de b15mer quelque faute,
on le croit généralement inspiré par la mal-
veillance et la
jalousie •.. "
(19).
La troisième raison de notre choix,
tient au
fait que Cicé-
ron dirigeait une familia
comprenant des esclaves.
S'il nous
est
im-
possible dleh évaluer le nombre exact,
nous savons que
Sositheus,
Tiro et bien d'autres,
faisaient
partie de sa propriété.
Et puisqu'il
les fait
intervenir,
i l nous donne
la possibilité de
suivre leur acti-
vité,
leurs mouvements et
leurs rapports quasi quotidiens avec
leur
maître.
Dans le même ordre d'idée,
son expérience vécue au
jour le
jour,
nous permettra de comprendre
ses
réactions,
d'analyser ses at-
titudes et de mieux percevoir le contexte dans lequel se déroule une
partie importante de sa vie.
Enfin,
puisqu'il est lui-même proprié-
taire d'esclaves,
Cicéron nous donne les moyens de mieux
décrypter
la philosophie esclavagiste développée à Rome,
de mieux saisir les
méandres de celle-ci et de confronter celle en vigueur dans
la socié-
té avec
la sienne.
Or,
le monde de
la dépendance que nous présente Cicéron,
n'est pas exclusivement empli d'esclaves. Les affranchis aussi en
font
partie à travers des noms comme Hilarus,
Spintharus,
Alexis,
Métrodore ••. ,chacun avec
son rôle et son
importance.
Avec
ces af-
franchis,
c'est donc un monde qui
s'amplifie.
Car
i l ne s'agira plus
d'avoir
un
regard particulier pour
les
esclaves,
mais plutôt un
re-
gard d'ensemble,
plus global,
plus
total.
Mais cela nécessairement,
... / ...
-
9
-
conduit à se poser les questions suivantes:
existe t - i l un
profond
hiatus entre l'esclavage et l'affranchissement 7 Les éléments de ces
deux groupes,
occupent-ils leurs positions respectives
que confèrent
leurs statuts 7.
Tous les affranchis,
sont-ils logés à la même ensei-
gne 7.
Bien évidemment,
depuis le
XIXè
s.,dans un certain nombre
d'études,
des réponses ont essayé
d'être apportées à ces questions
par le biais entre autres de G.
Baissier,
d'Ho
Eulenberg
(20),
de
W.
Warde Fowler
(21)
et de J.
Carcopino
(22).
Mais
les unes et les
autres de ces études ont toujours manqué d'exhaustivité,
comme le
souligna R.
Etienne en 1970:'
"Malgré
la
richesse d'une
personnalité qui pendant près
d'un demi-siècle a
joué un
rôle déterminant dans la marche des évè-
nements politiques et sociaux de Rome,
l'attitude de Cicéron devant
l'esclavage n'a pas retenu
l'attention des savants et à
part une thè-
se néerlandaise confidentielle,
aucun ouvrage important
n'a été con-
sacré à
la position de l'avocat,
de
l'homme politique,
de l'homme
privé en face de ce phénomène capital
pour le~ mentalités antiques"
(23).
Cependant,le monde servile et celui des affranchis ne
sauraient
être compris s ' i l s ne s'appuient
sur l'oeuvre personnelle de Cicéron.
2.- L'OEUVRE
PERSONNELLE DE
CICERON
Elle se subdivise en trois
groupes:
la Correspondance,
les Traités et les Discours.
a)
La Correspondance
Sont désignées
sous ce
terme,
toutes les lettres échangées
de 68 à 43 av.
J-C,
entre Cicéron et ses amis,
sa famille,
son frère
et certaines personnalités marquantes de la fin
de la République:
César,
Pompée,
Octave,
Caton,
Brutus •••
Quant aux
lettres antérieures
à 68, elles ne nous sont pas parvenues parce que si l'on en croit
L.A.
Constans,
Atticus ne les aurait
pas conservées
(24).
Atticus,
l'éditeur de
l'oeuvre de Cicéron,
les aurait-il
volontairement fait disparaître? Si
oui,
à
quelles fins
7 Est-ce
parce que certaines d'entre elles étaient indignes d'être publiées 7
(25).
Nous ne
saurions y répondre.
Mais nous ne saurions non plus
conclure,
comme
le fit
J.
Carcopino,
à une fausse amitié entre les
deux hommes.
Car
leur amitié était
réelle.
Et Cicéron
ne manque au-
cune occasion de
le crier tout haut.
Nous la voyons exprimée
ici,
après
la signature de l'accord de Lucques entre César,
Crassus et
Pompée.
D'abord dans ces lignes
où Cicéron dévoile
son
isolement:
"Il n'est rien en ce moment,
sache-le,
qui me fasse
autant défaut
qu'un
homme à qui
je puisse m'ouvrir de tout ce qui me
cause quelque
souci,
qui m'aime,
qui ait l'esprit bien fait,
devant qui
je puisse
quand
je parle avec lui,
ne
rien
feindre,
ne rien dissimuler,
ne
rien cacher"
(26),
ensuite dans celles-ci,
écrites dans
un
ton
sup-
plicateur
:
"Et toi dont si souvent l'entretien et les conseils ont
soulagé ma peine et mon
angoisse,
qui
es l ' a l l i é constant de ma vie
... 1...
-
1 0
-
publique,
le confident de toute ma vie intime,
qui as part à tout
ce que
je dis et à
tout ce que
je décide,
où es-tu 7"
(27).
Pourtant,
au moment où i l
expédie cette missive,
Cicéron
n'est pas vraiment
seul.
Se trouvent
à
ses côtés,
son épouse et
leurs enfants,
des êtres chers à
ses yeux.
En dépit de cela,
i l sent
un vide en lui,
un
flottement que seul son ami
peut combler.
Et pour
souder davantage cette amitié,
i l n'hésita pas à
rendre possible une
union entre Quintus son cadet et Pomponia,
la soeur d'Atticus
(28).
Attachant et sensible,
tel
fut donc Cicéron.
Cet aspect de
sa personnalité est très important,
car il
nous permet de mieux con-
naître l'homme et de maîtriser l'une de ses facettes.
N'est-ce pas
G.
Boissier qui
le
reconnait explicitement quand i l se pose la ques-
tion de savoir
"ce que nous apprendraient de plus Asinius Pollion,
Tite-Live ou Cremutius Cordus qui,
écrivant à
la cour des
empereurs,
ne pouvaient pas dire toute la
vérité
~ 7 (29). Sa conclusion est
d'ailleurs sans appel:"Il vaut •..
mieux,
au lieu de recevoir une
opinion toute faite,
se la
faire soi-même,
et c'est ce que nous rend
possible la lecture des lettres de Cicéron.
Elle nous
jette au milieu
des évènements,
et nous les fait
suivre
jour après
jour"
(30).
Cependant,
l'exploitation de
la Correspondance,
comporte
des difficultés que nous ne saurions taire plus
longtemps.
Ces dif-
ficultés tiennent pour l'essentiel à
une simple interrogation:
com-
ment arriver à
expliquer sans sombrer dans l'approximation,
la
réelle situation des esclaves tout au
long de la période concernée,
en nous basant sur des écrits émanant d'hommes appartenant
à un rang
social précis 7 En
effet,
en même temps que Cicéron,
tous ses cor-
respondants font partie de ce que nous pouvons appeler
la bourgeoisie,
c'est-à-dire ce milieu huppé,
où sénateurs et chevaliers rivalisent
d'ardeur,
dans
le maintien de leurs
intérêts.
Presque tous entretiennent des esclaves et même des affran-
chis.
Ainsi,
quand
i l arrive à
Cicéron de parler à
l'un de
ses
inter-
locuteurs,
en dehors des problèmes politiques et
de vie courante,
c'est pour faire part d'un affranchissement
(31),
du
besoin pressant
de disposer de quelques esclaves
(32),
ou encore de l'activité de
Tiro
(33),
des tribulations de Chrysippus
(34),
de Philotimus
(35) ..
L'autre problème que
pose
la Correspondance de Cicéron,
c'est l'inexistence des lettres de certains de ses interlocuteurs.En
effet,
nous savons que lors des maladies dont fut
victime Tiro
par
exemple,
Cicéron entretenait un
échange épistolaire
relativement
régulier avec lui
(36).
Et il en fut
sans doute de même pour les au-
tres esclaves,
surtout lettrés.
Mais aucune lettre émanant d'eux,
n'est publiée.
La constatation de M.
Lengellé est sur ce point,
d'u-
ne profonde lucidité:
"Le plus
impressionnant dans l'étude des cons-
titutions,
c'est le silence historique des
esclaves.
De ces hommes
qui ont pourtant été victimes de la plus implacable des exploitations
sociales,
ne monte aucune amertume"
(37).
. .. / ...
-
1 1
Certes,
pour tenter de combler ce vide,
nous
pouvons recourir aux
comédies de Plaute,
inspirées des comédies grecques et qui
présen-
tent
l'avantage de
laisser s'exprimer les esclaves,
comme ici,
où
Sosie donne ses impressions sur les moeurs de ses maîtres
:
Qui me alter est audacior homo aut gui confidentior,
Iuuentutis
mores gui
sciam,
gui
hoc noctis solus ambulem ? Quid faciam,
nunc
si tresuiri me in carcerem compegerint ?
Inde cras quasi
e
promp-
tuaria cella depromar ad flagrum-.
Nec causam liceat dicere mihi
neque in ero quicguam auxili siet.
Nec quisquam sit quin me
(malo)
omnes esse di
num de utent.
In
uasi
incudem me mi serum homines
octo ualidi caedant
3 8 .
Mais cela ne résoud
toujours pas le problème posé par leur
silence.
D'ailleurs,
les esclaves ne sont pas les seules victimes
de cet écartèlement.
Les Romains les moins pourvus,
en d'autres ter-
mes,
ceux qui
n'avaient pas la possibilité financière
de
se procurer
des
esclaves en abondance,
ne figurent
pas dans la Correspondance
de Cicéron.
Est-ce à
dire qu'il n'a entretenu aucun lien avec
eux?
Ou
les
ignore
t - i l
volontairement? La seconde hypothèse,
semble la
plus vraisemblable.
Ce lourd silence,
pèse également sur les épouses des af-
franchis,
et même
sur leurs relations féminines.
A première vue,
l'on
serait
tenté de dire qu'aucun affranchi de Cicéron ou de
l'un de ses
correspondants,
ne consola en
justes noces.
Hypothèse
invraisemblable,
car si Tiro par exemple continua
jusqu'à la mort de son maître puis
patron à
vivre
sous son couvert,
se soumettant ainsi
peut-être au
re-
fus
de celui-ci de se marier,
d'autres affranchis
tels que Hil~us,
Chrysippus,
Philotimus,
furent
parfois libres de leurs mouvements.
Par voie de conséquence,
se sentant et se sachant
liberti,
ils au-
raient pensé
à
trouver une épouse.
A moins que Cicéron et
tous ses
correspondants aient
imposé dans le
ius
iurandum liberti,le célibat
absolu!
Il ,n'est
pas
impensable qu'ils se fussent
comportés ainsi,
car ils savaient que
la libertinité
(39)
n'annulait pas
l'imperium
patroni.
Et cet imperium ne pouvait
pas s'exercer amplement,
si
l'affranchi avait pris des engagements familiaux
de par le mariage.
De plus,
n'oublions pas que c'est seulement à
partir de
l'époque au-
gustéenne,
que
les
lois
rulia de maritandis ordinibus et' Aelia Sentia
défendirent sous des peines sévères,
en particulier celle de
la per-
te de l'héritage,
d'imposer à
l'esclave au moment
de
l'affranchisse-
ment,
le serment de
ne point se marier,
ou' de ne se marier qu'à telle
date,
avec
telle femme.
Que vise donc en définitive cette limitation d'interlocu-
teurs ?
Sans prétendre y apporter une réponse définitive et figée,
nous
serions tentés d'y voir la manifestation d'une
logique simple
celle qui
tend à ne laisser s'exprimer qu'un
groupe social précis,
pour maintenir sous l'éteignoir tous
les autres,
les reclus de la
société et leurs
infirmités.
Par cette pratique,
Cicéron et ses con-
génères veulent
à n'en point douter,
laisser à
la postérité leur
empreinte exclusivement et effacer de la mémoire
collective,
celle
... 1...
-
12
-
de
tous ceux qui appartiennent à des moules différents
pauvres,
esclaves,
femmes •••
Mais qu'en disent
les Traités?
b)
Les
Traités
Il
s'agit de
toute la
réflexion philosophique de Cicéron
sur une variété de questions,
le fruit
d'une expérience et d'un en-
seignement reçu au-travers des
philosophes grecs comme Molon,
Dio-
dote,
Antioche,
Platon,
Aristote,
Dicéarque,
Arcésilas,
Carnéade
et les différentes écoles où
tous
ceux qui étaient avides de connais-
sances, allaient s'abreuver.
Mais de tous les détenteurs du
savoir
en Grèce,
Platon fut
dans la pensée de Cicéron,
celui qui bénéficia
de toute son admiration.
Son autorité sur lui fut
tellement grande
(40),
qu'il n'hésita pas à recourir à sa méthode non seulement pour
composer des livres,
mais aussi
pour adopter une attitude particu-
lière.
Le De
leqibus et le De Republica en sont un exemple frappant.
Ouvrages composés après que
l'Arpinate eut connu toutes les
vicissitudes du cursus honorum ainsi que ses délices,
après qu'il
eut
bataillé fort
pour le soulagement de la République et le salut de
tous
(41 ),ils se conçoivent
tous
les deux sous la forme
d'un dialogue
-
comme chez
Platon
-.Une différence cependant,
entre Cicéron et Pla-
ton:
le fondateur
de
l'Académie bâtit sa cité idéale en dehors de
la vie réelle,
en se basant sur une
pure et simple spéculation:
la
direction de
la cité par les poètes.
Cette
préférence pour les poè-
tes,
n'est pas le fait
d'un
hasard.
Ayant connu
les diverses
péripéties de l'histoire athénien-
ne par le renversement de la démocratie
et
l'affermissement de l ' o l i -
garchie des Quatre cents,
ayant
vécu
la combinaison de
l'oligarchie
et de la démocratie de même que l'établissement du
gouvernement des
Trente sous les auspices de ~ysandre, Platon constate amèrement la
corruption et la ruine de la cité.
Il
ne peut rester insensible à
la tyrannie des Trente et à la condamnation de
Socrate,
expression
de l'injustice de l'oligarchie et de la démocratie.
Lointaine est
la période dite d'âge d'or,
où
les
hommes réunis par groupes de qua-
tre ou cinq,
ne
se préoccupaient que de
leur alimentation quotidien-
ne,
de leur logement,
de leurs vêtements et
ne se nourrissaient que
d'orge,
de froment,
de légumes
et de fruits.
Dans une cité où désor-
mais tout cela a
"battu en retraite",
seuls
la musique,
le don des
muses,
toute cette culture de l'esprit,
sont susceptibles selon Pla-
ton,
de créer une atmosphère de
béatitude.
En dehors de Piaton dont
i l s'est
inspiré,
Cicéron a aussi
utilisé les
procédés d'autres savants grecs pour la composition de
ses oubrages théoriques,
à tel point que certains chercheurs, parlè-
rent de compilation.
En fait,
toute cette hargne studieuse,''Tépond
à un amour immodéré de la philosophie.
Il ne s'en cache pas:
"Assurément i l existe une médecine de
l'âme,
la philosophie .
. ../ ...
-
13
-
Pour en avoir le secours,
i l n'y a
pas,
comme
pour les maladies du
corps,
à s'adresser au-dehors, et nous devons déployer toutes nos
ressources et toutes nos forces
pour nous mettre en état de nous
soigner nous-mêmes ..• "
(42).
Et au moment de cette profonde crise
romaine,
seule la
philosophie lui permet d'oublier
les affaires du
forum
où
le
lan-
gage des armes a
supplanté toutes les formes
de vertu.
Tout l'inté-
rêt de ces ouvrages,
réside dans la place que tient
l'homme,
la ré-
flexion qui est faite
sur son essence,
sur sa condition et en f i l i -
grane,
comment
les Grecs à
travers leurs différentes
écoles,
ont
débattu de ce problème de l'esclavage.
Deux tendances principales
émergent de l'oeuvre cicéronienne:
l'épicurisme et le stolcisme.
A cette dernière,
se greffent
les péripat~ticiens
les doctrines
de l'académie et du
lycée,
dont
la primauté de
la pensée peut être
confiée à
Socrate
(43).
En fait,
quel
est le point de divergeence
de ces deux
tendances ? Il se trouve dans la démarche choisie par
l'une et l'autre d'entre elles.
En effet,
alors que l'épicurisme s'appuie sur la matière,
les atomes,
leur conférant ainsi
la paternité de l'univers,
le stol-
cisme par contre,
croit en l'existence d'une
force
immanente,
d'un
ordre divin régissant
le monde et responsable de tous
les comporte-
ments humains.
Mais au-delà de ces disparités de
raisonnement,
elles
cherchent une même f i n :
l'atteinte du
souverain bien,
dont
seul le
sage peut avoir la capacité.
Comme l ' a si
bien dit
A.J.
Voelke,
"ils adoptent vis-à-vis du sage •.• ,
la même attitude l1
(44).
Séduit par le stolcisme,
Cicéron s'y attacha pour modeler
sa pensée.
Ainsi,
dans cet univers où
l'homme apparaît comme l'égal
de l'homme puisque doté de raison et
issu
de Dieu,
la négativité
de l'esclavage fait
l'objet de
longs développements.
Les
Discours
d'ailleurs,
poursuivent et achèvent d'une certaine manière,
cette
même logique.
c)
Les
Discours
Dans l'antiquité romaine,
deux possibilités s'offraient
au ciuis
romanus désireux de faire une brillante carrière
:
les
armes ou
l'éloquence.
Cicéron opta pour la seconde.
Le champ d'ap-
plication de l'éloquence,
était
le forum.
C'est là que se débat-
taient les affaires politiques et
judiciaires.
Celles auxquelles
l'Arpinate prit part,
sont rassemblées au
sein des Discours.
Ces Discours présentent une difficulté énorme:
la fluc-
tuation de l'argumentation.
Selon qu'il défend
un de
ses amis,
un
sympathisant des optimates, ou
quelqu'un d'autre ayant une quelcon-
que relation avec
lui et pour le même problème,
la position de
cicé-
ron varie s ' i l a
en face de lui un adversaire.
Autant
i l
est capa-
ble de hurler dans une plaidoierie contre un
fait
qu'il
juge
inique,
autant i l
peut le couvrir quand l'intérêt de
son client
l'exige.
Nous en avons un exemple dans le Pro Fonteio.
Fonteius,
accusé
de
concussion par ses administrés,
fut
blanchi à
l'issue d'une véhémen-
te défense cicéronienne
:
"Personne,
non,
personne,
je l ' aff irme
juges,
ne se trouvera pour dire qu'il
a donné
un seul
sesterce à
... / ...
-
14
-
Fonteius pendant sa questure ou que celui-ci a
détourné quelque cho-
se des sommes
payées par le
trésor public"
(45).
Pourtant,
quelque temps auparavant,
il avait vitupéré
Verrès pour entre autres,
les mêmes faits.
Il en es~ ?u;si du Pro
Milone,
procès essentiellement de ui.
Avec une dexterlte et,u~e
profusion de mots familiers,
ord~naires, en conco:tan! u~ :e~lt
vraisemblable
Cicéron s'attela a
prouver ou plutot,
a
legltlmer
l'assassinat de Clodius.
Les esclaves sont eux aussi
l'objet de cet-
te versatilité.
S'il est des passages où il
les admire,
les félicite,
les défend même comme dans
le Pro cluentio à
la suite de la particu-
lière inhumanité dont a
fait
preuve Sassia en appliquant
la quaestio
à un esclave
(46),
i l en est d'autres où il
les attaque,
allant
jus-
qu'à encourager ce type de p~atique: " Je te le d eman d
e O "
pplanlcus,
qu'a-t-on fait
selon toi,
de ton esclave Nicostratu 7, l~i que, a~ant
l'intention d'accuser avant
peu mon client,
tu auralS du amener a
Rome,
mettre en état de faire des révélations,
enfin garder précieu-
sement pour l'interrogatoire,
pour les
juges que voici,
pour le mo-
ment présent
?"
(47)
Cette attaque prend surtout du
relief,
quand i l s'agit des
esclaves des mali:
Clodius,
Catilina,
Gabinius,
Pison,
Marc
Antoine ..
A la suite de
leurs maîtres,
ils sont alors peints comme
l'incarnation du malheur,
ceux
par qui arrive la chute de la Répu-
blique.
Et dans
les procès où
les mali sont mis en cause,
l'Arpina-
te excite la haine des
jurés et de~s les assistants contre eux
(48) •
Mais au-delà de cela,
il faut
reconnaître que
les Discours
sont d'abord une sorte de répertoire de
toute la législation romai-
ne,
depuis
les stipulations de
la loi des XII
Tables,
-
l'antique
code romain
-,
jusqu'au droit prétorien,
en passant par
le droit
civil.
La connaissance de
la
jurisprudence était d'autant plus im-
portante pour l'~orateur, qu'il devait avoir la parfaite maîtrise
non seulement des coutumes,
mais aussi
de la constitution
(49).
Le séjour de Cicéron chez
les
Scaeuola et les entretiens
qu'il avait avec certains de ses compatriotes versés dans le droit,
lui permirent de remplir cette obligation et de s'ériger en
"maître
de barreau".
En dehors de
la Correspondance,
des Discours et des
Traités sur lesquels nous nous sommes
appuyé au premier chef pour
décrypter la conception de
l'esclavage chez
Cicéron,
notre recher-
che nous a aussi conduit
à
accorder un
intérêt aux historiens de
la fin
de la République.
3.- Les Historiens de la fin de la République.
Postulatur a
te iamdiu uel flagitatur potius historia.Sic
enim
utant
te illam tractante effici
osse
ut
in hoc etiam
enere
Graeciae nihil
cedamus
5 0 ,
déclara Atticus à Marcus.
Cette demande
est l'expression de l'inexistence d'ouvrages purement historiques à
Rome et
par voie de conséquence,
de son
infériorité par rapport à
la
Grèce où Hérodote,
Thucydide,
Philistos et d'autres historiens,
avaient déjà fait
un certain nombre de publications.
C'est seulement
après la mort de Cicéron,
que l'histoire romaine devint un genre l i t - ~
ttéraire,
sous l'impulsion de Salluste,
César,
Pline l'Ancien,
Tite-
Live essentiellement.
L'histoire de Rome des origines jusqu'à l'an
9 av.
J-C.,
telle fut
la grande oeuvre à laquelle se consacra Tite-
Live.
. .. / ...
-
1 5 -
En effet,
à l'instar de tous ses contemporains,
Tite-Live a vécu
jour pour
jour l'e~périence cruelle de la dégénérescence de l'Urbs.
A Padoue sa ville natale,
sa
jeunesse s'est écoulée dans
la contem-
plation béate de la consomption graduelle de
la Cité par le biais
des guerres civiles et de
la dégradation de
la uirtus romana.
Cette
contemplation du "monde à
l'envers",
l'amena à
livrer
par écrit ce
qu'il a
vu,
à montrer comment de cité où i l
faisait
bon vivre,
Rome
se désagrégea et devint repoussante.
Quant à Salluste,
i l traite un pan de
l'histoire de la fin
de la République,
qui
nous
intéresse au
plus haut point dans notre
t r a v a i l :
la conjuration de Catilina.
Candidat malheureux aux élec-
tions consulaires,
Catilina ourdit une
insurrection contre Rome,
as-
sociant toute la lie de
la population:
gens écrasés de dettes,
es-
claves,
affranchis entre autres.
Salluste nous met donc
en contact
avec cette année 63 av.
J-C.,
pendant laquelle Cicéron et
Antonius
présidaient aux destinées de la Cité.
Les objectifs de Catilina,
le
contenu de sa propagande,
le programme de
ses divers
lieutenants,
tout cela a
été minutieusement analysé.
Compte tenu de
l'animosité que Salluste nourrissait à l ' é -
gard de Cicéron,
nous nous
serions attendu
à une cam~agne de déni-
grement vis-à-vis du consul de 63 et par
là même,
à ~ne réhabilita-
tion des conjurés.
Mais
i l
n'en est
rien.
L'oeuvre de Salluste com-
plète donc sur beaucoup de
points,
le plaidoyer de Cicéron contre
Catilina et mérite de ce fait,
une particulière attention.
Cependant,
si
notre confiance est entière à
l'égard de
Salluste,
elle l'est moins à
l'égard de
Tite-Live.
Laissons parler
Pline l'Ancien,
avant de formuler
notre
point de vue
:"
Je m'étonne,
j'en conviens,
de voir un auteur aussi
illustre que Tite-Live com-
mencer un volume de
son
"Histoire de Rome depuis sa fondation"
en
disant
"qu'une gloire suffisante lui était déjà acquise
et qu'il
se
serait arrêté,
si son esprit ennemi
du
repos
ne
trouvait
son ali-
ment dans
le travail".
Car
i l eût certainement mieux
fait
d'écrire
ces livres pour la gloire du
nom Romain ••.
Il eût été plus méritoi-
re d'avoir persévéré par amour
pour
l'oeuvre,
non
par satisfaction
personnelle,
et d'avoir
fait
ce travail
pour le peuple romain et
non pour lui-même
(52).
Si l'on en croit Pline l'Ancien,
c'est en vue du
délasse-
ment que Tite-Live se serait engagé dans son entreprise.
Or,
écrire
par plaisir,
peut comporter le danger de
ne
pas avoir présent à
l'esprit le souci d'objectivité,
de
la rigueur scientifique et de
la vérification de
l'authenticité des éléments contenus dans les
documents sur lesquels s'appuie pour construire
le texte.
Et c'est
justemenit le reproche qlJe J .M.
André et
A.
Hus ont fait
à
Tite-Live.
(53) •
De plus,
Tite-Live a appartenu
à une période où
la fin de
la République s'étant dirons-nous,
prononcée,
l'Empire avait déjà
pris naissance.
L'harmonie
sociale
installée par l'empereur Auguste,
avait gagné les couches sociales.
. .. / ...
-
16
-
L'empereur s'étant efforcé de circonscrire les maux de la Républi-
que en'~reconstruisant l'Etat sur les bases de la moralité et de
l'ordre,
une telle atmosphère aurait pu
"jouer"
sur son subcons-
cient,
pour aiguillonner ses points de vue,
ses opinions et ses rai-
sonnements.
La prééminence de cette tendance à la subjectivité,
appa-
raît marquée dans la Guerre des Gaules et la Guerre Civile de César.
Les Gaulois ayant été pour
les
Romains d'irréductibles ennemis,
César entreprit pendant sa campagne,
et dès sa victoire sur Vercin-
gétorix
à
l'automne
52, d'en raconter les épisodes au public romain,
qui
jusque là,
n'avait connu le déroulement des combats du proconsul
que par des nouvelles tendancieuses.
De plus,
i l fallait
préparer le
retour à Rome et par ces récits où l'on voyait le féroce Gaulois
plier l'échine,
conditionner en quelque sorte
l'opinion pour une se-
conde candidature au Consulat.
Dans
la perspective d'un succès,
i l
y avait donc pour César,
tout intérêt à
récolter le maximum d'admi-
ration,
quitte à grossir démesurément les évènements et à introduire
des
inexactitudes ou des omissions conscientes.
Cela est d'autant
plus possible que de
toute la guerre,
César n'aurait
pas eu la capacité de
tout retenir,
de mémoriser les
données
topographiques,
le déroulement de la bataille contre tel ou
tel
peuple,
telle ou
telle ville.
Au-delà du caractère
historique indéniable de cette oeuvre
de César,
on retrouve une certaine
partialité également dans la guer-
re civile où César et Pompée à la tête de leurs légions,
portèrent
un coup fatal à
Rome.
Sans
rien
nous apprendre sur les origines de
la
guerre,
cet: ouvrage débute
par l'ultimatum de retour -
retour simul-
tané des deux adversaires à
la vie
privée et la réaction de César si
le Sénat lui enlevait son gouvernement
-,
les campagnes de 49 et 48,
la mort de Pompée,
les épisodes de
la guerre d'Alexa~drie, mais ne
donne aucune information sur le dénouement de cette guerre.
Et comme
le dit
Asininus Pollion,
"ces commentaires ont été composés avec
trop de soin et trop peu de
respect pour
la vérité,
car la plupart
du
temps César a enregistré sur parole,
sans contrôle,
les actions
des autres;
quant aux siennes,
soit à dessein,
soit même
faute de
mémoire,
il
les a présentées de
façon
inexacte"
(54).
Sur ce point,
M.
Rambaud abonde dans le même
sens,
en déclarant que:
"César faus-
se le
jour sous lequel apparaissent
les Pompéiens.
Dans un récit où
règne la préoccupation de légitimer
les entreprises de
l'ambitieux,
en montrant que
tout le monde les applaudit,
i l n'y avait
pas de pla-
ce pour décrire
l'esprit du
parti adverse et analyser le moral
des
partisans.
La plus grande habileté,
consistait à écrire comme si
l'adversaire n'existait pas"
(55).
Ce faisant,
une certaine circonspection doit
être de
mise
quant à leur exploitation.
Car pour parler comme J.
Carcopino qui
faisait
allusion à
l'histoire diplomatique,
"les textes
ne
nous of-
frent qu'un aspect
fragmentaire
et suspect de réel.
N09archives . . .
ne gardent pmint les paroles qui
ne
furent
pas
écrites.
Ainsi,
nous
ne découvrons dans
les documents officiels,
que la vérité officielle,
. . ./ ...
-
17
-
et celle-ci
peut n'~tr~ pas la v~rit~" (56). C'est pour arriver
à saisir la r~alit~ qui se cache derrière les mots et derrière les
faits auxquels tous les
"documents officiels" font
r~f~rence, que
nous avons
pens~ devoir nous int~resser aussi aux auteurs grecs.
4.- Les Auteurs
Grecs
La question de
l'esclavage,
avant d'~tre longuement d~bat
tue à Rome à
partir de
la fin
de
la République,
l'avait d'abord ~t~
en Grèce.
Aristophane,
Platon,
X~nophon, Aristote ••• , s'en ~taient
au
pr~alable int~ress~s d'assez près, chacun essayant d'apporter sa
conception sur un sujet d'une aussi grande envergure.
Dans le cadre
de
notre ~tude, nous nous sommes efforc~s de nous apesantir sp~cia
lement sur X~nophon, par le biais de son oeuvre,
l'Economique et
sur la Politique d'Aristote.
L'Economique se pr~sente sous une forme de dialogue où
interviennent Socrate,
Ischomaque,
Critobule et où sont abord~es des
questions essentiellement agricoles.
Propri~taire terrien, X~nophon
s'int~ressait aux conditions techniques et morales qui permettaient
à
un agriculteur de tirer de son bien,
le meilleur profit.
Ainsi,
par la bouche de Socrate,
i l exalte les avantages de
l'agriculture,
ce laborieux et doux commerce que
l'homme entretient avec
la
terre,
expose la doctrine agricole et les conditions à
remplir pour
instau-
rer l'ordre et la discipline dans
un domaine
l'autorit~ par la
douceur,
plutôt que par la force
brutale.
A première vue,
un anachronisme frappant,
apparait dans
l'oeuvre
de
X~nophon : le fait d'avoir fait endosser à Socrate la
"veste" d'agriculteur et donc de parfait connaisseur de
la nature
des terrains,
des
labours,
de
la
jachère,
des semailles,
de
la mois-
son et des
battages.
Dr l'on sait que
Socrate n'avait rien d'un
agriculteur.
Lui-m~me le dit à Ischomaque : "Je ne vois pas .•
fondre
de l'or,
jouer de
la flûte
ou peindre un tableau.
Personne
ne m'a enseign~ ces arts,
pas
plus qu'à
cultiver
la
terre,
mais
je
regarde
tous ceux qui
travaillent
la terre"
(57).
Pourquoi avoir fait
parler Socrate en agriculteur
et non
en citadin? L'intervention de
Socrate,
avait été
sans doute moti-
vée par
le besoin de donner du
poids à
ses ~crits. X~nophon ~tait
conscient du fait que
la popularit~ de Socrate avait atteint une
dimension telle qu'en
l'insérant dans son oeuvre,
le message
qu'il
souhaitait transmettre,
b~néficierait d'une incontestable crédibili-
t~. Platon s'en était aperçu quand il avait écrit son Apologie.
Certes,
ayant butiné à la source de la science de Socrate,
il voulait
réhabiliter
son maître;
mais
i l voulait aussi
profiter
de la renomm~e de' celui -ci pour mieux atteindre sorl public .
. Ce public qui
en grande partie,
avait ét~ choqué par l'injus-
tice dont fut victime Socrate,
culpabilisé parce que n'ayant
pas
voulu reconnaître comme dieu~, ceux de la cit~.
. .. / ...
-
18
-
La Politique d'Aristote par contre,
aborde un problème
d'un autre genre:
la vie de la cité.
Considérant
l'homme comme
un animal politique
(58)
et donc comme
incapable de se dérober
face
à tous les problèmes touchant la société,
le stagirite passe
en revue les différentes composantes de la cité,
à
la tête des-
quelles
i l place la famille,
en
faisan~ lq matière du bourg et en
même
temps,
la plus petite cellule du corps social.
Puis,
vient
l'esclavage,
fait
entre
tous naturel
et universel:
" ••• Tels enco-
re pour leur conservation,
l'être qui
par
nature commande et l ' ê -
tre qui obéit.
L'être qui,
grâce à
son
intelligence est capable de
prévoir est chef par nature,
maître par nature;
l'être qui,
grâce
à
sa vigueur corporelle est capable d'exécuter est
subordonné,
es-
clave par nature ••• "
(59).
L'esclavage est donc
juste et utile à
l'esclave comme au
maître,
s ' i l est fondé
sur cette supériorité.
Mais si
par hasard
l'esclave devient moralement
l'égal de son maître,
i l a
droit alors
à la liberté (60).
Sur ce second plan,
la théorie d'Aristote se pose
comme
le point de départ de
tout le
rouleau d'humanisme qui déferle-
ra plus tard sur le monde romain.
5.- Les
Auteurs Contemporains
Nombreux
sont ceux qui ss sont
intéressés à
plusieurs
questions touchant à
la fin
de
la République.
I~ais la fécondité de
la recherche et le flux
des publications ne nous auront pas permis
au cours de ces années d'études,
de
parcourir
toute
la documenta-
tion faite
sur cette période.
Aussi,
ne nous sommes-nous
conten-.
té que de quelques éminents analystes et autres politologues tels
que J.
Carcopino,
G.
Bloch,
G.
Dumézil,
J. Gagé, R. Syme ••• A eux,
nous avons également
joint des auteurs ayant abondamment publié sur
l'esclavage et ayant donc apporté
la
lumière
sur des points impor-
tants de cette institution.
C'est d'ailleurs dans
cet ensemble que
nous
rangeons ceux que
nous appelons
les tenants de
l'école de
Be-
sançon,
c'est-à-dire tous
les chercherus qui depuis 1970,
font
avan-
cer la connaissance sur l'esclavage en publiant
sous le
label de
Besançon,
leurs communications.
Bien entendu,
la plupart d'entre
elles sont plutôt orientées vers l'idéologie marxiste,
donnant
par
là même,
une certaine coloration à
l'action des
esclaves.
C'est
d'ailleurs dans ce groupe que
nous
rangeons M.
Lengellé,
qui en par-
lant des
révoltés de Sicile et d'Italie du
Sud,
déclare:
" •••
De
ces hommes qui ont pourtant été victimes de la plus implacable des
exploitations sociales,
ne monte aucune amertume,
aucun programme
révolutionnaire.
Il ne nous est
rien
resté des paroles enflammées
d'Eunnus de Sicile ou
de Spartacus.
Npus sommes dans l'ignorance
absolue de programmes égalitaires autour desquels
les esclaves si-
ciliens,
les gladiateurs et les pirates ont pu
se grouper"
(61) .
. ../ ...
-
1 9
-
Cependant,
elles sont d'une profonde richesse et d'un
intérêt de premier plan.
Trois parties essentielles,
constitueront l'ossature de
notre travail.
Dans la première,
nous chercherons à savoir si l'es-
clavage est bien une notion d'infériorité ou au contraire, de
supé-
riorité ou mieux,
les deux à
la fois.
Il s'agira pour cela d'y ap-
porter les
justifications et les principales manifestations,
en
précisan~~ selon quel processus se formèrent ces conceptions, comment
cicéron
jugeait les esclaves,
selon quels critères et
si ces critè-
res s'appliquaient à
ses esclaves uniquement ou aussi,
à ceux des
autres.
En d'autres
termes,
Cicéron,
avait-il une idée figée
sur
la gent servile? Sa conception était-elle motivée par des princi-
pes globalement partagés ou plutôt par ses humeurs du moment
? Dans
un autre ordre d'idée,
le citoyen,
-
le ciuis romanus
-
était-il,
de par son statut,
à
l'abri d'une descente dans le monde des escla-
ves ? C'est donc à
la fois
le monde interne et externe de Cicéron
qu'il
faudra
examiner de près, ausculter et contourner,
pour espé-
rer en retirer la
"substantifique moelle".
Nous en profiterons pour
examiner les
idées philosophiques mises en application,
en nous
apesantissant sur celles ayant rapport avec l'homme.
La violence qui formera
le noeud de notre seconde partie,
en sera une sorte de prolongement;
car là aussi,
nous aurons
la
possibilité de voir quelle place les esclaves occupaient dans
l'em-
brasement,
l'explosion de la uis q~1 gangréna Rome à la fin de la
République.
A une époque où l~conflits politiques s'exaspéraient,
où la violence se généralisait à l'intérieur des murailles de
l'Urbs,
nous tenterons de savoir comment intervenaient les esclaves
:
est-ce
comme masse de manoeuvre ou plutôt comme élément conscient,
revendi-
quant une participation active dans
la vie de
la c i t é ? Dans le mêffie
ordre d'idée,
nous examinerons la procédure mise en place pour sanc-
tionner les fauteurs de trouble parmi lesquels se trouvaient des
esclaves.
En quoi consistait cette procédure?
Enfin,
la troisième partie sera consacrée à
l'affranchis-
sement,
pratique au-travers de laquelle les esclaves quittaient en
principe le monde de
l'infériorité,
pour s'agréger à celui des li-
bres.
Par la
seule uoluntas du maître,
ils accèdent à
la liberté:
de serui,
ils deviennent
liberti,
dotés d'une personnalité
juridi-
que et d'un caput,
c'est-à-dire de leur qualité d'homme,
conçu à
la fois comme entité biologique et
sociale.
Dès
l'abord,
comprenant un
élément unique,
leur onomas-
tique s'enrichit et prend une autre
dimension,
en se
trouvant
renfor-
cée par un nomen-gentilicium et un praenomen.
Cette transformation,
libère
t-elle
toujours un dépendant
? La tare servile contractée
pendant plusieurs années,
disparaît-elle pour sa part?
.... / ...
-
20 -
Notre modeste niveau de
latin,
nous a
souvent conduit
à nous fier à la traduction proposée par la collection G.
Budé
(C.U.F.),
à laquelle nous avons de temps en temps associé celle
de Garnier Frères,
tout en essayant d'y remédier par des ajuste-
ments que nous
jugions nécessaires à la compré~en8ion de notre
démarche.
De même,
le handicap de
la langue ne nous a
pas permis
d'utiliser aussi abondamment que nous l'aurions souhaité,
la docu-
mentation autre que celle écrite
en français,
même si nous avons
recouru souvent,
à celle écrite en anglais. Que les lecteurs
veuillent donc nous en excuser.
*********************
-
21
1-
(Y.A)
Dauge,
Le barbare,
Recherches sur la conception romaine
de la barbarie,
p.5
2-
Vie et ~~rt des esclaves dans la Rome antique, p.7.
3-
Cette opinion est largement
partagée par
les romanistes.
Il
suffit de
lire
singulièrement les
Actes du
colloque sur
l'esclavage tenus à Besançon,
en 1970-71-72-73,
pour s'en
rendre compte.
4-
"Contribution à l'étude de
l'esclavagisme:
la
propriété
esclavagiste chez
Cicéron"
in Texte,
Politique,
Idéologie
Cicéron,
p.40.
5-
Att.,
l,
16, 7.
6-
ibid.,
IV,
18,
2
:
Amisimus mi
Pomponi,
omnem non modo sucum
ac
sanguinem sed etiam colorem et speciem pristinam ciuitatis,
Nulla est
res p.
quae delectet,
in qua acquiescam.
7-
II.
Philip.,
XXII,
54.
8-
Pra~f., p.3
: . . .
Legentium plerisque haud dubito quin primae
origines proximaque originibus minus praebitura uoluptatis
sint,
festinantibus ad haec noua quibus
iam pridem praeualen-
tis
populi uires se ipsae conficiunt.
9-
IDe Leg.,
X,
29
:
Nihil
est enim unum uni
tan
simile,
tam par
quam omnes inter nosmet ipsos sumus.
10-
Q. f r . ,
l,
l,
17
:
Quo me animo in seruis censes? Quos quidem
cum omnibus in locis tum
praecipue in prouinciis
reqere debemus.
11-
Les
secrets de
la Correspondance de
Cicéron,
p.
374.
12-
Cicéron et ses amis,
p.
19
13-
De orat.,
II,
55
14-
De Diu.,
l,
50,
15-
De off.,
III,
113
; . . .
bonus auctor
in
primis,
16-
H.I.
Marrou,
"Défense de Cicéron"
in R.H.,
1936,
p.
72
17-
Comm.,
Pet.,
XII,
46,
18-
H.I.
Marrou,
De la connaissance historique,
p.
98 .
.../ ...
••
-
22
-
19-
De con.,
Cat.,
III,
57
;
Tamen imprimis arduum uidetur
res
gestas
scribere
:
primum,
guod facta dictis exaeguanda sunt
dehinc,
guia plerigue,
guae delicta reprehenderis,
maliuo-
lentia et inuidia dicta
pu tant
20-
Ciceron;
106-43 av.
J-C,
21-
La vie sociale à Rome au temps de Cicéron.
22-
op,
cit,
23-
"Cicéron et l'esclavage"
in
Actes du colloque d'Histoire
sociale, 1970,
p.
83,
24-
Correspondance T,
l ,
p,57,
25-
Cet avis est surtout émis par J.
Carcopino, ~0~p~,~~c~i~t_.,p.385 sq
26-
Att.,
1 , 1 8 , 1
Nihil
mihi nunc scito tam deesse quam hominem
eum guocum omnia guae me cura aligua adficiunt una communicem,
gui me amet,
gui
sapiat,
guicum ego cum loguar,
nihil fingam
nihil dissimulem,
nihil
obtegam.
27-
ibid.,
Tu autem gui saepissime curam et angorem animi mei
sermone et consilio leuasti
tuo,
gui mihi et in publica re
socius et in priuatis omnibus conscius et omnium meorum
sermonum et consiliorum particeps esse
soles,
urbinam es ?
28-
i b i d . ,
l,
6,
2,
:
q. frater, ut mihi videtur, quo uolumus
animo est in Pomponiam et cum ea
nunc
in
Arpinatibus praediis
erat,
29-
op,
c i t . ,
p,
2,
30-
ibid,
31 -
Att.,
IV, 15,
l
:
De Eutychide qratum,
qui uetere praenomine,
nouo nomine Titus erit Caecilius,
ut est ex me et ex te
iunctus
Dionysius M.
Pomponius,
32 -
Q.
f r . ,
III, 7,
4
:
De
manciplls guod mihi
polliceris,
ualde
te amo et sum equidem,
uti scribis,
et Romae et
in
praediis
infreguens.
33-
Att.,
VII,
7
;
VIII,
6,
Fam.,
XVI,
14
;
XVI,
15,
34-
frET.,
VII,
2,
35-
ibid.,
V,
8,
... / ...
,- ',
-
23
-
•
36-
Par exemple en 50-49 av.
J-C,
Fam.,
XVI, 1
(2 nov,
50)
Fam. ,
XVI,
2
(5 nov,)
Fam. ,
XVI,
3
(6 nov,)
Fam. , XVI, 4
(7 nov,)
Fam. ,
XVI,
5
(7 nov,)
Fam. ,
XVI, 6
(7 nov, )
Fam. ,
XVI,
7
(1 6 nov, )
37-
L'esclavage, p. 42.
.
38-
Amphitryon
1 , 1 ,
v • 151-160
;
39-
Ce terme est fr~quemment employ~ par un_certain nombre de
romanistes,
pour désigner le fait d'être libertus.
C'est
pourquoi, nous l'incluons dans notre vocabulaire.
40-
Fam., 1, 9, 18 ; Id enim iubet eidem ille Plato, quo ego
uehementer auctore moueor.
41-
In Q.
Caec.,
III, 9 : Fateor me salutis omnium causa ad eam par-
Item. accessisse rei publicae subleuandae quae maxime laboraret.
42-
III Tusc.,
III, 6 : Est profecto animi medicina,
philosophia
cuius auxilium non ut in corporis morbis petendum est foris,
omnibusque opibus uiribus ut nosmet ipsi nobis mederi possimus
elaborandum est.
43-
l
Acad.,
III,
l, 21
; Socrates mihi uidetur,
id quod constat
inter omnes, primus a rebus occultis,
et ab ipsa natura inuolutis
in quibus omnes ante eum philosophi occupati fuerunt,
auocauisse
philosophiam, et ad uitam communem adduxisse,
44-
Les rapports avec autrui, dans la philosophie grecque d'Aristote
à Panétius, p, 78.
45-
Pro M. Font.,
II,
3 :
Nemo,
nemo,
inquam,
iudices,
reperietur
gui unum se in guaestura M.
Fonteio nummum dedisse aut ilIum
ex a ea pecunia guae pro aerario solueretur detraxisse dicat.
46-
LXIII, 176-177 ;
47-
ibid.,
LXVI, 187
48-
Part,
orat.,
XVI,
56
•..
odia incitanturi
49-
ibid.,
XXIV, 90 ; .••
Non ad ueritatem solum,
sed etiam ad
opiniones eorum gui audiunt.
50-
l
De orat.,
XXXIV, 159,
51-
IDe leg.,
II, 5
52 -
N• H.,
Praef.,
16, 52
... / ...
,,
-
24
-
53-
L'histoire à Rome,
p,
74,
54-
rap,
par Suétone;
Diu,
Iul.,
LVI,
40 ;
55-
L'art de la déformation historigue dans
les commentaires de
César, p.
339,
56-
Les étapes de l'impérialisme romain,
p,
90,
57-
Economigue,
XVIII,
9,
58-
l
Pol,
II,
9,
59-
Ibid.,
II,
2
60-
ibid.,
61-
op,
cit.,
p,
43,
***********************
1è
PAR T l
E
§§§§§§§§§§§§§§§
- 25 -
A l'instar de
leurs voisins grecs
(1),
aucun des penseurs
romains ne
nous a
laissé une oeuvre exclusivement consacrée à l'es-
clavage,
problème pourtant essentiel dans
les sociétés antiques.
Même Cicéron qui
se consacra le mieux à l'étude et à la
compréhension de certaines questions
humaines comme
la mort,
la
vieillesse ou l'amitié,
n'aborde ce problème qu'incidemment.
Cepen-
dant,
l'irrégularité avec laquelle i l s'y apesantit,
n'exclut pas
la profondeur et surtout la complexité dont s'entoure à ses yeux,
le phénomène servile,
comme cela peut se percevoir à travers ces
propos tenus aux gatres conscripti en 44 av.
J-C.
" ••• 11 faut
toutefois combattre
pour la liberté au péril de sa vie.
Ce n'est
pas dans le souffle que consis'te la vie,
elle n'existe nullement
pour qui
est esclave •.• "
(2).
Si l'on se limite à cette réflexion cicéronienne,
l'on
serait tenté d'affirmer que l'Arpinate méconnait
systématiquement
l'existence de l'esclave en tant qu'entité
pensante et être humain.
L'on
indiquerait également que pour lui,
l'esclave
n'est donc rien
d'autre qu'un être
inanimé,
assimilable aux meubles et autres biens.
Si cette déduction comporte une
part
de vérité,
elle est tout de mê-
me incomplète,car elle ne
réflète pas
l'idée intégrale de l'auteur
sur la question.
C'est pourquoi,
plutôt que de circonscrire sa pensée
à un type d'ouvrage, à un type de discours dont le contenu s'inscrit
nécessairement dans une logique précise,
i l
faut
avoir à l'esprit
l'ensemble de son oeuvre.
A.
Daubigney
ne
recommandait
pas autre
chose quand il
indiqua ce qui s u i t :
" . . .
S'en tenir à tel ou tel
type particulier d'information fait
courir le risque,
avec les oeu-
vres philosophiques,
de se confiner dans un système de
représenta-
tion
idéaliste voire
illusoire
parce qu'ignorant des situations
concrètes; avec les discours et la correspondance,
de mettre en
exergue ce qui ressort du
vécu quotidien,
du
passionnel et en défi-
nitive fait
perdre
le bénéfice d'une confrontation
théorie/pratique,
qui
s'impose chez Cir;§ron comme préalable à toute d'marche
Il
(3)
Ce qui apparaît évident donc,
c'est que chez Cic'ron,
ne
se dégage pas une vision une et univoque de l'esclave.
Deux images
de celui-ci s'entrechoquent ou même
se combattent,
à défaut d'exis-
ter parallèlement.
Mais comment concrètement l'Arpinate les ressort-
i l ? De quels indices use-t-il
pour peindre et distinguer
les escla-
ves les uns des autres? Les esclaves,
malgré tout,
forment-ils un
groupe homogène par rapport à celui des libres ou une infiltration
permanente des membres d'un groupe dans un autre,
rend malaisée
leur différenciation?
Chapitre 1.-
Les modes d'identification,
un élément
fondamental
de cette dualité
Chercher à
identifier les esclaves,
c'est à proprement
parler tout mettre
en oeuvre pour retrouver leur personnalité,
leurs spécificités et
leurs particularités.
.. ./. ..
-
26
-
C'est aussi rendre
public leur univers,
"mettre ~ nu" leur micro-
société,
tout
en essayant d'épouser
les catégories mentales des
Romains et de
reprendre ~ notre compte, leur vision du monde. Car
les esclaves
-
i l
faut
le dire
-,
avaient
leurs codes propres,
des
règlements précis et par voie de
conséquence,
un environnement
propre ~ eux,- leur vie était régie par un certain nombre de prin-
cipes et de lignes directrices,
dont
ils étaient censés maîtriser
les arcanes.
Cependant
leur
"monde"
n'était
pas déterminé
par eux
seuls, mais plutôt
par
les autres,
c'est-~-dire leurs propriétai-
res,
romains en
l'occurrence.
Sur quoi donc s'appuyaient ceux-ci
pour donner une
image de leurs serviteurs?
1.- L'Onomastique
L'une des
stupéfactions que provoque l'Urbs,
au-del~ de
ses spécificités institutionnelles et de sa; stratification rigide,
reposant
sur l'énorme
échelle des valeurs,
se situe au
niveau du
système d'attribution
de
l'identité aux
individus.
Cette inscrip-
tion relevée au
IIIè
s.
ap.
J-C.,
en
Afrique du
Nord,
en est une
indication non
négligeable:
Imp.
Caes.
M.
Antonius Gordianus Divi
Gordiani
Nepos Divi
Gordiani Sororis Filius Pius Felix
Aug.
(4).
Elle démontre clairement
la possibilité qu'avaient les
Romains non seulement de
faire
preuve de zèle dans
l'établisse-
ment de leur"identité
(5),
mais surtout de manier
allègrement
une
série de composantes au-travers desquelles un homme devait
se
per-
sonnaliser.
Le nomen gentilicium,
le praenomen,
le
cognomen,
le
signum,
la tribu
et
la
filiation,
tels sont les principaux éléments
constitutifs de
l'onomastique.
Répartis
en
trois groupes,
ils
for-
ment les
tria nomina,
permettant ainsi ~ partir du-lllà s. av.
J-C
(6)
d'établir une
étanchéité
entre
les individus et de
conférer
automatiquement et
sans restriction,
le statut occupé
par les uns
et
les autres.
Véritable base de ségrégation sociale,
ces tria no-
mina
apparaissent
aussi,
comme
une sorte d'élément intégrateur
~ la cité, comme le véhicule d'une certaine forme de considération
ou
encore comme l'indicateur d'une
forme de pouvoir.
Dans l'Antiqui-
té
romaine,
cela était
d'une telle
évidence que nul
ne cherchait à
l'occulter.
En
64
av.
J-C.,
dans le
bréviaire du
parfait condidat
établi à l'intention de Cicéron, Quintus souligna
la nécessité d'a-
voir dans
son camp,
des
alliés Dont les noms seuls
généraient
la
popularité.
"Il faut
se créer des
amis de différentes sortes:
pour
l'apparence,
des hommes
illustres
par leurs charges et par leur nom,
qui même s ' i l s ne
font
rien:1
pour
le recommander,
apportent cepen-
dant
au candidat un supplément de
considération"
(7).
Dans cette propension à donner une étiquette aux hommes
sur
la base de
leur onomastique,
l'importance de
la gens était
non
négligeable,
car constituant
le créneau
par lequel
naissait
la cons-
cience de
"posséder
les
mêmes monuments ancestraux,
de
célébrer
les
mêmes cultes
et d'avoir des sépultures communes".
(8).
La célébrité
d'un ancêtre,
suffisait
pour en faire
un élément de
fierté
chez sa
descendance.
... / ...
-
27
-
P.
Grimal dont
la qualité
des études sur Rome
n'est plus à démon-
trer,
a essayé de
remonter loin
dans la gens Tullia pour trouver
l'origine ou
plutôt
les traces de l'Arpinate
:
"Pour nous,
l'his-
toire de cette famille
commence avec
le grand-père de notre Cicé-
ron,
ce vieillard bougon,
né semble-t-il,
un peu avant le milieu
du
siècle.
Il avait épousé une certaine Gratidia,
qui appartenait
à une famille liée à celle de C.
Marius,
le futur
vainqueur de
Ju-
gurtha et des envahisseurs Teutons et Cimbres •••
M.
Gratidius se heurta violemment
à son beau frère lors-
que
l'on agita,
dans
Arpinium la question de savoir s ' i l convenait
d'introduire
le scrutin secret pour les votes de
l'assemblée du
peuple •••
Tullius
s'opposa énergiquement à cette
innovation,
et
persista dans son opposition
jusqu'à la fin
de
sa vie •••
M.
Tullius
ciceron,le grand-père,
eut
deux
fils
de Gratidia
:
Marcus,
l'aîné
(le père de Cicéron)
et
Lucius,
le
cadet •••
Marcus était porté vers
les
lettres.
Mais
une légende voulait
qu'il
eat exercé le métier de
foulon
(c'est-à-dire blanth1sseur)
et fait
le commerce de raisin et
d'olives ••• "
(9).
Une honorabilité certaine se dessine donc dans l'ensemble
de la famille,honorabilité dont
Cicéron ne veut
se départir tout
au long de son existence.
Fier d'avoir appartenu
à une ascendance
aussi remarquable,
son dessein est
de voir se maintenir tous les in-
signes susceptibles de perenniser la force
familiale,
et les vertus
s'y rattachant.
Quant
à Marcus son
fils,
i l
ne
doit
pas déroger
à
cette voie,
d'autant plus que le critère du
nom
joue en sa faveur.
Ce n'est pas un hasard si
Cicéron
le lui rappelle:
"En ce qui con-
cerne celui qui,
dès son
jeune âge,
a
le bénéfice de la célébrité
et d'un nom,
qu'il
l ' a i t reçu de son père
-
ce qui
t'échut
je pense,
mon cher Cicéron
-
ou qu'il
le
doive à
quelque
hasard et bonne for-
tune,
sur lui convergent
tous
les
regards,
sur
lui on s'enquiert
pour savoir ce qu'il fait,
de quelle manière
i l v i t ;
et comme s ' i l
se trouvait au
plus clair de la lumière,
ainsi aucun secret n'est-il
possible ni pour sa parole ni
pour
son action
(10).
Le port du nom est donc
la conséquence du
port de toutes
les qualités
-
et des défauts
-
du
père et
à
travers
lui,
de
l'an-
cêtre.
Ainsi i l
en est de la gens
Claudia dont
l'importance tire
sa source de
~l'établissementa Rome vers l'année 251 av. J-C., du
sabin App.
Claudius avec
sa famille
et tous
ses clients au
nombre
de cinq mille,
et de sa priorité
parmi
les décemvirs chargés de co-
difier le droit puis de le conserver par écrit"
(11).
"Patrimoine donc le plus pécieux de
l'homme libre et de
la famille,
en même temps
que le premier signe
de la personnalité
humaine"
(12),
les trianomina qui
avaient
valeur de nom,
prennent
la
forme d'un symbole de latinité,
d'une espèce de valeufintangi-
ble incluse dans le tréfonds du
système social de
l'Urbs.
Du coup,
arguant du fait que seuls
les ciues Romani
jouissaient du privilè-
ge de disposer d'une totale autonomie dans
le maniement de leur
... / ...
-
28
-
onomastique et que
les esclaves en étaient dépourvus,
les Romanistes
dans leur quasi
totalité,
concluent sur leur
inFériorité.
C'est
en
susbstance le contenu de
la remarque de P.
Gontard quand entre au-
tres,
i l d i t :
"Le nom ••• ,
l'esclave ne l'avait pas"
(13).
Si nous nous
limitons à cette constatation,
l'idée que
nous retiendrons,
est celle d'un nivellement
profond entré
les
libres et les non libres,
par la seule indication du nom.
Cela
re-
vient à dire en d'autres
termes,
que
tous
les citoyens pris dans
leur globalité,
étaient supérieurs aux esclaves parce qu'ils béné-
ficiaient
des
trianomina.
Certes,
nous devons
reconnaître qu'en
passant
sous la domination d'un autre -
leur maître
-,
les escla-
ves se voyaient attribuer un seul élément
tenant lieu de
leur
iden-
tité.
Cet élément ne les quittait
pas,
sans changement préalable
de
leur statut.
Mais suffit-il
pour conclure à rune infériorité de leur
part? Les esclaves que nous présente Cicé~on, et qui tous,
por-
taient un seul nom,
étaient-ils dans son esprit tenus
pour
inférieurs
par rapport
au
bloc des citoyens? Ces noms,
bien qu'uniques,
ne
pouvaient-ils pas parfois leur conférer plus de considération,
plus
de poids que ceux
portés par certains citoyens? C'est en analysant
les noms portés par
les esclaves ou
supposés tels,
contenus dans
l'oeuvre cicéronienne,
que nous tenterons de répondre à ces ques-
tions.
A -
Nomenclature de l'onomastique servile
Pour une facile compréhension de cette classification,
nous avons
préféré
l'ordre alphabétique à toute autre disposition
( 1 4 ) •
/ ' .'
=========== == F======= ==== ======.==== ===7== ========== === ====~ === === == === === == =
Nom
:
Correspondance:
Discours
Maître:
Fonction
1
1
1
1
1
1
-------------r------------------------------ ------------------------
Acastus
Fam.,XVI,5,1
Atticus
XVI,
5,2
XVI,10,2
tabellarius
XVI,14
Att.,
VI,
9,
1
- -
VII,1,1
Aegypta
Fam.,XVI,15,1
XVI,15,
2
Cicéron
tabellarius
Att. ,VIII ,15
XII,37,1
XIII,
3,2
... / ...
- 29 -
--------------~-----------------f------------~----------~-------------~
N
i C
d
1
O·
1
M At
1
F t ·
am
1
orrespon ance 1
lscours
1
al re
1
onc lon
1
1
1
1
1
~-------------r-----------------~-------------------------------------,
Alexia
Att., VIII, 2 , 3
XIII, 25,3
Alexis
Att.,
V, 20,9
Atticus
scriba
VII,
2,3
VII,
7,7
XII, 1 0
XVI, 1 5 ,1
Anchialus
Fam. , XIII, 70
L.Egnatius
negotia
Antalus
Att., XIII,43,3
Anteros
Att.,
IX, 14
XI, 1 , 4
Antipho
Att. ,
IV, 15,6
Atticus
o r - -
Antiochus
Pro A. Caec.
VIII, 22
Apenas
IV, Ba, 1
1
1
Apronius
.Fam., XV,
3 ,
4
1 - - -
1
1
Aristocritus ' Fam., XV,
3,
4
Ascla
Pro A. Caec. 1
VIII, 22
1
1
1
1
1
Athenio
De Har.,resp:.
XII, 26
De frument,
XXV, 66
... / ...
-
30
-
r-------------1-----------------~------------~----------~------------I
:
Nom
: Correspondance
:
Discours
:
Maître
:
Fonction
:
L
~
~
~
--~------------I
1
1
1
r
r
1
1
0
1
1
e
praet.,
1
1
1
Sicil.,Liv,
1
136
1
1
1
1
De
frument.,
Bariobal
1
1
XXXIX,
89
Venus
1
1
1
1
Billenus
1 F am.,
VII l ,1 5 ,2
1
1
Birria
Q•
Asc.,
l V,l
Milon
1 [)
Cyrus
Att.,
I I , 3 , 2
Demitrius
Fam.,
XVI,
22
Dexippus
Fam.,
XIV,
3,
3
De
frument.,
Venus
Diognetus
XXXVII,
86
Dionysius
Fam.,
XIII,
77,3
Atticus
nuntius
V,
9, 2
V,
10, 1
V,
11,
3
Eros
At t . ,
XII,
7,
1
Atticus
1 - -
XII,18,
3
XII,21,
4
XIII,2a,
1
XIII,12,
4
XIII,30,
1
XIII,50,
5
XV,
3 ,
4
XV,
1 5,
1
XV,
20,
4
... / ...
-
31
-------------~-----------------T-------------~----------+-----------~
1
1
1
1
1
Nom
1
Correspondance
1
Discours
: ~aître
: Fonction
:
1
_______________________________ 1
1
- - - - - -
~
~
1
1
1
1
Halicor
Q.
Asc.,IV,20 '1
1
1
1
Hermia
Fam.,XV,
15, 1
1
1
1
,
1
1
Herpalus
Fam.,
XVI,24,
1
1
1
1
1
Licinus
Q.fr.,
1,2,14
1 Clodius
1
: Aesopus
,
Martiales
Menander
Nicanor
Nicephorus
Nicostratus
Orpheus
Panurgus
Pharnaces
- 32 -
-------------~-----------------~-------------~----------
1
1
1
1
Correspondance
1
Discours
1
l'laitre
Fonction
Nom
1
1
1
1
1
1
-------------------------------,-------------,----------
1
1
l
,
Phemius
Att., V, 20,
9
1
1
symphonicus
1
1
V,
21 ,
9
1
1
l
,
VI,
1 ,
13
1
1
1
1
1
1
Phiitlippus
'Pro reg. ,oeio~,
V,
17
VII, 21
,F am. ,
IX, 15, 1
L.Papirius tabellarius
Phileros
1
1
1
Philimus
1
Pro .1'1.1. Tull.,
1
,
1
IV, 11
1
,
1
Pollex
:A t t . ,
,
VII l, 5,1
XI, 4a
Atticus
pediseguus
1
1
IF am. ,
XIII, 46, 1
XII l, 46, 2
XIII, 47
XIV,
6 ,15
Rufio
ProM,. Tull.,
XXII, 60
1
1
1
1
1
Sannio
Rhét. à Heren~
L,
35, 1
Saturus
Att., XII, 22,2
,--
1
,
1
Sicura
'O. fr.,
l ,
29
Felix
Sylla
De frument.,
XL,
92
XL,
93
Sositheus
At t. ,
l ,
12, 4
Cicéron
... 1...
- 33 -
.-------------j----------------- -------------ï----------
:
Nom
: Correspondance
Discours
: ~aître
Fonction
~-------------1-----------------
1
-------------ï----------
1
1
1
1
Spartacus
'Att.,
VI, 3
XIII Philip.,:
x, 23
:
1
1
De Har. resp .•
XII,
26
Spintharus
Att.,XIII,2
librarius
Strato
Pro A.
Cluentl
LXI, 187
Tiro
Att.,IX17
Cicéron
1 - -
10.
fr.,
111,1,19
1
: Fam. ,
XV, 3, 1
1
XVI,3,3
1
1
XVI,6,2
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
Zethus
:Fam.,
IX, 15,1
1
1
1
~=============d===============================-=======================
L'observation de cette nomenclature nominative des esclaves
els qu'ils apparaissent dans l'oeuvre de Cicéron,
impose un certain
ombœe de remarques que nous avons cru bon de répartir en deux princi-
aux groupes.
Le ~remier type de remarques porte sur la présence irréguliè-
e des esclaves dans toute l'oeuvre de Cicéron.
En effet, qu'il s'agis-
e de la correspondance, des Discours ou des Traités,
les éléments con-
idérés comme appartenant au groupe des esclaves n'apparaissent pas
artout en même nombre.
... / ...
-
34
-
C'est ainsi que si dans
la plupart des missives échangées leurs noms
sont pàrfois abondamment cités,
donnant
l'impression d'occuper l'es-
prit de leurs maîtres,
dans les oeuvres à caractère
juridique et phi-
losophique,
ils n'apparaissent
que par
"jets"
ou encore de manière
accidentelle.
Ce déséquilibre,
aurait-il été voulu
par Cicéron? Si-
gnifierait-il que
dans ses réflexions sur l'essence de l'homme,
sur
sa place en société,
l'esclave n'occuperait qu'une
place dérisoire?
Nous ne saurions y répondre de manière catégorique.
Cependant,
i l se-
rait peut-être plus convenable de
nous apesantir sur la nature des
trois principaux
types d'ouvrages composés par l'Arpinate,
pour y dé-
celer une bribe de
réponse.
Car la correspondance par exemple,
regrou-
pe toutes les lettres échangées entre Cicéron et son environnement
im-
médiat,
c'est-à-dire son ami
Atticus,
son frère,
sa femme et ses en-
fants,
puis certaines de ses connaissances.
Il va donc
sans dire qu'une
intimité certaine animait ce
"cercle de proches",
facilitée
par la fré-
quentation qu'ils avaient
les uns des autres.
La missive que Cicéron
adresse à
Atticus,
en dit long sur la proximité amicale
tissée entre
eux:
"J'ai vu Pompée aux quatrièmes ides de décembre.
Nous avons été
ensemble deux
heures environ.
Il m'a paru avoir grande
joie de mon ar-
rivée:
encouragement à demander le
triomphe,
promesse d'appui
person-
nel,
conseil de
ne pas venir au
Sénat avant l'affaire
réglée, de peur
qu'en opinant
je ne m'aliène quelque tribun"
(15).
Au delà du
fait que dans
leurs échanges épistolaires ils
traitaient également des problèmes politiques,
la quotidienneté tenait
une place prépondérante et si
l'on
ose dire,
accaparait par moments
l'essentiel de leurs pensées
(16).
Les esclaves faisant
souvent partie
de leurs familiae
respectives,
ils devaient par voie de conséquence non
seulement
les connaître
-
les présentations étaient faites
pour les
nouvelles acquisitions
-,
mais surtout intéresser
leurs conversations.
En d'autres termes,
en
parlant d'un esclave précis d'Atticus,
Cicéron
le considérait comme quelqu'un faisant
partie de l'entourage
de son
ami et donc,
de sûr.
D'où cet emploi
à
profusion de
noms
serviles dans
la Correspondance.
Dans les Discours par contre,
l'emploi s'amoindrit parce que
les esclaves apparaissent rarement
comme éléments isolés responsables
d'unfait.
Hormis quelques cas où tel
ou tel seruus est
impliqué nom-
mément dans une affaire,
leur parler d'un esclave
tout
en prenant
le
soin de le citer par son nom,
suppose pour Cicéron,
une certaine con-
naissance de son
identité.
Si cela
ne
pose aucun problème pour celui
ayant
joué unrôle considérable par
exemple dans la tentative de bou-
leversement des institutions -
le cas de Spartacus est le plus vivace
-,
une certaine difficulté rejaillit quand i l s'agit d'aborder le cas des
esclaves dont les maîtres n'ont aucun rapport direct avec
lui
(17).
Quant aux Traités,
ils ne laissent poindre que de très fai-
bles cas de présence nominative servile,
car ils cherchent avant et
après tout,
à apporter des éléments de réflexion puis de compréhension
des problèmes généraux,
ayant un
lien avec
l'homme.
C'est seulement
.../ ...
- 35 -
quand de temps
en
temps Cic~ron "descend sur terre"
pour appuyer son
argumentation en prenant des cas concrets,
que
sa connaissance parfois
de
l'identit~ de certains esclaves, le pousse à en parler précis~ment.
Le cas de Sannio qu'il
~voque dans sa Rhétorique à Herennius, est l'un
des
seuls apportant
la preuve du
parfait
maniement
de
la vie de cer-
tains des personnages qu'il met en
valeur,
ou
parfois tourne en
d~ri
sion
(18).
Le second
type de
remarques que suscite cette nomenclature
servile,
r~side dans le hiatus existant entre d'une part les cognomina
à consonance gr~co-orientale, et ceux à consonance romaine, de l'autre.
Quelle valeur conférer à
cette disproportion?
Quels sens ces domini
voulaient-ils donner à
leurs esclaves en attribuant des
noms de ce
ty-
pe ? S'agit-il du
reflet
d'une mentalit~ collective de l'~poque, ou
plutôt d'une simple
faconde
dont ne pouvaient
que
se targuer certains
romains en mal de
particularisme? Le
"visionnement" de ce corpus ser-
vile est donc d'une
extraordinaire fécondit~, car il pourrait nous
permettre de faire
ressortir un clich~ de l'id~blogie ambiante de la
fin
de la République,
de comprendre
la r~alit~ historique, de "décoder"
le message et les
pr~occupations permanentes contenues dans les textes
de Cic~ton. Il faut cependant souligner que le maniement de cette ono-
mastique se r~vèlera à tout le moins malaisé, compte tenu des nombreu-
ses imprécisions statutaires qui accompagnent certains noms d'esclaves,
ou supposés tels.
En effet,
si dans une missive adressée à
son
frère
Quintus en 59 av.
J-C.,
Cicéron
parle d'un
Licinus en spétifiant
son
statut d'esclave
(19),
à d'autres
moments,
i l
garde
sur ce
point
le
mutisme le plus
total.
Certes,
nous pouvons parfois avoir dans
d'au-
tres cas,
recours à
la mention
de
la fonction
jugée typiquement
ser-
vile,
pour mener notre analyse:
une fonction
comme celle de Tabella-
rius,
que nous voyons mentionnée dans cette lettre à
Terentia
:
" ••.
Nous sommes arrivés
pendant les
Ides d'octobre
à Athènes, bien
contrariés par les
vents
qui
ont rendu
notre navigation lente et désa-
gr~able. Je débarquais quand Acastus m'aborda, avec le courrier: en
vingt
jours, cela s'appelle de
la ~iligence•.• "
(20).
Mais cela laisse
toujours persister des difficultés.
S'agis-
sant d'Asclapo par
exemple dont
le nom est suivi de
la fonction
de mé-
decin
(21),
nous
l'avons rang~ imm~diatement dans l'ordre des libertini
ou
des peregrini,
seuls susceptibles de l'exercer à l a fin
de
la Répu-
blique
(22).
Ceci étant,
les cognomina à consonnance gréco-orientale -
39 au total
-
peuvent être scindés en deux
groupes
:
ceux ayant
rapport
avec des personnalit~s
historiques,
et ceux dériv~s ou attachés à des
divinités.
Certes,
"servile names do
not often
take the form of
nick-
names derived from
physical
peculiarities,
doubtless becaue they were
bestowed by the man's superiors and not by his
fellows-slavers"
(23),
notent M.
Gordon et B.
Litt,
cependant
ils demeurent des
points
d'in-
dication essentiels à
notre
étude.
. .. 1...
-
36
-
1.- LES PERSONNALITES HISTORIQUES
Nous
aimerions ici faire
référence aux
personnalités ayant
marqué de leur
empreinte profonde,
la vie de
la
Grèce antique,
avec
des prolongements dans le monde hellénistique
;
des
personnes dont
les noms furent
gravés en "lettres d'or" dans
les
"registres" de
l'his-
toire pour avoir
joué un rôle
considérable.
De
toute
l'onomastique,
seuls les cas d'Acastus,
Anchialus,
Antaeus,
Athamas,
Athenio,
ont été
retenus pour faire
partie de cette cat~gorie. Les limites de nos con-
naissances sur
l'histoire
"profonde"
de
l'orient,
ne nous ont
pas per-
mis d'y
trouver
une signification
logique.
Nous savons malgré
tout,
qu'"Acastus,
fils
de
Pélias,
roi
d'Iolcos et d'Anaxibie,
participa à l'expédition des
Argonautes contre
la volonté de son père ••• ,
et
régna sur le
trône
d'Iolcos après
la mort
de
ce dernier.
Il
joua également un rôle
indirect dans
la Légende de
pélée,
le père d'Achille dont
i l aurait été à
l'origine de
la mort sur
le Pélion"
(24).
Le
nom d'Anchialus pour sa part,
porte
la
signification
de
"la nymphe qui avait lancé de la poussière dans la grotte où était
élevé Zeus en Crète.
De cette poussière naquirent
les Dactyles de
l'Ida"
(25).
Quant à Antaeus,
Athamas,
Athenio,
leurs
rôles
sont également dé-
finis.
Antaeus
-
que
nous avons rapproché d'Antée
-
apparait
dans
la
très
lointaine histoire,
comme
"un géant
:
le fils
de Poséidon et
de Gaia.
Il habitait en Libye et contraignait tous
les voyageurs
à l~~
ter
contre lui.
Puis,
quand
i l
les avait vaincus et tués,
i l ornait de
leurs dépouilles
le
temple de
son père.
Il
fut
cependant
tué
par
Héra-
clès lors de
son
passage en Libye"
(26).
C'est donc
un belliqueux
invé-
téré,
une sorte de combattant
infatigable à ses
heures,
dont
la
régula-
rité des combats
et des victoires,
faisait
sans
doute
croître
toutes
les
tendances d'invincibilité qu'il
croyait détenir de sa mère,
-
enten-
dez
le sol
-.
On
retrouve chez
Athamas et
Athénio,
ces velléités de pu-
gnacité poussées
à un niveau encore élevé, même si la vie d'Athénio
n'avait connu en
soi aucune valeur mythologique
et donc
surnaturelle.
Hormis le fait
qu'il avait bataillé
à la tête des esclaves en IIème s.,
ranimant les esprits les plus
ramollis,
engageant ainsi
une véritable
levée de boucliers avec
les légions
romaines,
rien d'extraordinaire
n'entoure ses combats.
Le
récit
que
nous en
fait
J. Schmidt, amène la
preuve de cet état de f a i t :
" . . .
Athénion,
à la tête de deux cents
cavaliers d'élite,
porta la mort dans
les rangs
ennemis;
les esclaves
découragés prirent
la fuite •••
Athénion,
feignant
d'être
mort,
se
sau-
va à la tombée de la nuit ••. "
(27).
Athamas pour sa part,
"roi
béotien qui
régnait sur le
pays
de Coronée,
ou
encore selon certains à Thèbes même,
reconnu
pour avoir
convolé en plusieurs noces •.•
garde
l'image d'un cruel non seulement
pour avoir voulu
sacrifier sa femme
rendue coupable de
l ' i n f e r t i l i t é
de
la terre,
mais
encore
pour
avoir
tué son fils
cadet,
Léarchos,
en
le
jetant dans
un chaudron d'eau
bouillante"
(28).
. . .1. . .
-
37
-
2 -
LES NO~S D'INSPIRATION RELIGIEUSE
Là aussi, quatre des noms portés par la gent servile, ren-
voient directement au panthéon grec
: Eros - Hermia - Pollex - Diony-
sius. Pour bien comprendre leur importance, il faudra tenter d'établir
et d'analyser leurs differentes composantes.
a) Eros
Issu du panthéon grec,
il se remarque par sa presence quoti-
dienne et permanente dans la
vie intime des hommes: c'est le dieu de
l'amour. De ce fait,
il se trouve inclus directement au coeur de l'acti-
vité génératrice et de tout le système de reproduction des êtres animés.
Eros est donc au centre du monde,
en ce sens qu'il pourvoit au peuple-
~ent, à l'essor démographique en quelque sorte et à tous les contacts
charnels.
L'on peut aisément étendre son activité au plaisir, celui-ci
étant comme diraient les épicuriens,
l'épine dorsale du paradis terres-
tre. Les savants qui se sont appuyés sur cette divinité, en font d'ail-
leurs "de par sa naissance de chaos pour les uns,
d'Aphrodite et d'Arès
pour les autres,
le protecteur des amours homosexuelles entre hommes et
jeunes hommes"
(29).
b)Dionysius
]dentifié à Rome au dieu italique Liber Pater,
cette divi-
nité est surtout caractérisée par sa primauté dans la production du vin,
de la vigne puis de la végétation. Dionysius tient une place particuliè-
rement importante dans le panthéon grec,
de par l'enfantement inédit dont
il fut l'objet de la part de Jupiter.
P.
Grimal rapporte à ce sujet
qu'ayant cédé à la demande formulée par Sémêlé de se montrer à elle dans
toute sa puissance,
"Sémêle ne put supporter la vue des éclairs qui scin-
tillaient dans le corps de Zeus et tomba foudroyée.
Alors,
Zeus s'empres-
sa d'arracher l'enfant qu'elle portait dans son sein,
c'est-à-dire
Dionysius et qui n'était encore qu'au sixième mois.
Il le cousit aussitôt
dans sa cuisse et lorsque le terme vint,
il l'en sortit parfaitement for-
mé et vivant"
(30).
Célébré pendant les Dinonysies, le culte de Dionysius attei-
gnit tout le monde grec en passant par l'Egypte et la Syrie, la Phrygie,
l'Inde ... et enfin l'Italie où par le biais du
caractère orgiastique
de ses Mystères,
"il trouva une terre d'élection parmi les populations
encore peu civilisées des montagnes d'Italie mériodionale et centrale"
(31). Dans l'oeuvre de Cicéron,
la référence que nous avons pu déceler
au nom de Dionysius, se rapporte au tyran de Syracuse que l'Arpinate
conspue pour ses méthodes peu orthodoxes:
"Trente huit années durant",
dit-il, "Dionysius fut tyran de Syracuse, et i l en avait vingt cinq
quand il s'empara du pouvoir. Combien superbe était la ville, combien
opulent l'Etat qu'il maintint sous le joug de la servitude
!"
(32) .
.../ ...
-
38
-
c) Pollux
L'on ne peu~ parler de Castor sans associer son frère ju-
meau Pollux.
Les deux divinités qui forment un tout inséparable,
seraient issus du roi de Sparte et de Léda, Tyndare, frère d'Hélène
et de Cly~emnestre pour les uns, et de Zeus pour les autres: d'où
leur appellation de Dioscures. Leur combativité et leur force ~u8r
rière les auraient rapprochés des marins, contribuant ainsi à la des-
truction de la ville d'Iolcos.
Adopté par les Romains,
le culte des
Dioscures fut reçu avec beaucoup d'enthousiasme et une singulière
attention dans l'Urbs, accentués surtout par la bataille du lac Ré-
gille:
"Les Dioscures chargèrent l'ennemi à la tête de la cavalerie
romaine et apparurent pe~;l de temps a~~ès, sur le Forum romain à des
kilomètres de là, vêtus exactement de la même façon.
Là,
ils firent
boire leurs chevaux à la source qui se trouvait près du temple de
Vesta et annoncèrent la victoire à la foule"
(33).
d) Hermia
Ce nom aurait-il été donné à un esclave par référence mas-
culine à Hermione,
fille de Ménélas et d'Hélène? Même si nous n'en
avons pas eu la certitude,
nous avons tenté somme toute d'établir une
certaine similitude entre cette divinité et lui. Une autre tentation
a effleuré notre esprit,
c'est celle qui consiste à
rapprocher
Hermia d'Hermès,
fils de Zeus et de la fille d'Atlas, Maria.
Le nom
de Maria ou du moins la même consonance, nous aurait alors incité à
l'établissement de cette parenté. Bien que dans l'état actuel de nos
connaissances il nous paraisse quasiment impossible d'arriver à une
conclusion sûre, nous pouvons affirmer l'appartenance au monde divin
d'Hermia.
Cette divinité serait alors venue grossir celle sur la base
de laquelle,
les Romains à travers Cicéron, auraient donné une iden-
tité à leur gent servile.
e) orpheus
La légende contée sur lui est sidérante à plus d'un titre~
"Fils d'De d'agre,
roi de Thrace, et de la muse Calliope, musicien
habile,
il avait cultivé surtout la cythare qu'il avait reçue en pré-
sent d'Apollon ou de Mercure; ajoutant ainsi deux cordes aux sept
qu'avait cet instrument. Ses accords étaient si mélodieux,
qu'il char-
mait
jusqu'aux êtres insensibles. Les bêtes accouraient à ses pieds
déposer leur férocité;
les oiseaux venaient se pencher sur les arbres
d'alentour,
les vents tournaient leur haleine de son côté •..
Initié
aux mystères de Bacchus,
il entreprit de longs voyages en Egypte . . .
Sa descente aux enfers est célèbre.
sa fiancée Eurydice qu'il aimait
passionnément étant morte le jour de leur hymen,
il se mit en devoir
d'a Il e r la
che r che r
jus que dan s I e s m0 r t s , avec s a I y r e ... "
(34) .
. ../ ...
-
39
-
Avec Orpheus,
nous voilà arrivé au
terme de notre analyse
des noms d'esclaves tirés de certaines divinités,
même si parmi tous
ceux que nous avons répertoriés,
nombreux
sont ceux qui comportent
toujours des zônes d'ombre.
Mais que peut-on en déduire?
-
les esclaves dans
leur globalité,
malgré leur origine,
n'ont qu'un seul
élément qui leur sert d'identité,
contrairement aux
citoyens,
les ciues optima ~ure_. Ce qui revient à dire dans la logique
courante à Rome,
qu'ils étaient défavorisés par
rapport à eux.
En
d'autres termes,
du fait de l'impossible identification de leur tribu,
de leur filiation,
de leur surnom et du
nom de leur famille,
les es-
claves ne pouvaient pas être classés au même titre que les citoyens.
Ils étaient marqués par une infériorité flagrante,
une situation qui
faisait d'eux,
des êtres complètement réduits par rapport aux autres.
De ce fait,
tous les esclaves
partageaient le même sort.
Face au grou-
pe compact des citoyens qui
bénéficiaient de tous les droits,
parti-
cipaient activement à
la vie de la cité,
les esclaves formaient
un
bloc homogène.
Sur la base de cet indice
qu'est l'onomastique,
rien
ne les différenciait et les distinguait.
Ils étaient donc un et un
seul groupe,
rigide,
voire hermétique.
Cependant,
pourquoi certains
esclaves portaient-ils des noms à
consonance gréco-orientale et d'au-
tres,
des noms à
consonance purement romaine? L'explication de cette
situation est à
trouver dans le poids que l'orient exerçait dans
le
subconscient des Romains.
En effet,
contrairement à
la période
impé-
riale où M.
Gordon et 8.
Litt expliquent
la profusion de
"l'orienta-
lisation des noms"
par le fait
que
l'''inter marriage produced a
comple-
te inter mixture
of races,
and environment quickly
obliterated almost
aIl traces of barbarous nationality"
(35),
les Romains
laissèrent
très
tôt
leurs pensées subjuguées par
l'omniprésence spirituelle et matériel
le
grecque.
Dans une étude remontant à
une dizaine d'années,
H.G.
Pflaum montre à
dessein l'ampleur de cette contamination
:" . . .
Les
noms grecs apparaissent d'abord chez
les sénateurs.
Le
premier noble
romain à porter un
tel nom est Q.
Publilius Philo,
consul
en
339,
320
et 315 av.
J-C.
le second cas est celui du
consul de 304,
P.Sempro-
nius Sophus et de son
fils homonyme consul en 268"
(36).
Le nom
n'est qu'un des multiples aspects de cette emprise
~recque, une particule de la multisectorielle présence des grecs dans
la cité fangeuse
de Romulus".
Si déjà copie des
noms
i l y a,
cela
suppose une béatitude dans l'admi~ation. Cicéron ne s'en cache pas.
Il reconnait à
plusieurs moments,
l'insuffisance
surtout culturelle
de Rome,
et donc
le recours aux
termes grecs pour tenter d'expliquer
ou d'exprimer
telle ou
telle de
ses
pensées:
"Le mot de notre
lan-
gue,
aer est
originairement grec:
mais
l'usage
l ' a naturalisé
par-
mi nous.
L'air est environné
à
son tour de
l'immense éther,
qui
est
composé des feux
les plus élevés.
Nous empruntons aussi à
la langue
grecque cet autre mot,
quoique
Pacuuis se soit cru de l'expliquer
la Grèce nomme éther les vastes champs des cieux"
(37).
M.
Villey
pour sa part,
abonde presque dans
le même
sens
que Cicéron quand dans son ouvrage entièrement consacré à la
juridic-
tion romaine,
i l déclare:
... / ...
-
40
-
"Les Grecs avaient ~t~ des martres dans l'art de la pensée.
A leur école, parce que la conquête les mêle sans cesse avec les Grecs,
les Romains se cultivent;
ils abandonnent leurs vieilles supersti-
tions, se livrent à la réflexion indépendante, produisent une philoso-
phie, une histoire, une littérature qui n'est souvent qu'une adapta-
tion de la philosophie grecque"
(38).
Le recours à des divinités grecques et orientales sans nul
doute plus sécurisantes et plus aptes à instaurer la sérénité dans les
esprits, vient complèter cette complicité entretenue entre la Grèce
et Rome. Certes, nous dit C.M. Bowra,
"les Grecs tout comme les autres
peuples, avaient besoin des dieux pour expliquer ce qui est autrement
inexplicable"
(39) et le panth~on Romain en avait un nombre relative-
ment important sur lequel compter comme support, mais eux seuls pas-
saient eux yeux des Romains, pour détenir
la possibilité d~appréhen
der les domaines purement transcendantaux. D'où cette séduction dont
parle H. Bardon :
"Le noble ~quilibre de la re'ligion grecque, sédui t
Rome: plus encone, la beauté de ces dieux et leu~légendes : un souf-
fle des îles allégeait les ombres venues d'Etrl!Jrie"
(40).
On le voit donc.
Si certains esclaves dont parle Cicéron
ont des noms à consonance gréco-orientale,
ce n'est pas seulement
parce qu'ils en sont issus. C'est aussi et surtout parce qu'ils
sont prisés par leurs martres,
presque "chéris" par eux. Parallèle-
ment à l'admiration que vouent les Romains aux Grecs, ils bénéficient
des faveurs de leurs martres,
les rôles que ceux-ci veulent leur fai-
re jouer dans la domesticité, ~tant proches ou même identiques à ceux
de leurs homonymes grecs. L'étroitesse des relations entre les d~ten
teurs de ces noms et leurs martres,
peut apparaître comme l'une des
bases mat~rielles de cette réalit~. Certains d'entre eux en font des
hommes de main, les hissent à un niveau tellement ~lev~ de leurs rap-
ports, qu'ils tendent même à supplanter les citoyens, les hommes li-
bres. N'est-ce pas le cas de ce Diognetus que Cicéron conspue,
trar-
ne dans la boue et entoure de tous les p~chés pour avoir usurpé grâ-
ce à l'aval de Verrès, le titre et les prérogatives de publicain?
"Mais quoi? dit-il de lui.
Les habitants de Tissa, dont
la cit~ est si petite et si pauvre, mais qui sont eux-mêmes des cul~
tivateurs très laborieux et de très honnêtes gens, ne leur arrache
t-on pas, au titre de bénéfice personnel~ plus que la valeur totale
du froment qu'ils avaient r~colt~ ? Tu leur as envoyé comme dimeur
Diognetus, esclave de V~nus : c'est une nouvelle espèce de publicain"
(42).
Même si Cicéron tance aussi vertement Diognetus, il ne
s'empêcha pas de fondre en larmes en 61
av. J-C., à la suite du d~
cès de son esclave - lecteur,
Sositheus (43). De la même manière,
Nicanor (45), Menender (46),
Aegypta
(47),
Hermia (48) et Acastus
(49)
entre autres, qui furent souvent utilisés pour servir de relais entre
les diff~rents correspondants, ne portaient-ils pas des cognomina à
consonance gr~co-orientale ? Etant donn~ qu'ils étaient choisis pour
des tâches aussi urgentes et d~licates, il va sans dire qu'ils avaient
la pleine confiance de leurs martres, comme d'ailleurs l'admet impli-
citement lui-même Cicéron dans cette missive adress~e à Atticus:
"J'ai bien confi~ une lettre à L. Savfeius
" lui dit-il "une seule et
... / ...
-
41
pour
toi,
parce que,
58ns avoir grand
temps pour écrire,
Je ne vou-
lais
pourtant pas laisser venir à toi
sans lettre de moi un ami qui
t'est si cher; mais,
de
la façon dont cheminent
les
philosophes,
celle-ci a
chance d'~tre remise la premi~re ••• "
(50).
L'acheminement du
courrier,
pour ne parler que de ce fait
précis,
apparaît donc
comme un privil~ge auquel n'a pas droit le com-
mun des
esclaves.
De la même mani~re, ce n'est pas un hasard si ce
sont
ces esclaves aux
noms grecs seulement qui
présentent non seule-
ment
des aptitudes intellectuelles et
politiques comme Dionysius
(51),
mais aussi des capacités d'imitateurs comme Tiro et Alexis
(52), ou
encore celles de grand argentier comme Pollex
(53).
Un
brin de cultu-
re,
"un vague frottis
de littérature"
(54), auquel l'on peut joindre
la capacité d'exécuter fidèlement
les
tâches à eux confiées; voilà
essentiellement ce qui
particularise
les esclaves aux
noms grecs et
génère une distinction entre eux et
les autres.
Mais i l y a
aussi
sû-
rement
-
m~me si
nos sources ne le révèlent
pas
-,
d'autres aspects
d'une
importance de premier plan comme la beauté
physique,
-
la ~
chritudo -,
le charme corporel qu'inspire le nom d'Orpheus conféré
par Térentia à l'un de ses esclaves et surtout,
la
faconde des
Ro-
mains.
Cette faconde
s'exprime clairement à
travers ce passage de Ci-
céron
où i l est peint un personnage au
milieu
de
sa domesticité:
"Il se retourne vers son unique esclave que
je connais et que vous ne
connaissez pas,
je pense;
i l l'appelle par un
nom,
puis par un autre,
e t
par u n au t r e en cor e.
Hal à, dit - i l ,
vie n s i c i , Sann io . "
de peu r
que
ces rustres n'exécutent mes ordres de
travers.
Par
ces mots,
i l veut
faire
croire à ceux qui ne le connaissent pas,
qu'il
choisit l'un de
ses nombreux esclaves.
Il
lui dit
à l'oreille de disposer les lits à
la maison,
ou d'aller emprunter
à son oncle
un Ethiopien pour l'ac-
compagner aux bains,
ou de
placer devant
sa porte un cheval d'Espa-
gne"
(55). La faconde, c'est-à-dire cette soif de paraître et de se
montrer exubérant,
de
frapper
l'imagination du
voisinage,
est une
constante des Romains
de l'époque républicaine.
Extraverti,
ce peu-
ple méditerranéen,
a
horreur du
vide.
Il veut montrer qu'il existe,
qu'il
n'a aucune pratique rétrograde
et qu'il a
atteint un seuil
inestimable de développement.
Montrer aux autre
Romains qu'il est
singulier,
n'est-ce pas
l'une de
ses
caractéristiques? Et cela
était d'autant plus important que
la Grèce et l'Orient
par exemple,
avaient la réputation de fournir
"de
rottJu8tes esclaves,
des
techni-
ciens
intelligents,
capables de perfectionner les cultures et d'ac-
croître les revenus"
(56).
A cela,
H.G.
Pflaum ajoute
l'élégance du
nom grec:
"Les
esclaves d'origine
grecque qui appartenaient
de par leur naissance
à la civilisation grecque et donc supérieurs par leur culture aux
autres esclaves,
furent
tr~s prisés par la haute société romaine, où
les aspirations culturelles furent
en
hausse.
Ce qui
entraîne un be-
soin toujours croissant de
bons maîtres
en langue grecque.
Leurs
noms furent
considérés comme plus élégants et purent donc servir de
modèle pour des noms d'esclaves donnés à Rome"
(57). Cette constata-
tion,
on la retrouve dans
la plume de E.
5madja
. même s ' i l utilise
l'argument de
~l'inadaptation du choix de noms latins aux besoins de
dénomination des masses d'esclaves affluant
sur le marché
romain 11
(58) •
.../ ...
- 42 -
Ce qui revient à dire que même s'ils n'étaient pas d'origine gréco-
orientale, les esclaves pouvaient, par le simple fait qu'ils atti-
raient l'admivation de leurs maîtres,
voir leur identité originelle
modifiée. Cette modification leur donnait ipso facto la jouissance d'un
pouvoir, d'une autorité que peu d'autres compagnons d'infortune éga-
laient. Devenus rien d'autre que le nec plus ultra de la domesticité,
ils se taillaient un rang à part.
D'autant pilius qu'à cette période les Romains tenaient absolu-
ment à ressembler aux Grecs et à les égaler,
le mimétisme qu'il en ré-
sultait, faisait d'eux - surtout pour ceux qui en avaient les moyens -,
des êtres non plus rustres, frustes et grossiers, mais des êtres plu-
tôt civilisés. L'abondance des noms grecs dans une domesticité, était
donc l'expression d'une promotion culturelle et intellectuelle non
seulement des maîtres eux-mêmes, mais aussi des esclaves. C'est sûre-
ment cela qui explique dans la domesticité Cicéronienne et de celle
de son environnement immédiat, la trop grande faiblesse des cognomina
typiquement latins - dix au total
- et la prolifération de ceux à
consonance gréco-orientale.
Bien évidemment, pour expliquer la faiblesse des noms latins,
l'on peut être amené à orienter nos investigations dans une autre di-
rection: la non réduction des citoyens en esclavage. Cette hypothèse
semble plausible, car au-delà du fait que "the ••• Latin was improlific
in name formation ••• " (59), à la fin de la République romaine,
le nom-
bre de cas de servitude des citoyens, est peu élevé. Les rares qu'évo-
que Cicéron, rentrent le plus souvent dans le cadre de débats purement
juridiques ou philosophiques et donc qui n'ont rien à voir avec l'actua-
lité. Il en est ainsi de celui-ci, qu'il évoque dans le plaidoyer pour
A. Caecina :"Quand le peuple vend celui qui s'est soustrait au
service
militaire, il ne lui ôte pas la lib~rté, mais il juge qu'il n'est pas
libre, parce qu'il n'a pas voulu,
pour être libre, affronter le péril.·
Mais quand il vend celui qui ne s'est pas fait inscrire sur la liste
du cens, il juge que, puisque l'inscription affranchit d'une servitude
légitime, l'homme libre qui n'a pas voulu être recensé a, de lui-même,
renoncé à sa liberté ••• " (60).
Il en est également de celui-là,
relatif aux guerres puniques
:
"Dans la premi~re guerre punique, Régulus fait prisonnier par les
carthaginois, avait été envoyé à Rome à propos de l'échange des pri-
sonniers et avait
juré qu'il reviendrait:
tout d'abord, dès qu'il
arriva, il n'émit pas d'avis au Sénat, en faveur de la reddition des
prisonniers, puis, alors que ses proches et ses amis le retenaient,
il préféra retourner vers le supplice, plutôt que de manquer à la pa-
role donnée à l'ennemi" (61).
Cependant, cet état de fait n'explique pas tout. Car comment
expliquer la profonde césure que Cicéron établit dans le langage qu'il
tient à ses esclaves, selon qu'ils portent des noms latins ou à con-
sonance gréco-orientale? En effet, alors qu'il fait preuve de réserve
et nous dirons même de retenue à l'endroit de ces derniers,
vis-à-vis
des autres, il déploie tout son savoir faire dans l'art de détruire
et de souiller.
... / ...
-
43
-
Dans un langage où se mêlent théâtre,
roman avec en filigrane la
comédie et le drame, certains des cognomina romains sont caricatu-
rés dans tous les sens, entraînant dans leur sillage,
l'inneité de
la bassesse morale et intellectuelle, la corruption de l'esprit et
du corps,
l'indignité. Spartacus n'en fut-il pas victime? Bien sûr,
ce maître à penser de l'insurrection des gladiateurs d'Italie du Sud
à la fin du I~ s. av. J-C_, cet homme "généreux d'une force étonnan-
te" qui réussit à "conserver ••• une intelligence perspicace, douce,
mais ferme"
(62) pour reprendre l'éloge de J. Schmidt, réussit le
tour de force de faire l'unanimité contre lui,,:au point d'être pré-
senté comme l'ennemi prioritaire, l'épouvantail même,
le ~ors-la
loi par excellence. Mais n'est-ce pas aussi parce qu'il fut spécifi-
quement romain qu'il fut
l'objet de tant d'invectives de la part de
l'Arpinate ? Est-ce un hasard si c'est un esclave au nom latin, Phi-
dippus qui chercha à faire reposer la tentative d'assassinat de cé-
sar sur Déjotarus, ami de Cicéron, passant outre l'ingenium,la ~
dentia,
la fides,
et la religio de celui-ci
(63)
et foulant aux
pieds ce qui aurait pu être sa qualité essentielle c'est-à-dire la
calliditas? (64).
Est-ce aussi une pure coïncidence si Nicostratus
(65),
re-
connu pour avoir été l'un des instruments d'oppianicus,
ennemi du
client de Cicéron, est porteur d'un cognomen latin? Tout ceci, pour
dire que comparativement aux autres, les esclaves aux noms grecs
avaient la préférence de leurs maîtres.
Dans un univers domestique
divisé en bons et en mauvais esclaves, ils occupaient le haut du
pavé
et symbolisaient par conséquent, le positif. Du fait de leur nom,
ils avaient donc taus les préjugés favorables.
Ce ~'est pas de ce
fait étonnant que Marc Antoine que Cicéron combatt~t vigoureusement
pour san esprit a - civique, ait été assimilé à un autre danger pu-
blic, Spartacus, démontrant ainsi leur équivalence (66) et leur ho-
monymie.
Comme on le voit,
le nom apparaît non pas uniquement comme
un
simple indice permettant d'identifier un esclave. C'est surtout
un élément de classification, le moyen idoine par lequel l'esclave
démontre la catégorie à laquelle il appartient,
le groupe dans le-
quel il peut être rangé.
Par son identité,
il s'aménage un environ-
nement particulier et une stfucture personnelle. Un hiatus naît donc
entre lui et les autres, faisant ainsi des uns et des autres, des groupes homo-
gènes, compacts. Par le biais de l'onomastique, l'on se rend donc compte que le
monde servile se présente comme un monde dual, ou encore bipolai~e. Si tous les
esclaves ont le même statut, ils ne sont pas logés à la même enseigne. Le voca-
bulaire utilisé pour chacun d'entre eux, n'en est qu'une confirmation.
II.- Le
vocabulaire
Pénétrer le monde servile tel que nous le présente Cicéron, ne peut
être passible si l'an se limite à une observation de toutes les théories et les
comportements de l'un au de l'autre de ses clients, de ses adversaires politiques
ou de ses relations les plus immédiates.
... / ...
- 44 -
Si l'étude de l'onomastique nous a tout de même donné le moyen de nous faire
une idée - si approximative soit-elle - des différentes
facettes entourant les
esclaves, en revanche, une autre partie du voile reste baissée sur l'essence
même:de la terminologie de l'esclavage, c'est-à-dire sur les différentes compo-
santes au-travers desquelles les ciues romani par Cicéron interposé, indexaient
les esclaves.
En d'autres termes, quels mots, quelles expressions utilise Cicéron,
pour parler des esclaves ? Dans quelles circonstances en parle-t-il 7 Que véhicule
tel ou tel terme utilisé pour désigner tel ou tel esclave 7 Tous les esclaves,
sont-ils indiqués par les mêmes mots? C'est donc une étude essentiellement lin-
guistique que nous allons tenter d'aborder. Le langage - et les spécialistes se
sont ingéniés à
le montrer -, est une forme d'extériorisation, de matérialisa-
tion des pensées contenues dans l'esprit de chacun des hommes. Il permet ainsi
au locuteur de s'affirmer, de se sublimer, d'imposer sa personnalité ou a contra-
rio, de la laisser se dissoudre. Dans le même ordre d'idée, il apparaît comme
le reflet de la façon d'être de son auteur. N'est-ce pas en s'appuyant: sur son
langage que Cicéron, au cours de son plaidoyer en faveur de P. Sulla, accusé
de ambitu, réussit à "mener avec sagacité une enquête sur le complot tramé con-
tre l'Etat", ~ "le dévoiler en toute vérité" et "à ch§tier les coupables avec
résolution 7" (67). Le langage est par voie de conséquence, au centre des préoc-
cupations humaines. De ce point de vue, il n'est ni plus ni moins qu'un des
points les plus importants de la réflexion de l'homme. C'est convaincu de cela
qu'Alain disait: "Qui n'a point réfléchi sur le langage, n'a point réfléchi du
tout" (68). Mais étudier le langage de Cicéron ou plutôt son vocabulaire, n'est
pas une sinécure. Ce n'est pas non plus une forme d'activité ludique. C'est une
tache ardue, mais essentielle somme toute, puis qu'elle permet non seulement de
décrypter une doctrime, mais aussi la réalité quotidienne historique; d'où la
nécessité de procéder par une classification en termes généraux et spécifiques.
1- Termes généraux
a) Seruus
Plaidoyers
Plaidoieries
Correspondance
In L. Pis., V, II ; XXVII, 64
AU.
III, 24
IX, 3
X, 23
XXVII, 67
XIII, 50 ; XIII, 52
XIII,
30
XXXIV, 53
Q. fr., VIII, 1
AU.,
VI,
8
Q. fr.,
vI, 17
Pro Milon.,
l, 4
XXV, 62
l, 5
XXVII, 65
l, 6
XXVII, 73
l, 7
XXXII, 87
1,11
XXXIII,89
1,12
XXXIV, 92
1,19
XLIX, 129
. . .1. ..
- 45 -
plaidoyers - Plaidoieries
Correspondance
-------------------------------------------------------------------------------------
1,25 ; XLII, 111
VIII, 18
IX,
,26
X,
29
XII,
57
XII,
52
XII,
, 58
XII,
59
XXI,
57
XXII,
60
XXIV,
65
XXV,
61
,Pro reg. oeiot.,
I,
2
1 ,
3
VI, 17
VI, 18
VIII ,24
; VI, 30
Pro Tull.,
VIII ,20
IX, 21
XI,27
XIV,34
XV,35
XVIII,43
XX,46
XXIII, 53
XXIV,54
,De suppl ••
L IV, 8
; V 10
IV,
9
; VI 13
IV,115
VI,
12
;VII,17
VI,
14
;LIII,139
VIII 18
;LVI ,141
VI
;LVI ,146
.P.....:r;;..;o~5~e.....:x..;,.._R.....:o~s;;..;c'--'.~A;;.;.m::::e=_r., XX IV, 68
XLI, 119
XLI, 120
XXVII,
74
XXVIII. 77
XXVIII,
78
Pro. A. Cluent. , LIX, 163
XVI,47
LXIV,
180
LXIII, 176
LXIV,
181
LXIV, 181
LXV,
184
LIV, 148
LXVI , 187
LXVII , 191
... / ...
- 46 -
De Dom.,
III,
5
II,
6
XX, 53
XXI, 54
XXX, 79
XXX, 85
De Frument. ,
XL, 91
XXXII ,75
XXXVIII, 86
XXXVIII ,87
XXXIX, 89
Pro Sest.,
XXIV, 53
XXX, 75
Pro Mur.,
XXXVII ,78
Pro P. Sul.,
XXXVII ,78
Pro Balb. ,
IV, 24
,Pro Q. Rose. Commoed., X, 27
XI, 32
De Praet. Urb.,
XXVI, 68
XXXIII, 85
,
XXXVI , 91
Pro P. Quinet., XXVI, 83
XXIX, 89
,
,Prad. Stoie.,
II,
4
IV,
5
XLV, 101
XLVI,104
L, 112
,De sign.,
XXXV, 77
,II Tuse.,
XX, 48
,De Prouine. Cons.,
V. 10
lIn L. CaL.
VI,17
,
XI, 28
IV In L. CaL,
VI, II, ; VIII, 16
XXIV, 68 ; XLI, 119
, Pro
Sexe Rose. Amer
XLI. 120
,De Har. Resp.,
XII126,; XI, 22
XVIII ,38
Top. ,
IV, 11 5 ; V1. 18
,II Philip.,
XXXV, 91
XXVII, 67
.../ ...
- 47 -
III Philip.,
XI,
29
Cato Maior.,
XI,
37
De Amie.,
XXII ,
82
l de Rep.,
XLIII, 73
.
III De Rep.,
XIX, 159 , XXV, 167
,
l Rhétorigue a Heren. ,
XIV, 43
Cum Senat.,
XIII, 33
l De Leg.,
XII, 25
II De Leg.,XIX, 45
b) Seruolus
l De Leg.,
X, 25
In L. Pis., XXXV, 88 ; XXXVIII, 92
Att., VIII, 10
Pro. A. Cluent.,
LXII, 175
De Suppl.,
III, 7
Pro A. Caee.,
XX, 58 ; XVII, 52
XIX, 55
De Fin., XXVII, 76
e) Seruitium
De Suppl.,
II l, 7, ; VI, 14
De Har. Resp.,
XIII, 26
IV In CaL,
II,
4 ;
VI, 13
.../ ...
- 48 -
d) Familia
Pro Tull.,
X, 24
XI, 27
Fam. ,
5, 3, 2
.
XI, 28
XIII, 31
VII, 7, 3
,
XV, 35
XVI, 39
XIV, 4
XVI, 41
XIX, 44
XX, 46
XXIII, 53
De Suppl.,
VI,
14
VIII ,
18
XIII, 29
Pro A. Caee. ,
XIX, 55,
XX, 58
XXII,
63
II In L. CaL, VII, 18
1X, 20
l De Rep.,
XXXIX, 65
Cum Senat., VII, 20
De Dom.,
XXI,
55
InL ... Pis.,
XXXIV, 84
E!:2....P. Su1. ,
XIX, 54
·Pto Milon.,
l,
30
De praet. Urb. ,
XXXVI, 91
Pro Sex. Rose. Amer. , VIII, 22
XXVIII, 77
Parad. Stoie.,
II~ 4
l Rhétorigue à Heren.,
XIV, 40
De Har. Resp. ,
XXVIII, 78
Brut. ,
XXII, 85
.../ ...
- 49 -
e) Verna
l De Rep.,
XXI, 3
Fam.,
VIII, 15
XV,
22
f) . Mancipium
De Sign.,
V,
9
Q. fr., III, 7
8, 1
De praet. Sicil.,
XIX, 80 ; XIX, 47
Att. V, 20, 5
De Suppl.,
XXXI, 80 ; XLVIII, 126
LVIII, 149
De Leg. Agr.,XV, 38
II Philip.,
XXVIII, 70
g) Seruu5 ueneriU5
De frument.,
XXVI, 65
XXXII, 75
XXXIX, 89
XL,
92
XXXVIII, 86
De Suppl.,
LIV, 141
Pro A. Caec., XLVI, 104
De Sign.,
XIV, 32
h) Ancilla
De frument.,
IV, 8
l De Fin.,
IV, 12
-
1
Pro Miron •."
IX, 28 ; XXI, 55
... ! ...
- 50 -
i) Fugitiuus
De Suppl.,
l,
1
III,
7
Att.,
IV, 3, 4
II,
5
VI, 14
IV, 1'J
X,
25
XVII , 42
Q. fr.,IV, 14
XV,
39
Fam.
XV,
4
LXII ,
161
LXIII,164
Pro P. Sul.,
V, 15
Pro reg. oeiot. ,
l,
3
VI,
17
X, 28
l Philip.,
II, 5 ; XXXIX, 84
XXV
63
De frument.,
XXVI: 1~g ; UV, 125
LXVII ,
;LXVIII,157
III De Rep.,
XIX, 159
j) Homo
III Cat.,
VII, 16
De Suppl., V, 11
Pro A. Caec ••
VIII,
23
VIII, 22
XI,
31
XI, 33
XVI,
45
XIII, 38
5 - Termes désignant une fonction
a) Gladiator
Plaidoyers - Plaidoieries
Correspondance
-------------------------------------------------~-----------------------------------
1
V Philip. ,
IV, 10 ; VII, 20 ; XII, 32
1
1
AU.
III, 24
1
1
IV,4a
1
1
1
1
1
.../ ...
- 51
-
III Philip., VII, 18 ; VI, 18
XII, 31
IV, 12
VI,
3
l In I. Cat., XII, 29
VII, 14, 2
XII, 37
II In L. Cat.
VI, 9
VIII, 19
q. fr. , II, 4a, 3
XI,24
XII, 62
Pro P. Sul.,
V, 15
XVIII, 54
XIX, 54
Att.; II, 1
XIX, 55
XXII, 62
VII, 14, 2
De Har. Resp., l, 1 ; VII, 15
Att.
l, 16, 5
IV, 49, 2
Pro Mur., XXXVIII, 83
XXV, 50 ; XXXII, 67
XXXV, 73
XXXVI, 77
IX Philip. ,
VII, 16
XIV Philip.,
V? 14
Pro Sest., XXXVI,
78
LXIV, 133
In L. Pis.,
l,
5
IX, 19
XII, 28
l Philip., II, 5
De frument.,
LXIII, 146
Pro Milon~,
III, 10
VIII, 21
Pro /'Il .. Tull,
VIII, 18
XVI, 39
XVIII , 42
XVIII , 43
XV! , 39
.../ ...
- 52 -
Pro Cluent.,
XVIII, 59
Pro Sest.,
XV, 34, LXIV, 134
Pro P. Quinet.,
XIX, 61
2 - Termes s'appuyant sur le sexe et l'âge
1
a) Puer
1
1
1
1
1
1
l De Rep.,
XII, 23
1 Att.
II, 1
II, 7
II Philip., XVIII, 45
II, 11
IV,
4
II in L. Cat.,
X, 23
III,
7
IV, 4
V,2D
3 - Termes désignant des esclaves à titre collectif
a) Grex
II in L. Cat.,
X,
23
In L. Pis.,
X,
22
Pro Milon.,
XXI,
56
Cum Senat.,
VI,
14
b) Exercitus
Pro Milon.,
XXVIII, 76
... / ...
- 53 -
c) Cohors
Pro Milo~.,
XXV, 67
d) Copia
De Dom.,
XXIII, 61
XXV, 66
Pro A. Caec., VIII, 22
Cum Senat.,
VII, 19
e) Turba
De Har. Resp.,
XI, 22
4 - Termes s'appiliyant sur l'origine éventuelle des esclaves
a) Graecus
Plaidoyers
Plaidoieries
Correspondance
---------------------------------------------------,---------------------------------
1
1
1
Pro Miloo
XXI, 55 ; IX, 68
q
1
Att., VII, 18, 3
XXVIII, 68
In L. Pis.,
X, 22
XIII, 3D
XXIX, 71
Cum Senat.,
VI, 14
... / ...
- 54 -
b) Indaeus
De Prouinc. Cons.,
V, 10
De Har. Resp.,
1, 1
In L. Pis.,
l, 1
De Prouinc. Cons.,
V, 10
d) Asiaticus
V Philip.,
VII, 20
e) Bithynia
De Suppl.,
XI, 27
XVI, 40
f) Cappadocus
Cum Senat.,
VI,
14
g) Emptus
II Philip.,
XVIII, 45
De Praet. Sicil.,
XIX, 47
II In L. CaL,
VIII, 18
IX, 20
De Leg. Agr.,
XV,
38
De Suppl.,
XIX, 55
XVIII, 54
LVI,146
.../ .. ·
- 55 -
h) Barbarus
1
1
1
TI De off.,
VII, 25
1
Att.,III, 11 , 3
1
,
IV, 16, 7
De Sign. ,
XXXV, 77
VII,139, 3
.
V Tuse. ,
L, 112 , XX, 58
Q. fr. , l , 1 , 27
l, 27
II Tuse.,
XVII , 41 ; XX, 46
1
1
XX, 46 ; XXII , 52
1
AU. , V, 16, 4
1
1
1
XXVII ,65
1
1
1
1
1
1
IX, 26
Pro Mikm.,
1
1
XI, 30
De Dom.,
XXIII, 60
,
De Imp. en. Pomp.,
IX, 23
,
II De Rep.,
IV, 9
.
De Orat.,
II, 265
, 11, 169
II Philip. , XLIII , 112
De Suppl., LIX, 149
LXI, 157
,
Brut. ,
LXXIII, 258
.../ ...
~
- 56 -
5 - Termes désignant une fonction
a) Gladiator
Plaidoyers - Plaidoieries
Correspondance
V Philip.,
IV, 10 ; VII, 20 ; XII, 32
Att ..
III, 24
IV, 4a
III Philip., VII, 18
VI,
1 8
XII, 31
IV,
1 2
l
In Le CaL, XII,29
VI,
3
VII, 14, 2
XII, 37
II In L. Cat., VI, 9
VIII, 19
Q.
fr.,
II , 4a, 3
XI,24
XII,
62
At t . ,
II, 1
Pro P. Su 1. ,
V, 1 5
XVIII, S4
XIX, 54
VII, 14, 2
XIX, 55
XXII,
62
1
Att. 1,16,5
De Har. Resp.,
l, 1
VII, 15
IV, 49, 2
Pro Mur.,
XXXVIII, 83
XXV, 50 ; XXXII,67
XXXV, 73
XXXVI, 77
IX Philip., VII, 16
XIV Philip.,
V, 1 4
Pro Sest. ,
XXXVI, 78
LXIV, 133
In L. Pis. ,
l ,
5
IX, 1 9
XII, 28
l
Philip.,
II, 5
De frument.,
LXIII, 146
Pro Milon.,
III, 10
... / ...
- 57 -
II Philip.,
XXIX, 74
Pro Sexe Rose. Amer., XXXV, 100
De Dom., XVIII, 48
XXX, 80
Cum Senat.,VII, 18
b) Myrmillo
De Suppl.,
III, 10
III Philip.,
XII, 31
V Philip., VII, 20
e) Seaena
II in L. Cat., V, 9
IV De Rep.,
X, 183
d) Pastor
Pro sesto ,
V, 12
III Cat. ,
VI, 14
De Suppl.,
III,
7
IV, 8
VII, 15
VII,17
Pro Cluent.,LVIII,161
e) Uilieus
l De Rep., XXXVIII, 64 ; XXXIX, 67
Q. fr.,
II l, 1, 5
III, 7, 4
.../ ...
- 58 -
V De Rep.,
III, 189
Pro A. Caee.,XIX,
55
XXI, 59
Pro Flac.,
IV,
11
De Orat. ,
1 , 249
II De off.,
VI,
17
De Suppl. ,
VII,
15
De frument.,
L.
119
Pro Cluent.,
LVIII, 161
f) Tabellarius
Pro Q. Rose. Amer.,
XLVI, 134
AU. , II, 8, 1
III, 17, 1
1,
1
III,i 7~ 1
III,
7, 4
IX, 7, 1
III, 19, 3
1,
1 D
V, 21 , 4
II, 19
VI,
1, 9 ; 11,
1
VI,
9, 1
IV,
4
VII, 1 ,
II, 12
Fam. ,
XIV, 5, 1
XVI, 9, 2
Q. fr. ,
1 , 3, 1
g) Scriba
De Orat.,
II, 225
Fam. ,
V, 20, 1
AU.,
VIII, 4,
Q. fr.,
II l, 7, 8
... / ...
- 59-
h) Symphonicus
De Orat.,
III, 225
Att.,
IV, 16, 7
AU. ,
IV, 15, 6
j) Comicus
Pro Q. Rose. Com.,
VII, 20
X, 27
X, 28
VI, 17
k) Coguus
Pro Sexe Rose. Amer.,
XLVI, 134
1) Pistor
Pro
Sexe Rose. Amer.,
XLVI, 134
m) Lecticarius
Pro Sexe Rose. Amer.,
XLVI, 134
Q. fr., II, 8, 2
Le corpus terminologique des esclaves contenus dans l'oeuvre de Cicéron,
incite à un certain nombre de remarques que nous allons tenter de mettre à nu.
Première remarque: une série de vocables, aussi différents les uns que les autres,
sont utilisés pour présenter les uns et les autres des esclaves.
Deuxième remarque: aux termes généraux s'appliquant à la gent servile
dans son ensemble, se superposent des termes spécifiques marquant une activité
précise ou particularisant un esclave pour son action. C'est ainsi qu'en dehors
des mots comme seruus, apparaissent d'autres, plus précis, tels que fuqitiuus,
uenerius etc ••• Cette diversité terminologique a une importance. Car elle démar-
que profondément l'Arpinate de la quasi totalité de ses contemporains comme cé-
sar et Catulle, chez lesquels on retrouve presque sans grande variété, les mê-
mes mots pour désigner les esclaves (69).
.../ ...
- bO-
De plus, elle révèle sa foisonnante richesse terminologique, celle-ci lui donnant
la capacité de connoter à son gré, tel ou tel esclave, en fonction d'une situation
précise. Disposant d'une abondante variété de termes et donc placé dans la facili-
té de les manier les uns à la suite des autres, Cicéron tient là une arme très ef-
ficace, un outil de premier plan pour véhiculer le fond de sa pensée. Certes, nous
ne pensons pas qu'il ait été parfois amené à créer certains d'entre eux. Ceux qu'il
utilise, font partie du fonds culturel romain (70). Mais de par leur nombre, il a
toute latitude d'e~primer les situations de son choix. Ces situations peuvent être
ran~ées don~' ~~ trois caté~ories principales ~ l'identité de l'esclave, ses acti-
vites et s~s origines.
1- L'identité de l'esclave
Qui était considéré comme esclave? Quel terme lui était appliqué? En
quelles
circonstanoes s'appliquait-il ? Cicéron essaie d' Y répondre en utilisant
un vocable : seruus.
a) Seruus
Seruus est si l'on ose dire, le terme generlque servant à désigner
l'esclave. Ayant entrepris une étude d'ensemble sur la méthode linguistique des
institutions indo-européennes, E. Benveniste définit cette notion comme étant la
condition juridique et sociale frappant le non romain et caractérisée par la sou-
mission à un autre: "... Comme aucun citoyen ne peut être esclave à Rome, c'est
très probablement hors de Rome et du vocabulaire romain qu'il faut rechercher
l'origine du mot seruus. Or, nous avons de nombreux témoignages onomastiques qui
prouvent que le radical de seruus existait en Etrusque sous la forme ~i, serue.
On trouve aussi dans l'onomastique latine seruenis, seruena, seruoleni avec des
suffixes qui caractérisent les noms latins d'origine étrusque. Il est donc probable'
que seruus est un terme étrusque, bien qu'on ne l'ait pas encore retrouvé dans les
inscriptions étrusques que nous sommes capables d'interprèter " (71). Peut-on éta-
blir l'origine de cette institution, en prenant pour base unique sa racine nomina-
le ? Nous n'entrerons pas ici dans ce débat linguistique qui échappe d'assez près
à notre propos et auquel seuls les spécialistes chevronnés seraient susceptibles
d'apporter des réponses d'une assez grande clarté (72).
Le seruus est donc un non-libre, par opposition au libre, l'ingenuus.
L'un et l'autre sont deux types d'êtres différents, caractérisés par une incontes-
table imparité, puisqu'appartenant à deux structures sociales purement antinomi-
ques. Il y a de ce fait d'un côté le seruus et de l'autre le liber, deux entités
entretenant des rapports antithétiques régis par des principes de droit et s'arti-
culant sur la dichotomie suivante qui fonde la société : Hon est libre ou on est
esclave" (73). Ce socle qui structure le monde antique, non seulement procure aux
liberi tout un
faisceau de pouvoirs, mais aussi en retire les plus fondamentaux
aux serui comme l'exprime implicitement, E. Benveniste :" •.• L'homme libre se dé-
signe comme ingenuus,comme né dans la société considérée, donc pourvu de la plé-
nitude de ses droits; corrélativement, celui qui n'est pas libre est nécessaire-
ment quelqu'un qui n'appartient pas à cette société, un étranger sans droits" (74) •
.../ ...
- 61 -
Comme l'ingenuus, le seruus est par voie de conséquence, un être humain, un-
homme ou encore comme le disaient les Romains, un homo. Nous voyons ce terme
mis en exergue dans ce passage où parlant des frasques de Catilina et de ses
troupes, Cicéron dit ceci :" ••• Un
coup était-il à faire, il avait sous la
main des hommes qu'il fallait, bien choisis, bien stylés ••• " (75). Nous le
voyons aussi explicitement
établi dans ces invectives à clodius, les homines
étant achetés par lui sur le marché, pour accomplir ses basses besognes" (76).
Mais la seule différence réside dans le fait que les uns sont libres
et les autres ne le sont pas. Est-ce conscient de cette réalité que Cicéron, de
retour de son exil et ce, dans un discours de remerciements aux patres conscripti,
tança Clodius qui avait, dans sa tentative de renversement des institutions de
l'Urbs, associé dans les rangs de ses sbires, des esclaves et des hommes libres?
(7~Il n'en est pas moins sûr. Ce faisant, aucun lien direct n'attache l'escla-
ve à la cité dans laquelle il vit. Le seul qui persiste, c'est celui entretenu
par l'entremise de son maître. L'esclave apparaît ainsi comme un "autre lui-mê
me", un homme qui n'existe pas par lui-même et donc qui ne s'appartient pas.
D'une manière générale, il se contente de cette situation, s'en accomode et n'y
trouve rien à redire, sauf quand le communis salus est perturbé (78). Vu sous
cet angle, l'esclave n'est donc pas quelqu'un qui "usurpe" un statut. C'est plu-
tôt quelqu'un qui vit un sort à la limite normal, allant de soi et qui de ce fait,
entend le pérenniser et le matérialiser par des actions concrêtes. C'est à ce ni-
veau qu'interviennent ses activités.
2 - Les activités de l'esclave
Elles se résument en une et une seule question
à quoi se consacrait
l'esclave? Un certain nombre de termes peuvent permettre d'y trouver une répon-
se : seruitium, familia, fugitivu5 etc •••
a) Seruitium
Cicéron en parle pour dénommer toute la pègre à laquelle recourt
Catilina pour mener son oeuvre destructrice (79). C'est donc un groupe d'escla-
ves réunis, ameutés en vue de la violence et doté d'~ne solide efficacité dans
l'engagement de ses actions. De ce point de vue, "le terme désigne un groupe plus
large
que familia, puisqu'il s'agit là du monde servile en général"
(80).
Ne serait-ce que sut le plan numérique, il paraît effrayant et terrassant. Il
inspire aussi une crainte tellement grande, que Manius Aquilius qui eut la pré-
voyance de contrecarrer leur action insidieuse, passa pour l'un des sauveurs
de la cité (81). Salluste pour sa part en fait un large usage, quand il donne
des détails sur les esclaves ou plutôt, sur le renfort qu'ils constituèrent
lors de la conjuration de Catilina, en montrant la spontanéité de leur capacité
de mobilisation (82). Les seruitia constituent donc une force considérable, ca-
pable d'intervenir'ou de "voler au secours" de leurs commanditaires, leurs maî-
tres en l'occurence. Alors à ce moment, ils interviennent efficacement dans le
déroulement de la vie de la cité et y laissent leur empreinte en tant que groupe
social sur lequel l'on peut indubitablement compter.
.../ ...
- 62 -:-
Certes, ils ne constituent pas nécessairement une force de premier plan, encore
moins un moyen d'action de première importance à lqquelle recourir par exemple
..
en cas de danger. Le fait que Catilina leur ait fait d'abord appel avant de se
débarrasser d'eux lors du ralliement à sa cause des forces purement civiles (83),
prouve largement cet état de fait. Cependant, en tant que force offensive et
même défensive, les seruitia savent se mettre au service de leurs acquéreurs,
suivis en cela par la familia.
b) Familia
Le terme familia comporte deux sens assez proches l'un de l'autre.
- le sens le plus usité et le plus couramment employé, e~t celui qui renvoie à
un groupe de famuli (84), attachés à un maître et regroupés à l'intérieur d'une
même domus (85), constituant ainsi son patrimoine (86). Cette connotation appa-
raît clairement dans le
De Suppliciis où Cicéron reproche à Verrès d'avoir im-
posé en quelque sorte à Apollonius, habitant riche de Palerme, un esclave afin
de mieux appliquer sur lui le châtiment réservé aux esclaves considérés comme
trublions: "Verrès nomme un esclave qu'il disait être berger en chef; il dé-
clare que cet homme a conspiré et soulevé des troupes. Cet esclave n'existait
absolument pas dans' la maison d'Apollonius ••. " (87).
Ce sont en général des esclaves d'un
nombre relativement élevé et
pouvant apparaître
comme un indicateur de standing et d'aisance
pour le pro-
priétaire : "••• Je ne dirai rien
de ses moeurs, de son mérite, de sa vie acti-
ve et laborieuse. Je ne répèterai pas ce que j'ai dit, que ses biens consistaient
en esclaves, en bétail, en métaieries, en créances •.• " (88).
Placée à proximité du bétail, richesse primitive des Romains (89), la
familia n'en constitue pas moins un signe de notabilité. De la même façon, elle
hisse les propriétaires à un rang respectable et difficilement
accessible au
commun des Romains, provoquant ainsi chez les désoeuvrés, des velléités insur-
rectionnistes ou bien même, l'usage des sources illicites d'enrichissement.
L'image qu'emploie Cicéron pour railler tous les assoiffés morbides de la ri-
chesse et de l'opulence,
matérialisée à travers les Catiliniens, est longue-
ment significative du degré de cette hantise : " A bâtir comme des riches, à
vouloir des fermes modèles, de nombreux esclaves - fani'liis magnis - , ils se
sont endettés à tel point que, pour se tirer d'affaire, ils devraient appeler
Sylla des enfers" (90). Ainsi perçu, l'esclave devient une sorte de pièce maî-
tresse dans le patrimoine du maître. Son rôle est d'autant plus aigu que dans
une société où tout le monde fuit la déchéance puisque génératrice de moquerie
(91 ), les esclaves, nombreux et de bonne qualité, sont la marque d'un . r.l hOfTllTle
né de parents libres et digne d'être libre lui-même" (92). Cicéron ne connut-
il pas cette déchéance? D'abord au lendemain de son consulat (93), ensuite en
57 av. J-C., année pendant laquelle, presque larmoyant, il indique ceci à
Alticus : "
Pour ma vie privée, je suis dans de grandes difficultés. On bâtit
ma maison; tu sais ce qu'il m'en coûte d'argent et d'ennuis •
.../ ...
- 63 -
On répare la villa de Formies, que je ne puis ni abandonner nI revoir. Quant_à celle
de Tusculum, je l'ai mise en vente: et pourtant je ne me passe pas facilement
d'une propriété dans la banlieue ••• " (94).
- En plus du premier sens tout à fait traditionnel, familia
peut aussi être
utilisé pour désigner des esclaves, sans propriétaire précis. Ainsi définie,
elle ne connait aucune règle élémentaire de discipline, encore moins de hiérar-
chie, l'essentiel du pouvoir résidant uniquement dans la force dont disposent
certains d'entre eux, ou dans leurs capacités de meneurs de troupes et de bons
stratèges. Spartacus, n'en est-il pas un cas singulier? La familia apparaît
dans cette conception, comme une bande armée, insoumise et indépendante, ~rête
à semer le désordre à chaque fois que ses acquéreurs l'exigent. Du fait de leurs
capacités physiques, de leur vigueur et de leur corpulence, familia et gladiator
se confondent alors et ne font qu'un (95). Mis à part leurs rôles respectifs -
descendre dans l'arène pour combattre, les armes à la main, pour les gladiateurs
et s'activer sur n'importe quel champ de guerre pour les autres -, tous se ren-
contrent sur un point: ils sont placés au service d'autres hommes, leurs maî-
tres, soucieux d'exploiter au mieux la virilité de leurs serviteurs. Ne se ran-
gent-ils pas dans le camp des inférieurs? (96). Oans cette situation de dépen-
dance cependant, une nuance apparaît
: celle qui concerne le fuqitiuus.
c) Fugitiuus
Il prolonge d'une certaine façon gladiator, car il signifie comme
le disait J. Annequin, des esclaves en rupture de ban (97), ptêts à intégrer un
mouvement insurrectionnel. Groupe enclin au désordre, les fugitiui et les gladia-
tores sont considérés comme étant deux mondes complémentaires, alliés, dont la
comm~nauté de la cause peut permettre à leurs commanditaires d'atteindre plus
facilement leurs visées. La force avec laquelle le souligne Cicéron, donne à leur
action, une inestimable portée: " Le premier (Antonius
), accusé de brigue, a
voulu empêcher le procès et disperser les juges, d'abord par une émeute, au moyen
de gladiateurs et d'esclaves fugitifs ••• "(98). L'adverbe primum que Cicéron em-
ploie, note à dessein la priorité dont bénéficient ces forces pour les actions de
grande envergure. Disponibles, elles sont prêtes à répondre à tous "les appels de
détresse" qui leur sont adressés. Leurs actions ne s'accomplissent pleinement que
dans l'unité. En dépit de cela, les fugitiui ont la capacité de préserver leur
autonomie, de faire montre de leur indépendance et de prendre l'initiative de
leurs actions. Bien qu'étant inféodés à leurs maîtres, ils ont la possibilité de
rompre par eux-mêmes leurs chaînes et de décider du lieu et du moment de leurs
actions violentes. La révolte d'esclaves d'Italie du Sud ne fut-elle pas l'oeuvre
des seuls fugitiui?
(99).
C'est pourquoi ils provoquent parfois de la répulsion de la part d'hom-
mes libres
canleur action étant susceptible de se propager dans d'autres cou-
ches de la population (100) au point de garder une certaine vivacité dans les es-
prits (101). C'est donc en connaissance de cause que dans ses explications sur
les raisons qui le poussèrent à arrêter les alliés de Catilina après
leur conju-
ration, Cicéron insiste également sur le cas de M. Ceparius, envoyé en Apulie
ameuter les pastores (102).
.../ ...
- 64 -
Ce n'est pas non plus par simple hasard, Qu'il loua P. Setius pour avoir amené
P.
Antoniu~ à combattre contre Catilina avant l'hiver, cette période étant dans les
projets du chef des insurgés, la plus indiquée pour se rabattre dans les drail-
les d'Apulie (103).
d) Coguus, atriensis, pistor et les autres
«
Des esclaves en v~tements sombres font le service, Quelques-uns
m~me sont des vieillards. Le cuisinier est aussi maître d'hôtel, chez lui, pas
de boulanger ••• " (104), tels sont les propos tenus par Cicéron, pour tourner en
dérision son adversaire politique, le popularis et épicurien Pison. Ces propos
démontrent donc à eux seuls Que pour les Romains., non seulement i l était indis-
pensable de se doter d'une certaine domesticité et de présenter en son sein tout
ce Qui concourt "à l'élégant, au' rrecherché et au raffiné" (105) mais encore de
posséder des esclaves qui exercent un certain nombre d'activités. Dans l'oeuvre
de Cicéron, plusieurs sont mentionnées: c'est le cas de coguus, d'atriensis,
de pistor, de tabellarius entre autres, démontrant ainsi la grande hétérogénéi-
té des occupations serviles. Dans une société où les intellectuels se font de
plus en plus nombreux et où ils éprouvent la nécessité absolue de communiquer,
n'est-il pas indiqué pour les maîtres de disposer des tabellarii ? De même, ne
leur convient-il pas d'avoir des cuisiniers, des porteurs de litière, des nomen-
clateurs, des chefs d'hôtel ••• ? On le voit. Dans l'environnement romain, les
maîtres ne se limitent pas et ne s'intéressent pas non plus uniquement aux do-
maines purement technocratiques, intellectuels ou manuels. Ils embrassent tous
les domaines et
entendent leurs serviteurs être présents dans tous ces secteurs.
Le monde servile est donc à l'image de la société: totalement diversifiée, tout
comme d'ailleurs l'était leur origine.
3 - L'origine des esclaves
Trois sources principales peuvent être retenues
,
- celle connue sous le nom d'escla\\:lage exogene
- celle connue sous le nom d'esclavage endogène
- celle liée à la moralité.
a - L'esclavage exogène
Il s'agit de la forme d'esclavage la plus courante, car orientée vers
les territoires autres que Rome. Elle s'exprime par deux termes:
mancipium et barbarus.
.../ ...
- 65 -
a1
- l'Iancipium
Il présente la particularité de porter le signe de la force, de la
lutte et de la guerre : ~ - capere (106).
Il est alors l'expression de l'usa-
ge des moyens autres que pacifiques, pour l'acquisition d'une main-d'oeuvre ou
encore, pour l'appropriation du personnel nécessaire à la domesticité. Le nombre
de fréquences de mancipium (107), est la preuve de la régularité somme toute de
ce procédé et du niveau belliciste des Romains, attitude que J.P. Brisson consi-
dère comme source de stabilité de l'Etat: "A partir de la fin de la Ligue Lati-
ne"", dit-il "la guerre romaine prend une tout
autre signification et s'écarte
du modèle des cités grecques auquel on pouvait la ramener pour la période anté-
rieure : elle devient le moyen principal d'une politique d'expansion de plus en
plus consciemment poursuivie jusqu'aux limites du cynisme avec, dans les dernières
années de la République, les campagnes de Pompéè en Orient et de César en Gaule"
(108) •
Si Pompée et césar sont mentionnés par J.P. Brisson, il faut souligner
qu'ils ne constituent qu'une frange de tous ces imperatores qui à travers de loin-
taines expéditions menées farouchement en dehors de Rome, non seulement oeuvrèrent
à l'extension de l'ager publicus populi romani, mais surtout en ramenèrent des cap-
tifs. Et c'est ce que Justifie Cicéron, quand il lance dans une phrase aussi lapi-
daire qu'expressive: "Les ennemis du dehors, on les écrase et ils dsviennent des
esclaves, ou bien on les traite avec indulgence et ils se jugent liés par le bien-
fait" (109). L'application personnelle de cette ligne de conduite, a eu lieu lors
de son proconsulat en Cilicie en 51 av. J-C •• " La province de Cilicie comprenait
outre la Cilicie proprement dite, la Lycie, la Pamphylie, la Pisidie, la Lycaonie,
l'île de Chypre ainsi que trois diocèses de Phrygie: Laodicée, Apamée et Symma-
da" (110).
Après une campagne digne du triomphe, il fut tenu par la lex.lulia
de repetundis qui couvrait le butin pris à l'ennemi, d'en remettre à l'aerarium
un compte fidèle. Cicéron avait alors noté ses prises: "Je suis quant à moi, de-
vant Pindénissus, place très forte des Eleuthérociliens, qui a toujours été, de
plus loin qu'on se souvienne, en état de guerre. Hommes farouches, belliqueux,
munis de tous les moyens de défense. J'ai investi la place: retranchements et
fossé, énorme terrasse d'attaque, mantelets, tour très haute, importante artille-
rie : archers en grand nombre ; à force de pénibles travaux de siège, au prix
de beaucoup de blessés, mais sans pertes, je suis venu à bout de l'entreprise.
Joyeuses saturnales, pour les soldats aussi, à qui sauf les chevaux, j'ai abandon-
né le butin; aujourd'hui, troisième jour des Saturnales, pendant que j'écris
cette lettre, on procède à la vente des prisonniers: à mon tribunal, c'est une
affaire de 120 000 sesterces" (111).
On voit très bien la joie, l'on pourrait même dire le bonheur qui
transparaît de cette lettre à Atticus. Hilara ••• Saturnalia
dit-il, pour mon- ,
trer la réussite de son expédition, insistant ainsi sur des qualificatifs tels
que feri, ~' preuve de l'âpreté des combats et partant, du potentiel mili-
taire déployé pour arriver à cette issue. Mais pourquoi cette hilarité de la
part de Cicéron, surtout quand l'on sait la vigueur avec laquelle il luttait
contre la remise en cause de la bonne morale, de l'équilibre du genre humain
et pour tout dire, de la societas generis humani
? (112) .
.../ ...
- 66 -
Pourquoi ne tient-il pas compte des idées de son principal maître à penser,
Platon, qui prônait essentiellement l'avènement d'une cité parfaite sans escla-
ves ? (113). C'est qu'il y a en Cicéron, en plus des conceptions philosophiques
et humanitaristes véhiculées grosso modo par l'hellénisme, la prépondérance de
l'esprit romain, un esprit qui oblige le général à conquérir le plus de territoi-
res possibles et à étendre l'hégémonie romaine le plus loin possible selon les
normes du iustum bellum (114) et en vertu de certaines valeurs comme la uirtus
bellandi, l'innocentia, la temperantia, la fides, et la facilitas (115), conte-
nues en lui.
A l'instar de ses congeneres donc, l'ArpinaJe pense à la nécessité
absolue pour l'Urbs d'avoir une certaine richesse territoriale, d'intégrer dans
son sein des pans
entiers d'Etats et par la même occasion, d'assujettir leurs
habitants, faisant d'eux des serviteurs. I~ettre pied à l'extérieur et inféoder
des populations entières par le fait du glaive, telle est en d'autres termes
par voie de conséquence, l'explication de l'attitude de l'Arpinate. La mancipatio,
qui avait pour effet principal la perte de la gentilité et de la ciuitas liber-
tasque (116), ne permettait-elle aux Romains d'accomplir tous leurs travaux?
W. Fowler d'ailleurs, ne trouve rien d'autre que des
mots justes quand il écrit
dans son ouvrage que "ce serait commettre une fâcheuse erreur historique que de
demander à ces généraux romains, hommes cultivés cependant, la moindre compas-
sion pour leurs victimes. L'hérédité avait si profondément façonné leur état
mental qu'ils ne voyaient dans leurs captifs qu'un simple butin, légitime pro-
priété du vainqueur" (117).
On admet généralement que l'avènement d'Auguste à Rome, allait en-
traîner un net ralentissement des guerres extérieures. Et comme pour matériali-
ser ce déclin, Suétone évoque l'état du temple de
Janus Quirinus: " ••• Le tem-
ple de Janus" dit-il "qui n'avait été fermé que deux fois avant lui depuis la
fondation de Rome, le fut trois fois sous son principat" (118). Mais cela laisse
persister une réalité: ce sont les guerres extérieures auxquelles l'on peut
joindre la piraterie, véritable fléau de la Méditerranée (119) qui permettaient
le mieux aux Romains d'être
pourvus en esclaves. Le terme de barbarus achève
de démontrer cette thèse.
a2 - Barbarus
C'est le terme de l'infériorité par excellence, la marque infâmante
de l'Autre, que l'on refuse ou que l'on rejette. Sur quoi se fonde cette concep-
tion ? Cette réponse de Cicéron, peut nous servir de point de repère : ~ •• Si
comme disent les Grecs, tous les hommes sont ou Grecs ou barbares, je crains
que Romulus n'ait règné sur des barbares; mais si le terme barbare doit s'appli-
quer non aux langages mais aux moeurs, je pense que les Romains sont aussi loin
que les Grecs d'être des barbares" (120). Elle met en lumière, l'existènce de
deux blocs : celui de la civilisation et celui de la sauvagerie ; deux blocs op-
posés l'un à l'autre, qui se tournent le dos et entre lesquels n'existe aucun
chevauchement. Cette absence de chevauchement est essentiellement sur le plan
culturel.
.../ ...
- 68 -
.•• Les rapports de Cicéron avec Arp1num n'ont pas échappé à la raillerie et
aux
sarcasmes de ses adversairys,
étaient souvent des Romains de Rome et af-
fectaient de traiter le petit municipe des bords du Liris comme une insignifiante
bourgade. On l'appelait par dérision le "tyran d'Arpinum" (147).
Du coup, se retrouvent jetés dans cette sphère sordide de la barbarie, "Ver
rès,
Catilina, Vatinius, Pison, Tubéron, Marc Antoine qui de par leur compor-
tement anti social ••. représentent une élite du mal ••• " (148). L'expression de ce
qui était donc au début une forme virulente de racisme (149), se dilue, se désa-
grège et se laisse rattraper par la "mauvaiseté" du comportement ~ les externi
seuls ne portent plus la responsabilité de gangrèner Rome et d'être bons pour
l'esclavage, mais dans la difficulté qu'ils posent pour une facile et bonne inté-
gration, ils accueillent comme alliés, les ciues romani. Cette classification
cicéronienne est claire, car elle montre le mode de pensée des Romains. Un mode
de pensée qui tend non pas à placer tous les peuples sur le même pied et à leur
reconnaître les mêmes capacités et les mêmes valeurs, mais à créer une profonde
césure en leur sein. Dans le même temps, elle place les Romains à un niveau suf-
fisamment élevé en rendant difficile, l'accès à leur groupe. A travers Cicéron
donc, se dessine ce que les Romains pensent des autres: des inférieurs, de sim-
ples valets, parce qu'étant insuffisamment formés sur les plans culturel et moral.
Etant donné que Rome est le centre de l'univers. le nombril du monde, la meilleure
partie de son
peuple bénéficie de son prestige et de son autorité,
le reste
étant relégué dans les ténèbres de l'inexistence.
b - L'esclavage endogène
Un terme permet de saisir sa place et sa portée au sein de la société
romaine
Verna.
b1- Verna
Quel senS lui donner ? Nous ne saurions le dire exactement, compte
tenu de la complexité d'interprétation que cette terminologie représente. En
effet, couramment utilisée, elle désigne à la fois un esclave et une forme
d'acquisition. C'est alors qu'on parle "d'esclave né à la maison", définition
établie également par F. Gaffiot (150). J. Bayet pour sa part, retient le sens
"d'esclave domestique" et l'applique surtout à cet esclave, Billénus, acousé
d'avoir saisi et étranglé un citoyen, Domitius (151). Si sa traduction reste in-
complète, car elle ne révèle pas la particularité de l'esclave: sa causticité
vulgaire et surtout. le fait qu'il ait été rémunéré pour accomplir son forfait,
elle ne nOus permet pas de répondre à la question suivante : Verna, signifie
t-il que dans la société romaine il existait des esclaves descendants d'autres
couples esclaves ou encore, d'un des parents eslaves ? Et si l'on élargit le
débat, les Romains, étaient-ils susceptibles d'être réduits en esclavage? A
cela, un fait d'évidence s'impose: jusqu'au Ivè s. av. J-C., un père de famille
appauvri, avait la latitude de vendre ses propres fils comme esclaves, quitte à
les racheter par la suite. Quant aux citoyens débiteuus. ils étaient soumis en
cas d'insolvabilité prolongée, à la menace de l'asservissement par leurs créan-
ciers, comme ce fut le cas à Athènes jusqu'à l'époque de Solon •
.../ ...
- 69 -
Ce qui veut donc dire qu'au Iè s. av. J-C, cette forme d'asservissement n'existait
plus. Reste la reproduction entre e s c l a v e s . au sein de la domus
fami-
liale.
Laissons en parler P. Grimal: " •.. Aux temps anciens, les amours des
esclaves entre eux étaient considérées de la même façon que celles des animaux
de la ferme: un moyen pour le maître d'accroître son patrimoine grâce aux pro-
duits. Mais il n'était pas aussi facile de les
régler que celles des bêtes à
l'étable et l'on imagine à quel point le problème pouvait être délicat, dans ;les
fermes comme dans les maisons des villes. Il ne suffisait pas d'enfermer, chaque
soir, les servantes dans une partie séparée de la maison ; les ruses des amoureux
sont multiples et il n'est guère de gardiens ou de gardiennes incorruptibles. Un
pot de vin dérobé au cellier des maîtres, une friandise avaient raison des plus
vigilantes vieilles femmes ••• Il (152).
Comme on le voit, les accouplements entre esclaves pouvaient conduire
à la naissance d'une progéniture que le maître utilisait alors directement à ses
ns, après l'avoir intégrée dans sa domesticité. Bien évidemment, Cicéron n'en
fait pas état abondamment, comme l'atteste la faible fréquence de ce terme (153).
Cependant, l'existence du vocable ancilla, servante placée essentiel-
lement au service dé la maîtresse, laisse admettre que dans certaines familles
où existaient des femmes et des hommes-esclaves, des relations coupables de-
vaient être relativement fréquentes, avec la conséquence évidente : la procréa-
tion. Même les maîtres, ne recouraient-ils pas à cela
pour assouvir leurs ins-
tincts ? pétrone n'exprime rien d'autre quand il.' laisse deux de ses personna-
ges, aller, dans sa satire, à ces propos: " ••• Jusqu'ici, jamais esclave ne m'a
tenue sous lui ; et aux dieux ne plaise que mes embrassements aillent à qui de-
main peut être en croix ! Libre aux maîtresses qui couvrent de baisers les mar-
ques des écrivières ; mais moi, toute servante que je suis, je ne fraye qu'avec
les chevaliers ••• " (154). D'aucuns pourraient être tentés de faire remarquer que
faire intervenir pétrone sur une question qui touche d'une certaine manière le
rè s. av. J-C., peut présenter un risque d'anachronisme, ce qui ne serait pas to-
talement inexact, vu les grandes modifications structurelles que connut l'Urbs
entre l'époque républicaine et le principat. Mais il faut aussi reconnaître que
si sous le
principat, période marquée entre autres par un retour aux bonnes
moeurs, des cas comme ceux évoqués par pétrone se produisent, qu'en était-il sous
la République ?
L'exemple de Tiro (155) et de tous les serviteurs d'Atticus (156) appor-
te donc la preuve de la régularité de ces amours ancillaires. En définitive, la .1
naissance au domicile du maître et la guerre, apparaissent comme les deux formes
principales de réduction en esclavaGe dans l'oeuvre de Cicéron et partant, à la
fin de la République romaine, même si comme le fait remarquer si bien A. DaUbi-
gney, la servitude exogène l'emporte sur l'endo-servitude (157). A elles seules,
elles permettent à la société de se pourvoir en main-d'oeuvre et de disposer
d'un capital humain de son choix. Mais l'esclavage n'est pas seulement un statut
c'est aussi un état, une manière d'être.
.../ ...
- 70 -
A ce niveau, intervient alors une forme de réduction en servitude, tout aussi
importante que les autres: ce que nous pourrions appeler, la moralité.
c - La moralité
" Apronius, un homme à peine libre, un homme flétri, perdu, infâme,
un homme qui n'a pas su conserver, je ne dis pas son âme intacte, mais même son
haleine pure ••• " (158). Ces propos tenus à l'endroit d'Apronius, l'un des nom-
breux adversaires politiques de Cicéron, ne permettent pas uniquement de con-
naître un autre pan de la personnalité de l'Arpinate injurieux et même, calom-
niateur. Ils nous donnent davantage la possibilité de savoir quelle place la
moralité occupait dans l'esprit des Romains.
Ce qui se ramène à une question fondamentale : le citoyen romain,
qui était-il? Un homme débauché, sans scrupules ou plutôt un être sans repro-
ches, gagné par la rectitude? Le fait que Cicéron ai t conspué Apronius, nou s
pousse à admettre la ~èuxième réponse. Personnage cultivant parfois avec force
la droiture morale, l'honnêteté ainsi que toutes les autres vertus, Cicéron
admettait difficilement dans ses écrits, que l'on s'écartât de ces principes.
Un homme - surtout public -, se devait non seulement de pratiquer la justice,
mais aussi d'adopter un comportement responsable et digne. Ceci devait l'obli-
ger à éviter certaines fréquentations compromettantes comme celles des dépravés,
des homosexuels, des ivrognes ou même certains milieux tels que les cabarets
etc ••• Dépositaire de la "vieille Rome", celle qui croyait
en ses valeurs et
dans les capacités de celles-ci à promouvoir la société et à lui assurer un dé-
veloppement marmonieux, l'Arpinate était fermement convenu que c'est aussi par
l'adoption d'une attitude conforme à ces idéaux, que la citoyenneté devait se
mériter et se pratiquer. D'où la relégation au rang d'esclaves, des personnages
comme Verrès, Catilina, Pison, Marc Antoine ••• Pour s'être enivrés, pour avoir
versé dans la violence aveugle et inconsciente, pour s'être laissés aller au
port des tenues grossières et impudiques, pour avoir privilégié les plaisirs
corporels par essence avilissants, ces personnages, plutôt que de cultiver leur
virilité, l'ont entamée au point d'être efféminés, devenant par ricochet, des
non-citoyens. Ainsi si le statut de ciuis romanus continue à leur être reconnu,
ils n'en demeurent pas moins indignes. Les termes de pueri, de pueri delicati
59)
de seruolus
(160)
qui leur sont accolés, le justifient pleinement. Po~r cicé-
ron, ces hommes qui se veulent populares, ~'ont plus rien en commun avec lui et
avec tous ceux qui respectent encore la morale antique. Véritables éléments dis-
solvants, ils gangrènent tous les milieux sains qu'ils fréquentent, les dénatu-
rent et leur font courir le risque de perdre leur civilité.
Avec cette approche, s'élargit' ainsi le "gaptl qui sépare la citoyenne-
té de l'esclavage. Etant donné que l'esclavage cesse d'obéir aux normes purement
juridiques, il devient une sorte d'épée de Damoclès, donc une menace quotidienne
et permanente pour tous les citoyens. En même temps donc que le droit, la morali-
té apparaît sous Cicéron, comme un indice important de positionnement social. Puis
qu'il ne s'assure plus et ne sait plus rester maître de son état originel, le ci-
toyen n'a plus la garantie de son statut. Sa déchéance morale pouvant entraîner
sa déchéance statutaire, il reste un être fragile, sous la hantise permanente d'une
chute profonde. A travers ces écrits de Cicéron, l'esclavage prend donc le visage
d'une situation fluide, indéfinie et imprécise, même si une certaine netteté se
dessine dans l'appréciation des rapports entre maîtres et esclaves .
.../ ...
- 71 -
Notes
1 - C'est tout au moins, ce que laisse entendre Y. Garlan, Les esclaves en
Grèce ancienne p. 31.
2 - X. Philip., X, 20, : Tamen pro libertate uitae decertandum est. Non enim in
spiri tu uita, sed e.a nu 11a est omnino.. i5w:àJ. ÏJ€.D.t i
3 - "Contribution à l'étude de l'esclavagisme: la propriét~ esclavagiste chez
Cicéron" in Texte, Politigue, idéologie
Cicéron, p. 1
4 - CIL, VIII, Suppl. P. III nO 22008
5 - Ce zèle dans l'attribution des noms s'est emparé des Romains de façon progres-
sive, au fil des siècles. Il n'y a qu'à remonter dans le temps, pour s'en
rendre compte. Les frères jumeaux placés à l'origine de Rome, sont appelés
Romulus et Rémus ; leurs successeurs Numa Pompilius et Tullius Hostilius. De
même, l'aïeul de Romulus porte la dénomination de Numitor Sylvius et son
grand-oncle, Amulius Sylvius.
6 - C. Mironesco, Le nom des personnes en droit comparé, p. 3.
7
Comm., Pet., XII, 18 : ••• Sunt instituendi cuiusque generis amici, ad speciem
homines illustres honore ac nomine, gui etiam si suffragendi studia non nauant,
tamen adferunt petitori aliguid dignitatis,
10 - l De off., XIII, 44 ; Si guis ab ineunte aetate habet causam celebritatis et
nominis aut a patre acceptaRL guod tibi, mi Cicero, arbitror contigisse, aut
aliguo casu atgue fortuna, in hunc oculi omnium coniciuntur atgue in eum, guid
agat, guemadmodum uiuat, inguiritur et, tamguam in clarissima luce uersetur
ita nullum obscurum potest nec dictum ei"U5esse nec factum.
8 - l De off., XVII, 55 ; Magnum est enim eadJ;:!m habere monumenta maiorum iisd
uti sacris, sepulcra habere communia.
g - Cic~ron, pp .27-28,
11 - N. Henry Michel, op, cit., IJ , 99,
12 - P. Gontard, Drolt romaln )
e
o la personnalité de l'esclave, p. 28
13 - id.
14
Par exemple, l'ordre chronologique de la publication de l'oeuvre cicéronienne.
15 - Att., VII, 4, 2 : Pompeium 1111, Idus Dec., fuimus una horas du as fartasse,
Magna laetitia mihi uisus est adfici meo adventu ; de triumpho hortari,
suscipere partes suas,mohére ne ante in senatum accederem guam rem confecissem,
ne dicendis sententiis aliguem tribunum alienarem.
16 - ibid., VII, 13a, 3
... / ...
- 72-
17 - Dans ce cas, il se limite à une généralisation, comme nous le verrons.
plus loin.
18 - L, 351 ; Heus tu, inguit, uenio sannio, ne guid isti barbari turbent': ut
ignoti, gui audiunt, unum putent eligi de multis. Ei dicit in aurem, est
aut domi lectuli sternantur, aut ab aunculo reg et ur Aethiops, gui ab balneas
ueniat, aut asturconi locus ante ostium suum detur.
.
19 - Q,fr. , l, 2, 14 , Praeterea Aesopi tragoedi nostri familiaris Licinus seruus
tibi notus aufugit.
20 - Fam., XIV, S, 1 ;
21 - ibid., XVI, 9, 2 ; Sed tamen Asclapo medicus plane confirmat propediem te
ualentem fore.
22
C'est l'avis de J. Mascquardt, La vie privée des Romains, p
437,
..
23 - "Nationality of slaves under the Early Roman Empire" in The J.R.S., 14, 1927, p.
97.
24
P. Grimal, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, P
3,
25 - M. Grant - J. Hazel, Le who's who de la Mytholocie, ~. 39,
26 - P. Grimal, op, ciL, p '. 37
27 - Vie et mort des esclaves dans la Rome antique, p. 115
28 - P. Grimal, op, ciL, p.127.
29 - M. Grant - J. Hazel, op, cit., P. 161 •
30 - op, cit., p,.127,
31 - ib~_~_., p~ 128
32 - V Tusc., XX, 57
33 - M. Grant - J. Hazel, op, cit., Pt 99,
34
Commelin, Mythologie grecque et romaine, p,.334.
35 - op. ci t ., p . 11 0
.../ ...
- 73 -
36 - "Sur les noms grecs port~s par les Romains" in R.E.L., LI, 1973, R 51.
37 - II De Nat. Deor., XXXVI, 243.
38 - Op.,. cit., p.
22.
39 - L'expérience grecque, p .. 59.
40 - "Traditions et innovations" in le génie latin p • 95.
41 - Cette question qui conslste à savoir si en majorité ce sont les esclaves qui
portaient des noms gxecs à Rome, a déjà fait l'objet d'une intéressante con-
troverse. 1. Kajanto qui s'V est spécialement concentré dans un riche article,
note en substance, s'appuyant sur les documents épigraphiques; " ••• This seems
ta demolish the theorY of greek cognomina as a speciality of slaves, and ta
suggest that greek and latin cognomina were used indiscriminately in Roman
nomenclature, Voir: "The signification of non-latin cognomina" in latomus,
XXVII, 1968, p. 527.
42 - De frument., XXXVIII, 86
43 - Att., 1, 12, 4 : Quid praeterea ad te scr ibam non habeo, et me hercule eram in
scribendo conturbatior. Nam puer festiuus anagnostes noster sositheus decesserat
meque plus guam serui mors debere videbatur commouerat.
guerare, si scias.
obsi.nauit
45 - Att.,
V, 20, 9: "Nicanor in officia est et a me liberaliter tractatur. Quem,
ut puto, Romam cum litteris publicis mittam, ut et diligentius perferantur et
idem ad me certa de te et a te referat.
46
Fam., XVI, 13 :
Summa cura exspectabam aduentum Menandri, guem ad te miseram
47 - ibid., XVI, 15, l : ••• Aegypta ad me venit pr, Idus Apr., Is etsi mihi nuntiauit
te plane febri carere et belle habere, tamen, guod Q2gauit te potuisse ad me
scribere, curam mi attulit.
48 - ibid., XVI, 15, 2 : ••• Scripta iam epistula Hermia uenit, Accepi tuam epistulam
uacillantibus litterulis, nec mirum tam gra~i morbo.
49 - ibid, XVI, 14, 2
Acastum retine, guo commodius tibi ministretur •
.../ ....
- 74 -
50 _ Att.,
VII, l'; 1 : Dederam eguidem L. Saufeio litteras et dederam ad te unum,
guod, cum non esset temporis mihi ad :scribendum satis, tamen hominem tibi tam
familiarem sine meis litteris ad te uenire nolebam
sed, ut philosophi ambu-
lant, has tibi redditum iri putabam prius.
51 - ibid.,
IV, 11, 2 : Nos hic uoramus litteras cum homine mirifico (iba me hercule
sentio) Dionysio, gui te omnesgue vos salutat.
52 - Q. fr., II, 11, 4 ;., Me magis de Dionysio delectat
ipse est enim ueterator
magnus et paterfamiliaris Philisto Dionysius.
53 - ibid., VIII, 5, 1,
54 - ibid., VII, 2, 8,
55 - Rhet , Haren., L, 351
56 - R. Nougier-S, Saumeron,
Hi§toire générale du travail
Préhistoire et Antiguité
p. 301,
57 - op., ci t., P, 51
58 - "Esclaves et affranchis dans la correspondance de Cicéron : les relations
~5clavagistes" in Texte, P01itigue, Idéologie ; Cicéron, p.
90.
59 - Mary Gordon - B. Litt
op, cit., ~
105,
60 - Pro A .Caec., XXXIV, 99
61 - De off.,
XIII, 39
62 - op., cit., P. 125
63 - Pro reg. Deiot., VI, 16
64
Ibid., VI, 18 : Quod igitur et conari occultius et efficere cautius potuit, id
tibi et medico cal lido et seruo.
65 - Pro A. Cluent., LXI, 187 : Quaero abs te, oppiànice, seruo tuo Nicostrato guid
factum esse dicas, guem tu, cum hunc breui tempore accusaturus esses, Romam
deducere, dare potestatem indicandi, incolumem denigue seruare guaestioni,
seruare, his iudicibus, seruare huic tempori debuisti. Nam Stratonem guidem,
iudices, in crucem esse actum esse exsecta scitote lingua.
66 - XIII Philip., X, 22
: 0 • Spartacus! Car quel nom te donnerais-je plutôt,
à toi dont les crimes abominables auraient rendu, semble t-il, Catilina tolé-
rable ?
.../ ...
- 75 -
67 - pro p. ~Il, V, 14 : Multum haec uox fortasse ualere deberet eius hominis
qui consul insidias reipumlicae consilio inuestigasset, ueritate aperuisset,
magnitudine animi uindicasset.
68 - Propos sur l'éducation, Paris, P.U.F. 1956
69 - Chez Catulle, Poésies, seuls ancilla - 67 v, 43, ~'~ 75 -, et se~vus - ~3 v, 24,
p~ 75 puis 24 v .29-37, p. 18 sont utilisés, de meme que chez Cesar, ou ils
reviennent comme une sorte de leitmotiv:
Barbarus
IV Bell. Gall. ,
XXXII, 11 ~
XXXIV, 120
LIV, 170
XXIV,
114
XXV,
114
XXXIV, 155
V Bell. Gall.,
XLV,
164
VI Bell. Gall.,
XIX,
190
XXXIX,
195
X,
183
XIII,
185
XXXIV, 199
XXXVII , 202
XXXIX, 204
XLII,
206
Seruulus
VI Bell. Gall,
XIX,
190
70 - Si l'on se réfère à l'usage :qu'en fait Salluste. op.cit~; ou même Qes auteurs
plus tardifs comme Martial 0 Voir par exemple, l'ouvrage de 'M. Garrido-Hory,
Martial et l'esclavage, pp. 91-106
71 - Le vocabulaire des institutions indo-européennes, pp. 359-360,
72 - Se reporter alors aux études menées par J. Heurgon, La vie quotidienne chez
les EtrUSques, Pr B et Th. Frankfort, "les classes serviles en Etruriel!
in Latomus, 1959 pp. 6-7.
73 - Gaius, Inst., 9, 2 : ••• Omnes homines aut liberi sunt aut serui.
74 - op. cit., P. 360.
75
III In L. eat., VII, 16
Ad certas res conficiendas certos homines delectos ac
descriptos habebat.
.
76 - Pro Sest., LXIV, 134 .... de uenalibus quidem homines electos.
... / ...
- 76 -
77 - De Dom., XXI, 54 : Cum in tribunali Aurelio conscribebas palam non modo
liberos, sed etiam seruos ex omnibus uicis concitatos, uim tuam uidelicet
non parabas !
78 - IV In L. Cat., VIII, 16 : Seruus est nemo gui (nunc) modo tolerabili condicione
sit seruitutis, qui non audaciam ciuium perhorresGat, qui non haec stare cupiat,
qui non quantum audeb et (in) quantum potest conferat ad communem salutem
uoluntatis.
79 - IV In L. Cat., II, 4
Solli~iatantur Allobroges, seruitia excitantur.
80 - J. Annequin, "Esclaves et affranchis dans la conjuration de Catilina" in Actes
du colloque 1971 sur l'esclavage, PP. 194-195.
81 - De Suppl., VI, 14
82 - De con. Cat., XLIV, 96
Cum ab senatu hostis indicatus sit, quo consilio
seruitia repudiet ?
83 - Ibid., LVI, 117-118 : dum ea Romae geruntur, Catalina ex omni copia quam et iPSf
adduxerat et Manlius habuerat, duas legiones instituit ; cohortis pro numero
militum complet, Deinde, ut guisque utilontarius aut ex sciis in castra
uenerat, aequaliter distribuerat, ac breui spatio legiones numero hominum
expleuerat, cum initio non arnplius duobus milibus habuisset ••• Interea seruitia
repudiabat, cuius initio ad eum magnae copiae concurrebant, opibus coniurationi5
fretus, simul alienum suis rationibus existumans uideri causam ciuium cum serui~
fugitiuis communicauisse.
84 - L'emploi de ce mot est assez rare, mais il désigne un serviteur, un domestique.
A. Ernout - A. Meillet, Dictionnaire étymologique de la langue latine : Histoi-
re des mots, P. 215.
85 - Ils s'opposent ainsi à la gens. Ibid., p
215. On peut également dans le même
cas, consulter l'article 'de
Radin M., "Gens, familia, Stirps" in C. Ph., IX
1914, et surtout à la page 237 où l'auteur dit: Gens is used to designate a
roman class or super family, i, e., a group of men believing themselves to be
descended from a common ancestor.
86 - C'est l'idée qui rejaillit de la définition que donne Cicéron de familia :
Pro A. Caec., XIX, 55 : Quid enim
facilius est, quam probar~:iis, qui modo Lat
ne :sc,iant,
il;l unD seruolo . familiae nomen non ualere ? Si uero ne habeas gui.!:!.:
seI:W.lm
. . oraeter eum qui me deiecerit, clames videlicet : "si habeo
raml1lam, a tamilia mea fateor te esse deiectum"
87 - VII, 17 : Nominat iste seruum guem magistrum pecoris esse dicebat ; eum dicit
coniurasse et familias concitasse. Is omnino serUU5 in familia non erat •
.../ ...
- 77 -
88 - ibid., VIII, 20 : Ninil de hominis fruqalitate, uirtute, diliqentia dicam ;
praetermitam illud etiam de quo ante dixi, fortunas eius ita constitutas
fuisse, familia, pecore, uillis, pecuniis creditis.
89 - A. Ernout et A. Meillet, Dictionnaire étymologie de la langue latine
Histoire
des mots, p.
402.
90 - II In L. Cat., IX, 20 : Hi dum aedificant tamquam beati, dum praedils lectis,
familiis maqnis, conuiuiis apparatis:delectantur, in tantum aes alienum
inciderunt, ut, si salui esse uelint, Sulla sit eis ab inferis excitandis.
91 - Salluste., De Con, Cat.,XII; 66
paupertas probro haberi
92 - In L. Pis., XXVII, 67 : •••• inqenuo ac libero diqnior
93 - Fam., V, 6,2 : Nunc me seita tantum habere aeris alieni ut cupiam coniurasse,
si quisguam recipiat, sed partim odio inducti me excludunt et aperte uindieem
coniurationis oderunt non credunt et a me insidias metuunt nec pu tant ei nummos
desse passe, qui ex obsidione feneratores exemerit.
94 - Att., IV, 2, 7 : Domesticarum autem ualde impedita. Domus aedificatur, scis quo
sumptu, qua molestia. Reficitur Formianum, quod eqo nec relinquere possum nec
uidere, Tusculanum proscripsi, etsi suburbano non facile careo.
95 - Pro P. Sull., XIX, 54 : Adrepta est familia, guae si esset praetermissa, posset
alia familia Fausti munus praebere.
96 - Pro T. Milon., XXXIV, 92 : Si in gladiatoriis puqnis et infinmi generis hominum
condicione atque fortuna timidos et supplices et ut uiuere liceat obsecrantis
etiam odisse so1flmus, fortis et animosos et se aeriter ipsos morti offerentis
seruari cURimus, eorumgue nos magis miseret gui nostram misericordiam non re-
guirunt, guam gui illam efflagitant, quah~b hoc magis in fortissimis ciuibus
facere debemus !
97 - OP., cit., P. 196
98 - Pro Rr Sull., V, 15 : Ille ambitus iudicium tollere ae disturbare primum
conflato uoluit gladiatorum et fugitiuorum tumultu.
99 - De Suppl., l, 1 : Prouinciam 5iciliam uirtute istius et uigilantia singulari
dubiis formidolosisque temporibus a fugitiuis atgue a belli periculis tutam
esse seruatam.
100 - D'où la décision de Catilina de les congédier. 5al, De con, Cat., LVI, 117-118 •
.. ./ ...
- lB -
101 - Nous en parlerons plus tard.
102 - III Cat., VI, 14 : ••• in M. Ceparium, cui ad sollicitandos pastores Apuliam
attributam esse erat indicatum.
103 - Pro P. Sest., V, 12 : Negue adiutor ei P. Sestius ad excitandum Antonium,
cohortandum, accusandum, inpellendum fuisset. datus illo in bello esset hiemi
locus, negue umguam Catilina, cum e pruina Appennini atgue e niuibus illis
emersisset, atgue aestatem integram nanctus Apuliae callis ••• praedari
coepisset.
104 - In L. Pis., XXVII, 67 : Serui sordidati ministrant, nonnulli etiam senes
idem coguus, idem atriensis. pistor domi nullus.
.
105 - Ibid •• XXVII, 67 .... Lautum, elegans, exguisitum •
106 - E. Benoist - H. Goelzer, Nouveau dictionnaire Latin français, p.
871.
107 - Employé dix fois.
108 - Problèmes de la guerre à Rome P. 6.
109 - IV In L. Cat., X, 22 : Hostes alienigenae aut oppressi seruiunt aut recepti
beneficio se obligatos putant~
110 - E. Fallu, Cicéron et les finances publigues, 'p. 194
111 - Att., V, 20, 5 : Nos ad Pindenissum. guod oppidum munitissimum Eleutherocilicu
omnium memoria in armis fuit. Feri homines et acres et omnibus rebus ad
defendendum parati. Cinximus uallo et fossa ; aggere maximo, uineis, turre
altissima. magna tormentorum copia, multis sagittariis. magno labore. apparatu
multis sauciis nostris. incolumi exercitu negotium confecimus. Hilara sane
Saturnalia militibus guogue. guibus eguis exceptis religuam praedam concessin
mus. Mancipia uenibant Saturnalibus tertis, cum haec scribebam
in tribunali
res erat ad HS CXX.
112 - l De off., XI, 34 : Sunt autem guaedam officia etiam aduersus eos seruanda,
a guibus iniuriam acceperis, Est enim ulciscendi et puniendi modus, atgue
haud scio an satis eum gui lacessierit, iniuriae suae paenitere ut et ipse
ne guid tale posthac et ceteri sint ad iniuriam tardiores.
113 - Voir le brillant article de C. Despotopoulos, "La cité parfaite de Platon et
l'esclavage" in R.E.G., LXXXIII, 1970, P. 26 •
.../ ...
- 7'1 -
114 - Var, V De Ling, Lat., XVI, 86 : Fetiales, quod fidei publicae inter populos
praeerant ; nam per hos fiebat ut iustum conciperetur bellum et inde desitum,
ut foedere-fides pacis constitueretur.
115 - De Imp., Cn, Pomp., XIII, 36
116 - A peu de mots près, cette situation est analysée par J. Ellul dans sa thèse
Etude sur l'évolution et la nature juridique du mancipium, p. 90
117 - La vie sociale
à Rome au· temps de Cicéron, p • 169.
118 - Diu, Aug., XXII, 80 : Ianum Quirinum semel atque iterum a condita urbe ante
memoriam suam clausum ••• ter clusit.
119 - Elle infestait la Méditerrannée, semait l'insécurité la plus totale, comme
nous le montre la capture du futur dictateur César, Suét., Diuus luI., IV, 4.
120 - l De Rep., XXXVII, 63 : Si ut Graeci dicunt, omnes aut Graios esse, aut
barbaros, uereor ne barbarorum rex fuerit ; sin id nomen rnoribus dandum est,
non linguis, non Graecos minws barbaros quam Romanos puto.
121 - Pro M. Font., XV, 33
••• barbaro atque immani terrore uerborum
122 - Brut., LXXIII,
: Omnes tum fere, gui nec extra urbem hanc uixerant negue eos
aliqua barbaries domestica infuscaverat, recte loguebantur.
123 - Y. A. Dauge, Le barbare. Recherches sur la conception romaine de la barbarie,
p. 62 •
124 - Cicéron en est persuadé, Se référer à l Tusc., l, 2,
125 - Les Grecs n'en pensaient pas autrement, M.F, BasIez, L'étranger dans la
Grèce antigu~ pp. 21-23
126 - ~ome et la conguête du monde méditerranéen, T, II
Genèse d'un empire,
p; 856,
127 - Q. fr., l, l,
••• Aut Hispanis aut Gellis praefecisset, •.• barbaris
nationibus.
128 - V Tusc., XXVII, 77 : Quae barba ria India.
129 - Pro Marcel, III, 80
.../ ...
- ElO -
130 - De Diu, l, 90.
131
De rep.,
I I , 9 .
132
- Att., V, 16, 4.
133
- De prouinc, cons., V, 10
•••
Iudaeis et Syris.
134
- De Diu" 1,90.
135
Pro L.
Flac., .X.XV) 1, 65
: Namgue, ut opinor, Asia uestra
constat ex Phrygia, Mysia,
Caria, Lydia •.. Utrum igitur
nostrum est an uestrum hoc prouerbium, "Phrygem plagis
fieri solere neliorem ? " Quid ? de tota caria nonne hoc
uestra uoce uolgatum est, "si guid èum pericullJ experiri
uelis,
in care id potisimum esse faciendum?
Quid porro
in Graeco sermone tam tritum atgue celebratum est guam,
si guis despicatui ducitur, ut
"Mysorum ultimus" esse
dicatur ? Nam guid ego dicam de Lydia ? Quis umguam Graecus
comoediam scripsit in gua seruus primarum partium non Lydus
esset ? Quam ob rem guae uobis fit iniuria, si statuinus
uestro nobis iudicio standum esse de uobis ?
136 - Fam.,
VII, 24,
2
137 -
In L.
Pis.,
l,
1,
138
- M.
Garrido - Hory,
op. cit .• p. 117
139 - Q. fr.,
I I , 8 , 2 ,
140 - id.,
141
- II Tusc. XXIII, 55 :
•••
Sed hoc idem in dolore maxume est
prouidendum, ne guid seruiliter muliebriterue faciamus
142 -
III Tusc.,
VIII, 17.
143 -
II De off .• XVI, 57 : Haec pueris et mulierculis et seruis
et seruorum simillimis liberis esse grata, graui vero homini
et ea guae fiunt.
144 - Le cas des Germains est le plus patent~ César raconte comment
leur approche pendant la campagne des Gaules créa la paniqu~
dans les rangs de ses soldats.
1. Bell, Gall.,
XXXIX. 30 :
Oum paucos dies ad Vesontionem rei frumentariae commeatusgue
... / ...
- 81
causa moratur,
ex perxontatione nostrorum uocibusgue
Gallorum ac mercatorum,
gui ingenti magnitudine in armis
sese praedicabant (saepe numero ses~ cum his congressos
ne uultum
uidem at ue aciem oculorum dicebant ferre
otuisse
tantus subito timor omnem exercitum occu auit
ut non mediocriter omnium mentes animosgue perturbaret.
145 - II Tusc.,
XXVII, 65 :
Itague barbari guidam et immanes
ferro decertare acerrume possunt, aegrotare uiriliter non
gueunt.
146 - op., cit., p
140.
147 - op.
cit.,
Po-
34,
148
- Y.
A.
Dauge,
op. cit.,
P.
61
149 - Chr. Delacampagne, L'invention du racisme
Antiguité
et Moyen-Aoe.
pp. 37-41, a largement ouvert le débat, en
analysant cette question.
150 - Dictionnaire Latin-français, p.
1601
151
- Fam., VIII, 15,2
152 - L'amour à Rome, p.
134.
153 - Employé trois fois.
154 - Satiricon, CXXVI, 150 :
Ego adhuc seruo nunguam succenbui
nec hoc dii sinant ut amplexus meos in crucem mittam
!
Viderint matronae, guae flagellorum vestigia osculantur ;
ego etiam si ancilla sum, numguam tamen nisi in eguestri~
bus sedeo.
155
Gaston Boissier, Cicéron et ses amis.
156 - Corn,
I\\lepos
: Att., 13, 4
:
Negue tamen horum guemguam
nisi domi natum domigue factum habuit, guod est signum
non solum continentiae, sed etiam diligentiae.
1 57
- 0 p. ci t ., p. 40
158 - De frument.,
LIX, 134
159 - "Remarques sur la notion de puer à l'époque classique"
in B.A.G.B., 1975, p, 222.
160 - In L. Pis.,
XXXVIII, 92
-
82 -
~IITETI
-
UN AUTRE ELEMENT DE CETTE DUALITE
LES RAPPORTS MAITRES 1 ESCLAVES •
La condition servile ne dénude pas seulement la person-
ne qui en est le principal sujet,
de l'intégralité de son faput,
de sa dignité d'être humain et de ses réflexes d'entité vivante et
pensante. Elle annihile également
en lui toute indépendance et
toute autonomie,
en le plaçant sous les ordres d'un autre que lui.
Du coup,
elle limite sa liberté de ~ouvement et fait de lui, une
sorte de prolongement du dominus.
La m~ qui pèse quotidienne-
ment et sans discontinuer sur lui,
le réduit à un état d'animali-
té,
à une quasi inexistence telle qu'il ressort de cette assertion
cicéronienne:
"S'il est dans la condition d'un esclave de se ton-
former en tout à l'humeur,
à la volonté et aux caprices du maître"
(1). Dans cette confrontation permanente entre deux individus
n'ayant aucune attache familiale
réelle,
l'équilibre de la familia
réside essentiellement dans la stricte observation des droits et
devoirs incombant à l'un puis à
l'autre des protagonistes, au res-
pect des clauses du contrat "tacite" passé entte eux,
lots de la
naissance des liens régissant
leur univers.
Mais quelle démarche
emprunteront-ils pour parvenir à ces fins? De quels procédés use-
ra le dominus pour tenter d'asseoir et de pérenniser son influen-
ce sur le seruus ? Il y a donc
là en quelque sorte posées,
les ba-
ses d'une véritable gestion de chaque propriété.
Les Grecs
avant les Romains;ont fait
l'expérience du contenu et même de la
gent servile.
Ayant connu des péripéties multiples, ayant vécu
avec les esclaves y compris dans leurs diverses tribulations,
ils
ont consigné par écrit la ligne de conduite que do1t observer un
bon maître.
Parmi ces écrivains,
figure
en bonne place le stagiri-
te Aristote.
C'est lui qui à l'aide d 1 une plume féconde et alerte,
a précisé quels rôles doivent
jouer les esclaves et leurs maîtres,
en.;indiquant ceci en substance
:
" •••
la science du maître,
c'est
l'emploi des esclaves;
être maître ne consiste pas simplement à
acquérir ses esclavesi mais à savoir s'en servir.
Cette science
d'ailleuf$ n'a rien de grand ni de majestueux:
le maître doit
simplement savoir ordonner ce que l'esclave doit savoïr faire ••• "
... / ...
-
83 -
Cette science,
par sa fermeté et sa rigidité,
ne tolère pas de la
part de l'esclave,
la moindre attitude libérale ou encore moins,
d'insoumission.
Elle ne laisse pas filtrer une quelconque compli-
cité étroite entre maître et esclave. Elle confère au maître l'ab-
solue initiative de ses actes quotidiens,
limitant tout si l'on
ose dire,
à sa seule uoluntas : c'est lui qui décide sans partage,
concède ou retire le moindre avantage à l'esclave,
principal ga-
ge, pour reprendre E.H.
Kaden,
du "ius utendi,
fruendi et
ahuten-
di"
( 3 ). 0 r,
g é r e r
une s il: l a v e,
rel è'v e d' une pra t i que 0 ù do ive n t
nécessairement s'entremêler les qualités purement humaines et cel-
les faisant intervenir une large part de dextérité'ldans le main-
tien des réflexes de soumission chez l'esclave.
L'autorité et la
bonhomie doivent faire route commune ou encore,
bon ménage.
Ser~us
et dominus
formant
un couple parfois indissociable,
l'irrespect
,J
de ces pratiques présenterait le risque d'enrayer l'un des éléments
et de fausser
le système. Dans sa rigueur,
Aristote l'a reconnu:
" ••• La partie et le tout,
comme le corps et l'§me,
ont le même in-
térêt.
Or,
l'esclave est une partie du maître: c'est comme une
partie vivante de son corps,
mais séparée"
(4).
Cicéron ne s'est pas inscrit en faux contre cette indis-
pensable bipolarité.
En homme éclairé
(5),
il a vu en quelque sorte
du même côté qu'Aristote,
l'impossible séparation de l'§me et du
corps et des conséquences f§cheuses qu'il serait capablè d(en ré-
sulter
: "Dissocier l'§me du corps" dit-il,
"ce n'est autre chose
qu'apprendre à mourir."
(6).
Bien que plaçant dans son ouvrage le débat à un niveau
philosophique, au moment
justement où la tyrannie venait de pren-
dre fin théoriquement avec l'assassinat de César aux Ides de Mars,
il n'oublie pas le fondement des rapports estlavagistes. Mais Ci-
céron, applique -t-il à la lettre les recommandations qu'il dis-
t
tille sans arrêt dans ses Traités sur ce type de rapports o~ se
contente -t-il d'une simple propagande philosophique? Comment
range-t-il les esclaves? Sur quelles bases le fait-i~ ? J.Carco-
pino qui,
dans une étude d'une indicible richesse s'est appuyé sur
les contours de ~l'idéologie" Cicéronienne, a montré le permanent
ondoiement de l'Arpinate en déclarant ce qui s u i t :
"Cicéron n'é-
tait qu'un doctrinaire de cabinet et il a toujours élevé une
... / ...
- 84
-
cloison étanche entre sa pensée et son action,
entre la composition
de ses ouvrages et les arrangements de sa vie."
(7). Plus virulent
encore, mordant à la limite du tolérable,
il ajoute
11 • • • Dans
ses
Traités,
il harmonisait en artiste les souvenirs de ses lectures
et dans ses lettres,
il s'est mis lui-même avec sa nature ondoyante
et fuyante,
avec
le scepticisme qu'il tenait à la fois de son tem-
pérament et des enseignements de la Nouvelle Académie"
(8).
Au fond,
au-delà de son langage dur et assurément porteur
de dénigrement qu'il distille à volonté,
il y a dans les paroles
de J.
Carcopino,
une réalité évidente:
aucune harmonie n'existe en
Cicéron. Dans sa
~uissonnante oeuvre, une logique entre ses pen-
sées et ses actions,
est difficilement perceptible.
D'un ouvrage
à un autre,
ses positions varient,
se modifient,
se contredisent
même,
rendant quasiment impossible,
la perception entière de sa
réelle personnalité.
Ce dualisme apparaît clairement au sujet du
traitement à réserver aux esclaves.
S'adressant à son frère
cadet
Quintus en 59 av.
J-C.,
en réponse d'une certaine manière à son
manuel de campagne électorale,
il rui écrit ceci
"Nous devons
en tout lieu les
(esclaves)
gouverner d'une main ferme,
mais dans
les provinces plus qu'ailleurs. On peut à leur sujet formuler
plus d'une règle,
mais voici la plus courte et la plus aisée à re-
tenir: qj'ils se comportent,
dans les voyages que tu fais à tra-
vers l'Asie comme si tu cheminais sur la voie Appienne et que
d'arriver à Tralles soit pour eux exactement comme d'arriver à
Formies "
(9).
Deux années auparavant,
dans un vibrant réquisi-
toire contre Catilina,
accusé d'avoir voulu renverser la Républi-
que aux calendes de Janvier,
un angélisme pourtant,
caractérisait
les paroles de Cicéron:
"Par Hercule,
si mes esclaves me redol]-
taient comme te redoutent tous tes concitoyens,
je croirais de-
voir quitter ma maison.
"
(10).
Des cas de ce genre,
abondent.
Déchiré entre deux ten-
dances,tiraillé par l'autoritarisme et le "libéralisme", Cicéron
modula son existence sur cette forme de dualité.
... / ...
85 -
Dans ce sens, une double approche de l'esclave se mit en place:
l'une marquant l'image du bon esclave et l'autte,
celle du mauvais
esclave.
1.
- L'IMAGE DU BON ESCLAVE
Aux yeux de Cicéron,
tous les esclaves ne sont ni sembla-
bles ni interchangeables (11).
Une difformité les singularise les
uns des autres et donne à chacun d'entre eux, une place appropriée
à la fois dans "le coeur" du maître et dans l'ensemble de la fami-
lia.
Cette difformité suppose un fractionnement du monde servile,
une "dyarchie" à la tête de laquelle le bon esclave se trouve pro-
pulsé. Mais comment parvenir à être rangé dans ce groupe? Un et
un seul mot pourrait résumer cela:
les merita.
Voilà d'ailleurs
ce que Cicéron en dit dans une remarque à son épouse Terentia :
"
Quant à l'affranchissement des esclaves, il n'y a nullement
lieu de t'inquiéter.
D'abord,
les tiens n'ont d'autre promesse
que celle d'être traités par toi selon les mérites de chacun "(11).
Les merita, ce sont donc les capaqités individuelles d'un esclave,
ses particularités qui en font un être singulier et sans commune
mesure avec les autres. Ce sont ses aptitudes à se mettre en avant
et même,
à exceller dans ce qu'il entreprend. Par ses merita,
l'esclave se rapproche du maître,
s'intègre dans son environnement
et partage avec lui ses secrets. De ce point de vue,
il devient
pour lui un ami que rien, mis à part certains incidents fâcheux,
ne peut altérer.
A - UN AMI DU MAITRE
Un esclave,
ami de son maître!
A priori, une telle con-
ception peut paraître scandaleuse, voire hérétique pour un Romain,
si l'on tient compte non seulement du puissant arsenal
juridique
mis en place à la fin de la République et qui n'admettait l'exis-
tence d'aucun lien complice entre esclaves et maîtres
(12 bis),
mais aussi de ces propos tenus par Caton le Censeur dans son De
A9.ricult.ur~
: " •. • Pour ceux qui
travaillent aux champs'" dit-il,
... / ...
86 -
pendant l'été, quatre modii
et demi;
pour le fermier,
la fermière,
le surveillant,
le berger,
trois modii
; pour les esclaves enchaî-
nés,
pendant l'hiver, quatre livres de pain; quand ils commence-
ront à piocher la vigne, cinq livres de pain
jusqu'à ce qu'il com-
mence à y avoir des figues,
ensuite revenez à quatre livres "(13).
Si dans la réalité les maîtres tiennent absolument à marquer leur
différence profonde d'avec les esclaves et à faire ressortir le ni-
veau de chacun de leurs statuts,
il n'en demeure pas moins vrai
qu'ils croient en la capacité de
leurs serviteurs d'adopter des
comportements souhaités par eux,
de respecter leurs desiderata et
donc d'une certaine manière, de favoriser
la persistance de leur
situation sociale.
S'il en est qui se singularisent par la "mauvai-
seté"
de leur caractère, par l'insoumission et
une conduite tout
à fait blâmable,
il en est aussi qui ont une attitude positive
dans l'esprit des maîtres.
Ce sont donc ceux-là qui tiennent la
dragée haute dans la hiérarchie servile. Mais sur quoi insiste
particulièrement Cicéron ?
1 -
LES QUALITES SERVILES
Ces qualités peuvent être 9I~~o modo regroupées au nombre de cinq;
la fides,
la certitudo,
la benevolentia,
l~hum~nitas, la frugali-
tas.
a)
- LA FIDES
L'on ne peut parler des relations humaines à l'intérieur
ou à l'extérieur des moenia de l'Urbs,
sans aborder le thème de
la fides.
La fides fut tellement
au coeur de la vie romaine,
que les Quirites en firent le fondement de leur société (14).Quant
à certains romanistes,
ils en firent un sujet de prédilection,
pé-
nétrant même dans tous ses compartiments
(15).
Mais ne firent-ils
pas l~qu'emboîter le pas de Cicéron, l'un de ceux qui, à son épo-
que,
se consacrèrent dans quelques-uns de ses ouvrages philosophi-
ques à cette étude?
(16). C'est donc sur la base de cette impor-
tance,
que nous accordons à cette notion, une place de'premier plan
dans l'analyse des qualités serviles.
Cette notion était d'autant
plus considérable qu'elle pouvait être utilisée aussi bien pour
.'... / ...
-
87 -
caractériser les relations d'ordre public, que celles d'ordre privé.
Il en est ainsi de Marius qui,
si l'on en croit Cicéron,
prit,
après avoir nourri l'intention de se présenter au consulat,
la décision de rompre avec Q Metellu
parce que celui-ci s'oppo-
sait à ses ambitions
(17). Oans son discours à ses sbires prononcé
par Catilina en vue de les enflammer pour renverser la Respublica,
le mot fides,
fut mis en avant
(18).
La fides
implique donc l'exis-
tence d'une véritable complicité entre partenaires,
avec pour
objectif essentiel,
une oeuvre commune. Elle suppose par là même
la signature d'un contrat tacite,
expression de l'unanimité de
tous les membres et de leur acceptation de la mise en valeur de
ce qu'ils ont au plus profond d'eux-mêmes.
Prise dans son sens le
plus courant,
la fides matérialise donc
la confiance,
"adhésion
librement consentie"
(19) d'un individu à l'égard d'un autre
(20).
Mais dans le même temps,
elle repose sur l'inégalité,
la sujétion,
l'écrasement de l'un par l'autre,
comme nous le suggère le terme
deditio qui l'acGompagne
"Pour les Romains d'abord,
le vaincu
se rend à la discrétion du vainqueur,
c'est la deditio.
Voilà
d'abord l'origine du lien;
il tend sa main dans le geste de quel-
qu'un qui accepte d'être encharné,
lié"
(21).
En exigeant des esclaves la fid~2' Cicéron les pousse à se
placer entièrement sous sa protection et à manifester de manière
continue,
leur soumission.
N'est-il pas obligatoire de faire ce
qu'on a promis?
(21). Cette obligation est par vojè de conséquen-
ce,
lourde de sens. J.
Hellegouarc'h qui s'y est apesàntie,
l'ex-
prime parfaitement en l'accolant au terme religieux Qietas (23),
. . .1. . .
88 -
l'un et l'autre faisant
ressortir le sens d'accomplissement ou
encore,
de remboursement
(24).
Dépendant du maître,
l'esclave
est donc tenu de se donner entièrement à lui,
de s'offrir à lui
sans retenue et de lui apporter tout son être,
même pendant son
départ dans l'au-delà
(25).
L'on comprend mieux la nécessité du
serment,
sous le regard de Jupi ter, ." lui qui n'a l' habi tude ni
de se mettre en colère ni de nuire"
(26).
Mais l'esclave sait
qu'en retour,
il recevra quàque chose de son maître, et ce en con-
formité avec la fameuse formule:
do ut des
(27) que J.
Hellegouarc'h
clarifie en ces termes:
" . . . fjdes
désigne
la confiance mutuel-
le qui s'établit dans les rapports entre deux personnages;
elle
implique un caractère de réciprocité entre les deux parties con-
tractantes et apparaît comme telle dès les plus anciens textes con-
nus
••• " (28).
N'est-ce pas pour marquer
l'importance de cette
réciprocité que Cicéron conseill~
à son frère
d'employer les es-
claves pourvus de la fides à des tâches domestiques et privées ?(29).
De ce point de vue,
l'esclave fidèle se voit projeté au faîte même
de la hiérarchie servile et occupe une place prédominante au sein
de la domesticité.
Son rôle n'est plus alors celui d'un simple
figurant qui n'apporte rien de const~uctif dans les entreprises
quotidiennes du maître,
mais plutôt celui d'un alter égo sur lequel
peut être placé tout espoir pour l'exercice parfait
d'une tâche.
Par ce fait,
la fides préfigure l'amicLtia, notion fondée selon les
propos de Cicéron,
à partir de "l'accord sur toutes les choses
humaines,
accompagné de bienveillance et d'affection"
(30).
Su b st l' a tu m deI a fi des
(31),
l'.?~i c i t i a est uni ndes t l'U C t i b l e 1: i e n
social en ce sens qu'elle symbolise la communion des êtres vers
... / ...
- 89 -
un même idéal.
Elle suppose également un refoulement de la vie casa-
nière et laisse la porte ouverte à l'altruismejà la rencontre d'au-
trui et à la constante mobilisation intellectuelle en vue de la
connaissance de l'autre. Dans ce sens,
elle permet de mieux s'ap-
ptécier
; de même elle permet de donner une dimension nouvelle
à l'environnement commun,
les haines et les divisions intestines
ayant été transcendées
(32).
Mais l'amicitia n'existe pas entre tous les hommes.
Ba-
sée sur la complémentarité,
l'entraide et la réciprocité,
seuls
les hommes de bien sont susceptibles de l'exercer
(33).
L'attri-
bution au seruus du titre de bonus uir,
en est l'illustration. Cet-
te dénomination, expression de l'humanitas de Cicéron et de ses
congénères
(34), dégarnit l'esclave de ses attnibuts de "sous hom-
me",
pour fairéplace à un statut qui lui confère de la hauteur
et une place honorable dans la société. Devenu l'ami du maître au
même titre qu'un homme libre,
l'esclave acquiert un poids impor-
tant et devient quelqu'un sur lequel l'on peut compter désormais.
Cette vision est d'ailleurs complètée par la certitudo.
b - LA CERTITUDO
Employée pour exprimer le fait d'être certus, c'est-à-
dire sûr, certain, elle s'applique à une attitude ne laissant au-
cune place à l'hésitation, voire au doute.
La certitudo implique
donc pour le maître vis-à-vis de son esclave,
l'absence de retenue
dans la divulgation de certains faits,
même relevant du secret,
puisque convaincu de sa discrétion.
Elle inst~lle en lui la séréni-
té, une certaine paix de l'âme et ôte l'éventualité d'un risque.
C'est surtout dans la transmission des informations et plus préci-
sément dans les échanges épistolaires que cette qualité est d'une
nécessité de prLmier ordre.
En effet,
à une époque o~ la poste
telle que nous l'entendons dans le langage moderne n'existait pas
... / ...
-
90 -
même le cursus publicus n'ayant été réellement mis en place que
dès Auguste
(35),
il convenait de disposer de couriers sûrs,
sus-
ceptibles d'aller d'un point à un autre de Rome et de ses dépendan-
ces,
lettres en main.
Bien évidemment, même des citoyens pouvaient
se livrer à cette activité.
Mais les esclaves constituant un élé-
ment sur lequel pouvait s'exercer l'autorité
du maître, ce sont
eux qui furent souvent sollicités.
En ce qui concerne Cicéron,
et
comme le signala E.
Smadja dans l'un de ses articles,
"le problème
se pose surtout pendant les périodes où il se trouve hors de Rome
:
ses séjours dans ses domaines,
son exil,
son proconsulat en Cilicie
ou la guerre civile.
La distance qui allonge les déplacements,
constitue un obstacle majeur:
il faudrait dans une situation idéa-
le,
disposer :d'un nombre important de messagers en qui l'on puisse
avoir confiance"
(36). Cicéron lui-même,
justifie d'ailleurs l'im-
périeuse nécessité de la certitudo, dans l'acheminement de ces
missives
" •••
Si cela se produit plus rarement que tu ne t'y
attends", déclare-t-il à Lentulus,
"la raison en sera que mes let-
tres ne sont pas d'une sorte à pouvoir être confiées à la légère.
Chaque fois que je disposerai d'hommes sûrs à qui
je puisse en re-
mettre sans crainte,
je ne laisserai point passer l'occasion"
(37).
A plusieurs reprises, cette notion revient comme un leitmotiv et
alimente une grande partie de sa correspondance.
Il en est ainsi
de cette lettre où.
après avoir mesuré
les risques que
susciterait
une trop grande liberté d'expression,
il prend l'initiative de
réduire les thèmes de sa conversation,
en indiquant ce qui:,suit
"Les propos familiers auxquels engage la liberté d'esprit sont
exclus par les circonstances,
et nos échanges sur celles-ci sont
usés jusqu'à la corde.Pour éviter cependant de m'abandonner tout
entier à l'inquiétude,
je me porpose des sortes de thèmes, à la
fois poltiqiues et liés aux circonstances actuelles propres à dis-
traire mon esprit de ses plaintes et à l'exercer sur l'objet même
qui nous occupe"
(38).
Il en est de même de celle-là où il avoue
à son ami Atticus,
son obligation d'utiliser dÉsormais une fausse
identité
"Pour ce que je t'avais dit,
que mes lettres seraient
adressées à Fu~ius, il n'est pas nécessaire de changer ton nom:
je m'appellerai Lébius,
et tu resteras Atticus
"(39) •
. .. . 1...
-
91
-
Cette série de précautions ne surprend pas.
En tant qu'hom-
me politique,
Cicéron s'intéressait de très près à l'évolution de
l'histoire intérieure de la cité.
Il ne
laissait pas dece fait
passer l'occasion,
si mince fût-elle,
d'exprimer son point de vue
sur le comportement de telle ou telle personnalité et sur la portée
de telle ou telle décision.
Avec clairvoyance,
il se voyait bien
placé pour servir de guide à la soctété romaine,
aidé qu'il était
par les enseignements des maiores et ceux d'autres nations.
Mais
cela ne pouvait que lui attirer des ennuis,
surtout si des atta-
ques acérées adressées à quelqu'un de précis par exemple,
parve-
naient aux oreilles de l'intéressé pour cause de maladresse du
porteur de la lettre.
L'inquiétude,
ou plutôt la peur de voir l'une
d'entre elles disparaître plutôt que d'arriver à bon port,
est
telle qu'en 59 av.
J.C.,
il n'hésita pas à s'emporter contre un
tabellarius qu'il avait envoyé vers Atticus:
"Crime abominable
"lui dit-il".
La lettre que
je t'avais écrite des Trois Tavernes
sur l'heure,
en réponse à
tes si délicieuses lettres,
personne
ne te l'a remise!
"
(40).
Il Y a indubitablement dans la stupeur Cicéronienne,
la
manifestation d'un climat d'insécurité et de suspicion,
dont Rome
se serait emplie à la fin de la République.
Dans ces conditions,
confier une lettre à ~'importe quel esclave devient particulière-
ment dangereux.
C'est pour essayer de contourner ce danger que ceux
auxquels il demande de remplir ce devoir,
sont soumis à un chrono-
métrage strict des distances parcourues.
Les plus zélés de ses cout-
rieES s'y soumettent, au point d'atteindre leur dèstination plus
tôt que prévu. C'est le cas d'Acastus qui,
envoyé par Terentia à
la rencontre de son époux de retour de son proconsulat cilicien,
bat tous les recors de vitesse pour arriver à AthèneJ:
"Nous som-
mes arrivés aux premières Ides d'octobre à Athènes,
bien contra-
riés par les vents qui ont rendu notre navigation lente et désagréa-
gle.
Je débarquais quand ACêstus m'aborda,
avec le courrier:
en
vin g t
j 0 urs,
cel a s ' a p p e 11 e d e lad i l i g e n ce"
( 4 1 ).
Trv i san née s
plus tôt, nous retrouvons ce même Acastus dans l'environnement im-
médiat de Cicéron,
parmi les esclaves auxquels il recourt le plus
souvent pour être en contact avec Tiro tombé malade.
Tiro "accom-
... / ...
-
92 -
pagnait Cicéron de Rome à Cumes au mOlS d'avril,
lordqu'il tomba
gravement malade en route.
Il resta alors dans la villa de ,
Formies"
(42). Mieux encore,
Acastus apparaît dans cette situation
comme une espèce de valet de chambre mis à la disposition de Tiro,
pour lui rendre
tous les services nécessaires
"Garde Acastus"
lui"" 0 ô n sei 11 e l ' Arp i n a te,
" a fin d' ê t rem i eux se r vi"
( 4 3 ). En même temps
Que lui,
ce sontAegypta
(44),
Andricus
(45),
Hermina {46),
Menander
(47),
qui se relaient non seulement dans le port des let-
tres à Cicéron, mais également dans
la garde de Tiro.
Certes,
les
lettres à Tiro ne présentaient en principe aucun danger,
d'autant
plus que dans ces moments de maladie,
l'essentiel des entretiens
ne portait que sur des encouragements pour un prompt rétablissement,
suivi de comptes rendus quasi quotidiens des activités de
l'Arpinate.
Mais le fait que ces esclaves seulement aient été choi-
sis pour servir de relais entre ses membres les plus proches,
prou-
ve que Cicéron était persuadé de leur fiabilité.
Il les
considérait
comme :incapables de lui "faussEr compagnie" et de l'induire en
ereur.
Il les inclut dans le carré d'esclaves stable$, confiants et
donc toujours prêts à faire montre de benevolentia.
c - La benevolentia
Il s'agit ici des bonnes dispositions, de
la volonté de faire
du bien et d'adopter un comportement qui ne porte nullement ombra-
ge à personne. La benevolentia fait
donc appel dans une certaine
mesure à l'esprit de dévouement et d'engagement entier, non pas
uniquement à un être déterminé, mais encore à la cité tout entiè-
re.
Il en fut ainsi dans l'environnement de Cicéron,
des
largititiones organisées par L. Murena en 63 av.
J.C.
(48) et de
l'arrestation par les habitants de Messine - les Mamertins -, d'un
citoyen romain enfUi
des Latomies
(49).
Le dévouement,
le don
entier et sans limites de l'esclave à son maître,
voilà entre autres
ce que voudrait retrouver Cicéron chez une partie des familiae.
Reprenant l'id~de "H. Pétré (50), J. Hellegouarc'h montre claire-
ment son importance dans les relations d'amicitia
:
"Benevolentia
exprime" dit-elle,
"plutôt que l'affectation même,
sa conséquence,
la disposition qu'elle entraîne et qui va à désirer et à procurer
... / ...
- 93 -
le bien de ceux qu'on aime ll
(51).
Et Cicéron l'exige d'autant plus
qe ses esclaves, qu'il eut l'occasion d'en apprécier la suavité
non seulement quand ses amis se mobilisèrent pour le faire revenir
de son exil
(52), mais aussi quand Plancius singulièrement,
tendit
à rendre son séjour hors de Rome, moins pénible
(53).
La fin de la
République,
période marquée essentiellement par l'éloignement de
la paix et par la montée de la violence,
nécessitait une telle
qualité.
Milon,
neut-il pas la vie sauve grâce à la combattitivité
et à l'énergie de ses esclaves?
(54).
C'est parce qu'il
en était
pleinement conscient qu'en 45 av.
J.C.,
il entra dans une noire
colère quand l'un de ses correspondants lui annonça la non-assistan-
ce de certains esclaves, à
l'égard de l'une de ses relations,
leur
maître
(55).
d - L'humanitas
Plusieurs interprétations ont été données à ce mot,
par les
Romanistes. Transcription du vocable grec philanthropos
(56),
voca-
ble introduit dans le vocabulaire
latih
en vue de l'enrichir et de
lui extirper certaines de ses lourdeurs dues à son caractère
frustre
(57),' Cicéron l'utilisa dans un nombre varié de circonstan-
ces, mais en diversifiant ses significations.
Prise dans son acception générale).l'humanitas
désigne la condition
d'être humain, d'entité pensante et agissante,
par opposition à
l'animal
(58)( Elle fait donc fi
de toute particularité fondée sur
la langue,
les us et coutumes ou même,
la race
•••
Cette qualité
fait
ressortir les idées de bonté, de communauté humaine,
avec en
arrière -plan,
l'appartenance au même cosmos
(59).
Mais cela passe par le refus d'instauration des relations
confliotuelles permanentes entre les cités et par voie de conséquen-
ce, d'auto destruction, contrairement à ce que firent
les Grecs
pendant une bonne partie du vè s.
L'analyse
menée pa~ G. Boissier
est sur ce point, d'une grande éloquence:
liA l'exception du grand
élan des guerres médiques,
ils ne sont jamais arrivés à s'unir
contre l'étranger;
et même alors ils n'étaient pas tous parmi les
combattants de Marathon ou de Salamine.
Leur affection se concen-
... / ...
- 94 -
trait volontiers autour du petit endroit d'où ils étaient origi-
naires: •• "
(60).
L'amaissement des autres peuples,
répond à l'impossibilité pour
ceux-ci,
de s'identifier à ceux qui gardent la conscience de déte-
nir la supériorité à la fois dans l'organisation sociale et les
modes de pensée et de comportement.
Il fait
naître un complexe do~
minateur,
tout en colportant la certitude pour ceux qui s'y com-
plaisent,
de détenir la clé de la civilité.
Ce fâisant,
il rend
incontournable l'absolue nécessité pour les "inférieurs" de "s'abreu-
ver à leur source"
(61),
de puiser dans leur science, pour les
égaler.
La culture et l'éducation,
tels sont les seconds piliers de
l'humanitas.
Dans l'esprit de Cicéron,
leur importance était telle-
ment grande qu'il n'hésita pas à l'exprimer dans le procès de
Caelius,
en indiquant ceci en faveur de deux
jeunes hommes qui
avaient témoigné pour son client:
"D'ailleurs Caelius juge excel-
lente la cause d'Ancius,
mai~ quelle qu'elle soit,
il estime qu'elle
est sans liaison avec la sienne.
Et ce n'est pas seulement l'avis
de Caelius;
c'est aussi l'avis de deux
jeunes hommes très culti-
vés et très instruits,
dont les sentiments sont droits et l'éduca-
tion parfaite
"(62).
De même,
passant en revu e les raisons qui poussèrent"
chrysogonus à
se faire aider des esclaves dans l'accomplissement de ses basses
besognes,
l'Arpinate émit l'éventualité de la culture, éventualité
qu'il rejetta par ailleurs:
"Non,
juges,
il n'en est certainement
pas ainsi,
il n'est pas vraisemblable que chrysogonus se soit épris
d'un amour passionné pour leur culture littéraimeet la distinction
de leurs manières"
(63);
Ce faisant,
l'humanitas élève celui qui en est pourvu, à un niveau
social peu ordinaire et érige de facto,
une profonde césure entre
lui et le commun des esclaves - s'il s'agit d'eux.
Elle lui donne
la possibilité, de par son ouverture d'esprit,
de saisir sans dif-
ficulté aucune,
des subtilités ayant
trait au fonctionnement du
système sociétal.
Elle lui enlève la "carapace" de la,rusticité et
lui facilite une insertion dans le corps des hommes civilisés, en
... / ...
- 95 -
le rendant poli, distingué et ordonné
(64).
De ce point de vue,
l'humanitas tient d'abord compte de l'ingenium, c'est-~-dire
des capacités réflexives d'un individu,
ainsi que celles facilitant
son appréhension des questions purement abstraites.
Elle permet ~
celui qui en dispose, de mesurer ~ leur juste valeur, la portée des
faits qu'il serait susceptible d'accomplir et même si possible,
d'éviter.
L'esclave dépourvu de l'humanitas,
porte les germes de
la destruction.
Ceux-ci croissent en lui et le transforment pro-
gressivement en danger public, en hors-la-loi, en anti social et
donc,
en opposant notoire ~ l'ordre de la cité. Les reproches que
Cicéron adresse à Marc Antoine, sont le résultat de cette bassesse
tant décriée:
"A-t-on jamais vu un homme,
tant soit peu initié
aux usages des honnêtes gens,
prendre prétexte d'un froissement,
pour rendre publique et lire devant tous une lettre reçue d'un
ami? N'est-ce pas supprimer de la vie l'esprit de société, sup-
primer toute conversation entre les amis séparés ? Que de plaisan-
teries, qui sont de misè dans la corres~pndance, paraîtraient dé-
placées si on les
rendait
publiques!
Que de choses sérieuses qui
cependant ne sont faites en aucune façon pour être divulguées
'"
(65).
L'acquisition des moeurs policées,
n'est possible qu'a-
près l'adaptation ~ un mode de vie qui s'identifie totalement aux
préceptes appris et retenus,
~ une formation intellectuelle dispo-
sant du pouvoir de modeler la pensée
• Cela suppose chez les escla-
ves pourtant ce titre, un niveau élevé de culture, une grande ca-
pacité ~ maîtriser les auteurs divers, un maniement parfait du la-
tin et du grec, véritables langues franches:;
la capacité enfin,
de soutenir une dialectique au maître et ~ ses invités.
Ils doi-
vent être ~ même de philosopher, de traiter des pans d'histoire
juridique et de distraire intellectuellement le maître.
N'est-ce
pas ~ cause essentiellement de sa solide formation intellectuelle
que Tiro réussit le tour de force d'apparaître auprès de Cicéron
comme une espèce d'éminence grise, au point de constituer un vide
lors de ses absences?
(66).
Voil~ d'ailleurs ce qu'i~ finit par
en dire dans une de ses missives qui lui furent expédiées pendant
sa conval~scence : "Emploie ton intelligence, que j'estime si haut,
~ te conserver pour moi comme pour toi" (67).
... / ...
- 96 -
Bien évidemment,
au sujet de ce Tiro,
bien des déduc-
tions furent émises par un certain nombre de Romanistes,
en s'ap-
puyant sur le caractère de uerna de
l'esclave, caractère invéri-
fiable d'ailleurs dans toute l'oeuvre.
C'est le cas de G.Boissier
qui déclara ceci
"Parmi eux
(les esclaves),
il en est un que
nous connaissons mieux que les autres et qui a eu
plus de part à
son affection:
c'est Tiro. Le nom qu'il porte est latin, ce qui
fait soupçonner qu'il était un de ces esclaves nés dans la maison
du maître
(uernae),
qu'on regardait encore plus que les autres
comme de la famille,
parce qu'ils ne l'avaient
jamais quittée ••• "
(68).
Mais ce"qu' il faut admettre, c'est que l'affection de
Cicéron pour Tiro, trouve
son origine non pas dans son acte de
naissance, mais plutôt dans ses capacités intellectuelles et plus
spécialement dans son ~oût pour lès lettres et l'éclectisme dont
il ne cessa jamais de faire montre, en s'occupant de plusieurs do-
maines à la fois
(69).
Vis-à-vis de l'esclave d'Atticus,
Alexis,
l'Arpinate,
ne manifesta-t-il pas à plusieurs reprises des senti-
ments d'estime très forts,
parce qu'humanissimus ?
(70).
De m~me
quand en 61
av.
J-C,
Sositheus, son esclave-lecteur, décéda,
n'é-
prouva-t:";il pas un profond chagrin?
(71).
Derrière ces sentiments, se profile l'envie lancinante
de pérenniser sa ·société d'intellectuels",
source d'honorabilité
des Romains à la fin de la République et principal .mode d'expres-
sion de la citoyenneté. Car l'inculture des esclaves et de leur
maître,
n'était-elle pas source de dérision? De la m~me manière,
il était inadmissible pour un esclave lettré, d'avoir en sa compa-
gnie, un autre esclave n'étant ~~s du même bord que lui. Aussi
comprenons-nous qu'en 53 av.
J-C, quand l'Arpinate envoya à Tiro
Aegypta,
il prit le soin de décliner la formation de ce dernier:
Nec inhumanus
(72)
lui dit-il.
Ce n'est pas là une précision inu-
tile. Cicéron imagine sans doute que c'est en se frottant aux ins-
truits comme lui, que Tiro aura la possibilité de rendre facile
toute communication/de s'épanouir davantage par d'éventuels débats
... 1...
-
')7 -
et donc comme l'a dit J.
Granarolo,
de "sortir le plus possible
de lui-même"
(73).
Lui-même Cicéron en sait d'ailleurs quelque chose.
N'éprouva-t-il en effet aucune
joie quand,
en lisant les lettres
d'Atticus atteint de la fièvre quarte en 50 av.
J-C,
il se rendit
compte de la dextéri té d'Alexis dans l'imitation
de l ' écri ture
de son maître? (74).
Au-delà
de la maîtrise des principaux éléments consti-
tuant l'essentiel de la culture antique,
l'avantage de l'esclave
lettré pour le maître,
résidait
dans sa capacité à notèr tout ce
qu'il lui transmettait,
que ce fût au niveau des discours politi-
ques, qu'à celui d'une simple correspondance,
le tiraillement quo-
tidien du dominus ne lui permettant pas de tout faire à la fois.
Ce type d'esclave qui avait reçu une formation sténographique per-
mettait ainsi au maître,
surtout si celui-ci était un homme poli-
tique,
d'avoir,
grâce à la rapidité dans la prise des notes,
une
chronologie de toutes ses activités et des faits quotidiens ide sa
cité.
N.I.
Herescu ne fait
rien d'autre que confirmer cet état de
fait,
quand il indique ceci
"L'habitude de dicter,
pouvait être
prise par des gens de plume qui exerçaient d'importantes charges
publiques ou une profession absorbante et de ce fait,
n'avaient
pas beaucoup de temps à leur disposition"
(75).
Aussi, voit-on Cicéron s'excuser auprès de ses correspon-
dants de temps en temps,
pour justifier le fait qu'il n'aifpas pu
tenir la plume,
préférant s'abandonner à des esclaves.
Tantôt il
argue le débordement d'activités
(76) et donc l'impossibilité
d'écrire en même temps,
tantôt la maladie
(77).
La familia urbana
où la division du travail favorisait
largement la place du ~us doctus, ne détenait pas si l'on ose
dire,
le monopole de l'aversion pour les activité autres que cel-
les fondées sur l'ingenium.
La familia ru~tic~, confinée dans l'ex~
ploitation a~ricole, n'omettait pas cette qualité, su~tout pour le
... / ...
- 98 -
choix du uilicus.
R.
Martin qui s'est intéressé aux avis des agro-
nomes latins tels que Varron,
Columelle et Caton,
rapporte que
"beaucoup plus exigeants que Caton,
qui se bornait à insister sur
les qualités morales du uilicus -
sobriété,
honnêteté,
absence de
superstition -,
ils affirment l'un et l'autre la nécessité pour
le régisseur d'être d'abord et avant tout un spécialiste d'agri-
culture,
susceptible d'être considéré par ses subordonnés comme
plus savant et plus expérimenté qu'eux "(78).
Prenant fait
et cau-
se pour ces qualités,
Cicéron félicite Quintus dont le uilicus
Nicephorus et le Jardinier,
font des merveilles:
lIJ'ai été très
content de Nicephorus,
ton uilicus
;
je lui ai demandé quels or-
dres tu lui avais donnés au sujet de cette petite construction de
Latérium dont tu m'as parlé
Il m'a répondu qu'il avait pris lui-
même l'entreprise de ce travail pour 16.000 sesterces,
mais qu'en-
suite tu avais fait beaucoup d'àdditions, sans rien changer au
prix,
et qu'alors il l'avait abandonnée •••
J'ai félicité
le jar-
dinier :
il a si bien tout revêtu~ de lierre, tant le mur de
soutênement de la villa que l'intervalle des colonnes de
la prome-
nade,
que finalement les statues de personnages grecs ont l'air
de s'ciccuper de
jardinnage et de recommander le lierre à notre
attention
••• 11
(79).
Mais au-delà de cette notion de culture,
d'ingenium à laquel-
le renvoie l'bumanitas et que J.
Hellegouarc'h interprête comme
étant surtout une marque de la conception moderne
(80),
n'y a-t-il
pas en son sein une autre vertu à laquelle pense l'Arpinate ? Il
est difficile d'y répondre avec exactitude, d'autant plus que quand
ce terme était employé pour les esclaves,
i l avait rapport essen-
tiellement avec ce que nous pouvons appeler l'aisance intellectuel-
le.
Cependant,
il n'est pas impossible que l'Arpinate ait cherché
également à exprimer même toutes les autres vertus qu'humanitas
renfermait,
des vertus comme la diligentia,
manifestation du scru-
pule mis dans l'exécution d'une besogne
(81),
l ' industria, notion
s'appliquant à une activité donnée
(82) et matérialisant la volonté
de conquête par l'utilisation rationnelle et réfléchie de la force
mais aussi de l'intelllgence
(83),
le labor,
"effort 'pour triompher
... / ...
- 99 -
des difficultés et des dangers"
(84)
et enfin le studium (85).
Etant donné qu'humanitas regroupe en lui-même l'ensemble de ces
notions (86),
il ne nous a pas paru par conséquent, superflu d'en
parler.
Dans un cas comme dans un autre,
le tournant pris par la socié-
té à la fin de la République et qui rendait inéluctable l'ouverture
vers d'autres mondes, ne se devait pas de se contenter indéfini-
ment d'une domesticité uniquement grossière et fruste,
maïs sur-
tout de celle disposant des moyens de concevoir,
de créer, de maî-
triser
jour après
jour,
les innovations technologiques de la cité.
De même,
les maîtres qui étaient restés attachés aux rusticités
romaines par une adoption permanente des vieux modes de la société
passaient pour des êtres attardés et anachroniques,
de mêmes les
esclaves sachant uniquement faire usage de leurs mains, se voyaient
rejetés dans l'abîme du mépris.
L'~rbs apparaît donc comme un monde
purement technocratique, où le savoir est considéré comme pourvoyeur
de richesse,
d'éloge et de considération.
La fru~alitas que Cicéron
recherche chez ses esclaves, n'en est qu'un des
'pendants.
e- La frugalitas
Appliqué ~ un esclave, ce terme qui sur la base de son éty~
mologie s'emploie par référence à la terre qui peut donner une mois-
son
(87),
insiste sur la productivité,
les pot(~ntialités ~ la fois
physiques et morales,
la plus value comme diraient les marxistes.
Cette plus value consiste ~ rendre au maître tous lès espoirs pla-
cés en l'esclave en faisant fructifier sa "matière grise"
et en
voyant s'exercer tous les bons aspects attendus de lui,
c'est-à-
dire
la serviabilité et l'esprit de discipline.
Diogène,
esclave
du médecin d'Habitus,
en est un cas typique.
Cicéron décrit le stra-
tagème utilisé par ce dernier,
pour pleger son corrupteur:
" •••
L'esclave, qui n'était point un sot, mais qui,
l'évènement le
montra, était Honnête et incorruptible, ne repoussa pas avec dédain
les propos de Fabricius
:
il rapporta l'affaire à son maitre •.• "(88) •
.../ ...
100 -
La L~ugalitas prise dans ce prisme,
réside dans la pratique
effective par
l'esclave, de l'activité principale pour laquelle son
acquisition par le dominus
a été faite.
Dans la plaidoierie pour
Cn.
Plancius,
Cicéron met une fois encore en valeur la notion de
rentabilité,
en la faisant remonter à la transaction entre l'ache-
teur et le vendeur
"Lorsque nous nous procurons des esclaves,
si
nous avons acheté comme forgeron ou, plâtrier un garçon aussi honnête
soit-il,
nous nous fâchons s'ils se trouvent ignorer le métier que
nous avions en vue au moment de leur achat,
mais si nous achetons
un esclave dont nous voulons faire un intendant,
à qui confier la
direction de la bergerie, nous n'attendons de sa part que de l'hon-
nêteté, du travail,
de la vigilance
"(89).
Le bénéfice à tirer de l'esclave est d'autant plus naturel,
que le maître s'investit entièrement en lui,
non seulement en en
faisant sa propriété, mais surtout en lui donnant facilement une
promotion. Car comme l'a si bien dit R.
Etienne,
"c'est
le
maître qui est responsable de la formation
- directement ou non-
technique et de l'éducation reçues par
l'esclave. C'est la volonté
même du maître qui détermine non seulement la carrière propre d'un
se r vit eu r , ma i s
au s s i l e ca ra c t ère g é n é ra Ide la fa mil ia "
(90). En
étant productif,
l'esclave rend donc au maître d'une certaine ma-
nière,
la monnaie de sa pièce et ce,
d'autant plus que le maître
est libre de le
rabaisser et même d'en faire le "dernier des escla-
ves"
(91). La moindre des attitudes à adopter vis-à-vis de cette
faveur du maître,
est évidemment de tout mettre en oeuvre pour ne
pas aliéner ses intérêts. C'est pourquoi Cicéron fulmine contre
Dionysius qui,
rendu auprès d'Atticus,
n'arriva pas à manifester
ne serait-ce qu'une infime parcelle de sa ~~litas, en lui fai-
sant transmettre ses remerciements
(92).
S'appuyant sur des' traits de caractère qu'il considère comme
étant de première importance et en tête desquels se placent les
capacités
individuelles,
Cicéron nous donne l'impregsion d'avoir
érigé dans son esprit,
deux blocs antithétiques:
celui des bons
et celui des mauvais esclaves,
les premiers cités, vivant dans son
intimité la plus proche.
S'il est des Romanistes qui,
à l'instar
... / ...
101 -
des adversaires politiques ont vu dans cette étroite proximité le
risque de contagion des maux propres à la servilité et l'abaisse-
ment de l'Arpinate au point de porter contre lui des accusations
d'impudicitia
(94),
il n'en demeure pas moins vrai que cette sorte
de lldyarchie ll existe bien en Cicéron et dans la société tout entiè-
re.
Il y a d'un côté des esclaves que les maîtres introduisent
dans leur sein, mêlent à toutes leu~s activités, même les plus se-
crètes,
au point de leur reconnaître plus de poids que les citoyens,
et de l'autre, ceux que nous pouvons appeler
·;les "esclaves réels",
parce que se
livrant à toutes les activités conférées par leur
statut.
Le pouvoir que s'arrogea le tristement célèbre chrysogonus
affranchi du dictateur Sylla, pouvoir qui fit
de lui la terreur des
hommes libres pendant les proscriptions initiées par son patron,
ne commença-t-il pas pendant sa servilité? Ces esclaves que les
maîtres choisissaient et rapprochaient d'eux,
esclaves parmi les-
quels on trouve plus ceux aux noms à consonnance gréco-orientale
que ceux aux noms à consonnance romaine, devenaient donc très in~
fluents.
Etant donné que par leur poids social ils éclipsaient
p.arfois des hommes libres,
ils devenaient ni plus ni moins que
des Hommes,
une situation que favorisa
l'hellénisme ambiant à
Rome,
pendant la fin de la République.
2- L'hellénisme au secours des qualités serviles
En effet, pendant la fin de lq République romaine,
période
que P.
Grimal qualifie de transitoire
(95),
un fait d'importance
eut lieu:
l'extraversion plus prononcée de la cité.
Menée par
les légions lourdement et solidement armées, celle-ci fut marquée
à la fbis par l'éclatement de frontières originelles et par l'intru-
sion ruisselante de la culture hellénique, culture caractérisée
par
une nouvelle approche des relations humaines, fondée sur les
notions d'égal i té,
de' oompréhension,
de tolérance de l'autre, avec
toutes les complexités de sa nature,
telquele' résum~ le ch-rémès
de Térence et que reprend Cicéron par ces- termes
:
Il.
(A:l 'homme)
... 1.. ·
- 102 -
rien de ce qui est humain n'est étranger"
(96).
"Caton l'Ancien lui-même,
le plus rigide des conservateurs romains,
n'était pas resté inébranlable,
et c'est à lui que Rome dut l'in-
troduction dans la société, d'Ennius,
la plus illustre personnalité
li ttéraire de l'époque"
(97).
Ne fut-il pas à la fois
rude,
in-
transigeant,
mais sapiens
(98) et doctus ? (99): Le fait que dans
son De Republica
Cicéron ait voulu mettre en scène des personna-
lités du siècle des Scipions, en les plaçant comme interlocuteurs
centraux, est la preuve manifeste de l'ouverture lointaine d'es-
prit des populations (100).
Paul Emile, après son échec au con-
sulat,
n'entreprit-il pas d'adopter à l'égard de ses enfants,
des principes d'éducation traditionnels et modernes, ceux-ci fai-
sant une place à la culture grecque marquée par l'enseignement
de la grammaire, de la rhétorique et de la philosophie? (101).
Bien évidemment,
Rome se montra dès l'abord hostile à
ces nouveaux modes de pensée,
expulsant tour à tour les "philo-
sophes épicuriens Alkarios et Philiskos
•••
et les storciens" (1 02).
Mais elle ne tarda pas à considérer la Grèce comme une sorte
d'abreuvoir intellectuel, laissant ainsi s'opérer au IIè s.
av.J.C.
ce qu'H.I.
Marrou appelle une "révolution spirituelle"
(103).
Entre l'épicurisme et le storcisme, quel mode de pensée l'empor-
ta ? Il ne saurait être question d'y répondre ici. Ce qu'il faut
admettre, c'est que l'hellénisme bouleversa les structures de
pensée en vigueur :dBns la société patriarcale romaine.
Il éclipsa
toutes les formes de rigueur,
tous les blocages et céda la place
à plus d'humanisme, .plus de souplesse et plus d'altTuisme des
populations.
Il n'est que de voir ce que professe le storcisme-
"l'observation de l'être vivant ,montre que toute saisie ou per-
ception des objets extérieurs s'accompagne d'une perception de
soi-même"-
(104) pour se faire ·une idée de la portée des innova-
tions qui eut lieu chez les Romains.
Zénon,
n'ajoutait-il pas si
l'on en croit Cicéron que " .••
L'homme digne de ce nom ne se laisse
ni toucher ni flébrir.
Seul le sage, fut-il
le plus contrefait des
hommes,
est beau; fût-lI
le dernier des gueux,
il est riche;
.. -. / ...
- 103 -
fût-il de cnndition servile,
il est roi.
Quant à nous qui ne
sommes pas des sages,
les stolciens nous traitent d'esclaves
fugitifs,
d'exilés, d'étrangers,
enfin d'insensés
••• "?(105).
Cicéron lui-même,
ne laissa pas échapper le caractère lar-
gement humanitariste de ce torrent d'idées.
"Grand consommateur
de philosophie grecque"
(106)
comme le surnomma affectueusement
H.I. Marrou,
il puisa à pleines mains dans chacun des grands cou-
rants de pensée, en s'attachant au flot de doctrines qui se bous-
culaient à Athènes. Platon
(107),
Gorgias
(108),
.3ocrate
(109),
Aristote,
Aristippe (110),
Eschine
(111)
...
ne le marquèrent-
ils pas à jamais? Son éducation familiale
(112) alimentée par une
lecture permanente, voire insatiable
(113),
son apprentissage du
droit
(114) et de l'éloquence
(115),
ses séjours auprès de
l'épicurien Phèdre
(116) et du stolcien Oiodote
(117)
••. ,
ne le
conduisirent-ils pas à plus de mâturité intellectuelle et surtout
à plus d'humanisme dans ses relations avec les inférieurs? Les
esclaves profitèrent donc à n'en point douter, de ce nouvel état
d'esprit.
Et ce n'est pas un hasard si les uns et les autres,
hormis toutes leurs qualités,
bénéficièrent d'un attachement cer-
tain de la part de leurs maîtres.
Leur soumission à l'imper~u~
domini n'en est par voie de conséquence, qu'une sorte d'atout
supplémentaire.
B- Mais aussi un être respectueux de l'i~rium domini
"
Au moment où itles individus du groupe servile pren-
nent plus d'importance dans les conditions d'élaboration matériel-
le de l'affrontement politique en cours,
la pression idéologique
s'accentue, qui les réduit par cette confiance même que
les maî-
tres sont contraints de leur accorder,
à de simples exécutants,
utilisés en tant qu'instruments techniques indispensables ••• "
(118) ..
Cette analyse de M. Clavel Levêque est d'une singuliêre profondeur,
puisqu'elle lève le voile sur un autre pan de la mentalité des
... / ...
-
104 -
esclaves et des maîtres. Elle nous montre que si ces dprniers
s'attachaient à leurs serviteurs au point de les considérer
comme des doublures, c'est parce qu'ils étaient persuadés de
leur maniabilité, de leur soumission et donc de leur acceptation
de l'autorité domestique.
Cela n'est d'ailleurs pas pour surpren-
dre, car le principe de la dépendance prolongée des esclaves ap-
paraît même dans cette réflexion fqite par Cicéron en 44 av.
J.C.
c'est-à-dire dans ses années de vieillesse, alors qu'il s'était
longtemps auparavant, familiarisé avec la philosophie humanita-
riste grecque:
"Assurer son empire sur la partie de l'âme qui
doit obéir" dit-il,
"voilà à quoi doit pourvoir un homme. Comme
un maître commande à un esclave, ou un général à un soldat, ou
encore un père à son fils"
(119).
Passant de la simple spécula-
tion à l'acte, il ne se fait aucun mal à appliquer sa théorie.
L'une des preuves les plus singulières de cet état de fait,
est
cette lettre qu'en 50 av.
J.C.,
d'Athènes où il se trouvait,
il
adressa à Atticus,
en lui tenant ces propos:
"In Piraeea cum
exissem pr. idus octobr. 1. a~~i ab Acasto seruo meo statim tuas
litteras ..• "
(120).
Statim montre la soumission permanente à laquelle il ramenait ses
esclav~s
,obligés par la place privilégiée qu'on leur faisait
au sein de la familia,
de se plier à la uoluntas domini. J.
Annequin
ne cherche à faire ressortir rien d'autre quand,
parlant de ceux
qui étaient considérés comme de bons esclaves, il d i t ;
"on peut
dire que ces individus ont de la chance et,
en même temps, qu'ils
manquent de chance, dans la mesure où ils sont "trop connus" de
Cicéron: il les reconnaît comme ses amis, mais il se doit de leur
rappeler aussi régulièrement leur dépendance qui limite leur Jib~
tas et les si tue à jamais dans une situation d'inférieurs"
(121).
L'humanisme Cicéronien, d'où découla l'amicitia nouée avec
les esclaves,
n'est-il alors qu'un faux semblant? Répondre par
l'affirrnative serait très catégorique et dénoterait une certaine
ignorance des fondements de la société esclavagiste romaine, où
... / ...
105 -
l'essentiel du pouvoir devait se perpétuer par l'exercice de
l'imperium et l'existence
d'un hiatus étanche entre individus
de différentes couches.
En posant la double équation
le maître
commander
l'esclave = obéir.
les Romains balayèrent tout sentimentalisme,
ne laissant persis-
ter que le socle sur lequel étaient assis ces rapports.
En privilé-
giant les relations personnelles d'homme à homme qui incluent
des notions comme la pitié,
la compassion,
une partie du système
pouvait s'en trouver compromise. D'où la nécessité de la rigidité,
même si celle-ci n'a pas nécessairement la teinte de la force et
de la violence.
Si Cicéron et partant ses congénères n'utilisent
pas contre leurs esclaves des pratiques particulièrement doulou-
reuses comme la bastonnade,
la torture ou autres supplications,
il n'en demeure pas moins vrai qu'ils recourent pour pérenniser
la soumission de leurs serviteurs à
la pratique douce.
En d'autres
termes,
ce n'est pas parce qu'ils sont magnanimes avec eux, que
les maîtres oUblient,méconnaissent leur autorité sur les esclaves.
Ceux-ci ne sont-ils pas d'abord "des travailleurs dont les maî-
tres peuvent s'approprier par la contrainte légale et au besoin
physique,
la force et le produit du travail? "( 122).
Ainsi dé-
finis,
les liens entre le maître et son esclave ne s'appuient sur
rien d'autre que l'intérêt, ou tout au moins ce que le serviteur
rapporte •• Ce qui veut dire que plus un esclave se dévoue pour
son maître,
lui obéit au doigt et à
l'oeil,
exécute ses ordres
sans sourciller, plus facilement il se fait admettre par lui dans
son cercle.
Inversement, un esclave incapable de se comporter
ainsi,
devient la souillure, objet d'opprobe.
On retrouve là pré-
sents,
les principes de la société patriarcale,
une société fon-
dée sur une profonde hiérarchie et qui n'admet pas totalement
l'infiltration des membres dans l'une ou l'autre des couches.
Et Cicéron,
n'en fut-il
pas uniquement lun des exécutants les plus
fidèles? Même dans sa vieillesse en effet,
il ne changea pas s'un
... / ...
106 -
iota. Oans les Paradoxes des 5tolciens,
l'Arpinate poussa même
très loin la tendance à son "impérialisme", en nivelant carrément
la position des esclaves à l'intérièur d'une familia
:
"Oans une
grande familia" dit-il",
il se trouve des esclaves qui croient
plus importants que d'autres, comme ceux qui
sont chargés des
appartements
ou des jardins, et ils n'en sont pas moins des es-
c l a v es "( 1 2 3 ).
L ' An t i que Rome l ' eu!: te 11 e men t
ancrée dans la mé -
moire collective,
qu'il n'e~t pas été permis de penser ne pas la
retrouver en Cicéron. P.Louis tranche d'ailleurs en disant:
"L'esclave reste une propriété, comme le cheval ou le boeuf "(124).
Même après Cicéron,
c'est-à-dire sous le Haut-Empire,
les tira-
des éloquentes et un peu ampoulées de Sénèque sur la fraternité
humaine,
ne changèrent rien à la réalité profonde. Ce n'étaient
là que des développements philosophiques ou littéraires,
d'où
ne se déduisait aucune conclusion pratique (124). Quant à ce qui
apparaît dans le De officiis comme une simple lecon de morale et
.:,
de bienséance à l'adresse du petit Marcus,
n'est en réalité qu'une
inculcation des idées reçues et déposées au tréfonds de Cicéron
le père et qu'il souhai~voir se poursuivre pour la survie de la
citoyenneté:
"ce qu'il y a de plus bas,
c'est la condition et
le sort des esclaves, et ils ont raison ceux qui
presctivent d'en
user comme des gens à gages:
d'exiger du travail, mais de leur
fournir ce qui est juste" (125). Fournir aux esclaves ce qui est
juste,
voilà en définitive somme toute,
l'une des
recommandations
centrales de l'Arpinate. Mais eut-elle cours à l'égard des mau-
vais esclaves ?
II - L'image du mauvais esclave
"Un mauvais esclave n'est pas un esclave qui a certains
défauts, comme lorsque nous parlons d'un plombier gourmand ou
d'un notaire paresseux; c'est un esclave qui est impropre à
l'usage. Comme un mauvais outil,
un esclave qui n'en'est pas un".
Ainsi s'exprima P.
Veyne (126) sur ce sujet. Cette version n'est
pas totalement exacte. Car à notre sens,
si certains esclaves ne
jouaient pas leur rôle,
c'est en grande partie parce qu'ils
avaient des défauts; autrement dit,
parce qu'ils avaient des
... / ..
1}7 -
imperfections ne
cadrant
pas
avec
les
oQjectifs
visés
par
leurs
maîtres.
Ainsi,
si certains
d'entre
eux
étaient
honnêtes,
ins-
truits,
dévoués
à
la
personne
du
maître,
d'autres
ne
l'étaient
pas.
Tels
le
dieu Janus,
divinité à
double
face,
ils
étaient
donc
porteurs en même
temps,
de
qualités
et
de
défauts.
Ils
étaient autant
capables de
bonnes et
de mauvaises choses.
Incor-
porés
dans
la domesticité souvent après
leur
capture et
leur
pas-
sage
par
la
vente -
ainsi
sont
quelques
esclaves
présentés dans
l'oeuvre
de Cicéron-,
ils arrivaient
avec
leurs
vices et
leurs
forces,
leurs modes de
vie
et
leurs
conceptions de
la société,
acquis
dans
leurs milieux
d'origine.
Bien que conscients de
leur
état d'infériorité,
ils gardaient encore
vivant
dans
leur mémoire,
ce qui
avait
fait
leur
existence antérieure.
Cultivés ou
non,
ils
étaient ainsi
étiquettés pour
une
partie du
restant
de
leurs
jours,
à
moins
que
n'intErvînt l'affranchissement!
Contrairement
au
bon esclave qui
dans
la
domus
du
maître
peut suppléer
à
celui-
ci
dans
les
moments
de
lassitude
ou de surcroit de
travail,
le
mauvais
esclave colporte
une
mauvaise
image et constitue un
obs-
tacle
à
la majesté du
maître
et même
à
celle du mos
patrius.
A- Un être opposé aux
intérêts
du
maître
Conserver
ou
favoriser
les
intérêts
du
maître,
oblige
nécessairement
l'esclave
à
se
soumettre à
ses
prescriptions et
à sa volonté,
à adopter
des
vues
qui
ne
lui
nuisent
pas,
à
n'avoir
pas
une
attitude tendant
à
s'écarter
de
la
ligne de
conduite
tra-
cée
par
lui.
Or,
le mauvais
esclave s'inscrit
en faux
contre
tout
cela et
porte
vivaces,
des
défauts
qui
feront
de
lui
un être
conspuré,
voué aux
gémonies.
Mais
de
quels défauts s ' a g i t - i l ?
1- L'improbitas
Il
porte
la caractéristique de
la
perversité,
de
la méchan-
ceté,
tout en marquant
l'absence
de
toute
forme
de
~entillesse
... / . ·
- 108-
et d'attachement aux
hommes.
De ce
fait,
i l
signifie
pour celui
qui en est
taxé,
la
dégradation,
et même
l'inhumanité,
ce dernier
terme signifiant un manque
total
de
compassion devant
la souf-
france
d'autrui.
Mais
l'improbitas engendre aussi
la
cupiditas,
c'est-à-dire
la
recherche effrénée
du
gain,
la
hantise
de
posséder,
source d'in-
justice
(127),
de malhonnêteté,
de
gaucheté de
caractère et de
tempérament et de démesure.
Pris
dans ce sens,
ce
vocable s'op-
pose
alors
à
bon~, comme l'indique si bien J. Hellegouarc'h :
"Dans
le domaine
politique,
le contraire
de
bonus
n'est
pas
le
plus souvent malus,
comme dans
le
vocabulaire
moral,
mais
impro-
bus;
au contraire,
probus,
s ' i l
est
un
qualificatif de
bonus est,
comme malus,
un terme plutôt moral.
On
peut
donc
poser
l'équation
bonus =
improbu~ = problus /malus " (128).
Opposé au bon~, ce type d'esclaves est alors capable des
pires
choses même
les plus atroces et
les
plus
décriées- vis-à-àvis
de
tous
les
hommes,
sans
distinction de
statut
(129).
Considérée
de cette façon,
l'jmprobitas
relègue son détenteur au rang de
ceux dont
l'action
porte atteinte au
bon
fonctionnement des
insti-
tutions et
partant,
à l'équilibre de
la cité.
Elle acquiert donc
la synonymie de
trublion et de
toutes
les
autres malversations
aux effets pervers
pour
la société.
Clodius,
pour ses activités
insidieuses,
ne s'inscrit-il
pas
d3ns ce
groupe
lugubre? Voici
d'ailleurs ce qu'en
dit Cicéron,
dans une
lettre
à Atticus,
même
si,
pour éviter d'essuyer ses
"foudres",
i l s'abstient de le citer
nommément:
If • • •
Cette révolution s'est
faite,
tu
peux m'en croi-
re assez joliment et avec moins de bruit que
je
n'eusse cru.
Elle au-
rait
pu être
plus lente:
c'est
la
faute
de
Caton;
mais c'est
aussi celle de ces malhonnêtes
gens qui
n'ont
tenu compte ni
des
auspices,
ni
de
la loi
Aelia,
ni
de
la
loi
Iunia Licinia,
ni
de
la loi
Cecilia Didia,
qui
ont distribué des
royaumes,
donné
des
domaines à
des
tétrarques et d'énormes
sommes d'argent à
quelques
privilégiés
••. If
(130).
Même si
au
départ un esclave se
trouve
pétri
de
qual~tés et inves-
ti
de bonnes
intentions,
i l
peut,
s ' i l se
trouve être le servi-
teur
d'un improbus,
contracter
ce
vice.
Du
fait
de sa cohabitation
... / ...
-
109 -
avec
son maître et du
principe
qui
veut
qu'un
bon esclave s'appa-
rente
à
son acquéreur au
point
d'être
sa
doublure,
i l
peut sans
peine,
devenir
l'envers
de
ce
qu'il
fut
au
départ.
N'est-ce
pas
sûrement
ce
système de
vases communicants qui
f i t
des
esclaves
de Clodius,
de
Gabinius et de Pison essentiellement,
des
êtres
odieux
puisque
violents
(131) et incestueux? (132). Face à un
maître
improbus
donc,
l'esclave
le
devient à
son
tour.
A ce mo-
ment,
i l se
voit
investi
de
pouvoirs considérables,
auréolé d'un
prestige
hors
pair.
Il se croit
tout
autorisé et
pratiquement,
au-dessus
des
ciues
romani.
La
participation
profanatrice aux
jeux Méga1ésiens de
certains esclaves
impr~bi, est à n'en point
douter,
la
conséquence directe
de
la
surabondance de
leur auto-
rité
(133).
Mais
d'un autre côté,
même sans avoir
été entraînés ou
initiés
par
leurs maîtres dans la contraction de
ce
défaut,
des
esclaves
d'un maître
honnête
et
pétri
de
qualités,
peuvent aussi
faire
preuve d'improbitas
(134). Dans ce cas,
le maître redouble de
vigilance et se
montre
soupçonneux à
l'égard
des
uns et
des
autres
d'entre
eux.
Placés ainsi
dans
une
situation d'alerte
permanente,
de
"qui
vive"
incessant,
i l doit
faire
appel à
toutes
les
techni-
ques
possibles et imaginables de
maîtrise de
sa
gent servile.
J. Schmidt qui dans son ouvrage s'est penché à la fois sur la
société esclavagiste
romaine de
la fin
de
la
République
et de
l'Empire,
nous fait
état du
climat
d'insécurité
généré
par
cer-
tains
groupes
d'esclaves,
par
le simple
fait
de
leur malhonnête-
té,
de
leurs
larcins,
en prenant
pour
base d'étude,
Pline
l'Ancien
"Aujourd'hui" dit
celui-ci
"il
faut
sceller avec
l'anneau
les aliments et
les
boissons
pour
prévenir
les
vols.
Voilà
le service
qu'ont
rendu ces
légions d'esclaves,
cette
~our
he
étrangère,
logée
dans nos maisons,
si
nombreuse
qu'il
faut
un nomenclateur
pour
nous rappeler
des
noms
de
nos
serviteurs .••
Aujourd'hui,
nous nous
procurons à
grand
frais
des
mets,
qui
nous seront
volés
"(135).
Le
vol,
la
fraude,
toute
cette série
de
mini-cambriola-
ges,
mais
qui en fait
désarçonnent
le maître
car
ils
le
dépos-
2
. . .
/
• • •
110 -
sèdent de ses acquis et
le
placent
dans
l'obligation de
renou-
veler
presque quotidiennement
des
objets
portés
disparus,
sont
le
résultat
de
l'imporobitas.
Cette
facilité
qu'ont
les escla-
ves
dans
l'exécution de
leurs
forfaits,
réside
comme
l ' a dit
Pline
l'Ancien,
sans doute
dans
le
nombre surélevé de
la domes-
ticité entretenue â
l'intérieur
de chaque domus
et
de
l'impossi-
ble contrôle des activités
de
tous~ Placés sous le contrôle du
maître -
le
dominu~ -
s ' i l s'agissait
plus spécifiquement de
la familia
urbana
et du
régisseur
-
le uilicus
-
s ' i l s'agis-
sait de
la familia
rustica
(137),
i l
leur était
loisible de
par
leur
nombre,
d'évoluer
en_ toute
liberté sans attirer
le moindre
regard
indiscret et
de mener
jusque dans son état
final,
le
plan
auparavant méticuleusement concocté.
D'autres encore,
profi-
taient assurément
de
leur
présence dans
le cercle
intime du mai
tre,
pour abuser
de
lui,
quitte
â
s'attirer ses
foudres
par
la
suite
• Cicéron
lui-même
fut
victime
du
revers
de
la confiance
placée dans
les esclaves
lettrés,
en
perdant
l'une
de ses riches-
ses,
pour mieux
dire,
la richesse â
laquelle
i l
tenait
comme â
la
prunelle de ses
yeux:
des
volumes
de sa
bibliothèque.
Outré,
touché au plus
profond
de
lui-même,
réduit â
sa
plus
simple ex-
pression,
i l ne cacha
pas alors
sa hantise de-récupérer
son
pa-
trimoine,
demandant
sur
un
ton
plutôt
impératif â
son ami P.Sul-
picius Rufus
installé â Athènes,
d'y
parvenir:
"Je
te demande
encore,
de
façon
plus
pressante,
au nom de notre amitié et de
l'attachement que
tu m'as sans cesse témoigné,
de
donner aussi
tous
tes soins â
l'affaire que
voici:
mon esclave Dionysius,
qui
s'est occupé de ma
bibliothèque -
un
joli capital!
-
a
sub-
tilisé
bon nombre
de
l i v r e s ;
pensant qu'il
ne s'en tirerait
pas
impunément,
i l a
pris
la
fuite . . . "
(138).
La fureur
de
l'Arpinate est
largement
justifiée.
Car
nul
n'ignore
non
seulement
le côté dérivatif
(139)
mais aussi
coûteux de ses
livres.
... / ...
-
III -
En
61 av.
J-C.
alors
que
son
"fournisseur" Atticus
lui
refusait
toute
forme
de
crédit,
ne
se
résolut-il
pas à
éco-
nomiser
sou après sou,
pour entrer en
possession de
sa documenta-
tion
? En déclarant ainsi ceci à son ami :"Pour ta bibliothèque,
garde-toi
de
la
promettre à
personne,
si enragé amateur
que
tu
puisses
trouver
;
car je mets
de
côté
toutes mes
petites écono-
mies
pour l'acquérir comme consolation de ma
vieillesse .•• "(140'
i l montre son attachement à
ces éléments de
connaissance et
tou-
tes ses capacités à
se sacrifier
pour satisfaire son
voeu le
plus
cher.
En
lui subtilisant sa
bibliotheca
au moment où "les
----
grandes bibliothèques étaient
inconnues aux Romains",
(14l),les
esclaves réduisirent ses efforts à
néant
et ôtèrent tout sens à
tous
les sacrifices consentis.
Dans
le
même
temps,
ils lui
firent
courir le risque de
la
rupture
d'avec
le monde
de
la culture et
donc,
d'une
inculture certaine.
C'est dans
cette
droite
ligne
que
s'inscrit d'ailleurs
la superbia.
2 -
LA SUPERBIA
Deuxième
volet de ce chapelet de revers attribués aux
esclaves dans le
langage cicéronien,
la superbia
occupe une
pla-
ce de
choix,
puisqu'elle
touche
directement
à
un
point
fondamen-
tal des relations maître/esclave:
la
tenue,
la mesure,
la solli-
citude,
la réserve
de
l'esclave,
sources de
la
bonne renommée ou
au contraire,
de
la dérision du maître.
Ce sont ces qualités
qui
conditionnent
l'orientation de
l'opinion
publique et donc,
tout
le crédit qui
entoure un homme
dans
l'exercice de ses fonctions
politiques ou à
plus
faible
échelle,
dans celles de
père
de
fa-
mille,
le Eater
familias.
Or,
la superbia se
présente comme
le
contraire de
toutes
les vertus,
parce
qu'elle
colporte de
la
part de celui qui en est soumis,
une
longue
série
de
défauts
d'une entière
nocivité (142).
Elle est donc
indiscutablement,
... / ...
- 112 -
un vice
dangereux.
Possédé
par
l'esclave,
le
danger
qu'il
pré-
sente,
croît
et
prend
des
dimensions
considérables,
voire
dé-
mesurées,
alimentent
ainsi
les
ragots
du
petit
peuple -
le
uulgus -
et
de tous
les
Romains
à la recherche de nouvelles
sensationnelles.
Il
nourrit
aussi
les
quolibets
des
gens,
leur
procure
un sujet de
discussion susceptible de
faire
rire
à tout
rompre,
la
ville,
dans
ce milieu
méditerranéen,
ne
se
prête-
t-elle
pas
à ce bruissement
d'informations?
"La ville",
remar-
que J .M.
Engel,
"est toute
puissante de
rumeurs et
de
bavarda-
ges.
L'oisiveté,
l'ennui,
la
grande
ville,
le climat,
la
vie
passée
volontiers hors
des
gîtes
inconfortables expliquent,
avec
le tempérament méditerranéen,
une
licence
verbale qui
tient
de
la passion"
(143).
La
ville de Rome
-
l'Urbs -
n'est
pas le lieu unique où
se
répandent
facilement
les médisances et autres
calomnies.
Dans
les provinces,
elles ont
la même
force,
la même
vigueur et
la même capacité destructrice.
Elles sont en outre d'une
telle
rapidité dans leur
propagation,
que
nul
ne saurait
les éviter
ou en prendre connaissance.
N'est-ce
pas
à
cause de
leur
degré
d'avilissement
que Cicéron tint
ces propos
à
son frêre
? "Quant
à me
l'envoyer
pour
qu'il
se
justifiât
à
mes
yeux"
lui dit-il"
ce n'était
nullement
nécessaire.
D'abord,
i l
ne m'a jamais été
suspect,
et ce que je t ' a i
écrit à
son sujet,
ce
n'était
point
mon sentiment propre mais
l'intérêt,
la
sOreté même
de
nous
tous
qui
prenons
part à
la chose
publique
ne
dépendant
pas moins de
l'opinion que
de
la
vérité,
je
t ' a i
toujours mis
par
écrit ce
qu'on
disait et non ce
que
je
pensais moi-même"
(144).
Quel est
donc
cet homme auquel
l'Arpinate
fit
référence en
insistant sur
la
valeur
des
indicia
? Il s'agit de
l'esclave de Quintus,
Statius,
l'équivalent de Tiro,
pour
le
frêre
cadet de Cicéron.
Considéré
par son maître comme un membre
à
part entière du
clan des Tullii,
constamment
tenu informé du
moindre
des
détails sur
leur
vie
publique et
privée,
Statius apparaît
dans toute
la correspondan-
ce,
comme une
personnalité influente
par
laquelle
toutes
les
-5
décisions de
grande envergure
transitent.
C'est san~
exagération
aucune,
l'éminence
grise
de
Quintus.
En
53 av.
J.C.,
quand
Quintus apprit
par une missive
de Cicéron,
la décision
prise
... / ...
113 -
d'accorder
l'affranchissement
à Tiro,
n'exulta-t-il
pas,
profi-
tant
de
ce
fait
pour
louer
la
bonhomie de
son frère
dans
le
même
temps,
la
pondération de Statius
? Voilà d'ailleurs,
les
propos qu'il
lui
tint à
cette occasion:
"Ce
que tu as
fait
pour Tiro,
mon cher
Marcus,
m'a
été extrêmement agréable,
aussi
vrai
que je souhaite
vous revoir,
toi
et mon Cicéron,
ma
chère
petite Tullia et
ton f i l s :
i l
ne méritait
pas
la condition où
i l était,
par
celle où i l est maintenant,
tu as
voulu
qu'il
fût
pour
nous
un ami et
non
plus
un
esclave.
Oui,
crois-moi,
j ' a i
bondi
de joie après avoir
lu
ta
lettre et
la sienne
:
je
te
re-
mercie et te
félici~e. C'est qu~n effet, si la fidélité
de
Statius m'est si
douce,
c~mbien dois-tu en apprécier les avanta-
ges
chez ton affranchi,
quand
s'y ajoute
le
charme d'un lettré,
d'un
causeur,
d'un esprit cultivé,
toutes
choses qui
valent mieux
que ces
qualités même que j'apprécie chez le mien!
(145).
N'empêche!
Cicéron n'avait
pas oublié
les
défauts de Statius
i l était
pétri de
la superbia,
chose
inadmissible à
ses
yeux.
Aux
mains
de
l'esclave,
la superbia
ne saurait se concevoir et avoir
droit
de cité,
puisque sur elle,
s'agrègent
l'orgueil,
la fier-
té et
l'insolence.
Elle est donc
l'image de
la
volonté
de
puis-
sance et de
la domination d'un
esclave sur son maître,
ce qui
place celui-là à
un niveau
élevé de
la société et lui
permet de
ne
plus occuper sa
place initiale.
La superbia installe en l'es-
clave
un
complexe de supériorité.
Cet état d'esprit
entraîne au-
tomatiquement sa rupture
d'avec
son infériorité et met à 5a
por-
tée,
l'imperium qu'il
peut allègrement
exercer
non seulempnt
contre
le maître et sa famille,
mais
aussi sur
tout son environ-
nement.
De ce
fait,
elle
renverse
l'ordre
de
l'imperi~m do~esti
cum,
l'altère,
le
fait
s'effriter et
en fait
un mot
vide
de sens.
En sachant
l'esclave de son frère
doté
d'élans dominateurs,
Cicéron craint de
se
voir
lui aussi assujetti avec
l'ensemble
de sa
famille
à
un esclave,
par
le simple effet de
contagion~
Dans
le même
temps,
i l
redoute
un effrondrement de
la société
et de ses
fondements.
C'est
pourquoi,
i l cherche à
faire
prendre
conscience de
la faiblesse
avec
laquelle Quintus se' laisse
"manoeuvrer" par Statius.
Pour
y parvenir,
i l
tempête,
utilise
tout un chapelet de mots crus,
sermonne son
frère
et lui
fait
... / ...
-
114 -
une série de réflexions.
Et Cicéron y tient d'autant que
sa famille a
laissé l'incontestale renommée de rigueur,
de
fermeté et de grandeur
(146).
Pourvue de la di~tas, fon-
dement de la vie sociale, ayant réussi à faire
de ses enfants
des êtres valables et ce,
grâce à une particulière auctoritas,
cette famille doit selon lui,
garder ses valeurs intactes.
Or,
la dignitas de l'homme,
c'est ce qui
fait
sa uirtus et
légitime la place qui lui sied dans la société.
Elle confor-
te sa potes tas et son emprise sur les autres membres du foyer
femmes,
enfants,
esclaves,
clients,
affranchis et répond de ce
fait,
à la définition que E. Tiffon a donnée du uir,
c'est-à-
dire:
"être guerrier
pour assurer la défense de sa patrie,
époux et père
pour permettre la survie de celle-ci,
religieux
pour lui gagner la faveur et la bienveillance des dieux ..• "
(147).
Le manque de virilité qui est en soi une flétrissure
terrible,
entraîne la régression vers la féminité et laisse
la porte ouverte à une tentative pour une femme -
la mulier -
de diriger le ménage.
De uir,
l'homme devient alors esclave,
comme le dit ici Cicéron:
"Regarderai-je comme libre
celui
qu'une femme asservit? à qui elle impose les lois,
ordonne et
défend ce que bon lui semble? qui n'ose contredire ni refu-
ser ? Elle demande,
il faut donner
elle appelle,
il faut
qu'il vienne;
elle le chasse,
qu'il se retire;
elle menace,
qu'il tremble. Un tel homme n'est
pas à mon avis seulement un
esclave,
mais le plus vil des esclaves,
rOt-il sorti d'une
illustre famille"
•••
(148).
En raisonnant ainsi,
l'Arpinate,
ne se
laisse-t-il
pas aller à une exagération volontaire? Oublierait-il l'am-
plitude que sont susceptibles de
prendre les relations tis-
sées au sein d'une domus entre un esclave et son maître ou
même entre
un homme et son entourage ? Ce que recherche
l'Arpinate assurément,
c'est la persistance de l'autorité et
de la place de
l'homme -
époux ou maître -.
Rien ne doit les
entraver et leur faire
échec.
Aussi comprenons-nqus pourquoi
au sujet de Quintus,
dont les rumeurs
faisaient état de sa
faiblesse et de50n incapacité à diriger ses affaires domesti-
... / ...
115 -
ques et publiques,
il avance ces arguments,
avec une mine de
désappointement:
"Une chose en revanche,
m'a toujours fort
tourmenté,
lorsque j'entendais dire qu'il
(Statius) avait sur
toi plus d'influence qu'il ne convenait à la gravité d'un
homme de ton âge,
d'un magistrat de ton rang,
d'un esprit com-
me le tien.
Car imagines-tu le nombre de gens qui m'ont
prié
de les recommander à Statius ? Combien de fois je l'ai enten-
du lui-même,
au cours d'une conservation me sortir sans bron-
cher des formules comme:
"Je n'ai
pas été de cet avis,
j'ai
donné tel avertissement,
j'ai persuadé de ceci,
j'ai détourné
de ce la ? " En pare i 11 e ma ti ère,
la fideli té fût-e Ile par fai-
te (et je la crois telle puisque c'est ton opinion),
n'empê-
che que la simple apparence d'un
pareil crédit accordé à un
affranchi ou à un esclave ne peut que nuire à notre dignité.
Oui,
il faut
t'en persuader (après tout si j'ai le devoir de
ne rien avancer à
la légère,
je dois aussi me garder des si-
lences trop habiles)
: tous les
propos des gens qui désirent
te décrier,
c'est Statius qui y a donné matière"
.••
(149).
En touchant à la graVitas de Quintus, Cicéron enfonce
encore son frère
cadet,
l'acaule et le conduit vers une forme
de capitulation. Le contenu de ce mot,
souligné par
J. Hellegouarc'h- "Gravitas exprime dans le langage intellec-
tuel et moral
l'influence exercée par un personnage sur la vie
publique de la cité,
son autorité personnelle
"(150) ne
l'aurait pas en principe,
laissé indifférent. Mais en dépit
de cela,
Quintus continua à garder la tête froide et ne cédd
pas d'un iota à ses cbnvictions,
sur la nature irréprochable
de son esclave.
En 69 av.
J.C.,
au moment où lui parvint la lettre de son
frère a.né,
il avait déjà accordé l'affranchissement à Statius,
lui conférant de fait
le statut d'homme libre.
Le fait qu'il
ne tînt nullement compte des
propos alarmistes de Cicéron,
est révélateur de leur incompréhension s~r la portée des jU-
gements,
leur différence de
perception des mêmes problèmes
... / ...
116 -
et la minimisation par Quintus,
du "qu'en dira-t-on".
Ce qui pou-
vait donc paraître comme un signe de sUQerbia aux yeux de l'exté-
rieur,
n'était rien d'autre dans sa propre vision,
qu'un trait
de caractère normal,
positif.
De toute façon,
venant de lui,
cela ne saurait surprendre.
Marié à une femme acariâtre
(151),
Pomponia la soeur d'Atticus,
il avait dû s'habituer à des compor-
tements déplacés,
même de certains proches de sa famille.
Cicéron,
comme pour vouloir prendre son ami'Atticus à témoin,
ne lui en
fit-il
pas état dans une correspondance particulièrement lon-
~ue (152)?
3- L'inhumanitas
Ego a te Aegyptam misi,
quod nec inhumanus est et te
uisus est mihi diligere,
ut ;s tecum esset (153),
telle est la
formulation significative de la missive adressée par Cicéron à
Tiro,
lors de sa maladie à l'issue de laquelle,
l'affranchissement
intervint. La façon dont l'Arpinate insiste sur la qualité
d'Aegypta, montre avec force,
le caractère primordial de
l'hum~ni
~ et inversement, le dégoût pour l'inh~manitas. L'inhumanit~
porte donc la marque de la dépravation,
de l'abjection et à la
limite,
du ridicule.
Entourée d'insignes amoralisants de la socié-
té,regardée avec légèreté,
sa place ne se limite qu'à une ~range
insignifiante dans la hiérarchie des vices,
les uitia.
Elle se
caractérise par la légèreté dans le comportement,
la rudesse des
moeurs,
l'incapacité à mettre en oeuvre l'ingenium avant d'accomp-
lir n'importe quelle action.
Sans réfléchir au préalable,
les
esclaves frappés du sceau de l'inhumanitas, excellent
par
leur
propension à exécuter promptement les ordres donnés,
même ceux
dont la finalité est de saccager,
de mettre sens dessus
dessousou de
donner
la mort.
Intrépides,
ils mettent leur férocité au service
d'une mauvaise cause,
celle en générale défendue par
les mali.
C'est le cas de ces "esclaves sauvages et barbares que. Clodius
... / ...
-
117 -
fit
descendre
de
l'Apennin,
avec
ordre
de
dévaster
les
forêts
du
domaine
public et
de
ravager
l'Etrurie ll
(154).L'inhumanus est
donc
un
barbarus,
c'est-à-dire
quelque'un
dont
l'intégration dans
la
cité romaine,
passe
par
une
refonte
intégrale
de
la mentalité et
des habitudes,
seul moyen
de
parvenir
à
une
cohésion et
une
har-
monie
avec
les
boni
uires.
Mais Cicéron ajoute
un
sens nouveau
à
ce
terme
d'inhumanitas
le
manqu~ment à la notion de respect,
la
non
reconnaissance
de
la supériorité des maîtres,
le
refus
de
s'exposer
à
la uoluntas domini,
faits
pourtant absents chez les
gladiatores
(155).
L'écrasement
devant
la magnitudo animi,voilà ce que
reven-
dique Cicéron
vis-à-vis
de
l'esclave qui
ne
se
sait
pas
inhumanus.
La
lenteur
des
tabellarii,
leur
négligence
dans
l'acheminement
des
missives,
les
epistulae,
leur indolence,
leur
valent
l'attribution
du
qualificatif indigne et dégradant
d'inhumanus.
Hippodamus
par
exemple qui
quitta
l'Arpinate sans
lui en avoir soufflé mot,
ne
fut-il
pas
frappé
de
cette
injure?
(156).
A l'horizon.de cette
attitude cicéronienne,
apparaît
la
peur
de
voir
sa
personnalité
mise à
défaut
par
une
lettre
qui serait confiée à
un esclave dou-
teux,
peu sOr.
Et ce,
d'autant
plus que
l'essentiel des échanges
épistolaires de cette époque,
se
situait dans
un
domaine aussi
périlleux que
celui
de
l'engagement
politique,
où
pendant
le
trin-
num 56-53 comme
nous
le décrivit
J.P.
Martin,
des
liaisons se
firent
et se défirent,
entraînant dans
leur sillage,
des
modifi-
cations
profondes de
la figure
de
la société." En avril
56,
à
Lucques,
Pompée,
Crassus et César
procédèrent
à
un
partage
du
pouvoir
comme si
l'Etat
leur appartenait.
Le
triumvirat était
renouvelé et
i l fut
décidé que Pompée
et Crassus seraient con-
suls en
55,
qu'à leur
sortie
de
charge Pompée
recevrait
l'Espagne
pour
cinq ans,
Crassus la Syrie
pour
le même
temps et que César
garderait ses
pouvoirs
proconsulaires cinq ans
encore
••.
En
54,
le
premier
partit
pour
la Syrie combattre
les Parthes;
mais
Pompée
resta à
Rome
où i l
put assister
à
la décomposition
de
la
,
/
Ville dans
les scandales et les meurrres
qui marquèrent
les an-
nées
53 et
54 . . . " (157) •
.. ./ ...
118 -
Or,
c'est exactement
l'année
54,
année
particulièrement
surchauf-
fée,
que Cicéron se
montra
aigre après
le
départ
d'Hippodamus
vers Quintus.
En homme
politique
directement
concerné
par
la
vie
de
sa cité,
personnage consulaire quelque
temps auparavant,
i l
devait
sans
doute
dans ses
missives,
bien en commenter
les
diver-
ses
phases,
les
tournants et
l'action de
chacun
des
hommes
qui
"manipulaient" l'Etat.
D'ailleurs,.L.A.
Constans,
résumant
l'ac-
tivité
de
l'Arpinate en ces
moments
troubles,
attrist~,
\\~nnonce la fin de la République, au milieu de l'effroyable cor-
ruption des
moeurs
politiques et sous
la menace
de
plus en
plus
précise
d'une
dictature ••• "
(158).
Les
moments
d'agitation,
puisqu'ils offraient à
Cicéron et ses correspondants
l'occasion
de
s'entretenir
le
plus abondamment
possible,
soumettaient
les
courriers à
une gesticulation incessante.
Ainsi,
même
si
cette
fois
Cicéron ne
lâcha
pas
le mot
d'inhumanitas,
i l
peut s'appli-
quer
à
ces
tabellarii
de
C.
Longinus en
45 av.
J.C.
"Tu as des
courriers qui
font
tout
de
travers;
personnellement,
ils ne me
dérangent
pas,
c'est
vrai.
Mais
enfin,
quand
ils me
quittent,
ils
me
réclament une
lettre,
quand
ils arrivent,
ils
ne
m'en apportent
aucune!
Encore
le
procédé serait-il moins
gênant
s ' i l s me
don-
naient
un
peu de
temps
pour
écrire
;
mais
ils arrivent coiffés
de
leur
prétase,
déclarant
que
leurs compagnons
les attendent à
la
porte
de
la
ville"
(159).
Elle exprime
le fait
de
fuir,
de quitter
brutalement et
souvent subrepticement,
le
domicile
du
maître,
soit
pour errer,
soit
comme
l'a dit
Y.
GarLan,
pour
"chercher
la
patrie d'ori-
gine"
(160).
L'esclave
fugitif
-
le
fugitiuus
-
f i t
donc
l'objet
de développements
longs,
rigoureux et
sarcastiques dans
l'oeuvre
de Cicéron. chaque
fois
qu'il
traitait
du sujet
dans
lequel appa-
raissait
l'esclave arborant
ce qualificatif,
l'Arpinate
déployait
sa
rage
verbale,
sa crudité linguistique,
signe manifeste
de
50n mécontentement
face
à ce qui n'était
ni
plus ni
moins
qu'un
... / ...
- 119 -
défi
lancé à
la
face
des
citoyens
romains,
les
ciues
romani.
Dans
la classification servile,
le
fugJtiuus
occupe
le
bas
du
pavé,
l'extremum de
la
décrépitude.
A contrario,
i l con-
centre sur
lui
toutes
les
énergies,
l'impétuosité des
Romains,
sentiment d'ordinaire
observé
pour
combattre
les
ennemis.
Dans
la
lutte menée contre
les
dissidents de
l'Q!~~, il demeure l'ob-
jectif primordial à
atteindre
puis
à
vaincre,
car
portant
les
germes
de
l'obstruction faite
à
l'épanouissement
de
la
civilisa-
tion.
Parlant
de Licinus,
l'esclave d'Esope qui
en 50 av.
J.C.,
prit la fuite
en direction du
territoire même
où Quintus assurait
sa
légation,
voilà ce
que Cicéron recommanda vivement
à
son
frère
cadet:
"Quoiqu'il en soit,
puisqu'il est à
Ephèse,
je
voudrais
que
tu le
fasses
rechercher et
que
tu
t'occupes
très
soigneusement d'assurer
son retour,
au
besoin en
le
ramenant
avec
toi.
Ne
t'arrête
pas
à
son peu de
valeur
i l
ne
vaut
pas
grand
chose,
étant dès
à
présent
un homme mort.
Mais
le chagrin
d'Esope est si
grand
devant
l'audace criminelle de
son esclave
que
tu
ne saurais
lui
faire
de
plus
grand
plaisir
que
de
le
re-
mettre entre ses mains .•• "
(161).
L'empressement qui
se
l i t à
travers
les
termes de
Cicéron
montre
de façon on
ne
peut
plus claire,
le déséquilibre
causé
par
la
fuite
des esclaves.
"Dans
un monde
où
la sauvegarde de
l'institution
(esclavagiste)
était
largement reconnue
comme de
la
plus haute
importance,
dans
un monde
sans abolitionnistes
pour organiser
l'under
ground
rail
road,
le réseau souterrain de
l'Amérique
du XIXè siècle .. "
(162), la fuite de l'esclave entraî-
nait
inéluctablement Ja remise en question non seulement de la
propriété de
l'homme
libre,
mais
encore
de
tout
le système
d'exploitation sur
lequel
reposait
l'Antique cité.
En effet,
vivant
sous
la responsabilité
du
maître auquel
i l devait
tout,
à
commencer
par sa
vie,
l'esclave ne
pouvait
donner
un sens à
son existence,
qu'en se
limitant
à
l'exécution
des
volontés même
les
plus élémentaires de son acquéreur.
Affecté à
l'une ou
l'autre
... / ...
- 120 -
des occupations en fonction
de
ses
réelles
capacités,
des
dis-
ponibilités ou des
objectifs du maître,
i l était soumis
à sa
réelle
uol~ntas. Garder sous son emprise un esclave,
déterminer
en
toute
liberté son sort,
n'était-ce
pas
le
voeu
le
plus
profond
de chaque
dominus
? Ce
voeu,
Caton l'Ancien l'exprime
si
bien
quand
i l indique c e c i :
"Que les eslcaves s'abstiennent de
se
disputer,
qu'ils
ne soient
pas dans
de mauvaises conditions
qu'ils
n'aient
pag
froid;
qu'ils
n'aient
pas
faim;
que
le
tra-
vail
les
tienne
en haleine
que
le maître
récompense
une
bonne
action,
pour encourager les autres à
bien
faire
"(163).
Dès l ' é -
poque classique grecque,
Aristote s'était
déjà
bien
penché sur
cette question,
en trouvant
les raisons
du
caractère
indispensa-
ble de
l'esclave.
"Si chaque
instrument
pouvait" dit-il"
par or-
dre ou
par
pressentiment accomplir son oeuvre
propre,
si
pareil-
le aux statues
légendaires de Dédale
ou aux
trépieds
d'Héphaitos,
qui au
dire du
poète
pouvaient
d'eux-mêmes entrer dans
l'assem-
blée des
dieux,
les navettes
tissaient d'elles mêmes
et
les plec-
tres jouaient de
la cithare,
alors
les maîtres d'oeuvres n'au-
raient
nul
besoin de manoeuvre.
ni
les maîtres d'esclaves .•• "(164).
Or.
en fuyant,
ces esclaves rompaient
brusquement
leurs
chaînes.
En procédant ainsi.
ils
faisaient
s'écrouler
tous
les
espoirs
que
les maîtres faisaient
se reposer
sur eux et
ramolis-
saient
la machine socio-économique
érigée depuis
l'époque des an-
cêtres.
Ils
usurpaient
en quelque sorte leur
liberté.
bienfait
dont
l'heure de
l'octroi
n'avait
pas encore sonné.
Ils leur for-
çaient
la main.
crime abominable et
intolérable dans
la pensée
des Romains.
puisque s'y
trouvaient
"attachées
les
idées de ré-
sistance à
l'esclavage et de
révolte"
(165).
Mais
les esclaves.
fuyaient-ils
sans rr,ison
? N'étaient-ils
pas aiguillonnés
par
autre
chose que
le souffle de
la
liberté dont
l'idée
pour
cer-
tains
d'entre
eux.
n'avait
jamais disparu
depuis
leur captivité?
(166).
Cherchaient-ils dans
leur esprit,
à
nuire aux maîtres?
... / ...
-
121 -
Cicéron ne
le dit
nullement.
En maître
concerné au
plus haut
point
par
ce
problème,
i l
laisse entièrement
voilées
par
exemple
les difficultés
rencontrées
par
de
nombreux esclaves dans
l'ac-
complissement quotidien
de
leurs
tâches.
Dans
les
mines singu-
lièrement,
leurs conditions d'existence,
n'éaient-elles
pas des
plus rudes? Voilâ d'ailleurs ce qui en est d i t :
"Les esclaves
employés dans
les mines
rapportent
â
leurs maîtres
des
revenus
incroyables,
mais
eux-mêmes s'épuisent
à
creuser
nuit
et jour
des
galeries souterraines et
ils
meurent
en
grand
nombre,
victi-
mes
d'un excès de mauvais
traitements.
Leur
travail
ne
connait
en effet ni répit,
ni
pause,
et des
surveillants
les obligent,
â
force
de
coups,
â
supporter
cette condition terr
ible,
jusqu'â
ce
qu'ils rendent misérablement
le dernier soupir.
Quelques-uns
ont
le corps suffisamment robuste et
l'âme suffisamment
trempée
pour
tenir
bon,
mais
ils
ne
font
que
prolonger leurs
tourments,
car
l'étendue de leur misère
devrait
leur
faire
préférer
la mort
à
la
vie
•.• " (167).
Certes,
à
la
lecture
de
l'oeuvre de Cicéron,
rien ne
permet d'indiquer
que
les
fugitiui
étaient constitués
pour la majeure
partie d'entre
eux,
de
ces
"ouvriers".
Il
n'est
que de se
référer au cas
de celui-ci,
esclave de P.
Vatinius et
dont Cicéron dit à
son ami P.
Vatinius
:
"On me
dit
que ton es-
clave
fugitif
qui
te servait de
lecteur,
serait avec
les Vardéens
bien que
tu ne m'aies
donné aucune
instruction à
son sujet,
j ' a i
pris
les
devants et donné
l'ordre
de
le rechercher sur
terre
et
sur mer;
je te
le
retrouverai
à
coup sûr,
à
moins qu'il
ne
soit enfui en Dalmatie;
et encore même
de
là,
je saurai
bien
le
tirer
un jour
••• " (168)
-
pour s'en convaincre.
Mais
leur
situation peut être considérée comme
une
sorte de reflet
de
ce qu'étaient susceptibles de
vivre
bien
d'autres,
â
une
plus
vaste échelle.
En tout
état de
cause,
la
fuite
d'un esclave
générait l'angoisse chez
le
propriétaire,
car
elle
pouvait
en-
traîner
le
bouleverse~ent de sa machine de production et de tout
le système
de
contrainte.
Le
non respect
du mo~~.rius, allai t
bien évidemment dans le même sens •
.../ ...
-
122 -
B -
Un irre~ctueux
du mas
patrius
La
nostalgie du
passé marqua et orienta de
façon
profonde
la
réflexion
politique
de
Rome,
servant ainsi
de
référence aux
actions menées
de
part et
d'autre
de
la
"cité fangeuse
de
Romulus"
par
les citoyens intéressés
par
l'actualité et
le deve-
nir
de
l'Urbs.
La
fin
de
la
République se
présentant sur
tous
les
plans comme le début
de
la
Rome
finissante,
les
Romains
éclairés et angoissés,
soucieux de
la
décadence et
de
la décré-
pitude
de
leurs
vertus,
essayèrent
de se recroqueviller
sur le
lointain
passé de
leur cité,
avec
l'espoir
d'y
puiser
des
pallia-
tifs capables de ramener
la
vie
à
son état
d'antan.
La
tentative
de
résurrection de
la
vieille
Rome,
repose
sur une espèce
d'exaltation du régime
institutionnel
régissant
leur milieu et marqué
par
l'absence de
la
soif du
luxe,
du
plai-
s i r ,
par
la généralisation de
la
quiétude et
de
la
paix.
Salluste en parle longuement,
non sans une
pointe
d'amertume
"
Dans la
paix et dans
la guerre les
vertus étaient en hon-
neur
;
la concorde était
grande,
nulle
la soif de
l'or.
La
jus-
tice et
la morale s'appuYdient moins sur les
lois que sur
l'ins-
tinct
naturel.
Querelles,
discordes,
inimitiés s'exerçaient
contre
des
ennemis du
dehors,
entre citoyens,
c'est de
vertu
qu'on rivalisait.
Ils
étaient magnifiques dans
les
honneurs ren-
dus aux
dieux,
économes dans
leurs
foyers,
fidèles
envers
leurs
amis.
C'est d'après ces deux
principes,
audace à
la guerre,
équité,
la
paix revenue,
qu'ils se
dirigeaient eux-mêmes et
dirigeaient
l'Etat
••• " (169).
Elle
repose aussi sur
le
poids de
certaines
personnali-
tés dans l'exercice des
activités
politiques et sociales.
En effet,
i l est
un
fait
d'évidence:
la
droiture
des
institutions ne suf-
fit
pas
pour donner
à
un Etat
une allure
humaine et
vivable
visant
absolument
l'équité entre ses membres et
le' bonheur de
tous.
Il
faut
surtout
des
hommes
capables d'appliquer sans
... / ...
123 -
fioritures
tout
le
contenu de
l'appareil juridique,
en faisant
intervenir
le sens réel
du devoir.
Disposant
largement d'un
sens aigu
de
l'humain,
de
capacités de meneurs
d'hommes
et du
souci
de
responsabilité,
c'est
grâce à
eux que
Rome
doit
sa
prodigieuse expansion et sa
pérennité
pendant
de
longs siècles.
Dotés si
l'on en croit Cicéron de
la
prudence et de
la
sagese Prudentia et sapientia-,
i1s n'eurent
pas de
peine à
parfaire
les
institutions, génération après
génération,
lente-
ment et
patiemment,
en conformité avec
la
nature et à
les
mettre
aussi soigneusement
que
possible,
en application
(170). Dans les
Tusculanes,
l'Arpinate approfondit
la question
portant sur
les
èlirtutes
des m~iores, en mettant à l'actif de leur dextérité dans
le maniement des
hommes,
d'autres merita d'une extrême éloquence
graVitas,
constantia,
magnitudo animi,
probitas et
fides
(171).
Mais d'où
vient cet impressionnant nombre
de
qualités qui,
-;
i l
faut
le dire,
relèvent
à
la
limite,
de
la surhumanité
M.
Rambaud,
nous en donne
des
éléments de
réponse
"
Non
pas
parce qu'ils sont
plus éloignés et
plus
vieux,
mais
parce que,
plus
proches des origines,
ils étaient
plus
proches de
la nature
et de
la divinité.
Ce
qu'il
y
a
de divin
chez l'homme se
trou-
vait
à
l ' é t a t
pur chez les ancêtres.
De là
vient
leur
sagesse,
leur consilium,
leur ratio ••• "
(172).
Utilisant
le mos maiorum,
comme
courroie de
transmission
de
toutes
les
vertus
innées en eux,
mos
dont
la
principale
caractéristique est d'être
"constitué par
des
principes tradi-
tionnels d'organisation sociale,
être
bouleversé
par
quiconque,
pas même
le
roi
qui dans
l'exercice de
son
pouvoir
respectait
ces
usages ancestraux
pour
leur autorité,
leur
légitimité indis-
cutable et
imprescriptible ••. " (173),
ces
personnages marquent
de
leur sceau,
leur existence et celle
à
venir.
C'est dans ce
cadre que Romulus
par exemple"
donna naissance à
un
peuple
nouveau
•.•
et,
loin de
le
laisser
vagissant
au berceau,
le con-
... / ...
- 124 -
duisit à
l'adolescence et presque à
la
puberté .•• " (174),
que
Scipion Emilien,
Lélius,
Caton le censeur,
Paul Emile,
App.
Claudius Caecus •••
inscrivIrent en lettres d'or,
leurs noms
dans les Annales de l'histoire.
Leur seconde appelation de
~tres qui connote tout le pouvoir reconnu aux patres familiarum
sur la progéniture et la domesticité,
est la
preuve marquante
de leur poids particulier.
En regardant leur société,
c'est essentiellement l'idée
de rigueur que nous trouvons partout présente. Cette rigueur,
F.
de Coulanges nous la décrit avec
force
détails tout en insis-
tant sur la soumission du citoyen à
l ' E t a t :
"Le citoyen était
soumis en toutes choses et sans nulle réserve à
la c i t é ;
il
lui appartenait tout entier. La religion qui avait enfanté
l'Etat et l'Etat qui entretenait la religion,
se soutenaient
l'un l'autre et ne faisaient qu'un;
ces deux
puissances asso-
ciées et confondues formaient une puissance presque surhumaine
à
laquelle l'âme et le corps étaient également asservis.
Il
n'y avait rien dans l'homme qui fat
indépendant.
Son corps ap-
partenait à
l'Etat et était voué à sa défense.
Sa fortune était
toujours à
la disposition de l'Etat
si
la cité avait
besoin
d'argent,
elle pouvait ordonner aux femmes
de lui
livrer leurs
bijoux, aux créanciers de lui céder gratuitement l'huile qu'ils
avaient fabriqué.
La vie
privée n'échappait pas à
cette omni-
potence de
l'Etat" (175).
Dans un univers aussi hermétique,
où la liberté se ré-
duisait à
un souci incessant de don individuel à
la cité,
chaque
domus sans nul doute gardait présente cette "politique du bâton"
qui consistait à
faire
prévaloir la force et la discipline de
fer,
ne laissant aucune place à
des écarts du comportement.
Ne
fut-ce
pas
le propre de la société patriarcale ? La vie de
chaque personne était fondée sur
la permanente reconnaissance
de
la supériorité d'un autre.
L'autoritarisme sans limite qu'il
... 1...
- 125 -
en résultait,
forçait
le sujet
à
garder
sa
place
et à
respecter
les hiérarchies.
Evoluant
dans
un monde
aussi
verrouillé dans
tous
ses compartiments que
celui
de
Rome,
les serui observaient
l'abéissance la
plus stricte envers
leurs
domini,
craignant que
ne s'appliquassent sur eux,
les
sanctions
les
plus
draconien-
nes.
Parallèlement à
cela,
le
nombre
assez
limité
d'esclaves
dans
les
familles,
rendait aussi aisée
la
cohabitation maître
esclave et
pour celui-ci,
l'adoption du même mode
de
vie
que
les
membres du
foyer
placés sous
la dépendance
du
pater
familias.
Ces
membres,
n'étaient-ils
pas
à
l'instar de ceux de
la
domus
d'App.
Claudius Caecus,
soumis
à
un strict respect
du mos
patrius et d'une
forte i~sciplina ? (176).
L'emploi
du
verbe
metuere
(177),
explique
bien le climat de
terreur
qui animait
l'environnement de ce
personnage.
A travers ce mot,
l'on suppose
que
personne
n'avait droit
au moindre
écart de
langage et encore
moins,
au moindre
écart de
comportement.
Revenant
sur son siècle
la
fin
de
la République,
Cicéron constate que
la seueritas
d'antan s'est émoussée,
qu'elle a
même
volé en éclats
et que
les esclaves en profitent
pour
étaler
leur arroganée.
Totalement
libres
de
leurs
faits
et gestes,
de moins en moins maîtrisés,
ils
se croient tout
permis et adoptent des avis malséants.
Une
telle
attitude entraîne
nécessairement une chose
fâcheuse
:
le
bouleversement de
la domestica discip~ina. C'est par rapport à
cette
logique que des esclaves,
tels
ce Déjotarus
que Cicéron
conspue
(178),
se laissent à
la
fois
suborner et corrompre
par
des
promesses,
pour
témoigner
contre
leurs
maîtres,
réduisant
ceux-ci
non
plus aur6le de maîtres,
mais
tout
simplement à
celui
d'esclaves.
Un maître
devenir
esclave? N'est-ce
pas
une nouveau-
té
? Impuissant devant
cet état de
fait,
l'Arpinate se contente
ainsi
d'un Otempora
! 2-mores
(180),
se
contentant sous
forme
de rêve,
de
faire
resurgir
l'image d'un alter
ego d'App.
Claudius
Caecus,
Cn.
Domitius:
"Cn.
Domitius,
ce personnage
illustre que
dans
notre
enfance
nous avons
vu consul,
censeur et
grand
pon-
... / ...
-
126-
tife avait,
étant
tribun
du
peuple,
cité en justice devant
le
peuple,
M.
Scaurus,
le
premier
citoyen de
Rome.
Un esclave de
Staurus,
vint secrètement
le
trouver
dans
sa maison et
lui
qu'il
avait des
révélations à
faire
contre son maître
:
Domitius
fit
arrêter
et conduire
cet
homme à
son maître"
(181).
L'imparfait
utilisé
par
Cicéron pour
parler
du
bon
vieux
temps
des patres,
contient
une amertume
très
grande et
une ad-
miration
presque
impuissante.
Désormais,
l'Urbs
s'est emplie
d'esclaves
qui,
au
lieu de
se conformer aux
principes
tradition-
nels,
créent
une confusion
totale dans
les
esprits.
Dans
ses
murs se
trouvent
des
serviteurs
qui
refusent
leur
rang et
leur
statut,
pour
vouloir,
parfois sous
la
tentation
d'autres
cito-
yens,
usurper
la
place de
leurs maîtres.
Dans cette dénoncia-
tion
cicéronienne,
i l
y a
donc
deux structures complètement
fissurées:
celle
des
citoyens eux-mêmes et
celle des
esclaves.
Les
uns et
les autres
ne
forment
plus désormais deux
groupes,
sans communion directe,
mais
plutôt une constellation de
grou-
pes,
souvent en conflit.
Cette
vision que
traduit
et exprime
l'Arpinate,
suivi
en cela
par
Sallust~
(182),
est-elle,
comme
l'indiqua R.
Etienne,
l'expression d'un
anti-historisme
? (183).
Nous ne saurions
nous engager
dans ce débat.
Ce qu'il
faut
admettre cependant,
c'est
que
l'Arpinate,
comme certains de ses
contemporains,
vit
avec morosité,
la
transformation des
moeurs
et
principes de sa société.
En Romain
pur
jus,
respectueux
des
valeurs ancestrales,
en homme
politique soucieux de
l'équilibre
profond des
institutions et du
bonheur de
ses compatriotes,
en
propriétaire d'esclaves
désireux
de
voir
se
poursuivre
la hiérar-
chie antique,
source de
la croissance démesurée
de
la cité J
i l
va en croisade contre
l'anarchie.
Ce qui
ne
l'empêche
pas d'ad-
mettre
les
modifications
de
la société tant sur
le
plan économi-
que que
dans celui des
institutions
(184).
Contrairement
donc
à
H.I.
Marrou qui
voyait
dans
la
propension pour Cicéron à
se
... / ...
- 127 -
tourner
parfois de manière
résolue
vers
le
passé,
une
perte de
temps,
un attardement
inutile
(185),
l'attitude de Cicéron
répond
donc à
sa
triple
fonction:
celle
d'avocat,
d'homme
poli-
tique et de citoyen.
Trois fonctions
qui motivent
également trois
états dâme dont
le choc
pousse
parfois à
exhorter
le
passé,
dans
le
but sinon de
s'y
réfugier,
du moins
d'obtenir
sa
rescous-
se.
Cet état d'esprit
dénote
un élan de
faiblesse,
de
résigna-
tion et même
de
découragement.
C'~st aussi un appel au secours,
une
invitation à
plus de
fermeté et de
rigueur
de
la
part des
citoyens.
C'est enfin
un
rappel
à
l'ordre
à
l'endroit de cesescla-
ves malintentionnés impliqués dans
l'action des-mali
et
parfois enclins à
toujours abuser
de
la confiance
placée en eux.
C- Mais aussi
un être enclin à abuser
de
la confiance
placée en lui
Le dernier
reproche
fait
aux mauvais esclaves
portait
sur
l'abus de confiance.
Cela consistait en effet
pour
l'esclave
apprécié du maître,
inclus dans son environnement
le
plus
immé-
diat
et complètement
intégré dans son groupe
le
plus sar,
à
endormir
la
vigilance
du maître
pour se conduire contrairement
aux espérances
placées en lui.
Ce type d'esclaves
donc,
fait
au départ
partie des
bons esclaves,
c'est-à-dire
de
ceux
qu'on
pourrait appeler
la
"crême" de
la domesticité.
Mais c'est
à
la suite de
leurs agissements qu'ils changent
de
bord,
appa-
raisant ainsi
sous un jour
nouveau.
Deux cas
pensent être
évo-
qués
pour justifier cet état de
f a i t :
celui de Dyonisius et
celui
de ceux que Cicéron appelle
les
jeunes esclaves.
-
Dionysius d'abord
Esclave lettré,
doté des
capacités de
tenir
un raisonne-
ment
intellectuel
rigoureux et même
de
prendre
des
notes
dans
un
style stê~ographié, Dionysius subtilisa de la bib~iothèque de
Cicéron bon nombre
d'ouvrages.
Voilà d'ailleurs ce que
lui-même
... / ...
128 -
rapporta dans
une
missive à
son ami P.
Sulpicius Rufus,
installé
à
Athènes:
" . . .
Je
te demande encore,
de
façon
plus
pressante,
au
nom de
notre amitié et
de
l'attachement que
tu m'as
sans
cesse
témoigné,
de
donner
aussi
tous
tes
soins à
l'affaire que
voici:
mon esclave
Dionysius,
qui s'est occupé de
ma
bibliothè-
que -
un
joli capital
! -
a
subtilisé
bon nombre
de
l i
res
;
pen-
sant
qu'il
ne s'en
tirerait
pas
impurément,
i l a
pris
la
fuite ..• "
(186).
-
Les
jeunes esclaves ensuite
"Comme
j'attendais impatiemment une
lettre
de
toi
vers le
soir,
à mon habitude,
voici
qu'on m'annonce
que de jeunes escla-
ves
viennent d'arriver
de
Rome.
Je
les
fais
venir,
je
leur deman-
de s ' i l s ont une
lettre,
ils répondent
que
non.
"Comment
?" dis-
je,"rien de Pomponius
?" Au ton de ma
voix et à
mon air
ils
prirent
peur,
et confessèrent qu'ils en avaient reçu
une,
mais
l'avaient
perdue en route.
Que te dirai-je
de
plus? J'en fus
très affecté"
(187).
Ces deux cas
ne sont
pas similaires.
Mais
à
des
degrés
divers,
ils donnent
la
preuve que
les
esclaves,
même ceux jugés
,$
"
les meilleurs,
étaient capables des
pires
méfaits.
Comment ne
pas
l'admettre quand l'on remarque essentiellement
l'acte de
Dionysius? Car
les
livres pour Cicéron,
n'étaient
nullement
un
pur et simple ornement.
Bien au contraire.
Après
des
journées
de
p1aidoierie,
de
joutes oratoires au
forum,
ils
lui servaient
de
profond
dérivatif
(187). C'est pourquoi en 61 av. J.C., alors
qu'Atticus son fournisseur
refusait
tout crédit mais
plutôt des
espèces sonnantes et trébuchantes,
i l
prit
la
résolution d'éco-
nomiser sou après sou,
pour atteindre
la somme exigée,
indiquant
ceci
dans
une missive à
l'adresse de son ami:
"Pour ta
biblio-
thèque,
garde-toi
de
la
promettre à
personne,
si enragé amateur
... / ...
_ 129 -
que
tu
puisses
trouver
;
car
je mets
de côté
toutes mes
petites
économies
pour
l'acquérir comme consolation de
ma
vieilles-
se
"(189).
De
plus,
lui subtilisa
sa
bibliotheca
au moment
où
"les
grandes
bibliothèques étaient
inconnues aux Romains"(190)
n'était-ce
pas lui
porter
un coup rude?
Un coup rude,
tel
peut être aussi
l'acte
posé
par
les
jeunes
esclaves,
c'est-â-dire
les
porteurs de
la
lettre de Pomponius
â Cicéron.
Car même s ' i l
nous est difficile
de
corroborer leurs
propos,
l'on
peut aussi supposer en toute
logique
qu'au moment
où
l'insécurité régnait
â
Rome et dans
ses environs,
au
moment
o~ la subornation d'esclaves était devenue presque monnaie
courante,
i l
n'était
pas
impossible que ces esclaves eussent
ouvert
la
lettre afin
d'en connaître
le contenu et
-
pourquoi
pas? -
le monnayer
â
d'autres
personnes
reconnues
pour
leur
inimitié â
l'égard
du
maîre
(191).
Il
nous est extrêmement
difficile
de
dire si Pomponius avait
des
griefs
particuliers
vis-â-vis
d'autres
Romains,
au
point d'alimenter
une
situation
conflictuelle.
Cornelius Nepos
qui
établit une
biographie sur
lui,
ne
le
dit
nulle
part.
Mais est-ce
â
dessein?
Ne chercha
t - i l
pas à
blanchir son
personnage? Nous
ne
le savons guère.
Cependant,
i l
n'empêche
que ses relations
privilégiées avec
Cicéron,
pouvaient
lui
causer des
rancunes
ne serait-ce
que
de
la
part
des
populares que Cicéron fustigeait.
Au-delâ de
tout cela,
un enseignement est
tiré
par
l'Arpinate
:
la duplicité
des
esclaves et
leur capacité de
nuisance.
Parlant
d'ailleurs
de
la
personnalité humaine,
i l
tient ainsi ces
propos:
"La
vraie nature
de
l'homme s'y cache
sous mille apparences trompeuses qui
tendent
devant elle comme
une sorte de
voile:
le
front,
les
yeux,
l ' a i r du
visage men-
tent
fort
souvent et
la
parole constamment"
(192),
Au
départ
presque naif au point de
penser que seuls
les
esclaves gros-
siers,
c'est-â-dire
ceux n'ayant
pas
de
penchant
particulier
... / ...
-
130-
pour
les
lettres étaient à
même
de
manifester souvent
une
fla-
grante malhonnêteté
(193),
Cicéron se
rendit
à
l'évidence et se
convainquit
finalement
que
la
raison -
la ratio -
était
parta-
gée
par
tous
les
hommes
(194),
y compris ceux
portant
atteinte aux
intérêts du maître.
Du coup,
le monde servile au
lieu' d'être
binaire,
devient
trinaire et donc,
explose davan-
tage.
Il
n'y a
plus uniquement
d!un
côté de bons
esclaves etd'e~
mauvais
de
l'autre,
mais
de
bons et de mauvais en même
temps.
Sous cette
présentation cicéronienne,
i l devient
ainsi
diffici-
le
de
percevoir
le monde servile et de
pouvoir
le classifier
ou le
ranger,
ce qui accroit davantage
la complexité de
l'en-
vironnement
domestique.
L'explosion de
la
violence
- la uis -
qui marque
la
fin
de
la République
et à
laquelle se mêlent
les
esclaves,
ne
fera
qu'apporter
plus de
lumière
à cette complexité •
.../ ...
131 -
N
0
T E S
1 -
C'est ce que
nous dit
P.
Jal,
La
guerre civile à Rome.
Etude
littéraire et sociale,
p.
367
2 - Pro Sest., XXIII,
51 : Externa bella regnum,
genitium,
nationum iam pridem ita exstincta su nt ut
praeclare cum iis
agamus quos
pacatos esse
patiamur.
3 -
II Cat.,
Il
: •••
Domesticum bellum manest
;
intus insidiae
sunt,
intus
inclusum periculum eSlJ
intus est hostis.
4 - Pro A. Caec., XV,
42
: Etenim reciperatores,
non ea sola
uis est quae a~ corpus nostrum uitamque peruenit, sed etiam
multo maior ea quae,
pericula mortis iniecto,
formidine
animum perterritum loco saepe et certo de statu demouet.
Itaque saucii saepe homines cum corpore_ debilitantur,
animo
tamen non cedunt neque eum ~eliquunt locum quem statuerunt
defendere
;
at alii
pelluntur
integri,
ut
non dubium s i t quiq
maior adhibita uis ei sit cuius animus s i t
perterritus,
quam
i l l i
cuius corpus
uo1neratum s i t .
5 -
p.
264,
6 -
ibid.,
p,
265
7 -
"Some remarkes on the causes and
repercussions of
the
so-called
"second slave revoIt
in Sicily"
in Athenaeum,
LX,
1982,
p,
443.
8 - Ch. Parain : "Les caract~res sp~cifiques de la lutte des
classes dans l'Antiquité classique" in Pensées,
108,
1963,
p,
I l .
9 - De S~.,
II,
5
10 -
ibid.,
Il
-
ibid.,
III,
7
12 -
ibid.,
13
"Two aspects of the Spartacus slave
revoIt"
in C.J. ,1967
p.
289
... / .. ·
-
132 -
14 -
L'esclavage
p.
44
15 -
De Agr.,
XII,
20
16 -
Le travail
en Grèce
et à Rome
p.
72
17 -
De Suppl.,
VII,
17.
Voir aussi
l'analyse
de R.Martin,
"Familia rustica
:
les esclaves chez
les agronomes latins"
in Aetes du
colloque
1972 sur
l'esclavage
pp.
271-280
18 -
Cl.
Nicolet,
l'ordre équestre.à l'époque républicaine.T.1
p.
361
19 -
De
frument.,
XIV,
36
20 -
ibid.,
XXV,
61
21 -
De Agr.,
VII,
2
22 -
Crassus
9,
7 -
8
23 -
Jules César p.
35
24 -
op.
c i L ,
pp.
110-111
25
Le travail dans le monde
romain p.
184
26 -
Fam.,
XVI,
14,
2
• Dies
promissorum adest,~~~iam
repraesentabo,
si adueneris
27 -
De Imp.
Cu.Pomp.,
X,
28
28 -
De Suppl.,
III,
6
29 -
De Imp.
Cn. Pomp., XI, 30
30 -
De Suppl.,
If
1
31
Cicéron et
l'histoire
romaine
p.
21
32 -
De Suppl.,
l ,
4
:
Sit
fur,
s i t sacrilegu~sit f1agitiorum
omnium uitiorumque
princi~s. At est bonus imperator
... / ...
- 133-
33 -
ibid.,
VII,
15: Quid? Iste motus seruitiorum bellique
subita suspicio utrum tibi tandem diligentiam custudiendae
provinciae an
noriam rationem
i~obissumi quaestus attulit r,
34 -
ibid.,
l,
3
35 -
0 p .,
ci t.,
p.
61
36 - De Imp. Cn. Pomp. ,
37 - id. ,
38 - l,
1
39 - De Imp. Ct"t. Pom..Q.. ,
40 -
id.,
41 - Pro Sest., XXIII,
51
42 - De Suppl., VI, 14
43 - De Con.Cat., X, 64
44 - XIV; 30
45 - IV, 9
46 - Pro M. Tull., VIII,
18
47 -
ibid., VIII,
18
48 - VIII,
22
49 -
ibid., IX,
21
50 -
ibi1~, VIII,
19
51 - Pro A. Caec.,
XXI, 60
52 -
"Les esclaves et la uis pritlata
: une approche des discours
de Cicéron" in Actes du colloque 1972 sur l'E;sc~avage
p.
218.
53 - Pro Milon.,
IX,
28
54 -
5 -
65 : magnum seruorum agmen
55 - Att.,
IV,
3, 4-5
... / ...
. - 134 -
56 - pe Dom., III, 6 : Ego vero neque ueni et domo ne tenui
quandiu turbulentum tempus fuit,
cum seruos tuos,
a te
iam pridem ad bonorum caedes paratos,
cum illa tua consce-
leratorum at perditorum manu armatos in capitolium tecum
uenisse constabat.
57 -
Pro Milon.,
IV,
Il
;Silent enim leges inter arma nec se
expectari iubent,
cum ei qui expectare uelit ante iniusta
repetenda.
Etsi persapient~r et quodam modo tacite dat
ipsa lex potestatem defendentdi quae non hominem occidi,
sed esse cum telo hominis occidendi causa uetat.
58 - Pro Sest.,
XLII,
90 :
An qui sua tecta defendit,
qui ab
aris focis
ferrum flammamgue depellit,
qui sibi licere uolt
tuto esse in foro,
in templo,
in curia,
iure praesidium
comparat
;
qui uolneribus,
quae cernit cotidie toto corpore,
monetur ut aliquo praesidio caput et ceruices et iugulum
ac latera tutetur.
59 -
II Ca t . , VIII,
18
60 - ibid. , IX,
19
61
ibid., X,
22
62
ibid. ,
63 - Pis.
V,
11,
64
Violence in Republican Rome,
p.
77.
65 -
De Dom.,
III,
6
66 -
ibid.,
III,
5
Hunc igitur,
fumesta rei puqblicae pestis,
hunc tu ciuem ferro et armis et exerçitus,
terrore et
consulum scelere et audacissimorum hominum minis,
seruorum
dilectu.
67 -
Pro.
Sest., XV,
34 ;
••.
Seruqrum dilectus habebatur pro
tribunali Aurelio nomine collegiorum,
cum uicatim homines
conscriberentur,
decuriarentur,
direptionem incitarentur .
.../ ...
- 135 -
68 -
Cum senat.,
XIII,
33,
•.• seruos simulatione collegiorum
nominatim esse conscriptos.
De dom.,
XXI,
54,
...
non modo liberos,
sed etiam seruos ...
Lire pour une plus ample compréhension,
l'analyse de F.
Favory "Classes dangereuses et crise de
l'Etat dans le
discours cicéronien (d'après les écrits de Cicéron de 57
à 52)" in Texte,
Politique,
Idéologie
Cicéron,
pp,209-233.
69 -
Etude historique sur les corporations professionnelles
chez les Romains depuis le~ origines jusqu'à la chute de
l'empi!e d'occident,
p.
96
70 -
Foreign groups in Rome during the first centuries of the
Empire,
pp.
203-240.
71 -
Numa.,
17,
1-4.
72 -
II De Leg.,
VIII,
19
73
De Suppl., XIX,
47-49
: Si et ex quo fit
nauis,
et qui
faciunt,
imperio tibi duo,
non pretio praesto fuerunt,
ubi
-----'----
_.. __ .•_-
--_._------_.
tandem istud latet quod tu de tua pecunia dicis impensum ?
-----_.------_.__ ..- ..~----------.._-- - - - - - - - - - - . _ - - - - - - - -
At Mamertini in tabulis nil darent.
Primum uideo,
potuisse
fieri ut ex aerario mil darent
: et enim uel capitolium,
sic ut a p u d ma i 0 r e ~ ~.?_~__t._!" 0 s fa c t ~_~~_p~ b 1 ~~__~_c o_~_~~ i ~
fabris operisque imperatis gratis exaedificari atque effici
potuit.
74 -
C'est ainsi qu'ils se présentent à Rome.
Ils constituent le
lieu de
r~groupement de la tourbe
:
les déclassés que les
membres de la haute sphère méprisent.
Voir J.P. Waltzing ;
op.,
cit., T,
l,
p,
94.
75
La vie à la campagne dans l'Antiquité romaine,
p,
106
76 -0 P ., ci t.,
p,
96
77 - Les conditions de pénétration et de diffusion des cultes
égyptiens en Ita1~p, 369,
78 -
II Philip., XLIV,
112 :
Cur homines omnium gentium
maxime barbaros
Ityraeos,
cum sagittis âeducis in forum?
... / ...
-136 -
79 -
ibid.,
l ,
1
:
Tu,
ne
uerbo
quidem uiolatus,
ut audacior
quam
L.
Catilina,
furiosior
quam P.
Clodius
uiderere •..
80 -
La
vie
quotidienne
chez
les Etrusques,
p,
263
81
-
Att.,
IV,
4 a,
2
82 -
R.
Auguet,
Cruauté et
civilisations
les
jeux Romains
p,73
83 -
QQ. cit.,
p,
202
84 -
ibid.,
p,
56
85 -
II Tusc.,
XVII,
41
86 -
Fam.,
VII,
1,
3,
87 -
Le
terme est
de M.
Clavel Levêque
"Rituels
de
mort et
con-
sommation de gladiateurs
:
Images de
domination et
prati-
ques
impérialistes
de
reproduction"
in Hommages
à Lucien
Lerat,
p,
199.
88 -
Crassus.,
10,
219.
89
G. Ville, "La guerre et le munus" in Problèmes de la
.Buerr~gome, p.
191
90 -
II Tusc.,
XX,
46
91
-
R. Etienne, "La naissance de l'amphithéatre
le mot et
la chose"
in R.E.L.,
XLIII,
1965,
p,
216
92 -
II
cat.,
XII,
24
93 -
Q. Asc
4-5,
66,
94 -
III,
7
95 -
Att.,
IV,
3,
4.
96
"Classes dangeureuses
et
crise de l'Etat
dans
le discours
cicéronnien
(d'après
les
écrits
de Cicéron de
57 à
52)"
in Texte,
politique,
idéologie:
Cicéron,
p,
136,
97 -
Pro Milon.,
IX,
26
:
Seruos agrestes et
barbaros,
quibus
siluas publicas depopula~us erat Etruriamque vexarat,
ex
Appennino
deduxerat,
guos
uidebatis,
... / ...
- 137-
98 - pe Dom., XX,
53
99 - Avis émis dans une interventiion à la suite d'un exposé:
se reporter à Texte,
politique, idéologie
Cicéron,
p,3l3
100 - De Dom., XXX,
79, - Pro Sest., XXIV,
53
101 - ibid., XXXVIII,
81, - Pro Milon.,
XIV,
45
102 - De Dom.,
XIX,
45
103 - ibid., V,
13
104 - Att., IV,
3,
2
105 - De Dom'
XVIII,
48
L
106 -
ibid., XXXIII, 89
107 - op., Cit.,
p,
74
108 - op. cit.,
p,
83
109 - VIII,
22
110 - XII,
33 - XVI,
46
111 - Pro Cae 1 • , XXII,
78
112 - De Dom. , X,
25
113 - VIII,
20-22
114 - XXV,
61
115
A. Guillemin,
"le legs de Cicéron" in R.E.L.,
XLVII 1969
p,
163
116 - J. Annequin - M. Létroublon,
"une approche des discours de
Cicéron;
les niveaux d'intervention des esclaves dans la
violence" in Actes du Colloque 1972 sur l'esclavage,
p,211
117 - De con. Cat., XXI,
76
118 - ibid~ LVI,
117-118
119 - P.Ch.Ranouil,
Recherches sur le patriciat (~09-366 av.J-C)
p,
165,
... / ...
- 138 -
120 -
La
politique et
les
partis à
Rome
au
temps
de César,
p,
43
121 -
op.,
cit.,
p,
95
122 -
Le métier
de cito~n dans la Rome républicaine,
pp,
458-459
123 -
Pro Sest.,
XXXV,
75-76
124 -
7-5,
66
125
ibid.,
9-7,
67
126 -
Pro Milon.,
VII,
18
127 -
Pro Sest.,
LXIV,
134
128 -
II Phi~, XLIV,
112
Cur . . .
Ityraeos,
cum sag~~~
deducis in forum
?
129 -
Pro P.
Sul.,
V,
15
130 -
XXV,
67
131 -
II,
4 ;
Itaque
illo i2sO tamen anno
cum ego cessissem,
~rinceps autem ciuitatis non legum praesidio,sed parientum
uitam suam tueretur.
132 -
Pro Sest.,
XXXV,
77
;
Meministis tum,
iudices,
corporibus
ciuium Tiberim,
compleri,
cloacas refarciri,
e
foro
spongiis effingi sanguinem.
133 -
ibid.,
XXXIX,
85
134 -
"Cybèle,
divinité étrangère ou nationale
?"
in B.S.R.B.A.P.,
LXII,
1951,
p.46
135 -
De Har.
Res~. XII,
24
136 -
De Con.Cat.,
LVI,
117,
137
Cette expression est
de J.
Annequin et M.Létroublon
ibid .
.../ ...
- 139 -
138 -
De Dom.,
III,
6 : Ego uero negue ~eni et domo me tenui
qua n d i u tu r bu 1 en t um t ernpus
fui t,
cu m se r u 0 s
tu 0 s , _q
te i a m
pridern ad bonorum eaedem paratos, eurn illa tua eonseeleratorum ae
perditorum ~u armatos in Ca~tolium teeum uenisse eonstabat
-
ibid.,
XXX,
79
139 - ~ Milon., XXVIII,
76 ;
Fingi putatis haee guae patent,
~. nota su nt omnibus~ae tenentur, seruorum exereitus
ilIum in urbe eonscripturum fuisse,
per guos totam rem
publieam resque priuatas omniu~ossideret ?
140 -
XXXIV,
92 ;
Ad seruos,
medius fidius,
res publiea uenisset
141 -
XLII,
III
;
Eumne potissimum libertas domo sua debuit
~ere gui,
nisi fuisset
in seruorum potestatem eiuitas
tota uenisset ?
142 -
XXI,
47 ;
Nonne ad seruos uidetis rem publieam uenturam
fuisse
?
143 - Pro Cael., XXXII,
78 ;
•.. atque in urbis ocu1is seruitia
a caedem et ad inflammandam urbem incitauit.
144 -
Curn senat., XIV,
34
145 -
Pro Milon.,
VII,
19
146 -
Pro Sest., XXXVIII,
81.-
p
A
R
T
l
E
I I
Les eslcaves et la
violence,
ou la dualité
servile
vécue autrement
Lorsque
l'on
parle de
la
violence
perpétrée
par
les
es-
claves à
la
fin
de
la
République,
la
tendance
générale
veut
qu'on
la circonscrive aux
révoltes.
Cette manière
de
voir
n'est
pas
fortuite.
Elle s'appuie
plutôt
sur
les
retombées
qu'eurent
les
révoltes
pour
la suite de
l'histoire
de Rome.
En effet,
ouvertement et en majorité,
les esclaves,
du IIIè siècle au
Iè s.
av.
J.C.,
portèrent
un coup rude à
la cité et
f a i l l i -
rent
la faire
vaciller.
C'est aihsi
que
la
plupart des
histo-
riens mirent
un accent
tout
particulier
sur
cette tentative
de déstabilisation,
ignorant ou
feignant
d'ignorer
l'action de
ces eslcaves
dans
l'explosion de
la
violence
qui marqua Rome
au cours de
la République
finissante.
Est-ce
parce qu'ils cons-
tituaient exclusivement une masse
de manoeuvre
pour celles-ci
et
une
force
de
pression et d'action
pour celles-là? Nous ne
saurions le dire
avec exactitude.
Cependant,
un
fait
d'évidence
demeure:
dans
les
actes de
frottement
entre
citoyens
perpétrés
plus spécifiquement tout au
long
du
permier
siècle avant
notre
ère,
les hommes
libres
ne
prirent
pas
seuls une
part active
souvent ils furent
côtoyés
par
leurs esclaves.
Et cela est
d'autant plus marquant
que
depuis
la fin
de
la
guerre entre
les optimates et les
populares matérialisée
par
l'écrasement
du mouvement
de Saturninus
(1),
Rome
s'embrasa
presque
l i t t é -
ralement -
Alors
que "les
guerres extérieures contre
les
rois"
avaient atteint un niveau
d'essoufflement
certain au point
d'inciter
les
Romains
à
"avoir
de
bons
rapports avec eux" et
à
les
"laisser vivre
en
paix"
(2),
les citoyens,
ambitieux
pour la plupart d'entre
eux,
en
proie à
des moeurs
nouvelles et
à
des
pratiques
bellicistes de
plus en plus ardues,
résolu-
rent d'instaurer
l'insécurité,
mieux encore,
"la guerre
••• ,
les embOches ••• ,
le danger ••• "
à
la
fois
"dans
les
domiciles
individuels et au coeur de
l'Etat"
(3).
Bien évidemment,
une
fois
les révoltes assoupies,
l'intervention des
esclaves
dans
le milieu social n'eut
plus la
même envergure.
Mais
souvent,
ces esclaves étaient là,
actifs,
tranchants et
prêts à en
... / ...
découdre.
Pourquoi
leur action était-elle déterminante?
Pour-
quoi
étaient-ils
redoutés dans
la société? Est-ce à
cause
de
leur nombre
et
donc
de
leur capacité à noyer
un
fait,
un évè-
nement
ou
plutôt
à
cause de
leur
force,
de
leur
cambatti~
vité et
de
leurs
élans guerriers? Dans
le
même
temps,
quel
sort
leur
réservait
la société par
le
truchement
de son arse-
nal judiciaire? Est-ce celui
réservé aux personnes
responsa-
bles
d'elles-mêmes
ou plutôt
ceJui
d'inférieurs et donc
des
gens ne
s'assumant
pas? Il
y aura
donc
dans
cette
partie,
deux
facettes
de
l'esclave qu'il
faudra
encore examiner:
celle
qui
fait
de
lui
l'auteur de
la
violence et celle qui
en fait
la victime.
Chapitre l
Les esclaves,
auteurs de
la
violence
Généralement,
la
violence est
perçue comme l'expression
d'une
forme
de
brutalité,
de
dureté non seulement
d'un être
contre
un autre,
mais
aussi
d'une
nation,
d'un
peuple contre
d'autres.
Ainsi
perçue,
elle sous-entend
l'usage des armes,
des
moyens
défensifs et offensifs
d'une
grande
portée,
en gros,
de
tout ce
que les antagonistes
trouvent
capable de
les conduire
à
la victoire
sur
les autres.
Cette vision
de
la
violence qui
met donc
en jeu l'existence,
la
vie
de
ceux
qui
s'affrontent,
au-delà
du
fait
qu'elle est plus courante,
est cependant réduc-
trice,
car
ellermet
une autre,
aussi
dangereuse
que
la
premiè-
re
:
celle qui
vise à
atteindre
l'esprit,
à
l'ébranler,
à
mettre
à
plat
le
psychique de
l'être.
Laissons
d'ailleurs
Cicéron nous en
fournir
plus d'amples
détails
dans cette mise
au
point aux
rec~ratores : fi
I l est d'autre
violence
que celle
qui atteint
notre corps et menace
notre
vie.
Beau-
coup
plus
grave est celle qui,
en nous
montrant un péril de
mort,
bouleverse notre âme
par
la
frayeur
et souvent nous
.. / ...
-
140 -
fait
quitter
le
lieu où nous
nous étions établis.
C'est
pour-
quoi
souvent des
blessés,
malgré
leur affaiblissement
physique,
ne
perdent
rien de
leur courage et
n'abandonnent
pas
le
poste
qu'ils
ont
résolu
de
défendre,
tandis
que
d'autres
reculent
sans avoir
été
touchés.
D'où i l
résulte sans conteste que
terrifier
l'âme,
c'est exercer
une
violence
beaucoup
plus
grave que
de
blesser
un corps"
(4).
Ainsi
définie,lâ
violence représente
pour
les
Romains,
une
des activités
les
plus
pernicieuses et
les
plus corrosi-
ves.
Dans ce sens,
elle apparaît comme
contraire
à
toute
loi
naturelle fondée
sur
la
paix de
l'âme -
l'Ataraxie chez
les
Grecs -
en même
temps
qu'elle
introduit
dans
la société,
une
espèce de
division viciée
par
la
permanence dans
le subcons-
cient de chacun de ses membres,
de
la metus,
la
peur,
qui
cloître,
intériorise et défend
l'extraversion,
la rencontre
de
l'autre.
Les esclaves,
étaient-ils conscients de
ces
réa-
l i t é s ? Nous ne
saurions
y répondre avec exactitude.
Il n'empê-
che qu'ils
participèrent activement à
l'explosion de
la
vio-
lence à Rome.
Tout au
long de
la fin
de
la République,
ils
s'y employèrent avec hargne,
parfois même,
avec conviction.
Pourquoi un tel engagement de
leur
part
? Que recherchaient-
ils
1 Est-ce l'affirmation de
leur
personnalité? Voulaient-
ils
prouver
leur existence,
demander
leur autonomie? Leur
présence dans
le combat
politique de
la
fin
de
la
République,
fut-elle
un incident ou encore
un accident,
ou
plutôt l'occa-
sion
pour eux de
faire
parler
d'eux?
l
-
Les esclaves,
auteurs
conscients
de
la
violence
Lorsque l'on
parcourt
l'oeuvre
de Cicéron,
l'on se
rend compte de
la
permanence de
trois
principaux mouvements
de
violence initiés,
conduits et orchestrés
par
les esclaves
ceux de Sicile de
135 à
132 et de
104 à
101 av.
J.C.
dirigés
.../ ...
-
141-
l'autre par Athenio et l'un
par Eunous,
et celui d'Italie du
Sud organisé de 73 à
71 av.
J.C.
par
le gladiateur Spartacus.
En perpétrant ces actes d'envergure,
ces esclaves apportent
la preuve que non seulement ils savaient pourquoi ils luttaient
mais encore qu'ils étaient
pleinement responsables du dérou-
lement de leurs actions.
Ils montrent
par la même occasion leur
capacité d'êtres réfléchis et raisonnables.
Loin de faire du
mimétisme béat et servile,
ces èsclaves agirent en hommes sé-
rieux. Et cela ne saurait surprendre, car ils étaient dotés
de la raison,
la ratio qui
leur donnait toutes les capacités
réflexives et toutes les attitudes d'êtres
pensants. Paral-
lèlement au nerf de la pensée cartésienne qui s'articule au-
t 0 ur du co g i toc 0 mme bas e e s sen t i e Il e deI' a f f i r mat ion d e I ' homme
le fait,
pour l'esclave
d'agir
lui-même, de se laisser gui-
der uniquement par ses pulsions,
est la preuve manifeste de
son désir d'exister et d'être tenu en compte. Les esclaves
étaient donc des auteurs conscients de cette forme de violence.
Mais pourquoi l'utilisèrent - i l s ? Est-ce parce qu'ils étaient
persuadés que leurs maîtres n'entendraient pas d'autre langa-
ge que celui-là? Est-ce parce qu'ils ne se savaient pas
fins
négociateurs pour arriver à rompre les chaînes de
leur servi-
tude ? Est-ce parce le chemin qui menait à
l'affranchissement
était à leurs yeux semé de beacoup d'embûches? Mais doit-on
pour cela parler d'une conscience de classe pour ces esclaves?
C'est l'avis unanimement partagé par les tenants de l'école
de Besançon, ces marxologues qui,
prenant appui sur la dialec-
tique du maître et de l'esclave, orientent sans cesse l~Vr
argumentation dans cette direction et appliquent selon cette
conviction,
leur démarche.
Il en fut ainsi de H.F.
Sartori
qui,
dans le cadre du colloque sur l'esclavage tenu en 1971,
affirma ceci:
" ••• On ne doit pas limiter cette idée (la
conscience de classe) à tel ou tel épisode. Il faut
l'appliquer
... 1...
-
142 -
à des manifestations différentes,
où
le sujet
de
l'action est
chaque fois séparément
un
groupe d'esclaves ou
un
peuple asser-
vi
par
un autre,
ou un
prolétariat dominé
par
des
maitres,
au
total
une classe
d'hommes
qui exercent
le
pouvoir
sans être
controlés par
la
communauté tout entière .•• "
(5).
Il en est éga-
lement de A.
Levi
qui,
abondant dans
le même sens,
déclara ce
qui s u i t :
" •..
Lq.
résistance anti
romaine,
c'est
un peu
partout,
pas seulement en Italie,
une
résistance contre
un
impéralisme
paysan,
exploiteur,
avide de
terre.
C'est aussi
un
impéralisme
tel qu'il
pouvait être
conçu par
une classe
de
gros capitalistes agraires,
de
marchands,
de
brasseurs
d'affaires •.. "
(6).
Z.W.
Rubinson,
ne
reconnaissait-il
pas
la même chose quand,
parlant
de
la
seconde
révolte servile,
i l donna
une
précision aux
termes suivants
? "1 submit
that
there is enough evidence
for
rejecting
the
term "second
slave insurrection",
and
for
substitutiong
the
less elegant
term "Events
(or
disturbances,
or
disorders)
in Sicily
••. (7).
Quant à Ch.
Parain,
même s ' i l
veut élargir
le débat
en montrant
la
traditionnelle opposition maitre-esclave dans
l'Antiquité
romaine,
ne
f i t - i l
pas
qu'admettre
l'argumentation soutenue
par ses devanciers et collègues?
(8).
Même si
nous reconnaissons
le
bien fondé et
le carac-
tère
pertinent de
la
position de ces savants marxologues,
i l
faut
tout
de même admettre
le
danger
qu'il
y a
à
mettre en
balance les mentalités et les modes de
pensée initiés par
Karl Marx et ses disciples avec ceux en vigueur dans une
loin-
taine antiquité.
Car à
cette période,
la société et
les
hommes
qui
la composaient,
vivaient selon des
normes
précises,
bien
déterminées.
La conception des structures
institutionnelles,
l'organisation du mode
de
production,
la
régulation des
nor-
mes civiques,
étaient
bien spécifiques et
propres au monde
romain.
En gros,
la
vision des
Romains et de tous ceux qui
... / ...
-
143 -
habitaient
le monde
connu,
obéissaient
à
des
chémas qu'un
homme
du
XIXè et encore
moins du
XXè s.,
ne
peut saisir d'un
premier
coup d'oeil.
Or Karl Marx qui
fut
l'initiateur de
cette approche,
vécut
dans une société où
l'organisation de
l'environnement,
les
rapports
inter
humains,
la structure
industrielle étaient
tout
à fait
différents.
Le
fait
d'avoir
voulu analyser
le monde,
son monde sur
la
base de
celui de
Rome,
n'était-ce
pas
une manière
simpliste
d'asseoir
sa
démarche,
de
lui donner
une certaine autorité et
plus de
vigueur? Bien évidemment,
pour reprendre
certains savants,
l'histoire
n'est
qu'un
perpétuel recommencement.
Ce qui
re-
vient
à
dire
que même nous une
forme
différente,
les mêmes
faits
à
plusieurs années
d'intervalle,
reviennent,
se repro-
duisent.
Mais i l convient de
reconnaître aussi
que chaque
fait
historique doit
être
intégré dans
un
contexte d'ensemble,
car
rien ne se
fait
isolément.
C'est
pourquoi
pour essayer
de
comprendre
les
tenants et
les aboutissants
des
actions des
esclaves
survenus au IIIè et au Iè s.
av.
J.C.,
nous nous
insprirerons de Cicéron.
Que dit-il
à
ce s u j e t ? Examinons
quelques-uns de
ses
passages glanés surtout
dans
le De Suppliciis
pour
tenter
de
décrypter
son point
de
vue.
D'abord ici,
où i l
indique ceci,
faisant
allusion à
l'insurrection conduite
par Spartacus:
"Car
nous
le savons,
depuis
la
guerre achevée
par Manius Aquilius,
i l n'y eut en
Sicile aucune
guerre d'esclaves fugitifs.
Mais
i l
y en eut
une en Italie.
Je
le
reconnais,
et ce
fut
en vérité une
guerre
sérieuse et acharnée"
(9).
Ensuite
là où parlant de
ces mêmes
esclaves,
i l se
lance dans
une
série de questionnements
à
l'encontre
de Verrès,
comme
pour
tenter
de
le confondre;
"Tu as
laissé dans doute,
aux troupes d'esclaves
fugitifs
le
passage d'Italie
••.
où ?
.../. ..
- 144 -
quand?
de quel
côté? Quand
ils
tentaient
d'approcher
sur
des
radeaux ou des
vaisseaux?
De
fait,
nous
n'avons jamais
entendu
dire
absolument
rien de
tel
! Voici-ce que nous avons
entendu
dire.
C'est que Marcus
Crassus,
ce guerrier
de
très
grand
coeur,
a
réussi
par sa
vaillance
et son habileté à empê-
cher
les esclaves
fugitifs
de
se
diriger
par
le détroit
vers
Messine sur des
radeaux assemblés"
(10).
Enfin là également où faisant
état
de
ce même soulève-
ment
d'esclaves,
i l avance ce
qui
s u i t : "
Quant à
la
contagion de cette guerre d'esclaves,
pourquoi est-ce
toi
plutôt
que tous les
gouverneurs
de
toutes
les autres provinces
qui
la
proclames? Est-ce
parce qu'en Sicile auparavant
i l
y
eut des
guerres d'esclaves
fugitifs?
••• " (11).
A partir
de
ces
propos cicéroniens,
un certain nombre
de
déductions
peu-
vent
être
tirées
:
1- L'Arpinate n'accorde dans
son De Suppliciis ou dans certains
autres de
ses discours
que
très
peu de
place aux mouvements
d'esclaves.
Cela
peut se comprendre aisément,
car
à
l'époque
où i l occupe le
barreau et même s'engage dans ses
réflexions
d'ordre
philosophique,
les soulèvements d'esclaves
de Sicile
avaient
pris
fin
longtemps auparavant.
Bien sûr,
i l
y
a
celui
de Spartacus qu'il
connut
personnellement et
vécut même
pour
ainsi
dire,
dans sa chair.
Mais
he fut-il
pas
non
plus étouf-
fé
dans
l'oeuf quand Crassus et Pompée se
lancèrent dans
la
bataille? En parlant très
peu de ces
évènements,
Cicéron
entreprend sûrement de
les
banaliser et de
ne
les
réduire
qu'à
la
portion congrue.
A telle enseigne
que
lorsqu'ils intervien-
nent
dans
un sujet
précis,
c'est
non seulement
pour servir
d'appui
à
une argumentation,
pour
lui
donner
une certaine acui-
té et
une
tonicité,
mais aussi
pour mieux
convaincre son au-
ditoire.
La digression,
n'est-ce
pas
une
formule
fréquente
et
utile
dans la
rhétorique
?
... / ...
-
145 -
2- Rien n'est dit sur les raisons des insurrections serviles.
Certes,
pour
tenter
de
justifier
la
non
propagation de
celle
d'Italie du Sud à
la Sicile,
l'Arpinate
ne
s'empêche
nulle-
ment
de
mettre en avant
la
prévoyance et
l'extrême
sévérité
des autorités et des
citoyens
(12),
mais
i l garde
un mutisme
absolu sur
les raisons
qui
amenèrent
les esclaves à
la révolte.
Faisant
état
de celle conduite
par
Spartacus entre
73 et
71
av.
J.C.,
voilà
les
propos
que
ti~t un auteur contemporain,
E.
Baldwin
:
"of the many
tragic slave revolts against
the
Romain authorities
in Italy and
Sicily in the
second and
first
centuries B.C.,
the one
led
by
the Thracian Spartacus
is easily
the most
famous . . . "(13).
Ce qui
veut
donc
bel et
bien dire
qu'il
y eut acharnement dans
les
combats menés d'un
côté
par
les
es laves
et de
l'autre,
par
les autorités romaines.
Or,
nous
savons que
l'acharnement
sous-entend la mise au second
plan
des
déboires éventuels,
de
la supériorité susceptible de
pré-
senter
l'adversité;
i l sous-entend également
le
renoncement
de
toute
hésitation et de
tout esprit
de
lâcheté.
Il laisse
plutôt
la
porte ouverte à
la
brauitas,
à
la
rage
de
vaincre,
de
dominer et de surpasser
à
tout
prix,
sentiment
qui
constitue
à
notre sens,
le
point cardinal
d'une
philosophie de
l'insur-
rection.
M.
Lengellé n'exprime
pas autre
chose
quand
i l dit
c e c i :
"La révolte de
l'esclave n'était
pas
celle dU mouton en
colère,
mais
plutôt l'explosion •••
redoutée
d'affamés"
(14),
adoptant ainsi
la même
vision que celle des
savants comme J.P.
Brisson,
J.
Schmidt,
J.
Carcopino
..• Mais est-ce à
dire si
l'on
comprend
bien M.
Lengellé
que
les
révoltés étaient des affa-
més
? C'est-à-dire des
gens
qui n'avaient
pas
de
quoi se
nour-
rir,
que
les
propriétaires abandonnaient
à
leur
triste sort
sans se préoccuper de
leur survie? Certes,
nous savons,
sur
la
base des
témoignages recueillis auprès
de
certaines sources
que les
latifundia sur
lesquels
vivaient
beaucoup
d'esclaves,
présentaient d'énormes
difficultés.
En effet,
si
selon Caton
l'Ancien le domaine moyen entretenu
par
les
agriculteurs était
... / ...
-
146 -
estimé
à
240
jugères
o~ s'activaient "un fermier, une fermière,
cinq manoeuvres
trois
bouviers,
un ânier,
un
porcher,
un
berger;
en tout
treize
personnes;
trois
paires de boeufs,
trois
ânes
munis
de harnais et de bastes pour
transporter
le
fermer,
un âne et cent moutons"
(15),
les
domaines
les
plus vastes,
s'étendaient selon Cl.
Mossé â
"plusieurs centai-
nes
d'hectares"
(16).
Et là
,
régnait souvent une autorité de
bagne
entretenue surtout par
les
uilici
et
les
magistri peco-
rum (17).
De toute façon,
le
principe des
propriétaires des
latifundia,
n'était-il
pas de
fructifier
au mieux
leurs domai-
nes,
d'augmenter sans cesse
le
profit
et de
disposer
d'un~venu
maximal? Et pour
y parvenir,
ne convenait-il
pas de
pressurer
les
serviteurs en les
utilisant â
fond?
L'on comprend d'ail-
leurs aisément,
l~ngouement des negotiatores (18) comme Q.
Septicius
(19) et Q. Lollius d'Aetna (20) entre autres,
à
inves-
tir
dans
le travail de
la terre.
Mais cela ne veut pas
pour autant dire
qu'ils restaient
parfois
des
journées entières sans se
nourrir.
Car cela aurait
eu inévitablement pour conséquence de les affaiblir, de réduire
leur
productivité et doncJde baisser
les
rendements.
Caton
l'Ancien,
bien que particulièrement rigoureux et
parcimonieux,
s'en était
d'ailleurs rendu
compte,
lui qui exigeait au fermier,
le
uilicus,
de
"ne pas
laisser
les
esclaves dans de mauvaises
conditions",
de
ne pas
les
laisser
"avoir
froid
et,
avoir
faim •• ~ (21). De quelle faim parla donc M. Lengèllé ? Est-ce de
la
faim
de
la liberté,
la
libertas
? Cicéron ne
le
dit nulle
part.
Et cela se comprend aisément,
car
i l apparaît dans ses
écrits d'abord comme un Romain
bon teint,
un homme attaché â
sa
patrie,
à
son terroir et aux
valeurs qui
les sous-
tend.
Même
si
de
temps à autre i l se
lance dans
de
longues tirades philoso-
phiques en
voyant
d'abord
l'homme comme membre du
cosmos et en
le considérant à
la suite de Socrate comme citoyen du monde,
mettant ainsi
tous
les êtres sur
le même
pied,
i l reprend
par
... / ...
-
147 -
la suite ses esprits,
revient
sur
terre et
met en avant
son
milieu.
Parler
donc des esclaves en analysant le
levain de
leurs
révoltes,
ne serait-ce pas
légitimer
leur action et
par
la même occasion tenter
d'apparaître comme
un anti
national?
Ainsi,
même si
à
la
lecture
d'autres
auteurs
tels
que Plutarque
nous apprenons
que,
après avoir
ameuté d'autres esclaves,
Spartacus
ne
voulut
ni
plus ni
moins que
"conduire son armée
ves
les
Alpes
persuadé qu'ils
(les
esclaves)
devaient
les
avoir
franchies,
retourner
dans
leurs
pays respectifs,
les
uns en
Thrace,
les
autres en Gaule"
(22)
;
même si des
auteurs
tardifs
comme J.
Carcopino admettent
que
les
révoltes
ne
furent" en
réalité que
le soulèvement
occasionnel
de
bandes
disparates
auxquelles
l'abjection où la
loi
d'aviain de
l'esclavage
les
avait
plongés n'avait
laissé la
force,
ni
de concevoir
un
idéal,
ni de se
plier à
une discipline"
(23) alors
que d'autres
tels
que J.
Schmidt
les expliquent surtout
pour celle d'Italie
par
la non
tenue de la
promesse de
la
libertas
aux esclaves après
les campagnes de Marius
(24)
enfin,
même si P.
Louis
fut
d'une
grande clarté quand i l
indiqua que
les
révoltes étaient
pour les esclaves de loin préférables à
la
fuite
car
elles
les
mettaient à
l'abri
des
tracasseries,
des
incertitudes et
des
peines
générées
par
le
froid,
la
faim
et l'absence
de
logis(25),
rien ne
nous
permet d'arriver
à
des
conclusions
finales
sur
la
base
de
l'oeuvre
de Cicéron.
De la même manière,
la
notion de
la
libertas,
notion pourtant
vitale et
intégrée à
l'essence de
l'homme que développe
l'Arpinate
(26),
ne
nous
permet
pas
de
trouver
les
raisons claires
pour lesquelles les esclaves déci-
dèrent
par
trois fois,
de
briser
leurs chaînes et de
dépossé-
der
leurs maîtres du capital qu'ils constituaient.
3- Plutôt
que d'utiliser d'autres
termes
d'une
portée moins
grande -
i l en avait
les moyens et les aptitudes -,
l'Arpinate,
dans ses envolées sur
les
révoltes,
fit
usage d'une terminolo-
gie
bien spécifique.
I l en est ainsi
de ~llum (27)
de
duces
hostium (28),
de taeter,
periculosum (29),
dubiis' formidolosis
... / ...
148 -
que
temporibus
(30).
Utilisés
par
l'Arpinate,
un homme
que
l'on peut considérer comme doté
d'une
intelligence particulière,
ces
mots
ne sont
pas
fortuits.
Rien
ne
l'est
d'ailleurs pour
lui
Habile orateur,
parfait
êclectique,
i l sait
que
tel
mot
plutôt
que
tel autre a
son
importance.
Et en fonction
des
objectifs qU'il s'est
fixé
au départ,
i l s'emploie alors à
les
ressortir.
Un mot
dans
la
bouche de
Cicéron,
n'est
pas
qu'un mot,
c'est-à-dire
l'expression d'un souffle.
C'est aussi
et surtout une arme et
une arme'particulièrement
redoutable.
Mais le mot
peut aussi apparaître comme
l'expression d'une
idéo-
logie,
d'un mouvement
de
pensée.
A ce titre,
dès
qu'il est uti-
lisé,
i l véhicule
toute
une
philosophie.
Enfin,
le mot
peut être
perçu comme le moyen
vicieux de dire
ce
que
l'on
ne
peut se
permettre de déclarer en
public.
A ce moment,
seuls
les esprits
avertis,
pointus et avisés s'en rendent
compte et
jugent ainsi
le
personnage qui
en est l'auteur.
Cicéron se
rangea
dans
quel
camp? Dans l'un d'entre eux ou dans
tous en même
temps?
Il
nous est
impossible d'y répondre
de
manière catégorique,
car
l'Arpinate lui-même
ne
l'indiqua nulle
part.
Cependant,
nous
pouvons dire
que
tous
les
termes
que
nous avons inventoriés,
n'expriment
nullement
la faiblesse
ou encore
la mollesse des
individus auxquels ils s'adressent.
Ils n'ont
donc
pas
pour
objectif inavoué de
la
part de
l'Arpinate,
d'apporter
la preuve
que
les esclaves dans
leurs
révoltes étaient
des
êtres qui
n'apportèrent aucun danger
à
la cité romaine.
Bien au contraire,
à
travers
bellum,
duces
hostium ••• ,
Cicéron décrit
le degré de
bellicisme des esclaves.
Il
indique que ce
furent
de
braves et
solides combattants,
des
assaillants redoutables,
des hommes
de
guere
redoutables.
Il indique également
que
non seulement
ils étaient organisés,
ordonnés,
mais aussi qu'ils n'avaient
par
leurs structures,
rien à envier même aux solides
légions
romaines,
formées
à
force
d'externa bella,
à
croiser
le fer
avec des
ennemis de haut calibre.
Il montre
que c'étaient des
hommes
nQrgneux,
intrépides,
féroces
et
véloces,
résolus dans
leurs actions.
De
toute
façon,
toutes
ces
révoltes,
pour
prendre
.../. ..
-
149 -
fin,
ne
durèrent-elles
pas au moins
trois ans? D'aucuns
pour-
raient
arguer
que cette
longueur
trouva son origine
dans
l'es-
soufflement
des
armées
romaines,
le combat
permanent étant
pour
les
Romains
une activité inlassable.
Mais
c'est aussi
oublier
la tenacité des
insurgés,
tenacité que Cicéron dépeint
bel
et
bien.
Et s ' i l s'y engagea,
ce n'est
pas
par simple ludisme.
C'est sarement
parce qu'il
voulut montrer et
faire
apprécier
la portée de
ces soulèvements et
leurs
retombées
sur
le fonc-
tionnement
quotidien de
la vie
romaine.
Acteur
plutôt que spec-
tateur béat et
passif
de l'ensemble de
l ' é l i t e dirigeante de
la cité,
i l
prit connaissance d'une oreille attentive,
des
différentes
tribulations serviles.
En les
dépeignant jusque
dans leurs contours,
avec
les
phases
les
plus marquantes,
i l
montre
qu'il savait
de
quoi
i l
parlait.
Certes,
puisque
l'Arpinate accorda
plus de
lignes aux
révoltes s'étant déroulées
à
une époque éloignée de
la sienne-
celles
de Sicile et dont
il n'en
prit connaissance que ~
auditu
-,
l'on
pourrait être amené à
penser
qu'il
était néces-
sairement à
la recherche d'un
but
précis.
Ce qui
ne serait
pas
totalement erroné
puisqu'étant
orateur,
i l
privilégiait le
passé.
En effet,
le
passé
présentait
toujours
l'avantage d'être abordé
avec aisance,
puisque non vécu directement,
mais enroulé dans
un
récit,
plus
poignant et disposant
d'un sérieux impact sur
les esprits des
auditeurs et des
lecteurs.
Colportant une his-
toire
derrière
lui,
agréable ou traumatisante,
i l permettait
de replonger
dans
des scènes endormies,
assoupies) inhumées.
Le
passé était
donc
une arme et même
un
pensum pour l'orateur.
M.
Rambaud
ne déclarait-il
pas:"Pour rendre
plus sensible le
mal
..•
(y a-t-il)
un meilleur moyen que
d'évoquer
le
pas-
sé
.•.
?
(31).
Bien évidemment également,
dans
son De Suppliciis où i l
évoqua ces
révoltes avec plus ou moins d'insistance,
Cicéron
se
retrouve
presque en compétition avec
un de ses'adversaires
politiques,
Verrès,
qui se singularisa
lors de sa
préture en
... / ...
-
150 -
Sicile,
par des malversations
flagrantes,
au
point
de con-
traindre
les
populations à
le
traîner
en justice.
Et ayant
la
responsabilité de
défendre
ses anciens
administrés,
Cicéron se
trouva ainsi
dans
l'obligation de
charger
son adversaire,
égrenant ainsi
ses défauts et ses in-
capacités,
parmi
lesquelles celles de
ne
point intervenir à
la
tête
de ses
troupes
pour mâter
la révolte des esclaves italiens,
contrairement à Crassus ou à
Pompée.
Et si
dès
le
début de son
réquisitoire dans
le De Suppliciis
i l aborda
la question des
révoltes,
coupant ainsi
l'herbe sous les
pieds d'Hortensius,
l'avocat de Verrès,
c'est
parce qu'il
savait
que
ce
thème était
d'une
grande sensibilité auprès de
l'opinion
publique romaine
tout entière.
Ce qui
dans
le même
ordre d'idée
revient
à
dire
que ce
thème,
dans ce combat
politique,
pouvait
lui
servir
de
propagande
politique.
D'où d'ailleurs
ce sarcasme
:" Que Verrès
soit
voleur,
qu'il soit sacrilège,
qu'il soit
le
type
de tous
les scandales et de
tous
les
vices;
oui,
mais,
dira t-on,
i l
est
bon imperator"
(32).
D'où également cette
interprétation
de
l'attitude de Verrès envers les esclaves
:"Eh quoi!
ce mou-
vement
d'esclaves,
ce soupçon soudain d'une
guerre,
t ' a
t - i l
donc donné activité pour
la surveillance de
la
province,
ou
nouveau prétexte à
gain malhonnête
?"
(33).
Comme on le voit,
une
telle appréciation de
l'argumentaire de Cicéron ne serait
pas
totalement erronée.
Pour enfoncer
son adversaire,
le noyer
et avoir
dans son camp ses clients et même ceux du côté adver-
se,
ne
convenait-il
pas de
choisir
minutieusement
une
thématique
porteuse et efficace
?
Mais
i l ne
fait
guère
de doute
qu'au-delà de ces
subterfuges,
l'Arpinate démontre clairf ment
que
les esclaves
ne
furent
pas des êtres singuliers.
Manius Aquilius, l'un des an-
ciens préteurs de la Sicile, n'en fit-il pas l'amère expérience? "Etant
orateur non seulement habile, mais fort, vers la fin du plaidoyer, il
(Antoine) saisit lui-même Manius Aquilius, le
campa debout à la vue de
tous et déchira sa tunique sur sa tunique sur sa poitrine pour montrer au
... / ...
-
151 -
au peuple romain et aux juges les cicatrices des blessures reçues en face,
en même temps aussi il parla longuement du coup que le chef des ennemis
lui avait porté sur la tête" (34). Pour Cicéron donc les esclaves méritent
7
attention parce qu'ils constituèrent un danger pour Rome. Ces propos fu-
rent d'ailleurs repris par P.Louis qui indiqua ce qui suit :" Les séditions
serviles inquiétèrent et terrorisèrent même à plusieurs reprises les
Ro-
mains. Non seulement ces séditions jouaient le même rôle que nos grèves mo-
dernes, en paralysant le travail et par la suite, en risquant d'affamer
une société qui communiquait difficilement avec le dehors, mais encore elles
suspendaient des menaces de toute nature sur la cité "(35). Et pour couron-
ner le tout, il clarifie la nature des combats : ces combats ne furent pas
de simples séditions, des insurrections ou des soulèvements anodins. Bien
pire, ils furent des guerres; d'où le nom de bella
(36) qui leur fut con-
féré, les plaçant du même coup aux côtés des autres types de guerre qu'eu-
rent à livrer
les légionnaires (37).
Mais ces guerres, furent-elles celles des égaux des Romains, des
adversaires qu'ils respectaient et devant lesquels ils étaient prêts à s'in-
cliner ? Là dessus, la position de l'Arpinate apparaît clairement et nette-
ment. Car il indique ceci ; " Prouinciam Siciliam uirtute istius et uigilan-
tia singulari dubiis formidalosisque temporibus a fugitiuis atque a belli
periculis tutam esse seruatam " (38). Plus loin, il ajoute ceci : " •• ~~uile,
Africanum, Transalpinum, Hispaniense •.• seruile, nauale belIum ••• " (39) •
En tenant ces propos, Cicéron lève toute équivoque. Il indique indubitable-
ment qu'il sort du camp des esclaves pour rejoindre le sien, celui des hom-
mes libres, les Romains. Il montre de manière résolue son camp: les révol-
tes ne furent que des guerres menées par des inférieurs, c'est-à-dire des
serviteurs, des hommes sans considération, des moins que rien. Du coup, il
les pointe du doigt, les indexe avec mépris et condescendance. A travers
ses mots, il exprime la haine, la
révolte devant cet état de fait
et tente de partager ses sentiments avec ses contemporains.
Il
sollicite de leur
part une grande sévérité,
une inflexible ri-
gueur dans le traitement à leur réserver.
En recourant aussi à
des mots tels que taeter
et periculosum
(40),
l'effet de
l'Arpinate sur le subconscient de ses lecteurs s'en trouve sûre-
ment atteint.
. .. / ...
-
152 -
Vues sous cet angle,
les
révoltes serviles
prennent
la coloration d'actes
sortant
de
la
droite
ligne,
d'actes
per-
pétrés
par des hors la loi
dont
l'unique
but est de détruire
Rome.
Ces
révoltes
furent
donc
illégitimes.
Il se dessine ainsi
chez Cicéron,
une tentative de
préservation du
statu quo ante.
Une
tentative
qui s'appuie sur
le
refus obstiné d'un quelconque
fervent
de déséquilibre dans
la cité et sur sa
répugnance du
moindre be1lum domesticum,
sous
quelque
forme
qu'il soit.
C'est
d'ailleurs ce qu'indique cet appel
au rassemblement
des
bons
citoyens
domesticis malis •••
est
resistendum
(41).
En
les
incitant ainsi
au ressaisissement,
i l
leur fait
prendre cons-
cience du
grave danger
pesant
sur
la cité et dans le même temps,
du
risque
qu'aurait couru cette cité en se
laissant assiéger
par
des
"moins que rien",
des
êtres faits
pour être des sujets,
des serviteurs,
des dépendants.
Implicitement donc,
apparais-
sent
dans
les
termes de
l'Arpinate
une
volonté
tenace
de
voir
Rome
être
toujours maîtresse à
la fois
du
bassin méditerranéen
et du monde entier;
de savoir sa cité toujours rayonnante et
exerçant son imperium.
L'on comprend mieux pourquoi,
presque
enragé,
i l tint ces
propos à
Verrès,
qui avait
fait
preuve vis-
à-vis
des esclaves accusés de
conspiration,
d'une
inacceptable
mansuétude:
" •••
Les coups de
verges,
les
fers
brQ1ants,
et
ces supplices suprêmes
des condamnés,
ces objets de
crainte
pour
tous
les autres,
et la
torture et la crucifixion? ILs
sont exemptés de tous ces châtiments.
Qui doute que
les esprits
des esclaves n'aient été accablés d'une extrême épouvante en
voyant
le
préteur assez indulgent
pour laisser racheter,
par
l'entremise du
bourreau lui-même,
la vie
d'esclaves condamnés
pour crime de conspiration"
(42)tEn d~fiGitive, lorsqu'il abor-
da cette question servile qui
fut
une
parenthèse
véritablement
douloureuse pour Rome,
l'Arpinate songeait
à
un
point
nodal:
rétablir
l'équilibre de sa société,
lui redonner
vie et énergie,
flétrir
le comportement
irrévérencieux des
esclaves et
par delà
eux,
les citoyens romains
qui
s'étaient montrés
tendres à
leur
égard.
Les
révoltes nous montrent
donc clairement que les escla-
ves
étaient actifs,
qu'ils
étaient
capables d'initiatives et
... / ...
-
153 -
générateurs de
Jéstabilisation.
Mais i l est
un
autre
fait
d'importance:
intégrés dans les familiae
des maîtres,
par-
fois
errant
à
la
recherche d'une
forme
de
"patronage",
ils
étaient
le
plus souvent conduits à
perpétrer
un certain
nombre
d'actes de violence commandités
par
leurs acquéreurs.
Comment
Cicéron
présente t - i l
ce deuxième volet
de
la
violence à
laquel-
le
participaient
donc
ces esclaves en tant
qu'auteurs
incons-
cients
?
II -
Les esclaves,
auteurs
inconscients de
la
violence
Si
les
révoltes serviles constituèrent
l'expression
de
la violence consciente,
voulue et recherchée
par
les escla-
ves eux-mêmes,
i l
n'en fut
pas de même
pour
tout
le reste.
Pour
comprendre
la situation,
telle qu'elle se
présentait
réellement,
i l faut
savoir
comme
nous
l'indiqua Salluste
(43)
que Rome
était
parvenue à
un état
de déliquecence morale
très avancé,
contrairement à
ce qu'elle
fut
sous
les maiores.
Non seulement
les Romains avaient
perdu
le sens de la dignité et
de
l'honneur,
mais aussi
ils s'étaient
laissés avilir
par
le
goût
du matériel,
la recherche du
lucre
par
tous
les moyens et
de
la
vie
facile.
La frugalité avait cédé
la
place à
l'abondance,
la
vie ascéti-
que s'était
laissée déclassée
par
les
plaisirs de
la chair.
Du
fait
de
la
transformation radicale
de
l ' é t a t moral
des Romains,
Rome ne
fut
plus dans
Rome.
Il en résulta
donc
inévitablement
comme autre moyen d'expression,
la
violence,
expression du
re-
noncement à
un
type de
langage,
à
une
forme
de communication.
A partir de
cet instant,
personne ne se
plaça à
l'abri
de
la
violence
qui
secoua Rome.
Nul
n'en fut
écarté
la cité s'embrasa tellement,
qu'elle atteignit même
des limi-
tes jamais
franchies
au depart.
Et comme dans
une situation
conflictuelle de haut
niveau,
seul
le langage de
la force
prime
sur celui
du droit
ou sur
la né9ociation,
tout
le monde
presque,
... / ...
-
154 -
recourt à
la violence
pour se placer sur
le même
pied
que les
autres.
C'est ce que
voulut exprimer Cicéron,
par cette référen-
ce au
poête,
dans son Pro Murena
"Comme
le
dit
un
poête de
génie et de
grande autorité,
une
fois
proclamé l'état de
guerre,
ou bannit
non seulement
votre
verbiage,
contre-façon de science,
mais encore la
véritable souveraine de
l'univers,
la "sagesse",
c'est la
force
qui
rêgne.
On
dédaigne
l'orateur non seulement
odieux et bavard,
mais même éloquent.
"C'est
le
farouche sol-
dat que l'on chérit.
Alors c'est
pour notre métier
l'abandon
total".
"Ce n'est
pas au sortir du
tribunal qu'on
invite au
combat,
mais c'est le
fer
à
la main"
dit
un
poête,
"que l'on
revendique son droit"
(44).
C'est également ce qu'il
voulut
indiquer
dans ce
passage du Pro Milone
;
" S'il Y a
des cas
où l'on a
le droit
de
tuer
-et ils sont nombreux -,
c'est
non
seulement justice,
mais n~cessit~" (45). A priori, quand des
conflits opposaient des citoyens entre eùx,
les esclaves n'en
étaient
pas concernés et en étaient
de ce fait,
exclus d'offi-
ce.
Les expressions comme bellum seruile et
bellum internum,
qui confinent les uns et les autres dans
leurs champs ou leurs
domaines
respectifs,
sont
là pour
le justifier. Mais
pourquoi
dans
le
bellum intern~ les esclaves se trouvêrent-ils inté-
grés? Bien évidemment,
la violence est
inhérente à
l'être hu-
main.
Elle fait
partie intégrante de lui et sommeille donc
en
lui constamment.
Il suffit de la réveiller
pour qu'elle se
déchaîne et fasse
des
ravages.
Enfouie
dans l'âme,
un effet de
choc est susceptible de la secouer et
de la faire
s'exprimer.
Mais est-ce
pour cette raison principalement que
les
esclaves,
ne supportant
pas de
rester inactifs,
s'engagêrent dans les
différents actes de violence perpétrés
par les citoyens? Leur
présence dans le
vent
dévastateur qui souffla sur Rome
tout
au
long de
la fin
de
la République,
fut-elle
sur une simple
coincidence ou
plutôt un autre moyen de démontrer
leur soumis-
sion à
leurs commanditaires,
leurs maîtres? Pourquoi
les es-
claves étaient-ils prisés ?
-
155 -
l
- Les esclaves,
une arme redoutable
a) La prééminence de la vigueur physique
Des hommes vigoureux,
forts,
robustes et prêts à
fondre sur l'adversaire,
voilà ce que recherchaient les cito-
yens englués dans ce lourd climat de violence.
Ce choix écarte
immanquablement les faibles,
les timorés,
ceux considérés comme
incapables de tenir la dragée haute à la
partie adverse et de
porter des coups décisifs.
Il privilégie de ce fait non pas la
capacité intellectuelle, morale,
mais avant et après tout,
la
combattivité ou la bonne structure physique.
Or,
de nombreux
esclaves répondaient à ces critères. De même Cicéron nous fait
découvrir des esclaves lettrés, des intellectuels,
aptes à con-
cevoir,
à
réfléchir et à théoriser,
de même il met en face de
nous,
ceux dont les seules capacités sont essentiellement d'or-
dre physique.
Voilà d'ailleurs par quels termes il les désigne:
homines ••• maximis animis et uiribus (46)
N'est-ce pas à eux et à eux seuls que recourut P.
Fabius pour accomplir son forfait? Laissons l'Arpinate nous
en dire un peu plus
"Pendant ce temps,
Fabius amène dans le
pâturage des hommes qu'il a choisis, d'un grand courage et
d'une grande vigueur;
il les équipe d'armes que chacun peut
bien avoir en mains et qui conviennent aux forces de
chacun
d'eux;
personne ne se rendit compte que ce n'était point pour
les travaux de la campagne,
mais pour le meurtre et pour le
combat qu'ils étaient ainsi équipés ••• " (47).
Quant à Antiochus
qui nous est présenté dans le Pro A. Caecina,
chargé de veil-
ler scrupuleusement à ce que personne ne franchisse la ligne
d'oliviers de son maître,
n'est-ce pas grâce à sa force qu'il
fut choisi ? " Ad eas cum accederetur" affirme Cicéron "iste
cum omnibus copiis pra~stofuit seruumgue suum nomine Antiochum
ad se uocauit,
et uoce clara imperauit et eum~ ilIum olearum
ordinem intrasset occideret " (48). C'est à n'en point douter,
à
des esclaves robustes,
à
de solides gaillards que fit appel
P.
Fabius qui,
aux
prises avec M. Tullius.dont il tenait
... / ...
-
156 -
absolument à s'approprier une parcelle de terre,
demanda la
strangulation des esclaves (49).
Bien sûr,
ces esclaves
étaient armés,
disposant donc d'un arsenal qui leur permettait
facilement
de s'imposer,
de contrôler
le périmètre d'un ter-
rain et d'y semer l'insécurité,
à
l'instar de celle commise
par leur vagabondage dans le saltus où ils vivaient (50).
Mais des armes placées
entre les maias d'esclaves phvsiQue-
ment réduits,
ou même impotent~,
n'auraient pas eu des effets
aussi monstrueux. Le principal n'était donc pas d'être armé,
très armé - armati,
armatissimi -
en s'aidant" des
pierres
ramassées sur le lieu même (du forfait),
des mottes de gazon
ou de terre,
une branche coupée à un arbre"
; en gros,
"d'ar-
mes défensives et offensives" (51),
mais d'être capable de
bien s'en servir. Or,
qui d'autre ne pouvait le mieux le faire
que quelqu'un de physiquement bien structuré? C'est à juste
titre donc que J.Annequin et M. Létroublon,
pa~lent d'organisa-
tion" paramilitaire" (52). De la même manière,
c'est assuré-
ment sur la vigueur physique d'abord,
que reposa le choix de
Milon,
lorsqu'il mit sur pied son escorte qui l'accompagnait
dan~ tous ses déplacements,
y compris celui au cours duquel
eut lieu son accrochage avec Clodius,
même si Cicéron son ami
et avocat,
la présente avec des traits inoffensifs (53).
Q.
Asconius ne parla t-il pas "d'une longue colonne d'esclaves ?"
(54).
La preuve,
il nous la donne en 57 av. J-C.
quand,
au plus
fort de la lutte contre Clodius,
il alla carrément, à
la tête
d'une troupe nombreuse,
passer une nuit entière au champ de
Mars,
afin d'empêcher le lendemain,
le déroulement des élec-
tions qui auraient pu conduire son ennemi politique à l'édili-
té (55). Cicéron lui-même d'ailleurs,
reco~raît à des esclaves
physiquement solides et aguerris pour assurer ses déplacements
et sa sécurité personnelle, même si l'impression qu'il donne
est d'être insuffisamment protégé (56). Sinon,
comment et pour-
quoi défendrait-il avec autant d'acharnement,
l'idée portant
sur l'absolue obligation d'être
prêt à
la riposte,
en cas d'at-
taque adverse?
(57).
~ .. /.I ..
-
157 -
Pourquoi
trouvait-il
absolument
nécessaire
pour
un
citoyen,
de s'entourer
d'hommes de
main capables de
lui épar-
gner
des
désagréments,
comme i l l'indiqua à
travers ces lignes?
"Quoi?
un homme
qui
défend
sa maison,
qui
détourne
de
ses au-
tels,
de
ses foyers,
le
fer
et la
flamme,
qui
veut avoir
la l i -
berté de
paraître sans danger,
au
forum,
à
la
tribune,
à
la
curie,
n'a-t-il pas le droit strict de
recruter une
garde?
L'homme
que des
blessures,
dont i l
voit chaque
jour les mar-
ques sur son corps,
avertissent· d'avoir
à
se
faire
escorter
pour
protéger sa tête
et sa nuque,
sa
gorge et ses flancs"(58).
Bien évidemment,
i l ne
précise
pas s ' i l s'agit d'esclaves.
Ce-
pendant,
nous concevons mal commeQt Cicéron qui avait
dans sa
domesticité des esclaves autres que
lettrés,
n'aurait
pas
pu
s'adresser à eux,
comme le
faisaient
les populares Catilina,
Clodius et Marc Antoine entre autres.
En laissant
le
lectorat et son auditoire dans
l'im-
précision,
voulait-il montrer
que
contrairement à
ses concito-
yens,
i l
n'utilisait
pas
les esclaves? Etait-ce aussi
une ma-
nière
d'indiquer qu'à Rome,
les esclaves
n'étaient
pas les seu-
les
forces auxquelles
pouvaient
recourir
les citoyens soucieux
d'assurer
leur défense? Cette seconde
hypothèse
peut paraître
vraisemblable,
car en raison de
la
grave crise qui secoua Rome
à
la
fin
de
la République,
de
nombreux Romains
virent
leur si-
tuation matérielle devenir alarmante,
n'ayant
ainsi
pour seule
planche de salut,
que
le don de
leur corps à,
un éventuel com-
manditaire.
Ce qui
veut dire en d'autres termes que
la crise
romaine
poussa de nombreuses
populations installées à
Rome -
originaires de Rome,
des municipes
ou des colonies -
,à s'of-
frir aux citoyens fortunés
soucieux d'assurer
leur sécurité,
concurrençant ainsi
les esclaves.
Deux éléments nous
permettent
de
le constater:
d'abord
ce
large
catalogue que
l'Arpinate
dresse sur les milieux sociaux des
uns et
des autres et gÙ se
retrouvent au coude à
coude
les
geqs aux dettes considérables -
Eorum qui magno in aere
alieno maiores etiam possessiones habent,
quarum amore adduc-
ti
dissolui
nullo modo
possunt
(59).
-
158 -
-
ceux qui convoitent
le
pouvoir -
qui,
quamquam premuntur
aere alieno,
dominationem tamen exspectant
(60)
les spécialistes de
mauvais coups -
parricidarum,
sicariorum,
denique
omnium facinorosorum
(61).
-
les efféminés -
quos
pexo capillo,
nitidos,
aut
imberbis aut
bene
barbatos •••
manicatis et
talaribus
tunicis
(62).
-
les
vétérans
de Catilina -
ueterum Catilanae militum (63)
ensuite ce
passage de A.W.Lintott
:
" Clodius succeded
not
only in rassembling the men that Catiline's
folloyers
had used,
but also mobilizing the class that had
failed
the Catilinarians
in their hour
of
need,
so
blending together
a
new political for-
ce of considerable
significance"
(64).
Ce
qui
veut dire que
dans
leur
vaste campagne de ratissage
des
forces
sécuritaires,
les esclaves et
les membres des autres couches sociales,
inté-
ressaient
les citoyens.
Et Cicéron le
fait
remarquer,
par exem-
ple dans ce
passage où fustigeant Clodius,
i l
le
rend
responsa-
ble de
sa claustration momentanée:
" ••• Je me suis
tenu chez
moi,
tant que
les
troubles ont duré,
quand on savait que
tes
esclaves,
préparés
par
toi
depuis
longtemps au meurtre
des hon-
nêtes gens,
doublant
ta
bande de scélérats et de misérables
t'avaient accompagné
en armes
dans
le capitole"
(65).
Il en est
de même
de
celui-ci
où une armée et
les esclaves sont considérés
comme
les
principaux éléments de
terreur à
la solde du même
Clodius
"Voici donc,
fléau
funeste
à
la République,
voici
le
citoyen que,
par le
fer
et les armes,
la
terreur d'une armée,
la scélératesse des consuls,
les menaces des hommes les
plus
effrontés,
la levée des esclaves •.
(66).
Abondants
pendant cette période
de
la fin
de
la Répu-
blique,
ces esclaves devaient sans nul
doute être disponibles
et accepter sans peine,
de
se
placer
dans
le giron
de
leurs
commanditaires.
L'un des signes de
cette disponibilité,
réside
dans la
facilité avec laquelle Clodius se constitua une armée
d'esclaves,
en
procédant
à leur recrutement:
"On recrutait
... / ./ ..
-
159 -
des esclaves devant
le
tribunal Aurelien
"lui rappelle
l'Arpi-
nate,
"sous prétexte de
former
des
collegia
;
ces hommes
étaient
enrôlés
rue
par
rue,
répartis en sections de
dix,
exci-
tés â
la
violence,
aux coups de main,
au meurtre,
au pillage"
(67).
L'enrôlement,
tel
que
le précise Cicéron dans
la plupart
de
ses
plaidoieries
(68),
voilà donc
le moyen souvent
utilisé
par
les citoyens désireux
de se constituer une
véritable arma-
da
;
d'oa cette traduction
qu'en
fit
J.P.Waltzing
:"Le
tribun
s'installa au forum,
sur
le
tribunal Aurelien,
avec un
régistre,
Ceux qui
voulaient entrer
dans un collège allaient
se
faire
inscrire.
On enrôlait
tous ceux qui
se
présentaient:
des ou-
vriers,
d'anciens soldats de Catilina,
des condamnés arrachés
à
la
prison,
non
seulement des
ingénus et des affranchis,
mais
aussi
des esclaves "(69).
George La Piana
qui mena
une
brillan-
te
étude sur les
foreign
groups
(70),
vit
à
travers cette re-
naissance des collegia compitalia,
une
volonté de réanimer
les
énergies des esclaves et de mieux
les souder.
A priori,
lorsque
l'on prend les collegia dans
leur ensemble et qu'on
les situe
dans
le contexte des
premiers romains,
c'est-à-dire ceux qui
donnèrent
des institutions à
la cité,
cette interprétation se~
rait
â
prendre au sérieux.
Si
l'on en croit Plutarque,
n'est-
ce
pas le souci d'un
large corporatisme qui aurait poussé
Numa â
regrouper
des hommes exerçant
la même activité profes-
sionnelle
? (71). Unités professionnelles, les collegia of-
fraient
la possibilité aux hommes exerçant la même activité
de se
reconnaître,
de mettre
leurs
intérêts en avant et de
mieux
fraterniser,
en
vue d'une identité commune et
d'un moule
mental
commun.
Unités religieuses aussi,
les collegia présen-
taient l'avantage de
permettre à
tous
ceux qui s'y trouvaient
réunis,
d'attiser
leur
foi
envers
les
divinités qui
plus que
d'autres,
veillaient â
leur survie,
répondant de cette manière,
â
l'unité divine que Cicéron croyait
fondamentale
(72).
C'est
pour cette raison essentiellement,
qU'ils entreprenaient cer-
... 1...
-
160 -
tains travaux gratuitement,
comme l'érection du capitole par
les fabri
(73).
Ils formaient de ce fait de larges associa-
tions où les individus de second rang communiaient entre eux.
Les co11egia compita1ia où les esclaves se retrouvaient par-
fois avec d'autres inférieurs -
les affranchis et même la
plèbe famélique
(74),
ne s'inscrivaient-ils pas dans ce sens?
Pour plus de détails,
voilà ce qu'en dit J.
Robert:
"Les
compitalia marquent ainsi
l'entente entre le propriétaire et
ses esclaves. Il est vrai que le maitre est souvent absent
du domaine
~Ù la confiance est
nécessaire entre ses
gens et lui. Les paysans déposent sur ces petits autels des
présents,
un joug brisé,
symbole que les travaux agricoles sont
finis et ils suspendent des
poupées qui représentent chaque
membre de la famille du maître ainsi que des balles de pelote
autant qu'il y a d'esclaves" (75).
En procédant à des enrôlements,
peut-on dire que
Clodius recherchait ces desseins? L'admettre,
serait passer
sous silence l'importance de la pugnacité et le poids de l'élé-
ment physique chez Clodius,
surtout en cette période parti-
culièrement trouble. Analysant cette question,
J.P. Wa1tzing
fut d'ailleurs sans détours.
"En réalité" dit-il "ce n'étaient
pas des collèges,
mais des régiments de misérables,
des gens
sans aveu,
que Clodius organisait sous le nom de collegia ... (76)
Ce que Clodius recherchait donc avant et après tout,
c'étaient
des hommes suffisamment forts
pour lui servir d'auxiliaires,
des soldats dotés d'une extrême virilité,
susceptibles de
le mettre en confiance dans la réalisation de ses voeux et
comme le signala M. Malaise,
"des bandes qui allaient lui
servir dans sa lutte ••• " (77). N'est-ce pas la raison pour
laquelle Marc Antoine ne se fit aucun scrupule dans la recher-
che effrénée de ses hommes de paille? Sinon,
l'on serait
dans l'incapacité d'expliquer
pourquoi à la différence de ses
prédecesseurs popu1ares,
et même des autres citoyens romains,
... / ...
-
161 -
i l
introduisit
une
innovation dans
la cité,
en faisant appel
aux
barbares,
et surtout aux
plus méchants d'entre
eux,
les
Ityréens
(78),
• Au
fur
et à
mesure
que
la
violence s'amplifiait dans
la cité,
les
citoyens qui
s'y exerçaient,
excellaient dans
la
manie d'avoir
des
guerriers
plus fermes,
plus rudes,
plus
belliqueux et
donc
plus aptes
à
faire
mal et à
détruire,
parce
que
plus cruels eux-mêmes.
Ainsi,
si Marc Antoine
recourut à
des êtres redoutables comme
les Ityréens,
c'est parce qu'il était
"plus imprudent que
L.
Catilina et
plus forcené que P.
Clodius"
(79).
Lorsque
l'on voit
cette
présentation de Cicéron,
l'on a
l'impression
que tous
les citoyens
violents
ne sont
pas
logés à
la même
enseigne.
Autant que
les esclaves,
ils
obéissent à
une sorte
de hiérarchie,
s'intègrent dans une
gradation.
Rien donc dans
l'esprit
de
l'Arpinate
ne paraît figé,
harmonieux.
A tous
les niveaux de
la société,
existent
des
blocs,
des
groupes
qui s'enchevètrent et concourent à
une oeuvre commune.
En tout
état de cause,
les esclaves solidement constitués apparaissent
comme
les
plus
prisés
par
les citoyens. Mais
i l
ne faut
guère
exclure ceux dotés
d'une expérience et d'un
passé
guerrier.
b- L'importance de
l'expérience et du passé guerrier
Deux autres
types d'esclaves
furent
utilisés sur la
base
de ces deux critères
:
les
gladiateurs et
les esclaves
fugitifs.
Quelle déviation dans
l'usage des
gladiateurs,
des
Etrusques aux Romains de
la fin
de
la République!
Même si au
temps
de Cicéron des
pugilats opposaient encore des couples
de
gladiateurs pour commémorer la mort
d'un
défunt,
ils ne
constituent grosso modo, qu'une strate
de
plus en
plus délais-
sée,
d'une
institution qui à ses
débuts,
était
fortement
imprégnée
dans
la mentalité collective.
En effet,
au
lieu de
tuer
leurs
prisonniers sur
la tombe
du
défunt qu'ils hono-
raient",
nous dit J.
Heurgon,
"les Etrusques
les
faisaient
combattre devant elle"
(80).
A la fin
de
la République,
cette
notion de combat prit
une autre dimension.
Galvaudés
par des
.../. ..
-
162 -
besoins nouveaux et de
nouvelles sensations auxquels
les
Romains devenaient
plus sensibles désormais,
ils trouvaient
leur
popularité et
l'attachement
qu'on
leur
vouait
non seule-
ment
dans
leur
rentabilité financière
(81),
mais aussi dans
leurs
optitudes
physiques.
La
force
de
ces
hommes,
réside
d'abord
dans la variété de
leur condition d'origine.
En effet,
en dehors
des esclaves jugés suffisamment
robustes,
musclés
et costauds,
se mêlent
les
noxi ad
gladium ludi
damnati,
c'est-
à-dire
les criminels condamnés à mort
par
l'autorité
publique,
les condamnés
passibles des ~nae mediocres qui,
envoyés aux
travaux
forcés avaient
la
possibilité de se convertir dans
le
maniement du glaive,
"ceux qu'une
vie
trop dure
poussait à
se
joindre aux troupes
de brigands de
tout
temps nombreuses
en Italie,
tout
un cortège de malchanceux,
désormais sine
domino,
mais sans autre maître
que
la mort"
(82),
les anciens
soldats,
c'est-à-dire
tous ceux-là dont
le melting
pot
qu'il
en résultait,
accroissait la farouche
combattivité.
C'est de
là que
nait
la seconde raison de
l'affection dont
ils jouis-
saient
de la
part des Romains
leur
particulière
bellicité
acquise
par
le
passage au
ludus.
"La formation
qu'ils
rece-
vaient
"
avoue J.P.
Brisson," développait
chez eux un indivi-
dualisme féroce
qui ne risquait
pas
de
favoriser
les
senti-
ments
de solidarité
:
ils apprenaient à
tuer
pour
ne
pas être
tUés
la
prolongation de
leur misérable
vie
dépendait
pour
chacun de
la mort
qu'il savait
infliger aux autres"
(83).
Dans
cette galerie disparate,
dans ce monde
où
planait
incessam-
ment
la mort,
prête à
faucher
à n'importe
quel moment,
se
formaient
des
êtres
pour
lesquels l'essentiel de
la
vie ne
devait se
limiter qu'à veiller
méticuleusement à
la
préserva-
tion de
leur intégrité corporelle.
Ils
y apprenaient à nour-
rir,
à en maîtriser les grandes lignes de la philosophie,
dont
les
points saillants étaient
le mépris de
la
vie et son idéa-
lisation (84).
Parler
de chair
à
glaive
pour
les
gladiateurs,
serait
loint d'être
un euphémisme.
Car
cette image est la
manifestation concrète de
leurs conditions d'exîstence.
Plus
qu'ailleurs,
c'est
à ce
niveau même
que réside
leur
point
... / ...
-
163 -
d'honneur.
Savoir mourir en hommes
intrépides,
entièrement
baignés de sang,
se moquant
du
glaive,
rester soi-même devant
la fin
de ses heures,
ne
pouvait être une
vertu universelle
et
que
tout
un chacun démuni
de
certaines
particularités
avait
la
possibilité de faire sienne.
En s'y appliquant,
les
gladiateurs étaient
donc hors
de
pair comme
le souligna Cicé-
ron
:
" . . .
A l'époque où c'éta'ent des
condamnés
qui s'entre-
tuaient,
nulle
leçon d'énergie
devant
la douleur et
la mort
ne
pouvait agir
plus efficacemënt,
du
moins
parmi
celles qui
s'adressent
non aux oreilles,
mais aux
yeux"
(85).
Meilleure
leçon de courage et de
virilité que celle donnée
par ces gla-
diateurs,
contrairement au spectacle fade
qu'offraient
les
chasses dans
l'amphithéâtre,
spectacle tant
prisé par
le
uulgus
! (86).
Spartacus n'en f i t - i l
pas
une démonstration
éloquente pendant
la
révolte des esclaves
d'Italie du
sud
menée de
73 à
71
av.
J-C.,
en refusant
de se rendre aux
trou-
pes
loyalistes,
attitude avilissante et en
préférant opter
pour la
voie de
l'héroisation
? (87).
Voilà d'ailleurs com-
ment Plutarque rapporta cette attitude
bien héroique
:
"A
la
fin,
ceux qui
l'entouraient ayant
pris
la fuite,
i l
resta
seul.
Enveloppé
par
de nombreux ennemis,
i l continua à
se
dé-
fendre
jusqu'à ce qu'il
fat
percé de coups"
(88).
De toute
façon,
Cicéron
lui-même,
en
bon stoicien,
admirait
cette atti-
tude et cette manière
de
faire.
Réagissant
comme ceux
qui
voyaient dans
les
gladiateurs
des
hommes
que
l'éducation his-
sait à
un rang élevé,
d'autant
plus que
leur
formation
faisait
d'eux des
guerriers alertes,
prêts à
apporter
la mort,
à
foncer
tout
droit
devant
les obstacles dressés sur
leur
passage,
à
minimiser
les
dangers,
à
n'avoir aucune difficulté à se mobi-
liser,
i l
les
mit au niveau de
véritables
légionnaires
(89).
A ce titre,
i l en
fit
des
uiri,
c'est-à-dire
des êtres diffé-
rents des mulieres,
puis qu'acceptant
la souffrance sans
rechigner,
à
l'instar
des enfants de Lacédémone et
d'Olym-
pie
(90).
Mais dans
le
même
temps,
i l les
opposa,
sur
la
base
de
leur
fréquentation
des
spectacula
(91),
à
tous
les essouf1és,
.../ ...
-
164 -
aux affaiblis et autres citoyens
fatigués,
dont
l'archétype
était Catilina -
gladiator
.••
confectus et saucius
(92),
être
n'ayant aucune mesure
avec
Eudamus et Birria par exemple,
les deux
gladiateurs qui
occupaient
l'arrière de
l'agmen de
Milon lors des
échauffourées
avec
les
troupes
de Clodius
(93).
Dans le même ordre d'idée,
c'est
également
par
référence à
leur
passé en tant qu'habitués des
insurrections,
que
les
fugitiui
attiraient
les Romains
désireux
d'avoir
une
force
redoutable à
leur
portée et de
disposer
d'un appui
extrêmement
solide.
Un seul d'entre eux se montra
particulièrement friand
de cette catégorie socio-juridique
:
P.
Clodius.
Popularis
autant
que Catilina,
Marc Antoine
et
tous ceux qui militaient
dans
leur camp,
i l se
montra
très sensible à
leur expérience
acquise
à
force
de
pratique de
l'audacia,
cet attribut
vivant
et actif chez les révoltés de Sicile,
d'Italie du
Sud et de
tous
les dépravés.
C'est ainsi
que
dans
le
De Domo sua,
Cicéron
le
présenta comme n'étant
qu'entouré d'eux
dans ses déplace-
ments au Sénat,
tenant ces
propos:
" •••
Non uenirem,
cum
~sertim te iam illinc cum tua fugitiuorum manu discessisse
constaret ?" (94).
Leur
faisant
jouer
le rôle de satellites,
i l
les
présenta en 57 av.
J.C.,
à
la veille des comices comme
t e l s :
"Clodius,
cum haberet fugitiuorum delectas copias in
campum ire non e~~ ausus"
(95).
Le
Cum qu'employa Cicéron,
connote
l'étonnement
devant
son refus
du déplacement du
champ de Mars,
étonnement sous-tendu
par
la conviction de
l'écrasante force des ~itiui, force
qui aurait pu perdre
la
face
devant celle de Milon dans
le
cas d'un accrochage.
Convaincu des
capacités physiques,
de
la formation
psycholo-
gique des esclaves fugitifs,
i l semble ne
pas comprendre
la
raison
pour laquelle Clodius n'alla
pas attaquer et
tenter
de
repousser son adversaire,
stationné avec ses copiae.
Mais
en insistant sur la nature des
esclaves utilisés
par Clodius,
Cicéron montre
la férocité singulière
de ses troupes.
Il met
en
lumière aux
yeux du
public,
la criante
disproportion des
forces
dont s'entouraient
les
Romains et donc,
l'inévitable
.../ ...
-
165 -
danger
qu'ils
faisaient
courir
à
la cité.
Il
énonce
un déni-
vellement
sur
les
types
d'auxiliaires auxquels
chacun recou-
rait et donc,
sur
les
objectifs réels
des
uns et des
autres.
De ce
fait,
i l
clarifie
la
scission de
la
société,
scission
qui
donnait surtout à
Clodius,
une
sorte
de
paternité dans
l'insécurité éventuelle et
latente à
Rome.
Nous assistons
donc
là,
à
un
tissage
de
toile d'araignée
qu'essaya d'expli-
quer
par
ces mots,
F.
Favory
:
" •••
La composition de
bandes
comme
la
pratique,
dans
le
passé,
permettent d'apprécier
l'ampleur
de
la menace
que représente
leur
entreprise.
Leur
passé subversif s'investit
dans
leur action
présente,
confé-
rant
ainsi
aux autres
forces
du tribun
les
mêmes
objectifs
l'action de Clodius en
58 et
par
la suite,
c'est
le
renou-
veau de
la conjuration
de Catilina,
de
la
révolte
de Spartacus,
des
révoltes
de Sicile"
(96).
Cicéron dans
le même
temps,
installe en quelque
sorte
le drame dans
l'esprit
des
Romains
qui
l'écoutaient,
sème
la
peur et
érige
une sorte de
barrière entre
tous
ceux
qui utilisaient des
hommes
de mains.
Cette
démarche
savamment
mise au
point,
fait
se reposer sur Clodius
le
présage d'un
danger,
l'im~inence d'une crise, car les fugitiui n'étàient
rien d'autre
que des
porteurs de crise et de subvertion.
Ils
portaient enfouis en eux,
les
germes de
la
destruction et du
démantèlement
de ce qui
était établi.
Il en est de même
pour
ces esclaves ruraux que Clodius incluait dans sa garde
rap-
prochée et qui
déjà,
s'étaient singularisés en Apehnin
par
leur
dextérité dans
la dévastation des
forêts
du domaine
public,
ainsi
que de
l'Etrurie
(97).
Mais
l'Arpinate ne s'ar-
rête
pas
là dans sa
présentation.
Il établit même
une coor-
dination entre
les
vrais serui
et
ceux que
nous
pourrions ap-
peler
les serui d'adoption,
c'est-à-dire ceux qui
tétaient
devenus
par
leurs carences
psychologiques,
par
des
pratiques
détournées
de
la bonne morale et dont
la conduite cadrait
très mal avec
les règles
du civisme.
C'est
le .cas des
latrones
... / ...
-
166 -
que
l'Arpinate
fait
cohabiter avec
les
serui
(98)
et que
R.
Etienne
définit comme
faisant
partie
intégrante des
"démons
de
la mentalité romaine" avec
leurs spécificités
:
"ne
pas
combattre
selon
les règles,
ne
pas mener
une
guerre juste,
ne
pas respecter
les
lois de
la
guerre,
ne
pas
savoir se
battre
et même
ne
pas
vouloir se
battre
selon
les
règles
.•. "
(99).
C'est aussi
le cas des egentes.et
des
sicarii
placés dans une
profonde
promiscuité avec
les serui
(100)
et même
des
facinerosi
(101).
Cette contagion atteignit
tous
les se-
conds de Clodius au tempérament
séditieux et qui,
mandatés
pour rassembler
les
troupes nécessaires à
leurs
desseins,
s'imprégnaient de servilité.
Il en est ainsi
tour
à
tour de
Ligus,
-
uenalis adscriptor et subscriptor-(102),
de Sergius -
armiger catilinae-(103),
de
Decimus -
designator
-
(104),
Sex. Clodius -
ommium non bipedum solum sed etiam guadripedum
impurissimo -
(105),
Lentidius,
Lollius,
Plaguleius -
qui mer-
cede
conducuntur -
(106),
englués
dans
la masse servile
pla-
cée à
la solde
de Clodius.
Une
telle hétérogénéité,
amplifie
sans cesse
le risque d'explosion
de
la
violence
courue
par
les
paisibles citoyens et les
tenants de
la
paix,
de
la
grandeur
permanente de
la cité.
Elle
donne
une
dimension plus
concrète à
la nation de
gangsters retenue
par A.W.
Lintott
(107)
et
laisse
clairement dévoilées,
les
intentions des esclaves
en
faveur
de
la violence.
Elle
rend enfin
pesante et éviden~
la menace
de
guerre que côtoie
Rome.
Comme on
le
voit donc,
les esclaves,
outre
le fait
qu'ils sont ameUtés
par les citoyens.
formant
ainsi
le gros de
l'arsenal militaire
que
les
uns et
les autres affectionnaient,
servirent
également
de sous-main
à
une
idéologie
intelligemment mise en
place,
structurée et
harmonieusement codifiée
par toute une
frange
de
la
popula-
tion
:
celle
des aristocrates dont Cicéron était
l'un des
porte
flambeaux.
Avec
la violence qui
quotidiennement
presque
était évidente et dans
laquelle se
trouvaient
impliqués les
citoyens,
s'amplifie
la démarche
cicéronienne .
../ ...
- 167 -
2- Les esclaves
une arme destructrice
J
Non seulement ils étaient redoutables,
mais aussi ils
étaient destructeurs.
Mais l'application de cette caracté-
ristique,
dépendait soit des maîtres auxquels les esclaves
ne pouvaient rien refuser soit d'autres commanditaires sou-
cieux de faire exécuter
telle ou telle tâche de leur choix.
L'analyse de A. W.
Lintott à propos des collegia,
traduit
nettement cette situation:
"By exploiting these associations,
he (Clodius) was able to recruit men for
violence and other
political pur poses on a mu ch larger scale than any one before
hirn had done ••• " (108). Cette analyse s'inscrit dans une cer-
taine mesure,
dans la logique des verbes à tendance autori-
taire tels que imperare que nous voyons exprimés plus
parti-
culièrement dans le Pro A.
Caecina à propos d'Antiochus
:
"Iste cum omnibus copiis praesto fuit seruuumque serum nomine
Antiochum ad se uocauit et uoce clara imperauit ut cum qui
ilIum olearum ordinem intrasset vocideret" (109).
Elle suit
également la lignée des termes comme coegere,
armare,
instruere
(110) ou encore incitare (111) et excitare
(112)
qui montrent le poids de
l'autorité pesant sur les esclaves
ainsi
que l'étendue de la soumission dans
laquelle ils se
trouvaient placés. Comment s'exprimait cette violonece sur
le terrain? Là aussi,
Cicéron se servit d'une double méthode
la méthode concrète par
laquelle il présenta les faits
tels
qu'ils se déroulèrent;
puis celle à portée
plus globalisante
donc abstraite,
où tout de même apparaissait prépondérante,
la
marque des esclaves.
a) La violence concrète
Celle-ci apparaît dans une partie de la Corres~ondance
et dans quelques plaidoieries. Cicéron prend alors la peine
de raconter,. parfois avec force détails,
le déroulement de
l'action.
Il en fut
par exemple du Pro A.
Caecina où pour
168 -
montrer
que la
violence ne consistait
pas
uniquement dans
l'usage des armes,
i l
prit
le cas
de son client qui dut
s'enfuir en compagnie de quelques membres de
son entourage,
au
vu des
forces
ennemies
(113).
On retrouve
le même son de
cloche dans le Pro Caelio où
les esclaves apparurent comme
ayant été au centre d'une
tentative d'empoisonnement
(114).
Mais là ne sont
pas
les seuls cas de
présentation concrète
des
faits
par Cicéron.
En effet,
dans son oeuvre,
l'Arpinate
en
donna quelques
rares autres,
où les esclaves étaient
pré-
sentés comme principaux acteurs de
la
violence quotidienne qui
sévissait à
Rome.
Trois milieux attiraient
les
citoyens en
mal de désordre et
d'actions de
force:
le
forum,
le Palatin
et
le champ de Mars.
Mais
parmi
tous
les
trois,
le
forum oc-
cupait le rang
le
plus élevé,
car
c'est
vers cet endroit que
convergeaient le plus régulièrement,
tous
les
fauteurs
de
trouble,
à
cause sans
nul doute,
de l'affluence qui
y règnait.
En effet,
dans
l'étroit couloir allant
du capitole à
l'arc
de Titus,
s'était établie au cours
des
siècles,
toute la
vie
politique de Rome:
temples,
curies,
tribunaux,
bure aux de
magistrats,
circulation des cortèges officiels" (115).
C'est
donc
tout
naturellement
là que
"la violence
..•
particulière-
ment sensible lors du
vote des
lois agraires,
connut Vn
tour-
nant"
(116)
par
la suite,
activée surtout
par
les esclaves qui
servaient de caisse de
résonnance aux entreprises déstabili-
satrices de leurs commanditaires.
Dans cette optique,
c'est
surtout au cours de
la
période allant de
60 à
44 av.
J.C.,
que
ces esclaves s'illustrèrent par
leur
virulence.
Pourquoi
l'année
60,
alors
que
trois années
plus tôt,
une
grave crise
enflamma Rome,
crise menée
par
Catilina,
candidat malheureux
aux élections consulaires de
64 et
de
63
? La réponse se trou-
ve
dans
l'objectif que se
fixa
le chef des
conjurés,
en menant
son mouvement:
populariser son action,
la
rendre
légitime et
conforme aux institutions de
la République.
Pour
ce
faire,
Catilina opta
pour
une stratégie magistrale
évacuer de son
... / ...
169 -
mouvement
les
esclaves,
de manière
que
seuls s'y
trouvassent
impliqués,
les
citoyens.
Cette stratégie apparaît
nettement
ici,
décrite
par
Salluste,
qui
insista
surtout,
sur
les
pro-
messes faites
aux
insurgés.
"Accablés de maux
comme
ils
l'étaient,
sans avoir,
comme sans espoir,
les
conjurés
trou-
vaient déjà
dans
le seul
fait
de
troubler
l'ordre,
un salaire
suffisant
..•
Catilina de
leur
promettre
•..
la
révision
des
dettes,
la
proscription des
riches,
les magistratures,
les
sacerdoces,
le
pillage,
et
tous
les autres
bénéfices que
com-
portant
la
guerre et
le
bon
plaisir
des
vainqueurs"
(117).
Le même Salluste ajouta d'ailleurs ce
qui
s u i t :
"Depuis
qu'Antonius approchait avec son armée,
Catilina ne
cheminait
plus qu'à
travers
la montagne
transportant
son camp tantôt
vers Rome,
tantôt
vers
la Gaule,
sans
donner
à
son adversaire
l'occasion de combattre:
i l espérait avoir
un
jour
prochain
de
grandes
forces,
si
ses complices réussissaient
leur coup
à
Rome.
En attendant,
i l congédiait
les esclaves
qui au début
accouraient en masse
vers
lui,
car
outre
qu'il
comptait sur
les seules
forces
de
la conjuration,
i l estimait contraire à
ses
intérêts de
paraître associer
la
cause
des
citoyens avec
celle des
esclaves"
(118).
Mais
à
partir
de
60,
cette philosophie
fut
battue en
brèche,
surtout qu'à cette date,
Clodius émerga sur
le
plan
politique.
Issu des
rangs
de
la noblesse,
descendant de
la
célèbre
gens
des claudii et donc
patricien de
naissance,
Clodius se mit
en effet,
à
"défrayer
la chronique"
pendant
presque
une
décennie.
Non content
de son
rang,
"dès janvier
60,
il
voulut
obtenir
du
peuple,
la qualité de
plébéien"
(119),
voie indiquée
pour
la
brigue du
tribunat,
magistrature sacro-
sainte,
"l'Etat dans
l'Etat",
pour
reprendre
les
termes de
Lilly Ross Taylor
(120).
Pour
y parvenir,
i l
fit
fi
des
moyens
légaux,
préférant
utiliser
les esclaves.
Ainsi,
i l revêtit
la
veste de
popularis et
voulut apparaître comme
le
porte
.. / ...
- 170 -
étendard
de
tous
les déclassés.
Bien entendu,
Rome
disposait
d'une
police
gérée
par
les
aediles,
ces magistrats chargés
aussi
de
l'organisation des
jeux et de
la
gestion des
travaux
publics,
du
rationnement
des
cultes étrangers et de
l'appro-
visionnement
de
la ville.
Mais dès
le départ,
celle-ci
ne
fut sans doute
pas conçue
pour
une
population aussi exubé-
rante et qui
plus est,
adopta une
forme
de
langage nouvelle,
faite essentiellement de
viriljté et
à
laquelle
l'Urbs était
peu habituée.
A.
W.
Lintott
le reconnut d'ailleurs,
quand
i l
affirma
:
"Only
one occasion,
do we find
them performing poli-
ce duties to check animaIs
:
in
186,
during
the suppression
of the Bacchanalia,
the curule aediles were
ordered
to
find
and keep under
open arvest aIl
priests of
the cult,
while
the
plebeian aediles
had
to ensure
that
the
rites were
not
perfor-
med insecret"
(121).
De
plus,
la
f~lure des institutions ré-
publicaines occasionnée
par
l'immersion des
valeurs ancestra-
les et des vertus des mai ores
,
par
la généralisation de
l'ambition et la
recherche du
pouvoir
par
tous
les
moyens,
gangrénèrent
la
force _originelle du pouvoir
étatique,
au
point de
la scléroser.
Cl.
Nicolet
fut
d'ailleurs sans amba-
ges sur cette question,
quand
i l tint
ces
propos:
"Pendant
longtemps,
nous
ne
voyons
pas ces
groupes divers
intervenir
en tant
que tels dans
la
vie de
la c i t é :
les institutions de
type civique
(armée,
census,
comices)
leur
imposent
à
la
fois
des
limites et une discipline,
canalisent
leur exubé-
rance:
du moins
à
partir
du IVès.,
lorsque se seront effa-
cés de vieilles institutions de
type archaiqup.,
que nous
connaissons d'ailleurs mal,
comme les gentes ou les curies "
(122).
La singularité de Clodius,
résidait
donc dans le
fait
qu'il était
le
plus véhément dans l'utilisation de
la
masse servile,
au
point d'apparaître
comme
le
principal res-
ponsable de
tous
les mauvais coups
perpétrés à
Rome
pendant
cette période.
... / ...
-
171 -
Il en
fut
ainsi
de
ce
carnage décrit
ici
par Cicéron et qui
eut
lieu aux kalendes
de Janvier
56
" . . .
Or
ces hommes,
à
l'instigation de qui
P.
Sestius est
traduit en justice,
que
f o n t - i l s ;
Après avoir
occupé en
pleine
nuit
le forum,
le
comitium,
la curie avec des hommes armés,
pour
la plupart
esclaves,
ils se ruent sur Fabricius,
ils
portent
la main sur
lui,
ils
tuent
quelques
personnes de
son groupe,
ils en
bles-
sent
beaucoup.
Arrive alors au
forum M.Cispius,
un
parfait
honnête
homme,
un citoyen plein de
courage,
qui était tribun
de
la
plèbe;
ils l'écartent
par
la
force:
ils
font
au
forum
un
massacre,
et
les
voilà
tous,
l'épée
nue et sanglante,
qui
cherchaient des
yeux mon frère,
qui
est
un homme excellent,
qui
est
très
courageux et qui m'aime
beaucoup"
(123).
M~me
si
l'on en croit Q.Asconius,
un
nombre
insignifiant d'escla-
ves
prit
part à
l'échauffourée qui
eut
lieu sur
la
voie Ap-
pienne en 52 av.
J-C.
et qui
occasionna la mort
de Clodius
(124),
tout laisse cependant penser
que
les esclaves en majo-
rité
,
prirent part à
l'inflammation de
la
curie et même
de
la
basilique Porcia,
par
la suite
(125).
D'ailleurs,
l'esclave
qui
fut
arr~té dans le temple
de Castor,
un
poignard
à
la main,
à
l'affQt de Pompée,
con-
traignant ainsi
celui-ci
à
ne
plus
paraître au
forum,
au Sé-
nat et en
public,
ne
fut-il
pas mandaté
par Clodius?
(126).
En dépit
de
cela,
ne nous
y trompons
pas.
Rares
sont
les Romains qui,
disposant et entretenant
des hommes de
paille,
s'abstinrent d'en
faire
usage,
non seulement pour
assurer
leur
propre sécurité,
mais aussi
pour servir n'importe
quel
dessein.
Vatinius,
n'utilsa-t-il
pas
des gladiateurs
imposants et célèbres
(127)
pour se
faire
élire antidémocrati-
quement
? Marc Antoine,
ne s'entourait-il
pas
d'Ityréens,
peuple redoutable et adroit dans
le maniement
des
flèches,
chaque fois
qu'il entrait au Sénat?
(128).
Quant à Antronius,
ne se servit-il
pas de
gladiateurs et
d'esclaves
fugitifs
pour empêcher
la tenue
d'un
procès?
(129) •
.../ ...
-
172 -
Cicéron
lui-même,
ne
fut-il
pas accusé par MareAntoine
d'avoir
envahi
le capitole à
l'aide de serui armati sous
son consulat
?
Il s'en défendit
par
un
questionnement
inno-
cent
:
"
At
etiam ausus es
-
qui autem est quod
tu
non audes
?
Cliuum Capitolinum dicere me consule
plenum seruorum armato-
rum fuisse"
(130).
Mais
rien
ne
lui
permit d'en apporter
une
preuve contraire suffisamment
étoffée.
Tout cela,
pour
dire
qu'à
la
fin
de
la République,
la
violence s'était
tellement
généralisée,
qu'il
était
devenu rare
d'y
échapper.
Les
citoyens s'en donnaient
à
coeur
joie,
pour
sa-
tisfaire
leurs
passions et
leurs
brûlants
désirs.
Et
dès cet
instant,
l'insécurité
règna
partout et atteignit
des
propor-
tions
démesurées.
Envoyés souv~nt comme simples exécutants,
les esclaves s'y
pliaient à
volonté.
Mais
les
quelques actions
que
nous avons
présentées,
constituant
ce
que
nous avons ap-
pelé la
violence
concrète,
prennent encore
plus d'éclat
quand
Cicéron
leur
donne
une amplification
volontaire,
décrivant
ainsi
une autre
forme
de
violence:
celle abstraite.
b)
La
violence abstraite
Si Cicéron
présenta concrètement
les
faits}donnant
parfois
tous
les détails,
dévoilant
les contours de
leur
dé-
roulement,
montrant
dans leur crudité
les actes de
violence
perpétrés
par
les esclaves,
i l
n'adopta
pas cette
pratique
dans
l'ensemble de
son oeuvre.
D'ailleurs,
peu
nombreux sont
les discours où l'Arpinate s'ingénia à
la
précision,
surtout
sur
un
thème aussi
brûlant
et
inquiétant
que
la
violence.
La
méthode
adoptée surtout dans
les
discours
par
Cicéron,
consis-
tait à
partir d'un fait
vécu,
à
l'exposer
et à
le reprendre
par
la suite
régulièrement,
en faisant
donc un cas général
et courant.
C'est ce
que
nous
constatons dans
les
plaidoyers
surtout avec
le cas
de Pompée.
Alors
que Cicéron rendit
un
esclave de Clodius
responsable
de
la claustra~ion de celui-
ci,
dans
le De Domo
non seulement
cette
responsabilité écla-
ta,
portée
par
les
troupes
de
son ennemi,
mais aussi
elle
prit
une allure
beaucoup plus
générale
comme cela apparaît
ici
"Avec quelle
facilité,
chaque Jour,
par
le
fer
et
la
ruse,
malgré
l'abandon
de ses meilleures
troupes,
i l éloigna
/
-
173 -
en Pompeius du
forum et de
la curie et
le confina chez lui
!
Vous
l'avez vu
;
et vous
pouvez juger
par
là
quelle
était
la
force
de
cette
faction
Jeune et
unie,
puisque
divisée et mou-
rante,
elle effraya encore en
Pompeius"
(130).
Ecoutons-le
encore,
cette
fois
dans
le Cum Senatui
:
"Ainsi,
cette année
même où je m'étaiS éloigné,
où le
premier
personnage de
la ci-
té,
privé de
la
protection des
lois,
abritait
sa vie
derrière
les murs
de sa maison"
(131).
Dans
le
premier
comme dans le
second
passage,
Cicéron
utilisa
à la
fois
un
temps
particulier,
l'imparfait,
et
des adverbes au sens
précis,
puique
d'ordre
temporel.
En
procédant
ainsi,
i l cher-
cha non seulement
à
montrer au
grand
jour
le caractère explo-
sif du
climat social,
mais aussi
le
danger
couru
par
les ci-
toyens.
Dans
le
même
temps,
i l chercha à
en
faire
une affaire
à
répétition,
qui s'était
produite
de
la même
manière,
à
plu-
sieurs reprises.
D'autres cas
viennent
illustrer cela,
mais
nous ne citerons que
quelques-uns
d'entre
eux,
assez marquants.
Par exemple celui-ci
où après
l'échauffourée ayant
éclaté au
forum à
la suite de
laquelle Quintus
fut
recherché
par
les hom-
mes de Cloôius,
Cicéron amplifia
l'étendue
du carnage
:" •••
Vous
vous souvenez qu'alors,
Juges,
le Tibre
était
plein de
cadavres de nos concitoyens,
que
les
égouts en étaient com-
blés,
qu'on étanchait
le sang sur
le
forum avec
des éponges ••. "
(132).
Par
exemple aussi cette série
de
tribulations qui
s'étaient déroulées,
pour
la
plupart d'entre
elles,
au forum"
L'année
précédente,
on s'était empagé
du
forum,
des esclaves
fugitifs
avaient occupé le
temple
de Castor
comme
une citadel-
le . . .
Des magistrats étaient chassés des
temples,
d'autres
empêchés d'accéder au
forum .••
Des
gladiateurs de
la suite
d'un préteur avaient
été arrêtés,
amenés au Sénat;
ils
avaient avoué;
ils avaient
été mis
aux
fers
par Milon,
libé-
rés
par Serranus ..•
Le
forum fut
jonché de
cadavres de cito-
yens romains massacrés
pendant
la
nuit .••
Vous avez pu voir
... / ...
-
174 -
un
tribun de
la
plèbe
gisant
à
terre,
avec
plus de
vingt
blessures et
moribond;
un autre
tribun
de
la
plèbe,
un homme
divin,
-
je dirai
ici
ce que
je
pense et ce que
tous
pensent
avec moi
-
oui,
un homme
divin,
d'une
grandeur
d'âme,
d'une
dignité,
d'une
loyauté
vrai
ment
éclatantes,
inouies,
excep-
tionnelles,
a
vu
sa maison attaquée avec
des armes,
des
tor=
ches,
l'armée
de Clodius!
"
(133).
Nous
pouvons également
citer
cette in. trusion d'esclaves
dans
les Megalesia,
ces jeux
célébrés en commémoration de
l'arrivée à
Rome
de
la Magna
Mater,
divinité qui
"délivra les
Romains
d'un
véritable cau-
chemar"
pour
reprendre
les
termes
de M.P.Lambrechts
(134),
et dont Cicéron dit
c e c i :
" Tout
homme
libre
qui
s'y était
rendu
par curiosité ou même
par
dévotion était
l'objet
de
sévices,
aucune matrone
n'y
était
venue
à
cause des
violences
et de
l'auditoire
servile.
Ainsi,
des
jeux si
sacrés
qu'on
les a
fait
venir
des
régions
les
plus éloignées
pour
les éta-
blir dans cette
ville,
les seuls qui
ne soient
pas
désignés
par
un mot
latin,
pour que
leur
propre dénomination atteste
qu'il s'agit
d'un
culte étranger,
célébré sous
le
nom de
la
Grande Mère,
ces
jeux ont eu des
esclaves
pour acteurs,
des
esclaves
pour
spectateurs,
en
un mot,
sous
un
tel
édile,
les
fêtes
mégalésiennes ont appartenu
tout
entières à
des escla-
ves"
(135).
Ce
type
de
présentation qui accorde
une mise au
second
plan de
tous
les
détails des actions menées
par
les es-
claves,
n'est
fortuite.
Au-delà du
fait
qu'il
relève
de
l ' a r t
cicéronien"
i l
fut
mis en
place à
l'intention des auditeurs
souvent
présents à
ses
plaidoyers
et
plaidoiries et à
celle
des
lecteurs.
Ce qu'il
voulait,
c'était
les amener
tous dans
son orbite,
leur
faire
prendre conscience
d'un
fait
terrible-
ment
brûlant
qu'ils
vivaient au
quotidien.
Montrer aux Romains
que les esclaves étaient dans
leurs murs,
que
leur
influence
était
sans cesse croissante,
que
les
lieux sacrés
étaient
pro-
fanés
par
eux et
que
de
ce
fait
i l
fallait
absolument
sauve-
garder
la
Respublica,
voilà son objectif.
Cette méthode avait
un avantage certain.
... / ...
-
175 -
En effet,
prêsenter tous
les dêtails chaque
fois
qu'il
re-
prenait
un
fait,pouvait
lasser,
dêplaire
le
public et à
la
longue,
rendre
peu rêceptible son message.
Alors
que
le
ra-
pide rappel des
faits
brisait
tout
cela et
laissait tout
le
monde
en êveil.
Il
ne
faisait
s'assoupir
personne et ne
prê-
sentait
pas le
risque
d'installer
l'indifférence.
En
faisant
apparaître constamment
les actions d'une
gavitê extrême êma-
nant
des esclaves,
l'Arpinate ainsi
pouvait avoir
la
garantie
de
marteler
le subconscient
du
public et des
lecteurs,
ren-
dant
par
là même pendant,
le danger servile.
Racontêes comme
par
fulgurations,
en
petits jets,
ces actions s'engrangeaient
facilement
dans
leur esqprit,
s'y
installaient et s'êveil-
laient
facilement
quand on
les incitait,
gardant
leur
incan-
descence.
En dêfinitive,
i l
fallait
pêrenniser
l'idêe des
esclaves dans
tout
l'environnement
des
citoyens,
pour accen-
tuer
le danger
qu'ils
représentaient,
de manière
à
faire
se
liguer
toute
la communauté civique contre
leur
intrusion.Cer-
tes,
ces esclaves n'agissaient
pas
le
plus souvent
par eux-
mêmes.
Confinês dans
leur
infêriorité,
i l
ne
leur arrvait
pas
de
prendre l'initiative de
partir
à
la
rencontre
des hommes
libres,
conscients de
perpétuer
la
violence dans
leurs murs.
L'initiative ne
leur
revenant
pas,
ils n'étaient qu'une mas-
se
de manoeuvre qui,
comme
dirait
Salluste,
n'entreprenaient
et
n'envisageaient absolument
rien
volontairement,
~ initio
(136).
Parfois englués
dans
des
groupes de
pression
(137),
in-
tégrés
dans de
grands ensembles où
leur
présence était
à
pei-
ne
perceptible
(138),
ils agissaient sur excitation de
ceux
qui
les
supervisaient.
Cependant,
l'Arpinate
voulait
par
tous
les moyens contraindre
la société civile à
éprouver
de
la
répulsion à
leur égard,à
les
"mettre en quarantaine" et
à
en faire
le groupe
le
plus
dangereux
de
tous;
d'où ces
propos
tenus au sujet
des Clodius
:
"Est-ce
là
une
imagination
dites-moi,
et
non
pas une
vérité évidente,
connue de
tous,
et dont on a
les
preuves en main,
qu'il
(Clodius)
aurait
levé
.../ ...
-
176 -
à
Rome des armées
d'esclaves
pour
se
rendre maître
de
l'Etat
tout entier et de
toutes
les
fortunes
privées?
"
(139).
La
dominatio
des esclaves sur
les citoyens,
n'était-ce
pas
aux
yeux des
Romains
la
pire
des épouvantes,
la catastrophe
que de
toutes
leurs
forces,
ils repoussaient? N'était-ce
pas la
pire
des situations? Ainsi
se comprend
leur exploita-
tion dans
un certain nombre
de
plaidoyers comme
le De Domo
où i l
indiqua ceci
"Les escl.aves,
ma
parole,
auraient mis
la main sur
l'Etat
. . . " (140)
;
"Si
la
liberté devait
chas-
ser quelqu'un de sa maison,
était-ce celui sans
lequel
la
cité entière serait tombée au
pouvoir
des
esclaves
?"
(141).
Même son de cloche
dans
le Pro Sestio où
i l
tint ces
propos
"Ne croyez-vous pas
que
la République serait
tombée aux
mains des
esclaves? "
(142).
Dans
une série d'autres
plai-
doyers
(143),
ce thème
revenait comme
une
sorte
de
leitmotiv.
La dominatio des esclaves avait ceci d'effroyable
qu'elle
supposait
pour
les
Romains,
la dissolution
des
moeurs
héri-
tées des
maiores,
le
ravalement à
un
rang de
quasi
bestiali-
té et
l'annihilation de
la
lucidité et
du
discernement,
at-
tributs
de
la
liberté.
Ainsi appliquée,
elle
pouvait entraîner
le renversement systématique du monde.
N'est-ce
pas à
ce
renversement
qu'aboutit
l'exil de Cicéron
(144),
l'intimida-
tion de Pompée
(145)
et
la
tentative
d'assassinat
de
Sestius
?
(146).
La dominatio des
esclaves faisait
aussi cou-
rir
à
la société,
l'attentat à
la
vie
des
boni,
cette caté-
gorie sur
laquelle reposait
la stabilité de
l'Etat,
en tant
que groupe solide de
l'ensemble des
optimates.
Du coup,
sous
la plume de Cicéron,
les
esclaves furent
réduits à
une sorte
d'épouvantail qu'il suffisait d'exhiber,
pour accroître
la peur sur
les
citoyens.
A une
insécurité réelle,
quotidien-
nement
vécue,
se superposa cette
véhiculée
par
le
discours,
celle-ci
étant
dotée
d'une efficacité sinon similaire,
du
moins supérieure à
celle-là.
Les deux
violences si
l'on ose
... / ...
-
177 -
dire,
une fois jumelées,
pouvaient ainsi
inhiber l'esprit
des Romains,
accentuant la peur vis-à-vis des esclaves et
mettant désormais en présence,
deux groupes presque conflic-
tuels
: celui des boni,
c'est-à-dire les
bons citoyens,
res-
pectueux de l'autorité supérieure de la nation et de l'ordre
établi et celui des autres couches de la population aux al-
lures serviles. Comme on le voit donc,
les esclaves sont
parfaitement dépeints sous une double inconscience:
celle
générée par leur participation involontaire aux actes de
violence et celle motivée par la
plume de Cicéron. Cette
manière de faire,
répond inévitablement à
un objectif:
garder intact l'ordre de la société,
éviter la permissivité
suscitée par l'arrivée des
idées et des
principes nouveaux;
en gros, susciter la résurgence du statu quo ante qui laisse
totalement distinctes,
toutes les couches de la population.
En leur faisant prendre une part plus ou moins active aux
principaux actes de violence qui marquèrent la fin de la
République, Cicéron démontra une fois encore,
l'une des deux
principales facettes de l'esclave. Mais une autre facette
apparut nettement:
celle de
l'esclave victime de la violence .
. ../ ...
-
173 -
NOT
E
S
1 -
Cons.,
XIV,
280
:
Si seruientis ea est conditio
;
ut
ex
eius,
cui
seruit,
moribus
uoluntate,
igenio
propriam sibi
fortunam
fingat.
2 -
l
Pol.,
VII,
4
3 -
"L'exercice de
la
proprié~é à la fin de l'époque classique
du
droit
romain"
in R.E.L.,
15,
1937,
p,
136.
4 -
Q.l!...L c i t . ,
5 -
Cet avis
fut
d'ailleurs largement
repris
par la
postérité.
Sur ce
point,
se reporter
à
la
thèse
de
R.Sansen,
Doctri-
ne de
l'amitié chez Cicéron -
Exposé -
Source
-
Critique -
Influence,
p,
339.
6 -
l
Tusc.,
XXXI,
75
:
Secer
nese a
cor pore animum,
nec quic-
quam aliud,
est mori discere.
7 -
Les
secrets de
la correspondance
de Cicéron,
p.
374.
8 -
ibid.,
p,
375.
9 -
Q.
fr.,
l,
l,
17
:
Quos quidem cum omnibus in locis
tum
praecipue
in
prouinciis regere
debemus.
Quo de
genere
multa
praecipi
possunt,
sed hoc et
breuissimum est et
fa-
cillime teneripotest,
ut
ita se
gerant
in istis Asiaticis
itineribus ut si
iter Appia uia
faceres,
neue
interesse
quicquam putent utrum Trallis an Formias uenerint.
10 -
l
Cat.,
VII,
17
:
Serui mehercule mei si me isto
pacto
metuerent
ut
te metuunt
nmnes ciues tui,
domum meam
religuendam putarem.
I l -
E.
Smadja,
"Esclaves et affranchis dans
la correspondance
de Cicéron:
les
relations esclavagistes
"in Texte,
Poli-
tique,
Idéologie:
Cicéron,
p.
90 •
.../ ...
-
179 -
12 -
Fam.,
XIV,
4,
4
:
De
familia
liberata
nihil
est
guod
te
moueat.
Primum tuis
ita
promissum est,
te
facturam esset
ut
quisgue esset meritus.
12bis Voir
J. Gaudemet, Le droit privé romain,
p,
317.
13 -
LXV,
S6
;
Qui
opus
facient,
per
hiemem t r i t i c i
modios 1111,
per
aestatem modios IIIS
;
uilico,
uilicae,
epistatae,
opilioni,
modios III
;
compeditis,
per
hiemem panis p,III
ubi
uineam fodere
coeperint,
panis
p,
v usgue adeo dum
ficos
esse coeperint
;
de inde ad
p,
1111 redito.
14 -
Lire à
ce
propos,
l'article de P.
Boyancé,
"Les Romains,
peuple de
la fides
"in B.A.G.G.,
XXIII,
1964,
p,
43S
lS -
C'est
le cas
plus singulièrement de J.
Hellegouarch,
Le
vocabulaire
latin des
relations et des
partis
politi-
ques sous
la République,
pp,
23-28
16 -
Surtout
dans
le De officiis et
le
De
Republica.
17 -
III
De off.,
XX,
79
18 -
Salluste,
De con Cat.,
XX,
73
:
Ne
uirtus fidesque
vostra
satis spectata mihi
forent,
neguiguam opportuna res ceci-
disset
spes magna,
dominatio
in manibus frustra
fuissent.
19 -
J.
Hellegouarch,
op,
c i L ,
Pit
17.
20 -
II
De off.,
IX,
33
21
-
P.
Boyancé,
op.
c i t . ,
p,
427.
22 -
Fam,
XVI,
la,
2.
23-~, cit., P. 276.
24 -
Nous
le déduisons
de l'analyse menée
par P.Flobert,
"Venus et
fides"
in Hommages à
Robert Schilling,
XXXVI,
p,
103.
. .. / ...
-
180 -
25 -
Cette
pratique mentionnée
par
César comme
faisant
partie
intégrante
des Gaulois,
était sans doute
en application
chez les
Romains:
VI Bell.Ga1l.,XIX,
190 ;
.
ac
paulo supra hanc memoriam serui et
clientes quos ab
iis dilectos esse constabat iustis funeribus
confectis
una cremabantur.
Voir aussi
C.W.Westrup,
Quelques obser-
vations sur
la notion antique de
la
fidélité,
p,
21
26 -
III De off.,
XXIX,
104 ;
Non fuit
luppiter metuendus ne
iratus noceret qui
neque irasci solet nec
nocere.
27 -
"La vie
politique des
Romains à
travers
le
vocabulaire"
in I.L.,
4,
1963,
p.
161.
28 -
"Le vocabulaire
latin des relations et
des
partis
poli-
tiques sous
la république,
p~ 27.
29 -
Q.
fr.,
1, 1,
17
;
30 -
Am.,
VI,
20
:
Est enim amicitia nihil aliud,
nisi
omnium
diuinarum humanarumque rerum cum beniuolentia et Caritate
consensio.
31
-
ibid.,
XVIII,
65.
32 -
Am.,
VII,
23 ;
Quae enim domus
tam stabilis,
quae
tam
firma est ciuitas,
quae
non odiis et discidiis
funditus
possit euerti
? Ex quo, quantum boni sit in amicitia,
iudicari
potest.
33 -
ibid.,
XVIII,
65 •
34 -
Histoire de
la
philosophie,
T.
1.,
p.
400.
35 -
Suet, ~., XXX,
88
36 -
"Esclaves et affranchis dans
la correspondance de Cicéron
;
les relations esclavagistes" in Texte,
Politique,
Idéologie
Cicéron,
Po'
91.
... / ...
-
181 -
37 -
Fam.,
l,
7,
1;
;
Quod si rarius fiet
quam tu expectabis,
id erit causae ,
quod non eius generis meae litterae sunt
ut eas audeam temere committere
;
quotiens mihi certorum
hominum potestas erit quibus recte dem,
non praetermittam.
38 -
Att.,
IX,
4,1 ;
39 -
ibid.,
II,
20,
5 ; Quod scripseram me Furio scripturum,
nihil necesse est tuum ncmen mutare
me faciam Laelium
et te Atticum.
40 -
ibid.,
II,
13,
1 :
Facinus indignum
! Epistulam tibi a tri-
bus Tabernis rescriptam ad tuas suauissimas epistulas
neminem reddidisse.
41 -
Fam., XIV,
5,1
42 -
L, A,
Constans,
Corresponandance, T I l l ,
p,
154,
43 -
Fam., XVI,
14,
2 : Acastum retine,
quo cornmodius tibi
ministretur.
44 -
ibid.,
XVI,
15,
2
Ego ad te Aegyptam misi.
45 -
ib~~, XVI,
14,
1 ;
Andricus postridie ad me uenit
quam exspectaram.
46
Jbid.,
XVI,
15,
2 ~
Scripta iam epistula Hermia uenit.
47 -
i b id., XVI,
1 3 : Su mmac u ra e..x~ ct a barn ad u en t umM en and ri,
quem ad te miseram.
48 -
Pro., L. Mur. ,XX,
41 • Huius sors es fuit
guam omnes tui
necessarii tibi optabamus,
iuris discundi
; in qua gloriam
conciliat magnitudo negoti,
gratiam aequitatis largitio
;
qua in sorte sapiens praetor,
qualis hic fuit,
offensionem
uitat aequabilitate decernendi,
beniuolentiam adiungit
lenitate audiendi.
... / ...
-
182 -
49 -
De Suppl.,
LXII,
160-161
50 -
"t1isericordia,
Histoire du mot et de
l'idée du
paganisme.
au christianisme" in R.E.L.,
XII,
1934,
Pa
40
51 -
op.,
c i L ,
p"
149
52 -
Cum pop.,
V, 15 ~
•.•
Ex guibus exce11enti animo,
uirtute
auctoritate,
praesidio,
copiis T.
Annius et P.
Sestius
praestanti in me beniuo1entia . .
53 - Pro., Cn, Plane., l, l, • ei meorum temporum memoriam suffragari
uidebam.
54 -
Pro Milon.,
XXII,
58
55 -
Fam. ,
IV,
12,
2-3.
56 -
A.
Mei11et,
Esguisse d'une histoire
de
la
langue latine
p"
209.
58 -
G.
Boissier,
"A propos d'un mot l a t i n ;
comment
les
Romains ont connu
l'humanitas" in Revue des
deux mondes,
1907,
PoO
103,
59 -
Idée stoiscienne,
elle fut
développée
par Cicéron.
l
De
~., XXIII,
61
60 -
ibid.,
61
Déduction faite
à
partir de l'argumentation cicéronienne
sur
la grandeur de Rome,
l
Tus.,
1, 2.
62 -
Pro Cae1.,
X,
24.
... / ...
-
183 -
63 - Pro sex,
Rosc.
Amer.,
XLI,
121 • Non ita est praefecto,
iudices
;
non est
ueri
simile ut
chrysogonus horum l i t t e -
ras adamarit aut
humanitatem.
64 -
l
De off.,
XL,
145 ;
Sed ea quae
multum ab humanitate
discrepant,
ut si
qui
in
foro
cantet,
aut si
qua est alia
magna
peruersitas.
65 -
II De Phil~,
IV,
7
66 -
Fam.,
XVI,
14,
1
67 -
ibid.,
XVI,
15
68 - Cicéron et ses amis,
P.
114
69 - William C,- Mc Dermott,
"M.Cicero and M.Tiro"
in Historia,
1972,
PP.
259-261.
70 -
Att.,
VII,
7,
7 ;
Alexim,
humanissimum puerum,
nisi forte
dum ego absum adulescens
factus
est
(id enim agere uideba-
tur)
saluere iubeas uelim.
71 -
ibid.,
1,
12,
4 ;
Me hercule eram in scribendo conturbatior
Nam puer
festiuus
anagnostes nos ter
Sositheus decesserat
meque
plus quam serui mors debere uidebatur
commouerat.
72 -
Fam.,
XVI,
15,
2,
73 -
"Humanismus militans"
in Hommaqes à R.
Schiling,
P.
471,
74 - btt., VII,
2,
3
75 -
"Le mode de composition des écrivains" in R.E.L.
XLVII,
1963,
P.
132.
... / ...
-
184 -
76 -
Att.,
IV,
16,
1
:
Occupationum mearum uel
hoc signum erit,
quod
epistula
librarii manust.
ibid. ,II,
23,
1 ;
Numguam ante arbitror
te
epistolam meam
legisse
nisi mea manu scriptam,
Ex eo colligere
poteris
quanta
occupatione distinear,
Nam cum uacui
temporis
nihil
haberem,
et cum recreandae
uoculae
causa necesse
esset mi hi ambulare,
haec
dictaui ambulans.
Q.fr.,
III,
3 ;
Occupationum mearuro signum tibi sit
libra-
r i i manus.
Diero scito esse
nullum,
quo die
non diam proreo.
77 -
Att.,
13b,
3 ;
Si scriberem ipse,
longior epistula
fuisset
sed
dictaui
propter
lippitudinem.
78 -
"Familia rustica
:
les esclaves
chez
les agronomes
latins"
"in Actes du
colloque
1972 sur
l'esclavage.,
p,
274.
Varro,
l,
17,
4
:
Animaduertant eum curo causa sibi
praeesse,
quod scientia praestet et
usu.
Col.,
1.
8,
4
:
Neque enim recte
opus exigere
ualet,
qui
quid aut
qua1iter
faciendum s i t a
subiecto discit.
79 -
Q.fr.,
III,
1,
5.
80 -
op,
c i t . ,
268.
Mais elle avait aussi
de
l'importance
dans
l'Antiquité,
comme
nous
l'avons
vu.
81
-
J.
Hellegouarch,
ibid.,
p.
251
82 -
Ibid.,
p.
253.
83 -
J.P.Martin,
Prouidentia deorum.
Aspects
religieux du
pouvoir
romain,
p,
50,
84 -
J.
Hellegouarch, QE~~, 248-249.
85 -
ibid.,
pp
174.
... / ...
-
185 -
86 -
J.P.Martin,
op,
c i t . ,
p,
58
87 -
III Tusc.,
VIII,
18.
88 -
Pro A.
Cluent.,
XVI,
47
;
Seruus non incallidus sed,
ut
ipsa res declarauit,
frugi
atque integer
sermonem Fabrici
non est espernatus
rem ad
dominum detulit.
89 -
Pro Cn,
Plane.,
XXV,
62 ;" Ut nos
in mancipiis
parandis
quamuis
frugi
hominem si
pro fabro
aut pro
tectore emimus,
ferre
moleste solemus si eas artis quas
in emendo secuti
sumus forte
nesciunt,
sin autem emimus quem uilicum impo-
neremus,
quem pecori praeficeremus,
nihil in eo nisi
fru-
galitatem,
laborem,
uigilantiam esse curamus.
90 -
"Cicéron et l'esclavage- in Actes du colloque d'Histoire
sociale,
p~ 90
91 -
L'attitude que Cicéron adopta à
l'égard de Chrysippus,
un
affranchi,
et dont nous
parlerons plus tard,
peut nous
amener à
penser la même chose de l'esclave.
92 -
Att.,
VII,
7,
1,
93 -
L'un de ceux-là est M.
Clavel-Levêque,
"Les relations
esclavagistes dans
l'idéologie et la pratique
politique
de Cicéron
;
leursreprésentations et
leur fonctionnement
d'après
la correspondance des années
50-49 av.
J-C",in
Texte,
Politique,
Idéologie
Cicéron,
PP.
247-249.
94 -
Ps.
Salluste,
In Cie.,
l ,
2 « An uero, M.Tulli, facta tua
ac dicta obscura sunt
? An non ita a
pueritia uixisti,
ut
nihil
flagitiosum cor pori
tuo
putares quod alicui ~olli
buisset
? Aut scilicet istam immoderatam eloquentiam
apud M.
... / ...
-
186 -
95 -
Le siècle des Scipions;
Rome
et
l'hellénisme au temps des
guerres Punigues,
P.S.
96 -
W.Warde Fow1er,
La
vie sociale à
Rome au
temps de Cicéron
P.
86.
97 -
Cato Maior,
II,
S,
98 -
P.
Wui11eumier,
Introduction à
Cato Maior,
P~ 16
9 9 - o p . ,
c i t . ,
P.
8
100 -
op.,
c i t . ,
P. 86
101
-
I1setrant Hadot,
"Tradition stoicienne et
idées
politiques
au
temps des Gracques"
in R.E.L.,
XLVIII,
1970,
P,
133,
102 -
Histoire
de
l'éducation
dans
l'antiguité
le monde
romain,
Pi 30
103 -
A.
Jean Voe1ke,
Les rapports avec autrui
dans
la
philoso-
phie grecque d'aristote à Panétius.
104 -
Pro Mur.,
XXIX,
61
105 -
"Défense de Cicéron" in R.H .• ,
1936,
P.
72;
106 -
l
Tusc.,
XVI,
39,
107 -
Brut. ,XXXI,
121,
108 -
II De ~.,
II,
4,
109 -
Inu.,
l ,
7,
110 -
l,
51,
111 -
II De 1eg,
II,
4,
... / ...
-
187 -
112 -
Fam.,
l,
7,
10,
:
Quod ego ad
te
breuius scribo,
gui
me status hic reipublicae non
delectat
;
scribo
tamen,
ut
te admineam,
quod
ipse
l i t t e r i s omnibus a
pueritia
deditus experiendo tamn magis
quam discendo cognoui.
113 -
~ l,
l,: Ego autem a patre ita eram deductus ad
Scaeuolam,
sumpta uirili
toga.
114 -
Brut.,
XC,
310
:
Idque
faciebam multum etiam Latine,
sed Graece saepius,
uel
quod Graeca oratio
pIura orna-
menta suppeditans consuetudinem similiter Latine
dicendi
afferebat,
uel
quod a Graecis
summis doctoribus.
115 -
Fam.,
XIII,
l,
2,
116 -
Brut,
LXXXIX,
309
:
Eram cum stoico Diodoto,
qui cum
habitauisset apud me Necumque
uixisset,
nuper est domi
mea mortuus.
117 - .2..E...
c i t . ,
p.
249.
118 -
II Tusc.,
XX,
47-48
:
Haec ut
imper et i l l i
parti animi
quae oboedire debet,
id uidendum est uiro
. . .
Vel ut
dominus seruo uel
ut
imperator militi uel
ut
parens filio.
119 -
Att.,
VI,
9,
1.
120 -
"Esclaves et affranchis dans
la correspondance de Cicéron
les relations esclavagistes" in Texte,
Politique,
Idéologie:
Cicéron,
p.
374.
121 -
"Contribution â
l'étude
de
l'esclavagisme:
la propriété
Chez Cicéron"
in Texte,
Politique,
Idéologie
Cicéron
p.
42.
... / ...
188 -
122 -
Parad Stioc,
II,
V,
143 :
In magna familia sunt alii
lautiores serui,
sed tamen serui,
atrienses ac topiaril.
123 -
Le travail dans le monde romain,
pp.
314-315.
124 -
ibid.
125 -
l
De off., XIII,
41
: Est infima condicio et fortuna
seruorum gui bus non male praecipiunt gui ita uibent
uti ut mercennariis
• operam exigendan,
iusta praebenda.
126 -
De l'empire romain à l'an Mil,
p.
34.
127 -
De frument,
LXXXIX,
207
128 -
op.
cit.,
p.
528.
129 -
Pro P. Quinet.,
XVI,
51
: Iugulare ciuem ne iure guidem
quisquam bonus uult,
mauult commemorari se,
cum posset
~erdere, pepercisse,
quam,
cum parcere potuerit,
perdidisse
Haec in homines aliennissimos,
denique in inimicissimos
uiri boni faciunt et hominum existimationis et communis
humanitatis causa,
ut,
cum ipsi nihil alteri scientes
incommodarint,
nihil ipsis iure incommodi cadere possit.
130 -
Att,
II,
9,
1.
131 -
In L. Pis.,
V,
I l
:
Pro Aurelio tribunali,
ne coniuente
quidem te (quod ipsum esset scelus),
sed etian hilariori-
bus oculis quam solitus eras intuente,
dilectus seruorum
habebatur ab eo qui nihil sibi umquam nec facere
nec
pati turpe esse duxit, Arma in templo castoris,
0
pro di-
tor templorum omnium •
.../ ...
-
189 -
132 -
ibid., X,
22
: Hic autem non tam concinnus he11uo nec
tam musicus iacebat in suorum Graecorum foetore atque
uino.
133 -
De Har,
resp.,
XII,
24
:
Ita ludos sos quorum re1igio
tanta est ut ex u1timis terris arcessita in hac urbe
quidem appe11antur Latino,
ut uocabu10 ipso et appetita
re1igio externa et Matris
•
•
Magnae nomine suscepta dec1aretur,
hos Iudos serui
fecerunt,
serui spectauerunt,
tota denique hoc aedi1e
seruorum Mega1esia fuerunt.
134 - Cicéron d'ailleurs en fut
lui-même victime, Voir
pp.
174-175.
135 -
Hist. Nat., XXXIII, VI,
9-10 rapporté par J. Schmidt:
Vie et mort des esclaves dans la Rome Antique,
p.
56.
136 -
Caton
De Agr., VII,
1~2.
137 -
Fam, XIII,
77,
3 : Praeterea a te peto in maiorem
modum pro nostra amicitia et pro tua perpetuo in me stu-
dio ut in hac re etiam e1abores
: Dionysius, seruus
meus,
qui meam bib1iothecam mu1torum numonorum tractauit,
cum mu1tos 1ibros surrupuisset nec se impune 1aturum
putaret, aufugit.
138 -
Att.,
l,
10,
4 : Bib1iothecam tuam caue cuiquam despondeaE
quamuis acrem amatorem inueneris
;
nam ego omnis meas
uindenio1as eo reseruo ut i11ud subsidium senectuti
parem.
ibid.,
II,
6;
1,
...
Itaque aut 1ibris me de1ecto,
quorum habeo Anti festiuam copian.
139 -
Ibid..!..,
l,
10, 4.
140 -
R. Cagnat - V.
Chapot, Manuel d'Archéologie romaine
TI,
p.
246.
... / ...
190 -
141
-
l
De off.,XXVI,
90.
142 -
Tacite et
l'étude du comportement collectif,
p.
327.
143 -
Q.
fr.,
l,
2,
2.
144 -
Fam.,
XVI,
16,
1-2.
145 -
Cicéron ne
parle
pratiquement
pas de
l'autorité morale
de son
père.
Par
contre sur sa mère Helvia,
nous avons
une
indication claire quant à
son esprit
rigoriste.
Elle
veillait avec
vigilance,
comme le confirme
P.
Grimal,
sur
les dépenses
de
la maisonnée.
Elle
faisait
également
cacheter
les cruches à
vin dont
le contenu
avait
été
bu,
afin
que
l'on
ne
pat en
vider
quelques-
unes à son
insu.
Cicéron,
p.
29.
146 -
Essai
sur la
pensée morale de Salluste à
la
lumière
de ses
prologues,
p.
135.
147 -
Parad.,
II,
V,
141
:
An ille mihiliber,
cui mulier
imperat
? cui
leges
imponit
praescribit,
iubet,
uetat,
quod
uidetur
? qui
nihil
imperanti negare
potest,
nihil
recusare audet
? Poscit
? dandum est
:
uocat
? ueniendum
eiicit ? abeundum :
minatur
? extimescendum. Ego uero
istum non modo seruum,
sed
nequissimum seruum,
etiam si
in amp1issima familia
natus
s i t ,
appe1landum puto.
148 -
Q.
fr.,
l,
2 , 3 .
149 -
op.
cit.,p.
279 .
.../ ...
-
191 -
150 - Lire à ce prppos J.
Carcopino,
Les secrets de la
correspondance de Cicéron,
pp.
237-239.
151 -
Att.,
V,
1,
3.
152 -
Fam.,
XVI,
15,
2.
153 -
Pro Milon,
IX,
26 : Seroos agrestes et barbaros,
guibus
siluas publicas depopulatus erat Etruriamgue uexerat,
ex Appennino deduxerat.
154 -
II Tusc.,
XVII,
41
: Mittunt etiam uolneribus confecti
ad dominos qui quaerant guid uelint
: si satis iis factum
sit,
se uelle decumbere.
Quis mediocris gladiator inge-
nuit,
guis uultum mutauit umquam ? quis non modo stetit,
uerum etiam decubuit turpiter
? quis, cum decubuisset,
ferrum recipe~e iussus collum contraxit.
155 -
Q.
fr.,
III,
1,
21.
156 -
La Rome anciennne
753 av.
J.C.
-
395 ap.
J.C.,
pp.
162-163.
157 -
Correspondance, T.
III,
p.
32.
158 -
Fa!!!.-.,
XV,
17,
1 : Praesposteros habes tabellarios;
etsi me guidem non offendunt
; sed tamen,
cum a me
discedunt flagitant
litteras,
cum ad me ueniunt nullas
adferunt
! Atgue id ipsum facerent
commodius,
si mihi
aliquid spatii,
ad scribendum darent
i
sed petasati
ueniunt,
comites ad portam exspectare dicunt.
159 -
Les esclaves en Grèce anciennne,
p.
212 •
.../ ...
-
192 -
160 -
Qo
fro,
l,
2,
14
:
Tu,
quoquo modo est,
quoniam Ephesi
est,
hominem inuestiges uelim summaque
diligentia uel
tecum deducas,
Noli spectare
quanti
homodit
i
paruienim
pretii est,
gui
iam n~hil sit,
Sed
tanto dolore
Aesopus
est affectus
propter
serui
scelus et audaciam ut
nihil
ei
gratius facere
possis quam si
ilIum per
te
recuperarit.
161
-
Moses
lo
Finley,
Esclavage antique et idéologie moderne
p.
1480
162 -
De Agro,
VI~, 1-2 : Litibus familia supersedeàt
000
Familiae male
ne s i t ,
ne algeat,
ne esuriat
i
opere
bene
exerceat
. . .
Dominus
. . .
pro
beneficio gratiam referat
ut aliis
recte facere
libeat.
163 -
Pol.,IV,
3.
164 -
A.
Daubiguey,
opo
cito,
p.
42.
165 -
Nous en
parlerons
prochainement.
166 -
Diodore
de Sicile,
V,
38 rapporté
par A.
Jean Voelke
op.
c i t . ,
p.
148.
167 -
Fam.,
V,
9,
2
:
Dicitur mihi
tuus seruus anagnostes
fugitiuus
cum Vardaeis esse
i
de
quo
tu mihi
nihil man-
dasti
i
ego
tamen
terra marique
ut
conquireretur
praemen-'
daui et
profecto tibi
ilIum reperia~nisi in Delmatiam
aufugerit,
et
inde tamen aliquando eruam.
168 -
De con.
eat.,
IX,
630
... / ...
-
193 -
169 -
II De
leg.,
XXV,
62
:
Gaudeo nostra
iura ad
naturam
accomodari,
maiorumque sapientia admodum delector.
170 -
l , Tusc.,
l,
2.
171 -
Cicéron et l'histoire romaine,
p.
109.
172 -
M. Meslin,
l'homme romain des
origines au Iè s.
de
notre ère,
p.
26.
173 -
II De Rep.,
XI,
95.
174 -
La cité antique,
p.
265.
175 -
Cato maior,
XI,
37.
176 -
id.
177 -
Pro reg,
Deiot.,
l,
3
Fugitiui autem dominum accu-
santis ..•
178 -
Ibid.,XI,
30
:
Seruum sollicitare uerbis,
spe promisisque
corrumpere abducere
domum,
contra dominum armare,
hoc
est non
uni
propinquo,
sed omnibus familiis
nefarium
bellum indicare.
Nam ista corruptela serui si non modo
impuni ta
fuerit,
sed etiam a
tanta auctoritate adprogata,
nulli parietes nostram salutem,
nullae
leges,
nulla iura
custodient.
Ubi enim id quod
intus est atque nostrum
impune euolare potest contraque nos
pugnare,
fit
in
dominatu seruitus z in seruitute dominatus.
179 -
ibid.,
XI,
31.
... / ...
194 -
180 -
Ibid.,
Cn.
Domitius ille,
guem nos
pueri consulem,
censorum,
pontificem maximum uidimus,
cum tribunus
plebis M.
Scaurum,
principem ciuitatis,
in iudicium
populi
uocauisset,
Scaurique seruus ad
eum clam domum
uenisset,
et crimina
in dominum delaturum se esse
dixisset
:
preendi hominem iussit ad
Scaurumque deduci.
181 -
p.
195.
182 -
"Cicéron et
l'esclavage"
in Actes du
colloque d'Histoire
sociale,
p.
88.
183 -
op.
c i t . ,
184 -
"Défense de Cicéron"
in R.H.,
1936,
p.
66 sqq.
185 -
Fam.,
XIII,
77,
3.
186 -
Att.,
II,
8,
1
:
Epistulae cum a
te auide expectarem
ad
uesperum,
ut soleo,
ecce tibi
nuntius
pueros uenisse
Roma
! Voco,
quaero ecquid litterarum -
Negant
"Quid
ais
?" inquam "nihil ne a Pomponio ?" Perterriti uoce
et uultu confessi sunt se accepisse,
sed excidisse in
uia.
Quid
quabis
? Permoleste tuli.
187 -
Att.,
l ,
10,
4.
188-ibid.,
189 -
op.
c i t . ,
p.
246.
190 -
Ce ne sont
pas
les
cas de
trahison des
maîtres par
leurs esclaves,
qui
manquent à
la fin de
la République.
Cf.
N.
Rouland,
Les esclaves romains en temps
de guerre
p.
22
sq.
... / ...
195 -
191 -
Q. fr., I, 1, 15.
192 -
Att.,
VII,
2,
9.
193 -
l
De Leg.,
X,
30.
-
196 -
CHAPITRE
II
LES ESCLAVES,
V 1CT 1 JŒS DE LA VI OLE.J1CE
-=-=-=-:-=-=-=-=-
Expressi on
de
la
Rome
fini ssante.
de
l'Urbs
chance lante.
la
violence
nous
venons
de
le
voir
a
énormément
été
mise
en
pratique
par
les
esclaves,
soit
de
leur
gré,
s o i t
pour
répondre
aux
injonctions
des
domini.
Son
explosion
a
a t t e i n t
même
une
t e l l e
dim;-nsion,
q u ' i l
est
devenu
pre:=.que
rare
de
ne
pas
les
voir
figurer
parmi
les
accusés
d'un
forfait,
à
l ' i n s t a r de cette affaire que
nous rapporte Cicéron:
((. ..
Comme i l ) ' a l'ai t
eu un massacre dans 1 a
forêt
de
Sila,
que
des
personnes
connues
avaient été
tuées,
qu'on accusait
non seule-
ment
les esclaves de
la.
société fermière
qui
tenait
des
censeurs
Publius
Cornelius
et
Lucius Xe~~ius l'entreprise de la poix,
mais
aussi
une ~rtie du personnel
libre de cette
soc i été .. . .t.t
(1)
Mais
à
la
fin
de
la
République,
les
esclaves
ne
commettent
pas
uniquement
les
actes
de
violence.
I l s
en
font
aussi
les
frais.
Une
situation
à
l'explosion
de
laquelle
i l s
ont
oeuvré,
se
retourne
contre
eux
et
les
broie.
La
vengeance
pri\\Tée
qui
n'est
pas
tolérée
dans
la
société
(2),
cède
la
place
à
d'autres
types
de
brutalité
sous
lesquels
tombe.nt
les
servi. Dressée
contre
les
ci toyens
pervers
et
d'autres
fauteurs
de
trouble,
Rome}par
le
biais
de
sa
législation,
ne
les
épargne
pas
non
pl us.
D'un
Côté
comme
de
l'autre,
i l s
sont
donc
la
proie
d'une
conj oncture
extrêmement
rigoureu::3e
d'où
i l
est
d i f f i c i l e
d'échapper,
à
moins
de
ne
pas
y
prendre
part.
Comment
se
présente
dirons-nous
cette
conjoncture
à
double
f a c e t t e ?
C01!llIl€nt
se
manifeste
t - e l l e
?
Dans
quelles
circonstances
les
esclaves
succombent-ils
à
-
197 -
cette
violence
7
C'est
à
cette
série
de
questions
que
nous
allons
tenter
de
répondre.
Une
te Ile
tentat i 'Ile,
nécessi te
que
l'on
les
suive
dans
leur
quotidienneté
au
cours
de
laquelle,
seuls
ou
englués
dans
la
messe
d'autres
compagnons
d'infortune,
mais
d'un
s t a t u t
socio-juridique
parfois
différent
du
leur
( 3 ) ,
i l s
sillonnent
Rome
et
ses
en\\ri rons,
cherchant
à
répondre
posi t i veroent
aux
voeux
de
leurs
cOIIlID3.nditaires,
brandissani;
parfois
leur
beneuolentia,
leur
brauitas et
leur
f i d e l i t a s
:
Quod
enim
praeJJ1.iuJJl
5:a.tis
DP-1gnVIJl
e s t
tam
beniuolis,
tam
bonis,
ta..m
fidelibus
seruis,
prvpter quDS uiuit ? (4)
L'autre
démarche
consiste
à
scruter
dans
les
pratiques
quotidiennes
des
liberi,
pour
tenter
de
débusquer
certaines
des
attitudes
tournées
vers
la
violence
contre
les
esclaves.
Enf i n,
notre
i ntrospect ion
du
monde
romai n
nous
amènera
à
interroger
la
jurisprudence
à
la
fin
de
la
République
et
de
voir
où
se
situent
les
e~3claves dans
le
flot
des
mesures
rigoristes prises à
l'encontre des
fauteurs de
trouble.
A - La violence «matérielle»
Cette
dénomination
a
été
retenue,
pour
qualifier
la
forme
de
violence
la
plus
cour-ante
à
Rome
celle
pratiquée
à
l ' a i d e
d'instruments
de
guerre
le
glaive,
le
bouclier
et
d'autres
(ncore
pouvant
entraî ner
la
mort
pierres,
bâtons
Ce
sont
eux
qu i
servent
de
sous
mai n
aux
affrontements
sanglants
qui
se
déroulent
à
l ' i n t é r i e u r
des
moenia
de
l'lJrbs.
Si
les
hommes
libres
ont
le
quasi
monopole
du
glaive
et
du
boucl ier,
par
contre
les
esclaves
recourent
le
plus
souvent
au
second
type
d'armes,
l ' u t i l i s a n t
facilement,
car
placé
à
leur
portée
et
doté
aussi
d'une
réelle
efficélcité.
Il
est
d'autres
instruments
plus
virulents
encorf7, que les
Eoma.ine
prennent
du
p l a i s i r
à
u t i l i s e r
al lè:è,Ternent ,
~,ans
courir
ici
le
moindre
risque
d ' ê t r e
repérés
aussitôt
le
-
198 -
ueneficium.
Deux
types
d'ustensiles
parallèles
donc,
qui
font
des
\\rictimes
parmi
les esclaves.
1 -
Les batailles rangées
En
abordant
cette
question,
la
première
impression
que
l'on
pourrait
avoir,
est
celle
de
la
permanence
de
«corps
à
corps.l.!
entre
individus
ou
bandes
armées,
dirigés
par
des
chefs
militaires
aiguillonnés
par
le
seul
souci
de
vaincre
l'ennemi.
En
réal i té,
i l
n'en
est
pas
ai nsi.
Certes,
en
suivant
le
déchaînement
de
toutes
les
copiae
et
autres
exercitus
levées
par
les
citoyens
qui
s'affrontent
presque
quot i diennement
dans
l es
di f f ér-ents
poi nts
chauds
de
Rome
le
forum,
le
Palatin
surtout
nous
pourrions
céder
à
la
te nt a t ion
d'a bo ut i r
à
cet t e e 0 n c lus ion,
d ' en té r i ne r
la
s i mi l i tude
de
Rome
avec
un
champ
de
guerre
Où
la
vie
des
hommes
se
trouve
placée
au
bout
du
gladiuJJl
et
où
le
sort
de
chacune
des
personnalités
qui
t i r e
les
f i c e l l e s
de
ces
groupes,
tient
à
sa
garde
rapprochée,
comme
nOU~3 pouvons
le
voir
à
travers
la
<<1e\\rée
de
boucliers.!.t
entre
les
hommes
de
Clodius et
ceux de Cicéron
Ante
diem
tertium
Idus Nouembres,
cum sacra
uia
descenderem,
insectus
est
me
cum
suis.
Clamor,
lapides,
fustes,
gladl i,
et
haec
iNprouisa
onmia.
Discessi
in
uestibulum
Tetti
Da.l1Iionis.
Qui
erant
IlleCUl1!f
facile
operas
aditu
prohi buerunt.
Ipse
occldi
potuit,
sed
erga
diaeta
curare
incipio,
chirurgiae taedet
(5)
Mais
ce
n'est
là
qu'une
escarmouche,
même
si
au
centre
de
celle-ci,
Cicéron
tient
à
préciser
l ' o u t i l l a g e
de
l ' ad.versa i re.
Un
out i llage
qu i
tend. à
montrer
le
caractère
801dates'.=J.ue
des
honmles
de
Clodius
et
de
ce
fai t ,
l'ampleur
du
danger
qui
l ' a
guetté
et
auquel
i l
a
échappé.
De
même,
quand
dans
une
l e t t r e
écrite
à
la
même
période
que
celle
-
199 -
portée
ci-dessus
56
av.
J. -Co
i l
parle
des
i ntent ions
de
Clodius
en
insistant
sur
le
CGledere
inimicos
(6),
son
intention
consiste
à
présenter
l ' é t a t
de
siège
de
l'Urbs
et
l'incessante
insécurité
planant
sur
les
boni,
principale
ci ble.
Grosso
modo
les
bandes
armées
qui
infestent
Rome,
ne
se
livrent
pas
entre
e l l e s
à
des
duels
sanglants.
En
général,
elles
s'épient,
se
suivent
et
ne
s'élancent
que
vers
un
endroit
«désert»
oG
e l l e s sont
assurées de
ne
pas se
heurter
à
une
force
ennemie.
La
meilleure
démonstration
réside
dans
l ' occupat ion
du
champ
de
Mars
par
des
hommes
de
Milon,
la
veille
des
élections
de
Clodius
à
l ' é d i l i t é .
Présents
toute
la
nui t ,
i l s
ne
se
font
guère
attaquer
par
les
copiae
de
Clodius
pourtant
stationnées
non
loin
de
cet
endroit
:
Ante
diem
XII
K.
Dec.
Kilo
ante
DJediam
noctem
CUl1l
manu
Eil!:llfna
in
campuJ1l
ueni t.
Clodius,
CUJ1l
haberet
fugitiuoruJ1l
delectas
copias,
in
Cn.IRJ?UJZl
i r e
non
es"t
ausus.
]010
perD:if1nsit
ad
),~ridie.1Jl
11drifica
ho.minum
laetitia,
su~ CUJ1l gloria
(7)
De
toute
façon,
même
s i
batai l l e s
rangées
i l
Y avai t
eu
à
un
moment
ou
à
un
autre
entre
diverses
factions,
i l
n'eût
pas
été
évident
de
retrouver
de
preuve
permettant
d'indiquer que
t e l l e
et
t e l l e
victimes
étaient
bel
et
bien
esclaves,
à
moins d ' é t a b l i r
une classification spécifique!
(8)
Cette
spécificité
se
retrouve
par
a i l l e u r s
dans
certains
ouvrages
de
l'Arpinate
le
Pro
Tullio
et
le
Pro
JUIone.
Discours
prononcés
entre
74
et
70
av.
J.-C.
pour
le
premier,
en
52
pour
le
second,
i l s
ne
l-eprésentent
qu'une
minorité,
une
({goutte
d·ee,u .... ,
en
comparaison
avec
tout
le
lot
laissé
par
Cicéron.
En
d'autres
termes,
i l s
ne
représentent
pratiquement
rien,
face
à
la
buissonnante
oeuvre
qu' i l
nous
a
léguée.
Pourtant,
ce
sont
eux
qui
dans: otre
propos,
sont
éclairants.
A
eux
deux,
i l s
pr-ésentent
l'énorme
avantage
de
nous
transporter
sur
les
champs
d'affrontement
des
esclaves,
-
200 -
de
les
y
dépister
et
de
les
suivre
jusqu'à
l'expiration
de
certains
d'entre
eux.
Ils
nous
donnent
en
définitive,
la
possibilité
de
voir
nettement
s'ouvrir
un
champ
quasiment
clos,
où
s'affrontent
les
esclaves
entr-e
eux,
l'interférence
des
l i b e r i
se
situant
uniquement
au
niveau
de
la
direction
des opérations.
La
singularité
de
ces
deux
ouvre-ges,
tient
à
la
similitude
de
leur
contenu.
Cette
similitude.
repose
d'a bo r d
sur
le
lieu,
le
cadre
choisi
comme
théâtre
idéal
au
déroulement
des
manifestations
b e l l i c i s t e s
la
campagne,
avec
ses
champs
incultes
s'étendant
à
perte
de
vue,
milieux
sinistres,
endroits de
prédilection pour toutes
les atrocités
«Les
terrains
étaient
incultes,
toutes
les
11J8.isons a~raient été incendiées))
(9)
di t
Cicéron
à
propos
du
fundus
de
Fabi us,
l'antagoniste
de
Tullius son
client.
Ce
fundus se
prête
tellement
à
des
actes
de
brigandage,
s'adapte
tellement
aux
velléités
b e l l i c i s t e s
des
serui
et
à
leurs
impulsions
guerrières,
que
s ' y
produisirent
souvent
des
f a i t s
pour
le
moins
inhumains.
La
description de
Cicéron,
en est
la preuve
« . . .
A peu
de
temps de
li!,
i l s
tuèrent
deux
hoI!1.'1Je S
qui
appartenaient
à
Q.
Catius
Aemi 1 ianus,
homme
honoréb1 e
que
connaissez
i l s
cOIflmi ren t
bien
d'autres
.'fleurtres
;
i l s
\\raga bondai ent
çà
et
1 i!,
en
arIlleS
i l s
ne
se
cachaient
pas
En
un
mot,
i l s
i !"lfesta i en t
les
c5.J»pagnes
et
1 es
routes))
(10)
Dans
le
Pro
Kilone
à
quelques
variante'3
près,
se
retrouvent
les
mêmes
t r a i t s ,
le
même
paysage
propice
à
une
Qffensive
le
lieu
o~ se
prodUit
la
bataille
entre
Kiloniens et
Clodius
est
dominant
a
proximité
d'une
auberge
(11),
sur
la
uia
-
201 -
Appia.
cachette
et
repai re
de
brigands
( 2 ) ,
adapté
à
une
attaque
surprise
<t'Considérons
maintenent
le
point
capital.
Auquel
des deux ed~rerseires en
fin
de
compte
le
terrain
même
où
i l s
en
sont
venus
eux
mains
était-il
le
plus
favorable
?
Est-ce
de~rant
un
domaine
de
Clodius
où
pour
les
soubassements
extravagants
qu'il
y
faisait
établir,
l'adversaire
occupait
un
lieu
dominant et élevé ?I.t (13)
La
deuxième
similitude
tient
à
la
nature
des
antagonistes.
au
type
d'esclaves
engagés.
Les
belligérants
sont
choisis
selon
leurs
capacités
physiques
et
sans
doute
leurs
expériences,
COlnIDe
le
faisaient
d'ordinaire
les
populares
pour
la
composition
de
leurs
troupes
serviles
et
extra
serviles
(14),
en
fonction
de
leur
aptitude
à
effrayer
puis
à
terrasser
l'adversaire.
Cela
veut
dire
que
les
plus
faibles
sont
mis
à
l ' é c a r t .
réservés
à
des
tâches d'un autre
ordre.
Alors
que
Clodius
u t i l i s e
des
{{hommes
vigoureux....
(15).
Fabius.
lui.
va
plus
l o i n :
<t'CIl)
amène
dens
le
~turage
des
bommes
qu'il
a
choisis d'un
grand
courage
et
d'une
grande
\\rigueur
;
i l
les
équipe
d'armes
que
chacun
peut
bien
avoir
en
ma.ins
et
qui
convi ennent aux forces de chacun d' eux.V
(16)
Et
enfi n
quand
éc latent
les
batai l l e s
rangées
proprement
dites.
à
la
faveur
de
la
nuit,
elles
sont
terriblement
mortelles.
Décidés
à
se
dépa.sser,
les
uns
et
les
autres
des
combattants
déploient
toute
leur
énergie
et
ne
se
font
pas
de
quartier.
Seule
les
anime.
l'envie
de
s o r t i r
vainqueurs
et
de
faire
place
nette
chez
l'ennemi.
Toute
la
rancune
accumulée
pal-
le
maî tre
trouve
alors
l'occasion
de
s'expriDr et
de s'assouvir sur
l'adversaire
-
202 -
({La
nui t
sui vante,
vers
les
i~.pproches
du
Jour,
les
esclaves
de
Fabius
se
rendent
en
nombre
et
ar.'!1és
\\rers
ce
b8timent
dont
j'ai
parlé
et
qui
s'élevait
sur
la
pièce
de
le.
terre
dite
Populiane..
L'entrée,
i l s
se
l 'OLnrrent
p8.r
la
force,
à
ll18.in
armée
les
escla\\res
de
.1lf.
Tullius,
des
hOI!LTJles
qui
\\~l8.ient beaucouR d'e.rgent i l s les attaquent
éi
l'impro\\riste
i l
ne
leur
fut
p8.s
difficile,
à
eux qui
étaient nombreux,
armés
et
équipés,
de
tuer
ces
escla \\Tes
qui
n'étaient
pas
en
8.ussi
grand
nombre
et
qui
n'opposaient
pas
de
résistance.
Et
i l s
firent
preinre d'une
telle haine,
d'une
telle
cruauté
qu'ils
les
laissèrent
tous
la
gorge
tranchée
i l s
craignaient,
s'11s
en
lais-
s8.ient
un
seul
à
demi-\\ri\\rant
et
respirant
encore,
que
leur
expédition
ne
f î t
moins
d'honneur . ...1,1
(17)
Le
terme
de
caedes
que
l'Arpinate
introduit
dans
son
récit,
traduit
largement
l'ampleur
des
dégâts,
l'extrême
férocité
des
esclaves
de
Fabius
et
à
la
limite,
leur
inhumanité.
Mais
i l
dévoile
un
f a i t
à
tout
le
moins
curieux
l'absence
de
sympathie
des
gE:ns
d'une
même
condition,
parallèlement
à
celle
qui
s ' e s t
étoffée
chez
les
esclaves
de
Sicile
et
d ' I t a l i e
du
Sud,
l'oubli,
la
minorisation
du
sort
COIDJllUn
devant
l ' i ncérêt
du
domi nus.
Entre
eux,
se
faisant
face,
les
esclaves
oublient
la
condition
d ' i n f é r i o r i t é
dans
laquelle
i l s
baignent,
véritable
boulet
auquel
i l s
sont
l i é s
et
perdent
ce
qui
ôurait
pu
être
leur
commune
identité,
au
profit
des
voeux
du
maître.
La
combativité
visible
à
travers
l'engagement
de::;
esclaves
de
Clodius
et
de
Milon,
en
est
un
élément d'appréciation:
.'<Les
,gens
de
Clodius
s'élancent
l'epee
au
clair,
les
uns
re\\riennent
en
cour8nt
éi
18
Foiture
pour
prendre
lfilon
de
dos,
les
-
203 -
8utres,
croyant
qu'il
déJè
été
tué,
tombent
sur
les
esclél.\\'es
qui
étél.ient
en
arrière.
Parmi
ceu.....·-ci,
qui
firent
preuve de
fidélité
à
l'égard
de
leur
l'!J8.ître,
et
de
résolution,
plusieurs furent
tuéS.l'
(18)
2 -
L'esclave,
objet d'expérimentation
L' usage
des
êtres
humai ns
pour
des
procédés
d'expérimentation,
ne
remonte
pas
à
quelques
siècles.
Ce
n'est
pas
parmi
les
pratiques
Nscientifiques»,
une
nouveauté,
même
si
dans
la
première
moitié
du
XXème
siècle,
certains
esprits,
imbus
d'humanitarisme
véhiculé
par
les
idéologies
qui
ont
déferlé
sur
nos
sociétés,
se
sont
plaint
de
la
banalité
avec
laquelle
les
Nazis
plus
particulièremen~
recouraient
à
cet
emploi.
De
plus
en
plus
pratiqué
par
les
savants,
l'usage
de
l ' ê t r e
humain
en
vue
de
l'expéri-
mentation,
ne
choque
presque
plus.
Il
y
a
comme
dans
nos
esprits,
une
tendance
à
n'y
voir
qu'une
simple
méthode
scientifique
comme
les
autres,
nécessaire
au
progrès
médical.
Nécessité
absolue
conditionnant
l'adoption
puis
la
diffusion
d'un
produit fV.- d'une
technique
nouvelle,
l'expérimentation
offre
la
garantie
de
mesurer
son
degré
d'efficacité,
d'en
étudier
l'étendue
et
les
limites.
Cela
permet
de
se
mettre à
l'abri
des
surprises
désagréables
et
de
se
limiter
aux
objectifs
escomptés.
Ainsi,
en
y
regardant
de
près,
entre
notre
mentalité
de
modernes
christianisés
et
celle
des
Romains
de
la
fin
de
la
Répub~ique
,'ustoïcisés.\\',
le
hiatus
n'est
pas
étanche
en
ce
qui
concerne
la
nature
m:~roe
du
cobaye
les
scientifiques
actuels
font
appel
aux
cadavres
pour
leurs
expérimentations,
pendant
que
les
Romains
en
épargnent
les
l i beri.
Seuls
les
escla\\'es
sont
en
quelque
exemple,
ne semble en éprouver aucun choc
- 204 -
(,'Pour
le
poison
d'dutre
part,
quelle
explicdtion
in~rente
t-on
?
Où
se
l'est-on
procuré
?
Comment
l ' {3
t-on préparé
.;>
Comment
a
t - i l
été
remis?
.4
g u i ?
Où?
C8.elius
l'a~rait cbez lui
dit-on,
et
i l
en .~~rait fait
l'essai
sur
un
escla~re
acheté
à
cette
intention,
dont
la
mort
très
~riolente
d
proLQré ld
,rirulence du poison),l
(19)
La
façon
anodi ne
dont
l ' Arpi nate
présente
ce
fai t,
prouve
éloquemment
la
vulgarisation
du
procédé
procédé
qui
va
de
pair
avec
l'universalisation
du
poison
comme
arme
de
violence
extrêmement
efficace
et
redoutable
extrêmement
avantageuse
aussi,
pu isque
contra i rement
au
glai ve
ou
aux
pierres
dont
i l
est
difficile
de
contrôler
la
portée,
le
ueneficium
est
soumis
à
la
volonté
de
celui
qui
l ' u t i l i s e , '
Il
se
lIlDdule
suivant
l ' e f f e t
escompté.
Les
esclaves
se
trouvent
alors
transportés
et
placés
au
centl-e
des
co~binaisons
mortuaires
opérées
par
les
libres,
dans
la
«déci ma. ti on))
de
leurs
pairs.
Ils
S,?
trouvent
entièrement
intégrés
dans
un
système
qu'ils
ne
contrôlent
pas
et
qu'ils
subissent
au
contraire,
puisque
formant
le
premier
relais
vers
la
«111Ort
finale).l,
celle
souhaitée.
L'Arpinate
ne
nous
en
dévoile
qu'un
cas,
mais
i l
va
sans
dire
que
beaucoup
d'autres
ont
dû
jalonner
la
quotidienneté
de
l'Urbs
(20).
Cette
mise
à
mort
d'une
femme,
commandi tée
par
son
époux,
peut
nous
apparaî tre
comme
un
indicateur
sérieux
de
moeurs
de
la fin de
la République:
«C'est
lui
(oppianicus)
qui
dVdit
donné
1ui-
même
à
sa
femme
Cluentia,
tante
de
notre
Habitus,
une
coupe
qU.Jjnd
elle,
en
train
de
boire,
cria
qu'elle
mourait
dans
des
souffrances
atroces
sa
vie
s'arrêt.s.
.s.vec
ses paroles,
car
elle
mourut
dl..'
milieu
JJJème
de
ces propos et de ces clameurs.
S'ajoutant
à
cette
mort
si
soudaine
et
à
ces
cris,
d'une
mourante,
i l
y
eut
de
surcroît
sur le
-
205 -
céfcla vre
tous
1 es
sympt3111es
et
l es
signes
ha bi t uel s
d'un empoi sonne:men t,lI
(21)
Il
en
est
d'ailleurs
de
même
pour
ces
femmes
qui
tout
au
long
d.e
l'histoire
de
Rome
se
sont
fait
remarquer
par
leur
ardeur
et
leur
ingéniosité
dans
la
préparation
de
ueneficia
à
leur
portée,
pour
asseoir
leurs
desseins
macabres.
Ainsi
Agri ppi ne
l l,
pare nte
de
Claude
et
épouse
de
ce lui -c i
(22),
n'hésita
pas
à
le
faire
empoisonner
pour
confier
l'empire
à
son f i l s
(23).
Valère
Ytaxime
nous
apprend
que
({Pub1icie,
qui
empoisDnna
le
consul
.4lbinus
son
époux,
et
Licinie
qui
cOlIJJJ1it
le
même
crime
sur
la
personne
de
son
mari,
furent
étranglées
par
ordre de
leurs parents))
(24)
Une
telle
banalisation du
crime
ne
peut
pas aller
sans
la connaissance
du
dosage
des poisons
et
des
antidotes
(25),
mais
surtout
sans
la
systématisation
d'objets
d'expérimentation
et
donc;
d'esclaves.
Les
deux
({phénomènes),t
vont
de
pair
et
se
coudoient.
Entre
eux,
s ' e s t
établie
une
symétrie
qui
ne
pourrait
s'estomper
qu'avec
l ' a r r ê t
du
recours
au
ueneficium.
Après
les
batailles
rangées,
la
réduction
d'esclaves
en
cobayes
constitue
donc
la
deuxième
forme
de
violence
qui
s'abat
sur
eux.
Elle
précède
une
autre
la
troisième
que
Cicéron
aborde
allusivement,
mais
qui
a
sans
doute
dû
se
produire
aU:3si
régu 1 ièrement.
3 -
L'esclave,
«bouc émis~i~~» Ge l'inuidia ? envers
ses maîtres
Si
jusqu'à
présent
i l
a
toujours
été
question
d'esclaves
d'un
seu l
mai tre,
le
cas
présent
nous
met
en
présence
d'une
réalité
peut-être
pas
très courante,
IDa-is ayant
tout
de
mème
existé
à
Rome
l ' assujettis:3ement
du
seruus à
deux
domini.
Preuve
singulière
du
déchirement
de
l'esclave
et
de
sa
dépersonnalisation,
de
sa
confiscation
par
d'autres
individus
soucieux
uniquement
de
t i r e r
le
plus
large
profit
-
206 -
possible
de
ses
capacités
virtuelles
et
de
ses
qualités
intrinséques,
cette
pratique
avait
surtout
cours
pour
tous
ceux
dont
les
aptitudes
réelles
étaient
capitalisables.
Elle
écarte
donc
systématiquement
les
frustes,
le:3
grossiers,
dont
la
seule
force
réside
au
niveau
du
physique,
laissant
le
monopole
de
la
double
appartenance
s i
l'on
ose
dire,
à
ceux
dont
l'essentiel
de
la
puissance
se
situe
dans
l ' i n t e l l e c t .
Panurgus,
l'esclave
dont
i l
est
question
dans
ce
propos,
fait
partie
de
ces
serui
prisés,
recherchés
puisque
facilement
pourvoyeurs de
ress,ources
:
((Puisque
S'aturius
a
insisté
quelque
temps
sur
cette
quest ion))
lance
Cicéron,
((il
est
nécessaire
que
moi
aussi
je
m'y arrête
un
peu.
Toi,
Sa t uri us,
tu
dis
que
Panurgus
était
la
propriété
de
Fannius.
Nais
moi,
je
soutiens
qu'il
appartenait
tout
entier
à
Roscius.
En
effet,
que
possédait
Fannius
?
Le
corps
de
Panurgus.
Que
possédai t
Rosel us
?
L'instruction reçue par Panurgus.
Ce n'est
pas
l ' extéri eur
de
l ' homme,
c'est
l'art
du
comédien
qui
a\\rait
un
grand
prix.
Ce
qui
dans
Panurgus
appartenai t
à
Roscius
\\rala1 t
plus
de
cent
cinquante
mi lle
sesterces.
Ce
n'est
pas
le
buste
de
Panurgus
que
l'on
consi dérai t,
c'est
son
ha bi 1 e té
dans
l'art
du
comédien
que
l'on
esti mai t.
Par
eux-
mêmes,
ses
melIJbres ne
pOLnredent
g8gner plus
de
douze
as
l'instruction
qui
lui
8\\Tait
été
donnée
p8r
Rosei us
ne
se
1 oU81 t
pas
l110ins de cent mille sesterces))
(26)
On
le
voit,
et
Cicéron
le
précise
avec
insistance
Fanurgus
est
un
comédien,
dont
les
talents
indéniables
sont
allègrement
exploités
par
se:3
maître:3
Fannius
et
Roscius.
Il
constitue
le
capital
d'une
société
t r è s
flori:3sante,
avec
pour
activité
principale,
la
distraction
de
la
population,
tout
comme
le
fut
d ' a i l l e u r s
l'un
de
ses
maîtres
Roscius.
-
207 -
Fl i ne
l'Ancien
nOU'3
ô.pprend
à
son
sujet
que
parmi
les
serui
l es
pl us
cotés
et
les
plus
{(coûteux....
de
son
époque.
«i 1
OCCup3.it
UDe
place
de
choix
par
le
g8.i n
annuel
de
ses
spectacles
500
mille
sesterces....
(27).
Or,
Panurgus
meurt
un
jour,
rompant
ainsi
la
communauté
établie
autour
de
lui
et
faisant
s ' e f f r i t e r
tout
le
marchandage
monté
sur
sa
personne
:
«Quelles furent
les suites de
tout
cela? Ce
Panurgus
di t
Fanni us
cet
esc1a ve
que
nous
possédions
en
CO~Tun,
un
certain
Q.
F1a\\rius de
Tarquinies l'a
tué.!1
(28)
Pourquoi
?
Nous
ne
le
saurons
pas.
Les
sources
gardent
un
mutisme
complet.
Elles
ne
nous
dévoilent
ni
les
circonstances
du
meurtre,
ni
la
raison
essentielle.
Elles
occultent
ce
faisant,
le
point
de
départ
du
procès,
l'origine
de
la
plaidoierie
cicéronienne
en
faveur
de
Quintus
Roscius
et
axent
le
débat
sur
un
autre
sujet
qui
occupe
la
quasi
intégralité
du
discours.
En
qualifiant
Quintus
Flavius
le
meurtrier
de
quidam,
l'on
a
même
l'impression
de
voir
en
l'Arpinate
quelqu'un
de
trè'3
peu
intéressé
par
les
tenants
du
crime,
d'autant
plus
que
Flavius s ' é t a i t
dédouané
aux
yeux
de
Roscius
en
lui
versant
une
i ndemni té
:
{.'" Une
fois
que
le
procès
a
été
engagé
sol ennell eL"ent,
une
fois
que
l ' instance
en
dOJ1J1Jl8.ge
CB.usé
con trai remen t
au
droi t
a
été
constituée,
tu
as,
sans
ma
participation,
transigé énrec Flavius"
Est-ce pour la moitié
ou
pour
la
totalité
que
j'ai
transigé
?
Parlons
plus
clairement
est-ce
pour
J'Iloi
seul
ou,
à
la
fois,
pour
toi
et
pour moi
?
Pour
_'"11oi
;
je
le
pou \\réi is,
j'a\\rais
de
nombreu ..~
e ..ye.rnpl es'
;
c'est
chose
licite
beaucoup
d'autres
l'ont
fait
en
usant
de
leur
d r o i t ;
en
cela,
i l
n'y a
de
ma
part
-
208 -
aucun
acte
contraire
à
ton
droit.
Quant
à
toi,
réclame
ce
qui
est
à
toi,
fais-toi
payer,
e.'11porte
ce
qui
t'est
dû
;
que
chacun
conser,re
la
possession
de
1~
part
qui
lui
re,rient
en
droi t
et
la
re,rendique.
"Oui,
mai s
toi
t u a s
fa i t
une
bonne
affai re"
Fais
toi
aussi
une
bonne
affaire
"Tu
as
transigé à
très ,haut
prix pour
ta
moi tié"
-
Toi
aussi,
transige à
très haut
prix pour la
tienne
"Tu
en
as
tiré
six
cent
mille
sesterces"
Ti re
aussi
de
ta
moi t i é
si x
cent mille sesterces).!
(29)
Tous
les
efforts
de
l ' Arpinate
tendent
donc
à
épargner
son
client
de
toute
accusation
de
fraude
vis-à-vis
de
son
associé,
de
le
blanchir
et
de
légitimer
l'aCt'~eptation du
paiement
de
Flavi us
1 lIa
superior
:fui t
oratio
necessaria.
haec
e r i t
uoluntaria
fIla
ad
iudicem.
haec ad C.
Pisonem ;
i l l a
pro
reo.
hL~ec
pro
Roscio
fIla
uictoriae.
haec
bonae
existimationis
causa
comparata
(30),
c l a r i f i e
t - i l ,
comme
pour
lever
la
moindre
équivoque
sur
son
intervention.
Notre
démarche
s' appuie
par
conséquent
sur
des
supputations.
C'est
à
travers
elles que
nous
pouvons affirmer que
Panurgus
a
dû
succomber
à
l'inuidia que
vouaient
les
autres
citoyens
à
son
instructeur
Rosc i us,
af i n d e
{{sa boter»
l'aura
dont
i l
s' entourai t.
En
lisant
le
discours
de
Cicéron
d' un
bout
à
l'autre,
nous
avons
écarté
une
autre
hypothèse
qu i
eût
pu
avoir
pour
fOIlciement
l'inimicitia
entre
la
population
et
lui,
D'8_près
Cicéron,
aucune
anomalie
ne
poi nd
de
ce
côté.
Le
poi nt
d' ombre
reste
le
succès
part icu l i e r
de
Rosc i U~:3,
que
son
avocat
décri t
comme
p é t i l l a n t :
(,'Ce
que
Panurgus sa ,ra i t,
très peu
de
gens y
faisaient
attention
Où
a,rait-il
Bppris.
c'est
ce
dont
tout
le
monde
s'enquerait.
On
ne
pensait
pas
qu'il
pût
sortir
de
chez
Roscius
rien
d'il2correct
et
de
défectueux.
-
209 -
SDrt 1
de
chez
SL"1 bi 1 i us,
Panurgus
aura i t
eu
beau
surpasser
Rosci us
même
en
tal ent,
i l
n'aurai t
pas
pu
obtenir
un
regard.
Càr,
si
on
n'8dmet
pas
qu'un
honnête
homme
soit
le
f i l s
d'un père malhonnête,
on ne saurait pas
admettre
non
plus
qu'un
bon
comédien
puisse
être
formé
par
un
méchant
histrion.
Parce
qu'il
\\renait
de
chez
Roscius,
i l
paraissait
encore mieux instruit qu'il
ne l'était.
Le
même
fai t
s'est
produi t
réceJ:!llDen t
ci
propos du
comédien
Eros.
Chassé
de
la
scène
non
seulement
par des s i f f l e t s ,
mais pélr
un
concert
de
huées,
i l s ' est
réfugi é
dans
la
maison de Rosei us,
COI12..7Je
à
l'a bri
d'un autel
protecteur
;
i l
trou va
un
refuge
dans
l'enseignement,
dans
le
patronage,
dans
le
nom
de
Rosei us.
Et
c'est
ai Dsi
qu'en
très
peu
de
temps
Eros,
qui
n'étai t
pas
même
compté
p8.rmi
les
acteurs
du
dernier
ordre,
p''3.r\\rint à
prendre place au rang des premiers
comédiens))
(31)
Devant
un
succès
aussi
monstre,
la
mei lleure
al ternat i ve
aurait
alors
été
de
s'en
prendre
à
Panurgus
pour
lui
«couper
1 'herbe
sous
les
pieds).',
le
((dissoudre))
et
le
priver
de
l'un des cordons de
sa renommée.
B -
La pratique de la quae~io
Deux
acceptions
ont
été
attribuées
par
les
Ramai ns
à
ce
vocable,
mais
en
principe
qui
se
rejoignent
toutes,
puisqu'orientées
essentiellement
vers
un
seul
et
même
domaine
l ' i n s t i t u t i o n judiciaire.
le
tribunal,
chargé
de
statuer sur des
faits
soumis à
son
appréciation,
dirige
par
des
iudices,
des
jurés,
choisis
par
l ' accu~5é
et
l ' é~ccusateur.
Cela
est
surtout
valable
pour
les
quaestioneG
perpetuae
ou
t r i bunaux
permanents,
-
210 -
qui
rendent
leur
juridiction
sur
des
affaires
courantes.
Cependant,
elles
peuvent
devenir
extraordinariae,
se
muant
automatiquement
en
t r i bunaux
d' except ion,
délibérant
sur
des
affaires
particulièrement
graves.
Il
en a
été ainsi
lors du
sacrilège de Clodius:
«Les
pontifes
apr~s
la
consultation
du
Sénat,
estim~ren~ que
la
cérémonie a~~it été
souillée Par la
présence d'un profane et
que
cet
acte
était
une
violation
de
la
loi
religieuse
(nefas) .
I l
fallait
maintenant
donner
une
sanction
ci~ri1e à
cette
décision.
Il
n'y
a~rait
pas
à
Rome
de
délits
reli-
gi eux:
on
ne
songea
donc
Pas
à
poursui ~rre
l'auteur
de
ce
scandale
com.me
coupable
de
sacrilège
on
assimila
cet
acte
à
celui
d'un
bom1rJe
qui
aurai t
eu,
a~rec une
vestale,
des
rapports
i l l i c i t e s .
C'était
assez
naturel,
puisque
la
feJ11D1e
de
César,
dans
cette
cérémonie,
était
une
sorte
de
prêtresse,
de
même
que
dans
le
cas
où
i l
s'agissait
d'une
~restale,
l'acte
fut
consi déré
C011JJ11e
un
adul tère
aggra ~ré
par
1 e
caractère
religieux
de
la
femme
et
qualifié
pour
cela
d'inceste.
Il
n'existait
pas
de
tribunal
permanent
(quaestl0
perpetua)
chalgé
de
juger ce crime
fort
rare,
i l
était
donc
indispensable
d'en
créer
un
pour
la
circonstance»
(32)
.4
la
suite
du
meurtre
de
Clodius
sur
la
\\roie
Appienne,
Pompée
en
institua aussi
un,
incluant
l'incendie
de
la
curie
et
le
siège
de
la
maison
de
l'interroi
Harcus
Aemi1ius
Lepidus,
renforçant
par
la
même
occasion,
les
peines
jusque
la appliquées en cas de
~rio1ence
((quant
au
tri buna1
que
~roici»
grommele
Cicéron,
((encore
qu' i l
ne
soit
pas
illégal,
-
211
-
le
Sénat
du
moins
n'a
Jam!iis
songé
8
le
constituer,
car
il
)'
a\\'ait
des
lois.
i l
y
aIrai t
des
tri Dunaux
qui
concernent
tant
le
meurtre que la
\\'i 01 ence 8
mai n armêell
(33)
Employée
dans sa
deuxième
acception,
la
quaestio signifie
({ la
mise
à
le.
questionll
(34) .
De
quoi
s ' a g i t - i l
?
Quintilien esquisse
une
réponse
«Les uns l'appellent
le moyen infaillible de
faire
al'ouer la
\\'érité ;
les autres y
voient
aussi
la
raison
de
mentir,
pe.rce
que,
chez
certains,
la
résistance ~ la
douleur rend le
mensonge
facile,
chez
d'élutres
la
fe.iblesse
le rend nécessaire.v
(35)
La
définition
de
l'Arpinate,
rejoint
grossièrement
celle
de
Quintilius,
dans
la
mesure
où
elle
insiste
sur
le
but
avoué
de
la
quaestio
:
découvrir
la
vérité.
La
question q u ' i l
pose
à
Oppianicus dans
le
procès de Cluentius,
confirme ce
f a i t :
«Je
te 1 e
demande
Oppi ani cus,
qu'a
t -on f ai t
selon
toi
de
ton
esclave
Ni castra tus,
lui
que,
ayant
l'intention
d'accus,'r
ave.nt
peu
mon
client,
tu
aurais
dû
8111ener
à
Rome,
JJJettre
en
état
de
faire
des
rél'élations,
enfin
pt1r1er
précieusement
pour
l'interro-
gatoire,
pour
les
juges
que
l'oici,
pour
le
!IXJmen t
présen t
?.I.1
(36)
I l
s ' a g i t
donc
d'un
interrogatoire,
mais
d'une
forme
particulière,
puisqu'il
consiste
pour
l'interrogé
à
passer
aux
aveux
devant
un
bourreau
le
carnifex
:
in
testibus et
in
quaestionibus
ratio
(37)
notifie
Cicéron,
pour
montrer
le
démarquage
d'avec
l'interrogatoire
ordinaire.
La
quaestio
n'a
rien
à
voir
avec
ce
jeu
de
ques;tions-réponses 'auquel
est
appelé
à
se
plier
tout
prévenu
~50umis à
une
enquête.
Comme
le
faisait
si
justement
remarquer
M.
Piques,
ce
n'est
pas un
-
212 -
<dnterrog.!2toire
long
et
h.!2bile,I,1
(38)
mené
par
des
juges
instructeurs,
mais
d'un
autre
plus
violent
encore,
où
le
cor pe
de
l ' i n div i du
é t ait
pla c é
e nt r e l es
ma i n s
d ' u n
tortionnaire.
La
particularité
de
cette
forme
de
témoignage
réside
par
voie
de
conséquence,
dans
sa
brutalité,
son
supplice et sa cruauté:
«Les
coups de
~re~-ges,
les
fers
brûlants,
et
ces
suppl i ces
suprêmes
des
condamnés,
ces
objets
de
crainte
pour
tous
les
Butres,
et
la
torture
et
la
crucifixion
?
I l s
sont
exemptés de
tous ces châtiments.!,'
(39)
Et
les
esclaves
en
sont
les
cibles
privilégiées.n~les
destinataires prioritaires,
les
Roroains
ne
l'admettant
pas à
l'égard
des
citoyens,
les
liberi
(40).
L'on
comprend
aisément
toute
la
révol te
de
Cicéron
devant
Verrés,
lorsqu'il
revit
la
soumission
des
ciues
romani
à
cette
pratique
douloureuse
et
ignominieuse.
En
la
transférant
aux
hommes
libres
par
Apollonius
interposé
(41),
Verrès
non
seulement
renverse
le
monde
et
introduit
une
profonàe
révolution dans
les
moeurs,
mais aussi
i l
donne
aux esclaves
une
place
qui
ne
leur
sied
pas
dans
la
cité.
I l
les
glorifie,
leur
insuffle
des
vélléités
«dominicales.!.'
et
les
dresse
cont re
l ' ixrq>eri ua
auquel
i l s
sont
d'ordinaire
asservis.
Il
leur
impose
-
contre
leur
volonté
-
un
mode
de
vie
qui
leur est
étranger,
et
qu'eux
mêmes n'auraient
pas
pu
imaginer,
puisqu'inédit:
Quis
dubitet
quin
seruorEl.Df
BI1il'!r:}S
SLl:t1t1!'la
formidine
oppreS'.:;;-eri t.
cu.
uiderent
ea
faci 11 ta te
praetorem,
ut
ab
seruorUlll
sce1eris
cODiurationisque
dal1flUlltoruJ1I
uit.!l
uel
ipso carnifice internuntio rediJJeretur ?
(42)
-
213 -
Verrès
fait
s ' e f f r i t e r
en
eux
et
malgré
eux,
la
trace
de
servilité
dont
i l s
s'étaient
par
ailleurs
accoutumé~
et
r-end
de
ce
fait
inadmissible,
intolérable
même,
un
fait
de
mentalité
que
les
Romains,
à
la
différence
des
(,'Rbodiens
et
des
Athéniens,
peuples
très
éclairés»
(4-3)
ont
toujours
r-epoussé
avec
la
dernière
énergie.
Au-delà
de
l ' ignomir.ie
contenue
dans
le
fait
lui-même,
ç'est
la
pratique
du
suppli-
cium que
l ' Arpi nate
désapprouve
sur
le
corps
du
ci toyen.
En
effet,
appliqués
sur
le
corps,
les
tormenta
affectent
l'équilibre
de
tout
l'organisme
humain,
étant
donné
qu'ils
atteignent
le
c8té
psychologique
de
l'individu.
Ils
ne
détru i sent
donc
pas
seu leroent
la
({sta t ure
physi que»)
de
l ' ho D'une ,
mais
également
toute
son
armature
psychologique.
Il
en sort
perverti et complètement dénaturé
(4-3bis).
Pourquoi
un
témoignage
aussi
ardemment
demandé
à
l ' e s c l a v e ?
Deux raisons à
cela.
D'abord,
l'efficacité.
Nul
ne
peut
y
résister.
Toutes
les
bonnes
volontés
cèdent,
ploient
et
se
meurent.
Les
esprits
les
plus
durs
s ' y
soumettent
et
laissent
délier
leur
langue,
te llement
est
violente,
la
pression
exercée
sur eux.
Une
pression générale
qui
s'étend sur
l'ensemble
de
l'organisme
humain,
en
même
temps
qu'elle
pousse
l'homme vers ses derniers retranchements
(44-).
Ensuite,
la
proximité
de
l'esclave
par
rapport
à
son
dominus
et
son
information
sur
tous
les
faits
et
gestes
de
celui-ci,
y
compris
les
plus
intimes.
Cicéron
a
prof i té
du
procès
de
Cael i us
pour
\\\\tonner"
sur
ce
rapprochement
insidieux,
en
prenant
pour
fait
et
cause,
son
client,
accusé
d'avoir
fait
appel
à
des
serui
pour
transmettre
la
mort
à
l'un
de
ses
ennemis
par
le
truchement du
ueneficium
uA
quoi
donc
enfin
s'en
est-j 1
rapporté
'?
Qui
a
été
son
aide,
son
associe,
-
:214 -
complice
?
.4
qui
a
t - i l
confié
un
si
grl~nd
forfai t.
confié sa personne,
confié sa
\\,j e
?
Aux esclaves de
cette
fem."!1e
?
C'est en effet
ce
qu'on
lui
a
reproché.
Etait-il
donc
si
fou,
1 ui
qui
".'DUS
accordez
pourt.!:!nt
quelque
esprit,
même
si,
d.!:!ns
\\'OS
propos
host i l es,
vous
1 ui
retirez
toute
autre
qua1i té,
fou,
dis-je,
.au
point
de
remettre
toute
sa
fortune
aux esclaves d'autrui?
Et
à
quels esclaves?
-le
fait
en
lui-même
est
de
la
plus
importance . ..
.4
des
esclen'es
qu' i 1
ne
\\'o)'ai t
pas
trl3.i ter
selon
la
condition
COJ'!UrJu ne
des
l11ai s
vivre
.avec
leur
l11a î tresse
plus
de
liberté,
d'indépendance,
de
fl3.miliarité.
Qui
ne
constate,
Juges,
DU
qui
ne
sl3.it
que
dans
une demeure
où la maîtresse de
J:IJaison
\\,it en
femme
galante,
où
rien
ne
se p.!:!sse
qui
soit
à
révéler au
dehors,
où
régnent
l'orgie,
la
débauche,
la
di ssipa t ion,
enfin
toutes
sortes de
\\,ices et des scandl3.les inouïs,
les
escl8.\\'es
ne
sont
plus
des escll3.\\'es,
puisque
tout
leur
est
confié,
que
tout
y
est
fait
par
1 eurs
soi ns,
qu'ils
participent
aux
mêmes
p18isirs,
qu' i l s
reçoi \\'ent
la
confidence
des
secrets
et
qu'ils
voient
refluer
jusqu'à
eux
une
pl3.rt
même
du
flot
des
dépenses
et
des
prodigalités
quoti-
diennes
?I.I
<44bis).
Auteurs
ma.lgré
tout
des
scandales
domestiques
ou
de
la
{{\\,ie
secrète.'.' du
maître
et
des
coups
bas
perpétrés
par
lui,
i l s
sont
plus que
tous,
censés
tout
connaître
sur
eux.
Les serui
sont
en
terme
imagé,
les
ombres
des
dOnlini,
leur
orei lle
étant
touj ours
tendue
en
vue
de
la
captation
des
nouvelles
les
concernant.
Poser
des
questions
aux
serui
revient
par
voie
de
conséquence,
à
remuer
le
creux
du
problème,
à
toucher
le
centre
de
gravi té
dans
laquelle
est
impl iqué
le
215 -
domi DUS.
Mê me
exprimée
à
mots
couverts,
c'est
ce
que
veut
dire
cette
affirmation
de
Cicéron,
où
apparait
la
justification
du
refus
des
mai tres
de
fai re
témoigner
les
esclaves contre eux
:
«Hais cependant si
nos ancêtres ont
interdit
de
provoquer
les
aveux
des
esclaves
contre
1 eurs
l1:.1.-';l. i t-res,
c.e
n'est
pas
parce
qu'on
ne
pouvait
ainsi
décou\\rrir
la
vêri t-é,
.mais
parceque
1 e
moyen
1 eur para i 55ai t-
i ndi gne
et
pl us
a troce
pour
les
maîtres
que
la
mort
e11e-EJême.\\1
(45).
Cicéron en
sait
quelque
chose
pour
y
avoir été
confronté
par
le
biais
de
Déj otarus.
Hôte
de
César,
ce
dernier
avai t é t é
dénoncé
par
son
esclave
comme
ayant
voulu
semble
t - i l ,
ourdir
une
machination
contre
lui
et
le
mettre
à
mort
par
la
main des armati.
Crime
abominable
car si
cette
pratique
est
admissible
uniquement
en
cas
d'inceste
(46),
elle
ne
pouvait
avoir
droit
de
cité
à
l'encontre
de
son
prot':gé.
L'arpinate
remue
tous
les démons
du
mal
et
les dresse contre
l'esclave.
1 l
le
sermonne,
le
traî ne
dans
la
boue
et
lui
accole
une
série
de
qualificatifs
avilissants,
dégradants.
Pour
Cicéron,
en
dévoilant
un
fait
d'une
telle
gravité,
l'esclave
a
annihilé
le
rempart
dont
se
servait
le
maître,
l ' a
mis
à
la
portée
de
toutes
les
vicissitudes
sociales
et
a
rabaissé sa
garde.
Il
a
airsi
porté
un coup rude
et
mortel
à
la
sécurité
des
dorndni,
en
les
laiSSant
abandonnés
à
eux-
mêmes
:
{,'En
\\Toyan t
ce t te
face
de
transfuge
accu:ant
son
maître
absent,
son
maitre
si
attaché
à
notre
République,
en
l'écoutant
parler,
j'éproLnrais
moins
de
douleur
de\\raut
cette
atteinte
à
la
dignité
royale
que
de
cTainte
pour l'ordre
social.
Comment? La
loi
de
nos
Cl ïeux
in terdi t
de
fa.i re
témoigner un esc1 a \\re
con tre
son
1."1B î tre
lJ18.1grë
1 a
possi bi 1 i te,
-
216 -
en
le
mettant
~
la
question,
d'8.rracber p!jr
18. do u 1 e ur 1 a
v é r i té a u x
pl us ré tic e n t s
..
en
voici
un
escla\\'e
qui
a
toute
liberté
d'accuser celui
qu'il
ne pourr8.it pas nommer
sur le chevalet du suppl i ce),1
(47).
Est-ce
à
dire
que
le
témoignage
des
liberi
n'est
pas
convaincant
?
On
ne
pourrait
le
prétendre.
L'Antiquité
romaine
y
accorde
foi
et
croit
en sa crédibilité.
Elle
lui
reconnait
une
réelle
capacité
à
enrichir,
mieux
encore
à
s'ériger
en
source
d'information
incontournable,
dans
la
précision des
faits.
Elle
lui
accorde
une
part
d' importance
considérable,
dans
la
recherche
de
ces
faits.
Par
conséquent,
la
version
des
citoyens
constitue
une
étape
menant
à
la
ueritas,
à
condition
que
le
juge
instructeur
fasse
preuve
de
clairvoyance
et
de
lucidité,
en
sachant
démêler
par des
recoupements,
le
vrai
du
faux
(48).
Dans
le
Pro
A.
Caecina,
c' est
à
ce
type
de
témoignage
que
recourt
Cicéron pour prouver l'innocence de son client
((Et
les
tél!1Oins,
que
disent-ils
?
P.
Vétilius,
parent
d'Ebutius
déclare
que,
msndé
par
Ebutius,
i l
est
\\renu
avec
des
esclaves
armés.
Qu'ajoute
t - i l
?
Que
les
gens
armés
étaient
fort
nombreux
?
Et
encore?
Que
Cécina
fut
menacé
par
Ebutius.
Quant à
moi,
que puis-je dire
de
ce
témoin?
Ceci
seulement,
récupérateurs
non
pas que
trous
ne
de \\rez
accorder
qu'une
médi ocre
confiélnce
li
son
té1!1Oignage,
parce
qu'on
le
tient
en
médiocre
estime,
mais
que
trous
detrez
le
croire,
précisément
parce
que
sa
déposition,
bien qu'elle \\rienne de
la pa.rtie
adtrerse,
est
tout
à
fait
contraire
il
la
cause .
.4.
Terentius le
second
témoin,
non seulement
accuse
Ebutius,
.':!l51is
s'accuse
1 ui -mème
de
l'action
la
plus
criminelle
..
contre
-
217 -
Ebuti us,
i l
di t
qu 1 i 1
un
Tasse."!1bl emen t
de
gens
armés
sur
lui -même
i l
déclare
hautement
qu'il
ordonna
Antiochus esclave
d'Ebutius,
de
se
jeter
le
fer à
la main,
sur Cécina
qui
s'a~rançB.it..
Ensui te
L.
Célius
B.
déposé
non
seulement
qu'Ebutius
é ta i t
entouré
d'une
foule
d'hommes
arJ!1és,
mais
encore
Céci Da
n'était
venu
qu'B.~rec un
très petit nombre de
C01!1F'dgn ons ,1.1
(49).
)/tais,
l'importance
du
témoignage
des
esclaves,
réside
dans
la
possibilité
de
confrontation
des
deux
8enres
de
versions
des
libres
et
des
non-l i bres
et
donci dans
la
facile
synthèse.
Elle
permet
aux
enquêteurs
de
s'approcher
le
plus
vite
possible
de
la
ueritas
et
d'avoir
une
vue
précise
des
faits
soumis
à
leur
appréciation.
Elle
ôte
des
difficultés
de
l'enquête
toutes
f iori tures,
les
contours
brous:::,ai lleux
et
encombrants,
pour
aboutir
directement
à
une
approche
claire,
nette
puis
précise.
C'est
conscient
de
cette
réal i té,
que
Cicéron
demande
avec
insistance
et
sur
un
ton
plutôt
suppliant
que
l'on
fournisse
à
son
client
Sextus
Roscius) les
esclaves
qu'on
lui
a
subtilisés,
afin
de
les
soumettre à
la quaestio :
({J'en
appel 1 e
à
toi
P.
Seipi on,
à
toi
Q.
Netell us
au
moment
où
votre
concours
a
été
demandé
et
où
~rous
a vez
agi
en
fa veur
de
Roscius,
i l
a
plusieurs
fois
réclamé
de
ses
B.d~rersB.ires
deux
des
escl a ves
de
son
père
pour
1 es
fai re
met tre
à
la
questi on
Ne
~rous
SOlHrenez-vous
pas
que
T.
Roscius
s'X
est
alors refusé
':J
Hais
quoi
!
Ces esclB.ves
où
sont-i ls
?
}fal ntenant
encore,
e' est
moi
qui
réclame
qu'on
les
mette
la
question.
Rosei!..!s
vous
en
prie,
~rous
en
supplie au no."!1 des Dieux,l)
(50)
-
218 -
Accusé
d'avoir
mis
son
père
à
mort,
c ' e s t
le
dernier
recours
qui
lui
reste,
étant
donné
qu'aucune
autre
possibilité
aisée
ne
lui
est
fournie
pour
prouver
aux
yeux
de
tout
le
monde,
son
innocence.
Il
a
beau
la
clamer
haut
et
fort,
personne
ne
prête
attention
à
ses
propos
et
ne
le
déculpabilise.
Les
charges
pour
parricide
restent
pesantes
sur ses
épaules,
les
sanctions
de
la
lex de
parricidiis maintiennent
leur
rigueur
(51)
tournées
vers
lui.
Cependar:t,
une
procédure
t e l l e
que
la
quaestio,
n'a
de
réelle
chance
d'aboutir
et
de
parvenir
régulièrement
à
son
terme,
que
si
et
seulement
s i
elle
s'appuie
sur
l'observation
par
les
esclaves
de
leur
propre
maître.
Seul
lui,
est
habilité
à
les
garder,;'les surveiller,
à
veiller
à
ce
qu'un autre
que
lui,
encore
moins s ' i l
est
du
camp
de
l'accusateur,
ne
prenne
contact
avec
eux.
Il
doi t
veiller
à
leur
isolement,
pour
éviter
un
témoignage
vicié,
semblable
à
celui
que
peut
livrer
un
certain
Rufion,
que
Cicéron
ci te
en
exemple
pour
apporter
de
((l'eau
au
moul in»
de son raisonnement
portant sur
la
mort
de Clodius
(( Voyons
donc
ce
que
fut
cet
interrogatoire
et
quelle
en
fut
la
forme.
"Di s
donc
toi,
Rufian
-
par exemple -
prends garde,
s ' i l
te
pl et i t
d e n e
}-'d s
me n t i r
!
. Cl od i u s a
t - i 1
tendu
une
embuscade
ëI
Mi 1 on
?
"Oui",
crest
le
gibet
assuré.
"Non",
c'est
la
liberté
en
espérance.
Est-il
rien
de plus assuré que le
résultat
de
cet
interrogatoire?
On
saisit
sans
retard
les
esclaves
qu'on
veut
soumettre
à
la
question
et
de
plus
on
les
met
au
secret,
on
les
jette
en
cellule pour
que personne
ne pui SBe
cOJJ'..muni guer a t'ec
eux.
Or
ceux-ci
sont
restés
cent
jours
chez
l'accusateur
et
c'est
l'accusateur
lui-même
qui
les a
produits.
Peut-on
iIIJéiginer rien de
plus
impartial
et
de
plus
irréprochable
que
cet interrogatoire
?l.'
<52).
-
219 -
M:oyen
d'information
quasi ment
sûr
en
ce
qu'elle
fait
faci 1 ement
vac iller
1 es
résista nces
1 es
pl us
tenaces
<53),
mais
méthode
pI-éventive
également
par
le
fait
qu'elle
peut
soustraire
par
les
tourments
suprêmes
toute
tentation
des
esclaves
par
exemple
pour
les
actes
ayant
une
portée
dangereuse
pour
la stabilité de
la cité
<54),
la quaestio se
heurte
cependant
à
une
seconde
restriction
«(j , i nu t i l e
cruau té))
<55) .
Sur
ce
poi nt,
le
Cicéron
homme
politique,
Romain et avocat
qui
recomma.nde
de
«li\\rrer les esela\\res il
la
question
et
de
ne
rien
négliger
pour
déeoLnrrir
le
vérité).'
<56)
change
de
veste,
éclipse
ce
pan
de
sa
personnalité
et
se
mue
en théoricien,
philosophe et
humaniste
et don~ en un
Homme
regardant
en face
de
lui
d'autres Hommes.
Ses réflexes
d'altruiste
refont
surface
et
dans
leur
acuité,
colportent
tout
un
flux
émotionnel
dont
i l
a
l'habitude.
Sassia qui
se
livre
à
une
quaestio
«furi euse.V
est
ainsi
traitée
de
scélérate
<57 )
et
sa
méthode
interrogatoire~ spécialement
vigoureuse,
mise à
nu avec force d é t a i l s :
«On procède il
la
question en usant de
toutes
les tortures les plus \\'iolentes.
L'espoir et
la
peur poussaient
les
soumis il
la
question
il
fai re
quel que
déel ara t ion,
pourtan t
émus,
je
pense,
par
l'autorité
des
personnes
rassemblées
(et
par
la
violence
des
sup-
pliees),
i l s
ont
persisté
il
dire
la
vérité
e t
déc 1 a ré
qu' i l s
ne
Sén'aie n t r i en.
Sur
1 'a\\,is des amis on suspendi t
pour ce jour la
question.
Après
un
inter\\'alle
assez
long on
les
convoque
de
nouveau.
On
reCOL'1menCe
il
procéder
il
la
question.
On
ne
négl Ige
la
violence
d'aucune
des
tortures
les
plus
péni bl es.
Les
personnes
convoquées
en
m8.rquent
de
la
répugnance;
elles ne peu\\rent
plus
l'endurer
qu'avec
peine.
Ce t te
femme
cruelle
et
emportée
est
prise
de
rage
à
1 ' idée
que
ce
qu'elle
avait
i!!làginé
ne
produisait
pas
du
tout
l ' e f f e t
attendu.
Le
-
220 -
bourreau,
les
instruments
mêmes
du
supplice
étaient
déjà.
lassés,
sans
qu'elle
\\Tou1at
y
Illettre
fin . .4lors
un
de.s
amis
con\\'oqués,
personnage
distingué
par
les
bonneurs
du
peuple
et
doué
du
plus
baut
mérite,
déclara
bien
comprendre
qu'il
ne
s'agis.sait
pas
de
découvrir
la
vérité
mais
d'extorquer
une
fausse
déclaration.
Les
autres
approuvèrent
ce propos et de l'a\\'1s général
i l
fut
décidé
qu'on e.stimait
l'enquête a.ssez appronfondie»
<58) .
Aux
yeux
des
recuperatores,
Sassia.
passe
pour
une
criminelle,
une
femme
dépourvue
du
sens
de
l ' humain.
L'Arpinate
la
dépouille,
la
peint
en
noir
et
à
la
l i mi te,
lui
plaque
un
masque
nouveau,
monstrueux
ce lui -1 à.
Sa.
criminalité
n'a
d'égale
que
son
indifférence
à
la
souffrance
inutile
des
esclaves
(59)
et
l'absence
en
elle
d'amour
maternel,
puisqu'elle
chercha
à
faire
accuser
son
f i l s
Habitus
de
parricide
(60).
Ainsi
noircie,
Sassia
se
voit
rejetée
dans
les
ténèbres
de
l'ignominie
et
a
contrario,
Cicéron
son
accusateur
en
quelque
sorte,
entouré
de
toutes
les
marques
d' humanisme.
Y..ais
cette
présentation
pathétique
du
traitement
des
esclaves
et
cette
révélation
à
tout
le
moins
accablante,
ne
sont-elles
pas
sous-tendues
par
une
recherche
d'assouplissement
de
la
sé\\'érité
des
juges
vis-à-
\\'is
de
Cluentius
?
Ne
sont-elles
pas
une
manière
comme
une
autre,
s i
l'on
se
limite
à
la
remarque
de
J.
Humbert,
de
((mystifier les Juges)
(51)?
Il
ne
saurait
être
question
pour
nous,
d'occulter
une
évidence
la
négativité
de
la
violence
utilisée
dans
la
procédure
de
ces
interrogatoires
d'esclaves.
Effrayé
par
la
torture,
l'escla\\'e
pouvait
être
amené
à
faire
des
révélations
fantaisistes,
éloignées
de
ce
fait
de
la
réalité
et
par
là
même,
à
gauchir
la
vérité
recherchée.
De
ce
point
de
vue,
appliquée
sur
le
seruus,
la
violence
ne
présentait
aucun
avantage
direct
quant
au
bon
déroulement
de
la
justice.
A.
Michel
est
plus
catégorique
encore quand
i l
dit
-
221 -
({Beaucoup
d'escla\\'es
a\\'ouent
n'importe
quoi,
parce
qu'ils espèrent
qu'on
les condamnera 8
.'nort,
et
qu'ils
ecb8pperont
ainsi
il
une
torture
qui
se
prolongerai t
s ' i l s
n'a \\'01..'-
aient
pas.
En
s 0l11.'!1e ,
la
torture
leur
extorque par la
violence de
faux aveux))
(62)
Le
cas
que
nous
expo'3e
Valère
k;Ci me,
n'est
sans doute
qu'un
archétype
de
tous
ceux
qui
avaient
cours
à
la
fi n
de
la
République
«Un
esclave,
qui
appartenait
au
banquier
H.
Agrius,
fut
accuse
d'a \\'oi r
assassi né
un
esclave
de
c.
Fanni us,
nomMé
.41 exandre.
Appliqué il
la
torture
par son
maître,
i l
se
déclara
constammen t
l'auteur
du
Iveurtre.
Livré
en
conséquence
à
Fannius,
i l
subit
le
dernier supplice.
Peu
de
temps apres,
on
vit
revenir chez son ma.ître celui
que l'on aV8it
cru assassi né.I•1 (63)
Ma i:3
au-dé là de
cet te
évi dence,
i l
Y a
aussi
i ndubi ta blement
en
l'Arpinate,
une
volonté
d ' a t t i r e r
vers
lui,
les
juges.
A
ce
moment,
i l
se
sert
de
cet
argument
déchi rant,
comme
d'une
arme
à
tranchant
vif,
susceptible
de
faire
s'ébranler
les
esprits
et
de
les
émouvoir.
Il
cherche
à
exc i ter
le
courroux
des
âmes,
pour
redorer
le
blason
de
son
client.
La
douleur
des
esclaves
qui
constitue
traditionnellement
une
forme
de
violence
unanimement
pratiquée
et
à
laquelle
i l s
succombent
régul ièrement,
sert
ainsi
de
sous
main
à
une
cause
éloi gnée ,
que
cependant
l ' Arpi na te
rapproche
tout
en
tissant entre elles,
une sorte de
toile d'araignée.
C -
La rigueur judiciaire
L'une
des
caractéristiques
de
la
jU~:3tice roma.ine,
est
de
ne
pas
souvent
intégrer
les
esclaves
dans
les
peines
encourues
par
leurs
maîtres.
Cette
pratique
tient
à
la
conception
-
222
-
entretenue
pendant
l'Antiquité,
tendant
à
<;infantiliser.'.'
les
serui,
à
en
faire
de
perpétuels
roineurs
inconscients
placés
sous
l'obédience
des
domini
dont
i l s
n'ont
guère
la
latitude
de
refuser
ou
de
contester
les
ordres
de
quelqu'ampleur
q u ' i l s soient
{54).
Réduits
à
n'êtr-e
que
des
comparses,
des sous-fifres
comme
on
parlerait
en
termes
modernes,
les
esclaves
se
trouvent
de
ce
f a i t
déliés
de
toute
responsabilité
d'un
acte
commis
au
sein
de
la
familla
ou
en
dehors,
par
eux.
Leur
rôle
(<'d'instrument
passi f.')
(55) ,
les
met
à
l ' a b r i
du
moi ndre
des
sévices
pénaux,
la
loi
n'existant
pas pour eux
«Quand
les
anciens
disaient
que
le
droit
était
civil,
ius
ciuile,
i l s
n'entendaient
pas
seul e.rrren t
que
chaque
ci té
a ~'ai t
son
code,
comme
de
nos
jours
chaque
Etat
a
le
sien.
Ils
voulaient
dire
que
leurs
lois
n'a~'aient
de
~'a1eur
et
d'action
qu'entre
memDres d'une
même cité.
Il
ne suffisait pas
d'habiter
une
~ri11e pour
être
soumis
a ses
lois
et
être
protégé
par
elles,
i l
fallait
en
être
cit~yen.
La
loi
n'existait
pas pour
1 ' esc1a ~'e . . .
(56)
A.
Watson
y
apporte
une
autre
argumentation,
connexe
à
celle
de
Fustel
de
Coulanges,
remettant
ainsi
en
question
l'hypothèse
avancée
par
W.V.
Buckland
sur
l'éminence
du
rôle
des
censores
(67)
quant
à
ces
franchises
servi les
sur
cette
espèce de
«cruauté pénale»
«First
of
8011,
censors
were
appointed
on1y
at
intervals
of
four
on
fi ~'e
years,
h
.
~el.ng
mo~'e
usua1,
and
at
times
tbere
much
longer
gaps.
The
maxiJlJlJm
period
for
wbicb
th~y
cou1d
bo1d
office
was
fi xed
according
ta
tradi tian
in
434
B. C.
DY
the
1ex
.4emi1ia
at
eigbteen
l'!1Dntbs.
This
means
-
223 -
tha t i n
genera1
for
three
and
a
bal f
years
out
of
every
filre
there
were
no
censors
to
1'IlBrk
thei r
di sapproval
of
cruel ty.
On1)'
the
most
notorious
instances
wou1d
e\\'en
have
a
chance of bei ng remembered.
Second1y,
sla l'es
nad
no
access
to
censors,
or other e1ected public officia1s or judges.
They
bad
no
.standi ng
and
no
1 ega11y
recogni zed
a venue
of
approach
to
anyone
in
autority,',l
(68)
Véri tables
alieui
iuris
(69)
composant
leur
sort
avec
les
biens
meubles
(70),
les
esclaves
jusqu'à
leur
affranchis-
sement,
laissent
abandonné
sur
les
épaules
du
mai tre,
le
support
de
toutes
leurs
actions.
Elles
sont
alors
dites
'\\\\Dxales
(71).
La
teneur de
l ' i n i u r i a qu'elles
engendrent,
ne
varie
pas
selon
qu'il
s ' a g i t
«d'un
personnel
tout
entier,
d'un
fermier,
d'un
esclave,
(du
dominus)
ou
des
esclaves
d'autrui
payés
pour
cela
. )
(72) •
ces
actions
gardant
toujours la portée des manoeuvres dolosives:
«Car,
lorsque
l ' ensemb1 e
des
esc1 a l'es
agi t
lui-même
par
la
violence,
par
des
hOJImJes
armés ou réunis en
troupe,
et cause ainsi
un
dom..'!18ge
quelqu'un,
ce
est
nécessairement
le
fai t
de
manoeul'res
dolosives
EMis,
quand
i l
s'arrange
de
.~nière
que
le
do~ge
soit
causé,
l'ensemble
des
esclaves
n'agit
pas
lui-même
et
cependant
le
dom~ge a
lieu
par suite
de
ses .w.,"Uloeuvres do10sives.v
(73)
Yl.Ôis
i l
faut
relativisel-
ce
que
nous
pourrions
appeler
ici
cette
«tbéorie
exclusionniste.l,l
des
esclaves,
dans
la
mesure
00
elle
n'est
pas
garantie
dans
son
intégralité
et
ne
concerne
pas de
ce
fait/tous
les cas de
figure.
L'esclave et
le
maître
forment
deux entités
différentes
et
existB.ntes.
De
par
leur
exi'stence
en
tant
qu' être'3
pen:=;ants
et
agis,sants,
-
224 -
i l s
constituent
deux
domaines
inviolables
en
droit
naturel,
que
les
Romains
d'ailleurs
intègrent
dans
leur
espace
juridique
( 7 4 ) ,
De
ce
poi nt
de
vue,
la
responsabi l i t é
au
départ
ret~nue contre
le
dominus,
peut
également
incomber
à
l'esclave,
en fonction du
délit
commis
«Les jurisconsultes reconnaissent deux espè-
ces de
d é l i t s :
les delicta atrocia
(appelés
aussi
facinora
ou
scelera)
et
les
délits
d'une
moi ndre gra \\7i té.
Quan t
à
ces derni ers,
le
principe
est
que
l'esclave
qui
s'est
rendu
coupable
d'un
de
ces
faits
pour obéir
à
son ll~i'tre n'encourt aucun ch6timent.
Nais
s i
le délit
présente un caractère de gravité
plus
grand,
s ' i l
est
atrox,
l'escldve
ne
doi t
point être exempt de
toute pei ne))
(75)
Le
seruus
n'échappe
plus
de
ce
dernier
point
de
vue
à
la
rigueur du
droit
pénal
et
doit
par
lui-mêmejrépondre
de
ses
agissements.
Seul,
i l
est
tenu
d'assumer ses actes,
«quoique
le
mai tre
soit
exposé
à
subir
par
contre
coup,
des
conséquences
de
la
poursui te,
en
perdant
son
droit
de
propriété
svr l'escla\\re
DU
en
le rece\\rant
des mains du
juge,
complètement
déprécié»
(76).
L'appréciation
de
cette
responsabilité
servile,
passe
par
l'examen
de
trois
délits
différents
les
uns
des
autres,
dont
Cicéron
fait
mention
dans
son
oeuvre
le
Turtum,
la
fuga
et
le
«don
du
uenefi ci U.Jl'J),1.
1 -
Le furtum
Qu'entend Cicéron
par cette
notion?
Nous
n'avons
pas
trouvé
de
trace
d'une
quelconque
définition
de
ce
qui
est
pourtant.
un
fléau
dans
l ' Ant i qui té,
à
en
juger
par
la
présentat ion
que nous en fait
Pline l'Ancien:
-
225 -
((Aujourd'hui,
i l
faut
sceller
avec
l'anneau
1 es
al i men ts
et
1 es
boissons
pour
prè \\'eni r
les
vols.
V....n'l'"
le
service
qu'ont
rendu
ces
légions
d'escla\\'es,
cette
tourbe
étrangère,
logée
dans
nos
lIlâi sons,
si
nombreuse
qu' i l
fa.ut
un
nomenclateur pour nous
rappeler
les
nol!JS de
nos serviteurs.
Aujourd'hui,
nous
nous
procurons
à
grand
frais
des
mets
qui
nous seront
volés
.....
(77)
Nous avons donc
recouru à
la définition classique
livrée par
le
Digeste,
qui
donne
des
indications
sur
le
contenu
de
furtum :
Furtum est contretatia l~i fraudulosa,
lucri
faciendi
gratia
;
uel
ipsius rei,
uel
etiam
usus
eius,
possessianisue,
quod
lege
natu-
rall prohibitum est ad~ttere (78)
Furtum
sous-entend
donc
l'expropriation
d'un
bien
d'un
autre
et
l'usage
illicite
qu'on
en
fait.
Il
signifie
l'infraction
vis-à-vis
de
la
propriété
et
du
patrimoine
d'autrui.
C'est
ni
plus
ni
moins,
une
violation
de
l' i ntégri té
de
l'être
qui
en
est
sujet,
une
subtilisation
d'une
partie
de
lui-même
et
de
son
équilibre} par
voie
de
conséquence,
entrainant
la
réduction
de
sa
stabilité.
Celui
à
qui
l'on
vole
un objet,
de
quelque
valeur que
ce
soit,
se
voit
ainsi
dégal-ni,
dépossédé
subrepticement
d'une
partie
importante
de
son
acquis,
inaliénable
par
nature.
Quant
au
voleur,
il
ra pt
le
contrat
établ i
entre
les
membres
d'une
société,
qui
repose
sur
le
respect
religieux
de~ biens
de
chacun.
En
fin
de
compte,
son
acte
est
interprété
comme
un
délit
grave,
dont
la
sanction
varie
en
fonction
de
la
manière dont
il est accompli
((Chez
nous
les
Décemvirs
qui,
après
le
ren,'ersement
des
rois,
donnèrent
à
notre
peuple
une
législation
et
écrivirent
la
loi
-
226 -
des
Douze
Tables,
ne
punissaient
pas
a\\'ec
une
égale
se\\,érité
tous
les
genres
de
vol,
mais
en
même
temps
i l s
refusèrent
de
se
montrer d'une
indulgence excessi \\'e.
.4.i Dsi
on
a\\'8it
le
droit
de
tuer
le
voleur
pris
en
flagrant
délit,
d
condition
toutefois que le
vol
eùt
lieu
la
nuit,
ou
que
le
voleur
tentât
de
se
défendre
a \\'ec
une
arme
81...'
moment
où
on
le
surprenait
Les escl a \\'es
pris
en
flagrant
délit
étaient
frappés
de
verges
et
précipi tés
du
hé1.ut
de
la
roche.\\}
(79)
Les
écrits
d'Aulu
Gelle
ne
diffèrent
guère
de
ceux
de
Cicéron
quant
à
la
seueritas
de
cette
peine
(80),
même
s i
très
peu
de
développements concernent
l'exemple
singulier du
seruus.
Tous
les
deuK
transcrivent
en
quelque
sorte,
une
même
réalité
à
laquelle
l'Antique
Rome
s ' e s t
trouvée
confrontée.
Mais
à
l i r e
Cicéron
et
surtout
l'ouvrage
où
i l
est
question du
furtum grevé
d'homicide,
l'on a
l'impression
d' assi ter
à
un
relâchement
de
la
ri gueur
des
maiores
et
partant,
de
Dracon
(81)
dont
i l s s'inspirèrent
la
sanction
ne se
limite qu'à
la mise aux f e r s :
«Juste d
ce moment ou d
peu près,
ce médecin
Strato,
dont
ai
parlé,
commit
chez
elle
le
\\'01
et
le meurtre que
voici.
I l
.Y a\\'ai t
dans
la
maison
une
armoire
où
i l
sa\\~it
se
trouver
une
grande
quan t i té
de
pi èces
de
monnaie et d'or brut.
Donc une nuit
i l
mit à
mort
pendant
1 eur
sOl1ll1Jei 1
deux
de
ses
compagnons de
servi tude
et
1 es
jeta
dans
un
vi \\'i er.
I l
sei a
1 ui -mê.rI1e
1 e
fond
de
1 ' armoi re
et emporta une SOl!1111e
sesterces
de
cinq
livres
d'or
un
des
esclaves,
un
tout
jeune enfant,
était son complice.
Le
lendeJ1lBin,
quand
on
s'aperçut
du
vol,
tous
les
soupçons
se
portaient
sur
les
-
227 -
escl a ves
que
l'on
ne
revoyai t
pas.
En
re~rqU!'Hlt 1 e
fond
ouvert
de
l'armoire,
les
gens
se
de,~ndaient
surpris,
co~~nt
cela
avai t
pu se
fai re.
Un
des amis de
Sassia se
sou\\'int
que
dans
une
encbère
il
avait
\\'u
naguère
parmi
1 es menus objets à
vendre
une
petite
scie
dont
toutes
les
dents
formaient
des
crochets et ,qui
étai t
elle-même
recour-
bée
a\\'ec
elle,
on
aurait
pu,
semblait-il,
opérer
cette
ouverture
circulaire.
Bref,
on
s'informe
auprès
des
rece\\reurs
des
\\rentes,
on
découvre
que
la
peti te
sci e
a \\rai t é t é
adjugée ~ Strato.
Les soupçons prenant ainsi
naissance,
Stra to
est
ouvertement
mis
en
C8use
;
le
jeune
esc18ve
complice
prit
peur
et
dénonça
toute
l'affaire
à
sa
maîtresse.
On
décou\\rrit
les
c8dlnrres
dans
la
piscine.
Strato fut
jeté dans les fers.I,1
(82)
A
la
fin
de
la
République,
la
législation
romaine
est-elle
réellement
devenue
moins
répressi ve
en
mat ière
de
vol
surtout
aussi
g r a v e ?
Ou
est-ce
là,
un
cas
isolé
qui
laisse
touj ours
persistante
l ' ant ique
seueri tas
?
La
première
hypothèse
semble
la
plus
plausible,
même
le
Digeste
ne
renfermant
aucun
passage
trai tant
d'une
quelconque
rigueur
dans
ce
damai ne.
Les
j urisconsu l tes,
n'en
font
pas
état.
Le
vol
commis
par
violence
est
condamné,
certes,
mais
uniquement
selon
les
normes
en
quelque
sorte,
fixées
par
l'actio
bonorum
ui
raptorum
(83),
cette
action
que
Cicéron
dans
le
Pro
Tullio
impute
au
préteur
urbain
(84)
Lucullus
sous
la
forme
originelle
d'actio concepta
in familiam et
qui
devai t,
tout
en
remplaçant
la
lex
Aqui lia
(85),
l'aggraver
au quadruple.
Fuisqu'aucune
autre
précision
n'est
apportée,
nous
pouvons
supposer
que
les
esclaves
s'en
trouvaient
aussi
assujettis,
même
si
Paul
au
livre
54
sur
l'Edit,
parle
lui,
de
bastonnade
pour
les
hommes
libres
et
de
fouet
pour
les
-
228 -
lescla.ves
{86) .
Hais c'est surtout
dans
les cas de
fuga et de
don
du
ueneficium.
que
la
juridiction
se
montre
d'une
lextrême
sévérité,
encore
qu'à
ce
niveau
existe
bien.
une
hiérarchisation que nous fait sentir Cicéron.
2 -
La fuga et le don du ueneficium
D'où
vient
cette
hiérarchisation
?
Son
origine
se
trouve
essentiellement
dans
l'acception
même
du
mot
fuga.
Bien
entendu.
la
fuite
d'une
maniére
générale
dans
l'Antiquité.
n'était
guère
appréciée.
car
elle
nuisait
à
l'ordre
établi.
à
la
société
et
de
ce
fait,
apportait
un
déséquilibre
sérieux
à
la
structure
socio-économique
existante.
Elle
remettait
en cause
l'harmonie de
la cité.
en lui
soustrayant
un
ou
plusieurs
bras
de
première
importance.
Mais
il
n'en
demeure
pas
moins
vrai
que
dans
l' espri t
des
Romai ns,
un
distinguo
très
net
existait
entre
ceux
que
les
modernes
appellent
les
esclaves
fugitifs
et
les
révol tés.
Bien
qu'étant
tous
des
fugitiui,
leur
sort
variai t
énormément.
comme
nous
le
montre
le
contenu
de
cette
lettre
envoyée
par
Cicéron
à
son
frère
Quintus.
dans
laquelle
i l
est
question
essentiellement d'un esclave en fuite:
({Notre
a111i
Esope,
le
tragédien,
un
esclave,
Licinus
tu
le
connais
qui
a
pris
la
fui te.
Il
el
demeuré
à
.4 thènes
chez
Patron,
l'Epicurien,
en
se
passant
pour
un
hOlJ1J1Je
libre.
Puis i l
a
passé en
Asie.
Après
cela
un certain Platon
de Sardes,
Epicurien,
qui
fait
de
longs
séjours à
.4thènes
et
qui
s'y
trouvait
au
moment
où
Licinus
y
était
arrivé,
ayant
appris ensuite,
par une lettre
d'Esope,
que
c'était
U12
esclave
fugitif,
le
f i t
arrêter
et
emprisonner
à
Ephèse
11l..~is
je
n'ai
pas
Dien
pu
comprendre,
d'après
sa
let tre,
si
c'est
la
prison
publique
ou
au
moulin.
Quoiqu'il
en
soi t,
pui:squ'i1
est
à
-
229 -
Epl~èse.
je
voudrais
que
tu
le
fasses
rechercher
et
que
tu
t'occupes
très
soi-
gneusement
d'assurer
son
retour,
au
besoi n
en
le
raIDenant
avec
toi.
Ne
t'arrète
pas,
à
son
peu
de
valeur,
i l
ne
\\'aut
pas
grand 'chose,
étant
dès
à
présent
un
homme
mort.
}t[ais
le
chagrin
d'EsDpe
est
si
grand
que
tu
ne
saurais
lui
faire
de
plus
grand
plaisir
que
de
le
remettre
entre
ses mains))
(87)
La
custudia,
voilà
ce
qui
fut
réservé à
l'impudent
esclave
à
Ephèse,
en
attendant
son
renvoi
chez
le
dominus.
Cela
est
bien
mi nce,
au
regard
de
ce
que
Rome
avai t
comme
moyen
de
punition
(88).
Cicéron
ne
donne
aucune
précision sur
le
sort
réservé
au
fugitiuus,
mais
celui-ci
pourrait
être
mitigé.
L'Arpinate
lui-même,
n'avait-il
pas
fait
preuve
de
légère
indifférence
quand
son
esclave
Dionysius
s ' é t a i t
enfui
en
emportant
sa
bibliotheca
?
Si
au
niveau
de
la
simple
fuite
l'audacia
ne
présente
pas
trop
dt i nconvéni ent,
c ' e s t
seu le-
ment
dans
le
cas
où
les
esclaves
se
révoltent
ou
ambi-
tionnent
de
la
faire,
qu'elle
devient
un
fléau
terrible
et
inquiétant
pour
la
cité.
En
effet,
placée
à
ce
niveau,
l'audacia
est
d'autant
pl us
dangereuse
qu' elle
condu i t
ceux
qu'elle
inhibe
vers
la
volonté
de
détruire,
de
trucider
l'espèce
humaine
q u ' i l s
rencontrent
et
de
balayer
toute
trace
adverse.
Elle
enlève
toute~
les
qualités
conférant
l'équilibre
et
injecte
en
retour,
de:3
uitia
dont
l ' a t t é -
nuat ion
ne
peut
être
consécut i ve
qu'à
la
dissol ut i on
i nté-
grale
de
l'équilibre
et
de
la
stabilité
de
llUrbs.
De
ce
fait,
l'esclave
qui
l'agite
devient,
à
l ' i n s t a r
du
«pirate,
l'ennemi
commun
à
toUS)),
avec
lequel
«on
ne
doit
,sn'oir
en
commun
ni
foi
ni
serment,')
(59).
Or,
cette
pratique
devint
courante
à
la
fin
de
la
République,
les esclaves
narguant
de
plus en
plus
les
hommes
libres.
Il
s'ensuivit
pour
réprimer,
ainsi
que
toute
autre
forme
de
violence,
un
édit
de
Lucullus
:
-
230 -
«Et~nt
donné
que du
temps de
nos ~ncêtres la
richesse
et
1~
cupidité
ét~ient
moindres,
que
les
troupes
d'esclen'es
moins
gr~ndes
éte.ient lwi I1tenues dans 1 e
devoir par une si
gre.nde
terreur
qu' i 1
arri ve.i t
très
rarement
qu'il
y
eut
mort
d'homme
et
c'éte.it
un
crime
que
l'on
regardait
comme
extr~or
din~ire
et
impie
i l
(Lucullus)
estima
qu'il
n 'y
a \\'e. i t
pas
eu
besoi n
alors
d'une
acti on
judiciaire
contre
les
actes
de
\\'i 01 ence
cO!1U11i s
par
une
réuni on
d' hommes
armés.
En
effet,
instituer
une
loi
ou
une
e.ction judiciaire contre
un attentat
dont
i l
ne
se
présentait
pas
d'exemple,
cela
eût
semblé
plutôt
en
donner
l'idée
qu'empêcher
qu'il se produise.
l{ais
de
notre
temps
où
et
la
suite
de
cette
guerre
ci\\Ti1e
qui
a
été
longue,
on
s'était
ba.bitué
à
a.\\'oir
moins
de
scrupules
de
recourir
~ux ~rmes,
i l
a
pensé
qu'il
était
nécesse.ire
et
de
donner
une
action
contre
l'ensemble
tout
entier
des
esc1a\\Tes
d'une
lMison,
quand
i l
était
dit
que
le
crime
e. \\'ai t
été
COlIllIJis
par
cet
ensembl e
d'esclaves,
et
de
donner
un
tribunal
de
récupérateurs
pour
faire
juger
l'affa.ire
le
plus
tôt
possible,
et
d'établir
une
peine
plus gra\\'e afin de comprimer l'aude.ce par la.
terreur . . . ))
(90)
La
meilleure
forme
de
répression
de
l'audacia
que
souligne
Cicéron
à
travers
cet
édit
prétorien
qui
succède
d ' a i l l e u r s
à
ct 1 autres
lois
existantes
(91),
ne
réside j pour
des
fai t s
d'extrême
danger
pour
la
cité
et
provoqués
par des esclaves,
que
dans
la
crux.
Répugnant,
violent,
agressif,
ce
supplicium est
une
forme
de
terr'eur
hautement
dis'3uasive
et
paci..Aicatrice,
car
elle
induit
les
e'=-claves
dans
la
peur
et
les
conduit
à
abandonner
toutes
les
velléités
insurbordina-
-
231 -
trices qui
les
tentent
tant.
En
les
privant
de
sépulture
par
leur
abandon
en
pleine
nature,
elle
laisse
leurs
âmes
el-rantes
et
ne
leur
assure
pas
le
repos
éternel
(92).
Elle
en
fait
donc
des
instables
permanents
auxquels
la
quiétude
échappe
(93).
N'est-ce
pas
l ' a t r o c i t é
de
la
peine,
jointe
aux
mesures
privées
des
maî tres
qui
a
instauré
la
tranquillité
de
la
Sicile
et
le
refus
des
révoltes
chez
les
esclaves ?
({Ancien
est
le
fait
que
je
raconterai
et
\\'U
la
sé\\'éri té
de
l'exemple,
aucun
de
vous
peut-être
ne
l'ignore.
On
a\\'ait
apporté
un
gros
sa.nglier
à
L.
Domitius,
préteur
en
Sicile.
Surpris
de
ce
beau
coup,
i l
s'in-
forma.
de
l'elUteur.
Axant
appris
que
c'était
le
berger de certa.in propriétaire,
i l
le
fit
appeler
de\\'ant
lui
;
l'esclave
accourut
de\\'ant
le
préteur
a\\'ec
empressement,
comme
s ' i l
allait
rece\\'oir éloges et récompenses;
Domi t i us 1 ui
dem3.nda
cO!!W1ent
11
a \\'03.1 t
a bo3. t tu
cette
si
énorme
bête
l'autre
répondit
avec
un
épieu;
aussitôt
après,
sur
l'ordre
du préteur,
i l
fut
mis en croix
.. n
(94)
Sanction
rude
(95)
reconnait
Cicéron,
comme
pour
marquer
son
caractère
hautement
écrasant.
I l l e
trouve
cependant
normal,
légitime
pour
tous ceux
qui
veulent
introduire
un
branle-bas
dans
la
cité
(96).
La
crux
est
une
peine
juste
qui
compense
la
gravité
de
l ' a c t e
des
fugitiui.
Elle
n'est
que
la
résu l ta.nte
de
l ' odium
qu' i 15
déclenchent
chez
les
gens
de
bien et
de
l'infamie
qu 1 i l s
nourrissent
parmi
les
membres du
Sénat
(97).
Elle
n'est
par
ccmséquent,
que
la
sentance
que
se doit
de
prononcer un citoyen humain:
Etenilll
quaero,
si
quis
pater
fa.l1dlias,
liberis
suis
a
serUD
interfectis,
uxore
occisa.,
incensa
do11JO.
supplicium
de
seruis
Don
quam
acerbissiJJP.JJII
su:mpser-it.
utru11I
l s
-
232 -
clemens
ac
misericors
Bn
inhumanlssimus
et
erudelissimus
esse
uideatur
?
Nihi
uero
iIilpOrtunus
ae
ferreus,
qui
non
dol ore
et
erueia tu
naeent i s
suum
dolorem
crucia tumque
lenierit (98)
Les
esclaves
utilisant
le
ueneficium
pour
apporter
la
mort,
s' y
trouvent
assujettis
et
cruellement
frappés
eux
aussi
( 99).
Ma i s
eux,
pa i e nt
le
f ru i t
de
leu r
co mp l ici té
et
de
leur
soumission
à
la
uoluntas
domini.
De
toute
façon,
une
échappatoire
n'eût
pas
été
possible,
vu
les
inJplications
de
la
lex
cornelia
de
s i c a r i i s et
uenificiis.
Promulguée
en
81
par
le
dictateur
Sulla,
elle
englobait
dans
les
mêmes
sanc-
tions
((celui
qui
a
fabriqué
ou
a.ura
fabriqué
du
poison
tous,
h01!11Des,
femmes,
gens
de
na. i ssance
1 i bre,
escla \\Tes)}
flOO)
Que
dire
pour
clore
ce
passage
sur
la
violence?
Arrivée
à
un
niveau
très
élevé,
elle
est
la
matérialisation
d'une
crise
aiguë
de
la
société.
Puisqu'à
travers
elle,
ce
sont
les
structures
qui
s'effilochent,
volent
en éclats,
laissant
la cité
dégarnie
et
privée
d'éléments
susceptibles d'assurer
sa
cohésion,
son
homogénéi té.
La
violence
étant
si tuée
aux
antipodes de
la
paix,
elle conduit
vers
le
doute
de
tous
les
citoyens,
en
même
temps
qu'elle
les
livre
en
pâture
aux
organisations des foyers de tension.
Les
esclaves
y
part ici pent
en
grande
part ie,
démontrant
par
là
même
le
dualisme
qui
les
caractérise,
ainsi
que
leur
incontournable
présence
au
sein
de
tous
les
mouvements
d'envergure
que
cannait
la
fin
de
la
République.
En
acquérant
l'affranchissement,
que deviennent-ils?
-
233 -
N,:> t. es
-_ .._--
- - - - -
1 -
Br~t"
XXII,
85
Cum
i~ sjl~~
silJ
fJctJ
(J~des ~ss~t ~Dtiq~~ h~~in~s
int~rfuti, if~si,~ulJr~h'r~·u~ l.M'iliJ.. PJrtili ~tiJM liberi soci~tJtis eh's q~'J~
picJrIU dl! P, CON1I!1iO L, lf~',IMlio cl!.'lsNib~ls rl!deliisset
2 -
La l"i des
XlI Tables en a fait une exception, par exeMple p,)ur celui qui
slJrprend un voleur en fla'3rant délit, de nuit,
Pro /filon"
Ill,
9 : ql.'odsi
dl.fOd~ti.~
tab!J1J~
,?~::t:.Jtnt.(m
/I.lrell
I.t"!./oql..'o
ll~do,
diurruill
.J!it~,r
~j
s:!
tel:)
de fef1d1! rI! t, irrtl!rlici imp:,'lle :Jol:Jen.'nt;
.3 -
Dans le chapitre précédent, nous avons tontré le caractère hétérogène des hommes
de lIain utilisés par les Rouins p',ur re~plir leurs desseins, S'y rHérer pour
plus aMple co~préhension,
4 -
Pro
lf1.l0n"
XXII,
S8
Quelle
réc"lapense
en
effet
peut
assez
payer
le
dévoui:ll\\ent, la bra'il)Ure, la fi,jélité d'esclaves auxque15 on doit la vie?
5 -
,4ft"
1V, 3, .3,
ft -
,'l,; .(
........ -!.I, ,
IY, .3, 2,
7 -
ibid"
IV 1 .3 1 4,
9 -
Co••e ici, aD ~ la suite de l'attaque Menée par la bande de Clodius,
ce sont les citoyens seuls qui sont eentionnés parti les victimes, Ainsi dans le
Pro Sest"
XXXIX,
e.5
Foruil
corporib:is
Cit.'itlfl ,/fo,unorwI cOflstrJh'lI
CJ~d~
n>)(t~rnJ
9 -
Pro T~1J"
VI, 14 : /)iAfidio fere pl:Jris inclift:.',,' eXl.'stis uillis ~',~In:'b~s,
10
ibid"
VIII, 19 : Creui illo tl!iNpore q, CJti ,4,"IIUIiJ.7i hOflinis hon~sti, q~'l!fI :Jos
.'losti5, dl./o ho~i.'l~s occid~Nint " fWnJ .11 iJ lJ:c~runt " pJ5SÙl uJ~'JbJnt:,/r J,",uti
Mn obswrl! '"
Jgros, :JiJs d~niq:J1! inf~5tJ5 ,~Jb~bJnt,
11 -
Pro l1i10n"
XX, 50,
12 -
ibid"
ill~ IJtro~:J1! ofCU1tJtor 100..'s,
13 -
ibid"
XX
lIid~JIIUS n:Jnc id q:,'od CJput est, 10(IJS Jd i~sidi1s j Ill! ips~
1
53
ubi (o,"Igressi SU," t,
utri tJ/1d~fI luerit Jptior '"
,4.?t~ f:J,,,dum Clodi, 1j'~(0 in
hmdo propt~r insJnJs illu sub5trudio.?~s ,"
edito Jd~(~rsJri Jtq~~ I!xc~lso
10fO sup~rjor~~ l' 1
14 -
/1 In L, CJt"
VIII-X, 18, 22,
SalI, /)J: Cor. CJt"
XVI - XVIII, 70-72,
15 -
Pro l1ilon"
XX, ~3
hc~inu~ ualentiu~
If, -
f'r~ T~lI"
VIII, 18: MdlHi! istl! '" in 5Jlt~'Il.' f:O~ijr.I!S I!I~ctos MXUUS a.<::,ùs
et !Jiribt.'j ~t iis .Jr'~II,J, ~"f!""J~ f!)iq:"~ ,J,.jbili...i .Jtq!..'~ Jpt.3 ~SS~,r~t,
17 -
ibid"
lX,
21
Ph',Ü~J ,'k'de,
jJ'
ll!rl!
WII
lux Jppropi:iq~'.lreti Jd illud
Jl!dil ù hi,fi..
d~ qliO Jnt~J d.'xi, quod erJt in c~nturiJ PoPt.'1 i.J!7J, SI!,"t.'l P, FJbi
lr~ql.i~nt~5 ~r,wJ.t."q:i~ /.)~nit.-'nt ,.' inirl)it:'ltI !psi sibi !.li ',(.Jnt.fq!i~ p.Jt~lJ:."i~l",t /
-
234 -
/10.'IIines Mgni preti SerliOS!'!,
hilli net Opi,'l,Mtes Jdvri:.'nttH " q:.'od luile fJet:.,
luit..
,'le-:.,':.'e
tJIIJ
!'t.'itl..'5
,'le-q:.'e
rep:.'gf':Jde-s
!ldti
JrA.'Jti
p.uJtiq:.'e
19cidt.mt
t.J/?t~tl"tqa~ odi cr[id~litati5q~t~ h.Jb!.,'~rfjntl f.it ~os O/l/~~S ~"fl./rgt.'liJ),?ib!..t'5 jn'5~ttiJ
r~l iq:.!~t~",t, n~, si q:'le.~.1 5~/rj/ji/./!i,'t .1:: Spif.J.~t~.f eiiJo'I r~l iq!.li5S~,r7tJ A'inor iis
ho/?or "',Jb~ r~ !./.,Ir,
le -
Pro .'filon"
X, 29 : llli q:,'i UJ,'lt C:"II Clodio.. ~'lJdiis edtgtis PUtill returrne
Jd rJedJl,..
:.'t J
tergo Jdorirentar .'filo,')e., p.uti,' q:.'od hU,'lt iJII in!erledwll
p:.'!uent,
cudere intipi:.'nt eias seruos qui post nJnt,
Ex quib:"5 q:"i Jnùlo
fide-li in dominum et prJesenti luerunt, pJrtill occisi sant,
19 -
Pro CJel, , XXIV, se : Ipsi:.'s Jt)!ell ve.'leni q:"Je rJtio fingi!:.'r ? Vbi q:.'usi!ulI
est,
quei' Jd /l'od:''.'1 pJrJtulI!
quo puto,
c:.,i,
quo in lNO tfJdituM ? HJbuisse
.Jiu.'1t ~.io.,i t..li.~ql.i~ ~i~/5 ~ss~ ~"p~ttlilt in 5~r!iO ~"f:jod.Jlr Jd ~.Jlf r~. iPS.?J.,f ,."ar.Jt~1
(t.'ù.'s pereeleri interitu esse .lb hoc cOMprobJtulI uenenUlI,
20 -
Tite-live en rapporte par ailleurs un notbre ilipressi,jnnant, parai lequel MUS
n'oublierons pas de citer la fa~H:use afhire dèS Bacchanales en 186 a\\', J,-C.,
qui 3IIèlU près de 2 000 con'::!atnations à ROlle et dans l'Italie. XXXIX-XLI, Hist,
,Ro,.'"
VIII - XI X,
21 -
Pro Cluent"
X, 30 : Qui J.'x~'ri suu Cluefltiu, q:"Je Jmita h:"iJ.'s HJbiti fuit, WII
ipse POCJ.'!:.'tI d~disset,
subi to i l1J in lediJ potione exc hllJui t se IJIJÜlll) W.f1
dolor~ e,fori net diutfus !,tù:it quu locutJ est,. nJit il! ipso sei'~,;,)ne .'Ioc et
l.'ociferJtione ,'lIor!t.'J est, Et Jd hJ!?L" lIortell tJII repentinJ. :"OL"esque t.torientis
O~llliJ prJetereJ qt,tu sole-nt esse indiffJ et I..estigfJ I..eneni in iJ1iu~5 /lor/uu
corpor~ h'e-ra.'?t,
22
De A9 à SA,
23 -
En écartant au préalable Britannicus,le véritable fils de l'eœpereur,
Suétone
Cl"
XLI II 1
1A7
!J"tib
~:a&u :"i tu signJ 'iUJedJ.f nu obswrJ
punitentis de IIJtritlonio ,4gfJ~"'pinJe deque Neronis Jdoptione d~derJt '"
et
s:.'bi,?tk obJ.'i:"1I '5 ibi Br i tJfiniWII .ut ius co.tplexas noriJ tus est 1
·I.'t aescere t
rJtione-~q:.'~ J SI:' Oll.'litilll futon'.f Jaiperet· '"
CUN iMpabi
ten~roque Jdhuc,
qUJfldo stJtt.irJ perllitteret, togJII due destinuset, Jdiedt : 'lit tJndem plJp:.'lus
l?, :.'er:"11 CJesJfeli hab~J t',
2A -
III Ife""
1Il, 9 : Pub 1ù iJ
ql..Je Postl.lltiull
Albint..'m COi1sulell,
it~ill LiciniJ..
qYJ~ C1Judi:.~ Asellall,
uiros
5[.'05,
lJe'?::l'10
n~fJti,,'rJt~t,
/'or~"'Pinq!.,l.'Jr!j."
d~Cl'~tJ.J
strJ.'?gt.'lJtJ~ sant,
25 -
Pline l'Ancien: H, if. HVI!!, , 117: Asinino lJde poto l.'~n~nJ resting:.'entur,
pewliJr;ter si hyosL")'J/I!:""" pot:"11 sit, JfJt I..i5CUII, Jl.'t (ùntJ
J:.'t l~pus tlJrinus,
1
Jut ~~otJrpJthuIII Jl.'t phJriton, lut dorr~nj~" et si toagul:.~ Jlitui notuerit :
,f/.J,f id q:..'oq~l~ fi~nena,~l ~st pri.fJ lJt!is Cl..'.Jg!il.Jtion~1
26 -
Pro Q,
,/io5t.
COli"
X, 28 : f/tNnÙJII ille Mc cons/iUt pJ:"lispu, ,t'j/II q:"<Jq:.'e
."~C~S5e ~'S t p,J!,ll fit.. f 1.1~U.(J.,'rJr i, pjl'!arg~/!l t:.r, S-l tt..l,r' il p,r':Jpr i!..lll f-lnni die is l!",fiss~1
At ego tot~, Rosti luisse t~ntendlJ, Quie ~rJt eni~ fJ.'?ni ? Corpus, vuid Rosti ?
Distip1in-l,
F-l::ies ,f'1on ~r-lt.,
-ll'S er-lt çr~!i~sJ., Ex q!l-l p.Jrt~ ~r.Jt F-lr~ni
.~O.f'1
~r.3t ifS IJ1! "1 ~x ql..l.3 _~Jrt~ er-lt Rosti, ,5"pli!../5 er-lt HS (({l)))/))) / ",~,'.4:..' ~rulJ
illt,NII ~x tr!.,/"'f'J) ::~rporis sp~[t.Jb-ltl
5~d ~x .Jrtjli(i~ (OllleO l:-=sti,~\\.ib-lt .: nJI.'
:'11.3 ~'~~br-l ,f1~t~".e p~/' 5~ nvn j,fplil..'s p:..-~t~r-lnt d:'.l~d~[...r",'J a~tis, dis:.,.. jcl:n.3. q:.t.j~
nJt ,'lb ho:" frJdltJ, h'(JbJt S~ M,'l lur:.'s ,ifS (({UN
-
235 -
27 -
Il!! lU;' , Xl, :39
meritass~ pr~dat~r,
28 -
Fr,-' Q,
R05C,
Co~"
Xl, 32 : fA'u d~irl,,~ st.'nt CO!lSUUt.! ? "FJ!lurgt.'m·,
irlq~it,
H.i?!.'nc s~r!..'t.(A,1 (C,.~dNn:,i'''~I''t,l
/(,
FI.j:..'i~ls r.jrq!..tir']i~r']sjs q!Jid~M int~rlecit,
.~Q -
ibid"
Lite l."ont~stJt.j, itidicio d.J.,(tr~i iniuria con5titt.'t~'1 t!., 5jn~ lf~ (!)II F1Jt.'io
duidisti, Utruil pro dùüdia pJrt~ a,rl pro r~ totJ ? F1Jnit.'s dÙJll .' ~trt.'ll pro A'~
Jn et pro lU
tJ:. pro te ? Fro ft~ .' pot~i exeflplo j'ultorum " 1ic itt.'.f est,' i ur~
f~cen'nt Mt.'Jti " ni/Ill in n
re
tibi iniuriJe
feci,
Pete tu h't.'/I,
exige et
.j!.(l~r, q!..fod d~b~t!il' " 5tiJlI q~li5qu~ p.j".t~1I i!iris p055id~.jt ~t p~r5eqtJ.jtt,.tr, - ',4t
enim h' t~UAl negdiulR gessisti bene" - Sere et tu tUUIlI ben~,
-
"!'fJgno tu h.'JfIt
di~idiaflt pJrtellt decidisti' - !'fJgno et tu t~J/I part~N d~ci,,~. - "HS Il (((1))) tu
JbstuJisti' - (Si fit hoc uero) HS Il (((/),I) h' Jt.'fu.
30 -
ibid"
V, 1.5,
31 -
ibid"
X, XI, 30 : Q~id sciret ille, pupJuci Jni/udvutebJnt, !.'bi d/dicisset,
o~nes q~Jer~bant " nihi1 Jb hoc prJ~t.~ ~t per~ers~fIt produci posse JrbitrJbJntur.
Si I.'eniret
Jb
StJtiJio,
tJ.'lietsi utificio RoscJt.'1I superJret,
.!dspùue !'1eilO
p,-'sset " nello eili.,
sicut ex ittprobo pJtre probu.1 fiJit.'fI !lJsci..
sic J pessillo
,I)istrion~ bonu. co.toedum f iui poss~ existituret. Qui.! ueni~bJt J /10scio, plus
etiJm scire, qUJ, sciebJt, uid~bJtur. Quod itell nt.per in [rote cOflo~do ~s~ ~enit
" qui poste.! qt.'JfI ~ scun.! Mn modo sibiJi5,
sed etiu conuic io e,~p/odebJtur,
sJct.'t in JrJll COflft.'gJt in i'luft/s dOllt.'II, di sciplinJfI, pJ troc i nit.'''·, ,'10t'i~17 .' i tJq~e
perbret.'i
teMpore,
qui
,'1~ in Muissh,i5 quidell erJt histrionibt.'s,
ad primos
p~r!.lenit (OA,IO~do5,
32-
J.E, Plispoulet, LJ l'ùpJr1em~ntJireJRo,'It'e,
p, 230,
33 -
Fro lff.lon., V, 13 : HJl7c t.'l:ro q!.Ja~stiol7~fI, ~tsi n/)17 est iniqt.'iJ., .'1~~qt.'allt fJ.':ef7
s~rl,J tus cons t j tt/~r~J.iJg PI"tJ!1! t, ErJnt ~ni. l~g(!$, erant qUiS t jOt!~s 'i~J d~ t.j~d~
t.'e1 de ui,
3A -
Didiol7nJir~ I!tYA1o!ogiqu~ d~ 1J 1Jngl.'~ 1atin~ .' Histoire d~s I.'Ots, p, 550,
3S -
I/lnst, O."Jt., IV, 1 : l'us J/tUJ ql.'J~stionl:/I unJ lJtendi n~cl!ssitat~,'II t.'ocet,
JlterJ 5J~pe etia. Cal.'5JII lJlsJ dicendi, I.,'uod .!liis patùntiJ lui1e flil!nduil.'l11
fJciat, Jlii5 infir~itJs necessJri~m,
36 -
Pro Clt.'~nl"
LXVI, 187 : I(t.'uro Jbs te, OppiJilfce, snt.'o tt.'o llico:1trato q~id
f Je tt.'ll esse dicJ5,
ql.'e. tt.',
Ct.'11 hililC br~t.'i te.pore Jat.'SJ turt.'s ~sses, ,Rofilall
deduc~re,
dare
potestateM
indicJndi,
inco/vlle"
d~nique servare qva~stiol7i,
s~ruu~ hi5 it.'dic ib/./5, setuJre huù te.~pori debt.'Js fi.
37 -
PJt. OrJt., XIV, 51,
?Q -
".
o~ suppl, 1
VI,
lA
IInb~r.!
atqt.'e
jgn~s
.. t
il1J
extrllf,'lJ
ad
SIJDp/Ùil.'I,1
dJ,f.'nJ t~)r:.,/AII,l
,let:..'.
[~t.~rOt~\\w (~t) ct't..'(iJof.:.i5 ~t Cl'fi:::, Hisc~ ........1N7i.b:,,/'S "S~./p;..,11(11S
5t.·nt hbuati,
!p =
Pro C. IR~b'l V, 16 : lfol'5 dr!.~iqu~ si p."oP~/7itt.',", i,,, ljb~rt.Jt~ ~;~,"'!J./~~"r, t.J.rrul~;-(
t.'~ro et obdt.'ctio (ap1t1s et no~en 1psum Cr~(lS absit non ~odo J (orpor~ (ll.'ium
.1?o)~,lal?l..'rt.iA.1 sed etj.J.,~ J (:..'gr:it.J!j/...v,~, 0(/)/15/ a:.,/tiÔf.,/S, H.jt&r~ ~ni,,,' J..'",'n:um ".~r!.JIf,l n·~1'"
-
236 -
s.)lull euel'1tus atque perpessio se,j etiall
c"n.jic il',
exspectatio,
"enti.,
ipsa
denique IndIgna ciue Ro~ano atque ho~ine libero est,
Al -
f)~ fl.'ppL, VIII, le : ,4p<~!!I)!'iu/II, 1::),I,'ÙI~,fI lorl.op!~tisSÙII.',f,', qUI si ,f:.';itilJi !:~lh'#1
ln Sic iJiJ
luttent.,
J.1IP.'i $SU,'H l,,'dl.'t'.'H .ufi tinè t,
beJJ i
h';i UIJO.'lJil nO.t i ."le,
in1iciJ C,Jl.iSJ! in !i,ir~(lJ tJ)ni~cjt, Ser!.i05 qf.'OS ip5~ d~ t'onsilii 5~l1tentj,.f b~11i
lj(i~l1di (Jf}5J (~'t75~r:sis5e inditJ!J!Ê,; ~!..,s 5i,ri~ (!.,r!silii 5~nt~,rJtiJ 5[,(4 spont~
O,Mi slJpplicio libn.udt.
A2 -
ib.'d., Vl,lA,
PJrt, arJt"
UXIV, 118,
Obis -
Pour la portée de cette vÎdence, se référer pH exellple ! ho Ch'~,?t., LXIII,
176-177 •
U -
C'est ce que peut nous inspirer la réfle:don de Quintilien,
ll/,?st. orat"
IV,
125 : JI"I p~.'s::I.'I:rJI.'~rit in ::0 ql.'od cl)~p;:rJt,
ao? a!iqlJid d!)h'r~ Iw/aunit, c'est
dans cet ordre d'idée que Cicéron a (o~battu ardef.lent Théophraste qui a soutenu
l'Hée du b"nheur huruin dans la torture, Voir II r/,lsc., IX, 2A,
Ubis -
Pro Cul"
XXIII, 57 : Cui denique cOllllisit ? quo Jdiutore /,ISUS est, qvo scio,
:;:"0 ~·o/lscio ? Cui ta..,tl.'iI fal.-i,'?:"s, ~-ui se, cui SJllit~1I sl.'a.e' credidit ? $;:rl.'iS,'I;:
A.'~'liujs ? SiL" e..,M ~st ob iedu.f, Et UJt tall dellens hic, cui Il>JS i.?':l~,'1Ù/i1l t~d~
tribuitis, eth'lsi,
cetera iniilicJ oration~ deJnlliJi5, ut >Jlulis sUJS lodu.'1as
031 i~nis ser!iis CO,filliiteret ? ,4t quibus seruis ? l?elut eni. lIa'1,'?op;:re id ipsl.'lI
/iS,~, qws i,'lt;:l!eg~baJ non cl).fllII/,Ini co,'1dicio.?e seNiJ&utis uti, s~d liantius
1ib~rù..s fJ.,iliJrù.'sl,l:.'e Cl.'k dOllina !ii:.';: ..e ? Quis ~nim hoc non !ild~t,. iI.'dfces,
J!Jt quis ig.'10l'Jt,
in ~i!is I.'odi do,1.lo, in qUJ l'aterla,ffili.Js ,,'~p~tri::i~ ~ore uftiat,
in qua nihil g~rJJur quod loras proleN.','?d:.-. siJ,.
i.? qua
lustrJ.
! ibid/nes,
luxurili's,
OIMfJ denique i,'?J:.'ditJ uitiJ Je lla.gitiJ 1J0rsen/ur, Mc '5;:rl.'os .'10."1
~ss~ servos, quibu5 o.niJ cOll4ittJntur per quos ;erantllr, qui :.~.'se.?tur isde. Jn
u,-,'hoptJtib:.'s, ql.libus ,xwlta. uedJod:.'r,
ad quos Jliql.'antu. etia." Ii'X coUdiHis
su~ptibu5 JC lllxu.'ie redllndet ?
AS -
Pro ~ilon"
UII, 59 : Sed tJtlen luior~s nostri in dOllinu. ql.'J~rj .?o1llen'nt, ,?Oo'7
q:"iJ non poss~t l.'e."l.'l1 imie,'1ir i, s~d l.j':"iJ uideba tur illdigo?:.'. li't dot~ini IMde ipsa
fr is t iliS,
A~ -
Clodius en fut victile : ibid"UVIl, 73 : L. Lf./Wl1U5 ilJl'ati.i5 s;: q:.'aestùniblls
habitis dixit cl)llperiss~, eUII, qui ci:"~II, qUI!,'I s~nah's,
qu~,.' P>Jpu!:.'s "NIIJn:.'s,
q:.~m Oh\\n~s ge.?tes tJrbi5 Je :.'it~e cilJh'lI cl)ns~r:.'ato.'ell itJdicuJnt, senJorUII J.'lIis
~,.\\·ter.~in,J/,.tit,
~7 -
l'l'!)
."~~'. Dei!.,t
l, 3 : rugit/tif at/tell d~',tin!,/Il ~'[t-'san"tis, ~t d~n.'/n~(,9.' .Eb5~rd~M
' l
et d~'/linull ,J,fùissi,I'I.W nos! ..àe r~ipublica~,
C:'/.fI I)S liidebJlI,
cu,e' I.'erba a-l.'diebaM,
,'lM
tJII1
adllictJ,f
r~giJm CO,'ldùioo'7::/I dol~ball q:"JJl de forh'.'?is C~'I1,~lI.'o'7jb:.'s
existiAl~sceba#t', ,/(a,f1 cl.'m 1I!!),"e IUÙ."iim de s;:."uo in d~#.'inl.'Sf ,'?e t!)Nllff1tiS ql.'id~.fI
q/.JJari
Jif~.Jt,
in q:,/J q!./J~'5tior!~
dolor ~lice."e I.lel'.J.' t/~f~1: pcs-sit et/J,~ JO
i,I'?!.tlito.
~:(Ort:t.,t5 es! 5:tl'/,'f."f$ q:.r,i,l q!,i~1I in ~~·:.(le~" Jppe.'lJr~ ,,,on poss::t, ~!.r.11 .3[[!..;'S~t
1
Sl,.~1/"'(t!.,i5,
A8 -
C~la perset de se ~ettr~ hors d'attelnte des propos de mauvaise fOl et de gens
impt.lljents PJrt,
Ord!",
XIV, A9:
,AfJ,t ~t de toto g~",~r~ t~$t/!."l!J.
~~:".l,~,l .rd 'S~'!
J,ry/~'r"u.r,~I,
SJ~p~ ~-li},.·~nJ..,-(!..(' èS! lsi) ~! JtgJ.~~l~l~tJ /'~."!jt, ~'S'1~ ~.".:."'{:'.":'4
!~'St ..I,":"",'1..f,J
J~'t~m !.io)u,~t.lt~/~ / t.{!~l"d!,it:.~!"/e ~X~t~tplj'S_I si qf.(is t~stib!.rs cr~d.'!:,,',~.' ,,,:)t~ si! " ~t
d~ sj.~g!..(l:'s !es!!bU5, si .7Jf.&'I,j' ..:t !)J,"f, si l~!J,I~s, si C~(.~I ignoA.'.rni.:,,! s:' sp~
5:
-
237 -
I,'et:.',
si ir~[!,.l,,,diJ/ si /fisericordiJ ..'.pt.tlsi,
si pr.Je~iJ), si gr.Jt,iJ .Jddl)~.. tj 1
[o.f.'P.Jr~.r,diq:..r~ (t.{,~ S/,.Ip~rior~ J!i~... tJ,)rjtJt~ t~5tit.'Alfl q!.(ib~15 tJ/~~n 'r~dit!J&' no,? sit,
J9 -
IX
2.4-26 : r~5t~5 q:.tid .3i!.fnt ? P, Verti.'i:,,/5, prJ.'Pi,,,~':..t:'15 ~~b/.Jti, 5~ 14~b&'tio, ~"fjl,l
I
,u,~IJ t is sU!Jis t"~f1iss~ adi.hl(J t!J", Qi/id pruter~J ? fl/i5S~ complt.'r i5 Jrutos,
v!.iid JJjtid ? ,f,'inJ!:.Ni' ~sse ,4~b!.rti!.(,t (.J~[ir:.Jel
~:.rid ~go d~ hoc t~st~ dj~"Jlf r~i5i
,~oc,
ruip~rJtiN~s,
I./t n~ iddrco ,lIini.'S ~i uedoltis qt.'od bO/lo .ir.l.'s idof1~I.'s
hJb~tl.'r, sed ideo uedoltis, ql/od ex illJ pol."!e id diu't ql/od illi tolt.'Sole IIJxi.,~
~st J1ierll.!m ? ,4, r~r~ntit.'s J1tu t~stis, non lIodo ~eb!Jtit.'t1 sed ~tiJfl S~ pessi,,,i
,1Jci,wris ,uquit, /:1 ,4ebuti!Jll ,~oc dieit "NutoS bO.'lfll!!S luiss!! " de se .,wt!!11 ,I)oc
pr..edicolt ~l1tiodlO, ,4ebl.'ii SIU!.'O, se iK!p~rHSe 1.'1 in Col~cir.JM oldl,ll!l1ientl!fI CUI/
lerro irl!JJde,"l!t,
O~if1d~ L. Caelius no,; S~llt.'l' ,4ebutilNJ W,i, .u.I'oltis dixit ll/isse
rOAlp/t..'rib!Js, UUI.'M ~tiollil ~-I./m adtJocatis pnpal.'d, ~o uenisse CJeeùw,.
SO -
Fro Sex. ,'?M, , .4J;!~r., XXVIII, 77 : T~ .'1t/flC app~110, P. Seipio,
t~ ~, l1~te/1~ "
~(obi5 Jdl,.'oCJtis !iJ.Jbis .Jg~ntjb!.i5,1 J1 fqf)oti~n5 dtJ~5 5~r:.105 pJt~rn05 in qt..'.J~5ti~n~1J
Jb Jdl)ersuiis S~,\\', Roseil.'s postu/J!Jit : '~lIif1jstin~
T,
!fos."iu"
rUlJsJr~ ?
QI.'id? Ji s~rl.'i éi SUllt ? ". Eth" ,ill.'nc :Ji ~:r iis q!..'o2lYo2i~r ego post!Jl0, Mc
Molt Jtql./~ obseaai,
51 -
E, Cuq les décrit COlllte particuli~rellent
lourdes. Aprés avoir été frappé de
verges ju~qu'au san'J, le parricide était cousu vivant dans un cu//ei.'s, grand sac
de cuir que les Romains e~ployaient pour le transport du vin et de l 'huile, Dans
ce sac, on enfermait avec lui une vipére, un coq, un chien et un singe vivants:
la vipére parce qu'en nai~sant elle déchire le ventre de sa r.ére ; le coq, parce
qu'il bat souvent sa Ilèl'e ; le chien parce qu'il est le SYMbole de la rage; le
'inge à cause de sa re':isertblance avec l'holille, Le CI.'1/el.'s était ensuite jeté!
la 1er,
52 -
Pro /filofl., XXII, €JO
: ,4]e :.'~r~' q:"o2e ero2t o2l.,t qt/a/is ql.'oll!stio ? ·H~t.'s tl.'.. ,'?I.',lio·
I.'erbi CJU5J' eo2t.'~ sis lJentiJr~, Clodius ir.sidiu l~cil /filoni ? "reus' . CutJ
Cw:r:.
'/'11/11.:5
l~rit', SpuJiol lib~rtH, quid ,l)oU ql/JutiOfl~ arti!Js ? Sl.'bito
Jdrepti in qUJ~siil.,)n~1I taRien s~pe,"Jntur i uteris et in JfCH eonieiuni!Jr, ne
quis eUIl iis colloq!Ji possii, Hi e~ntl.~ dies pene! Jeeusatore~ r~f luiss~nt, ab
I!O ipso {Ja!Jsoltor~,l pro"''',/Cii sI/nt. ~:.'id nu quustiOf1~ diei potut int~gri:Js,
quid in[~rr~ptitJ5 ?
53 -
11, /~ichel, Les rdppor/s d~ IJ rh~toriqu~ et de lJ pMlosopbi~ dol.'lS l'oe!JVr~ de
Cic~ron : RuMrches SiN l~s londe,f~r.t5 pMlos"-'PMql.'n de l'art de pUS!JJdu, p,
495.
54 -
T.)ute
tentative éventée
des
esclaves,
peut
entre 1ner
leur
s,)ullission !
la
qf.\\Jes t io etc e fa isant,
1es uene r i
ré "é 1er 1e'j dess,jus de 1eur pro jet, Ol!
SI.p,pl., YI, 12 : Tu q~~s sl!r:Jos Jr~J eJperl! I!t b~ll!Jm lJ(~re in Si.il1a v~luijsl!
ro~','1Or.:!, ~t d~ ror:s}lii S~l1t~ntia i.'1dirJras, h~'s Jd sf.~'Plicit.',~.. iJllI 10':).".:' l:ah'N...'1I
trolditos ~,'( lIi'dia 110ft!! i'npefe u
/ ib.:rolre JUS!J! es.
~.s -
R, Etienne, "Cicér,)n et i 'esclav3'2eu irl Hd~s dl.' coll,'que d'l1Htoi."1! SN/ale',
p, 83 sqq.
57 -
Pro C/I.'~nt., LXIII, 176
5e -
ibid"
LXIIl, ln-ln : rNIti~ntis O!)!fiibi.'s :"él!.~'I!.'1ti5Si,~ljs qI.'J~!1t:.lr, CI/,If ~ssl!.,'1i
J.'umi 5~rl.)~r~'m ~t 5p~ et ttetu t~,'N~tJti fit Jliq/./id in q:"IJe5ti~.',~ dlt~r~l?t, t.j~~n,
lit
drbitrot',
.J~I,torit.Jt~ ~~dt-/OtJtO/,/j,~' Jdd!Jcti ir: :'f::.I·i!Jt~ m.Jn5~runt ,~~q:..(~ S~
-
238 -
q!.ficq:'IJAt' scir~ dix~r!.'t1t,
(}f.,.la~stjJJ i1io di~ d~ Jllitort.'11 s~l,t~ntiJ di.~isSJ est,
$Jtf5 longo in!.eri.'Jllo post itI:YI.'~" Jdl.'OCJf?tlH,
HJb~ttH dl! in!e;,"o qlJJl!stfo ;
r~:.rllJ fifs J~r,'~t,t~/':,ill.l .j~·:.·~rrj/~o/,!,,/,(f pr.j~t~r.'littit!.'r " J&,~,t'5Jri .j~df.iO~-Jti et /.j1J
:.'J x
leNI! p~'SSI!,
l!.irlYI!
cn'dl!! is
J tqf.':!
i,l'PO'" ttinJ
.ul ilu
sibi
nl!qf.'4Qf.'JbI f.'t
Spl!'"JSSl!t eJ qf.!aI! (ogitJssl!t p,"O::I!dl!'"l!,
C:.rl.f iJ.' torto," dtqlJl! I!ssenf. L'ti$l!ntJ
ipSJ dell!isJ neq!.'e tuen i1!d linl!iI lJl:l!re :"I!l lI! t, qlJidJll e,o( aduocJ!is, .~o"'o I!t
hono,"ib:.'s p'-'P1.'li ornat:.'s et S:"i~IU ,.'irtu!e p,"uditus, in!l!llegl!rl! 51! di.l'i! Mn id
Jgi ut IIl!n.'. in:"I!!?ùl!ttJr sl!d IJt aliqt.'id falsi dicl!,"e coguen!t.'r, Ho~' postql.'J/I
cl!!ui
Cot~p,"obart.'!?t, ex oblni:"bI sl!ntl!ntiJ ::ons!i!:.'ti.'11 est SJtis lIidui I!SSI!
ql,iJI!S J&t.'II,
59 -
Elle coupe la lan'3ue à l'un d'entre "eux
ibid"
UVI,
1>37 : Nu 5tntofll!I.V
qlJidl!.fJ, it.'dùes, in crlJCI!,fJ essl! JI: !t.'AI essl! exsl!ctJ sc i t<:Jte lingt.'d,
~o -
ibid"
U II, In-l76 : .,' Cu idissl! I!.r I!qlJo die i h'r et homo inlirl.'d ua!e tlldit11!
lJ!:.'s ofll!nJisse l.'I!h~A.'l!tl!.l!r I!t, pJ)sted ql.'d/ll Jd t.'rbl!!I ~'II/II febri lIenerit, pat.'cis
diebl.'s essl! Md!.'!.'s.
Post i~ortell I!it.'s SUSid statill IIdiri,
coepit
insidias
filiJ) : qlJJestiJ)nell habl!rl! dl! [Jiri ~J)rte consti!uit,
~l -
"Cotlllent Cic~ron tI\\'stifia les ju,;es de Cll,Jentiu~'
in l?,E,L., 16, 1.539, pp, ns-
296,
ft 2 -
J)P, ci t " p, A% ,
63 -
{111I ,'1elll"
IV, \\35-\\36 : If..4grii ugentuii 'SU:"'U5 ,41I!XdnJrt.'1I C, Fant1fJ 5etf.'I.'AI
ouidisse
insiflu!J!I.'5 I!st
:
e04't.'l!
noAdn~ tortt.'1 d domino,
adAJisissl! S~ id
lJciM!.J5 ,~.'~sJJnti5si.,~ dss~t.'~rJ'iJS
" itJqu~ ,~Jru7ic d~djt'iSI 5!.fpplicio Jllect:is
~st, ParlJlJlo d~indl! te~''Porl! interiuto, i Ile, ct.rilJ$ d~ necl! credi!I.'Ao' nat doml.'l1
l
'"I!dii!,
~4 -
Lire à ce sujet, la brillante étude de (.J.P,) N~raudeau, Etre enlan! J l?O.fil!, pp.
49-54,
65 -
S, Legagneur, De la cJ)mplicit~ J ROII~ ~t ~n FrJnce, p, a,
~6 -
Fustel de Coulange~; LJ cit~ JntiqlJ~, p, 225.
Top"
II, e : h's ci!.'ill! ~s! Uqt.'l&as constitl.'td eis qui eh'sd~1I ~·jl.'i!,J!is 51.'111.,
dd rtS suu obtinendu.
67 -
The rOAIJn lu of s!Jv~rJ', Cubrid'~e, 1909, p, 36,
69 -
·R,~un slave law and ROlunist Ideol.,gy· in PMenù:, XXXYII, 1983, p, 54,
~9 -
6aiu~ : lnst"
1,49,9: ". f/IJJeddll p~rsonJe 5t.'i iuris sun!, ~'lJuda.r. J!i::,?o
il.'ri s:.'nt SlJbi:utJI!,
70 -
ibid., l, .54, 10 : .,' Ol:,~i.t, serl.':"tI in plJtestJ!~ do,fitli tHI! dil:::."W5 si 1.'1 b:J,~i5
tit.'s si t,
71 -
Dig., 6J.j\\J~ ; lY, 1 : lloXJ,Il!s Jctionl!5 Jppl!},IJntar, ql.'aI! non ex f,',?trJftt.', sed
ex n~'XJ Jtq/"le I/a}efifil.' 5~."/..(l.'r!..r'l ...~d!..ter5:"ls .c;{.,"s j.~stjt!..rnt!)r,
72 -
Pro .4, CJI!~'"
DI!, 63 : lion enù maior est i.7it.'riJ, si !!.'J lJ.<:i!iJ q:"J,~ si !f.,'I.'S
!;ll!(~tl / non fi 1:"'1 5~rt./JJ qUJA,' 5:' Jli~ni Jt' .•'err~.'~nJrii rI 1
-
239 -
73 -
Fro
/1,
ruu"
XI,
28
l'Jill
niil
faut
ip5a
.'a.lJiii4 I.'i,
JNUtiS
t/J4t!islJe
hc-~'i,r~ib!Js et dJ,~ln:'/l~' t~/jpjJl~ dJt( id 0'-'10 lIaio li~l'i .?~[~SS~ ~5t " cu. J~/t~1I
rJt1'.,,r~~,,' ln:'t, ~,t id fial, fa.~'lliJ ip54 l1J)'? fuit, fit JutU! d~'lo '''.Jio eill5,
74 -
0pP'Jsé 31.1 illS !:J'~,~!it."~', \\Jl','it il1ternatiJ)nal r~9u!ant les rapP'Hts entre t'JUS le'.i
pel.lples et .j,)nt il'.i s'inspirent dans leur vie 1 les ROllains en font la base de
l'unicité du genre humain,
1 D~ l~g"
IX, 29 : HiMl ut ~niN um.'11 I..'ni salll
SiNi 1~, t4," pu, q:"JAI o~n~s ir1t~r nM ipset Sl.',~'t.'$, Ils en tiennent cOllipte pour
légiférer,
75-
S Leniagne!Jr, op, nt., p, 48.
76 -
J, Blanc, D~s d~lit5 des e$tlJI~S, p, 9.
77 -
H, /'l"
XXX Ill, 6, 9-10,
78-
Paul., DXll, Il
79 -
JI lf. A.,
XVIII,
265
D~t~tll.'iri J:.'te"
rlostri,
qui post r~gu eXJcttJs !~ges,
quibus POPUitiS ,f?,'M4,r1i.'5 vtere tur,
i fi /)uodeciM
rJb!.'! is su ipserut'l t,
l1i'ql.'l! pui
severitate in pUl1i~ndi5 o~nii.''' generlJM furibu5 neque re~issa ni~is ienit4te 1..'5i
51.'.'1t.
NJm
fure',
qui
,uni{uto
Ii..... tl)
prehe.?sl.'s
e:u~/,
h'lI
de/lull
ouidi
perA.'is~rt.'r.t si 031.,1, q:/vlI f.u~ret furtUN, MX es5~t, nt inter,jiu 5~ tl!1o, qU1J1l
preh~.?dluetur,
defenderet., , $eftJog ii~M h'rli lul1if~5ti pre,7~r.50S I.wberibus
4fffti et ~ SJ:"--' prJ~tipitJfi,
80 -
Fro /111"-'1, 1 IV 1 9 : ~r.'~'d5i dl.''.'deciM tJbl.'lJ~ noc/ur.?I..'" furlilAJ ql.'l..'q:.'o 'h,do.. di:.'rm'II
l.'oll.'~rl.'nt, qvis est ql.'i qi.'oqvo MtJdo quis inter fee/us 5it, plJnitndr.~ putet.
el -
Aulu Selle : Il N,A.,
lVIII, 265 : Drul) ,4tMniensis ujr bl)iiUS t'l.'ltJql.'/iI ~S5e
pfl.'denti.J existiMJtu5 /ils!,
flNi5qt.'e dioini et h:"lI.Mi pen'!:.'s luit,
!s Druo
leges, quibt.'5 IUl,ef,ieF/5eS ut/ilrentur, pri~1j5 OIMitJII ttJ1it. ln i11i5 legibt.'5 h'rell
CUil.'5l1oditl.'llqt,'e {urti Hppl icio tJpilis pr.',~ie.~du" U5~, et .J1 i4 pllilrJq:.'~ ,~illi5
sliIOere tenslJit s.Jflxitque,
82 -
l'fi) A, Cluent, , UIY, 179-IBQ : HOL- ipso fer~ tellpl)rt Str4tiJ i1ie fudia.''S dO.fi
llHtVII f~dt et CJlildlilll eil.'5 .f",'di. CIJM es'Set in .Jl!dibl.'s 4rA'aNI.'1/ i:1 quo scitet
e5S1i1 m....fMiill"''rI.'il JJiqtunh'fI et Juri,
nod:; dl.'os Cl)nSIiINJOg dor.i~ntis I)tcidit in
pi5tf.rJJ"·q:.'~ deiuit,
ipi~ Jr,~'Jri h'ndt.'11 exseL"I.'it et sl!5tertioriJlI" , et JINi
ql.'inque pondo Jbstulit I.~I) ex seflJjg plierl) non gr4ndi tonscio, Fvrtl) postridie
tl)gnito 1),'Knis sl.'Spi[fo
in 11I05 SUU>,)$ qui non tl),l}pareb4nt
CO.~lfM!.'liIbatlJr,
CUII
exslildio
i11.1
{undi
in Jrtlluil) JllùJdl.'uterttur,
,7l)"inu qt,'I,\\~JII .odo fùri
poh'i:F5~t .l'irJrentl.'r,
ql.'idall ex J/n'tis
SJ55i4/i1
ruOtdJt!J5 I!st
51!
.?vper
in
JI.'CtitJne ql.'adJlJ I.tidisse
ftl
rebl.'s "i.7l.,ti5 Jdi./r1tJit! ex ol"'i paftlil dentJl4ft! et
tort:'fl..'5.j~.' t.lenjf~ 5~l'rf.llJfI q!iJ ill:Jd p~'!lJiS5~ it..3 ,itcr..(~'5e~:a.l'j
I.Jjd~.r'et!Jl'.
lf~
t'I.iita, P~"'1·r.'iritIH J Coattor ib:"5, inve.'1itur u
ser::,,'l.f Jd StrJh\\~i' p~rt...~tJi55~,
H/."
initif...' s~rspjfi~\\~i5 ~rf.o et Jp~t't~ it'tsi.'f.'!Jto, St,Jl't~li~ puer ill~ ~~~\\r:'5Ci:J5
p~rti,~&,jt,
r~A' c~n~~ d/.'l,in.J.~ indjc.J!.'it ,. 1~~"!lNi,r~~5 il~ pisei,?tf in:ienti 'i!'it~t, StrJi~
in &'inc!ilJ r'Qni~ctt..'5 est,
93 -
l,~st"
IY, Il : ~I.'i t~s J!i~t1a5 rJpit te,'1~tl)r ql.'idt:tI etù,' ftJrti""
5~d t4.~'~.~
pl'~"Pri~~1I Jcti0f7t,1l ei:"5 d~Jjttj nOlRir:~ pr4~tJ)r jl'ltf~duxit., q~(J~ app~ll,Jt{.it
b,lJn",,"vkf !./i rJptl..'r:'f~,
BA -
A,
lIats1)n,
"The deve,l,jpll~nt 'JI the praetor's Edict"
in J,ll,S.,
LX, 1970, pp
105-115,
240 -
8.5 -
Pro /1, ,T1,.'l!, , IV, 8
F, rr il'l,~h~heill, "The orll~in d
the lex Aqull ia" in .~~l, H~nri Lhy SN.'hl, XVII,
1959, pp, 233-244,
S,A, Crook, "Le:( Aquilia," /n Ath~,'7J~I./,~J, LXXII, 1984, pp. 67-77,
86 -
Si fion Ai,jg.~Ji! p~n'fliJi! r~5 ,funin! " lib~ro5 lf.'stibl.'5, S~n'05 fJ.lg~l lis unos
dillif !~r~ pot~ri5,
e7 -
Q,
lr"
l, 2, 14 : .4~sopi trJ~'o~d/ ,/105tri l,j,~liliJr/l,.'5 Litinus s~n'U5 tibi noh'5
Jt,dugit,
1$ .4th~ni5 ,jpud PJt,rl.',/1I!,f/ Epùl.'t~u~ pro libno lt.'it : ind~ in .4siJII
u~nit, Post~J P!Jto quidJII SudiJm.'5... EpÙt"rr~t.'S, '1't.'i .4!.~~nis 5o!~t ~5S~ lIl.'1tUIJ
~t qui h'l! AtMni5 h'~rJt al!I Licinvs .I~o t.'~ni5s~t (et) (UN I!VII ft.'gitit.'l.'m I!SSI!
PO$t~J I!X ,4~sopi littuis I.-o~'niJSS~t., ,~iJl:i./1~1I co,"prt,~~ndit ~t in ws!:.dia,~' Ep,~l!si
t radidi t, sl!d in pub! i CU .ln in pis t r inu" Mn ut i s I!X lit t~r i 5 tlt.,S itlt~l l~gul!
pott.'ù"us,
h',
qt.'I.'qt.'O ~odo ~5t,
qt.'o,/1iJII Ephl!si ~st,
Mllin~1J int.'l!stig~s UI!JiIf
SUAlI.1J'-f't.'~ diJi9~."ItjJ t.'~l tl!I.-t.'lt dl!dl.'I.·Js, Nol i $p~due qt.'Jnti hO/l1) sit " put.'i
~n;M pr~tii ~5t, qt.,j iJ/I n/hil 5it,
S~d tJnto dolNt .4::$'-'';us ~5t ,jll::dt.'s
proptu s::n'i 5c~h'5 ~t JUdMiJ.~,' ut .'1ihil ~i grJtit.'s /JC~,r~ possis qt.'J.1I si illul}
p~r t~ r~c~~erJrit,
88 -
~,)u~ pens·)ns entre autres au ,TuJ!iJnt.'t.l d,)nt Salluste n.)us fait une présentation
ucabre.
f)~ con,
CJt"
LV,
116
Est
/n
cJrctr~
}oo.'s,
qt.10d
,Tulliam:1J
Jpp~lJJtur,
ubi p.1t.'!UIt.'1I JSe~ndnis JO lUt/JIl, duitn dl.'od~till p::dl!s ,~v"i
dl!prl!!svs, fafll munivnt t.'ndiqvl! pJ."/ttts dtqUt insl.'pn CJlltrJ lJpid~i5 lornùibt.'s
/l.'nctJ " s~o incuJtv, tl!n::bris, odort fo::oJ Jtqv:: tl!rrib/lis I!ius fJei~s ~5!.
Voir éga1efllent dans le lIêlte sens
~ J, l'Iichel Davi.j, {)u cOA'itit.'A,' J 1J ,"01."/11!
,TJrph~!lnt,
St.'r I.-ntJi,/1s ,"itl.'l!'ls d'~x&l.'tion CJpitJle sot.'S JJ /?~pt.'b!iqt.'I!.,
ll!'s
reg,'1~s d',4!.'gvst~ et dl!' ,Tibh~, pp, lAO-14.5,
89 -
JJl {)~ olf"
lXIX, 107
PirJtJ non tst ex p::rdwllivlI nVll!rO dl!linitt.'5..
s::d
(o~~unis hostivs o~nium " (1..'1: llOC /11!'I.- / idl!'s d~bl!t nu lt.'S it.'rJnd:"'IJ 1!'5S~ Co.~'.~·t.'nl!',
90 -
Pro If.
,Tall, ,
IV-V,
9-10 : ,4pud NJiores ,/1{)stros CU" tt r~s I!'t C!.'piditJt~s
I.'ÙlortS I!ssl!'n t
~t f.U'J'J!JI! ,ion IIJgndl! IUg.'1O .,~tv cont inertn!ur,
ut pl! ....uo
fil!rtt,
at 1'10.'10 occid~;~tur,
idqut
nt/ar/vII Je
$in~~vlJ,"e lJfinus p!.'!Jr~ft.'r,
nil711 opt."
ft.'/SSt ivdil.-io d~ I.'i couti~ Jrt:IJtisque /7ollinibu5 ,. qt.'oJ ~ni" liS!.' non
l.'eni~bJt,
J~ I!O si qt.'is 1I!'gl!,I' Jvt iudùit.'1! corlstitVl!rtt, non tJ.œ prohib::r~
aiJl!'rl!tur '-f't.'J,t ,jdmonl!'re, His t~,"poribt.'s L'UII I!X bl!ll0 diutur no J tqul! JOII::S t ico
r~s in ::.1/1 CNI5I.ietr.'din~1II 1.'~.'liss~t, t.'t hOll'lin~s llinort fl!'Jigione dr,I'is ut~r~ntlir,
n~CI!5S!!' pt.'!,jUl& I!SSI!' I!t in vnh'ersJII / J.1IJ'J iJm ivdic iUI! du!!', q:..'oJ J fJ.tiJ iJ
/Uft.'1II die~rett.'r,
~t reo'p::ratores dJ.tl!, t.1t qu,j"
pri,tuil res it.',.üeJ.,"::!ur,
~t
po~nJ.m grJ!.li~re. tor:S!it!~ler~, ut 1,i~ttJ (o,~tprjAJler~tt,.tr JudJciJ,
31 -
Ll!'x P!,jI.,rfiJ et lex lut.JtiJ dl!' t.'i,
Voir sur CI! point l'ouvrage de A, Linttd,
(Iioll!'nrl!' i,/1 l?::pt.'b! icJ.,'I Rou, p, 107,
92 -
D'O~ selon Cicéron, la peur qu'éprouvaient au th!atre, d~s auditoires comprenant
des fl!ll\\I:elettes et des el'lhnts, quand on récitait la tirade ~ur les enfers, 1
Tase, , XYI, 37, Sur ce p,)int, lire au~si 1")!J'Ha,~e de l'l, B,)nj.)ur,
T~ ....~ ,/1J!3!e,
Eh'dl!' st.'r I),r;e rOlllposJ.f1!1!' ,jll~div~ dt., pJtridis/lJ1! ro,qJJin, pp, 3:33-33.5.
93 -
ibid"
Ce propos est
ai.i~si d~ve11)ppé par R, iUfO!l,
'Ori'3ihes et
sens de
l'inh'.lf~ation! l'ép"ql.Je lilpéri!le" in R,E"4, , LX, 1%9, pp, 32:3-347,
94 -
DI! sl.,;p1"
1[1, 7 : V~ti'/S 1f'It qt.'od dicJ.w., I!t prop!~r stuni!~t~,~, I!x::.1'pli ,')~,tj.'1i
fortuse 1.'~strt.'1!1 J.'7J!.'di!r.'/;f, L, DotJilit.'/;! prutorl!lH in SùiJiJ, n'It .Jp~,' ing::n-s Jd
~"/.'/I'" JJJJ.tl.i5 ~5S~t, -ldmit.Jt:'ifJ.' r~J,,;'f~tjsjss~ q!..'is t!"/f» p~rc!.ijiss~t
"
f:",4'
J/..'~.fiss~t
241
p.Jstorett {!./j!IS~.(.j,il lf.ifsS~,1 ef./. liOf.Jri .Jd S~ ft..'iss:! / jJ.lUR.1 c!.rpid~ Jd pra·~t~'r~A,1
qI,lJS! .1d J.J!.'de., J!q:'i~ Jd prJ~,,'j!..'.fl .JtC!./['!j!i5S~ " q:..tJ~Sj5S~ Do.wiii!.ili qui tJntJll
b~stiJJ: p~rt!.:siss~! / i J1:./11 ,'"espondiss:! f.ftt?Jbt.tl0 ./ sJJti.'1 da.'t1d~ iflS51.J prJetoris
in t,/cel.' crt.IC~I,1 eS5~ s:J.rClJ!.t.tI.',.
%-
97 -
/,'1 L, Pis"
XVIII, A3
98 -
/ II CJ t '1 Vl, 12 :
99
Pro C!~~nt"
LIV, lAS,
100 -
ibid"
LIV, 1M3
Jib~ri, s~rlJit"
PARTIE
I I I
- = - = - : = - = - = - - = = -
r u p t u r e
o u
p r o l o n g e x n e n t
cie
l a .
~e:rvitude?
•
•
•
•
•
•
.--'
",
.
;f
...
$'.
''&-"'f.,' ••' ..,~ '.""
/
..•>
-
242 -
A
la
fin
de
la
République.
deux
fEdts
concomitants
m3.rguent
l e'3
rapports
d' homme
à
homme
à
Rome
d'une
part,
l'accroissement
du
taux
des
esclaves
du
fait
de
l'extension
des
.::hamps
de
bataille
et
du
déploiement
des
légions
dans
les
territoires
placés
loin
de
Rome
(1)
de
l'autre,
la
hausse
des
affranchissE'ments
( 2 ) .
La
propension
à
libérer
les
esclaves,
a
atteint
un
niveau
tel
que
les
maîtres
ne
s'en
privent
pas
pour
l'appliquer
à
leur
guise
et
à
leur
con\\TenanCe,
comme
nous
le
fai t
comprendre
Cicéron
à
travers
cette
raillerie à
Clodia
:
«Pourtant,
dira
t-on,
les
escla~Tes dont
i l
s'agit
ont
été
affranchis
a~Tec
l'agrément
des parents de
Clodia,
qui
sont
de
haute
et
bien\\'eil1ante
lignée.
Ah
!
enfin,
nous
trouvons un
acte,
dont
on
peut
soutenir que
cette
feJl1Jl'1e
l'a
accompli
a~rec l'agrément
et
la. garantie de
ses proches,
qui
sont gens de
coeur.
Nais je
\\'oudrais sa\\'oir ce que prou\\re
cet
affranchissement
c'est
un
moyen
ou
bien de préparer l'accusation contre Caelius
ou
bien
de
soustraire
les
esclaves
il
la
question,
ou
alors,
cOJJmJe
i l s savaient
bien
des
choses,
de
1 eur donner
une
compensa t i on
justi fi ée.1,I
(3)
Qu'entraîne
l'affranchissement
pour
les
esclaves
qui
en sont
gratifiés
?
C'est
la
question
à
laquelle
nous
tenterons
d'apporter
des
éléments
de
réponse
dans
cette
dernière
partie
de
notre
Controversée,
tournée
puis
retournée
dans
tous
les
sens,
ressassée
par
maints
savants
qui
les
uns
à
la
suite
des
autres
y
ont
trouvé
un
point
d'intérêt
<3bis),
elle
est
d'une
très
grande
importance
pour
notre
probl éTI1.'3. t i que
de
départ,
dans
la
mesur~
où
elle
prolonge
la
question
de
l'esclavage
en
lui
ajoutant
une
dimension
neuve.
Elle
donne
beaucoup
plus
d'étendue
au
simple
fait
servile,
l ' é l a r g i t ,
et
l'amplifie.
Elle
rompt
-
243 -
les
amarres
du
probléme
de
l'esclavage
classique,
en
pénétrant
dans
un
domai ne
qu i
à
première
vue,
n'a
aucune
comInune
mesure
avec
lui,
mais
dans
lequel
des
imbrications
diverses
font
penser
à
la
perpétuation
du
même
esclavage.
C'est
pourquoi,
la
question
charnière
que
nous
nous
sommes
posée,
en
crée
d' autres
et
qui
se
ramènent
presque
toutes
à
e 11 e ,à
sa vo i r
y
a
t - i l
continuité
de
la
servitude
dans
l'affranchissement
?
Pourquoi
les
maîtres
se
l a i s s e n t - i l s
a l l e r
à
la
fin
de
la
République
à
une
t e l l e
pl-at ique
?
Est-
ce
par
humanisme,
par
souci
de
rendre
ces
êtres
dominés;
exp loi tés
pa r
eux,
des
hommes
véritables,
leurs
égaux?
Ou
est-ce
simplement
pour
en
faire
des
ser'viteurs,
toujours
assujettis,
mais
d'un
autre
niveau?
En
d'autres
termes,
les
maîtres
élargissent-ils
leur
domesticité
pour
l'intégrer
véritablement
dans
leur
sphère,
ou
bien
parce
q u ' i l s
savent
que
même
recouverte
d'un
autre
s t a t u t ,
e l l e
n'en demeure
pas
moins
à
leur
service
?
Alors,
l'esclave
et
l'affranchi,
sont-ils deux êtres partageant
le
même
s o r t ?
-
244 -
CHAPITRE 1
Une rupture évidente
-=-=::::'.-=-:=:-=-=-=:-
N~ sont
Bppelés
esclaves.
qu~ ceux qui
le
d~vienn~nt par
la
naissance
ou
par
application
du
droit
droit
civil
ou
droit
des
gens.
Les
juristes
sont
formels
sur
cette
double
équation
Serui
autem aut
IUlscuntur,
aut
fiunt.
Xescuntur
ex ancillis
nostris,
fiunt
aut
iure
gentluJ1I,
id
est
capti-
uitate,
aut
iure
ciuili,
cum h011IO liber ~iDr ulginti
annis
ad pretium participanduJ1l sese uenum dari
passus est (4)
Qui
sont
donc
les
affranchis
?
La
réponse
de
Gaius,
même
si
elle
concerne
directement
l'époque
impériale,
peut
être
tenue en compte pour
la fin de
la République.
Rursus
liberorum
hominum,
a l i i
ingenui
sunt,
a l i i
libertini.
Ingenui
sunt
qui
liberi
nati
sunt
libertini,
qui
ex
iusta
serui tute
manumissi
sunt
(5) .
L'esclavage
et
l'affranchissement
sont
donc
à
n'en
point
douter,
deux
statuts
différents,
reflétant
également
deux
conditions
opposées.
Non
esclave,
détaché
du
groupe
des
serui,
dépossédé
des
agrégats
propres
à
la
nature
servi le,
l'affranchi
se
trouve
amené
à
qui t t e r
le
monde
dans
lequel
i l
avai t
peut-être
pendant
de
longues années
(5bis),
fai t
sa
vie
et
qui
l ' a v a i t
façonné
selon
ses
principes
et
ses
objectifs.
Un
nouveau
monde
s'offre
à
lui,
lui
ouvre
largEment
les
bras
et
le
recouvre
d'un
certai n
nombre
d'a.tt.ributs
et
d'obligations.
Candidat
à
une
agrégation
au
cercle
des
Hommes,
cercle
auquel
i l
se
sentai t
assurément
attiré
de
tout
son
élan,
i l
se
doit
de
ce
fait,
une
fois
cette
agrégation
prononcée,
d'adopter
une
philosophie
et
une
pratique
nouvelles
de
la
vie.
Ce
sont
elles
qui
symbolisent
d'une
mBnière
générale,
sa
rupture
du
monde
où
pesait
-
245 -
constamment
l e i us
u i tae
necisque
du
domi nus
<6 ~,
véri ta bl e
épée
de
Damoclès
(6bis~.
G.
Dumézil
pa.rle
à
juste
t i t r e
de
((passage
juridique
au
néant
à
l'être.',',
de
{,'passage
mora.l
d'une
forme
supérieure
de
l'animalité
à
la
condition
huma.ine).'
<6ter).
Quels
sont
les
signes
de
cette
rupture
?
Que
confère
la
société
romaine
au
nouvel
é l u ?
Pour
répondre
à
ces
interrogations,
nous
nous
référerons
une
fois
encore,
à
Cicéron.
Certes,
l ' Arpi na te
n' €st
pas
un
j urisconsu l te.
Il
ne
participe
à
aucun
des
quatre
domaines
autour
desquels
s ' a r t i c u l e
son
action
et
qui
ont
pour
dénomination
respondere,
cauere,
agere,
scribere
.(~)
Cependant,
i l
présente
l'avantage
i nest i ma.ble
en
tant
que
patron,
confronté
quotidiennement
au
problème
que
posent
ses
rapports
personnels,
vécus
au
j our
le
j our
avec
les
affranchis,
de
nous
les
faire
connaître
et
vivre
aussi,
avec
leur
même
acuité
et
dans
leur
pureté.
Il
présente
le
second
avantage
par
sa
position
de
vulgarisateur
et
de
praticien
du
droi t ,
de
nous
met tre
au
courant
et
au
contact
des
Dpi ni ons
de
son
époque
sur
tel
ou
tel
sujet
ayant
rapport
avec
l'affranchissement.
N'est-ce
pas
à
ce
partage
des
connaissances
juridiques
que
l'Arpinate
voulait
absolument
consacrer sa v i e i l l e s s e ?
(8)
1 -
LA XODIFICATIOB DE LA ROKENCLATURE
============~~========================
Elle
est
le
premier
s i gne
matéri e l
du
changement
statuta ire
de
l'affranchi.
C'est
à
p a r t i r
de
la
modulation
de
la
nomenclature,
que
se
vérifie
réellement
le
départ
de
l'esclavage
et
l'insertion
dans
un
autre
milieu.
Vis-à-vis
de
la
société
et
de
son
milieu
d'origine,
l'ancien
esclave
se
recouvre
d'un
nouveau
corpus
qui
l ' i d e n t i f i e
clairement
et
le
situe
à
sa
jU~:3te
place.
Il
se
voit
pétri
d'une
identité
nouvelle
qui
c l a r i f i e
sans
ambages,
la. dimension
d~ ~on 1ndlv1dualitè.
Il
n'est
plus
un
esclave.
Donc,
i l
ne
peut
pl us
a
priori
être
désigné
par
le
terme
de
seruus.
De
-
246 -
la
même
façon,
i l
perd
le
bénéfice
de
l'unicité
du
nom.
Par
quoi
tout
cela e s t - i l
remplacé?
1 -
Une dénomination nouvelle
C' est
par
là
que
nous
aborderons
notre
réflexion
sur
l'évo-
lution
de
la
nomenclature
de
l ' ?ffranchi.
Quand
L.
Juglar
affir-me que
«La société entre mai.'tre et escltn'e n'existe
qu'à.
l'état
latent,
un
des
deux
associ ès,
1 ' esc 18 \\'e,
n'existant
pas
juridiquement.
Nais
l'escla\\'e,
en
de\\'enant
affranchi,
acquiert cette capacité juridique ,1.1
(9)
i l
expri me
seu lement
le
contenu
et
la
portée
rée 11 e
de
la
prQ;'IDotion
servile.
Mais
i l
ne
dit
rien
sur
l'extériorité
de
cette
promotion.
L'acquisition
des
capacités
juridiques,
ne
pourrait
se
concevoir
sans
la
transformation
du
quid
s i t
de
l ' ê t r e ,
c'est-à-dire
de
ce
qui
le
spécifie
par
rapport
aux
autres
et
qui
j u s t i f i e
une
telle
acquisition.
Elle
ne
saurait
être
validée
et
avoir
toute
sa
dimension,
sans
que
ne
soient
indiqués
tous
les éléments concourant
à
expliciter
la
portée
de
cette
évolution,
éléments
parmi
lesquels
on
trouve en bonne place,
le mode de désignation de
l'individu.
a)
libertus -
libertinus
Tels
sont
les
termes
utilisés
pour
désigner
l ' af franchi.
Nous
pouvons
nous
en
rendre
compte
en
observant
le
tableau
ci-dessous.
Libertus
Correspondance
At t. , XI II, 33, 2 ;
Ill, 17
j
Il, 11
Fa...
XII l, 64,
1
XIII,
70
Ill,
15
; VI, 5, 5 ; VI,
l,
12
XIII,
16
XIII, 21
-
247 -
II, 1, 7
; VI,
2,
1
Ill, 8, 2
XII l , 69, 1
Xl Il, 33
Ill, 2
IV,
Il,
1
XIl l , 60, 1
V Ill, 3, 2
1V,
12, 3
V,
20, 1
VII, 25, 2
Ill, 1, 2
Q.
fr.,
l,
4
l,
3,
4
VIll,
8,
Il 1, l, 1
Il ,
7
Ill, 9, 1
Discours
Pro Sest., XLV, 97
Pro Flac., XXXV, 88
XXVI, 80
1 Il Ph i l i p.,
VI, 18
Pro Sul.,
XIX, 54
Cua Senat., VIII, 20
De Praet. Sicil., XXVIII, 69
ln L. Pis., XXV, 61
Pro Sex. Rose. A.er., XLV,
130
XLIX,
141
Q. Asc. ~ilon., l, 18
De Fru2lent.,
Ill, 8
LVIII,134
Pro A. Caec., CXXII, 63
Libertinus
==========
Correspondance
Att.,
Il, 1,8
Discours
Pro Sex. Rose. !.er., VII, 19
Pro Cluent., XLVII, 132
II Phi l i p.,
Il, 3
III Gat., VI, 14 ;
Pro Sest., LI l, 11 0 IV Gat., VII l, 16
Traités
III Leg., XIV, 132
1 Leg., XIII, 30
Contrai rement
à
l'esclave,
deux
vocables
uniquement
servent
à
indiquer
l'affranchi.
Cette
sécheresse
lexicologique
a
son
importance.
Elle
montre
le
caractère
étriqué
et
limite
des
-
248 -
i nterpréta.t ions
suscept i bl es
d' êt re
fa i tes
et
partant,
l ' unici té
de
leur
contenu.
Elle
rompt
avec
toute
la
série
d'ondulations
dont
l'affranchi
é t a i t
porteur
du
temps
de
sa
servitude
et
la
caricature
q u ' i l
pouvait
en
résulter.
Elle
limite
également
le
champ
d'investigation
pour
la
trouvaille
d'une
signification
précise,
répondant
à
tel
ou
tel
vocable.
De
ce
f a i t ,
elle
est
l'expression
de
la
personnalisation
réelle
de
l'affranchi.
En
annihilant
toutes
les
variétés
terminologiques
dont
i l
é t a i t
affublé
pendant
l'esclavage,
la
société
reconnait
à
l'affranchi
une
certaine
autorité
et
une
pondérat i on
i ncontesta ble.
Ell e
le
libère
de
toutes
les
puérilités
auxquelles
i l
pouvait
être
soumis
de
la
part
d'hommes
libres
et
lui
permet
comme
le
d i t
si
bien
L.
Halkin,
de
((rompre
avec un passé déshol1orant
au....· yeux de ses
contemporai 115 ••• .t.t
(10)
L'unicité
terminologique,
traduit
donc
l ' u n i c i t é
de
la
pensée,
en
gommant
les
dist i net ions
fondées
sur
l'âge
ou
sur
une
autre
particularité,
excepté
celle
relative
au
sexe
(11).
Ainsi,
q u ' i l
s'agisse
d'un
affranchi
odieux,
ingrat,
méchant
. . . ,
ou
de
celui
qui
aura
f a i t
preuve
de
vertu,
le
mot
employé
pour
le
désigner
ne
varie
pas
et
ne
subit
aucune
contorsion.
Et
Cicéron
n'échappe
pas
à
ce
cloisonnement,
malgré
sa
particulière 'aversion
à
l'égard
de
mauvais
affranchis.
Furieux
contre
Chrysogonus
l'affranchi
de
Sylla,
homme
obnubilé
par
l'expropriation
des
biens
des
ci toyens
romains
et
remarquable
par
sa
pr0p'~nsion
tyran-
nique,
i l
n'a d'autre choix que de
recourir à
libertus
«...
Quae
a.7J1.o1a
si,
quem
ad
111Ddu»I
salent
liberti
nequam et imprvbi
facere»
(12)
De
même,
lorsqu'il
est
question
de
Timarchides,
cet
affranchi
et
appariteur
de
Verrès
qui
laissa
un
renom
si nistre
en
Sici le
par
son
doi gté
à
i mi ter
son
patron
dans
EE"t
folie
destructl-i,:::e
et
spoliatrice,
le
terme
ernploye
n'est
entaché d'aucune
modification
f l é t r i s s a n t e :
-
249 -
Venio
nunc ad
epistullHll
Ti 11iarchi di ,
liberti
et a.ccensi
(13)
Certes,
Cicéron
n'aurait
pu
ne
pas
recourir
à
ces
deux
termes,
ceux-ci
étant
le
r e f l e t
d'une
r é a l i t é
juridique.
Le
droit
romain
n'en
a
pas
connu
d'autres
et
n'en
a
pas
vulgarisé
non
plus,
qui
eussent
pu
décrire
la
situation
des
affranchis
03bis) .
Mais
l'Arpinate
n ' a v a i t - i l
pas
la
possibilité
de
créer
d'autres
mots,
proches
de
ceux
officiellement
u t i l i s é s
pour
les
plaquer
sur
des
affranchis
dont
i l
désapprouve
le
comportement
par
exemple
?
Le
fai t
qu'il
n ' y e n
a i t
pas
eu
d'autres,
ee;t
donc
à
notre
sens,un
indice
qui
pourrait
marquer
une
certaine
évolution
du
statut,
en
comparaison
avec
celui
de
la
servitude.
C'est
dans
ce
cadre
que
Cicéron
fait
appel
uniquement
à
des
adjectifs
répulsifs,
porteurs
de
souillure,
mais
en
les
mettant
en apposition
à
libertus
ou
l i bert i nus.
C'est
le
cas
de
tenuis
u t i l i s é
à
l'encontre
de
Mallius
Glaucia,
envoyé
par
son
patron
T.
Roscius
porter
la
nouvelle
dela
mort
.,je
Sex
Roscius
d'Amérie
à
T.
Capito
( 4 ) .
C' est
le
cas
également
de
i s t e
( 5 ) ,
accolé
cette
fois
à
Timarchides.
L'unanimité
qui
en
est
faite
autour
de
leur
définition
par
le Thesaurus linguae latinae
:
Qui e
seruitute liberatus est (16)
et
par
le
Glossarium mediae et infi~e latinitas :
e
seruitute ~Dumissus (17)
reprise
en
écho
par
H.
Lem"nnier
dans
son
étude
sur
la
condi tion
privée
des
affranchis
aux
t r o i s
premiers
siècles
de l'Empire
:
({, ..
Les
a.ffranchis
éta.ient
tous
ceux
qui,
n'étant
pas
nés
1 i bres,
l'éta.ient
ensui te
de\\renus.
Pa.r
rapport
au:-t
escla~res,
le
terme
de
liber-i
leur
éta.it
a.pplica.ble,
.'nais
pour
les
distinguer
des
ingénus,
on
-
250 -
aIrait
créé
un
terme
particulier,
cel ui
de
1 i bertus ou 1 i bertinus.l.l
(18)
est
révélatrice
de
cette
réalité. Du
seruus,
l'affranchi
se
trouve
en
fin
de
compte
bel
et
bien
éloigné.
A
l'égard
de
son
ancien
acquéreur,
1 e
[J}8 î tre
des
relations
neuves
naissent,
créant
un
couple
1 ui
aussi
neuf
patronus/libertus,
qui
se
substitue
1 ' anci en,
dominus/seruus,
et qu'achéve de constituer l'onomastique.
bJ
Les tria nomina
Ce
sont
les
trois
composantes
de
l'identité
du
citoyen
rOm8.in
et
que
désorm=1is, porte
l'affranchi
le
prénom
exclu
pour
une
femme
le
DDmen
gentl11ciu1Il,
et
le
surnom
auxquels
se
greffe
la
tribu.
Ils
mettent
fin
pour
le
l i bertus
à
son
nom
uni que,
qui
désor1Ddi s
devient
le
cognoJJJen.
Ainsi,
Ti ra
se
voit
reconnaître
l'appellation
de
N.
Tullius
Tiro,
une
agrégation
onomastique
dont
nous
pouvons
juger
le
procédé
par
1 e
passage
de
cet te
1 e t tre
expédi ée
par
Ci céron
à
son
ami
Atticus après
la
1!JanumissiD
d'Eutychidès et de Dionysius
«Je
suis
heureux
de
ce
que
tu
me
dis
d' Eutychi dès,
qui,
unissant
ton
ancien
prénom
à
ton
nouveau
nom
s ' appel 1 era
T.
Céci1ius
de
que
Dionysius
est
de\\renu,
unissant mon nom au tien,
H.
Pomponius.1.l
(19)
Certes,
l'Arpinate
n'utilise
souvent
que
le
cognomen
pour
appeler
l'affranchi.
Une
telle
pratique
n'a
pas un caractère
péjoratif.
L.
Kajanto en donne l'une des raisons
({. ..
Cognomi na
became rapi dly genera 1
in
the
nomenclature
of
ex
slaves
because
the
ODgDODeD
their
old
slave
name,
""as
L~eir
It
""as
the
name
by
l.,rhi ch
they ""ere known
. . . ))
(20)
-
251 -
De
plus,
elle
rentre
dans
le
cadre
de
la
familiarité
(20bis),
voire
de
l ' i n t i m i t é .
De
ce
f a i t ,
elle
s'applique
à
tous
ceux
qui
lui
sont
connus
et
avec
lesquels
i l
entretient
d ' é t r o i t e s
relations
même
en
dehors
des
af franchi s,
comme
son
ex
gendre
Dolabella
dont
i l
loue
l'inflexible
opiniâtreté
dans
la
répr'ession
des
esclaves
et
des
hommes
tarés
(21) ,
de
Brutus
aux
esclaves
duquel,
stationné
à
Laodicée
en
50
av.
·.J.-C.
i l
confia
du
courrier
(22) ,
de
Phi l ot i mus
l ' affranch i
de
Terent i a
qu' i l
protège
contre
les
accusat ions
mensongères
(23)
ou
d'autres
encore
qu'il
ne
connaît
que
de
uisu
(24) ,
prenant
le
soin
de
décliner
l ' i d e n t i t é
complète
de
ceux
dont
i l
parle
à
quelqu'un de
peu
familier
(25).
La
nouvelle
naissance
des
affranchis
que
constituent
les
tria
nODrina
<25bis),
leur
donne
une
assise
sociale
plus
dense
et
plus
marquée
et
leur
aj oute
un
mieux
être
en
comparaison
avec
leurs
malheureux
compagnons
d'infortune
restés
dans
l'esclavage
de
ce
poi nt
de
vue,
nous
avons
affaire
à
un
véritable
signe
d'insertion
au
monde
des
libres.
G.
Fabre,
abordant
l ' i n t é r ê t
du
gentilice
re\\Têtu
par
le
libertus est on ne peut plus clair quand il dit
«Le
fait
de porter un genti1ice est
. . .
pour
l'affranchi
un
signe
de
supériorité
juridique
pa.r
ra.pport
à
ceux
qui
en
sont
pri \\Tés,
esclaves,
mais aussi
étrangers),'
(26)
D'où
découle
le
caractère
positif
de
ce
gentilice
?
Est-ce
seulement
dans
l'allongement
de
l'onomastique?
Y répondre
par
l'affirmative,
serai t
oublier
l ' importance
que
les
Romain::=; accordent
à
un nom:
«Le
nom
crée
des
liens,
J--.a.rce
quil
exprime
la
parenté.
Ainsi
se
définit
Par.le
nom,
un
cer'::'le
de
rejEtions
qui
\\TBUt
au ni\\reBU de
la
faIIJille),1
(27)
-
252 -
Il
Y a
par
conséquent
derrière
le
simple
aspect
onomastique,
toute
une
histoire
qui
se
véhicule.
En
se
voyant
recouvert
d'un
nomen gentilicium,
l'affranchi
entre
de
plein
pied
dans
une
gens.
Intégré
depuis
sa
servitude
mais
en
tant
que
sujet,
sans
réel
pouvoir,
i l
renforce
et
affirme
sa
personnal i té
du
fai t
de
l'affranchissement.
Les
engagements
vis-à-vis
de
l'ensemble
de
la
gens
adoptent
désormais
une
autre
coloration,
puisque
venant· de
quelqu'un
qui
acquiert
le
droit
de
dire
son
mot,
d'émettre
ses
opinions,
et
d'avoir
une
liberté
de
pensée
(27bis).
Associé
aux
obligations
frappant
les
membres
act ifs,
y
compri s
ce Iles
de
perenniser
l'ancêtre
commun,
de
veiller
aux
dit
gentiles et
de
défendre
le
culte
ancestral,
l'affranchi
voit
sa
place
dans
la
«famille
elle-même»
(28)
comme
l'appelle
Fustel
de
Coulanges,
se
f o r t i f i e r ,
s ' i n t e n s i f i e r
et
enfin, se
réa-
liser,
pendant
que
lui-même
se
soumet
à
un
impératif
cardi-
nal
l'adoption
d'un
comportement
unitaire,
extrêmement
important
pour
l'équilibre du
groupe:
« Ri en.v,
à
entendre
Fustel
de
Coulanges, «n'est
plus
étroitement
1 ié
que
1 es
membres
d'une
gens.
Unis
dans
la
célébration
des
mêmes
cérémonies
sacrées,
i l s
s'aident
mutuellement
dans
tous
les
besoins de
la
vie.
La gens entière répond de
la
dette
d'un
de
ses membres;
elle rachète
le
prisonnier
;
elle
paxe
l'amende
du
condamné.
Si
l'un
des
siens
dev"ient
IMgistrat,
elle
se
cotise
pour
payer
les
dépenses
qu'entraîne
toute
magistrature.!.!
(29)
Son
rôle
prend
incontestablement
un
r e f l e t
singulier,
dans
la
mesure
où
i l
est
tenu
de
se
conformer
entièrement
à
toutes
les
prescriptions
relatives
à
la
gentilité.· Se
recon-
naissant
(descendant'.!
du
mëme
ancêtre
que
le
patron,
i l
en
devient
l'un
des
défenseurs
et
l'une
des
courroies
de
sa
perpétuation.
Cela
veut
dire
que
sans
y
être
contraint,
i l
-
253 -
doit
de
son
propre
chef 1
braver
tous
le:3
dangers si
possible
(29bis) 1
au
cas
où
l'honneur
de
la
gens serait
en
j eu
ou
en
péril.
Il
Y a
donc
là
un
lourd
fardeau
que
porte
désormais
l'affranchi,
des
responsabilités
énormes
qui
ne
le
quitteront
plus
jamais,
dés
lors
que
s'est
exercée
la
manumissio.
2
-
La manumissio ou
l ' instrument· de cette modulation
Elle
est
le
passage
obligé
de
l'esclavage
à
la
société
des
l i bl-es,
le
carrefour
que
devaient
emprunter
les
esclaves
candidats
à
leur
libération,
l ' incontournable
voie
à
sui vre
vers
la
sphère
des
citoyens,
le
point
(,'d'envol))
du
seruus,
enfin,
la source de sa promotion:
«. . .
ltanumissio))
signale
H.
Lemonnier,
Nindiqu8it
l'acte
qui
donn8it
la
liberté,
et
correspond
à
notre
mot
affranchi ssemen t,l)
(30)
Prisée
par
les
esclaves,
objectif
essentiel
de
tous
leurs
efforts
quotidiens
(38).
elle
représente
la
récompense
suprême
des
besogneux
et
des
dévoués,
la
considération
du
don
de
leur être
à
la
personne
du
dominus,
le
frui t
de
leur
soumission
et
de
leur
acceptation
sans
limites
des
services
exigés
par
lui
ou
par
ses
relations.
La
Kanumissio
couronne
pour
ainsi
dire,
les
inquantifiables sacrifices auxquels
les
serui
se
sont
assujettis
et
que
Cicéron
loue
d'ailleurs,
dans une
missive adressée à
Tiro
:
« Tu
m'as
rendu
a ~rec
dé~rouemeD t
d' i ...t'JnOJ11-
brab1es services en ma
maison et au
foru.'Zl,
à
Rome
et
dans
.ma
prolrince,
en
1ll8. t i êres
privées et publiques,
pour mes étbrdes et mes
êcri tS,!,1
(31)
-
254 -
et
dans
une
autre,
adres'=ôée
pl-ès
de
huit
ans
plus
tôt,
à
TerentiB,
après
la
lex Clodia de exsilio
,'>'Qu_'l.nt ~
l'affranchissement
des esc1a~'es,
i l
n'y a
nullement
lieu
de
t'inquiéter.
D'abord
les
tiens
n'ont
reçu
d'autre
promesse
gue
celle
d'être
trai tés
par
toi
selon
les
!!Jéri tes
de
chacun.
Or,
i l
n')'
a
qu'Orpheus
qui,
jusqu'à
présen t,
fai t
son
de~'oir,
part lui,
vraiment personne".'
(32)
S.
Treggiari
ne
trouve
pas
d'autres
mots
en
dehors
de
«meri t
.... ,
pour résumer cet te si tuat i on
:
({In
practice,
i t
was
recognition
of
i ndi \\'i dual
meri t,
ra ther
than
dou bts of
the
validity
of
the
IlJélster-s1 a ve
rel a t i onschip,
whi ch
provi ded
the
highest
mot i \\'es
for
1'!lBnV111i ssi on,1)
(33)
N'est-ce
pas
en
référence
au
dévouement,
à
tout
ce
qu i
fai t
la
soumission
d'un
esclave
à
l'égard
de
son
maître,
que
Quintus
passa
outre
toutes
les
injonctions
adressées
par
son
frère
Cicéron,
pour
empêcher
la
réalisation
de
l'affran-
chissement
de
Statius
?
(33bis)
Les
imprécations
de
l'Arpinate,
le
rappel
à
l'ordre
et
à
l ' a u t o r i t é ,
le
poids du
«gu'en-dira-t-on.I.I,
le
risque
de
la
perte
de
la
dignitas,
ne
le
firent
pas
changer
d'un
iota.
I l s
n'altérèrent
pas
son
envie
d'élargir
celui
qui
avait
répondu
positivement
à
ses
appels
et
l ' a v a i t
aidé
à
divers
moments
de
sa
vie,
préférant
ce
faisant,
adopter
une
surdité
à
la
rugosité
verbale
de
son
aîné.
Et
c ' e s t
avec
une
pointe
de
joie
qu'apprenant
la
:manumissi 0
de
Tiro,
i l
j u s t i f i e
son
acte,
établ issant
du
même
coup
entre
Statius
et
lui,
une
profonde
symétrie
:
(,C'est
qu'en
effet,
si
la
fidélité
de
Stativs
Io'est
si
douce,
combien
dois-tu
en
-
255 -
~~pprec i er
1 es
a van té!ges
chez
ton
affranchi 1
qUé!nd s ' y ajoute le cbarme d'un
lettré,
d'un
causeur,
d'un
espri t
cul ti \\l'e,
toutes choses
qui
\\ralent
mieux
que
ces
qua1 i tés
l1Jème
que
j ' apprec i e
chez 1 e
mi en}.'
(34)
Enfin,
la
manumissio
exercée
à
l'égard
d'un
esclave,
n'est
ni
plus
ni
moins qu'une
attitude .louable
pour
le
patron.
car
elle
est
le
résultat
de
sa
conscientisation
en
face
d'éminentes
qualités
contenues
dans
le
seruus,
sur
la
base
d'une
sé l ect ion
interne
ri goureuse
et
l ' expressi on
de
sa
gratitudo,
de
son
aequitas
et
surtout;
de
sa
iustitia,
attribut
essentiel
du
uir tmnus
(35).
Dans
le
même
ordre
d'idée,
elle
apparaît
comme
un
encoura-
gement
au
seruus,
en
le
rapprochant
du
cercle
du
maître
devenu
patron,
et
en
faisant
de
lui
automatiquement,
sans
restriction,
un ami
«Ce
que
tu
as
fait
pour
Tiro,
mon
cher
Nareus,v,
avoue
Qu i nt us,
«m'a
é té
extrêmement
8gréab1e,
aussi
vrai
que
je
souhaite
\\rous
re\\roir,
toi
et
l!1On
Cicéron,
.Iœ1
chère
petite
Tu11ia
et
ton
f i l s
i l
ne
meri tai t
pas la
condition
oü
i l
étai t
par celle
oü
i l
est
I!J,!j i n te na nt,
tu
8 S
\\rou1 u
qu'il
fût
pour nous
un
ami
et
non
pl us
un
esc1a \\re.
Oui,
cro~s-
moi,
J'ai
bondi
de
joie
après
avoir
lu
t.!:l
lettre
et
la
sienne
;
je
te
remercie
et
te
félicite.'.'
(36)
Ce
rapprochement
de
l'esclave,
passse
cependant
par
l'adoption
d'une
forme
d' aff ranchissement
qu i
met
en
présence
non
seulement
la
uolt$.ntas
domini
(37) ,
m3.is
aussi
l'Etat,
représenté
par
un
magistrat
du
peuple
roma,in
à
t i t r e
d'officiant
le
censeur,
le
préteur
ou
le
con'3ul
C38>
-
ou
encore
par
des
individus
à
t i t r e
de
témoins.
et
que
Cicéron
appelle
la
manu.I1dssio
iusta
(39) ,
Cette
forme
-
256 -
d'affranchissement
qui
laisse
caracoller
E.eul
un
triptyque
-
le
cens,
la
vindicte
et
le
testament
(40),
éclipse
donc
son
antithèse
la
m9.numissio apud
se
(41)
et
s'arroge
le
droit
d'amener
un
esclave
à
la
citoyenneté
en
lui
conférant
la
libertas c'est-à-dire
la ciuitas :
In
socios
vero
ipsos
et
in
eas
de
qui bus
agi1I!Us
foederatas
iniuriosuJll
et
contrunellosum
est
i i s
praemiis
et
i i s
honoribus
exclusos
esse
fidelissimos
coniunctissimos
sacias,
quae
pateant
stipendiariis,
pateant
hasti bus,
pateant
saepe seruis.
Nam et stipendiarias ex Africa
Sicilia
Sa.rdinia
ceteris
prouinciis
.multos
ci ui ta te
dona tas
ui del;.·,us,
et
qui
hastes ad
nastras
imperatores
perfugissent
e t
magno
usu
reipublicae
nastr~e
fuissent,
scimus
ciuitate
esse
donatos
;
seruas
denique
quorum ius fortuna
condieio infima est,
~~ne
de re publica meritos pe~epe libertate,
id
est ei!litate,
publiee donari
uidemus (42)
Un
esclave
devenir
citoyen
romain
En
fait,
cela
n ' é t a i t
pas
une
nouveauté
à
la
fin
de
la
République,
la
phi lanthropie
ayant
pénétré
les
âmes
des
Romai ns
dès
leur
contact
avec
l'hellénisme:
((Tbough
the
Roman
migbt
sometimes
justify
his
position
of
pOi'>'er
by
telling
hil11
s e l f
tha t
other
races
were
}lI0ral1y
i nferi or
and
barn
to
ser\\ri tude,
both
as
subjects
of
a
foreign
domi na t i on
and
as
i ndi Fi du~~ 1 s
actua11y ens1aved,
he
was
a150
open
to
})Jore
generous
ideas.
The
Stoic
\\rieh'
tbat
slaFes
coul d
be
the
."Iloral
equa 1 s
of
tbej. r
J1l.35ters
h'.5I5
fashionab1e
in
tbe late Republic )
'
(43)
-
257 -
Et
même
avant
le
stoicisme,
les
Roma i ns
ne
s'étaient
toujours
pas
montré
exclusionniste:=;
et
réfractaires
à
l'arrivée
des
peuples
étrangers
dans
leur
sein.
L' histoire
nous
montre
plutôt
une
Urbs
accuei llante,
tournée
vers
le
contact
avec
l'Autre,
lui
offrant
son
((siège).'
et
le
faisant
pa r t i c i pe r
au
dé r 0 u l e me nt
quo \\., i die n
de
l a
vie
à
l 1 i nt é rie u r
des
moenia.
Très
sensible
à
la
richesse
susceptible
de
constituer
le
voisin
et
du
bénéfice
qui
pouvait
résulter
de
leur
cohabitation,
e l l e
n'a
pas
hésité
dès
l'époque
rornu léenne,
à
met t re
un
terme
à
son
ani mosi té
contre
les
Sabins
et
à
conclure
un
synoecisme
dans
lequel
les
deux
peuples
allaient
participer
sur
le
même
pied
d'égalité! à
l'évolution
de
la
cité.
Le
texte
de
Tite-Live
est
plein
d'enseignements à
ce sujet
(( (Les
Sabines)
suppliaient
tour
à
tour
leurs
pères
et
leurs
mères
de
ne
pas
COI11IIJe t tre
un
crime
en
se
cou\\'rant
du
sa.ng
d'un
gendre
ou
d'un
beau-père
de
ne
pas
seui 11 er de
ce
forfai t
1 es
enfan ts qu' e11 es
ont mis au monde,
leurs f i l s
ou petits-fils.
"Si
ces
liens
de
parenté,
si
ces
.'nariages
\\'OUS
son t
odi eux,
c'est
contre
nous
qu' i 1
faut
tourner
votre
colère
"
L'émotion
gagne à
la
fois les soldats et les chefs.
On
se
tait,
on
s'apaise
soudain.
Puis,
afin
de
conclure
un
traité,
des
chefs
s'a.\\'ancent.
Non
contents
de
fai re
la
paix,
i l s
réunissent
en
une
seule
les
deux
cités,
mettent
la
royauté
en
COI!l111Un,
transportent
le
siège
du
pou\\'oir
à
Rome,
qui
se
trou\\'e
a.insi
doub1 ée.
Four
accorder
toutefois
quel que
cbose
aux
Sa. bi .'15',
i l s
prennen t
1 e
nom de
Quirites,
\\'enu
de
la
ville. de
Cures.>.'
(4-4->
-
258 -
Fri leuse
devant
les
voisi ns
pernicieux
ou
tout
autre
peuple
indigne
de
confiance,
car
capable
de
nuire
à
l'équilibre
de
la
vie
de
la
comrnunauté
et
de
bri-::;er
son
élan
vers
la
grandeur.
sourci lleuse
à
l'égard
de
tous
les
opposants
au
bien-être
de
la
c i t é
(44bis),
les
combattant
avec
hargne
et
1O\\.\\'ec
l'énergie
la
plus
vivace,
Rome
n'en
a
pas
été
moins
consciente
et
sensible
à
la
nécessité
d'une
ouverture
plus
large
de
ses
foyers
à
ceux
qu i
$e
montrèrent
di gnes
de
son
estime,
par
leur
capacité
à
rendre
service.
à
se
montrer
bienveillants
et
à
savoir
se
plier
pour
elle.
La
harangue
de
Claude
au
Sénat.
dans
laquelle
le
princeps
expl ique
avec
force
détails
l ' i d é a l
de
l'Urbs.
éclaire
de
façon
indubitable.
l'altruisme des Romains:
(( QI..' e 1 1 eau t re
cau se
y
a
t - i l
eu
à
la
ruine
des Lacédémoniens et
des Athéniens,
en dépit
de
leur
valeur
guerrière,
que
leur
entêtement
à
écarter
les
\\rai neus'
comme
étrangers
?
Au
contraire
le
fondateur
de
notre
empire
Romulus'
a
eu
de
sa.gesse
pour traiter le même jour,
les mêmes peuples
en
ennemis,
puis
en
conci toyens.
Des
étrangers
ont
régné
sur
nous.
Des
f i l s
d'affranchis ont accès
magistratures,
et
le
fait
n'est
pas
nou,'eau,
com.we
on
a
tort
de
le
croire
l'ancienne
Rome
en
a
donné
m~intes fois l'exemple.!.!
(45)
Un
altruisme
que
l ' a f f a i r e
Vindicius
j u s t i f i e
aussi
amplement.
pendant
les
bal but iements
de
la
Républ ique.
Plutarque
qui
comme
Tite-Live
nous
la
rapporte.
insiste
d'abord
sur
ses
tenants
et
se:3
abouti:=.sants
la
dénon-
ciation du
complot
contre
l ' E t a t
ourdi
par Tarquin
(Vindicius),
capabl e.
de
tout
plutôt
que
de
rester
inactif
et
pressé
par
sa
conscience
au
sujet
de
cette
affaire,
c'est
Valérius
qu'il
alla
trCU\\Ter
fina-
-
259 -
lement,
attiré
surtout
par son affabilité et
sa
bonté,
et
sacbant
qu' il
se
montrai t
accessible 8
tous ceux qui
a\\~ient besoin de
1 ui
et
que
5 8
mai son
é ta i t
toujours
ou \\'erte
aux gens
des
plus bU.Tbles
qui
voulaient
lui
par1 er ou 1 ui
demander un servi ce.'.'
(46)
avant
de
montrer
la
portée
de
cet
acte
de
bravoure
l ' i n s c r i p t i o n de
l'affranchi
dans une
tribu
de
son choix:
({ . . .
De
nouvelles
élections
eurent
lieu,
et
Val éri us
fut
brilla.~nt
proclamé
consul,
trol..n'ant
ainsi
la
juste
récompense
de
son
zéle.
Il
crut
qu'il
de~'ait le
faire
pa.rtager
8
Vindicius
et
f i t
décider
qu'il
serait
8
Rome
le
premier
affranchi
et
de~'iendrait
citoyen
a\\'ec
le
droit
de
\\'ote,
après
s'être
fait
inscrire
dans
la
curie
qu'il
voudrait.l}
(47)
Rome
ni est
donc
pas
foncièrement
i ngI-ate.
Elle
ne
re'3te
pas
indifférente
à
toutes
les
marques
de
sollicitude.
Imbue
de
sa
supériorité
et
convaincue
de
la
justesse
de
sa
domination
sur
les
autres
peuples
(47bis),
e l l e
n'en
demeure
pas
moi ns
à
leur
écoute,
prête
à
partager
avec
eux
les
délices
de
la
vie
civile
<47ter) .
Convaincue
de
la
f r a g i l i t é
de
l'isolationisme
et
des
dangers
qu'elle
peut
faire
naître
(48),
elle
se
reconnait
prête
à
accueillir
dans
ses
murs,
tout
homme
qui
accepterait
de
partager
ses
dangers,
de
braver
ses
difficultés
et
de
contribuer
efficacement
à
sa
grandeur
(4Bbis).
C'est
pourquoi,
pendant
la
guerre
Punique
qui
mit
aux
prises
les
légions
romaines
aux
troupes
d'Hannibal
de
plus
en
plus
menaçantes
dans
une
grande
partie
du
bassi n
méd i terranèen
par
leurs
v i etai res
et
le
flot
de
sympathis.:H:ts
qu'elles
drainaient,
en
215
av.
J. ,-C.,
oeta
milia
iuuenum
ualidorum
ex
s e r u i t i i s .
prius
siseitantes
singulos
uellentne
militare.
empta
publica
armauerunt
<.4E:ter)
et
furent
af franchis
en
214
par
Ti b.
Gracchus,
-
260 -
après
avis
du
Sénat.
De
même,
S,:aeura,
esclave
de
Q.
Croton,
fut
élargi
pour
avoir
mis
fin
aux
jours
de
L.
Saturninus
(49 >
le
Sénat
n'hésita
pas à
faire
miroiter
la
promesse
de
la
libertas à
tous
les
esclaves
désireux
de
se
joindre
à
lui
dans
la
lutte contre Catilina et
ses conjurés
(50).
II -
L'EXPRESSIOH DE LA RUPTURE STATUTAIRE
ENTRE
LES
ESCLAVES ET LES AFFRANCHIS
===~=========~=======~~=====~~===~===~================
Nous
avons
dit
que
Cicéron
é t a i t
propriétaire
d'esclaves
et
de
ce
fait,
a
dû
affranchir
un
certain
nombre
d'entre
eux.
C'est
le
cas
de
Tiro
auquel
dés
53,
i l
brandit
la
promesse
de
la
manumissio,
pour
l ' i n c i t e r
à
guérir,
d'a bord
dans
cette
première
l e t t r e
:
« ...
Prands
soin
de
ta
\\rie
qui
m'est
c.f)ere.
Le
jour approche
où
je
dois
faire
ce
que
j e
t'ai
promis
je
te
l'a \\rancerai
même,
si
t LI
vi ens.\\1
{51)
puis
quelque
temps
après,
dans
la
seconde,
où
i l
se
montre
plus alléchant
<1'.1fets-toi
en
mesure
de
pou\\roir
de
nou\\rea.u
servi r
nos
}fuses.
Nes
promesses
s'acconr
pliront au
jour dit
ne
t'ai-je
pas appris
l'étymologie de f i des....
(52)
Il
a
donc
une
expérience
personnelle
de
patron.
Mais au-delà
de
cette
simple
position,
i l
Y
a
également
autre
chose
d' intéressant
à
approcher
et
à
conna î tre
le
contenu
des
écrits,
la
disposition
des
catégories
socio-juridiques,
de
chaque
strate
sociale) dans
leur
énumération
une
dispo-
sition que. nous avons dénommée
la
phrasr301ogie.
-
261 -
1 -
Le poids de
la phraséologie
Nous
avons
retenu
ce
terme 1
non
pas
en
rapport
avec
le
sens
de
((di scours
pompeux)}
(53 )
que
lui
reconnait
le
((Pet i t
Larousse.l",
mais
plutôt
avec
celui
d' {{assemblage
de
mots,
présentan t
un
sens
compl et).!
(54),
et
qu i
expl i que
le
mot
phrase.
Esclaves
et
affranchis
étant
opposés
diamétralement
par
leur
nomenclature,
vont-ils
de
pair
à
l ' i n t é r i e u r
des
écrits
de
Cicéron?
La
place
q u ' i l s
occupent,
répond-elle
à
un
hasard
ou
à
un
ar'rangement,
à
un
ordonnement
p r é c i s ?
La
réponse
peut
être
contenue
dans
cette
hiérarchisation
servile au sein d'une
familia
:
{(Dans
une
grande
familia,
i l
se
trotnre
des
esc1a,res qui
se
croient
plus
importants que
d'autres,
COIIll11e
ceux
qui
sont
chargés
des
appartements
et
des
jardi ns,
i l s
n'en
sont
pas moi ns des esc la "es".'
(55)
Si
déjà
au
sein
des
esclaves
i l
existe
un
profond
hiatus,
i l
ne
pourrait
q u ' y e n
avoir
un
autre,
d'un
niveau
plus
élevé,
entre
les
serui
et
les
liber-ti.
Le
clivage
ne
pourrait
que
prendre
un
relief
d'une
autre
dimension,
marqué
par
l'appartenance
des
esclaves
aux
biens
meubles
comme
nous
le
suggère
la
diversification
du
patrimoine
du
f i l s
de
Hiéron,
Héraclius
{{ . . .
la !'!J8.ison était
pleine
d'une excellente
argenterie
bien
ciselée,
de
nombreux
tapis,
d'esclaves d'un grand prix.'.'
(56)
diversification
qui
ne
tient
pas
compte
des
affranchis.
LOl-sque
Cicéron
cite
les
produits
enlevés
par
Verrès,
le
fruit
de
ses
rapines,
les
escle,ves
occupent
une
position
centrale
parmi
les autres variétés:
-
262 -
((Car ce
dont
on
s'occupe
tout
d'abord,
c'est
de
faire
transporter
chez
Verrès
tout
ce
qu'il
y
avait
d'argenterie
cise1èe
dans
les
h '
_lens
d' Hèracl i us,
tout
ce
qu'il
de
vases
de
Corinthe
et
de
tapis
les
objets
de
ce
genre,
personne
n'en
donnai t,
ce
n'était
pas
seulement
de
cette
.~ison qu'il
avait
prise
et
,qu'il
ruinait,
mai s
de
la
province
tout
entière
qu'il
faudrai t
les
porter
en
masse
chez
lui,
Quant
aux
escla\\'es,
i l
emmena
ceux
qu'il
lui
plut,
pour d'autres,
i l
en
f i t
une
distribution
i l
y
eut
une
vente
d
l'encan
où
sa
cohorte
in\\'aincue domina
en sou\\'eraine,I,1
(57)
Dans
une
autre
énumération
où
l'Arpinate
évalue
encore
le
poids
des dévastations
de
Verrès,
les
esclaves sont
toujours
là,
au
milieu
de
ce
que
nous
pourrions
appeler
les
biens
i nani Inés
:
\\\\'Les Syracusains
qui
avaient
été
chargés en
apparence
de
faire
rentrer
les
sommes
pro\\'enant
de
la
\\'ente des
biens d'Héraclius,
mais
en
réalité
d'en
faire
le
partage,
rendaient
compte
dans
leur
Sénat
de
ces
opérations;
i l s
déclaraient
que
plusieurs
paires de
coupes d
boire,
que
des a.iguières
d'argent
précieuses,
que
beaucoup
de
tapis,
que
des
esclaves
de
prix ava.ient
été
donnés
d
Verrès.l•t
(58)
L'inexistence
des
affranchis,
leur
éloignement
de
l'emprise
dominicale,
leur
déchosification
et
une
certai ne
recouverture
de
leur
pr'opre
personnal i té.
Les
affranchis
apparaissent
donc
comme
des
êtres
à
part,
di f f,érents
et
eloignés
du
groupe
de
la
gent
servile,
La
pl ume
de
l'Arpinate,
jouera
beaucoup
dans
cette
césure
et
tendra
à
la
c l a r i f i e r ,
ne
serait-ce
qu'ici
où
elle
met
en
accord
-
263 -
esclaves
et
ciues
perditi
dans
le
~roe
combat
et
dans
les
mêmes visées
la destruction des
IDOenia de
l'Urbs
:
\\
Tune
eum,
quem esse
hostem comperisti,
quem
ducem
bel 1 i
futurum
ui des,
quelJl
exspectari
imperatore11l
in
c a s t r i s
hostiu11I
sentis,
B.uctorum
sceleris,
principe.11l
coniurationls,
euocatorem
seruoru.11l
et
ciuiu.11l
perditorem
(59)
Et
':tuand
les
affranchis
émergent,
c ' e s t
s ' i l s
sont
mauvais -
pour
occuper
la
tête
d'une
expédition,
pour
diriger
des
opérations
de
grande
envergure
où
se
joue
le
sort
de
la
cité,
faisant
ainsi
partie
des
duces
nefarii
(50).
Mis
à
côté
des
esclaves
dans
des
occasions
parti-
cu l i èrement
rudes
pour
Rome,
i l s
revêtent
a lors
des
attitudes
de
chefs,
les
distançant
et
arborant
des
airs
de
supérieurs
(51).
Rarement
mis
sur
la
même
ligne
pendant
des
moments
de
surchau f fe,
rarement
établ i s
dans
des
phrases
où
on
peut
les
voir
les
uns
dirigeant
les
autres
pour
venir
à
bout
de
l'Urbs,
saper
son
équilibre
et
la
détruire
jusque
dans
ses
fondements,
les
affranchis
apparaissent
seuls,
surtout
quand
i l
s ' a g i t
de
défendre
l'équilibre
romain.
A ce
moment,
i l s
y
vont
de
toutes
leurs
forces
et
de
tout
leur
savoir-faire
{( Il
importe
de
cannai tre,
Pères
conscri ts,
le zèle qui
anime les affranchis,
que
leurs mérites ont
associés à
la
fortune
de Rome,
et qui
~'oient ~'r8iment en elle leur
patrie,
alors
que
d'autres
qui
y
sont
nés,
et
qui
sont
nés des
.~illeures familles,
ont
vu
en
elle
non
la
patrie,
J:I:le;C=
une
\\'il1e
ennemi e.l.'
(52)
Une
exception
peut
être
faite
pour certains esclaves
seuls
sont
capables
de
s'engager avec
le
même
engouement,
ceux qui
s'accomodent
de
leur
condition
<53).
Cette
attitude
des
-
264 -
affranchis
ne
saurait
surprendre,
car
Cicéron
les
range
dans
le
lot
de
ces
hommes
vertueux,
défen:seurs
des
fondements
de
la
trancluillité
(64) ,6-1..~rmi tous,
à
gubernare
rempublicam
{55)
les
optimates
<56).
Propulsés
à
un
rang
aussi
prépondérant
de
Rome,
reconnus
comme
étant
de~3 éléments d' un
grand
poids
et
influents,
les
l i b e r t i
i l
va
de
soi
occupent
par
rapport
à
leurs
anciens
collègues,
le
haut
du
pavé.
Dans
une
quelconque
citation
apparaissant
dans
l'oeuvre
de
l'Arpinate)
ce
séparatisme
est
marqué
par
l'interposition
d'un
certain
nombre
de
catégories
socio-
juridiques
qui
servent
d'éléments
tampons,
renvoyant
les
esclaves
et
les
affranchis
assez
loin
les
uns
des
autres,
comme
dans
ce
pas,=.age
où
l ' Arpi nate
t r a i te
des
problèmes
purement
juridiques
((L'injure
n'est
pas
plus gratre
si
elle
est
fai te
par
ton
personnel
tot..'t
enti er
que
si
elle
est
féJi te
par
ton
fermier
;
par
ton
esclave
que
par des esclatres d'éJutrui
payes
pour cela
par
ton
procuratet..'r que par
ton
troisi n ou ton affranchi.ll
(67)
soit
par
une
juxtaposition,
mais
en
fa\\'eur
des
l i b e r t i ,
les
esclaves
intervenant
les
tout
derniers
dans
l'ordre
hiérarchique
:
Nunc
si
me
8~S,
si
te
a
me
amari
sels,
enitere
per
ami cos,
clientes,
hospi tes,
1 i bertas dellique
ae seruos tuas ut
scida
ne
qua depereBt
{68)
Une
barrière
hermétique
sépare
donc
les
affranchis
des
esclaves
et
rend
d i f f i c i l e / toute
forme
de
communication
entre
eux.
Un
fossé
infranchissable
à
n'importe
quelle
occasion
les
tient
confinés
dans
leurs
candi tians
respec-
l
tives,
rendant
de
ce
fait,
leurs
langages
di vergents.
En
disposant
les
serui
et
les
l i berti
de
cette
façon,
le
message
véhiculé
par
l'Arpin::>te
d'aucune
-
265 -
ambiguité
et
ne
souffre
d'aucune
confusion
mise
à
part
leur
origine
commune,
excepté
le
fait
q u ' i l s
appartiennent
tous
à
la
même
personne,
maître
ou
patron
i l s
ne
partagent
pl us
le
même
sort.
Leurs
obj ect i fs
ne
sont
pl us
les
mêmes
et
l'image
que
la
societé
a
d'eux,
n'a
pas
de
co~~une
mesure.
L'absence
d'une
quelconque
coordination
et,
ou
qui
eût
pu
nous
amener
à
penser
à
une
interdépendance
dans
leur
sein,.
oblitère
systématiquement,
le
moindre
compagnonnage
qu'explique
amplement
l'acquisition
par
les
l i b e r t i ,
d'une
influence
aus:si
grande
que
celle
des
homines urbani
industrii
mêlés à
la vie du
forum:
Xulti
humines
urbani
industrii,
multi
libertini
in
foro
gratiosl
mauique
uerse.n-
tur.
Quos peI'
te,
quDS
per C011111Wnes amicos
poteris,
su~
cura
ut
cupidi
tui
sint
elaborato,
appetito,
adlegato,
summa benefi-
cio te affici ostendito (69)
2
-
Une amplification de certaines qualités serviles
La culture,
c'est-à-dire
la
capacité
à
mettre
constamment
en
éveil
l'lngenium
au
détriment
de
toutes
les
autres
activités,
essentiellement
ma.nuelles,
le
respect
absolu
du
maître,
la
fidélité
et
le
dévouement
il
sa
personne,
t e l l e s
sont
entre
autres,
les
qualités
exigées
pour
faire
de
l'esclave
un
bon,
un
ami
du
maître
et
le
rapprocher
de
son
intimité.
On
retrouve
chez
certains
affranchis,
l'évocation
de
ces
points
forts
et
par
effet
contre.ire,
la
relégation
de
ceux
qui
s'en
trouvent
dépourvus,
vers
un
autre
uni\\rers,
éloigné
et
fourmillant
de
vices.
Il
en
est
ainsi
de
fides,
beneuolentia,
humanitase,=,sentiellement,
dont
se
recouvrent
aussi
les
serui
et
qui
les
distinguent
les
uns
par
rapport
aux
autre,="
à
l ' i n t é r i e u r
même
de
la
do:mus
du
pat;ron.
Il
ne
faudrait
guère
oublier
la
qualité
de
cerlus
<70>
à
laquelle
souvent
fait
référence
l'Arpinate
et
qui
s'applique
aux
-
266 -
comites
les
plus
confiants
de
son
entourage
esclaves,
affranchis et
même
hommes libres
<71>.
Cependant,
l'exposition ou
plutôt
la
reprise
de
ce'=-
qualités
chez
les
affranchis,
comporte
une
particularité
qui
a
son
importance.
Elle
se
si t ue
dans
leur
ampl i f ica t ion,
dans
leur
élargi ssement.
nous
di ri ons
encore.
dans
leur
grossissement.
Bons,
les
affranchis
qui
se
trouvent
rangés
dans
cette
ca tégorie
di f fèrent
grandement
de
leurs
anc i ens
partena ires
de
la
servitude.
parce
qu'ils
ne
se
voient
pas
parfois
gratifier
d'un
seul
mot
marquant
leur
positivité.
d'un
seul
qualificatif
indiquant
de
quel
côté
s'oriente
leur
source de
di st i net i on
par
rapport
au
flot
des
voisi ns.
Cont ra i rement
aux
serui,
les
liberti
ne
se
contentent
pas
souvent
d'être
porteurs
seulement
de
la
fides.
de
la
beneuolentia
ou
de
l ' humani tas.
Déj à
disposant
de
ces
poi nts
forts
pendant
la
seruitus,
points
forts
autour
desquels
s ' e s t
motivée
leur
manumissio,
i l s
ne
les
gardent
pas
inertes.
Ils
ne
s'en
contentent
pas
comme
d'une
fin.
Comme
insatisfaits
de
leur
prestation
servile.
beaucoup
d'entre
eux
transcendent
de
tout
leur
long
le'=-
capaei tés
virtuelles
en
eux
et
acquièrent
une
autre
dimension
dans
leur
expression
quoti-
dienne.
Cette
tran~;cendance se
manifeste
par
trois
procédés
qui
servent
de
tremplin
à
leur
particularisation
l'ad-
jonction
de
plusieurs
qualités
autour
d'un
seul
h01llDle.
l'existence
d'autres.
pas
encore
vues
parmi
les esclaves
et
l'usage du superlatif.
a)
L'adjonction de plusieurs qualités
C'est
un
procédé
qui
consiste
à
associer
sous
forme
de
faisceaux,
toutes
les
quaI i tés
contenues
dans
un
aff ranchi.
On
le
trouve
pratiquement
en
vigueur.
dans
les
passages ou
sont
mis en exergue
les
bons
liberti,
comme
cette
missive de
Cicéron
à
Servius Sulpicius
Rufus.
expédiée
de
Ro~ en 46-45
dane
Ls.qLlelle
c.~.
A'/ianu8
Hanunonius.
affranchi
de
M.
Aemilius
Avianianus est
recommandé
avec
toutes
les
richesses
qui
font
sa
personnalité
probitas.
fides.
beneuolentia
{72!.
Dans
-
267
-
une
autre
lettre
au
même
destinataire,
cette
fois,
le
tour
de
la
congratulation
revient
à
L.
Cossinius
Anchialus,
autour duquel
se
greffent
l'hu»~nitas et la probitas :
Hunc
tibi
ita
cODl11Jlendo
ut,
si
:meus libertus
esset
eode.mque
apud
~
loco
esset
qua
(et)
est
apud
SI.JUJ:1l
patronu11I,
maiore
studio
cOJ11111lendare
naD
po5Selll.
Quare
pergra t um mi hi
feceris,
si
eum iD
amicitiam
tuam receperis
atque
eum,
quod
sine
molestia
tua
fiat,
si
qua
in
re
opus
ei
fuerit,
iuueris.
Id
et
mihi
hominem
eDim
SU.Dl.lJl!j
probitate,
bumanitate opseruentiaque cognosces (79)
Humanitas
et
probitas
agglomérés
dans
une
seule
et
même
personne,
méliorent
sa
quintessence,
la
conduisent
à
un
ni veau
qual i t a t i f
surélevé,
que
seu Is
quelques
rares
indi\\ridus
peuvent
arriver
à
atteindre
et
encore
moins,
porter
en
eux.
Cet te
aIl iance
anni hi l e
systémat iquement
toute
propension à
des activités
louches,
peu
conformes
à
la
morale
adoptée
par
les
Romains
et
donc
avilissantes
et
dégradantes.
Non
seulement
l'affranchi
se
trouve
débarrassé
de
ce
que
J.
Granarolo
a
appelé
sous
forme
de
métaphore
«le
règne
du
mufle)),
c'est-à-dire
ce
vice
qui
fait
sub:sister
le
goût
de
la
bestialité,
du
cloisonnement
sur soi,
expressions
de
l'inculture
(74),
en
adoptant
des
airs
de
véritable
et
fin
intellectuel,
mais encore
i l
s'adjuge
la
capacité
d'être
honnête,
respectueux
de
ses
devoi rs,
loyal,
quaI i tés
antinomiques
de
la
superbia
(75).
En
l ' assimi lant
à
la
pietas,
J.
Hellegouarc' h
montre
] à
le
contenu
extrêmement
positif
de
cette
notion
de
pl~obitas (76).
L'huma.nitas
prise
dans
sa
singularité,
ne
représente
t-elle
pas
chez
un
affranchi
quelque
chose
de
particulièrement
important
?
Il
suffit
de
lire cette
lettre de
Cicéron expédiée à
Tiro en 46
av.
J.-C.
Video quid agas
t!.'.3S
quoque
epistulas uis
referri
in
llolumina.
Sed heus
tu,
qui
KaV.,V
-
268 -
0.
esse meorum scriptorum soles,
unde illud tam
"aKVpV"
ualetudini
fideliter
inseruiendo
?-
Unde
in istum locum -fideliter- uenit?
Cui
uerbo
dom ci 1 i um
est
propri um
in
offi ci 0,
Ddgrationes
in
alienuJ11
mvltae
;
Dam
et
doctri na
et
d0111US
et
ars
et
ager
etia11l
fidelis
diei
potest,
ut
s i t ,
quomodo
Theophrasta plac.et,
uerecunda
tralatio (77)
ou encore celle-ci,
pour s'en convaincre
Tu
istie,
si
quid
librarii
m5nu
non
intellegent,
IOCJnstra bi s
(78)
Pour
a,'oir
été
humanus
et
donc
avoir
su
u t i l i s e r
les
deux
âmes
qui
font
les
intellectuels
romains
à
la
fin
de
la
République
la
Romaine
et
la
Grecque
(79),
Tiro
est
adu lé,
ou
pl us
exactement,
cont i nue
de
l ' êt re.
Qu 1 en
est- i l
de
ce
fait
d'un
affranchi
qui
à
cette
qualité,
joint
une
autre ?
On
peut
retrouver
à
peu
prés
la
même
portée
par
la
liaison
de
l'humanitas
et
de
la
suavitas,
que
Cicér-on
souligne
à
propos d'Alexio
(80),
tandis que
Tiro
lui,
est
marqué
par
la
particularité
d'être
à
la
fois
humanus
et
modestus
(81),
bases sur lesquelles s'appuie Quintus pour
le distinguer
Si
enim
DIihi
Stati1
fideli tas
est
tDDtae
ual upta ti,
quanti
esse
in
isto
hlJ.ec
eede11l
bor?
debent
additis
l l t t e r i s
et
serlIIOnibus
et humanitate . . .
(82)
Souvent
par
paires,
ces
qualités
pouvaient
pas'3er
à
trois,
se
conjuguer
dans
leur
poids
et
de
ce
fait; accroître
la
valeur
du
bénéficiaire.
Dans
l'autorité
qu'el~es
étaient
susceptibles
d'engendrer,
elles
se
trouvaient
rehaussées
d'un
éclat
plus-: grônd.
Exprimant
le
serviteur
idéal
tel
que
cela
ressort
du
Pro
Pla.ncio
dans
une
définition
de
-
269 -
l'Arpinate
où
prennent
place
côte
à
côte
la
frugalitas,
la
laborentia et
la
uigilantia.
ut
nos
in
mtJ.ncipiis
parandis
quaJ1lUis
frugi
hominem si
pro
fabro aut pro tectore e.m1mus,
ferre
moleste
solemus si
eas
artls
qUelS
ln
emendo
secutl
sumus
forte
nesclunt,
sin
autem e~nus qu~m ui1icum imponeremvs,
quem
pecori
praeficeremus,
n1h11
in
eo
ois1
frugal i tatem,
1aborem,
uigi 1ant1a.m
esse
curamus (83)
le
poids
d'un
t e l
triptyque
qui
bien
évidemment
détachait
l'affranchi
du
flot
de
ses
congénères,
devait
avoir
pour
conséquence
inélw::table,
de
lui
inculquer
une
certaine
perfection.
Peu
d'affranchis
et
encore
moins
des
esclaves,
si
bons
soient-i Is, portent
agrégés
en
eux J t r o i s
ou
quatre
qualités
d'une
dimension
t r è s
grande
et
d'une
très
haute
valeur,
l ' ~ssociation de
bonus,
beniuolis,
f i d e l i s
chez
ceux
de
Milon
n'étant
vraisemblablement
que
de
l ' e x t r a -
polation
en
vue
de
j u s t i f i e r
aux
yeux
des
iudices
la
manumissio
appl iquée
auparavant
sur
eux
(84),
cependant
i l
n'en
demeure
pas
moins
vrai
qu'elles
devaient
avoir
une
haute
influence
sur
le
regard
porté
sur
eux
non
seu lement
par
le
patron
et
leurs
collègues
8.ffranchis,
mais
également
par
la
société
tout
entière.
D'autant
plus
qu'elles
se
manifestaient
et
à
l ' i n t é r i e u r
de
la
domus
s ' i l s
y
continuaient
à
\\'ivre
et
en
dehors
d'elle,
jusque
dans
l'entourage
immédiat
ou
lointain
du
patronus.
Nt est-ce
pas
par
le
contact
avec
certains
d'entre
eux
que
Cicéron
émet
des
avis
sur
leur
réelle
personnalité
'?
La
propulsion
de
Dionysius,
seul,
au
rang
de
uir
bonus
{85>,
semble
être
le
résultat
de
ce
mélange
que
Cicéron
traduit
par
la
\\'ertu,
l'obligeance,
le
zèle,
la
discrétion,
dans
cette
l e t t r e
à
Atticus:
({Dionysius
brûlait
de
te
re\\'oir
Je
te
l'en\\'oie,
non
certes
de
bon
gré,
IIldis
i l
a
-
270 -
fallu
s'y
résoudre.
Sans
parler
de
science,
qui
)!J'était
connue,
j'ai
trouvé
en
lui
pure
\\'ertu,
pleine obligeance,
zèle ~ême
pour ma gloire,
discrétion
. . . ,'.'
(86)
Il
en est
également
de
l'bonos accordé
à
Chrysippus
f8?)
et
que
l'Arpinate
reprend
d'ailleurs
à
l'égard
de
Dionysius,
mais avec
une
connotation
toute
~péciale,
puisque comportant
un
élan comparatif
en sa
faveur
honoratior
fuit
(88).
Une
honorabi l i t é
méri tée,
grâce
à
la
dextéri té
avec
laque Il e
le
libertus
conjugue
allègrement
ses
propres
capacités,
sa
valeur
intrinsèque
et
ses
bons
sentiments
envers
Atticus
son
patron,
sentiments que
partage
l'Arpinate
(89).
C'est
en
sachant
transmettre
toutes
les
intentions
de
son
patronus
Ap.
Claudius,
que Cilix: devient
un familiaris de Cicéron:
«Ci1ix,
ton
8ffranchi,
ne
111' é ta- i t
guère
connu
jusqu'à
présent
;
mais
a-pres
m'a-voir
remis de
ta.
pa-rt
une
lettre
pleine
d'amitié
et
d' ob1 igea-nce,
c'est
mer\\rei 11 e
COI!L.we
il
a-
su
seconder
par
s'es
propos
les
intentions
bi en,rei 11a-n tes
de
ta.
1 et tre.
J'ai
eu
graI:ld
plaisir
li
l'entendre
me
dire
ce
qu'étaient
tes
sen t i men ts,
dans
quels
termes,
chaque
jour,
tu F~r1ais de moi.
Bref,
en deux jours
i l
m'est de\\renu
familier
• •1,1
(90)
b)
L'emploi de qualités nouvelles
L'inventaire de
toutes
les qualités
utilisées
par
l'Arpinate
pour
indiquer
les
bons
esclaves
et
les
bons
affranchis,
montre
une
nette
discontinuité
dans
leur
usage.
Il
est
des
quaI i tés
présentes
chez
les
l iberti,
ma is
dont
les
serui
se
trouvent
dépourvus.
Cela
n'est
pas
le
fait
d'un hasard
les
esclaves
n'avaient
pas droit
à
toutes
les distinctions
(91).
Il
Y a
donc
là,
un élément certain d'infériorité
auquel
les
affranchis
échappaient
du
fait
de
la
manumissio
et
qui
continuait
à
les
marginaliser
des
esclaves.
C'e~;t ainsi
que
- 271 -
l'on
trouve
portés
par
des
affranchis,
des
qualificatifs
t e l s
que
pudens
que
Cicéron
emploie
à
propos
de
C.
Avianus
Hammonius
Hominem
pudentem
et
officiosum
cognosces
et
dignum
qui
a
te
di l i g i tur
(92),
pour
fai re
référence
à
son
humilité,
l'acceptation
de
son
rang,
de
son
statut
et
des
obligations qui
en
découlent,
parmi
lesquelles
la
soumission
à
l ' i n s t i t u t i o n
suprême,
la
Respublica,
comme
l'indique
Cicéron à
Yérrès en parlant
du
f~ls de celui-ci,
Quibus
in
rebus
non
solu11l
fi1io,
Verrès
uerUJ1l
etiBJ1l
rei
pub1icBe
fecisti
iniuriBJ11.
Susceperas eni11l 1 i beros non sol u. ti hi,
sed
etiaJ1l
patriae,
qui
non
mado
ti bi
uo1 uptBti
sed
etiBJ1l
qui
B1iquBndo
usui
rei
pub1icBe
esse
passent.
Eos
instituere
Btque
erudire
Bd maioru111 instituta,
ad ciuitBtis discip1i-
naJ1l,
non
ad
tua
flagitia
neque
Bd
tuas
turpitudines
debuisti
;
esset
ex
inerti
Btque
improbo
et
impur.J
parente
gnBuus
et
pudens et probus fi1ius,
hBberet a1iquid l'lbs
te TeS pub1ica muneris {93)
et
à
laquelle
doit
se
plier
l'homme
de
bien,
d'une
manière
générale.
Ce
q u a l i f i c a t i f
rejoint
légèrement
la
modestia,
sorte
d'abdication
de
ses
propres
intérêts au
profit
de
ceux
du
patron,
de
don
entier
à
sa
personne
et
même
à
celles
de
ses
relations,
de
privilégiation
de
ce
qui
f a i t
la
uoluntas
patroni,
poi nt
fort
de
Ti ro
{94)
et
de
T.
Ampi us
Menander
{95).
La
modestia
suppose
donc
pour
l'affranchi,
une
humilité,
la
manifestation
d'un
certain
esprit
de
discipline,
un
refoulement
de
la
volonté
de
se
s a t i s f a i r e
et
de
combler
ses
appétits.
Elle
laisse
f i l t r e r
aWSSl
un
esprit
de
gêne,
de
retenue,
répondant
sans
doute
à
une
volonté
d'autonomie.
Le
terme
de
uerecundia
appl iqué
à
Ti ro
pour
essayer
d'expliquer
la
décision
de
s'endetter
prise
par
lui
alors
que
Cicéron
avait
demandé
à
Curius
de
faire
une
avance,
est
donc
dans
ce
cas,
une
sorte
de
prolongement
de
rnodestia
:
-
272 -
Tironem
nostrum
8b
alter8
relictum
audio.
8ed eum uideo in sumptum ab a l i i s mutuatum ;
ego autem curicum nostrum si
quid opus esset
rogarl3..11l.
Nala
Tiranis
uerecundiam
in
culpa
esse quam inliberalitatem curi
(96)
C'est
entre
autres
sur
la
base
de
ces
aspects
purement
moraux,
que
l' af franchi
prend
de. l'avance
et
se
singularise
par
rapport
aux
esclaves
des
aspects
qui
font
l'essentiel
de
sa
personnalité
et
au
travers
desquels)
l'esclave
se
trouve
distancé.
Mais
i l
y
a
dans
la
tendance
à
particulariser
les
serui
et
les
liberti,
un
dernier
procédé
d'importance.
c) L'usage du superlatif
Rares
sont
l es
quaI i tés
servi les
qu i
sont
expri mées
sous
cette
forme
(96bis).
Là
aussi,
les
esclaves
se
trouvent
dépossédés donc
d'un
indice qui
eût
pu
peut-être Les mettre
au
même
niveau
que
les
affranchis.
Leurs
points
forts
sont
ressortis
dans
leur
état
brut,
étalés
dans
leur
état
naturel,
alors
que
les
liberti
eux,
bénéficiaient
du
pri vi lège
de
voi r I e s
leurs,
acquéri r
une
très
haute
dimension.
En
fait,
il
ne
s'agit
pas
d'un
artifice
littéraire
mis
au
point
par
l'Arpinate,
dans
la
simple
intention
de
marquer
la
désolidarisation
entre
les
deux
types
de
statuts.
Ce
n'est
pas
un
arrangement,
une
extrapolation
volontaire
servant
à.
indiquer
l'éloignement
des
esclaves.
Certes,
la
pl ume
de
l ' Arpi nate
j oi nte
parfois
à
une
tendance
à
la
confi rma t i on
de
la
fierté
dont
se
gargarisent
certains
patrons
eu
égard
au
poids
de
leurs
affranchis,
donnent
un
rel ief
marqué
aux
quaI i tés
e11es-
mêmes,
mais
celles-ci
sont
le
reflet
de
ceux
qui
les
portent.
Et
le
superlatif,
ne
fait
que
leur
donner
plus
d'acuité,
les
amener
à
un
stade
très
élevé
qu~
même
les
liberti
entre-eux
n'ont
guère
la
possibilité
de
franchir,
parce
qu'introduisant
une
notion de
limite.
C'est
l'effet de
la
jonction de
summa et
probitas,
dont
Cicéron
fait
usage en
-
273 -
parlant
de
L.
Cossinius
Anchialus
hominem
enim
su:mma
probi tate
(97).
ou
encore
du
i s s i mus
accolé
à
probatus
pour
caractéri ser
Ant i oenus,
l ' af franchi
de
L.
Fl accus
le
père
hune
Antiochum
paternum
hulus
adulescentis
libertum
i l l i
Flacco probatissimum
(98).
L'usage
du
superlatif
culmine
leurs
détenteurs assez
loin
de
leurs
congénères
et
f a i t
d'eux
en
somme,
des
hommes
à
part,
sans
lien
direct 1
sans
contact
permanent.
Elle
donne
aux
affranchis
qui
s ' e n
trouvent
gratifiés,
une
dimension
démesurée,
puisqu'elle
les
sort
du
lot
COInlIlun.
Elle
est
de
ce
fait,
une
source
de
hiérarchisation.
Ainsi) lorsque
Tiro
se
voi t
qual i f i e r
d' humanissimus
et
d' optimus
(99)
par
son
cher
Cicéron,
non
seulement
i l
va
au-delà
de
ce
q u ' i l
é t a i t
et
qui
faisait
de
lui
un
humanus
pendant
l'esclavage
<100>,
dépassant
ipso
facto
tous
les
esclaves
imprégnés
de
cette
qual i té,
m3.is
aussi
i l
surpasse
les
affranchis
contenant
un
brin
de
culture,
de
politesse,
les
a t t r i b u t s
de
l'honnête
homme.
Il
se
place
au
sommet,
au
faîte
de
toute
l'espèce
humaine
pétrie
de
cet
élément
positif
et
acquiert
incontestablement)
un
magistère
moral
inégalé.
C'est
le
«produit
rare'!,l,
une
espèce
de
spécimen
irremplaçable
et
introuvable,
puisque
surclassant
tout
le
monde
considération
j u s t i f i é e
par
le
carissimus
JIrlhi
es
<10U
que
lui
déclare
Cicéron,
pour
l ' i n c i t e r
à
se
r é t a b l i r
au
plus
vite
et
reprendre
ses
activités.
Des
acti\\rités
qui
à
chaque
maladie
de
Tiro
sommeillaient,
perdaient
de
leur
vigueur,
entraînant
le
refroidissement
dans
la
vie
intellectuelle
et
un
léger
désarroi
dans
la
vie
politique
de
Cicéron,
avec
une
gravité
prononcée
en
50-49
à
l'approche
de
la
guerre
ci \\Ti l e :
....Je
m'iI118ginais
un
peu
plus
supportable
le
regret
de
ton
absence
ma i s
je
ne
pu i s
décidément
le
supporter
et,
si
fort
qu'il
importe
à
.'Da
digni té
de
bâter mon
arri vee
à
Rome,
il
.~ semble être en
faute
pour m'être
séparé
de
toi.
Hais
tu
paraissais
décidé
à
-
274
-
ne
Fouloir
reprendre
1.!J.
mt?r
qu' .!J.près
com-
plett?
con~r.!J.lescence
Je
t'A'
8.pprouFè,
et
je
ne
c:h8nge
l)3.S
d'opinion,
si
tu
persistes
d.!J.ns
18.
tienne,
S1.
pourt8.nt,
8.près
t'être
a.1i.wentè,
i l
te
semble
pouFoir J'De
rejoindre,
à
ta. décision
. ......
(102)
C'est
d'ailleurs
dans
ce
contex.te
que
Cicéron,
comme
pour
vouloir
marquer
l ' u n i c i t é
de
son
affranchi
et
peut
être
amener
son
ami
Atticus
à
partager
le
même
avis
sur
Alexis
<l 03 ),
po u r e n
fa ire
en
fin
de
compte
deux
serviteurs
bors
de
pair,
lui
c o n f i a :
Cuius
quoniam
mentio
facta
est,
Tironem
Patris
aegrum
reliqui,
adulescentem
dili-
gentem,
ut
nosti,
et
adde,
si
quid
uis,
probum
nihil
uidi melius (l04)
Loin
donc
de
marquer
seulement
une
rupture
nette
entre
les
esclaves
et
les
affr"anchis,
le
courant
usage
du
superlatif.J
établ i t
également
une
séparation
entre
les
affranchis,
une
sorte
{{d'apartheid»
dirons-nous
dans
leur
milieu,
en
conduisant
ceux
qui
en
sont
marqués,
vers
la
perfection.
En
dernière
analyse,
elle
met
à
nu
un
monde
fossilisé,
où
les
serui
occupent
l ' a r r i è r e
plan,
mais
où
les
l i b e r t i
se
surpassent
selon
les
compétences
de
chacun
et
le
degré
d'affection
du
patron.
Cette
gradation,
surtout
entre
affranchis et
esclaves,
continue à
l ' i n t é r i e u r de
la domus.
III - LE CONTENU DES RAPPORTS AFFRANCHIS 1 ESCLAVES A
L'INTERIEUR
ET
A
L'EXTERIEUR
DE
LA
DOKUS
~~==~~=~~=~~~==========~~========~====~==~=======~===
Après
leur
éloignement-~ la
manum.issio
qui
modifiait
completement
leur
vie,
bien
de
l i b e r t i
acqUf~faient
un
domicile
personnel,
OÛ
se
déroulait
l'essentiel
de
leur
quotidienneté.
C'est
ce
que
nous
constatons
grâce
a
cette
l e t t r e de
Cicéron à
P.
Servilius
Isauricus
:
- 275 -
«C.
CurtiuES
Jfithrès
est,
COII1.:'11e
tu
le
sais,
l'affranchi
de
Postumus,
un
de
mes
plus
proches
fami 1 i ers,
~js
i l
m'entoure
d'autant
de
respect
et
d'attention
que
son
patron
lui-même.
Cb8que
fois
que
je
suis
allé il
Ephése,
j'éd
été
reçu
chez
lui
comme
cbez moi
et
bien des é\\rènements m'ont
fourni
l'occasion
d'èpr;:;u\\rer
son
dé\\rouement
et
S8
loyauté il mon égard,l)
(05)
Chrysogonus
l'affranchi
du
dictateur
Sylla,
disposait
lui
aussi
d'une
résidence
personnelle
sur
le
Palatin,
cossue
et
richement
pour\\rue
(106).
Cet
anonyme
installé
à
Tusculum,
avait
la
sienne,
d'un
rare
luxe
qui
entre
autres/inspira
L.
Lucullus pour justifier son train de vie fastueux:
«Un grand ho~~e et qui
fut
notre 8mi
il
tous,
Lucius
Lucullus,
8.urait,
t-on
raconté,
fait
cette
réponse,
qu'on
troLHrai t
i ngé-
nieuse,
lorsqu'il
di t,
C011J..Te
on
lui
reprocbait
la
magnificence
de
sa
villa
de
Tuscu 11..'111,
qu'il
a tra i t
deux
voi si ns
en
baut,
un
clle \\ra 1 i er
roma i 12
;
en
NS,
un
8.ffr8.ncbi
quand
tous
deux
avaient
des
\\ril1as
magnifiques,
on
pou \\ra i t
bien
lui
accorder ce
qu'on
laissait
faire
il
des gens
d'un ordre inférieur»
(107)
En
dehors
d'eux,
d'autres
affranchis
préféraient
poursu ivre
leur
vie
auprès
du
patron
et
de
la
famille
auprès
de
laquelle
i l s
avaient
fait
une
partie
de
leur
existence.
C'est
d'ailleurs
l'impression
que
nous
fournissent
presque
tous
les
liberti
de
l'Arpinate.
de
par
leur
présence
permanente
à
ses côtés
et
l'inexistence
dans
les écrits,
du
moindre
domicile
appartenant
à
l'un
d'entre
eux.
Cette
consta\\(!: ion
vaut
également
pour
ceux:
d'Atticus,
qui
à
•
l'instar de
Dionysius et
des
lect.carii,
continuent
à
couler
leurs
jours
aupl-ès
de
lui
<107bis).
Une
telle
promiscuité,
-
27S -
rendait
donc
inévitable,
la
cohabitation
entre
les
esclaves
et
les
affranchis.
Mèlés
au
service
d'une
même
personne
et
de
ce
f a i t ,
placés
sous
sa
responsabilité
en
tant
que
propriétaire
de
la
domus,
i l s
étaient
appelés à
accomplir
un
certai n
nombre
de
tâches,
à
exerce r
un
certa in
nombre
de
fonctions
nécessaires
à
l'équilibre
et
à
la
survie
de
la
familia.
Le
maître
-
pour
les
uns
-
et
le
patron -
pour
les
autres
attendait
d'eux
des
prestations
officia
di \\Terses.
Etaient-elles
les
mêmes
pour
t o u s ?
Existait-il
une
concordance
dans
les
act i vi tés,
une
ressemblance
dans
leurs
occupations,
ou
celles-ci
éta.ient-elles
fonction
du
statut
de
chacun
d'entre
eux
?
En
c l a i r ,
comment
dans
la
domus
se
passe
l'essentiel
de
la
vie
des
serui
et
des
l i b e r t i
?
1 -
L'exercice par les affranchis,
de certaines fonctions
exclusives
Il
n'y
a
pas
de
cursus
domesticus
donnant
la
possibilité
de
systématiser
les
fonctions
purement
serviles
et
celles
rele\\Tant
de
la
l i bert i ni té.
Les
esclaves
et
les
af franchis
en
grande
part ie,
dans
l'oeuvre
de
Cicéron,
donnent
l ' impression
de
converger
parfois
vers
les
mêmes
act i vi tés,
selon
les
valeurs
individuelles,
les
capacités
personnelles
et
les
apti tudes
reCOnnues
aux
uns
et
aux
autres.
Cela
est
surtout
valable
pour
les
activités
faisant
intervenir
l ' ingeni um,
ces
activités
que
l'Arpinate
loue
pour
leur
nobl esse
et
leur
essence
ci vi le,
car
ne
se
fondant
pas
sur
le
don
de
la
force
de
travai l
et
en
retour,
sur
la
perception
d'une
merces
et
parmi
lesquelles
figurent
en
bonne
place
la
médecine,
l'architecture,
l'enseignement
de
nobles
connaissances
(108)
ou
pour
ce l l e s
nécessi tant
une
hardie:::se
et
un
dévouement,
comme
le
transport
du
courrier
(09) .
Mais
c ' e s t
surtout
dans
le
passage
de
l ' ~"'~'l "'TaO'~
a"
,=:'~'~
~.
a'"
que
se
perçoit
cette
continuité.
Une
fois
affranchis,
les
anciens
esclaves
exercent
leurs
habituelles
fonctions.
Ainsi,
Tiro,
adulé
dans
la
servitude
-
277
-
pour
son
humani tas,
cont i nue
après
la
manumissio,
à
jouer
le
rôle
de
majordome,
de
lecteur,
de
copiste,
.'<mé1ange avant
la
lettre
de
secrétaire
B
~DU,
B
studiis,
B
bibliothecis»
(110).
Il
en
est
de
même
de
Dionysius,
dont
la
culture
est
largement
s o l l i c i t é e
par
Cicéron
ClIn.
Conseiller
politique
et
même
intime
de
Quintus,
Statius
pour
sa
part,
n'arrête
pas
de
remplir
la
même
tâche
(112),
malgré
les
récriminations
de
Cicéron
(113).
Mais
i l
ne
faut
pas
croire
que
cette
continuité
embrassait
l'en:3emble
des
branches
de
la
vie
professionnelle.
En
dehors
de
cette
linéarité
fonctionnelle,
i l
est
des
emplois
que
seuls
les
affranchis
sont
amenés
à
exercer.
Pareille
exclusivité,
crée
du
même
coup,
une
véritable
division
du
travail
qui
confère
à
chaque
catégorie
socio-juridique,
des
responsabilités
répondant
à
sa position au
sein de
la société.
a)
Les fonctions relntives aux affaires
L'explosion
croissante
du
t e r r i t o i r e
romain,
qui
entrai ne
derrière
elle
une
mutation
profonde
de
ses
instruments
d'échange
et
de
tout
son
appareil
de
production,
conduit
les
Romains
à
s'intéresser
de
très
près
au
flux
incessant
du
commerce
et
donc) à
briser
leur
étroite
vue
qui
se
confinait
uniquement
sur
l ' agricul ture
(113bis).
L'époque
des
guerres
Puniques,
i ntrodu i t
un
nombre
important
de
negotfatores qui,
partant
de
Rome,
s i 110nnent
le
bassi n
médi terranéen.
L.
Juglar traduit cette
métamo~phose par ces mots:
«A
l'origine
de
Rome,
le
co~~erce
n'est
presque
rien
l'agriculture
est
tout.
l'époque
des
guerres
Puni ques,
1 e
COIIWJerCe
se
développe
de
I\\'ome
partent
des
negiotiatores
qui
dans
tous
les
notamment
en Gaule,
précèdent
les 1ègions et
n.ouent
les preJ'!1ieres relations coJ!l!nercia1es.'.1
-
'273 -
Et
en
définitive,
Rome
devient
un
marché
financier
où
publicains,
par
l'entremise
de
sociétés
redoutables
et
puissantes
<114bis),
rivalisent
d'ardeur
dans
le
maniement
d'argent.
Voilà comment
A.
Deloume définit
leur
pouvoir:
((Les
fin~nciers
de
Rome,
C ' est-ii-di re
les
publicains
et
les
banqui ers,
ont
pendant
près
de
trois
siècles,
infiniment
plus mai tres
de
la
pol i t i que
i ntèri eure,
de
la
guerre
et
de
la
paix,
que
ne
le
sont
en
génèral
1 es
pl us
gr8.ndes
pui ssances
fi nan-
cières contemporai nes",i
(115)
C'est
donc
en
fonction
de
l'existence
de
ces
compagnies
de
pl us
ou
moi ns
grande
envergure,
installées
outre-mer,
que
certai ns
affranchis
sont
signalés
com:me
étant
mêlés
à
la
,ri e
turbulente
des
affaires,
faisant
de
nombreux
déplacements
entre
ces
points
et
leurs
patrons.
C'est
le
cas_
d'Antiochus,
affranchi
du
père
de
L.
Flaccus
dont
Cicéron
di t
qu 1 i l
étai t
allé
réclamer
de
l'argent
pour
le
compte
de
son
jeune
patron
(116),
alors que
d'un
autre
côté,
les
Fufius,
chevaliers
l-omains,
avaient
envoyé
un
affranchi
exiger
une
créance
à
Temt10s
(117).
Cicéron
lui-même
recommande
un
nombre
assez
important
de
liberti
à
ses amis,
gouverneurs
dans
des
provinces d'orient.
Si
pour
la
plupart,
i l
le
fai t
pour
rendre
service
à
certai nes
de
ses
connais-
sances,
comme
ce
T.
Strabo
dont
le
l i bertus
doi t
effectuer
le
déplacement
de
Narbonnaise
en
vue
de
faire
rembourser
une
créance
à
son
patron
(118),
i l
arrive
des
moments
où
les
affranchis
en\\royés
dans
ce
genre
de
misJbn,
lui
appartien-
nent.
Hi larus
qu i
va
auprés
d' Antoi ne
en
Macédoi ne
et
dont
se
plaint Cicéron auprès d'Atticus,
est
l'un de ceux-là:
\\',J' 8. i
un
8. ffranch i ,
un
parfait
coquin,
,./ ' 8. i
nOl!l}l1é
1-1i 18rLf s
qui
est
cOJI)ptable,
et
ton
..:-}ient,
V'llerius.
l'interprete,
.'Ile
dit
de
lui,
et
Thvi11us
m'écrit
avoir appris la
chose
sui\\'!inte
i l
est
aupres
d'Antoine
-
279 -
et
Antoine
dit
8
qui
~'eut
l'entendre
que
dans
les
SO!IJ}'nes
d'argent
qu'il
lè~'e
i l
y
a
une
part
qui
est
pour
moi,
que
j ' ai
en~'oyè
un
aFfranchi
pour
surveiller
nos
bénéfices
communs.
J'B.i
été
vi vement
ému,
quoique
je
n'en
~'eui 11 e
rien
croire
mais
i l
est
certain
que
des
brui ts
ont
couru.
Cherche,
enquête,
scrute 8
fond
toute
cette histoire,
et
fais
"i der
1 es
1 i eux
8
ce
Fripon,
si
tu
en as 1 e
maye n
. . . , 1 , 1
(11 9 )
Dans
une
autre
l e t t r e ,
mais
datée
celle-là
de
45
av.
J.-C.,
Cicéron
c l a r i f i e
sa
position
vis-à-vis
de
K.
Tullius
Laurea,
le
seriba
qui
l ' a v a i t
accompagné
en
Cilicie
lors
de
son
proconsulat
et
qui
semble
t - i l ,
avait
sur
lui
de
l'argent
destiné
à
l'édification
du
monument
de
Tullia
Sed est
quiddam apud
ilIum meum.
id
ego
in
hane
rem statui
eonferre
(120),
d i t - i l
à
Atticus.
De
même
c'est
à
la
fonction
de
negotiator
que
se
dévoue
inlassablement
Fhilotimus,
l'affranchi
de
Terentia,
mais
que
Cicéron
utilise
le
plus
souvent
pour
des
opérations
fi nancières
de
grande
portée.
Exubérant,
présent
dans
diverses
négociations,
on
le
trouve
en
mai
51
chez
Atticus
pour
la
contraction
d'une
dette
auprès
d'Oppius
et
à
laquelle
Cicéron
tenai t
beaucoup
pour
le
remboursement
de
celle
contractée
auprès
de
César
(121).
En
septembre
de
la
même
année,
toujours
aux
côtés
d'Atticus,
i l
est
prié
de
ne
pas
s'en
prendre
à
Messala,
garant
de
la
créance
de
Cicéron
(22).
Grosso
modo,
Philotimus
pendant
toute
la
période
allant
de
59
à
45,
n'arrête
pas
de
jouer
un
rôle
monum,=ntal
de
préposé
aux
affaires
de
l'Arpinate.
Le
point
culminant
de
ce
rôle,
se
situe
sans
conteste
après
la
condamnation
à
l ' e x i l
de
Milon,
à
l'issue
de
laquelle
une
societas
fut
nouée
entre
l ' Arpinate
et
son
affranchi
dans
la
reprise
de
ses
biens
en
58 av.
J.-C.
A.
H~ury qui a consacré un article
BUX
tenants
et
aboutissants
de
cette
affaire,
indique
quels
furent
les objectifs de Cicéron
-
280 -
H . . .
Cic~ron
se
s e r a i t - i l
risqué
à
dépouiller
son
ancien
client
sous
les
yeux.
autant
dire
avec
la connivence
de
la
famille
du
banni.
de ses gens.
de
leurs amis communs
et
surtout
de
Caton.
autre
défenseur
de
Milon.
dont
l'appui
lui
est
indispensable
pour
obteni r
les
ho n ne urs
qu' i l
gui g n e ? »
(23).
avant
de
poursuivre.
comme
en
guise
de
conclusion.
sur
la
vénalité de
l'affranchi
«La
vente
des
bi ens
de
Mi l on s' achè ve
quand
Cicéron
quitte
Rome
sans
défiance
vers
le
1er
mai
51.
A
Tusculum.
l'accompagnent
Atticus
et
Philotime.
Seuls
Philotime
et
Cicéron
conna i ssent
leurs
comptes
réc i-
proques.
I l s
les
arrêtent
dans
un
tëte-à-
tête
auquel
n'assiste
pas
Atticus.
Pour
mieux
leurrer
le
proconsul,
Philotime
le
prie
de
porter
sur
son
livre
de
raison
le
montant·
de
sa
dette.
Vers
le
1er
juin
à
Bri ndes.
à
l ' instant
d'embarquer,
arri \\'e
à
Cicéron
une
lettre
de
protestation..
Il
alerte
aussitôt
Atticus,
Camille
son
ban-
q u i e r .
et
les prie de
prendre
toutes dis-
positions
pour
que
F'hilotime
donne
satis-
faction à
Milon.
On
ne
saurait
faire
endosser
à
Cicéron
plus
de
responsabilité
qu'il
n'en
porte.
Sa
culpabilité est assurément
moindre
que celle
de
Philotime,
dont
le
rôle
annonce
en
tout
point
nos
Euphorbes
et
nos
Narcisses,
moindre
sans
doute
que
celle
de
Terentia,
prête
à
courir
dans
son
ai franchi
l'instrument
et
l'as30cié
de
ses
spéculations»
(124 )
-
281 -
Faut-il
réellement
voir
derrière
les
bredouillages
de
i,t§"
Philotimus co~~
le
dit
Cicéron
la
">'main
invisible.v de
Terentia
?
Nous
ne
saurions
y
répondre,
malgré
l'attachement
de
l'affranchi
à
sa
patronne,
qui
ne
f i t
que
s'accentuer
avec
la
détérioration
progressive
des
relations
entre
Cicéron
et
son
épouse
025bis) .
Cependant,
nous
devons
recoIV'Tlaître
le
privilège
détenu
par
certains
liberti,
en
tant
que
principaux
manieurs
d'argent
de
leurs
patroni,
d'autant
plus
que
ce
bra.ssage
permanent
d' affai res,
étai t
une
voie
ouverte
vers
l'enrichissement
ou
du
moins) vers une
autonomie
financière,
qui
pouvait
avoir
à
plus
ou
moins
longue
échéance,
l'effet
d'accroître
leur pouvoir auprès des
hommes
et
même
des
peuples
qu'ils
avoisinaient
régu-
lièrement.
Il
n'est
que
de
voir
l'influence
et
l'action
entraînante
de
cet
affranchi.
P.
Umbrenus
qui,
sans
doute
aidé
de
son
activité
in
Gallia
negotiatus
erat
nous
apprend
Salluste
(126),
fut
choisi
par
les
Catiliniens
pour
convaincre
les
Allobroges
de
l'opportunité
d'actions
violentes
(127).
L'idée
de
privilège
se
rapporte
aussi
à
la
fonction
de
procurator,
une
fonction
que
Cicéron
exprime
soit
par
le
nom,
soi t
par
la
forme
verbale
procurare,
et
qu i
truffe
une
partie
de
la
correspondance
des années
50 av.
J.-C.,
où
des affranchis sont
chaudement
recommandés à
des gouverneurs
placés
outre-mer.
L'insistance
de
l'Arpinate
et
le
ton
plutôt
suppl iant
employé
par
lui
dans ces missi \\res,
traduit
toute
l'étendue
du
prestige
révêtu
par
les
procuratores,
autant
que
l'importance
de
leur
activité.
De
M.
Acilius
Caninus gouverneur de Sicile
Cn.
OctBci l i a
J{,.:s.sone
utar
fam.i 1 ilJrissime,
ita
prorsus
ut
i l l i u s
ordinis
Du11a
fc..m.i 1 i a-ri us
;
nam
et
humanitate
eius
et
probitate
in
consuetudine
catidiana
m'J.gnopere
delector.
lih11
ilVlI
opus
est
exspectare
te
qui bus
eU11l
uerbis
tibi
commendem quo sic utar ut
scripsi.
Habet
i s
-
282 -
in
prouincia
tua
negotia,
quae
procurant
liberti,
Hi1arus,
AntigoDus,
DeIDOStratus
;
quos tibi
negotiaque omnia Nasonis DOD secus
commende ac si mea essent (128)
à
Servius
Sulpicius
Rufus
(129),
les
supplications
gardent
leur
vivacité.
Cet
épanchement
de
l'Arpinate,
est
en quelque
sorte
à
la
mesure
du
contenu
de
la
fonction
de
procurator
ségrégationniste
:
«Donner
à
tOLlS
les
hOlImles
libres
l'appe1-
lation
de
procLlrateLlr,
non
que
c"ette
ap-
pellation
con\\7ienne
tOLlS
ceux
qLli
S'oCCLlpent
pour
nous
de
qLlelqLle
affaire,
mais en cette matière l'esprit
de
l'interdit
étant
bi en connu,
i l s n'ont pas \\70ul u
qu'on
subtilisât sur tous les mots
(130)
et
hautement pondéreux
«Peu
importe,
pour la
question
de
droit,
du
moins en l'espèce,
que j'aie été expulsé par
ton
procurateur,
par
un
hOI11.11le
à
qui
l'on
donne
légalement
ce
titre,
c'est-à-dire,
administrant
tous les biens d'un
citoyen qui
n'habite pas l'Italie ou en est
éloigné par
le service de
1 'Eta t,
et en quelqLle sorte le
maître
de
ces
biens
et
le
représentant
de
tous 1 es droi ts d'un autre ci toyen.I.I
{131)
Il
en
résul te
une
quasi
dominicia,
qu i
rend
le
procurator
apte
à
remplacer
le
propriétaire
des
biens
dans
la
gestion
intégrale
de
ceux-ci
(132) ,
de
se
substituer
à
lui,
de
d.éployer
le
même
doigté
et
la
même
rigueur
que
s' i l s ' étai t
agi
du
mandant
et
dans
l'hypothèse
d'un
litige,
de
le
défendre
en
justice
{133).
La
condamnation de
l'affranchi
de
M..
Lurco
en
62
av
J. -Co
{134),
conformément
à
l ' édi t
de
L.
Flaccus,
est
la
conséquence
des
prérogatives
du
procurator,
-
283 -
même
s i
cela
n'est
pas
clairement
indiqué.
Certes,
tous
les
affranchis
ne
peuvent
se
permettre
d'arborer
ce
t i t r e
<134bis),
en
dépit
de
la
dimension
des affaires
placées sous
leur
responsabilité.
La
demande
formulée
à
M.
Acilius
Caninus
pour
que i l
entoure
de
tous
les
égards
la
famille,
le
patrimoine
et
les
intendants
de
L.
Bruttius,
cheval ier
romain,
demande
dans
laquelle
aucun
lien
direct
n'est
établi
entre
domum
eius,
rem
familiarem
et
procuratores
(135),
est
une
indication.
Kutatis
mutandis,
aucun
indice
ne
permet
de
savoir
s i
dès
le
début
de
Rome
les
affranchis
figuraient
déjà
aux
côtés
de
«simples
plébéiens,
parfois
même
de
séné2teurS.I.1
(136),
ou
s i
c ' e s t
une
innovation de
la
fin
de
la
Ré pu b l i que.
L'exercice
de
cette
fonction
pour
les
affranchis,
alors
que
les
esclaves
en
sont
exclus
(137),
n'en
demeure
pas
moins
un
signe
de
considération sociale,
de
rehaussement,
non
seu lement
aux
yeux
du
patron,
mais
aussi
-
de
tous
ceux
avec
lesquels
i l s
devaient
entrer
en
contact.
La
procuratio,
n ' e s t - e l l e
pas
pour
les
chevaliers,
l'un
des
signes de
leur prestige
7
<137bis)
b)
Les fonctions administratives
Là
aussi,
les
affranchis
sont
présents
et
se
répartissent
en
deux
groupes
les
accensi
et
les
scribae,
jouant
ainsi
ce
que
nous
pouvons
appeler,
le
rôle
d'agents
auxiliaires
de
l ' Etat.
Considérés
comme
des
appariteurs,
mais
à
t i t r e
privé,
leur
choix
étant
f a i t
parmi
les
affranchis
d'un
magistrat comme
le
précise Cicéron,
«Que
l'accensus
occupe
le
rang
que
nos
ancêtres
lui
ont
accordé
ceux-ci
n'y
voyaient
pas
un
emploi
de
faveur,
mais
une
charge
absorbante
et
à
laquelle
on
ne
pouvait
se
dérober
et
i l s ne
la confiaient
guère qu'à
leurs propres affranchis»
(138)
les
accensi
avaient
une
activité
qui
s'étendait
sur
toute
la
vie,
y
compris
administrative,
du
promagistrat
-
leur
patron
-
284 -
auprès
duquel
i l s
se
trouvaient
placés
dans
une
province
donnée
{138-bis).
C' e::::.t
pour
rempl i r
cette
tâche
que
nous
trouvons
Timarchides
aux
côtés
de
Verrés,
Statius
dans
le
milieu
de
Quintus.
Mais
l'exemple
de
Pausanias,
cet
affranchi
de
P.
Corne l i us
Lentu l us
et
qu i
tout
au
long
du
proconsulat
de
Cicéron
en
Cilicie
lui
servit
d'accensus
(139),
prouve
que
d'un
patron à
un autre
-
le
second en tant
qu 1 ami
certai ns
l i berti
-
'sans
doute
jugés
efficaces
parmi
d'autres -
pouvaient être reconduits à
la même charge.
Côtoyant
les
magistrats
039bis),
les
accensi
devaient
également
jouir
d'une
influence
considérable
et
orienter
profondément
une
partie
de
leur
vie
socio-politique,
bénéficier
d'une
particulière
audience,
surtout
pour
ceux
qui
arrivaient
à
s'imposer,
à
l ' i n s t a r
de
Statius
dont
nous
avons
déjà
souligné
ce
que
Cicéron
croyait
être
les
écarts
de
comportement.
Mais
dans
le
lot
de
ces
accensi
susceptibles d'influence,
nous
ne
saurions guère
passer sous
silence
Timarchides,
celui
qui
auprès
de
Verrès
en
Sicile,
fut
une
imago
du
préteur.
Cicéron
commence
par
souligner
sa
particulière
fatuité
qui
affleure
même
à
l'en-tête
de
la
lettre
adressée
à
Q,
Apronius,
par
la
mention
du
t i t r e
d'accensus
({J'arrive
me.intenant
à
la
lettre
de
Ti I1J8rcbi des,
l'affranchi
et
l ' app~~ri teur
de
Verrès.
Une
fois
que
j'aurai
parlé
de
cette
lettre,
j'aurai
terminé
toute
la
partie
de
l'accusation
qui
concerne
les
dîmes.
Cette
lettre,
Juges,
est
celle
que
nous
a\\'ons
trou\\'ée
à
Syracuse,
chez
.4proni us,
quand
nous étions en
quéte
de
pièces écrites.
Elle
él
été
en\\'oyée,
C01'Il."!1e
on
le
\\'oi t
pélr
la
lettre
elle-même,
au
cours
du
\\'oye.ge
de
Verrès,
déjà.
sorti
de S8 pro\\,ince'j
elle est
êcrite
de
la
main
de
Til1JB.rchides.
Qu'on
en
donne
lecture.
Lettre
de
Ti me.rcbi des
Ti marcb i des,
appariteur
de
Verres,
salue
-
285 -
Apronius.
Et,
à
la
w~rite,
Je
ne
lui
fais
poi n t
un
reproche
de
met tre
en
tête
de
sa
lettre
appariteur.
Pourquoi,
en
effet,
les
scribes
adJ"!]i ni stra t i f s
seraient-ils
les
seuls
à
s'arroger
ce
droit,
"l.
Papi ri us,
seri be"
?I.I
(140)
avant
de
montrer
l'un
des
aspects
de
l'étendue
de
son
pouvoir
puisée
dans
la
profonde
intimité
avec
son
patron
<141 )
et
s'abattant
sur
les
ha.bi tants
de
la
Sici le,
avec
une
pointe de
tyrannie
:
«. ..
Tous
les
habi tants,
i l
en
connaissai t
exactement
les
adversaires
et
les
ennemis;
il
entrait
en
conversation
a~'ec eux,
11
les
sondait;
il
pénétrait
leurs motifs et leurs
intentions
réciproques
i l
sa vai t
l'a bon-
dance
de
1 eurs
moyens
et
1 eurs
ressources
;
si
c'était
nécessi té,
i l
présentait
Q1 es
motifs
de
crainte
si
c ' étai t
.!il ~'an tageux,
i l
1110ntrait des raisons d'espérer.
Il
tenait
en
son
pouvoir
tout
ce
qu'il
y
d'accusateurs
et
de
délateurs.
Vou1ai t-i 1
susci ter
une
mauvaise
affaire
8
quelqu'un,
il
n'a~rait aucune
peine
8
y
réussir
tous
les
décrets
de
Verrès,
tous
ses
ordres,
toutes ses instructions écrites,
c'est de la
manière
la
plus
habile
et
la
plus
adroite
qu'il
s'employait 8
les vendre ....
(142)
Au-delà
de
ces
accensi
appartenant
en
propre
aux
magistrats
et
qui
gardaient
avec
eux
des
relations
patronales,
un autre
type
d'apparitores,
fonctionnaires
ceux-là,
propriété
de
l'Etat,
intégrés
de
ce
fait
dans
la
cahors
praetoria
de
.
!.lt~ b~
.
.
n'importe
quel
promaglstrat,
remplissaient
les
mêmes
cha.rges,
mais
avec
une
orientation
beaucoup
plus
marquée
vers
l'organisation
des
registres
officiels,
des
fichiers
de
la
province,
toute
la
«(paperasse»)
contenant
des
indications
-
286 -
sur
la
vie de
la
province
et sur laquelle pouvait s'appuyer
le
promagistrat.
Cependant,
i l s
pou\\raient
également
avoir
une
charge
financière
la
tenue
des
comptes
au
jour
le
jour,
pouvant aller
jusqu'à
la
reddition de ceux à
déposer à
l'aerarium -,
activité
à
laquelle
se
consacra
le
scriba
M.
Tullius
Laurea,
qui
seconda
le
questeur
de
Cicéron,
Mescenius durant
le
proconsulat
de Cilicie.
Dans une
missive
adressée
à
ce
dernier·
à
leur
sortie
de
charge,
l'Arpinate
parle de lui comme d'un seruus scriba :
Rationes
confectae
me
absente
sunt
tecum
;
ad quas ego nibil
adhibui praeter lectionem.
Ita
accepi
libruJII
a
ISIeO
seruo
seri M,
ut
eundeJII acceperim a
fratre tuo (143)
En
réalité,
il
est
libertus.
Habile
dans
l ' a r t
comptable,
c'est
à
lui
que
Cicéron
se
réfère,
au
mécontentement
de
Mescenius.
Et
lorsque
celui-ci
lui
demande
leur
position
financière,
il n'éprouve aucune gêne à
déclarer:
Ad
ea
quae
scripslsti,
co~ius
equidem
possem de singulis ad
te rebus scribere,
si
Jl.
Tullius,
scriba .meus,
adesset (44)
Une
confiance
portée
à
cette
éc he Il e,
n • est
guère
pour
surprendre.
Spécialistes
dans
leurs
domaines,
les
appari-
tores
faisaient
montre
d'un
incontestable
savoir-faire,
,tlt"b~
résu 1 tant
de
leurs
successi ves
expériences.
Const i tués
en
ordo
(45),
les 5cribae ne
se
devaient
de
faire
exception à
la
règle.
D'ailleurs,
Cicéron,
se
rappelant
le
bon
vieux
temps,
n'hésite pas à
leur faire des éloges:
((A
quoi
bon
remonter
élUX
temps
anciens
ou
rappeler
le
SOl.l\\7enir
de
ces
seri bes
qui,
c'est
de
notoriété
publique,
étaient
les
pl us
honnêtes,
1 es
pl us
irréprocha bl es
des
hol!Ur€s
?
Je
n'ignore,
juges,
que
1 es
exem-
ples
d'autrefois sont aujourd'hui
estimés et
-
287 -
reg8.rdés
CO;rT,]"!Je
des
histoires
fai tes
p l a i s i r
..ie
ne
sortirai
pas
de
notre
époque,
quelles
qu'en
soient
les
.raisères et
18.
dépr8.\\'ation.
I l
n' y
a
pas
longtemps,
Hortensi us,
que
tu
as
été
questeur.
Ce
qu'ont
fai t
tes
seri bes,
tu
pe 1..' x
1 e
dire.
Quant li moi,
voici
ce
que je dis des Illiens :
dans
cette
même
province
de
Sicile,
lorsque
je
pay~is
aux
cités
l'ergent
pour
le
froment,
et
lorsque
j'avais
alrec
moi
IlleS
deux
seri bes,
gens
de
la
plus
grande
honnêteté,
L.
Nami1ius
et
L.
Sergius,
non
seulement
ces
deux
cinquantièmes
n'ont
pas
été
pré1el'és,
.'11B.is
d'une
manière
absolue
il
n'a
été
fai t
li
personne
retenue
d'un
seul
sesterce).'
(14-6)
c) La fonction de précepteur
L'éducation
d'un
enfant
au
sein
de
la
famille
romaine,
vise
essentiellement
à
faire
naître
en
lui,
deux
sensibilités
aussi
importantes
l'une
que
l'autre
l'attachement
à
la
patrie,
à
ses
valeurs
et
à
sa
morale,
la
perpétuat i on
de
l'idéal
familial.
C'est
ce
que
Cicéron
rappelle
à
Verrès,
dont
le
fi ls se
laissai t
entraî ner
uniquement
aux
dél ices de
la vie
licencieuse
((.
Verrès,
ce n'est pas seulement li ce que
tu
delrais à
ton
fils,
c'est
aussi
à
ce
que
tu
dois li
la
République que
tu
as porté
une
gralre
atteinte.
Car,
si
tu
as
procréé
des
enfan ts,
ce
n'est
pas
seul emen t
pour
toi.
lMis
c'est
aussi
pour
ta
patrie
ce
n'est
pas
seulement
pour
ta
propre
satisf~~ction,
mais
c'est
.aussi
pour
que
ces
enfants
puissent
être
un
jour
utiles
li
la
République.
Tu
delrais
les
enseigner
et
les
former
d'apres
les
enseignements
de
nos
-
288 -
ancêtres
et
les
principes
de
l'Etat,
non
d'après
tes
infamies
et
tes
t urpi t udes),1
<l47 )
Cet
idéal,
{{fait
de
sacrifice,
de
renoncement,
de
dévouement
total
de
la
personne
8
la
com.munauté,
à
l'Etat,'}
(148)
et
d'al i gnement
sur
les
voeux
du
paterfamilias,
lui-même
dépositaire
de
toute
une
forme
de
culture
véhiculée
des
décennies
durant
par
ses
devanciers,
passe
par
un
modelage
de
l'esprit
de
l'enfant,
son
imprégnation
d'une
«méthode),'
d'approche
précise
du
milieu
dans
lequel
il
se
trouve
placé.
Cela
suppose
une
orientation
de
sa
dans
un
sens
déterminé
à
l'avance
et
au
choix
duquel
i l
ne
participe
pas,
n'émet
pas son avis.
Venu
au
monde,
i l
se
voi t
imposer
une
pratique
dont
les
principales
lignes
motrices
lui
sont
inculquées durant
toute
la
période
de
sa générescence
(149).
I l
est
tenu
d'adopter
le
mode
de
pensée
qui
lui
est
présenté,
de
le
faire
sien
et
de
l ' inclure
dans
son
innéité,
comme d'ailleurs procédaient
les grandes familles:
«Chacune des grandes maisons rOJ!la i n es)},
nous
apprend
H. I.
Marrou,
).'posséda i t
COI!JJIle
une
attitude
déterminée
en
face
de
la
\\,i e,
un
comportement
stéréotypé:
l'orgueil
indompté
des
Claudes,
la
rigidité
de
caractère
des
funi i,
1 ' austéri té
des
Ael i i
Tuberones
ou
des Qui ncti i
.),1
(150)
La
vocation
intellectualiste
de
Cicéron
et
qu'il
ch~rche à
partager avec son fils,
s'inscrit dans ce cadre.
Le
retenant
comme
interlocuteur
dans
les
Parti tiones
Oratoriae,
ouvrage
conçu sous forme de dialogue;
i l déclare à
son intention:
(,'Te
voir
aussi
savant
que
possible.
est-il
rien,
mon
cher
fi ls,
gue
.le
puisse
préférer ?,\\.
(151)
-
289 -
quelle
joie,
n'éprouve
t - i l
pas
en
voyant
venir
à
lui,
son
neveu,
le
f i l s
de
Quintus,
pour
butiner
à
la
fleur
de
la
connaissance,
pour
,'{bel 1 éniser.'.'
son
esprit
et
claquemurer
la
porte
de
l'ignorance
?
En
Grèce
où
i l
les
a
envoyés,
i l s
s ' i n s t r u i s e n t
auprès
des
grands
rhéteurs
comme
lui
et
l'Arpinate
peut
ainsi
annoncer
à
son
cadet,
les
progrès
de
son
f i l s
:
{{Ton
Cicéron,
qui
est
aussi
le
nôtre,
est
extrémeJDent attaché à
Peonius,
son
I:J'J,ditre de
rhétorique,
qui
est,
je crois,
plein d'expé-
rience
et
fort
bratre
ho.'!1.!11e.
l{ais.ma
méthode,
tu
ne
l'ignores pas,
est
un peu pl us s~nrente
et
fait
un
peu
plus
de
pl8.ce
aux
idées
générales'.
Je
ne
veux
p8.s
qu'il
soit
111is
d'obstacle
il
18.
marche
du
jeune
Cicéron,
et
il
cet
enseignement,
et
l'enfant
de
son côté,
p.51raît
être
attiré
par
ce
genre
d'e:·(ercice
or8.toire
et
.Y
trol..nrer
plus
d'attreit
(puisque
je
suis
moi-même
passé
Par
là,
j e
dois
admettre
qu'il
suitre
les
chemins
que
j'ai
suivis
car
j'ai
confiance
qu'il
partri endra où je sui s
Partrenu.v
(1::'·2)
Est-ce
pour
cela
qu'il
se
retrouve
finalement
entre
les
mains
d'affranchis
?
L'usage
de
confier
des
enfants
aux
affranchis
pour
une
éducation
intellectuelle,
é t a i t
courante
dans
les
maisons
qui
se
permettaient
d'avoir
parmi
leur
per-
sonnel,
surtout
des
ressol-tissants
gréco·-orientaux.
certains
maî tres
faisaient
appel
à
des
esclaves
{1~53).
Dans
la
doDlUS
de
l'Arpinate,
la
préférence
va
aux
l i b e r t i .
D' abord
Dionysi us
qu' i l
convie
instamment
par
le
truchement
d'Atticus
({Donne,
je
te
prie,
le
bonjour il
Dionysius,
et demande
lui
de
t'e.ynorter è.
venir le plus
-
290 -
tô t
possi bl e,
Blin
qu'il
puisse
instruire
J!JO n
fil s e t mo i - mê me .1.'
(154)
puis
Chrysippus
(55) .
Emi ne nune nt
l e t t r é s ,
rompus
à
la
culture
grecque,
ce
sont
eux
qui
pendant
une
grande
période
(156),
se
chargent
d' ((humaniser).'
les
deux
p e t i t s
Cicérons
et
de
les
perfectionner
dans
la
rhétorique,
de
les
amener
à
la
maîtrise
de
l'hellénisme,
à
~a
connaissance
parfaite
de
la
pratique
oratoire,
que
lui-même
l'Arpinate
de
temps
à
autre,
trouve
l'occasion
de
vérifier
(157).
On
comprend
la
profondeur
de
son
désarroi,
quand
ces
deux
instructeurs
refusèrent
d'instruire
son
neveu
et
son
fi Is.
Face
à
Dionysius
qui,
empêtré
dans
des
embarras
avec
ses
propres
esclaves
et
ses
affaires
a
jugé
u t i l e
de
ne
plus
les
avoir
sous
son
couvert,
alors
qu'il
reconnaît
lui
avoir
toujours
fait
des
politesses
(158),
i l
se
résigne
comme
nous
le
pou-
vons voir dans cette missive adressée à
Atticus
«Dionysius
m'étant
Brri\\'é
contrairement
d
mon attente,
nous avons con\\'ersé
tout à
fait
sur
le
même
pied
je
1 ui
ai
exposé
18
situation;
je lui
Bi
de 11UHJdé cre me àire ses
intentions,
ajoutant
que
je
ne
prêtendBis
rien
sur
lui
~lgré
1 ui.
11
,6.'11 ' a.
répondu
qu'i 1
ne
savBi t
où
i l
en
étBit
de
ses
Bffaires
;
que
de
ses
créBnces,
les unes ne
rentrBient
point,
les 8utres n'étaient pBS d
échéBnce.
11
aj auté
cert8ines
autres
choses sur ses escla~'es d
lui,
C01Jll1Je
quoi
il
ne pau~rBit rester avec
nous.
J'ai
fait
à
SB
guise
je
1 ui
ai
donné
congé
je
suis
fâché
que
les
enfants
perdent
leur
précep-
teur
mBis
non,
certes,
de
me
défBire
d'un
i ngra t»
(159)
MQle
face
A
Chryeippus.
le
ton change
et
cette
résignation
laisse
place à
la haine
la
plus totale
-
291 -
«. . .
Meis
ql.... e
ce
Chrysippus,
qu'un
vague
frottis
de
litterature
m'a
fait
gentiment
accueillir,
honorer,
quitte
]!Jon
f i l s
il
mon
insu
Je
ne
compte point ses autres
fautes,
dont
on
m'avise,
beaucoup
de
fautes,
je
ne
compte
pas ses
vols
mais sa
fui te,
non
je
ne
la
supporte
pas,
rien
ne
me
parai t
plus
criminel
.....
(160)
Le
désarroi
de
l'Arpinate
d'oG
teinte
une
part
d'impuissance
devant
l'arrogance
des
affranchis,
tradui t
toute
la
néces-
s i t é
du
préceptorat
à
l ' i n t é r i e u r
d'une
domus
et
par
exten-
sion,
l'extrême
importance
de
l'équilibre
psychologique
des
enfants.
C'est
à
juste
t i t r e
que
J. P.
Néraudeau
fa i t
remar-
quer
que
<(j'éduca.tion
aide
l e s
enfants
à
detTenir
ce
qu' i l s
sDnt
elle
n'est
pas
1 e
dressa.ge
d'animaux
curieux,
mai s
1 a
compagne
a tten-
titre
d'une accession il
la
condition
d'hom.we ....
<161 )
Par
la
même
occasion,
ce
désarroi
dévoile
une
autre
ques-
tion,
subsidiaire
l'auréole
dont
bénéficiaient
le'3
affran-
chis
appelés
à
exercer
une
t e l l e
activité,
l ' a u t o r i t é
qui
se
,réhicu la i t
à
travers
e Ile
et
enf in,
l ' émi nence
du
poids
sous
lequel
i l s
étaient
capables
de
faire
plier
la
maisonnée
(161bis).
En
tant
que
directeur
de
conscience
(162)
du
dis-
ciple
placé
à
la
quête
de
ses
connaissances,
de
son
savoir-
faire
et
de
son
expérience,
le
précepteur
libertus
chez
l'Arpinate
jouissait
donc
d'une
considération
spéciale
qui
à
l ' i n s t a r
des
autres
fonctions
dont
on
lui
réservait
l'e:<clusivité,
ne
faisait
que
l'éloigner
davantage
du
seruus.
}{..ais
en
même
temps,
ces
fonctions
éloignaient
les
affranchis
entre
eux,
attribuant
ainsi
à
chacun
d'entre.eux,
une
place
particuliére.
La
responsabilisation
accordée
à
certains
d'entre
eux
pour
l'exercice
de
certaines
tâches,
en
est
l'expression
la
plus vivante.
- 292 -
2
-
Une responsabilisation accrue
Cette
responsabilisation
peut
être
comprise
sous
deux
accept i ons
di fférentes.
Ce lle
re levant
du
droi t
de
propriété
sur
un
groupe
d'individus
-
les esclaves plus spécialement
-
et
dont
pouvaient
également
bénéficier
les affranchis
finan-
cièrement
stables,
à
l'exemple
de
Chrysogonus
dont
parle
Cicéron,
en
mettant
en
exergue
son
pouvoir
de
dominus
sur
des serui aux spécialités diverses:
«Quant
à
ses esc1a.I'es,
que
l'DUS
dirai-je
de
leur
nombre
im;rl1ense,
de
la
l'ariété
de
professions
qu 1 i l s
exercent
?
Je
ne
parle
pas
de
ces
111étiers
vulgaires
cuisiniers,
boulangers,
porteurs
de
1 i t i ère.
Hai s,
pour
charmer
son
espri t
et
ses
orei 11 es,
i l
a
tellement
d'artistes que,
le jour et pendant
les
festins
qu'il
donne
la
nuit,
tout
le
l'oisinage
retentit
du
bruit
harmonieux
des
l~ix,
des instruments à
cordes et
des flûtes
. . . ).1
(l63)
et
celle
fondée
sur
le
choix du
patron,
pour
l'exercice d'un
certai n
nombre
d' act i vi tés
auxquell es
de\\'aient
prendre
part
des affranchis.
a)
Les services du patron
Ils
sont
fractionnés
en
de
petits
groupes,
hiérarchisés
selon
leur
niveau
de
risque,
la
dangerosité
de
chacun
d'entre
eux.
et
l ' é t a t
de
mentalité
des Romains.
Si
certains
affranchis
avaient
toute
liberté
de
se
déployer
et
d'exceller
dans
les
artes
illiberales
(163bis),
i l
n'en
étai t
pas de
même
pour
tout
le
reste,
surtout
pour. ceux dans
lesquels
se
trouvait
impliquee
directement,
la
personnalité
du
patron
ou
tout
au
moins,
son
intègrité.
C' est
ce
qui
ressort
de
la
déclaration
de
Cicéron,
faite
au
sujet
de
-
293 -
Timarchides,
traité
de
{(soutien
de
lB.
Ir.-a.ison ..,l
columen
familiae
<1f..-4).
Cette
expression
traduit
la
responsabilisation
de
cet
affranchi
face
aux
serui,
sa
capacité
à
seconder
le
patronus,
à
diriger
la
domus
et
à
prendre
en
main
toutes
les
affaires
de
la
maisonnée.
Elle
est
une
sorte
de
reconnaissance
ou
plutôt
d'acceptation
de
transmutation
chez
certains
liberti,
de
tous
les
insignia
patroni.
Considéré
comme
le
pi vot
de
la
maison,
l'affranchi
pouvai t
alors
prendre
la
place
du
patron
en
l'absence
de
ce
dernier
et
avoir
tous
les
droits
et
devoirs
qui
en
découlaient.
La
désignation
de
Philotimus
par
Quintus
pour
la réception des tribules :
((J'ai
réparé
les
fatigues
des
grandes
chaleurs
(nous
n'avons
pas
sou\\'enir
d'en
a\\'oir
vu
de
pires)
dans
ma
v'i11a
d'Arpinum,
en
jouissant
des
agréments
de
la
ri vière
pendant
le
temps
des
Jeux,
8.près
8.voir
confi é
1 es
gens
de
1l15!
tri bu
à
Phi lot i mus>,'
(165)
et
même
celle
de
Statius
pour
faire
le
guet
devant
la
domus,
afin
d'éloigner
et
de
dissuader
tous
les
cambrioleurs
éventuels
qui
eussent
pu
profiter
du
départ
de
Quintus
po~r
porter
ombrage
à
son
patrimoine
<166>,
le
justifient
ampl ement
(167) .
Il
Y
a
donc
là
un
rô l e
de
supervision,
motivé
par
la
conviction
de
l'autorité
de
l'affranchi,
une
autori té
sécurisante
et
rassurante,
sat isfaisante
même,
émanant
de
son
comportement,
de
sa
façon
de
se
dévouer,
de
se
donner
corps
et
âme,
de
se
surpasser
pour
rempl i r u n e
mission,
si
dangereuse soit-elle
je
les
ai
ignorés lontemps,
et ne
les ai
connus que
le
26
décembre,
par
t8.
bien
bonne
lettre.
Pbi 1 ogène,
ton
affranchi
s'est
donné
beaucoup
de
mal
pour
la
faire
par\\renir
par
une
\\Toie
t-ort
longue
et
...'1!édiocrem-2nt
St!re
;
-
294 -
qU8.11t
8
celle
que
tu
8.S
remise,
l1Je
dis-tu
au.....·
escl a "es
de
Léni us,
je
ne
1 '8.i
pas
reçue 1)
(168)
et
de
couvrir
de
sa
personne,
toutes
les envies du
patron ou
de son ami,
par l'étendue de sa science,
de
sa culture:
(t'Je
n'ai
eml1Jené
personne
8. vec
que
Di onysi us,
.ma. i s
je
ne
cra i ns
pas
cependan t
d'être
8
court
de
cODt'ersation
tu
m'as
donné
18
quelqu'un
qui
fait
l1JeS
délices»
(169)
1
Ce
faisant,
le
l i bertus
doté
de
ces
potent ia lités,
ec l ipse
le
seruus,
le
domine,
puis
le
relégue
à
un
rôle
de
figurant,
où
sa
fonction
ne
se
limite
qu'à
une
portion
congrue,
celle
d'assistant,
n'ayant
pas
la
moindre
parcelle
de
pouvoir
et
encore
moins,
d'initiative.
L'esclave
ne
devient
que
l'ombre
de
l'affranchi,
une
sorte d'exécutant,
fait
pour suivre
sans
broncher
son
sillage.
C'est
ce
rôle
de
chef
que
Cicéron
expri me
en soll ici tant
dans
une
mi ssi ve
à
At t icus,
Tyranni 0,
pour le rangement de sa bibliothèque:
«Je
désirerais
que
vous
puissiez
m'entroyer
un
ou
deux
des
peti ts
employés
de
,;otre
bi bl i othèque
Tyrannio
les
uti 1 iser8.i t
COlI11I1e
relieurs .
. ,')
(170)
Nous
le
retrouvons
dans
la
perpétuation
d'actes
de
violence
contre les citoyens,
ou contre
la Respublica.
b)
Les actes de violence
Inexistants dans
les
principaux groupes auxquels
les
mauvais
citoyens
s'adressent
directement
en
miroitant
des
promesses
alléchantes
en
cas
de
victoire,
ces
groupes
dans
lesquels
prennent
place
des
endettés,
des
efféminés,
des
repris
de
justice,
des
vétérans
et
des
spécial istes
de
mauvais
coups,
-
295 -
et
donc
exclus
des
bénéficiaires
présumés
du
((\\Taste
gâteau
r011Jéjin.l.l,
les
affranchis
n'en
demeurent
pas
moins,
l'une
des
cibles
privilégiées,
en
tant
que
force
de
réserve
dont
l'intervention
peut
être
souhaitée
en
cas d'extrême
urgence,
ou
pour
une
action
de
grande
envergure
telle
que
l'extraction
de
prison,
dont
L.
Tarquinius,
complice
de
Catilina,
nous fournit
un exemple frappant
((Cethégus
de
son
côté.v
nous
apprend
Sa 11 uste,
((en \\Toya i t
des
messagers
il
ses
esclaves et à
ses affranchis,
tous triés sur
le
\\Tolet
et
entrafnés
aux
coups
de
ma.in,
pour
les
conjurer
de
faire
preU\\Te
d'audace,
et
de
former
bloc
pour
se
frayer
par
les
a.rmes un chemin jusqu'à lui).I
(171)
L'appel
au secours qui
leur est
lancé,
ne
fait
cependant
pas
s'étioler
la
conviction
dans
leurs
capacités
de
meneurs
d' hoIIUDes,
pu isque
dans
cette
même
tentat i ve
de
l i bérat ion,
on
les
voit
en
même
temps
que
les
cl ients
de
Lentulus,
quadriller
quasiment
tous
les
uici
pour
demander
l'aide
et
surtout
convaincre
les
esclaves
et
les
artisans
de
les
suivre
(172) .
I l
faut
y
ajouter
celles
d'organisateurs,
d'hommes
de
terrain,
de
tacticiens,
de
combattants
véritables,
qui
justifient
leur
intervention
pendant
la
bataille
finale
opposant à
Pistoia
les partisans de
Catilina
à
l'armée loyaliste conduite par C.
Antonius,
aux côtés des
colons,
derrière
l'aigle
d'argent
de
Kari us
(173)
et
sur-
tout,
le
rôle
de
direction
confié
à
Bellus,
l'affranchi
de
Faustus :
«..
Si
le recrutement
de la.
troupe
n'a. rien
de
suspect,
le
nom de
son
chef
importe
peu.
Il
est
\\Tai
qu'il
s ' e s t
offert
-
et
c'etait
là
un
emploi
d'escla\\Te
-
pour
s'occuper
de
l'armement,
mais
i l
n'a.
ja.111tJ.is
comma.ndé
la.
troupe.
C'est
Bell us
affranchi
de
Fa.ustus,
qui a
toujours tenu cet emploi,'.'
(174)
-
296 -
3 -
Le patron et la «promotion» de son affranchi
La
supériorité
de
l'affranchi
par
rapport
à
l'esclave
et
même
des
affranchis
entre
eux
(175),
ne
s'arrête
pas
à
toutes
ces
formes
d'exercice
de
leur
autorité.
Elle
se
poursuit
avec
d'autres,
d'une
dimension
toute
nouvelle,
puisqu'elle
touche
à
la
({promoti on....
de
l'affranchi,
en
mettant
entre
ses
mains,
des
moyens
lui
permettant
d'accroître
sa
personnalité,
de
s'affirmer
avec
plus
de
relief,
voire,
de s'imposer vis-à-vis des autres.
a) La question d'héritage
Nous
n' ignorons
pas
son
importance,
dans
l'accroissement
du
patrimoine
d'un
individu.
Un
certain
nombre
d'entre
eux
en
profi tèrent
pour
accumuler
une
richesse
dont
au
départ
i l s
étaient
dépourvus,
l'essentiel
étant
de
voir
leur
nom
figurer
dans
le
testament
du
défunt,
comme
héri t i e r s
(175bis).
A
côté
des
amis
vers
lesquels
le
choix
pouyait
s' orienter
en
reconnaissance
des
relat ions
qu' i l s
ayaient
entretenues
ou
des
serYices
qu' i l s
ava ient
su
rendre
(176),
figurent
en
grand
nombre
des
affranchis,
comme
héritiers
de
leurs
patrons.
Cicéron
nous
indique
quelques
cas
celui
de
No~ius
Zoilus
(177>,
d'un
autre,
anonyme,
auquel
i l
fait
mention
dans
une
lettre
adressée
d'Arpinum
en
45
à
Atticus,
institué
heres avec
Sabinus
Albius
et
lui
(178),
puis
de
M.
Fulcianus,
affranchi
du
premier
mari
de
Caesennia,
épouse
de
A.
Caecina
auquel
un
héri tage
de
deux
soi xante
douzièmes
aurait échu
({. .
Caesennia
pri t
possession
de
la
terre
et
l'afer~. Peu de
temps après,
elle épousa
Caecina.
Pour
achet"er
en
peu
de
mots,
elle
meurt
aprés
at"oir
fai t
un
testament
elle
institue
Caecina
son
béritier
pour
onze
douzièmes et demi
et
H.
Fulcianus.
affranchi
de
son
premier
~ri,
pour
deux
soixante
-
297 -
douziemes
;
elle
laisse
tomber
sur
Ebutius
un
soixante
douzieme.
Par
ce
soixante
douzieme,
elle
a
\\'oulu
récompenser
son
zele
assidu
et
ses peines,
si
tant
est
qu'il
en
ait eU".1 (179)
La
somme
léguée
à
cet
affranchi,
peut
sembler
dérisoire
et
sans grande
valeur.
Mais
le
principal,
réside
dans
la
portée
de
l'acte
lui-même,
dans
sa
signification
profonde
faire
participer
le
libertus
à
la
jouissance
de
ses
biens,
lui
donner
les
moyens
d'acquérir
une
partie
de
ses
finances.
Un
acte
d'autant
pl us
rehaussant,
que
M.
Fulcianus
n'est
que
l'affranchi
du
premier
mari
de
Caesennia,
mais
que
somme
toute,
elle
ne
tient
pas
à
priver
du
bénéfice
de
sa
richesse.
C'est
cette
volonté
de
voir
les
patrons
accorder
librement
à
leUr1)
l i berti
toute
chance
de
promotion,
d'équilibre
financier,
d'assise
matérielle
et
d'autonomie
devant
leur
permettre
de
(n'oler
de
leurs
propres
ailes".1 et
de
mener
aisément
leur
vie,
qui
f i l t r e
du
mécontentement
de
Cicéron
face
à
Verrès,
puisque
celui-ci
invalida du
temps de
sa
préture,
la
part
d'héritage
dévolbe
par
le
cheval ier
romain
P.
Trebonius,
mort
en
75,
à
son
affrhnchi,
en
laissant
les
autres
cohéri tiers,
prendre
possession
de
leur
quote part
((...
P.
Trebonius
institua
plusieurs
héri-
tiers,
gens
de
bien
et
bo~s
d'honneur,
parmi
eux,
son affrancbi.
Il
a\\'ai t
un
frere,
.4.
Treboni us,
qui
a vai t é t é
proscri t.
CO!1I.'l1e
i l
désirait
prendre
des garanties en
f!!nreur
de
ce
frere,
i l
écri \\,i t
dans
1 e
testa111en t
que
les héritiers s'engageraient par serment
prendre
leurs
mesures
pour
qu'il
ne
par\\rint pas à
ce proscrit màins de
la moitié
de
la
part
d'héritage
de
chacun
d'eux.
L'e.ffranchi
s'engage
pe.r
serment
les
e.utres
1Jéritiers
\\'ont
à
Verres
et
lui
font
sa\\roir
qu'il
ne
cont'ient
pas
qu'ils
s'en-
-
298 -
gagent
par
serment
à
agir
contre
la
loi
Cornelia,
elle qui
interdit de
'~nir en aide
à
un
proscri t
;
i l s
obtiennent
de
ne
pas
prêter
serment
;
i l
leur
donne
la
possession.
A
cela
j e
ne
trouve
rien
à
reprendre;
c'était
en
effet,
une
iniquité
que
l'on
donnât
quelque
chose
des
biens
de
son
frère
à
un
proscrit
qui
était
dans
l'indigence.
L'affranchi
pensait
commettre
un
crime
s ' i l
ne
prononçai t
pas
le
serment
de~ndé
par
le
testament
de
son
patron.
Aussi
Verrès
déclare
t-i1
qu'il
ne
lui
donnera
pas
la
possession
de
(,'héritage,
pour
l'empêcher
de
veni r
en
ai de
à
son
patron
proscrit,
e t
en
même
temps
pour
le
punir d'a,roir
obtempéré
au
testament
de
son
autre patron ....
(180)
Tout
en légitimant
l'attitude de
l'affranchi,
Cicéron trouve
donc
inadmissible
une
telle
punition
imposée
par
Verrès-
et
qui
n'a pour d'autre conséquence,
que d'empêcher
le
libertus
de
rentrer
dans
les
fonds
de
son
légataire
son
patron
-
moyen comme un autre d'honorer sa mémoire,
puis de souscrire
à
son
voeu.
Verrès
porte
atteinte
à
la
sacro
sainteté
du
statut
de
l'ordo equester,
en passant
outre
la
volonté
-
ou
plus
précisément
la
dernière
volonté
de
l'un
de
ses
membres
et
en faisant
de son affranchi,
un autre
que
celui
qu'il
aurait
souhaité.
En
refusant
de
lui
restituer
l'image
exigée
par son
patron,
i l
ne
fai t
que
conforter
son
mépris
légendaire pour les hommes issus d'une basse condition
«Quant à
son superbe mépris,
est-il
personne
qui
ignore ce qu'il
a
été,
qui
ignore à
quel
point
Verrès regarde de haut
en
bas,
accable
de
son
dédain
les
gens
de
18
plus
basse
classe
en
qui
i l
n'a
jal!J,8is
vu
des
hommes
l i bres ?,'
(le1)
-
299 -
semble
conclure
l'Arpinate,
conscient
de
l'importance
de
la
communion des hommes entre eux
;
puis en tant
que
patron,
de
la
nécessité
de
la
({ressemblance.v
des
liberti
à
leurs
patroni.
La
rapacité des affranchis,
montre
jusqu'où pouvait
aller cette ressemblance.
h) La rapacité de l'affranchi
Elle
n'est
que
le
prolongement
de
celle
du
patron,
le
continuum de
ce
dernier,
sa
ramification.
Fait
à
l'image du
patron,
éduqué
selon
ses
propres
obj ecti fs,
l'affranchi
en
général
en devenait
une
sorte
d'alter ego.
Son comportement
et
ses
réactions
n'étaient
que
la
résultante
de
son
{{éduca tian)".
S'il
avait
eu
pour
maître
d'abord
et
pour
patron ensuite
un rapace,
il
le devenait aussi,
profitant de
sa
qualité
d'homme
libre
en
supplément,
pour
conduire
ses
convoitises.
Certes,
à
entendre
Cicéron,
les
patrons
n'étaient
souvent
pour
rien
dans
les extravagances de
leurs
affranchis
et
dans
leurs
mal\\rersations.
Il
l ' a\\roue,
aussi
bien dans une diatribe contre Chrysogonus,
{{Tout
cela,
juges,
s'est fait
à
l'insu
de L.
Sulla
je
le
sais
avec
certitude.
.41 ors
qu'il
répare
les d0111m8.ges du
passé
et
qu'il
prepare ce qui
sera l'at~nir, alors que seul
i l
possede
les
moyens
d'établir
la
paix
et
de
diriger
la
guerre,
que
les yeux
de
tous
sont
fixés
sur
lui
seul,
que
seul
i l
gouverne
tout,
alors que,
l'esprit
sollicité
de
tous côtés par des affaires si
nombreuses
et si
importantes,
i l
ne peut
même pas res-
pirer librement,
on ne doit
pas s'étonner si
quelque
chose
échappe
li
son
attention,
surtout quand i l
y a
tant de gens à
épier le
momen t
ou
i l
est
le
plus occupé,
a guetter
un
i llEtBnt
de
distraction,
pour
.']Jet tre
en
trai n
quel que
machi na tian
dans
1 e
genre
de
celle qui
nous occupe»
(182)
-
300 -
que
dans
cette
mise
en
garde
adressée
à
tous
les
promagistrats :
«Si
nous
~'ou1 ons que l'on nous consi dère
comme
des
hOJ11111es
intègres,
ce
n'est
pas
seulement
de
notre
intégrité,
mais aussi
de
celle
des
gens
qui
nous
accompagnent
que
nous de~'ons fournir
la garantie . .4vant
tout,
i l
nous
faut
a~'oir soin
d'e1Ill11ener avec nous
des
hommes
capables de
~'eiller aux intérêts
de
notre
réputation,
de
notre
personna1i té
ci~'i1e . . . .1.1
(183)
Cependant,
nous
ne
devons
pas
omettre
le
poids
des
patrons
dans
la
formation
psychologique
de
leurs
liberti
une
format ion
qui
leur
donnait
une
nature
choisie
dél i bérément
par
eux
et
qu i
avai t
pour
essence,
en
même
temps
qu'une
promotion par rapport aux esclaves sur lesquels pesaient des
interdiction~
et
qui
de
ce
fait,
ne
pouvaient
de
leur
propre
chef
avoir des comportements d'une
grande
insidiosité
à
l'égard des ciues romani,
de
leur
dénouer
les
mains,
puis
de
leur
ouvrir
la
voie
vers
les
malversations
au
milieu
desquelles
st était
bâtie
leur
existence.
De
cette
éducation)
il
ne
devait
que
naître
un
type
d' homme
ayant
le
profil
du
patron.
Formé,
grandi
à
l'ombre
du
dictateur
Sylla,
tristement célèbre par ses prévarications,
«(ln
seul
homme
jusqu'a.
présent.l.' ,
affirme
Cicéron
«s'est rencontré depuis la
fondation
de
Rome
(fassent
les
dieux
i1!11I1ortels
qu'il
ne s'en
rencontre pas un
second
!)
è
qui
la
Répub1 ique
s'est
1 i ~'rée
tout
entière,
contrainte
Par
la
gra~'i té
des circonstances
et par nos malheurs domestiques
cet
homme,
c'est L.
Sulla.
Son pOI.-"roir fut
si
grand que
personne
ne
pou~'ai t,
contre
son
gré,
conser~rer ses
biens,
sa
patrie,
sa
~rie.
Il
étai t
animé
d'une
telle
audace
qu'il
-
301 -
n' bési ta.i t
pa.s
à
déclarer
dans
un
di scours
prononcé
à
l'a.sse111blée
du
peuple
que,
lorsqu' i 1
~'endai t
1 es
bi ens
des
ci toyens
r0111éJ.ins,
c'était
un
butin
à
lui
appartenant
qu' i 1
vendai t.t.t
(184)
les exactions
de
Chrysogonus
ne
sauraient
nullement
étonner.
Devenu
uel
potentissimus
hoc
tempore
nostrae
c i u i t a t i s
(185),
i l
ne
se
f i t
aucun
scrupule
à
racheter
les
biens
du
père
de
Sex.
Roscius,
le
client
de
Cicéron,
à
un
prix
dérisoire
(186),
après
s ' ê t r e
embouché
avec
ses
meurtriers
(186bis)}
se
permettant
même
de
persuader
les
délégués
des
décurions
dépêchés
auprès
de
Sylla
pour
mener
une
enquête
sur
le
dépouillement
de
cet
homme,
de
renoncer
à
leur
mission,
en
leur
promettant
de
régler
l ' a f f a i r e
(187).
Mais
Chrysogonus
n'est
pas
le
seul
de
la
série
de
ces affranchis
cupides,
véritables
potentats,
à
l'image
de
leurs
patrons.
La
supplication
de
Cicéron,
accrédite
la
thèse
selon
laquelle,
i l
n'en est
qu'un archétype:
«D' a. bord,
je
demande
à
Cbrysogonus
de
se
contenter
de
nos
biens
et
de
notre
fortune
et
de
ne
pa.s
demander
notre
sang
et
notre
\\'ie
;
ensuite,
juges,
je
vous
de111éJ.nde
de
résister à
la scélératesse des a.udacieux,
de
soulager
le
malbeur
des
innocents
et
de
repousser
dans
l'affaire
de
Sex.
Rosci us
un
péril
qui
est suspendu sur toutes les
têtes).'
(188)
Près
de
dix
ans
plus
tard
(189),
Timarchides
vint
s'ajouter
à
cette
liste,
lui
aussi
façonné
par
son
patronusle
préteur
Verrès
<189bis),
modelé
par
lui,
t a i l l é
à
son
image.
Notre
enquête
sur
la
vie
conj ugale,
ne
fera
qu' aj outer
du
poids
à.
cette nouvelle force
que constitue
le
libertus.
-
302 -
~ -
La vie conjugale
«Il
faut
pour
a\\'oir
une
personnalité
complète,
réunir
trois
éléments
dont
l'ensemble
constitue
le
caput
être
libre
et
non
pas
escla\\'e,
au
point
de
\\'ue
de
la
l i b e r t é ;
être
citoyen
et
non pas
latin
ou
pérégrin
au
poi nt
de
\\'ue
de
la
ci té
;
être
chef de
famille
et
non
pas en puissance,
au
point
de
\\'ue
de
la
famille.
Ceux
qui
ne
réunissent
pas
ces
trois
éléments
(statua
l1bertatis,
status
ciuitatis,
status
faDli.liae)
n'ont
pas
la
personnal i té
com-
plète,
la capaci té de droi t.v
(190)
indique
P.F.
Girard.
La
vie
conjugale
constitue
donc
le
«dernier
ca rré ,1,1
de
cette
trilogie.
Elle
conduit
l'affranchi
qui
en est
doté,
à
se
voir
recouvrir
de
droits
plus amples,
puisque cette
fois
i l s
interviennent
directement dans sa vie
de
uir,
de
«mle.v -
serons nous tenté de dire -,
dans sa vie
privée.
Cette
vie
par
laquelle
i l
se
détermine
en
tant
qu'entité
réelle,
disposant
d'un
pouvoir
sur
une
micro-
société,
de
capacités
lui
permettant
de
s'affirmer,
de
diriger
et
d'avoir
sous
son
emprise) des
hommes
et
des
femmes
lui
reconnaissant
tous
les
droi ts
puis
les
devoirs
afférant
au
pater
faDri.lias,
lui
aj oute
aussi
les
moyens
de
dicter
sa
ligne
de
conduite
interne
en
fonction
de
son
bon
sens.
Pour
ce
faire,
l'affranchi
doi t
se
soumettre
à
une
impérieuse
nécessité,
s ' i l
veut accomplir toutes
les respon-
sabilités
qu'attend
de
lui
la
société
la
procréation,
«mise
au
monde),l
d'une
progéni ture
mais
aussi,
base
de
la
constitution
d'un
foyer',
ce
patrimoine
qui
selon
Cicéron,
égale en importance la vie et
la liberté,
«Parmi
les choses
bonnes,
les unes
sont
in-
dispensables,
comme
la
vie,
la
retenue,
la
liberté,
comme
les
enf~nts,
les
père
et
-
303 -
mère
les
autres,
ne
sont
pas
indispen-
sab1 es.')
(191)
et
auquel
n'ont
pas
accès
les
esclaves
091bis).
L'usage
du
terme
puer
par
Plaute
pour
indiquer
les
enfants
issus
des
unions
serviles
(192) ,
peut
être
alors
compris
comme
une
sorte
de
r a i l l e r i e ,
de
dérision
et
même, de
re'i.rendication
d'un
acquis
essentiel
à
la
vie
une
sorte
de
«forcing.'.' de
l ' i n t r u s i o n
de
l ' escla\\Te
dans
l a
société,
pour
montrer
la
suavité
d'un
besoin
auquel
tout
un
chacun
aspirait
de
tout
son
élan,
et
vers
lequel
tendaient
tous
ses
e f f o r t s
la
famille,
puisque
constituant
la
plus
petite
cellule
de
la
société,
à
l ' i n t é r i e u r
de
laquelle
l'homme
libre
f a i t
exercer
sa
complète
personnalité
(193).
Homme
libre
lui
aussi,
l'affranchi
est
donc
tenu
de
se
conformer
à
cette
obligation
absolue,
véritable
règle
vi tale,
r e f l e t
de
la
capacité
de
la
v i r i l i t é
de
chacun
et
expressi on
de
son
«i111111Orta1ité.'.',
comme
nous
l'explique Fustel
de Coulanges
((Une
famille
qui
s'éteint,
c'est
un
culte
qui
meurt.
Il
faut
se présenter ces
familles
à
l'époque
où
les
croyances
ne
se
sont
pas
encore altérées.
Chacune d'elles possède une
religion
et
des
dieux,
précieux
dépôt
sur
lequel
elle
doit
Le
pl us
grand
~lheur que sa piété ait à craindre,
est
que
sa
lignée
s'arrête.
Car
alors
sa
rel igi on
disparai trai t
de
la
terre,
son
foyer
serai t
éteint,
toute
la
série
de
morts
tomberait
dans
l'oubli
et
dans
l'éternelle
.'1!isère.
Le
plus grand intérêt
de
la
,'ie hU1!J8ine,
est de
continuer
la
descendance
pour
continuer
le
cul te).'
(194)
E.
Benveniste
reprend
cette
idée
à
son
compte
et
lui
donne
une
autre
~cception.
Pour
lui
en
effet,
i l
n'y
a
guere
de
liberté,
sans
l'adoption
de
cette
pratique
procrèative
au
terme
de
laquelle
un
groupe
humain
prend
naissance,
se
déve-
-
304 -
loppe
et
s' inscri t
dans
le
vaste
mouvement
de
la
société
un
mouvement
de
flux
et
de
reflux
où
seule
la
tête
d'habitant,
est
tenue en compte
({ . . . La
notion
de
"liberté"
se
constitue
à
partir
de
la
notion
socialisée
de
"croissance" ,
croissance
d'une
catégorie
sociale,
dét'eloppement
d'une
c0111l11unauté.
Tous
c~ux qui
sont
issus de
cette
"souche",
de
ce
"stock",
sont pourt'us de
la
qual i té de
1 eudheros.l.'
(195)
L'équation
l i berté
fami lle
a
donc
ici
toute
sa
valeur.
et
marque
dans
toute
sa
plénitude,
la
charge
civile
que
l'affranchi,.
agrégé
au
monde
des
liberi,
ne
pourrait
sous
aucun prétexte
détourner,
sans
en subir
un certain
nombre
de
revers.
I l
n'est
que
de
voir
la
condition
imposée
aux
affranchis
volontaires
à
un
engagement
dans
les
rangs
des
armées
romaines,
au
lendemain
de
Trasimène,
pour
se
rendre
compte
de
l'écartèlement
dont
étaient
susceptibles
de
souffrir)
ceux
qui
n'avaient
pas
d'enfants
Magna
uis
hominum.
écrit
Tite-Live,
conscripta
Romae
erat
libertini
etiam
quibus
liberi
essent
et
aetas
mi.litaris.
in
uerba
iurauerant
(196).
Un
enfant,
n ' e s t - i l
pas
un
citoyen
romain
en
puissance?
N'est-ce
pas
une âme,
un
bras en
plus pour
la
c i t é ?
Le
devoir
de
procréer
est
d'autant
plus
normal,
que
l'affranchi
s ' e s t
«vu
reconnaître
le
droit
de
contracter le
mariage romain.'.'
(197),
que
les
juristes appellent
les
iustae
nuptiae
(198).
Cicéron
ne
di t
prat iquement
rien
à
propos
des
relations
amoureuses
et
encore
moins,
de
la
vie
conj ugale
des
affranchis.
Il
garde
un
mut isme
complet
sur
une
quelconque
vie
familiale
qui
eût-
pu
être
entreprise
par
l'un
d'entre
eux.
Ces
liberti
avaient-ils
dépassé
l'âge
de
la
procréation
?
Une
telle
hypothèse
ne
peut
être
retenue,
vu
la
relative
jeunesse
pendant
laquelle
Tiro
(199) ,
Cln-yec'gouus
(200);
f'hl101ogus
(201)
et
Ale;.cis
1.:2(\\2)
furent
gratifiés
de
l'affranchissement.
De
même,
nous
ne
retiendrons
pas
l'hypothèse
d'un
refus
systématique
des
-
304 -
loppe
et
s' inscri t
dans
le
vaste
mouvement
de
la
société
un
mouvement
de
flux
et
de
reflux
où
seule
la
tête
d'habitant,
est
tenue en compte
« ... La
notion
de
"liberté"
se
constitue
à
partir
de
la
notion
socialisée
de
"croissance" ,
croissance
d'une
catégorie
sociale,
dé~reloppement
d'une
communauté.
Tous
cgux qui
sont
issus
de
cette
"souche",
de ce
"stock" ,
sont pour~rus de la qualité de
1 eudheros.lI
(195)
L'équation
liberté
=
fami lle
a
donc
ici
toute
sa
valeur
et
marque
dans
toute
sa
pléni tude,
la
charge
ci vi le
que
l'affranchi"
agrégé
au
monde
des
liberi,
ne
pourrai t
sous
aucun
prétexte détourner,
sans en subir
un certain
nombre
de
revers.
Il
n'est
que
de
voir
la
condition
imposée
aux
affranchis
volontaires
à
un
engagement
dans
les
rangs
des
armées
romaines,
au
lendemain
de
Trasimène,
pour
se
rendre
compte
de
l'écartèlement
dont
étaient
suscepti bles
de
souffrir)
ceux
qui
n'avaient
pas
d'enfants
Magna
uis
hominum,
écrit
Tite-Live,
conscripta
Romae
erat
libertini
etialll
quibus
liberi
essent
et
aetas
militaris,
in
uerba.
iurauerant
(196),
Un
enfant,
n ' e s t - i l
pas
un
citoyen
romain
en
puissance?
N'est-ce
pas une âme,
un bras en
plus
pour
la
cité
?
Le
de',toir
de
procréer
est
d'autant
plus
normal,
que
l'affranchi
s ' e s t
«~ru
reconnaître
le
droit
de
contracter
le
J1J8.riage romain.'.'
(197),
que
les
juristes appellent
les
iustae
nuptiae
(198).
Cicéron
ne
di t
prat iquement
rien
à
propos
des
relations
amoureuses
et
encore
moins,
de
la
vie
conjugale
des
affranchis.
Il
garde
un
mutisme
complet
sur
une
quelconque
vie
familiale
qui
eû~ pu
être
entreprise
par
l'un
d'entre
eux.
Ces
liberti
avaient-ils
dépassé
l'âge
de
la
procréation
?
Une
telle
hypothèse
ne
peut
être
retenue,
vu
la
relative
jeunesse
pendant
laquelle
Tiro
(199),
Clu-ysog-ouus
(200).
fhl1Qlogu8
c2(1)
et·
Alex:is
{ 2 ( 2 )
furent
gratifiés
de
l'affranchissement.
De
même,
nous
ne
retiendrons
pas
l'hypothèse
d'un
refus
systématique
des
-
30S -
patroni
de
voir
leurs
l i b e r t i
convoler
en
justes
noces et
de
créer
leur
descendance
(203) ,
les
édits
prétoriens,
succédant
à
celui
de
Rutilius,
ayant
donné
un
coup
de
frein
à
l'autoritarisme
patronal,
comme
nous
le
précise
J. M.
Lambert
:
{{.4u
lendeJMin
de
l'édit
rutilien,
i l
n'y a
plus
de
ius
patroD.i,
de
co~ndement
arbitr~ire auquel
est soumis l'affranchi.
Il
y
a
un
rapport
personnel,
qui
source
7 .
~e
serment,
et
fonde
désorJMis
la dette d'operae»
(204)
Parallèlement,
i l
ne
saurait
être
question
de
tenir
compte
de
l ' a v i s
formulé
par
J.
Macqueron.
qui
consiste
à
imputer
l'apparent
célibat
des
l i b e r t i
au
poids
financier
qu'un
couple
pouvai t
représenter
dans
la
do-..s
patronale
(205),
étant
donné
qu'une
fois
mariés,
i l s
avaient
la
latitude
de
quitter
la
domus
du
patron.
pour
mener
ailleurs
leur
vie
privée.
tout
en
continuant,
au
cas
où
les
operae
jurées
n'étaient
pas
encore
terminées,
à
rendre
des
services
au
patronus.
à
l ' instar
de
Chrysogonus
ou
de
c.
Curtius
Mi thrès.
De
plus,
nous
voyons
mal
comment
parmi
tous
les
affranchis
qui
figurent
dans
l'oeuvre.
aucun
n'aurait
jamais
été -tenté
par
ne
serai t-ce
qu'une
vie
mari tale.
A
tout
poi nt
de
vue.
le
silence
cicéronien.
nous
prive
de
la
possibilité
de
mesurer
à
sa
juste
valeur,
cet
aspect
du
caput
du
libertus,
et
de
voir
comment
i l
se
comportait
en
face
de
l'impérieuse
nécessité
soiciologique.
qu'était
la
création
d'une
famille.
Le
seul
renseignement
fourni
par
l'Arpinate.
se
situe
au
de
la
modulation
terminologique
consécutive
aux
iustae
nuptiae
entre
une
libertina
et
un
ingenuus
appar-
tenant à
l'ordo equester
:
uxorem ducere
AD
sicubi
Gel1ius_
hODlD et
fratre
indignus,
uiro
clarissiDlD
atque
optUDID
cOD.sule
et
-
306 -
ordine
equestri,
cuius
i l l e
ordinis
no.men
retinet,
or.naJDenta
confeci t,
id
erit
populare ?
1
«Est
e n i . homo
iste
populo
Romano
deditus»
IJlI1JID
que.
forte.
et
bonuJ1l
ciue.
non
petulantissi.me
est
insectatus
?
qui,
ut
credo,
non libidinis causa,
sed ut plebicola
uideretur,
libertina. durit urore. (206)
Le
ton
pugnace
employé
par
l ' Arpinate,
a
pour
but
essentiel
de
dénigrer
et
de
brocarder
L.
Gell ius,
en
dé .... oi lant
ses
intentions
«popul istes.t.1
mais
i l
y
a
dans
cette
présentation,
l'avantage
certain
de
toucher
du
doigt,
la
réalité
de
la
«métamorphose
libertine»
dans
le
domaine
conjugal.
Le
f a i t
que
Cicéron
ne
s'attaque
pas au
bien
fondé
du
mariage
lui-même
et
n' y
apporte
aucune
objection
juridique,
montre
que
c ' e s t
une
pratique
ent ièrement
consommée
et
unanimement admise
à
la
fin
de
la
République.
Inclus
dans
le
monde
des
libres,
s o r t i
du
«bourbier ser~rile))
qui
le
tenait
à
l ' é c a r t
du
moindre
des
droits
se
rapportant
à
l'homme
véritable,
l'affranchi
se
présente
en
fin
de
compte,
comme
une
antithèse
de
l'esclave
en
beaucoup
de
poi nts,
même
s i
les
uns
et
les
autres
ne
possèdent
pas
la
même
importance
aux
yeux
du
patron.
et
à
l ' i n t é r i e u r
de
la
société.
Mais
son
passé,
d i s p a r a i t - i l
à
jamais
?
Ne
constitue
t - i l
,
pas
une
tare
indélfbile . qui
lui
reste
collée
à
la
peau,
prête
à
émerger
à
n'importe
quel
instant,
selon
le
bon
.... ouloir
de
ses
c o l l è g u e s ?
En
dehors
de
cette
émersion
à
laquelle
on
peut
le
réduire,
la
société
romaine,
efface
t -
elle
complètement
de
sa
nomenclature
tout
passage
dans
la
senTi l i t é ?
-
307 -
Not.es
=====
1 -
Un
certain
nombre
de
~aux tenaillant les ~itoyens et parmi lequels la
contraception, l'avl)rternent, le célibat '"cupent une place de choix, y auraieat
selble t-il eux aussi, contribué à partir de la fin de la République, l'analyse
de p. Sallon,
h'Pul~tion ~t dlipopulation dans l'e.pil'e 1'011.3 in, pp, >10-90 est
intéressante  lire sur ce brûlant problème,
2 -
Auncune donnée statistique ne permet de le justifier; mais les rOllanistes, se
basant
sur
des
supputations,
sont
forlels
là-dessus,
C'est
le
cas
de S.
Traggiari, Roman freedman during the late Republic, pp, 31-36,
3 -
Pro Cael"
XXIX, 68 :At ~unt serui illi de cog~toru. sententia, nobilissimoru.
et clarissiMoruM h~~inum, Manu Missi. Tdnde. aliquid in~niMus quod ista Mulier
de suorUM propinquoru. fortissimoruM uiroruM sententia dtque ductoritate fecisse
dùatur, Sed scire wpio ql./id habeat arguMenti ista MamMissio " in qua aut
cri_en est Caelio qU.lesituM .Iut qUdestio subldtd dut MuJtdru. reru. co,r1sciis
seruis cu. causa praemiuM persolu!UM,
3bis -
Se reporter  l'analyse de G. Pieri,
L'histoire du cens /usqu'J la fi,'1 de la
R~publ ique, p, 1,
A -
Ins&, Jus!., 1,3,3,
5 -
1nst, 1 l, 10 et 1l ,
5bis -
Six années suffiraient, selon Cicéron, pour recouvrer la liberté, Vl!l. Philip"
XI, 32.
6 -
Quintilien: jllJ J,'1st. Ordt., VII, 7,
6bis -
le rapprocheunt est indubitable. Il Tusc, , XXI, 612.
6ter -
La religion romaine drchaique, p. A06.
7-
Pro !fur"
IX,
19:
Seruisl1ic nobiscu. hanc I.'rba,r1JM Milithw respondendi,
scribendi, cduendi plenam sollici&udinis dC stoMachi secutl.'s est,
8 -
! Oe leg, , III, 10 : Ego uefO utdtis potù;s uocdtioni conlidebdll cu. pfaesedi",
non reCUSdrem, quo .inuf more pdtrio sedens in soJio, consulentibl.'s respondere.,
fenectutisque non iner!is grato dtque hones!o fungerer Munere,
9 -
Du r~le des esclaves et des dffranchis dans le cO.Merce, P. 69.
10 -
Les esclaves pt.'blics c,i,ez les ROt!dins, p, 31.
11 -
Ainsi, la femme est dite liberta, ou COlllle Cicéron ailte à le dire,
lIber!i,'1J,
P."o Sest., LIl, 110.
12 -
Pro ~èx. Rosc. A~~r., VII, 19.
13 -
{)e frullent., UVl, 15A.
13bis -
.J, Gaudellet, Les in5!i!:;!ions de l'Ant!quit~, P. 555.
-
308 -
1.5 -
f}~ frt.m~tlt"
UVI, 1.54 : till.3rchidi, liberti, istius,
II; -
Vol. VII, 2 Fasc, : VII, 1.573, p, 13220,
17 -
T. 1V, P. 94,
le -
19 -
!lU"
IV, 1.5, 1 : f}~ Eut.rcMd~ gr.3tum.. qui u~tere pr.3enolline.. nouo m,"in~ Titus
erit caecilius, ut est e,'( Ile et ex te iunetus !)ion)'sius ,11, PomponllJS,
20 -
On tlle chronolog)' of tlle cognonelJ ifl th~ R~publicafl period, p. 69.
20bis -
ibid,
21 -
1,
Philip"
Il,
5
Tdlis
dflÙlJd~r5io fuit
!)obJb~IIJ~ L"um
in auddcis
scelerJtosque seruos tu. in i~puros et nefJrios liberos,
22 -
FJM"
III, 7 : HJec scripsi subito, c~w Bruti pueri L.3udic.3e me conu~ni55ent ~t
se properJre dixi ssent,
23 -
h •. , VIII, 3,
24 -
FJM"
XI II, 33 : liberti, !lntigonus, Hi IJrus, !)eMostr.3tus,
Pro FIJc"
XXXVI, e9 : !lntiochulJ, pJternuM huius Jdulescentis !ibertu•.
Att"
IV, 15, 6 : !lntiphoni operJ.,
FJ."
VII, 25, 2 : ApellJ '"
liberto tuo,
Pro P, SUI"
XIX, 55:
BelluM, FJusti lib~rtulI,
.4tt"
VI, 2, 1 : Philog~,'1es liber tus tuus,
Fa."
1II, 1, 2 : Cil ix 1ibertu5 tuus,
Pro Cluent"
XIX, 52 : SCJ.Jfldru~ pJtroflo,
Att"
l, 12, 1
libertt.'ll HiIJru.,
25 -
FJ."
XIII, 69
C, Curtius ~ithr~s, affranchi de Postu.us,
FJ."
XIII, 70
T. A.pius ~enander, Affranhei de T. A.pius Balbus.
Pro A. CJec"
VI, 17 : ~. Fulcious, affranchi du prelier uri ,je Caesennia,
épouse de A. Caecina,
FJ."
XIIII, 2) : C. Avianus HalI.ooius,
Att"
VIII, 11 B : M. Tullius Laurea, affranchi de Cicéron.
2.5bis -
6, Fabre, Libertus, p. 175,
21; -
ibid"
p, 201,
27 -
Cl, Hicolet, L 'onollJstique des groupes dirigeJnts sous 103 R~plJbljqlJe, P. 51 0
27bis -
Le fait que Cicéron SOUMette souvent à Tiro ses aterloiements en ~atlére
politique durant l'année 49, en est un indice. FJM
XVI, 11,2,
o
,
28 -
L.3 cit~ .3ntique, p. 114.
29 -
ibid, 1
29bis -
Nous y reviendrons,
-
309 -
30 -
op, cit"
p, 4.
3Ubis -
S. Treg'3ian, op, cit"
p, 11,
31 -
f~II"
XVI,
4,:3
InnUller~bi!i.3 t!.:~ st..'.?t i.'1 fie ollùiJ dOlfestic~, lorensi~,
I.Irb~n~, pr~inci4li~, in re priu~t~! in public4, in studiis,
32 -
ibid"
XIV, 4, 4 : Oe l~mili~ liber~t~ nihil est quod te flone4t, Prifll.lfl tl.lis it~
proMissulI est te l~ctl.lr~fI esse ut quisql.le eS5et lIeritus ; est ~utell in ollicio
~dbl.lc Orplleus, pr~et4re~ II~gnopere nellO,
op. cit., p, 1.'3.
33bi'S -
q, lr"
I, 2, 3.
34 -
f41f.,
XVI, 16, 2 : Si eni. Mihi st~tii lidelitu est h'7t~e ulJ1upt4ti, qU4nti
esse
in
isto
n~eL' e~de. bon~
debent
~dditis
litieris
et
serllonibus
et
h~4nit4te, qU4e sunt his Ipsis (ollllodis potiol'~ !
35 -
1! Oe oll"
XI, 39 : [l'go et ll~ec ~niMi despicùntiJ ~d.ir~bilit~tell lI~gn411
,f~cit et IWfùle ù...stitiJ, ex ql.l~ l.m~ uirtute uiri boni ~ppe!!~ntur.
% -
f~II., XVI, 16, 1 : Oe Tirone,
~i l!~Ne !
i t~ te tlel.lllql..'e Ciceronelll et lIe.3.fI
Tu11io!411 tuullque liliull l.Iide.3l1, !.,t IIi/Ii ~'r~tissiIlWI lecisti, CUII eWf indignulJ
i114 lor/t.'n.3 n4c nobis .3llicutl Ij·U.3,'t sen'ull esse 1J.3!f.'isti. l'1iM crede,
tuis et
illius !itieris per1edis exsi!!.'i g~udio et tibi et .3go gl'~ti4s et gr.3tu!ol',
37 -
1 f}e 01'4t., XL, 193 : Quid .? !Je iiber/.3te quo i!.'diciw, gr~l.'il.'s esse nu!lu"
potest,
nonne ex iure cJuili pdut esse contentio,
quo. ql.'uritl.'r,
is q!.'i
dOllini uo1unt~te (ensus sit '"
6,
Pieri,
L 'histoire dl..' cens iU5qI."j
l~
li,'1 de
l.3
.R#ub1iq!.'e
,"oluine",
pp, 47-5.4,
H.
Lévy
Bruhl,
"L'affranchissement
par
la
vindicte"
i.'1
,R,H.DJ..
Il,
1930, pp, 6Q9-610.
38 -
Surtout
en
ce
qui
concerne
la
forme
testamentaire.
Lire
pour
plus
de
co~préhension, 6, Fabre, op, ci!., p. 41,
39 -
Pro A, C4ec., XXXIV, 99 : !.3fJ1 pop!.'!!.'s (!."I eu. !.'endit qui lIiles fu!!.'s .'10.'1 est,
non .3di.it ei 1ibert4tlYl.. sed it.'dJC~t no.'1 esse el..'11 liberulf qui, I.'t liber 51t,
.3dire perict.'1uII no lui t, Will .3!.'tell j,r1~·ensuN uendit. ho. iudfc.3! ... (!.'A.' ii qui in
seruitute iust~ luerunt (ensu liberentur.
40 -
Top., II, 10: Si ,'7eque (ensu, neque !.'indict.3, neque test.3/J'ento, non est liber,
Al -
Elle est constituée d'un triptyque: pel' NenS.3N pel' episto1.31f, inter allicos est
donc, n'a aucune p'Jrtée libératoire à la fin de la RépubliQue, llhe quand le
ugi'Strat rOllain lui-ehe se pl:>se c.)lUle patron ~t repré'Sentant de l'Etat. p.
60nnet est ~:<pliclt~ .jans s.,n artlc1e : "Le dr'Jit du II!gistrat r.'~ain de faire
dans son propre int~rH, act~ de Juridlction vol,:>nture" 1.'7 .R,H,~J"
16, 1937,
PP. 19:3-2~1,
..~~~ -
Pro 8.31b., IX, 24 .
U -
His/. .f?o,~', 1 U II 1 4.
-
310 -
Ubis -
D'où les nombreuses entreprises de Numa par exeeple, pour étendre la pai~:. Tite-
Live f Hist, Rom"
XIX, 1-6.
45 -
Tacite, 1J ,4n, , XXIV, 2S7 : I}tlid Jiiud e:<itio Laced.Jelloniis et Ath~niensibus
fuit, quamqu4m 4rmis poll~r~nt, nisi quod UiCt05 pro .Jli~nigenis 4rceb.Jnt ? At
conditor nostri Romulus t4ntull sapienti.J u41uit ut pl~rosque populos eode. die
hostis,
d~Ù1 duis h.Jbuerit. ,4duen.Je in nos regl1.luerunt. libertinorufI fijjis
M.Jgistr4tus lundue non,
ut pleriqu~ f,flluntur,
repens,
sed priori populo
f.Jctit.Jtum est,
\\
4ft -
Publicola : A, 5, ft2,
47-
ibid"
7/ 7, ft5,
47bis -
f Tuse, I, 2,
47ter -
J, 6audeaet, op, eit"
p. 368,
49 -
II Oe Rep, , V, 10,
49 bis -
J, 6audellet, op, cit,
49ter -
Tite-Live: UllHist, Rom"
LVII, 11,
4S -
Pro C, R4bir"
XI, 31
[tenifl si Saeu4e, serlJO Q, Crotonis.. ql.'i oa idi t L,
- S.JturninuM, !ibert4s d.Jt.J est,
50 -
Salluste: Oe Con, C4t"
XXX, 83 : Ad hoc, si quis indic.Juisset de coniur4tione
qU.Je contra rellptlb!ic.Jm f.Jd.J er4t, pr4elliull serlJO libert.Jtem,
51 -
F.JfI, ,
XVI,
14,
2
ConSerto'4
te flihj,
Oies pro"iuorull 4dest.,
quell etiaRi
t'~pr,Je5~l'!tJbo) si 4dlJ~neri5,
52 -
ibid" XVI/ 16, ? • Tu !fusis Mstris p4r4 ut Opl!r.J5 redd.J5, Nostr4 ad dle'l did4m
f jent ; dOL"lo'i enifl} te f ides ~:·r1'jJOI'~ quod h..beret,
53 -
p, 295,
5,4 -
ibid"
55 -
P.Jr..d,
Stoic"
II, V, 1.43 : ln ll14gn.a !.Jllili.. sunt Jiii l ..utiores serui, sed
t.JMen serui.. 4trienses 4C topiarii,
56 -
Oe Pr4et,
Sicil, , lIV, 35 : '" Plena do.us Cu14ti uge,rlti ~'Ptùi tll.'it.Jeql.'e
str.Jgulae uestis pretiosoruflQUe I/Ianeipioru••
57 -
ibid, 1 XIX, ,46 : li.J/I il lud quideM st4ti. cur4tur, ut quùquid cuh ti argenti
fuit in il!15 bonis 4d istum defer4tuf, quicquid corinthiorull uasor~w, str4gu!4e
t.'estis ,'luec
netlo dubit4bit quin non IIodo ex i114 dOllo C4pt4 et oppress4,
t.'eNl,fI ex tOt4 prouit~ci4 .Id istull cOllport4ri necesse esset. !'f4ncip14 quae l.'O!uit
4bdu,'(it, a!ia dil.'isit ; 4IJdio ,facta est, in quoi cohors istius intiIcfa domin4ta,
58 -
ibid, / XIX 1 A7 : S,vr4cusani qUI praefuer4nt Ms Ikruli bO,'7is Ilubo redlgendH,
,~e di,pertiendis,
reddeb4,'7t eoru,fI negotiorulIJ rationell in se,'7atl.' ;
dueb4nt,
scypl?orull PUi4 cOII.oplur4, hydrias ugenteas pretios.Js, ueste,,, stragt.'ia,~1 :lU! talt,
,unCIpia pretiosa d4ta esse i'ern,
-
311
-
59 -
1 Cat"
XI, 27,
60 -
III Cat., YII, 16 : Nunc quonia~, Quirites, consceleratissilli periculosissillique
belli ne la rios duces CdptOS iaAl et cOllpr:Msos te/letis,
_ .
f'
61 -
Pro P, Sul., XIX, 55 : At pra~h'l't la4filiae Corn~Jius libertus '"
eaque l'es
o.ni tHpOre pel' BeJJu., fdUSti libertulII; adllinistr.Jta est,
62 -
III Cat"
YIII, 16 : Oper.Je pretillll est, p.Jtres conscripti, libertinorlJll hOlllÙ1UIII
5tudia cognoscere,
qui,
su.J uirtute fortun.J1I huius ciui tatis conseatti, uere
h.Jnc SUIII p.JtriaM esse iudùant, quall quid-JII hic nati et SWMO nati 10co non
pdtria. suaM, sed urbe. hostium esse iudicauerunt,
63 -
ibid"
Seruus est ne.o qui (nunc) IIOdO tolerabili condicione sit seruitutls, qui
non autMciall ciuiw perhorresc.Jt, qui ,'1On h.Jec st.Jre cupi.Jt, qui non quantUM
audet et (in) qUdllltw potest confer.Jt .Jd Co.tllIUneli s.Jlute. uoluntltis,
6.4 -
Pro Sest"
XlYI, 99 : Huius .Jute~ otios.Je dignit.Jtis hdec fund.J.entd sunt, l'idec
.mrl,
qwe
tuenth principibus et uel
cdpitis pericul0 defendemid sunt
.'
religiones,
dUSPÙÙ,
potestdtes IIdgistrdtuu.,
sendtus auctorit.u,
leges, 1105
.dioru.,
iudicid,
iuris dictio,
Fides,
prouincide,
socii,
illperi
l.Jus,
l'es
.ilit4ris, aerariuM,
65 -
ibid"
H -
ibid"
XLV, 97
-quis
ergo
iste optl',us quisque
?' liuAlero,
si qUderis..
innuurdbiles - neque enilll aliter stlre possemus - " sunt prirlcipes consili
publici, sunt qui eorulII 5edd~ sequontur, sunt Mdxilloru. ordirlull homùles, qllibus
pdtet curi.J,
sunt .unicipales rustiriqu~ l~o"'dni, sunt ,'1egoti gererltes,
sunt
etialll libertini optulI.Jtes,
67 -
Pro A, C.Jec, , XXII, 63 : Non enill Il.Jior est iniurid, si tua fdlllilia quam si tuus
uilicus "
non si
tui serui,
qu.J. si .JJieni IC lIucennarii .: .'Ion si
tl.'llS
procurator qu.J. si uicinus al.·t libertus tuus,
68 -
Att"
l, 20, 7,
69 -
COMM, Pet"
VIII, 29 : Beaucoup de citadins oisifs sont capables d'actIon, bien
des affranchis aélés 1 la vie du forui ont de l'influence et savent s'en servir,
Ceux que tu pourras atteindre s.)i t directellent, soit par des amis COllluns 1 ne
lénage pas ta peine pour en faire des partisans enthousiastes, va à eux, envoie-
leur des élissaires, aontre-leur que le service qu'ils te rendent est à tes yeux
des plus considérables.
70 -
Att"
YIII, l, 2 : fi stdtim rescripsi homineMque cerium misi d~ ccmitibus meis,
71 -
F.JIII, , l, 7 : Quotiens .ihi certoru. hominuli potest.Js erit quious rect~ dem,
72 -
ibid"
XIII, 21, 2 : ... Collllendo tibi in ,uioreN ,'Odlll» dOllUIil ell.'S., qU.Je est
SiCJ'one,
re//1ql.'e fa~ili.Jrell,
Il.JXÙI'~ C, ~l.'i.Jnium Hauonilltl, lib~rtl.',~1 eius.. I,lllem
quideM tioi eti.Jm SIJO no~i,'1e commende .' na" Cilli prl.-opterea lIihi e!t prooat!.,s quod
est in p.JtronuM SU". offùio et .'ide singul,ui ..
h'" etiall in ~'e ips:..',~' .a!J~.'1a
officia contulit lIihique ",olestissi,'Iis
te,tlporiolls
ita
fideletet be:w,:oieq:,,'e
praesto fuit ut si .J II~ IIJnur.issus ess~t,
73 -
ibid"
XIII, 23, 2.
-
312 -
74 -
"Huunisllus militans" in HOAllJages J R. Schilling, p, 471,
75 -
J, Helleg'Juarc'h,
Le 1'0L"abu1Jire 1Jtù7 des relJtions et des pJrtis pIJ1itiques
sous 1.1 R~ptJb1ique, p, 286,
76 -
ibid"
77 -
FJIR, ,
XVI, 17, 1 : Je vois clair dans ton jeu: tu voudrai .. que tes lettre..
..oient, elles aus.. i rangées en rouleaux, "ai .. di ..-Boi donc, toi qui, d'ordinaire
es le canon de ee'5 éc rit.. , où as-tu pr i5 cette iBpropr iété : "en consacrant
loyalellent le'5 ..oin.. à lia santé ?" D'où "loyalelent" est-il venu dans ton
texte? Car ce Ilot e.. t propreaent chez lui dan.. le ca.. d'une obligation envers
autrui, souvent aus.. i tran.. férée dan.. une acception qui nle.. t pa.. la !ienne ; de
fait, un enseigneaent, une aaison, un art, ~Ie une terre peut Hre appelée
"loyale",
sans
que
la
létaphore
ces..e d'!tre,
coaae
le veut
Théophra'5te,
bien..éante,
78 -
ibid., XVI, 22, 1 : Là où tu es, .. i les copistes ne réus'5i'5..ent pas! déchiffrer
des passages écrits de _a Iain, tu le.. éclairera.. ,
79 -
P, Boyancé, "La connai ....ance du grec à ROlle u in R.E.L., 34, 1956, PP. 111-112,
8Q -
litt, 1 XV, l,
91 -
ibid"
VII, 5, 2 : De rirone uideo tibi L"/Jrle esse.
f}tJ9 quidell
ego,
etsi
Mirabilis /Jtilitates .ihi prJebet, cu. uJ1et, in ~.ni genere ue1 negoti~rum uel
studiorull MeoruN,
tJllen propter hUIII.ni tJ te.
et .odest iJll .410 5.1 llilill qUJIII
prtJpter !.'S!JI.' AleUII,
82 -
hw"
ïVI, 16, 2,
93 - , UV, ~2,
84 -
Pro Ifi 10n, lX 11, 058,
905 -
,4ft"
VIl, 4, l : '" Plam~ uirull bofUIII.
86 -
ibid"
DionysiF.'" l 1Jgrantell desiduio tui .isi I.d te, nec lIeherwle aequo Jnillo,
sM fui t conade,?!.."u", Quelf quideM cogno{)i quoll dodu", quod fIIihi fal» ante erJ t
no tu", tUII sanL"tulI/ plenum officii, studio5~ etilll lIele 1lu1iis, frugi hominem,
87-
ibid"
VI!, 2,8:
",ChrysiPPUII wrIJ,
qWII ego propter litteruI1Jrl.lAl ,'1euio
quid libenter uidi, in hontJre hJbui,
88 -
ibid"
IX, 12, 2 : Oe Dionysio sUllldllirltl/S, qui Jpud Ile honoratior h'it qt.'U
Jpud Sdpioflell! f'JflJ~tiI)S,
es -
Ibid"
V, 9, 3 : /}10lWSiUII semper equidell, ut s.Js, di1e:r:i, sM cotidi~ pll.'r i5
fJcio et Me hercule iMprimis ql)oo te J.4t flec tui lIentione. iflter.ttti sinit,
SO -
hw"
III, l, 2 : CIl lA,
libe!'tus tUtJs, aflteJ IIthi IIi/lUS fuit ,'10tI)5 " sed, ut
lIil,i
reddidit a t~ lJtt~"J5 pleflJ5 et JtlIJf'is et ollieii, IIirifù-e ipse 5t.'I.,'
5~rllJOne sub:1l!ct.rt:,.rs est hUA'JnitJtell littuJrUII tUJrIJM, luclJndJ IIi/Ii eius ~rJtN
fuIt, ~-UII d~ Jni.fo tl.'O, de Sef'!IOflilN/S qt.'os de III! naéeres cotidie 11ii'li .'1JrrJret,
Qt,,'id quauis .~ bidl.'o lJctus est lIiM fJMiliuis,
91 -
fi. Fabre, op, cit"
p, 405,
- 313 -
92 -
F~,w., XII I, 21, 2,
93 -
/)~ l r uII~n t, 1 LX IX, 161,
94 -
,4tt"
VIII SI 2 :
/)~ .Tùone uideo tibi cur~e ~sse, f}ueM quidell
ego,
etsi
.irdbilis utilitJtes mihi prJ~t, CUII uJlet
in oMni ge~re uel negotiorum uel
l
stidforull lIeOrlill.',
t~II~,'7 propter hUIUl1it~tl!1I et 1I1.'\\.-Iestiu .~lo 5Jluum qUJIl
propter 1.151.111 MeUII,
9S -
Fdm, ,
XI II,
10
Nu
cum
T,
Il.vpio
8d1bo
lIihi
SI.'IJIIlfJ
lui 1i~rilu
necessitudo'qu~ est ;
~ius libertuM,
T,
IIMpiuM /fen.mdrllll,
hOllineM
frllgi
et
Modestull ~t pJtro.?o et nobis uehellenter p.~obJtu.,
tibi
cOMMende IIIJio.~ell
i.'7
IIOdUII.
96-
litt., VIII, 6, 4.
96bis -
Exception faite pour Tiro, F.u, , XVI, \\S et Alexis litt"
VIl, 1, 7.
91 -
F~•. 1 XIll, 23 1 2,
98 -
Pro L. F14c., XXXVI, 89,
99 -
FJM"
XVI, S, 2
100 -
ibid., XVI, lA, 2 : Si II~ diligis, excitJ ex SOllno tuas litterJs hUIIJnitJtemqu~.
IOObis -
J, Granarol>J, :."{). Cit~, p. 471.
10) -
hf/"
XVI, 14, 2.
10Z -
ibid.,
XVI,
l,
1 : P4ulo fdcilius pllt.!ui posse Ile f~rre desidluù.l1I 11.'1,
sed
plJne non fero ; et, qU.JllqUdII IIJgni .Id honorell nostrlm interest qt.'Jm primulII 4d
llrbe__e uenùe,
tJllen peccasse lIihi uideor qui .1 te discesserill. Sed qt.'iJ !t.'J
uoluntJs eJ uidebJtur eS5~ ut prorslJS nisi confirtflto corpore 1101le5 n.!uig.!re..
JpprobJui tllum consiliulI, neque nunc IIUtO,
si tu in ll'.ldelJ es sll'ntentiJ ..' SUI
Jute., poste~ qUJII cibull cepisti, uideris tibi passe Ile consequi, tUUII consilium
est.
103 -
D'autant plus qu'il e~t convaincu de la présence en Tiro et en AleXiS, des eèmes
qualités . .4H., VII, 7, 1 : 1I1exill, hlJMJnissillulJ pueruII,
104 -
Htt., VII, 2, 3.
lOS -
FdM.,
XlII,
1;9,
1
C.Curtiu5 /fithres ~st iJ1e qtJidell,
ut
seis..
liberSu5
Postulli,
fuiliuissi.li lei, sed Ile colit et opperuJt .!equl! Jtque 1111.','11 ipst.'l1
pJtronu. SWII.
lIpud l!Ulll ego sù Ephesi flli,
quotienscullqul! fi..':,
tJI!!qUJ!lI do.~'i
lieu, lIu1tJqt.'e Juiderlll1t in quibus et beniuolentiJlI eius t!r~~J Ile ~,~perir~r et
f idell.
IQ6 -
Pro Sex.
,'?osc, ,q"er, , XLVI, 133 : lUter tibi d~5Cendit d~ P41Jtio ~t udibus
suis ; hJbet J.'1111i ~-JUSJ filS JfIIOMUM ~t suburb.JnuII.. ph'rJ prJeter~J prJedu
nel(lJl! tJllen 1.'111.'''' nisi prJeclulJ1I et propi.?J.,~Ulill, /)O,"us refer!J t.'Jsis corintMJs
et f)~lJJci5 i.'1 quib!is est JlJtbl!psJ i11J, qUJ. tJ.'7to pretio nup:y .fll!NJt(.'S est,
ut,
qui
pr4~t~reunt~5 qt.'id
pr~~::o
el'u.'tler~r~t
.J1.'~"'i~hdnt
l!.i,,,d!i,t~
t.'enl,r'~
JrbitrJrl!nf.t.'f.
iiuid prJet~r~J cJel~ti Jrgenti,
quid strJgulu
uestIs,
quJd
pictJrlJ1I tJbulJrulI, quid signorulII, quid IIIJrllloris Jpud illulII putJtis ~55e ~
-
314 -
107 -
Il! ()~ L~g., XIII, 30 : l'ir lugm.ts ~t noMs o~tribus a.•iCus L. Lucullus fu~baü.tr
quui
COlIIII}I..-4i SSÙt~
r~spondiss~t,
CUI/
ess~t
obi~d4
M.Jgni 1i(~nti.j
ui Jla~
Tus(ulJnJ~, duo S~ hJb~r~
ui(inos,
superil}rem
~qtJit~1I R~Jnu.,
inf~rior~M
lib~rtinuM : quoru~ (u~ ~ss~nt ~a~'7ificJ~ tJillJ~, cone~di sibi oport~r~ qtJod fis
qu~ in/~rioris ordinis ~gs~nt lic~r~t,
107bis -
AH"
IV, 15 ; YII, 2
YII, g,
lOB -
1 ()e 011"
XLI l, 151
Quibus aute~ JrtiblJS a:..t prlJdetltia .Jior inest 4ut 110tr
lI~diocris utilitu qU.J~ritl.'r, ut ~~dicinJ, ut Jrchit~ctlJrJ, ut dodrin.J reruli
hon~stJrUM, ~Je sunt iis quorum I}rdini conu~nil.'nt, honesta~,
109 -
FJtf., III, 1 : Cili,~', libertus tuus, JnteJ Milli minus luit .'1/)tus ; sed ut .illi
r~ddidit a te Jiit~r.J5 plenJs et a.oris ~t officii, .irilic~ lpSO suo Subs~(utug
est hulJnitatell JitterJruII tUJrUM,
ibid"
IY, 12, 3 : Ego t.Jtlen .Id tabernaCl.t1uN ~ius p~rr~xi, inueni duos lib~rtos
et pJUClJ10S s~ruos,
ibid"
XVI, 9 : ,4,d.....,KJ1, O~(, SUUUS C,7, f'J.Jnci BrlJndisi tande. aliquJndo lIilli
1 te exspectltissilllS litt~rJs reddidit dJtJS Idibus Hou,
110 -
a. Fabre, op, dt" p, 615,
111 -
AU"
IV, 11, 2 : ,1105 /lic uor,f.'Ius litt~ru ~·UII 1I0lline Nirifico fitJ .~ ,"~r(ule
sentio) Oion}'sio qui te oMn~sque "OS SJlutJt,
ibid"
VII, ~, 1 : Oionysiu. fJJgrJntell d~siderio tui lIisi .Id i~! n~e.~ h~rctJJ~
Jequo J.'1i,'o,
5ed luit c~v'1Cl:dendl.'tl, I}u~. quideAi eognoui q/Jo. dodu.•, quod lIilli
iJII Jnte ~rJt notulI, tl.'l1 5.1netUM, pl~null oflitii ".
112 -
Q,
fr.
,
1,
2,
B : ln litt~rjs .itt~f1dis, gJ~p~ Id t~ stripsi,
ni.fiil.'l1 t~
exorlbiJellJ prJ~btJisti,
ToJJ~ Ollnes, si pot~s, iniqu,fS, toJJ~ it'lusita tJ5, toJJe
cQntrJriJs, StJtiu5 Mihi nJrrJuit scriptJs .Id te sl}lere Jllerri, .1 se l~gi, et
si iniquJe sint, fi~ri t~ (~rtior~m : Jnt~ qUJII (J~ro ips~ .Id t~ lJ~niss~t, nul11.'11
d~leetfJII lit teruuII luiss~ : ex If0 ~SSIf uolullina seleetJflJ. epistolJr:.'M qlJJe
reprehendi soJ~r~nt,
113 -
Il voit à travers ce rapprochelent, une source de ridicule de Quintus et de sa
dévirilisation, Statius ayant très aauvaise presse auprès des habitants d'Asie
où s'exerce la légation de Quintus,
q, Ir"
l, 2, 3 : Qwd .ltit~ll M~ lIJ.ritl~
.ouer~ solebJt, cu. Judi~bJ. iJltim pJus .lpud t~ PQSS~ qU.l. gr.JuitJ5 illius tua~
letJtis, iMp~rii, prud~ntiJ~ postulJr~t - qUJII II1.'1tos ~niM .~CtJ. ~giss~ ptil.ls ut
s~ SI41io cOllllendJre. '"
Quibus in rebU5 ~tiJ. si fid~Jitu SUIIIIJ ~st, {qul)d
prorsus credo, qtiOniJM tu itJ itidieJsJ,
tJ.~n speei~s ipsJ tJ. grJtiosi Jiberti
.Iut 51!l'ui digni tJie. ,"abere nulJJ. potest - Jtqu~ ,'Ioc sic h.lb~to {ni,'Ii 1 i.lllen
nec t~.erl! dic~re n~( Jstute rl!ti(~r~ d~beoJ, IIJt~riJ. o.~. s~r.onu" eorull qui
de te d~trJhere lJ~lint StJtiulI dedi55~ : Jnt~J tJntl.'1I int~JJ~gi potui5se, irJtos
tuu s~u~ritJti eS5~ non fll/11os,
hOf
4'JnUII1sS0 irJtis qlJod Joqu~r~ntur
.'1IJl'r
defuiss~,
JJ~"bis -
l'oir 5lJr ce point.. l~g Jongl"~5 tirJdes d~ CÙ'~ron pu I!x~.ple c'.l4S 1 O~ Off"
XXXVI, 130 ou dans ,Pro !:J'ex, .Rose, lIA'er"
XVIII, 50 sur les bienfaIts ,ju travail
de la terre.
11~bis -
Yoir l'analyse qu'en tait Cl, Nicolet, L 'ordre ~ql..~stre J 1 '~poql.'~ r~pl.'bjùJin~,
PP. 32~-3.46,
-
315 -
115 -
116 -
Pro L, Fl.Jc,
XXXVI, 89 : I)uid .;' $i ist.J 0-.'115 p~cuni.J huic .JduJ/!s'~l1ttilo L.
fl.Jao
r~ddit.J est,
si petit.J,
si redut.J (si) pel' lllJnc 1/,'"ItiochUII, p.Jt~rmJ.11
huilJS .J1ulescentis libertur. seni illi f1.J'co proba.tissillum,
117 -
ibid"
XX, 47 : '"
lnteri,~l.. .'"Ieq(J~ it.J 10.'"1go interu.Jllo, liber tus .J f"ufiis cum
IJ"tteris .Jd HenlÏppulI uenit ... pecunia. petitur db Herllippo,
118 -
hw., XIII, 14, 1-2,
119 -
Att.,
l,
12,
2
LibertfJ~' ego habeo s.Jn/! nequ.JM btJl1Ù1ell,
Hila.ruil
di:: 0 ..
rJtiocinJtor~M
et
cliente~ tUUII,
Oe
~o
.ihi
~Jlerius interpres
n~'"Itia.t
,Thyil1usq:.'e se J:.'dis5e scribit hJec, ess~ ho.ine" CUI! I/.'"Itonio .: Antoniuli plJrro
in cogendis pecuniis di,ti tJr~ pa.!'telll "illi qU.Jeri et ,f Ile CfistOI."'e, COlltlfJ.'"lis
qUJestus libertulII esse IIi 5SUII , Non su, Mediocrite!' CONIIOtUS neque t411en credidi ..
sed
ce rie
J1iq:"1d
Ser/lOn1S
ltJit,
Totu"
inuestigJ,
cogm]s,e,
perspice
et
nebulonell iliUM, si qtJo P.J,to potes.. ~K istis locis alloue,
120 -
ibid., XIII, 22, 4.
121 -
ibid"
V,
4,.3
{Je Oppio be.'"Ie ~-tJrJ5ti quod el de OCCC ~,'(posuisti ..
idque ..
qtJoniJA.' Pl'liloti.IUII hJbes.. perfi,e, et cogno5Ce ntion~II, et ut .Jg.fll .Jllpliu5, si
~e .JIIIJS, priusqu.JlII proficiscJris ~ffi'e,
122 -
ibid.,
V,
19,
!'fess.J!J.w,
123 -
"Phil,:>tile et 13 vente des biens de l'lilon'' in lr,E,L"
XXXIV! 19&6, p, 182,
124 -
ibJd, , pp, 187-190.
125 -
.4tt., VI, 5, 1 : A. HaUry a 3bl)uti 3ussi à la .he constatation, op, cit"
125bis -
J. Carcopino, Les secrets de 1.1. corresplJnda nce de Cic~ron, T,I., pp, 237-239.
126 -
127 -
ibid"
si
possit,
in~~11Jt .Jd societJte. b~lli!
~xist~~.Jns publiee
priUJtùlque .J~re JUe.".:] "''Ppr~550S, prJ~t~,~~J quod n.Jtura gens 6.J1lic.J b~11ic05J
~ss~t, f.Jeile ~os ~d t~le consifium Jdducj pesse,
128 -
F.JAI. ,
Xl II,
l ?Q
_J -
ibid"
~III, 21, 2 : S~d CfJM 1flu~ Jbesse pute., co••endo tibi in ~Jior~m Modl.'M
d~'AJ:"tll eius, ql.'~e ~st $ itYM~, ..ellque f .Jlli1iJ,~~II, • .Jxi.e C, A:"1.J.'"I!JJlA', HJIIIIOn1ulI..
f ib~rtt...,'I.' eit.'s... que. ~~I.'id~.«, Ubi ~tùm St..o noMine cO.II~ndo : .'"I.JII CURI p"'-'Pt~r~J
Mih! est p ..obJtus,
q:.'od est in p~trom.'M SUUM officia ~t fid~ singu!Jri,
t:"11
e-ti.J,f.1 i,r1 .,~ ipsulf .'JJJ!:t"'/'!,J },)llj~"j1 CQrltt.flit llil'~i.ql.'e Il::1estissil1is t~mpL"ribt.'s i t.3
fid~liter beniuolequ~ prJ~sto fuit ut si .1. ~~ • .Jnufli55uS ess~t, It~que p~te J te
ai ~t.I'':t HJli'llO,"!i&'. ~t i,,, poltroni eia5 .~~goiic si~ t!J~d,t'~ lit eius pr:Jtt.f,t'J,tore,f,1
q~~m tibi commende et :p5~~ sue nomin~ dil1g4S hJbea.squ~ in nUNero tuoruN,
130 -
,"ro ~,
C"~·c,,
XX,
57
O~ !JbtfJS aut~M quisquis ~st! proc:....JtO...1S ,'70,'11,'7e
JPpell~tf.'r.'
non qt.t:..,' a.r,r~~s 'Sint t.'i Jpp~ll~r'lt!.Jr pr~c:.'r.1tore5 ql.'i '?~5J"Otl ,"osto"i
lliquid gerJf1t,
s~d in 17J( .. ~ ;:og.'"IitJ se.'"ItentiJ ir.t~,~dicti uerbJ s;.;btJfJt~..
~xqt.li ri J)r,,'l'~i.J .":1.'1t.'~rt.t,r: t .
-
316 -
131 -
ibid"
"10/7
JJiJ
rJtio iaris in hoc lJ~n~r~ dt.'lIIt.fXJ&., t.'trlJ,'1I III~ tUt.IS prOL"t.'fJtor
d~i~t~rit, is qui J~qiti.~ proturJtor dicitt.'r, o.ni~. reru. ~ius q~i in ItJJiJ
nOf~ sit Jbsitu~ reipubJù.f~ CJIJSJ, qUHi qlJidJfII pun~ dOl/li.'1us,
ln -
6, Le Bras, L'~vo1utiol1 g~n~rJ1e du proct.'rJtet.'r en droit rO.Jin d~5 orilJin~5 JI.'
IlliNe si~c1~,
'
133 -
D'où l'expression de procurator olllniulII rerue admise par J ,H, 'lichel, "Quelques
observations sur l'évolution du proclJrJtor en droit rouin" Ù~ [tud~s ollert~s J
J, 1103cqueron, p, &18,
134 -
Pro L, fl.fC, , XXXV, 88 : ln Lurconis libertufli iudiciuM ~x edicto d~dit ; lIostis
est Lureo. Ql1id igitlJr ? llO.i.'lu, grJtiosorulI splemüdorunqu~ libertis ,iuit .4sÏJ
trJdend4 ? an si.ult.ft~s n~scio qlJJS ClJlI 1ib~rtis uestri$ flJcclJS ~x~rcet ?
13Abis -
J,H, "ichel, op, cit"
p, &19,
135 -
fJM, , XIII, 39,
136 -
Cl, Nicolet, L 'ordr~ ~q~~str~ J 1 '~poqu~ r~plJblitJine, T,l"
p, 428,
137 -
Cette exclusion pourrait être contredite par cette lettre de Cicéron à Atticus,
en liai 44, .4H"
XIV, 16, 1 : '" Con:u~nd~ns .lb hortis tiuuiJnis in phJs,ûUII
~picoplJll hl5 d~di litJ~rJs, CUl~ PiliJ~ nostru ui11JII Jd LucrinulI, lJi1icos,
prott.'r.ftor~s trJdidiss~nt,
137bis -
H,G. PflaulII, L~s protf.'rJt~lJrs ~questr~s SOI.'S le HJ/Jt-[Mpir~, pp, 9-15,
138 -
GI. lr, 1 l, l, 13 : IIccensu$ sit eo nUllero quo eu. IIJJlJres Mstri eS5~
t.'01lJ~runt, qui hoc non b~n~ficii 10co s~d in 1Jboris JC Sluneris non tem~re nisi
Jibertis suis deter~bJnt.
138bis -
Ch, Oareeberg - E. Saglio, {lictionnJire des .4ntiquit~5 gr~cqlJ~s ~t rO'~'Jines, p,
16,
139 -
f .f#l"
XI 111 64, l,
139bis -
COlllle nous le lIIontre singulièrelllent le cas de Statius, ,. tr"
l, 2, 3,
140 -
{le trl.'.~nt"
UVI, 154 : lIenio nunc .f1 epistl11J#I rifurchidi, lib~rti istius et
Jccensi ; d~ qui cu. dù~ro, t",'iutl llOC crill~n detl1l1.MulI perorJro, HJ~L' epist~11J
est,
iudices quoi" nos S,vrJcf.'sis in Jedibu5 IIp,"oni ~"IJII litteru, tonquirereflllJ'S
inuenilJus,
l1iss.f
est,
ut
ipsJ
sigl'JilicJ(
ex itinu~,
Cl1i'
jll!rres
1.f1l de
prouinciJ lil!c~ssis5et, riflJfthidi lIanu suipiJ.
l~etit4, [pistulJ Ti.flJrdli1i,
.TiAlJrthid~5 lI~rris Juensus
IIpronio
sJluteli
dicit,
1JII
l'10t
q~lider.
."Ion
repreh~n10,
quod Jdstr ibi t
'Ja~n5us', eur ~ni,tI 'Sihi hlJL" s~r:J)J~ soli sUIII,mt,
"L, Pipirius scribJ~ ?
141 -
t'ne intillité nouée surtout autour de leurs appétits sensuels cOluums, et des
aêllles tendance, ,poliatrices, Ol! PrJl!t, Siei1., LIV, 13A.
JJ2 -
ibId"
LIV, 1:3.5 : '"
O.nil1m JdlJ~rsJrios .. o,Miul/,' ini.f!icos dilIgentN cognoscere,
co!loqui, JttentJre ; I!~' utr.fql1l! p.frt~ eJUSJ5, ~~l~~t.ftes per5p!Cer~. fJc111tJtes
et COpidS / quibus 0P/15 ~55~t I}~tu. oflet're/ qt.(ibf.i5 e/'r.pedir~t 5P~"': ~"'5te.~d~,f'~ "
JCtuSJtorlJM ~t qUJdrupl.ftorl1m quicquid erJt, l'1.fb~bJt in pOt~5t4t~ : quod tlJiq~~
n~goti conflJre t.'Ol~b.ft, fTu1l0 1.fbor~ f.fCi~bJt: iStJ~'5 OlMIJ d~tretJ. Jlllpe,"iJ,
Jitt~rJs peritis5im~ ~t cJllidissime lJenditJbJt.
-
317 -
1.42blS -
Ch,
l)arellberg - E. Saglio, op, tit"
p. 16,
1.43 -
F4111"
Y, 20, 2.
l''A -
ibid"
Y, 20, 1.
I....bis -
6, Boulvert, DOMestique et fonctionn4ir~ sous le Haut-EMpire, p, 16A,
us -
De frullent"
LXXVIII, 182 : Et in ,~.JC 'JUS4 scribaruil ordinem in Ile contitabit
Hortensius,
U6 -
ibid"
Quid ego uetera repet4AJ .Iut ql./id ~orutll scrit)4rUIl lJ~ntion~1I facta., quos
constit
SJ.'1ctissi.05
hOllines
Jtque
innocentis5iNos
fuisse
?
Non
Me
fugit,iudùes, lieterJ exe.plJ pro fidis fJbuJis iall 4udiri 4tque h4beri " ifl
his tlNlporibus uersabor lIiseris Je perditis, Nuper, Hortensf, qUJest",r fuisii.
Qllid tui saibie fecel'int, t!J pot~s dùu~ " ego de Meis ,?OC dico, CUIII in eade.
ista
Si,ili4
pro
fru.l~nto peCUniJM
ciuita tibus
soluerelll
et
.ecuil
duos
frugaJissillos hOllÙ1eg scribJS haberell, L, Ifaililiull et L, SergiuII, non 1I0do ist45
dws quinquagesiMJS, SM ollnino ntJIIlIlJII nulluA' cuiquall esse deduduII,
1.47 -
ibid., LXIX, 1~1 : "' ./i"'n solulil filio, Yerres, ~rI"" etiJlI rei publicae fecisti
iniuriall,
Susceperas eniM liberos Mn SOIUN tibi,
sed etiall pJtrile, qui non
.ado tibi uoluptJti sed ~ti4.. qui 4lùjvJ4ndo ust.ii r~i publfc4e esse possent, EJ)s
instituere 4tque erudire ad lIaiorulI institut4, ad ,iuitatis disciplina", non ad
tUl flagitia neque ad tuas turpitudines debt.'Îsti,
1.48 -
H.I, "arrou, Histoire Ik l'~ducation éal1S l'~ntiqt..it~ T,
Il I~ "onde rOMlin,
p, 18.
1.49 -
L'étendue de cette patriJ potest.u est abordée par L, V. Doucet-Bon, L~ tIIuiJ!1~~
dans les ciYilisJtions Jnciennes, p, ISA,
ISO -
op, cit"
p, 20,
IS1 -
l, 1 :
an est, IIi Cicer"', quod ego • .JIi., qua" te qU4M éoctissiAJtJ.. esse ?
Certains auteurs ont d'ailleurs analysé le contenu de cette vocation, C'est le
cas singulièreaent de ".
Testard,
"le fi 1s de Cicéron, destina ta i re du De
officiis ' in e,R,6.B"
1962, p, 19A,
1.s2 -
Q. Ir"~ III, 3, .. ,
lS3 -
Th, ftoaasen, Histoire rOlfiine,
l, YI, p, 71,
IS.4 -
Att"
IY, 15, 10 : Oionysiu. ueliM saluere iube4s et ~UII roges ut t~ h"'rt~tur
qua priMuII wniu, ut pouit cic~roneM '~UII ,tqtJ~ t!ti,• •~ ipsl.'lJJ ul.'dir~,
1.,5 -
ibid"
XlII,
2 b :
DùJnysilJS noster gr4uftt!r qtJt!ritUf,
et
tue,? iur~, J
dis(ip"lis abesse t411 diu : multis uerbis s(rip.i~;ld~, cr~do Item Jé te,
1.s6 -
ib id"
YIl, 2.
:~.t
1.,7 -
Part, orat, l, 2 ; toujours, par le biais du/
réponse'5 ". Sic eni. et ego te .ainisse inl'. .
,~
158 -
lUt., YIll, 4, 1 : '"
Cui qui noster M'
,eteros conteMPti (UiUSa4" .?Olliflis cOIJJMeth;,~1i .
-
318 -
159 -
ibid"
VIII, 10 ; Oi~~ysius CUM .Id Ne prJeter ~pini~ne. MeJN uenisset, i~cutus
sut! CU" eo iiberdiissille " tellp~rd e,r posui, rog.Jui ut dùeret quid hdberet in
J~i.~ ; me nihi! .Jb ipso inuito contendere, Respondit se quod in nu."is hJberet
nesàre q!.,'o lui esset : dUOS n~n soluue, dliorull diem .'10ndUM esse, Oixit
etidll Ji id qUJedJIf de suuulis 5/1is qu.J re nobistu. esse non p()sset,
Horea
gessi ; di~isi d ~e ut mJgistrum ciceronu. n~n !ubenter, ut ho.ine. ingrdtuM non
inui tus,
1~l) -
ibid"
VII, 2, e : ChrYSipptJM uero, queM eg~ propter lit teruluulI nescio quid
libenter uidi in honore h.Jbui, discedere d puero instiente Ile ! Hitto dliJ qUJe
dudio lIultd, mitto furtd : fugdll non fer~, qu.J lIihi nihi1 UiS/lM est scelerdtius,
1~1 -
l~lbis -
J, Scheidt, op, cit"
l', A6.
1~2 -
Il ne l'est pu ltoins, si l'on en croit Quint.,
lins!,
Ordt"
III,
12
on
brise plus qu'on ne redres5e ce qui a durci de travers,
163 -
Pr~ Se,r, irosc. timlU, , XLVI, 133-13A : FJ..ili.J1I uero qUdntdll et q/lu I.'Jriis CU"
utiflCiis
ilJbe4t,
quid eg~ dieJII
? lIiHo huce
utes
uu1gdres,
eoquos,
pistores,
1edÙJrù's " J,'1Î1li et .Juriull C.JUSJ tot hOMines hdbet, ut cotMid/10
an!t.' .'Jan.'//} et
.'1erUOrUM et
tibidrt.'"
noctumisque
cont.'ù.'iis
t~tJ tJici.'litu
personet,
163bis -
!{}eoll"
XLII, 150.
16.\\ -
!Je ln',fle.d,
LXXVI, 176
TillucMdes dute.,
tolu.en fdllil ide uestrJe., prersi t
{duces delensionis tUde, cui sillul et 1'()1cdtio pl!cuniJ .1 ciuitJte nUllerd!d,
165 -
I}.
fr"
Il l, l, 1 : [go e,r IIdgnis Ciloribus,
(non eniM .eMinilRus ,tldiores'! ln
.4rpi.'1Jti 5!.'&PIIJ c/,'/I .Jmoenit.Jte fJ:.'tIinis Ile refed
ludoruM diebus,
Pl1iliJti/1O
tribulibvs eONlRendJtis,
166 -
ibid"
I, 2, 1 : Stdtius dd Me uenit .J.d. flill-A', Nouellbr. [jus .Jduentus, qliod
itd scripsisti direptu~ iri te d tuis du. is db~sset, .oiestus Mihi fUIt.
167 -
A l'instar de Cicéron,
QUintus devait
tenir i
ses propriétés.
E,
l~uelennec
'Cicéron dans ses villas' in Hus~~ Belge, XXXIV, 1930, pp, 99-1013,
168 -
.4tt., V, 20. g
R~de~ 4d IIrbtlnJ qutfe egl) diu ignor..!ns e,," tufs i~h."t.tndjssillj'S
litte.~is d,d, Y••fJl, l.Jnudfi.Js deniqu~ cognoui, [dS djljg~ntissifle Philo~~erl~s,
libertus tws,
wrduit pulong.J ~t non 5dtiS tutd uù perl~rendJs, llJ.1f quJS
L.ie.?i puens scribis d.it.is non .iCC~plU.JM.
169 -
ibid., 1\\l, 1l, 2
[go ~ecu. prd~t~r DionysiuM edUxi n~.ineM nec Me/uo td~en rie
Mihi sermo desit
.ib isto m.Jgnopere d~1~ctor.
170 -
ibid.,
l'J, 4a,
1 ; Et ueli• •ihi,
,ittu d~ tuis 1ibrdrio1is dL/OS dUqliOS,
quibus ryrJ,'1.'lio vtJtur gluti.'1.1toribu5.
171 -
f)~ Con, Cl!"
L, 102 : C~thegus duteN pu nuntios fdtlilidtl Jtqu~ !ib~rtos 5!.'OS,
le.-&os et nerci!dtoS..
ordbdt f.r1 duduidll,
ut ~v~ge fdcto c:.'.~· t~lis ad s~s~
i n!'u~p~r~nt 1
172 -
ibid"
f}t,.w ,lJuc
itl senltu dguntur et dUIi legdtis 411obroguN ~! r.
{/oltureio,
conprobd!O,. ~orull indicilJ, p"d~Mid decununtur, liberti et pJud IfX c1i~tltlbu5
-
319 -
L~ntuli diuarsis itin~ribus ~ifjc~s atqu~ s~ruitiJ in ~icis ad ~um eripiunduM
sollicitabant,
173 -
ibid"
LIX,
121
; C. Il.MlilJM in d~,dra, Fusul.MUII quemiall in sinistra part~
curare iube! : ips~ (~, lioertis et colonis propt~r aquilam adsistit, quam b~llo
ci.brico C, l1arius in ~x~reitu habuisse dicebatur,
174 -
Pro P,
Sul"
XIX,
&& :
la, si Îll puandJ lJ,'IiliJ nulJ4 suspùio ~st, quis
pra~fuerit nihil ad r~m p~rtinet ; s~d tam~n .un~r~ s~ruili ille obtulit 5~ .Id
fura"'~nt4 prospùie,wa, pra~fuit u~ro nUlllql.'am,
~Jque r~s OlMi telllpor~ p~r
Be 1lUM) Fausti libertu~! ad.inistrata est,
17& -
Nous essaierons d'insister sur cet aspect de la question, dans notre prochain
chapi tre,
17&bis -
Co••e Héraclius, cet hoa.e dont parle Cicéron, Oe Praet, SiciJ, , XIV, 35,
176 -
Ainsi,
l'avocat Cicéron dont h
fonction ne peraettait aucune rétlunération,
hérita de beaucoup de ses clients. Tour! tour, Précius : ~tt"
VI, 9, 2 : H4fle
quae
lJeMrcule
"ihi
Magna
doJori
~st,
-
di1~xi eni" ho"in~1I -, procura
qUJn!IJJ4eullque
es(
Precidnall
hu~ditat~1I
prorsus
ill~
{/"hilo!iMus}
.'Ie
attingat,'
Titus
Pinnu!
:Fall.,
XIII,
61
II~
s~elJndu"
llered~.
i ns!i tueri t '"
cet anonyae ; Il Philip"
XVI, 40 : Ego ~niN a.pliI.'5 sestertiulf
dUClmtùns
uc~ptlA h~redi tatibus
ret tuli,
quallqua.
Ùl
,"oc
!l~n~re
l J teor
.'elidore., esse te : Ile n~lIo nisi aJlùus fecit herede. - lui lé'3uèrent des
quantités de biens, aussi varlés les uns que les autres.
177 -
178 -
.4tt"
XIII, 14, 1 : Brùmi libertus, coneres noster, scripsit .Id .~'e :.,'elle, si
lIiM pJacuet , col1eredes Se et Sabinulf IUbiuN .Id II~ uenir~. Id ego pJane nol0 "
ller~ditas tanti non est. Et tallen obi~ ,Juctionis di~. faci/~ poterunt {est eni.
il! Id.,1 si ,,~ in TuscuJa/W postridie Nl).~,f5 IJJn~ (onl.'~n~rint, ;;I.'od si IJxius
uolent prof~rr~ di~II, pot~runt u~l biduuII u~l triduuII uel ut uidebi!ur : .'1ihil
eni. i.'1!~r~s!, Quar~ "isi ia. profecti sun!, retin~bis homines,
179 -
Pro ~, Caec., VI, 17 : Caesennfa .'undull poss~dit Jocau1tql.'e , .~eque ita .91u1to
post Il. C4ecina~ nupsit. tlt in p,Juca confera., testallenta fado 1I/1lier !loritur,
Fadt h~N~dell ex deunce et selluflcù CJ~cinalJ, ex duabus S~xtl.l!iS l't, FI.'1 C1.'111.'11,
1ib~rtull
sup~riaris
uiri
:
lJ~bl.'tio s~,rtuJall 4spergit,
Hanc
sextl.'lJ/1i
i11a
lJ~r(ed~. 1sti ~sse uoJuit assiduitatis et molestiae si q~aM c~perat,
180 -
Oe Pl'Jet, llrb, , XLVIl, 123-124 : P, Trebortius uiros bonos et ,~Oi?estos tOtlpltN'U
ftcii h~r~des " in iis fteit SUUII 1ibtrtulI, 15 /J,
rreboniull fratrelN /ubuerJt
pros(riptum, Ei CU" cautuM uellet, scripsit ut heredes iurJr~i?t s~ cura/uros ~!
~x sua tl..'li.'sque par te nt .•inus diNidil.'N ad .4.
Treboniufl1
illi.'.\\' prQSU iptulf
peruerlf.ret,
Libertus
iurat
"
c~teri .~ered~s 4deIJlIt ad {le.~rem,
docent
Mn
oport~re se id iu"r~ faduros ~ss~ quod contra legell Cor.~eliJlI esse$. quu
prosaiptu.,,· iUl.'ari iJetar~t ,. i"p~trant ut ne 1IHe.'lt ,. da! Ms,
Id t!go .'10.'1
reprehe/ldt' " ~t~lIi" UJt iniqulJfJI ilOllirli prosaipto eg~nii de frJternIS bonis
qui(q:.~1J d4rl, Libertus, nisi ~~. testaMento pJtroni iura5se!, SC~jf.'5 St! fJeturulJ
ubitra/)atur,
/taque el Ilerr~s pos5ession~M hereditatis i?t!gat 5= da/an/N, ne
posset p3tronull SUI.'. p.~oscriptiJ" il.'u.ue,
sillul ilt esset poe.'1a qi.'od J1tenu5
patroni testamenta ob!eMp~rasset,
181 -
ibid"
XLVII, 123 : Superbia u~ro qua~ fuerit quis ignor4t J qiJe~ Jd ~odu~ iste
t~n!JissiIlUII ql.'e.ql./~ eont~lIp5~ri t, despexer i i, libu!.'11 esse n!.'lIqt.'a,~ di.'x~n t :,1
-
320 -
192 -
Pl'I) Se),', Rose, ~IIIIU"
\\/111, 21-22 : H.!ec ollni.!, iudices, illprudente L, Sull.!
f.!ct.! esse certo scio, Neque enim mirum, CUII eodem te~pore et e.! qu.!e pr.!eterit.!
sunt rep.!ret et eJ qu.!e liidentur inst.!re pr.!epJret"
CUII et puis cMstitl.'endJe
rJtioneM et belli gerendi potestJte,fl solus /l.!be.!t, Ctitl omnes in unull spedent,
u,tws ollni.! gubernet,
CUtl tot
t.!ntisque negotiis disten/us sit,
(Jt l'espùue
libere
non possit,..
si
Jliq(Jid .'10,'7 .!niIlJduert.!t,
cu. pl'.!esutim
iJIII lIulti
oaupJtionelil
eù.ls
obser(Jent
teAipusque
.!UCUPIMiul',
ut,
sillul
aique
ille
despe,'(erii, .!liql.'id l1ui:Jsce Mdi Mol i.!ntul' ,
193 -
{)e PI'.!ei, Sicil, , X-XI, 28: SI",
ftmocentes existituri UOIUIIUS, .'71),'1 solua
nos, sed etùiI nostros comites prJest.!re debellus, l'l'iliUM OMniu.' opel'.! dJndJ est
ut eos nobisciJA' educJflws qui ,'7ostr.!e f.!/lJe cJpitique consul.!nt,
194 -
De {ruMent, XXXV, 91 : LI.'7US JdhlH fuit post RI)/UII conditJII {di illllort.!les fUÙ1t
ne sit alter .1) cui l'es public.! tl)t.!11 se tr.!deret tetlporibus et Il.!lis co.!d.!
do~sticis, L,Sul!J, Hic t.!ntuII/ potuit ut nell/o illo inuito nec bon.! ne~ p.!tri.!11
nec ui t.!tI
retinere passel ;
t.!.'lluli .!nitli h.!bui t
Id JUddt1U ut dùere t'n
contione non dubi tJret,
bonJ ciuiu. ROIlJnOrUII CUII uenderet,
se prded811 SUJ.
lJIMdere,
1% -
,Pro Sex, ,/fOSt, ,4lJ1er"
Il, b,
196 -
ibid, 1
BO.'7d pdtris
huiusce Sex,
RoscJ
I,lude
sunt
se.'(.!giens.,
qUJe de uiro
{l)rti55illo et c1drissùto L, SuiJJ,
quell honoris C.!(JSI nOllino, duobus lIilibus
nUHfJII sese dicil
~Alisse .!dl.'les~·ens uel pote,'7tissi,fluS hoc
tefllpore
,'7oslrJe
ciuit.!tis., L. CI)rr.elius Cllrysogonus,
196bis -
Pro Sex. Rosc, Hlller"
XXXVII, lQ7.
197 -
ibid"
IX,
26
Cu,
ille
confirll.!ret
sese
nOllen Sex,
Rl)sci
de
tJbulis
eXellpturullI, prJediJ tlJeUJ li li1) IrJdi II.'rlit...
cullque id it.! futurl.',f} T, '/fOSciU5
C.!pito qui in dece" legalis erJI approllitteret, crediduunt.
\\l3B -
ibid"
!lI,
7
l'l'iliUM J
Cllr,l'so!,lono petJ..' ut pec!Jnia
{orllmisque
nost,"ù
conte,'7tus si t,
s.!.'7gui,'7e.'I e! Iii JJII ,'7e petd! .: deinde a uobis,
iudices,
Il!
Juthci.!11 sceüri
resis!JUs,
i,'lnocent iu.. CÛ.!lIi tJ tell leuetis et in CdUSJ Se.~·,
I?osà perùululII qlNd in OAmes intendi!ur propulsetis,
199 -
Cet espace séparant la date du Pro S~x. Rose, I-/ller., de l'affaire de Verrés
aO-70 av, J,-C.
189bis -
De Froles. Sieil, XXVIII-XXXI, 68-76.
190 -
191 -
PJrt,
OrJ!, 1
HIV,
86
Bonorum
Ju!em
PJrlill
necessJriJ
S~'7t!
ut
!JitJ ..
pudicitiJ,
liberlJS.
ti!
liben,
coniuges,
genuni,
pol rentes,
pJrtitf
.'70,'7
neeessJriJ.
191bis -
Toute
unl0n
n'~tant
assl.l1~e
qu'à
un
contuberniu~.
Llre
entre
autres,
B,
B"ulverl, [}omest!~'(Je et h'.'1ctio.'1f1J!!'e so(J~ !;;, Haut-El/pue l?ol/l.!!n p. 259.
192 -
Le'l c.,.é.;lle'l de Plaute ont cette p"rtée un peu dlthyrublque, tlles lalssent
circuler une sorte ,je l'ItJrale contre certunes iniquités de l'"rdre Habl i, en
.ontrant publ iquelllent leur c,Hé bur leSl~ue.
C'est le cas du C'!s!nJ où falsant
parler
deux
propriétaires
d'esclaves,
Plaute
fait
lettre
en
lumière,
11
nécesslté de la procréatlon pour deu:( de leuf1 esclaves, en n'lntrodulsant
-
321 -
aucune restriction terMinologique, V, 255-257 : ~~p~r 4ncillJ CJsinJ : ut d~tur
~~ptu~ n~stro uilico : s~ru~ frugi, Jtqu~ ubi illi bene sit ligno, JqUJ cJlida,
~'~5ii.~I~ntis/ ubique ed/.'tJt pU~rlJ5 qU05 pJriJt,
193 -
Cette thèse est assez bien développée par E, Volterra, ALa conception du eariage
! ROlle" if, ,~,I,IJ,.4" 2, 1955, p, 373,
194 -
LJ cité Jntiqu~, p, 50,
19~ -
~(!I Hist, Ro~"
Xi? 226,
197 -
H, leœonnier, "''P, eIt"
p, leS,
199 -
D'autres juristes de l'époque conte~poraine, parlent volontiers de conubiuM: F,
de Vischer, "Conubiul et ciuitas" i~ R,I,O,A"
1952, pp, 401-422 - ou encore de
iustu.flIJJtri.œ'onif.'II: J, Gaudeltet, "iustull aatriloniuauin R,I,O,A"
pp, 309-366,
199 -
,4ft"
VI, 7, 2
~ihil enill illo adulescente c4stius
200 -
Pro !3ex, Rosc. Ailler"
il, 6 : '"
~lIIi55e Jdul~sc~n5,
201 -
Plut"
CÙ-, , XLVIII, 2,
202 -
lUt"
VII, 7, 7 : ",Aiexùt '"
nisi fort~ dUII ego .iJ)5[)11} Jdul~5c~n5,
203 -
la déltonstrati'in en a été fute par J, Gaude.et, op, cii"
p, 310, E. V'ilterra,
"Quelques observations sur le marIage des filii fallilias" in R, l,D,A,. 1948, po.
213-214 ,
204 -
"Les operae libertin, Contribution! l'étude des droits du patronat, P, 23b,
20~ -
Pro S~5 t"
LI 11 111},
-
322 -
Chapitre II
L'affranchissement,
une perpétuation de l"infériorité
-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-
Que
l'affranchissement
octroie
automatiquement
la
libertas,
c'est-à-dire
la ciuitas,
nul
ne
saurait
le
nier et
le
mettre
en doute,
à
la
fin
de
la
République
romaine
( 1 ) ,
Dans
notre
chapi tre
précédent,
nous
nous
sommes
efforcé
de
le
faire
ressortir,
tout
en
insistant
sur
la
promotion
qu'il
en
résultait
pour
l'ancien esclave
une
promotion matérialisée
par
son
insertion
dans
la
vie
sociale,
comme
l'indique
F.
Lindet
:
«L'esclenrage
n'était
pas
une
condition
indélébile.
L'escla~re pou~rai t
sortir
de
la
ser,ri tude
et
par~renir
à
1 a
liberté.
Son
.m51 i t re
a tra i t
le
drai t
de
l'affranchi r,
de
1 ui
outrri r
ainsi
les
portes
de
la
ci tri 1 e,
et
d'en
faire
une
~réritBble
per-
sonne.V
(2)
Devenu
homme
libre,
doté
d'un
capu-t
par
le
biais
duquel
i l
s'agrégeai t
à
la
ci té,
l'affranchi
rompai t- i l
toute
attache
avec
l ' i nfériori té
qu i
avai t
fai t
l'essentiel
de
son
eKistence
antérieure
?
Un
certain
nombre
d'auteurs
que
nous
avons
consultés,
ont
tenté
d'y
apporter
des
éléments
de
réponse.
D'abord,
H.
Lemonnier:
«Le
terme
d'affranchi
est
emploxé
pour
désigner,
dans
l'histoire
des
sociétés
ant i ques,
l ' escla \\re
1 i béré
de
la
ser~ri tude.
Hais
la
condition
à
laquelle
il
correspond
est
bien
plus complexe
que
ne
l'indiquerait
une
pareille
définition.
En
effet,
s i
elle
n'est
plus
l'esclavage,
elle
n'est
pas
non
-
323 -
plus la.
liberté,
avec
l'acception à
la
fois
simple et large
qu'on attache aujourd'hui
à
ce l11Dt.l1
(3)
ensui te
G.
Fabre,
qui
axe
plutôt
la
situation
réelle
de
l'affranchi,
sur
le
plan
de
ses
rapports
directs
avec
le
patron
:
«Certes,
l'a.ffranchi
est
l'ancien esclave de
son
patron
;
de
ce
fai t,
malgré
toutes les
définitions
juridiques,
les
rapports
nou-
~~aux créés entre le libertus et le ~troDUS
ne peu\\'ent pas ne pas continuer,
au 1110i Ils en
partie,
des habitudes de soumission apprises
et subies sou\\'ent pendant de
longues années.','
(4)
De
ces
deux
auteurs,
i l
ressort
donc
clairement
que
la
Dlanumssio
ne
libère
pas
le
libertus de
son
infériorité.
De
même
elle
le
propulse dans
le
rang des ciues romani,
de
même
elle
laisse
subsister
en
lui.
des
strates
de
sa
candi tian
originelle.
Kais
cette
infériorité,
comment
se
caractérise
t-elle
dans
la
quotidienneté
de
l'affranchi
?
Fait-elle
parfois
du
libertus
sur
le
plan
du
traitement
qui
lui
est
infligé,
un
égal
du
seruus,
ou
existe
t - i l
une
nette
démarcation
entre
eux
?
Si
démarcation
i l
y
a,
est-elle
permanente
et
valable
pour
tous
les
liberti
?
L' humanisme
qui
caractérise
Rome
à
la
fin
de
la
République,
contribue
t - i l
à,
de
temps
en
temps
faire
disparaître
dans
l'esprit
des
Romains
l'existence
en
ces
affranchis
de
leurs
tares,
ou
les
y
f a i t - i l
p e r s i s t e r ?
C'est
à
ce
faisceau
de
questions que nous allons tenter de répondre maintenant.
1 -
L'AFFRAICHI.
UIE ORBRE DU PATRON
===========:========================
Propriétaire
d'esclaves
et
par
voie
de
conséquence
responsable
unique
de
leur
desti n,
le
maî tre
qui
prend
la
324 -
décisi on
de
libérer
une
part ie
de
ses
serviteurs,
devient
à
la
su i te
de
l ' accompl issement
de
la
manumissio,
le
patron.
Logiquement,
une
t e l l e
s i tuat ion
devrait
entraî ner
une
entière
autonomie
de
l'affranchi,
allant
du
droit
d'orienter
sa
vie
et
de
s'occuper
à
tous
les
instants,
à
celui
de
prendre
son
dest in
en
main.
Une
fois
libéré
et
démis
du
poids
écrasant
du
maître,
en
principe,
i l
devrait
revenir
à
l'affranchi
de
prendre
ses
responsabi l i t é s
et
de
ne
plus
forcément
avoir
de
contact
direct
et
obligatoire
avec
son
patron,
l'un
puis
l'autre
étant
hommes
libres.
La
liberté
acquise,
ne
devrait
que
lui
permettre
d'agir
en
égal
vis-à-
vis
de
lui,
de
décider
sans
son
accord
de
la
su i te
de
son
devenir
et
du
sens
à
donner
à
son
existence,
une
simple
relation d'amitié
restant
le
seul
lien entre
eux
(5).
Est-ce
à
cela
que
pense
Quintus dans
une
réponse
à
la
l e t t r e
de son
aîné,
où
celui-ci
lui
apprit
l'affranchissement
de
Tiro?
(6)
Nous
ne
saurions
l'admettre,
en
dépit
d'excellentes
relations
nouées
entre
Tiro
et
l'ensemble
du
milieu
cicéronien,
relations
fondées
sur
les
éminentes
qualités
du
libertus.
D'ailleurs,
même
les
bons
esclaves,
n ' é t a i e n t - i l s
pas placés au
rang d'amis?
(7)
Hommes
libres
tous
les
deux,
l'affranchi
et
son
patron
jouissent
presque
des
mêmes
agréments
de
la
ci toyenneté
et
en
récol tent
les
frui ts.
Classés
dans
la
sphère
des
détenteurs
de
la
libertas et
donc
des
privilégiés
du
système
de
la
Respublica,
i l s n'en
restent
pas
moins
séparés par une
cloison
étanche.
di fficilement
perméable
et
accessi ble,
où
chacun
d'entre
eux,
occupe
une
position
répondant
à
son
rang.
Placé
sous
les ordres du
maître
durant
la seruitus,
soumis à
son
entière
uoluntas,
façonné
en
fonction
de
ses
impératifs,
l ' esc lave
ne
s'en
1 ibère
pas
comme
par enchantement.
La
pré-
sence
du
patron,
ancien
maître,
persiste,
garde
une
certaine
intensité
et
se
mue
en
une
forme
de
domination,
mais
qui
n'ose
pas
dire
son
nom.
Pour
la
décrypter
e t
la
local iser,
-
325 -
nous
orienterons nos
inT,restigations
vers
les
t r i a
nomina
et
l'imperium patroni.
1 -
Les Tria nomina
L' observat ion
des
t r i a
nolllina
est
d'un
intérêt
part icu l i e r
dans
la
connaissance
d'un
individu.
En
effet,
non
seulement
elle
présente
l'avantage
de
mieux
le
si tuer
par
rapport
aux
autres,
mais
également
elle
apparaî t
comme
un
miroir
per-
mettant
de
mieux saisir son rang dans
la société.
Expression
de
l ' identi té
( 8 ) .
les
t r i a
nomina
sont
ai nsi
une
source
i nest imable
d' i nformat i ons,
copieusement
enrichissante
pour
quiconque veut s'y apesantir.
L'ordre
intimé
selon
Horace,
par
L.
Karcius
Philippus,
à
Demétrius,
consistant
à
aller
au-devant
de
Vol teius
Mena,
étrange par ses manières,
s'explique aisément.
«/ictif,
énergique,
illustre
élU
bélrreélu,
Phi 1 ippus,
ses
de~'oirs rempl is,
re t'enai t
un
jour vers la huitième heure et se plaigndit,
étant
déjil
~rieux,
que
lél
distance
fût
bien
grande
du
forum
élUX
C.arèmes.
Lorsqu' i l
aperçut,
dit-on,
à
l'ombre,
délns la
boutique
déserte
d'un bélrbier,
un homme rasé de
frais
qui,
paisiblement
se
faisait
lui-même
les
ongles
a~rec
un
petit
couteau
Il Dé mé tri us
(c'était
un escla~'e qui
n'était point gauche
pour exécuter les
ordres
de
Philippus),
t'a,
informe-toi
et
ret,iens me dire quelle est
la
patrie
de
cet
hOI11111e,
son
nom,
sa
si tua tian,
son père ou son patron".t.
(9)
Il
ne
peut
donc
en
ëtre
autrement
pour
les
t r i a
nomina
de
l'affranchl,
d'autant
plus
qu'ils
présentent
une
spécifi-
c i t é :
celle de s'aligner sur la personnalité du
patron.
-
32'S -
a) Le prénom et le gentilice
Premier élément
inscrit dans
l'onomastique en tant
qu'indice
. d'individualisation
de
celui
qui
le
porte
(10),
le
prénom
occupe une place spéciale dans
les tria noDd na ,
formant avec
le
gentilice,
un
couple
indissociable.
H.L.
Axtell,
note
d'ailleurs les raisons de cette indissociabilité :
«Tbe
cbief
purposes
of
this
form
are
to
identify
the
person
named
with
sufficient
compi eteness,
and
ta
add
honor
or
digni ty
officialiy or for~ilyv (11)
Al ignés,
le
prénom
et
le
gent i lice
de
l'affranchi,
le
sont
sur
ceux
du
patron.
Nous
le
constatons
à
travers
les
noms
que
nous
propose
la
documentation
cicéronienne
(12).
Cepen-
dant,
cette
pratique
n'est
pas
une
règle
absolue.
Des
patrons
à
leur
convenance,
pouvaient
en
toute
quiétude,
donner à
leurs liberti,
des prénoms et des gentilices autres
que
les
leurs
ceux
de
leurs amis
par
exemple,
comme
nous
le
suggère
cette
lettre de Cicéron à
Atticus
portant
essen-
tiellement sur Dionysius et Eutychidès :
«Je
suis
heureux
de
ce
que
tu
me
dis
d'Eutychidès qui,
unissant ton ancien prènom
il
ton
naut'eau
nom sr appel 1 era
T.
Céci 1 i us
;
de
même
que
Dionysius
est
detrenu
unissant
mon nom au
tien,
N.
Pomponius»
(13)
Une
exception comme
celle-là,
pratiquée
assez
rarement
(14).
laisse
malgré
tout
clairement
établi,
un
fai t
d'évidence
les
prénoms
et
les
gentilices des affranchis,
ne
relevaient
pas
de
leur
propre
choix,
mais
plutôt
émanaient
de
la
volonté des patroni,
qui
parmi
tous,
préféraient
imposer
les
leurs
(15).
Faut-il
y
voir
un
fait
anodin,
sans
valeur
réelle,
mais
tout
de
même
usi té
pour
évi ter
d'être
margi-
nalisé,
ou
plutôt
la
recherche
d'un
certain
prestige,
tel
-
327 -
qu'il
apparaît
dans
cette
recommandation
que
nous
a
laissée
Horace ?
{{Si,
quelque
,jour,
une
affaire
grande
ou
peti te
est
débattue
au
forum,
et
qu'un
des
deux
plaideurs
vi ~re
riche
et
sans
enfants,
h0111111e
d'ai 11 eurs
malhonnête
et
capa bl e
d'appeler i111pude~nt en justice celui qui a
le
bon
droit,
fais-toi
son
défenseur
méprise
le
citoyen
dont
la
réputation
et
la
cause
sont
supérieures,
s ' i l
a
chez
lui
un
fils,
ou
une
épouse
qui
peut
être
mère.
"Quintus"
dira
t-on,
par
exemple,
ou
"Publius
(un prénom qui réjouit les oreilles
sensibles"»
(16)
Cicéron
n' y
répond
pas.
Il
garde
un
parfait
silence
sur
les
raisons
du
maintien
dans
l'onomastique
de
l'affranchi.
du
prénom
et
du
gentilice
patronaux,
suivant
ainsi
dans
cette
même
voie,
l'attitude
de
ses
contemporains,
parmi
lesquels,
Salluste
et
César
essentiellement.
Nul
n'aborde
cette
question
importante
tant
soi
peu,
de
la
mentalité
romaine.
Pourtant,
et
nous
l'avons
bien
vu,
l'Arpinate
en
apprenant
le
transfert
de
son
prénom
à
Dionysius,
ne
cache
pas
sa
satisfaction.
Le
terme
gra:tuD
qu'il
emploie,
est
expl ici te
quant
à
la
dimension
de
cette
joie.
Nous
ne
pensons
pas
que
cette
congratulation
ait
répondu
à
un simple
souci
de
faire
plaisir
à
son
ami,
pour
apprécier
la
droiture
de
son
acte.
Si
cette
appréciation
n'apparaît
qu'en
filigrane.
elle
n'en
demeure
pas
moins
la
raison
essentielle,
surtout
pour
un
acte
assurément
aussi
courant
dans
la
vie
romai ne
et
donc,
entré
dans
les
moeurs.
Il
faut
donc
voir
dans
une
autre
direction,
celle
que
nous
propose
l'Arpinate
lui-même
et
dans
laque lle
i l
expl ique
en
quelque
sorte
à
At t icus.
les
tenants
de
son
bonheur,
surtout
vis-à-vis
de
ce
qui
a
été
fait
pour
Eutychidès :
-
328 -
«Et
j e
suis,
pour
le
coup.
extrêmement
heureux
qu'Eutychidès
ait
pu
appréci.er
ce
qu'était
ton
amitié
pour
I!1Oi,
et
apprendre
que
la
sym~thie
qu'il
m'a
toujours
témoignée
dans
mon
affliction
n'est
pas
restée
alors
ignorée
de
moi,
ni,
depuis,
sans retour),1
(17)
Le
transfert
du
seul
prénom à
Eutychidès
-
et
à
Dionysius -,
au-delà
de
son
caractère
normal,
re\\rêt
donc
la
particularité
d'être
une
forme
de
reconnaissance,
de
gratitude
d'Atticus à
leur
égard,
s'appuyant
sur
l ' a i d e
apportée
par
l'ancien
esclave
à
Cicéron
en
58
lors
de
son
exi l
(lB).
Il
revêt
de
ce
fait
le caractère d'une
sorte
de contre
don
pour
les
bons
et
loyaux
services
rendus
par
Eutychidès
à
cette
époque
particf..1...>"'lièrement
douloureuse
et
déchirante
pour
la
vie
de
Cicéron,
d' une
sorte
de
récompense
pour
son
secours.
Très
sensible
à
l'assistance
du
seruus,
au
moment
où
i l
se
sentait
quasiment
abandonné
et
trahi
par
ses
compatriotes
(19),
ruiné
par
le sort
et
propulsé
au
fond de
l'abîme
de
la
misère,
Cicéron
voi t
dans
le
geste
d' Att icus,
l'ex.pression
d'un
certain
remerciement.
I l
y
trouve
le
moyen
le
plus
indiqué
d'affirmer
à
l'escla\\re,
que
ni
Atticus
ni
lui
n'ont
oublié
ce
q u ' i l
a
fait
pour
eux,
q u ' i l s
gardent
entièrement
présente
à
l ' e s p r i t
la
justesse
de
son
comportement
et
qu'ils
continuent
à
l'apprécier.
La
beniuolentia,
n'est-elle
pas
l ' une
des
caractérist iques
de
1 • humanisme
cicéronien
?
Nous
la
voyons
encore
s'ex.primer
par
cette
missive,
où
l ' Arpi nate
recommande
chaudement
L.
Li vienus
Tryphon
un
affranchi devenu son ami
-
à
C.
Munatius
:
{,;] , ai rae
Trypbon
pour
lui-mê1!1e
i l
m'a,
en
effet,
rendu
les
plus
laquelle
pu
si
e. i sè!r1en t
reconnal'tre
Où
ètl},ient
la
\\rraie
Donté
et
la
loyauté,
Je
1:e
le
recol11!1Jande
CO!!!11!e
cn
doit
reco~~nder
quelqu'un
qui
quand
on
a
de
1 a
reconna i ssance
et
de
1 a
-
329 -
mémoire.
Tu
me
feré1s
un
plaisir
extrême
si
tu
lui
donnes
lieu
de
comprendre
que,
en
s'exposant
à
mai ntes
reprises
pour
1110n
sal ut,
-en nat7 iguant plus d'une
fois au coeur
de
1 'hit7 er,
i l
d ,
en raison
de
l'amitié
que
tv
me
portes,
fai t
de
toi
aussi
son
obl igé.l.t
(20 )
Elle
est
d'autant
plus
méritée
pour
les
deux
liberti
Dionysius
ayant
de
son
côté
réussi
à
bénéficier
de
l'estime
de
Cicéron
malgré
ses
sautes
d'humeur
(21),
qu'elle
j u s t i f i e
leur
maintien
dans
le
giron
des
patroni.
en
même
temps
qu'elle
procure
à
ceux-ci,
le
plaisir
de
se
savoir
toujours
matériellement
présents
dans
leur
vie,
intégrés
dans
leur
existence.
Le
nom,
à
lui
seul,
n ' a v a i t - i l
pas
d'ailleurs la même portée?
{{De
IIJême
qu'il
n'est
pas admissible
que
le
f i l s
porte
Lm
autre
[fentilicluJIl.t.t
note
N. H.
Michel,
({de
même
je
ne
puis
admettre
qu'un
patron ait
le droit
de
donner arbitrairement
à
son
affranchi,
tel
gentl1icium
qu'il
lui
plaît
de
choisir,
c'est
son
propre
gentilicium qu'il
lui
transmet et non pas un
avtre.v
(22)
Au-delà
du
simple
rituel,
i l
y
a
dans
le
patron,
une
tendance
à
ne
pas
perdre
sa
trace,
à
garder
son
image,
a
perpét uer
sa
personnal i té
et
même
à
la
rendre
priori taire
par
rapport
à
celle
de
l'affranchi.
Donner
le
prénom puis
le
nom
à
son
affranchi,
c'est
le
maintenir
toujours
lié,
l'immobiliser
dans
sa
sphère
et
ne
pas
accepter
de
lâcher
l'emprise
sur
lui.
Cela
revient
à
ne
pas
se
dessaisir
de
lui,
à
continuer
à
le
superviser
et
à
l'avoir
entièrement
maintenu
dans
son
orbite.
I l
y
a
donc
là
une
volonté
inébranlable
des
patrons,
à
ne
pas
montrer
aux
~{eu:c
de
l'extérieur
que
l'affranchi
a
rompu
toute
attache
avec
eux,
-
330 -
qu'il
a
pris
le
large
et
que
désormais,
plus
rien
n'existe
entre eux.
Ayant
donné vie à
l'ancien esclave en lui/ouvrant
les portes
de
la
civilisation,
i l s
n'entendent
pas
disparaître
automa-
tiquement
de
son
milieu,
encore
moins
de
son
cadre.
Garder
leur
identité
dédoublée
dans
celle
de
l'affranchi,
c'est
maintenir
fermement
imposée,
leur
manus.
C'est
aussi
créerl'une
des
conditions
susceptible
de
rappeler
leur
passage,
une
sorte
de
doublure
grâce
à
laquelle
tout
homme
ignorant
l'affranchi,
pourrait
l'identifier
sans
difficulté
majeure
et
ainsi
établir un rapide
rapprochement
entre eux.
C'est ce que L.
Halkin résume de la manière suivante:
{(L'affrdnchi
porteJ.i t
deJ.ns
ses
no1'l1S
1 e
sou\\renir
de
son
dncien
état
social . . Cette
appelldtion
correspondait dans
la
réalité,
à
des r,"pports de dépendance.>.>
(23)
Il
s'opère ce
faisant,
une symbiose entre
le
libertus et
son
patronus,
deux
êtres
en soi
totalement
différents,
mais
qui
n'en
font
qu'un,
se
combinent,
s'entrechoquent,
avec
un
relief
particulièrement
aigu
pour
le
patronus.
Le
libertus
qui
ne
devient
dans
ce
cas
qu'un
accompagnateur,
qu'une
ombre,
ne
peut
prétendre à
être
jugé
par
rapport
à
ce qu' il
fait
lui-même,
dans
son autonomie
et
dans
son
entité.
mais
bien par rapport
à
l'idée que
l'opinion a
du
patronus.
Cette
homonymie,
maintient
le
libertus
dans
le
cadre
ou
s'était
bâtie son
existence,
où
il
avait
appris
certaines
régles
de
la
vie civile,
dans
la mesure
où
l'affranchissement
ne réus-
s i t
pas à
l'en sortir
et à
lui
conférer
la plénitude de son
être à
laquelle
i l
aspirait.
Vivant à
travers
le
patronus ou
son
entourage,
où
qu' i l
pût
aller,
il
ne
pouvai t
se
débar-
rasser de
lui,
drainant ainsi
tout
son poids et
son autorité
si
seulement
i l
en
avait
une
La
déclaration
de
Cl.
Nicolet est sans ambages :
-
331
-
« •••
Une
fois
illustré
1 e
nom
transmet
cette
illustration
et
tout
ce
qu'elle
implique
de
droits
et
de
loisirs
aux
des-
cendants
.1.1
(24)
Conscient
de
cette
réalité,
l'affranchi
pouvait
alors
en
profiter pour asseoir même toutes ses exactions.
Le
cas
de
L.
Cornel ius
Chrysogonus,
dont
le
patron
était
Cornel i us
Sylla
et
que
nous
décri t
Cicéron,
nous
permet
de
nous
rendre compte
de
la façon
ignoble dont
un affranchi,
était susceptible de
tirer avantage de son homonymie avec
le
patron,
pour
exercer
une
large
influence
sur
les
popula-
tions :
{{.4
la
fi n,
i l
(25)
8.
conc1 u
i l
s'est
assis.
Je
me
suis 1et,e.
Il
el
p8.ru
respirer
en
voyan t
que
ce
n'étai t
p8.s
un
autre
que
moi
qui
prit
18.
p8.role.
J'ai
commence
à
p8.r1er.
J'ai
re~rqué,
juges,
qu'il
plaisan-
tait,
qu'il
s'occupait
de
tout
autre
cbose
que
de
~
p1aidoierie
jusqu'au
moment
où
j'ai
prononcé
1 e
nom
de
Chrysogonus.
.4
1 el
première
mention
de
ce
nom,
notre
bomme
dresse
aussitôt
la
tête
i l
semble
étonné.
Je
comprends
ce
qui
l'al
piqué
je
nomme
Cbrysogonus
une
seconde,
puis
une
troisième
fois.
Dès
lors,
ce
ne
sont
dans
tous
les
sens qu'allées et
venues précipitées de gens
cbargés,
j e
le
pense,
d'annoncer
Cbrysogonus
qu'il
y
a
dans
l'Etat
un
~"-omme
assez
audacieux pour parler
contrairement
à
58.
t'al on té,
que
la
cause
est
menée
tout
autrement
qu'il
ne
le
pensait,
gue
la
t'ente
des biens est dévoilée,
gue l'asoci8.tion est
fort
ma.1tr8.itee
que
l'on
ne
tient
aucun
compte de son crédit et de sa puissance
. . . »
(26 )
-
332 -
C'est
cette
manifestation
de
puissance
que
nous
retrouvons
également
chez
Q.
Tullius Statius,
cet
affranchi
du
cadet
de
Cicéron
qui
f i t
jaser
par
son
arrogance
en
Asie,
et
dont
l'Arpinate
se
plaint
amèrement
(27).
Une
t e l l e
assimilation
cependant
au
profi t
du
patron,
rend
ce
dernier
responsable
de
tout
ce
que
peut
commettre
l'affranchi
et
tend
à
le
déculpabiliser
et
même) à
le
blanchir.
Le
patron
porte
alors
sur
ses
épaules,
le
lourd
risque
d ' ê t r e
traîné
pour
des
actes
auxquels
i l
ne
participe
pas
de
près,
mais
que
l ' i d e n t i t é
du
prénom
et
du
nom
ne
peut
ne
pas
provoquer
aussi
intensément
que
lorsqu'il
est désigné
personnellement.
b)
La mention du patron
Placée
à
l ' i n t é r i e u r
de
l'onomastique.
la
mention
du
patron,
indiquée
par
le
prénom en abrégé.
mais
devant
être
développé
au
génitif.
est
d'une
valeur
inévitable
et
incontournable
dans
l'identification
d'un
affranchi.
Apparaissant
entre
le
gentilice
et
l'indication
du
statut,.
e l l e
re\\'êt
une
grande
importance.
La
régularité
avec
laquelle
l'Arpinate
y
recourt
par exemple dans cette
réponse à
Quintus
(( lfa.l gré
tout
cela.,
j e
t'a.i
écri t
CO!1L.Te
pu,
et
j'a.i
remis
une
lettre
pour
toi
à
Philogonus
ton
a.ffranchi
ell e
se
sera,
je
pense,
croisée avec la.
tienne.v
(28)
ou
dans celle-ci,
à
Atticus,
qui
l ' i n v i t a i t
pendant
son exil
à
reprendre courage et à
ne
pas se
laisser a f f a i b l i r
Accepi
Idibus
se~ilibus quattuor epistulas
a
te
m1.ssas,
una111 qua
me
obiurgas
et
rogas
ut
si.11l firmior,
altera111 qua
Crassi
libertu.11l
ais
tibi
de
mea
so11icitudine
macieque
narrasse (29)
n'est
pas
gratuite.
Ell e
permet
d' évi ter
le
flou
pou ...ant
naître
dans
l ' e s p r i t
d'un
interlocuteur.
Elle
permet
egô.-
-
333 -
lement
de
fixer
dans
son
subconscient,
son
image
et
son
rang,
de
le
cerner,
de
le
cloisonner
avec
précision.
sans
courir
le
risque
de
le
confondre
avec
quelqu'un
d'autre.
Ai nsi,
elle 'donne
la
possi bi l i t é
de
savoi r
de
qu i
on
parle
et
de
mieux
le
connaî tre.
C'est
donc
essentiellement,
le
rôle
d'informateur
qu'il
joue.
Mais
en
dehors
de
cela.
i l
y
a
autre
chose
de
subséquent,
qu' expl ique
bien
son
caractère
obligatoire,
dans
la
plupart
des
inscriptions
épigraphiques
(30)
la
mise
à
nu
du
contenu
des
liens
entre
l'affranchi
et
le
patron.
1 l
éclaire
le
posi tionnement
de
l'un à
l'égard
de
l'autre,
en
faisant
du
libertus,
un ,second
du
patronus.
Indiqué
en
référence
à
lui,
l'affranchi
n'est
représenté que
comme
un
calque
de
son
patron,
un
protégé,
incapable
de
se
détacher
de
lui.
de
prendre
du
recul
par
rapport
à
lui
et
de
se
déterminer
dans
son
exclusivité.
Une
sorte
de
cordon
ombi l ical
les
tient
étroitement
liés,
ne
permettant
pas
au
l i bertus
de
se
margi nal iser,
tout
au
moi ns
de
s'individualiser.
La
référence
au
patron,
indique
donc
q u ' i l
n'est
pas
d'affranchi
indépendant
ou
pouvant
se
prévaloir
de
l f être.
Le
lien
d' homme
à
homme
tissé
par
l'escla\\Tage,
légèrement
détendu
à
la
sui te
de
la
manuJaissio,
ne
se
dénoue
pas.
Bien
au
contraire,
i l
garde
sa
s o l i d i t é
et
rapproche
les
deux
hommes.
N.
Henry
Michel
est
on
ne
peut
plus
clair.
sur
la
nature de ce
lien
((L'esc1a\\Te,
a.ffranchi
pa.r
son
maître,
est
appelé
par
lui
d
la
\\Tie
cÎ\\Tile
de
telle
sorte
que
le
lien
entre
le
patron
et
son affranchi
présente une certaine ~n~~ogle
av'ec
le
lien
qui
unit
le
f i l s
3
son
père
,
• •
,1)
(31)
Etroi tement
mêlé
à
son
patron,
l'affranchi
est
considéré
comme
de\\'ant
logiquement
subir
touj ours
son
poids
et
se
refléter
sur
lui.
La
négation de
ce
principe
ne
pouvant être
admise.
de
gré
ou
de
force,
sa
place.
même
fortement
-
334 -
rehaussée à
l'intérieur de
la
familia,
se réduit
à
une
infé-
riorité
systématique.
Sa
situation
sociale,
soit-elle
d'un
très
haut
niveau,
n'édulcore
en aucune
façon
cette
réalité
i l
demeure
inévitablement,
qu'il
l-e
veuille
ou
non,
un
affranchi
de
quelqu'un.
Il
va de
soi
qu 1 au-dessus de
lui
se
place
une
autre
personne,
responsable
de
son
élargissement,
de
l'autorité
de
laquelle
i l
ne
pourrait
se
départir.
Il
ne
saurait
le
biffer et
ne
plus en
tenir compte,
patron puisse
t - i l
être
à
son
tour.
Ce
n'est
pas
sans
importance
que
Cicéron
prend
parfois
le soin de
faire
précéder
le
nom d'un
affranchi,
de son statut,
à
l'exemple de
la
missi ve adressée
à
M.
Célius Rufus
(f]e
t'en\\'oie
l'affranchi
Philon
et
le
grec
Diogène,
tj\\'ec
une
cOI!L.'11ission
et
une
lettre
pour toi.v
(32)
Cela
veut
dire
qu'en
tant
qu'affranchi,
i l
est
forcément
sous
l'obédience
d'un
patron
et
qu'il
n'a
pas
de
lui-même
été
agrégé
à
la
société.
Quelqu'un
l ' y
a
condu i t ,
l ' Y
a
poussé même
et a
favorisé sa promotion.
Sur
le
plan social,
cette
référence
a
la
même
valeur que
le
nom
et
le
prénom,
d'autant
plus
qu'elle
seule,
suffit
pour
orienter
le
libertus
dans
une
direction
précise
celle
occupée
par
le
patronus.
Kutatis
mutandis,
elle
guide
facilement
tous
ceux
qui
ne
sont
pas
inscrits
dans
la
familiarité
du
libertus,
en
leur donnant
l'occasion -
au cas
où
cette
précision
leur
serait
donnée
de
savoir
par
rapport
à
quel
personnage
i l
se
détermine.
Par
voie
de
conséquence,
elle
apparaît
comme
un
véritable aiguillon dans
la
considération
qui
peut
lui
ëtre
accordée
et
dans
l'orientation
de
l'opinion
extérieure.
Car
i l
suffit
de
savoir
que
tel
affranchi
se
trouve
sous
le
patronage
de
tel
homme,
pour
lui
accorder
un
crédit
particulier
ou
~ contrario,
le
lui
retirer.
La
facilite
était
encore
plus
accrue,
si
le
patron
y allai t
de
son
jugement.
N'est-ce
pas
sans peine
que Cicéron admit
dans son
intimité
Dionysius,
le
-
335 -
libertus
qu'Atticus
mit
à
sa
dispostion,
en
le
faisant
précéder
d'une
charmante
recommanàation
?
La
réponse
de
l'Arpinate
«Quel
besoi n
de
tant
d'assurances
sur
Dionysius!
De
toi
à
moi,
un
clin
d'oeil
ne
suffirait-il
à
persuader
?
Si
ton
silence
m'a
rendu
trop
soupçonneux,
c'est
que
d'ha-
bitude
tu
t'appliques
par
des
témoignages
obligeants à
cimenter les amitiés et
que
je
m'étais
laissé
dire
qu'al'ec
d'autres
i l
tenai t
sur
moi
d'autres
propos.
Nais
qu' i 1
en
soi t
COm..V1e
tu
me
l'écris,
je
t'en
crois
pdrfaitement.
Ainsi
mes
dispositions
sont
pour lui
celles que tu désires»
(33)
Ce
n'est
pas
l'affranchi
en
tant
que
tel
que
Cicéron
accepte,
mais
l'obligé
de
son
ami.
C'est
le
patron
Atticus
qu'il
accueille
au
milieu
des siens,
par
libertus
interposé,
lui
ménageant
un siége en harmonie avec son rang.
De
la même
manière,
il
ne
serait
pas présomptueux d'affirmer que
lors de.
la
maladie
de
Ti ro
en
50-49,
de
retour
de
Ci l icie
où
i l
avai t
pris
part
à
la
cahors
praetaria
de
Cicéron,
les
nom-
breuses
suppl icat ions
venant
d'amis
de
son
patron
et
que
celui-ci
lui
transmet dans cette lettre par exemple
«Vois com.me
tu
te
fais chérir.
Nous passions
deux
heures
à
Thyrréum
notre
12ô te,
Xénomênès,
t 1 aime
lH..rtant
que
s ' i l
tri t'ai t
atreC
toi
i l
est
prêt
li
tout,
disait-il,
pour
t o i ;
et
je
pense
qu'il
tiendrait
ses
promesses.
H' est
d tri s
qu' i l
pourrd i t,
tes
forces
un
peu
reprises,
te
fdire
passer
8
Leucdde,
où
tu
achêtrerdi!5
de
1 es
affermir.'.'
(34 )
ou dans celle-là
<, Vol 1 à
s i x
J OL..'rs
passés
que
nous
sO.'!1....Jles
retenus
a
Corcyre
les
Quintus
pêre
te
-
336 -
fils,
à
Buthrote.
Nous
nous
inquiétons
ter-
ri bl ement
de
tB.
sB.nté,
SB.ns nous ~tonner de
ne
recevoir aucune
lettre
de
toi
les
~~nts qui
nous
les
B.pporteraient,
nous
ne serions pB.S en panne à
Corcyre))
{35)
ne
furent
pas
mot i vées
par
la
personnal i té
de
l'affranchi.
Elles
le ~ord par le fai t
de
sa
posi tion
à
l'égard
de
Cicéron
une
position
qui
ne
le
détachait
pas
du
patronus.
La
révélation de
l'Arpinate
«Tiens
pour
B.ssuré,
mon
cher
Tiro,
que
nul
n'B.
d'affection
pour moi
qui
n'en
ait
8.ussi
pour toi
'"
,1,1
{36)
apporte
d'ailleurs
toute
la
lumière
sur
la
doublure
disions-nous
du
patron et
de son affranchi.
Aussi
laconique qu'elle
soit,
ellea
valeur
de
rappel
quant
à
la
perpétuation
de
son
alignement
sur
le
patron,
Le
voeu
de
Cicéron est
de
lui
faire
remettre
à
l ' e s p r i t
la vérité
selon
laquelle,
tant
q u ' i l
sera
affranchi,
et
lui
patron,
i l
ne
cessera
d'être
vu
au
travers
de
lui
sa
position
sera
toujours déterminée
en
fonction
de
la
sienne.
Cette
prat~1~c
qui
ignorai t
la
véri table
personnal i té
de
l ' af franchi,
ne
tenait
pas
compte
de
ses
valeurs
intrinsèques,
puisque
mettant
en
a,;rant
celles
du
patron,
présentai t
aussi
avantageuse
qu'elle
pût
être
par
moments
pour
les
ai franchis
rapaces
par
exemple
le
danger,
une
fois
la
cohabitation
consommée,
de
trou\\rer
en
la
personne
de
l ' aff ranchi ,
une
antithèse
du
patron,
c'est-à-dire
prés~tant une
image
autre
que
la
sienne.
Ce
fut
là,
le
désagrément
auquel
Cicéron
ne
s'attendait
pas,
quand
i l
apprit
à
connai tre
fondamentalement
Dionysius.
Et
c'est
non
sans
déception,
qu'il
écrivit à
Atticus:
,',' Ton
Di onysi us
car
i l
est
~
toi
plutôt
qu'à
nous,
et,
ne
connaiss~~nt que
trop
son
-
337 -
caractere,
je
m'en
tenais
cependant
à
ton
jugement
plutôt
qu'au
mi en.
Eh
bien
Dion)'sius,
sans
pudeur
ni
égard
à
tous
les
téI!1Oignages
dont
tu
as
appuyé
1IJé1
confiance
en
lui,
fait
l'insolent
en
escomptant
le
sort qu' i 1
nous croi t
réserl"é
un sort dont
nous
comptons
dans
toute
la
mesure
de
la
prudence
humai ne,
goul"erner
assez
sagement
1 ' él"ol ut ion))
(37)
De
toute
manière,
même
s ' i l
se
reproche
sa
totale
naïveté,
aurait-il
pu
la
contourner,
tant
que
ses
relations
avec
Atticus
étaie~t au beau fixe ? Il eût été inconcevable,
voire
inconvenant,
d' être
réservé
à
l'égard
de
l'affranchi
de
son
ami
et
de
se
montrer
dubitatif
sur
ses
valeurs
réelles.
Il
eût
paru
mal venu
et
non
conforme
au
principe
de
respect
de
l'autre,
que
de
manquer
d'égards
à
son
libertus
et
de
ne
pas
l'entourer
de
toutes
les
marques
d'honorabilité.
Un
tel
comportement,
ne
saurait
être
perçu
que
comme
un
profond
outrage,
d'une
consonance
aussi
grave
que
la
spoliation
d'une
l i b e r t a
Veneris,
dont
nous
avons
un
cas à
Lilybée pendant
la préture de
Verrès,
l'dl
existe
à
Lilybée
une
certaine
.4gonis,
affranchi e
de
Venus
Erac)'ne.
la
questure
de Caecilius,
cette fe~ possédait
d'abondantes
ressources
et
elle
était
riche
en
biens-fonds.
Un
préfet
des
na'l"ires
d'Antonius prétendait,
contre
toute
justice,
en1e'l"er de
chez elle des esc1al"es,
musiciens
d'orchestre,
qu'il
disait
'1"ou1oir
utiliser
sur
la
flotte.
.41 ors,
sui '1"ant
l ' habi tude
qu'ont en Sicile
tous ceux qui
appartiennent
à
Venus
et
CeL!X
qui
se
sont
affranchi s
de
Vénus ..
dans
l ' espoi r
que
1 e
nom
de
Vénus
opposerait
un
scrupule
religieux
8UX
intentions de
ce préfet,
cette
femme déclara
qu'elle et ses biens étaient
la
propriété de
-
338 -
Vé."1U5.
.4
peine
la
nou\\~elle de
ce
fai t
a
t -
elle été annoncée au questeur Caecilius,
cet
bomme
de
bien,
ce
personnage
doué
d'une
telle
équité,
i l
fai t
con\\'oquer
Agonis
de\\~ant lui,
i l
déli\\'re
aussitôt
la
forI11Ule
:
s ' i l appert qu·elle a
déclaré qu'elle et ses
biens
sont
la
propriété
de
Vénus.
Les
récupérateurs
rendent
le
jugement
qu' i ls
de\\~ient rendre
nécessairement
car,
personne
ne pou\\'ai t
en
douter,
ell e
a vai t
fai t
cet te
déclaration.
Il
entre
en
possession
des
biens de cette
femme;
i l
l'adjuge elle-même
comme
escla ve
il
Vénus,
pui s i l
\\'end
ses
biens;
i l
en
fait
de l'argent ....
(38)
Car,
portant
atteinte
non
pas
seulement
à
l'affranchi,
mais
aussi
et
surtout
au
patron,
par
le
biais
duquel
i l
se
fraye
un
passage
parmi
les
autres
membres
de
la
société.
De
ce
fait,
i l
équivaut
purement
et
simplement,
à
une
remise
en
cause de son
imperium,
que
le
libertus porte sur
lui.
2
-
Le poids de
l'imperium patroni
Ce
pouvoir
qu'a
le
patron sur
l'affranchi
et
qui
lui
donne
la
capacité
permanente
de
se
refléter
à
travers
lui,
d'éclipser
la
personnalité
du
libertus,
de
l'inféoder
en
quelque
sorte,
n'est
pas
le
résultat
d'une
situation
créée
par
lui.
Il
n'a
rien
d'une
fiction
mise
en
place
de
son gré,
selon
son
bon
vouloir
et
q u ' i l
avait
la
possibilité
de
moduler.
Il
est
plutôt
l'expression
d'un
état
de
mentalité
unanimement
partagé
par
les
Romains
et
fondé
sur
la
légitimité
d'une
hiérarchisation
des
rapports
entre
les
indi\\'idus
et
à
une
plus
grande
échelle,
au
niveau
de
tout
système
organique.
Cette
légitimité
que
Cicéron
exprime
de
la
rnaniere
suivante
en
parlant
du
uir,
de
l'imperator,
du
dominus et
du
parens
-
339 -
Haec
ut
i~ret
111i
~rti
animt
quae
oboedire debet,
id uidenduJIl est uira . . .
Vel
ut dondnus seruo ue1
ut i~rator mt1iti uel
ut ~rens filio (39)
se
tradui t
par
un
verbe
qui
connote
la
violence,
le
pouvoir
absol u
comme
disai t
J.
Macqueron
(40)
imperare;
employé
parfois
par
l ' Arpi nate
dans
son
oeuvre
(41)
et
sous
la
forme
nominale,
connu sous l'appellation d'imperium :
Denique
imperiuJIl dODesticuJIl nulluJIl erit,
si
seruolis
hoc
nostris
concesseriJ1lUs
ut
ad
,
uerba
nobis
oboediant,
non
ad
id
quod
ex
uerbis intellegi possit obtemperent (42)
di t - i l,
en
abordant
la
question
portant
sur
les
sources
du
maintien
de
l'autorité
dominicale,
iJllperare
ayant/ approxi-
mativement
comme
antithèse
impedire
(43)
et
comme
s)rnonyme
obtemperare
(44),
deux autres
verbes que
nous
trouvons
aussi
employés
par
l'Arpinate.
Quelle
était
donc
la
nature
de
cet
im:perium sur
l'affranchi
?
Le
patron,
l'exerçai t - i:1
i ndi f fé-
remment
sur
l'esclave
et
lui,
ou
plutôt
établissait-il
une
profonde
disproportion
quan~ à
son
usage?
En
un
mot,
doit-
on
parler
d'équidistance
entre
d'un
côté
l ' imperium domini
et de
l'autre,
l'imperium patroni ?
a)
Les tenants de cet imperium
La
recherche
de
l'équidistance de
cet
imperium,
passe
par
la
connaissance
de
la
pratique
sociale
obser'''ée
par
les
Romains
et
portant
sur
la
nature
des
rapports
à
observer
vis-à-vis de
telle
ou
telle
catégorie
socio-juridique
placée
sous
leur dépendance.
Elle
n'est
possible que
si
l'on arrive
J
à
établir
un
parallelisme
direct
entre
le
comportement
affiché
par
les
maîtres
à
l'égard
des
esclaves
et
celui
affiche
par
les
patrons
à
l'égard
des
affranchis.
Or,
de
cette
observation,
i l
ressort
clairement
que
les
affrB.nchis
se
trouvent
entourés
d'une
attention
considérable
(45),
340
Faut-i l
pour
cela
conclure
à
la
fai blesse,
voire
à
l'inexistence
sur
eux de
l ' a u t o r i t é
à
laquelle
esclaves,
i l s
étaient
soumis
?
Pourtant,
c ' e s t
ce
que
nous
serions
tenté
de
dire,
ne
serait-ce
qu'en
regardant
les
membres
de
l'entourage
d'Appius
Claudius,
membres
parmi
lesquels
ne
figurent
pas
d'affranchis,
alors
que
tous
les
autres
f i l i i ,
filiae,
en
gros,
serui
et
liberi
étaient
placés sous
son auctoritas
(46).
Mais
cela
s~rait
à
notre
sens,
«aller
t,ite
en
besogne)}
et
oublier
d'inclure
dans
le
faisceau
de
pouvoirs
dont
dispose
le
patron,
tous
les
para~tres
sur
lesquels
se
fonde
l'essentiel
de
sa
personnalité,
en
tant
que
propriétaire
puis
responsable
de
la
gestion
d'une
certaine
.catégorie
d'hommes.
Le
premier
d'entre
eux,
tient
à
la
conception même
du
contenu
de
familia,
tel
que
l'entendent
les
Romains.
Une
conception globalisante,
en ce
sens qu'elle
ne
se
limite
pas
à
un
esclave
(47),
mais
plutôt
s'étend
à
d'autres
membres,
parmi
lesquels
figurent
en
bonne
place,
les
liberti.
La
précision
que
nous
en
donne
l'Arpinate
au
travers
de
cette
énumération
:
Hoc
est
alieni
iuris
uicarius,
an
tuus
colonus aut
uicinus aut
cliens aut
libertus
aut
quiuis qui
il1am u i . deiectionemque
tuo
rogatu aut tuo nOmŒne fecerit
(48)
suivie
par
celle
de
Salluste,
où
l i b e r t i
et
clientes
semblent
former
un
couple
indissociable
en
tant
que
principaux
éléments
choisis
au
sein
de
la
familia
de
Lentulus
pour
convaincre
entre
autres
les
esclaves
ind.écis
pendant
la
conjuration
de
Catilina
(49),
balaie
toute
tentation quant
à
une
exclusion
des
l i b e r t i
de
la
familia et
qui
pourrait
naitre
des
expressions
du
genre
familiam atque
libertos suos
(50,
clientes,
l i b e r t i s ,
familia,
copiis
<51).
Inclus
dans
le
groupe
de,=:, do:mestici
<52),
et
ce
faisant
dans
la
do.mus
U,\\':1,)
du
patron,
i l s
font
partie
et
cela
au
même
t i t r e
que
le,::;
esclaves,
de
ceux
sur
qui
peut
compter
en
--~.
-
341 -
priori té
quelqu'un.
engagé
dans
une
entreprise
extrê~ment
difficile
(54),
puisque
placés
à
portée
de
la
mai-n.
La
remarque
de
Cicéron
portant
sur
l ' i névi table
improbi té
des
serviteurs
et
où
ne
s'inscrivent
clairement
que
les
serui
et
les l i b e r t i
Huc
accedit
quod
quamuis
i l l e
felix
s i t ,
sicut
est
tamen
in
tanta
felicitate
nemo
potest
esse
in
illagna
faailia
homne»i neque
seruu:m neque 1 i bertu:m iRlprobu:m habeat (55)
atteste
cette
proximité.
Placés
dans
son
voisinage
immédiat.
i l
va. sans
dire
q u ' i l s
continuent
à
subir
en
quelque
sorte,
la
pression
du
patron,
malgré
le
r e t r a i t
de
la
metus
<56)
opéré
en
eux,
après
la
manumissio.
Fai bles
ent ièrement
face
à
l'autorité
démesurée
de
leurs
patroni,
les
liberti
continuent
à
se
plier
à
leur
volonté,
à
subir
leur
totale
domination
et
à
les
suivre
sans
rechigner.
G.
Fabre
parti-
culièrement,
a
trouvé
comme
fondement
essentiel
de
la
toute
puissance
patronale,
le
caractère
assujetissant
de
la
d.ette
portée par l'affranchi
et
de son expression,
la gratia
« •..
Gratia
et
gratus illustrent
une
situa-
tion
dans
laquelle
systématiquement,
l ' a f -
francbi
a
un
rôle
subalterne
i l
est
celui
qui
a
reçu
et
qui
dol t
témoigner
sa
reconnaissance,
ou
bien
celui
dont
les
actions
sont
reçues
a\\'ec
féH'eur
dans
les
deux
cas,
l'initiati\\'e
re\\'ient
au
patron.
Dans
les
de~Y
cas
aussi,
l'image
d'une
relation
de
dominant
à
dominé
est
mise
en
é\\,idence
l'affranchi
est
i nféri eur.l.'
(57)
Certes,
i l
ne
saurait
être
question
ici
de
négliger
le
poids
exercé
sur
l'affranchi.
par
l'obligation
contractée
depuis
l'accomplissement
de
l ' a c t e
libératoire.
Nous
n'avons
pas
la
prétention
de
minimiser
la
lourde
charge
portée
par
le
libertus
et
qui
ne
pou\\'ait
s'amoi~rir autrement
que
par
-
342 -
l'acceptation
de
l'imperium
détenu
par
le
pa~ronus,
dont
l'obsequium
«Nous de~~ns l'entendre comme une soumission
constante,
une obéissance
de chaque
instant,
a~"ec
la
nuance
même
matérielle
tirée
du
~'erbe
sequor
on
suit
son
patron
sans
cesse,
on
est
sans
cesse
auprès
de
lui,
il
ses
ordres.
L'obsequlu~·est.1'état
perma.-
nent
d'obéissance.
On
exécute,
on
obéit
sur
l'instant,
et
la
notion
d'obéissance
s'é~"a-
nouit
a~'ec
l'accomplissement
de
l'ordre.
L'affranchi
est
là,
constamment
aupres
de
son
pa tron,
prêt
à
accomp1 i r
1 es
J1JOi ndres
ordres
de
celui-ci.
Tel
nous
apparaî t
l'absequiuJD,
le
fait
de
sui~"re pas à
pas le
patron,
d'être
prêt il répondre il
tout appel,
et
jusqu'apres
sa
mort
même,
le
Lai t
de
sui~"re son con~"oi funèbre". 1 (58)
les operae
(59)
et
les bona
(60)
en sont
la manifestation la
plus
profonde.
Nous
ne
saurions
taire
longtemps,
le
caractère
pondéreux de
la gra~ia de
l'affranchi
vis-à-vis de
son
patron
et
l'étendue
des
devoirs
devant
lesquels
i l
lui
était
impossible
de
se
rétracter.
La
position
centrale
occupée
par
ce
mot,
à
la
fois
dans
l'un
des
passages
que
nous
consacre
Plaute
par
l' i ntermédiai re
d'un
des
personnages,
Philematium qui,
parlant
de
son
élargissement,
déclare
Eunde. animum oportet nunc mihi
esse gratuJD.
ut iJllpetraui.
atque
olim
priusqu8..m
id
extudi.
qu01Jl
111i
sub1andiebar (61)
et
dane un certain nombre
de
lettres de
Cicéron
, ho ;. "
\\.
-........ ' ,
montre
son extrême importance.
Il s'agit pour le
libertus de ne pas
-
343 -
omettre,
encore
moins,
d'expurger
de
son
esprit,
la.
portée
de
l'acte
accompl i
par
le
patronus
et
de
ne
pas
'mi ni miser
la
nécessi té
de
le
payer
en
retour.
C'est
à
tout
le
moins,
ce que fait
ressortir Cl.
Moussy,
en parlant de gratus
«Gratus
tout
en
ga.rda.nt
un
sens
actif
signifie
pa.rfois
non
il
proprement
parler
"reconna. i SSél nt., ,
."118. i S
., bi en
di sposé,
bien-
~reillant, compl8.isan t "))
(63)
On
retrouve
ce
sens,
dans
l'analyse
qu'en
fait
J.
Hellegouarc'h
,'{La.
gratia
est
d'a.bord
une
disposi tian
de
l'esprit créée pa.r le
beneficium et qui
con-
dui t
il
se
comporter
d'une
certai ne
~nière.
E1l e
est
com..'1Je
l ' offi ci U1II,
la
marque
de
l'a.mitié
qui
existe
entre
deux
h01IW1eS
. .
.,.i
(64)
Mais
cette
gratta,
prise
comme
dette
morale
exclusi\\rement,
ne
pourrait
à
elle
seule,
suffire
pour
démontrer
l'étendue
écrasante de
la soumission des
affranchis.
De
la
même
façon,
aussi
logique
qu'elle
puisse
être,
l'argumentation
avancée
par
Fustel
de
Coulanges
(65)
et
H.
Lemosse
{€>€»,
consistant
à
dire
que
si
les
affranchis
étaient
aussi
soumis
à
leurs
patrons,
c'e'st
parce
qu'ils
n'étaient
que
des
clientes,
n'est
guère
suffisante
et
explicative.
La
similitude
de
condition
entre
le
libertus
et
le
cliens.
valable
aux
premières
heures
de
Rome
{67),
ne
l ' e s t
plus
à
la
fin
de
la
Républ ique,
même
si
comme
le
signale
N.
Rouland,
une
({parenté
certaine
existe
encore
entre
eux,
fondée
sur
leur
état
de
sujétion
à'un
patroDUs»
(68) .
Rien
d'ailleurs
dans
l'oeuvre
de
Cicéron.
ne
nous
donne
la
pos-
s i b i l i t é
de
penser
à
une
interchangeabilité
des
deux
statuts,
l'un
et
l'autre
étant
liés
uniquement
par
une
juxtaposition
<59).
La conclusion de
Fustel de Coulanges
-----iÎa~---------
«Il
Y
e
quel qu'un
qui
ressembl e
mieux
8
l'ancien
client,
c'est
l'effrenchi.
Autre-
fois
on
l'appelait
client,
~intenant
on
l'appelle affranchi.v
(7D)
ne
ré saud
donc
pas
le
problème
et
n'apporte
pas
de
solution
véri table.
Il
faut
aussi
tenir
compte
diautres
éléments.
C'est
pourquoi,
nous nous tournerons
vers J.
Macqueron
«Il
était
impossible
primiti\\~ement,
de
rendre
l'affranchi
indépendent
du
groupe.
Cette
indépendance
aurai t
été
sans
profi t
pour l'affranchi,
tout en imposant au patron
un lourd sacrifice.
Le
maitre
qui
donnait
la
liberté
a
L..'n
escla\\re
tenai t
à
conser\\rer
cet
instrument
don t
i l
a ira i t
besoi n.
D'autre
part,
a trec
l'organisation
patricienne
de
l'ancienne
Rome,
les
individus avaient
grand
besoin
de
la protection de leur groLlpe
familial"
(71)
L'éloquence
de
cet te
remarque,
tient
à
l'éclaircissement
du
contenu
même
de
la
l i berti ni té
et
de
ses
i mpl i ca t i ons
dans
les
rapports
d'homme
à
homme,
en
l'occurrence,
ceux
de
l'affranchi
et
du
patron.
En
libérant
son
esclave,
celui-ci
pouvai t
en
faire
un
ami.
Et
Quintus
ne
s'en
é t a i t
pas
caché
en
apprenant
la
manuBdssio
de
Tiro
{72).
Mais
une
fois
affranchi,
l'esclaye
se
devait
de
donner
encore
son
corps
au
patron,
de
le
mettre
à
sa
disposition,
à
peu
pres
comme
l ' esc lave.
Cet
état
de
fai t
tenait
sa
Yigueur
de
la
conception
entretenue
par
les
Romains
qui
n'admettait
pas
un
total
cloisonnement
entre
les
serui
et
les
l i b e r t i ,
mais
plutôt
comme
une
continuation,
un
prolong~ment
logique,
où
les
uns
et
les
autres
ne
pouyaient
tenir
la
dragée
ha'Jte
à
l'homme
sous
l ' a u t o r i t é
duquel
i l s
étaient
placés.
Nous
trouvons
là
un
des
aspects
de
la
notion
de
mas
qu' evo<~ue S.
Treggiari
-
345 -
({}(os
was
strong
agai nst
the
sons
of
freedmen,
W8S
stronger
sU 11
against
freedmen
them sel ~res.l.l (73)
et
d'où
découle
le
fort
conservatisme
des
Romains.
aristocrates surtout
{(La
condition
rOJ11{j i ne
de
liber1:us
répondait
aux
impératifs
d'une
mentalité
fortement aristocra tique.!.!
(74)
Bien
entendu,
à
la
fin
de
la
République,
de
nombreuses
réformes,
consécut ives
aux di vers
édi t s
prétoriens datant
de
116
av.
J. -Co ,
vinrent
sérieusement
ébranler
la
toute
puissance
patronale,
déserrer
leur
étau
sur
les
affranchis.
et
donner
une
certaine
autonomie
à
ceux-ci.
La
plus
patente
d'entre
elles,
fut
sans
conteste
celle
ayant
trai t
au
ius
iurandum
liberti,
prestation
de
serment
par
laquelle
le
libertus
jurait
d'exercer
un
type
précis
d' operae,
prestation
qi
avai t
lieu
avant
et
après
l'affranchissement
(75).
Mais
i l
n'en
demeure
pas
moins
vrai
que
l'affranchi,
d5.ns
l ' e s p r i t
du
patron.
demeurait
un quasi
seruus.
C'est
la
déduction
que
nous
faisons
au
regard
de
certaines
inter-
ventions cicéroniennes,
à
l ' i n s t a r
de
celle-ci
ou
l'Arpinate
met
en garde son cadet
Quintus contre
l'importance du
qu'en-
dira-t-on,
le
risque
de
la
dégradation
de
la
dignitas
d'un
magistrat
du
peuple
romain
et
lui
delIll1nde
de
t r a i t e r
son
accensus
sans
grande
différence
avec
un
seruus,
en
s'appuyant sur le mes patrius
((Que
l ' accensus 50i t
placé
au
rang
que
nos
ancêtres lui
ont
assigné
i l
ne
5 ' agi S'sa i t
point
pour eux,
d'un
emploi
de
fa~reur,
~i5
d'une
charge qui
exigeait du
tra~~il; et i l s
ne
la
confiaient
guere
leurs
affranchis à
qui
i l s donnaient
des
ordres 3
peu près com."!le 3
leurs escla~res).! <76>
-
346 -
puis
de
celle-là,
passage
"d'une
l e t t r e
à
son
questeur
de
Cilicie,
où
parlant
de
son
affranchi,
scriba,
M.
Tullius
Laurea,
i l
utilise
le terme seruus
If;a accepi 1ibru.m a
RleO
seruo scrlba
(77)
enfin,
toujours
dans
la
correspondance,
où
pour
exprimer
le
départ
précipi té
de
Chrysippus,
précepteur
de
ses
enfants,
i l
use d'un mot approprié aux esclaves
fuga:
Xi f; f;o furf;a
;
fuga.JII nDn fera
(7 8)
"
ce
passage
du
Digeste,
peut
aussi
nous
permettre
de
saisir
la réalité de
la quasi-servilité des affranchis
:
Hoc
edicf;um
a
praef;ore
propositum
est
honoris,
que.JII
l i berf;1
paf;ranis
bahere
debenf;,
moderandi
graf;1a.
llaRque,
uf; serui us
scribif;,
anf;ea
solif;1
fuerunf;
a
1iberf;is
duri ssimas
res
exigere,
sci1icef;
ad
reJ1lUnerandum
f;am grande
benefi ci um,
quad
in
1iberf;os
conferf;ur,
CU.JII
ex
seruitute
ad
ciuif;af;em
Ro~na.JII
perducunf;ur.
Et
quidem
prill1Us
praef;or
Ruf;11ius
edixi t
se
amp1ius
non
daf;urum
paf;rani
qua.JII
operarum
et
societatis
actione.,
uide11ce~
s i
hoc
pepigissef;,
uf;,
nisl
ei
obsequ1u. praestaret
1iberf;us,
in
socief;af;em ad:Ill1f;f;eref;ur
patro-
nus.
Posteriores
praef;oTes
cerf;ae
partis
bonorum
possèssione.m
po11icebanf;ur
:
uide-
1icef;
enim imago
societaf;is
induxit
eiusde.
partis praesf;atione.,
uf;,
quod uiuus solebat
socief;atis
nomine
praesf;are,
id
post
morte.
praestaret
(79)
Aux
yeux
des
patrons,
les
affranchis
n'étaient
donc
que
des
dépendants,
sans
autonomie,
et
sans
droit
de
regard sur
eux-
mêmes.
Il
n'était
pas
encore
question
pour
eux
de
les
-
347 -
a.dmettre
à
leur
table comme disait
J.
Macqueron
(80),
de
les
mettre
sur
le
même
pied
d'égal i té
qu'eux,
de
les
considérer
comme
des
êtres
il
entourer
de
toutes
les
:n:lo9.rques
d' honneur.
Pour
l'avoir
fait
vis-à-vis
de
Dionysius,
Cicéron
s'en
plaint amèrement
et se
le reproche
«Dionysius
brûlait
de
te
revoir""
d i t - i l
à
Atticus
«Je
te
l'en,roie,
non
certes
de
bon
gré,
.mais
i l
8
f811u
s ' y
résoudre.
sans
parler
de
S8
science,
qui
m' ét8.i t
connue,
j '8.i
trou,ré
en
lui
pure
vertu,
et
pour
ne
p 8 S
8 voi r
l ' a i r
de
louer
en
1 ui
un
affran-
chi,
l e s mérites d'un
honnête homme.v
(81)
Louer
un
affranchi,
ou
du
moi ns
ses
qual i tés,
parai t
peu
conforme
à
l'idéal
patronal,
un
idéal
qui
n'accepte
pas
une
équidistance
entre
l'ordre
des
patrons
et
celui
des
l i b e r t i
et
où
le
moindre
honneur
prend
l ' a l l u r e
d'une
bassesse
pouvant
entra i ner
une
perte
de
l ' autori té
des
patroni.
Il
Y
a
en
Cicéron,
comme
une
sorte
de
sursaut,
chaque
fois
qu'il
remarque
une
a t t i tude
risquant
de
provoquer
un
relâchement
de
l ' autori té
séculaire
des
patron!.
Ce
n'est
donc
pas
un
hasard
si
dans
l'ensemble
de
son
oeuvre,
aucun
affranchi
ne
nous
est
présenté
comme
menant
une
vie
à
part,
sans
en
référer
directemnt
à
son
patron.
A
aucun
moment.
nous
ne
nous
trouvons
en
contact
avec
un
affranchi
totalement
libre
de
toute
sujétion
à
la
personne
de
celui-ci.
Certes,
i l
en
est
dont
on perd
la
trace
juste
après
leur affranchissement
et
qui
ne
font
plus
parler
d'eux.
C'est
le
cas
de
T.
Cécilius
Eutychidès
dont
i l
a
été
question
plus
haut.
Mais
rien
n' indique
qu' i l s ' étai t
libéré
de
l'emprise
patronale.
Il
a
peut-être
continué
à
\\Tivre
dans
le
moule
d'Atticus.
sans
qu'arrivât
l'occasion
de
faire
état
de
la
moindre
de
ses
activités.
De
ce
fait.
i l
faut
admettre
que
tou::s
les
affranchis.
même
ceux
que
nous
voyons
aller
outre-mer
brasser
des affaires
et
arborer des
airs
de
financiers
(82),
ne
jouent
qu'un
r61e
d'exécutants,
de
subalternes,
d'assujettis.
Et
cela.
d'autant
plus
qu'il
parait
incon-
-
348 -
cevable
pour
un
patron,
de
se
dessaisir de
l'ensemble de
ses
prérogatives
auxquell-es
i l
é t a i t
habitué
depuis
le
temps
où
l'actuel
affranchi
étai t
dans
la
servi tude.
Il
ne
saurai t
abandonner
une
partie
inestimable
de
son
pouvoir
pour
se
contenter
de
com...-omander
à
des
esclaves
et
de
réduire
une
partie
de
son
prestige.
Avoir
une
imposante
famil ia,
n'était-ce
pas
l'expression
d'une
certaine
continuité de
son
droit
de
propriété
?
«L 1 affrancbi
a
fai t
un
pacte
a \\'ec
l ' anci en
maître ;
i l
a
accepté de
jouer une règle,
en
1aql..'e11e
des
a~'antages d'a~'enir compensent
1
1 1 inégal i té du
ti tre.','
{83)
Que
se
pass,erait
t - i l
donc
si
à
l ' i n t é r i e u r
de
la
familia,
le
patron
ne
pouvai t
être
écouté
que
par
les
esclaves
?
Assurément,
i l
courrait
le
risque
de
ne
plus
être
que
l'ombre
de
lui-même,
puisque
n'ayant
plus
la
possibilité
de
faire
intervenir
son
droit
de
chef
incontesté,
droit
que
Quintilien
estime
similaire
selon
qu'il
s'agisse
du
père
vis-à-vis
de
son
f i l s ,
ou
du
patron
vis-A-vis de
l'affranchi
{84).
En tant que
responsable de
la familia
«il
est
le
chef
suprême
de
la
religion
domestique
i l
règle
toutes les cérémonies
du
cul te
COJIm!e
il
l'entend
01..1
pl utô t
CO.I11J11e
i l
a
~'U
faire
à
son
père.
Personne
dans
la
famille
ne
conteste
sa
supré~tie
sacer-
todale.
La
cité elle-même et ses pontifes ne
peu~'ent
rien
changer
8
son
cul te.
Comme
prêtre
du
foyer,
• 1
1~
ne
reconnaît
aucun
supérieur....
(85)
Chef
religieux,
i l
é t a i t
tenu
de
maintenir
é t r o i t et
uni
son
petit
monde,
de
ne
pas
briser
les
liens
établis
entre
les
Lares
et
le:3
esclaves
puis
les
affranchis,
de
garder
intact
le
même
chaî non.
L' af franchi
de','ai t
êt re
assurément,
bien
conscient
de cette obligation
-
349 -
«.. .
Par
cela
même
que
le
ser~riteur
acquérait
le
culte
et
le
droit
de
prier.'.'
fait
remarquer
Fustel
de
Coulanges
«il
perdai t
sa
1 i berté.
La
rel i-gi on
étai t u n e
chaîne
qui
le
retenait.
Il
était
attaché
d
la
famille
pqur
toute
sa
vie,
et
même
pour
le
temps qui
suivait la mort
Sous le nom
d'affranchi
i l
continuait
d
reconnaître
l'autorité
du
chef ou
patron,
et
ne
cessait
pas d'a.\\roir des obligations en\\rers lui.'.' ,(86)
Cicéron
n'aborde
pas
cet
aspect
de
la
sacro-sainteté
des
patrons
dans
la
domus.
Il
ne
consacre
aucune
ligne
à
l'important
problème
rel igieux,
par
lequel
l'affranchi
pouvait
être
amené
à
accepter
toujours
sa
domination.
Cependant,
cet
aspect
est
d'une
indicible
richesse
dans
les
liens
noués
entre
les
membres
de
la
faJlJilia..
A
t - i l
une
relation
de
causalité
a\\rec
l'attentisme
s i
l'on
ose
dire,
des
affranchis
?
Contribue
t - i l
particulièrement
à
peren-
niser
dans
leur
pensée,
la
nécessité
de
ne
pas se
sortir de
l ' autori té
des
patrons
et
d'accepter
leur
mai n
mise
?
Le
rapport
n'est
établ i
par
aucun
des
auteurs
que
nous
avons
consultés.
En
dèpit
de
cela,
certains
d'entre
eux,
sont
unanimes
pour
reconnaître
que
l'affranchi
ne
perdait
pas
automatiquement
tous ses réflexes acquis dans la servitude
:
{(. ..
Le
1 i bert:us
ne
perd
pas
du
.f our
au
1ende~in,
les
habitudes
qui
étaient
les
siennes
et
qui
impliquaient
que,
loin
de
flâner,
i l
cherchait
il
réaliser,
en
b.omme
désireux de changer de condition,
le plus de
tâches possi b1 eS.',1
(87)
Cette
obsenration
de
G.
Fabre,
explique
quelque
peu,
le
comportement
de
L.
Cornel i us
Chrysogonus
que
nous
fai t
découvrir
l'Arpinate.
Il
est
inutile
de
revenir
sur
la
puissance
de
cet
affranchi,
qui
fut
l'un
des
plus
rapaces
qu'ait
connus
la
fin
de
la
République.
Omnipotent
grâce
à
-
350 -
son
homonymie
avec
le
dictateur
Sylla,
crai nt
quasiment
de
tout
le
monde,
propriétaire
d'une
luxueuse
et
cossue
demeure,
ayant
donc
des
airs
de
grand
personnage
à
l ' exté-
rieur
de
la
dODUS
patronale,
l'on
pourrait
être
amené
à
penser
de
prime
abord,
à
une
continuation
de
cette
autorité
à
l'intérieur
de
la
domus.
Or,
i l
n'en
est
rien.
Devant
Sylla,
Chrysogonus
ne
devient
qu'un
simple
dépendant,
trem-
blant
de
peur.
Ce
que Cicéron dit
de
lui,
pour
expliquer ses
bredou i llages
et
ses
atermoiements
en
apprenant
la
présence
à
Volaterres
d'une
délégation
venue
tenir
Sylla
informé
des
malversations de son affranchi
{(Car
i l
était
sa i si
d'une
crainte
si
\\~i 01 ente
qu' i l
aurai t
préféré
mouri r
pl utô t
que tie
\\~oir Sylla instruit de ce qui s'était
passé
. . . .1.1
(88)
montre
parfai tement
que
que lque
pùt
être
l ' af franchi,
l'imperium
du
patron
ne
lui
é t a i t
pas
méconnu.
Celui-ci
s ' é t a i t
exercé
sur
lui
pendant
l'esclavage,
i l
avait
pleinement
conscience
que
tout
d'un
coup,
i l
lui
était
impossible
de
s'en soustraire.
Sa
mentalité
s ' é t a i t
façonnée
peut-être
plusieurs
années
durant
en
fonction
du
poids
écrasant
du
patron
SUr
lui.
Elle
avait
été
formée
pour
accepter
les
ordres,
ne
pas
prendre
le
temps
de
les
interpréter,
encore
moins de
les
choisir,
mais
plutôt
de
les
exécuter
au
pied
de
la
lettre.
Libéré
alors
que
quelque
temps auparavant
i l
é t a i t
encore
dans
l'esclavage,
i l
ne
lui
étai t
pas
évident
de
sentir
la
métamorphose
radicale
opérée
en
lui,
de
la
prendre
comme
telle,
a'i.rec
tout
ce
qu'elle
impliquait
d'un
peu
d'indépendance
et
de
responsabilisation.
Il
avait
connu
l'esclavage,
i l
ne
voit
par
voie
de
conséquence,
aucune
peine
à
assurer
les
charges
de
l'infériorité,
surtout
qu'en
bon
esclave,
i l
avait
d0
ne
plus
sentir
le
poids
réel
des
infirmités
de
cet
état
de
sujétion.
Il
n'y
a
qu'à
voir
comment
Tiro
et
les
autres
s'adonnent
avec
engouement
aux
activités
qu'esclaves
i l s
exerçaient,
pour s'en apercevoir.
L'exemple
de
cet
affranchi
-
351 -
que
nous
présente
Plaute,
demandant
au
patron
d'accepter
sa
subordination
{{Salut,
l11Dn
cher
pa tron
je
slJis
bien
heureux
de
te
t''Oir
1 i bre,
Hessénion"
Je
trous en
crois pelrbleu"
-
Hais,
je
t'en prie,
1!1On
cher
pel tron,
continue
li
me
co.mmander,
C011ll11e
au
temps
où
j ' é t a i s
esclatre.
Je
continuerai
d'helbiter a\\reC
toi,
et quand
tu
regagneras
ta
maison,
je
t'elccompagnerai»
(89)
n'est
que
l'expression d'un
fait
courant
et
qui
dénote
chez
les .liberti,
une
volonté
de
partager
le
toi t
et
la
vie
du
patron.
son cercle,
de
garder
les
rapports
d'infériorité ..
et
de
ne
pas
les
briser.
D'un
autre
c6té,
est-ce
pure
coïncidence si
tous
les affranchis contenus
dans
l'oeuvre de
Cicéron
sont
présentés
comme
étant
c é l i b a t a i r e s ?
Ce
n'est
pas évident.
La
famille
au
sens
le
plus étroit,
c'est-à-dire
constituée
de
la
femme
et
des
enfants
étant
l'une
des
raisons
qui
pouvait
inciter
les
affranchis
à
vouloir
à
tout
prix
se
démarquer
un
jour
du
patron,
quitte
à
epuiser
les
operae
jurés
{90).
peut
vouloir
montrer
que
ceux ap?artenant
au
milieu
de
Cicéron
et
de
ses
relations,
n'avaient
pas
de
1
quoi
bouder
un
jour
ou
l'autre.
la
manus
du
patron
et
de
s'en
éloigner.
Il
Y
a
comme
un
souci
pour
l ' Arpi nate,
de
réunir
toutes
les
conditions,
pour
montrer
que
l ' imperium
patroni
étai t
vécu
et
accepté
comme
n'ayant
pas
de
di fférence
notable
d' aveé
l'impertum domini
et
que
tout
le
monde -
affranchis et patrons
s'en accomodait
volontiers.
b>
Manifestation de cet imperium
La
maintien
de
cet
imperium
a
pour
conséquence
directe,
l'écrasement
de
l'affranchi
et
l'obligation
pour
lui,
d'exécuter
les
ordres
du
patron.
Etant
donné
qu'il
n'est
touj ours
qu'un
inférieur,
son
droi t
a bsol u
e'3t
de
respecter
la
règle
du
jeu,
consistant
à
revoir
le
patronus
;
-
352 -
et
puisqu'il
a
prêté serment,
de
tenir ses engagements.
Il
y
a
donc
là
une
double
obl iga\\ion
à
laquelle
l'affranchi
ne
peut
se
dérober
et
à
laquell~ il
est
tenu
de
s'astreindre.
Aussi,
n'est-il
pas
surprenant
de
trouver
parfois
l'affranchi
auprès de
l'esclave,
tous deux assistant
la même
personne
maître
ou
patron -
comme dans ce
fait
que raconte
l'un des amis de Cicéron
((Le
1 ende111!!1i n,
cO.lIJJ11e
j e
me
proposai
de
partir
d'Athène,s
vers
la
dixième
heure
de
la
nuit,
un
de
!;es
intimes,
P.
Postumius,
trouver
et
m'annonça
que
coll égue
H.
Karcel1 us
a vai t
été
poignardé
aprés
le
dîner
par un
autre
de
ses intimes,
P.
}t[agius
Cilo,
et
qu'il
avait
recu
deux
blessLlres,
l'une
à
l'estomac,
la
seconde
a.
la
tête,
derrière
1 ' orei lle.
Postumius
espérait
cependant
qu'il
pourrait
garder
la
trie.
Hagius
s'était
ensui te
donné
1 a
mort
l{arcell us
m'a trai t
Postumius
pour
m'annoncer l'étrénement
et me demander de
lui
en troyer
des
IIIédeci ns.
En
conséquence,
je
réunis
des
médecins
et
me
rendis
aussitôt
là-bas
aux
premières
heures
de
l'aube.
Je
n'étais pas loin
du
Pirée,
quand
un
esclat7 e
d'Acidinus
trint
à
ma
rencontre
e.trec
doc
tablettes,
où
i l
était
écrit
que
}t{arcellus
atrait
trécu
sa
dernière
heure
avant
l'aube .
.41 nsi,
cet
homme
des
pl us
i 11 ustres
a
reç 1.1
du
pire
des
scélérats
la
mort
la
plus
cruelle
lui,
que
ses
ennemis
epargné
à
cause
de
sa
digni té,
i l
s'est
troutré
un
ami
pour
lui
infliger
la
mort.
Cependant
j e
poursuitris
mon
chemin
jusqu'a
se.
tente;
j ' y trouvai
deux affranchis et un
nombre
infime
d'esclaves
a.
ce
qu'ils
disent,
les
autres
s'éte.tent
enfuis
-
353 -
terrorisés,
d l ' idée
que
1 eur
mai tre
a vai t
été tué de t'an t
sa
ten te,I,1
(91)
ou
dans
celui-ci
que
rapporte
Cicéron
lui-même
et
concernant
son
frère
Quintus,
venu
au
forum
s'enquérir
de
son
aîné
alors
que
les
hommes
de
main
de
Clodius
faisaient
place nette
{{..
115
font
au
forum un borrible l!JéjSSdCre,
et
les
",'oili!.
tous,
l'épée
nue
et
sang18nte,
gui
cherchaient
des
yeux
1110n
frère,
qui
hurlaient
son
nom
par
tout
le
forum,
mon
frère,
gui
est
un
b0111111e
excell ent,
gui
est
très
courageux
et
gui
m'aime
beaucoup.
Dans
une
si
grande
affliction,
dans
les
regrets
gue
lui
inspirait
mon
absence,
. 1
J.~
se
serai t
\\'olontiers
offert
il
leurs
coups,
non
pour
résister,
llJBis
pour
mourir,
si
1 r espoi r
de
mon retour ne
lui
at'ait
fait
méndger 58
\\'ie.
Cependant,
i l
dut
subir
l'infâme
brutalité
de
ces criminels gredins
venu
i mpl orer du
peuple
rOllJBi n
le
salut
de
son
oF
'
_rere,
repoussé
de
la
tri bune,
terrasse
.au
comi t i UJ11,
abrité
derrière
les
corps
des
esclaves et des affranchis.
.....
(0';",
auquel
nous
pouvons
ajouter
cet
exemple
d'hérolsme
d'un
affranchi,
que Valère Maxime nous fait
connaître
((C. Cassius
t'enait
d'être
t'élincu d
la
journée
de
Philippes
Pindarus,
1 1 un
de
ses
qu'il
atrait
réce.mment
affranchi,
lui
trancha
la
tête par son ordre,
et,
après
l'a\\'oir ainsi
soustrait
aux
insultes de
ses
ennemi s,
se
déroba
1 ui -même
8.
ld
!'ue
des
hoJ111'1Jes
par
une
mort
volontaire,
s,-~ns
l'on pùt même retrou\\'er son -::ada\\'re"
iÇ<.)l
-
354 -
C'est
dans
cet
esprit
de
sujétion,
de
don
intégral
de
son
être
au
patronus,
que
nous
trouvons
en' Lydie,
Antiochus,
l'affranchi
du
père
de
L.
Flaccus,
exigeant
que
créance
lui
soi t
versée
(94),
ou
T.
Strabo
mettant
tout
en
oeuvre
en
Narbonnaise,
pour
recouvrer
une
det te
(95) .
Pl us
que
des
faits
concrets,
c'et
ce
qu'expriment
les
qualificatifs
variés
employés
par
l'Arpinate,
louant
soit
la
fidelita.s de
Phania,
affranchi
d'Appius
Claudius
(96),
de
Philargyrus
(97)
soit
la
beniuolentia
et
la
fides
de
C.
Curtius
Mi thres
(98),
de
Clodi us
Phi letaerus
(99),
ou
de
C.
Avianus
Hammonius
(100).
Ils
résument
à
eux
seuls,
le
degré
de
disponibilité
des
affranchis,
leur
application
et
leur
promptitude
à
répondre
aux
appels
du
patron,
à
suivre
ses
ordres sans
limite,
comme
nous
pouvons nous en rendre compte
par cette affirmation de Cicéron à
Tiro en 50 av.
J.-C.
Innu1JIerabi l ia
tua
sunt
in
officia
d01Jlestica,
forensia,
urbana.
prouincialia,
in
se
priuata.
in
publica.
in
studi i5,
in
l i t t e r i s nostris (101)
L'année
50
justement,
dans
les
relations
entre
Cicéron
et
Tiro,
est
riche
en
enseignements.
De
retour
de
Cilicie,
terrassé
par
la
fièvre
quarte
qui
le
cloue
à
Patras,
l'affranchi
est
obligé
d'abandonner
son
patron.
Celui-ci,
sur
la route
menant à
Rome,
lui
adresse
un certain nombre de
missives,
attendrissantes
les
unes
et
les
autres,
à
l'exemple de
la première d'entre elles
((Je
m'i~gin~is vn
peu
plus
support~ble le
regret
de
ton
absence
;
mais
je
ne
puis
décidément
le
supporter;
et,
s i
fort
qu'il
importe
8
l!la
digni té
de
hâ ter
mon
arri ~rée a
Rome,
i l
me semble ëtre en
faute
pour m'être
séparé
de
toi.
Hais
tu
paraissais
décidé
a
ne
~roul oi r
repre~dre
l~
mer
qu' aprés
compl ete
con ~ral escence
je
t'ai.
approuvén
et
je
ne
change
pas
d'opinion,
S l
tl..!
--: 355 -
persistes dans la
tienne,
si
pourtant,
après
t'être
alimenté,
. 1
.!~
te
semble
pou~roir
me
rejoindre,
à
ta décision))
(102)
et
de
la
seconde,
expédiée
le
lendemain,
par
le
biais
de
Marion
({Je
ne
puis,
je
n'en
ai
~s
le
coeur,
t'écrire
ce
que
je
ressens
je
t'écris
seulement
que
la
joie
sera
bien
pleine
pour
moi
C01I111le
pour
toi,
si
je
te
~'ois au
plus
tôt
tout
à
fait
solide.
Le
troisième
jour
après
t'a~'oir quitté,
nous
avons
accosté
à
.41yz ia
c'est
un
endroit
à
cent
~'ingt
stades a~'ant Leucade.
.4
Leucade,
j e
peux ou
t'accueillir toi-même ou recevoir par Harion
une lettre de
toi))
(103)
que
suivent
dans
le
mème
élan,
toutes celles de
la
premiére
quinzaine
du
mois
de
novembre
(104).
En
bon
patron,
Cicéron
prend tout en charge,
y compris les soins de son libertus
({.
..
If
.
..aJ.s
instance,
111012
Tiro,
...te
te
prie de n'épargner la
dépense en nulle cnose
qui
soit
nécessaire à
ta santé.
J'ai
écrit à
Curius de
te remettre
ce que
tu demanderais.
.41.1
lredecin
aussi,
je
pense
qu'il
faut
remettre
quelque
chose
pour
encourager
son
zéle ...'
(105)
Cette
attitude
adoptée
déjà
en
53
lors
de
la
première
maladie
de
Tiro,
mais
quand celui-ci
était
encore
esclave
ferait
penser
sans
hésitation,
à
une
part
d'affection
de
Cicéron,
à
une
marque
d'attachement
et
d'humanisme,
détachée
de
toute
arriére
pensée.
Les
épanchements
de
l'Arpinate,
donnent
l'impression
d'une
détresse
profonde
et
dl une
sollicitude
patronale,
Où
seule
la
guérison
en
tant
que
telle,
paraît
au
plus
haut
point
intéressante.
C'est
ce
-
356 -
qu'inspire
également,
l'absence
du
terme
libertus
ou
libertinus
dans
toutes
ses
lettres,
absence
remarquée
selon
L.
Ross
Taylor,
même
dans
certains
épitaphes
datant
de
l'époque
impériale
<l06),
Si
l'on
ne
peut
exclure
la
réali té
de
l'attachement
du
patron
à
son
affrancbi,
sous-tendu
par
quelqu'affection
(107),
i l
ne
faut
non
plus
guère
oublier
l'extrême
importance
que
l'Arpinate
accorde
au
côté
productif
de
son
libertus.
Cette
confidence
à
Atticus,
révèle son état d ' e s p r i t :
«Je
vois
que
tu
te
soucies
de
Tiro.
Bien
qu'il
me
soit
infiniment
utile
qu~nd il
est
en
bonne
santé,
en
toute
espèce
d' affaires
ou de
travaux,
je souhai te sa guérison 1110ins
pour mon
intérêt qU'd cause de la
qu~lité de
sa
culture
et
de
la
délicatesse
de
ses
sentiments....
(108)
Même
s' i l
essaie
par
moments
de
le
voi 1er,
ce
besoin
lanci nant
revient
presque
souvent,
aff leure
la
pl upart
de
ses
lettres
et
semble
d' ai lleurs
l'obséder.
Bien
que
très
proche
de
son
patron,
Tiro
continue
à
être
pour
lui
(,',
ce
qu 1 un pro~rerbe grec appelai t
la
proue et
la
po L!pe.
ce
qu 1 un
dicton
hébreu
aur,~it
traduit
par
la
loi
et
les
prophètes,
1 1 hOJ1U!Je
de
confiance
et
de
ressource
sur
qui
l'on
comptai t
pour remettre l'ordre dans le chaos""
(109)
Ce
faisant,
sa
guérison
pour
la
reprise
de
ses
act i vi tés,
demeure
le
souhait
primordial
de
l'Arpinate.
L'emploi
du
terme
officia,
soit
clai rement
comme
ici
De
tuis
innumerabilibus
in
me
o f f i c i i s
e r i t
hoc
gratissimum
( 1 0 ) ,
soi t
allusi 'i,rement
comme
là
utilitatibus
t u i s
possum
carere
(111)
illumine
l'intensité
du
besoin.
et
la
profonde
de
Cicéron
de
se
voir
privé d'un homme
de
main aussi
utile,
D'où
l'usage
d' un
ton
impératifè,.t'
d'un
accent
autol-itaire,
',Té hic u l é '3
travers
des
not;ions
comme
di 1 igentia
(112),
di 1 igenter
(113),
not ions
qu i
rappell ent
«l'attention
6
apporter .....
{de
soin
scrupuleux 8
mettre
pour
-
357 -
la
réa1isatiDn
d'une
tâche
quelconque ••
(114)
comme
l'absolue
expédition quotidienne de lettres
. .
((.
Que
chaque
Jour
.4castus
sDi t
sur
le
pDrt
i l
se
trDu~rera
bDn
nDmbre
de
persDnnes
auxquelles
on
puisse
cDnfier
des
lettres,
et
qui
se
feront
un
plaisir
de
me
les
faire
par~renir
en
.mai ns
prDpres
... »
(15)
C'est
d'ailleurs
dans
ce
contexte
de
pression
que
Cicéron
associe
sans
nul
doute
certaines
de
ses
relations,
le
nous
ayant beaucoup plus de poids que
le simple je :
«Vois comme
tu
te
fais chérir.
Nous passions
deux
heures
Thyrréum
notre
hôte
Xénoménès,
t'aime
autant
que
s ' i l
a,rec
toi
i l
est
prêt
il
tout,
disait-il,
pour
toi
et
je
pense
qu'il
tiendrait
ses
promesses"
(116)
De
la
même
façon,
l'exposé
que
Cicéron
lui
fait
de
la
situation
politique
à
Rome,
apparaît
comme
une
incitation à
recouvrer ses forces
et
plus encore,
comme
une
façon de
lui
faire
prendre
conscience
que
sa
place
n'est
pas
à
Patras,
mais plutôt auprès de
lui,
à
ses côtés:
((.4vec
quel
péril
se
joue
notre sort,
de
moi,
de
tDUS
les
bons citoyens et
de
l'Etat
tout
entier,
tu
peux
le
connaître
à
ceci
nous
tHrOns
dbandonné
nos
maisons
et
la
patrie
e1le-mëme
ou
au
pillage
DU
aux
flammes.
La
chDse
en
est
~renue
au
poi nt
qu'à
moi ns
de
l ' inter~rention
d'un
dieu
ou
d'un
hasard
impré~ru notre perte est assurée.'.'
{Il?)
-
358 -
C'est
cette
incitation
:mêlée 'de
regret,
que
nous
trouvons
mentionnée
ici,
mème
s i
Cicéron
s'efforce
tout
de
même
de
ne
pas paraître trop contraignant
«En
ce
qui
te
cpncerne,
du
1110ment
que
tu
n ' é ! s
pu
être é!uprès de
moi
d~ns 1 e
temps où
tes ser~rices et
t~
fidélité
m'eussent été le
plus
désirables,
garde-toi
de
trop
te
hâter
et
de
commettre
l'imprudence
de
prendre
la
mer
malade
encore
ou
pé!r
J:IJauv'é!is
temps.
Jé!mais
je
ne
jugerai
que
tu
m'~rri~res trop
tard,
si
tu arri~res en bon point),'
(118)
Dans
un
autre
ordre
d'idée,
l'ambiguité
de
Dionysius
que
situe M.
Clavel
Levèque
«ç..1ua n t a u
Cé!S
de
Di onysi us,
i l
nous
me t a u
coeur
du
problè.Te
des
rapports
de
dépendance.
tels
qu' i l s
se
redéfinissent
dans
l ' instabi 1 i te.
Des
qu'il
émerge
pendant
cette
dure
période,
i l
est
situe
par
Cicéron
dans
1 '.5lJ!lbiguité,
cell e
me.we
de
son
statut
é!ffr.5lnchi
d'.4tticus
place
au
sertrice
de
Cicéron
dès
é!~'é!nt
Sé!
1 i béra ti on
<l19)
j u s t i f i e
l'ardent
désir
des
patrons
d'exploiter
au
maximum
leurs
liberti,
en
décidant
par
leur
cession
:même
à
des
amis
(120) ,
de
leur
f ai re
prof i t e r
de
leurs
compétences
et
de
leurs
connaissance:3,
de
bénéficier
le
mieux
possi ble
de
leur
personne.
L'ébranlement
de
Dionysius;
consécutif
aux
reproches d'Atticus,
«Aux
buitièmes
cé!lendes
a~~nt
1 ' A rr
....
...... ..... h~
-- _. ,.
;0
....' --.
t'ai
expédié
une
lettre
sur
Dionysius
l e
soir
du
..'Dème
jour,
~'oi ci
qu' i 1
Ill' arri Fe
en
persDnne.
Tu
as
su
l'ébranler
je
soupçonne,
car
quelle
autre
bypot.~èse
Il
est
~..'r.fji
qu'après
un
accès,
i l
1 Li i
est
...~ss--ez
-
359 -
ordinaire
de
s'en
repentir.
Nais
i l
n'a
ja~is
été
plus
fou
qu'en
cette
affai re))
<l2lJ
l ' i n i t i a t i v e
prise
par
l'Arpinate
de
le
tancer
dans
une
autre
l e t t r e
{{.'t[ai s
admire
~
bonté -
j'a ,rais jeté dans 1 e
paquet,
avec celle
que
je
t'ai
adressée,
une
lettre
violente pour lui
je désire
qu'elle
me
soit
rapportée,
et
c'est
la
seule
raison
qui
me
fai t
envoyer
à
Rome
JI!Dn
esclave
de
confiance
Pollux
je
t ' é c r i s
pour
que,
si
elle
t'a
été
remise,
tu
,reilles
8
me
la.
faire
rapporter))
{122)
montrent
combien
le:3
patrons
tenaient
absolument
à
avoir
à
leur
portée,
les
affranchis
et
à
ne
pas
autoriser
une
quelconque
dérobade
de
leur
part.
L'extrème
sévérité
de
César
{123)
et
d'Auguste
{124)
à
l'égard
de
certains
de
leurs
affranchis,
est
la
manifestation
du
catégorique
refus
des
patrons
quant
à
une
i nsubordi na t i on
de
leu r
part
et
quant
à
une
altération
de
l'imperium.
Elle
montre
jusqu'où
pouvait
a l l e r
le
pouvoir
des
patrons
sur
leurs
l i b e r t i
et
quelle
é t a i t
la résultante de
leur supériorité.
c)
Un exemple marquant de cet
imperium
la menace
de la rétrocession dans l'esclavage
L'imperium
du
patron
sur
l'affranchi,
démesuré
e t
inscri t
.
dans
les
limites
du
,Vs iurandum, lui donnait la possibilité
de
t i r e r
profit
des
capacités
du
libertus,
de
disposer
de
lui,
ainsi
que
de
son
savoir-faire.
Mais
i l
ne
' s ' a r r é t a i t
pas
là.
Il
pouvait
a l l e r
plus
loin,
jusqu'à
faire
luire
à
l'affranchi,
la
menace
de
se
voir
effectivement
ramené
à.
sa
condition
d.épart
l'esclavage.
En
principe,
cette
pratique
n ' é t a i t
pas
courante.
De
plus,
e l l e
n ' é t a i t
que
peu
appliquée,
d'autant
plus
que
{{rien,
ni
dans
le
ius
ciuile,
-
360 -
ni
dans le droit
prétorien.
ne permettait au patron de
faire
retomber
un
affrancbi
en
ser~ri tude.
(même)
sous
prétexte
q u ' i l
.:;l
COI!1J!1is
des
~rols
ou
mB.nqué
d
l'obsequiu.ml.l
(125).
Cependant,
certains
patrons
avaient
la
latitude
de
se
le
permettre,
car
e l l e
figurait
dans
un
édit
prétorien
datant
de
Livius
Drusus.
Que
prescrivait-il
?
L'in\\ralidité
de
la
manuDdssio
apud
se.
Cicéron
le
s a i t
très
bien
et
le
ment i onne
d'ai lleurs,
en
ne
retenant
que
t r o i s
formes
d'affranchissement.
di tes
légale'3
Si
neque
censu.
neque
uindicta.
neque testamento liber s i t ,
non est
l i b e r
(126)
Il
emplois
même
l'adverbe
recte
(127),
pour
i ndiquero
leur
justesse
et
leur
conformi té
à
la
j uridict ion.
L' i nval idi té
de
la
manuDissio
apud
se,
viendrai t
donc
de
ce
qu'elle
ne
s ' i n s c r i r a i t
dans
aucune
de
ces
trois
formes
et
de
ce
qu'elle
ne
Î e r a i t
pas
intervenir
parallèlement
à
la
uoluntas
domini,
l ' a v i s
de
l'Etat
ramai n
dans
la solenni té
de
ce
r i te
de
passage
(128)
et
ce,
par
le
truchement
du
censeur
(129)
,
du
préteur
ou
du
consul
(130)
ou
encore) de
cinq
témoins
du
libripens et du
familiae emptor
(131).
Est-ce
pour
cela
que
pas
un seul
affranchissement
d'esclaves
de
Cicéron
ou
même
de
ses
relations,
n'est
présenté
comme
ayant
sui\\'i
la
procédure
o f f i c i e l l e
?
Il
serai t
inexact
de
l'affirmer.
En
effet,
nous
voyons
mal
comment
tous
les
patrons,
conscients
des
qualités
de
leurs
affranchis
et
de
l'opportunité
de
l'élargissement
de
ceux-ci.
se
seraient
complus
dans
une
pratique
peu
conforme
à
la
loi,
seu lemenk
pour
faire
planer
l'incertitude
de
la
liberté
et
la
menace
de
la
servitude.
Nous
ne
pensons
pas
que
Quintus
par
exemple,
convaincu
de
la
f i d e l i t a s
de
Statius,
a i t
voulu
se
livrer à
un
tel
calcu l
machiavé l iq ue
ou
que
Ti b.
Gracchu'3 en
214
a i t
cherché
à
ne
pas concéder
la
libertas définitive
aux
uolones
engagés
contre
Hannibal
(13:3).
Certes,
nous
savons
qu'alors que
la
manumissio censu conférait
uniquement
ce
que
nous
pourrions
appeler
une
pré'30mption
de
la
ciuitas
a
en
croire
Cicéron
-
361
({Hais.
puisque
le
cens
ne
garanti t
pas
le.
possession
du
droit
de
cité,
puisqu'il
rét~le seulement que le recensé s'est par le
fai t
comporté dès lors en ci toyen
. . . ))
(134)
contrairement
à
la
uindicta,
mode
le
moi ns
mal
commode
et
ayant
f a i t
l'objet
d'une
énorme
publicité
par
sa
vulgarisation
dans
quelques
pièces
de
comédie
t e l l e s
que
le
Curculio de
Plaute
Em,
istoc uerbo uindictaJII para (135)
ou
les Satires d'Horace
Que.m ter uindicta quaeterque
I.mpasi ta
baud
u.mqua.m
.misera
formidine
priuet
?
( 3 6 )
parce
q u ' i l
présentait
moins
de
lourdeur
et
moins
de
contrainte
(137),
mais
à
la
fin
de
la
République,
les
maî tres
n'employaient
ni
l'un,
ni
les
autres
non
pas
par
simple
volonté
de
laisser
suspendre
sur
la
tête
de
leurs
affranchis
une
menace
permanente
susceptible
de
les
rendre
doci les
et
de
forcer
leur
soumission,
étant
donne
qu' i l s
savaient
sans
doute
quelles
sanctions
le
patron
pouvait
appliquer
dans
le
cas
où
i l s s'avisaient
à
ne
pas
respecter
leur
iusiurandum
(137bis).
La
régularité
de
la
manumissio
apud
se,
s'explique
sans
nul
doute
par
le
refus
des
ma.ïtres
de
s'astreindre
à
des
procédures
jugées
peut-être
contraignantes,
surtout
pour
le
census qui
ne
se
ten;:li t
que
tous
les
cinq
ans,
ou
pour
la
uindicta.
qui
obligeait
le
maître
désireux
d'élargir
son
esclave,
d ' a l l e r
,jusqu'à
Rome
trouver
un
magistrat
de
rang
prétorien.
N'est-ce
pas
de
cette
façon
que
l'on
peut
expl iquer
la
décision
prise
par
Quintus
d'affranchir
Statius
?
Ce
n'est
pas
en
tant
que
magistrat
lui-même
q u ' i l
aurait
procedé
ainsi,
une
telle
possibilité
n'ayant
commencé
à
être
tenue
en
compte.
'=tue
sous
l'Empire,
comme
nous
l'affirme J.
Macqueron
-
362 -
(l'En
pri ncipe,
lorsqu'un
magistrat
désirai t
faire
une
opération
qui
nécessitait
un
acte
de
juridiction
gracieux,
i l
det'ait
s'e.dres-
ser
~
un
autre
magi stra t
jouissan t
d'une
dignité
supérieure
la
sienne.
Com.me
l'empereur
n'~
pas
de
supérieur,
. 1
.I~
fut
admis
dés
le
début
de
l'Empire,
qu' i l
pou tra i t
tralablement
affranchir
ses
esclat'es
1 ui -méme
i l
le
faisai t
sans
remplir
les
formali tés
de
la
uindicta
et
cet
affranchissement
" dom ",
l e s
mêmes
e f f e t s
qu'un
affranchissement
solennel
per
uindicta• .I.l
(138)
Si
les
maîtres
utilisaient
ce
procédé
de
la
manumissio
apud
se,
c'est
pa~e
q u ' i l s
savaient
que
même
n'ayant
pas
un
caractère
officiel,
un
affranchis:=:ement
restait
tel.
Un
esclave
fai t
affranchi
inter
amicos
ou.
per
mensam,
n'en
é t a i t
pas
moins
un.
Et
tant
que
r-ien
d'extrêmement
grave
n'entachait
ses
rapports
avec
le
pa~ron,
i l
ne
courait
pas
le
risque
de
voir
sa
liberté
remise
en
cause.
Le
fait
que
Cicéron
ait
attendu
d'étre
victime
d'une
ingratitude
de
la
part
de
deux
de
ses affranchis
-
un
anonyme
et
Chrysippus
-
pour
·déterrer
le
vieil
artifice
juridique
ordonnant
de
ramener
à
leur
esclavage
i n i t i a l
ceux
dont
la
libération
n'avait
pas
suivi
le
cours
norma~
de
la
loi,
l ' a t t e s t e
simplement
:
1"S'ur
Chrysippus
pc:..!rtant
de
l ' a ut re
j e
m'étonne
moi n5,
un
tâcheron
bien
que
lui
dépasse
les
bornes
~e l'improbité -,
~is de
ce
C'"
f
I r "
.
vague
frottis
de
l i t tera t ure
m'a
f = .; +-
ge n t i me n t a c c u e i 1 1 i r,
honorer.
quitte
mer:.
f i l s
à
mon
insu.'
Je
ne
CO!.!1pte
point
ses
autres
fautes.
dont
on
J'I} , â ~;ri se ,
beaucoup
de
f au tes,
je
ne
-::compte
-
363 -
pas
ses
vols
mais
sa
fuite,
non
Je
ne
le.
supporte
p.as,
rien
ne
paraî t
plus
. ,
1
Cr~JIllne~ ,
.4ussi
me su i s - Je
ré[éré à
ce
~ri eux
texte
(de
préteur
dit-on)
"sur
l'affranchi
qui
ne
prêterait
pas aide
de
la
même
façon
"
i l
l'lIe permet de
dire que 1Je
n'~i
pas
donné
la
liberté
8
ces
gredins,
,j'autant plus qu'il
n'y a~rait alors personne
st.'r
pla.ce
pour
sanctionner
juridiquement
1 eur aJfranchissement »
(139)
Il
Y a
COItl1l1':
une
~.rolonté de
se
venger,
de
montrer
qu'il
est
patron
et
que
les
affranchis
n'auraient
pas dû
adopter
ces
,agi8sements.
Par delà-même,
Cicéron met
en garde
les mau~.rais
affranchis contre
l'éventualité d'un retour à
leur condition
originelle
et
indique
le
caractère
intransigeant
de
sa
force.
Il
ouvre
une
bréche
dans
l'infériorité
des
liberti,
en montrant
leur instabilité à
la fin de
la République.
II - L"AFFRANCHI,
UB ETRE EXCLU DE L'IBGEBUITE
===================~=============~============
Tout
esclave agrégé
à
la
cité
par
le
bienfait
du
patron,
ne
pouvait avoir
la
prétention d'être
ingénu,
C'est ce que
nous
avoue H.
Lemonnier
:
«On
appelait
ingénus
(ingenui),
ceux qui
dés
la
naissance,
a~'aient
été
libres,
c'est-à-
dire
ceux
dont
le
père
ou
la
mére
n'était
pas cu n'était plus esclave à
ce moment.
Les
affranchis
ételient
donc
tous
c'eU:5i"
qui
n'étaien.t
pas
nés
1 i bres,
et
l'étaient
ensui te
devenus.
Par
rapport
eu ...Y
escl~c;"es,
le
-terme
de
liberi
leur
était
applicable.
les
di st:f. nguer
des
i ngenus-,.
cn
celui
de
libertus,
libertinus"
(140)
•
-
364 -
reprenant
d'une
certaine
manière.
la
classification
retenue
par
le
juriste
Caius
( 4 1 ) .
Ce
distinguo
entre
les libertini
et
les
ingenui,
n'est
nulle
part
clairement
abordé
par
1 '.4rpinate.
Il
n'y
accorde
pas
une
attention
particulière.
Son
silence,
ne
~roi1e pas cependant,
la
claire
césure
entre
eux,
au
sein
de
la
société.
Il
laisse
entière
l'existence
dl un
fossé,
profond
tout
de
même,
qui
se
ma t é ria 1 i se
pa r
l'infériorité
des
libertini,
expression
de
l'insuffisance
de
tous
les
droits .reconnus
au
ciuis
optimo
iure,
comme
le
reconnait
(encore)
H.
Lemonnier:
\\
((Bien
que
l'affranchi
soit
assi mi 1 é
aux
autres
hommes
libres
dans
sa
condition
pri~rée,
qu'il
jouisse
de
tous
les a~rantage5
que
la
société
assure
8
ses
membres,
et
parfois
l11ême
des
différents
pri ~ri leges
que
confère le droit
ci~ril,
une distinction
bien
tranchée
est
cependant
faite
entre
lui
et
l'ingénu.
Elle
éclate
aux
yeux
dés
qu'on
passe
du
droi t
pri vé
au
droi t
pu!:Jl i C.
1.-8...
tout
est
infériorité,
incapacite.
Inegalite",>
(42)
Sur quoi
se
fonde
cette
i n f é r i o r i t é ?
1 -
LE XAL D"AVOIR ETE ESCLAVE
A...,roir
été
escla\\re
n'est
guère
un
point
d' honneur.
Bien
que
se
réclamant
par
essence
de
l ' humanisme
<l43 .. ,
bien
que
tournés
vers
la
ferme
\\rolonté
d'intégrer
les
peu pl e2.
étrangers
à
leur
cité
et
cela
sur
la
base
des
merita
organe
de
sélection
par
exce 11 eno:::e
les
Romai ns
le
s.5.vaient.
Tous
étaient
conscients
de
la
déchéano::e
qu'impliqua.it
la
ser-,ritude,
de
la
dépersonnalisation
ou'elle
de
sa
"::omplete
déshumanisat ion.
La
réduction
dans
la
servitude,
3.<r}·.~it
un
-
365 -
effet
tellement
déshumanisant.
que
même
l'homme
libre,
s ' i l
lui
a r r i v a i t
d'y
tomber,
ne
pouvai t
après
la
manumissio,
recouvrer
son
état
origi nel.
Il
r e s t a i t
inférieur,
et
cela
ne
le q u i t t a i t
plus
{{ Il
pou tra i t
arri trer
qu' un
homme
ne
1 i bre
tombât
dans l'esclat~ge, par suite d'un
fait
de
guerre
ou
d'un
rapt
la
.lllt;jDuJJlissio ;mê;me
ne
lui
restituait
pas
les
atrantages
de
sa
naissance,
car
elle
le
plaça.i t
dans
une
condi t i on subordonnée.'.'
044 )
Le
terme
de
gentiles
(145),
résume
d ' a i l l e u r s
la
sacro-
sainteté
de
l'ingénuité.
Peuple
libre,
sou,Terain,
les
Romains
estimaient
de
ce
fait
q u ' i l
é t a i t
mal
venu
d'associer entièrement
à
leur
destin,
ceux
qui
n'avaient
pas
eu
la
même
f i l i è r e
qu'eux,
qui
n'a,raient
pas
de
dignité
et
qui
avaient
perdu
le
contrôle
de
leur
être.
Derrière
cette
exclusion,
i l
y
a
la
peur
de
la
contagion
des
s~rates
serviles
qu'étaient
encore
censés
porter
les
l i b e r t i .
En
effet,
les
ingenui
croyaient
fermement
qu 1 ayant
pris
contact
pendant
une
grande
partie
de
leur
vie
avec
un
monde
grouillant
d'infirmités,
de
u i t i a
aussi
corrupteurs
les
uns
que
les
autres,
ayant
abordé
les
i nsti nets
servi les,
les
affranchis
se
trouvaient
après
la
consommation
de
la
manuDli.ssio,
dans
l'incapacitè
matérielle
de
s'en
défaire,
de
se
purifier
et
d'adopter
toutes
les
caractéristiques
de
la
civilisation.
Les
bribes
de
la
servitude
restaient
foncièrement
incluses
dans
leur
subconscient
et
faisaient
partie
de
leur
existence.
Il
Y a donc là comme une sorte de
préj ugé
que
colportaient
les
Romains
à
l'égard
de
ceux
qui,
conune
l'affirme
L.
Ross
Taylor,
had
the
b100d
of
sla tres
in
their
(l45)
et
qui
enracine
en
eux,
rendait
presqu'inconcevable,
toute
insertion
automatique
des
affranchis
dans
leur
cercle
({rien"
d i t
H.
Lemonnier,
(n'eff-acera.
1~
t.§.c ..:~~e
or-iginel1e
de
l'es-c'l~"T~ge,
T'i e!1,
pas
rl!ème
.le.
trolonté
clu
maitre"
(14-7).
Ce
n'est
pas
un
hasard
si
-
366 -
icéron,
pour
tancer
Verrès,
arrogant
devant
les
affranchis,
emploie
le
superlatif
révélateur
de
tenuissimus
pour
désigner les liberti
:
Superbia
uero
quae
fueri t
quis
ignorat
?
quem
ad
1110dum
i s t e
tenuissimum
quemque
contempseri t.
despexeri t.
l i berum
esse
numquam duxerit
?
(148)
De
mëme,
dans
une
lettre
à
Atticus,
i l
lui
ra ppe 11 e
la
bassesse
de
son
affranchi
Dionysius,
en
lui
avouant
les
foudres
qu'il
s ' é t a i t
attirées
de
la
part
de
Quintus et
des
autres,
quand
i l s
furent
mis
au
courant
de
toutes
ses
gentillesses à
son égard
.3. ~'ons- nous
Ja.11l8.i s
refusé
ni
consi-
déra.tion,
ni
égards,
ni
même
ces-
reco!~mew-
d8.tions
qui
font
accueillir partout
un
~l).o"TJ!1e
?
d'aussi
basse
condition
de
préferer
subi r
1 es
reproc~lJes de
mon
frere
quintus
et
de
tout
le
!!1Onde
er.
genéral
plut6t
que
de
ne
p.3.S le
combler
de
lou.3.nges.
et
de
prendre
la.
peine
de
i3ire
répé t i teur
de
.'11on
fi 1 s
et
de
mon
ne t'eu
plutôt
que
de
chercher
un
a.utre
l!1.8.itre
.'.'
(149)
Enfin,
parlant
de
L.
Equitius,
tribun mort
en
100
av.
J. -Co ,
l'Arpinate n'hésita
pas à
recourir à
son origine
porteuse de
flétrissure
i l l e
ex
compedibus
atque
ergastulo
{149bis).
Pourtant,
en
regardant
de
très
près,
au
premier
abord,
on
pourrait être amené à
penser que vers
la
fin de
la
Republ ique,
l ' intégra tian
totale
des
affranchis
dans
la
société
romaine,
est
une
realité
acquise.
En
64
a',' . .}. -\\_. ,
par
exemple,
dans
son
petit
manuel
de
campagne
électorale
üresse
par
(;;':Ouintus a.
l'intention d.e
son ainé,
les aiiranchis
-
367 -
figurent
parmi
ceux
que
l'Arpinate
se
doit
d'avoir
absulument dans sa familiarité,
parce qu'influents:
(,'Beaucoup
de
citadins
o i s i f s
sont
capables
d'action,
bieD des affranchis mêlés é! la
trie
du
forum
ODt
de
l'influence
et
satrent
s'eD
sertrir.
Ceux
que
tu
pourras
atteindre
soi t
directeJ11ent,
soit
par
des
amis
C01!ll!!uns,
ne
!!1énage
pas
ta
peine
pour
en
oF
•
~a.lre
des
part i saDS
eD thousiastes,
entroi e
leur
des
émissaires,
J110ntre
leur
que
le
sertrice qu' i l s te rende12t
est é!
tes yeux des
plus c012sidérables»
(150)
'Cette
impression
est
confortée
d'abord
par
la
solide
assise
sociale
de
certains
affranchis,
qui
à
l'instar
de
P.
Umbrenus,
chargé
par
les conjurés de
63 de
ratisser
toute
la
lie
en
mê me
temps que
P .
Fur i u s e t
Q.
An ni u s ehi l 0
(15 1 ),
a
su
se
hisser
au
rang
de
négociant,
ayant
par
là
la
capacite
de
((S'occuper
tout
.;i
la
foi s
en
Gaul e
des
banques
et
du
cOl1!.T[]erce du
bl é
.......
(152)
Elle
l ' e s t
également
par
le
poids
dont
i l s
bénéficièrent
de
plus
en
plus
à
la
fin
de
la
Républ ique,
même
sur
la
vie
politique,
en
marquant
de
leur
empreinte,
son
déroulement,
du
fait
de
leur
influence
financière
conune
le
la.isse
entendre non seulement L.
Ross Taylor
((.4
new
class
h'dS
ri s i ng,
e!
cl as=:
cf
gre8 t
tral ue
to
the
nobl es
in
the
~nagment
of
tbeir
s t a t e s
and
their
business.
3
cl-ass
replaced
the
tranishi12g clie12ts,
~ny cf whom
bad
acquired
land
and
interests
of
their
own ....
(153)
mais
aussi
N.
Rouland
dans
une
analyse
sur
l'5ugmenta-l;ion
numérique des affranchis:
-
368 -
HOn
peut
penser
que
cette
augmentation
numérique
du
groupe
des
affranchis
s'accom-
pagne
pour
eux
d'une
certaine
promotion
économique,
dont
la
source
provient
de
leur
liaison
avec
ces
milieux
d ' a f f a i r e s
qui
commencent
à
na i t re
e t
à
se
dé\\relopper
au
cours du
siècle suivant
. . . »
(154)
Kais,
est-ce
pour
,:;ette
raiso~
uniquement
que
Q.
Cicéron
demanda
à
son
frère
de
s'attacher
absolument
entre
autres
les
affranchis
?
(155)
Les
qualités
des
affranchis,
s i
l ' o n
en c r o i t S.
Treggiari,
ne sont
pas à
é c a r t e r :
"'Tbe
freed.~n
bad
bad
to
de~relop
before
manumission
qualities
wbicb
might
ser~re bil!!
well
in politics . . . »
(156)
des
qualités
sans
doute
qui
pesèrent
beaucoup
dans
leur
super-puissance,
qu'étale
cette
plainte
de
Ti te-Li \\re
en
parlant
des humilli
Hum I l i lIJOrU111
in
1.I2lDU
cami tia
essent
( 156bis'
Kais
en
réali tè,
i l
n'en
est
rien.
Cette
incitation,
ne
s ' inscri t
que
dans
le
cadre
de
la
\\rision
électoral i s t e
de
Quintus.
consistant
à
ne
négliger
aucune
\\roix
possi blet
à
s'attacher
le
concours
de
tous
les
votants,
en
faisant
abstraction de
leur s t a t u t
et
de
leur circonscription
,.. Bien
qu'il
soit
nécessaire
d'a~roir acquis
au
préalable
des
éH!!itiés
solides
qui
vous
donnent
de
l'assurance
et un appui
effectit'....
précise
+- i l
,-,cependant
le
1l1O.ment
. . . . . . . . . . . .
l
même
de
la
brigue peomet
d'acquérir
des !5L'1!itiés
fort
nombreuses
et
:fort
utiles.
En
effet,
parmi
tant
de
des3grements,
la
situation
de
can-
36°
didat
présente
du
.'11oins
cet
enrantage
tu
peux sans honte,
ce
que
tu
ne
saurais
faire
dans
la
~rie
courante-,
admettre
qui
que
tu
ton
a111i tié,
des
gens
que
tu
ne
pourrais,
dans
un
autre
temps,
:in~riter
à
être
tes
amis
sans
que
ta
condui te
parût
déplacée
en
période
él ectoral e,
au
contraire,
si
tu
ne
1 é
fai sai s
pas,
et
auprès
de
beaucoup
de
personnes
et
d'une
façon
act i ~re,
tu
semblerais
piétre
candidat).'
(157)
Ai nsi
les
affranchis
constituent
un
ordo
(158),
1
même
s i
leur
si tuat ion
est
instable,
ce Ile-ci
ne
"dépendan t
que
de
l'Etat,
de
la
~rolonté des
censeurs,
et
plus
tard,
de
celle
du
législateur et
donc
du
peuple).'
(159).
Certes,
"toward
the
freed.'11en,
Rome
was
notably
.'11ore
generous
than
.4 thens
and
other
greek
cities.')
(159bis)
mais
elle
les
tenait
bas
dans
la
société.
La
manière
dont
Cicéron
se
réjouit
en
rappelant
la
mesure
prise
par
le
pére
de
Tibérius
et
Caius
Gracchus
pour
ramener
les
af franchis
en
169-168
av.
J. -Co
des
t r i bus
rurales
aux
tribus
urbaines
où
leurs
voix
désormais
ne
devaient
représenter
qu'une
très
faible
portion
-
quatre
sur
trente-cinq si
l'on en croit Cl.
Nicolet
(160)
({Je
me
contenterai
de
ci ter 1 es deu:-... hommes
('4ntoine
et
toi
Crassus
exceptes)
les
plus
éloquents
et
que
j'aie
ja~is
entendus
Ti béri us et
Cai us Gracchus.
Leur pere,
ho.'11me
sage,
homme gra~~,
mais sans aucun
talent
de
parole,
assura
cependant
en
plus
d'une
circonstance,
et
surtout
comme
censeur,
le
salut
de
la
Republique.
I l
n'eut
pas
besDin
de
ressources
d'un
discours
étudie
un
ge.=:te,
un
.!1!ot,
lui
sLlfIirent.
F'our
taire
passer
les
affranchis
dans
les
tribus
-
370 -
que
nous
a~'ons
tant
de
peine
à
maintenir
aujourd' bui,
serai t
depuis
longtemps
bien
morte pour nous ....
(161)
en est
un indice non négligeable.
De
la
même
manière,
i l
ne
faut
pas
considérer
les
di verses
interventions
des
affranchis
dans
l'armée
romaine
pendant
plusieurs épisodes de
l'histoire de
la cité,
comme
une
large
ouverture des
légions à
leur
intention.
Bien sûr,
on les vit
en
217
singulièrement,
faire
partie
des
troupes,
surtout
pour
ceux
qui
avaient
l'âge
mi litai re
et
les
enfants
(162).
Mais
les
portes
de
la
légion
leur
étaient
hermétiquement
f'
•
_ermees,
seules
restant
ouvertes,
celles de
la
marine
(163) ,
secondaires parmi
les unités de
bataille de
l'Urbe
(164)
et
donc,
objet de dérision:
({Les
Romains
méprisent
la
!11er
parce
qu'ils
ne
la
connaissent
pas
ou
peu.
Cette
ignorance
fait
que le
Romain sous-estime les
dangers
que
présente
la
na~'igation,
et
la
aux
classes
i nféri eures
de
la
population.
.4i nsi ,
le
soldat
romain
est-il
celui
qui
se
bat
sur
terre,
puisque
1 e
Romai n
estime
que
ce
sont
1 es
comba ts
terrestres
qui
exigent
le
plus
de
courage,
et
qu'être
miles
romanus,
c ' e s t
a~'ant
tout
être
capable
de
uirtus,
alors
que
les
conflits
na ~'als
peuvent,
sans
grand
incon~~nient, étre abandonnés a des éléments
étrangers ou sans valeur.'.'
(165)
De
plus,
ces
levées
n'avaient
lieu
qu'à
des
moments
de
désarroi,
devant
l'avancée
ennemie,
à
l'exemple
de
cette
annee 296 marquée par la percee des Samnites
:
-
371 -
({On
annonça
que
l'Etrurie
a~"ait
pris
les
armes,
que
Ge1lius
Egnatius,
général
des
Sa.mnites
poussa.it
les
o.'!1briens li
la
ré~"olte
et
cherchait
à
prix
d'or
l'alliance
des
Gaulois.
Le
Sénat
épou~"anté
de
ces
nou~"e11es,
fi t
proclamer l ' é t a t
d'urgence
et
ordonna
des
1 e~"ées
en
IDâsse.
On
fi t
prêter
serment
non
seulement
aux
hommes
de
naissance
libre
et
aux
jeunes
gens,
11JéJ.i s
encore
on
forma
des
cohortes de réser~"istes
et on enrôla
des affranchis))
{166)
La dissociation
par
le
diuus
Augustus des affranchis
et
des
soldats de
naissance
libre,
les deux
fois
pendant
lesquelles
. i l
les
enrôla
pour
défendre
les
colonies
voisines
de
l' III yricum
et
pour
garder
la
ri ve
{gauche)
du
Rhi n
(167).
n'est
que
le
prolongement
d'un
état
d'esprit
solidement
installé
chez
les
Romains de
la
fin
de
la
République.
C'est
pourquoi
l'argumentation avancée
par
N.
Rouland qui
consiste
à
dire que si
les Romains écartaient
les liberti,
des
levées
régulières
et
des
légions,
c'est
parce
qu'ils
ne
comptaient
pas sur
leur
engagement
total
{168),
n'explique
pas
le
fond
du
problème,
qui
est
celui
de
l ' é t a t
psychologique
ayant
toujours
animé
les
ingenui.
En
se
sentant
Romains
à
part
entière,
ces
liberti
auraient-i Is
réellement
trouvé avantage
à
ne
pas défendre
la
patrie qui
désormais leur appartenait
Il reste encore à
le prouver.
Quels
qu'ardents
que
pussent
être
leurs
efforts,
dès
lors
qu'ils a\\'aient
transité
par
l'esclavage,
leur
infériorité
ne
disparaissai t
jamais.
Elle
étai t
ineffaçable.
Et
Cicéron
ne
se
prive d'aucune
occasion
pour
rappeler
la
déchéance
de
ce
statut,
même
à
ceux
qui
comme
Marc
Antoine,
vivaient
maritalement avec des femmes nées d'affranchis:
«Si
tu
as
reveille
ce
souvenir,
c'est,
je
pense,
pour
te
faire
bien
~~ir de
la
Classe
-
3)'2 -
sociale
la
plus
basse
en
rappelant
à
tous
que
tu
as
ëté
le
gendre
d'un
affranchi,
et
que
tes
enfants
étaient
les
p e t i t s - f i l s
de
l'affranchi
Q.
Fadi US))
(169)
Ainsi
rabaissés,
ces
affr'anchis,
en
dépi t
de
la
valeur
i n t r i nsèque
de
certai nos
d'entre
eux,
ne
représentent
sur
le
plan
social
qu'une
portion
congrue,
puisqu'avec
la
plèbe,
i l s
font
partie
de
ce
q u ' i l
appelle
les
ceteri
ordines
{169bis) .
Cette
déchéance,
objet
de
r a i l l e r i e ,
prend
un
relief
particulier,
quand
quelqu'affranchi
présente
des
défauts.
A
ce
moment,
se
déploie
tout
le
sarcasme
de
l'Arpinate~son
accent
moqueur.
Alors
que
vis-à-vis
de
Dionysius
qui
resta
de
marbre
devant
ses
marques
d' honneur,
répondant
négati-
vement
à
sa
demande
de
venir
auprès
de
son
fi l s
et
de
son
neveu
(i.
Et
quelle
l e t t r e
ne
lui
a~Tais-Je pas
écri te,
dieux
i DJ..mortel s
témoignan t
de
combien
de
considération,
de
combien
d'atta-
chement
On
eùt
d . +-
.1 v
que
j e
s o l l i c i t a i s
de
un
Di céarque,
pardieu,
ou
un
Aristoxène,
non
le
plus babillard des hommes
et
le
1!lDins propre
à
enseigner.
Nais
s ' i l
a
bonne
mé1!lDi re.
i l
con~Tiendra
que
j ' a i e
la
mei 11 eure.
.4
1 ettre
i l
répond
cOI!ll!!e
TP
..J
-
n'ai
,ja~is
fél i t
~L.rcun
de
ceux
pour
lesquels
..le
refusais
de
plélider.
Car
j'ajoute
toujours
"si
je
puis",
"si
une
autre
cause
dont
j e
me
suis
déjà
ch.!:1rge
ne
m'en
e.wpèche
pas"
Il
n'est
poi n"t
à ' élccuse
si
bumbl e,
si
dégrélde,
s i
coupable,
si
antipathique,
qu'on
le
suppose,
éluquel
j'aie
di t
un
non
aussi
decisif
que
lui
et
sans la
moindre 3ttenuation
..
.~.t
<17CI :i
-
373 -
et
allant
jusqu'à
ne
pas
leur
prêter assistance
-
Atticus et
lui
-
au
dêbut
de
la guerre civile
« ...
Quant à
ce qu'il
eut
dû
faire
du
moment
que nous f~yions,
et
~
ce
qui
eût
été
digne
d'un
homme instruit
et
d'un ami,
qui
surtout
en étai t
pri t'é.l.1 (171)
i l
réagit
par
un
nihil
cognoui
ingratius,
in quo uitio nihil
mali non inest
(172)
ou
par un simple
«je n'en réclame pas tant d'un Grec.'.i
(173)
Où
semble
se
l i r e
une
réelle
passivité,
teintée
même
d'indifférence,
i l
de<,,rient
plus aigre
à
l'égard d'affranchis
rapaces,
de
c:eux
qui
dotés
d'un
certain
pou~oir grâce
a
leurs
patrons,
en
profi tent
pour
écorcher
les
ingénus
et
les
réduire
a
leur
merci
par
des
exactions
de
tous
genres.
Non
seulement
l'origine
grecque
est
mise
en
a\\'ant
et
cela,
de
façon
insistante
et
appuyée,
à
l'exemple
de
ces
reciperatores
de
la
cohors
praetoria
de
Verrès,
Cornelii
de
fraîche
date
({ .'t{a i s,
1
•
~ U1,
i l
leur
imposait
le
medecin
Artemidore Cornelius et le peintre
Tlépoleme
Cornelius,
et
d'autres
récupérateurs
de
.1.a
même
espece,
dont
pas
un
n'étai t
ci toyen
romain
tous
étai ent
des
Grecs
s,51cri 1 èges,
connus
d'ancienne
date
pour
leur
improbite
et
qui
tout
a
coup
étaient
det'enus
des
~.
1 ••
corne~ll
'.1
(174)
mais
aussi
l'ironie
sous
sa
forme
la
plus
truculente
vient
au
secours
de
l'Arpinate.
ajoutant
plus
de
piquant
a
sa
langue.
C'est
elle
eS:3entiellement
comme
disait
A.
Haury,
qui
charge
d' aC'cuei 11 i r
l'a d t'ersa i re ,
et
de
le
reconduire
bien
[ratte
sur
un
ton
qui
frôle
-
374 -
1 ' indigna t ion.!.!
(175:' .
Nous
nous
en
rendons
compte
quand
l ' Arpi nate
t r a i te
du
cas
de
Chrysogonus,
cet
affranchi
dont
nous
avons
déjà
signalé
les
atrocités.
A
la
différence
de
Pline
l'Ancien
qui
rappelle
son
ignominieuse
origine,
ne
comprenant
pas
qu'un
être
aussi
infâme
ai t
pu
être
déchaî né
pour se
lancer
à
l'assaut
des
ingénus
Tale.
in
catasta
uidere
Chrysoganu.
Sullae
aliosque
deinceps
qUDS
enUHJerare
i a .
non
est,
sanguine
Qui ri tium
et
proscriptionum
licentia
ditatos.
Hoc est insigne uenaliciis
gregi bus
opprobri umque
i nsolentis
fortunae
(76)
l'Arpinate s'appuie sur son nomen
Venio
nunc ad
illud
nOHJen
aureum Chrysogoni
( 7 0 )
façon
comme
une
autre
de
montrer
que
l'affr-anchi
ne
vaut
rien
par
lui-même
et
que
seul
le
nom
lui
procure
cette
auréole
qui
lui
permet
de
tenir
tête
aux
ingenui.
Ce
faisant,
l'Arpinate
déstabilise
l'affranchi,
en
lui
concédant
une
place
à
part
dans
le
groupe
de
ses
pairs,
une
place
qu i
i r a
s'abaissant,
quand
i l
recourra
à
un
argument
connotant
la
déchéance
la
plus
exécrable
la
basse
moralité.
2 -
LA BASSE MORALITE,
MEILLEUR ARGUMENT D' IHFERIORISATIOH
Vis-à-vis
de
ces
affranchis
rapaces,
l'invocation
de
l'origine
grecque
ou
l'usage
de
l ' i r o n i e ,
ne
suffisent
pas à
Ciceron.
Ce
ne
sont
d ' a i l l e u r s
que
des
atouts
plus
ou
moins
légers
et
donc
sans
grand
effet
avilissant.
Aussi,
ne
s'al-rëte
t - i l
pas
là.
Pour
inférioriser
ce
type
de
l i b e r t i
auxquels
i l
voue
une
haine
viscérale,
i l
affûte
toutes
ses
-
375 -
armes
et
ut i l i s e
la
plu s
noc i ve
la
basse
moralité.
Nous
voyons
quelle
portée
elle
a,
lorsque
"'oulant
j u s t i f i e r
la
collusion
entre
Verrès
et
Hortensius,
l'Arpinate
associe
également
les
esclaves et
les
affranchis dans
les
turpitudes
du
préteur de
Sicile
«Oui,
je
\\reUX
le
croire
s i
ce
n'est
pas
son
énergie,
son
activité
indl..'!strieuse,
son
honnêteté,
sa
chasteté,
ce
sont,
d'autre
part,
sa
conversation,
ses
connaissances
de
/
lettré,
se.
politesse
qui
ont
pour
\\rous
tard
de
charme.
Rien
de
tout
cela
au
contraire,
le
plus
grand
déshonneur
et
la
plus
grande
turpitude,
aussi
bien
qu'une
sottise
et
une
grossiereté
singulières,
COU\\rrent
toute
sa
personne
comme
d'un
endui t.
Si
quelque
1JJ8. i son
s'ou \\rre
pour cet
homme,
cette
maison
semble
t-elle
s' oU't'rir-
ou
bâiller
après
quelque
gain
et
réclamer
quelque
profi t
Cet
homme,
vos
portiers,
chambre
le
chérissent
\\ros affranchi s,
"OS
vos
servan tes
l ' adoren t
•
w
•
,f,i
{l78)
C'est
d'une
portée
destructrice,
s i
l'on
ose
dire.
Rien
chez
les
Romains,
n'exprimait
la
déchéance,
la
décrépitude
comme
la
basse
moral i té
et
ses
dérivés,
c'est-à-dire
la
beuverie
et
surtout
l'homosexualité,
pratique
par
excellence
de
la
passivité
:
({La
passi \\ri tè
dans
l ' fJ.cte
sexuel....
soul igne
F.
Gonfroy
«représente
pour
les
R01JJ8.ins
une
déchéance,
car
ell e l ' obl ige
à
une
soumis-
si on
i ncompa t i bl e
a \\reC l ' ho."!U!1e
1 i bre.'.1 {179)
Il
en
é t a i t
également
de
l'adoption
par
un
homme,
d'allures
féminines,
remarquables
par
sa
façon
de
se
peigner,
de
se
-
37-6 -
parfumer
allures
de
ce
f a i t
extrêmement
danger'euses
pu isqu telle::;;
tuent
la
virilité,f\\A.
les
caractères
de
la
masculinité.
Elles
portent
directement
atteinte
à
ce
qui
fait
la
particularité
du
uir,
en
lui
ôtant
inévitablement
sa
spécificité.
Elles
détruisent
tout
ce
qui
au
départ
le
distinguait
de
la
mulier,
en
en
faisant
un
assexué.
C'est
à
cette
assexual i té
que
fai t
référence
Cicéron.
en
parlant
de
Clodius:
'({ ...
et
surtout
qUdnd
cet
être
impur
et
i mpi e,
ennemi
de
toutes
1 es
rel igi ons,
ce
sdcrilège
qui
s'est
fait
sou,'ent
fe1IIJ11e
parmi
1 es
hommes
et
hOrtll11e
pdrmi
1 es
femmes
. . . ))
(180)
Pratiquée
d'une
manière
ou
d'une
autre,
la
basse
moral i té
exprime
le
refus
pour
l ' indi'i!idu
qui
s' y
élance,
de
garder
son
rang,
sa
place au
sein des
autres
membres
de
l~ société.
Elle
apparaît
comme
une
sorte
de
réaction
à
l'ordre
naturel,
ct' opposi t i on
à
la
hiérarchie
des
hommes
selon
leur
rang
et
selon
leur
sexe,
une
tentative
de
rupture
de
l ' en,semble
du
tissu
social.
Il
n'y
a
donc
que
des
antisociaux
et
des
déréglés,
des
hommes
qui
se
placent
sur
le
ban
de
la
société,
pour
oser
adopter
des
attitudes
de
ce
genre.
La
morgue
et
les
airs
hautains
de
Chrysogonus,
ne
sont
pas
donc,
pour
surprendre.
Pour
Cicéron,
s' i l
se
le
permet,
c'est
parce
q u ' i l
s ' i n s c r i t
ent ièrement
dans
ce
,::erc l e
d'efféminés:
{{Je
ne
parle
pas de
ces métiers
~'ulgaires
cuisiniers.
boulangers,
porteurs de
litière .
•1(ai s,
pour
charmer
son
esprit
et
se·5
oreilles,
i l
a
tellement
d'drtistes,
que,
le
jour
et
pendant
1 es
f'est i ns
q Il ' i 1
-
donne
la
~-
nui t,
tout
le
~'oisindge
retentit
du
bruit
ha. r1110n i eux
des
des
i nst rU ...rrJe::. ts
a
cordes
et
des
flûtes.
-
377 -
telle
vie,
Juges,
trous
faites-trous
une
idée
de
ce
que
]'017.
dépense,
de
ce
que
l'on
prodigue
chaque
jour
?
Et
quels
festins
!
honnêtes,
je
treux
bien
le
croire,
d8.ns
une
maison
de
ce genre,
si
l'on
peut
appeler la
demeure
de
Chrysogonus
une
maison
plutôt
gu'une officine
de pertrersité,
et le rendez-
\\
vous
de
tous
les
tri ces.
Et
lui-même,
juges,
trous
troyez
de
quelle
allure,
1 es
chetreux
bien
arrangés
et
ruisselants
de
parfUlrIS,
i l
tra
et
tri ent
de
tous
cô tés
sur
1 e
forum,
accompagné
d'une
troupe
de
clients
qui
portent
la
toge
du
citoyen
airs
de
mépris
pour
tout
le
monde,
lui
qui
n'admet
la
compagnie
atreC
personne,
lui
qui
se
croit
au
comble
du
bonheur
et
de
la
puissance).!
(181)
Mais
Chrysogonus
n'est
pas
le
seul.
I l
y
a
également
Trimarchides.
Il
s u f f i t
d'exposer
son
rôle
dans
l ' a f f a i r e
de
Sopater,
pour
saisi r
le
poids
de
sa
personnal i té
dans
les
turpitudes de Verrès:
((. ..
Il
Y
atrai t
un certain Sopater,
habi tant
d'Halicye
gui,
dans sa
trille,
allait de
pair
atrec
les
citoyens
les
plus
ric~~es
et
les
plus honnêtes;
accusé
par ses ennemis
d'un
crime
capi ta1
detrant
le
préteur C.
Sacerdos,
i l
fut
facilement
libéré
de
cette
action
judiciaire.
Le même Sopater
fut
dénoncé
à
C.
Verrès,
quand
celui-ci
eut
succéde
....~
Sacerdos,
par
1 es
!71êmes
ennemi s,
pour
le
même
fai t
La
cause
de
Sopa ter
étai t
défendue
par
~l.
lrfinucius,
che,ralier
r01Il3in,
l'un
des
premiers
de
son
ordre
par
son
éclatante
distinction
et
son
homosexualité
cependan t,
Ti .~rchi des
tri en t
trou trer
-
378 -
Sopa ter ;
i l
l ' tH'ert i t
de
ne
pas a \\'oi r
trop
confiance
dans
le
jugement
rendu
par
Sacerdos
et
dans
sa
propre
cause
i
ses
accusateurs,
lui
dit-il,
et ses ennemis,
ont
dans
l'esprit
la
pensée
de
donner
de
l'argent
au
préteur
i
ma i s
le
preteur
aimerait
mieux en
rece\\'oir pour
le
salut
de
l'accuse
Surpris
à
l'impro\\,iste
par
cette
démarche
inattendue,
Sapa. ter
l'amène à
se contenter de
quatre-\\'ingt mille
sesterces
Le
jour étai t
~'enu où la. cause
se
plaider
Ti marchi des,
~'i ent
chez Sopater,
i l
ll.."rl
dit
que ses accusateurs
promettent
au
préteur
une
somme
beaucoup
plus forte
que celle qu'il
avait donnée
lui-
même,
par
conséquent,
s ' i l
a~'ai t
le
moindre
bon
sens,
i l
de \\'a i t
voi r
ce
qu' i 1
a ~'â i t
8
faire
Il
ne
put
cependant
écouter
pl us
longtemps
Ti marchi des
"Fai tes-l ui,
di t-i l,
ce
q rt' i 1
- -- vous pl B. i ra"
c'est
donc
a~'ec
cette
espéra.nce,
qui
leur
est
COl!!.'T1U ne
à
tous,
qu'ils
se
présentent
devant
l'action
judiciaire
On
sans
cesse
Timarchides se pencher à
l'oreille de
l~rrès
Et
cet
accusé
c'est
d'apres
sentance
prononcée
par son
scribe
qu'il
1 e
condamne-'-'
(182)
Or,
une
t e l l e
rage
dans
le
démantèlement
de
la
province
sicilienne.
ne
fut
pas
l'oeuvre
même
des
fugitiui
qui
par
deux
fois,
la
prirent
d'as'3aut.
Bien
qu'animés
par
une
envie
d'arriver
à
leurs
fins
et
de
briser
leurs
chaînes,
i 15
ne
poussèrent
pas
leur
hargne
jusqu'à
laisser
la
terre
sur
laquelle
avait
lieu
leur
«expl Di ta t ion.'),
exsangue.
Elle
resta
debout
après
leur
pas'3age
et
leur
survécut
s i
l'on
peut
dire,
chose
impossible
après
le
passage
de
la
cohorte
prètorienne de
Verrès
:
-
379 -
...
({
Et
cette
cohorte
prétorienne
tout
entière,
qui
a
fait
plus de
mal
il
la
Sicile
que s ' i l
y a~'ait eu cent cohortes d'esc1a~'es
fugitifs,
n'était-elle
pas
sans
conteste
ta
main
?I)
(183)
,
1
demande Cicéron à
l'ancien preteur.
La distinction entre
les
fugi tiui
et
la
cahors
de
Verrès,
dans
leur
comportement
à
l'intérieur
de
la
Sicile,
est
donc
nette.
Une
disproportion
existe
à
leur
niveau.
Ai nsi,
si
Timarchides
et
d'autres
affranchis
rapaces
n'avaient
été
que
des
affranchis
ordinaires,
c'est-à-dire
ceux se
contentant
comme
l ' a dit
P.
Veyne
de
({demeurer
6!
jamais
fidèles))
(184)
à
leur
patron,
attendant
d'exécuter
ses
ordres,
soucieux
avant
et
après
tout
de
présenter
leur
infériorité
face
à
lui,
i l s
n'auraient
pas
été
choisis
à
l ' intérieur
de
la
cahors
par
Verrès,
pour
faire
partie
de
son
intimité.
Non
seulement
Timarchides
s'est
laissé
transformer
en
agent
habile
et
adroit de ses passions et de ses plaisirs libidinesques
{{ltfais
ne
soyez
pas
étonnes
q!...rel1e,s
sont
les
raisons
qui
ont
permis
6!
cet
affr~nchi
de
jouir d'un
tel
pou~'oir
auprès de
!ferrés ?
Je
vais
~'ous exposer
en
peu
de
mots
ce
q "'"
--
c'est
que
cet
homme
;
et
vous pourrez ainsi
connaître 6!
la
fois
l'immoralité
(iu
P rê. +-.0 rr r
-
....
..... _- ... ,
qui
l'a
ge.rdé
a~'ec lui,
surtout
a ce titre
et
6!
ce
re.ng,
et
la
situation
déplorable
de
Dans
l'art
de
corro.'llpre
les
femmes,
dans
toutes
les
pratiques
de
ce
genre,
immorali té
et
1 i bert i nage,
conste.tais
de
quelle
manière
admirable
les
aptitudes
naturelles
de
ce
Ti marchi des
con"ena.ient
au:tC
pas'ions
déshonorante.s
et
~
l'immoral i té
singulière
de
Verrès
je
constatais
qu'il
sa~'ait
sui~'re
à
la
piste.
a. border,
engager
18.
con~'ersation,
·-:-crrompre,
-
380 -
faire
toutes
les
manoeuvres
de
ce
genre ....
085 )
rejoignant
en
cela
q.
Apronius,
homme
libre
mais
débauché
lui
aussi
C'est
pourtant
en
cet
Apronius qu'il
a
, pensé
trou t'er
cel ui
qui,
en
tan t
que
~'éJ.urien,
en
tant
que
personnage
débauché
et
i mpuden t,
lui
était
absolument
sembl a bl e
;
aussi,
l'union
intime
qui
se
forma
bien
t'lte
entre
eux
n'était-elle
pas
fondée
sur
l'intérêt,
sur
les
raisons
d'affaires,
sur
quelque
titre
de
reco~ndation, mais sur la
turpitude,
sur
la
similitude
de
leurs
penchantsv
(186)
mais
encore,
i l
se
repaissait
des
miettes
de
Verrés,
recueillait
le reliquat
de son libertinage
«Hais i l
ne se contentait pas d'être
l'agent
de
ses
passions
i l
n'a~'ait
g.!2rde
de
s'oublier
1 ui -même
i l
ne
se
contentait
pas,
si
Verrès
laissait
tomber
quelques
sesterces,
de
les
ramasser
et
i l
s'en
ëtait
fai t
be.!2ucoup
d'argent
mais
i l
recueillait aussi
les restes de
ses plaisirs
t'ol upt uet.'x
et
de
ses
débauches
déshono-
rantes.'.'
(187)
pratique
dont
seul
l'esclave
fugitif
é t a i t
capable
puisque
baignant
dans
la
décrépitude
absol ue
et
la
souillure
la plus profonde.
Et
c' est
en
tant
que
fugi tiuus,
non
en
tant
qu'affranchi.
que
Timarchides,
véritable
potentat
pendant
la
preture
de
Verrés a
coordonne ses exactions en Sicile
-
381 -
«Voilà
pourquoi,
en
Sicile,
ce
n'est
p~s
.4 tbéni o..
1 ui
qui
ne
s ' e s t
jamais
emparé
d'aucune
ville,
!11ais
c'est,
sachez-le
bien,
c'est
l ' esc1a v'e
fugi ti f
Ti marchi des,
qui,
dans
toutes
1 es
tri 11 es,
penda.nt
une
péri ode
de
trois
ans,
a
été
roi
c ' e s t
au
poutroir
de
Ti !1J8.rch.i des
que
les
a l l i é s
les
plus
anciens.
les plus amis du peuple romain,
ont
tru
leurs
enfants,
1 eurs
mères
de
fa mi 11 e,
leurs
bi ens,
toutes
leurs
fortunes
(188)
Comme
quoi,
la
libertas dont
se
gargarisaient
les
af franchis
ne
tenait
comme
on
dit;
qu'à
un
f i l ,
ne
présentant
aucune
sécurité.
Loin
de
les
mettre
à
l ' a b r i
des
r a i l l e r i e s ,
mème
les
plus
obscènes,
elle
les
l a i s s a i t
à
la
merci
de
tous
les
abus
de
langage
porteurs
d'excommunication
et
de
rejet.
Considérés
à
tout
point
de
vue
comme
des
êtres
inférieurs
comme
nous
l'avons
vu
et
comme
nous
le
montre
la
dèsap-
probation
manifestée
par
Ciècron
en
apprenant
l ' initiati,'e
prise
par Caton de
confectionner
une
loi
ayant
pour
effet
de
conférer
tous
les
droi ts
aux
af franchis
et
de
leur
ouvri r-
les portes de
l'ordre équestre
({Et
que
ferons-nous,
si
nous ne
poupons
les
atroir autrement?
Veux-tu que nous devenions
les
esclatres
des affrt:lnchis
et
des
esclaves
.mêmes ?".l
(189)
i l
leur
é t a i t
ainsi
facile
de
voir
se
creuser
cette
infériorité,
jusqu'à
atteindre
l'extremum
de
la
déchéance,
surtout
pour
les
affranchis
rapaces,
même
s i
en
dèfiniti,re,
les
uns
puis
les
autres,
a<;n~_ient
chacun
leur
position
sociale
(90).
-
382 -
Not.es
=====
! -
lire aussi! ce sUJet l'article de Il, HUMbert,
"LibertH id est tiuitas : Autour
d'un conflit négatif de cit'~."yenneté
au I!èllle siècle av,
J,-C,"
in H.f.F.R, ,
LVIII, 197~, pp, 235-236,
2 -
!Je 1 '.3cqliisition et de 14 pert~ dt.' droit d~ (it~ rtJM4it1~J p. 33.
3 -
Etude i1istorique sur I.J c~..,diti~.., pril'~~ des .Jffranchis, p, 1.
4 -
Libertl.'s. Retherdles sur le~ r.Jpports pJtron/.Jllr.Jnchi j 1J fin de 1.J l?~publiql.'e
rOM.3ine, P. 4,
& -
H, Lelllonnier, 1."P. cit., avait d'ailleurs déJà fait ceUe remarque,
~ -
Nous y avons déjà fait référence dans notre chapitre antérieur. Quintus remercie
Cicéron, qui, en décidant d'affranchir Tiro, a donné i
l 'ensellble de la fallille,
un alti et n'~n plus un esc lave, F.3l'"
XVII 16, 1 : /)e Tir~ne, .1 Huce, i td te
Ne''''Allf:..r~ Cù~!'onell et lieu hl1liol.JllI !I.'tJ/lqtJe lilitJlI uide.JAI, tJt Nil}i gntis5ùll.I1I
{eL"i5ti,
wtl
~(J.t' indignuli il Id
{ortun.J
/I.JC
,?obi5
.J."ÙtJtll ql.'.JII.'
5nl.'I.'I.'
esse
tI.J1ui5 t i,
7 -
Dans le second chapitre de la pre.ière partie, nous avons traité et analysé cet
aspect de la question, Hais nous pouvons aussi nous reporter à la correspondance
entretenue en 45 av. J,-C. entre Harcus, le fils de CHéron et Tir.), lUt,. XV,
15, 4 - F.JAo'., XVI, 21, l,
9 -
f Ep"
VII, ~6-S4 : Strenul.lS ~t fortis t.Jusisqu~ PhilIPPus .Jgendis
Cl.3rus, .Jb ol{iciis oct.Ju.J,tI tirciter horJlI
dUIi redis Jsql.~ foro ni.iu/I dist.Jre t.Jrin.Js
ü" grdndis ndsu queriti.'r, tonspexit, I.'t d!Un!..
ddr.3SUIi quend.3. tJdCUJ tonsoris in ulIbr.J
tultello prl."Prio5 purqJntem leniter tJnguJs.
"{}elletr i·, {plier hic t'Ion l.Je'...e i:..'ss.3 Phi JipP!
JuipiebJJ..I ".3bi, ql.'Jere ~t r~ler, I.'f'lde dl.'1I0, ql.'H
~·UÙ"S {ortUI'IJ~, '-1~l.l"" si! pJtr~ ~~t..o(.'e pJsrono"
10 -
R, Cagnat] op. ci!"
Lira Kajant.~] T.lJe ell~"gIHlte 0'/ the Idt~ single ,"Id,fie syste.'iI, P. 421,
11 -
"Hen''Ji nalles in the writings of Cicer'~u i."I Cl. P.IJ., 191.5, p, 3%,
12 -
Att"
V, 4, ~ : ", Tullius Laurea, affranchi de ~. Tullius Cicero,
FJm., XIII, 60 : L, Llvienus Trypho, affranchi de L, Llvienus Regulus.
ibid"
VII, 18, .'3 : Pl. Aeailius Philetao, affranchi de Il, Aellllws leOl,jus,
ibid"
XIII, 70 ; T, Allpius l'lenander, affranchi de T, Ampius Ballus,
Pro S~X,
R~'5(,
,4,'1~rrl
Vil,
6
L,
C'}rnelius
Chr)'s,})~~'nu$/ affrlfH:hl
d~ L.
Cornelius Sylla.
FJ,fI., XIII, 23, 1 : L, Cossinius Anchalus, affranchi de L. Anchll1uo;,
i3 -
.4tto
IV, lS, l
O~ f!itrchj .....-4~
l
gr.Jt:.tll',;
:;r..'i I.iet~r~ çr..J::n"Vhln~J
1'1~UO ,,,...'\\"::],'1::: rl&(.fS
~rit CJ~cili!.t5/ !.,t ~st ~.!t.. IJ~ et ~x t~ i:.l."ct:..'s Dior:YS!!..t5 /'1, P~'-'19.1por!1:'ls
-
383 -
lA -
C'est le seul cas dont nous ayons connaissance dans l'oeuvre de Cicéron.
16 -
II ~àt"
V, v, 29-34 : H4gn4 minorue foro si res cert4bibur oJi.
uil1et I1ter Joct.'pJes sine gn4Ji5l improbl.'Sl uJJro
qui m~iorem 4ud4~' uocet in il1sl illil1s esto
defensor " f.rou ch'e", t-4us4qt.'e prior~1I
sp~rn~l dOlli si g114tr.lS er i t lect.'17d4ue conù..n.,·
'Ql1inte' PUt4 4Ut 'h'b1i {!1~4t.'d~nt pr4erlomine "oJl~s
4I1rÙ(.'14~) .
17 -
lUt"
IV,
).I~,
'Jûd~ 4·e.?~rwl~ .,ihi gr4/t.'mst Et.'t)'cMdell
~rg~
/I~
b~neuolentùlI cognoss~ et suu i1l411J in lJJeo dolore JI/H/~&uv
tUIJ
lIihi ObSCl1r4N neque post ingr4t4M luisse.
18 -
Voir à ca propos,
l'article de F.
5udja,
"Esclaves et affranchis dans la
correspon.jance de Cicéron
les relations esclavagistes"
in r~,'(te, Politiql1e,
Id~ologie : Cic~ron, p, 9A,
19 -
D'où cette lettre Ilélancolique à sa felille et à ses enfants, F411., XlV, A, 1 :
Ego mir1us s.Jep~ do 4d 1105 litJer45 qU411 pOSS!.'I/I, propt~re4 ql10d CUIII OIMÙ lIihi
teMpor4 Slln! Miser4,
tl1lN l1ero, CU" aut scribo ad uos 4ut ues!r4s lego, conficior
14criMis sic ut lerre non possim,
20 -
F4llf, 1 XII l, 60, l, 2
: Ego l ib~rtuilf eit.'s per se ipst.',' diligo " SUIMI4 enil/ eius
erg4
4'e
o,llùù
~xtitert.'f1t ,'lis nostris tellpl,)ribus,
quibus
luiili.lle
bon4.91
beniuolentùm hOllinulN
et
lidet: perspicere pote.'i EUll
tibi
i ta
co,fMlendo,
t.,t
ho~.'ines grati et .f,'e.~'~'r~S be,'l~ .'Ieritos de se cOfl.'IIe.'ld4re debel'!t, P~r!1~"'4tull .fi.'1i
fet-eris,
si ille intel1exerit se, ql10d pro salt.'te t.te4 1J111t4 p~rùu14 4diluit,
S4epe M~lIe SUI/lU n4:.'i']4ril, pro tU4 ~r!1~4 IJ,'e beniuo1entù gr4tt.'1II etia,~' tibi
luisse.
21 -
lUt"
V,
/)ionysius A,'i/'li ql1idem in uoribl1s est,
pueri 4ute.'1 4il1nt elJ.fI
lurenter ir4SCi,
2.4 -
L'ono~4stiqlJe des groupes dirigeants sous la R~pl1b1iql1e, p. 51,
25 -
Erucius, allié de Chrysogonus, l'un des accusateurs de Sex, Roscius, le client
de Cicéron.
26 -
Pro S~x, ./(osc. 1J.t.'er, , HII, 60 : Perrorat.'l& aliqu4ndo, adsedit " st.'rr~xi ego,
Respirare l1isl1s est ql10d .'10.'1 alit.'s potius diceret,
Coepi dicere.
i/sqt.'e eo
,J,?i,fl4dfJerti,
it.'dice5,
et.'tJI iocui atqc.'e 41 i4S res 4gere 4nte qt.'411 f,~,"yslv"9om"11
nomin4lJi,
que.ff sÙlt.'l atque at tigi,
st4 ti,~, hO/lo se uexi t,
.irui
tif 5lJS est,
I.'1tel!exi qlJid el1M pepc.'gisset, It~rt.'lfl u
tertio nl)minal1i, f'oste4 homines .:t.'rsue
dtro et L-itro Mn destiten,mt .. uedo, qc.'i C.?rysogoM ,'1untiue.?t ~ss~ aliqlJell i.'1
<it.'itJte ql.'i L-ontra ;.'",,'ll,,','1tat~,.,.. eius dic,",re a/.ideret .: aliter C4US4,I'- 4gi 4tqt.'e
111~ eXIstl.r..Jr~t
Jp~rirl bo.?·')r:'~A.' e.t.'Ptio.?~,~-, !.'lfxJri p~55iGf~ so~i~t,3tell'! grJti.Jltl
poi~ntJatJIql.'e elUS negl~gl,
27 -
i).
,Ir"
l, 2, 3,
-
384 -
28 -
ibid"
l, :3, & : Sed tJ.we/I, qf.'l)ql1l) ,f,'l)do potf.'!., sC!ipsi ~i d~di litteru ad t~
Pl1J'j~g~'no, l ibntl) tl10, ql.'U cr~do tibi post~a r~dditas ~sse,
29 -
Hit"
Ill, 15, 1.
30 -
Sous tette forae : C, Brut (us, C,l,} Speratus - C,I,L"
F, /589
- L, Treblanus l.L. Atastus - C,l,L"
F, ~'2h}
- Gessia P,l, Fausta - C,I,L., 13, JOU
31 -
op, cit"
p, 306.
32 -
Fa,fi ' , VIII, 9,
10 : Lib~rtl1," Philon~tI istoe misi et OiogelleM 6raect.'.'IJ, ql1ibl1s
Nandata ~t 1ittll'ras ad te dedi,
33 -
lUt"
VII, 9, 1 : quid ~plJS est de 010nysio tam l1alde 4d/ir,ure ? An lIi.l11 nlJtc.'s
tuus notl f a~-~ret f ide.f ,~ Sl1spi eione. autelll eo l.ihi ,uiorefl tU4 tad tl1rni tas
adt/,lier4 t,
~~f.'l)d et t!., soles ,oflgllJtifl4r~ 4/tic i t 145 test illoni is tl1is et 111uII
Jliter Cl./M 41iis de Mbis locu!tJfl 4udieb4fl, Sed pror5u5 it4 Il'sse ut saibis Ni.?i
persfJJdes, !tJq:.'e ego is in i 11u. St.'.fI que,,, h' Ne esse :"is,
:34 -
F4,'II, 1 XVI,
5,
: Ilide ql1a/lta sit ill te S:"4:"1$4S, OI1U hor4s ,T,I-Jyrrei fuilllJS,
lenOMll'nes hospll's t4.'I.' te diligit q:.'u si l1ixerit teeuII, 15 OIUllJ pollùitus est
q:"41l' tibi essent I)P:"5 / f.uit.'ru,t' p:.'to, HiM plJCebat,
si firmior 1l'55eS, I.'t te
L~ucJdem deport4ret, :./t ibi te pl.MIl' con/irAJ4rIl'S,
35 -
ibid, 1 XVI,
7 : Sep!i.lli,1I 14.'1 dÜ/I Corcyru tll'flll'ba.flfJr,
quinit.'s aute/ll p4!er et
fi1il.'5 Bu!nro!i, 50111.iti erafllJ5 de tua I1die!l1dine ~irlJfI in flodl.'fI nec ~irabJfI~r
niMl J
te litterJrt.'fI ,
iis enill t.'entis istifl n4uig4tur,
qui si eHe/I!,
,'105
c.'JrC.J'r...~~ r~~.'7 5~d~,"~N!,J5.
3~ -
ibid"
XVI, &, & : Si." ,?Jbetl), IIi Tiro, /le,wineAJ esse qui Ille al~et qt.'[.'1 ide,'II te
-l,ft'et
'37 -
,4tt"
VII, & : Oionysius qt.'idell,
tl.'us potius qt.'4,' Mster, Ct.'!:.'s e,:!~o W,~.' SJlis
cogtl055e/1
A'ore5
tuo
t4111en potiu5
s!4b48/
i:,'dicio
ql14111
lIeo,
ne
t!.'1
qt.lide,fl
!es!i/l~nù
quod el
s4epe 4pud Ile dedera5 :.'eri tus,
superbt.',t, se prJebt.'[& 1.'1
,fl)rti.mJ qUJm p:.'tJf.'i t Mstrall /~/'e " ~·ui:.'s f~rtunae 171)5, qUJntf.'11 ,?t.'tfJM c:.JnS11 io
effici poteri!, 1/O!1111 rJti~ne qlJ4dJII gubeN1abillu5,
38 -
1.'1 !J,
CJe::.,
XVII,
&&-&~
,4gonis ql1uda.f ~st Lilybitana,
liber/4
ileneris
Er.l'ci,'14e"
qt.'U IIlJliu 4,'1te ,?t.'f1C ql1ae5tor~.tI c"-'Pio5a plane ~! 10::upl~5 ,i[.'it. Ab
h4c prJefectlJ5 ~ntoni quidJN 5j~phoniacl)s 5erU05 Jbdl1ceba! pet' !nilJriJ~, qUlbf.'s
5~ in clJss~ titi !..'ell~ dicebJ&,
rUIJ
i11.3"
ut M}')5
in Sicill,J
~st ~"r~.?iU,~1
1/~.'1eriorlJA' et e~ruA.' qui J /lellere se iiberJI1e."l1n!, ut praeledo i11i religli)ne,f/
l/~n~rjs ,"JJ,t.lj,,,~ ~bi~"er~t,
dj",it
et
5~ 5U.J
'1~neri5 e'55~1
l,lbi
h~c ~"f.iJ~'it:)."j
Cuellio.. 11!:'0 opti.M ~t hO,fli,?! a~quiS5!1I0,
nun!ùtlJlI est, :"OCJrJ ad 'Se ,4!:<~t,.?idell
iub~t " iudicil1.'1 dat StJtill,
si PJre! e4111 se et SlJa
Ve.'1eris ~S5~ dlxj5s~,
}!,,ldjcJl1t recjp~r,Jtor~s
j~-I quad n~C~55e ~r.Jt ,,' n~q!.i~ ~,,,ill erat :."tljq:.r4l~ dl..'bi!.im
quin illJ dixisse!,
lste in p05S~55ilJnll'll bono!'f.'/I lIt.'lùris i,'1/rJt,
!PSJIII /le,'1erJ
in 5ert.'1'tute.~,1 adiudicJ t : d~inde bl)flJ uendit, Pll'cuniJ,II.' redigi t.
39 -
11 Fl.'st-, 1 XX, n-&B : Assurer S':>n empire sur la partie de l'âme ,JlJl ,j,:ll t "bélr 1
Val!! 1 quoI doit pourvoir un homme, Comme un ~aitre commande i un esclave, ou
un général à un soldat, ou entore un père à son fils,
-
385 -
Al -
Htt"
II, 1~, 1 ; Nec meu~ imperiu~ - He ~itto iNperium
IJ, ,fr"
11l, 4, 5 : Cllr,Vsippo tJllen ù'PerJbo
~!t;, II, .l, 7 : De mura i~perJui
A2 -
Pro H, CJec"
XVII, 52.
A3 -
,4tt"
II, 4,7: Philoti.wo ne i.pediret II'
u-
FJ,~"
XV!, 2
HJxi~e obtemperJris uoluntJti lIeJe
A5 -
Nous l'avons Montré dans notre chapitre précédent,
A6 -
CJto /'IJior"
Xl, 37 : QUJttuor robustos filios, qtJinque filiJs,
tJntJlI dOMtJII,
t-J.7td5 t! ienteJ45 .4ppi!J5 r~g~bdt et CeleCti5 et S~l~e~'(' /
i",tenst,l1J enim J.'7i,fUJIJ
tJNqUJA JrCUA hJbebJt nec lJngueseens stJccuAbebJt senectuti :
tenebJt non .odo
JaetoritJtelll,
sed etiJlI i.fperiull in suos : lIetlieb.Mt serui, uerebJ!ltur liberi,
CJrum Ollnes hJbebJnt : uigebJt in illJ domo 1105 pJtrius et disciplinJ,
A7 -
Pro~, CJec"
XIX, 55 : ln 1.'.'10 serualo ,fJmiliJe ", non uJlere
AS -
ibid"
H, 57 : Peu illporte que j'aie été e:cpulsé par ton fertlÏer, par t>:>n
voisin,
ton client,
ton affranchi, ou par toute autre personne qui aura été
l'auteur de cette vi»lence et de cette e:(pulsion ! ton instigation ou en t>:m
nOIl.
A9 -
De Con,
Colt"
L,
102
, . . liberti et pJI.'ci ex dientibas lerltull
i tinenb()s
seruitiJ in uicis Jd eUM eripiu?dam sollicitJbJnt.
50 -
ibid"
Sl -
CUN senJ!"
VIII, 20.
52 -
('est ce que nous inspire ce passage du petit manuel du parfait candldat, dressé
par Qui ntus A l' i ntent ion de son frère, en €lA
av, J. -( ., ou nous v»)'ons se
cHoyer les uieini, les die.?tes, les libel'ti et les sel'ui : Com,~.. , Pet"
'J,
17 :
Deirlck
at
qtJisque
est
inti.us
.JC
IfJ,~'ilfe
domesticas,
I.,t
15
JA'et
et
qUJ.11
J.flplissilltJlf esse te ~'upiJt uJ1l.-ie elJbor.JndulI est, tall I.,t tribuies, :.,t :"UÙll. I,lt
dientes, ut denique libutf, postrello etiJ.tI serl.'i tai.
53 -
Il en ressort a ins i de ce passage : .4t t"
XII, 33 , 2 : '" tot.J dot,'us in O~.'nl
ge.'1ere diligens. Nous retrouvons cette mbe intégration chez E, E'el1ven:s t.e, Le
l'oc.JbulJire des instit~tjons indo-europ~ennes,
T,l, p. 305.
5A -
Telles que les élections (consulaires), ou dans toutes les actl'.'ltés de la Vle
privée,
IJ,
,fr.,
l, 2,
16 : ... ONn~s et s~ et sal)S JlIlicos du.'1tes l!butos,
seruos, peeaniJs denique sa.J5 pollicentar,
S.5 -
Pro Se.r. lrose, HIJer"
VIII, 22 ; Ajoutez à ceL! que, qUIH ,~u'11 s>:nt heureu~:
c»ue il l'est, il n'e:dste cas cependant ,je bonheur assez co~plet o»ur que,
dans une >3rande lalS,)n;
il ne se trouve aucun esclave,
aUCU!1 affranchl sans
honnêteté,
.s6 -
Pr"., C, lr.Jbi,r, , VI
16 : ,4/1 ti~r~' ser!JJJS 1~'-'5tro5 hart.'ll 5!ippl j:.""10'p!,'.~ O,~.'."!lt.I.~.1 ~~t!.(
dominoru~ benjgnit~5 uindicta ~~~ liberJs,
S7 -
'--'P, cit"
p, AU,
-
386 -
5e -
J,
Lambert,
L~s op~ra~
libuti,
Contribfiti"f~ j
l'ili5toire
de5
dr"it5
dl.'
patron.3t, p, 11,
59-
ibid"
p, 44,
gO -
ibid"
p, 3, D'autres auteurs en parlent aussi, abondamment c'est le cas de
J, Macqueron, '-'P, n't"
pp, 150-152,
P,F, Girard, ,lfanuel ~l~,'»ef~t.3ire de droit rOnl.3j,r~, p, 129,
F, Lindet, op, dt"
G. Boulvert, Domestique5 et fonctionn.3ir~5 50U5 le H.3ut-Empir~ rO~.3in,
J. SaudeAlet, L~s institt.'tions d~ l 'Hntiquit~, pp, 359-359,
61 -
1!05tell.3ri.3, \\'. 220-223 : Je d'jis lui garder lU reconnaisance, uintenant que
j'ai obtenu ce que je vew(,
tout COlllle naguère avant d'avoir réussi,
je le
flattais pour l'attendrir,
62 -
D'abord dans cette lettre à Atticus, où Cicéron reproche à l'affranchi de Sljn
ui,
Di'jnysius,
de
ne
lui
avoir
pas
exprilé
sa
reconnaissance
par
des
remerciellents, et de pr>ju\\'er ainsi 50n honnêteté: .4H"
VIl, 7, 1 : ·OionY5iu5,
uir optimus, ut mihi quoqu~ e5t p~r5pe(tu5, et docti55i.U5 tuiqu~ dManti55iMU5,
li~OIU,t1l f.'eni t JIl, k.31~nd, 1.3,1'1, ~ t li ttU.35 .3 t~ "iM reddidi t "
TlJt ~fliN {,/~rb.3
5Utlt de Oionysio Ù~ ~pistl.'J.3 tua,
iliud - Pf.'t.3 ta - ,l'Ion 4d5aibi5 :
·~t libi
gr.3tüs egit""
,4lqui cede iiie .3gIN~ debuit ~i! 5i ~5set lu tUA', ql.'ae tU.3 est
/wM.3ni tJS, .3d5cr ip5i55e5,
Ensuite dans celle-ci, écrite à Tiro pendant sa maladie, où Cicéron considère la
guérison de son affranchi, cOlllle la plus grande larque de gratitude qu'il ait à
lui expriœer : Fall, , XVI, l, 3 ; O~ tf.'i5 inf~UfilU.3bi1ibu5 Ù~ file officiis /i!rit hlx
gr.3 t15siIlU,f/ ".
63 -
6r.3tiJ et 5.3 fa,fli lle, p, 159,
f,,4 -
Le vlJ,-abf.'laire latin des rel.3tio.'1s et des p.3rtis politiques sous 1.3 R~pf.'bliqf.'e,
p, 205,
65 -
L.3 ,-it~ 4ntiqf.'e, p, 317,
66 -
"Affranchissement, clientèle" dr'jit de cité" i,'1ll,I,{}"4,, 3, 1949, p, 47,
67 -
Fustel de Coulanges, op, cit"
p, 318,
Th, ~olllmsen, Histoire romJine, l, Ill, p, 211,
69 -
Cjj~tlteiJ, [ssai Sf.'r 1 'it~lh'eflce d~s r.3pports de die,r~t~le 5ur 1.3 vi~ politiql.'~
rO,fJ.3ine, p, 14b,
69 -
De Inu~nt"
f, 55 et II /09 : s~rujs ! iibertis 1 ciientibus
C",'~ senat., VIll, 20 : dùntibus! lib~rti5 / ldl/iilll clJpiis
~J! P.Jrad"
I! 1 46
C!.'l!,l se/,!.(!s ,1 f:".~' iib~rtis
l C/JlfI flielltib:J5
Q, lr"
l, 2? If; : a~ùos,l dÙ.'1&es,l libertos 1 sen'os l pecu.'1iJs
70 -
,'p, .-it"
p, 317,
71 -
~~, ~"lt,
0,107,
72 -
Nous y avons déjà faIt r~férence, QUlntus S'indignalt d'avoir été obilgè ,end3nt
un moment, de considérer Tlro comme ~n esclave, alors oue tout le prédestina~t i
l'intImIté de la tarai Ile: Falll, , :('Jl, 19, l : '"
fit mihi gr.3tissi'~'Wt l/i!,-:'5ti,
.-f./,w ::f.'m indignf.'.t' i11.3
lortf.'n.3 hal.- ,'lobis, .3illicf.'l! qf.'JM s~rfiU. ::SSe' MJifiis&i,
-
381 -
73 -
Rom4n freed.wen during the 14te Republic, p, 62.
74 -
N, Rouland, op, cit"
p, 146,
75 -
J, Placqueron, Histoire des ,oblig4tions
Je droit rom4in.. p, 55.
J. Lubert, op, ~-1t"
p, 241.
76 -
Q,
fr"
l, l, 13 : Accensus sii eo nUMero quo eUM .4iore5 nostri eS5e uoluerunt..
qui hoc non
in benefici loco 5ed in l4boris 4C Muneris non teM~re n1si liberti5
5fiis deferé.Mt, quibf.'5 i11i quid~1I 110n 1If.'ltO 5e/.-U5 4C s~rf.'is ù,pu.lb.lnt,
77 -
hl"
V, 20.
79 -
Htt., VII, 2,
79 -
Inpien, Dig"
XXXVIII, 2, 1,
90 -
Le !r.lI'JiJ de5 ho,uN~5 libre5 dJn5 J'Hntiq/Jit~ rO.Jin~, p. 156,
Bl -
.4tt"
VII, 4, 1 : DilJnysif.'I,1 ,iJJgrJnt~1II d~siderio tui lIisi .ld te, nec lII~h~rcf.'1e
uquo Jni"o,
5::d h'J't con/."edelldulI, Que. quidell cognoui qf.'OIll dodu.".. quod A'il1i
iJ. Jr1te er.lt ndf.'III,
!lJ.~ SJllctulI, plenuM oflicii, 5tudi05Ultl etiJllI lIe.le 14udi5,
lrugi homi ne,.' JC, ne Jiberiinuli JJudue uid.e.lr, pJ.lne uiruM bOllf.'m,
92 -
Se reporter! notre chapitre précédent,
B4 -
llf! !n5!,
Or4!, , VII, 109
PJiri in liliuN, pJtrono in libertum INJnus iniecto
5i!,
85 -
Fustel de C.,ulanges, I.-"P, nt"~ P. 99,
86 -
ibid"
p, 129,
87 -
G, Fabre, op, cit"
p, 547,
ge -
Pro Sex, ,Rosc, .4.,'er, , B, 26 : V5que Jdeao Jutem ill~ pertifluer4& I.!& INori ,wdil~t
qU4. de hi5 rebu5 5f.'llJIII doceri,
89 -
lfenJec,'I"
v, 1033-1039 : S.lifJe.. IIi pJtrone - CUlt tu liber e5..
~e5senio, gJudeao - credo hercle uobi5
Seo, pJtrone, te obsecro, n~ lIinu5
iJlperes I.'iM, qU.lfl CU" tf.'us 5erUU5
li..'i, 4pud ted .'I4bit4bo, et qU4ndo ibi5.. l./n4 !ecf.',11 JblJ
dOllun,
90 -
VOH
6, Fabre,
op,
cit"
p, 329 sq. l'affranchi dans ce cas prècis, D'Juvut
alors e:(écuter les operJe chdsis par lui pendant le if.'siurJndf.'IN, lIême en un
laps de temps, et avoir son autonomie,
Lire également du même auteur, 'Remarques sur la vie faailiale des affranchis
pr lvés au:( deu:( del'nlers sl~cles de la Républ i)~ue
: problélles Jur l(jl'JUeS et
SOCiologiques" in ~cte5 du colloque 1971 5ur 1 'e5c141~ge, pp, 239-2AA,
91 -
F4m, , IV, 12.,2-:3,
, n.i~n ,In; Si.,1&'.IEsr;û'FWF GCtLl pF iSJ"oJ'~;od ~.iFS.rnFu' sndl'~'~;r~'u'E' J~d ;~ ,,'~u.IJ-~n;~IFn
.l~d;~ ~OI"I"O] ~',r;J i;~ F&'.irlu'OJ;~~; oJ'nr;Sl FoJ'n) II,
:
(':fl ~q) L jI(~X l'p.rq.l
'SF;;;~WO; ~rln ~nt~u !~O!;E'S!np~ ~nb~ü ~I 'sF~/tn ~F/d
pFontr il.i!nb c:;.:qnp llt.~u· tfilp,'Fnt ;:u'J~l.J' roJ' P,.;?! 'S/71F~.i);J roJ'rf tF ~nlnFd '·sn;Fq.Jn1Ji1d
P'1/lOFG iI.IOU~ ilPtFI"i 'SUiI;Fi s,on; snprlPF ,J'ns ilUFll
IL ill) l 'V 'lM "prq.r
'slq~iFl;
rs
'o..ilpm il; rrp.r;CI) S.IfFS " SUl',lild o,ld ir/lUl ilJ Ft7~ '1'~'r;IJ'ilrFn ','1J.rJ Til 'piiS
"~Ji1p.;n ~; 1I1PJlI.IJd lIFl'lb 'S.li'!.ld ;"'l oS,; 'sn&'.;d~; S~u'lJû IS,"tI'';;;.r r s.ln; ~'n_1 w~uo.r.lF/'
ilpUT~ 'li1.7lr;;s il; IImHJd 0prdSxr O,UIJ'F osuildsns ilPiE'n 00] : <: '(; 'lM "prq.r
'ill F~J;jUO; 'wnn;
IInnJ;s.rü/f 'il., ili7duilFJd fil SUiF SilUIlO SClIJ' rs l'Il ."
: \\3 ilt) l '2 'It,X / 'P.Tq.r
- VOl
'wnJn;dn;F
il. IlFqF;,7d ilIJClUF/i
F
SF,lil; F r
SFnl
pl' &~o;sd.; il1 Flf' ilpFJnil7 ... (XX; F.rPF;S
~ilpf')n.7 FJF; ;SiI sn;or sn Sn6'FJilSSil;ll' NfFrzlit' pP' rÎ sqf' ilrp on~'ilJ 'oJ~p.rn
Imllud ,'tIUlb .n'~'Ti il; .rs 'iI~'Oj T;f';dnrCon ilFIIlXFIV ll/.lIf ;ilrq;; ;. oq.rns wn;lIl';
.' SnpiljpF WlS O".rUF Mt il~'.qtJlS iilqni Jill,' il; pE' oilnt IJ'ON
: <:
'lflX "P.Tq.r
- SOl
,;Sil
IfnltrSuo; ~~";; 'lnbilSUo; iI~ ilSSCld rqll S;J~rn 'lisrdill ~nq.rl wFnb l'iI;sod 'w.;nF
lUS ;' E'.r;U.;UilS S;; WilpFiI UT ,0;; .rs
'O;nA1 lunu ;;nbillJ
'IinT r lS"'CoJ 1/1"11"1;
,rnrqoJddF
'~JE'Sl"FU s~rrc:u' il.lOd.Jo,] 01P"'II'liü'O) rSl"" SJ~SJo.ld ;n ~SS~ .in;Fq~~!" F~ SFllJ'olon
FnI
r.rnb
piiS
'WUilSSil3S.rp
<:;
E'
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~'.,~.;,o; ,TI/rlf ilSSFJJild "';;.YlF;
'iI~,/lJiln iI~
w;;qJ'Î pl' IIJn.ud l8E'nb ; SilJ;;;lI.; ;r,";J; sou lIil~'Co"'O/l pE' ;u5f'~ NfFnb.'1Fnb '1 il " O~';;j UOII
ilUF{d p;;s ln; 1IJ,";u;;prs;;p il~'Jilj il'" ;;sSCld .mE'li'ld snT r.r.7FI ""'IFà' ; i 'l 'lM "p.rq!
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'8 1 V 'lflX "prq.;
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- 96
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l.n;l']~'JlqÇ snrsd! nssn.r 'snssr~,ul'If
0;; gr JildnlJ 'wn;;.rn or{iloJd rsuilddr[r4d 'IIn!ssE') 'J 6nJl'purd : 85'8 '~ "lIJiI~ 1"
- 86
';rxiI;qCl snqrJodJ(I] wnJo7Jilqrr ;iI WnJOl7JilS ilnbils ';!nJP!
MF.") U.T S,U;SOJ il sns{nd
';ilSSWiI,o;
IIFpUFJilJdilp
0"'F~'08 (I{ndod F IIi1;nrFS
s.r JI FJj pp ,n;
'1é1
'IInuoJ; F{
IPn~'o;FJiI{nSU(IJ I6FUFjilU IfFft.r lIJ!n lJilWE'1 FqnS
'li1SSFnJilsélJ sn;.rpil~' .TiI•., 'ilds pr ,~'FF'"; lIff'ns !6.ru IInn6 ;ilSS; {,o;;do SndH'J FsnF_~
.TpU•.UOIi piiS
i rpu l',,'5.o;dilJ
uou
.r~r,' CI.T ~~.rs~p JF npnl CI;Ul'l 1.1': J~;u~qr { s.r {~;
iI{ r.r ~nJon~
,;uFq;;:;sod ;;:;(1,0; ";uFq;;~'ilFnb s,t [,';0 "Im'J'.rssJ ;UFIIlF ilnbT;;iJ wM'.Tssll JOI
'.1"1'; ;do
"n~'.rn 'wn;;11 II/;;;F,II snqr; ~'FdT,IOj snqnltlO u; Sl lUiI,7JJ
;~ S.r.TPF{O
S.TPT./;S;;P élnbTs,/ilmun ';Um;E'1 ,"F~'.rXE','; CI~'ol tn 'ilpilE'J'"
; 3L 'l'tXXX ";s.S ClJd
- 1:6
-
88[
-
389 -
lOS -
ibid"
XVI, A, 2 ; '"
Il ltJd, .~i riro, t~ rogo stJmptu ,rl~ pdrcas ullJ in rel qtJod
ad 1J.û~tudj,r,~I.' ~,ptJs si J, Scripsi ad ClJriUII qtJod dixisses dar~t, If~dico ipsi puto
diiqtJid d.'indu~.' ~ss~! qtJo sit stl.'diosor,
10~ -
"Free.j"en and freeborn in the Epitaphs .)f lraperial Rotae" ù, .4,/, Ph., 82, 2,
1961, p, 122,
107 -
C, Boissier, Cicl!ron et ses 'uis,
10e -
lUt"
VII,
S,
2
De
Tiro.'1~ uid~o tibi C/,/ru I!SS~, f}tJ~1II qtJid~1I ~go, ~tsi
~irabilis tJtiliJat~s "ihi prJ~b~t, (U~ I.'Jl~t, in omni g~n~r~ uel n~gotioru~ tJ~1
sttJdiortJ#I
fleortJlI.',
tJiI~n propt~r hUfldnitat~1I
et
lIod~5tÙII Malo sJitJ'"'' 'qtJa.
prl,'Pt~r tJstJ.1.' lI~tJlN,
109 -
J. Carcopino, Les s~cr~ts de la correspondanc~ d~ Cic~ron, p, 113,
110 -
,~d,<tt' XVI, l, 3,
111 -
ibid"
XVI, 3, 2,
112 -
ibid"
XVI, A, A,
113 -
ibid"
XVI, S, 2,
lIA -
J, Helle90uarc'h, ~'p, cit"
p, 2S1,
115 -
Faill, , XVI, S, 2 :
lit cotil.."'i~ sit .4CJst!.fS itl poréu, ,~tJJti ~t'!,Jnt qt.'iblJ5 ,t'ect~
lifteras dJr~ possis,
qui Jd lo'e !ib~nter p~rferant,
11~ -
ibid"
XVI, S, 1 :
llid~ qUJ.'1tJ si t in t~ stJui tas, !JtJu hlJras .~".l"Nei ll.'illUS,
l~.~"~n~s h05p~S ta~ te diligit quaN si ui~~rit t~cu., Is olllnia pollicittJs ~5t
quae tibi ~ss~nt opus; ldcturu. puto,
117 -
ibid"
XVI, 12, i : Quo in discrilline l.'ers~ttJr sdlu5 lI~a et bonorUfl olllnil.'l1 Jtque
IJniU~rSd rei p,
~x ~o scire POt~5 quod dOMOS Msiru et pJtrid,ll iPSd,'I/ :.'~j
diripie,'1dalll uel inllalllld.'1ddlll r~liquiflus, [,'1 ~tJll 10cIJII r~s d~dtJctast lo,t, .'lisi qui
de/Js /Jel CJSUS Jliqlo'is sublo·~n~rit, sdlui ~ss~ n~qlJealltJs,
l1e -
ibid.,
XVI,
12, 6 :
h'!
"f~lo'O.'1iJllI eo tellpor~ "~(UM esse non poJtJisti qlo'o ~go
.axi.~ l,'Perali ~t fid~litdt~fI de5id~rdui ttJa,,! catJ~ fe5tin~5 atJt cOllllliitas /Jt .lut
.uger Jut ,"i~,fle .'1dtJi9~S, NUl/quJIII sero te lo'enisse putl/xJ, si s.J1tJus I.'en~ris,
119 -
"Les rapp.)rts escla'(a.~istes ,jans l'idéologie et la pratique de Cicéron : leurs
représentations et leur fonctionneNent d'apr~s la correspondance des années SO-
A9a'{, ,J,-C," in T~xt~. Po1itiqu~, Id~o1ogie: Cic~ron, p. 258,
120 -
.4tt"
l'J, 15, 10 : !Jio,'1ysi:"lI u~Jj"
SJltJere ilorb~as ~t el.'. r0!1~es lo,t t~ .'1ortetur
qlo'lfI} PrJA'UI.' ueniJs, ut possit cicuoneM "eu~.. Jtque ~ti.tlll /Je ipsu/l} erlo'dir~,
121 -
ibid"
VIII, S, l : CUIf J.'1t~ lIJC~.«' Fl/!, /(Jl, litterJ5 Jd t~ Dionysio dediss~/II..
u~5~~r i .Jd .~O'5 e],.'d~,t.' di~ lJ~r~:' t ips~ Dion,Ys fus,!
.J!JC t~r i td t~ t:iJ p~r.fot!.r5.'
ut
slo'spicor " '-lu1d e,'1i.t.' plo'te.'!,' Jl:tJd .~ Elsi soles ~IJAI, Clo'lI diiqlJid lt.'riose luit,
p~enjt~r~, Nu~q~d~ a~t~m cerrltior f~jt qu~m in hoc negotio,
122 -
ibid"
~~d ~n medM mdnsuetudin~M ! c~nl~c~ram in fJ5Ciculum und C~~ t.~J u~ment~m
Jd ilIum ~pistl.'llf1}, HJnc Jd m~ rel~rri uolo nec l.'!lJII} ob J11JIII CJUSIN Pollic~m
-
390 -
5~r!.'t.f.f.1 J p~dibt.'s I.'~f.i~ l?OI~IJlN .fis1, [0 Jat~s» Jd te 5cripsi LI!.,
si tibi lorte
l'eddita esset, mihi c~rares l'efel'endaN,
12.;; -
Suétone, f)il.'~s fu1. 1 XLVIII , 3:3 : f)olllestica,f di sciplinu in puuis JI: Qlaioribas
l'eb,.'s diligenter
adeo
se~el'eque
l'exit..
at pistoreN
alia.
qaall
sibi panel/}
COI1l.'ù'.'iS sabcie.?âm cOllpedibas l.'itl:cerit ..
1ibert~1I gratissin~1I ob adaitel'atall
equitis Romani l.~orell, q~alluis n~llo querente, capitali poena adfecel'it,
J2.4 -
lhius .4ug, , LXVII, 119 : Patl'onus dOllin~sqae ,?o,? Mitll.'S seuet'as qaa.I' fui1is et
de,t'/Ms lI~ltos liberiorl./fI Ù1 honore et ~sa fUÜ.fO .'lab~it, ,..t Lùinw~ et Ce1adull
ali,-,sque COSlllUlI ser~uII grauissille de se opinantell .'10.'7 altra qadtl cOflpedibus
coerc~it, Oiomedell dispensa tore", a q~o sillu1 aNba1ante incarrenti repente fero
apro pel' lIetuII obiectl.'s est,
lIal~it tÙlliditatis ugaere qaall no.l·ae relique non
lIi.'1fA.oi periculi,
quia
ta.fen
fraus aberat,
Ù1
iOLl11A
uertit,
Idell
Poh,A.' ex
Jl:ceptissillis libertis 1I0/'i coegit cONpertwlJ ad~iterare
lIatronas ,.
Tha1lo a
Ma,?l.',
quod pro
epist~lo3 prodito3 denarios quingentos Jecepisset,
auro3
ei
fregi t ,. paedagogall lIinis tr/)sq~e C,
fil i, pel' occdSionefl uJ1 i tadi nis IIor ti sque
eil.'s superbe o3aa/,eql.'e fil pro~incia grdSSo3tos, oneratos graui pondere cel'aùibus
pl'aec:pitauit in flullen.
J25 -
J, Macquer,)n, Le travail des hOllmes libres dans l'lintiqait~ rOMaine, p, 152.
J26 -
Top., l l, 10 ,
J27 -
.4tt"
VII, 2.
128 -
Voir A, van Gennep, Les rites de passage,
l ?Q -
~-
1:30 -
J, Macquel'on, op, cit"
pp, J53-J5.4,
H, Lévy Bruhl, "L'affranchisseftlent pas la vindlCte" ml?,H,DJ.. D. 1930, op,
;;09-;;JO.
H, Lellonnler, op, ci t"
pp, .40-.4 J,
A, 80uché Leclercq, ~an~e1 des institutions r~waines, p, .4.4J.
G, Fabre, :.."{J,
p, .41 .
1:32 -
.4ft., IV, !5 , 1.
133 -
Ilte-Live ; J{I!I' Hisi, ,ROll"
XIV, e : Liberiaiis al.'ciarem e:s no,'1 se /'-'l'e SOh'A'.
sed (onsu};~AI
lf,
lfarc~l }I./II,
sed u,'7iael's:}s
Patres,
:,~l.'od :;"".IS:.'1 SOS a se de
lib~l'tat~ eoru. sib: permisiss~,
J 3.4 -
Pro 4rch l, V, 11 : " / S~~, quoniJm r~n5U5 non i~5 ci~itJtj5 c~nflrmJt Jt tant.u~
NOdo indicas (t.'m, :,~I./i sii censl.'s, ita se ia.w tu.w gessisse pro nl.'e,
13& -
v, 212 : fais toi-.ê~e la réponse en .'affranchissant,
1%
Il, 7, v, n-77 : .,' Toi que la baguette imposée trolS ou quatre i,ns sur t"n
épaule pourrait Ja~ais délivrer d'une misérable crainte?
VOir G,
heri, op. cit.
M, Lera,)sse, op. nt"
P. .47,
1:3lbis -
Se rep,)r ter à l' H,~umentatl.)n ,je Ci. /1oussy, ,,"P. (i t
p, 1el,
-
391 -
138 -
L~ tr~l~il d~s homm~s libr~s d~ns l'Antiquit~ romJin~, p, 152.
139 -
At t, / VI!,
2, 8 :
/1 h:d tJ.~~n d~ Cl1r,Vsippo - nu d~ J!t~ro i 110 lIinl.'s su,,,·
JdNi roi tus,
op~r~rio hOllin~ ;
s~d tJ.'II~n n~ i 110 If/..idel! quicql.'JII illprobil.'5.
CllrrsippuAI f.:~ro,
ql"~.,.. ~!liJ proptl!r li tt~ruIJru", n~stio quid /ib~nt~r uidi, in
ho,rl0r~ hJbl.'i, disL"~d~re J puero insrie17te me .' lfitto d/iJ qUJ~ Judio IIUUd,
lIitto furtJ ;
fl.'gu :'Ion l~ro,
quoi lIihi ,'1ihil,
uisuli ~5t sc~lerJtius. ltJqu~
uSI.'rpJui f.'~t!.'s i IIf.'d Orusi, ut l~runt, prdetoris ni,"1 ~o qlii
~Jd~1I Iib~r non
iuuaret·,
.~ istos 1ib~ros non Jddixissl!, prdl!s~rti.w wm Jdl!sset nl!IIO J qf.'O
rl!rte uindicJr~ntur,
lAO -
op, rit"
p, 2,
lAl
l, 10 : Lib~rorl.'m hominl.'lI, alii ing~nui sunt, J1ii lib~rtini,
lA2 -
op, rit"
p, 25i,
IA3 -
Nous avons établi cette déduction, à partir de l'observation de la philosophie
intégrationniste adoptée par les Romains tout au long de leur histoire, et dont
le point de départ se situe à sous Roaulus, Nous avons ~'al11eurs traité cette
question dans notre chapitre précédent, S'y reporter pour plus de coapréhensl0n,
lU -
H, LeMonnier, op, cit"
p, ii.
lA5 -
Top"
VI, 29 : GI!,"Itil~s sf.mt qf.'i i,"It~r s~ ~odefl !70"in~ sl.mt, 1(1./1 Jb i!1g~ntiis
ori u."Idi sun!,
Ql.'lJrufI NJiorf.'fJI /7ellO s~rui tut~,'11 S~rUif.li t ,
f/Ul
CJpi t~ ,"10/7 sunt
ani nt.l!i .
lA6 -
op, L" i t"
p, 132,
IAl -
lAS -
O~ Prd~t. IIrb"
XLVII, 123-1204 : Quant à son superbe tlépns, est-ii pers,)nne qUl
ignore ce qu'il a été, qui ignore à quel point Verrês regarde de haut en bas,
accable de son .jédain les gens de la plus basse c.,n.jitlon en qUl 11 n'a jamais
vu des ho••es libres?
1049 -
Hit., VIII, 4, 1 : Cui qui niJst~r honos, quod ObS~ql..iufl, qUJ~ ~!1J.~' Jd ~·I!t~ros
canteNpti cuius dol" hOflÙ7is rONII~ndJtio d~luit .~ lit .~IJ. iudidl.'.ll repreh~:ldi 01
Q.
lrdtre
uulgoqu~ Jb
o.nibus
MJ11en
qUJm
illum
non
eflereN
1Judibus,
cicero:'Iesque
nost ras "'~o po t i us 1dbore Sf.:b doci'r i
qUdtN IIi' J lwm
,~'dl:1~is t rf.'m
qUJeri're.
1049bis -
Pra C, RJb, , VII, 20,
150 -
Call1ll. Pet"
VIII, 29 : l'uiti l'lol/ines f.'rbJ.'1! i."lldustrii, .uiti 1:bi'!'!irl1 i.'1 loro
grJtiasi /7Juique UerSJ17tur, Quas pu te, quas pi'r L"Oflflf..'."Ies JflÙOS pderis, SU/l11J
Cf.'rJ ut ClJpidi tui Sirlt elabarJto
~ppetjto, Jd1egato
5t.'.""0 b~."Ielùio t~ JUin
l
l
oste.'1di to,
151 -
III Colt"
'JI, lA,
152 -
J, Annequin, "Esclaves et affranchls dans ia ("nJuratl"n ,je Catli:na"
.... ,4di'S
du colloque 1911 fur 1 '~5clJI~g~, P. 198,
l53 -
,~~e l'oting distrids al the ,lfof.lJ.'1 Ri'pl.'blic, p, 133,
-
392 -
1.,4 -
'-'P .. Cit"
p, 300,
CO.t.',~I, Pet, 1 V, 17
lit ql.'i5~"t1e ~5t inti"ui5
' 1 1
Je lJ1a.xitl~ do.s'esticf.'s" fit 15 J/,~t
et qUJlI 4Alp1i ssi IIUCI esse te cupiat !.'alde el4bor4!ldu~.' est,
it.'111 fit trioules! ut
fiie j,'11, ut cJier~t~s, ut. deniqu~ liberti! p~5tre.o etia~ 5erui tui,
1.,6 -
op , ci t"
p. 164.
1.,6bis -
U His t , N4 t '1 XlVI, 12,
1.,7 -
CO,1M.' ,
Pet,
,
VII,
2., : Et qI.'4mq:"41J putis 4~· fU.'1d4tis 41'Ùitiis fret!.'f.'I 4e
Il:''f,i t:".~1 esse ~'Portet! !4,,'e,., in ipS4 petitione 41lici t Jae pertlluJt4~ U p~rut i les
COAlpu4.'1!:.'r,
Nu in celeris ll'oiestiis h4bet ,~oc t4.'IIen petitio ~·otl!lodi : potes
,~of'este! ql.'od in ceter4 l.'it4 Mn qt.'eH! quosCu,.ql.'e I.'elis 4diungere 4d 4/1ùitia,(f..
q!.libusculII
si
4lio
tell/pore
4gH
ut te ut4ntur,
4bsurde
f4cere
uide4re..
in
petitione aute~ nisi id 4gas, et CUtl Mt.'ltis et diligenter, nul lus petitor esse
l.'ide4re,
158 -
!Je Pr4et, l'ro, 1 XLVI l, 124,
1.,9 -
Cl, Nlcolet, Rome et 14 conql.'~te du 1I0nde lII~diterr4n~en,
TI., P. 214,
1.,9bis -
L, Il, 1ayl>:>r, ~'p, cit"
p, 132,
160 -
Le m~tier de cito)~n d4ns le ROINe r~pl.'blic4ine,
p. 419,
161 -
! !Je ~'r4t"
1:(,
38
lJt
reliq:"4 pruterllittu,
oll.'7il.'l1 lIi.'1i uideor excep!is..
cr4sS_, uoois dl.'oous eloquentissiNOS 4udisse Ti, et C. Sempronios, quorl.'l11 pater
,~O.fO pn'dens et gr4uis, h4Ud q:"4qU4.• eloquens, et s4epe 41i4S et. t,'4X:".tle censor
s4luti rei public4e fuit,
~tque is non accurata quadalll orationis cop1a, sed nutu
4tq:,'e
uuoo
libertiMs
i,,,
ur04.'74S
tribl./s
tr4nstulit
;
qu~'d nUl
f:H:sset,
re'~'Pl.'01iC4,~', qualll nunc :"ù' tenet}t.'s, ial!l dit.' nu1J.J1I habere#lus,
162 -
Tite-live: n!! His!, /rO.fI, , XI, 8,
163 -
Comme en 181 av, J,-C"
année pendant laquelle on décide à Ro~e de poufthasser
les pirates ll'jures et de la Iller >j'Ionie, Tite-live: IL His!., /fo.t,'"
XVIII, 7,
164 -
16., -
N, Rouland, Les esclaves rom.Jins en temps de guerre, p. 72,
166 -
Tite-li'{e
,( Hist, /ro...', , nI, 33,
167 -
Suétone,
!Jiuus
~ug"
XXXV,
82
Libertino
milite,
prae!erq~4~ Rom4e
incendiort.',~' ~·4usa et si t:,IIo'u!tus ifl grauiore annot14 Netueret~r/ bis :"51,:5 ut "
5~A'~! 4d pr.3~sidi!J.f r~'lo,r~iJrUII 111rril.,-ulf ::ctttinge.'7tiIJ1I
fier!.'A' .1d t:.ttel ..i,~ ripJ~
1
Rh~,r~i llu,ç,ir:is " ~L''5~"f't.te.' 5~r!.'a5 Jdhu( $.'iri5 f~l.'ini5ql.te p~:''-IJ.'1io5jorib:~ls i,r~djctos
.Je
si,"e A/Or4 ."'411:.'!~issos,
sub pr iore uexil 10 .~4bui t
tleq:,'e 4d :~,,~'.tU,d05 CI.'.'"
l
inge.?:,'Is 4ut eode.w I,'OI.'io 4r...·4t.oS,
168 -
1! Pb1) ip"
1l, :3 : H~..'c id~.: ireo cot~met,lot'.Jtu,,: J
t~ p!.,t:..' ui! te : ,~ll.1,t~.} -,-',"dini
C,o,fM,'e.'1dares,
C:".~l
o:l.~es
te
l'ecord.3re/1t!1l'
1ib~rt ini g~r'7erUl!1 ~t
lib~r05 !:"OS
nepot~5 i}/ ra di, ! IDer!.i..,j hO.~/i.'1i5l ,1tJi5'5e,
-
393 -
....... \\:-.
l59bis -
170 -
.4tt"
VIIi, 4,
l, 2
'"
.4d q[:~., ~go q::4S litt~r4s .. di ù't:orl41~s, tlis~r4m,
ql..'417tUI.'
hotloris
si':1~/liliant~s, q,r:4tIÜJI1I 4110ris
,/
{)ic4~4NllulJI
lI~h~rcl..'l~
Jal
.4ristox~m:,t.' dic~r~s 4rL-~55i, non [:tl~ olmia,,, Joqt:uissilll.'l1 ~t lIinilN~ 4ptt:,'1 4d
dN~nd[J.fI
'S~d ~st 1.'~,flOri4 bon4', /'f~ dic~t ~ss~ II~Jior~, f(uibt:s 1J'tt~ris it4
r~spondit ut ~go /I~mini cuil.'s C41.'S411 non r~cip~r~lI, S~lIp~r ~nill : "Si pot~ro! si
4nt~ SI.'5L"~pt4 C41.'S4 non illp~diu·, N&lfJq""JII r~o C[:iqI.'411 tu 11/:/11"1 il t4,f} sordido,
t4m noc~nti,
t4m 41i~I?0 t411 pr4~cis~ n~g4l.'i ql.'411 hic mihi pJ4n~ nulJ4 ~~~eptiol?e
prucidit,
171 -
ibid"
VU, 18, 3 : '"
OMflÙIO q/','id i!J~ luere debuuit in nostr4 il14 .'U':1'J,
qaid docto homine ~S 4mico dignl..'M fu~rit, CUII pr4es~rtil1l rog4tl.'s ~ss~s,
l '?
.
ibid"
VIII, 4, 2,
~
-
173 -
ibid"
Vrr, 1e, 3 ' '"
hJ~c non fl1l,is e)('quiro J Gruc i s,
174 -
D~ .fra."~nt"
XXVI II,
59
Ing~r~b4t
ist~ ,4rt~."idor[:11
ClJr/l~l it.'il lI~dicUIi ~t
Tl~pol~All.'lll Cornelit.'11 pidorell et eil.'5 lIodi ru iper4 tor~51 qt.'orl.'l1 ciuis ,I?01l4n[:s
I?~.f,'~' U4S, s~d Bruci S4trlî~gi iJI1I prid~N illprobi, r~pent~ corneJii,
175 -
L 'ironi~ ~t 1 'hum~ur chez Cic~ron, PI 115,
171; -
H,N, , XXXV, 200,
177 -
Pr~' S~x, fflJsc, ,4.f~r. 1 XLI II, 124
j'arrive maintenant à ce nom de Chrysogonus,
un Mil d'or,
178 -
D~ .'rument"
IV, e : l!4 uedo " si non uirtute, flO/l irldustri4" ,'llJn Inrl"'~'entJJ,
n~'.'1 pt.'dlJr~!
nofi
pudidt14,
4S
serllfon~,
4t
!itt~ri5..
Jt
hf..'I1W7itJt~ ::1t.'5
deJ~d4,wini,
Ni/liJ
~orufJI ~Stl
cOl7tr41.,'&'~ sunt Ol1lfl14 C:.IN SUllIAIO d~d~~·or~
Je
tt.'rpltl.'dj,r7~! h'l' singului stuJtit14 Jtql.'e in!ll.'llw71t4te oblit4, Ht.'ic i,,,,mirl1 si
c:.lius dOllU5 p4t~t,
f..'tr:.lll ~4 p4tere 4/1 hiJr~ 4C poscer~ 41iq:.lid f..'id~t:.lr ! H:.Inc
f..'~stri i4,',itor~5,
h:.lnc wbic:.IJJrii diJigl.'nt " hunc Jib~rti f..'~5tn,
in//lc s::rui
Jnc il 14::ql..':: 4/U.?t,
179 -
180 -
[le 0011, 1 UV,
1:39 : ,"
Pr4~s~rtill CUII i5t~ illpt.'rus 4tqU~ impif..'s :"lJst15 O,MWII
reJigilJnf..'.f!..
qt.'i L-lJntr4 .'4S ~t int~r uiros 54~p~ ,fJlJ1ùr et int~r .tJtlli~r~s t.,jr
ll.'iss~t,
1Bl -
Pro S~x,
ffos~-, ,qm~r"
XLVI, 134-135
llftto 114S~-~ ut~s :.It.'lgu~s, ~''''qUM,
piStN~S, l~dù-,Jrios ,: 4ni.tli ~t 4urit.'tI C4t.'SJ tot ilolJlin~s ilJb~t, !it ~·",tldi4,'1o
CJntu t.'OC!i~1
~t
.'I~rI.'Ort.',f ~t
tibiJruli
/lodt.'rni5ql.'~ co.?&'ù.Jiis
lot4
1..'h-i,'11t45
p~r50n~t,
In jl,dt uitJ
iudicl!s, q!JJ.)S 5/JAJptti5 tvtidi.Jl10S, q!iJ5 ~llusion~'5 .'j~rl
l
put4tis 1 Qt.'4~ t.'::rlJ conuiuiJ 1 Hon~st4! cr~do.. Ir. ~il.'s modi dOIl""
si domus hJ~c
,"4b~r.,i4 ~st p",tif..'S qt.'4,'1 ollicin4 n~qt.'itiu JC d~:.I~rsoriu., llJgitilJru,~ omniutI,
lps~ f..'~ro, ql.'~m 4d ~odf..'~ composito ~t d~1ibf..'to c4piJ10 p4ssill per .'orull ~~lIt~t
W.tI .ugn4
c4t~ru4 t0':1~4tIJN.lllo', !iidetis.. i::dic~s .: :.Iid~tis ut IJ.M~S d~Spl~·i4t, ~(t
."iJAlin~1I pru s~ !1~IIU!1elli pl..'t~t, ut s~ soll.'-'I b~4h(II", S01UAI pot~nt~,11 P~(t~t.
iS2 -
D~ PrJ~t. Slci1"
XXVIII-XXXI, 68-76.
183 -
ibId"
X, ?'I
,
~.
,
-
394
184 -
Pe l'empire romain j l'an Hil, p, 9A,
1%
!Je f'raet,Sieil"
LIV,
134 : Sed r~e mirelllù~i /.j'ua rJtione Mt: tantum apud istuli
libertus potuerft.,
exporwI uobis bret.'iter
quid llo.1.'inis
sit,
'.It
et
istius
nequitialll qui illuN seculi habuerit, eo praesertim nUllero de loeo, et calaMitateM
pf'ouinciae eognl.'scatis,
ln .flulierwI t:orruptelis et in olmi eius modi 1uxuria
atque
,'7equitiJ
,"ira.7dt.'fl.'
in
tfOdUIi
repuieball
hune
TiMut:llideN
dd
istius
flagitiosas
libidines
singularemque
nequitiall
nat~fI Jtque
aptuM
fuisse
/
imlestigare,
adire/
,~ppellare, e,-v rU"'Pe re/ quiduis faeere in eù.'s IIodi ."ebus
qua.fluis eaIl ide,
186 -
/Je frulle.7t.,
IX,
22
:
...
Et t:ut.' ipse seWM sui s1.fl1/es dt.'xiset non PUUII
Multos, nequitia, l~~uria, Judacia sui si"i11illuil iudieauit : itdque istos inter
se perbre~'i tell/pore non res.. r.on ratil}, ."1,-'."1 t:ollllenddtio aliqt.'a, sed studiorUIl
turpitudo silllilitudoque ,--oniunxit,
187 -
/Je f'raet.
Sidl., LIV, 1% : ik non solwI uat adlllinister 1stius wpid.rtatulI,
uerUM etia" ipse sui lIe.flinerat,
neque solt.'11 nUllllos,
si qui isti exciderant,
tollere
solebat,
ex
quibus pet:unfa"
','JXÙlWII
feeit,
s«/
etiall
uoluptdtulJ
flagitior~flque istius Ipse reliquias eolligebat.
188 -
ibid.!
1taq~/e in Sieilia tfOn fUhenionell,
qui
nullull 1,"PP1du., eepit,
sed
!i.flJreMdelll
h'gi t1ut.'l~.' ollnibus oppidis per
trienniulII
sc i tote
regnasse :
in
Tillut:hidi potestate sodoruM populi f?ollla.'1i af7tiquissillorull atlot"f.le a.widssillorul.'
liberos, matres familiJs, bona fortunasque omnes fuisse,
,189 -
.4tt"
Il, l, e : I}~'id f.uielllus, si aliter non POSSUflUS? liberti.?1s atqtle etiallo'
seruis serui~us ~
190 -
Cl, Nicolet, Ro,.'e et la e"nqu~te dt.' IIonde ,f~diterran~e,'1,
T. ,4
de l'Italie rOMJine, p, 217,
C O N
C
L U S
I O N
-
395 -
Notre
étude
enfi n,
s ' a.::;hève,
Longue
et
si nueuse
à
la
fois,
elle
nous
aura
permis
de
~
'+
pene ~rer
dans
le
monde
romain,
de
l ' auscul ter,
et
de
chercher
à
en
dégager
par
le
biais
de
Cicéron,
la
conception
en
vigueur
sur
les
esclaves.
Peut-on
pour
cela
prétendre
avoir a t t e i n t
notre
o b j e c t i f ?
Ce
s e r a i t
à
notre
sens,
présomptueux
que
de
pouvoir
l'affirmer.
Car
l'Arpinate
est
resté
pour
nous,
une
sorte
d'énigme,
un
mystère
pourrait-on
dire,
d i f f i c i l e
à
ceinturer
et
à
maitriser.
Placé
dans
sa
t r i p l e
fonction
de
citoyen,
d'homme
de
l e t t r e s
et
d'a,'ocat,
i l
lui
é t a i t
quasiment
impossible
d'adopter
un
point
de
vue
linéaire
et
logique,
cohérent
sur
toute
la
ligne.
G.
Boissier
qui
a
é c r i t
un
ouvrage
dithyrambique
sur
lui,
parle
d ' a i l l e u r s
à
juste
t i t r e
d' ({une
extrême
mobilité
d'impressions ....
(1),
suivi
par
H.
Eulenberg
qui
conclut
sur
une
(âme
1110bile et
instable-,-',
et
,{(ln
naturel
ondoyant ....
( 2 ) .
Dans
un
autre
sens,
lui-même
l'Arpinate
n'a
pas
hésité
à
faire
é t a t
de
cette
fluctuation,
en
abordant
la
méthode
des Péripatéticiens et
de
l'Académie
«C'est
pourquoi
j ' a i
toujours
ai .Te
la
méthode
des
PériPatéticiens
et
de
l'Aca-
démie,
qui
consiste
il
traiter
le
pour
et
le
contre en
tout sujet»
(3)
Du
coup,
l'opinion
admise
sur
l'esclave,
se
trouve
e l l e
aussi
soumise
à
cette
constante
mutation
d'esprit
de
notre
auteur.
Faut-il
lui
en
faire
grief
Ce
serai t
là.
oubl ier
la
profonde
richesse
de
ses
arguments.
Car
riches,
i l s
le
sont.
Et
c ' e s t
non sans raison que
P.
Guillemin a
déclaré
« ...
Ce
n'est
pas seulement
un
style
et
une
cul ture
que
Cicéron,
en
.TOurant a~'ec tant
de
simplicité
et
de
courage,
a
legues
à
sa
patrie,
mais
sont
des
dis po,s-i t ions
durables,
qui
ont
pu
par
instant
s'eclipser,
sombrer dans
une mort apparente.','
( 4 )
-
396
Ondoyant
tout
au
long
de
son
existence,
l ' Arpi nate
a
su
cependant
véhiculer
à
la société
dans
laquelle
i l
a
vécu,
et
même
à
la
postéri té,
les
courants
de
pensée
qui
se
bouscu laient
dans
les
âmes
de
la
plupart
de
ses
congénères.
Placé
à
la
croisée
des
chemins,
au
creux de
la
civilisation
véhiculée
par
les
mai ores.
seuls
responsables
de
la
magnitudo
reipublicae.
et
de
celle
issue
de
l'hellénisme
dont
le
rouleau
humanitariste
déferle
sur
l'Urbs,
i l
a
réussi
le
tour
de
force
de
nous
faire
vivre
en
quelque
sorte,
l'ambiance
du
moment.
Et
c ' e s t
dans
cet
éclectisme,
que
nous
avons
pu
déceler
la
place
occupée
par
l'esclave
s t r i c t o sensu celle
d'un être
inférieur
inhumanum negotium
(5).
d'un être
dégradé,
placé
sous
la
coupe d'un autre
homme
au
service
duquel
s'effectue
son
existence
en
un
mot,
celle
de
,'d'env'ers
d'un
bom."!!e
libre.'..
( 6 ) ,
parce
que
dépos-
sédé
de
la
libertas ciuitasque.
La
libertas,
voilà
l'une des
notions
que
nous
pouvons
considérer
comme
ayant
occupe
le
gros
de
toute
l'argumentation
cicéronienne
sur
le
monde
de
l'infériorité.
La
définition
qu'en
donne
D.
Cels
est
on
ne
peut
plus lumineuse
ft • . .
LB.
1 i berU~
n'est
pas
seulement
un
statut juridique,
une condition,
~~lS
en
quelque
sorte
une
nature,
opposée
à
la
nature
serv'ile
;
elle
se
définit
par
des
\\'ertus comme l'autre par des "ices."
(7)
Elle
l ' e s t
d'autant
plus
qu'elle
éclaire
si
l'on
ose
dire,
la
conception
de
la
servitude
dans
l ' e s p r i t
de
l'Arpinate
une
conception
qui
transcende
celle
traditionnellement
en
vigueur,
et
qui
ne
reconnaissai t
comme
esclave'3
que
les
ét rangers,
c' est-à-di re
ceux
placés
en
dehors
de'3
moenia de
l'Urbs,
et
barbotant
dans
la
barbarie,
pour
désormais
s'appliquer
aussi
aux
Romains,
sur
la
base
de
leur
'.raleur
morale.
Cette
considération,
permit
ainsi
à
tous
les
efféminés,
les
pédérastes
et
les
destructeurs
de
la
cité
qu'étaient
Clodius,
Verrès,
Pison,
Gabinius,
Jotarc
Antoine,
Catilina
ainsi
que
leurs
sbires
recrutés
parm1
tous
les
- 397 -
-5,
dépravés
de
la
population
grouillante
à
Rome,
de
grossir
le
nombre
des
esclaves
({ordinaires.'.',
pour
se
trouver
refoulés
....·ers
l'abîme
de
la
bas,sesse.
Leur
refoulement
é t a i t
tel
q u ' i l s
occupèrent
le
bas
du
pavé
par
rapport
aux
bons
esclaves
que
furent
Tiro,
Dionysius,
Statius
remarquables
par
leur
capaci té
à
faire
preuve
d' hUDlani tas,
de
fides,
de
beneuolentia,
de
certitudo,
et
donc
à
se
conformer
aux
désirs
des
maî tres,
devenant
par
la
même
occasion,
des
«demi-libres.I•1
{ 8 ) .
C'est
dans
ce
groupe
que
l'on
retrouve
les
tristement
célèbres
serui
uenerii
que
Verrès
entoura
de
suffisamment
de
prestige,
pour
écorcher
les
citoyens
de
Sicile
pendant
sa
préture.
Répartis
en
bons
et
mauvais
esclaves,
plus
importants
les
uns
que
les
autres
à
l ' i n t é r i e u r
de
la
familia,
voire
à
l'extérieur,
dans
les
milieux
où
leur
auréole
les
conduit,
i l s
n'en
demeurent
pas
moins
des
êtres
que
le
doDlinus
tient
à
avoir
à
sa
portée.
Humanus
entre
autres
qualités,
même
Tiro
n' y
échappe
pas.
Bien
au
contraire,
(d~
culture.'.'
qui
le
distingue
de
ses
collègues,
î( • • .
traduit
a~rec
la
promotion
qu'elle
conIere.
Jusque
dans
l'aJrJ.itié
de
Cicéron,
la
dépendance
essentielle
• • • . t.t
( 9 ) .
Même
s i
à
la
fin
de
la
République,
l'auctoritas
domini
tend
à
perdre
de
sa
vigueur,
l'un
des
soucis
de
l ' Arpinate,
est
de
revenir
à
l'antique
emprise
dominicale,
de
façon
à
enrayer
l'indiscipline
servile.
D'où
le
recours
au
passé,
qu'en
consul
togatus
{lO;',
politiquement
engagé
dans
la
marche
de
la
cité,
i l
s'emploie
sans
ce'3se.
D'où
également
sa
profonde
haine
envers
les
fugitiui,
qui
par
excès
d'audacia
rompent
leur
ban,
et
dégarnissent
leurs
propriétaires.
De
façon
grossière,
cette
concept ion
se
résume
en
ces
termes
se
montrer
aimable
envers
les
esclaves,
surtout
les
plus
méri tants
d'entre
eux,
les
intégrer
dans
la
familiaritas
des
doDlini,
mais
à
condition
q u ' i l s
respectent
la
règle
du
jeu.
L'affranchissement
dont
se
trouvent
gra t i f iès
de
pl us
en
plus
d' esc laves
a
cet te
époque,
n'altére
pas
une t e l l e
conviction.
Formant
un
ordo,
les
ël.ffranchis
constituent
un
groupe
très
important
dans
la
vie
romaine,
mëme
s i
Cicéron
ne
les
range
-
398 -
qu'avec
la
plebs
sordida
(11)
sous
l'acception
de
ceteri
ordi nes
(12),
en en
faisant
ainsi,
une
sorte
de
ut i ers Eta t.'>
(13)
(,'Libertini
as
class
becam a
distinguishable
force
in
poli tics,
to
be
spoken
of
in
the
sa11!e
breath
as
other
ordines
in
the
state.
There
Wé1S
some
justification
for
calling
them
an
order,
since,
~s
the
Equestrian
order
r.,ras
ItJarked
o f f
bX
certain
pri tri 1 eges,
sa
the
freedmen
were
distinguished
bX
certain handicaps»
(14)
Leur
importance
est
tellement
reconnue,
qu'on
en
f a i t
une
arme
politique
de
choix,
sur
laquelle
compter
en
cas
d'élection.
La
tentati"..e
de
P.
Clodius
Pulcher en 58
av.
J.-
C.
de
les
inscrire
dans
les
t r i bus
rurales
(15),
en
est
l ' i l l u s t r a t i o n
la
plus
claire.
Et
Cicéron
le
reconnait
parfai tement
.lege
noua
quae
est
inuenta
apud
eum
cum
reliquis
legibus
Clodianis.
seruos
nostros
libertos
suas
effecisset
(16) ,
d i t - i l
dans
son
Pro
lIi l one.
Certains
descendants
d'affranchis
furent
même
élus
à
des
magis-
tratures.
Le
cas
le
plus singulier est
celui
que
nous
relate
Tite-Live,
et qui
eut
lieu en 304 av.
J.-C.
Cn.
Flavius
Cn.
f i l i u s
seri ba,
patre
libertinD
huml i
fDrtuna
Drtus,
ceteruJ1l
callidus
u i r
et
facundus,
aedilis
curulis
fui t
(1'1)
Les plus
fortunés
également,
pan.rinrent
à
se
faire
une
image
«noble .... ,
et
à
({é1cql..Jérir
une
position
sociale
influente
que
leur
condition
de
naissance
ne
laissait
pas
prêtroir'"
<Hn
hommes
libres comme
ceux
qui
l'étaient
par
la
nais'3ance,
i l s
les
dominaient
cependant
par
leur
pouvoir,
e'3:3entiellement
financier
(19).
Dans
ce
monde
d'afffranchis
pre'3tigieux,
i l
ne
faut
guère
oubl ier
ceux
qui
avaient
rèussi
grace
.3-
des
qualités
precises,
à
graviter
autour
des
patroni
et
à
faire
-
399 -
partie
de
leur
intimité.
Tous
ensemble,
i l s
tendaient
ainsi
à
é l a r g i r
le
cercle
de
ces
hOIIllIles,
donnant
à
première
vue,
l ' impression
d ' ê t r e
éloignés
de
leurs
patrons.
Mais
i l
n'en
est
rien,
dans
la
réalité.
Non
seulement,
les
l i b e r t i n i
restent
exclus
de
l'ingenuitas,
mais
encore
i l s
gardent
ancrées
sur
eux,
beaucoup
d' i nf i rmi tés
héri tées
de
la
servitude,
et
parmi
lesquelles
le
droit
de
regard
du
patronus sur
sa
vie,
occupe
une
place de
choix.
C'est
ce
que
résume
ici
M.
Jakota
«Il
était
impossible
pour
la
classe
dirigeante
de
reconnaî tre
ou~"ertemeDt
la
capa ci té
de
l'escla~"e
(et
de
]'affre.nchi)
c'eût
éte
mettre
en
discussion
les
bases
même de l ' expl ai ta t i aD ,l,'
(20)
Cicéron
n'appelait-il
pas
l'un des
affranchis
qui
lui
servit
de
scribe
en
Cilicie,
s e r u u s ?
Entre
l'escla\\re
et
l'affranchi
au
regard
du
maî tre
et
du
patron,
nous
pouvons
donc
dire
que
le
hiatus é t a i t
lâche,
exigu.
Ces
deux s t a t u t s
colportent
encore
sinon
l ' i n f é r i o r i t é ,
du
moins
la
dérision,
COIIllIle
nous
pou\\rons
nous
en
rendre
compte
par
ces
mot,::.
de
l'Arpinate
lancés
à
L.
Equitius,
tribun
assassiné
en
100
a·,r.
J. -Co
i l l e ex compedibus atque e r g a s t u l o .
{21)
Sous
le
Haut-Empire,
les
dynaste:,:;
firent
souvent
eux aussi
preuve
de
cette
parcellisation,
Auguste
ayant
donné
le
coup
de
signal
en
instituant
une
profonde
gradation
dans
l ' o c t r o i
de
la
citoyenneté
intégrale
(22).
Même
au
IIIème
siècle
ap.
J . -
C.,
siècle
pourtant
marqué
entre
autres
par
la
vivacité
du
combat
pour
l ' é g a l i t é
civique
(23),
de
t e l l e s
restrictions
ne
s ' é t a i e n t
pas
estompées.
Il
n'est
que
de
ci t e r
la
portée
de
l ' é d i t
de Caracalla
(24),
pour
s'en
rendre compte.
-
400 -
Not.es
=====
! -
Cic~ron et s~s amis, p, S,
2 -
Cichon : /115-J2 al', J, -C,
3 -
II T~sc"
III, 9 : Itaq~~ mihi se~per PeripateticorufI AC4d~.ia~qu~ consuetudo de
oNnibus r~bus in contrarias partis disser~ndi,
A -
"Le legs de Cicér"n" in R,E,L"
3A, 195A, p, 175,
5 -
Cf.',~' S~nat, VI, lA.
~ -
J,C, DUllont, "La signification de la révolte" in l~,E,L"
XLV, 1967, p, 96,
7 -
"Les esclaves dans les Verr ines"
in Act~s du colloque /97/ sur l'esdal'a9~,
0,
180,
s
~, Jakota,
"Les
transforllations de
l'économie romaine pendant
les pre.iers
siècles ,je notre ère et les conditions de l'esclave agriculteur·
in Etudes
o.'fertes J J, l'fuqf.'eron, p, 100,
9 -
A,
Daubigney.
"Contribution
à
l'étude
de
l'esclavagiste
;
la
pNpriété
esclavagiste che~ Cicéron" in Texte, Politique, Idéologie: Cicéron, p, 254,
10 -
lire à ce sujet le brillant article de Cl, Nicolet, "Consul togatf.'s : Remar'Jues
sur le v.,cabulaire politique de Cicéron et de Tite-live· in ll.E,L., 38, 1960,
pp, 236-2A l ,
11 -
Z, Yavet~, "Plebs sOl'dida" in ,4t/'~na~tJIJ, J:.l, ,1955,
-The living conditions 0.' the l'rbu pl~s ifll~epublic4n ,'?o..,e· in Lah'Alt..'s, 1%8,
pp, 510-51 l ,
12 -
Pro Clue,~t"
LV,
1&0 :
Conl.'ute ,'1unc id equestrefl ordine. atqu~ in C~t~NJ5
ordin~5 ea5d~~ uitJ~ condicion~5,
13 -
.], Béran'~er, "Ordres et classes s.,ciales d'après Cicéron" in l~~ch~rches 51.'." les
5trf.'ct~res sociales dans 1 'Antiq~it~ clas5iqu~, p, 227,
lA -
S, Treggiari, l~0,','a!1, ,'reed.t'e!1 during tll~ lat~ R~public, p, 16:3,
15 -
L,R, Taylor, The l'Otin9 districts 0.' tlle ROMan Republic, p, lA5,
16 -
Pro lfilorl.,
XXXIII, 89 : Par une loi nouvelle qu'on a trouvée chez lUI parall
tant d'autres lois clodiennes, il aurait fait de nos esclaves ses affranchiS,
17 -
I.r Hist, /?Ol.'"
XLVI, l,
18 -
H, Vans ,j'Escul'ae, "Le personnel ,j'.,rigine servile" in Actes dl.l colloql..'e /9,72
5~r lle5[lJ'~g~1 P, 312,
19 -
Dans l'oeu\\'fe de C1cér"I1, 11 est essent1ellelllent la source du POUVOlr ,j'l,JI' 9l'and
noabre d'affranchlS,
20 -
Op, ci t "
p, 132,
21 -
Pro C. l?ab., VII, 20.
22 -
Suet, OÙN1S .4t.'g., Xl, 97,
2A -
P~r cet édit, tous les h~bit~nts de l'empire reçoivent la citoyenneté rOM~ine, à
l'exception des déditices, Voir entre autres, l'ouvrage de (A,N,) Sherwin White,
!l'le rO.flla.? ci tizef1s/lip, p, 3B6,
SOURCES
ET
BIBLIOGRAPHIE
•
•
•
•
•
•
-
402 -
Nous
ne
rangerons
dans
cette
rubrique,
que
les
ouvrages
cités
tout
au
long
de
notre
travail.
Ai nsi,
nous
nous
passerons
de
tous
les
autres,
même
si
eux
aussi
nous
ont
apporté des éléments d' importance.
A -
Sources
===========
Sauf
indication
contraire,
elles
émanent
dans
leur
presque
totalité,
àe la collection Universitaire de France
CC. U.F.)
1
-
Littéraires
a)
romaines
Aulu-Gelle
)Jactes Atticae
Texte
tradui t
par
M.
Mignon,
Paris,
Garnier
et
Frères.
Tome
l
l i v.
I-V
Tome
II
Liv.
VI-XIII
Tome
III
Liv.
XIV-XX
Caton
De
Agricultura
Texte
établi,
tradui t
et
commenté
par
R.
Goujard,
Paris,
1978.
Catulle
Poésies
Texte
établi
et
traduit
par
Lapaye,
Paris,
1964.
César
Bellum Gallicum
Textes
établis
et
traduits
par
L.
A.
Constans,
Paris,
1967.
Cornelius Nepos
Oeuvres
Texte
établi
et
traduit
par
A.M.
Guillemin,
Paris,
1970.
Cicéron
• Epistulae
Tome
l
texte
établi
et
traduit
par
L. A.
Constans,
Paris,
1969.
Tome
l l
texte
établi
et
traduit
par
L.
A.
Constans,
Paris,
1978.
Tome
III
texte établi
et
traduit
par
L.
A.
Constans,
Paris,
1940.
Tome
l V
texte
établ i
et
t radu i t
Dar
L.
A.
Constans et J.
Bayet,
Paris,
1950.
Tome
V
te xt e
é t a b l i
et
traduit
par
J.
Bayet,
Paris,
1964.
-
403 -
Tome
VI l
texte
éta bl i,
tradu i t
et
annoté
par J.
Beaujeu,
Paris,
1980.
Tome
VIII
texte
établi,
traduit
et
annoté
par J.
Beauj eu,
Paris,
1982· .
•
Orationes
Tome
l
Pro
P.
Quinctio
-
Pro
Sex.
Rose.
Amerino
Pro Sex.
Rose.
Co.mmeodo
Textes
établis
et
traduits
par
H.
de
la
Ville Mirmont,
Paris,
1960.
Tome
Il
:
In Q.
Caeeilium -
Praetura Urbana
Textes
établis
et
traduits
par
H.
de
la
Ville Mirmont,
Paris,
1960.
Tome
III
:
De Praetura Siciliensi
Texte
établi
et
traduit
par
H.
de
la
Ville
Mirmont,
Paris,
1960.
Tome
IV
De Frumento
Texte
établi
et
traduit
par
H.
de
la
Ville
Mirmont,
Paris,
1960.
Tome V :
De Signis
Texte établi
par H.
Bornecque et
traduit
par
G.
Raband,
Paris,
1959.
Tome VI
De Suppliciis
Texte établi
par H.
Bornecque et
tr3duit
par
G.
Rabaud,
Paris,
1961.
Tome
VII
Pro Fonteio -
Pro A.
Caecina -
De
Imperio Cn.
Pompei
Textes établis et
traduits
par
A.
Boulanger,
Paris,
1961.
Tome VIII
Pro Cluentio
Texte
établi
et
traduit
par
P.
Bovancé,
Paris,
1953.
Tome
IX :
Pro C.
Rabirio -
De Lege Agraria
Textes établis et
traduits par
A.
Boulanger,
Paris,
1932.
Tome X
In L.
Catilinam
Texte établi
par H.
Bornecque et
traduit
par
E.
Bailly,
Paris,
1961.
Tome Xl
:
Pro L.
Kurena -
Pro P.
Sulla
Texte
établ i
et
traduit
par
A.
Boulanger,
Paris,
1962.
Tome XII:
Pro Archia poeta
Texte
établi
et
traduit
par
A.
boulanger,
Paris,
1959.
- 404 -
Tome
XIII,
Cum Senatui
-
Cum
Populo
De
Domo sua
Textes
établ is
et
tradu i t s
par
P.
Wuilleumier,
Paris,
1952.
Tome
X Ill",.
De Haruspicum responsis
Texte
établi
et
traduit
par
P.
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Btud.
Clas.
Studii
clasice.
Bucarest i,
Soc.
de
Studii
clasice din RSR
(959) .
Table des Matières
Introduction
"
" . "
" " "
" "
" . " . " . .
6
Première Partie: L'esclavage ou la dualité
d'un statut .. "
"." .. """."."
,,
25
Chapitre 1 : Les modes d'identification.
un élément fondamental de cette dualité""" ... "
25
1 - L.' a nOnlA.stique
" .. "
26
l-Les personnalités historiques." .. "
36
2-Les noms d'inspiration religieuse"." .37
II -I....e VOCA..bu.l air e
" " " " . " "
" . " " .43
l-L.'identité de l'esclave""""."" .. ""
"60
2-Les activités de l'esclave
""
,,61
3-L. 'or igi ne des esclA.ves
"
"
.
Chapitre II. Un autre élément de cette dualité:
les rapports maîtres esclaves
" "" .. "
82
1-L.'imA.ge du bon esclave
" .. "."." .. "." .84
A- Un ami du maître
""
"
84
l-L.es qualités serviles
""
"
" ",,85
2-L'héllénisme au secours des
qualités serviles ... "." . . . . . "" ... "" . . . . . 101
A-Mais aussi un être respectueux de
1 ' impér ium domi ni.
" "
102
II-L'image du mauvais esclave" .. "." .. ". ,,105
A-Un être opposé aux intérêts du
ma î t r e
"
" " . " .. 1. 06
B-Un être irrespectueux du
mos patrius."
"
".. ",,182
C-Mais aussi un être enclin à abuser
de la confiance placée en lui. "
126
Deuxième Partie : I....es eelaves et la violence ..
ou la dualité servile vécue autrement
138
Chapitre 1 : les esclaves auteurs de la violence .. 139
1- I... es esclaves, al.lteU)"S conscients
de l a vi 0 l e nce
" " "
" "
140
2-Les esclaves, auteurs inconscients
de la. violence."
"""
",,
1.53
l-Les esclaves, une arme redoutable
155
2-L.es esclaves. une arme destructrice
167
Chapitre II : Les esclaves, victimes de la
vi 0 l e nce
" " . " . " . " " . " .. " " . " " . " " .. 196
A- La violence matérielle .. "." .. "."."",, .197
1-Les batailles rangées .. "."."
" .198
2-L'esclave. objet d'expérimentation
203
3-L'esclave, bouc émissaire de l'inuidia
envers ses maîtres.""
"."
" .. 205
B-La pratique de la quaestio
""."." .,,209
C-L.a. rigu.eur Judiciaire"."
" .. " .. " .. 221
Partie III
: L'affranchissement. rupture ou
prolongement de la servitude?
"."",,
,," .242
Chapitre 1 : Une rupture évidente .. "
"
244
I-La modification de la nomenclature
,,245
1-Une dénomination nouvelle" . . . . "." .. " .246
2-La manumissio ou l'instrument de
cette modu.lation
""
"
25:3
II-L'expression de la rupture statutaire
entre les esclaves et les affranchis .. " .260
l-Le poids de la phraséologie
" " .. 261
2-Une amplification de certaines
qualités serviles
" .. ""."."."
265
III-Le contenu des rapports
affranchis/esclaves à l'intérieur
de la domus
"
""."
"
"
,," 274
1-L'exercice par les afranchis de
certaines fonctions exclusives .. """.""" ,,276
2-Une responsabilisation accrue
.
3-Le patron et la promotion de son
affr a nchi . "
"
"
" .. " . "
296
4-La vie conJugale
"
" .. "
302
Chapitre II : L'affranchissement. une perpétuation de
l'infériorité." .. "
"
"
" .. 322
I-L '8ffranchi, une ombre du p8.tron."
323
l-Les tria nomina
"
325
2-Le poids de l'imperium patroni
338
II-L'affranchi, un être exclu de
l ' i ngé nu i té ... " " " . . . . " " . " " " . " . "
" "
,,363
l-Le mal d'avoir été esclave
364
2-La basse moralité, meilleur argument
d'infériorisation .. "
"."
"
" .. 374
Conclusion
"
" . "
" . 395
Sources et Bibliographie
"
"
" .. "
402
Tables et Sigles utilisés" .. " " " ' . ""
"
" .. 417
Table des matières. "
" " . "
" .. 419