UNIVERSITE DE CLERMONT - FERRAND 1
F ACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES
t 979
-
t 980
'CONTRIBUTION A UNE THORIE NORMATIVE DE LA NATURE
ET DU ROLE DE L'ETAT EN PAYS
SOUS -DEVELOPPEES
"LE CAS DES PAYS
D'AFRIQUE NOIRE DE SUCCESSION FRANCAISE"
THESE
PRESENTEE ET PUBLIQUEMENT SOUTENUE EN JUIN 1980
EN VUE DU GRADE DE
DOCTEUR III e CYCLE EN SCIENCE ECONOMIQUES
PAR
MIAKA OURETTO
JURY : Président : Monsieur P. PASCALLON , Professeur
Suffragants
:
J. C
BERTHOLON
M.
PASSEMARD

UNIVERSITE DE CLERMONT~~ERRAND
l
FACULTE DES SCIENCES ECONO~IQUES
Président de l'Université
Mr. L. JOYON
Vice-Présidents de l'Université
Mr. R. CLUZEL
Mr. M. DEYRA
1t
l1me S. GUILLAUMONT
f
Secrétaire général de l'Université
Mr. J. ORTOLI
!
Doyen de la Faculté
Mr. J.P. VEDRINE
1
t
1
Assesseurs de la Faculté
Mr
AULAGNIER
!
Mr • BERTHOLON
Secrétaire générale
Mme J. ESTORGES
Enseignants de la Faculté
Mr. AULAGNIER Jean, Professeur délégué
Mme BARA Marie-Françoise, Maître-Assistante
Mr. BERTHELON Jean-Claude, Maître-Assistant
Mr. BERGOUGNOUX ~ichel, Assistant
Mr. BLANC François, Assistant
Mme BOISSONNADE Marie, Maître-Assistante
Mme BRINGUIER Elisabeth, Assistante
Mr. BRISARD Alain, Assistant
Mme BROCHART Françoise, Assistante
Mme CADIER Christiane, Assistante
Mme DEMEOCQ Marielle, Maître-Assistante
Mr. DEMONTEIX Yves, Chargé de Conférences
Mlle DIARD Marie-Claide, Assistante
Mr. FRANCK Bernard, Professeur
Mr. FRELASTRE Georges, Professeur associé
Mr. GALLET Jean, Assistant
Mme GARNIER Jeanne-Marie, Assistante
Mr. GUILLAUMONT Patrick, Professeur
Mme GUILLAUMONT Sylviane, Professeur


Mme MAJNONI d'INTIGNANO Béatrice, Professeur
Mr. PASCALLON Pierre, Professeur
Mr. PASSEMARD Michel, Maître-Assistant
Mr. RIGAUD Louis, Chargé de Conférences
Mr. SERRE Jean-Marin, Assistant
Mlle TERRI OU Claiae, Assistante
Mr. VEDRINE Jean-Pierre, Professeur.

A ma mène,
A me.6 en6ant.6.
La Faculté n'entend donneJL aucune appILoba.üDn
ni hnplLobation aux opinion.6 émi..6e.6 dan.6 cette
Thè.6e. EUu doivent me cOn.6idéILéu· comme
plLOplLe.6 a leuJl a.u..teuJr.•

, . .
. "

sor·1r·1A IRE
PAGES
INTRODUCTION GÉNÉRALE
A - DE LA NATURE et du ROLE de L'ETAT dans les
4
PAYS
DEVELOPPES
B - L'ORIGINALITE du PROBLEME de la NATURE et du ROLE de
L'ETAT en AFRIQUE NOIRE
10
PREMIÈRE PARTIE
THÉORIE NORMATIVE DE LA NATURE
ET DU RÔLE DE L'ÉTAT EN AFRIQUE
NO 1RE : CADRE GÉNÉRAL
17
CHAPITRE l
LA NECESSITE DE PRISE EN COMPTE DES VALEURS
HISTORIQUES PE~~ENTES DE L'AFRIQUE NOIRE
20
CHAPITRE II:
LA NECESSITE DE DEPASSER LES VALEURS
46
HISTORIQUES PERMANENTES DE L'AFRIQUE
NOIRE
CONCLUSION
88
DEUXIÈME PARTIE
THÉORIE NORMATIVE DE LA NATURE ET DU
92
ROLE DE L'ÉTAT EN AFRIQUE NOIRE
ESSAI D'ILLUSTRATION,
CHAPITRE
1: LA NATURE ET LE ROLE DE L'ETAT EN
AFRIQUE NOIRE A TRAVERS LE CODE DES INVESTISSEMENTS
94
CHAPITRE I I :
LA NATURE ET LE ROLE DE L'ETAT EN
147
AFRIQUE NOIRE A TRAVERS LA PLANIFICATION
CONCLUSION
182
CONCLUSION GÉNÉRALE
184
Annexes
191
Liste des tableaux
215
Bibliographie
218
Table des Matières
227

REM E R C I E MEN T S
Nous voudrions adresser nos sincères remerciements
au Professeur Pierre PASCALLON pour L'aimabLe atten-
tion qu'iL a bien vouLu porter à notre travaiL et pour
toute
La sympathie qu'iL a manifestée à notre endroit
quant à ce qui concerne
Les travaux de mise en forme
de notre thèse.
Nof.J Jte.me.Jtc.ie.me.n.t6 vont dal'L6 le. même. f.Je.1'L6 au
poye.n Je.an-Pie.JtJte. VEVRINE.
Nous ne saurions aussi ne pas témoigner notre profonde
gratitude
à Mme Pierre PASCALLONpour Le dévouement
avec LequeL eLLe a toujours su nous répondre toutes
Les
fois que nous téLéphonions en
L'absence de son
époux.
Nos remerciements vont enfin
:
- A tous
Les membres du jury qui~ en dépit de Leurs
Lourdes responsabiLités ont bien vouLu se consacrer
un moment à La
Zecture de notre ouvrage.
- A tous nos compatriotes et frères d'Afrique noire qui~
d'une manière ou d'une autre nous ont été d'un précieux
concours dans La construction de cette thèse.
- A Mme Bartomeuf pour tout
Le grand soin avec LequeL
eLZe a su mener Les travaux de dactyZographie.
-
0 -

l .
INTRODUCTION
GÉNÉRALE
Peu de
recherches, à l'heure actuelle, ont été menées
sur la nature et le rôle de l'Etat en Afrique noire (1)
• Une telle situa-
tion est d'autant plus préoccupante que de nos jours l'Etat, ainsi que
le dirait Hichel DRANCOURT (2)
est au "Centre
des décisions économiques"
et qu'il
transparaît clairement dans certaines lecture sur le Sous-
développement (3) que seule une certaine structure
étatique peut permettre
aux pays attardés de
résoudre
leurs problèmes de croissance économique.
Encore faut-il que la nature et le rôle
souhaitables
de cet Etat soient
précisés de façon rigoureuse eu égard aux objectifs de développement éco-
nomique et social. L'ambition de cette recherche est de constituer un pas
vers cette direction d'une théorie normative de la nature et du rôle de
l'Etat en Afrique Noire.
Dans cette perspective nous avons limité nos réflexions au
cadre de l'Afrique noire de "Succession française" (Cf. carte ci-après)
pour deux raisons qui nous semblent essentielles
- D'abord il y a l e degré relatif d'unité politique, économique
et financière qui a présidé cet ensemble pendant plus de cinquante années
de colonisation sur la base des principes d'une organisation administrative
due à la présence française. Ce passé historique, ainsi que nous le verrons
dans le corps de notre thèse, a son importance dans la construction d'une
théorie normative de la nature et du rôle de l'Etat en Afrique noire.
- La deuxième raison tient ensuite au fait que le vaste ensemble
de l'Afrique noire (qui regrouperait donc l'Afrique anglophone et l'Afrique
francophone) ne nous paraît pas suffisamment homogène socio-culturellement
ou politiquement pour permettre des généralisations qui seraient forcément
abusives. Or notre démarche ne se propose pas d'être une étude spécifique
ou détaillé de telle ou telle formation politique. Il s'agit
plutôt d'une
"analyse globale" qui soit basée sur une appréciation des ressemblances
générales appartenant à tous les pouvoirs africains (dans la zone Afrique
de succession française)

2.
AFRIQUE
CARTE POLITIQUE
ECHELLE APPROXIMATIVE
1 / 40,000,000 E

3.
Notes de la page précédente.
(1) -
C'est ce que constate aussi le Professeur Jean SURET CANALE dans
l'avant-propos de son ouv~ge : L'Afrique noire
l'ère coloniale
1900-1945.
Editions Sociales ;- 1977.
(2) -
'~artout à l'Est comme à l'Ouest le rôle de l'Etat dans la vie
économique s'élargit. Les décisions qui engagent le plus l'avenir3
celles qui intéressent les investissements sont prises par l'Etat"
écrit-il précisément.

Cf. Michel DRANCOURT : Les clés du pouvoir
Fayard
- 1975 - PP
45.
(3) -
On ne saurait évoquer ici toute la littérature sur le développe-
ment et le Sous-développement. On retiendra pour mémoire :
- P. BOREL : Les trois révolutions du développement.
Les Editions Ouvrières
1968.
- E. GANNAGE : Economie du Développement
Préf. de F. PERROUX
-
P U F
-
1962.
- G. MYRDAL : Théorie
a s sous-dévelo
és
(Economic the-o-r--an........,,--....--...,.>--.....,,-e"""-r-"-c-o-un--:'"t-r-z..
......·e-s-).-t7"r-a.....".u--z..;-;-·
t
de l'Anglais par Mme
- Présence Africaine
1959.
- F. PARTANT: La Guerilla Economique
:
les Conditions
du Développement
Seuil
1976.

4.
Comment allons-nous précisément construire cette théorie nor-
mative de la nature et du rôle de l'Etat?
- Pour y parvenir il convient, nous semble-t-il, d'appréhender
d'abord ce qu'est la nature et ce qu'est le rôle de l'Etat dans les pays
développés, pour ensuite poser le problème par rapport aux réalités et
au contexte spécifique de l'Afrique noire. C'est autour de cette double
démarche méthodologique que nous construirons l'essentiel de cette intro-
duction générale.
A -
DE LA NATURE ET DU ROLE DE l' ETAT DANS LES PAYS DEVELOPPES.
Il semble
possible de présenter le problème dans un cadre général,
du reste, applicable à toutes les sociétés organisées et d'envisager une
étude des différentes conceptions de la nature et du rôle de l'Etat dans
le cadre des différents systèmes économiques.
l -
LA CONCEPTION GENERALE DE LA NATURE et du ROLE DE L'ETAT
DANS LES PAYS DEVELOPPES.
Dans sa nature
et dans son rôle, l'Etat est d'une manière géné-
rale perçu comme un "produit de la Civilisation". Autrement dit, l'Etat
résulterait du besoin d'ordre et d'harmonie que ressentent des hommes qui
désirent vivre en groupe.
Tous les auteurs qui proposent cette définition font l'hypothèse
qu'il n'y a pas de société possible où tous les projets des individus
seraient automatiquement convergents. En tout cas, il semble qu'il n'y
ait pas de possibilité d'y penser. On part ici de la nature même de l'homme
pour dire qu'il y aura toujours un dialogue conflictuel entre l'individuel
(l'atome) et le social (le groupe). Dans cette perspective de conflit
inévitable entre
"individus inorganisés", on va s'acheminer vers ce que
nous qualifierons volontiers d'une conception idéaliste de la nature et
du rôle de l'Etat.
- L'Etat, nous dit Nicos POULANTZAS ; (1), possède cette fonction
particulière de constituer le facteur de cohésion des niveaux d'une formation
(1) -
N. POULANTZAS: Pouvoir politique et classes sociales de l'Etat
Capitaliste
Maspero - 1968 -
pp. 43-44.

5.
sociale. Il est le facteur de l'ordre, le principe de l'organisation d'une
formation dans le sens de la régulation de l'équilibre de cette formation
en tant que système.
Ainsi se trouve mise en évidence l'idée que dans toute société
on ressent le besoin d'un Etat immanent, besoin qui naît précisément du
fait que dans les activités humaines inorganisées il y a l e plus souvent
des "luttes-concours", des "conflits-coopérations"
(1)
entre les agents
et leurs groupes. On va pour ainsi dire confier à l'Etat, aux institutions,
un rôle "d'arbitre social". Autrement dit l'Etat sera dans sa nature et
dans son rôle une sorte de force née de la "Conscience Collective" (2)
et destinée à assurer la pérennité du groupe, à le conduire dans la recherche
de ce qu'il considère (le groupe) comme son bien et capable le cas échéant
d'imposer aux membres de la collectivité sociale l'attitude que commande
cette recherche.
Toutes ces définitions, ainsi qu'on peut s'en apercevoir, mettent
par ailleurs en évidence la notion de pouvoir
+ Non seulement en tant que capacité de transformer une force
en acte pour rapprocher l'action économique d'un objectif visé (pouvoir
économique) .
+ Mais
aussi en tant que capacité d'ordonner les rapports
entre les groupes très nombreux de sorte à les maintenir intégrés à l'ensem-
ble
global (pouvoir politique) (3)
+ Autrement dit, l'Etat dans sa nature et dans son rôle apparaît,
de nos jours, comme la sommation des pouvoirs politiques et économiques.
Ce détail nous semble très important. Il souligne, en effet, comment l'Etat
de par sa double nature et son double rôle doit nécessairement s'élever
au-dessus de la "mêlée",
au-dessus de tous les autres pouvoirs pour amener
(1) -
Cf.
Maurice HAURIOU cité par François PERROUX dans :
Pouvoir et économie
- Bordas
1973 - pp. 34
(2) -
Cette terminologie de Georges BURDEAU pose, à notre avis, le problème
de la démocratie et de la légitimité du pouvoir.

Cf.
G. BURDEAU : L'Etat
- Seuil - 1974 -
pp. 24
(3) Cf sur tous ces points :
J. L'HO»WE : Pouvoir et Société économique
Cujas - 1966 - pp. 277
F. PERROUX : "Esquisse d'une théorie de l'économie dominante"
Economie appliquée 1948
pp.
243.
A. RIEU: Pouvoir et Sous-développement
Thèse complémentaire
AIX
- 1979 -
pp. 22.

6.
la société
dans son ensemble vers ce qu'elle considère comme son idéal.
Encore faut-il que soit reconnue à cet Etat une certaine légitimité.
- Voilà
un des points que nous nous efforcerons d'expliciter
dans la deuxième partie de notre introduction.
Mais auparavant nous vou-
drions examiner un moment les différentes conceptions de la nature et
du rôle de l'Etat dans les sociétés avancées et cela dans le cadre des
principaux systèmes économiques.
II -
LES DIFFERENTES CONCEPTIONS DE LA NATURE ET DU ROLE
DE L'ETAT DANS LE CADRE DES PRINCIPAUX SYSTEMES
ECONOMIQUES.
Dans les sociétés avancées, l'Etat dans sa nature et dans son
rôle s'est d'abord vu refuser le statut d'un sujet économique. On l'éloigne
au maximum du domaine de l'économie privée (système libéral)
- L'Etat sera par la suite réintroduit dans toute sa dimension
en tant que sujet économique agissant. Il ne sera plus exclu du champ
de l'analyse économique
ainsi que le voudraient les néo-classiques (1)
C'est un des agents sinon l'agent essentiel
de l'activité économique
(système interventionniste).
- Dans le système socialiste ou collectiviste l'Etat dans sa
nature et dans son rôle va essentiellement se préoccuper de l'intérêt
de la collectivité tout entière.
III - La nature et le rôle de l'Etat dans le système
libéral .
• La conception de la nature et du rôle de l'Etat dans le cadre
(1)
-
Cf. les
nuances de :
- P. TABATONI : "La rationalité des choix financiers"
Economie appliquée
- 1955 Tome VII - 1 - 2 pp. 163.
- A. RIEU:
Pouvoir et Sous-développement
Thèse complémentaire
Aix
- 1975 -
pp. 36
- A. WOLFELSPERGER:
Les biens collectifs
P U F
- 1969 -
pp. 17

7 •
libéral (1) pose comme règle la neutralité de l'Etat vis-à-vis du secteur
privé.
Cette idée d'un Etat neutre sera notamment systématisée par
Adam SMITH dans sa désormais légendaire théorie de la main invisible.
Pareillement par Jean-Baptiste SAY à travers sa loi des débouchés selon
laquelle l'Economie serait toujours ep situation d'équilibre (de production) -
l'offre est toujours égale à la demande.
L'Etat n'a donc aucun "rôle actif" dans cet univers parfait
et dans le système libéral,
c'est sur le marché
(2), les capitaux privés,
l'épargne et l'investissement, l'initiative individuelle que repose le
dynamisme de l'économie, la croissance en longue période de la capacité
productive de l'économie .
. Les classiques orthodoxes attribueront précisément à l'Etat
un rôle essentiellement politique et administratif (3). En témoigne cette
phrase
d'Adam SMITH que nous rapporte TRAN VAN MINH (4)
:
"Quand cet animal insidieux et hahile vulgairement appelé
l'homme d'Etat ou politique a donné la paix à l'extérieur
et l 'oréfIoe à l'intérieur, son principal travail est accompli"
Le souci est ici de permettre les conditions d'une libre entreprise
(l) -
Il s'agit ici du Courant libéral au sens large regroupant tous ceux
qui d'une manière ou d'une autre essaient d'éloigner au maximum l'Etat
et ses instruments du domaine de l'économie privée et tous ceux qui se

préoccupent plus de l'intérêt individuel que collectif. Un tel courant
regroupe:

- Les classiques orthodoxes (A. SMITH, J. B. SAY, Ricardo),
les néo-classiques (L. BAUDIN, M. FRIEDMWN, J. RUEFF) ; les margina listes
(DALTON, PIGOU) et néo-marginalistes (EDGEWORTH, PARETO etc .. )
(2) -
Cf. J. PERCEBOIS : Fiscalité et Croissance : une approche par les
modèles
- Economica
1977
pp. 3 -12.
(3) -
Les classiques orthodoxes demanderont précisément à l'Etat d'authen-
tifier la monnaie et mentionnons ici la différence entre classiques ortho-
doxes

et marginalistes. Car si les uns sont partisans d'une neutralité
farouche, les autres reconnaissent tout de même à l'Etat la qualité de
producteur de biens collectifs.
Cf.
G. TERNY : Economie des Services Collectifs et de la
~pense Pübtique - DUNOD
1971,
pp.
18
(4) -
TRAN VAN MINH: Vie politique du Tiers-Monde
Les Cours de droit
1976 - 77
pp. 179.

8.
individuelle. La neutralité de l'Etat est affirmée sans réserve. Un Etat
neutre par son budget et sa monnaie, c'est ce que traduit
précisément
la théorie quantitative de la monnaie ou la thèse de l'équilibre budgétaire
annuel au plus faible volume (classiques orthodoxes) ou encore la volonté
de soumettre le budget et la monnaie aux règles de l'Economie de marché
(marginalistes et néo-marginalistes) .
Les grandes crises économiques mondiales (notamment celle de
1929) viendront s'inscrire en
faux -on le sait- contre cette conception
de la nature et du rôle de l'Etat et favoriseront l'éclosion de l'inter-
ventionnisme.
11
- La nature et le rôle de l'Etat dans le système
2
interventionniste .
• Le cadre interventionniste est celui de la doctrine keynésienne
et néo-keynésienne (1) •
'~'élargissement des fonctions de l'Etat nécessaire à l'ajustement
réciproque de la propension à consommer et de l'incitation
à investir semblerait à un publiciste du XIXème siècle ou à
un financier américain d'aujourd'hui une horrrible infraction
aux principes individualistes.
Cet élargissement nous apparatt au contraire et comme le
seul moyen d'éviter une complète destruction des institutions
économiques actuelles et comme la condition d'un heureux
exercice de l'initiative individuelle"
(2)
Ces maîtres-mots résument toute la conception keynésienne et
(1)
-
C'est précisément aux Etats~0nis que Keynes trouvera le plus grand
nombre
de ses adeptes. Nous pensons entre autres à ECKSTEIN,
TOBIN, Walter HELLER,
les tenants de la thèse de la politique
volontariste.
Nous empruntons sur tous ces points au cours
du Professeur
Pierre PASCALLON : La doctrine financière keynésienne et néo-
keynésienne -D E A

1976 - 77.
(2) -
J. M. KEYNES : Théorie générale de l'emploi, de l'intér~t et de
la monnaie
Payot
1966
pp.
394.

9.
néo-keynésienne de la nature et du rôle de l'Etat. Désormais on va consi-
dérer l'Etat comme une entité spécifique (1) qui dispose de certains ins-
truments économiques (budget, monnaie)
pour infléchir le libre jeu des
mécanismes économiques dans un sens souhaité. On soutient, en effet, que
les mécanismes auto-correcteurs capables de rétablir l'équilibre de
plein-emploi
ne suffisent pas et qu'il faut nécessairement l'intervention
d'une "Puissance extérieure" pour apporter comme un lubrifiant au système.
La doctrine keynésienne va dès lors apparaître
à la fois réaliste
et ambiguë.
La conception de la nature et du rôle de l'Etat est réaliste
au sens où la doctrine keynésienne est la fille des grandes crises écono-
miques qui ont ébranlé l'équilibre du monde ainsi que nous l'avons souligné
précédemment .
. La conception est par contre ambiguë parce que Keynes et key-
nésiens ne sortent pas assez du cadre du libéralisme (interventionnisme
libéral) qui est le soubassement de leur doctrine. On se contente ici de
purger la philosophie libérale de cette croyance aveugle aux mécanismes
du marché, croyance que les faits ne permettent plus d'entériner. Il
s'agit dès lors de prouver que le système capitaliste libéral peut survivre
en lui injectant une "bonne dose d'interventionnisme étatique". Tout comme
dans le libéralisme classique, l'Etat doit dans sa nature et dans son rôle
se préoccuper de la sauvegarde des intérêts individuels.
Dans le cadre marxiste on va dépasser cette conception d'un
Etat au service des individus pour poser le problème d'un Etat au service
de l'intérêt collectif.
11
-
La conception de la nature et du rôle de l'Etat
3
dans le système socialiste
Dans le système socialiste l'Etat n'est, en fait, qu'un pouvoir
transitoire. La dernière étape de l'évolution du système est, en effet,
(1) -
'~'Etat est promu au rang de centre autonome"
écrit précisément
Guy TERNY
dans :
Economie des Services collectifs et de la
~pense pûbZique -
DUNOD
-
1971
pp.
18.

10.
d'aboutir
à une société
sans classe, sans Etat (1)
.
Dans cette perspective, l'Etat aura pour fonction de prélever
et répartir le surplus
ou surproduit social destiné à être reversé par
ses soins au peuple. D'immenses ressources sont par ailleurs nécessaires
en vue de réaliser des
investissements productifs, de faire des recherches.
Le souci de l'Etat
sera précisément d'organiser la population, la collec-
tivité
sociale à cette fin. Ainsi dans sa nature et dans son rôle l'Etat
est-il au service du groupe social tout entier et non de quelques indivi-
dus
(2).
Quel système convient-il aux Etats africains ? La réponse à
cette question sera l'une de nos préoccupations dans la deuxième partie
de notre introduction ; deuxième partie dans laquelle nous nous efforcerons
précisément de dégager l'originalité du problème de la nature et du rôle
de l'Etat en Afrique noire.
B -
L'ORIGINALITE DU PROBLEME DE LA NATURE ET DU ROLE DE L'ETAT EN
AFRIQUE NOIRE.
Nous situerons cette originalité par rapport à la conception
générale et aux différentes conceptions de la nature et du rôle de l'Etat
dans les pays développés.
l -
PAR RAPPORT A LA CONCEPTION GENERALE de la NATURE
ET DU ROLE DE L'ETAT .
• Dans les sociétés avancées, il est vrai, ce qui fait la force
et la légitimité du pouvoir d'Etat c'est:
(1) -Cf.
les nuances de J. FABRE - F. HINCKER et L. SEVE : Les Communistes
et l'Etat
Edit. Sociales
1977 pp.
123
et celles de H. LEFEBVRE:
De HEGEL à MAO : La théorie marxiste de l'Etat
U. G.
D'Edit.
1976
pp. 216 - 220.
(2) -
_L 'Etat~ à travers la gestion de la force de
travail~ du budget~ de
la monnaie~ bref à travers tout un système de règlementations~
de
contrainte et de contrele sert de médiation~ dans le système libéral
au 'processus d'accumulation individuelle"
précise Suzanne de
BRUNHOFF
dans : La ~olitique monétaire: un essai d'interprétation
marxiste
avec la co laboration dë
P. BRUINI -
P U F
1973 -
pp.
13.

IL
-
Dans le domaine social, l'influence d'une idéologie, c'est-à-
dire des idées, des concepts
et des valeurs généralement acceptés par
la masse des individus; idéologie qui n'est sérieusement mise en cause
que dans de rares situations de crises. Une telle idéologie, un tel ciment
social n'existe pas dans les pays d'Afrique noire. Le plus souvent les
hommes au pouvoir n'ont pas conquis le pouvoir dans une révolution populaire
qui unifierait toute les couches de la nation derrière eux (Cf. tableau n° 1
ci-après qui retrace le processus d'accès au pouvoir des personnalités
politiques en Afrique d'expression française). Même ceux qui ont conquis
le pouvoir à la suite d'un "combat"
contre le colonisateur n'arrivent
pas à développer une idéologie qui serve véritablement la cause de la
nation pour deux raisons qui nous paraissent essentielles
+ d'abord ils sont prisonniers de certains principes hérités
des communautés ancestrales, principes qui sont pour la plupart aux anti-
podes
d'une entreprise de construction nationale.
+ il y a aussi l'impact de la domination coloniale. On ne se
démarque pas assez de certaines habitudes sociales héritées de la période
coloniale de peur d'offenser "l'ancienne mère-patrie".
-
Sur le plan politique il y a une pratique de la démocratie
formelle, ce processus par lequel la masse des individus s'autorise à
un jugement de valeurs sur la compétence du pouvoir d'Etat. Une telle
pratique fait défaut dans les communautés africaines.
Pour toutes ces raisons sus-évoquées, une véritable théorie
normative de la nature et du rôle de l'Etat en Afrique noire doit, nous
semble-t-il,
s'attacher à conférer à cet Etat une dimension nationale
et politique. Une telle théorie ne saurait dès lors se réduire uniquement
à une analyse d'ordre économique. Il s'agit plutôt de souligner
aux res-
ponsables africains tous les liens qui existent entre l'ordre économique,
politique, idéologique. Autrement dit, avant de nous prononcer sur les
"querelles théoriques" (agriculture ou industrie, croissance équilibrée
ou déséquilibrée)
qui existent aujourd'hui sur les économies sous-
développées, en général et les économies africaines en particulier, il
s'agit pour nous de définir ce que doit être l'état dans les sociétés
africaines, de montrer ce que doit faire cet Etat, en d'autres termes
d'attirer l'attention
des dirigeants d'Afrique noire sur leurs vraies

12.
TABLEAU N° 1
Le processus d'accès au pouvoir en Afrique
noire d'expression française.
P A Y S
PERSONNALITES,
REGIMES POLITIQUES
et PROCESSUS d'ACCES au POUVOIR
CONGO
Vie politique marquée par le tribalisme.
pays
connaît depuis les régimes "légitimes"
de l'Abbé FULBERT YOULOU et de
MASSE~mA­
DEBAT une succession de régimes militaires.
COTE D'IVOIRE
Le Président de la République actuel,
M. Houphonet- Boigny est parvenu au
pouvoir à l'issue d'un combat contre le
colonisateur mené au sein du rassemblement
démocratique africain. (R DA) •
DAHOMEY (BENIN)
La vie politique marquée par le tribalisme
sera faite d'une succession de régimes mi-
litaires. Depuis
octobre 1972, la magistra-
ture suprême est assurée par le Commandant
Mathieu Kérékou.
EMPIRE CENTRAFRICAIN
L'actuel président Mr DAVID DACKO est
toujours arrivé au pouvoir par des cir-
constances fortuites. D'abord en 1960,
il remplace
Barthelemy BOGANDA décédé,
- Ensuite en 1979,
il remplace l'empereur BOKASSA déchu.
GABON
Le Président Ol1AR BONGO
vint au pouvoir
en remplacement de Mr Léon ~rnA mort à Paris
en 1967
(pas eu de scrutin)
GUINEE
Le Président Sékou TOME a derrière lui une
longue carrière syndicale •
- Cofondateur du rassemblement démocratique
africain, c'est au prix d'un combat politique
qu'il parvint au pouvoir.
HAUTE-VOLTA
Après
OUEZZIN COULIBALY, militant actif
du rassemblement démocratique africain, la
vie politique reste marquée par une longue
tradition ancestrale où le poids des anciens
chefs traditionnels (le MORRO NABA) demeure
important.
- L'actuel Président, Ur LAMIZANA,est par-
venu au pouvoir à la suite d'un coup d'état
militaire.

13.
Tableau nO 1.(Suite)
MAL l
Le
Colonel
MOUSSA TIAORE
parvint au
pouvoir à la suite d'un coup de force
qui entraine la chute de MODIBO KEITA
(1969)
MAU RIT ANI E
Le rég1me légitime était celui de
Maître
MOKTAR Ould Daddah, fondateur
du "Regroupement mauritanien".
Actuellement, régime militaire.
N IGE R
Le pays a connu une expérience démocratique
et, c'est à l'issue d'un scrutin démocratique
que le premier Président Hamani
DIORI
vint
au pouvoir. Depuis 1974 le pays
est sous un régime militaire.
SEN E GAL
Le Président
SENGHOR,
chantre de la
négritude et théoricien du socialisme
africain parvint au pouvoir grâce surtout
à sa qualité
d'intellectuel.
T CHA D
Depuis 1975 le pays est sous régime mili-
taire.
T 0 G 0
Mr
GNASSIGBE EYADEMA
a pris le pouvoir
par un Coup d'Etat
en 1967.
Source:
TabLeau construit à partir des renseignements fournis
dans
: Le Nouveau Dossier Afrique : Situation et
Pe~spectives d'un Continent
MARABOUT UNIVERSITE
1977
pp.
286 et suivantes.

14
responsabilités.
- Au-delà de ce cadre Q;énéral quelles sont par ailleurs,
nos préoccupations par rapport
aux différentes conceptions de la nature
et du rôle de l'Etat
dans le cadre des principaux systèmes économiques?
II -
PAR RAPPORT AUX DIFFERENTES CONCEPTIONS DE LA NATURE
ET DU ROLE DE L'ETAT.
Faut-il que dans des économies sous-développées l'Etat, comme
dans l'optique libérale, se comporte en tant "qu'organisme d'enregis-
trement des préférences individuelles" (1)
et que par conséquent son
rôle
se réduise à donner aux individus les moyens d'assouvir leurs
besoins égolstes ? Ou alors faut-il que cet Etat se substitue aux indi-
vidus pour organiser l'économie de façon globale en prenant en compte
les besoins essentiels et fondamentaux des populations ? La situation
des économies africaines montre que la première hypothèse est illusoire
et la seconde réaliste.
• Dans les économies sous-développées en général et dans les
économies africaines en particulier, les trois-quarts de la population
active végètent dans une agriculture archalque. Les superficies cultivées
sont généralement faibles avec un outillage rudimentaire sans uti1isation
de la force animale, d'où une faible productivité de l'agriculture tra-
ditionnelle qui rappelle encore l'époque assez lointaine de l'économie
naturelle (chasse et cueillette). Qui plus est, cette population est à
majorité
analphabète et ne peut donc pas, livrée à elle-même, correcte-
ment
assimiler les techniques modernes en matière de développement agricole.
L'Etat doit par conséquent non seulement offrir des moyens mais
(1)
Cf.
A. W9LFELSPERGER
: Les biens coUectifs.
P U F
1969 -
pp.
17.

15.
aussi aider à l'assimilation d'une utilisation efficace et rationnelle
de ces moyens. Ceci suppose un encadrement total qui est aux antipodes
des fonctions de l'Etat libéral .
. Par ailleurs, ainsi que le souligne le Professeur Lionel
RaBBINS (1)" le principe de la Uberté économique n'était pas seulement
une recommandation désintéressée de non-intervention~ mais
la demande expresse~ urgente de détruire les obstacles entra-
vant le développement social dans le dessein de libérer
l'irrunense potentiel d'initiative individueUe".
C'est
dans
cet esprit que ses défenseurs proposent, dans la pratique, une lutte contre
les principales formes de contrainte : privilège des corporations, lois
de l'apprentissage, règlementations et restrictions des échanges intérieurs
et extérieurs. Cette initiative individuelle dont il faut favoriser l'éclosion
fait défaut dans les communautés africaines. On ne saurait le nier. Les
rares agents qui disposent de ressources gagnent davantage dans l'usure ou
la spéculation immobilière que dans une tentative d'entreprise individuelle
Comme
peut l'affirmer un éditorialiste africain contemporain
'~u lieu d'investir dans les secteurs productifs qui améliore-
raient le niveau de vie de la population~ ils se sont lancés
dans des affaires spéculatives telles que la construction de
luxueuses villas que ne peuvent habiter que les étrangers et
les élus de ce monde~ l'ouverture de magasins de luxe dont les
articles n'ont rien à faire dans des pays où des malades man-
quent de quoi s'acheter de la nivaquine ,
l'acquisition de
camions destinés
à intensifier la contre-bande et le marché
noir. Voilà le salut que les bourgeois du Tiers-Monde
appor-
tent à leurs Sociétés " (2)
(1)
-
L. ROBBINS "The theory of economic po Ucy"
English classical
political Economy
- Londres
1952
pp. 19
- Cité aans
P. BARAN:
"Economie
politique de la Croissance"
Economie et Sociatisme
nO 7
Maspéro
- 1967 -
pp. 50
(2) -
M. P. EBONGE SOELLE
dans
BINGO
274 - Novembre 1975
"Les Contradictions du Tiers-Monde"

16 •
• Le développement économique implique, il est vrai, le
contraire
de toutes ces pratiques. Il signifie dès l~rs une transforma-
.tion
de la structure politique, économique et sociale de la société
envisagée
(1), un changement
dans l'organisation de la production, de
la distribution, de la consommation. Il implique un combat
contre le
statu-quo et comme tel il exige un engagement total de la part de l'Etat.
Cependant il ne s'agit pas de verser dans
le dogmatisme et dans l'irréa-
lisme. Il s'agit plutôt de fonder la politique économique sur une cons-
cience claire et volontaire de l'intérêt national.
Voilà notre perspective de construction
d'une théorie norma-
tive de la nature et du rôle de l'Etat en Afrique noire; perspective
qui nous amène à concevoir notre thèse en deux parties :
Dans une première partie nous dégagerons le cadre général
de notre théorie.
Dans une seconde partie nous nous efforcerons de mettre
davantage notre théorie en lumière à travers des illustrations
et des exemples concrets.
D'où le plan
PREMIERE PARTIE
Théorie normative de la nature du rôle de l'Etat
en Afrique Noire:
Cadre Généra l.
DEUXIEME PARTIE :
Théorie normative de la nature et du rôle de l'Etat
en Afrique noire : essai d'illustration.
(1) - P. BARAN
: Economie politique de la croissance
- op. cit.
pp. 55.

PREHIERE PARTIE
THEORI ENORi':lP.TI VE"
DE LA ~ATURE ET DU ROLE DE L'ETAT
EN
AFRIQUE NOIRE:
CADRE GENERAL
1/ En
chaque instant de la durée
une culture apparatt
3
comme un compromis entre ce qui est reçu de la tradition et
les influences extérieures et ce qui est produit par la
Société elle-même telle qu'elle fonctionne au moment consi-
déré. Chaque culture
chaque civilisàtion est un assem-
3
blage contingent de phénomènes techniques
juridiques
3
3
éthi-
ques
religieux que le ou les groupes considérés cherchent
3
sans y réussir jamais co~tement à intégrer dans un
tout structuré
1/
( 1)
(1) -
J. SOUSTELLE:
Les Quatre Soleils.
P U F
-
1970
pp.
47.

18.
INTRODUCTION.
D'une manière générale, l'Etat dans les Sociétés africaines
contemporaines a hérité dans sa nature et dans son rôle d'un certain legs
historique
(1) • Si quelques unes des composantes de cet héritage semblent
bien venues, il convient cependant de reconnaître que beaucoup sont déplo-
rables tant elles contribuent à détourner les dirigeants d'Afrique noire
de leurs vraies responsabilités et tant elles sont à l'origine du grave
problème de sous-développement économique.
De quoi est constitué ce legs historique? Il Y a d'abord le
poids des valeurs propres aux Civilisations africaines pré-coloniales telles
que ces valeurs peuvent s'apprécier à travers les&ructures politico-écono-
miques
et socio-économiques de ces Civilisations. Il y a ensuite des habi-
tudes
introduites en Afrique noire par la présence du colonisateur et surtout
l'impact des
bouleversements consécutifs à cette présence du colonisateur
à la fois
sur le plan économique et sur le plan politique.
Quelles sont, en réalité, les fonctions et les dysfonctions de
cette marque de l'histoire? Quelles sont parmi les valeurs héritées du
passé celles qu'il convient
de réhabiliter et au contraire celles qu'il
faut combattre ? Voilà les questions qui constitueront la toile de fond
de notre conception de la
nature et du rôle de l'Etat en Afrique noire.
Ainsi donc
qu'on peut s'en apercevoir, il ne s'agit pas ici
de forger des concepts, de faire des innovations mais plutôt de laisser
transparaître ce que devraient être à nos yeux la nature et le rôle des
pouvoirs publics africains à travers une critique constructive des réa-
lités existantes.
Conformément à ces préoccupations notre démarche s'articulera
autour des deux points suivants :
Dans un premier chapitre nous présenterons les composantes
essentielles du legs historique qui demeure
très solidement ancré dans
(1) -
Et c'est à juste titre que le Professeur Pierre François GONIDEC
affirme
que la voie du déve loppement économique en Afrique Y.J.oire réside
dans un
examen profond des formations socio-politiques que l'on devra
"purger des vices hérités du passé"
Cf.
P. F. GONIDEC dans
B. ASSO : Le Chef d'Etat afT'icain :
l'Expérience des Etats africains de succession française. Albatros
1976.
pp.
10.

19.
habitudes et les réalités africaines et surtout nous nous efforcerons de
souligner
tout au long de nos développements la nécessité de prise en
compte de ces valeurs permanentes de l'Afrique noire dans la perspective de
nos réflexions.
- Dans le second chapitre, nous apprécierons les prolongements
des valeurs du passé eu égard à la mission que se proposent les respon-
sables africains de sortir leurs pays du sous-développement économique.
Autrement dit, nous dégagerons les alternatives possibles d'un dépassement
des valeurs permanentes de l'Afrique noire.
Nos deux chapitres s'énoncent précisément ainsi
CHAPITRE I
: La NECESSITE de PRISE en COMPTE des VALEURS
HISTORIQUES PERMANENTES de L'AFRIQUE NOIRE.
CHAPITRE I I :
La NECESSITE de DEPASSER les VALEURS
HISTORIQUES
PERMANENTES de L'AFRIQUE NOIRE.

20.
CHAPITRE
1
LA
NÉCESSITÉ
DE
PRISE
EN COMPTE
DES VALEURS
PERMANENTES
DE
L'AFRIQUE
NOIRE
==========================================================
Un certain nombre "d'historiensde l'Afrique noire" (1)
s'accordent à définir les principales étapes de l'évolution africaine à
partir de la Conférence de Berlin du 26.2.1885.
- Ainsi
la période pré-coloniale serait finalement toute la
période antérieure à cette Conférence.
- La période Coloniale s'étendrait de cette Conférence jusqu'à
la période des indépendances africaines -jusque dans les années 1960
(Cf. tableau nO 2 ci-après)
- La période post-coloniale (l'Afrique Contemporaine) est enfin
celle qui part des indépendances jusqu'à nos jours.
C'est précisément au cadre des deux premières périodes que nous
nous limiterons dans ce chapitre. Et dans ce cadre ainsi défini nous envi-
sagerons
l'étude des structures politico-économiques et socio-économiques
de l'Afrique pré-coloniale (SECTION 1) et des apports de des boulever-
sements dus à l'occupation coloniale (SECTION II)
(1) -
Cf. précisément :
G. DEHERME : L'afrique Occidentale Française :
- Action politique
- Action économique

- Action sociale
Paris BZCud & Cie
1908
pp
43.
G. PADMORE : Panifracanisme ou Corrmunisme : la Prochaine Lutte pour l'Afrique.
Présence africaine
1960
pp
85.

21.
Tableau nO 2.
Principales dates des indépendances
africaines.
P
A Y
S
DATE - INDEPENDANCE
DATE
REPUBLIQUE
CONGO
Août
1960
Mars
1960
COTE-D'IVOIRE
Août
1960
Novembre
1960
DAHOMEY (Berin)
Août
1960
Novembre
1960
GABON
Août
1960
Février
1961
GUINEE
Septembre 1958
Novembre
1958
HAUTE-VOLTA
Août
1960
Novembre
1960
MALI
Juin
1960
Septembre 1960
MAURITANIE
Novembre
1960
Mai
1961
NIGER
Août
1960
Novembre
1960
REPUBLIQUE CENTRAFRI-
Août
1960
Juillet
1961
CAINE
SENEGAL
Juin
1960
Mars
1961
TCHAD
Août
1960
Avril
1962
TOGO
Avril
1961
Avril
1961
SO?a'ce : S. LANCINE : Triba lisme et parti unique en
Afrique noire.
Presse de la fondation nationale
des sciences politiques
1977 pp 236.

22.
SECTION 1
LES
STRUCTURES
POLITICO-ÉCONOMlQUES
ET
SOCIO-ÉCONOMIQUES DE L'AFRIQUE PRÉ-COLONIALE.
- Les
sociétés africainffipré-coloniales ont été considérées
par. certains chercheurs comme étant des Sociétés sans Etat. Albert MEISTER
(1) par exemple justifie cette assertion par le fait qu'il n'y avait pas
dans c es sociétés une "Autorité Centralisée". Le groupe familial apparaît
comme la seule unité sociale et politique fondamentale.
- En réalité , toutes ces observations -fort justes du reste-
s'inspirent
très largement de cette définition plutôt juridique que donne
Max WEBER de l'Etat:
"L'Etat exige un groupement politique territorial où
l'autorité est imposée et pré-établie3 disposant
d'une
organisation continue et d'un personnel qui maintient avec
succès le droit au monopole de l'usage légitime de la force
physique " (2)
- Il est vrai qu'au regard de cette définition on peut se
rallier
à ces différentes positions ; car ces grandes organisations
administratives qui sont aujourd'hui la matérialisation de la puissance
étatique ont fait défaut, d'une manière générale, à l'Afrique noire (3).
Mais lorsque nous considérons l'Etat en tant que pouvoir dans toute sa
génèse politico-économique ainsi que nous l'avons cernée dans notre
introduction générale, l'Afrique pré-coloniale n'a certainement pas été un
espace sans Etat. Les communautés africaines pré-coloniales ont précisément
connu
des structures politiques et des structures socio-économiques extrê-
mement variées d'autant que chaque peuple s'organisait selon
son héritage
ancestral, selon le milieu, selon le temps.
(1) -A. MEISTER : ilL 'Afri
et
déve 0
Seu~
celle du
. Professeur Marcel MERLE
dans un ouvrage collectif:
L'Afrique Contemporaine
A. Co lin
1968 pp 92.
(2) -
M. WEBER
Cité dans J. LOMBARD : Autorités traditionnelles et pou-
voirs européens en Afrique noire: le dJclin d'une
aristocratie sous le régime colonial.

A. Colin
1967
pp
49
(3) -
Bien sûr il y avait des '~tats" organisés et structurés comme le
royawne d'AbomeY3 mais ce sont de rares exceptions.

23.
A ce stade de la réflexion les facteurs énumérés par Jacques
LOMBARD (1) comme suceptibles d'influencer l'organisation et la forme
du pouvoir en Afrique apparaissent riches d'enseignements
- Il Y a d'abord l'écologie et la morphologie sociale au sens
où les dimensions territoriales de la société constituent un facteur qui
conditionne l'organisation politique et la distribution du pouvoir.
- Il Y a ensuite les facteurs socio-ethniques au sens où
l'homogénéité ethnique de la société, la correspondance entre son unité
politique et son unité ethnique sont autant de facteurs qui influencent
l'organisation sociale et politique.
- A un troisième niveau l'auteur souligne l'importance de
l'influence du caractère familial sur l'organisation politique, dans le sens
de l'influence que peut avoir le régime successoral, le régime de la trans-
mission des biens et du pouvoir, et le degré d'homogénéité du groupe fami-
lial.
- En dernier lieu, l'auteur met l'accent sur l'influence des
facteurs religieux. Ainsi la conception que se font du pouvoir une communauté
animiste et une communauté islamique, la valeur et l'efficacité religieuses
que chacune d'elles accorde au chef affecteront-elles différemment le
pouvoir.
Tous ces éléments mettent en évidence deux séries de spécificités
qui constituent les valeurs
permanentes de l'Afrique noire. Si les spécifi-
cités des structures politico-économiques résident dans une rigidité dans
la hiérarchie des pouvoirs et l'exercice du pouvoir, celles des structures
socio-économiques se caractérisent essentiellement par une prédominance
de l'esprit communautaire.
(1)
J. LOMBARD - !..!::!:!:. pp.
28-36.

24.
Nous essaierons d'apprécier ces points respectivement dans
deux paragraphes.
PARAGRAPHE 1 :
Les spécificités des structures politico-
économiques de l'Afrique pré-coloniale: une rigidité dans la hiérarchie
des pouvoirs et l'exercice du pouvoir.
PARAGRAPHE II : Les spécificités des structures socio-économiques
de l'Afrique pré-coloniale: une prédominance de l'esprit communautaire.
PARAGRAPHE l
Les spécificités des structures politico-économiques de
l'Afrique pré-coloniale: une rigidité dans la hiérarchie
des pouvoirs et l'exercice du pouvoir.
Dans les communautés africaines pré-coloniales, en réalité,
le pouvoir apparaît à la fois individuel et collectif. Il est individuel
parce que tout compte fait et pour en convenir ici avec Georges BURDEAU (1),
i l est
"1' alibi" de celui qui le détient ;mais en même temps i l est
collectif, parce que ceux qui l'incarnent sont censés posséder certaines
valeurs qui confèrent
au pouvoir son fondement et sa légitimité. Et à
contrario c'estdecerondement et de cette légitimité que provient une
certaine rigidité dans la hiérarchie des pouvoirs et dans l'exercice
du pouvoir.
Du reste,
deux structures de pouvoir prédominent dans ces
communautés. Il y a des structures dans lesquelles le pouvoir est l'apa-
nage d'un chef et celles dans lesquelles le pouvoir appartient à un roi.
Nous envisagerons donc l'exposé de la rigidité dans la
hiérarchie des pouvoirs et l'exercice du pouvoir d'abord à travers les
fondements et la légitimité du pouvoir, puis ensuite à travers les
différentes structures du pouvoir.
- (1) -
G. BURDEAU
L'Etat
- Seuil-
1970
pp. 17

25.
A -
LES FONDEMENTS et la LEGITIMITE du POUVOIR.
Malgré
de grandes différences dans le mode de vie, le mode
d'organisation économique ou politique que peuvent présenter les commu-
nautés africaines pré-coloniales, des caractères commu~émergent qui
semblent permettre des généralisations, tout au moins en ce qui con-
cerne les fondements et la légitimité du pouvoir.
Ainsi selon Alfred SCHWARTZ (1)
les facteurs qui jouent un
rôle prépondérant dans le processus de création du "schéma d'autorité"
dans .ces communautés peuvent être classés en cinq rubriques essentielles
-
Il Y a d'abord l'âge au sens où dans les sociétés pré-
coloniales
un respect particulier entoure la "vieillesse". L'âge est
du reste, ici synonyme d'expériences vécues, de qualités morales comme
la clairvoyance, la générosité, qualités qui permettent
somme toute,
au détenteur du pouvoir d'en faire bénéficier la communauté tout entière.
-
Il Y a ensuite la sagesse : les qualités de jugements, de
négociations qui contribuent
bien plus que l'âge à fonder l'autorité
d'un individu.
-
En troisième lieu est prise en compte la situation sociale
de l'individu. L'homme riche représente, en effet, l'image de ce que
tout individu cherche à devenir. Ainsi la réussite personnelle de l'in-
dividu l'auréo1e-t-e11e d'un prestige particulier et lui confère-t-e11e
un ascendant moral incontestable.
-
Une quatrième source d'autorité non moins importante reste
la force physique ou le talent, et ceci se justifiait par le fait
qu'il y avait dans les communautés pré-coloniales le plus souvent des
conflits ouverts
ou latents entre groupements et la guerre, du reste
était considérée
comme le moyen normal de régler ces conflits. Dès
lors la force physique constituait la méthode directe et la plus effi-
cace d'accès au pouvoir. Le statut du guerrier est particulièrement envié.
(1)
A. SCHWARTZ : La vie quotidienne dans un village
GUERE. INADES
Abidjan
1975
pp
126-129.

26.
Un tel homme
imposait son autorité à l'ensemble du groupe jusqu'à ce
que quelqu'un de plus fort se substituât à lui.
-
Enfin il y a la fonction magico-religieuse qui confère à ceux
qui la détiennent un prestige et une autorité morale qui en font les
principaux garants de l'Ordre.
Bien évidemment toutes ces sources d'autorité ont de profondes
répercussions sur le fonctionnement des structures étatiques des sociétés
africaines contemporaines.
Nous ne saurions ici dresser la liste des chefs d'Etat africains
qui trouvent
aujourd'hui une fierté à se voir
ranger parmi les
"Sages
d'Afrique".
Par ailleurs les "Coups de force" qui se succèdent en Afrique
noire ne sont pas sans rappeler la philosophie ancestrale qui consiste
à s'emparer du pouvoir au prix de la force physique. La sacralisation
du pouvoir dans les communautés africaines contemporaines est un phénomène
connu de tous
(1). Des marques de sensibilité, voire d'adoration sont
en effet, prodiguées aux détenteurs du pouvoir que l'on considère souvent
comme des sauveurs, des envoyés de Dieu. S'agit-il réellement d'un esprit
de discipline? Laissons Georges DEHERME répondre à cette question.
"Il n'y a pas là de la discipline mais plutôt de la vanité
et de la superstition : d'une
part exigence d'une énorme
vanité chez les chefs imposés par la force et maintenus
par la crainte puis répercussions de vanités chez les sujets ;
d'autre part
attributions de vertus propriatoires au chef
3
qui descend d'un homme é levé par une chance extraordinaire
ou un coup d'audace surnaturelle. Ce chef n'est au demeurant 3
qu'un fétiche
un gris-gris
un talisman vivant" (2)
3
3
(1) -
'7l est impossible de comprendre la voie africaine si l'on néglige
la place qu'y tient le sacré. L'homme africain est avant tout un
croyant qui vit dans l'intimité de Puissances invisibles"
révèle à ce sujet M. MERLE:
L'Afrique Contemporaine
- A. Colin
1968 pp
197.
(2) - G. DEHERME : L'A~ique occidentale française
Elo
& cie
1908 -
pp.
27.

27.
On comprend pourquoi aujourd'hui en Afrique noire le pouvoir
est le plus souvent incarné dans un homme presque déifié auquel on
doit respect et soumission. Plus que le sous-développement politique
ainsi que le dit fort justement Robert DELAVIGNETTE (1), c'est ici
qu'il convient à notre avis, de situer l'origine du sous-développement
économique de l'Afrique.
Du reste, ce problème d'individualisation du pouvoir que nous
considérons comme l'une des causes essentielles du sous-développement
économique s'apprécie encore mieux au niveau des différentes formes et
structures du pouvoir.
B.
Les DIFFERENTES FORMES et STRUCTURES du POUVOIR.
Nous
envisagerons tou~ à tour l'étude
du pouvoir dans les
chefferies et dans les royautés.
1.
Le pouvoir dans les chefferies.
Dans les chefferies ainsi qu'il a été dit dans nos développe-
ments précédents, l'unité politique et supérieure est
le groupe familial.
Le pouvoir autrement dit sera l'exclusivité des chefs de famille ou de
lignage. Quelles sont, au-delà de cette rigidité, les implications sur
le plan des affaires courantes ?
Du fait que le chef de famille ou de lignage soit le seul habi-
lité à maintenir la paix et à assurer le bon fonctionnement des relations
sociales, il se développe à la limite un certain paternalisme. Le phé-
nomène est très à la mode dans les sociétés africaines contemporaines
et réside en ceci que certains membres de la communauté, pour fuir leurs
responsabilités vont s'en remettre au chef du soin d'assurer à lui seul
la marche des affaires du pays. Le phénomène est d'autant plus regrettable
que le paternalisme qui est une forme de personnalisation profonde du
pouvoir et qui comme tel devient une "idéologie de domination" (2) exclut
toute forme de concertation et de discussion telle qu'on en a aujourd'hui
besoin dans les grands débats politiques et économiques.
(1) -
R. DELA VIGNETTE :
Service africain
- Gallimard
1946 pp.
148
(2) -
Cf. Louis MOREAU de BELLAING : L'Etat et son autorité :
L'idêologie paternaliste
Anthropos
1976 pp. 370-400.

28.
Si certains responsables africains appliquent aujourd'hui
ce schéma des chefferies d'autres par contre s'inspirent du cadre des
royautés.
II -
Le pouvoir dans les royautés.
Dans les communautés royales, le roi va concentrer entre ses
mains l'essentiel du pouvoir judiciaire, militaire, politique, religieux
qu'il délègue parfois à des "fonctionnaires nommés et révocables par
lui" (1).
En fait,un tel pouvoir
est dit "monocratique" au sens où ce
terme définit un régime dans lequel tout procède d'un centre unique d'im-
pulsions politiques. La volonté seule du roi pourvoit à toute l'activité
politique.
-
Il semble cependant que rien ne s'oppose à ce que le roi écoute
l'avis des gouvernés et se soumette à la coutume. Ce qui contribue à
atténuer le caractère autoritaire et individuel-du pouvoir. Les décisions
du roi sont, en effet, admises par la population dans la mesure où elles
ne contreviennent pas à la coutume, dès lors que les actes du souverain
sont conformes à la tradition.
-
Si ceci
est un aspect positif encore faut-il savoir à quelle
limite situer l'abus du pouvoir. Cela ne nous semble pas une chose facile.
Autrement dit ce seul aspect apparaît, en réalité, insuffisant pour jus-
tifier le recours
à un tel schéma. Le problème ne semble pas malheureu-
sement
avoir été perçu de cette façon en Afrique noire ainsi que nous
le verrons dans la suite de nos développements.
Le seul modèle qui, à notre avis,devrait servir de référence
réside dans l'esprit d'entraide et de solidarité qui a caractérisé les
sociétés africaines pré-coloniales. C'est ce cadre de l'esprit communau-
taire
que nous allons nous efforcer à présent d'expliciter.
(1)
Voir une étude de cas dans
R. STA VENHAGEN :
Les classes sociales dans les sociétés
agraires.
Anthropos
1969
pp
183
et suivantes.

29.
PARAGRAPHE II
.:
Les spécificités
des structures socio-économiques
de l'Afrique pré-coloniale: une prédominance de
l'esprit communautaire.
Les structures socio-économiques des communautés
pré-coloniales ont fait l'objet d'une abondante littérature ces dernières
années. La plupart des sociologues soutiennent précisément que ces com-
munautés se caractériseraient essentiellement par un esprit de solida-
rité et par l'absence du "phénomène de divisions en classes sociales'!.
Il semble à notre avis, difficile de prouver le contraire.
C'est ce que nous essaierons de montrer. Dans cette perspective nous ferons
d'abord le point de la littérature sociologique sur la question; nous
nous efforcerons ensuite de compléter cette littérature en
insistant
davantage sur le problème de la monnaie (1) et des échanges monétaires
dans ~es communautés, deux points qui nous semblent extrêmement importants
pour mettre en lumière le phénomène de l'esprit communautaire.
A -
LE POINT des DISCUSSIONS sur les STRUCTURES SOCIO-
ECONOMIQUES des COMMUNAUTES AFRICAINES PRE-COLONIALES.
Les sociétés africaines pré-coloniales, semble-til, ignoraient
le phénomène de "domination économique, d'exploitation d'une classe par
une autre". Quelles en sont les raisons?
Selon Albert MEISTER (2) par exemple cela proviendrait
(1) - Au sens où la monnaie en tant que porteuse de valeurs~
en tant
'~u'incarnation de la valeur" joue un rôle fondamental dans la
division de la société en classes antagoniques.
Cf. sur ce point les nuances
de
:
J. FAVRE - F. HINCKER
et L. SEVE : Les Comnrunistes et l'Etat
Edit. Sociates
1977
pp. 125
P. PASCALLON:
"Problème du dualisme et de l'intégration; réflexion
pour une définition essentielle de la monnaie"
Revue de science financière T.LXIV n 0 1
1972•
. (2) - A. MEISTER : L'Afrique
peut-elle partir?
Changement social et
dévelOppement économique en Afrique
Orientale.
Seuit
1966
pp.
26-32

30.
simplement du fait que
dans ces sociétés seul le groupe familial est
"l'unité fondamentale" .11 est l'unité de production et de consommation,
de contrôle social, lieu de création et de culte. Qui plus est à l'inté-
rieur de la cellule familiale règne une "homogénéité sociale" qui renforce
l'absence de la division du travail. L'entraide et la solidarité sont
de règle.
-
La position qui nous semble
fort juste, du reste, est aussi
celle du Professeur Georges BALANDIER (1). Les communautés africaines
pré-coloniales, soutient-il, précisément ignoraient la "division en classes
détentrices de moyens de production et en classes détentrices de la
force productive"
et
toute forme
"d'accumulation du capital".
Mais au fond pourquoi cette absence d' acc:unul.ation du capital
et cette absence de division en classes antagoniques ? Cela tient essen-
tiellement,à notre avis, au fait que les communautés pré-coloniales ne con-
. naissaient pas le phénomène
de la monnaie et des échanges monétaires
ainsi que nous entendons l'expliciter à présent.
B - Les STRUCTURES SOCIO-ECONOMIQUES PRE-COLONIALES à la
LUMIERE du PHENOMENE de la MONNAIE et des ECHANGES
MONETAIRES.
Les
sociétés traditionnelles, soutenons-nous, n'ont pas connu
le phénomène de la monnaie et des échanges monétaires. Une telle affir-
mation peut paraître à première vue paradoxale
(2), il est vrai. Mais
pour admettre cette nuance il convient, nous semble-t-il de considérer
(1) -
G. BALANDIER : "Structures traditionneUes et changements économiques"
Cahiers d'études africaines nO 1 da~s Cahiers
internationaux de sociologie Volume xxx
1961 pp 321-325.
(2)
-
Des auteurs affirment par ailleurs que l'Afrique connatt depuis
des siècles le principe de la monnaie. Mais quelle signification donnait-
on à la monnaie et à l'échange? C'est là que réside la question de fond.
Du reste~ sur ce point on pourra.consulter :
- P. BESSAIGNET : "Monnaie primitive et théories monétaires" in
Revue
européenne des Sciences Sociales
Droz Genève
nO 21 - 1970
pp. 37-69
- M. MERLE: L'Afrique contemporaine ~ op. cit.
pp" 211
- G. TUCCI : '~rigine et développement de la monnaie primitive "
Revue européenne des Sciences Sociales
Droz Genève
21
1970
pp.
17-36.

31.
la monnaie non dans son rôle vulgaire de simple instrument d'échange
mais plutôt
comme porteuse de valeurs, ainsi
que nous l'avons dit
précédemment.
L'échange, la monnaie pour paraphraser ici Henri LEFEBVRE (1)
traduit un rapport social: le travail antérieur à l'échange avec les
qualités des sujets, leur habileté, leur force toutes inégales. De par
donc sa finalité dans l'économie d'échange, la monnaie va traduire des
inégalités sociales. L'absence du phénomène de la monnaie dans les
sociétés traditionnelles s'apprécie à la lumière de cette précision.
En réalité, l'économie africaine traditionnelle présente des
caractéristiques spécifiques qui la différencient de l'économie d'échange
concurrentiel, caractéristiques qui expliquent la prédominance de l'esprit
communautaire .
D'une manière générale l'économie des communautés pré-coloniales
était essentiellement une économie du besoin, une économie
d'auto-
subsistance. Elle repose sur certaines caractéristiques structurelles
qui vont traduire la nature des relations socio-économiques. Ces carac-
téristiques sont de deux ordres
-
Dans les sociétés pré-coloniales la propriété est généralement
une propriété collective de la famille (2), c'est-à-dire du matrilignage
ou du patrilignage selon les cas. C'est dans le cadre
de ce matrilignage
ou de ce patrilignage que se situent les rapports de production et
d'échange. On a donc affaire à une société assez homogène malgré qu'il
se dégage des minorités privilégiées : chefs de matrilignages ou de
patrilignages, aristocratie terrienne, corps d'aînés ayant une suprématie
sur les cadets sociaux (les femmes, cadets de famille, dépendants etc ••• )
Le fait important réside, répétons-le, dans la forme quasi-collective
de la propriété, surtout celle des moyens de production, l'organisation
(l) -
H. LEFEBVRE
: De l'Etat
tome II : le mode de production étatique.
U.G. d'édit.
1977
pp
19-36.
(2) -Cf
des Gouros de la
s~stance à
econo~e
- J.
OUPOH OUPOH
: Le
rocessus
une économie à crois-s-an-J..c-e-a-gr-~"":c":"o:""'--~~":"":'~"':':":"":-::"';;'::"":"':~~:::";"~·
Thèse d'état
clermont
1979 pp
- A. SCHWARTZ : La vie quotidienne dans un village
GUERE
INADES
ABIDJAN
1975
pp
51-59.

32.
à dominance
collective de la jouissance des biens produits. Ce dernier
point est extrêmement important.
Dans les sociétés pré-coloniales
-et c'est là la seconde
caractéristiques structurelle de l'économie traditionnelle- la finalité
de la production est d'être d'abord et avant tout destinée à la consom-
mation , c'est-à-dire, à la satisfaction des besoins vitaux de la
communauté et des besoins sociaux en général. Le surplus est affecté aux
réceptions et aux fêtes, c'est-à-dire aux grandes occasions de socia-
bilité sanS qu'il soit question de rentabilité économique.
Toutes ces structures
et toute cette organisation excluent
finalement le phénomène de l'échange monétaire. La monnaie n'était, du
reste, utilisée que dans les contacts avec l'extérieur. Entre les commu-
nautés locales, l'échange se réduit à des opérations de troc. Et cet
échange, ce troc n'obéit pas à la loi de l'offre et de la demande telle
que cette loi s'apprécie dans le régime concurrentiel (1). Bien souvent
dans les échanges sont transposées certaines valeurs qui sont le lot
des communautés pré-coloniales. Ainsi par exemple des liens sociaux,
ethniques, classiques, peuvent influencer le rapport entre "l'offre
et la demande". Le troc ne traduit pas autrement dit un rapport marchand (2),
un rapport social parce que le processus de production ignore un tel
rapport. Il empêche par conséquent"l'accumulation" qui est la caractéris-
tique essentielle de l'économie monétaire et de la division de la société
en classes antagoniques (3), pour au contraire, favoriser l'esprit
d'entraide et de solidarité.
(1) -
Les occasions de troc sont nombreuses. Il peut par exemple y avoir
échange de produi ts frappés de tahous contre des produi ts que les

membres de la tribu peuvent consommer librement.
Cf. nuances de
G. TUCCI : "Origine et développement de la
monnaie primitive"
article cité préalahlement cité p 17.
(2) -
'~a monnaie marchandise permet
non seulement d'acquérir la mar-
chandise mais aussi la force de travail" précise P. BESSAIGNET
dans
"Monnaie primitive et théories monétaires" article cité p.29.
(3) -
Cf Les nuances de H. LEFEBVRE
: De l 'Etat~ le mode de production
étatique
op. cit
pp
91
Le système fiscal traditionnel va par ailleurs obéir au
même
principe
de solidarité
communautaire. (Cf. annexe I )

33.
Voilà , à notre avis, des valeurs qui auraient pu être exploi-
tées à fond pour mettre en oeuvre des structures rationnelles de déve-
loppement économique en Afrique rioire. Ce n'est tout à fait pas le cas
aujourd'hui pour ne pas dire du tout; et il est vrai aussi que la
pénétration coloniale a contribué à un éclatement des structures commu-
nautaires, en même temps d'ailleurs qu'elle va favoriser la rigidité
dans la hiérarchie des pouvoirs et dans l'exercice du pouvoir en Afrique
noire.
Ce sont ces différents points
que nous allons à présent
examiner.
SECTION II
LEs VALEURS D' ORDRE POLIT1CO-ÉCONCJv1IQUE ET SOCIO-
ÉCONCJv1IQUE
INTRODUITES
EN AFRIQUE NOIRE AVEC LA
PÉNÉTRATION COLONIALE 1
"La féodalité que nous avons trouvée en Afrique
est en train
de s'effriter. Et le village qui était son support et que
nous n'avons pas
découvert tout de suite est en train de
se dissocier. Avec l'économie commerciale que nous avons
apportée
nous avons fait pénétrer jusqu'au village un ferment
3
individualiste qui ronge l'antique communauté. Le chef de
vi llage perd sa nature de lien re ligieux tt.

34.
Pour peu que l'on creuse ces phrases
de Robert DELAVIGNETTE
(1). on mesure tout l'impact
de l'occupation coloniale sur l~s struc-
tures
politico-économiques et socio-économiques africaines.
En ce qui concerne précisément les structures politico-
économiques il convient de reconnaître que si la présence du colonisateur
a plus ou moins contribué à une "désacralisation du pouvoir". elle n'a
cependant pas moins été à l'origine de nouvelles valeurs telles que la
centralisation. la concentration et la personnalisation du pouvoir dont
vont hériter les premiers responsables africains. Le processus de désa-
cralisation du pouvoir s'est. en fait. traduit par une véritable margi-
nalisation du pouvoir traditionnel (2)
. Quant au niveau des structures socio-économiques et des
relations sociales. il y aura effectivement un effritement de l'esprit
communautaire avec l'introduction
en Afrique noire de cultures spécula-
tives sur des bases individualistes.
Voilà les différents points que nous allons tenter d'expliciter
dans les deux paragraphes suivants :
PARAGRAPHE l
L'impact de l'occupation coloniale sur les
structures politico-économiques africaines.
PARAGRAPHE II
L'impact de l'occupation coloniale sur les
structures socio-économiques africaines.
(1) -
R. DELAVIGNETTE : Service africain
Gallimard
1946
pp
137
. (2) -Cf.
les nuances
de J. LOMBARD : Autorités traditionnelles et
et
ouvoirs européens en Afrique noire: le dêctin d'une
~stocarat~e sous
e reg~me co on~a .
A. Colin
1967
pp
36 et suivantes.

35.
PARAGRAPHE
l
L'impact de l'occupation coloniale sur les structures
politico-économiques africaines.
Le phénomène de centralisation du pouvoir qui viendra en
ajouter
au problème déjà évoqué de
la rigidité dans la hiérarchie des pouvoirs
en Afrique noire est, à y regarder de près, l'une des conséquences,
sinon la conséquence essentiëlle du système colonial français dit
"d'administration directe"(l)
- Nous essaierons de le montrer d'abord à travers une présen-
tation ou plus exactement une appréciation
du système dans sa forme,
sa nature et ses objectifs ; et ensuite à travers une mesure des réper-
cussions du système sur les structures politico-économiques traditionnelles.
A -
Le SYSTEME D'ADMINISTRATION DIRECTE: PRESENTATION
et APPRECIATION:
Quelles étaient la forme et la nature du pouvoir colonial ?
Et surtout quelle finalité traduisait une telle organisation?
l - La forme et la nature du système.
Le système
"d'Administration directe" est apparu comme un
système hautement centralisé politiquement et économiquement dominé par
le parlement métropolitain qui exerce une autorité
souveraine sur
toutes les unités territoriales qui composent l'empire colonial (2). Le
professeur
Jean SURET CANALE(~~alifie précisément le système de
"despotique"
au sens où le personnel européen(administrateurs des colonies,
commis des affaires étrangères) avait, semble-t-il, hérité de l'époque
militaire non seulement le despotisme mais aussi l'omniprésence.(4).
/
(1) -
Par opposition au système anglais de "l'indireot rule Il -
Cf.
sur oe point
les nuanoes de Sylla LANCINE: Tribalisme
et Parti unique en Afrique noire
- Presse de la fondation nationale
dès soienoes politique
1977
pp
63 - 64
. (2) -
Cf. Les nuanoes de G. PADMORE : Panafrioanisme ou oommunisme : la
proohaine lutte pour l'Afrique - Présenoe afrioaine 1960 pp~05
et suiv.
(3)
J. S. CANALE: L'Afrique noire: l'ère ooloniale
1900-1945
Edit. Soo.
1977
pp 94.
(4) -
C'est en l'ooourenoe le système administratif appliqué à l'Algérie
que
FAIDHERBE~ anoien militaire d'Algérie implantera au Sénégal
et qui se généralisera à toutes les oolonies françaises.
Cf. J. S. CANALE
E;;.id pp
93.

36.
L'Administration a le monopole du pouvoir politique et écono-
mique.
Le Commandant de Cercle perçoit l'impôt, rend la justice, fait
la police, gère les prisons, dirige tous les services publics. C'est
un autocarate imbu de sentiments d'autorité et de pouvoir personnel.
L'organisation même des colonies sera marquée par cette conception du
pouvoir.
L'Administration coloniale avait, en effet, découpé chaque
colonie en régions, chacune
ayant
à sa tête un administrateur colonial.
Ces divisions régionales autrement appelées "cercles" (Cf. tableau nO 3
ci-après) comprenaient chacune deux ou plusieurs subdivisions dont chacune
avait à sa tête
un Administrateur français placé sous les ordres du
Commandant de cercle, lui-même directement dépendant du Gouverneur des
colonies. Ce n'est
qu'au niveau inférieur de la subdivision, le CANTON,
que l'on va trouver un commandement africain: le chef de canton qui,
en réalité, n'a aucun pouvoir ainsi que nous le confirme le Gouveneur
VAN VOLLEN HaVEN :
'~es chefs n'ont aucun pouvoir d'aucune espèce~ car il n'y a
pas deux autorités dans le cercle: L'autorité coloniale et
l'autorité indigène. Il n'yen a qu'une
seule: le commandant
de cercle~ le seul responsable. Le chef n'est qu'un instrument~
un auxi liaire " (l)
Ainsi le système d'administration directe apparaît-il
dans
sa forme et sa nature comme un système "totalitaire", forme et nature
qui, du reste, sont à la mesure de l'objectif du système.
II -
L'objectif du système •
• Au contraire pour le colonisateur, ce découpage administratif
et cette nature quasi absolue du pouvoir colonial répondaient au souci
de la métropole de favoriser le développement
des Colonies. C'est, en
(1) - Propos rapportés par
P. F.
GONIDEC
dans: La République du Sénégal
Berger-Levrault
1968
pp.
28

37.
Tableau nO 3
Découpageaoministratif de la COTE -d'IVOIRE
CERCLES
CHEFS-LIEUX
.
POSTES SECONDAIRES
ASSINIE
ABOISSO
ASSINIE
BASSAM
BASSAM
BASSAM
LAGUNES
ABIDJAN
ABIDJAN - Ville
- DABOU
ALEPE - AGBOVILLE - ADZOPE
BINGERVILLE - JACQUEVILLE
LAHOU
GRD-LAHOU
FRESCO - DIVO - LAKOTA
ZIKISSO
BAS-SAS SANDRA
SOUBRE
SASSANDRA - BUYO
BAS-CABALLY
TABOU
SAN-PEDRO - GRABO - BEREBY
INDENIE
ZARANOU
ASSIKASSO
BONDOUKOU
BONDOUKOU
BOUNA
N'ZI
COMOE
DIMBOKRO
BOUGOUANOU - BOCANDA - OUELLE
et un poste à créer.
BAOULE Nord
BOUAKE
TIEBISSOU - BEOUMI - M'BAHIAKO
BOUAKE-Ville.
BAOULE Sud
TOUMODI
YAUROUSSOKRO - TIASSALE
GOUROS
BOUAFLE
OUME - SINFRA - ZOENOULA
OURODOUGOU
SEGUELA
MANKONO
HT. SAS SANDRA
DALAO
ISSIA - VAVOUA - GAGNOU
TOUBA
MAN
TOUVA
ODIENNE
ODIENNE
BOUNDIALI
KONG
TAFIRE
KONG-KORHOGO
Source:
G. ANGOULVANT : La pacification de la COTE-D'IVOIRE
Larose
1916
pp
100-101

38.
,
Tableau nO 4
Organisation politi~o-économigue de
l'Etat colonial.
\\
1885-1886
1901-1902 .
1 9 0 5
l - GOUVERNEMENT LOCAL
· Agents de l'Etat
.
91
1 271
1 615
• Postes et stations
45
215
296
Chefferies indigènes
45
258
423
II - FORCE PUBLIQUE
• Officiers
23
223
158
· Sous-officiers
23
308
264
· Effectifs
1 487
16 775
16 136
III - TRIBUNAUX et CONSEILS de
GUERRE
1
44
49
IV - SERVICES CIVILS
• Officiers de l'Etat Civil
4
57
95
• Officiers notariaux
1
26
26
Officiers des titres fonciers
1
26
1
V. - ADMINISTRATION ECONOMIQUE
.Postes d'élevages
70
145
Postes de culture
55
75
• Postes forestiers
1
21
Source : Revue de droit international et de législation
comparée 3
1906
pp 76 3 rapporté dans
A. RIEU : Pouvoir et sous-développement
Thèse
3
compZémentaire
Aix
1975 pp 80.

39.
tout cas la thèse chère à Georges ANGOULVANT (1)
, un des gouverneurs
généraux des colonies qui écrit notamment :
"Il faut un régime dur à la limite de la dictature pour organiser
un peup le de primi ti fs. L'idée que l'on peut en que lque sorte
civiliser l'Afrique
tout au moins en développer les richesses
3
naturelles sans prendre en main toute la direction politique
et économique des peuplades
africaines est une idée frivole.
Ce sont des théories trop idéales qui ne cadrent pas avec la
réalité "
. Dans une moindre mesure cette position
est aussi celle
d'économistes bien connus pour qui l'expansion coloniale avait essentiel-
lement un but humanitaire. Ainsi par exemple, pour Paul LEROY BEAULIEU
et W.W. ROSTOV (2)
la colonisation
serait avant tout une mission civi-
lisatrice destinée à combler un écart de développement. Le premier nommé
écrit notamment :
'~es colonies ont été souvent fondéesà l'origine non pour
atteindre un objectif principal de politique économique
ni
3
même pour exclure une puissance économique vitale
mais pour
3
remp lir un vide 3 c'est-à-dire 3 pour organiser une société tra-
ditionnelle en vue d'activités modernes d'importations et
d'exportations"•
•Voilà des thèses que l'on ne saurait totalement refuter au
sens où dans les "communautés pré-coloniales" on se préoccupait peu de
la mise en valeur et de l'exploitation des richesses naturelles
(3)'
• Mais il convient de reconnaître que l'esprit dans lequel les
opérations ont été menées contredit cette vérité. La colonisation jusqu'à
preuve
de contraire est d'abord en elle même une entreprise de domina-
tion, d'assujettissement, et d'exploitation de l'homme africain. Ici encore
(1) -
G. ANGOLVANT : La Pacification de la Côte-d'Ivoire - Méthodes et
Résultats
E. Larose
1916 pp 17 et suivantes.
3
(2)
P. LEROY BEAULIEU: De la colonisation chez les peuples modernes3
Paris GuiUawrrin
1902
pp
48.
3
W.W. ROSTOV: Les étapes de la croissance économique
Seuil 1962 pp 167.
3
(3) -"En Afrique noire l'emprise de l 'horrune sur la nature était jùgitive"
écrit fort justement le Professeur Marcel MERLE dans un ouvrage
collectif: L'Afrique Contemporaine
A. Colin
1968
pp
58.
3

40.
l
il faut recourir -si l'oD4 en abuse- aux réflexions du gouverneur VAN
VOLLEN HOVEN (1) pour éclaircir cette nuance.
'~ous savons que l'homme est une richesse~ à tout le moins
aussi prec~euse que celle du sous-sol et nous ne voulons
pas supprimer ou écarter celle-là pour nous emparer
de celle-ci. Nous voulons les deux et multiplier l'une par
l'autre"
• La situation de conflit qu'entretenait le pouvoir colonial
de par son organisation appuie encore cette thèse. Au sein même des com-
munautés africaines deux groupes antagonistes se trouvaient finalement
en présence.
- D'un côté il y a des "chefs administratifs" nouveaux nommés
par le pouvoir colonial ; donc sans référence aux lois coutumières ou
aux principes qui légitiment le pouvoir dans les communautés africaines.
- De l'autre côté il y a des chefs "légitimes" non reconnus
par ce pouvoir, ainsi que nous le verrons dans la suite de nos développements.
Il se créait ainsi une situation de conflit interne qui servait
la cause du pouvoir colonial. Disons en un mot qu'il y a eu sous l'adminis-
tration directe une véritable déchéance du pouvoir traditonne1 africain.
B -
Le SYSTEME D'ADMINISTRATION DIRECTE et la DECHEANCE du
POUVOIR TRADITIONNEL.
Il Y a eu effectivement sous l'Administration directe une véri-
table crise du pouvoir traditionnel.
Comment se présente la situation ~
- L'Administration coloniale, ainsi que nous l'avons mentionné
(1) -
VAN VOLLEN HOVEN : cité dans G. DEHERME :~que Occidentale
française
- Action politique~ économique et sociale.
Paris -
Blond et Cie
1908
pp
20.

41.
dans nos développements précédents. nommait un certain nombre de chefs
auxquels elle n'attribuait d'ailleurs aucun statut juridique sinon qu'ils
étaient de simples intermédiaires (1).
Cela semblait d'autant plus inconfortable et traduisait
d'autant l'assujettissement du pouvoir
traditionnel africain que d'un
côté le "nouveau chef" se désolidarisait de son groupe et que de l'autre
il servait la cause d'une administration qui ne le reconnaissait pas en
tant que tel.
Autrement dit un tel personnage incarnait mieux qua quiconque
une sorte d'opposition d'intérêt que son comportement contradictoire
reflétait et qui ne faisait. du reste. que traduire l'incapacité dans
laquelle il se trouvait de prendre partie du fait de sa double appartenance
au système colonial et à la société colonisée.
En fait. le nouveau chef s'identifiait bien souvent soit sous
la contrainte. soit parce qu'il Y trouve son compte. au pouvoir colonial.
I l représentera notamment le fisc auprès des populations. se chargera de
la présentation des jeunes devant les commissions de recensement en vue
de permettre une détermination aussi précise que possible de l'assiette
de l'impôt et des prestations diverses. Il se chargera aussi de l'envoi
des contingents de travailleurs sur les plantations européennes.
La situation sera à l'origine de querelles tribales qu~ opposeront
bien souvent les parents proches du chef et ses partisans aux autres
membres de la communauté.
Les répercussions de cette réalité historique se font aujourd'hui
sentir sous une forme ou sous une autre en Afrique noire. Plus profondes
encore apparaissent les répercussions de l'impact de l'occupation coloniale
sur les structures socio-économiques.
PARAGRAPHE II
L'impact de l'occupation coloniale sur les
structures socio-économiques africaines
L'occupation coloniale a contribué à l'effritement de l'esprit
communautaire par unê transformation de la mentalité due à l'introduction
(1) -
Cf les nuances de
A. MEISTER : Changement social et développement
en Afrique
Seuil
1966
pp
88

42.
d'un nouveau système de valeurs dont le fondement essentiel reste la
monnaie. Plus explicite que nous sur ce point le Professeur Jean SURET
CANALE éc r i t
'~e développement de l'usage de la monnaie a eu pour conséquence
essentielle de substituer aux cadres sociaux traditionnels~ aux
hiérarchies anciennes~ l'individu isolé~ juridiquement égal des
autres individus en tant que vendeur ou acheteur de marchandi-
ses 1/(1).
En fait, l'effritement de l'esprit communautaire s'explique par
deux
phénomènes interdépendants :
- Le développement de l'usage de la monnaie d'abord
- L'institutionalisation du principe de la propriété privée
ensuite.
A - LE DEVELOPPEMENT de L'USAGE de la MONNAIE et L'EFFRITEMENT
DE L'ESPRIT COMMUNAUTAIRE.
L'accent mis sur le développement de l'usage de la monnaie en
tant que facteur de désintégration sociale en Afrique noire est sans
équivoque
(2).
Pourquoi ce développement de l'usage de la monnaie? Cela
semblait répondre -à y regarder de près- à un double objectif :
-
Il s'agit d'abord de fournir à l'administration coloniale
un "processus d'accumulation monétaire" par l'écoulement sur le marché
colonial des produits
fabriqués
dans la métropole. Cela faisait donc
partie d'une stratégie de conquête de marché.
-Il s'agit ensuite de fournir à cette administration des ressources
fiscales
substantielles à travers la monétarisation de la matière imposable
(Cf. tableau
nO 5 ci-après)
(l)
J. S. CANALE :
ue noire: L'ère coloniale
1900-1945
Soc~ales
1977
pp
79.
(2) -
Cf. Les nuances de A. SCHWARTZ : La vie sociale dans un village
Gué
INADES
ABIDJAN
1975
pp
63 -
64.

43.
Tableau nO 5
Amendes de guerre versées par différentes
tribus de COTE-D'IVOIRE.
D A TES
TRIBUS
TAUX d'AMENDE (F.F)
-21 juin 1910
AKOUES (Baoulé sud)
44 850
21 juin 1910
OSROU (Lagunes)
75 000
21 juin 1910
DABOU (Lagunes)
66 760
12 octobre 1910
ABBEYS (Lagunes)
18 760
21 juin 1910
ATTrES (Lagunes)
18 200
12 àctobre 1910
N'GBANS (Baoulé sud)
98 000
12 octobre 1910
SALEFOUES (N'ZICOMOE)
38 500
25 janvier 1911
PAYS OUELLE (N'ZICOMOE)
45 250
22 février 1911
ABBEYS (Lagunes)
14 200
22 février 1911
ATTIES (Lagunes)
8 700
17 juin 1911
OUELLES (N'ZI COMOE)
13 200
30 septembre 1911
AGBAS (N'ZI COMOE)
91 600
25 janvier 1912
KONGO SANON (Baoulé nord)
3 000
25 janvier '1912
TOUMODI BAOULE (Baoulé
2 000
nord)
25 janvier 1912
NANAFOUES KPNIS (Baoulé nord)
20 000
25 janvier 1912
YAOURES (Baoulé sud)
43 500
25 janvier 1912
AYAOUS (Baoulé nord)
13 500
25 janvier 1912
KODES (Baoulé nord)
21 500
TOTAL
733 276
Source: George.> ANGOULVANT : La pacification de la Côte-à'Ivoire
Méthoàes et résultats.
E. Larose
1916
pp 244.

44.
Comment ce processus a contribué à l'effritement de l'esprit
communautaire ?
En réalité, la monétarisation de l'économie ne faisait que
substituer "l'argent" à un ensemble de biens traditionnels. Il faut dès
lors trouver les moyens de se procurer ce nouveau bien. Ainsi va-t-on
assister au développement des cultures de rente comme le cacao, le café,
etc •• Il Y aura effritement de l'esprit communautaire dès lors que ce
développement des cultures de rente s'accompagne d'une individualisation
des rapports de production ; rapports de production qui ne seront plus
régis par les valeurs traditionnelles. Le seul stimulant pour inciter
"l'individu" à entrer dans le circuit de production devient désormais le
système de rémunération du travail (1).
Cette monétarisation des rapports
de production a été fort justement perçue par Alfred SCHWARTZ (2) qui en
mesure les conséquences à deux niveaux :
-
n'abord les systèmes d'entraide deviennent rares sinon
inexistants.
Il Y a ensuite un développement de clivages sociaux -d'un côté
individus fortunés et d'un autre individus non fortunés-
Ce processus de l'effritement de l'esprit communautaire sera
d'autant plus profond que la monétarisation de l'économie s'accompagne d'une
institutiona1isation du principe de la propriété privée.
B - L'INSTITUTIONALISATION du PRINCIPE de la PROPRIETE PRIVEE
et L'EFFRITEMENT de L'ESPRIT COMMUNAUTAIRE.
L'institutiona1isation de la propriété en Afrique noire
s'inscrit dans le cadre général du développement du système concessionnaire (3)
(1) -En fait
le développement du salariat en Afrique noire a été un phé-
3
nomène de violence avec le phénomène du travail forcé. C'est ce que
montre notamnent Hilaire BABASSANA
dans: Travail forcé et formation
du Salariat en Afrique noire.
P U G
1978.
(2) - A. SCHWARTZ -
Op. cit.
pp
51 - 59
(3) -Au début de 1912 l'étendue des concessions en Côte d'Ivoire était de
3 290 ha. Elle atteint 6 300 ha au Sénégal,
2829 ha dans le Haut-
Sénéjal et le Niger. 5917 ha en Guinée et 1502 ha au Dahomey.
Cf. J. S. CANALE: L'Afrique noire
L'ère coloniale
op. cit
pp
40.

45.
Précisément le pouvoir colonial dote les colonies
d'un ensemble de principes
qui organisent le cadre forestier, foncier et le régime dee
terres doma-
niales. Trois décrets
officient ces principes:
- Le décret du 8 février 1899 définit et garantit la propriété
privée de l'Etat colonial.
-
En application effective de ce principe un autre décret
du 26 mars 1899 introduit dans les colonies la notion de domaine privé
de l'Etat, décret qui justifiait
en quelque sorte la suppression du
"droit de propriété" des nationaux sur leur
terre
(1).
- Enfin un troisième décret de Mars 1899 introduit la notion
d'immatriculation des moyens de production dits fixes comme les bâtiments
et les terrains. Ce principe
qui se présentait sous la forme individualisée
de titre de propriété conférait précisément à son propriétéire un droit
privatif, absolu, et se substituait ainsi aux signes traditionnels de
titre de "propriété collective"
(2).
Comment convient-til de dépasser ces valeurs historiques perma-
nentes dans la perspective de constructions d'une théorie normative de la
nature et du rôle de l'Etat en Afrique noire?
C'est à cette question que nous voudrions essayer de répondre
dans le cadre de notre
second chapitre.
(l)
l:f. H. BABASSANA op. cit
pp
111 - 134 et J. S. CANALE
op cit
pp 327
(2)
Ce dernier principe d'immatriculation sera à l'origine du développement
d'wt système de transaction et de spéculations foncières, phénomène

qui se perpétue encore en Afrique Noire.

46.
CHAPITRE
II
LA NÉCESSITÉ DE
DÉPASSER
LES
VALEURS
HISTORIQUES
PERMANENTES
DE
L'AFRIQUE NOIRE.
---------------------------------------------------
---------------------------------------------------
Deux aménagements nous paraissent nécessaires
- Du point de vue des valeurs propres aux civilisations pré-
coloniales, l'esprit d'entraide et de solidarité qui a caractérisé
ces civilisations devrait être, à notre avis, réhabilité. Par contre
les habitudes qui consistent à faire du pouvoir l'apanage d'un indi-
vidu où à soumettre ce pouvoir à l'influence des facteurs magico religieux
devraient être abandonnées. Elles excluent, en effet, toute forme de
participation et de concertation et sont donc contraires à une véri-
table oeuvre de construction nationale.
Ces différentes préoccupations seront précisément explicitées
à travers une appréciation du fonctionnement des structures politico-
économiques des sociétés africaines contemporaines notamment celles du
Parti Unique (SECTION l )
Par rapport aux bouleversements consécutifs à l'occupation
coloniale, il s'agit, à notre avis, de lutter contre le statu-quo entre-
tenu par les responsables qui ont été formés à l'école coloniale. Ce
statu-quo porte précisément sur les modèles individualistes hérités
du colonisateur,
modèles qui à l'heure~~rrespondent pas aux
réalités et qui doivent par conséquent être repensés.
En fait, i l ya là le pro1:il.èmedu choix d'un modèle de Société
auquel nous tenterons d'apporter des éléments de réponse (SECTION II )

47.
SECTION l
LE DÉPASSEMENT DES VALEURS PROPRES AUX
-----------
----------
CIVILISATIONS AFRICAINES: ESSAI D'APPRÉCIATION
DES STRUCTURES POLITICO-ÉCONOMIQUES DE
L'AFRIQUE CONTEMPORAINE ,
l' é tud e
des structures politico-économiques africaines se
ramènera ici pour l'essentiel à l'examen de la qu~ion du Parti unique,
ainsi que nous l'avons dit précédemment. C'est, du reste, la seule
structure dominante que l'on rencontre partout (1) quelles que puissent
paraître par ailleurs les divergences politiques ou idéologiques.
Les justifications d'une telle réalité sont, au demeurant
fort convaincantes. Le Parti unique en Afrique noire apparaît, à y regar-
der de près, comme un instrument de sauvegarde de l'esprit de solidarité
des communautés pré-coloniales, esprit de solidarité qui semble plus que
nécessaire dans le dur combat contre le sous-développement économique.
Mais on s'en doute; les structures des pays en voie de développement
sont tout le contraire de celles du monde développé où les mécanismes
rodés depuis des siècles tournent indépendamment des leaders politiques
ou tout au moins de leur tempérament, leurs goûts, leurs fantaisies.
Et c'est sans doute là que résident les spécificités de la vie politique
africaine.
L'effort consistera ici à présenter d'abord les fondements politico-
économiques du Parti Unique (Paragraphe 1) puis ensuite à montrer comment
la permanence de certaines mauvaises habitudes héritées du passé ances-
tral contribue à freiner l'efficacité du Parti Unique (Paragraphe II).
(1) -
Bien-sûr le pluripartisme commence à l'heure actuelle à se dëvelopper
dans certains pays. Mais d'une manière généra le il appara-tt qu'en

Afrique noire là où le pluripartisme existe.. il est davantage fondë
sur des querelles de personnes que sur des divergences idëologiques.
Cf. sur ce point les remarques pertinentes de
C. COQUERY
VIDROVITCH et H. MONIOT : L'Afrique noire de 1800 à nos jours.
P U F
1974.
pp
246 - 247
et ceUe.Jde
Nicolas MAmIN : La politique internationale du
Sénégal. ABC
1979
pp
35-37.

48.
PARAGRAPHE l
Les fondements politico-économiques du Parti Unique
en Afrique noire.
Le Parti Unique a été perçu par les responsables africains comme
un instrument d'intégration nationale (1) et comme tel il est censé
traduire une certaine. rationnalité économique.
A - LE PARTI UNIQUE., INSTRUMENT D'INTEGRATION NATIONALE.
Il semble finalement -pour comprendre le fondement politique
du Parti Unique en Afrique noire en tant qu'instrument d'intégration
nationale-
qu'il faille le replacer dans toute sa génèse et ses origines
historiques.
Déjà en 1946, en effet, le Rassemblement Démocratique Africain :
le R. D. A. considéré comme la première force politique africaine de lutte
contre la domination coloniale et pour la revendication de l'Indépendance
nationale, mettait, semble-t-il, au premier rang de ses préoccupations
l'unité
du mouvement national. Le terme même de rassemblement aurait été
alors expressément choisi pour faciliter la fusion de toutes les organisa-
tions
régionales. Il s'agissait en clair de constituer une force africaine
unique et homogène qui fasse contre-poids à la puissance coloniale (2)
Par référence à ce cadre historique le Parti Unique en Afrique
noire (Cf. tableau nO 6 ci-après) se propose d'exprimer une certaine unité
nationale contre les forces de désagrégation qui pourraient résulter
d'organisations à base tribale ou régionale (3)
(1) -
L'intégration., nous dit Maurice DUVERGER est Ze 'processus d'unification
d'une société en vue d'un idéaZ"
Cf.
M. DUVERGER
: Introduction à Za poUtique.
Gaitzinard
1964
pp
275.
(2) -Il Y a Zà -à contrario- cet apport poZitique essentieZ de Za coZonisa-
tion d'avoir été à Z'origine de Z'émergence d'une force poZitique
africaine. Somme toute à
qu~Zque chose maZheur est bon.
(3)
Les premières expériences de pZuripartisme à Z'occidentaZe ont
historiquement dégénéré en quereZZes parZementaires ou en quereZZes

tribaZes ou régionaZes.
Cf. C.i'COQUERY VIDROVITCH et H. MONIOT
op. cit. pp 246-247.

49.
Tableau nO
6.
Les Partis uniques en Afrique Noire
de succession française.
1
NOMENCLATURE des PAYS
NOMENCLATURE des PARTIS
UNIQUES
BENIN
Le P.R.P.B. (Le PARTI de la REVOLUTION
POPULAIRE du BENIN) .
CAMEROUN
L'U.N.C. (L'UNION NATIONALE du CAMEROUN)
CONGO
Le P.C.T. (Le PARTI CONGOLAIS du TRAVAIL)
COTE d'IVOIRE
Le P.D.C.I. (Le PARTI DEMOCRATIQUE de
COTE D'IVOIRE)
GABON
Le P.D.G. (Le PARTI DEMOCRATIQUE du GABON)
HAUTE-VOLTA
Pluripartisme ~vec l'U.D.V. (L'UNION DEMO-
CRATIQUE VOLTAIQUE)
comme parti dominant.
MALI
L'U.D.P.M. (L'UNION DEMOCRATIQUE du PEUPLE
MALIEN)
MAURITANIE
Régime militaire
NIGER
Régime militaire
REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
Le MESAN (Le MOUVEMENT pour L'EVOLUTION
SOCIALE de L'AFRIQUE NOIRE)
SENEGAL
Pluripartisme avec l'U. P. S. (L'UNION
PROGRESSISTE SENEGALAISE) comme parti
dominant.
TCHAD
Régime militaire
TOGO
Le
R.P.T. (Le RASSEMBLEMENT DU PEUPLE
TOGOLAIS)
Sources : Tableau construit à partir des renseignements fournis
dans les bulletins : JEUNE AFRIQUE (J. A. )
- J. A. nO 978
du 3.10.79 pp 28
- J. A. nO 985
du 21.11.79 pp 20-21
- J. A. nO 986 du 28.11.79
pp 24
- J. A. nO 987 du
5.12.79
pp 34
- J. A. nO 989 du 19.12.79 pp 44

50.
La perspective est donc claire. Il s'agit de mobiliser toutes
les forces vives de la nation en vue de résoudre ensemble le grave pro-
blème du sous-développement économique. Il n'y a là, à notre sens, ni
plus ni moins qu'un effort pour retrouver l'esprit de solidarité qui a
caractérisé les sociétéSpré-co1onia1es. Le Parti Unique est alors censé
traduire, à notre avis, une certaine rationalité économique.
B - Le PARTI UNIQUE et RATIONALITE ECONOMIQUE EN VUE DU
DEVELOPPEMENT.
Dans le langage économique, le terme de rationalité ne se prête
pas à une définition absolue et universelle (1).
C'est, semb1e-t-i1, une attitude de l'esprit qui renvoie à
l'analyse du fondement des structures et de leurs raisons d'être.
Dès lors convient-il , pour saisir le Parti Unique comme tradui-
sant une certaine rationalité économique,
de partir de la finalité même
de la science économique ainsi qu'elle se définit couramment. L'objectif
premier de la science économique est, semb1e-t-i1, de combiner des moyens
pour atteindre au mieux un idéal. Dans cette perspective précisément la
rationalité devient la "propriété de toute activité finalisée de posséder
une logique qui en assume l'efficacité face à une série de contraintes".
A la lumière de cette mise au point on saisit
toute la problé-
matique. L'Afrique Noire est, en effet, un continent marginal où l'impératif
économique demeure celui de la mise en place d'une infrastructure technique
et sociale adéquate. Il faut à cette fin un effort de financement de la
(1) -
La conclusion dE MaW'ice GODELIER au terme d'importanti3
travaux
d'analyse et de réflexion - Cf. précisément M. GODELIER :
Rationalité et irrationalité en économie.
Tome
II
- Maspero
1974.

51.
formation de capital (1). Dès lors
l'adoption de la structure du Parti
Unique apparaît comme un moyen de mobilisation des ressources nationales
au sens où l'on s'attache à éviter un gaspillage de ressourc~inhérent
à l'existence du pluripartisme.
Il s'agit en clair par le biais de cet instrument d'intégration
nationale de mobiliser les ressources disponibles qui devraient être
consacrées à la résolution des problèmes les plus
urgents en matière de
développement économique.
Voilà qui répondrait au souci même de la science politique du
développement tel que nous l'explicite Paul BOREL (2)
:
'~a sc~ence politique du développement apparatt comme un
volontarisme de changement~ une création organisatrice~ une
construction consciente à partir de et contre l'ordre existant
Ce qui lui importe alors essentiellement c'est autant que le
choix du but~ ce lui du mode d' action ~ la forme de participation".
Mais malheureusement lorsqu'on se retourne pour jeter un regard
sur le chemin parcouru on se
rend compte qu'en Afrique noire beaucoup
reste encore à faire. La résurgence de certaines pratiques traditionnelles
et de certaines habitudes héritées de la période coloniale constitue,
en effet, un frein à l'efficacité
et au bon fonctionnement de la struc-
ture
du Parti Unique.
(1) -
Les auteurs sont unanimes sur ce point.
Par exemple pour le Doyen BA1?RERE~ ce7-a doit être 7-'objectif à assigner
à 7-a politique financière. Cf.

A. BARRERE : Politique financière
Da7-loz
1958 pp 543.
- De m~me H. BROCHIER et P. TABATONI~ sans dissirrruler que des mesures
p7-us 7-arges sont nécessaires à la réalisation du rythme souhaité de
croissance dans les pays en voie de développement~ insistent parti-
culièrement
sur 7-'accroissement des possibilités d'épargne et
d'inves-
tissement.
Cf.
H. BROCHIER et P. TABATONI : Economie financière
P U F
1963
pp
605.
(2) -
P. BOREL : Les trois révo7-utions du développement
Les Edit. ouvrières
1968
pp
19.

52.
PARAGRAPHE II
La rigidité des valeurs traditionnelles et limites du
Parti Unique: perspective de dépassement.
-
Dans l'énumération
des causes du sous-développement écono-
mique de l'Afrique noire certains auteurs mettent fort justement l'accent
sur la rigidité des hiérarchies sociales (1).
En fait, le vrai problème, à l'heure actuelle, réside non seulement
dans le caractère peu démocratique du fonctionnement des structures politico-
économiques, dans la personnalisation du pouvoir mais aussi dans la trans-
position au niveau des structures étatiques de pratiques tribales et
régionales.
Nous
ferons dans un premier temps le point de la situation,
puis dans un second
temps, nous tenterons un effort de dépassement.
A - LE
POINT de la SITUATION.
Ce que l'on constate d'une manière générale en Afrique noire,
c'est le fait que les partis politiques dits souvent "parti de masse",
prennent une
physionomie toute particulière. A tous les niveaux des
structures politico-économiques, les dirigeants forment le plus souvent
un groupe assez nettement distinct du reste des adhérents et des militants
de sorte qU'il se constitue un cercle intérieur qui prend la structure
d'un Parti dans le Parti.
En fait, le vrai problème est qu'à l'origine de la constitution
de ces cercles fermés (qui sont cela va sans dire tout le contraire d'un
processus d'intégration nationale) se
trouvent des considérations d'appar-
tenance
à une même tribu, à une même religion, à une même secte ou à
une même génération, de sorte qu'en définitive, les décisions d'ordre
politique ou d'ordre économique
se prennent le plus souvent non sur la
(1) -
Cf. sur ce point :
A. MEISTER : Changement social et développement économique en Afrique
Orifentale
Seuil
1966
pp
26
et suiv.
M. DUVERGER : Introduction
à la politique
- Gaillinard
1964
pp 189-190
Dans une moindre mesure, Sylla LANCINE: Tribalisme et Parti Unique
en Aj!ique Noire
Presse de la fondation nationale dès Sciences
politiques

1977
pp
42
notamment.

53.
base
d'un programme politique ou économique précis mais en fonction de
toutes ces considérations personnelles. Le Parti Unique qui se voudrait
être un Parti de masse devient alors le Parti d'une couche sociale qui
aura le monopole de la vie publique et des biens de l'Etat; s'il n'est
pas l'affaire personnelle d'un individu qui en incarne la force et la
légitimité.
Et c'est fort justement qu'Alain RIEU
(1) se demande si,
en définitive, dans les pays d'Afrique noire, l'Etat n'agit pas dans le
seul intérêt de ses "membres" et de l'extérieur en se servant des préro-
gatives de la puissance publique dont il dispose pour conquérir les
fondements du pouvoir économique : propriétés
des biens de production
acquisition de fonctions et de positions prédominantes dans le processus
de production et de distribution.
Il
devient alors vrai que lorsqu'elles se situent dans cette
logique, la nationalisation des moyens de production, la prolifération
des Sociétés d'Etat en Afrique noire acquièrent une signification toute
particulière que nous précise Frantz FANON:
(2)
"Pour la bourgeoisie nationale
nationaliser ne signifie pas
3
mettre
la totalité de l'économie au service de la nation.
Pour elle
nationaliser ne signifie pas ordonner l'Etat en
3
fonction des rapports sociaux nouveaux dont on décide de faci-
liter
l'éclosion.
Nationaliser pour elle signifie très
exactement
transfert aux autochtones des passe-droits hérités
de la période co lonia le ".
Dès lors
i l y
a détournement du pouvoir au profit de nouveaux
intérêts privés et en même temps une sorte de trahison flagrante dans
la mesure où l'on pouvait compter sur l'Indépendance et les nouveaux
gouvernants pour réorienter l'économie en fonction des intérêts nationaux
détournement du pouvoir que d'aucuns expliquent, du reste, par l'absence
(1) - A. RIEU: Pouvoir et Sous-dévelo~pement
Thèse complémentaire A~x
1975
pp
14-15 . C'est aussi
tout le prob lème de di lapidation des fonds pub rics et de corruption qu'évoque
tristement
A. W. LEWIS dans :
La chose publique en Afrique noire
S EDE S
Futuribles
1966
pp
33 -
36.
(2) -
F. FANON: Les ~s de la Terre
- Maspero
1961
pp
115.

54.
d'une conscience explicite de la fonction précise de la puissance publique
ou par une sorte d'ardeur (celle du néophyte) engendrée par l'accès aux
plus hauts postes d'une élite
longtemps comprimée aux échelons inférieurs
(1)
• Ce dernier point explique précisément les abus du pouvoir et la
tentation de l'enrichissement en Afrique noire.
B - Les
PERSPECTIVES de DEPASSEMENT
Il semble finalement qu'un véritable processus d'intégration
nationale et de développement tel que nous l'avons conçu et explicité
dans nos développements précédents, ne peut se fonder que sur une démo-
cratisation des structures, sur une participation collective à tous les
niveaux des décisions politiques et économiques. Cela suppose que l'homme
politique puisse s'élever au-dessus de la mêlée pour apprécier les situations
nationales avec désintéressement, de façon constructive et positive. Dans
cette logique lorsqu'on prétend se référer à certaines valeurs tradition-
nelles dans la conduite des affaires économiques, on doit constamment
avoir à l'esprit que dans les communautés pré-coloniales ce qui légitimait
le pouvoir c'était avant tout la capacité de l'individu, ses connaissances
par rapport aux autres membres de la communauté, surtout son aptitude à
défendre les intérêts de la communauté tout entière et à réaliser la cohé-
sion du groupe.
Dans le contexte actuel il s'agit de savoir concilier la tradition
avec la modernité. Les problème. de développement économique en Afrique
noire, soutenons-nous, ne peut être le fait que d'un Etat suffisamment
cohérent en lui-même pour dégager et produire des objectifs consciemment
élaborés
d'un Etat suffisamment relié à l'ensemble de la société pour
déterminer une certaine forme de cohésion sociale qui semble aujourd'hui
nécessaire dans le combat contre le sous-développement. Dans ce sens nous
ne pouvons que partager le point de vue du
Professeur François PERROUX
. (1) -
Par exemple
A. RIEU
op. cit -
pp
217 - 218.

55.
quand il écrit
'~es
paramètres du pouvoir ne sont pas seuLement Le capitaL
technique et financier, Les moyens de Liquidité et La capacité
de crédit, mais aussi La cohésion de L'unité du groupe, La
capacité
de résister aux forces de dissoLution internes et
aux pressions externes " (1)
Comment
dans cette perspective concevoir le problème des
modèles de développement
économique en Afrique? C'est à cette question
que nous allons nous efforcer de répondre dans le cadre de notre seconde
section.
(1) -
F. PERROUX: Pouvoir et Economié.
Bordas
1973
pp
36

56.
SECTION
11
LE DÉPASSEMENT DES VALEURS INTRODUITES PAR
LE COLONISATEUR: ESSAI D'APPRÉCIATION DES
STRUCTURES SOCIO-ÉCONOMIQUES DE L'AFRIQUE
CONTEMPORAINE.
Le passage
du colonisateur en Afrique noire ne s'est pas tra-
duit seulement par un effritement de l'esprit communautaire ainsi que
nous l'avons montré dans nos développements précédents; il a été aussi
à l'origine d'un "certain choix de société"
au lendemain des indépen-
dancesafricaines. Si les systèmes libéraux d'Afrique noire apparaissent,
en effet,
comme une réaction favorable à la politique de l'ancienne
puissance coloniale, les régimes socialistes par contre sont une réaction
défavorable, somme toute un défi à cette politique.
Aujourd'hui devant un certain nombre de problèmes urgents à
résoudre en matière de développement économique et les troubles sociaux
que connaît
l'Afrique noire, il convient, nous semble-t-il de s'interroger
un moment sur le bien-fondé et l'opportunité des différents choix en pré-
sence. Faut-il réellement aux sociétés africaines un modèle libéral ou
au contraire un modèle socialiste? C'est une question que nous nous
étions déjà posée dans le cadre de notre introduction générale et que
nous voudrions
davantage creuser. C'est une question essentielle à laquelle il
convient, à notre avis, de répondre en prenant en compte un certain
nombre
d'observations:
-
Il Y a d'abord la nécessité de tenir compte du fait que pour
les pays d'Afrique noire le processus de développement économique exige
à l'heure actuelle une collaboration avec l'extérieur en matière de ca-
pitaux et de technologie. Dans cette perspective toute position dogma-
tique nous semble illusoire et irréaliste.
Il Y a ensuite la nécessité de prise en compte des erreurs et
des lacunes du passé; erreurs et lacunes que le modèle à préconiser devrait
s'attacher à enrayer.
Ces deux préoccupations qui constitueront l'essentiel de nos

57.
développements
dans cette seconde section s'inscrivent, du reste, dans
le cadre général des querelles doctrinales qui opposent depuis longtemps
les partisans de l'intégration sociale et ceux de la lutte sociale en
Afrique noire. Les uns tempèrent, en effet, l'affirmation des classes
sociales, les autres au contraire, insistent sur la nécessité de la lutte
des classes comme processus de libération du peuple
du joug de l'oppres-
sion et de la domination économique
(1).
Notre objectif en entrant
dans ce débat est de montrer précisément que les vrais problèmes de
l'Afrique noire sont moins d'ordre idéologique que d'ordre économique
et d'ordre
socio-culturel. Leur
résolution suppose une prise de conscience
claire et réelle des besoins véritables des populations.
Noua expliciterons
ces différents points dans deux paragraphes
PARAGRAPHE
l
Le PROBLEME des CLASSES SOCIALES EN
AFRIQUE NOIRE.
PARAGRAPHE II
QUEL MODELE de SOCIETE pour L'AFRIQUE NOIRE
LIBERALISME ou SOCIALISME ?
(1) -
Cf. sur ces points
les nuances de Claude RIVIERE dans
Classes et stratifications sociales en Afrique noire
Le cas guinéen

P U F
1978
notamment
pp
17 - 33.

58.
PARAGRAPHE l
Le problème des classes sociales en Afrique noire
Le problème des classes sociales en Afrique noire a
été l'objet d'une controverse ces dernières années ainsi que nous l'avons
dit précédemment. Un certain nombre d'auteurs
affirment l'existence
des classes, d'autres au contraire nient cette existence. La question
reste donc entière.
Au demeurant, lorsqu'on fouille la littérature (1) sur la ques-
tion on sent un certain goût d'inachevée. Les analyses sont faites sans
que soient suffisamment prises en compte un certain nombre de réalités
spécifiquement africaines. La prise en compte de ces réalités d'origine
politique, sociale et culturelle va nous permettre justement de dépasser
un débat que nous considérons comme trop empreint de subjectivité.
Dans un premier temps nous ferons le point de la controverse
sur les classes sociales en Afrique noire. Dans un deuxième temps nous
tenterons un effort de dépassement de la controverse ainsi que nous l'avons
déj à mentionné.
A -
LE POINT DE LA CONTROVERSE
sur les
CLASSES SOCIALES en
AFRIQUE NOIRE.
On peut schématiquement distinguer deux thèses
- La première thèse qui est essentiellement celle des idéologues
au pouvoir nie l'existence de classes. Cette négation
se fonde sur les
valeurs des communautés pré-coloniales à savoir l'entraide, la fraternité
qui excluent toute forme d'exploitation et tout antagonisme à caractère
de classe.
(1) -
Cf
par exerrrple :
- Diop
~JHEMOur: Les classes sociales dans l'Afrique occidentale
2 tomes :
Tome I : Le ~LI
3
pp
15 et suiv.
Tome II: Le SENEGAL pp
13-15
Maspero
1972.
- R. STAVENHAGEN : Les classes sociales dans les sociétés agraires
Anphropos
1969
pp
153
et suiv.
- S. LANCINE: Tribalisme et Parti unique en Afrique noire
Presse
de la fondation nationale des sciences politiques 1977 pp 113.

59.
- La seconde t hèsa, au contraire, affirme que les conditions
d'exploitation sont réunies, à savoir, la grande Industrie Capitaliste
et ses ramifications.
• Pour expliciter
davantage la première thèse on peut citer
ces phrases d'un auteur africain contemporain (1)
'~ans notre société négpo-berbère il n'y a pas ~ classes
en guerre mais des groupes sociaux en lutte d'influence. Ils
seront demain en guerre les uns contre les autres si nous n'y
prenons garde, si nous laissons les intellectuels, professions
libérales,
employés, fonctionnaires, voire
ouvriers consti-
tuer
une classe qui opprime en trompant paysans et artisans".
Finalement on voudrait ici superposer les valeurs d'une société
pré-coloniale d'auto-subsistance, non monétarisée
(nos développements
précédents) avec celles d'une société
africaine contemporaine dans
laquelle les rapports
ont désormais une autre nature avec l'insertion
dans l'économie d'échange. Et c'est là -à notre avis- la limite essentielle
de cette thèse
que de postuler un statisme contraire au réel.
Comme échantillon d'une théorie relevant de la deuxième école
on peut
mentionner notamment les travaIx de Diop MAJHEMOlJT (2)
qui,
à partir des cas spécifiques du Mali et du Sénégal distingue quatre
classes en Afrique noire (Cf. tableau nO 7
ci-après).
Il y
a d'abord les capitalistes de toutes origines alliés à
la bourgeoisie bureaucratique et aux féodaux de celle-ci : assistants
techniques par exemple. Cet ensemble constitue selon l'auteur la "haute
bourgeoisie" qui a la mainmise
sur les affaires du pays.
Au second échelon se débat une bourgeoisie
moyenne non moins
hétérogène.
Au troisième échelon on trouve la paysannerie qui reste encore
marquée par les empreintes de la tradition •
.
(1) - L. S. SENGHOR: Nation
et voie af!icaine du socialisme, Présence
Africaine
1961 pp
116.
(2) -
MAJHEMO ur
Diop : Les classes sociales dans l'Afrique occidentale
op. cit.

60
Tableau n° 7
Les classes
sociales au Sénégal
.
: COMPaS ITION
EFFECTIF
TOTAL
C LAS SES
% CLASSES
: (Effectif)
POPULATION
GRANDE BOURGEOISIE
Capitalistes
1 500
3 000
0,15 %
Bureaucrates et
1 500
alliés
MOYENNE BOURGEOISIE
- Hommes d'Affaires
2 000
3 000
0,15 %
- Marabouts moyens
1 000
PETITE BOURGEOISIE
- Commis et employés
30 000
- Artisans et
professions libérales
85 000
Etudiants
2 000
137 000
7
%
- Petits hommes
d'affaires
6 000
Petits marabouts
urbains
14 000
PROLETARIAT
- Agents de Maîtrise
8 000
100 000
5
%
- Ouvriers qualifiés
42 000
- Manoeuvres
49 000
- Apprentis
1 000
PAYSANNERIE
- Paysans pauvres
670 000
- Paysans moyens
730 000
. 1 717 000
87,7
%
- Paysans aisés
240 090
- Maraîchers
4 000
- Eleveurs
45 000
- Marabouts ruraux
28 000
Source:
D. MAJHEMOUT : Les classes sociales au Sénégal
Maspéro
1972
pp
254.

UNIVERSITE DE CLERMONT - FERRAND 1
FACULTE DES SCIENCES ECOJ'l'OMIQUES
19":'9 - 1980
'-CONTRIBUTION A UNE THORIENORMATIVE DE LA NATURE
ET DU ROLE DE L'ETAT EN PAYS SOUS -DEVELOPPEES
MLE ,CAS DES PAYS D'AFRIQUE NOIRE DE SUCCESSION FRANCAISE"
·THESE
PRESENTEE ET PUBL'QUEMENT SOUTENUE EN ..ro1N 1980
EN VUE DU GRADE DE
',.,
" 0 '
,
DOCTEUR HI eCYCLE EN 'SCIENCE ECONOMIQUES
..
'
~ ;
.f,
l'AR
;l
MIAKA OUREITO
'-
....: .
".
.fURY : Président : Monsieur P.· PASCJI.LLON ,Professeur
,
.
;
,
.
Suffragants :
J. C
BERTHOLON
M. PASSEMARD
. ....~~.. ,
':.;. ,
.~.,
,1
. .",..~-,

61.
Les classes sociales ainsi qu'on peut le constater se réduiraient
donc à de simples regroupements socio-professionnels. Du coup apparalt
le caractère empirique de l'analyse pour partager ici les critiques de
A. A. DIENG (1). Les différents regroupements sont, en effet, trop hété-
rogènes pour constituer une classe. L'analyse
pêche don~ par le fait
essentiel
qu'elle minimise les différents conflits qui peuvent subsister
entre les différents éléments qui composent les regroupements (2).
Il
semble ,en effet, que pour définir les classes sociales
il ne suffit pas
d'opérer une sorte de dissection. Il faut apprécier
non seulement leurs rapports réciproques mais aussi les relations
qu'elles entretiennent avec l'ensemble de la société, en particulier
avec sa superstructure culturelle, politique,
etc .•. (3)
Dès lors la classe n'est pleinement constituée qu'à partir
du moment où apparalt une réelle conscience de classe et cette cons-
cience de classe, on s'en doute, ne nalt pas de la simple coopération
matérielle dans le travail mais plutôt d'une idéologie commune qui
conditionne son existence, d'où les insuffisances encore une fois,
d'une analyse en terme de regroupement professionnel.
En réalité, il existe aujourd'hui un certain nombre d'inégalités
en Afrique noire: des inégalités dans le5professions, dans la répar-
tition du revenu etc •. qui sont, du reste, à l'origine de clivages
sociaux. tfuis il nous semble difficile d'affirmer l'existence de véritables
classes sociales. C'est ce que nous allons essayer de prouver.
(1) - A. A. DIENG : Marx~ Engels et les problèmes de l'Afrique.
Sankoré
1978
pp
145.
(2) -
Cf. J. MARCHAL et J. LECAILLON:
La répartition du revenu
national
- Tome III : le modèle classique et le
modèle marxiste
Edit. M. Th. GENIN
1958 pp 65 et suive
(3) -
Cf. Traité marxiste d'économie politique
Tome l
: Edit. Sociales
1971
pp
389
et suivantes.

62.
B -
Le DEPASSEMENT de la CONTROVERSE.
Il convient de reconnaître qu'en Afrique noire les anciennes
structures ainsi que nous l'avons montré dans nos développements précé-
dents ont été modifiées. De nouvelles structures issues du développement
de l'économie monétaire sont encore en formation. Des obstacles d'ordre
divers, viennent, du reste, émousser le caractère de classes des diffé-
rentes mutations que l'on observe
- Il Y a d'abord et avant tout les particularismes _claniques,
ethniques qui président
aux relations socio-économiques. Et c'est fort
justement, nous semble-t-il, que Jean-Marie GIBBAL dans "Citadins et
villageois dans une ville africaine" (1) souligne l'importance de ces
facteurs d'ordre ethnique qui rendent aléatoire une approche du milieu
africain en termes de classes.
Il Y a ensuite la nature absolutiste des pouvoirs africains
qui empêche tout regroupement sur la base d'une idéologie précise. A la
limite donc on ne peut faire cas, à l'heure actuelle, que d'une seule
classe politique qui regrouperait les hommes au pouvoir unis autour du
Parti unique, ceux-là que René DUMONT (2) appelle la "caste privilégiée
de la vie africaine". M"eme dans cette catégorie des divisions subsistent
qui se fondent sur certains critères particuliers où se mêlent la parenté,
l'ethnisme, au point qu'à l'intérieur de cette pseudo-classe il y a des
divisions closes, des conflits-coopérations.
Il Y a enfin l'importance de la diversité d'influence et la durée
de l'empreinte coloniale. Beaucoup de régions en Afrique ont été très
tôt ouvertes à la colonisation tandis que d'autres sont restées dans le
carcan des pures traditions. Il semble dans ces conditions très difficile
de réaliser un rapprochement qui permettrait la naissance d'une conscience
de classe. Le dualisme social
(3)
constitue ici un véritable obstacle
à la formation de cette conscience.
(1) -
J. M. GIBBAL :
eois dans une ville a ricaine :
P U G
1974
pp
172.
(2)
R. DUMONT: L'Afrique noire est mal partie
Seuil
1962
pp
63
(3) -
Il se manifeste par l'apparition à côté de la société traditionneUe
et se superposant à eUe, d'une structure sociale introduite par
la colonisation •
Cf.
Les nuances de TRAN
VAN MINH: Vie politique du Tiers-Monde
Les cours de Droit
1976 - 77
pp
66.

63.
Dès lors apparaît-il
plus réaliste, nous semble-t-il, de
raisonner en termes de clivages sociaux, de stratifications. L'économie
capitaliste a, en effet, conféré une dimension nouvelle aux antagonismes
sociaux. Il y a désormais en Afrique des détenteurs de moyens de produc-
tion et des détenteurs de la force productive, des inégalités sociales
flagrantes.
Mais la situation- est encore loin d'être la situation
dichotomique bourgeoisie-prolétariat telle qu'elle peut s'apprécier dans
les sociétés occidentales (1). La bourgeoisie et le prolétariat sont
non seulement
deux classes économiques mais aussi deux classes politiques.
Mieux nous disons avec TRAN VAN MINH (2) que la situation
en
Afrique noire est celle
d'une stratification hétérogène où des tensions
apparaissent sans qu'elles s'intègrent encore à un système de classes.
C'est désormais une situation en mouvement.
Le problème dès lors est de repenser les modèles individua-
listes de développement pour les adapter aux réalités économiques et
sociales de sorte à résoudre de façon satisfaisante tous les problèmes
d'emploi, de revenus et de répartition.
Il ne semble pas dans cette perspective que la voie pour les
pays d'Afrique puisse résider dans un libéralisme qui ne résoudrait
pas les
problèmes
structurels de développement ni dans un socialisme
rigide qui condamnerait l'Afrique dans une situation autarcique impossible
et irréaliste. La voie, nous semble-t-il, est à chercher dans un modèle
qui doit
être véritablement pragmatique et national.
C'est autour de ces points que nous construirons l'essentiel
de notre
second paragraphe.
(1) - Au sens où il n'existe que deux classes fondamentales:
la
bourgeoisie et le prolétariat.
Cf. Traité marxiste d'économie poZitique.
op. cit. pp
207
. (2) -
TEAN VAN MINH
op. cit.
pp
163

64.
PARAGRAPHE
II
Quel modèle de société pour l'Afrique noire
Libéra-
lisme
ou
socialisme?
Quels sont les besoins réels des pays africains sur le
plan économique et quelles sont les priorités en matière de politique
économique ? Dans la gamme des moyens dont on dispose pour réaliser ces
priorités les apports extérieurs n'apparaissent-ils pas comme un complé-
ment nécessaire et indispensable ? Le combat contre le sous-développement
économique n'exige-t-il pas enfin de rationaliser certains comportements?
- Voilà, à notre avis, quelques unes des questions
essentielles
qui doivent présider à tout effort d'élaboration d'un modèle de société.
- En nous inspirant de ces différentes interrogations nous mon-
trerons dans un premier temps le dilemne dans le choix d'un modèle de
société. Dans un deuxième temps nous expliciterons les erreurs à éviter
dans le choix d'un modèle de société. Enfin dans uneconclusion de syn-
thèse nous préciserons les contours de notre modèle de société.
A - Le DILEMME DANS LE CHOIX D'UN MODELE de SOCIETE pour
L'AFRIQUE NOIRE.
Le libéralisme ou plus exactement ce qu'il convient désormais
d'appeler
"interventionnisme libéral"
(1) ne saurait résoudre les pro-
blèmes structurels des économies africaines. Nous expliciterons ce point
(1) -
On le sait
depuis le dernier conflit mondial
l'action de l'Etat
3
3
est devenue si importante
ses fonctions si diversifiées que
3
l'économie dirigée est devenue une réalité. L'Etat intervient
non seulement à titre d'entrepreneur
mais avec l'intention de
3
contreler
d'orienter. Le libéralisme classique n'a plus dès lors
3
son
sens.
Cf.
A. BARRERE : Politique financière
Dalloz
1958 pp
15 - 16
P.M. GAUDEMET ; Finances publiques - politique finan-
cière - Budget et trésor
- Montchrestien
1974 pp 120.
G. TERNY: Econome des services collectifs et de
la dépense publique
Dunod
1971
pp
5 - 9

65.
par une étude
de cas qui montrera les insuffisances des instruments
keynésiens appliqués aux économies africaines (1)

La voie d'un
socialisme au sens classique du terme, c'est-à-
dire
projet collectif de développement basé sur une appropriation
collective
des moyens de production et sur une planification rigoureuse
(1) apparaît cependant irréaliste compte tenu d'un certain nombre de
besoins des pays africains (II).
l - Les insuffisances du libéralisme à résoudre les
problèmes structurels de développement économique en Afrique noire .
Nous tenterons ici un effort d'appréciation non seulement de
la doctrine générale de Keynes mais aussi et surtout d'un certain nom-
bre de modèles de croissance d'inspiration keynésienne qui ont été
proposés ces dernières années aux pays africains notamment celui de
Henri LEROUX .
Quelle est, en fait, la problématique keynésienne?
Le souci de la démarche keynésienne sera
explicité d'abord d'une
manière générale puis ensuite dans le cadre spécifique du modèle de
Henr i LERO UX •
\\1 - ~~_~~~~~_~~~~~~~_~~_~~_e~~~~~~~~g~~_ke~~~~~~~~
La doctrine keynésienne (2) -on le sait- se propose avant tout
de corriger les déséquilibres économiques par une intervention de l'Etat
(1) - Cf. ch. BETTELHEIM: Problèmes théoriques et pratiques de la
pZanification -
l&2spéro
1966
pp
24 et 35.
(2) -
Hormis la Théorie générale de J. M. KEYNES~ on consultera sur' ce
point :
- A. BARRERE : Politique financière
op. cit. pp 22 et suiv;
Economie financière tome II
Dalloz
1971
pp 551 et suivantes
- H. BROCHIER et P. TABATONI : Economie financière
P U F
1963
pp
407
et suivantes.
- M. DUVERGER : Les finances pub liques
Que sais-je
1967
pp 6 et suive

66.
qui dispose à cet
effet de deux instruments essentiels
le budget et
la monnaie.
Du reste, Keynes
et keynésiens pour formuler leur théorie
partent de l'hypothèse d'un équilibre de sous-emploi
chronique dû, semble-
t-il, à
une insuffisance de la demande globale. Le
rôle de la puissance
publique
sera alors de réaliser par une politique monétaire active et
une politique budgétaire active un équilibre de plein-emploi. Il s'agit,
en fait, d'accroître le revenu (national) grâce au jeu du multiplicateur.
Mieux on pourrait dire que la politique de plein-emploi au
travers des modalités budgétaires et monétaire répond dans la logique
keynésienne à un souci unique essentiel : augmenter le flux de consom-
mation et d'investissement pour permettre l'égalisation de l'offre et
de la demande globales à un niveau plus élevé de revenu et d'emploi.
L'instrument privilégié est ici l'investissement additionnel qui aura
un effet multiplicateur. Et i l est très important de saisir le mécanisme
du multiplicateur qui traduit finalement toute la philosophie véhiculée
par la doctrine keynésienne •
Keynes et les keynésiens définissent le multiplicateur de la
façon suivante :
- Si nous appelons
"K" ce multiplicateur des investissements,
i l nous indique que, lorsqu'un accroissement de l'investissement global
se produit, le revenu augmente d'un montant égal à K fois l'accroissement
de l'investissement. La valeur du multiplicateur (K) est précisément expri-
mée en fonction de la propension marginale à consommer
(C)
par la
formule suivante
l
K
= - - -
l-C
1-----------
Dans cette formule du multiplicateur transparaît le souci
fondamental de Keynes et des keynésiens: celui d'une croissance forcenée
par une politique délibérée. Nous
apprécierons encore mieux ce souci
à travers le contenu du modèle de LEROUX .

67.
l
La problématique
dans le cadre du modèle
12 -----------------------------------------
de H.
LEROUX.
Monsieur Henri LEROUX
(1)
propose un modèle de croissance
économique s'appuyant sur la pression fiscale à partir de l'observation
des comptes nationaux des 14 pays africains et malgaches d'expression
française.
Le modèle va traduire, somme toute, le souci de l'auteur de
dégager la nécessité de tenir compte des aspects spécifiques de la réalité
économique et sociale de ces Etats. Certains aspects de cette réalité
lui échappent malheureusement ainsi que nous le verrons dans la suite
de nos développements.
Comment procède l'auteur pour construire son modèle?
Monsieur LEROUX
à partir des structures économiques des
14 pays qu'il a retenus souligne entre autres le "poids des administra-
tions dans l'économie de ces pays et le rôle moteur des investissements
publics" (Q). Les investissements publics, montre-t-il, et nous sommes
en plein dans l'optique keynésienne du multiplicateur des dépenses (3),
entraînent
non seulement un accroissement de la production nationale
mais incite également les entreprises
privées à accroître leur produc-
tion en vue de faire face à l'augmentation de la demande de consommation
due aux distributions de revenus supplémentaires qu'engendre l'investis-
sement
nouveau. Il s'agit donc ni plus ni moins de déclencher le proces-
sus de croissance économique en palliant, ainsi que
le préconise KEYNES,
à l'insuffisance de la "demande globale" (4).
:MJnsieur LEROUX
ne perd pas de vue par ailleurs que "1' inves-
tissement administratif" engendre des charges récurrentes, c'est-à-dire,
des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de formation du personnel.
L'auteur étudie ces charges récurrentes et dégage pour les 14 pays
retenus un taux moyen qui se situe entre ~ et 25 % de l'investissement.
Après avoir dégagé les principales caractéristiques que nous
venons de présenter, ~nsieur LEROUX propose alors le modèle technique
dont nous voudrions exposer les hypothèses et la résolution :

68.
Notes de la page précédente.
(1) -
Cf. H. LEROUX
: '~es comptes économiques aux modèles : essai
d'application à des pays sous-développés"
Revue d'économie appliquée
1963 nO 1
pp
19? - 221.
On consultera par ailleurs sur ce point les travaux auxquels
nous empruntons~ du reste~ dans le cadre de nos développements : à savoir
ceux de :
- G. ~ GBAKA : Le rôle de la fiscalité dans le pays du Tiers-
Monde : Cadre de référence : La Côte d'Ivoire
Thèse Clermont
1978
pp
296 - 30?
- A. SILEM : Structures fiscales des jeunes nations
L'exemple dé l'Algérie~ un essai d'élaboration d'un
système fiscal d'introversion économique.
Thèse
Lyon II
1975 pp
353 - 356.
(2) - H. LEROUX
op. cit.
pp
198.
(3) -
Cf. sur ce point
J. LECAILLON : Analyse macro-économique
Cujas
1969
pp
245 et suiv.
E. VESSILIER : Les fondements de l'économie
financière -
Dossiers Thémis
1972
pp
34
et suivantes.
(4) -
Cf
les nuances de:
A. BARRERE : Politique financière
Dalloz
1958 pp
22 et suivantes - Economie financière
tome II
Dalloz
1971
pp
551 - 561 •
H. BROSSIER et P. TABATONI : Economie financière
P U F
1963
pp
407.

69.
• Les hypothèses du modèle ?
(1) Existence d'un multiplicateur d'investissements administratifs dans
la relation :
1
= T
avec
I
a
= investissement administratif réalisé au temps (tJ
t
=
investissement induit par
Ia t
1
_
~ - multiplicateur
L'auteur précise qu'un investissement administratif d'un
montant
I a
entraînera un investissement total de
I t dans le rapport
1
(=
1, 8 à 2,3 pour les pays étudiés)
T
(2) La fonction de production choisie est de type Harrod DOU&R
1
1
=
+
K'
~

)ft =
production au temps (t)
et
K' = Coefficient marginal de capital.
(3)
Les investissements (Ia)
sont financés par les recettes fiscales
(F), augmentées de la contribution publique d'origine extérieure, aide
extérieure (A)
et diminuées des dépenses courantes en achats de biens
et services (Ca)
et des traitements et salaires ( Wa)
soit
(4) Les investissements publics réalisés en année
t
entraînent en année
t + 1
un accroissement des dépenses courantes de fonctionnement

70.
de telle sorte qu'on peut définir un taux (e)
de charges récurrentes:
r
1
+
:. Cat+
Wat
+ 1 \\
e
j
(5)
Soient :
~= F
le taux moyen de pression fiscale .
Y .)
A
a
=
le taux moyen de l'aide extérieure
1
(6)
L'ob j ectif est de réaliser une "accélération" de la croissance du
taux (j)
dans la relation 5 1 = ~ 0
(1+j) ~ 0
étant le taux de croi9-
C
sance du produit au temps ( 0)
et 81 ce taux au temps (1)
• La résolution du modèle ?
Le problème de Mmsieur
LEROUX
consiste à déterminer l'accrois-
sement du taux moyen de pression fiscale (4 rr ) qui permette d'atteindre
l'objectif du taux de croissance fixé. L'auteur pose alors que, compte
tenu des hypothèse 0)
et (2) , les investissements pub lics devront
s'accroître au taux 81 =
0
(1+ j )
ce qui donne :
[
I a 1
I a 0
1 +}o
( 1 + j ) ]
ou encore
I a
-
I ao
= fl I a
=
(3 0 +j~-O ) Iao (7)
1
-
Le taux de l'aide extérieure supposé constan~
permet à partir
des relations (3), (4) , (5)
et (6)
l'accroissement des investissements
administratifs selon le processus suivant. :
AIa = ÇoAY + Â~[~ + !J.Y - e I ao
( 8 )
c'est -à -dire J f
~1lIa - fo A y
il t
t- e I ao (9)

71.
Or d'après la relation (2)
on sait que
47' =K~ ~. Iao on
peut dès lors écrire, avec les relations (7)
(8) et (9) , l'expression
du taux moyen de pression fiscale nécessaire pour réaliser une accéléra-
tion du taux go
(l + j)
:
~o+a
il b=
. Iao
(go + jgo)
Iao
+ e I ao
k' é
d'où
fo
L1 g
+ a
Iao
= (go + jgo + e
) .
K '. f:,
par~o,
En désignant
le taux d'investissement réalisé en année
zéro on obtient
LI! = go + JgO + e K'G (1 + go
L'auteur s'appuie
sur cette équation pour affirmer que dans
un "Etat africain moyen" pour lequel les paramètres auraient les valeurs
1
go =
0 04
15
0
= 0 10
08 ; G
= 2;
0
= 0 12 et
3
3
e =
03
3
3
a = 03
3
K' = 4
il serait nécessaire d'accroître d'au moins 0,6 % le taux moyen
de pression fiscale pour assurer une accélération de la croissance de 20 %.
Quelles sont les conditions
structurelles qui permettent de
dégager cette pression fiscale? C'est à cette question essentielle que
ne répond pas
d'une manière générale la doctrine keynésienne et d'une
manière spécifique le modèle de LEROUX.

72.
II. Les limites du schéma keynésien appliqué aux économies
africaines.
Comment se pose généralement le problème et
comment peut-on
l'apprécier
dans le cadre du modèle de LEROUK
? Ce sont à ces deux questions
que nous allons essayer de répondre •
II
-
Le cadre général du prob lème.
1
-----------------------------
Les insuffisances de la théorie de plein emploi dans son applica-
tion à des économies sous-développées que sont les économies africaines
s'apprécient au niveau des hypothèses qui sous-tendent cette théorie et
encore mieux au niveau des objectifs que poursuit la démarche keynésienne.
L'analyse keynésienne, on le sait, est une analyse macro-économique
le raisonnement se fait en termes globaux • A ce niveau le problème ne
consiste pas à rejeter en bloc ce que d'aucuns considèrent comme l'une
des "innovations des plus importantes"
apportées par Keynes à l'analyse
économique (1). Il s'agit plutôt de savoir si un agrégat national
à
une signification quelconque dans le cadre des économies africaines. La
tentation est grande de répondre par la négative à cette question pour
une raison essentielle :
-
Les économies africaines sont,en effet, caractérisées par la
coexistence d'une économie monétaire dite moderne et d'un secteur tradi-
tionnel d'auto-subsistance dominant, d'où une hétérogénéité profonde.
Une analyse en termes d'agrégat n'aura par conséquent aucune signification.
-
Toute agrégation d'ordre macro-économique aboutira, on ne
saurait
le nier, à une évaluation grossière et tronquée des problèmes
à résoudre.
-
Précisément l'évaluation de la demande globale - l'accroissement
de cette demande globale reste dans la perspective keynésienne l'objectif
essentiel de la politique économique -
n'aura aucune signification.
Si l'évaluation ex-post d'une telle demande ne pose pas de difficultés
particulières dans le secteur moderne: c'est la multiplication des quantités
échangées sur le marché par leur prix en monnaie constaté sur le marché ;
(1) -
Par exerrrp le J. FREYSSINET
Le concept de sous-dêveloppement
Mouton
1966
pp
78.

7 3.
le problème devient, en effet, quasiment insoluble lorsqu'on passe au
secteur traditionnel où une grande partie
de la demande est satisfaite
par l'auto-consommation.
Au-delà de ces premières observations un accent particulier doit
être mis sur le concept même de plein-emploi qui oriente toute l'analyse
keynésienne. Le pleirr- emploi, nous dit Keynes (1)
c'est l'ab sence de
chômage involontaire ; le contenu même de la notion de chômage involon-
taire est précisé avec soin :
'7l existe~ semble-t-il~ des chômeurs involontaires si en cas
d'une légère hausse du prix des biens de consommation ouvrière
par rapport aux salaires nominaux~ l'offre globale de main-d'oeuvre
disposée à travailler aux conditions courantes de salaire et
la demande globale de main-d'oeuvre aux m&mes conditions s'éta-
blissent toutes deux au-dessus du niveau antérieur de l'emploi" (2)
A la lumière de cette définition on voit
que l'effort dans la
perspective keynésienne revient finalement à résoudre le problème des
seuls salariés de l'économie en débloquant l'appareil économique par
une politique monétaire ou budgétaire.
Cet objectif apparaît insuffisant dans le cadre des économies
africaines où l'effort de développement
économique doit, nous semble- t- il,
porter essentiellement sur le secteur traditionnel qui reste le principal
réservoir des ressources. Les tâches urgentes consistent à créer les
conditions structurelles de l'emploi, à savoir, la modernisation du secteur
traditionnel , la formation des hommes, la transformation des structures
mentales et des habitures sociales pour nous limiter à celles-là
(3).
(1) -
J.M.
KEYNES: Théorie générale de l 'emploi~ de l'intérêt et de
la monnaie
Payot
1966
pp
34.
(2)
J. M.
KEYNES
Ibid
pp
37
(3) -
Cf. les nuances de F. PERROUX
: La généralisation de la General
theory "
dans M. BYE
et De BERNIS : Relations économiques inter-
nationales
Tome l
: échanges internationaux.
Dalloz
1971
pp
422
E. GANNAGE : Economie du développement
Préf. de F. PERROUX
P U F
1962
pp
27 - 28.

74.
Nous touchons là précisément le domaine sur lequel échouent les
modèles libéraux de croissance qui tendent à présenter le développement
économique comme un simple processus d'accumulation, sans chercher à
remettre certaines structures en cause.
On perçoit encore mieux cette lacune à travers le modèle de
LEROUX.
H. LEROUX.
Le modèle de Mmsieur Henri LERO UX
constitue un apport certain
dans le cadre des économies africaines de deux points de vue :
-
n'abord le modèle s'inscrit en faux contre le principe de
laisser-faire. Les motifs de croissance économique rendent désormais
illusoire le principe de l'équilibre budgétaire au plus faible volume
(Cf. notre introduction générale).
Le modèle souligne ensuite la nécessité pour les pays africains
d'adapter le taux de pression fiscale au taux et aux objectifs de la
croissance
économique. Il semble finalement que pour ces pays,
seule
une politique volontariste peut constituer une solution à leurs problèmes.
Cependant le modèle passe sous silence un certain nombre de
réalités et de contraintes qui paraissent essentielles dans le cadre des
économies africaines. Le vrai problème ainsi que nous l'avons dit
dans nos développements précédents est celui d'une restructuration et
d'une organisation
globale de la production et du système de production.
C'est pour contourner cette réalité que Mmsieur LEROUX fonde, à notre
avis, son modèle sur un certain nombre de paramètres qu'il suppose
abusivement constann4. Empruntons la liste de ces paramètres à K. G.
ŒAKA (1):
-
n'abord le modèle suppose constant le niveau
général des
prix, le taux de salaire réel et le taux de l'intérêt. Les limites du
modèle apparaissent dès lors qu'on sait que les économies africaines
(1) -
K. G. GBAKA : Le rôle de la fiscalité dans les pays du Tiers-Monde
op. cit.
pp
304-307.

75.
subissent le plus souvent
le contre-coup de la détérioration des termes
de l'échange (1)
L'auteur associe indirectement le secteur privé au modèle
de
croissance
sans proposer une véritable stratégie de prélèvement fiscal
sur ce
secteur qui contrôle les 3/4 des économies africaines.
L'auteur fait aussi l'hypothèse d'une constance du montant de
l'aide extérieure. Cette hypothèse, on ne saurait le nier, est peu
réaliste car les concours financiers extérieurs sont des ressources très
aléatoires en raison de nombreux facteurs qui les influencent (facteurs
politiques, stratégiques, idéologiques, etc).
Au total le
modèle considère les structures existantes comme
une donnée de base sans chercher à les modifier. Cette philosophie
libérale apparaît insuffisante dans le cadre des économies africaines.
On ne le dira jamais assez. Cependant
la voie d'un modèle socialiste
de croissance semble se heurter à un certain nombre de contraintes.
Notre second
sous-paragraphe
sera consacré à l'examen de cette
question
II -
Les difficultés d'application du socialisme
en Afrique noire.
L'adoption
d'une structure
socialiste rigide se heurte aujour-
d'hui, on ne saurait le nier, à deux obstacles majeurs:
Il Y a d'abord le poids des entreprises multinationales.
-
Il Y a ensuite la contrainte qu'impose la dépendance
finan-
cière
des économies
africaines à l'égard des économies développées.
Les firmes multinationales(2) (Cf. tableau nO 8 ci-après) de
par leurs activités ne constituent pasœulement un apport pour les pays
en voie
de développement ainsi que1~tipulent certaines analyses trop
partisanes (3). Elles menacent aussi de par leur pouvoir économique
l'autonomie des décisions publiques. Cela semble d'autant plus indéniable

76.
NOTES de la page précédente.
(1) -
La défiriition et la mesure du concept sont fort bien présentées
par J. OUPOH OUPOH : Le processus
d'industrialisation d'une économie
à croissance agricole
: le cas de la Côte-d'Ivoire.
Thèse
Clermont
1979
pp
209 - 218
(2) -A propos
du concept de firme multinationale Charles Albert MICHALET
écrit :
'~es nations industrielles ne se bornent plus à vendre à
l'extérieur une part croissance de leurs produits. Elles
déterritorialisent
aussi bien leur propre appareil productif.
Elles arrachent les industries entières. Elles déplacent certains
secteurs hors du berceau originel pour les installer dans
d'autres économies développées et dans des régions périphériques
sous-développées ".
Il ressort que les firmes multinationales sont de grandes entre-
prises nationales qui possèdent ou contrôlent plusieurs filiales de pro-
duction dans plusieurs pays. Ce concept va~ du reste~ évoluer pour atteindre
l'appeUation
toute récente de "firmes transnationales".
On parlera de multinationales lorsqu'il s'agit d'entreprises
des pays
industrialisés ayant leurs filiales uniquement dans des pays
industrialisés. Les entreprises transnationales seraient par contre des
firmes de pays industrialisés ayant leurs filiales dans les pays sous-
développés.
- Nous nous contenterons quant à nous du concept classique de
multinationales dans la mesure où nous estimons que le problème des multi-
nationales n'est pas un problème spécifique aux pays en voie de développement.
Cf. d'abord pour la définition Ch A. MICHALET : Le capitalisme
mondial
P U F
1976
pp
10
~
Pour la discussion du
concept: J. OUPOH OUPOH : Le processus
d'industrialisation dans une économie à croissance agricole : le cas de
la Côte d'Ivoire
Thèse d'Etat
Clermont 1979 pp
366.
(3) -
Notamment celles de Raymond VERNON
dans : Les entreprises
multinationales
Calman Levy
1973
pp
214 - 227.

77.
Tableau nO 8
Quelques filiales de multinationales
en Côte-d'Ivoire.
NO r-ENCLAT lRE DES
PRINCIPA UX ffiOUPES
RAISON
SOCIALE
DE
FILIALES
ACTIONNAIRES
LA
RLIALE
LACIPA
(Compagnie
: Filiale du groupe
Production alimentaire
ivoirienne de produits
.• M[}RAN
alimentaires
ICODI (La Société
: - C.
F. A. o. (27 %)
des impressions sur
: - C.
F. C. l.
(27 %)
Usine d'impression
tissus de Côte-
d'Ivoire)
RIE CEL TE Xl'ILE
sur tissus
CORPORATION (17 %)
Ets SCHAEFFER (17 %)
S. C. D. A.
(12 %)
La S.I. A. C. A.
Filiale de la Société
(Société ivoiro-
allemande de conserve
allemande de conserve
d'ananas et de
Conserve d'ananas
d'ananas)
..
TAIWAN PENEAPPLE
CORPORATION
La
SOCIETE UNIWAX
• - TE XOPRINTNV
(20 %)
· - COWAGNIE FRANCAISE
·
.
Impression sur
·
· de la COTE-d'IVOIRE
·
.
tissus.
·
· et l'A FRICliiINE
·
·· FRANÇAISE
(80 %)
·
·
·
S07O'ce
Tableau construit à partir de : Economie ivoirienne ~
EDIAFRIC : La documentation française Edition 1973
pp
90.

78.
que ce
n'est
pas une situation spécifique aux pays en voie de déve-
loppement. L'approche du conflit entre les firmes multinationales et
l'Etat-nation repose, en effet, sur une incompatibilité naturelle que
l'on peut étendre à toutes les sociétés, quoique dans les pays sous-
développés le problème semble plus grave
La grande firme, on le sait, a pour finalité normale et prin-
cipe de fonctionnement la recherche du profit tandis que l'Etat par défi-
nition poursuit des intérêts collectifs. A priori donc il semble difficile
de concilier les objectifs des multinationales avec ceux d'une planifi-
cation rigide. Ce rapprochement est d'autant plus difficile que les
"objectifs de ces firmes", pour paraphraser ici Pascal ORDONNEAU (1) ,
sont déterminés à un niveau mondial sans référence aux objectifs écono-
miques des différentes nations. Il en résulte que les filiales installées
dans les divers pays ont des objectifs prédéterminés qui n'ont aucune
raison de coincider avec ceux des plans nationaux
(2).
• Dans cette perspective il est vrai on ne saurait préconiser
la voie d'une socialisation rigide pour des pays encore technologiquement
dépendants qui se trouvent du fait même de cette situation sous l'emprise
de l'économie mondiale capitaliste; une emprise d'autant plus forte,
du reste, qu'elle exerce -ainsi que le précise Yves BENOT (3) un
"irrésistible pouvoir d'attraction sur les cadres supérieurs des sociétés
africaines entraînés à devenir les arrière-gardes des trusts internationaux"
Dans cette perspective, il est vrai, une des solutions au problème
pourrait consister à engager un débat au cours duquel seront posées les
règles qui précisent ce que doivent apporter les firmes étrangères pour
être acceptées. C'est ce que devrait être la meilleure ligne de politique
économique pour les économies africaines. Nous n'en doutons pas. Mais
une telle perspective exclut d'emblée -ce que nous
cherchons justement
à prouver- tout dogmatisme et tout radicalisme dans les positions doctrinales
(1) -
P. ORDONNEAU : Les multinationales
contre les Etats - Les
Edit. Ouvrières
1975
pp
126 •
. (2) -Voir aussi les nuances de F.
HINCKER -L. SEVE et J. FABRE: Les
Communistes et l'Etat. Les Editions Sociales
1977
pp
60 et suiVe
(3) -
Y. BENOT
Les idëologies des indëpendances africaines
Présence Africaine
1972
pp
300.

79.
car on n'oubliera pas que dans ce consensus des avantages seront exigés
en échange des concessions qui pourraient être octroyées. Encore une fois
toute attitude radicale se trouve d'emblée exclue du champ d'analyse et
ce d'autant que l'on ne saurait nier l'apport des firmes étrangères à des
pays qui ont un profond besoin d'équipement.
Mieux il y a l e problème de la dépendance financière qui rend
davantage contraignant l'environnement économique africain.
-
Au-delà des limites économiques de l'endettement extérieur (1),
ce sont surtout les limites d'ordre politique de cet endettement qui retien-
nent ici notre attention.
-
Le problème encore une fois n'est pas spécifique aux pays en
voie de développement. L'histoire nous fournit l'exemple du cas français
avec le retentissant échec du gouvernement communiste en 19 36 à un moment
où il Y avait encore dans le pays
l'influence des capitaux américains (2).
- L'emprunt, ainsi que le reconnaît le Doyen BARRERE (3)
peut
s'accompagner pour ne pas dire s'accompagne toujours de conditions poli-
tiques implicites dont la forme la plus courante réside dans l'immixtion
dans les affaires intérieures du pays débiteur (Cf tableau nO 9 ci-après).
(1) -
Ces limites tiennent au fait que l'endettem~nt7de I~Etat~st
effectué en monnaie étrangère et comporte ~ ob&~gat~on
ae
remboursement en cette monnaie.
Il en résulte pour le service
des intérêts
de la dette et pour le remboursement au moment de
l'échéance une charge de transfert qui peut provoquer un désé-
quilibre de la balance des paiements. De plus si une dévaluation
est intervenue entre temps~ la charge de remboursement s'en trouve
accrue.
Précisions empruntées à
A. BARRERE : Economie et institutions
financières
Dalloz
1972
pp
124.
(2) -Cf. FABRE-HINCKER et SEVE: Les communistes et l'Etat
op. cit . pp
83.
(3) -
A. BARRERE : Economie et institutions financières
Dalloz
1971
pp
125.

80.
Tableau
nO
9
Evolution de la dette
extérieure des
six pays
de l'UMOA
(Milliards de FCFA)
PAYS
EVOLUTION DE LA DETTE
1967
1968
969
1970
1971
1972
1973
1974
1975
1976
BENIN
10,5
10,2
13,9
13,7
15, 1
23,2
35
43,1
45,3
48
COTE-D IVOIRE
62,6
88,7 107,9
117.8
137
179
198,8
256,8
327,5
519,9
HAUTE-VOLTA
5.1
5,2
6,4
9, 1
9,5
10,5
26,4
31,3
43,3
60
NIGER
7,8
13,3
17,2
23,7
25,2
17,5
28, 1
41,8
49,6
61,6
SENEGAL
22,5
34,5
39,4
40, 1
44,5
48,9
84
95,8
118,6
145,7
TOGO
8,8
9,9
12,6
13
14,9
27,8
42,5
44,7
46,7
80,5
Source:
Statistiques
BIED
(1967-1971)
B.C.E.A.O. (1972-1976)

81.
Le "grand capital" autrement dit réussira à un degré
ou à un autre à
conserver des positions décisives dans l'économie, à limiter la démocra-
tisation des structures et du fonctionnement de l'appareil d'Etat.
\\bilà
un certain nombre de réalités qui excluent, à notre
avis, une prise de position du genre dogmatique. Queli,* sont au-delà
de ces faits les enseignements à prendre en compte dans le choix d'un
modèle de société, tels que ces enseignements peuvent dé'couler d'une
analyse critique des structures et des systèmes africains ?
C'est à cette question que nous allons à présent essayer de
répondre.
B -
Les ERREURS à EVITER DANS LE CHOIX D'UN MODELE de SOCIETE:
UNE ANALYSE CRITIQUE DES SYSTEMES ECONOMIQUES AFRICAINS.
Nous envisagerons tour à tour une analyse critique du libéralisme
et du socialisme tels qu'ils se pratiquent de nos jours dans les pays
africains.
l - Le contenu et les limites du libéralisme africain.
Le libéralisme africain se voudrait d'être un instrument pragma-
tique de politique économique (1). Il n'en demeure pas moins plein
d'ambiguités et de confusions.
Ce libéralisme est, d'une manière générale, le fait d'une inter-
vention de l'Etat qui oriente le développement, provoque les initiatives,
finance parfois les réalisations; intervention de l'Etat qui, du reste,
s'apprécie dans le développement d'un important secteur public comportant
à la fois des sociétés d'Etat et des sociétés d'économie mixte (Cf. tableau
nO 10, ci-après).
Apparemment la situation n'appelle pas de critiques; mais en
réalité des contradictions subsistent qui tiennent à la nature même et
au mode de fonctionnement de ce secteur public. Et c'est très objectivement
-que
Mme
J. DUTHEIL de la ROCHERE
(2)
se penchant sur le cas
spécifique
(1) -
Cf les nuances de M. MERLE dans l'Afrique contemporaine
A. Cotin
1968
pp
271.
(2) -
J. DUTHEIL de la ROCHERE: L'Etat et le développement de 'la Ctte-
d 'Ivoir e
A. Pedone
1975 pp
30 - 31.

Tableau nO
la -
Sociétés d'état en COTE-d'IVOIRE
PrAPITAL SOCIAL
PARTICIPATION
DENOMINATION
OBJET
SOCIAL
(miUions FCFA)
PUBLIQUE
(%)
l. Autorité pour l'am~
Aménagement de la
200
100 %
nagement de la
vallée du
vallée du Bandama
Bandama
(A. V.B.)
2. Autorité pour l' am~
Aménagement de
200
100 %
nagement de la région
la région du
du Sud- Oues t
Sud-Ouest
(A.D.S.O.)
3. Bureaux nationaux
Bureaux d'études
d'études techniques
techniques
283
100 %
et de développement
(B.N.E.T.D.)
4 -
Crédit de la
Côte- d'Ivoire
Banque
1 000
100 %
(C.C.I.)
5. Centre d'exploita-
Développement de
tion industrielle
l'élevage
150
100 %
du bétail
(C.E.I.B.)
6- Centre ivoirien du
Promotion des échanges
commerce extérieur
commerciaux
50
100 %
(C.I.C.E.)
7 - Caisse de stab i-
Achat et vente du
4 000
100 %
lisation et de
café, du cacao et de
soutien des prix
quelques autres
de produits
produits agricoles
agricoles
(C.S.S.P.P.A.)
8 -
Institut pour la
Recherche sur les
technologie et
produits agricoles
l'industrialisation
tropicaux
50
100 %
des produits
agricoles tropicaux
(I.T.I.P.A.T.)
9 -
Loterie nationale
de Côte-d'Ivoire
Loterie nationale
50
100 %
(L.O.N.A.C.I.)
./ ...

82.
Tableau nO
10
-
suite
la - Société pour le
Défrichement et
développement de
travaux agricoles
230
100 %
motorisation de
l'agriculture
(M.O.T.O.R.A. G.R.I.)
11 -
Banque nationale
Crédit Immobilier
1 000
100 %
d'Epargne et de
Crédit
(B.N.E.C. )
~ - Société d'assistance
Développement de
technique pour la
la culture du
150
100 %
modernisation agricole
café et du cacao
de Côte -d'Ivoire
(S.A.T.M.A.C.I. )
13 -
Société d'équipement
Aménagement
des terrains
urbain
200
100 %
urbains
(S.E.T.U.)
14 -
Société des
Création et
caoutchoucs de
exploitation des
2 917
100 %
Côte- d'Ivoire
plantations
(S.O.C.A.T.C.I.)
d'hévéas
15 -
Société ivoi-
Compagnie de
rienne de trans-
navigation
100 %
port maritime
(S.I.T.R.A.M.)
16- Société des trans-
Transports
ports ab idjanais
urbains
(S.O.T.R.A.)
D -
Société pour le
Promotion des
développement des
cultures de
fruits et légumes
fruits et légumes
~O
100 %
(S .O.D.E. F.E.L.)
18 -
Société pour le
Reboisement
50
100 %
développement des
plantations
forestières
(S.O.D.E. F.O.R.)
19- Société pour le
Recherche minière
65,3
100 %
développement minier
en Côte-d'Ivoire
(SO.DE. }[.)
20 -
Société pour le
Développement et
développement et
exploitation du
l'exploitation du
palmier à huile,
400
100 %
palmier à huile
du cocotier et
(S.O.D.E. PALM.)
des industries
annexes
1

Suite du tab 1eau nO 10
83.
1
21- Société pour le
Développement de
développement des
l'élevage
405
100 %
productions animales
(S.O.D.E.PR.A
22 -
Société pour le dé-
Plantation de canne
ve10ppement des
à sucre et
plantations de canne
production de
à sucre, l'indus-
sucre
100
100 %
tria1isation et la
commercialisation du
sucre (SODESUCRE)
23 -
Société de gestion
Construction et
financière de
gestion immob ilière
623
100 %
1 'hab itat
(SO. Œ. FLHA)
24 -
Société nationale
Prise de participation
de financement
dans les entreprises
800
100 %
(SO .NA. FI)
25 - Bureau ivoirien de
Réalisation des
normalisation
études de norma1is&-
30
100 %
(B. LN.)
tion dans l'industrie
et l'agriculture
26 -
Centre national
Organisation du trans-
10
100 %
des bureaux de
port
routier des
fret
marchandises
(C.N.B.F.)
27 -
Société nationale
Exécution de
de Œnie Civil
travaux pub 1ics
720
-
(SO.NA. Œ.CI)
28 -
Société pour la
Exécution de forages
réalisation de forages
hydrauliques
850
100 %
d'exploitation en
Côte- d'Ivoire
( roREXI:)
29 -
Société nationale
Fab r ica t ion
de conditionnement
d' ernb a11ages
150
1
(S.O.N.A.C.O.)
30- Société ivoirienne
Commercialisation des
pour la commercia1i-
fruits et
500
-
sation des fruits et
légumes
légumes
(S.I.C.O.F.R.E.L.)
Fab rication d'outils
31 -
l \\UIROUTIL
agricole
200
-
32 -
PETROCI
Recherches pétrolières
2 000
-
Source
H. BOURGOIN et H. GUILHAUME : Côte-d'Ivoire
Economie et
soci4t4
Stock
1979
pp
72-74

.~ ....
84.
du libéralisme
ivoirien
en souligne les deux faiblesses essentielles
- D'abord d'un point de vue purement théorique l'intervention
de l'Etat dans la vie économique ne se fonde sur aucune option doctrinale
sur la place de l'Etat~ du secteur public dans la vie économique (1).
Encore mieux on relève une sorte de confusion entre l'étatique et le
privé dans la mesure où l'intervention de la puissance publique se fait
selon les règles
les plus élémentaires du droit privé.
- Le caractère ambigu de cette intervention se trouve~ en
seconde vue~ accentué par le fait
qu'il n'y a aucun effort pour assoc~er
la population à l'action du gouvernement,(2).
En définitive~
l'intervention de l'Etat dans les régimes libéraux
d'Afrique revient à organiser l'économie nationale non seulement au profit
des intérêts précis de certaines couches sociales (3) mais aussi au profit
des intérêts étrangers. Les caractéristiques essentielles sont donc celles
d'un capitalisme monopoliste d'Etat (4) à saVOH :
- - Financement par l'Etat dans de grandes proportions; l'acqui-
sition pour les grands groupes capitalistes des moyens matériels de
production.
Création de sociétés d'économie mixte où sont associés Etat
et entreprises privées.
- - Tarifs préférentiels accordés aux grands groupes capitalistes.
Il n'en reste pas mo~ns que les régimes libéraux d'Afrique
traduisent un certain souci de pragmatisme, de réalisme. Le fait de
percevoir la nécessité de la coopération économique internationale, même
s~ le système dans son fonctionnement ne s'inspire guère de la théorie
du commerce international des classiques orthodoxes (5))même
si l'on
perçoit le développement uniquement comme un processus d'accumulation J
relève de ce réalisme
qui nous semble indispensable dans les conditions
économiques actuelles de l'Afrique. Encore mieux quand dans les structures
dites socialistes, la corruption, les pratiques tribales et des confusions
de tous ordres n'autorisent pas une remise en cause systématique de ces
régimes libéraux , ainsi que nous allons le montrer dans les lignes qu~
vont suivre.

85.
Notes de la page précédente.
(1) -
L'Etat est d'abord producteur de biens collectifs. Voir
A. BARRERE:
~olitique financière Dalloz. 1958 pp
22 - 23.
G. TERNY: Econorrrie
es services collectifs et de la dépense publique
Dunod
1971
pp 5
notarrunent.
(2) -
En fait, en Côte-d'Ivoire il y a deux organes professionnels:
- La Chambre de Commerce et d'Industrie créée par 4 décrets
du 17.5.63 dont les membres sont recrutés selon un mode de scrutin qui
favorise les commerces importants et les grandes entreprises au détriment
des
petits groupes professionnels.
- La Chambre d'Agriculture qui, parce qu'éloignée des réalités
du monde paysan n'est pas justement l'organe de ce monde, ,mais plutôt
celui des milieux intégrés à l'éconorrrie moderne.

J. DUTHEIL de la ROCHERE
op. ci t.
pp
30
(3) -
Voir les nuances de F. PARTANT: La Guerilla éconorrrique - les
conditions du développement. Seuil
1976
pp
75.
(4) - Anonyme : Traité marxiste d'économie politique: le capitalisme
monopoliste d'état. Les Edit. sociales 1976 pp'17 et suiv.
FABRE - HINCKER SEVE : Les communistes et l'Etat
Les Editions sociales
1971
pp
118.
(5) -
L'ouverture sur l'extérieur doit permettre non seulement un
processus d'accumulation, mais aussi un développement dans

la mesure où il s'agit d'encourager la société à perfectionner
le travail, à augmenter la puissance productive. Il ne s'agit
donc pas de permettre une liberté abusive de transferts.
Voir sur la théorie du commerce international
Christian PALLOIX : Economie mondiale capitaliste et les
firmes multinationales
Tome l
Maspero
1975
pp
84.

86.
II -
Le contenu et les limites des différentes formes
de "socialisme africain".
Deux formes de socialisme subsistent en Afrique no~re. Il y a
un socialisme dit "communaucratique ou africain" se fondant sur les
valeurs de la société africaine traditionnelle (essentiellement la
solidarité africaine) et un socialisme dit scientifique s'inspirant
du marxisme-lénisme.
- Le socialisme africain ou communaucratique n'est ni du com-
munisme, n~ du capitalisme mais un système qui assure une cohabitation
du capitalisme et du socialisme. Les moyens préconisés sont la plani-
fication souple, les sociétés d'économie mixte, les coopératives et une
reconnaissance de la nécessité de l'aide extérieure (1).
Ainsi qu'on peut le voir il n'y a aucune innovation par rapport
aux régimes libéraux, sauf que le socialisme africain apparaît comme la
stratégie de l'homme politique visant à concentrer le pouvoir aux mains
de l'appareil
d'Etat,
une certaine formule, somme toute, pour légitimer
la nature autoritaire du pouvoir (2). Les mêmes observations faites à
l'encontre des régimes libéraux
restent donc valables pour ce système.
Quant au socialisme scienfifique il se caractérise essentiel-
lement par un anti-capitalisme qui conduit à un neutralisme bienveillant
vis-à-vis
du bloc oriental. La lutte des classes signifie rupture avec
toutes les formes de domination par l'étranger.
Le but de la politique
économique est d'éliminer les inéga-
lités résultant du système colonial, d'empêcher la constitution de
groupes professionnels susceptibles d'exploiter les autres; même si les -
réalités sont aux antipodes de cette conception théorique. La seule étude
(1) -
Précisions empruntées à M. MERLE: Z'Afrique contemporaine op cit
pp
273.
(2)
A. MEISTER :
artir : changement sociaZ et
_ _--"""'--
e_n_A-!Cf_n----"-que_.
Seui
1962
pp
327.

87.
de Jean Pierre POATY sur les "'contradictions sociales au Congo" (l) constitue
un témoin éloquent qui autorise à cette boutade. L'auteur dans son article
insiste notamment sur le problème
du détournement des fonds publics ,
de la concentration des richesses au bénéfice de la bourgeoisie commerçante
et intellectuelle et
de l'organisation de la vie économique au profit
de cellules familiales
et tribales.
Voilà au total un certain nombre de faits essentiels dont il
convient, à notre avis, de tenir compte dans l'élaboration d'un modèle
de croissance pour l'Afrique noire: à la fois une nécessité du concours
extérieur qui interdit de verser dans le dogmatisme
et un tableau sombre
des réalités socio-culturelles africaines telles qu'elles constituent
un frein à un véritable processus de développement économique.
Quels enseignements convient-il d'en tirer? La réponse à cette
question va nous permettre de conclure cette première partie de notre
thèse.
(1) -
J. P. POATY : '~ontradictions sociales et formes de conflits sociaux
dans W'le ville africaine : BRAZZAVILLE" dans
Espaces et sociétés octobre février nO
10 - 11
pp
139 - 151.

88.
CONCLUSION
La construction de notre modèle de société dont le contenu
se précisera tout au long de nos développements sera fondée sur deux
enseignements essentiels :
• D'abord il semble que pour l'Afrique no~re le véritable pro-
blème à résoudre en matière de développement économique réside dans
un assainissement et dans une rationalisation de certaines habitudes
et certains comportements séculaires de sorte à réaliser dans le cadre
de chaque pays une cohésion nationale qui soit le moteur du développement
économique. Il faut que l'Etat soit véritablement souc~eux
de l'intérêt
de la collectivité tout entière. Cela impose de lutter contre la corrup-
tion, le tribalisme, d'aiguiser la conscience nationale de chaque indididu,
de sensibiliser les populations sur les vrais problèmes de développement.
I l semble ensuite que les pouvo~rs africains dans les relations
nécessaires avec le reste du monde devraient s'affirmer en tant que
l'émanation de la volonté
de tout un peuple qu~ aspire au bien-être
social. Dans cette ligne de réflexions Alain RIEU (1) souligne fort jus-
tement que
la logique d'une indépendance va plus loin que le simple
transfert de la souveraineté politique et administrative des mains du
colonisateur à celles des nationaux. Elle implique, on s'en doute, que
le nouveau pouvo~r prenne en charge les intérêts véritables des autoch-
tones sans les identifier nécessairement aux intérêts étrangers en place
au besoin le pouvoir politique s'opposera aux détenteurs du pouvoir éco-
nomique ; en s'assurant, en prévision de ces conflits, les moyens néces-
saires pour que son autorité ne reste pas un vain mot.
On retrouve là une idée chère au Professeur Gunnar MYRDAL
(2)
qu~
soulignait déjà que pour les pays pauvres l'indépendance politique signifie
-puisqu'on l'ignore dans bien des cas- la liberté pour eux d'organiser
leur propre vie conformément à leurs propres intérêts ; leur situation
de sous-développement les dispensant de tenir compte d'autres considérations
(1) -
A. RIEU
Pouvoir et sous-développement thèse complémentaire
Aix
1975
pp
14-15.
(2) -
G. MYRDAL : Théorie économique et pa~s sous-développés (Economie
theory and under dëvelope
countries)
trad. par
Mme
M. CHAZELLE
Présence Africaine
1959
pp 83.

89.
d'ordre international que celles qui jouent prioritairement dans leur
propre intérêt.
- A la lumière de ces seules évocations on devine le contenu
du modèle théorique que nous préconisons. En fait, à l'heure actuelle,
nul ne saurait douter de la nécessité de la prise en main de l'économie
par l'Etat;
encore moins quand cette intervention, cette prise en main,
répond aujourd'hui à un certain nombre d'objectifs que nous précise
Guy TERNY (1)
:
. Le développement technique suppose une organisation globale
de l'économie.
Cette organisation est reconnue plus efficace que les
ajustements approximatifs résultant de la concurrence •
• Les lois classiques sont insuffisantes pour satisfaire les
besoins sociaux
or aujourd'hui l'économie n'est pas seulement quanti-
tative mais aussi qualitative.
Le problème dès lors réside dans la nature de ce contrôle
nécessaire de l'économie par l'Etat. Pour les pays d'Afrique nous pensons
pour notre part à une structure dans laquelle tout en maintenant un
certain degré de liberté, l'Etat prendra en main les secteurs vitaux
de l'économie nationale; encore mieux une structure qui soit le produit
d'une
"conscience nationale" pour produire des objectifs consciemment
et rationnellement élaborées dans le sens où nous le précise Paul BOREL (2)
'~es peuples du Tiers-Monde devront créer une culture neuve.
En matière politique c'est leur propre histoire~ les circons-
tances
fortuites de leurs situations internes qui leur
indiqueront le modèle à suivre".
(1)
G. TERNY op cit
pp 5 - 9
(2) - P. BOREL : Les trois révolutions du développement.
Les Editions ouvrières
1968
pp
12.

90.
Il s'agit pour les pays d'Afrique no~re non seulement de
lutter contre le statu-quo hérité de la période coloniale mais aussi
d'exploiter rationnellement certaines valeurs traditionnelles telles
l'esprit communautaire que l'on devrait concilier avec les exigences
de la modernité.
Voilà le contenu de notre modèle national et social de
développement économique (Cf tableau nO J' ci-après)
Du reste, que l'on se rassure. En tenant ces propos nous
ne sommes pas sans ignorer le fossé qui existe le plus souvent entre
une conception théorique et sa traduction dans les faits. Il nous faut
dès lors et cela pour lever le doute et l'équivoque illustrer par des
exemples concrets ce que devraient être à notre sens, la nature et le
rôle de l'Etat en Afrique noire.
Comment convient-il concrètement de lutter contre le statu-
quo hérité de la période coloniale?
Comment réaliser la cohésion
sociale et l'esprit communautaire?
C'est autour de ces différentes interrogations que nous
construirons la seconde partie de notre thèse.

91.
Tableau nO
III
Schéma représentatif de la V01e africaine
de développement.
EST (socialisme)
OUEST (libéralisme)
MONDE
SOUS-DEVELOPPE
DEFENSE DES INTERETS
COHESION et PROMOTION
ETAT
ECONOMIQUES
SOCIALE de
Emanation de
L'HOMME AFRICAIN
~
NATIONAUX
la Nation
(dimension écono-
(dimension politique)
mique )
1
DEFENSE DES
INTERETS DE
L'AFRIQUE
(dimension
régionale)
Source: Construction personnelle.


92.
z
X
Z
DEUXI Er:1E PARTIE
THEORIE NORf1ATIVE
Z
Z
DE
Z
Z
Z
X
LA NATURE ET DU
ROLE DE L'ETAT EN
X
Z
X
X
X
Z
AFRIQUE NOIRE
ESSAI
D'ILLUSTRATION
Z
Z
Z
X
X
1
1
"Le déchirement
de notre monde actue l
exige que notre économie soit totalement
repensée~ réaménagée dans un sens plus
favorable
aux besoins de nos populations
qui végètent
dans
la ruine et
la misère
physiologique"
(1)


93.
INTRODUCTION
Nous nous limiterons ici à l'étude de deux cas pour appuyer
davantage notre théorie normative de la nature et du rôle de l'Etat en
Afrique noire.
Nous montrerons précisément à travers une analyse de la poli-
tique du code des investissements et de la politique de planification en
Afrique
ce que devraient être, à nos yeux~ la mission et la préoccupation
de l'Etat à la fois sur le plan économique, politique et social.
Notre souc~ et notre choix procèdent ici d'une observation des
faits. En effet~ dès les premières années des indépendances~ la politique
du code des investissements et la politique de planification ont été per-
çues par les responsabl'es africains comme deux moyens privilégiés pour met-
tre en place une infrastructure technique~ économique et sociale.
Des résultats probants ont été relativement atteints. Il con-
vient cependant de reconnaître que des insuffisances demeurent. Le contenu
que l'on donne à ces instruments ne répond pas dans la plupart des cas aux
impératifs du développement économique ; autrement dit on ne sent pas à
travers la mise en oeuvre de ces deux instruments la présence d'un Etat vé-
ritablement soucieux de l'intérêt général des populations.
Il convient dès lors~ nous semble-t-il~ de développer un effort
de réorientation et d'adaptation.
Voilà ce qui constituera l'essentiel de nos réflexions dans le
cadre de cette deuxième partie de notre thèse ; deuxième partie que nous
articulerons précisément autour des deux points suivants
CHAPITRE
I
:
LA NATURE ET LE ROLE DE L'ETAT EN AFRIQUE
NOIRE A TRA VERS LE CODE DES INVESTISSEMENTS
CHAPITRE
II
:
LA NATURE ET LE ROLE DE L'ETAT EN AFRIQUE
NOIRE A TRA VERS LA PLANIFICATION.

CHAPITRE' 1
LA
NATURE
ET.
LE
RÔLE
DE
L'ETAT
EN
AFRIQUE
NOIRE
À
TRAVERS
LE
CODE
DES
INVESTISSEMENTS

"A l'exception des téméraires
l'homme
cherche
3
les conséquences possibles de son action
sup-
3
pute ses chances~ évalue le risque~ prend ses
précautions et oriente son entreprise d'après
les espoirs~ les craintes et les suites favora-
bles ou défavorables qu'il entrevoit".
(1)
(1)
J. FREUND
:
Qu'est-ce que la politique?
Seuil 1970 -
pp. 70

9S.
INTRODUCTION DU CHAPITRE
• A Y regarder de près, la politique du code des investissements
en Afrique noire n'est pas un phénomène nouveau. En effet, déjà sous le ré-
gime colonial existaient des institutions
(1)
dont la mission formelle
était de contribuer par une politique de mobilisation des capitaux à la mi-
se en valeur des colonies. Les modèles actuels -dans leur formulation et
leur contenu- apparaissent comme la fille de ces anciennes institutions.
· Le problème est donc moins de nous interroger ici sur l'origi-
nalité de ces instruments (les politiques du code des investissements) que
sur leur pertinence eu égard aux exigences du développement économique.
• Dans cette perspective, les réflexions, nous semble-t-il, doi-
vent procéder en un premier temps par une présentation des fondements du
code des investissements, de ses limites et des contradictions qui subsis-
tent, pour aboutir ensuite à un ensemble de propositions qui tendent à ren-
dre la politique du code des investissements beaucoup plus "opérationnelle
et rationnelle".
Ce chapitre sera donc développé autour des deux points suivants
- SECTION I
:
LA POLITIQUE DU CODE DES INVESTISSEMENTS EN
AFRIQUE NOIRE : THEORIE ET REALITE
- SECTION II:
POUR UNE POLITIQUE VOLONTARISTE DU CODE DES
INVESTISSEMENTS EN AFRIQUE NOIRE
(1) On pense ici aux fondements et au fonctionnement des I~ompagnies à
Charte". Voir sur ce point :
S. AMIN : L'Afrique de l'Ouest bloquée: L'économie politique de la
colonisation 1880-1970 - Edit. de Minuit 1971 pp. 136 et suive
H. BABASSANA : Travail forcé et formation du sàlàriat en Afrique noire
PUF 1978 -
pp. 182 et suive
J.S. CANALE
: L'Afrique noire: l'ère coloniale 1900-1945
Les Editions Sociales - 1977 - pp. 20 et suive
G. NGANGO
: Les investissements d'origine extérieure en Afrique
noire : Statut et incidences sur le développement -
Présence Africaine 1973 - pp. 56.

96.
SECTION l
LA POLITIQUE DU CODE DES INVESTISSEMENTS
EN
AFRIQUE
NOIRE
THËORIE
ET
RËALITË

· Les fondements théoriques de la politique du Code des investis-
sements s'apprécient tant au niveau des difficultés économiques des nations
africaines et de leurs aspirations politiques au lendemain des indépendances,
qu'au niveau des craintes qu'éprouvent les capitaux métropolitains à s'in-
vestir dans des pays dont les structures sont encore fragiles (paragraphe 1).
· En réalité, des limites et des contradictions subsistent dans
la m~se en oeuvre de cette politique du code des investissements, limites
et contradictions qui s'apprécient tant dans les déséquilibres économiques
régionaux (dus à une concentration géographique des capitaux) que dans le
"laxisme fiscal" qui accompagne la politique du code des investissements
(paragraphe II).
PARAGRAPHE
l
LES FONDEMENTS THEORIQUES DE LA POLITIQUE DU CODE DES
INVESTISSEMENTS
Pour les dirigeants d'Afrique noire -on le précise- la politi-
que du code des investissements est, au-delà d'un simple instrument de po-
litique économique, une affirmation de la souveraineté nationale.
· Pour les investisseurs étrangers par contre elle représente un
gage de sécurité.
A -
LE CODE DES INVESTISSEMENTS:
INSTRUMENT DE POLITIQUE
ECONOMIQUE ET SYMBOLE DE SOUVERAINETE
· Le manque de capitaux et de technologie nécessite la mise en
oeuvre du code des investimments ; instrument par le biais duquel on

97.
voudrait auss~ manifester son autonomie aux yeux des partenaires économi-
ques
(1) ••.
l. Manque de capitaux et de technologie et nécessité du code
des investissments
Deux niveaux
D'abord il y a une certaine difficulté à mobiliser l'épargne
nationale généralement insuffisante .
. Cependant des ressources locales (matières premières, richesses
du sous-sol) existent de façon abondante ; mais elles demeurent inexploitées
du fait précisément d'une carence en capitaux et en technologie.
La politique du code des investissements -on le devine aisément-
va donc consister à s'en remettre à l'investisseur étranger qui devra appor-
ter capitaux et technologie; investisseur étranger qu'il convient précisé-
ment d'attirer du point de vue économique et de sécuriser sur le plan poli-
tique.
A la limite donc la démarche s'inspire ici de l'optique classi-
que. On s'en remet à l'initiative privée du soin d'assurer la production
nécessaire à la vie de la nation
(2). La politique répond précisément à
la logique de l'évolution d'un système fiscal au cours du développement
économique ; logique développée entre autres par COLM et HELZNER
(3)
et
qui préconise une politique fiscale de développement en trois phases essen-
tielles.
(1) Voir sur ces points les nuances de :
G. ABRAM-FROIS : Essai sur les problèmes d'investissement en pays sous-
développés
Sté d'Edit. d'Enseigne Sup. 1962
pp. 5 et suive
. J. ~THONNAT
: Le code des investissements dans les E.A.M.A.
Mémoire D.E.A. Clermont 1976
pp. 8 et suive
. G. NGANGO
: Les investissements d'origine extérieure en Afrique
noire
op.cit.
(2) Voir A. BARRERE : Economie et institutions financières Dalloz 1972 pp 4
(3) COLM et HELZNER repris dans H. BROCHIER et P. TABATONI : Eèonomie
financière -
P U F
1963
pp. 99-100.

98 .
Dans sa première phase, la cr01ssance économique repose sur
l'investissement. Les anticipations de profit doivent alors être suffisan-
tes pour inciter les industriels à investir suffisamment et à réinvestir
leurs gains.
Le système fiscal correspondant met l'accent sur la consomma-
tion et sur la propriété. Les revenus personnels et les profits des Socié-
tés ne supportent qu'un prélèvement léger -
(Nous sommes en plein dans la
logique de la politique du code des investissements).
Dans la deuxième phase il y a progrès de l'industrialisation
et le groupe des entrepreneurs s'est solidement établi; les besoins d'in-
vestissement deviennent moins contraignants, la nécessité d'un vaste marché
de consommation commence à se faire sentir. En même temps on prend conscience
de l'écart entre les revenus des entrepreneurs et ceux des grandes masses
de la population; d'où un développement d'impôts progressifs sur les reve-
nus. Nous verrons dans la suite de nos développements que cette deuxième
logique a échappé aux responsables africains.
Enfin au troisième ~tade du développement économique, le niveau
de V1e de la plupart des travailleurs s'élève au-dessus du minimum vital;
par ailleurs les dépenses publiques (les besoins de l'Etat) s'accroissent.
L'essentiel des recettes fiscales sera alors fourni à la fois
par les hauts niveaux de revenu et par les revenus moyens. L'impôt n'est
plus considéré comme une "pénalisation" de la richesse, mais comme un impôt
d'assiette beaucoup plus large, payé par tous les détenteurs de revenus qui
dépassent le niveau de subsistance. Il est complété par la taxation des
Sociétés.
Cette dynamique du développement des systèmes fiscaux implique,
il est vrai, de la part des pouvoirs publics un degré de connaissance de
l'évolution économique et des exigences de cette évolution sur le plan de
la politique fiscale. Disons tout de suite que cette connaissance des méca-
nismes économiques et de leurs répercussions échappe à l'Administration
fiscale en Afrique noire ; tout au moins dans le cadre de la politique du
code des investissements. Mais nous n'en sommes pas encore là.
Au-delà de ces raisons qui ont suscité en nous cette première
série de réflexions d'ordre théorique, il semble que la politique du code
des investissements réponde aussi à un souci d'ordre politique. Elle est
(la politique du code des investissements) précisément perçue comme un

99.
instrument de sauvegarde de la souveraineté nationale.
II.
Code des investissements et sauvegarde de la souveraineté
nationale
Avant l'Indépendance -ainsi que nous l'avons mentionné pour
introduire ce chapitre- le statut de l'investissement privé était régi par
la législation de l'autorité de tutelle.
Du fait donc de l'Indépendance et par réaction à l'égard de
l'ancienne métropole coloniale, les dirigeants des pays en voie de dévelop-
pement (pays africains précisément) ressentent le besoin de traduire sans
ambiguïté leurs aspirations à la souveraineté (économique).
Une résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies en
date du 14 décembre 1962
(1)
concernant la "souveraineté sur les riches-
ses et les ressources naturelles" va justement le leur permettre puisqu'elle
ne reconnaît d'obligation de respecter les accords conclus que dans l'hypo-
thèse où ils auraient été librement discutés par les différents partenaires •
. Dès lors, en élaborant un statut de l'investisseur étranger, le
code des investissements permet aux pays africains de se démarquer par rap-
port à l'ancien colonisateur et aussi de s'affirmer en posant les conditions
d'un ordre économique nouveau, comme un prélude à une forme de relation
fondée sur une coopération et un échange profitable aux deux parties .
. C'est dans ce sens, du reste, que l'investisseur étranger per-
çoit son rôle et définit les conditions de son intervention dans les éco-
nomies africaines.
B.
LE CODE DES INVESTISSEMENTS COMME GAGE DE SECURITE
Les capitaux privés -en direction des pays en voie de dévelop-
pement- redoutent (au-delà des risques purement économiques ; essentielle-
ment un souci de rentabilité), des risques surtout politiques qui découlent
de la situation politique trouble, des mouvements passionnels qui se
(1) A en croire J. ~THONNAT : Le code des investissements dans Zes
E.A.M.A.
op. cit.
pp. 8.

100.
succèdent dans des pays dont pour la plupart l'Etat n'a pas encore une
structure stable. Ces risques sont entre autres :
Des mesures unilatérales que peut prendre un Etat à l'égard
de l'entreprise étrangère comme par exemple la nationalisation sans com-
pensation équitable; la confiscation totale ou partielle; l'expropria-
tion sans indemnités ou avec indemnités bloquées.
Des risques comme les préjudices subis du fait d'une guerre,
d'un coup d'Etat, d'une insurrection locale, d'un sabotage.
Des risques de non-transférabilité et d'inconvertibilité,
ensemble de restrictions faites aux investisseurs dans le libre transfert
des capitaux eux-mêmes en cas de cessation d'activité.
Des risques de non arbitrage des différends ou de non exécu-
tion de la sentence arbitrale.
Au total donc le code des investissements apparaît comme un
contrat juridique entre pays africains et investisseurs étrangers. Et au-
delà de cette conception théorique la question de fond qui demeure est de
savoir si les objectifs de développement que les pays africains se sont
assignés au départ sont effectivement atteints.
D'aucuns répondent sans réserve par l'affirmative à cette
question. Mais lorsqu'on part du principe théorique que nous avons précé-
demment évoqué et selon lequel la dynamique d'un système fiscal implique
de la part des responsables politiques et économiques un degré de cons-
cience de l'évolution économique et des exigences de cette évolution sur
le plan de la fiscalité.
(l~ on s'aperçoit que des insuffisances demeurent
et que des efforts restent à faire pour combler ces lacunes.
Mais au fond quelles sont ces lacunes? C'est à cette question
essentielle que nous essaierons de répondre dans nos prochains développe-
ments.
(1) En nous inspirant ici de H.
BROCHIER et P. TABATONI
Economie financière
P U F 1963
pp. 100.

101.
PARAGRAPHE
II
LES MODALITES DE MISE EN OEUVRE DU CODE DES INVESTIS-
SEMENTS ET LEURS LIMITES
L'attraction des capitaux privés en Afrique noire se fait par
le biais d'agréments fiscaux. Nous présenterons le processus dans le cadre
de la Côte d'Ivoire et du Gabon (1), puis nous essaierons d'en expliciter
les inconvénients.
A -
LES AGREMENTS FISCAUX COMME MODALITES DE MISE EN OEUVRE
DU CODE DES INVESTISSEMENTS : LES EXEMPLES DE LA COTE
D'IVOIRE ET DU GABON
Les agréments fiscaux consistent, en réalité, en d'énormes faci-
lités fiscales octroyées aux entreprises et aux capitaux étrangers.
1.
L'exemple de la Côte d'Ivoire
Les avantages octroyés aux capitaux étrangers sont régis par la
loi nO 59/134 du 4 septembre 1959, déterminant le régime des investissements
privés dans la République de Côte d'Ivoire.
Dans sa formulation générale et dans ses modalités de mise en
oeuvre le code ivoirien des investissements ne fait pas de discrimination
entre investisseurs étrangers et nationaux.
Deux types de régimes fiscaux sont établis :
- Un régime (A) des entreprises prioritaires en fonction
de leur secteur d'activité.
- Un régime (B) définissant les avantages octroyés en fonc-
tion de l'importance économique et sociale de l'entreprise.
En réalité, le code des investissements dans ses modalités ou plus
précisément dans sa mise en oeuvre est l'application du régime du Droit Com-
mun tel qu'il est explicité dans le régime douanier et le régime fiscal (2).
(Cf. tableau nO 12 ci-après)
(1) Des éléments d'information sur les autres pays d'Afrique noire d'expres-
sion française et des informations complémentaires sur la Côte d'Ivoire
sont fournis en annexe.

(2) On consultera là-dessus : La brochure de la Commission des Communautés
européennes juillet 1974 - pp. 42 et suivantes.
J. MASINI
M. IKONICOFF : Les multinationales et le développement du
3
Tiers-Monde: trois expériences et la Côte d'Ivoire
PUF 1979 pp 19-23.

102.
TABLEAU nO 12
1.1. Tableau synoptique du régime douanier
TAXES A
TAXES A
.
TAUX
.
MATIERES IMPOSABLES
L'IMPOR-
L'EXPOR-
: APPLIQUES:
TATION
TATION
.------------.------------.---------.-------------------------------------.
.
.
.
.
.
Le droit
o à 40 % En principe tous les produits ~m­
fiscal
Valeur
portés mais certains en sont
d'entrée
CAF
exemptés.
(D.F.E. )
·
..
.
------------ ------------ --------- -------------------------------------
·
·
.
.
.
.
Tarif
Appliqué aux produits en provenance
de la Bolivie, de l'Albanie. Les
Le droit
minimum
produits de la C.E.E. en sont
de
o à 30 % exemptés de même que les biens d'é-
quipement, les matières premières
:
douane
destinées aux nouvelles entreprises.:
---------.-------------------------------------
(D.D. )
: 0,5 %
. Pour les produits manufacturés en
: Côte d'Ivoire
o %
: Pour certaines exportations des
: entreprises prioritaires
1.2 Tableau synoptique du régime fiscal
TAXES
TAUX
MATIERES IMPOSABLES
:------------:------------:---------:-------------------------------------:
1. En ma-
33 %
Du bénéfice net réalisé par les
tière de
sociétés
fiscalité
on a l'im-
pôt sur le
18 %
Du bénéfice réalisé par les par-
bénéfice
ticuliers
industriel
et commer-
Exonération:
Pour toute entreprise nouvelle à
cial (BIC)
pendant
compter de la date d'entrée en ac-
tivité. De plus en cas de réinves-
10
ans
- .
tissement 50 % maximum du montant
.
des investissements peuvent être dé-:
duits du bénéfice net de quatre an- .
nées successives
II. Taxe
Chiffre d'Affaires brut. En outre
sur la Va-
les entreprises prioritaires sont
16 %
leur ajou-
admises au régime fiscal de longue
tée (TVA)
durée (25 ans). Durant ce temps pas
de modification des règles d'assiet-:
tes des tarifs des charges auxquelles
l'entreprise est soumise au moment
~
~
~
~_~~_~~_~E~~!iog~
tLL~
~
(1) Les entreprises prioritaires sont celles qui concourent à l'exécution des
Plans de Développement au moyen d'investissements revêtant une importance
particulière pour la mise en valeur du pays (entreprises immobilières,
de transformation des productions végétales! de production d'énergie).
En fait, ce sont des conditions très formel es.

103.
II.
L'exemple du Gabon
Le code des investissements résulte des conventions communes
aux Etats membres de l'U.D.E.A.C.
(1)
L'ensemble des dispositions est
donné:
par l'ordonnance 21/27 du 28 mars 1967.
Les investissements privés bénéficient d'un régime de Droit
Commun et de régimes privilégiés.
(2).
On s'efforce -comme précédemment- de présenter ces régimes dans
des tableaux synoptiques.
II. 1.
Le régime de Droit Commun
TAXES AFFERENTES
PRODUITS TAXES
TAUX
AU REGIME
OU BENEFICIAIRES
·
. .
.
----------------------------------------------------------------------------
Droit de douane
(droits et taxes
Exonération
d'entrée)
Exemption
Entreprises m1n1eres, agrico-
Bénéfices industriels
temporaire et
les ou forestières
et commerciaux
réduction
50 % de réduc-
Sur les bénéfices de la deu-
(B. 1. C.)
tion
xième année civile
Réduction pos-
Pour les bénéfices des trois
sible
années suivantes
Plus values de
Exemption
Pour les entreprises priori-
cession
taires
· Taxes sur les construc-:
Exemption
: tions ou additions de
. pendant une per10~
·
construction
de de 5 à la ans
:
.
. .
.
.
----------------------------------------------------------------------------
(1) -
Entendons: UNION DOUANIERE DES ETATS DE L'AFRIQUE CENTRALE
(2) -
COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPENNES : Le code des Investissements
du Gabon~ juin 1974~ pp. 42.

104.
II. 2
Le régime privilégié
Il comporte trois régimes applicables aux entreprises installées
au Gabon et dont l'activité est limitée au territoire national (régimes lA -
lB et II suivant l'importance économique de l'entreprise). Deux régimes
applicables aux entreprises installées au Gabon dont le marché s'étend aux
territoires de plusieurs Etats de l'U.D.E.A.C. (régimes III et IV).
La durée de ces régimes ne peut excéder la ans.
LE REGIME lA
LE REGIME lB
(complète le régime lA)
:-----------------------------------:------------------------------------:
Application d'un taux global ré-
Exonération de l'impôt sur les bé-
duit à 5 % des droits et taxes
néfices industriels et commerciaux
perçus à l'importation des maté-
pendant 5 ans.
.
riels et matériaux, machines né-
Exonération de la contrihution fon-:
cessaires à la production.
cière des propriétés bâties de
la à 25 ans.
Exonération des droits et taxes
Exonération temporaire de la con-
perçus à l'importation pour des
tribution foncière des propriétés
produits fabriqués par l'entre-
non bâties
(la ans).
prise et vendus sur le terri-
Exonération pendant 5 ans de la
toire gabonais.
contribution des patentes.
.
.
.
.
.
--------------------------------------------------------------------------
c'est un régime susceptible d'être accordé à des entreprises
d'une importance capitale pour le développement économique national, met-
tant en jeu des investissements exceptionnellement élevés. La durée de ce
régime ne peut excéder 25 ans. Il comporte :
- La stabilisation du régime fiscal particulier ou de
droit commun qui garantit l'entreprise bénéficiaire contre toute aggrava-
tion de la fiscalité directe ou indirecte qui lui est applicable à la date
de départ de l'agrément, tant dans son assiette et le taux de l'impôt que
dans les modalités de recouvrement.

105.
- En outre tout ou partie des dispositions fiscales doua-
nières relatives au régime lB peuvent être étendues par le décret d'agré-
ment à l'entreprise bénéficiaire du régime II.
Ce régime comporte l'application pendant la période d'installa-
tion d'un taux global réduit à 5 % des droits et taxes perçus à l'importa-
tion sur les matériels d'équipement. L'exonération totale po~rra, exception-
nellement, être accordée par le comité directeur. Il comporte en plus le
bénéfice de la taxe unique en vigueur dans l'U.D.E.A.C.
(1)
Il comporte outre les avantages fiscaux et douaniers définis
au régime III et notamment l'application de la taxe unique, le bénéfice
d'une convention d'établissement qui définit:
sa durée et ses modalités de prorogation,
- éventuellement divers engagements de la part de
l'entreprise, notamment:
· les conditions générales d'exploitation,
· les programmes d'équipement et de production minima,
la formation professionnelle ou les réalisations
de caractère social prévues.
- diverses garanties de l'Etat gabonais et des Etats
membres de l'U.D.E.A.C., notamment:
· des garanties de stabilité dans les domaines juridi-
ques, économiques et financiers ainsi qu'en matière
de transferts financiers et de commercialisation des
produits,
(1) La perception de la taxe unique est exclusive de la perception des droits
et taxes applicables à l'importation des matières premières et produits
essentiels (y compris
les emballages) utilisés en usine pour l'obtention
des produits fabriqués dans
leur forme de livraison au commerce. De la
perception de toute taxe intérieure sur les matières premières et produits
essentiels (y compris les emballages) importés ou d'origine locale utili-
sés pour l'obtention des produits fabriqués. Les produits fabriqués sous
le régime de la taxe unique et destinés à l'exportation hors de l'UNION
sont exemptés de la taxe unique. Ils en sont exemptés lorsqu'ils sont li-
vrés à une autre fabrique également soumise au régime de la taxe ou à un
régime fiscal privilégié prévu
par le code des investissements~ à titre
des matières premières ou généralement de produits à incorporer aux fa-
brications.


106 •
des garanties d'accès et de la circulation de la
main-d'oeuvre, de la liberté de l'emploi, ainsi que
le libre choix des fournisseurs et des prestations
de services,
des garanties relatives aux modalités d'utilisation
des ressources hydrauliques, électriques et autres
ainsi que les modalités d'évacuation des produits.
- dans tous les cas
-que ce soit dans le régime de droit
commun ou les régimes privilégiés-
l'Etat garantit le
transfert des bénéfices.
Que conclure au terme de cette présentation descriptive ?
Il s'avère finalement que la politique du code des investisse-
ments est perçue non seulement comme un instrument de m~se en valeur des
ressources naturelles ; mais aussi un outil par le biais duquel on se pro-
pose d'atteindre certains objectifs spécifiques. Le seul exemple des Etats
membres de l'U.D.E.A.C. suffit pour corroborer cette affirmation. En fait,
qu'en est-il?
La politique du code des investissements s'inspire ici de la
philosophie de l'union. Une union qui met l'accent sur la solidarité entre
pays très diversement situés du fait que certains d'entre eux n'ont pas
accès à la mer et ne peuvent ainsi valoriser d'éventuelles ressources na-
turelles que sur la base d'un processus commun d'industrialisation. Cette
solidarité se manifeste précisément dans le souci d'éviter qu'un Etat ne
concurrence les industries déjà implantées dans un autre et par l'institu-
tion de mécanismes fiscaux et financiers de compensation (système fiscal de
la taxe unique au moment de la consommation, fonds de solidarité).
Soulignons que ces mécanismes de solidarité n'ont pas toujours
été jugés satisfaisants par les Etats dépourvus d'accès à la mer: à la
suite d'un conflit à ce sujet début 1968, le Tchad et la République
Centrafricaine ont quitté l'U.D.E.A.C. Seule la République Centrafricaine
a réintégré l'Union à la fin de l'année 1968. L'Union est donc réduite ac-
tuellement à quatre membres, à savoir
le Congo, le Gabon, le Cameroun et
la République Centrafricaine.
(1)
(1) Précisions empruntées à M. BYE et G. DEBERNIS : ReZations économiques
internationaZes l
: échanges internationaux
4e Edit. DALLOZ - 19?? - pp. 849.

107.
Dans le domaine propre des mesures liées au choix et à la loca-
lisation des projets industriels, trois ensembles d'interventions sont
prévus :
- Protection des industries locales: chaque fois qu'un
Etat membre envisage chez lui une réalisation industrielle, il en avertit
le Secrétariat général de l'Union
- Harmonisation des mesures de promotion d'industries
nouvelles : un code-cadre des investissements délimite ce que peuvent être
les codes nationaux d'investissement et énonce les avantages maxima sus-
ceptibles d'être accordés aux investisseurs selon que leur activité concerne
exclusivement le marché d'un seul Etat ou est susceptible de s'étendre à
celui de l'ensemble de l'Union.
- Répartition optimale des investissements : la volonté
d'entente ne supprime cependant pas des rivalités; souvent, les différents
pays se portent candidats à l'égard des mêmes projets. Toutefois un succès
a été enregistré avec la décision de localiser à Port-Gentil (Gabon) la
raffinerie commune.
Quoiqu'il en soit cet exemple de l'U.D.E.A.C. reste le seul
aspect véritablement fonctionnel de la politique du code des investisse-
ments. Pour qui veut, en effet, observer ces schémas à fond, une constata-
tion s'impose qui ne manque pas de surprendre compte tenu du problème bien
connu du manque de capitaux dans les pays en voie de développement : les
énormes avantages fiscaux consentis aux entreprises et capitaux étrangers.
Ceci constitue la limite essentielle de la politique du code
des investissements en Afrique noire, au-delà du fait que cette politique
d'avantages fiscaux est à l'origine d'une "polarisation croissante et de
déséquilibres économiques".
Ce sont ces deux points que nous allons nous efforcer d'expli-
citer.

108.
B. -
LES INCONVENIENTS DES AGREMENTS FISCAUX : LE PHENOMENE
DE DEVELOPPEMENT INEGAL ET LE PROCESSUS D'APPAUVRISSE-
MENT DE L'ECONOMIE NATIONALE
"Tl faut donc~ pour parvenir à la vérité connattre~ non
pas beaucoup de faits~ mais les faits essentiels et vé-
ritablement influents ; les envisager sous toutes leurs
formes et surtout en tirer les conséquences justes ; être
assuré que l'effet qu'on leur attribue vient réellement
d'eux et non d'ailleurs. Toute autre connaissance de
faits est un amas d'où il ne résulte rien~ une érudition
d'almanach".
CI)
Deux séries de limites, soutenons-nous, résultent des politi-
ques actuelles du code des investissements :
- Il Y a d'abord la situation des "déséquilibres économi-
ques ll que le Professeur François PERROUX (2) explique fort justement par
le fait que les investissements additionnels dans les pays en voie de dé-
veloppement s'accumulent aux points où une "constellation d'investisse-
ments antérieurs leur donne un rendement élevé".
- Ce phénomène que nous convenons d'appeler "un phénomène
de développement inégal et de po1arisationll n'est pas seulement le fait
d'une prolifération de structures industrielles non adaptées aux réalités
économiques mais aussi et surtout le fait d'une polarisation qU1 engendre
des conflits sociaux.
Il Y a ensuite la situation latente d'appauvrissement des éco-
nomies africaines d'une manière générale; situation due à leur caractère
"d'économie extravertie" (3). C'est ce que traduit réellement le laxisme
fiscal qui accompagne la politique du code des investissements.
(1) J.B. SAY: Traité d'économie politique
6e Edit. GUILLAUMIN
1841 - pp 10
(2) F. PERROUX: L'économie du XXe siècle~
PUF 1961~ pp. 214.
(3) La terminologie désormais bien connue est du Professeur Samir AMIN.
Voir par exemple : S. AMIN : Sociétés précapitalistes et capitalistes
in A.G. FRANCK:
L'accumulation
indépendante
Anthropos 1978.

109.
1. Le phénomène de développement inégal et de polarisation
Le thème de développement inégal dans les pays en voie de
développement ne semble pas nouveau dans la littérature économique.
L'existence de toute une série de concepts désormais à la mode corrobore
cette assertion.
Les économies sous-développées sont par exemple caractérisées
de "dichotomiques Il ; la dichotomie étant selon le Professeur François
PERROUX (1) cette malheureuse situation dans laquelle on assiste à une
prolifération de grandes entreprises qui ne sont pas reliées à l'économie
nationale. La dichotomie c'est aussi le fait du développement d'un secteur
dit moderne au détriment du secteur rural traditionnel qui reste pourtant
le principal réservoir de ressources
(2).
Dès lors apparaît une opposi-
tion rigoureuse entre les régions-pâles et le reste du territoire intou-
ché par le progrès économique (dualisme social) (3).
Les causes d'une telle situation peuvent, semble-t-il, paraî-
tre de deux ordres :
- Les pays en vo~e de développement ont été influencés par la
théorie de la croissance et l'expérience récente des pays industrialisés
où l'accroissement de l'offre et de la demande dépend du montant du capi-
tal investi ; dès lors on fait appel à des industries à forte intensité
capitalistique qui, dans la plupart des cas, n'ont aucun lien avec les
besoins des économies nationales.
Le deuxième facteur est psychologique. On associe la modernité
sinon à la densité de capital du moins à la prolifération d'industries
gigantesques (4).
(1) F. PERROUX dans E. GANNAGE : Economie du Développement (Préface)
PUF 1962 -
ou F. PERROUX: L'Economie du XXe siècle
op. ait. pp 156 =
la notion d'Economie inarticulée.
(2) Voir les nuances de G. NGANGO : Les investissements d'origine exté-
rieure en Afrique noire. Présence Africaine 1973
pp. 42-50 ou celles
3
de F. PARTANT : La Guérilla Economique - Les conditions du développement
Seuil 1976 - pp 89.
(3) Voir E. GANNAGE : Economie du Développement op.cit. pp 61-63 ou
B. STUCKEY : '~nvironr.ement et espace en Afrique"
Espaces et Sociétés
octobre-février nO 10-11 1974 pp 3-5.
(4) Ce sont nos interprétations des travaux de W. GALENTON : Essais sur
l'emploi dans BIT: L'emploi en Afrique Noire : aspects critiques du
problème
Genève 1973
pp. 4.

110.
Au total donc ce n'est pas d'un problème nouveau que nous allons
débattre; mais d'une question vieille comme le monde qui demeure cependant
d'actualité en Afrique noire où la "dichotomie" et le "dualisme" sont d'au-
tant plus préjudiciables à l'équilibre et au progrès qu'ils sont à l'origine
d'inégalités sociales et du développement d'un important chômage urbain.
Nous nous efforcerons dans un premier temps de présenter de
façon descriptive les deux phénomènes ; puis nous essaierons de développer
un certain nombre de réflexions d'ordre théorique qu'une telle situation
suscite.
1. .1
L'Etat de développement inégal et de polarisation
en Afrique noire
Le tableau nO 13 ci-après donne la localisation géographique
\\
d'un certain nombre d'entreprises-industrielles en Côte d'Ivoire.

Ill.
TABLEAU nO 13
Répartition des travailleurs de l'industrie en 1974
(selon le lieu d'emploi)
.
.
: RESTE
B R A N CHE S
:ABIDJAN: BOUAKE:
du
: TOT A L
.
.
: PAYS
----------------------------------- ------- -------
.
-------
.
.
-------------
.
05
Extraction de minerais
o
o
451
451
06
Travail des grains & farine.
2 187
717
2 596
5 500
07
Industries de conservation
& de préparation alimentaire
089
2
021
2 1 12
08
Fabrication de boissons et
glaces alimentaires
.
770
284
o
2 054
09
Industries des corps gras
alimentaires
.
o
o
475
475
:010
Autres indust. alimentaires
186
479
o
665
1 1
Industries des textiles et
habillement
.
3 31 1
3 405
294
8 010
12
Industries du cuir et des
articles chaussants
.
714
o
o
714
13
Industries du bois
.
3 073
236
8 511
II 820
14
Raffinage du pétrole
308
o
o
308
15
Industries chimiques
3 151
o
188
3 339
16
Industries du caoutchouc
300
o
260
560
17
Fabrication de matériaux de
construction
.
812
33
o
845
18
Sidérurgie et première
transformation des métaux
133
o
o
133
19
Construction et répartition
de matériel de transport ...
624
o
o
624
20
Autres industries mécaniques
2 597
o
o
2 597
21
Industries diverses
477
10
o
487
22
Energie électrique et eau ..
714
40
822
2 576
:24 446
5 206 :16 618
46 270
TOT A L
: (52,8%): (11,3%): (35,9%):
(100 %)
..
.
.
.
.
. .
.
.
.
---------------------------------------------------------------------------
Source:
Tableau reconstitué à partir de Côte d'Ivoire en Chiffres
Ministère du Plan - 1976 - pp 174.

112.
Les chiffres du tableau se passent de commentaire. Ils soulignent
tout le poids d'ABIDJAN sur le reste du pays: 52,8 % de l'effectif des tra-
vailleurs de l'industrie contre seulement 47,2 % pour les autres villes de
Côte d'Ivoire (y compris Bouaké).
La même situation de polarisation se rencontre, du reste, au
Tchad où la seule ville de N'Djamena reste le centre privilégié des implan-
tations industrielles et par conséquent le lieu de concentration de la po-
pulation active a1RS1 qu'en témoignent les chiffres des deux tableaux qui
vont suivre.
TABLEAU n O 14
Localisation des entreprises industrielles au TCHAD
.
..
..
..
B R A N CHE S
:MOUNDOU: AUTRE :T 0 T A L:
..
..
..
..
:-------------------------------:-------:-------:-------:-------:---------:
- Energie
....................................
2
5
Industries animales ..............
3
4
- Industries alimentaires ...
3
3
4
1 J
Industries textiles ..............
2
20
24
- Industries chimiques ............
3
4
Industries mécaniques ..........
2
3
- Industries du bois ................
3
3
Industries du bâtiment
7
7
- Industries extractives
2
3
Industries diverses ..............
2
2
.
.. _------------------------------._-----_._-----_._-----_._-----_._-------_.
..
..
..
..
..
..
27
6
6
27
66
TOT A L
: (40,9%): (9,09%): (9,09%): (40,9%):
(lOO %)
Source : Tableau construit à partir des données fournies par la
Commission des Communautés Européennes -
Brochure - Juin 1974 - pp 18.
Pour un bref commentaire du tableau, disons qu'au TCHAD dont les
deux grandes richesses demeurent le coton et le cheptel, l'industrie encore
très peu développée se trouve concentrée dans deux régions : celle de
N'Djamena (la Capitale) à l'ouverture du pays et celle de SAHR et MOUNDOU

113.
au Sud. Dans l'ensemble la région de N'Djamena reste la plus sollicitée
(autrement dit la région-pâle).
TABLEAU nO 15
Répartition géographique des emplois industriels au TCHAD
NOMBRE
LOCALISATION
%
d'Et-WLOIS INDUSTRIELS
.
.
.
.
------------------------ ------------------------ --------------------
N'DJAMENA
.......
540
49,35
SARH
............
600
19,23
MOUNDOU ..........
420
13,46
Autres Centres ...
650
20,83
.
.
.
.
.
.
.
.
------------------------------------------------------------------------
Source :
Tableau construit à partir de la source précédemment citée.
On ne saurait pousser l'effort au-delà de ces exemples pour
illustrer la situation de polarisation qui caractérise les économies afri-
caines. Quelles sont les conséquences économiques et sociologiques de cette
situation et quelles réflexions d'ordre théorique suscitent ces conséquences
1.2. -
L'approche socio-économique du problème
Les conséquences économiques et sociologiques de la situation
de polarisation dans les pays d'Afrique noire peuvent se résumer en deux
points essentiels. Il y a d'abord un problème de disparités régionales
dans la répartition des revenus à l'échelle nationale; il y a ensuite un
problème de "disparités individuelles" des revenus dans le cadre d'une
région-pâle.

114.
~~~_~!.~E~E!.~~~_E~g!.~~!~~_~~~~_!~_:E§E~!~!.~!.~~
"
~g~_E~~~~~~
De récentes études menées sur la répartition des revenus en
Côte d'Ivoire (1) font état des disparités régionales suivantes:
Le revenu moyen par tête dans le département d'ABIDJAN dépasse
142 000 FCFA alors que ce même revenu n'est que de 18 158 FCFA dans la ré-
gion de l'Ouest.
Par ailleurs 21 départements (sur 24) représentant 74 % de la
population ont un revenu inférieur à la moyenne nationale ( soit
67 777 FCFA), tandis que les trois autres départements (celui du Sud no-
tamment) avec 26 % de la population cumulent 49,2 %.
L'étude met un accent particulier sur l' "asymétrie de crois-
sance" entre le secteur SUD-OUEST en forte progression et le vide relatif
du quart NORD-EST.
(Le tableau nO 16 ci-dessous donne justement une image synthé-
tique des différentes situations)
TABLEAU nO 16
Un cas d'inégalités régionales en Côte d'Ivoire:
L'assymétrie de croissance entre le Sud-Ouest et
le Nord-Est
R = revenu
REGIONS
P = population
Rlp
FCFA
la 6 FCFA
.
la 3
personnes
.
.
.
------------- --------------------- ---------------------
l
en
Valeur
absolue
NORD
1 238
50 501
40 792
SUD
4 649
348 499
74 962
TOTAL
5 887
399 000
67 777
II -
en
pourcentage
NORD
21,0
12,6
60,2
SUD
79,0
87,4
110,6
l __:~:~
l
~~~
l
~~~
l_~~~~~__:_~~~_l
Source: Tableau reconstitué à partir des travaux de A.Y. COULIBALY-
Thèse Gomplémentaire - Clermont - 1979 - pp 28.
(1) Précisément les travaux de A.Y. COULIBALY : Répartition personnelle des
revenus : essai sur la loi de Pareto généralisée - Thèse Complémentaire
Clermont-Fd
- 1979 - pp. 20 et suivantes.

115.
Reconnaissons que ces àifférentes situations d'inégalités ne
s'expliquent pas par le seul phénomène de polarisation. Beaucoup d'inéga-
lités régionales en Afrique noire sont, en effet, le fait de conditions
écologiques favorables aux uns et défavorables aux autres. Il y a aussi
le fait d'une "discrimination" dans le mode de production. La pénétration
coloniale a favorisé certaines régions du point de vue de l'organisation
de la production, tandis que d'autres ont conservé des structures tradition-
nelles. Ce dernier point souligne, du reste, que le phénomène de polarisa-
tion en Afrique noire a une origine historique.
Au demeurant la conséquence du phénomène qui nous intéresse le
plus dans le cadre de nos réflexions réside dans les "disparités indivi-
duelles des revenus" à l'intérieur d'une région-pôle.
Encore une fois une étude menée dans l'agglomération d'ABIDJAN
par les experts du Ministère du Plan a abouti aux conclusions suivantes (1)
Il existe dans l'agglomération-pôle un net décalage entre la
répartition des emplois et des salaires par nationalité. Ainsi la masse sa-
lariale versée aux Africains (y compris les Ivoiriens) est très largement
inférieure à la proportion des emplois occupés par eux.
D'une manière générale il ressort de l'enquête que les emplois
les plus rémunérateurs (ceux de cadres notamment) sont occupés par les
Etrangers (Européens et non-Africains). Cette situation est par exemple très
marquée dans la branche 17 = fabrication de matériaux de construction où
l'écart entre le taux d'ivoirisation dans la catégorie des cadres et celle
des employés subalternes et manoeuvres est de (45,9). Il en est de même
dans la branche 05 = extraction de minerais où cet écart est estimé à
(25,8). (Cf. tableau nO 17)
(1)
Nous adoptons ici les travaux de Arthur ACHIO au cadre de nos
réflexions. Voir A. ACHIO
: Physionomie de l'emploi en Côte d'Ivoire
sous la direction de H. BARTOLI - Institut de Sciences sociales du
travail
- 1969 - pp 118 et suivantes.

116.
TABLEAU nO 17
Taux d'ivoirisation et Catégories socio-professionnelles
à ABIDJAN
(au niveau seulement de quelques branches significatives)
:
Cadres
Cadres
Employés
Employés
; Supérieurs
Moyens
; qualifiés
subal-
BRANCHES
ENSEMBLE
ternes
(1)
(II)
(III)
(IV)
·
.
.
.
.
.
.
.-----------.-----------.-----------.-----------.----------.-------------.
05
5,3
31,3
62,4
31 , 1
34,5
09
10,7
6,0
54,2
100,0
48,8
12
10,7
7,7
54,1
26,8
31,7
16
10,7
13,2
66,5
81 , 1
60,7
17
3,6
4,0
67,8
49,5
46,2
20
13,3
6,7
64,7
51,9
51,6
·
.
·
.
.
.
.
.
.
.
.
.
--------------------------------------------------------------------------
Source:
Tableau reconstitué à partir des données de A. ACHIO
op. cit
pp 118
Au vu des chiffres de ce tableau on est tenté de conclure qu'en
Côte d'Ivoire, la catégorie socio-professionnelle la plus déshéritée est
constituée d'Ivoiriens (essentiellement des employés subalternes et des ma-
noeuvres).
L'étude de Monsieur COULIBALY (1) que nous avons précédemment
utilisée confirme cette remarque. Cette étude montre, en effet, que du point
de vue des distorsions du marché du travail sur l'ensemble du secondaire mo-
derne, 83,6 % des travailleurs africains immigrés se composent d'ouvriers,
de manoeuvres et d'apprentis, 15,5 % sont des employés qualifiés et seule-
ment 0,9 % sont des cadres supérieurs.
Les Nationaux (Ivoiriens) par contre se répartissent en 68,8 %
d'ouvriers, 28,5 % d'employés et seulement 2,7 % d'agents d'encadrement (2).
(1) A.Y. COULIBALY -
op.cit
pp. 29
(2) Les estimations sont précisément faites sur un échantillon de
9 000 Africains salariés.

117.
Le problème, en réalité, est de trouver une explication plau-
sible à cette situation d'inégalités que l'on rencontre,du reste, dans
toutes les villes-pôles africaines.
La première cause essentielle d'une telle situation réside,
à notre avis, dans le phénomène de l'exode rural de la campagne vers la
ville.
(Le Tableau nO 18 ci-dessous traduit le phénomène de l'exode en
Côte d'Ivoire).
TABLEAU nO 18
Mouvements annuels de population en Côte d'Ivoire
1.
Milieu rural
Croissance naturelle
58 000
Migrations externes
13 000
TOT A L
71 000
A déduire mouvements vers les villes
17 000
Solde
54 000
II.
Milieu urbain (sans ABIDJAN)
Croissance naturelle
15 000
Migrations internes
10 000
Migrations externes
18 000
TOT A L
43 000
A déduire mouvements vers ABIDJAN ...•..
3 000
Solde
40 000
III. ABIDJAN
Croissance naturelle
7 000
Migrations internes
10 000
Migrations externes
9 000
TOT A L
26 000
Source:
Tableau reconstitué à partir des trava:u:x: de A. ACHIO :
L'emploi en Côte d'Ivoire. Institut des Sciences Sociales

du Travail - 1959 - pp la.

118.
Qu'est-ce qui explique ce mouvement des populations? Et
comment et pourquoi les migrants constituent la masse des déshérités
en Afrique noire ?
Une approche économique du phénomène de la migration dans les
pays en voie de développement est l'oeuvre de Michaël P. TanARO
(1)
Selon cet auteur le migrant fonde sa décision d'émigrer sur
des considérations de maximisation du revenu qu'il pense pouvoir escompter
en ville et à la campagne.
(première hypothèse de son modèle) -
A cette hypothèse l'auteur ajoute une seconde hypothèse selon
laquelle le migrant est déterminé à la fois par le revenu prédominant dans
le secteur moderne (cela est indiscutable) et la probabilité d'obtenir un
emploi dans ce secteur (l'hypothèse relève ici de la rationalité économique
et devient discutable dans le cadre des économies africaines ainsi que nous
le verrons dans la suite de nos développements).
Soient alors :
v (0), la valeur actualisée du flux de revenu urbain et
rural "net" escompté pendant le laps de temps envisagé par le migrant.
Yu, Yr (t), le revenu effectif moyen des personnes occu-
pées dans l'économie urbaine et dans l'économie rurale,
n, le nombre de périodes comprises "dans le laps de temps
envisagé par le migrant,
r, le taux d'actualisation reflétant le degré de préférence
temporelle du migrant,
La décision d'émigrer, selon TanARO dépendra du fait que l'é-
quation ci-dessous soit positive ou négative :
-rt
v (0)
(t)
Yr (t)} Cdt - C (0)
avec
C (0)
=
Coût de la migration
p (t)
probabilité d'obtenir un emploi urbain.
(1) M.P. TODARO
:
L'exode rural en Afrique et ses rapports avec l'emploi
et les revenus dans BIT: L'emploi en Afrique
op. cit. 53-54.

119.
Ainsi le migrant déciderait d'émigrer si et seulement si la va-
leur actualisée du revenu urbain qu'il escompte est supérieure à la valeur
actualisée du coût de migration qu'il aura à supporter nécessairement: man-
que à gagner pour le temps qu'il consacrera à chercher un emploi, frais et
dépenses dans cette période transitoire.
On se rend tout de suite compte que cette théorie "béhavioriste"
de la migration ne peut pas totalement rendre compte du phénomène en milieu
africain. La raison en est toute simple et réside en ceci qu'en Afrique
noire ceux qui ont la notion de ce que c'est que l'économie ou la rationali-
té économique se comptent ou bout des doigts.
Les causes de l'exode restent alors pour nous plus sociologiques
qu'économiques.
La cause essentielle réside, en réalité, dans la quasi-absence
de véritables mesures d'aménagement de l'espace de sorte à maintenir les
Jeunes dans leurs cadres régionaux. Cela semble d'autant plus indispensable
que la plupart des migrants n'ont pas la qualification nécessaire pour occu-
per un poste honorable dans la grande industrie. Ainsi une fois parvenus
dans les villes-pôles se voient-ils obligés d'accepter un salaire très près
du minimum vital. Il se développe dès lors un chômage involontaire dans le
sens Keynésien du terme et en même temps un phénomène d'inégalités sociales
que ne peuvent masquer les élans de solidarité que soulignent fort justement
certaines études sociologiques en milieu africain (1).
Il est vrai aussi que le comportement ostentatoire des respon-
sables politiques et économiques qui, en mal de modernité sacrifient le
problème de développement à celui de prestige, est une des causes essentiel-
les du mouvement des populations. On crée des villes gigantesques où se
concentrent toutes les usines. la te~tation est alors forte d'aller décou-
vrir les merveilles de la nouve11~ cité.
Comment résoudre le problème ?
Certains nÉo malthusiens comme Walter GALENSON (2) n'hésitent
pas a préconi~er une régulation des naissances, ignorant par là même les
causes structurelles et socio-culture11es du phénomène de la migration
ainsi que nous les avons développées.
(1) Par exemple J.M. GIBBAL : Citadins et Villageois dans une ville afri-
caine: L'exemple d'ABIDJAN
- pUG 1974
pp 215-239
(2) W. GALENSON : Essais sur l'emploi
BIT Genève - 1973 pp 4
op.cit.

120.
Pour tenir compte des phénomènes socio-culturels dans la lutte
contre le phénomène de l'exode, nous ratifions les thèses développées par
des auteurs comme P. NDEGWA et John P. POWELSON (1) qui préconisent une
lutte contre le tribalisme, la corruption et le népotisme ; dans la mesure
où en Afrique noire ces considérations d'ordre personnel détournent les
responsables des vrais problèmes de développement. Pour enrichir la thèse
nous disons alors que le problème à résoudre est un problème structurel.
Sa résolution suppose la maîtrise du concept de développement économique.
Dans le cadre précis de la politique du code des investissements ceci ré-
side dans un choix délibéré d'une politique d'aménagement de l'espace et
d'industrialisation. Avant de faire des propositions concrètes dans cette
direction, examinons un moment la question du laxisme fiscal, cette autre
limite des politiques actuelles du code des investissements.
II. Le processus d'appauvrissement de l'économie nationale
Dans le système interventionniste les incitations fiscales sont
un des moyens essentiels dont dispose la Puissance Publique pour associer
les entrepreneurs privés à la réalisation des programmes de développement
économique.
Si dans les pays d'Afrique noire l'insuffisance de capitaux et
le besoin de technologie justifie cette pratique (Cf. nos développements
précédents), force est cependant de reconnaître que les mesures d'incita-
tions fiscales ont pris ces dernières années des proportions telles qu'elles
constituent, en réalité, un manque à gagner pour la prospérité de l~économie
nationale.
Ce manque à gagner peut s'apprécier à deux niveaux selon cer-
tains théoriciens (2)
- D'abord il y a un transfert financier qui est directement lié
à la politique meme des stimulants fiscaux.
- Il Y a ensuite une mauvaise utilisation du capital humain qui
s'explique par le développement d'un important chômage. En effet, les capi-
taux privés en quête de profit et surtout conscients des conditions extrême-
ment avantageuses qui leur sont offertes font de plus en plus appel à des
(1) P. NDEGWA et J.P. POWELSON dans L'empZoi en Afrique: aspects critiques
du probZème
- BIT 1973 op.cit INTRODUCTION
pp 15
(2) Cf. notamment Zes travaux de P. NDEGWA et
J.P. POWELSON : L'empZoi en
Afrique
BIT 1973
pp 17.

121.
techniques perfectionnées où les machines remplacent l'homme (situation
davantage dramatique quand cet homme n'a déjà pas toutes les qualités re-
quises pour être employé dans la grande industrie). Il y a du fait de ce
chômage un essoufflement du marché intérieur qui n'arrive pas à se déve-
lopper.
Ce cas d'étranglement de l'économie nationale est d'autant
plus regrettable que par ailleurs des enquêtes menées dans les pays en
voie de développement en général (1) et dans les pays d'Afrique noire
en particulier (2) concluent que les capitaux privés en direction de ces
pays sont moins attirés par "l'appât fiscal" que par toute une série d' au-
tres facteurs dont la liste suit :
Il Y a d'abord des motifs d'ordre politique. La stabilité po-
litique du régime, la permanence de l'équipe dirigeante et des orientations
de base sont, en effet, des facteurs déterminants dans les décisions d'in-
vestissement.
Il Y a ensuite le coût des facteurs -
Il s'agit de facteurs de production
capital, travail et ma-
tières premières. Trois motifs sont alors mis en évidence
- la proximité des matières premières
- le coût de la main d'oeuvre
- .la :pr~ximité des grandes artères de communication .
. Il Y a en troisième lieu les avantages de marché. Le souci de
l'investisseur privé c'est d'abord l'existence d'un marché potentiel et la
possibilité de conquête d'un marché nouveau.
(1) Cf.
l'étude de FREDERICO HERSCHEL: "Fiscal poZicy for economic grOùJth
in Latin America"
The Johns Hopkins Press 1965 pp 89 rapporté dans
P. NGAOSYVATHN : "Attraction de l'épargne privée par l'impôt" -
RSF nO
4
Déc. 1974
pp 994
(2) CHEVASSU (J.) et VALETTE (A.) : "Les investissements de la Côte d'Ivoire
Qui et Pourquoi?
ORSTOM, Centre de Petit-Bassam, Série industrielle
nO 13 ABIDJAN 1975 pp 32 rapporté dans G.K. GRAKA : Le rôle de la fis-
calité dans le Tiers-Monde
Thèse Clermont 1978 pp 389-392.

122.
Il Y a enfin les économies ou déséconomies externes
Les externa1ités sont, en effet, tous les facteurs externes
à l'entreprise mais qui ont une influence soit favorable (économie ex-
terne) soit défavorable (déséconomie externe). L'environnement économique
et social, la proximité de grandes artères de communication sont ici des
facteurs qui pèsent lourd dans les décisions d'investissement.
On constate ainsi à la lumière des différents facteurs (dont
les détails figurent dans les tableaux nO 19 et nO 20 ci-après) que les
avantages fiscaux ne sont, en réalité, qu'un privilège supplémentaire
pour les capitaux privés étrangers (1). Ce n'est, du reste, pas nier l'ef-
ficacité de ces mesures dans le cadre des économies africaines. Mais il
semble que la politique de stimulants fiscaux ne s'avère réellement effi-
cace que dans la mesure où elle est fondée sur la certitude d'une rela-
tion directe de cause à effet ; autrement dit il faut que les concessions
fiscales permettent à terme un certain nombre de compensations. Comment y
parvenir ?
- Claude VALDES (2) après avoir dénoncé dans le cadre de l'ensem-
ble des pays du Tiers-Monde la malheureuse situation de concurrence à la-
quelle conduit la politique des stimulants fiscaux préconise une libre con-
currence entre les capitaux ; concurrence qui devrait donc permettre aux
entreprises étrangères de contribuer mieux que par les incitations fiscales
au développement économique de ces pays. La solution n'est pas moins aléa-
toire. En réalité, le problème nous semb1e-t-i1, n'est pas de réaliser des
profits immédiats et d'assurer son succès personnel -ainsi que c'est le
cas présentement. Il s'agit plutôt avec le concours des capitaux étrangers
de mettre en oeuvre une politique économique qui permette à long terme à
l'économie nationale de s'auto-entretenir. Précisément dans le cadre des
économies africaines il s'agit, pensons-nous, de lancer un processus de
développement cohérent et intégré comportant la mise en valeur de toutes
les potentialités agricoles et la mise en oeuvre d'une industrialisation
en profondeur.
(1)
Voir les nuances de G. KGBAKA -
op.cit
pp 395
(2)
Cl. VALDES "Tendances actuelles de la fiscalité en Amérique Latine"
R S F nO
1 - 1964
pp 57.

124.
TABLEAU nO 20
Les facteurs déterminants dans les décisions des capitaux
privés étrangers à s'investir en Côte d'Ivoire
RANG
FACTEURS
1
La croissance du marché ivoirien
2
La stabilité politique
3
Le libéralisme économique affirmé
4
Les économies externes d'ABIDJAN
5
Le marché ouest-africain
6
Le code des investissements
7
L'existence d'un grand port
8
La proximité des matières premières
9
La promotion industrielle
la
Divers facteurs non économiques
11
La conservation d'un marché
12
Les agréments du pays
13
Le coût de la main-d'oeuvre
14
Divers facteurs économiques
SOÙ1'ce :
CHEVASSU (J.) et VALETTE (A.)
:
Les investissements de ta Côte·d'Ivoire : qui et
pourquoi?
ORSTOM - Centre de Petit Bassam
1975
pp 36-37
.-...

125.
Dès lors une véritable politique du code des investissements
devrait consister non seulement à attirer les capitaux étrangers mais aussi
à les canaliser et à les orienter en fonction de ces différents objectifs.
Voilà la perspective dans laquelle nous ferons nos prochains
développements.

SECTION II
POUR
UNE
POLITIQUE
VOLONTARISTE
DU
CODE
DES
INVESTISSEMENTS
EN
AFRIQUE
NOIRE

On ne saurait nier l'apport des capitaux privés étrangers aux
pays en vo~e de développement. Notre point de vue sur cette question est
donc loin de converger avec celui de ceux dont parle à tort ou à raison
un homme politique contemporain quand il écrit
"Some people regard a private enterprise as a
pedatory tiger to be shot ; others look it as
a cow they can milk ; not enough people see it
as a healthy horse pulling a shirdy wagon"
(1)
Cet apport est d'autant plus indéniable que la question en
soi ne constitue pas une innovation dans la littérature économique.
Déjà les classiques soutenaient que l'apport de l'investisse-
ment privé réside pour l'essentiel dans la meilleure répartition entre
pays des ressources en capital et en facteurs associés.
(1)
W. CHURCHILL
:
Reader's Digest
Avril 1960
Cité dans F. ALBIALY
:
La société financière internationale
et le développement des pays sous-développés
DROZ Genève 1963
pp 16.

126.
Pareillement à l'heure actuelle, on affirme d'une manière ou
d'une autre que le capital privé an transmettant aux pays sous-développés
le savoir-faire (know-how) et des fonds de placement contribue à l'accrois-
sement de leurs échanges et par conséquent à leur développement (1). Nous
pensons avoir suffisamment mis en lumière les limites de telles affirma-
tions (2).
En fait, nous estimons que si la contribution des capitaux et
entreprises étrangers au développement économique du Tiers-Monde est évi-
dente, cette contribution souffre de certaines lacunes.
(1)
Voir les nuances de
:
G.Y. BERTIN
:
L'invéstissement international
PUF 1971 pp 25-26.
Nations-Unies
Méthodes et problèmés d'indus-
trialisation des pays sous-développés
op.cit
pp 122-149 -
P. ORDONNEAU
:
Les multinationales contré lés Etats
Les Editions
ouvrières
1975
pp 192
La position est surtout celle de Raymond VERNON dans
Les entreprises
multinationales
Ca Zmann-Levy
1973
pp 214.
(2)
Des études récentes soulignent par ailleurs les limites au transfert de
technologie et de savoir-faire dans les pays en voie de développement.
Les entreprises qui opèrent le plus souvent dans ces pays
sont des filiales de multinationales. Il y a donc un quasi-
monopole de la maison-mère. C'est elle qui a la capacité
d'offrir à ses filiales la totalité des connaissances dont
elles peuvent avoir besoin. Ce n'est pas sûr que ce trans-

fert corresponde et réponde aux besoins de l'économie d'ac-
cueil.
La prépondérance du centre dans le choix du matériel
ainsi
3
que l'intégration très étroite des filiales dans le proces-
sus productif international ne sont pas sans effet
d'homo-
généisation des normes et des techniques de production.
En définitive
ce phénomène conduit aussi à une uniformisa-
3
tion des formations professionnelles.
Cette homogénéisation des normes et des techniques de pro-
duction conduit par ailleurs à l'existence limitée de centres
de recherches délocalisés.

Voir dans J. OUPOH OUPOH
:
Le processus d'industrialisation dans
une économie à croissance agricole : le cas de la Côte d'Ivoire
Thèse d'Etat - Clermont-Fd - 1979 - pp 390.

127.
On comprend mieux notre souci à la lumière de cette phrase
de Gilles Y. BERTIN
'~'investissement à destination des pays pauvres ne
fait qu'entretenir la croissance de ces pays pour en
tirer le meilleur parti possible au lieu de susciter
cette croissance; et
cet élément d'équilibre accen-
3
tue parfois les déséquilibres existants" (1).
Voilà qui ouvre donc une perspective en matière de politique
économique.
- Il semble, en effet, que pour une contribution pleine
et entière des capitaux privés au bien-être des populations des pays sous-
développés, les dirigeants de ces pays ne doivent pas laisser les seuls
investisseurs contrôler et décider des modalités et de l'affectation de
leurs capitaux. Il faut au contraire -comme nous l'avons déjà souligné-
une "volonté politique de participation" qui canalise et oriente les ca-
pitaux privés selon les impératifs du développement.
- Dans un premier temps on précise les axes théoriques
de notre démarche
autrement dit la politique que nous envisageons.
- Dans un deuxième temps on montre comment on peut JUS-
tement adapter la politique du code des investissements à ce schéma théo-
rique.
(1)
G. Y
BERTIN
: L'investissement international
op. cit
pp 25

128.
PARAGRAPHE
l
LES DEUX AXES THEORIQUES DE LA POLITIQUE ENVISAGEE
Il faut une politique volontariste d'aménagement de l'espace
pour lutter contre les déséquilibres économiques régionaux. Cela est au-
jourd'hui un des impératifs en matière de développement.
Il faut -dans cette perspective- une politique d'industriali-
sation adaptée au cadre et aux réalités des économies africaines. Le mo-
dèle industriel devrait permettre (prioritairement) une valorisation des
ressources naturelles (agricoles essentiellement).
A. -
UNE POLITIQUE VOLONTARISTE D'AMENAGEMENT DE L'ESPACE
Il Y a bien longtemps déjà -on le sait sans doute- que l'on
est passé d'une conception purement quantitative de la croissance et du
développement (1) à une conception que l'on pourrait désormais qualifier
de qualitative. Ce n'est, du reste, pas tous les détours de cette muta-
tion des objectifs de la science économique que nous allons reproduire ici.
De nos jours, en effet, le problème de croissance et de déve-
loppement ne se pose plus non seulement en terme d'une dichotomie entre
croissance et développement mais aussi il ne se pose plus en terme d'accu-
mulation quantitative (mercantilisme) ; mais plutôt en terme de complémen-
tarité, en terme "d'accumulation qualitative".
La croissance suppose précisément que la Puissance publique
veille à l'utilisationrationnell~des ressources et à l'emploi judicieux
du surplus retiré de la production (2) ; et surtout le développement sup-
pose une juste répartition des fruits de la croissance et un aménagement
de l'espace social.
(1) -
Au sens où ces termes sont précisément définis par le Professeur
François PERROUX dans : L'économie du XXe siècle
PUF 1961
pp 155 et 557
,
(2) -
A. BARRERE
:
Politique financière
Dalloz 1958
pp 22-23

129.
Ainsi l'effort semble fait de dépasser l'inhumaine chrématis-
tique classique pour aboutir à placer l'homme et la collectivité tout en-
tière au centre des débats économiques (1) ; d'où le schéma que nous em-
pruntons au Professeur André PIETTRE (2).
1.
Le rétrécissement des théories classiques
La
nature
L'homme
II.
L'élargissement des théories contemporaines
L'homme
Le milieu
On perçoit alors clairement les contours du modèle d'aménage-
ment de l'espace que nous préconisons.
Ce n'est pas une politique d'accompagnement ou de "déve-
loppement économique" (3) dans un but d'accumulation quantitative
ma~s
plutôt une politique d'anticipation - de développement social - qui cana-
lise l'assistance vers les régions où les équipements collectifs sont in-
suffisants.
La politique industrielle doit être adaptée à cet impératif
de développement.
(1) Voir.P. PASCALLON : Regard sur ce temps ou réflexion sur la èroissance
Cujas 1977 pp 199-226 -
Les tares de la croissance libérale
F. PERROUX : Economie et société - PUF 1963 pp 21.
(2) A. PIETTRE : Pensée économique et théories contemporaines
Dalloz 1975
pp 254.
(3) L.H. KLAOUSSEN
Méthodes de séleètion d'industries pour les régions
en stagnation
O.C.D.E.
1967
pp 24-27.

130.
B. -
VERS UN MODELE D'INDUSTRIALISATION DES·ECONOMIES
AFRICAINES
Le thème de développement industriel pour les économies du
TIERS-MONDE a fait l'objet d'une littérature abondante au cours de ces
dernières années.
D'une manière générale, c'est le souci de tous ceux qui prô-
nent la voie d'un
"industrio-centrisme"
(1)
que l'on voudrait être
le "processus d'éducation et d'émancipation des populations du TIERS-MONDE".
On insiste précisément sur le rôle révolutionnaire de l'industrialisation
qui devrait faire éclater les structures réactionnaires, les mentalités
traditionnelles (inaptes au progrès) pour les remplacer par le comporte-
ment rationnel et les formes de vie urbaine.
Mais de façon ponctuelle un certain nombre de modèles d'indus-
trialisation ont été proposés aux pays en voie de développement. Il s'agit
dans un premier temps d'exposer brièvement ces différents schémas, d'en
expliciter les insuffisances et de voir ensuite au-delà de ces limites
quelles sont les conditions d'une rationnalisation de la politique indus-
trielle dans le cadre des économies africaines.
1.
Les différents schémas d'industrialisation proposés aux
économies africaines et leur appréciation
Quel est le contenu des différents modèles ? Quel est leur
apport et quelles sont leurs faiblesses !
Deux modèles d'industrialisation ont été proposffices dernières
(1)
Cf. J. FREYSSINET
:
Le concept de sous-développement
Mouton 1966
pp 160.

131.
années aux pays en voie de développement: le modèle d'industrialisation
par substitution aux importations et le modèle d'industrialisation pour
l'exportation
(l).
Le modèle d'industrialisation par substitution d'abord
Il stipule que pour les pays en vo~e de développement la pre-
mière étape d'industrialisation devrait consister à implanter des industries
dont les produits viendront se substituer à ceux habituellement importés de
l'étranger. L'objectif est en dernier lieu de permettre à ces pays de réa-
liser une "accumulation de capital" par des gains de devises. La définition
que donne le Professeur René GENDARl·lli (2) est très explicite à ce propos
.La substitution aux importations~ écrit-il~ est la
'~atisfaction d'une grande partie de la demande inté-
rieure par la production de biens de consommation~
puis progressivement de biens d'équipement en utilisant
sur place les matières premières dans le but d'économi-
ser des devises et de réduire la domination des pays
industrialisés ".
(1) Voir A. HIRSCH~NN
:
A strategy of economic development
New Haven Yale University Press
1972
pp 131-133 notamment.
Nations-Unies
:
Problèmes d'industrialisation des pays sous-développés
New York
1955
pp 122-149
On pourra sur ce point se reporter aussi aux travaux de :
AXA EBAH
:
Croissance industrielle et politique d'intégration plurina-
tionale entre pays en développement
:
le cas des Etats de l'Afrique de
l'Ouest
Thèse d'Etat - Clermont-Fd - 1979 - pp 392 et suive
J. OUPOH OUPOH
Processus d'industrialisation dans une économie à
croissance agricole: le cas 'de la 'Côte d'Ivoire
Thèse d'Etat - Clermont-Fd - 1979
pp 226 et suivantes.
(2) R.
GENDARME
: \\\\ Réflexions sur le prob lème de l'industrialisation des
pays en voie de développement à partir des expériences de l'Egypte et
du Maghreb"
in:
Problèmes Economiques
nO 1377 - 19 juin 1974.

132.
Ainsi transparaît le souci de contribuer au développement éco-
nomique des "Jeunes Nations" pour paraphraser ici le titre de l'ouvrage
du Professeur François PERROUX (1), développement économique qui est donc
subordonné à une condition essentielle: L'accumulation interne de capi-
taux.
Les conditions d'une telle accumulation sont-elles vraiment
réunies dans ces pays ? Et puis une telle proposition, malgré sa pertinence,
ne contient-elle pas un germe de danger qui résulterait d'une mauvaise assi-
milation du principe ? En quoi consiste justement le principe de la substi-
tution aux importations ?
Trois phases sont distinguées dans la m1se en oeuvre du mo-
dèle (2)
Dans une première phase les pays sous-développés doivent pro-
duire, en remplacement des importations, des biens de consommation exigeant
des techniques simples connues et n'imposant pas l'existence ou la construc-
tion préalable d'autres unités complémentaires. Cette première étape est
censée résoudre le problème des devises. La baisse des importations entraî-
nera, en effet, une économie de devises équivalentes à la valeur des im-
portations ainsi réduites (cf Tableau nO 21 ci-après). L'investissement in-
duit et les revenus distribués contribueront par la suite à élargir les di-
mensions du marché local et en même temps à l'accroissementde la demande
de biens manufacturés. Le pays concerné peut aborder la deuxième phase
d'industrialisation.
Dans cette deuxième phase on passe de la production de biens
finis de consommation à la production de biens intermédiaires et de pro-
duits semi-finis.
Enfin la troisième étape sera l'étape de la transformation à
grande échelle des matières premières qui trouvent désormais leur débou-
ché dans la production de biens semi-finis et de produits intermédiaires
troisième étape permise, du reste, par des effets cumulatifs dans les
gains de devises résultant des deux premières phases.
(1)
F. PERROUX
L'Economie des Jeunes Nations
PUF
1962
(2)
Nous empruntons beaucoup pour ces développements aux travaux de
AKA EBAH - Thèse préalablement citée
pp 396-398

133.
TABLEAU nO 2]
Evolution (en %) du Taux d' import / substitution
selon les secteurs en Côte d'Ivoire
SEC T E URS
]961
]971
]974
:------------:------------------------------:---------:---------:---------:
Agro-alimentaire
........
58,0
70,0
72,0
Bois .....................
85,0
93,0
9] ,0
Textiles .................
33,0
59,0
64,0
Matériaux de construction.
33,0
48,0
42,0
Papier - imprimerie ......
24,0
49,0
46,0
TOT A L
47,5
66,0
69,0
Chimie et assimilés
.
24,0
54,0
54,0
Industries mécaniques
électriques, travaux des
métaux
.
]6,5
34,0
31,5
TOT A L
]9,0
44,0
42,0
TOT A L
G LOB A L
35,0
53,0
52,0
.
.
.
.
.
.
.
.
---------------------------------------------------------------------------
Source:
CHEVASSU (J.) et VALETTE (A.)
:
Les modalités et le contenu de la croissance industrielle
de la Côte d'Ivoire
ORSTOM
Cahiers Série Sciences Humaines - Volume XIV -
nO 1 - 1977 - pp 50 - rapporté dans AKA EBAH
op.cit
pp 497.

134.
Mais au fond mieux ne serait-il pas de produire pour le marché
extérieur que pour le marché intérieur très étroit? En tout cas c'est ce
que cache la politique d'industrialisation pour l'exportation.
Le modèle d'industrialisation pour l'exportation ensuite
Il s'agit cette fois de produire à partir des ressources loca-
les ou importées des biens destinés pour l'essentiel au marché extérieur.
Et une telle politique sera le fruit d'une étroite collaboration entre les
firmes étrangères qui devront apporter la technologie, le personnel quali-
fié de gestion et d'exploitation industrielle et le pays d'accueil qui
fournira l'emplacement géographique souhaité en même temps qu'il définira
les conditions juridiques et institutionnelles qui garantissent la rentabi-
lité maximum de l'unité de production.
Tentons un effort d'appréciation des deux modèles.
1.2 -
~~~EE~E!_~!_!~~_~~i~!~~~~~_~~_~~~§~~~
~~i~~~~!Ei~!i~~!i~~_~~_g~~~!i~~ :
Les deux formes d'industrialisation traduisent, quoique l'on
puisse dire, un certain souci de promotion de développement économique
dans les pays du TIERS-MONDE. C'est un apport que l'on ne saurait nier.
Mais malheureusement tous ces modèles, non seulement leur
réussite se
heurte" .. à des obstacles d'ordre socio-cu1ture1 et d'ordre socio-économique
qui parsèment les pays d'Afrique noire; mais aussi ils véhiculent une phi-
losophie qui en limite par ailleurs l'efficacité et la portée.
Il y a d'abord des limites spécifiques à chaque modèle pu~s,
ensuite des limites d'ordre général.
Les limites spécifiques d'abord
Le modèle d'industrialisation par substitution aux importations,
il est aisé de le remarquer, repose sur l'hypothèse implicite de la rationa-
lité économique. C'est à ce niveau qu'apparaissent, nous semb1e-t-i1, ses
limites spécifiques dans le cadre des économies africaines .
. D'abord compte tenu du comportement ostentatoire des responsa-
bles des pays d'Afrique noire, il n'est pas sûr que les gains de devises
qui pourraient être réalisés puissent être effectivement employés à l'entretie

135.
de l'appareil de production. Mieux nous disons avec les Professeurs
Maurice BYE et G. DESTANNE DE BE~~IS (1) que cette stratégie réserve
finalement à la minorité des privilégiés ayant déjà accès au marché des
produits importés l'utilisation du capital disponible (substitution d'im-
portation) ou transfert à l'extérieur des effets de l'investissement
(promotion d'exportation) au lieu d'utiliser ces effets d'entraînement
au sein de l'économie nationale et pour son développement global.
Quant à l'industrialisation pour l'exportation elle entraîne-
ra sans doute dans certains pays où le secteur traditionnel est important
une perte substantielle d'emplois. Et il n'est pas sûr, nous semble-t-il,
que cette perte d'emplois sera compensée par la création d'unités moder-
nes de production.
Mais ce ne sont là que des limites subsidiaires par rapport
aux problèmes de distorsions dans l'économie nationale et d'insertion
dans le réseau d'échanges internationaux que posent les deux formes d'in-
dustrialisation qui préconisent toutes les deux une "industrialisation
sélective de marché" •
. Les limites d'ordre général ensuite
En réalité, les deux schémas, pour emprunter ici des détails
au Professeur Mohamed DOWIDAR (2), reposent sur l'une des versions de
l'idée de croissance non-harmonisée (unbalanced-growth) par opposition à
la croissance harmonisée (balanced-growth).
Deux concepts qui, du reste, se comprennent par rapport à l'i-
dée selon laquelle le système économique d'une société donnée devrait être
conçu en tant qu'une totalité organique composée de différentes parties
entre lesquelles existent des relations d'interdépendance.
Il y a donc selon le Professeur DOWIDAR l'idée d'une " cro is-
sance harmonieuse" qui peut être considérée du point de vue (par exemple)
de la nécessité du développement simultané de l'agriculture et de l'indus-
trie, étant donnés les rapports d'interdépendance liant les deux secteurs
(1) M. BYE et G.D. DE BERNIS: Relations économiques internationales -
Echanges internationaux
Dalloz 1977 pp 1042
(2) M. DOWIDAR : La stratégie de l'import-substitution~ stratégie de la
croissance dans la subordination
Cours Sciences Econ.
Brazzaville - 1975 -

136.
(l'agriculture fournit à l'industrie les matières premières et les biens
alimentaires nécessaires à la force de travail; l'industrie fournissant
en retour des produits industriels de consommation courante).
Opposée à la "croissance harmonieuse" il y a la croissance
"non-harmonieuse", c'est-à-dire, une croissance qui se réalise par étapes
successives; à chacune de ces étapes l'accent sera m~s sur un certain do-
maine de l'activité économique qui recevra un effort de croissance relati-
vement plus grand; cette étape préparant ainsi l'étape suivante jusqu'à
ce que soit atteinte celle où l'ensemble de la croissance de l'économie
sera harmonieuse.
c'est précisément à ce concept de croissance "non-harmonieuse"
ou de "croissance par déséquilibres successifs" que se rallient les deux
modèles.
Dès lors se précisent leurs limites dans le cadre des écono-
mies africaines. On ne saurait imaginer un seul instant que des sociétés
essentiellement agricoles puissent se développer en privilégiant d'abord
l'émergence d'un sous-secteur industriel au détriment du secteur rural
traditionnel. Le processus inverse paraît plus réaliste.
Mais, en réalité, i l ne s'agit pas
d'opérer une "discrimina-
tion". Pour les économies africaines, le modèle industriel devrait se
fonder à notre sens sur
- Une prise en compte "consciente" (I) des besoins fon-
damentaux des populations; ce qui suppose l'existence d'un Etat capable
de cette volonté s'appuyant sur des forces qui n'ont pas partie liée avec
le capitalisme mondial.
- Les potentialités réelles de l'économie. Le modèle
industriel doit autrement dit reposer sur une dynamique interne et doit
s'attacher à valoriser l'ensemble des potentialités humaines et naturel-
les (ressources agricoles essentiellement).
(1) Une action consciente nous dit le Professeur DOWIDAR suppose un choix
conscient basé sur une appréciation critique des différentes possibi-
lités offertes à la société. Certaines de ces possibilités sont réel-
les et peuvent conduire au développement. D'autres
par contre sont il-
lusoires et visent à maintenir la société dans son état de sous-déve-

loppement.
M. DOWIDAN
Cours préalablement cité
pp 3

137.
II. -
La valorisation des ressources agricoles, une priorité
absolue dans une relation d'interdépendance agriculture-
industrie
En Afrique noire la véritable politique d'industrialisation,
à notre sens, ne devrait pas être une obsession pour l'industrialisation
mais plutôt une politique qui tende prioritairement à valoriser l'ensem-
ble des ressources locales et précisément les ressources agricoles compte
tenu de l'importance de ces ressources dans l'économie nationale (cf Ta-
bleau nO 22 ci-après).
Ce dernier point nous semble d'autant plus important que
l'histoire nous apprend que la plupart des pays aujourd'hui développés
ont réalisé leur processus de développement économique à partir de l'a-
griculture (1).
Il est, du reste, vrai, ainsi que l'affirme TIBOR MENDE (2),
que le schéma historique de développement des pays industrialisés est
"inimitable" pour les pays d'Afrique noire. Les conditions qui ont, en
effet, permis le développement des rapports agriculture-industrie à sa-
voir: l'existence d'une paysannerie riche dans le cas de L'ANGLETERRE
et de la FRANCE, d'une féodalité centralisée ayant eu pour mission his-
torique de maintenir en équilibre les tendances contradictoires dans la
communauté nationale en vue du développement économique (cas du JAPON) ou
encore d'une idéologie qui galvanise toutes les énergies (cas de la CHINE)
toutes ces conditions, on ne saurait le nier, n'existent pas dans ces pays.
(1) -
J. OVPOH OVPOH dans sa Thèse d'Etat montre bien par un rappel his-
torique très enrichissant comment dans des pays à structures libé-
rales (Angleterre, France, Japon) ou socialiste (Chine) les progrès
de l'agriculture ont engendré le développement industriel et le dé-
veloppement économique dans son ensemble.

J. OUPOH OUPOH
:
Le processus d'industrialisation dans une écono-
mie à croissance agricole : le cas de la Côte d'Ivoire -
Thèse - Clermont-Fd - 1979 - pp 4-15
(2)
TIBOR MENDE
:
De l'aide à la recolonisation
Seuil 1972 -
pp 33.

138.
TABLEAU nO 22
Production annuelle de quelques grands produits
d'exportation d'origine agricole en Afrique d'expression française
(Millions de tonnes)
P A Y S
-------------------------------------------------
.
.
.
.
.
.
PRODUITS
Haute-
: S"
1:
Côte
:
enega
.
Mali
Congo
Volta
:
: d'Ivo1re :
:-------------------:---------:---------:---------:---------:---------:
Arachide
.
133
828
30
100
17
Coton fibre ...
3
18
15
6
Cacao
145
Café
.
204
2
Huile de
Palme
.
35
57
.
.
~-------------------~---------~---------~---------~---------~---------~
Sozœce
Tableau construit à partir des statistiques de
l'Annuaire de la production
PAO
1974 -

139.
Mais à notre sens le problème ne doit pas être posé en ces termes. Il ne
s'agit pas pour les pays d'Afrique noire de suivre la même filière que
les pays aujourd'hui développés. Il s'agit plutôt ·.pour eux de s'inspirer
des expériences historiques pour bâtir un modèle original qui résolve les
problèmes réels de l'économie nationale.
Il semble que pour les pays d'Afrique la condition essentielle
pour dégager un surplus économique (1) en vue de réaliser les objectifs de
croissance réside dans la mise en valeur prioritaire du secteur agricole,
sans toutefois faire des entorses au développement du secteur industriel.
La politique industrielle qui ne doit pas être une obsession pour l'indus-
trialisation doit répondre à cette nécessité de la valorisation des res-
sources locales (cf Tableau nO 23 ci-après).
Ainsi se trouvent définies les conditions d'un modèle global
de développement économique par opposition aux modèles partiels que nous
avons précédemment décrits. Un tel
schéna n'est pas une innovation de
notre part. D'autres recherches ont déjà souligné la nécessité d'un dé-
veloppement simultané de l'agriculture et de l'industrie comme condition
essentielle du "démarrage économique" des pays sous-développés en général
et des pays à croissance agricole en particulier.
(1) Le surplus économique en tantqu'~pargne ou accumulation est un concept
qui peut s'apprécier sous trois angles selon Paul BARAN :
- Il Y a d'abord le surplus économique effectif: à savoir la différence
entre la production courante effective de la société et sa consommation
effective.
Ce surplus peut donc être assimilé à l'épargne ou à l'accumulation.
- Il Y a ensuite le surplus économique potentiel qui est la différence
entre la production qui pourrait être réalisée dans la société et ce
que l'on pourrait y considérer comme consommation vitale. L'apparition
de ce surplus est subordonnée à une réorganisation plus ou moins totale
de la production et de la répartition du produit social.

- Il Y a enfin le surplus économique planifié qui ne peut être appliqué
qu'à une planification de type socialiste. C'est un '~ptimum planifié"
obtenu à partir d'une utilisation optimale de toutes les ressources
productives.

Cf.
P. BARAN
Economie politique de la croissance
Economie et Socialisme
Maspéro 1967
pp 70-92

1400
TABLEAU nO 23
Schéma des relations possibles - agriculture - industrie
dans une perspective de croissance harmonisée
(A..~ONT)
- - - - - - - - - - >
SECTEUR
SECTEUR
f.ourniture d'outil-
AGRICOLE
lage, machines,
INDUSTRIEL
engrais, etc 000
(Population rurale)
(AVAL)
< - - - - - - - - -
SECTEUR
SECTEUR
les produits agricoles
sont transférés au
AGRICOLE
INDUSTRIEL
secteur industriel
(Population rurale)
cette production
sert à 1a consomma-
tion industrielle
TRANSFORMATION
OU
COMMERCIALISATION
(biens industriels
accroissement du revenu
des populations rurales)
Source :
Construction personnelle

141.
Historiquement, depuis Frédéric LIST (1), nous savons, en
effet, qu'aucune agriculture ne peut se moderniser sans entrer dans un
système de relations étroites avec l'industrie et sans se laisser trans-
former techniquement et sociologiquement par l'industrie: recours à la
machine, recours au produit de l'industrie, recours à la recherche scien-
tifique, recours à la discipline du travail dans la perspective d'arri-
ver à une double maîtrise de la production (technique) et du produit
(économique) analogue à la double maîtrise de l'industriel sur sa pro-
duction et son produit. Plus près de nous, le Professeur Gérard DESTANNE
DE BERNIS (2) précise davantage la nécessité de cette relation d'inter-
dépendance entre l'agriculture et l'industrie à travers son concept
"d'industrie industrialisante" qu'il définit ainsi:
"Une industrie ou un groupe d'industries dont la fonc-
tion économique fondamentale est d'entrainer dans son
environnement localisé et daté un noircissement systé-
matique ou une modification structurale de la matrice
industrielle et des transformations des fonctions de
production grâce à la mise à la disposition de l'éco-
nomie entière d'ensembles nouveaux de machines qui ac-
croissent la productivité de l'un des facteurs ou la
productivité globale
en tout cas un accroissement de
3
la maitrise de l 'homme sur sa production et son produit".
Notre problème devient, dès lors, mo~ns de nous étendre sur une
notion déjà largement fouillée que de réfléchir aux moyens pratiques de
traduire le concept dans la réalité. Dans le cadre de notre propos il s'a-
git précisément de montrer comment par le biais de la politique du code
des investissements on peut concilier les deux objectifs de développement
industriel et de promotion de l'agriculture.
(1) F. LIST: Système national d'économie politique
Paris-
Chapelle Libraie éditeur 1857
livre II
pp 348-371 -
rapporté dans J. OUPOH OUPOH - Thèse préalablement citée
pp 408.
(2) G. D. DE BERNIS
"Industrie industrialisante et contenu d'une politique
d'intégration régionale ". Economie appliquée nO 3-4
1966
pp 440 -

142.
PARAGRAPHE
II
LES VOIES D'UNE ADAPTATION DE LA POLITIQUE DU CODE
DES INVESTISSEMENTS AUX IMPERATIFS DU DEVELOPPEMENT
La réussite de la politique du code des investissements telle
que nous la préconisons est subordonnée à l'adoption d'une plate-forme
théorique minimale; plate-forme théorique qu'il convient de préciser
dans un premier temps.
Cette réussite doit être surtout le fait d'une volonté poli-
tique de développement. L'étude du cas algérien va nOUS permettre de cor-
roborer cette réflexion.
A. -
UNE PLATE-FORME THEORIQUE MINIMALE
Il s'agit tout simplement pour les responsables africains de
réviser les pr~nc~pes doctrinaux qui président aux choix des partenaires
économiques. La politique du code des investissements ne doit pas avo~r
pour finalité l'attraction d'une catégorie spécifique de capitaux; mais
plutôt la recherche d'une industrialisation en vue du bonheur des popula-
tions.
Cette recherche d'une industrialisation suppose aussi et sur-
tout un minimum d'harmonisation des législations africaines en matière
d'agréments fiscaux; de sorte que soit évité un élargissement du champ
des possibilités des capitaux privés ; élargissement que favoriserait
une concurrence inter-africaine.
Ceci suppose en dernière analyse l'existence d'une volonté
politique de développement qui voudrait que l'on fasse fi des querelles
et des considérations idéologiques et des égoismes particuliers.
Seule une politique d'harmonisation peut donner aux Etats du
Tiers-Monde les moyens d'accroître leur force de négociation - ainsi
que le précise Maurice GUERNIER (1) :
(1)
M. GUERNIER : La dernière chance du Tiers-Monde, Edit. R. Laffont -
1968 pp 64-65

143.
'Ze Tiers-Monde n'entrera dans le processus de dévelop-
pement que dans le cadre d'accords régionaux qui leur
permettent de dépasser le cadre des micro-nations nées
du colonialisme et de profiter des vertus des écono-
mies de grande éche He".
Concrètement comment traduire cette volonté politique de dévelop-
pement (dans un cadre national) ?
B. -
UNE VOLONTE POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT : L'ETUDE
DU CAS ALGERIEN
La question apparaît d'autant plus délicate qu'il s'agit non
seulement d'attirer les capitaux privés -parce qu'ils sont nécessaires-
mais aussi de les maîtriser -parce qu'ils sont dangereux-.
En fait, des expériences montrent que la coopération avec les
capitaux privés dans la limite d'un respect mutuel des engagements est tou-
jours possible. Il suffit de poser au départ et sans ambiguïté les objec-
tifs que l'on désire atteindre.
On expose d'abord le cas algérien (1) puis on essaie d'en tirer
des enseignements dans la perspective de notre analyse.
1. -
Les rubriques essentielles du code algérien des
investissements
Dans l'expérience algérienne on s'efforce d'attirer les capi-
taux en leur offrant des garanties matérielles de sécurité ; car il est
vrai que ce n'est pas tant "l'appât fiscal" qui attire les capitaux inter-
nationaux que l'assurance d'être à l'abri des troubles politiques et so-
ciaux et des mouvements passionnels qui se succèdent dans les pays en
voie de développement.
(1) Dans l'exposé on se limite à l'essentiel. On pourra consulter (pour en
savoir plus) :
· A. AHMED : Capitaux privés et libération économique: l'expérience
algérienne, Maspéro 1971 pp 102
• ANNUAIRE DE L'AFRIQUE DU NORD: XV 1976 : L'expéi'ienèe algérienne
Edit. du C.N.R.S. 1977 pp 123-125
· F.M.I. : SURVEYS OF AFRICAN ECONOMIES Vol. 7 Washington DC 19?? pp 127

144.
Ces mesures de sécurisation sont les suivantes
- Minimisation de l'effet de nationalisation éventuelle
(cette nationalisation ne devant intervenir que dans un délai tel que les
bénéfices d'exploitation aient atteint le montant du capital investi et
une indemnisation est prévue).
- Avantages fiscaux.
Protection douanière par tarifs et contingentements.
- Facilités de crédit auprès des établissements finan-
ciers publics et para-publics.
Accès aux marchés de l'Etat.
-Atténuation des effets de la législation des transferts
de droit commun (50 % des bénéfices nets et la totalité du produit de la
vente ou de la liquidation peuvent être transférés à l'étranger).
Cas avantages sont octroyés en fonction -évidemment- de certai-
nes réalisations importantes telles que
- L'importance de la valeur ajoutée dégagée sur le ter-
tiroire national.
- Le degré d'utilisation des matières premières locales -
ce qui permet une valorisation des ressources locales ; dans cette pers-
pective il est prévu des méthodes de sélection des investissements repo-
sant sur des mesures d'agrément. En principe aucun projet ne peut être
mis en route sans l'accord d'une Commission nationale chargée d'étudier
ses incidences sur le plan de développement national.
- Obligation d'un effort de formation de la main-d'oeuvre
nationale.
Dans tous les cas le capital privé
-et ce point est extrêmement
important-
est considéré comme un complément à l'effort de l'Etat qui s'oc-
troie un droit de reprise (nationalisation avec indemnisation) dans tous les
secteurs.

145.
II. -
Les enseignements dans la perspective de notre analyse
Cet exemple algérien peut s'apprécier dans deux directions
Il montre
-si besoin était-
que la coopération avec
les capitaux privés étrangers est absolument nécessaire (elle l'est encore
plus dans le cadre des économies africaines). Cependant cette coopération
ne doit pas être une soumission pure et simple politiquement impensable.
Enfin cette coopération ne doit se concevoir qu'en
tant que forme de transition, une étape nécessaire qui doit déboucher sur
la maîtrise de l'économie par les nationaux eux-mêmes.
Ce dernier point nous semble extrêmement important. Il montre
qu'en matière de politique du code des investissements deux impératifs
subsistent qui ne sont pas contradictoires :
D'abord les mesures d'incitation fiscales devraient
avoir pour effet d'augmenter le volume des investissements dans les sec-
teurs vitaux de l'économie et par contrecoup
de
décourager les investis-
sements à caractère spéculatif dans les branches d'activité qui n'ont au-
cun "effet de propagation"
(1).
Ensuite on ne doit pas perdre de vue que l'Etat a be-
so~n de ressources fiscales. Cela impose même des limites aux concessions
fiscales. Autrement dit, pour faire les concessions en matière fiscale
(ce qui n'est pas en ce moment le cas) il faudrait partir de l'idée qu'elles
doivent suffisamment stimuler de nouveaux investissements et par conséquent
provoquer un accroissement compensatoire du revenu national.
(1)
Ce que le Professeur GUNNAR MYRDAL appelle précisément "effets d'en-
tra'Înement par absorption /1
Cf
E. GANNAGE
:
Economie du déve-
loppement, P U F
1962
pp 67-68.

146.
Voilà notre perspective d'une "rationalisation consciente"
(car c'est de cela qu'il s'agit) de la politique du code des investis-
sements.
Au total il apparaît que
Le développement économique et social
-on le dit
encore une fois-
est affaire de volonté politique.
Cela suppose une mobilisation de la population sur
un idéal connnun.
La politique de développement (enfin) ne doit pas
être une improvision ; mais plutôt l'exécution
d'un projet collectif consigné dans un plan natio-
nal de développement.
C'est précisément sur ce dernier thème (celui de la planifi-
cation) que nous allons réfléchir dans le cadre de notre second chapitre .


147.
CHAPITRE
II
LA
NATURE
ET
LE
RÔLE
DE
L'ETAT
EN
AFRIQUE
NOIRE
À
TRAVERS
LA
PLANIFICATION

"Le facteur de
loin le plus important~ c'est
que dans
la plupart des pays peu développés~
les principaux problèmes de planification à
résoudre sont avant tout d'ordre politique
et administratif et non d'ordre économique.
Ceci au sens où les objectifs à atteindre en
matière de planification~ les méthodes utili-
sées pour élaborer et appliquer le plan sont
étroitement déterminées par les valeurs et
les situations politiques~ économiques et so-
ciales des pays en cause".
(1)
(1)
A.
WATERSTON
:
La planification du déve loppemen t
Dunod
1969
pp 4.

148.
INTRODUCTION
Un des phénomènes économiques les plus importants de ces der-
nières années
-on s'en doute-
est l'apparition puis la vulgarisation
progressive de la planification.
Ce nouvel instrument économique
-on le sait-
fut d'abord
utilisé de façon effective par la nation socialiste du monde: l'U.R.S.S
et ceci au lendemain de la révolution bolchevique de 1917 qui donna le
Jour au premier pouvoir socialiste.
Quelques années plus tard -précisément au lendemain de la
dernière guerre mondiale- de nombreux pays occidentaux d'abord puis ensui-
te ceux du Tiers-Monde se lançaient à la suite de l'Union Soviétique dans
l'aventure de la planification (1).
En Afrique noire précisément les premières expériences de
planification ont été -encore une fois- le fait de l'administration colo-
niale. L'objectif était une mise en valeur des colonies pour les rendre
plus rentables (2).
Dans cette perspective il y eut d'abord le projet Albert
SARRAULT -considéré comme la charte de tous les programmes postérieurs
dans les colonies- projet qui, du reste, ne verra pas le jour faute de
moyens (3).
(1) Hiérarchie historique qui ne signifie pas identité ; car si dans les
pays socialistes la planification cherche à épanouir les besoins so-
ciaux~ dans les pays occidentaux par contre~ elle est une simple pro-
grammation qui cherche à épanouir les besoins individuels.
D'aucuns
utilisent des ter.minologies incomplètes comme 'planification impéra-
tive" et 'planification indicative" pour distinguer les deux types de
planification.
Voir par exemple J. MARCZEWSKI : Planification et croissance dans les
démocraties populaires~ MASPERO 1956 -
pp 423.
(2) Au sens où l'effort de planification visait avant tout à rendre l'éco-
nomie des territoires coloniaux complémentaires de celle de la métro-
pole dans un système dit "intégré". Voir A. WATERSTON .~ La planifica-
tion du
développement~ DUNOD 1969
pp 34-35
(3) Sur ce point voir J.S. CANALE: l'Afrique noire - de la colonisation
aux Indépendances~ Edit. Sociales 1977 pp 103 et suive
C. COQUERY
VIDROVITCH et H. MONIOT : L'Afrique noire de 1800 à nos jours
PUF 1974
pp 407 et suive
G. NGANGO
:
Les investissements d'origine extérieure
en Afrique noire~ Présence Africaine 1973
op.cit. pp 82 et suive

149.
Les efforts postérieurs déployés dans les colonies avec la
création du Fonds d'Investissement et de Développement Economique et
Social
(F.I.D.E.S.)
ne remettent pas en cause la philosophie véhiculée
par le projet SARRAULT. Il s'agissait -à travers une sorte de programmation-
d'accroître la capacité de production des territoires coloniaux pour ré-
pondre aux besoins pressants et accrus de la métropole. On s'attachait pré-
cisément à valoriser les produits d'exportation, l'Etat intervenant pour
orienter et coordonner les activités privées ou éventuellement suppléer
leur défaillance. Ainsi fut réalisé le projet d'aménagement du fleuve
Sénégal et de l'Office du Niger qui prévoyait non seulement un vaste en-
semble cotonnier mais aussi l'intensification de la riziculture. Certains
pays furent le champ d'expérimentations positives comme le Cameroun où la
Compagnie Française pour le Développement des Fibres Textiles (C.F.D.T.)
inaugura la culture industrielle du coton.
Il Y eut aussi la création d'instituts de recherches appli-
quées tous orientés vers la production agricole exportable, à l'exclusion
des cultures vivières. Citons entre autres l'Institut des Fruits et Agru-
mes Coloniaux (I.F.A.C.) créé en 1946
l'Institut de Recherche des Huiles
et Oléagineux (I.R.H.O.) créé en 1942
l'Institut de Recherche du Coton
et des Textiles exotiques (I.R.C.T.) ; le Centre Technique Forestier
Colonial (C.T.F.T.).
Toutes ces réalisations montrent -encore une fois- qu'il ne
s'agissait que d'une simple programmation. L'objectif étant -on le rappelle-
d'ajuster l'appareil de production colonial aux exigences de la croissance
économique dans la métropole.
Du reste, au-delà de cette caractéristique essentielle, ce que
l'on reproche à la "planification coloniale" c'est d'abord son caractère
trop ambitieux
-certains programmes ne seront pas réalisés faute de
moyens (1)-
c'est ensuite son caractère peu démocratique; aucun effort
n'étant fait pour associer les responsables locaux à la politique planifi-
catrice.
(1)
Voir par exemple: R. DUMONT
L'Afrique noire est mal partie
Seuil 1962 pp 265
S. AMIN
:
L'Afrique de l'Ouest bloquée -
l'économie politique de la colonisation 1800-1870
Edit. de ~nuit 1971 pp 154.

- - -
- - - - - - - - - - - - ,
150.
Quoiqu'il en soit, une question de fond demeure parrapport
à ce cadre historique. La planification dans les Etats indépendants
d'Afrique est-elle suffisamment dégagée des idées reçues? du cadre
colonial ? des techniques et des modèles occidentaux?
Nous répondrons
tout de suite par la négative à ces différentes interrogations. En effet,
des ambiguités et des contradictions subsistent qu~ font de la planifica-
tion en Afrique noire une simple programmation-, une simple conjoncture.
Notre effort va être justement de lever
-dans un premier
temps-
le voile sur ces ambiguités et ces contradictions ; puis dans
un deuxième temps de faire des propositions en vue d'une meilleure poli-
tique planificatrice.
Nos développements s'articuleront autour de ces deux points
SECTION
I
:
LA PLANIFICATION EN AFRIQUE NOIRE :
THEORIE ET REALITE
SECTION
II
:
POUR UNE POLITIQUE VOLONTARISTE DE
PLANIFICATION EN AFRIQUE NOIRE •


151.
SECTION 1
LA
PLANIFICATION
EN
AFRIQUE
NOIRE
THÉORIE
ET
RÉALITÉ

Dans
ses fondements
théoriques
la politique de planifi-
cation se propose d'être un instrument pour la réalisation d'une indépen-
dance économique (effective).
La réalité est faite cependant d'ambiguïtés et de contradic-
tions qui entâchent la politique planificatrice .

PARAGRAPHE
l
LES FONDE~ŒNTS THEORIQUES DE LA POLITIQUE DE
PLANIFICATION
Les préoccupations à long terme sont partout de rendre l'éco-
nom1e nationale compétitive, "d'intégrer cette économie à l'économie in-
ternationale de marché". L'impératif est celui de la croissance économique.
Les préoccupations sont aussi de réaliser une certaine unité
nationale, une solidarité sans laquelle l'effort de développement économi-
que ne peut être possible.
A. -
LA PLANIFICATION ET L'INDEPENDANCE ECONOMIQUE
Le souci commun des responsables africains -on ne le dira jamais
assez- est celui de l'indépendance économique. Et il semble que cette indé-
pendance économique passe nécessairement par la réalisation d'un certain
nombre d'objectifs quantitatifs dont les plus avoués sont:
- L'équilibre de la balance commerciale et de la balance
des paiements,

152.
La recherche d'un taux max~mum de croissance du pro-
duit intérieur brut (cf Tableau nO 24)
(1).
Conformément à l'objectif de croissance économique on s'atta-
che fort justement à développer l'économie rurale, à promouvoir le déve-
loppement de l'industrialisation.
Dans l'optique du développement de l'économie rurale l'accent
est m~s sur l'accroissement de la production agricole par une politique de
diversification des cultures (2).
Quant à la politique d'industrialisation on va chercher une
complémentarité entre le secteur industriel et le secteur rural. Mais ce
choix n'est pas suffisamment affirmé et suivi ainsi que nous l'avons dit
dans nos développements précédents.
Cet objectif de croissance économique justifie aussi le re-
cours partout en Afrique noire à des méthodes techniques d'élaboration
des plans de développement économique - on pense en particulier au modèle
CHERVEL et PROU dit méthode des effets - qui donnent priorité à un tel
objectif.
Les grandes lignes du modèle pour fixer les idées ? Elles se
résument en trois points essentiels. La réalisation et le fonctionnement
d'un projet (3) entraîne, semble-t-il, trois sortes de perturbations dans
l'économie dans laquelle ce projet vient s'insérer
(1)
La progression des différents taux de croissance du PIB assignés
aux plans nationaux togolais corrobore cette réflexion

1er Plan
5~3 %
2e
Plan
:
7~ 7 %
3e
Plan
:
8
%
Source : Ministère du plan togolais : Bilan du IIe plan quinquennal
de développement économique et social
1971-75
pp 4.
(2)
Voir par exemple J. OurOH OUPOH
Le processus d'industrialisation
dans une économie à croissance agricole : le cas de Za Côte d'Ivoire
Thèse d'Etat - CZe~ont-Fd - 1979 - pp 48 et suiVe
(3)
Pour un exposé complet du modèle cf : M. CHERVEL et M. LEGALLE :
Manuel d'évaluation économique des
projets~ S.E.D.E.S. - Ministère
de la Coopération 1976 - pp 7 et suivantes.

153.
TABLEAU nO 24
Evolution du Produit Intérieur Brut de la Côte d'Ivoire
depuis 1960
(en valeur courante)
PRODUIT
INTERIEUR
POPULATION
PIB / habi tant
ANNEE
BRUT
(millions de
(milliers
(F CFA)
F CFA)
d'habitants)
----------- -------------------
.
.-------------------
.
.
.-------------------
.
1960
142 615
3 735
38 183
1961
161 422
3 840
42 037
1962
168 350
3 945
42 674
1963
197 810
4 050
48 842
1964
239 675
4 165
57 545
1965
239 586
4 300
55 718
1966
257 975
4 430
58 234
1967
275 681
4 560
60 456
1968
326 468
4 765
68 514
1969
365 568
4 940
74 002
1970
415 326
5 115
81 138
1971
440 074
5 264
83 600
1972
472 480
5 423
87 125
1973
565 267
5 809
97 309
1974
742 237
6 064
122 400
:
:
:
-------------------------------------------------------------------------
Source:
TabZeau construit à partir de : Côte d'Ivoire en
chiffres -
Ministère du PZan
-
1976
-
pp 37

154.
Il Y a d'abord une modification (accroissement) de la produc-
tion nationale connne conséquence d'un système de "relation inter-
industrielles" ; deux entreprises A let B peuvent accroître leur production
respective (et par conséquent la production nationale) lorsqu'elles se ser-
vent mutuellement de source de consommation intermédiaires (effets directs
du projet).
Il Y a ensuite une modification (favorable) du commerce exté-
rieur du fait même de ce système de complémentarité. On pourra ainsi
as-
sister à une diminution des importations (de consommations intermédiaires)
et à un accroissement des exportations, d'où une amélioration de la balance
connnerciale et de la balance des paiements (effets primaires du projet).
Il y a enfin une modification de la répartition des revenus. La
valeur ajoutée qui sera dégagée (du fait de cette "dynamique") sera distri-
buée sous forme de salaires, de charges sociales, de droits et taxes de
douane, de revenus d'exploitation entre divers agents (effets secondaires
du projet).
Ainsi le modèle
-dans sa formulation et sa structure-
ne se
préoccupe uniquement que du développement de l'appareil de production
l'objectif essentiel étant celui de croissance et d'accumulation.
On saisit aisément les limites d'une telle démarche qui ignore
les questions essentielles comme celles relatives à l'éducation, à la for-
mation, à l'encadrement des populations rurales, à la valorisation du sec-
teur rural, à la santé, etc...
(1)
Les autres priorités de la planification "africaine" ?
Elles sont à la fois nombreuses et variées et reflètent une
certaine conception spécifique ou une philosophie du développement (cf. Ta-
bleau nO 25 ci-après).
Mais d'une manière générale, la seconde priorité essentielle
reste que le Plan se propose d'être un instrument de cohésion et de solida-
rité nationales.
(1) Pareillement le Professeur Pierre PASCALLON déplore
-dans le cadre de
la planification française-
le fait d'un "conflit" entre la philosophie
véhiculée par des méthodes de planification importées (modèle physico-
financier "FIFI") et les aspirations réelles et prodondes des populations.
P. PASCALLON : Quelle planification pour la France?
Les Editions de
l'Epargne - 1979 - pp 33.
Nous ne posons donc pas un problème de spécificité ; mais nous nous in-
quiétons plutôt de l'ampleur et de la dimension d'une telle situation
dans le cadre des économies africaines.


155.
TABLEAU nO 25
Tableau synoptique des options spécifiques
des plans africains
l
-
COTE
D'IVOIRE
Moyens pour atteindre
Période considérée
Objectifs visés
ces objectifs
. PLAN QUINQUENNAL
· Modernisation agri-
• Ouverture de l'économie
cole et industria-
sur l'extérieur
(1971-1975)
lisation
· Coopération avec les
· Formation des hommes
pays voisins
· Réduction des dis-
· Ivoirisation de l'éco-
parités régionales
nom~e
• Solidarité nationale par
la création de régions
économiques
II -
r·1ALI
• PLAN QUINQUENNAL
· Satisfaction des be-
so~ns fondamentaux
(1974 - 1978)
des populations
· Reconstitution du
cheptel
· Revalorisation des
produits primaires.
· Désenclavement pro-
gressif par l'ex-
térieur de l'in-
frastructure des
transports
III
SENEGAL
.
5 e PLAN
QUINQUENNAL
. A long terme faire
· Participation de l'Etat
accéder le Sénégal
au processus d'industria-
(1977 - 1981)
au rang de société
lisation
industrielle avec
• Insertion des cadres na-
un revenu par ha-
tionaux et entrepreneurs
bitant de l'ordre
locaux dans le circuit
de 600
~
de production
· Développement des
· Plus grande ouverture sur
secteurs produc-
le marché mondial
tifs et formation
• Coopération régionale
des hommes
... / ...

156.
TABLEAU n
25
(suite)
IV -
TOGO
. 2e PLAN DE DEVELOP-
· Indépendance écono-
. Rationalisation
mique.
des
PEMENT ECONOMIQUE
structures
Accroissement réel
ET SOCIAL
·
de
de la production
l'Etat
nationale
( 1971
-
1975 )
· Réduction des
disparités régio-
nales
SOURCES:
Tableau construit à partir
:
I. -
Des renseignements du Ministère du Plan (Côte d'Ivoire)
Loi-Programme des investissements publics 1971-75 -
Exposé des motifs
pp. C
II. -
Des informations reproduites dans Afrique Industrie nO 155
du 1er février
1978
pp. 36-37
III. -
Des informations reproduites dans Afrique Industrie nO 158
du 15 mars 1978
pp. 57-89
IV. -
Des documents du Ministère du Plan
(Togo)
Bilan du
deuxième plan quiquennal 1971-75
pp. 4.

157.
B. -
LE PLAN ET LA SOLIDARITE NATIONALE
On s'efforce à ce n~veau de traduire dans la réalité la philo-
sophie véhiculée par le Parti unique.
Précisément lorsqu'on creuse un peu on s'aperçoit que les me-
sures qu~ vont dans le sens de l'unité nationale sont essentiellement de
deux ordres
D'abord elles se résument en une décentralisation et une ré-
gionalisation de la planification; le souci étant d'associer toute la
population au processus de planification par conséquent de rendre la pla-
nification démocratique.
Dans le cadre de la planification sénégalaise et pour emprun-
. . d
~..
' J
P'
B RARD~I)
. d
"d~
. . "
ter ~c~
es prec~s~ons a
ean- ~erre
E
,ce souc~
e
emocrat~sat~on
du processus de planification se traduit par la création de comités régio-
naux de développement qui ont pour rôle :
- D'une part d'établir la meilleure localisation des opérations
et investissements ainsi que l'ordre de leur réalisation selon l'urgence
relative et les possibilités techniques
D'autre part d'estimer la quantité de travail volontaire qu~
pourrait être prêtée par la population pour certaines opérations les ~n­
téressant directement.
Le souci de solidarité nationale se traduit ensuite par une
lutte contre les disparités économiques régionales. Ainsi par exemple fu-
rent créés en Côte d'Ivoire, dans le cadre de l'aménagement du territoire,
les Fonds Régionaux d'Aménagement Rural (F.R.A.R.) qui se proposent d'amé-
liorer les conditions de vie de la population rurale et de réduire les
disparités économiques régionales. L'ambition est précisément de donner
au milieu rural suffisamment d'équipements collectifs: construction
d'écoles, de dispensaires, de centres socio-culturels (2).
Mais si dans certains pays -ainsi que nous venons de le vo~r­
on s'efforce de traduire effectivement ces objectifs et ces exigences de
(1) J.P. BERARD: Planification en Afrique - Tomé II : problèmes de plani-
fication en Afrique noiré d'expréssion française et à
Madagascar
Ministère de la Coopération 1962 pp 11 & suiv.
(2) Voir:
Côte d'Ivoire en Chiffres
Ministère du Plan - 1976 - pp 332 - Annexe II.

158.
la cohésion nationale dans la réalité, il convient de reconnaître que
d'une manière générale la planification en Afrique noire souffre d'ambi-
guités et de contradictions. Ces ambiguités et ces contradictions tien-
nent, a contrario, à la faible participation de la population au proces-
sus de planification et surtout à l'absence de tout effort national de
financement des plans nationaux de développement économique (1) de sorte
à rendre l'Etat et la Nation tout entière responsables de la planifica-
tion.
PARAGRAPHE
II
LES AMBIGUITES ET LES LIMITES DE LA PLANIFICATION
Les limites de la planification en Afrique noire s'apprécient
à deux niveaux :
- d'abord au n~veau des "modalités institutionnelles" d'élabo-
ration de cette planification,
- ensuite au niveau du financement des plans nationaux de déve-
loppement (ainsi que nous l'avons souligné précédemment).
A. -
LES MODALITES INSTITUTIONNELLES DE LA PLANIFICATION
ET LES LIMITES DE LA PLANIFICATION
Nous examinerons ici tour à tour le rôle de l'Assemblée
Nationale (Parlement), du parti et des associations professionnelles
(les syndicats) dans le processus de planification.
1. -
Le rôle de l'Assemblée Nationale
En Afrique noire le rôle de l'Assemblée Nationale dans le
(1) Une des conditions essentielles -à notre sens- pour que le plan soit au
même titre que le drapeau et l'hymne nationaZ~ un symboZe de souverai-

nationale en paraphrasant ici Albert WATERSTON dans
:
La Planification du développement
Dunod
1969
pp 28.

159.
processus de planification se situe généralement à quatr~ niveaux
(1)
la définition des objectifs et des moyens globaux de la plani-
fication,
l'élaboration preprement dite,
la discussion et le vote du plan,
le contrôle de l'exécution.
Dans les faits cependant ce rôle se limite à une approbation
des options fondamentales définies et des projets retenus dans le plan.
Les insuffisances de cette intervention apparaissent évidentes
lorsque l'on jette un regard critique sur le fonctionnement même des ins-
titutions politiques africaines. En fait, en Afrique noire il est diffi-
cile de faire une distinction entre l'Exécutif (le Gouvernement) et le
Législatif (le Parlement) ; les deux rôles étant la plupart des cas sinon
la totalité des cas joués par le premier. Il ne peut donc pas y avoir
-et il n'y a pas effectivement- une véritable concertation en matière de
planification. Les options et les projets retenus dans le plan sont le
fait d'un gouvernement qui concentre entre ses mains tout le pouvoir éco-
nomique
(2).
Ce sont des conclusions semblables qu'on va rencontrer en
nous intéressant maintenant au rôle du Parti dans le processus de planifi-
cation.
(1) Sans doute faudrait-il avoir à coeur le sens profond des différentes
étapes de la planification pour comprendre nos objections :
Il y a d'abord la conception qui permet de se prononcer sur les
options fondamentales de la
planification~ les objectifs généraux
poursuivis et les critères et les principes à observer dans le
choix des moyens
d'action~
Il y a ensuite les travaux d'élaboration qui vont de l'analyse et
du choix des projets au contrôle de leur exécution~
Il y a enfin l'étape de décision qui pose~ semble-t-il~ le problème
de la nature des liens qui relient les divers centres de décision.

Pour plus de précisions cf : Christian COMELIAU : La planification
du développement~ Mouton~ 1966~ pp 310-312
(2) Cf les nuances de J. DUTHEIL DE LA ROCHERE: l'Etat et le développement
économique de la Côte d'Ivoire~ A PEDONE - 1975 - pp 11-12
M. GAUD : Les premières expériences de planification en Afrique noire
Cujas~ 1967~ pp 13.

160.
II. -
Le rôle du Parti
On ne peut douter un seul instant de la nécessité de l'inter-
vention du parti dans le processus de planification quand on connaît les
idéaux du parti en Afrique noire.
Ces idéaux -on le précise- sont
- d'abord de définir une conception de la politique
éducative, sanitaire et culturelle,
- ensuite de réaliser une orientation conforme de la
politique internationale
Dès lors le parti se présentant en tant que structure de base
du pays
-a~ns~ que le stipulent ces différents objectifs-
il va effecti-
vement intervenir tant au niveau de la conception qu'au niveau de l'élabo-
ration et de l'exécution du plan, se proposant par là même d'être le relais
nécessaire qui fera connaître au gouvernement les aspirations de la popu-
lation.
Le processus est apparemment sans équivoque. Mais l'ambiguité
réside dans le fait qu'en Afrique noire les responsables de la planifica-
tion sont en même temps membres du parti. Cela n'a donc aucun sens de par-
ler d'un rôle spécifique du parti en matière de planification; le parti
se confondant avec l'exécutif dont nous avons souligné la position très
particulière dans l'administration économique africaine. Cela met -encore
une fois- en évidence le caractère très peu démocratique de la planifica-
tion ; phénomène qui s'apprécie encore au niveau de la faible association
des organisations professionnelles au processus de planification.
III. -
Le rôle des syndicats
On ne saurait aujourd'hui n~er le rôle d'écran que jouent les
syndicats entre les pouvoirs et les peuples.
Dès lors une intégration ou tout au moins une association des
syndicats aux processus de prise des décisions qui engagent l'avenir du
pays signifie en même temps une association de la population tout entière
à cette prise de décision. Et il est vrai aussi que dans cette perspective
les syndicats doivent être effectivement l'émanation des aspirations des
populations.

161.
En Afrique noire, la réalité est aux antipodes de cette con-
ception du syndicalisme. Au-delà de certaines spécificités ou de certaines
exceptions à la règle, le syndicalisme est d'une manière générale ce que
Hichel GAUD (I) appelle un "syndicalisme d'association" ; les responsables
syndicaux travaillant en étroite collaboration avec les responsables poli-
tiques sans chercher à remettre en cause les décisions arrêtées. De sorte
qu'il n'y a aucune politique concertée en matière d'emploi ou de formation
professionnelle qui soit consignée dans le document-plan.
Ainsi se trouvent mises en lumière -à ce premier niveau de nos
réflexions- les contradictions qui subsistent entre les objectifs "d'inté-
gration nationale" de la planification et sa mise en oeuvre effective.
Reste maintenant à lever le voile sur le danger qui persiste
au niveau du financement des plans de développement.
B. -
LES MODALITES DU FINANCEMENT DES PLANS DE DEVELOPPEMENT
ET LES LIMITES DE LA PLANIFICATION
On constate une prépondérance du financement extérieur dans
le processus de planification.
Les limites sont justement l'inadéquation entre cette prépon-
dérance du financement extérieur et les objectifs à la fois quantitatifs
et "qualitatifs" de la planification.
1. -
La prépondérance du financement extérieur dans
le processus de planification : le constat
Les tableaux nO 26, 27 et 28 ci-après montrent la part du fi-
nancement extérieur dans la planification en Côte d'Ivoire, au Mali et
au Togo.
(1) M. GAUD
:
Les premières expérienées de pZanifiéation en Afrique noire
Cujas 3
1967
pp 15.
3

162.
TABLEAU nO 26
Statistiques sur la part du financement extérieur dans la
planification en Côte d'Ivoire
1. PART DE L'ENDETTEtlliNT DANS LES RESSOURCES DE l'ETAT EN
%
Millions F CFA
-----------------------------------------------------------------------------
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
:
1973
:
1974
:
1975
:
1976
:
1977
: 75-77 :
:-------:-------:-------:-------:-------:-------:
RESSOURCES DEFINITIVES
51,5
53,1
48,2
44,1
38,5
43,9
(A)
RESSOURCES A REMBOURSER
48,5
46,9
51,8
55,9
61 , 1
56,1
(B)
EMPRUNTS INTERNES
3, 1
3,8
4,9
3,2
3,3
3,8
EMPRUNTS EXTERNES
45,4
43,1
46,5
52,7
57,8
52,3
TOT
A L
100
100
100
100
100
100
Source
Ministère du Plan
-
Loi-programme des investissements
publics - 19?5-?6-??
pp. 90.
II. PART DE L'EPARGNE IVOIRIENNE ET DES CAPITAUX EXTERIEURS EN %
DANS LE FINANCEMENT DU PROGRAMME
.
.
.
.
.
:
1973
:
1974
:
1975
:
1976
:
1977
: 75-77 :
.
.
.
.
.
.
.
.-------.-------.-------.-------.-------.-------.
EPARGNE IVOIRIEN
48,2
51,8
48,3
43,1
38,9
43,6
CAPITAUX
EXT.
51,8
48,2
51,7
56,9
61 , 1
56,4
T
0
T
A L
100
100
100
100
100
100
:
:
:
:
:
:
:
:
-----------------------------------------------------------------------------
Source
:
Ministère du Plan - Loi-programme des investissements
publics
- 19?5-?6-??, pp. 90.

163.
TABLEAU nO 27
Ventilation des ressources privées ayant concourru
au financement du programme triennal de redressement économique
(70-73)
du
Mali
(en %)
------------------------------------------------------------------------
·
.
·
.
.
. .
.
ORIGINE
ORGANISMES OU ETATS
%
·
.
.
.
.----------------------.-------------------------------.---------------.
AIDE INTERNATIONALE
PNUD - BIRD - BAD - AID
20 %
environ
AIDE MULTILATERALE
FED
40 %
AIDE BILATERALE
OCCIDENTALE
FRANCE - U.S.A. -
R.F.A. -
20 %
environ
AIDE DES PAYS DE
U.R.S.S - R.D.A. - CHINE
20 %
l'EST
environ
·
.
.
. .
.
------------------------------------------------------------------------
Source :
'Programme 70-73 de redressement économique et financier
du Mali"
Reproduit dans Marchés tropicaux nO 1296 sept. 1970
pp 2680.
-------------
TABLEAU
0
n
28
Part du financement extérieur dans le premier plan
de développement au Togo
RESSOURCES
RESSOURCES
MONTANT
MONTANT
INTERNES
EXTERNES
PUBLIQUES
8.210,181
PUBLIQUES
20.488,436
PRIVEES
5.102,473
PRIVEES
3.638,470
TOT A L
13.312,654
TOT A L
24.126,906
·
.
.
.
.
·
.
.
.
.
------------------------------------------------------------------------
Source : Secrétariat d'Etat à la Présidence chargé du Plan -
Bilan du 1er Plan de Développement économique et social
1966-1971
pp
25a et 26.
(Sommation faite par nous)

164.
Les chiffres de ces différents tableaux sont si éloquents que
tout commentaire apparaît superflu. Cependant un certain nombre de préci-
sions méritent d'être apportées.
En fait, l'intervention des capitaux étrangers dans le proces-
sus de planification en Afrique noire peut s'apprécier, au-delà des parti-
cipations résultant d'accords bilatéraux ou multilatéraux (cas du Mali),
dans le poids des entreprises étrangères dans le processus même de dévelop-
pement économique national. Un cas spécifique, celui de la Côte d'Ivoire,
va nous permettre de corroborer cette assertion.
Les travaux de CHEVASSU et VALETTE sur les "Industriels de la
Côte d'Ivoire: qui et pourquoi 7"
(1), montrent, en effet, que la FRANCE,
douze ans après l'indépendance reste le principal actionnaire dans les in-
dustries ivoiriennes. Cela se traduit, semble-til, par un investissement
de
21 430 millions de FCFA (2) en capitaux sociaux des entreprises ivoi-
riennes en 1971, soit 65,7 % du total des investissements. Les deux auteurs
précisent par ailleurs que 21 millions de FCFA de capitaux français sont
répartis dans environ ISO sociétés sur les 183 qu'ils ont retenues dans
leur étude.
Au-delà de ce cadre général d'intervention les récents travaux
de J. OUPOH OUPOH (3) nous permettent de classer en trois groupes les
principaux acteurs français de la vie économique ivoirienne, autrement dit
ceux qui d'une manière ou d'une autre ont un droit de regard sur le proces-
sus de planification.
Un premier groupe est formé de grandes sociétés commerciales
largement implantées dans toute l'Afrique noire francophone depuis la pé-
riode coloniale. Elles ont un poids considérable dans l'organisation du
commerce intérieur et extérieur. Ce sont principalement:
(1)
J. CHEVASSU et A. VALETTE
:
Les industriels de la Côte d'Ivoire :
qui et pourquoi ?
ORSTOM
ABIDJAN
1975
pp 3-17
(2)
1 FCFA
= O~02 FF
(3)
J. OUPOH OUPOH
Le processus d'industrialisation dans une économie
à croissance agricole : le cas de la Côte d'Ivoire
Thèse - Cler.mont-Fd - 1979
pp 355-356

165.
La Compagnie Française de l'Afrique de l'Ouest
la C.F.A.O.
La Société Commerciale de l'Ouest Africain
la S.C.O.A.
La Compagnie Française de Côte d'Ivoire
la C.F.C. 1.
Un second groupe d'investisseurs influents est constitué par
les banques françaises qui interviennent dans la vie économique nationale
par l'intermédiaire de filiales locales. Trois groupes de banques sont à
distinguer :
Les banques françaises nationalisées comme la
Banque Nationale de Paris (B.N.P.) qui intervient en Côte d'Ivoire par
l'intermédiaire de la Banque Internationale pour le Commerce et l'Indus-
trie de la Côte d'Ivoire
(la B.I.C.I.C.I.) ou la Société Générale (S.G.)
dont la filiale ivoirienne est la Société Générale de Banque en Côte
d'Ivoire (S.G.B.C.I.) ou enfin le Crédit Lyonnais qui est représenté pré-
cisément en Côte d'Ivoire par la Société Ivoirienne de Banque (S.I.B.)
(cf. Tableau nO 29
Tableau récapitulatif)
TABLEAU nO 29
Les filiales de banques françaises nationalisées
en Côte d'Ivoire
-------------------------------------------------------------------------
·
.
.
NOMINATION DES BANQUES
FILIALES
EN
COTE
D'IVOIRE
:----------------------------------:------------------------------------:
1.
B.N.P.
Banque
B.I.C.I.C.I. : Banque internatio-
Nationale de Paris
nale pour le Commerce et l'In-
dustrie de la Côte d'Ivoire
:----------------------------------:------------------------------------:
:
II.
CREDIT LYONNAIS
S.I.B.
Société Ivoirienne
de Banques
:----------------------------------:------------------------------------:
S.G.B.C.I. : Société Générale
: III. S.G.
= Société Générale
de Banques en Côte d'Ivoire
·
.
.
.
-------------------------------------------------------------------------
Source:
TabZeau construit à partir des déveZoppements ci-dessus.

166.
Le troisième groupe est constitué par la Banque de l'Indochine
intégrée maintenant au groupe SUEZ.
En fait, ce cas des capitaux français n'est qu'un exemple
parmi tant d'autres. Les systèmes bancaires africains, d'une manière géné-
rale, sont contrôlés par des capitaux privés étrangers qui en sont les
principaux actionnaires (cf Tableau nO 30 ci-après). Le poids de ces capi-
taux dans le processus de planification sera d'autant plus grand que leur
intervention ne se limite uniquement pas au niveau des banques commercia-
les. Les actionnaires privés étrangers sont, en effet, la plupart des cas
majoritaires dans les banques de développement qui, par définition, sont
les organismes nationaux chargé du financement des plans de développement
économique et social.
Le problème dans le cadre de notre propos est de voir l'ina-
déquation qu'il peut y avoir et qu'il yale plus souvent entre cette
"dépendance financière" et les objectifs à la fois qualitatifs et quanti-
tatifs de la planification, surtout quand l'on ne s'efforce pas de cana-
liser et de maîtriser le mouvement des capitaux privés étrangers.

167.
TABLEAU nO 30
La structure du système bancaire ivoirien : répartition
du capital social des banques et leur domaine d'inter-
vention
--------------------------------------------------------------------------------
.
.
.
.
NOMENCLATURE
MONTANT
et
REPARTITION
SECTEUR
des
du
BANQUES
CAPITAL SOCIAL
d'INTERVENTION
·
·
.
.
---------------- ----------------------------------------- -------------------
SOCIETE GENE-
2 400 Millions FCFA
dont
RALE DE BANQUE
Industriel
EN COTE d'I-
Groupe Sté Générale •....... 37,18 %
VOIRE
Intérêts ivoiriens
34,37 %
Commercial
Sociétés étati-
(S.G.B.C.I.)
· Divers
28,45 %
ques & para-
étatiques
. .
. .
.----------------.-----------------------------------------.--------------------
1 250 Millions FCFA
SOCIETE
· Cate d'Ivoire ......•....... 32,5
%
Industriel
IVOIRIENNE
Crédi t Lyonnais ..........•. 31,5
%
Artisanal
DE BANQUE
Deutsch Bank
12
%
(S.I.B.)
Morgan ........•............ 12
%
Commercial
· . Banca Commerciale Italiana • 12
%
-------------------------------------------------------------------------------.
. .
. .
BANQUE INTER-
66 240 000 FF
dont
NATIONALE
Agricole
POUR l'AFRIQUE
· FNCB N. Y. .................• 49
%
Commercial
OCCIDENTALE
· Ensemble de grandes banques
Industriel
(B.I.A.O.)
françaises .•....•.•.•.•.••• 51
%
:
:
---------------- ----------------------------------------- -------------------
·
.
BANQUE INTER-
1 500 000 000 FCFA
dont
NATIONALE POUR
B.N.P •....•..•.......•.•.•• 21
%
Agricole
LE COMMERCE &
L'INDUSTRIE
. • S.F.O.M•..•.•..•••......... 28
%
Commercial
DE COTE
SONAFI (Cate d'Ivoire) ••..• 41
%
Industriel
D'IVOIRE
• Privés ivoiriens ....•..••.. la
%
(BICICI)
:----------------:-----------------------------------------:-------------------:
... / ...

168.
suite du Tableau nO 30
1 050 Millions
FCFA
BANQUE
IVOIRIENNE
ACT ION N AIR E S
DE
CATEGORIE
A
DEVELOPPEMENT
=========
=
INDUSTRIEL
Côte d'Ivoire
21 ,1
%
. B.C.E.A.O
.
5,7
%
(B.!. D. 1. )
Banque Française du Com-
merce Extérieur
.
5,4
%
AGRICOLE
Caisse Centrale de Coopé-
ration Economique (C.C.E.)
10,7
%
International Finance
Corporation
7,1
%
CATEGORIE
B
=========
=
COMMERCIAL
CHASE }f.ANHATTAN
Overseas Corporation
8,9
%
LAZARE Frères et Co New York
8,9
%
LAZARE Frères et Co Paris .
8,9
%
PARI BAS INTERNATIONAL .....
4,3
%
INDUSTRIEL
MEDIO BANCA
.
2,7
%
SKANDINAVISKA ENSKILD
BANKEN
.
2,7
%
ALGEMEINE BANK
NEDERLAND
2,7
% ..
DEUTSCHE ENTWICKLUNGS
GESELLSCHAFT
M.B.A
.
1 ,8
%
BERLINER HANDELS - GESEL
LSCHAFT-FRANKFURTER BANK
1 ,8
%
Société Financière France
Afrique .•.................
1,8
%
B.I.C.I.C.I ...•.••..••.•..
1,8
%
S.I.B •...••.....••.•......
1,8
%
Autres actionnaires privés
ivoiriens ..•.........•.•..
5,8
%
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ e
- - - - : - - - - - - - - - - - - - - - - - - - :
.
.
... / ...

169.
Suite du Tableau nO 30
1 300 millions FCFA
BANQUE
NATIONALE
AGRICOLE
Côte d'Ivoire
66,7 %
DE
Caisse de stabilisa-
essentiel-
DEVELOPPEMENT
tion et de soutien des
lement.
prix des produits
AGRICOLE
agricoles ..•.........
16,6 %
(B.N.D.A. )
B.C.E.A.O
.
8,3 %
C.C.E.
8,3 %
=======================================================================
Source:
Tableau construit à partir des renseignements
fournis dans Côte d'Ivoire en Chiffres
~nistère du Plan - 1976 -
pp
274 - 276

170.
II.
Inadéquation entre prépondérance du financement extérieur
et la réalisation des objectifs quantitatifs et qualitatifs
de la planification
Les objectifs quantitatifs d'abord. La limite du financement
extérieur est essentiellement le décalage possible dans le délai de réa-
lisation des objectifs quantitatifs du plan (1). Ce décalage peut s'expli-
quer de deux façons
- d'abord les délais d'obtention des crédits peuvent
accuser -et accusent le plus souvent- des proportions considérables dues
à des exigences variées des différentes sources de financement,
- en seconde vue il peut y avoir tout simplement une
diminution du financement extérieur escompté compte tenu d'un environne-
ment conjoncturel défavorable (inflation par exemple).
La question de fond est que ces différentes situations condui-
ront nécessairement à l'improvision ; situation dont on ne peut nier la
gravité quand on sait que la planification est avant tout une question de
rigueur. Cela suppose que l'on se fixe des objectifs cohérents, hiérarchi-
sés et ordonnés en fonction de certaines échéances et qu'objectifs et
moyens soient rigoureusement définis (2).
Les objectifs qualitatifs ensuite. Le plan, ainsi que le dit
le Professeur Charles BETTELHEIM (3) vise à "adapter la production aux
besoins sociaux".
(1) -
Par exemp~e dans ~e deuxième p~an togo~ais (1971-1975) i~ était
prévu un taux de PI B de 7~ 7 % (prix constant). En fait ~e taux
atteint n'a été que de 4~5 % ; parce que ~'Etat n'a pas pu obte-
nir ~a tota~ité du financement escompté.
Source: Ministère du P~an - Bi~an du 2e P~an 1971-1975 - pp 7.
(2) -
Un vrai processus de p~anification ne saurait dès ~ors être fondé
sur ~e financement extérieur même si ~'on ne peut nier ~'apport des
capitaux étrangers aux
pays en voie de déve~oppement.
Voir par exemp~e dans : M. F. RENARD : Financement extériéur et
p~anification du déve~oppement au Sénéga~ etau Ma~i -
Thèse 3e Cyc~e - C~ermont-Fd - 1979 - pp 184.
(3) -
Ch. BETTELHEIM : Prob~èmes théoriques et pratiques dé ~ap~anification
Maspéro - 1966 - pp 24.

171.
Une telle approche met en évidence non seulement le caractère
social et collectif de la planification, mais aussi et surtout elle souli-
gne le fait que l'Etat doit pouvoir organiser l'économie, orienter la pro-
duction en fonction des besoins essentiels de la population.
Et il est vrai, une telle perspective ne peut pas être POSS1-
ble lorsque la planification est entièrement sous le contrôle des capitaux
privés. Autrement dit, en matière de planification le financement extérieur
doit être, à notre sens, considéré non comme une fin en soi mais comme un
complément de l'effort national ..
Avec cette dernière assertion nous débouchons sur la question
de ce que doit être la planification en Afrique noire (Section II).

172.
SECTION
II
POUR
UNE
POLITIQUE
VOLONTARISTE
DE
PLANIFICATION
EN
AFRIQUE
NOIRE

Il convient de préciser les objectifs et les moyens de la
planification.
PARAGRAPHE
l
LES
OBJECTIFS
DE
LA
PLANIFICATION
Les objectifs s'apprécient tout d'abord à travers une défini-
tion même de la planification ;
L'effort sera ensuite fait pour préciser certaines priorités
ponctuelles.
A. -
UNE REDEFINITION DE LA PLANIFICATION
Tout indique finalement (problème d'une restructuration com-
plète de l'économie; souci de solidarité nationale) que pour les pays
d'Afrique le système de planification ne peut être qu'un système original
fondé sur les réalités objectives et sous-tendu par une volonté politique
de développement (1).
Ceci exclut d'emblée toute hypothèse d'un arbitrage quelcon-
que qu~ ferait incliner ces pays vers tel ou tel système de planification.
(1) -
Dans "toute planification, l'action entreprise doit être voulue; il
faut que ce soit le gouvernement qui l'entreprenne; il faut que les
actes de ce gouvernement montrent effectivement, comme il le dit ou
le pense, il applique une politique concertée visant à réaliser les
objectifs d'ord:t'e économique et social" écrit Albert WATERSTON dans:
La planification du développement
Dunod 1969 pp 21.

173.
En réalité il n'y a qu'une seule forme de planification:
celle qui vise prioritairement à adapter la "production" aux besoins
sociaux. Les autres formes sont plutôt des "progratmnations" (1). Evi-
tons donc les confusions et les nuances trompeuses.
Cet objectif d'un assouvissement des besoins sociaux signi-
fie précisément dans le cadre des économies et communautés africaines
la prise en compte dans le processus de planification de toutes les con-
traintes,socio-économiques (problèmes d'éducation, de formation, d'infor-
mation, de répartition, etc •.. ) ou socio-po1itiques (divisions claniques
ou tribales), bref toutes les conditions qui permettent à tous les mem-
bres de la collectivité d'assumer pleinement leurs responsabilités dans
le processus de développement.
Dans cette perspective on ne saurait ne pas insister davanta-
ge sur les limites des méthodes de planification importées qui se conten-
tent de s'insérer dans les structures existantes sans jamais chercher à
les remettre en cause.
Cette prise en compte des réalités socio-économiques et socio-
politiques suppose aussi que le plan soit le "fruit d'une concertation au-
thentique entre tous les partenaires économiques et sociaux" (2).
Reste maintenant à préciser quelques priorités de cette p1ani-
fication.
B. -
LES PRIORITES DE LA PLANIFICATION?
Contrairement à ce que certains préconisent (3), l'effort pour
les pays en voie de développement ne doit pas avoir pour finalité -estimons-
nous-
de rattraper d'une manière ou d'une autre le retard qui les sépare
des pays avancés.
(1) Charles BETTELHEIM : Problèmes théoriques et pratiques de la planifi-
cation~ Maspéro - 1966 - pp 35.
(2) Voilà la condition du 'plan de la nation" qui soit l'oeuvre de tous;
dont l'élaboration soit faite avec toutes les forces vives de la na-
tion afin d'apporter une plus grande clarté dans le débat social et
politique. Sur cette notion de 'plan de la nation" voir P. PASCALLON
Quelle planification pour la France?
-
op.cit.
pp 56.
(3) Voir précisément: J. MARCZEWSKI dans G.A. SOBGUI : Planification éco-
nomique et projections spatiales au Cameroun
Nouvelles Editions
Debresse - 1976 - pp x.

174.
Une telle approche est -à notre avis- très dangereuse ; non
seulement parce qu'elle privilégie les aspects quantitatifs de la poli-
tique économique mais aussi et surtout parce qu'elle pose des principes
contraires à la logique même d'une véritable planification. Tous les mo-
yens sont bons pourvu qu'ils permettent de combler le retard. Dès lors
les décisions seront prises au hasard et les plans improvisés.
Il semble plutôt que pour ces pays (les pays en voie de dé-
veloppement) la politique de planification doit avoir pour objectif essen-
tiel la "structuration de tout l'ensemble économique" (1).
Cette structuration suppose, du reste, que soient réalisées
certaines priorités dont on voudrait emprunter la nomenclature au Profes-
seur Jacques FREYSSINET (2)
- Assumer une couverture minima des coûts de l'homme
ce qui pose principalement un problème de consommation ;
- Réaliser un taux maximum de croissance du produit
national
ce qui pose principalement un problème d'investissement;
- Parvenir à un degré d'indépendance économique le plus
élevé possible ; ce qui pose principalement le problème de la composition
et de la structure des échanges extérieurs.
Reprenons cette nomenclature point par point
- Assurer une couverture minima des coûts de l'homme
par un accroissement de sa consommation pose en termes concrets le pro-
blème de la répartition et de la justice sociale.
Dans la situation actuelle des économies africaines cette as-
sertion est très significative -compte tenu des cas d'inégalité qui sub-
sistent.
Des exemples dans ce sens ?
En 1970 la population rurale sénégalaise représentait près de
75 % de la population active totale, tandis que la part du secteur primaire
dans le produit intérieur brut (PIB) était d'environ 30 %.
(1) F. PERROUX: L'économie des jeunes nations, PUF 1965, pp. 21 -
Voir aussi S. AMIN: L'accumulation à l'échelle mondiale, Editions
Anthropos 1970 pp. 39.
(2) J. FREYSSINET : Le concept de sous-développement, Mouton, 1966,
pp 157-158.

175.
La seule comparaison de ces deux chiffres indique déjà la pos-
sibilité d'inégalité entre les revenus du secteur primaire et ceux des au-
tres secteurs de l'économie.
Pareillement en Côte d'Ivoire où la population active agricole
est estimée à 80 % de la population totale
-dans la période 1960-1970-
la part du secteur agricole dans le PIB (30 %) demeure très faible et met
en évidence encore une fois les disparités des revenus entre le secteur
primaire et les autres secteurs (en Afrique noire)
(1).
Une des priorités en matière de planification doit donc consis-
ter à réduire ces disparités en permettant au monde rural d'accroître non
seulement son revenu en nature mais aussi son revenu monétaire.
Il faut précisément une politique de distribution de crédits,
d'équipement (engrais, semences sélectionnées), d'organisation et d'enca-
drement technique des populations rurales et un développement du système
d'évacuation et de commercialisation de leurs productions.
Ceci est une des composantes d'une politique économique géné-
rale qu~ doit permettre de réaliser un "taux maximum de croissance" (deu-
xième objectif) ; car en accroissant le revenu du monde rural (qui reste
dominant dans la population) on élargit en même temps l'assiette de l'im-
pôt et les possibilités de prélèvement de ressources pour financer les
investissements.
- Résoudre le problème de la composition et de la
structure des échanges suppose
-à notre avis-
une politique de diversi-
fication des cultures. On peut craindre à terme un étouffement des écono-
mies africaines du fait qu'elles reposent dans la plupart des cas, seule-
ment sur quelques cultures d'exportation.
On ne saurait dire que ces urgences n'ont pas encore été per-
çues. Il s'agit d'intensifier l'effort et de doubler d'ardeur.
Reste maintenant à réfléchir sur les moyens de traduire ces
priorités dans la réalité.
(1) Pour, tous ces renseignements cf. J. FREYSSINET et A. MOUNIER
:
Les revenus des travailleurs agricoles en Afrique centrale et
occidentale,
BIT - Genève 1975 -
pp 38.

176.
PARAGRAPHE II
Les MOYENS de la PLANIFICATION en AFRIQUE NOIRE
. Les moyens de la planification sont d'ordre humain et d'ordre
financier.
Le prem~er aspect de la question a été déjà largement traité
par un certain nombre de chercheurs (1) qui insistent sur la nécessité
(pour les pays d'Afrique) de former les cadres nationaux de la planification
et sur la nécessité aussi de refondre les structures administratives trop
lourdes qui ne permettent pas une efficacité économique, conduisant plutôt
à un énorme gaspillage de ressources.
Nous prenons toutes ces observations et ces propositions
à
notre compte •
. Seule la question financière fera l'objet d'un développement.
Nous nous attacherons précisément à définir les conditions d'une "fisca-
lité agricole"
et la stratégie d'une association des capitaux privés
étrangers à l'exécution des plans de développement.
A -
UNE
"FISCALITE AGRICOLE" :
Dans la quasi-totalité des Etats d'Afrique no~re l'essentiel
des ressources de l'Etat provient du prélèvement sur les résultats de
l'activité agricole. Ces ressources sont constituées principalement des
taxes à l'exportation et des bénéfices nets des offices de commercialisation
des produits agricoles ou de stabilisation des prix (Cf. tableaux nO 31
et 32 ci-après) (2).
- Autrement dit les ressources sont uniquement prélevées sur
les cultures d'exportation. Une grande partie de l'activité agricole
(secteur des cultures de subsistance) ne contribue donc pas au financement
de la croissance .
. (1) -
Par exemple Christian COMELIAU : La planification du développement
Mouton
1969
pp
53.
Jean-Pierre BERARD: Planification en Afrique noire
d'expression française ~ Ministère de la CoopJration octobre 1962
pp
2-3
(2) -
Voir Wle étude de cas dans : MAMADOU KONATE Ahmed : Les rapports
~cultUre Finances publiques dans l'économie ivoirienne.
Memo~re D.E.A. Clermont-Fd - 1977
pp
27
et
suivantes.

177 •
- Une des possibilités, à notre avis, d'associer ce secteur tra-
ditionnel au processus d'accumulation réside dans l'institution d'un sys-
tème d'impôt en nature. Ainsi la fiscalité ne se limiterait pas à la seule
imposition des cultures d'exportation, mais elle se doublerait d'une
"contribution annuelle en nature" portant sur les produits de consommation
courante (igname, bananes, riz, patates, etc .•• ).
- Au demeurant préconiser une fiscalité agricole pour les pays
d'Afrique noire ne semble pas être une innovation de notre part.
Mr Konadio GBAKA (1) dans sa Thèse d'Etat envisage pour les pays du Tiers-
Monde ce qui serait plutôt un système de collecte de produits agricoles de-
vant permettre aux pouvoirs publics de limiter les dépenses alimentaires
en vue de consacrer les ressources disponibles à l'entretien de la crois-
sance. Le problème ne semble pas résolu à notre avis. Au fond en limitant
les réflexions à un tel schéma il semble que l'on cherche à contourner tou-
tes les difficultés à résoudre
et toutes les hypothèses à formuler pour
la mise en oeuvre d'une fiscalité agricole effective. C'est-à-dire dans
notre esprit un prélèvement en nature en vue d'alimenter les caisses de
l'Etat. Du reste, ces difficultés ne sont pas des moindres .
. D'abord, et pour en convenir ici avec Lucien MERL (2), l'une
des difficultés de mise en oeuvre d'une telle politique réside dans les
travaux de stockage et de revente des produits collectés •
. La deuxième série de difficultés est d'ordre structurel. Les
caractères originaux, ainsi que les formes particulières de la vie rurale,
la diversité des conditions naturelles dans lesquelles l'activité agricole
s'exerce et se débat (3), les tendances autarciques des exploitations
agricoles rendent difficile, il est vrai, l'établissement d'une fiscalité
semblable à celle à laquelle se trouvent soumis les revenus de l'industrie
et du commerce.
(1) - K.G.
GBAKA : Le rôle de la fiscalité dans le Tiers-Monde
Thèse - Cle~ont-Fd - 1978 -
pp 154-159 -
(2) -
L. MEHL
. Sciences et Techniques financières
PUF - Paris - 1959 - pp 51.
(3) -
Voir les nuances de Gilbert RULLIERE
l1Fiscalité agricole et développement économique 11
R S F nO 2 - 1974 - pp. 241 - 248.

TABLEAU nO 31 :
Evolution du prélèvement sur le revenu du cacao (millions FCFA) en Côte d'Ivoire
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
.
.
. .
.
Prix CAF
Revenus
Prélèvements
Campagnes
Tonnages
de vente
globaux
%
(F CFA)
(millions de FCFA)
(millions de FCFA)
:
: :
:
:
------------------- --------------------- ------------- --------------------- --------------------- ---------
·
·
. .
1964/1965
:
139.126,031
:
112
:
15.582,115
:
5.843,293
:
37,5
:
:
:
:
1965/1966
116. 121 ,342
:
80
9.289,707
2.902,934
31,24
:
:
:
:
:
1966/1967
:
149.592,243
:
125
:
18.699,030
:
8.227,573
:
44,0
1967/1968
:
150.662,021
:
160
:
24.106,563
:
13.559,942
:
56,25
1968/1969
:
139.695,734
:
201,50
:
28.148,690
:
18.369,989
:
65,26
1969/1970
:
178.413,333
:
226,81
:
40.465,927
:
26.192,227
:
64,72
:
:
:
:
:
1970/1971
:
181.984,770
:
177
:
32.211,310
:
13.127,144
:
40,75
1971/1972
:
224.519,599
:
140,18
:
31.473,156
:
15.754,012
· 50,06
·
1972/1973
:
184.931,098
:
175,19
:
32.398,079
:
9.284,688
:
28,65
:
:
:
:
:
1973/1974
210.121,743
303,58
68.792,960
27.482,518
39,94
:
:
:
:
:
1974/1975
236.059,670
370,21
87.391,662
46.597,795
:
:
:
:
· 53,32
1975/1976
T O T
A L : 1.911.241,584:
:
388.559,2
.
187.342,12
:
48,21
·
. .
·
. .
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Sourae:
Tableau aonstruit à partir des statistiques de la Caisse de Stabilisation et de Soutien
des prix des produits agriaoles
-
ABIDJAN,
Mars 1977 -
-...l
00
.

TABLEAU nO 32
Evolution du prélèvement sur le revenu du café (en millions de FCFA) en Côte d'Ivoire
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Prix CAF
Revenus
Prélèvements
Campagnes
Tonnages
de vente
globaux
%
(F CFA)
(millions de FCFA)
(millions de FCFA)
:-------------------:---------------------:-------------:---------------------:---------------------:---------
1963/1964
174,00
1964/1965
189.733,899
142,52
27.040,875
9.964,825
36,85
1965/1966
281.640,511
163,88
46.160,880
25.037,842
54,24
1966/1967
126.180,475
171,51
21.641,218
10.286,039
47,54
1967/1968
284.124,794
166,46
47.306,779
21.735,547
45,94
1968/1969
207.538,648
162,79
33.787,291
15. 108,813
44,71
1969/1970
277.915,213
208,82
58.034,254
31.632,309
54,50
1970/1971
236.272,227
230,19
54.387,502
29.578,919
54,38
1971/1972
265.076,632
220,35
58.409,635
30.576,589
52,34
1972/1973
299.899,773
222,35
66.682,721
35.193,245
52,77
1973/1974
182.506,512
222,52
40.611,349
18.710,568
46,07
1974/1975
233.295,247
266,31
62.128,855
27.134,57
43,67
1975/1976
273.930,652
416,75
1.141.606
1.100.516,4
96,40
:-------------------:---------------------:-------------:---------------------:---------------------:---------:
T O T
A
L
2.858.114,6
1.657.797
1.355.475,7
81,76
Source:
Tableau construit à partir des
Statistiques de la Caisse de Stabilisation des prix
des produits agricoles
-
ABIDJAN
-
mars 1977
.......
\\0
.

180.
A la lumière de ces deux séries de difficultés nous pouvons
formuler un certain nombre d'hypothèses pour la mise en oeuvre de notre
modèle.
Le problème de stockage et de revente précédemment évoqué dé-
coule, en réalité, de l'idée généralement admise de l'étroitesse des mar-
chés intérieurs dans les pays en voie de développement (1).
A notre avis la situation des économies africaines est telle
que cet obstacle ne nous semble pas insurmontable. Les pays africains
sont généralement interdépendants au plan agricole. Certains sont produc-
teurs d'ignames, d'autres de riz et quelques-uns même défavorisés par la
nature ne produisent rien du tout. Il s'agit d'exploiter cette interdépen-
dance au sein d'une zone d'intégration économique. Autrement dit un mar-
ché potentiel existe; il suffit de se donner les moyens de l'exploiter.
La deuxième série de difficultés mérite plus d'attention;
car elle pose le problème de l'organisat~on du mode de production rural.
En réalité, lorsque nous envisageons une fiscalité agricole nous ne pen-
sons pas du tout à l'ancien système français de la dîme royale qui frap-
pait le propriétaire individuel. Nous avons longuement souligné dans nos
développements précédents que la population rurale africaine avait besoin
d'être effectivement encadrée. Dans cette approche il semble difficile
de ne pas penser à un système de coopératives de producteurs qui soient
organisées techniquement et qui soient matériellement aidées par l'Etat.
Dès lors toutes les difficultés de détermination de l'assiette
et du taux de l'impôt sont évacuées, à partir du moment où l'Etat a en
main le schéma général de fonctionnement des grandes coopératives de pro-
duction qui seront nécessairement régionales (compte tenu du fait qu'en
Afrique noire les conditions écologiques et climatiques imposent la plu-
part des cas une spécialisation agricole). L'Etat peut donc prélever par
région un volume de récoltes correspondant à un un taux d'impôt préalable-
ment fixé.
(1) -
Voir P.M. GAUDEMET : Finances publiques
politique financières
Budget et Trésor
Edit. Montchrestien - 1974 -
pp
11.
Problems of capital formation in underdeveloped
countries
Oxford University Press - 1958 - pp 169 et suiVe

lB I.
.Ceci suppose en dernier ressort l'existence -encore une fois-
d'une volonté politique de coopération régionale et de développement (1).
Du reste, au-delà de cet effort national de mobilisation des
ressources il s'agit, pour le financement des plans de développement
d'exploiter rationnellement la coopération avec les capitaux privés
étrangers.
B - La CONTRIBUTION des CAPITAUX
PRIVES au FINANCEMENT DES
PLANS de DEVELOPPEMENT.
Il s'agit ici de préciser les conditions de l'étroite relation
entre la politique du code des investissemens et la politique de plani-
fication.
• Dans cette perspective la contribution des "entreprises privées"
au financement des plans nationaux de développement sera rendue possible
par les avantages qui leur seront consentis selon que leur projet va ou
non dans le sens des perspectives
générales dégagées dans le plan de
développement.
· Autrement dit le projet de toute entreprise devra être proposé
à l'accord de l'organisme de planification qui sera en même temps respon-
sable
de la politique du code des investissements ; organisme qui décidera
alors de l'individualisation de cette opération (c'est-à-dire de la
~localisation du projet par rapport à l'ensemble du plan).
• Les avantages qui seront alors consentis aux capitaux étrangers
tiendront compte de l'importance de tel ou tel projet dans la vie économique
et sociale. Encore faut-il que les objectifs du plan national de développe-
ment soient rigoureusement définis, cohérents et hiérarchisés. Le plan
est bien un "anti-hasard" ainsi que le dit Pierre MASSE
(2).
(1) - La "compétence du fisc ou son incompétence sont le reflet de la
volonté
politique des catégories dirigeantes" écrit P. NGAO SYVATHN
dans : Le rôle de l' i
ôt dans a s en voie de déve lo
ement.
Librairie Générale
de Droit et
e Jurisp
nce
- 1974
pp
160.
(2) - J. MASSE: Le plan ou l'anti-hasard
- Galùronard
1965, notamment
pp
30-42.

182.
CONCLUSION
DE
LA
DEUXIEME
PARTIE
========================================
Il n'est pas de modèle économique qui soit parfait et qui ne
pu~sse parfois être démenti par les faits. La question essentielle n'est
donc pas à ce n~veau.
L'intérêt de tout travail de recherches dans le cadre des
économies sous-développées en général et des économies africaines en par-
ticulier est finalement (nous semble-t-il) de pouvoir
-même si l'on ne
peut prétendre tisser le fil d'Ariane qui sortira ces économies du laby-
rinthe du sous-développement-
contribuer (en faisant un minimum de pro-
positions concrètes) à une "sensibilisation" des responsables politiques
et économiques aux vrais problèmes du développement.
Les modestes conclusions auxquelles nous avons abouti à tra-
vers l'examen critique des politiques du code des investissements et de
planification répondent à ce souci.
Il est vrai, le reste du monde exerce une influence décisive
sur les économies africaines ; mais il appartient aux responsables politi-
ques et économiques de trouver les moyens d'échapper à cette domination;
en cherchant précisément en eux-mêmes et de façon prioritaire les forces
nécessaires à cette "rupture" ; car ainsi que le disent les Professeurs
BYE et DE BERNIS (1)
"Affirmer la nécessité d'une introversion de la
politique de développement est une manière de tirer les leçons de l'his-
toire du sous-développement".
Ceci pose deux conditions essentielles par rapport aux ins-
truments que nous venons d'examiner.
(l)
-
M. BYE et G. DESTANNE DE BERNIS
:
Relations économiques internationales
Dalloz
1977
pp 1042.

183.
D'abord il s'agit de prendre du recul par rapport à un cer-
tain cadre préétabli pour apprécier les situations dans leur contexte
et leurs dimensions réels et résoudre les problèmes avec des moyens et
des outils adaptés.
Ensuite il faut que l'Etat, la Puissance Publique se donne
pour finalité la satisfaction des besoins essentiels des populations.
La recherche du prestige et du superflu est aux antipodes d'une vérita-
ble politique de développement qui, ainsi que nous le précise le Profes-
seur John K. GALBRAITH
(1),
"doit être la manière de faire prévaloir
les intérêts de la collectivité" .

(1) -
J.K. GALBRAITH
:
Tout savoir ou presque sur Z'économie
SeuiZ
1978
pp
11.

184.
CONCLUSION
GENERALE
---------------------
---------------------
La vo~e du développement économique en Afrique noire réside
..
dans un dépassement du statu quo hérité de la période ancestrale et de
l'occupation coloniale. Cela signifie que parmi les valeurs qui consti-
tuent le legs du passé il y a certaines qui sont bonnes et d'autres par
contre qui sont mauvaises, qui précisément ne cadrent pas avec les réa-
lités de notre temps. Le problème est de pouvoir faire le bon choix en
,
fonction de l'intérêt national et de l'intérêt économique général des po-
pulations.
C'est ce que nous avons essayé de montrer tout au long de no-
tre travail.
Dans la première partie de notre thèse nous avons particuliè-
rement insisté sur le fait que les schémas des pays avancés ne sont pas
totalement aptes à résoudre les problèmes de développement économique
en
Afrique no~re.
Les limites de ces schémas tiennent au fait qu'ils ont été
projetés dans les sociétés africaines consécutivement à un phénomène de
"violence" qu'a été la pénétration coloniale. Autrement dit ce sont des
modèles définis dans un cadre qui n'est pas le même que le cadre africain.
Nous avons précisément essayé de dégager la différence essentielle entre
les valeurs africaines et les valeurs occidentales du point de vue des ob-
jectifs qui occasionnent l'acte économique et du point de vue des conditions
qui définissent les relations sociales dans l'univers économique.
En fait, notre objectif à travers une telle démonstration n'est
pas de n~er le bien-fondé de tel ou tel schéma de société. Un véritable
choix politique, nous semble-t-il, doit procéder de l'observation des faits
et doit se traduire par des actes concrets. Or en Afrique noire on note une
trop grande tendance à se "gargariser" de dogmes et d'idéologie au point
d'ignorer les vrais problèmes à résoudre en matière de développement écono-
~~que et social.

185.
La meilleure façon de résoudre les problèmes du sous-
développement économique et social conâste
, à notre sens, à se démar-
quer par rapport aux schémas externes pour fonder l'acte économique sur
les réalités et les besoins concrets de l'économie nationale et des po-
pulations en faisant sien cet adage à valeur de slogan : "La charité bien
ordonnée commence par soi-même". C'est cette logique d'une politique de
développement économique fondée sur les aspirations réelles des membres
de la collectivité que nous avons essayé d'expliciter dans la seconde
partie de notre thèse.
Au total il se dégage au terme de notre travail et cela en
rapport avec le problème de la nature et du rôle de l'Etat, un modèle
global de développement économique et social dont nous subordonnons l'ef-
ficacité à trois conditions :
La première condition est d'abord de réaliser à l'in-
térieur de chaque état une " cohésion sociale"
La deuxième condition est de s'armer d'une volonté
politique de développement ;
La troisième condition enfin est la nécessité de la
coopération économique régionale en Afrique noire
(1).
(1) -
Problème très important sur lequeZ insisteront certainement les
travaux des compatriotes africains qui traitent de l'intégration.
Koffi
KONAN
La nature et le rôle de l'Etat dans le proces-
sus d'intégration économique : application à la sous-région
ouest-africaine
Thèse en cours
Clermont-Fd
I
KEBE SOUMWHIBA : Fiscalité et intégration économique dans
l'Afrique de l'Ouest
Thèse en cours
Clermont-Fd
I.

186.
1. -
L'optique de la cohésion sociale
Julien FREUND écrit à propos de l'Etat
'~'Etat (le politique) n'existe en tant que tel parce qu'il
y a une collectivité qui le déte~ine~ qui en explique la
genèse~ le fondement"
(l) .
Ceci dégage la spécificité du bien de l'activité politique.
Ce bien nous dit encore une fois l'auteur de lIQu'est-ce que la poli ti-
que 11
(2)
n'est pas un bien propre à des "particuliers~ à des individus
ou à des groupements subordonnés tels la famille ou toute autre associa-
tion professionnelle~ économique~ moins encore celui de l'Etat en tant
qu'Etat~ mais celui de la collectivité totale au sein de laquelle les
individus sont intégrés à titre de membres qui se donnent un Etat comme
institution ".
Il convient de reconnaître que cette conception de la nature
et du rôle de l'Etat n'a pas encore été suffisamment perçue en Afrique
noire. Les institutions politiques et économiques apparaissent le plus
souvent comme un instrument privé au service d'un clan, d'une tribu. Les
responsables n'ont ni la conscience nationale ni la conscience de l'in-
térêt national. L'Etat au bout du compte apparaît totalement étranger à
la Société. Le jeu politique et économique est fait d'arbitraire, d'ab-
solutisme qU1 émoussent en quelque sorte la nature collective de l'Etat.
A ce propos TRAN VAN MINH écrit :
'~ans la plupart des pays d'Afrique ou bien le Parlement n'est
pas &ssu totalement ou partiellement d'élections~ ou bien il est élu;
mais les élections plus ou moins faussées ou truquées enlèvent toute s&-
gnification à la représentation populaire"
(3) .
(1) - J. FREUND
:
Qu'est-ce que la politique?
Seuil 1965
pp 25
(2) -
J. FREUND
ibid
pp 38
(3) - TRAN VAN MINH
Vie politique du Tiers-Monde
Les Cours de droit
1976-1977
- pp 300-302

187.
Ainsi la démocratie politique conçue historiquement en Occi-
dent comme un système de pouvoir limité (moins de risques d'absolutisme
ou d'arbitraire) et démocratique (participation du peuple aux mécanismes
des décisions publiques), tend à recevoir en Afrique noire une significa-
tion particulière. D'instrument de limitation et de contrôle du pouvoir,
elle devient, en effet, un instrument de renforcement du pouvoir.
Voilà une réalité qui précise les conditions d'un schéma de
"cohésion sociale ll • Il s'agit pour l'Etat en Afrique noire de prendre
conscience de sa dimension nationale. On aimerait par exemple qu'il s'ins-
taure au sein de chaque Parti unique (cf. notre première partie) un vrai
débat social qui s'étendra à toutes les activités économiques, politiques
et sociales.
Dans cette perspective il convient de faire en sorte que la
politique de développement économique et sociale profite à toute la po-
pulation et non qu'elle se fasse au profit de quelques ethnies ou de
quelques régions. La
"décision la plus importante qui appartient au po-
litique~ à l'Etat est celle de la répartition équitable du produit natio-
nal entre les groupes sociaux" écrit précisément Claude RIVIERE
(1).
Si la théorie économique souligne aujourd'hui le rôle impor-
tant de la population comme facteur de structure (2)
-la population
étant à la fois la base de l'offre de main-d'oeuvre et de la demande de
biens de consommation-, il n'est, nous semble-t-il, qu'au prix de cette
cohésion sociale (3) que l'on pourra amener chaque individu à prendre
conscience de ses responsabilités dans le combat contre le sous-développement
économique.
(1) -
Cl. RIVIERE
:
Classes et stratifications sociales en Afrique
noire : le cas guinéen
P U F 1978
pp 285.
(2) -
Voir par exemple dans J. FREYSSINET:
Le concept du sous-développement
Mouton~ 1960~ pp. 137 - 139
A. WADE
L'Economie de l'Ouest africain: unité et cro&ssance
Présence Africaine - 1959 - pp 242
(3) -
Voir les nuances de A. MARSCHAL dans:
l'Europe solidaire
Cujas 1964~ pp 191.

183
Comme il n'est pas par ailleurs certain que l'économie la
plus développée serve absolument de modèle à toutes les sociétés qui
devraient nécessairement passer par son stade, il ne nous semble pas
qu'il faille "calquer" les schémas externes vaille que vaille mais
plutôt l'on devrait étudier ces modèles, voir leurs forces et leurs fai-
blesses en fonction des contraintes et des besoins de l'économie natio-
nale. C'est là notre optique d'une volonté politique de développement.
II. -
L'optique de la volonté politique de développement
Le développement
-s'il était encore besoin de le définir-
est un tout, un processus culturel intégral chargé de valeurs et qui
englobe l'environnement naturel, les rapports sociaux, l'éducation, la
production, la consommation, le bien-être et de fait même la diversité
des voies de développement répond à la spécificité des situations cul-
turelles ou naturelles
(1).
Pour l'Afrique noire, on ne le dira jamais assez, il s'agit,
à défaut d'une structure originale de développement, de fonder le modèle
économique sur les besoins réels des populations. Les responsables afri-
cains devraient savoir choisir parmi les différentes stratégies de déve-
loppement celles qui sont aptes à résoudre les problèmes essentiels en
matière de développement économique à savoir le problème de la formation
de l'épargne nationale, de la restructuration du secteur traditionnel
pour nous limiter à ceux-là.
C'est dans cette perspective, du reste, que A. GREJBINE (2)
souligne pour les pays du Tiers-Monde les inconvénients des modèles clas-
siques fondés sur la division du travail, la théorie des ,coûts compara-
tifs
-schémas qui se reproduisent aujourd'hui dans le processus d'indus-
trialisation pour l'exportation (cf nos développements deuxième partie)-
et qui tendent à maintenir ces pays dans un état de dépendance chronique.
Poser par ailleurs le problème d'une '~olonté politique de
développement", c'est aussi souligner la nécessité d'une coopération éco-
nomique régionale en Afrique noire.
(1)
Rapport
DAG HAM~RSKJOLD : 1975 VIIe Session extraordinaire des
Nations-Unies
pp 7
(2)
A. GREJBINE:
"Vers une autonomie concertée des régions du monde"
Revue d'Economie Politique
LXXXVIII
1978
pp 250-268.

189.
III. -
L'optique de la coopération économique régionale
Les pouvoirs africains devraient, à notre sens, former une
force de cohésion au sein d'une intégration de sorte à résoudre en com-
mun les grands problèmes dè développement économique. La dimension de
cette intégration est à la fois politique et économique.
La dimension politique d'abord.
En prenant à notre compte les réflexions de A. MARCHAL (1),
nous dirons que l'intégration africaine doit être conçue en termes po-
sitifs et non en termes négatifs de rupture de l'intégration nationale
car ce n'est pas, à notre avis, l'excès de patriotisme qui menace l'uni-
té africaine ma~s plutôt une certaine aliénation à des "idéologies ~m­
portées" ; autrement dit l'intégration se conçoit ici non comme un saut
périlleux du particulier dans l'universel de la part de ceux qui sont
incapables de mettre de l'ordre dans leur propre maison; mais plutôt
comme un "élargissement progressif du cercle de la solidarité qui, de
locale, régionale puis nationale devient plurinationale, continentale" -
ce qui doit sous-tendre ce processus d'intégration étant finalement la
prise de conscience que la "micronation" ne constitue pas un espace op-
timal pour résoudre les problèmes de développement.
La dimension économique de cette intégration.
L'intégration économique en tant que processus évolutif re-
vêt cinq formes essentielles selon Bela BALASSA (2) :
L'intégration économique se traduit d'abord par l'institution
d'une zone de libre échange où les droits de douane et les restrictions
quantitatives sont abolies entre pays membres mais où chaque pays conser-
ve ses propres tarifs contre les pays non membres.
Elle revêt ensuite la forme d'une un~on douanière caractéri-
sée par la suppression des discriminations en ce qui concerne les mouve-
ments de marchandises à l'intérieur de l'union et l'égalisation des tarifs
dans le commerce avec les pays extérieurs.
(1)
A. MARCHAL
L'Europe soLidaire
Cujas - 1964 - pp IX.
(2)
B. BALASSA : Theory of economic integration
R. Irwin
Homoword
ILLinois - 1961 - pp 1.

190.
En troisième lieu elle devient un marché commun, degré plus
élevé d'intégration puisque l'abolition des restrictions ne concerne pas
seulement les échanges commerciaux ; mais aussi les mouvements des fac-
teurs de production.
L'union économique en est la quatrième forme et combine la
suppression des restrictions concernant les mouvements des produits et
des facteurs de production avec un certain degré d'harmonisation des po-
litiques économiques nationales afin d'éliminer la discrimination due à
des disparités de politique.
Enfin la dernière forme en est l'intégration économique to-
tale qui présuppose l'unification des politiques monétaires et fiscales
et requiert l'établissement d'une autorité supranationale dont les déci-
s~ons lient les Etats-membres.
On ne peut pas dire aujourd'hui qu'un tel schéma ait été de-
meuré inaperçu par les responsables africains. Bien au contraire il sem-
ble qu'il ait été à l'origine de la création d'institutions régionales
l'Union Douanière des Etats de l'Afrique Centrale et l'Union Douanière
des Etats de l'Afrique de l'Ouest (U.D.E.A.O.). Mais il semble que le
point de faiblesse de ces institutions soit de tendre à exclure du champ
des échanges les pays dont on ne partage pas les options tandis que d'au-
tres pays (occidentaux notamment) sont privilégiés (1). L'effort devrait
donc consister à rationaliser ces différentes institutions.
Il s'agit pour les pays d'Afrique de privilégier d'abord les
intérêts nationaux plutôt que d'adapter les instruments de politique éco-
nom~que à l'accroissement des intérêts étrangers.
Voilà comment nous concevons la nature et le rôle de l'Etat
en Afrique noire. En fait, le débat ne vient que de s'ouvrir. Il repose,
il est vrai, sur des observations et des valeurs qui liées à une société
en mutation sont périssables. Dès lors un tel débat au stade où nous l'a-
vons abordé ne peut permettre de dégager toutes les conséquences et tous
les futurs.
Nous espérons que d'autres travaux seront entrepris dans cet-
te voie, peut-être encore plus fouillés au sens où ils doivent contribuer
à affiner
et à rationaliser la nature et le rôle de l'Etat eu égard au
grave problème de sous-développement économique.


(1) Voir par exemple l'Etude du F.M.I. : Etudes générales sur les économies
africaines Tomme III~
WASHINGTON - 1970 - pp 13-16.

191.
ANNEXES
l
- Fiscalité traditionnelle et solidarité.
II - Les régimes d'agrément en Afrique d'expression française.
111- Extraits de la Convention CEE - A C P
sur la coopération
industrielle.
IV - Renseignements complémentaires sur la République de Côte-d'Ivoire.

192 •
ANNEXE
l
FISCALITÉ
TRADITIONNELLE ET SOLIDARITÉ : UNE
---------
---------
ÉTUDE DES SPÉCIFICITÉS DE LA FISCALITÉ TRADI-
TIONNELLE ET DES MUTATIONS SOCIO-ÉCONOMIQUES
EN AFRIQUE NOIRE SOUS L/0CCUPATION COLONIALE

193.
· Les sociétés africaines pré-coloniales, d'une manière générale,
n'ont pas connu le "principe de l'impôt" •
Cependant dans certaines communautés plus ou mo~ns centralisées
se pratiquaient des formules de circulation de richesses comparables à
un sytème fiscal, quoique le concept de système fiscal, à notre sens,
ne rende pas totalement compte de toute la situation. Un système fiscal,
en effet, et en empruntant des précisions au Doyen Alain BARRERE
(1)
se définit par trois composantes essentielles : un but, une technique,
une organisation.
· Le but
détermine l'orientation du système en fonction des
mobiles fondamentaux qui animent la politique de l'Etat. si l'Etat est
animé de mobiles socialistes il recherchera une répartition égalitaire
du produit social; par contre s'il est animé de mobil~capitalistes,
il établira un système dont le but sera de faciliter la réalisation du
plus grand gain monétaire. Pour cela il prendra soin de gêner au minimum
l'activité économique et de ne pas paralyser l'esprit d'initiative par
une fiscalité trop lourde.
- Un tel cadre théorique de référence n'existait pas dans les
communautés pré-coloniales. Le "système fiscal" même s'il obéit à certains
mobiles d'ordre socio-culturel, ne s'inspirait pas pour autant d'une
logique aussi ordonnée et r~goureuse.
• La technique
est la façon dont s'opère le prélèvement de
l'impôt
et dont se détermine le taux de cet impôt. si l'Etat est socia-
liste il adoptera des techniques qui amenuiseront les charges pesant les
revenus faibles, tout en frappant durement les revenus élevés. Par contre
s'il est capitaliste il aura recours aux procédés productifs. Le souci
de la productivité primera en tout cas celui de la justice.
Nous verrons que les structures fiscales traditionnelles se
fondaient sur des réalités fondamentalement différentes.
• L'organisation du système enfin comprend le choix des bases
sur lesquelles repose l'impôt: revenu nominal, consommation, transactions,
fortune, capital. En second lieu elle comprend l'ensemble des règlements
(1) - A. BARRERE : Politique financière
Dalloz
1958
pp
99 - 117.

194.
et dispositions qui assurent le prélèvement fiscal.
On ne saurait dire que les sociétéS pré-coloniales ignoraient
une telle organisation. Mais il convient cependant de reconnaître qu'il
n'y
avait pas dans ces sociétés un cadre codifié rigoureusement défini
qu~
serve de référence à l'organisation du "système fiscal".
Nous présenterons d'abord le contenu de la fiscalité tradi-
tionnelle en empruntant une étude de cas à MAJHEMONT Diop (1)
,puis
nous développerons ensuite un effort d'appréciation.
l - LE CONTENU DE LA FISCALITE TRADITIONNELLE
le "SYSTEME
FISCAL"
dans L'ANCIEN EMPIRE DU MALI:
Dans l'ancien empire du Mali, l'impôt était, semble-t-il, le
fait de redevances particulières versées par les esclaves ou des prestations
en nature pouvant revêtir des formes extrêmement variées. Cinq formes
essentielles de redevances retiennent ici notre attention
1. ~~_~E~~~_~~_~~~E~~~~~~~
C'était, semble-t-il, un impôt spécial sur les riches et les
produits de luxe de l'époque. Il était comme son nom l'indique de 1/40e
de la forture ou de la valeur.
L'impôt a donc ici toute sa nature contraignante et le mobile
est plus ou mo~ns d'ordre socialiste.
C'était une sorte de redevance sur les récoltes dont le taux
était fixé en fonction du volume de la récolte. L'impôt était payé en
monnaie locale. A quoi servait ce prélèvement? Essentiellement à
enrichir les maîtres.
3. Le mouddou :
Une sorte de redevance religieuse acquittée librement par chaque
membre de la communauté tous les ans et à la fin du Ramadan (2).
(1) - MAJHEMOUT Diop :
ue occidentale
Tome I
Le Ma 1,
Maspéro
33.
(2) '~érémonie" religieuse dans la religion musulmane qui impose aux
croyants
de rester à jeun à longueur de journée pendant un mois.
Ils n'ont droit au repas que la nuit.

Il
~ ~/ -....
,. .
195.
L'impôt s'inscrit donc dans le cadre religieux et il nous semble
plus approprié
de parler ici de don ou d'offrandes en vue d'acquérir
la bénédiction de Dieu.
4. Le fabé :
C'était, semble t-il , un prélèvement militaire spécial dont
le montant et la nature dépendaient des besoins de l'armée, montant et
nature
qui variaient selon que l'on était en guerre ou non.
5. L'oussourou :
C'était une sorte de droit de porte qui frappait les marchan-
dises de toutes provenances. Le taux était fixé à 1/10è de la valeur du
produit.
L'impôt revêt donc ici un caractère protectionniste et tendait
précisément à protéger les grands marchés de l'époque qu'étaient ceux
de DJENNE et de
TOMBOUCTOU, véritables centres commerciaux de l'Afrique
occidentale.
Ces différentes structures appellent un
certain nombre
d'observations.
II -
QUELQUES REMARQUES sur la FISCALITE TRADITIONNELLE.
Deux remarques essentielles s'imposent
. La première porte sur le caractère improductif, d'une manière
générale, de la fiscalité traditionnelle. Il ne s'agit pas ici d'opérer
un prélèvement en vue de stimuler l'utilisation efficace des ressources.
L'impôt est dans la plupart des cas un instrument ud'accumulation stérile"
au profit des rois, des chefs religieux ou des personnes âgées .
. La deuxième observation est que d'une façon générale, l'impôt
apparaît
comme un instrument par le biais duquel on assure la continuité
de certaines valeurs sociales, culturelles ou religieuses que l'on considère
comme fondamentales. C'est l'aspect
don ou offrande de l'impôt qui s'inscrit

196.
dans le cadre général des échanges entre les membres de la communauté.
En effet, selon P. BOHANNAN et G. DALTON (1) le système d'échange tradi-
tionnel était régi par deux principes essentiels :
• Le principe de réciprocité qui décrit la sphère où la
circulation des biens de prestige (colliers, arcs, étoffes) résulte de
dons
ou d'échanges socialement obligatoires, fondés notamment sur les
obligations de parenté.
Dans ce cadre s'inscrivent les redevances aux personnes âgées.
Ensuite le principe de redistribution
qui suppose un versement
obligatoire préalable sous forme de tribut, de taxes de la part des mem-
bres de la communauté à l'autorité supérieure. Mais celle-ci (roi ou chef)
redistribuera la richesse à la communauté en fonction du statut social
de chacun et à l'occasion de grandes cérémonies telles que les fêtes reli-
g1euses .
. Dès lors l'impôt, l'échange devient un instrument de soli-
darité, de l'esprit communautaire. Et à ce niveau une digression
apparaît
nécessaire pour montrer comment la pénétration coloniale a bouleversé
ces différentes structures que nous venons de présenter.
En fait, avec l'occupation coloniale l'impôt requiert toute
sa signification c'est-à-dire qu'il devient un "prélèvement autoritaire"
en nature ou en argent effectué sans contre-partie directe (2) au nom
et au bénéfice de l'Etat colonial. L'impôt colonial était, du reste,
essentiellement un
impôt de capitation c'est-à-dire une contribution en
travail obligatoire (3). Deux objectifs inavoués étaient
assignés à la
fiscalité.
D'abord elle obligeait les populations locales à entrer dans
le circuit monétaire dans la mesure où l'administration fiscale admettait
(1) - P. BOHANNAN and G. DALTON:
Markets in Africa~
NorthliJestern
University
1962
cité par C. COQUERY VIDROVITCH et H. MONIOT :
L'Afrique noire de 1800 à nos jours -
P U F
1974
pp
262.
(2) -
Voir les nuances de P. NGAOSYVATHN dans :
Le r~le de l'i
~t dans les
ays en voie de dévelo
ement
PaY'1.-S
Lt. rat.rt.e genera e
e
rot. t et
e J UY'1.-Spru ence
1974
pp
11.
(3)
Cf. J. S. CANALE
L'Afrique noire: l'ère coloniale
1900-1945
Editions sociales 1977
pp
39-40
H. BABASSANA : travail forcé~ e
ro riation et formation du
sa art.at
en
Y'1.-que not.re.
PUG
1978
pp
81-92.

197.
le principe
d'un règlement en numéraire. Dès lors vendre pour se procurer
l'argent
de l'impôt devient une impérieuse nécessité.
On remarquera
donc en passant que le développement de l'usage de la monnaie en Afrique
noire était dû plus à la contrainte qu'aux sollicitations du marché •
• Le deuxième objectif qui est la suite logique du premier était
de permettre un'processus d'accumulation" au bénéfice de l'administration
coloniale. Les échanges très fructueux qui se sont développés en Afrique
noire avec les compagnies concessionnaires ont été le moteur de cette
accumulation. Du fait de la charge excessive de l'impôt
de capitation
les populations se trouvaient en effet, obligées d'écouler leurs produc-
tions à n'importe quel prix et plus grande devenait la masse des bénéfices
des compagnies concessionnaires et de l'administration coloniale .
. Il est évident que de telles structures provoqueront un écla-
tement de la solidarité communautaire. Le mot d'ordre de "chacun pour
soi et Dieu pour tous" devient une réalité.

ANNEXE II
LES
RÉGIMES
n'AGRÉMENT
EN
-----------
----------
AFRIQUE n'EXPRESSION FRANCAISE.

198.
Tous
les codes des investissements en v~gueur dans les pays
d'Afrique noire d'expression française s'articulent autout du concept
d'attraction des capitaux privés étrangers à travers précisément la
politique d'agréments prioritaires.
Après les exemples de la Côte-d'Ivoire et du Gabon que nous
avons présentés dans le corps de notre thèse, nous reproduisons ici les
caractéristiques essentielles de ces différents codes dans le cadre des
autres pays d'Afrique noire d'expression française (1).
1. CAMEROUN: régimes A et B pour les entreprises prioritaires
agrées
régime C : convention
d'établissement; régime D : régimes
fiscaux de longue durée.
2. REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE:
Régime de droit commun
régime A et B
- 4 régimes privilégiés
Régime fiscal de longue durée
convention d'établissement.
3. REPUBLIQUE POPULAIRE DU CONGO :
- Régime de droit commun pour les pays dont l'activité se
limite à un seul état de l'U.D.E.A.C~régime A, B + convention d'établissement.
Pour les pays dont l'activité s'étend à un ou plusieurs pays
de l'U.D.E.A.C. : régime C, D (convention d'établissement).
4. DAHOMEY:
Régime de droit commun
3 régimes privilégiés (A - B - C) pouvant être accordés à des
entreprises présentant un intérêt spécial pour l'économie. (+ Régime
D pour encourager les entrepreneurs et promoteurs nationaux).
5. HAUTE-VOLTA:
Régime de droit commun
Régimes A l, A 2, A 3 (entreprises prioritaires agrées)
Régime B (convention d'établissement)
+ ordonnance nO 74/057/PRES/MF portant statut général des
sociétés d'économie mixte.
(1) -
Des détails sont fournis dans J. ~THONNAT : Le code des investisse-
ments dans les E.A.M.A. Mémoire DEA Clermont-Fd
1976
pp 16 - 20.

ANNEXE
III
EXTRAIT
DE
LA
CONVENTION
------------
-------------
C.E.E.- A.C.P. SUR LA
COOPËRATION INDUSTRIELLE.

199.
6 . M A L I :
Régime de droit commun et régime particulier, l'un et l'autre
réservés aux entreprises prioritaires agréées.
7. MAURITANIE :
Régime de promotion industrielle
Régime d'entreprises prioritaires agréées.
Régime fiscal de longue durée.
8.
N IGE R
Régime de droit commun
Régime privilégié pour les entreprises prioritaires agréées.
9. SENEGAL
Régime des entreprises prioritaires agréées
Convention d'établissement
- loi nO 72-46 du 12.6.72
portant encouragement à la création
ou l'extension de la petite et moyenne entreprise sénégalaise.
10. T CHA D :
Régime de droit commun
Régimes privilégiés (entreprises prioritaires agréées)
Régime A pour les entreprises dont l'activité est limitée
au TCHAD.
Régime B pour les entreprises dont l'activité s'étend à un ou
plusieurs états de l'U.D.E.A.C.
Régime C ou régime fiscal de longue durée
Régime des conventions d'établissement.
11.TOGO:
Régime de droit commun
régime A
Régime des entreprises prioritaires agréées, régime B
Régime C
régime fiscal de longue durée
Régime D
convention d'établissement.

ANNEXE l
CONVENTION DE LOMÉ
TITRB III
Coopération industrielle
ArlJcle 26
La Communauté et les Etals A.C.P., reconnaissant la nécessité
impérieuse du développement industrid de ces <.Ierniers, convien-
nent de pren<.lre toutes les mesures nécessaires en vue de r~<lliser
une coopüation in<.lustrielle l:{f~ctive.
La coopération in<.lustrielle cntre la Communauté et les Etats
A.C.P. a les objectifs suivants:
a) promouvoir le développement et la diversification industriels
<.les Etats A.C.P. ct contribuer li réaliser une meilleure répilrti-
lioll de l'industrie li l'intérieur de ces Etats et entre eux;
b) promouvoir de nouvelles relations dans le <.Iomaine indus-
triel entre la COJllmunaut~. les Etats membres ct les Etuts A.C.P.,
1l0lamment l'établissement de nouveaux liens industriels et COIlI-
rnerciaux entre les industries des Etals membres de la Commu-
nauté et celles des Etats A.C.P.;
c) multiplier les liens entre l'industrie l:t les autres secteurs
de l'économie, notamment l'agriculture;
.N
o
o

d) faciliter le transfert de la technologie aux Etats A.C.P. et
Article 29
promouvoir son adaptation à leurs cqnditions et besoins spéci-
fiques, notamment en développant les capacités des Etats A.C.P.
La Communauté contribue à la création et à l'extension, dans
1 il
en matière de recherche, d'adaptation de la technologie et de
les Etats A.C.l)., d'industries relevant des domaines de la trans-
!il
formation des matières premières et de la fabrication des pro-
..
formation industrielle à tous les niveaux dans ces Etats;
duits finis et semi-tinis.
Il
e) promouvoir la commercialisation des produits industriels des
il
Etats A.C.P. sur les marchés extérieurs en vue d'accroître leur
part dans le commerce international de ces produits;
Article 30
\\ \\
f) favoriser la participation des ressortissants des Etats A.C.P.,
A la demande des Etats A.C.P. et sur la base des programmes
et notamment celle des petites ct moyennes entreprises inJustriel-
soumis par ceux-ci, la Communauté contribue à l'organisation et
i:\\
les, au d~veloppement industriel de ces Etats;
au financement de la formation à tous les niveaux de personnel
il'
g) favoriser la participation des opérateurs économiques de la
ressortissant Je ces Etats, dans des industries et des institutions
!
Communaut~ au d~veloppcmcnt industriel des Etats A.C.P., lors-
à l'intérieur Je la Communauté.
,1
III
que ceux-ci le souhaitent et en fonction de leurs objectifs écono-
En outre, la Communauté contribue à l'organisation et au
. ,
miques et sociaux.
développement des possibilités de formation industrielle dans les
!,1
Etats A.C.P.
: Il
-
..JI
Article 31
Article 27
En vue d'aider les Etats A.C.P. à surmonter les obstacles qu'ils
W li
En vue d'atteindre les objectifs énoncés à l'article 26, la Com-
rencontrent en matière d'accès à la technologie et d'adaptation
munauté contribue, par tous les moyens prévus dans la présente
de la technologie, la Communauté est prête notamment à:
convention, à la mise en œuvre de programmes, projets et actions,
1;
a) mieux informer les EtalS A.C.P. en matière de technologie
l,Ii
qui lui seront présentés il l'initiative ou avec l'accord des Etats
et à les aider à choisir la technologie la mieux adaptée à leurs
A.C.P. dans les domaines des infrastructures et des entreprises
besoins;
Iii
industrielles, de la formation, de la technologie et de la recherche
b) faciliter les contacts et relations des Etats A.C.P. avec Ic:s
Il
des petites et moyennes entreprises, de l'information et de la
promotion industrielle et de la. coopération commerciale.
entreprises et les institutions détentrices des connaissances tech-
:1
nologiques appropriées;
l,)
c) faciliter l'acquisition, à des conJitions favorales, de brevets
li
et d'autres propriétés industrielles, par voie de financement etlou
Article 28
par d'autres arrangements appropriés avec des entreprise$ et des
1
institutions à l'intérieur de la Communauté;
II1:
La Communauté contribue à la création et à l'extension des
d) contribuer à l'organisation et au développement des possi.
,;
bilités de recherche industrielle dans les Etats A.C.P., en vue
'1·
infrastructures nécessaires au développement industriel, en par-
l,'
ticulier dans les domaines des transports et des communications,
tout spécialement de l'adaptation de la technologie disponible aux
il!
conditions et aux besoins de ces Etats.
1'1
de l'énergie, de la recherche et de la formation industrielles.
V
lill;,:,
i,!
l, 1
N
o

1
1
Article 32
munauté, dans le but de prom~uvoir le développement industriel
i
des Etats A.C.P.;
La Communauté contribue à l'établissement et au développe-
'1
d) de contribuer, par des actions de coopération technique
j \\1
ment de petites et moyennes entreprises industrielles dans les
appropriées, à l'établissement, au démarrage et au fonctionne-
,:/
Etats A.C.P., par des actions de coopération financière et tech·
ment d'organismes de promotion industrielle des Etats A.C.P.
, l'
nique adaptées aux besoins spécifiques de ces entreprises et cou-
l'
vrant notamment:
a) le financement d'entreprises;
Arlicle 34
b) la création d'infrastructures appropriées et de parcs indus-
triels;
En vue de permettre aux Etats A.C.P. de tirer pleinement pro-
fit du régime des échanges et des autres arrangements prévus dans
c) la formation et le perfectionnement professionnels;
la présente convention, des actions de promotion commerciale
1
sont mises en œuvre pour favoriser la commercialisation des pro-
L
d) la mise en place de structures d'encadrement et de crédit
spécialisées.
duits industriels des Etats A.C.P., tant sur le marché de la Com-
1
munauté que :iUr les autres marchés extérieurs. En outre, des
Le développement de ces entreprises doit conduire, autant que
programmes sont conjointement établis entre la communauté et
/11
possible, au renforcement de la complémentarité entre les petites
les Etats A.C.P. pour stimuler et développer le commerce des
et les moyennes entreprises industrielles ainsi que de leurs liens
; 1
-
produits industriels entre Ce:l derniers.
avec les grandes entreprises industrielles.
...J
Article 35
W
Arlicle 33
1. Un Comité de coopération industrielle est établi. 11 est
II
Des actions d'information et de promotion industrielles sont
placé sous la tutelle du Comité des Ambassadeurs.
entreprises en vue d'assurer et
d'intensifier l'échange régulier
d'informations et les contacts nécessaires en matière industrielle
2. Le Comité de coopération industrielle est chargé de:
1
entre la Communauté et les Etats A.C.P.
a) veiller à la mise en œuvre du présent titre;
, 1
Ces actions peuvent notamment avoir pour objet:
b) examiner les problèmes relatifs à la coopération industrielle
,1
a) de réunir et de diffuser toutes informations utiles portant
qui lui sont soumis par les Etats A.C.P. et/ou par la Commu-
sur l'évolution industrielle et commerciale de la Communauté et
nauté, et suggérer des solutions adéquates;
; 1
sur les conditions et les possibilités de développement industriel
c) orienter, surveiller et contrôler les activités du Centre pour
des Etats A.C.P.;
le Jéveloppement industriel visé à l'article 36 et rendre compte
: 1
b) d'organiser et de faciliter toutes formes de contacts et de
:lll COlllité des ambassadeurs et, par son intermédiaire, au Conseil
rencontres enlre responsables des politiques industrielles, promo-
des Ministres;
'II
teurs et opérateurs économiques de la Communauté et des Etats
d) soumettre périodiquement au Comité des AmbaSliadeurs les
,il
A.C.P.;
rapports et recommandations qu'il considère utiles;
:.1,
c) de réaliser des étuJes et expertises visant à déterminer des
e) exécuter toutes les autres tâches qui lui seront confiées par
li
possibilités concrètes de coopération industrielle avec la Com-
le Comité des Ambassadeurs.
: :1
! Il
N
o
!
' '1.
N
, i,
:.;:
:li

3. La composition du Comité de coopération industrielle et
munauté s'cffectue conformément au Titre IV, compte tenu des
ses moJalités de fonctionnement sont déterminées par le Conseil
caractéristiques propres des interventions dans le secteur indus-
Jes Ministres.
triel.
Article 36
Article 38
1
,1
~ l
Un Centre pour le développement industriel est créé. Ses fonc-
1. Chaque Etat A.C.P. s'efi'orce de donner une indication aussi
, "
tions consistent à:
claire que possible de ses domaines prioritaires dans le: cadre de
q
la coopération industrielle et de la forme qu'il souhaiterait pour
, '1
a) réunir et diffuser, dans la Communauté et les Etats A.C.P.,
toutes informations utiles sur les conditions et possibilités de
celle coopération. Chacun de ces Etats pre:nd également les me-
,\\1
coopération industrielle;
sure:s nécessaires pour promouvoir, Jans le cadre du présent titre,
,\\
llne coopération eCticace avec la Communauté et les Etats mem-
1
b) faire réaliser, à la demande de la Communauté et des Etats
bres ou avec les opérateurs économiques ou ressortissants des
A.C.P., des études sur les possibilités et potentialités de dévelop-
Etats membres qui respectent les plans et priorités de dévelop-
1
pement industriel des Etats A.C.P., en tenant compte de la néces~
pement de l'Etat A.C.P. d'accueil.
sité d'adaptation de la technologie il leurs besoins spécifiques, et
2. La Communauté et les Etats membres, pour leur part, s'em-
se charger de leur suivi;
--
ploie:nt à me:llre en œuvre les mesures propres à inciter les opé-
c) organiser et faciliter toutes formes de contacts et de ren-
ralcurs économiques à participer à l'eITort de dévdoppeme:nt
contres entre responsables des politiques industrielles, promo~
industriel des Etats A.C.P. intéressés et encouragent Ie:sdits opé-
....J
teurs et opérateurs ~conomiques, y compris les institutions de
rateurs à se conformer uuX aspirations et aux objectifs de déve-
financement, de la Communauté et des Etats A.C.P.;
loppement de ces Etats A.C.P.
~ ,1
d) fournir des renseignements et des services de conseil indus-
ill
triels spécifique:s;
Article 39
e) aiJer à identifier, e:n fonction des besoins exprimés par les
'il
Etats A.C.P., les possibilités de formation et de recherche appli-
l'
Le présent titre ne fait pas obstacle à l'établissement d'arran-
quées inJustrielles dans la Communauté et dans les Etats A.C.P.
:Il
gements spécifiques entre un Etat A.C.P. ou un groupe d'Etals
ct fOurnir Je:s informations et des recommandations appropriées.
'l'
A.C.P., un ou plusieurs Etats membres de la Communauté concer-
II
nant développement de ressources agricoles, minérales, énergé-
li
Le statut ct les modalités de fonctionnement du Centre sont
tiyues, d'autres ressources spécifiques des Etats A.C.P., pO,urvu
:d
ilrrétés par le Conseil des Ministres sur proposition du Comité
:1
Jes AmbasaJeurs, Jès l'entrée en vigueur de la présente conven-
que ces arrangeme:nts soient compatibles avec la présente conven-
l,
tion.
tion. De tels arrangements doivent être complémentaires des eITorls
i:
d'industri.a1isation et ne: doivent pas fonctionner au détrimt:nt du
présent titre.
li
Article 37
h
La mise: e:n u:uvre Je:s programmes, projets et actions de coopé-
l'
ration industrielle qui comportent un financement par la Com-
h
1:
:11
dl
N
o
II
lJ.)
l'
li
1

204.
ANNEXE IV
RENSEIGNEMENTS COMPLËMENTAIRES
-----------
-----------
SUR LA COTE-n'IVOIRE.
l
-
Extrait
de la loi nO 59 /
134 du 3 septembre 1959
déterminant le régime des investissements privés
dans
la République de Côte-d'Ivoire.
II - Nouvelles propositions de réforme du code des 1nves-
tissements .

..- ~------~ .
'.-
.._-""",--
1
La lui :)9/18.~ du 3 septembre 1959, déterini-
'uallt le régime cltJH Îltl'l!st-issements 1Jl'ivés dan~ la
.
l
-
Ré/ml/lique de l'fite <!'II'o;re, a 1lVltl' olJjet dc',
déjLui,. ce qu'est une enirepri~e prim'ilaire et cie
analyse de la loi
p"écise,' les conditions auxCJuelles est sll[;orcloi/Jlf
;
l'agrémeut d'ulle entreprisc en celte rtl/alité.
En 1Il.ême temp.~, le lë,qisla.tcu1· institue: d'unc
part,
indistinctem.elll.,
en favem' ilp' lOllles les
e11 /relJ1' il:ie:i
1J1'iu1'i1aires,
d'imporla?!1 Co'>
l/WS UJ'cs
~
d'exoll~l'ation8 el d'alll'gemcll/s fiscaux: d'a /lIre
N· 59/134 du 3 Septembre 1959
i!
]Jart,
à l'é,qa}'d d(~ ('utaines d'entre el1rs, lm
.
déterminant le régime
ré!Ji1lle fiscal (Il.' lOlif/lit) durée clcs7ù/(~ il yurun!.ù·
des investissements privés
.-
penda'Ht ulle périude qui iJell~ al/el' jll.~q1L'ii p;H!J/~
dans la Républiquo de Côte d'Ivoire)
!1
1:
CiTUj' (triS,
la stalJililé des l'!lm'f}Cs fiscàlcs /JlLi

kW';l/comln'lll ,. de3 ('OHI'Cllt ;UJL'i d·é/Llhli.'l:;cl1(I~llt
passers eHlre le gOIlI'(!l'}WIlWJll de, la Côte d:fl'(I;rc
,
ct c:e~ 'IIlême8 eul reJJ/'i3e~, élcLltl exptl'.o)sél1lelli
7J1'él-'lIcS }Jar la. l(li, afin de -fixe,' les conù il ;lIll''1 d~~
.
créatiun et de !mwf.;oJlnentcnt ,dcs enlrepris(':·) aiJ/ ...:i
bénéficiaires du J'égilJle fisCal de lOllgue dUJ"éi:,
N
("')

_,-------
,
1&
. ,
..

--'.
j
L
Loi n· 59-1~;l du 3 Septembre 1959 d~tcnllilUUlt le ré~Ï1nl~
de~ lll\\'cstis!jenwuts l'rivés tIans la. n(~)lublillae de Côte
d'Ivoire.
L'AsscmIJléc I~gislutivc a uuopté,
Le Premier Ministre promul~ue la loi dont lu teneur suit
Article premier. Le régime
des investissements prévus en
Côte d'Ivoire est déterminé par les' dispo:.oitions ci-apr'::s qui
confirment et complètent
les
mesures arrêté!.:s ou
rl'com-
mundées par :
'. teHto de 1!1'~oi
- Ln délibération n" 33-58 AT. et le vœu n"
35-58 AT. du
Il Avril 1958 de l'Assemblée territoriale;
- Les di·libé.l:ltions nO. 270-58 AC., 271-58 AC. et 272-5.8 AC.
et le vœu n° 273-58 AC. du 23 J<1nvier 1959 de l'Assemblé~
'1
constituante.
1
1
1
Les entreprises prioritaires
TITRE 1
Ar!. 2. Sont réputées prioritaires sur le territoire de ILl H~pu­
Les
2
Le régime fiscal de fongue duriie
blique de Côte d'Ivoirc, les catégories d'entreprises ci-après:
entrcpr)scs
priori hli rc~
1° Les entrcprises immobiJjères ;
2" Les eutrcprisea ÙC culturcs industrielles et les iùtlll!i-
trics COl1l1CXeS de prépara.tion (oléagineux, hév~a, cunne
3
Ll;s conventions d'établissement
à sucre, dc...) ;
3" Les eutrc}lrbcs industrielles de. préparation ct dc 'trans-
formation
Illécalliqll~ ou chimique des productions
\\'ég-ét.ale~ ct uniflluJcl:> locales (café, cacao, olt:ugineux,
4
La fiscalité
hévéa, IJois, coton, CUille à sucre, etc...) ;
N
o
0\\
4" Les inl1l1stl-ics de fn.brication et de mOIlt.ll~c ùcs article!>
et objds de grande consoTilma.tion (textiles,' mut~riaux
de construction, fabrications mûtulliqul:s, véhicules, outiJ-

,- --
.- ,-----~~~

- ,
fi.1lan\\ do IOIl!JUP duroo tlHini cktessous ct peW1:icr avec le
):lbe
Gouvernement dos COllveution~ dite:! d'élobli:';:JClIlcnt dans
d
'luincllil1erie, clI~rtlis, produits chimiques ct pha"·
IC:J
1I1I\\Ct:ulitluc~, pÎlle ù pnpicr, pupiers, cartons ct /lJlplicntiorn,
conditiol1s détermllléc:I d-oprès.
jJlOduilS plusli'luc::, C,lC...) ;
Ln Joi prévue Q l'IIlinéo précédent fixera la période d'appli-
5" LI~~ illùust.rlcs minièn.-s tl'cxtrnctioll, d'eru;chissement
catipn du réglnle lIscal de longue duréo airu;i que lu durée et
ou de transformation de sub::lllnces minémlcs et les entrt.-.
les conditions s~nérales de la convention d'étllhlissemcnt, les
I"
outres dispœiltlorls étant dMerminées
j·;/,s conncxes de mnllulcnlioll ct de transport, Ilinsi que
1111; dl'Crcl: )11 is en conseil
k~ l'lIlrL'pri!\\<:s d'l IcclIL·i\\hcs pétrolières i
des ministres.
1;' I.C·S l:lllr(ll'ris(~:i t11\\' )IJ'(lIll1diulI <l'énergie.
eonditions'd'Agrément.
'Art). Les entreprises uppurlenant il J'une des catégories
TITRE II
cÎ-UèSSUS
pourront, par décret pris en conseil' des llIinistre~.
êlrc ol:réées comme prioriloircs lorsqu'ellcs remplissent les
conditiuns "'üerément SUiVlIlILCs :
Art. 6. Le régime fiscal de longue durée est de~tjné l\\ eumntir
Le' rcgJJllC
à de:i cntreprise:! agréées comme prioritaires, ln stabilité de
fiscal
a) COIll:ullrir il. l'cx(-I'uliun 1h..'S Jll:um do di:\\'c111JlIWIIICllt
tout ou partie c1es chorges, fiscales qui leur incombent, pendant
de
longue'
feollulIliqllc ct social <Ians les cOlulitions l1éh~rnljlll~cs
,"
une périodo ma-.:imum de 25 ons, majorée, le cos échéant,
<Juree
)Iar le llécrct ll'agrt~lIJcut j
dans la limite de 5 années, des dé/ui9 normaux d'inst.ulJatioIL
0) JGffcclucr
des
ill\\'cslis5clllel1t~ rc\\'êtaut 11110 impor-
~
.Art. 7. -
Pendont la période d'oPlllication d'un régime fiscal
tancc )Iurticlllièrc pOlir la lIIise cn valeur du payu i
de longuo durée, aucune modification ne peut être npportée
c) A\\'uir élf. (:réél'S lLJlri:s
le
Ji
Avril
]t)58
011 ~1\\'oir
oux règles d'assiette et de perception, ainsi qu'oux torils pré-
1:l1ü'cprb uJlI'ès wttc <Ialo dcs cxtclisioJis illlJlortantes,
VU9 par Ce régime en faveur de l'entreprise bénéficiaire.
m;li:; selllcll\\ent en ce Ilui COllcerllC cc~ è.d,l~llsiùIW.
Pendont ln même p~riode, l'entr~prise bénéficinire ne p6ut
être soumica aux impôts, taxes et contriiJutions da toute JUltuce
Art. 4. En cos ù~ manquement grave d'wle entreprise agréée
'Ill·'
dont la cr6otion résulterait d'W10 Joi pootérleuce il lu date
obligatiolls illlposées par le décret d'agrément, le retrait
d'application du régime fiscal de longue durée.
d'lI~~r';'mcllt est prollon';é, après mise en demeure non suivie
ù'effet, par décret pris en cOllseil des ministres. Dons ce cas,
Art. 8. En cns de modification nu régimo fiscal de droit
l'clltIt:prise est soumise pour cornpler de la date dudit décret
commun, toute entreprise bénéficiant d'un régime fixaI de
nu rér.ime de droit commun.
longue durJe t>cut demander le bénéfice desditell modifica-
tionll. II peut lui être donné slItillfllction par décret en conseil
dos minisu·eB.
"Id. 5. TOlll,-~~ les elll.rqlrise"q ab'ré(~cs ,COJlIIUU priorilaires
hallS n:I'Cplillll, h<'lléli<:icront dl: lucsur09 tl'cxolll~ralioll 011
Toute entreprIse bénôficiaire peut demander à être replacée
d'alli~I~I:lIlCllt fise:d. Ct:lle~· Il'clltTO elles qui l'réslmtl:nt IIIlO
sous le régime du droit commun à partir d'une date qui sera
N
o
illlpllrt:lIIcc l'I\\fticlllièro Ilourrlllll., sur autorisation spécillie
fixée l1ar décret pris cn conseil des ministreu.
'-J
dOI\\II~~ par· Ulle loi, Î'\\l'C allll1Î:;c!i nu bénéfico du réI;il1lc

TITRE III
C
Certfll~ drQit~ et hlleos perçus il la :;orti~ du territoire cl.: III
cOllventiun
.·trt. 9. Lu convention d'établbscment fixe ut gOl"II11tit les
République: droit fiscol de sortie, taxe forCllil:llire à j'cApùrO
condition:! O~ créution I:=t de Conctionncm~nt de l't'ntfcpri:ic
tatiol\\ n.llrésclltutivu de la tuxe de tranlôl.lclion.
~cl, étabÙsse- prioritaire admis.: à en Lén~ficicr.
Leur li:lte Cil e:ot fixéc IlU tableau annexé à la pr~lIente loi et
ment.
Elle Ile pcut êln: l'a::;séc IJU'IL't'CC lIUI} cl,treJlrl~c lJénHlcbut
Ics
1.llcsurcs
nu
pourront prendre
effet
qu'n
c~mpter du
Ù'UII régisuu fi~ènl do IUlIgllC IJurée et su ùurée ne peut
1" tlvl"il 1959 ell ce 'lui concerne ·les droits ct taxeS prévus à
ëxC"éder céll~ de Ct; r~~iml: fîscn\\.
l'ulin~1l 2 du présl:nt urticle ct ûu Il avril 1~sa en cc qui
Ellc ne peut cOl\\lporter, dt: III part de l'Etat, U'engagernllut
concerne les ulinéu:I 3 t:t ....
ayul\\t rour~fict de déchurger l'cn\\reprise Ll:nHicinire des
j":.,r\\ê:i ou chuq~cs ou Jes lIlun'l.ues il gll~l\\er dw à l'évolution
de III conjoncture économique ou à des Cacteurs propres il
l'cntr~pri:;c.
TITRE V
Art. 10. Le r~glemèl\\t Jcs différends résultllnt de l'application
1
1
des <.Iispositions d'une convention d'étùlJlissement ct :n déter-
Art. 12. Des décrets pris en conseil des mini~tre:l détcrminunt
minutloll évelltucllu ûe "i1\\Jemnit~ duo pour la méconnais-
le:l modulit,s d'upplicution de la pré:lcnte loi qui ~ru publi.!t:
1
sance de:! cll~lIgelfll;lIt:l pris, poWTOlLt fuire l'objet d'unI: pr<r
ull )ollrnul oUiciel de la République de (Ate d'I voiru et e~~o
c~dure d'mbitrull.c dOllt lcs moùalité~ serollt fixL"ùS pur ChUltUI:
culée cornIl lU loi de l'Etut.
1
cûllventiolL
Fuit il Abidjan, le 3 lieptcmbrtl 1959.
TITRE IV
La tbcali lé
Art. 11. Les mesures d'exoné:mtion ct d'uW:~elllent fj:v:al OOlLt
FiolÏJ< HOUPHOUl!T-fiOIGNY
L6nélicient; sans
e~c(;ption, touteS Il:S entreprises Qgrêées
Lo JlJirùdro oJ.." )o·jn/H'cu.
cumme prioritaires concerncnt :
do. Aii.,),... ~c..JtlO"ai('f1o" ot I1lJ PIIUl,
11. 6ALl.UR
o Ccrtaill:i droits et taxc,. perçus à "cntré" du territoire de lu
r":l:pulJli'luc sur 1e:l lIlétn:llundises f:t produits importés: droit
de douune, droit fiscal d'entrée, tmu: forfuit4ire rcprésenlUo
Live de lu tll),:e de truosllction i
- CcrtailCi impôts, l:olliributions et tu>:es frUPJlllllt les bctivité~
illlérieurcs du production ou les trum:~ctiolls. impé,l sur lcs
uéll~ficcs industriels el commCrl:iaUlC, COIII riblll jon fOllcièn:
N
des propriétés Lûties, taxe sur les Licus de llIUillmortc, contri·
o
C1J
\\.mtiOll Iles patulltes, droits d'e.llrl:~istreHIl:l\\t et de timlJrc,
tuxe d'c)(tracliûlI des nllltériaux ;

II -
LEs ftlUVELLES
PROPOS 1T IONS

209.
RESUME
DES NOUVELLES PROPOSITIONS ET CORRESPONDANCE AVEC LA SITUATION
ACTUELLE.
SITUATION ACTUELLE
OUVELLES
PROPOSITIONS
(Droit commun et loi de 1959)
l - DROIT COMMUN
- Régime de l'usine nouvelle
• exonération de l'impôt sur les
• exonération de l'impôt
sur les
BIC et de la patente pendant
BIC et de la patente pendant 5 ans
5 ans : les PME
ne bénéficient
ans le Grand Abidjan (applicable
pas dans la pratique de cet avantage.
aux PME)
. exonération de l'impôt sur les
BIC et de la patente pendant
7 ans en dehors du Grand Abidjan
(applicable aux PME)
Article 84
- réinvestissements déductibles
- réinvestissements déductibles des
à 50 % maximum, des BIC sur 4
impôts sur BIC sur les 4 exercices
exercices suivant l'opération
suivant l'opération de réinves-
de réinvestissements, à concur-
tissements ; Cette déduction
rence de 50 % maximum des BIC sur
des impôts dus sur BIC sera
ces exerC1ces (au mieux donc,
au maX1mum de :
20 % du montant des investisse-
+ 15 % du réinvestissement total
ments peuvent être déduits
si il est effectué dans le
des impôts.
Grand Abidjan
+ 25 % du réinvestissement total
- Taxes sur les salaires
rien
s'il est effectué hors du Grand
Abidjan.
+ Abattement d'un montant for-
faitaire annuel (fixé par exemple
à
fois le SMIG), réservé aux
PME (moins de 75 M de C.A TTC)

210.
SITUATION ACTUELLE
NOUVELLES
PROPOSITIONS
- F N l
(Utilisation pour
investissement industriel)
- Seuil m~n~mum
d'investissement
seuil minimum d'investissement
+ 15 millions à Abidjan
+ 2,5 millions de F.C F A pour
+ 10 millions en région
les entreprises individuelles
et les sociétés du secteur du
secteur
industriel, ayant un
chiffre d'affaires TTC de
moins de 75 ~: rie F. CFA par an.
Pas de changement en ce qui concerne
les autres sociétés.
-
Abattement forfaitaire annuel
Ab attement forfaitaire annuel de
de 80 000 F
150 000 F.
Pas de délai d'utilisation: pour
-
Délai d'utilisation
5 ans.
les entreprises et sociétés réalisant
moins de 75 millions de C A
TTC.
Inchangé pour les autres.
-
Coefficient multiplicateur
i- Coefficient "investissements/
1
"investissements/certif ica ts"
1
certificats" égal à 2 sur tout
égal à 2 en région et à 3 : à
le territoire pour les entreprises
Ab idjan
et sociétés de moins de 75 millions
de CA:
Inchangé pour les autres.
-
Droits d'entrée sur matière
première :
-
Existence de droits sur pra ti-
-
Suspension des droits sur les
quement toutes les matières
matières premières de base ne
premières.
pouvant être produites à moyen
terme dans le pays (Cf. § D,
ci-après)
-
Droits de sortie
-
les droits actuels montrent une
-
fixation des taux de sortie sur
certaine dégressivité en fonction
les produits transformés selon le
du degré de transformation.
principe
de conservation des
droits de sortie en valeur absolue
quel que soit le degré de trans-

211.
formation du produit (+ le produit
fini à une valeur élevé.:, + le taux
de droit de sortie est faible). Ce
principe fixe un maximum de taxe
applicab le en deç a duquel la taxe
sera fixée en fonction de l'effort de
promotion nécessaire à la création
de l'activité considérée. (Cf. § D,
ci-après)
- Aide à la formation
réduction de moitié de la taxe
Idem pour la formation continue
de formation continue, si la
formation est effectuée par
l'entreprise.
-
pour la formation au démarrage,
l'Etat prendra en charge 50 %
du programme agréé (sous forme
de réduction des taxes sur salaires
(formation continue) pendant les
premières années de fonctionnement.
II -
CODE
DES
INVESTISSE lENTS.
-
Champ d'application
-
Le champ d'application retenu
a été légèrement modifié ; ne sont
concernées que les activités réelle-
ment industrielles subissant la
concurrence et fabriquant des
produits transformés semi finis et
finis.
Ne sont pas prise en compte :
+ les entreprises immobilières
+ les entreprises de cultures
industrielles et les activités
connexes
de transformation primaire
+
les industries minières
+ les entreprises de production
d'énergie.

212.
SIT Ut\\.TION
ACT tELLE
NOUVELLES PROPOSITIONS
Par contre, sont concernées
+ les activités de pêche industrielles
+ les activités de recherche
+ les activités de formation du
personnel
-
les petites entreprises peuvent
être agréées dans le cadre d'un
programme global.
- les sociétés d'état et d'économie
mixte pourraient b énéf icier du Code.
-
Régime fiscal stabilisé
• maximum
25 ans (majoré de 5 ans
-régime fiscal stabilisé sur 10 ans
au maximum, délais normaux d'instal-
accordé à toute entreprise nou-
lation) dans le cadre d'une conven-
velle agréée au Code.
tion d'établissement.
-
Régime fiscal stabilisé pouvant
être étendu au maximum à
~ ans
(majorés dans la limite de 5 ans,
des délais normaux d'installation)
dans le cas d'investissements
lourds à rentabilisation longue.
-
Droits d'entrée sur matériel
d'équipement :
-
exonération du matériel de
- même chose
premier équipement et des
pièces de rechanges (n % maximum
de la valeur de l'équipement)
Le quota de 10 % \\aleur maximum des
pièces exonérées pourrait être
élargi en région
(20 %, ou plus)
-
Droits d'entrée sur matières
premières
- Exonération pendant
JO ans
-
exonération seulement dans le
cas de l'exportation des produits
fabriqués à partir de ces matières.

213.
SITUATION ACTUELLE
NO U\\ELLES
PROPOSITIONS
- Droits de sortie
- réduction de 50 % pendant 5 ans
• réduction de 50 % pendant
sur certains produits correspon-
10 ans
dans à une réelle transformation
industrielle.
-
Taxes sur salaires
Rien
-Exonération temporaire (ou perma-
nente mais partielle) dans cer-
taines régions.
-
Contribution foncière et
biens de main morte
• Exonération pendant 5 ans
- même chose
- Aide à la création d'emploi
Rien
-
crédit d'impôts de taxes accordé
pour tout emploi industriel
permanent créé, occupé par un
ivoirien.
~ntant par emploi, égal à
+
1/ 2 S M[ G annuel dans la région
d'Abidjan (au sens élargi) pour
les PME agréées dans le cadre
d'un programme.
+ 2 SM[ G dans les régions excen-
trées les plus éloignées d'Abidjan.
+
1 SM[ G dans les régions intermé-
diaires.
Cette mesure est permanente : elle
porte sur les accroissements
d'effectifs nationaux.
Aide à l'exportation
Rien
-
crédit d'impôt et de taxes
accordé en fonction :
• d'une part, du niveau absolu des
exportations, et ceci pendant
ID ans
à partir
du début de l'activité de
l'entreprise.

214.
SITlATION ACTŒLLE
NOUVELLES
PROPOSITIONS
d'autre part, de l'accroissement
des exportations (mesure permanente)
- Aide à la formation au
démarrage
Rien, sauf si cette formation peut
en droit commun l'entreprise
être considérée comme la formation
bénéficierait d'une réduction
continue (réduction de 50 % de la
de taxes (formation) équivalente à
taxe correspondante.
50 % du coût du programme agréé.
Dans le cadre de l'agrément
au Code, l'Etat peut avancer la
moitié du coût de la formation
agréée, l'entreprise n'étant
plus alors exonérée de taxes.
==========================================================================================

215.
LISTE
D:=S
TAB ' r: :'l!J'/
~
L-L-:.'./\\
Pages
Tableau nO
Le processus d'accès au pouvoir des personnalités
12
africaines.
Tableau nO
2
Principales dates des indépendances africaines
21
Tableau nO
3
Découpage administratif de la Côte-d'Ivoire
22
Tableau nO
4
Organisation politico-économique de l'Etat
38
colonial
Tableau nO
5
Amendes de guerre versées par différentes
43
tribues de Côte-d'Ivoire
Tableau nO
6
Les Partis uniques en Afrique noire de succeSS10n
49
française
Tableau nO
7
Les classes sociales au Sénégal
60
Tableau nO
8
Quelques filiales de multinationales en Côte-
77
d'Ivoire
Tableau nO
9
Evolution de la dette des S1X pays de l'U M 0 A
(milliards de F CFA)
80
Tableau nO 10
Société d'Etat en Côte-d'Ivoire
82
Tableau nO Il
Schéma représentatif de la V01e africaine de
développement
91
Tableau nO 12
Tableau synoptique du régime douanier
102
Tableau nO 13
Répartition des travailleurs de l'industrie en
Côte-d'Ivoire en 1974 selon le lieu d'emploi
1 1 1

216.
Pages_
Tableau nO
14
La localisation des entreprises industrielles
du Tchad .
112
Tableau nO
15
Répartition géographique des emplois industriels
113
au Tchad.
Tableau
nO 16
Un cas d'inégalités régionales en Côte-d'Ivoire
l'assymétrie de croissance entre le Sud-Ouest
et le Nord-Est.
114
Tableau
nO 17
Taux d'ivoirisation et catégories socio-
professionnelles à Abidjan.
116
Tableau
nO 18
Mouvements annuels de population en Côte-
117
d'Ivoire.
Tableau
nO 19
Influence relative des facteurs ayant déterminé la
décision d'investir en Argentine de
1959 à 1964.
123
Tableau
nO 20
Les facteurs déterminants dans les dêcisions
des capitaux privés étrangers à s'investir
en Côte-d'Ivoire
124
Tableau
nO 21
Evolution (en % ) du taux d'importl
133
substitution selon les secteurs en Côte-d'Ivoire
Tableau
nO 22
Production annuelle de quelques grands produits
d'exportation d'origine agricole en Afrique
d'expression française (millions de tonnes).
138
Tableau
nO 23
Schéma des relations possibles - Agriculture
industrie dans une perspective de croissance
harmonisée.
140
Tableau
nO 24
Evolution du produit intérieur brut de la Côte-
d'Ivoire depuis 1960.
153
Tableau
nO 25
Tableau synoptique des options spécifiques des Plans
africains •
155
Tableau
nO 26
Statistiques sur la part du financement
extérieur dans la planification en Côte-
d'Ivoire.
162

217.
Pages
Tableau nO 27
Ventilation des ressources pr~vees ayant
concouru au fiancement du programme de
redressement triennal du Mali.
163
Tableau nO 28
Part du financement extérieur dans le premier
plan du Togo.
163
Tableau nO 29
Les filiales de banques françaises nationalisées
en Côte-d'Ivoire.
165
Tableau nO 30
La structure du système bancaire ivoirien
répartition du capital social des banques et leur
domaine d'intervention.
167
Tableau nO 31
Evolution du prélèvement sur le revenu du cacao
(millions de F CFA)
en Côte-d'Ivoire
178
Tableau nO 32
Evolution du prélèvement sur le revenu du café
(en millions de F CFA) en Côte-d'Ivoire
179

218.
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-0-

227.
TABLE
DES
r~TIÈRES
Pages
• • • • •
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 .
INTRODUCTION GENERALE
A. DE LA NATURE et du ROLE de L'ETAT dans les
PAYS DEVELOPPES
4
l - LA CONCEPTION GENERALE DE LA NATURE ET DU ROLE DE L'ETAT
DANS LES PAYS DEVELOPPES
4
II - LES DIFFERENTES CONCEPTIONS DE LA NATURE ET DU ROLE DE
L'ETAT DANS LE CADRE DES PRINCIPAUX SYSTEMES ECONOMIQUES
6
III
La nature et le rôle de l'Etat dans le système
libéral
6
11
La nature et le rôle de l'Etat dans le système
2
interventionniste
8
11
La nature et le rôle de l'Etat dans le
3
système socialiste
9
B- L'ORIGINALITE du PROBLEME de la NATURE et du
ROLE de L'ETAT en AFRIQUE NOIRE
10
l
- PAR RAPPORT A LA CONCEPTION GENERALE DE LA NATURE ET DU
ROLE DE L'ETAT
10
II - PAR RAPPORT AUX DIFFERENTES CONCEPTIONS DE LA NATURE ET
DU ROLE DE L'ETAT
14
PREMIÈRE PARTIE
THËORIE NORMATIVE DE LA NATURE ET DU
ROLE DE L'ETAT EN AFRIQUE NOIRE:
CADRE GÉNËRAL.
17
INTRODUCTION
18
CHAPITRE· 1 : LA NÉCESSITE DE PRISE EN COMPTE DES VALEURS
HISTORIQUES PERMANENTES DE L'AFRIQUE NOIRE. 20

228.
Pages
SECTION l : les structures politico-économiques
et socio-économiques de l'Afrique pré-coloniale
22
§ !
: Les spécificités des structures
politico-économiques de l'Afrique pré-coloniale
une
rigidité dans la hiérarchie des pouvoirs et
l'exercice du pouvoir
24
A - LES FONDEMENTS et la LEGITIMITE DU
POUVOIR.
26
B - LES DIFFERENTES FORMES ET STRUCTURES
DU POUVOIR
27
l - Le pouvoir dans les chefferies
27
II - Le pouvoir dans les royautés
28
§
II: Les spécificités des structures soc~o­
économiques de l'Afrique pré-coloniale: une prédominance
de l'esprit communautaire
29
A - LE POINT DES DISCUSSIONS SUR LES
STRUCTURES SOCIO-ECONOMIQUES DES
COMMUNAUTES AFRICAINES PRE-
COLONIALES
29
B - LES STRUCTURES SOCIO-ECONOMIQUES
PRE-COLONIALES A LA LUMIERE DU PHENO-
MENE DE LA MONNAIE ET DES ECHANGES
MONETAIRES
30
SECTION I I :
Les valeurs d'ordre
politico-économique
et socio-économique intoduites en Afrique noire avec la pénétration
coloniale
33
§ 1 :
L'impact de l'occupation coloniale
sur les structures politico-économiques africaines
35

229
Pages
A - LE SYSTEME D'ADMINISTRATION DIRECTE :
PRESENTATION ET APPRECIATION
35
l - La forme et la nature du système
35
II - L'objectif du système
36
B - LE SYSTEME D'ADMINISTRATION DIRECTE ET LA
DECHEANCE DU POUVOIR TRADITIONNEL
40
§ II
L'impact de l'occupation coloniale sur les
structures socio-économiques africaines
41
A - LE DEVELOPPEMENT DE L'USAGE DE LA MONNAIE
ET L'EFFRITEMENT DE L'ESPRIT COMMUNA UTAIRE
42
B - L' INSTITUTIONALISATION DU PRINCIPE DE LA
PROPRIETE PRIVEE ET L'EFFRITEMENT DE
L'ESPRIT COMMUNAUTAIRE
44
CHAPITRE
II
LA NÉCESSITÉ DE DÉPASSER LES VALEURS
HISTORIQUES PERMANENTES DE L'AFRIQUE
NOIRE
46
SECTION l
Le dépassement des valeurs propres aux
civilisations africaines: essai d'appréciation des structures
politico-économiques de l'Afrique contemporaine
47
§ l
Les fondements politico-économiques du Parti
unique en Afrique noire
48
A - LE PARTI UNIQUE, INSTRUMENT D'INTEGRATION
NATIONALE
48
B - LE PARTI UNIQUE ET RATIONALITE ECONOMIQUE
EN VUE DU DEVELOPPEMENT
50

230.
§ II - La rigidité des valeurs traditionnelles
et limites du Parti unique : perspective de
dépassement
52
A - LE POINT DE LA SITUATION
52
B - LES PERSPECTIVES DE DEPASSEMENT
54
SECTION II :
Le dépassement des valeurs introduites par le
colonisateur: essai d'appréciation des structures socio-économiques
de l'Afrique contemporaine
56
§ l
: Le problème des classes sociales en Afrique noire
58
A - LE POINT DE LA CONTROVERSE SUR LES CLASSES
58
SOCIALES EN AFRIQUE NOIRE
B - LE DEPASSEMENT DE LA CONTROVERSE
62
§ II
Quel modèle de société pour l'Afrique noire
Libéralisme ou socialisme
64
A - LE DILEMME DANS LE CHOIX D'UN MODELE DE
SOCIETE POUR L'AFRIQUE NOIRE
64
l - Les insuffisances du libéralisme à résoudre
les problèmes structurels de développement
économique en Afrique noire
65
Il La problématique keynésienne
65
IllLe cadre général de la problématique
keynésienne
65
112La problématique dans le cadre du modèle
de H. Leroux
67
1
- Les limites du
schéma keynésien appliqué
2
aux économies africaines
72
1
Le cadre général du problème
72
21
1
Le problème dans le cadre du modèle
22 de H. Leroux
74

231.
Pages
II - Les difficultés d'application du
socialisme en Afrique noire
75
L'emprise des multinationales et les
limites du socialisme en Afrique noire
75
La dépendance financière et les limites
du socialisme en Afrique noire
79
B - LES ERREURS A EVITER DANS LE CHOIX D'UN MODELE
DE SOCIETE : UNE ANALYSE CRITIQUE DES SYSTEMES
ECONOMIQUES AFRICAINS
81
l - Le contenu et les limites du
libéralisme africain
81
II - Le contenu et les limites des différentes
formes de socialisme africain
86
CONCLUSION
88
DEUXIÈME PARTIE
THÉORIE NORMATIVE DE LA NATURE ET DU RÔLE
DE L'ÉTAT EN AFRIQUE NOIRE :
ESSAI D'ILLUSTRATION
92
INTRODUCTION
93
CHAPITRE l
LA NATURE ET LE RÔLE
DE L'ETAT
94
EN AFRIQUE NOIRE À TRAVERS LE CODE DES
INVESTISSEMENTS
SECTION l : La politique du code des investissements en
Afrique noire : théorie et réalité.
96
§ l
Les fondements théoriques de la politique
du code des investissements
96
A - LE CODE DES INVESTISSEMENTS : INSTRUMENT
DE POLITIQUE ECONOMIQUE ET SYMBOLE DE
SOUVERAINETE
96

232.
pa.ges
l - Manque de capitaux et de technologie
et nécessité du code des investissements 97
11- Code des investissements et sauvegarde de
la souveraineté nationale
99
B - LE CODE DES INVESTISSEMENTS COMME GAGE DE
SECURITE
99
§ II : Les modalités de mise en oeuvre du code des
investissements et leurs limites
101
A - LES AGREMENTS FISCAUX COMME MODALITES DE MISE
EN OEUVRE DU CODE DES INVESTISSEMENTS : LES
EXEMPLES DE LA COTE-D'IVOIRE ET DU GABON
101
l
-
L'exemple de la Côte-d'Ivoire
101
I I -
L'exemple du Gabon
103
B - LES INCONVENIENTS DES AGREMENTS FISCAUX
LE
PHENOMENE DE DEVELOPPEMENT INEGAL ET LE
PROCESSUS D'APPAUVRISSEMENT DE L'ECONOMIE
NATIONALE
108
l - Le phénomène de développement inégal
109
et de polarisation
Il L'état de développement inégal en
Afrique noire
110
1
L'approche socio-économique du problème
113
2
II - Le processus d'appauvrissement de l'économie
nationale 120
Section II
Pour une politique volontariste du
code
des
investissements
125
§ l
Les deux axes théoriques de la politique envisagée
128
A - UNE POLITIQUE VOLONTARISTE D'AMENAGEMENT
DE L'ESPACE
128

233.
Pages
B -VERS UN MODELE D'INDUSTRIALISATION DES
ECONOMIES AFRICAINES
130
l - Les différents schémas d'industriali-
sation proposés aux économies
africaines et leur appréciation
130
I l Le contenu des schémas d'indus-
trialisation en question
130
1
L'apport et les faiblesses des
2 schémas d'industrialisation en question
134
I I - La valorisation des ressources agricoles,
une priorité absolue dans une relation
d'interdépendance agriculture-industrie 137
§ I I
Les voies d'une adaptation de la politique du code
des investissements aux impératifs du développement 142
A - UNE PLATE-FORME THEORIQUE MINIMALE
142
B - UNE VOLONTE POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT:
143
L'ETUDE DU CAS ALGERIEN
l
- Les rubriques essentielles du code
algérien des investissements
143
I I - Les enseignements dans la perspective
de notre analyse
145
CHAPITRE II
LA NATURE ET LE ROLE DE L'ETAT EN AFRIQUE
NOIRE À TRAVERS LA PLANIFICATION
147
INTRODUCTION
148
Section l
La planification en Afrique no~re
151
Théorie et réalité
§ l
Les ·fondements théoriques de la planification
151

234
Pages
A - LA PLANIFICATION ET L'INDEPENDANCE
151
ECONOMIQUE
B - LE PLAN ET LA SOLIDARITE NATIONALE
157
_ 0
§ II
Les ambiguités et les limites de la
planification
158
A - LES MODALITES INSTITUTIONNELLES DE LA
PLANIFICATION ET LES LIMITES DE LA
PLANIFICATION
158
l - Le rôle de l'Assemblée Nationale
159
II - Le rôle du Parti
160
III - Le rôle des syndicats
160
B - LES MODALITES DU FINANCEMENT DES PLANS
DE DEVELOPPEMENT ET LES LIMITES DE LA
PLANIFICATION
161
l - La prépondérance du financement
extérieur dans le processus de
planification : le constat
161
II - Inadéquation entre prépondérance du
financement extérieur et la réalisation
des objectifs quantitatifs et qualitatifs
de la justification
170
Section II
Pour une politique volontariste de
172
planification
§ 1
Les objectifs de la planification
172
A - UNE REDEFINITION DE LA PLANIFICATION
173
B - LES PRIORITES DE LA PLANIFICATION
173

235.
Pages
§ II
Les moyens de la planification en
Afrique noire
176
A - UNE FISCALITE AGRICOLE
176
B - LA CONTRIBUTION DES CAPITAUX PRIVES
181
AU FINANCEMENT DES PLANS DE DEVELOPPEMENT
CONCLUSION
182
CONCLUSION GÉNÉRALE
184
l
- L'OPTIQUE
DE
LA COHESION SOCIALE
186
II - L'OPTIQUE DE LA VOLONTE POLITIQUE DE
DEVELOPPEMENT
188
1
III - L'OPTIQUE DE LA COOPERATION ECONOMIQUE REGIONALE
189
Annexes
191
Liste des tableaux
215
Bibliographie
218
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