1
JPlJROJJET JD)JE JRJECHJEJRCHJE
l'ESPACE DTISCUJRSTIf DU ROMAN AfRTICAJIN
fRANcCOPHONJE POST~ceOlONJIAl
PAR
JOSEPH PARÉ
PH.D. DE LITTÉRATURE COMPARÉE
DÉPT. DE LITTÉRATURE COMPARÉE
FACULTÉ DES ARTS ET DES SCIENCES
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Directeur de thèse:Alain ROCHER ( Université de Montréal)
Co-Directeur de thèse:Fernando LA~IBERT (Université Laval)

L'examen
de synthèse
au
département de Littérature comparée
(Faculté
des
Arts
et des
Sciences 1 Université de
Montréal)
est le
préalable
à
la
rédaction
de
la
thèse.Cet
examen
consiste
en
la
soutenance, devant un jury,d'un travail articulé en fonction
de deux
champs de recherche.
Le
premier
champ
de
recherche
comprend
l'exposé,dans
ses
grandes
lignes,de la
problématique
sur laquelle portera la
thèse et
l'application de la démarche d'analyse proposée à partir de l'extrait de
l'un des textes du corpus.
Le second champ de recherche qui doit être connexe au premier
champ de recherche porte sur une question susceptible de constituer
un terrain
pour les travaux post-doctoraux.
Le
document
,que
voici,regoupe
les
éléments
qui
sont entrés
dans
le
cadre
de
la
soutenance
de
mon
examen
de
synthèse
du
291111993.
Mon premier champ de recherche (sujet de doctorat) présente,
dans
ses
grandes
lignes,la
problématique
de
l'espace
discursif
du
roman africain francophone post-colonial et la démarche d'analyse qui
est,par ailleurs,appliquée à un extrait de Les soleils des
indépendances
de A. Kourouma.
Le second champ de recherche pose les jalons d'une réflexion sur
la théorisation de la littérature africaine écrite.

2
ELAN
INTRODUCTION
I.Préliminaire à la formulation de la problématique et de la
démarche d 'analyse
1.1. La polémique autour des littératures nationales
I.2.Aperçu de la nouvelle thématique et du renouvellement
esthétique
II. Problématisation et démarche d'analyse
II.l.Problématisation
IL2.Démarche d'analyse
CONCLUSION
RÉFÉRENCES
BIBLIOGRAPHIE ANNOTÉE
PROJET de PLAN pour la THESE

INTRODUCTION
3
La critique avait, parfois, avec bonheur, caractérisé le roman
africain de la période coloniale de "contre-littératures" (1) ou de
roman de protestation. De telles caractérisations qui se justifiaient à
cette époque ne semblent plus suffisantes pour apprécier,
aujourd'hui,la production romanesque africaine tant elle s'est
diversifiée aussi bien dans sa thématique que dans son mode
d'actualisation scripturaire. Depuis la fin du régime colonial, la
réorientation dans la création romanesque implique, parallèlement,
celle de la recherche des axes privilégiés autour desquels s'articulent
les novations que signalent les différentes oeuvres romanesques.
Autrement dit,il s'avère nécessaire d'analyser ce genre littéraire
dominant dans la perspective d'en dévoiler la lisibilité à partir des
structures sémantiques qui portent le roman africain francophone
post-colonial.
Étudier dans ce contexte, de renouvellement, l'espace discursif
du romanesque africain francophone post-colonial impose d'abord de
partir d'un corpus assez vaste susceptible de rendre compte des
étapes successives, dans le temps post-colonial, suivant lesquelles
s'est opéré le remodelage de cet espace et, du même coup,
inventorier ses traits fondateurs.
Par ailleurs, l'analyse de l'espace discursif du romanesque
africain francophone post-colonial nécessite le dépassement de la

4
simple affirmation, presque empirique, d'un état de renouvellement
du discours romanesque pour la construction d'une démarche
méthologique qui, sans être une entéléchie, sera l'outillage
,
1
permettant d'opérer dans le champ discursif pour en démontrer les
1
,
1
)
mécanismes de fonctionnement principaux. Pour ce faire, des
postulats doivent, dès à présent, être formulés.
En Occident, une tradition établie présente le genre
romanesque comme descendant de l'épopée à travers diverses
"dégradations". En Afrique,la genèse du genre romanesque est liée à
d'autres circonstances parmi lesquelles la plus décisive est le fait
colonial. Du même coup, l'écriture, l'événementialité dans
le roman tout comme d'autres éléments telle que la temporalité (et
son traitement par le discours romanesque) obéissent à une autre
structure voire, une autre structuration. De par ce fait, l'analyse de
l'espace discursif du romanesque induit la nécessité d'outiller le
champ conceptuel en relation avec: ce qui constitue la dynamique
propre à la production romanesque africaine, les conditions de
fonctionnement qui sont le sien et qui marquent son caractère
distinct et distinctif. En bref, il faut aller au-delà du simple "statut
quaetionis" ayant cours jusqu'ici, dans le projet critique africain.
Ainsi, à travers une démarche qui se veut plus déductive
qu'inductive, notre approche de l'espace discursif du romanesque
africain francophone post-colonial s'effectuera en rapport avec les
questionnements relatifs à la médiation qui s'opère entre le langage,
l'écriture et les réalités politiques, sociales et culturelles de l'Afrique

5
moderne à travers le discursif romanesque. Autrement dit, il s'agira
d'analyser, à la fois, ce discours significatif que constitue le discours
romanesque africain mais, également, les modalités spécifiques
suivant lesquelles ce discours romanesque généré par l'écriture
s'offre comme champ d'actualisation de phénomènes divers: horizon
de réception du discours structuré, établissement d'un nouveau
contrat d'énonciation du discours, "recyclage" (au sens de nouvel
emploi dans un contexte différent d'éléments pris à l'oralité) de
certaines modalités de la parole empruntées à la culture
traditionnelle,
traitement
spécifié:
de
la
temporalité,
de
l'actorialisation discursive, etc.
Aussi, notre étude, tout en se fondant sur des emprunts que
nous ferons à différents théoriciens, appréhendera-t-elle le discours
romanesque africain francophone post-colonial à travers les
caractéristiques essentielles de sa lisibilité et s'appuiera sur les
structures sémantiques qui portent ce discours. Cependant, notre
analyse ne se limitera pas à cet unique aspect du discursif même s'il
semble fondateur ce, d'autant plus, que la formulation du sujet de
recherche indique qu'il s'agit de l'espace du discours qui est l'objet
du travail. En effet, l'analyse du discours, dans notre perspective,
devra découler d'une délimitation préalable des cadres qui balisent
l'espace du discours lui-même.
Le point nodal autour duquel va s'articuler,dès lors,la
problématique peut se schématiser en termes d'analyse de deux
"strates" constitutives de l'oeuvre romanesque.D'une part,la
construction de l'espace romanesque et,d'autre part,les modalités de
fonctionnement du discours dans cet espace à l'aide d'outils d'analyse

6
Cependant,les niveaux d'analyse de l'objet d'étude et la
problématique circonscrits,le sujet de la réflexion ne se laisse pas
pour autant aborder sans susciter d'autres interrogations.D'une
manière implicite,sa formulation semble postuler une double
validité. Celle de la désignation globalisante du roman africain au
moment où,justement,il subsiste ce débat sur la question des
littératures nationales.Par ailleurs,le terme post-colonial qui surgit
dans la formulation du sujet est ,parfois,sujet de controverses;même
s'il est acquis ,aujourd'hui,que la distinction en termes de roman
africain francophone,anglophone ou lusophone ne pose plus de
problèmes majeurs.C'est pourquoi,avant d'aborder le champ
d'étude,il s'avère nécessaire de situer la formulation de notre sujet et
l'objectif que nous nous assignons par rapport à la polémique autour
des littératures nationales mais,aussi,à ce qu'on peut convenir de
désigner période post-coloniale comme étape distinctive dans la
production littéraire (ou spécifiquement romanesque) africaine.

7
1.
PRÉLIMINAIRES À LA FORMULATION DE LA PROBLÉMATIQUE
ET DE LA DÉMARCHE THÉORIQUE.
LI
La polémiQue autour des littératures nationales
Le choix d'analyser l'espace discursif du romanesque africain
francophone post-colonial inscrit, d'emblée et à notre corps
défendant, notre sujet dans la polémique qui traverse actuellement
l'ensemble de la littérature africaine.En effet, depuis le début des
années 80 l'opposition s'accentue ,de plus en plus,entre ceux qui
considèrent qu'on peut continuer à parler de manière globale d'une
littérature africaine (quitte à tenir compte des diversités régionales
en fonction des aires d'appartenance culturelle des écrivains) et ceux
qui,au contraire,soutiennent qu'au regard d'un certain nombre de
paramètres
survenus
depuis
pl us
d'un
quart
de
siècle
d'indépendance il serait judicieux d'aborder le fait littéraire africain
en termes de littératures nationales.
De plus,le sujet de réflexion circonscrit au romanesque post-
colonial et, spécifiquement,a.celui francophone pose,implicitement,la
possibilité d'établir une distinction entre un romanesque colonial
(votre pré-colonial) et un autre post-colonial.Autrement dit,c'est
considéré qu'en se fondant à la fois sur la langue d'usage des
écrivains et sur des périodes historiques propres au continent noir
l'on pourrait cerner les traits qui délimitent les caractéristiques du
romanesque africain de chaque période historique.

8
Sans entrer dans les détails disons simplement par rapport à la
polémique que les critères suivant lesquelles on peut parler de
littératures nationales ne sont pas forcément généralisables à
l'échelle de l'ensemble du continent. Si dans certains pays (Congo,
Bénin,. Cameroun, etc) il existe une assez longue tradition littéraire
(ou, tout moins, d'écriture littéraire) d'autres pays par contre,
sortent, à peine, des limbes sur ce plan. Par ailleurs, certains tenants
de la littérature nationale ont une vision organiciste de la littérature
ou perçoivent le fait littéraire à travers un modèle organiciste qui
n'est pas prégnant en Afrique. C'est pourquoi, notre appréhension du
phénomène littéraire africain, sans ignorer ce débat qui oppose deux
camps dont chacun dispose d'arguments à la justification de sa thèse,
engagera à travers l'analyse du romanesque africain une étude
d'oeuvres romanesques produites par des écrivains africains après la
période coloniale et abordant, à travers divers récits, des questions
relatives au continent noir aux lendemains des indépendances
politiques. Nécessité s'impose, dès lors de dégager les critères de
pertinence du post-colonial comme point de démarcation dans cette
prod uction romanesque africaine.
Le roman, selon Gérard A., "est apparu en Afrique comme un
genre nouveau étranger à l'art traditionneL." (1). De fait, la naissance
du
roman
africain
(comme
celle
de
la
littérature

9
africaine de manière globale) est liée au fait colonial. C'est en tant
que colonisés que les africains sont allés à l'école et ont acquis les
langues européennes. Les premières oeuvres produites, dans ce
contexte, tendront, dans un comportement "juvénile",vers l'imitation
des maîtres occidentaux dans le but de faire montre de l'assimilation
à la culture occidentale. Les intellectuels noirs se rendront
compte,très tôt, du malaise que comportait l'assimilation puisqu'elle
conduisait à une impasse et signifiait la négation du Noir. C'est en
réaction à cette situation mais également à cause du nouveau visage
que prenait l'Afrique en Occident (intérêt marqué par le cubisme, par
exemple, pour l'art africain; travaux des ethnologues montrant la
grandeur des civilisations africaines) que naîtra le premier
mouvement littéraire nègre; ta Négritude.
A travers ce mouvement, il ne s'agissait plus de montrer qu'on
avait suffisamment assimilé la culture occidentale mais, au contraire,
de proclamer à travers les "armes miraculeuses" qu'est l'écriture
qu'on était Noir et fier de l'être et que la colonisation avait jeté le
Noir dans un abîme profond. A travers ses chantres tels que Léopold
S. Senghor, Aimé Césaire, Léon G. Damas, la Négritude constituera un
temps fort dans la prise de conscience de l'homme noir malgré les
critiques qu'on pourra lui faire par la suite. Elle est, seulement, à
apprécier dans la perspective où elle a donné au noir d'entrevoir la
possibilité de "sa véritable libération, c'est-à-dire celle de sa
conscience." (3)

10
Les romans de cette période coloniale tels que: Le. vieux nègre
.e1l.a médaille Ferdinand üyono (1956); Y..illf. cruelle Eza Boto alias
Mongo Beti (1954); s'attacheront à montrer la brutalité avec laquelle
la colonisation a fait irruption dans la vie des noirs et les
bouleversements que cette intrusion a entraînés. Ils dépeignent
également le caractère répressif du système colonial aux plans:
administratif, politique, économique, culturel et idéologique. Se
déploie aussi, dans le roman de cette époque, le milieu urbain
marqué par l'égoïsme, l'individualisme par opposition au milieu
traditionnel (le village) où fonctionne la solidarité.
L'un des traits marquants du romanesque africain colonial se
situe également dans la division manichéenne du monde qu'il établit:
d'un côté le monde blanc et de l'autre le monde noir. Les deux
communautés placées dans une situation conflictuelle permet au
roman de traduire l'intensité du drame qui se joue à l'échelle de tout
un continent.En se construisant de la sorte,le roman colonial se
plaçait dans le champ du témoignage, de l'engagement dans le
combat pour la liberté.
Après l'acquisition de l'indépendance, la littérature africaine a
continué à se développer même si les premières années, après les
indépendances, ont constitué une espèce de passage à vide. Les voix
des ténors de la Négritude se sont éteintes d'elles-mêmes puisqu'il
devenait anachronique de continuer à chanter les affres de la
domination et de l'oppression coloniales. En même temps, on assistait
à un bouleversement des centres d'intérêt comparativement à la
période de la Négritude où la poésie fut le genre dominant.

I l
Dans la pratique littéraire, le genre romanesque prendra de
plus en plus d'ampleur aussi bien sur le plan quantitatif que
qualitatif. Au fur et à mesure que les écrivains maîtrisaient leur art,
le roman africain dans sa composition évoluait en même temps que
changeait le statut de l'écrivain. Des romans écrits sur le style
linéaire où la narration se donnait facilement à suivre on a évolué
vers des formes narratives plus complexes où, parfois, se côtoient des
modes de narration empruntés à l'oralité et diverses autres
techniques modernes de narration (symbolisation, allégorie, etc).
D'une stylisation manichéenne du cadre romanesque on est
passé à un éclatement (voire un émiettement) de celui-ci. Quant au
récit, il se focalise davantage sur les réalités post-coloniales
auxquelles les africains de différents pays sont confrontés. Enfin,
l'écrivain a pris ses distances par rapport à l'homme politique pour
ne revendiquer que le statut celui qui écrit.
Au regard de tous ces changements majeurs intervenus au
lendemain des indépendances dans la littérature africaine de
manière générale et plus spécifiquement dans la production
romanesque, l'étape historique post-coloniale se présente, donc,
comme un moment pertinent
de démarcation pour l'analyse de la
littérature africaine, en général, et ,en particulier de l'espace discursif
du romanesque africain francophone post-colonial. Un romanesque
africain dont on peut articuler les formes de renouvellement autour
deux axes majeurs: nouvelle thématique et renouvellement
esthétique.

12
1. 2
ADerçu .de. la nouvelle thématique .el .d..u renouvellement
esthétique
Au-delà des levées de boucliers opposant les tenants
d'une appellation "globalisante" du phénomène littéraire africain et
ceux qui proposent une distinction basée sur la nationalité des
écrivains, la question qui fait, aujourd'hui, l'unanimité, au niveau de
l'ensemble des critiques, c'est l'effectivité du renouvellement aussi
bien au plan de la thématique que de l'esthétique dans la production
littéraire. C'est, du moins, le point de convergence que serrlblent
indiquer des travaux comme: "Impact et limites de la littérature
africaine comme instrument de transformation sociale" (4); "Dix ans
de littérature africaine: pouvoir, société, écriture" (5); "Tendances et
perspectives de la littérature africaine francophone contemporaine"
(6); "Une décennie parmi les livres" (7); Nouvelles écritures
africaines"Les écrivains de la seconde génération" (8); Le. Prince .e..t k
scribe "Lecture politique et esthétique du roman négro-africain post-
colonial" (9); L.f..s. littératures francophones depuis 1945 (l0); La
littérature africaine .el .s.a critiQ.ue (11); Littératures africaines (12);
Ecritures .el discours littéraires "Etudes sur le roman africain" (13);
etc.
1. 2 a. La nouvelle thématiQ.ue
Fonkouo R., après l'analyse d'un certain nombre de romans de
la période post-coloniale en arrive à la conclusion que l'unité de
préoccupation au plan thématique s'articule autour de deux points
essentiels: "... le pouvoir politique, la question sociale, ... " (l4)

13
I.2.a.ü1 Le Douyoir DolitiQue
Depuis la parution du roman de A. Kourouma, Les soleils des
indépendances (15), le thème du pouvoir politique constitue l'un des
champs d'ancrage thématique privilégié du romanesque africain
post-colonial. La plupart des romans font le procès des régimes qui
exercent le pouvoir politique depuis les indépendances; critiquent les
moeurs politiques; dévoilent les conséquences des dictatures des
partis uniques ou des régimes militaires sur les peuples africains.
La focalisation du romanesque sur le pouvoir politique permet
aux écrivains de montrer dans quel abîme les pouvoirs "abâtardis"
des indépendances ont jeté les africains; au-delà, il s'agit pour
romanciers africains d'interroger, à travers leurs oeuvres le sens de
l'histoire africaine.
Aussi, l'usage par les romanciers d'une écriture "pistolégraphe"
(16) vise-t-il à faire montre de tout ce qui éloigne les pouvoirs post-
coloniaux de la rationalité
qui se signalent par leur brutalité dont
l'écriture se fait l'écho en recourant à la symbolisation discursive.
C'est ainsi, par exemple, que le caractère protohistorique de
l'expérience africaine apparaît à travers la fossilisation de l'espace
d'écriture du fait que les écrivains exploitent dans la symbolisation
discursive le lexique du bestiaire comme
le signale P.N. Ngandu: "Il
faudrait d'abord observer la part importante du lexique propre au
bestiaire particulièrement des sauriens paléontologiques [...]. Ces
réminiscences paléozoïques ne sont pas que des références aux
sauriens fossiles. Ou plutôt, en fossilisant ainsi l'espace d'écriture, le
texte caractérise significativement les expériences protohistoriques

14
des sociétés africaines. Un espace qui n'appartient à aucune géologie
rationnelle. Les humains eux-mêmes se réduisant à des organismes
protozoaires, à la limite des terres qui ne sont pas encore créées."
(17)
On peut conclure qu'une telle exploitation de la thématique du
pouvoir politique dans le romanesque permet d'appréhender celui-ci
comme une "anté-politique"
qui ne génère qu'une"anti-société"
comme cela se donne à voir à travers le second axe thématique
qu'est la question sociale.
I.2.a.02 La Question sociale
Le roman africain post-colonial décrit la société africaine
comme un complexe traversé par un malaise général; une société où
se déploient toutes les formes de misère (matérielle, morale,
spirituelle, etc.); une société dans laquelle l'histoire devenue
problématique offre, suivant les romanciers, deux visions de l'avenir;
le goulag et l'utopie comme le signale ]. Chevrier: "La relecture de
l'histoire à laquelle procède la plupart des écrivains africains
s'articule autour d'une double vision. D'une part une approche
délibérément pessimiste, débouchant sur le constat d'une société
irrémédiablement bloquée, d'autre part,une vision qui tout en
s'enracinant dans le même univers (...] que la précédente, laisse
toutefois augurer un avenir, fut-il de l'ordre du rêve. D'un côté donc,
la goulag tropical, de l'autre l'utopie." (l8) ..
Ainsi, le roman montre l'ensemble des difficultés auxquelles se
trouvent confrontés les peuples africains: guerres tribales,
sécheresses meurtrières du Sahel, coups d'État qui se transforment
en génocides, répressions brutales, révoltes, grèves, chômage des

15
jeunes, délinquance, école inadaptée, concussion, prostitution, exil
politique, zombification généralisée, incohérence des politiques
sociales, etc.
I. 2. b W contours .d..u renouvellement esthétiQue
I.2.b.Ol Le nouveau contrat d'énonciation
A l'opposé du roman de la période coloniale, celui post-colonial
établit un nouveau contrat d'énonciation du discours. Ainsi, on y
assiste à l'exploitation de stratégies comme: la dé linéarisation du
récit voire même, dans certains cas, son oralisation; la rupture de
contexte et la destruction du réel (recours à rallégorie comme dans
La. carte d'identité de ].M. Adiaffi (19) ou à l'invraisemblable La. vie
t l demie (20)). Par ailleurs, la dérive du temps et de l'espace
s'accompagne de la disparition du narrateur olympien auquel
succède le narrateur et des voix, plus ou moins anonymes, qui se
conjoignent pour donner une image kaléidoscopique du réel. Tel qu'il
est énoncé le discours romanesque africain post-colonial prend des
formes baroque et polyphonique.
I.2.b.02 La. nouvelle écriture
Le nouveau contrat d'énonciation du discours romanesque
s'accompagne d'un "recyclage" de l'écriture romanesque. C'est ainsi
qu'à une "écriture politique" se substitue selon]. Chevrier "une
politique de récriture": "On s'oriente vers une conception symbolique
de la littérature au détriment du sociologique. A une écriture de la
politique succède donc une politique de l'écriture"(21).

16
Du reste, en observant la pratique scripturaire
on peut
déterminer trois niveaux dans ce renouvellement de l'écriture: l'acte
d'écriture perçu dans sa finalité d'acte tout simplement, la manière
dont l'écriture permet de structurer le récit et l'usage de l'écriture
dans le but de générer de nouvelles catégories romanesques (par
exemple, la politique-fiction dans ~ dernier.df l'empire (22)).
En définitive, nous retiendrons qu'il s'est surtout opérée une
dialectique de la pratique à la théorie donnant lieu, dans les romans,
à un symbolisme parfois complexe qui n'est pas sans rapport avec la
complexité de la situation africaine actuelle.
Ces préliminaires qui tracent une esquisse globale du
romanesque africain francophone post-colonial tout en indiquant la
nature de l'objet d'analyse pose que le discours romanesque quels
que soient ses modes d'actualisation est avant tout un langage
significatif structuré relativement à un horizon de réception pluriel.
C'est pourquoi, pour l'analyser il faut user d'une démarche
susceptible de rendre manifeste les règles "générales" suivant
lesquelles ce discours se constitue mais aussi comment par lui se
structure le sens donnant ,ainsi, au discours romanesque africain ses
attributs particuliers.
Par ailleurs,le roman africain (ou ,plus précisément,le discours
romanesque)
appartient
au
genre
écrit
dont
l'une
des
caractéristiques est la clôture. Mais il se trouve que ce texte (c'est-à-
dire le roman) existe à côté de textes de l'oralité dont l'une des
caractéristiques est l'ouverture. Autrement dit, il existe en Afrique

17
deux littératures qui se côtoient: une littérature orale (encore vicace)
et une littérature écrite. C'est pourquoi, il est nécessaire d'être
attentif, dans l'analyse du discours romanesque, aux emprunts faits à
l'oralité et à la forme que prennent ces emprunts une fois inscrits
dans un système ontologiquement distinct.
Au regard de tout ce qui précède comment, dès lors, aborder
l'analyse de l'espace discursif du romanesque africain francophone
post-colonial? A travers quelle démarche et à l'aide de quels outils
d'analyse
étudier
la
structuration
de
l'espace
discursif
et,singulièrement,le fonctionnement du discours dans cet espace?

19
imaginaire(s); ce par quoi nous prenons connaissance de tous ces
éléments constitutifs de l'oeuvre romanesque c'est le discours. Il y a
donc un acte de langage qui donne naissance à des énoncés. Cet acte
d'énonciation est pris lui-même dans un contexte précis, il est déposé
dans un espace spécifique où une intention de communiquer d'un Je
interpelle un récepteur quelconque. Déjà à ce premier niveau, il
ressort que l'espace discursif se donne à voir comme un lieu de
rencontre entre deux "subjectivités",au moins,qui essaient d'établir
un certain contact par le biais d'un code qui leur est commun. C'est
pourquoi, on peut essayer de voir les rapports de force qui
s'actualisent entre ces "subjectivités", les stratégies utilisées dans le
but de convaincre, d'informer ou d'influencer d'une quelconque
manière. Autrement dit, comment, (dans ce "corps à COrps" (24)> où se
trouvent en présence, dans un espace (celui du discours romanesque)
des consciences qui agissent d'une quelconque manière l'une sur
l'autre ou l'une par rapport à l'autre);les personnages se
positionnent,axiologiquement, dans l'univers fictif ainsi créé;etc.
Par ailleurs, l'espace discursif est un lieu où on assiste à un
discours partagé. Même si conventionnellement il y a un narrateur
qui rapporte le récit, il y a également le discours des autres
personnages et parfois l'intrusion de l'auteur lui-même dans ce
discours. Comment dès lors, dans le discours romanesque africain
francophone post-colonial, s'organise le partage du discours d'autant
plus qu'à l'opposé du roman de la période coloniale, celui post-
colonial joue sur la diversité des voix qui se conjuguent avec celle du
narrateur dans le dessein de donner une vision kaléidoscopique de la
réalité.

20
Nous avons dit préalablement que le roman est un jeu
complexe où se trouvaient pris dans une espèce de mécanisme divers
éléments; l'analyse de l'espace discursif devrait permettre, au regard
de la hiérarchisation des différents éléments, de pouvoir déterminer
la manière dont se structure l'espace discursif et, du même coup, de
procéder une espèce de catégorisation des oeuvres romanesques en
fonction des modes d'organisation apparentés de l'espace discursif.
Au-delà de l'espace discursif tout court, un autre enjeu majeur
de notre étude consistera en l'analyse du discours romanesque lui-
même. A cet égard, un certain nombre constats relatifs à l'état actuel
du discours romanesque africain francophone post-colonial
pourraient constituer les lignes de force à partir desquelles peut
s'analyser la problématique de la mise en forme du discours
romanesque.
Le discours romanesque, nous l'avons déjà dit est proféré par
une quelconque instance mais il n'est pas que discours car il porte en
son sein autre chose (un récit ou des récits). Il y a lieu donc de
considérer les rapports qui s'instaurent entre les différents éléments
différenciables dans l'ensemble du discours. Autrement dit,comment
le discours romanesque rend-t-il compte de la structuration du
récit,du traitement de la temporalité,de l'événementialité,de la
référentialisation,etc.
Par ailleurs, le discours romanesque est "suis generis" d'un
travail d'écriture et de ce fait même il s'actualise en prenant
certaines formes. Or,dans le roman africain au lieu de la narration
linéaire on assiste, de plus en plus, l'exploitation de certaines formes

21
d'écriture comme l'allégorie, la symbolisation, l'invraisemblable,le
baroque etc.
Ce discours qui résulte d'un travail d'écriture est en relation
permanente avec une autre littérature qui elle s'actualise oralement
ou, du moins, les faits de l'oralité se trouvent impliqués dans le
discours écrit ne serait-ce que par l'emprunt de certaines modalités
d'actualisation discursive propres à la littérature orale. Cependant,cet
emprunt ne se fait pas seulement à la littérature orale, car le
discours romanesque tend à inscrire en son sein ce parler populaire
des centres urbains africains, un parler à la lisière du faire
locutionnaire occidental par son lexique, sa syntaxe ou d'une tout
autre façon qui le distingue du français central.
Le discours romanesque du fait qu'il s'inscrit dans la société qui
le porte est également un discours derrière lequel se cache une
certaine vision du monde. Autrement dit dans le discours
romanesque il faut situer la place de l'idéologème car
l'oeuvre
comporte "cette interrelation entre texte et coordonnées historico-
sociales" (25).
Signalons, enfin, que le discours lui-même s'actualise autour de
nouvelles thématiques qui sont autant de ruptures avec le roman
colonial au point où, rien que l'étude des titres permet déjà d'établir
une distinction entre les romans de la période coloniale et ceux de
l'époque succédant aux indépendances comme le note P.N. Ngandu:
"L'un des éléments qui permettent d'introduire à la problématique
de la thématique [..], est assurément le choix du titre des ouvrages.
Autant
les
textes
de
la
première
étape
impliquaient
avantageusement les symbolismes telluriques et anthropologiques

22
comme ,EthiopiQues, L'enfant noir ou Q pays. ill..Q.ll beau peuple!,
autant les titres actuels portent les préalables qui se rejoignent ou
qui s'affrontent dans le texte." (26)
Cet ensemble de constats indique que l'espace discursif et son
corrélat le discours lui-même dans le champ du romanesque africain-
francophone post-colonial sont un terrain d'analyse possible où
peuvent être étudiées les diverses modalités qui participent non
seulement à la structuration de cet espace mais également
s'inscrivent au coeur de l'actualisation discursive. Reste, alors, à
déterminer quelle démarche utiliser,en se fondant sur un corpus
suffisamment représentatif de l'état actuel du romanesque africain
francophone post-colonial et des diverses mutations qu'il a
connu,pour mener une telle analyse.
11.2
Démarche d'analyse
Dans un premier temps, nous analyserons les contours
essentiels de l'espace romanesque africain francophone post-colonial.
C'est ainsi que nous étudierons comnlent se structure l'horizon de
réception: les stratégies mises en oeuvre dans l'organisation de
l'espace d'actualisation du discours permettant ainsi d'atteindre un
premier destinataire mais, également, par le biais de celui-ci, un
second destinataire .
Par ailleurs, l'étude de l'espace discursif impose également de
l'appréhender comme cadre dans lequel s'organise le sens. Dans cette
perspective)il apparaît nettement que l'espace dans lequel s'organise
le discours romanesque est d'abord un espace chaotique qui s'allie
bien avec la tendance à l'éclatement de sens du romanesque africain
post-colonial. Contribuent également à la structuration d'un tel

23
espace certains procédés stylistiques auxquels les écrivains font de
plus en plus recours dans l'élaboration de l'oeuvre romanesque
comme par exemple le baroque.
Cette analyse de la structuration de l'espace discursif en se
fondant sur des aspects comme l'horizon de réception ou encore sur
les modalités suivant lesquelles s'actualise, à travers lui, l'acte de
narration, les artifices par lesquels, cet espace devient le lieu qui
délimite les contours de l'imaginaire! les structurations actorielles,
etc; débouchera sur une première possibilité de déterminer les traits
généraux qui définissent les contours de cet espace mais également
d'établir une distinction entre les écrivains eux-mêmes. C'est ainsi
qu'on notera chez certains écrivains que ce travail est très élaboré
donnant à leur production une densité scripturaire très nette par
opposition à certains écrivains qui donnent à lire des oeuvres moins
achevées de ce point de vue là.
L'analyse des contours de l'espace discursif induit l'étude de
son élément central c'est-à-dire le discours romanesque lui-même.
A ce second pallier nous orienterons notre travail en nous
intéressant au travail de W. Krysinski traitant du roman (27). Dans la
perspective de W. Krysinski se dégage une perception du roman en
termes de combinaison et de hiérarchisation de certaines
modélisations considérées comme des données héréditaires du
~.u!...:t ..d..iMi..V\\.WLI!.. 1UlY\\t .cl'o'triJu. ~
roman. Ces modélisations v référentielle, idéologique, axiologique,
esthétique, intertextuelle et pulsionnelle (28) . Au regard de la
manière dont chaque roman les combine et les hiérarchise W.
Krysinski définit trois modèles de constitution du texte romanesque à
partir de son corpus (14 romans).

24
Cette approche de W. Krysinski du texte romanesque présente
un certain intérêt pour nous dans la mesure où, une telle conception
de la manière dont se structure le texte du roman nous fournit des
outils conceptuels d'analyse du discours romanesque (ce par quoi le
texte acquière sa matérialité). Par le biais des concepts mis en vue
par W. Krysinski on peut, par exemple, envisager l'importance du
discours dans la structuration esthétique du texte romanesque. C'est
ainsi, qu'à travers A~ 'Pô~ ~ .mJ:lti&nt llœ~-: la référentialisation,
l'idéologique, l'axiologique, l'esthétique, l'intertextualité et le
pulsionnel (utilisés par W. Krysinski dans une autre perspective)
nous analyserons le discours romanesque africain francophone post-
colonial.
Cette démarche dont les axes généraux nous intéressent permet
de sérier les traits qui rendent compte du caractère distinctif du
roman africain mais,également,d'analyser le discours romanesque à
travers une grille de lecture suffisamment pertinente.
L'analyse axiologique permettra de faire ressortir tout ce que le
discours romanesque charrie comme valeurs et leur positionnement
paradigmatique. Il s'agirait,dès lors,de partir de la structuration
actantielle dégagée au niveau de la structuration de l'espace discursif
pour déterminer les valeurs dont sont investies les diverses
structures actantielles.Par ailleurs,la dimension mythique pourrait
trouver ici également un lieu d'analyse.
Quant au pulsionnel il permettra de mettre en exergue la place
de plus en plus prépondérante de l'expression de l'irrationnel
primitif dans le discours romanesque. Ce phénomène qualifié par

25
Ngandu N.P. comme une façon "de signifier dans la brutalité des
forces irruptives les temps anhistoriques d'une Afrique qui s'arrache
de sa propre gangue terreuse par une nouvelle conscience de soi."
(29). Ici, également, nous analyserons la manière dont le discours
romanesque traduit les nouveaux espaces dominés par la peur,
l'angoisse existentielle, l'inévitable cheminement vers la folie du
"héros" ou de l'intellectuel. En même temps qu'il permet de lire
l'expression du délire, des visions hallucinatoires, des fantasmes, de
la "chute" des points cardinaux et du désordre figé.
La référentialisation se centrera sur la manière dont le discours
participe à la construction du monde du roman par la mimésis à
l'oeuvre dans le roman. Bien entendu il s'agirait de distinguer les
degrés de variabilité du procès de référentialisation d'oeuvre à
oeuvre et d'établir de ce fait entre les romans les traits de
ressemblance que présente cette fictionalité d'une part et,d'autre
part la manière dont le réel se trouve mis en relief à travers ce
travail de référentialisation. Cette étude de la référentialisation parce
qu'elle puise certaines de ses ressources dans l'oralité permet
d'ouvrir la voie sur des réflexions relatives à l'esthétique.
Au stade de l'analyse esthétique il sera question du recours fait
à l'usage de certaines formes d'écriture à travers lesquelles
s'actualise le discours romanesque, mais aussi de l'analyse d'une
esthétique de la nécessité" (dans un univers dominé parfois par la
peur qu'inspire les dictatures au pouvoir ou tout simplement parce
que la parole devient le moyen de conquête du pouvoir) qui se
développe dans le romanesque . Par ailleurs,
la manière dont le
discours romanesque intègre des éléments de l'oralité ou tout

26
simplement des éléments exogènes voire périphériques (les tracts,
les coupures de journaux,etc) pourra être étudiée.
Le dialogue du discours romanesque africain avec des discours
romanesques venant d'autres horizons culturels sera le pallier à
partir duquel nous aborderons l'intertextualité d'autant plus que le
discours romanesque se laisse, parfois, appréhender comme le
résultat d'un travail de seconde main. Dans une telle perspective,
nous accorderons une attention particulière au dialogue entre le
Nouveau-roman français, le roman latino-américain et celui africain
francophone post-colonial. Par ailleurs, seront pris en considération
tout ce qui se traduit par l'intégration dans le tissu discursif de
fragments de sociolectes ou d'autres éléments de même nature.
Enfin la dimension idéologique permettra de montrer que le
discours romanesque (comme tous les autres discours sociaux) est un
complexe à travers lequel se réfracte les idéologèmes; dans la mesure
où l'encodage discursif romanesque implique que celui qui produit le
discours (ou celui à qui on l'attribue) "effectue une mise en sens qui
rend compte de sa propre place dans un système idéologique
global. .. " (30). Il est donc nécessaire que cette "complétude
idéologique, comme le dit F. Flahault, qui se trouve en jeu à travers
l'acte locutionnaire soit analysé puisque "...dans l'énonciation,un sujet
produisant une parole selon quelque discours que ce soit ,demande à
ses interlocuteurs de le reconnaître dans la complétude idéologique
qu'il entend soutenir."(31).
Ces axes d'articulation de l'analyse se fondant sur les concepts
élaborés par W. Krysinski suffisent-ils pour rendre compte des

27
contours suivant lesquels s'actualise le discours romanesque africain
post-colonial?
Si à travers les axes comme la référentialisation, l'esthétique,le
pulsionnel, l'intertextuel, l'idéologique et l'axiologique nous pouvons
analyser une grande part du discours romanesque africain actuel, il
demeure, cependant, que certains aspects de l'objet d'étude ne
pourront pas trouver, dans un tel cadre, lieu de mise à jour .C'est
ainsi, par exemple, que nous ne pourrions rendre manifeste le
rapport dialectique entre le travail esthétique réalisé à l'aide du
matériau langagier et le fait que le discours romanesque conçu à
partir de ce premier travail se présente .omme un nouvel énoncé
dans la polémique sociale. Par ailleurs,les différentes métamorphoses
constatées dans la constitution du discours romanesque, indiquent
l'existence d'un pacte préliminaire à l'acte d'écriture qui définit
l'intentionnalité dans la mise en discours. De ce point de vue, il y a
comme une nécessité de s'interroger sur l'impact et les limites du
discours romanesque,dans sa forme actuelle,en tant que phénomène
informant la collectivité (se faisant par et pour lui);aussi,ses
faiblesses comme instrument de transformation sociale! C'est
pourquoi,il serait judicieux de conjoindre aux axes précédemment
explorés des points d'analyse traitant, par exemple, de la "dimension
hylique" (32) du roman africain post-colonial, du rapport dialectique
(ou dialectisable) entre le discours romanesque et ses cadres de
surgissement qui induisent celui-ci à être le lieu de matérialisation
de consciences historiques données au fur et à mesure que certains
mythes tombent en désuétude et que s'en constituent de

28
nouveaux;les modes par lesquels s'actualisent pactes et contrats
d'énonciation du discours;etc.
Le corpus (33) que nous avons retenu pour mener notre étude
opère une sélection dans
la production romanesque africaine
francophone post-coloniale en tenant compte de la trajectoire suivant
laquelle s'est fait le renouvellement signalé précédemment. C'est
ainsi qu'en partant du roman de A. Kourouma L.ti soleils .d.e..s.
indépendances (Paris: Seuil, 1970) apparu, au moment de sa
publication, comme une tentative hardie (aulC. plans thématique
et esthétique) nous suivrons la courbe évolutive de cette production
qui a été marquée, quelques années plus tard, par des ruptures plus
prononcées à travers un roman comme celui de Sony L. Tansi La. m
.tl demie (Paris: Seuil, 1979) et,plus près de nous, par ceux de Henri
Lopès, ~ pleurer-rire (Paris: Présence africaine, 1982) et de Borris
Boubacar Diop, 1& temps de. tamango (Paris: L'Harmattan, 1981),
pour ne considérer que ces quelques oeuvres assez connues.
Aussi, notre corpus sans couvrir toute la production
romanesque africaine francophone post-coloniale englobe-t-il
chacune des oeuvres dont la parution a été considérée comme un
effort particulier dans la constitution de la spécificité du romanesque
africain. En tout état de cause, les oeuvres retenues exploitent, de
diverses
façons,
les
nouvelles
techniques
participatives
à
l'actualisation du discours romanesque africain. Parmi les oeuvres de
ce corpus si on note que lM. Adiaffi fait recours à l'allégorie et au
mélange des genres dans son roman la carte d'identité; Sony L. Tansi,
quant à lui, fait appel à l'invraisemblable dans L.a. i l l .e1 demie,
tandis que M. Bâ adopte le style épistolaire dans .lIJ.:l.e si longue lettre.

29
Si le récit romanesque dans ~ dernier ~ 11eml>ire de O. Sembène
sl actualise à travers la politique-ficition, celui de Perl>étue de M. Beti
prend 11 allure du roman policier.
Au cours de notre analyse nous mènerons une exploitation à
deux vitesses du corpus. C'est ainsi que nous distinguerons des
oeuvres pour lesquelles nous ferons une étude assez poussée et ,
pour les autres , nous ne ferons qu'une exploitation relativement
ponctuelle dans le dessein soit de renforcer un constat relever
ailleurs ou soit Ae. \\"(\\\\.w.x~',- ~ actualiseR
- ~n phénomène qui
n'existe
qu'à l'état de frémissement dans les oeuvres retenues
prioritairement.
Ce corpus majeur se compose des oeuvres suivantes: La carte
d'identité, Une si longue lettre, Perpétue ou l'habitude du malheur,
Le boucher de Kouta , Sahel! sanglante séchéresse , Le temps de
Tamango,
Une aube incertaine, Les soleils des indépendances,
L'écart, Les chauves-souris, Giambatista Viko ou le viol du discours
africain, Le dernier de l'empire, La vie et demie, Les méduses ou
les orties de mer, Elle sera de jaspe et de corail .

30
CONCLUSION
A travers cette étude qui aborde le romanesque africain
francophone post-colonial, nous voulons surtout montrer qu'il
devient de plus en plus urgent de travailler à partir du matériau
qu'offre le phénomène littéraire africain, à travers les différents
genres pratiqués (roman, théâtre, poésie, nouvelle) pour analyser ses
contours et déterminer les structures sémantiques essentielles qui
portent la production littéraire africaine. C'est seulement à travers
une telle démarche qui part du phénomène pour en étudier les
différentes formes de manifestation, les actualisations spécifiques
que peuvent se corriger les tendances à une appréciation obéit à des
critères étrangers à la création littéraire comme ce fut le cas lorsque
surgit la littérature africaine pendant la période coloniale et qu'on
usa du critère racial comme marque de sa spécificité.
Cette étude ne secrète pas de méthodologie inédite d'approche
du fait littéraire parce que des outils conceptuels d'étude de l'oeuvre
littéraire que nous fournissent des travaux antérieurs permettent
1 :'1IQo'c.o.t..~l\\k 1
d'all~rvau coeur de la production romanesque africaine francophone
post-coloniale afin de rendre manifeste l'actualisation spécifique de
tel ou tel phénomène(esthétique ou idéologique). La spécificité de la
littérature ne nie pas le caractère opératoire des outils conceptuels
ici. Ce qui change lorsqu'on use de ces outils dans le cadre du roman
africain ce sont les nouvelles frontières qui se trouvent délimitées et
les nouveaux enjeux qu'ils impliquent pour le critique qui doit en
quelque sorte pouvoir les inscrire dans son projet avec toutes les
insuffisances qu'ils peuvent générer.

31
Les
résultats
auxquels
nous
parviendrons,par
ailleurs,n'épuiseront pas les possibilités de lecture du romanesque
africain francophone post-colonial car des oeuvres de la période que
nous avons pris en charge exigent d'autres grilles de lecture qui ne
figurent pas dans la démarche que nous avons adopté. C'est pourquoi,
malgré son titre ambitieux, notre étude ne sera qu'une lecture
partielle de cette production romanesque qui doit être lue au pluriel.
Sous cet angle l'intérêt de ce travail réside dans ce qu'il partage
avec des travaux connexes. En effet, depuis un certain temps de
nombreuses recherches s'attachent à plier le fait littéraire africain
aux exigences d'une démarche scientifique qui permet d'en asseoir
les fondements épistémologiques. Ainsi, que ce soit le phénomène
littéraire ou que ce soit autour de toute autre production sociale
l'effort tend à chercher des axes de réflexions qui permettent de
parler de l'objet lui-même,comme un produit émanant d'un contexte
spécifique donc forcément marqué par celui-ci et, non plus, comme
un objet qui attire simplement la curiosité "exotique". La littérature
(et plus spécifiquement du genre romanesque) constituera, de plus
en plus, un objet fécond d'analyse si,est gardée, cette démarche qui
vise davantage à questionner l'objet lui-même au lieu des éléments
exogènes qui l'entourent et qui ont certainement moins d'effet de
sens que l'objet analysé en rapport avec une approche qui lui
reconnaît le statut de phénomène qui renferme les éléments qui
rendent compte de ses fondements rationnels.

RÉFÉRENCES
32
1. Bernard Mouralis caractérise la production romanesque (et
globalement littéraire) de contre-littératures parce que cette
production littéraire" .. ne se réfère pas seulement à une société
spécifique - culturelle, historique et sociopolitique qu'elle entend
dévoiler dans une perspective de combat, elle se réfère aussi à des
textes et c'est à ce niveau qu'apparaît véritablement son caractère de
contre-littératures. La reconquête de l'initiative culturelle suppose au
préalable que soient lus, démontés, désamorcés, inversés tous les
textes qui, jusqu'alors prenaient l'Afrique et l'homme noir comme
objet du discours, ethnographique, politique ou littéraire... C'est à
partir de ce travail que s'élabore le texte négro-africain qui devient
dès lors tout autre chose que ce discours tenu sur l'Afrique, à la place
de l'Afrique et, la plupart du temps, contre l'Afrique, qui seul,
jusque-là, avait droit de cité.U. Mouralis B. Les contre-littératures.
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16.C'est une expression forgée par l'écrivain et dramaturge
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(Préliminaires p. 9-14; Introduction p. 15-34)

39
NGANDU, N.P. Kourouma et le mythe. "Une lecture de k.s soleils des
indépendances Paris: Silex, 1985
Introduction p. 9-15
Chap l "Le sens des mythes" p. 19-23
Chap II "Le mythe dans le roman africain" p. 25-57
Chap VI "La présence d'une nouvelle parole" p. 127140;
"La fin des mythes" p. 143-153
NGANDU, N.P. Ecritures et discours littéraires "Etudes sur le roman
africain" Paris: L'Harmattan, 1989
Préliminaires p. 5-13
"Langages et discours littéraires: de l'oral - l'écrit" p. 17-21
"Les formes mythologiques dans le roman" p. 164-229
"Pour une pratique du texte: le roman et la fiction" p. 254-266
"Document: entretien avec Bernard Magnier" p. 267-299
NOUREINI, T.S. Aspects de la critique africaine Paris: Silex, 1987
OSSITO, M. L'idéologie dans la littérature africaine d'expression
française. Paris: L'Harmattan, 1986
SANON, J.B. Images sodo-politiques dans le roman négro-africain.
Sherbrooke: Naaman, 1983
(3ème partie Chap III "Images socio-politiques et structuration
romanesque" p. 247-268)
b) Articles
AMELA, A. "Littérature africaine et critique traditionnelle" in
Présence africaine, no 139, 1986, p. 74-87
BEMBA, S. "Impact et limites de la littérature comme instrument de
transformation sociale" in Forces littéraires d'Afrique j.P. Jacquemin
et B. Bitumba (Eds) Bruxelles: De Boeck-Wesmael S.A., 1987, p. 33-45
CAZENOWE, O. "Marginalisation et identité des personnages dans la
littérature négro-africaine des années 80: l'image du métis" in
Présence francophone, no 38, p. 111-132
CHEVRIER, j. "Le roman dans tous ses états" in Notre librairie no 78,
Janvier-Mars 1985, p. 37-45

CHEVRIER,]. "L'image du pouvoir dans le roman africain" in Afrique 40
littéraire
no 8, 1989, p. 3-1.
DERIVE,]. "L'utilisation de la parole orale traditionnelle dans les
soleils des indépendances" in Afrque littéraire n054/55,1979,p.103-
109
ECHEMIN,K. "Aspects de l'écriture dans le roman africain" in Présence
africaine ,no139,1986,p.88-144.
ECHEMIN,K. "Liberté créatrice et option collective:la problématique de
la création romanesque en Afrique" in Présence africaine n071/72,
p.13-18.
FONKOUO,R."Dix ans de littérature:pouvoir,société et écriture" in Notre
librairie
n0103,Octobre-Décembre 1990,p.70-77.
GLISSANT,E. "Le romancier noir et son peuple" in Présence africaine
n016,1957,p.25-32.
KANÉ,M. "Le feminisme dans le roman africain de langue française"in
Annales de l'Université de Dakar n010,1980,p.141-200.
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Forces littéraires d'Afrique. Bruxelles:De Boeck-Wesmael S.A., 1987,
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LY,A. "Quelques réflexions sur la forme des soleils des indépendances
de Kourouma" in Annales de l'Université de Dakar n011,1981,p.115-
134
MAGNIER,B. "La vie et demie des littératures africaines" in Notre
librairie
n078,Janvier-Mars 1985,p.5-7.
MATESO,L. "Critique de la critique:quelles ruptures dans la littérature
africaine" in Notre librairie n0103,Octobre-Décembre 1990,p. 77 -83.
MAYER,]. "Le roman en Afrique noire francophone:tendances et
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MELONE,T. "La critique littéraire et les problèmes du langage" in
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41
MICHEL,V. "Tchicaya:les années-roman" in Notre librairie
n° 103,
Octobre-Décembre 1990,p.84-91.
MONCEF,B.S. "Ahmadou Kourouma:écrivain africain" in
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MOURALIS,B. "L'évolution du concept de littérature nationale en
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NGANDU N. P. 'Thématique des littératures africaines actuelles" in
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Boeck-Wesmael
S.A.,1987,p.15-24.
TINE, A. "Pour une théorie de la littérature africaine écrite" in
Présence africaine n° 133/134,1985,p.99-121.
c) Collectifs
"L 'Afrique:philosophie,littérature,histoire"
Annales de
J'Université de Dakar n02,Paris,P.U.F,1972.
Colloque sur la littérature et J'esthétique négra-africain Dakar-
Abidjan,Nouvelles éditions africaines,1978.
Rencontres internationales de Bouaké "Tradition et modernisme
en Afrique noire" ,Paris,Seuil, 1965.
Colloque sur la littérature burkinabé Annales de l'Université de
Ouagadougou n° spécial,Décembre 1988.
"Littératures africaines et enseignement" Actes du colloque de
Bordeaux o~ganisé par le CELMA et le CNRS,Presses Universitaires de
Bordeaux,1985.
"Écriture noire en question"Débat animé par Chevrier J. in Notre
librairie n065,]uillet-Septembre,1982.
"Littératures nationales : modes ou problématique"Notre
librairie n083,Avril-]uin 1986.

42
"Littératures nationales:langues et frontières" Notre librairie
n084,Juillet-Septembre 1986.
"Littératures nationales:histoire et identité"
Notre
librairie n085,Octobre-Décembre 1986.
B) les textes qui suivent contribueront au renforcement de la
démarche théorique qui guidera l'ensemble de notre travail.
BAKHTINE,M. Esthétique et théorie du roman. Paris,Gallimard,1970.
"Problème du contenu,du matériau et de la forme dans l'oeuvre
littéraire" p.22-82
"Discours poétique,discours romanesque"p.99-121
"De la préhistoire du discours romanesque" p.399-437
BAKHTINE,M. Esthétique de la création verbale Paris,Gallimard,1983.
"Les genres du discours"p.263-437
BONZON,S. BUHLER ,P. (et autres) La narration "Quand le récit devient
communication" Genève,Labor et Fidès,1988.
Ricoeur,P. "L'identité narrative" p.287-300
BOURNEUF,R. et OUELLET,R. L'univers du roman. Paris,P.U.F,1972
(5ème édition 1989)
"Fonctions du personnage romanesque'1 p.158-208
CALLE-GRUBBER,M.
L'effet-fiction de J'illusion romanesque.
Paris,Nizet,1989.
"Le texte conflictuel1! p.241-265
"Le paradoxe du narrateur" p.267-292
CAZAURAN,N. (éd) Autour du roman. Paris,Presses de l'Ecole Normale
Supérieure,1989.
"Épopée,roman,histoire:le moyen-âge" p.13-48

43
GUYON VAN ROSSUM,F. Critique du roman. Paris,Gallimard,1970.
"Le vérifiable dans la modification ou l'intersection de l'espace
romanesque dans l'espace réel"p.59-74
"Le problème de la perspective narrativell p.114-140
"L'intégration épique de l'espace" p.175-189
"Progression narrative et progression thématique"p.215-277
"Le vraissemblable" p.81-113
jAUSS,H. R. IlEsthétique de la réception et communication littéraire" in
Critique n0413,Octobre 1981.
KRISTEvA,j .Le texte du roman
IlApproche sémiologique d'une
structure discursive transformationnelle Il Paris:Mouton,1970.
"Les livres dans le livre ll p.146-148
"La notion de texte comme idéologème" p.12-13
IlL'idéologème du signe à travers les statuts de l'actant
destinateurll p.102-104.
KRYSINSKI,W. Carrefours de signes. Paris:Mouton,1981.
"Le texte,le hors-texte et les modélisations" p.3-62
"Le littéraire et le paralittéraireIl p.295-306
KUNDERA, M. L'art du roman. Paris:Gallimard,1986.
LANE-MERCIER, G. La parole romanesque. Paris :Klincksieck,1989.
"Le dire comme prédicat actoriel ll p. 277-336
LUKACS, G. La théorie du roman. Paris:Denoël,1968.
"Épopée et roman"p.49-63
"La forme intérieure du roman" p.64-78
"conditionnement et signification historico-philosophique du
roman" p.79-89
MACHEREY, P.Pour une théorie de la production littéraire.
Paris:Maspero,1970.

44
"Pacte et contrat" p.69-74
MC CARTHY, M.Le roman et les idées. Paris:Fayard,1988.
"Roman,conte,romance" p.160-191
MENDEZ, ]. G.La dimension hylique du roman. Québec:le
Préambule,1990.
"Vers la dimension hylique" p.30-48
MERCIER, M.Le roman féminin. Paris:P.U.F,1976.
"Féminisme et oppression" p.18S-216
MICHEL, R.Le roman. Paris:Armand Colin,1988.
"Les modalités du récit" p.100-113
"Les problèmes de la narration" p.114-121
"Les personnages" p.173-180
MITTERAND, H.Le discours du roman. Paris:P.U.F,1980.
"Avant-propos" p.S-17
MOSER, W.Romantisme et crises de la modernité "Poésie et
encyclopédie dans le Brouillon de Novalis" Québec:le
Préambule,1989.
"Intermède théorique:vers l'analyse discursive" pS4-73
OUELLET, R.Les critiques de notre temps et le nouveau roman.
Paris:Garnier,1972.
"Pour le nouveau roman" p.13-37
"Contre le nouveau roman" p.38-S0
PAVEL, T. Univers de la fiction. Paris:Seuil,1988.
"Les actes de langage et la fiction" p.27-44
REUTER, Y. Introduction à J'analyse du roman. Paris:Bordas,1991.

45
"Roman et société" p.16-34
"Les composantes principales des récits" p.35-43
"La fiction" p.44-57
"La narration" p.59-70
"La mise en discours" p. 84-97
RICARDOU, J Problèmes du nouveau roman. Paris:Seuil,1967.
"La construction" p.161-190
RICARDOU,]. Le nouveau roman. Paris:Seuil,1973.
"Le récit en procès" p.26-133
RICARDOU, ]. Nouveaux problèmes du roman. Paris:Seuil,1978.
"L'introscopie" p.36-38
RIFFATERRE, M. Fictional truth . Baltimore:The John Hopkins
University Press,1990.
"Symbolic systems in narration" p.53-83
SORENSEN, K. La théorie du roman "Thèmes et modes"
Kobenhavn, 1987.
"Typologie des modes narratifs" p. 76-1 07
"Les grandes théories thématiques" p.127-154
C . Autres textes qui présentent un intérêt certain pour notre
travail.
ADAM, ]. M. Linguistique et discours littéraire. Paris:Larousse, 1976.
ADAM, ]. M. Le texte narratif. Paris: Nathan,1985.
ANGENOT, M.; BESSIERE, ]. ;FOKKEWA, D. ; KUSHNER, E. Théorie
littéraire. Paris:P.U.F,1989.
AUSTIN,]. Quand dire c'est faire. Paris:Seuil,1970.

46
BAKHTINE, M. La poétique de Dostoïevski. Paris:Seuil,1970.
BAKHTINE, M, (Volochinov V. N.) Le marxisme et la philosophie du
langage. Paris:Minuit,1977.
BARTHES, R. Le degré zéro de J'écriture. Paris:Seuil,1953.
BARTHES, R. S / Z . Paris:Seuil,1970.
BARTHES, R. Essais critiques. Paris:Seuil,1964.
BESSIERE, ]. Dire le littéraire. "Points de vue théoriques"
Bruxelles:Pierre Margada éditeur,1990.
BUTOR, M. Essais sur le roman. Paris:Gallimard, 1969.
CHABROL, C. (éd) Sémiotique narrative et textuelle
Paris:Larousse, 197 3.
CHARAUDEAU, P. Langage et discours ."Éléments de
sémiolinguistique" Paris:Hachette, 198 3.
COMPAGNON, A. La seconde main ou le travail de citation
Paris:Seuil, 197 8.
COQUET, ]. C. Sémantique littéraire. Tours:Mame,1973.
COURTES, ]. Introduction à J'analyse sémantique narrative et
discursive. Paris:Hachette,1976.
CROUZET, M. Espaces romanesques. Paris:P.U.F,1982.
DUCROT, O. La preuve et le dire. Paris:Mame,1973.
DUCROT, O. Les mots du discours. Paris:Minuit,1980.

47
DUCROT, O. Dire et ne l'as dire Paris,Hermann,1880.
DURAND. G. Les structures anthropologiques de l'imaginaire
Paris:Bordas,1969.
ECO, U. L'oeuvre ouverte. Paris:Seuil,1965.
ECO, U. La structure absente ._Paris: Mercure,1972.
FALARDEAU, ]. C. Imaginaire social et littérature.
Montréal:Hurtuboise, 1974.
FLAHAULT, F. La parole intermédiaire. Paris:Seuil,1978.
FOSTER, E. Aspects of the novel . Hardmondsworth:Penguins
books,1962.
GENETTE, G. Introduction à l'architexte . Paris: 1979.
GOMEZ-MORIANA,
A.
; POUPENEY
HART,
C.
(éds)
Parole
exc1usive,parole exc1ue,parole transgressive . Québec:le
Préambule, 1990.
GOLDEINSTEIN, ]. P. Pour lire le roman: initiation à une lecture
méthodique
de la fiction narra tive . Gembloux: Duculot,1991.
GREIMAS, A. ]. ; COURTES, ]. Sémiotique.Dictionnaire raisonnée de la
théorie du langage. Paris:Hachette,1979.
HAGEGE, C. L'homme de paroles. Paris:Fayard,1985.
HAMON, P. Introduction à l'analyse du discursif.
Paris:Hachette, 1981.
HAMON, P. Texte et idéologie. Paris:P.U.F,1984.

48
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HENRY, P. Le mauvais outil langue sujet discours.
Paris:Klincksieck,1977.
JACQUES, F. Dialogiques.Recherches logiques sur le dialogue.
Paris:P.U.F,1969.
JAMESON, F. The political unconscious "Narrative as a socially
symbolic act11 Ithaca: Cornell University Press,1981.
MAINGUENEAU, D. Initiation aux méthodes de l'analyse du discours.
Paris: Seuil,1976.
tvIILNER, J. C. Langue, discours, société ._Paris:Seuil, 1975 (Kristeva J.
éd).
MIRCEA, E. Aspects du mythe. Paris:Gallimard,1963.
PLAZA, M. Ecriture et folie. Paris:P.U.F,1986.
PERROT, J. Mythe et littérature. Paris:P.U.F ,1976.
TODOROV, T. Théorie de la littérature. Paris:Seuil,1975.
TODOROV, T. Littérature et signification. Paris:Larousse,1967.
TODOROV, T. Les genres du discours. Paris:Seuil,1978.
VALETTE, B. Esthétique du roman moderne. Paris:Nathan,1987.
WEST, R. B. The act of writing fiction. New York: Crowell,1978.

49
PRO TET de PLAN
Ce projet de plan donne des indications générales de ce que
sera la thèse subséquente au projet que nous soumettons.
INTRODUCTION
Intérêt de l'étude de la problématique en relation avec l'évolution de
l'objet romanesque.
Rapport avec des travaux connexes (littératures post-coloniales en
général et,roman africain francophone,en particulier).
Étapes de l'étude de la problématique.
1.
OUESTIONS CONNEXES À LA FORMULATION DU THEME DE
RECHERCHE
Problème des littératures nationales et / ou littératures méta-
nationales.
Le critère post-colonial et sa pertinence pour la distinction des
oeuvres produites dans le contexte africain francophone.
II. LE CHAMP DE LA RECHERCHE
Présentation de la problématique et distinction des niveaux
d'investigation.
Les outils d'analyse et leur caractère opératoire pour l'étude de la
problématique.
Présentation du corpus et des modalités de son analyse.
III. ETUDE DE LA PROBLEMATIQUE
A. L'ESPACE DISCURSIF
Les
principes
constructifs:
réunion
des
voix
(effet
kaléidoscopique,dissolution de la notion de personnage central,de la
linéarité récitative,etc.);structuration de l'horizon de réception
(recours à ,ou réutilisation de modes traditionnels d'organisation de
la discursivisation;le pacte préalable à l'acte de narration;le contrat
de
narration;etc) ;traitement
de
la
temporalité,
de
l'événementialité;structures actantielles dominantes et leurs modes
d'interaction;les rapports récit et discours dans la structuration de
l'oeuvre;etc.
La valeur symbolique des modes de structuration de l'espace
romanesque: espace chaotique en relation avec la situation actuelle
de l'Afrique;lieu de construction d'une identité polymorphe par

opposition à une identité archéologique;espace de l'ironisation et/ou 50
de la polémique sociale;cadre de constitution de nouveaux
mythes,etc.
RLE DISCOURS ROMANESQUE
Est h é ri Que
les
grands
axes
du
renou veHement
esthétique;usage de certains procédés de recyclages endogènes et
exogènes ;place des sociolectes et des idiolectes;les éléments exogènes
(tracts,coupures de la presse, ... );déploiement d'une esthétique de la
nécessité;artefacts littéraires dans la mise en forme esthétique des
oeuvres romanesques,etc.
Idéologique: rapport entre le "prince et le scribe" positon
idéologique du créateur africain;place des idéologèmes;etc
Référentialisation:stratégies discursives utilisées pour réaliser
la mimésis;les différents jeux dans l'acte de discursivisation
(symbolisation,allégorie,polémico-fantastique,baroque,l'absurde,etc);
les degrés de référentialisation;etc.
Pulsionnel: le discours romanesque rend compte de la peur ,de
l'angoisse existentieHe,des fantasmes, de la chute des points
cardinaux,du désordre figé;le rôle de l'irrationnel primitif;etc
Ax i 0 log i Que
:
les
valeurs
et
leur
positionnement
paradigmatique dans la mise en discours du texte;les valeurs dont
sont investies les structures actantielle~;le mythe et son rôle de
déconstruction (les nouveaux mythes viennent supplanter les
anciens);etc.
Intertextuel
: rapport dialogique du roman africain
francophone avec le roman africain anglophone
et lusophone;le
roman latino-américain,le nouveau roman français;rapport du texte
écrit et des textes de l'oralité;etc.
l V. ETATS GÉNÉRAUX DU ROMANESOUE AFRICAIN FRANCOPHONE
POST-COLONIAL
Les traits généraux du roman africain francophone post-colonial.
Tentative de catégorisation de la production romanesque en fonction
des niveaux d'analyse précédents.
Les modes d'intégration épique de l'espace romanesque.
L'interaction de l'espace romanesque et de l'espace réel (modes
d'actualisation du sociogramme);rapport entre fiction et méta-fiction.
Rapport de la structuration du romanesque post-colonial avec la
démarche de la déconstruction et de la post-modernité.
Tendance à l'homogénéisation des contenus ou ruptures successives;
etc.

51
CONCLUSION
Relativisation de la démarche par rapport à l'ensemble de la
production romanesque.
Intérêt de la démarche et les connaissances qu'elle permet d'avoir
du texte romanesque africain francophone à travers l'analyse des
structures sémantiques qui le portent.
Perspective d'évolution envisageable du roman africain francophone
et des autres formes littéraires.
etc.

(Extrait de Les soleils des indépendances,p.7 -17)
Joseph
PARÉ
Ph.
D
de
Littérature
comparée
Département
de
Littérature
comparée
Faculté
des
Arts
et
des
Sciences
Université
de
Montréal
Directeur de thèse: Alain ROCHER (Université de Montréal)
Co-directeur de thèse: Fernando LAMBERT (Université Laval)

Le roman de Ahmadou KOUROUMA,Les soleils des indépendances
(Presses
de
l'Université
de
Montréal,1968;réédition,Seuil,Paris,1970)
constitue l'oeuvre qui souligne,le mieux,la rupture entre la littérature
africaine écrite de la période coloniale et de celle de l'époque post-
coloniale au double plan de l'esthétique et de la thématique. Sans être
un
pamphlet
politique,le
roman,
en
se
focalisant
sur
la
situation
survenue
au x
lendemains
des
indépendances
africaines ,mon tre
comment les nouveaux systèmes politiques n'ont pas su répondre aux
espoirs que les populations avaient placés en eux.
Fama,le héros du roman,prince déchu par la colonisation s'était
battu pour la fin du régime colonial en espérant que l'avènement des
indépendances lui permettrait de retrouver un statut en rapport avec
sa position sociale avant la colonisation.
Malheureusement,ses efforts
ne seront pas récompensés. Malgré son anti-colonialisme farouche,il ne
sera
gratifié,après
les
indépendances,que
de
la
carte
nationale
d'identité
et de celle du
parti
unique.
Désabusé par ses
différents
échecs dans la vie sociale,ses déboires dans la VIe familiale (sa stérilité
et/ou
celle
de
son
épouse
Salimata),il
ne
lui
reste
plus
que
les
cérémonies
(baptêmes,mariages,funérailles),le petit commerce
de
son
épouse et son rêve de grandeur pour survivre, tel
un
névrosé.
Ses
successives vaines révoltes qUI sont autant de tentatives sans espoir
de
se
faire
valoir
dans
la
nouvelle
société
des
indépendances
culminent jusqu'à sa mort tragique qui sera pour lui,en définitive,une
délivrance.
La réussite de Kourouma dans cette oeuvre se situe également au
niveau esthétique. Il
a non
seulement innové le langage du
roman
africain mais il a surtout,avec adresse,transposé dans le français les

2
expreSSIOns
du
malinké,restructuré
la
langue
française
pour l'adapter
à son projet scripturaire. Comme l'a SI bien relevé J. P. Gourdeau «L a
richesse thématique de l'oeuvre est exaltée par un style qui résulte de
la
rencontre
du
français
et
du
malink~,langue de
Fama
et
de
l'auteur;expression au premier abord déroutante mais dont on admire
très vite l'efficacité lyrique et polémique.»
(l).
L'extrait qui fait l'objet de notre application inaugure le roman.
Dans
ce
passage,nous
faisons,déjà,connaissance
avec
Fama
dont
les
différentes
péripéties
(passées,présentes
et
à
venir)
constituent
la
trame
du
récit.
De
même,affleure
la
situation
qui
va
fermenter
la
tragédie du héros.
Au
regard
de la démarche d'analyse exposée dans
notre projet
de
recherche,nous
allons
d'abord
procéder
à
l'étude
de
l'intégration
épique de
l'espace romanesque
en la centrant sur
le
personnage de
Fama et sa quête impossible. L'analyse du discours produit sera menée
en
rapport
avec
la
manière
dont
se
réalise
l'acte
de
référentialisation,la
mIse
en
forme
esthétique
du
texte,le
positionnement
paradigmatique
des
valeurs
(axiologique),la
proposition idéologique et la réfraction du pulsionnel.
a.L'intégration épique de l'espace romanesque.
Si
l'extrait
commence
par
le
discours
du
narrateur,celui-ci
disparaît progressivement pour laisser la place à Fama autour de qui
s'organise
tout
le
roman.
Le
personnage,lui-même,
est
à
la
fois
tragique et comique. C'est un personnage tragique au même titre que
Don Quichotte de Cervantès parce qu'il est un roi sans sceptre;un chef

3
sans griot,sans royaume et sans cour pour le légitimer qui s'enferme
dans
son
rêve
de
grandeur
et
qUI
ne
peut
s'adapter
aux
valeurs
fa us sées
des
soleil s
des
indé pen danc es.
Sou s
certain s
aspects,cependant,Fama est présenté ou vu par les autres personnages
comme quelqu'un qui ne fait que radoter;c'est l'éternel insatisfait.
Dans cette société des indépendances tandis que Fama s'insurge
contre l'erreur,la bâtardise,les autres s'en
accomodent et essaient de
s'adapter. C'est pourquoi,on peut le considérer comme un individu en
quête de valeurs authentiques dans un monde de contingence. En effet
dans
la
société
des
indépendances « ... toutes les valeurs sont non
seulement niées,mais déformées : les marabouts et leurs maraboutages
sont devenus
des
escrocs patentés.
Les griots
et les féticheurs
des
profiteurs sans scrupules.»(2);il n'y a que Fama qui veul:
réssuciter
les valeurs originelles et les disposer à sa guise en pensant qu'il est le
seul à détenir la vérité. Il est donc un héros
problématique
dont la
tragédie est déjà inscrite dans son incapacité de s'adapter au monde
des soleils des indépendances,au monde de contingence qui s'offre à
lui.
En forgeant et en vivant dans un tel mythe,les rêves de Fama
finissent par le briser surtout que ce personnage, qui veut reconstruire
le mo'nde, est un individu « ... diminué,miné et corrodé à l'intérieur de
lui-même. Brisé par la vie et abandonné de tous.»(3).
Sa
mort
qui
s'inscrit
dans
la
logique
acquiert,cependant,une
dimension
symbolique.
En
même
temps qu'elle
souligne la fin
des
mythes
originels
elle
n'annonce
pas,paradoxalement,la
constitution
effective
de
nouvelles
mythologies
qui
puissent offrir un
refuge
à

l'individu.
La tradition
apparaît désormais
comme
inopérante
malS,en
même temps,la nouveauté ne donne pas des points de repère solides.
b.Analyse du discursif.
b.I.La
référentialisation
A. Kourouma convie le lecteur à pénétrer l'univers de la société
des indépendances africaines en se servant d'un personnage qUI a tout
perdu. Fama est, sous cet angle,l'alter ego de tous ceux que le nouveau
système a,plus ou moins, exclu en les mettant hors-jeu. Le refus d'un
tel sort conduit Fama à se construire un mythe et à vivre en fonction
de
celui-ci.
L'usage d'une
telle
démarche
fait que
le
traitement de
l'évenementialité prend,dans
le
roman,une
dimension
OnIflque et que
le personnage de Fama fonctionne de manière particulière par rapport
à son histoire qui n'est,en définitive,qu'une démaîtrise s'accentuant au
fur et à mesure que se dessine l'issue tragique. Même en se réfugiant
dans le mythe,Fama n'est qu'un «être à la dérive »(4) comme toute la
société des
indépendances.
Le
nouvel ordre instauré par les
soleils des
indépendances ont
ôté aux
titre de
noblesse leur valeur de même qu'il a instauré une
nouvelle
forme
d'exclusion
sociale
qui
ne
concerne
pas
uniquement
Fama même si ce dernier la vit tragiquement. Les
badauds présents
sur les trotoirs et que cotoie Fama en se rendant à la cérémonie du
septième jour de Koné Ibrahima ,les «vautours »
et les «bandes
d'hyènes »
(p.9) présents sur les lieux de la cérémonie sont autant
d'exclus
que le roman permet de voir et qui indiquent que la société
des indépendances ne fonctionne pas bien. De la même manière, c'est

5
la démaîtrise qUI permet de comprendre pOurqUOI les rites des morts
sont
désormais travestis en moyen de gagne-paIn par tous ceux
qUI
ont
été ruinés par les soleils des indépendances et qUI autorise à
enterrer le défunt en ville contre les eXIgences de la coutume comme
le dénonce le narrateur «
Eh bien,moi,je vous le jure,et j'ajoute : si le
défunt
était de
caste forgeron, et si l'on
n'était pas
dans
l'ère
des
indépendances
(les
soleils
des
Indépendances, disent
les
Malinké),je
vous le jure,on n'aurait Jamais osé l'hinumer dans une terre lointaine
et étrangère
(p.8).
Fondement de l'ère nouvelle,l'ère des bâtardises comme le répète
Fama,la
démaîtrise
caractérise
bien
la
société
des
soleils
des
indépendances que met en relief Kourouma dans son roman. Il s'agit
bien
de
lire
derrière
une
telle
référentialisation,
par
le
biais
du
discours,un
« ... système construit sur la terreur et le chantage avec la
vie, bâti sur le mensonge et sur la corruption, le parti unzque qUI ne
peut offrir un refuge à aucune conscience tourmentée ( .. ). Contre la
peur, contre
l'inquiétude, contre
l'angoisse
le
texte
souligne
le
caractère
anti-mythologique
des
nouvelles
institutions ... »
(5). Au
contraire,la
nouvelle
société
a
réussi
à installer
« ... des
essaims
d'hommes diminués, menés par la grande misère... »(6).
Une telle référentialisation invite à chercher,derrière ou dans le
discours,la dimension idéologique qui s'y déploie.
b.2 La dimension idéologique.
Selon S. Dabla <<. .. depuis Les soleils... d'A. Kourouma,rares sont les
romans
qUI
n'interrogent
pas, directement
ou
indirectement, les
nouveaux pouvoirs installés sur le continent africain à la faveur des

indépendances
nationales. »
(7). Si dans l'extrait que nous analysons la
place de l'idéologème semble assez mince,il n'en demeure pas moins
que,dans l'ensemble de l'oeuvre,derrière le discours se profile toujours
divers
idéologèmes.
Fama avait vu dans l'avènement des indépendances
le moment
de sa réhabilitation. Au lieu de cela,ce fut le début de la descente aux
enfers,le
stade
ultime
de
la
déchéance. C'est
pourquoi,il
ne
peut
accepter que seuls quelques personnes se partagent le gateau obtenu
par l'effort collectif. Dans le discours de Fama et d'autres personnages
revient cette même critique à l'endroit des nouveaux maîtres du pays
qui,après aVOIr utilisé des gens comme Fama les ont oublié une fois
installés
dans
leur
fauteuil
comme
ont
peut
le
noter
dans
ce
monologue
du
héros
«Comme
une
nuée
de
sauterelles
les
Indépendances
tombèrent sur l'Afrique à la
suite des
soleils de
la
politique. Fama avait comme le petit rat de marigot creusé le trou pour
le serpent avaleur de rats, ses efforts étaient devenus la cause de sa
perte car comme la feuille avec
laquelle on a fini de se torcher, les
indépendances une fois acquises, Fama fut oublié et jeté aux mouches.
» (p.22).
Le parti umque dont Fama détient la carte de membre et qUI est
sensé oeuvré pour la cause commune est devenu « ... une société de
sorcières, les
grandes
initiées
dévorent les
enfants
des
autres... »
(p.23 ).
Toutes
ces
déceptions
apportées
par
les
soleils
des
indépendances
finiront
par
conduire
Fama
à
regreter
la
période
coloniale où, à défaut de posséder son trône, il pouvait encore faire du
négoce.

Ce
texte
que
J.
Chevrier
étiquette
comme
«roman
du
désenchantement »(8) présente,au-delà des enjeux idéologiques sous-
jacents,de nombreux aspects interessants au plan esthétique.
b.3 L'esthétique dans la discursivisation.
Le titre du roman de Kourouma indique le choix de l'écrivain
d'user
de
l'esthétique de
la
parole
malinké
dans
la confection
du
discours romanesque. L'expression "les soleils des indépendances " est
une traduction en français d'une métaphore malinké pour désigner la
période des indépendances.
dans la mise en discours,Kourouma se livre à une restructuration
de la langue française. Comme il le dit lui-même de son roman «Je l'ai
pensé en malinké et écrit en français
en
prenant une
liberté que
j'estime naturelle avec la langue classique. »
(9). C'est grace à cette
liberté que Kourouma peut écrire dès les premières lignes «Il y avait
une semaine qu'avait fini
dans
la capitale Koné Ibrahima ,de race
malinké,ou
disons-le
en
malinké
:
il
n'avait pas
soutenu
un petit
rhume... »
(p.?). Dans ce passage,il s'agit essentiellement du malinké
transposé en français pour dire que Koné Ibrahima était décédé
d'une
maladie bénigne. L'ensemble du discours romanesque foisonne de ce
type de
transpositons que l'on peut,
selon
A.
Ly, classer en
trois
groupes:
les «constructions Impropres en français ordinaire,mais qui dans le
récit
des
aventures
de
Fama
jouent
toujours
un
rôle
ml-
hyperbolique,mi-métaphorique,avec
quelquefois
un
soupçon
de
métonymie. »
(l0) ~ dans l'extrait le passage suivant en donne une
illustration
«Il
dégagea
sa
gorge
par
un
hurlement
de

8
panthère ... »(p.13). La panthère n'a pas un hurlement mais plutôt un
feulement;
_les «sortes de soLécismes,constructions fautives du point de vue de
L'orthodoxie grammaticaLe,mais qui sont voLontaires, .. Leur rôLe est non
seuLement de permettre une
traduction mot à mot
du
malinké en
français,mais de créer une image pLus suggestive. »
(lI);
les
«constructions
diverses

se
rencontre
idiotismes
et
néoLogismes. L'intrusion du malinké dans Le français,avec L'observance
de la syntaxe de cette langue africaine est à la source des idotismes; de
L'autre côté L'acceptation LocaLe de certains mots français et L'usage qUI
en est fait, voire les dérivations selon Les procédés français fondent La
pLupart
des
néoLogismes.
»
(12).
Dans
notre
extrait,un
exemple
d'idiotisme se trouve dans ce passage où à la place de voir se trouve
connaître
«C'étaient Les
immenses
déchéance
et honte,aussi grosses
que
la
vieille
panthère
surprise
disputant
des
charognes
aux
hyènes,que de connaître Fama courir ainsi à des funérailles. »
(p.lO).
Quant aux néologismes l'emploi de vilaineries au lieu de vilenie
qUI
dérive de vilain est assez illustratif : «
Le manque de réflexe fut une
invite pour Le damné griot et ceLui-ci se lança dans Les viLaineries Les
plus grossières avec le contentement du Bambara qui se jette dans Le
cercle de tam-tams. »
(p.17).
En dehors des traductions du malinké dans le français,un certain
nombre d'ethno-textes renforcent également la malinkanisation de la
mise en forme esthétique du discours.
Le narrateur,au début de l'extrait, use de l'ethno-texte pour nous
décrire la manière dont se déroule les rites funéraires dans la caste
des
forgerons
chez
les
malinké.
Les
proverbes
qui
sont aussi
des

9
ethno-textes
sont largement utilisés
par le
discours
romanesque.Ces
proverbes qui sont source de sagesse inscrivent dans le discours l'un
des traits de la palabre africaine.Le proverbe dont le sens est à la fois
multiple et adapté au contexte qui dicte son emploi met en branle des
Images
suggestives
et
devient
,dans
la
production
discursive,
le
véhicule privilégié de la parole. C'est pourquoi,les personnages y font
abodamment recours. L'aîné qui préside l'assemblée dit «La vérité il
faut la dire,aussi dure qu'elle soit,car elle rougit les pupilles mais ne
les casse pas. »(p.9).
Signalons enfin,que la mIse en discours use de l'ironie et que
justement dans l'ensemble du texte on pourrait établir une typologie
des formes d'ironie. Celle qui est évidente dans cet extrait se rapporte
au personnage de Fama lorsque c'est le narrateur qUI le juge. C'est
ainsi
qu'il
dit <<Aux funérailles
du
septième
jour
de
feu
Koné
Ibrahima,Fama allait en retard.Il se dépéchait encore, marchait au pas
redoublé d, un diarrhhéique. »
(p.9). Il en va de même du mot molosse
utilisé dans le titre et quil à la fin, sert,justement,à désigner Fama : « 0 n
savait aussi que Fama allait méfaire et encore scandaliser.
Car dans
quelle
réunion
le
molosse
s'est-il
séparé de
sa
déhontée façon
de
s'asseoir? ..
»
(p.l7).
Fama,tel
un
molosse,n'est en
définitive,que
quelqu'un
qui
ne
se
pare
d'une
certaine
apparence
de
férocité.
bA.Le
positionnement
paradigmatique
des
valeurs
et
la
dimension
pulsionnelle.
Comme
nous
l'avons
déjà
mentionné
Fama
est
en
quête
de
valeurs authentiques dans un monde de contingence. Aussi,ne peut-il

10
pas acepter tout ce qui
n'est pas en
accord
avec
les
normes qu'il
s'impose. C'est pourquoi il marque toujours la différence "ontologique"
qui distingue le prince «<Fama
DoumbouyaJVrai
Doumbouya,mère
Doumbouya,dernier
et
légitime
descendant
des
princes
du
Horodougou ... »
(p.9)
des fils d'esclaves même sous les soleils des
indépendances;
la panthère (animal
totémique des
Doumbouya)
n'est
pas l'égal des
hyènes ou des vautours même si, pour survivre, il a
recours aux mêmes stratégies.Il se considère comme celui connaît le
chemin
de
l'honneur
par
oppositions
aux
bâtards
des
soleils
des
indépendances.
Pour
Fama,seules
les
anCIennes
valeurs
qUI
méritent
d'être
suivies.Dans
la
mesure

ce
retour
aux
sources
est
désormais
impossible,Fama ne peut que vivre sa situation tragique jusqu'au bout.
Sa quête irréalisable,le conduit à s'exprimer à travers des exclamations
qUI sont largement significatives du point de vue pulsionnel.
Les mots qUI reviennent dans le discours de Fama sont ceux qu'il
prononce pour la première fois dans l'oeuvre «Bâtard de bâtardise J
Gnamokodé
J... »
(p.9). Si Fama se récrie habituellement de cette
manière c'est que,comme l'indique P. N. Ngandu « ... le dégoût qu,il
éprouve pour la période humiliante des
indépendances se situe au-
delà de toute parole,et n'exige de lui que ce seul cri. Il ne parvient plus
à formuler sa haine de toute une longue malédiction ni à clamer haut
sa colère. Il a été détruit , au-delà des forces humaines, au-delà de la
souffrance possible. »
(13).

1 1
Ce roman de Kourouma dont nous venons d'analyser un extrait
présente
un
certain
nombre
d'analogies
avec
son
second
roman
Monnè,Outrages
et défis (Paris,Seuil,1990). Dans les deux romans,les
personnages
principaux
sont
des
rois.
Fama,le
prince
déchu
est
désespérément en quête de reconnaissance tandis que Monnè,Outrages
et défis s'organise autour du long règne de Djigui. Cependant,tout en
étant des personnages en rapport avec le pouvoir Fama et Djigui se
distinguent l'un de l'autre. Tandis que la logique de la mauvaise foi
amène Ifgui à se donner l'illusion de la continuité de son pouvoir
même
quand
tout
indique
que
c'est
le
colonisateur
qUI
exerce
désormais ce pouvoir. Avec Fama '.C .
ce n'est tus la logique de
la
mauvaise
foi.La
perte
du
pouvoir
est
vécue
comme
un
drame
individuel qui se densifie dans le roman Les soleils des indépendances
au point où finissent par coïncider l'eschatologie (la prédiction de la fin
du règne des Doumbouya) et la fin tragique de Fama.
Les deux
romans de Kourouma tout en se référant à la culture
malinké,illustrent l'histoire les pérégrinations des africains. Malgré la
différence
temporelle
qui
sépare
les
deux
récits,les
deux
romans
entretiennent des
rapports.
Ils
traduisent,
tous
les
deux,
la grande
désillusion
face
à
la
situation
africaine
qui ,selon
les
propos
de
Kourouma, au lieu de s'améliorer est « ... pire maintenant.(... ).
Trente
ans
après
les
indépendances,
le
bilan
demeure
décevant
dans
beaucoup de domaines. »
(14). Par ailleurs,~'
référence à la culture
malinké rapproche A. Kourouma (l'ivoirien) de Massa Makan Diabaté
(le malien). Tous les deux appartiennent justement à l'aire culturelle
malinké qui recouvre différents pays de l'afrique Occidentale et dont
certains aspects comme l'esthétique de la parole est au coeur de leur

12
création.Une telle homonymie dans la démarche
scripturaire adpotée
par
des
écrivains
appartenant
à
deux
États
différents
indique
la
nécessité
de
la
relativisation
de
la
désignation
de
la
production
littéraire
des
États-Nations
africains
en
termes
de
littératures
nationales. Il serait peut-être plus judicieux d'user de la désignation
de
littérature
méta-nationale
ou
régionale
pour
établir
cette
nécessaire distinction dans la littérature africaine puisqu'elle ne plus
véritablement être appréciée en des
termes généraux comme cela a
été fait
pendant un certain temps.

1 3
NOTES DE RÉFÉRENCE
1.Jean-Pierre
GOURDEAU ,La littérature
négro-africaine
d'expression
française,Paris,Hatier, 1973 ,p.136.
2.
Puis
NKASHAMA-NGANDU ,Kourouma et le mythe "Une lecture de
Les soleils des indépendances" , Paris, Silex ,1985 , p.13.
3. Puis
NKASHAMA-NGANDU, Kourouma et le mythe, op cit. ,p.153.
4. Puis
NKHASHAMA-NGANDU, Kourouma et le mythe,op cit.,p.13.
5. Puis
NKASHAMA-NGANDU, Kourouma et le mythe,op cit.,p.133.
6. Puis
NKASHAMA-NGANDU,Kourouma et le mythe,op cit.,p.133.
7. Sewanou DABLA,Nouvelles écritures
africaines "Les écrivains de la
seconde
génération"
,Paris,I'Harmattan,1986,p.86.
8.Jacques CHEVRIER, Littérature nègre,Paris, Armand colin,1974,p.156.
9. Badday
S.
MONCEF, "Ahmadou Kourouma : écrivain africain" in
Afrique littéraire et artistique,n O 10,Avril 1970,p.7.
10. Amadou L Y , "Quelques réflexions sur la forme des soleils des
indépendances de Kourouma" in Annales de l'Université de Dakar,n °Il,
1981,p.122.
Il.
Amadou L Y,
"Quelques réflexions
sur la forme des soleils des
indépendances de Kourouma" op cit.,p.122.
12. Amadou L Y , "Quelques réflexions sur la forme des soleils des
indépendances de Kourouma" , op cit.,p.124.
13. Puis
NKASHAMA-NGANDU,Kourouma et le mythe,op cit.,p.131.
14.
Ahmadou
Kourouma,propos receuillis par Bernard Magnier,N otre
librairie,n o
103,Octobre-Décembre
1990,p.95.

ILlES
lEN 1rlE10 X
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'lI'JBIlÉ(0)lflrr SA 'lI'rrCO)N
ID>lE
ILA
ILli 1I''lI' lÉ lfl A "lI'10 lfl JE
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J.
PARÉ
Ph.
D.
de
Littérature
comparée
Dépt.
de
Littérature
comparée
Faculté
des
Arts
et
des
Lettres
Université
de
Montréal
Directeur de thèse: Alain ROCHER (Université de Montréal)
Co-directeur de thèse: Fernando Lambert (UNiversité Laval)

INTRODUcrION
Dès son émergence,le phénomène qui fut désigné par le terme
assez équivoque de
littérature négro-africaine s'appréciât en fonction
de critères essentiellement raciaux.Qalifiée par J. P. Sartre de «racisme
anti-raciste»
(l ),la littérature de la Négritude et tout le mouvement
intellectuel
qUI
l'accompagnait
furent
évalués
comme
la
seule
conscience d'appartenance à la race noire. A l'arrière-plan d'une telle
appréciation
se réfractait une VISIOn mystique, sinon mythologisante
du
Nègre
et
du
continent
noir.
A
l'évidence,
les
critères
herméneutique et méthodologique d'estimation
de cette littérature ne
se basèrent pas sur des fondements épistémologiques solides. Pour les
premiers
analystes,
des
critères,
aussi
vagues
,et,
peu
pertinents,
comme
l'émotion
nègre,
l'originalité
des
nègres, ... ;
pouvaien t
transcendantalement
se
greffer
sur
la
littérature
des
nègres
et en
expliciter tout le contenu.
Les études qui feront suite à cette première appréciation de la
littérature
des
nègres
tenteront de
corriger cette
VISIOn
erronée en
adoptant
une
approche
immanente
du
texte
littéraire
quoique
les
outils d'analyse fussent , largement , ceux utilisés pour étudier le texte
occidental.Cette
analyse
dont
le
grand
mérite
aura
été
de
ramener
l'approche
des
textes
littéraires
nègres
sur
le
terrain
de
la
"scientificité"
tentera
avec
plus
ou
moins
de
succès,suivant
les
critiques littéraires considérés,de mettre de côté le postulat racial et
d'apprécier les oeuvres littéraires et leur spécificité à partir de l'objet
esthétique
lui-même.

Des réflexions comme celles de
J. Chevrier, Littérature nègre (2)
B. Mouralis ,Les contre-littératures (3); M. Rombaut, La nouvelle poésie
négro-africaine (4) ; 1. Kimoni ,Destin de la littérature négro-africaine
ou
problématique
d'une
culture (5)
P.N. Ngandu ,La
littérature
africaine écrite en
langue française (6) qUi inaugurèrent cette rupture
ont révélé la vacuité et l'inadéquation du
seul critère
racial pour
expliciter le contenu de toute une littérature sans courir le danger de
tomber dans une caricaturation grotesque. C'est pourquoi, B. Mouralis
considère que la cécité des premiers critiques a consisté à ne pas
percevolf
la
littérature
africaine
naissante
comme
des
"contre-
littératures" .Dans le même prolongement , P. N. Ngandu signale que
les avatars idéologiques ont conduit
les
premiers critiques à ôter leur
statut d'oeuvre
à des
créations
qui
étaient
,avant
tout,
des
objets
esthétiques
puisqu'elles
rejetaient
toute
équivoque
sur
leur
destin
d'acte de création même si elles s'articulaient en fonction de la réalité
vécue.
Depuis
la
rupture
instaurée
par
la
critique
de
la
première
critique,
des
efforts
soutenus
ont permis
de
saisir
la dimension,la
portée,les
diverses
mutations
intervenues
dans
cette
production
littéraire qu'on désigne ,depuis quelques temps déjà, par le terme de
littérature africaine (si ce n'est pas par celui des littératures africaines
). Cependant , cet effort critique
ne s'est pas accompagné de la même
volonté de théorisation sur l'objet littéraire .On assisté , curieusement ,
pendant
longtemps
à
une
espèce
de
concensus
selon
lequel
la
littérature africaine pouvait vivre sans théorie,s'en passer ou , tout

3
simplement
,
se
réfracter
à
travers
la
théorie
occidentale
de
la
littérature.
Au
regard
de la maturité
atteinte par la production
littéraire
africaine de manière globale , de la vitalité de sa critique n'est-il pas
nécessaire , aujourd'hui , d'engager des réflexions qUI portent sur cet
autre
versant
de
la
littérature
que
représente
la
théorie
de
la
littérature ? Une telle démarche ,si elle se concrétisait,présenterait le
mérite
de
sortir de
la situation
aussi
inconfortable qu'ambiguë qui
prévaut ,en ce moment, l' orsqu'arrive l'instant crucial de penser la
littérature africaine (écrite de langue française) dans une perspective
théorique.
Néanmoins,si le constat du
vide théorique
ne fait
aucun
doute,
il reste que
la
nécessité de
la
théorisation
a
besoin
d'être
justifiée .En fonction des raisons qui militent pour cette théorisation,on
pourrait dégager les lignes de force délimitant les enjeux qu'implique
la tâche de théorisation elle-même.

I. POURQUOI UNE THÉORIE DE LA LITTÉRATURE AFRICAINE
ÉCRITE?
Le point final de notre introduction valide-t-il suffisamment le
postulat d'une nécessaire théorisation de la littérature africaine écrite?
Dès lors, la problématique , pour être pertinente et mieux circonscrite ,
mérite
qu'on
se
soumette
à
un
certain
nombre
d'interrogations
préliminaires.
Faut-il
orienter la réflexion à partir des épistémés du champ de
la
théorie
littéraire
occidentale
avec,
à
l'arrière-plan,
le
souci
que
ceux-ci trouvent un mode de fonctionnement distinct dans
le cadre
africain (qu'ils sont
relativisés) ou , au contraire , se fonder sur la
nature ontologique de la théorie de la littérature,son rapport à l'objet
littéraire
pour
déterminer
les
lignes
de
force
des
enjeux
de
théorisation
de la littérature africaine
?
Autrement dit,
la validité
heuristique
de
l'une
des
démarches
choisie
conduira
à penser
la
théorisation de la littérature africaine en termes
de relativisation des
épistémés occidentaux quand il s'agit du texte africain. A l'opposé,si
l'on
pense
la
théorie
littéraire
comme
la
science
de
l'explication
rationnelle
du
fonctionnement
de
l'objet
littéraire,il
devient
alors
important de, déterminer les enjeux qu'induit cette réflexion dans le
cas spécifique du corpus africain.

En
plus
bref,
faut-il
rester
dans
le
schéma
occidental
des
épistémés
sur
lesquels
repose
la
théorie
de
la
littérature
ou
les
déborder
,
dans
une
espèce
de
raccourci,
permettant
de
penser
autrement
la théorie de la littérature et, de ce fait ,fonder les axes de
réflexions
qUI
peuvent
guider
la
théorisation
de
la
littérature
africaine?
En
nous
référant
aux
épistémés
qu'offre
la
théorisation
Occidentale de la littérature* dans le dessein de penser la théorie de la
littérature africaine écrite de langue française,nous
ne
pourrons pas
trouver une argumentation solide validant la nécessité d'une réflexion
théorique.La littérarité,par exemple (mise en avant par les formalistes
russes et qui, l'on
sait,malgré ses différentes remises en cause,reste
encore un épistémé important dans le champ de la théorie
* Il est peut-être abusif d'affirmer,dans le cas de l'Occident,l'existence
d'une théorie de la littérature.Il y a lieu de parler plutôt d'un horizon
théorique que viennent défaire les différentes
réflexions critiques.On
peut,d'ailleurs,convenir
avec
S.
Santerre-Sarkany
que
cet
horizon
théorique est, de plus en plus,remis en cause. Il signale justement que
«La théorie de la littérature est arrivée à un point de non-retour.Elle
se
trouve
de
plus
en
plus
fermement
récusée
par
les
"milieux
littéraires"
les
écrivains et leur entourage corporatif_ et elle est
harcelée
"de
l'intérieur"
par
ses
propres
thuriféraires.
Les
deux
émettent
des
doutes
sur
ses
tendances
généralisantes.
Les
interrogations
sur
ses
préalables
épistémologiques
fusent
de
tous
côtés. Il est à craindre qu'on soit bientôt tenté d'en parler au passé
défini.»
Théorie de la littérature. Paris: P.U.F , 1990 , p.3.

6
1· ,
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la
littérarité.
Elle
connaît,simplement,dans
le
texte
africain,un
autre
mode d'exister comme d'autres principes constructifs de l'oeuvre.
En restant sur ce terrain la question ne peut être que formuler
en
termes de
relativisation
des
épistémés
occidentaux
(ou
de
leur
réadaptation).
Or,
cette
relativisation
ne
permet
pas
de
rendre
suffisamment
compte
des
fondements
de
la
pratique
littéraire
africaine qui repose sur d'autres structures de l'imaginaire et qui est
en rapport avec un contexte socio-culturel distinct.La littérarité pensée
en relation avec une
société de tradition essentiellement écrite peut-
elle simplement être réadaptée à un contexte où
la création littéraire
intègre,largement,
des
éléments
de
l'oralité
dans
une
aventure
de
l'écriture? Il y aurait,en adoptant une démarche qUI s'articule à partir
d'une
simple
réadaptation
des
épistémés
de
la
théorie
littéraire
Occidentale, le risque de ne pas atteindre l'essence de l'oeuvre. C'est
pOurquOI , nous pensons qu'il faut sortir de ce champ en recourant à ce
qUI constitue la nature même de la théorie de la littérature.
Une fois réorienté , le questionnement s'articulera autour de la
nature de la théorie littéraire et ce qu'elle détermine dans son rapport
immanent à l'objet littéraire (les fondements de l'objet littéraire telle
que
la
pratique
permet
d'en
rendre
compte).Sa
formulation
instaure,alors,une dynamique par laquelle « .. .la pratique est mise en
formule.»
(7).
Dans cette perspective,la théorie littéraire s'assimile à un horizon
formulé
à partir
d'un
méta-discours.
Une
science
(ou
une
attitude
scientifique)
qui
en
s'appuyant
sur
ce
qUI
particularise
la

littérature,en
étudie
les modalités
de fonctionnement. C'est, en tout
état de cause, le plus petit commun dénominateur qu'on peut établir ,
à travers le temps , entre les démarches ou attitudes théoriques de
penseurs
ou
de
regroupements
de penseurs
(Aristote,W.
Dilthey,
R.
Ingarden, les formalistes russes , les structuralistes tchèques , le new
criticism
, etc.
) qui
permet
d'émettre
l'hypothèse
que
la
nature
ontologique de théorie de la littérature c'est d'être
une "philosophie
de
la
littérature"
,
« ... une
science
de
la
science
littéraire,une
épistémologie...»
(8) qui correspond à ce qu'on nomme en anglais
"theory
of
literature"
ou
"allgemeine
literaturwissenschaft",
en
allemand . En
tant que
telle,
elle permet de
formuler
les
lois
qUI
président à la création littéraire afin de mettre à jour ses
conditions
d'existence,son
essence.
Par ailleurs,
dans
la mesure

elle pense
l'objet littéraire, elle a partie lié avec la critique littéraire, l'histoire
littéraire
comme
le
montrent
R.
Wellek
et
A.
Warren.
Car,disent-
ils:« .. .l'on ne peut concevoir de théorie sans histoire et sans critique ...»
(9).
Ce déplacement du terrain des
épistémés vers ce qUI
constitue
la nature de la théorie de la littérature et le rapport qu'elle instaure
avec
l'objet
littéraire
permet
de
penser
la
problématique
de
la
théorisation
de
la
littérature
africaine
écrite
en
des
termes
mOInS
déprédateurs.
Cependant
, l a
quête
de
l'essence
de
la
littérature
africaine indique-t-elle , suffisamment , la nécessité de la théorisation?
La réponse à cette question
révèle
, en elle-même , l'un des
enjeux majeurs de la littérature africaine actuelle qui a besoin de se
doter d'une démarche méthodologique comme l'annonce clairement P.
N. Ngandu : «
La question de la méthode concerne principalement le

(ou les)
langage (s)
par le
(s)
quel(s)
s'opère
une représentation
logique du discours , ou même de la rationalité. Si l'on admet que la
matérialité de la science, c'est d'une part son énonciation sous une
forme discursive , et d'autre part , le fait que cette énonciation par
elle-même
constitue
le
fondement
de
l'évolution
du
discours
scientifique , il devient plutôt
inquiétant de
constater que ce qUI se
veut "une science du
texte" ne se soit pas encore appropriée les
mécanismes
par
lesquels
peut
s'atteindre
une
telle
forme
de
logique.»(10).
La
théorie
de
la
littérature
africaine
devrait se
focaliser
sur
"l'identité écrivante"
africaine en vue de formuler les lois générales
qui président à l'acte de création car selon J. Bessière
« ...théoriser le
littéraire,c'est< ...>
théoriser
une
identité
parlante
(écrivante)
qui
se
constitue
de
manière
figurée
par
le
biais
de
l'interprétation
linguistique des discours ...»(11). Cette théorisation passerait donc par
diverses motivations qui se trouvent au coeur du projet scripturaire
africain parce que cette création est en rapport avec : une situation
polysystémique , la remise en cause de la "littérarité
traditionnelle";
l'usage
du
polémico-fantastique,du
baroque,de
l'absurdité
pour
pervertir le
temps
de
la narration,etc.
Dès
lors,comment situer les
lignes
de
force
qui
puissent indiquer la marche
à
suivre
dans
la
réflexion visant à formuler la théorie.

9
IL COMMENT
PENSER UNE THÉORIE DE LA LITTÉRATURE
AFRICAINE?
La
philosophie
de
la
littérature,
pour
pOUVOIr
formuler
de
manière
cohérente
les
règles
de
fonctionnement
de
la
littérature
devrait,
avant la formulation
des lois, préciser la
nature de l'objet
esthétique (la manière dont celui-ci se constitue à travers les aspects
les plus pertinents et qui ,en même temps,le spécifie) et, amener à un
nIveau de cohérence, les formes significatives de l'objet esthétique lui-
même. Ce préalable permettrait de fixer les enjeux de théorisation à
partir
desquels
les
règles
générales
de
fonctionnement
de
l'objet
pourraient être
formulées.
ILl. L'objet
esthétique.
L'objet littéraire africain est encore majoritairement confectionné
à
partir d'une
langue
d'emprunt
(français,anglais,portuguais).
De
ce
fait,l'écrivain en élaborant son oeuvre se trouve dans l"'obligation" de
traduire dans une langue autre , les réalités
historiques, culturelles ,
économiques et sociales de son environnement. Comment peut-il , dès
lors, à travers une autre langue , forgée par d'autres déterminismes
que les SIens , exprimer ce qui le fonde en tant qu'individu distinct de
l'autre dont il emprunte la langue?
Cette problématique (née en même temps que prenait forme la
littérature africaine) se trouve encore , aujourd'hui , au coeur de la
création
littéraire
malgré
les
différents
appels
invitant
à
une
production dans les langues africaines. Du reste, face à cette question ,

10
de nombreux écrivains estiment qu'écrire dans les langues des anCIens
colonisateurs ne constitue pas un véritable handicap dans la mesure

ceux-ci
soumettent
la
langue
d'emprunt
aux
désirs
du
vouloir
africain.
Il s'est donc opéré une mutation dans l'écriture se traduisant par
des
ruptures
avec
l'écriture
normative
française
que
les
oeuvres
littéraires ont ,diversement, accentuée.
Cet ensemble de motifs justifie amplement que l'un des axes de
réflexion
théorique
sur
la
littérature
africaine
se
focalise
sur
la
manière dont se réalise l'objet littéraire à travers l'écriture: En ce sens,
ce
sont les
ruptures
significatives
qui
permettront d'établir,
par
le
biais de l'écriture,
les règles essentielles qui
fondent
la création
littéraire africaine et d'aborder, de manière
plus significative la visée
sémiotique dans l'acte scripturaire.
En effet, l'écriture apparaît comme une arme subversive à deux
niveaux , tout au moins. C'est par l'écriture
que l'écrivain africain
procède
au
démontage
de
la
langue
française
de
l'intérieur.Elle
est,aussi,l'arme
avec
laquelle
on
attaque
le
pouvoir
en
place
en
présentant
son
discours
comme
la
langue
de
bois
auquel
il
faut
opposer une nouvelle parole.
En plus, l'écriture (ou du moins sa mutation) est ce par quoi la
littérature
africaine
(le
roman
notamment)
a
rompu
avec
le
temps
millénariste et linéaire pour construire l'oeuvre littéraire à travers une
articulation, par touches successives, de la temporalité. C'est pourquoi ,
le baroque et l'absurde viennent,de plus en plus, pervertir le temps
qui,lui-même,
s'emballe en faisant des personnages des pantins et des

l i
acteurs non plus d'un vaste récit mais, plutôt, d'une histoire dont l'axe
central est perpétuellement miné par des récits "parasites" . Enfin c'est
par
l'écriture
que
s'affirme
nettement
cette
volonté
de
l'écrivain
africain de rejeter la classification
occidentale des genres littéraire.
Il
apparaît de
plus
en
plus
nettement que
l'écrivain
africain
rejette, par sa manière de concevoir l'objet esthétique, la division des
genres
dont il
a
hérité de
l'Occident.
L'acte d'écriture permet de
subvertir et de s'opposer à cette division canonique. Une théorisation
de
la
littérature
africaine
écrite
devrait
s'interroger
sur
la
validité
occidentale de la désignation
des genres quand
il
s'agit du
corpus
africain. En effet, des oeuvres assez récentes accentue ce refus de la
classification
, ipso
facto,
dressée
par
l'Occident.
C'est le
cas
,en
l'occurrence, de Wéréwéré Linking
qui
considère son oeuvre Elle sera
de jaspe et de corail (12)
comme
un chant-roman . L'analyse de ce
texte prouve , effectivement, qu'il est malaisé
de séparer ce qui relève
strictement de la poésie de ce qui appartient au domaine de la prose
sans ôter
à celui-ci une part importante de sa visée significative. Une
telle démarche scripturaire aurait pris les traits d'un épiphénomène SI
elle se limitait au seul cas que nous venons de signaler. Ngal
M. à
M.,aussi, à travers ses deux romans
(Giambatista Viko ou le viol du
discours
africain et L'errance (13»
procède à un tel travail mais
dans
une
perspective
qUI
se
rapprocherait
d'une
interrogation
philosophique
face
au
discours
lui-même.
Loin
d'être
seulement un
refus des genres,cette attitude scripturaire qui marque de plus en plus
la création littéraire (notamment romanesque) trouve ses racmes dans

les
rapports
que
l'écrivain
instaure
avec
la
tradition
littéraire
africaine.
La
littérature
traditionnelle
ne
connaît
pas
dans
son
mode
d'actualisation cette séparation systématique des formes littéraires. Le
conte ,par exemple, est à la fois chant et récit comme le mythe est à la
fois
prose
et poésie.
En
examinant les
règles
de
composition des
oeuvres à la lumière de certains modes traditionnels de création on
pourrait déboucher sur des possibilités d'homologation entre les deux
styles
de
création
esthétique.
C'est
pourquoI,
toute
tentative
de
théorisation de l'oeuvre écrite africaine
doit,dans une perspective plus
large,
formuler
les
règles
générales
qUI
décrivent
la
nature
des
rapports qui s'instaurent entre la littérature écrite et l'oralité car ne
fait pas de doute que ces deux littératures entretiennent des rapports
étroits qu'une analyse superficielle ne permet pas de rendre compte.
Si
la
simple
affirmation
de
l'existence
en
Afrique
de
deux
littératures
peut apparaître , à la limite,
un truisme , tenter de situer
ces deux littératures qui obéïssent à des systèmes distincts
se révèle
une voie de réflexion intéressante.
Si l'on pose simplement que la
littérature écrite fonctionne suivant le principe de la "clôture" tandis
que celle orale s'organise en fonction de l'''ouverture''; la différence des
structures
institutionnelles
sur
lesquelles
repose
chacune
de
ces
littérature conduit à les penser comme ontologiquement distinctes. Par
contre, si l'on aborde la littérature orale comme fait littéraIre réutilisé
par l'écri ture,redéployé dans
un espace écrit , sans en modifier les
aspects essentiels , la parole orale (même si elle est ontologiquement
distincte) procure à l'écrivain africain des sources inépuisables pour
l'élaboration de l'objet esthétique; même si, dans le nouveau circuit où

13
la parole orale se trouve inscrite, celle-ci ne Joue plus le même rôle
idéologique. Sous cet angle, le point de vue de P. N. Ngandu relatif à la
"rupture épistémologique" (14) entre la littérature orale et celle écrite
ne
nous
semble pas suffisamment justifiable de
la distance que ce
dernier
propose
de
tenir
entre
ces
deux
formes
littéraires.Au
contraire,il
devient
important
d'appréhender
certaines
des
modalités
dont usent les écrivains et qui se constituent,dans le texte littéraire,en
indicateurs,implicites ou explicites,
des recours
faits aux ressources
de l'oralité pour forger l'objet esthétique; une littérature traditionnelle
qui harcèle les créateurs africains
même dans leur désir de s'inscrire
résolument dans une pratique écrivante.
La théorie de la littérature en prenant son
appui
sur l'objet
esthétique
permettra
de
dévoiler
les
lois
générales
de
son
fonctionnement,ses conditions d'existence et pourrait , dans cet ordre
d'idée
,
apporter
des
réponses
intéressantes
sur
la
question
des
littératures
nationales.
A
partir
des
règles
générales
de
fonctionnement
de
la
littérature
se
dégagerait
avec
netteté
ce
qUI
fonde
la
différence
entre
les
oeuvres
produites
dans
le
cadre
des
Etats-nations
ou
, alors
, ce
qui
se
dessine
comme
possibilité de
regroupement
en
fonction
des
aIres
d'appartenance
culturelle.
Autrement
dit,
la
théorisation
du
littéraire
africain
féconderait
cet
« ...effort des études littéraires et de l'histoire littéraire pour dégager
l'individualité
d'une
oeuvre,d'un
auteur,d'une
période
ou
d'une
littérature
nationale.»(l5)
En
définitive,formuler
une
théorie
de
la
littérature
(ou
une
philosophie
de
la
littérature)
en
interrogeant
,d'abord,
l'objet
esthétique
permettrait d'élaborer les règles générales significatives à

14
partir
de
l'écriture
, des
modes
de
réutilisation
qu'elle
engage,du
travail de déconstruction qui s'opère dans la mise en forme de l'objet
esthétique,etc.
Néanmoins
,
cette
première
étape
ne
peut
suffire
puisque le produit littéraire est,non seulement,un objet esthétique qui
se constitue en fonction d'un certain nombre de lois mais,aussi,porteur
d'un certain nombre de formes significatives.
II. 2. Les formes significatives
La
préoccupation
du
créateur
africain
a
toujours
consisté
à
Inscnre dans sa production ce qui le caractérise et ce qui confère à son
oeuvre
sa
socialité.
L',épiphanie
de
ce
qUI
spécifie
dans
l'oeuvre
littéraire,de ce
qui distingue,
induit à penser que
l'une des formes
significati ves
de
l'objet esthétique
africain
est la manifestation
de
l'al téri té.
L'oeuvre littéraire africaine ne jaillit pas du néant mais «d'une
source
lumineuse ...»(16)
comme
le
mentionne
P.
N.
Ngandu.
La
création
littéraire
se
révèle,
à travers
diverses
stratégies
mise
en
oeuvre, comme le lieu ou s'exprime cette volonté d'assumer l'altérité
qui ,dans la forme scripturaire actuelle de la production , s'exprime à
travers
deux
choix
qui,quoique
apparemment
contradictoires,
soulignent la direction dans laquelle l'identité est à construire comme
l'illustre la production de certains écrivains.
La mise en parallèle de la création romanesque de A. Kourouma
et de M. M. Diabaté avec celle d'un H. Lopès
souligne, avec netteté,
la
double
voie
suivant
laquelle
doit
se
construire
l'identité.Dans
les
oeuvres de
Kourouma et Diabaté l'expression de l'altérité transparaît

15
dans cette démarche qUI consiste à inscrire dans le discours littéraire
l'esthétique de la parole malinké.Par ce biais, Le discours romanesque
se mue en lieu de reconquête de l'identité.Grace à ce que
A. Tine
a nommé "l'oralité feinte" s'actualise
le passage (de l'écrivain et de son
lecteur potentiel
africain)
de la situation
de
"dé-territorialisation"
à
celle de "re-territorialisation" car «
c'est dans l'usage de l'oralité feinte
que
l'auteur et
son
auditoire
implicite
se
re-territorialisent dans
la
langue
française ... »(l7)
et
trouvent
dans
l'objet
esthétique
cette
fenêtre
ouverte sur une identité commune.
A côté de cette démarche , il Y a celle que nous trouvons ,par
exemple , densifiée dans Le pleurer-rire de H. Lopès . A travers Radio-
trottoir (la rumeur qui court les
rues de Moundié) le texte littéraire
intègre
ce
français
propre
aux
centres
urbains
africains
avec
ses
propres
idiolectes
et
sociolectes;un
français
éloigné
du
français
central.L'inscription dans le texte romanesque de ce parler populaire
confère à celui-ci une dimension qUI souligne l'identité de ceux qUI
prennent en charge la narration du récit.
Ces deux voies par lesquelles s'assume l'altérité sont le reflet de
la situation africaine actuelle. Ces deux modes d'assumer l'altérité dans
la
création
littéraire
indique
la
manière
dont
l'identité
est
à
construire.Elles montrent
qu'il ne s'agit pas de construire une identité
archéologique mais plutôt
une identité polymorphe dans le présent.
C'est là , certainement , le fondement philosophique essentiel de la
démarche littéraire actuelle
qui se distingue de celle de la Négritude.
La nouvelle "carte
d'identité" sans oublié ce qu'on est, ne peut se
faire sans tenir compte de ce qu'on,on est devenu dans cette aventure
avec
l'autre
et
dont
il
est
impossible
désormais
de
faire
table-

16
rase.C'est
pourquoI,
tout
en
convenant
avec
J.
Chevrier
que
la
littérature
africaine
est
une
« .. .littérature de
la
quête
et
de
la
reconquête de l'identité ...»
(18) , nous pensons que toute réflexion
théorique doit fonder sa validité sur le principe de l'altérité car il ne
suffit pas de dire que la littérature africaine écrite est distincte mais
plutôt de montrer en qUOI
cette distinction est significative et les
enjeux qu'indique la différence. C'est de cette façon
que la théorisation
a
un
sens
car
elle
se
batirait
en
rapport
avec
des
fondements
épistémologiques
qUI expliquent la rationalité des différents pnncIpes
constructifs
de
la
création
littéraire.
Néanmoins,
l'oeuvre
littéraire
n'est pas seulement une opérativité par le biais du discours,il implique
des enjeux idéologiques qUI sont,aussi,l'une des formes significatives.
Selon M.
Bakhtine (V. N. Volochinov) : « ...le discours écrit est en
quelque
sorte
partie
intégrante d'une
discussion
idéologique
à
une
grande
échelle:
il
répond
à quelque
chose,il
réfute,il
confirme,il
anticipe
sur
les
réponses
et
les
objections
potentielles,cherche
un
soutien,etc.»(19). De ce point de vue,la théorie de la littérature devrait
inventorier les schèmes idéologiques qui se trouvent au coeur de la
création littéraire;les idéologèmes qui sont une façon de se positionner
par rapport à l'autre. Une démarche féconde dans cette perspective
consisterait à formuler la manière dont la dimension hylique se trouve
à l'oeuvre dans la production littéraire. En déterminant la portée de
celle-ci,on
fonderait
sur
des
bases
solides
le
dialogue
qu'instaure
l'ow~ avec la société
considérer
les
formes
significatives
de
l'oeuvre
littéraire
suppose,à notre avis,que soient pris également en
considération les
différentes ruptures qui s'instaurent dans l'évolution de la production

11
littéraire.De ce point de vue,le rôle de la théorie consisterait à situer
les lois générales qui président aux diverses mutations mais également
à dresser ce qui constitue une ligne dynamique dans l'évolution du fait
littéraire.
autrement dit,
tout en
se constituant en
une
science
des
textes à travers une méthodologie appropriée la théorie devrait placer
les formes significatives de la littérature africaine dans un paradigme
qUI
définisse
les
lois
existentielles
de
développement
du
projet
scripturaire
africain.
Une
telle
démarche
se
démarquerait
de
la
tradition théorique occidentale qui a force de théoriser a perdu de vue
l'objet de théorisation lui-même.
Enfin,cette nécessité de théorisation survient à un moment où la
littérature africaine est à une période désignée communément époque
post-coloniale, et comme on l'a vu au niveau de l'objet esthétique lui-
même où le travail de création se fait parfois dans une perspective de
déconstruction,
il est peut-être
intéressant de voir SI dans ses modes
d'actualisation
l'objet esthétique africain post-colonial
n'entretient pas
des rapport avec ce qu'on désigne par la post-modernité.
Sans vouloir succomber à une mode et dans le souci de ne pas
dresser , à priori , une muraille de Chine entre la post-modernité et le
post-colonial
nous
dirons
simplement
que
les
deux
phénomènes
partagent ce fond commun qui est celui d'une rupture radicale. Autant
la post-modernité est une rupture radicale avec la modernité autant le
post-colonial introduit une rupture radicale avec la période coloniale
(au moins au plan de la création littéraire). Cependant , une similarité
aussi mince ne saurait justifier la mise en rapport identique des deux
phénomènes.

18
CONCLUSION
«La
théorie
élève
la
pratique
à
la
dignité
de
virtuosité
consciente,elle en tire les conséquences permises par la formule,et,en
lui montrant son bien-fondé,elle accroît la confiance avec laquelle elle
s'exerce.»(20).Ce rôle que W. Dilthey accorde à la théorie est,nous
semble-t-il,celui que devrait jouer la théorie de la littérature africaine
écrite. Elle procurerait ,alors, à la littérature africaine écrite de langue
française
(ou
aux
littératures
africaines
écrites)
les
fondements
épistémologiques
indispensables
au
regard
de
l'épanouissement
que
celle-ci connaît ,d'une part et ,d'autre part,placerait un certain nombre
d'enjeux
qUI
sont
au
coeur
de
la
pratique
littéraire
dans
une
perspective
dynamique.
Par ailleurs,d'autres
secteurs de la littérature africaine tels que
l'histoire
littéraire
et
,davantage,la
critique
littéraire
trouveraient
à
travers la théorisation de la littérature des cadres de légitimation de
leur mode distinct d'exister et d'étude du fait littéraire car,comme le
soulignait J. M. Ellis «La théorie doit partir de la critique ... et revenir à
elle...»(2l).
Cependant,il convient de placer tout effort de théorisation dans
une perspective qui ne se limite pas à la simple formulation de règles
malS
à
la
détermination
des
fondements
épistémologiques
qUI
expliquent rationnellement le fonctionnement de l'objet esthétique à la
fois dans sa matérialisation et dans les formes significatives qu'il porte
en son sein. Elle devrait de fait donner lieu à une appréciation qui est
sous-tendue par une logique. Les motivations qui peuvent être à la

19
base de cette théorisation pourraient se réfracter dans ce qui fut au
fondement de la démarche des formalistes russes. Comme voulaient le
faire
les formalistes
russes,
le théoricien
de
la littérature africaine
devra tirer la littérature africaine écrite des marécages fangeux de la
spéculation pour la placer résolument sur le terrain de la "scientificité"
afin de formuler la rationalité à laquelle obéït la création littéraire
africaine.
En même temps,que
la théorisation
tracera une
VOle nouvelle
dans l'appréhension du phénomène littéraire africain , cette démarche
contribuera
au
renouvellement
de
la
théorie
littéraire
qUl,en
Occident,semble s'essouffler. Dans cette perspective ce qu'on désigne
pudiquement,aujourd'hui,
comme
étant
des
"littératures
émergentes"
seraient le
lieu

peuvent
se jouer
de
grands
enjeux
littéraires
conduisant à forger
pour la théorie littéraire de nouveaux desseins.
Ce
travail
de
théorisation
dont
nous
n'avons
présenté
qu'une
ébauche demande,avant toute chose,
une connaissance accrue de la
théorie
littéraire contemporaine,de littérature
africaine,de
la critique
(ou des critiques) qui a (ou ont) fleuri à côté d'elle et l'histoire du
développement même de cette littérature. C'est pourquoi,l'on peut déjà
dire que même si cette théorie n'est pas encore constituée certains
aspects que nous avons mentionné dans
notre réflexion
se trouvent
inscrits
dans
des
études
de
nature
critique
ou
historique
sur
la
littérature africaine écrite
ou relatives à des genres largement usités
comme le roman ou la nouvelle. Aussi,l'essentiel des efforts devrait -il
tendre vers une mIse en commun des réflexions qui existent déjà et
une
mIse
en
forme
cohérente
des
éléments
épistémologiques
susceptibles de constituer les fondements de la théorie.

20
NOTES de RÉFÉRENCE
1.J. P. Sartre "Orphée noir" Préface à l'Anthologie de la nouvelle poésie
nègre
et
malgache
d'expression
française
publié par L.
S.
Senghor,1945 ,p.XIV.
2.J. Chevrier Littérature nègre.
Paris: Armand Colin,1984 (réédition).
3. B. Mouralis Les contre-littératures. Paris: P.U.F,1975
4. M. Rombaut La nouvelle poésie négro-africaine. Paris: Seghers,1976.
5.1. Kimoni
Destin de la littérature africaine ou problématique d'une
culture.
Sherbrooke: Naaman, 1975.
6. P. N. Ngandu
La littérature africaine écrite de langue française.
Issy-les- Moulineaux : Editions St Paul,1979.
7.
W.
Dilthey
Le
monde
de
l'esprit
Paris
Aubier
Montaigne, 1965 ,p.340
8. P. BruneI; Cl.. Pichois; A-M
Rousseau Qu'est-ce que la littérature
comparée?
Paris : Armand Colin,1983,p.104.
9. R. Wellek ; A. Warren La théorie littéraire .Paris : Seuil , 1971 ,p.5.
10. P. N. Ngandu Ecritures et discours littéraires. "Études sur le roman"
Paris:
L'Harmattan,1989,p.
11. J. Bessière Dire le littéraire. "Points de vue théorique" . Bruxelles
Pierre Margada Éditeur, 1990 ,p. Il.
12. W. Linking Elle sera de jaspe et de corail. Paris
L'Harmattan,1983.
13. Ngal M. à M. L'errance .Yaoundé : CLE , 1979.
Giambatista Viko ou le viol du discours africain. Paris
Hatier,1984.
14. P. N. Ngandu Littératures africaines. Op cit,p.18.

21
15. P. BruneI; Cl.. Pichois; A-M Rousseau Qu'est-ce que la littérature
comparée?
Op cit, p.1 09.
16. P.N. Ngandu Littératures africaines ."De 1930 à nos jours" . Paris
: Silex,1984,p.30.
17. A. Tine "Pour une théorie de la littérature africaine écrite" In
Présence
africaine
nO 133/ 134 ,1985,p.117.
18.
J.
Chevrier
"Les
littératures
africaines
dans
le
champ
de
la
recherche comparatiste" in Précis de littérature comparée . P.
BruneI
(éd) Paris: P.U.F , 1989,p.109.
19.M. Bakhtine ( V. N. Volochinov) Le marxisme et la philosophie du
langage. Paris : Minuit , 1977 ,p.1 06.
20. W. Dilthey Le monde de l'esprit. Op cit,p.340.
21. J. M. Ellis soulignait :« Theory must take its starting point from ...
criticism,and (mostly) feed back into it . But, in the meantime,it needs
more
independance
than
it
has
had
in
order
to
do
anything
worthwile.»
The theory of literary criticism . California : University of
California Press,1974,p.

2~
BIBLIOGRAPHIE
A) Ouvrages
théoriques
BESSIERE
J. Dire le littéraire. "Points de vue théoriques" . Bruxelles
Pierre Margada Éditeur,1990.
BRUNEL P. , PICHOIS Cl. , A-M
ROUSSEAU Qu'est-ce que la littérature
comparée.
Paris: P.U.F ,1983.
CHEVRIER
1.
Littérature
nègre
. Paris
Armand
Colin
, 1984
(réédition).
DILTHEY W. Le monde de l'esprit. Paris: Aubier Montaigne,1965.
ELLIS
J. M. The theory of literary criticism ." A logical analysis"
California : University of California Press,1974.
KIMONI
I. Destin de la littérature africaine ou problématique d'une
culture. Sherbrooke : Naaman,1975.
MOURALIS
B. Les contre-littératures. Paris: P.U.F , 1975.
NGANDU N. P. La littérature africaine écrite de langue française .Issy-
les-Moulineaux
Editions St Paul,1979.
NGANDU
N. P. Littératures africaines "De 1930 à nos jours". Paris
Silex,1984.
NGANDU
N.P. Ecritures et discours littéraires "Études sur le roman" .
Paris : L'Harmattan,1989.
ROMBAUT
M.
La
nouvelle
poésie
négro-africaine
Paris
Seghers,1976.
SANTERRE-SARKANY
S. Théorie de la littérature. Paris: P.U.F,1990.

23
SARTRE
J. P. "Orphée noir" préface à l'Anthologie de la nouvelle poésie
nègre et malgache d'expression française.
publiée par L. S. Senghor
en 1945.
WARREN
A.; WELLEK
R. La théorie littéraire. Paris: Seuil, 1971.
B) Articles
TINE
A.
"Pour une
théorie de
la littérature africaine écrite"
10
Présence africaine
nO
133/133
C) Oeuvres littéraires citées
LINKING
W.Elle sera de jaspe et de corail. Paris
L'Harmattan, 1983.
NGAL M. à M. L'errance.
Yaoundé: CLE , 1979
NGAL M. à M.
Giambatista Viko ou le viol du discours
Hatier,1984.