UNI VER S l T E
D E
P 0 l T l ERS
FACULTE
DE
DROIT
ET
DES
SCIENCES
ECONOMIQUES
ECONOMIE VILLAGEOISE
OU
ECONOMIE RURALE 1
LES
PERSPECTIVES
DE
DEVELOPPEMENT
EN
HAUTE-VOLTA
T H' E S E
POUR
LE
DOCTORAT
DE
3ème
CYCLE
EN
"SYSTEMES D'INFORMATION ET DE PROGRAMMATION ECONOMIQUE-
Présentée et soutenue publiquement
par
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1 COI\\lS~!!.. AFRICAIN El MAtGAtCfrolfE'
M. KABORE
Tibo Jean HerY;OUR L'ENSEIGNE1\\J\\ENT SUPERIEUR
! C. A. M. E. S. - OUAGADOUGOU 1
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-:' :::::;:~,:i'é sous n° #·0·1. 1· .g. 6.
J URY
Président : M. GUESNIER Bernard, Professeur
Suffragants r M. JALLADEAU JolI, Chargé de Conférences
M. GABILLARD Jean, Professeur
Hars 1980

-1-
APERCU
GEOG·RAPH 1QUE
La Haute-Volta est un pays situé dans la boucle du Nager. Il. s'étend
sur 274 000 km2 entre les pa,rallèles 9'200 et I5'SP et entre les méridiens
2'20° de longitude Est et 5'5 0 de longitude Ouest (le méridien GreenwitCb
ou méridien zéro passe par Dori), en affectant la forme d'un quadrilatère
d'environ 650 km du Nord au SUd et 850 km d'Est en Ouest.
La dite continentalité du p~s se remar4ue dans le fait que par rapport
aux villes oôtières. Ainsi la ville de Ouagadougou est située par la route
à environ l 000 km de Lomé, l 100 km de C~tonou, l 450 km de Conakry, l 8eo
ICtn ai Dakar et à l 145 km d'Abijan paP la voie ferrée.
Il est à noter que les 4/5 de la superficie du p~s sont oonstitués par
un plateau cristallin généralement reŒOuvart de latérite avec de part et
d'autre des grès souvent p~rméableŒ dans la région de Bobo-Dioulass~
1) L 'HYl)ROGRAPHIE
La Haute-V~lta se caractérise pan l'absence des vnies navàgables, les
seuls cours d'eau permanente sont la Volta Noire (débit de 10 m3 en étiage
et de 500 m3 en crue) et les rivières du SUd-OUest (Leraba, Gomoé).
Le territoire voltaïque est entaillé par un système hydrQgraphique de
deux bassins, celui du cours moyen du Ndger sont les affluents (Garoua1:,
Birba, Gorbi, Tapoa ••• ) mmnt à seo en saison sèohe, et oelui des trois voltas
la Volta Blanche (575 km en Haute-Volta sur 1 025 km de parcours total), la
Volta Rouge (300 km sur un totàl de 350 km) et la Volta Nbire-' ( 950 km sur
un total de 2 500 km).
Les vallées supérieures de la Volta Noire et de la Comoé et le bassin'
du ao~ou afflUent de la Volta Noire au Nord-Ouest, portent des sol~ profonds
recouverts d'alluvions en général fertiles.
A l'exception d'une zone sahélienne au Nord du p~s, il existe une
n~ppe
phréatique de faible profondeur, au débit modeste, mais permettant de
couvrir les besoins en eau des populations de la région dans le cadre du

-11-
forage des puits. Par contre dansr·1a.,va1~é~Ldu Sourou il existe une nappe
profonde et continue.
II) LE CL1ItiT
a- Généralités sur le climat de la Haute-Volta:
Le olimat de la Haute-Volta est conditionné par l'action antagoniste de
deux flux d'airz
Le premier, l'harmattan, est un vent sec issu de l'anticyolone saharienJ
Le seoond, oharg6 d'humidité est la mousson provenat de l'anti~olone
austral.
La zone de contaot entre les deux masses d'air est représentée par le
Front intertropioal (FoI.T.) qui au oours de l~année se déplaoe entre l~ c6te
SUd en Janvier et le 25ème degré de latitude Nord en Ao~t.
Durant la saison sèche l'anticyclone saharien maintient sur la Haute-
Volta un flux d'air sec et chaud pendant la journée et frais la nuit par sui-
te du fort rayonnement terrestre.
Pendant la saison des pluies, l~antioyclone saharien est rejeté ve~s
le Nord du continent sous l'aotion de poussées originaires de ]'liémisphère
Sud en hiver et cède la place à la bordure septentrionale de l' antioyo~lone
austral qui dirige sur le pays un flux d'air maritime humide (moussan).
C'est dans oettemasse d'air que se forment les nuages ~'hivernage responsa-
bles des pluies et qui en filtrant le ràyonnement solaire pro~quent une
diminution des éoarts diurnes.
Toute l'étendue du pays subit donc les influences périodiques de oes
deux oentres de haute pression. Ainsi, la Haute-Volta appartient à la zone
olimatique soudanienne. Au Nbrd du pays le olimat est du type soudano-sahé-
lien filors qu 'au SUd il tend v:ers le climat soudano-guinéen.
b-Les oaractéristiques olimatiques~
Le olimat de la Haute-Volta, presque entièrement comprise entre les
isohyètes 500 mm (Djibo, Dori) et ] 300mm dans le ahd-OUest, se caraatérise
par l'alternanoe de deux saisons froides (15 Novembre-15 Février et 15 Juin
15 Septem'Bre) et de deux saisons ohaudes (15'Fevrier-15 Juin et 15 Septembre-

")
-.;1-
15 Novembre). Des nuances existent cependant entre le Sud-Ouest, le SUd-Est
et le Nord. Au Nord d'une ligne Djibo-Dori (moins de 500 mm de pluies), ap-
parait l'influence du climat sahélien. La pluviométrie annuelle moyenne est
de 766 mm mais pour la période de 1966 à 1973, les variations sont comprises
entre 617,7 mm (I97I) et 938,4 mm en 1967 (I).
c- Variabilité et intensité des préoipitations. incidenoe
~onomique et morpho-pédalagique.
L'examen des données précédentes montrent bien une forte variabilité de
la pluviométrie d'une anné.e sur l'autre. au seiit d'une même année la vaLeur
de la pluviomé~ie mensuelle subit d'énormes fluctuations, essentiellem~nt
durant les mois d'Avril, Mai et Juin alors que oelles-ci sont beaucoup plus
faiRles à partir du mois de 38ptembre oomme nous l'illustre très bien1 le
tableau ci-dessous.
Tableau nO I. Pluviométrie mensuelle de la période 1966-67.
Mois
: J
: F
• M
A •
M •
J

J
A

S,

0
• N
• D

:
f·luviométrie: -
: 3,9: 3,7136,31 54,81115,31165,8:236,2:122,2. 37,1: 0,11 0,5.
Source: Plu~ométrie-sta:Hon-lIogtedo.
Cette particu~arité est essentiellement due au oaractère des pluies qui,
en début d'hivernage, ne tombent qRe localement sous forme d'a~erses. De
plus, ces premières pluies peuvent être Suivies d'une pério4e de séoheresse
relative où la pluv.iométrie est très faible. Cette interruption peut 8tre
tardive (Ière quinzaine de Juin), ce qui peut Atre désastreux pour les semis.
Les oonséquences en sont accentuées par la diminution très rapide du volume
(I) ASECNA, Aperçu sur le climat de la Haute-Volta, sepvice météorologique
Ouagadougou.

- 4-
des précipitations à partir du mois de septembre ne permettant pas au végétal
de terminer son cycle végétatif Bi les semis ont été troptaedifs (risque
d'avortement ou di.échaudage).
Deux séries de mesures pourraient pallder en partie ou totalement à
ces inconvénients; la première consiste à déterminer une date limite de semis
correspondant à un certain volume de précipitation (analyse fré~uentielle),
la seoonde consiste à tirer le maximum d'avantages de ce vo]ume de précipi-
tations en augmentant l'infiltration et ainsi les réser~s en eau du sol.
Cela nous amène à parler d'un faateur, l'intensité des pluies. En effet
les pluies tombent essentiellement sous forme d'averses généralement de cour-
se
te durée mais extrêmement violentes, il n'est que de trouver sur le terrain
lors d'une de ceB fortes a~rses pour se rendre oompte de l'intensité avec
laquelle les gouttes d'eau entrent en contact avec le sol•.
L'étude de quelques précipitations faites par la œompagnie Française du
Dé~loppement des Textiles (C.F.D.T.) a montré que dans le cas d'a~rse ex-
ceptionnelle pour Mogteso (1) l'intensité atteignait des valeurs supérieures
à 100 mm par heure et oela pendant quelques dizaines de minUtes.
On comprend aisément les oonséquences que peuvent ~oir certaines pluies
lorsque le sol ne présente pas une oouverture végétale suffisante (o'est le
cas d'une partie du solvolta!que) pour diminuer l'énergie cinétique des
gouttes d'eau, ce qui se produit souvent en début de saison des pluies sur
les sols mis à nu par les feux de brousse. A propos de feux de brousse, nous
y rev:iendrons dans le cadre des obstacles artificiels au dév:eloppement de
la Haute-Volta. Il faut voir ici l'origine du déolenchement de tous les types
d'érosion.
d- Les températures.
D'une façon générale les températures diurnes sont toujYurs plus élevées.
Les températures moyennes mensuelles se caractérisent par la présenoe de deux
maxima, llun en fin de saison sèche (Avril) et l'autre en fin d'hivernage
(Octobre-Novembre), qui varient faiblement d~une région. à l'autre. Les tem-
pératures moyennes mensuelles décroissent du Nord vers le Sud oomme l'illus-
tration est faite par le tatileau suivant:

-5-
Tableau n0 2: Température moyenne.
J Régions
J
.
DORI
OUAGADOUGOUJ
BOBO~IOULASSO
:
J
MARS
39,3
J
38',1
J
36,8
:
AVRIL
41,2
:
39,0
36,3
MAI
40,8
31,0
34,5
:
:
SourceJRelevées météorologiques de l'ASECNA de HAUTE-VOLTA.
Les températures minimales mensuelles se situent de Novembte à Février.
En climat SUd-soudanien, les minima, plus faibles dans la région Boho~iou­
lasso oscillent entre 11 et 23°, alors que les minima absolus sont de 10° à
Bobo-Dioulasso et de 12° à Gaoua. En saison des pluies, les minima moyens
sont voisins de 21 à 22°.
En olimat Nord-soudanien, la moyenne des minima varie de 16 à 260 ave~
des minima absolus se situant entre 1,4 et 9°. La moyenneœs minima se situe
en saison des pluies entre 20 et 23°5.
Les températures minimales pouvant baisser en dessous des minima observés
(1 0 4 à 9°), peuvent s;opper tout développement végétatif. Cela peut av.oir
une incidence agronomique dans le das de l'éta~issement des oultures irri-
guées durant cette période.
e- Evaporation-évapotranspiration.
L"'évaporation mensuelle est égàlement oyolique et varie de 315 mm au
mois de Mars à 10 mm au mois d.'Aollt. L'évaparation annuelle, très importante,
passe de 192Bmà Gàoua à 2 880 mm~à Ouagadougau, 2 810 à Ouahigouya et 3 360
à Dori.

-6-
1'évapotranspiration quii est "la quantité d'eau dégagée par une surface
cultivée" correspondant en un lieu donné "aux besoins en eau ~oyens
d'une
couverture végétale", et la pluviométrie permet d'établir le~bil~s hydriques.
En Haute-Voltà le bilan hydrique est positif pendant 3 ou 4 mois et négatif
pendant 8 ou 9 mois en zone soudanienne, et positif pendant 2 mois et négati~
pendant ID mois en zona sahélienne. Les bilans hydriques diminuent du SUd'; ,
vers le N:ord, où"les possibilités de culture sont plus réduites et où Jl' agri-
oulture doit faire place à l'élevage". Le tableau ci-dessous montre que les
oilans hydriques annuels sont négatiftt dans l'ensemble du PSJ's.,
Tableau nO 3
Pluviométrie
1 Evapctranspira-
Bilan
Stations
1
en mm
tion en mm
hydrique
:
GAOUA
]) 162'
li 705
- 543
: BDllO-DIOULASflO
:
l 18]
:
li 55].
37~
'
1 BOROMO
:
l 010
:n-6I7
:
607
. FADA~ 'GOURMA
:
889
l 612
- 'f.Z]
: OUAGADOUGOU
860
1685,1
- 825
DORI
:
540
:
]; 740
- l 200
.
:
:
Source: Plan,quinquénnal du développement économique et social
(PoQ.D.E.~)
CONCLU SlIONJ
Cet aperçu rapide des conditions climatiques de l'a Haute-Volta met olai-
rement en évidence le caractère très contrasté du climat: Saisom sèohe et
longue,saisonl des pluies relativement courte à averses viole~tes et nombreu-
ses qui vont être à l'origine de processus (de ruisselleme~ di~s ou con-

centré et de lessivage) qui imprimeront d'autant plus leur effet sur le mi-
lieu
que sur la végatation.
Les développements plus haut montrent que la Haute-Volta est ~ p~s
sec, les bilans hydriques annuels étant partout néga~ifs et n'apvaraissent
positifs que quelques mois par an. Cette caractéristique de climat aride
rend indispensable L'irrigation d'Octobre à Avril. Les efforts doivent donc
s'orienter prioritairement sur des opénations tendant à· s'assurer la maitr!se
de l'eau, sur la reoherche de variétés hâtives et sur le développement de
l'élevage dans les zones, trop arides pour se pr8ter à. l~agriculture •. ~es
efforts éventuels ne pourront se concrétiser positivement que dans le cadre
d'u~ politique globale préoise, pour laquelle nous y reviendrons plus loün.

~-
INITRODuœTION
GEN'!ERALE
Le thème que nous nous proposons d'ahorder oomporte des aspeots oomple-
xes au regard de la réalité de l'Afrique du subsahara en généra.l et volta!-
que en partioulier. Il est incontesta.ble que d'importants progrès aient été
réalisés; au ~ours de ces dernières décennies dans l'ana~se de la croissanee
du Dtiers monde"; mais ces analyses n'ont pas réussi jusqu'ici à appréhender
de façon satisfaisante le orucial problème du sous-développement en général
et particulièrement de l'économie ~llagéoise en Afrique.
En fait, les àivergenoes théoriques entre économistes sont encore nom-
breuses et profondes. Elles se traduisent par des positions pratiques sauvent
contradictoires donc peu fa~rables à l'élaboration de politiques éODnamiques
nettement définies.
En ce qui nous ooncerne, nous allons tenter une approche qui marque
une certaine différence par rapport aux points de vue de oes spéoialistes
du développement qui,lorsqu'ils abordent l'analyse d'un proliilème particulier
relatif au sous-développement, se oontentent de constater et de recenser les
effets de ce problème et en se livrant souvent à ~ desoription fort détail-
lée de ses caraotéristiques oonstitutives. Bien entendu, une telle approche
ne manque pas d'intérêt. Cependant, elle renferme un piège dangereux notam-
ment des limites sérieuses dans la reoherche d'une solution définitive au
mal que l'on veut détruire.
Il nous semble plut8t indiquer diadopter une démarohe qui s'oriente
prioritairement dans la mise en évidence des oauses internes. De notre
point de ~e si les oauses externes peuvent jouer un r8le important, il n'en
demeure pas moins que les causes internes en sont la base, et que o'est par
leur intermédiaire qu'opèrent les causes externes dans tout prooessuB de
développement économique et social.
En dernière analyse,nous
envisagerons la question de "L'ECONOMIE
VILLAGEOISE :En' LES PERSProTIVE3· DE DEVELOPPEJ4ENT" sous son double angle

-9-
politique et économique et non exclusivement éGonomd.que comme c"ast le cas
très souvent. Car selon nous les deux aspeots (éoonomiques et politiques)
agissent l'un sur l'autre et constituent un tout indissociable.
C'est avec une telle méthode que nous ess~erons d'approoher l'éoonomie
rurale en Haute-Volta, sa place et son rÔle dans la transformation :éoonomi-
que et sociale. L' Eoonomiie rurale afrioaine frappe par sa part icularité in-
sulaire. Comme le souligne fort justement le professeur RUDLOFF: "il est
plus faoile de passer d'une ~lle afrioaine ou malgaohe à une ville d'Europe,
surtout des oÔtes méditerranéennes que de passer de la brousse à une ville
africaine située seulement quinze 0\\1 vingt kilomètres".
(1) Ceoi montre éLo-
quement qu'il existe Parfois un abtme qui sépare l'éoonomie urbaine et l'é-
conomie villageoise; dans l'une semble se dégager laprédominanoe des :fforoes
de l'inertie sooLale, tandis que dans l'autre, un relatif dynamisme meroanti-
le apparait. Certes, il existe une oertaine ligne de démaroation entre la
ville et la oampagne, mais les deux renferment désormais des forces novatri-
ces.
D'une manière générale, en Afrique, selon les observateurs, se juxtapo-
sent Bans s'interprénétrer deux seoteurs éaonomiques. Le seoteur agricole et
le seoteur urbain extraverti.
~s deux secteurs qui apparaissent se juxtaposer, sont en réalité inti-
mement liés jusqu'à un certain degré l'un' et l'antre, mais les organes et
a
les liaisons qui transmettent dans l'ensembWe de l'économie ~ne',impa]m~
reçue en un point n'existent que relativement. Tout oela nous oonduit à oerner
et à exposer l'ampleur des diffioultés que oonnait l'éoonomie ~Iaageaise
qui, en s'ouvrant progressivement ~, l'éohange monétaire et au paiement fisoal,
demeure encore une société 'repliée sur elle-même sur certains aspects non
négligealJles.
La"duali té"entre les deux secteurs se perçoit au niveau de la transforlTla-
tion de l'homme qui V-ivait en fonction du passé et les modèles que lui four-
nissaient les coutumes en'un homme"désemparé" qui aspire à améliorer ses
conditions d'existence. C'est ainsi que le paysan se dégage progressivement
de la paralysie engendrée par la traditionl et le fatalisme, mais son effort
(1) M. RUDLOFF: "Planification économique et choix"; Revue économique de
Mad~èar 1966.

-10-
productif ,est rapidement accaparé par les forces sociales qui dominent et
orientent l'agriculture des p~s Ouest-Africains en général et volta!~ue en
part iculier.
Comme nous aurons l'occasion d'y revenir et de montrer que cette société
traditionnelle dans sa période pré-ooloniale étâit orientée vers la lutte
contre la faim: le p~san pour subsister devait stooker le surplus de sa
production céréalière. Si les bonnes ânnées se suocèdent, i l vendait une par-
tie de cette production dans le seul but d'augmenter son troupeau qui lui
sert en quelque sorte de livret d'épargne, mais avec les mauvaises années,
il v:endra une partie de ce troupeau pour assurer la nourriture de sa famille.
La société à économie villageoise dont l'essentiel des efforts consis-
taient à se prémunjr contre la faim ne s'oriente dono pas spontanément même
lorsqu'elle le pourrait financièrement, vers l'investissement dans le cadre
d'une amélioration des rendements des cultures existantes ou l'entreprise
de spéculation plus rénumératrice.
~
..
<-~\\CAf,yE
p..{
f?t
De ce qui précède nous conduit à abo~~èr/re-pr-ob~,~e de la pénétration
du capitalisme dans les campagnes, qui c{~t~nement~a\\~cé1érer le processus
~~ 1 v ~ MES \\ ~~
de désintégration de l'écono~ie Vi1lageo~~e~ra-oons~quencesera à la
base d'une apparition plu~ visible de st~~t,~:t~n/~io:iale dans le monde
rurale. Cette modification des struatures ''à~Ci!o~é.ooiîbriiiques de l'économie
".
. :.~"~\\"-
villageoise pourrait reposer sur plusieurs méoanismes qui, pour le besoin
de clarté dans l'analyse, seront ramener à deux séries: les mécanismes poli-
tiques et les mécanismes écenomiques encore qu:'il faille préciser qu'ils sont
intimement liés.
- A propos des mécanismes politiques il y a quelques années les autori-
tés v6lta!ques ont adopter la thèse "de la terre à oeux qui peuvent la tra-
vailler". En d'autres termes, la terre doit revenir prioritairement à oeux
qui ont les moyens financiers et techniques nécessaires de la mettre en valeur.
Il s'agit d'une remise en cause du fondement de la propriété jusqu'alors en
vigueur qui préconise le principe "de la terre à ceux qui la travaillent".
- ~uant aux mécanismes économiques: dl est évident que le développemeat
du capitalisme dans les campagnes va de pair avec la méoanisation de l'agri-
culture. Mais on sait, que la mécanisa~on suppose des achats asseE importants
de machines, d'engrais, d'insectiaides etc••• En un mot, elle exige des mo-
yens financiers dont l'importance ne saurait être sous-estimee.

-I1-
Au total, les deux séries de méoanismes font apparaitre um dénomiina1reur
commun
et plaçant les paysans devant une dure réalité: il leur fautà'im...
portants moyens financiers pour faire face i la situation, nouvell~. Face à
cela deux hypothèses peu~nt 8tre retenues quant à la réactionldes paysans:
Soit ils optent de reoourir au système de orédit dont les oonditions
sont telles qu'ils s'appauvrissent davantage.
Soit ils refusent et dès lors, ils sont exposés & l'expropriation
de leurs .terres•.
Déja nous assistons 5 la naissance d'une nouvelle tendanae dans ]a so-
ciété voltaique. Cette nouvelle ~endance n'est pas étrangère à l'appliea~on
de la thèse (citée plus haut) qui, elle même sous-tend l'amorce d'un~ appli-
catiomdu Nouv.el Ordre Economique International (N.O.E.I.). R~us y voyans
une expér±ènce très intéressante pour laquelle nous ess~erans de oerner à
travers son influence sur l' évolut iODl de la struo:ture sociale c' esti~ àl dire
des couches et olasses sociales à partir de la modifioation de leur assise
économique.
De cette brève présentation, nous pouvons dire que l'éoonomie villageoi-
se dans sa grande partie à subi très peu de mutations profondes durant les
dix-huit années d'indépendance, mais aussi que l'éoonomie urbaine qui est
une création artificielle s'est dé~loppée avec Il'éoonomie de traite. L'éco-
nomie villageoise a aussi subi un choc dans ses fondements historiques ~ui
a pro~q~éoune cassure à l'intérieur de la struature sooiale. Bien que les
méthodes culturales aient pau é~lué, l'homogénéité du monde p~san' demeure
désormais ambigüe et précaire, car plusieurs formations sociales tendent
également de naitre. paysans cultivateurs de coton, p~sans étalagistes, pay-
sans éleveurs pé\\Ysans avec terres seulement ••• A-oela il faut ajouter les
~ictimes ,du mythe urbain qui ont quitté les oampagnes depuis l'époque cola-
niale pour peupler les villes. Enfin la ville et relativement le village
rentrent désormais dans le sillage de l'éoonomie de marohé dont ]a s,écula-
tion et la course à l'appât du gain constituent le soubassement. Mais le
flux de transfert en sens inverse notamment de la vilDe vers la campagne est
faible. Cela a pour consaquence la stagnation économique comme en! témoigne
la baisse continuelle du pouvoir d'achat des populations rurales. L'inflation
la famine, le taux de mortalité infantile élevé, expliquent si besoin est

-12-
la situation des pays afnioains au Sud du Sahara dont la Haute-Volta ne fait
pas exoeption. Il se pose alors le problème du développement agrioole et sa
maitrise.
En effet la question de la ma1trise nationale du développement d'une
façon générale et singulièrement de l'éoonomie rurale devient plus que jamais
un problème oruoial qui appelle à des solutions urgentes et définiti~s. De
la réponse à la question posée, nous oonduira à faire une approohe du sous-
dév~loppement. Au fond nous tenterons de saisir la signifioation profonde
du dév~loppement aux yeux des populations v~lta!ques.
D'ailleurs oomme nous l'avons dit tout au début, quë le dé~loppement
loin d'être réduit à des aspeots éoonoMiques doit englober tous les aspeots
de la vie des hommes et des nations. Car le ~Ditable développement doit na1-
tre d'une~action oonsciente et oonoertée de l'ensemble des P9pulations oonoer-
nées; oondition qui permettra de maitriser mieur le devenir éoono~ique, po-
litique et sooial du pay,s.
De notre point de vue, développer, oe n'est pas seulement augmenter oer-
taines quantités globales ou oertains agrégais, o'est aussi veiller à la
formation des hommes et au renouvellement de leur mentalité. Ainsi de l'effort
de l'investissement doit se oonjuguer étroitement la prise en main de la po-
l
pulation, de sa:propre destinée. Cette oonoeption doit aller de pair avec la
naissanoe dans ,Ia nation d'une ardeur oommune qui serait oapable de oatalyser
les aspirations sur la voie du progrès sooial. Finalement,le dé~loppement
est un saut dans le vide, o'est la reoherohe de l'inoonnu après acoeptation!
de tous les risques possibles. Il oonvient dono d'8tre oonsoient des diffi-
oultés qui surgiront sur le paroours et se préparer à les surmonter d'où le
raIe de la planifioation.
En oe qui nous ooncerne, la planifioation est un aote politique, une
affirmation de la volonté nationale de pFogrès, laquelle ne se oon90it pas
sans une transformation profo~de de la sooiété.
Cela nous m~ne à nous interroger sur le rôle de la planifieation en
Haute-Volta et à reoheroher oomment les premiers plans ont été réalisés et
quelles ont été les oonséquenoes.
Bien entendu, nous aborderons les objeotifs de la planifioation dans

-]3-
le cadre spécifique de l'agriculture, car un PaYs Où 95~ de la population
est engagée dans l'agriculture et l'artisanat traditionnel Où la famine ne
cesse de hanter les esprits, il est nécessaire de conjuguer tous les efforts
pour vaincre la pauvreté et la misère. làs lors il ne s'agit pas
de' se deman-
der si l'industrialisation est un mode obligatoire de croissance, mais plu-
tôt de savoir qu'elle est la meilleure combinaison de facteurs qui permettrait
de réaliser les objectifs définis dans un plan. De savoir le type de société
que l'on veut promouvoir pour qu'émerge un agent éco~ique conscient.
~otre but ne sera pas de poser un diagnostic seulement, mais également
de proposer des remèdes, dans la mesure où le développement est à la fois
un problème posé et à résoudre. Il est é~ident que l'étude de l'économie
rurale ne peut pas être un pur exercioe académique, mais tout au contraire,
doit déboucher sur des conclusions pratiques. Ces propositions concrètes sont
à faire dans un cadre bien1précis réunissant certaines conditions indispensa-
bles, faute de quoi elles ne seront que cautère sur jambe de bois.
Enfin, nous analyserons plus largement et plàs profondement la problé-
matique du développement de l'économie rurale et mn impact dans le développe-
ment à tra~r~ les principaux intitulés suivants:
PARTIE" II: POUR LA MAITRISE, DlJJi D1iPlEL0PPlBMl!DP.D AGRlGOLIL-ElJJ -HA.~VOL'rÂe

CHA P l
'l' iRE
PRE L l MIN AIR ,~
ESQUISSE D'UNE APPROCHE DES STRUCTURES SOCIO-ECONOMIQUES DE LA
HAUTE-V6LTA.
Les processus des bouleversements sociaux qui ont secoué l'Afrique dent
la Haute-V~lta, ont été étudié en fonction de l'approche et la spécialité des
diverses catégories de chercheurs: anthropolgues, ethnologues, économistes
et ceux appartenant aux différents seoteurs des soienoes politiques. Il faut
reconnaitre cependant que la première impulsion de ces reoherches a été don.;;"
née par les ;:ethnologues. Il était normal qu'ils se soient attachés d' aborè.
au processus de transformations sociales et la dislocation des oadres tradi-
tionnels et ensuite aux chances de voir quelques uns de ces éléments tradi-
tionnels se manifester, sous urie forme nouvelle dans une société "moderne"
caractérisée par un éventail plus large de différenciations.
Dans ces conditions, il nous est permis de dire que les reoherches ont
porté surtout sur les multiples faces de]a dégradatiom des structures "triba-
les", la déchéance hiérarchique des chefs féodaux ou des femmes et d'une
façon générale, sur~ déclin' des vieux cadres traditionnels; oes recherches
ont porté également sur l'apparition d'une organisation "bénévole" urbaine
présentant encore de nombreux éléments traditionnels aussi bien sur les nou-
veaux
mouvements et les nouvelles formes de culte. Dans toutes ces recherches,
l'aspect principal est la confrontation de l'anoien et du nouveau qui a tou-
jours été au centre de l'intérêt des oheroheurs.
C'est ainsi que les travaux '~e sont regroupés autour de quelques sujets
et problèmes relevant du domaine des sociologues et éoonomistes (sans inté-
gration des sciences politiques) et convergent vers les multiples aspects de
l'urbanisation: tels que la délinquance, l'éclatement de la cellule familiale
- les premières formes d'industrialisatiGn ainsi que l'apparition de struc-
tures"modernes" qui se juxtaposent aux structures conservatrices..
Toutes ces analyses reflètent bien entendu l'interprétation d'une réalité,
en dapit de son caractère descriptif: c'est un fait qu'on ne peut pas manquer
d'être frappé par l' i~ortance des ohangements subis par la sociét:é vol ta'I-
que depuis les débuts de l'Qccupation coloniale. Mais les problèmes abordés
ne peuvent pas être interprétés comme la conséquenoe directe d'une attitude

- 15 -
conservatrice, d'un refus de changer qu'auraient manifesté les p~sans essen-
tiellement. Nous sommes poussés, à croire que les paysans apparaissent dans
une certaine mesure comme les conséquences des intenses bouleversements inter-
venus tant
sur le plan social, que sur le plan: économique et démographique
depuis trois quarts de siècle. Nous affirmons également que les modifications
qui se sont accumulées durant cette période se sont produites le plus souvent
en réponse aux impulsions venues du monde industriel (il est partioulièrement
significatif, à cet égard que les fluctuations de la période anachidière au
cours des ~uarante dernières années soient, par delà les variations à court
terme liées aux âléas climatiques, les contre-coups d'évènements ou de déci-
sions ayant pour théâtre la France, l'Europe ••• ). Par conséquent il nous
semble impossibie de considérer les faits que nous observons maintenant comme
les résultats d'une "modernisation" insuffisante ou des effets d'une ineJ!tie
paralysante du passé. Mais plut6t rechercher l'ëXplication dans l'évolution
qui a conduit à la situation actuelle c'est à dire le processus historique qui
se trouve être à la base de l'apparition des structures socio-économiques.
C'est ainsi seulement que nous pourrons répondre aux questions brûlantes qui
se posent sur le sous-développement, 'le~progrès social et ses corrélaires
(démographie, formation des hommes••• ).
SECTION I: APERCU RAPIDE DU ~OUS-DEVELOPPEMENT
ET SES FOND.EJlENTS·
STRUCTURELS EN HAUTE-VOLTA.
r
L'avenir des pays pauves constitue,depuis la fin ,de la deuxième guerre
mondiale l'une des préoccupations des organismes ihternationaux. En Afrique,
on assiste à üne activé tentative d'amélio~ation du visage du oolonialisme
qui semble se mani~ester par l'abolition du trav~il forcé, affranchissement
des collaborateurs africains.
Ce premier recul est suscité en partie par la pression et la résistance
des peuples qui constituaient la partie la plus pauvre, la plus déshéritée
et aussi la plus nombreuse de l' humani té, qui ont pris conscience de leur sort.
En effet, en Afrique, les masses populaires après avoir concrétement contribué
à la dâfaite
du fascisme et à la libération de la métropole, affirment avec

- 16 -
une force croissanta leur volonté d'accédeF un' niveau de vie plus élevé
et leur détermination de bénéficier, eux aussi, de la aultu:re mod.erne et des
possi bilités cie mieux être et de santé qu'offrent la science et la technique.
Les réactions de certains représentants des p~ys pauvres et d.écolonisâe, dans
les f,randes conférences des Nations-Un~es a entrahé l'adoption rapide à l'échel-
le mondiale la caractérisation tiers,=monde OU PayB-sous-développés pOUJl' indiquer
la façon dont les pays riches voient les sous-développés. Son succès extraordi-
naire après 1960 (l'année de décolonisation de l'Afrique susaharienne) laisse:
penser qu'elle répondait à un besoin psychologique profond. A ce sujet voilà
ce que nous dit CH. BETTELHEIM : "personnellement, je pense cependant que si
les pro'lllü~mes des peuples les plus désheri tés sont désignés par l'exyression;
prohlèmes des pays-sous-développés et non par une autre expression scientifique
plus exacte, cela tient à l'effort conscient ou inconscient peu :iimporte, de mys-
tification de l'idéologie bourgeoise" et il poursuit pour ajouter que :: Ille terme
"pays-sous-développés" évoque, en fait, des idées qui sont scient-iif'iqueme:mct
fausse,. Ce terme suggère que les pays qu'il désigne sont tout simplement "en'
retard" sur les autrEffi,ceux-ci étant d'ailleurs désignés par l'expression "Pc\\ys-
aV2.Dcés" (1). Probablement au début, ce n ' était pour les honnêtes ~ns qu'une
façon commode d'attirer l'attention de l'opinion sur un problème complexe de
notre temps. Mais aussi la vérité ét ait qu' H
est plus commode de diluer les
mauvaises consciences individuelles des anciennes puissances coloniales dans U~
concept général ambrassant des traditions, des cultures et des olimats divers
ainsi que les conséquences quantifiables de la domination étrangère. Selon nous,
ce oui a joué le rôle c'est le désir de glisser sur l'immense diversité des pro-
blèmes et
des situations pour re~~ir à des généralisafions simples et rassj-
rantes en outre, dans le contexte politique mondial, de l'époque, il était ten-
tant de justifier que les pays sous-développés a peine décolonisés devaient ru3-
cessairement choisir les méthodes du schema libéral de développement et l'occi-
dentalisation pure et simple. Tout cela n'est qu'une application de la division
internationale du travail qui permet de répo~re aux besoins des économies dé-
veloppées en ma~ières premières.
(1) CH. BE'1"l'ELHEH1: "Planification et croissance accélérée"
P - 26 ...

- Il -
l?aragraphe l
ESqUISSE DE LA CONTROVERSE THEORIQUE SUR LE SOUS-.;DEVELOPPUoŒNT.
La terminologie tiers-monde est une théori~ation de la division internatio-
nale du trave.il, car"l'organisation internationale de la production dans le sys-
tème capitaliste a toujours consisté jusqu'ici au niveau des grandes tendances
à e.ffecter aux pays sous-développés la fonction d'approvis~onnement. (en matières
premières et énergitiques, en ~yens de consommation alimentaires) du procès de
product ion des aires capitalistes dites imdustrielles" (1).
Cette concept~on du sous~développement vise à masquer une réalité dramatique
ce.T drms la plupart des cas,
le sous-développement est vécu aujourd'hui p0UX
l'essentiel par les n0n occidentaux. Mais la majorité de aux qui analysent seg,
s;y;mptôines ou construisent des théories sur ses origines et la façon de l'élimi-
ner sont des occidentaux (néanmoins ce nlest pas fondamental) au des intellee>-
tuels "occidentalisés" appartenant aux pays économiquement arriérés. C'est un'.
des aspects les plus remarquables des études aujourd "hui très nombreuses qui.
sont consacrées au développement. Em un~, mot une ignorance relative de :l!"h:iistoi-
re des sous-déveloooés a permis de croire plus aisément que leur situation ~­
sente ou passée ressemble aux étapes antérieures des Etats actuellement a~ancés
sur le plan technologique.- Sous-tendant tout cela, on trouve l'idée flatteuse
et égocentrique que la dégradat ion qu' ~mpl ique le sous-développement représent.e
obligatoirement une déviation par rapport à une norme et que, par conséquent,
il faille l'analyser et envisager son évolution future par comparaison avea· ce
qui est arrivé dans les sociétés occidentales.
Four nous résumer, nous cernons, deux écoles pri"cipales qui. sont apparues
en matière_d'économie du développe~ent. Leurs idées de bases sont: d'un côté
l' "économie à double secteurs" c'est à dire le sec-teur "traditionnel" et "m0derne ll
et de l'autre, à la suite des efforts pour considérEE le problàme dans une pers-
pective historique, la théorie des "stades", du développement. Il convient de
souligner qu'il existe bien entendu des varia~es dont certaines tentent de COD-
cilier leux tendances. La base com!J1llne des deux écoles est qu'elles prennent l'ex-
périence occidentale comme base de comparaison.
(1) PALLOIX
"Procès de production et crise du capitalisme"; P.Ur
Maspero 1977
P- 204.

- f8 -
Dans le premier cas, la société sous-développée soumise à l "observation au
microscope est divisée en secteur "traditionnel" et "moderne", en impliquant 'que
ce dernier assimile les formes occidentales et réagit à des stioulants de type
capitaliste, tandis que l'autre, plus vaste, ne le fait pas. La théorie dans
ce cas concerne le rÔle respe<l::tif de deux secteurs, leur inter-act:i!,on prG>duiisant
une croissance équilibll'é~ou non.
TIans le deuxièoe cas de la conception des "stades", on trouve des défiinitions
de différents niveaux à franchir avant que la société en question ne parv:iennte::
au niveau économique rep:L'ésenté par une consommation pax tête élevée de voitUlI'es
automobiles, de machines ménagères et autres bien faits de la société de consom-
mation.
Les deux conceptions supposent que le prbPès économique qu'a connu l'occi-
dent après sa révolution indu,strielle devra être reproduit par des stades Qom-
pare.bles au processus original, quoique plus courts, OU l'espère du moims. Dans
les deux concept ions, il :L'essart implicitement que les pays :;wus-dévelo;ppés d' au~
jourd'hui, tout comme les pays avancés attendent leU]! pro'pre "décollage'" pour-
accomplir leur propre révolution industrielle.
N,ous estimons qu'on doit prêter toujours attention, au fait que les mo1leurs
ou même le dessin de l'avion qui attend actuellement en bout de peste peuvent
avoir subi les m.Oldificat ions essent ielles, pendant les deux siècles de diffé:L'emce.
Et l'on refuse de considé:L'er que pendant la:, même période les règles de ]a oi11'-
cula#i.on et le caractère des pilotes deçus ont pu changer ou qu'en raisQ<n de ]J"Îl!!-
tensi té de la circulation des obstacles aient pu apparaître sur la piste elle-
même.
Ces différentes positions théoriques sur les pays qui occuperaient plus (i)U
moins un mauvais rang dans la course au progrès économique et social 4emble nous
par.f'tre superficielles. En effet, cette vision tend à substituer une constati<Zln
statistique portant sur l'ordre croissant ou décroissant des niveaux <!Le vie,. à
une analyse concrète. Cet!J;e explication historique et cette analyse ne peuvent,
elles, faire abstraction des relations de domination et des rapports d'exploita-
tion qui existent à l'heure actuelle entre les di~~érents p~s. Pour éviter que
l'approche du sous-développent ne garde un caractère de terminologie, nous allons
tenter de prendre un cas concret de notre étude : la Haute-Vol ta. Nous pensf(,)Q
ou'une analyse concrète nous fera gI"'âce de discussions de conceptualisatioo du
sous-développeoent.

- 19 -
Paragraphe II
SOUS-DEVELOPFEJ.fENJr ET SA REALITE HISTORIQUE EN HAUTE-VOLTA.
La compréhension du dégré de sous-développement actuel de la Haute-V01ta de-
mande qu' cm)resitue le problème dans sa contexture historique "parce que l'écon0-
mie des hommes dans la force et la plénitude de cette expression lo,in de pouvoir
invoquer une longue et sftre.tre.dition" en est à ses premiers essais décisifs,
l'une des tâches de l'économiste est de reprendre â. la base, son observation
et sen analyse. S'il ne s'astreint pas à cette tâche qu'elles qu'en soient les
diffic\\i;1tés pratiques, i l se condamne à constituer à l!"interpréter' un monde qu'il
connaît ~l avec des concepts élaborés dans
une problématique occidentale qui
a toujours subordonné les besoins fondamentaux de l'homme aux "exigences" de
l'économie et qui n'a jamais réellement retenu comme hypothèse de travaiil JJa
couverture pr~oritaire de ces besoins"(I).
Dans un tel cadre d'analyse, on distinguera les différentes phases histori-
ques avec. leurs caractéristiques socio-éconornqw;ls et politiques. Nious aOQJl'derons
l'analyse en trois points qui suivent:
- Les sociétés com~unautaires pré-coloniales ;
période d'occupation coloniale
période post-eoloniale.
1°)- LES SOOCIETES COHMUNAUTAIRES PRE-COLONAIALES EN HAUTE-VOLTA.
Avant la pénétration coloniale, des sociétés communautaires et des groupes
à régi:ne patriarcal .
même matriarcal existaient dans ce qui al-
lait devenir l'actuelle Haute-Vol tao
Au Nord, au centre, centre-ouest et à l'Est de puissants em,ires et royaumes
à l'organisation sociale bien structurée se partageait le territoire. Les Empi-
res Mossi du Yatenga (Ouahigouya), du More~aba (Ouagadougou), et de Tentogo qui
constitu aient la communauté Mossi parce que repondant à. certains égards la dé-
finition de "Nation qui est une com:nunauté de personnesJ:' stable, historiquemenrt
constituée sur la base d'une communauté de langue, de territoire, de vie écono-
mique et de formation psychique qui se traduit dans une communauté de culture" (2.).
De l'autre c8té en bordure du Niger, c'est le royaume du G:ourma. A l "ouest et
au Sud, en croire à certaines historiens, l'organisation était de :,\\;ype I/anarchi-
~o-démocl'atique" basé sut. la tribu.
Cr} TIBOR ~(ŒNDE : "De l'aide à la recolonisation ; les leçons d'un échec" Ed.Seuil:
~ 2'-) ~T ~ 1.1 N'ë. : •. \\..& mu.~I06I"'t. Q)- \\,.", qloalU\\",'O'l'\\ ~Q,h:~" ôle. '1 • t1. .At'1'4. ?,,~_

- 20 -
C'est ainsi nous pouvons nous résumer pour dire qt1èn, Haute-Volta il existe
d'un côté, des régimes dont la Jérachie féodale est bien charpentée et
et d'un autre coté, des structures fluct Luantes car le matriarcat et le patria~
cat font bon menage.. En nous rapportanct aux rEroherches de. T. THIor.mI.Al'W : il
ressort que selon ce que rapportent la tradition orale ainsi que las rec.its des
anciens, l'organisation des empires et rOlfaumes était semblable à toutes les ,1
m-onarchies du monde: Emp-érewr (Ii'foro-Naba), Roi (Tidarpo), Cour (Simandé), m:ii-
nistres etc•••
A coté de cette hiérachie à catactère féodal, et lignagel!' se trou:voe juxtapo-
sée une division du travail, ceci de façon héréditaire. Cette division montre
que ce n'est plus la société primitive où: les hommes travaillent en commun, ac-
complissent le même geWe de travail ou v;ivent de cueillettes. La
division de cetge société est de la
~"'"
f:'0'.rrîe fon'c~'i~nnelle.
Dans ce type de
h-: ,~ c"".'
. , ' ,
société on distinguera deux camps dont le,s.:;'r,81es sont b.J!,en d~st~ncits.
{~ (~!11 ~ ~ r;~,
D'un coté, une no,blesse (N.AKOMSE) qui%.j'oue u'n"T.~e fil'oins important contrai-
t
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C' \\-:'t\\
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a ce qu~ se passa~
en
urope.
.e~"l..~"r:au~"~e:~'7l
arra
e roy,a e que se
~II/. .
• .,",e~,:?'
const i tue cette noblesse qui ne possède cepeng..e1f.~s1:es terres comme ct'est sou-
vent le cas? Néanmoins, elle a toute possibilité de pouvoir se livrer au p:iilLa-
ge des récoltes des paysans... D'une manière générale, elle détient Jle poov(}iF!po,...
l itique, adnninistratif et spirituel. La particularité de cette n(!)'blesse qui la
distingue de son homologue occidental, est qu'elle ne détient pas les m0~~
de production. C'est une couche oisive car, la terre appartientà celui qui la
cultive et les instruments de travail relèvent du' chef de famille...
De l'autre, le camp de la paysannerie devait obéissance au Roi et à toute
la noblesse. Du point de vue politique le paysan n'avait pRatiquement aucun droiito
Tout de même i l jouissait de prérogatives supérieures à ce qu'on a appelé les
"castes" dont la fonction principale aussi était la culture... Dans ce monde pay-
san n'était pas du tout homogène, il renfermait une diversité d'activités des-
Quelles on pouvait percevoir un certain début de stratification sociale au sei~
de cette couche paysanne.> Pour des raisons de concision nous nous contenterons
de ce qui précède...

- 21 -
Au cours de cette période pré-coloniale, la base des rapports de production
de cette société étéit la propriété familiale de la terre, le pouvoir temporel!.
et politique Qui ~et par exemple le Moro~aba au dessus de tous.
Quant à la loi écol1onique fondamentale, exclusivement, la société réside dans
une production d'unsurproduit pour l'échange de troc ain';"si que la satisfaction
des besoins de la n~blesse. Il est à noter que la monnaie n'était pas ignorée
bien que le système de troc const i tuait l'aspect dominant. C'est ainsi que les
Cauris ont servi de déno~inateur commun aux échanges~
La réalité qui caractérisait ces sociétés est qu'elles ne vivaient pas en
vase closo- La vérité est qu'à l' intériew d'un peupl'e des échanges eommerciau.x.
et cela s'étendait aux royaumes et empires voisins. Cette situation allait con-
naître des bouleversements au lendemain de la Conférence colon:iiaJ!e de Berlil!lJ (15
Novembre 1884, 26 Février 1885 ) sur le partage colonial de l'Afrique. Clest ainsi
l'Afrique d'une manière générale, la ffiaute-Volta en particulier allait ressen-
tir un choc dans leur processus d'évolution historique. De ce qui va suivfe"
nous permettra de e~rner la pénétration et installation du colonialisme.
2°) - PENErRATION ET OCCUPN1'ION COLONIALES EN HAUTE-VOLTA.
La pénétration coloniale a débuté par des rapports commerciaux entre le
continent africain et l'Europeo C'est ainsi on peut constater que les Hollandais
Danois, Suèdoi et Portugais, avaient avant la Conférence coloniale de Berlu,
installés des comptoirs commerciaux pour la traite des "nègres" en échange de
quelques pacotilles.
Ji:n Europe, à cette époque, c'est celle du capitalisJ1e et les pays les
plus pr\\tigieux en déhors de l'Angleterre sont la Prusse et la France. Les pays
ont besoin de débouchés pour l'écoulernent de leurs produits et, Cl est dws cet
esprit qu'il faut situer et comprendre la Conférence de Berlin dont le but est
un partage équitable du Cont inent Africain pour une meilleure expIai tation, c'est
L';
ainsi que les différents empires si tués au milieu \\de la Boucle du Nir-;er,. feDont
l'objet de ri~alitéo

D'abord Binger en 1885 pour le compte de la France "pénétre dans le Yatenga
une année plus tard, Fergusson venu du (};hana tente de conclure 'un tral:té d"am.-
nexion au profit de l'Angleterre; tandis que les tentatives prussiennes de pé-
nétrer dans le Royaume du Gourma par le Togo' échouent"(1)~ Finalement, la con-
quête défini ti ve sera marquée p8.r la rencontre du 23 février 1897 de deux mis-
sions françaises : celle de Voulet Chanoine (cormu sous le nom de Sergent-fou)
pour l'Empire de Mossit·et celle du capitaine Baud pour les royaumes du Gourma.
Dès lors, il se produisit un choc entre deux cultures et laresistance spon-
ten6e des peuples à l'occupation sera vaine. On peut dès ce moment s' in:ter:uoger
sur la manière dont vonlt s'opérer les mutations des nouvelles sociétés.
~)- Sous occuEat~on coloniale : 1895-1960.
Pour les uns, c'est semble-t-il au nom de l'Europocentrisme c'est à dire une
volonté des europérns "d'apporter la civilisation et l'évangile au reste du
monde" .. Pour d'autres les intentions JII.1e souffraient d'aucun doute, c "est ainsi.
que JOm~ STUiillT MILL, l'un des plus célèbres économistes anglais de son temps
devrait préciser le rôle des colonies; en effet, il dira: lion peut affirmer
dans l'état actue1.du monde, que la fondation des colonies
est la meilleure af-
faire dans laquelle on puisse engager les capitaux d'un vieil et riche pays"(~o
Il n'y a pas d'équivoque possible, tellement les intentions sont claires (quand
on sait en plus que l'Empire de la couronne était "celui Où le soleil ne se cou.-
chait
jamais").
iiprès le crise des grandes compagnies commerciales qui ont remplacé les cam-
péJ,gnies de charte, ainsi que le conflit de possession, il fallait dOlmer un nou-
veau départ, qui devait favoriser l'expansion commerciale et la libre navigation,
des puissances européermes. La Conférence de BerLin donna un nouveau souffle'
à
cette polit ique en m~me temps qu'elle élargis sai t les domaines dl exploi tatiolll
(agriculture, ~ines•••. ). Cette occupation coloniale en force, et l'établisseme~t
de ses structures administrativ.es vont engendrer certains processus de CZ:'hange-
ments socÎt.'mx qui seront la base de la désintégration des structures autochtones,
aux rapports de production simples et non mercantiles. On pe~t percevoir dans
ces processus de cha9gements quelques traits principaux :
(r)'1'. THIC:ŒL4J.JEO : "Problémü.t igue socio-t!conomique et financement du dévelop-
pement" (Paris II - Panthéon) P -26.
(2) J. 3. 1.ilL1) : Cité par G. N:'Gango in "1es investissements d'origine extérieure
en Afrio.ue Noire Francophone ll ; Statut et incidence.

- L'introduction de la monnaie"a été le pillier lie base du système capita-
liste pour son implantationo Ainsi, l'économie monétaire allait acc81éere la
désé1t'3"régation des civilisations de la Boucle du Niiger. Cela a entra1né l'inser-
tion de l'économie d'échange simple dans le monde villageoiso Cette nouvelle'
si tuat ion qui faisait obligat ion aux "indigènes" des cultures industrielJ.es"
le paiement d'impôt en monnaie métallique, en même temps en instituait ]Je tra-
vail forcé et le salaire (pour les interprètes, les comrrdis "pointeurs" ••• ). IJL
va s'en dire que, mi le travail forcé, ni le travail salarié, ne se font au liea
de résidence mais, le plus souvent dans les grands centreset parfois h0Ts du
pays, ceci va entrainer un déplacement de populations.
- Les migrations des travailleurs et l'exode rural a~ont pOUF seule expJii-
cation le travail forcé,
l'appauvrissement des masses paysannes et les exigen-
ces de l'économie monétaire.
On ne peut pas parler dl industrialisation)en tant que telle en H\\aute-Vo1ta
car le rôle principal qui lui était assigné, était d'~tre "un resBJ1'voiJ!' de main
d'oeuvre" pour les besoins de la métropole ~pour sa défense) et les grands chan~
.~
tiers de mines et des plantationso On peut tout de même décéler à partir de la
,~
Conférence de Brazzaville de 1944-45, la création de quelques fabriques qu~ Dé-
pondent aux orientations du "premier plan F.I.D.E.S". Les moyens de production:
.,
sont entre les mains des entreprises manufactui'ères et com-;lerciales et le pay-
ch.
san pour faire face à ses -devoirs" est obligé /vendre sa force de trava:iil.., D'ores
et déjà les rapports de production se modifient sous l'impulsion des forces ex-
térieures. Pour mieux mettre les colonies sous la dépendance totale de la métro-
pole, il fallait que la toute puissance en vint à s'incarner dans l'esprit de
tous leG "indigènes" comme le paradis sur terre
l'implantation de l'Ecole de-
vient une impérieuse nécessitéo
L'installation de l'école répond à un do-g.ble objectif: créer les con-
ditions qui permettent d'arracher définitivement aux "indig~nes" de toute résis-
tance à la culture de son mattre d'une part et d'autre part donnefl'occasion
gui facilite le contact avec les autochtones. A propos de l'Ecole, GORSE écrit
dans son rapport que: "l'école de l'époque coloniale fournissait des cadres
subalternes et moyens du secteur tertiaires: elle était bien adaptée à ce ~en­
re de débouché. Il y avait contradiction à vouloir développer l'économie en gé-

_ '24 -
n,'l'~,lic];lnt ce type de forma.tion. Le résutltat actuel n'a rien d'étonnant; dis-
pens.J.nt un savoir abstriJ.i t
et non un savaoir faire, l'école détourne de la vie
activebe·..ucoup plus qu'elle n'y prépareo L'enseignement importé de France ne
difi'use pas H~s valeur~; liées au travail product if, mais presqueexclusivement
des connaissances t','énéraleso Plutôt des connaissances de 12, culture française'''o
'i'oujours c)::""lS ce sens il Va plus loin pour aj ....outer Que "l' exploi tation de notre
culture, c'est l'exportation de notre marchéll(1). L'évidence est que cette for-
::l2.t ion engendrera, de nouvelles catégories sociales <:Lui se seront plus liées à
la t eTre.
M2.is 1.<1 couche la plus nombreuse encore demeure la paysannerie dont les con-
ditions de vie deviennent de plus en plus pénibles car, le progrès de la prQduc-
tion marchande et l'extension des rapports monétaires, la destruction de la pe-
t i te product ion ë,rtisaih.ale vont de pair avec le maint ien fact ice de survivé.U1ces
tributaires et l'implantation de méthodes de travail forcé (une sorta de réqui-
sition). Néanmoins si le paysan dispose de ses moyens de production pour l'es-
ca,
sentiel (terre) mais c'est qu'on lui/privé l'essentiel notamment ses enfants
les plus valides. C'est ainsi le processus du développe~ent des rapports capi-
talistes, la rente en argent, paiement de l'impôt en espèce vont hâter une si-
tu~ltion irréversible de ruine des masses paysannes.
Ce qui précède donne une idée, selon nous, moins m~tificatrice du: sous-dé-
lop,?ement de la Haute-Volta qui rejette la conception du phénomène comme une
chose en soi, isolée, mais le replace dans le reseau des liens de dépendance
écono~ique, politique et financière dont les conséquences avec le soutien des
r:Jé,sses laborieus~s d'exiger leurs droits à la liberté et au mieux" êtreo Cela
était surtout possible
à la fa.veur d'un contexte international sérieusement
troublf par la guerre de 1914-18 et celle de 1939-45 auxquelles s'ajoutent les
se0uelles de la crise de 192&.
~~Ull
La déf::i te ci.u fe.scisme appari',issai t auxJ des peuples coloniSés
comme la con-
damnution implicite du colonialisme dont les principes politinucs étaient fina-
l
l
f
· bl Il
lement se'Jblables à
savoir "le droit du plus fort ;1 dominer
e P us
cU
e .
(1) l'!l. GORSE
"rapllort sur la coopération entre la France et les pi:YS en de
d0veloj)pement".

~yunt concr0tem' nt contribu6 h cette défaite du fascisme et ~ la libération
de; lu Ii'rance, le peuple volta!c:ue, de même oue les autres populé:.tions 2.fricai-
nec sous eêlprise fronçai se, entendaitots' insurger contre les che.ines qu'ils ve-
nc:.ient d' :lider à ~riser ailleurso
Il apparaissait alors urgent pour les colo-
nialistes 6e procèder à O,uelques réformes, de faire quelqueG concessions pour
tenter à' endiguer le vent de 12_ libération qui soufflait.
Ce fut le principe.l objectif de la ConfL'rence colonio.le de Brazzaville tenue
du 30 jancier au 8 février 1944 que El' esa.uisser les Grandes lignes d'une nouvelle
politil']ue coloniale pernett211t not2ll1ment la représentation des colonies au Par-
lempnt métro:!,oli tain, l'élareis:"ement des attribut ions des administrateurs colo-
niaux, l'aménage!1ent mais non la supFession du système de l'indigenat et l'abo-
.D-
l it:Eon du "t1'2vil fores suscept i ble néanr:lOins è' être remplacé par le "travail
oobligo.toire", 'PêT ailleurs, tout en parlant d'associer les africains à la ges-
tion de leurs propres affaires, l~ Conférence de Brazzaville rejettait expresse-
ment non seulement toute idée è'indépendance, mais même celle d'autonomie locale
des colonies. Le Président de la Conférence, R~JE PLEV~~ déclarait dès le début
de celle-ci: "••• Dans 12 Gr211de France coloniale,
il n'y a ni peuple à affran-
chir, ni discrLlino.tion sociale à abolir. Il y a des populations qui n'entendent
cœmo.ître d'autre indépendance oue celle de la France" (1).
Le même principe sera plus clairement énoncé en ces termes: " ••• Les fins
de l 'oeuvre dec i vil isat ion accomplie par la France dans les colonies f~cart ant
tmIte iô6e d'autonomie, toute possibilité d'évolution hors du bloc français de
l '~npire, ID. constitution éventuelle, même lointaine de self-government dans
l es colonies e~:t ,3, écarter" (2). ~t ;Jourt ant, cette Conférence allait const i tuer
G.ans les colonies le point de dép2_rt d'une évolution politique et institution-
nelle qui débute avec l'ordonnance du 22 août 1945 fixant les nodalités des é~
lections à. la 1ère comjtituante.
M.
IHLCEN'l' écrit au sujet de cette ordonnance
" .... Peer le t,iais de l'ordonnance de 1945, l'ex-sujet devient citoyen, citoyen
~ineur sans doute, mais citoyen tout de même. Pour la premiôre fois dépuis le
début de 12. colonis2.t ion,
il al Lü t
part ic iper, par l ' int erméd iaire de ses re-
pTé,:entants élus, à l'élabore,tions des textes régissant son sort ;
pour la pre-
mière fois il allait entendre sa voix"C))o Le colonialisme français allait mettre
(1) A.;J. BALLU... :
"Genèse de la Haute-Volta" P.37 • P:ee8().afI'ic~l.ine-()u~;,gadougou
(2)3.8. CBTALE
"Afri['ue Noire,
l'ère colonia.le 1900/45" - P 599 Ed.
soc-iale.;
(3) 3.
nIL~ïi,1IfT : "L'A.O.F. entre en scène", Témoignage Chrétien, Paris 1958, P.26 o

à profit la désorganisation des masses africaines cQnséœutives du travail d'édu-
cation et d'organllsation antérieurement m.ené pour s'engager dans la voie de ce
que le préambule de la consti tut ion de 1946 prônait, à savoir "conduire les peu-
ples de l'Union à la liberté de s'admininistrer eux-mêmes et de gérer démocra-
tiauement leurs propres affaires •• o"~ Tel sera le sens de l'invention du gouver-
veeement GUY MOLLET, invention qualifllée de progressiste et connue depuili lors
sous l'appellation de i,oi-cadre ou encore LO'i Defferre, du norm du r,~ins:iitre de
la France 6utre-r'Ter de l'époque. Ce dernier exposait clairement les motifs réels
c.
de la Loi-Cadre en ces termes l
"Dans les territoires relvant du- ministre de la
F. O. N.
(France Outre-~1er), il.
est encore possible de procéder en temps opprtun
à un ce:rtain nomibre de réformes soulj:aitées par les populations. La question qui
se pose à l'heure actuelle est avant tout celle des délais dans lesquels des 1
réformes indispensables seront prises•• ~ Il ne faut pas se laisser devancer et
dominer par les événements pour ensuite céder aux reven~ications lorsqu'elles
s'expriment sous une forme violente.... Le gouveJm:ement propose donc Ull' pTQjet
de loii qui prévoit des réformes dont la mise en, application satisferait certains
désirs léeitimes des populations d'Outre-Mer"(I)o
Il fallait attendre l'échec des réformes institutionnelles et économiques
,-'lises en place dont l' objet était de contrer l'opposition grandissante des masses
africaines au système colonialiste.. Cela a conduit la Raute-Volta à faire suc-
cessivement part ie de l'Union française (1945/58), de la Oommunauté à la Commu-
nauté IIRenovée" (19 58-60)~ ll_evant la faillite de ces aciaptat ions vaines du co-
lonialisme a été la base qui a permis à beaucoup de comprendre la profondeur
du mouvement à 1 i indépendance vériilable. G~, est dans ce cadre qu"on voit la por-
tée de l'analyse du G;énéral De Œaule qui a su percevoit clairement le carctère
irréversible de l'aspiration des masses africaines en· 1960 quand il affirmait:
"••• Des territoires qui ne cessaient . pas depuis dix ans d'aspirer à l"indépen-
dance, la réclament aujourd' hui avec; imsitance. ]faut.".jj] laisser ce mouve menti ;se
développer contre nous ou, au contraire, tenter le comprendre, de l'assimiler,
de le canaliser"(2)o
Cette assimilation et cette canalisation devaient se traduire conc?ètement
sur le plan politique par l'octroi des indépendances formelles de 19600 Le ca-
(I)Etudiant
d'Afrique Noire, N°64,
Décembre 1970, P~2
(2) Etudiant d' AfrLiue Noire N°44 Décembre-J anvier 1965 ll'fl.7 et 8 r Nouvelle serie.

- 27 -
du
ractère formel des indépendances se confirme à trave~s la déclarationlpxemier
ministre français (1)rr. Michel Déb~é) immédiatement après l "échange des signatures
en ces termes s ".- ••Au mannent Où nous signons ces accords de transfert, Je man-
R
querais à la fois à ce que nous aVons toujours voulu ensemble, je manquel'aiLs
à la fois à ce que :j:àL!doiis à la France et à ce que nous devons tous
à la hance
et au G"é.néral de (G;aule, si je ne vous di sai s pas qu'au fond de nous-mêmes, nous
estimons que moins de choses doit être changé dans l'avenir••• "(I). Pour renfor-
cer ce point de vue,la Haute-Volta de concert avec les 3 autres membres du Con-
seil de l"Entente (C&te-.d'Ivoire, Niger, et l'acwel Jli:enin) signeront le 24 a-
vril 1960 avec la France des accord de coopération dont la caractéristique es-
sentielle est, selon nous, d'h~pothéquer l'indépendance en la vidant de tout
contenu politique véritable et d' instaurer?c':;tain,S appellent à juste titre le
néo-colonialisme.-pour caractériser la période post-coloniale.
3°) - Période post-coloniale de 1960-1978.
L'observation profonde que l'on peut faire et qui s'impose est celle d'un
colonialisme français constamment confronté aux luttes des peuples colonisés
et qui, après toute une série de vaines mesures dites de "décolonisation progres-
si ve" a dil procéder à l'octroi en 1960 d'une cascade d'indépendances juridiques"
allant parfois même jusqu'à inciter vivement des leaders politiques ~cains
à prendre unetelle indépendance. Si on se refère aux déclarations de ces mêmes
leaders en 1958, surtout celui du Premier Président de la 1ère République vo~­
ta!que Maurice Yaméogo, qui faisait ressortir nettement devant le cercle de
Koudougou que : "Il y a des forces qui osent demander l'indépendance. Nous ne
savons même pas fabriquer une boite d'allumettes et ils veulent qu'on soit indé-
pendants. ce sont des illuminés. Nous du R.D.A (Rassemblement Démocratique Afri-
v
cain), nous n'avons que faire de l'indépendance". c;.es propos, de(.Qux qui allaient
diriger la Haute-Volta dans sa période post-coloniale s'équivalent. A la diffé-
rence de la situation antérieure, l'accession à l'indépendance marque un tour-
nant décisif d'une nouvelle période dont l'évolution, entamée pendant la colo-
nisation, aboutissait d'une part à la mise sur pied d'un Etat distinct de l'Etat
métropolitain et à une nouvelle disposition des forces sociales face à cet appa-
reil d Jl!ltat
car "••• La signification de l'indépendance, c'est que le poids
(1)
Carrefour Africain
Dimanche 17 Juillet 1960, I~De année, N° 18, P 1.

- 28 -
de l' impérialisne passe désormais par des relais locaux. Les causes externes
9\\
(
)
l:
agissent par l' i termédiaire des causes internes" 1 .
'est donc dire que le co-
lonialisme à l'ancienne mode n'a pas disparu entièrment, ce qui conduira le Dr.
KH.A11IE N'KRUMAH (2) a caractérisé la nouvelle situtation de néo-colon:ii.alisme et
y va plus en profondeur, pour dire que i "l'essence du néo-colonialisme, c'est
que l'etat qui y est assujetti est théoriquement indépendant, possède tous les
insignes de la souvérainété sur le plan international. Mais en réalité son éco-
nomie et par conséquent sa politique, sont manipulées de l'extérieur; Cette œa-
nipulation peut révêtir des aspects divers ; par exemple, dans un' cas extrême
les troupes de la puissance impériale peuvent être stationnées sur le territ~i­
re de l'Etat néo-colonial et en contrôler le gouvernement. Plus fréquemment pour-
tant le contrÔle est exercé par des m03J'en1s économiques ou monétaires. L'Etat
néo-coloniaL. peut être obligé d' achèter les manufactures de la puissance impé-
~ialiste.à l'exclusion des produits concurrents venus d'ailleurs. Le contrQle
de la politique de l'Etat néo-colonial peut se faire par des versements assurant
les frais de fonctionnement de l'ttat, par l'introduction de fonctionnaires à
des postes où ils peuvent dicter une politique". {:n effet, la période post-eo-
o
loniale, va se carctériser par l'apparition des nouvelles couches dirigeantes t
composée essentiellement
de œauts fonctionnaires, d'i~telle~~uels qui Vont
hériter théorique~n,t du pouvoir politique et économique, et, les versements
des subsides suffiront à stabiliser la situation léguée par le colonisateur.
Cette période constitue le début de nouvelles formations sociales à Pi-
mage de la métropole qui viendront se superposer aux anciennes structures exis-
tantes. Petit à petit, la stratification de type clanique le système de "caste"
se fon.ront dans une nouvelle lutte, qui
est celle du droit au produit de SOEl
travail. Il est ~ noter que dès la décolonisation acquise, la nouvelle couche
dirigeante s'est attelée à mettre en plâce une structure juridique et politique
:rendue nécessaire
)par l'apparition d'un Etat~séparé-i1de l'Etat métropolitain "
avec dorénavant un pouvoir autochtone. Aes structures ec~no.iques correspondent;
à. l"option ancienne de développement, tout simplement, parce que le pays nomi-
nalement indépendant devrait renforcer ses liens organiques existants avec l "ex-
métropole grâce au traité de coopération diplômatique,ainsi que les neuf Accords
(1) J. P. OLIVIER
"Afrique: qui exploite qui ?", Les ~emps Modernes nO 347~
Juin
1975 - P.I77J.
( 2) IŒAHE N'KRUlilAH : "Néo-colonialisme dernier sta<ie de l'impérialisme", pp 9 et
rD..

- 29 -
de coopérations qui couvrent tous les domaines (politique, économique, culturel
et militaire'. .-.,). C-et ensemble dl accords de coopérat i'on transforme l'ancienne
dépendanae coloniale en une nouvelle dépendance post-eolon:iale plus suMile.
Cette nouvelle donnée va être la base des formations sociales actuelles en I!Ilawte-
Volta qui sont aussi le résultat de la dialectiqu8" cultl!llrelle entre deux <!Iiv::iiIl.i-
sations. La mutation de la civilisation au milieu de la Boucle du NigeJr' a,été
interrompue et son cours a éité modifié. C'est la raison pour laquelle de séJ1if..eu-
ses difficultés et blocaees s'opposent au développemento Nie pas tenù compte,
de ce fait ou vouloir le nier revient à passer toujoUlI's à côté des véDi tables
problèmes qui doivent êtDe résolus pour qu'une solution, ou un début de solutiŒn
puisse êtr~ dégagée pour le crucial pro~lème du sous-dév.eloppement de la ffiaute-
Volta..
Paragraphe III t
SOrrS'-DEVELOPPEMENT' ET REALITE VOLTAIQlŒ.
E~ partant de l'analyse historiao-fonctionnelle de la maute-VQlta~ il se
dégage que le développement des fODces productives actuelles ainsi que des rap-
ports de production, renferment des t'aJ!es congénitaLes graves.:. Oar~ o:ette tran~
formation
'éoonomique laisse la grande majoll'ité de la population végéter dans
la pauvreté et l'ignorancel> ./:ilOTS, le problème se pose de savoir comment faire
une approche du sous-développement qui rende fidèlement à certains égar~s la
réalité concrète, d'où qu'est-ee-que le sous-développement en Haut~~ta ?
ro) ~Qu'est-ce-que le sous-développemen~?
Comme nous l'avons précisé plus haut que le te:nme de "p~s-sous-dévelo:ppés'f'
est un terme nouveau qui caractérise U1!e réalité relativement anciemme, et a.-
vons
ajouté que ce terme a pris naissance au sein des organismes internati~a~
Il nous faut faire une approche critique d t'une telle terminologi~
Om dit et chacun en accepte le terme, que la IDaute-Vol ta est un J.l'8YS sous.-
d:éveloppé, ou encore en voie de développement ou en développemen1t. P]usielmB
termes apparemment non contradictoires qui désignent une même rAalité. Et on
utilise l'un de préférence par rapport aux autres sel~ qu'on veut ménager- les
susceptibBités "nationalistes" des iiBltéressés. On affirme aussi queJLe sous-dé-
veloppement est engendré par la pauvreté du pays, pauvreté qu'expliqueraient les
conditions naturelles défavorables comme l'aridité du climat, la faiblesse des>
ressources naturelles et l'enclavement, tout se résumant en un revenu par t~te
très bas.

- 30 -
De cette réalité, à~âtir des assimilations qui se veulent savantes entre la si.
tUGtion de la Raute-Volta àwjourd'hui et aelle des pays avancés a~n~ leur in-
dustrialisat io~ il y a qu'un pas que nombre d "économistes classiques et experts
n'hésitent pas à franchiJl'. Cependant ncms faisons observer que si la France,
par exemple, est assez tôt devenu~' un important produateur dans le domaine de
la sidérurgie et de l'aluniadum,. c'est parce qu'elle détenait non seulement dia.lIDs
son sous-sol le minerai (fer, bauxite, charbon.... ) et que ces richesses éta:iien.rt
également entre les mains des nationaux et non des étrangers qui en. disposaient
à leur guiseo-
Ni la L"rance, ni aucun autre des grands pays aujourd' hui i,ndustrialisés n'é-
taient dominé par un autre. '.l.'ous avaient la maîtJl'ise de leurs ressources et la
conduite de leur développement .. Or, nous notons que la Haute-V&lta comme tous
les pays africains sont de nos j ours dans une situat Lon totalement différente.
Leurs richesses essentielles sont exploitées par des capitaux étrangeJrs" p.oUJr
satisfaire les aptJétits des multinationales et les besoins des économies occi-
dantales. Ce qui a a:onduit CH~ BETTELHEH1 à écrie ce qui suit l "les P'B3s aujaDuJr-
d"hui industrialisés n'étaient pas des pays économiquement dépendants. La stJrU:~
ture de leur production ne comportai .t pas quelques secteurs hypertro})hiés étJroii-
tement liés à quelques marchés étrangers et fortement pénétrés de capitaux étJraJ8l-.
gers. C:es économies ne se développaient pas ou ne stagnaient pas se lm lt'évolu-
tion du marché mondial de telle ou telle matière première ou produit brut agri-
cole. Elles ne supportaient pas la charge de lourdes obligations extérieur8s~••• )
d'industries puissantes déjà établies et dominées par le même grand capital qu:e
celui qui aui"ait dominé leurs propres richesses naturelles., Ces économies ne
dépendaient pas pour leur reproduction élargie d'importations d "équipements ve-
nant de l'extérieur. Si elles étaient peu industrialisées, ces économies n' é -
taient pas déformées et déséquilibrées mais, au contraire, intégrées et auto-
centréestt~I). Le très bas revenu ou produit national bll"'Ut par habitant de la
Haute-Volta serait une des principales caraa:téristiques du sous-développement p
par la seule raison qu 1 il mesure économiquement le retard par rapport aux p~
aVdncés. ~ais une constation statistique ne saurait, selon nous, se substituer
à une analyse concrète de la situation et SAMIR AMIN a perçu brillammment le
problème, lorsqu'il note: ttLe Gabon aujourd 'hui, qui a un produit par tête voi-
sin de celui de la France de 1900; n'est pas la Frana:e de 1900, même en modèle
(1) CH. BETTELHEIM: ttplanification et croi~sance accelérée" ; FM/Petite pol.
MASPERO - P. 28.

- 31 -
1.(,
réduit car ses structures propres sont qualitativement celles de la périphérie
(c'est à dire du tiers-monde);. non d'un centre attardé dans son développement,a(1).
De ce sui précède nous amène à dire que le paysan gabonnais a une vie matér±~l}e
sensiblement égale au paysan volta!que. A vrai dire le niveau de vie de la ma-
jorité des habitants de la Haute-Volta est en retard sur celui des pays comme
12 France, mais ce retard. n'est pas lié au fait que l'économie des péYS sous-dé-
veloppés en général, serait à un stade d'évolution moins avancé que celle des
PélYS plus industrialisés... En fait, la Haute-Volta, pays sous-développé a évolué
en même temps que les pays avancés, mais elle n'a pas évolué dans le même sens,
ni de
la même façon•. C'est ici que les théoriciens du sous-développement ten-
dent à ne pas rendre la réalité... C· omme le propose JBJETTELHE1M·, de substituer
à
l'expression "pays-sous-développés" par l'expression plus exacte de "pays ex-
ploités, dominés et à économie déformées". Pour nous, nous n'allons pas revenir,
sur ces termes, bien que chaque terme mérité un développement quoique dépendance
et exploitation aient entre elles des rapports intimement l~és et indiss0ciables~
nous ne dévepperonJ~avantagepour respecter l'esprit de notre sujet. Néanmoins
nous dirons que la quasi-totalité des pays du tiers-monde dont la ffiaute-Volta
ont été naguère des colonies, quelques ums le sont encore et la dépendance mi-
lit~ire et politique n'ai été établie dans la plupart des cas, que pour asseoDr'
la dépendance éco~omique qui n'est de nos jours "que la survivance et l'iadapta-
tion au monde moderne du vieux "pacte colonial".. Les Pé33s du tiers-monde sont
tous aujourd' hui intégrés au marché monde capitaliste, mais ils ..le sont en! si-
tuation de subordination par rapport au centre dominant que constituent les mé-
tropoles im:périalistes" (2 )•. Le maintien des rapports organiques avec l' ex-puiJs-
sance coloniale ne manquent pas d'influer les structures économiqqes du pays.
2 0 ) -
Dépendance~~Conséquences.
Les conséquences structurelles qui résultent pour la Kaute-Volta de son rat-
tachement involontaire avec l'extérieur, qu'elle subit, sont ressentiies au' pl<lil.n:
économique mais aussi au plan social et politique... Ces conséquencellt s'exprim, anrti
d.3nS les structures économiques et socië.les fondamentales~ il ne sau:*a.ill: être
question d'y porter remède qu'au terme d'une entreprise de longue haleine où
le peuple en constituera la soupape. Pour nous, nous nous contenterons d'une
(1) I.F.AN 1970 : cite dans "le pillage du tiers-monde" par P. Jalée.
(2) P. J ALEE : "le pillage du tiers-monde" : Préface de 1975 - P.. I60.

- 32 -
approche des conséquences économiques et revtir ~ plus loin poux les effets
socio-politiques.
La caractéristique particulière de l'économie volta!que est celle de la dé-
formation ou du déséquilibre, car, les monopoles étranger.s ne portent leur. i'nrté-
rêt, dans le pays qu'ils ont· dominés et dominent enC0I"e, que sur les re.ssou:vees
et les potentialités qui sont susceptibles de répondre à un besoip.. des économies
du centre, ils négligent les autres parce que "profits cQnna.ndent "'~ Il en résulte
1
le voisinage, à des dégrés divers dans toutes les régions de la Haute-Ilol ta,.
d'immenses portions de territoires pù les forces productives (généralement agri-
coles) demeurent mises en oeuvre par les moyens les plus archa~ques et avec um
niveau de productivt~éextrêmement bas, avec des portions de territo~re plus ré-
duites où d'autres forces productives s~nt mises en oeuvre par les procédés ~e
la technique de pointe. (}' est ce qu'on appelle l'économie "dualiste'''. Les auteurs
du Plan Quinquenal de llévelo,ppement Economique et Social (P. Q•.E. S.) 1912/76 de
la IIau1te-"Ioil:ta partageant les points de vue des économistes qui s' enii t:iiennenrli.
à. une perception descriptive et par conséquent superficielle des bhoses et qui
avancent que les secteurs archa1ques de cette économie ne sont que la survi~an~e
d'une société de type féodale et d'une économie de subsistance millénaire, esti-
ment que les seC1.teurs dits ar.chaiques constitués du' monde rural est clo,so Pour
les rédacteurs du P. Q.E.S,,, le secteur traditionnel est replié sur lui-même sans
com'TIunications sociales et économiques avec le monde capitaliste et- "'mode;u.ne u,
qui le a~toie et souvent même s'installe au milieu du premier sous forme d'en-
claves. La totale séparation des deux m0'ndes, leur ignorance mutuelle seraH 'lm
fait d'évidence et le colonisateur n'en serait pas responsable.
En' ce qui nous concerne, nous reJet tons cette prétendue évidence. Pour nOU;s,
le monde traditionnel ou pré-capitaliste que n'au~ait pas touché le colon:iialisme
est d'abord un mythe au niveau des faits pour ce qui est de notre pays.
En effet, ce monde traditionnel ne produit pas, que ce qui est néœessaire
à son autosubsistance. C test à l'intérieur de ce monde traditionnel que se sont,
développés les activités de c:ollec'te de produits destinés au marché mondial ca-
pitaliste notamment français. pour l'essentiel ce monde est moDus refermé sur
lui-même qu'on ne le prétend,

- 33 -
i l envoie aux pourtours des
centres industria~sés ou modernisés un s~
plus de population qu'il ne peut pas nourrir qui oonstitue, pour le sec-
teur capitaliste une "t,rop providentielle armée cie reserve du travai~".
Surtout quand ~e monde capitaliste s'implante en ai~ieu traditionnel soue
formes d'ilots (exem.ple de la S,ocié-té Sucrière de :la Haute-Vo1ta (S.O.SU.HV
.....d.t:IUt'
à
Ban:forah) et c'estJ~'e8pace ~biant que les sociét6s p,ré1.event l.'ess'en-
tiel de ltuà main d'oeuvre. Ce ct~ tend à désagréger ce mende traciitionne1. •
Ba Radio surtout a
"Radio rura1.e" pour le cas vo~t&ique, k'6n'tre ce~ui-ci
1
.en
profondeur
avec toutes ~es conséquences que c~ comporte.
Le monde capitaliste sait très biea l.orsqu'i~ en a besoin privait de ses
terres le monde arriéré ou bien i l absorbait 1.a popu1&ion qui vivent Bar
ces terres, ou encore i l la rejettait sur les terras restantes ~
l'équi-
libre de la société- rurale
s'en trouTe
désorieaté. BD.p1.ue 1es produits
1
cle ]..a société capitaliste
supplantent parfois dé~ruisent
certaines ac-
tivités villageoi.ses entre autre l'artisanat traditionne~ I(Coordonniers,
'tisserands, bijoutiers ect ••• ),
,
1
Enfin i l faut no'ter que le développeme~ inég&1, ~égional et sectoriel.
est une constante du regime capitaliste et la société "duJliste- n'est
que la. forme principale que revOt cette constante, dans le cas de 1.&
Haute-Vo!ta,
cette situation se présente Gans ~·coexistancea d'un sec-
teur traditionnel, arriéré, végétant cians des struotures cOlllllDunautaires,
en désagrégation et d'~ secteur amoderne~" intégré à l'économie mondiale.
Si l'on observe maintenant les tendances concrètes qU,i fa9 0 nneront
peut-@tre l'avenir de la Haute-Volta, une illlage transpara1t, illllPGsée
déjà par les intér@ts financiers les plus puissants.
Ces tendances réélles se const~~ent à travers la nature des investisse-
ments ou des projets ayant trouvé un financement et par l'examen des,
conventions passées relatives à ]..a création d'entreprises nouvelles.
Les uns et les autres portent surto~ actuellement sur l'industrie a1ï-
mentaire àestinée à l'approvisionnement des ~ohés européens, anéricains
ou japonais, c'est-à-dire en priorité sur les ranchs, d'élevage et les
entreprisée mara1chères. Les investisseurs capitalistes enviBa~ ent
l'avenir des pays du sa...~e~ autour de ces derni~res activi trés .Leur ren-
tabilité, encore mise en doute, semble acquise dans la.pperepective d'une
pénurie mondiale de viande. Ces expériences pilotee se dé:roulent au
Niger à Efrakane, où un ranch de plusieurs milliers d'hectares fonction-
ne. En Haute-Volta, le ranch de Ouargaye compte un
troupeau permanent

- 34 -
d'environ six 1IÙll.e têtes. Des prospections sont fai"tes actuel~ement par
observation aérienne des parcours de nomadisation pour repérer les terres
plus favorables à d'élevage industriel au Mali, au Niger, en Hau~e-Vo~1;a.
I l en est de même pou~ la culture mara!chère agro-industrièelle, repré-
sentée en Haute-volta. p~ l'UVOCAM (union VoJL"ta~que des eoopé:rs.tives
Agricoles et mara.!chères)g La produc"tion est destinée, à raison de 4 500
à ID 000 tonnes ~ ~ à l'Europe. Or, ces investissements et
projets de l'UVOCAM sont généra.lemen"t cités comme faisant partie de la
lut"te contre ~ ~ine (1). La Ha.ute-Volta n'a cessé d'exporter des pro-
1
duits mara!chers sur la France pendant toute la période de :famci.ne.
La sécheresse, la. famine et ses séquelle ont ainsi contribué à
met~re à jour d'une :façon brutale la dépendance des pays africains du
Sahel. Dépendance d'abord à l'égard d'une politique agricole inspirée,
encadrée par des puissances étrangères, qui a conduit leur agriculture
vivrière à la crise et compromis leur capacité de subvenir à leurs be-
soins de base. Les implications de cette situation sont Bonsidérables 1
- r
, les chances d'un "décollAge" économique so,nt
pratiquement anéanties car ce "décollage" devai"t s'appuyer pendant une
première phase sur la mobilisation de la paysannerie "traditionne~e, de
ses surplus en produits et surtout en force de travail co-.e moyens
primaires de l'accumulation. Or, cette mobiliss;tion, cette accumula.tion
s'est
, fai.tes·
certes, mais au pprofit des puissances industriel-
les qui laissent derrière elles une agriculture exsangue,
incapable de
remplir cette fonc"tion. Au contraire la dépendance économique s'est ag-
gravée. Elle repose entre autre sur un d~fioit en produits de subsis-
tance, absolument essentiels à la survie. R cevoir l'aide des pays déve-
e
loppl!s et surtout 18 mériter par une attitude conforme aux intérêts de
ces pay~ est désormais une question de vie ou de mort. GLes pays dépen-
dants dans leur actuelle détresse, n'ont plus de possibilité de marchan-
dage. Ils n'ont plus que le choix entre diverses formes de domination
impéria~Liste. Ils peuvent certes aligner des projets, des program-
mes, des plans, ils dépendent entièrement du bon vouloir des bailleurs
2-es - . • . .
d
sahel
de fonds
( )
2v. En effet, la Haute-Vol ta, un/ ~
_
s~x paysu
ne peut qu'accepter les financements qui lui sont proposés, financements
conçus de telle sorte que, non seulement l'essentiel des profits r,etour-
t "
+
ma;s encore que la dépendance écono~que et po-
ne aux inves ~ssemen~s,
~
é
d
t
+
s'entret;ent d'elle-mArne comme, nous
litique à son
gar
es
accrue e~
~
~
le confirme le tableau suivant o
(1) Cf. La dépêche A.F.F. du 14/4/1974.
(2) a'.omi té d'Information S-ahel : "Qui se nourrit de la famine en Afriq~e 1"
'-

35 -
BALANCE DES PAIEMENTS 1960-1970
MOYENNE .AJ:{l'JUEL~ EN MILLIARDS CFA
1--------------------: :---------------------1
l---------------t
Entrées en faveur
Sor~ae en défaveur
·
Solde
·
:
:
de la Haute-Volta
de la Haute-Volta
::_-----------~:
----------: ~--------------------: :---------------------&
:---------------1
Balance
Exportations
4,3
Importations : 9,9
-5,4
:
:
t
-1,4
:
:
:
.
:
:
courante
Recettes ext.:
5,0
Dépenses
_ _ _ _ _
volt&
_ _ _ _ 1,0
_ _ _ t
_+_4_,O_-.!I:..-_ _:
----------t :--------------------: :---------------------1 :--------.------:
Mouvements
Aides exttr.
: 4,5
:
:
:
. : 4,5
.
:
t
- - - - - - - - - . , . . . . - - :
:_----
capitaux
Capitaux prive I,O
Transports privés
:
:
:
vers l'extérieur 3,9
-2,9
.
-----_. -----------_: :
;
:
:---------------1
Râserves 72,2
-
Source : Selon S.. Amd.n- l ' Uri.que de l'Ouest bloquée.
Rn
- fait, l'"aide" extérieure,(l'assistance technique, l'aide
publique extérieure, les pr@ts à long terme, ••• ) sert à couvrir les
transferts privés vers l'extérieur des sociétés et personnes étrangères
installées en Haute-Volta. De la sorte, les investissements privés qui
n'ont apporté à la la Haute-Volta qu'un millard par an ont pu en expor-
ter à leur profit presque 4 ~llards par an et cela depuis dix ans.
L'ftaide influence la structure de la production locale qui, à eon
tour, détermine la nature des exportations,
expliqué de m@me celle des
importations, beaucoup plus diversifiées: quelques biens d'équipeamnts,
produits de consllDBlDlations manufacturières destinés aux classes dominantes,
ayant
· adopté un mode de consommation de type occidental. Il faut
remarquer cependant sur le poids considérable des importations alime~
"taires soit environ 20% (Cf. tableau ci-dessous) des importations totales,
ce qui est paradoxal pour des pays à dom~nante rurale.
0//1/1/Il . ..

-
Source 1 Comité d'Inf'ormation du Sahel.. Bul.J.etin d'Mrique
Noire N°988 du 24/1/1979
C'est dire l'i.nsuffisance des efforts consacrés à. la production
vivrière et la dépendance du pays pour sa nourriture quotidienne.
Il faut noter qu'à. l'exception de la Mauritanie, le rapport du prix
des produits exportés aux produits importés rend la balance commerciale
des pays du Sahel structurellement déficitaire ainsi que les bud8ets na-
tioaaux dont l'équilibre est étroitement lié aux revenus des cultures
d'exportation. La France ren~or~e cet état de fait en aidant "généreuse-
ment" les Etat. du Sahel à
n gü~vlM.~ au dessus de leurs moyens. et s'assure

- 3T-
ainsi la. dépendance étroite des classes dirigeantes locales en dévelop-
pant chez elles une mentalité d'assisté propre à déoourager toute velléi-
té "nationaliste".
Les données 'lui suivent illaatrent, sans 'lu'il soit besoin de les
commenter longuement p ~Iimportance d'un nombre réduit de produits d'ex-
portation dans les échanges extérieurs des pays du Sahel et le poids
..cL4I:AA"~
occupé par ces ~mes produits au sein des économi.es nationales,JLa..dé-
pendance de ces pays dont la Haute-Volta vis-à-vis de la Franee/~a.:ratt
clairement à
. travers leStableaux ci-dessous.
BALANCE COMMERCIALE DE LA FRANCE AVEC LES ETATS DU SAHEL.
:---+--è--------------------------------------------------------1
: millions deFF:
1971
:
1972
1973
1976
1977
1
·
1
1
·

:


·


: Haute-Volta
:+ 87,6
• +101,9
: +128,6
1 +240
1 306
:
·
1
:
:
:Ma.li
1+101,7
: + 81,4
+128,7
•• +198
:+174
:
·
:
·
:Niger
1& 64,9
· + 6,7 :

- 67,3 : - 71
:+ 38
:
:
:
1
: Mauritanie
:- II,6
: + 14,4
: + 62',4
1
:
:
: Sénégal.
1+ 82,4
: op
5
: +198,7
: - 3·1
:-110
•·
:
·
:
:
:
·
:Tcbad
1+ 53,1
+ 51,1
: + 70,5
• +169,5
:+179
:
·


:
:
·
.
:
TOTAL
: +248,3
· +237,1 1 +521.6 : "5'9,5 :+587
:
·
Source •
(1971-1973 1 Comité d'Information du Sahel.)-

Bul1.etin d'A.frique Noire N°993 du 28/2/1979.
CE tableau fait apparaître l'excédent commercial réalisé par la
France avec l'ensemble des pays du Sahel. Le déficit structurel du com-
merce extérieur de la Haute-Volta s'est nettement acoentué en 1977.
Depuis 1960, les échanges volta~ques avec la France sont mar'luées par
un déficit permanent vis-à-vis de l'ex-métropole. Ce déficit commercial
a progressé de plus de 300% de~
1973-1977.

Indice des pri)'t des produits manufactures vendus par la
FRANCE aux pays de la zone t'ranç.
--------------------------------------------------------------------
: 1965 :
I970 : I97I :
I972 : I973 :Janv.74
------------------:-~----:------l------:------:------:
_
.
:
.•
(1960 = 100)
: 116,2: 135,4: 148
'153
: 180 ::
185
:
:
:
:
:
:
Source:
(qomité d'information
Sahel.)
RAJ?FOllT D'ECHANGE :
cours mondiaux/prix des produi~s manufac~ures.
(1960 = IOO)
1965:
70
:
7 l
:
72
: 73
: Janv. 74
- - - - - - - - - - - - - - - - - : - - - - - - - &- - - - - - . z,------: ------.: ---
:
_
·•
:
:
••
:
Coton
83
:
77
:
BI
:
80
:
I04
:
IJ4
:
:
:
:
:
.Arechide
.
:
88
:
86
86
80
:
95
132
·
:
:
:
:
:
Hui~e d'a.ra.chide ·
:
86
82:
:
80
:
72
:
64
:
97
:
:
:
:
s
:
.
Source
(Comdté dtinforma~ion ,
Sahel)
Les rapports d'échanges des: pays de :La zone Franc aveo l.a France Se sont,
donc dégradés ju.squ~en I973. Ce qui correspond à un déve1.oppemen~ du sous-
développement, l.a légère améliora~ion de la. période 1973-1974 êtai~ due à
la. hausse générale des matières premières,
cependan~ cette tende.l!llce f_ora-
ble nia êté que de courte d~e du t'ait du repli des cours mondiaux des
produi~s primaires ces dernières années.
(Es~i..I1œ;tion approxi.matives. Il s 0 agit de ce qu Ion appelle le Ptroc-ne~"
défini comme é~ant le rapport de l'indice de La và1eur unitaire des exporta-
tions et de l'indice de La valeur unitaire des importaions)
: 1961: 62:
63:
64: 65 : 66 : 67 : 68 1 69 : 70 :
:---·-:----:---·ü s----: ----.:----:---- •• ---: ---- :----.----------
Hau-a.-Vol1;a
: 98 1105: 110: 105: IrO: 102: II2:rœ,: 112: 1I9:
:
~::
: : :
1
:
T% de couve·r-:
: ;
:
ture deslmp/EXP.
50 : 51
42
39 :
Source : Urique Trop.icale ; indicateurs socio-éconoM'iques, Commd.slfs16n
des Communautés européennes;
1973

- 39 -
Les co-nclus;ons qu; se de'gagent à l
l
.1....
d
-
-
a
e~re
es chiffres des
différents ta.bleaux sont
s
ola production commercialisées de la Haute-Vol~a est actuellement
composée essentiellement ,d'un nombre réduit de produits destinés à 1.'ex-
p6rta.tion.
1
• i l en résulte une dépendance économique donc politique vis-à-vis
des pays industrialisés ete~articulier .de'la. France, à la. fois princi-
pal acheteur e~ fournisseur des pays,d'autant plus forte qu'elle s'étend
aux besoins alimentaires dont la satisfaction dépend des livraisons en
!
provenance des pa.ys industrialisés.
• la tendance à la dégradations des termes de l'échange,
particu-
~
lièrement marquée au niveau/producteur (coton, et arachide) témoigne de
l'exploitation croissante du paysan volta~que par les soc.étés d'inter-
vention a.vec la comple~té des classes domina.n5es, locales.
o
l.a place importante prise par les exportations et les importa.tions
dans la production intérieure brute commercialis6e, symptomatique de
es. structure d'a.ppendice producteur de matières premières au sein: du
système économique mondial.
• Cet ét~ de choses est certes généra~ aux pays de la p6riphérie
dominés par les groupes puissants, mais la dépendance des pays du Sahel
dans le cadre structurel actuel est particulièrement marquée. M@me à
travers ces données partielles, i l appara!t clairement que les cultures
d'exportation ne profitent en rien aux popu~tionB sahéliennes, ni
d'ailleurs à l'économae générale de ces pays qui continue de garder une
physionomaé d'une économie coloniale, commè cela est particulièrement
dans le cas de la Haure-Volta, les importa.tens de nourrit.ure y sont
supérieures aux exportations des cultures commerciales.
-
Ainsi le sous-
développement de ce pays appara1t à nos yeux comme un phénomène écono-
rmique, i l serait cependant grave et risqué de vou ..>loir ignorer son
contenu sociologique.
Il. n'est done pas faux d'affirmer que le Bous-développem'ent a é~é
et demeure encore, essentiellement un phénomène socio-économique. Le BOUS-
développement tel que nous venoDS de le décrire, apparatt dans les faits
et les consciences, lorsque deux sociétés de niveaux techniques for-
tement différents se rencontrent. I l prend d'abord èomme le souligne
G. Balaftdier, l'aspect d'un problème de relation. Une société t~hnique­
ment plus développée fait irruption dans une so·ciété techniquement
moins développêe. Cette miee en relation, à la longue, des structures
des deux sociétés en contacts, celles-ci s'adaptant progressivement l'une

- 40 -
à l'autre, en cei sens
qùe l'écon~ie dominan~ s'adapte aux tFanS5rmations qu'elle
impose à l'économie dominée.. C'est ainsi qu'est né le pacte colonial, par exem-
plœ, entra1nant à la suite une certaine "division internationale du travail!",
c'est à dire un certain mode d"adaptation réciproque dans l'espace internatio_=\\ 1
nal!.( 1).,
Cette mise en relation a résulté souvent de heurts violents (guerres et 00-
cupations coloniales) ou des contacts commerciaux et: financiers pacifiques. las
sociétés ai'nsi mises en relation réciproque ont continué d'évolueI' .$., des :uytbmes
et selon des prOC~SSU8 foncièrement differents. Le"couplageVest devenu très vite
assymétrique et spoliateur pour le plus faible.
Il est inutile de rappeler que c'est à la suite d'évènements politiques
et de la Seconde Guerre Mondiale, que les sociologues et les économistes (i)cci-
dentaux découvrent le "sous-développement" dans les :uégions du monde qu'ils
fréquentait depuis longtemps! ce sous-dév~oppement, saisi à. travars les nOD~
mes de référence des pays développés, les frappe par sa diversité et sa multi~
plicité des symptômes indicateurs qui sont t les critères démog:uaphdJques, nutI!i-
tionnels, sociologiques et bien
'entendu économ,ii{ues.. Ultiili.sés avec prudence,
ces critères, qUll n'expliquent rien mais constatent des faits caractéristiques~
pouvant servir d'indicateurs sur le délé de pauvneté d'un pays. Néanmoins nous
essayerons de cerner leur con~bu-tiCIJiIll au maintien
du: sous-dévelO'ppement, mais
également le rôle démographique dans l'économie volta!que.
(1) BALAND1ER: sociologie des régions sous-développées, dans traité de sociolo-
gie dirigé par G. OURVITCR tomeIo

D .. eD~-
8 A N QlJ e:
HE2
rOM
LAM e> E Jl T
"O'''1 1''''-T <"T;O.,
FINANc.UI/.
MAl..
!lA,... K
pt,
P'_~.ANc.e:~
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&AN~
. r.A)
eELGIOUg,
AF"~tQUe:
Co H C>
D.&.6
c.c Go E:-
5.G.E.A.O
tl 1e: T A T
PRyve:
'VOTAi QU e::.
(r
lR.
~ANC.
~A)
S. F. O.M
e. . t . A.O
"'"~•
~
o
C..N.!).!
O.p.T
SOVOt.C.OM
VOl.TEL C:c.
Of'NAcItR
~.
N.
D
~. 1. c.. r A
LoTERIe
!'fAT 1 ONAL.E
.e ~ r ~ v.
O.N.E
AU S ~ D' ~ïA61LJSA..
T'~() "

- 42 --
SECTION II:
IMPACT DEMOGRAPHIQUE DANS LE DEVELOPFEMENT
Les ~ays africains comme la Haute Vo~~a sont bien SQuvent con-
frontés à des prob~èmes spécifiques d'identi.;;é. et d'unité nationales.
Les aDCiennes
frontières eQ~.nia~es qui s'paraient ~es territGires
placés soue 1a juridiotion des puissan~es européennes différemtes
sont devenues des frontières ne;tionales. Mais c' es;;. insuffisant )lour
que des populations s'identifient avec ~e cadre terrirorial ~uquel
e~s sont supposées appartenir. Four elles, dans bien des oas, 18
patrie nettement ci.éfinie, c'est 1.8 vil1.a.ge. Dans ces conditions,
~·édi.:fication nationale, le progrès sooial. 8;; la croissance éconolllli-
que sont intilllelDtent ~iés. Ma;is ~' . .pect qui retient notre anal.yse
est celui port~t Sur ~s prob~èœes désographiques dans 1es ex-col~­
nies pour lesquelles on indique que tout déve~oppe~ent est nécessai-
rement sous -
tendu par une régression 4émographique.
PARAGRAPHE 1: Contreverse sur a~e Banquet àe 18 Nature"
I l nous es;; Ilonné de reconnaitre que :les débats sur l.es problèmes
démographiques sont pratique.ent aussi anciens que les doo:trines
économiques. Ainsi, dans LA REPUBLIQUE de Platon, le. population doit
restée stationnaire. Aristote tout en rejetant le eommunisDe de P1&-
ton n'en prouve pae Boins la ~imdtation du Dombre d'enfants, oar
dit i l ,
"la pauvreté engendre des séditions"
(1). Les IDlGroanti~iste6
croient quan;; à eux,
à
la vertu de ~ population, en effet pour eux
"i~ n"est force, ni richesse que d'hommes" (2). UBEl telle idée résu~­
~e oertainement de laccroyanoe à une s~rte de ,pompe à riohesses illi-
mdtées. C'est surtout avee ~'écoàomie classique que le postu~at de
la prolifération de ~'esp!ce humaine dans le ~Qng terme aura UDe
Brande p~ce à ~ ~imite des capacités de subsistance. Suocessivement
Richard Cantillo'n, Turgot seront hantés par oe prob~èl!le, lIlais le
p~us cé~èhre sera Malthus ( 1776-1834 ) qui devant "~es bas fonds
(r) F. PERROUX. l "L'économie des jeunes nations".
(2) ci té par ALFRED SAUVY l
"croissance Séro"/

- 43 -
de la m.isère" , l'am:,ène é
soutenir que 1.& population croit ae façon
géométrique alors que les subsistances ont ~. pragressian arithmé-
tique. C'est ce~te affirmation qui
. :f"<&1.t l'apologie du "Ban-
quet de la nature D dans leQuel on peut lire:
"Un homme qui es~ né
dans un œonde déja possédé, s ' i l ne lui est pas pessible d'obtenir
de ses parents des subsiistanoes qu'il peut justement leur dell!alOièer,
et si la société n'a nul besoin de son travai~, n'a. aucun Eiroit de
réclaœer la moindre part de la nourriture, et,
en réalité i1 est de
trop~ Au grand banquet de la nature, i l n' y a p;oint de couver vacant;
elle lui ordonne de s'en. s.1.1er, et elle ne tardera pas elle-dme à.
mettre son ordre à exécution, s ' i l De peut recourir à la compassion
de quelques oonvives du banqu.t. Si ceux-ci se ee~rent pour lui faire
place,
d'autres intrus se présentent aussitOt, réclament les mOmes
faveurs. La nouvelle qu~il y a des ~nts pour tous ceux qui arri-
vent,
remplit 1.& salle Gie nOlllbreux postul.e.nts. L'ordre et l.'harmonie
du
Festin son1; troublés;
l'e.bondance qui régnait précédemment se
change en disette et la joie des convives est anéantie par le spec-
tacle de la masère et de la pénurie qui sévissent dans toutes les
pe.r1;ies de la sal..:te et par lescl.ameurs i.m:portbè-e, -ide ceux qui sont
à
juste titre furieux <i.e ne pas trouver des e.J.iments qu'on J..eur avait
fait espérer."(I);
qui soulèvera ~ I9è sièe1.e 1'animositl expJLosive
de beaucoup de penseurs.
La riposte ~ de te-le propos esi; si violente contre cet égoisme
de celasse de. Ma1.thus,
que: Ù&ns ~es preehaines éclitians il. supprimera
l'apologue. ED effet, Proud'hon ironise "i~ n'y a qu~un seul ho-.e
de trop sur la terre o'est MaJ.thus D .(2)
Ms-rx a démontré que la "surpopulation" m.t.st nU'llement une ~ai
immuable et éternelle de la nature, mais uniquement une loi his;;orique
du lnoEle eapi;;aliste de production. Rn CilénoDçant les tenaDts russes
du malthusia~sme strouvé, BoulgakSv et autres,
Leniae a démentré
que la "surpopulation Glans la Russie agrioole s'explique par :la cio-
mnation du capital e1; non pa.r un décliÙ.age entre Jltacoroissement de
(I} Kal.thus. Ci:té pa.r A.l.:fre« SAUVY, "Croissance zéro".
(2) A. Sauvy,
"Croissance zéro".

- 44 -
l..a pop.ulation et celui des lBOyens d'existence".(I)
De nos jours, le dileune est teujours pesé; peut-il en être au-
trement? Ce.rtainement pas car ce sont ~s tares (contradictions)
mêmes de la société 'lui l'imposent.
I l faut no~er d-après l&5 sources statistiques citées par le
savant soviétique K.M:. MaJ..i.n que la surface ioota1..e de l.a. pl.é.n~:te
non compris l$s terres antart~ques serait de I,,60 ~lliarda d~hee­
i:ares et 1,45 mrl.lli.arda. de terres se\\Ù.ementsont cul.:tivées. (2})Tou-
jours de l'avis de Ma1.iD-, on peut nourrir 65 -.il..Jd.a~ds à 1:";0 1Imi.~::". ,,'
liards de personnes.
En possession de telles CliQ)nnâes, nous ne POUVODlS que donner 1.&
parole à Miche1l.. Chevalie r , flui. t raitant
le prob:Lèllle général. de 1..&
lPGpulation en 183,8, estimait que le globe pouva:i.t abriter I2 mUiards
d'hoDUl1les. En eff'e.t,
i l dira "s"il 'JT a pour la civilisatia)l'l un péril
à redouter,
ce n'est donc pas la fam~ne ••• La cause du mal est bien
plus dans les exigences de nos eerve~es et de nos nerfs que dans
celles de notre estomac. La population para~t aurabondante seulement
parce que à. càrta.ins moments,
à cause de l'iDllPrévoyance socia1e, à
cauae de la vicieuse organiaatiolll. de 1.' industrie, à cause de 1.' im-
perfection des règles qui gouvernent les relations inte.rnationa1.es,
un morne silence succède dans 1..es e..1ieliera à une activité démesurée
et que l.es bras se trouvent sans em.ploi sans que rien ait été pré-
paré pour subvenir à la faim et là. la soif des travailJi.eurs pendant
la durée de ces dép~rables entractes.~(')
En d'autres termes,
c'est l.'égo!s~e àes peuples qui serait à
l'origine de nos maux. C'est poursuit-il,
lien substituant au paupé-
risme un. bien-être permanent e: régulier, fondé sur le travai~ que
l'on verra s'évanouir tous ~es inconvénients attribués ~ 18 .opula-
tiGn par bea.ucoup d' éco.noms"te.a. Il (4)
Noua allons essayer de v~ir c~mment se présente 1& situation
déBl:Ographique en Haute-Vo1ta, a.:f'in de nous faire une O'pini.OJl). eoncrè-
te du p.robUm:e.
Lénin~: Oeuvres T. l, édition russe, p. 458.
K. M. MALIN ,
"FOID RES$OURCES; OF THE EARTHr" cité par Bour<cie:u de G;arbon
in "Zléments de démographie économq1ie".
M. CHEVALIER, cité par Bourcier de Garbon in "Elément de déI1lQg~aphire;
économique"
Idem.

- 45 -
PARAGRAPHE II: Situat~on démographique en Haute-Vo1~a
La surface de la Haute-VQ~ta, COllllRe celle de tous: les pays afri-
cains n'est pas une donnée homogène.
Si. ces disparités lece:les-':peu-
vent se définir coœme de. inéga~tés de to~te nature qui apparaissent
entre différentes zones d'un mêm.e espace,
il.. es't cer~a:in qu'on re-
tr()uve .,même des disparités dans -toutes h e l.ocaJ.i tés et régions du
pays. Le déve1.oppement(si on peut s'exprimer en termes de déveJl.op.pe-
Dent) éeonomd.que et social. st est opéré $.1; st opère à des rythmes dif-
férents à l'~térieur suivant les localités e~ les régions. Ce qui
signifie que certaine encilroits son.t propices là 1.& preAuc'tion agricol..e
tandis que d'autres sont fav.rab~es aUJlt,-é.c"h~es. Las populations à
~. image de 1.' hétérogénéité dupQ7B so:m.1; inégal..eu_nt r.parties à iJra-
vers l.'étend.ue du t.erritoire.
La Haute-Volt.a aveœ une population résidente estiaée en 1977 à
environ 6 200 .000 habitants se répartit cOIIIDle nous l'indiquer~ le
tabhau qui s.uit, dans onze départements eorrespendant aua Ôvl~~ li50IJe-a
dites économiques (ORB).
Comme le tableau nO 4 nous~indique
_
<Jl.la densité de la p·opu1.ation
rurale (populat.ion. des g~ands aentres non compris) varie seÀOn les
régions, atteignant dans certaines zones rurales,
surtout du ]i)iliateau
Maa,si 42,2 à 35. l ha/k:D2 pour tOllliber à. 27,9 ba/1œJ2 cila.ns le centre
Est
(Koudougou),
7ba./k:s2 dans :la région. cie Esàa N'Gourma et 6 ha/1araJ2
dans celle de D~ri. Mais d'une manière générale, :la densité dans la
région Ouest du pays est faible bien qu~' en oonstante augmentati~
du fait du phénomène migrat.oire interne qui semb1e prendre une cer-
taine ampleur ees dernières années. La pop.uJ..a1;i.on rurale volta5:que
contrairemœnt à ee qui caractérise tout. pays en développellliSnt eS1;
àemeurée stab~ par rapport à la pepulation tota1e. E~e représente
~es 95% e1; se r.épartit dans 7000 vi~l..ages environ avec un nombre
d'exploitations familiales estimée actuelleaelll.t ~ 530 000. Le -taux
de population urbaine ne reIlrésente donc que 5%. I l y a aependant
quelques centres urbains importants.
",,..1

- 46 -
Tableau 0°4: POPULATION RURAL ET SA DENSITE PAR REGIONS.
,
,
l'
r,,
REGIONS
POPULATIONS
f
, SUPERFICIE
1
(milliers.) -t;
f
,,
(milliers
km2) -
1I,
Ouaga. (r)
847,6
24,2
3:5.1
ya.-te:ç.sa Est
53I,5
12,2
42.2
- -
Kaya
592,6
21,3
27,8
Kdgou (r)
719.3
26,3
27,9
Koupéla
272,6
9,0
30,2
Sahel.
259,6
36,9
7,0
Fade.
287.1
48.0
6,0
Bobo (1)
326,4
28,3
II,5
Volta No:ire
479,4
29,6
16,2
Bougouriba
350,0
17;4
20.6
Banfora
I80.0
18,3
9,6
total.
4856,1
272,0
234, l
(1): Sans compter la popula-tiao des vi.lles
Source: chiffree tirés de rapports des ORn pour la oa,mpe.gne
1972 / 1973
Banque Mondiale:
rapport eur l..a. Haute-V~Ji..-ta 24/5/1976)

... 47/ -
Tableau n05
CENTRES URBAINS
POPULATION
Ouagadougou
130 000
BQDO Diou1a.sso
102 000
Koudougou
43: 000
Ouahigouya
2I 000
Kaya
15 000
Banf'orah
10 000
Fa.ta N'Gou.rma.
la 000
Selon les statistiques cile l.'organisation Mèndia.JLe de la Sant'
(OMS)
Les densités humaines élevées de ee. pays eontribuent sans doute
à expliquer le fort peuplement ciles localités urbaines.
Jacques: Bu-
gBricourt,
anaJoysant la faible urbanisation de ]L'Afrique souJ!.i.gne à
propos de la Haut.e. Volta que
,"le -taux d-'urbanisation atteint 21,5%
dans la 7è région (139bo-Di.0u1..aSSG) et :tI% dans l.a 1ère région (eel.1.e
de Ouagadougou);
à
ceci s ';opposen-t les taux extr8m.elllent faibles de
la 2è région (Ouahigouya)
et 1.& 8è
(K8Yfl);
respectivement 2 a-t 2',1%.
fl nI en r.esta pas moins q~e :pa.: raI?~.~rt à. l.a.. C8:te d'Ivoire et au
GhaJ:La".<?ù les. ~a~ d"urb~nis~~on_atteignent 177,8 %~t 17:'.% la. lIDautfal-V0Jlta Q,"Vlii)O
A,Y 'fa', ~&±-t 'fJ.gurell' tout entJ.811'e de zones sous..aéve]O'Ppées~'(I)~-
Dans un pays cOJlÛDè la Haute-VQ1..ta , Jo." é~uipem:ent
essentiel. d' un es~ce
en déve.loppement, c'est la ville.
Ainsi l.es taux d'urganisa-ti.on pren-
nent i l s va1..eur d'un indice "privilégié".
(1) Jacques Bugnicourt: Disparités régi.onales et Aménagement d~
territoire en Afrique";
Institut d'A.dmi.nistra-tion Pub.1.ique,
p.
25

-·48
La. Haute-Volta vient en tête à l'échelon mondial pour les taux
de natalité pToches de 5o%c.par an. et de mortali.té de l.'ordre de 29%0
par an, ce qui donne un taux de croissance délDiographique de l'ardre
de'2I%o . I l faut ajouter que l'espérance <le vie se situe entre 33 -
35
ans en moyenne. La popuJ..a.tion vol.ta1que. as-t très jeune et près de
52% d'entre elle a moins de d5 ans avec una population active qui
s'évalue ~ 2.625 œdllions.
La Haute-Volta se cara.ctérise aussi par la très grande dIversité
de ses groupes ethniques. On en dénoabre une soixantaine dti.por~ance
riuni$r:i.que inégale. Traditionnellement, on dd.:stingue deux grandes
fami~s qui sont: d'une part, la famille vo~ta1que c08prenant no-
tamment les Mossis, les .r3obos" J..es GQurmantehés, l.es Labi.s, les
Gourounsis,
etc ••• et d' aatre part la. famille Mand,é,qu:l regroupe les
Samos" l.es Markas, les Boussanssés, les Sénoufos, les Dioulas etc .••
I l faut également mentionner l&s Peu1.hs,
grands éleveurs qui occupent
surtout le Nopd du pays. Avec plus de 50% de la. popuJ..ation g1obale,
les Mossis forment le groupe éthnique le plus nOllllbreux. Cette diver-
sité ethnique qui devrait oQrrespendre à. une trios grande richesse
sur le plan culturel, est souvent exploité d'une manière anti-natio-
nals par la couche dirigeante et des classes politiques ~ansSsrupu~es.
Quant on sait qu'il se trouve aujourd'hui des hommes politiques in-
eapabJ..es de se doter un fief électoral et une popularité à. l'éohelon
nationù, utilisent cette di:versi té ethnique et régionale pour entre-
tenir et dé"lelopper un régionalls1ll!lle aigu et néfas·te à l'avancement
du processus d "édification de la nation va.lta1que. Cette pratique
pensions nouS était l'apanage des col~ni.a~stes qui s'en servait RQur
diviser afi.n de mieux exp1.oi tér et domd.ner. Face aux pro,portions
grandissantes du phénomène trïbaliste et régioDaliste dont se sont
rendus responsab~es les classes dirigeantes durant les périodes élec-
torales (Avril et Mai 1978); les E~êques de Haute-Volta réunis en
Conférence EpiscOopale devaient rendre h.ommage aux militants qui ont
oeuv:t'er pour l'avènement des libertés démocratiques,
et marquer leur
indignation en ces terœes:

- 49 -
Il'Nous regrettons cependant,
et nous :Les dénoD.çQo.s cOBUIIe indignes
de notre peup·le .. certains faits hautement eondaœna.bles qui. sont venus
asa~brir notre horizon poiitique:
- violence verbale,
et parfois physique;
- médisances et mensonges;
calomnies et injures;
e.xploi tation indécente de aoe différences' etbniques
régiona:Les et religieuses;
-
corruption des consciences par l'argent.
CQlfl1!bien nous aurions été heureux 1là dire que les chré*iens au moins
se sont mieux oom.portés; qu'ils ae son.t rappe:~és ~eur lD'issiom à' être
nle sel de la terre Q et la "lWl'l.d.ère du m&nde a ,
et p$1ursuivent Dl.lus
:Lain pour tirer une des conclusions signifiaatives pour :Les persp.ee:-
tives d'avenir du pay~ et nous font savoir ceci:"nous ne so~s pas
snrs
que tout est fini. auJourd'htui. Car ~e earaotère: trop persQnne~
cie la eampagne élect~rale semble avoir creusé des plaies qui ont
peine â se cd;ea~rf's-er.ll' (1)
Voici une ~ustration é:Lo.quente de ~ façon dont la oLasse dir~­
geante arrive à s'inverstir du mandat du peuple pour le .onduire verS
son Il bonheur Q •
Bref,
inet.errogeons-nous maintenant sur le r8le., de la
population agricole e:4J d a n s " propre subs/istance?
PARAGRAPHE III: Population et pro.duvtiQn.
Notre but est devoir dans quelle mesure un accroissement démo-
graphique se répercute sur un certain ~bre de structure. Notons
qu'à propos de st~ucture, F. Perroux écri.t: "la structure d'une unité
économique est lFensenb1e des propositions et re~tions qu~ caracté-
rise cette uni.té dans des conditions et à un Dom.ent .onné~ prop.ortiona,
c'est à dire importance relative des élkments qui eoœposent :L'unité
économique éxaminée,
relations- c'est à di.re,
rapPCl)·rts.: .(idi s' 'frablia-
sen.t entre les éléments qtÙ. œ:onsti tuent une uni t~, d "une' part, entre
(I} Message des Ev8ques de Haute-Ve1ta à l~ ••oaaion de la Fête de
l'Asso.ption.
15/9/1978.

- 50 -
cette unité et d'autres unités éconQmil\\f.ues d'autre part."(I)
Les structures en question ici seront celles de la population
rurale aU niveau de la production agricole.
La. su:perficie totale de la. Haute-Volta couvre 27.4 millions d'hec-
tares CO~prenant 2,2 millions d'hectares de terres cultivés auquelles
s'ajoutent d,8 millions de jachère et 13,6 . i l l i . n s de patura~es
naturels, enfin 2,8 millions d'hectares consacrés à d'aut'res usages.
( 10%)
(èônfèré
tableau ci-dessous)
Tableau n06: UTILISATION DES SOLS EN HAUTE-VOLTA.
1
!
Millions d'ha.
% de 1.a. superficie
1
1
Culture
2,2
8
Jachère
8,8
32
Pâturages
I},6
50
Autres
2,8
ra
Total
27,4
100
30urce: Banque Mondiale: Rappor-t- nO
10686;
UN 24 Mai 1976;
L'agriculture emploie presque toute la population .ais n'utilise
que 8% du territoire alors qd'on sait qu'au moins plus àe 70% des
terres sont labourables.
Noabreux observateurs estiment que 1. pays
(r) Fo PERROUX
(déjà cité). f.~).J

- 51 -
connait un rapide accroissement démographique qui risque d'aggraver
la MQsère déja intenable de la population.
Cette reœarque est selon
nous vraie seulement dans le contexte actue~ non dans une réelle
politique agric0~e qui intègre ~ variable démographique,
comme un
é~éaent puissant et nécessaire de demande oroissante et de tout dé-
velœppement. Pour nous,
les 6 milliCi>ns de vo~ta:tques .~ sauraient &tre
le faet·eur fondam.eJ;l:ta~ de la pauvreté en Haute-Vol:tA.
(Les vrais
facteurs se trouvent ailleurs et nous y revienàrons p~us lo~n)
Pour mieus nous convaincre, examinons le ~aùleau n07 (page suivante)
qui synthétise :p~usieurs tahleaux
élabor6s par le progra.ae cie la
1
Banque Mondiale dans son rapport nOIO 686. uv.
Selon les nouvelles données avec une super:f'i~ie de terres 8ultivées,
la production dé céréales pa.sse de 870 000 ~onnelJ à 1';698 000 tonnes,
soit .une progression de 188% , à peine le àouble. Ces résultats 80nt
obtenus. à pe,rtir de la pluparr des bas.-foncis· ms en valeur. Ces ])OS-
sibilités optimistes ne résistent pas à une réalité quotidienne.ent
vécue par les po~ulations rurales dont le sort est remds entre les
lDains de la chari té i.n.ternatio,nale.
L'indice de la pr~duction agricole nous renseigne davantage sur
la situation dramatique de la popu~tion rurale et .onfirae la ten-
dance selon laquelle ~ population
surtout rurale est passée d'une
économie de subsistance à une éconoœ~e de survie et la suite .••

- 52 -
'l'ableau n.O 7: PRODUCTION ACTUELLE ET PREVISIONNELLE (selEm ]Les nou-
veaux rendements obtenus)
1
= = = =
- - - =
- =
- =
- = =
- - =
- =
- =
- -= =
, =
- =
- ; =
- =
-
=
-
= =
- = =
- -
= =
- -
= =
- =
- = ~
- -
=
- -
Superficie
Productio
Rende.ents
Production
normale
sols am:élio-
prévisionne
res
(milliers)
(B1.:illiera)
kg/ha
nles donnée
=-=-=-=-=-=-
======
= = = = ~
= = = = = =
= = = = =
- - - - -
- - - - - - - - - - - -
Céréa.l.es
1.883,2
870,0
870
1.638,4
Mil
771,4
265,6
Sorgho
1.050,7
512,3
M.a.:ts
80,9
58,6
Riz
40,2
33,6
3.500
140,1
Divers
338,2
Arachide
104,7
66,04
Coton
70,1
32,6
700
49,07
Autres
163,4
=
= = = =
= = = = = =
= = = = = = = = = = =
= = = = = =
- - - - - - - - - - - - - - - - - - -
- - - - - - - - - - - -
;,ourcà: 13anque Mendiale; RaP'1;>ort nO ro 686.
av.

- 53 -
~ableau nP8: INDICE DE LA PRODUCTION AGRICOLE. 1967-68/1971-74 (1)
(19$9-70 = IDa);
1967-68
1968-69
1969-70
1970-71
1971-72
1972-1"-
1973-74
Mil
91
87
100
90
.82
72
72
Sorgho
98
97
100
90
85
91
88
Maïs
96
96
~
100
80
96
86
84
,
Riz
92
. .
97
100
87
95
87
80
Arachi-
96
96
100
83
85
80
81
des
Sésame
38
63
100
50
50
75
63
c~ton
47
89
100
67
81
89
75
'roduc;1lion
agricole
TOTAL
88
94
100
88
8!J
83
81
"
(I} En prix constante de 1967
Source: Rapport Banque Mqndiale. Rapport nO 10 686; NV .

- 54 -
Devant ces chiffres.,
est-il beso·in de remettre en cause 4
pression
démographique? si aê.me Gn constate une progression cont:inue de certai-
nes cultures de rente, et une régression ~Qntinae .es cultures vivriè-
res
(mil,
sorgho, mats etc .•• ) Beauc$up à'études àéaontremt que la si-
tuation catastrophique des populations africain&s est loin d'8"tre le
fait de leur no.bre, mais réside bel et bien dans l'orientation poli-
tiCiue des pays (souvent impGsé de l'extéri.eur). A ee propos, eroissano.e
des Jeunes nations écrit que:
"sur la fer"ti.lisation des' so·ls,
on a
démontré à Baabey au. Sén.égal qu "une Bi.p.~e amélio.ration des techniques
de travail de la terre (enfouissement des tiges de mil), pouvait amé-
liorer Les rendements.
Le mil qui donnait en Casamance tIOO kg à l~hec­
tare y fournit 2500 kg; les rendements de sorgho passent de la .~me
façon de r600 à
2200 kgl hectare.· Avec ces rendements,! i l suffit d' r/6
de la superfivie cultivée en Haute-Volta pour obtenir la production
actuelle.
Il. nous est difficile de soutenir la.. thèse "de la cro·issance
démGgra:phique engendre la :pauvreté ft qui e st en fait une' couver"ture de
1
la réalit.é voltatque et des agissements de ceux qui s&nt là. l a base
.ême de la "pauvreté légendaire de la Haute-VQll'ta".
D'ailleurs l,'exem-
ple de la sécheresse a permis aux. honnltes gens de prendre un peu
conscience de la face cachée d'une certaine "coopéra"tion" et de s'ex-
primer clairement en ces termes.
1
Ilpa,r ailleurs,
certaines études,
certàins: pro.jets de "sau-
vetage" des régions sahéliennes paraissen"t avoir pour ebjet
Zee:
moins la restauration et l'améliorati.on des condittions de vie
des populations sinistrées Elue l'implantation sur ces "terres
commodément vidées de leurs oecupanta,
d'une agriculture et
d'un élevage à haut rendement,
destinée à l'al~entation pro-
chaine des pays riches,
dans la perspeotive d'une pénurie ali-
mentaire mondiale.
Les populations frappées par la fe.m:ine,
dépendant entièrement dans ce désa.stre des décisions des pays
capitalistes semblent d.evoir ainsi souais& aux. impératifs de
l'économie de prGfit jusque dans leur pire détresse."(I)
(I)CROISSill~CB des Jeunes Nations - Mensuel N° 160 -Juin 1975.

- 55 -
On comrend bien dans ces cond~tio1l!.S que nous ne pouvons pas sousc:L"ire aux ana-
lyses qui, certes, partent des réalités pour les masquer en leur interprètant
de façonmalhonnête et confuse. En ce sens qu'elles prennent pour fondamentaux
les facteurs qui ne sont en fait que résiduels pour ce qui est de parvenir à
Ü.ssurer l Céquilibre : population-ressources. Selon nous, le problème qui se pose
c'est de savoir comment la variable démographique s'intègre au système éducatif
afin de déclencher le processus d~émancipation des hommes qui seront incontes-
tablement la base d'une plus grande rentabilité de la population dans les cir-
cuits écono~q~e-notamment dans l'agriaulture.
CON C 1 U S ION
Nous retenons des analyses de ce chapitre préliminaire, que trois secteurs
structurels (secteur traditionnel, secteur public à activités économiques dites
nationales et le secteur des firmes étrangères) ou trois zones coéxistent dans
presque tous les pays africains.. Ces trois serleurs, d' importancre et de struc-
tures très différentes ne sont pas encore entrelacés et pouvant se stimunler
mutuellement ; les liaisons de complémentarités techniques restent négligeables.
Chaque secteur, pris en lui même, manque d'homogenéité économiques et de c~hé­
sion sociale. 1e seoteur industriel national, faible en général, manque d'arti-
culation interne: il traduit une mosaIque d'activités parallèles autonomes.
Par conséquent, le schéma de développement par entraînement réciproque et
pÜ.r induction se montre totalement inapplicable dans l'espace des pays africains.
Fait plus grave, ce secteur dit national couvre généralement les usines alimem-
taires et de consommation, et peu d'usines d'équipement. industriels. Souvent,
par interpénétration des capitaux, il glisse de façon irrésistible dans l'orbite
du capital étranger. Le secteur des firmes étrangères demeure, pour lenmomelIlt,
une enclave extravertie combinant du capital étranger à une main-d'oeuvre inter-
ne sous-payée ou à une matière minérale brute d'exportation. lCéchec des sociétés
l
,
minières étrangères en Afrique Noire mérite l'attention des responsables politi-
ques. Trois secteurs coéxistent dont l'indépendance et le couplage dynamique
n'ont nulle part dépassé le stade du projet.
1
Une question fort importante semble se poser avec une acuité croissante.
Il ne suffit pas de discuter d'interdépendance et d'articulation; un problème
préalable, inaperçu jusque-là, modifie les perspectives: l'articulation n'est

- 5"6-
pas 90ssible si l'on prend ces trots secteurs en leur état actuel. Chaque sec-
,
teur, avec: ses structures spécifiques et sa mentalité, exige une évolution et
l'articulation n'est souhaitable et profitable qu'au point de convergenoe &e
de l'ensemble de ces réformes~ Coupler des secteurs à puissanoes économiques
et socio-poli tiques tellement différentes conduit tout simplement au mair:"i;ien
des structures du sous-développement et des mécanismes d'exploitation de la mas-
se paysanne.. Cela est d'autant plus grave qu'un autre clivage désarticule la
société : celui qui s'epare de plus en plus la ville de la campagne..
La persistance de l'inarticulation économique et l'approfondissement des
différenciations sociales menacent très gravement le développement rationnel
et équilibré dans de nombreux pays africains.. Les struc~es sociales portent
une responsabilité, cependant les causes économiques paraissent prédominantes
dès lors que l'on se plaoe dans l'optique des pays sous-developpés. L 'on est,
souvent surpris par l'incohérence et l'insignifiance des politiques mises en
oeuvre, mais très certainement les pressions venan~ de raxtérieur ne sont-elles
pas négligeables.
L'incapacité actuelle de s'orienter courageusement vers une industrie'
appuyée sur l!~agriculture et tournée vers l'intérieur, bien des p~s risquent
de gâcher leurs meilleu:s cartes. Les obstacles ne sont rien insurmontables mais
supposent
des conditions préalables à réaliser. Une économie asservie à des
intérêts étrangers dont l'action pourrait perp~\\tuer l'inarticulation ; elle
est condamnée à la spéculation improductive et menacée de stagnation et de re-
gression~ Pire,l'inarticulation et ses sous-produits, dans la mesure Où ils con-
duis~nt à une mauvaise rapartition des facteurs ou de ressources, metteAfen ques-
tion l'avenir économique et politique même de la société.
C'est devant ce constat d'échec amer des modè~es de développement mis
en oeuvre en Afrique au Sud du Sahara, qui nous conduit à aborder l'important
problème du aéveloppement rural à travers le cas concret de la Haute-Volta. Le
but de cette deuxième partie est de partir d'un regard sans complaisance sur
la situation réelle de l'agriculture voltaIque et les perspectives qu'elle offre
pour des millions d' hommes en état de survie
Celé analyse aura cettes, des. iI!l:-
9
suffisances, mais ce n'est qu'une ambition d'approche et nous ne pouvons aucune-
ment avoir la prétention de vouloir cerner dans toute sa complexité la réalite
Vivante villageoise.

- 57 -
~ R • MIE M E PAR T l E
LE DEV~PPEMENT RURAL EN\\CRISE EN'J ~UTE-VOLTA.
La grande sécherŒSse qui s'est abattue sur les zones sahéliennes d'Afri-
que tropicale depuis 1969 coïncide à la fois avec une crise de monopole des
sociétés de l'ex-puissance coloniale vis à vis de leurs concurrentes en Afri-
que et une crise de l'agriculture vivrière provoquée par la politique agricole
appliquée dans les pays sahéliens d'expression française. Inscrite dans oette
double conjoncture, ses effets ont acquis une portée qui a dépassé les pro-
blèmes immédiats des populations sinistrées et qui menace l'avenir.
En effet, les anciennes colonies ~ricaines converties en Etats indépen-
dants, se' trouvaient datées du privilège de nouer librement des reàâ.ions
avee n'importe quel Etat dans le monde. Elles étaient cependant retenues dans
l'orbite des intérêts de l'ex-colonisateur par leur insertion dans une zone
monétaire qui les àépouille de toute initiative éoonomique, par des accord~
dits de coopération très étroits, par l'aide liée, permettant l'encadrement
de
de la production agricole commerciale ainsi que l'enseignement par des "assis-
tants" techniques qui livrent en priorité l'industrialisation aux capitaux
français.
A l'instar d'autres pays du globe, la Haute-Volta n'est pas isolée. Il
y ~ inter-dépendance, plus, dépendance des uns par rapport aux autres. Les
comportements sont variée: les uns sont d'adaptation, les autres de tactique
et enfin de stratégie. Dans ses relations avec les pays développés, la France
en l'occurence, la Haute-Volta a un comportement d'adaptation; c'est l'exem-
ple du pays dominé, sous-développé, ayant son économie tournée vers l'exté-
rieur, ce qui s'explique par son histoire.

- 58 -
Ces relations ne sont rien d'autre qu'un réseau de diffusion
des crises
qui secouent actuellement le monde dans sa quasi-totalité. La hausse des prix
des proàuits importés, la baisse constante des prix des· matières premières
d'origine agricole n'~ sont que quelques manifestations. Ces manifestations,
dans les p~s sous-développés dont la Haute-Volta fait partie intégrante, Qon-
duisent à des tentatives d'élaboration de ~esure d'atténuation à partir des
conf'renoes internationales comme par exemple celle sur le Nouvel Ordre Econo-
mique International.
Au plan international, la Haute-WoHa se situerait dernière ou avant-der-
nière des 25 pays les plus pauvres du monde, selon le olassement des spéoialis-
tes de la :B.l.R.D. et des Nations Unies.
Les oapitaux d'origine étrangère financent en réalité la totalité des
investissements, sans parler de leur apport sous une forme affectée ou non,
au budget de fonct~onnement. Dans le domaine économique, les interventions
gouvernementales se limitent l l'aménagement des struotures d'accueil, suscep-
tibles de drainer auprès des organismes de financement, les fonds nécessaires
& la réalisation des infrastructures~ et à un rÔle d'incitation auprès du
capital privé, en joignant les "apports" de l'Etat à ceux des grandes sociétés
européennes ou américaines. Cette dépendance à l'êgard de l'étranger, dans le
domaine de l'infrastructure agricole, es~presque tŒtale. Or le secteur rural
est considéré comme le moteur de l'économie, ocoupant près de 85~ de la popu-
lation active et contribue à raison de 50% ~ la formation du P.I.B.
P'ourtant, depuis l'indépendance formelle de 1960, les efforts développés
dans le secteur rural restent nonlplanifiés sinon' fragmentaires: dans la pé-
riode du ~lan-Cadre (1960-1967), on a assisté & la création de différentes
institutions dont les activités devraient avoir des inoidences
sur l'organi-
sation du milieu rural. En effet, une lettre circulaire du 6/10/61 lancé par
le premier gouvernement, met l'accent sur la nécessité de monétariser l'écono-
mie en même temps que de faire appel aux capitaux privés par une "législation
appropriée" susceptible d'inspirer confiance aux investisseurs. La Banque
Nationale pour le développement (B.N.D.) qui a été oonstituée le 21 Mai 1961,
devait intégrer dans ses attribution$ le rÔle de crédit agrioole. L'office de
Commercialisation (O.F •.C.O.'M.), dont la fusion plus tard av:ec les Coopératives
Centrales de Consommation de Raute-Vo1ta (C.e.e.R.V.) donnera naissance à la
société voltaïque de Commercialisation (Sovoloom). Toujours durant cette

- 59 -
période du plan cadre, et dans l'esprit des aacords de coopération, le F.A.C.
(F.I.D.E.S. sous la colonisation) interviendra par le canal des sociétés d'in-
tervention telles la C.F.D.T. (Compagnie Française pour le Développement des
Textiles) qui devait"favoriser le développement des productions agricoles par
l'introduction d'innovation$'. A partir de 1966, la décentralisation! du pou-
voir aussi bien politique qu'économique amènera progressivement l'organisation
administrative et économique du p~s à s'articuler autour de onze Organismes
Régionaux de Développement (O.R.D.) et dix départements.
La résistance des paysans à toutes ces formes d'innovations a aboutt à
un constat d'échec. La sécheresse des années 1968-1969 dont les effets ont été
ressentis durement en 1972-1973 a fini par faine prendre conscience au monde
entier des problèmes des pays sahéliens dont fait partie la Haute·Wolta.
Cette mise à nu de l'échec de la poursuite du schéma de développement
colonial aux yeux de l'opinion internationale a conduit les responsables à
prospecter de nouvelles formes d'interventions sans une remise en cause des
anciennes•. C'est dans ce cadre qu'il faut situer le renforcement et l'exten-
sion de l'U.V. O.C.A.M. (Union voltaique des Coopératives Agricoles et Marai-
chères) et la mise en route de l'important projet d'envergure nationale: l'A-
ménagement des Vallées des Volta (A.V.V.). Notre but, dans la présente étude,
est de cerner les facteurs qui sous-tendent les difficultés que connait le
développement rural et de voir les voies et moyens pour les surmonter.

- 50 -
CHAF l
s LA PENETRATION DU CAPITALISME DANS LES STRUCTURES SOCIO-EXroNOMIQ.UES
ViILLAGEOL3ES ID' SES CONSEQUENCES
Voilà plus d'un demi siècle que la communauté villageoise suscite des rérac-
plus
tions les/diverses, se traduisant par des jugements contradictoires quant'à sa
nature et à ses perspectives historiques.
Les uns y voient une sorte de barrage "proteoteur" presque une panacée con-
tre la pénétration de l'injustice sociale et de l'exploitation au seinde la pay-r
sannerie, une sorte de voie wers le "socialisme paysann" et préconisent en con-
séquence de la préserver et de l'entretenir jalousement.
D'autres, au contraire, vouent la communauté aux gémonies, la denonçant
comme un anachronisme ignorant le cours général de l'innovation et du progrès
technique, ainsi que l'évolution sociale du monde actuel,. isolant de vastes ré-
gions rurales à économie de subsistance traditionnelle et archa!que.
Dans les doctrines de ce genre, la communauté n'est pas seulement un syno-
nyme, mais même la cause principale du reta~ social et économique, les pers-
pectives de progrès social passant par son abolition, par la lutte contre les
instittutions villageoises. D'autres encore préconisent et appliquent l'indif-
ference envers la communauté qui, selon eux, trouvera elle-m@me le sort que lui
réserve l'histo~ dans le cours de transformations sociales et économiques ve-
nues à maturité.
Bien entendu, ce se~ait simplifier le problème que de donner d'emblée la
la préférence à l'une de ces thèses. Chacune d'entre elles prend appui sur un
énorme matériau empérique et reflète tel ou tel aspect de Itinter-action des
institutions villageoises avec la réalité sociale et les tâches sociales des
qui s'affranchissent du joug de la domination impérialiste.

- 6-1 -
En ce qui nous concerne, il ne peut être fécond que l'examen dynamique de
la place et du rôle que tient le village ou la communauté dans le processus d'a-
bolition radicale du retard historique des pays dépendants comme la Haute-Volt~
Une telle approche nous permettra d'apprécier les points de vue sus-menti0nnés
COM1VfE UN REFLf!."'T DE CERTAINS ASPECTS inter-dépendants de la communauté, qui ne
peuvent qu'ensemble exprimer sa nature socio-économique avec assez de plénatude.
Etant donné l'alternative des deux voies de développement social et économi-
que à laquelle sont confrontés les populations des p~s qui se libèrent, le pro-
blème de la comptabilité de chacune de ces voies avec des structures et insti-
tutions villageoises acquiert une grande portée non seulement théorique, mais
aussi pratique. Nous tenterons d'appréhender, dans une optique économique, le
jeu antagoniste, passé et présent, entre les structures dominées et structures
dominantes à l'intérieur des économies villageoises.
Paragraphe r s LES SURVrVANCES DES STRUCTURES socrO-ECONOMIQ,UES VILLAGEOISES.
L'économie villageoise d'aujourd'hui s'identifie de m '.oins en moins à ce qu'
elle était il y a trois quarts de siècle. Elle n'a pas atteint pour autant une
nouvelle situation d'équilibre. Bien entendu d'anciennes structures lI s écurisantes ll
s'effondrent; de nouvelles tardent à émerger. La société villageoise se trouve
dans une phase transitoire, mais encore chargée des contraintes et les inerties
traditionnelles. En fait, la communauté villageoise s'oppose au capitalisme et
même lui lance un défi moral les éléments d'égalité et la possession collective
d'une partie des biens, l'esprit ~'entraide qui se sont figés en elle constras-
tent d'une manière flagrante avec l'approfondissement de la differenciation
sociale et l'exacerbation de la concurrence dans le monde capitaliste.
La pénétration du capitalisme dans les campagnes a pour conséquence l'appa-
rition lente mais irrésistible des forces nouvelles qui sécouent la société
villageoise. Elles constituent les vecteurs d'une économie villageoise nouvelle
c'est à dire une éco~ie rurale 3 caractère occidental. Cette situation parti-

- 62 -
culière nous amèhe à constater un "dualisme" à l'intérieur de la communauté.
Cette contradiction interne est due génétiquement au fait que la communauté ru-
rale se trouve être un phénomè~e social caractéistique pour la période de tran-
sition entre la structure sociale des communautés villageoises et la société
de type capitaliste. Elle se situe pour ainsi dire à leur croisement comme nous
le confirment les reflexions imaginées d'un vieux de village sur cette nouvel-
le situation: "aujourd'hui, on est comme devant un carréfour ! on ne sait pas
quelle piste prendre ! quelle est la piste de la vérité?
On a mts quelques uns de nos enfants à l'école pour qu'ils ga-
gnent une place et rapportent de l'argent. Mais maintenant, a.'est
chacun pour soi, tous ve~lent partir ~t ils sont tous perdus
pour le village !
depw.is que les "blancs" sont venus, ils nous ont appris à aimer
l'argent plus que les hommes! aujourd'hui, il n'y a plus d'en-
tente··
~lors maintenant, on est trop découragé. On est comme un homme
qui pvend une corde et court en brousse pour aller se pendre! ••• "
(1 )0
Peut-on arracher cette corde et aider les villageois à traouver la bonne piste
sur laquel1.e s' eneager '?
Sur quelles bases nouvelles "sécurisant es" les ru~raux, les 95 % de la popu-
lation volta!que, peuvent-ils s'appuyer pour être réellement participante à la
construction d'un développement harmonieux ?
Dans l'Etat actuel des choses il semble difficile de trouver dans la scola-
~isation, l'alphabétisation, la vie urbaine, les éléments nécessaires qui puis-
sent sortir le paysan de son impasse. Examinans la communauté villageoise elle-
même.
(1) G.R.A.A.P s Groupe de Recherche et d'Appui pour l'Autopromotion P~sanne ;
"pour une pédagogie de l'autopromotion" ; P.IO - Hiaute-Volta
Bobo BP 305.

- 63 -
Comme nous'l'avons indiqué dans notre introduction générale, la communauté
villageoise renf'erme des f'orces de l "inertie emrore prédominantes, mais aussi
des f'orces novatrices qui s'attaquent aux premières c'est à dire aux struc~es
ant iques et aux hiérachies ancestrales. C "est pourquoi, nous est imans que la
communauté rill~eoise est "cousue'" d'ambigu'ltés, si non de crontradictions :
porta
d'une part, elle) tel l'escargot sa maison, les antiques traditions d'entraide,
de démocratie spontanée dans le règlement des af'f'aires sociales ; alors que,
d'autre part, l'inf'luencre de la société industrielle se traduit par la dif'f'eren-
ciation des f'ortunes et, par suite, des couches sociales, par la transf'ormation
graduelle des institutions traditionnelles au moyen_ de la monétisation de toute
la vie villageoise et l'obligation de payer des impôtso
La communauté est déjà sortie de la société primitive, mais elle semble "ré-
sister" à l'entrée dans la société de classe. "La communauté agricole, écrivait
Marx, étant la phase ultime de la f'ormation sociale première, est en même temps
la phase de transition à la f'ormation séconde, c'est -à~dire le passage de la
société reposant sur la propriété privée••• "(1). En clair le caractère
contra-
dictoire de la aommunauté est une invitation à l'utiliser pour réaliser des mo-
dèles opposée de développement social et économique. Ainsi les autorités de la
période post-coloniale tentent aujourd'hui encore, de spéculer sur le penchant
de la paysannerie pour les f'ormes colleotives de gestion, de "diss1muler" dans
les traditions communautaires la base de leur parasitisme social (ce qui va jus-
qu'à la création de pseudo-coopératives af'in d'obtenir des avdntages et des cré-
dits de l'Etat: cas des UJUMAAS en Tanzanie).
En Af'rique, certains leaders de plusieurs pays au Sud du Sahara, avaient d'a-
bord considéré la prédominance de la communauté dans les campagnes af'ricaines
comme une sorte de panacée contre les conf'lits et les antagonismes sociaux,
gàrantissant en<.quelque sorte le "naturel" du développement socialiste. ''Mais,
bientôt, les dif'f'icultés qui avaient surgi "dévaluèrent" dans une certaine me-
sure ces espoirs en un développement spontané et sans encombre dans cette voie,
forcèrent à parler de la lutte de classe à la ville et à la capagne, puis d'au-
(r) K. MARX, F. ENGELS : Oeuvres T. 19

- 64 -
tres phénomènes semblables (lue l'on avait considéré tacitement comme n' ~ant
aucun rapport direct avec l'Afrique communautaire. Cette évoluti.on. d'opinions
reflètait l'évolution objective de la réalité politique, la modification du rap-
port des forces sociales dans le tournant ~rs le développement"non capita~iste~
Elle atteste aussi qu'il est erronné non seulement en théorie mais aussi sur
le plan pratique, politique, de mettre en avant un aspect quelconque dwdualisme
de la communauté et d'en méconna1tre un autre"(I). Il s'agit d'éviter de répè-
ter l'erreur classique de J. PROUDHON, qui tentait (m~ pan les meilleurs senti-
ments) de diviser les contraires en séparant le bon grain de l"ivraie. Selon
nous, on ne peut supprimer un aspe~i; de la communauté sans qu'Ile cesse d"@tne
ce qu'elle est, COmme on ne peut, ayant mangé la meitié dtune pomme, ten~ dans
la main c~tte pomme entière. Il convient de reannna1tre que la communauté n'est
ni une premisse, ni à nlus forte la "~llule" de la société collectiviste :
le socialisme passant au communisme. Par conséquent, il s'agit non pas de pré-
server à tout prix ni, à plus forte raison, de restaurer, de "replâtren" arti-
ficiellement la communauté, qui se désagrège au cours du développement histori-
que mais de mèner une action politique et idéologique sur ce processus de désa-
grégation, afin de "relaver" et préserver, dans les institutions et formes de
rapports sociaux lui succèdent;
les tendances à l'entraide, au règlement dé-
mo~atique de nombreuses affai*es communes, à la propriété sociale J tandance
inhérente à la communauté villageoise. En outre, ce processus ne peut se confi-
ner au domaine de la conscience : son succès demande de la transformation radi-
cale de la vie matérielle, des formes de travail et de vie des anciens membres
de la communauté•.
Bref, on ne peut pas séparer mécaniquement les pôles sociaux de la commu-
nauté. sur le plan méthodologique, la dualité de la communauté villageoise em-
pêche de retranJ~r un de ces aspects sans toucher l'autre,et sans supprimer
ainsi lia communauté en tant que telle. Gomme institution sociale, elle ne con-
tient pas de potentiel propre à un développement social de grand~ enveItgur~
Ge potentiel se forme sur ses décombres, en tant que microcosme localisé, fon-
cièrement incompa~ible aussi bien avec l'envergure qu'avec l'esprit de la pro-
duction élargie moderne et de la communication sociale. Les futures formes so-
(1) Extrait de problèmes du monde contemporai~, N°l, 1971 "pour combler le re-
tard économique formes et méthodes d'action-. P.135o

- 65 -
~les procèdent des éléments de désagrégation de la communautë et dépendent des
conditions politiques du milieu historique dai.s lesquels la communauté néalise
cette transformation. En sOD, la communaut~ n'est ni une panacée contre tous
Des maux du retard et de la domination étrangère, ni leur source•. Certes, i l
manque à la communauté villageoise les forces productiv.es internes susceptibles
de promouvoir un ménde rural moderne à elle. B:ie~ enteniu, nous essayerons d'exa-
miner plus en profondeur l'économie villageoise traditionnalle dans ses diffe-
rentes tendances d'évolution.
Paragraphe II : LJECONOMIE VILLAGEOISE TRADITIONNELLE.
Le monde rural actuel est issu directement des sociétés ancestra]es africai~
nes. Ces sociétés à travers les âges ~nt été capables de peraeVooir les ~ifferents
problèmes qui se pesaient à elles, de les analyser et d'élaborer des solutionffi
adaptées pour les résoudre. Des sociétés qui existent et subsistent ainsi à tra-
vers les âges sont des sociétés bien vivantes. Une société qui n'est pas capa-
ble de cela meurt. Quelques traits saillants pourraient ca*actériser, sur le
plan économique, la société v.illageoise traditionnelle 1 les normes ancestrales,
la résistance (1U progrès, le repliement et 1 "apparœnce statique. Ces aspects,
qu'il faut souvent nuancer, définissent, peut être aveo des insuffisanoes, les
fonctions économiques essentielles dans une communauté autarcique.
AI - Le Œonservatisme socio-économique.
La structure sociale des communautés villageoises demeune étroitement orga-
nisée et hiérachisée. Le village est moins une collectiv;ité territorial1e que
i1
cimentent des intérêts économiques, qu'une communauté parentale au seBS large
1
avec des ramifications ou une association de lignages
l'a1né du lignage pater-
nel le plus ancien dirige cette communauté : il incarne le savoir transmis, il
assure la liaison avec les ancêtres, il veille au respect des coutumes et trou-
pe autour de luâ les ainés de famille, il peut rendre la justice. Fait essentiel
pour l'économiste, le pouvoir de décision économique lui appartient: il décide
de la division du travail, du calendrier agricole, de la formation des jeunes,
de la distribution des moyens de production (La houe manuelle, repartition des
terres••• )..

- 66 -
Cette structure sociale se rencontre en Haute-Volat et généralisable à toute
l'Afrique Noire. ~n effet, le pays Mossi, se situe dans la partie centrale de
la Haute-Volta dont il représente un peu plus du quart de la superficie. Dans
un pasné lointain, le p~s Mossi
était peuplé de groupes ethniques très ancien-
nement installée ~et organisés, pour-la plupart d'entre eux, sur des bases socio-
politiques lignagères. 1111 a été investi à partir du XVè siècle, par une popu-
lation guerrière, venue du Nord-Est du Ghana. Celle-ci a peu à peu étendu sa
domination politique, découpant le pays en une hiérachie de commandements ter-
ritoriaux, rassemblés dans un Royaume dont la capitale était OUAGADOUGOU (actuelle
capitale du pays)~I)o Favorisant par ailleurs une certaine unification culturel~e
faite d'échanges entre les envahisseurs - les NAKOMSE - et les autochtones, le
pouvoir politico-militaire mis en place, garantit jadis la sécurité de la popu-
lation face aux agressions extérieures. Hormis les querelles de succession -
qui concernaient ipeu les gens du "commun" - il imposa également une paix inté:-
rieure que ne connaissait certainement pas les peuples voisins. En somme, si
dans les temps anciens la population ffbssi est parvenue à s'accrottre, elle le
doit pour une grande part à la protection que lui assurait le système politique
1
mais en place pro: les "NAKOMSE". Sa forte densité lui a été en quelque sorte
donnée plus qu'elle n'est l'expression, la sanction d'une gestion ef:ficace des·,
ressources locales, naturelles et humaines.
Au demeurant, peu intéressés par les valeurs liées à l'agriculture, les
"NAKOMSE" n'ont pas su ou voulu prêter à cette gestion une grande attention.
C'est une faiblesse de là société traditionnelle Mossi: une inêgalité dans l'ef-
ficacité respect~ve de ses techniques d'encadrement des hommes et de son syst~me
de production, d~mauré à un niveau technique élementaire.
Ce bas niveau technmlogique du système de production et les modestes res-
sources en sols de l'essentiel du pays Mossi, associés à une population déjà
nombreuse, rendent compte de la place particulièrement éminente que tenait l'~u­
to-subsistance vivrière dans l'économie ancienne en pays Mossi. Produire régu-
lièrement du mil en quantité suffisante avec possibilité d'un an de stock était
l'axe d'orienta~ion de la société~
(1) G. REMY
"Migration et développement" - flevue économique du tiers-monde,
T.18, N° 11 Juillet-Septembre 1~ - P.6I9.

- 67 -
C'est
ainsi que l'exploirtation traditionnelle - définie comme une unité
de production vivrière
regroupait le plus souvent plusieurs cellules familiales
élementaires (les hommes mariés et leur famille) rassemblées autour d'un ainé -
l'homme le plus âgé de la génération la plus ancienne. La solidarité de ses mem-
bres était concrétisée par la participation de tous à l'exploitation des champs
céréaliers communs (mil, sorghos, ma!a). Il appartient à l'ainé effectivement
de choisir et de délimiter les parcelles, de répartir le travail, veiller au
bon entretien des cultures, distribuer les ressources obtenu: 'es entre les diverses
cellules familiales.
Cette responsabilité sur le troupeau et sur la production vivrière communes
ne pouvait être source de richesse, ni de pouvoir économiqye. Elle s'associait
aux autres foncti9ns sociales (notamment au plan matrimonial et foncier) et ré-
ligieu:ses dévolues à l'aîné en raison de son âge et de sa place généalogique.
Devenir chef de rtxploitation était le prolongement économique d'une promotion
sociale obtenue à la suite du décès du précédent ainé.
La soci:,té ]'I10s8i é1.ncienne ne s ' opposait pas à la segmentation des exploi-
tations, celle-ci se traduisait par une rupture de solidarité dans le secteur
de l'autosubsistance vivrière uniquement. A cette rupture cependant nul n'avait
intérêt: la sécurité vivrière de tous, était d'autant mieux garantie, compte
te2'l.U cJ2:'1 techniques mises en oeuvres, que les forces productives demeuraient
unies; le nouveau chef d'exploitation n'accédait pasp-pso-facto aux fonctions
sociales (au plan foncier) au statut d'aîné.
Après avoir pris leur part des activités sur les champs communs, tous les
hom~es r;ariés membres d'une exploitation avaient - au même titre que le chef
cJe celle-ci
la possibilit~ de cultiver en outre, pour leur propre compte,
avec l'aide de leur famille, un champ personnel vraissemblablement as:'·ez vaste,
et de pratiquer toute activité complementaire, de saison sèche (artisanat, chasse,
actlvité marchande ••• ). Avec les ressources obtenues ils avaient la charge ex-
clusive de subvenir à leurs propres besoins nos vivrièrs et à ceux de leurs dé-
pendants fa''liliaux avec toutefois une reserve : ils ne disposaient de leurs res-
sources personnelles que dans la ~'lesure O-l'l l}l'-'col te commune paraissait couvru
les besoins vivriers pour au moins une année supplementaire, à défaut"elles
étaient jointes à celle-ci.

- 68 -
Adolescents et jeunes hommes célibataires représentaient essentiellement
une force de travail au service des aînés ; ces derniers ayant obligation de
de satisfaire tous leurs besoins jugés légitimes.
Bref l'organisation socio-économique laisse ainsi apparaître trois niveaux
successifs - les a1nés, les hommes mariés, les jeunes célibataires - correspon-
dant à des dégrés differents dans les ~esponsabilités économiques assumées p~
les hommes selon leur avancement dans la société. Incontestablement cette struc-
ture sociale se trouve liée à la fois à une certaine vision des hommes et des
choses, et à une certaine techntlogie du travail agricole. De cette vision so-
ciale, RUDLOFF la peigne en ces termes z "pour le paysan africain ou malgache
la nature domine par son ambiguité : elle est richesse et exubérance, mais auss~
mystère et puissance destructrice. L'univers lui appara1t comme un mécanisme
bien réglé dont les principes lui échappent; l'homme n'a pas d'emprise réelle'
ni directe sur la nature, son action novatrice risque le déclenchement des cata-
clysmes" (1 )., Cette conception résume assez bien la sagesse millénaire à laquelle
tout villageois doit se soumettre sous peine des sanctions les plus graves."Cet
environnement sociologique, poursuit RUDLOFF, est également favorable au main-
tien de la technœlogie ancestrale et du cycle traditionnel des cultures. Ce se-
rait là, pensent les paysans, la meilleure voie et la moins aventureuse pour
s'assurer l'alimentation indispensable"(2).
Dans un univers économique stable et "stationnaire", la coniervation des
techniques, des coutumes, des modes de cultures et d'organisaion peut apparaî-
tre comme la meilleure stratégie de survie. Toute change lorsque cet univers
se déstabilise.
L~nsularité villageoise se présente à la fois comme un fait démographique
et comme un phénomène économique~ Elle est née de la très grande dispersion des
hommes sur des expaces géographiques inéagalement accueillants, les villages
ont su maintenir longtemps un relatif équilibre démographique ; les migrations
n'ont en rien déformé la structure traditionnelle, si elles ne l'ont pas, en
certains cas, renforcée. Enfin, RUDLOFF note à propos de l'insularité économique
que : "dans les zones tropicales, africaines et malgache, faiblement ,
(1) M. RUDLOFF : Economie plolitique du tiers-monde" ; ED. CUJAS
P.3I9.
(2) Ibidem •

- &9 -
peuplées, l'articulation entre réseaux de pistes était pratiquement inéxistante
jusqu'à ces dernières années. Qui plus est, durant les longs mois de pluies,
les pistes de brousse et de nombreux tronçons de .outes dites nationales ne sont
pas utilisables. Les villages et certaine centres semi-urbains retrouvent alors
leur total"isolement jadis".. Ainsi s'explique que l'économie d'auto-subsistance
soit encore larègle"(1). !elle est par exemple la situation des provinces de
la Haute-Volta. Effectivement au Sud du pays, précisement en Pays LOBI(&), les
gens ont opté pour une organisation de type segmentaire dans laquelle la famille
étendue, ou mieux, le segment de lignage apparaît comme le~.ul élément de la
société où l'on puisse déceler un système d 'autorité reconnue. Cela a pcmr CGln-
séquence l'éparpillement des maisonnées des t!erroirs famil iaux.
Toutefois avant l'époque coloniale et jusqu'en 1920/1930, la famille éten-
due(=) comptenant quelques dizaines de personnes placées sous l'autorité d'un
a1né, disposait d'une force de tra~ail suffisante pour mener à bien les tâches
agricoles, subvenir aux besoins alimentaires de toute la maisonnée et, éventuel-
lement faire face aux difficultés du m~ment (incapacité temporaire dlun ou plu-
sieurs membres, reparations de dégâts causés par les eaux, sécheresse, etc••• ).
Au plan politique, c'est au niveau de la famille étendue, et à ce n'iveau seule-
ment, qu'apparaît une organisation des pouvoirs hiéra~hisée et une autorité re-
connue et agissante. Aucune structure politique nouvelle n'étant jusqu'à présent
acceptée par les populations(les chefs de canton, les chefs de villages nommés
par l'administration coloniale n'ont jamais eu assez de poids ni autorité dans
les groupes du LOBI) .. Chaque exploitation ~e fort modestes dimensions, est con-
duite à ne compter que sur elle-même. Le système d'entraide qui autrefois jauait
un rôle important pour égaliser les forces de travail entre les maisonnées se
déteriore.
h
Bref d'une manière générale en Haute-~olta à part guelques rares etnies;
le paysan pratique essentiellement la culture du mil sur brûlis et d"autres cul-
tures vivrières,c'est à ses champs qu'il consacre l'essentiel de s~n temps et
de son effort. Passe pour i~prévoyant et passereux celui qui ne cultive pas son
) M. RUDLOFF :(déjà cité).?,~1
:) Les populat ions du LOBI rassemblent en Haute-Vol ta et dans le Nord de la Côte-d'Ivoire
300 000 persomles environ et se subdivisent en quatre ethnies peincipales : les Lobi
proprement dits, les Birifor, les Dagari et les Wilé •
.) On entend par famille étendue, un groupe descendant d'un aîeul com',un et proche,
comprenant le chef de famille (généralement l' ainé ), ses frères, leurs femmes et
leurs enfants.
(Cah•. ORSTOM, sêr. sci. Hum., volXII, N°l, 1976 ; 23-40.)

- 70 -
mil. .t:.n
pays Moosi, les villages n'<m1i étié que peu touchés paJr' l'in1lJl.uence
monétaire~ l'aut~-subsistance est strictement assurée et les cinc~tB c~
ciaux de. Crousse prospènent du troc,. surttouit li "usage des cauris (+ r~ G'énand
Remy, notre qu'à. propos du paiementt dtiimp&t en· monnaie" -]a popullatioo ad@1rlie
une sailiutiion 1 11 esquive, pan la fui te. Les mouvements "'échappatoimes"' alle fa-
lTtillles ou dlindividus fuyant les contraintes administratives ou Jleuns et'fets
sun· ]a production se multip]ient~ affectant ~es dizaines et ies dizaines ie
mdl]iers de personnes. ~hassés-croisés de fam~lles à. llintérieur du pays KQSsi,
tmplantat ions dans des aires nefuges sur lLes marges de celui-ci ou jUtlte au'
delà des frontières du territoire ~au Œhana, au Mali) ne sont que ~ee modali-
tés particulières dlune même tunbulence migratoire. LtGbjectif est. CQIIIIJIUD.' 1
slinstaller dans un milieu où les ccnditions de la producti<:m sont ]ll['ése]IVées
de's agressions de 11 administrat ion" (1).
1. "économie villageoise est stat iannaire parce qu' iinsulaiire. :L' intttroduc~
t ion autour de 1920,~ de diverses cultures commerciaJLes dl eXID'Ortat ioo a été
comprise d "emblée comme une menace d'éclatement par 11 intérieur lies CtlllDIIIIlnau-
tés villageoises traditionnelles.. NI enrichit-elle pas cert!ains, et précisement
ceux quii se détournent lie plus des cultures vivrières ancestrales ! ~s eon-
seils des anciens ont essayé de resister au pomroir destructurant qu "exerce
une économi;e de plantation commerciale • Dans de nambreux villiages, CJÙ dllail....
leurs la terre se prête.nait aux plantations commerciales, les ouilltures indus-
trielles sont demeurées marginales. Pour m.eux S'oppoBer aux modes alie produc-
tion intrGduits pan l'administration ooloniale, les a1nés ont eu rec:ours & la
solidarité familial~ en confiant aux célibataires, la charge dlaller quérir
(par le commerce, la migration saisonnière) llargent pour l'impSt ~++) fàmL-
lial sans cesse croissant. C:lest 1& un Jreflexe légitime, mais il' n'est pas
question 4e sous-estimer la force de l'inertie et la puissance de conservatiœn
~es anciennes structures et des anciennes oligarchies village~ises. Malheureu-
sement, l'économie villageoise actuelle ne peut le plus souvent que' demeurer
(+) C'auris et monnaies légales sont utilisés pour des échanges commerciaux.
(1) Gérard iEMY : "Mobilité Géographique et immobilisme social ; un exem-
ple volta!gue" ; P. 626.
('H) G'haque viIlage devait fournir en féhors de l'impÔt de capitation et des
prestationâ entravail (entretien des routes et pistes tout spécialement)
un certain tOllnp.ge.. d pro.dui:l;s d.e n.-\\ni.èr.e. néoessité à la. Métr.op,ole): œoton
arachide karJ. te, .latex ~ extran- <1'une .lJ.ane sauvage 1 Lando.1pnJ.a
;
ces produits étaient payés en plusieurs tranches au chef de village, qui
d~~tribuait les sommes aux JrOduc~eur
au prorata de leur ~~OS~

- TI -
"dans: la mesure même où l'insularité s'apprecie, enfin de compte, en termes de
de distance et de ~oût d'approvisionnement"(I). L'é
. .
.
cOnom~e v~Jlageo~se est sou-
vent isolée et ignorée, tend à se replier un peu plus sur elle-même, si ne vient
de l! ead;érieur un effort de désenclavement.
Ainsi les nouvelles orientations prises par la Ca~agnie Internationale
pour le Développement Rural (C.I.D.R.) depuis quelques années, s'attelent à re-
soudre,la problème du oloisonnement de la société t en priorité.
En Haute-Volta, la mise ~en application de méthodes agricoles simples, des-
tinées à améliorer les rendements des cultures vivrières, se heurte à des diffi-
, a.-
cuItés d'ordre sociologique: leur diffusion à travers le p~s est délicate/réa-
liser. En effet, les structBres mêmes de la société segmentaire (comme le pays
Lobi) ne se prêtent guère à une action d'animation rapide et généralisée; cha-
que forme, chaque maisonnée, jalouse de son autonomie, vit d'autant plus repliée
sur-elIe-même qu'elle a pleinement conscience de s~faiblesse, de sa vulnérabi-
lité; chacune oonstitue un vériatable petit "bastion" qu'il faut assièger et
convaincre l'un après l'autre. Lorsqu'une action de développement a réussi en
un endroit, le processus de ·'contagion" à travers tout le groupe local(+), se
heurte ici à l'obstacle du particularisme familial ou lignager. Les familles
étrangères (o~on liées) à la maisonnée ~ant réussi à surmonter Bes difficultés
ne se sentent pas concernées par le succès de cette dernière. Chaque maison,
chaque groupe local devra faire l'objet d'une
approche profonde et particulière
de la part des responsables de développement.
La C.F.D.T (Copagnie Française pour le Développement des Textiles) et la
CIDR ont échoué dansl'action rurale entreprise d'introduire la culture cotonière
dans le Sud de la Haute-V~lta (en p~s Lobi). Cet échec ne peut s'expliquer par
les conditions du milieu naturel: depuis 1957/58 des variétés nouvelles de CQ-
ton ont été mises au point pour être cultivées sous climat humide(++). Les causes
évancées par la C1DR, pour expliquer le semi-échec cQtonnier sont à peu de choses
près oelles relevées une dizaine d'années au paravent par la CFDT. Elles se ré-
sument en ces points : semis trop tardifs, parasitisme plus dévelopé, absence
) Groupe local correspond à l'idée de village aveo cette !ifference que dans les po-
pulations du I.obi,~ il n'existe pas d'organisation politique, d:'autorité hiiéraahisée
au niveau communal ,
+-) Depuis 1965, au N,brd de la c"'Ote d'Ivoire, dans la région de KDrogho, soumise à une
forte p~uviométrie (plus de l 200 mm par an) la oulture du co~on donne d'exoel~
lents resultats.
'
"

,J.e.
DE TOUT traitement des plantations, amendements nuls ou insuffisants Boins im-
parfaits.. Une organisation défectueuse, de mauvaises méth0'des de travail.. appa-
raissent donc~omme responsables de l'échec de la culture cotoniière.
Pour nous, les échecs répétés de la CFDT et" plus recemment de la CIDR, dans
le développement de la culture cotonnière, tiennent à des causes plus pr~fonàBs
que celles relevées dans les rapports de ces deux organismes d'intervention.
Au délà des mauvaises teChniques culturales dénoncées, au d~elà des négligences
relevées dans la pratique de la culture cotonnière, on découvre une dégradatiœn
profonde du système socio-économique des population du Lobi. Dégradation qu'èlJLes
sont incapables d'enrayer et qui les conduit chaque année vers une misère de
plus en plus difficilement supportable. Dans ces conditions, la faillite de la
politique de développement entreprise, dans l'ensemble du p~s Lobi ou de tout
le territoire voltalque en général, relève plus d'un processus de dé"agrégati<m
sociale que d'une simple "défallllanoe" teahnologiqueo La conséquence déooule
directement du désarroi du paysan, isolé, ne pouvant compter que sur lui-même,
face aux problèmes qu'il ma1trise de plus en plus mal, on comprend mieux san
manque d'intérêt pour développer les cultures spéeulatives alors que chaque ,an-
née, il parvient de plus en plus difficilement à satisfaire les ~soins vita~
de sa maisonnée, tou~les efforts du chef de famille, toute son attent~Œn sont
tendus vers le souci primordial et souvent exclusif d'éviter la àisette. Son
anxiété est telle qu'il est incapable de oontrôler maintenant, ses reflexes de
peur de l'avenir, et d'appliquer avec toute la rigueur voulue les techniques
héritées des générations précédentes; techniques qui avaientfait leur preuve.
G'est pourquoi, en négligeant de résoudre ce problème cruoial des subsistances
tous les programmes de développement appliqués jusqu'ici ont essuyé des échecs.
Est-ce-à-dire que le monde paysan est plongé dans une léthargie incurrable ?
cl - UN, APPAR.ENT !lOfOBILISPlE DE L'ECONOMIE VILLAGEOISE.
Certains élements tels que: la stabilité des besoins, l'allergie au problè-
me de la productivité, la consommation du surplus concourrent à décrire l'imm0~
bilisme de l'économie vilageoise •
La stabilité des besoins découle inévitablement du conservatisme social
et du cloisonnement économique, qui caraotérisent les villages africains. Les

- 7(3 -
besoins de neuf à dix mois sur douze sont couverts par la production v~llageoise,
les revenus monétaires demeurent en géréral faibles et conse:nrent un c'aractère
marginal. La monnaie sert à l'achat de quelques tissus, d'un transisüor, d'une
bicpclette et au paiement des impôts~ Les besoins paraissent ainsi plus stables
dans les villages se livrant peu à la culture industrielle et d'exportation
la stabilité découle non point d'une satisfaction des besoins humains, mais de
la saturation des besoins sO~ables. D'autre part, cette stabilité est fonction!
directe de la pressioli:
des pouvoirs villageois traditionnels. G:e point de vue
s'accorde avec celui exprimé par J.M.:BROUSSARD
en ces termes l "l'idée direc-
trice est que la maximisation de la richesse peut~toujours être considérée ao~
me 1 "objectif ultime du paysan., Mais cette maximisat ion se fait s<llusdes a.ontrain-
tes qui sont très strictes.Pour les desserrer, il faut atteindre des objeotifs
sécondaires qui peuvent temp~airement apparaitre comme les obJeax~~s principaux
des paysans,. mais seulement dans la mesure où ils ne voient pas d'autres moyens
. lu
t
. t
I l ' 1
t
.
(
) N'
d .
ma~s con ra~n es auxque
es ~ s son
soum~s.
•••
ous avons pu repro u~re avec
une approximation le comportement de l'agriculteur malgache - y compris sa ten-
dance à accumuler les bestiaux - à l'aide de modèles mathématiques (des program-
mes linéaires) base sur l'hypothèse que les paysans cherchent à maximiBe~ la
croissance leur richesse. ( ••• )Dans ces conditions, quel peut être le comporte-
ment rationnel du paysan qui cherche à maximiser son revenu? Il vafulti~r au-
tant de cultures spéculatives à haute rentabilité moyenne qu'il va pouyoir, mais
seulement dans la mesure où il disposera de reserves suffisantes pour lui per-
mettre de passer deux ou trois mauwaises années" (I). Ce qui fait l'intérêt de
~tte
analyse, c'est l'accent mis sur les contraintes plus que les objectifs.
Car· pour de nomlDreux paysans, en particulier les plus pauvres, le risque d'échec,
même si la proballili t⧠en est relativement faible, reste insupp0Ttable à. cause
des conséquences économiques et sociales aatastrophiques qui y sont liées. Par
contre dans les villages touchés par les cultures d'exportation; les besoins
subjectifs:!
croissent plus vite que le pouvoir d'achat; les contraintes an-
cestrales y sont moins respeQ~ées. La monnaie prend progressivemen~ une signi-
fication ignorée dans les structures villageoises
traditionnelles.
cn J. M. BOUSSARD l "La rationnaI!té économique paysanne" ; techn,ique et déve-
loppement - Juillet-Aot 1913.

- 74 -
L'allergie au pr0blème de la productivité' s'explique,
Î aussi ,
par la sécu-
rité qu'apportait l'ancienne organisation villageoise. Pour quelle raison aug-
menter la productiwi.té du trav:a.il, puisque de toute façon les cultures n"occu-
pent que quelques mois par an et que la production
couvrP. les besoins d'éconQ-
mies insulaires non soumises à des marchés. S~uvent l'on associe encore l'inten,..
sification des méth0des de tra'lXail au travil forcé et
aux réquisitions admiinii.s-
tratives du .,_ temps colonial.

i
-La consommation du surplus villageois. I l n'est pas detŒGf~té humaine au
monde qui ne dispose d'un surplus, si faïble so~t-il. Sous une forme ou sous
une autre, chaque groupe détient un excéd~t des production. sur les consomnla-
tions.T-out le problème consiste dans le choix: des affectations du sutrplus. L'éC:.-Q>-
nomie villageoise sont de son "immobilsme" si elle cède ses excèdents contre
les biens productifs ; elle y reste si elle stérilise ou neutralise, sem surplu&o
Or, danB les sociétés villageoises traditionnelles dtAfrique, les ezoè~ents se
trouvent encore, de nos jours, très largement stérilisés et "consumée". Ils sont
stérilisés dans la mesure où une fraction, de ces disponLbilLtés nettes
sert
au remboursement des dettes aux usuriers, ~mmerçants et collecteu:ns ; ils sont
"consumés" dans la mesure où ils financent les fêtes familiales, les cérémonies
funéraires et les sacrifices aux ancêtres. Tels seraient les traits essentiels
de l"économie villageoise traditionnelle. EU fait la situation ed, bien moins
0-
simple qu'il ne parit au premier abord.
L'économie villageoise parait @tre toujours engendrée dans son sommeil cen-
tenaire s les be soins des villageois présentent une très faible élasticité,
la productivité du travail n'est pas reaherchée et l'innovation semble plut&t
violer la philosophie traditionnelle
la faible épargne, disponible annuelle-
ment, se perd "comme des Gueds dans le sable" et nourrit tout au plus quelques
circuits parallèles improductifs. Telle est l'apparence première. Mais des in-
dices d'un changement sont aujourd'hui perceptibles s les besoins sont envoie
de s'étendre, l'on distingue mieu~x l'écart entre besoins humains et besoins
solllables ; besoins nouveaux se heurtent à l'insuffisance du POUVOiT d'achat.

- 1'5 -
De même, les paysans sont en v~ie de s'étendre, l'on distingue mieux l'écart
entre besoins humains et besoins solvables; besoins nouveaux se heurtent à.
l'insuffisance du pouvoir d'achat. De m6me, les p~sans sont envoie de prendre
conscience du problème de la productivité du tra~ai~ Pour vivre, il ne suffit
plus de travailler comme jadis, il faut que ce travail soit productif et ne dé-
tériore pas les capitaux naturels. L'on sait désormais qu'il est indispensable
d'entretenir outils et terres, et que les techniques de travail sont largement
et constamment perfectibles. L,'impact colonial, les idées modernes, les notion~
de liberté individuelle, comme partout ailleurs en Afrique, ont contribué à. dé-
manteler les familles, à libérer les menages de l'autorité gérontocratique SQU-
vent pésante, mais ils n'ont jamais, jusqu'ici, entamé les liens communautaires
entre habitants d'un même village, liens qui sont d "une autre essence que les
liens du sang.
Il est émouvant de constater que le peuple HiA (+)
grace à sa "double
filiation"(Jl se réfère d'abord à son village, à sa ccimmunauté v:lllageoise avant
de se situer par rapport aux siens, avec sa famille'
par le sang, avec. sa com-
munauté par le coeur), ne s'est pas trou~ isolé lorsque~es liens familiaux se
sont rélâchés s au cours des vingt dernières années, il n'a rien renié de ses
attaches avec sa communauté villageoise à laquelle il a recours fréquemment po~'
rtntretien de ses cultures•••
En se libérant de la sujetion et des contraintes familiales, il semble
même que les jeunes p~sans (maillonâ ~ibles de la communauté paysanne ances-
trale) se soient affranchis des directives conserva~rices de leurs a1nés, et
sODent à même désormais
d'innover plus librement J ils sont capables de modi-
fier le calendrier agricole traditionnel et de s"adonner à. des cultures délica-
tes. <::;, est là une ezpérience qui indique que le communauté jadis organisée sur
des structures sociales parentales et tribales, et de la propriété co.il.lective
(+)
BWA
les BWA comptent au total plus de 200 000 individus vivant à cheval
sur le Mali et la Haute-Volta (des rives du Bani à celle de la B0U-
gouriba).

- 76 -
archaIque des terres, ne peut coéxister tant soit peu durablement avec le capi-
talisme, que le oapitalisme, en s'implantant dans les eampagnes, les -,roue à une
agonie douloureuse sous la pression des rapports de production fondés sur la
propriété - "Du coup nous dit RUDLOFF, le mode ancestrale d'emploi des épargrœs
se trouventde plus en plus critiqué certes, des ~leurs morales et religieuses
voilent fort souvent en~ore la réalité économique, à savoir la destruction du
capital, mais vouloir augmenter la producti~té conduira nécessairement à une
réorientation des dépenses. Le village africain et malgache semble vouloiir son-
tir de sa torpeur, le statisme de l'économie v.illageoise, bient6t, ne sera plus
qu'une fausse apparence"(I). L.'économie villageoise cesse d'ltre celle des an-
cêtres. Elle est désormais rentrée dans l'irréversible processus du développe-
ment capitaliste.
Paragraphe 3', f
L'~ONOM!E VILLAGEOISE DE TR.ANSITIOlfi
Laissons
T.SHANIN introduire cette partie, mieux que nous ne pcmrrions le
faire f "On ne peut guère parler de découvertes en matière de sciences sociales.
pourtant, i l arrive souvent que des problèmes sociaux s"imp0:sent à, l'im-
telleatuel avec toute l'intensité dramatique de la pomme tombant aux
pieds de Jli~\\Yton. Cres dernières années, lm a assistlé à la redéa:ou"l.erte
quelque peu paradoxal des paysans. (••• ) Après vint-cinq ans d~Qubli,
le "problème paysan" s'est de nouveau manifesté brutalement, au même
titre que la question de la g.uerre et de la paix. (••• )
ce regain
d'intérêt pour les sociétés rurales a coIncidé avec les nouveaux pro-
grès en hthnopolagie. (.u) Enfin les historiens" les économistes ell
]jes sociologues contribuent également à une sorte de renaissana.e dans
les recherches sur la paysannerie. (••• ) Le concept de paysannat est
une entité
réaliste, et non pas une parole creuse"(2). Et T. SHANIlIJ
définit ensuite ce qui lui paraît être les principales carac1iénistiques
des sociétés rurales. Elles sont au nombre de quatre f
(:E) M.RUDLOFF : (déjà ci té). f. - 1-
(2) T. SHANIN :"le paysan est bien, là " ; CERES - Novembre-DécembreI972.

- 77( -
L'explotitation palfsanne est familiale et constitue la base dtune Gr@anisa-
tion sociale m~ltidimensionnelle, intégrant non seulement la product~on et la
consommation, mais également la formation, les loisirs etc•••
L'activité agricole est prédominante;
Il existe une culture palfsanne en rapport avea:: lé mode de vie des C<mlmuc!!'_
nautés rurales
- Les Pél3sans sont dans une situation de sujétion, de dépendance. En parti-
culi eIt , ils sont généralement tenue à l'éoart des structures sociales cW. :PQU_
von. Leur culture est meprisée•••
P'ar conséquent que l'économie villageoise le souhaite ou non, elle s'enga-
ge actuellement dans un processus de rapide transvformation. Elle ne peut pas
s'y refuser, car, dans cet espàce micro-économique, deux series de forees p~­
sent à la destabilisation. Le village, au mieux "dispQse " du chou relatif de
cette orientation 1 une première évolution, celle qui.
nécessite le moins d' in-
terventio~ mene l'économie villageoise à l'appauvrissement continu et à l'auÎo-
destructiom; une autre évolution, quiexigera une prise de conscience cie l':état
réel du village et un effort de redressement, peut conduire une éconemie villa-
:eoise "modernisée" et restructurée à l'intégration: dans un espaa.e naticDnal dy-
namique. De nombreux vil~es n'ont pas encore -flécidé R de leur choix, ils de-
meurent au oarrefour ; le risque majeur qui les gette est que ce choix se fasse
sans eux, et que les mécanismes naturels alors se retournent contre e~
AI - LA DEGENERESCENCE DE L'ECONOMIE VILLAGEODSE TRADITIONNELLE.
~omme nous l'affirmions plus haut que: le monde rural actuel est issu direc-
tement des sociétés ancestrales africaines. Ces sociétés à travers les âges ont
été capables de percevoir les differents problèmes qui se posaient à elles, de
les analyser_ et d'élaborer des solutions adaptées pour les résoudre. Des sociétés
qui existent et subsistent ainsi à travers les âges sont des sociétés bien va-
vantes. Une société qui n'est pas capable de cela me~
Enr effet, cette néalité, souvent ignorée et méprisée par les mentalités
"occidentales': est le signe de communautés capables d'observations très précises,

- 7,8 -
et~à parir de là , d'élaboration intellectuelle débouchant sur una organisat~on
et une action efficace pour l'épanouissement de leur propre vie et celle de tous
leurs membreso-
Mais les situations ont changé brutalement, surtout depuis quelques décen-
nies. Les civilisations ancestrales habituées à un rythme lent, se trouve tout
à~ coup agressées violemment par la civilisation occidentale. Les villageois sont
confrontés à de multiples problèmes nouveaux qui apparaissent à un rythme de
Rlus rapide: avec l'actuelle croissance démographique, l'économie villageoise
de plu~ en plus mal à nourrir sa populationii:Le taux de couverture des besoins par
arrlvef - la product ion locale se redui t ; des périodes de "mauvaise soudure;"
ou de réelle pénurie apparaissent et menacent de s'allonger.
Il est un fait indiscutable que dans la majorité des villages volta!ques~
l'accroissement net de la population est élevé, alors que les réc~ltes annuel-
les demeurent très en retard sur les besoins. ~aurrir ses enfants devient un_
problème de plus en plus ai~ Comment réagit alors l,paysan traditionaaliste ?
RUDLOFF répond en ces termes :
''N e modifiant pas ses méthodes de travail, denc
'accroissant pas sa pIrCit-
ductivité il ne lui reste que de~olutions auxquelles il recourt d'ail-
leurs simultanément; la première se trouve dans l'extension des champs,
c'est à dire des feux cie brousse dégageant des têrrains de culture provi-
~oiYe
la deuxième, consiste à ne plus respecter les temps de jachères
et accélèrer la rotation des terres. Quelle que soit l'échappatoire choi-
sie, les effets en sont désastreux: l'extension des champs dégrade je
sol et le térilise assez rapidement; la rotation trop rapide des terres
prcrv~que de son G~té un appauvrissement des sols et accélère l'érosiGn.
~s effets destruct~eurs se font sentir fatalement dansf'édbnomie villa-
geoise pour qui le dilemme de malthus s'aggrave"(r).
Pire.encore, toute une région risque de souffrir de telles pratiques, car l'é-
rosion S'intensifie, l'écoulement des eaux devient de plus en! plus irrégulier
et adopte un régime torrentiel, lequel étend l'érosion en a~a] même des teD~es
brO.lées.
(1) ld'. RUDLOFF : (déjà cité) p.U4.

-18-
Essayons d' exa:niner un peu plus profondement la situation en pays Mossi. Après
1945, bien que l'administration coloniale dev,tnne moin~ressante, la société
Mossi ne parvient pas à s'extraire de l'économie de survie. Deux évolutions eo~
plémentaires lui en retirent les moyens ; eu moins dans certaines régions la
part des terres ·usées" s'accroit sous l'effet de la croissance dela pepulation
très rapidement, des migrations spontanées de travaime'1i.rs vers la COte-d'Ivoire
se substituent aux recrutements forcés antérieurs. "Pourtant que les recensements
admininstratifs font foi, la population du pays Mossi parait avoir di-
minué ou au mieux être restée stable pendant la période~ui sépare les
guerres mondiales. ~a disparition des grandes famines(dès 1935, sauf au
Nord-OUest du pays Mossi)~ le retour de nombreux émigrés entre 194~/I950p
l'efficacité des actions sanitaires entreprises, la fin des prélévements
excessifs de main-d'oeuvre l'engagent ensuite, dans une phase de forte
croissance démographique: l'accroissement naturel annuel est estimé
à 1,8 % en 1961"(1)e>
Cette croissance traduit avant tO'llt par une pression accrue sur les terres et
dansres régions les plus peuplées, par la m~se en valeur régulière des parties
les moins fertiles des terroirs villageo~s, par une utilisation pro~engée de
terres et un épuisement progressif du sol.
Les effets en sont multiples•. Koins généreux, les sols appellent des va-
riétés àendls et sorghos moins exigeantes et aussi moins product~ves, et imp~­
sent des méthodes culturales plus soignées. TanQis que simultanément les migra-
tions vers l'étranger réduisent la force du travail disponible. La baisse des
rendements conduit les exploitants à étendre les surfaces consacrées aux cultures
vivrières (mils et sorghos conviennent partout en pays mossi près des neuf di-
xièmes des surfaces cultivées) au déDriment des cultures complemen~aire (cot0n
arachides et sésame). Moins abondantes, les récoltes dév'4nnent aussi plus sen-
sibles aux variatioml', pluviométriques annuelles, les "mauvaises" années celles
où la "soudure" n'est pas.aâtiurée, deviennent plus fréquentes. Pratiquement les
champs personnels des hommes disparaissent, se fondent au sein des exp~oitations
familiales. A mesure que les ressources vivrières devfènnent plus précaires p
(1) G.REMY
(déjà cité) P. 1<>.

- 80 -
les revenus complémentaires s'amenuisent. L'extension des suFf'aC'ps cilltivées
l'ai t disparaître le gibier et la chasse. L'artisanat s'étiole SenlS la con<mr-
ren<œ des produits importés (VJêtement en particulier) ; i l ne se maintient que
dans les régions où les condi tmol}s climatiques plus défavorables (au N!QIDd du
pa~s Mossi) accentuent le déficit en mil., ~i le commerae par contre devient l'af-
faire de tous ou presque, il ne rapporte que très peu à chacun.
L'économie villageoise assure difficilement l'équilibre vivrier. L'adminis-
tration post-coloniale ne lui apporte au demeurant guère de secours. Elle mene
certes, une politique agricole co'O.teuse, quelque peu "prestigieuse" : elle s "ef-
force d'amé~.liorer les moyens d,produaiion (barrages hydro-agricole, lutte anti-
érosive) et de modifier le comportement des ~iculteurs (fermes pilotes,te~ta­
tives, de diffusion de la culture attelée, colonisation organisée des terres
neuves par les A.V.V.(Aménagement des V,allées des Volta). Il manque à cette p~­
litique d'être suffisamment proche des exploitants; elle est perçue oomme tout:
à. fait "étrangère" à lafoi.. dans ses objectifs et dans les moyens mis en oeuvre.
Les ouvrages ne sont pas ou mal utilisés, lestnnovations techniques ne se repan-
dent pas. L'agriculture Mossi est de fait dominée et livrée à elle-mêm.
S,irilultanément la Côte-d'Ivoire est devenu attrative. Relayant les requisi-
tions autoritaires du passé rédent, les flux spontanés de travailleurs vers c~
pays se développent à partir de 1950/54, favorisés par la diffusion des cultures
du café et du cacao
exigeantes en main-d'oeuvre- la période de la croissance
accélèrée des villes, et une amélioration relative des conditions de travail
.~c.s
et de rémunérationJimmigrants. "Fondé sur l'explo:htation, privilégiée - au sein
du domaine colonial - les ressources naturelles les plus rémunératnices pour
le capital investi, l'essor économique de la zone forestière de la crÔte,...d'Ivoire,
par ailleurs relativement peu peuplée, appelait nécessaitement un appoint de
1
main d'oeuvre.Ils s'inarivent dans une politique regionale de ~veloppement vi-
sant à mettre à la disposition des régions riches en produits utiles pour la
métropole _ la force de ~ravail qualifiée d'excédentaire des régions au les hom-
mes sont nombreux" (cf.. G.REMY - déjà cité).

- 81 -
3,i les migrations spontanées de travailleurs se multiplient vers la Côte-d' I-
voire c'est certes parce que ce p~s offre des emplois. Elles sont indiasocia-
b]es également de l'idéologie qui entoure l'action économique du colenisateur.
Les nouvelles valeurs qu'elle impose - rassemblées autour de la Ul;iort
de Pl'CÏl-
-fit personnel et symbolisées par l'argent - et les nouveaux biens de consomma-
tion qu'elle propose, pénétrent de plus en plus dans les villages. Ils suscitent
une montée des "besoins",. alors que l~roduction stagne et se trouve absorbée
par l'auto-subsistance d'une population de plus en plus nombreuse. Le retour
des migrants en particulier ne s'accompagne pas d'une rupture totale avec les
habitudes de consommation acquises à l'étranger, et contribue à répandre celles-
ci parmi les villageois. L'écart se creuse entre les besoins et les revenus.
monétaires. Il s'amplifie également entre l'argent qu'il est possible d'obtenir
par la mise en valeur des terres familiales, et les revenus migratoires. Là pren-
nent leur source, pour les jeunes Mossi ; le "mi~age" ivoirien ainsi qu"un cer-
tain découragement quant aux potentialités économiques du pays Ioss~
Les migrations de travail spontanée vers le Ghana ont été à l'origine
d'une forme dérivée, spécifique, de la turbmlence migratoire qui affecta le pays
Mossi à partir essentiellment de la première guerre mondiale, sous l'effet des
vontraintes de l'administration. Prolongeant et se substituant à ses migrations
les mouvement s de travailleurs vers la COte-d' IvoiTe sont à leur tour la premi,;'
ère facette de la nouvelle turbulence migratoire qui s'emparera progressivement
du pays Mossi à partir de 1950/55 et débouchera en 1969/70, sous l'effe~ d'évé-
nement conjoncturels, sur un véritable déwordement migratoire.
Ces mouvements sont la manifestation ': ,précoce et spectaculaire d'une
montée des «ifficultés économiques et sociales et de la prise de conscience de
celles-ci par les individus les plus directement concernés. ~branlée par son
passé colonial et les formes nouvelles par lesquelles il se prolonge dansfe pré-
sent, heurté par les nouvelles valeurs qui lui sont proposées, inapte à faire
face à la croissance de sa population enraison pour une part de son environne-

- 82 -
ment géographique tel qu'il est ,(climats, sols) et tels qu'elle s'y projette
..
(densité de peuplement), la socité mossi comme l'ensemble de la Haute~V:'olta n'a
jamais été et ne peut être aux leviers de commande de son avenir parce que la
société ~ossi sous-ensemble de la société volta!que oonstitue désormais un mail-
lon du système capitaliste mondial. I~ serait utopique de croire que la société
sera capable de resoudre ses problèmes internes, économiques et sociaux et d'y
retablir une complementarité, une solidarité entre ses divers éléments consti-
tutifs, à les rassembler autour d'un même projet de nouvelle société indépendante
du système dans lequel, elle est partie intégrante. "En dcartant, nous dit G.RE~
MY, les individurs les plus touchés par ses problèmes, diverses formes actuelles
de l'émigration offrent aux classes dirigeantes de la société l'opportunité de
repousser une crise économique inéluctable et de désarmer les conflits sociaux
majeurs. Chacune à sa manière traduit aussi la volonté des migrants de se défi-
nir un autre présent, en cédant aux appels venus de l'extérieur. L'affrontement
de la société avec son temps est differé".
L'économie villageoise se trouve ainsi attaquée sur deux fronts 1 de l'in-
térieur, car elle n'est plus en mesure d'assurer la survie de ces membres; de
l'ex~térieur, car les centres urbains progagent un idéal de vie et bien être
économique nouveaux et l'administration intervient sous une forme ou sous une
autre, de plus en plus fréf:l.uemment, dans cet univers tel que la princesse au
bois dormant.
ces attaques ont eu raison de l'économie villageoise traditionnelle, en,
~
la réduisant à une économie villageoise, domminée pour l'essentiel par les or-
ganismes, sociétés d'intervention et les "gros" commerçants. S'Dulllise aux coutu-
mes ancestrales, elle semble vouloir sécouer son apathie et prendre conscience
des graves contradictions qui rendent son mode d'existence traditionnel extr@-
ment précaire. Les générations nouvelles paraissent moins attachées à certaines
coutumes et à certaines hiérachies qu'elles jugent contestable dans un monde
qui se veut nouveau et créateur. C'est surtout du côté des jeunes célibataires
en pays Mossi, que montera d'abord la contestation, le refus de la place et de
la situation qui leur sont offerts par la société.

- 83 -
A travers les perturbations introduites car l'administration colonIiiale et celle
post-coloniale dan~a vie et l'activité rurales,puis la dégradation cosntante
des conditions de production, les jeunes célibataire sont devenus, par la migra-
tion et le commerce, des agents essentiels des revenus monétaires des exploita-
tions
dans trois groupes de villages étudiés, l'argent provenant de ces acti-
vi tés représente entre 25 et 40 %des revenus monétaires nets
des exploitations..
Ces activités n'ont pas pu contribuer par ailleurs à les ériger au sein
de la société Mossi en ,tenants privilégiés du "nouvel ordre économique" tel qu'il
est établi dans les p~s côtiers, et xonstamment proposé à la population Mossi
par les responsables du p~s. C'est à travers cet ordre fondé sur le pouvoir
de l'argent et la promot:lou1 individuelle, que les jeunes céliilataires ont pris
conscience de leur statut de dépendants.
Le pouvoir au sein des lignages repose essentiellement sur le contn81e
des rapports sociaux, en premier lieu ceux qui se nouent autour des ane~tres,
des femr~es et de la terre.. Ce contrôle est détenu par les, alnés, en raison de
leur rang social. L'accumulation de biens économiques ne peut se substituer à
ce dernier. Aussi, dans le ~ystème social ancien n'existe-t-il aucune structure
d'accueil pour l'argent des migrations : les migrants ne peuvent investir le-g.r
épargne dans les échanges sociaux déterminants, les ainés, pour leur part, ne
disposent pas de moyens institutionnels qui leur permettraient de dé~urner à
leur profit les revenus migratoires, la société Mos~i traditionnelle n'a pas
l'usage social de l'argent.
La stratégie suivie par les alnés vise à maintenir cette situation, à
refuser l'envahissement de la pratique sociale par l'argent. Face au nouveau
pouvoir détenu par les jeunes, ils se crispent sur leurs prérogatives foncières
et surtout matrimoniales•. Ma1tres de l'accès aux terres familiales, ils veillent
à préserver les échanges fonciers de toute contamination par l'argent (loca~ion9
vente) interdisant à l'épargne migratoire de s'investir dans le sol. De même
refusent-ils de laisser cette épargne irriguer les
rapports sociaux - en pre-
mier lieu les échanges matrimoniaux - et permettre aux cadets d'échapper par
l'argent, à leur condition de dépendants..

- 64 -
~
Le choix et l'éfficacité de cette stratégie doivent beaucoup aux conditions
actuelles de la production des revenus monétaires & les a1~és n'ont aucun moyen
de contrôle sur l'activité des migrants et son produit; l'état de l'économie
villageoise ne leur laisse aucune chance de soutenir une compétition monétaire
qui serait obtenu par le détournement dell'épargne migratoire; les pœssibili~
tés économiques Q~fertes par le pays Nossi dissuadent les migrants d'investir
leur épargne sur place et aident les ainés à maintenir leur pouvoir à l'abri
de l'argent..
Ires ainés sont'parvenus jusqu'à présent, là. préseh.e:n les relaij,:i:ons sCllciaJl.es
essentielles de toute contaminat ion monétaire. Il n "en demeure pas moins que
les cadets ont acquis, grâce à la migration" une autonomie éaéiomique qui leur
était jadis refusée et qui transforme leur situation au sein de la SQcdét.é. Cette~ r~
._fJ.. iH GI.,,,"tNJo1L ?\\.'" ,\\Ul-.~':",~.v.û"J
~ ....l.i.()..tü 'lA ~ l~
ma1trise par les migrants de leur propre force de travaill et l'étranger et les l-,,"""
difficultés économiques à l'intérieur des villages a longtemps dissimulé le ca-
ractère origilJal - par rapport au système de productionr ancien - du statut: de
travailleur émigré acquis par un nombre croissant de cadets célibataires. Wais,
d'une migration à l'autre, ces derniers se sont peu à peu convertis au nouveau
système de valeurs éconmiques prévalant à l'étranger &. c'est à travers celui--cii.
qu'ils ont été conjuits à préserver la jouissance du fruit de leur travail. Ils
constituent les forces de changement portées par le "nouvel ordre économique"
proposé à la société Moss~, et véhiculées aux premier chef par les migrants.
ce conflit antre ainés et cadets n'est nullement un conflit de génération, mais
bel et bien un affrontement entre l'économie villageoise traditionnelle et l'é-
conomie villageo~se engagée dans. le dév~ 'loppement capitali8te~ Pour nous résumer 1
en un...e
/ formule sur l'ensemble de ces. mouvements complexes, on, peut dire que l"on assis-
te à une progressive faillite du mode de production familial traditjjonn&l. Les
facteurs qui sont à l'origine de ce processus sont multiples et il ne saura~t
être question de présenter ici une théorie "unitaire" de ce courant de transfor-
mation dans lequel causes et effets s'enchevêtren14 Néanmotna;nous tenterons
S
de saisir le processus de déintégration de l'éeonomie traditionnelJl.e ou p~us
précisement comment s'effectue l'émergeance du nouveau sur l'ancien.

- 85 -
BI - QUELQUES ELENEN'rS DE LA MUTATION, SOCIO-ECONOMIQUE A LA CAMPAGNE.
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
-----------
..._ -
Au centre des mutations socio-économiques traditionnelles, que nous a~ons
retracées brièvement, on reconnatt,d0nc l'influence exercée par l'intensité du
besoin de monnaie. C'est l'obligation de trouver de l'argent qui coniuit de nom-
breux cultivateurs à s'engager comme maneeuvres ou à vendre leur troupeau. C'est
l'impossibilité à résister aux charges financières qui les écrasent et incitent
certains chefs de famille à se séparer de leurs fils et à enga ger des travail-
leurs salariés.,
On peut, en partie, expliquer cette pression monétaire par les mécanismes
internes à la société locale et à l'espace économique danslequel, elle est dé-
sormais partie intégrante = importance fonctionnelle de la oirculation des biens
et des richesses ; rôle des dons et des échanges non, mercantiles comme mayen
d'expression et de protect ion des structures socieales et enfin, l'impÔt, et au-
tres côtisations pour le Parti Unique du pays constituent pour le paysan un
v.ériatable "calv.ère". "l'impôt, avant et après l'indépendance, en est un autre,
nous dit J. F.'. OLIVIER. Il prend même aujourd' hui une place décisive. Les
paysans engagée dans des rapports de production pré-capitalistes, "c0mmu-
nautaires" et "féodau", alimentent directement par l'impôt les caisses
de la bourgeoisie bureaucraticue au pou'roi:lr. la part, dansP.e cas des redé-
vances "traditionnelle" , tributs ou prestation, peut être: sécondaire en,
valeur par rapport à la fd6tion de l'impôt. Même là où l'agriculture sem-
ble "végéter", même là où les formes pré-capitaliste "survivent",. i l y a
donc bel et bien acculmulation, et cette accumulation se suit pas les li·--
gnes tracées par les rapports de production, maip ~'impose de l'extérieur
par l'appareil coercible, despotique,de l'Etat"(I). Mais comment ne pas
se rendre à l'évidence que, de nos jours, l'édifice traditionnel n'a plus guère
l'autonomie, ni de cohérence intrinsèque et que nombre de phénomènes qui s'y
déroulent, trouvent leur source au sein du secteur "moderne" de l'économie.
Dans ce cas précis il suffit pour s'en conv-ainere de se demander: d'où vient
la monnaie 1 et où va-t-elle ?
(I) J.F. OLIVIER
(déjà cité)
P.~&'

- 86 -
Il est clair que l'essentiel du numéraire qui pénètre au sein de la commu-
nauté rurale vient de la vente de l'arachide, coton, cultures imposées naguère
pour le pouvoir colonial ; il trouve sa source en déhors non seulement de la
société locale mais du pays luii-même dans une sphère qui obéit à tlies lois to-
talement indépendantes de celles qui régissent l'univers traditionnel. Or, à
peine introduite,
cette masse de monnaie est, en ~elque sorte rœa~irée veas
l'extérieur: une grande partie étant dirigée vers les caisses de l'Etat JRr
le biais de l'ilOt r le reste étant recupéré grâce à la vente des produits ali-
mpntaires et manufacturés par les
négociants de la ville voisine. L'argent est
donc irrésistiblement soumis à un mouvement de va-et-vient qui lui est imposé
de l'extérieur; il est contraint de traverser la communauté san~ pouvoir s'y
fixer,sans y laisser d'enrichissement durable~ des conditions de rareté monétaire
et de circulation forcée sont ainsi créées, et les répercussions de ces; contrain-
tes sont prœfondes sur les mécanismes traditionnels, En effet, toutS& passe CQm-
me si les espèces, éléments essentiels à la vie et au fonctionnement du groupe
social, devaient, avant de le quitter, passer le plus de f~is possible de main
en main et se trouvaient ainsi entrainées dans une course folle qui peut donne~
à l'observateurs extérieur. Ce qui ne voit pas c'est en fait un nombre limité
de pilces et billets qui circulent.
L'tmpression d'une certaine richesse, mais
qui laisse aux acteurs l~sentiement diune constante course après l'argent, d'une
complète impuissance à le retenir une fois qu'on le détient~ Ce comportement
des paysans ne peut être interprété comme la conséquence directe d'une attitude
conservatrice, d'un refus de changer qu'ils auraient manifesté. Tout au contraire
ces attitudes apparaissent dans unerarge mesure comme la base des intenses bou-
le~ersements intervenus, tant sur le plan social, que sur le plan économique
et démograghique, depuis trois quarts de siècle : compte tenu du fait que les
modifications qui se sont accumulées durant cette période, se produisent le plus
souvent en réponse 8U% impulsions venues du monde industriel, il nous parait
impossible de considérer les faits que nous observons maintenant autBement que
comme pleinement
capitalistes.
(1) JoP.OLIVIER
"AFRIQUE # qui exploite qui? les temps modernes" N°346, PoI544.

- 8T -
En réalité, l'apparence de structures communautaires cache le développement
drun mode de production nouveau à la compagne, et J.P.OLOVIER nous l'explique
par l'annalyse suivante f
"On pourrait parler d'un mode de production, spéfifique à l'agriculture sous
domination capitaliste, non sans rapport aveœ la petite production marchande
- appelons la petite production p~sanne : sa base .en est l' exploi tatio::m
agricol'e familiale. Un paysan, propriétaire de ses moyens de productliim,
échange une partie de sa production contre des bien~ manufactuBés. ]1 n'y
a pas d'achat de force de travai~ f le capitalisme achète les produits, et
laisse au paysan la charge de la reproduction de sa torce de travail, assu-
ré en général par l'auto-consommation. Ce système, où chaque paysan est seuli
face au marché capitaliste, et réalise à l'échelle de la famille restreinte
l'unité entre .bjet de travail et moyen de travail, se retrouve dans l'en-
semble de l'agriculture BIlUS domination capitaliste"(I).
En effet, en Haute-Wolta, particulièrementFhez les BWA, la dissolution des
rapports traditionnels et l'émergence du mQde de production petit-paysan Be
manifeste et est favorisée par le développement de la propriété privée du sol
inconnue auparavent sous la double influence de la monétariation et du système
juridique occidental. Par contre chez les Mossi on peut observer la persistance
de rapports de production traditionnels, on pourrait donc dire que le
mode de:
production capitaliste ne se subordonne pas nécessaitement ces modes de produc-
tion
traditionnels, au sens où il se grefferait sur eux à un ndveau quelconque
o
du prcès de production, mais aussi qu'il tourne leur résistance économique pan
des mécanismes politiques. Le maintien éventuellement dan~es zones d'autosub-
sistance et l'agriculture vivrière, de formes traditionnelles,est une résistance
au monde "moderne" donif-e capital, en attendant, doit s'accommoder.
Cependant la pression extérieur du capitalisme tend à substituer aux rapports
de production traditionnels les rapports de production petits-paysansocêtte_pres-
sion ne s'exerce pas le plus souvent par des mécanismes ouvertement coercibles:
elle agit par des mécanismes internes aux sociétés villageoises, dont la décom-
pesit~on appara1t comme le produit de phénomènes spontanés: au niveau économi-
que, c'est la monétariaation
; au ~~veau juridique, c'est ltévolution du droit
coutumier (introduite par immixtion du droit colonial et occidental) ; au niveau
social c'est l'émancipatio~es cadets et dépendants (induitse par l'émigration
(1) J.P. OLIVIER: (déjà cité)
P.tb

- 88 -
rurale et l'influence occidentale dans les vilJes) - Cette modification des rap-
ports de production est masquée par la permanence de l'hégémonie politique et
idéologique du grpupe.
iffectivement si la résistance des rapports de production traditionnels
s'effondre, elle tend à se déplacer au niveau social et politique, par le main-
tien des liens familiaux et donnant souvent l'illusion de la persistanae des
rapports de production antérieurs, alors que ceux-ci ont en fait plus ou morins
dispar'u. "l son tour le. capitalisme tend à s' accomoder de résistance politique,
sociale ou culturell~"
en s'alliant les POUVOiilS traditionnels"(OLIVIER, déjà
cité). Ce qui peut renforcer l'illûàion précedente. Il faut savoir donc distin-
guer les rapports d'exploitation internes à la communauté de ceux qui se nouent
entre la p~sannerie dans sonrnsemble et les respoBsables de l'~tat, représen-
tant le système capitaliste mondiale.
On voit donc dansfe monde rural qu'une situation complexe se dessine; la
subordination des rapports économiques traditionnels au capitalisme n'y est qu'une
phase de transition.
E N
CON C LUS ION,
nous dirons que les paysans sont déracinés et
obligés de se soumettre aux conditions de la production industrielle d'un p~s
étranger. Les familles disloquées, ne comportant plus que des femmes,des enfants
et de vieillards,. peu capables d'assurer leur propre subsistance et impuissants
à fournir celle que nécessiterait le r.tour des cultivateurs masculill,$ telle
était la situation dans laquelle se débattaient les gens de la localité à la
fin de la deuxième année de secheresse. Quelques paysans, rebelles à l'émigra-
tion don~ls connaissent biens des aléas - l'exploitation économique, l'insécu-
rité, l'humiliation - restèrent néanmoins. Ils ne se dissimulaient pas leur in-
quiétude ; de leur enfance à leur ma turi té, le territoire villageoi1s, dont ils
é9nnaissent ch~ue pierre et chaque arbris~eau, s'était modifé ; la verdure y est
[;loins abondante,- la terre moins fertile • .l·ul doute que si une campagnede reboi-
sement se dévelopoe dans la région, elle ne rencontre auprès d'eux échos favo-
rables et participation. Encore f~ut-il qu'elle soit menée à temps.
les agriculteurs avaient aussi un autre sujet de préoccupation; le coton.
Alors que, ces dernières années, ils s'étaient soumis aux directives gouverne-
mentales et avaient~ugmenté les sunerficies destinées à cette cvlture, ils adop-
tèrent, en IQ73, une attitude plus~ritique : "si j'avais cultivé le mil dans le

- 89 -
Cb;amps de coton,. j'aurais récolté plus de lJIliU', "la culture du coton gêne celle
du mil", "Gette année je n "ai pas semé de coton mais du mil, seuJJementl', autanrt:
de propos nouveaux, révelateurs d'une opposition grandissante, passive ou active
à l'orientation adopté, en faveur d'une culture aommercriale appauvrissant. un s01
qui n'a même pas pu procurer le minimun de subsistance à ses habitants.
l N T R 0 D U G T ION
- APPROCHE THEORIQUE
En 1967 Je le Secrétaire général de l'O.C'.D.E., THOREKYL KRISTENSENi, pTésent-a:L"lt.
un iTnl'Ortant rapport sur le "problème alimentaire des pays en voie de déve:U(j)p~e­
me2It"(I). C-e rapport commençait par mettre en évidence six ph~ll)mè:m;es Ju~s fOil!l-
damentaux 1
la production alimentaire augmente mains vite que la demande,.
la superficie des nouvelles terres faciles à mettre en culture diminue con-
sidérablement,
- la population des pays en voie de développement augmente à une cadence cons-
tante,
1
les stocks e4'édentaires de céréales de l'Amérique du Nord ~ont pratiquement.
épuisés,
- l'aide au développemexrt ne fait aucun progJl'ès,
- le fardeau de la dette des pays en voie de dével:oppement s"alourdit rapi-
dement •.
~ompte tentt de ae constat, le rapport KRISTENSEN préconisait un ceFtain nom~re
de solutions :
-Développer l'utilisation des variétés à haut rendement (U.R.H.) ; intFoduire
des méthodes modernes de cultures (engrais, pesticides, irrigation, etc••• )
- Augmenter l'aide extérieure, notamment sous deux formes a aide alimentaire
et aide aux investissements agricoles~ Ceci apparait, selon l'auteur, comme la
seule solution propre à résoudre à court-terme le problème alimentaire-des Pél\\YB en
voie de développement et à assurer à plus ou moins long terme leur développement
rural, sans aggraver la situation de leur balance des paiements; on notera à oé
propos que le rapport n'hésite pas à affirmer qu'en définitive, les difficultés du
tiers-monde en matière de balance des paiements sont plus inquiétantes que son
déficit alimentaireo
Prendre toutes les mesures capables de favoriser le développement des ex-
portations des p~s en voie de développement, seul moyen dlaccro~tre durablement,
le niveau de vie des populations de ces pays. En particulier,
(1) L'OBSERVATEUR DE L'O.C.D.E : numero de décembre 1967.

- 90 -
les paya riohes doivent renonoer aux pratiques oommeroiales restriotives et
au protectionisme agricole~
- Augmenter les apports de oapitaux privés dans le~ pays en voie de àéve-
loppement,
Accroitre l'effort de reoherohe,
Et "last,but not least", aider les gouvernants du Tiers~onde à ihettre
en place d'énergiques politiques de contr~le des naissances.
On a quelques difficultés à admettre que ce rapport date seulement d'une
dizaine d' ânnées, tant les eapri ts ont évolué depuis •. Il témoigne d 'une épo~e
vraisemblablement définitivement révolue, où la teohhique inspirait encore
une confiance totale, où les problèmes du sous-développement étaient envisagés
sous un angle essentiellement quantitatif, où le développement du oommerce
international apparaissait comme une panaoée.
Les constats de l'anoien Seorétaire Général de l'O.C.D.E. semblent aujour-
d'hui curieusement limités. Bien d'autres problèmes que oeux qu'il évoque ont
été depuis mis en évidenoe et sont placés au premier plan. 'uant à ses propo-
sitions, flan est peu qui ne soient vigo~eusement oontestées et auoune or-
ganisation internationale, aucune autorité pleinement responsable, auœun ex-
pert objectif ne présenterait désormais un tel programme.
Les oauses de cette évolution rapide apparaltront sans doute limpides aux
historiens de demain. Pour le moment, il est enoore difficile de dégager d'un
ensemble de facteurs, le ou les éléments déterminants. Seraient-ce la sagesse
et l'intelligence humaines, qui auraient permis que l'on tirât enfin les le-
çons de l'expérience? Seraient-ce des évènements comme la sécheresse des zones
tropicales sèches, qui auraient remis en question un certain nombre de oerti-
tudes ou plut~t d'espérances? Serait-ce enfin le renversement des attitudes
des pays SOUS-développés eux-mêmes, dont les revendicà:tions nouvelles oblige-
raient les pays riches à reconsidérer non seulement leurs politiques, mais
aussi leurs doctrines?
Nous laisser~ns plus ou moins de eSté ce débat théorique. Car les pays
les plus pauvres dont la Haute-Volta n'ont guère progréssé s pour la plupart,
la productivité reste extrêmement faible et le niveau de revenu scandaleuse-
ment bas. Les pop~lations n'ont pas les moyens de se nourrir, s'habiller, se
loger convenablement, elles sont privées d'eau potable, d'installations sani-

- 9I -
taires décentes, et ne disposent pas des services élémentaires de santé et
dl enseignement. L'important est ici de prendre!' concrètement la mesure de cette
,
situation, et de cerner les facteurs qui favorisent le maintien et le renfor-
cement d'un sous-développement, rural en particulier. Ce qui nous conduit à
nous interroger sur les obstacles socio-économiques au développement rura~,
les institutions non structurées et les institutions structurées de finance-
ment des investissements et de faire un diagnostic de la situation agraire
actuelle •
..; LES INSTITUTIONS STRUCTUREES ET NON STRUCTUREES DE FINANCl!JŒNT
DES INVESTISSEMENTS AGRICOLES.
Le développement véritable des p~s agricoles comme la Haute-Volta exige
la mobilisation de moyens techniques, financiers et humains en faveur da monde
rural. En effet, l'application des techniques nouvelles pour l'au~entation
de la procBro.ction nécessite un financement de l t égrioulture•. C.ela revient à
scruter les voies et moyens de mobilisation de l'épargne nationale et de les
c~naliser vers les investissementœ agricoles. Car les besoins de finanoement
des ruraux s'expriment de plus en plus intuitivement, parfois même de façon
direote du fait d'une oertaine conjugaisom d'actions de vulgarisation et du
phénomène de diversificat ion des besoins. Le problème reste d'offrir à" ce mi-
lieu ouvert et sensibilisé la dotation nécessaire à la modernisation de leurs
activités et cela à travers des structures appropriées de crédit.
Du fait de sa faible capacité de financement découlant d'un revenu moné-
taire très faible, le paysan voltaique se trouve confrorrté aux sources instii-
tutionnelles et non institutionnelles de crédit agricole, dans le cadDe de ses
dépenses saisonnières (acquisition d'intrants et èemences améliorées, conser-
vation de récoltes, commercialisation des produits) et pour l'acquisition de
moyens de production (petits équipements agricoles, charrues, charrettes etc••• )
Ces deux sources principales du monde rural feront l'objet de l'analyse de ce
présent chapitre. C'est èn termes concrets que nous approcherons certains
traits caractéristiques des sources institutionnelles et non' institutionnelles,
et de relever quelques blocages auxquels se heurtent aotuellement la diffusion
du crédit à l'agriculture.

- 92 -
Section 1: L'agriculture et les Institutions organisées de crédit.
Le crédit constitue certainement un élément nécessaire dans le processus
de modernisatio~ de l'agrivulture voltalque. Tout en supprimant l'obstacle
financier, il peut accélérer dans une certaine mesure d'adoption de techniques
nouvelles. Les facilités de crédit sont également partie intégrante du proces-
sus de monéttsation et de commercialisation de l'économie rurale. Toutefois,
nous pensons que le crédit, même consenti au taux le plus raisonnable, ne peut
à lui seul accro1tre la productivité ou les revenus des catégories rurales
les plus défavorisées. Pour cela, il faut que de nombreux éléments soient
réunis: disponibilité de facteurs de production et de services complémentaires,
saine politique de oréèit, institutions bien gérées et circuits d'acheminement
adéquats, prise de conscience des ruraux de leur autopromotion.
En effet, comme l'indique la Banque Mondiale à propos de l'incidenoe du
crédit sur la production et les revenus: "les renseignements dont on dispose
prouvent que le crédit n'a que de faibles chancestd'être utilisé à des fins
.
au res
productives s'il ne s'accompagne pas de oertaines co~dition8 dont notamment.
1°_ Des possibilités certaines de gains économiques résultant de l'adoption,
de techniques de productiQn nouvelles ou d'autres améliorations,
2°_ La prise de conscience et l'acoeptation de ces possibilités par les
exploitants et l'accès aux moyens
de formation dans le domaine refUisJ
3°_ Des systèmes de livraison permettant de mettre les facteurs de produc-
tion nécessaires à la disposition de ceux qui en ont besoin, quand ils en ont
besoin et des débouchés pour les produits agricoles.
Ces conditions sont rarement réunies dans les p~s en voie de développe-
ment. Il (1) Nous ess~erons de voir la situation de l'agriculture face au crédit
institutionnel à travers les paragraphes suivants.
- Portée du crédit institutionnel: Banque Nationale de Développe-
ment, les banques commerciales,
Les institutions èoopératives de crédit mutuel;
Autres formes de financement.
Paragraphe 1: Portée du crédit institutionnel: Banque de développe-
ment.
(1) Crédit agricole: Politique sectorielle; Banque mondiale 1976, p.7.

- 93 -
Dans la Haute-Volta d'après l'indépendance, les banques d'affaires étran-
gères cèdent, en apparence du moins, leur position prédominante à la Banque
Nationale de développement. En fait, cette dernière a souvent bénéfioié du
soutien de banques étrangères dont les banques d'affaires.
L'on avait assisté depuis 1949 à la mise en plaoe de société de crédit
dans de nombreux pays africains. Leur objectif demeurait cependant limité à
l'agriculture et à l'artisanat. Elles ont, par endroit, réussi & lander des
coopératives rurales sans toutefois bouleverser les structures traditionnelles.
Après 1960,avec l'accéssion à l'indépendanc~, les pays africains se sont
tournés vers la création de banque de développement.
Deux traits fondamentaux caractérisent ces banques dans leur phase ac-
tuelle. - Les banques de dé~loppement nouvellement créées sont, un peu par-
tout, des banques pu~liques à la gestion desquelles l'Etat participe de façon
souvent majoritaire. Ce sont des textes législatifs ou réglementaires qui
réservent une partiuipation majoritaire à l'Etat. C'est ainsi qu'ill est prévu
par les textes que 51% au moins du capital social reviennent à l'Etat pour le
cas de la Haute-V,~lta. Souvent ces banques bénéfioient, au départ, d'une do-
tation en capital fournie par la Caisse ~entrale française de Coopération
économique l "C'est ainsi qu'au Bilan de la Banque Malgache de dé1Jeloppement
1
figurent à c6té des 450 millions F.N.G. venant de l'Etat malgache, 350 millions
venant de la Caisse G:entrale de Coopération économique" (1). Cet exemple est
applicable à toutes les banques qui ont souscrit aux mêmes relations avec la
C. C. C. E.
La non-spécialisation des opérations de financement constitue le
deuxième trait caractéristique. Les banques de développement s'interessent aux
opérations à long, à ~oyen et parfois même à court terme. L'on entend par là
éviter l'émiettement de fonds insuffisants et la non-coordination des techni-
ques et des institutions.
Aujourd'hui avec l'accélération du développement et l'extension des opé-
rations financières, les divers départements spécialisés des banques de déve-
loppement se constituent ou se constitueront en organismes autonomes.
La Haute-Volta comme tous les Etats africains francophones dispose actuel-
lement de sa banque mationale de développement. Cette banque dispose de
(1) Marcel Rudloff: "économique monétaire nationale et dévelopyement"J
Edition Cujas, p. 291.
.

- 94 -
ressources propres et assurent un certain nombre d'opérations banoaires.
- Ses ressources sont variées et proviennent de dotations en c$pital, du
produit d'emprunts, de subventions publiques, de revenus d'exploitation, de
bénéfices de gestion.
Son capital social (après une augmentation en 1976 de 350 millions de
FCFA à l 100 millions FCFA) est d'origine tripartitel un apport de l'Etat,
un apport d'organismes publics ou para-public. étrangers (ex: Caisse Centrale
Française de Coopération économique, la Caisse Française des dépôts et consi-
gnations etc ••• ), un apport de capitaux privés nationaux.
- Ses ressources se trouvent employées en un certain nombre d'opénations
de créditl le financement des activités agricoles. La Banque Nationale de
développement de Haute-Volta joue un rôle déterminant dans l'octroi des cré-
dits de campagne. Mais le financement des moyens nécessaires i. l' améliorationl
des conditions de production en milieu rural s'avère diffioile dans les struc-
tures classiques d'intervention des banques, même lorsqu'elles ont comme la
Banque Nationale de développement (BND) une vocation particulière pour le
développement national •. D'autant plus que la poli tique de ces structures
de
financement est plus favorable au crédit à ~a consommatiom de typa oocidental
ou à la mise en oeuvre d'industries liées au modèle de consommation extérieu-
re. Nous allons examiner les structures des sources institutionnelles de
crédits à l'agriculturel elles comprennent des organisations de types offi-
ciels et souvent bureaucratiques telles que les banques de développement; les
coopératives de crédits, les organisations non gouvernementales.
A) Les sources institutionnelles de crédit agrioole
Depuis l'accession de la Haute-Volta à la souveraineté avec un Etat
distinct de celui de la Métropole, les objectifs du crédit public à l'agri-
cULture ont évo~é de façon notable du moins dans les pro~lamations d'inten-
tions. Traditionnellement, il s'agissait surtout de réduire la dépendance
des
agriculteurs, et particulièrement des agriculteurs démunis, vis-à-vàs
du prêteur local qui, pensait-on les exploitait par la pratique de taux d'in-
térêt usuraire. En outre, un endettement excessif et le oo~t élevé des prêts
imposaient à un bon nombre d'exploitan*s bénéficiaires, des opérations de
refinancement. Toutefois, en raison de l'importance grandissante attribuée

- 95 -
depuis la derniêre décennie à la croissance économique et de la tentative
de mise au point au cours des années 1970 de nouvelles techniques agrioo]es
plus productives, les programmes de crédit visent maintenant, pour la plupart
à augmenter la produotion. La Haute-Volta théoriquement sembi~ aller plus
loin, les institutions de crédits constituées par les lanques de la place,
servent aujourd'hui à mobiliser l'épargne urbaine et rurale afin de réduire
la dépendance du secteur agricole à l'égand des fonds extérieurs. Ces insti-
tutions de crédits se résument en trois grandes rubriquess
- La Banque Nationale de Développeme~t (B.N.D.)
- Les sociétés coopératives de crédits mutuels
- Le's organismes non gouvernementaux,
1) La Banque Nationale de développements
Comme œ-ans nombre de pays africains, l'accession de la Haute-Volta à
l'indapendance, a necessité, dès 1961, la transformation de la première ins-
ti tut ion: "crédit de Haute-Volta" en un établissement dont le capital est
détenu en majorité par l'Etat (cf. tableau ci-dessous) et qui devait devenir
l'outil principal du gouvernement de développement national.
Banque Nationale de développement (B.N.D.)s
l 100 millions de FCFA
(capital sooial)
Etat voltaique
,54,55%
Caisse Nationale de dépets et d'investissememts
9,99%
(C.N.D.I.)
9,05%
G.C",C...E.. (France)
9,09%
Do E.,G o,
(R. F. A. )
9,09%
Divers
18,18%
La Banque Nationale de Développement prête essentiellement à de gros
exploitants, encore qu'à l'origine elle ait souvent eu pour objectif de fi-
nancer la petite agriculture. Il faut noter que la BoN.D. dépend dlune ad-
ministration très centralisée, ce qui la rend généralement peu apte à prêter
à un grand nombre de petits agriculteurs très dispersés. Pour ce type de
PTêts, la centralisation excessive entralne souvent des co~tŒadministratifs
plus élevés, des programmes mal adaptés aux con4itions et des ingérences

- 96 -
politiques.
L'expérience semble montrer que les banques agricoles spécialisées
accordant des crédits à court, moyen et long terme présentent un a~tage
certain par rapport à la B.N.D. qui est multisectorielle. Par conséquent
elle a tendance à favoriser les secteurs autres que l'agriculture et à~ê­
férer le crédit à long terme.
Effectivement, en nartant des mesures prises par les gouvernements en
faveur du crédit à l'agriculture, deux faits sont frappants.
- La part de ces crédits ne représente que de 5 à 10% de l'ensemble
des crédits alloués, contre 30 à 35% pour les industries. En 1975, le
rapport était de 5,08% pour l'agriculture et 94,9% pour l'industrie~
- Au niveau du crédit agricole, la part la plus importante du crédit
destiné aux sociétés et organismes liés au secteur public et destinés à
la commercialisation est plus importante que le crédita:. l'équipement
des produeteurso
Sur l 054 millions de FCFA de crédits alloués aux organismes régionaux
de développement (O.R.Do) par la Banque Nationale de Développement (B~.D.)
1,3 millions ont é*é destinés à l'équipement des producteurs agric~les i~
di~iduels (soit 0,12%) et 212 m~llions pour l'équipement des coopératives
et groupe,ents (soit 20%)0 Les crédits alloués à la commercialisation sont
de 840,7 millions FCFA, soit près de 80% de la masse de crédits accordés
aux O.R.D.

- 97 -
Tableau n0191 Crédits agricoles et industries 1974-1975:
Crédits et Annexes
Crédits à Pindustrie
Nature
.
8
du
millions
C.rédit
millions
FCFA
'. 1
FCFA
1.
Cout:\\; terme
331
13,5
2
109
86,5
t
1
Moyen terme
3
0,3
980
99,7
Long terme
).
143
100
TOTAL
334
5,08
6 232
94,92
l,
Source: B.C.E.A.O.
L'évolution du crédit à l'agriculture par la Banque Nationale de Déve-
loppement (B.N.D.), de 1970 à 1975, et sa répartition par secteur, cette
fois-ci depuis l'origine, nous sont résumées dans les tableaux nO 22 et 21.
Nous pouvons constater que si le crédit à court terme généralement destiné
à l'acquisition en nature des intrantŒ (engrais, insecticides••• ) a connu
au cours de la période considérée une progression continue (il passe de
127,5 millions de FCFA en 1970 à 331 millions en 1974-75), le crédit à moyen
terme,destiné à l'achat des équipements pour la culture attelée, a diminué
considérablement passant de 20 millions en 1970 à 3 millions FCFA en 1974-75.
Cette régression est due aux difficultés rencontrées pan' les O.R.D.,
dans la récupération des crédits à moyen et long terme. Cela a entrainé
certains O.R.D. à renoncer au crédit à moyen terme en raison du faible taux
de reml:iourseme nt. 1

- 98 -
Tableau nO 20: Evolution du crédit à l'agriculture accordé par la Banque
Nationale de dév~loppement de 1970 à 1975.
:
ANNEES
LONG TERME
M•.T.
C.T.
TOTAUX
:.~
:montant:
:montant:
, : montant :
:montant:
montant
Nbre
. Il'
Nbre
Nbre millionsNbre millions Nbre
mJ.
J.ons
millions
:
1
:
1
: :
: :
:
:
..
1970
30 . 20,2
7 : 127,5 : 29 r 9S8,I
66 r
1.135,8
,
1971
l
7,5
24 r
10,8
7 r
0,1 :
8 r 78I,J
38 :
954
:
1972
: 35
15,6
8 . 153,9 : 31 : 053,7
74 r
1.222.,8
1973
2
48,9
19
10,6
10
0,2
39 : 99 6 ,5
70 :
1..242
1974
: -
: 45
69,7
7 : 205,5 : 44
835
96
1.101,4
1975
: -
3,0
- : 331
- : 723
56 :
1.054
: 400 ::
6.710,00
Source: Rapport d'activité B.N.Do

- :9' -
Tableau n0211 Gxédits agréés par Secteur depuis li'origine (1961-1977).
CREDITS AGREES
:
POURC ENTAGES
(Millions FCFA)
Sur le total général,
s,
1 Agriculture••••••••••••••• 12 077
33,00%
: Artisanat - Commerce ••••••
5 227
14,28%
: Industrie •••••••••••••••••
6 572
17,95%
: Colleotivités publiques•••
2 058
5,62~
1
Immobilier••••••••••••••• ~
7 985
:
21,82~.
1
Equipement familial •••••••
2 681
7,33~
1
:
TOTAL•••••• 36 600
100,00%
1
Source: Europe-Outre Mer; Mensuel nO 575, Décembre 1977.
De ces tableaux, on retire que le montant total des engagements de la
B.N.D. au titre de l'agriculture est passé
à 6 710 millions FCFA, pour les
six exercices 1970 - 1975, et à 12 077 millions FCFA pour l'ensemble des
exercices depuis l'existence de l'ét_blissement. L~ proportion des crédits
affectés aux petits exploitants est à son niveau nul. De 197,0 à 1975, la
B.N.D. a accordé quelques 400 prêts dont les bénéficiaires sontl les digni-
taires du régime et quelques agriculteurs aisés du monde rural. Par contre
les millions de petits exp10itants ayant 5 ha de terres ou moins ne bénéficie-
raient d'aucune opération notable de crédit agricole à court et à long terme.

- roo -
Malgré cet effort· dans les intentions, les opérations de la Banque ~ationale
n'ont atteint qu'un .. infime pourcentage de petits exploi tants ~ui ont opté
de s'engager totalement dans les cultures d'exportation ainsi que l'illustre
la répartition des différents orédits du tableau sunvant.
Tableau nO 22. Répartition des orédits du Crédit agrioole de 1966 à 1974.

- ror -
TaOleauno 22. suite
Source: 2ème projet de Fonds de dév~loppement rural
24/5/1976:
De ce tableau, il faut retenir que derrière le chiffre globaJi de. cré-
crédit agricole, les prêts de' commercialisation, accordés à la Compagnie
Française pour le développement des fibres textiles (C.F.D.T.~) pour ses aohats
de coton représentent l'é1é~ent le plus importan~ du portefeuille agricole
de la B.N.D ••. En 1973/74, ils s'élevaient à 837 millions de FCFA, soit 76%
des prats de la B.N.D •• Cependant le crédit a~~ordé pendant la mIme période

- r02 -
pour l'aohat des facteUrs de production saisonniers correspondait à 205 mil-
lions, soit 19% du total du créait agricole. L'ensemble du crédit à court
terme (CT) équivalait à environ 35% des prêts de la B.N.D. en faveur de l'a-
grioulture, plutôt en faveur de la oollecte des produits primaires agrioolles.
Cette orientation des PJ!8ts de la B.N.D. loin d'etre--'un support de la pro-
duction agricole, ne profitent pour l'essentiel qu'aux sociétés d'interven-
tions (C.F.D.T.). La preuve en est que le crédit agricole à MT accordé pan-
la B.N~D. reste insignifiant, comme l'illustre le tableau ci~dessus qui en
donne la ventilation par catégories pour plusieurs années. Pour la période
1973/74, le orédit agricole accor4é par la B.N.D. se répartissait oomme suit:
Tàbleau n0 231 BJature du crédit agricole 1973/74
1
1
·
1
·
Hontant
1
Nature du crédit agricole
1
1
Pouroenta«e
(millions de FeFA)
~
1
t
1
1
1
:- Facteurs de produ ctiolll saisonniers ·
205
·
19
s:
·
·
1- Commercialisation du coton
.-
1
837
1
76
1
·
Crédi t à coutt terme
·
(1 (42)
1
(95 )
·
·
:- Nouvelles Plantations
1
8
·
Q,7
1
·
:- Bâtiments
1
3
1
0,3
1
:- Matériel
·
36
1
3
·
:-Elevage
·
12
1
l
·
·
Crédit à. moyen terme
·
mr
1
( 5)
1
·
·
...
ft


1
TOTAL
·
110,1
::
100
·
1
:

- 103 -
Les dits prOts à l'agriculture qui ont connu une forte augmentation au cours
des années ont toutefois diminués en pourcentage du crédit accordé (ot~ ta-
bleau: Nature du crédit agrioole de 1966 à 1974) r. passant de 5a% environ à
la fin des années soixante à 23% en 1973/74.
Les seuls besoins des petits exploitants en petits équipements agricoles
(charrues, charrettes~ polyculteurs) pour la Campe.gne 1976/17: se chiffreat-;·à,
environ II 580 demandes potentielles et elles atteindront 90 000 d'ici 1985.
Une comparaison de ces bessins potentiels au ryt3me actuel de finanoement de
l'agriculture de la B.N.D., soit une moyenne
de 80 prêts par an d'un montant
de 81!~ millions d-e FCFAJ voilà ce qui fait ressortir à la fois l'effort
effectif que la B.N.D. et lea autres institutions de crédit doivent déployer
pour couvrir ces besoins réels, et également pour examiner objectivement la
procédure d'octroi de orédit et les conditions d'accessibilité.
a) La procédure d'octroi de crédit de la B.R.Do
I)-Conception théorique de la politique du crédit et d'adminis-
~ration:
Les décisions qu'implique l'éxécution d'un programme de crédit peuvent
être divisées en trois catégories, stratégiques, tactiques et au jour le jour.
La première catégorie couvre les questions de priorité générale comme
les affectations budgétaires à l'agriculture plut6t qu'à d'autres secteurs
et plus particulièrement au crédit plut6t qu'à d'auiTes mQUens de dé~loppe­
ment. Se rangent sous cette rubrique les emprunts co~ractés auprès d'orga-
nismes et les paramètres clés d'une politique de orédit, tels que le taux
d'intérêt. Les crédits publics ne pouvant touche~ qu'un nombre limité d'ex-
ploitants, les consid'rations d'ordre stràtégiques comprennent aussi les
décisions qu'il faut prend~e ~uant aux caractéristiques,définies en termes
généraux, des bénéficiaires; il peut s'agir de choisir parmi les régions, des
classes de revenus ou des cultures~ Cés décisions sont prises au niveau mi-
nistériel.
Normalement, les problèmes tactiques sont du ressort de l'organisme

- 104 -
chargé d'administrer le financement du sacteur agricole. Cet or~isme doit
mettre au point et oDganiser les programmes de crédits, choisir, former et
encadrer le personnel, gérer les l1"onds;'et la Comptaliilité, et assurer la
coordination avec les organismes responsables des se~ices auxiliaires. Ces
services de base s'occupent des opérations au jour le jour; ils sont donc
chargés d'adapter le programme:::de crédit aux conditions locales, de choisiBé
les emprunteurs ou d'organiser les groupes de crédits, d'assurer la coordi-
nation avec d'autres organismes au niveau local et d'accorder, de superviser
et de recouvrer les pr@ts.
Ce prooessus étant complexe, des problèmes peuvent surgir à n'importa
quelle évape de la distribution du orédit. Toutefois, i l semble qu'ilJ,y ait,
ce~tains problèmes qui, sans figurer dans toutes les orMannsations de crédits,
sont communs à beauooup d'entre elles. Le premier ooncerne la pŒiitisation
du mécanisme de-distribution du crédit li laquelle s'assooie la corrupviOllle-
Ce ris~ue est presque inévitaijie lorsqu'il s'agit d'un élément camme le cré-
dit, qui est rare et qui est distribué pan l'inteeméèia~e de l'administration.
En raison de leur influence politique, les gros agriculteurs et la couche
dirigeante s'approprient généralement la majeure partie des crédits aoekdés.
par l'Etat.
En Hante-Wolta comme dans de nombreus p~s, la politique et la corrup-
tio!1J ont envahi la distribution du orédit au niveau tactique, voire au niveau
des opérations•. Il arrive que le choix des responsables des institutions de
cmédit - et quelquefois même du personnel soit fondé sur l'appartenance poli-
tique plut6t que sur les compétences. Dans certains oas, la politique influen-
ce même le choix des bénéficia~es et la façon dont les sanotions sont ap-
pliquées. S'il est vrai que la dtratiégie du crédit ne peut @tre séparé de
la politique, il n'en est pas moins éminemment souhaitable d'isoler, autant
que faire se peut~ les opérations effeotives des intertérences politiques.
Le second problème (dé.ja évoqué plus haut) commun à beaucoup de program-
mes de crédit est la centralisation exoessive _ui a pour corollaire des mé-
canismes rigides et lourds d'attribution des prêts. Un organisme qui accorde
des crédits aux agriculteurs, particulièreRJent là où les prêts Bont:~lnomllreux,
et portent sur de petits montants, dcit être très décentralisé. De plus, au
niveau local, le personnel est généralemeht peu nombreux et relativeme~ mal

- 1°5 -
formé. Comme le contr61e est chose difficile, la procédure généralement adop-
tée consiste à centraliser le processus de déc~ion. ~es déeisions en matière
de prêts doivent souvent être renvoyées aux nivesux, supérieurs de l'adminis-
tration. Il en résulte un programme de crédit couteux, embarassé de paperas-
serie et de fgrmalités, et mal adapté aux conditions locales. Les exploitants
illétrés sont soumis à des vérifications comptables avant et après l'actroi
du prêt. La distribution effective du crédit est lente, ra»es sont les orga-
nismes capables de dépouiller les demandes de prêts en moins de soixante jours
et beaucoup mettent jusqu'à quatre vingt dix jours pour foUrnir les fonds.
Pour les petits agriculteurs qui ne planifient pas leurs besoins da crédit,
de tels délais dans l'obtention de crédits de oampagne font souvent que les
fonds sont accordés trop tard. L'indifférence de bOB' nombre d'agriculteurs
s'explique en raison de la complexité des ft>rma1i tés et des mesures dracronien-
nes du ohoix des candidats.
b) Choix des candidats à la B.N.D.
Les candidats au crédit sont tout d'abord choisis an niveau du v.illage
et
par un comité compose des anoiens ohefs de terre qui jugent de la moralité
et des capacités de remboursement du oandidat. L'approbation finale est don-
née an niveau du sous-secteur des O.R.D. (chaque O.R.D. est divisé en cinq
ou six secteurs, qui sont eux-memes divisés en quatre ou cinq sous-secteurs).
Les formulaires individuels de demande sont oomplétées aven: l'aide du
personnel de vulgarisation des O.R.D. et acheminés à l'administration.cen-
traIe.
Avant que la saison agricole ne commenoe, chaque O..R.D. établit une
projection des besoins financiers proHables,généralement approuvés par le
conseil d'administration. La B.N D.
0
autorise un plafolld maximum dans le oas
des prêts è court-terme pour chaque O.RoDoo Le financement des crédits à
moyen-terme fait l'o~et d'un'examen cas par cas, et les candidatures sont
revues par le comité directeur des O.RoDo
Lorsque les demandes sont accèp'ées, les reoommandations du comité sont
alors envoyée~ à la B.N.D. pour appDoba~ion finale. Les dossiers de orédits

- 106 -
~ court-terme sont conservés par les O.R.D., tandis que ceux des crédits à
moyen et long-terme sont déposés au siège social de la B.N.D. à OuagadougOu.
Pour l'attribution des crédits, la B.N.D. a étabii les critères suivantss
-avoir remboursé toutes les dettes antérieures.
-appartenir à une association pré-coopérative.
-avoir démontré par le passé sa volonté de suivre les techniques agricoles.
-avoir un revenu agricole prouvé au moins égal! à trois :Ids le nontant du
crédit à moyen-terme.
Pour appartenir à une association pré-coopérative, le paysan ou le fer-
mier p~e__une seule fois une cotisation de 200 FC~, s'il a l'intention d'ob-
tenir un crédit saisonnier, et 800 FCFA s'il désire demander un crédit mo-
yen-terme. Ces cotisations sont versées alUn fond de garantie géré par l'O.R.D.
et qui pourrait être utilisé pour rembourser les dettes payées. Les aaaocia-
tions pré-coa:pératives n'ont pas de statut léga.li et ne conatituent pas des,
associations de garanties mutuelles.
D'autre part, à partir de 1976 et dans certains O.R.D., les ea.n4i.dati c,
au crédits sont tBnus également de verser à l'O.R.D., le 1/5 du montant de
leur prêt, correspondant aux frais d'études du dossiet et aux frais d'enquête•.
Les conditions d'octroi de prêts ne profitent pas aux agrivulteurs les plus
déshérités, étant donné qu'i! faut,si l'on veut aider Ges p~sans déshérités,
un crédit moins cher à procédure moins lourde et aussi agir par d'autres m~
yens: réforme agraire,programmes visant à développer les possibilités d'in-
vestissements producteurs, amélioration des méthodes de polyculture (prati~
quée par la grande majorité des plus petits exploitants et que la recherche
agricole a souvent délaissée jusqu,tàprésent au profit de la monGculture),
amélioration de
la productivité agricole grâce à des programmes connexes
(de santé et d'éduoation par exemple) etc••• Le succès des opérations de
crédit ne dépend pas un~uement des conditions; 4ans lesquelles les agriaul-
teurs utilisent les prêts accordés par les
organismes de créAit agricole
pour développer leur production. Il dépend éga1emen~ de ces organismes mêmes,
et plus précisément de trois facteurs déterminantss l'élaborationlde leUDS
programmes en partant des réalités socio-économiques des bénéficiaires, leur
solvabilité et surtout leurs mécanismes d'attribution des prêts. Voyons les
conditions du crédit à l'agriculture v~ltaïque.

- 107 -
B) Les conditions du crédit ffi l'agriculture.
Dans le cas de la Haute-Volta les O.R.D. sont financièrment responsables
envers la Banque Nationale de Développement, en ce qui ooncerne les crédits
sisonniers, obtenus par les agriculteurs dans leurs zones nespeotiv.es.
Etant donné que oes O.R.D. sont des organismes d'intérêt public qui fono-
tionnent selon les règles et avec la souplesse des sociétés privées, qui sont
censées réaliser (peu ou pas de profits) à partir de leurs activités d'enca-
drement, de vulgarisation et de commeroialisation des produits agricolesJ ils
ne sont pas considé?és comme solvables par la B••~D•• Aussi, cette dernièr&
exige-t-elle la garantie des prêts par l'Etat •.
Le Ministère des Finances et la B.C.E.A.O. avaient cependant souhaité
q~e ~~ gouvernement retire cette garantie, mais la ~N.D. a refusé en avan-
-'. ..
"
'
,
çant que les O.R.D. n'étaient pas solvables et restreindre les prêts aux
seuls agrivulteurs offrant des garanties tangibles 4é~irait le développe~
ment du orédit agrioole en Haute-Volta. La B.N.D. a mis au point UDl système.
de prêt aux D.R.D. dans lequel les smus-secteurs e~ les seoteurs ~ant des
dettes dépassant respeotivement 10 et 2~ n'obtiennent d'antres crédits.
La B.N.D. fait p~er aux D.R.D. un taux d'intérêt de 5,5% pour les prêts
d'équipement (orédit MT) et les prêts saisonniers (orédit à oourt-terme).
Les prêts sont également étalés sur douze mois au maximum peur les cnédits
saisonniers; jusqu'à oinq ans maximum pour les orédits d'équipement aveo
choix entre plusieurs prooédés de remboursement.
Un an de différé avec amauités oonstantes. U~, an de différé signifie
pour le p~san le temps de l'apprentissage pour lui et pour les animaux. Pen-
dant l'année de différé, le prêt fait des petits. Dans la bonne logique
financière, même si oet argent n'a pas travaillé pleinèment il a été quand
même immoHilisé par les prêteurs. Ce qui veut dire que pour un prêt initial
de X, le rembourseDIIBnt oourt à partir de l'année 2 et conoerne un oapital de
Xc +'A, tel que A = 0,055 Xe
Le p~san a le ohoix tout de même d'amortir sa dette en deux, trois ou
quatre annuités.

-
108 -
- sans différé, annuités constantes,
- un an de différé, remboursement progressif.
Concernant toujcmrs les crédits d'é'luipement, le taux d'intérêt varie
selon l'apport personnel de l'agriculteurz si l'agriculteur paie au comptant
les 50% dU1 mon1iant du prêt, le crédit lui est accordé av:e c un taux d' intén@t
de 4% sur la somme restante, PB3'able en douze mais.
Si son apport personnel est de 35% du montant du prêt, le taux d' iMér@t
varie selon l'apport perllDnnel, le taux d'intérêt est de 8~ environ sur la
somme restante paJ'"able en vingt quatre meris. Signalons enfin que l' figricnürteur
paie une commission de 5% pè~ lès facteurs de production fournis à orédit,
pB\\Vable en six mois au taux d' intérêt ann1lel~de I~.
L'objectif des programmes de prit ad' aborÈ ét'é de protéger les agricul-
teurs déshérités de l'exploitation 4es usuriers. Avec cela,les taux d'intérêt
étaient relativement bas. On ne &:l'attendait pas, il faut le reconnattre, que
ces programmes puissent s'autofinancer et le gouvernement admettait, au moins
implicitement, que les prêts contenaient une part importaàte de subventio~
Rien que les objectifs aient changé,les taux d'intérêts sont re&tés relative-
ment faibles en valeur nominall.eeèt surtout en Haute-Volta qui connait une
inflation importante. Ils::sont même dev..enus négatifs en termes réels. De- ma-
nière générale, l'intérêt éxigé par la B.N.D. est faible en oamparaison de
celui demandé par les prêteurs commerciaux, il l'est aussi par rapport au
codt des capitaux, déterminé par l'offre et la demande, et aux co~ts de ges-
tion des organismes de crédit.
Si l'on se place maintenant du point de vue de l'agriculteur, les crédits
institutionnels entrainent d'autres co~ts. Les co~ts véritables des prêts des
organismes officiels se concentrent dans les frais de dossier, de voyage, et
de "divertissement", ainsi que les jours perdus pour la négociation des prêts.
Ces frais fictifs diminuent l'attrait du crédit public par rapport aux em-
prunts privés. Néanmoins nous pensons que les "A-côtés" liés aux cœédits d'o-
rigine publique ne se limitent pas A oes quelques exemples. Malgré ces oaftts
cachés, les crédits institutionnels sont, dans la plupart des PB3's, certai-
nement plus avantageux que les prêts des bailleurs de fonds co~eroiaux.
L'expérience de la Banque Nationale de Dév.eloppement et de ses agences

- 109 -
(O.R.D.) montre que, du fait qu'on s'adresse à la fois à de gros et petits
exploitants, la plupart des crédits vont aux plus gros exploitants. Il s'agit
là en partie d'un problème politique. A l'échelle de l'O.R.D., ce sont les
gros agriculteurs qui joüissent de la plus grande influence politique et
sociale. De plus les opérations de crédit en faveur des gros agriculteurs
entrainent des coftts et des ris4ues moins élevés. Enfin, les garanties qu'e%~
g~at ces organismes de crédit des p~sans, les exploitants déshérités sont
"
souvent inaapables de les réunir. Pour notre part, afin qu'unœplus grande
part des fonds dégagés à leur intention soit effeotivement mise à leur dis-
position, il semble néoessaire que la B.N.D. travaille à la création de prêts
distincts pour les petits et les gros exploitants dans toutes les régions où
les exploitations sont de taille très inég~le. La B.N.D., qui est elle-même
centralisée, n'est pas plus apte que les organismes régionaux de développe-
ment à éxécuter des programmes de crédit en faveur des petits exploitant~.
Ces deux types d'institutions peuvent, toutefois, prêter à des groupes ou ~
des coopératives qui serviraient d'intermédiaires•••
Paragraphe II: Les Sooiétés Coopératives de Crédits Mutuels.
a) -Pré8entation du problème:
Pour surmonter les problèmes liés à une centnalisation excessive, beau-
coup de p~s en voie de développement tentent de oréer des groupemeats et
des coopératives d'agriculteurs pour atteindre les petits exploitaans. Ils
misent ainsn sur le fait que ces groupements ou coopératives sont une forme
d'organisation qui présente la décentralisation et incorpore oonnaissances
et responsabilités locales.
Bien entendu ces··termes "coopératives" et "groupements" couvrent diverses
formes d'organisations. Les groupements d'agriculteurs ont en général, un
caractère officieux; ils sont orgânisés autour du village, et sur la base
des relations de parenté, ou d'intérêts économiques communs. Ces groupes qui
comptent en général de dix à vingt membres, cmmprennent des, associations
d'agriculteurs, des sociétés villageoises et des sociétés de p~sans.

-110-
Quant aux coopératives officielles, ce sont généralement des organisations
plus importantes qui s'occupent essentiellement de distribuer le crédit, de
fournir les facteurs de production, ctle commercialisation de la production,
et de gérer les investissements communs comme les installations de stockage
ou de tr~nsformation.
b) -Groupements et coopératives en Haute-Volta.
Il existe environ quatre vingt dix coopératives de crédits agricoles
d'approvisionnement en matériels et facteurs de production, et près de 2000
groupements villageois pré-coopératifs qui n'ont pas de statut légal, et ne
constituent pas des associations de garanties mutuelles. C'est cependant par
l'intermédiaire de ces coopératives et de ces groupements villageois que
passent les O.R.D. pour distribuer et recouvrer les crédits alloués aux p~­
sans. Il s'agit presqu'exclusivement de crédits en nature, en engrais et in-
secticides pour les cultures de rente, notamment le coton. Les équipements
et boeufs de labour pour la culture attelée sont également distribués à cré-
dit moyen-terme, surtout aux paysans des zones votonnières.
Des expériences d'implantation de caisses populaires ont é~é tenter en
1912 dans l'O.R.D. de la Bourguirba par la Compagnie Internationale de Déve-
loppement Raral (C.I.D.R.). Au départ, ces caisses ont limi~é leurs opérations
à la collecte de l'épargne, et ~ la mise au point d'un système de oomptabilité
et de contr81e dont l'objectif est de faciliter le plus possible les opéra-
tions aux membres. Dans une seconde phase, il a été créé un comité chargé~
d'étudier les mécanismes de crédit propre à chaque caisse.
Afin d'atteindre la responsabilité, le capital initial des caisses a
été fixé à 100:000 FCFA, le montant des cotisations à 500 FCFA et le nombre
d'adhérents à 200 membres. Ce capital initial a été prêté aux çoopératives
locales afin d'augmenter leurs fonds de roulement ou leur servir ~ stocker
des pro~uits vivriers pour la période de soudure.
Incontestablement, quand il fonctionne convenablement, ce système présen-
te de nombreux avantages. La décentralisation de la gestionlau jour le jour
facilite l'adaptation du programme de drédit aux conditions locales et réduit
le temps nécessaire au dépouillement des demandes de prêt et à, d'aavres

-
I I I -
décisions. La connaissance du milieu peut être utilisé pour:déterminer le
risque d'un prêt à un agriculteur donné et ses possibilités d',investissement,
ce qui, ajouté œ la responsabilité du groupe pour le remboursement et à la
participation au capital de la cooprative, devrait réduire les imp~és. De
plus, le regroupement des exploitants augmente le montant des prêts, ce qui
permet de réduire les co~ts et d'aocro1tre le pouvoir politique des petits
agrioulteurs face aux pouvoirs illimités d'une administration régressive et
corruptrice.
Ces groupements villageois et coopératives constituent-ils ~ espoir
pour le p~san voltalque à l'avenir biOOqué?
Pour nous, des institutions oomme celles-ci ne sont des coopératives
que dans la mesure où l'on exige des membres un engagement financier sous
forme d'actions CIU de d'pôts. A d'autres égards, elles demeurent titèssembla-
blesaux servioes agricoles spécialisés de la B.N.D. et beaucoup souffrent
des mêmes difficultés. Dans le contexte actuel, il serait illusoire deilmettre
sur pied des coopératives et groupements d'agriculture vraiment contrÔlés
,
localement à la base. Beaucoup de ces sociétés sont très individualis~es et
les petits exploitants se dérobent devant toute tentative bureaucratique
d'organisation. De plus, dans beauooup de régions, l'administrationl la dhef-
ferie et les agriculteurs aisés, qui sont les dirigeants locaux, ont déoouragé
le développement
d'organisations représentant les petits exploitants. Les
coopératives et groupements n'ont pas connu de meilleurs résultats parce
qu'il n'existe pas d'homogénéité dans le régime de propriété (antagonisme
entre droit communautaire et droit moderne) et les systèmes fonciers, une
forte cohésion sooiale de "terroir" et un niveau suffisant d'éducation pri-
maire. Le groupement des petits exploitants est oertes un "progrès", mais
l'organisation et l'adaptation aux uonditions locales sont une entreprise
de longue haleine qui exige un sacrifice, sinon un inversement du rÔle des
pouvoirs de l'administration actuelle. La Banque Nationale de Développement,
qui vise à favoriser ce processus, doit se départir de sa conception unique
ou rigide de l'organisation coopérative, puisque oelle-ci peut être efficace
sous des formes très diverses.
Paragraphe III: ~es organismes non gouvernementaux.

- 112 -
La H~ute-Volta qui a été classée par la C.~.U.C.E.D.(I) parmi les vingt
cinq p~s du monde les plus désavantagés, reçoit une aide ex~érieure très
importante. Depuis les années 1973 - 1974, l'aide bilatérale et multilatérale
réunies dépassent en moyenne le budge~ national. Cette ai4e finanaerait la
majeure partie des investissements du p~s, le reste étant ~ la charge des
organisations non gouvernementaies. Que dire de oela, sinon ~ue c'est la
consolisation de la dépendance qui constitua.i t déja une réal1i té.
Comme nous le rapgorte René Dumont (2), A propos d'Dne étude faite par
un économiste américain,
"L'aide extérieure a surtout permis, en accroissant le nombre et;.
la rénumération des salariés, d'enrichir les villes; lesquelles,
on le sait, ne produisent guère mais vivent surtout de cette aide,
au dé~iment de la camp~e. Finalement, au lieu de contribuer à
rendre le p~s autosuffisant, cette assistance augmente à terme
les besoins en aide et enfonce le p~s dans une dépendénce accrue."
L'aménagement des vallées dis Vonta est un exemple très frappant où les
dépenses de fonctionnement et deœlaires représentent 35% (naus y reviendrons
plus loin) des dépenses totales. Pour une large pant, le finanoement du pro-
jet servira la catêgorie des assistants t«ohniques et quelques fonctionnaires.
Nous disons dans la première partie (cf. tableau p.53) que l'aide exté-
térieure sert juste à couvrir les transfltrts pri~s vers l'extérieur, des
sociétés et persannes étrangères installées dans le p~s. Face à cela, on ne
peut que douter de l'intérêt d'~n développement rural pris en change exclusi-
vement par des finances extérieures.
Par ailleurs, en plus de l'aide bilatérale, la Haute-Volta reçoit le
concours de très nombreux organismes non gouvernementaux~ Ces organismes non
gouvernementaux prennent en oharge dans le p~s, une multitude de petits pro-
jets ou de "micro-réalisations" •. La Haute-V,ol ta, de par son extr3me pau~eté
et le libéralisme de son régime, est certainement le p~s de l'Afrique de
l'Ouest où la présence de ces organismes non gouvernementaux (C.N.G.) est la
(1) C.N.U.C.E.D.: Conférence des Nations-Unies pour le Commerce et le Dévelop-
pement
(2) Le Monde Diplomatique 1976.

- 113 -
plus forte. La plupart de ces O.N.G. promettent dans le cadre de leur pro-
gramme, des systèmes de crédits agricoles destinés soit à l'ac~uisition d'in-
trants, soit à l'équipement ou à la conso~ation. Les prêts sont également
accordés aUK paysans avec un taux d'intérêt plus faible que oelui de la B.N.D.
Chacune de ces OolloG.'essaie d'amener son originalité, d'y exeroer sa concep-
tion de développement au nDYeau local, sans pour autant trop gêner les struc-
tures officielles du pays (ex. O.R.D.), les uhes réussissent leur proje~ en
atteignant les objeotifé fixés, les autres essuient des échecs et ~.paatent
sur un autre pidd. Toutes ces organisations oonstituent alors un ensemble
plutôt original et bien hétérogèDIB (1) qui donne donc à la Haute-V.olta l'image
d'un vaste champ d"expérimentation", ohacU:I al;lant de la llienne, portant'
bien haut son drapeau dans l'éspoir de sortir d'un an~at parfois dur s
supporter.
Cette aide, ces projets,quelqu'ils soient, bilatéraux ou multilaténaux,
gouvernementaux ou non, ont acquis aujourd'hui en Haute-Vol*a une telle im-
portanoe, qu'il est difficilement imaginable que ce p~s pui*se subitement
s'en passer. La Haute-Volta est dev.enue plus que jamais davantage dépendante
de l'eKtérieur, et en particulier son agriculture.
Pour conclure" nous rapellerons simplement que l'action de oertains or-
~~ismes non gouvernementaux est une entreprise noble, oertes,~ais qui, oomme
la majorité des autres organismes et institutions, au lieu de s'adresser
direotement aux paysans
pour mieux se péné~rer de leur désir ardent et mieux
les ~ider, les ignore. Comment s'étonner que le nombre de. e%ploitants ayan~
accès au crédit agricole institàtionnel reste faiDie. L'immense majorité des
paysans s'abstiennent d'emprunter, soit font appel aux prêteurs looaux, où
autres garents et amis. Si le crédit institutionnel se développe rapidement;
il reste une source rminori taire en Haute-Vol ta.
L'aide des organismes non gouverneme nt aux pour autant génl§reuse qu'elle
puisse parattr., est vue par le paysan au même titre que celle
spoliatlrioe
que lui présente les institutions gouvernementales (ou le monde du"blane).
Qu'on lui assure que oes deux types d'aides sont de
nature et de oonoeptioD
différente~, c'est offrir au p~san les deux fruits identiques d'un même arbre
(1) Il existe un Secrétariat Permanent des Organisations non G,ouvernementales
(S.P.OoNoG.) à Ouagadougou.

- 114 -
ne produisant que des fruits qu'il sait par expérienoe empoisonnés - qu'on
lui dise qu'un des deux fruits est nourrissant et non dangeneux, tout en l~
sommant de choisir le non toxique sans aucune démonstration au préalable
qu'on pense que le p~san vous croira sur parole, c'est certainement prendre
ses désirs pour la réalité.
C'est pourquoi, en dépit du taux d'intérêt relativement faible parfois
inexistant pratiqué pan les sources institutionnelles non gouvernementales,
même gouvernementales (av~c l'aide de la Banque Mondiale) de cré4its, et
des différeniesGoampagnes menées conjointement par la RadiodiffUsion et les
O.R.D. pour détourner les p~sans des sources non institutionnelles de cré-
dits; qu'un grand nombre de ces derniers continuent toujours à B'adresse~
aux commerçants et négociants spéculateurs de leur village pour ijénéficier
de crédits. Vo~ons ce que représentent les sources nOŒ institutionnelles dans
la ~e'::'économique du pB\\1san.
Section 2: Le paysan solitaire face aux sources non institutionnelles
de crédit.
En milieu traditionnel, oertains ezploitants pauvres font appel au cré-
dit de façon ~égulière afin de couvrir leurs dépenses familiales pendant les
mois précédant la récolte. Cependant la plupart des agrioulteurs n'empruntent
que si la récolte a été mauvaise ou~s'ils doivent faire faoe à une dépense
inhabituelle, souvent à l'occasion d'un évènement,'f'amilial - naissance, ma-
riage ou décès.
Une grande partie des frais est tinancée, à oharge de revanche, par
d'autres agriculteurs (voisins, parents et amis), qui ne demandent qu'un in~
térêt nominal. Beaucoup de petits emploitants, partioulièrement ceux qui
empruntent de façon]~égulière, s'adressent à des commerçants, intermédiaires
et prêteurs qui pratiquent des taux d'intérêt élévé. ae~jains de oes pr8teurs
puayent être en situation de monopole (dans leur secteur), par conséquent
ils peuvent appliquer des taux
allant de 20 à 100%, selon~ les garanties
offertes par l'emprunteur. Dans ce~qui ~a suivre, nous allons tenter d'examineI

- 115 -
certains traits caractéristiques de oes sources non institutiannelles_
Paragraphe 1: Portée des souroes de financ~ent nonlinstitutionne]-
les.
On a tendance à"considerer les institutions de orédit agricole plus com-
me un élément isolé que comme un maillon du oircuit de financement agricole.
Toutefois, elles ne fournissent qu'une partie - du crédit utilisé par les
exploitants. Si l'on inclut l~épargne agricole, bien que faible, leur contri-
bution est encore moins importante. D'ailleurs les programmes de crédit ins-
titutionnel obéissent à des ohjectifs (des bailleur. de fonds étr~gers) qui
ne tiennent pas compte de la situation financière du monde rural. Certes,
certains problèmes concernant le financement de l'agriculture ont pour origine
la fragmentation~des "marchés financiers". Dans bien des régions du pays, les
capitaux circulent mfficilement entre les marchés et même à l'intérieur j'un
même marché entre prêteurs et emprunteurs. Dans ces oonditions il faut retenir
~e
10) l'absence de concurrence entre les pBêteurs, entraine des taux d'inté-
rêts usuraires. En effet les taux d'intérêts ont subi des hausses depuis 1972,
où les estimations les situaient dans une fourchette de 20 à 100%. Une étude
plus récente" effectuée pour le compte dm l'U.S.A.I.D. en Février 1976, si-
gnale des taux d'intérêts variant entre 60 à 140% dans l'6.R.D. de FADA.
~o) L'offre inélastique de capitaux peut aggraver les investissements alors
que la demande s'accroît dans une certaine mesure;
3°) Les fonds éxcédantaiues sont souvent utillisés soit pour la consomma-
tion, soit pour l'achat at l'entretien des terres pour vergers (ce qui accroit
les problèmes financiers), soit pour des investissements divers sans rapport
avec l'amélioration de la productivité. Chacun de ces problèmes correspondant
à une phase de développement différente, encore que le mono~ole de l'offre
constitue une source de diffic~';à tous les niveaux.
Dans le cadre des sourees non institutionnelles, il arrive que des prê-
teurs se fassent concurrence et demandent des intérêts correspondants à peu
près aU"coût élevé des prêts aux paysans pauvres, qui comprend un supplément

- 116 -
justifié couvyant les risques et tenant compte du coat d'opportunité des
capitaux. D'autres prêteurs, qui sont en situation de monopole, peuvent effe~
tivement appliquer des taux d'intérêts nettement supérieurs à oeuz d'un mar-
ché de concurrence. Néanmoins, il est nécessaire de préoiser qu'en Afrique
d'une façon générale, ce sont les parents et les amis qui fournissent uae
bonne partie des prêts. Sur ces prêts, l'intérêt est nul ou nominal. Là encore,
certains agriculteurs, qui sont sans doute en grande majorité de petits p~­
sans, sont obligés de s'adresser à des prêteurs, intermédiaires, propriétaires,
commerçants et agriculteurs aisés. Ces derniers fournissent une part non né-
gligeable du crédit total à l'agriculture. Ces prêts d'origine oommerciale
sont généralement assortis de taux diintér8t Bouvent usuraires, par contre
leur volume est très faible. Toutefois, les taux d!intérêt peuvent induire
en erreur, dans la mesure où tls sont fondés sur l·'annualisation de taux
mensuels, alors que la plupart des prêts à taux d'intérêt élevé sont de courte
durée, ils dépassent rarement trois mois.
Si certains emprunteurs sont exploités, c'est du fait de l'i~.anee,
de la médiocrité des communications, de l'absenoe d'autres sources de prêts
(à leur portée), du caractère figé des circuits commerciaux et du déséquili-
bre des forces politiques et éoonomiques. Il faut noter que les taux d'inté-
rêt pratiqués sur les marchés non institutionnels sont mal connus (absence
de statistiques).
Les pouvoirs publics voltaiques ont oherché • éliminer non pas le prê-
teur mais le profit supplémentaire qu'il tire parfois de son monopole. La
bureaucratisation des sources de orédits et le volume insuffisant de crédit
à l'agniculture ne sont pas les façons les plus effioaces de diminuer les
taux d'intérêt et l'exploitation des DBYsans. A propos de l'exploitation du
paysan par les sources non institutionnelles de crédit, l'I.N.S.E.R.M.(I)
indique ,u'à chaque période de soudure, une bonne partie des p~sans voltal-
ques manque de grains pour manger correotement jusqu'à la réoolte suivante.
Et c'est justement lors des grands travaux agricoles, quand la montée des
herbes menace d'étoufter les moissons et qu'il faut fournir le plus gros
effort, que l'on mange le plus mal. "Alors, le p~san s'endette, suivant un,
mécanisme assez déroutant: la vente verte - on dit "en feuilles" - d'une
(1) I.N.5.E.R.M. :Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale -
Haute-Volta.

- 117 -
récolte à venir. Il va trouver le commerçant ~'qui il vend habituellement
ses récoltes, et propose de lui oéder, dès avant qu'il ne soit mdr, une cer-
taine quanti té de grains, un certain, nombre de lltines" de 17 kg de sorghos
ou de mils qu'il lui livrera,après la récolte. Le prix en est débattu et se
trouve certes beauooup plus bas - souvent la moitié, mais aussi beaucoup moins
- que celui espéré lors de la récolte. En Ao~t 1977, on a vendu dans l'Est,
sur pied, la tine de mil à 225 FCFA, et elle valait l 360 FCFA en Janvier 1978.
A oe moment l'arachide, vendue sur pied en Aoat 1977, à 28 F le kg en valait
85. Le fonctionnaire participe à cette forme d'usure, achetant 50 dabas(houes)
quand les Pél3sans en manquent. Pour. chaque daba fournie en Juillet, le PB3'san
doit livrer 8 kg de grains en Novembne. n (l) Autrefois, c'était déshonneur que
de vendre son mil, et celui qui se proposait de le faire venait vous le dire
la nuit. Aujourd'hui le gros commerçant tient haut le pavé.
La sécheresse a largement contribué à la domination des gros oommerçants
spéculateurs en bouleversant certaines conditions éoonomiques. En Janvier
1978 nous dit René Dumont, la disette survenant plus tôt que d'ha~tude, on
a même"innové ll dans ce sens: et certains paysans ont vendus à l'avance une
récolte non encore semée au prix de 500 FCFA la tine de sorgho. Il leur fallait
alors en vendre trois pour pouvoir en acheter tout de suite une, qui allait
bientôt se vendre 1500 FeRA. De sovte qu'ils empruntaient une mesure qui se-
rait remboursée parfais, dix mois plus tard~ Devant cette spoliàtion du monde
rural (surtout en période de sécheresse où le paysan végète entre la vie et
la mort), les O.R.D.,s'appuyant sur les lois interdisant les intérêts usuraires
en matière de crédit, ent tenté d~éliminer ou du moins de restreindre les
activités de prêteurs privés et de les remplacer par leurs homologues institu-
tionnels. Mais le problème n'a pas, été résolu pour autant. Etant donné le
libre choix des paysans et les conditions d'octroi de orédit par les sources
institutionnelles, l'application des lois contre les intérêts usuraires n'a
fàit que pousser les prêteurs privés dans la clandestinité. ~ En tait l'ap-
plication démagogique de ces lois n'est rien d'autre que le "voleur qui crie
au voleur ll • Si l'administration offre toujours d'acheter le grain, elle ne
(1) René Dumont: cité dans "paysans écrasés terres massacrées ll Equateur, Inde,
Bengladesh, Thaïlande, Haute-Volta p.:t""
(2) René Dumont: déjà cité.

- 118 -
l'achète qu'à un prix officiel très bas. Sans oûhlier que pour nombre de pay-
sans, le fonctionnaire ou l'agent de l'administration, c'est déj~ le gouver-
nement, donc un tout autre monde. D'autant plus que de nombreux agents de
l'autorité abusent de leur pouvoir pour comme l'explique Dumont "détrousser
les paysans, on trouverait difficilement un mot plus juste". Il poursuit en
donnant l'exemple suivant, "Sur la route de Piéla, vers le grand marché de
Ponytengà, j'ai vu le hangar dans le4uel un agent de l'agriculture représen-
tant de l'O.R.D. entassait les arachides qu'il "arrachait" de force, littéra-
lement, des mains des paysans, leur payant d'office en 1976, 150 F-le double
décalitre enfaité, la tine, qui en valait alors le double au marohé de Pony-
tenga. Il n'aurait pu se permettre Un tel abus d'autorité, un tel vol prolongé,
sans la complicité de ses supérieurs - ~ui en tiraient aussi bénéfices" (1)
Face aux deux types d'institutions, le paysan est un agent économique "pris
en san~ichn. Seule une solide organisation coopérativ.e doublée d'objectifs
socio-politique, ,permettrait aux paysans de se défendre efficacement contre
un monde qui le domine, l'exploite et l'opprime. (Sans les coopératives agri-
coles l'office du blé eût échoué en France). Les paysans y pensent intuitive-
ment, mais n'y sont guère préparés, étant donné que les forces puissantes
s'organisent sur leur dos et que les mécanismes économiques leur sont imper-
méables.
Paragraphe 21 Organisation des prêteurs particuliers.
a) -Voies de transmission.
Les prinoipaux prêteurs privés comme nous l'avons vu plus haut sont pour
l'essentiel les Commerçants de céréales, ou de bétail. En marge de ses acti-
vités, le commerçant de produits agricoles prête de l'ar&ent aux paYsans et
exige à ce que le remboursement s'effectue en nature (céréales) qu'il stoke,
en attendant la période de soudure.
Il existe toute une chaine d'inteEmédiaires entre le bailleur de fonds
et le p~san qui bénéficie du prêt. Le bailleur de fonds est souvent un gros
commerçant de céréales, ou un haut dirigeant du pays (fonctionnaires "affai-
riste", cadre du secteur para-public etc ••• ) qui fournit des fonds à un
(1) René Dumont: déjà cité. f.I"l

- 119 -
parent commerçant. Il est généralement installé dans un grand centre urbain
(chef lieu de préfecture) et dispose de petits magasins de céréales de "for-
tune" disséminés dans les petits villages. Il exerce ses activités dans les
régions où il est connu de la population, et où il jouit d'une bonne Denommée.
D~s chaque village, il dispose d'un représentant également d'une bonne
réputation dans la région. Dès le début des vultures
il remet à chaque
commerçant un fond, des intrants et des petits équipements destinés aux opé-
rations de prêts. Le représentant perçoit une commission de 5 à 10% sur le
montant de chaque crédit recouvré. Dans la région de l'Ouest Volta le repré-
sentant percevait 100 kg de céréales pour 20 000 kg recouvrés. En résumé,
nous dirons que la pénétration du capitalisme dans l'économie villageoise
communautaire aboutit à un endettement croissant, au dév~loppement de l'usure,
laquelle suit des mécanismes spécifiques de monétisation, de commercialisation
de l'économie agricole. Les objectifs atteints (profits) sont identiques à
tout développement capitaliste, mais les conditions et méthodes sont appa-
remment à l'opposé.
b) -Les conditions de l'octroi des crédits non instit.tionne~s
Les conditions et les processus d'octroi des crédits agricoles par les
sources non institutionnelles obéissent aux structures socio-politiques des
communautés villageoises. Ced conditions et procédures peuvent se synthétiser
dans les points suivants
L'accorœ entre les deux parties se fait verbalement en présence d'un
témoin qui généralement est un personnage influent dans le village (chef
coutumier ou religieux, fonctionnaires en retraite, anciens combattants ou
politü:-iens). Le commergant n'exige pas d'actes authentiques notariés (auto-
risation écrite d'exploitation ou reconnaissanoe écrite de dette), et compte
sur la bonne foi et ses relations particulières avec le p~san pour de faire
rembourser dans les délais généralement flexibles. Il n'a recours à la pres-
sion sociale susceptible d'être exercée par le témoin, qu'en cas de refus
catégorique de non remboursement.
- Le commerçant n'exige pas de oautionnement tangible ou réel, et se con-
tente de la bonne foi et de la bonne ~éputation dont jouit le p~san dans

- I20 -
- A'octroi du crédit se fait immédiatement, la durée des négociations
n'excèdant pas 3 à 7( jours. L'argent liquide est remis "sans protooole" au
paysan dans la plus grande discrétion et dans une atmosphère empreinte d'amitié
et de respect qui caractérisent les relations dans les sociétés communautaires
villageoises.
- Le commerçant n'exige pas du paysan, que le pr8t qui lui est consenti soit
utilisé exolusivement à des fins productiveso Le p~sant peut utiliser une par-
tie du crédit pour la consommation (achat de vivres). Le p~san n'a aucun compte
à,rendre au commerçant quant à l'utilisation du crédit.
- Conscient des risques qu'il court en pr8tant de l'argent sans autres ga-
ranties que l'honn8teté et la bonne foi du paysan, le commerçant, soucieux de
recouvrir le crédit exerce un contr81e informel sur les activités de l'agricul-
tueur ; il (ou ses intermédiaires) lui rend fréquemment des .isites au champ
comme dans son foyer, entretient de bonnes relations avec tous les membres de 18
famille de l'agriculteur.
En ce qui concerne les
prêts dent le remboursement s'effectue en natu-
re, le transport des céréales du champ de l'agriculteur aux magasins des commer-
çants est pris en charge par le commerçant.
e) Accessibilité des sources non institutionnelles de orédit.
Le systèmes des succursales ou des ORD (cas voltalque) ne s'est pas
révélé efficace pour atteindre la clientèle des petits agriculteurs, et ce pour
plusieurs raisons 1 les petits agriculteurs ont difficilement accès aux cadres
des ORD car les moyens de transport sont limités , les formalités administrati-
ves leur sont étrangères et le cadre les intimide ou
les térrorise ( le p~san
est souvent l'objet de vexations et d'exactions par la plupart des titulaires
d'une parcelle d'autœ8ité), enfin, le personnel des ORD ou des succursales (BND)
ne s'intéresse guère à leurs problèmes, s'i~ne refusent de les recevoir.
Par contre les bonnes relations que le oommerçant entretient avec sa
clientèle, lés "petits gestes" et les marques de sympathie aux quels les p~sans
sont toujours sensibles, la procédure d'octroi du prIt réduite au plus simple,
le savoir faire et la force de persuaBion du commerçant, font que le paysan est
iisposé à rembourser les prêts dans les delais fixés saas que le prêteur ait
besoin d'avoir recours aux pressions sociales ou à des saisies qui risquent de
détourner d'évemtuels emprunteurs vers d'autres sources de crédit. L'aspect via-
ble des sources non institutionnelles de crédit au point de vue de la prooédure
d'octroi est incontestablement plus aocessible que oelle des souroes institution-
nelles. C'est ainsi en plus de la simplification des démarches pour le oontrat,
il y a aussi une promptitude dans le déblocage du pr8t dès que le paysan le sollicite

- 121
o
Ce déblocage se fait selon les procédures tout. traditionnelles. En effet, il
n'est pas besoin que le paysan offre des garanties ou des cautionnements réels.
Les prêteurs se contentent d'une garantie intangible (moralité de l'agriculteur,
parole donnée, l'appartenance patriarcale etco •• ). En plus les prlts sont acc~
dés pour des buts très variés, y compris la consommation, parce que la' capacité
de remboursement et rendement d'un individu augameBtent quand il ,arrive à subve-
nir à ses besoins fondamentaux (vivres••eo ).
Pour prom~oir un minimum de développement en Haute-Wolta, c'est-à-di.- passer
d'une économie de survie à une économie de subsistance afin que naissea l'espoir
de sortir de la subsistance sans sacrifier des catégories sociales, il importe
d'améliorer les marchés financiers et d'acor01tre le volume du crédit, à la fois
entre les secteurs et à l'intérieur d'un m@me secteur. Les politiques finanoières
doivent aussi tenir oompte des taux d'intérêts pratiqués dans différents seoteurs.
P,îxer, comme l'ont fait les différents gouvernemnts volta!ques, aux taux d' in-
térêtê des plafonds qui déoouragRBt les orédits institutionnels à l'agrioulture
sans que l'on puisse les imposer aux prêteurs non institutionnels ne sert pas
à grand chose simm à frapper un coup d'épée dans l'eau. Mais scruter la voie
qui préconise qu'on change la demande et l'emploi de crédit. Est-ce la voie qui
constituera le souffle nouveau?
Paragraphe III 1 CHANGEJ[ENT DE LA DEMANDE ET DE L'DœLOI DE CREDITS
La modernisation de l'a~ioulture exige divers types d'innovations
introduction d'une nouvelle culture, adoption de méthodes visant à maintenir
les rendements, telles que la conservation ou l'humidifioation des sols et la
lutte oontre les insectes, utilisation de techniques de nature à accro1tre les
rendements- nouvelles variétés de semences, pesticides, ,engrais, machines, li-
gnées plus résistantes à la sécheresse, à. la chaleur etc•••
Ces divers types d'innovation ont différentes implications financières.
Certainesja3mandent que peu de capital additionnel que ne possède pas le petit
exploitant (par exemple, le passage d'une variété de semences à une autre).
D'autres, telle l'introduction de pestic;tes, peuvent 8tre financés seulement
par l'épargne des agriculteurs richeso
Cependant, beaucoup d'exploitants doivent emprunter, particulièrement lorque
l'investissement est important par rapport à leurs revenus. Dans une agriculture
en voie de modernisation, il y a peu de ohances pour que les exploitants eux-
~
mêmes puissent constituer une source de crédit,car, en toute logique, les excé-
dants monétaires sont employés aux mêmes fins.
Quant aux négociants et aux prêteurs, ils ne peuvent sans doute pas
pratiquer de façon importante au financement de l'agriculture, étant donné

-
!GO
l'inélasticité de leur offre de crédit. De plus, ils ne prêtent qu'à oourt terme
et les gros investissements échelonnés sur une longue période doivent presque
1.
toujours être financés par d'autres sources. Enfin, ils sont appelés à disparaî-
tre en cas de reforme agraire profonde.
. Le problème se pose donc lors~ue les innovations techniques exigent
des investissements dépassant les possibilités des sources traditionnelles de c
crédit. C'est alors que doivent intervenir des organi&'mes de crédits extiérieurs,
faute de quoi la stratégie d'investissement des agriculteurs, spécia~ement des
petits exploitants, ne visera que des variantes de la technologie traditionnelle.
Mais dans la mesure où les institutions de crédit agricole ne pourront pas deve-
nir la plaque tournante des marchés financiers locaux sur le plan de la mobili-
sation de l'épargne et de la distriV'ution du c:lédit, sans appui de l"'aide inter-
nationale". Elles/B:uvent que rendre le secteur agricole plus tributaiile des
sources extérieures de financemeni j, tel qu' i l ~1 se présente actuellement en
Haute-Volta. C'est ainsi que dans sa thèse présantée à l'université de Michigan,
David C. Vi1cock, de l'USAID (Agence internationele de développement des Etats-
Unis) qui travaille à Fada N'Gourma estime que, pour 1972-1974, le montant total
des "aides" reçues par la Haute-Volta atteindrait 60 millions de dollars par an,
tandis que le budget national de 1973 ne dépasse pas 51 millions de dollars. Les
investissements sont financés à 80% par l'étranger 1 l,uaide u atteint 117~ du
budget, 15~ du produit national brut et d'passe 10 dollars par tête et pan. an.
uCe pay~ s'exclame Réné Dumpnd, a donc, perdu toute réalité d'indépendance. On
lui laisse son drapeau, son hymne national et ses militaires, mais il n'est plus
capable de vivre sans cette espèce "d'assistance publique" internationa1 u•
AEt celle-ci ne p.ut être considérée comme transitoire, car elle ne lui
permet absolument pas de ,s'appmecher de l'auto-suffisance. Bien au contraire 1
elle l'enfonce dans la dépendance Il (1)0 En effet, elle a surtout servi à augmen-
ter les besoins et le niveau de oertains privil'giés des villes J en commerçant
par la capitale, ville presque improductive, avec l'administration et le commerce,
qui ne créent point de richesse, et qui vivent donc sur ses paysans et sur
l' "aide" extérieure, dont elle ne pourrait plus se passer dans la tendance actuel-
le. Comme le note encore fort justement Réné Dumont l "La Haute-Volta est peut-
être le seul pays au monde où l'écart entre le niveau de vie rural et urbain est
aussi élevé 1 de 1 à 10. Il Y a quelques années, il était encore de 1 à 5,; il
ne cesse donc de s'accro1tre. Le Produit national brut par tête ayaàu plut8t dé.
cliné (le Professeur KI-Zerbo estime que 7~ de la population contr81e 40% du re-
venu national 1 cf. R. Dumond : paysans écrasés. P. 277) , la campagne s'appauvrit
(1)
Réné Dumont ( déjà cité.) P.Utll
(2)
idem.

-
li::j
-
et les privilégiés de la ville contineunt de s'enrichir. Comme nous l'avons vu
précédemment, cela nous autorise à dire que la richesse urbaine, même relative
permet aux citadins nantis de mettre la main sur les quelques moyens "modernes"
de production p~sans. Certains acquièrent du bétail : le nombre de bêtes que p
possèdent les ~e~S des villes augmente dangéreusement. D'autres plantent des ver-
gers (cf. enoncé plus haut) dans les bas-fonds, les seules terres fertiles où
le paysannat pourrait espérer accroître sensiblement sa production. Ils se font
"attribuer" des terres grâce à leurs relations et parfois mOrne, les achètent.
Alors que J. Mo Kahler (1) disait justement de la terre l
"Epouse de Dieu, elle
constitue spirituellement la puissance femelle fondamentale, prinoipe ~. symbole
de toute fécondit6 : la terre est sacrée••• A tout vivant doit 8tre concédé suf-
fisamment de terres pour les besoins de sa subsistance••• personne n'est autori-
sé à l'accaparer au détriment d'autrui". Qui n'a pas de terre s'en fait aisément
"prêter". Si les terres sont, en pays surpeuplé comme l'Ouest Mossi, depuis
~ "-1 longtemps distribuées, oes prêts ne oomportent encore (pour oombien de temps?):
aucun loyer du sol, aucune rente foncière sous la forme classique.
De ce qui précède nous pouvons nous interroger sur le raIe exact du
crédit dans le développement rural.
(1) Activités agricoles et changement sociaux dans l'Ouest Mossi,
Memoires ORSTOM , 1971

- 124 -
ffect~œn 3 1 Les limites du r6le du crédit dans le développement.
ll..e flux financier que constitue le crédit n'est pas lui-m@me un facteur de
production. S'ils veulent augmenter ]~ production, les p~sans doivent uti-
liser les fonds qu'ils ont empruntés pŒUr se procurer en principe des engrais,
des semences, des pesticides, parfo~s de la maind'oeuvre eta. La production
doit alors être acheminée vers les marchés et ~ndues au consommateur loœal
ou étranger, ce qui constitue un processus complexe. C-:eJrtes, le crédit permet
aux paysans d'achèter des facteurs de production, mais il ne faut negliger lea
éléments déterminant que sont les techniques, les marchés, l'infrastructure,
l'information et les mentalités, les contraintes du crédit•••
Dans la plupart des p~s en développement, la croissance de la production
du secteur agricole est plus faible que dans tous les autres secteurs. ~aucoulJl
de programmes de crédit se fondent sur l'hypo~èse que l~ pénurie de fonds est
en grande partie responsable de la faiblesse des taux d'investissements et de
croissance dans l'agriculture, notamment dans le cas des petits expilioit~
Les paragraphes qui suivent,étudienont les facteurs qu'il' est essentiel1dt ajauteIt
au crédit si l'on veut promouvoir un certain dév~loppement agrianle qu~ engen-
dre des clivages socia-pol!itiques.
Paragraphe] 1 Les limites de l'application des techniques nouvelleS.
Les occasions sont nombreuses pour utiliser à dea fins productives dana le
secteur agricole villageoiiB. Elles vont du simple épandage d "engrai!s sur d.es
terres jusqu'alors non fertilisées à l'empiloi des techniques les plus avanClées
à la transformation agraire, la polyculture essentiellement. Mais le champ d'ap-
plication de ces nouvelles méthodes est surtout limité à certains agriculteurs
ou aux régions bénéficiant de certain~ agriculteurs ou aux
régions bénéfiaiant
de certaines expériences pdUlotes et possèdant des ressources naturelJl.es. s:±_
]J'on a enregistré un acaroissement considérable des rendements à la suittCl' de
l'introdua:tion de nouvelles teahniques, indique la lIlBDqts Mondiale l "dans cen-
taines régions du monde vers les années 1960, l'adoption de oes techniques a
été geographiquement limitée"(r).. Mais en IDaute-iiIolta OB. ne peut par~.ler qu'une
décro~sance du secteur rural, bien que certains progrès s'enrégistrent pour
quelques cultures et seulem.nt dans les régions à fortes précipitation~
Cette décroissance des produits de survie des populations paysannes est mieux
mesurée par le tableau qui suit.
:) Crédit agricole 1 Politique sectorielle de la Banque Mondiale r976 - P. 31.

- I25 -
INDICE DE LA PRODUCTION' 1967-68/1973-74
(1969-70 = 100)
'1967/68
1968/69
:
1 J9./70
1
1970/71
1971/72
1972/73
197 3/114
:---
:
-
A
l -
I -
I
1
1
.
Mil
1
91
1
87
100
1
90
82
1
72
j
71
Si>rghc
j
98
1
97
100
1
80
1 96
1
91
1
88
Mals
96
96
1
100
80
1
96
1
86
1
84
Riz
92
97
100
1
87
95
87
1
80
Arachides
96
96
100
1
83
1
a5
Bo
81
Sésame
38
63
100
50
50
1
75
63
G"cton
47
89
.
1
100
1
67
1
81
89
75
. --:-
Production
-.
- - 1 -
1--
I -
I
totale
88
1
94
1
100
1
88
1
85
1
83
81
Source 1 Rapport économiqj& de Haute-Va~ta - 1975.
En fait ces teahniques nou~lles constituent, à notre connaissaae, l'élémrnt le plus
oonnu de ce que l'on a appelé la "Revolution verte", qui a été indroduite d19.ns un
certain nombre de pays en voie de développement, et en particulier en Inde et au
Mexiqu~ Elles ont suscité beaucoup d'espoir, à tel point qu'elles ont donné nais-
1
sance à un véritable mythe, comme en temoigne d'ailleurs le terme même de "révolution
verte" par lequel on a qualifié les résultats qu'elles permettaient d'obtenir. Pour
certains, un vieux rêve technocratique était en train de s'aa:complir 1
une teohnique,
mise au point dans les laboratolires occidentaux, allait 4&uver des teuples entiers
de la famine, la "revolution verte'" rendait périmée l' idée m~me de "révolution sociale''''c
Qelle merveilleuse invention que ces variétés qui permettaient de concilier b0Dne
consc~ence et conservatisme•••
De nombreux auteurs s'attachent aujourd'hui
à donner une vision plus scientifique
plus rigoureuse, de la"révolution v-erte". Ils montrent, en quelque sorte, que les va-
riétés à haut rendement ne réprésentent que la partie visible de l'iceberg. En effet
leur emploi suppose d'importants travaux d'infrastructure (plannage et irrigation),
une mécanisation poussée, d'importantes quantités d'engrais, un calendrier cultural
rigoureux etc•••
On ne s'étonnera donc pas que beaucoup de spécialistes en arrivent à une conclusion
semblable à celle formulée par K. C. ABERCROMBIE (1):
"il est particulièrement
BERCROMBIE K.C. /
"L'emploi rura\\lObjectif prioritaire. Il CERES Jan~ier-Février 1973

- 126 -
déplorable que dans certaines régions de l'Inde ou du Pdistan ti'O. la "révolution
verte" a percé, le bond en avant de la production, ( ••• ) ont profité s u r t . aux
gros exploitants et ait permis à certainB d'entre eux d'aaquérir davantage de terres
et d'en déloger les ftermiers":"
En fait, il n'est pas certain qu'Abercrombie pose le problème de manière parfai-
tement satisfaisante. C,ar il est inconstestable que les résultats négatifs de la
"t'évolution verte" sont d'fis à l'application d'une technologie que l'on peut quali-
fier d'industrielle sur un système économique et soc:ti&l extremement "sensiblell
;;.;;;::,',"-;
(grande dépendance à l'égard de l'étranger pour la tea:hnologie, les engrais; les
équipements, faible niveau de développement des forces produatives ; ~aible résis-
tance au mouvement d'appropriation privée des terDes ect••'. )et oeer1 dans unl contexte
général d'économie villageGise de tnansition.
L"introduction de technique permettant d'obtenir des rendements élevés ou de
prat iquer la polyculture n'est posaible, à l "heure aa::tuelle, que dans 1:&8 régions
irriguées ou à fortes précipitationso Dans de nombreuBs contrées, i l est possible
de maintenir, si non d'acaroltre, les rendements. Cependant, il est indispensable
de poursuivre sans délai les recherches fondamentales qui permettraient d'élargir
les potentialités techniques de l'agriculture des p~s en développement-.
En Haute-Volta la modernisation agricole fut d'abord confiée à des sociétés ~­
çaises d'intervention. Comme le B.D.P.A (r) ou la S.A.T.E.C(2). Uhaoune d"elles a
fait un certain éffort, au début de la déoolonisation, pwr ré~dre la traction ::,.-'.~.l.
asine, aveo du matériel cédé à crédit aux p~sans qui se consacraient surtout aux
cultures de rentes. ~ertains résultats ont été obtenus de point de vue teohnique
comme le confirme un peu nettement le tableau oi-degous.
EXEMPLE D'EXPLOITATION AGRICOLE (4 Ha), GULTURE EN SEX; AVm OUVRAGE DE
WTTE CONTRE L'EROSION·!
sSuperfi-:
Rendement
1
Production
s Prix sortie
(Kg/ha)
sexploitation
Régions
cie (ha)-
s
Amélioration
s
Amélioration
!
(FCFA)
,
!
Avant 1-
Après
Avant
: Après
t
s
,
§gion du Centre (entre 700!
1

s
.
D et 900mm de précipitatei,) !
s
s
s
- Céréales
!
3,6
1 500
1
650
1
r 800
• 2 340 s
22
- .8.rachides
0,2
s
450
:
585
:
900
:
II7
:
25
- c~ton
0,2
:
300
:
500
s
60
100
39
égàon du SUdt~,lus)de 900
1
1
n
e preclp~
Ion
-C éréa.I.es
3,8
600
:
870
2 280
: 2610
22
,
- Arachides
0,2
f
550
f
800
i
110
i
160
1
25
!
30urce . Tableau partiel tiré du 2ème projet de fonds
rapport
Bal' ~w... ~O"'l~
de développement rural:
m-
Annexe
AoC' _ \\)v..
I I

- 127' -
Des rendements ont été accrus, mais le remboursement des crédits a 'i6
généra-
lement un échec.~ans le contexte éQOnomique actuel, il est souVcent difficile, pour
une famille paysanne de rembourser de tels crédits, surtout quand il s"agit cfe
cultures d'exploitation dont les prix imposés sont extremement bas. ~e tableau pré-
cédent montre qu'on achète au paysan, un Kg d'arachide et un Kg de QOton respecti~
vement à 39 ~ ET 25 F. Ces prix qui n'ont pratiquement pas évolué dépuis ~es années
des indépendances de 1960, constituent une négation du pouvoir d'achat du monde
rural. Dans ces conditions, il est tout à fait logique que le rembloUDsement des
prêts agricoles apparaisse ardu, surtout quand on sait par ailleurs que les dépenses
exigées pour l'amélioration des sols sont souvent supérieurs aux revenus farmels
escomptés ou obtenus.
Devant la serie impressionnante d'échecs de toutes les tentatives de lutte contne
l'érosion des sols et leurs amélioration. Les responsables de l'avenir de ce pays
ont décidé, en 1965, de confier les actions de modernisation aux offices régionaux
de dévelCIPpement, les O.R.D.. Il s'agit d'organes techniques établis par l!'adminIis-
tration. ~es aaiions entreprises le sont sans consultation générale des p~san~
La majorité des crédits sert à construire des bureaux, des logements et à achèter
"
des voitures. ~ec ce qui reste, l'effort principal portal toujours, jusqu'à una
date recente, sur la culture attelée, avec la traction d'un Ane pour les ~ans
modestes et celle d'un beeuf, ou d'une paire de lloeufs, pour les plus "aiiséslf. Le
ct.ltivateur a rasette, le plus utilisé, décape le sol et ne permet pas d"eDIfouir
la fumure organique. Ce travail du sol aggrave finalement les dégâts de l'érosiœn,
dti.s que la terre présente la moindre pente, même 0,5 %. S'il s'agit
de sols sablo-
neux, a faible teneur en argile, le manquant de liant - dès que le taux d'humus
Il;' abaisse -
favorise aussi l'érosion par le vent 1 surt_t; si le sol est' plus ameu-
bli~ Les;O.R.D. conseillent la culture de rente, arachide ou coton, et ,_~ien
la culture du coton - et dans une moindre mesure de l'arachide, car celle-ci peut
@tre nourricière - en prenant la place des oultures vivrières, compromet l'équili-
bre alimntaire de nombre de famdlles p~sannes. Les insecticides organo-chlorés
conseillés pour le coton attaquent les y~ ••
Ces organismes régionaux de développement en fin eonseillent encore les engnais
chimiques, surtout les engrais azotés, dont l'efficacité est directemànt liée à
la pluviometrie. 3,i UlJe première pluie favorise, avec l'engrais azoté, une v:igou-
reuse pousse de végétation, celle-ci sera rendue plus sensible à la sécheresse qui
peut suivre.. La fumure organique, utilisant les ressources lGcales de végétaux
et de main-d'oeuvre, mérite la priorité, mais on ne la pro,age GUère.

- 128 -
En somme l'üRD introduit, à l'aide de financem8nt extérieur, des technologies
décidées sans consultation paysanne, dont l'économie n'est nullement prouvée et
qui risquent de dégrader plus vite enaore le milieu naturel. On dit au ~san que
tout ce qui vient de son monde ait sans valeur, au lieu de le faire partir juste~
ment de ce qu'il sait p~ expérience et tradition.
Effectivement depuis le regiœe jusqu'à nos jours, toutes ces tentatives de mo-
dernisation agricole ont été élaborées de l'extérieur. De l'étranger d'abord, puis
par l'intermédiaire de l'administration locale, sans que l'on fasse jamais appel,
~ leur conception ou leur mise au point, à la participation effective des premiers
intéressés. Le résultat est que la population ne cesse d'augmenter, la pr0duction
alimentaire ne suit pas, la paysannerie s'endette de plus en plus; et elle se trouve
elle aussi,
acculée à dégrader le milieu naturel, les arbres et les sols , donc
à attaquer la potentialité de production de l'avenir. ~alheureusement beauc~p de
programme de crédit se fondent sur l'hypothèse que la pénurie de fonds est en grande
pantie responsable de la faiblesse de la croissance, si non de la décroissance de
~'agriculture, notamment dans le cas des petits explotitants. Nous pensons peur notre
part que le crédit à lui seul ne suffit pas, et dans les lignes qUL vont suivre
nous tenterons d'étudier les facteurs qu'il est essentiel d'ajouter àu crédit si
l'on veut:~espérer sortir l'agriculture de son "coma" irréversible.
Paragraphe 2 1 Le Crédit 1 à lui seul ne suffit pas.
L'insuffisance de l'encadrement du monde rural doublée d'une incohérence dans
la distribution des crédits agricoles, sans une étude des problimes sociaux réels
que connaissent les exploitants agricoles, le manque de suivi dans l'utilisation
des équipements agricoles cédés à crédit, constituent au tant de facteurs qui s'a-
joutent à ceux économiques et sociaux pour empêcher l'essoufflement de :Ir' agricul-
ture.
AI - Les obstacles économiques et sociaux+
Dans le contexte actuelle de la voie de développement suivie par la Haute-Volta,
il est tri:3te de constater lorsque les innovations requises sont techniquement pos-
sibles, elles peuvent ne pas être économiquement viables. De nouvelles variétés
de céréales, bien que susceptibles d'augmenter les récoltes, comme nous l'avons
~
vu plus haut, sont vendues au rabais, les autoités étatiques et les sociétés pré-
férent encaisser l'essentiel du surplus agricole. La rentabilité des p~ssibilités

- I29 -
d,t investissement J!'ésultan:t1 de techniques nouvelles ou deJ1ise en cultUl!e cie nou'VJel-
les ternes n'est absolument pas asquise. De plus, il serait fallacieux de penser
que toutes les techniflUes nouvelles miises à la dispClJSi tion du p~san
VO'J1.1tatque
dans le con~exte socio-politique actuel lui permettrant dtaccr~1tre ses *-venuS;
Car certaines des demlières aaélioraticms teahn~ues son'b. difficiles; à utili'sc'
1
dans des petites' unit(.s agricoles en raison des "1ndivisibilitésll qu'telles compmr-
tente ~'est ainsi que les nouvelles variétés de semences sont beaucoup, Flus p..œnc~
tives lorsque l'utilisation de l'eau peut être contrôlée ; mais si petits qu'en
soient les modèles, les puits tubulaires ou les pompes à faible élévation que ~~
trouve dans certaines exploitat~ons sont encore trop importants par rappcrt aux
besoins des villageois qui ne vi~ent plus selan un systè.e communautaine l~ager
qui ea± désonmais soumis de plus en plus à la segmentation (petite expl~~ation
familiale). Dans certains villages, ces derniers ont pu se palt~er une pompe ou
un pui~s, mais l'organisation d'un tel système est plus diffiio~e ùGrsque les exp~oi-
tants cultivent plusienrs petites parcelles. Parocmüe, les engrais, l!es pesticii~
des et les nanvelles variâtés de semences sont parfaitement divisibles. Au périmè-
tre agricole de GUIEDOUGOU - Vallée du Sbunou(I) -déjà irrigué au moment de Itta.ci0Jp-
tian dès techniques nouvelles en matière de ootClal - il semble que celles-ci aient
adcilptées dans la même mesure par les di'fferents groupes ethniques. I l n'en demeure
pas moins que d'Ilindivisibilitê" est important, la nouvelle technologie est gén.
nalemen~ moins rentable pour les petits exploitants et privilégie les gros agricul~
teurs sur le marché.
Il est certains aussi que, nombre d'innovations comportent des risques 1 par exem~
~e, les variations de rendements pour les .ouvelles variétés de semenaes sont pl~s
importantes que pour les variétés traditionnnelles. En effet, dans des conditians
idéales,. le rendement peut doubler, mà:hs avea: les conditions mé:ltéoJ!ctJJogiques qui
sont souv~nt défavorables,. pour ne prendre le cas de la maute-Volta la ~oduotion
peut baisser(2)•. Nombreuses sont les variétés traditi~e]es qui ont évolués avec
]e tempts ou que l'Ion a, dès; le départ, cherché à adapter à des climats extrèmes.
Les aléas des techniques nouvelles peuvent compromettre l'existence des p~san8
au bord de la survie, particulièrement dans des régions aux condition~ écolagiques
Le Périmètre d'aménagement est situé sur la rive Est du Sourou alfluent de la Vo1ta
~e, dans la sous-préfecture de Tougan, à environ deux cents Xilomètres, par la route,
)uagadougoUo lAc)
Banque Mondiale I97I 1 ~esnouvelles variétés de blé Mexicain introduite au MalUtc.se
se sont révelées très sensibles à la rouille - ce problème ne
s'était jamais posé au Mexique, où le climat est peu différent~V

- 130 -
déforables, et, de ce fait, l'adoption de toute innovatio~
Les méthodes nouvelles repercutées brutalement risquent d'aller à l'en contre
des habitudes culturelles, des traditions, des mentalités et des systèmes de valeurs.
Elles ne peuvent que déboucher sur une seule issue pGSsible 1 l'échec - aDmm~
l' ~este éloquemment l'expérience de' développement rural volta!que.
après la reaonstruotion, vers 1950, le gouvernement français consent de gras
efforts (pour des raisons évoquées dans la première partie) pour améliorer l'éae-
nomie de ses territoires d'Outre-Mer, la maute-Volta, à peine reconstituée (1),
ne sera pas en mesute de bénéficier à plein l'aide qui lui est offerte, des expé-
riences
de développement qui sont tentées sur son territoire.
L'expérience "ferme pilote"(1953/59)
fondée sur l'association élévage-cul-
ture attelée, trop ambitieuse, mal encadrée, est un,échec.
La politique des petits barrages (1947/60) menée avec des moyens fort mo-
destes, mais à la portée du p~san, connait un succès relatif, permet la duffusioa
de la riziculture ; par contre, celle des grands barrages (entreprise à partir de
1960) nécessitant un matériel coûteux, des techniques élaborées, un encadrement
serré, ne trouve auaun écho chez le p~san.
- Les essais de lutte anti-érosive menés à grands frais à titre d'expérience.
dans la région de Ouahigouya, - année 1962/65
sont incompris par les p~latiQns
qui se tiésrinteressent totalement des ouvrages et ne les entretiennent pas, même
les détruisent •••
- L'expérienae S.A.T.E.C (Société d'Assistance Technique et de COClpération}J
basée sur la culture attelée (traction asine) et la fumure animale est, de 1961 ~,
65, une réussite, tant qu4 el]e s'applique à des seateurs de modestes dimensions
a.
et qu'elle procure au pysan un encadrement serré. Elle échoue par la suite lorsqu'elle
est étendue brusquement à dès régions plus vaste, sur des populations mal préparées
i
et insufissamment encadrées.
Enfin l'expérience coton, confiée à la C.F.D.T (op. cit) d~8 1951/52 réalisée
avec des moyens modestes, dans les secteurs selectionnés, puis élargie progressive-
;:'lent à des zones plus vastes, pourvue d'un encadrement solide très proche du ri.,):,,,,:
paysan appara1t, en 1974, camme une réusàite 1 500 T commeraialisées en 1951, près
55 000 en 1977.
.---
"'-..---
La Haate-Wolta a subi pendant de longues décennies, des tribulations administratives
qui entravèrent son organisation et son équipement. Elle fait d'abord partie, apèès
la conquête, de la aulonie maut~-Sénégal-Niger, jusqu'enl919 , à cette date, elle
elle devient l'un des 8 territoires de l'Afrique ocaidentale française, mais en
~ pour des raisons économiques et surtout politiques est démantelée au profit des
colonies voisines, ceci jusqu'en 19470 (i)

-
131 -
Ce rapide inventaire des essais de développement rural réalisés au cours œtu. dennieJl'
quart de siècle en ~ute-Wolta nous conduit à poser deux questions: quelle fUt
l"attidtude du PBYlJan face aux expéflTiences agricoles? Dans quelle mesure son~
niveau de vie s'est-il amélioré, pendant cette période?
BI - Le paysan face au monde capitaliste.
Un fait est oertaine, aucun groupe n'est resté insensible aux ~érienoes d~t il
a été le témoi'o.. Souvent méfiant, mais toujours attentif, le paysan observe, consute
s'étcmne et •• o attend.. les résultats. A partir de 1950,. les populations qui vivaient
en marge de leur époque, renouvelant à chaque saison les mAmes gestes aa::eomplis par
leurs anciens, utilisant des méthodes éprouvées depuis des générations et des outils.
aux formes immuables, sont brusquement ~onfrontés à un monde nouveau qu·e11es imagi-
naient mal à travers les récits des anciens militaires ou des jeunes émigrés revenus
des villes. Elles saisissent mal les nouvelles tea:hniques mises en pratique où la
machine joue un r~le essentie~
Les sentiments qu'elles éprouvent sont dlitigés : empreints de méfiance et dt'étcmne-
ment. Méfiance ! Parce que la colonisation jusque là ne leur a gruère apporté que
de mauvaise surprises 1 impôt de capitation, prestations en nature, cultures foroées
qu'il faut accomplir au moment des gros travaux, cadeaux,
que l'on doit verser aux
agents de l'admi"Btrat~on, pour règler une affaire ou un oubli••• sont présents ~s
toutes les memoires et prédisposent à adopter une attitude d' expective, d "autant! plus
qu'aucune manifestation pratique ne laisse croi~e que ce temps de brutalité ~~ble
à l'endroit de la personne humaine est revolue. D'étonnement? Parce que les aut~i-
i
tés, en période électorale, sortent, elles aussi de leur isolement et semb~ent enlin
,
s'intéresser au paysan, à ses cult~res, à ses soucis. ••
1
.1
(
i
]I:ien qu'il n'ait pas été consuité sur toutes les décisions intéressant son aveniIr,
bien que des maladresses dues à une mauvaise approche de son milieu, ou à la pJl'~ci­
pitation aient été à l'origine d~nombreux échecs, le paysan a retenu certaines idées
certaines méthodes, conservé qu~lques p~oduits nouveaux (arachide,rtllt blanc, coton,
1
nanioc) qu'il utilise à sa façon. En somme, à des dégrés variables, le paysan voltaI-
t
que est désormais sensible au p'rogrès technique, SIlvert à l'innovation, "informé"
j
des méthodes modernes de déveldppemen~.
j
L'adoption de méthodes nouvèlles peut être entravée par la pénurie de facteurs
i
de production. Ainsi, il arriye que l'on ait des semences et des pesticides, mais
pas assez d'engrais. Comme 1~1 succès de ces nouvelles techniques dépend de' l'associa-
tion harmonieuse de plusieu~s éléments, l'absence de l'un de l'autre risque de faine
/
1

- 132 -
échouer l'ensemble... Un investissement dans un puits tubulaire est "inutile" si lce
paysan ne peut obtenir les engrais nécessaire. Comme les faeteurs de producti0n
essent ils sont rares, les petits exploitants se trouvent nettement désawantagés.
Ils le sont également pour les prix qui montent en flèche. Et même lorsque ces de~­
niers sont soumis à un contrôle (et parfoi's subventÏ!lmnés), les agriculteurs d"orÏi-
gine citadine les plus riches et les plus influents sont mieux à même d'acquérir
les produits disponibles.
Il arrive aussi que les p~sans ignorent les occasions qui se présentent à eux
ou évolue mal les rendements potentiels de .cuvelles méthodes. ~ans de nombreux
cas, les recommandations sont appliquées de faç~n imparfaite. Les paysans utilisent
de nouvelles semences SQ~S se servir d'engrais ou utilisent des engrais paur les
semis mais non en plein champ. Pour des raisŒns multiples, incluant l'effort consi-
dérable qu'il faut déployer pour atteindre la masse des p~sans, les agents de vul-
garisation consacrent peu de temps aux petits exploï.Jtants, qui sont de ce fait S0US
ingormés. Dans ces conditions il serait illuso~re
de croire à une application vÏ!c-
torieuse des méthodes modernes de développement sans au préalable des transfÔrmatilllllS
profondes et radicales. Surtout que les résultats obtenus en Haute-~olta au cours
de ce dernier quart de siècle font généralement appara1tre une dégradation des res-
sources alimentaires. En effet, le faible accroissement du volume des produits
vivriers (obtenu par une augmentation des surfaces cultivées, parfois par une lé-
gère amélioration des rendements) ne correspond nullement à la poussée démograph~­
que qui atteint en moyenne 2 %par an.
Les expériences agricoles, précedemment évoqués, n'ont en général que de très
faibles répercussion sur l'accroissement de la production alors que dans le même
temps, l'action sanitaire parvenait à accro1tre faiblement l'espérance de vie et
à ne"diminuer" la mortalité infantile de façon insignifiante{I )., Dans ces conditions
l'aspiration majeure du paysan (ou pourrait parler parfolis d'obsession) est de sub-
venir aux mieu~ aux besoins alimentaires des siens, le reste, c'est à dire les cul-
tures de rente, apparait comme une activ,ité de luxe que l'on pratiquerait en der-
nier lieu, souvent
à temps perdu, si des pression multiformes ne se font pas jour.
L'économ~e voltaique reposant essentiellement sur l'agriculture, ne peDmet guère
d'en..1sager dans les prochaines années des amélioratians substantielles, si un
(1) Enquête démographique par sondage en Republique de Haute-Volta 1960/61, 2t,
466P. Paris INSEE voir page 315 ; espérance vie; tableau nO 273 : 1960 = 32 ans
et demi, 197 5 = ,,( ans.

- 133 -
chaneement fondamental n'intervenait pas au niveau de la superstructure actuelle.
act~le~ Ce qui peut permettre de s'attaquer au mieux aux formes pré-capitalistes
de développem&nt et également du développement capitaliste anti-national. Mais
le problème actuel, le plus urgent est sans nul doute celui du vi~ier, ]a dégra-
iation des niveaux de vie exigeant des mesures urgentes. Or notre examen attenti~
de la situation économique des fifferentes populations, vivant dans des milieux
naturels comparables, bénéficiant de moyens techniques analogues, fait appara1tre
des inégalités de développement importantes. L'analyse des véritables causes d'une
relative réussite chez les uns, de la dégradation des ressources chez d'autres,.
nous au~ait certainement permis de mieux conna1tre en particuliers les raisons
du recul des niveaux de vie, mais cela nous conduira à dépasser largement le cadre
des objectifs de cette thèse. Bref en guise de conclusion, nous dirons que le cré.rlit
est certes nécessaire mais à lui seul ne suffit pas, car le crédit dans l'économie
africaine serait comme un arbre planté en plein dessert, d'où des conditions dra-
coniennes à réunir pour que cela ne soit pas une fin en so~'
GONCLUSI~
&'ils veulent réussir à accr01tre la production, les pouvoirs publics doivent
chercher à aplanir tous les obstacles, financiers et autres. Si l'obstacle provient
de l'ignorance des agriculteurs, les programmes doivent comprendre des services
de vulgarisation; s'il na1t d'un manque d'expérience dans l'utilisation d'un fac-
teur de production ou d'un produit particulier, les programmes peuvent prévo~
une subvention ou un soutien des prix. $i les paysans redoutent de prendre des
risques, on doit, soht instaurer un ~tème, d'assurance qui reduise les pertes
n
dues à la faiblesse éventuelle des redements, soit soutenir le pouvoir d'achat
ou pouvoir de subsistance des paysans dont la baisse est souvent lourde de consé-
quences...
Certes nombreuses sont les techniques qui permettent d'accr01tre les ressources
du secteur agricole. Outre les programmes de crédit institutionnel, on doit réduire
les charges pésant sur l'agriculture, les taxes à l'exportation, par exemple et
améliorer les termes de l'échange du secteur agricole par rapport au reste de
l'économie. De nombreux pays dont la Haute-Volta pratiquent une politique de prix
differente pour les produits agricoles et les produits industriels: ils majorent
les prix des séconds en établissant des barrières tarifaires et baissent celui
des premiers en instituant un contrÔle des prix sur les prOduits alimentaires lo-
caux (seulement) et un système de taxes à l'exportation.

- 134 -
Dans un pays comme la Haute-Volta, la plus haute priorité devrait être accor-
dée à l'amélioration des termes de l'échange du secteur agricole, qui aurait sans
doute un effet très important sur la production et, par voie de conséquence sur
la demande de crédit.
Doit-on reoonnaître, cependant, que le crédit ne constitue qu'un volet de la
politique économique. SOtlaugmentation n'au~a qu'une incidence limitée sur la pro-
ducti:on si d'autres mesures de p~litique économique diminuent la rentabilité de
son utilisation. Dans ces conditions, le crédit ne sera efficace que si les autres
mesures sont modifiées.
Qu'il s'agisse du crédit, les ressources sont rares et l'objectif identique 1
encourager le monde vi~lageois â adopter de nauvelles techniques agricoles. Le
choi~ de moyens ou de leur combinaison dépend de.la nature des obstacles analysés
1
du coût des differents programmes et de leur viablité dans un contexte politique.~
et administratif donné. Les programmes de crédit agricole destinés aux agriculteurs
les plus démunis ont un champ d'application limité. Etant donné qu'il s'agit en
,
glnéral des propriétaires d'un lopin de terres qui n'ont pas d'occasi:ons produc-
tives d'investir. Ils ont par conséquent besoin à'un financement si limité qu'ile$~
économiquement plus rationnel de leur venir en aide par des dons que par des pr~ts.
Cette nécessité s'explique d'autant plus que des grandes difficultés qui frappent
ces dernières années, l'~iculture des p~s de la bordure sahélo-soudanienne - Sé-
négal, Mali, Haute-Volta, N:iger, Tchad - posent, d'une manière brûlante, la ques-
tion des causes d'une telle précarité de la vie agricole dans ces régions. Le plus
souvent on invoque à ce propos la fatalité des aléas climatiques et le caractère
archa!que qui n'ont pas évolué depuis le debut du siècle.
Notre ambition, dans les prochains chapitres, certes limitée, est de montrer
de quelle logique profonde s'inscrivent les coups aveugles du hasard; quels bou-
leversemdnts vitaux se dissimulent sous l'apparent immobilisme des sociétés tra-
ditionnelles ; comment le désastre qui est l'aboutissement d'un certain nombre
de déséquilibre qui s'accumulent depuis le début de l'occupation coloniaLe.
Les faits concrets sur lesquels s'appuie ce qui va suivre se rapportent à la
Haute-Volta. Toutefois, les problèmes que l'analyse de cet exemple précis permet
de soulever présentent une portée beaucoup plus générale.
Mais dans le prochain chapitre, noUS nous propaserpns de faire un diagnosti~
de la situation actuelle, tant:~u point de ~e du système agraire que celui de
de l'organisation politique et socio-éconmique de la aommunauté villageo~se. Nous
nous attacherons à préciser les causes essentielles des insuffisances, des retards
et des déséquilibres existants.

- 135 -
CRAF 3 L
'l'BATmi-' D'UN DEVELOPPmBNT AGR ICOLE
Introduction..
Le secteur agricole volta!que est l'un de ceux où les interventions de bannes
intentions des pouvoirs publics sont les plus nombre~es. Cela n'a rien de. surpre-
nant puisqu'au moment de l' "accession" au développement, le secteur agria:ole o~
cupe dans l'économie une place non négligeable pour un pays dont 95 ~ Œe sa popu-
lation vivent d'activité _~~~. ~'expérienae de l'humanité nous enseigne que
les exigences du développement appellent non seulement une amélioration des per-
formances de l'agriculture, mais une mutation de ses structures abDutissant à un
changement qualitatif du système socio-politique de l'économie ruralgo
Certes, les mobiles économiques (perspectives de revenus accrus) peuvent cons-
tituer un stimulant "puissant. Mais outre que leur existence est parfois do:u.teWle,
leur présence théori'lue ne dispense pas les pouvoirs publics en principe de pou-
voir mener une politique agricole fort active. S'il est vrai que l'Un des aspects
originaux de toute politique, est que les pouvoirs publics ont comme parteaaires
des agriculteurs encore liés à la société de subsistance où prédominent les modes
~
de product••ns pré-capitalistes. Il n'y a pas nécessairement convergence entre
les buts poursuivis par le planificateur soucieux de développement et les agricwl-
teurs opérant selon d'autres normes. Cela n'est certainement pas l'obstacle insur-
montable quant à la mise en oeuvre d'une politique agraire efficaoe.
Il est par conséquent intéressant d'essayer de se faire une idée plus ou moins
exacte de la portée de l'intervention de l'autorité publique dans le secteur
agricole en Haute-Volta. On peut en rendre comp~e en ccmsidérant les dif'ferents
aspects suiv,ants 1
lle di~ostic de la situati0n agric~le
_ Place et rOle de l'agriculture dans la politique de dével~pement. ;
- Le Secteur rural tel qu'il se présente aujourd'hui,l'travsrs ces métho-
des culturales, sa structure foncière et les taux d'occupation du sol.
Si nous devons résumer en une formule simple l'ensemble des problèmes qui
se posent dans le domaine agricole au sein d'un pays qui reste à l'image de Itàfri-

- 13~ -
que tropicale sahélienne. Il n'est pas exagéré de dire que lion assiste actuelle-
meDt à une sorte de blocage du système agraire, considéré dans son ensembl~ a~tte
constatation globale s'appuie sur l'observation d'un certain nombre de phénomènes
- surchage de l'espace et surexploïï.tat ion des sols dans c:ertaines régions du crentJrEt,
centre-est et centre-ouest, déséquilibre des ternoirs, déficit alimentaire chr0-
nique - que nous allena:: maintenant aborder syBthétiqueœent'.
Paragraphe l
1 Le blocage du système agraire.
AI - La surchage de l'espace•.
Deux foiK plus petite environ que la France (275 000 km2), la Haute -Volta ras-
semble une populatiO'n d'environ 17 millions de personnes. Près de la 1Zl0itié appar.~
tinet au peuple Mossi ; les autres se répartissent en une dizaine de groupes
de minorités nationales pricipales. Presque toute la population s'adonne princi-
palement à l' agricul ture ai; l'exemple de la région Mossi se situant dans la part;ie
centrale qui représente un peu plus du quart de la superficie du P~s.
Les caractéristiques essentielles et originales domin:tes sont 1 la forte char-
ge démographique pésant sur les terroirs villageois. Les sols sont d'autant mŒias
productifs qu'ils sont fréquemment surexploités. Toujours:; supérieure à 20 hab./km,
(sauf dans les principales vallées et sur les marges septentrionales), la densité
de la population dépasse 50 hab./km2 (localement 75) dans une grande partie de
r
la faction occidentale des plateaux Mossi et dans quel'ues autres aires éparses.
~e sont là des valeurs exceptionnelles compte tenu du système agricole mis en
~uvre~ Seule l'histoire en rend compte. En effet, à l'intérieun
de la Roucle
duN±ger, les peuples Mossi et B~bo s'étaient constitués en puissants royaumes.
rn les emp6reurs du Mali, ni les Conquérants Sonra'l nI avaient réussi à s'imposer
aux Moss}; et l'Islam non pilus n'a réussi les:; y pénétrer. C'e pqs .osn qui, a
travers les pratiques étatiques importées et imposéeB par le groupe, politique d0,-.
mânant 1 les ''NaJlomsé", a bénéficié d'une certaiines unification culturelle :t'aïit.e
d'échang.es entre les envahisseurs - les "nakomsé" - et les autochtooes, le pouvoir
politico-rmUitaire mis en place garantit jadis la sécurité de la populatiion faOllB
aux agressions extérieures. LI ordre instauré et assuré par les "nakomsé" permet
l'accroissement de la population. L'accumulation des hoimes à l'intérieur de cette
f

partie de la Haute-Volta est en partie un fruit de l'eficience de S0n organisation
politique anaie~

- 137 -
tOlltefoÛ, à cette situation initiale spécifique se sont surajoutés, en partii.-
culier durant toute la première moiti'é de l'occupation <mlam:iiale" les ef:fl'eim d"un
phénomène de ltJrande ampleun, quii·aeaftdtedé
li' ensemble du P'BJ'"S t la cro:iissana:e-
démographique s'effectue au bénéfice des zones rurales.. L' accroi'ssement global
du chiffre de la populatiQn s'explique par une amélioration relative des condit~ons
de vie, due notamment à la fois des guerres et à la suppressions de l"escla'V:age
colonial; En outre, même si l'infrastructure médicale est demeurée jusqu'à aujour-
d'hui très insuffisante, des aQt~s préventives, telles que les vaccinations anti-
varioliques massives, ont eu sans nul doute des effets positifs sur la mortalirté.
Si dans les temps anciens la population volta!q~ particulièrement mossi est par-
venue à s'accrottre, elle le doit, comme nous veno. .] de le souligner, pour une
grande part à la protection que lui assurait les structures politiques mises en
place par les pouvoiirs de la chefferie (les "nakomsé tt en pça mossii). Sa forte
densité lui a éDé en quelque sorte donnée plus qu l elle n'est ]~expressiœn, la
sanliltion d'une gestion efficace des ressources locales, naturelles et humaines.
tu demeurant, peu interessé par les valeurs li;ées à l'agriculture, le pouvoir p<D:>-
litique féodal n l a pas su ou voulu prêter à cette gestion une grande attentiœn.
C'est une faiblesse de la société villageoise communautaire 1 une inégalité dans
l' efficaci té Jrespective de ses teahniques d "encadrement des hommes et de son Bp-
~ème de production, demeuré à un niveau technique élementair~.
Dès l'époaue coloniale elle était engagée dans la voie d'un déséquilibre entre
sa population et ses ressources. C'est ainsi que rapporte R. Dumont dans son livre
les pél\\Ysans écrasés : "les famines n'ont jamais cessé au Yatenga, nous dit Y. Mar-
chal, qui rappelle celles de 1831-1834, 1879-1884 et 1914. Quand je citais cette
date devant un paysan malien, je pensais à la grande guerre ; pour mon interlocu-
teur, elle évoquait l'année de la grande famine"(I). Le colonisateur à constamment
précipité cette évolution, dans une première phase en désorganisant la prŒductian,
dans une deuxième phase en facilitant à son tour l'essor du peuplement, sans ja-
mais tenter ou parvenir à promouvoir des techniques agricoles plus effi~iente~
crest ainsi "pour faciliter le paiement de l'impÔt", l'administr.q,tion ajouta
aux cultures vivrières, qui ne furent paurtant jamai.' excédentaires, les cultures
dites de "rente" : l'arachide et le coton. A ce propoa Qn pouvait lire en 1932
dans les "pél\\Ysans noirs" de jobert délavignette, un administeur Colonial qui se
R.. Dilmont : op•. ci t. P. 269

- IJB -
souciai t des ses administrés - il Y en eut quelques uns - "ce pays (la Haute-Volta)
était ~tigué, fatigué de corvées de route et des convées de aulture••• réquisition
de mil pour les travailleurs. l'arachide fut alors payée "10 sous" ou 0,50 f
le kg, 3- fois moins qu'un oléagineux t~éré, pour une graine plus riche en huile
certes, les chefs et les riches avaient la gr~sse part. Et les pauvres avaient
le peu qu'il faut aux pauvres o •• le profi~ allait au chef••• tout se passait
comme si le champ eüt été une corvée••• "(1). De l'impOt en nature et de la ~
vée, op. passait donc à l'imp6t en argent et à la culture "commerciale", forme
son
plus moderne de prélèvement du surplus du travail. a·'est à travers/économie
qua la société villageoise est le plusBUciement malllénée par son histoiire re-
cente. Pourtant la lIia.ute-volta notamment dans sa région Mossi a fortemeut iim-
pressionné les premiers observateurs :f'r~f].B.iBêà lafiini .ib.' XIXè siècle : par
sa masse démographique et l'étendue des terres cult-oYJs, par l "efficacité de
l'encadrement politique de la population. ~'était en effet un exemple sans pa-
reil dans le domaine colonial naissant. Divers indices temoignent cepentant
d'une certaine fragilité de l'économie ancienme.
>.J
$.e consavrant :fréquemment après la oampagne agricole à des activités arti-
sanales, de nombreux mossi se déploJaient en saison sèche autour de leur aire
ethnique, s' installant sur des marchés, se déplaçant de village en village:
ils proposaient leurs services, leur savoir-faire, en échange de produ~ts vi-
vriers, de bétail, de tabac. Ces mouvements s'amplifiaient à la suite de mauvaises
récoltes. les populations se dispersaient alors dans des "aires de survie" par-
fois très étendues: ces déplacements témoignent que l'acaumulation des hommes
associée à des techniques de production demeurées élémentaires, s'accrompagne
d'une certaine insécurité vrivrière ; l'espace économique de la sooiété commu-
nautaire débordait son aire villageoise.
La mise en place d'une administration coloniale devait avoir progressive-
ment de multiples effets qui feront naitre une situation nouvelle, pllongeant
la société communautaire dans une véritable éconamie de survie. Elle était
mal armée pour supporter les exigences économiques du colonisateur et les mu-
tations qu'il lui imposera.C' est le début de la longue agonie de la société
Villageoise communautaire qui va cilminer avec la période des indépendances
(1) Comité Information Sahel
"Qui se nourrit de la famine ? 1\\
.'
.

- 139 -
D.epuis la grande famine de 1932 et la relative stabilité alimentaire qui
s'en est suivie, J.Y. Marchal note que la situation s'aggrave à partir d&~~(
1966 et devient catastrophique après 1970, donc bien avant que l'on alerte
le mondeo.·Le Yatenga, au N'ord-ouest de la Haute-Volta, cromptait 250 000 hab.li.-
tants dès I930 t "~'un pouvoir politique (évoqué plus haut) fort et stable
(l'emprire mossi) avait apporté la sécûxité et permit d'atteindre de fontes
densHés" .. (1). en 1973,. CE NOMBRE AVAIT 'DOUBLE f un demi-million, sO.Î.l't 41ha'&/
Km2 et plus de 100 dans certains villages. as qui dépasse largement le nombre
d'habitants que le système de oulture a~tuel peut arriver à nourriri correcte-
ment, sans dégrader les solso La communautée villageo~se ébranlée par son re~~nt
passé colonial et les formes nouvelles par les quelles elle se pionge dans le
présent, heurtée par les nouvelles valeurs du système capitaliste qui lui sont
imposées, inapte à faire face à la cro~sance de sa population en raison pour
une part de son environnement géographique tel qu'il est (Climat, sols) et tel
qu'elle s'y projette (densité de peuplement), la société villageo~se ne sait
se définir un avenir parce que ne ma1trisant plus son àestin.
,Pas plus que les mouvements du passé, les diverses formes actuelles de l'émi-
gration ne sont réellement déliberées. exercée jadis de l'extérieur, la contrain-
te vient désormais de l'intérieur, l'incapacité de la société à résoudre ses
problèmes internes, économiques et sociaux, à rétablir sur place une comple-
mentarité, une solidarité entre les divers éléments constituti~s, à. les rassem-
bler autour d'un même projet de nouvelle soci'été•. Ce mouvement communement ap-
pelé exode rural dort être interprété comme la manifestation de la faillite
du système agraire actuel, de son impuissance à s'adapter (parce que étant lui
même contraire au nouveau qui émerge) aux contraintes qui s'exercent sur lui,.
au premier rang des quels se situent celles qu'imposent la nécess~é d1un acarois-
sements constant de la production agricole. Pour analyser concrètement ce phé-
nomène, pour mieux dégager le mécanisme et les conséquences, il nous faut en-
visager maintenant le problème de la structure et de l'équilibre du terroWr
viillageoÏis.
(1) J. Y. MilRCHAL- Geagraphie des aires d'émigration en PB3s Mct8sÏ!
- ORSTOM - Oua-
tadougou 1974.

- 140 -
BI - Le déséquilibre structurel des terroir~
Dans le Nord-Ouest de la ffiaute-Vol ta, :grécisement au Y:atenga,. les terres
d'un village Mossi s'organisent traditionnellement autour d'un opposition fon-
damentale entre une zone centrale r travaillée de manière permanent& grAS8~
l'apport du fumier, de oendres et déchets menagers et une ceinture extérieUl'e,.
cultivée selon la méthode de jachère. ~~est là. un modèle d'organisation large-
ment répandu en œaute-Volta VOiT en Afrique occidentale et analysé par ~UTTER
sous le nom de "terroirs auréole(1)1,!
Entre ces deux éléments du terroir se nouvnt des relations de cromplémenta-
rité fonctionnelle. En effet, si l'on considère une communauté villageoiie prise
comme un tout, il bien certain que, sauf exception (que l'cm rencontre peut 'ètre
chez certains élévaur-agriculteur, gros pessesseu2s de bétail), la quantité
de fumier disponible ne permet de traiter qu'une superficie de terre reduite.
LI est donc Béèessaire qu'une partie de l'espace so~t cultivée sans apport de
fumier, c'est à dire avec le procédé de jachère. Jachère et fumure sont deux
méthodes de culture complémentaires, dont l'association permet ia couverture
des besGins alimentaires de l'ensemble de la population d'un village.
L'équilibre global du système agraire repose sur la capacité que celui-ci
à se perpétuer sans appauvrir gravement le milieu :·matU!!'el et à respecter
les deux équilibres partiels
- le premier concerne le rapport entre l'étendue de la zone des cultures
continues et la quantité de fuaure disponible;
- le second concerne le dégré d'intensité d'explolltation de la zone des
jachères.
Or, sur ces deux plans, il apparalt que, par rapport à une situation de fonc-
tionnement normal, d'importants décalages peuvent être observés qui conduisent
à des perturbations de l'ensemble du système. C'est aussi que dans les gros
villages des plateaux du Yatenga
comme nous le montre le tableau qui suit.
(I) S1IlJ'rER • G. .dt propos de quelques terroirs d'Afrique occidentale", Etudes
rurales, nO 4, Pari s , 1962..

- 141 -
DENSITES, DE POPULA'l'ION PAR CERCLES. DU DEPARTEMENT DU NORD
(YATENGA)
~ercles
:Populationl~upercif~~1
Densit8's
: ~en 1973)1 cite (km2
1
h/km2
--------------------4.1-------:
1---
_
:
1
-GOURCY... ~.~.o •••••••••••.•ooo.oo 1 131 000
t
2 003
1
65,4
- OUAHIGOUYA••••••••••••••••••••• J 242 000 1
489TI
1
49,5
SEGUENIDUA.
0 0 ;
1 123 000
1
l
515
1
81,2
- TIATAO........ •••• •••• •••••
:
82 000
1
3 884
j
21,1
f-----.-------.----__
578 000
: 12 293
1
47,0
&ource:: Centre d'études et de recnerches ethnologique, bordeau 1971.
De ce tableau on n0'te une densité largement supérieure à 81 habit ant s/k:m2 ,
on e:bserve une extensicm démesurée de la zooe centrale au aire d"ooaupation
cont inue du sole. Superfici:e qui n'a pas de rapport avec la taille réduite du
troupeaUJ rlllage0'iis. Il en Ilésulte une insuffiisanae de la fertilisation _
soJL
qui ccmduit à sem épl1'isement· et à. une baisse des ren-dements qu-e "les cultivateurs
intél.1rogés sont unan~es à cronstaterll(I).
Par contre dans certaines partiies du pays on rémarque que l'aire d'occupa.tion
continue constitue le centre du village;.. IUle rassenr:ble autour des cases, les
Jardins aeintursn~~~es cases, et les champs permanents s'étalent à la ~éripbé­
rie. Œrossièrement circulaiTes, ces derniers ont cependant des formes waniables~
généralement massive~~ Les jard~s p-*te~ des cu~ures hâtives t mats et mil,
qui permettent d'assurer la "soudure" alimentaire de la famille.. C~haque année,
ils s~t enrichis par les détritus ménagers et le fUmier des bêtes damestiqueB;
Par contre, les champs permanents, qui
portent du mil, du sorgh(l), des araahides
du coton, des condiments, ne sont engraissés que par le passage rapide des tDau-
peaux, abandonnés à la vaine pâture après la moiisseu.:·. cm par lia oendre des
tiges de mil rassemblées et brdlée sur place(2).
(1) Claude Raynant : "Centre d'Z"tudes et de recherches érnologique," - B\\ordeau:x. 1971.
~)Près des centres urbains, près de la Oapitale : Ouagadoug~ notamment, où la
pénurie en bois Va n'accentuant, il est à remarquer que la plupart des paiilles
de mil sont ramassées par lesfemmes, et brftlées pour la cuisson des aliments ou
la fabrication du dilo (Bière de mil) pendant la saison sèche.

- 142 -
C'est ce qui expliique que dans certains villages, là où l'espace disponible
llSt encore relativement abondant, on les laisse en repos de temps à autre, pcmr-
qu "jjls se régénèrent, pendant une période de 2 à 3 années.
La concession tres vaste, surtout au département Centre Ouest, est divisée
en trois unités éconcmiques autonomes. (}haque chef d'unité a ouvert une entItée
separée, dans la partie de la concession qui lui. a été attri."buée '~L..es.J te.mraa '
lili.··jiardin de cœ.se et du champ serni-permanent ont été partagées en serleur SJ"ant
pour sommet la ferme elle-même. Mais à cette catégorie de chapps permanents
ou semi-permanents se rattachent également les terres des bas-fon48. Chaque
année le paysan y cultive du riz, en saison humide, des tubercules nota.rnment
dans le sud, des fruits et des légumes, ave~ arrosage quotidien, pendant ]a
saison sèche. La recons~itution du s01 y est fait de manière naturelle ~'jjnœn­
dation et le dépet des charges alluviales~
Quant à l'aire d'ocaupation aiairsemée du sol, elle est à la périphérie
des champs permanents, en pleine brousseo Etle est fbrmée de champs, precl.se-
ment appelés "champs de brousse"', dont les formes sont irrigulières. Chaque
année, le paysan abandonne en effet, la partie la plus épuiiBée de son ahamp,
pourl' agrandir dans une autre direœtiion, généralement du obté où le sol est
le plus fertile, oe qui se traduit inévitablement par des formes très compiliexes.
Il parte des mils et des sCDrghos, des arachides, du coton, des haricots <DU des
Pei- de terre. œ'est en quelque sorte le champ dont le pSJ"san tire le pri~ci­
pa] de ses res~ources, et pourtant il n'est pas fumé, ce qui justifie l'habi-
tude des longues jaohères pouvant durer suivant les cas de 10 ans à 30 an""
Sur ùn plan national dans un cas ou dans l'autre, ce que l'on d~~t retenir
de cette situation évolutive c'est qu'elle marque et nmrquera une certaine :D'aille
du système de production traditionnel, fondé sur une combinaison harlllenii.euse
entre exploitation intensive et exploitation extensive des ternes. Que a.e so:Lt
du fait d'un dév.elopp~ent excessif des superficies soumises à, une culture
continue ou à la suite d'un raccourcissement du temps de jachère, l'équilibre
entre l'effort que les hommes imposent 811"
milieu naturel et les me.yens de
regénération qu'ils lui apportent se trouve dans une certaine mesure profonde-
ment perturbé. Des indices comme l'apparition de plantes parasites (telles q~e
la striga Sânégalensis) ainsi que la modification de compositicm et de structure
des 801s sont tout à fait significatifs à cet égard. C'est au niveau de la pro-
duction vivrière qu'il faut cheroher les premières conséquences à cette situa-
tion, c'est pourquoi nous allons envisager maintenant les problèmes qui se
posent sur le plan alimentaireo

- 143 -
~I - ~A QUESTION Dm DEFICIT ALIMENTAIRE.
nans notre s~s-paragraphe A, nous indiquions qu'aussi loin que l"cm rement-e
l'insécurité alimentaire rep~ésente une constante des c~ditians œe wie Œe. la
paysannerie des r~:Lcms du sahel, particulièrement celles rii~raines du S;ahara.
--
(1'i ornme dans les campagnes européennescf9squ'au début du siècle deDnii.elt',
la. mémoire
collective jalonne le passé de référence aux grandes famines qui décimèrent la
populationo Parmi les plus l'ecentes, celles qui s'abat1tiit sur tGnlte la zCIII1e sahé-
lienne durant les années 1913/14 se révèla particulièrement meurtrière.
Cet état de fait est dil essentiellement à la dépendance de l'agriculture à
..
l'égard d'un climat extrêmement capricieUX6 Qelle que SQit l'adaptation du mil
aux conditions particulièrement rudes du milieu,"il n'en démeure pas moiins sensi-
ble aux vaniations pluviométri~es, ~omseuleme~ du point de VUe de la hauteur
annuelle des précipitations, mais aussi de celui de leur rêpartiticm selon les
differentes étapes du cF~e dit croissance de la plante"\\I). En effet, le problème
est moins d'obtenir une quantité globale d'eau que d'avQir la quantité nécessa~
au moment adéquat•. Le petit Ilflmlbre d:è jours de pluie et le caraa.tère 'Wiolent et
très localisé des précipitations entra1ne une grande probabilité de ne pas obtenir
l"eau néClessaire au moment ~ulu.
Face à \\a précarité des conditions naturelles
la sQCiété villageoise avait
t
su mettre en oeuvre un certain nombre de pratiques, en individuels ou Com:munautaire,
qui lui permettaient de bénéficier d'un minimun de sécurité. Il faut soulignen
tout d'abord l'efficacité des techniques traditionnelles de stocliage (les épis,
non égré8~sont disposés à plat, en couches successives, dans él:e vastes cuves de
vannerie ou de potérie crue,) grâce auxquelles le grain peut être conseDvé pendant.
des périodes relativemŒnt longues - éventuellement plusieurs années -, ce qui rend
possible la cOBStitution de réserves.
Naguère, les règles rigoureuses présidaient au sein de la communauté patri-
arcale productrice, au partage de la production agricole , après la meisson, les
semmences destinées à être mises en terre au prochain hivernage, ainsi que la quan~
(1) S~E.D.E.S~ l "les produits vivriers au Niger"" T.I ; les mils et sorghos, minis-
tère de la Coopération, Paris l, 1963.

- 144 -
tité de céréales nécessaires à la subsistace du groupe durant toute la saison des
..
pluies étaient entrpesées par le patriarche dans/m greni-er qui ne dé'WaIlt:. plus
être ouvert avant les premières pluies. De cette mani;ère, même en cas de mauvaise
année, 11 avenir, Cl est à dire la possibilité de travailler durant la prochaine
saison des pluies, se trouvaient sauvegardé. Mais lorsque, dans ceDta~&B catas-
trophes, les reserves communauta~res ne pouvaient suffire à boucler l'année et
à passer le cap de la Il soudure Il ,
chefs et digni,taires" placés aWl differents ni-
veaux de la hiérachie politique, étaient tenus dlouvrir les leurs - remplis en
majeure partie grâce aux contributions, en nature ou en, travail, :fourn:hell; par Jlea;
paysans - et de porter sécours aux ~ndigents.
Malheureusement à leur arrivée, les colanisateurs ne surent pas reeonna1tre
llexistence de ces procédés de sauvegarde. Ruinant le POUVOiT politique tradition-
nel ou le travertissant, ils le dépouillèrent non seulement de ses prérogatives
mais aussi de ses responsabilités ou; du moins, des m~ens matériels dly faire
face. . . la suite de la grande fami-ne des années 1913/14, des mesures f'urent pri-
ses pour assurer la constituti-on de reserves collectives. Tout d1abord, ~bligation'
fut faite à chaque village de conser;.œr en permanence, dans des greIlliers spéc::i.a-
lement consacrés à cet usage, de stocks corespondant à quinze ~nhes de mil
(so:iiit ISO lcg-. envfurGn) PaJr' habttan1t. En ~t2"&p la méfiallCe à l"égari die ttcmt:. œ
quii. pouvajjt êitt'e technÏl4Ue tJradi ticmnelle étant de Dèglet' des silctS placés s01llS
la nesponsab~lité des autorités adminjjstnatives ~en1i; u]téDie~men~ c0nsti-
tués a~c des méthodes ett des maté~~ux -madennes". Ce fut; un échec c~e1t
~ toute la 1igne, cela da à une méconnaissanoe des effets dies oand:htiQD8 o1i-
matiques locales J le m11, conservé en g'l'ain dans des cuv.es c1oses~ Da tardait
pas à germer et à deven~' impropne à la consommat:io~
Enè Ig63;,. ~n notait en_ra que les gltains stockés aIWès battage <a!ans ]jes'
magasins administratifs étaien1t. f:réquemment, dévas1tjés pan' des attaques de ~:iL­
bolium eit de Trochodemne ; ce qui ne se produisait pas danS les grenielrS p~­
sans (SEnES, 196.:3). Plus Décemment,- la mise sUlt pied des Onganismes Régionau:x:
de Développement qui sont chargés non seulement d"acheter des céréales eit cie
,
les conserver, ma:i:s aussi, ce qui est tout aussi import:an't,d1en assure!l2' la
distribution dans llensemble du pays et de les livren, à 'GI111 couns siiablePi llà
où le besoincs'en fai~ plus particuliè~men~ sentiro Pour des raisons de gest~

- 145 Q.
internes (détournements J 1e scandal du ''Wait.eJr-g:Irain") et:. aussi: du fait <aie la
concurrence exercée palZ les gros commerçaüS.c;spéculateurs du ma.:aehé "libre" au.
moment de llapprovisionnemen~. Cet~ expérience se solda pa~ un éch~ Le d~­
nier en date de ces organismes, Cl est 110ffice ~atiDnali de Cél!éales ((OFNA<:::ER)
qui a été crée dans les mêmes objectifs que ses atnés (ORD) mais e&tte ~ois-c:ii
pour y accueillir les céréales provenant de 11 aide internationale. L"OF'NACER
n l'a pas su éviter les tares qui minent ses homologues ORn. Car 110FINACER au dé-
part avait pour O'bjet prioritaire de règlementer le marché national des oérés-
les~ mais malheureusement il mla pu jouer son rôle de stabilisation et se
comporte comme un organisme commercial~ soucieux de réaliser des bénéfiees
substentiels. Bien qulil dispose dlinfrastructur:de stockage relativement
importantes, (30 000 tonnes environ selon le CILaa ~,I) dans la seu]Je ville de,
Ouagadougou, dans son napport cie synthèse 11141).
~bleau l Estimation du déficit céréalier p~ Qnganism& d·en~ent.
1------,--------------.--'----------------1
,
Organismes d·encadnement
Dé~c~~ en, tannes
1
• •f - '- - - - - - - - - - - - - - - . - - - - - - - , - - - - - - - - - - - - . - - - - _ _ . _
Autorité des Wallées des Woltas .................
1
'.A.V.VJ. ).
on
,
cie ]la <C:omoé {Han.forah) ••• ~:••••••••••••••••• I6.l 000
œD de B~bo·•••••••••••••••••••••••••••••••••••••
2 000
1
n
de la BOugouriba o •••••••••••••••••••••••••• 15 616
1
" de la Wolta NGire ~Dédougou) ••••'•••••••••••
1
..
4500
èe 1 1:E3ID! •••••••••••••••••••••••••••••••••••
4 000
du Nord plateau Mo~si •••••••••••••••••••••• 29 ).5(>
n
du,Cen~-OUest (Koudougou) •••••••••••••••• 23 310
1
de ~onpéla o •••••••••••••••••••••••••••••••• 10500
1
Il
du Centne (OUagadougou) •••••••••••••••••••• 14 840
1
~
~ Sahel ~DŒrii.)
.
9,000
1
ORD dUJ. "!'"at enga o.
51
0
• • • • • • • • • • • • 0
.
000
1
Total 1 Haute-Volta.
]80 488
1
1:---------------'---'-----
,--------1
( SOUJl'ce ,. Ministère du Développement' Rural - campagne I91(6-I911).
Ces 180 488 tonnes représen-cenit des besoins complémentaires poun une ])é-
~I) ~omité Permanent ]nter-Etat\\s de Lutte Contre la Sêcherease ciians]je:
sahel.

- 146 -
~iode de 12 mais, auxquels i l faut retrancher 40 000 T' pOtU' couvrir les bescdin
èn
semences, soit 140 488 tonnes. Ce déficit céréalier est une photographie
d'une situation à un moment donné. Cette: situation ponctuelle demeure' à l "ima-
ge d'une situation constante chez le p~san voltatq~
Dans tous les cas, il faut bien convenir que le problème essentiel Deste
celui. d1ll. solde gi:oba:Ii de la product ion par rappcnrt. à la conSClmlJllat ii_ 1 JI:OUJr'
constituer et redistribuer des réserves, en déhors de toute visée spéculati~Œ
il est évident qu":iil faut qu'il y ait des excédents disponibles. Dans le sys-
tème agraire traditionnel, la production du mil bénéficiait d'un statut extrê-
mement privilégié, qui se manifestait aussi bien sur le plan économique que
,-
sur celui des valeurs religie~ ses ou sociales.
~ertes, de nombreuses autres plantes étaient cultivées mêmes sur les ter-
res dunaires (haricots, potis de terre, niébé, arachide, sésame, patates d0Uces
oseille de Guinée••• ) mais on ne les ~tB0Uvaiit qu'en quantités très réduites
(Villomé I9I3)(I), de sorte qu'avant l'implantation GCcidentale la production
du tout concourait alors à assurer, en année de pluviométrie satisfaisante,
une récolte de céréales largement supé~eure aux besoisn de la ~munauté rurale,
c'était les surplus qui alimentaient les ventes à l'extéDii~ur. Même si une
suca-.ession d'années de sécheresse débouchaient sun' la pénurie et la disette;
du fait même de ses objecrtifs excédentaires, le système de productii.on tradi-
tIL
tionnel tendait indiscublement à assurer une marge de sécurité fane aux fluc-
tuations à coUDt terme et à réculer au maximun les limites de rupture de l'é-
quilibre alimentaire.
Le fait déterminant quant à la remise en cause de cet équilibre a été
l'intense développement de la aulture de rente à des fins industrielles.
surtout celle du co: ton, comme nous allons le constater avec les deux tableaux
su:tvants 1
(1) Villomé (1913)
notait qu'a moins de mauvaise année la production su»pas-
sait la consommation et que les cultivateurs divisaient
leur récolte de mil en trois parties: - Ge qui'il leur
faJJlàii.t pour vivre un an , plus une réserve en cas de séche-
resse - la semence - les surplus destinés à la venta.

- 141 -
EVOLu'noH' DE LA PROnuGIT'ION DES PRINCIPALES; CULTURES, VOLT AI QUE
tliase 100 1 1961)
1
·
1
1
1
·
Nomenc1ature
1
1967
1
1968
· 1969 1 1910 1 1971 1 1972 1 1973 1 1974
·
1
1
1
1
1
1
1
1
,
1
1
1
1
1
1
1
Mi] et S-orgho
1
100
1
91,T
1 125,8
1 112,3
1 100,6
1 102,1
1
I06,T 1 130,4
Ris
100
1
IIi,O
139,3
1 133,7
1 120
1
91,9
1
115,4 1 139,7-
Mais
1
100
1 103,1
1 107,8
1 109 ,.8
1
98,.6
1 107,4
1
111,4 1 114,7
Arachide
100
: 102 t"7
1 102,7/
1 IiI1 ,5
1 11]:,4
1 124;4
1
132,4 1 139,4
Coton
1
100
1 188,2
1 211,6
1 135,3
1 162,1
1 187;7
1
153,7 1 176,1
Sésame
100
1
97,7
1 144,2
1 104,7
1 107
1 131,4
1
123,3 1 135,3
.
1
1
:
1
1
Slarorce
D.oaument du Plan quinquennal 1972/7 6 P.. 57 etRapport économique 1975 du PLan
P.14 à20.
EVOWTION DE LA CULTURE COIONNDRlB EN HlAUTE-VOLTA
1
1
1
1
1
1
1 1910/11
1
1971/72 1 1972/73
1973/7411914/75 11915/76
: 1

I -
I
1
1
- Su~erfiaies aultivées
1
1
1
1
1
en hiJtSUtum (ha)
1 80 557
1
74 056
70 058 1 66 601 1 61 520 1
- Superficie fertilisées
1
1
1
1
engrais minéral (ha)
1
13 214
1
16 246
1
14 905 1 18 812 1 20 nO l
- Superficies traitées
1
1
1
1
1
trois fois (ha)
8 776
1
12 407
J 16 302 1 18 710 1 22 022 1
- Produaitiion a:tDmmerai'ali-
1
1
1
1
1
1
lisée de cotton grain(T) 1 23 484
1
28 126
J 32 574 1 26 669 1 30 563 1 50500
-Rendement en coton gBabne 1
1
1
1
1
(Kg/ Ha)
1
291
·
379
1
465 1
413 1
491 1
·
.
- Production de o:oton fibre 1
·
1 :
1
1
·
.
(T)
:
18 425
:
10 402
1
II 951 1
9 833 1 II 328 1 18 000
1
1
:
1
1
s,ourcre 1 C.lt'.D.T : 1975/76.
De ces tableaux, il ressort la part importante qu'a prise la culture du cot~n
dans l'économie rurale du p~s. En effet , entre 1961 et 1970, les superficies

- 148 ...
aonsacrée à la plantation du coton seraient passées, selon les estimations of-
ficielles, de 22 925(bulletin d'Afrique Noire. 1973 ; P. 188) à 80 557 hecta-
reao Très lent au dépant, en partie du fait des problèmes d'écoUlement et d'ache-
minement de la prodhction, le mauvement prit san essor dans l'avant dernier
quart du siècle pour conna1tre ensuite un taux de croissance rapiide. Effecti~
vement la politique de dével~ppement agrianle de la Œau~e-Wolta dans sa phase
post-coloniale est demeurée entièrement au service des monopoles étrang~.
:in accordant des investissemlllIlts que pourdes cultures de rente (ClDrl<m, araahi-
des, sésame)et pour les cultures riches (riz) et, en négligeant tQ1;:alement les
cultures vivrières ; éléments de base de l'alimentation de l'immense -.' majorité
de la masse rurale•• Les surfaces oultivables des cultures vivrières (mil, sor-
gho, mals, le fonio etc••• ); comme l'illustre très éloquemment les tableaux
ci-sus, ne sont nullement améliorées. , Néanmoins, l'amélioration pratiqué~ se-
lectivementFst une évolution qui c0XresponJ.à un véritable bouleversement, car
elle s'est concentrée sur les régions ',::,' ~ fertiles, les seules où, pour des
~onomiques, la culture du coton pouvait être pratiquée.
Il ne nous est pas aisé de faire un bilan puis des conséquences ent~a1nées
sur le Irilan alimentaire, par le développement de la culture cotonndère. Les
premiers temps de la clOlonisation, ont permis, grâce aux effets de la "paClifi-
cation", une vive expansion de la produa:tion agricole, de sorte-que s"illy a
eu, en valeur relative, un recul des superficies occupés par le mil sur l'en-
semble des superficies explontées, oe recul siest insc~it tout d'abODd dans
un mouvement général de croissance, masquant les effets à long terme de aette
évolution. Par ailleurs, un début de diversification apportée à la nourriture,
l'imp0rtation de certaines denrées telles que les fruits et les légumes, de,
la Œ6te-d' Iv:oiire et du Ghana, la farine, les pâtes alimentaires et le suc~e,
ainsi que le développement de la culture du riz ait Jiégérement attenués la dé-
pendance à l'égard du mil (encore faut-il préciser que ce phénomène concenne
presque exclusivement la catégorie aisée de la population citadine).
En ~ontre partie, touefois, une rapide croissance démographique amplifiait
la demande de produits vivriers dans les proportions considérables tandis que
les possibilités d'intensification des cultures et d'extension des surfaces
exploitées semblaient approcher de leurs limites dans certaines régions, e~mme
nous l'avons vu précédemment o

l
- 149 -
DI - RESPONSiA.B1LTE DU PAYSAN DANS LE DEF1C1lI
Grâce à la Gonscience aigu~ que manifeste le paysan d'une constante menace
que la famine fait Jaser ~' lui, la pr~oxité absolue , au sa~n du terra~
est encore souvent donnée au mi~ et le principal souci d'un chef ~e famille
demeune d'assurer, avan1ï tcmte autre, la subsistance des siens. Ce processus
r
de limitation spontanée de la progession du coton tend à mainten~ la produa-
tion céréalière à la Illimite de oe qui est nécessaire à la survie. La situatiCDll1I
n'en est pas mODnS préoccupante, car, si elle permet, lorsque la plu~iométrte
est satisfaisante, d'obtenir simul1ïanémant une bonne récolte de coton et les
conditions d'un équilibre alimentaire convenable, elle laisse les agriaulteu~
totalement vulnérables devant les conséquences d'une mauvaise année. La faiblesse
devenua'habituelle, des excétents produits plusieurs effets J
D'une part, il est extrêmement difficile, aussi bien pour les paysans
que pour les organismes officiels et même les commerçants spéculateurs, de réa-
liser des reserves portant sur plus d'une année. La marge de sécUJ!ité est, de
ce fait, très restreinte, et toute baisse de la productiicm se traduit immédiate-
ment, pour les cultivateurs, pan des problèmes de subsistance.
D'autre fart la quantité de grain commercialisée ne représentant qu'une
très petite parie de la production totale, toute 'aonaommation, ou du stœkage
a des repercussions considérables, en valeur relative sur le v~lume des oéréa-
les o~fertes sur le marché.
Coton et mil ne subissent pas nécessairement de la même manière les e:f
fets des conditions pluviopétriaues ; pour une hauteur de précipitations don-
nées, telle répartition des pluies pourra être favorable à l'un et nefaste à
l'autre. 0n pourrait penser ce décalage peut jouer dans le sens d "une attenua-
tion des effets de fluctuations climatiques, i~ n'en est rien: car l'hypo-
thèse d'une bonne récolte de céréales et celle médiocre des arachide, des pe~
turbations s'observent néanmoiins dans le secteux vivrier. En effet, soumis à
une intense demande monétaire - principalement du fait de l'imp8t - les paysans
~éréales
se verront obligés de vendre une partie de leur récolte (;""':<.:J p0ur pouvoir
se procurer le numéraire dont ils avaient impérieusement beso:iin.. lans le cas
inverse, une bonne récolte de coton et mauvaise récolte de mil, la rareté des

- 150 -
p~oduits alimèntaires de remplacement et la primauté pnesque exclusive du mii
dans la nourriture font que c'est suDtout vers l'achat de grain que se porte
le surplus de liquidités fourni par la vente du coton' , la camséquena~ en asit
une forte hausse des prix et donc, dans la pnatique, une annulation du bénéfi-
ce obtenil·' sur le plan de la culture commerciale.
Du fait,de.l1erlr@me prudence des cultivateurs et des possiltd.lités de tnans-
ferts entre régions diversement fa~risées, un certain équilibre await pu être
conservé jusqu'à maintenant. La famine actuelle, qui cono1ut une serie de di-
settes entre coupées par des plus importantes, qui. se sont succé4ées dapuis
près de dix ans, sonne comme un avertissement 1 elle révèle une incapacité de
l'édifice économique à ..tempéren les conséquences des fluctuations climatiques.
Plus profondement, elle exprime la contradiction entre une croissance démo~
phique très rapide {2% par an)qui impose une progression soutenue de la pro-
ducti'on vivrière et 11 inertie d'un système agraire en transi tiGlll qui semble
s'e"ouffler 1 les sols s'appauvrissent ,. les surfaces exploiitables encore dis-
ponibles se rarefient dans certaines régions du pla,#eau Mossi. Par de_ de la
concurrence entre cultures commerciales et cultures vivrières, le prob1ème fon~
damentale est celui du passage dlune agriculture extensive "consommatnice" d'es-
pace, devenue déprédatrice du fait de la rupture des équilibres sur les quels
elle reposait, à une agriculture plus intensive, plus produc~ve ma~s saucieufe
de restituer un milieu ce qu'elle en retireoOr, jusqulà aujourd'hui~ il est
clair que ce passage nIa pas pu se faire; c'est en ce sens que noua pouvons
parler dlun blocage. Quelle que soit la part, au demeurant incontestable, des
accidents climatiques dans le déclenchement de la crise actuelle, clast sur
cet aspect plus profond et plus durable de la réalité qu'il convient d'appro-
cher awec l~cidité, car clest à ce niveau que des solutions peuvent être trou-
vés pour l'avenir proche.
Il nous semble que l'on doiit considérés ces"series" non pas comme des
accidents mais comme des forces caractéristiques de la succession dans le temps
des événements climatiques. s.' il en est aussi, l'un des critères fondamentaux
du bon équilibre dlun système agraire et économique est donc sa capacité de

- 151 -
de faire face à ces périodes de "vaches maigres" sans conséquena:es grav-es pOUIt
la société qui l'applique. Dans cette période de crise c;limatique, cromme celle
que nous observons aujourd~hui, c'est donc bien plus sûr le dégrè d'adaptaticm.
du système de production et de repartition des biens essentiels qu"il faut osel!"
s'interroger sur un hypothétique
renversemen~ soudain des tendances climatiques,
renversement que l'observation du passé rend très improbable.
rrertes, nous avons analys€
quelques unes des contradictions qui se sœnt
accumulées dans le domaine agricmle du fait de l'arrimage forcé ~u ~stème OQm-
munautaire avec le système capitaliste. BIais, ce faisant ,. nous n'avons envi-
sagé qu'un aspect de l'évolution du système global au sein du quel lespr0)bJLè~
mes concernant l' organisation soci;~oonomique revêtent une iirnpontance lIllon D:é-
gligeablEf.
PMtAGRAPHE 2 1 LE SYSTlIMB .. aacIO-E<roNONIQUE COMMUNAUTAIRE m
TRANaITION, DIFFICILE
L'évolution des structures de la production agricole au sein de la sodété
communautaire vdllageonse que nous tentions d'approcher se caraG~érise avant
tout par le jeu de trois processus étroitement solidaires.
Le premier d'entre eux est le morcellemen~ oroissant des groupes familiaux
et des unités d'exploitation agricole qu'ils constituent. maguère, c~me nous
l'avons vu dans la première partie sur quelques aspects socio-économiques d~
la communauté, la cellule familiale était composée d'un vaste groupe de parenté
pfatrilinéaire, rasse~lant sous l'autorité d'un chef de famille pluseieurs
hommes mariés.-ses fils ou ses frères cadets - ainsi que les membres de, leur
foyer (épouses, enfants). De nos jours cette callule tend de plus en plus à, :
se réduire à un simple foyer monogame ou ~ygàme (ùn homme, son ou ses épouses
et leurs enfants non mariés). Dans bien des cas, ce phénomène d'éclatement est
en voi.e d' achèvelllent dans bien de régions. Le Plus/souvent, Gepencfant les jaunes
gens demeurent avec leur père et continuent de travailler avec lui presque dans
les premières années de leur mariage. En suite rapidement, la ruptuxe inteItvient
souvent à l'amiable et sous la pression des circonstances, dans certains cas.
même, elle se produit à l'initiative du chef de famille. Fréquemment, bien.que
séparés sur le plan des activités économiques et domestiques le~membres du seg-
ment de lignage continu' ent de cohabiter
au sein du même enclo6~

- r52 -
Le deuxième processus (est caractérisé par le développement du capitalisme
dans la campagne et son incidence sur les transactions monétaires. Avant toute
chose, interrogeons-nous sur la question de la tenure dans le p~s, pGUD ceÙ8
n~s nous contenterons de l'enqête de ~.L.BOUTELLIER ~ui fait ressortir qua-
tre types de tenure. Ces quatre types varient en fonotion des dif~erentes na-
tionalités du pays.
STRUcm'URES, FONCIERl!E El( H.AIJ!l1E-VOLTA
T,ype de tenure
: type l
1 Type 2-
1
type 3 1 type 4 1 t0JtaJL
1
Densité dela
1
hérité Ibrousse
IDroit dei
prêt
1
lPQ!lulatiicm'
1
,1
------------:
1----
Principaux grQUPes
1
1
1
1
1
1
athniques: 1
1
1
1
1
1
1
: B'-G.vo - Marka - S'arno
1
48
:
25
1
1
1
20
1
roo
1
15;2
,----- ------:-,----1-"-----:----1----1--------
- S:enouto - Goiin
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Peulh -, H'-ella
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- Lobi - D.a.gari
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- Gaurounsi
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- Ma:ssi
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- M'ssa
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100
28,2
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- Œ<mrmantché
1
31'
1
1
9
1
roo
1
1
1
1
1
Siources l
"Les *tnuctures foncières en H~te-V:olta" de J.L.BOUTILLER I914
Ai'la lumière de ce tableau, on remarque une f0Xte corrélation entre lm:ca.tiion
de terre (type 4) et densité de population. Ainsi c "est dans le plateau l'>'!QSsi
où cette forme de tenure est la élevées 33 %en relation avec une densité de

- 153 -
population de 33,5. A"ant la monétisation de l'économie villageoise, la rentœ _
travail et la rente naturelle ont existé. En effet, les hommes li'bres bien que
pas'sédant leurs propres lopins de terres étaient tenu de cultiiver les terres
du chef. Par ailleurs, ils devaient amèner une partie de leur récolte au chef. Au 1
lendemain de l"indépendance formelle de 1960, certains allefs tradi tionneJls mil,
c<imser~ leurs positions aa:quises c'est à dire des grands domaines terriens.
~veœ le développement des capitaux dans le p~s, ces ahefs traditionnels qui
"'"
Gmt exproprié les p~sans ou qui ont hérité (type 1) de terres
exprapr~ees
ant saDt fait des vergerspu on~spéculé sur les terrains dans les villes e~ leuns
périphérie~La plus fréquente des formes de cession à la périphérie des viilles
et dans certains vilages est le prêt sur gage, ft1-lc:QD.siste à, ceèder l'usagé
d'un champ en contre partie d'une centaine somme d'argent lor~que selle-e~ est
remboursée, le champ do~t 8tre rendu. a'une manière générale, la vente propre-
ment dite est plp rare, mais il ne faut pas se dissimuler que dans le cas d'une
m~e en gag~de longue durée ou s'achemine en fait pragressivement ~rs une
cession définitive. Dans l '"iamédiat, la vente de terre est limitée par l' ins1ldr:'"
fisante rentabilité des activités agricoles~ Néanmoins, à la périphé~ie de la
ville les chefs de villages vendent chaque parcelle de terre rurale D.ml lotie
à 15 000 - 20 000 F, quelquefois 50 000 F(I)o Dans le système traditionnel,
il n'y avait pas, à proprement parler (sauf dans les cas particulie~s), d'ap-
propriation de la terre, mais un droit d'usage obtenu après alliance avec les
divinités (type3). Ce droit ne persistait que tant que la marque du tra~il
restait perceptible, et toute parcelle demeurée inculte suffisamment longtemps
p6ut être reconquise par la brsusse pouvait à nouveau être défrichée et cult~~
vée par quiconque le désirait.
Par conséquent, ce qui donnait des dro.ts sur la récolte qu'un, champ,
pouvait porter, ce n'était pas le fait de la p~sséder mais, plutôt, celui; de
l'avoir fécondé, de l'avoDr fait produite en lui apportait son travail. Le c~­
cept de rente foncière existait mais seulement ~aus une forme primitive. Ge Ci
qui est important et significatif dans l'évolution actuelle, CL' eri qu'elle s' ins-
crit dans un vaste mouvement qui tend, au contraire à intégrer objets, servi~s
personnes
dans un système marchand d'évaluation et de circulatian.
(1) l1evue économique et sociale volta"lque f C.E.D.R.E.S (Ce~tre d'Etudes de
dicumaentatiom de Recherches
Economiques et so-ciales de l'uniwersité de
Ouagadougou - P-65 (1979).

- 154 -
Le troisième grand type de phénomène, que l'on constate, c'est une rapiide
généralisation du salariat agricoleo Dans certaines régions les formes tradi-
tionnelles d'entraide et d'échange de travail ont disparu ou en voie de dispa-
rition, remplaoées par l'emploi de main-d'oeuvre salariée. C'est ainsn l'exem-
ple
des paysans de Houndé (Bobo) qui cultivent le coton, i~ s'agit de terres
de type l, 2 ou 3 et souvent il:s cultiv.ent anc- quelques ouvriers agricoles.
tuan. au système de prêt, le plus souvent c'est sans contre partie, l'essentiel
est que les arbres
fruitiers appartiennent toujours au propriétaire dusol et
qu'en cas de besoin ce dernier puisse résilier le contrat verbalJ~ p
_
eu a peu
des rapports marchands, fondés sur la médiation de la monnaie et dépouillié~
tl
de leur contenu personnel, se substuent aux relations de solidarités qui cons-
tituai.ent naguère le tissu vivant des communautés villageoiises et, familiale~
Somme toute pouvons-nous parler d'accumulation primitive de œapital à~antir
de l' agriaulture ?
Les éléments de reponse à cette interrogation ne peuvent proveniir d'un~
examen attentif et concret des differenciations qui s'opèrent Itntement cillDli
le monde rural. Du monde p~san nous pouvons retenir des catégories sociales
qui suivent 1
- la première catégorie relève des p~sans attachés aux cultures tradit~on­
nelles. Comme force productive, ils disposent de la force de travail des m~
bres de leur famille désormais réduite et des instruments de production :rruciiii.
mentaires (houe, coupe-coupe, hache). k la merci des caprices de la nature
puisque les cultures ne sont pas irriguées, les produits de subsfUance arra-
chés à la nature suffisent à peine à courir les besoiins de la famille. AUDGDB
accumulation n'est possible surtout qu'il sont victimes des commerçants spécu-
lateurs qui achètent leurs jeunes pousse~
La deuxième catégorie de p~sans se définit par rapport au manché in-
ternational et auxmaisens de commerce.
En occurrence ce sont les p~sans
à culture du coton et le mara1cher qui cultive lesharicots verts pour le mar-
ché français. C'est enfin, les p~sans encadrés de l'aménagement des Vallées
des Voltas (A.V.V.). L'objectif est de former une couche aisée de paysans.
Mais nous dit Thiombiano : "victimes de l'exploi;tation néo,-coloniale, la plu-
part d'entre eux arrivent à peine à rembourser aux O.R.D les instruments payés.
Ile Pitù du ~logramme de coton n'a: pratiquement pas varié depuis 1954"(1).
) Revue Economique et Sociale , (dejà cité)." 15~.

- 155 -
- La dernière catégorie sociale dont le développement est encore récent,
c'est celle des ouvriens ~icoles qui ont fait leur apparition danscertaines
ré~ion~. On rencontrait déjà des ouvrieum agricoles saisonniers emp~oyés en
grande partie par des commerçants
ou des fonctionnaires e1lJlI'J!ompus lIIlOtamment'
la bourgeoiisie bureaucratique. Avec l'installation de la société sucrière de
ffiaute-~olta S.O.a.U.H.V' et l'expropriation des p~sans de leurs bonnes terres,
i l est né cette catégorie de "liournaliers non possédants et travaillent cQntre
salaire".
Ue la differenciation sociale de la paysannerie analysée ~essus, in-
dique qu'il n'existe pas une base d'accumulation capitaliste susceptible de
déclencher un développement de fermes modernes. lillautant plus que la transfor-
mation mécanique du pays de même que la croissance extravertie engendrée e~tra1­
nent des sources d'accumulation differentes de celles qui ont prGV~qué au XIXè
siècle des bases d'accumulation capitaliste des pays occidentaUX4
En effet, l'histoire nous enseigne que la reforme agraire, l'expropria-
tion violente des pays sans de leurs terres ont conduit une concentration de·'
la propriété agraire entre les mains de quelques propr4étaires fermiers qui
ne travaillent pas ces terres mais les louent à des serfs affranchis. Ces fer-
miers capitalistes qui ont à leur disposition des travailleurs salariés vont
tirer la plus-value sur eux et se transformer progressivement en capitalistes.
Or dans le cas de la Haute-Volta, cela semble impossible du moins de la manière
occidentale. Cela à cause du p~ocessus inachevé du mode de productian féodal.
à ce stade, le processus marchand n'était pas encore très développé et c'était
le troc qui dominait. La rente était en travail ou en nature. Par quelle voie
l'accumulation capitaliste va-t-il s'opérer dans la oampagne v-olta!que ?
Les catégories sociales constittItées 1 de hauts fonctionnaires de l'an-
cienne administration coloniale, d'intellectuels issus des grandes écoles et
1
universit~s métropolitaines, de gros commer9ants dont l'existence dépend ~
soutien financier étranger et des chefs tTaditionne~s qUh commencen~ i, aceu-
muler du capital et essayen~ de le réinvestir; Elles le font dtabond en zone
urbaine cru un marché potentiel de consommation se développ-e. Dans une secon-
de étape, des investissements pour le contr81e et la mainmi!se sUJt ee:trhaines
productions font j&ur dans le secteur agricole.

- I56 -
Ce nouv,eau phénomène a pour conséquence l'apparition d"un faire valoi~·
de type indirect et en part~culier pour les bas-fonds aménagés au p-roi'itl tùJe
hauts fonctionnaires ou de gros commerçants résidan1;is en villes. Pour meux
situer et découvrir cette situation, fil importe de comprendre la signifii.cati:iiollll
cachée par le rapport' f'ami:lial entre le "grand f'rèDe u, qu:fl a réussi. en viille,.
et qui emp,lote ses "'petits fDères" restés au village sun. le bas-f'emœs aménagé
pœur son compte personnel.
La notion de prolétariat agricole es~ surtout ~lus évidente ~ans Le made
d~exploitation industriel des cultures de plantatiœn où des gnandes sun1aces
sont direct·ement cont:n&lées e1l; traitées PaJ!' des complexes industri'els aux DIIB.:lins
de sociétés à capital multiple. Pour ~hiQmbia.na' ces-eatégories sociales qu~
accumulent (••• ) ne reçoivent que des mi;e~es et la technologie comme lies fii-
nancements, de même que les secteurs d'iinvestissemen"b scnt imposés cie l'extéri&UJr'.
Le transfert de pr~fit ne leur permet pas d"ass"ir une base économique tlata-
lement indépendante de l'extérieur" (1)'. Et: il poursuiv.œ. plus loin pouJZ con-
clure qu'·"en Iraute-Volta, l'accumulation primitive ne vient pas de l"a.gricul-
ture, mais du petit commerce et essentiellement du financement exténieur-. {I~
Avec cette réalité nouvelle, dont profitent les oatégories sociaJl.es aisées
et: 1 "étIranger, foroe est de cGmstat'er que c-et-te lente et double: de-structunatii-.
foncière et sociale du milieu agricole se fait au détriment des masses nurales.
(rem es, personne dans ce pa" ne conteste l'enjeu de l' agrioulture dans :I!a vii.a
quotidienne de l'iimmense majorité de la population, Bd son ~le dans le prQces-
sus du dévelop~ement, mais un dilemme demeure au niveau de,scu aspect po1itique
et du choix des cultures.
(r) Revue économique et so icale volt a!que 1 (dé jà cité). f. A.s".s

- I57 -
S~ion 2 : ~0ncep~±Qn théGrique de 1a R0~i~~que agricole afn±ca~n~
: Le chois opéré par les autori tés politiques'
,,' concernan"b; le rôle
de l'agticulture dans le processus de dévéloppement est fonotion de deux élé-
ments principaux s la disponibilité en ressources productives d'Une part, la
possibili té ou l' opportunité d' éffectuer sur la productii.on agrianle un pré Ile-.
vement appréciable dont le montant servira au "planifi;cateu.n" à oriente]t' le
développement.Dès lors trois stratégies existent s
- celle quiconsiste à faire du seoteur agricole un seat'.eur de lancement
de la croiss&n«e ;
celle qui considère l'agrioulture ,cromme un seoteur Ile financement de
la croissance ;
celle qui attend de l' agriculture un ajustement à la croisssanc~
Paragraphe l
La stratégie de la polititue agricol~
La première stratégie est celle adoptée en Afrique subsaharienne dans deux
hypothèses assez differentes : celle dans laquelle existe un secteur agricole
vigoureux, et celle où le choix de cette stratégie est type residuel, aucun
autre facteur n'existait pratiquement dans l'éoonomie.
- La première hypothèse correspond à la situation de la Côte-d 'I~ire.
],'expansion ascendante de la production agricole dépuis vingt cinq ans a permd.s
la création d'autres secteurs s industrie de transformation des produits agrii-
coles, industries de biens de consommation achètés par les agriculëeurs, e~menca,
transport, logement, art isanat. 1.-' agriculture, à travers les droi,ts de porte
prélevés sur les produits exportés ou ceux que ces exportations permettent
d'importer, à participé un financement de la croissance.
Le succès relatif (si on associe le rôle joué par le capital étranger)
de la C8te-d' Ivoiir'e met en lumière les conditions, faute desquelles un dévelop-
pement axé sur l'agriculture industrielle ne donne que des résultats médiocres s
• L'ampleur de la croissance est fonction de la poussée exercée par
l'extension des productions agricoles,
• la poussée de la production exige des débouchés de la dimension:
correspondante:, ce qui implique que l'essentiel du supplement de produits agTi-
cales soit dirigés sur le marché international.

- 158 -
• La poussée sera d'autant plus facile à réaliser que le p~s dispGSera
au moment où s'opère l'accession au développement capitaliste, de quantités
appréciables de facteurs de production inutisables à bon compte(terres vierges
et fertiles, pluviométrie suffisante, chômages dégu~sé.)
na"':;.écqaée:_~üèrMJ; :.'"l consiste surtout à laisser aux agriculteurs l' es-
sentiel des gains des à l'accroissement de la production agricole. Dans certains
cas, les responsables du développement ont estimé que les pouvoirs publics de-
vaient avoir une maitrise plus complète du développemant•. Pour cela ~ls doitvent
avoir la disposition d'une fraction appréciables des sommes liées à une augmen-
tation de la production agricole.On peut signaler en Afrique Noire deux exemples
d'une polit~ue qui rélève de cette stratégie.
- Au Ghana, la créàtion du COIOA MARlETING BOARD avait eU initialement
pour objet de provoquer un assainissement des circuits commerciaux internes.
~t assainissement ne permettant pas de réaliser une stabilisation des revenus
le (IocGa marketing '!Ward se voit confier la mission de stabiliser les revenus
des producteurs de cacaoo Mais, en moyenne période, l'intégralité des recettes
de cacao devrait être distribuée. Par la suite la stabilisation des revenus
se fit, non à un niveau moyen, mais à un niveau plancher, ce qui permit aux
finances publiques, via le Cocoa marketing Board, de s'attribuer des sommes
considérables. Celles-ci purent être affectées
au financement des investisse-
ment s product ifs.
- Une autre tentative de ce genre eut lieu au Mali dans les années 60.
L'agriculture devait fournir l'essentiel des m~ens de financement de la crois-
sance. L'Etat
promoteur du progrès agricole estimait devoir en être aussi le
bénéficiaire. Les prix agrico~es fixes à un niveau bas, devaient être le ~n
d'assurer un prélevement ~ l'agriculture, prélèvement dont le montant devant
servir à financer l'implantation d'un appareil productif dans les secteurs n~n
agricoles. Mais les résu1~ats sur le terrain ont été décevants.
Le succès de cette seconde hypot~Be comme celui de la première, est
soumis à un certain nombre de conditions r
- le poids du prélevement ne doit pas disuader l'agriculture de pour-
suivre son effort p.aductif, la concia1iation n'est pas toujours aisée à réa-
liser.

_159. _
.' Les structures de la production ou celles de la commercialisat'ion doivent
se pmêter aux tchniques du prélevemen~.
La séconde stratégie s'applique, toutes les fois que les pouvoirs publics
disposeront, dans l'économie, d'autres forces motrices, en provenance du sec-
teur minier par exemple, que l'agriaulture, ils assigneront à cette dernière
le rôle d'un secteur d'ajustement de la croissance.
Il s'agit pour l'agriculture de. faire face à
;l'augmentation de la demande
qui lui est adressée, et cela afin de ne pas freiner ou bloquer la poursu±te
du processus de développement... Cette delDB.nde concerne les produits aJ1imentai:rzes'
aornme les matières premières industrielles... L'accroissement de la demande adressée
à l'agriculture peut être considérable et elle s'accompagne d'une modification
de sa composition.
Eh définittve, dans la phase d'accession difficile au développement qui
est celle danst!aquelle se trouve la plupart: des pays ~ l'Mfrique au sud du
sahara, la marge de choix dont dispoent les responsables politiques quant ~
la définition libre d'une stratégie agricole est assez limitée. Mais, quelle
que soit la stratégie retenue ou imposée, celle-ci' exige un accroissement assez
sensible de la production agricole. Cœmment les pouvoirs publics qui ne sont
pas maîtres de leur politiques, peuvent-ils espérer promouvoir cette expansion
de la production agricole l'
Paragraphe 2 1 Les stratégies de développemen~ de la product ion, agricolie.
Les agricultures encore proches des sociétés œe àubsistance ne pnésen-
tent pas des caractères qui les prédisposent à un accroisssement continu du
volume de la production. La logique sociale subit une mutation certaine -
d'une société de subsistance à une écogmie de transition vu ]a cro~s-
sance..
Il est donc nécessaire de provoquer une transformation de l'appareil
productif agricole pour faire face aux exigences du développe~nt. Les responsa-
bles de la politique semblent s'orienter vers l'adoption deux stratégieS;

-I60' -
La première consiste à encourager la transformation de l'agriculture tradi-
tionne, la séconde à créer de toutes pièces des uRités de production u_tilisan~
une t echnelogie..
~rès une période marquée par des oscillations entre l'adoption de l'une
et l'autre des deux stratégies, il semble que la tendance actuelle so~t une
conjugaison de l'une et l'autre de ces deux stratégies.
La décennie 1950/60 a été marquée par des tentatives, le plus souvent in-
fructueuses, d "installation de grandes uni tés de production (Office du Niger,.
1
Peanut acheme, casier rizicole de Jtiohard '1'011) .. Ires deboiŒ'es rencontré. par
oes relations entra1nèrent le repli sur une politique destinée~ à. assurer la
mutation de l'agriculture traditionnelle au cours des années 60. Le souhait
de faire du développement non pa~n élément parachuté mais un processus orga-
nique découlant du comportement des populations, et notamment de la populatiem
rurale, accentue cette orientatio~
Au cours de la décennie 1970, l'implantation de grandes unités de prOduc-
tion retrouve une
certaine faveur. Elle s'explique parfois par des considéra-
tions d'ordre technique (palmier à huile en Œ6te-d'Ivoire), dans dtautres cas
par le soucis de c0mbler dans les délais relativement rapides, un déficit ali-
mentaire important. On s'interroge sur le }'Omt de savoir si l'ap-provisionne-
ment du Sahel en céréales rte devrait pas être assuré par un petit nombre de
grands ensembles irrigués c~nt une fraction tnès modeste de la zœne sahé-
lienne..
L'opposition entre création d'unités de production de type m0derne et me-
liernllsation des uniités traditionnelles s'estompe et la :Plupart des Etats prati-
quent simultanement l'un et l'autre ilfpe de politique.. Cette dualité de poli~±­
ques agrieol~s s'alimente à des considérations d~fferentes si non contradiee
toires..
na création de grandes unités agricoles permet une planification plus a
aisée de l'agriculture que la trans formation des unités traditionnelle~ On
a sans dodte trop exagéré le caractère délabré des agricultures traditionnelles
et leur détérioratio~ On en avait conclu, sans doute hâtivement, que cette

- 161 -
agricultu2e était relativement malléable et plastique. La réalité est tout autre 1
les sociétés rura.les possédent pour la plupart leur logique et les transforma-
tions qu'elles subissent ne se traduisent pas nécessairement par un dément~e­
ment complet, mais par une adaptation aux modèles variables selon le type de
société. Les apports extérieurs peuvent être refusés ou reçus en subissant des
modifications qui les dénaturent~ Telle société aceepte bien de cultiver l'a-
rachide, mais le fait sur le mode
extensif, tandis que l'on attendait d'elle
qu'elle la pratique de manière intensive.
La confuaian a été accrue par le sens trop général et trop vague à l'ex-
pression d'économie paysanne. Il existe certaines analogies entre l'agriaulture
d'économie de subsistance et celle de l'économi4paysanne mGderne, ma~a elles
sont assez superficielles. En réalité dans la plupart des p~s africains, l'agri~
culture paysanne est à créer av.ec le déweloppement du capitalisme dans les œa__
pagnes.
Tout cela explique qu'en dép:bt des efforts déployés en matière de recher-
che, de vulgarisation, de crédit ou de commercialisation, et des progrès réa-
lisés dans la mise en oeuvre de ces diverses procédures, les progrès aient été
décevants•. (rertes, les processus de transformation sont à l'oeuvre, mais les
progrès de la productionont été assez lents et des écarts souvent considérables
sont apparus entre la demande de certains produits de base de l'alimentation
et l'apurovisionnement local et national.
C'est pourquoi, sans renoncer à une p-olitique de modernisation des unités
de production traditionnelle, la plupart des Etats
ont estiFII.é.1qllecertaines
branches de production, une planification de la production et ~justement entre
production et consommation seraient plus facilement réalisables à partir de
grandes unités..
Le recou~s à des aides extérieures ou à des capitaux étrangers à facilité
cette mise en place. La formule juridique est le plus souvent, soit celle de
l'entreprise publique, soit celle de la société d~économie mixte (Compagnie
Sucrière du Sénégal ou Société sucrière de la Haute-Volta). Les POUVODrS publics
possèdent de cette façon une emprise directe sur ces grandes unités de produ~
tion dont un petit nombre suffit à réaliser Hes objecti:fS fixés :gBr le plan

- 162 -
ou le programme de travail des gouvernants" La planification deI' agriculture
peut devenir plus effective que lorsque l'acc:.roissemenit attendu d'une pro-duo-
tion doit résulter de la combinaison du comp&rtement de plusieurs milliers d'a-
gricult~s pratiquant des formes variées de polyaBlture
Quelle qu'ait pu
h
être au départ,d'ailleurs inévitable de tatonnements quant aux résultats éC0-
nomiques de ce~andes unités, leur performance prouve que, contrairement à
ce que la première vague des grandes ensembles avait pu sembler établir, elles
pe sont pas nécessairement vouées au déficito
Ces grandes unités de production, bien qu'à. caractère insulaire, prennemt
le plus souvent, à. l'heure actuelle, l'allure d'un complexe agro-industriel.
C'est autour d'une unité de transformation du produit agricole, l'usine à sucne
ou l'unité de première transformation des régimes de palmiste, que s'établit
le bloc de plantation ou le domaine. Gette intégration dans le maDché ~nte~a­
tional facilite la solution de certains problèmes techniques (~écessité de
_,
l'approvisionnement et rapidité de la transformation) et économiques.
Si\\ies grandes unités, de production convient une fraction limitée du ter-
ritoire agricole, l'importance de leur apport pour aertains produits établit
que les structures agricoles africaines s'orientent vers un dualism~
Paragraphe 3 1 Le choix d'une politique d'encadrement.
Quelle que soit l'importance prise dans certains secteurs par les gran~
des unités et les vastes complexes, l'Etat
ne peut ignorer la multitude d'a-
gricult~ur vivant au sein d'unités de petites dimensions.
Pour parvenir à une agriculture authentiquement moderne, les POUVoDr.s
publics doivent avoir recours à un encadrement exerçant une influence sur les
cultivateurs et mettant à leur dispositian de nouvelles
teahniques, adaptées,
de nouveaux procédés culturaux, de nouvelles ressources productives. A cette
politique d'encadrement, s'ajoute une politique de promotion de$ agriculteu:JISI
fondées sur l'animation rurale, l'action coopérative, p~ssibilité de aonstitu-
tion d'unions paysannes et la nécessaire ldifftUsion de l'éducationo

- 163 -
Si la nécessité d'un encadrement d~t les pnincipaux éléments constitu-
tifs sont la vulgwisation, le cDédiit et la commerci;aliisatioJm, pas p-J..us que
l!es principes qui: doivent présider à;, sa mi:se en oeuv:t'e 118 sont conbstéE; paJ!'
contIte Olt' assiste à une évolution assez sensi bl1e dans la miise en oeuv:ne cie lia
po~it~que d0encadrement o ~ette év~]tu~0n présente un œouble caractèD~
'!'Gnlt d"abord, une tendance assez accentuée se, tnaduisant: PB.Jt ]je passage
d'un encadrement de type polycentrique à un encaœnement; dont les dLve.ns as-
pects nelèvent d'un seul organisme (l)U s~ articulés auto~ de cet; organisme.
La structure de l'encadrement agricClÙJe cians Les pays de l'Afrique SUbsa-
harienne était calquée sun cellé de la métr~~le. Il s~agtssai~ en, ~'~n­
ce d~un encadrement, poly~entrique. Chaque organisme, que sa fondation ou ses
caractères fassent de lui un ~ganisme public ou prGfessionnel~ p~sédai~
une compétence bien déterminée a certains ass~aien~ ]a diffusio~ ~es inno-
vations, d"autres étaient challgés de la di.stDibution du cDédit tandiiB que la
commercialisation des produits relevait de la compétenoe d"une troisième
inst i tut ion. C:et:t.e foJml1Ù!e a l'avantage de peDmettJre à, chB.q1Jt ~:iicuJJtemr'
d'établir le menu de son choix et de requér:ii.n de chaque ins1rltuticm 1Ul~ v~
de services correspondant à. ses propres besoins. C;"es1t l' agricul..ltie~· qu:b. dé-
"termine le Decours qu ':il a intérêt: &. fa:bre, auprès cie chacune d "entk4,elJJJes.
e:et'te formule, parfàt1t.emen1t ace,eptiabl!e dans une agriculuture évoluée, ét:ait
sans doute prématurée dans des économies QÙ l ' agriculture émerge des socr.i.étés
de subsist:ance. On connairt les difficultés rencontnées en matilnre de onéd:±iit
'c~. ch 1 ~ le elIédit agniclole en maute~olta).
Aussi, à, ce système p~lycentrique, se sont progressivemèn~ suhsti~ées
des formules de tyPes plus unicentrique. Le mouvementf a revêtu des aspeds
assez diveJ!s.
La compagnie Française pour le Développement des Textiles, changée du
développement de la culture du CGton, n'avait pas manqué de r_anquel!' que le
coton continuerait à être cultivé que si la commercialisation du produit étaœ~
assuréeo Elle assurera non seulement les opérations de ,,;ulgarisation, mais
celles de commercialisation. Pan ailleurs, le respect des normes de culture
impose certains frais pour le financement desquels l'existence d'un crédit de
campagne peut se révé 1er opportun. La C'. F1. D. T. avance des fonds qu'elle
récupère automatiquement sur le produit des ventes. Le circuit se trouvant

- r64 -
bmlclé et la C.F~D.T., d'organisme de vulgarisation, devient également: <nrga-
nisme de commercialisat~on et organisme de financement. Ce ~61e que joue la
C-'F.D.T. en lli:l.ute-Volta n'est: pas contradictoiIre au caractèIl'e polyct:entrique
de l' encadrment, dans la mesure Où une oo<Wdination a été établie à li' échelle
de la région, dont le développement agricole est confié ~ un organisme Dég~~
nal de développement' (O.R.D.)~
C'est un système voisin qui fonctionne au Sénégal: autour de l 'O.~C.A..D.
~ r).. Coet office a ]e monop~le de la commercialisation des récoltes ass'lUle
une très forte aJ.'ticulation entre l "équipement des unités de procillucc:t:i-,. lia
distributiŒn du crédit, et la commerci~isa~ion des récoltes.
C:"est dans un but analogue qu'en C&t'e-d' rvO'i(L'e, le dév-elcrppement agrico-
le s'est effectué sur une base sectorielle. Chacune des socié~és de œéwel~p­
pement est' responsalib."de l'extension d'une culture ~riz,. for.@t, pnodueticm
animale, culture maIra1chère etc••• ) et c'est autour de chacune d "elles que,
doivent @tre organisées les iliifiérentes actions.
~a seconde tendance caractéristique 4e l'ordonnancement des ~pérations
d'encadrement dans les économies de l'Afrique ~aharienne consista~ éta-
blir une sorte de liai;son entre encadrement et planification agric.oJ.!e.
C:ela se traduit par le fait que les organismes chaxgés de: l "encadrement
ne sont pas t0'Ujours spécialisés dans cett,e tAche .awt aspect:s multiples, maiis
effectuent aussi des opérations d"aménagement et d'exploitation;.'imrersement,
de.s sociétés publiques engagées dans l' exploi tation de leurs propres domaines
seront changées d'effectuer des opérations d'enc~ement aupnès de petits
agriculuteurs s'adonnant à la m@me spéculation qu"elles-m8mes.
Telles sociétés d"Etat, comme la S~.E.D. (2) au Sénégal ~ enmaut~­
VQlta, ont été chargées tout à la fois de travaux d~aménagement fonciers
(en l'occurrence création de rizières), de travaux de culture (iceux quL ne
pouwa~, pas @tre faits en dehors de la culture motorisée en rais0n ~ la na-
ture du sol notamment) et de l'encadrement des cultiva1i:eurs effectuant les
travaux complémentaires.
Dans ces conditions d'association au sein <Pune ~me unité de producti<m
d'une société d'Etat d'une part et d'un certain nombre d"agriculteurs d"autNt
part, la tentation est grande a'allier la planification à l'encadrement.
(r) Office Nationale de Commercialisation et de Distribution.
(2) Société Africaine d'Etude et de Développement. (Section locale de la
C.~.R. ou Compagnie Internationale du Développement Rural).

- 165 -
L"affectation des parcelles aménagées ne se fera pas le souvent sans contre
partie 1 c'est la société qui fixera le plan de cultuDe et détermnera de
façons culturales que le p~san devra réaliser. Il existera un cahier des char-
ges, un véritable contrat entre les agriculteurs et la société. Parce qu'elle
exécute certains travaux, parce qu'elle assure l'encadrement, la société v~ille
à ce que les termes du contrat so~ent respeœté~ Les agriculteurs nIant plus
à décider entre eux que de la repartitircm des travaux et celle de revenus.
Dans les formules de ce gen~, l'interv~ntion de l'~tat se fait plus di-
crets et plus pressante.. L "autonomie du producteur individuel est réduite pa.:!!'
rapport à ce qu'elle est lorsqu'il est en présence d'uni encadrement pQ~ycentr~~
que Où i l lui appartient de définir les prestations qu'il attend de lurlL.
Paragraphe 4 1 Les incertitudes de la politique des pri~
g~il est un domaine où les pouvoirs publics dans les pays de l'Afrique
subsaharienne ne se sont pas privés d'intervenir, c'est bien celui des pri~
agricoles. La plupart des prix des produits agricoles aussi bien aeux des pr~
,
duits à~stinés à être export's, que ceux des produits faisant l'objet d'une
consommation nationale font l'objet d'une intervention des p0UVo~S publics~
Meis il est difficile de déceler une tendance de politique économique dans ce
type d'intervention, tant les ~bjeatifs poursuivis peuvent être complexes et
parfois même contradistoire. Par ailleurs, sous certains de ces aspects, la
politique des prix parait être demeurée en marge de l'ensemble de la politique
de développement agricole.
ha politique des prix agricoles para1t~avoir reposé dans la plupart des
pays sur deux principes 1 regulariseD' les prix perçus par les producteurs 10~s
de la vente des produits destinés à l'exportation, maintenir à un niveau peu
élevé le prix de quelques produits de grande consommatio~
r
be pre~bé~ pincipe, la régularisat~cm du prix des pDoduits agnicQilles
œ'exportation, repose s~ l'idée que les fluctuations de prix bénéfiaiant~
da~tage au commerçant qu'a l'agriculteur, et que des ~scillatiGns c~santes

- 166 -
et de grande ampleur sont à même de déconcerter ces derniers. Il fallait donc
prelever les années de recettes aQondantes pour distribuer lors des ~ampagnes
moins bénéfiques. Pour effectuer cet ensemble d'opérat'ions, il fallait créer
des caisses de"tltabilisation" et de "péréquation" des prix des produits agr:i.c~l1eff;
Effectuant des compen'~sations entre produits et des arbitrages dans le temps,
ces organismes devaient parvenir à une stabilisation relative des prix touchés
par les agriculteurs et des revenus perçus par euxo
quant au sécond principe, celui du mainti'en à un niveau peu él1evé du ;J
prix d'un petit nombre de produits lÛimentaires de grande consommmation, son
apP'licatiOJl: était rendue po"ssi ble par l'état des marchés internaticmaux, les
recours à des qualités inférieures de ces biens, et la faiblesse de la demanne
s~able des biens en question.
Au départ, la politique qui s'exprime dans les deux principes précités
"
est parfaitement cohérente, cette cohérente allait &tre mise en cause, soii:;
par des altérations dans leur appliicatian,soit par les changements intervenus
dans certaines données.
En dépit du niveau élevé des prix des biens de premiers nécessité acquis
par voie de 'importation a accéléré·
la désaffection de la consommation de pre>-
duits d "origine locale. L,' accroissement de la consommation, alimenté par à:U-
leurs par les phénomènes démographiques et d'urbanisation, s'est accru dans
i
des propurtiom sensible4 (te qui était au début tole.rable, s'est mué en que]@-
PLUS
ques années, indépendan«e aliment-air~ I.ea~. pGfltes les/importants à l'importa-
tion des p~s africains ont souvent été ceux concerneœ~ des produits agric~~es
(riz, sucre••• ). Cette
part ipp0rtante des produits alimentaires dans les ~
portations totales se confirment par le tableau qui ~a suivre, portant sur einq
p~s africains~
PART DE L'ALIMENTATION DANSLES IMPORTATIONS. TOTALES· (%).
Pays
1
60
1
63
1
66
1
69
1
70
1
71
1
72
.
1
:
1
1
1
1
1
Sénégal.
1 30,41
1
33,5
1 37,0
1
33,1
l
27,9 1 31,0 1
27,4
Mali.
l.
l
1 25,0
~ 30,8
1 37:',2
1 34,1 1
37-,3
Haute-Violta
1
s 23,7
1 27,8
1
19,3
l
19 ,4 1
1
Niiger
1
1 15,5
1
10,8
1
10,5
1
9,9 1
9,2 1
II,8
.
.
Tchad:
20·,0
1
1
1
1
~.
Source ,. C.omi té d' irif'n:rmatio!: du

... I67r -
EVOLUTION DU POUVOIR D'ACHAT DES PAYSAN S PRODUCTillRS DES CULTURES,
DE RENTES· (ARACHIDE? COTON)
1
sTRuœruRE DES PRIX
11960/611 64/65 1 69fro
114/15
115/76(&116/11=& 1 18/19 0:&
1
1
1
1
1
J
1
1
1
1
1
1
1
1
-Mali (1)
1
1
1
1
1
1
... Araahide (coques)
1
I4
13
1
30
1
40
1
1
1
- C.tGn1
1
34
1
34
1
45
1
1
1
1
- 1
I -
I
1
1
1
1
... Sênégal
1
1
1
1
- Arac-hidea ( coques)
1
22
22
~': 1
13
1
41
1
41
1
41
1
41
- cotou,
u
33
1
29
1
41
1
49
1
4~
1
49
- :
1
1
-1
1
1
1
-·NIGER
1
1
1
1
1
1
-Arachide (coqye)
16
1
14
13
1
22
1
55
1
55
15
- C;oton
1
31
1
32
1
29
1
41
1
41!
1
55
1
62
1
1
- 1
1
1
1
r
- Tchad
1
1
1
1
1
1
1
~:oton:
1
26
1
26
1
26
1
43
1
1
1
- :
-~---I
1
1
1
1
... H-aute-Ilolta
1
1
1
1
1
1 ~
1
- Coton
1
1
1
1
40
1:
40
1
55
... Ar.a.chiides
~
r:
••
1
r:
341
~
38
r
54
- Sésame ad:
1
1
1
1
1
34
1
40
t
64
- Karité -&
1:
1
1
1
20
r
20
l
(]) ll'rancs maliens à partir de 1969 ; l franc malien' = 0,.5 FCFA = l aent±me.
SoUJ1ce 1 1960 à 19:15 1 e;Qmi té d' infomnat ion Sahel 1 '~ui se nom:rriit- de la
famine en Afrique". Po 16].
-& 1 19175 à 197,90 Bulletin de l'Afrique N!oiire nt' 1 1002 du 9 Dai.
1979,.. P. 19462.

- 168 -
Un', regard objectif sur ces prix nous enseigne que l ' évolutil)n du p.ouV0Ù·
d"achat du producteu~ de coton et d'arachide a été nullie, sin0n négative..
Certies, la concur~ence entre les deux catégories de produit s n "est pas
inévit al be... Dans la plupart des pays de l'Afrique SUbsahari enne ,. i l nestte
suffisamment de ressounces productives disponibles pour acerottre en ~me
t'emps, et le volume des produits agricoles d'exportation, et oelui! des pro-
duits destinés à la co-ns0mm:ation nationale. Mais il serait: vaiin de croire que.
le producteur s'intéresse à ces dernieItS s'ils 'Walorisent-. moins bienl que: les
autres l'heure de travail ou fournissent un revenu à l'hectane plus faibl!e.
Il n'est pas étonnant, dans ces conditions, que l'on observe cemme noos
dit
l'avons/plus haut, un décalage entre l'acoroissement dans la production des
biens destinés aux marchés étrangers et l'augmentation des produi.t!s faiiBant
l'objet d'une consQmmation natiGnale.
On assiste depuis quelques années à. une prise de conscience de l'inoon!'-
séquence de la politique prix. Le maintien de prix peu élévés à la production
est difficilement copatible avec un accroissement nécessaire du vol'ume de: 1'a
production. S'il est vrai qu'un prix avantageux constitue un st imul anti , e-ffica-
oe~ la politique des prix peut entra~ner des économies en facilitant les mani-
festations de la polit~que d'encadrement. D"autre part, le relèvement des pr~
des biens de première nécessité peu~ encourager les product-eurs locaux & entre-
prendre les cultures correspondantles, ce quii se révelait· irI!éalisable à. des
niveaux de prix très inférieurs.
Oertes la politique des prix n'est pas touj@urs facile à ajust;er~ mais
on doit c0"nstater une atténuation des faiblesses qui furent ]Les siennes au
cours des années soixante.
L'agriculture est le sectuer le plus récalcitrant, celui qui se pr@te. le
moins à une planification efficace.. L'action.=; des facteurs naturels comme la
structuDe du monde villageois communautaiIre ..., erd1!:ilsarê'dt. ~1~YlB1lt".~J.1I8i.1a "
sitt~"1ion.. Dans les pays qui, comme ceux de l'Afrique Subsaharienne,. veul1ent~
accéder au développement, le phénomène est accentué par la différen~e ent~
la logique d'une agriculture de subsistanoe et celle d'une économie en voie de
croissance.
Aussi ne sera-t-~ pas surpris outre mesune par la portée limitée de la
politique agricole, le nombre élévé d'insuccès, la difficulté d'atteindIle les
points de non-retour.
Au delà de ces considérations structurelles, si l'on suit l'évolution: de

- 169 -
Enfin, un
"
chagement dansl' orientati,on des termes de l "échange devait ac.
centuerle phénomène et faire appan!tre la faiblesse de la pGl:ütique des priJre
~vec la décennie 70,,, et en raison en partie de la Hausse relative des prill
.,
des produits agricoles au cours de la pé~iode précedente, la demande tend à
ciiiborde~ l'offre sur un certain nombre de marchés agnicoleS4. Il en résulte
des hausses très marquées de ces produits, h~9ses accentuées JlB.1:' les craintes
de pénurie. Le déficit alimentaire des p~s ~icains aggrave laltendance à
un solde davantage négatif de la balance externe de ces p~s.
Il devenait nécessaire de revoir la politique des: prix qui s'avèrait dé-
sormais peu conforme' à la politique générale de développement agIl'ieole.
Dans les pays qui avaient miis &Il oeuvre une politique de maintien à un
niveau peu élevé des prix agricoles à la production stagnait ou diminuait. A
Au Sénégal, par exemple, les producteurs d'arachides se révélaient très sensi-
bles au niveau du prix du produit~ Le changement du ~stème de commercialisa-
tion, les opérations de vulgarisation ne purent ri;en contre les effets d"une
dégradation du prix. ]1 est vrai
que la sécheresse ajoute son influence, mais
la baisse du prix de l'arachide à révélé une élasticité insoupçonnée de l'o~~
fre du produit. Et l'élevage du prix a déQouché sur des volumes reuord de pn~
duct ion.. Le Ghana a perdu en rai son de sa pol i tique des prix une part ie de
l'avance qu'il pGlssédait sur des pays voisins... Le I11ali a d'ft renoncer au main-
tien à des niveau peu élevés des prix agricoles à cause des phénomènes de re-
tention et de ventes frauduleuses qui y étaient l±és;
Aux effets associés au niveau des prix agricoles, il faut ajouter ceux
découlant de la structure de ces prix. Le souci de maintenir le pouvoir d'achat
des consommateurs urbains a eu comme conséquence que les prix des biens de
consommation destinés à la consommat'ion
domestique étaient beaucoup. moins
moins attractifs pour le producteur que ceux des biens destinés à l'exporta-
tion.. Bien que cette constation ne se verifie pas avec la réalité.

- 110 -
la politique agricole depuis Itaccession à la dite Lndépendance des Eta~s
africains, on peut aboutir aux conclusions non exhaustives suivantes J
- La marge de choliJt
des Etats quan1t au.'
~le assigné au secteur agri-
cole dans le développement économique est faible J ce rele dépend davant~
de la do-tation en ressources productives et' des Il'supputations'' du capital é.-
tranger que de la volonté politique.
- L'emprise du pouv@;d.r pO'litique sur la production à. travens une inter-
vention au niv.eau des unités de production demeUJ!'e faible t cependant;, cœlle-
ci s'est accrue, parfois dans les proportions apprécialbles ittnavers la
création de grandes unités ayant génénalement le statu1t d'entneprise publique
ou des sociétés d'éconlltDie mixte et l'avèllement des sociétés d."amén~men1t
associés également à l'expleitation des périmètres aménagés.
- La pQlitique des prix cependan~ négligée et non alignée sur la po]1ti~
que géBénale de développemen~ agricole n'a pas encore fait l'objet de DeQtifi~
cation satisfaisante. Elle pourrait si un relèvement des prix s"opérait, @tre
un adjuvant puissant à toutes les mesures destinées à faciliter un aocroisse-
ment de la production agricole •
Après le diagnostic que nous avons retracé dans ~a première section de
ce chapitre, et au terme de la présentation de la pQlitique agricole des Eta~B
Subsahariens, nous estimons qu'il est plus judicieux d'avoin une photographie
m@me relative du sectuer rural à travers l'exemple volta1que.

- 171 -
S,ecticlm 3 : Siituation réelle du secteur :nuraJl..
Des analyses précédentes, nous sommes en d.Iro:ii:tt de dire que l''éccmmmii.e
rurale dans le contexte d'aujourdDhu:ii s'apparente enc:ore dans sa grande majcn-i-
té à ce qu'elle était dans la période PTé-colomï.aJl.e. Néanmod:ns, elle se trou"re
de plus en plus ébranlée et anciennes structures"sécrorisantes" s' écroul,ent, de
nou,,;elles émergent quoique lentement'. La saciété des aneêtres s'engage dans cetta
phase transitoire, toute chargé'e encore de contraintes et de tares encrore du
passé.
Dès lors, quels sont les traits qui peuvent aaract'ériseJ!, sur le plian
économiqua du moins, ce monde rural en,transit~0n vers le cBpita]jjsme?
P'aragraphe l : Les méthcro.es culturales et les perspectives.
Comme nous l'avons montré dans ]es précédants paragraphes, que, dans la
plupart des sociétés africaines, la struaiure sociale demeure solidement onga-
nisée et hiérachiséa. Malgré le phénnmène colonial et la pénétration du cap4ta-
lisrne dans les campagnes rurales, le village voltatque donne encore l'aspect
d'une communauté parentale au sens large, un lignage avec ces ramifica11i;<ms 1
ahez le Mossi~ le plus ancien du lignage p~ernel incarne cettœmoBB!que
il assure la liaison avec les ancêtres, il veille maintenant certes, avee' peine
au respect des coutunes.. Dans les villages au coeur de la "lbJ!ousse", le pouvoill"
de décision économique continue à lui revenir (diVlision du trav.ail, repartitiam
des récoltes initiation des enfants etc••• ).
On peut comprendre cela qu'en replaçant. l'image du paysan, dans JJa nature
et le monde nouveau qui l'entourent. G-etlle nature ambigu~ est richesse mais aussi
elle est chargée de mystère et de purissance. L'univers alors, semble êtne UDl
Phénomène bien réglé surlequel l' homme n'a pas une totale emprise:. S'~omme tClllU:te,
traditions, coutumes, règles, proverbes et rites transmis de génération en géné-
ration depuis des millénaires, témohgnent de cel~ Il se dégage que cet enwi~on-

- 172 -
nement sociologique, dont le cours évolutif a été interrompu en 1885, sera fa-
vorable au maintien d'une "technologie ancestrale'" et du cycle tracliitiionnel des
aultures..
Ai - Les méthodesc.ulturales.
Aujourd'hui encore le paysan volt~que avec les quelques membres de sa f~
mille essaient d'arracher à la terre ingrate ses moyens de survie, woilà ce qu,ton
peut appeler propriété paysanne. Il faut dire que nous touchons là ce qui cons-
titue peut être le coeur du problème de la stagnation de~ techn~ques agricoles~
ce par quoi elle se révèle être non pas un phénomèile aa:cidenteJ1. Mais,·, au C<im-
traire, une manifestation de la logique :P.rofonde d'une certaine organtsation é
économique. Les cultures d'hivernage constitue une entreprise peu rentable et
beaucoup trop périlleuse pour être suceptible d' attirelt' des investissements.
En revanche, les opérations commercriales qui se situent en "aval" - Cl est à dire
qui consistent à achèter les denrées agricoles une fois qu'elles ont été reco],-
tées et qu'on ne risque plus, par conséquent, de su'dr aléas inhérents à leur
production
sont tout à la fois sÛTes et fruatueuses. C'est cette double cons-
tation qui a guidé la politique des détenteurs de capitaux depuis le début de
l'action en faveur du développement des cultures de rente jusqu'à nos jours.
C:e qui explique que dansun univers écon01!lique quasi-stable et stationnaire, les
forces productives sont demeurées rudimentaires. Elleçse composent encore au-
jourd11hui de la daba, le coupe-coupe et la hache de fabication artisaàaJJe,et
dans certaines régions du pays, quelques paysans régroupés en coopérattves dis-
posent de materiel plus ou moins moderne telle, entre autre la charrue. JL res-
sort que dans la majorité des cas, les paysans utilisent ellC0Œ'e les instruments
du "grand-père".
On dispose des statistiques douanières et bien que celles-ci
puissent pré-
senter certaines erreurs ou certaines lacunes. Elles permettent cependant d "ap-
precier l'importance du matériel agricole employé ou supposé en servieeà l'éche-
lon national,. De ce ma.té:xriel et outillage agricoles, on récens~
1
des tracteurs"
des charrues, Res houes, des pulvérisateurs, des semoirs, des bêches, des pelles,
des piobhss eta.

- 113 -
L "introduct ion, de la culture attelée ne remonte qu'à une vingtaine d'années
et s'est peu à pSUimplantée dans les différentes régio~s du pays. Q~pendant
ce n'est que ces dernières années qu'elle a pris un certain essor avec l'inten-
sification des cultures commerciales. Pour estimer l'importance des équipements
pour la culture attelée nous disp~Gns du napport de
A4 ROCHEZ expert de la
F. A. 0 en Haute-Violta dansle cadre du projet uPVln, qui rea:ense tous
les équi-
pements de traction animale encadrés par les ORD et donne des estimati0fis sur
les besoins du pays. L'étude des instruments de }lroduction agricole et leU!!
amélioration aura pOUJl" base les travaux de J. L
NOVElJ!AZ 1 étude des possibili-
tés de création d'industrie mécanique en IEaute-Volta, et LYONNET 1 napport fi-
nal du projet UPV 11/514 "d'aide
à la formation des artisans ruraux", enfin,
IMBOIDil expert de la FAO au Comité de Coordination de Développement Rural (CCDR),
"avant progïet de coordiantion des actions de fabrications d'entretiens et de
réparation du matériel agrioole".
El - Les instruments de production agricole
Le petit autil1age manuelle reste en IDaute-Violta d'~ usage très repandu.
De fabrication primaire, il en existe une grande variété selon ]]es cultures et
les régions•. Le principal outil est la "daba" outil en metal sur un bois de 40
à.60 cm. De tailles diverses, elle sert avec l'énergie humaine, au sarclage,
à la préparation du semis manuel, au binage, au buttage et permet également la
récolte des tubercules. Pour la récolte du riz, du mil,· du sorgho le paysan e~
ploie des faucilles et canifs égalemen~ produits localement.
L'introduction d'outils importés pelles, bêches, rat eaux, binnettes etc,
est fait récent et ceux-ci ne sont encore utilisés que sur certaines exploita-
tions de cultures industrielles contrôlées par les encadreurs où sur des péri-
mètres irrigués pour lesquels un matériel adéquat est indispensable dans la no-
tion de rentabilité de l'exploitation. Leur emploi pourrait cependant se géné-
raliser sous l'influence des jeunes sortant des centres de formation de jeunes
agriculteurs de l'éducation rurale "renovée",
où ils ont reçu une éducation
pratique leur permettant de se familiariser aux nouvelles techn~ques culturales.
Si celà s'associe à une dotation aux paysans de ces instruments agricoles.

- 174 -
Le matériel de traction animale est très faiblement implanté dans le pays,
même dans les régions, tels que le Sud-Est et le Nord-Est qui sont des zones
~'élevage par excellence, la culture attelée y est peu utilisée. Ce constat se
confirme aVec les chiffres ~es plus recents dont ou dispose, qui sont ceux de
~HEZ re~t la situation au 31 mars 1975. D'ailleurs le tableau qui suit, cons-
titue le recensement de houes, charnues et cherettes effectivement utilisées
par les explo~tants volta!ques et permet d'avoir une idée du niveau d'équipemeœt
agricole du pays.
NOMBRE ID'EQUIPEMENTS. TRACTION ANIMALE ENCADRES PAR LES ORD AU'.13I/3/I975
(unité = équipement)
1
charrues 1 mul t icul- 1 charrues: houes
1
charretts
Divers
o • :ft .. D
s
(BM2 )
Iteurs com-s
(Tom) 1 manga
1
1
1
1
pIets
1 :
1
1
1
1
i-
l
1


1
1
1
1
1
1
- YATmGA
1 2 054(1)
1
1
1
867
1
l 800
-1
-+
I -
I
1
1 - - -
1
1
1
1
1
1
-KAYA
1
705
1
1
l 2&$0
l 012
1
l 587
1
- 1 ;
1
1
1
1
1
-FADA
811
5
1
63
75
1
II9
1
69 (2)
- I I
1
1
1
- KOUPELA
12
1
66
1
27
1
327r'
1
40
1
150(3)
1
I-
I
1
1
- OUAGADOUGOU
:
366
1
1 5 521(41
l 500
1
121'(3 )
,.
1
1
I-
I
1-
- KOUDOUGOU
332
1 2 564
1
992
I-
I
I-
I -
1-
- DEDOUGOU
1
l 764
1
175
1
195
784
4 165
479 (2)
I-
I
l'
1
1
- BOBO-DIOULASSO
1
l 952 (5) 1
1
l 241
- 1
1
1
1 - - 1
1
- BANFtJRA
1
.18 l
1
160
1
1
110
1
1"
- 1 -
-1
1
- BOUGOURIBA
r
50
73
r
7
:
53
35
48
- - - - -
1
1
:
:
Tqstal
1 7 429
479
l 531
1
I I 141 : II 959
: 746
Source 1 Projet UPW/I7 de M. ROCHEZ expert de la FAO.
( 1) dans ces chiffres sont inclues les charrues TOM ; (2) Houes fabriqués Jlocalement ;
.
~§ ~ Butteurs Emdikof'f (provenance du Ghana) , (4) 607 houes sont équipés aveQ butteu7s
dans ces chiffres sont les multiculteurs.

- 175 -
Ce qu'il faut retenir en plus du tableau, c'est le cheptel mort encadré
par les ORD en fin de campagne 74/75 et l"augmentation du nombre d'équipements
qui se chiffrait à 21 000 charrues et houes si l'on ajoute les nouveaux équi-
pements de la campagne 75/76 : soit environ
2 000 charDUes et 3 000 houes.
Mais la CélJlpagne 76/77 avaient été estimée à 4 700 charrues dont a 000 mult.:i!-
cul teurs, 3 350 houes manga, soit au total 8 150 équipements de labour. De plus.
la construction de 3 560 charrettes (dont 350 en traction bovine) était program-
méœpour ne pas disproportionner le parc de transport visà v~s du parc matériel
oratoire et av~ir des problèmes lors de la recolte des produits.
Depuis les dernières années de sécheresse des pro~ets étrangers d'assistance
technique et financière sont venus ap~er l'action des autorités gouvernemen-
tales de développement de la culture attelée, so~t en assistant direœtement
les ORD pour ce qui concerne l'approvisionnement et le dressage des animaux
ou la fourniture des équipements. Cette assistance effectue aussi l'étude qua-
litative et quantitative des besoins en matériel (p~ets US-A1D,FAO) et accorde
aux paysans des subventions pourLl' acquisition du matériel de traction animale
afin que celui-ci soit livré aux paysans à un prix "abordable,,(projet de la
"coopération" suisse) ... Les fonds accordés 43 millions de FCFA sont maintenant,
épuisés. et le tableau suivant montre comment ces fonds ont été en partie uti-
~~eAA"
lisés enfdes paysans.
SUBVENTION DU MATERIEL AGRICOLE
(unité = FCFA)
Mat@riels
1 Prix de vente 1 Subvention, Prix aux Paysans
1
1
1
1
1
1
Charrues
1
18 000
1
8 250
1
9 750
.
1
1
H10ues
1
17 000
1
7 250
1
9 750
1
1
Multiculteurs
1
34 000
J
9 000
1
25 000
Chareéites
130 à 35 000
1 5 à 10 0001
25 000
1
Saurce • Projet de la coppérat ion suisse.

- 176 -
«'4mmte on peut le G.onstater sur le tablp.él.u d-dess.ous, les taux d 1 équip~ment
en culture attelée" son;!; très cfilfferents suivant les ORD,
selon l'intensité
de la culture de rente, l'importanC'e de l'assistance
_ technique et son ancien-
neté et la disponibiité en moyens financiers. Enfin l'augmentation relat~ve de
15 FCFA par Kg de coton pour la campagne 1976/77, pourrait accroître les dispa-
rités d'équipements entre les ORD cotonniers et les autres.
NIVEMJ D' EQU IPEMENTS DES ORD
a
Nombre d'équipements
a T'aux de oroisae.nee
O.R.D.
a 1972
a
1973 a 1974 a 1975a 1973
1
1974(1).
1975
a
a
a
a
a %
a
%
a
%
.
a
a
a
a
a
a
- BOBO-D HlULAS:SO
a
650 a
l
165a l 452a1 952a
79
a
24
a
34
a
a
a
a
a
a
a
- DEDOUGOU
a
2 035 a 2 463a 2 740a3 397 a 21
a
12
a
34
a
a
a
a
a
a
a
WUDOUGOU
a 2 720 a 2 900a 2 900a2 900a
7
a
a
a
a
a
a
a
a
-KAYA.
a
JI 500 · 2 200a 2 850a2'95Y, 46
a
23
a
3
·
I l
a
a
a
a
a
a
- YATENGA
a
2 039 a
2 302a 2 485a2 861a
12
a
8
a
15
a
a
a
a
a
a
a
- OUAGADOUGOU
a
3 700 a 4 827: 5 200a6 014a
30
a
8
16
a
·
a
a
a
a
a
·
(1) 1973 est l'année de la sécheresse.
Siource a Rapport Rochez-Projet UPV/17.
A la lumière de toutes ces données et consi_ratiions, les besoins jusqu'en
1985 ont été estimés par Monsieur Rochez comme suit a

- 177 -
ESTIMATION - ROCHEZ
:Nombre d'Equi-: Augmentation
Années (31 mars)
:Taux d'équi-
: mani; du labour:
en %
:ment des ex-
:
:
:ploitations(j)
:
:
:
- 1973 (1)
16 500
:
9
:
3
- 1974
:
18 000
:
la
:
4
- 1975
:
21 000
:
23
:
4
- 1979-
:
26 000
:
30
5
.
- 197f1
34 000
:
23
:
7
- 197~
:
42 000
:
19
:
8
- 197~
:
56 000
:
16
:
10
- 1geO
:
58 000
13
:
12
- 1981
:
66 000
:
12
13
- 198:!
74 000
:
ro
:
14
- 1983
:
82 000
:
9
:
17
,
.
1984
:
90 000
:
18
- 1985
:
98 000
:
19
:
:
:
:
:
(1) On considère le pays totalisant 512 000 exploitants.
(2 ) 1973 année de la secheresse.
Ce tableau indique une demande constante d~équipement pour la culture at-
telée de 8?000 pièces chaque année. La livraison de 3 500 charuettes par an doit
complèter
ce parc matériel agricole. Ceci représentant une valeur globale moyen-
ne de 300 millions de F CFA par an. le nombre d'équipements d,ici 1985 pas-
àe:bait de 21 000 à 100 000 soit une augmentation de 400 %. Maintenant analysons
. comment
l'la maîtrise de cet important équipement du paysan s'opère en faveur du dévelop-
pement agricole..

- 178 -
C/ - Perspectives d'avenir de la culture attelée.
Un constat ton~amental dans les campagnes précédentes a montré qu'en
l.l\\:V I.o...t.- ô~
ffaute-Wolta il y a une sous-~its~iQn des sols dans les parties à faible densié
ou un appauvrissement de ceux-ai du fait de façon culturale ~nE)olitJpil.ètes. J'ù-;i.Ra;'
daptée""On a vu de façon générale que dans la plupart des CaS les mèthodes cul-
turales de préparation du sol sont faibles et leurs effets sur les rendement a
peu sensibles. L'introduction de la traction animale permet théoriq~ement de
pallier à ces invonvenients en 8 à 9) jours d'attelage, i l est par exemple pos-
sible de sarcler et semer et entretenir l ha d'arachide. Mais comme on considère
qu'en moyenne la période du labour s'étale en Haute-Volta sur 40 jours et qu'une
paire de boeufs bien entretenus doit pouvoir pendant ce temps être capable de
labourer 8 ha (4 à 5 jours/ha). La superficie moyenne théorique normalement cul-
tivée par un exploütant travaillant en traction bovine devrait ~être de 8 h~
Or rare sont les exploitants qui arrivent effectivement à cultiver une telle
superficie, les raisons principales se résument de la façon
suivantes.
- le manque de main d'oeuvre au niveau de l'exploitation: avec l'introduc-
tion de la traction bovine le travail du paysan s'accroit considérablement, il
doit disposer au niveau de son exploitation d'une certaine force de travail suf-
fisante pour l'entretien et p~us particulièrement la récolte de ses cultures
d'où la nécessité d'une solution à l'émigration rurale.
- Le défrichement est insuffisant, en effet le défrichage sur invitation
pratiaué selon les coutumes locales ne permet qu'un débroussaillement sommaire,
or en culture attelée toute la couverture arbustive doit être déracinée et non
seulement coupée superficiellement.. Ce travail doit donc se faire en saison sè-
che, mais traditionnellement c'est une époque de "repos" pour le paysan. Mais
en réalité c'est une période qu'il reserve pour certaines activités: restau-
ration des cases, tissages, forges, travail de cuir, réparation des cycles, tra-
vaux mara1chages, chasse, pêche, travaux d'artisanat. Il s'agit d'un problème
de formation et d'information de l'exploitant, pour lui permettre une combinai-
..
,
son de ses activités de saison sèche avec celles qui sont naes du fait de la
possession d'un matériel moderne. Par consé<tuent le paysan doit pouvofr dispo-

- 119 -
ser d'un certain matériel adéquat ne serait ce qu'un treuil, un matériel qu'il
ma1trise.
a) - ~nque de ma1trise des techniques de culture attelé~ •
Toute la question qui se pose ici, c'est la capaoité du paysan à innover
et à organiser. Même si l'on reconna1t que le paysan fait preuve d'un comporte-
ment rationnel, même si l'on admet que ses techniques sont intéressantes à bien
des égards, l'on peut tout de même s'interroger sur sa capacité d'innovation,
sur sa possibilité de faire face à des mutations brutales. &a prudence, son sens
de l'équilibre, sa profonde connaissance du milieu ne sont-ils pas dans certains
cas, lorsque les défis extérieurs sont trop sévères, des handicaps plutôt que
des atouts ?
Beaucoup de spécialistes - et singulièrement Jo. BROUSSABD (r) - repondent
à cette question de la manière suivante: 'le paysans n'est pas intrinsèquement
different des autres hommes. Mais, comme chacun d'entre nous, il est profondé-
ment ~rqué par ses conditions de vie. Et les siennes sont très particulières
les aléas climatiques lui font courrir des risques énormes dont généralement
il est le seul à supporter la charge, il a conscience de travailler pour l'en-
semble de la communauté nationale à laquelle il appartient et n'a pas le senti-
ment d'être payé de retour, que ce soit en monnaie ou en considération; il sait
que le progrés qu'on lui propose estAun marché de dupes, car l'essentiel du fruit
de son travail lui sera extorqué. Refuser l'innovation, c'est sa manière à lui
a
de voter, autrmentdit de poser le problème de sa participation au développement
et à la vie politique.
A contrario, lorsque les contraintes qui l'enserrent sont relâchées, lors-
que l'amélioration des conditions de vie est certaine, on trouve chez les
paysans des comport~ents identiques à ceux d'autres groupes sociaux placés dans
des conditions également favorables 1 l'acceptation de technologiesnouvellest
se manifestent parfois de manière originale.
(1) J.M.BRüUSS.4RD
"la rationalité économique paysanne" techniques et dévelop-
pement -Juillet- Ao~t 1973.

- 180 -
Plutôt donc que de ratiociner à l'infini sur les qualités et les défauts
"naturels" des paysans, n'est-il pas préférable d'orienter la reflexion vers
les conditions sociales qui leur permettraient-de relever les dêfis êoraeants
,ut ,.aent sur leurs épaules, et ce, sans sacrifices inuti]es ?
Le ~aysan afrioaiu ne subi~pas, dès le premier âge, il se bat avec ses ou-
tils directement contre la nature pour satisfaire des bésoins primaires ; de
ce combat il a tiré bien des leçons qui lui donnent une connaissance qu'il est
facile définir comme non scientifique parce qul'lle n'a pa été estampillée par
un diplôme ou un brévet. A l'op"f)osé dans sa recherche du profit, "1'occidantal"
subit de ,~lus en plus l'outil qu'il a créé et sa domestication de la nature s'ap-
parente peu à peu à une destruction.
L'absence de maîtrise de la technologie moderne par le paysan entraîne qu'on
attribu~aux paysans du tiers-~nde la tare de la ~ntalité retrograde, en ou~
bliant que celle-ci est partagée par tous les paysans du monde.
Pour nous, si l'agent de dévelopnement pense que le paysan africain est blo-
qué par sa. mentalité, c'est au fond de lui i l a du mépris pour'~~'ce paysan dont
l'univers culturel n'est plus~]e sien. Son action se limitera à donner des or-
dres et toutes les propositions faites pour la
"recherche d'alternaiives appro-
priée dév iennent inapplicables".
Au contraire, si l'agent de dévelop:Jement sait que l'univers culturel du
paysan est enchaîné, ses: ordres deviendront conseil, explication, persuasion
et éducation; du paysan débarassé de ses chaines, il apprendra ce qu'il sait
et, ensemble, ils pourront rechercher les alternatives appropriées. Certes, il
y a souvent une mauvaise assimilation de nombreux thèmes de vulgarisation de
la culture attelée. Il faut insister sur l'insuffisance accordée à l'association,
de l' agricul ture-élevage, véritable indlice de réussi te à l"introduction de la
traction animale.

- 181 -
Les progra~mes de formation négligent en effet encore trop souven\\les pro-
,
1
blèmes de choix des animaux, de leur dressage, de leur alimentation, de leur
protection sanitaire, de l'utilisation des residus de l'exploitation de la vul-
garisation des fosses fermières ••• , élements qui permettent de fixer les boeufs
sur l'explOitation et au paysan de maîtriser son attelage. Une fois ces thèmes
connus il pourra correctment suivre les calendriers de semis, d'épandage des
engrais, des Barclages, il pourra diversifier ses cultures. Par la pratique de
la jachère cultivée en fourrage il pourra en outre augmenter le potentiel de
son élevage (volaille). La vulgarisation de la traction animale ne doit pas ê-
tre une fin pour le paysan mais un moyen de pénétrer le monde nouveau et un
moyen d'accroître ses revenus bruts et sa qualité de vieZ Nous pouvons essayer
de comprendre les obstacles que rencontre le paysan au moment d'une acquisition
d'un équipement moderne.
b) - ~~~~~moment de l'acquisit~o~du mat~ri~
L'obstacle principal au niveau du terrain réside dans la grande variété du
matériel en place, l'impossibilité de l'entretien et de le complèter lorsqu'il
ne couvre pas les nouveaux besoins d~s par exemple à une évolution de l'exploi-
tation. Il existe en effet, environ 10 modèles de aatériels agricoles en Haute-
Volta. Généralement introduits voici plusieurs années par des organismes ou des
programmes d'aide ayant fait appel à des maisons de commerce étrangères, ces
outils ont été utilisés jusqu'au bout de leur possibilité et parfois abandonnés
faute de pièces de rechange. Effectivement l'approvisionnement des réparateurs
en pièces détachées et en matières premières reste sporadique, du fait de cette
grande diversité mais aussi parce que ces approvisionnements sont faits par
des projets qui ont une duré" de vie limitée (financement extérieur) ou n'ont
paS les moyens de mettre en place des structures permanentes dans d'autres cas
les matériels empêchent une vulgarisation rapide et efficace des nouveaux moyens
de production.
Il n'e::;t pas rate qu'un vulgarisateur ne reçoive pas de matériel qui a servi
à fQire la senssibilisation et les démonstrations au ~ivea~
de sa zone, annu-
lant ainsi tous ses efforts ou encore il arrive que lors de la séconde année

- 182 -
un matériel different soit commercialisé dans sa zone empêchant ~insi une métho-
de de travail Uniforme. De cet obstacle sérieux s'ajoute les délais de livrai-
son.
a) - Les délai~~~ li~raisons.
Pour le matériel importé les delais de livraison sont toujours très long
au ~inimun au moins six meis. Entre la commande et la réception les prix varient
sensiblement, il est difficile d'établir une prévision chiffrée et d'indiquer
des prix exacts aux paysans demandeurs.
De même sur le plan local, la production étant toujours insuffisante et
parfois même stoppée par manque de matière première i l est là aussi très diffi-
cile d'organiser la distribution du matériel et sa réparation sur le terrain
qui reste encore très anarchique. Une meilleure coordination au niveau de la
production et une rationalisation de la fabrication des ~ifferents modèles per-
~ettraient un approvisionnement régulier et des prix moins élevés pour les p~­
sans. Pour ce qui concerne l'insuffisance du cnédit, nous ~'y~reviandrons plus
mais nons nous contenterons des analyses faites dans la première partie.
..
1
~près la neo-colonisation, et dans le cadre des perspectives décennales
de développement capitaliste, l'effort s'est sensiblement accru, et la distri-
bution de semences, de produits phytosanitaires, de matériel agricole, d'en!rais
ainsi que la vulgarisation de differents thèmes techniques sont devenues les
principales, si ce n'est unique
taches de plusieurs services et organismes z
D.R.D, animation rurale, services de l'agriculture. Nais l'écart est grand entre
les décisions administratives, les directives d'un plan et leur réalisation con-
crète. Aussi louables qu'aient pu être toutes ces intentions, les progtès,
comme les analyses précédentes le démontrent, ont été très infimes, et les ré-
sultats obtenus demeurent extrêmement décevants. Pour tenter d'expliquer cet
insuccès, on peut invoquer des erreurs, des insuffisances qui se sont manifes-
tées à differents niveaux : m~thodes d'animation destinées à vaincre les résis-
t:.
tances légime du milieu.rural, fonctionnement interne des services administra-
tifs et technique ainsi que la coordination entre leurs actions respectives,
formation et importance numérique du persormel de terrain, qualité du matériel

- lB3 -
proposé etc. !~fectivement, ce sont là autant de constations qui traduisent
des réalités concrètes et dont chacune exprime un aspect particulier du phé-
nomène de st agnat ion des techniques agrio:oles. Néanmoins, en dépit de ]1"1.-
portance que leur confère l'évidence, ces ~aits ne représentent que des causes
accessoires et, somme toute, des phénomènes contingents. Le facteur fondamental,
il faut la rechercher au plan des structures économiques et politiques, c'est
à dire de la position qu'occupe le monde rural au sein des mécanismes de circu-
lation et de la répartition des richesses nationales.
Bien que la pén~tration de la culture attelée s'implante et que la monnaie
métallique se soit imposée en développant de surcaroit un esprit mercantile et
individualiste, la structure foncière demeure hostile à toute speculation géné-
ralis~~ de la terre.
Paragraphe II
STRUCTURE FONCIERE EN H~UTE-VOLTA.
Il s'agit là d'une tentative d'approche d'une réalité très complexe au-
quel jusqu'à présent seuls quelques chercheurs comme J.L. B, OUTILL:ER(déj"à cité)
ont essayé de faire une esquisse. Neanmoins nous éssayerons de voir c~mment
se présente le système foncier voltalque à travers le pays Mossi, mais tout en
tentant d'avoir une idée approximative des taux d'occupation des sols d'autre
part. Pour ce qui concerne la tenure nous nous contenterons de l'analyse de la
section précédente dans son paragraphe 2 : le système socio-économique communau-
taire en tansition difficile.
A l'heure actuelle deux formes de propriété de sol prévalent en H'aute-Volta
Il s'agit de la propriété de type traditionne~encore largement dominant et de
la propriété de t~pe occidental bien qu'iâconciables, font apparemment bon ména-
ge ensemble.
Pour mieux comprendre les droits traditionnels de la propriété de la terre
en Haute-Volta nota~ment en pays !~ossi, nous pouvons les comparer à une serie
de cercles concentrioues qui représenteraient les drotits et les privilégès
hiérachiques des differentes couches sociales. Ainsi le Moro-Naba ou le chef

- 184 -
suprême du Royaume, qui se trouve au centre serait le dépositaire de toutes les
terres, c'est à lui qu'incombe la tAche de la linitation de la territorialité
des terres aux differentS.chefs de cantons (sorte de département du Royaume ) •.
Ces derniers d'une part, disposeraient du droit d'exploitation des forêts, des
o
lacs, des rivières po\\soneuses, du sous-sol, des terres qui se trouvent à l'in-
térieur de leurs limites territoriales, d'autre part la gestion proprement dite
des terres est laissée au TEN_'.SüPBA au niveau de chaque village.
Le TEN 'SOPBA A POUR ROLE ESSENTIEL DE FAIRE EN SORTE QUE TOUS LES HOMT.1ES
adultes habitant au village aient suffisamment de terre pour pouvoi~~ nourrir
ceux qui dépendent d'e~ Un des principes importants du système traditionnel
est celui d'après lequel la terre ne peut appartenir qu'à
ceux qui la cult.,vent"
ce qui resoud le problème de l'absentéIsme ~'une part et d'autre part, étant
.a.lI\\o.~"
donné que la terre, appartient en dernière/au patriarche de chaque lignage, le
1
1
lécipendaire n'a pas le droit de la vendre à des tiers, tout en pouvant la lè-
guer à ses héritiers directs.
D'une manière générale les droits d'exploiter le sol, de construire sur
le territoire villageois s'obtiennent moyennant une simple demande. Cette réa-
lité, tout le monde y comprix les étrangers à le droit de faire la chasse, de
chercher du bo~s pour se chauffer, de cueillir des champignons et d'élargir son
champ, à condition de ne pas gêner son vODsin car aucun conflit n'est admissi-
ble (ainsi en ont parlé les ancêtres). Cette élasticité dans l'acquisition des
fondements juridiques légales ~ant pour philosophie de base "la terre à ceux
qui peuvent la travailler". Jettant ainsi le soubasssement de la propriété pri-
vée du sol avec le système de bornage. Cette forme de propriété de type occiden-
tale échapne totalement et définitivement du contrÔle du TEN'SOPBA.
BI - Le liroit coutumier de la terDe.
En dépit de la monétisation de l'économie agricole voltaIque, le mode de
production n'avait pas fondamentalement changé. Par ailleurs, l'aspect familial
de la production va demeurer dans une large mesure.Ce qui coastituait la base

- I85 -
essentielle de cette production, la terre, va rester regie par le dront cofttu-
muer en llabsence de tout dro~t écrit.
Comme dans toute société avancée, les règles de droit valent pour llensem-
ble de la communauté où llindividu se confond au groupe.
Pour mener à bien notre approche, nous rechercherons les fondements de ce
droit foncier à travers quatre aspects 1 juridique, socio-réligieux , politique
et économique.
1°) - L1aspect juridique
En tant que droit relevant
de la co6tume, donc non écrit, les normes ju-
ridiques existant et se transmettent à travers la mémoire des membres de la col-
lectivité. Cette existence de droit ne peut être contestée tout au moins dans
les sociétés qui étaient structurées avant la période coloniale. Ai:nsi, un ce:e-·,
tain nombre de règles protégées par les tribunaux et une jurisprudence vont régir
ce drojjt.
a) - La terre est la "propriété" d1une communauté.
,
Les bén!ficiaires du dront d'appropriation collective sont les membres de
la grande famille. C'est les lignages et les segments de lignage. A ce propos,
Raymond Verdier définit
le lignage comme une "généalogie uniliilLéaire, inscrite
sur le sol constituant une unité apatio-temporelle"(I). A cet égard, bénéficie-
ront du patrimoine foncier, tous ceux qui se considèrent
comme apparentés et
forment des clans unis par les multiples ramil#'ications 'tiliologiques"(2).
b) - Le droiiit de culture est individuel.
~'un point de vue juridique, on peut dire que le droit d'appropriation
collective s'apprente à la nue-propriété tandis que le droit de culture relève
d'un droDt usufruit.
Le droit de culture d'un membre de lignage a pour conséquence la réduction
du droi1 d'appropriation collective du chef de lignage à un simple droit de ré-
gard s'il arrive que le titulaire de ce droit de culture disparaît, dans la pRu-
part des sociétés, ce droi~ revient aux héritiers et le chef de lignage ne peut
enfeindre.
R. VERDIER :"Chef de terre" et "terre de lignage".
J.L. BOUTILLER • "les structureS foncmères en Haute-Volta" ORSTOM - N° 5 I964

- I86 -
c) - he dro,ii:t est protégé yar un chef de terre.
5ans toutefois vouloir généraliser, on peut dire que dans la grande majorité
des régions voltaioues, il existe un chef de terre, il s'agit du TEN'SOPBA chez
les Hossi. Doyen des descendants de la première famille à se fixer sur un ter-
roir, ce dernier possède un "droit éminent'" sur l'ensemble des terres cre sa
juridict iono On peut dire que Sel,' rôle s "est réduit de plus en plus, surtout
dans les régions 0,)-' l "appropriat ion colled ive des lignages remonte loin dans
le passéo Aujourd"hui le droit éminent du chef de terre s'exercera sur les
terres vacanteso
SDuvent des conflits éclatent sur ces problèmes (chose qui était rate) sur-
tout à propos d'occupation lignagère et devant les juridictions de ItEtat, le
chef de terre do1-it apporter son témoignage.
d) - Le dro~t sur les arbres
S.elon l'étude de la revue d'information éoonomique "S.A.E.D", les arbres
ne relevent pas du même droit d'appropriation que le sol, sur lequel
ils pous-
sent. Il apparait que ce droit varie avec l'importance économi~ue de l'arbre
et le dégré de vie communautaire.
Selon les régions, les détenteurs de ce droi.t peuvent être classés en
Quatre groupes :
chef de terre,
- le chef de la communauté villageoise,
le chef du groupe familial détenteur du droit d'appropriation collective,
l'exploitant de la terre sur laquelle pousse l'arbre, dans le cas d'un
anbre fruitier, l'arbre appartient à celui qui le plante. Mais enfin d'éviter
tout conflit ou dédommaeement éventuel, il est interdit au tiers à qui l'on
prête un droid de culture de planter des arbres fruitierso D'antan, l'interdic~
tion de détruire un arbre fruitier avait beaucoup plus une valeur traditionnel
qu'économiqueo

- 187 -
2°)_ Le Problème socio-religieux
En tant que doyen du lignage, le chef a sur le plan réligieux des liens mys-
tiques avec cies ancêtres. Ce pommir fait de lui le pl"être du so].
Dans certaines régions, au moment du défricmement, d"une terre merge, des
ensemencements ou des récoltes, le TEN'SOPBA dlirige dlLfferentes so:viles cie ri-
tuels qui se résument en· pl"ières et sacrifices sur des autels pl"ovisoires ~
permanents on1i pour but de demander à creux qui sont aorts, fertilité, pluies
et récoltes abondanteso
"Droit éminent" et pouvoiir réligieux confèrent au chef de terre un, impwtanil
ltÔle social, qui peut être réduit dans certaines sociétés par les p~voirs po-
litia_ues exercés par certains liignages (Nrossi), cette situation peut changer
la répartition des droits fonciers

3°) - RÔle politique
Partant des recherches de certains historiens, d:li.stingue trois types p<Dssi-
bles d'organisation politique traditionnelle parmi les divers groupes ethniques
en Haute-Volta(T. TH10MB1ANO - déjà cité) 1
le système segmentaire (anarchie),
l'organisation à pouvoir centralisé (confédération),
- l "organisation à pouvoirr centralisé cre type memarcmique.
a) - les systèmes "segmentaires"
Cao type d'organisation Politique est basée sur la juxtaposition et l'équi-
libre entre les lignages.
le pouvoir politique est exercé par un groupe de segments de lignages diî-
ferents, dont la
hiérachie se trouve établie par l'ancienneté sur le sol.
On rencontre de tels systèmes surtout dans le Sud-Ouest du pays en parti-
cullier chez les BWA et Lobis( cf. premier chapitre de la première partie.)o Da.ns
ces organisations, le "droit éminent lt du chef de terre s'exerce entièremento

- 188 -
b) - O~ganisation à pouvoir aentralisé (confédération)
Par les peuples où ces structures organisationnelles ont existé, on trouve
surtcmt les G'<Gurounsii. Dans èe système, chaque village conserve une relative,
autonomie.
Dans ces groupements une double hiérachie apparatt aelui des chefs poillitiques
et celui des chefs de terre.
c.) - L'organisation à pouvoiir centralisé à caractère monarchiiciue.
On retrouve ce système dans les sociétés structurées comme dans les royaumes
Mossi. En effet, ces royaumes sont Bés de la conquète du centre et de ]"Ouest
~
de la boucle du N'ige:r vers le XIIlI-siècle.
L'lorganisation politico-administrative des empires du YATENGA et du Moro-Baba
en canton~ et villages ayant à leur tête des membres de lignages roy~, donne
naissance à un système à caractère féodal. Les chefs de aanton conservent en
leurs mains d'importants domaines fonciers. Peu à peu, le "droit éminent" du
chef de terre dispara!t au profit des c0nquérants (les NAKOMSE). Seuls les fonc-
tions religieuses lui seront reconnues.
De là va naitre une double hiérachie, les TEN "SQPBA et les Niaba ~chefs po-
litiques). Ce système dans la mesure où ill s'exerçait dans des régions à fortes
concentrations hu~aines, a provoqué une inégalité dans la répartition des droits
fonciers au profit de ces deux couches dirigeantes qui détiennent la plus granrlel
partie des terres.
Pour les TEN'SOPBA, la concentration à leur prcrfit de grands domaines p~o­
vient de leur pouYO~ sur les terres vacantes et sur les surfaces abandonnés
par les lignages éteints ou des émigrants. hes "Naba n'au~nt fait que profiter
de leur pouvobr politique pour requisitionner de grandes surfaces nécessaires
à l'entretien d'une cour notamment le harem et pour faire face aux nécessités
du pouvoir (festivités, céremonies••• ).

- 189 -
4 0 ) - L'aspect économique
La reconnaissance de la constitution d'un dro~t foncier dans ces sociétés,
revêt beaucoup plus l "aspect d'établir un ordre., que d' accorden à la ter:zre une
prédominence,éco!mique.
Plus que l'abondance des terres, la justificaticni essentielle cie ce hctteur
résultait des croyances qui cfunnent à la terre une appartenance divine. 1Je48lé_
'V:eloppement des forces productives ainsi que le mode deproductian,.. ete nr8me que
la plac'e attribué,e' aux é~nges tiennent renforcer cette thèse.
Lféoonomiit .serait 'final~mert lLa consâql,Jéncedur---droi1t ~~(:'-::f': ofon.cj.ar trad:f;,..
."}
tii.cm:nel et non po:iint s'a cause,. c~ dans lessœciétés e1irO}:léennes (I~
A 1 "époque a:ontemp-oraine, cet aspect d:u dl.7oiit se trouve de plus en p'lus
précaire surt01i~: dans les régi~s (Plateau l'r0SBii) où li équilibre entre p~ula­
tiém et ressources est -brisé. Ife ce bref aperçu du droi."i foncien vcl ta!que,. nous
reten .ons troisélements~
-Le droit fomaier voltaIq~e est un droit coutumier qui varie selan les na-
tionalités du pays ,
- Le droit est Un droit d'appropriation colleati~ dont sont nantii4S1es
lignées ;
1
- Il existe Un "droi!:t éminent" sur la terre, exercl par le chef
p<!l'Ur le chef
de terre selon les: locall tés.
Naintenant nous allons exam~ner la situation de l'occupation du sol dans ce
pays.
Paragraphe 3 ILES TAUX D'OCCUP'AT10N DU SOL.
Selon les services de la planification, pour une superfic~e de 274 000
l[m2',
la repartition des terres se" fait comme l'indique le tableau suivant 1

- d90 -
Superficie totale ••••••••••••••••••••••••
27 400 000.:- ha
- C;uil. tures~ .'
.
2 100 000
ha
- Paturages ••••'
0 .
1 400 000
ha
- J:achères.e .................. ••••••
6 600 "000
ha.
- li1'orêts classées. ••••••••••••••••
2 300 000
ha
La carte d'occupation du sol nous donne à partir de Phot(l)graphie aéniennes
~u ]/50 000, le dégré ou taux :réel d"occupation du SCl'l par les activité9:' agri-
1
aoles. Cependant, il faut émettre de sérieuses récours quant â l'exac~tude des
chiffres avancés compte tenu des difficultés de déterminer les jachères par rap-
port à la brousse, ,les surfaces tn."ilisables, etc.
Le tableau qui suit nous donne par contre une vue d'ensemble de O'ette, ll'epa:r-
titian.
COEFFIC IEIfT S, D1 OGeu PATl ON DU SOn..
.S.uperficie K.m2
Occupation du SOI
• Pcnmcentages

1
- Nulle
1
39 000

14'6

1
- Insigniii'iante
• 49 000

18,0
1
1
- Inférieure à 6 %
• 86 000
1
31,9


- De 6 à 25 %
1
7'4 000
1
27,,5
1
1
- De.;25 à 50 %
1
19 000
1
7,0
1

- Plus de: 50 %
1
2 000
1
0,7


- Non couv.ert

900
1
0,3
1

total
• 272 500
1
100,0
(~,()urce 1 Cahiers ORSTOM, Vol WIll N° 2 1910.)

- 191 -
De ce t'ableau trois remarques s'imposent 1
- 14,6 %du terJritoire voltaique est iinn0 ŒClapé. Dans la majorité des cas,
ces aires de dépeuplement situe 1
• le long des grandes ri~ères et de leurs principaux affluents est
partivulii.èrement inoccupé. La cause principale de désertion d:è oes zones ferti-
les est l ' insalubrité de ces régions. De nombreuses maladi'es tells que le palu-
disme, le trachome et surtout l "onchocercose frappent la pÙJUpart des :ljjvoains•
• Dans les régions sahéliennes où à l "oPP06é, des grandes r:ii:v:1lères
très hum~des, c'est surtout la sècheresse qui est à l'origine de la fuite des
populations. Au cours dela famine, ce sont ces zones qui cmt été.' très durement
touchées. La. principales activité des habitants est l'élevage car les.' eulturEllll3
s'adaptent peu.
o
Dans les zones de désertes éparses. De telles zones sont signalées
à l'Est de DJiiapaga et au Sud d:è Fata N"G~rma • Contrairement aux deux régions
précritêes, les conditions climatiques sont très favorables et les maladies se
propagent moinso ~'est plutat des raison~ h~storiques relevant du caractère
gruerrier de ces populations et des querelles qui les oyp~saient souvent qui
ont entrainé les royaumes à l'éloiigner les uns des autres. Dens 11,e rééquilibra-
ge - population-ressource - iLy a lieu d'en ten~r compte de tous ces faitS.
- Près de la moitié du territoire cannait un taux d'occupation inférieu:L'
à· 60 %.
- Les aires moyennement ou fortement ocaupées ne s'étendent que sur un peu
plvs du tiers du territoire (environ 35,2 %du pays pour des taux campris eœtre
6 et plus 50 %). Ces taux se rencontrent principalement dans trois régians ,
les pays Mossi, Bissa et les SMO.
'Pirant note de cette carte d' occupat ion du sol dans le pays, G;. REMY con-
clut en ces termes r "rmême si l'on estime que les surfaces cultivées, une année
donnée ne représentent que le quart ou 1.e cinquiième des ter:L'es indispensables
aux villageois, et en tenant com:pte des étendues incuIt ivables cians les c:'amdJi-

- 192 -
tions techn~:ques act1lelles, il faut bien con"l'eniir qu twœ partie iim'Portan"tl;e
des terres est inex~loi~ées, et que le territoire vclta~ue offre de grandes
p0ssibil:Hés dans ce domaine"(I).
C'est là un dementi forme~ à ceux qui prétendent que la Raute-Yo~ta est
très peuplée et que la famine actuelle trouve sa just'ifi;cat:ion lians 1.' exeès de
natalité. Une telle conclusion c()l1fi:mne aussi dans une large mesure ce ~a nous
retenons comme enseign'ement à n~tre propre niveaUo C'est celui. qui. nous ~~~e
qu'en fait la situation de "pauvrété lé~ndaire" de la lffiaute-Woltadil:m1t. plus
d'un "humanitariste" ne cesse de s'apitoyer est dénuée de tout fondement.
En effet, les facteurs favorables qui s'offrent à ce pays se trouvent tem-
pérés par plusieurs causes ,
- l'insalubrité de certaines zones;
la pratique de cultures extensives dansles reg~ons peu peuplées;
- Les techniques archa!ques de production qui épuisent les sols ~pratiques'
de bl!Ülis)
- Les longues jachères et l'abattage désordonné des arbres;
- la campagne orchestrée par les sociétés d'interventiom pour la spéciia]i-
sation des paysans dans la monoculture de rente, au lieu d'amener ceux-ci
à
faire une juste proportion entre le ~~ et le mile
- Toutes ces causes sont
résiduelles du point de vue d'une véritable po-
litique de développement, surt~ lorsqu'on sait que ce n'est pas mon plus la
main d'oeuvre et le courage qui manque. Le tout est de pouvoir canaliser toutes
ces énergies dansle sens d'une mise en valeur rationnelle des ressources exis-
tantes.
On estime la population rurale est repartie en 500 000 exploitations (2)
et l'effectif moyen d'une famille rurale selon l'enquête démographique de
1961/61 est de 9,~ dont 6 personnes actives. Avec 2 100 000 ha de superficie
en cultures, l'aire moyenne d'explomation est de 4,2ha soH 0,7 ha par pe:nsOD;
ne active. Ces chiffres confirment d'une part, la situat'ion invoquée plus haut,
mais permettant de voir aussi le ch&mage déguisé qui existe dans ce secteur
d'autre part.-
(1)
G. REflIT:
"une carte d'occupation du sol en Haute-volta" note Méthod<ll10·
giaue et descriptive , Cahiers ORSTOM, serie
sciences humaines
vol, VIII N° 2 1970
(2) SAED / Information revue économique N° 14 du l au 15/5/74.

- 193 -
CON C LUS ION
En Ifaute-Wl1l1ta comme dans toute la frange de l'Afrique sèche, l "augmenta-
ticm de la productivité du trav;ail est devenue maiintenant une nécessité' devant
laquelle il n'est plus possible de reculer. Mais cette nécessHé, selon nous,
n'est pas en termes de rentabil±té économique qu "elle s'imp0se : pas plus qu' hriier
l' agriculture n'est aujourd(hui une "'bonne affaire"o Dans ]la situ'8.t ion limite
1
qui est atteinte maintenant, le critère du prtfit est totalement, dépassa; lJ"en-
jeu est la survie de milliO'ns de cultivateurs et d'éleveurs et l'existenee même
du pays dont la subsistance humaine peut s'év.anoui~ sous l"effet d'un pwii.ssant
mouvement d'exode.
Bien que tous les problèmes techniques ne so~ent pas encore résolus, ce
n'est sans doute pas à leur niveau que se situent les obstacles v.éritables
une application cohérente des thèmes proposés par la recherche agronomique dou-
blée d'une reforme de fonds en comble de la superstructure étatique pouœraient
effectivement permettre un accroissement sensible des rendements. Une autre ques-
tion est de savoir s'il est souhaitable de continuer à assimiler dé'œlapp8lllent
de l "agriculture et augmentat ion de la product ion co,t onnd.s:re.
Quoi qu'il en soiit, l'essentiel n'est pas tout à fait lLà, aussi va1lables
que puissent être, en elles-mêmes, les solut i<m.s économiques et, agnonamiqu&s
envisagées, tout projet visant au dével~pement de ~~efficacité ~s ~ens de
product ion restera lettre morte tant que ne sera pas pJréalablemenrli; levé ]e fa:t1.-
deau qui leur "donne" de l'autre, on les mettra dans l'impossiibili:té matérielle
d'accomplir les efforts financiers que l'an réclame d'eux ; tant qu "<Dn n "a1rlra
pas admis que ce n'est pas eux de SuppoIrter la IPlus gDosse part des Jrisques
qu'entrahle l'innovatiolll- car, pour eux l'en j'eu est v.ital - tant que l'Ion en
mettra pas tout en oeuvre
afin de leur permettre de franchir le cap au-
delà duquel ils jouiront d 'une sécurité suffisante pour lP'uvoiir, enf:iim prendre
des ini:tiat ives dans le domaine de la product ion agricole, faire des par±s sur
l'avenir avec une chance raisonnable de réussite. I l se pOise aloTs le pro,blème
de la conception p-ilanili..ée du développement agricole et sa ma1t1"Ïise. C~esll
bien entendu l'objet de notre dernière Eau*ie.

- 194 -
DEUX,1EIIE
PART][F.
HOUR LA MAllTRISE DE DEVELOPPEMENT AGRI<roLE m IlJA.UTE-WOmA.
L"adoption à l'échelle mondiale de l'abré"t'iation "tiers-monde" en dit lCll~
sur la façon dont les anciennes puissances colonisatrices voient les ~sous-dé­
veloppés". Ce concept qui traduit une division tI!i;partite
du monde est b:d.en
entendu discutable. Les differen8'e économiques e1i~ socio-eultwrellu entre les
Etats-Unis, l'Europe et le J'apon d'un c,oté ou l'Umion S:.eviétique et ses sate-~­
lites et la chine de l'autre, ont proba"b:Jement piLus d'impGm"tance que ~llea qud
séparent certains pays dév.eloppés e~ sous-développés. Mais en déhors de cette
division tripartite du monde, l'amalgame de tous les p~ sous-dévelCllppés sous
une dénomination commune ne pouvait manquer de causer beauco~p de tGm"~~
Il a contribué à fixer l'image des p~6 à bas revenus comme un grCllUpe ho~
gène et à rendre pjl.ausible en conséquence la croyanoe en ia pClSsibilitê d'une
thérapeutique commane pour s'attaqueI! à leurs m~
B~en qu'une certaine différenc~ation ait été inéwit~ble dans la pratique,.
,
on a continué à recourir en règle générale à des presexiptions qu~ l "on CJ!QYai:t
valable pOUl! tous les pays sous-développés. Et cette tendance s "est aggravée
à mesui'e que le problème des pays à. bas revenus est devenu l'un des thèmes pI!in-
cipaux des nouvelles organisations internationales.
Cette caractérisation· des pays sous-dévelioppés n'a jamais correspond.u, ne
correspond à. aucun fait tangible fondamental sinan pour justif~er la stratégie
du développement capitaliste qui a nécessité la division internationa~a du t~a­
vail~
hes pays agricoles relèvent du t'iers-monde composé d'Etats non homogènes.
6ertains de ces pays sont des vastes entités territoriales dotées d''une large

- 195 -
diversité de ressources naturelles. D'autres beauooup plus nombreux, ont des
populations réduites d'um faubourg de oapitale
et mnt dénués des ressouroes
humaines o~matér*el~es sur lesquelles oonstruire une éoonomie via~e.
A coté d'Etats possédant des réserves importantes de terres en ~iohe
mais fertiles, d'autres n'ont pas d'autres possibilités que d'essayer d'ac-
oroitre les rendements des surfaces dé'à cultivées. Il y a ceux qui possèdent
des frontiè~es naturelles correspondant A des réalités ethniques, linguistn-
ques
ou culturelles. Les autres dant. les frontières grotesquement artificiel-
les, tracées
pour les commodités des ma1tres oolonisateurs n'ont aucun rap-
port avec les facteurs organiques d'une nation.
En Afrique, errtre 1'Islam au Nor. et l'emprise oooidentale-·'au Sud, on
trouve décaupé~ en en~ités artifioielles ne correspondant à auoune logique,
une mosalque d'Etats africains tournés vers l'extérieur, tendant de oonstruire
des structures "teohnioo-administratives" sur une base Bocio-cul~urel]e dif-
fioilement reconnaissable. Le grand nombre de œes pays sont ceux qui «nt reçu
en héritage des diversités ethniques et raciales nées des iœpératif~ des mines
et des plantations ou simplement des limites des oonquêtes étrangères, mais
qui constituent certainement à l'heure actuelle des obstacles à un degré marne
modeste de co.érence administrative ou nationale.
Rares mnt oeux dè a.es Etats qui ont pu introduire les ohangements néoes-
saires pour établir quelque rapport ,ntre la performanoe éoonomique et si
récompense. Bien plus souvent, des minorités bénéfioient des privilèges sans
justifcation, ni en rapport avec un r6le éoonomique et sooial.
Tous les postulats des théories de développement doi~nt partir non des
géxéralités, mais de la ~alité concrète de ohaque pays. Cé qui posera le
problème de contibuité de la politique de "dé~loppementU menée par le colo-
Bisateur d'abord et reprise pour l'essentiel par les Etats indépendants
ou
de rupture avec la stratégie de développement, imposée par l'ex-métro~1e,
qui se traduit le plus souvent par le "développement des inégalités régionales,
dév~loppement des villes au dépens des campagnes, développement des privilèges
de quelques uns, développement des profits des sooiétés étrangères et leurs
alliés locaux. mais l'envers de la médaille, 0'e81 l'appauvrissemnt des mas-
ses paysanBes, la dégradation des sols, la détérioration de l'agriculture
o

- 196 -
v,i vri~r~ l' accroissemco:nt: du chômage" (1).
Plus de vingt ans de reflexionsau sujet des probièmeœ de dév.eloppement n'~t
fait que souligner que les projections sont hasardeuses, que toute généralisaticm
est une source inévitable de déformations et que les approches les p~us néalDst~s
et ratiannelles continuent ài ~tre dominés par un élément dlincertitudee.
Les nombreux ouvrages, missions et a~rl;l!es colloques, une mul ti tude de. pro,jets
et études n'ont about i à aucun progrès Vléritable dans la vile dJes masses a:fl'ricai-
nes.. Après pJ\\Js d'un ~uart desiècle que llentreprise ait dé marné , e'est une pe-
sante impression d'impuissance qui pl!évaut'. L'importance accordée dans la ]j:fjtté-
rature des économistes et autres experts au~rob]ème démographique sent consciem-
m-ent ou non qu'à masquer l'essence du sous-développement du t:iers-mcmde qui. dé-
coule pour l'essentiel de la domination et de l' exploitati'on impérialistes. PCllWll'
ce qui est de llAf~ique ~oiTe, la question se pose quelle voie suivne pour ré-
p(mdre pleinement GUX v.oeux des masses laborieuses pour la satisfactian de leurs
besoiins immédiats: nourriture, emplClli, santé. Pour ce qui est de la politique
économique qui se veut rationnelle, elle doit chercher à appréhender les saebas-
sements socio-économiques qui se pCllsent au PB3"s afin de le conduih sur la v0iie
<i:~un épanouissement:. réel de la population. Mais pour PIERRE JALES" "il nllexiste
pour les pays du tiers-monde que deux voies 1 celle du capitalislll8 parvenu à SOll;
stade impérialiste qui;engendre et conselide leur sous-développement et celle
du socialisme qui seule leur ouvrira les portes du développement. I]j n'en est
pas de troisième"(2) ..
?our le problème de la maitrise nationale du dévelCll~pement notamment de
1 I:agriculture , revient à rappeler, sur un plan' scientifique, ce qu~a tCllUjOUl!S
révélé l'histobre des peuples
: la Lutte contre la famine et la misène. Au' fi~
des siècles, chaque civilisation a essayé de perfectionner ses tec~ques peur
satisfaire ses besoins•. Les Royaumes au milieu.
de 1..a Boucle œu lIîigen(fleuv.e)
sont passés de la civilisation organisée d:;e greniers, à une déviation imposée
de l'extérieur d'où émergeront des ilots de "modernismes" : les grandes villes
soumises à l'informatique. Peu à peu s'imposeront les notions d'éohange & grande
échelle èt surplus économiques~ Dans une telle société bejaune, le spectre de la
faim n'est pas totalement écarté et l'auto-consommation domine. Alors tout le
monde s'interroge 1 est-il possible d'accéder à l'aisance physique et matérielle
pour les populations villageoises sans passer p~ les voies de développement que
propose et applique l'occident indus~iel T
Le développement devient une stratégie qui permet d'engager tout un processus
.
d'organisation sociale animé par la base, où l'individu dev.l.n~ait cnéateur,
maitre de sonenvironnement, et non un sous-comssmmateur extra-déterminé.
)mité d'Information Sahel : "Qui se nourrit de la famine en Afrique" ; P. 15.
o
JALEE : "Le pillage du tiers-monde" ; Pref. 1975 ; FMI Petite Collection MAS~ERO.

-19T -
CRAF l
J
g,STRATEGIE ACTUELLE DU DEV1E.LOPPEMENT AGRICOLE .m HAUTE-VOLTA..
Nous avons analysé et montré que l'économie villageoise en transit~mn de
lia plupart des pays africains agricoles, se trolive attaquée sur daux fronts J
de l'intérieur car elle n'est plus en
mesure d'assurer la survie d'une COJlll-
munauté villageoise«familles disloquées, émigration••• )9 de l'extérieur car le;s
centres urbains diffusent un idéal de vie è~
de"bien Atre'" économique nouveaux~
et le pouvoir central intervient sous une ferme ou sausiune autre de pillus poi plus
fréquemment, dan;cet univers traditionnel en agGnie.
.
n
Ce fait rappelé, i l para1t urgent d ' éviter l'etnaglement cm la disl,o:catioDJ.
non organisée de l'économie villageoise et le reflux des jeunes ruraux vers les
centres urbains encore mal outillés p0U71e recevoir. Dès lors, l'évolution équil~­
brée de l'économie exige plutôt que l'économie rurale se modernise et s"intègre
à une to1alité dynamique. Boutes et pistes ne doivent pa~even1T des nQWales ~é
li'émigration ruralle, mais comme, les dessertes d'une économie villageoise revita-
1Jisée et transformée dans uni processus planifi~é. D'ores et déjà, DIOUS 'V:OY0ns a~
para1tre les signes annonciateuxsde progDès.
Mais le progrès de la société économique n'a de véritable
sens et de fina-
lité que lorsqu'il dévient intelligible au grand nombre, somme ~oute, lorsqu'il
associe tous les hommes dans une immense oeuvre de solidarité nationale et rég~o­
nale. Dans le domaine agricole, le développement agricole dirons-nous es~une
véritaile transformation bourgeoise radicale de type nouveau, en ce seBS ~ met-
tra au défi les attitudes du monde. Certes, il s'agit d'une mutation profonde,
sans précipitation et sans complaisance des structures sociales et mentales qui
se sont tissées depuis des générations.
Pour y repondre sur le terrain, il faut que nous examinons l'élaboration
et l'application des stratégies micro-dimensionnelles et œacro-dimensionnelles
de développement en Haute-Volta.

section
l : ~OPPEMENT AGRICOLE ET REALISATIONS, NATIONALES ET R.EXHONALEs,t
Nous étudierons ici le rôle des organismes régionaux de développement et deux
exemples de projets qui, en ffiaute-V~lta,sont susceptibles d'avoiT des repercus-
sions non négligeables, voir primordiales sur le
déve~oppement de l'agricultu~e
~lta!que. Le pre_ier exemple sera de l'U.V.O.C.A.K.(I) qui est déjà bien implan-
té dans certaines zones rurales et e~pleine expansion. 1,e deuxième exemple seDa
celui de l'A.V.W.(2) , en cours de réalisation et qui se prolongera sur plusieurs
années. ~o~s les aborderons successivement.
Faragrapht! l
1 <rrpnisme Régionaux de Développement
~O.R. D).
Ces organismes ont été mis en plaoe au lendemain
èQ àaulèvemen~ populaire
du 3, JJanvier. 1966: afin dit-on d'aider les paysans à mieux pro:duiire pour améliG.-
rer leur niveau de vie.nG~tte initiative, qui semble en apparence o~ig~nale, est
en fait une proposition de ID3rnard de GieraDdin expert:, français venu en Haute-Volta
en 1965" (3).
Recourant chaann un secteur géographique homogène et ~ui présente, des données
sensiblement identiques sur le plan physique e~ socio-économique, ]~O.R.D. p~
met à la fois une vulgarisation plus facile des .ouvelles méthodes de culture
et une paD1icipation active des campagnes à la politique nationale de développe-
ment.
En 1967 ,. furent créés les premiers O. R. D. dont seux de Ouagadougou, Dédoug-.,
Kaya, IKoudougou et Ouahigouya. Il faut remarquer que c'est aussi la période d'é-
laboration
du plan cadre 1967/70.
ujourd'hui, il existe onze. De façon générale la véritable mis6ion assignée
B,
aux a/R/D/ dès 1966 est celle correspondant aux structures administratives qui
doivent marquer le départ de la plan~~cation et la coordination du développe-
ment agricole(I).
Dans notre exposé, nous chercherons à définin la fonction et la place que
joue l'O.R.D. dans le développement rural. N~us traiterons en prem'ér lieu des
données communes aux O.R.D. et ensuite nous verrons les résultats que l'on peut
tirer à travers l'exemple de l'O.R.D. du Sud-Est (Fata N'gourma.)
(1) Rapport Terminal ONU
"la vulgarisation a!ricolell-FAO, pour le gouver1lement
de la Haute-Violta.

AI - ~tatuts et esprit de l'O.R.D.
1'O.R.D. se veut un "instrument de promotion rurale":, comme le dit PH. DE
LIPPENS(r), cependant i l reste à savoir de quel type de promotion i l s'agit.. Il
n'est pas rare de constater un décalage entre l'esprit d'un organisme et la réa-
lité de son action. Cependant, nous se~ons mieux à même d'en: apprécier par les
~aits après l'exposé des enquêtes de terrain.
Depuiis 1963, on s'est penché sur la transi ticm à opérer pcmr aller d "une agri-
culture primiitive vers une agriculture moderne. Le rappœrt ONU-FAO, suscité,
présente danSfette optique les mQdifications que le mœnde paysan doit engage~
p~ accèder &un type d'agriculture qui ne serait pas "sans oonnaissance sftre
et éprouvée, sans méthode", en l'occurrence l'agriculture primi~ve.
En matière de"mGdification, on parle de "données psycho-sociales" t
- G:apacité du paysan de s'adapter au changement.
- Laisser le mode de vie traditionnel pour celui enseigné par de jeunes
techniciens.
Et de "données économiques" 1
- Pratiques agricoles pour une meilleure rentabilité;
~ accepter les techniques culturales et le matériel nouveau;
- accepter le crédit ;
- accepter l'intélration de la culture avec l'élevage.
Ces termes, san~tre très précis expriment déjà ce que l'on peut appeler
l'opti<m rDOderniste que lesresponsables veulent fond en
sur l'exp,lo:iitatiion fami-
liale devenue rationnelle.
L'article IV des statuts des O/R/Di insiste sur le rôle d'animation et de
coordination avec toutes les instances concernées par ce développement le perfeo-
tionnement est aussi un axe d'orientation très marqué au travers d'une politique
de vulgari~ation qui se définit comme suit 1
(1) PH. LIPpmS
Influence des micro-réalisations sur le développement généra]
de la Haute-Volta..

- 200 -
"vulgarisation: système d'éducation extra-scolaire ou informet@e destinée-
principalement aux populations rurales en vue de les aider à s'aider elles-
mêmes à élever leur standard de vie. Cette éducation est basée sur l'ensei-
gnement d'un ensemble de pratiques améliorées, relatives à l'agriculture-
et aux foyer•• Cet enseignBment tient surt~ compte des besoins
( '
conscients des populations qu'il fautformer"(I).
1'O.R.D. doit égalemen~
être un agent de recherche appliqu~e, en pratiquan~
des éssais culturaux dans le prolonfement des instituts de recherch&.
>.>
~ le plan économique, les ORD doivent participer à la diffusion des cré-
dits en liaison avec la banque ~ationale de développement et organisev des struc-
tures de conditionnement et de commercialisat~on des produits (collecte- stoc-
kage - distribution••• ). Le domaine économique constitue de fait une urgence
car une politique de développement conçue dansl'optique des planificateurs ne
peut avoir l'effet si elle ne s'attache pas à(2) 1
l'écoulement des produits à des prix rémunérateurs;
l'approvisionnement efficace en crédits et en facteurs de productionl ;
une politique des prix et de subventions susceptibles de favoriser l·~~
croissement de la productivité ;
- une meilleure protection contre la concurrence des produits agricoilles
d'importatiotfè,
Aux vues de Bes objectifs, il semble que la voix officielle atten~ ]e déve-
~oppement d'une agriculture, rationnelle, efficace et source d'expnrtatiŒns.
Cette politique ne doit pas cependant remettre en cause une structure d"exploi-
tation c qui doit rester familiale et communautaire. N,ous verions que ces deux
choix constituent en fait une contradiction.
Le terme de développement communautaire est fréquemment employé pax les res-
ponsables. Rous avons pu trouver, quant à sa définition, diverses reflexions
intéressantes à livrer :
"le développement communautaire, c'est encourager la participation du peu-
ple à l'identificaion et à la solution des problèmes loca~ Le village
constitue la cellule de développement communautair en tant qu'unité de
base des services de développement"(3).
r) Rapport, ONU-FAO (déjà cité). Po \\CS~
~) Source : "Perspective~ d7 dével~ppem7nt agricole à long terme de Lt Ibute-VüLta"FAü 1915
~) Source: Rapport du Ihch~gan Un~vens~ty dans l'ORD de Fata N;'Gourma;
Jan.I916.

..! 201
Dans le document d'introduction au projet de Kantchari, la S.A.E.D. énonce
les principes de bases suivantes
1
1
- le développement communautaire est une méthode de participation da ]a
population à sa propre évoluti'on.
_Les projets de développement doivent répondre aux besoins exprimées et
hiérachisés par la population
1
- réalisation des Iprojets, doit se faire avec l'adhésion et la paritiic:bpati:ii0il
r
1
de la population sous le cont61e des agents d'encadrement à travers des struc-
tures communautaires : groupements villageeiis, grpupements de femmes et de jeu-
nes"(I)o-
1
Les OoB.D. sont nés avec ces grandes orientations pour l' dévelQPpement
1
rural du pays. Afin d'assurer la charge de ce programme, les O.R.D. doivent dis-
poser de moyens efficac,es. Dans les paragraphes suivants, nous abordons les é]é-
i
ments communs dont disp:osent les ORD lTOlPr' répondre à. leur vocation de dévelop-
pement.
1
BI - Moyens d'intervention des O.R.D.
a) - Le territoire d'intervention.
Le pays est di~sé en II ORD qui correspondent à des Départements sur le p]an
administratiGoCes unités géographiques constituent généralement un ensemble eth-
nique et géographique aSBez homogène. On peut donc dire que chaque ORD possède
i
une certaine identité
caractéristique du milieu où i l opère. L'ORD a un siège
dans la principale ville d'où sont coordonnées toutes les opérations sous la
responsabilité du direc~eur. La structure ~lontairement décentralisé& de l'6RD
permet une indépendance d'action assez large pour ]a direction. Dans cette aire
géographique, on a ensuite des secteurs à la tête desquels il y a un responsable
chargé de coordonner le1travail des agents de ternain~ Des encadreurs - il exista
aussi une subdivision dés secteurs à savoir les sous-secteuns.
(1) Source
-Programme de développement rural de la rét ion de Kantchari?' ; Re-
publique de Haute-Volta, Ministère du développement ruaalJ,ORD
de L~Est
S.A.E.D. Juin 1976.

- 202 CD
b) -
~ru~u::!!.-~' anim.i,!~_!es agents d'encadrement.
~i nous partons des directives pour le développeaent, les structures d~ani­
mation doivent répondre à la politique du "développement rural intégré'" qui doit
engendrer un "système de changements sociaux, culturels et institutionnels ap-
parentés,dont tl'objet est d'améliorer le bien être matériel de la pCllpulation
rurale en matère d'alimentation minimale, d'habillement, de logement: et de ser-
vices essentiels"(I).
L'action des agents de l'ORD peut donc aller très loins auprès des p~sans.
Ces recommandations dépassent d'ailleur8 les notions de rentabilité ou de via-
bilité des exploitations. Il s'agit d'engager une action gloiale qui peut même:
déborder le cadre strictement agricole (santé" éducation), bien qu'une limite
se soit efftctivement pa~acile à définir. Dans le rapport du ~~chigaa 5eate
University, l'encadreur doit encourager s
111'adopition d'une serie de techniques améliorêes, pesticides, engrais,
semis en ligne, ••• et dans certaines régions, la traction animal~ Il
doit aussi prendre part aux campagnes d'achat et contribuer à la forma-
tion des gro'\\Jpements villageois" (déjà cité).
Les groupements villageois sonifies structures d "encadrement des paysans, aj.
travers desquels l'ORD peut atteindre le paysan. L'adh~sion au groupement est
libre. En général,son activité se .développe autour d'un champ cultivé en. commun
dont le produit des cultures (généralement de rente) sert à alimenter una caisse.
Cette caisse constitue un moyen.-' de financemment à crédit du matériel, des se-
mences ou des traitements fournis par l'ORD.
Pour l'animation des jeunes, des clubs ont été mis sur pie~ Cependant, le
manque de stabilité de la jeunesse qui exprime des besoins auxquels l'agricul-
ture ne peut subvenir, handicape, lourdemen~ la bonne marche de ces clubs dits
"4 c". Ce terme "4C" vient d'une devise très expressive quant,à l'esprit qu'cmt
voulu donner les responsa~les aux clubs s
j'engage mon ~orps à de plus~~rands services,
j'engage mon Coeur à la fidèlité ;
j'engage mon Cerveau à des pensées plus claires;
j'engage ma
~oopération pour une mission parfaite et pour le dévelop-
;-ement de mon Club village et pays.
(I \\ Recpmmandation-AlD-FAO
( cité dans "Demain les P~sans d'Afrique"
Bellard
,
et B~nnin - Février 1919.

- 20) -
Ces clubs peuvent comprendre 10 à 15 membreSfonstitués en Comité directEl'llX, de
product~on ,des
ac~ivités sociales et des activités civiques.
Pour les femmes, les ORD ont des projets de groupement avec des animatrices
rurales. La tâche des animatrices serait d'apporter une information sanitaire
et de~utrition. Les femmes exerceraient en] coroml un des activités formatDices
pour la vie familiale et leur travail. A ce jour il semble qu'en général le peu
de moyen dont disposent les animatrices ne leur permet pas d'être actives
SUD
le terrain. Les conditions de la femme dansle milieu traditionnel, où son temps
libre est extrêmement réduit, jous aussi dans ce sens. D'ailleurs l'exemple d'un
calendrier des activités journalières pendan*. la saison agricole de la femme
se passe de tout commentaire.
CALENDRIER DES ACTIVITES JOURNALIRES PEllD.ANT LA SAISON S:EX::HE
(c'est-à-dire d'Avril à janvier)(I).
Hmsaires
A

- 5 h
,travaux champs personnels
s P'ilage du mil
6h
, Oorvée d'eau
: Corvée d'eau
6h30 àt 7 h
rrépart pour l'exploitati~
1 Cuisine
familiale,
.
s
- 9 h
.
: Départ pourU' exploHattion fam:ii.li;al
13 h
, Repas aux champs
s repas aux champs
- 14 h
Reprise
des travaux
: rll'frise des travaux
16 h
, arrêt çles trayaux
, arrêt des travaux
: ramassage du bois
: ramllasage du bois
- 17h30
: corvée d'eau
corvée d'eau
:
, moulure du mil
18h38
: 'l'ravaux divers
Cuisine
20 h
repas
, repas
:
A = Emploi du temps de la femme quand elle n'est pasde corvée pour la cuis~ne
B
~mploi du temps de la femme quand elle est de corvée pour la auisine.
Cet emploi du temps es t quoditien pour 60 ~ des femmes de l'A/vivi,
celles qui n'ont pas de coépouseso
(i) S.A.E.D. : Etude sur les besoins des femmes dans les villages de l'AiV et
proposition d'un programme d'intervention Aoftt-Avril 1977.

- 204 -
- r
A propos de cet exemple revoltant retracant le calendrier journalier
de la femme dans le cadre des AVV? on peut remarquer de ce calendrier i l le~t
que la femme se trouve sur pied de 5 h à 20 h, soit 15 heures par jour e~
105 h par semaine.
c) - Leffi mepens financiers ..
Comme dans la plupart des pays pauvres du tiers-monde, nous avons vu que
les organismes de développement doivent attendre des finances extérieures.
En général, les ORD disposent de deux moyens pour s'assurer des ressources :
Un autofinancement issu des opérations commerciales réalisées par l lIaRD
entre les paysans et les organismes de fourniture et de commercialisati~n des
biens agricoles.
- Une source de financement étrangère, en· t~aboration directe avec liaRD.
Dans ce dernier cas, un contrat d'assistance est passée entre l'organisme '~an­
cier et l'ORD. Ce contrat, déterminé dans le temps, présente bien sar les moda-
lités de versement mais surtout, i l précise les orientatiions, voir les affecta-
tions de cet argent. La venue d'experts,chargés de concevoir et de suivre la
..
rélisation des projets, est en fait généralement acquis. La présence de ces spé-
1
cialistes, qui: ne sp~~
pas toujours au fait des.-alités locales, est souvent
une source de heurts avec les responsables nationaux qui=:aspirent à une plus
grande autonomie d'initiati~e plus souvent dans des opérations obscureS.
La possibilité d'autofinancement des ORD ne dépend pas directement d'eux-
mêmes mais aussi des dispo~itions~égislatives qui leun sont accordées au niv~';
de l'Etat. A ce sujet, pluJe~rs étapes ont été franchies sans donner toute sa-
tisfaction :
- De 1968 à 1970,~ les ORD obtiennent le monopo:le sur le commerce des pro.-
duits primaires.
- D~ 1971 à 1974, suspension officielle et théorique de la concurrence pri-
vée des commerçant~
- à partir de 1974, ce monopole devait permettre aux ORD de s'autofinancer.
En effet, dans cette situation de' .l1IlOnopole, les ORD sont en mesure d' im-
poser une marge de prélévement nécessaire à leur autofinancement. Ce prélévement

- 205 -
se fait d'ailleurs sans grande contestation
les p~sans n'~ant plus.qu'un seu]
9
interloculteur pour lequel ils ignorent ses mécanismes de mêmes que les agen~s
de traitement ou de transformation des produits agricoles.
H~en s~r, ces mesures risquent de compromettre le peu d'estime des paysans
pour 1'6»D et on voit difficilement comment l'ORD pourra ensui~assurer son
rÔle d'assistance auprès des rura~ En dépit, de l'application du ~rincipe de:
l'impôt indirect sur la production, l'ORD dispose des fonds insuffisants pour
assurer son autofinancement et l'Etat accorde à ce dBDnier les subventions in-
dispensables pour la réalisation des programmes.
Il arrive aussi et ce qui est fréquent d'ailleurs, que l'ORD reçoive des
dons, subventions ou toute autre ressource des collectivités publiques oÙ~e.
personnes physiques ou morales publiques ou privées. Presque tous les ORD béné-
ficient de l'assistance financière du F. A. G, ciu F.E.D ou de la B.l.R.D.
Dans les faits, aomment se présente l'ORD du SUd-Est (FADA W'GOURMA).
l:/ - L'O.R.D. de Fada N 'Gourma.
L'ORD de fada N'ŒDurma est à l'image du modèle général des ORD cependant,
il est intéressant
de prendre connaissance d'un cas particulier, permettant
ainsi de voir la concr~tisation de la structure ORD.
Cette présentation nous
permettra aussi de mieux situer le rôle èt l'orientation que peut d~er II~RD
de Fada N' GtlUrma.
a) - Les rapports de coopération avec l'étranger
:L'ORD a pu étendre so n champ d'activité à partir de 1975/1976 , période
où l'org~nisme a reçu l'assist~ce de la FAO, llAID et de la CTS(I).
Ces organismes ont pris une part très importante dans ;IlaŒdéfinition des
stratégies de développement e~ntégrant au sein de l'administration ORD leurs
experts agronomes, zoot~hniciens, économistes (pour la gestion, le crédit, la
(1)
C.T.S
Coopération technique Suisseo

- 206 -
commercialisation) et sociologues (pour la vulgarisationpt l'animation). L'or-
ganigramme de l'ORD de l'Est de Janvier 1976 (mission CTS du 5 au 13 janvien
1976) demontre bie~e rôle et la place de ces agents. \\
~ous l'impulsion de ces experts, représentant des sources non négligeables
le

,
~e f~nancement, des études de milieu et de potentialités ont ététealisées. Au-
jourd'hui, ce travail n'a pas encore porté tous ses fruits mais on peut déjà
supposer que l~accornpJ.issement des objectifs définis aura des conséquences in-
discutables sur la région~
b) - Mode d'intervention et_types d'actions de l'ORD auprès des p~s~
En se référant à l'ensemble des documents relatifs aux petentialités agri-
coles des régions, on remarque que l'identification de l'ORD à la région est
courante. Plus que la région, c'est l'ORD qui dév:ient zone de développement.
L'orientation est donc axé sur un modèle entreprise-région, comparable à une
société mixte. Plus que le paysan ou la région, c'est l'ORD qui s'assigne des
objectifs comme toute entreprise, il faut trouver des dé'ouchés, aussi le docu-
ment du M.S.U(I) fait-il l'analyse des possibilités de ventes à l'extérieur des
produits cultivables (mil, sorgho, maIs, niébé, igname, fruits et legumes,ara-
chide, sésame et coton)o Puisque semble-t-~l, des possibilités existent, un pro-
1
jet de lancement a été conçu avec une politique de crédit pour l'equipement des
paysans. Hbur ce faire, l'ORD dispose d'une enveloppe g.Gbale de 260 millions
de FCFA fournie par l'AID. Ces crédits seront accordés pour l'achat de ma~ériel
agricole sur une durée de cinq ans avec un intérêt de 8 ~.
Pour l'assistance aux paysans, un budget de formation des encadreurs ORD
a été débloqué, le montant est de 160 millions de FCFA environ. L'objectif assi-
gné sera de réaliser un développe::1ent rural où "le. paysan gourmatché doi...it ê"bre
considéré comme une partie prenante d'un système de production et de commercia-
lisation. Les décisliions de production seront raisonnées en fonction des carac-
téristiques techlJ.ique, physiques(sol) et climatiques, mais aussi du crédit dis-
poni~le et des débouchés de marché. Ces orientations ont été definies p0u~une
décennie.
(1) M. S.U.
Michigan State University.

- 207
On èl. Inentionné à plusieurs reprises
la nécessité d'associer le paysan
en tenant compte des données sociales et culturelles traditionnelles qui sont
les siennes. Cependant, il ne nous a pas semblé que dans cette volonté de déve-
loppement, il se dégageait un souhait réel de donner au paysan une tribune qui
lui permettrait de négocier son avenir sur un pll.edJ d'égalité avec les agents
du développement rural. Bien sûr, les paysans ne disposent pas de tous les moyens
pour promouvoir leur évolution, cependant, ne pas compter sur leur participatio~
active risque fort de con6uire à une impasse. De part, il ne faut pas se troppe~
sur la nature d'une participation pré-orientée, où le chemin est droit tracé
cW
sur un modèle/productivité et rationaliste. N'y at-il pas là en effet une con-
tradiction, que nous avons déjà souligné entre les objectifs de la politique
de développement communautaire, fondé sur le maintien des structures d'exploi-
tation traditionnelle et la participation paysanne? Cette contradiction, qui
:vn~
met en jeu\\deUx - ou deux choix - se fait au détriment, dans les faits, de la
seconde ; à savoir que le développement communautaire dev.ent un moi avec: lequel
on habille les projets dont les objectifs s'opposent, ne serait-ce que parce
qu'ils sont décidés par d'autres que les paysans~
Des projets conçus au niveau de chaque ORD se double des projets à enver-
gu:res nationales que nous allons maintenant aborder afin de montrer la non,rup,..
ture qu~~ existe entre prGjets de niveau micro-dimensionnels et macro-dimmen-
sionnels. Au contraire, ils sont tous les deux représentatifs d'une même stra-
tégie, dans une même réalité sociale les paragrapl)es qui suivent, nous permet-
tront d'examiner deux exemples de projets qui constituent à nos yeux un "parii"
pour l'avenir. Il s'agit de 1.'U.V.O.C.A.M. qui est déjà bien implanté dans cell"-
taines zones rurales et en pleine expansion, et l"Â. V. V, en cours de réalisation
et qui se prolongera sur plusieurs décennies.
PARAGRAPHE II
L'UNION VOLTAIQUE DES COOPERATIVES AGRICOLES ET MARAICHERES
(U.V.O.C.A.M)
L'UVOCM~ regroupe une quarantaine de coopératives reparties dans toute la
Haute-Volta. Elles participent activement au développement de la culture mara1-
chère. Née en I968,elle n'a cessé de connaître une constante progressian. Nous
rappellerons quelles ont été ses origines, quel est son fonctionnement et quel]e,
politique elle a suivi à l'égard des adhérents. Nous évaluerons ensuite les con-
séquences pratiques de cette Union vis à vis de ces mêmes adhérents.

_ 208 -
AI - LEa-ORI~ES, DE L'U.V.O.C-A.M.
L'U.V.O.C.A.M a été crééèpour assurer la commercialisation et l~approvision­
nement des paysans quipratiquent la culture mara1chère sur les pér1mètres
irrigués. Elle doit aussi contribuer aux études techniques pour la réaltsationl
des aires de cultures. Entre l'UVOCAM et les coopérat ives loclales, i'l exis#e
une structure intermédiaire, les copératives régionales.
C;omment sont né~s ces coopératives, et ensuite le souci de créer une insti-
.
~
tutio!' de conditionnement et de commercialisation? mous nous Ml referons pas
à "histoire de toutes les coopératives puisqu'elles se sont constituées indi-
viduellement et donc de manière diffé'rente. Elles ont vu le jour dans' les sec-
teurs où il était possible d'iriguer, c'est à dire là oùil existe de l'eau sto~
liée par des retenues en aval desquelles les amènagements sont possibles.
Ce sont, par exemple, des responsables paro:i:ssiaux.~qujj, pour rép~mdre aux
bésoins des jeunes paysans, en instance de partir, la:'lal:ent l'idée de la aulture
mara~chère. Des jeunes ~olontaires acceptent alors de mettre en valeur quelques
hectares à proximité d'une reserve. Il faudra aussi assurer la formation des
!
volontaires pour la culture irriguée(I). La réussite des premi~res années pousse
ensuite d' aufres personne' à SI engager dans ce genre de travail!. Les résultats
devenus encourageants, la surface cultivée et le nombre de candidats augmentent
très vite. La création d'une coopérative se justifiera ainsi. C'est alors que
la naissance de quelques coopératives ici' et là a provoqué la création de
l'UVOCill~. ~n effet, créer des insfrastructures (barrages, périmètres, ••• )
est
un point, mais développer des dévouchés commerciaux est tout aussi nécessaire ;
les petites coopératives ne pouvaient seulement qu'assurer une commercialisation
locale.
L'UVOCM1 et les premières coopératives sont donc pour ainsi dire nées simul-
tanément, c'est seulement ensuite que le nombre de coopératives à l'intérieur
de l'UVOCAM a augmenté.
(1) au début, des coopérants animateurs avaient créé un centre de perfectionne
ment de brousse. Aujourd'hui, l'UVOCM~ a mi s en place une politique de for-
mation des paysans que nous verrons par-la suite.

- 209 -
BI - ,LE fONCTIONNEMENT ET LA POLITIQUE DE L'U~V.O.C.A.M.
On l'a déjà dit, les coopératives locales sont regroupées en coopératives
régionales (1) qui sont chargées de centraliser les diverses productions· pwr
ensuite les alD8ri.er au siège de l'UVOCAM à Ouagadougou, d'0ù elles seront condi-
tionnées et commercialisées.
Aussi bien au niveau local que régional, les coopératives possèdent un con-
seil d'administration, où tous les paysans producteurs sont~~résentés. tes paysans
participent également au consëil d'administration de l'UVOCAM.
Au sein d'un périmètre irrigué, chaque paysan dispose d'une parcelle que
lui rétrocède la coopérative, qui en reste propriétaire. Un producteur peut aussi
être renvoyé (pour ne pas -dire licencié) de sa c00pérative, s~in ne veut pas
satisfaire aux normes fixées par le conseil d'admininistration, lui~même resp0n-
sable devant l'UVOCAM de ses adhérents. Nous indiquerons p0pquoi cette norma-
lisation du produit est demandée. La situation juridique pourl'Union, est telle
que toutes les coopératives qui y adhèrent ont
~unstatut d'entreprises privées
dans un certain sens, les producteurs sontfes propres empl8Yé~ de la coopérative~
a donc une structure indépendante et l' objec~-if de l'UCOCAM seraiit que ~è:lhacune
puisse s'autofinnacer. Aujourd'hui tous les principaux flux d'angent passent
par l'UVOCAM : puisque c'est elle qui assure la commercialisation et remet les
bénéfices. Pourl'avenir, il est souhaité qu'une plus grande décentralisation
intègre mieux les paysans aU]( eesponsabités struaturelles. En: parallèle à cette
participation paysanne, l'UVOCillfl et ses coopératives entretiennent des nélations
directes avec l'administration.
Localement, des relation~techniques sontftablies avec les O~. Des enca-
dreurs spécialement formés viennent aider les paysans et les suivre sur le plan
des techniques c'_lI turales. ê·' est d'ailleurs le
seul niveau où l 'ORD peut inter-
venir dansfes affaires intérieures de l'UVOCAM et des coopératives.
Dans les coopératives régionales, lesORD peuvent néanmains s'intègrer mais
en tant que producteur (ce qui veut dire que l'ORD
prend en tutelle des produc-
teurs) • La voix d'un paysan est alors égale à la voix de l'ORD. Dans.ces mêmes
coopératives régionales, les sous-préfets font partie des comités de gestion,.
mais ils ne participent pas aux conseils d'administrationo

- 210 -
Le directe?r de l'UVOCAM
est un fonctionnaire détaché du minsitre de l'agri-
culture et payé par celui-ci. En effet, l'Union est obligée d'entretenir des
relat iom;avec les milieu: x ministériels pour ce qui conèerne en particulier ses
financements.
L'UVOCAM et les coopératives ont beso~n de bâtiments et de materiel powr
travailler et se développer. Or, Elles n'ont pas de ressources suffisantes pour y
-subv~nir. Nous retrouvons une fois de plus le problème de la remunération de .
la production, incapable d'assurer un autofinancement correat. L'Union présente.
alors un projet au menistère de l'agriculture (développement rural), qui va le
transmettre au ministère du plan puis aux finances.
Il est ensuite adnessé au
Trésor public où le financement est mis à l'état de la dette publique. Le ma1-
tre d'oeuvre restera l'UVOCAJ.1. En ce qui concerne les amènagements propres à
une coopérative, celle-ci se met en rélation avec un ~g&Bisme de financemènt
ext@rieux dt l'UVOCAM.
La fonction principale de l'Union est, comme on le sait, de conditionner
et de commercialiser les produits. Quelle est donc sa politique dans ce domaine?
S,ignalons tout d'abord qu'une part de la production est consommer locale-
ment; ce sont les paysans eux-mêmes ou leur coopérativ:e qui s'en cha.I!gent. Cette
co~mercialisation est essentiellement tournée vers l'exportation qui se fait
surtout vers l'Europe~~ assez faciles à trouver ~ les produits légumiers
arrivent sur le marché en contre-saison; n'oublions pas en effet que les cul-
tures maraîchères se pratiquent en-saison sèche à partir de décembre au mois
de mai.
Face à de tels marchés, si ouverts soient-ils, l'UVOCAM a mis en place une
politique d'approtdsionnement assez rigoureuse pour ne pas se laisser sur~assen~
Un accent particuliér est porté sur la normalisation et la qualité des produits.
Quand on sait les exigences du consommateur européen et les règlements p~tosa­
nitaires aux frontières, l'UVOC.~~ se doit de prêter un maximun d'attentiono

- 211 -
L'U.V..O.C.A..M-opère en
trois temps a
- Elle demande un planning de production à chaque coop.érative z nature des
produits, volume et surface de production.
- Elle ajuste ces propositions avec la réalité possible et s'accorde ave~
la coopérat ive.
- Elle recherche ses potentialités commerciales d'écoulement et arrête dé-
finitivement son plan d'approvisionnement par les co~pérative~
Pour faciliter les œpérations de gestion au sein des coopératives, l'UVOCAM
y déléguera à sa charge un comptable.
Un dernier point que l'on peut souligné, c'est la politique de formation
qu'essaie de mettre en place l'Union depuis quelques années. Elle estime impor-
tant que le développement et l'extension de ce type de coopérative passe par
les paysans. C'est donc à eux d'acquérir au mieux les qualités nécessaires à
leur travail. Pour cela, elle vient de monten'un centre de formation qu~ accueille
des élèves sur trois ans. Il y a trois échelons de formation
1
année 1
année II
année I I I
(-F-o-r-m-a-t-i-o-n-d-e-b-a-S-&-.--)(--=F'-o-r-m-a~t~i-o-n-a-p-p"'=l~i-q-u-:é:-e--)(--~P-e-r~f:-e-c-t-i-o-nn-e-m-e-n-t--)
Une selection a été instituée au début de chaque année; cette sélection
est faite plus en fonction des besoins qu'en fonction des aptitudes.Il ne peut
pas y avoir plus de paysans formés que de périmètre irrigué, en proporti,on. La
sélection entre les années ne laisse pas le paysan éliminé sans format~on reQon-
nue. L'agriculteur qui part au bout d'un an
est considér~ en mesure de conduire
un périmètre en tant que travailleur. Après deux ans, il peut prétendre à l'en-
cadrement technique au niveau de tout le périmètre. Enfin, les trois années lui
donnent une ~ompétence d'animateur de coopérative.
L'enseignement que l'on peut donc retenir, c'est le souci particulier de
l'union quant à la place des agriculteurs dans~,son appareil. Ceux-là peuvent
participer à l'admnisistration de leurs coopératives,même s'ils font appel à
des personnes extérieures penn assurer certains financements et la commercialt-
sation. Au demeurant, n'est-ce pas de cette façon que vivent et sont administrées
les coopératives agricoles dans les pays européens?
S,i une npgligence de la base paysanne survenait, il serait clair que ceux

- 212 -
qFi oublieront que l'U.V.O.C.A.M est, avant tout, un service pour les ~sans,
reduiraient d'autant l'espoir que soulève la poursuite de l'expérience.
C/ - L'U.V.O.C.A.M.
: UNE C~OPERAT~~E!!TES, MAlS EST~E L'ESP<DIR DE DEMAIN?
L'originalité de ces cultures maraîchères comme on l'a dit, c'est qu'elles
se pratiquent pendant la saison sèche. Elles ne se font donc pas au détriment
des cul~ures vivrières qui se font en saison des pluies. Il importe que la mise
en place des périmètres pour la culture maraîchère ne soit pas seulement une
source de revenu monétaire. En effet,cette production sert déjà un peu à la con-
sommation locale d'une part et les activités sur les périmètres prolongent la
période de travail jusqu'à plus de six molle d'autre part.
L'UVOCM~ présente cette originalité. Toutefoi~ nous sommes en droit de nous
interroger sur le bien fondé de l'ex~~ation des produits vers l'Europe. Dans
un certain sens, n'est-il pas contradictoire, dans un pays comme la Haute-Vol ta
où la famine et la malnutrition sont permanentes, que des haric*i* vers franchis-
sent les mers pour satisfaire la ménagère européeenne, toute heureuse de trouver
des produits frais sur le marché au mois de ~anvier ? Surtout quand on voit l'in~
térêt d'une telle alimentation riche en protéines pour des enfants.
La &onsommation intérieure se situe aujourd'hui exclusivement autour des
lieux de production ou dans les villes. La majorité des voltaïques ne sont pas
so\\rables au prix que pratique l'Union pourl' exportation. Mais ne serait-il
pas
préferable de baisser justement ces prix pour .. la consommation intérieure, qu~tte
à diminuer d'autant la rémunération à l'unité pour les producteurs et limiter
un certain type de modernisation onéreux qu'on remplacerait par une main d' Q:euvre:
l
mieux organisée. En contre partie, oette augmentation de la demande sovable pou-
sserait à augmenter la production et rétablirait le manque à gagner pan unité.
Nous n'émettons ici que des idées qui mériteraient naturellement un appro-;
fondissement beaucoup plus sérieux; ce n'est pas l'ob~et de notre étude.. Notlte
dernière appréciation ~i touche à la politique de l'UVOCAM concerne les produc-
teurs.àujourd'hui, son activité regroupe environ 5 000 travailleurs, soit une
estimation de l 000 familles. Comment vivent ces familles paysannes?

- 213 -
En trois mais et demi de travai~ un préimètre peut
rapporter·jusqu'à
325 000 FCFA (soit 6 500F) par famille. N~tons pour comparaison qu'un enc'adreur
perçoit environ 150 000 FCFA/an (soit 3~OOF). Aux vues de ces chiffres, on cons-
tate qu'une monorité de p~sans en Haute-Volta sont susceptibles de g~er plus
que le salaire d'un fonctionnaire, mais nul doute qu'une telle lmunération
dépasse largement to~s les espoirs. ~u stade actuel du développement de l'UVOCAM
on remarque donc une héténogénéité économique au sein du monde p~sam entne les
détenteurs et nondétenteurs de droit au travail sur les périmètres.
Les revenus vont
certes se ré~tir dans toute la grande famille ; le phéno-
mène peut faire aussi tache d'huile et, si les périmètres se développent, d'au-
tres paysans s'y engageront, dans la mesure des capacités de vente; et puis
l'incidence sur la création d'un marché local de matériels divers Ge fera res-
sentir; la popula~ion se concentrera dans chacune des zones. L'UVOCAM souhaite
d'ailleurs travailler sur des zones à forte concentration d'activités mana1chères
pour baisser les coüts d'acheminements et de services; les infrastructunes se-
condaires, alor~ise en place seraient d'autant mieux utilisées que La popula-
tion serait plus regroupée. Par conséquent, le "p1:ivilège" des populations pro.-
ches des zones humides (c'est à dire là uù on peùt faiTe du mara!chage) pourrait
s'estomper quelque peu par toute cette dynamique. ~e pro~ème n'en est pas pŒUr
autant diminué.
Pour nous resumer, l'UVOCAM peut apparaltre a priori comme une expérience
originale dan~a mesure où une participation réelle des paysans à l'admininis-
tration de ses activités existe. Par contre, l'émergence relative de paysans
privilegiés et l'exportation de produits mara1chers constitue une arme dangereuse
qui risque de faire perdre le pouvoir aux paysans ou de le donner à une certaine
couche de paysans dont les intérêts n'iront plus dans le sens commun à tous les
travailleurs de la terre.

- 214 -
Paragraphe 3
L'AMENAGEMENT DES VALLEES DES VOLTA
A.V.V.
Y
L'oll;jectif est., de pouvoir de....congestionner certaines régions du pays parti-
culièrement le plateau Mossi (certaines densités peuvent àtteindre 100 hab./~),
alors que dans certaines régions (les bassins des 3 grands fleuves r les trois
Volta), les densités dévlénnent très faiqle~
Cette forte concentration sur le plateau Mossi pousse à la surexplontation
des sols déjà trèsfragiles. La sécheresse n'a pas amélioré la situation écono-
mique de cette région et accélère les mouvements migratoires vers les pays
côtiers. Il en résulie donc une perte importante du potentiel d'activité et du
dynamisme du milieu '.rUral.
Dans certaines régions plus arrosées et donc plus fertiles, la simulie, vec-
teur de l'onchocercose, sévit durement et en particulier dans les vaIlles des
trois volta qui recourent avec leurs bassins versants 2 700 000 hectares, soit
10 %('DU
territoire aational. Les populations rurales ont quitté leur village
devant les menaces de la oeoité des "rivières"..
L'ensemble de ces oonditions (zone pauvre surpeuplée
et mone sous peuplée
suite à l'onchocercose) a conduit la Haute-Volta, en lieA avec six autres pays
africains, également touchés par ce 'lé au , à demender aux organismes internatiQ-
naux de vient vouloir l'aider à entreprendre une campagne d'éradication. Un ~o­
gra'lme ne pouvait se justifier que s'il s'accompagnait d'un projet de réaména-
gement du milieu.
et des terres agricoles pour éviter la réapparition de zones
incultes. Cette dernière condition nécessité donc une politique de repeuplement
qui en fait sera une politique de contrÔle des migrations, du centre vers les
volta. On estime qu'environ 700 000 personnes peuvent être installée dans les
vallées des volta. L'A.V.V prévoit l'installation d'un nombre sensi~lement égal
de personnes (650 000) pour une période de 15 à ZO ans, de la façon suivante r

Secteurs
PQpulation à installer
- V:allées des Volta,; Rouge et Blancbe
175 000 (260 villages)
- Vallée s de la Vri:àa Noire
115 000 (260 villages)
- Pé~imètre de Fagré
200 000 ( 300 villages)
- P{rimètre de Tanema
40 000
(60 villages)
-Périmètre de Karaniasso
120 000 (120 viJJ1ages)
Source : WORLD HEA1TH Organization , Rapport annul 1977 - Programme da )Jutte
contre l'onchocercose dans la région du bassin de la Wolta -P.36.
~Iest ainsi qu1est né le projet dé~énagement des vallées des trois volta.
Nous formulerons les objectifs qui ont/retenus. A la suite de celà et à partin
des résultats attendus, nous porterons quelques commentaires,
tout en émèttant
des reflexions sur les insuffisances du projet dans l'approche de certains pr~
blèmes.
A/ - LES PROJETS DU PROJET.
Le programme d'aménagement des vallées des volta est une suite logique de
,
la lutte contre l'onchocercose, quant aux objectifs laissons l'Autorité des
A.V.V donner des pré4isions qui suivent (1).
- L'A.V.V! a pour mission de promouvoir, coordonne't et exécuter toute,açticm
concourant au développement harmonieux du Bassin des Vol ta. •• Cette mise
en
valeur est une opération de dévelop·,ement intégré touchant diverses aci;ivités 1
développement agricole, industriel, touristique et navigation•
• Pour ce faire, l'A.V.V vise à repeupler les Vallées des Volta dont la
densité actuelle de population est de un à trois habitants au Kme, en organisant
les transferts de population à partir de certaines régions, notamment le plateau
j,lossi, et en deviant une part ie des migrants vers une zone dl accueil en terre
volta!que ou terre neuve•
• Mettre en valeur les terres fertiles de ces vallées en emplSlfant des
méthodes modernes de cultures et en assurant eux migrants, des infrastructueBs
de base (route, hangars) hyirauliques (puits) et sociales (dispensaires, écoles).

- 211 -
• Effectuer des études ~'aménagement faisant intervenir des études pédo-
1
1
logiques, hydr0gliologiques, topographique et d'expérimentations agronomiques
d'accompagnement. En fait l'élaboration de SDAR(Schema Directeur d'Aménagement
Rural) prévoyant les zones à vocation agricole et pastorald.
.' De mettre en place un encad:t:ement dense et efficace et de doter les
paysans d'unputillage permettant la vulgarisation.es methodes modernes, en as-
surant la formation de l'encadrement et des paysans. mais le p~san est tenu
de construire ses cases, de dessoucher sa'! parcelle, d'effectuer des lJahours'
en 2ème année avec la traction animale et de respecter les ~onsèils techni~uès
de l'encadrement et le réglement imposé d~ns le choix des cultures et leur prQ-
port ion. (1)
Œomme nous le voyons l'autorité des aménagements des vallées des volta_
s'assigne la mission
de coordonner la mise en oeuvre du projet et ses diffe~en­
tes composantes.
Comme l'avGns-nous énoncé pr~édemment, la Ha~te-Volta a demandé aux orga-
nismes internationaux de prendrœ en charge ce projet. Ces organismes, a~c l'aide
de nombreux pays et sous l'égide de la BEnque Mondiale ont décidé de le financer.
Devenu une des priorités du plan voltaique. Ce projet, COmme le montre le tableau
ci-dessous, est un point de rencontre de nomVreux agents de la c00pération ou
experts internationaux de divers pays.
(1) Synthèse des documents
ESSOR Rural Nc\\'26 AoUt 1975 ; N° 33 Mars 1976
Bulletin de liaison et d'information technique et pr0-
fessionnelle. - La demande de financement au FAC par lE
les autorités des aménagements des vallées des volta
sous la tutelle des ministères du plan, du Dévelop-
pement rural, de l'environnement et du tourisme
février 1975.

- 218 -
PROJETS DE DEVELOPPE:-lENT DANS LA ZONE D'ENDEMIE DE HAUTE-VOLTA
Secteurs
· Nbre de projets
c:oo.t(en millions de-
FCFA)
,,
- Agricul turQ.,.
10
5 918,3
,
- Elevage
7i
4 184
,
- Sylviculture
2
l 284
- Mines
2
65
- Industrie (artisanat)
1
190
- Industrie (agro-industzie ••• )
2
1 S55
,
- Enseignement et formation
,
professionnelle
3
111 ,5
,
Santé
4
l
150
,
- Puits, forages, Barrages
4
l 560
-Routes, transpoft et Communi-
·
cation
2
3 510
- Divers
19
8 276,5
---------------------s---
,---'-----
TOTAL
56
28 110,3
,--------,-- ------+...---
Source: WORLD HEALTH ORGANIZATION ; Rapport annuel 1911; Programme de lut-
te contre l'Onchocercose.
SOURCES DE FINANCEMENT DES PROJEr~s REALISES DANS LA ZONE D'ENDEMIE DE: LA
HAUrrE-VOLT A
Source
Nbre de projets
, Coo.t (Mill:i:ons FCFA)
- l!::anada
,
3
s
2 200
" CEE/FEn
,
9
s
9 27'7'
:
5
,
3 390
'" RFA
- France
FAC
:
14
:
2 656
CCCE
,
2
s
l
798
- BIRD
,
2
,
2 534
- Pays-Bas
s
8
s
4 270
- PNUD
:
8
s
3 II
- Etats~nis (AID ••• )
,
5
,
l 744,3
----------------------------1--------------1----
'Jo'otal
,
56
,
28 110,3
Source : WORL::.J HEAI'rn ORGANIZATION : RAPPORT ANNUEL 1971'.

- 219 -
Les'.l.'ableaux récaWi tulatifs des projets
rec'Elnsés dans la zone d'endémie en
,
général (ycompris les projets en cours d'exécution par l' A.V.V) couvrent un
large éventail d'activité. Sur une liste de 56 projets représentant un total
de 28 milliards de FCRA, le groupe le plus:
importa.nt est constitué par les P:UQ-
jets agricoles (10 projets représentant un total de 6 m1iliardBèe FCFA) ; v'en-
nent ensui te les projets d~:élevage (1' projets représentant un total de 3,5 rmil-
liards de FCFA)..
Du deuxième tableau si on exclut les deux projets financés par le C'anada,
l'essentiel des investissements provient du FEn, de la FRANCE, des PAYS-BAS,
de la RFA, de la Banq~e Nbndiale et des Etats-Unis d'amérique.
L l'A. V. V est dotée par ailleurs de top.s les pouvoirs pour la mise en' 0euvre:
du proj et et les inves,t issements resteront sa "propriété'''.
L "A. V. V, comme il
ressort de ses objectifs, doit élaborer des schemas directeurs dl'amènagements
qui prévoient les zones à vocation aBricole, pastorale ~ 'o~estière. Il faut
,de,
aussi réaliser les voies/communicati~ Actuellemen~, deux périmètres d~améDa-
gement rural (SDAR;. Ce sont
s
- Le périmètre des ~olta Blanche et Rou~e dont la
répartition,
c
agro-syvo-pastorale sera la su~vante (1) :
• Amé.agement agricole••••••••••••••••• 403 000 ha
• zones pastonales••••••••••••••••••••• 210 000 ha
.. zones d'aménagement •••••••••••••••••• 211 000 ha
t
. t'
'1
; zones
our~s ~ques•••••••••••••••••••
300 000 ha
Le périmètre de la V:olta Noire avec la repartition suivante s
.. Aménagement agricole•••••••••••••••••• 350 000 ha
.. Zones pastorales•••••••••••••••••••••• 180 000 ha
~ ZGnes forestières ••••••••••••••••••••• 100 000 ha
• Zones d'aménagement touristiques•••••• 100 000 HA
~eul, le périmètre des Volta blanche et rouge a fait, au stade actuel, l'objet
d'un aménagement et d'une colonisation. &ix blocs pour l'instant ont été œuverts
(r) ESSOR RURAL: " l.'A.V.V r;pond à nos questions" N° 33 Wars r916 ; Haute-Volta"

- 220 -
et ce, de façon échelonnée en 1973 et 1975. Le tableau sui~ant en résume les
principales données J
1
Années 1 libre de fa-
1 Nbre de- wi.l-
B LOC S
Ide créa-I
milles
1
lages
1 tion
:
1
1
1
1
- Linoghin
.
1 1973
1
53
2
- Mogtédo
11974
1
119
1
3
.
- :&ané
1973
1
73
1
2
- Kakbo-SUd
1
1974
1
125
1
4
- :iraIbo-N ordo
1
1975
:
25
1
]
- Tiébélé
1
1975
1
44
1
1
-:
- 1
-1
TOTAL
1
1
439
1
13
1
1
1
$ource 1
ESSOR RURAL N°33, Kars 1976.
En fait, l'installation progresse lentement dans les périmètres d "ores et
déjà créés par l'A.V.V. On estime à 736 (quelques 4 000 à 5 000 personnes) le
nombre des familles installées au cours de la périede 1973/76 par rapport à une
migration spontanée estimée à plus de 800 à 900 familles par an en direction
de la VIol ta Noire. M'ais la phase expérimentale du programme de l'A. V. 11 est
terminée en ~976.
Dans les bassins des Walta, l'AVY: ne doit pas uniquement participer à la
mise en place des aménagements, elle do~t aussi, par exemple, assurer l'entre~
tien et le fonctionnement de l'ensemble des installations, promouvoir. l'appro-
vtsiannement des populations installées, participer à la construction de barra-
ge sur les Wolta, etc•••
Enfin, elle doit intervenir en aval de la production en installant par exem~
pIe desAndustries agro-industrielles pour valoriser les production agricoles
et l'élevage~ ~ef, l'AVV est un organe qui contrêle tous les secteurs de déve-
loppement. Toute initiative individuelle risque de ne pas trouver sa place, de
même que celle d'un groupe de paysans.

- 22I -
Une évaluation des coüts a également été faite. les dépenses ont été esti-
mées sur une période de 25 ans environ.PIr exemple, pour le périmètre des Volta
blanche et rouge, ces dépenses s'élèvent à 12,2 milliards FCFA(I).
On estime aujourd'hui que l'aménagement des vallées des Volta représentera
un ivestissement au cours des trois décemnies qui dépassera 60 MILLIARD~ de
}iCFA. Woyons maintenant de que l'on pe-;t en attendre.
cl - LA REPERCUSSJON $OCIO-ECONOMIQUE POTElJTIELLE DES~ A. V. v.
Les résultats que l'on attend sont multiples, mais nous nous contenterons
essentiellement de deux ordres 1 l'ordre soci_al, ce qui correspond aux. Gl:bjec-
tifs démographiques et d'ordre économique avec les objectifs de production.
Le programme de mise en valeur doit permettre l'installation en 15 ans
environ 650 000 personnes regroupées en 65 00 familles. Le di.ième de la popu-
lation volta!que participerait donc à ce courant d'émigration. L'incidence so-
ciale sera, sans aucun doute très importante. Les résultats économiques atten-
dus du projet n'en sont pas moiins impomants. Le Directeur général l' 8 affirmé
dans le Bulletin
"ESSOR RURAL' N°33 de.Mars 1976 en
ces termes 1 Il du point
de vue production, en phase de croisière l'ensemble des périmètres aménagés
deVRait donner les résultats suivants 1
PRODUITS
:
PRODUCTION EN TONNES(estimation)
-
---------,---,------1---------·-----
- C'anne à sucre
1
500 000
- Ca;;on
935 000
- mats
1
85 000
- Riz
1
81 000(1)
-S01:'gho
73 000
- IUL
1
27 000
- arachide
1
28 000
- Niébé
16 000 (1)
- S.oja
1
6 500
1
(1) chiffres tirésde la Demande de financement FAC (déjà. cité).

- 222 -
A 1- examen de -,ces Jtesultat-s à v.enir, on l'eut, noteJt, l'a ~c:ltion de ccr.tODJ.
qui sera amenée à augmenter 18,.7 :rois de la pItoduct-i,on actuelle qui es1t de
50 OOOT/Campagne 1917/78 (cf. Europe d l ()utDe-4fer N° 575 déco_ 1971.). Les dis-
ponibilités en produits céréaliers seront notablement accrues~ A cela, il; ~au~
ajouter les productions animales (~andes) que l"A.V.VJ v..eut fixer à enVliron
]0 %de la ~leur' monétaire de toutes les productions8nnuelles ré~ie~
Le projet de 11 aménagement' des vallées des trois volta appara1t donc comme:'
très ambitieux. On y met beaucoup d'espérance•. Il est même précisé que l "1 "a_
venir de la IDaute-Wolta est conditionné par ce projet agricole de gDand~ enver-
gure" (1).
J(ais de quel avenir s,, agi t-il réellemen't; ?
DI - UN PROJEl' POUR LA HAUTE-VOLTA OU UN BOND EN AVANT DANS L"ECONOMIE .ODULE.
Ce projet de par ses objeotifs p-andioses ne manque pas d'intérêt, mais e:e-r-
taines de ces composantes et de ses conséquences restent à apprécier.
'lrout d'abord, le projet nécessite une très Ï1çortante migrat ion. S,I'est-on
interrogé sur la façon dont sera organisé ce trans fert de population ou un
accompagnement à un mouvement spontané? enr:!onction ~e quels cDivè~s pour~
t-on migrer 1 avantages et invonvenients ? Tcoutes oes questions restent pQSées
et sans éléments de reponse.
Aussi est-on en droit de s'informer sur le point suivant 1 comment:, estt-il
possible de promouvoir un projet qui s'a4zesse à 650 000 pers~nnes sans avoir'
consulté la population concernée? A-t-tlln fait l'effort de laisser les gens
participer à ce projet ?
Celui-ci va en effet à l'encontre d 1une prise en main réelle du développe-
ment par les p~sans (jusqu1~ un' certain dégré). On engage des sommes énormes,
(l)Nation Solidaire. Rensuel nO 78, Edité par le Comité français pour la aBm-
pagne mondiale cont~e la faim.

- 223 -
Qn se lance dans les inv.estissement eo~teux, ~n fait venir des expe~ts, ma~
on oublie de di~e aux p~ysans pourquQi il est nécessaire dtamènagar ces vallées,
et comment ils devront être les principaux acteurs du changement dans e.ette
régfion. Al' opposé, on amènage les vallées, on réalise les trawaux, et <le n "es1\\:
qu'ensuite qu'on fait venir une population sous-informée qui sera suivie par
un "encadrement dense et efficace". Dan~ l'éventualité certaine où des p~sans
n'auraient pas compris pourquoi ils en sont là, quel sera alors leur r6Je ? Si
ce n'est celui de simple exécutant assujet~.
En définitive, une phase primordiale a été ou\\Yliée dans ee projet, celle
qui perrdt la confrontation avea:: les paysans. On s'est abstenu de leur laiisse:r
une place en profitant du fait qu'ils ne sont pas encore eapables de la Ileven-
d1i.quer. Toute la première phase qui consiste à la consoientisation et à l "in_
formation du paysan de son statut dans un, village A.V.V n'ont jamais eu lieu.
Considérés comme d'éternels "assistés", on a préféré faire appel exclusivement
à l'extérieur plutôt que de "perdre son temps" à montrer à ces paysans commen~
ils peuvent partioiper aux aménagements. &egligence involontaire? Nous ne le
croyons pas. Abstention consciente ? Absolument.
~n effet, l'AeV.V. et le pouvolir n'ont pas intérêt à laisser la parole et
donner quelque initiative aux paysans. En temoigne d'ailleurs l'existence même
de l'A.V.W qui contrôle absolumment toutes les opérat:i!ons , son rÔle intégra-
teur se justifie pleinement. Les enjeux du projet sont trop importants pour
prendre le risque de laisser les paysans produire autre chose que les prévisions
ou d'être en retard sur le calendrier de travaux car il s'agit, comme l·indi-
que la demande de financement au F.A.C, de "rentabiliser au mieux les investis-
sements réaliser par la mise en place d'une agriculture moderne".On prévoit
donc augmenter considérablement, grâae à ces aménagements, la produ~iŒn de
coton et le BUVIle qui profiteront moins aux paysans (à la résolution du déflicit
alimentaire évoqué plus haut) qu'aux industries de transformations montées sur
place et représentantes des capitaux multinationa~~n veut mettre aussi un
accent particulier sur l'exportation de viande. Par là même, la H'aute-Volta
améliorera sa balance commerciale.

- 224 -
Dans cette optique, on n'hésite pas à utiliser de gros moyenœfinaaiers,
i
:
notamment en ce qui concerne les frais d'études de direct ion et d "ena.a.ci!r'ement:
(personnel, fonctionnement). Par exemple, pour le périmètre des Volta ~]anahe
et Rouge (cf0' Demande de financement au F.A.C par la H'aute-V'olta), ces dépenses
représentant 41,8 %des dépenses gJ~bales. C'est énorme mais probablement re-
présentatif de la majorité des projets d'envergure natii.onale ou jjntel'nationale·
que l'on trouve en Afrique de l'OüeS'. Pour suivre ces opérations qu"ils finan-
cent, les Etats et organisations interna:tionales envoient des experts. Nous
ne doutons pas l'influence que peuvent avoir à ces occasions les orgwll'Ïismes
étrangers sur les poli tiques nationales, en l "occurrence celle de la lH!aute-V1olta.
Peut-on réellement oser parler d'indépendance économique dans ce sens l!~ ? !fous
ne le pensons pas.
Nous rappellerons simplement que ce projet d'aménagement: des vallées des
v.olta est un projet ambitieU4 certes. mais qui, comme la majorité des autres
projets, au lieu de s'adresser directement aux p~sans, les ignora. Les promo-
teurs essaient en outre, et plus dans ce proJet que dans tout autre, de par
son envergure, d'introduire les p~sans dans les circuits économiques interna-
tionaux sur lesquels ils n'ont aucune prise face aux mécaniismes d'exploitations.
D'autant plus qu'il existe de nombreux problèmes de notre point de vue, et que
le programme de l'aménagement des vallées des volta ne semble pas y porller une
attention particulièrement. Au nombre desquels nous avèns, :
le rôle de la femme dans les A.V.V ,
la réinstallation et le reclassement des populations,
le déplacement et le relogemen~,
enfin l'urbanisation et la conception des logemen"tis.
El - 9UEL~UE& ASP~!S CRITIQUABLES DU PROJET.
La troisième phase du pr~jet qui consiste essentiellement au repeuplement
des vallées. Comme on devrait s'y attendre cette migration interne n'est paS
sans entrainer une perturbation dans la vie. NI'ayant pas compris ce danger,
1
l'A.V.V n'a pas engage
comme il se devrait sur le terrain concret, un vaste
programme de sensibilisation et d' explicatilOn dans toutes les régilllns du pays.
Mais on se contente simplement d'indiquer que les futurs migrants doivent être
mariés et possèder chacuro une famille et des enfants au mo~s en âge de travail,

- 225 -
avoir une santé rigoureuse. Tout en faisant miroitant une vision simple et m~el­
leuse de l'AVV, les colons ne peuvent que s'engager volontairement Q ~uitter
leur village d'origine, sans savoir les contraintes qu'imposent ce déplaeemen~
et la réinstallationo
a) -Le problème de réinstallation et de reclassement des populatiQns.
- - - - - - - - - - -
- -
-
De la lecture du préambule du projet OB peut dire celui~i entend pQUrsui~e
un double but 1
d'une part attirer, susciter et déclencher un désir de placement vers des
zones très fertiles chez les populations à zones de fortes densités.
D'autre part profiter de cette Gccasion pour créer par l'introduction d'un
programme d'animation rurale des agglomérations modernes et d'aut0~suffisanoe.
Dans l'espoir que ces agglomérations seraient repandues sur une superficie con-
s:ii.déJrable,. et que celle~i se transformeront en tête de pont qui servirait de
modèle aux autres villages qui s'empresseraient de les imiter.
Il convient cependant de signaler pour la réinstallation et le reclasseme~t
des populations dans les vallées nécessiteront un pro~mme finement élaboré
dans la mise en oeuvre des moyens, or cet aspect 8em~e échapper aux autorités
vol ta'lques dans la prat ique. L'intér!t serait d'aborder les problèmes que p0~
seront l'évacuation, la selection des sites et les nouveaux logements avant
de passer au programme d'animation rurale non clairement défini.
01 - ~! probl~~~ dépla~~~t et de sélection des sites.
1°) Le déplacement.
La première difficulté non négligeable serait de pouvoir persuader les in-
téressés qu'il est de leur intérêt d'accepter le déplacement vers les zones
aménagées. Ces p~sans très attachés à leurs terres des anc~tres, il leur est
très difficile de quitter définitivement ce qui leur est de plus cheJr. Cela
doit demander un long travail de persuasion, pour parvenir à convaincre le pa~
sans d'accepter consciemment le déplacement••,Pour ce Ifaire il faudrait tenir
compte de l'évacuation des objets de culte comme les autels, les totemes, les
fétichesetc ••• Ce sont là des problèmes, s'ils sont négligés, peuvent conduire
à l'échec du projet.

- 226 -
2°) La sélection des sites.
La sélection des sites pour les nouvelles agglomérations risque de consti-
tuer la tâche la plus ardue à causes des contradictions internes et les nombreux
critères de sélection qu'il faudra respecter.
Du point de vue économique le facteur déterminant étant naturellement la
disponibilité des terres cultivables, ce qui impliquérait l'existence de point
d'eau en permanence. Pour allèger les tâches particulièrement pénibles des fem-
mes que sont la préparation du mil pour le repas et la corvée d'eau, or il res-
sort de l'étude sur les besoins des femmes dans les villages de ItAVV que l "les
puit~ n'ont pas été installés en fonction de l'emplacement des villages, de
telle sorte que dans chaque bloc, 2 viillages au moins sur 5· se trouvent très
éloignés de 2 à 4 Km du puits le plus proche. Les femmes sont obligées d'aller
chercher l'eau 1
-4 fois par jour en saison sèche à cause de l'alimentati9n des animaux,
- 2 fois par jour en saison des pluies d'une part par manque de temps,
d'autre part, à cause de la diminution des besoins.
Il en résulte que dans 2 villages au moins par bloc, les femmes fon~ p~
la corvée d'eau 1
• 16 à 32 Km par jour en saison sèche,
• 8 à 16 Km par jour en saison des pluies.u(1)
La conséquence est que certaine femmes se contentent de puiser l'eau des
étangs qui se créent à proximité des villages en saison pluvieuse, pour éviter
d'aller jusqu'au puits. Les résultats sanitaires de telles pratiques sont évi-
dentes (parasitoses, diarrhées chez les enfants).
Du point de vue sociologique la distance qui séparerait ces sites des te~~es
patriarcales, les futurs colons pournaient constituer un désavantage important,
car les nouveaux venus auront peur de se h~er à l'hostilité des autochtones.
La sélection des sites doit prendre en compte les aspects économiques et SOCi6-
logique, mais aussi et surtout pour l'aveni~' les aspects urbanistes.
(1)
S.A.E.D l ".l!itude sur les Besoins des femmes dans les villages de l"LV.V,
et proposition d'un programme d'intervention" - Aodt 1976 et
Avril 1977.

- 2211 -
c) Les problèmes d'urbanisme et de conception des logements..
La réorganisation des nouveaux villages va constituer une pierre de touche
du succès ou l'échec du projet. ~es nouveaux villages selon les pr0moteurs du
projet, auront des populations variant entre 10 à 800. On s'imagine facilement
les multiples problèmes qui v,ont se poser. N,ous nous contenterons de menticon-
ner quelques un. J
D'abord il faudrait que les villages soient localisés de telle manière que
,
les champs qui les entourent plus ou moins aquidistants du centre, sans pour
autant occuper les terres fertiles, mais tout en étant près des po:iints d-eau
des fleurs et situés approximité des principales voies de communications exis-
tantes ou à réaliser.
Ensuite au niveau des logements la tendance à uniformfer doit à tout prix
être évitée, laissant le soin à chaque chef de famille de concevoir le style
d'habitat de son choi;x.
Une des insuffisances du programme d'aménagement se descelle à travers l'u-
tilisation de l'espace vital de 900 me par menage. Or ces mêmes parcelles ccores-
pendent dans les villes à des densités moyennes de 23 à 18 h~itants par ha,
contre actuellement 162 personnes dans les villages Mossi. Il y a là un manque
de diaernement quant aux différenciations démographique pour les ménageS d'~
pays où le système de la famille étendue et la polygamie, sont encore très re-
pandues. Cela risque de créer de graves problèmes de pomiscuité.
Comme nous l'avons, dit plus haut que le programme dé ]'aménagement des
vallées des Volta est double : d'une part fournir aux colons de nouveaux moyens
d'existence et d'autre part introduire des techniques agricoles moderne dans
lies campagnes volta!ques. Selon nous ce programme d'aménagement a l'avantage
de présenter un essai de planification dans la mesure où le problème de l'irri-
gation, une des solution à la secheresse, reste entier. Reste aussi entier
les problèmes sanitaires, sociaux et une esclavagisation davantage accentuée
de la femme.

- 228 -
CON C L U S ION
De ce qui précéde nous a conduit à mettre en évidence l'occultation, de
la voix paysanne dans l'élaboration des ~rojets. Si la plupart des orianismes
nationaux, multinationaux et régionaux, et autorités publiques déclarent qu'ils
sont pour la promotion des paysans, comb~en envisagent leur mode d'action en
,
considérant le paysan comme un interlocuteur à part entière. Ces organismes
prétendent vouloir aider les p~sans sans parfois même prendre la délicatesse
de savoir s'ils souhaitent vraimmBn,cette aide et comment ils la souhaitent,
1
effectivement. Malheureusement la conséquence est tout autre 1 un décalage entre
les aspirations et la réalité.
Or, chaque jour qui passe, l'urgence d'un changement de la réalité sociale et
économique se fait de plus en plus impérieuse. Faut-il revenir à une économie
d'auto-subsistance où le paysan voltalque reterait à son Biveau le plus bas
et en dégradation constante? Faut-H au contrai're continuer sur le même che-
min, même s'il comporte des accros inévitables, en espérant que l'histoire des
pays industrialisés se produise de nouveau tci (1)?
On ne peut que douter
de l'intérêt économique et social de ces deux options pour le mande p~san.
Aussi, devant ce dilemme, pour ~ucoup, la recherche d'une voie nQuvelle s'im-
pse. Celle où le paysan déviendra maitre et bénéficiaire de son propre dévelop-
pemenit.
Cà et là, quelques rates paysans commencent à prendre consc~e~ce ùe leur
situation et s'engagent dans cette nouvelle voie. Une lente évolutio~~ enc~e
très lO.caltsée naU aujourd'hlli,. et de nouveaux modèles d'organi'saticm et d'ani-
mation sont inventés spontanémen~.
Dans la section qui suit, nous analyserons les bases de ce qu,t'am appsllle
l'autopromotion.
(1) ~Iest-ce pas de tels mécanisme socio-économiques, basés sur l'injustices
et la dtfférence de richesse matérielle, qui ont permis historiquement le ~é­
veloppemcnt des nations aujourd'huii nanties et industrialisées; p<llUJr' ce qui.
pour ce qui concerne tout au moins le monde occidental.

- 229 -
Section II s L'AUTOPROMOTION COL~TIVE PAYSANNE s ALTERNATIVE D'ESPOIR
OU D'ILLUSION?
INTRODUCTION:
Esquiss! théorique.
AI - Quelques orientations principales
Il est à nater que, dans la littératunœ le thème d-e l' autopomGtion 801180-
~ive du monde paysan est en définitive peu traité. Il est souvent sous-jaŒen~,
cela va de soii, eon particulier lQrsque tel ou tel auteur dénonce la JaX.0UJ.aki-
saticm'" et le renforcement des inégalités. Sais rat'es sont ceux quii. abOItdent-.
le problème de manière positive et qui proposent des solutions conc~tes.
H. SENTILHES , se plaçant du poimt de vue du formatewr·,. écrit "la vieille école
1
développe donc l'esprit de compétition individuelle, tencil à. faire des ciiipl8mes
et cherche à créer des entrepreneurs. 1,' éoole nouvelle v.eut pr<imlOtt"Eoiix ]La CQ.]-
lectivité, met l'acoent sur le trava~l de groupe, sur la œ4hésAen de la société
villageoise, associe la communauté des adultes à l'éducation des en~ants, ~­
trouvant là un· des principes de base de l'éducation traditionnelle précoloniaJl.e."
C.'est aussi une perspective pédagogi.que qui est ouverte par G'. BELLONCLE 1
"Et cette nouvelle façon de procéder, il ne s'agit
pas de la présenter à'f eha-
que individu, mais au groupe, à la communauté de base (village, quartier, ham~au)
confrontée à des problèmes dont la solution ne peut être le pùus souvent que
collective.. Il est étonnant,- alors qu'en, Occident la "dynamique de grouIlle" fait
fureur, que la vulgarisation agricole en Afrique n'ait pratiquement jamais uti-
lisé la valeur pédagogique du palabre, non pas discussu~on oiseuse, comme le
pensent encore trop de techniciens, mais analyse en commun d'un problème et
recherche en oommun de solutions".
Il poursuit sa démarche en proposant cie
remplacer les PB3'sans-p:iilotes par des villages novateurs, où l';ensemble du ter-
roir ferait l'objet d'expérimentation.~aettealllproohe pédagogique d~ ~évelQlll­
pement à donné nl:i.issance à de nombreux oU'Wl."ages ou articles spédaliséQ, ..{ql1e
nous n'abordons pas ici) à la sui~e notamment des éxpén1ences menées ~P. FREIRE
en Aménique lat ine et des réflexions que ce dernier en a t irée~ la:iien qu' atta-
chantes, toutes ces études n'abordent pas, sauf exception, le problème cie l'oIt-
ganisation concrète de la promotion colleative.

- 2)0 -
$ans doute est-ce par prudence. Prudence justifiée et qui contraste avec la
foi plaoée, vers 1960, dans les stnuctures collectives de production et de aom-
mereialisation, telles que champs collectifs et surtout ooopérati1reso
~:elles-ci n' cant en effet pas atteint, en généll'al, leurs objecrl ifs et soit
se sont désagrégées, soi.it ont été "réoupérées" par des notables, à leur pr()~i1t.
1
quasi-exclusif. y.~ GOUSSAlJLT 1 ilLe développement du ooopérativisme dans les
sociétés lignagères n'a pas donné de résultats beaucoup plus enoourageants.
L'obstacle ioi encore a été la combinaison particulière qui s'était instituée
au fur et à mesure de la pénétrat ion du commeroe oolGNlilal entre la prociuot.iQ1i1l
1
marchande et les structures sociales p~écapitalistes. ( ••• ) La cendition «e
cette
pénétration a été précisement le détourm.ement des méca.n.d.smes tJ:l'aditiLcm-
nels de démocratie sociale (contrale de la distribution des moyens de produc-
1
tion et du produit social) et leur manipulation par les aines ou chefferies
que leurs contacts avec les commerçants et l'administration avaient poussés
à l'activité marchande. Mais le fait aggravant dans ce cas à été que les coo-
pératives elles-mêmes servirent d'instrument et d'occasion pour une telle des-
tructuration, les structures lJignagères offraient au coogérativisme l'alibi d'U1Il
milieu social homogène et égalitaire, alors que leur fonotionneme~t réel ét&l~
de p~us en plus faussé dans le sens d'une stratification opposant les éléments
liés au marché soucieux de se garantir le contrôle des moyens de production
et les catégories jouant le rôle de force de travailL."
C.6n.e..~ns
Nous/de ce fait que m.me les spéoialistes les plus enthousiastes hésiten~
aujourd'hui à proposer des formules, des modèles, des solutions. Ils se conten-
tent, et cette modestie nouvelle n'est sans doute pas mauvaise, de suivre a~c
~térêt et de faire conna1tre les expérienc~s novatrices tentées ici où l~Par
exemple l"expérience tanzanienne, qui commence à faire l'objet d'un certain
nombre d'articles. Leurs auteurs s'accordent à définir les villages ''Ujarnaa''
comme des coopératives polyvalentes 1 "Les habitants prennent en charge certaines
des tâches économiques, et organisent la production. Communautés socialistes
et démocratiques dont les membres ne répondent qu'à eux-mêmes, les Villages
Ujamaa sont gérés par leurs habitants, qui ont à décider de toutes les questions
qui sont du ressort du village. Ils doivent assurer la gestion des exp~oii.tations

- 231 -
agricoles, des moyens de production et d'un certain nombre d'établissements
et d'entreprises qu'ils possèdent en commun t magasinsn moulins, écoles mater-
nelles et primaires, dispensaires, centres culturels etc••• L'Assemblée géné-
rale, composée de tous les membres du village, a la pleine resp~sabilitS des
affaires locales. Rlle se réunit normalement quatre fois par an.. La maj~ité
des deux-tiers est requise pour modifier la constitution ou pronClncar l"ex-
clrusion d'un membre., En l!.evanche, c'est à la mojori té simple que sont prises
toutes les autres décisions, y compris celles qui concernent les plans et les
budgets annuels., La gestion
courante est assurée par le comité éllécmti& liu
village élu par l'assemblée, Ce comité doit se réunir une fois par mois; le
village peut en outre créer des comités spécialisés, consultatifs ou éxécutifs."
J.H.J MAEDA et l.M. ~
Ces auteurs, qui sont tanzaniens, font preuve d'une grande modestie. tout:;
en estimant que l'attitude des p~sans a beaucoup évolué dans le sens d'une
prise de conscience et d'une participation à l'oeuvre communautaire, ~ reeon-
naissent volontiers que des échecs ont été enregistrés, tant en ce qui con-
cerne la gestion que la vie démocratique. Ils concluent leur article sur cetite
phrase, très significative de l'Etat d'esprit qui règne en Tanzanie 8 "Ainsi
que l'a dit M~alimu Nl,yerere, "1es erreua.fne sont que des erreurs" et la faculté
de reconnaltre ses erreurs, de les cOTriger et ~tn tirer un enseignement est
l'une des caractéristiques essentielles d'un autre dévelLoppemen1t". Et Ho DUMOND
montrant les faiblesses du développement communautaire écrit 1 "La Enaute-lTlDJla
a opté en 1974 pour le développement communautaire, dont nous avons souligné
le retentissant échec en Inde. On y signale bien que les blocages r~ultent d1l!l
manque d'adhésion des populations rura~es, mais c0mment celles-ci adhéneraient-
elles à une société dans laquelle elles sont si profondémen~ exploitées? Dm
reste, (••• ) Le projet d'une école de promotion collective du village ne nous
parait guère réalisable dans le cadre politique actuel. ~out me semble subor-
dcmné à la réduction préalable des priviilèges ville-campagne, que s ilefforcu-
en Tanzanie J':ulius Nyerere, dapuis la 0élèbre déclarat ion d' Arusha (1961 )"0
Qu'en est-il de cette vision théorique du développement communautaiD&
en Haute-Volta?

- 232 -
BI - Les Orientations du développemen~ communautaire volta!quee.
En 1973, toute la Haute-Wolta était touchée par la famine. Des sécours
arrivent, mais une question, la~ssée jusqu'à ce jour sans réponse reste pasée 1
"-
Que faire pour éviter que pareille catstrophe se reproduise dans l"av.enir .,
Au delà des actions de grande envergure, qui se caractérisent n~ammen~
pan' une transformation importante du milieu et ne pouvant qu'âtre dlQrdne gou-
vernemental.vu international, des p~sans de oertains villages (en nom~e in-
fime) s'organisent spontanément. Des ca~sses populaires d'épargne, des groupe-
ments d'hommes et de femmes, des cOG~ératives dt~levage de parcs et de stoc~­
ges de céréales se mettent en place. Devant cette réal~té il serait tentant
de cons~dérer ces expériences comme la panaoée un~verselle de tous 1es maux
dogt souffrent les p~sans. Po~ certains responsables du dévelappement Q8S
expériences pourraient même aller jusqu'à servir d'éhauche à un modèle de dé-
veloppement dont ces villages seraient la réprésentation quasi-parfaitee.. lIDn
danger surgirait alGrs, celui de vouloir projeter ces expériences SUT d'autres
situations dans d'autres lieux, sans en apercevoir les revers et en mesuren
les oonséquences, et surtout sans reflèchir profondement sur les m~ens à utiliserc
C'est pour rédudire ce risque, qu'une reflexion théorique s'impose,
oette es-
t
quisse servira à tracer les contours, d'une nouvelle vote ou d'un mode de dé-
veloppement du monde rural.
En effet, de nombreuses tentat~ves dans la recherche de cette voie n0U-
velle dit de troisième voie ont déjà été proposées, certaines d'entre elles
ont été mises en places. Hier, à la sGrtie de la colonisation direate, c'était
la proposition d'un système de coopératives. Nious verrons en quoi ce système
ne s'est pas adapté à la condition p~sanne et fut un, échec. Puis des centres
de formation, des firmes pilotes, des centres de demonstration et de vu1gari-
satioj, ce fut également l'éChec. La copie du modèle occidental indust~iel~
y était trop flagrante. Aujourd'hui, des organismes et le gouvernement prônent
un modèle de développement communautaire.

- 233 -
C'est ainsi, lors de la séance de olôturede la première réunion du CGmité
de coardination du développement rural, en décembre 1974, le ministre ~ltatque
ANTOINE DAKOURE déclarait à propos du Développement Communautaire que,
"Il me pl ait de constater qu'à l'issue de cette réunion, les conditions essen-
t~elles sont dores et déjà réunies pour envisager l'amorce de l'action au cou-
rant de l'année prochaine. J' invHe dOlltle Siécrétariat éxécutif du Comité de
Coordination du développemnt Rural (CeDR) à prendre toutes dispositions pour
que le mois de mai 1975 voit la maissance des premiers villages oommunautaires
vol talques. "(1)
Un an plus tard c'est à dire en février 1976, son Successeur au minsitère
de l'agriculture devrait dire sur la mise en application de "l'option naticma1:e
du développement commun~utaire" que , "le développement communautaire: est exi-
gence. son application demande une motivation profonde de la part des agents J
des qualités de persuasion et de caractère capable de conquérir la confiance~••• )
il lui faudra changer de mentalité, modifier son comportemènt vis à vis du p~­
san, ~'adapter à la nouvelle mystique de développement. Un enoadreur devenant
agent de développement qu'est le développement communautaire n'est plus un agent
de distribution d'engrais, d'insecticide ou de matériel agricole"(2). Ces pro-
pos donnant l'impression d'une prise de oonscience de la complexité du pr~blème
p~san, appellent néanmoiins quelques guestions de réflexions , le développement
communautaire en tant qu' option "nat~_ale", n' a-t-il pas des dimensiGms p<itJ.i-
tiques, doctrinales qui recommandent une certaine philmsophie d'aations d'en-
semble disciplinaires au niveau national? Le développement c0mmunautaïne, p~
être une option vraiment efficace, est-il le seul fait d'un ministè~e ou plus
deux ministères comme cela a été le cas jusqu'à présent? Quels sont les moyens
à promouvoiir pour que l'encadreur cesse d'être un agent de distribution d'in~
trants, pour devenir un agent à mentalité nouvelle comme le veut le Nininstre ?
"L'Qrganisation paysanne est une condition indispensable pour la survia
du monde rural"(j), déclarait un leader paysan en maute-Volta. Les uns pensent
que les paysans africains s'organiseront pour un développement autonome et res-
(1 ) ESSQr Rural: " Buletin de liaison et d'information technique professiŒDnel]e"
Acrilt 1975 - nO 26 - P.19.
(.2 ) Essor Rural s
Idem N° 39 - Septembre 1976 - P. 21.
(]'.) L.
BELLARD et P. BONN,lN : "Les paysans d' atrique , des projets de dévelop-
pement pour quelle espérance 1" - P. 161.

- 234 -
pGBsabilités. Quelle démagogie lorsqu'on découvre la vérité cachée der~iBre
ces mots charmeurs. Ecoutons encore ce même leader p~san qui fait part des
difficultés que son groupemeDt villageois rencontr~ dans les tâches quoditiaœ-
nes s "l'incompréhension des uns, le sabotage des autres affaiblii.ssemèn:bs de
l'union dans]e.village ; le manque de formation, l' autoritarisme de certaines
sociétés d'intervention et l'action sournoise des commerçants "véreux" en mi_
lLieu rural rongent les fondements des organisations p~sannes et bloquent touta,
communiicat:Lon••• (I)". Faut-i;l conclure <ple le p~san s'enfonce dans un fatalisme
iiI'réversible et dans un système politiico-économique qui le méprise? Nious n'eD!
saurons dire non. Wa:L,s nous penSŒnS qu'il est temps de pratiquer une polit~que
effectivement tournée ve.sles p~sans et leur promét:iiem.
Au point de vue de démarche générale, nous noterons, tout d'abOlI'd, que la
mi,se en route de cette politique ou de cette voJie déte:nminera un changement,
celui des structures et des conditions de t:rrava:iil du paysan-. Or comment pra'VJo-
quel' ce changement sans que son acteur principal, à savoir le paysan, pne-nne
conscience de la nécessité de celui-ci? En conséquence, une phase de Gonscien-
tiisat ion nous apparAtt absolument fondamentalLe dans un processus <fa p:nomat ii0D!
paysanne.
'ij:ne séconde phase de recherche dans la quelle les paysans essaye:o<mt de
tmouver eux-même des solutions à leurs problèmes dont ils 0nt pris ~onsciena&.
devra suivre. Il s'avèrera que cette reche:nche De peut se justif~er que dans
un désir de promotion co.il.lective des paysans. C"est pourquoi les pay,mms p<ro.Jl''''
ront trou~r dans les structures communautaires de travail, le meil]euD appui
à cette recherche; on s'attachera à rappeler les ~bjeatifs et les moyens pé-
dagogiques nécessaires à, la constitution de petites Q1Dganisati;ons p0J1lctuelles
(pri~ des céréales, stockage, approvisionnement, santé etc ••• ) ; il sera néaes-
saire en outre de mesurer la capacité d'auto-développement aussi bien au nivea~
des hommes qu'au niveau économique, ceci pa:Il rapport à la p~ésence d-animatemrs
et à l'existence des financements étrangers.
~nfin, nous chercherons les conditions d'extension à un niv~au p~us large
de ce processus de promotion collective, qui ne pcm.r:zra qu'être au \\départ que
ponctuel. Il appara1tra comme nécessaire que les p~sans cherchent d'abord à
établir des relations entre eux, puis avec les autorités ; ils aur0'nt alo1's
un objectif ; être act~s de changement dans le système politico-économiqueo
Grâce à l'acquisition d'une conscience de classe, ils seront alors capables
de formuler des revendications.
(I) L. BELLARD et P. BONNIN s (cJ~~à et oit,). f- ~!~.

- 235 -
Pmragraphe l
s POUR UHE PARTICIPATION PAYi'SANIVE.
La mise en. route de cetta politique ou de cette nvoi~ déterminera un
changement, celui des structures et des conditions de travail du p~sanf mai~
à condition de lui doubler d'un projet de remiise en cause de la superstruetUll'e
etY
étatique quitrde son état actuel, serait incapable 's'en acquiter. Aussi sUDtout
se pencher/l'impontante question de savoiT, comment prov~quer ce changement
sans que son acteur principal ; le péJ3san, pl!enne consciencre cie la née.essité
~ celui-ci? En conséquence, une phase de consc:iientisation nous appana1t alb;.-
solument fondamentale dans un processus de promot~on paysanne en ~ënant camme
appui les aspirations et les besoins urgents des iintéJ!esséBo
AI - ~ARTIR DES BESOINS.
Ct'olDlent faire prendre consc ience à quelq'l'un que le changement attendu
ne peut être qu'à sa ch~ge pour qu'il so~ réel?
Il faut rendre ce quelqu'un autonome. Qu'entendons-~mus ici par autonGmie ?
sa signification doit aller au délà d'une notion de li.i~rté ou d'indépen'anoe ;
BERTRAND SéBWAttTZ(I) définiit l'autonomie comme s "la capacité pOUJ! l'inliivr.lidu,
de comprendre son environnement pour agir sur lui".
Comprendre son environnement veut dire 8tre capable de saisir et analyser
1l
les forces sociales et économiques auquelles l "individu est confronté.. La per-
SQnne
saura alors exprimer ses observations et son analyse.aussi dans le cas
présent, toute phase de conscientisation doit-elle passer par une phase d'eX-
pression qu'ill en fera ne pourra qu'être révélatrice de situations dans les
quelles ses problèmes et ses besoins appara1tront. La première phase consiste
donc à favoriser l'expression des besoins des paysans. Le raIe de celui qui
sera ici déterminant ; nous reviendrons sur le rÔle que doit avoir oette, per-
sonne (animateur). Maintenant interrogeons-nous auparavant à propos du contenu
à donner, sur la nécessité de partir des besoins exprimés par les paysans._
L~ notion de besoin recouvre un large éventail. Au départ, on trouve
(1) BERTRAND SCHllARTZ l
"L'éducation demain s vers l'auto-formation assistée"
Aubier-Montaigne, Paris 1973.

- 236 -
d'abord un manque: c'est l'aspiration vitale d'un confort matériel, économique
ou social dont beaucoup peuvent être satisfaits par"l'argent", d'où l'impor-
tance de celui-ci. Certains besoins peuventêlre aussi des souhaits, comme celui
de l'épanouissement personnel, celui de prendre des responsabilités. ~ous sommes
aussi amenés à nous poser la question suivante : connaltJre les lieso:iins di''une
population, est-ce PDBsible ?
Il faut pour cela observer que les besoins ne sont pas immuables. Ils, cbBn-
gent avec les systèmes de valeurs et donc avec le~ conditions sociales, écono-
miques, pillitiques. Ces nouveaux besoins créent à leur tour des tensions sociaJLes
et deviennent les facteurs de dynamisme et de concurrence. Ajoutons :lai. la fonc-
tion impontante de l "information oriente sur de n'ouvelles atteintes. Un 'b.esoin,
une fois satisfait, entraine une insa~isf~hon qui, à l'extrême, peut deven~
permanente. La connaissance des besoins quisqu'elle existe, une recherche con-
tinue et une observati~n toujours à reprendre, sera donc très difficile à saisim
elle ne sera jamais parfaite.
Dans ces conditions, pour connaitre les souhaits ~éritables, d'une popula-
tion, un' échange le plus fréquent possible s'impose. Cette populaticm, d'ail-
leurs, n'existe pas en soit puisqu'elle est composée de beaucoup de sous-grou-
pes hétérogènes, avec des options particulières., Le rôle de l' animat:eur sera
alors de vieiller à l'égale expression de tous, condition nécessaire pour per-
cevoir l'ensemble des besoins ressentis par les divers groupes. Rais :!rares se-
I
ront les cas où les differents sous-groupes (jeunes, parents, femmes••• ) vont
d'emblée se mattre d'accord. Les intérêts sont souvent opposés. De plus, les
possibilités de satisfac.tion ne sont pas également répa.:rlies entre les groupes.
~outefois, au délà du choix particuliers de cbaque groupe, il existe des beSDins
collectifs sur lesque18,,:,~'1'animateurdevra mettre l'accent pour mobliliser la
poPulation entière.
Venons-en donc maintenant au rôle de l'~imateur. Comment doit-il exercer
sa fonction de sensibilisation?

- 237 -
BI - L' llliIMATEUR , LE PERSOMMAGE CENTRAL.
Il est à remarquer qu'au départ, cet animateur sera dans la pres~e totalité
des cas un agent d'encadrement de l'O.R.D, théoriqueme~t formé dans la ligne
très officielle. ce sera une solution d'atteinte au relais que devront pnend~e
les p~sans eux-mêmes. Nous reviendrons par la suite sur ce transfert de res-
ponsabilités.
La première chose dont l'animateur doit se méfier, c'est son statut. L'ea-
cadreur est un fonctionnaire auquel le p~san est historiquement et naturelle-
ment soumis(I), Conformement à son carac~ère propre et à la représentation qu'il
s'en fait, le fonctionnement (même s'~l n'est qu'un assimilé à cette classe
pour le cas de l'encadreur) détient le saViOir, l'argent et c'est un membre de
l'administration, monstre ~stifié et intouchage.
La présence l'rime de l'agent
qui veut apprendre du milieu et aider pour la satisfaction des besoins, fausse
l'expression. On formule à l'agent uniquement ce qui sera susceptible de l'in-
téresser , certains besoins ne sont donc pas exprimés. Les p~sans pense~t sou-
vent que, s'ils veulent obtenir de l'aide de la part de l'argent, ils doivearti:
lui faire plaisir en répondant à ses attentes explicites ou nono
L'encadreur devra donc dépasser ce~ handicap et aider les p~sans à fran-
chir ce "mur" psychologique. Il devra se faire oulFlier, oublier ce qu'il sait
et analyser en profondeur ce qui cache les apparences. En fait, l'eneadreur
oc~upe une place inconfortable
être en même temps lié à deux couches sociales
fondamentalement antagonistes, met celui-ci dans une situation doat. il aura
du mal à aSsume les contradictions. A ce propos, écoutons ce que dit un enca-
dreuJ!' l
"le travail dans les villages est des p,lus exigeants, je me sens par-
tagé, je dois satisfaire tout le monde à la fois. Alors que mes supérieuJ!s exi-
gent que j'éxécute le .programme qui m'a été confié, les villageois alltencient
tout de moi: apports techniques, conseils, pratiques etc ••• Ce qui dépassem~
spécificité. A la question agricole se greffent les problèmes d'assainissement,
du milieu, d'éducation"
de formation, d'alphabétisatiiorlo Ce n'est pas possible
de continuer comme celau (2).
:1) L'ancêtre de l'encadteur est un agent colonial, employé par les sociétés cotonières
et chargé d' "encadrer" le pB\\Ysan pour la production du coton.
'2) li:. LECOME : "Construire ensemble" - C.E.S.A.O, 1977, N° 6 - article l "cadre
et p~sans.n

- 238 -
lilace à cette situation, que doit faire l'agent? "Il n'a pas à agir seul, à
satisfaire tout le monde. Il doitt écouter d'abord••• S'interroger••• saisir
les attentes ••• percevoir les conflits entre les groupes .... analyser les points
d'entente... permettre la discussion. Bref, il doit se mettre à la disposi1t.i.on
du village"(I).
Certes, l'agent doit avoir des objecitfs, avoir un programme de travail, mais
celui-ci doit être modelable. Ces objectifs et oe travail doi;vent être repro-
grammables au fur et à mesure de leur avancement en, fonction des attentes et
les besoins des paysans. ~ais, en fait, il ne faut pas se tromper sur les réel-
les possibilités effertes à l'encadreur pour opérer une telle réflexi~ Wous
pensons qu'une telJe demarche de conscienti~ation est incompatible avec son
statut et sa formation. Il n'est pas formé dans le but de répondre et d'aideJr'
les paysans à satisfaire leurs besoins, mais au contraire, dans le but de les
faire consentir aux "justes" orientations prises par les O.R.D. C'est powrquoi
nous ne pensons pas que l'encadreur pourra effectivement met~re en applicatioa
la démarche que nous venons de décrire.
Les paysans doivent dJb apprendre à maltriser leur propre changement. L'ani-
mateur aidera les groupes dans ce sens là.. Et devant le peu d'initiative d'UJlIl
groupe (qui attend très souvent tout de l'animateur, car pour eux seuls, les
animateurs ont le monopole du savoiir), i:l ne devra pas tomber dans le piège
de tout faire à leur place, comme èertains l'attendent. Le savoir ne doit pas
être quelque chose de tout préparé~d'avance ; il faut faire expri~ chaque
membre du groupe, totaliser le savoir commun et le rendre clair pous ~ous.
En fin, l'animateur ne se contentera pas de réveler les bes~s et les as-
pirations. Il s'attachera aussi à rechercher avec les intéressés les m~s
de les satisfaire. A ce ndveau là, la phase de conscientisation touchera à sa
fin puisque les paysans ont découvert leur ~so~ et aspirent à un changeme.t o
Cette fin ne sera d'ailleurs que temporaire, tout changement procurant de nou-
veaux besoins, eux-mêmes révélés par une nouvelle prise de conscienc~.
(1) B'ernard Lecome 1 ( déjà cité)/.f. "'~,.

- 239 -
Mais encore une fois, cette opération ne devra pas laisser les p~sans
passifs; ne pas satisfaire leurs besoins, mais aider à ce que les groupes leŒ
ressentent assez pour les satisfaire eux-mêmes. Il faut "laisser le groupe s'em-
parer de tel besoin (même "crtamt",'"ressentie", "exprimé"), le discuter, le
rejeter, le reprendre ; laisser la tension créatrice aa!tre fun besoin non sa-
tisfait et qu~ devient insupportable au groupe agit oomme un revélateun. A]~
peu~ se créer une vo~onté commune et cette vol~té commune peut débŒUchan sur
une action la leur"(I).
Le schéma suivant réalisé dans une perspecti'll'e dynamique traduit la fla-
çon dont peut articuler cette phase de conscientisation 'avec ce qui caloit l~i­
quement en découler, c'est à dire un projet d'action qui s'intègre dans le pro-
cessus de l'auto-promotion p~sanne qui fera l'objet de notre paragra~he qui
suit.
Paragraphe II 1 VŒRITABLES UNIONS PAYSANNES 1 UNE N~ESSITE POUR ACJDl.
Au cours de la phase consacrée à la conscientisa~jj~n, les paysans ont pu
exercer leur capacité à vivre en groupe. En effet, les réunions et les rencQU-
tres dans les centll'es d'alphabétisation ont permis à chacun· de s'expI!imer lii-
brement et d'acquérir un esprit "nouveau". Ni'est-iil pas logique a]œs qu"une
prise de conscience collective de leur condition sociale, se traduise par un
chaiX d'action de type communautaill'e ? Ce choix semble le seul capable de pll'~
longer et d'accentuer l'esprit de solidarité qui animait ohacun.
La seule issue pour se sortir de cette conditi0n sociale miséll'able
c'est
9
à di~e pour lutter pour arracher des concessions auprès des autorités qui dé-
tiennent les pouvoirs économiques et politiques et qui a su s'organiseI! e~ oc-
cupant les positions sociales dormiln':':antes, résidera dans la capacité d"organi.-
sation des paysans. Ceux-ci doivent donc s'uniir. "l'Umon fait la force" ; ce
~eiil adage prend ici toute sa signification.
(I) PAULO FRE1RE l "Pédagogie des opprimés" -Petite collection, maspéro, Paris 1974

- 240 -
Si la nécessité de s'unir et de s'organiser parait acquise, les structures
à mettre en place le sont moins. ~es difficultés sont encore nombreuses et les
constats d'échec relativement fréquents. ~e sera l'objet de la recherche qu~
suit. Cette recherche sera étendue aux espoirs réels de changement à long terme
que l'on peut atteindre de telles structures, tout en précisant les limites
de leur autonomie.
A/- LES ORGANISATIONS. COMMUNAUTAIRES J LEURS OBJECTIFS, LIDR El!".B'ICACITE,
LElJR ECHEC POTENTIEL.
Il serait inutile et d'ailleurs inopérant de refaire une explication détaillée
de la nature et du fonctionnement de celles-ci, puisqu'il ne doit pas y avoilr
de modèle fixe. Aussi, nous contenterons-nous de rappeler les objectifs de oha-
cune d'entre elles et d'en mesurer l'éfficaoité présente par rapport à eee ob-
jectifs. Nous ess~er~ns également de déceler les erreurs potentielles et sus-
ceptibles de conduire à l'échec ces mouvements communautaires.
a)
Les groupements d'hommes.
Rien qu'ils apparaissent parfo~ comme des "oeuvres de bllenfaisance", ces
groupements visent à une amélioration de la production J production qui sera
dans la majorité des cas, rémunératrice. C'est l'objectif des champs collectifs
et l'utilisation de nouvelles techniques (charrues, engrais, pest icideseo.),
y compris pour les champs individuels, qui repondent à cette orientatio~
Nous estimons ici que ces cultures de rente (coton, araohide••• ) devnont
être exclusivement reservées aux champs collectifs. Les besoins d'argent se
faisant toujours de plus en plus
pressant, il est inconcevable, et d'ailleurs
ce ne serait pas accepté par le paysan,àe lui enlever la possibilité de g~er
de quoi achèter les biens de consommation qu'il présente comme essentiels; ces
cultures ne devant pas se faire au détriment des cultures vivrières. Surtout
si on tient compte du rôle important que joue dans ce domaine la pénétration de
la société de consommation dans le monde rural.

- 241 -
Ces groupements doivent aussi servir de test, dans une première étape,
à l'espprit de solidarité entre les membres. Une période d'adaptat~on de deux
à trois ans se justifie alors pleinemento Cet~e période constitue"l'auto-exame.
de passage" à la création de structures communautaires qui demanderont ensuite
beaucoup plus d'exigence de la part des p~sans. N'ous reviendrons sur· le sys-
tème de crédit accordé à ces groupements lorsque nous panIer ons des caisses
"populaires".
b) -Les groupements de femmes.
Ces groupements sont bâtis sur le même modèle que ceux ces hommes, avec
le même esprit et surtout les mêmes objectifs, à savoir, assurer une producti~
nouvelle pour, bénéficier d'un petit revenu uti'le à l'fndépendance des femmes.
A cela, s'ajoutent une prise en charge collective de travaux pénibles et une
animati;on sand.taire pour les soins des enfants (santé, hygiène, alimentatiom).
le système de crédit sera le même que celui des groupements d'hommes.
Que penser de l'efficacité de ces deux formes de groupements ? Le~ objec-
tifs peuvent-ils être atteints ?
La quasi totalité des groupements nous ont étonné quant à leur étonnante
eapacité à atteindre les objectifs choisis. Pour nous, la réussite de ces gr~
pements tient pour une certaine part, dans ce que nous avons nommé
"l'auto-
examenLde passage", phase cruciale et déterminante pour la survie me l'entre-
prise._ ~'est dev~ant cette période que surgissant souvent les problèmes maté-
niels et d'entente entre les personnes, aussi est-il préférable de les résou-
dre ayant de s'engager dans un processus d'association avancé. Dans le cas in-
verse, un danger guette le groupemént, celui d'être récupéré et tota]emènt
soutenu de l'extérieur par ceux qui en
ont A l'indtiat1ve. ~0Us pensons ici
spécialement aux grpupements villageois de l'O.R.D , il est toujours pl.s fa-
cile de manipuler un groupe que des iiàiY1dus. Pour s'en convaincre, hll ~fit
de consulter les études à propos des "effets de groupe" et sur la "manipulation
des masses".

- 242 -
c) - Les caisses populaires.
Les caisses populaires, on l'a vu, répondent aux objectufs suivants s
permettre l' élaborat ion d'un système de crédit grâce à l'épargne dé'po-
sée par les membres.
Etablir un climat de confiance entre les p~sans.
Quand on parle à des paysans de vouloir mettre en commun' de l'argent, un,
souvenir leur revient à l'esprit, celui de l'échec quasi-général des "coopé-
ratives" dans les années 60. "On seJra de .ouveau volé" ; "iIls partirent aVee'
la cailise" ; "ceux de la capitale ne nous remboUJrser(i)nt pas" ect••• (I).
te p~san n'a plus confiance dans les organiismes coopératif's suceptibles
de gérer son argent• •@me si des associations existent, m~me si 0n se groupe
,
pour cultiver, s'équiper, commercialiser, on ~lpugne à épargner eD' c~fi~
] "argent. Aors comment franchir ce nouveau "mur psycholC!)gique" sal!l!S es~r
dans un p:remier temps d'établir un climat de c0nfiance entre les individus.; eit
entre les groupes ?
il.
L"importance d'une phase de sensib:Uiistion pJl'enè de nQuveau ici toute sa
signification. 'Dout d'abord, ne pas se presser 1 i l faut laisser les pa,ysans
retrouver la confiance entre eux et à leur rythme, et tout faire dans le sens
que ce soit les paysans qui décident d'eux-mArnes la création d'une caiisseo B'ien
ent'endu, plus le village aura l' habitude de règle. ses problèmes pal!' des dis-
CUSSiODS
et des décisions c0,11ectives, plus le chem ..-in vers le mutua]isme
sera aisé. Cette dernière remarque s'inscrit bien dans l'esprit général à sa-
voi~ 1.es paysans doivenrt prendre en charge eux~êmes leur promotioDl&
En partant du fait qu'une certaine épargne existe dans les campagnes, il
est logique de penseD que cette épargne, au lieu de croupir au fond d'une case
ou encore d'être anéantie par l'achat de certains biens particulièrement impro-
ductifs, puisse:
être regroupée et ensuite redistribuée sous forme de prêts.
C'est l'objet des organismes "populaires" d'épargne et de crédit, plus CQnnua
sous le nam de caisses "populaires".
(1) L. BELLARD
et P. BONNIN 1 (déjà cité). '? ,,3~.
,

- 243 -
Nous nous attarderons sur l'utilisation de l'épargne, sa fonction et par
voie de conséquence à l'importance de l'emprunt. L'équipement e~ outil de p~o­
ducti~n est un facteur nécessaire à l'augmentation des masses produi~s et d0BC
des revenus (si la valeur des prix reste au moins constant et de parité égale
au cotit des autres produits) .. Il est donc utile que l'épargne puisse être con~
sacrée au financement des moyens et facteurs de product:i!oDo Pour la commercia-
lisation, l'épargne permettra aussi d'attendre le moment le plus fa~able eB
matière de pouvoir sur le marché de sorte que les paJ'sans contr~arJNmt les
commerçants spéculateurs. C,ette ·stratégie" ne se fera', bie~ s1h- qu'au prix
d'une coordination stricte entre les caisses "populaires" et les "c0,opérativ.es"
de stockage de céréales. Cette action canjuguée peut alors devenir un outil
politique des p~sans contre les cemmerçants spéculateurs~
Les caiisses "populaires" doivent donc opérer une politique de clrédit,
certes large, mais sélective ; les risques de non remboursement seraient t~0p
conséquents pour la survie de la caisses
et de plus seraient très mal accep~ée
par les p~san~ La confiance mutuelle pourrait en être affectée.
En déhors des cwédits d'équipement pour la production et parfois pour
la commercialisation, les ca:i!,Sses "populaires" doivem.t permettre aux adhéren;ts
d'apprendre à gérer leurs ressources. Déposer de l'argent dans une caisse ap-
prend aussi à budgétiser ses dépenses dans le tempso L'habitat, les biens de
consommation, le déplacement, les frais médicaux, les fêtes ou l'impôts, woici
les dépenses auxquelles le p~san n'arrive pas à suffire faute de gestion p~é­
visionnelle. On! sait bien que le paysan est vite tenté de dépense~ une bomme
part de son argent après la récolte.
Le double intérêt des caisses "populaires" ; favoriser une épargne col-
lective destinée à garantir des emprunts, et aider à la gestion individuelle
de l'argent qui sera accessible de façon plus permanente pour répondre à des
besoins et des achats programmés.

- 244 -
Pour en terminer avec les caisses "populaires", nous nous contenterons
deux observations.
La première observation concerne les perspect'ives d 1avenir des caisses
"populaires". S,i elles suivent la voie qui vient d'être décri te, elles cons-
titueront sans nul doute le moteur économique du monde rural touché par celles-
ci.. Il faut ajouter cependant que dans Ull! premtBr' temps, aujourd' hui :i!ndéter-
mtpé, les capacités financières de ces caisses se~ont ~ès réduites, tant es~
faible l'épargne des paysans. Il est à noter que les crédits ne servent qu'à
financer de pe~its investissements de p~oduwt~Qn (matériel) et comme~c!aU% (ma-
gasins de stockage). Le reste des travaux, en particulte~ l'aménagement du
milieu, reste à la charge dlorgan~smes étrange~s de financement. Il est donc
logique de s'interroger sur les possib.ilités de
relai Gle ' ces organismes paJr
les caisses. Em fait, nous n~ p@sons la question suivante 1 est-il possible
d'arriver à une autonomie éconemique du monde paysan! Autrement dit, parvien-
dlla-t-:iû. à assurer luii.-6leme et d'une façon permanente, le financement de son
capital structurel, si faible soit-il au départ'? si non, dans quelles li_tes
les paysans pourront-ils rester ma1tres de leurs moyens de plloducti~ ? Pour
être clair, sera-t-il p0.ssible un jour de parler d' autopromotion gr-!ce à un
auto-financement ?
A ce niveau, dans la logique du combat engagé, la réussite de 11autofiBan-
fi
cement passera aussi par une modication intégrale de la superstructur~_ Il n'y
a pas de luttes "sectorielles" (le social, le polit~que, l'économique) , il
Y a seulement une lutte pour la naissance d'un POU'1'O·iir d'Etat dans leque]L la
paysannerie constituera une des forces motriceso
Ici nous n 1avons aucunement la prétention de répondre pleinement à toutes
ces questions, tant elles font appel à dl autres nécessités (dl autant plus nous
y
avons repondu en partie dans notre analyse sur 11accumulation primitive du
capital dans le monde rural. Cf. Partie l ; chap II). Surtout nous avons SQU-
lement souhaité les poser par souci d 1honnêteté.
En deuxième observation, nous signalons que certaines de ces caisses "po-
pulaires" commencent à se regrouper au niveau national. Diverses Unions natie-

- 245 -
nales se sont créées ici et là : en Haute-Volta, c'est l'Union des Assoeiations
volta!que d'Epargne et de crédit(I), au Togo clest le Comité de Développement
des Unions d'Epargne et de Crédit(2), on! en trouve également au Ghana, au Sénâ-
gal, au Mali et plus récemment encore en C:ote-d' Ivo:bre. Au niveau de l'Af:nique
entîère, i l existe aussi une associati.on (A.C.E.C.A) (3) qui regroupe les di-
veI!ses
Unions nâtionales.. Le rôle de oes unims senaU de plltovoquer1la lillais-
sance des caisses :uurales ou urbaines, et d l'assister celles-e:ii., so~i.t. paJ! des
actions de formation, soit par des actions de structura~ion en~s les Qaiss~o
~ous verrons par la suite quel jugemen~ on peut porter sur ces associatiQnso
lious all(!)lns mai'ntenant aborder la dernière structure communautaiire, celle
qui; permettra aux paysans de satisfaire un besoin ou un problème urgen~9 celwi
de la période de soudure où la famin.-e est toutj<mrs latente, et celui de la
spéculation c0mmerçante ;; il s'agit des groupements ou "coop'érativ:es'" de stoc-
kage de céI!éales.
d) - Les co~pératives de stockaga de céréales.
C'est llorganisation où la prise de consciience est certainement la plus
forte. Ils comprennent qulen s'unissant, ils peuvent Atre capables de déf~ndre
leurs intérêts devant une couche priviilégiée,- à. sava\\Ï:rr les Ctommençantso Ils é
établissent ainsi un nouveau rappoI!t de force en leur faveur. Un risque guette
cependant les "coopératives", c'est celui de refaine les m~es erreurs que ceLles
des années 60. Après l'indépendance, en Haute-Volta comme dans d"autres paysl)
on a voulu constituer des "coopératives" dlapprovisicrmnement ; elles seJmaieJlllt
parfois également de stockage pour les céréales et même, faisaient office de
banque. Hlélas, on a voulu donner à ces "coopératives" des structures trop, im-
portantes basées su~ le modèle européen et en, paJ!ticuJLier fnançais. Le fonctioD-
nement de ces"co(!J)p:érat ives" impliquait alors des gérants, des comptables, c'est
à dire des cadres administratifs et techniques. Il en resulte que ces "coopé-
ratives" représentaient une forme trop rigide et trop ambitieuBe par rapp<lm't
aux réalités et aux possibilités de la plupart des pays africains. Le système
s'est avéré inefficace. La corruption les a achévés.
(1) U.A.V.E.C. : Union des Associations Woltaques d'Epargne et de Crédit.
(a) C. D.lt. A. U. D. E. C : C:omité de développement des unions d'Epargne et de Crédit cm
'l'ogo - Lomé•.
(3) A.C.E.C.A. ~ Association des Coopératives, d'Epargne et de Crédit; Sige à
Nairobi - Kenya; Direction régionale : Lomé.

- 246 -
~0Us voulons affirmer par là que les paysans ne sont pas prêts aujourd'hui
à rest er ma1tres de telles coopérat ives. Ils doivent d "abord d' acquérilD une
:t:ormation (c'est le r&le des centres d' alphabétisatiolih) et puis tester lem!
capacité à administrer de petites coopératives (par exemple de stockage) avan~
de passer à un autre dégrê' d' organisation-, ; si non, le contrele de celles-ci.
leur échappera de nouveau. Ce risque devra d~nc être bien mesuré par les ~-
.\\1:-
sans pOUl! éV7i:ter qu "il se réal:iiseo e:eDtes, les p~sans aspire' à une réelle im-
dépendance, mais il s'agit de rendre effectif avec clarté ce que les paysans
expriment confusement'.
BI - UNiREELLE INDEPENDANCE..
Cett'e indépendance prend act e à deux niveaux s le politique et l'éc<mmmiqueo
a) - Un espo!E-! des cadres.paysans~
Nous avons vu et reconnu que le raIe de l'animateur appara1t conne fonda-
mental. L'animateur est le véritable catalyseur de la dynamique p~sanne. Nais
puisque l'on parle d'autopromotion
p~sanne, ne peut-on pas imagimer des p~­
sans capables de se passer d'animateurs extérieurs! li'y-a-t-:iil pas une' cantta-
Q:iction
flagrante entre ce ,jésir des paysans de prendre en main , leur a:Efaires
et cette présence permanente d'un animateur extérieur qui impose le pouvoir
des O.R.D ?
Les animateurs doivent, pendant la période où ils exerceront leur fonctiGmp-
former les paysans et les amener à prendre le relai au bout d'untpérioda déte~­
~née. Des animateurs paysans doivent na1tre et prendre leu~ place. La réali-
sation de cet objectif traduirait le succès de l'animateur; le contraire ne
serait que le reflet de son écheao. L'animateur le plus efficace et, le plus ap-
précié sera celui qui auta transmis le mieux et le plus vite son savoi~ et e~
liberant celui potentiel des paysans.
Le jour où l'on verra des paysans animer leurs réunions, quand on verra
des paysans alphabétiser d'autres paysans, eh bien, ce processus d"autopromo-
tion sera parvenu à un point de Bon-petour. Tant que des animateurs exténieuFs
seront indispensables, le retour au point de départ sera en effet possible si
ceux-là sont amenés à partir précipitamment.

- 247 -
POUl!' illustrer ce cas de depart précipité, on constate en Haute-Volta des
mutations fréquentes des "encadreurs". Dans ces mesures, on se sou-sie peu du
travail d'animation qu'ils avaient pu commencer jusque là : cette mutatiGn cor-
respond d' aHleull's souvent à un changement de directiu!r' d'ORD, celui-ei jiUgean~t
bon pour son arrivée d'opérer des changements internes pour "mettre de li"orrdll'e ..·•
Par ailleurs, on remarque qu'un encadreur sera d'autant plus facilement muté
que son travail d'animation risque de réussir; les intérêts l'ORD et de !!les
hauts responsables vont dans le sens opposé au processus d'autopromotion pay-
sanne. Autrement dit, l'animateur p~san, forcement stable, sera l'indiie-ateull"
pour les observateurs, de la survie des expériences d'autopromotiiCDJlf.
b) - ~'autopromotion financière 1 un~utopie motrice".
-Thes paysans doivent, dans la mesure du po.ssible utilisera les reSBour~es
.,
financières tl!'ouvées sur place
épa.:tgne, caisses "populaires", cotisations.
G
Ils doivent agir avea; l'espoir d'atteindre un jour l'autonmie totale et de n~
plus avoir sans cesse à . tendre la main à la "générO'sité internationale"',. si
nen ce serait maintenir un esprit d'assisté.
frienJ
évidement, cette auto~mie financière ne sera jamais complètement at-
teinte. D'ailleurs, estLelle réellement souhaitable et possible ? "coupeJr les
ponts" avec tout autre secteur d ' activité conduirait plLus à une autarcie pay-
sanne qu'à une autonomie l'éelle. Cette situat ion donnerait 1 "image d "un monde
replié sur lui-même, vivant sur un capiital très faible, qu';il :a:e seJ!"aii.t ea}1lable
d'accroitre que très lentement. De là à dire que le monde rural doiit G:lU'V'ltÎll!
ses portes, comme cela se pratique aujourd"hui, mais mal~é lui, aux c:a.:P'itaux
extéI'ieurs qui l' oppll'iment et l'exploütent i;gnGlblement nous disons non.
Il faut plutôt examiner les voies susceptibles de conduire les paysans
vers une autonomie financière (même très lointaine) et voir dans quelle meSUll'e
l'aide. extérieure peut leur permettre de francir les obstacles financiers, à
savoir le manque d'argent o
Le nombre de ces voies est très restreint dans le contexte socio-p$litiique
actuel ; mais on peut Jteteniir néanmaims l'autofinancement, les caisses lf'pCllPU_
laires", le système prêt-projet. MaÎJs il convient de s'arrêter avant sur le
sens profond donné à l'autonomie financières qu'entendons-~ous par 1&. T

- 248 -
dans laquelle de ces deux situations, les paysans possèdent la plus grande
autonomie financière 1 la situation où l'épargne des paysans, en qu~~ité suf-
fisante, est gérée par une personne extérieure (banqu:ber, "homme d'affa:fute u ) ;
ou bien celle où les paysans gérent eux-mêmes ou participe à la gestion de leur·
épargne, même si une partie de celui-ci provient d'une aide extérieure. Dans
le cas présent, l'autonomie financière, c"est moins avoir de l'argent géré par
d'autres que gérer soi-même de l'argent à d'autres.
Aussi peut-on admettre les apports extérieurs comme supports financiers
aux réalisations paysannes, mais à la condition suivante: que ces supports
financiers corresp~ndent à des besoiins exprimés par les paysans et quii se oon~
crétisent dans les projets élaborés en partie et réalisés par e~ tes paysans
sont chargés de repartir et gérer cet argent. C'est le s~stème prêt-projeto
Quant aux caisses "populaires" qui jouent, on l'a vu, un ]l'ale très impcm-
tant au niveau de l'épargne et du crédit, elles ne sont pas capables auj~urd'h~i
de prendre le relai des organismes d'aide. leur capacité financière (flNitde
l'épargne paysanne) ne leur permet pas en effet, de subvenir à de gll'OS beso~
Peut être que l'avenir, quand le nombre de caisses "populaires" seIta suffisam-
ment grand au niveau d'un pays, pourront-elle élargir le champ de leux attri-
bution., Le regroupemenit dans une uniionl (UAVEC: déjà cité) comme en l{iaute-Vo.lta,.
pourrait être un facteur déterminant da.'1.s ce sens. Mais nous sommes en dJro.:ii1l
de nous interroger sur l'exact devenir d'une telle union quand on sait que
!'
l'UAVEC a le projet de déposer une part de son argent à la Banque Nati~nale
de Développement (BND)
et qu'une partie du capital de cette banque appartient.
à la C. C•.C. E.
Où sont alors les intérêts des paysans? où est la place que Iton accordait
aux paysans dans les caisses "populaires" de base'? le paysan
risque d-êtr6
1
tromne. L'argent, am lieu de reveni,r directement aux paysans se fait drainer
par les banquiers et se mêle aux jeux des grandes stratégies
bancaires natio-
nales et internat i<males. Dans ces conditions, ~n est loin de l'autconomie finam-
cière définie précédemment, où le paysan pouvait gérer son capital et même celui
qui ne lui appartena.it pas mais qu'on lui offrait. "Blancarisé", son argent qu'il'
avai t placé dans une cai,sse"populaire"
de base, à d'autres utilisat ions que
celles de revenir sous forme de crédit dans l'espace rura~

- 249 -
En effet, nous avons pu constater dans la réalité que, si le paysan utilise
son .rgent sur le marché des biens locaux et dans les circuits coJts des éc~
ges entre les poysans, cet argent ne se déprécie pas ou peu, parce que les p~ix
des denrées locales évoluent peu (1).
l."argent ne se déprecie pas en soi, mais sa valeur peut changer face à. la
capacité d'achat d'un bien. Cet argent des paysans, intégIré dans le système
~ccidental, perdra sa valeur par rapport à la croissance des prix des denrées
~onsQmmables Lssues des p~s industriels (la détér~oration des termes de l'é-
change).
Le pouvoir d'achat du p~s sera aussi réduit lorsqu'un bien (coton,. arachide)
est livré au système marchand où l'on spécule sur sa valeur dans le but ~'ac_
crQ.,itre les profits des l'iirmes multinatitDnales (baisse du prix des prtd"tüts
primaires). Dans ce contexte, tel que nous venons brièvement de le décrire,
le p~sanl n'est pas capable de résister à la dépréciation de sa capacité éco-
nomique.. Des mesures de prote<Ltion du capital des paysans s'impose. En clair,
il faut éviter toute technique des "'l'ases communlÎ:cants" qui' se réalise· avec
les liens bancaires.
Pour résumer, les p~sans qui seront capables d'épargner, de cumuler leur
épargne et de la gèrer pour la redistrubuer sous forme de crédit entre eux,
ces paysans qui ne feront recours à, l'aide extérieure que pour finan~er le~s
propres projets, au~œnt acquis une certaine autonomie financière; l'aide ex-
térieure n'est pas une fin en soi maiS un sécours provisoiire, et c'est en ce
sens , que le désir de devenir de plus en plus autonome constitue une "utopie
motrice". Cette indépendance financière, même si elle existe, n'empêchera pas
les paysans de devenir alors maitre de leu~ moyens de production, il en seront
les initiateurs et les gérants: ils toucheront du doigt ce que l'on peut ap-
peler une aspiration "autogest ionnaire".
Ce processus d'autopromotion paysanne, même s'il a conduit à s'unir et
à s'organiser vers l'autonomie, permettra-t-il à ceux là de former une c0Uche
sociale qui, non plus, se contentera d'exister, mais aussi voudra dans un pre-
mier temps, prendre part aux décisions du pays et, peut-être dans un seconll1
temps, imposer un projet de développement ?
(1) Exception faite du marché des produits alimentaires locaux (mil et sorgho)
A ce niveau, le paysan à la capacité de bloquer cette spéculation avec les
coopératives de stockages de mil.

- 250 -
cl - SUR LA VOIE D"UNE PRISE DE CONSC IENCE DE CLASSE.
La volonté paysanne de participer aux décisions, c'est à dire de jouir du
fruit sational au même titre que les autres couches sociales' qui, aujourd'hui
rappelons-le, sont minoritaires,mais déterminsnt,le pou'V'Oir ne pourra être ef-
fective qu'a deux conditions s créen des unions paysannes à la tête desquelles
seront choisi des représentants paysans qui établiront des relations avec les
membres du pouvoir et acquérir en même temps une conscience de classe.
a)
Etablir des relations avec les autorités.
~ace aux autorités dont les paysans sont le jouet, ceux-ci ne doivent pas
réculer., En effet, plus les paysans apparaîtront faibles, inorganisés et dociJJes,
plus la bourgeoisie en abusera., T0Ute exploitation de l'homme par l'homme est
issue d'un rappGrt de force, même caché, dans lequel un déséquilibre se: déve-
loppe. Les paysans doivent aller vers les autorités et ne pas craindre la ren-
contre. Pour aborder le pouvoir, il faut l'intéresser à ce que les paysans foni;,
à ce qu'ils ont construit et leur montrer que le résultat de leur action va
dans le même sens que le discours de ce même pouvoir. Un paysan dit à ce sujet s
"Il faut prendre les autorité à leurs propres paroles ; tu prends leur discours
et tu montres que ce que fait le groupement réalise leurs belles phrases, tire
dans le même sens qU'eux"(I). A ce niveau là, les autorités seront obligées
de travailler en collaboration avec les paysans et de con~truire a~ec eux, si
non
elles mettraient au grand jour leurs contradictions. En effet, quelle con-
tradiction ce serait si les dirigeants allaient ouvertement à l'encontre de ce
que le paysan ont réussi à leur faire comprendre et admettre malgré elles !
Etablir des relations avec les autorités veut donc dire non pas répondre
P-
au jeu d'une collaboration politique de la "main tendue", mais au contraire,
négocier d'égal à égal avec celles-ci, leur faire d'abord admettre ou aut~ise~
l'action paysanne et ensuite les faire travailler avec eux dans le même sens.
Pour cela, les paysans doivent choisir des représentants. On a vu que le choix
d'animateurs paysans, responsables de l'animation et la formation, étaient in-
dispensables " pour conduire ceux-ci vers une vé:fitabl!e autonomie. De même iiJj
(1) L. BELLARD ET P. BONNIN s (déjà cite -P.I93)

- 251 -
faudra choisir les paysans capables d'être des interlocuteurs représentat1fs
et sûrs pour cet~e rencontre.
Ces représentants devront prendre garde, de ne pas tomber dans le piège ten~
tu par le pouvoir, toujours prêt à proposer aux leaders paysans le strapontim
du pouvoiir ; c'est le risque de la "réoupération". Ces représentants ne doiven,t
être que des rapporteurs fidèles des aspirat~ons Lmmédiates du monde paysan
et rien d'autre. Du c&~é de ces représentants~ on. doit sentir le poids de ce
même monde paysan derrière eux, prêt à les souteniJr•.
b) - Acquisi~ion d'une concience d'=~ploitéso
Au delà de ces rapports avec les autorités, les paysans doivent être capa-
bles de formuler des revendications. En effet, après s'être unis, organLsés,
avoir fait comprendre et admettre le sens de leurs action,. les paysans compren-
drait alors que ces actions iront dans le sens contraire des intérêts de la
couche dirigeant •• Il ne sera plus possible d'agir seul, le monde paysan ne
pourra plus compter sur ses propres forces ; il sena obligé de négocier. Et
parlera de négociation, devra parler aussi de revendications. Ces revendicati~s
seront celles d'hommes qui défendent les mêmes intérêts face à une autre classe
sociale: ils auront acquiB une conscience de leur situation d'explontés.
"Les chemiiils:de la reconnaissance" seront certes encore long, maÏJB à ce nÎl-
veau là, la naissance d'un mouvement paysan sera proche; un mouvement grâce
auquel le paysan aura l'espoir un jour d'exercer ses droits ]égitimes et de
participer aux choix de son pays. Ma:iis, il ne tient pas à nous de savoiin quand.
Evidemment, aujourd'hui mous nous n'en sommes pas là • Cependant, avant de cLore
cette section, nous ferons une remarque très importante.
~ous présentons le processus d'autopromotion paysanne comme un mode de dé-
veloppement, en considérant celui-ci comme une réponse aux aspirat~ons des pay-
sans. MaDs n'y au~ait-il pas des aspirations auxquelles ce processus ne repon-
drait pas r ~ous pensons particulièrement à ce dési~ qu'ont tous les paysans

- 252 -
de gagner
. .
.
/Vi~~ dp. ~'~rgent. En témoigne aujourd'hui le départ mass1f des Jeunes vers les
villes, où ils espèrent lagner vite de l'argent "libérateur". En témoigne aussi
la relative facilité avec laquelle OA arrive à faire admettre à un p~san de
faire des cultures de rente au détriment de ses cultures vivrières, dès qu "on
prétexte leur waleur soi-disante rémunératrice.
Le paysan, les jeune en particulier, a un désir d'amélioration de sa con-
dition de vie qui est formulé dans une inspiration de type occidentaL 1 faci-
li tés et commodité pour une ne familiales autre, moyens de communicc:atton,. avoir
une "capacité de consommatione" Ces divers aspects sont tel1ements apparents
à tous les niveaux qu'il serait utopique et illusoire d'aller contre ce souh&it.
A ce sujet, les chiffres tirés d'une étude de KOHILER et crAPRON(1), donne une
idée de l'utilisation de l'argent issu de l'épargne migratoire; cette épargne
est obtenue par les émigrants volta!ques partis en Cate-d'Ivoire ou au Ghana 1
Achats personnels et dépenses de "prestiges"•••••••••••••••• 55 %
Imp8ts•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 15 ~
Dépenses sociales•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
8 %
Dot (mariage) •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
3 %
C::ommerce. .... • .... • • • •• • • • • • • • •• • • • • • • • •• • •••• • • • • • ••• •• • ......
7f %
-Bétail - agriculture •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
5 %
- v' ivr i'er. • • • • • • • • • • •.• • • • • • • • • . • • • • • • • • . • . • • . • • • . • • • • • • • • • • • • •
7 %
Totalo~ •••••••••••••••••••••••••••••••••• o. 100 %
NOllons bien'
la part très importante de l'épargne utilisée dans des achats
personnels et des dépenses de "prestiges". Nous sommes donc nécessairement C(i>n-
duits à considérer ce facteur très rapidement, à ces lL'Cuveaux besoins des pay-
sans d'aujourd'hui et peut être de demain.
Or, le processus d' autopromatiion paysanne ne répond pas, tout du m0'ins très
rapidement, à ces nouveaux besoins occas~onnés par la pénétration de la société
de consommation. Aussi à <Xe niveau là, ne risque-t-0'n pas de vouloi!r pré}l)oser
(1) "f<léthodologie de la planificat ion - étude sur les migrations. Minstère de
la coopération, France. Ministère du Plan, Raute-Vol ta - ].'Iars 1976 - KOHLER
et CAPRON.

- 253 -
~u imposer
aux paysans un idéal à long terme qui ne satisfait pas leurs
as-
pirations à court terme? N·;ous ne pouvons pas répondre à cette question; ce
sera aux paysans de choisir, laissons leur la parole •• o
Il ne faut pas disi1~nguer l'option pour iléveloppement libéral et l "autopro-
motion
l'une aide à compreadre l'autre et reciproquement o Nous pensons en
effet que l'autopromotion permettra aux paysans d'engager une reflex:i!<m sur
ce qui est plus, à notre sens, une stratégie de la liquidation du monde vilLa-
geois dans ce qui un fretn à la pénétration du capitalisme qu'un modèle déve-
loppement pour la pleine réalisation de l'homme. Plus qu'une quest:i!~n da men-
talité, l'attirance du villageoiis pemt' un modèle de consommation superf'iciel
est le fruit de la ~estabilisation dont le capitalisme est responsable.
CON C L U S ION
Dans la multiplicité des projets de dével~ppement reveil et des cours s'y
rapportant, les paysans ne s'expriment pas, n'ont aucun recours économique et
politique. kes paysans sont donc refoulés et laissés pour compte t leur avenir
se dirige irrestiblement dans une impasse.
Nous avons vu au travers les exemples des O.R.D et du p~ojet des A.V.V, que
]' élaboration des projets de dévelO'ppement est faite sans les paysans et pOOl:'
les paysans, et que leur finalité va à l'encontre des intérêts à court et long
terme de ceux-ci. En fait, les paysans ne s'expriment pas, et c'est le ~ésultat
d'une totale inorganisation grêce à laquelle une couche dirigeante arrive à
SKerce une pression politique, sociale et culturelle, et autres vexations et
v
un
exactions de toute sorte. Nous obsenons une paysannerie, subiisst!LIl:J miisérable
sort et incapable de provoquer un changement. En clair leur destin les écrase.
Une expérience limitée a l'autopromotion paysanne semble indiquer une alterna-
tive possible mais les obstacles et blocages sont trop nombreux pour espérer
un succès. Dès lors nous nous tournons vers une voie où l'effort d'investisse-
ment doit se conjuguer étroitement la prise en main de la populati.on, avec la
naissance, dans la communauté nationale, d'une ardeur commune capable de cata-
lyser ses aspirations vers le progrès social. Finalement, la voie d'un vérita-
ble développement est un saut dans le vide, c'est la recherche de l "inconnu
après acceptation de tous les risques possibles; il faut par consé~uent, au
préalable, être conscient des difficultés qui surgiront sur le parcours et se

- 254 -
préparer à les$urmonter s d'où le rôle de la planification dans la mattriBe
du développement lIIational parculièrement celui de l' agricul ture. Cette perspec-
tive de planification doit s'intégrer dans un processus de transformations bOUF-
geoises radicales de la sociét& à son stade actuel.. C'est bien ir6.:z!. l'objet de
notre chapitre sui,vant'.
CEAP II s LES. PERSPECTIVES NOUVELLES s LA MODERNISATION DE L'AGRICULTURE.
-
..
Les problèmes du développement économique et social s'inscrivent dans un&
priorité absolue non seulement dans les pays développés mais surtou~ dans les
pays sous-développés parmi lesquels la HJaute-Vœl ta.
Il ~fallu attendre l'indépendance formelle de 1960 ~~ que
ces problèmes soient posés avec acuité de tout point de VU~I indépendance p~
litique et économique. Mais l'histoire du développement des systèmes en, pJré~
sence (capitalisae et socialisme) nous amène à conclure que tout déve1oppemen~
économique et social d'un pays ou groupes de pays passe nécessairemlllmb--par ];a
mCldernisation de l'agriculture et de l'industrie. Cette modernisation n'a été
réalisée que dansfe cadre d'une étroite liaison entre l'agriculture et l'induB-
tie d'une part et d'autre part sous la dire~ion d'une autorité natianale au-
tonome. Ceci suppo!se avant tout une remise en cause de tous les liens de su,jè-
tion vestige ou non d'un passé colonial permettant un passage d'une ~I!oissatlJce
éventuelle dépendante de l'extérieur 'à une croissance autonome ave~. pou~ sou-
bassement politique : "compter sur ses propres f0Xces". Or, pour en arriver
à cette dernière étape, les pays occidentaux ont réduit les pays africaiin's em
simples fournisseurs de matières premières et consommateurs des produits man~
factués ; ceci au nom d'une prétendue division inrternatiionale du travail.. Cel1e-
ci contribue à élargir de plus en plus le fossé entre les deux groupes da pays.
Elle contraint ainsi l'Afrique donc la Eaute-Walta à un. état permanent de sta-
gnation liconomique qui n'est en réalité qu'''une répression économique chroni-
que et infantilell(I). C'est pourquoi, pour nous, c'est un faux problème que
de choisir une priorité entre l'industrie et l'agriculture, mais nous nous CQn-
tenterons seulement de dégager quelques po,si tions sur la m!Ddernisatiion de l' agri,...
culture.
;
(1)
ALY TRAORE .s "1 "importance des grands produits agricoles d'exportation dans le
.
développement économique et social de la c~,te d'Ivoire". Thèse ..
Paris.
1974.

- 255 -
AI
PLACE DE L'AGRICULTURE DANS LE DEVELOPPENT.
Le rôle que joue l'agriaulture dans le processus de développement reste
toujours une grande préoccupation pour la plupart des PB3S rétaJrdés. En effet,
la Haute-Volta est un pays où le monde rural compte au moins 95 %de la
population. Ainsi, la situat:iion agricole doit consister à promouvoir la biien-
être réel du paysan, à le libérer de la domination poliiique, économique et
culturelle; bref, à construire dans un temps court une société nouvelle dans
laquelle le paysan deviendrait un cita,yen à p~t entière, un homme économique-
ment efficient. ~l est donc normal que l'effort essentiel doit être consaeré
à l'accroissement de la production rurale afin d~élever le niveau de vie assez
bas de la population surtout celui des paysans et d'augmenter les ressources
de l'Etat. C'est là une condition, nécessaire pour susciter l'ardeur au travail,
la volonté de créer et d'améliorer les modes de production et d'existence, é-
léments de base de tout progrès sans oublier bien sftr, l'éducation dont ~ous
.~
aurons en parler. Il s'agit alors de rompre définitivement/tous les éléments
d'inertie politique, économique et culturelle empêchant l'épanouissement de
la paysannerie. Pour cela, les campagnes doivent être dotées des conditions
d'existence qui n'auraient rien à envier à celles de la ville.
"Il s'agit, écrit J. RICHARD i:WLARD, d'grriver si:nultanément à protégelt',
voire améliorer les sols, à donner à l'homme une productivité telle que sa terre
le nourrisse lui et sa famille correctement, lui fournisse un surplus commer-
cialisable, lui permette d'élever une famille dans la sécurité matérielle, mo-
rale, sociale, psychologique" .. Ce n'est que lorsque ces conditions seront rem-
plies que l'agriculture jouerait son rôle. Il est
inconcevable qu'une popula-
tion essentiellement agricole n'arrive plus à se nourrir de son propre travail.
Ceci est le résultat de la faible productivité du travail paysan et la trop
négligence des cultures vivrières par la bourgeoisie étatique. De ee fait, dé-
velopper l'agricultur vivrière de~ient un impératif à court terme. Pour ce qui
est des possiblités de l'Afrique dans ce domaine, elle poull'll'ait deveniir "le
gr~ier du monde" si l'agriculture est considérée comme essentiellement la COD-
binaison de trois éléments: terre, l'eau et l'énergie solaire (Aly TRAORE).
Mais, le concept orthodooce de la division in~ernationale du travail a contraint

- 256 -
le pa,ysan à centrer ses efforts sur les produits d'exportation afin de satis-
faire la "demande du marché mondial". NIRINA ANDR1AMANERASOA et ROYUBN AlIllDR1A~
MANMJJARA ont illustré ironiquement en termes simples les bienfaits thé0~iques
tellement vantés de la spécialisation s "Vous, de la p-ériphérie (pays sous-dé-
veloppés) vous devez vous échinar pour produire ce que nous, du centre (pays
développés), ne pouvons pas produire ou ne v.oulons pas produire parc& que ~e
travaH est trop dur ou indigne de nous (exemple s produHs agrico,les tropicaux)
et ce dont nous aVions besoin: tout cela mous vous l'aohèterons "au prix du
marché",.. c'est-à-dire pQur ce que nous vou'rQns bien vous payer, cre qui était et
est nécessairement à des prix dérisoires.
En contre-partie, nous vous ferons une grande faveur ~ nous vous vendrons
nQS produits manufactués - la plupart du temps à partir de vos prop(L'es r&ssol.-
ces - également "au prix du marché", c'est-à-dire à des prix aussi élewés que
nous pouvons vous faire accepter. C:ar,. dit le centre,. vous avez besQin de nos
produi ts manufactués s ils feront de vous des gens "civilisés" comme nous'·.
c'est ainsi, gagnée par la fièvre de la produatiGn marohande(café, ca~Q, C0~•• )
contrainte par les autorités coloniales, et enoouragée par la bourgeoi,sie
au pouvoir, la population africaine s'est lanoée dans la culture d'e~tatii.~
C'est ainsi qu'au GHANA par exemple, pour accroitre leur potentialité, lies tri.;..
bus Aburi, Akropong et Akl;fapin émig>rèrent par vagues successives sur les terres
fertiles en friche et accumulèrent de grandes surfaces pour cette culture. Ced
est surtout Ù'alable que pour les Pél3s cotiers•. et humides. Egalement au CAMEROUN,
p
le C:amero6ns Develo:pment Corporation, organisme gouvernemental, dispose des
plantations s'étendant sur des centaines de milliers d'acres (1 acre = 52 ~es)
des meilleurs terres du Pél3s où llo~ultive la banane, le palmier à huile, le
cacao, le caoutchouc et d'autres produits. D'après une enquête faite par EDWnJ!
ARDENER in (Modern Africa Oxford 1961) les conditmons de vie des ouvriers et
de leur famille y sont catastrophiques ; insuffisance ie logements et le~ mBÙ-
vais état, la chereté de la nourriture, les déficiences alimentaires etc••• La
plupart de ces ?uvriers et pél3sans pauvres vivent COBstamment endettés. Cet
exemple est gé~alisables dans les autres Pél3s africains. Et c'est à juste titre
qu'on peut lire dans la revue (Le Travail en Afrique Noire - Présence AfricaiDle
1952 à la page 196). " une agriculture de substance échappant au marohé capi-
taliste reste un obstacle à la construction d'une main·-d'oeuvre salaL'iLée massive',

- 251 -
dont la disposition est une exigence du capital. Si d'autre part, cette: agri-
culture capitaliste, dont les c~üts de production; sont supérieurs. Le ~plta­
lisme s'emploie donc à développer l'agriaulture de marché, les récoltes commeD-
aialisables, à condition d'en prendre la direction et d"assurer lui-m&me la
commercialisation pour en tirer profit. de sorte que dans cettev~ie, l'agricuù-
teur africain, même "indépendant'" se verra, en échange d'une pr0ductioD.J améJi.io-
rée, accablée de dettes, d'imp.Hs et de pBestati~ns qui sont dans ce nég:iim.e,.
la rançon du développement". On cQ1llprend dès lors que la dév:eloppesenrt1. agni'co~e
soit it 1 créer des emplois à la campagne, satisfaire les besoims essentiels
de la ma.sse de la population, rédl1ùe les inégalités, develcpper
les technologies adaptées, permettre aux paysans de s'exprimer et ~e s~ganii­
ser••• nus que sur le problème de l'accroissement de la production,: on attire
aujourd'hui l'attention sur celui de la répartition des richesse. Il na s'agiiit
pas de renoncer à toute progression quantitativa, naturellement r Mais le dogDe
de la production à tous prix". est battu en brèche , ''tiJ!n accroissement de:s dis-
ponibilités alimentaires serait inefficace pour lutter contre la mamltrition,
à moins è'avoir l'assurance que le supplément sera distribué à ceux qui en eat
besoin"(I). C-ar la réalité est la suivante; dans la 'plupart des pays scms-dé-
veloppés, même ceux qui ont connu une croissance de la production agria:eù.e,
le pouvoir d'arihat de la grande masse des paysans a *tagné, si ce n'est Dégrèssé.
Le développemsBt des inégalités s'accompagne donc d'une paupérisation absQlwe
d'une partie de la population, ce qui rend le problème sPécialement dramatique.
Ce langage n'est pas "
uniquement celui d'expert s en tous genreso
des hommes politiques le tiennent également. C'est ainsi que ROBERT MAC NAMARA
a déclaré (2) l
"limiter notre attention à l'accroissement du PNB, même s'il
devait passer de 5 %par an à 6 %ou 7 ", ne peut mener qu'à acCU'ottre les
déséquilibres politiques, sociaux et économique. Si nous atteignons les objec-
tifs quantitatifs du développement en négligeant ses objectifs qual:iitatifs,
nous a1Ut0nS échoué".
Ces affirmation s'appuient en général sur un certain nombre d~argaemeB$s.
(1) M.AHBUD U'1 HAQ l
"Crise de stratégie du développement" - ac;;uel développemant-
Juillet-Aoüt 1974.
(2) MAC NANARA Ro,bert 1 n Une vie meilleure pour deux milliards d' hommes u • Cctl.
Regards sur le monde. DEN.OEL 1973.

- 258 -
X0US retiendr0ns ioi ceux de: MALBUD ~ HAQ (déjà, cité), directeur à, la Banque
Mondiale.. P'our lui, la vieille théorie selim laquelle des taux de crctd.ssaJlQ:e
faibles, qui a pour cornolair~ la croyance' que les problèmes de diistnibutiion
viennent après ceux de productiion est tout siiJn~J.ement fausse( i). C;eCI:ii pcmn' trCl'is:
D'aisons au moins s
-La fiscaliité ne peu"t être un instrument efficace de redisfu!i!butiion des:
revenus dans les pays pauvres ;
- ]es flux de revenus ne sont pas des flux financiers, mais sont formés
de biens matériels, comment redistribuer des appartements et des automobiles:
de. luxe? Dans le même ordre d "idées, i l sera tr.ès diiflficile, a pastéri,orii,
de reconvertir un apparŒil productif'
destiné:
&, satisfaire les besoins d'une:
catégorie sociale minoritaire et privilégiée~
-
]J.' inégali té engendre l'inégalité.
"Si les structures de l:a aroissanCE:
sont caractérisées par de larges disparités dans la propriété ternienne e~ des
concentrations de la puissance iindustrielle,. le pr~essus de croissance: ne
pourra que les renforcer encore, et ils s'apposeront à. toute tentative de leur
ôter leurs pouvoirs et leurs privilèges par le moyen de néf<n'mes paisible ....
D'ailleurs de nombreux auteurs s'attachent à déu-ire les inégaliités qui
se développent dans les pays sous-développés. 'IJout ceci est bien c(j)nnu, et iJI.
n'est donc pas nécessaire de s'y attarder ici. Il el!rt toutefois intéressant:
de noter que le problème des inégalités parait aujourd' hui directement liié à,
des stratégies de développement négligeant le se~eur ruraL. Il s'~ii~ là é~ii­
demment du sujet central de toutes les réflexions récentes sur le sous~ével~p­
pement, que l'on retrouve de façon concnète dans nos analyses précedent~
Néanmoins, nous nous proposons d'examiner le comment ~aire pour so~tir de cet~e
impasse le monde paysans.
BI - COMMmT FA.lRE ?
L "époque n'est pas si éloignée où l'on n:hésitai t pas à considérer les pay-
sans comme une catégorie sociale hom0gène. :&es travaux des ethnologues et' des
anthropologues avaient pourtant mis en évidence les différenass de statut s~
cial qui existent depuis longtemps dans l "agriculture di te traditionnelle. Mlais
(i) V!air également la "déclaration de COCOYOC" s "nous rejetons par conséquen1lt,
l'idée de croissance d'abord,
justice dans la distTib~tion d~ ses fruits,
plus tard" (citée dans Actuel Dévela:ppement, maus-avrü 1975).

- 259 -
elles étaient, il faut le croire, peu perceptibles par des yeux œ-ciidentaux
"normaux".
S·i l'on en juge par le nombre des auteurs qui désM'mais les dén<llncemb,
elles (diffénences de statut social) ont pris récemment des formes mains sub-
tilles.
"B-ien que ce résultat ne soit peut-être pa.s celui qui étaH reahenehé,
écrit A. llATERSTON( 1), le développement agricole a été souvent plus pra~ita
ble aux agriculteurs riches qu'aux agricul!teurs pauvres des l"éWs en vœie de
déveloRPement, car les riches bénéficient, natamment en matière d"éduc:ati0llp
de crédit et d'irrigation, des meyens nécessaires pour utiiliiser à,. b<m esciient
de JIOuvelles possibilités, melt'yens dont les pauvres sont souven't dépour"ro.s".
On peut citer également cette phrase très caractéristique d'HENRI BICHA'I!.{2)
"On assiste alors, si les pouvoirs puHias n'y prennent garde, âI. une "koul~­
sation" du milieu rural, rompant ainsi la cohésion du milieu social et favori-
sant l' ini tiati ve indi1viduelles au dépend de la solidarité du groupe"'.
Assez curieusement, les diffé*ents auteurs qui traitent de la questiom
ne se demandent guère si les opérations de développement rural ont fongé ces
inégalités "exnihile" ou bien si elles n'ont fait qu'accentuer des tendances
préexistantes. Le problème a plus qu'un intérêt historique 1 aucune p~Jitique
de développement rural ne peut le négliger. Par conséquent ",];, aveu" de N. miL
H''Â.Q(3) parait très sym\\omatique à cet égard l "je ne suis pas un apatre. de 1"a
confront2tiion, et je ne suis pas prêt à abandonner mon libéralisme pers.QllUleJlo,
Mais je pense qu'il importe que nous comprenions que le libéralisme ne peut.
pas survivre dans un monde non libéral~(••• ) ~e ne peux pas prédire ce qui S<llT-
tira de ce réexamen. Mais si je devais aujourd'hui m'y essB\\1er,
je dirai vque
je m'attends à ce que le développement éconmique, dans les q~lques années
qui viennent, sera de plus en plus fondé sur une stratégie comportant une at-
taque directe sur la pauvreté des masses, un recours authentique au s<llciialis1Dle,
et un dégré beaucoup plus élevé d' autosufficance'~.. ,
Donc la nécessité qui est de compter sur ces "propres forces". Comme
(1) WATERSON ALBERT l ''Un modèle viable de développement rural" ]<'inances et dé-
veloppement - déc. 1974.
(2 ) H.EllRI BICHAT l "Recherche agronomique et révolution industrielle" Actuel!.
développement -
ja-vier-février 1975
(3) IlL HAQ MAHBUD 1 (déjà cité).~.. AJST.

- 260 -
]j'écrit A. WAT~SON, qui pourtant ne va pas jusqu "à parleI' de socialisme, "lle
dével(l)ppement :rural repose de plus en pilus SUl' le pDi!nci!'le; salon leque] lies
collectivités intéressées doi'vent compter ë?,vant tout sur elles-mêmes,"'(déjà
cité). Et·. l"auteu:n de citer b-ien s6:r les exemples de la 'llanzani,e et.
de la Chine•••.
En fait, 1a formule "compter sur ses prQ,PlI'e.s fQrces," est. davantage l"exJlIIDes....
sion, sous forme de slogaa, d "une idé0110gie mQitilisatrice., qu'un concept rigo~
reux permettant de fonder une analyse économique•. I l ne c.ont ient en e;ffrat-, au-
cun jugement sur la nature des ltelatiiQns économiques iinternat :ii(Dnalle-s ae.t:u.elllea"
et peut simplement donner à penser que l "aide et la caapérat hm sont. iinsuffrii~
santes, et que les pays sous-développés doivent par conséqueni; "se déb:nouille:r".
Au niveau intérieur de ces pays que les ruraux doivent dispfllSer de l "e.ssentiiel
du surplus qu'~ls dégagent.
En effet, l "actuel modèle de dévelop-pement est caractérisé, à nG>,tre sens
par le fait que le mopde rural subit une ponction très forte, qui ne leUJr' laisse
pas toujours le nécessaire et dont une partie est "évacuéanl sur ]j'étranger IDaJr
le jeu du commerce international, l'autre permettant d'entreien~r une croissan~e
uxbaine accélérée.
ÂUcun véritable développement rural ne pourra se faire sans un renversamént
de cette pratique.
En premier lieu, la production rurale doit permettre de satisfaire les b~
soins essentiels des paysans. Le progDès dans l'agriculture, l'élevage, passe:o
par l'amélioration sans délai, et significative, du niveau de vie des intéres-
sés. Ceci pose, dans nombre de cas, le problème de la reconversion des cultures
de rente.
IJ"autre part, i l .onvient de continuer à dégager un surplus et de ll'u~iser
t\\"
pour l"essen"tiJJel en zone rural.
Il/faudra pas, en eff'etl,
que l'amélioration
de la situation, des paysans conduise à une absorption totale de surplus dans
les dépenses oourant'es non Dr0ductives. eeci
veut dire qu'une telle politiqe.e
ne peut être réalisée grâce au jeu uniique des loiis du marché, ou même pal' une
planification qui se contenterait de jouer sur les prix. Une
organisation poussée
du monde rural est donc jjndispensable, ainsi qu'une planification qUli pa.JrV:ienne
à "'C.Oncilier les aspirations locales et les contraintes' nationales.

- 261 -
L'utilisation locale du surplus devrait permettre non seulement d'accDo!tre
le potentiel productif agricole, mais d'i.m.",lant;er sur place des activités se-
condaires et tertiaires qui stopperaient l'exode rural et qui peut être même
parviendraient à déccmgestionner les concentrations urbaines. Pour cela, nous
" 'Al.c:.orcl.
sommes(avec K.C. ABERROMB1E qui écrit que 1 ~es éconemistes du déveleppement
sont à la recherche, depuis quelque temps, de techniques à. haut coeffici'ent
de main-d'oeuvre et autres mesures visant spécifiquement à timuler l'emFl~i.
De mêm on a admis progressivement que, dans les p~s en voie de développement~
l'agriculture ne saurait se cantonner dans son ]l'61e traditionnel de pcmrvoyeur
de main d'oeuvre pour le reste de l' écan011li>e, mai.s qu "elle doiit au contraine
procurer du travaiil à l,a, pOl!lulati,om active jusqu "à ce que les autre,s secteurs
1
soient en mesure de la relBJ'"er. C'est ainsi que l'on s "est rendu a:;OlJIlPite que
les secteurs agricole et rural de l' éconQWI:Ee ont une Ï!mportance cruciale pour
l'empl~i. ~cmt ceci représente un grand pas en avant. Il se~ble malgn~ tout
que cette conception se fige déjà œans une sarte de sagesse conventiannelle
qui n'engendre qu'une serie de mesures fragmentaires, de paliatifs relative.
ment- inefficaces. ( ••• ) Peut être serait-H nécessaire de chercher des soJ.ut:ii.ons
d'une portée plus vaste. "(cf.. "l'emploi rural, 0'bjectif prioritaire". CRES janvier-
février 1913).
Il faut noter que peu d'auteurs (à notre connaissance) signaleI1Jt que
cette nouvelle stratégie va à l'ncontre des théories classiques de la orm1saan~
ce lIui supposent un exaildent de main-d'oeuvre, donc des salaires faibles, afin,
de favoriser l'industrialisatio~ Dans une économie de marché, le maintien
de la population aotive dans les campagnes risque par conséquent d"é]Lever les
rémunérations urbaines, ce qui a de fortes chances de relancerl"exode rural!.
On sent, à travers cette analyse rapide que le problème du dével~ppement de
l'emploi rural ne peut pas être traité "en soi". ie n'est pas uniquement une
affaire d'investissements agricoles et ou d'animation et d'encadrement des ~­
sans, etc ••• Bien évidemment, il conduit à remmet~e en cause l'ensemble des
relations vi'lles/ campagnes, et n-otamment le finanoement de la croisBanee urbaiins
(iavec son double volet t production et consommation) par le surplus InlJl'al. R.
MAC NAMARA (déjà cité) affirme-~il autre chose lorsqu'il écrit 1 -Pauvreté,
inégali té et sous-emp10,i ne peuvent être efficacement enJ183'és en déve10)ppant
le seul secteur urbain, mais doivent être attaqués à leur source dans les ré-
gions rurales, par des mesures propres à améliorer les revenus des agriculteurs
les plus pauvres."

- 262 -
Toujours d'après la théorie économique classique, la croissanc~ supp~se
que l' agricul ture dégage un surplus et que celui-.e:i soit utilisé dans œe;s ac-
tivirés productives, essentiellement l'industrie... Ce point de vue explique,
soit dit en passant, que certains économistes, de moins en moins DDrnbneux,
heureusement; se bornent à.: analyser le sous-développement enlterme dtut:iiJJiisa-
tion du surplus rural. Ils s'étendent longuement sur les gaspillages, su::tr']] 81hy_
pertrophie de l ':administration et du secteur tertiaire, etc ••• , sans se rendre
c@TTIpte que ces élément "fâcheux" Be sont: pas simplement des "bavures" du; ~s­
tème, mais qu'ils en font intégralement partie.
Un autre volet de notre point de vue serait de combattre la dépendance
vi's à v:is de l'étranger. Il convient bien s'dr d'arrêter le plus rapidement pos-
sible l'~émorragie du surplus rural vers l'étranger, donc améli~er et stabi-
liser le pouvoir d'achat des matières premières agricoles. Certaines pensent
que cet objectif peut être atteint par la valorisation sur place des ~oduits.
L'expérience montre, en fait, q~e la nature des produits échangés n'est pas
en cause et que l'essentiel du problème porte sur les rappC1>rts ~'
de force entre "partenaires" internationaux.
Développer les ententes entre p~s producteurs constitue de toute évidence
un excellent moyen de faire basculer ces rapports de force. La véritable entente
suppose que ces pays sont ma1tres de leur destin~IB'aïlleurs cette stratégie
se heJte à très nombreuses difficultés pour cei~n_rne les produd.ts agFicl::eJJes.
L'autre moyen pour les p~s sous-développés améliorer leur pouvoir de négocia-
tion - non exclusif évidement du précédent - est de deveniJr moins dépendants
des pays industriels pour ce qui concerne, osons le dire leur survie. Comment
négocier une augmentation des prix des exportations 10JI'sque l'alimentation de
la pa.pulation du pays dépend àes imp:ortations du riz ou du blé? expoirter moÎDlB
de produits de rente, produire plus de cultures vivrières, ce1&peut para1tre
une théorie simpliste, mais c'est la seule politique réaliste à long-terme qui
s'offre à la grande majorité des pays sous-dévelo-ppés.
Cette relative rupture avec le marché international devra s'acCl::ompagner,.
dans un premier temps d'une diminution de la capacité d'importation. C'est :Lei
que la no.tion de "self réliance" prend toute sa significatiGm; car il faudra
réduire les importations non indispensables, et produire davantage suxp~aee.

- 263 -
Et l"on· retrouve le thème des techno10g±es appropriées qui sont à. lier aveClr'
,
un proJet de société, pour laquelle ncms allons maintenant tenter d "abordeI!
dans le cadre d'un dévelo,ppement réel du monde rural. La résultante d'une telle
0'ption: stratégique s'intègre dans un processus de '1'RAN·SFORXATIOllUS. BOURGEOISES
RADICALES; base d'un, nou'V7el oJl'dre éC0ll0f1l(~ique et sooiali.
S,ection II J DES; TRANSFORJ}lATIONS BOURGEOISES RADICALES DES STRUCTUro:.s.
Nous sommes à un stade de l'analyse des perspectt~s du développement oÙ1
le problème principal est de savoir quels programmes économique et social ou
quels t9pes de développement peuvent mettire un terme au C!Jous-dévelO'ppemenll, eD
tant que produit de la domination étrangère et du retard d"év-olutioo des sociétés
communautaires, 'JlIaiis aussi celui de savo-ir quelles foraes sooiales ~~im·t.....
réellement engendré un véri_table développement avec quel genre de société~ A
propoB des forces motrices de développement, ILBOUDO KOUDA lI'épond en <i:es tenmes 1
" en effet, à notre connaissance, ce sont les modes de production qui fmden1t.
en dernier ressort les alliances de classes. L'analyse de la structure é~on0­
mique de la société volta!que actuelle révèle que le mode de producti01lt. capi-
taliste est celui qui est en plein développement. Il se subordonne les autres
modes d'organisation de la production qui eux, connaissent un recrul certain.
L'agriculture s'intégre de plus en plus au système capitaliste et se soumet
aux lois du marché. Au niveau de la structure de classes, le développement de
la bourgeoisie et du prolétariat est de plus en plus évident. La paysannerie~
tout en restant nombreuze, va en se différenciant et beaucoup de ses membres
se prolétarisent avec le développement du capitalisme dans les campagnes. Classe
ouVJ.':ière et paysannerie sont à l'heure actuelle, les principales f0a:'ces s(j)cilales
productrices des richesses mais les exploitées".(I). Avec nécessairement la
particiipation1 et la contribution acttves sur tous les plans des: i;ntellec1luel·s
aco_uis à la supériari té de la nouvelle société.
&
Il est bien évident que dans le cadre de ces transformations bouxgoises
radicales des structures, la planication doit être au centre des préoccupations
de la mise en mouvement de la société nouvell~
(r) ILBOUDü KOUKA : "classes sociales et developpement économique en
Haute-V0JJt:a"
Thèse, Doctorat 3è cycle; Novembr 1979. P.367 - Pë1tieI'B

Ce mouvement dQit viser à. 1
renforcer les finaliés du plan ;
la transformation radicale de toutes les stllUctures archaïque ell; moyteJl_
'âgeuses de la société actuelle ;
la transformation des mentalités et les rapports sociaux gll"âce à. une
éducation de type nouveau.
Paragraphe l
1 LA FINALITE DE LA PIlANIFICATIOIl.
Cette finalité est la lutte contre la raréiTé et les contraiintes~ les J!.o±-s
naturelles et la domina1iion pour l'indépendance nationale et la satisf'actioDl
des besoins du plus grande n0mb:ue~
Les "'etats rentiers", c'est-à-dire les pays industrialisés qui prélèvent.
en permanence un tribut sur les économies périphériques, comme nous l'avons
vu plus haut, que ce prélèvement puisse trouver une solution adéqualle.· Pour 'ce
faire, i l faut insister plus longuement sur l'éventualité d "une surévaluation'
du taux de change qui constitue un moyen très peu voyant d'assurer des tranferts
de l'agriculture vers les autres secteurs de l'économie. Une surévaluation dU!
taux de change, en effet, favorise les importations en diminauant leur prix
relatif. L.es sell:;teurs ou groupes sociaux importateurs, c'est à dixe essentiel-
lement les consommateurs urbains, l'industrie et les services, y trou~t âon~
un avantage. Q;ua.ntlt aux exportations, i!3U'rs prix Bont géJlléJr'alQIDent, p01œ? les -
payssous-développés, fixés en monnaie~s étrangères, par exemple dollar ou livre
sterling. Par conséquent, plus le taux de change est "élevé", plus la contre-
partie de la valeur des expo:utations exp:uimée en monnaie g.tationale est faible.
On peut dire, dans ces donditions, que le sous-paiement des exportations, qui
sont souvent agricoles, permet de financer un excédent d'impo:utations. Pour
R.N. B;IRD(I) : "Onl peut par exemple mai"tenir un taux de change unique qui su-
révalue la monnaie nationale; l'expo:utateur est ainsi taxé, en ce sens qu'il
reçoit moins de monnaie louRle que si le taux de change était fixé à un niveau
moins élevé plus réaHiiste" alors que les importateurs sont en fait subvenrb;ioiYl-
nés du fait qu'il leur est possible d'acheter des produits étrangers à _
_ un prix inférieur à leur valeur "réelle". Cette méthode a parfois
été utilisée par des pays comme l'Argen1ine et le PaKistan dans le but de t~an~-
(r)
BIRD RICHARD.M.: "L'imposition du secteur agricole dans les pays en voie
de développement" Finance et développement Septembre 1974.

- 265 -
fé~r des revenus réels du seoteur agricole exportateur au seateur imponta-
teur, en grande partie non agricole. ë' est na.turellement "invisible"', en ce
. sens que le gouvernement n'encaisse effectivement aucune taxe (sauf dans
la mesure où i l est lui même un importateur) n. On conçoit ~ue les agents éco-
nomiques qui se situent dans le secteur importateur (salailfés UJ!bains à. lI'eVelilUS
élevés, industriels) aient un intérêt objectif au maintien du taux de change
stfévalué. Au delà de son aspect purement technique, le problème du taux de chan-
ge prend donc une dimens\\:ion éminement politique. Ceci devrait être pris en
considération, pour ce~ui concerne les Etats d'Afrique et de Madagascar (E.A.M),
lorsqu'il est question de la parité du FranœC.F.A. Nul doute que le débat e~
serait éclairé.
Si les deux grande systèmes économiques ont élaboré une finalité, les p~s
qui restent doivent s'ils ne veulent pas continuer à être le reservoir des pro-
duits pniœaires, poser leur finalité qui doit consister à la ~onstitutian d'une
unité politique économique et sociale structurée de l'intérieur. Il s'agit de
bâtir des nations cohérentes intégrées et autonomes. De ce fait, il se dégage
un double combat s
a) - au niveau ëJdell'me
Il s'agit de bâtir une économie nationale. A ce titre, GUNAR lITRDAL·, d8Jil1s
son titre "planifier pour développer" distingur très judicieusement le natio-
nalisme progressif et le nationalisme regressif.
- Le premier vise la réalisation de l'intégration sociale et, par le
plan, la mise sur pied d'une économie intégra.lement intravertie. Il recourt
souvent au protectionni9~e, à l'orientation des échanges extérieurs. Le déve-
loppement des pays européens est jalonné de ces exemples.
ilLe- nationalisme, écrit-il, tel qu'il se développe à l'heure actuelle dans
les p~s sous-développés, n'est pas comme il l'est dans la plupart des pays
développés - associés aux opinions politiques réact':ionnaires, mais du mouvememt
de modernisation et de réforme. Il est une force de plus en plus favorables à
(1) GmlAR r,ITRDAL : "Planifier pour développer" - cité par Rudloff P. 366.

- 266 -
llégalisat~9~~. jes chances et à la démocratisation des conditions sociales et
êconomiques••• L'inèitation aux sentiments nationalistes parmi les peuples at-
tardés est une conditim du pr-ogrès économique et social. Si le pro~ès 0ons-
titue l 'object if, stimuler ces émotions devient un moyen rat:i!onneJl d'y parveIrir-".
Dans le même ordre d'idée,_ M.AIJRrCE DUVERGER écrit que "la valeur du natiCll-
nalisme est incontestable s il est d'une certaine façon l'expression même de
la liberté. Dans les formes et les conditons différentes contre les hégémonies de
natmre-
et de dégréa dif'férents, c'est un même combat que mènent ainsi des
peuples d'Asie et d "Afrique centrale contre l'URSS, les lat mo-américains et
1
la France, contre les USA dans les rapports entre etats de forQe inégale, le
nationalisme des autres est un moyen de résister à cette' domination••• Par na-
ture, le nationalisme des Etas donnés plus ou moins libérateur (cela n"empêche
pas que le second puisse être déterminé à des fins d' opprèsion' interne, nm'
que le premier puisse parfois aider à créer les conditi:.Olœ de lilrerté)"(I).
Si l'on reconnaît incontestablement la dynamique structuran~e du natiQ-
nalisme, il faut se dire qu'à l'intérieu:u du pays, il existe des fOl!matiions
sociales diférentes et quelquefois antag0niques qui peuvent ~tre source de
blocage du développement, ce phénomène, MYRDAL
le qualifie de nationalisme
régressifco
Sur le plan interne, on constate dans le cadre de la Haute-Volta que dif-
férentes classes et couches existent,que certaines sont même antagoni:ques. Ce
que R. STAVENHAGEN caractérise comme étant la contradicti0n entre les fQrces
de production et les rapports de production, en ces tEll"meS s"La classe domi:Œ!l.D.lte
et la classe dominée, représentent l'une des relations de production établies
dans la société; l'autre les forces de production nnuvelles qui t&t ou tard
entreront en contradiction avec ce système de relations"(2). Cette dominatiom
plL4.ee
d'une classe sur l'autre est fortement redoutée par MYRDAL, lorqu'il/de natio-
nalisme regressif, i l voi~ là l'arme de la politique chauvine et autéU'cique
(r) fil. DUVERGER : "Selection du monde du ~9/5/65" cité par Rudloff PP. 366 et 367.
(2) R. STAVENHAGEN : "Les classes sociales dans les sociétés agraires ll -
P.4I
Ed. Anthropos - Pa~ lt74.

- 267 -
gue va bra~dir la bourgeoisie au pouvoir pour tenter de consolider leurs acquis.
Pour NrYRDAL, les contradict ions qu' on tentait d'éviter risquent de réap-
para1tre sous ses formes les plus aigu~s, parce que la bourgeoisie au pQUvoir
essaieront de bloquer la restructuration de la société. Il faut éviter que lm
nat ionalisme ne devienne un poison entre les mains de crette c:aste oligarchique.
En d'autres termes; les objectifs stratégiques des réformes profondes
doivent répondre efficacr~ment aux besoins de la nation tout entière. Ils ne
peuvent être établiS indépendamment des masses et leurs réalisat~ons ne p~
vent
se concevoir sans celles-c~ ae ce fait tout projet de société doit vi~
ser à 1
la liquidation de la domination économique du pays
l'indépendance économioue et politique;
- la formation d'une véritable nation homogène où la minorité c&toie
la majorité et vice-versa;
l'amélioration des conditions de vie des populations;
la formation;, en général, d'une société nouvelle au service d'un hom-
me nouveau.
Paragraphe II 1 SOCIE..'TE NOUVELLE 1 STRATEGIE DE Rt1Pl!l!mE m' DE CHANG»ŒN1l'.
La s~tuation d'ensemble dans sa forme actuelle n'aura de positif qu'une
destruction de la base archa!que et obscurantiste qui~
soit constitue un·
frein au développement puisque souvent hostile auchangemen1l. Comme nous l':a-
vons vu à la fin de notre premier chapitre de la première partie, que cette
réalité a conduit à créer une société au carrefour entre d'une part le sys-
tème traditionnel et le système capitaliste d'autre part, d'où la nécessité
de la rupture radicale et consciente avec toutes les structures archa!ques,
ceci dans un processus bien planifié. mous pouvons d'ores et dejà serier les
facteurs principaux bien s~r non exhaustifs pouvant servir de base à cette
impulsion nouvelle du développement agricole en particulier en traitant les
objectifs à rn-oyen et long termes que sont les trans~armation8 socio-écon0.&t
miques à réaliser 1
transformations structurelles par l'éducation
la transformation des institutions ;
- les changements de mentalités et les rapports sociaux.

- 26" -
AI - LA TRANJSFORMATIOIf DES INSTITUTIONS:.
N·ul part au monde, le développement ne s'est fait de façon spontanée, sans
un minimun de coordinationo Aussi il convien~ de voir cette transformation
institutionnelle par la recherche de structures admin~àtratives efficaces mais
démocrat iques.
En effet, il est fort possible de contin'jjeJ!' à penser que la "main invisible"
continuera à faire le jeu de la prospérité, mais force est de constater que
dans le monde en plein bouleversement toute action spo~tanée
peut entralner
le chao... (}e qui distingue l'homme de l'animal, ce qui a permis d'assurer sa
suprematie sur le deuxième, c'est l'acte reflèchi, intelligent que l'homme.:
a su mettre en pratique par l'organisation.
L'organisation, la cohérence demeuraient la pierre angulaire de toute ac-
tion de propulsion du développement. Or, ce qui a manqué à la société volta!-
que post-coloniale c'est d'avoir accepté un état de fait qui la mine dans ses
contradictions. ~'administration et les structures qui sont l'héritage de la
deuxième période ont été conservées comme telle. Mais l'Etat doit être le oa-
talyseur du développement, il ne peut le faire qu'en se débarussait de son ca-
ractère bureaucratique.
Les recherches doivent être menées à trois niveaux si l'on ne veut pas tom-
ber dans l'anarchisme qui conduit inéluctablement au totalitarisme
qui! est
source de confiscation desjlibertés individuelles et au collectivisme imposé
qui en~ndrera la passivité et l'indifférence 1
- la recherche de structures administratives rép$ndant à la situation
véritable du pays;
- l'harmonisation des pouvoirs régiona~ et la décentralisation locale
dans l'unité;
- le rÔle que doivent jouer les organisations de paysans, l'efficacité
d'une structuration ne peut être réalisée que si elle s'accompagne de change-
ment de mentalités et de comportements...
BI - LES CHANGEMm'TS DE MENTALITJIS.
l'agent économique n'est pas un facteur de développement parmi d'autres,

- 269 -
il est le fondement. Ceci implique que, dans le développement, il faut change~
la vision de l'agent quant au pouvoir surnaturel et aux cro31ances mystiques.
Il faut que l'homme puisse à tout instant se reconnaître en tant que tel dans
su propre culture, afin de trouver les valeut5 qui lui sont propres pour
façonner son développement et son histoire.
On voit combien sont importantes les mèthodes d'animation et foncti~q~
meneront ce bond qualita~if' humain à ses fins. C'est dans ce contexte que
les groupements coopératifs peuvent trouver leur signification et que: la fo:Jl'-
mation des hommes s'impose•••
:n..es groupements coopératifs. Il y a déjà longt-.èmp's que ll!lon parle du' "com-
munisme primitif" des sociétés aficaines.. Cette vie communautaire, basée sur
la structure classique et familiale ne s'est pas totalement effondrée. S,, il
doit y: avoir groupements coopératifs, on ne saurait ignorer ces aspects posi-
tifs et négatif's de la cellule famiale. Ces groupements doivent tendre à. créer
des animateurs et encadreurs issus Gu
milieu,. n' auir0!11t r'ien à vO.ir avec les
encadreurs actuels dont le but est d'orienter le paysan vers les cultures de
rentes au détriment des cultures vivrières.
1
Par cet encadrement et ces groupements d'animation, l'esprit cfatïf doit
naître. Ces groupements seront compiètés par une sérieuse formation à tous les
niv~aux particulièrement en matière de l'enseignement.
cl - LES 'l'RANSFOR!IL'1.TIONS STRUC'rURELLES..
Il faut cocnprendre
par transformations stJl'Ucturelles, tout changement vi-
sant à modifier les comportements sociaux de la polpulation dans un certain
nombre de technique et d'institutions qui entrent nécessairement en cQnf]it
avec les structures existantes. Parmi les éléments qui contribuen~ au chanBe-
nu.;ent; l'éducation tient une place importante. C'est parce qu'il en est ainsi
pour LOmIS MALASSIS qui définit le système d'éducation rurale et agricole adap-
té aux objectifs de développement comme: "••• Un ensemble complexe qui tise à
la fois à intéger les populations rurales dans la société globale, à leur per-
mettre de participer au processus de développement en assumant les responsabi-
lités aux quelles elles peuvent prétendre, à former et informer e~ permanence le

210
personnel qualifié nécessaire à l'accomplissement des tâches techniq~s que
réquiert la cfoissance ll (1). Pour répondre à la double néc'ssi té d' initég,ratioll
1
des ruraux dans la communau::te nationale et de format ion des hommes qua:I!ifiés dont
l' agr:iJcul ture a besoin reviennent su· système éducatif 1 l ' ol!lljet de notre section 2,
SECTION Ill: LE HOLE DE L'EDUCATION.
Dée~ivan~ l'a~tributian du Ministère de l'Educa~ion Na~iGnale et
de la Culture, le Plan ~u.inquennal écri vait
.. c.e propos:
"qu':i..l. in-
combe 1.& tâche de dispenser l'enseignement et ci'aasurer la:. formation
de la jeunesse volta~que. Son r8le es~ essentie1 ~ans le développement
du pays qui exige des ~ravailleurs qualifiés dans ~ou*es les branehes
et à tGUS les ni veaux de l'économie nationale". I~ poursuit en para-
phrasant un éconollld.ste contemporain pGur souligner que "l'Ecluea'tion
et la formation à t(i»US le s niveaux devaient précéder 1.' insta.l.la'tion
des .achines outils. En effet, les stru.~ure8 ~s plus pe~ectiGnnées
n'ont de se.ne que si elles sont am,jmées par des i.ndividus: coapéten"ts.
aussi l'objet du M:iniis~ère de l'Ed.ucation Nationale es-t-iJL de recruter
de préparer et de m.ettre è. la disposition de la Na-tion,. les persennes
nécessaires à son dével.oppement écono.uque et sa;cial".(~)
Avant de faire une ~pproche concrète du r8le effectif de ltEduca~ion
sous sa fo·rme moàerne, examinons sa fOrDlle traditionnelle qui de.eure
bien que sous fo~e de vestige, tlo,n négl.igeabs.
FARAGRAPHE 1: C9ntenu de la forma-tion traditionnelle.
CelmlLe dans -toute l'afrique tro·picaJ..e occidentùe,
l.a Haute-Vol.ta,
située surtout dans les aones souàaniennes e1;., au Nor. ,sahélienne"
av.ai-t déve.loppé une civilisa"tion dà type semi-fé~dal CGm-e les Royaumes
Mossi à l'intérieur de la bouche du Niger. En e~fe-t, les peuples Mossi
ât Boho s'étaient constitués en puissan-ts royaumes de pasteurs et de
cultivateurs de mil et de sorgho, avec un art.isana-t assez poussé pour
couvrir les besoins de la population (le fer y
était prbdui.t_de longue
date et les tex"tiles (c.o.ton), le cuir et le. beis large·ment -travaillés.)
Néanmoins, l'état des forces productives dans la péri.ode précolc:mia-
le,
étai~ rudimentaire en .ême -te.pa que les rapports de production,
:(1) L. MALASSIS l "Education rurale et agricole" ; in revue du tiers-monde, Nœ54
Avril~uin 1913.
(2 )
Plan quinquennel de développement éoonomiq~e et social 1972/76 11
Republique de H,aute-Vol ta.

- 211 -
basée sur une organisation sociale structurée,
étaient tributaires.
Bien que pour 1. t essentie1.., le moàe de production était de j:ype familial..
e"t lignager.
La faa:i.lle en tan"t que cellul.e sociaJ.e ,
constitue la. base fondaaen-
"t&1..e dans :laquelle à' épanoui"t 1..' enfan-t. C'es1; lA. qu'il reçoi't les pre_
mers ruciimen"te ù
~'éci.uca"tion. Minsi, waJp-é ~e caractère patriarcal.
du systàme, le rOle d'6àueateur revien-t à La màre dans le jeune age
de l'e~ant, qu t i l soit garçon ou fille. A partir d'un certain age
~'&ciucation du garçon
revien't au pàre, tandis que ],a aère s'occupe des
filles. La socié'té,par àelà 1& faaiUe. à-.eure le monele dans lequel,
se déve~oppe la p,eraonnaJ..ité de l ' e~an~ et surtout 8' ~f"irsen't son ca-
ractère 8-t se. -t&len-ts. Petits -travaux (eommdasions),
jeux,
jou-tes ora-
toires, initiation cons-ti-tuent les éle.ents de base ,ui doiv.n-t parfaire
à la formation de l'enfant et sur son aptitud.e à garder le seoret qui
con&-ti-tue un ori-tère essentiel à' inser-tion -to-t&1e et intégrale tians·
J.a •
vie insulaire de la ~aad.lle.
Dana un -tel systèIRe éduca.tionnel,
tout es-t en rapporl avec lee ae'ti-
vi-té.s quO-tiàiennes de la c<I>lUI:UIlauté, .a_ les contes"
les récits 1ora-
cluisent bien les scène. de tous. les jours. L'en1'an't (fiUe ou ga:l"9o.),
àès son jeune age, est un. agent productif ~ ~i"s travaux chamrp61;res
garde des animaux, activités menagères pour 1a fille,
per.etten-t •
l ' e . -
fant àe saisir les réalités concrèt.s de ce qu'il vit to~
les jours.
La formation physique va cle pair avec la forma~ion in'telleo1ouelle puis-
que la lutte, la danae, la chasse
(les ba~tu.s) sont autant àe jeux phy-
siques qui s'insèreat dana la division de 1& 80ei6t' en groupe à.'&ps,
dans la formation de l'enfant ~ la sagesse ainsi qu'. la ma1-trise de
la Langue. Ce sys'tèae éduoationnel 6tait 1. souDease. .n't À'une OO.mUDaU-
,
.
-té villageoise aquilibrée où ~. vol, lea crimes ecrapu1eux, ~ noa-assis-
tano•.•• 'taient des choses rares si non in.xis'tan-t.s. -n .~fe~, 1&
traàition veut que les conflits qui éclatent dans.le village soient
46Da-t~us en publie~ Âu-tooritique en commun biea sar, avec eepeDdan~
une note d 'h1UlOur parce que tout le ..onde est dé"bem.-tu, parc.que noWS
voulons en àernier ressort les mêmes choa••• Le calcul, les silences
insolites, les arrières-pensaes, l'esprit souterrain, le secre10 son1o
des manifestations étrangères, mais qu'on re~rouv. chez l'in-teUectue1

- 272 -
/CO.lOn:i&é. c~ «iernie~ n' &"Dantlon.nera oe1..te con~ep-tiOD •• ' ' ' ' flU" à "sure
làe sa. p.].0D«ee ~u ~e111 d~ ,peUPle. Dès ~o%'S r
~.. peut àire que 1.& oo_mau-
Ité . trJ..oaphe: déJà IL oe n~veau, qu ~.ll. sécrè"te sa propre lumièr., Sa propre
'ra~son.
Mais sous t~Occupation oolon.ial.e alhit Be prG4iiui:re une société à la
,:fois uni1:a:i.Jr. -
ausai
oontradic1Poireàu fai1P ... J.a con:fron"ta1PioD li. tleuz
cu.l:turea. C.tte confron:ta1>ion plus 'ro:fonà.e que cut~ture11.e "evait e..-n-
cirer les lBIU1:ations SGcia1.es qui se sont tiéP«ées.
Ici, nous tenterellS tla
,_ttre eD. relle:r, }.e, r$le àe l ' étlucat ion e-t
pertant àe l ' ense i p e. .nt ~
J.'époque à'occupation colonial.e. Pour cela, laissons. ALBBRT Sarraut, ùers
laJinistre. des Coloniers de donner ce qu'il enteDli par "œd.ssion oivi~is.trice"c
I~ 6iira à cet effet lIi.nstruire les inàicènes eet assurésent notre ..évoir( ••• ;
maie ce àevoir fonci_n"tal s'aceorae par surare!:t avec no. int.~t. "OGI10-
aiques, aàmi.ni15tratifa, m.i.U taires. et politiques le. plus è:vicie'nts. L'ina-
'truction, en effet, .... 'abord pour resul1:at "'a-éliorer 1& vaJ.eur ... la
proàuction coloDi.~e en aUltip1.iaDt Gans ~ ~Gule à. travadlleura indicènes,
la q~~té .es in'te~cencea et 18 nom.re àes capacités a elle àoit, en
outre, parai. la maaae :laborieuse, 4i.égager et càresaer les élites cl.s colla-
borateurs qui, C0InJB8. agen1:s techniques, contre..JII&t'tres, surveillants, eDt-
:p~OyéB ou coanda àe "irection, 6u:p.:p~6eront à ~'insuffi.sance numériClue des
européens et satis:t"aront à la cielll&Dtie croissante des entreprises agricoles,
inaustriellea ou coœmerciales de colonisation"(r).
Voilà qui ne laiese auoun doute quant au rôle Téri"~e cle oe type d'é-
ducation. Pour ce faue,
tout sere. mis en oeuvre pour détrui.re 1.& culture
des peuples au .ilieu de 1& bouole QU Niger. L'école aura oe bu't. A ce su-
jet N. Gérie évriv&it que 1/ le :rlt'allLçais~doit atre iMJPOs"
au plue granà noa-
bre d'indigènes et servir (i.e langue,
véculaire dana toute l'é'tenà.ua lie
J.' Ouest-aflt"icain franç&is. Son étude est rendue GD1iptoire pour les futur"..
chefs ••• I l n'est pas ù a i s e i b l e '
après quarante ans d'occupa1lion, que"·
tous les chega
sans exception avec 1esquels nos relations de service sont
journalières, ne puissent rentrer en oonverg'tion avec noua" (~). B:xa-inons
ltapport de l'indépendance à l'Ecole voltaique.
(1) Albert Sarraut tilla n e . en valeur des oo1.oni_ fran9ais•• " P. 95.
Cité dans "probléa_tique eocio-économique et finance.ent du développement Il
(Puis II -Eanth6on)1 : ~;. Ta.la<iidi. Th:i.ombiano l thèse d 'B1:a't) •
(2) M. Gerl. cité par Jeune Vo~t. in "les problèmes àe l'enseignement en
Hau'te-Vo1ta.

273 -
:h:ragraphe II
La déco~o:tU.sa1;ion .. cer"tes appor'té aux ho_s: col.o~.és une certaine
rêpara"tion m.era.l.e e"t consacré en per"tie ~.ur ài.nci't6. Mais i l . :D'en de-
.-ure pas moins qu' i1a n' on"t pas enc.orl1l.' abou"tisseœen"t 6ie l.eur aspira"tioa
pro~oJde. qui es~ celle à'édifier une socié"té ~carnan't 1e& va1eura na"tie-
na1es. Le ~oyer incandescent où le citoyen et l'hoa. . se développent e"t
s'enrichi.sS8n"t Ù8DS a..s do_ines: cile p~us e~g.8 n' :ix:isten"t P". Pl.ac6s
clans une: s:or'te à' in..é1;enad.na"tion. ces ho.mes se pe:rsuaàen"t ass•• :taci~e"'D't
que "tou't se décide. aill..eurs pour "teu"t 1.. _ù., 8n dme 'temps. Quamrt à
ceux qui. pré:sicilen't la àes"tinée "u ~s n 'on't 'trouv6 lie mieux que àe' recon
.aire. un. sys"tèae ci' éàuca1;ion qu d.._ure dans: son ~ond-.ent idem.'tique à
ce qu" elle 6't&;i't sa cours de ].a pé'rioàe c.l.~••
Dans 1es: graraàes lignes généraù.es de ].a peU'tiqu.e .e l'enseignement e~
~.s ."bjec'ti:ls, l.e- pJ.an (1972:-1976)
écri't l
-qu'en raison
cie 1& l.iDfi.'ta'tioD
"très stric'te des reasources humaines e"t finaDcières que ~ ua'tion peut COD-
sacrer à son enseigneraen't, l'éciucation cieaeure enc.re un Diea cea'teux
e't rare-. »n inciiquan:t plus loin que "... 1.8 r61e de 1 tEè.ucatioD Da"tie.:aale
c.nsis."te."t-i~ à cli~fuser cet"te éducation et à rel.ier son cié".eloppepen't aux
o'Djec'tifs, .lu p~s sur le plan économ.ique et sooiaJ.. Ces prioocupa'ti.ons
àevrai.D~ se 'tra~ui.re par la défiDi'tion d'une p0~i'ti~ue à long-terme- • •
propos «le ces • • jec"tifs
à long "terae ~e plan poursui"t pour aire qu'-il
ntest pas ptassi"Dle
Gie parle.r vérita'bleaen't Gl'objec'tifs à 1ong-"terme
cOIBIp'te tenu è.e ce qui a é.té cii."t pricéde.œen"t. 1;ou"t au plus peu't-on tracer
une esquisse ghDaJ.e des buts ~()int.ins de 1. 'eJJ18eigneaen"t et de 1.& :foraœ.-
"tion-(I). l'our pallier aux carrencea des proposi"tiena du pl.an un proje't
de re~Grme de l'Bàuca"tioa a âté présen"té aux differen'tea au'tori"t§S et aux
organisa"tions d&moera"tiques du pays ;
l'adop"tion 6tai't oonài'tionnée au pré.
1.&'81e du "type d'E.u"t aucep~ib1.e de l'appliquer. L'aDaenee de repense au
préa.l.a.bl.e' àevra.i.t conduire/une iapas,se dana le processus à'acce-p"ta"tion
ale la reforme.
Quan't à l.'hypo"thèse cle sa mise en pr."tiqu.~ ~.d Dmaoncl
,..
y reponà en ces t&raes :
·on a préparé en Hau"te-V.1.'t. un vas'te projet de
refor.e de ~'éduca'tion. en reconnaissant officiel.1eaen't que 1e sys't~ma
(2) Réné nw.onà :
"Faysans écrasées,
"terres massaorées : Equateur,
r_àe,
Bangladesh. T~l.anél•• Hau1;e-vol"ta (cf/Page. 73)
(I) P.Q.D.E.S àéjà ci"té.

~ 214
eno.re ·coieni~· •• oe11.-oi est -iDaàapta, a1i6. . .~, élitis~., o"~eUE-.
Hais si 1e projet part -
c . . . . toujours -
à'.%Ce11e.ts principes ~k"ri,••s
cile' .é.o,cratie, àe jllS1:ic., d.'êga1i~6 fians ~'.àueati.B, en .e voill pas
18 aoinÀre espoir avec ~es ressource. finaacièree et 1. eaàre pe1itique
.oainant à. pouveir s'.n approcher-.·
• De c.~t. cenat.tion, ess~.DS d'e-
xaminer un pe. plus profondeaent 1& Bi~uati.n ao~uell. ae ~'enseiene.en~
qui est un aspect d. l.'éduca"tien ne ~.ucbaa"t qu'une :faib)'. proper1;ion 4 ••
enfan1:s acolarisables coaae nous l.e d6.Gn~re le tableau qui sui"t.
Ta'bJLeau nO' 9
L'baeigneaen't am Hau~e-V.11:.
2
~aWt
1:
Les ciLi:f:feren~. niveaux ci' enseigne.n'
2 de
BCO- 2
lIIIi:i't.n'tse a
Prt.aire 1
Seco.ciaaa
Sup6rie-.:r
.Paie.
1
1arill'&sc.~isa-:
1
re
t
.1.e.
-------~----s-------&----------I-----------I-----------I------------~--
&
1:
&
1970
1
10
al 058 000 1
I05 700 1:
10 879
1
903
1
1:
1
1:
1:
1974
1
I I
II 136 100 1
124 966 &
II 953
l
714
.
1:
..
1:
a
1975
&
l '
II 127 500 1
l'3 660 a
12682
a
l
946
1
a
1
a
1976
a
1',5 II III 000 t
150 000 1
15 468
t
2 120
&
1977
:
13,5 II 260 000 t
170 000 a
18 800
1
2 700
,
a
a
1
1
Source t Burope Ou"trelUtr 1 Hau"te-V.1~a à la veille de 1.& Troisiè.. R6pu-
'b1.i,ue.
De ce. donnée.,
i l ressort qu'à peine 13,5 ~ à.a em1an"ts sco~isaDlee VI
von~ à ~'Qco~e. ~e qui &arque vâritaD~e.en't ~e earac1:ère de ~uxa d'un tel
enaeigne.en"t. La pyraaide scol.ai.re en part_ll de nG"tre tabl.eau est 'troite
par rap.il·or~ aux effets Ile chaque tranche d' &ge et se retréci."t rap:ideaent
vera le aommet. pour 1e aas de 1.& Hau1:e-Vo1.~a ~.a 1',5 % àes enfants Clui
:franehi.ssen"t ~es portea de l'école pour entrer dans le ooure 4ll.eœen'taire
preaière année,
IO à II % seu1eaen1: à'entre eux achèveron1: leurs 6tuàes
du premier cyc~e seaondaire et moi.ns de l % parviendron"t
au B~e uni-
verai:taire •

- 275 -
Bien s~, ~es autorités estiment qu'~l faut un Duàget de ~'oràre de

480 li. 500 IIlillions de FranCl CFÂ pour l ' enB.~p.e••" ·
primaire, ~ors
qu'en 197'-1974, i l n'a 6ta retenu que 22,18 ~11iOD8 soit l,O F aFA
(2 , 60 PF) par é~ève et par an; cependaa.'t qu'un oahier de 200 pagea
ootl.~e 2&0 !'raacs (3.20 FF)
en liltra~ri.·.
:ma o.. qui eonc.erlle ~'eDlIlei.peI!ll&Dt sécGùaire et •.up.c§rieur qui co....
p'tem;t 18 880 éJ.èv. . et 2 700 6tuàiants. Leur no.Dre se.Dl. être à ].a Usd
'te du possi.ble <ians 1.& . .sure où Gn .st~_ le cotl.1; au ài.pJ..6111e .. 850 000
FCFJ. pour un B.E.p.• a 81; à l }OO 000 7CFA. »our un bacaaJ.auria't (1). l.ors-
quJon sai't oo. . .nt les revenus sen't repartie àaBa ce PeTs, ce 008., '~"v'
JLim,t. nécesBauement le taux Q' wscripti.oD-, aocrai"t le peurcentage' cle
défectiom et abaisse ~e8 succàs. Les él..èTea àana un coamuniqué au ciébut
pas
de ~ ren~r6e sce1aire 1978-1979 a'6orivaient-il./~1& p1ace des parents
.'âlêves ce qui sui' 1 aco.ment assurer l'instruot~on de mes enfants?
CoaDien de fo~s par jour devrait manger maintenant - . feaille 1 ft Pour
aieux voit l'aap1eur de ce problè•• pGursuivent-ils c anoua voua propo-
BOns l'étude d'un cas concret
1
preDena l'exemple d'un. fonotionnaire do.'t
le saJaire est é1evé de 40 000 FCFA et qui a trois (,) enfanta ~ ~'éoQle
2 au premier cyc~e e~ un au seeond oycle. ~on revenu annuel étant d.
480 000 FCFA, i l àoit payer 175 000 FCFA pour les é~udes d'une
aanêe, payer eventuelle. .nt ua. . .yen cie ci.6p:lac. . .nt, a s 'tab~isaemeD.~B
'tant de plus eD p~ éloignés de 1& vLLLeo 11 àoi~ aussi assurer les
fournitures Bco~es, aéciicaaeD~s pour la fa-ille e~o •• No. . VG70ns que
~
pour ce ~onctionnaire le ceut de 1& vie est inteD&b~e, qu'en sera-t-i1
de l'ouvrier e~ du paysan 1-(1). Ce point de vue i~ustre un peu fidèle-
aent 1.a situation des vrais paren'ta d'élevas. -»n plus des pro'blêae.s 1Iti\\Ù.-
~iformes qu'on rencon~re sur le che.in d'accès à l'éc01e.
On peut .e peraettre de s'interroger sur la valeur cie l"àuca~ioD par
rapport à sa contribution tant ~ l.'épanou~sse.en~, qu'à l'aptitude de
~'h~ dans Son environnement.
M. ~bioabLano T~idi& Profesaeur à ~·Univ.rsi~é cie Ouacadougou
explique e~ delllOntre que "1'Bduca~ion est vide totale_nt Ae tout Bon
con'tenu; où tout au moins elle ne serv~ plus àirect. . .nt La SGciété
àana son enseaàl.e. ]lUe s' inaère clams un co.tarte,
q~ correspond al. un
niveau de forces productives, à. DOde de preàuotion et de rappo~s de
iareduC~i.n ~ou-t autre que ce qui avait cours jusqu'à présent.
(1) a-un:iqué public : Ji propos de la rentré_ 1978-79 par l'AaseciatioD
des scolaire. de Ouaga.ciougou (A..S.O).

- 276 -
Le IIID3de de proàuction ."t les
rappor"ts cie pro.uc"tion
"tendront à ê"tre "type capitaliste -
favori"s par l'iàtroduction de la
IJLOnnaie. lt ,
il.. poursuivra pour ajouter que
·pour Son déve~oppement siocio-
éconm.i.que,
lA Raute.-Volta est obligée de tenu compte de cat"te réa1..i:t'-,
de ce CIli.JLellW.e dans; l.equel eUe s·e trouve p.lacée. ~ll.e· ne peut ingnorer
aette. pénétration co1.oniale désormai.s. tout au. tatl1; qu'elle doi1; reeon-
na!:tre que chaque "type à' Bàuca:tioll se meu"t ciaas tUl ense.'b1e cul:tureJ.· ( 1) •
Le sys:tèaœ éduca"tif, fruit de l ' his'toire e1; de 1& culture, es'è fertemen"t
J.i' au sys1;èlle économique,
ce qui nous condui1; à ai1;uer J..'éco1.e vo1"taique
par rapport .. :la production(surtou"t agricole).
:Paragraphe III t Le ga"tèœ.e Hucaji:( e1; ],a ::Pn4ucii.oll.
Le àéve10ppement est aiem le prinoip~ o'bjec1;if de J..'Afri~ue ci'au-
jourd'hui. On étai"t en droit de se rejoair de tous J.es effor1;s em"trepris
àana ce Du"t, ai:in. que t a u " les afrioains. puissent vivre chaque jour
un peu aieus: • Mais le oonstat
lie 'tous ces ef:forts sur J.e terrain
de 1& vie reste décevant par rapport à J..'objectif. Quand on sad"t que,
pour un pays co.ae l..a Haute-Volta,
95 % de aa popu1.a"ti.on ea"t une ];»C)pu.l.a-
1;ion r~e et qu'une grande parti.e de ses ressources vien't pour I.e ...-
. .ut du 'travail de .la terre.,
c "es'è .. à:i.re des paysans.
Certainement, :le. . .1"tre d'école français peZlsai't bien apporter en A-
frique,
avec l ' é.cQ~ , un ou'ti~ de pro_-tion, .e llbération ~BeDne z
en préparant 18S fu'turs paysans à mieux "trava~er, s'organiser, se dé-
fendre. Mais quand la différence ville-aaapagne a a't'teint une propor"tioa
importante, 1e paysan ntenvo~e pas Son fi.1a à l'éooJ..e pour ~u'~ 4evien.e
un lIl8i.lleur eul'ti va'teur, c' es't seulement dans l'espoir qu'il. sortira de
1.& paysannerie et pénétrera dans la wcaste privi~êgié. de 1& fenation
puol~que", ce qui lui permettra alors d'aiàer effioacement - par son ar-
gent et ses re1.&tio,na -
s.a. fand.lle paysanne i
Four J.e p~san acoepoter d'en-
voyer son fiJ..s à 1'êeole e'es't tou't d'abord un sacrifiae
(1e manque à
gagner dans l.es travaux cham,p.&tres et les charges scolaires) et enf:ln
clest un inv8stisse.en't à lGng-terBle, car i l a't'tend 'beauooup que ne fils
puisse un jour las sort:ir de 1.& &i.sère Noi.re. Or ·~'écQl.e primaire ne
touche qu'une peti"te frac'tion de ~ pop~"tion d'&&e Bco1.arisaDJ.e des
c&alPagnes,
entre l
et 8 % contre 75 % dans la capite.1.e, s'oit une m:oyenne
offic~elle de 13 %. Hais 60 %des enfants au D.oias quit'ten't ~'école avaa't
1.& fin du prilllaire, surtout dans l.es caapagnes. Sur 1e8 bancs Ge 2' ou ,
M. ThiQabiano TaJ.adidia 1
aprob1e••tique aocio-écon~~ique e't finanoemen't du
dével.oppement
:
aas Hau'te-vol.ta"
lParis II-panthéon)
P. 61.

- 277 -
pl.ac.es on y
trouve 7 é~ève8 et des c.l.aases en co.ptent 80 et souven"t ù -
vantagel(I). ne ce fait l'école est devenu p~i~ueme~t un privi~ège et
-........~ \\.~"" \\.Q. ~c tl~OIW\\ ... ~CUM ~I'''--..a~_ ~~
ce sont les seuls nantis qu~ peuvent vraiment pousser/de réussite. A pro_
pos da réussi1:e i l subsiste une profonde incoaprél1Qaion
entre p&ren"ts
et enseignants quan"t aux. "B&uva:i.s résuJ..tata des examens·. A. ce sujet 1.e
S.N.E.A.H.V (Syndicat National das EDBeignants A,frica:i.Ds de HauiJe-vo1.1:a)
ten1:e de s'explique auprès des parents d'&~èves en ces termes &
-Lea échecs sont trop facilemaat iapu:téa au Beul -.!.1;re sans qu'on es-
saie d' ~ voir a
part tenant aupys"tèla. et à son ad6,uation et 1& par"t de
l.'E'tat. Chaque a.nnâe enCore des parents souvant h&1lU1è1:ea, et fort soucieux
A~ Aèveni.r de ~eur progéniture reclaœeront L& .utat~on de te1. ou 1:el. ~tr.
pour n'avoir rien obtenu à ~'entrée en 6è_. saveJll."t-~, que sur les 18 000
'~èv.a de nos C.M.2 ~~éaenté& au C.E.F.R en 1977~ 12 215 6ta~ent oandidats
à l'entrae an 6èœe 1
e1: que 1548 contre 1625 en 1977 soi1: 12,6 ~ ont &1:'
retenus? s'en prendraient-ils à ~'en••icnaa*
s'~ avaient su que
1.8 seuU d'adll1Jissibi1.ité étai.t JaCnté à 134,5 points cette année? Nous
avons Fis au hasard un centra donné l'our y
àélalontrer 65 canàidats t
47
d'entre eux ont to"tali.sé p~us; de points que .la .,oyenna (73 %). Leurs en-
seignants, pouvaient s'esti..mer satisfa..i"ts de ~eur travai~. APrès cilélib6ra-
1:ionat compte tenu du faaeux seuil ;
9 se.ron-t re-"enua (7 %). A. qui. la faute '1
Four l'entrée en l/McoJ:Là.e, le phénoaène est ideD,1:iqu. t
sur 3 465 oanciida"ts
au B.E.F.C,
on n'en retiendra que 560. Ve11à chers parents,
~ ~a1i1:é
des examens aujour.'hui A (2).
Uors, les paysans, après une désil~l1sion, ne voiem:t auoun in-"érO"t vé-
rita.ble à. y
envoyer leurs en1aJ:lits. Du res,te,
quanci ~e oultivateur :peut;
achè"ter un troupeau, i l en confie plus volontiers 1a garde à ses en~ants, osa
l'enseignement n'a auc:un ra.p,port avec 1.& vie du Vi~t 1.e JSé1:ie:r payBaJA.
Il. ne. vise que l'examen et l'enfant qui restera au viJ],a«e nly ap$>rendra.
- rien d'uti~ pour sa future vie prof&ssi.onnelle. après l..'épreuve
tie la. s;évère sé1.ection que~ques "6'lus· pourauivron-t jusqu'au aéoond&ire,
œa:La 1.es autres ne retiren1; de l'éoo1.e que l..'iRllpreasi.on d'aTo1.r échoué
(situation souvent injus"t:l:fiabJLe au village), et 1.& ••cié1:6 ]..'8 CtODSiàè-
:ren1: co.-e des "ra"tés sociaux"" pour l.esqua1a a.ucune perspective n. s' anouce 0
inè DumIOnd :
(Ctité page. 72)
; F.288
~.E .A.~HV 1 "La vo~x des enseignants voltaiquesA ; "Education eet-el1.e un
~oductif 1_, ~.30.

- 278 -
Cette si"tuation dramatique "tire sa source cians 1. fonde_nt cie :l.'6eüe
qui aBot pour JLes enfan'ts des cJ.asses e1; c:oucbe• • •eiaJ.as ai.he 0 La
oonséquence o'est ,.l.'inaàaptation. cle :l.'écol.e au ai.lleu., et ainsi • .1."_
coa es1; devenue foncil&mentalemeD:t anti-agricoJ.e e1; cela nous al.10l!lS
essayer de montrer pourquoi.
'eut à'aBord,
vouloir continuer al. enseicner A. clea en:t_U prove-
~t d'ethnies différentes, des progr. . . .a qui VieRDeDt de 1'e~6rieur,
est une obQse. i.noonoevalal.e. Cer"tea ~, enfant qui sorl de J.' éco1.a primaire
possède une certaiJae cul.1:ure g'a6raJ.e qui. J.ui sera ut i:1.. s ' i1 a 1 • •
œl0'yena fixl_ciers de poursu.i.vre ses "tuAsa GU la chaace d'occuper un
pcl»Et1;e. ùalniatra."ti:f,
. .i.s il.. n'est pas prê.parê pour 1.& vie au. village,
pire i~ re jette 19 travail de la terre qui. est peur ~ui :l.e de1'llilt'r
des métiers; i l -m.e peut ~ua avoir qu'un désir, c.~ui. de fuir la terre
et son escavage. L'6co1e essaie cil 'ouvrir :L'enfant au monde œecie:nae,
Àe 1..ui donner une oer"taine :formation gén.é-raJ..e i.nte1.l.ectuelle et Ilseien
"tif:lque- sans correspondance avec ce qu' i l vit quetidienneJlll&n"t, sans
tenir compote ci.es val.eurs de: la seci.6té tra.clitionner.,joe qui entraine
UJŒa rupture avec l.e mi.J.ieu,
qui fait renier à l ' en:faDt ses origines .1Iaf'ia
Ceux qui n'ont pas la chance d-accèd.er aux étucies supérieures iron't
grossir ~e no.bre d.es chômeurs dans :l..a vi~es.
L'Ecole au lieu de contribuer à une vêrita.le insertion d.. l'en-
fant daDs ~ a.oi'~é, en fait un chOa.ur maia auasi un -8xi16 aocial.·~
delà decoule 1e carao~ère regressif de l'Boole vo~ta!que; laeauooup
cie. parents ci. t élèves • • sent consci.eat du tir. . . ,
c' .s:t la raison. pour
1aqualle les autorit6a tentent cie colaater les br.ches par que~ques
reformes que noua a~ons examiner en détai~ cians ce qui sui't.
Soua-Paragra.phe III 1 Reforaea ou repl.atrage ?
On a essayé de rectifier ~e t i r en créant ~es centres d'&ducation
rurale, dans lesquels l'enfant consacrait une partie du te.pa aux tra-
vaux agri.coles
1
an le préparait à
devenir un a.illeur paysan. De-vant
un projet apparemment séduisant n-était qu'un .irae. quan't aux resul-
tata ~égiti.e.ent attendus.
~
Bn effet, en 1959, la France et la Haute-Volta 6tabî:'i.ssent un p,lam
cie scolarisation ruraJ.e. La mise en application cie ce projet de.uta
.Il
••
1961 et dès ...i
1966,
pouvait es"tia.er à 22 aille é1.èves
les effectifs des éco~es rurales en Haute-VoJ.ta.

- 279 -
~
Jusqu'à cette(une bonne partie àu pUD~ic vo~taiqu., surt.u~ cel1e
qui est ~oin de ~'aàBiDistration, en occurrence 1. monde ~8aa
se
demandait quell.e différence exista.it entre ~'Eco1e p'ri~ire classique
et l.tEco~e rurale. Pourquoi ~IKc.1e rura~e ?
Du c&té français co-.e du coté vQ~taique, on déclare que le systà. .
-est destiné à remplir trois fonctions éQu~atives ordinairement dis-
tinctes :
- Asauaœer une scolarité àe co.pensatien après l'&ge sc.laire de
sujets qui n'ont pas trouvé place & 6 ana àana 1e eystèse primaire
cl.aasique
- Une a1phabétisation pour le groupe àlAge sur le point . ' I t r e
engagé dans 1.& production agrico~., action qui r6poncl à la p~upart
des récollmandationa d.u congrès menàiù de ']éb.6ran quant à ~'a1.phab6­
tisation fonctionnel~e, sé~eci;i.ve et intensive 1
- Mettre en place une structure Q.'accueil.. pour une formation pro-
fessionnelle agricole destinée à augaenter la pro.uctivité r~ :a1e
par le. diffusion de consignes novatrioes réa..l.istes"(r).
Pour justifier ~I'écart entre ~e p~an théorique et la ria1ité 1es
mAmes autoritâs .ettent ~laccent sur :
- l'existence d'uae l~te budgetaire iaposant une d~inution des
codts c~ condition à tout extension du système éducatif;
~e goul..ot d'étranglement <ile ~Ielltploi pour ~eB activités secondaires
et'. tertiaires dans un pays essentiellement a«ricole
;
- la nécessité d'une augmentation rapide de 1.& production rurale
pour permettre le développement économique et social de la nation ;
-
~ volonté du gouvernement vo~taique de àémGoratiser 1'enseigne-
ment et ctétait l'un des critères posés en àépit de 1& ~iaita~io. fi-
nancière ci-dessus év~qué.
La version 1.& p~us repandue pour ceux qui avaient l.a chance ••
l'entendre était que cette nouve~ Eco~e -avait pour But d'assurer
à
1.& totallté des enfants qui 11 t ont pas pu I~re scel.ariaés une instruc-
~ioa éleœentaire et une formation rural..e, c~Tique et sora1e-.
Toujours est-il que l'explication qu'on àonnait au p&7saR sur ].'a-
venir de 1B,0n enfant p1.&C& à ~'école rurale nt 6tait pas, toujours 1.&
.a.e et aanquait parÏeis 48 e~•• La c1art. dans ce domaine et à ce
ao. .nt pouvait-elle Itre opportune ? Les ~~re. de 1'Educa~ion Rurale
repondront non; en toute connaissance de cause. Ba effet, ils aont
(1) R. Medard. : Education Rurale en Haute-Vo~ta 1 Evaluation et révision
du projet. Rapp.ort au gouvernement de 1..& Râpubl.ique de Haute-Vo].~a,
Unesco, Mars 1966.

_ 280 -
confron~és quodi~iennement à la ré~icence Àès parents; lesquels parents
. . veulent pas voir leurs fils
devenir cul~ivateur comme eux,
(J.a peur de voir ~eur f i a subir leur "sort").
~aute de précision, l'élève sorti da l'Ecole rurale é~ai~ comme un
produit semi-oauvré au débouché liJIIÙ.té et il1cer~ain••• C'est ainai sit'~
les porles de la classe franchies, et le dos paumé à l'Eco~e que l'&8-
cien é~ève de l'Bcole Rural.el'lOntra co_ent i l ententiait lIlet~re en pra-
tique 8a formation. ·Yn sondage effectué par la Direotion avance comme
~aux d'ex.cie 20 %, sur un échan.tillon de 501 anciens "lèves. Rehec ou
"uccès ? Pour 1.es au~orH'" e~t 1.8.. eJtpe~ paa de dou~s. c'es~ wo. succès-
(r). Mais ~à ause.i, 1.& réali~é dement UAe af'firlll&tion au niveau de la
cell~e familiale, l'enfant n(a pas d'autorité pour "diffuser ces consi-
gnes. nova~rices réalistes", de plua i l sa.it lire et écrire son nOIl1 ; c'est
suffisant pour par~ir loin ? E~ voi1& l ' exode ~égit i _ par un p1an cle
scolarisation. Ji, p:ropos, cèdons 1.& pareie à R. D'uDtend pour dire que
g
"les cen~rea a'éducation rurale, àans lesquels 1'enfan~ consacrai~
une partie de ~em::ps aux travaux agricoles ( ••• ) Cela ne p1aisai~
nulJ..ement aux parents, pour qui cette perBpec~ive ne devait pas 8tre
.1.e but de ~'&cole. Quel.ques JD8,itres dévoués de ces cen~res on~ pu
Karder quelques mois une partie de le ure anciens élèves au~.ur d'un
projet agricole, d'un jardin irrigué ou À'un petit él.eva~e, mais
cela n'a pu durer,
faute de moyens et de co.préhension de la part
des ainés,
qui n'aimaien~ Pa. recevoir de le90ns de leurs caàeta"(2).
C'es~ ~à ineontesta~lement une impasse dans ltuelle le système éducatif
voltaique se ~rouve plongé. On y signale bien que les blocages resul.teD~
du manque d'adhésion des popul.a~iona rura~ea, ...i5 oomm:en~ celles-ci
a.dhéreraien~-elles là. une socié~é dans laquelle elles son~ si pref'G>nde-
ment exploi~ées ? Du reste, même les très àod.estes reformes envisagées
son~ actuellement en paJUle, car priori~é é~a.i1; denné, au d'litut I918,
au ·re~ou" à la vie constitu~ionnelleD. 8:lors., ce proje~ doit être
soumis à une échéance incertaine, au nouveau gouverneatent de la -IIIèRllEt
RépuBlique-, puis à l'Asse.blée, puis • • • • 'ailleurs le projet d'une
-école de proaotion cellective du vi~ge" ne nous parait guère réali-
sable dans le cadre alune politique qui traite le lIlonde rural. comllfe le
"quart-monde" du Dtiers-œonde". -~an~ qu'on aura pas réellement et pro-
fondement modifiée la conception mS.e de l'école, force est de oonsta-
ter que celle-ci échouera ~otalement en ce qui concerne sa cantribution
(I) Echanges : Tradition Ecole et promotion de zone le groupement _. yaten-
ga (Hte-Vol.~a) -P.5.
(2) Réné Dumont
(déjà ci~é -P.72)

- 281 -
à une éventuelle émancipation de la Basse paysanne. Blle a seulement
foraé -
et bien mal -
un petit nombre de privilégiés, mais beaucoup Bont
des déracinés et des chÔmeurs petentiels" (I).
Une autre tentative est actuellement amora6. dans le cadre de l ' a l -
pha'oétisat.ion fonotionnelele,
en l.an«ue africaine, qui touche (1976)
quelques IBO petits groupes de I5 à 20 adultes. Lea programaeB d' ensei-
gnement par~iaaent s'adapter aux beao~ns des adultes.Mais c.~ va-t-il
suffire à
bouleverser les caapagnea voltaiques ? certes non. Cependant,
un effort eet ainsi ~ait vers La peaaibilité parait-il d'organiser les
:&>9..:Jsans pour qu'ils puissent
"se ciéfen~" contre les deux principales.
puissances,
qui les Gppriments :
l'aàm:i.nietration'
et les organisl1I,es
et SQciétéz d'interventiou. Â ce sujet R. nu..nt nous précise aeci
:
"&ans lIlêae parler des fonctionnaires af'fairistes,
qui se servent de leur
fon~ionB pour réaliser de douteurx trafics. quand un fonctionnaire de
l'ORD (organisme Régional de Dével~. . . .t) arrête un casion chargé de
zil, alors qu'il est interdit aux commerçants d'en achèter,i8mâàiatememt
après intervient un haut fonctionnaire,
qui "participe à l'opération et
couvre donc son illégalité·. Cela atteste certaine.ent la faillite d'un
système. car précise-t-il "le grand draae de la jeunesse voltaique est
n'~
qu'elle
généralement plus d'eapeir de promotion rapide en restant
dans
sa famille. Elle y
gagne
juste lie quai
lIlBnger,
tandis que tous
ceux qui sont allés travailler au déhors en r8Jllènent "argent· et "pres-
tige" ce qu~eu.r permet de présenter n'est-fusse qu'un certain temps
une façade de privilégi,·(r). Tous les poin._ de vue qui 6e veulent ob-
jectifs ~me s'ils menagent la suceptibilité de ~ classe dirigeante,
arrivent aux ~mees conclusions à savoir que
La plupart des programmes scolaires jsqu'à .-inteaant ne 80nt pas
adaptés aux besoins du IILOnde rural, les enfants n'ap·prennent ni la théo-
la pratique des travaux agricoles et artisanaux.
rie, ni
proposé, est toujours plue
surtout, le
Hais
m~d~le qui leur est
renîorce ainsi une mentalité
le modèle occidental,
et llécole
ou moins
terre et
qui dépreaie le
travail manuel.
surtout celui de la
générale
son ensemble.
la vie du village dans
un exode ru~l de la M&J·.rité des enfants scola-
Tout ceci provoque
.~
risée et par entrainement, m~me l'exode des jeunes ruraux n~n soolarisés.
(I)
Réné DUlftont déjà cité -P. 72.

Quant à ceux qui restent au village ou y reviennent avec un petit bagage
scol~ire, il s'avère Qu'ils oublient très vite ce qu'ils ont aGquis, étant
repris par la vie et la langue du village, et le peu d'utilité pour eux de
p2rler une langue étrangère gue les autres villageois ne comprenant pas.. De
tout ce qui précède nous montre à quel point la contè.xture éducative auxque1!lLes
s'ajoutent d'autres facteurs structurels, constitue un obstacle fondamental
à une participation active et dynamique des villageois au développement harm0-
nieux du p~s. La seule alternative,
qui influe qualitatiVement
sur le processus du développement est un système d'éducat~on rurale qui se veut
intéGré, fonctionnel, coordonné, global et permanent.
Sous-Paragraphe II : L'ECOLE NDUVEnLE.
Dans son . ouvrage "Les conditions actuelles du développement économique .m
l'économiste américain C:ALBRAITH note que tant que la formation profe~sionnelle
des h'Ommes n "est pas assurée "il n'y a que peu à attendre des investissement:s
en capit2ux et de l'assistance technique, les plans pourront être grandioses
sur le papier, leurs résultats seront maigres" .. Plus loiIh il poursuit "au siè-
cle dernier, ce qui fut la condition décisive du progrès économique et social,
c'est l'instruction publique qui tire les masses de l'obscurantisme".
De son c8té, F. PERROUX souligne aveo force et conviction la relation entre
la culture, l'information et le développement économique. Selon lui" la culture
est "la combinaison de changements mentaux et sociaux d'une population qui la
rend apte il faire croître cumulative",ent et durablement son produit net ~lob'al",
~Ipas de développe::lent réel, sans culture des masses entraînées dans 12. groncke
mutation. Mais pas de culture réelle, ~2.ns prise sur les réalités Cluollicliennes
des masses africaines et m2.1Gache:::;" ajoute RUD10FB'.
11ais "s'il est vrai que le faible niveau d'instruction peut être une des
causes du sous-développement, il faut savoir qu'alphabétiser ne signifie pas
nécessairement développer.. L'alphabétisation nlest valable que si elle s'insère
dans un ensemble de mesures liées au développement" précise .A.LBERTnn.
Tous ces points de vue nous montrent combien l'éducation est importante
paul' le développement économqàedtun pays
à condition que le contenu de l'en-
seignement soit adapté aux réalités de la vie.

- ~83 -
AI - UN i:lYS'l'EilE D'EDUCATION RURALE INTEGREE.
C e système doit être inté~ré dans le système g10bal d'éducation, s'orien-
tant à faire du paysan, ou plusexactment de son fils, un citoyen à part entière
intégré dans la vie économqüe nationale. L'enseignement agricole doit cesser
d'être un dtversoir de dechets de l'enseignement général, pour devenir un en-
Geignement au même titre que les autreso
Il est désastreux et socialement inadminissible de prétenire maintenir les
travailleurs à la c~mpagne par des mesures de ségrégation scolaires. Par con-
GéQuent, le système d'éducation rurale et agricole doit être fonctionnel. Cela
i~pli~ue que les efforts aboutissent à la mise en place d'une structure de Qua-
lification de trav2illeurs adaptés au systè~e aux rythmes et modalités du dé-
l.
veloppe~ent. -'agricultur a autant besoin de travailleurs qualifiés que de ca-
dres moyens et supérieurs.
Quant au contenu de l'enseigne~ent agricole, les deux aspects fondamentaux
que sont les changements techniques et socio-économiques ne doivent pas être
perdus de vue.
BI - UN SYS'l'EiIE D'EDUCATION COORDONNE, GDOBAL ET' PERlI1ANENT.
Cette coordination doit être à la fois verticale (hiérachie des formations
et des types d'établissements) et horizontale (étroite collaboration entre les
différents services concernés).
En effet, l'Education est la base fondamentale du processus de création
et de propa~ation du progrès technique. Ilimporte ~ue les différents services
qui concourent à la formation et à l'information du monde rural, à la l!'éa1isa.-
tion et à la diffusion du progrés, soient coordonnés entre eux. Or, en Haute-
Volta, il y El d'un côté un appe.reil administratif appelé "Direction de l'jo~du­
catio!1 Nationale", rattaché au ministère de l'Education nationnale, et de l'au-
tre les organismes de recherche et d'expérimentation (C.F.D.T., B.D.P.A.
,
~).A.'i'.E.C. etc ••• ) qui contrôlent les vulgarisateurs - dont la formation est
du reste sommaire - ni les éducateurs et encore moins les p~sans ne participent
à l'élaboration des plans.

- 284 -
Dès lors, on peut se demander comment l'information peut circule~, commen~
la diffusion des techniques peut s'opérer, puisque les services intéressés ne
sont pas coordonnés. Partant, un système d'éducation agricole et rurale g1~bal
et permanent s'avère nécessaire. Ce système doit reposer sur la communauté
rurale entière et reflèter son désir de promotion collective qu'il doit tend.:l!'e
à assouplir.
Pour qu'il y ait processus de développement, il faut en effet que la s0ciété
en ressente la nécessité et se l'assigne comme objectif. Dans ce cas, l"aniima--
tion rurale, la production collective doivent tendUe à stimuler globalement
et dans leurs diverses structures les communautés villageoises, de façon à
dégager des responsables capables d'assummer les tâches concrètes du déve~
loppement. Dans cette perspective, le déve10ppement ; processus de changement
technÀlogique et social, requiert des efforts continuels de reflexilMl', de f~
mation et d'information. C'est ce qui confère au système son caractère penma-
Mais pour en arriver ~ une telle phase, il faut une trans.....Jormatiionl du ca-
dre institutionnel à l'intérieur iuquel s'organisent les rapports entre 11hom-
me et la terre. Car, pour vaiQr~eles condit~ons physiques, climatiques~ politi-
ques et économiques dans lesquelles vit le paysan, il lui faut s'instrJre, se
libérer à jamais de la malnutrition, de l'ignorance, de la maladie"
brd èe
la misère éffroyable qui l'écrase. Jusqu'à préEent, il ne se sent pas concerné
par les grandes décisions nationales prises en déhors de lui. ~ans la mesure
où, l'expérience montre que l'appareil purement bureaucratique, même s'il a
des conceptions techniquement justes des exigences de développement rapide,
ne peut jamais mener à bien une politique de développement rapide sans les mas-
ses d'où la nécessité d'une liaison étroite entre les cadres de conception
et
les couches les plus larges de la population. De ce fait, "ce n'est pas une
bureaucrat ie qui peut pousser au maximun les efforts de la populat ion d'un pays..
C'est de l'activité de la population, de son action enthousiaste et confiante
pour la réalisation de la politique de développement, que dépend le succès m~Be
de cette politique" écrit le proéesseur CH. BET'I'ELHEIM(I) .. par conséquent, une
réforme agraire s'impose pour rompre avec une politique agricole conditonnée
trop longuement par des sujetions d'origine étrangère.
( 1) CH. Bgl"J' J.!:IIU m
(dejà cité).

- 285 -
SEC'J1ION III s LA REVOLUTION BOURGEOISE DANS LES CAMPAGNES.
'x
La terre est l'un des facteurs essentiels à la production des denrées
alimentaires et des autres produits de l' agricul ture. Dans les pays en Jretard"
l'accroissement de la production altmentaire étant parallèle à la prog~ssi<ml
démograpQique, la pression se fait de plus en plus forte sur les ressources
foncières pour aacroitre la production.
La situation de l'agriculure varie considérablement dtun p~s en dévelop-
pement à l'autre. Un trait, toutefois, est général: la croissance très rapide
de la population rurale• .tl.insi, tandis qu'augmente -;la pression exereée SUlr les
res~urces foncières, le rapport moyen du nombre d'habitants à la supcJrficie
des terres se détériore. Or, cette tendance intervient à un moment où les p0:S-
sibilités d'emploi non agricole ne s'accroissent pas assez vite pour assUJreJr
un revenu suffisant à tous les nouveaux venus sur le marché du travail~ Dans
ces conditions, il est donc certain que sans réforme agraire et la transfor-
mation radicale du système agraire, nulle rupture avec le sous-dé~l0,ppement
n'est possible. Mais cette réforme agraire doit reposer sur le principe 6el",Il'
lequel "la terre à celui qui la travaille" et non "à celui qui a les m(j)yens
financiers de pouvoir s'en procurer". En d'autres termes, le p~san, doit per-
cevoir l'intégralité du fruit de son travail et non seulement le prix de sa
force de travail~ La terre, principal moyen indispensable d'existence, ne doit
donc être ni vendue, achetée ou louée. C'est pourquoi, nous acceptons avec Mo
ALBERTDJI qu'une réforme agraire pour le profit des paysans surtout pauvres
et ouvriers agricoles doit "permettre de briser les structures sociologiques
traditionnelles en faisant dispara1tre un groupe qui bloque le développement
ou qui limite son influence" car comme nous l'avi'ons déjà étudié en indiquant
que cette population rurale ne forme nullement un ensemble homogène.
Quelles
peuvent être les conditions de la réussite d'une réforme agraire?
Paragraphe 1: LES FONDEMENTS THEORIQUES DE LA REFORME AGRAIRE.
Les conditions de la réussite d'une réforme agraire, selo-n M. ALBERTIN:I(I)
sont de deux ordres s politiques et économqies.
(1) rd. ALBERTINI : "Les mécanismes du sous-développement" ; Ed. Ouvrière 1967.

- 286 -
La réforme agraire en soi ne veut absolument rien dire. Sa réussite dépend
du système politique dans lequel elle se fait. Dans le cas concret du système
politique àctuel avec la nature des fifférents pouvoirs africains, on ne peut,
pas aujourd' hui parler d'une réforme agraire en Afrique N.:oire allant dans le
sens de la satisfactiori des intérêts des millions de paysans surtout pauvres
dont les conditions misérables d'existence deviennent de plus en: pl~s insuppor-
tables.
En effet,
si par définition, une réforme agraire affecte la terre et la
transfère de certaines classes à d'autres, tant que le système dans lequel elle
se produit n'est pas afferlée c'est à dire transformé profondément, on ne peut,
la qualifier que de très peu bénéfique aux nouveaux propriétaires surtaut si
ces derniers sont des paysans pauvres. Elle ne contri.bue pas au' Q!évelLoppemenrt
du pays dans lequel elle se fait. Elle ne peut être rentable en, Afrique que
lorsque les transformations sociales et agraires vont ensemble ave~ la remise
en cause de son système politique actuel d'où la nécessité pour elle de satis-
faire . llÏiJld:ii.Spensable stratégie de InlPture 'e'b:.de.changement pour une soe::iiété
nouvelle.. Ent effet, comme le s0Uligne
MICHEL GlL'ITELKAlt CI), la réforme- agrai.re
est un "produit de l' act ion de la société sur une part ie d' elle-même ~ cett,e
partie pour laquelle la terre est un instrument de création et de captation
d'une fraction de surpr@dujjt social" mais dans le rapport de force "lL'Etat a
une attitude particulière et défend une politique particulière. Il s~ppQee à
certaines classes sociales et défend les intérêts d'autres classes"'., Il n.e peu1t
défendre que les intérêts des classes dont i l est is:su car on n'est jamais mieux
servi que par soi-même. -Aussi n'est-il pas étœnnant écrit YVES, LACOSTE, ~e
"la réforme agraire" soit apparue comme le m,oyen fondamental pohr- ll'établir une
situation sociale moiins absurde et moins injuste. Pour les mouvements RS3san
flUS
le partage des terres était une des revendications les/anciennes et les plus
subversives ; ce fut aussi la plus redoutée et la plus énergiquement écrasée
par les nantis. Après la seconde guerre IIOOndiale, et apnès la réalisation de
cette aspiration pQUr des millions de paysans chi,nois, la réforme agraire est;
devenue la revendication révolutionnaire pan excellence, celle aussi dont la
signification concrète est la plus claire pour les paysans sans te~e, à tel
point qu'elle a été inscrite dans les <!tJbjectifs de divers mouvements politiques;
y compris pour des paya comme le TCHAD, OÙ pourtant la propriété privée de 1a
terre agricole n'existe pas encore."(2)
(1) M. GUTELMAN l
"structures et réformes agraires"; Col. Maspero. '
(2) YVES LACOSTE: " G:eographie du sous-développement" Ed. fUF - P. 150

- 287 -
Pour mettra fin à la condition misérable du p~san, la réforme agraire dQ±t
consistell' à 1
- mettre fin, selon un processus progressif, aux rapports pTé-capi~alistes
qui ont longtemps freiné le développement économique et social ;
- liquider la base c~loniiale qui a maintenu et reni'O'xcé ces rapp~JI'ts pré_
capitalistes de propriété agraire dans les campagnes, source de :lia QXUl8.Uté
de ll'exploi tation et de lloppression de la grande bourgeoisie 'état iq;lle , faisant
gémir les masses paysannes dans la famine et la pauVl!'eté,. ;
- abolir définitivement dans les cappagnes, to~me forme d'expro~riatio.
foxcée des paysans, de leurrs terres_~quii-permettent de SUJl''tivre ;
- réorganiser l' agriaul ture en '''expll'opriant'" les terres des a~en11éts1Mls
pour les distribuer à ceux qui les travaillent effectivement.
Cette viisi;on de la réforme agraire s'oppose à la théorÎlê non PG_puJ.aire "la
terre à ceux qui peuvent la cultiver"f qui; suppose l"expropriation des paysans
A:tNUb
pauvres et moyens de leurs/au profit de
la grande b~geoisie eit des fii:rmes
multinationales qui, seules, ont la possibilité d'accéder au crédit. :fiina.ne;ie:r
et de mettre en valeur de grandes surfaces. La minori té pri~];égiée Ta S"opp<ll,ser
à tout changement radical du système politique et éconmique puisque ses inté-
rêts sont menacés d'où, pour la réussite de cette réforme agraire, il faut une
mobilisation effective des paysans, pour remettre en question les anciens pri-
vilèges..
BI - LES FONDEMEN~S, EaONOMIQUES.
La réforme agraire doit être réalisée dans un système politique et écono-
mique inlfépendante pour un développement économique vérLtc:l.,ble. Pour être liJée
à une conception stratégique de la place de l'agriculture dans le développement
et à une véritable ma1trise de son devenill', la réforme agraire doDt répondre
à un certain nombre de prérogatives. Outre la forma~ion des hommes, la réfor.
me'j·,;,dnit
contribuer à la formation d'un surplus agricC1tle, élément fondamental
de base pour l'accession au dével(!)ppemenlli. Mais l'appa.:uition d'un surpltts agri-
cole suppose que les besoins ali~entaires de la population du pays eTh questi~
sont satisfaits. ~en que n'é~ant pas un élément suffisant, le surplus agricole
est nécessaire pour qu'un développement industriel puisse prendre place.

- 288 -
.i!;n effet, l'histoire nous ensé;iig:&e que le développement du surplus agTi-
cole fut la base première du.,développement des métiers, des différenciations
sociales, dès industries etc••• Lorsque ces métiers et industries etc. •• , se
fhl'
sont développés, le surplus a cessé d'être exclusivement un sux/agricole. Il
devint ainsi un surplus économique et permit une accumulation générale et sur-
tout ~e aocumulation productive. Ce n'est que lorsque cette dernière permet
de créer des moyens de production de plus en nombreux et diversifiés que la
croissance économique s'accélèreo Mais le surplus agricole ne suffit pas pour
un développement industriel~ Ce dernier nécessite aussi des conditions sociales
et techniques favorables. Si un pays n'a pas la capacité de produire lun-m~me
ses principaux moyens de production, il peut être contraint de vendre son sur-
plus agricole à bas prix sur les marchés étrangers, ce qui la place dans l'im-
possibilité de s'industrialiser. C'est le cas des p~s africains~ ~énéralement
monoproducteurs agricoles. Ils ne peuvent pas utiliser leur surplus sur pl'ao-.
Ils sont alors sujets des marchés internationaux contr81és par les pays nantis
pour leurs échanges. De ce qui précède, on peut affirmer que le surplus agri~
cole est une condition nécessaire mais non suffisante pour la croissanœe éco-
nomique. Une réforme agraire n'aura donc pas de sens si elle ne vise pas l'a~
croissement de ce surplus ou si elle n'est pas liée au développement et à la
diversification. Il est plus que jamais nécessaire de former, d'encadrer la
population rurale, de créer des exploitations de dimensions optimales, de con-
damer de trop petites et de trop grandes exploitations qui sont inefficaaes
ainsi que la division très poussée des exploitations et des parcelles et des
parcelles éparses en Afrique.
cl - Les limites potentielles de la réforme agraire.
Pace aux inégalités marquées des multiples situations particulirères
et de la productivité agricole, la réformes agraire impiique nécessai~ment
toute une gamme d'ajustements. Ce sont, dans la plus part des cas des considé-
rations sociales ou un souci d'équité qui sont au centre des pré0Ccupationa.
"ainsi, dans le cadre du type féodal asiatique ou lationo-amériaain, où les
propriétaires fonciers exploitent leurB .locataires, la réforme indlut des mo-
di~él.tions aux droits des premiers, une redistribution de la proprliété indivi-
duelle, dans le cadre d'une éconOmie de marcié, est de règle mais que la répa:r-

- 289 -
tition des terres n'est pas uniformes, la réforme peut exiger le morcellement;
des exploitations ou leur transfert à l'Etat."(I)
Cependant, pour nécessaire qu'elle soit, la réforme agraire ne suffit pas
à elle seule à améliorer la productivité des ter~es ni la repartition des re-
venus. ~es modifications apP0rtées aux structures de la propriété fonoière n'en-
tra1neaont pas automatiquement une augmentation des rendements ni un Ghange-
ment technologique dans le secteur agricole. Ces phénomènes n'interviendront
que si l'on prend des mesures appropriées pour mettre à la disposition des ex-
ploitants les facteurs de production et les services dontfls ont beso~ En
fait, souligne la Hanque Mcmdi.ale, i l est essentiel d'organiser, parrallèlelllsnil
à tout programme de réforme foncière, la fourniture des facteurs de production
réquis, il en est particulièrement ainsi lorsque le processus des réformes dé-
sagrége le cadre institutionnel du secteur agricole, sans le remplacer par des
nouvelles structures.
Il nous convient de recwnnaHre l "iimpossibilité d' énencer en termes sim-
ples la politique de réforme agraire applicable à une situation dbnnée. Il faut
d'abord j.ger de la valeur du système en vigueur et de la meilleure SQluti.on,
de remplacement. Les études faites par la Ranque Mondiale, montrent que ies
gouvernements favorables aux réformes, du ~enya et du Pérou par exemple, ont
emprunté des voies différentes. <rertains gouverne.ents donnent la préférence
à la propriété individuelle, dtautres à la ma'1.trise c011ective 0U communajtaiire
des sols. Il est clair que les mesures adoptées ne dépendent pas seulement de
:t:acteurs économiques. Elles refl"tent également des considérations d'0rdre p~
litique et idéologique et transcendent donc l~~gement tout calcul purement éCQ~
nomique. La réforme agraire peut poser un problème hautement poli tique, parti-
culièrment lorsqu'elle vise des s~tèmes de type féodal traditionnel et commu-
nautaire (c'est le cas en Afrique). C'est souvent le regime foncier en vigueur
qui constitue l'obstacle essentiel au
déveleppement. C'est a~ors qu'une ques-
tion surgit: la grande exploitation agricole communautaire ne peut déployer
(1) BANQUE MONDIALE , Politique sectorielle 1 lIr éforme foncière"
1975.

- 290 -
pleinement son efficaoité que si la mécanisation du travai\\est possible. Or
celle-ci nécessite un développement idustriel qui serait justement bloqué par
l'étroitesse de la production agric01e si la réforme agraire n'est pas suivi~
d'une transformation des structures de la production. On se trouve ainsi enfer-
mé dans le cercle vicieux du sous-développement c~est à dire le développement
de l'agriculture nécesite sa mécanisation, mais celle~ci n'est possible que
par le développement industriel, qui nécessite lui~me un développemen1l. ~i­
cole. Il y a là une interdépendance entre l'agriculture et les autres secteurs
de l'économie.
L'aménagement de la campagne exige des progès conduisant à la transforma-
tion de l'équipement du p~san, à la vulgaaisation du progrès technique et à
l'oragan:hsation des marchés et des crédits. Ceci suppose le regroupement des
hommes et des terres en coopératives en vue d'un meilleur équilibre entre les
produits vivriers et les produits industriels, d'une rationalisatnon dans la
diversification et la spécialisation régionale. Ceci nUest possible qu'ave~ W1he
décent~alisat ion du plan développement au niveau dSs_ooopérativea. -EJiJ.'a~eJ!Qn,t
ainsi non seulement deffiunités de production mais aussi des centres de concep_
tion et d'exécution du plan.
Les nouveaux rapports de production seront alors caractérisés par la n~
séparation du capital ni du produit d'avec les producteurs. Ainsi, le partage
des bénéfices leur donne une fraction du fruit de leur travail tandis qu~ les
investissements dont ils sont aussi copropriétaires , leur permettront de co~
server les fruits de leur surtravail. Mais les coopératives se seront pas re~
tables si elles sont dominées par les lois du marché c'est à dire si la produc-
tion est organisée en vue de l'écoulement sur le marché régi par le taux de
profits, les lois de concurrence etc. Dans ces conditions, les coopératives
ne changeront rien, mieux elles contribueront à renforcer le système écoJlliomi-
que et politique actuel en Afrique c'est à dire la théorie orthodœxe de spécia-
lisation. Eais si les membres des coopératives ne sont pas préparés, il serait
dangereux de mettre en place trop rapidement oette structure coopérative car
il est impossible de pouvoir passer directement d'un système de solidarité

- 29] -
c0mmunautaire ou villageoise à un système de solidarité de coopérative qui de-
mande une prise de conscience des interdépendances, du calcul écon.omique et
une notion de bien commun•. Le manque de cette éducation ou préparaticm est 1a
cause principales des échecs des tentatives de coopérative en Afrique. En efffeil t
"l'esprit coopératif ne semble pas animer nos coopérateurs. Pour beaucoup d'a-
dhérents, la coopération est la vache grasse qui doit fournir,~peu de frais,
le complément de vivres ou d'espèces que le créancier n'a pu donner par plI'Udence".
,
Aussi, "les dlirigeants, dans leur grosse majorité, montrent une facil'ité étoù-
nan1te pour transformer les coopératives en agences d'affaires, plus préoccu-
pés de réaliser des bénéfices à taut prix que de créer un esprit coopératif
qui est avant tout esprit de solidarité entre les membres d'une même associa-
tion. Il serait alors dans ces conditions "vain de parler de l'avenir de la
o
copération en Afrique, si on ne veut pas s'atteler sans tarder à l'éducation
coopérative des masses et à la formation des cadres autochtones en vue d'une
gestion Saine et éclairée de l' entreprise ll écrit MAMTAD<JUT DIA( 1).
Enfin, la réforme agraire doit enfin aller de pair avec une réforme du
crédit agricole et la lutte contre l'usure. P~ un véritable développement
économique, il est indispensable que le crédit agricole soiit considé~é'.'Comme-­
un élément de la politique économiq1i1e et d'assistanoe sociale dans l'agrlou.Jj.;o-
ture.pour être plus rentable, la oaisse de crédit agricole dp±t l"":lIÏ'àv&i:'l'lër··. .
étroite è011aboration a~ les. services de l' animation, rura:l!.eet de la 11i\\1lgem:!-
sation. Il est alors nécessaire dans ce cadre, d'amener les agriculteurs a re-
membrer leurs terres
afin CBue les remboursements soient collectifs. Il serait
aussi préférable que les coopéIratives aient une autonomie finanoière à partir
de l'accumulation du surplus agricole réalisé
afin d'investir dans l "industIrie.
Par conséquent, dans un pays comme la œaute-Yolta, où un grain de mil est
un grain de douleur, là où il y a beaucoup de faim et point de mil, 1& défini-
tion du rôle politique de l'agriculture devient une nécessité de survie d'un
peuple. La réforme agraire peut alors fort b:ien constituer un préalable à tout
développement.
(1) IlAMADOU DIA l "Contribution à l'étude du mouvement coopératif en Afrique
Noire ll - Présenoe Africaine Paris.

- 292 -
Paragraphe I I :
LA REFORME AGRAIRE EN HAUTE-VOLTA : JIlEXjESSITE DE SURVIE.
Gomme nous l'avons eu à le montrer plus haut, que la ffiaute-Voillta appartient
aux pays où la propriété lignagère des droits fonciers demejre de règle pour
l'essentiel. Cela veut dire que dans le système communautaire à l'inverse du
système féodal liant le prtpriétaire au locataire, la terre appartient à la lIlOl-
lectivité et l'accès est relativement lib~e. Alors que dans le système à carao-
tère féodal, la distribution de la propriété foncière et la repartit~on des
bénéfices sont très dissymètriques. "Les deux systèmes sont relativement!; stables
lorsque les conditions sont favorables; par contre, ils peuvent entra1ner des
difficultés lorsqu'à la suite de la croissance démographique, le rapport des.
superficies à la population déc~01t, à moins que n'interviennent des changements
techniques conmpensatoires. Dans le système proJiétaire-locataire~ la pression
exercée sur les terres se manifeste par l'augmentation de la foule de paysans
sans terre et par des disparités croissant~s de revenus. Dans le système com~
munautaire, ces tensions se traduisent par la réduction des temps de jachère,
la dégradation de la fertilité du sol, le surpâturage, l'aggravation de l'érQ-
sion, qui s'accompagnent d'une extensionfe la pauvreté et d'une plus grande
vulnérabilité aux variations s&isonnières"(lBianque Mondiale: déjà cité).
AU regard de ce qui précède, aucune réforme sans remise en cause vériata~le
des rapports existants, ne peut aboutir à un progrès économique vable. C'est
en un mot d'une révolution agraire s'inserrant dans une mutation totale dont
il s'agit. Cette réforme est envisagée comme un moyen de déclencher au sein (
du secteur villageois des mutations structurelles aysant effet de modifier 1a
superficie des exploitations et la distributions des revenus. Dans le contextle
'1
voltaïque actuel, l'exécution des projets pilotes ne sautait être assimilée
à une réforme agraire puisqu'il s'agit d'opérations intervenant au sein du ca-
dre structurel préexistant, même si elles ont leur utilité pour juger de la
v:aleur économique de divers "modèles", idenfier les problèmes que pourrait po-
ser leur gestion ou les mesures susceptibles àe faire partie d'une réforme ul-
térieure~ La colonisation de nouvelles terres, comme c'est le cas actuellement
à travers les A.V.V, ne constitue pas non plus une réforme foncière, bien que
cette opération puisse permettre de mettre en valeur les terres jusqu'alors
inutilisées. En soi, le colonat peut avoir ou non une incidence sur la structure

- 293 co
des exploitations : tout dépend de la façon dont sont choisis les colons et
de la superficie des nouvelles exploitations.
Dans le cas concret de la H~ute~Yolta, il s'agit de faire sortir le monde
villageois de :
sa passivité;
l'abandon d'une mentalité et d'attitudes rétrogrades: vision de la
nature et du monde, conception de la nouvelle "'e. ..
-_\\-1'.
mo""'"
Cela. implique des sacrifices et finalement comme leI ALBERT IN l
: "La"'..:réfOOl'-
Dœ agraire doit permettre de briser les structures SDciologiques traditionnelles
en faisant dispara1tre un groupe qui bloque le développement ou en limitant
son influence. Il faut donc éviter que l'ancienne classe possedante ne puisse
arrêter le processus. Uhe réforme agraire doit se réaliser soit dans Ul1ll climait
politique qui mobilise les maS8&s rurales et les intégrer au pouvoir, soit à
travers des mutations économiques et sociales qui réorientent d'anciennes clas-
ses possédantes" (1 ).' :Bl0uleverser les données politiques fondamentales c'est
animer une population rurale, la former en changeant son attitude devant le
destin, c'est en définitive empêcher une mainmise totale de la bourgeQisie éta-
tique voltaIque et son cousin commerçant sur le développement et la vie poli-
tique, c'est empêcher que quelques gro~pes accaparent le pouvoir et s'instal-
lent dans la richesse et la consommation opulente, tandis que la masse est dans
la misèreo
Rien ne saurait garantir en fait le développement du poi.t de vue politi-
que et de son orientation mieux que les masses mises en mouvement. La réforme
agraire si elle doit avoir lieu, doit se situer dans cet objectif. C'est pour-
quoi l'encadrement et la formation doivent se situer au premier plan~ Maiis cela
ne peut se fair qu'avec une administll'at'ion déba.Fassé de tous les mobiles mer-
cantiles (rôle spéculateur des O.R.n). PBJl' conséquent les éléments fondamentau.x
du succès d'une réformes agraire ciléms ce pays doivent part ir d'une reViision
totale du rÔle et des structures des O.R.D, s 4 impose car, d'une part, la p~~an~
nerie voltaIque est absente
de ces organismes, d'autre part, seules ]es cu~~
tures d'expo~tation motivent ces sociétés pour l'encadrement.
(1) J. Mo ALBERT IN l
(déjà cité) PP. 230 ET 233.

- 294 -
La situation de l'agricultuFe ne peut qu'être parcellaire. De m&me C0rnme
dans le' cas entre économie villageoise et économie urbaine, au sein de la p~e­
mière, i l existe également des contradictions. Il n'est possible de dégageJt'
de surplus agricole que dans un système intigré GU l'esprit créatit, engendné
par l'éducation va de pair avec la diffus±o~ ~ors des règles élémentaires
s'imposent telle que la coordination des actions de l'ensemble des institutions
et services qui pr~cèdent à la recherche des techniques écon0miques et SQci0-
logiques, et à la dif~sion des techniques dans un ensemble donné. Ces 0~ganismes
et services sont :
- La Direction du développement agricole ;
la Direction de l'élevage J
la Direation de l'hydraulique ;
les Organismes Régionaux de Développement
- Les organismes techniques ;
T~utefois, contrairement à ce qui se passe mainten~tla préparation des
programmes de "création-diffusion" est faite en liaison étroite avec les :nepré-
sentants des paysans organisés. Dans le schéma de la fin du paragraphe, ~ar
lequel nous essayons de montrer comment cette syhthèse doit se faire si possi-
ble.
- D'abord l'objet de la reaherehe tant au niveau socio-écon0mique que
que dans l'agriœulture en vue d'aboutir à la création de systèmes techniques
de product ione
- La première phase consiste à analyser la structure socio-écon0fflq~
du milieu une fois les directives politiques d0nnées. Ains~, la propriété des
moyens de production, le niveau de aes moyens, les rapports de production, de
même que les comportements des~forces productives analysées, doivent' faire l'ob-
jet d'une sy~nthèse ét:lissant les structures réelles de production.
trll-mic.'C' ~
- Toujours dan$ la/phase, il est nécessaire de conna1tre le milieu aussi
bien du point de vue des hommes (leurs comportements), que du point de vue des
possibilités des richesses naturelles de cette zone (plantes, animaux pour la
culture attelée, etc,). Ces recherches doivent également être synthéti~ées en
vue de voir quels sont les systèmes de production possibles dans chaque zone.

- 295 -
La deuxième phase, qui -est celle de ,la diffusion comporte deux étapes :
• La première étape est celle d'un essai de modélisation. En effet"
la
double synthèse des structures réelles de production et des systèmes de produc-
tion possible permettent de voir quels sont les mojèles socio-écon0miques vuJJ-
garisables. C'es modèles doivent être simple et avoir un impact sérieux au ni-
veau des couches laborieuses•
• La séconde étape consite à diffuser très largement ces modèles dans las
zones de développement concernés.
Du fait de la participation des premiers intéressés à toutes ces phases
on peut rapidement dresser un bilan de la compagne de diffusion. C'e bilan vise
plusieurs objectifs: conna1tre les résultats techniques et économiques du point
de vue des paysans et de la collectivité, calculer l'éfficacité économique d~
la vulgarisation, déceler les facteurs de freinage ou de blocage de la diffU-
sion.
$i les résultats ]Ile sont pas satisfaisants, les facteurs de fre:i!nage
peuvent être recherchés dans quatre directions 1
+ alanlyse insuffisante des structures réelles ;
+ propositions trop ambitieuses ou inadaptées de la recherche agre-
mique
+ m.d~lisation mal faite conduisant notamment à des systèmes 1ÙIlJSU:fr'~
fisament motivant pour les paysans;
+ mauvaises techniques de diffusion et d'animation.
L'évaluation de la diffusion constitue donc la base d'un processus de
Feed-back et de correction par l'erreur, qui remet en cause le système lui-mê~e.
Finalement, nous voyons que le succès de la réforme agraire implique
qu'elle réponde à un certain nombre de conditions préalables.
eette transformation ne doit pas être séparée de la formation des hommes.
Elle doit être menée dans l'intérêt iu plus grand nombre des masses paysannes.
Elle doit viser à l'accroissement des surplus agricoles dans le sens de
l'élevation et l'amélioration des conditions de vie de ceux qui sont les auteurs
de ces surplus..
Elle est inséparable de l'effort général d'intégration économq.e :
• aménagement des eaux d'irrigation et de la terre;
• amélio~ation et développement des circutis de distributiœn et de comme~-

- 296 -
cialisation_ des produits de base•
• aménagement du crédit agricole accessible au plus grand de p~sans;
• liaison avec l'industrie pour les surplus agricoles et le transfert pr~
gressif de la main-d'oeuvre dans le secondaire.
SCHEMA 1 S~STEME INTEGRE DE CHEATION DIFFUSION! (AGRICULTURE.).
r-------
,---L-
)
Création (])
Recherches socio- écono-
miques et agronomiques

1Diffusion (II) ~
, Application, des re-'
cherches
l
' I I
l
I I
1
(analyses)
(synthèse)
(modèliaa.1;iQn ): ~====-1......
1
1
,
1
moyens de
1
t
productio
1
,
.recti..,
Jiapports de
,
IS
poli
productio
-&-~ structures
l(modèles socio-éco-)
...;;.q.u.es• •1
--,,",-:o:a ré e 11 es. de
_
roduc"t ~on.
nomiques vulgarisa
bles
)
entres et pro~ssus
de décision.~ 1
Milieu
Plante
Animal
( systèmes de
travail et
( Production
Techniques
( possibles
( (évalués)
&ource 1 LOOIS. !ILA.LASSIS' : "Educat ion rurale et
agricole ll in Revue tiers-monde P.277 ..

- 297 -
1'émergeance d'une société nouvelle dont les prémisses s'appréhenderaient à
travers les tranformat:ions des structures administratives et les transformailiGIDs
agraires, le changement des mentalités et des rapports socia~ Premisses qui
pourraient apporter une sénieuse impulsion au développement agricole et au p~o­
grès social de tout le pays. En atendant que ces perspeo.tives ne deriennenrli UlIlle
réalité accessible aux masses rurales," nous allons terminer notre étude en nous
interrogeant sur l'épineux problème de l'auto-suffisance alimentaire du] sahel
dont la ~aute-Volta en serait un échantillon représentatifo
GHAP III 1
URG:ElNCJ!E D'lJll1E POL ITIQUlII; AGRIC&LE DE SllllRY;Œ.
-
,~
=
INTRODUCTION : AUTO-S1J1Fli1IANCE ALlMENTAmE: ou: SURVIS, D'llmΠPOPULATIOlll ?
Nous nous permettons de nous poser le problème de l'auto-suffisance alimen-
taire en dépit de l'importaace du défici~ alimentaire des pays sous-déve10p~
qui n'apparaît pas comme un phénomène nouveau. Mais il a pris une ~leur par-
ticulière ces dernières années en s'enrichissant de llouvelles donnl§es 1 l'au-
gmentation des importations alimentaires dans de no~eux pays pauvres se si-
tuent dans le contexte d'une expansion quasi~générale de la production agricole,
dont l'indice "per capita" calcul par la F. A. 0 est passé, comme le souligne
g. IUCHA'jLOF'(I),
de roo en 195:0 à 122 en 1971. Cet expert ajoute 1 uLe taux de
croissance de la production agricole dans la plupart des pays en voie de déve-
loppement ne s'est guère écarté pendant ces deux décennies de celui des pays
développés".
~e paradoxe émeut tous ceux qui ne sont pas fanatiquement attaché au dogme
de la division internationale du travail. Et nom~eux sont les agronomes qu~~
comme M~ CEPEDE(2), se scandalisent en constatant que très grande majorité de
ceux qui souffrent de faim ou de mal nutriti~ dans le monde sont des paysans.
(1) MICHAILOF SERGE
"L'identification des prolfets de développement rural"
actuel dévelopc'ement - lUTovembre-Décembre 1974.
(2) M. CEPEDE
"Libre propos sur la Conférence de RQme e:l le problème alimen-
taire", actuel développement - Ma.s-Avril 1915.

- 298 -
r..
Dans un article très"dw:r", A. EIDE(I) analyse le problème en termes plus
politiques: "les politiques agricoles traditionne~ont un échec. Elles ont
tendance à aggraver la dépendance et le nombre des individus mal nourris 0U seua~
alimentés( ••• ) au niveau national, faire d'une ou deux cultures de rapport la
base du développement agricole rend les nations en voie de développement extrê-
mement vulnérables à des pressions qui s'exercent par le biais d'un contrôle
extérieur des prix, de la pénurie d'aliments de base et de considérations d'or-
dre politique. Il n'y a qu'une seule défense possible contre ce gen~e de chan-
tage ,alimentaire, et c'est l'indépendance de la production agricoJile au plus
petit échelon possible : le maintien partout où on le peut, de production viVriè~
re destinées à être consommées localement de façon à dépendre le moins possible
des échanges commerciaux".
Œ'est ce contexte de péssimisme que nous osons poser comme object~~ : as-
surer l'auto-suffisance alimentaire du sahel à la fois sous forme de révendica-
tions et de mir d'espoir
~ _,
'des millions de Pél3sans du S.allel. C:ar selon,
nous, l'auto-suffisance ne signifie nullement une autarcie absolue, impossibLe
à. réaliser.. Mais nous tenons à souligner que la Jll1aute-l1oJLta fpél3s du Sahel) peut
et doit produire l'essentiel des produits alimentaires dont elle a beso~
Ainsi pour nous, l'auto-suffisance alimentaire définie ne peut pas être
un objectif unique : chaque communauté humaine qui vit dans le S·ahel a son pro-
pre projet pour l'avenir. Mais l'auto-suffisance est une condition nécessaire
à la réalisation effective de tout projet. Aussi la solution d'auto-su:f':f'isanc~
doit-elle être considérée comme une base minimale, une conditions sine quanon
de subsistance et de tout développement futur même quantitatif•. IDous menerons
notre approche dans un premmère section, en abordant la problématique de l'au-
to-suffisance, dans une seconde, nous cernerons le rôle et l'impact des cultures
en sec et les cultures irriguées dans le cadre de l'objectif sus-défini.
Seeiion 1 : LA PROBLEMATIQUE DE L'AUTO-suFFISANCE.
N~tre sujet de thèse nous conduit à indiquer l'urgence d'un programme de
(r) A~ EIDE
"Cultiver de tout partout", CERES - Janvier-Février I975.

- 299 -
croissance permettant d'assu~~ l'auto-suffisance alimentaire du pays sahéliea
qu'est la Ifaute-Volta quels que soient les aléas climatiques et d'anrenell' ce Pél\\Ys
à un certain niveau de développement "autonome". En effet, pour un p~s qui vient
de subir les conséquences désastreuses d'une longue sécheresse, il nous était
normal de révendiquer la nécessité d'une haute priorité à la réalisatian de l'au-
to-suffisance alimentaire. La suite logique nous conduit à nous livrer à une
réflexion théorique sur la notion même d'auto-suffisance alimentair~ afin que
soit bien précisé l'objectif à atteindre~aette reflexion s'ordonne autour des
points qui suivent.
Paragraphe l
L'IDTO-suFFISANCE ALIMENTAIRE PEUT;..ELLE m'RE ABSOLUE ?
L'auto-suffisance alimentaire considérée dans le conterie voltaïque comme
un objeatif ne serait pas synonyme d'autarcie.
e'0mment pourrait-elle être une autarcie lorsque l'on considère que l'é~­
lution des habitudes de consommation en maute~Volta et le dévelopmement des é-
changes internationaux contribuent à étendre de jour en #Our la gamme des pro-
duits alimentaires dont la EHaute-Wolta a besoin'!' Le G::lub du Sahel résume un
peu mieux les points de vue de ceux qui s'opposent à une telle orientation en
c
termes l "ce sont les perspectives de développemenll- de ces éhanges internat:iiG)-
naux qui font dire à certains que le SBhelj~'aar.it pas intérêt, mJme en année
normale, à produire la totlité des produits alimentaires dont il a besoin ma~
qu'il devrait plutôt développer les productions pour lesquelles i l dispose d'um
avantage relatif, exporter ces productions sur le marché international et impor-
ter le complément de produits vivrières nécessaires à sa subsistance"(I)• .illn
fait ce raisonnement est très théorique. Il dénote de la part de ceux ~i le
1
soutiennent à une grave ~~onnaissance des réalités sahéliennes et des profon-
des aspirations des populations de la région. De plus, ces personnes ignorent
que les prix des produits exportés par le S;ahel varient dans ile grandes propor-
tions et que cela n'est pas le fait des sahéliens. Il demeure qu'aux yeux des
sahéliens après ces douloureuses expériences, il n'est pas concevable de dépen-
dre de l'extérieur pour les produits vivriers de base. Malheureusement ces point$
( 1) C'W1B DU SAHEL
"Rapnort de synthèse " __)0 77141 -P. 12.
-,.'."

- 300 -
de vue trouvent d'a~tp~1 au niveau de ceux qui président la destinéé des popu-
lation en sursis de mort.
Toutes les études prospect ives sur l' av.....nir du Sahel effe<e:tuées ont tonclu
à la possibilité pour la région d'atteindre l'auto-suffisance alimentair&(~IT,
F.A.O etc..... ), mais soulignent également que J "la sécurité absolue esit toujours
d'un coüt élevé et assurer une auto-suffisance alimentaire absolue SUPPOS81'
que le ~ahel développe considérablement des cultures irriguées peu sensibles
à la sécheresse mais coûteuses en investissement, et mette en place des moyens
de stockage, permettant de mettre en réserve le surplus des récoltes des années
de bonne pluviométrie"(I)o Res pays du S,ahel doiivent prendre conscience <les dif-
ficul tés et obstacles de toute.! nature qu'ils auront à faire face dans la voie
qui mene à cet objectif~ Et non considérer ceux-ci comme un moyen qui justifie-
rait la démission.
C,ependant, ces pays peuvent considerer que :
eu égard aux potentialitém
physiques et humaines sur:-:tout de la ffiaute-V:ol ta
grâce à une approche systéma-
tique, identifiant très correctment les étapes et les moyens nécessaires et grâ-
ce à des efforts persévérants - l'objectif d'auto-suffisance alimentaire peut
être atteint à terme.
To'{j..<te personne de bonne foi reconnait que pendant longtemps le développe-
ment agricole de la ffaute-Wolta a été contré sur le développement des cultures
de rente d'exportation au détriment des cultures vivrières. ~ette orientation
du développement agricole doit être remise en cause. L'accent sera mis sur les
cultures vivrières t1ou1l ell' accordari aux
/ cultures de rente la plaoe qui leur revient, et l'intensification des oultures
peuvent permettre de sauver la population de cette partie du monde. MalB l'auto-
suffisance alimentaire peut-elle être un objectif en soi ?
Haragraphe II : L' AUTO-SUFFI3.ANCE ALIMENTAIRE PEUT-ELLE ETRE UN· OBJEaIDIF
UNJIQUE ?
Après une longue période de sécheresse, la garantie d'une sécurité alimen-
taire est certainement un objectif prioritaire pour la rnaute-Volta. Mais, il
(I) FliO ET BIT
cité par
le CLUB du Sahel ( dejà cité) P. 13.

- 301 -
est bien
évident que ce ne peut être un objectif unique. Survivre et manger
à sa faim est cettes une condition nécessaire à la réalisation de tout projet.
Mais le projet formé pour la société de demain ne peut se limiter à cet ob-
jectif unique. Il est donc nécessaire de replacer l'auto-suffisance alimentaire
dans l'ensemble de l'aspiration de la population au mieux être.
Dans le seul domaine agricole d'abord, le développement ne peut se limi-
ter au seul problème des cultures vivrières, de l'élevage et des pêches desti-
nées à l'alimentation locale. C'omme nous l'avons vu dans la premier ,chapitre
préliminaire, nous avons montré que la Haute-Volta exporte du bétail sur pied
ve~ les pays africains équatoniauxo Pour ce qui est le problème des cultures
de rente en raison du rôle que celles-ci devraient jouer dans le processus d ',é-
quipement et d'industrialisation
du P~s. Nous pensons que ces cultures d'ex-
portation ne doivent pas @tre négligées mais développées paRallèlement aux cul~
tures vivrières qui aur~ une impulsion p~ioritaire.
L'équilibre de la balance commerciale volta!que en déficit chronique, est
basé sur l'exportation de produits agricoles comme le coton et l'aracrhiie. Cet~e
exportation permet à la ffiaute-Volta d'importer des biens d'équipement pour
l'essentiel improductifs (voitures, matériels immobilie~••• ), les produits ~~
dustriels de consommation courante et en dernière place les facteurs de produo-
tion agricole modernes comme les engrais ou les matériels agricoles. Intensifier
les cu)tures suppose un apport de facteurs modernes de productio., notamment
d'engrais, qui ne pourront pas tous être produits à l'intérieur du pays, cela
suppose aussi une ,attenuation de la tendance de la bourgeoisie dirigeante à
son engouement pour la consommation de luxe (voitures de dertjier "cri" aux frais
de l 'Eiat). l':aute de quoi on ne saurait parler d'équipement de l'économie nailio-
nal~. D'ailleurs, le développement économique et social souhaité par les respon-
sables volta!ques se tradui~~ vraissemblement pemdant lo~emps par des impoF-
tations accrus de biens industrie]so Dans ces conditions, exporter davantage
et en particulier
. davantage de produits agricoles walori:sés par une
transformation industrielle, est un impératif absolu pour ce p~s sahélien si
celui-ci ne veut pas voir se dégrader de façon inacceptable sa balance commer~
cie.le.

- 302 -
Mais, le développement agricole n'est qu'une partie du développement~ car
le développement ne se conçoit pas sans un certain
nomb~d'àutres éléments,
notamment socio-culturels qui sont essentiels; amélioration de la santé~ cons-
truction d'un cadre de vie urbain et rural~plus satisfaisant, développement des
communications, de l'information, des échanges entre les hommes, ép1anouissement
de la culture propre à chaque communauté na~ionale, le développement ou plût~t
la croissance agricole et industrielle n'étant qu'un moyen de réaliser cette
vie décente à la~uelle toute la population aspireo
L'auto-suffisance alimentaire n'est donc un élément parmi beaucoup d'au-
tres dans le projet de société de la Eaute-Volta de demain et il peut paraitre
bien arbitraire de l'isoler des autres secteurs de l'économie et de la société.
Nous estimons néaBllloins qu'il est légitime de privilégier le secteur des
productions vivrières et de dresser une plate-forme révendicative pour ce seUl
secteuro La dernière sécheresse a e1\\ effet, montra à l'évidence combien la fami-
ne avait de conséquence catastrophiq~es pour les p~sanB sahéliens, non seule_
ment par les souffrances qu'elle a infligées directement aux populations mais
par les répercussions à moyen et long termes qu'elle à eues et contWnue d'avoir
sur la démographie, sur l'équilibre écologique, sur l'organisation sociale et
sur la vie normale de la population~ Le Sahel dans son ensemble ne peut pré-
tendre construire aucun avenir, si cet avenir risque d'être brisé par une pro-
chaine sécheresse. lI:omme l'indique le Club du Sahel que ilIa sécheresse n'est
pas seule en cause. L'évolution au cours des vingt cinq dernières années, en
raison des conditions de cultures et l'aménagement des terres s'est fait~ ve~s
une diminution, de la production alimentaire par tête dans le Sahel et l'on a
pu dire que la sécheresse n'avait fait que mettre en évidence de façon dramati-
que une évolution qui el1t conduit t&t ou tard à une situation, catastrophique".
iviter la famine et donc assurer l'auto-suffisance alimentaire et redresser l'é-
volution de la production vivrière est donc un impératif absolu pour les p~s
du Sahel. C'est dans ce sens qu'il nous a paru légitime de considérer isolement
le secteur des productions vivrières, qui est en quelque sorte la base ninimun,,.
cemmu?e en principe à tous les projets de développement du Sahel
se justifie.

- 303 -
Et c'est aussi la raison pour laquelle ce secteur des productions
vivrières
justifie que d'es critères particuliers d'évaluation des pI.!ojets lui so,ient ap-
pliqués.
C'est dans cet-:esprit que nécessite une plate-f0'rme révendicative du mon-
de paysan. Mais cette plate-forme en soi, est un programme min±mun de c~o±ssance
une condition nécessaire att développement volta~que, il est bien évident qu'il
ne saurait être suffisant. Ce programme exigé doit être complété par les projets
que le pays élabore pour l'ensemible de son développement économique et social
selon ses besoins.
Assurer l'auto-suffisance alimentaire n'est qu'un objectif partiel et
l'on peut complète!." cette formule en disant qu'iil faut aSSUJrer cette auto-6U:f'-
fisance tout en dégageant les moyens nécessaires à la satisfaction des autres
besoins vitaux de la population du pays J: la santé, le logement, l''ha1DlJlement,
la culture etc••• Enfin, il faut rappeler que l'autosuffisance alimentai~e n'au-
rait aucun sens si elle était acquise de façon précaire, au prix d'une dégrada-
tion des sols et sans qu'un nouvel équilibre écologique ait pu être trouvé. Réa-
liser des conditions écologiques stables est donc un: impératif' qui ne peut .tre
dissocié de la croissance agricole.
Il est indispensable que l'~tat voltaIque résolve lui-même ses problèmes
d'approvisionnement en produits vivriers et atteigne un niveau élevé de sécurité.
Mais, vu l'ampleur des problèmes à résoudre au cours des prochaines années, il
nous a paru que l'autosuffisance à l'échelle régionale était une étape nécessaire
à la réalisation de l'autosuffisance sur des bases nationales. Cet objeatif in-
termédiqire repose sur le fait que les aléas climatiques étant moindres au ni-
veau de la région qU'ils ne le sont dans tout le PB\\Ys, l'autosuffisance devrait
être plus facile à atteindre au niveau régional qu'au niveau national. Ceci im-
plique que, au cours de cette première étape au moins} les mouvements de Ir0'duiits
vivriers entre zones excédentaires et zones déficitaires soient facilités par
des mesures énergiques contre les responsables corro~us et l'Iaction spéculative
des gros commerçants.
Enfin, le fait que la Haute-Volta ne forme pas en Afrique un pays isolé,
mais qu'il est naturellement complémentaire des zones plus équatoriales mieux
avrosées et de l'ensemble du S,ahel. e"e Sahel dont la Hiaute-Vol ta sera demain

- 3~-
relié au Maghreb, ce qui rendra possible aussi une certaine complémentarité dans
toute option urgente de production. Pour atteindre le but qu'est l'autosuffisaB-
ce dans le sens que nous l'entendons, il est nécessaire de déclencher l'essor
de la culture irriguée en combinaison avec la culture traditionnèlle en sec.
SiEI:TIOlIh'II : LES CHOIX PRIORITAIR1!lS : B'ABE DJUiNE AUTO-suFFISANCE ALIMENœAIRE.
L'objectif de l'auto-suffisance assigné à la plate-forme programmati~e ~e
développement peut certainement être atteint par plusieurs voies différentes,
chaque voie constituant une option précise. Il nous a paru nécessaire de ~
notre réflexion sur les options possibles qui puissent servir de guide dans 1es
choix de production pour lesquelles se présentait une alternative. Produ~ie l'es-
sentiel des produits vivriers doit êtrœ la première grande optiom. Comme nous
venons de l'indiquer que la notion d'auto-suffisanae alimentairŒ1 sans attein~e
l'autarcie absolue, consiste à produire sur le sol national l'essentiel vital
des produits vivriers dont le pays a besoin. Mais, les objectigs de pro.Q.uction
étant définis de façon quantitative, en fonction de cette première optiom, d'au-
tres options à prendre se présentent aussit8t : Gomment réaliser cette produc-
tion ?
Paragraphe l
: ~EQUILIB~ ENTRE CULTURE ~ sm ET CULTURE IRRIGUEi.
~i certaines productions comme le riz, le blé, la canne à sucre ne peuvent
être obtenues qu'en culture irriguée, il n'est pas de même des céréales tradi-
tionnelles", Sorgho, mil, ma"1s qui peuvent être à la fois produites en culture:s
irriguées et en cultures sèches. Comment se fera la répartition entre les deux
types de cultures et quels objectifs assigne-t-on à chacun ?
AI - Pour le développement de l'Agriculture en sea.
Il n'est pas inutile d'abord de rappeler le rôle essentiel que joue l'agri-
culture en sec en ~aute-Volta :
- son rÔle social d'abord, puisqu'elle fournit la majeure partie de la
populati0I1.9
- son rÔle économique, puisqu'elle fournit la majeure pantie de la pro-
duction agicole, tant vivrière que d'exportation.
- son rôle dans l'économie générale des pays, car elle participe large-

- 305 -
ment au financement de la "croissance" des autres secteurs, soit directement
par le jeu de la fiscalité et de la p~~fiscalité, soit indirectement par ses
effets induits. Enfin dans tout le Sahel, elle assure la base de la participa-
tion au commerce international~ Ce rÔle essentiel, les cultures en sec devront
continuer à la jouer jusqu'à la fin du: siècle si les conditions d'un changement
raiical n'interviennent.
1°) - ~!~!~~ actuelle.
L'agriculture en sec est restée largemànt traditionnelle eü extensive,
continuant à utiliser des outils et des techniques qui n'ont que peu varié de-
puis des siècles. Moins de paysans vol talques utilisent des intrants industriels
du fait de multi~les blocages qui s'érigent au niveau des canaux de distribution
et d'information et moins de 2 %des paysans font de la traction animale (of.
section 3: sur les méthodes culturales). Comme nous l'avons vu dans le cadre
du diagnostic du monde rural où on est souvent frappé d'abord par la repartition
très inégale des populations agricoles dans tous_les pays du Sahel. G:ertaines
zones demeurent vides ou sous-peuplées alors que d'autres, du fait de l'accrois-
sement démographique et de la stabilité des peuplements, se trouvent aujourd'hui
surpeuplés ou en voie de l'être. C'est le cas du plateau mossi où" les techni-
ques de culture n'ayant pas évolué, les temps de jachères sont maintenant insuf-
fisants pour maintenir la fertilité des sols et où les sols ont commenG,é à se
dégrader. La s@conde constation que nous avons fait plus haut, c'est la stagna-
tion générale de la productivité de travail et du sol: l'agriculture tradition-
nelle s'est avéré impuissante à suivre le rythme auquel croissaient les besoins
vivriers de la.1populat ion.
Ce n'est pas cependant que des actions développernent et de modernisation
des cultures en sec n'aient pas été tentées au cours des années passées. La
majeure partie de ces actions ont plutO$ été centrées sur le développement des
cultures de rente. Cependant, également de nombreuses opérations ont concerné
les cultures vivrières et ont porté sur la vulgarisation de thèmes techniques
spécialisés. Certains ont été bien sftr des échecs dl autres ont connu' des succès
~éels. Mais, ces succès ont été limités et localisés.

- 306 -
Hlus recemment, la politique de développement "communautaire", on assiste
à une remise en cause, du lIOins dans les discours, de cet*e politique de déve-
lopnement centrée sur la seule évolution des techniques au profit d'une appro-
che plus intégrée de développement rural, celui-ci étant désormais considéré
co~e un ensemble indissociable d'éléments, technique, économiq~e et socio-eul-
turels.
En apparence, il nous semble que l'approche par le développement rural in-
té~ soit la seule voie effica~ pour parvenir à cette mutation de llagri~l­
ture traditionnelle. Mais les expériences du passé in..ci tent aussi à éliminer
l'approche "élitiste'! ; gén@ratrice d'inégalités
-
entre les divers éléments de
la population rurale et confortent le choix d'un développememt de masse.
2°) - Les o~jeœtifs de base du développement des cultures en en sec.
Les grands axes de bases pour atteindre les objectifs peuvent se resumer
aux points suivants J
- la mise en culture des terres neuves doit permettre à la fois le désser-
rement de la population dans les zones déjà surexploit~èSt permettre de fournir
un emploi à une partie de la population supplémentaire due à la croissan~ dé-
mographique et permettre une augmentation importante de la production de c€réales.
Cette extension des terres culivées se fera par l'extension des terrains dépen-
dants des villages actuels lorsque ceci sera fJOssible. Mais elle devra se faill'e
aussi par la colonisation de terres présentant de bonnes caraotéristiques pédo-
logiques, bien arrosées, situées dans la partie méridional du p~s et rendues
accessibles à la colonisation notamment l'éradication des endémies. aette colo-
nisation, telle que la pratique les A.V.V. qui transforme le paysan en; simple
métay~r, doit être rejetée. afin que le prétexte de la réduction de la pression
de la population dans certaines zones ne puisse servir de couverture à une for-
lBIB"de déportation "moderne~ Un des préalables à remplir, c'est la préparation
soigneuse des opérations de colonisation qui se heurtent à de nombreux obstacles.
sociologiques et techniquëso Ces obstaclès në seront SUrmontés que si tout UD
ensemble d'opérations préliminaires: éradication des endémies, préparation
ps,ycho-sociologiques, mise en place d'une assistance technique aux migrants,etc. ••

- 3~-
- Il faut intensifier la production dans les zones acfuellement cultivée"
sans comprollettre l'avenir, c'est à':<dire à la fois aocroître la product ivité
du paysan et rechercher un nouvel équilibre de l'écosystème. La traduction pra-
ti~ue d'une politique d'intensification doit cependant être conformes ajx exi-
gences des conditions diverses s
• Dans les régions à très faible pluviométrie, l'emploi des engrais
chimiques est délicat, la fumure organique ne peut avoir qu'un rôle margina] E
et les possiblités d'augmentation des rendements sont assez limitées;
• Dans les autll'es régions, le passage de la culture traditionnelle à
une culture ,nanuelle améliorée conrportant le récours à des assolements appropriés
et l'utilisation d'engrais chimiques alIIl.:organiques et de pesticides devrait par-
mettre d'augmenter de façon sensible les rendements et ce, d'autant plus que
l'on se trouve dans les zones lIieux arrosées, tout en maintenant un taux d'em-
ploi élevé de la main d'oeuvre;
• Enfin, dans les régions disposant d'une infrastructure technique
et humaine minimale et au fur et à mesure qu'un bon niveau d'infrastructure
sera nécessaire de passer à une cu~ture attelée voire; motorisée avec utilisation
concomittante d'engrais et de pesticipes permettant d'envisager une augmentatiQR
encore plus impoBtante des rendements.
Enfin, par la cherche et la diffusion de variété de céréales à cycle
végétatif c~rt, susceptibles de parvenir à maturité même lors d'une saison des
pluies écourtée, on essaiera de rendre les cultures en sec moins vulnérables
à la secheresse.
3°)~es thèmes pour l'intens~fication.
Il est bien évident que l'application de chacun des thèmes qui, pour l'es-
sentiel se résume à quatre devra être modulée selon les zones agro-climatiques
et les régions du pays•. Et l'amélioration de la productiv;ité passe par 1
- la diffusion de variétés améliorées s l'effort de recherche et multipIl.:Ii-
cation doit être intensifié en ce qui concerne les sorghos, les m~ et les 1e-
gumineuses vivrières, afin d'en améliorer le rendement ou la résistance à la
secheresse, tout en conservant leUJr rusticité.
- La fertilisation chimiq'lj"e, lIIalgré son coilt élevé, est indispensable. Il

- 301-
sera bon d' étudier du reste comment ce coftt pourrait être abaissé par l "utilisa-
tion-des ressourQes en pbesphates connues dans la zone d'ARLY dont uni début de
mise en exploitation est déjà cOIIUI~é.
L'adoption de techniques culturales approprées et leur application à la
bonne époque (labours, semis, rotations entretien des cultures) peut augmenter
sensiblement l'efficaa±té de la production tradiiionnelle. ~ ce domaine, l'ef~
fort d'information dt de formation doit être poursuivi~
BI - ORITANISATION ET EQUIPill4ENT DES UNTTES DE PRODUCTIO~.
Il s'agit d'étudier pour chaque milieu une exploitation type et un système
de production (avec des variantes éventuelles) le plus apte à. d0nner des résul-
tats socio-économiques satisfaisants en tenant compte des différentes contra~
tes existantes J nature des sols, nombre d'actifs, disponi1i1..1ités financières
pOUL' l'achat d'éQuipements, ect ••• Un moyen d'augmenter l'efficience- des systè-
mes de production est d'adopter la culture attelée et de réaliser une véri-
table association agriculture-élevage.
cl - SERVICES D'AMONT ET n'AVAL.
Les producteurs doivent être encadrés, formés, informés de manière de plus
en plus efficace sur les plans techniques à caractère logistique. L'organisation
d'opérations régionales décentralisées, semi-autonomes semble pouvoir répondre
à cette exigence. Il importe que ces opérations soient dotées des m0~ens humains
techniques et financiers nécessaires et que l'accent soit mis sur les approvi-
sionnements, les débouchés et les possibil:ités de crédit, en même temps que sur
la vulgarisation des techniques les problèmes de prix et de commercialisation
sont certainement fondamentaux pour le succès des opérations.
DI - ORGANISATION SOCrO-PROFESSrONNELLE DU MONDE RURAL.
L'encadrement technique de la paysannerie risque de devenir de plus en plus
lourd et onéreux. Il semble nécessaire de repenser le problème et de développer
l'organisation professionnelle des producteurs qui devrant pou~oir, à terme,
se charger de fai~ passer le message technologique~
Ce système risque d'être lourd au dé~t, mais ils amenera plus tard une ,.

- 308 -
assim±lation plus profonde des thèmes et une participation plusactive des pay-
sans au processus de développement. Il devrait également conduire à une plus
grande souplesse dans l'approche du développement, celle-ci devant po~ir
être modifiée au fu~ et à mesure de l'évolution et les paysans eux-œêmes étant
évidemment les, plus sensibilisés aux besoins nouvea~
Pour conclure sur l'agriculture en sea, nous dirons que les cultunes e~
sec quelles que soïent les améliorations apportées, par l'introduction de varié-
tés végétales à cycle végéta§if court par exemple, demeureront très vulnérables
à une pluviométrie insuffisante ou maJL répartie dans le temps. Elles doi-v:ent
être complétées paf des stockages dont le aDftt d'investissement et d'expartatiom
n,' est pas négligeable si l"on veut obtJnir la sécurité d'approvisionnement re-
cherchée. L'irrigation apporte cette sécurité.
Raragraphe II s POUR LE DEVELOPPEMENT DES, CULTURES IRRIGuœrES>.
Le développement des cultures irriguées suppose que les producteurs, rompant
~vec les technologies traditionnelles, adoptent de nouvelles techniques. Ceci
ne peut être acquis que progressivement et moyennant un effort très important
de formation. Les cult~s irriguées sont encore peu développées en Baute-Wolta.
En 1976, on a recensé '7 700 ha aménagés en ma1trise totale de l'eau, ce qui re-
présente bien moins de l %du total des terres cultivées. Voilà d'ailleurs un
tableau qut donne une vision à long terme des perspectives d'extension de la
culture irriguée en Œaute-Volta.
SURFACES; IRRIGUEES EN HAUTE-VOLTA
Suxfaces irriguées s Investissements
Années
(milliers)
(m-illions ~)
----
: - -
- s
s
- 1976
s
T,7r
s
- 1982
·
21,3
27,5
··
s
·
- 1990
58,8
s
173,0
'.·
- 2 000
104,0
292
·
Source s Tableau extrait du rapport de synthèse du Clud du Sahel ND 77 1410

- :no -
Ce développement modeste des irrigations a sans doute plusieurs causes :
- Jusqulà présent, la Waute-Wolta siest nourrie, tant bien que mal, à par-
tir des cultures en sec, extensives, traditionnelles, ne faisant pas appel à
des investissements coftteux, complétant ces cultures par les cultures de décrue
dans les grands bas-~Qnds. Le récours à des cultures irriguées nia pas été res_
senti comme une nécessité absolue pour assurer l'alimentation.
- Un certain nombre de projets d'irrigation n'ont pas des succès probants
et les bénéfices que
le monde rural a pu en retirer ont été loin de rembourser
les sommes investies dans les aménagements. Parfois même, les frais de ffbncti~~
nement et d'entretien n'ont pu être couverts et les inètallations se son~ dété-
riorées., Une mise en 0euvre efficace des périmètres irrigués exige une main d' oeu-
vre bien lo~e à tous les niveaux : cadres de gestion, encadreurs, producteurs
qui doivent assimiler des techniques différentes des techniques traditionnelles.
La ffiaute-Volta est donc déjà largement dépendante des cultures irriguées
pour son approvisionnement en riz et coame la consommation de cette ~réale va
décroissante dans les villes. Par conséquent il est nécessaire de développer
les irrigations ou de dévenir intégralement dépendant de l'extérieur.
Une fois d~ plus, nous nous reférons à la dernière secheresse, poux montrer
tout l'intérêt que pouvaient présenter les aménagements hydro-agricoles avea"
maitrise totale de l'eau pour la sécurité de llalimentation.
AI - LA_BASE LOGIST~.
Pour parvenir à certains objectifs, la base de départ se résume en deux
aspects :
Il convient au mieux d'exploiter les ptrimètres existants, réhabili-
ter ceux qui méritent de Itêtre et surtout tirer le maximun d'enseigements de
l'expérience acquise sur ces périmètres. Si dans le passé en effet, certains
projets ont été des essais trop hât ifs dl intensification agricoles, ils ont. per-
mis d'identifier les difficultés techniques, sociales et d'organisation qu'il
faudra obligatoirement surmonter dans llav~niro
,
_ Il faut amfnager de nouveaux périmètres, en commençant par ~eux qu~
sont économiquement les plus avantageux.

- 311 -
Pour des raisons évidentes de réduction du coût des infrastructures, on a
estimé que les périmètres d'irrigation dévaient être conçus pour garantir, gEâce
à la maîtrise totale de l'eau, soit une culture pérenne, , soit une dou~e cul-
ture. On a admis dans ce dernier cas que les cultures de contre-saison occupe-
raient en régime de croisière les deux tiers des superficies aménagées.
Les plans établis par le crlub du S:ahel prévoient pour la Haute-Volta 100 000
h~ctares a aménager en ma1trise totale de l'eau, dont 14 000 heçtares au cour~
,
de la pariode 1918-82. D'une façon gén@rale, il ne suffit pas à!énoncer les sur-
faces à aménage~, encore faut-il voir commentcces surfaces se~ont aménagées et
exploitées ensui te. Examinans. donc les contraintes que peuvent renc0n;trer le Il',
cultures irriguées.
!
~I - LES CONTRAINœE3.
l œ) - Les ressources en sol et en eau.
ITne étude prospective de la F.A.O(I), indique qu'il y a dans le sahel de
l'ordre de 12 millions d'hectares de bons sols qui, si l'eau était disponible,
seraient aptes à l'irrigation, le facteur sol n'est donc certainement pas un:
facteur limi~ant de l'irrigation dans un;avenir prévisible.
Il en est de m@me pour l'eau. Le potentiel des ressources en eau de sur-
face est relativement bien connu., C:elui des grands bassins fluviaux (Sénég,al,
Niger, Gambie, C:asamance, ~hari-log0ne~ Yol tao •• ) , doit être de 150 milliards
rie mètres cubes en année moyenne. Assurer une régularisation totale de,. ces
grands bassins c~est~pres~ue quatre millions d'hectares qui_ pourraient être
irrigués... A ce chiffre, il faudrait ajouter encore les miltiples petits péri-
mètres 8Illénageables en déhors des grands bassins. Les pisponibilités en eau
~sont très largement suffisantes pour nourrir une population accrue et même en-
visager des exportations de céréaleso
2 0 ) -
La réalisation des ouvrageso
La maîtrise de l'eau suppose la réalisation d'ouvrages de régularisation.
En outre, la régulatisation des grands bassins sera faite à partir d'ouV'tlages
importants dont on sait que les délais d'études et de contructions sont longs
et incompressibles. Les études de pré-factibilité pour les ouvrages vo]]lIa!queB
(1) RAPPORT DE SYNTHESE : (déjà cité)

_ 312 -
de BAGRE et du SOUROU sur les Volta sont relativement auancées.
Le potentiel irrigable à partir des ouvrages 1 le barrage de Noumbiel sur
la Volta Noire, et le barrage de :ffi1agré sur la Volta Blanche qui vient d'être
cités, dépassera les 60 000(1)
hectares. A l~ng terme, il n'y àonc pas de COD-
trainte empêchant la réalisation d'un programme à définir - A court terme et;
moyen terme en revanche, il n'en est. paS:.;.<i-ermême,,- l'Etat volta!que
dans l'ensemble, de dispose pas d'un volume d'études préparatoires suffisan~
pour permettre le lancement d'importants programmes d'irrigation au cours des
prochaines années. C·eci signifie que, quel que soient les efforts faits sans
pessimisme certes, les cultures irriguées ne pourront contribuer de façon im-
portante à l'alimentation.
3°) - Les ressources humaines.
Le passage de l'agriculture en sec à l'agriculture irriguée suppose une mu~
tation dans les techniques agriooles et dans les comportements humaiM. Dans
l' agriculture traditionnelle, l' homme subit les conditions climatiques naturelles
et il adapte ses techniques aux conditions du moment. Il a une attitude semi~
passive. En culture irriguée, l'homme doit décider en permanence de ses produ~
tians et adoÎpter une attitude active pendamt toute l'année. De plus, i l est
étroitement solidaire de l'ensemble des producteurs qui utilisent l'ea~ L'ef-
ficacité de l'irrigation dépend totalement de la cohésion entre les membres du
gro~ement et les groupements eux-mêmes.
Il est donc; obligatoire que les paysans "irrigants" reçoivent une formatiorl
particulière et, comme les coftts d'aménagements sont très élevés, il est impor_
tant que les actions de formation correspondantes soient prévues et mises en
oeuvre avant la mise en serv~ce des pér±mètres aménagés. Aux besoins en puysans
formés s'ajoutent les besoins en cadres moyens et supérieurs pour l'étude et
la réalisation des aménagements, la gestion des périmètres, l'encadrement des
producteurs et la vulgarisation. Il est certain que la ~autŒ-Volta connaîtra
au mains à court terme un manque de cadres pour les. cul tures irriguée·s. liais,
il est toujours possible d'avoir récours à des cadnes expatriés en cas de néces-
l
sité imperieuse. Em revanche, la formation des producteurs est une conditién
absolument nécessaire au développement des cultures irrigu:ées et il est à craindre
1
vu les expériences passtes que ce soit le véritables facteur limitant des irri-
gations à venir.
--------
(1) La Haute-Volta à l'heure de l'industrialisation
marchés tropicaux 12/1/7~

- 313 -
4°) Aspect rentabilité.
Du point de vue rentabilité, tout laisse croire que la viabilité de l'opération
d'irrigation repose sur la possibilité de l'auto-financement et du remboursement
des dettes, comme nous l'avons soulignê plus haut, au bout d'un certain nombre
d'années par jes expioitants agrianles.
etuant à la rentabilité, nous nous contenterons d'examiner le tableau. suivant •
qui nous permettra de tirer les conclusions qui s'iimpesent.
RENTABIL1TZ, corœ AR AT IVE DES DIFFERBNTES CULTURES.
• Dépenses par ha en Dollars
:
Recret tes par ha en Dollars

Produits

• Œ'oût variable

:abût fi.
!"otal '.
Recettes • Recettes nettes
: -xe
.Capi tal :T'I"a~a.âl~
·
'l'
'.


.-----.--:

- " -
·
'.- --


·

- Riz
• 17,5 • II4,IO
93
225

533
'.
308
·
- croton
• 11 ,5 • 67,82
112
197

360

162
- l,'0fIlates
• 11 ,5 1 143,05 • a-ee
368
:
2 349
• l 980
- Oignons
• 11 ,5 • 109 ,62 • 161 • 278
l 950
:
l 661
,
-Aubergines
11 ,5
153,85 • 138
310
750
1
439
- Manioc
: 17,5
116,75 • 75
227,
927
:
699
- Ma!s
• 17,5 : 79,21 · 90 • 187 •
187
·
• 76,92
39, :
116
120
·
4
·
------------:--~:----:---I-----:----I-
Source. etudes faites par la ,~ociété ~ationale IT'Aménagement des Vallées
des
Volta (S.O.N.A.M. V.O.) • 1972 ..
Nous constatons~ue toutes les cultures irriguées dég~t des bénéfices subs-
tanciels. Et face à ces données assez encourageantes, il faut toutefois recon-
naître que le succès de l'irrigation ne constituera pas la soluttion' à tous les
p~blèmes. A moins d'être considéré comme partie d'un vaste ensemble de mesures
telles que l'aménagement des bas-fonds rizicultivalbes dans les zones peuplées,
ce qui ne semble pas être le cas. D'autre part, la non intég~tion de la cultu~e
irriguées, les transplantation~brutalesde populations, la réalité quoi que très
limitée d'occupation incontrôlée de certaines zones et l'accaparemment de grandes
surfaces par les quelques pri vil:égiés, sans oublier aussi les obstacles struc-
turaux et naturels, autant de faits qui marquent les limites du projet et des
résultats que l'on peut escompter.

- 314 -
CONCLUS.,ION
Nous esperons, qu'au cours de cette partie, avoir pu appollter des pll"écisions
sur differents poins s
- le rôle crucial que dom avoir, dans le pr0cessus de développement,. une pla-
nification dont les modalités devraient s'accorder aux conditions particuliè~es qui
existent dans le pays. Ainsi, nous avons montré la nécessité de c~erche~ à. é~ablir
un rapport effectif de l'homme à la terre, en apportant à l'agriaulte~ le désir et
les :taisons de se consavrer conscriemment et sans reserve à sa tAche. Le peJ'i'San doiil,
être éduqué dans ce sens car "pas de développement réel, sans culture des masses en-
trainée dans la grande mutation". L t:obje~tif de l' éducaticm est de former un h0fIlme
nouveau libéré de tous les complexes et réflexes d'aliénés, un homme dégagé de tout
préjugé de caste, d'ethnie, de régionalisme, de tribu et de sexe, un homme physique-
ment et moralement équilibré et jouissant de b~nne santé, connaissant l'hygiène.
Il ressort qu'u~ des contradictions fondamentales du régime colonial,. intè~.­
lement transmise à la période post-eononiale, se traduit par la destruction de l'an-
cien ordre social sans qu 'ul:h nouveau le remplace pour autant•. Autrefo'is le tra"l'a:il
en commun et les solidarités de groupe garantissant à chacun sécurité et. assistanee
même en cas de malheur individuel ou fam~lial, aujourd'hui CBS solidarités s'effondre~
avec la dislocation progressive des groupements traditionnels. Le p~sans se trouve
abandonné à lui-même. Comble de malheur, ses produits agricoles s'écoulent sur u~
marché dont il ignore complètement les mécanismes, dont il cons~ate les rigueurs.
Le pouvoir polit i;que aussi est entrain de oesser de s'exercer à part ir de l "op:hnioa
des gens du groupe, aux intérêts extrèmement peu différenciés.
B,ref, ne pouvant plus communier avec les valeurs traditionnelles donll il réa-
lise les insuffisances et l'effondrement, ne pouvant non plus communier aYec celles
d'un monde moderne qui lui apparalt dur et dont la publiaité lui .ante cependant les
avantagea et les richesses. Le monde du paysan est un monde au seuil d'un moDXie elDi
pleine crise, qui souffre du supplice de tantale.
C'est dans ce contexte que nous y voyons la néoessité de conduire des ~éf(/)iI'mes
prCi>fondes qui tirerons leur source de l' aspiirattion populaire, - crédits et facilité,s
offerts aux producteurs, une réorganisation des marchés, fournitures d'e~ais, de
moyens d'irrigation, de semences de machines et outillage agricole divers - de faç(j)D'
que les masses paysannes puissent en bénéficier réellement et que ces mesures ne
soient pas, comme cela se produit actuellement,. une des disparités croissantes entre
la condition des couches déshéritées et celle de la minorité privilégiée:...

-"314 -
De ce qui précède nous convaint davantage que la situation actuelle
en Afrique au Sud du Sahara est indétachable de son paséé colonial notamment
des multinationales qui occupent une place essentielle dans la période post-
coloniale. Nous nous devons de rappeler que les peuples africains demeurent
esclaves de tout ce qui se décide pour le présent et l'avenir de leur sort
par ceux qui, hier étaient directement leurs maitres. l~tt~ 8it~dQlqui ..'....
plique pa:u .1~histoire,.et que nous apprécion'S comme étant: 1
l'évolution des
zones exposées à l'influence occidentale, d'un autre c6té, peut se comparer
à>une plante qui se trouve subitement entourée par le réseau dense des racines
irrésistibles du banian. L'évolution de la plante n'a"paB'">été arrêtée. Mais
sa direction une fois déterminée, elle doit se faufiler entre les branohes
inflexibles et adapter sa forme et son trajet aux ouvertures laissées par le
géant envahissant. Elle est forcée de s'âppuyer sur les racines envahissantes
et ce faisant, elle est privée de la possibilité d'aoquérir l'expérience né-
cessaire pour se dresser par elle-même. Graduellement, la contorsion devient
sa forme normale et le prix de la continuation de son existence.
Cette
image rend un peu co~pte de la ré~lité de l'Afrique et de son devenir.
Pour nous oette réalité afrioaine nous enseigne que s'il y a une région
de notre globe dont la situation é~onomique, politique et sooiale actuelle
est plus marquée par les conséquences dues à la naissance et au développement
du système capitaliste c'est bien le continent africain. S'il y a dans le
monde aujourd'hui une région qui subit le plus les troubles inhérents
au pro-
cesBUS d'intégration économique de plus en plus poussé, c~est bien] aussi l'A-
frique. Cette intégration de tous les p~s ouest-africains, singulièrement
dans les domaines économiques et politiques des puissances colonialesJ leur
impose une orientation qui se détermine exclusivememt pour la protectiony le
renforcement et l'acroissement des entreprises multinationales.
Dans un tel contexte, l'économie ouest-africaine est entrainlde passer
dlune économie de"subsistance" à une économie de survie. Cette réalité obéit
,",
'"
..
à un double jeu de causes à effets dans lequel l'économie n'intervient pas
seule.

_ 3I5 ...
En effet, nous avons les causes externes qui entrent dans le oadre d'un
véritable colonialisme de type nouveau: détérioration des termes de l'échange
puis échange inégal - f,ixa~on souvent unilatérale des prix des matières ;~:~es
par les instanoes internationales (exoeption faite des décisions de l'O.P.E.P.)
- grave encore ce sont des pressions exercées par l'aide liée - survivance
des pactes coloniaux qui ont pour oonséquenoe la prat ique courante des BUr-
prix, le rapatriement des bénéfices vers la métropole dominante grloe à des
codes d ',investissements favorables - emprise de plus en plus sensible des
sociétés multinationales••• Sans nier, bien sür la réalité des déterminan~s
géographiques (climat, sol et sous-sol, isolement ••• ) et de le~ aléas (inon-
dation et sécheresse), il faut bien admettre ~ue la réalité de la misè~ noire
du continent ~fricainlreste le produit d'un monde mal fait (division in~erna­
tionale du travail), oonstruit dans l'exploitation des faibles par les plus
forts. Enfin les causes internes quant au fond résiduels demeurent néanmotns
intimement liés aux causes externes. Pour ce qui est des causes internes, il
s'agit des survivances de structures socio-éoonomiques arriérées dont les
traits dominants sont les mentalités à pjédominance féodales ou "ancha!ques",
la faiblesse des foroes productives d'une part et d'autre part ce qu'il oon-
vient d'appeler les secrétions du oolonialisme c'est à· dire l'apparition de
classes dominantes looales qui s'acoaparent des "bénéfices" de la décolonisa-
tion sur le dos des masses laborieuses. C'est ainsi que les classes dominantes
ont confisqué la plus-value en complice non déguisé aveo le capitalisme inter-
national par des spéoulations sur les prix des vivres de première nécessité
et autres spéculations foncières.
D'autres facteurs cette fois-oi théoriques ont leur part de responsab~li­
té dans l'éohec des tentatives de développement paroe que ceux-ci se trouvent
être le fondement et le soubassement~e toute entreprise économique~ C'est
ainsi que l'insuffisance notoire des théories "néo-réwlutionistes" et teoh-
nooratiques" de la croissance (rappelons nous l'ouvrage de Rostov consacré
aux étapes du développement) résulte-t-elle:
- De ce qu'elles privilégient indftment le quantitatif d'où l'oubli des mé-
oanismes de domination et l'exploitation de la qualité de la vie.~.
- Du fait qu'elles tiennent davantage compte des forces productives (in-
dispensables sans aucun doute) que des rapports de production (injustice

- 316 -
sociale, aliénation, accaparement par le non-travailleur des formes produ~
tives et du produit brut du travail et détournement impunis de deniers publics,
corruption ••>. )
Enfin de ce qu'elles ignorent qu'une politique de développement pour
réussir doit être autonome (rejet du dicta du capital étranger, rupture a~c
l'économie coloniale et Bes implioations pqlitiques, oonstruire une économie
intravertie à régulation interne, qu'il s'agisse des déoisions,de la produc-
tion' et de la répartition des biens tout cela reposant sur l'oeuvre des peu-
ples africains).
A_l'optique nécessairement réduotrioe paroe que homogénéisante de l'éo:~­
nomie (du développementalisme comme on dit partois) s'oppose le "manifeste
f,l
:,
différentialiste" propre au dév.eloppement entendu dans le sens le plus pié-
cis. (1)
"Lé développement restitué dans sa plénitude, implique un enriohissement,
une complexification non réduite des rapports sociaux. Il est qualitatif. Il
Buppose la création de formes de la vie sociale, de valeurs d'idées, de façons
de vivre, de styles. En un mot, de différences. Sans doute faut-il produire
davantage pour nourrir des centaines de millions d'affamés, tenus à l'écart
de l'ènrichissement qualifié. Mais l'homme ne vit p~s seul de pain! Qui dit
révolution dit aussi oréation. Seul le silence de la révolution mondiale a
permis de substituer des structures désséchées, des formes glagées, des fono-
tions obscènes à la capacité créatrice". On mesure, à oet égard, tout oe qui
sépare la prévision soientifique et la prospective qui admet, selon l'expres-
sion de G. Berger, que l'évolution est créatrice de situations nouvelles.
Mieux encore, le comble de la politique de croissance en Afrique est qu'elle
abouti.t à sa propre négations gaspillage des riohesses nationales par une
minorité nationale en collaboration avec les forces extérieures, exaoerbation
des rancoeurs, multiplication des besoins artifioiels, oivilisation où l'ac-
cumulation des biens finit par l'emporter sur l'accumulation qualitative des
hommes, accélération des inégalités entre les hommes, contradiotions multi~
pIes•••
Devant ce divoroe conSidérable entre la théorie ~t la réalité des résul-
(1) H. Lefèvre: "L.~__.manifeste différentialiste", Gallimard 1911 - cité dans
"Prospeotive du développement en Afrique Noire", p. 18 -
LOuis Vincent Thomas.

- 317 -
tats de nombreux"spéoialistes" de développement de l'Afrique ne manquent pas
de faire retentir le ori d'alarme ou de mettre en aoousation les soienoes
éoonomiques auxquelles on reproche l'incapaoit~ de comprendre les problèmes,
les difficultés, la tendance au développement du sous-développement dans les
~tats subtropicaux. (1) Pour nous il s~agit de renverser l'optique habituelle
qui met au centre la production et fait de l'homme un moyen de produotion
- et tout en reconnaissant- au pEocessus de la croissance le rÔle qui est le
sien (pousuivre l'~radication de la misère et de la p8UVTet~, assurer partout
et pour tous la satisfastion des besoins vitaux) de s'attacher prinoipalement
à mettre en lumière l'impact du d~veloppement sur la condition humaine, cela
biem entendu possible dans un p~s v~ritablement indépendant.
M4is nous devinons aisément en quoi et pourquoi une politique de la non-
croissance prÔnée tout réoemment par oertains irait , dans le statu-quo aatuel
évidemment à l'encontre des intérêts des paya sous-d~veloppés. Cela signifie-
rait pour les peu,les africains une perp~tuation de la pauvreté et sans auoune
perspective d'avenir même du point de vue utopique. Cette non-eroissanoe se-
rait tout anssi néfaste que la politique de croissance (couvàrture dé pillage
et d'exploitation) dont pourtant les sous-développés font les frais, et y
verraient à juste titre une nouvelle forme masquée de l'impérialisme.
De cette politique de croissance appliquée à travers les deux modèles
de développement (libéral et"socialiste") en Afrique, que pouvons-nous dire
de leur bilan? 1e bilan de oes modèles est relativement positif par rapport
à celui de l'ère ooloniale. Certes, l'objectif prévu (5% de taux de croissance
annuel du P. 1.B.) n'a, pas été atteint. De 1960 à 1967, oe taux ne dépassera
pas 4%. 1a croissance démographique s'élevant à 2,4% l'an, celle du P.I.B.
par tête d'habitant serait alors pour la même période, de l'ordre de 1,6%.
N~anmoins oe résultat est quantitativement supérieur que celui des époques
antérieures. Ce qui ne signifie nullement qu'il y a eu développement. Toujours
selon les données de la C.E.A. (commission économique des Nations Unies pour
l'Afrique) indique, de 1860 à 1960, la croissance per capita en Afrique aurait
été de l'ordre de 0,2% l'an pour 23 pays; de 1,3% pour I4"·Pays et pour les
cinq pqs qui ont le P.l.B.~pà.:t tête le plus élevé aujourd'hui (sup~rieur à
250 ~) de 1,9% seulement. A la veille de l'indépendanoe, soit de 1950 à 1960,
(1) S. De Brunoff, M. Beaud, Cl. Servolena "1a crise de la science économique";
1e Monde, 22 Mai 1973

- 318 -
l'Afrique n'aurait eu une croissance de P.I.B. par t8te que de 0,6%.
La croissance observée depuis l'indapendance résulte surtout d'une aug-
mentation parallèle des exportations. Le taux de oroissance annuel de celles-ci
a plus que doublé par rapport à oelui des années 50. Les produits de base
(agricoles et miniers) continuent à représenter 80% du total des exportations
du continent (cf. Vol. VII nO l ,
2 19691 bulletin êwononmique pour l'Afrique-
Nations-Unies).
Enfin, on a assisté à partir des années 60, à un début d'industrialisation\\
s~stématique amorcée par les industries légères de substitution des importations
( seule l'~e s'est lancée dans l'industrie lourèe). Au delà des inégali-
tés de 'développement entre les différents PB3's, que ce bilan global et napide
peut masquer au'·niveau des Etats, pris séparément néanmoins, on- ne pourra
dire à aucun moment que l'Afrique a rattrapé le "retard" qui la séparait des
p~s développés.
En réalité, si cet éeart constitue le revers des deux modèles africains
adopiés, c'est parce que ceux-ci sont des modèles de croissanoe plutôt que
de développement et qu'ils n'ont fait que perpétuer des structures antérieures.
Certes, ils s'inspirent mécaniquement de modèles mis en pratique par des p~s
qui sont actuellement développés. Mais il faut reconnattre qu'une part de res-
ponsabilité incombe à la théorie panoe qu'elle se voulait standard donc por-
teuse d'illusions. C.ette part de responsa'tiilité imputable à la théorie ne
saurait être les seuls éléments justificatifs de l'écheo. En fait, c'est plu-
tôt la dépendance vis à vis de l'éxtérieur qui est à la fois l'origine et la
résultante de l'écheo des deux fameux
modèles qui n'ont pas entrainé un dé-
veloppement autonome et soutenu, o'est à dire une transformation qualitative
des struetUDes:écDDsmiques etosociales. Elle explique leur logique mécanique
et leur soumission au secteur extérieur, non seulement sur le plan:oommercial,
mais également sur le plan financier et surtout politique.
En résumé, ees modèles ne peuvent pas être comparés à oeux des p~s dé-
veloppés, et la croissance qu'ils entrainent est transmise à partir de ces
derniers. en comprend dès lors pourquoi le deuxième rapport du Club de Rome
a eu parfaitement raison, de dénommer ce type de oroissanoe oomme "croissance
indifférenciée", et de démontrer que son processus devrait être l'alternatiw
indiquée puisque le monde n'est pas une entité uniforme et qu'enfin "la

- 319 -
"cnoissance organique" offre de meilleures p0'Ssibilités puisqu'elle tient compte des
spécificités structurelles propres aux diverses régions.
Un 'lait marquant est de reconna1tre que les modèles de développement élaborés pour
le tiers-monde deviennen~ des métaphores et leur application une tentative de faire.
1
entrer les faits dans des moules établis par c0mparaison. Cet~e vision de l"av,enu
des p~s africains à travers le modèle œccidental est de nature à aggraver très dan-
gereusement la dégradation déjà constante des conditions de vie des masses africai-
nes et à limiter les facteurs internes qui permettront de rélever le formidable défi
auquel les pays africains se trouvent confrontés s réduire les inégalités sociales
nourrir leur population et assurer un développement harmonieux et indépendaftt. ~'ail­
leurs l'Editorial des "Marchés tropicaux du 12 Janvier 1979 Il reconnaissait la situa-
tion suivante s "indépendants les nouveaux itats se sont trQuvés confrontés essentiel-
lement à deux problèmes ; celui de leurs frontières, ar~i~airement tra«ées par les
puissances coloniales; celui du choix d'un modèle de développement politique et êco-
n(i)mique ( ••• ) Quant aux m(i)dèles de développement propo,séslpar les Occidentaux e"t qui
se ramènent en fait à deux, le l ibéraliisme ou l "autQritarisme, ils 0nt fiJlllB,lemeDit
tous demr dé9U l'Afriqu~ Le libéralisme, si les élites africaines peuveil', ellt appré-
cier les avantages, est trop souvent perç~ par les masses Comme un système dQnt la
complexité leur est: inaccessible et qui, dans la réalité, favorise exclusivemen.ll les
riches et les puissants."
Il faut Qu'on se mette à l'é~dence que l'histoire non seulement ne se répète pas
de la même façon,. mais aussi on ne peut ,jamais faire le bonheur d'un peuple à sa pla-
ce.. Par conséquent continuer à laisser croire que les sous-dévelQPpés en se dévelo-
ppant à l'image de l''Occident, connaitront la révolution industll'ielle dans le décol-
lage économique•. C'ette orientation fausse n'est ni pms ni moins qu'une man;ipu][ation
à la limite psychologique de nature à provoquer des bouleversements t&t, ~ tard, sui-
te aux esp0irs déçus. D'autant pLus qu'on établit avec difficultés les causes exacr-
tes qui: 0nt déclenché le succès industriel. Par contre, lorsque les "spéc:ïJalistes"
du développement abordant l'a~lyse d'un problème particulier relatif au sous-dévelo-
ppement, ils se contentent de constater et de recenser les effets de celui-ci et aussi
se livrent-ils à une description fort féta±llée de ces caractéristiques constitutive~
D'ailleurs, c'est la mJme attitude qu'ils adoptent quand il s'agit de traiter~U
phRnomène du sous-développement en tant que tel. Inconstestablement, une telle démar-
che ne manque pas d'intérêt... Cependant, elle renferme un piège dangereux et des li-
mites potentielles si l'on se propose de rechercher une thérapiel .i, efficace et dé-
finitive au mal que l'on veut détruire... Pour notre, part, il nous a semblé que la meil-
leure démurche était de s'orienter prioritairement dans la mise en évidence des
causes profondes aussi bien internes qu'externes.En dernière analyse, il faut tou-
jours envisager la question sous son double angle politique et socio-économique
et non exclusivement économique.

- 320-
C"est dans une telle optique que nous avons tenté ile cerner les problèmes de
l'agriculture en IDaute-Volta. En clair nous avons montré que le développemenll de
l ' agriculture est entravé autant par des facteurs internes qu "externes ,
- L'économie villageoise principalement agricole est repliée sur elle-même et n'e.-
tretient avec les autres secteurs que des relations insu·ffisantes et unilat,éraleso
- L'économie urbaine présente les caractères d'une économie moderne~ mais elle es~
denatUDée par sa dépendance vis à vis de l'extérieur.
-Le secteur des grandes firmes exportatrices f~rment
~e enclave économique q~i
ont plus de rélations avec les économies développées qu'avec l~économ~e vill~oise.
Ce qui signifie que dans une économie sous-développée, l'évolution de l'agrioul-
ture n'est pas seulement entravée par le manque des terres arables, pau l'absence
d'infras~rucutures qui empêchent les communications rapides entre les différentes
régions, et les maladies endémiques qui limite~t la productivité des p~sans~ mais
également le mode de vie rurale inadaptée aux éxigences des techniiqlites nouvelles et
de la croissance économique, du fait de sa non-intégration à ce que les économistes
appellent l''l~économie progessive d'échange", mais quand bien même i l pourra:ii1l; s'y;
intégrer, le développement de l'agriculture serait bloqué par les nombreuses domina-
tions sociales qui la paralysent.
Cette domination est exercée paa trois series de groupes 1 celui des ~sti~s
des forces féodales (chefferie traditionnelle), celui des commerçants usuraires et
celui des firmes étrangères. Cette distinction, peut parattr~ d'ailleUMs abusive car
enfin de comPle ils opèrent en commun.
La domination des forces féodales prendra de l"ampleur avec le pro'et des AeV.V.
qui participera au développement du capitalisme dans les campagnes , quant à la do-
mination des gros compradores et des firmes multinationales, elle a fait son appari-
tion avec1~développement de l'ouverture de l'agrioulture au marché monétaire. I]s
sont les seuls à bénéficier de la hausse des prix, même lorsqu'il y a diminu~ion des
cours mondiaux, ils font supporter cette baisse à l'agriculteur. Les pratiques elll!-'."'.i'
ployées à cette fin sont fort diverses, elles peuvent aller jusqu'à l'empêchement
des p~sans de connaître les prix auxquels l'uiilisateur final achète leurs produits.
'llelle est et sera la condition imposée au paysan
si auaune transformati<i>n révolution-
naire ne se mette à l'ordre du jouro

- 321 '
TABLE.
DES
A~CU, GEOORAPHJ.IQUEo.o ., •••••• 0' o •••••••••••••••••••••••••••••••••• 0 •••••••
l
10 ') -
L' hydrol ique-
., •••••••••"••••••••••••••••••••••••• o •••••••••••
l
2 0') -
Le climat. 0
'
"
.
2
mIDRODUCTION!•••• G
0
• • • • • • • • • 0
" • • • • • • •' • •'
.
6
GHlA..PITRE PRELIMD'AIRE 1 ESQUISSE D lUNE APPR0CHiE DES STRUCTURES SOCIOe
EaO~OMIQUES DE
LA IFAT.1'l'E..l10LTA.
.
14
S:œTION 1 1 APERCU DU SOU s-DEVELOPPEMBNT ET SES> FONDEMENTS STRUCTU~.
am,S EN HAUTE-VOLTA.
.
15
Esquisse de la controverse théorique sur le sous-
àêveloppement••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• ~
Il
PARAGRAPHE 2 1 Sous-dévelo,ppement et sa réalité volta!que
.
19
_io~ ... <bes sociétés communautadi.res précapitalis1les en FE:aute-VoJ!ila••
19:
2 O)
Pénétration et occupation c(),loniales••••••••••••••••••••••••
21
a )
Pértode de la pénétration coloniale•••••••••••••••••••••••••
2I
b)
Sous occupation coloniale 1 1895#1960
..
22
c)
Pha.se transitoire à la décolonisation•••••••••••••••••••••••
24
3°)
Période post-col!,niale de 1960/1978 ••••••••••••••••• ~ •••••••
21
Paragraphe l
1
Sous-développement. et réalité vol tatque••••••••••••••
29
1°)
Qu'est-ue-que le sous-développement•••••••••••••••••••••••••
29
2°)
Dépendance et ses c.onséquences. ~ ••••••••••••••••••••••••••••
}I
SECTION 2 1 DiPACT DEMOGRAPH.:IQUE DANS LE DEVELOPPEMEIllœ~ •••••••••••,••••
42
Paragraphe l
: C'ontroverse sur Ille B'anquet de la N!'atu~"
.
42
Paragraphe 2 1 Situation démographique en Haute-Volta•••••••••••••••
45
Paragraphe 3 1 Population et productio~••••••••••••••••••••••••••••
49;
CONCLUSIOll
55
P REM l E R l6
P A R IJ) rE
LE DEVELOPPEMENT RURAL EN' CRISE g
H:AUlrE-YOLTA...
mRODUCTIONl• ., ••'
-•••••••••••••••
51
CI
.
GRAP•. l
1A PENETRATION DU CAPITALISME DANS LES SrmUCTURES OOCIO-
ECONOMIQUES, VILLAGEOISES ET SES CONSEQUE&CES
.
6{l
INTRODUCT rOM•••••••'
60
CI
0
.
Paragraphe l 1 Les survivances des structures socio-économiques vil~
lageoises•••• o ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
61
Paragraph~ 2 1 L'économie villageoise traditionnelle...............
65
AI -Le conservatisme socio-économiques..........................
65
BI -L'insularité économique de la communauté.....................
68
cl - Un apparent immobil isme de l'économie ril1.ageobe..... • •••••
72
Paragraphe 2 1 ]ltéoonomie villageoise da transi tian..... ••••• ••••••
Tt&
AI
La dégénérescence de l' écon9mie villageoise traditionnelle..
77:'
BI - Quelques éléments de la mutation sacio-économique à la
cam·pagne•••••••••• ,. ••••••••••••'. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • ••
85
CONCLUSION
88
CHAf' 2: 1 IDB$ DIF1i'lCtmTElS ORG.AJnQUES: DE, IHAGBIC'UL'l'URllI: TJlOlPIQ:ALB.........
89
l'NIrR onuc TION!. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
89

322 -
SECTION l
: L'AGRICUffiURE E'l' LES INSTITUTIONS ORGANISEES DE CREDIT..
92
Paragraphe l
1 Portée du crédit
institutionnel 1 Banque de déve-
loppemente •••••••••••••••••••••'••••••••••••••••••••
92
AI - ],es sources institutionnelles de crédit agricole•••••••••••
94
la) -BANQUE OOationale de Développement ••••••••••••••••••••••••
,"'95
a) - Procédure d'octroi de crédit•••••••••••••••••••••••••••••
95
hl) - Choix des candidats de la B'.N.D••••••••••••.••.••••••••••••
105
B/ - Les conditions de crédits à l'agriculture•••••••••••••••••••
1071
Paragraphe 2 1
Les sociétés coopératives de crédit mutuelles••••••
109
a) - crésentation du pro~lèm~•••••••••••••••••••••••••••••••••
109
b) -
.roupements et aooperat1ves en maute-Volta. ••••••••••••••
110
Paragraphe 3 1
Les organismes non gouvernementaux. ••••••••••••••••
III
SEaTIOR 2
1 LE PAYS.AN SOLIJ"AIRE FACE AUX ?OURCES DE CREDIT
.
114
Puragraphe l 1 Portée des sources de financement mm institution_
nelles••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
115
Paragraphe 2 1 Organisation des prêteurs particuLiers••••••••••••••
118
a) - Voies de transmissiono •• o ••••••••••••••••••••••••••••••••
118
b) -Les conditions de l'octroi de crédits non institutionnels
II9
c) - Accessibilité des sources non institutionnelles de crédit
120
Paragrap~e 3 1 C'hangement de la Demande et de l'emploi de crédits••
121
SECTION' 1 . LE~ LIMITES DU ROLE DU CREDIT DANS LE DEVELOPPEMENT~•••••
124
Paragraphe I l Les limites de l'application des techniques nouvelles
124
Paragraphe 2 1 ne crédit 1 à lui seul ne su1rf:iil: pas•••••••••••••••••
128
AI - Les obs,acles économiques et sociaux••••••••••••••••••••••••• 128
BI - Le paysan face au monde capitaliste• .,
.
131
CONCLUS;ION
133
CHAP 3 1
tmIœ~,~ D'UM DEVELOPPEl~ AGRIeoLE•••••••••• ., •••••••••••
135
IN'rRODUCTION
'••
135
SECTION l
1 DIAGNOSTIC
SANS COMPLAISANCE DE LA SITUATION AGRICOLE•••••
I3§
Paragraphe IlLe ~locage du système agraire••••••••••••••••••••••••
136
AI - La ~urch~: de l'espace••,
:". :.•••••••••••••••••••••••
136
BI - Le deséqu1lJ:bre structurel des terr1towes•••••••••••••••••••• 140
cl' - La question du déficit alimentaiJ!'e
.
143
DI - Responsabilité du paysan dans le déficit••••••••••••••••••• .,•• 149
Paragraphe 2 1 Le système socio-éc0nomique communautaire en transi-
tion difficile
.
151
SEX;TION 2
1 CONCEPTION THEORIQUE DE LA POLITIQUE AGRICOLE AFRICAIl!l'!E•••
151
Paragraphe l 1 La stratégie de la politique agricole••••••••••••••••
157
Paragraphe 2 1 Les stratégies de développement de la pJ!'Qdueilion
agricole•••••••• "
159
Do • • • • • • •' •
• • • • • • • • • • • • • • • • • • • •
Paragraphe 3 1 ~hoiJ[ d'une politique d'encadrement••••••••••••••••••
162
Paragraphe 4 1 Les incertitudes de la politique des pri
ct ct
165
SECTION 3
1
SITUATION R~LE DU SECTEUR ffiJRAL •••••••••••••••••••••••••
171
Paragraphe l
1 Les méthodes culturales et
les perspectives••••••••• o
17 l
AI - Méthodes culturales•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 172
BI - Les instruments de production agricole••••••••••••••••••••••• ns
cl - Les perspectives de la culture attelée•••••••••••••••••••••• o 178
a) -Manque de maitrise des techniques de cultures attelées••••••
179
b) - Obstacles au moment de l'acquisition du matériel••••••••••••
181
c) - Les délais de livraison•••••••••••••••••••••••••••••••••••••
182

- 323 -
Paragraphe 2 1 Structures foncières en ~aute-'Œlta•••••••••••••••••••••
183
AI - Acquisition des terreso ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
BI -
183
Le droit coutumier de la terre•••••••••••••••••••••••••••••••••••
184
ro) -L'aspect juridique•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• ~
185
2 0 )
Problèmes socio-jéligieux. •••••••••••••••••••••••••••••••••••••
187
)0) _ RaIe politique•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
187i
4°) - L'aspect économique••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
I89
Paragraphe 3 : Les taux d'occupatio~ du sol•••••••••••••••••••••••••••••
189
CONCLUSION
193
DEUXIEME
P .1. li ']1' l E
POOIt LA MllTRISZ' DE DEVELOPPErœNT AGRICOLE EN! H!A.UTE-llOLTA
!NfJ.1RODUCT ION~ ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
194
CRAF l : L.A STRATEGIE ACTUELLE DU DEVELOPPEMENT AGRIGOLE EN' HAUTE-VOLTA. •••
191
lN[1R ODUeT ION••••"••••••••••••••'•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
I97r
SEC'rrON l : DEVELOPPEMENT AGRICOLE ET REALISATION NATIONALES ET REGIONALES
198
Paragraphe 1 • Organismes Régionaux de Développement (D.R.D.) ••••••••••
198
A/-s.tatuts et esprit de l'O.R.D•••••••••••••••••••••••••.•••••••••••
199
BI - Moyen d'intervention des O•.R.D••••••••••••••••••••••••••••••••••
200
a) - Le territoire d'intervention•••••••••••••••••••••••• ~ ••••••••••
200
b) _ S~ructures d'animation: les agents d'encadrement••••••••••••••
202
c) - Les mouens financiers ••••••••••••••••••••••.••••••••••••••••••••
204
C/- LIO.R.D de Fada ~·œourma•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
205
a)
Les rapports de coopération avec l'étranger•••••••••••••••••••
205
b) - Mode d'intervention et types d'actions de l'ORD auprès des
pa::fsans••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• o ••••
Paragraphe 2 : L'UnioIù~Voltaïque des Coopératives Agricoles et maraî~
chères (U.V.O.C.A.M.) •••••••••••••••••••••••••••••••••••
201
AI
Les origines de l'U.V.O.C.A.M••••• o •••••••••••••••••••••.••••••••
208
BI
Le fonctionnement et la politique de l'U.V.O.C.A.M••••••••••••••
209
cl
L'U.V.O.C.A.M: une coopérative certes, mais est-ce l'espui:iti de
demain:. •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
212
Paragraphe 3 : L ':Aménagement des Vallées des Volta (A. V. V)
.
215
A/- Iles projets du ffTojet
.
216,
Bi - ~omposantes du Projet••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
2171
cl - La repercussion socio-économDque potenttelle des A.V.V•••••••••• G
221
Dj
Un projet pour la Hiaute-Volta ou Ull:. bond en avant dans Itéconc-
mie mondiale o ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
222
El - ~elques aspects critiquables du projet••••••••••••••••••••••••••
224
a) _ Le problème de réinstallation et de réclassement des populations
225
b) - Le problème de déplacement et de sélection des sites
..
225
c) -
Les problèmes d'urbanisme et de conception des logements•••••••
227:
CQl;CLUSION
SECTION 2 : L' AUTOPROHOTION COLLECTIVE PAYS,ANNE c ALTERNATIVE OU DAILLUSrON.228
INTRODUCTION: ESQUISSE THEORIQUE•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
228
AI - QUELQUES ORIENTATIONS PRINCIPALES•••••••••••• K. ••••••••••••••••••
228
BI - LES ORIENTATIONS DE DEVELOP~ COMr,'IUNAU'fAIRE' VOLTAIQUE •••••••
232
Paragraphe l : POui!'· une part icipat ion paysanne••••••••••••••••••••••••••
, 2,5
AI _. Partir des besoins•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
BI _
235
L'Animateur: le personnage central••••••••••••••••••••••••••••••
231

- 324 -
Paragraphe 2 : Vérita~le tiJ1nlion paysannes s une nécessité pour agix•••••
239
AI - Les organisations communa"àDtaiJres : leu~s Qbject'tif's, leu!r
efficacité" leuJr échec potentieL •••••••••••••••••••••••••••••••
240
a) - Les gJroupements d'hommes•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
240
"b>l) - lies groupement.s de femmes••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
241
c) - Les caisses populaires•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
242
d) - Les coopératives de stockage de céréales•••••••••••••••••••••••
BI -
245
Une réelle f~dépendance••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
246
a) _ ITn espo±Jr' r des cadres paYSan.s•••••••••••••••••••••••••••••••••
246,
b) - L1autopromotion f:iin:ancrière S Ull-e "Utopie !TtO't:rice"••••••••••••••
241
el - Bur la voie d'une prise de con,scienae de classe. •••••••••••••••••
250
a)- ~abli:r des relations avec les autorités
..
250
b)-AcquisitiŒn d'une concience d'exploités••••••••••••••••••••••••••
250
C6NCLUSION,
CliAP 2, r LES PERSPECTIVES J LA MODERNISATION! DE L4'AGRlCULTURE.
. .
254
SECTION: 1 s APPROCHE THiEORIQUE DE LA MODER5ISATION AGRICOLE••••••••••••••••
255
A!
Place de l'!agriculture dans le développement••••••••••••••••••••••
255
BI - Comment- faire ? •••••••• e ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• ·efi8
SECrrrON 2
s DES TRANSFORMATION' BOURGEOISES RADICALES DES, STRUCTURES•••••••
263
Paragraphe IsLa final!ité de la planificat iom:. •••••••••••••••••••••••••
264
a) - Au niveau exteIJ'lle••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
265
lX) - Au· ni·veau 'Ïint erne••••••.••••••.•.••..•...••••••••••••••••••••••••
266
Paragraphe 2 r Société ~ouvelle r stratégie de Jl'Upture et de cban~me~t.
267{
AI
La transformation des institutions•••••••••••••••••••••••••••••••
268
BI
lies changements de mentalités••••••••••••••••••••••••••••••••••••
268
cl
Les transformat ions des structure,s•••••••••••••••••••••••••••••••
269
SECTION 2
r
LE ROLE DE L'EDUCATION••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
27:0
Paragraphe 1 r Cont enu de la format ion tradit ionnell'e••••••••••••••••••
270
Paragraphe 2
LI enseignement dans une Haute-Volta décolonisée. ••••••••
273
Paragraphe 3 r lle système éducatif et la P~oduction.•••••••••••••••••••
276,
Sous-Paragraphe l
r Réforme ou réplatrage ? •••••••••••••....•••••••••
278
S:ous-Paragraphe 2' r L'école nouvelle ••••••••••••••••••••••••••••••••••
282
AI
Un: syst.ème d 'éd!1cat ion :IM1:rale :intég:rée•••••••••••••••••••••••
283
B!
un systèmes d' éducati.6~ eoordonnée, g1Gl1l1a1!•. a,:!t Pet~~-" ••••
283'
SEC~ION 3 J LA REVOLUTION: BOURGEOISE DANS LES CAMPAGNES..................
285
Paragraphe l
J
Les fondements théoriques de la réforme agra~e•••••••••
285
AI
Les fondements po-l±.tiqu·es•• 00 •••••••••••••••••••••••••••••••••••
285
Bi - Les fondements économiques••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
281'
cl - Les limites potentielles de la réforme agraire••••••••••••••••••
288
Paragraphe 2 r La réforme agraire en Haute-volta r nécessité de su~vie.
292
CHAF 3 ~ URGENCE D'UNE POLITIQUE AGRICmLE DE SURVI~
INTRODUCTION r AUTO-SUFFISANCE LH'lENTAIRE OU SURBIS D'UNE POPULATION? •••• 297:
SSC'l'ION l
r LA PROBLE~ŒœIQUE DE L'AUTO-SUFFISANCE••••••••••••••••••••••••• 298
Paragraphe 1
L'auto-suffisanQe alimentaire peut-elle être absolue ? .
299
Paragraphe 2 J Llauto-suffisance alimentaire peu~-elle
être un
objectif unique 1 •••••.....••••..•••..••..•••......•• 0 ••
300
SEc'rrON 2
: LES CHOIX PRIORITAIRES r BASE D'UNE AUTO.;;.sUFFISANCE ALIMENTAIRE 304
Paragraphe l
r L ' équilibre entre culture en sec et cul tUJ1'e irriguée••••• 304
AI - Pour le développement dé l'agriculture en sec•••••••••••••••••••• 304
1 0 )
Situation••••••••••••••••••••••••.••••..•••.••••••••••••••••••• 305
2 0 j
Les o.bjectifs de base du développement des cultures en sec••••• 306,
30
Les thèmes p l "
t
. ':".J'"
t .
ou~
1n enS~1ca 10n. ••••••••••••••••••••••••••••• 307'

- 325 -
BI
Organd:.sat ion et ~quipement des un·:iités de product ion ...... ••• •••••
308
cl
Services d'amont et d'aval.,
'.•••••.••...••.••••••
308
DI
Organisation socio-professionnelle du monde rural•••••••••••••••••
308
Paraeraphe 2 1 Hbur le développement des cultures irriguées•••••••.•••••••••
309
AI - La base logistique•••••••. o ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 3:mll
B/ - Les contrain.teso
oo
.
311
ro)
Les ressources en sol et en eau. ••••••••••••••••••••••••••••••••
3I1
2°)
iéalisat i.on des ouvrages. o ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
3I1
3°)
Les ressources humaines••••••••••••• ,••••••••••••••••••••••••••••
3:Œ
4°)
AspeClt~ rentabi.J.1iité ••••••••• o ••••••••••••••••••••••••••••••••••••'
3I3
CONCLUSION••••••••••••.•••••••.•••••••••••••••••••••••••••••.•••••••••••••••
314
CON cr LUS ION
-------------
G,ENERALE. •••••••••••••••••••••••••••••
3I5

- 3::.6 -
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Ede Pekin..